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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 17 octobre 2002 - Vol. 37 N° 120

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour à vous tous. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez prendre place.

Affaires du jour

Débat sur les rapports de commissions

Prise en considération du rapport de la commission
qui a examiné la problématique des fluctuations
du prix de l'essence et leur impact
sur l'économie québécoise

À l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a tenu des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur la problématique des fluctuations du prix de l'essence et leur impact sur l'économie québécoise. Ce rapport, qui a été déposé le 14 juin, contient des recommandations.

Je rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, cette prise en considération donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable.

À la suite d'une réunion avec les leaders, je vous informe de la répartition du temps de parole que j'ai établie pour la durée de ce débat restreint: 10 minutes sont allouées aux députés indépendants; les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants sera redistribué entre les deux groupes parlementaires, et les interventions ne seront soumises à aucune limite. Enfin, je vous rappelle que, en vertu du deuxième alinéa de l'article 95, ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

Je suis prêt maintenant à reconnaître un premier intervenant. M. le député de Matane, président de la commission, je vous cède la parole.

M. Matthias Rioux

M. Rioux: Merci, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir dans le cadre de ce débat restreint justement pour rendre... et pour témoigner surtout de l'excellent travail qui a été fait par notre commission sur une étude rigoureuse des fluctuations des prix de l'essence au Québec et l'impact des prix de l'essence sur le développement économique des régions.

Ce rapport de la commission, évidemment, on l'a écrit, on l'a rédigé, et je vous dirais même, M. le Président, pour être honnête, qu'on l'a négocié. Les députés membres de la commission n'étaient pas tous d'accord sur les orientations que nous voulions nous donner, mais, cependant, on s'est entendus sur un certain nombre d'objectifs qu'on retrouve dans ce rapport.

La commission s'est donné ce mandat d'initiative, et nous avons tenu des audiences les 3, 4 et 16 octobre 2001. Les groupes qui sont venus devant nous, multiples, ont présenté des mémoires et ont défendu avec une vigueur et une intelligence remarquables ce qu'ils prétendaient être, eux autres, des enjeux pour leur industrie d'abord, mais des enjeux également pour les consommateurs du Québec. Nous avons entendu le ministre des Richesses naturelles de l'époque et évidemment nous avons jugé bon de faire venir le président de la Commission de la Régie de l'énergie. Et nous avons déposé ce rapport, vous vous en souviendrez sans doute, au mois de juin, à la fin de la session.

Sur les composantes des prix de l'essence, je ne m'étendrai pas beaucoup là-dessus, laissant à d'autres parlementaires le soin de développer davantage cet aspect des choses. Cependant, M. le Président, le prix de l'essence a toujours été un sujet de débat qui suscite dans notre société beaucoup d'inquiétude. Et les variations des prix de l'essence, qui sont considérables parfois et qui sont différentes d'une région à l'autre, fait en sorte que les régions s'inquiètent de leur développement. Je pense notamment aux agriculteurs, je pense à tous les propriétaires de PME qui sont tributaires du transport dans le fonctionnement de leur entreprise. Je vous dirais que ces variations des prix de l'essence, qui parfois sont journalières, hebdomadaires, laissent les gens sans moyens devant de puissantes industries qui n'ont de comptes à rendre à peu près à personne. Alors, si les parlementaires du Québec se sont intéressés à cette question, c'est parce que nous voulions justement sensibiliser le gouvernement du Québec à cette problématique. Les consommateurs, les citoyens en général assistent impuissants à un marchandage éhonté qui fait en sorte que qui sont les bénéficiaires des guerres des prix de l'essence? Ce n'est pas les consommateurs, c'est les multinationales du pétrole.

Sur la question des taxes, parce qu'il y a quatre éléments qui est ressorti dans nos travaux et que j'aimerais bien faire partager à mes collègues. Il y a eu bien sûr toute la question touchant le prix du pétrole, les taxes, les composantes des prix du pétrole, et elles sont multiples: il y a le prix du brut, la marge des raffineurs, la marge de commercialisation et il y a eu bien sûr les taxes.

n (10 h 10) n

Le prix du pétrole est déterminé à l'échelle internationale, et les fluctuations mondiales de l'offre et de la demande sont des choses qui échappent complètement au pouvoir des Québécois et à leur gouvernement. Toutefois, malgré le fait que le marché détermine le prix du pétrole brut, l'OPEP s'avère la force dominante pour ce qui est de l'orientation que prennent les prix. Vous savez, M. le Président, il n'est peut-être pas inutile de faire ressortir que les 11 membres du cartel qui déterminent et qui jouent avec les prix et qui sont les seigneurs de la guerre, bien, il y a l'Algérie, l'Indonésie, l'Iran, l'Irak, le Koweït, la Libye, le Nigeria et le Qatar, de même que l'Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis, et ça va jusqu'au Venezuela. Ensemble, les pays membres de l'OPEP représentent 40 % de la production mondiale. Alors, même si le désaccord de certains membres et les actions des non-membres contribuent souvent à affaiblir la position de l'OPEP, aucun autre groupe ou pays n'exerce une telle influence sur les prix du pétrole.

Le Québec ? ce n'est pas inutile de le souligner ? le Québec, de son côté, s'approvisionne en pétrole brut à partir des gisements de la mer du Nord ? ça, c'est le Royaume-Uni et la Norvège. Cette région est le principal fournisseur du Québec, avec près de 60 % des approvisionnements totaux du secteur québécois du raffinage. Des achats sont aussi effectués en Algérie ? ça représente environ 20 % des approvisionnements. Les autres livraisons proviennent du Venezuela, environ 15 %, et du Mexique, pour un peu plus de 6 %.

M. le Président, lorsque nous avons regardé cette réalité, nous avons dû nous rendre à l'évidence que le Québec est un bien petit joueur. Nous ne sommes pas un pays producteur de pétrole, mais, cependant, nous avons des consommateurs, nous avons des entreprises, nous avons des industries comme le taxi, le camionnage qui, eux autres, sont en attente de gestes et de volonté politiques de notre gouvernement pour faire en sorte que les consommateurs soient un tant soit peu protégés.

M. le Président, j'ai dit tout à l'heure que certains de mes collègues auront l'occasion d'aller plus loin et de pousser plus loin la réflexion en ce qui a trait aux taxes. Qu'il me suffise de vous dire qu'il y a trois ans le pétrole brut à la pompe se vendait environ 0,57 $. Trois ans plus tard, il était à 0,84 $, et hier soir, alors que je faisais le plein d'essence, il était à 0,799 $. Ça reste des prix, pour nous, consommateurs québécois, très élevés. Des augmentations considérables de prix donc de l'essence ont des répercussions énormes chez les consommateurs mais également chez nos entrepreneurs et nos industriels du camionnage et du taxi.

M. le Président, il y a des faits qui sautent aux yeux, et c'est ainsi que les députés, dans l'analyse de la problématique des prix de l'essence et leurs variations sur l'économie du Québec et les revenus de l'État québécois, ont considéré les taxes comme un des facteurs les plus importants. Il y a l'efficacité énergétique qui a été prise en compte par les députés, les recommandations concernant la concurrence et les recommandations, enfin, pour mieux connaître le marché.

Sur la question des taxes, je dois le dire, les libéraux et les péquistes n'ont pas réussi à s'entendre. Les libéraux souhaitaient que le gouvernement du Québec procède à des réductions de taxes. Personnellement, je suis arrivé en commission avec aucun préjugé à l'avance, disponible pour écouter ce que les gens avaient à dire, disponible aussi pour écouter ce que l'opposition avait à dire. Si mon cheminement me conduit à refuser une diminution de taxes, c'est qu'il y a plusieurs facteurs qui m'ont influencé: bien sûr, les témoignages des consommateurs qui sont venus devant la commission, mais aussi plusieurs groupes qui sont venus plaider de façon vigoureuse et qui ont dit: De grâce, ne cédez pas à un courant comme celui-là, parce que vous risquez de voir les multinationales profiter d'une baisse de taxes de l'État pour mettre le produit de tout cela dans leurs poches, comme ça s'est produit dans certaines régions du Québec qui ont bénéficié d'exemptions de taxes.

Ce qui également m'a amené à refuser une baisse des taxes... Pas parce que je ne sois pas conscient que les Québécois ne sont pas taxés et très taxés, pas qu'il n'aurait pas été agréable d'offrir aux consommateurs du Québec une diminution de taxes, ç'aurait été fantastique. Mais, si j'avais eu la conviction que la diminution de taxes serait allée directement dans les poches des consommateurs, j'aurais certainement dit oui à une diminution. Si j'avais été convaincu aussi qu'une diminution de taxes n'avait pas eu comme effet ou comme conséquence d'augmenter la consommation de pétrole et ainsi produire davantage du gaz à effet de serre, ce qui va à l'encontre des politiques gouvernementales du gouvernement, qui désire ardemment signer le protocole de Kyõto et diminuer les effets désastreux des gaz à effet de serre, probablement aussi que j'aurais accepté de prendre en considération une baisse de taxes en faveur des consommateurs.

Je n'ai plus cette naïveté de croire que les multinationales ont le goût de faire des cadeaux aux consommateurs du Québec. Ils nous l'ont démontré dans leurs démarches et dans leurs pratiques, que, à chaque fois que les gouvernements essaient de diminuer le fardeau des consommateurs de produits pétroliers, c'est les multinationales qui empochent, ce n'est pas les consommateurs.

M. le Président, j'ai tenu compte également du fait que l'industrie du pétrole est une industrie... Et, on les a entendus, ils sont venus devant la commission parlementaire. C'est des industries qui se parlent, qui communiquent entre eux, qui ont la capacité de prendre des décisions. Je ne les accuserai pas, M. le Président, de collusion; je dirais cependant qu'ils ont certainement des intérêts communs à défendre. Alors, compte tenu de tous ces facteurs, je n'ai pas jugé bon de m'associer à une démarche visant la réduction des taxes sur l'essence, bien que je sois conscient que le Québec fait partie des provinces canadiennes où les taxes sur l'essence sont les plus élevées. Je vous dirais même qu'il y a une surtaxe sur l'essence.

Il y a un autre facteur qui m'a beaucoup guidé dans ma réflexion. Parce je suis un député de région, je viens de province, et que l'entretien des routes et le développement du réseau routier québécois m'intéressent au plus haut point, je me suis dit: Nous avons une belle occasion d'envoyer un message au gouvernement du Québec de maintenir sa politique de développement du réseau routier et d'entretien du réseau routier. Alors, ce n'est pas en privant l'État québécois de revenus et de moyens que cet objectif-là peut être atteint convenablement. Je ne veux pas épiloguer longtemps là-dessus parce que les députés qui sont des régions ? je pense au député de Kamouraska-Témiscouata qui vient de région comme moi ? les députés de la Gaspésie et du Bas-Saint-Laurent se sont rendu compte que l'entretien du réseau routier a une influence considérable dans le développement de nos régions respectives.

n (10 h 20) n

M. le Président, un autre facteur qui a retenu beaucoup l'attention des parlementaires ? et je voudrais l'évoquer rapidement ? c'est les consommateurs du Québec. On a évalué tous ensemble que les consommateurs du Québec sont dépourvus de moyens devant les multinationales du pétrole. Mais, par ailleurs, on s'est rendu compte que nous avions entre les mains un instrument fantastique qui s'appelle la Régie de l'énergie, qui a été créée, vous vous en souviendrez sans doute, M. le Président, qui a été créée lorsque nous avons eu une guerre des prix assez phénoménale qui a engendré, dans la seule région du Bas-Saint-Laurent, en Gaspésie et les Îles, la fermeture de la moitié de nos indépendants dans le domaine de la distribution du pétrole, la moitié de nos indépendants et la perte d'à peu près 750 emplois dans le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine. C'est à la faveur de tout cela que le ministre de l'Énergie de l'époque, M. Chevrette, a convaincu le gouvernement de créer la Régie de l'énergie, qui a un rôle de surveillance. Mais nous avons essayé, nous, d'examiner attentivement le rôle et la mission de la Régie de l'énergie et on s'est dit: Voilà une occasion intéressante qui nous est fournie de revaloriser la Régie de l'énergie, lui redonner les pouvoirs qu'on lui a enlevés et faire en sorte que la Régie de l'énergie soit le chien de garde et qui travaille au nom des consommateurs du Québec pour leur éviter les guerres de prix et l'exploitation abusive des multinationales dans la fluctuation des prix selon les régions et selon les semaines.

La guerre de prix sans précédent que nous avons connue nous a donc amenés à réfléchir et à créer cet organisme. Cependant, de nombreux intervenants qui sont venus nous rencontrer nous ont dit: Le véritable malaise se trouve au niveau de la concurrence. Fort bien! Mais, avant de parler de concurrence, est-ce qu'on pourrait s'entendre, nous, les parlementaires, pour dire au gouvernement du Québec: Est-ce qu'on ne pourrait pas donner à la Régie de l'énergie les moyens et la mission de protéger les consommateurs, d'abord, premièrement, en les informant de ce que représentent les composantes des prix du pétrole, l'impact des taxes, l'appropriation du brut, la marge commerciale des entreprises, de sorte que les consommateurs comprennent qu'on est face à une industrie où il faut les protéger? Parce que, vous savez, M. le Président, une multinationale du pétrole n'a pas de projet de société. L'État québécois, lui, au nom du peuple québécois, a un projet de société, et, dans ses projets, la protection du consommateur est une dimension fort importante. Alors, nous avons demandé, et nous en faisons la recommandation, que la Régie de l'énergie dispose de toutes les ressources financières et humaines nécessaires et devienne l'organisme expert et de référence au Québec en ce qui concerne la connaissance du marché des produits pétroliers. Vous comprendrez, M. le Président, cette volonté des parlementaires d'envoyer ce message clair et unanime au gouvernement du Québec. C'est que nous aimerions bien qu'il prenne acte de ces recommandations et en tienne compte.

Je voudrais également souligner que nous croyons et je crois fermement que la Régie de l'énergie peut jouer un rôle non seulement d'éveilleur de la conscience populaire et des consommateurs, mais aussi devienne une sorte de pédagogue capable d'expliquer aux citoyens du Québec le comportement des multinationales de l'énergie et aussi et surtout capable de les protéger en les informant et en étant capable de faire enquête. Et c'est mon deuxième élément face à la Régie, j'aimerais que les pouvoirs d'enquête de la Régie de l'énergie soient tels qu'on puisse bien exposer, et bien étayer, et faire comprendre au public quelles sont les manoeuvres de l'industrie et ce sur quoi il faut lutter, un pouvoir d'intervention également qui nous permettrait de protéger certaines régions frontières qui sont sur la frontière des États-Unis et du Canada et faire en sorte que ces gens-là ne soient pas d'autres victimes des fluctuations du prix de l'essence.

M. le Président, j'ai beaucoup aimé le témoignage des camionneurs. J'ai beaucoup aimé également les témoignages de certaines personnes qui sont venues nous dire: Soyez prudents, MM. les députés, soyez prudents parce que le prix de l'essence est un élément important dans l'économie du Québec. Faites bien attention, dans vos réflexions, vos délibérations et vos décisions, de ne pas demander au gouvernement d'être complice des pétrolières. Au contraire, on nous a demandé d'être le complice des consommateurs et des payeurs de taxes québécois.

Je voudrais, M. le Président, en terminant, vous dire que nous nous sommes beaucoup intéressés à l'efficacité énergétique, et les membres de la commission ont eu avec beaucoup de surprise... et y ont consacré beaucoup d'énergie, et c'est avec beaucoup d'intérêt qu'ils ont écouté les intervenants venir leur dire que le gouvernement doit pousser plus loin cette problématique, notamment par le biais de l'Agence de l'efficacité énergétique, et, en conséquence, de doter l'Agence de l'efficacité énergétique de moyens la rendant apte à exercer ses fonctions. Vous savez, dans un marché comme celui-ci, qui coûte une fortune aux consommateurs, tant les consommateurs qui utilisent leur voiture pour aller travailler ou qui sont tributaires de l'industrie du camionnage ou l'industrie du taxi, comme j'en ai parlé tout à l'heure, bref tous ceux qui de près ou de loin vivent en relation avec cette industrie, voudraient bien que l'État québécois mette à leur disposition des moyens pour qu'ils soient suffisamment sensibles à l'ensemble de ces problématiques, pour qu'ils puissent réagir aussi. Ça nous a fait plaisir d'accueillir les groupes qui sont venus nous rendre visite. On les a écoutés avec beaucoup d'intérêt. Mais il me semble que l'ensemble des consommateurs ne sont pas suffisamment conscients de l'impact économique des prix de l'essence sur le développement économique des régions.

M. le Président, lorsque nous avons examiné l'ensemble de cette problématique, on s'est dit: On ne fera pas de miracle, les parlementaires, c'est sûr. Nos capacités d'intervention, notre pouvoir au sein de l'organisation gouvernementale québécoise, c'est sûr qu'on ne pèse pas lourd. Mais est-ce qu'on peut au moins utiliser le peu d'influence que nous avons pour dire au gouvernement du Québec: Dans ce secteur-là, comme dans bien d'autres, une volonté gouvernementale doit s'affirmer non seulement pour contrôler les prix de l'essence, non seulement pour établir des barèmes, des prix plancher, ou un prix maximum, ou une fourchette de prix... L'État québécois a établi le prix du lait au Québec à l'intérieur d'une fourchette, vous le savez. Est-ce qu'on ne pourrait pas envisager dans l'avenir une telle démarche pour le prix de l'essence? Je pense en particulier à certaines régions du Québec.

n (10 h 30) n

M. le Président, on n'est pas naïfs non plus. On sait qu'un rapport de commission, l'avenir d'un rapport de commission et ses recommandations, ça prend la filière 13 et on n'en entend plus parler. Alors, ce petit débat restreint qu'il nous est donné de faire ensemble aujourd'hui nous fournit l'occasion, comme parlementaires, de dire en toute liberté ce qu'on pense. Vous pouvez me croire, M. le Président, les députés qui ont travaillé à la commission sur un problème aussi difficile, complexe aussi, personne d'entre nous n'était des experts, mais, cependant, on a eu la finesse d'écouter, on a eu la finesse de travailler, de lire, de chercher aussi, par une documentation appropriée, quels étaient les enjeux à l'intérieur de notre société et l'impact sur notre société et notre développement des prix de l'essence et des prix du pétrole.

Je souhaite, en terminant, que le gouvernement et le ministère qui s'intéresse à ces choses lisent le rapport de la commission, examinent attentivement les recommandations, et je souhaite aussi que le ministre concerné nous indique bien simplement ce qu'il a l'intention de faire avec ce document. Le ministre de l'époque nous avait dit: La question des taxes, il ne faut pas compter sur moi pour une diminution des taxes, ce sur quoi j'étais d'accord. Mais, quant au reste, la Régie de l'énergie, ce qu'elle peut faire de travail utile auprès des consommateurs au chapitre de l'efficacité énergétique... Il me semble que le gouvernement du Québec a un signal à envoyer à la population et aux payeurs de taxes et surtout aux consommateurs québécois. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Matane. Nous poursuivons les débats, et je cède la parole au porte-parole officiel de l'opposition en matière d'énergie et ressources. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, la parole est à vous.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci beaucoup. Merci, M. le Président. M. le Président, à mon tour de parler sur le rapport de la commission de l'économie et du travail, qui a été déposé en juin, sur la problématique des fluctuations de l'essence et leur impact sur l'économie québécoise.

Simplement pour tout d'abord vous tracer un peu un portrait de l'évolution qui nous a amenés à préparer ce rapport, à tenir cette commission, on se souvient, comme l'a mentionné le président de la commission tantôt, qu'il y a eu en trois ans des fluctuations des prix de l'essence, qui sont passés de 0,57 $ à à peu près autour de 0,84 $. Et les conséquences de tout ça pour plusieurs individus au Québec: il s'est dégagé, je dirais, énormément de perceptions, parfois vraies, parfois fausses, de ce qui est était à la base des fluctuations du prix de l'essence. Là, on se remet dans le contexte où ça augmentait d'une semaine à l'autre ou ça baissait. Là, on en a entendu de toutes les sortes, puis à un moment donné on se disait: Tous les jeudis ? parce que les gens vont faire le plein le jeudi ? l'essence augmente, ça redescend le dimanche matin quand les gens ont presque fini la fin de semaine. Les perceptions étaient toutes là.

Et le but qu'on avait... Parce que, en tant que parlementaires, en tant que députés qui représentons nos circonscriptions électorales, on s'en faisait beaucoup parler. Et on se souvient tous que 1998, 1999, 2000, il y avait une série d'ingrédients, je dirais tout aussi explosifs les uns que les autres, qui faisaient en sorte que, quand on retournait dans nos comtés puis qu'on arrêtait nous-mêmes mettre de l'essence, on se faisait, comme on dit, siffler les oreilles: Qu'est-ce qui se passe? Comment ça que ça marche comme ça? Comment ça que l'essence augmente? Vous ne faites rien puis vous ne voyez pas ce qui se passe. Puis tu essaies de comprendre un peu comment tout ça arrive puis, à un moment donné, bien, toi aussi, tu te dis: Bien, ça ne peut pas être juste le hasard, alors essayons d'aller un peu plus loin.

Et on a eu plusieurs débats avant de tenir cette commission-là. Je me souviens, entre autres, d'une interpellation un vendredi matin. On a eu des motions du mercredi. Ma collègue de Bonaventure, qui était porte-parole en matière d'énergie et de ressources avant moi, a tenu aussi le débat pendant presque un an. Et, finalement, pour en arriver à la conclusion que les fluctuations du prix de l'essence, il y a énormément de facteurs qui sont à la base: il y a des facteurs carrément de marché, il y a des facteurs de raffineries, d'offre et de la demande, il y a des facteurs de consommation.

Quelques-uns des éléments que je veux vous souligner en partant. D'abord, le marché comme tel de l'essence au Québec est un marché continental. On ne vit pas dans une bulle où il y a uniquement l'essence qui vient au Québec avec une étiquette: Ça, c'est tel prix, ça ne bouge pas, c'est comme ça. Il y a un marché qui est là, et on dépend beaucoup plus, à la limite, du marché de New York qu'on peut dépendre de tout autre marché en ce qui a trait au prix de l'essence. Voici un des facteurs d'explication. À un moment donné, avec les problèmes qu'on connaît ou qu'on a connus, qu'on connaît ou qu'on va reconnaître encore au Moyen-Orient, ça a un impact. Donc, en tant que parlementaires, on veut bien, là, au Québec, là, ça, c'est un élément sur lequel on a très peu de contrôle. Je serais surpris que le ministre des Ressources naturelles puisse appeler M. Bush après-midi puis dire: Écoute, là, le prix de l'essence, calme-toi un peu, ça va avoir un impact, là, ce qui se passe en Iraq. Alors, je serais surpris de ça. Par contre, il faut regarder aussi ce sur quoi on a des possibilités.

Il y a un autre élément qui est là aussi, qui est toute la question du raffinage, les marges de raffinage, qu'à un moment donné c'est 0,02 $, 0,03 $ le litre puis tout à coup on tombe à 0,08 $, 0,09 $ le litre. Alors, ça aussi, ça a un impact à la fin sur le prix. Et ça, ce qu'on en a entendu en tout cas en commission et ce qu'on en entendait avant: Ah, bien oui, on sait bien, là, les raffineurs, là, c'est eux autres, c'est eux autres, les coupables et c'est de leur faute. Il y a d'autres facteurs d'explication. À un moment donné, c'est l'offre et la demande. Quand la demande est telle, bien, c'est sûr qu'on raffine puis qu'on raffine le plus possible, et que ça a un impact sur les prix à la hausse, puis ça, c'est un élément qui est là.

L'autre élément important aussi est relié aux guerres de prix. On en a connu au Québec. C'est ça qui a mené, à la limite, à la Régie de l'énergie, au prix plancher. On se souvient qu'à un moment donné, je pense, l'essence était descendue à 0,39 $ dans les années 1996-1997, avant la création de la Régie. Alors, ça, c'est un autre élément qui était là en 1996-1997 et qui est revenu. Souvenons-nous, dans la région de Québec, je pense, c'est il y a à peu près un an comme aujourd'hui, se terminait une guerre des prix de l'essence qui avait duré un an et demi avant. Donc, la région de Québec payait l'essence le moins cher au Québec. Je me souviens que mes collègues de Montréal arrivaient à Québec puis disaient: Mon Dieu! C'est épouvantable, c'est 0,08 $, 0,09 $, 0,10 $ parfois de moins le litre que les prix qu'il y avait à Montréal. Alors, ça, c'est un autre élément du contexte de fluctuations qu'on a essayé de voir.

Un autre élément qui est bien important est relié carrément aux habitudes de consommation des gens. On en a entendu parler, on a parlé même, il y a un an, je pense, à Washington, lors d'une visite avec mon collègue de Groulx, où les habitudes de consommation des gens, des Américains, des Québécois, des Canadiens pour les fameux quatre-par-quatre, des voitures plus grosses, des plus grosses cylindrées qui, donc, consomment plus d'essence... Et ça aussi, ça a un impact. Parce que, à un moment donné, on est passé, dans les années quatre-vingt, à la voiture la plus économique possible, c'était devenu ça, la mode, et là, là, c'est le retour en force des quatre-par-quatre et des voitures, des grosses cylindrées qui prennent beaucoup d'essence. Alors, ça aussi, c'est un facteur qui a de l'impact sur la demande et donc sur les prix de l'essence.

Bien sûr, et c'est certain, un des facteurs les plus importants, qui... Je pense, ça, mes collègues d'en face... Le président de la commission l'a mentionné tantôt, et je pense que tous vont s'entendre là-dessus, l'essence est une source de revenus importante pour les deux paliers de gouvernement. Et ça, c'est relié aux taxes. Et, comme le mentionnait le député de Matane, président de la commission, au Québec, on est l'endroit où on taxe le plus l'essence. Donc, ça aussi, c'est un facteur qui, à un moment donné, dans les variations... qui a peut-être moins d'impact dans la variation comme telle, mais qui a un impact sur le prix en bout de ligne.

Et, d'ailleurs, on a vu apparaître, depuis deux, trois ans maintenant, les fameuses pointes de tarte sur les pompes à essence qui disent: Bien, voici, c'est la marge du raffineur; ça, c'est le prix du brut; et ça, ce sont les taxes provinciales, taxes fédérales, et tout ça. Donc, le consommateur a la chance, en voyant débouler ses dollars dans son réservoir d'essence, de voir quelle est la partie qu'il envoie aux deux paliers de gouvernement. Donc, ça, c'est un facteur important qui est là, les taxes, et d'autant plus qu'au Québec on a une des taxes spécifiques pour l'essence les plus élevées et qu'elle est retaxée par une taxe de vente provinciale après. Donc, ça amène un élément extrêmement important au niveau de la fluctuation comme telle et du prix, en bout de ligne, que l'on paie.

n (10 h 40) n

Quand on regarde, là, l'ensemble des facteurs, une des perceptions qu'on entendait souvent, des commentaires qu'on entendait souvent dans le passé, c'était de dire: Ils ont toujours une bonne raison pour augmenter les prix de l'essence. On vient nous expliquer que c'est soit en raison des prix de gros, des marchés internationaux, des marges de raffinage. Il y a toujours une bonne raison quelque part pour augmenter, mais il semble n'y en avoir jamais de bonne pour diminuer. Puis c'est vrai. Même dans les médias, là, quand ça baissait de 0,05, 0,06 $, 0,07 $, on n'en entendait pas parler, mais, quand ça augmentait, là, on voyait tout ça arriver.

Et, dans cet esprit-là... Et c'est un des facteurs qu'on a un peu démystifiés, je pense, en commission parlementaire quand on a reçu des groupes, c'est qu'il y avait la perception que, d'un côté, il y a les grosses entreprises, les multinationales, et, de l'autre côté, il y a les indépendants. Mais ce que plusieurs nous disaient et nous disent encore: Sur un coin de rue, que ce soit un Esso, un Shell, ou un Sergaz, ou un autre indépendant, les prix montent et descendent partout pareil. Il n'y a pas... L'indépendant sur le coin ne dit pas: Bien, moi, je vais le vendre 0,10 $ plus cher, puis l'autre, en face, va le vendre 0,10 $ de moins ou quoi que ce soit. Alors, ça, c'est un élément qui, je pense, dans la commission... Et je me souviens de certains débats, entre autres avec les indépendants, où on leur demandait: Oui, on veut bien, mais vous suivez la même guerre de prix et vous êtes au même niveau. Donc, il y a là un facteur aussi, un impact important.

L'autre élément qui est bien, bien important dans, je dirais, la compréhension comme telle du marché de l'essence des dernières années, c'est qu'il y a eu une évolution du bien de consommation qui est l'essence. On se souvient tous, avant, tu avais soit des stations d'essence qui étaient uniquement des stations d'essence, avec deux, trois articles que tu pouvais acheter, et souvent, de l'autre côté, tu en avais aussi avec un garage. Maintenant, on voit de plus en plus l'essence avec un dépanneur, avec plein de services autour, avec un arrêt complet, là, où on peut avoir toutes sortes de choses. Donc, la nature du bien de consommation qui est l'essence a changé dans ce domaine-là, c'est-à-dire qu'on ne va plus seulement, dans la majorité des cas, pour mettre de l'essence, plusieurs consommateurs y vont aussi pour faire autre chose, pour acheter autre chose en même temps.

Et un des facteurs qui s'en vient et qui peut avoir encore beaucoup d'influence sur le marché et sur le bien de consommation qu'est l'essence, c'est que, pour plusieurs grandes chaînes qui s'apprêtent à avoir des stations d'essence et à vendre de l'essence au consommateur, l'essence va devenir non plus un bien de consommation et on y va parce qu'on a besoin d'essence, mais va devenir un bien d'attraction, c'est-à-dire de faire en sorte que, par ses prix les plus bas possible à la pompe d'essence, tu vas réussir à faire stationner la personne dans la cour, qui là va entrer dans le magasin et qui là va magasiner. Donc, pour cette personne-là, ces gens d'affaires là ou ce commerce-là, l'essence ne devient pas uniquement un bien parmi d'autres, elle devient le bien d'attraction pour permettre d'entrer des gens dans le magasin, et c'est là qu'ils vont aller faire le plus de profits. Donc, de faire 0,01 $, 0,005 $ sur l'essence, à la limite, c'est plus ou moins important parce qu'ils cherchent le volume là-dessus, mais surtout le pouvoir d'attraction que ça peut avoir pour amener les gens dans le commerce. Donc, ça, c'est un des facteurs qui, dans l'avenir, va aussi jouer sur les prix et sur le bien de consommation qu'est l'essence et la nature de ce bien de consommation là.

