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Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mardi 27 mai 2008 - Vol. 40 N° 88

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures cinq minutes)

Le Président: Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Aux affaires courantes, aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Oui. Bon matin, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article a.

Projet de loi n° 91

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 91, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales concernant la sécurité dans les tribunaux judiciaires. M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Alors, tel que vous venez de l'indiquer, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires en vue de consacrer les responsabilités du ministre de la Justice et du ministre de la Sécurité publique en ce qui concerne la sécurité dans des immeubles occupés ou utilisés par la Cour d'appel, la Cour supérieure et la Cour du Québec. À cet effet, le projet de loi prohibe évidemment la possession dans ces lieux, sauf par les personnes qui sont légalement autorisées de le faire, d'armes à feu ou autres objets pouvant servir à porter atteinte à l'intégrité physique d'une personne, à la menacer ou à l'intimider. Il établit également l'obligation de se soumettre à des contrôles de sécurité pour avoir accès à l'immeuble et y circuler.

Le projet de loi énumère les contrôles qui peuvent être exercés pour assurer la sécurité de ces lieux et encadrer leur exercice. Il dispense certaines personnes de l'application des contrôles de sécurité.

Finalement, M. le Président, le projet de loi confère aux municipalités responsables de l'administration d'une cour municipale la faculté d'établir de tels contrôles de sécurité dans leurs cours municipales. Je vous remercie.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Dépôt de documents. M. le ministre de l'Emploi... S'il vous plaît, les téléphones cellulaires, hein, vous savez que vous devez les fermer. Alors, je ne sais pas qui c'est, mais faites attention.

Dépôt de documents

Alors, Dépôt de documents. M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Hamad: C'est moi qui ai sonné, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

Plan stratégique 2008-2011 du ministère
de l'Emploi et de la Solidarité sociale

M. Hamad: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le Plan stratégique 2008-2011 du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Le Président: Ce document est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède la parole en question principale à M. le chef de l'opposition officielle.

Application des concepts de
multiculturalisme et d'interculturalisme

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. Dans les lendemains de la commission Bouchard-Taylor, il y a certainement l'ampleur des discussions de la dernière année, l'intérêt que les Québécois y ont porté. Tout ça crée une occasion très importante pour le Québec, une occasion unique de poser des gestes qui sont significatifs, des gestes fondateurs, des gestes qui ont une portée de long terme. C'est pour ça que notre formation a proposé une stratégie en trois volets: constitution du Québec, des balises aux accommodements raisonnables clairement exprimant la culture de la société d'accueil au Québec, ses traditions, ses valeurs communes, mais aussi un amendement à l'article 27 de la Charte canadienne des droits et libertés sur le multiculturalisme, parce qu'il s'agit bien, là, d'inscrire que le multiculturalisme, pour le Québec, n'est pas une politique compatible avec les orientations qu'on s'est données.

Sur ce dernier point, je dois dire que j'étais très heureux d'entendre le premier ministre, vendredi soir, en entrevue avec M. Bernard Derome, qui a dit... Il a affirmé très clairement que le multiculturalisme n'est pas applicable au Québec. C'est les termes qu'a employés le premier ministre.

Alors, ma question, aujourd'hui: Peut-il réaffirmer clairement à l'Assemblée nationale cette position? Mais surtout serait-il d'accord pour que nous travaillions ensemble sur une formulation pour en faire une position officielle de l'Assemblée nationale et une demande formelle du Québec?

n (10 h 10) n

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Alors, je veux noter au passage, M. le Président, que le concept d'interculturalisme a été inclus officiellement dans une politique du gouvernement du Québec en 1990. C'est ma collègue députée de Saint-François, qui, à l'époque, était ministre responsable de l'Immigration et des Communautés culturelles, qui, pour la première fois, a donné à ce mot une politique pour encadrer en quelque sorte ce que veut dire l'interculturalisme pour le Québec. Alors, en ce sens-là, c'est un concept qu'a repris la commission Bouchard-Taylor. D'ailleurs, dans le rapport de la commission, ils racontent en détail l'évolution du concept jusqu'à aujourd'hui.

Cependant, dans la commission Bouchard-Taylor, ils ne recommandent pas, eux, une mesure où on réouvrirait la Constitution canadienne. J'ignore ce qui a pu motiver les commissaires. Moi, je sais par contre que, si on devait proposer une réouverture de la Constitution canadienne ? et le chef de l'opposition officielle le sait aussi ? là on s'engage dans une démarche qui est très lourde, qui est très compliquée, qui porte toutes sortes de conséquences qui n'ont pas un impact direct, par exemple, sur le débat sur les accommodements raisonnables, alors que ce que nous souhaitons, de ce côté-ci de la Chambre, c'est qu'on puisse bouger sur les enjeux sur lesquels il y a un consensus, par exemple le projet de loi n° 63.

J'étais très heureux d'entendre le chef de l'opposition officielle dire qu'il était prêt à adopter ça dans l'espace d'une demi-heure. Il disait que c'était à l'étape de l'adoption; ça ne l'est pas, c'est à l'étape de principe que ça a passé à l'Assemblée. Les consultations ont été faites sur ce sujet, des consultations détaillées ont été faites là-dessus. Je pense que les trois partis politiques à l'Assemblée nationale du Québec seraient prêts à bouger là-dessus. Si on veut poser un geste fort, immédiat, qui est à porter, c'est ce geste-là que nous devrions poser.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Mario Dumont

M. Dumont: On n'a pas fait un an de commission pour adopter ensemble une loi qui était déjà appuyée unanimement par tous les partis.

Ma question: Il dit qu'il y a des sujets sur lesquels on peut poser des gestes quand on est d'accord. Sur le multiculturalisme, ce que je comprends, c'est qu'on est d'accord. Il l'a dit à Radio-Canada clairement, que le multiculturalisme, comme politique canadienne, n'est pas applicable au Québec.

Peut-il le réaffirmer ici, à l'Assemblée nationale, et faire qu'on se mette ensemble à travailler pour en faire une position officielle de l'Assemblée nationale et une demande formelle du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je ne vois pas en quoi l'interculturalisme va être en contradiction avec le multiculturalisme au niveau canadien, alors que, dans le cas du multiculturalisme...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration, s'il vous plaît. La question a été posée dans l'ordre, je vous demande le respect de tous les parlementaires, pour les questions et les réponses, d'être dans l'ordre toujours. M. le premier ministre.

M. Charest: Dans le cas de l'interculturalisme, je rappelle au chef de l'opposition officielle que ce concept va s'appliquer pour le Québec qui est reconnu comme étant une nation à l'intérieur du Canada, une motion, une résolution qui a été passée par la Chambre des communes postérieurement à l'adoption de ce concept de multiculturalisme. Et là-dessus, chez nous en tout cas, on est... on est, de toute évidence, parmi ceux qui croyons profondément à ce concept d'interculturalisme. Le Parti libéral du Québec est le premier à avoir donné à ce mot...

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Bien oui, M. le Président, la semaine passée, à Radio-Canada, le multiculturalisme, c'était inapplicable au Québec puis, aujourd'hui, ce n'est plus incompatible avec rien. Voyons! On est aujourd'hui dans un moment privilégié qui se présente pour sortir de l'immobilisme, poser des gestes fondateurs, comme une constitution du Québec, comme le fait de clarifier l'établissement d'une politique québécoise d'immigration qui rejoint vraiment celle d'une société qui est reconnue comme une nation, une nation qui est elle-même une société d'accueil et que ça doit être reconnu dans la Constitution canadienne. Veut-il en faire une demande...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, nous allons mettre en pratique cette politique d'interculturalisme et nous allons y associer des mesures concrètes. Je pense, entre autres, à la question de la francisation des immigrants avant qu'ils arrivent au Québec, les efforts qu'on doit faire en ce sens-là. Je pense à ce que la commission Bouchard-Taylor a relevé, dans son rapport, d'actions déjà entreprises par le gouvernement du Québec et qu'ils ont pris la peine de relever. Que ce soit dans le domaine de la reconnaissance des diplômes, la francisation des immigrants ou le français dans l'espace public, là, dans les trois cas, la commission a pris la peine de souligner les mesures que le gouvernement du Québec avait déjà mises de l'avant, et ça va inclure, M. le Président, justement une actualisation de ce concept de l'interculturalisme.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Charlesbourg.

Ligne téléphonique d'information
sur les pratiques d'accommodement
reliées aux différences culturelles

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Merci, M. le Président. Une des attentes de la population dans la crise des accommodements raisonnables, c'est d'avoir des balises claires face à des cas concrets. La semaine dernière, nous n'avons pas eu de réponse sur les enseignants voilés, ou portant un kirpan, ni sur le calendrier multiconfessionnel recommandé par la commission Bouchard-Taylor. Ce qu'on a appris, c'est que le gouvernement allait refiler le problème à des fonctionnaires et à une ligne 1 800. Mais, pour répondre aux citoyens, ça va prendre des balises, il va falloir que ceux qui répondent sachent quoi répondre.

Alors, ma question est simple: Si un élève retourne à la maison, le soir, et qu'il annonce à ses parents que sa nouvelle enseignante porte le hidjab, les parents vont être en droit de se poser des questions. Ils vont peut-être avoir envie d'utiliser cette ligne-là 1 800 afin de poser des questions. Alors, le question est simple: Qu'est-ce qu'on va lui répondre?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: M. le Président, ces questions-là ont déjà été considérées de plusieurs façons, notamment par les tribunaux. La notion d'accommodement raisonnable, au sens juridique, les tribunaux en ont traité. La notion d'ajustement raisonnable, M. le Président, il y a de l'expertise au gouvernement du Québec, il y a des expériences qui sont intervenues avec le temps. Oui, la Commission des droits de la personne sera habilitée à donner des conseils à des gens qui souhaiteraient en avoir. En fonction, M. le Président, de quoi? En fonction évidemment de la jurisprudence que les tribunaux ont établie déjà dans certains cas. Je pense, entre autres, au cas du kirpan. D'autre part, M. le Président, en raison bien sûr de l'expertise qu'il y a au Québec sur ces questions-là parce qu'il y a eu des ajustements qui ont été faits avec le temps. En fonction d'abord et avant tout, M. le Président, et tout le monde l'a dit et tout le monde l'a reconnu, en fonction d'abord et avant tout des valeurs fondamentales que la société québécoise veut voir être respectées par tout le monde. Le principe, il n'est pas compliqué, M. le Président.

Le Président: En terminant.

M. Dupuis: Les immigrants qui viennent vivre chez nous ont le devoir de s'intégrer. Nous avons...

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Charlesbourg.

Mme Catherine Morissette

Mme Morissette: Oui. Moi, je posais une question sur un cas concret. Je m'attendais à une réponse concrète puisqu'il y a déjà eu des analyses de faites. Mais je vais y aller sur une autre question simple. Quand un employeur va appeler la ligne 1 800 pour vérifier si le congé qui lui a été demandé est bien une fête religieuse, soit musulmane, sikhe ou zoroastriste, la personne qui va lui répondre va devoir se référer à un calendrier probablement arrêté par le gouvernement, puisque c'est la recommandation des commissaires. Donc, il va lui en falloir un.

Le Président: Votre question.

Mme Morissette: Quand est-ce que le gouvernement a l'intention de rendre public...

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Jacques P. Dupuis

M. Dupuis: Il y a une chose qui apparaît clairement dans la question de la députée que le chef de l'opposition officielle n'ose pas se lever pour poser, c'est que ces gens-là, ces gens-là, particulièrement l'ADQ, cherchent, depuis que le rapport a été publié, une allumette pour allumer un incendie...

Le Président: Je vous demanderais, M. le ministre de la Justice, de vous adresser directement à la présidence. Oui, M. le leader.

M. Proulx: Oui, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, à l'ordre! M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx: M. le Président, j'en appelle encore à l'application du règlement. La question qui est posée était simple, concrète. Je comprends qu'on a changé de porte-parole, je comprends qu'on veut noyer le poisson, mais on n'en est pas là, M. le Président. La première question qui a été posée était claire, la deuxième l'était tout autant. On s'attend à une réponse en fonction de 79. Je m'attends à ce que vous le lui disiez.

Le Président: Alors, pour la question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Alors, je ne pense pas que le leader de l'opposition peut vous émettre des directives, d'une part, comme il le fait en ce moment. Deuxièmement, je crois que, pour décider de la teneur de la réponse, encore faut-il avoir un peu de respect pour celui qui a la parole et écouter la réponse, ce qui... jusqu'ici, on n'a vraiment pas... on ne lui a pas donné le temps de pouvoir exprimer l'ensemble de sa pensée. Et troisièmement ? et je termine là-dessus, M. le Président, je sens que vous voulez vous lever ? je pense que le leader de l'opposition devrait cesser de choisir ceux qu'il aimerait qui prennent la parole. Il remanie suffisamment souvent son cabinet fantôme.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demanderais, mes chers collègues, de ne pas imputer de motifs. Et, M. le ministre, si vous voulez poursuivre et vous rattacher à la question.

n (10 h 20) n

M. Dupuis: Le gouvernement a toujours été clair, M. le Président, sur le fait que nous souhaitons... et nous avons répondu à plusieurs questions. Le premier ministre a été clair la semaine dernière, il l'avait été avant ça, différents ministres du gouvernement l'avaient été, et tout le gouvernement est clair: les valeurs fondamentales du Québec seront respectées. C'est le chef de l'opposition officielle, M. le Président, c'est le chef de l'opposition officielle qui s'était engagé à respecter toutes ? toutes ? les recommandations du rapport Bouchard-Taylor. C'est quoi, aujourd'hui, le genre de questions qui sont posées?

Le Président: En question principale, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Affirmation des valeurs
fondamentales du Québec

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. La réponse du premier ministre au rapport Bouchard-Taylor se résume à une ligne 1 800 accommodements et à beaucoup de publicités dans les journaux, où le premier ministre d'ailleurs se met en valeur. Dans cette publicité, celui-ci énonce par ailleurs trois valeurs fondamentales du Québec: l'égalité hommes-femmes, la prédominance du français, la laïcité de l'État. Pourtant, son gouvernement semble refuser d'inscrire ces trois valeurs dans nos textes juridiques, comme par exemple dans la Charte des droits et libertés de la personne. Maintenant que les journaux et que les publicités du premier ministre sont dans les bacs à recyclage, qu'est-ce qui va rester de ces valeurs si chères au premier ministre?

Comme celui-ci rappelle le projet de loi n° 63, est-ce qu'il est disposé à enchâsser ces trois valeurs fondamentales dans la Charte des droits et libertés, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Je ne sais pas ce que la chef de la deuxième opposition a contre l'information qu'on a voulu rendre publique sur les grandes valeurs. Mais non, mais, pour une fois qu'il y a une bonne photo, M. le Président, on ne va pas se priver de l'occasion.

Mais, cela étant dit, je lui rappelle que nous avons voulu réitérer, comme, je pense, notre devoir le commandait, les valeurs de la société québécoise qui sont incontournables, incluant la question de l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous avons présenté un projet de loi, le projet de loi n° 63, qui va en ce sens-là. J'ai compris que la chef de la deuxième opposition était favorable au projet de loi, qui a fait l'objet d'une consultation très vaste. Alors, la consultation a été faite, on a entendu les partis sur cette question-là. Je n'ose pas croire, aujourd'hui, que c'est la députée de Charlevoix qui va empêcher l'adoption de cet amendement pour les femmes du Québec. Si c'est le cas, si c'est le cas, M. le Président, l'histoire retiendra que c'est la députée de Charlevoix qui se sera posée en obstacle à une affirmation de l'égalité entre les femmes et les hommes au Québec.

Le Président: En question complémentaire, Mme la chef du deuxième groupe d'opposition.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président, si la publicité du premier ministre dit vrai, pourquoi, à ce moment-là, n'accepte-t-il pas d'inclure ces trois valeurs? Oui, à l'égalité entre les hommes et les femmes, ça va de soi. Pourquoi n'inclut-il pas la langue et la laïcité de l'État? Dans le cas de la langue, est-ce que c'est parce qu'il a des pressions de la part de son parti politique, lui qui n'a même pas été capable de parler de ce sujet-là lors de son dernier congrès?

Oui, à l'égalité hommes et femmes, mais oui à la langue française et oui...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, ça nous étonne toujours quand la chef de la deuxième opposition se lève pour nous parler de la langue, nous donner des leçons sur la langue, elle qui, à venir jusqu'à tout récemment, voulait faire de l'enseignement de l'anglais, de l'histoire en anglais au niveau primaire, hein, elle qui défendait le bilinguisme, M. le Président, qui a été rappelée à l'ordre par les gens dans son propre parti. Alors, elle n'a pas beaucoup de leçons à donner aux autres sur les congrès des partis politiques, M. le Président.

Mais elle a une occasion historique d'affirmer l'égalité entre les femmes et les hommes. Je lui pose la question: Est-ce que c'est elle, la députée de Charlevoix, qui, aux yeux de l'histoire, sera la personne qui se sera objectée à l'affirmation de l'égalité entre...

Le Président: En question principale...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre! En question principale, Mme la députée de Taillon.

Plan d'action en matière
de décrochage scolaire

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: M. le Président, quand nous avons questionné le premier ministre, en avril dernier, à propos du décrochage scolaire, il a préféré vanter ses réalisations et nous dire que tout va bien plutôt que de nous indiquer quelles actions concrètes il comptait prendre pour contrer ce fléau. Il avait pourtant promis solennellement, lors de son discours inaugural, et je le cite: «Nous allons intervenir dès le primaire afin de prévenir le décrochage scolaire. [...]Dans cinq ans, le taux de décrochage scolaire aura diminué.»

Or, les chiffres du ministère, qui ont été révélés, hier, par l'entremise du Journal de Montréal, ce qui est une première, M. le Président, ne démontrent en rien des signes d'amélioration, bien au contraire.

Et ma question est la suivante: Est-ce que la ministre de l'Éducation a enfin réussi à convaincre sa collègue ministre des Finances de dénouer sa sacoche afin d'annoncer son plan d'action pour les élèves en difficulté? Est-ce qu'elle peut nous assurer qu'elle va y mettre de l'argent neuf sans couper dans les services actuels?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je veux dire d'emblée que la question du décrochage scolaire est évidemment une question qui est extrêmement sérieuse au Québec et que nous prenons ce dossier avec toute l'attention requise. Sauf que, M. le Président, je suis toujours étonnée qu'un député ou une députée du Parti québécois se lève pour poser cette question-là. Parce que je voudrais dire à la députée de Taillon: Est-ce qu'elle réalise, est-ce qu'elle réalise à quel point son parti, son gouvernement, lorsqu'il était au pouvoir, a causé des dommages irréparables en enrayant les 800 et 1 000 professionnels dans chacune des classes de nos écoles, M. le Président?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Courchesne: M. le Président, ça prend au moins trois ans à embaucher 1 800 professionnels dans notre société, M. le Président. C'est ça que le Parti québécois ne veut pas comprendre, M. le Président, c'est ça qui est grave et c'est ça, le tort qu'ils ont fait à tous les enfants du Québec, M. le Président. Il faut dénoncer cette situation-là.

Cela dit, M. le Président, cela dit, la députée de Taillon sait très bien que nous investissons, depuis que nous sommes là, plus de 800 millions de dollars annuellement...

Le Président: En terminant.

Mme Courchesne: ...pour réparer leurs...

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Ce que je réalise, M. le Président, c'est que le premier ministre n'a pas pu tenir ses engagements. Ce que je réalise, c'est qu'au-delà de ses préoccupations la ministre ne peut pas nous annoncer des progrès aujourd'hui. Ce que je réalise, c'est que ce gouvernement a du mal de passer de la parole aux actes. Je lui demande: Que vont-ils faire et quand vont-ils le faire?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, je trouve qu'il faut avoir beaucoup de culot pour reprocher à notre gouvernement de ne pas réaliser ses engagements en matière d'éducation, M. le Président. Non seulement je...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Courchesne: Je déclare et réaffirme que le premier ministre du Québec de même que l'ensemble de son gouvernement et sa ministre de l'Éducation respecteront leurs engagements, comme ils l'ont fait depuis 2003, en matière d'éducation, en réinvestissant plus de 2 milliards de dollars et en réparant les erreurs du gouvernement précédent.

Ce plan d'action, il est annoncé... il sera annoncé, il sera déposé. M. le Président, ça ne fait pas leur affaire que je le dise, qu'on va le déposer, le plan d'action, hein? Ça ne fait pas leur affaire que je leur dise qu'il va...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! J'en appelle à votre collaboration, chers collègues. Il y a des gens qui nous regardent, alors je vous demande... qui nous regardent correctement, et je vous demande votre collaboration. Mme la ministre.

Mme Courchesne: Ce que je constate, M. le Président, c'est, quand on leur dit la vérité et qu'ils savent très bien que, quand on dit, comme membres du gouvernement, qu'on va avoir ce plan d'action puis les enfants...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! En question principale, M. le député de Terrebonne.

Publicité sur les valeurs
fondamentales du Québec

M. Jean-François Therrien

M. Therrien: Merci, M. le Président. J'aimerais vous lire une citation que je trouve fort intéressante aujourd'hui: «À chaque jour, les citoyens du Québec ont l'occasion de voir à quel point ce gouvernement se consacre davantage à l'image qu'à régler de vrais problèmes[...]. Ils ont tapissé [...] les pages de journaux au Québec d'une publicité qui sort directement des poches des contribuables québécois. Et, quand le gouvernement se plaint qu'il n'a pas d'argent pour régler les problèmes dans les salles d'urgence[, dans] les centres d'hébergement [...] de longue durée ou pour les enfants autistes du Québec, ils devraient se regarder dans le miroir le matin puis faire un peu le tour des journaux pour voir où ils choisissent de dépenser l'argent des contribuables québécois. [...]ce gouvernement, c'est un gouvernement qui, de toute évidence, pense que c'est plus important d'entretenir son image que de régler les vrais problèmes.» Ces propos ont été tenus par le premier ministre actuel le 19 décembre 2001.

Je comprends bien qu'il peut être fier de sa photo, ce matin, mais est-ce qu'il peut dire aux contribuables du Québec combien a coûté cette propagande?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président, c'est... À la question posée, je dois dire que, comme elle a été soulevée déjà, la publicité qui informait sur les suites de la déclaration ministérielle du premier ministre de jeudi dernier... je dois avouer, le ministre avait raison, la photo est particulièrement bonne. J'espère qu'on n'a pas de jalousie de l'autre côté. Mais il serait peut-être utile de savoir du député quelle est la mention contenue dans cette information avec laquelle il s'oppose, quelle est l'information qui ne ferait pas son affaire.

Pour ce qui est...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Et je crois, M. le Président, qu'il était tout à fait approprié, dans le contexte du rapport Bouchard-Taylor, que le gouvernement ? d'ailleurs, il y avait une motion qui était associée aussi avec l'Assemblée nationale ? puisse informer l'ensemble de la population sur certains des éléments. Il y a donc là une séance d'information pour l'ensemble des gens.

Parlant de publicité, j'ai ici une photo du leader de l'opposition officielle avec un peu le chef de l'opposition. Enfin, c'est difficile à voir à la caméra, j'imagine, mais on nomme le leader Un leader, votre député. Franchement, on pourrait se poser la question qui a été posée, qu'il n'y avait pas beaucoup de rapport dans un contexte, si ce n'est que de faire la promotion d'une personne. Nous, c'est la promotion d'une idée: le Québec qui intègre avec ses valeurs.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Terrebonne.

M. Jean-François Therrien

M. Therrien: M. le Président, on peut remarquer ici que le premier ministre ne regarde même pas les Québécois en pleine face.

M. le Président, après 3,7 millions, les Québécois veulent savoir combien d'argent le gouvernement a englouti dans cette publicité. Combien a coûté la publicité, où elle a été diffusée, et quelle agence a fait ce placement-là?

n(10 h 30)n

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Il faut le faire, M. le Président! Une déclaration ministérielle, à l'Assemblée nationale, pour l'ensemble des Québécois. Alors, l'interprétation que vous voulez donner, là, honnêtement, je pense que vous êtes peut-être un petit peu biaisé. Un petit peu.

Je vous rappelle la publicité de votre leader. Parlez-en, parlez-en à votre caucus. Oups! Il a de l'air à avoir un gros document. Parlez-en... Ah! bien là, on le voit.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît. Alors, je rappelle à cette Assemblée que seuls les... seuls les tableaux didactiques sont permis. Alors, je vous demande votre collaboration. Alors, avez-vous une question de règlement, c'est ça? Oui, question de règlement.

M. Proulx: ...du règlement actuel, il peut prendre avis de la question, mais il est obligé au moins de commencer à répondre.

Des voix: ...

Le Président: Alors... S'il vous plaît!

Des voix: ...

Directive de la présidence
concernant l'interprétation des
articles 79 et 81 du règlement
portant sur la réponse
à une question orale

Le Président: Alors, je vais faire un certain rappel de l'article 79 et 81 dans cette Assemblée. Alors, j'aimerais vous rappeler rapidement le libellé des articles 79 et 81 du règlement et l'interprétation qui a été faite par la présidence de l'Assemblée.

Tout d'abord, l'article 79 du règlement prévoit que, et je cite: «La réponse à une question doit être brève ? et j'insiste sur ce qui suit ? se limiter au point qu'elle touche et ne contenir ni expression d'opinion ni argumentation. Elle doit être formulée de manière à ne susciter aucun débat.»

Quant à lui, l'article 81 se lit comme suit, et je cite: «Aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante». Fin de la citation.

On oppose souvent à l'article 81 un rappel au règlement fondé sur l'article 79. Je tiens à mentionner que ces deux articles sont parfaitement compatibles. Comme l'a déjà rappelé le président Guay le 29 mai 1985, comme quoi il ne s'agit pas d'une problématique nouvelle, et je cite: L'article 81 dit bien qu'aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre a été insatisfaisante. Mais un rappel au règlement peut être fondé sur le fait que la réponse fournie par le ministre ou la ministre ne porte pas sur le sujet de la question. C'est autre chose. Fin de la citation.

Je vous demande de ne pas faire de commentaire. Dans la même décision, le président Guay interprétait ainsi l'article 79, et je cite, entre guillemets: «Il n'y a pas d'introduction à la réponse qui permette de faire un commentaire sur [toute] autre [chose] que [le sujet] de la question.»

C'est en vertu de cette interprétation que le président avait alors décidé qu'une réponse qui traitait du programme du parti gouvernemental à une question qui portait sur le budget fédéral était contraire aux dispositions de l'article 79. Bien entendu, le respect de l'application de ces articles repose d'abord et avant tout sur la volonté des parlementaires de s'y conformer. La présidence a certes un rôle à jouer à cet égard, toutefois je suis convaincu qu'il n'est pas souhaitable pour le bon déroulement de la période de questions que la présidence intervienne constamment pour demander le respect de l'application de l'article 79 du règlement. J'en appelle donc à la collaboration de tous les parlementaires.

M. le leader, à la question, s'il vous plaît.

M. Fournier: Alors donc, à la question qui était le genre de publicité ou d'information donnée, M. le Président, et je retire...

Des voix: ...

M. Fournier: ...et je retire...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Terrebonne, vous avez posé votre question, alors la parole est maintenant au leader du gouvernement.

M. Fournier: M. le Président, je retire donc l'affiche, de la même façon que j'espère que le leader de l'opposition retire ses panneaux-réclames, qui étaient sur les autoroutes dans sa région, qui n'informaient en rien les Québécois sur quoi que ce soit, alors que la publicité dans les journaux était en lien avec une déclaration ministérielle à...

Le Président: S'il vous plaît. En question principale, M. le leader de l'opposition officielle.

Lutte contre le décrochage scolaire

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Oui, M. le Président. Dans le débat sur le décrochage scolaire, on a entendu une formation politique qui gouverne et une qui a déjà gouverné se faire l'échange des bons et des mauvais coups. Mais, au-delà de ça, M. le Président, on a oublié qu'au-delà des statistiques il y a des drames humains en arrière de tout ça. La réalité, M. le Président, c'est qu'à chaque fois qu'un jeune décroche on se retrouve dans la situation où il y a un parent...

Le Président: Un instant. Voulez-vous aller enlever ça, s'il vous plaît, vous, là? Monsieur, voulez-vous enlever ça sur le fauteuil qui est là? S'il vous plaît.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, à l'ordre!

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration, là.

Une voix: ...

Le Président: Je vous demande de retirer ce que vous avez dit. On l'a tous entendu.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Allez à votre question, M. le leader.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Proulx: Au-delà de ça, M. le Président, on se retrouve devant des drames humains. Il y a des jeunes qui, eux, décrochent, mais il y a aussi des parents qui, dans la fatalité, ne reconnaissent pas l'école qu'eux ont connue.

Alors, la question qu'il faut poser à la ministre, elle n'est pas compliquée, M. le Président, parce que, vous savez, être préoccupé, c'est une chose, mais la ministre actuelle, préoccupée en 2008; l'ancien ministre de l'Éducation, préoccupé en 2007; le député d'Orford, préoccupé en 2006...

Le Président: Votre question.

M. Proulx: ...et Michel Pagé, préoccupé en 1991, M. le Président: Qu'est-ce qu'on va faire avec le décrochage scolaire...

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Ce qui me rassure, M. le Président, c'est qu'en voulant abolir les commissions scolaires et en ne participant pas positivement au débat de notre société face aux commissions scolaires ce parti, M. le Président, ne gouvernera probablement jamais au Québec, et c'est ça, la bonne nouvelle.

M. le Président, le décrochage scolaire est évidemment, je l'ai dit tout à l'heure, une question très sérieuse mais aussi très complexe. Et c'est une question qui se complexifie au fil des décennies. C'est évident que les chiffres que nous avons rendus publics sont des chiffres qui sont préoccupants, et nous le prenons pour compte. Sauf qu'il faut faire attention dans l'analyse de ces statistiques, il faut avoir une analyse complète, puisqu'au Canada, actuellement, le Québec est la province où le taux de raccrochage est le plus élevé. Ça, c'est quand même...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre, si vous voulez poursuivre.

Mme Courchesne: C'est quand même une donnée importante, qui signifie qu'effectivement, dans le monde de l'éducation, les choses ne se passent plus exactement comme elles se passaient il y a 10, 15 ou 20 ans.

Cela dit, nous avons investi et nous continuons d'investir dans des programmes d'adaptation, particulièrement au niveau secondaire, M. le Président, et particulièrement chez les jeunes garçons, pour que nous puissions...

Le Président: En terminant.

Mme Courchesne: ...avoir une école qui est motivante et une école...

Le Président: En question complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx: Oui, M. le Président. Dans le palmarès qui a été rendu public, qui manifestement ne fait pas l'affaire des gens qui veulent conserver les structures actuelles, dans ce palmarès-là, on voit des horreurs, M. le Président.

Ce qu'on veut savoir de la ministre et de son gouvernement: Est-ce que ce n'est pas un peu gênant que le seul projet de loi d'envergure qu'on propose dans une session comme celle-là, ce soit sur la gouvernance, alors que, partout ailleurs dans le monde, lorsqu'on a voulu s'attaquer à ce problème-là, on a débureaucratisé, on a décentralisé puis on a retourné ça vers l'humain, c'est-à-dire l'élève, et non les statistiques de la ministre?

n(10 h 40)n

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: M. le Président, j'ai hâte que le député de Trois-Rivières explique en commission parlementaire comment il va débureaucratiser en abolissant les commissions scolaires, comment il va s'empêcher d'avoir 20 000 fonctionnaires au ministère de l'Éducation pour qu'il y ait justement un régime pédagogique qui soit juste et équitable au Québec, M. le Président.

Le décrochage scolaire est une question complexe qui fait appel à l'ensemble des intervenants. Il y a de relié à ça d'autres problèmes que des problèmes d'éducation: des problèmes de société, des problèmes familiaux, des problèmes qui sont liés à des phénomènes de pauvreté intense, M. le Président. Et ça, ça veut dire une mobilisation de toute la collectivité, et c'est à ça qu'on s'attaque, M. le Président.

Le Président: En terminant.

Mme Courchesne: Et parlons de l'exemple du Saguenay?Lac-Saint-Jean, où, en 10 ans, ils sont passés à 35 % à 5 %, M. le Président...

Le Président: En question principale, M. le député de Marie-Victorin.

Réduction des listes d'attente en chirurgie

M. Bernard Drainville

M. Drainville: M. le Président, petit extrait du communiqué du Parti libéral, février 2003, je cite: «Pour réduire les listes d'attente en chirurgie, il faut opérer plus. Dès le lendemain de l'élection, nous allons ouvrir les salles d'opération fermées. Nous allons lancer un programme de mise à jour des équipements médicaux.» Fin de citation.

Cinq ans plus tard, les salles d'opération sont sous-utilisées, on manque de matériels médicaux. Ça fait des mois que le ministre sait qu'on pourrait améliorer l'efficacité des blocs opératoires et, ce faisant, augmenter le nombres de chirurgies; il n'a rien fait. Ça fait des mois qu'on lui dit, entre autres, qu'à Sacré-Coeur ils font rentrer des infirmières à six heures le matin plutôt qu'à sept heures pour prendre les patients plus tôt, pour pouvoir les préparer pour qu'ils soient prêts à être opérés dès huit heures. Le résultat de ce petit changement: une augmentation de deux chirurgies par jour, 400 par année. Le ministre savait, le ministre n'a rien fait, M. le Président.

Est-ce qu'il peut nous expliquer maintenant comment il explique ça aux gens qui attendent depuis cinq ans des chirurgies, qui attendent depuis cinq ans d'être opérés? Est-ce qu'il peut nous dire, depuis cinq ans, ce qu'il a fait, là, pour réduire la souffrance de ces gens-là et pourquoi il ne s'est pas attaqué...

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, avec respect, je dirais que notre collègue manque un peu de cohérence, là. Il vient de signaler, de signaler à l'attention de l'Assemblée un exemple où les gens innovent, où les gens font des choses améliorées. Est-ce que c'est grâce au gouvernement?, en dépit du gouvernement? Non, c'est tous les acteurs ensemble qui se mettent à la tâche et qui arrivent à faire des changements qui font en sorte ? et je vais en profiter, parce que je suis heureux de communiquer cette information à mes collègues de la deuxième opposition ? que, depuis 2003, le nombre de patients hors délai pour la chirurgie de la cataracte a diminué de 91 %, M. le Président, 91 %; pour la hanche, de 80 %; pour le genou, de 77 %; pour les chirurgies avec hospitalisation, de 21 %. Et c'est sur cette base d'amélioration, parce que pour la première fois un gouvernement au Québec a agi de façon significative sur les délais d'accès aux chirurgies, c'est sur cette base-là qu'avec les partenaires, avec les médecins spécialistes, avec les syndicats, avec les administrations hospitalières on va continuer la bataille contre l'attente qu'on a déjà commencé non pas à gagner totalement, mais on a commencé à faire des progrès sans précédent, et on va continuer.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Marie-Victorin.

M. Bernard Drainville

M. Drainville: M. le Président, au mois de janvier dernier, le directeur général de l'agence de l'Estrie est venu dire aux députés de cette Chambre qu'en améliorant l'efficacité de ses blocs opératoires ils avaient augmenté de 20 % le nombre de chirurgies en quatre ans. Le ministre savait et n'a rien fait.

M. le Président, où est-ce qu'il est? Où est-ce qu'il est? Où est-ce qu'il est, son plan, M. le Président? Où est-ce qu'il est, son plan?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À ma droite, s'il vous plaît! S'il vous plaît! La parole est à M. le député de Marie-Victorin. M. le député, la parole est à vous.

M. Drainville: M. le Président, le ministre savait et n'a rien fait. On pourrait aller chercher 50 000 chirurgies de plus par année s'il avait un plan d'action pour améliorer l'efficacité des blocs opératoires. Visiblement, il n'a plus le coeur à l'ouvrage. Est-ce qu'il a l'intention de demander au premier ministre un changement de responsabilité, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien, M. le Président, je remercie le premier ministre de m'avoir fait confiance pour obtenir des résultats bien sûr incomplets mais des résultats sans précédent que, j'en suis certain, la députée de Charlevoix et le député de Rousseau auraient bien aimé présenter à cette Assemblée. Diminuer le nombre d'accès... d'attentes hors délai, de la cataracte, de 90 %, je pense qu'on doit rêver et pleurer des larmes de tristesse, même, au Parti québécois, en espérant avoir eu l'occasion de le faire.

Encore une fois, il est incohérent, M. le Président. Encore une fois, avec respect, il dit qu'il y a des établissements qui apportent des changements remarquables, puis il dit: Le ministre savait et n'a rien fait. Je ne comprends pas celle-là puis je pense que les citoyens ne la comprennent pas non plus.

Alors, M. le Président, pour compléter l'information de notre collègue et de l'Assemblée, je voudrais déposer dans cette Chambre le Bulletin de l'Alliance sur les temps d'attente, qui démontre que le Québec a obtenu quatre notes de A. C'est la meilleure performance, avec Terre-Neuve et Labrador, décernée par cet organisme extérieur au gouvernement.

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Ce document est déposé. En question principale, M. le député de La Peltrie.

Mesures de réduction des
temps d'attente en chirurgie

M. Éric Caire

M. Caire: Merci, M. le Président. À l'époque où le Parti libéral prétendait réinventer le Québec, sa priorité d'action numéro 3, c'était d'augmenter le nombre de chirurgies pour réduire les listes d'attente. Donc, au moment où le ministre de la Santé a pris son mandat, on se serait attendu à ce qu'il fasse une tournée des blocs opératoires pour faire l'analyse des problèmes et apporter des correctifs dans l'objectif d'optimiser le rendement, d'augmenter le rendement, faire plus avec ce qu'on avait entre les mains à ce moment-là.

Or, M. le Président, c'est une initiative de la FMSQ, pas du ministre de la Santé, de la FMSQ, l'automne dernier, pas en 2003, l'automne dernier, qui a fait en sorte qu'une équipe a fait la tournée des blocs opératoires, soulevé un certain nombre de problèmes relativement simples à solutionner, de la bouche même, de l'aveu même du président de la FMSQ, faciles à régler, de nature à augmenter de 50 000 le nombre de chirurgies au Québec.

Est-ce que le ministre de la Santé peut nous dire de combien de chirurgies son manque de leadership a privé les Québécois?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, la veille du déclenchement de l'élection, en 2003, j'ai opéré trois malades au centre hospitalier de l'Université de Sherbrooke, et je faisais ça depuis 25 ans. Je pense que la réalité des blocs opératoires, j'en connais quelque chose. On peut toujours connaître plus, mais je pense que je n'ai pas à rougir devant personne de cette Assemblée quant à la connaissance pratique et intime du fonctionnement d'un bloc opératoire.

Maintenant, la raison pour laquelle on a pu faire ça, et je voudrais corriger ce qu'a dit notre collègue...

Des voix: ...

Le Président: ...s'il vous plaît. Je vous remercie. M. le ministre.

M. Couillard: ...c'est que, M. le Président, jamais cet exercice conjoint ? et je répète, c'est un exercice conjoint, qui était consigné à l'entente de l'automne dernier; jamais cet exercice ? n'aurait pu se faire si chaque partenaire n'avait accepté d'assumer sa part de responsabilité. Et classiquement ? et mes collègues de la deuxième opposition en gardent des souvenirs émus, j'en suis sûr ? ce n'est jamais ce qui se passe, c'est toujours la faute de l'autre groupe.

Alors, ici, on en a la démonstration, on en a la démonstration, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de l'Emploi, vous n'avez pas la parole, c'est M. le ministre de la Santé qui l'a. M. le ministre.

M. Couillard: On en a la démonstration, M. le Président, parce que ces équipes étaient constituées du ministère, de la fédération, également de l'Ordre des infirmières et infirmiers, qui chacun ont joué un rôle en assumant leur part de responsabilité. Par exemple, le président de la FMSQ ? et c'est révolutionnaire, ça ne s'est jamais dit jusqu'à maintenant ? accepte la part de dysfonction de la grille tarifaire des spécialistes et va la corriger.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire: M. le Président, je suis d'accord avec le ministre de la Santé, la FMSQ fait un excellent travail dans ce dossier-là, mais ce n'est pas de la FMSQ qu'on parle, c'est de lui.

Est-ce que je comprends de sa réponse qu'il était courant qu'il manquait des infirmières auxiliaires, qu'on aurait pu augmenter la performance dès 2003? Est-ce qu'il était au courant depuis 2003 que le manque d'outils de chirurgie faisait en sorte qu'on annulait des chirurgies? Est-ce qu'il était au courant de tout ça? Il est en train de nous dire qu'il le savait depuis 2003, puis, depuis 2003, il n'a rien fait pour corriger ça? Il a attendu que le président de la FMSQ fasse un rapport public pour bouger? C'est ça qu'il est en train de nous dire?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, c'est une autre erreur, là, ce n'est pas un rapport du président de la FMSQ, c'est une démarche conjointe du ministère puis de l'Ordre des infirmières, et ça ne s'est jamais vu jusqu'à maintenant et c'est une très bonne nouvelle. Maintenant, je comprends, l'opposition doit transformer une bonne nouvelle en mauvaise nouvelle, mais là il y a une bonne nouvelle sans précédent dans le réseau de la santé, c'est que chaque groupe, au lieu d'être un groupe de pression qui déplace le problème d'un groupe à l'autre, assume sa part de responsabilité. Les spécialistes acceptent...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous demande, à ma gauche... M. le député de La Peltrie, vous avez posé votre question. La parole est au ministre actuellement. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Je répète, M. le Président, que c'est très significatif. Les spécialistes ont accepté de concéder la réalité, qui est que la grille tarifaire, qui est interne à la fédération, peut nuire à la productivité. L'Ordre des infirmières a accepté, et ça, ça se fait hôpital par hôpital, qu'on peut avoir 15 % d'infirmières auxiliaires dans nos blocs opératoires et que ça va améliorer la productivité. Et, quant au ministère, il a déjà donné carte blanche depuis longtemps au réseau...

Le Président: En question principale, M. le député de Verchères.

Cotisations au Régime
québécois d'assurance parentale

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: M. le Président, depuis la mise en place du Régime québécois d'assurance parentale, il y a trois ans, le gouvernement a haussé à deux reprises les cotisations parce que le régime est déficitaire. Or, le déficit inclut un remboursement de 347 millions de dollars réclamé par le gouvernement fédéral pour la mise en oeuvre du régime. M. le Président, manifestement, le gouvernement libéral met beaucoup plus d'énergie à aller chercher l'argent dans les poches des familles que dans celles d'Ottawa. En effet, nous apprenions dans les médias, la semaine dernière, que des parents se font réclamer d'importantes sommes d'argent par le régime, et ce, de façon pas toujours diplomatique. Mais, comme si ce n'était pas déjà suffisant, on apprend qu'il y aura une nouvelle augmentation des cotisations à l'assurance parentale.

