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Version finale

40e législature, 1re session
(30 octobre 2012 au 5 mars 2014)

Le dimanche 30 juin 2013 - Séance extraordinaire

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Table des matières

Affaires courantes  

Déclarations de députés  4191

Rendre hommage à M. Pierre-Ferdinand Côté et offrir des
condoléances à sa famille et à ses proches 

M. Bernard Drainville  4191

Féliciter Mme Chloé Isaac, finaliste à l'Omnium de nage synchronisée du Brésil

Mme Fatima Houda-Pepin  4191

Souligner la tenue du 10e Relais pour la vie de La Vallée-des-Patriotes 

M. Pierre Duchesne  4191

Féliciter les lauréats des prix Henri

Mme Rita de Santis  4192

Souligner le 120e anniversaire de l'Harmonie de Loretteville 

M. Gérard Deltell4192

Rendre hommage à Mme Monique Boucher, cuisinière à la polyvalente Le Carrefour, à l'occasion de son départ à la retraite 

Mme Élizabeth Larouche  4192

Souligner la tenue du Symposium des grands peintres de Chesterville 

M. Sébastien Schneeberger4193

Rendre hommage à M. Nelson Mandela 

M. Emmanuel Dubourg  4193

Féliciter M. Gilles St-Amand, lauréat d'un prix Hommage bénévolat-Québec 

M. Émilien Pelletier4193

Dépôt d'une lettre de la première ministre demandant que l'Assemblée se réunisse en séances extraordinaires  4194

Questions et réponses orales  4194

Projet de loi spéciale sur la reprise des travaux
dans l'industrie de la construction 

M. Jean-Marc Fournier4194

Mme Pauline Marois  4194

M. Jean-Marc Fournier4194

Mme Pauline Marois  4195

M. Jean-Marc Fournier4195

Mme Pauline Marois  4195

M. Jean-Marc Fournier4195

Mme Pauline Marois  4195

Conflit de travail dans l'industrie de la construction 

M. Guy Ouellette  4196

Mme Agnès Maltais  4196

M. Guy Ouellette  4196

Mme Agnès Maltais  4196

Mme Lise Thériault4197

Mme Agnès Maltais  4197

Impact de la grève dans l'industrie de la construction sur les grands chantiers 

Mme Julie Boulet4197

Mme Agnès Maltais  4197

Mme Julie Boulet4198

Mme Agnès Maltais  4198

Mme Julie Boulet4198

Mme Agnès Maltais  4198

Détermination des conditions de travail des travailleurs de la construction 

M. François Legault4199

Mme Pauline Marois  4199

M. François Legault4200

Mme Pauline Marois  4200

M. François Legault4200

Mme Pauline Marois  4200

Conséquences économiques de la grève dans l'industrie de la construction 

M. Christian Dubé  4200

Mme Agnès Maltais  4201

Document déposé  4201

M. François Bonnardel4201

Mme Agnès Maltais  4201

Mme Hélène Daneault4202

M. Stéphane Bédard  4202

Impact économique de la grève dans l'industrie de la construction 

M. Sam Hamad  4202

Mme Agnès Maltais  4203

M. Sam Hamad  4203

Mme Agnès Maltais  4203

M. Sam Hamad  4203

Mme Agnès Maltais  4203

Situation économique et financière du Québec 

M. Raymond Bachand  4204

M. Nicolas Marceau  4204

M. Raymond Bachand  4204

M. Nicolas Marceau  4204

M. Raymond Bachand  4205

M. Nicolas Marceau  4205

Impact de la grève dans l'industrie de la construction sur les régions 

Mme Dominique Vien  4205

Mme Agnès Maltais  4205

Motions sans préavis  4206

Définir le cadre des séances extraordinaires  4206

Établir la procédure législative d'exception en vue de procéder à la présentation et aux autres étapes de l'étude du projet de loi n° 54 ― Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction 4206

Commentaires sur les motions  4206

M. Pierre Moreau  4206

M. Gérard Deltell4207

M. Amir Khadir4207

M. Stéphane Bédard  4207

M. Pierre Moreau  4207

M. Stéphane Bédard  4208

Débat restreint sur le motif de la convocation en séances extraordinaires et sur les motions fixant le cadre temporel et la procédure d'exception  4208

Mme Pauline Marois  4208

M. Jean D'Amour4209

M. Gérard Deltell4211

Mme Françoise David  4212

M. Stéphane Bédard  4213

Mme Fatima Houda-Pepin  4214

Mme Agnès Maltais  4215

Mme Dominique Vien  4217

M. Daniel Ratthé  4219

Mme Francine Charbonneau  4219

M. Gilles Ouimet4221

Mme Stéphanie Vallée  4222

Mme Lise Thériault4223

Mise aux voix de la motion proposant de définir le cadre temporel des séances extraordinaires  4227

Mise aux voix de la motion proposant d'établir la procédure législative d'exception en vue de procéder à la présentation et aux autres étapes de l'étude du projet de loi n° 54 ― Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction 4228

Affaires du jour  

Projet de loi n° 54 ― Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction 

Présentation  4228

Mme Agnès Maltais  4228

Mise aux voix  4228

Adoption du principe  4229

Mme Agnès Maltais  4229

M. Raymond Bachand  4231

M. Christian Dubé  4234

M. Amir Khadir4238

M. Nicolas Marceau  4238

M. Sam Hamad  4240

M. Stéphane Le Bouyonnec  4244

M. Daniel Ratthé  4246

M. Gilles Chapadeau  4246

M. Laurent Lessard  4248

M. François Bonnardel4250

M. Jean-François Lisée  4253

M. Guy Ouellette  4255

Mise aux voix  4257

Commission plénière  4258

Remarques préliminaires  4258

Mme Agnès Maltais  4258

M. Guy Ouellette  4259

M. Christian Dubé  4259

Étude détaillée  4260

Prise en considération du rapport de la commission plénière
qui en a fait l'étude détaillée  4287

Mise aux voix du rapport4287

Adoption  4288

Mme Agnès Maltais  4288

M. Guy Ouellette  4288

M. Christian Dubé  4289

Mme Françoise David  4289

Mme Pauline Marois  4290

M. Jean-Marc Fournier4290

M. François Legault4291

Mise aux voix  4292

Ajournement au 17 septembre 2013   4292

Journal des débats

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Bonjour à tous et à toutes. Bon dimanche.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous allons procéder par la rubrique Déclarations de députés. Veuillez vous asseoir. Alors, je cède maintenant la parole au député de Marie-Victorin. M. le député.

Rendre hommage à M. Pierre-Ferdinand Côté et offrir
des condoléances à sa famille et à ses proches

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Merci, M. le Président. Alors, au nom du gouvernement du Québec, je tiens à rendre hommage à un grand homme qui nous a quittés le 17 juin dernier, Pierre-Ferdinand Côté. M. Côté aura laissé sa marque tant comme artisan de la Révolution tranquille que comme premier grand arbitre de notre système électoral.

Au cours de son mandat à titre de Directeur général des élections, M. Côté a établi les standards d'impartialité et d'intégrité exigés d'une telle institution. Du Nunavik à l'île Maurice, en passant par Haïti, il a participé à plusieurs missions pour soutenir l'établissement de processus électoraux crédibles, contribuant ainsi à faire avancer la démocratie partout dans le monde. Ce riche bagage lui a valu de nombreux honneurs, notamment celui d'être nommé au grade d'officier de la l'Ordre national du Québec en 1998. Pierre ‑ F. Côté a contribué de façon importante au développement du Québec à des moments marquants de son histoire contemporaine. Il laissera le souvenir d'un homme qui avait le sens du devoir et le respect des institutions démocratiques.

Je terminerai en adressant mes plus sincères condoléances à la famille et aux proches de M. Côté. Vous pouvez être fiers de l'héritage de ce grand homme, de ce grand Québécois.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Marie-Victorin. Je cède maintenant la parole à la députée de La Pinière. Mme la députée.

Féliciter Mme Chloé Isaac, finaliste à
l'Omnium de nage synchronisée
du Brésil

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin : M. le Président, Chloé Isaac, une athlète olympique québécoise, s'est encore distinguée, le 8 juin dernier, en se classant au troisième rang du programme libre de l'épreuve en solo à l'omnium de nage synchronisée de Rio de Janeiro, au Brésil. Elle a réitéré cette performance en participant au programme technique de l'épreuve, où elle a aidé l'équipe canadienne à se hisser au troisième rang.

Chloé Isaac est une jeune athlète olympique de 22 ans qui participe depuis 2009 aux compétitions internationales et qui s'est déjà distinguée aux jeux olympiques du Commonwealth en 2010 en remportant une médaille d'or en duo, suivie d'une autre médaille d'or en solo à l'omnium de Grande-Bretagne de nage synchronisée, en avril dernier.

À titre de députée de La Pinière, je suis très fière de Chloé Isaac, une inspiration pour les jeunes et un modèle de persévérance et de détermination. Son exploit au Brésil la place en bonne position pour les championnats du monde de la fédération internationale de nage synchronisée prévus à Barcelone en juillet 2013.

Félicitations, Chloé, et franc succès dans vos prochaines compétitions!

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée de La Pinière. Je cède maintenant la parole au député de Borduas. M. le député.

Souligner la tenue du 10e Relais pour
la vie de La Vallée-des-Patriotes

M. Pierre Duchesne

M. Duchesne : Oui. Merci, M. le Président. Alors, dans ma circonscription de Borduas, il y a un événement majeur, bien, à la fois grave et festif, qui a eu lieu au début du mois de juin, c'était le 10e Relais pour la vie de La Vallée-des-Patriotes au bénéfice de la Société canadienne du cancer, une marche nocturne qui s'est déroulée cette année à l'école secondaire Ozias-Leduc du Mont-Saint-Hilaire. Ce n'était pas facile, il y a eu deux orages pendant la nuit; les gens ont continué à marcher. J'étais ambassadeur. C'était organisé, tout ça, par la journaliste Isabelle Laramée, elle-même qui a perdu sa mère, l'année précédente, du cancer.

Mais je veux souligner la fierté d'être inspirés, dans le comté, par une jeune femme exceptionnelle, dynamique, débordante d'énergie, Frédéricke Allard. Frédéricke Allard est survivante de trois cancers, trois cancers, M. le Président. Elle a continué et elle continue à inspirer. Sa fille, d'ailleurs, une jeune adolescente, est venue témoigner du combat et du triomphe de sa mère. Ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que le cancer est une terrible maladie, mais qu'on y survit, il y en a de plus en plus, et qu'il faut rendre hommage à ces personnes, dont Frédéricke Allard.

• (9 h 50) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Borduas. Je cède maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé. Mme la députée.

Féliciter les lauréats des prix Henri

Mme Rita de Santis

Mme de Santis : Merci, M. le Président. Plus tôt ce mois, lors de la soirée gala, l'école secondaire Henri-Bourassa a honoré plusieurs élèves en leur présentant un prix Henri pour souligner leur rendement académique, leur persévérance, leur engagement communautaire de même que leurs exploits sportifs.

Au nom de l'Assemblée nationale, je tiens à ajouter ma voix au concert de félicitations adressées à Doran Vermette, Annie-Kim Nguyen et Kéven Jacques, qui ont reçu la médaille du lieutenant-gouverneur; Vanessa Auguste, Johanny Paré, Jose-Erlyne Saget, Mouhcine Morabite, Marie Ève Payeur et Habiba Cherkaoui, qui ont reçu, des mains du policier Alain Clément, la bourse Beaulieu-Blondin pour la persévérance; à Frédérik Bourque-Messier, Yassine Ghalem, Yassine Graitaa, Oumaima Haqqi, Mélissa Charles, Manal Essadri, Sorina Medesan, Sara Sibri et Selsabil-Anfel Bouziane pour leur engagement communautaire; et Robertha Charles et Jean Clairemond Cesar pour le mérite sportif.

C'est tout Montréal-Nord et moi qui sommes fiers de vous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Je cède maintenant la parole au député de Chauveau. M. le député.

Souligner le 120e anniversaire de l'Harmonie de Loretteville

M. Gérard Deltell

M. Deltell : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ce soir aura lieu au parc Jean-Roger-Durand, dans le secteur Loretteville, dans le comté de Chauveau, un spectacle de l'Harmonie de Loretteville. Et la raison pour laquelle je vous en parle, M. le Président, évidemment, c'est pour inviter tout le monde à aller assister à ce spectacle-là, mais aussi pour souligner le fait que ça fait 120 ans que l'Harmonie de Loretteville opère. Et, M. le Président, on le sait, des organismes… je ne dirais pas communautaires, mais des organismes de citoyens qui s'impliquent bénévolement, quand on est capables de durer plus que 10 ans, c'est déjà pas pire, alors imaginez 120 ans. Ce sont donc des générations après générations de musiciens amateurs qui ont fait vivre l'Harmonie de Loretteville, c'est donc plus de 1 000 personnes qui, au fil des années, ont fait vivre la musique ici, à Loretteville.

Il faut comprendre qu'au départ c'était une fanfare et, à partir de 1907, c'est devenu une harmonie. Et, dans les années 60, il y a eu une perte de popularité, mais, heureusement, le maire de l'époque, Jean-Roger Durand, a réussi à remettre ça sur les rails, ce qui fait qu'aujourd'hui une cinquantaine de musiciens s'activent au sein de l'harmonie, et, entre autres, M. le Président, M. Gaston Picard, 97 ans, qui a 85 ans d'implication musicale, qui est toujours piccoliste et flûtiste et qui joue d'ailleurs devant son fils — son fils, oui — qui est lui-même le directeur de l'harmonie. Bravo aux 120 ans de l'Harmonie de Loretteville!

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Chauveau. Je cède maintenant la parole à la députée d'Abitibi-Est. Mme la députée.

Rendre hommage à Mme Monique Boucher, cuisinière à la
polyvalente Le Carrefour, à l'occasion de son départ à la retraite

Mme Élizabeth Larouche

Mme Larouche : M. le Président, chers collègues, aujourd'hui j'aimerais honorer une cuisinière dévouée qui a oeuvré pendant plus de 30 ans auprès des jeunes de l'école secondaire de ma circonscription. Il s'agit de Mme Monique Boucher.