Quand on regarde les tendances, est-ce qu'on peut dire que la tendance est à l'économie d'essence, à l'économie d'énergie? Je voyais dernièrement que certains constructeurs, même si les prix de l'essence sont assez élevés, se disent que, démographiquement, la nature des consommateurs fait en sorte que ceux qui achètent des quatre-par-quatre vont continuer d'acheter des quatre-par-quatre même si l'essence augmente de 0,03, 0,04, 0,05 $. Donc, il n'y a pas un grand, grand phénomène de chercher des alternatives comparativement au début des années quatre-vingt où, à un moment donné, on s'est mis à chercher plein d'alternatives. Et ça, c'est peut-être un des points faibles qu'il y a actuellement et qu'on a entendus: Est-ce qu'on recherche suffisamment d'alternatives à l'essence? La réponse a été non, je pense, de ce qu'on a entendu de la plupart des groupes. Cependant, la tendance de consommation n'ira pas en diminuant, elle va continuer d'augmenter. Et, dans plusieurs cas, ce sont des gens qui, une fois que la maison est payée, une fois qu'ils n'ont plus de dettes, et tout ça, décident, oui, d'y aller avec une grosse voiture, un gros quatre-par-quatre, et ils se disent: On se gâte, puis ce n'est pas grave quand même que ça coûte 60, 70 $ par semaine d'essence. Et donc, ça, c'est un phénomène de marché qu'il faut aussi regarder.

Dans les recommandations qu'on a eues, dans les pouvoirs comme tels que les gens ont, qu'est-ce qu'on peut faire là-dedans au Québec? Est-ce qu'on peut dire, là: Il n'y a pas un seul quatre-par-quatre qui va entrer au Québec? Je ne pense pas qu'il y a un seul gouvernement qui serait très, très populaire en disant ça, tu sais. Je vois le ministre des Ressources naturelles dire, là: Je ne veux plus voir un chat avec un quatre-par-quatre puis un pickup. Puis, surtout dans le bois, je pense que vous vous feriez recevoir avec un deux-par-quatre.

Une voix: Un deux-par-dix.

M. Béchard: Un deux-par-dix, en plus. Ensuite, je pense qu'on ne peut pas non plus dire: Demain matin, voici, là, on va tout remplacer... les moteurs, on va tout remplacer ça par des moteurs électriques ou quoi que ce soit d'autre. Il y a une liberté du consommateur qui est là et, à la limite, qu'on doit suivre.

Mais qu'est-ce qui peut être fait? On ne peut pas non plus, comme je l'ai dit, se mettre tous sur le téléphone, puis envoyer une pétition à la Maison-Blanche, puis dire: Arrêtez, là, arrêtez avec l'Irak, là, ça va avoir un impact sur le prix de l'essence. On ne peut pas faire ça non plus. On ne peut pas non plus lancer quelques coups de fil au Koweït puis dire: Bien, là, on trouve que les prix, là... Augmentez la production, ou quoi que ce soit.

Donc, les facteurs sur lesquels on peut intervenir se limitent à très, très peu de choses: les taxes, la Régie de l'énergie et sur le développement d'alternatives ou de promotion de l'économie de l'énergie, ou quoi que ce soit. Donc, les pouvoirs sont assez limités.

On a eu plusieurs recommandations. On a eu beaucoup, beaucoup de recommandations, et un des points était bien sûr de comprendre les fluctuations, mais l'autre, de voir quel est l'impact que ça peut avoir, la variation des prix de l'essence, sur l'économie des régions. Et je me souviens, entre autres, de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes qui était venue nous dire que, pour 90 % des gens qui avaient répondu à leur sondage, oui, les variations des prix de l'essence avaient un impact très important, entre autres sur les PME. On le comprend, dans les régions, les distances de transport sont énormes, et, en bout de ligne, d'amener un camion plein de fruits et de légumes à Gaspé, avec une variation de 0,02 $, 0,03 $ le litre du diesel et même de 0,10 $, dans certains cas, du diesel dans les dernières années, bien c'est sûr qu'en bout de ligne le consommateur de Gaspé voit une différence sur le prix des oranges. C'est certain. Parce que, à un moment donné, il faut que ça se paie quelque part, et donc le consommateur des régions est pénalisé. Donc, sur les taxes, on a eu des recommandations, mais, sur l'impact sur l'économie des régions, je pense, c'est clair, tout le monde s'entend là-dessus, oui, il y a un impact sur l'économie des régions.

Sur la question des taxes, malheureusement, on ne s'est pas entendu, puis je pense que ça reflète les tendances qu'on a eues. Il y a des gens qui sont venus dire: Oui, il faut une réduction de taxes ? nous, c'est ce qu'on prônait ? de l'autre côté, il y a des gens qui ont dit non, pour toutes sortes de raisons, aussi bonnes dans un cas que l'autre. Mais je pense que le but du rapport ce matin, et de la commission, ce n'est pas nécessairement d'avoir un rapport unanime, mais d'avoir le meilleur rapport possible. Et on verra pour la suite des choses, chacun de nos côtés, dans chacun de nos partis. Mais, sur les taxes, il faut admettre qu'on a eu, puis je l'admets, des recommandations pour, des recommandations contre.

Mais je suis heureux de voir que ça n'a pas été le seul élément de recommandation. Il n'y a pas eu juste des groupes qui sont venus dire: Je veux qu'on baisse les taxes, ou: Je veux qu'on augmente les taxes, ou: Je veux qu'on n'y touche pas. Et, dans l'éventail des choses qui ont été dites, moi, je me souviens encore du témoignage des gens de l'Abitibi-Témiscamingue qui sont venus nous dire: Tout le système ? puis c'est parce que, chez nous, je le vis aussi, dans le Témiscouata, je suis à côté du Nouveau-Brunswick et du Maine ? tout le système des frontaliers et des réductions de taxes déjà consenties pour les frontaliers, bien, dans bien des cas, ça ne fonctionne pas et ça ne se rend pas dans les poches du consommateur. S'il y a une différence de 0,02 $, 0,03 $, 0,04 $, ça ne se rend pas toujours en bout de ligne dans les poches du consommateur. Et c'est pour ça que, nous, ça nous a amenés à dire dans nos recommandations qu'avant de procéder à quelque baisse de taxes que ce soit il faut s'assurer que les mécanismes actuels sont efficaces, que, si on dit que, par exemple, à Pohénégamook ou à Rivière-Bleue, que l'essence est 0,02 $ ou 0,03 $ moins cher qu'à Saint-Alexandre ou plus à l'intérieur des terres, bien, il faut que ça s'applique, il faut que les gens y voient une différence. Sinon, effectivement, ça ne donne rien.

Donc, à la recherche de ces mécanismes-là... Et on a entendu les pétrolières nous dire qu'ils étaient prêts à être audités puis qu'il y a différentes choses qui peuvent être faites. Je comprends le scepticisme de certains de mes collègues. On peut regarder ces alternatives-là, mais, chose certaine, avant de procéder à quelque baisse des prix des taxes possible, je suis parfaitement d'accord avec tous ceux qui disent qu'il faut s'assurer que ça aille dans les poches des contribuables. Ça, c'est extrêmement important, puis c'est essentiel, et c'est à la base. Et il faut s'assurer que les mécanismes actuels fonctionnent, entre autres en ce qui a trait aux taxes pour ce qui concerne les frontaliers. Et ça, ça a été une des premières... la première recommandation qu'on a faite.

Il y a eu bien sûr la recommandation ? et je suis heureux de voir que le ministre délégué aux Transports est là ? la recommandation qu'il y ait une plus large part de ces taxes-là qui aille en travaux routiers, sur les routes. Je pense, dans les dernières années, on a rétabli un certain équilibre qui est là. Donc, ça a été une des recommandations, une des choses qui ont été amenées. Je pense que les taxes sur l'essence rapportent autour de 1,6 milliard ? peut-être un petit plus ? de revenus au gouvernement du Québec. Je pense que les budgets du ministère des Transports sont rendus aussi autour de ça. Donc, ça, c'est un des éléments qu'on a beaucoup entendu.

n (10 h 50) n

Mais un des éléments qui est ressorti très, très souvent aussi était de dire: Vous avez mis en place une Régie de l'énergie, est-ce qu'elle est efficace? Est-ce qu'elle fonctionne bien? Est-ce qu'elle a, à la limite, les moyens de ses ambitions? Est-ce qu'elle est capable, cette Régie-là, dans, entre autres, ce qui concerne les guerres de prix qu'on a connues, est-ce qu'elle a la capacité de mener des enquêtes efficaces qui, à court, à moyen terme, permettent au consommateur de bien s'en sortir? Et donc, là-dessus, c'est une autre de nos recommandations, de s'assurer que la Régie de l'énergie, dans le cas de guerre de prix, est capable de jouer son rôle. Et on l'avait vu dans la région de Québec, une guerre de prix qui a duré au-delà d'un an avant qu'en bout de ligne il y ait une certaine stabilité dans le marché. Alors, la Régie de l'énergie, sans intervenir directement dans le marché, parce qu'on est quand même dans un marché libre, là, mais est-ce qu'elle a les outils et les moyens? Et ça, je pense que le gouvernement doit le regarder, j'ose espérer qu'il regardera, et dans le suivi aussi des prix, les variations, pour voir...

Et c'est un des éléments souvent que les pétrolières nous disaient: Si les gens sont à ce point informés, l'opinion publique met une pression sur tout le monde. Elle en met une sur les gouvernements, elle en met une sur les pétrolières. Et, quand on est capable de bien informer les gens, c'est un des points importants. Et ça fait d'ailleurs partie de nos recommandations sur la Régie de l'énergie, c'est-à-dire qu'elle puisse exercer une présence beaucoup plus marquée sur le territoire et qu'elle dispose, finalement, des moyens de ses ambitions.

On a aussi, mon collègue de Groulx en reparlera sûrement, mais tout ce qui a trait aux lois de type «divorcement», c'est-à-dire de sectionner les différentes étapes dans le processus pétrolier. On peut avoir nos réticences, être pour ou contre. Moi, je pense qu'avant d'aller de l'avant avec ça ? puis c'est un peu le but de la recommandation ? voyons voir comment ça peut marcher. Est-ce que ça peut marcher? Puis il n'y a pas de mal à regarder si ça peut être une solution ou pas. Puis, après ça, bien, ce sera aux différents gouvernements en place à décider ce qu'on fait avec ça puis voir si ça doit être mis en place ou pas. Donc, on ne parle pas de la mettre en place immédiatement, on parle de regarder comment ça peut se faire puis quel est l'impact de ça là où ça se fait. Donc, ça, c'est important.

Et je vous dirais que, finalement, tout ce qui a trait à l'efficacité énergétique, c'est un volet qui, trop souvent... Que ce soit au niveau hydroélectrique ? on le voit avec Hydro-Québec, on se souvient des audiences qu'on a eues sur le plan stratégique d'Hydro-Québec ? dans ce cas-ci sur tout ce qui a trait à la question de l'essence, comme dans plusieurs autres secteurs, on est chanceux, au Québec, on a beaucoup de ressources naturelles, on a une certaine qualité de vie, et, parfois, ça devient très, très facile de gaspiller l'énergie, autant hydroélectrique, l'essence puis, je dirais même, plus ça va, au niveau de l'eau, on vit les mêmes problématiques. À un moment donné, il faut se rendre compte des richesses que nous avons et de leur valeur. On voit à quel point les Américains regardent, par exemple, notre eau avec beaucoup, beaucoup, beaucoup d'intérêt, et ça, il faut faire très attention. Mais on voit la même chose. Donc, améliorer, ou augmenter, ou sensibiliser davantage les gens à l'importance de l'efficacité énergétique. Le fait d'économiser l'énergie, d'être plus conscient de sa valeur, ça peut avoir aussi un impact.

Donc, en terminant, je vous dirais que, sur cette commission-là, on avait eu un mandat d'initiative à un moment donné. Le député de Matane s'en souviendra sûrement, c'était sur les clauses orphelin à l'époque. On avait tenu une préconsultation. Le climat était différent. Je dirais que, dans ce cas-ci, moi, je suis très content de voir qu'en bout de ligne on a un rapport, je pense, qui se tient, qui a des recommandations qui sont convenables, qui fait l'affaire, pour ce qui est dedans, des gens qui étaient là. Il y a des éléments qui manquent. Ça ne peut pas être complet. Le ministre l'a dit, on n'est pas tous des spécialistes ou des experts, sauf que, moi, je vous dirais que, depuis cette commission-là, personnellement, je trouve qu'on est beaucoup mieux outillés pour répondre aux gens de nos comtés, aux gens qui parlent de ces problématiques-là, et expliquer ce qui s'en vient non pas seulement en termes de fluctuations, mais en termes, je dirais, de futur du secteur pétrolier au Québec et quelles sont les tendances de marché.

Et ça, bien, au cours des prochains mois, moi, j'ose espérer qu'avec un travail comme ça... J'aimerais croire et être un peu plus positif que le député de Matane sur l'avenir du rapport. Quand il parlait de filière 13, j'ose espérer que ce ne sera pas le cas. J'ose espérer ? puis je ne sais pas si on va entendre le ministre de l'Énergie ou le ministre des Ressources naturelles ? qu'il y aura une suite à ce rapport-là quelque part puis qu'on pourra dire à un moment donné, oui pour les parlementaires qui ont participé, mais aussi et surtout pour les gens qui sont venus, qui ont pris le temps de venir nous voir pendant trois jours d'audiences, nous dire c'est quoi, l'impact que ça avait autant pour les consommateurs, autant pour les constructeurs, les transporteurs, les PME, de leur dire: Bien, voici, oui, il y a eu un rapport, et, voici, il y a quelques suites qui vont y être données à ce rapport-là. J'ose espérer que ce sera le cas.

Mais, sur l'exercice comme tel, je peux vous dire que ça a été un exercice très enrichissant où je pense qu'on a eu une franche collaboration, des deux côtés de la Chambre, avec le président puis avec mes collègues qui ont participé, autant le député de Mont-Royal et le député de Laurier-Dorion, le député de Beauce-Nord aussi et, bien sûr, ma collègue de Bonaventure qui a fait, je dirais, la première année des crises de fluctuation du pétrole. Alors, je pense qu'on a fait un travail qui est sérieux et qui mérite à tout le moins des suites de la part des instances gouvernementales. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je reconnais maintenant l'adjoint parlementaire du premier ministre et député de Groulx. M. le député, la parole est à vous.

M. Robert Kieffer

M. Kieffer: Merci, M. le Président. Alors, écoutez, au même titre que mes deux confrères qui viennent de présenter leur vision de cette commission, je dois dire au départ que ça a été une bonne commission. Ça a été une bonne commission à quelque part parce que ça découlait peut-être d'un mandat d'initiative des députés, un mandat d'initiative qui doit refléter évidemment la volonté des deux partis qui siègent. C'est peut-être le lieu où les députés expriment le mieux les préoccupations de ceux et de celles qu'ils et qu'elles représentent. Ça a été une bonne commission aussi dans la mesure où les intervenants qui se sont donné la peine ? et il y en a plusieurs ? de venir nous présenter leur point de vue l'ont fait avec sérieux, et ce sont des gens, des groupes qui connaissaient bien la question. Ils reflétaient à toutes fins pratiques l'ensemble des groupes sociaux préoccupés par la question des prix de l'essence. On pouvait rencontrer aussi bien des gens de l'industrie du camionnage, on pouvait rencontrer aussi ou on a rencontré des groupes de défense des intérêts des consommateurs. On a rencontré des gens reflétant les différents niveaux de gouvernement, régionaux et québécois. On a rencontré à toutes fins pratiques tous ceux... y compris, et je le souligne évidemment, y compris des gens de l'industrie eux-mêmes, et j'y reviendrai tantôt parce qu'il y a une partie de ma présentation qui va s'arrêter à cette question-là.

Je vais, moi aussi, illustrer, je pense de façon forte, ce que j'appelle les fluctuations dans le prix de l'essence qui ne trouvent pas d'explication rationnelle dans le contexte politico-stratégico-économico-mondial. Et, si j'utilise le terme «mondial», c'est parce que l'industrie du pétrole a effectivement des assises mondiales et non pas des assises locales ou des assises régionales.

Mes deux confrères l'ont souligné, je vais utiliser une autre façon de le présenter, cette fois-ci en pourcentage, mais, de 1998 à 2001, le prix de l'essence au Québec à la pompe a augmenté de 47 %. C'est énormément beaucoup. Je ne connais aucun autre produit ou service qui, dans une période de temps aussi courte, ait connu une croissance aussi rapide. Mais cette croissance-là, M. le Président, ne s'est pas faite sur une pente normale qui progresserait au fur et à mesure des besoins et de l'offre; ça s'est fait comme ça, avec des hauts et des bas.

n (11 heures) n

Comme l'industrie pétrolière a des assises mondiales, comme je le soulignais tantôt, y a-t-il quelque part durant cette période des événements qui auraient pu provoquer des fluctuations aussi grandes? Écoutez, le dernier conflit majeur qui a eu un impact direct sur la production mondiale de pétrole, il faut remonter à 1990, et c'est la guerre du Golfe où, effectivement, l'Irak, si on se rappelle bien, avait occupé le Koweït. Les États-Unis, les Alliés, s'en étaient mêlés. Et là on a eu aussi une crise, mais qui pouvait s'expliquer par le contexte politico-stratégique au Moyen-Orient. Mais ce n'est pas le cas pantoute de 1998 à 2001, et ce n'est toujours pas le cas. Évidemment, si, dans quelques mois, les États-Unis décidaient de chasser Saddam Hussein, on assisterait probablement aussi de nouveau à une crise qui aurait ses assises à l'intérieur d'un conflit qui affecterait directement la production du pétrole. Mais, de 1998 à 2002, maintenant, ce n'est pas le cas.

Donc, comment expliquer qu'il y ait d'aussi grandes fluctuations et aussi une croissance aussi exagérée des prix du pétrole? Je vais tenter d'identifier dans un premier temps, en expliquant le fonctionnement, ce que je considère être à la fois le principal acteur et probablement la principale cause de cette croissance des prix et de ces fluctuations.

Lorsque nous parlons du pétrole, je vous dirais que, dans 90 % des cas, nous avons affaire à un cartel qui contrôle toute la structure de mise en marché de ce produit particulièrement névralgique, pour ne pas dire tout à fait essentiel à la survie des sociétés développées. Le cartel du pétrole a cette particularité de contrôler les différentes étapes de la production, de la transformation et de la mise en marché du pétrole depuis le moment où on l'extrait, que ce soit en Arabie Saoudite, que ce soit un peu partout dans les océans, que ce soit au Mexique, au Venezuela ou ailleurs. Il y a un certain nombre de grandes compagnies qui possèdent à la fois les puits de pétrole ou qui ont des contrats à très long terme avec les propriétaires, en général nationaux, de ces puits de pétrole, qui en font l'extraction, qui font le transport du brut par voie terrestre, ou par voie maritime, ou par oléoduc, qui sont aussi propriétaires des installations de raffinage, qui, par la suite, transportent le produit raffiné depuis la rampe ou depuis le poste de raffinage jusqu'à la station-service du coin de la rue où nous allons nous approvisionner, et qui, finalement, est propriétaires de la station-service. Et là on parle de la situation dans 80 à 90 % des cas.

Il y a effectivement des indépendants sur le marché, mais qui occupent un espace tellement réduit qu'ils ont peu ou pas d'influence à toutes fins pratiques. Et c'est tellement vrai que, par exemple, au Québec, certaines compagnies multinationales ont utilisé comme slogan ces dernières années Nous fixons toujours les plus bas prix, et, en général, quand elles baissent, les indépendants suivent automatiquement. Ce ne sont pas eux qui forcent la réduction des prix, en aucun cas.

Quand on est à ce point structuré verticalement, on est facilement en mesure de transférer d'une opération à l'autre les coûts et donc les profits. Et, lorsque, à un niveau, les profits sont plus faibles, pour quelque raison que ce soit, guerre des prix sur le marché local ou autres, ce qu'on fait à ce moment-là, c'est qu'on hausse à un autre niveau le prix pour compenser les pertes momentanées que nous pouvons subir à une étape ou à l'autre.

Ce qu'on a découvert, lorsque nous avons à la fois rencontré les experts mais aussi les intervenants, c'est qu'il semble que, dans toute cette structure-là, il y a un niveau ou un pivot qui nous apparaissait comme étant critique quant à la capacité des multinationales de contrôler l'ensemble de la structure, et c'est ce qu'on appelle le niveau du raffinage: alors, les trois raffineries dans l'est de l'île de Montréal, etc., les raffineries américaines et autres. Et c'est ce lieu central, entre l'extraction et la vente au détail, qui nous apparaissait porteur, entre autres, d'une bonne partie ? pas totalement, mais d'une bonne partie ? des fluctuations que nous avions connues.

Nous nous sommes aperçus, par exemple, qu'au litre les coûts de raffinage ou les coûts de production pouvaient varier sur une période de trois, quatre ou cinq mois du simple au triple. Ce n'est pas parce qu'il y avait eu des modifications importantes dans les technologies, ce n'est pas parce que le salaire des travailleurs avait doublé ou triplé, c'était le lieu choisi par les multinationales, le fameux cartel, pour effectivement asseoir son contrôle sur le marché.

Nous nous sommes aussi aperçus que, quoique le Québec soit autosuffisant au niveau de ses capacités de raffinage ? il a été démontré clairement que les raffineries que nous avons dans l'est de l'île de Montréal suffisaient amplement à satisfaire à la demande québécoise ? nous nous sommes aperçus que, si, par exemple ? et ça a été une idée qui nous a été présentée à quelques reprises ? que, si, par exemple, le gouvernement décidait de plafonner les coûts de raffinage, ce qui se produirait fort probablement ? et mon confrère de Témiscouata l'a mentionné ? ce qui se produirait très certainement, c'est que la raffinerie dans l'est de l'île, qui appartient, par exemple, à Exxon, devant cette volonté gouvernementale de fixer un plafond, se revirerait de bord, prendrait son pétrole raffiné, le mettrait dans ses camions, traverserait la frontière aux États-Unis puis irait le vendre là. Et on ne peut d'aucune façon empêcher ce type de transaction là parce que nous vivons dans un marché continental où les produits traversent très facilement la frontière sans qu'il ne puisse y avoir quelque façon que ce soit de limiter, si vous voulez, au Québec la production pétrolière qui se fait ici. Donc, on s'est aperçu que ce serait une mesure à toutes fins pratiques contre-productive.

Ce qui nous a amenés quelque part, à un moment donné, à commencer évidemment à évaluer les pistes de solution qui pourraient être utilisées pour tenter de mettre un peu d'ordre et tenter de remettre à l'intérieur de ce marché-là des pratiques de libre concurrence. Tout le monde l'a souligné, et nous-mêmes en étions témoins évidemment, il s'agit effectivement qu'il y ait une hausse de prix dans une pompe ou dans une station-service pour que très rapidement tout le monde suive le mouvement, surtout quand le mouvement est vers la hausse, ça aide particulièrement, hein!

L'argument des pétrolières de dire: Écoutez, le prix du brut a augmenté au Koweït ou le prix du brut a augmenté en Algérie ou en Arabie Saoudite, il faut nous aussi qu'on augmente le prix au détail, puisqu'il y a une répercussion immédiate... ce qui est complètement faux parce que, avec les réserves que les pétrolières, que les grandes pétrolières ont, avant que l'impact se fasse sentir sur l'augmentation du prix du brut, par exemple, on peut calculer entre 45, quand les réserves sont très, très basses, mais ça va facilement jusqu'à 90 jours. Par contre, quand le prix du brut baisse, les répercussions sur la pompe sont en général très, très lentes, parce qu'ils utilisent exactement cet argument-là, mais cette fois-ci ils l'appliquent.

n (11 h 10) n

On s'est posé la question: y a-t-il effectivement au Québec et au Canada des moyens, des outils qui nous permettraient d'exercer plus étroitement la surveillance, le contrôle sur la collusion possible qui pourrait exister entre les grandes pétrolières quant à la fixation des prix à la pompe, donc des prix à la rampe, etc.? Mes confrères tantôt ont parlé de la Régie et du rôle qu'elle pourrait jouer quant à l'enquête ou aux enquêtes qui pourraient être faites, quant à la surveillance à exercer. Je ne reviendrai pas là-dessus.

On a aussi parlé du Bureau de la concurrence à Ottawa, c'est un organisme fédéral. Ce qu'on a réalisé et ce que les intervenants nous ont dit, c'est qu'il est extrêmement difficile de démontrer et de prouver la collusion entre les différents intervenants dans une cause anticartel, extrêmement difficile, pour ne pas dire presque impossible. Il faut avoir des preuves écrites à toutes fins pratiques qui disent: Bon, bien, Exxon s'entend avec Shell ou avec Petro-Canada, on va tous augmenter à peu près de ce même niveau. On sait très bien que ce n'est pas comme ça que ça se fait. Ça ne signifie absolument pas qu'il n'y en a pas. Il faudrait peut-être à ce moment-là que nous fassions, que le gouvernement fasse effectivement des représentations à Ottawa pour à tout le moins amener le Bureau de la concurrence à exercer des contrôles beaucoup plus serrés, sinon à changer la loi, du moins à amener le Bureau de la concurrence à dire: On vous surveille de très près, et d'amener le Bureau de la concurrence à exiger de la part des pétrolières qu'elles leur expliquent comme il se fait que, lorsque les prix augmentent quelque part, ils augmentent partout de la même façon. On s'est fait dire que ça ne se fait pas. Alors, il y aurait lieu pour le gouvernement en place de faire effectivement des représentations soit pour modifier la loi, pour rendre la preuve moins exigeante ou à tout le moins pour donner des mandats beaucoup plus précis au Bureau.

Il y a aussi... A été amenée une deuxième piste de solution, et mon confrère le mentionnait tantôt, la question du «divorcement». Les Américains en général, on l'a vu très souvent, sont très exigeants et très pointilleux lorsqu'il y a risque de pratique monopolistique. Dans quelque secteur d'activité que ce soit, les grands procès aux États-Unis ? ça a commencé au début du siècle ? les grands procès, aux États-Unis, anticartel ont à toutes fins pratiques encadré le développement de l'industrie aux États-Unis. Le principe du «divorcement», c'est de faire en sorte que la compagnie qui contrôle le raffinage ? on ne parle même pas de l'extraction, du brut, on parle du raffinage, quoique, comme je vous l'ai expliqué tantôt, en général, ce sont les mêmes ? mais à tout le moins les compagnies qui contrôlent le raffinage ne puissent d'aucune façon contrôler aussi la vente au détail. Donc, les stations-service ne pourraient appartenir aux compagnies qui, par ailleurs, raffinent le pétrole. C'est ça, le principe du «divorcement».

On l'a regardé de près, entre nous, on a eu quelques commentaires, mais il n'y avait pas énormément d'informations. Il n'y a aucune province canadienne qui le pratique. Il y a quelques États aux États-Unis qui le pratiquent ? si vous me permettez de retrouver le passage. Il y a, entre autres, le Delaware, il y a le Connecticut, il y a le Maryland, le Nevada et le district de Columbia. Donc, il y en a cinq, cinq États américains. Ce n'est pas énorme. Les quelques documents que nous avons eus quant aux États qui pratiquaient cette politique ou cet outil, qui utilisaient cet outil du «divorcement», c'est qu'à tout le moins ça a eu deux effets: des prix plus stables sur une longue période et une croissance moins rapide, non pas une annulation de la croissance, mais une croissance moins rapide. Donc, les fluctuations que nous connaissons ici, ces États-là ne les connaissent pas.

Par ailleurs, il semblerait que la croissance des prix soit moins grande. Ce n'est pas énorme comme impact, on n'a pas inventé les boutons à quatre trous, mais c'est un outil parmi d'autres qui pourrait effectivement nous aider à mieux encadrer les pratiques dans cette industrie-là. Et, moi, je souhaite, au même titre que mes confrères, que le ministre des Ressources naturelles jette un coup d'oeil, possiblement demande un complément d'information, possiblement rencontre, envoie une délégation là-bas pour voir si, effectivement, il y aurait lieu, au Québec, que nous puissions pratiquer ou utiliser le même type d'outil.

Je vais, moi aussi, avant de terminer, m'arrêter à la question des taxes. Alors, il y a une chose qui est claire, il n'y a pas eu de consensus. Les positions étaient à peu près le reflet, je pense, des analyses que la société civile fait de la question des taxes. Certains groupes nous ont demandé des réductions de taxes. D'autres groupes nous ont dit: Non, on ne veut pas de réduction de taxes parce que, et je vais y revenir, parce que, quand il y a une réduction de taxes, l'effet quasi automatique, c'est que les multinationales occupent l'espace que la taxe occupait assez rapidement, de telle sorte que l'impact que pourrait avoir la taxe sur une réduction du prix se fait non pas nécessairement pas sentir, mais peu sentir. D'autres nous ont dit: Écoutez, la question, ce n'est pas de réduire les taxes, la question, c'est de prendre les revenus générés par ces taxes-là et les réinvestir dans le réseau routier, puisque, en principe à tout le moins, la taxe sur l'essence, ça vise effectivement à permettre aux utilisateurs du réseau routier de pouvoir se promener sur des routes qui ont de l'allure.

Il y a une chose qui est certaine, et c'est clairement mentionné dans le rapport, il y a une chose qui est certaine, c'est qu'il n'y a aucune garantie que des réductions de taxes profiteraient au consommateur. Et, moi, ce que j'ai toujours dit à l'intérieur de ça, c'est que, si je n'ai pas de garantie que de réduire les revenus du gouvernement ne profitera pas automatiquement au payeur de taxes, que ce soit le payeur de taxes au niveau de la taxe de vente, que ce soit le payeur de taxes au niveau de l'impôt sur le revenu ou autres, si ça ne profite pas directement, on n'y touche pas; aussi bien travailler à des niveaux où, là, c'est le consommateur, citoyen, voteur qui, lui, va pouvoir en profiter. Et j'en reviens toujours à ce moment-là à dire: Écoutez, il y a un endroit où on sait qu'une réduction de taxes va être directement profitable au payeur de taxes, et c'est l'impôt sur le revenu. Ça, c'est clair, les multinationales ne peuvent pas s'en accaparer, les grandes pétrolières ne peuvent pas venir nous le chercher. On a plus d'argent sur notre chèque. Tant qu'à baisser les taxes, j'aime autant m'assurer et garantir aux citoyens et aux citoyennes qui nous ont tous élus que c'est eux qui vont le mettre dans leurs poches et que ça n'ira pas gonfler les profits des multinationales, ce dont j'ai très peur et ce qui me semble être le cas quand j'analyse la situation dans les régions qui ont effectivement profité de rabais de taxes pour cause d'éloignement ou bien pour cause de proximité avec le marché américain ou le marché du Nouveau-Brunswick ou de l'Ontario.

n (11 h 20) n

Ce que je retiens aussi, l'Association des camionneurs nous a dit: Écoutez là, on est capable de vivre avec les taxes, on n'est pas capable de vivre avec les nids-de-poule, on n'est pas capable de vivre avec un réseau routier qui se détériore constamment; de grâce, MM. les députés, on veut que vous réinvestissiez les sous que vous ramassez dans le réseau routier. Ça n'a pas été facile, ça. Ça n'a pas été facile. Ça n'a pas été facile, d'autant plus que les taxes, elles ne viennent pas juste au Québec, même si la responsabilité du réseau routier, à 90 % près, est une responsabilité du Québec.