En ajoutant les diverses hausses successives de tarifs, doit-on comprendre que le gouvernement s'est donné pour objectif, avec les familles, comme le disait Clémenceau, de presser le citron jusqu'à ce que les pépins craquent?

n(10 h 50)n

Le Président: M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Sam Hamad

M. Hamad: M. le Président, je suis d'accord avec le député sur un point seulement dans tout ce qu'il a dit. Définitivement et malheureusement, il y a eu des lettres qui ont été adressées à des citoyens, et ça a causé un inconvénient. Lorsque j'ai pris connaissance de cette lettre-là, on l'a modifiée immédiatement. Il faut comprendre que le régime d'assurance parentale, M. le Président, c'est un grand, grand succès du gouvernement libéral. On a distribué, l'année passée, M. le Président, 1,4 milliard de dollars à tous les papas et les mamans du Québec, M. le Président. En 2007, il y a eu 117 000 naissances, il y a 195 000 parents qui ont utilisé ce régime-là. Et d'ailleurs ce régime-là, il a eu plusieurs succès, plusieurs trophées qui ont été attribués. Et je demande au député de l'opposition de faire attention. C'est un régime que tous les parents sont contents de l'avoir. Le taux de satisfaction, c'est 99 %. Ce qu'on essaie de faire, c'est maintenir la pérennité de ce système-là parce que les parents du Québec le veulent, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron: Parlant de pérennité, manifestement, les prévisions actuarielles ont été déficientes lors de la négociation des modalités du régime avec Ottawa.

Qu'attend donc le gouvernement, dans les circonstances, pour réclamer d'Ottawa les sommes nécessaires pour assurer la pérennité du régime?

Le Président: M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Sam Hamad

M. Hamad: Il faut comprendre le contexte, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! La parole est à M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Hamad: Je n'ai pas dit conversation nationale, j'ai dit contexte. Alors, le contexte est le suivant. Ce régime-là connaît un succès et il est victime de son succès pour deux raisons principales. La première raison, c'est que le taux de natalité au Québec a augmenté, le taux...

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Verchères, vous avez posé votre question, M. le ministre est après répondre. Oui, M. le leader du gouvernement... leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Gendron: Justement, j'ai entendu la question du député de Verchères et ce que vous venez de dire. Il a posé sa question. La réponse n'a rien à voir avec la question qu'il a posée. C'est toujours le même problème. Vous voulez notre collaboration, je vous la garantis. C'est simple, qu'ils répondent aux questions posées.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur la question de règlement.

M. Fournier: Pour commencer, si le leader de l'opposition, le deuxième leader de l'opposition, la garantit, je ne vois pas pourquoi vous êtes obligé de rappeler à l'ordre des membres de son groupe qui parlent tellement que, moi-même, je n'entends pas la réponse du ministre.

Le Président: Alors, M. le ministre, s'il vous plaît, à la question.

M. Hamad: M. le Président, le député parle de négociations avec le fédéral. Ils ont essayé, sur trois reprises, avec le fédéral, de négocier ce régime-là, le résultat, c'était quoi? C'était zéro d'entente. Grâce à notre gouvernement...

Des voix: ...

M. Hamad: M. le Président, j'entends plus que je m'entends, M. le Président.

Le Président: S'il vous plaît. En question principale, M. le député de Chambly.

Impact du prix des hydrocarbures
sur les finances publiques

M. Richard Merlini

M. Merlini: Merci, M. le Président. Hier, l'étude réalisée par le ministère des Finances et déposée en cette Chambre le 13 mai dernier a été clairement critiquée et même discréditée par un chercheur des Hautes Études commerciales. Ce que le chercheur nous dit, c'est que ce n'est pas juste les pétrolières qui font de l'argent avec les hausses du prix de l'essence, mais c'est le gouvernement qui s'enrichit avec les hausses du prix de l'essence. Clairement le contraire de ce que prétendait le ministère des Finances.

Alors, la question est très simple, M. le Président: Qui dit vrai? Quel impact a la hausse des prix des hydrocarbures sur les finances du Québec? À quand une étude crédible et sérieuse? Pourquoi le Québec est en retard dans le développement des technologies alternatives, comme les voitures électriques? Qu'est-ce que ça prend, M. le Président, pour que le gouvernement agisse?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, je veux remercier le député de sa question. Je souhaitais, M. le Président, avoir une question, ce matin, sur ça. Parce que, vous comprendrez, ce n'est pas sorcier, M. le Président, j'ai dirigé un institut économique pendant sept ans de temps avant de venir en politique, alors vous comprendrez que, deux économistes qui disent le contraire que d'autres économistes, j'ai vu ça pendant plusieurs années.

Mais, M. le Président, j'aimerais par ailleurs revenir sur la question qui est posée et sur finalement le doute que l'on met sur l'étude qui a été déposée par le ministère des Finances, qui a été faite par le ministère des Finances. Il y a deux volets, M. le Président: il y a une taxe qui est sur l'essence et il y a la TVQ qui s'ajoute sur le prix de l'essence, et il y a évidemment les coûts additionnels pour le gouvernement, ne serait-ce que les voitures de police, ne serait-ce qu'au ministère des Transports les camions au niveau du transport, M. le Président. Il y a de nombreux coûts qui s'ajoutent bien sûr aux coûts du gouvernement.

Je réitère, M. le Président, que l'étude que nous avons, elle est exacte. Elle est tellement exacte que les revenus, au niveau de l'essence, ont été de 1,6 milliard de dollars...

Le Président: En terminant.

Mme Jérôme-Forget: ...en 2003 et 1,6...

Le Président: Ceci met fin à la période des questions et réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la motion sans préavis. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Souligner la Semaine de l'aphasie

M. Couillard: Alors, Mme la Présidente, j'aimerais, de façon conjointe avec mes collègues le député de La Peltrie et le député de Marie-Victorin, déposer la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine de l'aphasie qui a lieu du 26 mai au 1er juin.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Pelletier (Chapleau): Alors, il y a consentement, Mme la Présidente, pour qu'elle soit adoptée sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Je prie les députés qui doivent vaquer à d'autres occupations de le faire dans l'ordre, s'il vous plaît.

Alors, nous sommes toujours aux motion sans préavis. Mme la ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport et ministre de la Famille. Mme la ministre.

Souligner la Semaine des services
de garde en milieu scolaire

Mme Courchesne: Alors, Mme la Présidente, il me fait plaisir de proposer, conjointement avec le député de Trois-Rivières et la députée de Taillon, la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine des services de garde en milieu scolaire et qu'elle témoigne sa reconnaissance au personnel de ces services pour son engagement à offrir un milieu de vie accueillant et stimulant aux élèves qui lui sont confiés.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Pelletier (Chapleau): Alors, il y a consentement pour qu'elle soit adoptée sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. Mme la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine.

Féliciter le cinéaste Denis Villeneuve,
lauréat, à Cannes, du Grand Prix Canal+
du meilleur court métrage

Mme St-Pierre: Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de cette Chambre pour déposer la motion suivante conjointement avec les députés de Berthier et de Borduas:

«Que l'Assemblée nationale félicite le cinéaste Denis Villeneuve, lauréat du Grand Prix Canal+ du meilleur court métrage, qui lui a été décerné vendredi dernier à Cannes pour son film Next Floor.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Pelletier (Chapleau): Alors, il y a consentement pour qu'elle soit adoptée sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est adoptée? Adopté. Mme la députée de Matapédia.

Souligner le 10e anniversaire des
centres locaux de développement

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, je demande le consentement de cette Chambre pour présenter, conjointement avec le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation et le député de Lévis, la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 10e anniversaire de la création des centres locaux de développement du Québec et l'importante contribution de femmes et d'hommes qui, par leurs actions et leurs engagements, contribuent au développement social et économique de toutes les régions du Québec;

«Qu'elle réitère l'importance des CLD dans le développement de nos régions.»

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée de Matapédia. Alors...

Mme Doyer: ...on avait convenu d'une intervention de trois minutes, chaque personne.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, madame. Je comprends ça, je vais vous le dire, Mme la députée. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Pelletier (Chapleau): Alors, Mme la Présidente, il y a une entente pour que chaque groupe parlementaire intervienne pour une durée maximale de trois minutes, en commençant par la députée de Matapédia, suivie du député de Lévis, et enfin le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le leader. Alors, je comprends qu'il y a consentement pour qu'il y ait un intervenant de chacun des groupes parlementaires et pour que la durée des interventions soit limitée à un maximum de trois minutes chacune. Mme la députée Matapédia.

Mme Danielle Doyer

Mme Doyer: Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec plaisir que je me joins à vous pour souligner, en ce 27 mai 2008, le 10e anniversaire des centres locaux de développement du Québec, dossier qui a été porté d'ailleurs par le ministre Guy Chevrette à l'époque, par un gouvernement du Parti québécois.

n(11 heures)n

Pendant toutes ces années, c'est grâce aux efforts soutenus des employés des CLD, de ses administrateurs, des élus municipaux et de nombreux bénévoles travaillant en collaboration avec les agents ruraux dans les municipalités, MRC et villes du Québec que leurs activités ont pu avoir un impact si grand sur le développement social et économique de nos milieux.

Permettez-moi, Mme la Présidente, de vous citer quelques chiffres qui illustrent bien les excellents résultats des CLD. En termes de maintien et de création d'emplois, pendant ces 10 années là, ce sont 51 769 emplois qui ont été créés, 64 718 maintenus, pour un total de 116 487. Au niveau des entreprises de créées et de consolidées, c'est un chiffre de 16 969 entreprises au Québec qui ont été créées ou consolidées, pour un total, Mme la Présidente, d'investissements de 346 millions de la contribution des CLD, et des investissements générés au total, avec tous ces chiffres-là, des CLD, des investissements générés pour un total de 3 796 400 000 $. Alors, c'est un succès évident.

Mme la Présidente, les CLD sont identifiés comme des leaders dans l'accompagnement, le soutien et la mobilisation. Toutes leurs actions permettent d'innover, de s'enrichir et de s'engager dans une vision partagée de développement et de développement durable. Pensons aux retombées de l'économie sociale et de la Politique nationale de la ruralité, d'ailleurs deux réalisations au niveau du Chantier de l'économie sociale. Je me souviens, et sûrement vous aussi, Mme la Présidente, des petits sourires en coin il y a 10, 15 ans quand on parlait d'économie sociale. Mais maintenant c'est pris au sérieux, et je vous cite quelques chiffres. Les données les plus récentes du Chantier de l'économie sociale montrent que le Québec compte 6 254 de ces entreprises, dont 2 313 coopératives, 3 941 organismes à but non lucratif. Le nombre d'employés d'économie sociale dépasse les 65 000, leur chiffre d'affaires est de 3 milliards par année.

Alors, je termine, Mme la Présidente, en remerciant et en félicitant tous les partenaires des centres locaux de développement, et je souhaite à toutes les personnes qui agissent au niveau des CLD, les partenaires, je leur souhaite une bonne continuation et un excellent succès dans l'avenir. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, Mme la députée de Matapédia. Je cède maintenant la parole à M. le député de Lévis, porte-parole de l'opposition officielle en matière de développement économique, pour un maximum de trois minutes.

M. Christian Lévesque

M. Lévesque: Merci, Mme la Présidente. Je joins ma voix à mes collègues pour souligner le 10e anniversaire des centres locaux de développement. J'aimerais réitérer leur importance pour l'économie régionale du Québec et reconnaître l'importance du travail de celles et ceux qui sont au service du développement de nos régions. Je salue le travail dévoué des professionnels et des administrateurs, hommes et femmes, qui ont à coeur le développement économique et social de leurs régions. Je veux aussi saluer l'Association des centres locaux de développement et tous les gens qui oeuvrent au sein des différents programmes des CLD.

Notre formation politique souhaite une véritable autonomie pour les régions du Québec. Nous croyons que les gens des régions sont les mieux placés pour assurer leur développement économique de la meilleure façon qui soit. Les centres locaux de développement sont présents partout sur le territoire québécois. Leur présence sur le terrain leur permet d'exploiter les richesses locales efficacement et avec le soutien de la population. Chaque région a son rôle à jouer dans le développement du Québec. La diversité des régions est un atout sur lequel nous devons miser. À l'ADQ, nous souhaitons faire des régions du Québec de véritables régions politiques de développement.

La création d'emplois, le soutien à l'entrepreneuriat, le développement de nouvelles technologies au sein des entreprises et l'aide aux entreprises locales sont des sujets sur lesquels travaillent les CLD. Ce que nous fêtons aujourd'hui, c'est le travail des hommes et des femmes qui s'engagent dans leur milieu. Nous en connaissons tous et nous savons leur engagement, leur dévouement et la fierté qu'ils ont à travailler au service de nos régions.

Et j'aimerais souligner le travail des employés du conseil d'administration du CLD SDE de Lévis ? je leur fais un beau salut ? et aussi saluer le travail de l'ARDECA de Chaudière-Appalaches. J'ai eu la chance de siéger avec leurs représentants sur le comité économie que je présidais en tant que président de la Chambre de commerce de Lévis par le passé. Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de Lévis. Je cède maintenant la parole à M. le député d'Outremont et ministre du Développement économique, de l'Innovation et des Exportations pour un maximum de trois minutes.

M. Raymond Bachand

M. Bachand: Merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux, avec mes collègues de l'opposition, de souligner le 10e anniversaire des centres locaux de développement et d'abord de rendre hommage à tous les membres des conseils d'administration, dont un très grand nombre d'élus municipaux, à tous les membres des personnels des CLD qui contribuent, chaque jour, au développement économique du Québec, les 17 régions du Québec. C'est une présence très intégrée dans le territoire. Et il faudrait aussi rendre hommage aux 1 500 employés qui travaillent quotidiennement dans le réseau des CLD, qui travaillent aussi, les employés, et le nombre équivalent d'administrateurs qui sont issus du milieu. C'est à ces hommes et ces femmes qu'il faut rendre hommage et remercier pour la contribution au développement économique.

On parle, entre 1998 et 2006, de plus de 100 000 emplois, près de 116 000 maintenus ou créés, du soutien à 17 000 entreprises, presque 4 milliards d'investissement dans tous les projets gérés avec les CLD. Mais ce qui est encourageant dans ces statistiques, Mme la Présidente, c'est qu'au cours des trois dernières années, de 2004 à 2006, il y a une augmentation très sensible du nombre de dossiers traités à chaque année, et ça correspond à une décision très importante de ce gouvernement, que le gouvernement du Parti libéral a prise en 2003 en faisant un pas de plus vers la confiance aux régions, vers la décentralisation en conférant des compétences aux MRC et aux municipalités pour la gestion des CLD. La Loi sur le ministère du Développement économique a donc été amendée pour confier la responsabilité du développement local et de l'entrepreneuriat aux MRC, et toutes leurs compétences.

Mais, deuxièmement, non seulement on a donné le pouvoir aussi aux régions, mais on ajouté de l'argent, Mme la Présidente. On a donné des moyens additionnels considérables. Dans le dernier... dans le discours du budget 2007-2008, c'est 90 millions de dollars sur cinq ans que nous avons choisi d'investir pour améliorer l'entrepreneurship dans les régions, et les CLD bénéficient donc, depuis l'an dernier, de ressources financières additionnelles importantes, ce qui va augmenter le nombre de dossiers traités, plus d'entreprises, plus d'emplois et des milieux plus prospères. Ce sont les premiers répondants de l'entrepreneurship sur le terrain, les services de première ligne pour le soutien au démarrage d'entrepreneurship, particulièrement actifs auprès des jeunes entrepreneurs dynamiques, des partenaires de premier plan du développement économique du Québec.

Alors, au nom du gouvernement, Mme la Présidente, je tiens à offrir mes meilleurs voeux, une bonne continuité à tous les CLD du Québec parce qu'ils ont une contribution essentielle au développement économique et au dynamisme de l'économie du Québec. Merci.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous sommes rendus aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Pelletier (Chapleau): Alors, merci, Mme la Présidente. J'avise cette Assemblée que la Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 75, Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui jusqu'à 13 heures, immédiatement après l'élection du vice-président, ainsi que de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 55, Loi modifiant de nouveau le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de l'éducation entreprendra des consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur les élections scolaires, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 12 h 45, de 15 heures à 18 heures ainsi que de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et enfin

La Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 72, Loi sur la protection sanitaire des cultures, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le leader. Pour ma part, je vous avise que la Commission des institutions se réunira aujourd'hui, mardi 27 mai 2008, après les affaires courantes, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de procéder à l'élection du vice-président de la commission.

Nous sommes aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Affaires du jour

Alors, la périodes des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

n(11 h 10)n

M. Pelletier (Chapleau): Alors, je vous prierais d'appeler l'article 11 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 81

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): À l'article 11, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du principe du projet de loi n° 81, Loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec. Y a-t-il des intervenants? M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Laurent Lessard

M. Lessard: Alors, merci, Mme la Présidente. J'ai le plaisir de soumettre donc pour adoption le principe du projet de loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec. Alors, le projet de loi donne suite à l'énoncé de politique sur la modernisation de la gouvernance des sociétés d'État qui a été déposé à l'Assemblée nationale par le ministre des Finances du temps, M. Michel Audet, le 6 avril 2006. Le projet de loi donc fait également suite à l'adoption, au 14 décembre 2006, de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, loi qui constitue donc la première étape de la mise en application de l'énoncé de politique.

Afin de situer les enjeux dans une juste perspective, permettez-moi, Mme la Présidente, d'exposer les grandes lignes du projet gouvernemental de modernisation de la gouvernance et de retracer donc avec vous les cours des événements qui ont conduit aux modifications proposées à la loi constitutive de la Loi sur La Financière agricole du Québec.

En 2004, le gouvernement du Québec se dotait d'un plan triennal de modernisation intitulé Moderniser l'État. Ce plan a pour but donc d'adapter l'État québécois aux nouvelles attentes de la population et de le rendre plus performant. Il vise notamment la mise à jour des façons de faire, le développement d'une offre de services de qualité afin de mieux faire face aux enjeux du présent et surtout de l'avenir.

La révision des gouvernances des sociétés d'État fait partie intégrante de ce plan. En procédant à la modernisation de la gouvernance des sociétés d'État, le gouvernement s'inscrit dans un effort entrepris à l'échelle internationale. Il tire ainsi profit de toutes les réflexions effectuées dans les pays industrialisés, et notamment au Canada, dans le secteur privé comme dans le secteur public, pour faire bénéficier les sociétés d'État, donc des sociétés d'État québécoises, d'une gouvernance modernisée et surtout conforme à l'intérêt public.

Cette gouvernance doit respecter donc la nécessaire autonomie des sociétés tout en maintenant le lien existant entre ces sociétés d'État et les citoyens. L'énoncé de politique déposé par le ministre des Finances le 6 avril 2006 donne suite donc à l'engagement du gouvernement. Il prévoit donc une révision en profondeur, par une voie de modifications législatives, des règles de gouvernance des 24 sociétés d'État. L'objectif principal de la modernisation est clair: favoriser donc une gestion qui répond à des critères exigeants de transparence, d'intégrité et de responsabilité afin d'assurer la performance attendue des entreprises du secteur public et de répondre ainsi aux attentes légitimes des citoyens.

La Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, adoptée en décembre 2006, introduit les nouvelles règles de gouvernance au sein de six sociétés d'État à caractère financier commercial. Ces mêmes règles s'appliquent aux sociétés visées par l'énoncé de politique, dont La Financière agricole du Québec, en tenant compte de leurs particularités respectives. Ainsi, les lignes directrices de la loi-cadre s'articulent autour de trois axes, soit une répartition claire des responsabilités du conseil d'administration, du président du conseil et du président-directeur général, le renforcement du rôle du conseil d'administration par l'établissement de nouvelles règles de formation et de fonctionnement et l'amélioration donc des moyens gouvernementaux de surveillance et de contrôle des sociétés d'État.

Ainsi, le 14 mai dernier, nous présentions à l'Assemblée nationale un projet de loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec. Dans ce projet de loi, nous retrouvons notamment les propositions suivantes: de faire passer le conseil d'administration de 11 à 13 membres ? sept de ces membres, incluant la président du conseil d'administration, devront se qualifier comme administrateurs indépendants ? que le président-directeur général de La Financière et que le sous-ministre du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation soient membres d'office, ce qui n'était pas le cas. Quatre membres seront nommés par les personnes désignées par l'association accréditée en vertu de la Loi sur les producteurs agricoles, soit l'Union des producteurs agricoles du Québec. Deux comités seront également mis en place afin d'éclairer le conseil d'administration, le premier sur les questions d'éthique, de gouvernance, de ressources humaines, et le deuxième sur les questions de vérification.

Rappelons que le projet de loi sur La Financière agricole s'inscrit également dans les recommandations de la Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire québécois de même que dans la vision gouvernementale dévolue au secteur. Tout en reconnaissant que le soutien financier accordé au secteur agricole est un enjeu majeur pour son développement, le rapport de la commission déposé en février dernier recommande que certains changements soient apportés au mode d'intervention de La Financière agricole. M. Michel Saint-Pierre agira donc comme mandataire au regard du chantier de travail visant à redéfinir les modes d'intervention en matière de sécurité du revenu et sera responsable des travaux devant conduire à la conclusion d'une nouvelle entente et convention donc avec La Financière agricole pour 2009.

La commission a consacré un chapitre entier de son rapport à la gouvernance du secteur agricole et agroalimentaire et a formulé des recommandations touchant certains angles particuliers. Elle recommande notamment de revoir la composition du conseil d'administration de La Financière agricole du Québec pour la rendre conforme à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État. Le rapport de la commission nous demandait d'agir rapidement afin de remplir les objectifs d'efficacité et d'imputabilité de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État selon des critères rigoureux de transparence et d'intégrité.

De plus, la vision gouvernementale d'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire dévoilée le 6 mars dernier, dans la foulée du rapport de la commission, se veut un guide pour définir et adapter l'intervention du gouvernement destiné à aider le secteur à faire face aux enjeux et à relever les défis des prochaines années. Elle invite l'ensemble des acteurs à miser sur leurs forces pour bâtir l'avenir du secteur et indique que le partenariat et la concertation sont des atouts qui méritent d'être valorisés. Ainsi, à l'instar des autres sociétés visées par la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, le gouvernement du Québec s'engage dans une démarche de modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec, qui vise notamment la composition, là, du conseil d'administration et des règles de fonctionnement de cet organisme.

Le gouvernement reconnaît le rôle stratégique joué par La Financière agricole dans le développement du secteur agricole de même que sa contribution à l'occupation dynamique du territoire dans l'ensemble des régions du Québec. L'application des règles de gouvernance se fera tout en préservant le partenariat unique développé avec les producteurs agricoles. L'expérience et l'expertise des producteurs agricoles continueront d'être mises à profit pour éclairer judicieusement les choix des orientations prises par le conseil d'administration de La Financière en matière de sécurité du revenu. Le conseil d'administration reflétera donc les fondements de La Financière agricole en termes d'implication de la clientèle tout en appuyant les principes de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État à l'égard de la diversité de ses membres. C'est donc dans cette optique, Mme la Présidente, que nous voulons faire adopter ce projet de loi.

Je rappelle, en terminant, que la gouvernance du secteur agricole et agroalimentaire repose sur un partenariat étroit avec des producteurs agricoles. Ainsi, le partenariat auquel je fais référence s'exprime non seulement par une participation du monde agricole au sein du conseil d'administration de La Financière, mais il s'exprime quotidiennement dans la concertation avec les producteurs, qui sont des interlocuteurs privilégiés et stratégiques pour permettre au ministère d'accomplir sa mission, qui consiste à influencer et soutenir l'essor de l'industrie bioalimentaire québécoise. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Huntingdon, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'agriculture, de pêcheries et d'alimentation. M. le député.

M. Albert De Martin

M. De Martin: Merci, Mme la Présidente. Nous sommes réunis aujourd'hui pour discuter du principe du projet de loi n° 81, soit la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole. Je suis très heureux de voir ce projet de loi appelé puisqu'il s'agit d'une des principales recommandations du rapport Pronovost venant de la Commission sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire du Québec. C'est d'autant plus un projet de loi important, Mme la Présidente, qu'il touche au-delà de 700 millions de dollars qui sont distribués dans le monde agricole via La Financière, via les différents programmes. Et ce qui est important à l'intérieur de ça, c'est de faire en sorte que les argents qui vont être investis dans le futur aillent réellement au développement du futur de l'agriculture au Québec, puis c'est pour ça que pour moi, aujourd'hui, c'est un moment extrêmement important, et aussi les acteurs du milieu. Je pense qu'ils sont conscients du changement qui va être apporté.

n(11 h 20)n

Et aussi j'écoutais le ministre. Justement, à l'intérieur de ses propos, il parlait de partenariat. J'espère que pour une fois il va se servir justement de la modernisation du n° 81 pour établir un véritable partenariat, pour faire en sorte que l'agriculture de demain soit prospère au Québec, pour faire en sorte que les hommes et les femmes qui veulent pratiquer l'agriculture au Québec aient le goût de la pratiquer. Pour moi, c'est extrêmement important, ce facteur-là. On va être impliqués de très près dans l'étude de ce projet de loi là, et je vais faire en sorte, M. le ministre, qu'on va collaborer, puis, s'il y a des choses qui ne sont pas en rapport avec une vision vraiment d'avenir, on va être là pour justement en faire le constat.

Plusieurs fois depuis le dépôt du rapport, j'ai demandé au ministre d'agir en agriculture. Il essaie de le faire par un peu de saupoudrage ici et là. On le voit, il se promène énormément en province, par les temps qui courent, avec le même 60 millions, là, qui est annoncé pour cinq ans d'augmentation au niveau du budget de l'agriculture. J'ai bien mentionné sur cinq ans, Mme la Présidente, ce qui fait 12 millions par année. Il est en train, au niveau des annonces, de se faire un peu de saupoudrage ici et là et non pas régler le problème véritable. C'est un peu le message que je veux lui laisser. À la blague, je lui disais qu'il dépense probablement plus en frais de voyage et de déplacement que les annonces qu'il fait. Ça fait que c'est un petit message en passant.

Pourtant, la situation actuelle sur un bon nombre de fermes, au Québec, se détériore, Mme la Présidente, donc la qualité de leurs propriétaires se détériore également. Le Parti libéral nous a habitués avec le temps au même procédé, ce que je viens de dire, il annonce plusieurs fois les mêmes investissements. On revient souvent sur la même chose pour tenter de démontrer qu'ils font quelque chose et pour que les chiffres soient plus gros. Parce que 60 millions, c'est cinq ans, ça paraît bien, mais, quand on revient à la réalité, 12 millions, quand on regarde les chiffres réels, 15,8 millions d'augmentation au niveau des dépenses, dans le budget du MAPAQ, on se retrouve avec un petit déficit au niveau de ce qui se passe réellement au niveau des budgets de cette année.

De plus, régulièrement, les mesures souvent sont mal ciblées, donc elles ne répondent pas aux besoins réels des agriculteurs et de l'industrie en général. C'est typique, Mme la Présidente, d'un gouvernement qui est complètement déconnecté de la réalité du terrain. Le ministre devrait donc y aller plus souvent, parce que, sur le terrain, il y a énormément d'information à s'enquérir justement pour faire en sorte que les solutions... Les gens sur le terrain, Mme la Présidente, en ont, des solutions, puis il faut être capable de les écouter. Et souvent ces gens-là utilisent aussi un mot qu'on appelle la logique dans la façon de régler des problèmes, puis il me semble qu'on a un peu de difficultés actuellement, au niveau du ministère de l'Agriculture, à utiliser à l'occasion cette façon de faire.

Nous, ce qu'on veut de notre côté, c'est que chaque dollar soit bien investi. Un dollar bien investi ne va pas dans les structures mais directement à l'agriculteur. Je fais référence à ce que le ministre vient de dire, une augmentation de 11 à 13 au niveau des administrateurs. Je ne suis pas convaincu actuellement de la nécessité d'augmenter le nombre d'administrateurs sur le conseil d'administration. Lorsqu'on veut alléger, soit qu'on reste au même niveau puis qu'on soit plus productif, mais on n'augmente pas... parce que par expérience je peux vous dire qu'un conseil d'administration, plus il est gros, plus c'est difficile d'arriver à des consensus, Mme la Présidente.

Faire les choses autrement sans créer de distorsion pour gonfler artificiellement les prix... Et c'est très rarement les producteurs qui empochent mais les gens en périphérie. On a souvent entendu ça par le passé: le producteur, c'est une courroie transmettrice dans les économies locales. Mais il faut faire attention qu'il ne transmette pas tous les argents qui reviennent du gouvernement et qui sont là en support à l'agriculture. Et j'insiste à ce niveau-là quand je dis «vraiment en support à l'agriculture». Donc, le gouvernement doit trouver des façons d'investir là où le marché va donner le maximum pour les produits agricoles, ce qui est très important.

Il faut éviter de créer des programmes qui ne répondent pas aux vrais besoins. Un exemple: je reviens encore... Je l'ai déjà mentionné parce que c'est important, ce bout-là. Lorsque le gouvernement finançait ? si je reviens assez loin en arrière, ça, ça a été sous l'égide du Parti québécois à l'époque ? la construction des silos, 50 % de financement au niveau des silos, l'objectif était louable, c'était d'amener une certaine autonomie au niveau des céréales, au Québec, puis c'est correct. Mais ce qu'on s'est aperçu, c'est que le prix des silos a doublé du jour au lendemain, sur le terrain.

Lorsqu'on a fait un certain virage environnemental, puis ça, je l'ai vécu personnellement aussi au niveau du travail minimum sur les terres, au niveau du semis direct, on s'est mis à subventionner l'équipement. Comme par hasard, du jour au lendemain, l'équipement a doublé. C'est ce genre d'exercice là, Mme la Présidente, qu'il faut faire extrêmement attention parce que, lorsque le prix des intrants remonte de cette façon-là, ce n'est pas l'agriculture qui en profite.

Ça a été la même chose dans le système de drainage du terrain. Encore une fois, l'objectif était louable, à l'époque. Ça a bien servi le Québec au niveau de l'amélioration de la productivité des terres agricoles. Mais ce que je retiens de l'exercice: lorsqu'on a décidé d'abolir les subventions au niveau du drainage, le prix du drainage a baissé, comme par hasard, sur le terrain. Meilleure compétitivité au niveau des entrepreneurs, ça fait qu'il y avait plus de liberté pour le producteur de choisir lui-même quel entrepreneur utiliser, quel type de drainage faire chez lui en fonction de ce que lui connaissait de son terrain.

Au niveau des intrants, Mme la Présidente, c'est un peu le même problème qu'on vit au niveau du Québec, on se retrouve avec des engrais chimiques, des pesticides souvent beaucoup plus chers que ce que d'autres producteurs vivent soit en Ontario ou aux États-Unis. Il faut se poser la question, Mme la Présidente, pourquoi. Au bout de la ligne, il y a une facture à tout ça. Ça fait que c'est important de se poser ce genre de question là pour arriver avec les vraies solutions.

Il y a l'autre problème qu'on vit régulièrement, Mme la Présidente, au niveau de l'industrie de l'agriculture, c'est le nombre de crises qu'on vit dans le monde agricole, puis ça n'a pas tendance à s'améliorer, compte tenu de la mondialisation qu'on vit. L'agriculture est ouverte au monde, actuellement, puis les producteurs ont à faire face à ces nouveaux défis là. Si les systèmes ne sont pas faits en sorte pour s'adapter rapidement, bien ça crée un problème, puis il faut éviter que ça laisse des dommages collatéraux qui sont extrêmement difficiles à récupérer.

Actuellement, il y a 60 % de l'industrie agricole qui vit grosso modo une crise. Il y a certains secteurs qui s'améliorent, mais ce qu'on voit aussi par le côté ? je l'ai mentionné tout à l'heure ? c'est l'augmentation immédiate du prix des intrants. Est-ce que nos systèmes font en sorte de contribuer à cette augmentation-là? Il faut se poser la question, là aussi, Mme la Présidente. Puis aussi c'est principalement la partie qui est sous gestion de l'offre qui est relativement stable, mais en même temps il y a une certaine précarité au niveau de ce secteur-là quand on regarde le transfert des entreprises, la valeur des entreprises qui est liée à la gestion de l'offre, les discussions au niveau de l'OMC. Je sais que dernièrement la dernière semaine, là, a été très difficile pour les discussions, là, au niveau des contingentements. Ça fait qu'il faut faire en sorte que, ce qui va bien, on ait tendance à l'améliorer. Par contre, ce qui va mal, il faut s'y attaquer immédiatement et le plus rapidement possible.

n(11 h 30)n

En agriculture, en général, la situation est majeure. Le problème des crises, c'est qu'on en règle une, puis il y en a une autre qui survient, puis il y en a plusieurs actuellement qui affectent l'agriculture, dont la crise porcine qu'on vit à peu près depuis deux ans, une baisse sans précédent du prix du porc conjuguée à une conjoncture difficile au niveau de la transformation, qui a fait en sorte que nos industries ont eu de la misère à être compétitives par rapport à ce qui vient de l'extérieur. Puis ça, actuellement ça laisse des dommages sérieux au monde agricole, notre secteur porcin qui n'était pas prêt à faire face justement à ce genre de crise là.

On a favorisé un développement à partir d'une orientation qui a été donnée en 1995, sous le Parti québécois. On a dit aux producteurs: Produisez. Les producteurs ont cette habitude-là, Mme la Présidente, que, quand on leur passe une commande, ils prennent ça au sérieux, puis ils y vont, puis ils développent, et ainsi de suite. Mais le problème, c'est qu'on ne leur avait pas donné le bon coffre d'outils, on n'avait pas prévu qu'il aurait pu y avoir des changements au niveau de la conjoncture économique. Puis c'est fondamentalement là, Mme la Présidente, où il faut être efficaces, il faut arriver à réussir à prévoir les choses, à prévoir des tendances pour faire en sorte que, lorsqu'un problème arrive, on puisse réagir rapidement.

Dans l'Écho-porc du 12 novembre dernier, on constate que le prix moyen du porc a atteint son plus bas niveau depuis janvier 1999. Il était, à cette époque-là, de 83 $ du 100 kg. C'était du jamais-vu. Ce qu'on s'aperçoit aujourd'hui, c'est qu'il y a une légère hausse, le prix est passé tout près à 140 $, entre 140 $ et 150 $, mais ce qu'on remarque en même temps, Mme la Présidente, c'est l'augmentation du prix des intrants. Vous n'êtes pas sans savoir que le prix du carburant augmente au Québec. Donc, ça a un impact majeur sur tout ce qui englobe l'opération d'une ferme agricole. Puis c'est extrêmement important de... Puis je parle en connaissance de cause à ce niveau-là. Quand on remplissait un réservoir de diesel pour 1 200 $ puis que c'est rendu à 5 000 $, ça a un impact à la fin sur les finances de l'entreprise. Ça fait qu'encore une fois il faut être extrêmement efficaces dans tout ce qu'on fait, mais en même temps il faut aussi que les gens qui gravitent autour de l'agriculture fassent le même exercice. Quand je vois des prix de porc en général ? puis je me réfère à des statistiques qui sont ici ? l'année dernière, où le prix du Québec est en bas du prix cible, on doit se poser des questions. Pourquoi? Puis ça, ça se reflète directement, Mme la Présidente, dans le coût qui est payé justement par La Financière agricole.

Est-ce que le rôle de La Financière, c'est de financer l'improductivité des fois de certaines chaînes de transformation? Je ne pense pas. La Financière, c'est là pour financer le monde agricole. Comment est-ce qu'on le fait pour que justement cette efficacité-là que les producteurs essaient d'amener à leurs entreprises soit aussi dans la chaîne de transformation pour faire en sorte que notre agriculture au Québec soit compétitive avec ce qui rentre de l'extérieur? Si on regarde l'évolution des revenus de vente estimés, on constate justement la baisse continuelle des revenus des producteurs québécois. Et, si on se compare aux États-Unis, la différence est frappante. J'entendais à l'occasion M. le ministre dire: Oui, bien on subventionne autant, sinon plus ici qu'aux États-Unis. C'est peut-être vrai, mais, la question: Est-ce qu'on subventionne bien?, je pense qu'il faut se la poser. Puis justement, au niveau du changement de principe au niveau de la gouvernance, je pense qu'on est en train de se poser ces questions-là.

Les libéraux nous disent qu'ils s'occupent de la situation financière dramatique des producteurs de porc. En tout cas, jusqu'à maintenant, je n'ai pas vu grand changements, à part que des interventions faites au niveau de l'ASRA. Pour le reste, je n'ai pas vu une grosse amélioration. Pourtant, on pouvait sentir bien avant les problèmes poindre à l'horizon ? c'est ce que je mentionnais tout à l'heure ? compte tenu de la hausse constante du dollar canadien. Comment ça se fait que les financiers l'ont vu venir? Une tendance, ça se dessine. Puis une tendance lourde, à un moment donné, ça indique que le prix s'en va là. Comment ça se fait qu'on n'a pas réagi encore une fois au bon moment? On a attendu d'être vraiment dans la crise majeure pour arriver à poser des gestes.

Cet été, le ministre prévoyait la nomination d'un mandataire dans la crise porcine pour évaluer et trouver des solutions à cette situation sans précédent. C'est ce que je viens de mentionner, Mme la Présidente: la crise est arrivée, on réagit un peu tard puis on n'a pas de résultat encore, justement, de cette démarche qui a été faite par M. Coulombe. Il a fallu plusieurs mois pour choisir le mandataire. Pourtant, on parlait d'une crise véritable. À ce que je sache, une crise, dans mon livre à moi, Mme la Présidente, ça veut dire «urgence», et, lorsque c'est urgent, il faut agir rapidement. Enfin, normalement, c'est ce qu'on fait, mais ça ne semble pas être le cas actuellement, au niveau du gouvernement libéral. Le mandataire n'a pu trouver de solution véritable. Puis là la fédération s'est prise en main et a mandaté M. Ostiguy pour essayer de trouver des solutions au problème. Que fait le ministre pendant ce temps-là? Ça va faire un an que le ministre a compris qu'il y a une crise. Pourtant, on fait encore du surplace dans le dossier.

Mme la Présidente, pouvez-vous rappeler à nos amis d'en face que, si la population les a envoyés à l'Assemblée nationale, c'est pour prendre des décisions et principalement lors des moments les plus difficiles? Vous savez, si on gérait nos entreprises agricoles de cette façon-là, la façon dont le gouvernement gère certains dossiers, ça ferait longtemps qu'on aurait fermé la porte, Mme la Présidente, pas pour se défiler en nommant des gens qui vont faire le travail pour eux. Est-ce que c'est ça, la méthode libérale? La crise est telle que le gouvernement doit agir immédiatement. On ne peut plus attendre. Qu'est-ce que le ministre va faire? On voit un petit mouvement avec le projet de loi n° 81. Est-ce que le ministre comprend que les gens sont à l'étape du désespoir actuellement, dans plusieurs secteurs d'activité agricole. Ce n'est pas évident de pratiquer l'agriculture actuellement, au Québec, pour plusieurs secteurs. On sait déjà que le milieu agricole est un secteur où la détresse psychologique est plus élevée. D'après les statistiques, c'est deux fois ce qu'on vit dans la population, au niveau de la détresse. Donc, il y a une cause à ça, puis souvent c'est relié, Mme la Présidente, souvent à la charge de travail et au revenu du secteur dans lequel le producteur pratique. Puis c'est pour ça que c'est important d'agir rapidement puis de se donner des bons outils. J'espère que le message va bien passer pour une fois, pour faire en sorte que ça ne laisse pas trop de dommages collatéraux lorsqu'un événement survient.

n(11 h 40)n

Pour véritablement faciliter la résolution de ce fléau, on doit faire en sorte que les fermes au Québec deviennent rentables. C'est la première solution à privilégier. Le gouvernement libéral agit toujours ainsi. Bien, les péquistes, c'est pas mal pareil. L'un ne va pas sans l'autre. C'est l'histoire de, on peut dire quasiment, The Odd Couple, mais deux vieux groupes qui se partagent le pouvoir depuis déjà longtemps. Ce qu'on s'est aperçu, c'est qu'ils attendent toujours que les crises soient majeures, presque insurmontables avant de faire quelque chose. Pourquoi le gouvernement attend toujours à la dernière minute avant d'agir? J'ai de la difficulté à comprendre ce bout-là. Parce que, je l'ai mentionné, en commission parlementaire sur l'étude des crédits, j'avais posé une question: Quel est le coût de l'inaction, justement?

Quel est le coût pour l'agriculture de faire en sorte qu'on laisse pourrir les dossiers? Je pense qu'on ne s'est pas arrêté à cette question-là jusqu'à maintenant, en termes monétaires et en termes sociaux aussi, pour le monde agricole. Est-ce que c'est pour avoir l'air de sauveur lorsqu'il se décide de faire quelque chose? Parce qu'on attend toujours à la dernière minute, puis là bien on arrive avec une espèce de saupoudrage qu'on fait régulièrement. On ne règle pas le problème, on vient mettre un plasteur souvent sur une plaie qui grandit constamment. Actuellement, les producteurs porcins sont majoritairement découragés. Une majorité d'entre eux n'ont plus la force de se battre. Habituellement, on les entend quand ça va mal, mais cette fois la crise est telle qu'ils ne voient même plus la façon de s'en sortir. Il n'y a plus beaucoup d'espoir sur le terrain. Que fait le gouvernement? Il attend. Il semble que le ministre ne voit pas l'urgence d'agir, Mme la Présidente. Non seulement ils sont confrontés à un coût de production plus élevé, parce qu'ici, au Québec, les intrants coûtent plus cher que chez les compétiteurs qui nous entourent, de plus, puis c'est ce que j'ai mentionné tout à l'heure, lorsqu'on vend nos produits, souvent on vend meilleur marché. Ça, c'est un problème majeur dont on va devoir trouver la solution.