Derrière son fourneau, Mme Boucher a nourri plusieurs générations de La Vallée-de-l'Or en cuisinant plus de 1 million de repas pour les adolescents de la polyvalente Le Carrefour, de Val-d'Or. Durant toutes ces années, Mme Boucher a jumelé ses deux passions, soit les jeunes et la cuisine. Elle a participé au virage entrepris par le gouvernement du Québec afin d'améliorer la qualité des repas dans les cafétérias. En optant pour une cuisine santé, elle a ainsi contribué au changement des habitudes alimentaires chez une clientèle attirée davantage par les pommes de terre frites plutôt que par un succulent brocoli.

En mon nom et au nom des gens d'Abitibi-Est, je souhaite une retraite des plus agréables à une femme remarquable de notre circonscription. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée d'Abitibi-Est. Je cède maintenant la parole au député de Drummond—Bois-Francs. M. le député.

Souligner la tenue du Symposium des grands peintres de Chesterville

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. En ce dimanche tout à fait particulier, il me fait plaisir de souligner un événement tout aussi extraordinaire qui se tenait au mois de mai dernier, le 14e symposium de Chesterville, L'Accueil des grands peintres, devenu au fil des ans un lieu prisé des artistes ainsi que des amoureux de l'art visuel. Plus de 3 000 personnes sont venues admirer les réalisations et sculptures d'artistes tels qu'Hélène Charland, Bruno Lord, Claude Bonneau, Jérôme Grenier, Marie-Claude Demers et celles du président d'honneur cette année, Humberto Pinochet.

Depuis 14 ans, le symposium s'est forgé une réputation d'excellence, jouissant d'un rayonnement provincial. J'invite déjà les gens à inscrire pour l'an prochain, le 15 mai 2014, la visite du 15e symposium de Chesterville, L'Accueil des grands peintres. Félicitations aux organisateurs, et artistes, et nombreux visiteurs qui ont fait de ce symposium un événement à ne pas manquer dans la belle région de Victoriaville et surtout du comté de Drummond—Bois-Francs. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Alors, je cède maintenant la parole au député de Viau.

Rendre hommage à M. Nelson Mandela

M. Emmanuel Dubourg

M. Dubourg : Merci, M. le Président. « Être libre, ce n'est pas seulement se débarrasser de ses chaînes; c'est vivre d'une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. » Ces paroles ont été prononcées par M. Nelson Mandela. Aujourd'hui, alors qu'il mène peut-être son dernier combat, c'est un devoir pour moi de le saluer et de lui rendre hommage.

Après avoir passé 27 ans en prison, il a reçu le prix Nobel de la paix en 1990, et j'insiste, pour sa résistance non violente à la lutte armée. Élu président en 1994, M. Mandela a poursuivi sa lutte pour les droits de l'homme. Son combat transcende les frontières de l'Afrique du Sud. Ses valeurs de liberté, de justice, d'égalité et de fraternité entre les peuples resteront gravées dans notre mémoire. Merci. Merci, Nelson Mandela.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Viau. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Hyacinthe. M. le député.

Féliciter M. Gilles St-Amand, lauréat d'un
prix Hommage bénévolat-Québec

M. Émilien Pelletier

M. Pelletier (Saint-Hyacinthe) : M. le Président, récemment, ma collègue ministre de la Solidarité sociale et du Travail a remis un prix Hommage au bénévole distinctif pour l'engagement dans le secteur de la culture à M. Gilles St-Amand. Il a oeuvré toute sa vie à la diffusion et à l'enseignement de la musique.

C'est à l'âge de six ans que M. St-Amand a tenu une trompette dans ses mains pour la toute première fois. Il est bénévole et musicien à La Société philharmonique de St-Hyacinthe, où il cumule plus de 40 000 heures d'engagement accumulées en 66 ans de bénévolat, que ce soit à la direction musicale, au conseil d'administration, à la planification de concerts estivaux, la réparation d'instruments ou encore pour l'organisation de campagnes de financement et la reconstruction des locaux suite à un incendie. Il a été le premier à mélanger la musique de fanfare et la musique d'harmonie au Québec alors qu'il était directeur musical. Depuis 1990, la salle de répétition de la société philharmonique porte son nom en reconnaissance de son implication significative.

Je le remercie pour toutes ces années de don de soi et l'encourage à continuer à communiquer sa passion. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Saint-Hyacinthe. Alors, cela met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Je suspends pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 57)

(Reprise à 10 h 15)

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Bon dimanche. Alors, nous allons nous recueillir un moment. Veuillez vous asseoir, merci.

Dépôt d'une lettre de la première ministre demandant que
l'Assemblée se réunisse
en séances extraordinaires

Avant de poursuivre les affaires courantes, je vous rappelle que nous sommes réunis à la suite de la lettre que m'a adressée Mme la première ministre me demandant de prendre les dispositions nécessaires pour que l'Assemblée se réunisse en séances extraordinaires à compter de 9 h 45 ce 30 juin 2013 selon le calendrier et l'horaire qui seront déterminés par l'Assemblée afin de permettre la présentation d'un projet de loi visant la reprise des travaux dans l'industrie de la construction ainsi que de procéder à toutes les étapes de son étude. Je dépose cette lettre.

Alors, nous poursuivons nos travaux. Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi. Il n'y a pas de dépôt de documents ni de dépôt de rapports de commissions. Il n'y a pas de dépôt de pétitions. Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droits ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Projet de loi spéciale sur la reprise des
travaux dans l'industrie de la construction

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je veux vous indiquer, Mme la Présidente, que nous approchons cette séance extraordinaire dans un esprit constructif.

Cela dit, je ne comprends pas la conduite du gouvernement au cours des dernières semaines. Premièrement, la première ministre a refusé de s'impliquer avant la grève. Deuxièmement, la première ministre a refusé d'évaluer les coûts économiques de la grève. Troisièmement, la première ministre a refusé de convoquer rapidement l'Assemblée pour rouvrir les chantiers rapidement. Et, quatrièmement, la première ministre, qui convoquait une séance spéciale hier, refusait, en même temps, de nous dévoiler l'essentiel du projet de loi dont elle veut qu'on débatte. L'opposition veut bien l'aider, Mme la Présidente, mais le gouvernement devrait commencer à faire sa part.

Ça fait près de quatre semaines que nous demandons au gouvernement d'agir. La première ministre a refusé. Elle a dit : Pas besoin, tout va bien. Au déclenchement de la grève, nous avons proposé un échéancier serré, la première ministre l'a refusé. Le 18 juin, nous avons demandé de nommer un médiateur spécial, la première ministre l'a refusé pendant une semaine. Le conflit a des impacts sur l'économie de tous les Québécois, mais le gouvernement a dit : Ce n'est pas grave, il n'y a pas de pertes économiques vu qu'on n'a pas évalué les pertes économiques.

Mme la Présidente, c'est l'équivalent d'aveuglement volontaire. C'est un gouvernement irresponsable. Je demande à la première ministre d'expliquer pourquoi son gouvernement...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, Mme la Présidente, je remercie le chef de l'opposition officielle qui nous assure de sa volonté de travailler avec l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale pour que nous puissions adopter la meilleure loi possible dans les circonstances, M. le Président... Mme la Présidente.

Moi, je crois que l'aveuglement volontaire, là, ça a été pratiqué pendant très, très, très longtemps par le gouvernement qui nous a précédés, sur la question de la collusion dans l'industrie de la construction en particulier, Mme la Présidente. Ça, c'en était, de l'aveuglement volontaire. Si nous avions retenu la suggestion faite par l'opposition officielle de même que la deuxième opposition, M. le Président... Mme la Présidente, il n'y aurait pas eu de règlement négocié pour plus de 100 000 travailleurs de l'industrie de la construction. Parce que c'est ce qui s'est passé suite aux décisions responsables et raisonnables que j'ai prises et que mon gouvernement a prises, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Première complémentaire.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Oui. Je vais garder le ton approprié à cette séance, Mme la Présidente, mais la réponse est plus que décevante. D'abord, je pose une question annonçant que nous voulons collaborer  — évidemment, on va lire le projet de loi pour savoir sur quoi on parle  —  et la première ministre me répond sur un autre sujet. Il y a des logements qui ne sont pas livrés, des chantiers qui sont retardés, il y a des salaires qui ne sont pas payés. Il y a des revenus de l'État qui ne sont pas au rendez-vous. On a appris que les revenus de l'État étaient 250 millions de moins pour 2012‑2013. On est en 2013‑2014, ça ne va pas mieux.

Je demande à la première ministre pourquoi elle a choisi l'aveuglement volontaire. Pourquoi elle n'est pas intervenue quand on lui...

• (10 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Dans toute négociation, Mme la Présidente, il faut donner le temps au temps, il faut permettre aux parties d'aller le plus loin possible pour arriver à une entente, parce que, je le répète ici, Mme la Présidente, je ne suis pas très heureuse de me retrouver ici maintenant pour proposer l'adoption d'une loi spéciale. Une entente négociée, soit-elle imparfaite, est toujours, toujours meilleure qu'une loi spéciale qui impose, Mme la Présidente.

Alors, ce que nous avons fait, c'est que nous avons respecté le droit qu'ont les parties de négocier convenablement, et ça existe, le droit de grève, dans le secteur de l'industrie de la construction. Cependant, évidemment, on ne doit pas le laisser s'éterniser, et c'est la meilleure décision, je crois, que nous avons prise à cet égard.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En complément.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : C'est toujours important que la première ministre des Québécois s'intéresse à l'économie de tous les Québécois, et, dans ce cas-ci, elle a fait fi de cette notion.

Maintenant, je lui demande ceci, toujours pour être constructif. Au cours de la journée, je comprends qu'il y aura un projet de loi qui sera déposé. Est-ce qu'elle va permettre que nous entendions les parties sur ce projet de loi, patronales et syndicales, pour qu'elles nous expliquent les positions qu'elles ont sur ce projet de loi en termes constructifs, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, Mme la Présidente, le leader du gouvernement a rencontré les représentants des oppositions pour indiquer généralement le contenu de la loi. Évidemment, nous n'avons pas le droit de dévoiler le contenu avant qu'elle ne soit déposée, par respect pour les membres de l'Assemblée. On a donné les grands objectifs, les grandes perspectives, et, par rapport à certaines inquiétudes que pouvait avoir l'opposition, je crois qu'on a pu les rassurer. Enfin, ils le verront au moment où le projet de loi va être déposé, Mme la Présidente.

Moi, je crois qu'à ce moment-ci nous ne devenons pas des médiateurs entre les parties, il n'est donc pas question de recevoir les parties. Nous avons une responsabilité, puisqu'on croit qu'il faut remettre les gens au travail, et c'est d'adopter la loi spéciale, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Je pense qu'on ne s'est pas compris puis qu'on est bien mal partis pour avoir du travail de collaboration. On a eu quelques informations une demi-heure avant le début de la séance, on ne connaît pas le projet de loi. Ce qu'on sait, c'est que la ministre a déclaré que les parties en étaient satisfaites.

Nous voulons que les parties viennent devant les parlementaires  — qui ont ce droit-là au nom des Québécois  —  nous dire ce qu'ils pensent du projet de loi. On n'est pas en train de reprendre les négociations, on veut savoir ce que les parties patronales et syndicales pensent de ce projet de loi là.

Est-ce que c'est abusif de demander ça? Est-ce que la première ministre veut retourner en vacances?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Est-ce que je comprends que le chef de l'opposition officielle était en vacances, lui, jusqu'à maintenant? Ce n'était pas mon cas.

Mme la Présidente, ce que je veux dire au chef de l'opposition officielle d'abord : Le projet de loi va être déposé dans l'heure qui suit. Il aura l'occasion — et le temps est prévu dans notre règlement — il aura l'occasion, de même qu'avec tout son groupe parlementaire, de prendre connaissance de ce projet de loi qui est un projet de loi raisonnable, responsable, qui respecte le droit de négocier des travailleurs et des entreprises dans le domaine de la construction, Mme la Présidente, parce que nous avons un objectif, oui, c'est de faire en sorte que les travailleurs retournent le plus rapidement possible sur les chantiers, mais on doit le faire aussi dans une perspective de paix sociale et de meilleure productivité, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En principale, M. le député de Chomedey.

Conflit de travail dans l'industrie de la construction

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Merci, Mme la Présidente. Ça fait des semaines que nous demandons à la ministre du Travail si elle est consciente des conséquences que pourrait avoir une grève générale dans l'industrie de la construction et quels sont les outils qu'elle a mis en place pour éviter un conflit. Au lieu de nous répondre qu'elle a posé les bons gestes, que, si les négos n'avancent pas, elle nommera un médiateur spécial afin d'éviter un conflit que le Québec ne peut pas se payer, elle nous a répondu : Je ne peux pas m'en mêler, il faut les laisser négocier. Ça s'est toujours réglé. Son laisser-faire a mené à la détérioration de la situation comme tous les dossiers qui étaient sous sa responsabilité qui ont mené au chaos. Son irresponsabilité fait qu'aujourd'hui ce sont tous les Québécois qui en paient le prix.

Pourquoi la ministre nous a-t-elle dit que tout allait bien, alors que, dans les faits, la situation se détériorait de jour en jour?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : M. le Président... Mme la Présidente, pardon. Une séance de période de questions par une présidente, excusez-moi, ça fait longtemps qu'on a vécu ça, Mme la Présidente.