Ça fait des années, et des années, et des années, et là, là, c'est tous partis confondus. Puis c'est arrivé bien avant que le député de Témiscouata ou moi soyons ici. Pour la première fois, M. le Président, en tout près de 25 ans, le Québec, effectivement, cette année, a réinvesti la totalité ? la totalité, et je le dis bien et j'insiste ? la totalité des revenus générés par les taxes qui frappent directement ou qui s'adressent directement à l'automobile, que ce soient les plaques, que ce soient les taxes sur l'essence, et autres, dans le réseau routier. Puis ça faisait 25 ans que ça ne se faisait pas, il était temps que ça se fasse. On aurait peut-être dû le faire avant, on avait tous les problèmes que vous connaissez, on a réussi à le faire cette année. Nous réinvestissons cette année 1,4 milliard ? ça, c'est pas mal plus que la taxe de vente et la taxe sur le pétrole, c'est l'ensemble des taxes ? dans le réseau routier. Ça en fait suer quelques-uns, dont celui même qui vous en parle aujourd'hui, parce que, quand je descends vers Montréal, je suis poigné pour faire des détours assez souvent, quand je traverse l'île de Montréal aussi, vous le savez, M. le Président; il y a beaucoup de travaux à bien des endroits.

Mais ce n'est pas la totalité des taxes qui sont payées par les Québécois et les Québécoises, dans l'essence. Les Québécois et les Québécoises, lorsqu'ils achètent leur litre ? hein, on l'a mentionné tantôt ? il y a aussi les taxes d'assises fédérales et il y a la TPS. On envoie, grosso modo, 1 milliard à Ottawa. Lorsque l'Association des camionneurs nous faisait la remarque de dire: Réinvestissez, là, eux autres, ils ne font pas la différence. Eux autres, ils disent: Tous niveaux de gouvernements confondus, réinvestissez. On envoie 1 milliard à Ottawa, on récupère, au niveau de l'entretien, de la réfection, de la construction des voies terrestres, des routes, des chemins, 100 millions d'Ottawa. Là, il y a un écart majeur de 900 millions qui, si on l'avait, si on l'avait, on serait sûrement en mesure de réinvestir encore plus pour faciliter. Alors, là aussi, je recommande fortement au ministre de faire des représentations à Ottawa pour dire: Écoutez, nous autres, on le fait, là, il y aurait-u moyen que vous autres aussi vous le fassiez?

Donc, et je termine là-dessus, M. le Président, ce qui ressort de cette commission, c'est qu'il n'y a pas eu de solution miracle. Il y a eu des pistes intéressantes. Mes deux confrères l'ont souligné, j'espère l'avoir moi aussi souligné, c'est un problème énorme qui dépasse largement les frontières du Québec. Et je ne parle pas uniquement des frontières géographiques, je parle des frontières politiques, je parle des frontières économiques du Québec.

Je pense que c'est aussi un choix de société. On dit toujours que les taxes sont trop élevées au Québec, parce qu'on se compare avec les États-Unis, par exemple. Mais si on se comparait avec l'Europe? En Europe, le prix de l'essence est le double d'ici. Ça, c'est un choix de société. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que les Européens, ils ont dit: On va se forcer à fabriquer des autos beaucoup plus performantes, avec des petits moteurs, on va mettre beaucoup plus d'argent dans nos autoroutes, ce n'est pas vrai qu'on va continuer à polluer. Alors, toute la question de la protection de l'environnement, ça aussi, c'est un choix de société. L'essence ne peut pas être envisagée, analysée, regardée dans le sens étroit, on doit la voir dans une analyse globale. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Vimont.

M. François Gaudreau

M. Gaudreau: Merci beaucoup, M. le Président. Après avoir pris connaissance du rapport final de la commission de l'économie et du travail, qui est la problématique du prix de l'essence et leur impact sur l'économie québécoise, je me dois de constater certains faits y étant énoncés et qui me semblent refléter une tendance problématique au Québec.

Prenons le tableau 1, par exemple, où on nous confirme que nous sommes deuxièmes, après Terre-Neuve, pour le plus haut tarif de taxes à la consommation sur l'essence et la seule province au Canada à exiger explicitement une taxe de vente, la TVQ, c'est-à-dire que nous taxons les taxes.

Sur la tableau 3, nous constatons que le prix de l'essence au Québec est plus élevé de 38 % versus les États-Unis. De même, pour mieux faire passer la pilule, on nous compare avec certains pays de l'Europe. Mais ne soyons pas dupes, nous vivons sur le continent nord-américain, et notre concurrence est nord-américaine.

Prenons finalement le tableau 4 où de nouveau nous constatons que Montréal arrive au deuxième rang des villes du Canada où nous trouvons les prix de l'essence les plus élevés, taxes comprises, après Saint-Jean, Terre-Neuve. Devons-nous en être fiers? Non, M. le Président. Si au moins la qualité de nos infrastructures routières y était, on comprendrait un peu mieux.

Ces tableaux nous confirment que nous sommes encore une fois les plus taxés au Canada. J'entendais tantôt mes collègues faire le tour de la question, parler des cartels, des monopoles, et tout ça, et la crainte de baisser les taxes de peur de voir les méchantes entreprises pétrolières en profiter. Je pense que c'est un peu nous leurrer. Je crois que notre gouvernement pourrait aisément contrôler cette baisse. Et n'oublions pas que 45 % du prix de l'essence est composé de taxes.

Finalement, les recommandations de la commission vont dans le sens de ce que préconise l'Action démocratique du Québec, c'est-à-dire remettre le consommateur, le citoyen finalement, au coeur de nos préoccupations. Le gouvernement du Québec a deux leviers importants pour influencer les prix de l'essence: les taxes elles-mêmes ainsi que la Régie de l'énergie, et elle devrait s'en servir.

L'ADQ demande à ce que le gouvernement prenne ses responsabilités afin que les consommateurs n'aient plus un aussi lourd fardeau en matière de coût de l'essence. L'essence est un bien de consommation essentiel pour plusieurs Québécois et Québécoises, notamment dans les régions. L'ADQ souhaite que le gouvernement finalement donne suite à ce rapport et à ses recommandations.

De plus, je voudrais féliciter la commission, ses membres et les 17 organismes et personnes qui ont déposé ces mémoires lors des consultations pour la lumière que ce rapport finalement apporte sur la problématique de l'essence au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député, de votre intervention. Nous procédons au prochain intervenant, M. le porte-parole de l'opposition en matière de travail et député de Mont-Royal. M. le député, la parole est à vous.

M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. À mon tour, il m'est très agréable d'intervenir sur le rapport de la commission de l'économie et du travail en ce qui a trait à toute la problématique des fluctuations des prix de l'essence au Québec.

Mes premières paroles, M. le Président, seront pour remercier et féliciter, je pense, les 17 groupes qui sont venus nous rencontrer au cours des trois jours de session que nous avons passés avec eux. C'est 17 groupes, je pense, qui ont... groupes ou personnes qui ont présenté des mémoires assez étoffés, connaissants du milieu de l'essence et des prix de l'essence au Québec. Alors, je voudrais personnellement les remercier et les féliciter pour la qualité de leur travail. Ça m'a permis, moi personnellement, de comprendre un peu mieux le marché du prix de l'essence, mais ça m'a permis aussi de comprendre que c'est un marché qui est extrêmement complexe, qui est très difficile à cerner et où le Québec et nous tous, nous avons extrêmement, très, très peu d'influence sur ce marché.

Comme on vous l'a dit précédemment, le prix de l'essence dépend de plusieurs choses. C'est sûr qu'il dépend des taxes à 45 % en moyenne en général au Québec, mais il dépend aussi à 32 % de ce qu'on appelle le prix du brut, et j'y reviendrai tantôt. Il dépend aussi à 18 % du raffinage, de ce qu'on appelle le raffinage, et finalement de 5 % au niveau de la commercialisation, c'est-à-dire au niveau des stations d'essence elles-mêmes. Alors donc, on a peu d'impact. En tout cas, moi, j'ai réalisé qu'on a peu d'impact ou on a peu d'influence sur le prix de l'essence au Québec parce qu'il dépend, d'une part, du prix du brut qui est un prix mondial, déterminé mondialement, et aussi de ce qu'on appelle le prix à la rampe, c'est-à-dire le prix qui est déterminé à New York, qui a une influence évidemment sur le prix qu'on peut demander au Québec, ici, et ailleurs au Canada aussi, parce que c'est assez facile de transporter de l'essence, c'est un produit qui se transporte assez bien en vrac. Donc, peu d'influence, c'est ma première constatation, le peu d'influence que nous avons. Une deuxième constatation, ça a été, comme je vous ai dit, la complexité de cette situation où nous avons peu d'influence et où notre influence est très peu déterminante dans la structure de prix et la façon qu'on y arrive.

n (11 h 30) n

Troisième constatation, c'est que les nombreuses fluctuations qu'on a regardées au cours des dernières années dans le prix de l'essence ici, au Québec, bien, les nombreuses fluctuations, ce n'est pas le niveau de taxation du Québec qui en est responsable. Autrement dit, quel que soit le niveau de taxation du Québec, il a été constant au cours des dernières années, et donc, ce n'est pas lui qui a fait que les prix à la pompe ont monté ou descendu au cours des dernières années, mais c'est plutôt le prix du brut et le prix de la marge ou, si vous voulez, du raffinage. Comme mes collègues vous l'ont souligné, quand on a regardé la période de 1998 à 2001, il s'est passé une période très courte, finalement, on parle de trois ans, et, en ces trois années-là, le prix de l'essence à la pompe, en général, au Québec est passé de 0,57 $ à 0,84 $. Tantôt, on faisait remarquer que c'était une augmentation de 47 %, mais, dans les poches des contribuables québécois, ça voulait dire une augmentation de 0,372 $, M. le Président. Alors, c'est énorme. À chaque litre d'essence, ça coûte 0,372 $ de plus que ça coûtait en 1998. Donc, c'est important, et ça valait la peine que la commission se penche sur ce dossier.

Alors donc, pour revenir à cet écart-là de 0,37 $, on remarque, par exemple, que le prix du brut, qui, en 1998, était de 0,106 $, il est maintenant de l'ordre de 0,26 $, il varie entre 0,24 et 0,28 $. Ça veut dire que, en 1998, le brut était payé 0,106 $, et maintenant il est payé, disons, en moyenne 0,26 $, c'est-à-dire une augmentation de deux fois et demie, deux fois et demie le prix que l'on payait autrefois. Donc, ça a eu une influence énorme sur la tendance à l'augmentation du prix de l'essence au Québec.

Deuxième constatation qui est importante aussi au niveau des fluctuations du prix de l'essence, c'est la marge des raffineurs. La marge des raffineurs, qui, au début, en 1998, était de 0,044 $ le litre, elle est maintenant environ... Ça fluctue d'un mois à l'autre, mais elle est environ de 0,093 $ le litre, en moyenne. Donc, c'est-à-dire que, là aussi, on a multiplié par deux les prix de... la marge des raffineurs.

Donc, ça veut dire que, des augmentations dont on vous parle, les principales causes, c'est le brut, le prix du brut, qui a passé de 0,106 $ à environ 0,26 $... Et ça, on sait, M. le Président, que ni le Québec ni le Canada n'ont d'influence sur ce prix mondial, ça dépend du cartel de l'industrie. Et ce cartel-là, vous savez ce qu'ils font depuis quelques années, ils ont décidé de contrôler ? je ne parle pas des périodes de guerre ou des choses comme ça, comme la guerre du Golfe, je parle dans les périodes normales ? ils ont décidé qu'ils contrôlaient l'offre de brut sur le marché. Alors, quand on contrôle l'offre, on crée une rareté et, en créant une rareté, on se trouve à augmenter le prix du produit qu'on vend. Et, en l'occurrence, ici, on parle donc de l'essence. Donc, peu d'influence sur le prix du brut; par contre, on subit cette augmentation de deux fois et demie le prix qu'il était autrefois. Durant cette même période qu'on a analysée, donc, on a doublé les marges de raffinage et deux fois et demie le prix du brut. Par contre, les taxes sont restées constantes. Alors donc, ce n'est pas les taxes qui peuvent expliquer les fluctuations du prix de l'essence.

Ceci étant dit, par contre, M. le Président, je me dois de constater que le prix de l'essence à la pompe au Québec est plus élevé que toutes les autres provinces, à l'exception de Terre-Neuve. Mais aussi je me dois de constater, M. le Président, que non seulement le prix de l'essence à la pompe est plus élevé au Québec, mais que, par hasard ? oh, surprise! ? c'est aussi la province qui a le taux de taxation le plus élevé sur l'essence. Donc, il semble y avoir un lien, à tout le moins, entre le prix de l'essence à la pompe et le niveau de taxation que l'on demande. Et je vous rappelle, M. le Président, que la taxe compte pour 45 % du prix de l'essence, donc à toutes fins pratiques la moitié du prix de l'essence, et donc, si on demande plus d'argent en taxes, c'est sûr que ça va avoir une influence au prix à la pompe. Et, à mon point de vue, ça nuit énormément aux citoyens eux-mêmes, mais aussi aux entreprises québécoises, particulièrement aux PME, particulièrement aux agriculteurs. Et tantôt on mentionnait, et je le répète, tout le domaine de l'industrie, pour qui l'essence est un phénomène important dans leur coût de production, par exemple toute l'industrie du camionnage, l'industrie du taxi, par exemple, M. le Président.

Alors donc, c'est absolument essentiel qu'on reconnaisse que, au Québec, c'est la deuxième province en termes de niveau de taxation et c'est également la deuxième province en niveau du prix à la pompe. Je n'ai pas fait d'étude scientifique détaillée de ces phénomènes-là, mais il semble y avoir un lien de cause à effet entre le fait que la taxe est plus élevée et le fait que le prix à l'essence est plus élevé au Québec. Et ceci, c'est indépendant des fluctuations parce que, comme je vous l'ai dit, et je le répète encore, les fluctuations de prix ne sont pas une conséquence des taxes, mais le niveau des prix peut être une conséquence des taxes.

L'autre chose qu'on est appelé à constater, c'est que le gouvernement du Québec a même reconnu d'une certaine façon que les taxes sont plus élevées au Québec et que ça a une influence sur le prix, puisque, dans les zones frontalières, par exemple, on permet d'avoir un niveau de taxation différent, c'est-à-dire plus bas, pour justement permettre à ces zones frontalières de pouvoir concurrencer.

Je vais vous donner deux exemples, deux exemples extrêmes, vous me direz, mais quand même deux exemples. La région de l'Outaouais, par exemple, qui est évidemment juxtaposée ou à côté de l'Ontario. Évidemment, eux autres, ils ont la concurrence qui n'est pas loin, avec un niveau de taxation plus bas et des prix à la pompe plus bas. Et on remarque que la région de l'Outaouais, par exemple, est, en général, en moyenne, de 0,06 $ à 0,07 $ plus basse que la moyenne québécoise. À l'opposé de ça, on a la région, par exemple, du Nord-du-Québec, qui, elle, est une région totalement isolée, qui est vulnérable, puis je comprends qu'il y a du transport, qu'il est plus dispendieux de rendre le produit là, mais, quand même, la région du Nord-du-Québec, où, en général, encore une fois, le prix de l'essence là est de 0,10 $ le litre plus élevé qu'ailleurs au Québec ou à la moyenne québécoise.

Alors, ce que je conclus, moi, personnellement, c'est qu'il est donc possible que, si on baissait le prix de l'essence au Québec... le prix de la taxe au Québec, il est possible que le prix de l'essence baisse. Maintenant, j'admets volontiers qu'on n'a pas de preuve irréfutable de ça et j'endosse donc volontiers la recommandation qui dit que la Régie de l'énergie devrait faire une étude approfondie de voir: Si les taxes sont plus basses, est-ce que le consommateur en bénéficie ou pas? parce que, finalement, c'est le citoyen qui devrait être au centre de toute cette pensée au niveau de la taxation.

Mais, pour revenir à la complexité du prix de l'essence, permettez-moi de parler d'autres choses aussi qui influencent le prix de l'essence. Le comportement des consommateurs, par exemple, au cours des dernières années ? et le Québec n'est pas différent des autres provinces, j'imagine, à ce point de vue là ? le comportement des consommateurs, toute la question des véhicules qu'on appelle les véhicules quatre-par-quatre, les véhicules quatre roues motrices, les gros véhicules, les véhicules qui consomment énormément. Il faudrait sensibiliser la population à regarder ou à acheter plutôt des véhicules qui consomment beaucoup moins, sans nécessairement aller jusqu'au véhicule électrique, mais, quand même, des véhicules qui sont plus raisonnables au niveau de la consommation. Et aussi, par exemple, en milieu urbain, on pourrait sûrement faire des efforts pour motiver les gens à utiliser beaucoup plus le transport en commun que ce n'est le cas dans le moment. Parce qu'on sait fort bien que le transport en commun, dans les villes comme Montréal ou Québec, c'est peu utilisé, en tout cas, peu en proportion de ce qu'il pourrait l'être. Alors donc, le comportement du consommateur n'aide pas, évidemment, à faire que la demande pour les produits pétroliers est plus élevée, et, quand la demande est plus élevée, en général, ça fait augmenter les prix.

n (11 h 40) n

En second lieu, le comportement du marché lui-même, le marché local. Il y a deux choses que j'ai notées dans tous les trois jours qu'on a passé avec les gens qui sont intervenus, c'est qu'au Québec, il y a une plus faible concentration de ventes par point de vente, si vous voulez, ou par station-service, autrement dit, les stations-service, au Québec, sont en général plus petites que dans le reste du Canada, il y a une plus grande prolifération de stations-service, ce qui fait que, si vous avez un moins grand volume pour amortir vos frais fixes, bien, vous allez demander un prix plus élevé pour pouvoir absorber justement ces frais fixes et rester avec une rentabilité raisonnable à la fin de l'année. Donc, ça, c'est une autre incidence sur le prix de l'essence qui est plus élevé au Québec.

Finalement, aussi, on ne peut pas faire autrement que de noter le comportement des indépendants, les indépendants, qui, on l'espérait, créeraient de la concurrence et feraient en sorte que les prix de l'essence baissent. Et, chose surprenante, M. le Président, c'est que, quand on a regardé l'évolution des prix au Québec, on remarque que, quand il y a une hausse subite de prix ? et je vais en reparler dans quelques minutes de ça ? les indépendants ont tendance à suivre les hausses subites de prix plutôt que de les restreindre et de créer cette concurrence qu'on s'attendait que les indépendants créent.

Finalement... Alors, j'ai parlé du comportement du consommateur, j'ai parlé du comportement du marché local, et finalement c'est le comportement des raffineurs. Bien, personnellement, je peux vous dire une chose, sans les accuser, je peux vous dire que les hausses subites de 0,05 $ ou de 0,10 $ du prix de l'essence me surprennent et me laissent totalement, mais totalement perplexe. Je ne peux pas comprendre que, soudainement, toutes les stations-service d'une région, quelle que soit la région, soudainement, un bon matin, augmentent de 0,10 $, comme ça. Quelle est la raison? Je ne la comprends pas. Je n'ai pas de preuve, mais ça me laisse des doutes et ça me laisse, comme je vous l'ai dit, perplexe face à ces augmentations subites du prix à l'essence. Heureusement, la compétition fait toujours qu'il y en a un qui finit par baisser pour essayer d'attirer plus de clientèle, et le prix a tendance à redescendre, tranquillement, mais il redescend. Mais c'est les hausses subites de prix qui me laissent le plus perplexe.

Deuxième phénomène important au niveau des raffineurs, c'est l'apparition de ces dépanneurs qui donnent aussi ou qui vendent de l'essence. Pour eux, l'essence, ce n'est vraiment qu'un seul des produits qu'ils vendent, et souvent ils vont s'en servir pour ce qu'on appelle des «loss leaders», c'est-à-dire pour attirer le consommateur chez eux, et ils vont se contenter d'une marge bénéficiaire beaucoup, beaucoup plus faible. Alors, ça, ça veut dire que les raffineurs peuvent baisser leurs prix et, à ce moment-là, devraient nous permettre d'avoir de meilleurs prix au niveau du consommateur. Finalement, c'est sûr que l'intégration verticale de tous les raffineurs, c'est-à-dire le fait qu'un raffineur raffine et aussi possède des stations-service, bien, il peut décider de jouer, évidemment, de quel côté il décide de faire un profit, que ce soit au niveau du raffinage ou au niveau de la commercialisation.

Alors, tout ça pour dire, M. le Président, comme je le disais au début de mon exposé, que la situation du prix de l'essence au Québec et ailleurs, j'imagine, au Canada est très perplexe, très difficile, très difficile à saisir. On parlait du Bureau de la concurrence tantôt qui a fait des études pour essayer de voir s'il y avait collusion sur les prix, et on n'a pas réussi à démontrer rien, c'est absolument impossible de rien démontrer.

C'est donc ce qui m'amène à dire qu'une des principales conclusions, sinon la principale conclusion, c'est justement d'essayer d'élargir le mandat de la Régie de l'énergie. Comme vous savez, M. le Président, la Régie de l'énergie a été créée suite à une guerre de prix énorme qu'il y a eu au Québec et elle a été créée pour, au début, protéger les détaillants, particulièrement les détaillants indépendants. Mais aujourd'hui je pense qu'on devrait modifier et élargir le mandat de la Régie pour qu'elle s'étende à protéger le consommateur, protéger le citoyen du Québec parce que, à mon point de vue, l'essence est maintenant un bien essentiel. Très peu de gens peuvent dire: Je peux me priver d'une automobile. Et plus vous allez en région... À la rigueur, à Montréal, quelqu'un peut utiliser le transport en commun, mais, en Gaspésie, par exemple, il n'y en a pas de transport en commun, pensez-y pas, alors donc, l'automobile est un bien essentiel. L'automobile étant un bien essentiel, l'essence devient automatiquement aussi un bien essentiel. Donc, il faudrait modifier le mandat de la Régie pour que son rôle soit de protéger le citoyen, le consommateur du Québec.

Je suis pour aussi qu'on fasse une étude approfondie, finalement, sur l'incidence d'une baisse de taxes au niveau du consommateur, autrement dit: Est-ce que c'est vrai ou si ce n'est pas vrai que, quand on baisse les taxes, c'est le consommateur qui en bénéficie, c'est le citoyen qui en bénéficie? C'est ça, le but, dans le fond. Et, si on démontre ça, je pense que le Québec devra réagir et baisser les taxes, justement, pour arriver à baisser en général le prix de l'essence au niveau de la pompe. Parce que, comme je vous le disais au début, il est surprenant de voir que Terre-Neuve et le Québec sont les deux provinces où les taxes sont les plus élevées. Ce sont aussi les deux provinces où le prix à la pompe est en général le plus élevé, et ça, M. le Président, ça n'a rien à voir avec les fluctuations de prix de l'essence, ça a quelque chose à voir, par exemple, avec le niveau du prix. Et je pense que, si on peut...

Vous savez, au Québec, on est la province la plus taxée ? on le dit assez souvent, j'espère qu'on va finir par le comprendre, de l'autre côté de la Chambre ? la province la plus taxée au niveau de l'impôt, mais là, en plus de ça, on est plus taxé au niveau de l'essence. Alors, je pense que le citoyen du Québec a besoin d'un peu de répit face à cette taxe. Mais, de grâce, démontrons, avant, démontrons clairement, grâce à la Régie de l'énergie, que c'est possible de s'assurer, de s'assurer qu'un transfert ou une baisse des prix des taxes se transfère au niveau d'une baisse de prix à la pompe.

Alors, ceci étant dit, M. le Président, je rejoins mes collègues qui ont parlé précédemment pour dire qu'il serait important qu'un suivi soit donné à ce rapport de la commission. J'ai extrêmement apprécié ces trois jours d'audiences. Je pense que nous avons fait un rapport qui se veut sérieux, le président de la commission le soulevait tantôt. Et je réitère aussi mon espoir que le ministre des Ressources et particulièrement, en tout cas, le gouvernement qui est au pouvoir fassent en sorte qu'il y ait un suivi qui soit donné et que la Régie de l'énergie soit équipée d'un mandat plus large et des ressources humaines et financières pour accomplir ce mandat. Sur ce, je vous remercie bien sincèrement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Mont-Royal, de votre intervention. Je voudrais reconnaître un prochain intervenant. Il s'agit de la porte-parole de l'opposition en matière de régions, Mme la députée de Bonaventure, en vous indiquant que vous avez un droit de parole de 11 minutes.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, évidemment, je souhaiterais joindre ma voix à celle de mes collègues qui se sont exprimés ce matin sur le rapport qui a été rendu public par la commission de l'économie et du travail. Dans un premier temps, vous me permettrez de féliciter les collègues qui ont pris part aux travaux de la commission, également aux groupes qui ont pris le soin de participer et de contribuer à une meilleure compréhension du marché des prix de l'essence au Québec. Mes collègues ont eu l'occasion de dire que c'est un marché évidemment complexe; on le voit, sur la base des recommandations et des explications qu'on trouve dans le rapport.

Mais, M. le Président, je souhaiterais cependant prendre un certain temps pour vous dire qu'au moment où le Parlement s'interroge et que la société en général s'interroge sur la façon de valoriser davantage le rôle du député je dois vous dire que les travaux, les mandats d'initiative qui sont confiés à certaines commissions parlementaires prennent une importance particulière. Et je pense, M. le Président, qu'on a là un exemple concret d'une contribution exemplaire que peuvent apporter des parlementaires à une meilleure compréhension d'une problématique qui touche la vie des citoyens du Québec dans leur vie de tous les jours.

Cependant, ce qui serait intéressant... Et tous les collègues qui ont pris la parole, peu importe notre formation politique, ont tous été unanimes pour dire et pour souhaiter que le ministre des Ressources naturelles prête un écho favorable et une oreille attentive aux recommandations qui sont contenues dans le rapport. Et je pense sincèrement, M. le Président, que, si le ministre des Ressources naturelles accepte de mettre en branle certaines recommandations qui sont contenues dans le rapport, nous pourrons arriver à la conclusion que le rôle des parlementaires est effectivement non seulement valorisé, mais que les parlementaires contribuent véritablement à la recherche de solutions dans certaines problématiques, donc, qui touchent les gens partout au Québec.

Alors, M. le Président, voilà là donc un rapport qui nous donne un nouvel éclairage ou un éclairage, en fait, qui permet de mieux comprendre tout le dossier de la fluctuation des prix de l'essence. C'est un sujet qui est très sensible auprès des consommateurs, sensible notamment lorsque les prix à la pompe, les prix au litre augmentent d'une façon substantielle.

n (11 h 50) n

Dans le rapport qui a été présenté, des membres de la commission ont fait un petit historique en mettant en lumière le fait qu'entre mai 1998 et mai 2001, en fait, les consommateurs québécois ont assisté à une hausse de 45 % du prix à la pompe, du prix au litre. Alors, on est passé d'un prix de 0,571 $ le litre à 0,826 $ le litre. C'est une augmentation importante qui trouve une certaine part d'explication, même si mon collègue le député de Mont-Royal s'interroge encore, malgré tous les travaux qui ont eu cours, qui se sont tenus pendant trois jours en audiences, il s'interroge toujours sur une augmentation subite des prix. Il y a certains facteurs qui contribuent donc à une telle augmentation, des facteurs sur lesquels évidemment on n'a pas nécessairement d'emprise. On pense à l'augmentation du prix du pétrole, du prix du brut, et à l'augmentation de la marge des raffineurs.

Mais, M. le Président, je souhaiterais ici rappeler aux membres de cette Assemblée que, lors de la session parlementaire qui s'est tenue au printemps 2000, notre formation politique a déposé une pétition de 12 000 signataires, 12 000 signataires qui, de toutes les régions du Québec, donc, ont demandé au gouvernement provincial et au gouvernement fédéral d'alléger leur fardeau en demandant carrément une réduction de la taxe sur l'essence. Les travaux de la commission ont mis en lumière le fait que 45 % du prix du litre d'essence contient, en fait... est consacré à la taxe, taxes provinciales et taxes fédérales. Je pense que c'est important de rappeler, M. le Président, quel est le niveau de ces taxes. Donc, on parle de 45 % au total. Au provincial, on a deux types de taxes: la taxe spécifique, qui représente 0,152 $ le litre; également, la TVQ, qui représente 4,5 %. Au fédéral, la taxe d'accise, donc 0,10 $ le litre, et à ça on rajoute la TPS, donc, pour 7 %. Et c'est ce qui fait en sorte, M. le Président, qu'au Québec, comme mon collègue l'a si bien souligné... Québec et Terre-Neuve sont les deux provinces au Canada qui ont les taux de taxe les plus élevés dans chaque type d'essence qui est vendu sur leur territoire. Cependant, la province... le Québec, en fait, c'est la seule province qui impose une taxe provinciale sur les prix de l'essence.

Alors, M. le Président, on sait que les Québécois sont les plus taxés en Amérique du Nord, et nous avons plaidé à plusieurs reprises pour un allégement du fardeau fiscal du contribuable. Ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys a mis en lumière le fait que, depuis 1994, le gouvernement qui est en face de nous a imposé 17 nouvelles taxes aux contribuables québécois, 17 nouvelles taxes, et c'est pour cette raison que notre formation politique a plaidé à plusieurs reprises, depuis maintenant deux ans ou trois ans, nous avons plaidé pour un allégement, donc, du fardeau fiscal du contribuable qui passerait notamment par une réduction des taxes sur l'essence.

Cependant, les membres de la commission, dans leur grande sagesse, ont questionné ? et je pense que c'est très méritoire, c'est fondé ? ont questionné le fait que les réductions de taxes qui pourraient être consenties aux consommateurs québécois ne le seraient pas nécessairement... c'est-à-dire que les consommateurs n'en bénéficieraient pas nécessairement. Et, en fait, la crainte qu'ils ont exprimée, c'est une crainte qui est souvent exprimée de la part notamment des ministres qu'on a eu l'occasion successivement d'entendre, donc, au cours des dernières années, et les ministres... Il y a eu le ministre des Ressources naturelles, l'ancien ministre des Ressources naturelles, l'ancien député de Lac-Saint-Jean, qui, donc, s'est toujours refusé... a toujours refusé d'acquiescer à notre demande en prétextant justement le fait qu'une réduction de la taxe sur le carburant ou sur l'essence n'irait pas dans la poche des contribuables. Alors, dans leur grande sagesse, donc, les membres de la commission suggèrent au gouvernement, au ministre des Ressources naturelles, de développer une mécanique ou d'évaluer un mécanisme suffisamment efficace pour s'assurer qu'effectivement une réduction de la taxe bénéficie réellement aux consommateurs.

Parce qu'il faut dire, M. le Président, qu'il y a des éléments sur lesquels nous n'avons aucun contrôle. Je pense notamment à tout le dossier... à un dossier qui est éminemment politique. Lorsqu'on parle de l'augmentation du prix du brut, hein, on voit la croisade que mène actuellement le président américain qui pourrait peut-être se traduire par un conflit avec l'Irak, qui pourrait aussi peut-être se traduire, dans quelques mois, par une augmentation du prix du pétrole brut qui viendrait nous rejoindre... qui reviendrait rejoindre les consommateurs jusqu'ici, au Québec. C'est des éléments sur lesquels on a peu d'emprise.