Il y a aussi des producteurs qui envoient leurs porcs se faire abattre à l'extérieur de la province parce que souvent la capacité d'abattage est en constante diminution. Ça implique des coûts supplémentaires encore une fois que les producteurs doivent assumer et encore une fois, indirectement, que La Financière et le gouvernement doivent assumer. Est-ce normal? Je ne croirais pas. Il ne faut pas oublier dans tout ça que le gouvernement péquiste aussi était au pouvoir également quand la crise dans l'industrie du porc sévissait. Il n'y a pas eu vraiment de solution qui a été trouvée à cette époque-là non plus. Ce qui a été apporté, c'est une augmentation de la production sans véritable solution concrète, sans véritable coffre d'outils pour faire en sorte de maximiser la production dans son ensemble. Puis, quand je dis: Dans son ensemble, ça va juste s'il y avait une gestion intelligente des déjections animales. Ils ont essayé de trouver des solutions pour aider les producteurs, mais ils ont simplement échoué, Mme la Présidente. Ils n'ont pas fait mieux que les libéraux, car, aujourd'hui, c'est une crise des revenus plus forte que jamais que les producteurs québécois vivent. C'est eux, les péquistes, qui ont incité autant de producteurs dans l'aventure porcine, sans leur donner un véritable coffre d'outils pour développer cette production-là en harmonie avec le contexte agricole québécois et aussi avec l'environnement.

En résumé, dans cette industrie, les péquistes et les libéraux n'ont fait que pelleter les problèmes en avant, de telle sorte que les problèmes ont continué de s'aggraver, Mme la Présidente. Les libéraux, à ce niveau-là, on peut dire qu'ils sont quelque peu paresseux. Ce ne sont certainement pas eux qui vont mettre en place de grandes politiques qui changeront... l'agriculture au Québec, à la lumière de ce que j'ai vu depuis mon arrivée. Quand je les regarde, j'ai l'impression, Mme la Présidente, qu'ils jouent à la statue, le jeu qui consiste à rester immobile le plus longtemps possible.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): ...s'il vous plaît, je vous inviterais à la prudence et je vous demanderais de retirer le mot «paresseux», s'il vous plaît.

M. De Martin:...Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci.

M. De Martin: Et les PQ, les péquistes, eux ont des idées préhistoriques. Sortis tout droit de l'ère glaciaire, ils ne sont peut-être même pas décongelés encore. En passant, les mammouths, ça fait longtemps qu'on n'en abat plus au Québec.

Dans le secteur bovin, Mme la Présidente, ça ne va pas mieux. Il y a de sérieux problèmes au niveau de la production. Tout a commencé par la crise de la vache folle, encore une crise, et la fermeture de la frontière canado-américaine. Encore une fois, nous n'avions pas de mécanisme en place pour faire face à une telle éventualité, et la lenteur du gouvernement à agir dans ce dossier a causé des torts inacceptables à cette industrie, d'où l'importance, Mme la Présidente, d'avoir un plan B. Souvent, lorsqu'on fait une intervention, on se doit d'avoir des portes de sortie. Je reviens toujours à l'image de ma marmotte, parce qu'elle creuse un trou, elle se fabrique trois, quatre, cinq, six sorties pour ne pas être prise si jamais une des sorties est bloquée. Certains producteurs ont investi dans de petits abattoirs, dans un contexte d'urgence, et on en connaît le résultat aujourd'hui, des pertes énormes pour une industrie qui était déjà mal en point, des pertes énormes aussi pour les producteurs qui ont investi dans ces entreprises, financement inadéquat et souvent mal localisé soumis à des normes environnementales très sévères et à un taux de productivité aussi très bas si l'on se compare à nos compétiteurs, et ajoutons le dollar canadien au pair avec la devise américaine.

Tous ces faits-là qui ont conjuré en même temps ont fait en sorte de mettre l'industrie bovine dans une situation extrêmement précaire, puis encore une fois parce qu'on n'avait pas de mécanisme en place pour prévoir justement cette crise qui actuellement, au niveau du boeuf, est sans précédent aussi. Avant, on pouvait compter sur le levier qui était notre dollar canadien à faible valeur. Aujourd'hui, la donne a changé considérablement. Encore une fois, Mme la Présidente, ça a été notre incapacité à réagir, incapacité à réagir, comme gouvernement, à cette hausse du dollar là face à une production qui ne demandait qu'à avoir les bons outils pour se développer. Les abattoirs ayant accumulé d'énormes dettes n'ont eu d'autre choix que de se placer sous la loi de la protection de la faillite.

Et, par-dessus tout, Mme la Présidente, le dossier des matières à risques spécifiques est venu planter le dernier clou dans le cercueil de ces entreprises. Puis je veux insister un petit instant, justement, sur ces matières à risques spécifiques. On exige de nos producteurs qu'ils suivent des normes extrêmement sévères, alors que pour nos compétiteurs ces normes n'existent pas. Puis je relevais justement dans un article que j'ai lu pas plus tard que cette semaine que les Américains actuellement regardent l'implantation d'un système semblable au niveau des MRS mais qu'ils ne sont pas prêts à aller aussi loin que le programme qu'on a ici, au Canada, parce que ça impliquerait des coûts trop élevés pour l'industrie. Si les MRS impliquent des coûts trop élevés pour les Américains, comment nos producteurs arrivent à compétitionner quand on laisse justement rentrer au Canada, sans aucune restriction, les produits venant de l'extérieur qui viennent compétitionner directement les produits québécois, canadiens qui ont à subir justement ces normes-là?

n(11 h 50)n

En novembre dernier, dans Le Soleil, on pouvait lire, et je cite: «En raison de la force du dollar canadien [...] des coûts associés à la gestion des matières susceptibles de transmettre la maladie de la vache folle, il devient plus avantageux d'exporter [les] animaux vivants aux États-Unis ? Mme la Présidente ? pour ensuite importer des biftecks et des rôtis [ici, au Québec].» Il y a comme une aberration qui entoure ça. Comment se fait-il qu'un producteur qui exporte son boeuf aux États-Unis reçoive un montant par tête plus élevé qu'ici? Comment se fait-il qu'on importe cette viande découpée au Canada et qu'elle soit tout de même moins chère que si on fait tout ça ici? Pourquoi on ne peut pas le faire dans nos installations, sur notre territoire, tout en faisant travailler notre monde à un prix qui est valable?

Ceci, c'est important, Mme la Présidente, parce que justement, lorsqu'il y a des coûts supplémentaires reliés au transport des animaux vers, entre autres, ici, les États-Unis, pour le bouvillon d'abattage, c'est encore La Financière agricole qui en fait les frais parce que les coûts de production en sont augmentés d'autant. Est-ce que c'est normal qu'on subventionne des emplois à l'extérieur du Québec? C'est le genre de question que je me pose, Mme la Présidente, puis on va se devoir de trouver des réponses et très rapidement. Après quatre ans et demi de crise, la situation est encore problématique parce que, dans le bouvillon d'abattage au Québec, c'est l'abattage justement qui fait défaut. Comment se fait-il qu'on n'est pas capable d'investir en partenariat avec les groupes pour faire en sorte que ces animaux-là soient abattus ici, au Québec, Mme la Présidente, et aussi créent de l'emploi dans les régions, des régions bien ciblées, et que ce genre d'exercice là soit un succès? Comment se fait-il, Mme la Présidente, qu'on ait de la difficulté à réaliser ça? Parce qu'en bout de compte c'est toujours les producteurs qui font les frais du système qui vacille de plus en plus.

La semaine dernière justement, j'ai approché le ministre avec une autre petite problématique qui a été portée à mon attention, justement, Mme la Présidente, c'est une maladie qui suscite dans certains troupeaux, au Québec, actuellement... Il y aurait un microbe qui infecte les bêtes, le M. bovis entre autres. Elle se transmet assez facilement. Et, lorsque le microbe se développe, la bête a des symptômes ressemblant à une pneumonie et une mammite en même temps. Donc, lorsqu'elle infecte un troupeau, c'est le troupeau entier généralement qui en est affecté. Encore une fois, comment se fait-il qu'on ne soit pas plus au courant, que ce soient encore les producteurs qui amènent ça à notre attention? Puis d'autant plus ce que j'ai eu comme information, c'est qu'il n'y aurait rien à faire pour justement, pour sauver les bêtes infectées.

Donc, c'est un dossier extrêmement important, puis il y a quelques producteurs au Québec, actuellement, qui encourent des pertes énormes justement par cette infectation-là, ce qui... à court ou moyen terme, plusieurs pourraient voir leurs troupeaux atteints par cette maladie. Parce que les animaux, ça se promène souvent d'une ferme à l'autre. Ce n'est pas actuellement une maladie à déclaration obligatoire, mais il reste qu'elle est en train de faire des dommages dans plusieurs fermes au Québec. Justement, on parlait d'une production qui allait bien jusqu'à maintenant. Les producteurs de lait ont communiqué avec moi et ils sont vraiment inquiets. Je demande au ministre d'être proactif dans ce dossier. Est-ce qu'il considère pertinent de rendre cette maladie à déclaration obligatoire? Je pense que la question se pose.

J'ai mentionné au début de mon intervention le taux de détresse. Le problème financier augmente justement le stress dans des entreprises agricoles. Comment est-ce qu'un producteur arrive à gérer les investissements d'une vie face à une crise? Est-ce qu'il a le soutien adéquat? Comment le producteur arrive à gérer quand il a travaillé toute une vie absolument pour rien? On en voit. Il y en a plusieurs actuellement qui font ce constat.

Quand je reviens à un autre secteur d'activité qui est l'acériculture, l'an passé, on vivait un certain problème au niveau des finances en acériculture. Cette année, on s'aperçoit que c'est la pire récolte en 10 ans que les producteurs ont à supporter. Pourtant, l'an passé, on parlait possiblement d'un programme d'assurance récolte. Il n'y a encore rien qui s'est passé à ce niveau-là, Mme la Présidente. Est-ce qu'on va attendre encore que ces producteurs-là sortent, prennent le chemin puis viennent manifester, pour commencer à bouger? Ça donne cette impression-là. Ce que j'aimerais savoir: Est-ce que le ministre a un plan face à cette situation? Est-ce qu'il a une idée? Puis combien ça pourrait coûter de mettre en place un système d'assurance récolte en acériculture et aussi, en même temps, tant qu'à y être, de faire le bilan, comment ça pourrait coûter, l'inaction dans ce dossier-là aussi?

J'aimerais toucher en même temps à un autre petit dossier ? parce que l'agriculture, ça englobe plusieurs domaines ? le phénomène des algues bleues, en même temps. Trop souvent, cette problématique est mise sur le dos des agriculteurs. Pourtant, actuellement, plusieurs font déjà beaucoup d'efforts de leur côté pour faire en sorte que les polluants ne se retrouvent pas dans les cours d'eau. Il faut faire attention d'éviter de mettre tous les problèmes au niveau des algues bleues sur le dos de l'agriculture. Il y a ? ce que je pense ? sur tous les territoires, de l'activité humaine très intense. Il faut le regarder, ce problème-là, dans sa globalité, Mme la Présidente. Il y a plusieurs phénomènes qui peuvent faire en sorte qu'on voie la prolifération de ces algues. Puis encore une fois c'est en partenariat, c'est ensemble, avec le monde agricole, le monde municipal et le gouvernement, qu'on va trouver de véritables solutions à ce problème. Donc, ça invite un véritable partenariat entre les différents ministères, donc possiblement un certain décloisonnement éventuel entre les Affaires municipales, l'Agriculture et le ministère de l'Environnement qui souvent fait cavalier seul dans plusieurs dossiers.

Un autre problème que j'ai soulevé au niveau de La Financière, c'est au niveau du veau de lait et du veau de grain qui se vendent à l'épicerie environ le même prix, puis pourtant le producteur de veau de lait reçoit 1,70 $ de plus que le producteur de veau de grain. Ça vient illustrer, Mme la Présidente, cette différence qu'on peut avoir souvent dans les prix pour certains aliments. Puis la question qu'on doit se poser: Est-ce que ce n'est pas La Financière encore une fois qui fait les frais de cette différence-là? Parce qu'on va prendre la production de veau de lait qui est hautement supportée par La Financière agricole, tellement supportée qu'ils en sont venus à mettre en place un système d'urgence pour essayer de réparer les pots cassés, ce qui fait que la situation de ces producteurs de veau de grain là est extrêmement difficile actuellement. Encore une fois, est-ce que le ministre a un plan pour aider cette industrie?

J'aimerais revenir aussi sur un dossier que l'on a parlé la semaine passée, et ça fait un bout de temps que je questionne le ministre et mes collègues à ce niveau-là, c'est au niveau de l'industrie du cheval au Québec, Mme la Présidente, qui est un moteur de développement économique régional incroyable. Puis, comme par hasard, il y a à peu près juste ici, au Québec, que ça ne fonctionne pas. J'aimerais savoir pourquoi.

n(12 heures)n

Cet été, le ministre invitait la population à manger des fruits et des légumes québécois. Il disait à l'époque: En ajoutant des produits alimentaires québécois à leurs assiettes, les consommateurs participent directement au développement de notre secteur bioalimentaire. Et c'est vrai. Ainsi, de nombreux emplois seront maintenus dans nos régions, et une véritable forme de reconnaissance sera exprimée envers les producteurs. Il ajoutait: L'alimentation de proximité gagne en popularité, et les gens veulent connaître la provenance des aliments qu'ils consomment. Et c'est vrai, ça aussi.

Mais est-ce qu'il s'agit d'une alimentation de proximité, Mme la Présidente, lorsqu'on envoie nos porcs et nos boeufs se faire abattre dans d'autres provinces et ensuite on les ramène ici? Les gens veulent bien manger... québécois. Pour ça, ils ont besoin de trouver les produits québécois. Et ce n'est pas une mince tâche, mais il faut s'y attaquer. Qu'attend le gouvernement pour agir? Lui-même est conscient que la population veut connaître la provenance des aliments, les différents organismes sur le territoire veulent connaître la provenance des aliments, et le consommateur aussi, Mme la Présidente, veut savoir qu'est-ce qu'il y a dans son assiette et d'où ça vient.

Le gouvernement peut créer un logo indiquant que ce produit-là vient... et a été transformé au Québec. Par cette mesure simple, Mme la Présidente, on peut aider en partie, j'en conviens, mais on peut aider tout de même les agriculteurs et les transformateurs québécois à améliorer leurs revenus, à aller chercher la majeure partie du revenu via la chaîne de transformation. Les Québécois veulent soutenir les agriculteurs. Actuellement, le gouvernement ne facilite pas la tâche, Mme la Présidente. Le ministre sait très bien que les normes québécoises et canadiennes sont plus élevées souvent que des produits importés, et ça, ça implique des coûts supplémentaires pour nos producteurs. Et en général les Québécois apprécient ces normes de qualité. Cependant, ils ne peuvent être certains qu'ils choisissent des produits régis par ces normes. D'ailleurs, vous avez vu dernièrement le gouvernement fédéral qui commence à bouger dans ce sens-là. Pourquoi le gouvernement ne donne pas une chance aux producteurs d'avoir une plus-value visible, ce qui contribuerait à alléger justement le support financier de La Financière? Pourquoi le gouvernement n'exige pas du gouvernement fédéral que les produits importés soient soumis aux mêmes normes que les normes canadiennes et québécoises? C'est un principe très simple, Mme la Présidente, qui s'appelle la réciprocité.

Et je reviens sur ce qu'a dit le ministre il y a quelques mois, les gens veulent connaître la provenance des aliments qu'ils consomment. Est-ce qu'il faut comprendre que la population le veut? Mais le gouvernement, lui, est-ce qu'il est prêt à agir? Il me semble que c'est long, il attend actuellement. Ça, on appelle ça de l'immobiliste, Mme la Présidente, surtout quand on parle d'aide qui entre dans les boîtes vertes de l'OMC.

Est-ce que le ministre peut nous dire pourquoi il a réussi à être dépassé par le gouvernement fédéral qui, lui, fera en sorte que clairement il sera possible d'identifier si un produit est véritablement canadien? Le gouvernement doit passer à l'action pour mettre le Québec en première ligne vis-à-vis les consommateurs. Ça passe par la première, deuxième et troisième transformation et, si possible, ça doit être fait à proximité des producteurs, Mme la Présidente. Le ministre nous a dit, comme je le mentionnais au tout début, que le gouvernement subventionnait beaucoup l'agriculture québécoise, comparé à ce qui se fait ailleurs. Il nous disait que le gouvernement du Québec, les subventions sont bien au-delà du farm bill américain. Si l'aide du gouvernement est plus importante, elle est visiblement moins efficace.

Que se passe-t-il comparativement aux autres provinces et de nos voisins du Sud? Comment se fait-il que notre revenu net chute catastrophiquement et qu'il augmente aux États-Unis et qui, selon des chiffres du ministre, subventionnent moins que nous? Comment le gouvernement du Québec dépense l'argent? Est-ce que le ministre se pose des questions sur la qualité des interventions de son ministère?

Dans le rapport Pronovost, il était indiqué que le ministère était non performant. Ça, ça ne vient pas de moi, ça vient des commissaires qui ont fait l'étude, le rapport. C'est bien beau, dépenser de l'argent; il faut le dépenser judicieusement et il faut qu'il se rende à l'agriculteur. Le gouvernement doit mettre en place des politiques pour supporter toutes les productions, et le faire avant que la filière ne tombe en crise, Mme la Présidente, et avoir des programmes adaptés à la réalité 2008, et avoir des programmes adaptés aux règles qui régissent la mondialisation aussi.

Il y a aussi un autre débat, l'accès aux rivières et les bandes riveraines sur les entreprises agricoles, un autre dossier actuellement où on a énormément de difficultés, on a énormément de difficultés à gérer. Les producteurs sont propriétaires de ces bandes riveraines là, j'en conviens, et ils doivent faire des efforts pour les protéger, mais en même temps la protection de ces cours d'eau là va faire en sorte que ça va coûter moins cher à la société pour épurer l'eau qu'elle consomme. Donc, le gouvernement doit trouver une solution pour faire en sorte que les producteurs qui justement appliquent des règles de saine gestion au niveau de leurs bandes riveraines, qu'ils en retirent un certain bénéfice. Parce qu'actuellement ces bandes-là sont quand même soumises à la taxation municipale, Mme la Présidente, et, si ça ne rapporte pas au secteur agricole, ça va être extrêmement difficile d'avancer dans ce dossier.

Il y a aussi en même temps, je l'ai mentionné au tout début, la valorisation des déjections agricoles. Ça aussi, ça va être un dossier extrêmement important pour faire en sorte de retirer des revenus supplémentaires pour les entreprises animales, le porc, le boeuf, le veau de lait, veau de grain, voir la possibilité de fabriquer de l'énergie quand c'est possible avec des déjections animales, voir la possibilité aussi de fabriquer de l'engrais avec ces déjections-là, de l'engrais qui pourrait être réutilisé par les producteurs du Québec. Donc, on a un bon exemple de ce qui... Mme la Présidente, puis en même temps on a un exemple aussi de produits à valeur ajoutée qu'on pourrait avoir sur nos fermes. Au lieu d'importer du phosphore, on en a de disponible sur nos fermes. Si c'est bien développé, on pourrait apporter une valeur ajoutée à plusieurs entreprises agricoles, donc moins de support de l'État en bout de ligne.

Au niveau de la relève et de la main-d'oeuvre, ce qu'on s'aperçoit actuellement, c'est qu'il y a un manque criant de main-d'oeuvre dans le monde agricole. Il y a des exercices qui se font sur le terrain pour essayer d'avoir... mais l'agriculture est en compétition directe avec d'autres secteurs d'activité qui ont la capacité de rémunérer leurs travailleurs à un niveau que l'agriculture ne le peut pas. Donc, ça aussi, ça crée des contraintes.

Qu'est-ce que le gouvernement fait pour pallier à cette situation-là? Actuellement, si vous êtes un jeune, investir dans une entreprise agricole, c'est s'endetter à très long terme, Mme la Présidente. Tant qu'à investir dans un domaine, aussi bien que ce soit dans un secteur rentable, d'où l'importance de rendre l'agriculture rentable au Québec pour solutionner en même temps le problème de transfert des entreprises agricoles.

n(12 h 10)n

Cette situation n'aide en rien la relève. Plusieurs agriculteurs préfèrent démanteler leur ferme plutôt que de la vendre à leurs enfants, Mme la Présidente, et c'est un signe de l'importance du malaise. Ce que le secteur a besoin, c'est une véritable politique de transfert des entreprises agricoles, une politique qui assurera la continuité du secteur. Bref, une politique avec une vision à long terme, pas une politique de saupoudrage. Il faut regarder encore une fois l'ensemble de l'entreprise pour arriver à trouver vraiment la solution.

Avec l'âge moyen qui est de 49,3 ans, ils ne sont plus jeunes, nos agriculteurs, et ça continue d'augmenter. Donc, sérieux problème, d'où l'importance d'une bonne formation adaptée au secteur. Le mentorat aussi: inciter les agriculteurs qui se retirent à accompagner les plus jeunes. Faire la promotion aussi du mode de vie parce que l'agriculture, en même temps, c'est un mode de vie, ça s'enseigne. L'entrepreneurship, bonne formation, transmission des valeurs, tout ça, ça doit faire partie d'un plan, d'une vision bien concrète. Il est temps que le ministre fasse ce pour quoi il est payé, qu'il prenne des décisions afin de réduire l'impact des nombreuses crises que le secteur vit. Le ministre doit rendre cette industrie attrayante pour les jeunes. Malgré tout, à travers tout ça, de nombreux agriculteurs innovent dans plusieurs domaines. Le gouvernement doit aussi investir dans la recherche, le développement, des secteurs névralgiques qui ont été abandonnés, dans le marketing, pour faire en sorte que le marché paie une plus grande part du marché pour nos produits.

Et aussi un point extrêmement important, la protection du territoire agricole, qui a été laissée de côté, Mme la Présidente. On est passé de 3 % à 2 % de territoire propre à l'agriculture au Québec, et la tendance lourde se maintient pour du dézonage de nos meilleures terres. Encore une fois, le ministre doit être proactif à ce niveau-là pour éviter qu'on perde nos meilleures terres et qu'on ait à aller défricher du terrain qui souvent n'est pas propice au développement de l'agriculture.

Comme à chaque fois que le gouvernement ne sait plus quoi faire, créé une commission, d'où le mandat de M. Jean Pronovost pour revoir l'ensemble de l'industrie. Ce rapport est le premier depuis le rapport Héon en 1955, donc 53 ans pour revoir nos façons de faire, ce qui est complètement inconcevable, Mme la Présidente. Le gouvernement a décidé d'obtenir un nouveau topo. C'était le temps. Après 18 mois de consultation, dépôt du rapport, le ministre nous annonce fièrement qu'il déposera quelque chose dans deux ans. Les agriculteurs et les agricultrices auront donc dû attendre près de quatre ans pour que le gouvernement leur donne une nouvelle politique qui, on l'espère, répondra aux réalités d'aujourd'hui.

Dans l'ensemble, le rapport Pronovost fait un bon constat de la situation, et la majorité des recommandations vont de soi. Un des mandats de La Financière agricole est de protéger les revenus en vue de favoriser la réussite et la pérennité des entreprises québécoises. Est-ce que les outils sont adéquats? Est-ce que ces outils sont suffisants? Est-ce que les agriculteurs du Québec peuvent savoir ce qui se passe au gouvernement? Est-ce que le mandat de La Financière a été renouvelé? Pour une année. Pour la suite, le ministre prévoit quoi? Quels sont les montants qui seront remis à La Financière agricole? Le contrat durera combien de temps? Est-ce que le ministre nous consultera sur ce sujet? Est-ce qu'on peut simplement, à cette étape-ci, savoir est-ce que le ministre en a au moins une, idée, à ce niveau-là?

Ce qu'on sait, Mme la Présidente, c'est que La Financière agricole fait régulièrement des déficits. Que compte faire le ministre au niveau de cette situation? Il y a une mentalité au gouvernement au niveau de l'agriculture, c'est d'être simplement réactif. Il faut savoir prévoir à l'avance, prévoir les coups, prévoir les problématiques. Tout le monde au Québec avait observé la montée du dollar canadien. On le voyait, la valeur augmentait depuis 2001, et ça monte encore. Il a attendu, encore une crise. La Financière a un rôle des plus importants pour les agriculteurs. Sa signature corporative est même toujours là quand ça compte, mais il faut quand même avoir les moyens et les outils pour que la présence ait un impact.

En conclusion, Mme la Présidente, on voit que La Financière a de la difficulté. La gouvernance ne peut pas tout régler, mais c'est un pas dans la bonne direction. Il ne faut surtout pas croire que c'est une solution magique. Nous sommes pour le principe, mais nous avons encore des questions pour le ministre. Le problème que je vois, c'est que les nominations partisanes pourraient être toujours présentes au niveau du conseil d'administration. Les deux vieux partis peuvent bien s'époumoner lorsque le gouvernement en fait, c'est qu'ils oublient qu'ils font exactement la même chose lorsqu'ils sont au pouvoir. Est-ce que le Québec est mieux servi par ces nominations partisanes? Je ne crois pas, Mme la Présidente. On va se devoir de favoriser la compétence au niveau de ce conseil. Les deux vieux partis peuvent bien tenter de nous faire croire, ainsi qu'à la population, qu'une fois nommée la personne devient totalement neutre et indépendante, j'ai de la difficulté à croire qu'un employé d'un parti politique, qu'un ancien contributeur, qu'un ancien candidat, qu'un ancien député, qu'un ancien ministre, qu'un ancien ami devient sans couleur politique, Mme la Présidente. Une fois le contrat signé, est-il toujours la meilleure personne pour le poste? Le gouvernement a le devoir de rendre ce processus neutre, et ça, pour le grand bien des Québécois. Est-ce que le ministre serait prêt à ce que le président soit nommé par l'Assemblée nationale? C'est le défi que je lui lance aujourd'hui.

J'ai aussi des réserves au fait d'augmenter le nombre de membres du conseil d'administration. Pendant qu'on est ici à parler de structure et d'organisation, La Financière agricole a encore un déficit, et les producteurs n'ont pas plus d'argent dans leurs poches. Ça ne règle donc pas le problème de rentabilité des fermes, il reste beaucoup de travail à faire, Mme la Présidente.

Le ministre devra cesser de faire du saupoudrage à travers le Québec et travailler. Finalement, oui à un changement sur la gouvernance, mais ce changement doit faire face à un système de gestion sain qui sera capable de relever les défis de demain pour le monde agricole québécois, Mme la Présidente. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de Huntingdon. Je cède maintenant la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'agriculture, des pêcheries et d'alimentation. M. le député.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je suis, à mon tour, très heureux d'avoir à intervenir, à ce stade de l'adoption de principe, sur le projet de loi n° 81 qui est un projet de loi, on le sait, qui vise la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec. Donc, cette institution très bien vue dans le monde agricole et qui fait la jalousie partout ailleurs, je dirais, au Canada et en Amérique du Nord a à peine sept ans, et il faut déjà penser à moderniser.

Mme la Présidente, vous savez que je trouve... je suis heureux, et, pour moi, c'est toujours un privilège que j'ai d'intervenir sur ces sujets, qui me sont chers et qui me rejoignent. Et je sais, Mme la Présidente, puisque vous avez été présidente de la commission, de cette Commission sur l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, à quel point ces sujets vous tiennent à coeur. Évidemment, ces sujets-là qui nous rejoignent, ce sont évidemment l'agriculture en général et les pêcheries, l'alimentation. Et, Mme la Présidente, dans cette Chambre, j'ai déjà parlé de ces deux métiers comme étant parmi les plus anciens du monde, exercés encore aujourd'hui parce qu'essentiels justement à notre existence, à notre survie sur la planète. Nourrir le monde, voilà, Mme la Présidente, la noblesse des gestes que posent chaque matin, dans toutes les régions du Québec, mais aussi ailleurs sur la planète, les agriculteurs, avec pour résultat d'apporter sur la table des Québécois des produits frais, bons et au moindre coût possible. Voilà la noblesse des gestes qui sont posés chaque matin par ces gens.

n(12 h 20)n

Au Québec, Mme la Présidente, ce ne sont plus que 4 % à 5 % de la population active qui pratiquent ces métiers dont nous parlons et qui réussissent l'exploit de nourrir le Québec de belle façon, on le sait. Dans certains pays, Mme la Présidente, ce sont encore 50 %, 60 %, 70 % de la population active qui sont dirigés vers ces pratiques de l'agriculture, ces activités que nous appelons premières. Et cette population donc, même à 50 %, 60 %, 70 %, très souvent ça ne suffit pas, puisqu'on sait qu'il y a des pays où justement il y a encore de la misère, de la famine.

L'agriculture a changé, Mme la Présidente. Depuis le temps des mammouths, dont parlait le député de Huntingdon, et depuis le temps où on trouvait des libéraux moins vaillants, l'agriculture a changé. De toute évidence, bien sûr, ces changements aussi, puisque ce sont les changements de l'industrialisation, entraînent quelques problématiques, comme tout ce qui touche au développement. Mais, Mme la Présidente, une chose est claire: la crise alimentaire mondiale que nous connaissons maintenant, qui affecte déjà une quinzaine de pays dans le monde où justement... On rencontre même des émeutes, Mme la Présidente, actuellement dans certaines contrées, dans certains pays. Je crois que cette crise forcera des prises de conscience sur des concepts extrêmement importants, modernes, comme, par exemple, la souveraineté alimentaire, des prises de conscience sur les impacts de décisions irréfléchies, opportunistes, à tout le moins, Mme la Présidente, comme celles ayant amené certains pays à opter pour de l'éthanol à partir de certaines productions agricoles végétales, à partir de maïs, par exemple, avec des pourcentages, avec des objectifs de pourcentage de ce type d'énergie mêlé à d'autres types d'énergie, fossiles entre autres, comme aux États-Unis.

Ces décisions, que nous avons prises aussi au Canada et au Québec en partie, ont une poussée extraordinaire sur les prix, et ça a des impacts majeurs. Et cette crise alimentaire mondiale aura aussi... amènera des prises de position extrêmement importantes sur les décisions de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, qui ont forcé certains pays en voie de développement à axer leurs productions agricoles sur les exportations au lieu de tâcher de nourrir leur monde d'abord, et ça a des impacts considérables, avec les résultats qu'on connaît.

Ça amènera aussi, Mme la Présidente, je le souhaite, des prises de conscience sur, par exemple, les négociations à l'OMC sur la gestion de l'offre, et je crois... Et c'est ce que je souhaite, Mme la Présidente, qu'on se rende compte que l'agroalimentaire ne peut pas être considéré uniquement comme un «big business», comme une business comme les autres. Ça ne peut pas être traité comme tel, Mme la Présidente. Il s'agit d'activités ancestrales, traditionnelles, mais qui ont changé, qui sont devenues modernes, mais qui demeurent des activités essentielles à notre survie sur la planète. Et c'est inacceptable, à l'époque où nous vivons, que nous ayons des crises comme la crise alimentaire.

Mme la Présidente, au Québec, l'agriculture n'est pas un secteur comme les autres. Tous les pays soutiennent leur agriculture, c'est un fait. Au Québec, le gouvernement prétend qu'il la soutient assez. Les agriculteurs prétendent qu'ailleurs ils sont soutenus davantage, comme aux États-Unis, ce qui est vrai, comme en Europe, ce qui est vrai, d'autres façons, d'autres mesures. Mais une chose est certaine, ce qu'il importe, c'est de s'assurer que ce soutien qui va aux agriculteurs et aux agricultrices soit acceptable justement en regard des échanges commerciaux sur les marchés internationaux. L'agriculteur... et l'agriculture, Mme la Présidente, au Québec, ne fut jamais considérée comme un secteur comme les autres.

Et ne vous inquiétez pas, je vais arriver au projet de loi n° 81, Mme la Présidente. Le projet de loi n° 81 justement s'inscrit, s'insère dans ce que l'on veut se donner comme outils pour faire en sorte que les agriculteurs et les agricultrices du Québec, lorsqu'ils se retournent vers le gouvernement du Québec, se retournent vers le gouvernement, qui s'occupe d'eux, qui les comprend, qui les accompagne et qui est leur vis-à-vis et leur porte-parole.

Mme la Présidente, de tout temps, au Québec, malgré le fait que l'agriculture est un pouvoir partagé, un pouvoir partagé dans la Constitution canadienne, de tout temps les agriculteurs et les agricultrices du Québec se sont tournés vers le gouvernement du Québec, et celui-ci à mon sens avait toujours assumé ses responsabilités, entre autres jusqu'à temps qu'arrivent à mon sens 2003 et la signature du cadre stratégique agricole canadien. Là, il y a eu un changement extrêmement important.

Écoutez, Mme la Présidente, on a déjà vu même un premier ministre du Québec agronome, agriculteur, qui avait conservé le ministère de l'Agriculture. C'était un libéral aussi, en passant, et c'est dans le comté de Kamouraska, oui, c'est ça, le député... le ministre des Ressources naturelles, d'ailleurs. Il s'agit bien sûr de Godbout, tout le monde l'a reconnu. Mais donc, jusqu'au cadre stratégique agricole canadien qui a été signé, à mon sens, sans prendre toutes les précautions, on a, là, perdu un petit peu de cette responsabilité, on a manqué un peu dans le fait qu'on ne s'est pas assuré de suffisamment de flexibilité pour pouvoir maintenir les programmes québécois qu'on destinait à nos agriculteurs. On s'est comme mis sous la coupole d'un programme pancanadien, qui s'appelle le programme canadien de stabilisation agricole, dans lequel le gouvernement canadien, pour mettre ses sous, exige que les provinces mettent la contrepartie à 40 %, ce qui force le gouvernement du Québec et son outil qu'est La Financière agricole à évidemment mettre la pédale douce sur ses propres programmes pour pouvoir ? passez-moi l'expression ? accoter les programmes canadiens, et ça nous pose des problèmes. Ça nous pose beaucoup de problèmes et ça cause une partie du déficit de La Financière agricole, Mme la Présidente.

Donc, tout ce détour que j'ai pris, Mme la Présidente, c'est pour mieux comprendre l'impact du projet de loi n° 81, puisque ce projet de loi parle d'un outil extraordinaire de partenariat que s'est donné le Québec avec son monde agricole pour pouvoir justement éviter ou pour pouvoir plus facilement rencontrer les difficultés dont parlait dans son long détour qu'a fait le député de Huntingdon, pour qui j'ai beaucoup de respect, Mme la Présidente... Puisqu'il y a dans cette Assemblée le député de Huntingdon qui est un agriculteur, le député de Beauce-Nord, le député de Maskinongé, il y en a dans toutes les formations politiques. J'ai beaucoup de respect, mais c'est un long détour. À un moment donné, j'ai pensé, Mme la Présidente, qu'il allait nous dire qu'il était contre le principe du projet de loi n° 81, mais heureusement, dans la conclusion, on a vu que finalement il allait l'appuyer.

Comme, par exemple, dans beaucoup de situations où il disait au ministre qu'il était temps qu'il se mette à travailler pour le salaire qu'il avait, je me suis dit: Finalement, ces gens-là n'ont pas pu voter contre le budget, c'est incroyable. Mais, ceci étant dit, j'ai quand même beaucoup de respect pour le député de Huntingdon. Et dans le fond ce qui est important dans le projet de loi n° 81, et ce qui est en cause, et ce pour quoi, Mme la Présidente, je veux prendre le temps d'en parler, c'est la question du partenariat qui a été développé avec le monde agricole. Parce qu'avant la signature du cadre stratégique agricole canadien le Québec avait développé ce partenariat unique avec les agriculteurs, et La Financière est au centre de ce partenariat.

Mme la Présidente, je ne veux pas me citer, mais je veux quand même parler que La Financière agricole est entrée en fonction, en opération en avril 2001. Et, à ce moment-là, je faisais mes classes au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, et nous n'étions pas peu fiers de cette mise en place de La Financière agricole du Québec. Et je peux vous dire que ce qu'on disait de La Financière à l'époque, c'était que c'était une révolution dans le monde agricole. On disait que c'était un modèle de partenariat unique. Et on ajoutait: C'est un dossier extrêmement important pour les productrices et les producteurs agricoles. Et les gens me disaient: Il faut régler ce problème. Malgré les quelques réticences des porte-parole du Parti libéral à l'époque, tout le monde comprenait qu'on devait aller vers cette et dans cette direction. La mise en oeuvre de La Financière agricole du Québec résultait, Mme la Présidente, d'un processus de modernisation des outils financiers destinés au secteur agricole qui avait été amorcé au moment de la conférence sur l'agroalimentaire à Saint-Hyacinthe, en 1998.

n(12 h 30)n

Et, Mme la Présidente, la mission de La Financière agricole du Québec, c'est celle de soutenir et de promouvoir, dans une perspective de développement durable, le développement des secteurs agricole et agroalimentaire afin bien sûr de contribuer à l'essor économique du Québec et à la création d'emplois. Cette société, La Financière, doit participer à la croissance des entreprises en mettant à la disposition des produits, des services en matière de protection du revenu, d'assurance et de financement agricole, des programmes adaptés à la gestion des risques inhérents bien sûr au secteur agricole.

Et nous avions, à ce moment-là, Mme la Présidente, je tiens à le faire parce que... Et on pourrait... Je ne veux pas réveiller les mammouths, puisqu'on ne peut plus nourrir la population du globe avec ces animaux vénérables et qui datent d'une autre époque glaciaire, Mme la Présidente, mais, le Parti québécois, nous n'avons jamais eu peur de montrer notre soutien, notre volonté, notre désir de faire en sorte de protéger le patrimoine, qui fait partie non seulement de la réalité économique de chacune des régions du Québec, mais de protéger ce patrimoine qui permet à 4 %, 5 % de la population et dans toutes les régions du Québec... Non seulement l'agriculture, mais l'agroalimentaire, à savoir la transformation de notre production agricole dans la valeur ajoutée, ça représente au moins 10 % à 12 % de tous les emplois dans toutes les régions du Québec, incluant les grands centres urbains où on a une concentration de la transformation alimentaire. Le Parti québécois n'a jamais hésité à soutenir les agriculteurs du Québec, et La Financière est un exemple, Mme la Présidente.

Mais, au moment où nous mettions en place La Financière agricole, nous donnions un coup de barre extrêmement important dans le virage agroenvironnemental, avec le programme Prime-vert, qui a donné ses fruits, qui permet au ministre maintenant d'aller vers la pollution diffuse, vers d'autres secteurs. Mais c'était à l'époque un tournant très important. Nous avons mis, dans La Financière agricole, à un article, l'obligation de regarder l'écoconditionnalité. C'était dans l'entente sur La Financière agricole du Québec, Mme la Présidente. C'est donc un outil extrêmement moderne.

Mais le Parti québécois avait aussi donné un coup de barre sur la traçabilité en créant Agri-Traçabilité, qui nous permet d'être en avance sur l'ensemble non seulement des provinces canadiennes, mais de l'Amérique du Nord, puisqu'ils nous regardent. Et j'ai vu des ministres de l'Agriculture libéraux, dans des rencontres d'hommes politiques et de parlementaires américains, faire la promotion d'un outil comme Agri-Traçabilité dans le secteur bovin en particulier mais qui est encore à développer. Je pense aux normes HACCP où on a investi, je pense à d'autres.

Et bien sûr, bien sûr, Mme la Présidente, il faut parler de cette Loi sur la protection du territoire agricole du Québec. Mais là n'est pas la question. Ce qui est à voir dans le projet de loi n° 81, Mme la Présidente, ce qu'il faut et ce qui doit être au coeur de nos préoccupations, c'est la question de l'existence même de ce partenariat. Est-ce que le partenariat va se retrouver dans la nouvelle Financière qui répondra aux normes de la Loi sur la transparence et de la loi sur la gérance des organismes... la gouvernance des organismes de l'État, Mme la Présidente? C'est une préoccupation importante.

Il ne faut pas se faire de cachette, Mme la Présidente. À écouter le député d'Huntingdon, on pourrait croire que tout va mal dans le secteur agricole. Je crois qu'il y a des nuances à apporter. Ce qu'il est important de comprendre du modèle de La Financière agricole, c'est que le gouvernement du Québec, en signant ce partenariat, il s'est assis avec le monde agricole et il a dit: Voilà la situation.

En 1998-1999, ça n'allait pas très bien, Mme la Présidente, les cochons se retrouvaient sur l'autoroute non pas pour la direction des États-Unis, mais pour des manifestations parce que le système de protection du revenu des producteurs porcins n'était pas suffisant pour faire face aux difficultés et à la crise, comme la crise qu'on rencontre actuellement. Et ce partenariat, c'était le suivant, c'était de dire: Quand ça va mal en agriculture, ça coûte cher au gouvernement. C'est simple, le gouvernement paie une partie des programmes de soutien des revenus. Alors, La Financière agricole, c'était de dire au monde agricole: Voilà, au cours des 10 dernières années, ça a coûté en moyenne 300 millions au gouvernement du Québec. Les mauvaises années agricoles, ça coûtait 500, les bonnes années agricoles, ça coûtait moins; un dans l'autre, 300 millions par année.

Le gouvernement du Québec à l'époque s'est engagé avec le monde agricole en leur disant: Nous vous garantissons que, pour les sept prochaines années, l'enveloppe dont pourra disposer le monde agricole pour gérer ces programmes de financement de stabilité du revenu, etc., le gouvernement du Québec mettra 305 millions de dollars, on vous garantit ces 305 millions. Si ça va bien dans le monde agricole, vous allez participer non seulement à l'élaboration de programmes, mais à la gestion de ces sommes, comme agriculteurs. Le gouvernement n'ira pas piger dans La Financière agricole. Vous allez gérer ces sommes pour mettre en place de nouveaux programmes pour soutenir les agriculteurs dans d'autres secteurs.

Si ça va extrêmement mal, il y avait un article dans l'entente de La Financière agricole qui disait: Vous pourrez interpeller le gouvernement en cas de crise extraordinaire. Et le gouvernement, dans l'article 4 ? je ne sais pas, le ministre pourrait très bien répondre, là, on lui posera la question en commission parlementaire, Mme la Présidente ? le gouvernement s'engageait, en cas de catastrophe, en cas de crise particulière, à ne pas laisser tomber ses agricultures. Mais il disait aussi: Toutes les sommes qui viendront du gouvernement fédéral canadien, au lieu d'être versées dans le trésor du Québec, iront à La Financière agricole. Voilà un changement extrêmement important.