Alors, Mme la Présidente, nous avons agi de façon responsable d'abord, d'abord, en permettant aux gens de négocier. Alors, ce que ça a donné comme résultat, c'est qu'après cinq jours de grève ouvrables, seulement cinq jours de grève ouvrables, il y a eu une première entente qui s'est signée de façon négociée dans le secteur génie civil et voirie. Dès le lendemain, sixième jour de grève, il y a eu une autre entente de signée dans le secteur résidentiel. Ce qui veut dire qu'en quelques jours à peine il y a eu près de 100 000 travailleurs sur les, environ, 175 000, 180 000 travailleurs qui sont visés qui sont rentrés à partir d'une entente qu'ils ont négociée. Ils ont eux-mêmes négocié et signé leurs conventions collectives. Ils ont donc, dans ces deux secteurs, assumé leurs responsabilités. Si nous avions écouté les oppositions, cela n'aurait pas pu se produire. Or, que veut dire des travailleurs qui rentrent sur un chantier… sur une convention qu'ils ont négociée? Ça veut dire une rentrée pacifique sur les chantiers. Ça vaut la peine. Ça prend la peine... ça vaut la peine de prendre…

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Probablement, Mme la Présidente, que, si le gouvernement avait écouté les oppositions, on ne serait pas en loi spéciale ce matin. Est-ce que la ministre, Mme la Présidente...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député.

Je nous rappellerais que c'est dimanche. Soyons zen ce matin, là, et allons-y comme ça doit se faire. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Comment peut-elle nous dire, Mme la Présidente, que ça négociait alors que tout le monde sortait et disait le contraire? Peut-elle avouer aujourd'hui que la seule chose qu'elle tentait de faire, c'était de se racheter auprès des syndicats et peut-elle aujourd'hui présenter des excuses aux Québécois pour le gâchis dans lequel elle les a plongés de façon irresponsable?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Le député vient de nous rappeler qu'effectivement, si on avait suivi la ligne de conduite des deux oppositions, de la deuxième opposition après seulement une journée de grève, dès la première journée de grève, ils réclamaient une loi spéciale, donc, après 48 heures, il y aurait eu une loi spéciale, et, du côté de l'opposition officielle, bien, on demandait une loi spéciale après cinq jours, donc les deux ententes qui se sont signées auraient été imposées. 100 000 travailleurs sont rentrés sur les lieux de travail avec une convention collective qu'ils ont signée. Voilà ce qui est la réussite du gouvernement actuel, et c'était quelque chose d'important. Pourquoi? Parce qu'il faut s'assurer de la productivité de nos entreprises...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

Mme Maltais : ...de la productivité de nos chantiers de construction, et que c'est la façon de faire.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En complément, Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : Merci, Mme la Présidente. Depuis le début de la grève, plusieurs cas d'intimidation et de violence ont été soulevés, et des actes criminels ont été commis. En Outaouais, des actes de vandalisme ont été posés; à Trois-Rivières, un entrepreneur a reçu des menaces de mort. Et ce ne sont pas des cas isolés. La seule chose que la ministre du Travail a trouvé à dire, c'est que c'est normal que ça brasse un peu sur les chantiers.

Est-ce que la ministre réalise qu'en minimisant ces cas graves elle a elle-même créé les conditions propices pour que de tels actes se reproduisent?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Dès le début du conflit, nous avons demandé à la Commission de la construction du Québec, qui est notre partenaire pour assurer, pour valider, là, qu'il n'y ait pas d'intimidation, de brassage sur les chantiers, nous lui avons demandé une présence assidue et constante, ce qu'elle a fait. Et la démonstration que vient de faire la députée, c'est que nous avons eu raison. La démonstration qu'elle vient de faire, c'est que nous devons tous toujours, à chaque fois, comme ça s'est réalisé depuis 20 ans, voir à ce que les travailleurs conviennent eux-mêmes d'une entente collective, d'une convention collective. Grâce à notre patience, 100 000 travailleurs sur près de 175 000 sont entrés...

• (10 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

Mme Maltais : ...sur la base d'une convention collective qu'ils ont négociée. Voilà qui est la meilleure façon de s'assurer...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Laviolette, en principale.

Impact de la grève dans l'industrie de la
construction sur les grands chantiers

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : Merci, Mme la Présidente. Alors, la grève dans la construction, évidemment, ça a stoppé de grands chantiers au Québec. On n'a qu'à penser au CHU de Sainte-Justine, au CHUM, au CUSM. On peut penser également à l'amphithéâtre de Québec, au complexe minier du Mont-Wright, au barrage de la Romaine. En fait, Mme la Présidente, c'est toute l'économie du Québec que le PQ paralyse.

Ce qu'il faut comprendre, c'est que, dans le dossier des grands chantiers, c'est une situation particulière, parce qu'on ne peut pas les redémarrer instantanément. Alors, à moins de deux semaines des vacances de la construction, certains chantiers ne pourront reprendre leurs activités avant le mois d'août. Donc, ce sont des retards, et c'est du temps double. Alors, c'est 70 000 travailleurs qui n'ont pas leur paie, et c'est des dizaines de milliers de travailleurs également qui sont touchés indirectement. En plus, le gouvernement du Québec va imposer à tous les contribuables du Québec des coûts supplémentaires, dû à leur inertie et à leur irresponsabilité.

Alors, le gouvernement peut-il reconnaître qu'il est lui seul responsable...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Écoutez, Mme la Présidente, je vais me permettre de citer le communiqué de la compagnie Stornoway qui annonçait la fin de la grève des travailleurs de la construction, parce que nous avons réussi à les amener à négocier une entente dans le secteur génie civil et voirie. Que nous a dit Stornoway le 25 juin? « Cet arrêt de travail a eu peu d'impacts sur les activités de construction de la route d'accès au projet Renard et les effets sur l'échéancier de réalisation sont négligeables. Le développement du chemin d'accès minier continue de progresser selon le budget et l'échéancier. »

Ce que nous disons depuis le début, c'est que nous voulons que les gens retournent au travail le plus rapidement possible, et ce que nous avons fait, c'est de voir à ce qu'il y ait des ententes négociées. Maintenant, aujourd'hui, nous ne voulons pas qu'il y ait plus d'impacts et nous présentons une loi spéciale pour permettre de la façon la plus juste, raisonnable, la plus pacifique le retour des gens sur les chantiers. C'est ce que nous faisons ce matin.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En première complémentaire, Mme la députée de Laviolette.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : On peut se demander ce qu'on fait tous ici en ce dimanche matin. Il n'y a pas de problème, tout va bien. Alors, ce gouvernement a fait fi des risques de grève depuis avril dernier. Il a tardé à nommer un médiateur spécial, alors que les négociations n'allaient nulle part et il le savait très bien. Il a refusé de tenir compte des conséquences particulières de l'arrêt sur les grands chantiers.

Alors, ce gouvernement peut-il admettre qu'il est responsable de la catastrophe économique qu'il crée actuellement par l'arrêt des grands chantiers au Québec?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Mme la Présidente, la députée vient de dire : Des négociations qui ne mènent nulle part. Or, parce que nous avons respecté ce choix québécois, un choix québécois, de voir à ce que les gens négocient leurs ententes collectives dans le domaine de la construction, 100 000 travailleurs, 100 000 travailleurs, sont rentrés sur une entente négociée, 100 000 travailleurs. Dans le secteur institutionnel et commercial, industriel, les gens ne sont plus capables d'avancer, ils n'arrivent plus à régler ensemble malgré 38 rencontres en trois mois, 38 rencontres : les 14, 15, 20, 21, 25...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

Mme Maltais : ...27 mars, les 2, 3, 8, 10, 12, 16, 18, 22, 24...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader.

M. Moreau : La ministre a cité un document, on aimerait qu'elle dépose le document.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt?

Des voix :

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Laviolette, en deuxième complémentaire.

Mme Julie Boulet

Mme Boulet : Alors, Mme la Présidente, là, le choix des Québécois, là, c'est que la ministre aurait dû s'impliquer en avril puis en mai pour qu'on évite de se retrouver dans la situation qu'on est aujourd'hui. Alors, ce sont des...

Des voix : ...

Mme Boulet : Même la première ministre et le ministre de la Santé ont dit que ce n'était pas grave, des retards, que ce n'était pas grave, que ça ne changeait rien. Bien, ce sont des milliers d'emplois, des milliers de familles et des coûts supplémentaires considérables pour tous les Québécois.

Alors, avec l'arrêt des minicentrales, l'abandon du Plan Nord, les retards dans l'industrie forestière, maintenant, c'est l'arrêt des grands chantiers...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Alors, il y a eu des rencontres dans les domaines, ici, les 1er, 6, 8, 10, 15, 29 et 31 mai. En juin, les 5, 6, 11, 13, 14, 18, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28 et 29 juin. En sus de ça, toutes les rencontres téléphoniques. Alors, voilà la preuve que les gens ont travaillé. Ils ont vraiment tenté d'en venir à une entente négociée à notre demande. C'était leur responsabilité. Maintenant, ils n'y arrivent pas. Ils nous disent eux-mêmes — ils nous le disent — qu'ils n'arrivent plus à avancer. Alors, nous allons déposer une loi spéciale pour permettre la réouverture des chantiers. Nous espérons que les oppositions, qui l'avaient demandée, voudront...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le chef de la deuxième opposition officielle.

Détermination des conditions de travail
des travailleurs de la construction

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, le 17 juin dernier, on a demandé au gouvernement de déposer un ultimatum de 48 heures aux deux parties. Le 19 juin, ce qu'on a proposé, Mme la Présidente, c'est de reconduire dans une loi spéciale les conditions de travail actuelles pour une période maximale de un an ou jusqu'à la conclusion d'une entente entre les parties.

Or, Mme la Présidente, plutôt que de répondre et d'accepter notre proposition, la première ministre a envoyé des signaux contradictoires. Elle a d'abord dit : Je veux tout régler avant mon voyage au Mexique, donc mardi dernier. Elle a dit ensuite : Bien, ça sera après mon voyage au Mexique. Or, en refusant, dès le début, de laisser planer le risque d'une loi spéciale, la première ministre a failli à ses responsabilités. Et, Mme la Présidente, mon inquiétude aujourd'hui, c'est qu'on passe d'une session d'improvisation sur la loi spéciale à une session de bricolage du dimanche sur des nouvelles conditions de travail pour 77 000 travailleurs.

Mme la Présidente, moi, je veux répéter notre proposition : Est-ce que la première ministre peut accepter de reconduire, pour une période maximale de un an, les conditions actuelles des travailleurs de la construction? C'est la seule proposition responsable.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, merci, Mme la Présidente. Je rappellerai au chef du deuxième groupe d'opposition que j'ai dirigé une mission économique et commerciale au Mexique qui a permis à 60 entreprises d'avoir des contacts directs avec des entreprises mexicaines, ouvrant ainsi un grand nombre de marchés potentiels pour ces mêmes entreprises. 16 partenariats ont d'ailleurs été signés, Mme la Présidente.

S'il y a quelqu'un qui improvise, Mme la Présidente, et qui change d'avis selon le jour pair ou impair où on se trouve, c'est bien le chef du deuxième groupe d'opposition. Si on l'avait écouté, Mme la Présidente, on aurait dû mettre Montréal en tutelle. Si on l'avait écouté, on aurait été en loi spéciale dans les premiers jours, ne permettant pas à la négociation d'avoir lieu avec les résultats fort concluants que nous constatons maintenant, Mme la Présidente.

Ce que nous avons fait, c'est d'agir de façon responsable et de façon raisonnable. D'ailleurs, un des grands spécialistes des questions syndicales, M. Grant, qui est professeur à l'université, qui est particulièrement reconnu dans son champ de compétence, indique lui-même que c'était la meilleure voie à suivre dans les circonstances. J'avais été très claire, je suis restée cohérente d'un bout à l'autre du processus. J'ai souhaité que les négociations...

Des voix :

Mme Marois : Est-ce qu'on m'entend l'autre côté, Mme la Présidente? Je ne sais pas. Ça placote pas mal, là...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader.

M. Bédard : Écoutez, moi, je demanderais à tout le monde... Effectivement, de ce côté-ci, on entend beaucoup de propos. On aimerait ça que la première ministre puisse répondre dans le calme, si c'est possible, là.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Moi, je peux rester debout comme ça jusqu'à temps que je vais avoir le silence, aussi longtemps. Mme la première ministre, si vous voulez compléter.

Mme Marois : Les orientations ont été très claires dès le départ, Mme la Présidente. J'ai souhaité qu'il y ait négociation, ce qui a donné des résultats puisque la moitié des travailleurs de la construction sont maintenant au travail...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

Mme Marois : ...à la suite d'une entente négociée, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En complémentaire, M. le chef de la deuxième opposition.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, ce qu'on comprend, c'est qu'aujourd'hui, ce matin, un dimanche de juin, la première ministre va venir fixer des nouvelles conditions de travail à 77 000 travailleurs.

Mme la Présidente, j'aimerais savoir si la première ministre a fait des analyses comparatives des conditions de travail des travailleurs de la construction avec les autres provinces. Est-ce qu'elle est en train de jouer aux apprentis sorciers un dimanche de juin?

Mme la Présidente, je répète ma proposition : Est-ce qu'on peut se contenter de reconduire les conditions actuelles?

• (10 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, merci, Mme la Présidente. J'invite le chef du deuxième groupe d'opposition à la patience. Dans même pas une heure, on déposera le projet de loi. Il pourra donc prendre connaissance de ce que nous proposons pour régler le conflit.

Moi, je crois qu'il devrait se réjouir que l'on se rencontre aujourd'hui, un dimanche, oui, un jour férié, mais nous travaillons, et c'est normal, parce que, comme on sait qu'il y a un congé officiel demain, si nous pouvons nous entendre pour adopter la loi spéciale, ça permettra aux travailleurs de l'industrie de la construction de retourner au travail dès mardi matin, donc, faisant en sorte qu'il n'y ait pas de perte d'avantages pour les prochains jours qui viennent. Il me semble qu'il devrait plutôt nous offrir de travailler correctement à l'adoption de la loi, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Deuxième complémentaire.

M. François Legault

M. Legault : Est-ce que la première ministre est consciente que son improvisation a coûté des centaines de millions de dollars, depuis deux semaines, à l'économie, aux travailleurs? Est-ce qu'elle est consciente que ça n'a pas de bon sens puis que c'est irresponsable de fixer pour plusieurs années des nouvelles conditions de travail?

Mme la Présidente, il faut laisser les parties négocier pour l'économie, pour l'économie...