Cependant, le gouvernement provincial a une certaine marge de manoeuvre avec non seulement le levier lié à la taxe, mais également avec la Régie de l'énergie. Et, de ce côté-là, les membres de la commission ont été unanimes pour demander que la Régie de l'énergie ait davantage de mordant, en fait, et davantage de pouvoirs sur toute la question liée au prix de l'essence, aux fluctuations du marché de l'essence. Et, là-dessus, M. le Président, rappelez-vous les nombreux débats qu'on a eus en Chambre sur la Régie de l'énergie. Parce que, lorsque le gouvernement a créé cette instance au niveau énergétique, en fait, il a créé un organisme qui, au départ, avec la loi qui a été déposée et adoptée... Ce qu'on voulait, c'est un organisme qui ait réellement les moyens de ses ambitions, qui ait réellement, finalement, les leviers nécessaires pour intervenir dans le secteur énergétique au Québec pour faire véritablement, donc, un rôle non seulement de surveillance, mais de contrôle. Alors, ce qu'on constate, dans les faits, c'est que la Régie de l'énergie, comme elle a été émasculée ? c'est un terme qu'on a entendu souvent en cette Chambre ? le gouvernement lui a retiré des pouvoirs importants qui l'empêchent aujourd'hui de faire le travail pour lequel elle a été créée.

Alors, ce que je souhaite ? et là-dessus je joins ma voix à celle de mes collègues ? c'est que le ministre des Ressources naturelles donc réhabilite certains pouvoirs qui ont été retirés à la Régie de l'énergie pour qu'elle puisse véritablement faire son travail, et tout ça bien sûr pour le bénéfice des consommateurs québécois et pour le bénéfice de plusieurs régions du Québec. Parce que ça me permet également de vous dire ? et ça a été mis aussi en lumière par les travaux de la commission ? qu'une fluctuation des prix de l'essence qui se traduit par une augmentation importante a des impacts évidemment significatifs en région, notamment auprès des petites et moyennes entreprises mais aussi dans le secteur de l'agriculture et dans le secteur forestier.

Et je me souviens, justement, autour de 2000, lorsqu'on a assisté à une augmentation importante des prix, des travailleurs forestiers dans la région de la Gaspésie et ailleurs dans plusieurs régions forestières, des propriétaires de machinerie forestière notamment qui étaient complètement dépassés par l'augmentation des prix du carburant, qui, dans un contexte où le gouvernement n'a pas bonifié... où les entreprises pour lesquelles ils contractaient n'ont pas bonifié les prix au mètre cube qui leur étaient consentis, qui, au même moment, se voyaient imposer un fardeau additionnel au niveau de l'augmentation du prix du carburant, bien, je dois vous dire qu'il y en a plusieurs qui se sont cassé la tête, et vraiment ça a rendu un peu plus fragile leur situation. Et on se rend compte à quel point, M. le Président, nous sommes dépendants, au Québec et en particulier dans les régions, donc, de toutes fluctuations qui se traduisent par une hausse qui est souvent significative.

Et je me souviens, à l'époque ? et c'est pour ça que, dans un contexte comme celui-là, le débat prend une importance particulière ? on a parlé beaucoup de réduction de la taxe sur le carburant en 2000-2001. Cependant, lorsque les prix sont à la baisse, M. le Président, et c'est un réflexe naturel, les consommateurs sont satisfaits, et le réflexe que nous avons, c'est de mettre au rancart, donc, le dossier de la fluctuation des prix de l'essence. Mais le réflexe que nous avons également, c'est de mettre au rancart la proposition qui a été maintes fois apportée, c'est-à-dire de réduire la taxe sur le carburant.

Alors, M. le Président, c'est intéressant, ce matin, de profiter du débat pour réitérer, de notre côté, cette demande maintes fois formulée qui est celle d'alléger le fardeau fiscal des consommateurs en réduisant la taxe sur l'essence. Et ce que je souhaite sincèrement, M. le Président, c'est que le ministre des Ressources naturelles puisse dès aujourd'hui, sur la base du rapport qui a été déposé et sur la base des discussions que nous avons ce matin ? parce que le ministre va constater l'unanimité à l'endroit des recommandations qui sont formulées dans le rapport ? puisse passer à l'action et évaluer avec les spécialistes de son ministère la faisabilité de certaines recommandations qui sont contenues dans le rapport qui a été déposé.

Alors, M. le Président, en terminant, je souhaite évidemment joindre ma voix à celle de mes collègues et dire, en terminant, parce que c'est une recommandation qui a été exprimée dans le rapport... On entend souvent dire que le gouvernement du Québec, par rapport à la taxe sur le carburant qu'il perçoit, ne réinvestit pas totalement les sommes perçues dans l'amélioration du réseau routier. Pour le budget 2002-2003, le gouvernement prévoit donc retirer des recettes de 1,6 milliard, alors que les crédits du ministère des Transports prévoient un investissement dans le réseau de 900 millions. Il y a donc un déficit de 700 millions de dollars par rapport au fardeau qu'on impose aux consommateurs de carburant, par rapport au réinvestissement qu'on fait dans le réseau routier. Alors, si cette taxe sur le carburant était véritablement une taxe qui était dédiée à l'amélioration et à la réfection du réseau routier, eh bien, je pense que le gouvernement prendrait les mesures nécessaires pour s'assurer que ce 1,6 milliard qui est perçu via la taxe sur le carburant soit effectivement réinvesti dans l'amélioration du réseau routier.

Alors, en terminant, M. le Président, il me reste très peu de temps, simplement pour vous dire que je réitère évidemment mon appui à l'ensemble des collègues des deux côtés de la Chambre qui ont pris part aux travaux de la commission. Et je souhaite évidemment ardemment que le ministre des Ressources naturelles puisse donc mettre en oeuvre certaines recommandations contenues dans le rapport. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bonaventure. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, ceci met fin au débat restreint sur le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a tenu des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur la problématique des fluctuations du prix de l'essence et de leur impact sur l'économie québécoise.

Alors, compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi. Bon appétit à vous tous.

(Suspension de la séance à 12 heures)

 

(Reprise à 14 h 4)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires courantes

Aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, j'inviterais Mme la vice-première ministre et ministre des Finances, de l'Économie et de la Recherche à nous déposer des documents.

Rapports annuels de la Commission
des valeurs mobilières, du Conseil
de la science et de la technologie,
de Financement-Québec, d'Innovatech Québec
et Chaudière-Appalaches, d'Innovatech
Régions ressources et de la Société du parc
industriel et portuaire de Bécancour

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 2001-2002 suivants: celui de la Commission des valeurs mobilières du Québec; du Conseil de la science et de la technologie; de Financement-Québec; d'Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches; d'Innovatech Régions ressources; et de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ces documents sont déposés. Maintenant, M. le ministre du Revenu.

Rapport annuel du Centre de perception fiscale,
état détaillé intitulé Remise des droits, et
sommaire statistique intitulé Renonciation et
annulation des intérêts, des pénalités et des frais

M. Julien: Oui, M. le Président, je dépose le rapport annuel de gestion 2001-2002 du Centre de perception fiscale, ainsi que l'état détaillé des remises de droits, ainsi que le sommaire statistique de la renonciation et de l'annulation des intérêts, des pénalités et des frais du ministère du Revenu.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ces documents sont déposés. Mme la ministre déléguée à l'Emploi.

Rapport annuel du Fonds national
de formation de la main-d'oeuvre

Mme Maltais: M. le Président, je dépose le rapport annuel 2001-2002 du Fonds national de formation de la main-d'oeuvre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce document est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Nous passons maintenant au dépôt de pétitions. M. le député de Maskinongé.

Améliorer les conditions de travail des responsables
de services de garde en milieu familial

M. Désilets: Oui, M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 9 300 pétitionnaires.

Désignation: citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que les responsables de service de garde travaillent, en moyenne, 25,25 heures et gagnent, selon notre estimation, moins que le salaire minimum;

«Considérant la précarité dans laquelle les intervenantes en milieu familial vivent leur quotidien (absence de congé de maternité, de sécurité d'emploi et de stabilité du revenu);

«Considérant l'impasse dans laquelle se trouvent les responsables de service de garde en milieu familial quant au droit aux absences;

«Considérant qu'elles n'ont pas droit au paiement des congés fériés et que le droit aux vacances reste à satisfaire;

«Considérant la non-reconnaissance à sa juste valeur de leur profession;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, refusons qu'une politique familiale progressiste s'appuie sur l'exploitation des intervenantes en milieu familial.

«Par conséquent, nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès de la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance et ministre responsable de la Condition féminine, Mme Linda Goupil, afin qu'elle prenne conscience de l'état dans lequel elle confine ces femmes et qu'elle accepte de s'inscrire dans un processus de négociation afin d'améliorer le sort des responsables de service de garde en milieu familial.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette pétition est déposée. Maintenant, M. le député de Châteauguay.

Permettre aux chauffeurs et usagers d'Oxford Taxi
d'utiliser la voie préférentielle pour taxis et
taxi-bus pour accéder au pont Mercier

M. Fournier: Oui, M. le Président. J'ai trois pétitions à déposer. Commençons par la première.

Je dépose l'extrait d'une pétition signée par 557 citoyens et citoyennes du comté de Châteauguay concernant la voie préférentielle pour taxis et taxi-bus.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, les chauffeurs et usagers d'Oxford Taxi, demandons d'utiliser cette voie pour accéder au pont Mercier.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Châteauguay, pour une deuxième.

M. Fournier: Les deux pétitions qui suivent, M. le Président, dont une est conforme, l'autre ne l'est pas ? je vous demanderai le consentement pour celle-ci par la suite ? concernent le même sujet, l'autoroute 30. Et il y a des gens dans nos estrades qui ont travaillé très fort pour que cette autoroute puisse voir le jour. Je voudrais les saluer et les remercier de leur dévouement.

D'abord, celle qui est conforme, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Celle qui est conforme. Très bien, M. le député.

Terminer les expropriations et signer une entente
de partenariat avec le gouvernement fédéral
pour le prolongement de l'autoroute 30

M. Fournier: Je dépose l'extrait d'une pétition signée par 4 800 citoyens et citoyennes de Châteauguay et des villes environnantes.

n(14 h 10)n

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Le 17 octobre 2000, la Chambre de commerce et d'industrie de Châteauguay appuyait devant l'Assemblée nationale l'adoption d'une motion visant à mandater le gouvernement du Québec de terminer les travaux d'arpentage et les procédures d'expropriation du corridor de l'autoroute 30 pour janvier 2002. À ce jour, ces travaux ne sont pas terminés.

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons que le gouvernement du Québec, en tant que maître d'oeuvre en matière de transport, s'engage à terminer les expropriations pour le 1er janvier 2003 et exigeons que les gouvernements du Québec et du Canada conviennent d'ici le 1er septembre 2002 du financement afin d'entreprendre dès lors la construction de l'autoroute 30.»

Et je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Châteauguay, pour la non conforme.

M. Fournier: Maintenant, pour la deuxième pétition, non conforme, sur le même sujet, avec le consentement de la Chambre, M. le Président, qui fait d'ailleurs porter le total à 10 513 pétitionnaires.

Je dépose l'extrait d'une pétition signée par 5 713 citoyens et citoyennes de Châteauguay et des villes environnantes.

«Les faits invoqués sont les suivants...»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement?

Une voix: Il y a consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement? Très bien. Poursuivez, M. le député.

M. Fournier: Merci. «Le 17 octobre 2000, en présence d'une délégation d'élus et de gens d'affaires réunis sous la bannière du Comité d'action régionale pour l'autoroute 30, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une motion mandatant le gouvernement du Québec de terminer les travaux d'arpentage et les procédures d'expropriation du corridor de l'autoroute 30 pour janvier 2002. À ce jour, ces travaux ne sont pas terminés.

«Or, le BAPE concluait dans son rapport du 17 juin 2002 que "non seulement l'opportunité de terminer l'autoroute 30 fait-elle consensus, mais aussi la nécessité d'entreprendre les travaux et de les mener à terme avec toute la diligence possible[...]. Son parachèvement est vital pour le Québec, pour l'agglomération montréalaise et pour la Montérégie[...]. Pour la Commission, le MTQ a d'abord l'obligation d'agir avec diligence, tant pour planifier les travaux que pour les mener à terme."

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Dans ce contexte, nous demandons que le gouvernement du Québec, en tant que maître d'oeuvre en matière de transport, s'engage à terminer les expropriations pour le 1er janvier 2003 et qu'il en vienne, d'ici le 31 décembre 2002, à signer une entente de partenariat avec Ottawa quant au financement nécessaire pour entreprendre la construction du prolongement de l'autoroute 30.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition et souhaite ardemment une réponse rapide du ministre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la pétition est déposée. Mme la députée de Jonquière.

Mme Gauthier: M. le Président, je sollicite donc le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition jugée non conforme.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement? Consentement, Mme la députée.

Maintenir en service la Centrale
ambulance de Métabetchouan

Mme Gauthier: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 6 550 pétitionnaires, les employés de la Centrale d'ambulance du Saguenay?Lac-Saint-Jean et les citoyens et citoyennes de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que la Centrale d'ambulance du Saguenay?Lac-Saint-Jean, Chibougamau, Chapais se verra fermée d'ici les prochains mois pour être centralisée à Québec;

«Considérant que ceci va occasionner 12 pertes d'emplois dans le comté du Lac-Saint-Jean;

«Considérant que de nombreuses questions seront posées pour évaluer la nécessité du transport et le système de communication sera moins efficace dû à l'éloignement;

«Considérant que l'efficacité et le bon rendement de la Centrale actuelle;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous voulons que la Centrale ambulance de Métabetchouan ne soit pas fermée et qu'elle demeure dans notre région.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit et de privilège.

Questions et réponses orales

Nous sommes rendus maintenant à la période des questions et de réponses orales, et je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant. M. le député de Châteauguay et whip en chef de l'opposition.

Conséquences d'une possible
privatisation de certains services de santé

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, depuis de nombreuses années, nous avons choisi, au Québec, de soutenir un système de santé dont le principe de base est que nous sommes tous égaux devant la maladie. Nous avons toujours soutenu que le guide d'intervention devrait être la gravité de la maladie et non la grosseur du portefeuille. Aujourd'hui, un parti politique propose de changer cela.

Le ministre peut-il éclairer la population sur les conséquences de ce recul pour les classes moyennes et moins nanties? Peut-il confirmer que les coûts, sans tenir compte des honoraires des médecins, qu'auraient à payer les patients pour un pontage sont de 23 000 $, pour une chimiothérapie, de 24 500, et pour un infarctus, sont de 11 000 $?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Et, M. le Président, d'abord, je veux vous assurer que ce n'est pas une question plantée, qui a été négociée avec le député de Châteauguay. Je voudrais d'ailleurs saluer son retour de sa tournée, sa tournée où on promet tout à tout le monde.

M. le Président, on le sait, effectivement les besoins en santé croissent à un rythme plus important que la croissance des revenus au Québec, et ça nous amène effectivement à avoir un certain débat dans la société pour savoir comment on peut régler ce problème. Il y a un parti qui propose la privatisation d'une partie de notre service de santé en permettant à des gens plus riches de payer effectivement pour certains services qui peuvent aller, dans certains cas, jusqu'à 10 000, 20 000, 40 000, 100 000 $.

M. le Président, je pense que, d'abord, ça va contre toutes les valeurs de ce qu'on peut avoir bâti au Québec au cours des dernières années, depuis la Révolution tranquille entre autres, où on a vraiment réussi à se donner un filet de sécurité pour permettre à tout le monde au Québec, incluant ceux qui ont la malchance d'être malades, de pouvoir être soignés.

Maintenant, effectivement, je pense que la question, aussi, qui se pose: Est-ce que ça peut régler les problèmes de financement de la santé? Je pense que non. La formule qui est proposée ne règle pas les problèmes de financement du réseau de la santé, parce qu'on a au Québec seulement 1 % des Québécois qui gagnent plus de 100 000 $, seulement 15 % des Québécois qui gagnent plus de 45 000 $; on a un revenu disponible après impôts qui est environ de 17 000 ou 18 000 $. Donc, vous pouvez imaginer que des opérations à des coûts comme ceux mentionnés par le député de Châteauguay ? 10 000, 20 000 $ ? ce n'est pas possible pour la majorité des Québécois et des Québécoises.

Donc, je pense que, effectivement, ce ne serait pas possible, avec un système parallèle privé qui irait contre toutes nos valeurs, ce ne serait pas possible de régler le problème de financement. Il faut voir ailleurs. Oui, il faudrait investir davantage dans notre système de santé, faire des choix qui sont peut-être difficiles. Mais, M. le Président, je pense que, là-dessus, on est très d'accord, on a un service et on...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous inviterais de... On est assez tolérant pour dépasser un peu les limites habituelles. Je sais qu'il y a des questions qui demandent des réponses très longues, mais vous aurez l'occasion... Par des complémentaires et ainsi de suite, il y aura d'autres lieux pour compléter si vous n'avez pas le temps dans le temps qui vous est imparti. Alors, M. le député de Châteauguay.

Financement du système de santé

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui. En deuxième principale et avec le consentement de la Chambre, j'aimerais déposer un tableau concernant la chirurgie cardiaque et la radio-oncologie ? pour lesquelles on sait qu'il y a des bons délais d'attente ? qui établit le coût à assumer par patient, selon la proposition de l'Action démocratique, que le ministre pourrait peut-être, à un moment donné plus tard aujourd'hui ou cette semaine, la semaine prochaine, commenter pour mieux informer la population. Avec le consentement de la Chambre.

M. Corriveau: Question de règlement. Quand on demande le consentement, il me semble qu'on doit être consultés.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez! Ha, ha, ha! Excusez, monsieur! Excusez!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il faudrait écouter... Avant de demander le consentement, il faut avoir le droit de parole et demander à la présidence. Alors, on ne peut pas intervenir comme ça. On se lève, et, si vous avez une question, vous demandez à la présidence: M. le Président, j'aimerais, pour une raison de règlement... ainsi de suite. Ça va. Mais vous ne pouvez pas intervenir sans vous référer... tout d'abord demander le droit de parole en vous référant à un article du règlement. M. le député.

M. Corriveau: J'ai cru comprendre qu'on demandait le consentement. Bon. Alors, on doit être consultés, nous aussi. C'est tout simplement ça. Je vois que, depuis tantôt, vous regardez toujours l'opposition officielle ou vous...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, c'est une question de règlement? À ce moment-là, oui. Mais vous pouvez le manifester, dire: Non, il n'y a pas consentement, puis on vous entendra. Très bien.

Des voix: Il n'y a pas de consentement.

M. Fournier: Alors, je comprends...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez un peu, là, il n'est pas question de donner un consentement sur tous les contenus qui seront véhiculés dans cette Chambre, on n'en finirait pas. Il y a des moments où on demande le consentement, et là vous avez droit, mais vous n'avez pas à vous lever pour dire que: Je ne suis pas d'accord, je ne consens pas à ce qu'il dit, puis ainsi de suite. On n'en sortira pas, là.

Des voix: ...

M. Corriveau: ...obtenir consentement. Alors, si on veut obtenir consentement, je vous demande de nous regarder, s'il vous plaît.

Des voix: Ah, ah, ah!

M. Corriveau: C'est tout simplement de dire: L'Action démocratique est ici, en cette Chambre. S'il y a un consentement à demander, je vous demande de prendre en considération du fait qu'on est présents.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et, vous, vous devez prendre en considération que vous êtes présent, et, quand vous n'êtes pas consentant, vous le dites. M. le député de Châteauguay.

Des voix: Ha, ha, ha!

n(14 h 20)n

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je constate qu'il n'y a pas de consentement. Ma question principale néanmoins reste: Est-ce que le ministre est au courant que c'est le gouvernement du Parti québécois qui, par ses mauvais choix, a permis que s'ouvre une porte sur une tentative d'établir un système de santé préférentiel pour les riches? Parce que vous avez toujours refusé de couvrir plus que la moitié des coûts de système, les reculs au fil des ans se sont multipliés. Pour l'avenir, M. le Président, le gouvernement du Parti québécois nous propose la même politique que celle du passé. On pouvait lire aujourd'hui dans les journaux: 2 milliards pour les cinq prochaines années. Ça, ce n'est même pas la moitié des coûts de système pour les cinq prochaines années. Autrement dit, pour l'avenir, même recette que le passé: encore des reculs pour la santé des Québécois.

Quand comprendrez-vous que les errances de l'ADQ prennent leur source dans les erreurs du PQ? Et, surtout, quand allez-vous gérer et financer correctement la santé pour fermer la porte à une santé à deux vitesses?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, d'abord, je voudrais rappeler au député de Châteauguay que depuis qu'on a réussi à réparer le gâchis ? parce que c'était vraiment un gâchis qui nous a été laissé par les libéraux, c'est-à-dire un déficit annuel de 6 milliards par année ? depuis qu'on a réussi à réparer ce gâchis, c'est-à-dire en 1998, plus de deux tiers des marges de manoeuvre ont été consacrées à la santé, ce qui nous a permis d'augmenter la proportion du budget de la santé, qui était à 36 % sous le gouvernement libéral, à plus de 40 % aujourd'hui. Donc, de dire, M. le Président, qu'il n'y a pas eu d'effort de fait, je pense qu'il faudrait que le député de Châteauguay revoie un peu ses chiffres.

Maintenant, oui, il y a encore des difficultés à bien financer les augmentations annuelles des coûts de santé à cause des impacts du vieillissement de la population, du coût des médicaments, du coût des nouvelles technologies, mais on sait où sont les surplus: les surplus et les marges de manoeuvre sont à Ottawa. Ici, on fait le maximum, M. le Président, les deux tiers de toutes les marges de manoeuvre du gouvernement du Québec ont été mises à la santé.

Maintenant, regardons ce que propose le Parti libéral du Québec. Le Parti libéral du Québec propose des réductions de revenus, c'est-à-dire d'impôts, de 5 milliards de dollars par année. Donc, comment le député de Châteauguay peut-il concilier sa promotion d'un meilleur budget en santé tout en appuyant une baisse de revenus de 5 milliards? J'aimerais qu'il nous explique un peu mieux comment on peut comprendre un peu de cohérence dans de telles propositions, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Est-ce que le ministre comprend que, pour être cohérent, lorsqu'on dit qu'on veut fermer la porte à un système à deux vitesses, il faut s'assurer d'ouvrir celle qui est à une vitesse, celle qui est pour tous les Québécois? Ce que vous avez fait dans le passé, c'est des mauvais choix. Vous avez décidé de ne pas financer la santé correctement. Vous pouvez dire ce que vous voulez, on est passé de la troisième position des provinces canadiennes à la dixième et dernière position. Forcément, il y a eu des mauvais choix.

Nous, ce qu'on fait, au Parti libéral du Québec, oui, on fait des choix, mais gouverner, c'est choisir. Vous avez la possibilité de choisir. Vous nous parlez du 50 millions par semaine à Ottawa alors que vous avez 1 000 millions par semaine dans le budget du gouvernement du Québec dans lequel vous pouvez faire des choix. Ce que je vous demande: si vous avez la main sur le coeur toujours pour défendre le système public pour tous les Québécois, même ceux qui sont moins nantis que les autres, commencez donc par avoir de la cohérence, de regarder dans les budgets de l'État, faire les bons choix pour que tous les Québécois bénéficient d'un vrai système de santé.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, je vais essayer, pour une tentative ultime, j'espère, d'expliquer au député de Châteauguay qu'on n'est pas au dixième rang. Je vais lui donner des chiffres. On a dépensé, lors de la dernière année, 2 236 $ per capita pour la santé, et on doit ajouter 21 $ per capita pour les dépenses qui sont payées par la Société d'assurance automobile du Québec. Ça nous amène à un grand total de 2 281 $ per capita, ce qui nous amène au huitième rang. Donc, pas au dixième rang, au huitième rang. Huitième rang, c'était le rang qu'on occupait en 1990 quand les libéraux étaient là, mais en empruntant de l'argent sur le dos des prochaines générations. On avait un déficit qui a monté jusqu'à 6 milliards. Nous, on est au huitième rang, c'est-à-dire à la même place qu'en 1990, mais avec notre argent. Maintenant, huitième rang, ça ne nous suffit pas, M. le Président. Ça ne nous suffit pas.

Le Vice-Président (M. Brouillet): En conclusion.

M. Legault: Il faut comprendre, par contre, qu'il y a des petites provinces, les provinces maritimes, quand on regarde le per capita, qui sont devant nous, et l'Ontario. Maintenant, l'objectif du Parti libéral, c'est de dépasser l'Ontario. Or, l'Ontario est sixième. Mais ce que le député de Châteauguay oublie de nous dire, c'est qu'il y a un écart salarial de 13,5 % entre l'Ontario et le Québec. Ça veut dire que, quand on réajuste pour l'écart salarial, on donne plus de services au Québec qu'en Ontario. Donc, on est déjà cinquième, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): En conclusion.

M. Legault: Donc, on donne plus de services. Et, en 1994, je termine là-dessus, M. le Président, dernière année des libéraux, l'écart salarial était seulement de 7 % avec l'Ontario. Ça veut dire que, sous les libéraux, on dépensait moins de services en santé que l'Ontario. Aujourd'hui, on en dépense plus et on va continuer de le faire, mais avec notre argent, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la députée de Jonquière.

Financement des chirurgies avec hospitalisation
au Carrefour de santé de Jonquière

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, en début d'après-midi, des représentants de la Coalition intersyndicale du Carrefour de la santé de Jonquière sont venus à Québec déposer au ministre de la Santé 10 000 cartes postales signées par des personnes qui proviennent d'un peu partout au Saguenay?Lac-Saint-Jean et qui exigent la dispension de services de santé de qualité pour les 68 000 citoyens et citoyennes du secteur Jonquière. Ces services de santé de qualité passent obligatoirement par le maintien de la chirurgie avec hospitalisation à l'hôpital de Jonquière.

Mme la Présidente, compte tenu que le ministre de la Santé refuse de donner suite à plusieurs demandes de rencontres que lui a adressées tant le conseil d'administration de l'hôpital, tant la Coalition intersyndicale, tant moi-même afin de connaître sa position sur la vocation qu'il entend donner à l'hôpital de Jonquière, compte tenu, M. le Président, que des représentants sont ici aujourd'hui ? que je salue d'ailleurs ? est-ce que le ministre peut nous dire s'il entend, oui ou non, donner suite à des engagements formels qui ont été faits par l'ancien premier ministre M. Bouchard, par l'ancienne ministre de la Santé, l'actuelle vice-premier ministre, et nous dire si, oui ou non, il va autoriser le financement de la chirurgie avec hospitalisation au centre hospitalier de Jonquière?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, d'abord, je voudrais dire à la députée de Jonquière que l'hôpital de Jonquière ne souffre pas de sous-financement. Dans les études qui ont été faites par M. Bédard, on voit clairement qu'il n'y a pas de sous-financement, quand on tient compte du volume qui est opéré à l'hôpital de Jonquière.

Maintenant, pour ce qui est de la décision qui avait été prise par mes prédécesseurs, entre autres ma prédécesseure, d'abord, il y a eu une autorisation d'effectuer des chirurgies d'urgence à cet hôpital le temps que le centre ambulatoire soit complètement fonctionnel. Il n'y a jamais eu d'autorisation d'ouvrir des lits. Cette autorisation-là n'a jamais été faite ni par la régie régionale ni par le ministère. Donc, il n'y a pas eu d'autorisation permanente; c'était une autorisation en attendant qu'on construise le centre ambulatoire.

Or, M. le Président, on avait une demande en 1999, au moment où ma prédécesseure avait accepté le dossier, une demande qui était évaluée à 5 millions de dollars. Aujourd'hui, M. le Président, le centre à Jonquière nous dit que ça va coûter 17 millions de dollars. Donc, vous allez tous convenir avec moi que ça mérite des analyses additionnelles. On a demandé des explications à l'établissement et à la régie régionale. Et, M. le Président, on va continuer de gérer les fonds du gouvernement du Québec de façon responsable et non pas promettre tout à tout le monde, comme le fait le Parti libéral du Québec, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): En complémentaire, Mme la députée de Jonquière.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, à la lumière de la réponse du ministre, est-ce que je dois comprendre... Est-ce qu'on doit comprendre et on peut rapporter ça à la région, que la réponse, c'est non, qu'il n'y aura pas de financement de chirurgies avec hospitalisation à l'hôpital de Jonquière? Et, nonobstant le fait qu'il n'y a toujours pas de centre ambulatoire et nonobstant le fait qu'on a une promesse qui a été faite en 1998, réitérée en 1999, est-ce qu'on doit comprendre qu'il ne se fera rien à l'hôpital de Jonquière?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'il y avait une autorisation temporaire, le temps qu'on s'entende sur le coût de construction du centre ambulatoire. Le coût initial qui avait été approuvé par ma prédécesseure était de 5 millions. Maintenant, on nous demande 17 millions. Ce n'est pas un petit écart, M. le Président. Je ne peux pas, quand même, dire: Ce n'est pas grave, allons-y pour 17 millions de dollars.

n(14 h 30)n

M. le Président, entre-temps, on a fait des ententes aussi avec l'hôpital de la Sagamie, à Chicoutimi, qui est à 20 minutes. On a augmenté... On a donné un budget de 800 000 $ pour une neuvième salle d'opération qui va permettre 1 000 chirurgies supplémentaires. Donc, on est quand même à 20 minutes. C'est important, puis je comprends que c'est parfois difficile, mais il faut agir en complémentarité. On ne peut pas éviter de regarder qu'est-ce qui se passe, aussi, à un hôpital qui est à 20 minutes.

Maintenant, je terminerais là-dessus, M. le Président, quand la députée de Jonquière vient nous dire qu'il faudrait s'assurer qu'on donne des soins à Jonquière, je trouve ça quand même exceptionnel, parce que cet été on a ici, dans cette Chambre, adopté la loi n° 114, qui a demandé du courage. Et rappelons-nous qu'à l'hôpital de Jonquière la salle d'urgence était fermée à toutes les nuits depuis un mois. Et, depuis que la loi a été adoptée ici, à tous les jours, la salle a été ouverte 24 heures par jour. Ça a été comme ça sept jours par semaine depuis le 25 juillet. Donc, la députée de Jonquière, qui a voté contre ce projet de loi, a beaucoup de culot aujourd'hui de venir dire qu'elle souhaite des soins pour la population de Jonquière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mme la députée de Jonquière, en complémentaire.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: M. le Président, est-ce que le ministre réalise que sa loi spéciale n'a fait qu'empirer les choses à l'hôpital de Jonquière? Et, s'il ne me croit pas, qu'il demande aux femmes qui sont venues aujourd'hui, qui ont traversé le parc des Laurentides avec 30 cm de neige pour venir vous lancer le message. Quand vous venez dans la région, vous faites le tour de nous, vous ne venez pas nous rencontrer, vous ne venez pas discuter avec nous des problèmes de l'hôpital de Jonquière. Est-ce que vous réalisez qu'il y avait un engagement de votre part, de financement, et que, au moment où on se parle, depuis 1998, vous n'avez jamais, jamais, jamais respecté vos promesses?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui. M. le Président, d'abord, la députée de Jonquière nous dit qu'on refuse de rencontrer la Coalition. Ce n'est pas exact. Ce n'est pas exact, M. le Président, les gens de mon ministère ont rencontré la Coalition il y a deux semaines. Pas il y a six mois, il y a deux semaines, M. le Président. Donc, il y a des rencontres. On est au courant des revendications qui sont faites par la Coalition.