Or donc, pourquoi on créait ce partenariat avec le monde agricole? Pas seulement pour faire plaisir aux agriculteurs. Parce que les agriculteurs sont les gens qui connaissent probablement le mieux l'agriculture, Mme la Présidente. Les agriculteurs ne sont pas intéressés à détruire la valeur de leurs terres, ne sont pas intéressés nécessairement à polluer leur environnement, c'est leur existence, c'est leur vie, c'est leur bien, c'est ce bien qu'ils veulent laisser à leurs enfants. Donc, ce partenariat a été décidé parce qu'il faut se fier aussi à la compétence des agriculteurs mais aussi parce que les agriculteurs mettent des sous dans leur programme de soutien de stabilité du revenu. Pourquoi il faut faire attention à ce partenariat, Mme la Présidente? Parce que l'agriculteur, il va verser un tiers des primes qui seront versées à l'ensemble des secteurs agricoles qui auront des besoins de soutien. C'est leurs sous, Mme la Présidente, c'est aussi leur argent, Mme la Présidente. Alors, voilà pourquoi il faudra faire attention à ce partenariat.

Bon, nous avons voté pour le principe et pour la loi sur la gouvernance des organismes d'État, Mme la Présidente, nous serions bien mal venus de ne pas adopter le principe du projet de loi n° 81, à tout le moins pour se rendre... essayer de se rendre conformes à la Loi sur la gouvernance, Mme la Présidente. Mais je dis: Attention, voyons comment on peut faire en sorte d'essayer ou de tendre à respecter les prescriptions de la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État, mais protégeons l'essentiel de ce partenariat, faisons en sorte que ceux qui pourront décider pour ce qu'ils feront des sous de La Financière agricole soient aussi des agriculteurs.

Mme la Présidente, actuellement le député de Huntingdon dit: Attention, la Financière fait des déficits. C'est vrai que La Financière est en déficit. Mais est-ce que c'est par malveillance? Est-ce que c'est de la mauvaise gestion? Doit-on envoyer le Vérificateur général? Non, Mme la Présidente. La réponse à ça, elle est dans l'histoire récente de l'agriculture du Québec.

La crise de la vache folle, malgré les moyens qu'on s'était donnés, malgré l'avance du Québec en regard de l'ensemble des composantes nord-américaines en ce qui concerne la traçabilité, en ce qui concerne la crise de la vache folle, était mieux protégée, aurait pu garantir aux Américains qu'ils auraient pu très, très facilement retrouver, par la traçabilité, l'origine des animaux qui étaient problématiques. Mais la crise de la vache folle a touché durement les agriculteurs et l'économie du Québec, comme la crise porcine frappe actuellement durement l'agriculture du Québec. Et La Financière agricole s'est adressée au gouvernement, en regard de l'article dont je vous parle, pour compenser une partie, parce qu'on ne peut pas dire que la crise de la vache folle est une crise ordinaire, Mme la Présidente, ce n'est pas une crise ordinaire.

Alors, j'entendais le député de Huntingdon, puisqu'on l'a écouté patiemment, parler, par exemple, de la crise actuelle dans le secteur porcin. Mais c'était difficile, en 1999 puis en 2000, de prévoir que le dollar allait être ce qu'il est aujourd'hui, Mme la Présidente. Par contre, n'eût été de La Financière agricole et n'eût été des programmes, la situation aurait été plus catastrophique peut-être. Et, quand on pense que c'était juste pour faire plaisir au monde agricole, non. Les agriculteurs sont ceux, comme je l'ai expliqué, qui probablement sont les mieux placés pour contribuer au mieux-être de leur secteur, pour contribuer à une meilleure gestion de La Financière agricole du Québec. C'était ça, le défi qu'on s'était donné en 2001, Mme la Présidente.

n(12 h 40)n

Et je regarde un tableau que j'ai devant moi, où, par exemple, on parle de d'autres organismes et sociétés d'État, comme la SAAQ, comme par exemple la Loi sur Investissement Québec, sur la SODEC, où on a trouvé des formules pour essayer de protéger la particularité de ces organismes, et je pense, et je plaide ce matin, Mme la Présidente, pour dire que La Financière agricole du Québec n'est pas un organisme comme les autres. C'est un organisme extrêmement important pour le monde agricole, c'est un partenariat qu'on a développé. D'accord pour qu'on regarde la composition: Est-ce qu'il y a trop ou pas assez? Comment on peut faire ça?, mais protégeons ce partenariat. Je plaide ce matin pour vous dire que, si on ne le protège pas, quel sera l'intérêt des agriculteurs du Québec de continuer à siéger?

C'était un couteau à deux tranchants, Mme la Présidente, pour les agriculteurs, d'accepter à même cette enveloppe qui, pendant sept ans, a été gelée à 305 millions, c'était tout un défi. Et, en acceptant que leurs propres agriculteurs siègent sur le conseil d'administration de cet organisme, il y avait un risque. Comment veux-tu aller chialer le gouvernement quand c'est toi qui gères les deux tiers ou la moitié du budget du ministère de l'Agriculture, presque, presque?

Alors, voilà ce qu'il faut protéger, Mme la Présidente. Et voilà pourquoi nous allons accompagner le ministre pour faire en sorte qu'on puisse trouver des solutions. Nous sommes ici, à l'Assemblée nationale, pour ça. Et nous allons donc voter, du côté de ma formation, en faveur du principe de l'adoption de ces lois. Mais vraiment, les questions... et le ministre va s'attendre certainement à cette question: Qu'en sera-t-il du partenariat établi par la Financière avec le monde agricole? Sera-t-il encore intéressant pour les agriculteurs?

Probablement que, moi, ce qui m'aurait fait plaisir, Mme la Présidente, avant même l'idée de la gouvernance de La Financière agricole, ça aurait été que le gouvernement me rassure sur son intention en regard du renouvellement de l'entente de partenariat de La Financière avec le gouvernement, parce que cette situation financière problématique de La Financière fait en sorte que finalement on devra trouver des façons. Et les gens, je suppose, dans le monde agricole, comme les administrateurs qui sont nommés par le gouvernement, devront dire oui à une rationalisation, oui à l'atteinte du déficit zéro, mais, Mme la Présidente, je pense que l'essentiel, ce qu'il faut protéger là-dedans, c'est la question du partenariat qui a été développé au moment de la création de La Financière agricole du Québec. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Y a-t-il d'autres interventions? M. le député...

M. Jean Damphousse

M. Damphousse: De Maskinongé.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): De Maskinongé. M. le député de Maskinongé.

M. Damphousse: Merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux d'être ici sur l'adoption de principe du projet de loi n° 81, Loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole.

Vous savez, Mme la Présidente, je suis député de Maskinongé et je suis producteur agricole aussi, et ça m'arrive, les fins de semaine, d'aider mon fils, parce que je suis producteur de céréales. Je ne sais pas si vous avez vu mon teint ce matin, il a beaucoup changé depuis à peu près un mois parce que, les fins de semaine, quand je trouve un petit moment, je me lève à 5 heures le matin pour l'aider puis je travaille jusqu'à la baisse du jour, comme on dit, là, jusqu'à la nuit, puis je travaille très fort avec mon fils pour faire le transfert éventuellement de ma ferme.

Mais, quand je regarde la situation actuelle de l'agriculture, la problématique qu'on a aujourd'hui, c'est que La Financière agricole, qui était un levier pour aider les producteurs, on se pose la question, avec le déficit qu'elle a aujourd'hui, qui... Si je prends le Fonds d'assurance stabilisation, au 31 mars, on parle de 596 986 000 $ de déficit, et la contribution des adhérents à chaque année est tout près de 135 millions. Ça veut dire que, si ça irait bien pendant une période de quatre ans, le déficit, on ne le voit plus, il s'efface automatiquement.

C'est pour ça que, Mme la Présidente, concernant le projet de loi, on parle: ces nouvelles règles qui visent notamment la composition du conseil d'administration dont la majorité des membres doivent, de l'avis du gouvernement, se qualifier comme administrateurs indépendants, ce qui veut dire, si je comprends bien, c'est qu'on va avoir des administrateurs indépendants, mais on a des producteurs sur le conseil d'administration, et on veut qu'ils aient moins de pouvoirs, dans le sens qu'en plus de diminuer le nombre de producteurs, qui devient de cinq à quatre, mais on augmente le nombre d'administrateurs. Ça veut dire que le pouvoir des producteurs baisse beaucoup.

Puis, je vais vous dire, Mme la Présidente, en 2001... de 1999-2000, M. Laurent Pellerin, qui était président alors de l'UPA, il était venu visiter toutes les régions. Puis, moi, en tant que producteur de culture commerciale, je suivais ça fortement. À ce moment-là, qu'est-ce qu'il nous disait, le président de l'UPA? Il nous disait ceci: Écoutez, le gouvernement nous offre un partenariat, nous offre de garantir 305 millions, comme le député des Îles-de-la-Madeleine nous parlait tout à l'heure. Puis, moi, je me suis levé debout, j'ai posé une question: Pourquoi qu'on changeait les règles? Pourquoi que vous allez là? Moi, j'étais un syndicaliste, dans le milieu agricole, qui était de conviction et qui disait: Le gouvernement, on veut avoir un pouvoir ou dire qu'on n'est pas d'accord, il faut être à l'extérieur de ça. Bien, il m'a été convaincu puis il a convaincu dans la salle, parce que j'ai travaillé très fort à poser des questions puis à amener mes arguments, que ça a passé 53 % contre 47 %. Donc, ma région a dit oui à ce moment-là.

Puis il me disait à ce moment-là aussi: C'est parce qu'il faut absolument qu'on adopte cette ligne-là parce que le gouvernement fédéral ne nous subventionnera plus les montants d'argent qui rentrent à la... Dans ce temps-là, c'était l'assurance stabilisation. C'est un peu qu'est-ce que monsieur... pas monsieur, mais le député des Îles-de-la-Madeleine parlait tout à l'heure, là. Ça, je me souviens très bien. À ce moment-là, moi, j'étais vraiment contre et je m'aperçois aujourd'hui qu'on a donné... L'UPA était de partenariat, on nommait le président, puis, aujourd'hui, je m'aperçois, avec la nouvelle loi, bon, bien, ça va être nommé par le conseil d'administration et le gouvernement. Donc, au niveau partenariat, on y perd à ce moment-là.

Mais, si je me regarde en tant que producteur, moi, je suis producteur agricole depuis 28 ans, j'ai passé toutes les vagues de crise imaginables. Dans le secteur porcin, au début, au début des années quatre-vingt, on avait des taux d'intérêt usuraires, des 30 %, des 25 %, 30 %. J'ai passé au travers avec un de mes frères, on était associés ensemble, on avait pris la ferme à ce moment-là, et on s'est retrouvés avec des... pendant les... jusqu'en 1985-1986, à des taux quand même qui étaient très hauts, qu'il était difficile aux producteurs de... On avait beau penser, réfléchir, analyser, se trouver des stratégies pour passer au travers ces crises-là. Et, malgré tout ça, Mme la Présidente, j'ai passé au travers, notre ferme a passé au travers. Puis pour dire que notre famille était très fière qu'on continue à travailler à faire en sorte que l'agriculture, chez nous, se continue.

n(12 h 50)n

Et voilà, les 10 dernières années... J'étais avec mon frère, on était ensemble. Je lui ai vendu mes parts parce que je suis retourné à l'université, je suis allé faire un cours, j'ai été faire une maîtrise en gestion de projet. À ce moment-là, j'ai cédé mes parts à mon frère. Mais, un an après, il y a quelqu'un qui m'a proposé une autre ferme, puis là je suis producteur de céréales depuis les 10 dernières années. Dans ces 10 dernières années là, si j'exclus 2007, j'ai passé des moments très difficiles, des situations de crise très difficiles où j'ai rencontré le député des Îles-de-la-Madeleine, qui était, à ce moment-là, ministre de l'Agriculture, où on allait, l'UPA, ensemble, où on allait les rencontrer pour leur dire: Écoutez, nous avons besoin d'un soutien. Puis le 305 millions... À ce moment-là, on était en crise, et les producteurs de cultures commerciales, on vendait à des prix dérisoires. Quand on parle de 100 $, 125 $, même j'ai vendu jusqu'à 85 $ la tonne mon maïs, c'étaient des moments très difficiles à passer.

Et on disait: Bon, l'assurance-stabilisation et La Financière agricole doivent soutenir le producteur sur ses coûts de production. Et on s'est aperçu, je me suis aperçu, en faisant toutes les gymnastiques qu'il y avait, que je n'étais pas comblé, dans le sens que ça ne suivait mes coûts de production chez moi, dans ma région. Et, quand on analyse les coûts de production, on dit: Bien, c'est tant de rendement par région. Quand on avait un rendement probable pour la province de 6,6 tonnes, notre région, la Mauricie, était capable de suivre ça. Et, à un moment donné, on a changé les règles du jeu à 7,2. Là, on est rendu à 8 tonnes, 8 tonnes/ha pour le rendement dans le maïs. Ça, c'est dans la région de la Mauricie, là, puis dans ma région à moi, qui est la région de la MRC de Maskinongé, on est... au niveau des rentrées d'argent, ça représente au-delà de 50 % pour la région de la Mauricie. On est une région qui est très agricole, dans mon comté.

Et, à ce moment-là, je vais vous dire ? je vais vous parler en tant que producteur comme je vous parle là ? quand je rentrais le soir, à la maison, là, que c'étaient des situations que j'avais toutes dans la tête. Tous les problèmes, je les avais dans ma tête, puis mon épouse puis mes enfants ne le savaient pas, qu'est-ce qui se passait, où je me disais: Comment je peux passer à travers de cette situation-là? Puis, à ce moment-là, on essayait d'aller voir, d'aller rencontrer nos politiciens. Puis, moi, je suis une personne qui demande quand vraiment on en a besoin. À ce moment-là, je regardais mes enfants, je me dis: Je vais tenir, je vais tenir puis je vais passer au travers pour vous autres, les enfants. Mais ça, c'est dans ma tête que je me le disais. Parce que c'étaient des situations où je disais à ma femme, à mes enfants: On s'est permis certaines choses... Puis ma femme comprenait ça, cette situation-là. Et on a mangé de notre terre, je vous le dis, là. Qu'est-ce que je vous dis là, c'est la réalité, là. Puis ça, j'ai vécu ça dans les années 2000, là ? ce n'est pas dans les années soixante, soixante-dix ? où les revenus que j'avais, là, ne suffisaient pas à faire vivre ma famille. Mais j'avais une femme extraordinaire, qui cultivait, puis on cultivait, on avait un jardin, puis on cultivait, puis on avait des animaux, on a réussi à passer au travers. Mais c'est ça, des producteurs agricoles.

Mais ça, je suis d'accord avec vous, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, quand vous avez parlé, tout à l'heure, que les producteurs agricoles sont des gens très attentifs puis qui font très attention à leurs terres puis à leurs animaux, ça, je suis d'accord à 100 milles à l'heure avec vous. C'est exactement... Parce que je rencontre des producteurs que je rencontrais, puis ils venaient chez nous, là, O.K., ils venaient me rencontrer, puis je leur disais: Écoutez, il ne faut pas lâcher, puis je les encourageais. Puis ils me disaient après ça: Je ne sais pas comment tu as fait, Jean, tu viens... Toute la situation qui se passe là, tu nous encourages puis tu as confiance encore. Bien, c'était ça, moi, je me disais, c'était le but que j'avais d'encourager mes producteurs.

C'est pour ça qu'aujourd'hui, quand je vois tout ça puis que j'entends le ministre puis l'ancien ministre de l'Agriculture... Vous savez, aujourd'hui, on parle... Là, c'est sûr qu'au niveau des céréales les prix sont en augmentation, hein? On voit ça, là, on parle de 200 $, 210 $, 250 $, 240 $, le prix de la tonne de maïs. Mais qu'est-ce qu'on ne dit pas, qu'est-ce qu'on ne dit pas à cette population qu'on nourrit, c'est qu'il y a une bourse, la Bourse de Chicago, c'est des actionnaires qui font en sorte de faire monter les prix. Ça augmente, je regarde ça, à chaque semaine. C'est en haut, en bas, on doit-u vendre, on ne doit-u pas vendre? C'est ça qui se vit actuellement.

Ça fait que, quand les gens me disent: Bon, on veut nourrir le monde, puis les prix augmentent beaucoup, c'est dû à certaines choses comme question de l'énergie faite à partir des grains, O.K., si on parle d'éthanol, tout ça, c'est une partie. Parce que l'éthanol, quand on produit de l'éthanol... on a une usine ici, à Québec... pas à Québec, à Varennes, et, ces produits-là, il y a toujours bien... 40 % à 50 % des sous-produits sont retournés pour nourrir les animaux. Ça, on n'en entend pas parler ici, puis je suis le seul à le dire aujourd'hui. Puis j'aimerais que... j'espère qu'il y a de nos producteurs puis qu'il y a des citoyens qui nous écoutent parce que c'est très important de le dire. Et ça a fait en sorte qu'on a 10 % de la production, 10 % de la production de maïs ici, au Québec, qui va à la production d'énergie d'éthanol. Il y a aussi, là, on parle, il y a une nouvelle usine qui va s'établir dans la région voisine de la mienne, la région de Bécancour, une usine où on va fabriquer aussi de l'énergie diesel, là, à partir du soya et du canola.

Et c'est ça, c'est pour vous dire que c'est sûr qu'aujourd'hui les producteurs, ils vont devenir un petit peu plus indépendants, dans le sens qu'aujourd'hui, depuis un an, c'est qu'on ne reçoit plus, les producteurs de culture commerciale, qu'on a été des demandeurs pendant une dizaine d'années... on est ceux qui vont contribuer à La Financière agricole pour faire en sorte que, si un jour, éventuellement, on voit que les prix de la production porcine augmentent, ça fait qu'un jour probablement que ces déficits-là, je ne dis pas qu'ils vont s'éliminer rapidement, mais on court une... Je pense que dans l'avenir l'alimentation devient de plus en plus importante pour nourrir le monde parce que la demande est très forte.

Tu sais, j'ai passé un petit peu par ricochet pour expliquer la loi n° 81, mais qu'est-ce qui m'anime dans ça, qui me fait peur un peu, c'est la nomination: «Le gouvernement nomme les membres du conseil, autres que le président de celui-ci, le président-directeur général et le sous-ministre du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en tenant compte des profils de compétence et d'expérience approuvés par le conseil.» Bien, comme on sait, il va y avoir quatre producteurs sur 13. On va dire: Nous autres, c'est quelle compétence qu'on va pouvoir faire approuver si on est juste quatre personnes? Tu sais, c'est une autre partie qui me fait peur un peu.

J'ai dit: Tu sais... cinq sur 11, si on aurait parlé de quatre sur 11... Pourquoi nommer des gens de plus sur ce conseil d'administration là? Moi, j'ai beaucoup de difficultés. Puis, si je parle à mes producteurs, ils vont me dire: Pourquoi, ça, Jean? Voyons donc, 11 personnes, il y en a assez, voyons donc! Pourquoi? Tu sais, je me dis: Pourquoi, au lieu d'être 11 personnes, on nomme 13 personnes? Mais ça, le ministre pourra nous en parler au moment où est-ce qu'on fera notre étude article par article.

Pour aller très rapidement, parce que je vois que le temps passe et... C'est ça. Et en terminant, je voudrais saluer le ministre et mes collègues de mon parti, les collègues des deux autres partis politiques ici, en Chambre, à l'Assemblée nationale.

Il y a une chose qui est sûre, moi, en tant que député, producteur agricole, je suis nommé en matière de politique rurale, qui me touche beaucoup, qui touche beaucoup mon comté, qui touche beaucoup de nos régions, notre formation politique, l'opposition officielle, je vous dis, on va être très vigilants à l'étude article par article de la loi n° 81. Et on s'opposera à toute forme... ou règle dans la nomination des administrateurs et des dirigeants de la fédération... pas de la fédération, de la Financière agricole du Québec, soit le président-directeur général, qui aurait un lien à des nominations partisanes. Comme suggérait le député de Huntingdon, que ce soit nommé ? rapidement, je vais finir ? que ce soit nommé ici, à l'Assemblée nationale. On tend la main au ministre de l'Agriculture pour qu'on puisse le faire ici.

Comme on dit, on va collaborer à l'étude du projet de loi n° 81, et on va poser des questions, puis on veut des réponses claires et transparentes. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député de Maskinongé. Vous avez complété votre intervention? Merci. Alors, le principe du projet de loi...

Une voix: ...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Très bien, Mme la députée. Alors, compte tenu de l'heure... Parce qu'on est rendus quand même à 13 heures. Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée nationale sont suspendus à cet après-midi, 27 mai, à 15 heures. Bon appétit.

(Suspension de la séance à 13 heures)

 

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Chagnon): Bon après-midi, mesdames, messieurs. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

L'Assemblée maintenant poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 81, Loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec. On m'a informé que le député de Maskinongé avait terminé son intervention, et je vais tout de suite reconnaître Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi là parce que vous savez, tous et chacun savent que le comté de Lotbinière est un comté très agricole. Seulement au niveau de la production laitière, le comté de Lotbinière, le comté de Nicolet-Yamaska et le comté de Richmond, ces trois comtés-là comptent à peu près 80 % de la production laitière du Québec. Mon seul comté devrait abriter 18 des 22 atocatières du Québec. Donc, au niveau de la canneberge, c'est très, très fort. Et au niveau du porc, dans la région un petit peu plus au sud, il y a beaucoup de porcheries, il y a beaucoup de porcheries. C'est la région qui s'approche plus de la Beauce. Il y en a aussi dans ma région, Centre-du-Québec.

Donc, dans ces circonstances, vous allez comprendre que je ne vais pas à une activité de... les activités que tous les députés fréquentent les fins de semaine, je ne vais pas à une activité sans entendre parler de l'agriculture, sans qu'un agriculteur m'interpelle sur sa production, sur les liens qu'il entretient avec le MAPAQ ou sur son opinion quant à l'avenir de l'agriculture, de la relève et tous ces problèmes-là. Donc, il me fait plaisir d'intervenir sur un sujet qui est extrêmement, extrêmement important pour le comté de Lotbinière puis vraiment au coeur de toutes les préoccupations.

Je voulais un peu continuer sur l'idée qu'a dégagée le député des Îles-de-la-Madeleine concernant la crise alimentaire qui se vit dans le monde. On a vu la crise du tortillas au Mexique, on a vu les émeutes qui ont eu cours en Haïti concernant le manque de nourriture, la difficulté de s'approvisionner en nourriture. Le problème là-bas est que la nourriture n'est pas disponible ou trop chère. Chez nous, bien c'est les producteurs qui produisent souvent en bas de leurs coûts de revenu, mais la nourriture reste quand même pas chère. On sent qu'il y a là un malaise, là, qui, après le problème de l'environnement, Kyoto puis toutes les incidences que ça aura sur la race humaine, sur notre environnement, notre écosystème... on sent se dessiner une crise assez internationale sur l'alimentation, l'agriculture.

Moi, M. le Président, ça me fait mal au coeur quand j'entends des responsables de l'ONU venir nous dire qu'au Brésil les mères de famille font bouillir des cailloux pour faire accroire à leurs enfants qui pleurent parce qu'ils ont trop faim, pour faire accroire à leurs enfants que c'est de la soupe qui bout puis qu'elle n'est pas prête, jusqu'à temps que leurs enfants s'endorment, épuisés d'avoir trop pleuré mais sans avoir mangé. Je pense qu'on va avoir des examens de conscience à faire, autant les pays occidentaux, parce que vous savez qu'on rencontre des membres des autres Parlements, des parlementaires de l'Afrique, de... bien ça m'arrive, là, plus souvent, en faisant partie de l'association des parlementaires de la Francophonie, qui nous sensibilisent à ces enjeux-là puis aux enjeux de l'agriculture en général. Dans leurs pays, 50 % à 60 % des personnes vivent de l'agriculture; chez nous, c'est peut-être 2 % à 3 % des personnes qui vivent de l'agriculture, mais dans mon comté c'est extrêmement important, là, la proportion est d'autant plus importante.

Pour en revenir un petit peu plus précisément au projet de loi n° 81, c'est un projet de loi qui fait suite au désir du gouvernement de moderniser la gouvernance, de la rendre plus transparente. Bien, quand j'ai entendu la première lecture de ce projet de loi sur la gouvernance puis ce qui ressemble aussi à celui-ci: «Ce projet de loi a pour objet d'assujettir La Financière agricole du Québec à la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État et [introduire] dans la loi constitutive de cette société [des] nouvelles règles de gouvernance adaptées à celle-ci», ce que je trouve un peu curieux dans l'exercice, c'est qu'on a besoin de se réglementer pour être plus transparent, pour éviter les nominations partisanes, pour éviter que nos mécanismes donnent lieu à des opérations politiques plutôt que, dans ce cas-ci, administratives ou financières. Il me semble qu'on aurait pu se discipliner. Il me semble qu'on aurait pu le faire sans s'obliger à le faire par un projet de loi. Il me semble que, comme société moderne et occidentale, s'obliger par un projet de loi à être transparent et à être honnête, c'est un peu curieux comme phénomène.

n(15 h 10)n

C'est peut-être un peu un aveu de ce qui s'est passé dans le passé et ce qu'on ne veut pas répéter. Pour moi en tout cas, comme avocate, j'appellerais ça un aveu extrajudiciaire de quelque chose qui s'est déjà passé, soit des nominations partisanes, du manque de transparence. Et tous les partis sont pour la tarte aux pommes, tous les partis sont pour la transparence, l'éthique et la responsabilité, mais qu'on soit obligé de faire cet exercice-là par une loi, bien je trouve ça regrettable. Je pense qu'on aurait pu se discipliner.

Plus précisément, la gouvernance de La Financière agricole, c'est très important, au Québec, parce que l'agriculture, à la grandeur du Québec, vit des crises, des soubresauts. Puis, en regardant l'agriculture dans son ensemble depuis le début, depuis le début de... on fête les 400 ans d'histoire de la ville de Québec, là, mais, depuis le début, est-ce que l'agriculture en tant que telle, du simple paysan à agriculteurs modernes qu'on est devenus, du simple sujet du seigneur de la place aux agriculteurs qu'on connaît, là... Je pense, entre autres, à des agriculteurs qui, dans mon comté, ont commencé à faire l'agriculture derrière la charrette à boeufs ? excusez-moi l'expression, c'est comme ça qu'ils faisaient, puis c'est avec le boeuf qu'ils allaient à la messe, puis c'est avec le boeuf qu'ils faisaient la charrue ? qui maintenant ont 10 tracteurs, qui ont un robot de traite, qui tirent, qui traient un troupeau d'environ 350 vaches trois fois par jour avec un robot de traite. C'est le même agriculteur, là, qui, dans sa vie, a fait de l'agriculture avec une charrette à boeufs qui, aujourd'hui, a des gros tracteurs qu'on appelle articulés. Elle a subi beaucoup, beaucoup de changements, l'agriculture, en apparence, quand on regarde les équipements, quand on regarde la taille des entreprises, quand on regarde la taille des troupeaux, quand on regarde toutes les techniques de fertilisation, toutes les techniques d'intrants, d'extrants, ce n'est plus la même agriculture que celle qu'il y avait quand je suis née, et je ne suis pas si vieille que ça.

Mais, tous ces changements-là, est-ce que vraiment ça a changé sur le fond? Sur le fond, je crois que non, parce que l'agriculture ne doit... La production de nourriture à partir de la terre demeure un aspect fondamental de la vie humaine, demeure une activité qui est différente de la simple activité économique, bien qu'elle ait de gros impacts sur notre économie. Dans le temps, là, au début, dans les seigneuries ? il y a un seigneur assez célèbre chez nous, le seigneur Henri-Gustave Joly de Lotbinière ? le seigneur ramassait les profits, les paysans avaient de quoi vivre, et plus la terre était rentable, plus le seigneur en prenait, en en laissant juste un petit peu plus aux paysans. Maintenant, je pense que la situation est encore la même. Les producteurs en ont toujours juste assez pour vivre. C'est les intrants qui augmentent, les intrants, c'est-à-dire ce qu'on a de besoin pour produire un produit fini, c'est-à-dire, pour le maïs, admettons, ce sont les insecticides, les pesticides, les engrais, ce sont tous les intrants qui augmentent, pour laisser seulement la marge au producteur pour être capable de nourrir sa famille puis nourrir... puis assurer une relève. Mais ce n'est jamais beaucoup plus long.

Puis, à chaque fois qu'on voit le prix du grain augmenter, ça allume une lumière dans les yeux des producteurs, ils pensent qu'enfin ce sera la bonne année, mais, non, les intrants augmentent. Regardez, cette année, le prix du grain a augmenté, mais le carburant est tellement cher, 1,40 $, là, en moyenne. Au Canada, c'est 1,36 $. Puis le diesel blanc, qu'on appelle, est à 1,40 $. Pendant ce temps-là, Petro-Canada, là, a augmenté ses profits de 82 % pour le dernier trimestre; Shell et BP, respectivement, Shell, 20 %, BP, 60 %, qu'il a augmenté ses profits. En 2007, là, Exxon a eu un record de 40,6 millions de profits. En 2008, là, je suis certaine que ce sera un très grand cru pour les compagnies pétrolières, à voir le prix du pétrole.

Mais, quand le prix du pétrole augmente comme ça ? ça, c'est un intrant qu'on ne peut pas se passer ? qu'est-ce qui arrive dans les champs? Les producteurs ont labouré, mais au printemps dernier... à l'automne dernier. Mais, cette année, ils vont peut-être sauter le labour parce que ça va coûter trop cher d'essence, parce que ce ne sera pas assez rentable. Mais, pour cette année, pour survivre aux récoltes, aux épandages, à plusieurs tours dans le champ qu'ils doivent faire, qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont éliminer ce qu'ils peuvent. Ils vont éliminer le chaulage, ils vont éliminer le drainage qu'ils avaient prévu. Puis, petit à petit, les entreprises vont devenir de moins en moins productives. Puis, au lieu de gérer l'avancement de l'entreprise, ce qu'ils gèrent, c'est le niveau de la marge de crédit. Puis ils se demandent si... En perdant cette productivité-là, le niveau de la marge de crédit devient de plus en plus serré puis de plus en plus toujours au bout. Et puis cette perte de productivité là, comme elle amène une perte de profits, elle amène également une perte d'avancement. Puis, en agriculture, là, c'est prévu, c'est vu, c'est su, si on ne devient pas de plus en plus compétitif, le marché nous avale.

Seulement pour vous dire, la ferme sur laquelle j'habite, c'est une ferme qui est l'équivalent de 26 petites entreprises d'il y a 50 ans. Puis ce n'est pas une grosse ferme. Il y avait 26 familles qui pouvaient vivre d'une terre de la superficie de chez nous. Maintenant, il n'y a seulement qu'une famille qui pourrait en vivre. Ça vous donne un peu l'idée, l'ordre de grandeur de façon plus... plus conceptuelle du fait de la concentration de l'agriculture. Mais ça, c'est seulement pour survivre. Parce que, comme je vous disais, les revenus... malgré que les recettes sont plus élevées, les profits, en proportion, diminuent.

Et puis tout ça, c'est dans un contexte où on gère notre territoire, on gère le territoire agricole du Québec d'une façon peut-être un peu incohérente. Quand on permet aux producteurs... au périmètre d'urbanisation de s'étaler sur des terres agricoles, on leur permet de détruire des forêts ou de prendre de la terre faite puis qu'on dit, d'un autre côté, aux producteurs agricoles: Vous ne pouvez pas prendre votre boisé, le déboiser pour faire de la terre agricole, parce qu'il faut protéger la biodiversité, et vous devez garder une bande de forêt le long de vos cours d'eau pour protéger les cours d'eau, la biodiversité, les cours d'eau et l'érosion du sol, eh bien je dis que les producteurs agricoles en ont beaucoup à supporter.

On a vu récemment créer 15 aires protégées dans le Nord-du-Québec, des forêts qui vont être protégées pour le bien-être de la population. Quand on décide de faire ça, c'est extrêmement... c'est simple, c'est le principe de l'expropriation, c'est confronter le bien privé versus l'intérêt commun, et, dans ces mesures-là, on a le droit de prendre un bien privé parce que c'est tellement l'intérêt de tout le monde. Mais, dans le cas qui nous occupe, quand on dit à un producteur: Sur ta terre, tu ne pourras pas exploiter ton boisé pour en faire de la terre, sur ta terre, tu ne pourras pas cultiver près des cours d'eau parce que ce serait dangereux que tes... pour l'érosion, puis ce serait dangereux que tes intrants aillent dans la rivière, quand on dit: Tu ne peux plus mettre tel engrais sur la terre parce que tu dois protéger la nappe, peut-être qu'aussi ça t'entraîne une perte de rendement, mais on demande au producteur de faire le sacrifice d'une parcelle de terre pour le bien-être commun mais sans les indemniser en retour, contrairement à tout ce qu'on fait quand on exproprie ou qu'on prend des aires protégées.

Mais les producteurs sont conscients de ça. Ils se sentent solidaires des Québécois, ils se sentent fiduciaires également de leur environnement, fiduciaires pour les Québécois, parce qu'ils ne veulent pas que ça se pollue, ils ne veulent pas que la nappe se contamine, ils ne veulent pas que nos cours d'eau soient contaminés également, et ils le font de bon coeur. Sauf qu'ils s'attendraient, je pense ? je peux m'adresser au monde urbain ? ils s'attendraient en retour de leurs efforts à avoir plus de considération.

Aucun producteur, en tout cas une très, très faible minorité de producteurs a intérêt ou veut absolument ou essaie de contaminer autour d'eux, et puis ils sont toujours pointés du doigt quand il y a des... à chaque fois qu'il y a une contamination, puis c'est difficile pour eux de perdre le statut d'agriculteur reconnu à devenir presque des bandits. Plusieurs producteurs agricoles se confient dans mon bureau, puis c'est une part de la détresse psychologique qui habite les producteurs agricoles, cette perte de prestige qu'ils avaient d'être les nourrisseurs du monde en ville, comme ils disent, puis être devenus les bandits de la pollution de l'eau. Je pense que j'ai l'occasion de passer ce message-là et je le fais, M. le Président, parce que c'est important, puis je l'entends souvent dans mon bureau.

n(15 h 20)n

En ce qui concerne La Financière agricole, c'est certainement un mécanisme de régulation des revenus, c'est comme un genre... sur le principe d'une mutuelle qui fait que, les bonnes années... on met de l'argent de côté, les bonnes années, pour que, les mauvaises années, on ait de la difficulté. C'est normal que le rendement de la caisse fasse comme ça puis suive le marché. C'est normal qu'il y ait des années déficitaires, des années qui sont plus fastes, et qu'il y ait des profits à la caisse. Sauf que, sauf que Daniel-Mercier Gouin, qui est un économiste reconnu dans le monde agricole, qui travaille tout près, ici, à l'Université Laval, qui faisait une conférence récemment, il dit qu'au niveau de l'assurance agricole plus ça va mal, plus on en fait. Collectivement, ça ne marche pas, parce que ça ne marche pas dans le veau d'embouche, ça ne marche pas dans le porc. Selon lui, il y a un trou de 735 millions pour les fonds ASRA. Pourquoi que ça ne marche pas? Parce qu'on ne suit pas... selon lui, on n'est pas assez attentifs au marché, on n'est pas assez attentifs.

Je vais vous donner un exemple: dans le bovin. Dans le bovin, il y a eu une date très, très grave, tous les producteurs s'en souviennent, c'est le 20 mai 2003, quand on a découvert un cas d'encéphalite ? ESB. C'était un choc violent. Qu'est-ce qui est arrivé? 70 % de notre exportation... On a arrêté d'exporter, nos frontières se sont fermées, puis, à cette époque-là, il y avait 70 % de notre production qui allait à l'extérieur. Donc là, on a perdu environ 600 millions. Je vais vous dire, les producteurs, là, avaient ramassé ? avaient payé de l'endettement ? ce qu'on appelle de l'équité sur leur équipement pendant 10 ans, ils ont brûlé ça, une année. 10 ans de travail, là; cette année-là, ils ont tout perdu. C'est-à-dire que, là, ça a entraîné des faillites, des faillites techniques parce que les caisses ne voulaient pas reprendre les équipements parce qu'ils n'étaient pas capables de les liquider. C'est pour ça que les producteurs se sont surendettés. Et puis là on vient, on vient de survivre puis arriver au même point. On est arrivés maintenant au même point qu'on était lors de cette crise. Mais ce que les producteurs nous disent, le secrétaire général de la Fédération des producteurs de boeuf du Québec, Gaëtan Bélanger, nous dit: La filière bovine et le gouvernement n'ont pas retenu les leçons de l'ESB, et l'industrie est hypothéquée par la lenteur du gouvernement à s'ajuster. C'est parce qu'à l'heure actuelle notre capacité d'abattage ici, au Québec, de notre production au Québec, ne se fait pas. On a des problèmes au niveau de l'abattage. Depuis l'ouverture de la frontière, la production a baissé de 7,1 %, en 2006, puis de 6 % en 2007. Donc, il y a des problèmes, il faut s'ajuster.

En parlant d'abattage ou d'abattoirs, il y a eu des sommes dévolues par le fédéral au provincial pour appliquer des normes. Les abattoirs de type provincial, on leur demande d'accepter des normes de type fédéral, mais sans les subventions, à l'heure actuelle. Ils doivent composer avec tellement d'inspecteurs... Puis je pense que le ministre de la Santé, qui est ici présent, là, envierait le ministre du MAPAQ parce que les inspecteurs sont là, peuvent y aller n'importe quand. Ils peuvent rentrer dans n'importe quel établissement pour contrôler la qualité de la nourriture. Tandis que, lorsque j'étais critique en matière de santé, je me souviens, j'espère que c'est changé, que ceux qui veulent entrer dans les CHSLD pour voir les conditions de vie de nos aînés doivent avertir 48 heures d'avance. Je vous dis qu'au Québec on n'a pas eu de problème d'innocuité sur notre viande, puis je me demande si, encore une fois, on ne fait pas assez confiance aux producteurs, on ne fait pas assez confiance aux intervenants sur le terrain. Et encore une fois le message qu'on leur envoie, c'est qu'on ne les respecte pas.

Je m'en voudrais de ne pas terminer sur une note un peu plus positive, c'est la production de canneberges. La production de canneberges, malgré l'appréciation du dollar, parce que le marché est également écoulé vers les États-Unis, Ocean Spray, eh bien elle progresse de 15 % par année. Mais pourquoi? Parce que ce sont peu de producteurs qui se sont organisés ensemble, 22 producteurs, dont 18 dans mon compté, qui sont créatifs, qui n'ont pas demandé d'argent au gouvernement, qui vont chercher leurs parts du marché. Et, tant que ça va demeurer ainsi, tant que ce ne sera pas hyperbureaucratisé, vous allez voir, ça va fonctionner. C'est un exemple qu'on devrait appliquer dans tous les secteurs de production, faire confiance aux cultivateurs, faire confiance aux organisations, et je vous dis que l'agriculture se porterait beaucoup mieux au Québec.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, Mme la députée de Lotbinière. J'inviterais maintenant M. le député de Beauce-Nord à prendre la parole.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, écoutez, ça me fait plaisir ici d'intervenir dans un domaine que je connais assez bien, moi aussi. J'ai été producteur laitier quand même une grande partie de ma vie.

Alors, écoutez, moi, je pense que l'agriculture, il ne faut pas mettre ça de côté, parce qu'il faut revenir un peu à la base de la société. Si on regarde la base de la société ici, au Québec, l'agriculture en a fait partie. L'agriculture et la famille sont les deux piliers de la base de notre société. Il faut absolument garder aussi le... essayer de réajuster les programmes. Parce qu'on voit aujourd'hui qu'avec un dollar de la même force, canadien, américain, tous nos programmes qu'on a présentement pour l'agriculture doivent être réajustés pour faire en sorte que nos agriculteurs aient le même poids, si vous voulez, quand ils cultivent. On sait très bien aujourd'hui que ça traverse les frontières, les engrais chimiques. Le porc, aujourd'hui, est rendu que.... Avant, on était une province qu'on exportait; là, on est rendu qu'on importe. Ça va dans les deux sens, alors il faut absolument avoir une réglementation comparable. Alors, là-dessus, c'est très important.

On voit aussi, dans les bouvillons d'abattage, aujourd'hui, on... Les producteurs me parlaient, moi, qu'aujourd'hui nos bouvillons vont se faire abattre aux États-Unis à cause, ici, du prix énorme. C'est tout rattaché, si vous voulez, à la crise qu'on a eue avec la vache folle. Alors, il faut qu'ils fassent des prélèvements spéciaux, là, présentement sur nos bouvillons. Alors, on va les faire abattre aux États-Unis, soit aux États-Unis ou en Ontario, et ils reviennent au Québec par la suite. Parce qu'au Québec, pour abattre un bouvillon aujourd'hui, ça coûte 40 $ de plus que ça coûtait avant.

On a mis beaucoup d'outils ici, au Québec, comme la traçabilité ? Mme la députée de Lotbinière en parlait tout à l'heure ? mais, quand on a vécu la crise de la vache de la folle, ça, c'est des réglementations qu'on s'est mises, c'est des réglementations qui sont très bonnes, qui auraient dû nous protéger énormément lors de cette crise-là parce que, nous, ici, au Québec, on était capables de retracer nos animaux qu'on avait abattus, et pourtant ça ne nous a pas protégés du tout, on a eu le même impact à la grandeur du Canada. Et nous, ici, au Québec, on s'était donné cette réglementation qui était à mon sens très bonne, très valable, mais elle ne nous a pas protégés. Alors, on le voit encore aujourd'hui, les gens nous le disent, nous, aux frontières canado-américaines, les aliments, que ce soit de l'agneau, que ce soit du porc, que ce soit du boeuf, ça rentre au Québec, il n'y en a pas, de traçabilité, mais nous, ici, on exige de nos producteurs beaucoup de traçabilité.

Il faut faire en sorte aussi que... essayer avec La Financière agricole, dans les prochains temps, d'essayer de protéger la petite agriculture, qui a l'air à vouloir redémarrer dans plusieurs municipalités du Québec. Où il y avait des terres qui étaient un peu laissées à l'abandon, là il y a une petite agriculture qui serait intéressée à redémarrer.

Si nous parlons des... La semaine passée, on rencontrait des gens de la France ici, il y avait une délégation de la France et il y avait des agriculteurs là-dessus. Et on intervenait beaucoup sur qu'est-ce qu'on avait, les points en commun avec la France, et, en France, ils ont certaines productions qui sont contingentées, comme nous. Et puis ils disaient qu'il va falloir être très vigilants dans les années qui s'en viennent pour essayer de garder nos productions qui sont contingentées, pour ne pas qu'ils soient noyés dans les histoires de négociation du GATT, comme le lait, le poulet, les oeufs. Parce que c'est des productions ici, au Québec, à l'heure actuelle, mais même, je vous dirais, au Canada, c'est des productions qui vont très bien. Je pense que c'est des productions présentement qui s'en sortent le mieux parce qu'on s'est mis des règles du jeu il y a quelques années. Et je pense qu'il va falloir être très vigilants, nos décideurs, il va falloir qu'ils soient très vigilants pour faire en sorte qu'on conserve ces outils-là qui sont pour moi essentiels.