Des voix :

La Vice-Présidente (Mme Poirier) :

M. Legault : …comprennent pas notre proposition. Mme la Présidente, ce qu'il faut, c'est une loi spéciale pour reconduire les conditions actuelles...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, Mme la Présidente, je veux revenir sur la stratégie que nous avons décidé d'adopter au gouvernement et qui va dans le sens de ce que propose le chef du deuxième groupe d'opposition puisque nous avons souhaité que les parties négocient et aient un espace pour le faire. Ça existe, le droit à la grève dans nos lois. On peut ne pas aimer, on peut vouloir que ça ne s'exerce pas, mais c'est un droit qui est reconnu, et on l'a laissé s'exercer, cependant dans un temps raisonnable, croyons-nous à ce moment-ci. Alors, ça a donné des résultats réels : deux ententes signées, plus de 100 000 travailleurs retournés au travail.

J'avais indiqué que 15 jours était le maximum acceptable à mes yeux et aux yeux du gouvernement. J'ai mis de la pression pour qu'on aille plus rapidement la semaine dernière. Nous sommes à l'échéance. Maintenant, nous agissons de façon responsable.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Lévis.

Conséquences économiques de la
grève dans l'industrie de la construction

M. Christian Dubé

M. Dubé : Mme la Présidente, il y a quelques jours, la ministre du Développement économique disait que la grève ne coûtait rien. Par la suite, la ministre du Travail espérait que quelqu'un quelque part, dans un ministère, était en train de calculer les conséquences de l'inaction et de l'improvisation de ce gouvernement.

Nous, à la coalition, nous avons fait nos devoirs. Une perte d'investissements de 1,2 milliard, plus de 230 millions en salaires perdus, des compensations de près de 15 millions à payer aux entrepreneurs seulement pour les trois hôpitaux de Montréal. Si nous sommes ici ce matin, c'est bien parce que la grève a un coût pour l'économie, les finances publiques, les travailleurs et tous les citoyens du Québec. Si le gouvernement n'est pas d'accord avec notre évaluation, qu'il fasse preuve de transparence et nous donne ses chiffres. Si le gouvernement n'a pas ces chiffres, Mme la Présidente , c'est qu'à l'inaction et à l'improvisation il ajoute l'incompétence.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Alors, Mme la Présidente, je vais donc être obligée de déposer le communiqué de Stornoway pour que les gens comprennent que, quand il y a une grève et qu'elle dure quelques jours seulement sur des grands chantiers, ça peut se rattraper. Donc... D'où nous disions qu'il est extrêmement difficile de faire des calculs.

Je vais inviter le collègue à parler à son chef, parce que, là, son chef vient de nous dire : Laissons les parties négocier. Ça semble tout à coup très important pour la CAQ de laisser les parties négocier. Ils viennent de prendre conscience du système de relations de travail au Québec. Or, dès le premier lundi, la Coalition avenir Québec demandait une loi spéciale, demandait une loi spéciale dès le premier lundi, une loi spéciale dans les 48 heures. Cela n'aurait pas permis ce qui est arrivé, qui est une heureuse chose, que deux secteurs sur trois signent leurs conventions collectives. Cela n'aurait pas permis que 100 000 travailleurs rentrent sur les chantiers de façon libre avec une convention collective qu'ils ont librement négociée. Voilà notre régime de travail. Maintenant, il y a impasse dans le secteur ICI. Nous allons agir, je l'espère, aujourd'hui.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document?

Des voix : ...

Document déposé

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Il y a consentement. Et je nous rappellerais ce qu'on s'est dit en début de séance.

M. le député de Granby, première complémentaire.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Mme la Présidente, l'inaction et l'improvisation du gouvernement ont non seulement des coûts pour l'économie et les finances publiques, mais aussi sur les résultats attendus d'Hydro-Québec. C'est impossible que les chantiers soient restés fermés durant deux semaines sans conséquence sur la performance d'Hydro-Québec. Seulement à la Romaine, c'est 1 600 travailleurs qui ont été renvoyés à la maison et c'est une centrale qui ne produira pas d'électricité à la date prévue.

Est-ce que la ministre des Ressources naturelles a demandé à Hydro-Québec l'évaluation des pertes économiques causées par la grève?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Concernant ce dont on parle, c'est-à-dire la stratégie du gouvernement, il y a le professeur associé au Département d'organisation et ressources humaines de l'UQAM, M. Grant, qui a été cité par la première ministre tout à l'heure, qui a dit comprendre la stratégie gouvernementale de ne pas adopter, pour l'instant, de loi spéciale forçant le retour au travail. Pourquoi? Les parties doivent arriver elles-mêmes à une entente. Voilà ce...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez. M. le leader du deuxième groupe.

M. Deltell : …article 79. On va être patients aujourd'hui, dimanche, mais quand même. La question porte sur les pertes d'Hydro-Québec, est-ce que la ministre responsable d'Hydro-Québec pourrait nous répondre, oui ou non?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre, veuillez poursuivre.

Mme Maltais : Alors, si on avait une loi spéciale après deux jours de grève, comme le demandait la CAQ, bien, retirons le droit de grève parce que ça ne voudrait plus rien dire. Voilà la chose qu'il faut dire. Il a fallu laisser un maximum de place à la négociation, et là, aujourd'hui, on en est rendus à la limite, et c'est surtout que le médiateur spécial nous a dit qu'il y a impasse, alors agissons.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Groulx.

Mme Hélène Daneault

Mme Daneault : Mme la Présidente, le 14 juin dernier, mon collègue le député de Lévis a demandé au président du Conseil du trésor de dévoiler l'évaluation faite par le gouvernement des compensations qu'il devra verser dans le cadre des trois projets hospitaliers de Montréal. Évidemment, nous n'avons pas eu de réponse.

Je repose la question aujourd'hui : À combien sont estimés les montants d'indemnisation aux entrepreneurs du CHUM, de son centre de recherche, du CUSM et de l'Hôpital Sainte-Justine?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader du gouvernement.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Ce que j'invite tout le monde aujourd'hui, c'est qu'on doit trouver une solution au litige actuel puis faire en sorte que les gens puissent retourner au travail sur l'ensemble des chantiers. Donc, chacun a sa responsabilité, et j'espère que la CAQ sera à la hauteur de leur responsabilité aujourd'hui de fixer des conditions acceptables pour faire en sorte que les chantiers reprennent dans la sérénité. Donc, je vous invite aujourd'hui à travailler dans ce sens-là et surtout éviter de replonger le Québec, comme le propose actuellement la CAQ, dans un an, dans une nouvelle négociation. Je pense qu'on mettrait fin aux ententes...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez. M. le leader du deuxième groupe.

M. Deltell : Mme la Présidente, l'article 79. La question est simple : Comment ça a coûté pour les trois chantiers? Oui ou non? C'est combien? C'est quoi, le chiffre?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader, veillez poursuivre votre réponse.

M. Bédard : ...de règlement.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Votre question de règlement, oui.

M. Bédard : Sur la question de règlement, qu'il commence aussi... qu'il avise son chef de respecter l'article 32 et de faire en sorte qu'on puisse répondre paisiblement, là, parce qu'on est interpellés constamment par le chef de la deuxième opposition.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que vous voulez poursuivre sur votre complément de réponse?

M. Bédard : Alors, ce que nous souhaitons aujourd'hui, c'est que tout le monde ait des positions responsables, puis on ne peut pas changer d'idée dans la demi-heure. Alors, la deuxième opposition souhaitait une loi spéciale, elle est sur la table, elle est correcte, elle est bien mesurée et pour tous les chantiers, que ce soit au CUSM ou les chantiers d'Hydro-Québec, Mme la Présidente.

• (10 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

Impact économique de la grève
dans l'industrie de la construction

M. Sam Hamad

M. Hamad : Mme la Présidente, le régime péquiste a fait preuve d'un déni total des impacts économiques depuis le début de la grève. C'est irresponsable et improvisé, comme le PQ nous a habitués. La ministre déléguée à l'Économie a dit que la grève ne coûte rien à l'État dans la mesure où on ne dépense pas. La ministre du Travail a dit : Ça ne sert à rien actuellement d'évaluer, on ne connaît pas la longueur de la grève, on fera l'évaluation à la fin. Le ministre des Finances a ajouté : Je ne veux pas embarquer dans la question de l'impact; une fois que ça sera derrière nous, on en parlera. La première ministre a mentionné : Nous ne l'avons pas systématiquement évalué. C'est 1 milliard de dollars de moins dans l'économie du Québec par semaine, c'est 250 millions de dollars de salaire aux familles touchées.

Alors, pourquoi avoir abdiqué vos responsabilités en laissant durer inutilement un conflit annoncé, prévisible, évitable et en niant les impacts économiques importants pour tous les Québécois?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Le chiffre de 1 milliard qui vient d'être nommé par le député de Louis-Hébert est un chiffre qui est à la limite du farfelu, à la limite, et tous les spécialistes en économie qui sont intervenus cette semaine ont tous dit que ce n'est pas comme ça qu'on pouvait calculer les grèves. Pourquoi? Et c'est ce que nous répétons depuis le début : Parce qu'il peut y avoir des retards qui soient rattrapés.

Mais, deuxièmement, il y a un coût aussi qui est caché, dont nous allons parler toute la journée aujourd'hui, c'est la productivité. C'est le fait que rentrer pacifiquement sur les chantiers, c'est bon pour tout le monde.

Alors, aujourd'hui, nous avons à nous assurer... nous aurons à travailler de façon à ce que et les patrons et les travailleurs sortent heureux de cette rencontre d'aujourd'hui de l'Assemblée nationale. Il faut que tout le monde y trouve son compte. Il faut que les gens sentent que nous les avons traités de façon juste et raisonnable, de façon équitable. Voilà le sujet du débat aujourd'hui et qui peut avoir un impact sur la société et sur l'économie québécoise. La conduite de nos travaux aujourd'hui est importante.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En première complémentaire, M. le député de Louis-Hébert.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Si tout va bien, pourquoi qu'on est ici aujourd'hui, là? C'est des millions de dollars de pertes pour les entrepreneurs, c'est des millions de dollars que le contribuable paie pour vos négligences, c'est 70 millions de perdus pour les quincailleries. Vous mettez l'économie du Québec en otage.

Allez-vous agir? Allez-vous reconnaître votre incompétence et votre négligence pour l'économie du Québec?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : C'est ce que nous faisons exactement aujourd'hui, Mme la Présidente. Nous avons d'abord vu à créer des conditions pour que deux ententes soient signées de façon convenue entre les parties dans deux secteurs. 100 000 travailleurs sont rentrés sur une entente qu'ils ont négociée.

Maintenant, il y a impasse dans le secteur industriel, commercial et institutionnel. Nous agissons donc de façon responsable, et la première ministre avait donné la limite de sa patience. Nous voici donc aujourd'hui pour déposer une loi spéciale, que vous verrez tout à l'heure.

Ceci dit, ceci dit, il est important qu'aujourd'hui nous travaillions de façon respectueuse tant envers les entrepreneurs qu'envers les employés. Il est important que ce que nous allons faire amène non seulement une ouverture des chantiers, mais ramène aussi la paix sur les chantiers...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Deuxième complémentaire.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Mme la Présidente, j'espère que le gouvernement est conscient. Il y a 250 millions de moins en salaires pour les familles, il y a 100 millions et plus de moins de revenus pour l'État, il y a 100 millions de revenus… de dépenses pour les entrepreneurs en attente d'un règlement de grève, il y a 70 millions de moins pour les quincailleries, plus les fournisseurs, les entrepreneurs qui devront payer pour les retards, les familles qui attendaient leurs maisons, les enfants qui vont attendre leur école à l'automne et les hôpitaux qui sont attendus dans les régions. Votre déni à la réalité...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : C'est fini, monsieur, c'est fini. Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Mme la Présidente, le député oublie simplement de se réjouir d'une chose : nous avons un système de relations de travail où les gens doivent assumer leurs responsabilités et nous avons permis, nous avons mis en place les conditions pour que deux secteurs sur trois, plus de la moitié des travailleurs de l'industrie de la construction rentrent sur une entente qu'ils ont eux-mêmes signée. Ils l'ont négociée, et ça, c'est ce qui est important.

Deuxièmement, il reste un troisième secteur. La première ministre avait annoncé la date de sa patience. Aujourd'hui, nous sommes réunis pour en venir à mettre fin à cette impasse.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

Mme Maltais : Le qualificatif d'impasse vient du médiateur. Il y a impasse. Nous allons donc...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député d'Outremont.

Situation économique et financière du Québec

M. Raymond Bachand

M. Bachand : Pendant qu'on a un gouvernement qui a des problèmes majeurs de manque de revenus, il a laissé pourrir la situation dans le domaine de la construction. La recette du PQ, on le sait, c'est de laisser les choses se détériorer pour ensuite reculer et tenter de réparer les pots cassés. C'est cette même recette que le Parti québécois a appliquée dans le conflit de l'industrie de la construction. Par son inaction, le PQ a laissé se détériorer l'économie du Québec. Jeudi dernier, le ministère des Finances a publié le dernier rapport budgétaire sur l'année financière 2012‑2013. Le PQ a raté sa cible budgétaire, les revenus ne sont pas au rendez-vous, et le gouvernement fera un déficit de 246 millions de plus que prévu. Pourtant, il y a deux semaines, le ministre témoignait en commission parlementaire et il a répété solennellement à plusieurs reprises que les revenus étaient au rendez-vous.

Qui dit la vérité, Mme la Présidente, le ministre des Finances ou le ministère qui révèle une détérioration majeure de 246 millions par rapport à la mise à jour du ministre?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le ministre des Finances et de l'Économie.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Merci, Mme la Présidente. Alors, écoutez, je constate que mon collègue d'Outremont n'a pas profité des premiers jours de l'été pour calmer ses angoisses. Alors, je suis content que la première ministre nous ait convoqués, parce que je vais pouvoir le réconforter un petit peu ce matin.

Alors, écoutez, le rapport mensuel des opérations financières auquel a référé le collègue d'Outremont contenait tout d'abord une excellente nouvelle. Et cette excellente nouvelle, c'est que le président du Conseil du trésor a fait un travail remarquable dans la dernière année et que nous allons faire mieux que quiconque, ces 10 dernières années, au plan du contrôle des dépenses.