Maintenant, quand la députée de Jonquière nous dit qu'elle n'est pas d'accord avec la loi n° 114, j'aimerais bien qu'elle nous trouve une autre solution. C'est vrai que ce n'est pas facile. Les gens à Jonquière ont travaillé très fort pour être capables de trouver des médecins. Dans certains cas, ça a été difficile. Il a fallu effectivement demander, avec des lettres peut-être qui auraient dû être recommandées... mais, quand même, on a dû forcer certains médecins à venir travailler à l'urgence de Jonquière pour donner des services à la population parce que le seul but qu'on vise, de ce côté-ci, M. le Président, c'est de donner des services à tout le monde, incluant à la population de Jonquière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la députée de Jonquière, en complémentaire.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre, compte tenu du fait qu'on a la représentation de l'intersyndicale ici, qui vous ont demandé de vous rencontrer... Elles sont ici. Vous n'aurez même pas besoin de vous déranger. Est-ce que vous pouvez nous accorder cinq minutes après la période de questions et rencontrer ces jeunes femmes?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, on a rencontré la Coalition vendredi dernier, vendredi dernier. On vient de me dire ça, il y a eu une autre rencontre vendredi dernier avec le ministère. Mais, si la Coalition a des nouvelles informations à nous donner, ça me fera plaisir de les rencontrer tantôt, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Richmond.

Utilisation de la réserve de minerai
extrait à la mine Jeffrey d'Asbestos

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Merci, M. le Président. La fermeture de la mine Jeffrey d'Asbestos s'inscrit malheureusement dans la foulée d'une série de rendez-vous manqués du gouvernement du Québec à l'endroit de l'industrie de l'amiante. Dès 1996, lors de l'annonce du bannissement de l'amiante par la France, le gouvernement du Québec est intervenu de façon très timide auprès du gouvernement français. On connaît la suite: d'autres pays de l'Union européenne ont suivi l'exemple de la France et ont banni à leur tour l'amiante.

Durant tout ce temps, nous revendiquions ici maintes et maintes fois, à l'Assemblée nationale, que le gouvernement du Québec se devait de donner l'exemple pour un usage sécuritaire et accru de produits à base d'amiante. Il aura fallu plus que des mois mais des années pour qu'enfin en juin dernier le gouvernement du Québec annonce une politique inopérante et sans effet.

À combien de reprises ai-je demandé au même gouvernement de modifier le Code de sécurité de la construction, qui traite injustement l'amiante par rapport aux autres matériaux de même nature, sans que rien n'y fasse? Faut-il donc s'étonner aujourd'hui de la fin brutale de l'exploitation de la mine Jeffrey d'Asbestos? Le gouvernement du Québec aurait voulu qu'il en soit ainsi qu'il n'aurait pas agi autrement. Les répercussions de cette fermeture sont néfastes et touchent autant les travailleurs que les entreprises et commerces et que la population en général dans le comté de Richmond et dans la région d'Asbestos. La perte de plus de 700 emplois directs et indirects dans une petite communauté, ça fait mal à tout le monde.

M. le Président, compte tenu de ce qui a déjà été annoncé par le ministre des Ressources naturelles, comment la vice-première ministre compte-t-elle s'assurer du traitement de la réserve de minerai déjà extrait de la mine et prêt à être broyé? Cette réserve, évaluée à plus ou moins 125 000 tonnes de fibre si elle était traitée au moulin, permettrait au moins de préserver plusieurs emplois, et ça, pendant plusieurs mois d'opération.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je remercie le député de sa question et je le remercie aussi d'avoir mentionné que notre gouvernement avait fait un effort particulier pour adopter des politiques nous permettant de soutenir cette industrie malgré qu'elle soit en grande difficulté, entre autres, sur les marchés internationaux. Vous savez que notre gouvernement a fait des représentations importantes à cet égard de telle sorte que l'on puisse continuer à utiliser cette fibre qui, si elle est bien utilisée et de façon sécuritaire, ne cause pas de problème à la santé, évidemment si toutes les règles sont respectées.

Je trouve évidemment déplorable, comme le député, que cet événement à la mine Jeffrey se produise et de voir ces travailleurs concernés par la fermeture de cette mine se retrouver dans une situation difficile. Je peux vous dire que le gouvernement a analysé et continue d'analyser ce dossier, tant au niveau des sociétés d'État ? je pense, entre autres, à Investissement Québec ? qu'au niveau du ministère des Ressources naturelles de même qu'aux Finances. Déjà la semaine dernière, des représentants des travailleurs ont été rencontrés par le personnel du bureau du premier ministre, et j'ai eu moi-même la possibilité d'échanger avec le président de la Centrale des syndicats démocratiques qui représente ces mêmes travailleurs.

Le problème que soulève le député de Richmond m'a été souligné, et nous sommes actuellement à évaluer quel type de solution pourrait s'appliquer dans de telles circonstances, étant entendu, et le député le sait, que nous avons déjà investi des sommes considérables à cet égard et que, malheureusement ? et il faut être franc avec les gens aussi ? que, malheureusement, nous devons, dans ces secteurs, rationaliser certaines activités parce que le marché n'est pas là et que, s'il était là, bien sûr, nous ne serions pas acculés à de telles décisions.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, Mme la ministre.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, ma question était précise et visait la réserve de minerai. C'est déjà connu par le gouvernement. La ministre y faisait elle-même allusion suite aux rencontres qui ont eu lieu la semaine dernière au bureau du premier ministre.

Et je voudrais savoir, M. le Président, de Mme la ministre comment elle peut, de son siège, aujourd'hui, se lever puis nous dire qu'elle travaille avec son gouvernement à la pérennité de l'industrie de l'amiante, alors que son premier ministre, pas plus loin que la semaine dernière, nous indiquait ? je ne peux pas citer «Landry», là, mais je vais dire: Le premier ministre doute de l'avenir de l'industrie de l'amiante. Et, à entendre la ministre qui se plaint de l'état des marchés présentement, il y a une certaine partie qui échappe à son contrôle, il en va de soi.

Mais est-ce que l'attitude gouvernementale dans ce dossier au cours des derniers mois n'est pas en train de témoigner, avec la mise en place d'une politique de l'amiante... de l'utilisation de l'amiante complètement inopérante, est-ce qu'elle n'est pas en train de témoigner que le gouvernement aurait lui-même un agenda caché qui vise la fermeture, qui vise à prendre acte tout simplement de la fermeture pure et simple, à plus ou moins court terme, de l'ensemble des mines d'amiante sur le territoire québécois?

n(14 h 40)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: En fait, M. le Président, si le député a bien écouté mes propos, je dis essentiellement la même chose que le premier ministre à cet égard. Nous avons travaillé et nous avons travaillé sérieusement et de façon, je dirais, consistante dans ce dossier depuis un long moment en faisant des représentations à un plan international, en nous assurant que les normes de sécurité s'appliquaient de telle sorte qu'on puisse garantir que cette fibre ne présentait pas un degré de dangerosité trop important. Nous avons fait ces démarches et nous continuons de les faire. Nous avons même adopté une politique pour augmenter l'utilisation de cette fibre ici, au Québec, et dans certains produits qui pourraient même être exportés. Donc, je dis la même chose que mon premier ministre aussi, dans le sens où bien sûr on n'a pas réussi sur tous les fronts. La preuve en est faite à bien des égards sur les marchés internes et internationaux.

Cependant, ce que je dis au député, c'est que, oui, le problème plus précis et plus concret qui est soulevé est actuellement sous étude. Ma collègue la ministre déléguée à Industrie et Commerce rencontre d'ailleurs cet après-midi même, si je ne m'abuse... Pardon. La ministre de l'Emploi, pardon, rencontre cet après-midi même les gens qui représentent les syndiqués de la mine Jeffrey. Et, sur le front de l'utilisation du minerai qui a été extrait, qui est en tas, je peux vous dire que, et aux Ressources naturelles et dans les sociétés concernées, on étudie ce problème-là pour voir s'il n'y a pas matière à trouver une solution, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, j'aimerais que la vice-première ministre nous indique si elle compte prendre l'engagement de mettre à la disposition de la MRC d'Asbestos, qui, en soi, est une MRC ressource, avec la production d'amiante et de magnésium, certains outils qui soient adaptés à la situation actuelle et qui devraient permettre de diversifier la structure économique de cette sous-région et possiblement de mettre à la disposition de la MRC d'Asbestos des outils qui s'apparentent à ceux qu'on retrouve actuellement dans les MRC ressources.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je trouve intéressante la proposition du député de Richmond. Cependant, il devrait en parler avec son chef, parce que celui-ci souhaite plutôt que nous abolissions un certain nombre d'outils fiscaux qui viennent en aide aux entreprises qui sont, entre autres, dans le secteur de la transformation, et c'est vrai d'une façon toute particulière dans les régions-ressources, M. le Président. Alors, j'aimerais et je l'invite à ce qu'il se réconcilie avec son chef, ça nous aidera à avoir l'unanimité sur ces questions, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, est-ce que la vice-première ministre, au lieu de se défiler, pourrait faire preuve d'un peu de sensibilité à l'endroit d'une population qui est gravement dans le besoin présentement, une population qui, à mon sens, a droit aux mêmes services à l'intérieur de programmes existants actuellement au gouvernement du Québec, qui sont déjà en application dans d'autres régions? Est-ce que, oui ou non, elle accepte de répondre à cette question? Et, s'il lui plaît, elle pourrait venir le faire publiquement également dans mon comté prochainement. Elle est la bienvenue pour venir expliquer et la politique d'usage sécuritaire de l'amiante, qui a traîné depuis plus de quatre ans maintenant dans les officines gouvernementales, et également les programmes qu'elle compte mettre à la disposition de la population pour se tirer d'affaire présentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, je répète à mon collègue le député de Richmond que le gouvernement du Québec met tout en oeuvre pour soutenir ces travailleurs concernés par un tel événement qu'est la fermeture d'une mine, ou la transformation, si on veut, la transformation de l'institution et de l'organisation. Nous l'avons fait dans tous les cas de figure, et pensez à ce que nous avons fait en Gaspésie, pensez à ce que nous faisons partout dans les régions-ressources. Et nous l'avons fait dans votre région, comme nous offrons ces services partout à travers le Québec, M. le Président, et nous le ferons avec la même détermination et le même soin que nous avons mis jusqu'à présent à le faire.

La meilleure preuve, c'est que nous travaillons encore avec les gens de la mine Jeffrey, que ma collègue la ministre déléguée à l'Emploi va rencontrer des représentants des travailleurs de telle sorte qu'on puisse trouver à court terme des solutions pour les aider, en plus de la réalité qui concerne l'aspect minier, plus industriel, qui est travaillé avec mon collègue le ministre des Ressources naturelles et les diverses institutions gouvernementales qui ont des outils pour ce faire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Laurier-Dorion.

Rétablissement de la gratuité des médicaments
pour certains citoyens à faibles revenus

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, aujourd'hui, c'est la Journée internationale de lutte à la pauvreté, qu'on soulignera d'ailleurs tantôt, et ce matin c'est dans le cadre de cette Journée internationale que nous recevions au Parlement des personnes vivant des situations de pauvreté qui nous ont fait part par ces témoignages de leur situation personnelle, de la réalité qu'elles vivent. Et je tiens d'ailleurs à souligner le courage qu'ils ont démontré en nous exposant cette réalité personnelle. Et ça nous interpelle ? je crois que je parle au nom de tous ceux qui étaient là ? au plus profond de nos solidarités humaines. Et il est évident à qui veut bien prendre le temps d'écouter et de comprendre qu'il y a indéniablement des aberrations dans le système actuel qui sautent aux yeux. Il y en a plusieurs. Je m'en limiterai à une seule aujourd'hui en profitant de cette Journée internationale de lutte à la pauvreté puis en espérant qu'on pourra poser un geste concret.

Il y a plusieurs années, sept à peu près, le gouvernement du Parti québécois a aboli la gratuité des médicaments pour les personnes âgées bénéficiant de la sécurité du revenu... du supplément du revenu et les personnes assistées sociales. Depuis sept ans, ces gens sont souvent placés dans des situations où ils doivent choisir entre manger ou prendre leurs médicaments. Je vous rappelle que, à notre dernier conseil général et dans le plan d'action qu'on a adopté, nous nous sommes fermement, chiffres à l'appui, engagés à rétablir cette gratuité.

Alors, je veux savoir simplement, M. le Président, de la ministre, en cette Journée internationale de lutte à la pauvreté, si elle est prête de façon immédiate, après ces sept années, à mettre en application l'engagement que nous avons pris de restaurer cette gratuité des médicaments pour les personnes âgées recevant le supplément du revenu, d'une part, et pour les assistés sociaux, d'autre part.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je remercie le député de sa question parce qu'elle est pertinente. Il est évident que, si nous avions les moyens collectivement de le faire demain matin, nous accepterions de le faire immédiatement. Cependant, ce qui a été fait comme choix depuis que le gouvernement du Parti québécois occupe ces fonctions, depuis 1994, il s'est attaqué à plusieurs éléments.

D'abord, il fallait, comme société, que nous puissions rétablir les finances publiques pour justement nous permettre d'être davantage solidaires à l'égard des femmes et des hommes du Québec. Nous avons réussi à réduire de 6 milliards la dette qui existait. Nous avons réussi en même temps à faire en sorte qu'il y ait plus de 1,8 million de personnes qui aient accès à des soins de santé par les assurances, parce qu'elles ne l'avaient pas, au niveau de l'assurance médicaments. On a réussi à couvrir un plus grand nombre de personnes.

Il y a des choix qui ont été faits aussi de faire en sorte, au fur et à mesure que les moyens financiers nous le permettaient, de réduire des anomalies qui avaient été mises de l'avant également par le Parti libéral. Pensons, par exemple, à la facture pour le partage du logement. Nous tentons de l'abolir. On ne peut pas tout faire en même temps. Cependant, M. le Président, il faut aussi être équitable pour l'ensemble des personnes. Nous avons tenté de faire en sorte qu'il y ait le plus grand nombre possible de personnes qui puissent bénéficier de l'assurance médicaments. Et il faut aussi être solidaires à l'égard des femmes et des hommes qui ont des revenus modestes ? salaire minimum et un peu plus ? et qui... Pour ces personnes-là aussi, il est important qu'elles aient un régime d'assurance, et on leur a permis de l'avoir.

Alors, M. le Président, si nous réussissons ensemble, au sein de cette Chambre, à faire front commun pour aller récupérer l'argent qui appartient aux femmes et aux hommes du Québec par le déséquilibre fiscal, si nous réussissons ensemble, nous qui parlons d'une voix unanime pour avoir l'argent qui appartient aux femmes et aux hommes d'ici, M. le Président, notre gouvernement sera fier de l'abolir immédiatement et de faire en sorte que les personnes qui vivent dans le quintile le plus pauvre aient accès à de l'assurance médicaments...

Le Vice-Président (M. Brouillet): En conclusion, Mme la ministre.

Mme Goupil: ...et qu'on puisse couvrir les frais pour eux et pour elles. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Laurier-Dorion, en complémentaire.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Oui, M. le Président. N'est-il pas exact, M. le Président, que gouverner, c'est effectivement choisir, que vous avez fait des choix? Vous reconnaissez pour la première fois aujourd'hui, vous reconnaissez que c'était une erreur et vous dites: On le corrigera. Vous dites que vous le corrigeriez si vous aviez des moyens. Mais, les moyens, vous les avez, il y a 1 000 millions par semaine qui sont gérés par le gouvernement. En choisissant vos priorités, vous avez les moyens de corriger l'erreur que vous reconnaissez enfin.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je répondrai en disant: J'aimerais savoir du député de Dorion comment ils vont faire pour réussir à réinvestir 5 milliards dans la santé, comment ils vont faire pour geler tous les ministères, donc le ministère de la Solidarité sociale dont j'ai le privilège de porter le titre de ministre, le ministère de la Famille et de l'Enfance, le ministère qui est responsable également du dossier de la condition féminine, des aînés et des familles. Alors, M. le Président, qu'on me dise comment on va réussir à faire tout ça. C'est Alice au pays des merveilles!

n(14 h 50)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Laurier-Dorion, en complémentaire. M. le député.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Oui, M. le Président. D'ailleurs, j'inviterais la ministre cet après-midi, à 6 heures, en débat de fin de séance, pour que je lui explique comment, parce que les chiffres sont là, les choix sont faits. Venez, vous allez comprendre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, je l'accepte avec grand plaisir, parce que les femmes et les hommes du Québec s'attendent à ce que nous soyons capables de leur proposer des choses qui sont réalistes, et les gens ne veulent plus qu'on leur promette des choses dont nous ne sommes pas capables de livrer, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Saint-Laurent.

Inscription de la reconnaissance du processus
de règlement des différends par négociation
dans le projet de loi n° 119

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Oui. Dans le conflit qui oppose les procureurs de la couronne au ministre de la Justice, M. le Président, il y a eu ce matin évidemment une commission parlementaire, une commission parlementaire qui a révélé qu'effectivement ? et je pense que le ministre de la Justice l'a admis ? le projet de loi qui avait été déposé par le ministre hier pouvait porter à confusion sur deux points majeurs. L'un de ces points-là a été réglé en commission parlementaire ce matin par un engagement du Procureur général, le ministre de la Justice, à modifier le projet de loi pour qu'il soit clair que le gouvernement reconnaît l'Association des substituts du Procureur général comme étant une association habilitée à négocier avec le gouvernement sur ses conditions de travail.

Un deuxième point majeur a achoppé en commission parlementaire, et c'est celui de la reconnaissance par le gouvernement ? par le biais bien sûr du Procureur général et du ministre de la Justice ? que toute négociation comprend nécessairement, en cas de différends, un processus de règlement de ces différends, et les procureurs de la couronne souhaitent, exigent que cette reconnaissance soit comprise dans la loi qui a été déposée hier. Et, au moment où on se parle, ça n'y est pas.

Le ministre de la Justice a indiqué ce matin, après cette commission parlementaire, qu'il avait besoin d'un temps de réflexion pour réfléchir à ce deuxième point de litige. Je comprends qu'il a eu le temps de réfléchir et je lui demanderais quel est le fruit de sa réflexion, à la condition bien sûr que le fruit ne soit pas pourri.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, permettez-moi de dire que ce matin nous avons eu une excellente commission parlementaire, quand on se rappelle que le but d'une commission parlementaire, c'est de regarder si le projet de loi peut être adopté tel quel ou s'il peut être modifié afin d'atteindre les objectifs qu'on y retrouve. Effectivement, nous avons découvert, comme dans n'importe quel projet, qu'il était perfectible et que l'on pouvait modifier certaines clauses de manière à s'assurer que tout le monde comprenne la même chose, et je me suis engagé à modifier les textes en conséquence. C'est ce que le député de Saint-Laurent a appelé le règlement des litiges.

Cependant, ce matin, qui devait être un moment où on réglait le passé, on a voulu également régler le futur, parce que, dans le passé, il avait été convenu qu'il n'y aurait pas de clause d'arbitrage obligatoire ou encore de grève qui serait permise et qu'il n'y aurait pas non plus de clause relativement au règlement des différends, c'est-à-dire lorsqu'on ne s'entend pas sur une convention collective. Cependant, nous avions une clause que l'on retrouvait dans un document qu'avait reçu ma collègue alors qu'elle était ministre de la Justice, qui s'appelait Recommandation conjointe à la ministre, signé par le président de l'Association des substituts du Procureur général et mon sous-ministre, Me Michel Bouchard. La clause se lisait comme suit ? et ça, c'est dans le cas d'un début des pourparlers, mais c'est dans le cas d'un différend ? on disait: «Dans le cadre de ces échanges, les parties pourront faire appel à la demande de l'une d'elles à une tierce personne choisie d'un commun accord qui les assistera dans la recherche d'un règlement satisfaisant. Cette personne pourra faire des recommandations, lesquelles ne lieront pas les parties.»

J'ai dit ce matin que, cette clause ayant déjà été incluse, nous serions d'accord ? évidemment, sujet à vérification avec mes collègues ? pour l'inclure dans le futur pour la solution des litiges futurs. Je peux dire au député que nous sommes prêts à inscrire cette clause-là dans la loi, même si ce n'est pas pour respecter ce que nous avions convenu, mais nous l'inclurions afin que, s'il survient un différend dans le futur, nous soyons en mesure d'utiliser cette clause pour le régler. Je dis que ceci n'était pas inclus et je voudrais bien qu'on me comprenne, que c'est un élément nouveau. Je réfère à une lettre que le procureur Jean Keable, alors représentant du gouvernement, avait écrite à Me Melançon, qui était le représentant de l'Association, et ça, le 27 avril 2001, au moment où on réglait le dossier: «À la suite de nos longues rencontres avec le représentant du Secrétariat du Conseil du trésor, vous trouverez ci-joint quatre documents...

Une voix: ...

M. Bégin: ... ? je termine dans deux secondes ? qui, joints à l'entente de principe sur les questions normatives, traduisent le contenu de nos discussions. L'acceptation gouvernementale est formulée dans le contexte où il n'y a ni possibilité de recours vers la grève, ni droit d'arbitrage, ni existence d'un processus de médiation formelle.»

M. le Président, le gouvernement est prêt, malgré cela, à inclure dans le projet de loi cette clause que je vous ai lue ? l'article 7.2 ? et faire en sorte que, quand il y aura un différend dans le futur...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Saint-Laurent, en complémentaire.

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Évidemment, M. le Président, en commission parlementaire ce matin, nous avons discuté surtout de la possibilité que les procureurs de la couronne retournent au travail le plus rapidement possible. Dans le but de faciliter cette décision-là ? parce qu'ils doivent aller en assemblée générale ? dans le but de faciliter, est-ce que le ministre... Et je ne veux pas qu'il le prenne mal, mais il reste qu'hier vous avez déposé une loi dans laquelle vous avez dit: Elle est claire, voici ce qu'elle dit, puis aujourd'hui, bien, on est obligé de la modifier un peu, hein?

Alors donc, est-ce que le ministre pourrait, pour faciliter les discussions pour l'autre partie, faire une offre écrite, ou enfin s'engager par écrit à ce qu'il vient de dire? Je ne veux pas qu'il le prenne mal. Je comprends qu'il s'engage en Chambre. Arrêtez de crier, là. Mais, simplement, simplement pour que ce soit plus facile à l'autre partie de prendre sa décision, qu'il fasse ça par écrit, qu'il le fasse parvenir à l'autre partie, et c'est beaucoup plus facile, quand on lit les textes, souvent, que lorsqu'on écoute le ministre. C'est tout ça que...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, je ne sais pas si le député se rend compte qu'il est en train de dire que, lorsqu'un ministre parle, lorsqu'un député parle, lorsqu'il prend un engagement, ça ne vaut rien. Ça ne vaut rien parce que ce n'est pas écrit. J'avoue que ce n'est pas la conception que j'ai du rôle. Cependant, pour le satisfaire...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît!

M. Bégin: ...je vais demander qu'on traduise, comme on dit dans notre jargon, les notes de ce que je viens de dire, et je vais les signer, et je vais les envoyer aux procureurs, de sorte qu'ils sauront exactement mot à mot ce que j'ai dit, puisque ce sera ce que je viens de dire. Alors, ma parole sera là.

M. le Président, je pense que nous avons ce qu'il faut pour que les procureurs puissent retourner au travail et offrir à la population québécoise les services auxquels ils ont droit. Je les implore de retourner au travail, s'il vous plaît, pour la population du Québec.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Saint-Laurent, en complémentaire.

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Tout le monde admettra, n'est-ce pas, que les procureurs de la couronne ? et eux-mêmes le disent ? doivent retourner travailler. Ils doivent retourner travailler avec les assurances que le ministre leur donne, leur a données en commission parlementaire. Dans le fond, là, j'avais un vieux collègue, moi, qui disait: Souvent, dans la vie, c'est plus difficile d'être intelligent qu'orgueilleux. Dans le fond, là, il est plus difficile d'être intelligent qu'orgueilleux. Au fond, là, que le ministre laisse de côté son orgueil personnel, qu'il écrive tout simplement, qu'il s'engage tout simplement par écrit et que ce soit clair, que ce ne soit pas verbieux, pour que ces gens-là puissent regarder et prendre une décision éclairée. Mais, moi, je suis certain qu'on va avoir fait avancer le dossier. C'est tout simplement ça qu'on demande.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre, je vous rappellerai l'article 35.6°. Je vous inviterais, là... Il y a des paroles blessantes, là, pour tous ceux qui comprennent ? ha, ha, ha! ? pour celui qui comprend...

Des voix: ...

n(15 heures)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, non. Quand même, il y a souvent des sourires qu'on simule. En tout cas, je tiens à le rappeler, on n'a aucun avantage, ici, à ne pas se respecter dans nos propos. M. le ministre.

M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce n'est pas parce qu'on montre ne pas être blessé par des paroles blessantes qu'on ne l'est pas. Deuxièmement, je ne suis pas orgueilleux.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Là, je vois que, M. le Président, je suis en train de faire l'unanimité contre moi. Ha, ha, ha!

M. le Président, alors, sur un sujet sérieux, je vais répondre sérieusement. Je vais transmettre aux procureurs ce que je viens de dire, avec la citation que j'ai faite au texte. Donc, je ne peux pas être plus précis que cela. Et je vais le transmettre dès cet après-midi, et j'espère qu'ils en tiendront compte dans le vote qu'ils s'apprêtent à faire à cet égard. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie. Ceci met fin à la période des questions.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi. La question, est-ce que ça se réfère à la période de questions?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît. On n'a pas à requérir un consentement quand quelqu'un ne demande pas la parole. Alors là, soit qu'il faut arrêter ce jeu qui a commencé il y a quelques jours... Il n'y a personne qui a demandé la parole, donc on n'a pas à offrir un consentement pour que quelqu'un la prenne, la parole, s'il n'a pas demandé la parole.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, les amis, vous pourrez débattre ça à l'extérieur de la Chambre. Mais ce n'est pas un propos qui doit se tenir en Chambre, selon nos règlements.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis.

Alors, aux motions sans préavis, M. le ministre des Affaires municipales. Très bien.

Souligner le 70e anniversaire
de la Commission municipale du Québec

M. Boisclair: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin que soit présentée la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 70e anniversaire de la Commission municipale du Québec.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement pour une intervention de chaque côté. Alors, c'est ça, le consentement, oui? Alors, M. le ministre.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Alors, M. le Président, depuis sa création, en 1932, la Commission municipale du Québec joue un rôle important en contribuant au bon fonctionnement de nos administrations locales. C'est dans un contexte de crise économique mondiale, à la suite du crash de 1929, qu'elle a vu le jour.

Pour aider les municipalités et les commissions scolaires, qui étaient confrontées à des problèmes financiers insolubles, à retrouver l'équilibre, le législateur, cette Assemblée nationale, M. le Président, a créé la Commission en lui conférant le mandat de surveiller leurs finances et d'exercer un contrôle sur leurs emprunts. Il lui a donné aussi un pouvoir d'approbation portant sur toute forme d'emprunt ou d'endettement des municipalités. Il lui a confié aussi un important pouvoir d'enquête et un pouvoir de tutelle dans le cas où une municipalité ne remplirait pas ses obligations.

Au fil des décennies, la Commission s'est vu confier de nouvelles responsabilités qu'elle a scrupuleusement assumées dans le meilleur intérêt des Québécois et des Québécoises. Je donne quelques exemples, M. le Président. En 1964, il y a bien de ça quelques années, les municipalités sont invitées à procéder dorénavant par appel d'offres avant d'accorder certains contrats. Ainsi, la Commission est appelée à donner un avis au ministre des Affaires municipales sur les demandes d'octroi de contrats à un autre que le plus bas soumissionnaire.

Au début des années soixante-dix, la Commission se verra confier le pouvoir d'administrer les municipalités là où le conseil ne peut plus siéger faute de quorum. Quelques années plus tard, elle acquiert aussi la compétence en matière de tarification des services d'aqueduc ou d'égout fournis par une municipalité à une autre, ainsi que les exemptions de taxes foncières pour les organismes à but non lucratif.

En 1984, donc plus près de nous, la Commission nationale de l'aménagement est abolie et ses pouvoirs sont transférés à la Commission municipale qui exercera un nouveau mandat en matière d'aménagement et d'urbanisme. Trois ans plus tard, aussi, la Commission se voit confier un pouvoir d'arbitrage conventionnel permettant de régler les différends entre les municipalités. À la demande du ministre des Affaires municipales, la Commission peut dorénavant tenir des audiences publiques sur divers enjeux, notamment sur le changement de nom d'une municipalité, la modification d'une demande de constitution d'une municipalité ou le redressement de limites territoriales municipales.

Ces dernières années, la Commission municipale n'a pas chômé, M. le Président, elle a cumulé aussi de nouvelles responsabilités qui s'inscrivent parfaitement à l'intérieur de ses compétences. En effet, elle joue un rôle déterminant relativement à la réorganisation municipale en fournissant des avis sur les avantages et les inconvénients d'un regroupement de communautés locales. L'expertise de la Commission est également mise à contribution dans le domaine de l'organisation territoriale municipale en ce qui a trait à la détermination du caractère soit local ou supralocal d'un équipement, d'une infrastructure, d'un service ou d'une activité.

La Commission emprunte encore une fois cette année la voie du changement. Je dirais même qu'elle prend le pari de l'innovation en offrant aux municipalités un service de médiation qui était jusqu'alors inexistant. En juin dernier, le gouvernement du Québec a adopté de nouvelles dispositions législatives dotant la Commission municipale du Québec d'un pouvoir de médiation, à l'instar de plusieurs organismes ou tribunaux administratifs québécois. L'objectif, bien sûr, est de favoriser la négociation d'une entente lorsqu'un différend surgit entre des municipalités. Il en résultera non seulement une économie, mais également des relations que je souhaite encore plus constructives entre les municipalités. En effet, la médiation offre aux parties de participer activement à la solution du litige. Il est donc possible d'en arriver à des solutions plus satisfaisantes et, je dirais, surtout beaucoup moins coûteuses pour les parties en cause. Avec son nouveau pouvoir de médiation, la Commission est outillée pour contribuer... des différends qui paralysent l'action de nos municipalités, et je m'en réjouis.

Une culture de la médiation doit se développer dans le milieu municipal pour que cette innovation porte tous ses fruits. Il faut promouvoir cette façon moderne de faire auprès des associations municipales, auprès des élus aussi. Je pense que les municipalités doivent en venir à bien comprendre la Commission comme étant une ressource inestimable à cet égard. Le nouveau pouvoir de médiation de la Commission s'appliquera à tous les domaines de sa juridiction. Il n'y a donc, M. le Président, plus de place au Québec pour des conflits qui s'éternisent et qui accaparent des ressources vitales sans apporter de contrepartie valable pour l'ensemble de la communauté impliquée. Je suis confiant que la Commission municipale du Québec, qui a longtemps oeuvré dans un esprit de collaboration avec le monde municipal, saura relever avec brio ce nouveau défi qui lui est lancé.