J'ai rencontré, la semaine passée, des producteurs de porc qui sont venus nous rencontrer ici, au parlement, parce qu'on vit une crise porcine depuis quelques années, et ces producteurs-là, je pense qu'on aurait tout intérêt, tout le monde, à les écouter parce que les solutions qu'ils nous amenaient sur la table, ce sont des solutions qui ne coûteraient pas énormément cher au gouvernement et, je pense, qui régleraient une grosse partie de la production porcine. Alors, on a été très, très conscients de tous les outils qu'ils nous amenaient et les solutions. Et je pense que ce serait important qu'on les écoute, je pense qu'ils en ont, des solutions pour essayer de régler cette crise-là.

n(15 h 30)n

Moi, je ne peux m'empêcher de vous parler, en agriculture, de qu'est-ce qui s'en vient, qu'est-ce qui commence à se développer ? nous, ici, au Canada, on est en retard, au Québec, encore plus ? sur les énergies vertes. On a rencontré beaucoup de gens de l'extérieur du Canada, de l'Allemagne, il y a quelques années. Et puis, moi, la semaine passée... Justement en fin de semaine, j'allais visiter une ferme qui ont converti leur système de lisier de porc, et ils en font de l'électricité. Alors, c'est un projet pilote qu'il y a eu au Québec. En tout cas, j'en ai un, moi, dans la Beauce et puis je dois vous dire que ça fonctionne très bien. C'est sûr que ça s'est fait avec la recherche et développement, qu'ils ont eu de l'aide. Mais, quand on regarde qu'avec le lisier de porc ils sont rendus qu'ils sont capables d'alimenter toute leur ferme en électricité, et ils vendent le surplus à Hydro-Québec, en plus qu'ils vont... Il y a une espèce de séparation qui se fait dans le lisier, ils peuvent récupérer le phosphore, et le mettre en granules, et le revendre un peu comme un engrais chimique, si vous voulez. Quand on regarde, aujourd'hui, comment est-ce que les engrais chimiques peuvent coûter, au Québec, à cause justement du prix du pétrole. Alors, on a tout ici pour être autosuffisants, mais là, présentement, on ne l'utilise pas.

On a visité aussi dernièrement une autre entreprise, dans le coin de Saint-Hyacinthe, qui faisait la séparation, toujours dans le lisier de porc, ils pouvaient faire ça avec le lisier de boeuf, ils pouvaient faire ça avec les déchets d'abattoir. Ils séparent justement le phosphore, l'azote, et ils peuvent... ça peut remplacer les engrais chimiques. Ça fait que, quand on regarde tout ce que ça peut coûter... Je pense, c'est le député de Huntingdon qui parlait ce matin que les engrais chimiques présentement, au Québec, ont doublé de prix à cause de l'énergie qui monte tout le temps. Alors, moi, je pense que ce serait une solution qu'on devrait... La Financière et, je pense, le gouvernement, avec la recherche et développement, on devrait embarquer là-dedans le plus tôt possible parce qu'en même temps qu'on récupérerait ça, on pense à la pollution, on pense aux crédits du carbone, c'est toutes des choses qu'on pourrait utiliser, qu'on a ici.

Et c'est sûr qu'il faut parler un petit peu du projet de loi n° 81. Le projet de loi n° 81, je pense, ce que les producteurs nous disent et qui est très important, je crois, il faut s'organiser, il faut leur laisser le poids qu'ils avaient à l'intérieur de La Financière agricole. Si on calcule que, présentement, ils sont quatre sur 11, on veut ramener ça à quatre sur 13, moi, je pense que c'est un peu diluer leur poids de décision à La Financière agricole et je pense que ce serait une erreur. Il faut absolument que les producteurs agricoles aient un poids important dans ces décisions-là parce que, s'il y a quelqu'un qui connaît le domaine, s'il y a quelqu'un qui peut amener des solutions, qui peut faire avancer l'agriculture au Québec, c'est les producteurs agricoles qui vivent dans le champ tous les jours. On est en accord avec le principe du projet de loi n° 81, mais ce qu'on aimerait, c'est que le poids de nos producteurs agricoles demeure intact ou qu'il s'améliore et non le diluer dans tout ce projet de loi n° 81 là.

Alors, voilà, M. le Président, c'étaient mes déclarations du jour. Merci.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Les éphémérides. Merci, M. le député de Beauce-Nord. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix

Alors, à défaut d'autres intervenants, il ne me reste plus qu'à vous demander si le principe du projet de loi n° 81, Loi portant sur la modernisation de la gouvernance de La Financière agricole du Québec, est adopté.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Chagnon): M. le leader.

Renvoi à la Commission de l'agriculture,
des pêcheries et de l'alimentation

M. Couillard: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour étude. Et nous insistons pour qu'elle soit détaillée, cette étude.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Chagnon): Tant qu'à l'étudier, aussi bien de la détailler, effectivement. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Chagnon): M. le leader.

M. Couillard: Oui. Pourriez-vous avoir l'amabilité, M. le Président, de nous faire passer à l'article 37?

Projet de loi n° 73

Adoption

Le Vice-Président (M. Chagnon): Voilà. Alors, à l'article 37, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 73, Loi sur le courtage immobilier. Est-ce qu'il y a des interventions? Oui, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Alain Paquet

M. Paquet: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, permettez-moi d'abord de remercier ma collègue députée de Marguerite-Bourgeoys de me donner à nouveau l'occasion de prendre la parole pour soutenir le projet de loi n° 73, Loi sur le courtage immobilier. Il faut rappeler qu'à titre de ministre des Finances elle est la ministre responsable de l'application de cette loi dont nous entamons, aujourd'hui, l'étape finale du processus de son adoption.

La ministre des Finances a souligné, à plusieurs reprises ces dernières semaines, les avantages de ce projet de loi pour le public, pour les courtiers, pour les agences et pour l'organisme d'autoréglementation lui-même. Elle a dit et répété qu'il visait à moderniser l'encadrement actuel en protégeant mieux le public et en allégeant le fardeau réglementaire par des règles plus flexibles et mieux adaptées au fonctionnement actuel de cette industrie.

Rappelons que la loi qui encadre ce secteur date de 1991 et n'avait pas été revue significativement depuis. Il faut dire qu'il n'y avait pas de problèmes majeurs dans cette industrie et dans ce secteur, c'est important de le mentionner. Ça n'empêche pas quand même qu'avec l'évolution des pratiques, des us et coutumes, il y avait des éléments qu'on pouvait améliorer et moderniser en amont, et c'est ce que notre gouvernement fait, avec l'appui des oppositions, je présume, pour faire en sorte effectivement d'avoir un secteur qui soit mieux encadré et encadré de façon moderne.

Le projet de loi n° 73 en effet offre une meilleure protection du public par un encadrement pratique et efficace du courtage immobilier et du courtage hypothécaire. Il est attendu depuis de nombreuses années par l'ensemble du milieu, et la réforme de l'encadrement du courtage immobilier qui est proposée par le projet de loi n° 73 comporte même une série de nouveautés qui permettront d'assurer une meilleure protection du public qui a recours aux services des quelque 17 500 personnes qui oeuvrent dans le secteur.

Aujourd'hui, M. le Président, je profite de l'occasion pour revenir à l'essentiel. Je rappellerai donc l'essence même du régime d'encadrement du courtage immobilier et du courtage hypothécaire. Si nous discutons de l'adoption du projet de loi n° 73, c'est parce qu'il est d'intérêt public que les personnes et sociétés qui se livrent à des activités en courtage immobilier moyennant rémunération agissent avec honnêteté et compétence afin de bien protéger le public. L'objectif même de la loi et des règlements qui en découleront est de s'en assurer et de pouvoir sanctionner les personnes et sociétés qui manqueraient à leurs obligations, le cas échéant.

Tout courtier immobilier gagne d'ailleurs à ce que les autres courtiers et les agences agissent correctement. En effet, lorsqu'il arrive, heureusement rarement, mais lorsqu'il arrive, qu'un courtier manque à ses obligations d'honnêteté et de compétence, cela entache l'image de l'ensemble du secteur d'activité, et c'est toute l'industrie qui en souffre. M. le Président, en l'an 2000, l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec, connue aussi sous le nom d'ACAIQ, a présenté un mémoire sur la révision de la Loi sur le courtage immobilier. Ce mémoire était intitulé Pour une meilleure protection du public: des courtiers immobiliers pleinement responsables. C'est justement une orientation qui a été retenue dans le projet de loi n° 73. Ainsi, le courtier sera désormais solidairement responsable avec son agence de la bonne exécution du contrat de courtage.

Je mentionnais qu'il y avait des innovations proposées dans cet important projet de loi. Permettez-moi de les mentionner. D'abord, les personnes qui rendent des services aux consommateurs porteront tous le même titre. Le projet de loi n° 73 propose en effet que toutes les personnes physiques qui rendent des services de courtage soient désignées comme courtiers. Les entreprises de courtage pour lesquelles agiront ces courtiers porteront le nom d'agence. Donc, la notion qu'il y avait d'agent versus courtier auparavant donc était une double appellation, bien cette appellation maintenant est simplifiée. Et le public ne faisait pas la différence entre un courtier et un agent. C'est une clarification importante.

Deuxièmement, les personnes qui rendent des services aux consommateurs seront, je le disais, pleinement responsables. Le projet de loi n° 73 prévoit que le courtier ? ou anciennement agent ? sera solidairement responsable avec l'agence qu'il représente du préjudice qui serait causé en cas d'inexécution d'un contrat de courtage. Cela viendra corriger une anomalie fondamentale qui existait dans la loi actuelle. En effet, en ce moment, la responsabilité de l'agent n'est que partielle, même si c'est lui qui en pratique rend tous les services aux consommateurs, notamment la mise en marché de l'immeuble, les visites, négociations, rédaction de promesse d'achat, etc.

Troisièmement, les personnes qui rendent des services aux consommateurs devront être personnellement assurées. Le projet de loi n° 73 obligera tous les courtiers et anciens agents à détenir personnellement une assurance responsabilité professionnelle. Les agences représentées par les courtiers devront également détenir une telle assurance, comme c'est déjà le cas.

n(15 h 40)n

Étant donné l'intérêt légitime de l'industrie du courtage immobilier à ce que les personnes qui y exercent des activités soient bien encadrées, le législateur lui maintient sa confiance pour veiller à ce que les courtiers et agences agissent avec honnêteté et compétence. C'est ce qu'on appelle de l'autoréglementation. C'est cet organisme qui adoptera la réglementation, sous réserve d'une approbation gouvernementale, pour complémenter ou pour compléter les règles de la loi.

De la même manière, le comité de discipline de l'organisme continuera à veiller à discipliner les personnes et sociétés. Le législateur a aussi permis l'autoréglementation dans d'autres secteurs, notamment dans l'encadrement des ordres professionnels et du secteur de la distribution des produits et services financiers. Je souligne toutefois que le système d'autoréglementation sera renforcé. En effet, l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec, qui sera le nouveau nom de l'organisation, aura dorénavant pour seule mission la protection du public.

M. le Président, il est apparu important par ailleurs que la réforme de la Loi sur le courtage immobilier, concrétisée dans le projet de loi n° 73, ne pose pas un frein au dynamisme de l'industrie qui joue en effet un rôle important dans le développement économique du Québec. À ce sujet, je suis persuadé que les courtiers et les agences sauront bénéficier des mesures d'allégement réglementaire qu'il apporte et seront en mesure d'offrir des services encore meilleurs au public, et ce, toujours dans une optique de protection du consommateur. Le projet de loi n° 73 tient en effet compte des besoins des consommateurs et des réalités du marché immobilier d'aujourd'hui.

Un très grand nombre de personnes et organismes ont collaboré à cette réforme, et je voudrais encore une fois les remercier en mon nom et au nom de la ministre. J'ai eu l'occasion de présider un groupe de travail de députés ministériels, dans l'ancienne législature, qui a entendu pas moins de 16 organismes et reçu au total 18 mémoires qui ont permis de faire le tour et d'échanger avec les acteurs de ce secteur pour voir comment on pouvait améliorer et moderniser la loi ou l'encadrement réglementaire et législatif actuel, et je veux remercier la collaboration et la grande rigueur avec laquelle ces échanges ont permis de préparer un rapport qui a inspiré le projet de loi n° 73, et je veux saluer la ministre encore une fois pour la grande ouverture et le grand respect qu'elle a pour le travail des parlementaires, ministériels comme de ceux des oppositions.

D'ailleurs, comme je l'ai souligné précédemment, les travaux en commission parlementaire se sont déroulés dans un contexte constructif. J'ajoute donc un merci tout spécial à mes collègues de la Commission des finances publiques que j'ai l'honneur de présider, et notamment je veux saluer le député de Chauveau et ses collègues de l'opposition officielle ainsi que le député de Rimouski et ses collègues du deuxième groupe d'opposition. Je les remercie, en passant, pour les félicitations qu'ils ont faites en privé pour le travail qui avait été fait en amont à la préparation du projet de loi.

M. le Président, j'ai donc le plaisir et l'honneur de recommander, aujourd'hui, à cette Assemblée, au nom de la ministre des Finances, d'adopter le projet de loi n° 73, Loi sur le courtage immobilier. Ce sont les gens que nous représentons qui en sont les grands gagnants. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Je vous remercie beaucoup, M. le député de Laval-des-Rapides et adjoint parlementaire à la ministre des Finances. Nous entendrons maintenant M. le député de Chauveau qui est critique en cette matière.

M. Gilles Taillon

M. Taillon: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est une réforme qui arrive à terme, la réforme tangente de... le projet de loi n° 73, qui arrive à terme après plusieurs années d'attente de l'industrie. Il faut reconnaître le travail assidu du député de Laval-des-Rapides en amont de ce projet de loi là, et je le fais, M. le Président, publiquement aujourd'hui.

L'évolution du courtage immobilier et du courtage hypothécaire rendait nécessaire la révision de la Loi sur le courtage immobilier. Les courtiers et agences nous ont fait part des défis et des changements importants auxquels cette industrie est confrontée maintenant. Il y avait définitivement, de la part de ce milieu et de la part du public, une forte attente pour moderniser la législation en cette matière.

Les changements apportés par le projet de loi n° 73 répondent à cela et vont permettre, premièrement, d'assurer la sécurité du public et de mettre en place un ensemble de mesures cohérentes pour protéger le public. Ils vont permettre aussi, les changements apportés, de contraindre l'industrie à s'autoréglementer, notamment par la création d'un nouvel organisme d'autoréglementation du courtage immobilier. Et finalement les changements apportés par 73 vont permettre de simplifier la réglementation et d'alléger plusieurs processus au cours des transactions touchant le secteur immobilier et hypothécaire.

Nous estimons, M. le Président, que, dans l'ensemble, ce projet de loi ajuste de manière positive la Loi sur le courtage immobilier. Lors de l'étude détaillée en commission, l'ADQ a porté une attention particulière à certains aspects, notamment la question du référencement. Je veux souligner la contribution significative des principales associations, et du secteur immobilier, et du secteur hypothécaire, et leur collaboration à l'amélioration de cette législation, et leur apport aux amendements que nous aurons pu apporter en commission parlementaire pour bonifier le projet de loi.

Bref, M. le Président, l'opposition officielle est en faveur de l'adoption de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, M. le député de Chauveau. J'inviterais maintenant M. le député de Rimouski à prendre la parole.

M. Irvin Pelletier

M. Pelletier (Rimouski): Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir encore une fois sur le projet de loi n° 73, Loi sur le courtage immobilier. Pour ce faire, bien je vais m'inspirer des arguments qui ont été amenés par l'ACAIQ, auxquels je souscris. Alors, c'est pour ça que je les répète.

D'abord, ça va permettre une meilleure protection du public par un encadrement pratique et efficace du courtier immobilier. C'est leur premier argument. Disons que l'organisme d'autoréglementation va fonctionner un peu comme un ordre professionnel qui est vraiment dédié à la protection du public, puisque l'organisme en question aura un syndic, aura un comité de révision des décisions du syndic, aura un comité de discipline, aura un comité d'indemnisation, un service d'assistance, un comité d'inspection, des cours de formation continue, un fonds d'indemnisation et un programme d'assurance.

Un autre point, les personnes qui rendent des services aux consommateurs porteront toutes le même titre. Le projet de loi n° 73 propose que toutes les personnes physiques qui rendent des services de courtage soient désignées comme courtiers. Et les entreprises de courtage pour lesquelles agiront ces courtiers porteront le nom d'agence. Alors, la notion d'agent sera abandonnée, ce qui viendra simplifier les appellations.

Un autre point, les personnes qui rendent des services aux consommateurs seront pleinement responsables. Le projet de loi n° 73 prévoit que le courtier sera solidairement responsable, avec l'agence qu'il représente, du préjudice causé en cas d'inexécution d'un contrat de courtage.

Un autre point, M. le Président, les personnes qui rendent des services aux consommateurs devront être personnellement assurées. Le projet de loi n° 73 obligera tous les courtiers à détenir personnellement une assurance responsabilité professionnelle. Les agences représentées par les courtiers devront également détenir une telle assurance, comme c'est déjà le cas.

Un autre point, le projet de loi n° 73 tient compte des besoins des consommateurs et des réalités du marché immobilier d'aujourd'hui. C'est pourquoi le projet de loi permettra d'assurer une meilleure protection du public tout en ne faisant pas obstacle à l'évolution des pratiques professionnelles des courtiers.

Enfin, le projet de loi n° 73, fruit d'un long processus de consultation et de concertation... Puis ici, comme mes deux collègues, je pense que je dois souligner le travail qui a été fait depuis plusieurs années pour en arriver à ce résultat-là. Je peux souligner le bon travail aussi du député de Laval-des-Rapides, mais je ne prendrai pas la chance de le féliciter. Alors, plusieurs consultations ont été menées au cours des 10 dernières années auprès des courtiers et des agents ainsi que de leur association volontaire. Cette importante réforme reçoit d'ailleurs l'appui des chambres immobilières regroupées au sein de la Fédération des chambres immobilières du Québec. Ce projet de loi, M. le Président, regroupe aussi le courtage en prêt hypothécaire, ce qui est un champ d'activité très proche du courtage immobilier.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, notre formation politique est favorable à l'adoption de ce projet de loi. Merci beaucoup.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Est-ce que le projet de loi n° 73 portant sur le courtage immobilier est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Alors, le projet de loi est adopté. M. le leader.

M. Couillard: M. le Président, pourquoi ne pas passer dès maintenant à l'article 36?

Projet de loi n° 70

Adoption

Le Vice-Président (M. Chagnon): Vous insistez pour qu'on commence immédiatement le projet de loi... l'article 36? Alors, si ça peut vous faire plaisir, on va commencer, on va aller à l'article 36 pour faire en sorte que... vous demandez, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux... fasse en sorte qu'il propose l'adoption du projet de loi n° 70, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, la Loi sur l'assurance maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Est-ce qu'il y a une intervention ou des interventions? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, je voudrais d'abord remercier le leader d'être intervenu auprès de vous pour que nous discutions maintenant de cet article qui nous permet de faire l'adoption du projet de loi n° 70.

Rappelons brièvement de quoi il s'agit, parce qu'on a eu l'occasion d'en parler abondamment dans les étapes précédentes.

n(15 h 50)n

Le Vice-Président (M. Chagnon): Il me semble qu'il y a une certaine chimie entre vous et...

M. Couillard: Oui, nous avons une longue histoire commune, M. le Président.

Donc, nous avons eu l'occasion de discuter abondamment de ce projet à toutes les étapes de son adoption: à partir du dépôt, principe, étude détaillée, récemment la prise en considération du rapport de la Commission des affaires sociales. Rappelons très brièvement de quoi il s'agit: il s'agit de réintroduire ce qui était initialement prévu, là, lors du dépôt du projet de loi n° 83, à l'époque, c'est-à-dire le projet de loi prévoyait le consentement implicite pour la mise sur pied du Dossier de santé Québec, c'est-à-dire que tout citoyen est présumé consentant à ce que les informations pertinentes le concernant et pertinentes à son état de santé et aux professionnels qui le traitent, donc consent implicitement à ce que ces informations soient mises à la disposition des partenaires au moyen du Dossier santé Québec, à moins que cette personne bien sûr n'ai eu l'occasion ou n'ait exprimé son refus de la façon dont il sera convenu, notamment suite aux enseignements du projet pilote qui est actuellement en cours dans la région de la Capitale-Nationale, où on constate déjà que le nombre de personnes qui expriment un refus est très faible. La majorité des citoyens le considèrent en effet à leur avantage puisqu'ils veulent collaborer avec leur médecin, leur infirmière dans le traitement qu'ils ont à subir ou le suivi qu'ils ont à faire, veulent que ces informations soient disponibles.

Je rappelle encore une fois que, d'une part, ce n'est pas le dossier médical dont il est question, mais de certains éléments du dossier médical qui sont particulièrement pertinents au suivi tels que la liste des médicaments, qu'on soit ou non assuré du régime public, les résultats des examens de laboratoire, de radiologie, certaines données d'urgence, par exemple. Donc, ce n'est pas le dossier médical, il n'y a pas de diagnostic, de note d'évolution médicale, mais uniquement les informations que je viens de mentionner.

Ceci se fait parallèlement au déploiement de la radiographie... de la radiologie numérisée sur le territoire du Québec. Il y a déjà une région, le Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui est complètement numérisée. L'Estrie l'est également, ou, si elle ne l'est pas, c'est à quelques jours de se réaliser. À Montréal, l'Hôpital du Sacré-Coeur a déjà réussi le virage, et l'ensemble du territoire québécois devrait être couvert d'ici la fin 2009, ce qui se fait donc parallèlement au déploiement du Dossier santé Québec.

Rappelons, pour ceux qui nous écoutent, que l'imagerie numérisée permet d'acheminer les clichés radiologiques sur base numérique, comme le nom l'indique, donc par ordinateur et non pas sur les films traditionnels, ce qui est une économie considérable et une façon également de mettre les professionnels en contact les uns avec les autres.

On a eu l'occasion, au cours des travaux de la commission, d'entrer en dialogue avec la Commission d'accès à l'information, qui suivra avec nous le déroulement du projet expérimental sur le territoire de la Capitale-Nationale, qui lui-même, ce projet, sera l'objet d'un débat à la Commission des affaires sociales pour en tirer les enseignements et, si nécessaire, moduler le déploiement sur le reste du territoire suite à ces enseignements, tout ce déploiement étant déjà, au moment où nous nous parlons, déjà en phase de planification sur l'ensemble des régions du Québec.

Donc, M. le Président, sans plus de détails, je voudrais quand même signaler qu'il s'agit d'une évolution utile, importante pour le déploiement du Dossier santé Québec, un outil à la disposition des professionnels mais, d'abord et avant tout, au service des patients du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Chagnon): Merci, M. le député de Jean-Talon et ministre de la Santé. J'inviterais maintenant M. le député de La Peltrie à prendre la parole, s'il vous plaît.

M. Éric Caire

M. Caire: Merci, M. le Président. Alors, rendu à l'étape de l'adoption de principe, je pense qu'il n'est peut-être pas sans pertinence de faire un peu l'historique du projet de loi, M. le Président, parce qu'il y a eu, sur le type de consentement, un débat assez intense.

Quand j'ai pris mes fonctions comme porte-parole en santé et services sociaux, vous comprendrez que, de par ma formation passée, le Dossier de santé Québec est un des dossiers auxquels je me suis intéressé prioritairement. Et, lorsque j'ai regardé l'ensemble du projet, il y a un certain nombre de points qui ont attiré mon attention, M. le Président, dont le type de consentement. Alors, assez rapidement, j'ai fait le tour des fédérations des professionnels pour voir un peu, tâter le terrain parce que, de mon point de vue, il m'apparaissait que le type de consentement qui était suggéré initialement, c'est-à-dire un consentement explicite, m'apparaissait être une mauvaise solution. Je le regardais bien sûr avec un autre oeil, l'oeil de l'informaticien qui voit là-dedans toutes sortes de problèmes, qui voit là-dedans toutes sortes de défis non nécessaires, compte tenu du fait qu'il m'apparaissait assez évident que quelqu'un qui fait appel aux services d'un professionnel de la santé consentait à mettre entre les mains de ce professionnel de la santé là tous les outils afin qu'il puisse poser le meilleur diagnostic possible. Et ça, prioritairement, M. le Président, ça incluait son dossier de santé. Donc, il m'est apparu assez rapidement que c'était une voie qu'il ne fallait pas emprunter.

Et j'ai eu l'occasion de faire des représentations à ce sujet-là, représentations aussi fortes du même constat qui était fait par les fédérations médicales, qui voyaient là aussi toutes sortes de problèmes, toutes sortes de difficultés, difficultés, M. le Président, dont la conséquence était de voir le dérapage du projet. Parce qu'assez rapidement le constat qu'on faisait, M. le Président, c'est tout le projet de Dossier santé Québec qui était menacé par un élément qui normalement ne devait pas être aussi fondamental pour le projet. Or, je pense qu'il était important, il était de notre devoir de signaler nos craintes, de signaler nos appréhensions, d'autant plus qu'elles étaient appuyées de façon significative par les principaux intervenants.

M. le Président, je ne veux pas profiter du moment pour faire le procès de ce qui a été fait. Ce qui a été fait a été fait, et je dois présumer de la bonne foi de tout le monde dans cette perspective-là, mais je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il y avait, ailleurs au Canada, d'autres législatures qui avaient emprunté le même chemin, le chemin du consentement explicite et qui, en cours de route, n'avaient eu d'autre choix que d'arriver à la même conclusion, conclusion à laquelle nous arrivons aujourd'hui avec l'adoption finale du projet de loi, c'est-à-dire que cette voie-là était une voie sans issue, que c'était une voie où on hypothéquait le projet plutôt que de le faire avancer.

Je pense qu'il aurait été pertinent, dans l'ensemble de l'évaluation du dossier, de tenir compte du fait que deux législatures canadiennes avaient dû ? comme nous l'avons fait, comme nous avons dû le faire ? reculer sur la notion du consentement. Ce n'est pas anodin, M. le Président, parce qu'il y a là-dedans beaucoup de leçons et beaucoup de leçons que l'ensemble des parlementaires, des législateurs que nous sommes devons tirer de ces conclusions-là. Et je reprends ce vieux proverbe chinois que j'aime beaucoup, M. le Président, qui dit que l'homme sage apprend de ses erreurs, mais l'homme vraiment sage apprend des erreurs des autres. Et il m'apparaît que la sagesse dans ce dossier-là aurait été minimalement de s'interroger pourquoi ces législatures-là ont reculé, pourquoi est-ce qu'elles ont changé, comme nous le faisons aujourd'hui, de vision quant au type de consentement à mettre de l'avant dans un projet comme celui du Dossier santé Québec?

D'autant plus, M. le Président, que, sur tout l'aspect de l'informatisation du réseau de la santé, le Québec est très en retard. Et, sans vouloir minimiser les efforts de rattrapage qui sont déployés, il faut constater à quel point ces efforts-là doivent être soutenus, à quel point ces efforts-là doivent être encore plus grands, parce que l'ensemble de notre réseau en souffre énormément. Et, dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, dans un contexte où, on l'a vu, la gestion du réseau souffre et ça amène des pertes d'efficacité, je pense qu'on ne peut pas se permettre de perdre du temps sur des débats comme nous avons présentement et qui trouvent sa conclusion dans l'adoption finale du projet de loi.

D'autant plus qu'à mon avis le grand principe de l'informatisation du réseau de la santé doit être une priorité, et, dans ce sens-là, il est important de poser les bons gestes, et, dans ce sens-là, il n'est pas mauvais de s'inspirer de ce qui se fait ailleurs. C'est quelque chose que j'ai répété au ministre à satiété dans un autre débat, et je pense qu'il est fondamental de s'inspirer de ce qui se fait ailleurs. Et, à trop vouloir réinventer la roue, bien, on se ramasse avec des roues carrées, puis là on se rend compte que, bien, finalement, il faut peut-être arrondir les coins, et ça, ça prend du temps, nous perdons du temps, et, pendant ce temps-là, il y a des professionnels de la santé qui ont besoin d'outils, qui ne les ont pas.

n(16 heures)n

Un autre aspect, M. le Président, sur lequel je voulais revenir: le ministre de la Santé et des Services sociaux se plaît, depuis un certain temps, à souligner l'absence de suggestions, l'absence d'idées de l'opposition officielle. Alors, je voulais prendre le temps qui m'est imparti pour corriger un certain nombre de choses, et je pense que le Dossier santé Québec et la question du consentement implicite, explicite est une bonne tribune pour le faire, parce que, M. le Président, nous avons fait des suggestions. Je pense que, dans ce dossier-là, nous avons été, nous serons toujours une opposition extrêmement constructive.

Sur la notion du consentement explicite, M. le Président, c'est un des premiers sujets, dans tout l'ensemble du Dossier santé Québec, c'est un des premiers sujets que j'ai abordés avec le ministre de la Santé le printemps dernier. Ça faisait quelques mois que j'étais en fonction et j'ai dit au ministre de la Santé que, s'il avait l'intention de revenir au consentement implicite, il aurait mon appui mais que, s'il maintenait le cap sur le consentement explicite, ce serait une bataille sans merci parce que j'avais la conviction que c'était une erreur, et le ministre ainsi que son équipe ont fait les mêmes constats. Donc, vous me permettrez, M. le Président, on n'a pas nécessairement toujours les tribunes pour le faire, mais vous me permettrez au passage, là, peut-être de ramasser une partie du crédit.

Je ne voudrais pas... je n'ai pas la prétention d'avoir été celui qui a fait changer la planète de cap, mais je pense qu'il y a une partie du crédit qui revient à l'opposition officielle et au travail qu'on a fait parce que c'est évident que le ministre de la Santé et des Services sociaux, dans ce qu'il se plaît à appeler le Parlement de cohabitation, n'a pas la capacité d'agir seul. Bien sûr, ça prend l'appui minimalement d'un des deux groupes d'opposition, et, dans ce dossier-là, il a reçu aussi l'appui de mon collègue et de la deuxième opposition. Mais je pense qu'il est important de souligner les bons coups que l'opposition fait et de faire la promotion du consentement implicite au détriment du consentement explicite, qui, lui, nous amenait dans une voie sans issue. Je pense que c'était un travail d'opposition constructive. Je pense que c'était dans l'objectif de rendre ce projet-là viable, performant et d'en faire un outil qui va augmenter le temps que les professionnels auront à traiter leurs patients plutôt que d'augmenter le temps de paperasse qui sera utilisé à remplir des formulaires de consentement, à faire des mises à jour et autres tâches connexes qui ne sont pas en lien avec une prestation de services à donner aux patients.

Il y a une autre suggestion qu'on a faite aussi, que je me permets de souligner dans le grand débat, même si ce n'est pas lié directement à la question du consentement explicite, c'est sur le nombre de technopoles. Quand je suis rentré en fonction, M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux a offert un briefing technique, que j'ai accepté. J'ai pu rencontrer les responsables du projet, dont Dr Simard, qui ont expliqué, entre autres, que le déploiement du Dossier santé Québec passait par l'installation de 16 technopoles. Pour rendre ça peut-être un peu plus simple, M. le Président, là, ça veut dire que, dans 16 régions, la région aura ses serveurs, toute la quincaillerie informatique nécessaire pour garder l'information de sa région. Alors là, on va multiplier ça 16 fois.

Encore une fois, M. le Président, probablement mon passé a resurgi assez rapidement, et j'ai demandé au responsable: Pourquoi 16 emplacements? Pourquoi multiplier par 16? Parce que, là, il faut se rendre compte que ça veut dire 32 serveurs minimalement, là, parce que, tu sais, normalement tu en as un, mais tu t'assures d'en avoir un autre au cas où le premier tombe. Bon. Ça fait que ça, c'est 32 serveurs plus la quincaillerie, plus les logiciels, plus les 16 équipes que ça prend pour maintenir ça, donc on voit la facture monter, on voit la difficulté monter en même temps que la facture.

Et là la réponse, M. le Président, m'a laissé un peu perplexe, parce qu'on me disait: Bien, les régions, si on centralisait ça, vont avoir l'impression d'être un peu dépouillées du contrôle. Il y a un peu de politique là-dedans, politique avec un immense P. Là, je disais: Mais c'est parce que peut-être que les contribuables québécois n'ont pas envie de signer un chèque pour qu'on puisse faire de la politique avec un immense P. Peut-être que le contribuable québécois, lui, il a envie d'avoir un système qui est performant au meilleur coût possible. Et, sur la performance, je me disais: Vous, M. le Président, c'est très possible que vous soyez traité à Montréal, région d'où vous venez, mais il n'est pas impossible, amateur de plein air comme je vous connais, que vous ayez un pépin de santé ailleurs au Québec et que vous soyez traité ailleurs au Québec. Et donc il y aura très certainement un...

Une voix: ...

M. Caire: Oui, bien, je le sais, M. le Président, on a eu l'occasion d'en discuter. Alors, ce n'est pas impossible. Même chose pour le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est un grand pêcheur devant l'Éternel, et ce n'est pas impossible, je ne le souhaite...

Une voix: ...

M. Caire: À la ligne, oui, absolument, un pêcheur à la ligne devant l'Éternel. Ce n'est pas impossible, M. le Président, ce n'est pas impossible, je ne le souhaite pas, bien sûr, mais ce n'est pas impossible qu'il ait des problèmes de santé. Donc, ça veut dire que vous pourriez avoir un dossier de santé à Québec, vous pourriez en avoir un autre au Saguenay?Lac-Saint-Jean, vous pourriez en avoir un autre en Abitibi. Alors, bien sûr, quand le professionnel de la santé veut s'informer de l'ensemble des informations qui vous concernent, il faut faire une requête. Alors, ça veut dire que votre requête va être transmise à 16 technopoles différentes. Donc, c'est 16 requêtes que vous envoyez à 16 endroits différents. Ça fait que vous imaginez, multiplié par le nombre de patients, le trafic que ça peut faire sur un réseau, là, d'avoir les 16 technopoles. Alors, ça aussi, c'est des questions que je posais, parce qu'au niveau de la performance, bien sûr, on multiplie les requêtes. Là, je ne veux pas tomber dans le langage trop technique, mais ça, ça veut dire, M. le Président, que l'autoroute, elle va être occupée, là, il va y avoir du trafic rien qu'en masse.

Or, nous avons eu l'occasion d'avoir un autre briefing technique, en séance de travail de la CAS, avec mon collègue de Marie-Victorin, et, à ce moment-là, j'ai eu l'occasion de réinterroger le Dr Simard sur les intentions de sa direction quant à l'installation de 16 technopoles. Le Dr Simard a dit: Bien, écoutez, suite aux recommandations et aux constats du député de La Peltrie, on a considéré de réduire le nombre de technopoles. Alors, à ce moment-là, on a parlé de trois qui seraient calquées sur les RUIS. C'était pour moi une bonne nouvelle parce qu'on ramenait... dans des dimensions à mon avis beaucoup plus performantes et beaucoup plus respectueuses des enveloppes budgétaires du projet et dans une perspective où effectivement ce qu'on vise, c'est l'efficacité et non pas la politique avec un grand P. Et là on avait à coeur un projet qui fonctionne, et je pense pouvoir dire, M. le Président, qu'on avait là-dedans notre mot à dire. On a eu là-dedans notre mot à dire, et le Dr Simard l'a dit à la CAS, et nous en étions fiers.

Donc, je veux revenir évidemment sur les interrogations ou les allégations du ministre, qui dit: Bien, l'opposition officielle n'a pas de suggestion, on attend toujours les propositions de l'opposition officielle, on attend toujours les idées de l'opposition officielle. Je pense que, dans ce dossier-là, comme dans d'autres, mais dans ce dossier-là, je pense que c'est un bon exemple où nous avons été extrêmement proactifs tout en étant constructifs, parce que, je le répète, M. le Président, l'objectif de l'opposition officielle, il est de voir à ce que ce projet-là naisse, à ce que ce projet-là aboutisse. Nous souhaitons l'informatisation efficace et performante du réseau de la santé tout comme, j'en suis sûr, mon collègue de Marie-Victorin, tout comme, j'en suis sûr, le ministre de la Santé et des Services sociaux, et donc c'est dans cette optique-là que nous avons fait les recommandations que nous avons faites, et j'espère que le ministre l'enregistre et j'espère qu'il aura l'occasion de faire amende honorable, M. le Président, et de reconnaître qu'effectivement l'opposition officielle, dans ce dossier-là comme dans d'autres, a eu une approche constructive, une approche qui vise l'efficacité du système tout en faisant notre travail, notre travail d'opposition quand même, parce qu'il n'y a pas de chèque en blanc.

Je l'ai dit dès le début, il n'y aura jamais de chèque en blanc pour le gouvernement, pour le ministre. Mais, si on peut apporter nos suggestions, nos commentaires, si on peut faire avancer les dossiers, dans la mesure où nous sommes en accord avec les dossiers, c'est avec plaisir qu'on va le faire.

Maintenant, M. le Président, le consentement explicite. Pourquoi le consentement explicite et pour qui le consentement explicite? Je l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, si par malheur, et ça nous arrive tous un jour ou l'autre, si par malheur on a à consulter un professionnel de la santé, bien il est clair que notre objectif, et au moment où on est malade, il est clair que l'objectif, c'est de recouvrer la santé le plus rapidement possible, et, dans ce sens-là, ce qu'on veut, c'est de donner aux professionnels de la santé tous les outils pour qu'ils puissent nous aider à recouvrer la santé le plus rapidement possible. Alors, pourquoi on le fait? Bien, M. le Président, imaginez, imaginez-vous, là, que chaque individu, au Québec, doit consentir explicitement à ce que le professionnel de la santé qu'il consulte puisse avoir accès à son dossier, que ce soit le médecin, que ce soit le spécialiste, que ce soit le physio, que ce soit le psychologue, que ce soit quelque professionnel de la santé que ce soit, M. le Président, et là vous consentez, vous consentez, vous consentez: Oui, je consens, puis on peut-u me soigner, s'il vous plaît? Mais là ce professionnel de la santé là, lui, a une tâche administrative à faire. Ce n'est pas juste: je consens, je te signe un formulaire, mets ça dans le tiroir de ton bureau, puis c'est fini, maintenant on peut passer au diagnostic. Non, non. Après, il est prévu dans la loi que le professionnel de la santé a une tâche administrative qui suit le consentement qui a été exprimé explicitement.

n(16 h 10)n

Alors, M. le Président, pourquoi on change? Bien, c'est parce que je pense que c'est assez simple d'imaginer toute la tracasserie administrative, toute la paperasserie, toute la perte de temps que ça représente. Or, je pense que tout le monde en est conscient, déjà, dans le réseau de la santé, le personnel médical, le personnel soignant est astreint à énormément de tâches administratives. Je ne voudrais pas me lancer dans des statistiques hasardeuses, M. le Président, mais il y a un pourcentage non négligeable du temps de nos professionnels de la santé qui va en tâches administratives, et quelquefois on a l'impression que c'est même le principal de leur temps qui va à des tâches administratives, alors que ça devrait être l'inverse. Ce qu'on devrait viser, c'est qu'un professionnel de la santé passe la majorité de son temps à soigner des patients puis qu'on laisse l'administration puis la paperasserie à d'autres personnes.

Donc, le consentement explicite nous amenait directement dans ce cul-de-sac là, M. le Président. Alors, pourquoi changer? Pour éviter ça, pour faire en sorte de ne pas ajouter au fardeau administratif des professionnels de la santé, pour ne pas augmenter le pourcentage de leur temps qui est occupé à des tâches administratives, alors qu'au fond ce qu'on veut, c'est qu'on soigne des gens, hein, on s'occupe de ceux qui sont malades.

Pour qui? Bien, fondamentalement, M. le Président, pour les patients. On en discutait avec le ministre de la Santé, dans 95 % des cas, le patient va consentir, le patient va consentir à ce qu'on consulte son dossier. En fait, M. le Président, si on prend la situation actuelle... M. le Président, ne pensez pas que je veux m'acharner sur votre santé, mais admettons que vous tombiez malade, qu'il vous arrive quelque chose. Vous vous présentez à l'hôpital, le médecin vous voit, va vous ausculter, va poser un diagnostic, va prendre un dossier, va remplir le dossier, va remplir le diagnostic, va faire des constats, va faire une prescription dans certains cas, bref il va constituer un dossier, et en aucun temps, dans le processus, en aucun temps le médecin ne vous a demandé la permission, ne vous a dit, M. le Président: Acceptez-vous que je consigne par écrit les observations que j'ai faites sur votre santé, et le diagnostic que je pose, et le traitement que je propose? Acceptez-vous? Je ne pense pas, M. le Président. Je ne pense pas ici, là, qu'on... On fait le tour des gens puis on leur demande, là, à chaque fois qu'ils ont consulté: Est-ce qu'on leur a demandé ça explicitement? Je ne crois pas.

La réalité, c'est que ça se fait, et le ministre de la Santé nous disait qu'à l'époque où il était médecin il était courant pour lui, sur une note manuscrite, de transférer un dossier d'un de ses patients à un autre professionnel de la santé, à un autre médecin, et en aucun temps, en aucun temps on ne demandait le consentement de la personne. Ça se faisait parce que la santé du patient commandait qu'on agisse de cette façon-là, parce que le bon fonctionnement, à l'intérieur du traitement, commandait qu'on fonctionne de cette façon-là et qu'il était logique de le faire de cette façon-là parce que ce qui était au centre de la préoccupation, ce qui est au centre de la préoccupation de cette façon-là de faire, c'est l'efficacité, et l'efficacité pour le patient.

M. le Président, c'est clair qu'il y a des gens pour qui le consentement implicite n'est pas une bonne chose, on en a parlé en Commission des affaires sociales, notamment pour des groupes peut-être plus facilement identifiables, des gens qui souffrent de problèmes de santé mentale, entre autres, qui ont des réticences par rapport à ça, qui ont des craintes par rapport à ça, bien sûr, d'autres groupes qui peuvent être ciblés, qui peuvent être ostracisés par cette façon-là de faire, qui pourraient être victimes de préjugés. Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable puis penser que c'est impossible que ça arrive, mais, au nom de la majorité ? et même, quand on parle de 95 % des gens, là, on peut dire au nom de l'immense majorité des citoyens du Québec ? il m'apparaît que l'utilisation, le recours au consentement implicite sert les intérêts du patient, sert les intérêts du plus grand nombre, sert les intérêts des Québécois.