Par ailleurs, par ailleurs, le rapport contient aussi d'excellentes nouvelles quant à la croissance économique du Québec. Je rappellerai que la Banque Royale du Canada, le Conference Board du Canada ont tous les deux augmenté leurs prévisions de croissance économique pour le Québec. Et, Mme la Présidente, cela est confirmé par l'excellente tenue du marché du travail québécois. Je vous rappelle que, si on compare les cinq premiers mois de l'année 2013...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En terminant.

M. Marceau : ...avec les cinq premiers mois de l'année 2012, il y a 80 000 personnes...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : En première complémentaire, M. le député d'Outremont.

M. Raymond Bachand

M. Bachand : Ça va tellement bien que, les revenus, il rate sa cible de 800 millions, déficit, 250 millions plus qu'élevé, mais tout va bien, Madame la Marquise. La semaine dernière, le ministre et ses deux collègues ont dit vouloir attendre avant d'évaluer les coûts liés au conflit de l'industrie de la construction. Le conflit prend fin.

Afin d'être transparent et responsable, le ministre des Finances peut-il dire aujourd'hui aux contribuables québécois l'impact du conflit sur les finances publiques du Québec?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le ministre des Finances.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Mme la Présidente, j'invite les Québécois à comparer l'approche responsable que nous adoptons dans le cas du dossier de la grève de la construction avec l'approche irresponsable, Mme la Présidente, irresponsable... que ce soit dans le fait d'avoir pris plus de trois ans avant de mettre sur pied une commission d'enquête sur l'industrie de la construction, trois ans avec des coûts impressionnants. On parle probablement de milliards de dollars, Mme la Présidente, c'est de cela dont on parle. Aïe! Ils ont été irresponsables également, j'aimerais le rappeler, irresponsables dans le dossier étudiant, dans le dossier de l'année dernière, qui a coûté 90 millions de dollars, Mme la Présidente. Alors, moi, des leçons de responsabilité, je n'en prends pas de leur part.

• (11 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député d'Outremont, votre deuxième complémentaire.

M. Raymond Bachand

M. Bachand : ...diversion absolue. Il manque 250 millions, il rate sa cible, les revenus sont en chute libre, il laisse l'industrie de la construction en grève depuis deux semaines. On sait qu'il reste 400 millions de coupures à identifier — le président du Conseil du trésor l'a dit — pour l'année en cours, auxquelles il faut maintenant ajouter les coûts du conflit de la construction — probablement 100 millions — pour les finances publiques.

Vous avez déjà coupé dans l'aide sociale, dans l'éducation, dans les services de garde. Vous voulez toujours arriver à l'équilibre budgétaire. Pouvez-vous dire aujourd'hui c'est quoi, les prochaines coupures que vous allez faire dans les services...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le ministre des Finances et de l'Économie.

  M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Mme la Présidente, s'il y a un coût qui est réel, un coût qui est chiffré, un coût qu'on a vu dans les budgets du gouvernement, c'est le 90 millions de la crise étudiante de l'an dernier. Puis ça, c'est un coût que le gouvernement a eu à assumer. Par ailleurs, pour ce qui est...

Des voix : ...

M. Marceau : Par ailleurs, pour ce qui est de ce que nous allons régler aujourd'hui, je l'espère, avec des apports constructifs de la part des deux oppositions, ces coûts-là, je le répète, on ne peut pas les estimer aussi bien qu'ils le voudraient. Ah, puis j'ai vu des chiffres qui sortaient... qui étaient absolument farfelus, Mme la Présidente. Et il y a des... Les travaux vont être reportés à travers le temps. Stornoway, Stornoway émet un communiqué pour dire que les jours de grève qui avaient été vécus n'ont pas eu...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Il nous reste moins d'une minute, est-ce qu'on pourrait la finir dans le calme? Est-ce que vous voulez compléter, M. le ministre, s'il vous plaît?

M. Marceau : Mme la Présidente, j'étais en train de dire que Stornoway a émis un communiqué pour dire que, malgré la grève...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Bellechasse.

Impact de la grève dans l'industrie
de la construction sur les régions

Mme Dominique Vien

Mme Vien : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je ne vous apprends rien ce matin si je vous dis que la grève de la construction touche aussi les régions du Québec et qu'elle leur fait mal, très mal, même, et qu'il y a plusieurs projets au Québec qui sont arrêtés.

Je vais vous en donner quelques exemples, Mme la Présidente : la deuxième phase du parc éolien du Lac-Alfred dans la vallée de la Matapédia; le parc éolien Boralex Métro à Beaupré, dont l'arrêt du chantier coûte 1 million de dollars chaque jour; le parc éolien Des Moulins à Thetford Mines; le chantier de parc éolien au kilomètre 190 de la réserve faunique des Laurentides, qui représente plus de 800 millions de dollars et dont une cinquantaine de travailleurs ont été retournés chez eux; et la centrale hydroélectrique de Val-Jalbert. Là, je ne parle pas des minicentrales, je ne parle pas de l'abandon du Plan Nord, Mme la Présidente.

Qu'est-ce que ce gouvernement a contre les régions du Québec? Qu'il se lève et qu'il nous dise ce qu'il a contre les régions.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Mme la Présidente, nous comprenons donc que les oppositions sont d'accord avec l'idée d'adopter cette loi spéciale et nous en venons maintenant à un appel à ce que les débats et le résultat soient respectueux de notre régime de relations de travail, que l'entente soit la plus juste et raisonnable possible et que nous nous assurions de la paix sur le chantier et d'une rentrée des travailleurs dans un système où nous avons besoin de leur productivité. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, cela met fin à la période de questions et des réponses orales.

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

Définir le cadre des séances extraordinaires

M. Bédard : Alors, Mme la Présidente, vous excuserez la motion, d'ailleurs, telle qu'elle est écrite, c'est écrit «M. le Président ». Alors, on avait espéré son retour, mais je suis convaincu qu'il est avec nous en pensée.

Alors, Mme la Présidente... Et nous sommes heureux de vous avoir avec nous aujourd'hui. Donc, je présente la motion suivante :

« Qu'en vue de procéder à la présentation et à toutes les autres étapes de l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, l'Assemblée se donne le cadre temporel suivant :

« Que l'Assemblée puisse siéger tous les jours à compter de 9 h 45 jusqu'à ce qu'elle ait terminé l'étude de l'affaire pour laquelle elle a été convoquée ou qu'elle décide d'ajourner ses travaux. »

Et je fais l'autre motion, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Oui, s'il vous plaît.

Établir la procédure législative d'exception en vue
de procéder à la présentation et aux autres
étapes de l'étude du projet de loi n° 54

M. Bédard : Mme la Présidente, je fais la motion suivante :

« Qu'en vue de procéder à la présentation et à toutes les autres étapes de l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, l'Assemblée établisse la procédure législative d'exception telle que prévue aux articles 182 à 184.2 et 257.1 à 257.10 du règlement;

«Qu'à tout moment de la séance le président puisse suspendre les travaux à la demande d'un ministre ou d'un leader adjoint du gouvernement. »

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, je vais suspendre nos travaux pour une durée de 20 minutes... 15...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a consentement pour 15 minutes? Consentement? Consentement.

Alors, je suspends nos travaux pour une durée de 15 minutes afin que les députés puissent prendre connaissance des deux motions présentées par le leader du gouvernement. Donc, nos travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 11 h 5)

(Reprise à 11 h 26)

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous reprenons nos travaux.

Commentaires sur les motions

Est-ce qu'il y a des interventions sur la recevabilité des deux motions présentées par le leader du gouvernement avant la suspension de nos travaux? M. le leader du gouvernement.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : De l'opposition.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : …excusez-moi.

Des voix :

M. Moreau : Non, non, on a… Mme la Présidente...

Une voix : ...

M. Moreau : Oui, il est prêt à traverser. Mme la Présidente, le chef parlementaire de l'opposition officielle a indiqué ce matin que nous voulions procéder dans un esprit de collaboration. J'ai donc deux éléments de remarque à faire valoir. La deuxième touchera la procédure.

La première, sur la première lecture que nous avons du projet de loi. J'ai indiqué au leader du gouvernement quelles étaient les conditions sur lesquelles l'opposition tablait pour nous assurer que ce projet de loi là soit celui qui est le plus approprié qui soit voté par l'opposition officielle. Il y a un élément, à une première lecture… Évidemment, je comprends qu'il y aura une suspension, Mme la Présidente, pour nous permettre d'en faire une étude plus détaillée. Il y a un des éléments qui était de permettre que ce projet de loi là soit un incitatif à la négociation. La première lecture nous semble plutôt y voir un désincitatif. Mais je dis encore une fois qu'il s'agit d'une première lecture. On veut agir d'une façon qui soit constructive, et, à cet égard-là, nous réserverons nos remarques pour la suite de nos travaux.

Sur la question de la recevabilité des motions. Depuis la réforme parlementaire, vous savez que les éléments qui conduisent à une session extraordinaire sont extrêmement balisés, et nous n'avons aucune représentation à faire sur la recevabilité des motions qui ont été présentées par le leader du gouvernement.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le chef... M. le leader du deuxième groupe.

M. Gérard Deltell

M. Deltell : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, en ce beau dimanche, comme vous vous plaisez à le rappeler, en ce beau dimanche, nous sommes réunis pour adopter une loi d'exception et non pas pour faire une guerre de procédurite. Nous sommes donc d'accord avec le dépôt tel qu'il a été fait. Nous allons prendre le temps qu'il faut pour en débattre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. Quant à nous, ce n'est pas tant sur la procédure, sur la recevabilité sur le plan de la forme mais quant au contenu, quant à la décision qui consiste à amputer un levier important de négociation dans le régime du travail au Québec. Lorsqu'on invoque une loi spéciale, ce que ça veut dire en clair, c'est que le droit de grève n'est plus réellement effectif, et, pour nous, c'est une question fondamentale. Bien sûr, étant donné l'exercice auquel on participe aujourd'hui, nous ne nous opposerons pas sur cet aspect des choses, mais il est clair que c'est une brèche importante  —  et il faut le rappeler  —  au principe fondamental du droit de grève dans notre société, qui a été acquis de chaude lutte par 100 ans, 100 ans de combat social mené par les employés et les travailleurs.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader du gouvernement.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Mme la Présidente, je remercie les leaders des deux oppositions, qui reflètent effectivement les discussions que nous avons eues avant, donc je salue cette ouverture.

Quant aux autres étapes, nous sommes ouverts, nous allons collaborer, évidemment, dans un esprit de collaboration, en prenant pour acquis que tout le monde, évidemment, souhaite cette collaboration et l'adoption rapide de cette loi. Donc, je demanderais aux leaders, comme je l'ai indiqué lors de nos rencontres, à quel moment ils souhaitent passer aux différentes étapes, et nous le ferons dans un esprit… Même si à certains moments il faut suspendre pour se donner un peu de temps, nous le ferons en autant que nous gardions cet esprit de collaboration, Mme la Présidente.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le leader du gouvernement. M. leader de l'opposition.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Mme la Présidente, à dessein, j'ai fait les remarques que j'ai faites au début. Et c'est toujours dans l'esprit de collaboration que je continue les remarques que nous avons faites. Pendant la période des questions, le leader parlementaire a indiqué notre intention d'entendre les parties. Il n'est pas question ici de faire une question de procédure, on n'est pas là. J'envoie le message au gouvernement. Nous voulons nous assurer qu'il y a un équilibre, ce qu'une première lecture ne nous permet pas de constater. Et on souhaite, et je le réitère, trouver un format, mais trouver un format pour que les parties qui seront visées par ce projet de loi d'exception puissent avoir une voix au chapitre.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors... Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Sur la question qui m'a été posée, effectivement, il n'y aura pas, je vous dirais, d'audition de quelque intervenant que ce soit. Par contre, nous avons du temps. Les gens peuvent discuter — effectivement, il y a des représentants de chaque côté — donc... et de regarder à l'intérieur du projet de loi. Les gens vont avoir la disponibilité pour contacter, j'imagine, les personnes concernées, donc... Et on va le faire, encore là, dans un esprit pour faire en sorte que les gens prennent le temps de vérifier certains aspects de la loi auprès des parties concernées. Voilà.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, je comprends que, dans la pratique, nous suspendons pour environ 1 h 30 ou deux heures. Alors, je comprends que c'est deux heures.

Alors, nous allons maintenant suspendre nos travaux pour une durée de deux heures afin de permettre à l'ensemble des députés de prendre connaissance du projet de loi.

(Suspension de la séance à 11 h 32)

(Reprise à 13 h 40)

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Nous allons reprendre nos travaux.

Débat restreint sur le motif de la convocation en
séances extraordinaires et sur les motions fixant
le cadre temporel et la procédure d'exception

Alors, les motions présentées par M. le leader du gouvernement étant recevables, je vous informe maintenant de la répartition du temps de parole établi pour le débat restreint sur le motif de la convocation en séances extraordinaires et sur les deux motions présentées par le leader du gouvernement, soit la motion fixant le cadre temporel de la séance et la motion de procédure d'exception.

La répartition du temps de parole se fera comme suit : 50 min 29 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 46 min 45 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 17 min 46 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition et cinq minutes sont allouées aux députés indépendants. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué aux groupes parlementaires en proportion de leur représentation à l'Assemblée. Enfin, mis à part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Je suis prête à entendre le premier intervenant... la première intervenante. Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, je veux remercier les élus de l'Assemblée nationale d'être ici, en ce dimanche d'été. Nous avons été convoqués pour étudier et adopter une loi de retour au travail dans le domaine de la construction industrielle, commerciale et institutionnelle. Nous le faisons en ayant en tête l'intérêt général du Québec. En effet, les négociations dans ce secteur sont dans l'impasse. Le temps est donc venu pour le gouvernement de mettre fin au conflit afin que les chantiers puissent redémarrer dès mardi matin, et ce, dans le contexte le plus harmonieux possible.