Un mot, M. le Président, en conclusion pour vous dire aussi que la Commission municipale, c'est l'affaire d'hommes et de femmes, de Québécois et de Québécoises bien engagés qui, avec leur expérience de la vie publique, leur expérience de la vie municipale, avec les compétences professionnelles qui sont les leurs... qui font vivre la Commission. Je veux reconnaître ici aujourd'hui que cette Commission a l'expertise et le rayonnement qu'elle a non seulement à cause de la force que lui donne la loi, mais beaucoup aussi à cause de la compétence des gens qui la composent. Avoir un pouvoir délégué par l'Assemblée nationale, c'est une chose; l'administrer avec brio, c'en est une autre. Et je veux dire jusqu'à quel point les hommes et les femmes qui composent les membres de la Commission, leurs collaborateurs aussi qui travaillent dans le quotidien avec eux, sont des gens compétents. Je veux saluer leur travail et je veux aussi, vous me le permettrez, M. le Président, saluer la présence des membres de la Commission qui sont aujourd'hui dans les tribunes. Je les salue, je veux les remercier et je peux leur dire que l'ensemble des Québécois et des Québécoises et l'ensemble des gens du monde municipal sont fiers de votre travail. Vous méritez nos applaudissements.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le ministre.

M. Boisclair: Je prends la peine de nommer les membres de cette Commission. Je veux saluer M. Leblanc, le président de la Commission, bien connu pour son engagement dans le monde municipal et ses compétences professionnelles; les vice-présidents de la Commission, M. Brisebois, M. Delisle et Mme Trudeau; les administrateurs et administratrices de la Commission, Mme Auger, M. Dion, M. Filion, M. Gendron, M. Girard, M. Hamelin, M. Lajoie, Mme Lavoie, que je salue de façon particulière, M. Laurin, M. Martel, Mme Ouellet, M. Pagé, Mme Paiement et, en dernier lieu, celle que nous affectionnons dans cette Assemblée de façon toute particulière, notre ancienne collègue, Céline Signori. Mesdames et messieurs, soyez salués.

n(15 h 10)n

Je voudrais bien sûr saluer, mes collègues me le rappellent, et c'est sans doute là la grande connaissance et la sensibilité de ma collègue de Pointe-aux-Trembles, Mme Ouellette. Votre contribution ici, aussi, à l'Assemblée nationale, a fait sa marque, et il m'importe aussi de le souligner. Et merci à ma collègue de Pointe-aux-Trembles de me le rappeler.

Je veux dire des mercis particuliers à la secrétaire de la Commission, la notaire Mme Pouliot, et vous dire jusqu'à quel point, comme ministre des Affaires municipales ? en conclusion ? je suis content de pouvoir compter sur cette expertise. La Commission, par son talent et la distance qu'elle a, aussi, à l'endroit du gouvernement, aide souvent, dans un monde difficile de gestion du pouvoir, à calmer certains esprits. Et il est bon, je pense, pour notre Assemblée, bien au-delà des compétences qui sont les miennes, pour notre Assemblée, de voir ce corps public, à distance de l'exécutif, calmement et avec lucidité échanger avec les gens du monde municipal, avec nos concitoyens et concitoyennes et nous faire des recommandations qui sont par la suite tranchées par des membres de l'exécutif et, dans certains cas, par les membres de l'Assemblée nationale.

Donc, merci, et je suis convaincu que cette Commission aura encore de nouveaux mandats. Et je suis à veille de vous envoyer un tout nouveau mandat, dans la circonscription de Rivière-du-Loup. Et j'espère que les gens de l'Action démocratique vont se faire entendre sur la compétence de la Commission municipale à l'occasion de cette motion, M. le Président. Merci pour votre attention.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de joindre la voix de l'opposition officielle à celle du gouvernement pour souligner ce 70e anniversaire de la fondation, de la création de la Commission municipale du Québec. Je salue également tous les membres qui sont présents avec nous ici, à l'Assemblée nationale. J'ai eu l'occasion d'en rencontrer quelques-uns alors que je m'apprêtais à prendre mon petit repas au Mini-débat sur l'heure du midi, M. le Président, mais j'aimerais saluer leur travail, leur dévouement et les nombreux services qu'ils rendent et que leurs prédécesseurs ont rendus aux nombreuses administrations municipales ainsi qu'aux différents citoyens de la province de Québec et bien sûr aux ministres des Affaires municipales qui ont précédé l'actuel ministre des Affaires municipales et de la Métropole, qui souvent ont eu recours aux services de la Commission municipale pour intervenir dans un certain nombre de dossiers.

Comme le ministre l'indiquait un peu plus tôt, c'est en 1932 qu'a été créée la Commission municipale du Québec. Et on lui confiait, comme législateur, l'administration financière de certaines municipalités qui connaissaient de graves difficultés suite au crash de l'année 1929. Au fil des années... Et c'est remarquable, lorsqu'on lit l'historique de la Commission municipale du Québec, de constater les nombreux mandats, aussi diversifiés les uns que les autres, que le législateur a choisi de confier à la Commission municipale du Québec.

Aujourd'hui, la Commission constitue le seul organisme indépendant voué exclusivement au domaine municipal. Elle agit comme à la fois expert et décideur en matière d'organisation territoriale, d'équipements supralocaux, de tutelle, de tarification, d'enquête et d'adjudication, dans une perspective d'efficacité et d'efficience des administrations municipales. La Commission est également appelée à statuer sur les droits des municipalités, des organismes et des citoyens en tranchant les litiges et les différends. Elle effectue bien sûr des études, donne des avis, entre autres au ministre des Affaires municipales. Elle peut superviser, administrer ou gérer une municipalité lors d'une tutelle. Elle doit rendre des décisions motivées et produire des rapports circonstanciés en mettant à profit l'expérience et l'expertise multidisciplinaire de ses membres. Elle a une fonction également quasi judiciaire, M. le Président, et elle agit en toute objectivité et en toute impartialité dans le meilleur intérêt des citoyens et des citoyennes du Québec.

M. le Président, si aujourd'hui on reconnaît la grande valeur de la Commission municipale du Québec, c'est à cause de tout le travail qui a été effectué au cours des 70 ans de son existence. La Commission a toujours été à l'écoute des citoyens et des administrations municipales. Ses nombreux déplacements à travers la province de Québec, à tenir des audiences publiques, témoignent de cette écoute et de son souci d'être accessible.

À mon tour, M. le Président, de souhaiter long règne à cette Commission municipale du Québec, et on attendra avec plaisir de voir les nouvelles responsabilités qu'entend lui confier le ministre des Affaires municipales et de la Métropole, et, bien sûr, on souhaite toujours que les effectifs et que les budgets vont suivre pour bien lui permettre de rencontrer les nombreux mandats que lui confie le législateur. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion... Très bien, on n'a plus de grand 1, mais c'est 1-1-1.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, M. le député de Saguenay.

M. Boisclair: La limite de temps est illimitée, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ha, ha, ha! Alors, M. le député de Saguenay, vous avez la parole.

M. François Corriveau

M. Corriveau: Alors, outre les sarcasmes, évidemment, je ne suis pas un fan de la redite, je ne suis pas un fan non plus de procédurite, mais je dois donc...

Sans rajouter à tout ce qui a été dit par le leader, sans ajouter à tout ce qui a été dit par l'opposition officielle, j'ai eu moi-même au cours de ma carrière à transiger à plusieurs reprises avec les gens de la Commission municipale, et ça a toujours été savoureux comme échanges. Ça a toujours été une question très intéressante que de faire affaire avec des gens qui connaissent ça, qui connaissent bien le milieu municipal, puis des gens aussi qui ne sont pas trop accros à la procédurite.

Alors, de faire des rencontres à la bonne franquette, de recevoir des groupes qui demandent des exemptions pour fins de taxes municipales, ils ont toujours, ces gens-là, été très bien accueillis au sein ? je vois des visages, là, qui me rappellent des choses ? mais au sein de ces rencontres-là. Alors, ça a toujours été des plus agréables, et je tiens à vous en remercier, à chaque fois, de l'accueil qui m'a été réservé lorsque j'ai eu à plaider ou à défendre les intérêts de ma municipalité ou même parfois à prendre les intérêts de nos propres organismes pour vous faire comprendre à quel point il est important pour eux de ne pas avoir de taxes ou d'impôts fonciers. Alors, pour ça, je vous en remercie.

Et, évidemment, il y a des dossiers qu'on traite déjà en commun dans mon comté, dont celui de la municipalité de Colombier qui profite de vos savants services et de vos savants conseils pour essayer de remettre le train sur les tracks; également d'autres dossiers, plus importants, au niveau des fusions, qui pourront, encore une fois, revenir sur le feuilleton, et je pense particulièrement au comté voisin, où vous avez beaucoup de pain sur la planche, je crois, concernant Gallix, qui fait encore une fois l'actualité, qu'on voyait hier aux nouvelles.

Alors, pour tous ces mandats que vous avez réalisés dans le comté de Saguenay et ailleurs au Québec, je vous en remercie et je vous souhaite de continuer sur cette belle voie que vous avez su emprunter au cours des dernières 70 années.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député. Alors, la motion de M. le ministre est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Je crois qu'il y a une autre motion sans préavis, de la part de la ministre d'État à la Solidarité sociale, à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre.

Souligner la Journée internationale
pour l'élimination de la pauvreté

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, qui se déroule aujourd'hui le 17 octobre, en invitant plus que jamais chaque citoyenne et chaque citoyen à se mobiliser afin de bâtir un Québec toujours plus juste et solidaire.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Alors, Mme la ministre.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Alors, au nom du gouvernement du Québec, au nom de mes collègues de l'aile parlementaire du Parti québécois, de ma collègue ministre de la Solidarité sociale qui poursuivra dans quelques instants aussi sur cette motion... de souligner la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté.

C'est à la suite de l'appel du Père Joseph Wresinski, fondateur, en 1957, d'une association qui deviendra plus tard le mouvement ATD Quart Monde, que 100 000 défenseurs des droits de l'homme se réunissent le 17 octobre 1987 sur le parvis du...

Une voix:...

Mme Léger: ... ? pardon ? Trocadéro, à Paris, pour rendre hommage aux victimes de la faim et de la violence ? par chance que j'ai mon collègue qui m'a rappelée...

À cette occasion, une dalle a été inaugurée sur le parvis des Droits de l'homme et libertés, là où fut signée en 1948 la Déclaration universelle des droits de l'homme, et sur cette dalle nous pouvons lire ce message d'espoir: «Là où des hommes sont condamnés à vivre dans la misère, les droits de l'homme sont violés. S'unir pour les faire respecter est un devoir sacré.»

n(15 h 20)n

Il existe au Québec deux répliques de la dalle; la première a été inaugurée en 1993 à Rouyn-Noranda, et la seconde en 1997 à Thedford Mines. Depuis 1987, le 17 octobre de chaque année est donc reconnu comme la Journée mondiale du refus de la misère. Le 17 octobre 1992, M. Javier Pérez de Cuellar, ancien secrétaire général de l'ONU, lance aussi un appel pour la reconnaissance du 17 octobre comme journée dédiée. C'est ainsi que, le 22 décembre 1992, la journée du 17 octobre est désormais proclamée Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté par l'Assemblée générale des Nations unies.

Cette année encore, plus de 90 pays à travers le monde souligneront la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté. D'ailleurs, M. Kofi Annan, secrétaire général de l'ONU, a commémoré cette journée toute particulière dans le Jardin des Nations unies en début d'après-midi.

Au Québec, plus précisément à Sherbrooke, des dizaines de personnes marcheront ce soir dans les rues du centre-ville pour dire non à la misère, parce que trop de gens font face à des préjugés qui nuisent à leur insertion sociale. C'est le maire de Sherbrooke, M. Jean Perreault, qui est le porte-parole de cet événement.

De notre côté, ce matin, à l'invitation du vice-président de l'Assemblée nationale, M. Raymond Brouillet, plusieurs membres de cette Assemblée, ma collègue ministre d'État à la Solidarité sociale, la secrétaire à la Condition féminine et plusieurs autres de nos collègues et moi-même avons été reçus par les représentantes et les représentants du Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté, ainsi que des personnes en situation de pauvreté, au Parlementaire pour souligner cette journée importante que nous ne pouvons passer sous silence. Les témoignages que nous y avons entendus sont touchants et nous encouragent avec encore plus de détermination à poursuivre, notamment en commission parlementaire où nous étudions le projet de loi n° 112, notre objectif central qui consiste à amener le Québec parmi les nations industrialisées comptant le moins de pauvreté.

C'est ça, la social-démocratie, au Parti québécois. Non seulement nous y croyons, mais nous agissons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, Mme la ministre. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Christos Sirros

M. Sirros: À mon tour, M. le Président, j'aimerais joindre ma voix à celle du gouvernement pour appuyer cette motion. Et je prendrai, avant de revenir sur quelques propos de la ministre, le temps, tout simplement, de donner quelques mots d'encouragement, si vous voulez, à ces dizaines de milliers de personnes qui vivent directement des situations de pauvreté. On a eu des témoignages ce matin, comme le soulignait la ministre tantôt, grâce à votre intervention, grâce à l'intervention de la présidente de la commission des affaires sociales, M. le Président, et ça nous a permis de recevoir une deuxième sensibilisation directe, parce que, l'année passée aussi, on avait organisé au sein du Parlement une autre journée de sensibilisation, encore une fois au même temps, quand on soulignait la Journée internationale de lutte à la pauvreté.

M. le Président, je veux également souligner l'engagement social des centaines et des milliers de personnes qui oeuvrent quotidiennement avec beaucoup de dévouement auprès de ces personnes et dans des milieux particuliers. On en voit constamment. D'ailleurs, on a des témoignages constants, au niveau de la commission parlementaire, de personnes qui, par leur dévouement, par leur engagement social, font la démonstration qu'il y a effectivement une solidarité concrète qui peut s'exercer afin d'aider les personnes qui sont dans des situations difficiles.

Ce qu'il faut aussi essayer de faire comprendre, M. le Président, que la lutte à la pauvreté, ce n'est pas une question de bienfaisance, ce n'est pas une question de charité, ce n'est pas une question de coûts, tout simplement, au niveau des colonnes des coûts du gouvernement qui dépense des sommes d'argent pour les programmes spécifiques, c'est une question de bien-être pour la société tout ensemble. Et, les dépenses en lutte contre la pauvreté ne sont pas des dépenses, ce sont des investissements, M. le Président, parce que ça nous permet d'avoir effectivement un avenir plus prospère, et plus prospère comme ensemble, et ça nous permet également de bâtir sur des solidarités qui nous font marcher ensemble vers l'avant, M. le Président, en tenant compte des disparités, en s'assurant qu'on essaie de garder certaines valeurs au coeur de notre action politique.

Et, si on parle de valeurs... La ministre a choisi de clôturer son discours en parlant de la social-démocratie du Parti québécois, mais, moi, je vous dirais, M. le Président, que je ne sais pas qu'est-ce qu'on entend par «social-démocratie». Mais je sais qu'est-ce qu'on entend par «action libérale». Nous avons des valeurs concrètes, au coeur desquelles est la notion de la justice sociale, un engagement envers le développement économique pour s'assurer qu'on peut avoir de la justice sociale et toute une série d'autres valeurs qui définissent les choix que nous devons faire. Et, fondamentalement, exercer le rôle d'élu et de gouvernant, c'est exercer des choix et c'est exercer des choix à partir de certaines valeurs.

Je ne reprendrai pas ce que je disais à la période des questions, M. le Président, quant aux choix. Il suffit de dire tout simplement qu'il est clair que, la question de la lutte à la pauvreté, la valorisation du travail, l'aide qu'on doit apporter aux gens de réintégrer la société dans son sens large, de les sortir de l'exclusion, M. le Président, le soutien qu'on doit leur accorder pour les efforts qu'ils font, l'approche individualisée qu'on doit instaurer pour s'assurer que, quand on tente d'aider quelqu'un, on le fait en fonction de ses besoins, non pas en fonction des besoins de l'État, non pas en fonction des besoins de l'administration, mais en fonction des besoins de l'individu, ce sont là ce qui nous guidera dans les choix que nous ferons, à partir des valeurs que nous avons comme gouvernement, quand on aura l'opportunité d'exercer ces responsabilités, M. le Président.

Et je suis convaincu que nous pourrons faire des grands pas en avant dans la lutte à la pauvreté. Nous sommes en train d'étudier un projet de loi qui va donner l'opportunité à la société toute entière de tenir compte du fait qu'il y a des actions qu'il faut entreprendre, que nous avons tous et chacun une responsabilité puis un rôle à exercer. Et ça, ça interpelle non seulement les personnes qui oeuvrent auprès des personnes pauvres, mais ça interpelle également toutes les strates de la société et toutes les composantes de la société.

Et c'est dans ce sens-là qu'il serait important qu'on puisse s'assurer que tous les éléments de la société puissent se sentir interpellés par cette lutte à la pauvreté qu'il faut faire et choisir les moyens que nous pouvons choisir pour non seulement les interpeller, mais leur faire voir l'intérêt que chacun peut trouver, chacun pour ses raisons à lui. Mais, tous et chacun, on peut trouver un intérêt commun à s'assurer qu'on puisse viser effectivement un Québec plus prospère, un Québec sans pauvreté et un Québec qui sera fier, finalement, de ne plus être catégorisé, peu importent les mesures qu'on choisit, dans des sociétés modernes et avancées qui ont trop de pauvreté.

Alors, l'objectif, c'est de s'assurer qu'on puisse sortir de cette trappe, M. le Président, et qu'on réussisse ensemble à arriver à cheminer vers un Québec solidaire, un Québec basé sur des valeurs de justice sociale et d'équité et un Québec où effectivement on pourra dire: On a fait ce qu'on avait à faire en luttant contre la pauvreté. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la députée de Berthier, je vous cède la parole.

Mme Marie Grégoire

Mme Grégoire: Merci, merci. Alors, au nom de l'équipe parlementaire de l'Action démocratique du Québec, j'aimerais, moi aussi, appuyer cette motion. Une journée comme aujourd'hui, ça nous permet de nous rappeler que, chaque jour du reste de l'année, la pauvreté a un visage, un visage de femme, un visage d'homme, un visage d'aîné et surtout un visage de ti-loup, des enfants qui vivent dans des milieux démunis et où ils n'ont pas les mêmes chances que les autres.

Je veux aussi profiter de la journée pour reconnaître les efforts. Parce qu'on l'a vu ce matin, les deux députés en faisaient référence, on a été reçu ce matin par la Coalition et on a vu, ce matin, des gens qui travaillent pour une caisse d'autonomie, qui travaillent fort pour l'inclusion, qui s'engagent au quotidien dans des organismes communautaires, malgré le fait qu'ils vivent des situations profondes de pauvreté, pour aider les autres à s'en sortir. Et, pour ça, je veux leur lever mon chapeau et leur dire qu'il ne faut pas arrêter. Il faut continuer au jour le jour. Des fois, c'est plus dur de s'accrocher, mais il faut prendre la petite lueur d'espoir, il faut prendre des journées comme aujourd'hui pour se dire que ça vaut la peine de le faire.

Je veux aussi rendre hommage aux travailleurs du monde communautaire qui... On a vu Lauberivière, ce matin, qui font un travail extraordinaire d'accompagnement dans la quête d'autonomie. Trop souvent, on entend des gens dans la société dire: Ah, c'est comme donner du poisson, ce n'est pas donner les bonnes choses. Moi, je dis toujours à ces gens-là: Parlez-nous, parlez-nous de vos succès, parlez-nous des gens que vous avez intégrés, à qui vous avez donné de l'autonomie, des gens que vous avez sortis de l'inclusion. Et Dieu sait qu'il y en a! Et on voit trop souvent juste la boîte de conserve qu'on va porter, sans savoir ce que ça a donné au bout.

n(15 h 30)n

Alors, moi, je veux aussi saluer ces gens-là qui, chaque jour ? pas juste aujourd'hui, chaque jour ? travaillent d'arrache-pied pour aider, pour accompagner dans la quête d'autonomie. Donc, j'espère qu'on va savoir reconnaître le travail de ces gens-là et financer adéquatement, les supporter au niveau local, au niveau régional. Pour moi, la régionalisation des enveloppes, dans ce cadre-là, est supraimportante, parce qu'on doit avoir des initiatives qui ressemblent aux gens des milieux. Et la pauvreté, je l'ai dit tantôt, a différents visages, mais elle a aussi le visage de l'urbanité et de la ruralité puis elle ne s'exprime pas de la même façon à ce moment-là. C'est pourquoi on doit donner aux différents milieux les moyens, la capacité de mettre en oeuvre des solutions à leur image.

Pour moi, c'est une responsabilité partagée que de vaincre la pauvreté, une responsabilité partagée entre l'État, la communauté et les citoyens. Je l'ai dit, il y a des citoyens qui s'engagent, qui ont le goût d'être des citoyens à part entière, sans étiquette. Il va falloir leur en donner l'opportunité. Dans les communautés, il se bâtit des solidarités, mais on manque d'outils. Donc, l'État a le rôle de donner des outils aux gens des communautés qui ont les solutions, des solutions à leur image, mais qui manquent d'outils pour être capables de les concrétiser. Il faut donner aux milieux les moyens. Ainsi, l'État a un rôle prépondérant dans la décentralisation des moyens, dans l'investissement aussi de la prévention, parce que, pour moi, avoir une chance de réussir dans la vie, ça peut commencer dès la conception. Ça veut dire avec des programmes comme OLO, ça veut dire avec des programmes de prévention dans l'accompagnement des mères qui ont de la difficulté et des familles en difficulté. Alors, il faut miser sur la prévention, parce qu'un dollar investi en prévention va permettre d'avoir des gens qui pourront atteindre l'autonomie. Il faut aussi miser sur la formation. On doit avoir la mission de donner des programmes de formation, des outils de formation dans tous les milieux pour qu'on puisse opter sur la réussite de chacun.

Finalement, je pense que ce qu'il faut, c'est bâtir des solidarités pour une approche centrée sur la personne, mais une personne sans étiquette. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Berthier. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François et présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. M. le Président, je voudrais joindre ma voix aux autres parlementaires pour cette motion concernant la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté.

M. le Président, normalement, lorsque l'on présente une motion pour une telle journée, généralement, c'est un moment joyeux, c'est un moment heureux, on souligne un heureux événement. Malheureusement, lorsqu'on parle de pauvreté et qu'on revient année après année pour souligner la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, c'est un peu moins heureux, parce que ça nous fait penser à quantité de gens démunis qui vivent la pauvreté à tous les jours.

Vous savez, M. le Président, nous ne sommes pas à l'abri de la pauvreté. Nous avons tous connu des gens aisés, des gens d'affaires, par exemple, dont le commerce s'est effondré, on a dû faire faillite, ces gens-là se sont retrouvés sur l'aide sociale; nous avons rencontré aussi des gens en pleine santé qui ont eu un accident ou encore qui ont été malades et qui se retrouvent sur l'aide sociale; nous avons rencontré aussi des gens qui étaient dans des institutions, qu'on a sortis aujourd'hui, qui se retrouvent à gauche et à droite, et, si on n'avait pas justement les organismes ou des maisons comme Lauberivière, ce matin, par exemple, pour en prendre soin... Alors, on se rend compte que ces personnes-là sont dans la rue, n'ont pas de moyens, sont démunies.

Vous savez, M. le Président, nous sommes en commission parlementaire actuellement pour essayer de trouver des solutions à la pauvreté, et c'est au-delà de 150 mémoires qui ont été déposés pour non seulement se prononcer sur le projet de loi, mais aussi essayer de trouver avec nous des solutions, des pistes d'atterrissage. Et ce matin, justement, des groupes sont venus, des personnes, des personnes en chair et en os, des personnes qui vivent cette pauvreté à tous les jours, sont venues nous parler de leur situation. Et je pense que, même si on la côtoie, cette pauvreté, à tous les jours, dans nos bureaux ou dans la rue, ça nous frappe toujours, on est toujours surpris de voir à quel point ces gens-là nous lancent un cri d'alarme et que, parfois, on se sent un peu impuissant et on se demande comment on peut les aider. Et il y avait... Puis c'est des personnes intelligentes, là. Je vous avoue, ce matin, il y a des gens qui étaient là et qui sont venus nous faire des témoignages, et on sentait quand même leur cri d'alarme, et je pense qu'il faut y répondre. Mais il y a une aberration, entre autres, et un cas qui vraiment, ce matin, m'a très touchée, c'est celui, par exemple, M. le Président, d'une femme qui a une indemnité à cause... par exemple, en vertu d'un acte criminel, c'est-à-dire qu'elle a subi une agression criminelle, elle a reçu une indemnité, et, par la suite, naturellement, on sait très bien que ces personnes sont très vulnérables. Alors, sa santé s'est effritée, elle se retrouve à l'aide sociale, mais cette pauvre dame, on lui coupe son indemnité, son petit 200 $ qu'elle avait obtenu parce qu'elle avait été agressée. Parce qu'on l'avait reconnu, on a reconnu qu'un criminel a posé un geste sur cette personne, on lui enlève son 200 $. Alors, je me disais: Mais qu'est-ce qu'on peut faire? Et je pense que c'est tous ensemble ? c'est nous, les législateurs, les parlementaires ? qu'on doit se pencher sur ces solutions qu'ensemble on peut trouver.

On se rend compte également que, malheureusement, on travaille trop en silo, parce que la pauvreté, aussi, ça peut commencer à très bas âge. Et plusieurs femmes, plusieurs parents, devrais-je dire, ne souhaitent pas laisser en héritage à leurs enfants ce qu'ils ont vécu, mais souhaitent un meilleur avenir pour leur enfant et ne peuvent s'en sortir à moins d'avoir de l'aide. Et je pense que, dans ce sens-là, il faut avoir énormément de compassion. Mais aujourd'hui, M. le Président, je voudrais rendre hommage, rendre hommage à ces femmes et à ces hommes qui n'ont pas à avoir honte finalement de vivre leur situation, mais qu'ils peuvent et qu'ils doivent garder espoir d'une vie meilleure.

Je veux rendre hommage aussi à ces nombreux et nombreuses bénévoles qui, à chaque jour, travaillent pour garantir une vie meilleure à ces personnes et aussi aux organismes qui travaillent avec des moyens tellement minimes mais qui font tellement de belles choses. Et à chaque jour, en commission parlementaire, vous avez des organismes qui viennent nous dire justement ce qu'ils font avec très peu de moyens mais, malgré tout, qui réussissent.

Alors, M. le Président, en cette Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté, je souhaite trois choses: je souhaite au moins que l'on puisse ensemble faire en sorte qu'on puisse éliminer les préjugés, que l'on puisse faire tomber les préjugés; qu'on soit plus réceptifs à trouver des solutions, des alternatives, des pistes d'action; bien sûr que l'on puisse travailler sur la prévention, mais aussi avoir de la compassion et se concerter pour... on sait très bien qu'on ne pourra pas l'éliminer à 100 %, mais au moins qu'on puisse soulager ceux qui en ont le plus besoin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique qui est reconnu par le règlement. C'est pour ça que vous parlez la dernière. Je vous cède la parole.

Mme Linda Goupil (réplique)

Mme Goupil: Je vous remercie, M. le Président. D'abord, je suis tout à fait heureuse et privilégiée de pouvoir prendre la parole après les bons mots qui ont été exprimés par les parlementaires de cette Assemblée et je joins ma voix à ce qu'ils ont exprimé.

Cette Journée, aujourd'hui, M. le Président, doit nous interpeller au plus haut point pour que la pauvreté et l'exclusion sociale ne demeurent pas une priorité d'une seule journée.

Nous avons, comme parlementaires, un grand privilège et une grande responsabilité de travailler sur un projet de loi dont l'ensemble de notre société, j'ose espérer, adhérera et sera extrêmement fière, parce que c'est une loi exceptionnelle qui est actuellement en commission parlementaire. On a exprimé tout à l'heure qu'il y avait plus de 154 mémoires. Qu'est-ce que ça signifie, ça, M. le Président? C'est qu'il y a des femmes et des hommes de différents organismes, de différentes instances, de différents regroupements de la société civile qui sont venus nous dire haut et fort, d'abord: Bravo pour cette loi; non seulement nous sommes d'accord, mais nous souhaitons qu'elle puisse être la meilleure possible. Et c'est ce que nous allons avoir comme défi, comme parlementaires, d'essayer de faire en sorte qu'elle puisse répondre le mieux possible aux besoins et aux attentes des personnes qui vivent des situations de pauvreté.

n(15 h 40)n

À mon tour, M. le Président, je voudrais aussi joindre ma voix à mes collègues qui ont exprimé une reconnaissance exceptionnelle pour ceux et celles qui travaillent de différentes façons. Vous savez, ce que nous venons de dire aujourd'hui, en parlant d'une voix unanime, c'est que non seulement, malgré que le Québec réussit de façon extraordinaire, malgré les progrès que nous avons comme société, il faut reconnaître qu'il y a des femmes et des hommes qui se retrouvent exclus de ce progrès social pour différentes raisons et qu'elles n'ont pas, comme Mme Gagnon-Tremblay l'a exprimé, elles n'ont pas à avoir honte de cela. Mais nous devons prendre acte que ça existe. Et nous devons, ensemble, faire en sorte d'utiliser les meilleures mesures pour que l'objectif qu'on s'est fixé... c'est-à-dire de réduire de moitié, d'ici 10 ans, le nombre de personnes qui vivent dans cette situation.

Je voudrais également nous interpeller tous, comme parlementaires et comme membres de cette société, parce que, si nous voulons éliminer le plus rapidement possible les préjugés qui, il faut en convenir, persistent beaucoup trop, il faudra se lever haut et fort. Et je vais interpeller la commission, parce qu'encore tout récemment sur des ondes de radio, hier, il y avait un animateur de radio qui a tenu des propos méprisants à l'égard des personnes prestataires de l'aide sociale, et c'est inacceptable. Indépendamment de nos allégeances politiques, nous avons été élus démocratiquement, chacun et chacune, dans nos circonscriptions, et nous ne pouvons tolérer et accepter que, sur les ondes publiques, il y ait quelqu'un qui se permette d'entretenir et de soutenir une démagogie à outrance comme ça a été fait.

Alors, si on veut que le geste que nous posons aujourd'hui, par cette motion unanime à l'Assemblée nationale... J'interpellerai tous les membres de la commission, des trois partis politiques, pour que nous puissions insister auprès de l'ensemble de la population à faire valoir que, ce genre de discours et de propos, nous ne voulons plus l'accepter, pour aucune considération, en 2002.

Et, M. le Président, je sais que nous ne réussirons pas à répondre à tous les besoins et toutes les attentes qui ont été exprimés. Cependant, il y a une chose que nous pouvons faire, c'est, de par cette cohérence que nous nous donnons dans le cadre de la stratégie de lutte à la pauvreté... Dans la cadre de ce projet de loi, ce que nous venons dire, c'est: Nous venons inscrire la lutte contre la pauvreté dans le temps. Nous venons dire qu'elle devra...

À partir du moment où cette loi sera adoptée, nous devrons, comme gouvernement... Indépendamment de ceux et celles qui suivront, nous avons l'obligation de nous engager à avoir des résultats concrets. Elle donne de la crédibilité à tous les engagements qui sont faits non seulement par les gouvernements, mais par l'ensemble de notre société; elle vient également engager la société civile.

Malgré toute la richesse collective qu'un gouvernement a le privilège d'avoir à gérer, la pauvreté, elle est l'affaire de tous. Et ce qui a été exprimé et qui l'est à tous les jours, c'est d'abord et avant tout: Permettons à la communauté qui connaît le mieux les hommes et les femmes qui vivent cette réalité d'avoir l'appui et le soutien nécessaires pour être capables de lutter efficacement et de tenter de résoudre cette exclusion.