Et, je le dis en toute bonne foi, M. le Président, bien sûr, dans la mise en application, dans la gestion de tout ça, il faudra tenir compte des préoccupations des minorités. Bien sûr, il faudra s'assurer que le système est au service de tout le monde et non pas de 95 % de la population mais bien de 100 % de la population. Mais je pense que ce n'est pas incompatible. Je pense que l'efficacité que nous amène le consentement implicite n'est pas incompatible avec la notion de servir l'ensemble de la population du Québec.

Autre domaine où l'opposition officielle a été extrêmement proactive, M. le Président, je pense que le ministre va le reconnaître aussi, c'est dans l'étude article par article qui a été faite du projet, parce que, je viens de le dire, M. le Président, bien sûr il y a des groupes qui pourraient être ostracisés, qui pourraient se sentir menacés d'être ostracisés par le consentement implicite, mais il y a aussi, dans le projet de loi, à mon avis, des zones grises, des zones qui ne sont pas claires et des situations qui ne sont pas prévues ou rencontrées par le projet de loi. Le ministre de la Santé d'ailleurs, je pense, l'a reconnu en commission parlementaire, et je pense, par exemple, à la capacité de rétroagir.

Il peut arriver, M. le Président, que vous tombiez malade, hein? Non, vous pouvez garder votre carte d'assurance maladie, M. le Président. Il peut arriver que vous tombiez malade. Il peut arriver que vous décidiez de ne pas permettre la constitution d'un dossier électronique. Ça peut arriver. Et donc, dans le temps, vous maintenez cette décision-là jusqu'au jour où, pour une raison qui vous appartient, M. le Président, vous changez d'idée. Vous dites: Finalement, je consens à ce qu'il y ait un dossier qui soit constitué, au niveau du DSQ, pour moi. Alors, admettons que la période où vous n'avez pas consenti est de une, deux, trois, quatre années. Est-ce qu'il y aura possibilité de rétroagir? Est-ce qu'il y aura possibilité de reconstituer cette portion-là de votre dossier qui pourrait être extrêmement pertinente pour le professionnel de la santé? Parce que, dans votre historique médical, en quatre ans, il a pu se passer bien des choses ? on ne le souhaite toujours pas, M. le Président, mais ça a pu arriver ? et, s'il y a eu des phénomènes, s'il y a eu des événements majeurs, bien c'est pertinent, pour le professionnel de la santé, d'être en mesure d'y avoir accès bien sûr parce que plus on a d'information, mieux on comprend, mieux on comprend, mieux on traite.

Donc, c'est important ? et c'est une observation qu'on a faite dans l'étude article par article ? qu'on puisse rétroagir dans ces cas-là parce que bien évidemment, si on accepte la notion que le consentement peut être retiré et que le patient peut changer d'idée, donc peut dire: Bon, bien, moi, je veux changer d'idée, il serait pour le moins nuisible, pour cette personne-là, de ne pas être en mesure de revenir en arrière et de donner toute l'information. Il serait pénalisant pour cette personne-là qu'une telle situation se produise, pénalisant, M. le Président, parce que ça met une pression supplémentaire sur l'individu. Il se dit: Écoute, si je ne donne pas le consentement maintenant, il est possible que, dans mon historique de santé, il manque plusieurs années, il manque plusieurs informations importantes. Alors, même si je ne suis pas d'accord, même si j'ai des doutes, j'ai des réticences, même si j'aimerais ça peut-être prendre un peu de temps, là je n'ai pas le choix, il faut que je donne le consentement maintenant.

Or, cette possibilité-là, ça amène une pression inutile sur des gens qui n'en auront probablement pas besoin, parce qu'au moment où on va leur demander ça ils seront malades, ils auront besoin d'un professionnel de la santé, ils n'auront pas nécessairement envie de s'asseoir puis avoir des grandes réflexions sur la pertinence du consentement explicite, du consentement implicite, de la capacité de revenir en arrière et les impacts que ça va avoir de ne pas constituer maintenant un dossier sur les individus en question.

Donc, si on veut qu'il y ait un bon niveau de conscience et si on veut que le consentement qui est donné, explicite, implicite, si on veut que ce soit fait en toute conscience, de façon libre, bien, évidemment, il faut boucher ce trou-là. C'est clair, M. le Président, comme je viens de le démontrer, que ce sera de nature à amener vers une décision qui ne sera peut-être pas celle qui serait privilégiée par la personne.

n(16 h 20)n

Une autre observation, M. le Président, qu'on a faite, et sur laquelle la loi est muette, et qu'il faudra se pencher, c'est sur la question des mineurs qui atteignent l'âge du consentement. Or, M. le Président, pour toutes sortes de raisons, on comprend qu'un parent peut décider qu'on ne constitue pas de dossier informatique pour son enfant. M. le Président, imaginez-vous un enfant qui a des problèmes de santé dès son jeune âge, donc qui a plusieurs épisodes à l'hôpital, donc un dossier médical assez volumineux, et les parents, pour des raisons, comme je le dis, qui leur appartiennent, prennent la décision qu'il n'y a pas de dossier médical électronique qui sera constitué pour leur enfant. Si l'enfant en question est en très bas âge, avant d'atteindre l'âge légal, qui est de 14 ans, vous comprendrez, M. le Président, que ça peut vouloir dire une période extrêmement importante de sa vie. Or, là aussi, il faut se pencher sur cette question-là, parce qu'à partir de 14 ans l'enfant aura la possibilité de consentir à ce qu'on constitue un dossier sur sa santé, sur son historique de santé, et là-dessus aussi, pour sensiblement les mêmes raisons, M. le Président, il va être fondamental d'être capable de reconstruire tout ça.

Je prends des exemples proches de moi. On sait que, quand les enfants ont des problèmes de santé, problèmes de santé importants, l'impact, il est là et l'impact à long terme, il est là. Et, pour le professionnel de la santé, bien c'est fondamental d'être capable d'avoir l'historique complet, et rapidement. Donc, encore une fois, il m'apparaît, M. le Président, que, sur cette question-là, le projet de loi laisse des zones d'ombre importantes, et il va être extrêmement important, pour le ministre de la Santé et des Services sociaux et son équipe, de considérer ces questions-là et d'être en mesure d'y répondre dans une future législation que nous aurons à étudier, possiblement l'automne prochain, du moins je l'espère, parce que je pense que ce sont des questions qui sont importantes, fondamentales, et qui en plus vont avoir un impact sur la façon dont on va administrer l'ensemble des dossiers et le consentement implicite. Alors, c'est clair que ce n'est pas des notions qui sont sans impact, ce n'est pas des notions qui vont nécessairement se régler facilement. Alors, la loi peut apporter des correctifs, mais encore faut-il que ces correctifs-là puissent être transposés sur les systèmes informatiques, et donc ça veut dire déjà avoir en tête une façon de faire pour être capable de pallier à ça.

Donc, évidemment, on a bien hâte de voir ce que le ministre va nous proposer pour répondre à ces observations-là que nous avons faites et qui ne pouvaient pas être corrigées dans le présent projet de loi, on le comprend, on le comprend, parce que c'est des questions complexes, c'est des questions qui méritaient qu'on y réfléchisse, qu'on s'assoie, qu'on réfléchisse et qu'on arrive avec une solution bien ficelée. Donc, on n'a aucune objection à laisser au ministre et à son équipe le temps d'observer ça, mais on pense qu'assez rapidement il faudra arriver avec des solutions concrètes là-dessus et que les législations nécessaires seront présentées assez rapidement, tout ça dans l'optique du bon fonctionnement et de la réalisation du Dossier santé Québec.

Donc, encore une fois, M. le Président, je pense que l'opposition officielle agit de façon responsable, dans l'objectif de voir progresser le projet, de le voir aboutir, de le voir se concrétiser, mais que ça se fasse évidemment de façon responsable et efficace. Et encore une fois je souligne que je pense que l'opposition officielle, de ce côté-là, a fait un travail qui était digne de mention, et qui était constructif, et qui vient un petit peu à l'encontre de ce que nous disait le ministre de la Santé sur l'absence de nos propositions. Moi, je pense qu'on vient de lui en faire quelques-unes, là, qui sont assez pertinentes.

Je vais vous parler rapidement de la CAI. Effectivement, je dois reconnaître à mon collègue député de Marie-Victorin que c'est à sa suggestion que nous avons entendu la CAI. Je vais peut-être apporter un petit correctif par contre sur le fait que nous avions des réticences. On n'avait pas de réticences, on voulait juste que ça se fasse dans une certaine perspective. Mais je salue cette initiative effectivement de mon collègue, que nous puissions entendre la CAI dans une perspective évidemment constructive. Pour nous, et j'ai eu l'occasion de le dire à mon collègue, le consentement implicite n'était pas nécessairement un grand sujet de débat parce que pour nous c'était quelque chose qui allait de soi qu'on puisse le faire, eu égard à tout ce que j'ai dit précédemment, M. le Président, et sur lequel, rassurez-vous, je n'ai pas l'intention de revenir.

Mais il y a des éléments extrêmement importants qui nous ont été apportés par la CAI, et, entre autres, entre autres, M. le Président, la grande conclusion de ça, c'est que le débat que nous avons à faire dans ce dossier-là, ce n'est pas le débat sur le type de consentement...

Une voix: ...

M. Caire: Tant qu'à être là, M. le Président... Ce n'est pas sur le type de débat, M. le Président, parce que consentement explicite, implicite, dans les faits, pour le citoyen, pas convaincu, M. le Président, que ça a un impact extrêmement majeur. Là où ça a un impact majeur et là où la CAI a amené un avis qui était important, M. le Président, c'est sur le niveau de conscience qu'ont les citoyens quand ils prennent une décision, qu'elle soit explicite, qu'elle soit implicite, parce que, M. le Président, vous comprendrez que de ne pas refuser explicitement la constitution d'un dossier, c'est une décision, hein?

Ce qu'on adopte comme projet de loi aujourd'hui, ce n'est pas le fait que le citoyen n'a plus à décider, c'est que la façon dont le citoyen va décider est différente, c'est-à-dire que, par son consentement implicite, tacite, il décide qu'on peut constituer sur lui un dossier, alors qu'avant on nous demandait de le faire de façon explicite. Et la CAI a été très claire là-dessus, ce n'est pas ça, le débat. Ce n'est pas: Est-ce que c'est le bon type de consentement? Ce n'est pas: Est-ce qu'il faut avoir un consentement explicite? Est-ce qu'il faut avoir un consentement implicite? Le vrai débat, ce qu'il faut faire, et les mesures qui en découlent, et ça, c'est extrêmement important à mon avis, M. le Président, les mesures qui vont en découler, c'est sur le niveau de conscience des citoyens.

Or, tout à l'heure, M. le Président, je vous relatais... Puis je pense que vous avez sans doute eu le même type d'expérience de la façon dont ça se passe généralement au cabinet du médecin. Le médecin, il va faire ce qu'il a à faire puis il ne va pas vous demander: Est-ce que je peux faire un résumé de mes constatations?, il va le faire. Il ne va pas vous demander: Est-ce que je peux écrire mon diagnostic?, il va le faire. Il ne va pas vous demander: Est-ce que je peux consigner mes recommandations puis le traitement que je propose?, il va le faire. Est-ce que je peux classer tout ça dans un dossier?, il va le faire. Si vous retournez le voir, M. le Président, il ne va pas vous demander: Ça vous dérangerait-u si je regardais votre dossier médical?, il va le faire. Il va le faire, M. le Président, parce qu'il assume que vous êtes d'accord, parce qu'il assume que vous comprenez qu'il a besoin de cet outil-là pour être en mesure de vous soigner. Or, le consentement implicite, c'est exactement ça, M. le Président, c'est la continuité de ce qui se fait déjà, sauf que le support maintenant est différent. Au lieu de faire ça sur papier, ça va être sur informatique.

Mais pourquoi le niveau de conscience est si important? Parce que ce qui interpellait la CAI, c'est que le dossier papier bien sûr, s'il est disponible, l'est pour un petit nombre. Donc, les gens malintentionnés ont plus difficilement accès à un dossier papier parce qu'évidemment il faut être sur place, il faut physiquement être capable d'avoir accès au dossier, alors que le dossier électronique ? bien sûr, tout le monde connaît Internet, hein ? fait en sorte que, depuis son salon, depuis son sous-sol, depuis son ordinateur, où il soit, des gens malintentionnés avec un haut niveau de compétence pourraient, je dis bien «pourraient», tenter d'aller se procurer cette information-là, ce qui n'est absolument pas souhaitable bien sûr mais qui pourrait arriver. Or, cette dimension-là...

Je n'ose pas prononcer le mot «accessibilité de l'information» parce que, M. le Président, et j'y reviendrai, il y a quand même des mesures de sécurité qui existent et qui font en sorte que c'est plus compliqué qu'on pense d'avoir accès à de l'information qui est sécurisée. Mais, disons-le, cette accessibilité-là ou cette possible accessibilité là fait en sorte que le patient qui voit ces informations-là consignées doit être bien conscient du geste qu'il pose, et c'est très exactement là-dessus que la CAI nous a mis en garde ou, je dirais plutôt, nous a orientés, parce que ce qu'il faut bien faire dans tout le processus d'implantation, c'est de faire en sorte que nous soyons conscients de ce qui se passe, alors qu'actuellement nous ne le sommes pas. Actuellement, on se laisse guider là-dedans, on agit là-dedans, on avance là-dedans puis on trouve ça normal, naturel que ça se passe comme ça.

Ce que l'implantation du DSQ avec le consentement implicite va nous amener, c'est la possibilité pour le législateur, surtout pour le gouvernement et pour l'équipe de mise en place, c'est la possibilité d'informer la population sur le processus, sur ce qui se passe quand on va en cabinet, quand on va voir le médecin, quand on va rencontrer un professionnel de la santé, sur ce qui se passe et sur les impacts de ça, et c'est là-dessus où la CAI nous a allumés, c'est là-dessus où la CAI a dit: Nous, on a des craintes par rapport à ça parce que... Et là on a donné l'exemple de certaines institutions en Europe qui malheureusement ont été victimes de piratage informatique, avec les conséquences que ça amène bien sûr pour ceux qui en sont les victimes.

n(16 h 30)n

Là-dessus, M. le Président, vous me permettrez une parenthèse. Bien sûr, aucun système au monde ne peut garantir une sécurité à 100 %. Aucun système au monde ne peut avoir la prétention qu'il n'y aura jamais de faille, il n'y aura jamais de fuite, il n'y aura jamais d'ouverture pour des personnes mal intentionnées, que c'est absolument impossible de pirater un système. Il n'y a aucun système informatique au monde, M. le Président, qui peut vous garantir ça. Ceci étant dit, moi, je me plais toujours à rappeler que les grandes banques dans le monde ?  même au Québec, une institution renommée, réputée et chérie par les Québécois que sont les caisses populaires Desjardins ? permettent plusieurs transactions, sinon à peu près toutes les transactions financières, sur Internet. Pourquoi? Parce que ces institutions-là, bien conscientes des failles qu'il peut y avoir, bien conscientes des lacunes qu'il peut y avoir, comprennent que le niveau de sécurité est extrêmement élevé et que, oui, bien sûr, il y aura toujours des possibilités de contourner ces mesures de sécurité là, mais que ça demeure un exploit quand on y arrive, quand on y parvient, et que le risque est probablement moins élevé que les gains d'efficacité qu'on a à accepter cette façon-là de faire.

Parce qu'actuellement, il faut bien le dire, le support papier n'amène pas un très haut niveau de sécurité non plus, et j'ai eu l'occasion d'en discuter avec le président de la CAI, sur la situation actuelle, M. le Président, à savoir que, moi, dans les visites que j'ai faites de centres hospitaliers, il est arrivé souvent que je suis rentré dans des locaux et que, dans ces locaux en question, je voyais le dossier d'un patient grand ouvert sur la table, accessible, à la vue de tout le monde, et qu'il aurait été extrêmement simple pour n'importe qui, je dis bien n'importe qui ? évidemment, qui a accès à la pièce, mais, comme ce n'était pas un endroit où il y avait quelque sécurité que ce soit; n'importe qui ? qui est à l'hôpital avait accès à la pièce en question aurait pu, de façon mal intentionnée, prendre le dossier puis partir avec. Et ça, le président de la CAI l'a admis, il a dit: Oui, effectivement, c'est une réalité, c'est une réalité. Et le ministre de la Santé, je pense, était aussi d'accord avec moi sur le fait qu'actuellement la façon de consigner et de conserver les informations n'offre pas un niveau de sécurité qui fait en sorte que la transition du présent vers le support informatique va faire en sorte qu'on va perdre au niveau de la sécurité. Au contraire, je pense que, même le ministre de la Santé était d'accord avec moi, au niveau de la sécurité, je pense qu'il y a un gain.

Donc, il y a un gain au niveau de la sécurité, il y a un gain au niveau de l'efficacité, et, dans le fond, ce que nous dit la CAI, c'est que le vrai débat que nous avons à faire comme législateurs, c'est conscientiser les citoyens par rapport au changement, profiter de l'opportunité que nous avons pour conscientiser nos citoyens, nos concitoyens au geste qu'ils sont en train de poser et à la portée du geste qu'ils sont en train de poser et aux conséquences du geste qu'ils sont en train de poser. Et ça, je pense qu'on a une belle occasion de faire tout ça avec les projets pilotes qui sont à se déployer notamment dans la région de la Capitale-Nationale, ils seront une occasion extrêmement importante pour nous.

Alors, parlons de ce projet pilote, M. le Président. Une chose à laquelle je consens, une chose qui pour moi est importante, et je sais que c'est le cas aussi pour mon collègue de Marie-Victorin, avec qui on en a discuté, c'est que, nous, les groupes d'opposition, on ait l'opportunité de suivre ce qui se passe dans les projets pilotes. Le ministre de la Santé et des Services sociaux a offert à la CAI de superviser les étapes, mais je pense qu'il va être extrêmement important que, du côté des deux partis d'opposition, nous puissions faire sensiblement la même chose. Et là l'objectif n'est pas d'interférer dans la prérogative ministérielle de faire cheminer le dossier, mais, comme je l'ai dit précédemment, je pense que le ministre, le gouvernement, a besoin des deux groupes d'opposition pour faire avancer ce projet-là.

Autant mon collègue de Marie-Victorin et moi-même avons déclaré très ouvertement être favorables au projet et à son aboutissement, mais autant, un comme l'autre, nous avons un travail de surveillance à faire, et en aucun temps nous n'avons l'intention de signer un chèque en blanc au ministre de la Santé et des Services sociaux. Donc, je pense qu'il va être important que nous puissions, dans le cadre des projets pilotes, que nous puissions faire le suivi. D'autant plus que, bon, si mon expérience des blocs opératoires est assez limitée... Malgré que j'en ai une, M. le Président, je tiens à le dire. J'ai eu l'occasion, de par mes fonctions, d'assister à une chirurgie cardiaque, donc j'ai une faible expérience des blocs opératoires, qui n'est en rien comparable à celle du ministre de la Santé et des Services sociaux.

Par contre, par contre, au niveau de l'informatique, de l'implantation, de la conception de projets, là, je pense qu'on peut inverser les rôles. Je ne dis pas que le ministre de la Santé n'a aucune expérience. Probablement qu'il a déjà installé Word sur son ordinateur, donc ça lui donne quand même une certaine expérience. Mais, de mon côté, j'ai été un peu plus loin dans le concept. Et de la même façon, M. le Président, que j'ai posé un regard critique mais constructif sur l'architecture qui était proposée du projet, de la même façon que j'ai posé un regard objectif et constructif sur, par exemple, le consentement explicite, implicite, les impacts sur le système, les impacts sur l'efficacité du système, de la même façon que nous avons posé un regard critique mais constructif sur le projet de loi quant à la capacité de rétroagir quand une personne change son consentement, quant à la gestion inévitable qu'il faudra faire sur un mineur qui atteint l'âge de donner son consentement, donc dans tous ces dossiers, je pense que nous avons fait la démonstration qu'on était capables de porter un regard critique mais constructif, de la même façon je pense qu'on peut agir au niveau du projet pilote.

Et ce serait à l'avantage, il me semble, du ministre de la Santé et des Services sociaux, de son équipe mais du gouvernement dans l'ensemble de s'assurer de cette collaboration des deux partis d'opposition. Puis je suis convaincu que mon collègue de Marie-Victorin, puis je le laisserai s'exprimer là-dessus, mais je suis convaincu que là-dessus on parlera d'une même voix. Il serait fondamental que les deux partis d'opposition aient l'occasion de faire un suivi de ce projet pilote là de façon à être bien informés et à en connaître tous les tenants et les aboutissants.

Pourquoi, M. le Président? Parce qu'au fond le projet pilote va nous donner plusieurs pistes. Tout à l'heure, bon, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur le déploiement, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur le fait qu'on voulait voir aboutir ce projet-là, on voulait le voir s'implanter. Et le Québec a besoin qu'on accélère la cadence et qu'on puisse informatiser l'ensemble du réseau aussi rapidement et efficacement que possible. Alors, dans «efficacement et rapidement», il y a le mot «efficacement», et le projet pilote va nous permettre justement, M. le Président, dans ses conclusions, de voir ce qui n'a pas fonctionné. Par exemple, quand je parlais qu'on avait une opportunité en or au niveau du consentement, de la conscientisation des citoyens, je pense qu'une des grandes conclusions attendues du projet pilote, c'est jusqu'à quel point on a réussi à conscientiser le citoyen, jusqu'à quel point on a réussi à faire en sorte que le citoyen, dans un processus de consentement implicite, était bien conscient de tout ce qui se passait.

Et de la même façon, M. le Président, dans le cas où un citoyen décide de changer son consentement, de quelle façon on va être en mesure d'orchestrer tout ça, M. le Président? De quelle façon on va être en mesure de s'assurer que, dans tout le processus, le citoyen a de façon volontaire, même si c'est implicite, M. le Président, et j'insiste là-dessus, même si le consentement est implicite, que le citoyen, de façon libre et volontaire, a consenti à ce qui se passait? Et pour ça bien sûr il faut qu'il soit conscient de ce qui est en train de se passer.

n(16 h 40)n

Et là on a une occasion en or avec le projet pilote, dans l'information qui sera donnée aux citoyens, dans l'interaction que les professionnels de la santé auront avec les citoyens, nous aurons l'occasion de mesurer jusqu'à quel point le déploiement est efficace, le déploiement se fait bien et le déploiement atteint les objectifs que nous nous sommes fixés, dans une perspective où on le fait dans un endroit où ça se passe bien. Parce que la raison pour laquelle la région de la Capitale-Nationale a été choisie, c'est qu'elle rencontrait plusieurs critères, dont le haut niveau d'informatisation, dont l'organisation des soins sur le terrain, donc un ensemble de critères, là, où on a dit: À Québec, ça va bien, ça fait qu'on va se donner un terreau fertile pour planter la graine. Puis c'est un peu ça qu'on a fait. Et il faut être conscients de ça aussi, M. le Président, parce que, si le projet pilote nous amène les bonnes solutions dans un endroit où ça va bien, bien il y a des chances pour qu'on puisse répéter le processus et créer les mêmes conditions dans les endroits où ça va moins bien, et il y a des chances qu'on puisse développer une recette qui va faire en sorte qu'implanter le DSQ, implanter le Dossier santé Québec et faire en sorte de le déployer à travers toute la province, ça va devenir facile, ça va devenir simple. Alors, la première fois, on est un peu moins bons que la deuxième, que la troisième, et ainsi de suite, M. le Président, je pense que ça va de soi.

Et donc il est important pour nous d'être en mesure de se prononcer là-dessus. Quand je parle de «nous», c'est un «nous» d'opposition, j'oserais dire que mon «nous» est inclusif puisqu'il comprend le deuxième groupe d'opposition. Donc, ça va être important pour les deux partis d'opposition d'être en mesure de se prononcer et de juger de l'efficacité du travail qui aura été fait. Parce que bien sûr il y aura un travail subséquent à faire. Il y a d'autres étapes, d'autres étapes qui vont nécessiter l'appui des deux groupes d'opposition, et, si ce travail-là se fait bien au niveau du projet pilote, si ce projet-là se fait à la satisfaction des trois partis, incluant bien sûr les deux groupes d'opposition, bien vous comprendrez, M. le Président, qu'après ça on sera assez mal placés pour critiquer le gouvernement dans sa façon de faire. Et donc la conclusion de ça, c'est: je pense qu'il est de l'intérêt du gouvernement d'inclure les deux partis d'opposition à travers le travail qu'on pourrait faire, au niveau de la Commission des affaires sociales, sur le projet pilote, sur le déploiement du projet pilote, sur l'analyse que nous pourrons faire des résultats du projet pilote, sur ses conclusions mais aussi sur les corrections qui pourront être apportées.

Parce que c'est souhaitable, mais c'est peu probable, M. le Président, que le projet pilote fonctionne du premier coup puis que tout marche bien du premier coup, qu'il n'y ait aucun correctif à faire puis qu'on se dise: Voilà, nous avons, la première fois, pondu la recette. Alors, c'est peu probable, c'est souhaitable, mais c'est peu probable. Puis, en quelques années de carrière en informatique, je peux vous assurer d'une chose, M. le Président, je n'ai pas vu ça souvent. J'ai vu le contraire assez souvent arriver, mais ça, je n'ai pas vu ça très souvent, et, même si je souhaite ça, même si je souhaite le voir avant mon dernier jour, j'ai un doute que le projet pilote va me permettre cette petite satisfaction, M. le Président. Donc, ça va être important, je pense, qu'autant de la deuxième opposition que du côté de l'opposition officielle on soit en mesure d'avoir accès à toutes les étapes, surtout les conclusions, pour être en mesure de corriger le tir et d'aider le gouvernement à corriger le tir.

Sur cette question-là, M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux a été on ne peut plus clair: il serait étonnant qu'il n'y ait pas d'autre législation à venir. Donc, ce que je décode, là, c'est que déjà, dans la planification de la mise en place du DSQ, dans la planification qui est faite de tout ce projet-là, le ministre de la Santé et des Services sociaux est conscient qu'il y aura d'autres lois à venir. Je pense à la constitution du registre, qui a, l'automne dernier, si ma mémoire est bonne, donné lieu à la présentation d'un projet de loi qui était une correction qu'on devait apporter. Je pense à la loi n° 70, que nous adoptons de façon définitive aujourd'hui, M. le Président, qui est un correctif d'une décision qui avait été prise initialement, pour laquelle il y a des changements qui ont dû être apportés. Je comprends de ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux nous a dit à la Commission des affaires sociales qu'il y aurait vraisemblablement d'autres correctifs à être apportés par le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui nécessiteront encore une fois l'appui des deux groupes d'opposition.

Et c'est dans ce sens-là, M. le Président, où j'espère que le ministre va nous impliquer autant que faire se peut dans tout le déploiement des projets pilotes et des conclusions de façon à ce que, lorsque ces législations, qui, au dire du ministre, sont inévitables, arriveront, bien nous serons dans une continuité au lieu d'être toujours en train de se dire: Bon, bien, attendez, là, vous nous demandez ça, puis là on va prendre le temps de regarder le projet de loi, puis on va regarder les impacts, puis on va essayer d'évaluer qu'est-ce que ça veut dire, puis... Alors, nous serons déjà au fait, et, qui sait, M. le Président, peut-être pourrons-nous, dès l'élaboration du projet de loi, être en interaction avec le gouvernement pour s'assurer qu'au moment où le projet de loi sera déposé bien ce sera le fruit d'une collaboration. Ça n'a pas été le cas jusqu'à date, malheureusement, ça n'a pas été le cas, mais, sait-on jamais, peut-être que ce Parlement de cohabitation dans lequel nous vivons, au dire du ministre de la Santé et des Services sociaux, amènera ces nouvelles façons de faire qui sont souhaitables, surtout dans un dossier comme celui-là, M. le Président, où il y a consensus des trois partis, où les trois partis voient d'un bon oeil l'implantation du Dossier santé Québec et dans une perspective ? et je pense que là-dessus mon collègue de Marie-Victorin sera d'accord avec moi; dans une perspective ? où nous ne souhaitons plus avoir, ou apprendre des choses, ou avoir des surprises désagréables comme ça a été le cas au moment de la publication du rapport du Vérificateur général. Il y avait là-dedans des choses qui étaient de nature à nous déranger profondément, des choses qui amenaient un questionnement par rapport au ministre de la Santé et des Services sociaux. Et, dans la mesure où lui me disait qu'il était transparent, qu'il était ouvert, qu'on avait accès à toute l'information, vous comprendrez que, quand le rapport du Vérificateur général arrive et qu'on apprend tout ce qu'on a appris sur la gestion, sur les contrats ? je ne reviendrai pas là-dessus, M. le Président, vous l'avez lu comme moi ? bien on s'est sentis tassés, mis de côté puis à quelque part un peu trahis aussi, et ça, c'est beaucoup plus de nature à susciter la méfiance que l'adhésion.

Et je reviens sur le projet pilote, M. le Président. Je pense que le ministre de la Santé et des Services sociaux a une belle occasion de faire en sorte qu'une situation comme celle-là ne se reproduise plus, parce qu'il aura accepté que, des deux côtés de la Chambre, du côté de la deuxième opposition puis l'opposition officielle, nous serons partie prenante du travail qui aura été fait, qu'il n'y aura plus de surprise, qu'il n'y aura pas de mauvaise surprise, parce qu'il y aura toujours des surprises dans un projet de cette ampleur-là, il ne faut pas non plus demander la lune, mais qu'il n'y aura plus de mauvaise surprise et il n'y aura pas des choses qui arriveront comme ça et qui seront dénoncées par le Vérificateur général plutôt que discutées avec le ministre de la Santé, l'opposition officielle, les responsables du projet et tous ceux qui sont pertinents dans le dossier.

M. le Président, je vais conclure en disant que le projet de loi n° 70 nous amène un certain nombre d'enseignements. D'une part, je pense que, de par sa nature même, de par le travail qui a été fait, le ministre de la Santé et des Services sociaux doit comprendre aujourd'hui qu'il doit quérir l'adhésion des deux partis d'opposition dans un dossier comme celui-là. Je me permets de faire un petit crochet, M. le Président, parce que je pense, entre autres, au projet de loi n° 23, qu'on retarde, et qu'on retarde, et qu'on retarde, et pour lequel on offre des choses, on les retire, on propose d'autres choses, on change d'idée. Je trouve ça un peu déplorable comme façon de faire, et nous avons fait la démonstration, dans le projet de loi n° 70, de notre ouverture à collaborer avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, de notre ouverture à faire avancer les dossiers. Mais, vous savez, M. le Président, un Parlement de cohabitation, il faut que tout le monde cohabite. Il ne faut pas que ce soit: J'ai des idées, vous m'appuyez. Il faut que ce soit: Bien, moi aussi, j'en ai. Puis ce serait le fun que le ministre de la Santé ait les mêmes égards pour nos propositions et nos idées sur d'autres sujets que nous en avons pour les siennes. Cette adhésion-là, et c'est son leadership à lui bien sûr, cette adhésion-là, c'est à lui de la susciter par sa façon d'agir, par sa façon de respecter ses engagements, par sa façon de respecter les deux groupes d'opposition. Et, si le projet de loi n° 70 a un grand enseignement, M. le Président, je pense que c'est celui justement de l'adhésion et du travail qu'on peut faire en collaboration.

n(16 h 50)n

Il peut arriver, M. le Président, qu'on ne soit pas d'accord. C'est arrivé, le ministre de la Santé et moi, qu'on n'était vraiment pas d'accord sur certains sujets, mais je pense que ça s'est toujours fait dans le respect. Sur le projet de loi n° 70, M. le Président, en fait sur le Dossier santé Québec, il y a des éléments sur lesquels je n'étais pas d'accord. J'en ai parlé en ouverture de mon allocution, il y a des éléments que je voyais puis je me disais: Il y a un danger là-dedans, ce n'est pas bon. J'en ai parlé au ministre, on a discuté ensemble. Je suis allé voir les gens sur le terrain, j'ai été chercher leurs réactions, leurs commentaires, leurs inquiétudes. J'en ai rediscuté avec le ministre, on a collaboré, en partie. Comme je dis, là, je comprends que je ne peux pas prendre tout le crédit des changements, là, c'est sûr, là, mais, en partie, là, ça a eu pour effet de changer des décisions. Et là, sur d'autres tribunes, sur d'autres terrains, on tente de faire la même chose, mais, cette fois-là, pour des raisons que je juge, moi, idéologiques. Visiblement, on n'a pas la même réaction, on n'a pas la même ouverture, et je trouve ça déplorable.

Je trouve ça déplorable, parce qu'on ne peut pas être constructifs juste d'un côté de la Chambre, il faut que ce soit des deux côtés de la Chambre qu'on ait l'objectif d'être constructifs, il faut que ce soit des deux côté de la Chambre qu'on ait pour objectif de faire avancer des dossiers, et je ne pense pas que la bonne philosophie, quand on veut faire avancer des choses, c'est de dire: Si vous n'êtes pas d'accord avec moi, je retire mes billes, je m'en vais dans ma chambre. Je m'excuse, là, mais la cohabitation, ce n'est pas ça, là. Ce n'est pas de dire: Je m'enferme dans ma chambre, je barre la porte, je ne parle à personne, je mets la musique dans le piton parce que je ne veux pas vous entendre. Je ne pense pas que ce soit comme ça qu'on va faire progresser des dossiers puis je ne pense pas que ce soit de cette façon-là qu'on va faire bien fonctionner ce Parlement de cohabitation. Je pense que c'est comme...

Et la grande leçon du projet de loi n° 70, c'est en ayant de l'ouverture, c'est en ayant à l'esprit que l'opposition officielle a un travail de surveillance à faire, tout le monde en est conscient. Tout le monde sait que le rôle de l'opposition officielle, c'est de surveiller l'action du gouvernement, de dénoncer ce qui ne fonctionne pas, de forcer le gouvernement à faire plus, à faire mieux. Tout le monde est conscient de ça, mais, dans un Parlement minoritaire, le rôle de l'opposition officielle, c'est aussi d'être constructif, et nous le sommes, nous le sommes, mais on ne peut pas être tout seuls à être constructifs, il faut que le ministre de la Santé et des Services sociaux, sur tous les dossiers, sur l'ensemble des dossiers, soit prêt à recevoir nos idées, nos suggestions et le fasse de façon vraiment ouverte, pas juste en paroles, pas juste en façade, pas juste quand ça fait son bonheur. Il faut qu'en tout temps, sur tous les dossiers, sur toutes les tribunes, le ministre de la Santé et des Services sociaux soit capable de piler un peu sur son orgueil puis dire: Bon, bien, c'est correct, je ne suis pas nécessairement d'accord, mais je vais vous écouter, je vais vous écouter et je vais donner suite à vos propositions, et ça, M. le Président, je pense que c'est fondamental.

Et, si aujourd'hui l'opposition officielle, à votre question: Est-ce que ce projet de loi est adopté?, nous allons répondre «adopté», c'est parce que nous avons été constructifs, c'est parce que le ministre de la Santé a eu une certaine écoute, et, s'il a la même écoute, la même ouverture dans tous les dossiers, M. le Président, je pense qu'il y aura beaucoup plus de projets de loi où nous pourrons dire, tout le monde ensemble: Adopté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Marie-Victorin, porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de santé. M. le député.

M. Bernard Drainville

M. Drainville: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, c'est sans surprise que nous allons vous annoncer, cet après-midi, que nous allons effectivement voter en faveur du projet de loi n° 70. Si jamais il y a quelques curieux qui prennent la peine de relire les propos que nous tenons aujourd'hui en cette Chambre, dans un futur lointain sans doute, je les inviterai à relire tout ce que j'ai déjà dit sur le projet de loi n° 70, que ce soit au moment du dépôt du projet de loi, que ce soit au moment de la prise en considération, que ce soit également de l'étude article par article en commission parlementaire. Bref, je ne vais pas répéter tout ce que j'ai déjà dit sur le projet de loi n° 70. Je pense quand même qu'il faut réitérer un certain nombre de choses, puisque c'est la dernière fois que nous aurons à nous prononcer formellement sur la question du projet de loi n° 70, je pense que c'est important de réitérer un certain nombre de choses, M. le Président.

Nous avons décidé d'appuyer le projet de loi n° 70 parce que nous croyons à l'informatisation du Dossier de santé du Québec. Nous, on croit à l'informatisation du réseau de santé du Québec de façon générale parce qu'on pense que c'est une façon essentielle, incontournable, primordiale d'augmenter l'efficacité et la productivité dans le réseau de la santé du Québec. On met déjà, M. le Président, plus de 25 milliards de nos taxes et de nos impôts dans le réseau de santé et de services sociaux québécois, et il est bien évident que nos concitoyens n'ont pas beaucoup d'appétit pour augmenter leur fardeau fiscal. Ils considèrent de façon générale qu'ils versent déjà beaucoup de taxes et d'impôts au trésor public et donc ils souhaitent ardemment, nos concitoyens, que nous utilisions ces 25,5 milliards que nous investissons dans le système de santé et de services sociaux de façon intelligente, de façon efficace, de faire en sorte qu'on obtienne le maximum de résultats en échange de cette ponction fiscale, en échange de cet investissement public donc que nous dégageons pour nos soins de santé et de services sociaux.

Et là le Dossier de santé du Québec, nous en avons bon espoir, va nous permettre justement d'augmenter l'efficacité de notre réseau de santé et de services sociaux, M. le Président. Nous croyons sincèrement que c'est une façon intelligente de maximiser notre investissement public dans le système de santé et de services sociaux. Donc, on ne peut pas dégager notre appui au projet de loi n° 70, on ne peut pas séparer notre appui au projet de loi n° 70 de notre appui plus large à l'informatisation du réseau de santé, de notre appui plus large à la création du Dossier de santé du Québec. Bon, évidemment, pour en arriver à cet appui, il faut quand même mettre les choses un peu en perspective. Ce que propose le projet de loi, c'est de passer du consentement explicite à un consentement qui est implicite.

Je pense que c'est important, M. le Président, de rappeler que, lors de la création du Dossier de santé du Québec, en 2005, l'actuel ministre de la Santé du Québec était favorable à ce qu'il y ait un consentement implicite. Et ce n'était pas un consentement implicite total, mur à mur, si je pourrais me permettre, ce n'était pas un consentement implicite absolu, mais il était favorable à ce qu'il y ait consentement implicite dans la phase posthospitalière. Lorsque, par exemple, quelqu'un subit une chirurgie, rentre à la maison, a droit donc à la visite de l'infirmière, a droit à des soins à domicile, il était favorable à ce qu'une partie de l'information soit transmise à la personne qui va venir traiter donc le patient à domicile, pour que ces soins-là puissent se donner, puissent se faire de la façon la plus efficace possible pour le patient.

Et je tiens à citer quand même quelques extraits de cette étude article par article du projet de loi n° 83, en 2005, donc au moment de la création du Dossier de santé du Québec. Alors, c'est le ministre de la Santé, l'actuel ministre de la Santé qui parle, et voici ce qu'il disait. «Il existe déjà également, dans la Loi de santé et de services sociaux, des circonstances spécifiques où des renseignements peuvent être transmis sans le consentement de l'usager. Ce que ce projet de loi fait ? il parlait de 83 ? ça en ajoute, et en particulier dans le cas d'un programme de soins ou de services individualisés ? et c'est essentiellement ce qui fait difficulté», disait-il. Alors, «ce que ce projet de loi fait, ça en ajoute, et en particulier dans le cas d'un programme de soins ou de services individualisés [...] toujours dans la perspective de l'équilibre, [donc] d'avoir le maximum de garanties, mais également de favoriser la libre circulation de l'information pour améliorer les soins et les services aux personnes. C'est l'objectif qu'on poursuit», disait-il à ce moment-là.

Je continue à le citer, M. le Président. C'est toujours le ministre de la Santé actuel qui parle. «Pour ce qui est du problème plus épineux, celui qu'on a discuté plus longuement hier avec la Commission d'accès à l'information, de la transmission de renseignements entre l'instance locale [l'hôpital, par exemple] et les partenaires du réseau local ? exemple, organismes communautaires, entreprises d'économie sociale ou autres, bureaux de médecins, par exemple, privés ? le raisonnement que nous avons suivi est le suivant[...], c'est que, lorsqu'on a, par exemple, adhésion ou consentement d'un citoyen à un plan de services individualisé, de la même façon que lorsqu'on est admis à l'hôpital et qu'on consent à des soins, implicitement on consent également à la transmission de l'information jugée pertinente. Par qui? Pas par le système de santé, par le professionnel ou la professionnelle qui est en charge d'organiser ce plan de services et qui exerce son jugement professionnel, d'après le critère de nécessité qui est déjà inclus dans les lois protégeant les documents publics dans le contexte privé ou public.»

n(17 heures)n

Troisième extrait, toujours... on est toujours en 2005, 9 février 2005, c'est l'actuel ministre de la Santé qui parle et qui nous... Il est en train, M. le Président, de nous expliquer ce pour quoi il est en faveur d'un consentement implicite, à ce moment-là, disons, pour des traitements donc individualisés lorsque la personne, par exemple, retourne d'un séjour à l'hôpital. Alors, il dit ceci, je le cite toujours: «...lorsqu'on discute avec la personne de son plan de services individualisé, d'avoir une discussion explicite sur le fait que le consentement à ce plan de services comprend également le consentement sur la circulation d'informations pertinentes et nécessaires en regard du service particulier. [Par] exemple, si vous avez besoin d'un soin à domicile, ce n'est pas votre dossier médical qui est envoyé là-bas, c'est des informations qui sont pertinentes à la prestation de service, style vos coordonnées, la présence ou non d'une limitation physique, des besoins particuliers, etc.»

Et là il ajoutait ceci, M. le Président. Je pense que c'est important de le verser au procès-verbal de cette ultime intervention sur le projet de loi n° 70, il dit: «...mais il faut faire attention, toujours dans cette recherche d'équilibre ? entre l'explicite et l'implicite; il faut faire attention, toujours dans cette recherche d'équilibre ? de ne pas créer tellement d'alourdissements que, comme nous disait quelqu'un hier, on n'en n'aura jamais, d'informatisation du réseau de la santé, puis on n'aura jamais de circulation de l'information.»