Comme vous le savez, le gouvernement a mené une politique très raisonnable en laissant les parties négocier. L'approche responsable du gouvernement a été couronnée de succès pour deux des trois secteurs concernés. Des ententes ont été conclues dans le secteur résidentiel et celui du génie civil et de la voirie. Des milliers de travailleurs, des centaines d'entrepreneurs sont actuellement au travail. Cela nous assure un climat de travail serein sur les chantiers, et c'est bien la preuve qu'il était sage et raisonnable de donner du temps aux parties pour qu'elles s'entendent.

Un gouvernement responsable ne se précipite pas pour adopter une loi spéciale au premier jour d'un conflit. Tous les acteurs expérimentés dans les relations de travail savent que l'imposition précipitée d'une loi spéciale peut avoir des conséquences très négatives, les relations de travail peuvent s'envenimer et l'économie, en souffrir. De plus, ce n'est pas le rôle des gouvernements de décider des conventions collectives dans le secteur privé. Nous avons donc fait preuve de patience en donnant du temps aux négociateurs des différentes parties au conflit. Ce temps est écoulé, et l'impasse persiste dans le secteur de la construction industrielle, commerciale et institutionnelle. Le temps est donc venu de continuer d'agir de façon responsable.

En adoptant une loi de retour au travail maintenant, les quelques jours qui auront été perdus pourront être rattrapés, ce qui signifie que l'impact économique du conflit sera très réduit. Le gouvernement a le devoir d'être juste, cette loi de retour au travail ne penche donc ni d'un côté ni de l'autre. Elle prévoit essentiellement de reconduire l'ancienne convention collective pour quatre ans, ce qui assurera la stabilité économique pour plusieurs années, ce dont nous avons besoin, Mme la Présidente. Elle prévoit également les mêmes augmentations de salaire que celles négociées dans le secteur du génie civil et de la voirie. Les mêmes travailleurs, les mêmes travailleurs oeuvrent souvent dans les deux secteurs, et il serait absurde que les augmentations ne soient pas les mêmes. En outre, il n'appartient pas au gouvernement d'imposer des conditions au secteur privé.

Tout en permettant aux parties de négocier le temps qu'il faudra pour en arriver à une entente satisfaisante, la loi met fin au conflit. Tout cela est parfaitement raisonnable et inspiré du gros bon sens. La crise sociale du printemps 2012 a montré ce qu'il en coûtait quand un gouvernement décide de provoquer la division. Il y a un contraste frappant entre juin 2012 et juin 2013. L'année dernière, la crise sociale faisait rage. Cette année, malgré l'adoption d'une loi spéciale, le calme règne dans nos rues.

De la même façon, les pratiques qui avaient cours dans le domaine de la construction ont entaché cet important domaine de notre activité économique. Ces pratiques qui ont envahi le Québec sous l'ancien gouvernement nous ont coûté très, très cher. Aujourd'hui, les entrepreneurs honnêtes ont enfin la voie libre. Nous savons que la majorité a toujours agi de façon irréprochable. À ceux-là qui font honneur à leur industrie et qui donnent du travail à des milliers de personnes dans toutes les régions du Québec : Vous pourrez aller de l'avant dès mardi matin.

Nous savons aussi que les travailleurs québécois de la construction n'avaient rien à voir avec les pratiques douteuses. Je veux profiter de cette occasion pour saluer le travail et le professionnalisme des travailleuses et des travailleurs de la construction. Nous allons vous croiser tout au long de l'été sur les chantiers, sous la pluie ou sous un soleil ardent. Je vous invite à la prudence pour éviter autant que possible les accidents de travail. Mais j'invite aussi la population à faire preuve de prudence aux abords de nos chantiers routiers, nous avons besoin de tous nos travailleurs en santé et heureux de leurs conditions.

En terminant, j'invite les élus de l'Assemblée nationale à faire en sorte que nous adoptions rapidement cette loi de retour au travail. Pour le bien de l'économie québécoise, pour le bien des travailleurs de la construction et des entrepreneurs et pour l'intérêt général du Québec, faisons ce qui est juste et responsable, faisons en sorte que l'activité reprenne sur tous les chantiers du Québec, et ce, dès mardi matin. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Rivière-du-Loup—Témiscouata.

M. Jean D'Amour

M. D'Amour : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, il y a quelques instants, pour définir la situation, la première ministre a elle-même employé le mot «impasse », une impasse qu'elle-même et son gouvernement ont contribué à créer au cours des dernières semaines. Le tableau est le suivant : nos chantiers reliés à la rénovation, la transformation de nos écoles sont interrompus, il en va de même pour nos hôpitaux, il en va de même pour certains autres projets menés par Hydro-Québec.

Ce matin, à l'occasion de la période de questions, nous avons eu l'occasion d'élaborer sur des projets, sur des constructions, sur des interventions littéralement compromises. À celles-ci je voudrais ajouter enfin la construction d'une quinzaine de barrages dans le Nord-du-Québec, 15... 12 milliards d'investissement, pardon, 12 milliards d'investissement, des projets qui sont arrêtés. C'est tout le Québec qui est touché, pas rien que le Nord. C'est tout le Québec parce qu'il y a des travailleurs sur ces chantiers qui proviennent de chacune des régions du Québec, des travailleurs et leurs familles. Ça, c'est la situation. On est en face d'un gouvernement qui improvise au quotidien. Ce n'est pas ça, gérer avec vision. Ils improvisent au quotidien. C'est un gouvernement qui a fait preuve, au cours non seulement des dernières semaines, mais des 10 derniers mois, d'une irresponsabilité qui est flagrante.

D'autres exemples, Mme la Présidente, de gens qui sont touchés : l'un de nos fleurons au Québec, la compagnie d'aviation Pascan, qui est notre plus important transporteur aérien indépendant au Québec. Savez-vous quoi? Sur les 90 pilotes, il y en a 34 qui ont été remerciés. Il y a une vingtaine de mécaniciens qui ont été mis à pied, sans compter une quarantaine d'autres travailleurs touchés à l'intérieur de l'entreprise. Pourquoi? Parce qu'il y a moins de transport qui se fait au Québec, notamment en direction du Nord. Ça, c'est une réalisation péquiste encore une fois. L'un des seuls projets du Plan Nord qui n'avait pas été touché par le gouvernement encore, le Mont-Wright, bien, voilà qu'ils sont aussi victimes de cette entreprise de démolition en quelque sorte. Vous me permettrez de le dire ainsi. Or, ça s'additionne au lot des projets, hein, qui sont compromis, qui ont été illustrés ce matin à l'occasion de la période de questions.

Il y a un dénominateur commun à travers l'intervention gouvernementale depuis le 4 septembre dernier. À tout niveau, à peu près tout ce qu'ils ont touché, ça s'est traduit de la même manière. On n'a qu'à penser notamment au traitement qui a été accordé aux assistés sociaux au cours des derniers mois. Comme par hasard, il s'agit de la même ministre, la ministre du Travail, hein, qui nous disait défendre les intérêts du Québec à Ottawa dans le cadre de la réforme de l'assurance-emploi, qui, au même moment, proposait aux Québécois une réforme qui touchait de plein fouet les assistés sociaux au Québec. Ça, c'est une réalité.

• (13 h 50) •

Dans le dossier des minicentrales, même chose, le gouvernement, en cours de route, a aboli le programme des minicentrales. Qui est touché? Ils sont nombreux, Mme la Présidente, ceux qui sont touchés dans les régions du Québec. Tous ces projets ont littéralement tombé, et les régions ont été pénalisées. Encore une fois, ce sont des travailleurs québécois, des travailleurs et des travailleuses et leurs familles qui écopent de la gestion improvisée du gouvernement du Parti québécois.

On peut parler aussi de l'éolien. On a vécu l'expérience à la toute fin de la session, où il a fallu qu'une délégation de la Gaspésie se présente ici, à l'Assemblée nationale, pour tenter de faire entendre raison à ce gouvernement. Malgré une présence nombreuse de députés et ministres en Gaspésie, personne ne levait le petit doigt pour eux. Il a fallu que l'opposition se manifeste bruyamment avec la contribution et la collaboration de Gaspésiens qui se sont déplacés jusqu'ici pour faire en sorte de débloquer un dossier qui avait été annoncé par l'ancien gouvernement : 4 000 MW. Il en reste 800, et le gouvernement fait la sourde oreille et compromet la filière éolienne au Québec.

Sur la question des redevances minières, Mme la Présidente, sur la question des redevances minières, hein, on se rappelle de la campagne électorale où le gouvernement prenait un engagement clair : 400 millions de redevances supplémentaires. Ce n'est pas le régime de redevances qui a été proposé au Québécois. Et tout ça s'est fait dans un cadre d'incertitude, parce qu'il n'y avait pas de projet de loi sur les mines non plus. Alors, il y a un mot pour caractériser l'action du gouvernement, c'est le mot «improvisation ». Alors, le résultat, c'est qu'on a vécu dans un cadre d'incertitude, ça éloigne les investisseurs, ça éloigne les investissements, et l'image du Québec à l'étranger s'en trouve compromise.

Sur la question des forêts, même chose, même irresponsabilité, même improvisation, même incertitude. Sur la question des travaux sylvicoles, c'est drôle comme le Parti québécois savait quoi dire aux régions, ah, c'était un engagement ambitieux : Avec nous, vous allez travailler. Le résultat : les travailleurs en forêt, les travailleurs sylvicoles travaillaient 22, 23, 24 semaines au cours des dernières années, ce qu'on apprend depuis la dernière annonce, dans ma région, celle du Bas-Saint-Laurent, c'est que les travailleurs vont être à l'intérieur des forêts, là, 12, 13 semaines. À peine vont-ils se qualifier pour l'assurance-emploi, à peine vont-ils se qualifier.

Je vous fais une prédiction, Mme la Présidente : Au cours des prochains mois, l'hiver prochain, vers le mois de février, le mois de mars, le mois d'avril — on parlait de trou noir, hein, dans le domaine de l'assurance-emploi — bien, grâce au gouvernement du Parti québécois, là, ça va être un précipice de grande noirceur pour les travailleurs québécois de l'industrie forestière, qui ont été laissés pour compte. Encore une fois, l'ensemble des régions du Québec sont pénalisées, l'ensemble des régions du Québec sont littéralement touchées.

On a vécu aussi dans ce même cadre d'improvisation, d'incertitude...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Monsieur...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Excusez-moi. S'il vous plaît! M. le...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Je vous invite à poursuivre votre propos.

M. D'Amour : Vous allez voir, Mme la Présidente, vous allez voir, je vais en arriver à parler du présent projet de loi. Mais, pour bien comprendre ce qu'on est en train de vivre aujourd'hui, en ce dimanche, à l'Assemblée nationale, il faut revenir en arrière et illustrer l'ensemble de l'inaction, pas de l'action, l'ensemble de l'inaction du gouvernement depuis les 10 derniers mois. Ce n'est pas drôle, ce qui se passe. Je comprends que chacun des points qui sont soulevés aussi dérange le gouvernement. Je les comprends de réagir comme ils le font, Mme la Présidente, à ce moment-ci, parce que la vérité fait mal. Elle est dure à entendre, la vérité, mais la réalité, c'est que les régions du Québec sont littéralement touchées. Les régions sont secouées. On perd des emplois. Et aujourd'hui on se retrouve ici par un beau dimanche de l'été pour adopter une loi spéciale. On est contents d'être là parce qu'il fallait le faire, il fallait le faire, il faut le poser, ce geste-là. Alors, on est présents ici aujourd'hui, puis on le fait au nom de l'économie du Québec, puis on le fait pour les travailleurs et les travailleuses, puis on le fait pour les familles du Québec qui ont besoin d'être soutenues.

Alors, j'allais vous parler des garderies, toujours la même chose, la même constante : l'improvisation. On s'est retrouvés encore au cours des dernières semaines dans un climat de confrontation pour en arriver à quel résultat, Mme la Présidente? Vous le connaissez, le résultat. Alors, aujourd'hui, avec ce projet de loi, bien, ce qu'on veut, c'est régulariser une situation que le gouvernement a refusé de voir comme problème au cours des dernières semaines. Tout allait bien au Québec, Mme la Présidente, tout allait bien à tout moment. Notre collègue de Chomedey s'est levé en cette Chambre pour questionner la ministre du Travail. Sa réponse : Tout va bien, on va laisser les gens négocier, on va laisser les gens s'entendre. Avec quel résultat? On se retrouve ici dans le cadre de l'étude d'un projet de loi, et qui va nous conduire, probablement la nuit prochaine, à une adoption, du moins, nous l'espérons, parce qu'on a l'intention de collaborer. Mais la résultante de ça, c'est qu'on est pénalisés de centaines de millions de dollars. Le Québec a besoin de ces investissements. Le Québec a besoin de rentrées de fonds. Le Québec a besoin de voir ses travailleurs sur les chantiers. Et pourtant le gouvernement a improvisé de façon absolument exceptionnelle au cours des dernières semaines. Malgré, malgré les propos de l'opposition, le gouvernement a fait la sourde oreille. Je le disais, ce sont toutes les régions qui sont touchées. Ce sont des dizaines et des dizaines de milliers de travailleurs qui, jour après jour, depuis quelques semaines, se posent des questions. C'est tout à fait déplorable. Et ça s'inscrit, je le répète — je le sais que c'est dur à entendre par le gouvernement — ça s'inscrit dans un processus d'improvisation absolue, d'irresponsabilité, et j'oserais même employer le mot «incompétence », Mme la Présidente. Alors, en ce qui me concerne, c'est le message que je voulais vous livrer, d'autres interviendront au cours de l'après-midi, j'en suis convaincu, pour en redire sur ces éléments-là.