J'ai le privilège d'être ministre responsable de la région Chaudière-Appalaches. Ce qui a été identifié pour lutter contre la pauvreté, c'est le logement social, le transport collectif et l'alphabétisation. Peut-être que, dans d'autres régions, ce sera d'autres priorités. Mais ce qui est important, c'est que nous puissions être en soutien à ce que les hommes et les femmes de terrain viennent nous dire lorsqu'ils disent: Voici l'axe avec lequel nous devons aller de l'avant.

M. le Président, je me permets aussi de rappeler que, la loi, elle oblige une vision d'ensemble et une stratégie cohérente. Elle interpelle l'éducation, elle interpelle l'emploi. Elle interpelle tous les hommes et les femmes de notre société, et, à juste titre, nous devrons y apporter certains éléments de bonification. Parce que des gens sont venus nous dire: Nous ne nous retrouvons pas suffisamment dans ce projet de loi, alors que ce projet de loi est pour les femmes et les hommes, indépendamment de leur âge, indépendamment de leur sexe, indépendamment de leur réalité ou de leur territoire. Nous prenons l'engagement, par ce projet de loi, de permettre cette bougie d'allumage pour ces femmes et ces hommes qui en ont tant besoin.

Et, finalement, M. le Président, je terminerais en vous disant qu'une société ne peut se permettre de laisser personne de côté. La vie a donné des talents à chaque être humain. Cependant, il arrive parfois que ces talents ne peuvent pas se développer à une vitesse aussi rapide, pour différentes raisons. Alors, nous prenons l'engagement au sein de ce gouvernement, au sein de cette équipe ministérielle et partagés avec les autres partis politiques... Parce que nous devons, ensemble, convenir que c'est un débat de société et que nous ne pouvons nous permettre de laisser personne de côté.

Et, M. le Président, je terminerais en vous disant qu'indépendamment du déséquilibre fiscal dans lequel nous vivons actuellement, nous avons indiqué, comme gouvernement, que la lutte à la pauvreté est une priorité. Évidemment, il faudra faire des choix dans d'autres secteurs. Mais il n'en demeure pas moins que, les femmes et les hommes du Québec, je les invite à suivre de très près ce qui est dit en commission parlementaire. Je les invite à se lever debout, chacune et chacun, pour dénoncer les préjugés. Et je nous invite tous à travailler au sein de cette commission pour que, lorsque nous adopterons ce projet de loi là, il correspondra le mieux possible aux attentes de ceux et celles qui vivent la pauvreté.

M. le Président, je vous remercie, et Mme la présidente de la commission, pour ce qui a été fait ce matin. Plusieurs collègues étaient présents également. Et ce qui est extraordinaire au Québec, c'est que, indépendamment de ta situation personnelle, tu as le droit d'être entendu, tu as le droit d'être respecté. Et je sais que nous sommes capables, ensemble, d'aller au bout de cette commission, de ce projet de loi, et la stratégie qui est sur la table, M. le Président, indépendamment des modifications qu'on peut y faire... Il y a un consensus social à l'effet que la cohésion avec laquelle nous nous apprêtons à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale fait du sens, on peut en être fier. Et je sais que nous allons atteindre notre objectif, non pas le gouvernement seul, mais avec l'ensemble de la société, et c'est comme ça que le Québec est solidaire et c'est comme ça qu'il s'est démarqué. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre.

Mise aux voix

Alors, cette motion va de soi. Elle est adoptée par tous les membres de cette Assemblée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Elle est adoptée.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous passons maintenant aux avis touchant les travaux des commissions, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer les travaux.

M. Simard (Montmorency): Je vous remercie, M. le Président. Alors, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, aujourd'hui, de 16 heures à 18 heures, ainsi que le mardi 22 octobre 2002, de 9 h 30 à midi trente, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Merci. Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de l'aménagement du territoire se réunira aujourd'hui, jeudi, le 17 octobre, à compter de maintenant jusqu'à 17 h 45 et de 20 heures à 22 h 15, ainsi que demain, vendredi, le 18 octobre, de 9 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de ces séances est de procéder à des consultations particulières portant sur le document de consultation concernant le mandat d'initiative sur le logement social et abordable.

Je vous avise également que la commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance de travail demain, vendredi, le 18 octobre 2002, de 12 h 30 à 13 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de discuter de l'organisation des travaux de la commission dans le cadre du mandat d'initiative sur le logement social et abordable.

Alors, ceci met fin aux avis concernant les travaux des commissions.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous sommes rendus maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Je vous avise qu'il y aura sanction du projet de loi n° 78, Loi budgétaire n° 2 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires, au cabinet de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, cet après-midi, à 15 h 30. Alors, c'est probablement déjà fait.

Alors, je vous avise également que l'interpellation prévue pour le vendredi 25 octobre 2002 portera sur le sujet suivant: La politique du gouvernement péquiste quant au soutien financier accordé aux familles québécoises. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce s'adressera alors à Mme la ministre de la Famille et de l'Enfance.

Alors, ceci met fin à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer le point à l'ordre du jour, s'il vous plaît.

M. Simard (Montmorency): Avec plaisir, M. le Président. Je vous réfère donc à l'article 12 inscrit au feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 113

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 12, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 16 octobre 2002, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 113, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant la prestation sécuritaire de services de santé et de services sociaux.

n(15 h 50)n

Alors, il restait 11 minutes à M. le député de LaFontaine pour compléter son intervention. Il n'est pas ici; alors, je vais céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, après ceux qui m'ont précédé hier, de venir discuter à propos du projet de loi n° 113, celui dont on peut dire qu'il traite des erreurs médicales, dans une façon de le mal nommer, je dirais, les accidents évitables, les erreurs médicales; une façon de viser, à mon avis, un peu trop directement les professionnels qui, eux, nous disent et nous répètent sans cesse et sans cesse dans quelles conditions difficiles ils exercent leur profession.

Et vous allez me permettre aujourd'hui de noter, par rapport à ce projet de loi, une dimension qui a été omise, qui me semble de la plus grande importance. Il est évident qu'il y a des éléments... des procédures qui doivent être adaptées dans les établissements pour permettre que ces accidents évitables puissent être effectivement évités. Mais il faut savoir regarder au bon endroit pour comprendre la cause, la cause systémique de ces nombreuses difficultés qu'ont les donneurs de soins dans notre système qui peut parfois provoquer des erreurs médicales. On dira alors de cet urgentologue qui aura fait huit heures à un hôpital, aura fait deux, trois heures de route, deux heures de sommeil et il commence déjà un autre huit heures, on dira que c'est une erreur médicale, alors que, si on gratte un peu, on comprendra que la fatigue, la surcharge de travail aura ? et je ne m'arrête pas ici aux conditions de travail dans les urgences du Québec ? aura amené cette erreur médicale.

Alors, il faut aller plus loin que l'erreur médicale. D'ailleurs, il faut, ne serait-ce que pour prendre un texte de journal qui avait été écrit par Luc Bessette ? qu'on connaît, puisque je parle des urgentologues ? qui est urgentologue et qui avait écrit un texte un peu plus tôt cette année, et, juste dans l'encart, en caractères plus gras, nous éveille, il dit: «Les erreurs médicales sont portées par un système désorganisé et ne sont pas le fait des seuls praticiens.» Il souligne notamment que les délais d'intervention peuvent contribuer... peuvent être ensuite appelés «erreurs médicales». Mais d'où vient ce délai d'intervention, d'où vient cet écart entre le diagnostic et le moment pour exercer une chirurgie? Comment expliquer ces listes d'attente avec ces personnes de plus en plus nombreuses en attente?

On l'avait déjà noté, pour les dernières statistiques que l'on avait, qui dataient de 2001, dans les trois dernières années, 1998 à 2001, le nombre de personnes en attente sur les listes avait augmenté de 20 % et la durée d'attente avait, elle, augmenté de 25 %. Ensuite, ces gens... Il nous arrive d'entendre des gens, au CHUL notamment, à l'hôpital Laval, en chirurgie cardiaque, nous dire qu'ils en perdent, qui décèdent sur des listes d'attente. C'est une réalité qui existe, qu'on essaie de couvrir pour ne pas trop en parler, et, pourtant, ça existe. Et lorsqu'on parle des erreurs médicales et qu'on veut simplement regarder l'établissement et le professionnel et qu'on oublie de regarder celui qui est le grand manitou, le gestionnaire de notre système de santé, l'État québécois, nous tous, autant que nous sommes interpellés, je pense qu'on doit être capables de poser les diagnostics dans cette organisation-là, faire en sorte de minimiser, à notre tour, les cas potentiels d'erreurs.

D'ailleurs, le Dr Denis Roy, spécialiste en la matière, aimait mieux, lui, parler d'erreurs dans la prestation des soins de santé. Et, si vous me permettez de m'inspirer un peu de lui, il me semble qu'on devrait plutôt parler d'erreurs dans la prestation et l'organisation des soins de santé, parce que, à ce moment-là, on couvrirait beaucoup plus large, et, surtout, on se souviendrait, chacun réciproquement, de regarder au bon endroit pour voir qui est le coupable, qui est le responsable, quelle est la cause, et de pouvoir agir ainsi plus facilement sur les causes.

Les causes. Bon, ça peut être les délais, ça peut être le système. Il y a, dans notre organisation du système de santé, des décisions qui n'ont pas été prises. Je cite ici les Drs Rousseau et Morissette, de L'Enfant-Jésus, qui disaient: «Seul centre de traumatologie d'importance dans la région, l'Hôpital de L'Enfant-Jésus dispose d'appareils d'imagerie médicale d'une vétusté et d'une lenteur telles qu'ils mettent en péril la vie des patients polytraumatisés pour qui chaque minute compte.»

Avouez que, lorsque vous avez des chirurgiens cardiaques qui nous disent qu'ils en perdent sur des listes d'attente parce qu'on a décidé de ne pas financer des salles de chirurgie cardiaque pourtant construites ? mais on avait oublié de prévoir un budget d'opération ? il y a une faute qui n'est pas celle du médecin, là; il y a une faute qui est gouvernementale.

Lorsque des médecins d'un hôpital nous disent qu'ils ne sont pas en mesure ou peu en mesure d'être assurés de leur diagnostic, considérant les équipements qui sont à leur disposition, leur vétusté, c'est assez effrayant, puis, encore une fois, on ne peut pas mettre ça sur le dos des professionnels, et, pourtant, il y a là des erreurs possibles qui peuvent intervenir.

Dans notre système décisionnel politique, que nous avons, nous nous sommes dotés d'une ressource qui s'appelle le Vérificateur général, qui a déjà commenté la question des équipements. Et vous allez me permettre, je vais citer deux courts passages ? je pourrais en citer bien d'autres ? deux petits courts passages qui donnent juste un aperçu de ce que ça peut représenter comme problématique que nous vivons et dont nous sommes entièrement responsables.

Ici, le gouvernement est responsable de ça. On peut bien ne regarder que dans le champ des établissements et ne regarder que les professionnels, mais voyons comment nous les équipons, ces professionnels, avant de leur jeter la pierre. C'est déjà bien assez. Puis, dans le fond, je pense qu'il faut se dire ça aussi à l'égard de ce projet de loi là, dans quel environnement, dans quelle ambiance il s'installe. Il vient s'insérer, ce projet de loi, sur les accidents évitables, et, bien qu'à la base il y ait là une matière à réflexion et à action, il faut voir que, quand on omet de parler de la responsabilité gouvernementale, on est toujours dans la même dynamique que le gouvernement du Parti québécois a instaurée au cours des dernières années en matière de santé: loi spéciale contre les infirmières, loi spéciale contre les pharmaciens, loi spéciale contre les médecins. De tous ses partenaires, que le gouvernement considère comme des adversaires, maintenant, il installe une loi dans laquelle il ne dit pas à l'avance qu'il a lui-même une partie de la responsabilité, qu'il a lui-même une part dans la façon dont les services sont offerts au Québec et qu'il verra à l'avenir... qu'il accompagnera ce projet de loi qui veut éviter des erreurs dans la prestation des soins de santé, qu'il verra à accompagner de façon bien mieux maintenant les services qui sont offerts. Rien là-dessus. J'y reviendrai tantôt.

On en a parlé à la période de questions. Le gouvernement nous a annoncé ce matin, par la voie d'une fuite dans les journaux, que le plan d'action à l'égard de la santé pour les cinq prochaines années, c'est copie conforme de ce qui s'est passé depuis les huit dernières années. C'est quoi? C'est-à-dire ne pas couvrir même la moitié des coûts de système. Autrement dit, à chaque année, il y aura un recul dans chacun des établissements de santé du Québec.

Ça va amener quoi? Ça va amener des listes d'attente qui vont se rallonger, ça va amener des équipements qui vont de plus en plus être désuets, des diagnostics de plus en plus difficiles. Ça veut dire des difficultés, pour les donneurs de soins, de pratiquer leur métier. Et c'est dans cette ambiance-là, dans cet environnement-là que nous étudions aujourd'hui un projet de loi au ton ronfleur: Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant la prestation sécuritaire de services de santé et de services sociaux.

On se serait attendu que la première mesure, pas une mesure législative, une mesure budgétaire à l'égard de la santé, nous amène à ce qu'il y ait une injection de fonds qui permette au moins de couvrir les coûts de système. C'est, en tout cas, nous, la proposition, au Parti libéral du Québec, que nous faisons: nous assurer d'abord qu'on revoie la planification, la gestion, l'organisation du système de santé pour qu'on en ait valablement... Pour chaque dollar qu'on met dans la santé, qu'on en ait un plein dollar.

Aujourd'hui, force est d'admettre qu'il y a des fuites, la piscine coule, et il y a lieu de colmater la brèche; il y a des modifications dans l'organisation qu'on doit faire. Mais, une fois qu'on a fait ça, une fois qu'on est capable d'en avoir pour chaque dollar et un plein dollar qu'on investit, soyons en mesure de reconnaître ce que d'ailleurs tout le monde dit sur le terrain ? d'ailleurs, tous les partis politiques le reconnaissent, tout le monde le sait ? qu'il y a un sous-financement chronique décrété annuellement par le gouvernement. Alors, bien, si on veut en faire une priorité, on fait des choix pour que ce soit traité en priorité. Ça, ça aurait été, je dirais, la façon de bien placer le cadre et l'ambiance à un projet de loi en nous disant: Oui, on veut, nous aussi, assurer une prestation sécuritaire des services de santé, mais regardons dans notre cour avant de regarder dans la cour des autres, il y a des choses qu'on peut faire ici.

n(16 h 00)n

Je vous avais annoncé, avant d'ouvrir cette parenthèse, que j'allais vous parler du Vérificateur général. À la page 119 de leur rapport 2000-2001, on pouvait lire ceci: «Le ministère n'a pas élaboré de planification relative à l'acquisition de tous les équipements d'imagerie médicale nécessaires en fonction des besoins. De plus, à l'instar de plusieurs régies régionales, il ne dispose pas d'un portrait complet du parc d'équipements pour orienter ses décisions en matière d'investissements. À défaut de projections à plus long terme fondées sur une analyse rigoureuse, le ministère en est réduit à s'appuyer principalement sur les résultats d'un exercice annuel mené par chacune des régies [...] pour arrêter la liste des équipements à acquérir. Rien ne garantit que les bonnes décisions sont prises et qu'elles le sont en temps opportun puisque les façons de faire actuelles ne correspondent pas à une démarche proactive.»

Autrement dit, on dépense notre argent à la mauvaise place. C'est un peu comme me disaient les gens que je rencontrais cette semaine à Drummondville et qui me racontaient que, lorsqu'il y a eu le programme accéléré d'investissement, ils ont été forcés d'acheter tant de bains, tant de lits, tant de lève-personnes, même si ce n'était pas ce qu'ils avaient besoin. Voyez-vous? Dans les années passées, juste avant le programme, ils avaient déjà augmenté leur parc d'équipements en termes de bains. Alors, eux autres, ils avaient plus acheté des lits. Mais le gouvernement a dit: Non, non, c'est mur à mur. Toi, tu vas acheter tant de bains, même si tu n'en as pas besoin.

Savez-vous où sont les bains, en ce moment? Ils sont dans les boîtes. Ils sont dans des boîtes, ils ne sont pas installés. Pourquoi? Bien, deux raisons. D'abord, ils n'ont pas besoin de tous ces bains-là. Ils les ont pris parce que, qu'est-ce que tu veux, ils arrivaient puis ils se sont dit: Dans l'avenir, on va en avoir besoin. Mais la deuxième affaire, c'est qu'ils n'ont pas le budget pour les installer. On n'a pas couvert les coûts de système, au cours des dernières années. Donc, les bains sont dans des boîtes, entreposés.

Ça, ça me rappelle, M. le Président, ça me rappelle qu'il y a à peu près, quoi, deux ans, l'histoire du bain thérapeutique, à cet hôpital de Québec, qui avait été acheté depuis un an, qui était resté dans sa boîte, et, pendant un an, il y avait eu une discussion entre la régie régionale, l'établissement et même le ministère, au niveau central, pour savoir: Mais qui donc allait installer le bain? Pendant un an, à chaque semaine, à chaque lundi, il y avait une rencontre de trois fonctionnaires, le matin, pour se dire qui va le payer. Finalement, on est arrivés en Chambre ? le Journal de Québec en avait fait sa manchette ? on est arrivés en Chambre, on a demandé à la ministre: C'est-u possible? C'est-u vrai? Ça se peut-u? Et elle a dit ? je la cite à peu près aux mots qu'elle utilisait: Il y a des coups de pied au derrière qui se sont perdus à la mauvaise place, disait-elle. Soit, le bain a été installé, mais après un an.

Sauf qu'ils n'ont pas réglé le problème, on est encore dans la même dynamique. Là, ce n'est pas un bain, c'est plusieurs bains qui sont en attente d'être installés parce qu'il n'y a pas de budget pour l'installation. Un bain, ça ne se rentre pas juste dans un coin, là. Un bain, il faut refaire la pièce. Et déjà il n'y a pas suffisamment d'argent pour permettre que des gens soient opérés. Qu'est-ce que vous faites, dans ce temps-là? Vous laissez les bains dans les boîtes, les boîtes en arrière, entreposées dans l'entrepôt, et il y a des sommes d'argent qu'on a dépensées qui ne sont pas utiles. Voilà!

C'est comme ça que ça marche dans le système de santé, au Québec. On ne fait pas de l'organisation comme il faut. Chaque dollar-santé ne vaut pas un plein dollar. Commençons par régler ça, commençons par nous donner une vraie valeur d'un dollar et, après ça, finançons correctement. Faisons les choix dans nos budgets, hein? C'est 1 000 millions par semaine qui sont dépensés par le gouvernement du Québec. Il y a des choix à faire. Il y en a, de l'argent, pour la santé, là-dedans. En fait, avant, il y en avait. On ne l'a plus puis on l'a mis ailleurs. Nous, tout ce qu'on dit, c'est: On le remet dedans.

La deuxième citation du Vérificateur général: «Dans les établissements publics, des équipements non conformes aux normes de qualité reconnues sont susceptibles d'être utilisés sans qu'on détecte ni corrige rapidement leurs anomalies sur le plan de la radioprotection, d'où le risque que la production d'images ne reflète pas adéquatement la réalité ou que des personnes soient exposées à des doses de rayons X indues.»

M. le Président, je vais juste vous le relire, pour le bénéfice des gens qui sont dans l'Assemblée et ceux qui nous écoutent. C'est le Vérificateur général du Québec qui nous parle, qui nous écrit. Il nous dit: «Dans les établissements publics, des équipements non conformes aux normes de qualité reconnues sont susceptibles d'être utilisés sans qu'on détecte ou corrige les anomalies, d'où le risque que la production d'images ne reflète pas adéquatement la réalité...» Ça, ça veut dire «que le diagnostic ne soit pas bon». En clair, là, ça veut dire que tu te trompes, le patient arrive, tu fais un test, tu te trompes de test, le patient retourne chez eux, tu ne le traites pas, hop! tu le perds. On ne peut pas parler d'erreur médicale, là. Ici, on parle d'un environnement de travail qui est décidé parce qu'il n'y a pas eu de suivi sur le parc des équipements.

Pire: «...ou que des personnes soient exposées à des doses de rayons X indues.» Pensez-vous, M. le Président, que le Vérificateur général ? je pose la question entre vous puis moi, là; ne répondez pas, là, puis... répondez pour vous, gardez ça pour vous ? pensez-vous que le Vérificateur général, il a écrit ça sans avoir vérifié avant? Pensez-vous que ça ne voulait pas dire qu'il n'y a pas au Québec quelqu'un, un jour, qui, parce que les équipements ne répondent pas aux normes, n'a pas été exposé à des doses de rayons X indues? Pensez-vous vraiment que ce n'est pas arrivé? C'est le Vérificateur qui parle.

Bien, si vous voulez parler des accidents évitables, on va commencer par parler de l'organisation, on va commencer par parler de la gestion puis de la planification. Puis il y a des choses qui devaient être faites ici de la part du gouvernement. Si ce n'est pas en même temps, c'est peut-être même avant de regarder ce qui se passe dans les différents établissements. On a parlé de la prestation, on a parlé de l'équipement, je vais vous dire un court mot sur les pharmaciens d'établissements parce que je pense que c'est utile de s'y arrêter quelque peu. L'Association des pharmaciens d'établissements... Bien, soit dit en passant, il y a une très grande pénurie parmi les pharmaciens d'établissements de santé. Ce n'est pas un métier très, très facile. Et puis je lève mon chapeau à ceux qui y sont, soit dit en passant.

«L'Association affirme qu'une majorité des accidents proviennent d'erreurs de système et qu'il est urgent de se donner les moyens de l'améliorer. "Il ne faut pas baisser les bras", d'ajouter Mme Lambert, qui est la directrice générale de l'Association. Elle pointe à ce sujet les erreurs fréquentes dans la distribution des médicaments, attribuables notamment à la désuétude de l'équipement qui appelle à être modernisé. Elle identifie aussi la charge de travail comme source d'erreurs évitables, l'interruption du travail due à des infrastructures déficientes et fréquente dans les départements de pharmacie, alors que la concentration serait de mise et permettrait de minimiser les erreurs.»

Il y a donc un ensemble de problématiques qui est au coeur de la prestation de soins, qui concerne beaucoup plus l'organisation. Et, à l'égard du projet de loi, on aura l'occasion d'en reparler durant la commission parlementaire, mais j'ai l'impression qu'on devrait beaucoup plus parler, donc, d'erreurs dans la prestation et surtout dans l'organisation des soins de santé.

Il me reste quelques minutes, je m'en voudrais de ne pas parler du Conseil canadien d'accréditation, M. le Président, qui est une instance qui existe déjà, qui a déjà accrédité d'ailleurs bon nombre de nos établissements de santé. Doit-on pousser plus loin? Peut-être. Mais on ne doit pas non plus être aveugle et ne pas voir que le Conseil existe, que les accréditations ont été données, qu'il y a une démarche proactive préventive que ce Conseil apporte, qui est plus loin que la démarche punitive et qui, à mon avis, apporte mieux.

Mais, dans la documentation du Conseil canadien d'accréditation, on met en lumière un élément qui doit, je pense, nous guider et nous accompagner dans l'étude du projet de loi. C'est celui, lorsqu'on parle des accidents évitables, celui des facteurs actuels qui jouent et qui entraînent une augmentation du risque. Selon le Conseil, on note notamment la population vieillissante, le sous-financement, les pénuries de personnels qui, donc, amènent une surcharge de travail et qui entraînent des complications dans la prestation, ça va de soi.

Selon le Conseil canadien d'accréditation, on s'éloigne de plus en plus de l'erreur processionnelle, lorsqu'on parle de l'erreur médicale ou des accidents évitables, on s'éloigne de plus en plus de l'erreur professionnelle pour se rapprocher beaucoup plus de l'erreur systémique, celle qui est due au système tel qu'il est planifié, tel qu'il est organisé, tel qu'il est géré.

Le Conseil fait aussi référence à une étude menée par M. Reason, Human Error: Models and Management, et cette étude nous rappelait que la grande responsabilité, en ce moment, était beaucoup plus celle des organisations que celle de la performance individuelle. Et, pour eux, pour cette étude, ce qui était noté, c'était la surcharge de travail et les pénuries qui constituaient donc les plus grandes problématiques, en ce moment, d'augmentation de risque.

Comment ne pas, alors, regarder en direction des décisions qui ont été prises dans le passé? Bonus à la retraite qui ont amené le départ de plus de 4 000 infirmières, plus de 1 000 médecins qui sont partis, les lits qui ont été fermés, le parc d'équipements qui n'est pas suivi, le sous-financement chronique auquel on semble s'habituer, de l'autre côté, du côté du Parti québécois. On a pris la décision de rester les derniers au Canada, en termes de financement. Il faut attendre que le fédéral envoie de l'argent. Donc, on sera consacrés les derniers au Canada pour je ne sais pas combien de temps, et ça, même si on n'est pas la province la plus pauvre, on va être la plus pauvre en matière de santé, avec le Parti québécois.

L'Action démocratique, de son côté, a choisi de baisser les bras, et veut tellement brasser la cage qu'elle a décidé de casser la cage. Et donc, le système de santé public qui met chaque citoyen sur un pied d'égalité, ça, on va l'oublier. C'est une position, ils ont droit de la tenir, comme nous, on a le droit, si on ne croit pas à ça puis si on croit à d'autres valeurs d'équité... qu'on a le droit aussi de discuter et de discréditer, à mon avis. Je pense qu'il y a des vraies choses qui devaient être dites.

Mon temps est terminé. On aura le temps d'en reparler durant la commission, M. le Président, mais je vous remercie du temps que vous m'avez consacré. Merci.

n(16 h 10)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Châteauguay et critique de l'opposition officielle en matière de santé et services sociaux.

Je vous fais part de trois demandes de débats de fin de séance, à ce moment-ci.

M. Simard (Montmorency): Avant de parler des débats de fin de séance, me permettriez-vous de faire une petite motion?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Mme la députée de Jonquière...

Mme Lespérance: Non, Joliette.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, de Joliette, oui, oui.

Mme Lespérance: J'ai encore un droit de parole de 10 minutes. Hier, j'ai pris 10 minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, je vous expliquais... Non, excusez. Quand vous ne complétez pas votre 20 minutes, vous avez droit de le compléter si c'est à la fin d'une suspension. Alors, vous n'avez le droit d'intervenir qu'une seule fois.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, bien, enfin, ça prendrait le consentement. Le règlement ne permet pas... C'est un précédent qu'on crée, là, pour... au consentement.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. Ce n'est pas seulement pour éclairer un peu Mme la députée de Joliette. C'est que chaque intervenant ne peut intervenir qu'une seule fois sur le même sujet au niveau de l'adoption du principe. Vous avez droit à 20 minutes, mais il faut que vous le preniez une seule fois, sauf s'il ne reste plus suffisamment de temps à la fin de l'après-midi, une période, là, vous pouvez poursuivre pour compléter votre 20 minutes. Mais ce n'était pas votre cas, vous êtes intervenue à l'intérieur même... Vous auriez pu poursuivre, je crois, à ce moment-là.

Mme Lespérance: Est-ce qu'il y a consentement pour que je puisse parler cinq minutes?

M. Fournier: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui.

M. Fournier: Je pense qu'on peut constater que notre collègue de Joliette s'est jointe à nous, à mon avis, si je ne me trompe pas, peut-être durant l'été, en juillet, en tout cas très dernièrement, et je pense qu'on doit le remarquer et donner une chance à ceux qui se présentent ici pour la première fois de pouvoir apprendre les procédures sur le tas. Moi, de mon côté, je suis très prêt à lui permettre... à consentir à ce qu'elle puisse terminer son intervention. Je pense qu'on y gagnerait tous.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader.

M. Simard (Montmorency): M. le Président, il faut bien comprendre aussi que nous sentons tous la bonne foi de la députée de Joliette. Et je reçois favorablement les commentaires et suggestions de mon collègue de Châteauguay et je serais également prêt à consentir à ce qu'elle puisse prendre la parole, en autant qu'on comprend bien ensemble, M. le Président, qu'il ne s'agit pas là d'un précédent et qu'on ne crée pas un précédent. J'aimerais bien qu'on s'entende, là, hein, exceptionnellement. Alors, moi, je consentirais, bon, puisqu'elle a déjà parlé, hein, quand même longtemps là-dessus, qu'elle puisse parler maximum trois minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Alors, c'est sur la base d'un consentement, je l'ai bien expliqué, parce qu'on ouvre une porte très grande, là. Alors, on va l'entrebâiller en disant que c'est vraiment, là, par consentement qu'on vous l'accorde. Puis prenez donc trois minutes, avec le consentement. Très bien.

Mme Sylvie Lespérance (suite)

Mme Lespérance: Alors, merci beaucoup. Sans plus tarder, je veux bien répéter qu'on est d'accord avec un principe qui existe déjà, un droit à l'information du client de savoir qu'est-ce qui s'est passé pendant l'état... pendant qu'il était en service au niveau de... qu'il était en soins. Maintenant, je le répète, c'est prématuré de pouvoir changer l'ordre des choses tant et aussi longtemps qu'on n'a pas réglé les problèmes de fond et qu'on n'a pas créé le principe d'indemnisation des victimes. Donc, ce serait prématuré.

Lorsque mon collègue soulignait toutes les problématiques de planification, d'organisation, de direction, j'endosse à 200 % tout ce que mon collègue a dit. Et c'est extrêmement important de bien comprendre qu'actuellement faute de financement, faute de ressources, il y a des choses qu'on ne fait pas. Et il faudrait aussi s'interroger, comme État: Est-ce que, nous autres, on va avoir aussi, comme gouvernement, une responsabilité de faute professionnelle à l'endroit d'un client qui n'a pas reçu les soins dans les délais requis? Il n'y a pas eu nécessairement d'erreur, vous me direz? Oui, il y a une erreur, puisqu'on a une obligation, par la loi, de donner les soins.

Je vous donne un exemple très simple, très court pour expliquer mes propos. Dans ma vie antérieure, j'étais infirmière, je m'occupais de personnes âgées qui étaient en besoin de soins. Donc, on a envoyé un client qui avait besoin d'un triple pontage. Avant d'être capable d'avoir une place pour être transféré à Montréal, on a pris trois mois et demi ? et c'est dernièrement que ce cas-là est arrivé ? trois mois et demi pour le transférer à Montréal. Son état de santé s'était tellement détérioré que, en plus d'avoir coûté à l'État 750 $ par jour, soit 75 000 d'hospitalisation, on l'a opéré pour son triple pontage, ça a coûté 23 000, comme disait mon collègue, et, sept jours après, son état était tellement détérioré, il a pogné une infection, il est décédé. Donc, ce client-là a coûté à l'État plus de 75 000 $. L'opération...

Donc, on a une responsabilité. Est-ce que, avec une loi comme ça, ça va améliorer notre système? Je ne pense pas. Donc, commençons par corriger les choses qu'on doit corriger. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien, merci. Alors, comme je vous le disais, nous avons reçu trois demandes de débat de fin de séance. Je vous les mentionne immédiatement...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, là, j'annonce les trois débats qui ont été demandés, ce doit être fait. Avant de les annuler puis les changer, il faut qu'ils soient à l'ordre du jour, qu'ils soient devant l'Assemblée. Alors, je le mets devant l'Assemblée, puis, s'il y a des consentements, bien, vous m'en ferez part après.