Alors, déjà à ce moment-là, M. le Président, en 2005, le ministre de la Santé craignait qu'un consentement explicite mur à mur, où les gens doivent signer une formule, un formulaire pour permettre donc qu'on inscrive dans le Dossier de santé des informations concernant leur santé, concernant, bon, le profil pharmacologique, concernant les résultats des tests de laboratoire, les résultats d'imagerie médicale, les allergies, et tout le reste, bref, ce qui est compris dans la création du Dossier de santé du Québec... donc, déjà à ce moment-là, M. le Président, le ministre nous disait, en 2005: Il faut faire attention, là, il faut faire attention. Il ne faut pas que ce soit un consentement explicite mur à mur parce que ça risque de créer tellement d'alourdissements qu'il n'y en aura pas, d'informatisation du réseau de santé du Québec.

Savez-vous quoi, M. le Président? Dans les jours, dans les semaines qui ont suivi ces déclarations en 2005, le ministre a changé d'idée. Pour des raisons qui ne sont pas très, très claires, il a décidé de changer son projet de loi et de proposer un consentement explicite global, absolu, mur à mur. Donc, les possibilités, là, qu'il avait d'abord insérées dans le projet de loi original, le projet de loi n° 83, les possibilités d'un consentement implicite pour les soins individualisés lorsqu'on est de retour à domicile, par exemple après une hospitalisation ou une chirurgie, bien cette possibilité-là, il l'a refermée. Et là, M. le Président, trois ans plus tard, le ministre de la Santé nous revient et nous dit, sans reconnaître son erreur ? ce n'est pas dans ses habitudes, M. le Président, de reconnaître ses responsabilités ? il nous dit: J'ai fait une erreur et je vous demande ? à l'opposition officielle et à nous, du Parti québécois ? de procéder à un changement législatif et donc de retourner au consentement implicite avec le projet de loi n° 70.

La vérité, M. le Président, c'est qu'il n'avait pas bien, bien le choix parce que presque tous les acteurs concernés par le Dossier de santé du Québec ne voulaient rien savoir de gérer le consentement des usagers, hein? Ça devenait extrêmement compliqué de demander à chaque personne qui se présente dans ton cabinet ou à chaque personne qui se présente dans une clinique de radiologie, ou dans une pharmacie, ou dans un hôpital, lui demander: Écoute, veux-tu signer ce formulaire? Serais-tu d'accord pour que tes informations personnelles sur ta santé, à toi, puissent être inscrites, puissent être déposées dans le Dossier de santé? Ça devenait ingérable, M. le Président.

Je me rappelle d'avoir rencontré le Dr Dutil, l'ex-président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, qui me disait: Écoutez, si le ministre continue à aller de l'avant avec cette idée de consentement explicite, il va nous perdre, il va nous perdre, on n'est pas d'accord. Et là il était déjà dans une négociation, le Dr Dutil, pour que ses membres, si jamais ils étaient obligés par la loi de gérer le consentement, donc de demander le consentement, demander la signature aux usagers, il était déjà dans une négociation pour obtenir compensation. Et il est bien évident, M. le Président, que ça aurait coûté des sous aux bons contribuables qui nous écoutent. Il aurait fallu payer non seulement les omnipraticiens, je pense que les médecins spécialistes également auraient demandé compensation, les pharmaciens, etc.

Et le problème évidemment, M. le Président, c'est que, dans un contexte où on manque de médecins, dans un contexte où c'est difficile d'avoir accès à un médecin de famille, imaginez le temps que tous ces médecins auraient passé à demander le consentement, à expliquer à monsieur ou à madame ce qu'est le Dossier de santé et toutes les petites clauses qui viennent avec. Imaginez tout le temps qu'on aurait investi là-dedans et qui aurait ralenti la prestation des soins, hein? On en aurait sans doute eu pour des années à obtenir le consentement de combien de millions d'usagers pour que le Dossier de santé se mette finalement en branle. Parce que, tant et aussi longtemps, M. le Président, que vous n'avez pas ce consentement des usagers, tant et aussi longtemps que vous n'avez pas une masse critique, le Dossier de santé n'est pas vraiment fonctionnel. Parce que, pour que le Dossier de santé fonctionne, M. le Président, il faut que la vaste majorité des usagers y adhèrent, il faut que l'information clinique ou... «clinique», ce n'est peut-être pas le mot, M. le Président, mais l'information sur la santé des usagers en ce qui a trait... je l'ai dit tout à l'heure, le profil pharmacologique, les données d'urgence, les allergies, et tout le reste, les médicaments qui ont été prescrits par le passé, les tests de laboratoire qui ont été subis, les résultats de laboratoire et d'analyses, les résultats, dis-je bien, d'imagerie médicale, il faut, à ce moment-là, que toute cette information-là, dans la majorité des cas, se retrouve dans le DSQ pour que le système puisse fonctionner, pour qu'on ait un niveau de fiabilité et de, je dirais, de sécurité qui soit suffisamment élevé.

Alors là, le ministre, voyant le mur qui se dressait devant lui, M. le Président, a décidé de changer d'idée et là il nous est arrivé avec le projet de loi n° 70. Et, nous, on a dit, depuis le départ, M. le Président, qu'on était prêts à le regarder, le changement du consentement explicite au consentement implicite, parce qu'on voyait bien qu'avec le consentement explicite on risquait de faire échouer l'opération d'informatisation du réseau de santé. Mais on voulait que ça se fasse, hein, ce passage du consentement explicite au consentement implicite, on voulait que ça se fasse d'une façon qui soit responsable, M. le Président, parce qu'on voyait bien... on entendait, on a lu, on a reçu des mémoires d'un certain nombre d'organismes qui nous disaient avoir des inquiétudes au sujet du consentement implicite et donc on avait, comme législateurs, M. le Président, le devoir de prendre en compte ces hésitations, ces inquiétudes et voir si elles étaient... s'il y avait moyen, disons, de les... s'il y avait moyen, disons, d'expliquer à ceux et celles qui nous les formulaient un certain nombre de réponses qui étaient susceptibles de les rassurer. Et, moi, je dois vous dire, M. le Président, qu'après avoir écouté les arguments de part et d'autre, qu'avoir participé d'une façon extrêmement, je dirais, réfléchie à l'étude du projet de loi n° 70, on en est venus à la conclusion, nous, que, dans l'ensemble, c'était un bon projet de loi qui respectait le droit à la vie privée, qui respectait le droit à la sécurité, à la protection des renseignements personnels.

Ça ne veut pas dire qu'on ne comprend pas les inquiétudes, M. le Président, des groupes qui se sont adressés à nous, là. Quand on sait, par exemple, qu'il y aura dans ce DSQ tout le profil pharmacologique, tous les médicaments qui ont été prescrits par le passé, les résultats d'analyses de laboratoire, d'imagerie médicale, et tout ça, vous comprendrez, M. le Président, que, quand on a toute cette information-là, on n'a pas besoin du diagnostic du médecin pour se faire une assez bonne idée de la condition de santé, de la pathologie ou de la maladie que la personne devant nous a pu avoir par le passé, hein? Ce n'est pas tout le dossier patient qui va se retrouver dans le Dossier de santé du Québec, mais, avec toute l'information qu'il va y avoir dedans, on peut se faire une sacrée bonne idée de la condition de santé... de l'état de santé de la personne qui se trouve devant nous. Donc, ces informations sont extrêmement importantes, et on sait, M. le Président, le tort qu'on peut causer à une personne si on utilise à mauvais escient des informations sur son état de santé. Et c'est évident que les groupes qui se sont adressés à nous et qui nous ont mis en garde avaient de bonnes raisons de le faire, M. le Président.

n(17 h 10)n

Ils avaient de bonnes raisons de le faire, sauf que je dois dire en mon âme et conscience qu'après avoir pris connaissance du projet de loi et après avoir également fait un peu une révision, hein ? c'était un peu nécessaire ? de ce que le projet de loi n° 83, le projet de loi original, mettait en place, moi, je suis rassuré, M. le Président. Je suis rassuré sur, je dirais, le cadre, les contrôles qui sont mis en place par 83 et par le projet de loi n° 70 pour assurer la confidentialité des renseignements personnels.

Évidemment, ça ne s'est pas fait tout seul, M. le Président. Nous, on a été le seul parti des trois, là, présents à l'Assemblée, on a été le premier et le seul parti à demander l'intervention de la Commission d'accès à l'information parce qu'on voulait être rassurés justement sur toute cette question des renseignements personnels. On voulait être certains que le commissaire ne voyait pas dans ce projet de loi n° 70 une menace, une intrusion possible dans la vie privée des gens et donc on a fini par convaincre, M. le Président, et l'opposition officielle et le ministre que c'était une bonne idée d'entendre la Commission d'accès à l'information. Et même le député de La Peltrie, tout à l'heure, reconnaissait que c'est grâce à notre intervention qu'on a pu finalement entendre le commissaire à l'accès, parce que je pense qu'il reconnaît rétroactivement, je pense qu'il reconnaît avec le recul que c'était une excellente idée de demander l'avis du président de la Commission d'accès à l'information, M. le Président. Pourquoi? Parce que le président de la Commission d'accès à l'information nous a fait un certain nombre de suggestions qui sont extrêmement importantes. Il nous a parlé, et j'ai retenu quelques points de ses interventions. Parce qu'on l'a rencontré en briefing technique puis on l'a rencontré également en session ouverte et publique, mais il y a quelques points sur lesquels je me dois de revenir, M. le Président.

Sur la question du consentement implicite ou explicite, il nous a dit à un moment donné: Ce qui est important, ce n'est pas que le consentement... Enfin, ce qui est essentiel, ce qui est primordial, ce n'est pas tellement que le consentement soit implicite ou explicite; ce qui est important et primordial, c'est qu'il soit éclairé, ce consentement. Et je me permets de le citer, M. le Président, il a dit, ce sont ses mots: Il faut que le citoyen sache dans quoi il s'embarque. «Dans quoi il s'embarque», ce sont ses mots, M. le Président. Donc, il faut que le citoyen sache que, quand il décide implicitement de consentir à ce que ses informations personnelles, les informations concernant sa santé, à lui ou à elle, soient enregistrées, soient stockées dans le Dossier de santé du Québec, il faut qu'il sache à quoi s'en tenir, il faut qu'il sache ce que ça veut dire.

Il faut qu'il connaisse la nature de ces informations-là, M. le Président. Il faut qu'il sache également qu'il peut, à tout moment, se retirer du Dossier de santé du Québec. Il faut qu'il sache également qu'il peut intégrer le Dossier de santé du Québec si, après avoir mûrement réfléchi, il décide que finalement c'est une bonne chose pour les soins qu'il pourrait éventuellement recevoir, les soins de santé qu'il pourrait éventuellement recevoir, pour les traitements médicaux dont il pourrait éventuellement être l'objet, s'il décide que c'est une bonne idée d'intégrer ou de réintégrer le Dossier de santé du Québec. Parce que tu peux donner ton accord implicitement au départ, donc tu fais partie du DSQ, si je peux me permettre, tu peux t'en retirer et tu peux revenir si c'est ton bon vouloir. Alors, tout ça, c'est prévu dans le projet de loi n° 70 et également dans le projet de loi n° 83, qui en est, je dirais, la législation... qui est la législation maîtresse. Alors, c'est important, M. le Président, que le citoyen qui nous écoute sache qu'il a tous ces droits et que, s'il est mal à l'aise, s'il n'est pas confortable avec l'idée d'avoir toutes ses informations contenues dans un dossier informatisé, bien qu'il puisse s'en retirer et y revenir éventuellement, le cas échéant.

Alors, le président de la Commission d'accès à l'information nous a dit: Pour que le citoyen sache justement dans quoi il s'embarque, il faut bien l'informer. M. le Président, à titre d'ancien journaliste, je connais assez bien la valeur de l'information. Quand j'étais journaliste, je considérais que j'avais un rôle important parce que les journalistes, ce sont des courroies de transmission, ce sont des gens qui sont là pour s'assurer que les citoyens, nos concitoyens aient accès à la meilleure information possible pour pouvoir par la suite porter un jugement éclairé, pour pouvoir prendre des décisions éclairées. Et c'est justement ce à quoi le commissaire à l'accès nous invitait, il nous a dit: Comme législateurs ? et je pense qu'il s'adressait en particulier au ministre de la Santé ? vous devez vous assurer que le citoyen est bien informé de ce qu'est le DSQ et des droits qui s'y rattachent. Et évidemment, là, M. le Président, il faut faire un peu confiance. Le ministre de la Santé nous a présenté un certain nombre de documents qui font état justement des informations qui vont être mises à la disposition du citoyen, qui vont lui permettre de prendre cette décision bien éclairée.

J'en ai un exemple ici: Le Dossier de santé du Québec, un outil électronique efficace pour améliorer votre suivi médical. En fait, c'est une publicité, M. le Président, qui sert à informer les citoyens de la région de Québec qui vont participer au projet pilote dont je vais parler tout à l'heure, en conclusion.

Alors, on peut lire dans cette publicité, M. le Président: Au cours des prochains mois, la région de la Capitale-Nationale deviendra la première région québécoise à vivre l'expérience du Dossier de santé du Québec. Ce projet pilote permettra d'évaluer de nouvelles façons pour les professionnels de la santé de travailler ensemble afin d'assurer le suivi médical de leurs patients. Ce dépliant, voilà, est destiné aux personnes inscrites au groupe de médecine de famille, GMF, Saint-Vallier. À moins d'exprimer leur refus, ces personnes seront les premières à bénéficier du Dossier de santé du Québec.

Et là, sur ce dépliant, M. le Président, on pose un certain nombre de questions. Votre Dossier de santé, c'est quoi? Et on répond: Le Dossier de santé du Québec est un nouvel outil d'information électronique qui permet principalement aux médecins, aux infirmières et aux pharmaciens de consulter et de transmettre de façon simple et rapide des informations de base concernant votre santé.

Votre Dossier de santé est un complément à votre dossier médical conservé dans les établissements de santé, les cliniques médicales et les pharmacies. Il ne remplace pas vos dossiers médicaux, qu'ils soient sur support papier ou électronique.

Qui va participer au projet pilote? Que contient votre Dossier de santé? Alors, des informations permettant de vous identifier; les résultats de vos examens et analyses de laboratoire; les listes des médicaments d'ordonnance que vous vous êtes procurés dans les pharmacies participantes; les coordonnées des professionnels de la santé que vous consultez; informations de base sur votre état de santé que vous et un intervenant habilité, par exemple votre médecin, conviendrez d'inscrire dans votre Dossier de santé.

Au cours du projet, ces renseignements pourraient s'ajouter à votre Dossier de santé: la liste des médicaments qu'on vous a administrés dans un centre hospitalier participant; les vaccins qui vous ont été administrés; les résultats de vos examens d'imagerie médicale, par exemple radiologie, résonance magnétique, échographie; les résultats de vos examens de laboratoire d'exploration fonctionnelle, par exemple un électromyogramme; d'autres informations de base, etc.

Et là on dit, M. le Président, quels sont les avantages du Dossier de santé. Alors, le professionnel que vous consultez pourra prendre plus rapidement connaissance de votre profil de santé. En évitant les répétitions inutiles, vous aurez probablement moins de tests à passer, et ainsi moins de déplacements à effectuer. La liste de vos médicaments sera constamment tenue à jour, et vous serez moins exposé aux réactions indésirables liées aux médicaments, pour ne pas dire que vous serez moins exposé aux erreurs médicales, M. le Président. Et c'est ce qu'on dit justement par la suite: Votre Dossier de santé sera mis à jour automatiquement, et le risque d'erreur médicale ou pharmaceutique sera ainsi diminué.

Qui peut consulter, etc.

Alors, la question, M. le Président: La confidentialité de vos renseignements de santé est-elle assurée? Réponse: Oui, plusieurs mesures sont prévues pour protéger vos renseignements personnels et en assurer la confidentialité et la sécurité. Le DSQ a été conçu dans le seul but de vous dispenser des services de santé. Même avec votre consentement, les renseignements contenus dans votre Dossier de santé ne peuvent être communiqués, notamment à un assureur ou à un employeur, exemple un médecin de la Société de l'assurance auto du Québec ou de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ou encore à quiconque dans le but de conclure un contrat exigeant l'évaluation de votre état de santé, par exemple contrat d'assurance, contrat d'embauche, contrat en cours d'emploi.

Donc, c'est important, même avec votre consentement, les renseignements contenus dans votre DSQ ne peuvent être communiqués à un assureur, ou à un employeur, ou à quelqu'un qui cherche à conclure un contrat avec vous et qui exige, en parlant du contrat, l'évaluation de votre état de santé, un contrat d'assurance, d'embauche ou un contrat en cours d'emploi. C'est important, M. le Président, ça. Ça, c'est une des grandes inquiétudes qui m'a été communiquée, moi, par un certain nombre de personnes, on craignait, entre autres, qu'un médecin puisse se servir du DSQ pour éventuellement, disons, nous inciter à contracter une assurance. Et là on voit, dans ce projet de loi, qu'il y a des protections, qu'il y a un certain nombre de garanties pour protéger donc les renseignements personnels.

n(17 h 20)n

Alors, M. le Président, c'est justement parce qu'il y a ces balises, ces contrôles, ce cadre réglementaire, législatif qui protègent l'usager, c'est justement pour cette raison, M. le Président, qu'on en est arrivés à la conclusion que c'était une bonne idée de passer du consentement explicite au consentement implicite. Parce qu'à partir du moment où on a ces balises, où on a cette sécurité, cette protection pour l'usager, pour ses renseignements personnels, on pense que c'est une bonne idée, à ce moment-là, de faire le saut vers le consentement implicite parce que ça devient, à ce moment-là, la condition pour que réussisse l'opération. Parce que, moi, j'en étais venu à la conclusion, M. le Président, que, si on n'allait pas vers le consentement implicite, là ? en autant qu'on s'assure donc de la confidentialité des renseignements, là ? j'en étais venu à la conclusion qu'on ne l'aurait pas, le Dossier de santé du Québec, M. le Président, que ce serait beaucoup trop long, beaucoup trop complexe et beaucoup trop coûteux de le mettre en oeuvre.

Et c'est pour ça, M. le Président, que, comme parti politique... Puis j'en ai discuté avec ma chef, M. le Président, j'ai eu plusieurs échanges avec la députée de Charlevoix sur cette question-là. Et elle a déjà été ministre de la Santé, la députée de Charlevoix, et elle comprend très, très bien le bien-fondé, l'utilité, la justification d'informatiser le réseau de santé, M. le Président, et donc c'est d'un commun accord qu'on en est venus à la conclusion qu'il fallait appuyer le projet de loi n° 70.

Mais il fallait le faire, il fallait le faire ? je me répète, mais c'est important ? il fallait le faire après avoir entendu la Commission d'accès à l'information. Et la Commission d'accès à l'information, M. le Président, en plus de nous dire qu'il fallait que le consentement soit éclairé, en plus de nous dire qu'il ne fallait pas que ce soit l'usager qui porte le fardeau de la compréhension du Dossier de santé du Québec, qui porte donc le fardeau de comprendre ce qu'implique la participation au DSQ... Ça, c'est le travail du ministre, du gouvernement et également de nous, les législateurs, de bien expliquer, de bien vulgariser les tenants et aboutissements... et aboutissants, dis-je bien, de ce DSQ, alors il faut donc s'assurer que les usagers comprennent bien ce dont il s'agit. Il nous a dit également, M. le Président, le président de la Commission d'accès à l'information, qu'il fallait bien étudier les leçons du projet pilote qui va se déployer dans la région de Québec, M. le Président.

Et là c'est assez intéressant, ce qui s'est passé en commission parlementaire, M. le Président. Nous avons proposé un amendement, et encore une fois on était seuls au bâton au départ, on était seuls à souhaiter cet amendement. Et je vais vous le lire, l'amendement, M. le Président, sur lequel on s'est finalement entendus et je vais vous en expliquer par la suite, je dirais, ce qui en découle, les conséquences qui découlent de l'adoption de cet amendement. Alors, voici l'amendement, M. le Président, qu'on a adopté dans les dernières minutes de la commission parlementaire, après des discussions avec l'opposition officielle et finalement avec le ministre de la Santé. Lui et moi, avec son équipe, et moi avec quelques personnes également de notre formation parlementaire, on a négocié ça, et vous voyez, M. le Président, c'est encore la... c'est l'écriture manuscrite, là, vous voyez les flèches qui montent et qui descendent parce que ce que je m'apprête à vous lire, ça a été le fruit d'une discussion, le fruit d'une négociation.

Alors, l'amendement se lit comme suit:

Article 23.1.

Insérer, après l'article 23, le suivant, je cite:

«23.1. Le ministre dépose à l'Assemblée nationale, dans les 15 jours de sa réception ou au plus tard le 15 juin 2009, le rapport d'évaluation du projet expérimental du Dossier de santé du Québec sur le territoire de l'Agence de la santé et des services sociaux de la Capitale nationale.

«Ce rapport est transmis, pour étude, à la commission parlementaire compétente dans les soixante jours suivant son dépôt à l'Assemblée nationale.»

Et c'est écrit: Adopté. Et tout le monde, M. le Président, les trois formations politiques qui étaient autour de la table, se sont prononcés en faveur de cet amendement.

Pour les gens qui nous écoutent, M. le Président, ça peut sembler un peu technique, là, cette formation, mais ce qu'on dit, là, c'est qu'au terme du projet pilote qui va se mettre en branle dans la région de Québec, dans les... Enfin, ça fait des mois que c'est supposé se mettre en branle, M. le Président, mais là on nous dit que c'est la bonne, là, que ça va se faire, là, que c'est en train de se faire, là, que c'est en train de démarrer, là, hein, au Groupe de médecine de famille Saint-Vallier. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'au terme de cette expérience-là, au terme du projet pilote, il va falloir tirer les conclusions du projet pilote. Il va falloir se demander ce qui a bien fonctionné et ce qui n'a pas bien fonctionné, qu'est-ce qui a marché, qu'est-ce qui n'a pas marché.

Et qu'est-ce qu'il dit, l'amendement? Il dit qu'au moment où le ministre va recevoir le rapport d'évaluation du projet pilote il va devoir, dans les 15 jours de la réception du rapport ou au plus tard le 15 juin, il va devoir le déposer, il va devoir le transmettre à la commission la plus compétente. C'est une formule parlementaire, M. le Président, mais ce dont on parle ici, on parle de la Commission des affaires sociales. Alors, cet amendement que nous avons, de notre côté, proposé, qui a finalement été adopté, appuyé par l'opposition officielle et par le ministre, par le gouvernement, ce qu'il dit, c'est que, quand le ministre va recevoir le rapport, quand il va recevoir les conclusions du projet pilote, il va être obligé de le déposer à l'Assemblée nationale, ce rapport sur le projet pilote, et on va devoir le regarder, on va devoir l'étudier en commission. On va donc s'en saisir comme parlementaires. On va pouvoir regarder comment ça s'est déroulé donc, ce projet pilote, dans la région de Québec, pour apprendre, M. le Président, de ce projet pilote et pour s'assurer que, si jamais il y a des erreurs qui ont été commises, pour s'assurer, que si jamais il y a des ajustements qu'il faut faire, par exemple, au projet de loi n° 70, qu'on s'apprête à adopter, ou encore au projet de loi n° 83, le projet original... bien, pour qu'on puisse justement procéder à ces changements, M. le Président.

Et, moi, je vais vous le dire, là, peut-être que je suis encore un peu idéaliste, mais, moi, je suis très fier d'avoir contribué à l'adoption de cet amendement, M. le Président, parce que je trouvais ça un peu... Comment dire? Je trouvais que ça n'avait pas beaucoup, beaucoup de bons sens d'avoir un projet pilote et de ne pas prendre la peine de l'étudier, de ne pas prendre la peine d'en tirer les enseignements avant de procéder au déploiement du Dossier de santé du Québec à la grandeur du Québec. Et je trouvais ça normal... Et je me faisais en ce sens un peu l'écho aussi de ce que le président de la Commission d'accès à l'information nous avait déclaré, nous trouvions ça normal, lui et moi, qu'on prenne la peine, comme parlementaires, de regarder ce que le Dossier de santé du Québec va nous apprendre, dans sa partie expérimentation, dans sa partie projet pilote dans la région de Québec, en ce qui a trait, entre autres, à la gestion du consentement implicite avant d'aller de l'avant partout au Québec. Le ministre dit: Ça va déjà de l'avant actuellement. Il a raison. Le consentement implicite, maintenant on le prend pour acquis. C'est ça qui va se produire, c'est ce qui va être mis en oeuvre partout au Québec. Mais il est bien évident, M. le Président, que, dans le cours de ce déploiement, les conclusions qu'on va tirer du projet pilote vont nous aider à s'assurer qu'on fasse bien le travail et qu'on s'assure donc que le Dossier de santé du Québec, lorsqu'il sera mis en oeuvre un peu partout au Québec, soit mis en oeuvre le plus efficacement possible, soit mis en oeuvre pour qu'on s'assure, pour qu'on garantisse... pour que les chances de réussite soient le plus élevées possible, M. le Président.

Alors, je pense que c'est important de le souligner, on a pris l'initiative de cet amendement. Je salue, M. le Président, l'ouverture d'esprit de mon collègue de La Peltrie. Je pense que c'est important de le dire. Je souligne également l'ouverture d'esprit du ministre de la Santé. Je dois le préciser, M. le Président, au cours de cette commission, il y avait une atmosphère extrêmement, je dirais, constructive, de bonne entente qui régnait autour de la table. Nous souhaitions tous la réussite de cette discussion. Nous souhaitions en arriver à un accord, et, au-delà des lignes partisanes, M. le Président, j'ai senti, lors de cette discussion autour du projet de loi n° 70, une volonté commune de tous les parlementaires présents et des trois formations politiques présentes, nous souhaitions sincèrement que ça fonctionne, que le Dossier de santé du Québec fonctionne.

n(17 h 30)n

Parce qu'ultimement on souhaite tous la même chose, M. le Président: au-delà des lignes partisanes, on souhaite tous que notre Dossier de santé soigne le mieux possible notre monde et qu'on obtienne les meilleurs soins possible. Et on est tous convaincus dans cette Chambre ? en tout cas, jusqu'à preuve du contraire ? on est tous convaincus que le Dossier de santé du Québec va nous permettre d'améliorer la qualité des soins au Québec, M. le Président. C'est pour ça ultimement qu'on travaille. Moi, en tout cas, comme critique à la santé, c'est pour ça que je travaille. Je travaille ultimement pour le patient, je travaille pour celui ou celle qui, un jour, aura peut-être besoin d'un médecin, d'une infirmière, aura peut-être besoin d'une chirurgie, pour qu'il obtienne, qu'elle obtienne les meilleurs soins de santé possibles.

Alors, le projet pilote, M. le Président, va aller de l'avant, on va l'étudier. C'est important de noter, M. le Président, que le commissaire d'accès à l'information va accompagner le ministère, va accompagner le ministre, si je peux me permettre, va accompagner l'Agence de la région de la Capitale-Nationale dans ce projet pilote. Il va surveiller donc le déploiement de ce Dossier de santé dans la région de Québec. Et ça, je trouve ça très rassurant, M. le Président, que la Commission d'accès soit là, soit présente et qu'elle continue à s'assurer que les renseignements personnels vont être bien sécurisés, bien protégés.

Évidemment, on n'est pas à bout des questions sur ce Dossier de santé du Québec, M. le Président, hein? Le projet de loi n° 70 va être adopté, mais ce n'est pas la fin l'histoire. Le Dossier de santé du Québec, M. le Président, on s'y est intéressés depuis les tous débuts, on a posé beaucoup de questions là-dessus. On s'est interrogés, entre autres, sur les coûts, les coûts liés au déploiement... à la création et au déploiement de ce Dossier de santé du Québec, M. le Président. On est très inquiets là-dessus.

Officiellement, ce projet-là doit coûter autour de 560 millions. Le ministre de la Santé continue à nous dire que ça va être à peu près dans ces eaux-là, sauf que, nous, on dit, depuis déjà plusieurs mois, que ça va être beaucoup plus près du milliard que du demi-milliard,. Et le Vérificateur général nous a donné raison, M. le Président, dans son dernier rapport, il a dit: Effectivement, si on prend en compte non seulement les coûts directs, mais les coûts indirects, si on prend en compte également un certain nombre de dépenses qui n'ont pas été comptabilisées, si on prend en compte les possibles retards d'échéanciers... C'est lui qui le disait, hein? Le Vérificateur général, il doute qu'on va être capables de mettre en oeuvre le Dossier de santé du Québec, partout au Québec, d'ici 2010, comme c'est supposé être le cas. Alors, si on prend en compte tout ça, on est probablement... on n'est pas probablement, selon le Vérificateur général, on est beaucoup plus près du 900 millions que du 560 quelques millions qui est encore prévu par le ministre.

En passant, M. le Président, ces chiffres de tout près de 900 millions, c'est des chiffres que nous avions rendus publics en 2007 et ils ont été repris pour l'essentiel par le Vérificateur général. Et, moi, je vais vous dire, M. le Président, là, le ministre de la Santé peut nier tant qu'il voudra, là, mais, moi, je fais confiance au Vérificateur général, je fais confiance à sa rigueur, et, quand le Vérificateur général nous dit qu'il doute du respect de l'échéancier de 2010, en tout cas qu'il se questionne sur l'échéancier de 2010, qu'il se questionne sur les coûts de ce programme, de ce projet, j'ai tendance à le croire, j'ai tendance à lui faire confiance. Et c'est pour ça, M. le Président, qu'on ne lâchera pas, nous. On va continuer, de notre côté, à s'intéresser à ce dossier-là parce que c'est un dossier essentiel pour l'avenir du réseau de santé, c'est évident, mais aussi parce qu'il en va de l'intérêt du contribuable, M. le Président. Il faut le protéger, l'intérêt du contribuable.

D'ailleurs, la majorité des coûts de ce projet sont supposés être assumés par le gouvernement fédéral, M. le Président. Aux dernières nouvelles, là, le gouvernement fédéral, qui devait verser plus de 300 millions, n'en avait versé qu'une centaine. D'ailleurs, ça, c'est une des questions qu'on a, et qu'on a toujours: Comment se fait-il que le Québec soit à la traîne? Si on compare le Québec aux autres provinces du Canada, Québec ne fait pas figure de meneur, hein, dans la mise en place de l'informatisation du Dossier de santé, M. le Président, dans la mise en place du Dossier de santé du Québec. On est loin, loin d'être les meneurs. On a pris beaucoup de retard. Et c'est parce qu'on a pris du retard que la contribution fédérale se fait attendre, M. le Président.

Alors, on va surveiller ça, on va surveiller ça, toute la question des coûts. Et on invite, M. le Président, le Vérificateur général à continuer à s'intéresser à ce dossier-là, on invite le Vérificateur général à continuer à garder un oeil sur ce projet parce que c'est un projet extrêmement important, qui implique des sommes d'argent considérables.

Alors, M. le Président, il y aura le projet pilote, on verra ce qui en adviendra. Il y aura, le ministre nous l'a dit lors de l'étude article par article, il y aura sans doute, dans les mois ou les années à venir, d'autres modifications législatives qui devront être apportées pour ajuster des choses, pour améliorer le cadre législatif, pour s'assurer que nos lois, nos règlements collent bien à la réalité, pour s'assurer que la protection soit au rendez-vous, la protection des renseignements personnels, la confidentialité, la sécurité soient au rendez-vous, pour s'assurer également que l'efficacité soit au rendez-vous.

Alors, c'est un dossier qui est extrêmement important, M. le Président. Je tiens à réitérer qu'on va continuer à le suivre d'une façon extrêmement constructive, M. le Président. On n'est pas du tout dans une démarche d'obstruction. Si on l'avait été, ce n'est pas le discours que je vous tiens présentement que je vous tiendrais, je vous tiendrais quelque chose de pas mal, pas mal différent. Mais on a fait notre démarche de façon rigoureuse et puis on en est venus à la conclusion que, dans l'intérêt du public, que, dans l'intérêt du patient, dans l'intérêt du système de santé du Québec, il fallait aller de l'avant avec le consentement implicite.

Alors, M. le Président, je nous souhaite bonne chance. Je souhaite bonne chance à l'équipe du Dossier de santé du Québec. On les a côtoyés lors de quelques réunions, ils sont venus en commission. Personne ne doute de leur bonne foi et de leur bonne volonté. Je doute un peu du leadership du ministre, moi, je pense qu'il aurait pu s'occuper davantage de ce projet-là. On sent, là, qu'il a, à la suite des interventions que nous avons faites, des critiques qui lui ont été adressées, on sent qu'il a pris une participation beaucoup plus active au déploiement de ce Dossier de santé du Québec. Une fois par semaine, il rencontre l'équipe du DSQ. On sent qu'il s'y intéresse de façon beaucoup plus assidue, beaucoup plus étroite.

D'ailleurs, je lui ai dit, à un moment donné, pendant la commission parlementaire: M. le ministre, vous serez jugé, vous serez jugé, comme ministre de la Santé, sur les grands projets que sont les centres hospitaliers universitaires et le déploiement du Dossier de santé du Québec. J'en ai la profonde conviction, M. le Président. L'héritage qu'il nous laissera, la plus ou moins bonne réputation qu'il aura comme ministre de la Santé seront étroitement liés à l'évaluation que nous ferons, dans quelques années d'ici, de la réussite ou de l'échec concernant les mégahôpitaux universitaires et concernant le Dossier de santé du Québec, M. le Président. Et je pense que c'est une des raisons pour lesquelles il s'est ressaisi. Je pense, c'est une raisons pour lesquelles il a décidé de s'intéresser beaucoup plus étroitement à l'avenir, à l'avenir de ce Dossier de santé du Québec et à sa mise en oeuvre.

Alors, pour la suite des choses, M. le Président, nous allons faire notre travail d'opposition, nous allons faire notre travail de surveillance, de contrôle, et on le fera, M. le Président, en ayant, comme toujours, à l'esprit l'intérêt de nos citoyens, l'intérêt du contribuable québécois et l'intérêt, M. le Président, du patient québécois. Je vous remercie infiniment.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Le projet de loi n° 70, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, la Loi sur l'assurance maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Picard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Fournier: Je vous demanderais d'appeler l'article 10, M. le Président.

Projet de loi n° 79

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Picard): À l'article 10, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le ministre.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Alors, je soumets à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 79, intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Ce projet de loi, M. le Président, a été présenté le 8 mai dernier. Il modifie diverses lois afin de donner suite notamment au discours sur le budget du 24 mai 2007 et à divers bulletins d'information publiés par le ministère des Finances en 2006 et en 2007. Ainsi, il modifie huit lois, dont la Loi sur les impôts et la Loi sur la taxe de vente du Québec. Ce projet de loi propose diverses modifications à la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin d'améliorer le mécanisme de perception anticipé de l'impôt sur le tabac à l'égard des cigares. Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur les impôts, principalement afin de modifier, d'introduire ou d'abolir certaines mesures fiscales propres au Québec. Ces mesures sont regroupées sous différents sujets.

n(17 h 40)n

Je vous rappelle, M. le Président, qu'il est d'habitude d'étudier ce projet de loi en commission parlementaire par sujets et non article par article, bien qu'un de nos projets de loi précédents, qui met aussi en vigueur d'autres parties du budget de l'an dernier, est malheureusement un peu pris dans des mesures d'obstruction en commission. Mais je suis sûr que les oppositions voudront bien collaborer à l'égard de ce projet de loi dont nous étudions le principe aujourd'hui et l'autre dont nous avons déjà adopté le principe en cette Chambre et qui piétine un peu en commission bien malheureusement.

Le premier sujet que je porterai à votre attention concerne la mise en place d'un nouveau crédit d'impôt remboursable pour favoriser l'épargne-études. Je m'arrête là-dessus tout de suite ? vous allez me dire: C'est le début, mais quand même ? pour vous dire que ce projet de loi, comme l'autre qui est déjà en commission et qui malheureusement piétine, comporte de nombreux sujets très importants pour les contribuables, dont notamment, celui qui est en commission, la baisse d'impôt, la limite à payer pour l'assurance-médicaments pour ne pas payer trop, tous des sujets qui sont dans le projet de loi mais malheureusement, pour une raison qui m'échappe encore, il ne semble pas qu'il y ait une collaboration entière pour faire avancer le projet de loi. Je vous le dis pour que vous puissiez y voir, M. le Président, parce que ce sont là des mesures importantes pour les citoyens et je sais que, du haut de votre trône, vous saurez influencer nos collègues pour qu'ils puissent veiller à ce que nos concitoyens voient leur sort amélioré.

De façon générale, si je reviens sur le crédit d'impôt remboursable pour favoriser l'épargne-études, ce crédit d'impôt sera égal à 10 % du montant versé par les parents et les grands-parents à un régime enregistré d'épargne-études dont le bénéficiaire est leur enfant ou petit-enfant, M. le Président. D'ailleurs, ne faisons-nous pas de la politique pour nos enfants? Certains, pour leurs petits-enfants; je n'y suis pas encore, je n'y suis pas encore, mais je sais que certains de mes collègues y pensent. Mais je pense que, lorsqu'on pose des actions, il faut penser à ceux qui vont nous suivre. Voilà un bon exemple de projet de loi qui s'intéresse à la suite finalement du Québec que nous bâtissons.

Donc, ce crédit ne pourra toutefois excéder 250 $ par année, par bénéficiaire. Le crédit d'impôt sera versé à la fiducie afin d'augmenter les fonds consacrés au financement des études postsecondaires. L'aide financière pourra atteindre, sur une base cumulative, 3 600 $ par enfant. De plus, dans le cas des familles à moyens revenus, la contribution du gouvernement à leur effort d'épargne se traduira par une aide financière égale à 15 %. Tantôt, je vous ai parlé de 10 %, maintenant on arrive à ceux qui sont à moyens revenus, c'est plutôt à 15 % donc de la première tranche de 500 $ de cotisation annuelle versée dans un régime enregistré d'épargne-études, et ce taux étant porté maintenant à 20 % pour les familles à faibles revenus.

Le coût de cette mesure est estimé à 29 millions de dollars pour l'année financière 2007-2008, mais sera de 41 millions pour 2008-2009. C'est intéressant d'ailleurs de le voir. Je sais que des collègues, qui portent attention à cette allocution que je présente cet après-midi, M. le Président, se demandent pourquoi je parle de 29 millions en 2007-2008 et que le projet de loi n'est pas encore adopté. Il faut dire que les mesures sont en vigueur parce que le budget a été adopté grâce la collaboration de l'ensemble des membres de cette Assemblée. C'est pourquoi je m'étonne encore de voir que le projet de loi dont je vous parlais tantôt piétine en commission. Mais je m'attends évidemment qu'il avance un peu plus vite, maintenant que vous vous impliquez, M. le Président.

Le deuxième sujet donc concerne la bonification du crédit d'impôt remboursable pour les particuliers habitant un village nordique. Cette mesure vise à soutenir davantage les ménages qui habitent l'un des 14 villages nordiques qui se caractérisent par leur éloignement, leur climat et, il faut bien le dire, un coût de la vie plus élevé qu'ailleurs. Ce crédit d'impôt est établi en fonction du nombre de mois d'une année au cours desquels un particulier habite un village nordique. Par suite de la bonification, le montant mensuel de base est passé de 40 $ à 60 $, alors que le montant mensuel pour une personne à charge est passé de 15 $ à 25 $ pour l'année d'imposition 2006. Ces montants font l'objet d'une indexation automatique pour les années 2007 et suivantes.

Le troisième sujet, M. le Président, porte sur l'abolition des choix québécois distincts. La législation fiscale québécoise comporte des dispositions qui permettent d'opter pour un traitement fiscal donné différent de celui applicable en vertu de la législation fiscale fédérale ? je sais que mon collègue de D'Arcy-McGee a un intérêt particulier pour la question. L'expérience a démontré que l'existence de choix fiscaux différents a donné lieu à des opérations d'évitement de l'impôt provincial qui vont clairement à l'encontre de la politique fiscale. Afin d'assurer l'intégrité du régime fiscal québécois, ces choix distincts sont abolis.

Le quatrième sujet concerne la bonification du crédit de taxe sur le capital. Afin de soutenir...

Une voix: ...

M. Fournier: Oui, mon collègue le président du caucus a tout à fait raison. Je l'entends avoir un écho de bonheur à l'égard de cette modification, déjà en vigueur, faut-il le dire.

Afin de soutenir et accélérer les efforts des entreprises dans la modernisation de leurs machines et de leur matériel, ce projet de loi propose que le taux de base du crédit de taxe sur le capital soit haussé à 15 % du montant des investissements effectués après le 23 novembre 2007, soit le même taux que celui applicable à l'égard de certains investissements réalisés dans le secteur forestier. Cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'abolition graduelle plus rapide de la taxe sur le capital des sociétés. En ce sens, d'autres mesures ont aussi été annoncées dans le cadre du dernier discours sur le budget, elles feront toutefois l'objet d'un prochain projet de loi. Évidemment, nous parlons ici du budget 2007 et non du budget 2008. Le budget 2008 bénéficiera, lui aussi, d'un projet de loi pour le consacrer.

Ce projet de loi modifie aussi ? je parle de celui-ci ? la Loi sur le ministère du Revenu afin d'instaurer une infraction spécifique pour un commerçant qui remet des reçus qui ne correspondent pas aux véritables transactions.

Par ailleurs, le projet de loi n° 79 modifie la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin de hausser le montant des exemptions qui sont accordées dans le calcul de la prime au régime d'assurance médicaments. De plus, il modifie la Loi sur le Régime de rentes du Québec quant au délai accordé à un salarié pour verser une cotisation facultative au Régime de rentes du Québec.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur les impôts afin d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada. À cet égard, il donne suite à des mesures d'harmonisation annoncées dans les discours sur le budget du 12 juin 2003, du 23 mars 2006 et du 24 mai 2007 et dans les bulletins d'information publiés en 2003, 2005, 2006. Ces modifications concernent notamment: le fractionnement des revenus de retraite; le traitement fiscal des entités intermédiaires de placement déterminées; le traitement fiscal d'un montant reçu en vertu d'un engagement de non-concurrence; les règles relatives aux dépenses rattachées à un droit aux produits; les organismes municipaux ou publics qui remplissent des fonctions gouvernementales; les règles relatives aux fiducies.

Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi sur la taxe d'accise. À cet égard, il donne suite à des mesures d'harmonisation annoncées dans les discours sur le budget du 12 juin 2003 et du 24 mai 2007, dans l'énoncé complémentaire à la politique budgétaire du gouvernement du 19 mars 2002 et dans des bulletins d'information publiés en 2005, 2006 et 2007.