Et, tantôt, j'ai parlé brièvement des redevances, hein? On a été pénalisés comme Québécois en regard des redevances puis de l'absence d'un projet de loi sur les mines. Savez-vous quoi? Le CN a dû mettre de côté des projets. Gaz Métro a dû mettre de côté des projets. Or, c'est l'ensemble de l'oeuvre du gouvernement du Parti québécois, et les Québécois doivent savoir aujourd'hui à quel gouvernement ils sont confrontés. 10 mois plus tard, moi, je n'ai pas d'espoir que la situation va se corriger parce que c'est la marque de commerce de leur gouvernement. Je n'ai aucun espoir qui fait en sorte qu'on va espérer, là. Donner la chance au coureur, Mme la Présidente, c'est une chose. On l'a fait. Aujourd'hui, on est rendus plus loin, on est rendus ailleurs et on voit bien que ça ne tient pas la route. À chaque fois qu'il y a une intervention du gouvernement, c'est pour enfoncer une fois de plus l'économie du Québec, atteindre un nouveau sommet de désolation. C'est le message que je voulais vous livrer à ce moment-ci, vous réitérant le fait, Mme la Présidente, qu'on est tout de même heureux d'être là pour agir en fonction des intérêts supérieurs des Québécois et des Québécoises. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chauveau.

M. Gérard Deltell

M. Deltell : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je tiens à rappeler à cette Chambre que nous sommes actuellement au débat concernant le dépôt d'une loi spéciale pour forcer le retour au travail des gens dans la construction, et, au moment où on se parle, on est sur la pertinence, oui ou non, d'avoir une loi spéciale. On n'est pas encore sur le fond, on n'est pas encore sur l'étude article par article, on n'est pas sur l'adoption du principe, on est sur la pertinence d'avoir, oui ou non, une loi spéciale.

Mme la Présidente, c'est notre devoir comme parlementaires d'assurer de la saine gestion de l'économie québécoise. Et, lorsqu'on voit qu'il y a un problème majeur qui éclate dans notre société et qui touche de façon très directe et très concrète notre économie, c'est notre devoir premier d'assurer que ça fonctionne, et c'est pourquoi, oui, nous sommes ici rassemblés, en ce jour du Seigneur, en ce dimanche après-midi, pour débattre de ce point-là. Et je suis très fier, Mme la Présidente, de compter sur la députation des députés de la Coalition avenir Québec, du deuxième groupe d'opposition, qui sont ici et qui, comme tous ceux qui sont présents, ont dû mettre de côté des activités dans leurs circonscriptions pour être présents ici, à l'Assemblée nationale.

J'ai eu l'occasion d'en parler tout à l'heure, lors de ma déclaration de député, Mme la Présidente, ce soir, j'aimerais bien assister au concert des 120 ans de l'Harmonie de Loretteville au parc Jean-Roger-Durand. Mais je risque d'être conscrit à mon devoir premier de parlementaire. J'aurais bien aimé, au moment où on se parle, être à Wendake, dans ma circonscription, pour assister au pow-wow du village huron, qui existe depuis des dizaines d'années. Mais, non, je suis ici. Cela dit, Mme la Présidente, si par bonheur des gens nous écoutent et aimeraient découvrir l'art autochtone, je les invite à aller à Wendake, ce n'est même pas à 20 minutes d'ici, et ainsi faire fructifier leurs connaissances et faire bonifier aussi le comté de Chauveau. Bien.

Maintenant, revenons au débat pertinent concernant devons-nous avoir, oui ou non, une loi qui amène le retour au travail dans l'industrie de la construction. Oui, Mme la Présidente, le Québec en a besoin, et ce qui se fait aujourd'hui aurait dû se faire il y a plusieurs jours. Et je vous rappelle, Mme la Présidente, notre position : quand, par malheur, il y a deux semaines, le conflit a éclaté, d'entrée de jeu, nous avons dit, notre chef a été très clair là-dessus : Négociation de 48 heures et, s'il n'y a pas d'entente, adoption d'une loi spéciale. Pour nous, c'était clair dès le départ que, si les négociations n'aboutissaient pas, il nous fallait avoir une loi spéciale pour amener les gens à revenir au travail. Mais, attention, Mme la Présidente, contrairement à ce que tous les ministres ont pu dire ce matin et depuis deux semaines, notre intention était de forcer la négociation puisque notre mesure visait à, oui, ramener les gens au travail mais, oui, maintenir la négociation.

• (14 heures) •

Alors, Mme la Présidente, quand j'entendais, ce matin, les gens dire : Écoutez, si on avait appliqué la proposition de la CAQ, on n'aurait pas eu les deux ententes qui sont survenues. Non, Mme la Présidente, ces ententes-là auraient pu survenir. Pourquoi? Parce que nous, on voulait forcer le retour au travail, oui, mais également forcer la négociation à se poursuivre. Alors, je trouve ça dommage que les ministériels aient fait cet oubli. C'est malheureux parce que c'est le coeur même de la proposition que nous avons faite il y a deux semaines. Mais, malheureusement, il semble y avoir une mémoire sélective de la part des ministériels. Mais, pour la tenue et la qualité des débats ici, dans cette Assemblée, je tenais à rappeler cette vérité-là : Notre proposition était la plus sérieuse, la plus réaliste, la plus responsable, la plus intelligente. Oui, retour au travail, oui, négociations, et maintenons les conditions de travail actuelles pour un an. Donc, on fixe l'échéance dans un an et, si, dans un an, il ne se passe rien, bien on se reparlera, mais, au moins, on amène... on continue la négociation. Bref, c'était gagnant-gagnant pour tout le monde : les travailleurs revenaient à l'ouvrage, donc étaient payés puis avaient de l'emploi, les entrepreneurs pouvaient continuer à faire progresser leurs chantiers et puis les contribuables étaient contents parce qu'ils voyaient que l'économie roulait bien. Et puis qui dit bonne économie, qui dit : Quand la construction va, tout va, eh bien là, heureusement, ça aurait pu continuer à nourrir l'économie du Québec. Mais, non, malheureusement, Mme la Présidente, parce que ce gouvernement a été beaucoup trop borné, n'a pas voulu appliquer notre proposition qui était la plus sérieuse, la plus responsable, eh bien, on se retrouve 14 jours plus tard, en ce beau dimanche après-midi, à adopter une loi spéciale.

D'ailleurs, Mme la Présidente, je tiens à rappeler que ce gouvernement a fait preuve d'une improvisation désolante. C'est un véritable gouvernement d'abandon et d'improvisation que nous avons eu depuis deux semaines au Québec. Dois-je rappeler, Mme la Présidente, que, lorsque le conflit a éclaté, d'entrée de jeu, d'entrée de jeu, la ministre du Travail a dit : Pas question de loi spéciale, il n'en est pas question, on n'en veut pas, de loi spéciale, c'est la pire chose qui puisse arriver. Donc, première position, il n'y en aura pas, de loi spéciale. Après ça, la première ministre est allée dire quoi? Ah, moi, il faut que ce soit réglé d'ici 15 jours. Ah! Déjà un premier virage. Alors, de « pas de loi spéciale » à « 15 jours » . Et, après ça, ça a été quoi? Le plus vite possible. Troisième changement, Mme la Présidente. Pas de loi spéciale, 15 jours maximum, le plus vite possible. Puis, après ça, c'était quand? C'était le mardi, Mme la Présidente, avant le voyage de la mission économique au Mexique, il fallait que ce soit réglé avant le départ au Mexique : quatrième étape. Et, après ça, qu'est-ce qui est arrivé? Au retour du voyage du Mexique. Donc, on se retrouvait quand? On se retrouvait à vendredi. Si, vendredi, ça ne marchait pas, ah, bien, là, il fallait qu'on recommence. Un, deux, trois, quatre, cinq, et aujourd'hui on se retrouve en ce dimanche avec la loi spéciale.

Mme la Présidente, six fois, six fois, le gouvernement a changé d'idée. Comment voulez-vous qu'on les prenne au sérieux? Comment voulez-vous que les syndicats les prennent au sérieux? Comment voulez-vous que les travailleurs les prennent au sérieux? Comment voulez-vous que l'Association de la construction du Québec les prenne au sérieux? Voyons donc, Mme la Présidente, ce n'est pas des gens qui sortent d'une boîte à Cracker Jack, ils ont quand même une certaine expérience. Ces gens-là ont déjà négocié des conventions, ont déjà adopté des lois spéciales, ils savent de quoi ils parlent. Mais qu'est-ce qu'ils ont fait? Ils ont changé de cap six fois, et c'est la pire chose à faire en négociation quand vous donnez une date butoir, mais vous la changez six fois en l'espace de 10 jours. Alors, on se retrouve dans la situation actuelle. Mais ça, Mme la Présidente, je trouve ça dommage parce qu'on se retrouve dans un gouvernement d'improvisation qui a fait en sorte qu'on se retrouve dans cette position-là.

Maintenant, ce matin, la première ministre a affirmé une chose en Chambre, et je dois malheureusement corriger le tir, pour être poli, O.K.? La première ministre a dit ce matin que les leaders se sont parlé et ont eu les grandes lignes du projet de loi. Mme la Présidente, ça ne correspond pas à la réalité. Lorsque nous avons rencontré... lorsque nous avons eu la rencontre ce matin avec le leader du gouvernement, c'était uniquement sur la question technique de la loi spéciale : comment ça allait fonctionner, c'est quoi, notre temps de parole, qu'est-ce qu'on allait dire, est-ce qu'on pouvait s'entendre sur certaines choses, ce qui est tout à fait logique et pertinent. Mais, Mme la Présidente, jamais, jamais, jamais le gouvernement n'a eu le sens de la responsabilité, la décence, l'honneur et la dignité d'informer les partis d'opposition du contenu de cette loi-là, et c'est dommage, Mme la Présidente, c'est dommage.

Dans le cadre d'un gouvernement minoritaire, il est de mise que le Parlement fonctionne correctement. Il est de mise que le gouvernement informe les partis d'opposition. Mme la Présidente, on est des grands garçons, là, on est capables de tenir un secret, là, et on se serait entendu. En fait, c'était tout simple, il avait juste à nous dire en une phrase : Regardez, c'est clair, on prend les mêmes affaires que les génies civils puis on fait ça pour quatre ans. Paf! Merci. Bonsoir. C'est tout. C'est ça. On l'aurait su. Bon. On aurait pu commencer, nous autres, à regarder, à discuter et à évaluer, mais non, d'aucune façon, Mme la Présidente. Quand la ministre du Travail a parlé au député de Lévis, on lui a demandé : Est-ce que vous pourriez nous donner... Non. Silence radio, rien.

Ce matin, lors de notre rencontre entre leaders : Non. Silence radio, uniquement sur les technicalités de la loi spéciale. Et c'est dommage, Mme la Présidente, il aurait été préférable de la part du gouvernement d'informer correctement les parlementaires du travail, qui auraient pu avoir amorcé... Les discussions auraient pu amorcer dès hier, et donc on aurait pu arriver aujourd'hui à un consensus, on aurait pu trouver un terrain d'entente. Mais, non, le gouvernement s'est obstiné à agir de façon tout à fait aveugle comme s'il était tout seul et qu'il ne pouvait pas compter... ou enfin n'avait pas à travailler avec les partis d'opposition. Et, dans un Parlement d'un gouvernement minoritaire, ce n'est pas la façon de procéder.

Donc, Mme la Présidente, je termine mon propos là-dessus, en rappelant que notre proposition d'il y a deux semaines nous apparaît être encore et toujours la meilleure, c'est-à-dire reconduire les conditions actuelles pour un an mais ramener les gens au travail avec l'obligation de négocier. Nous estimons qu'il s'agit là d'une très bonne position. On a cru comprendre que l'opposition officielle se rallie en grande partie à notre idée. Bravo! Jamais trop tard pour bien faire. Nous souhaitons également que l'on puisse adopter une loi qui va amener le retour au travail. Nous condamnons vigoureusement l'attitude du gouvernement qui a fait comme s'ils étaient gouvernement majoritaire, et nous rappelons, Mme la Présidente, nous rappelons que jamais, jamais, jamais le gouvernement n'a informé le deuxième groupe d'opposition du contenu de cette loi-là, et ce qui est dommage. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David : Merci, Mme la Présidente. Je vais sans doute briser cette belle harmonie qui existe entre les deux principaux partis d'opposition pour dire que la formation que je représente, en fait, condamne fermement l'idée même d'une loi spéciale dans le secteur de la construction.

On a quelque chose au Québec qui s'appelle le droit d'association, le droit à la libre négociation et le droit de grève. Ce sont des droits fondamentaux, reconnus depuis déjà longtemps par nos lois québécoises. Sommes-nous dans une situation de catastrophe naturelle, d'émeute? Sommes-nous dans une situation où des services publics essentiels ne sont pas rendus? Là, on pourrait se poser des questions. Mais le problème, c'est qu'aucune de ces situations n'existe à l'heure actuelle. Si, à chaque fois qu'une grève menée par des travailleurs dans un domaine, oui, important pour l'économie, automatiquement, au bout de quelques jours, on leur annonce que : Faites attention, vous êtes mieux de vous entendre, sinon il y aura une loi spéciale, eh bien , la formation je représente, Québec solidaire, appelle ça brimer, éroder le droit de grève, qui est pourtant un droit reconnu par les lois québécoises et un droit, dans ce cas-ci, qui s'exerce dans un cadre parfaitement légal.

Nous nous opposons donc à cette loi spéciale qui pense résoudre un conflit patronal-syndical, en fait, en imposant le retour au travail, et ce, particulièrement dans un contexte où la partie patronale n'a cessé de réclamer cette loi spéciale. Et je pense qu'il faut dire ces choses au moment où certains nous convient pour bientôt à un débat sur les valeurs québécoises. Je rappelle que, parmi ces valeurs québécoises, il y a le droit d'association, le droit à la libre négociation et le droit de grève. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le leader du gouvernement.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Merci, Mme la Présidente. Donc, très brièvement, il me fait plaisir d'intervenir à cette étape pour souligner, dans certains cas, effectivement, où nous devrions nous inscrire dans un travail de collaboration, à l'évidence, il y a des aspects qui vont être plus difficiles, parce que certaines conditions ne sont pas rencontrées pour être capables d'agir au meilleur de ce qui se passe actuellement dans le secteur de la construction et des impacts que ça a sur bien des vies et pour des familles.