Alors, le premier débat, Mme la députée de Jonquière questionnera le ministre de la Santé et des Services sociaux concernant le financement pour la chirurgie avec hospitalisation à l'Hôpital de Jonquière. Le deuxième débat, M. le député de Laurier-Dorion questionnera la ministre de la Solidarité sociale concernant l'engagement qui a été pris de rétablir la gratuité des médicaments pour les gens les plus démunis de notre société. Et, le troisième débat, M. le député de Richmond questionnera la ministre des Finances concernant les solutions qu'envisage le gouvernement dans le dossier de la fermeture de la mine Jeffrey et plus particulièrement en ce qui a trait aux réserves de minerai.

Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, je vous cède la parole. Vous avez quelques suggestions à nous faire?

M. Simard (Montmorency): Oui. Suite à de fructueuses discussions avec l'opposition officielle, nous vous proposons respectueusement ce qui suit. Alors, c'est qu'il y ait d'abord un premier débat dans les minutes qui viennent, après une légère suspension, entre la députée de Jonquière et le ministre de la Santé et aux Services sociaux. Il nous faudrait suspendre quelques instants, le temps qu'ils puissent sortir de l'actuelle réunion à laquelle ils sont présentement tous deux. Nous pourrions, dans un deuxième temps, envisager, à 18 heures, un débat entre le député de Laurier-Dorion et la ministre à la Solidarité sociale, puisqu'ils sont présentement, comme vous le savez, en commission. Et, en dernier lieu, en ce qui a trait au troisième débat dont vous parliez, il y a également entente pour que nous puissions reporter ce débat à mardi prochain.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Maintenant, est-ce que ce consentement, là, signifie qu'il n'y a plus d'intervenant sur le principe? S'il n'y a plus d'intervenant, je vais mettre le principe aux voix. Alors, très bien, très bien, on va régler tout d'abord ceci. On va adopter le principe puis nous reviendrons, là, sur le consentement.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 113, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux concernant la prestation sécuritaire de services de santé et de services sociaux, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le leader adjoint.

M. Mulcair: On a tous participé et entendu l'intervention de la députée de Joliette, il y a quelques minutes. Est-ce qu'on veut lui donner le temps de venir s'exprimer là-dessus? Il n'y a plus personne de l'ADQ dans la salle, alors je ne sais pas quoi faire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la députée était là il y a quelques instants puis elle est intervenue.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à ce moment-là, donc, le principe est adopté sur division.

Alors, le consentement... Le premier consentement, vous l'avez dit tantôt. Pour la suite, maintenant, comment vous voyez ça?

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Simard (Montmorency): Oui, M. le Président. Je vous remercie de me céder la parole. Je ferais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales et pour que le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux ainsi que le ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux, à la Protection de la jeunesse et à la Prévention en soient membres.

n(16 h 20)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres... Pour les autres, pour les autres débats... Il y a seulement un seul débat qui aurait lieu après une suspension?

M. Simard (Montmorency): M. le Président, pour récapituler...

Le Vice-Président (M. Brouillet): On verra pour la suite après?

M. Simard (Montmorency): M. le Président, nous suspendrions quelques instants, le temps que nos collègues la députée de Jonquière ainsi que le député de Rousseau puissent se joindre à nous ? parce que je crois comprendre qu'ils sont présentement en réunion ? le temps qu'ils puissent sortir tous deux de la réunion à laquelle ils assistent présentement, là. Il faut bien organiser nos travaux. Et, par la suite, après ce premier débat, nous aurions, à 18 heures, un autre débat où le député de Laurier-Dorion ainsi que la ministre concernée puissent faire cette intervention. Parce qu'ils sont présentement en commission, comme vous le savez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et le troisième débat serait reporté, quoi, le troisième débat.

M. Simard (Montmorency): Tout à fait. Le troisième débat, comme je vous le disais, serait reporté, selon l'entente que nous avons eue, mardi prochain.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Donc, ça va. C'est ça que je voulais savoir, avoir un tableau d'ensemble.

Donc, effectivement, nous allons suspendre quelques instants pour le premier débat, dès que le ministre et le député concernés ? ou la députée ? seront présents.

(Suspension de la séance à 16 h 21)

 

(Reprise à 16 h 29)

Débats de fin de séance

Financement des chirurgies avec
hospitalisation au Carrefour de santé de Jonquière

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, tel que nous l'avons convenu tantôt, nous allons procéder immédiatement au premier débat de fin de séance. Mme la députée de Jonquière questionnera le ministre de la Santé et des Services sociaux concernant le financement pour les chirurgies avec hospitalisation à l'hôpital de Jonquière. Alors, Mme la députée, vous le savez, vous avez une intervention de cinq minutes puis une réplique de deux minutes à la fin. Mme la députée.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, si vous me permettez d'entrée de jeu de faire un court historique du centre hospitalier de Jonquière. Parce que ça fait à quelques reprises, depuis mon élection à l'automne dernier, que j'interviens sur ce dossier-là parce que c'est une préoccupation majeure pour la population de mon comté et, davantage, c'est une préoccupation majeure pour la population du Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Parce qu'il faut comprendre que le centre hospitalier de Jonquière dessert une population de 68 000 habitants. 68 000 habitants, une population de CLSC, ça comprend, outre les gens de Jonquière, ça comprend les gens du secteur Lac-Kénogami, ça comprend les gens de Saint-Ambroise, ça comprend les gens de Shipshaw, qui, eux, ne sont pas à 20 minutes de l'hôpital de Chicoutimi, mais je dirais même qu'ils sont à peu près à 45 minutes de l'hôpital de Chicoutimi. Or, il faut que vous constatiez que ce centre hospitalier là est un centre important pour nous.

n(16 h 30)n

C'était, avant 1998, un centre hospitalier avec une vocation véritable d'hôpital, c'est-à-dire on y offrait un service d'urgence, évidemment, on avait un bloc opératoire avec lits d'hospitalisation, on avait les services d'obstétrique, de pédiatrie, de podiatrie. Et, en 1998, est arrivé le virage ambulatoire, et, à ce moment-là, on a demandé aux deux conseils d'administration ? celui de l'hôpital de Chicoutimi et celui de Jonquière ? d'essayer de voir pour réduire les frais d'administration et focusser sur les services qui pouvaient être offerts à la population dans un même hôpital.

C'est ainsi qu'il y avait eu une entente, en 1998, une entente de complémentarité qu'on appelle, où, à ce moment-là, Jonquière se voyait réduire de ses fonctions d'hôpital, et on s'était entendu pour faire de Jonquière un centre ambulatoire. On s'était entendu aussi pour faire de Jonquière un centre de réadaptation physique. Ça a créé beaucoup de tollés de protestation, et on a constaté, nonobstant la bonne foi du conseil d'administration de Jonquière, de celui de Chicoutimi, nonobstant la bonne foi de tous les intervenants dans ce dossier-là, que l'entente de complémentarité n'a pas fonctionné.

Et je pense que vous vous rappellerez, M. le Président, l'élection de 1998 alors que M. Bouchard, qui était premier ministre à l'époque, avait eu son investiture dans le comté de Jonquière, et on se rappellera aussi que, lorsqu'il était venu pour son investiture, il y avait eu une ligne de gens qui avaient manifesté, manifesté contre cette entente de complémentarité et, surtout, surtout, M. le Président, ils avaient manifesté parce que cette entente de complémentarité ne fonctionnait pas.

Je ne veux pas rentrer dans les détails des raisons pour lesquelles l'entente n'avait pas fonctionné, mais force est de constater qu'il y avait un problème. Il y avait eu des discussions qui avaient été faites à ce moment-là. L'ancien ministre de la Santé, M. Rochon était venu, et il y a une entente qui avait dénoué l'impasse, et cette entente-là faisait en sorte qu'on mettait un frein à l'entente de complémentarité et qu'on redonnait à Jonquière une vocation d'hôpital, c'est-à-dire on lui redonnait la vocation, entre autres, un bloc opératoire avec un volume de 10 lits d'hospitalisation.

Cette entente-là, M. le Président, avait même été confirmée par la ministre de la Santé à l'époque, et je vous réitère une lettre, du 12 mai 1999, écrite par Mme Marois, qui dit: «De plus, j'ai confirmé une mission de service ambulatoire au centre hospitalier de Jonquière, laquelle se traduira par la création d'un centre ambulatoire garantissant la dispension de services externes et le fonctionnement du bloc opératoire de l'établissement.

«Dans ce contexte, votre conseil d'administration est mandaté pour compléter le programme clinique de centre ambulatoire d'ici le 15 juin, en invitant les équipes médicales à y collaborer. De façon préliminaire, on peut évaluer à quelque 5 millions les travaux nécessaires à l'établissement de ce centre ambulatoire. À ce montant s'ajoutera rapidement un budget d'équipements qui comprendra notamment l'installation d'un tomographe axial.

«D'ici à ce que ce centre ambulatoire puisse assurer l'utilisation du bloc opératoire, les services de chirurgie pourront être rendus avec hospitalisation, selon l'évaluation des professionnels concernés.»

Or, M. le Président, malgré... nonobstant le fait qu'on se retrouve cinq ans plus tard, nonobstant le fait qu'on n'a toujours pas de centre ambulatoire à Jonquière, on n'a toujours pas le financement pour le bloc opératoire pour les lits d'opération. C'est pour ça que L'Intersyndicale demande une rencontre avec le ministre; la Direction générale demande une rencontre avec le ministre; il s'est ajouté une panoplie, là, de groupements dans le comté de Jonquière qui demandent une rencontre, et, vous allez voir la semaine prochaine, il va y en avoir d'autres qui vont venir déposer une pétition. On veut le rencontrer, on veut qu'il vienne chez nous nous rencontrer pour discuter de la problématique de l'hôpital de Jonquière parce que manifestement son interlocuteur, la Régie, ça ne passe pas. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Jonquière. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. D'abord vous dire que ça m'a fait plaisir tantôt de rencontrer les représentantes syndicales du centre hospitalier de Jonquière. Bon.

Effectivement, la députée de Jonquière nous parle d'une entente pas facile, pas simple. Les gens qui connaissent bien la région du Saguenay savent toutes les discussions qu'on peut avoir entre les résidents de l'ancienne ville de Chicoutimi et les résidents de l'ancienne ville de Jonquière, et, heureusement, on avait réussi en 1998 à convenir d'une entente de complémentarité. Il faut comprendre, là, que c'était important de le faire. On le dit presque à tous les jours ici, à l'Assemblée nationale: il y a des ressources qui sont limitées, donc raison de plus pour bien les utiliser, de façon complémentaire.

Donc, il avait été convenu que certaines missions seraient confiées à l'Hôpital de Chicoutimi et que d'autres missions seraient confiées à l'hôpital de Jonquière. La députée de Jonquière nous lisait tantôt une lettre de ma prédécesseure qui effectivement avait confirmé cette entente, c'est-à-dire qu'on n'aurait plus, à terme, de chirurgies avec hospitalisation à l'hôpital de Jonquière, mais qu'on aurait plutôt un centre ambulatoire qui devait être construit et qui, en 1999, était estimé par les gens de l'hôpital de Jonquière à un coût de 5 millions de dollars. Or, M. le Président, aujourd'hui, la construction de ce centre ambulatoire est maintenant évaluée, toujours par l'hôpital, à 17 millions de dollars. Donc, on a demandé une série de questions à la Régie régionale.

J'étais... Et puis je vais peut-être faire une petite parenthèse là-dessus, M. le Président. Tantôt, j'étais très heureux, dans la rencontre, d'entendre la représentante syndicale nous dire qu'elle, elle était d'accord avec les régies régionales, elle était d'accord pour donner plus de pouvoirs aux régies régionales. Parce que, vous comprenez, M. le Président, il y a 350 établissements, au Québec, de santé; le ministre de la Santé ne peut pas commencer à transiger avec chacun des 350 établissements. Donc, c'est pour ça qu'on a convenu, au Québec, d'avoir 16 régies régionales pour coordonner le travail dans chacune des régions.

Et je trouve ça malheureux que le Parti libéral du Québec propose, dans son programme, d'abolir ces régies régionales. Je pense que c'est un désaveu des régions. Je pense que ça va à contre-courant. Alors que tout le monde souhaite qu'on ait plus de décentralisation, c'est-à-dire que plus de décisions se prennent en région, bien, le Parti libéral du Québec vient nous dire: Non, non, non. Nous, on voudrait que ce soit le ministre à Québec qui décide tout avec chacun des 350 établissements.

Puis on en a eu une preuve cet après-midi; la députée de Jonquière a tenu à ce que le ministre de la Santé rencontre les gens, aille éventuellement à Jonquière, que tout soit réglé de façon centralisée, à Québec. Nous, on n'est pas d'accord avec cette approche, M. le Président. C'est pour ça que j'ai mentionné aux représentantes... Et j'étais content de voir que les représentantes étaient d'accord avec notre approche. J'ai dit que je parlerais avec la Régie régionale, les représentants de la Régie régionale, pour leur poser des questions, entre autres, sur deux sujets.

Il y a deux sujets qui sont en suspens actuellement. Les budgets de fonctionnement, parce que, effectivement, il avait été promis que, dans la période intérimaire, jusqu'à ce que le centre ambulatoire soit construit, on puisse poursuivre, avoir donc des chirurgies avec hospitalisation. Donc, les gens nous ont dit: Peut-être qu'il y a eu des erreurs de codification dans les travaux qui ont été faits par M. Bédard et que le budget qui nous est alloué n'est pas exactement celui qui devrait nous être alloué de façon équitable. Donc, je vais effectivement, au cours des prochains jours, communiquer avec les représentants de la Régie régionale du Saguenay?Lac-Saint-Jean pour que les vérifications soient faites.

Et, deuxièmement, on m'a demandé aussi de vérifier pourquoi le coût de construction du centre ambulatoire était passé de 5 millions à 17 millions de dollars. Parce que les représentantes syndicales n'avaient pas eu toutes les réponses à ces questions, et nous non plus, M. le Président.

Mais je pense que ce qui est intéressant de noter, j'ai eu une rencontre très agréable avec les représentantes syndicales qui, elles, font confiance à la Régie régionale, donc font confiance aux instances régionales qui existent, et on va passer par ces instances. Et, contrairement à la députée de Jonquière qui souhaite que tout se règle de façon centralisée, dans le bureau du ministre, nous, on va continuer à agir en laissant du pouvoir aux régions parce que ce sont les personnes des régions qui connaissent les vrais besoins des régions. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant notre collègue la députée de Jonquière à son droit de réplique de deux minutes.

Mme Françoise Gauthier (réplique)

Mme Gauthier: Je vous remercie, M. le Président. D'entrée de jeu, je vous dirais, M. le Président, que je suis un peu surprise d'entendre le ministre de la Santé dire que les représentantes de l'Intersyndicale étaient d'accord avec l'institution de la Régie régionale. Ce n'est pas ce qu'elles ont dit, pas du tout, mais pas du tout! Et, si c'est comme ça que vous comprenez le dossier de l'hôpital de Jonquière, comme vous avez compris la réunion qu'on a eue avec les représentantes de l'Intersyndicale, bien, ça va aller mal à la shop pas à peu près.

Parce que ce n'est pas ça qu'elles vous ont dit. Elles vous ont dit, M. le ministre, que les régies régionales de la santé, eux autres, ce n'était pas leur problème puis que c'était un autre débat. C'est ça qu'elles vous ont dit. Mais elles vous ont aussi dit que, chez nous, la Régie régionale de la santé faisait mal le message. Mais là, là, à la lumière de ce que vous dites, je ne suis pas certaine si c'est la Régie qui fait mal le message ou tout simplement vous avez une volonté, volonté politique ferme et arrêtée, de fermer le centre hospitalier de Jonquière. C'est ce que je comprends de vous, cet après-midi.

n(16 h 40)n

C'est que, dans le fond, vous avez beau vous réfugier... C'est pour ça d'ailleurs que vous ne venez pas chez nous, parce que vous ne voulez pas le dire, hein? Mais c'est ça, dans le fond, on comprend très bien. Et le pire, M. le Président, c'est qu'on s'est fait dire cet après-midi, à la rencontre, que, quand on lit dans la lettre, qu'en attendant le centre ambulatoire, là, on va avoir un budget... on va avoir un bloc opératoire avec lits d'hospitalisation, M. le Président... on s'est fait dire que, compte tenu qu'on n'avait pas écrit que les lits d'hospitalisation seraient financés, donc on devait comprendre que ce ne serait pas financé.

Franchement, M. le Président, franchement! Et c'était tellement gros, cette réponse-là, que même le ministre a été obligé de dire à son fonctionnaire qu'on va essayer de nous trouver une réponse plus intelligente. Bien, je constate, M. le Président, je constate aujourd'hui, après-midi, que les réponses plus intelligentes, elles ne viendront pas. Elles ne viendront pas parce qu'on n'a pas le courage politique de dire à la population de Jonquière, à la population du Saguenay?Lac-Saint-Jean: L'hôpital de Jonquière, là, faites-en votre deuil. D'ailleurs, c'est commencé, le travail est commencé, M. le Président. Mais, simplement, ils vont rencontrer les gens sur leur chemin, comme ils les ont rencontrés en 1998. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée. Alors, ceci met un terme à ce premier débat de fin de séance.

Je suspends maintenant les travaux jusqu'à six heures, ce soir, pour reprendre le deuxième débat de fin de séance.

(Suspension de la séance à 16 h 42)

 

(Reprise à 18 h 2)

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bon. Alors, nous allons poursuivre le deuxième débat de fin de séance, tel qu'il avait été annoncé un peu plus tôt.

Rétablissement de la gratuité
des médicaments pour certains
citoyens à faibles revenus

Et c'est à la demande du député de Laurier-Dorion que la ministre de la Solidarité sociale devra répondre... des dispositions des articles 308 à 312 de notre règlement pour répondre aux questions de notre collègue député de Laurier-Dorion sur la question de la gratuité des médicaments pour les gens les plus démunis de notre société.

Simplement pour vous rappeler très brièvement les règles, le proposeur a cinq minutes d'intervention, la ministre, cinq minutes, et puis, M. le député, vous aurez deux minutes de droit de réplique. Alors, sur ce, je vous cède la parole.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Effectivement, la ministre, cet après-midi, pour esquiver une question difficile, après avoir reconnu que c'était une erreur d'abolir la gratuité des médicaments, elle disait qu'elle n'avait pas l'argent pour la corriger. Quand je lui rappelais que, nous, on avait fait nos choix, puis chiffrés, c'était possible, elle disait: C'était de la fantaisie. Alors, je l'ai invitée ici aujourd'hui, M. le Président, pour qu'elle comprenne, pour qu'elle comprenne exactement comment on est arrivé à ces chiffres-là, parce que je trouve qu'elle est sous l'influence de son collègue, son voisin de banquette qui, lui, a tendance à toujours mêler les choses puis éviter de répondre en blâmant les autres.

Alors, voici des chiffres, des vrais. D'abord, Mme la ministre, lisez le document et lisez surtout l'analyse du cadre financier, parce que ce qu'on fait là-dedans, c'est très simple, on prend vos chiffres, ceux du gouvernement, pour établir d'abord la base. Selon l'énoncé complémentaire du 19 mars 2002, ça nous donne le cadre financier du budget de 2003-2004. À ça, M. le Président, on ajoute un taux de croissance non pas de 3 % réel, comme le prétendait le ministre de la Santé, mais seulement de 2,5 réel. Plus l'inflation de 2 %, ça nous donne un budget, pour la première année, d'un mandat d'un gouvernement libéral.

Après ça, M. le Président, à partir de ces taux de croissance, on estime donc les rentrées fiscales. C'est facile à comprendre, on prend la base, on ajuste le taux de croissance, on arrive à des rentrées fiscales au niveau des revenus. On ajoute à ça le taux d'élasticité pour avoir ce taux de croissance correspond à quoi comme rentrées fiscales. On le fait de façon moins conservatrice que vous. Vous, vous utilisez à l'heure actuelle 1,06 comme taux d'élasticité, c'est-à-dire, s'il y a un taux de croissance de 100, vous dites: Il y a 1,06 dollar qui rentre. Nous, on dit: Il va y avoir juste un dollar qui va rentrer. Donc, ça nous donne l'ensemble du budget disponible avant d'ajouter les transferts fédéraux. Et on ajoute des transferts fédéraux. Là aussi, on le fait de façon très conservatrice. Jusqu'à maintenant, les cinq dernières années, ça a été à peu près 3,6 %, 3,5, 4 %. Nous, on prend un taux de 3,3 pour être dans la game, si vous voulez. Alors là on a l'ensemble du budget puis on fait nos choix. On fait nos choix, parce que finalement gouverner, c'est choisir. Et on dit: tout de suite, on va soustraire 1 milliard par année en baisse d'impôts, en réduction fiscale pour les contribuables, qui s'étouffent à l'heure actuelle.

Après ça, M. le Président, on a le montant disponible après la baisse des impôts. On affecte à la santé la totalité du coût de système, pas comme vous faites depuis les dernières années, seulement... même pas la moitié, mais, comme le recommande le rapport Clair, 5,1 %, coût de système pour la santé. Même chose pour l'éducation à 1,7 %, tel qu'estimé par le ministère de l'Éducation lui-même. On gèle toutes les autres dépenses, on soustrait le service de la dette et on arrive à la marge disponible. La marge disponible nous donne un montant d'argent, après qu'on a exercé ces choix prioritaires, qu'est-ce qu'on a de disponible. C'est à partir de ces montants-là qu'on peut effectuer des choix. Et un de nos choix a été choisi, si je peux parler ainsi, de rétablir la gratuité des médicaments pour les personnes âgées bénéficiant de la prestation de supplément du revenu et les personnes assistées sociales que vous avez abolie il y a sept ans maintenant, plaçant des gens dans des situations inacceptables, vous l'avez entendu ce matin.

Vous l'avez reconnu, que c'est inacceptable, parce que vous dites: On aimerait le corriger. Donc, c'était une erreur que vous avez faite parce que vous reconnaissez qu'il faut le corriger. Et on vous dit: Nous, on va le corriger, on vous démontre également comment on va arriver à le corriger, et tout ce que vous avez à dire, c'est de remettre en cause les chiffres. Bien, je vous invite à prendre les chiffres et les regarder, dans les cinq minutes que vous avez à me répondre, puis m'indiquer où est l'erreur, m'indiquer pourquoi vous les mettez en cause, si ce n'était que de jouer facilement à votre propre galerie pour que vos collègues se lèvent vous applaudir parce que vous avez fait de la démagogie en attaquant le Parti libéral du Québec.

Bien, nous, on ne veut plus... On ne veut pas faire de démagogie, M. le Président. Il y a un document, Un gouvernement au service des Québécois, des choix qui sont identifiés et des chiffres qui sont mentionnés pour que les gens sachent à quoi ils ont à s'en tenir, où sont nos priorités, quels sont nos choix et comment est-ce qu'on va les financer. On aimerait que vous vous tenez à ces affaires-là. Et, «by the way», quant à l'ADQ, on aimerait au moins qu'ils nous déposent leurs affaires.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Mme la ministre de la Solidarité sociale.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je vais laisser aux femmes et aux hommes qui nous écoutent de juger des explications qui ont été données, parce que je maintiens totalement, M. le Président, que d'investir 5 milliards en santé, que de réduire de 5 milliards les impôts, de geler tous les budgets pendant cinq ans, y compris le ministère de la Solidarité sociale, de la Famille et de l'Enfance, des Aînés et de la Condition féminine... Alors, ce que j'ai dit cet après-midi, je le maintiens.

Je voudrais cependant ajouter: ce qui a été dit de ma part aussi, c'est que, si nous réussissions à récupérer l'argent des contribuables du Québec, le 60 % d'impôt qu'ils paient au gouvernement central, et que nous réussissions à le faire maintenant, puisque nous avons parlé d'une voix unanime et que démocratiquement des députés ont été élus de part et d'autre et qu'ils ont dit... et que nous avons eu la confirmation du déséquilibre fiscal, il est évident qu'il y a beaucoup de choses que nous ferions demain.

Maintenant, quant à l'assurance médicaments, avant l'instauration de l'assurance médicaments, combien de personnes n'avaient aucune assurance? M. le Président, c'est 1,5 million de personnes, dont 400 000 enfants n'avaient aucune assurance médicaments. Maintenant, combien de personnes sont assurées par le régime public? 3,2 millions de personnes sont assurées par le régime public et 4,2 millions ont une assurance privée. Quelles catégories de personnes sont couvertes par le régime? Les personnes couvertes sont des personnes âgées de 65 ans et plus, c'est 900 000 personnes, les prestataires d'assistance emploi et leurs enfants, c'est 600 000 personnes, les adhérents, les travailleurs, travailleuses autonomes et des préretraités et leurs enfants, 1,7 million de personnes. Qui jouit de la gratuité, M. le Président, actuellement? C'est 600 000 enfants qui sont couverts, 135 000 prestataires inaptes.

n(18 h 10)n

M. le Président, ce que j'ai dit aussi et que j'aurais aimé qu'il puisse être rajouté, c'est le fait que, dans les choix qui ont été faits, ça a été de faire en sorte qu'il y ait un plus grand nombre possible de personnes qui puissent bénéficier d'une assurance médicaments. Et je vais vous dire, il y a des gens qui, pas plus tard que la semaine dernière, dans mon bureau de circonscription de Lévis... il y a un couple qui a des revenus modestes de près de 35 000 $, et ces deux personnes-là... madame, elle est atteinte de la maladie de la sclérose en plaques. Et l'utilisation des médicaments qu'elle doit prendre, c'est des coûts énormes, énormes, qui fait en sorte qu'avant l'adoption du régime d'assurance médicaments il n'avait aucune couverture, ce couple. Aujourd'hui, ce que monsieur et madame sont venus me dire, c'est: Si nous n'avions pas ce régime d'assurance médicaments, nous ne pourrions pas conserver notre résidence et nous ne pourrions pas profiter de la vie comme nous le faisons aujourd'hui. Et je pourrais en citer bien d'autres, exemples.

Ce que j'ai dit en Chambre, cet après-midi, ce n'était pas pour épater la galerie, c'était pour répondre à une question précise qui est à l'effet que, oui, nous avons exercé des choix et que, si nous réussissons à récupérer l'argent qui appartient aux femmes et aux hommes, il est évident que, demain matin, nous pourrions faire en sorte d'être beaucoup plus généreux et solidaires à l'égard des femmes et des hommes du Québec.

Et, M. le Président, j'en profite pour aussi rappeler que, quand on se retrouve aujourd'hui avec près de 44 % des gens qui ne paient pas d'impôt parce que, au Québec, on a choisi une fiscalité qui est progressiste, on dit, comparativement à des gens qui viennent en Ontario ou dans le reste du Canada, c'est que, si tu as des revenus inférieurs à 15 000 ou à 22 000, tout dépendamment de la situation du couple, tu n'a pas suffisamment de revenus pour payer de l'impôt. Alors, le choix que nous avons fait, plutôt que d'envoyer un chèque d'allocation familiale, par exemple, à différentes familles pour qu'ils puissent voir à chaque mois le montant qu'ils reçoivent, on a fait le choix de faire en sorte que ces gens-là n'aient pas à payer d'impôt et qu'ils puissent bénéficier directement de leur montant. Ce sont des revenus modestes, M. le Président, et j'en conviens, mais il est évident que le choix que nous avons fait, ça a été de soutenir le plus solidairement possible les gens à faibles revenus.

Et la raison pour laquelle aussi je suis tout à fait certaine de ce que j'ai dit cet après-midi, à l'effet que je ne sais pas comment le Parti libéral du Québec va faire pour arriver, 44 % des gens ne paient pas d'impôts, et vous avez au Québec, après le Japon, le deuxième endroit au monde où la population du Québec va vieillir plus rapidement. Ce n'est pas une problématique, de vieillir lorsque tu es en santé, heureux et heureuse, c'est une richesse pour une société. Mais, du fait qu'il y aura... et ça a déjà commencé, beaucoup de personnes prendront leur retraite de façon plus accélérée, parce qu'on a l'effet baby-boomer que l'on a appelé... fait en sorte qu'on se retrouve avec un pourcentage élevé de gens qui ne contribuent pas parce qu'ils n'ont pas les revenus suffisants, et parce qu'il y aura un nombre important de gens qui vont prendre leur retraite plus rapidement que dans d'autres pays.

Bien, M. le Président, on se retrouve avec des choix de société que nous avons à faire. Et, si nous ne réussissons pas actuellement à récupérer les argents qui appartiennent aux femmes et aux hommes du Québec, il n'y aura pas un parti politique, M. le Président, qui va réussir à faire face à ce défi. Il faut avoir la lucidité de le dire.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la ministre. Maintenant, j'invite le député de Laurier-Dorion à nous adresser la parole pendant deux minutes, comme droit de réplique.

M. Christos Sirros (réplique)

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, si la ministre ne veut pas comprendre, elle ne veut pas comprendre, elle veut jouer à la sourde, elle veut faire de la surdité volontaire. Pourtant, les chiffres sont là, c'est clair. Alors, si elle veut juste répéter: Ce n'est pas vrai, je maintiens ce que je disais, c'est parce qu'elle n'est pas capable de les défaire. Elle n'est pas capable, M. le Président, de dire que ce n'est pas vrai.

C'est effectivement très vrai et c'est incroyable de la voir partir, M. le Président, parce que... je trouve ça... M. le Président, je sais que ce n'est pas pertinent de dire que quelqu'un s'en va, mais on est engagé dans un débat, puis la ministre se lève pour partir, je trouve ça inacceptable. Elle s'en fout. En tout cas. Ça veut dire que, tu sais, tout ce qu'elle avait à dire, c'est de lire sa petite affaire. Quant à l'argumentation qu'il y a plus de gens qui sont couverts par l'assurance médicaments, effectivement, il y a plus de gens qui sont couverts par l'assurance médicaments, personne n'a rien contre ça. Ce qu'on a contre, c'est que, pour faire du bien à quelqu'un, on a fait du mal à quelqu'un d'autre, et ça serait inacceptable de continuer dans ce sens-là. On ne procède pas comme ça dans une société qui se veut civilisée. On ne fait pas du mal à quelqu'un pour se vanter qu'on a fait du bien à quelqu'un d'autre. On fait du mal à l'heure actuelle à beaucoup de personnes très démunies. Inacceptable. Corrigeons-le.

Quand on leur demande de le corriger, surtout en cette Journée internationale de lutte à la pauvreté, ils nous répliquent, M. le Président, que notre programme ne se tient pas debout, nos chiffres ne se tiennent pas debout. Quand on leur explique comment ça se tient debout, ils disent: Ce n'est pas vrai. Puis ils s'en vont. Honnêtement, là, je trouve que ce n'est pas du parlementarisme que j'estime beaucoup, c'est... Je ne suis pas venu ici à six heures, aussi, moi non plus, avant de partir chez moi, M. le Président, pour finalement juste finir le temps, je suis venu parce que je voulais faire un débat réel avec la ministre sur la base des idées, des valeurs et des choix. Son choix, c'était de dire: Ce n'est pas vrai, je m'en vais, bien, je la laisse avec ses choix, M. le Président.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, ceci met un terme à notre débat de fin de séance. Et, sur ceci, j'ajourne nos travaux au mardi prochain, le 22 octobre, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 15)