Je prends la peine de noter ici que nous regroupons donc diverses mesures déjà annoncées, parfois qui remontent un peu plus loin dans le temps, mais il s'agit ici, dans ce projet de loi, de les regrouper de manière à proposer, sur la base législative, un tout cohérent. Vous comprendrez bien que cela m'amène encore une fois à faire un léger aparté sur la façon dont il est coutume d'étudier en commission les projets de loi donnant effet au budget, projets de loi présentés par le ministre du Revenu. À l'opposé de ce qui se fait dans d'autres lois, où on étudie article par article, dans les projets de loi de ce type, nous les étudions par sujets, de manière à favoriser une compréhension plus aisée pour l'ensemble des membres de cette Assemblée, mais aussi et surtout pour les concitoyens qui nous regardent.

Cela m'amène évidemment à vous faire un rappel sur ce qui se passe avec l'autre projet de loi que nous avons déjà déposé, qui est en commission parlementaire et malheureusement qui piétine parce que nous y sommes article par article plutôt que par sujets, favorisant non pas son adoption et une meilleure compréhension, mais, je dirais, peut-être plutôt une certaine obstruction. Le mot est peut-être un peu fort, M. le Président, j'essaie de trouver... Peut-être que je dirais: une perception d'obstruction que j'ai développée certainement au fil du temps.

Ces modifications, donc, à propos des mesures d'harmonisation, concernent notamment: l'exclusion de l'assiette de la taxe de vente du Québec des consignes à boisson remboursables aux consommateurs; les règles d'allégement relatives au transfert initial d'éléments d'actif par une banque étrangère qui restructure sa filiale québécoise en une succursale québécoise; les règles d'allégement accordées aux membres d'un groupe étroitement lié; la détaxation des fournitures de biens meubles incorporels à des personnes non résidentes ? je sais que mon collègue de l'opposition officielle me disait d'ailleurs qu'il anticipait avec bonheur que nous puissions discuter en commission parlementaire des biens meubles incorporels; les ajustements requis aussi à la suite de la diminution du taux de la TPS à 5 %. Voilà certaines mesures qui sont dans le projet de loi.

Je vais, et vous me le permettrez sans doute, M. le Président, m'abstenir d'énumérer toutes les autres mesures contenues dans le projet de loi n° 79, puisque ses notes explicatives en font état et que nous aurons l'occasion de l'examiner plus en détail en commission parlementaire, je l'espère, tel que les usages le veulent, sujet par sujet, pour une meilleure compréhension de tous, une adoption rapide, que le bénéfice qui donc est offert à l'ensemble de nos contribuables puisse leur échoir le plus rapidement possible.

M. le Président, j'espère que nous adopterons ce principe dans les prochaines minutes, que nous pourrons procéder à l'étude détaillée par sujets, que nous l'adoptions donc pour le plus grand progrès du Québec. Merci, M. le Président.

n(17 h 50)n

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le ministre. J'ai bien pris note de vos commentaires sur le travail minutieux de nos collègues députés en commission parlementaire. Je cède maintenant la parole à M. le député d'Arthabaska, porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu.

M. Jean-François Roux

M. Roux: Alors, merci, M. le Président. C'est avec grand plaisir qu'encore aujourd'hui j'ai le loisir de m'adresser à cette Assemblée, avec la participation de mes collègues et des membres des deux autres partis. Alors donc, aujourd'hui, on va parler de l'adoption du principe du projet de loi n° 79, qui est un projet de loi qui modifie les lois sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, pour un total, comme le ministre l'a mentionné un petit peu plus tôt, de huit lois au total qui sont touchées.

Ce projet, qui modifie diverses lois afin de donner suite à des mesures budgétaires annoncées dans le discours du budget de l'année dernière et dans les bulletins d'information également qui ont été publiés par le ministère des Finances en 2006 et en 2007, alors c'est une véritable brique, M. le Président, de 300 pages, 424 articles. C'est un projet de loi encore une fois très, très, très technique. Et je peux vous avouer que, comme baptême du feu, à mes premières armes en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, c'en est tout un. On a eu droit, par le ministre, à certains détails qui ont été donnés, qui ont été intéressants. Aujourd'hui, je considère que c'est un projet de loi qui demande beaucoup d'analyse, beaucoup de temps pour bien comprendre tout ce que ça implique, et c'est ce qui est important à mes yeux.

Ce qu'il est aussi important de noter, c'est que le projet de loi n° 79 permet la mise en place... ou confirme une série de mesures qui sont déjà en place, hein, pour la plupart, déjà en application. Donc, il n'y aura pas de changements majeurs qui découlent de cette loi-là dans la vie quotidienne des citoyens et citoyennes du Québec, vu que ces dispositions-là sont déjà choses connues et choses appliquées déjà.

Donc, dans les mesures qui nous occupent aujourd'hui, qui découlent du budget, comme mentionné, le budget de l'année dernière... Je comprends, à la complexité du document, que ça a pu prendre un bout de temps à écrire, c'est pourquoi on l'étudie l'année suivante ? des choses qu'on découvre, comme ça, avec l'expérience, hein? Je me permets de rappeler à cette Assemblée le contexte dans lequel le budget de l'année dernière a été adopté, et je pense que c'est intéressant d'y revenir un peu.

On se souvient que c'était le budget postélectoral, qu'il devait donc tenir en considération les promesses par le parti ministériel lors de la campagne. Et c'est un gouvernement plutôt affaibli, qui se relevait à peine d'une élection générale, qui avait pris un gouvernement majoritaire pour l'amener dans une minorité, et dans une période où à peu près tous les parlementaires, ici, s'entendaient à dire, et beaucoup de concitoyens également, et de concitoyennes, qu'ils s'attendaient à ce que le gouvernement, qui était devenu minoritaire suite aux dernières élections, allait descendre un peu de leur piédestal pour collaborer davantage avec les différents partis d'opposition. Puis on s'attendait à ce qu'on puisse à en arriver à un budget où tout le monde puisse gagner certains points, certaines parties.

L'expérience nous a montré, l'année dernière, que malheureusement ça c'est réglé un petit peu dernière minute. Vous savez, un budget, c'est un exercice qui prend beaucoup de temps à mettre sur pied, ce n'est pas quelque chose qui se fait dans un après-midi. On a entendu la ministre nous dire à quel point elle a travaillé très fort pour en venir à ce budget-là puis, cette année, on l'entendue également dire que ça a été un travail de longue haleine et d'intenses négociations. Mais, de façon assez surprenante, l'année dernière, ça s'est réglé dans la nuit qui a précédé le vote. On nous a invité, à ce moment-là, à faire part de nos demandes une journée, 24 heures avant le dépôt du budget, comme si on pouvait changer d'une façon importante et logique un budget qui a pris plusieurs mois à mettre sur pied, dans l'espace de 24 heures. Puis suite à ça, bien, le gouvernement ayant fait certaines promesses, on s'est rendu compte qu'il y a des gens qui ont perdu le chemin du salon bleu. Il y a un parti qui n'est pas venu voter, M. le Président. Donc, c'est un peu triste pour les citoyens et citoyennes que l'exercice principal et le plus important de l'année ait été mis un petit peu de côté, là, par nos collègues de la troisième... de la deuxième opposition.

Des voix: ...

M. Roux: Non, non, deuxième, deuxième.

Maintenant, pour revenir au côté plus technique, là, de ce projet de loi, on nous a présenté un... on parlait, l'année dernière, d'un budget à déficit zéro. On sait ce que ça veut dire, un budget à déficit zéro. Quand la dette augmente de façon catastrophique à toutes les années, à chaque budget, année après année, on se retrouve un petit peu plus loin dans le trou. Puis on nous parle d'un déficit zéro quand même. Il y a des choses que... ça je n'ai pas arrivé, malgré mon expérience, à le comprendre.

Donc, l'année dernière, dans le budget 2007-2008, on estime que l'augmentation de la dette a été de 3 milliards de dollars, ce qui est quand même plutôt important, et ça, malgré le fait qu'on ait vendu plusieurs actifs pour payer les dépenses de tous les jours. C'est un peu décevant, là. Ça démontre clairement qu'on a un problème au niveau du gouvernement, c'est qu'on a beaucoup de difficultés à arriver à un déficit réel à zéro. Et là-dessus, bien sûr, on se rappellera, si on se ramène à l'année dernière, qu'en campagne électorale, pour sauver un petit peu la campagne qui allait nulle part, le gouvernement a promis des baisses d'impôt de 1 milliard de dollars, et ce, dans un contexte où on a augmenté la dette du Québec de 3 milliards. Donc, cette baisse d'impôt-là a été prise directement à même l'argent de nos enfants, qui auront à rembourser cette taxe-là... ces baisses d'impôt-là. Donc ça, on s'en souvient quand même.

Je vais reprendre un peu les calculs qui avaient été faits l'année dernière parce que probablement que le ministre a utilisé une calculatrice qui leur est commune, qui est celle des membres du gouvernement, qui n'est pas tout à fait la même que celle utilisée par le Vérificateur général. Bon. Je vais essayer celle du Vérificateur général pour voir si on arrive au même montant. Bon. Ce que je veux faire maintenant, c'est de décrire un petit peu l'impact dans la vie de tous les jours des familles du Québec, suite à ce budget-là puis suite aux mesures qu'on va adopter aujourd'hui, qui découlent de ce budget-là.

On parlait, là, de... il mentionnait, le ministre, l'année dernière, un montant, pour une famille, par exemple, avec deux enfants, un seul revenu de 75 000 $. Pour être un peu plus inclusif, je veux parler d'un montant de 65 000 $ parce que, 75 000 $, on coupe encore beaucoup de gens, là, entre 65 000 $ et 75 000 $, plusieurs familles se retrouvent laissées de côté un petit peu, donc je veux ramener à 65 000 $. Mais ça, ça représente, là, 75 % des familles du Québec. Donc, les baisses d'impôt qui ont été proposées par le gouvernement, l'année dernière, qui ont coûté au Québec au-dessus de 1 milliard de dollars, bien ces baisses d'impôt-là, pour ces familles-là, ne représentent même pas un montant assez important pour compenser les hausses de tarifs prévues par Hydro-Québec, par la Société de l'assurance automobile du Québec, par l'assurance médicaments et pour les taxes scolaires. Donc, si, l'année dernière, on était très fiers d'offrir un cadeau à l'ensemble du Québec, ce qu'on se rend compte, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de cadeaux, là. En fait, il y en a moins dans l'assiette totale de ce qui reste aux familles que l'année précédente, même si on offre un gros cadeau.

En somme, M. le Président, quand on considère le projet de loi dans sa globalité, dans sa portée générale, le portrait du Québec s'assombrit. Comme les mesures de ce projet de loi sont directement liées au discours sur le budget de l'année dernière, nous allons être conséquents. Je vous le dis, M. le Président, nous allons voter contre. Nous ne pouvons et nous ne voulons pas cautionner des mesures irresponsables qui vont continuer à endetter le Québec.

Sur ça, M. le Président, je termine et j'attends avec impatience la chance de pouvoir m'asseoir et d'étudier de façon détaillée le projet n° 79, qui sera pour moi mon premier projet de loi avec mes nouvelles responsabilités. Je prévois de longues heures de travaux intéressants en compagnie du ministre. Il me fera plaisir de discuter plus à fond de ces dispositions-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard): Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Picard): O.K. Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont suspendus à ce soir, 20 heures. Donc, je vais reconnaître M. le député d'Abitibi-Est... Ouest, Ouest.

(Suspension de la séance à 18 heures)

 

(Reprise à 20 h 5)

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous allons poursuivre le débat sur le projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Je reconnais M. le député d'Abitibi-Ouest et leader du deuxième groupe d'opposition. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, d'entrée de jeu, je voudrais indiquer aux collègues parlementaires et à ceux et celles qui pourraient nous écouter par distraction sur le canal de l'Assemblée nationale que je ne remplace pas mon collègue de Gaspé, critique en matière de revenu. J'ai toujours les mêmes responsabilités, mais étant dans l'impossibilité d'être ici présent, ce soir, et comme c'est les travaux qui nous concernent, je me crois en mesure de faire la réplique au principe de notre formation politique.

Alors, très simplement, Mme la Présidente, je veux indiquer aussi d'entrée de jeu que, l'an dernier, parce que ce dont il est question, même si vous avez bien appelé le projet de loi n° 79, qui est une loi pilotée par le ministre du Revenu, c'est une loi qui donne suite au budget de 2007, or, dans les fonctions que j'ai eues à exercer bien sûr d'une façon intérimaire, j'ai eu un rôle important à jouer lors de l'élaboration de ce que j'appelle le budget suite à l'arrivée de la nouvelle équipe, suite à l'élection de 2007. Parce que l'ancien ministre des Finances, M. Audet ? et j'en parlerai tantôt, puis on a le droit de le nommer parce qu'il n'est plus dans ces responsabilités ? il avait prononcé un discours du budget, le 20 février, et par la suite, pour des raisons, x, y, z, le gouvernement a décidé d'aller en élection, et ça a donné ce que vous savez, et ça a exigé la présentation d'une nouvelle politique budgétaire.

Je voudrais toucher quelques éléments parce que je répète que, même si le projet de loi qu'on a étudié et qui comporte, comme ça a été dit, 424 articles, qui est un projet de loi très technique, parce que c'est un projet d'application d'un certain nombre de mesures prévues au budget pour donner ce qu'on appelle une assise législative à des dispositions prévues dans le budget, c'est un outil régulier que les parlementaires se donnent pour la suite des choses, mais c'est un moment privilégié, Mme la Présidente et chers collègues, pour faire ce que j'appelle une discussion sur des principes, sur des réalités budgétaires, sur des sensibilités par rapport à des demandes de l'électorat, sur des consultations prébudgétaires qui normalement devraient démontrer que le gouvernement a été sensible ou peu sensible à des réalités, et c'est ces éléments-là que je veux toucher.

Premier élément que je veux toucher, c'est ce qu'on appelle normalement le cadre financier. Il faut se rappeler que le cadre financier 2007 a été équilibré, mais en créant une impasse budgétaire dans le budget... C'est pour ça que je trouvais ça drôle, la nouvelle loi qui a été déposée cette année, qui prouve notre thèse automatiquement. Tu sais, c'est comme une vérité de La Palice, Mme la Présidente. Écoutez, le budget 2007-2008 était tellement ce que j'appelle «déséquilibré», mais, dû à des artifices de toute nature que je vais expliquer, il créait, pour l'année en cours, une impasse de 1,1 milliard, et l'impasse budgétaire est apparue cette année. Et là, cette année, quand on a déposé le budget, on a émis un paquet de communiqués pour faire accroire à la population que le budget 2008, lui, était équilibré. Il ne l'est pas plus, et on le verra plus tard, quand le Vérificateur général va faire la démonstration que, oui, par toutes sortes de modifications des règles comptables, par toutes sortes d'arguties, peu importent les mots qu'on peut utiliser pour décrire ces usages... d'essayer de faire accroire qu'on a bâti un discours au budget équilibré, ce n'était pas le cas.

Pourquoi qu'en 2007 il y avait 1,1 milliard d'impasse? C'est simplement parce que le gouvernement a décidé d'utiliser les revenus exceptionnels d'Hydro-Québec réalisés en 2005-2006, premièrement, grâce à des ventes d'actifs puis, deuxièmement, à l'impact des hausses de tarifs d'électricité, parce que n'oubliez pas, là, que ce gouvernement-là nous a claqué quatre ou cinq hausses répétitives pour une valeur de 17 %. Alors, d'une main, faire accroire qu'on va pomper davantage les revenus d'Hydro-Québec dans la cagnotte du gouvernement pour équilibrer les finances publiques puis, de l'autre main, on va également hausser les tarifs. Donc, c'est évident qu'Hydro-Québec n'a jamais contribué à la hauteur... Écoutez, ça fait assez longtemps que je suis dans ce Parlement-là, jamais je n'ai vu des niveaux d'exigence aussi élevés par rapport aux dividendes et aux revenus d'Hydro-Québec pour mettre dans le fonds général du gouvernement pour balancer et pour équilibrer ce budget-là. Premier élément.

n(20 h 10)n

2007-2008, le gouvernement avait prévu verser 653 millions au Fonds des générations. C'est exact, il l'a probablement versé. 200 millions de plus que la prévision du budget du 20 février de M. Michel Audet, qui a précédé le budget de la ministre des Finances actuelle. Mais ce qu'il faut ajouter, c'est qu'en même temps le résultat net, c'est que la dette du Québec a augmenté de 3 milliards, et il faut savoir que, depuis 2006 à 2007, juste après avoir augmenté de 4,1 milliards en 2006-2007, il faut rajouter ce 2,8 milliards. Tout ça pour dire clairement: nos amis, là, qui dirigent le Québec actuellement, là ? puis, en passant, là, en faisant des ronrons, parce qu'ils ne touchent pas à grand-chose, c'est un peu le pilote automatique, là ? c'est 11 milliards depuis quatre ans qu'ils ont pelletés sur la dette. Avez-vous compris, Mme la Présidente, là? 11 milliards depuis quatre ans. Puis ça, c'est des gens qui nous ont constamment reproché que ça n'avait pas de bon sens d'augmenter la dette à ce niveau-là. Ça, là, c'est le cadre budgétaire dans lequel on a opéré. Ça, c'est les faits, là, Mme la Présidente. Alors que le ministre des Finances prétend s'attaquer à la dette avec fermeté en annonçant que les revenus supplémentaires d'Hydro-Québec provenant de l'exportation d'électricité permettront de verser 400 millions de plus par année au Fonds des générations, bien, en même temps on aura pelleté 5,4 milliards de plus sur la dette jusqu'en 2009.

Donc, moi, je ne peux pas parler du principe de ce projet de loi là sans remettre ça dans le véritable contexte, et on a appelé ça un gouvernement qui décide de repousser à plus tard les problèmes, puis, ce n'est pas grave, on verra comment gérer ça un de ces jours. Moi, je ne peux pas ne pas revenir sur cette réalité-là.

La deuxième, c'est les baisses d'impôt. Je me rappelle, les baisses d'impôt, écoutez, y a-t-il quelqu'un, Mme la Présidente, dans ce monde, quelles qu'en soient son évolution et ses composantes, qui peut être contre des baisses d'impôt? Il n'y a pas personne...

Une voix: ...

M. Gendron: Non, François Legault, c'est mon... Excusez, on n'a pas le droit, là. Le député de Rousseau, il est aussi d'accord que moi sur des baisses d'impôt, mais pas quand il y a des besoins aussi criants en éducation, puis en santé, puis un peu partout, et que les baisses d'impôt, c'est pour une classe de citoyens que je respecte à mort, qu'on a besoin dans la société, mais qu'est-ce que vous voulez que ça leur fasse, eux autres, là, 0,85 $ par semaine de différence, parce que c'est ce que ça donne, là? En moyenne, chaque contribuable du Québec va recevoir 0,85 $ de plus dans ses poches pour 2007-2008. Qu'est-ce que vous voulez qu'ils fassent avec ça? Alors qu'au même moment, moi, j'avais des discussions au plus haut niveau avec le premier ministre ? je m'en rappelle, c'était ma responsabilité ? des discussions au plus haut niveau avec le premier ministre, la ministre des Finances pour lui faire comprendre deux petites réalités pas compliquées. La première: Il est urgent, Mme la ministre, d'augmenter le budget des soins à domicile, parce que c'est là qu'on est les plus faibles. Puis, compte tenu du vieillissement de la population, ce serait important de mettre un peu plus d'argent. On a négocié, on a discuté puis on est allés chercher 60 millions de plus. Mais les besoins étaient beaucoup plus importants que ça. On n'a même pas dépensé le 60 millions qu'on avait obtenu par un addendum budgétaire.

Le deuxième élément, moi, j'ai toujours aimé ce que j'appelle la mission éducative d'un État normal. J'ai toujours aimé la mission éducative de l'État du Québec. Et qu'est-ce qu'on a constaté, depuis deux, trois jours, puis encore ce matin, puis hier? Des problèmes de décrochage sans précédent. Je ne suis pas plus fin qu'un autre, mais j'avais demandé à la ministre des Finances de faire deux choses: augmenter les crédits au niveau des élèves en difficulté d'apprentissage, mieux accompagner les élèves qui sont portés à décrocher, pour que, comme société, on arrête de fabriquer des décrocheurs. Je trouve que ça coûte énormément cher, Mme la Présidente, de fabriquer, comme système, des décrocheurs officiels. Et, dans ce sens-là, oui, elle a considéré un petit peu ? un poquito ? la demande qu'on avait faite. Mais c'était d'un ridicule consommé. Ces gens-là avaient aimé mieux faire le choix de baisser les impôts des contribuables qui nous auraient remerciés à tour de bras...

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): S'il vous plaît! Un instant, M. le député. À l'ordre, s'il vous plaît! Seul le député d'Abitibi-Ouest a la parole. S'il vous plaît! M. le député.

M. Gendron: Mme la Présidente. Alors, je poursuis. Je croyais que... Puis, regardez, à l'époque, en 2007, il y avait ce qu'on appelle des sondages d'opinion publique. On peut être pour ou contre. Moi, je ne fais pas de commentaire sur les sondages, mais je vous dis que... je vous lis, là: Le consensus des citoyens-payeurs de taxe du Québec réclamait plus d'argent pour défrayer les coûts croissants des services publics, et principalement la santé. Et le gouvernement libéral a décidé: Les avis de la population, moi, je n'ai pas besoin de ça, j'ai décidé que je baisserais les impôts d'une classe qui est nécessaire dans la société. Mais elle n'avait pas besoin de ce 0,85 $ là de moins. Donc, contre la volonté populaire, ils ont décidé pareil de poser le geste de réduction des impôts. Puis le pire, Mme la Présidente, même pas avec l'argent qu'ils avaient, avec l'argent du transfert fédéral, par la péréquation...

Une voix: ...

M. Gendron: Oui. 700 millions de baisses des impôts venant de l'argent d'Ottawa. Puis, eux autres, ça ne leur fait rien, ils ne font même pas la différence entre Ottawa puis Québec. Ils sont d'accord pour applaudir ça, eux autres. Ils sont toujours heureux de voir que c'est Ottawa qui décide de leur permettre de poser des gestes qui sont complètement en désaccord avec la population.

Autre point que je voulais couvrir, c'est ce que j'appelle, dans le dernier budget de 2007... ? rappelez-vous toujours que je parle du budget 2007 ? c'est la couverture des coûts de système. Dans le budget 2007, on a ajouté un peu d'argent en éducation, on a ajouté de l'argent dans la santé, on a mis quelques éléments à gauche et à droite pour tenir compte de la consultation prébudgétaire sur laquelle il y avait eu des indications de la population, et là ça veut dire qu'à ce moment-là, si on ne couvre pas les coûts de système, si on ne couvre pas les coûts de système, il y a effectivement des sacrifices à faire à peu près dans tous les autres ministères. Donc, ce qu'on a constaté, ce qu'à peu près toutes les autres missions éducatives ont dû... pas éducatives, toutes les autres missions de l'État, pardon, ont dû souffrir, c'est une réduction de leurs crédits puis ils n'ont pas été en mesure de faire ce qu'on appelle soit de l'accompagnement soit du développement pour s'assurer que les autres missions de l'État soient mieux accompagnées.

Je reviens avec mon exemple, en éducation, je prends juste ce point de vue là, là, les élèves en difficulté d'apprentissage devront attendre. On voit qu'est-ce que ça donne aujourd'hui: des pourcentages de décrochage effarants. En éducation, le gouvernement libéral couvre simplement les coûts de système puis les coûts de l'équité salariale. Les sommes supplémentaires de 240 millions investies de l'enseignement postsecondaire avaient déjà été annoncées à plusieurs reprises et ne représentent que l'utilisation des sommes placées en fiducie par le gouvernement fédéral en 2006, donc pas une cenne de plus.

Le gouvernement confirme également que les 187 millions annoncés par le gouvernement fédéral pour les cégeps et les universités lors du budget Flaherty de mars dernier seront intégralement versés aux institutions postsecondaires mais en 2008-2009, donc cette année, pas en 2007. Malgré les beaux discours de la ministre des Finances, les sommes consacrées à l'éducation dans ce budget sont exactement les mêmes que celles annoncées dans le budget de M. Audet.

Et ça doit être vrai, Mme la Présidente, parce que racontons un peu ce qui s'est passé. Moi, je me rappelle, M. Audet fait le discours, il n'était pas, à cette époque-là, question d'élection. On entend ce discours-là et on fait une réplique au discours en disant: Il n'y a pas ça, il n'y a pas ça, vous n'avez pas couvert tel élément, et ainsi de suite. Et là, dans les discussions qu'on a suite à l'élection que vous connaissez, de 2007, la nouvelle ministre des Finances présente un budget et elle m'avait dit, suite aux discussions qu'on avait eues, mon collègue de Rousseau et moi-même dans la responsabilité de chef intérimaire de ma formation politique: Regardez bien comment on a été attentifs à vos demandes. Vous allez voir que vous allez avoir des belles surprises. Vous m'avez demandé plus d'argent pour les élèves en difficulté d'apprentissage, vous allez voir. Vous avez demandé de l'argent pour les soins à domicile, vous allez voir.

n(20 h 20)n

Je vais arriver tantôt aux crédits aux régions ressources parce que, moi, je tenais, je suis un gars de région, j'y tiens, et je voulais que les régions du Québec, les régions ressources du Québec soient mieux accompagnées, soient plus outillées pour faire face aux défis du futur puis de l'avenir. Elle m'avait dit: Tu vas voir la belle surprise. Elle prononce son discours, on écoute attentivement, il n'y avait pas une ligne, il n'y avait pas une somme, il n'y avait pas rien de plus au chapitre des trois éléments les plus essentiels qu'on avait revendiqués. On retourne s'asseoir, puis vous connaissez... on a parlé de psychose, on a parlé d'une semaine de tension extraordinaire. Il n'y a pas eu de psychose, il n'y a pas eu de tension extraordinaire. On a juste dit au premier ministre et à la ministre des Finances: Y a-t-il moyen de respecter un peu plus les discussions qu'on a eues? Et, si effectivement vous respectez un peu plus les discussions qu'on a eues, on ne posera pas de geste qui auront comme conséquence de renverser le gouvernement quelques jours après l'élection.

Parce que la priorité qui me guidait dans ma responsabilité à l'époque, c'est que je ne trouvais pas sérieux de retourner en élection tout de suite après une élection parce que le jugement populaire ne l'aurait jamais accepté. Je m'en rappelle très bien, tout le monde faisait le message: Tu fais bien d'être plus exigeant sur le budget parce qu'il n'y a pas ça, puis il n'y a pas ça, puis il n'y a pas ça, mais on peut-u te dire quelque chose? On ne veut rien savoir de retourner en élection deux mois et demi ou trois mois après qu'on vient d'en faire une. Puis, moi, là, j'ai assez d'expérience, j'ai assez d'expérience, là, pour lire le peuple, puis comprendre le peuple et respecter le peuple. Donc, quand j'ai un signal aussi fort du peuple qui dit: Je ne veux pas aller en élection, ça, c'est ma première priorité. Ma première priorité, là, ce n'était pas mon moi puis nos petites particularités, c'était: Il faut tout mettre en oeuvre pour ne pas qu'il y ait d'élection, et je savais ce que ça voulait dire, parce qu'on avait eu le signal de l'autre formation politique, puis c'est leur droit le plus strict, en 2007, ils ont voté massivement contre le budget puis ils avaient le droit de le faire, c'était l'opposition officielle puis c'est leur droit le plus strict.

Nous, on a voté contre le budget parce qu'on a des principes, mais on l'a fait avec un nombre réduit pour ne pas que ça ait la conséquence que je suis en train de décrire, Mme la Présidente, parce que, si on n'avait pas fait ça, la conséquence, c'est qu'on se ramassait en élection, un autre petit 80 millions de plus, ce n'est pas grave, c'est les payeurs de taxes qui le paient, puis c'est deux mois après qu'on vient d'aller en élection. Moi, je n'ai pas posé ce geste-là pour éviter d'aller inutilement en élection et de refaire à peu près le même jugement populaire. On venait d'y aller. Qu'est-ce qu'il y avait de changé? Les mêmes formations politiques en présence, les mêmes plateformes électorales, le même contenu. C'est ça, la réalité, puis il faut en parler.

Mais on ne pensait jamais qu'on aurait l'audace de représenter un deuxième budget qui ne tiendrait à peu près d'aucune façon compte de ce qu'on avait discuté. Ça a donné lieu à un addendum budgétaire où, dans l'addendum budgétaire, on a été obligé d'ajouter les trois éléments que je répète pour une dernière fois: de l'aide aux élèves en difficulté d'apprentissage, de l'aide pour les soins à domicile et un peu plus de considération pour le crédit budgétaire aux régions ressources. Et j'en profite pour en parler tout de suite.

Le crédit budgétaire aux régions ressources, nous, on insistait là-dessus parce qu'on a la conviction que le Québec moderne, il doit se développer bien sûr dans les régions où la démographie a plus d'effets, que ce soit par l'immigration, que ce soit par l'augmentation des naissances, que ce soit par la concentration de l'urbanité. Je m'en fous, des raisons, mais il y aura toujours des régions au Québec, et, moi, je ne veux pas un Québec tellement différent, un Québec urbain prospère puis un Québec des régions négligé, mal accompagné. Et je voudrais en parler un peu parce que le crédit aux régions ressources, comme par hasard, on a eu l'appui de toutes les régions ressources en disant: Vous avez raison, M. le chef intérimaire de la formation politique du Parti québécois, d'être exigeant là-dessus, on a besoin de cet accompagnement pour, nous autres aussi, progresser, puis on...

Une voix: ...

M. Gendron: Non, non, les régions ressources. Et on ne dérangeait pas, on ne dérangeait pas, à ce moment-là, d'aucune façon les régions centrales parce que ce n'est pas la Gaspésie, là, qui est à 4 % de taux de chômage, ce n'est pas la Gaspésie, c'est la région de Chaudière-Appalaches; puis ce n'est pas région des Laurentides puis de Lanaudière qui est à 12 %, puis 14 %, puis 17 %, puis 26 % de chômage. Donc, vous repasserez, là, pour l'espèce de musée des horreurs qu'on a essayé de démontrer en disant que ça causait énormément de préjudices dans les autres régions.

Ce qui a causé préjudice dans les autres régions, c'est le non-accompagnement dans le secteur manufacturier, c'est la mauvaise gestion de la crise forestière et c'est le marché d'exportation à haut volume aux États-Unis avec l'appréciation du dollar. À partir du moment où notre piastre a pris énormément de valeur et qu'on exporte à peu près tout ce qu'on produit à l'étranger, est-ce que c'était une bonne affaire pour le marché de l'exportation? Vous savez bien que non. Ça, c'est la réalité économique difficile que des régions prospères ont vécue. Mais mettre ça sur le dos du crédit aux régions ressources, je regrette, c'est inexact, ça ne correspond d'aucunement à la réalité, et ce n'est pas pour rien que les gens des régions ressources savent ce qui se passe dans leur milieu, puis, eux autres, ils disaient: On a besoin de cet accompagnement-là.

Je donne juste un exemple. Et, tantôt, je voyais le ministre de l'Agriculture, puis il peut avoir d'autres obligations, là, parce que... Il faut respecter ça, mais... Il est là. Parfait! Alors, je vois le ministre de l'Agriculture, qui est donc ici. Je donne un exemple, ce qui se passe chez moi. On avait une réunion avec l'UPA en fin de semaine, et qu'est-ce qu'on a eu? Un cri d'alarme sans précédent, et je voudrais avoir son attention pour le petit bout que je vais développer. Ces gens-là, là, ils nous ont demandé: Y a-t-il moyen d'avoir de l'accompagnement pour des programmes régionaux? Parce qu'ils avaient l'habitude, avant le gouvernement libéral, d'avoir un gouvernement qui s'occupait de les accompagner. Quand le Parti québécois était là, il y avait un programme régional sur la chaux, il y avait un programme régional sur terres en friche, il y avait un programme régional sur ce qu'on appelle... voyons, pas le... les sols, là, quand on va mettre du... le drainage souterrain. Parce que, regardez ce qui se passe présentement, là, il n'y a à peu près aucun agriculteur qui a fait ses semences en Abitibi, parce que ça fait deux semaines qu'il neige, puis il pleut, puis il mouille. Alors, le sol es tellement imprégné d'eau qu'on ne peut pas aller ensemencer. Si on avait fait le drainage, comme ces gens-là le souhaitaient, bien, ils pourraient accéder plus rapidement sur leurs terres et ensemencer.

Ce que je veux dire au ministre de l'Agriculture, c'est qu'on a reçu une demande très forte. Comment ça se fait que ça fait deux ans et demi qu'ils demandent à ce gouvernement-là d'avoir des programmes régionaux en agriculture, ils ont zéro, Mme la Présidente, ils ont zéro programmes régionaux? Ça fait au moins un an qu'il dit: Nous autres, là, si le secteur ovin et bovin n'est pas accompagné, on va perdre 25, 30 très gros producteurs qui ont tracé le modèle pour le Québec dans le boeuf à l'herbe. Et c'est un méchant drame présentement, là, parce que mes producteurs ovins et bovins sont en train, les uns après les autres, de disparaître suite à la crise de la vache folle, et dans ce sens-là ça prendrait un peu d'accompagnement, ça prendrait un peu d'aide.

Et, comme si ce n'était pas assez, les producteurs agricoles s'assurent, dans les programmes d'assurance stabilisation... Donc, il y a un programme par rapport à ce qu'on appelle l'assurance récolte. Ils ont tout changé les normes. Puis, nous autres, l'été passé, qu'on aime ça ou pas, là, il y a eu une gelée dramatique, une gelée qui a fait qu'à peu près rien... Puis d'ailleurs, le plus bel exemple, là, c'est quand... Puis je le donne, l'exemple, parce que les gens de la Faune connaissent ça. Moi, ça fait quand même longtemps que j'habite cette région-là. En moyenne, là, quand on entend parler de 10, 12 ours par été qui se déplacent, là, ça, c'est la moyenne qu'on vit depuis des années. Puis, cette année, là, il y en a 300, 350, là, qui étaient en pleine ville de Rouyn, puis en pleine ville de Noranda, puis en pleine ville de La Sarre, là, parce qu'ils cherchaient de quoi à manger. Pourquoi cherchaient-ils de quoi à manger? Parce qu'ils ont eu le même problème que je vous raconte: à cause du gel, il y a bien des fruits sauvages qui n'ont pas poussé. Je le sais, je suis un amateur de bleuets, puis il n'y en avait pas cette année.

Mais, pour les producteurs agricoles, quand ça a été le temps de faire la récolte du foin, qu'est-ce qui s'est passé? Gel tardif, mauvaise fenaison, pas de récolte. Puis ils sont assurés pour ça, là, ça s'appelle l'assurance récolte. Mais, quand tu es assuré pour l'assurance récolte, puis on change toute la paramétrie pour faire accroire que, non, la gelée n'a pas été si pire que ça, même si on n'a rien récolté, bien c'est un 35 000 $, un 40 000 $, un 50 000 $ de compensation qui n'est pas dans leurs poches, plus la vache folle, plus l'augmentation du pétrole, plus l'Agrivert, puis l'agrément, plus les amas au champ qu'on ne veut plus permettre, même si le ministère de l'Environnement a toutes les preuves que les amas, ça ne dérange pas pantoute, dans le guide des bonnes pratiques. Ça ne dérange pas pantoute.

Le collègue qui vous a précédé, l'ancien ministre...

Une voix: ...

M. Gendron: C'est en plein ça. L'ancien ministre de l'Agriculture, je lui ai aidé à défendre, au Conseil des ministres, cette logique du guide des bonnes pratiques agricoles, concernant les amas au champ. Le jour où on fait disparaître les amas au champ d'un coup sec, je perds un autre 40, 50 producteurs de bovins en Abitibi-Témiscamingue.

Et je termine, là, là-dessus, sur cet élément-là. C'était juste pour illustrer comment c'est majeur d'accompagner plus et mieux les régions qui ont des productions sensibles et qui ont besoin de support pour poursuivre leur mission de développement économique, puis de s'être adaptées à toutes les normes et les règles légitimes d'un gouvernement responsable qui veut faire du développement durable. Parce que je suis en accord avec ces valeurs-là, de faire du développement durable, mais entre devenir fou puis faire du développement durable, il y a un milieu, là, il y a un milieu qu'il faut prendre, là. Puis là on ne sent pas que ces gens-là sont capables de prendre le milieu. C'est ce qu'on a vécu, dans le budget 2007.

n(20 h 30)n

Je terminerais avec un autre élément. C'est tellement caricatural qu'il faut que j'en parle. Dans le discours du budget de 2007, c'était marqué: Le gouvernement décide de vendre ses meubles pour payer ses factures et ses immeubles. Exemple: le Centre de gestion des équipements roulants ? parce qu'on m'a dit d'en parler ? ça s'appelle le CGER. Ça fait de l'argent. C'est 20 % en bas du marché privé. Il y en a un à Rouyn-Noranda. La ville de Val-d'Or... Puis la ville de Rouyn-Noranda a tout vendu ses équipements pour fonctionner avec le CGER. Je répète, là: Le CGER fait de l'argent. Il est 20 % moins cher que le marché. Mais, pour des raisons idéologiques, pour une phrase, simplement pour faire une belle phrase: Il n'est pas de la mission du gouvernement de gérer du matériel roulant, on va mettre à l'enchère puis on va vendre... on va défaire les deux CGER. J'ai reçu des centaines de résolutions. La ville de Val-d'Or est contre ça. La ville de Rouyn est contre ça. Tout le monde est contre ça. Tout le monde dit: Ça n'a pas d'allure. Puis, moi, je suis sûr que ça ne se fera pas.

Ce ne sera pas la première fois que quelque chose qu'ils mettent dans le discours du budget ne se fait pas. Mais, si je vous donnais un exemple, si ça avait été analysé un tant soit peu avant... Parce que j'ai regardé, là: La privatisation de ces services représente une coupure de juste 500 emplois en Abitibi, ce n'est pas grave. Il est à noter que jamais le gouvernement actuel n'a produit l'ombre d'un poil d'une étude démontrant que la privatisation de ces services entraînerait des économies. Au contraire, Rouyn, Val-d'Or, eux, ont des études qui prouvent l'inverse. Ça coûte moins 20 %. Mais, eux autres, de la logique, dans les budgets, ils ne sont pas habitués à ça, là. Alors, pour des raisons de principes idéologiques, on met ça dans la parenthèse, puis: Salut, Baptiste! C'est passé.

Puis là, comme si ce n'était pas assez, le gouvernement annonce une accélération de la diminution des effectifs de la fonction publique de 4 000 équivalents temps complet. Conséquence, Mme la Présidente? Mon directeur régional des transports m'avise: M. Gendron, je suis content pour vous. Cette année, vous avez 18 millions au lieu de 12 millions dans le plan régional de transport pour ma circonscription. Je me mets à applaudir. J'étais content de ça. J'aime mieux avoir 18 plutôt que 12. Mais il me dit: Ça se peut qu'on ne soit pas capables de faire le 18. Comment ça? Je n'ai plus de personnel, je n'ai pas d'effectif, les plans, les devis vont sortir trop tard, puis, quand je vais aller en appel d'offres, tous les contracteurs, ils sont pleins, donc ça va être de l'argent de Monopoly comme ce gouvernement-là m'a habitué. Entre la somme qu'ils annoncent et la réalité à l'automne, puis ça fait plusieurs années que je le fais, il y a toujours un écart de 2, 3 millions entre ce qu'ils ont dit qu'ils feraient puis ce qui s'est fait. Donc, moi, il me semble que, si on avait un peu le sens de la gestion, on s'assurerait qu'avec le niveau d'augmentation que vous avez effectivement accordée dans les crédits de la ministre des Transports... il faudrait s'assurer qu'il y ait le personnel requis pour être capable de faire la suite des choses, être capable de préparer ce qu'on appelle les devis appropriés pour aller en appel d'offres. Pas comme on m'a fait sur le pont, par exemple, de la rivière de La Sarre. Je suis appelé en appel d'offres au mois d'octobre, alors qu'est-ce qui est arrivé, tu penses? L'appel d'offres a sorti 1 million plus élevé, 1 million plus élevé que ce qu'on m'avait attribué. On a dit: M. Gendron, on s'excuse, mais on va refaire... on va refaire les travaux l'an prochain. Ça ne va pas vite ça, pour faire des travaux. Ça fait trois ans qu'il est dans mon programme, mais, moi, j'ai hâte qu'il se fasse, et non pas qu'il reste dans le programme.

On fait la même chose d'ailleurs avec le poste de Sûreté du Québec à La Sarre. J'ai été obligé de rencontrer la ministre, la présidente du Conseil du trésor. Là, elle m'a dit qu'elle toucherait à ça. Mais pourtant j'ai appelé ce matin puis, qu'est-ce que tu veux, il est toujours dans des cartons du ministère. J'ai l'autorisation du Conseil du trésor, mais on me demande de faire ça avec à peu près 400 % inférieur à la somme que partout ailleurs... Alors, comment je vais faire? Alors, vous savez bien que je n'arriverai pas.

Donc, moi, Mme la Présidente, je ne veux pas aller plus loin, mais je voulais juste profiter de l'occasion pour dire que c'est bien beau, là, que le ministre du Revenu nous présente un projet de loi n° 79 pour donner suite au budget, puis de toute façon, quel que soit le geste que nous aurions posé, c'est en vigueur, c'est en application, mais je trouvais que c'était une bonne occasion, c'était une excellente occasion pour rappeler des réalités objectives, pour être en mesure de décrire exactement ce qui s'est passé en 2007, et ce n'est pas pour rien qu'on pellette le problème cette année, et probablement qu'on aura l'occasion d'en faire une autre démonstration, que la situation budgétaire du gouvernement du Québec, actuelle est critique, est en sérieuse difficulté. On a changé les paramètres comptables, et c'est tellement vrai qu'on présente une loi où on va modifier à peu près tout le calcul qu'on connaissait pour encore une fois laisser voir qu'on est en situation d'équilibre, alors que ce n'est pas le cas.

Voilà les commentaires que je voulais faire, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres interventions? Le principe du projet de loi n° 79, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives d'origine fiscale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Sur division. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des
finances publiques

M. Fournier: Mme la Présidente, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques pour étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Fournier: Et je me permets de faire une autre motion, celle-ci pour ajourner nos travaux au mercredi 28 mai 2008, à 10 heures.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Houda-Pepin): Alors, en conséquence, nous ajournons nos travaux à demain, 10 heures. Merci. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 20 h 36)