Pour reprendre les propos de la députée de Québec solidaire, je pense que c'est sous-estimer l'impact du secteur de la construction au Québec, là. C'est 175 000 travailleurs, ce n'est pas une PME, c'est tout un secteur au complet, donc il faut faire la différence, je pense, dans ces cas-là. Et il faut dire d'ailleurs que le régime qui concerne la construction est un régime d'exception. Pourquoi? Parce qu'on a décidé au Québec, de façon correcte, de négocier sur l'ensemble d'un secteur, Mme la Présidente. Donc, la députée fait abstraction d'une réalité bien concrète, et ça, c'est bien dommage. Il n'y a personne qui va enlever des droits... Bien que ça ne soit pas un droit fondamental, d'ailleurs... Le droit de lockout n'est pas un droit fondamental. C'est un droit qui est important, en matière de relations de travail, et ça fait en sorte, ainsi que le droit de grève, de permettre un juste équilibre des forces, Mme la Présidente. C'est simplement ça, le principe du droit de lockout et du droit de grève, ça n'a rien à voir avec un droit fondamental. C'est un droit important qu'il faut protéger effectivement et qui, dans certains cas, peut trouver une limite, dans le cas que nous sommes ici, quand l'intérêt public doit prévaloir sur l'exercice du droit de grève.

Mais je tiens aussi à rappeler à ma collègue que les syndicats réclament aussi l'intervention du gouvernement. Alors, aujourd'hui, elle s'oppose à la position syndicale, qui est maintenant de souhaiter aussi un règlement du conflit. Quand les deux parties souhaitent ce règlement, je pense que le mieux ici, c'est de s'assurer que le règlement soit le plus correct possible.

• (14 h 10) •

Il faut tenir compte, Mme la Présidente, du fait effectivement que le gouvernement est en minorité, donc ça impose plus de responsabilités aux partis d'opposition. Et j'espère qu'ils seront à la hauteur de ces responsabilités. Mme la Présidente, il faut souhaiter que tout le monde ici agisse de façon responsable. Et, avec ce que j'ai entendu du leader de la CAQ, je vous dirais que j'ai certaines craintes, Mme la Présidente, de bien comprendre l'impact des décisions ou des propositions qui peuvent se faire de part et d'autre.

Ce que tout le monde doit souhaiter, c'est le retour au travail. Ça, les Québécois souhaitent le retour au travail, les travailleurs le souhaitent et — je suis convaincu — ainsi que les entrepreneurs du domaine de la construction. Il faut souligner aussi, et c'est important, que plus de 100 000 travailleurs ont maintenant une convention, ont des ententes signées, négociées et valables. Donc, il faut en tenir compte.

Donc, à partir de là, de quelle façon on doit établir ce retour au travail? Eh bien, il doit se faire en cohérence avec ce qui est déjà signé, c'est la moindre des choses, Mme la Présidente. De faire le contraire, c'est aller à l'encontre du bon sens, c'est aller à l'encontre des parties, c'est aller à l'encontre d'un historique de dizaines d'années dans le secteur, mais c'est surtout avoir une position qui peut avoir des conséquences, Mme la Présidente, sur la suite des choses. Ce que nous avons actuellement, c'est un historique où le domaine de la voirie, du domaine de la construction, les conditions de salaire sont toujours liées avec le secteur institutionnel, c'est un historique de plusieurs années, et je pense que vouloir le briser à ce moment-ci est une bien mauvaise idée, Mme la Présidente, une bien mauvaise idée dans le contexte d'une loi spéciale.

Le deuxième, c'est que ce que nous souhaitons, c'est la stabilité. La stabilité, ça veut dire : Ce n'est pas vrai qu'on va négocier de six mois en six mois ou d'année en année. Le Québec a besoin d'un secteur de la construction qui est stable pour continuer l'ensemble des travaux et qu'on ne se retrouve pas dans la situation que nous vivons actuellement; personne ne le souhaite. Donc, il n'est aucunement question d'aller avec une loi qui, année après année, reconduirait des conditions de travail. Je pense que cette position, elle est en soi irresponsable, Mme la Présidente. Quant au fait de nous-mêmes jouer aux négociateurs en proposant un pourcentage qui va à l'encontre du principe historique que je vous ai parlé entre le secteur de la voirie et le secteur institutionnel... est encore là irresponsable, Mme la Présidente. Il peut avoir des effets concrets sur les parties mais surtout sur leur désir de retourner au travail dès mardi matin. La meilleure façon qu'on a de briser ce retour au travail, c'est de s'improviser arbitres à ce moment-ci et de grands négociateurs à l'égard de l'ensemble des parties.

La troisième chose, Mme la Présidente, c'est que ce qui est réclamé par la CAQ n'est pas réclamé par aucune des parties, et maintenant par le Parti libéral, c'est ce que j'ai compris, mais je souhaite que tout le monde revienne, je vous dirais, à la raison. Et je lance un appel correct mais bien senti à l'effet que nous devons agir de façon raisonnable et responsable. Donc, cette demande ne provient d'aucune des parties, ni la partie patronale...

Des voix : ...

M. Bédard : C'est bien, c'est bien, des fois, écouter. Il faut parler mais il faut aussi écouter. Je pense que c'est... ça aide tout le monde en général. Alors, il faut tenir compte de cette réalité-là, Mme la Présidente, et faire en sorte que ce qui est proposé corresponde à une réalité concrète des parties vécue dans leurs négociations et pas tout d'un coup, ex cathedra, déterminer des conditions qui ne tiennent pas compte de la réalité de négociation. Là, ce serait s'improviser dans un domaine où une mauvaise décision peut avoir des conséquences importantes. Donc, j'invite les partis à la responsabilité.

La dernière chose, c'est que la position du gouvernement et exprimée dans le projet de loi est une position raisonnable, est une position responsable, est une position équitable. Il faut toujours chercher, lorsqu'on est dans une loi spéciale, à représenter une forme d'équité. Personne n'est entièrement content mais personne non plus ne doit y trouver l'entièreté de ce qu'il souhaite. Elle doit représenter un juste équilibre, et c'est ce que nous avons atteint, Mme la Présidente, avec le dépôt du projet de loi de ma collègue. Et de vouloir s'ingérer à ce moment-ci à ce niveau peut avoir des conséquences sur un retour harmonieux au travail. Il faut que tout le monde se sente respecté malgré une loi spéciale, Mme la Présidente. Je pense que c'est à nous d'être à la hauteur de cette responsabilité, parce qu'on n'agit pas dans l'absolu, là. On n'est pas tout seuls ici à dire qu'est-ce qui est le mieux, qu'est-ce qui est moins bon. Il y a des gens qui ont négocié pendant des jours, des semaines, des mois. Il y a eu des avancées dans plusieurs secteurs. Vous le savez, je vous l'ai dit tantôt. Tout près de 100 000 travailleurs ont réglé leurs conditions de travail, d'autres étaient... avançaient. Il y avait des points de rupture, Mme la Présidente, mais, en aucun temps, le fait de donner un salaire représentant l'IPC n'était un élément de blocage, et tout le monde le sait ici, y incluant les parties patronales et syndicales. D'autres éléments de demande ne faisaient pas consensus, mais il n'y a personne qui s'est accroché à l'idée qu'on devait geler, finalement, le salaire des employés.

Donc, ce que j'invite tout le monde maintenant, c'est de faire en sorte que... C'est bien beau se retrouver au mois de juillet à faire une loi spéciale ce dimanche, parce que c'est important de le faire, Mme la Présidente, mais ce que je souhaite aux Québécois, c'est qu'il ne faut pas se retrouver dans ce scénario à tous les six mois ou à toutes les années. Donc, ce qu'on doit prévoir, c'est une convention, c'est une loi qui va s'appliquer à long terme. Les parties ont des obligations à s'entendre sur d'autres aspects en cours de route, mais pour nous il est important de rassurer la population, de rassurer les travailleurs, de rassurer les entrepreneurs dans le domaine de la construction et leur dire : Maintenant, pour une période prévisible de quatre ans, vous aurez des conditions qui seront fixées tel qu'il est prévu et qui s'inspirent de ce qui s'est négocié — jusqu'à encore quelques heures, Mme la Présidente — du secteur de la construction. Donc, on a encore le temps pour y penser. J'invite tout le monde à agir au mieux de la population québécoise et au mieux des travailleurs et des entrepreneurs du secteur de la construction. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de La Pinière.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin : Merci, Mme la Présidente. Alors, pourquoi sommes-nous ici, dans cette Assemblée, aujourd'hui, exceptionnellement, un dimanche 30 juin, alors que la session parlementaire régulière avait mis fin à ses travaux le 14 juin dernier? Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui? Qu'allons-nous accomplir aujourd'hui que nous ne pouvions faire en session parlementaire régulière il y a à peine deux semaines? Poser la question, c'est y répondre. Et la réponse est venue de la première ministre qui a demandé hier, le 29 juin, à la présidence de l'Assemblée nationale de convoquer les parlementaires pour aujourd'hui en séances extraordinaires afin de permettre la présentation d'un projet de loi visant la reprise des travaux dans l'industrie de la construction et procéder à toutes les étapes de son étude.

Alors, nous voilà rassemblés ici pour procéder à l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Pourtant, pourtant, l'opposition officielle, par la voix de son chef intérimaire et par la voix de son porte-parole en matière de travail, a interpellé ce gouvernement à de nombreuses reprises pour qu'il puisse agir, agir à temps et éviter justement l'éclatement d'un conflit de travail comme celui auquel on assiste, un conflit qui est coûteux pour l'industrie de la construction et coûteux pour l'économie du Québec.

Soucieux de maintenir l'équilibre entre les parties patronales et syndicales, le chef du Parti libéral du Québec, M. Philippe Couillard, a souligné l'importance de ce paramètre d'équilibre afin de protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et maintenir les emplois dans ce secteur névralgique pour notre économie. Et, lorsqu'on parle de l'industrie de la construction, Mme la Présidente, ce n'est pas banal, l'industrie de la construction. Ce n'est pas pour rien qu'au Québec on disait que, lorsque le bâtiment va, tout va. L'industrie de la construction, c'est 51 milliards de dollars d'investissement en 2012. C'est 14 % du produit intérieur brut du Québec. C'est 244 300 emplois directs en moyenne par mois, soit un emploi sur 20 au Québec, sans compter les milliers d'emplois indirects dans les différents secteurs d'activité.

• (14 h 20) •

L'industrie de la construction, Mme la Présidente, a aussi un certain nombre de particularités, notamment le fait qu'elle soit une industrie de petites entreprises. Et on sait à quel point les petites entreprises sont créatrices d'emplois et sont présentes dans toutes les régions du Québec. 80 % des entreprises dans cette industrie de la construction sont des petites entreprises de moins de cinq salariés. C'est extrêmement important. Le gouvernement, ce gouvernement, aurait dû écouter l'opposition officielle qui a sonné l'alarme bien avant que le conflit n'éclate.

Cette industrie si importante a aussi deux caractéristiques : c'est une industrie où la mobilité de la main-d'oeuvre est très, très, très forte et également c'est une industrie qui est cyclique et saisonnière, donc qui a besoin d'attention et particulièrement d'attention de tout gouvernement, y compris celui qui est en face de nous. L'industrie de la construction, c'est plusieurs secteurs. C'est le secteur industriel, c'est le secteur institutionnel et commercial, c'est le secteur du génie civil et de la voirie et c'est le secteur résidentiel.

Alors, pendant plusieurs semaines, ce gouvernement a fait la sourde oreille, il s'est traîné les pattes et n'a pas entendu les interventions constructives, les demandes constructives qui lui ont été faites par l'opposition officielle et les autres oppositions. Plusieurs membres de ce gouvernement, Mme la Présidente — et cela m'a beaucoup étonnée, personnellement — ont même nié que ce conflit de travail puisse avoir un coût sur notre économie. Je viens de vous dresser succinctement le profil de l'industrie de la construction. N'importe qui qui a le moindrement le sens de la raison ne peut nier qu'un conflit dans ce secteur puisse avoir un impact négatif sur notre économie. Il a fallu attendre le 25 juin, là, il y a quelques jours, pour que ce gouvernement reconnaisse du bout des lèvres que ce conflit a un impact négatif sur notre économie, un impact négatif. Mais il a toujours refusé, à ce jour, de le chiffrer. Et, lorsque l'opposition officielle dresse des chiffres, donne des chiffres, eh bien, ils sont niés de l'autre côté. On peut leur retourner l'argument : Sur quelle base est-ce que vous pouvez nier ces chiffres si vous-mêmes, vous n'êtes pas en mesure d'en présenter?

Je vous ai dressé le portrait global de l'industrie de la construction, mais, dans la vraie vie, Mme la Présidente, lorsqu'on atterrit dans nos régions, par exemple en Montérégie d'où je viens, eh bien, l'industrie de la construction, c'est 4 400 entrepreneurs. Ils oeuvrent dans tous les secteurs de l'industrie de la construction, Mme la Présidente. C'est des projets très significatifs, très importants pour nos communautés. Dans mon propre comté, j'ai eu le bonheur d'accueillir le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, le 6 mai dernier, pour un projet sur lequel j'ai moi-même travaillé avec l'ancien gouvernement. Et le bonheur était total parce qu'on annonçait la création d'une nouvelle école. Eh bien, là, où est la nouvelle école? Chez moi, combien d'autres circonscriptions, dans plusieurs municipalités, eh bien, les projets sont bloqués parce qu'il y a un conflit que ce gouvernement n'a pas su gérer, auquel il n'a pas prêté l'attention nécessaire? Et, Mme la Présidente, c'est désolant de constater qu'on est face à un gouvernement qui a une marque de commerce. Et c'est quoi, sa marque de commerce quand on le voit depuis qu'il est en place? D'abord et avant tout, c'est l'improvisation, improvisation totale dans tous les domaines, dans tous les dossiers : majeurs ou petits. Et, après les improvisations, qu'est-ce qu'il y a? Il y a les reculs, avec toutes les conséquences que cela implique. Nous sommes face à un gouvernement d'irresponsabilité, Mme la Présidente. Ça a assez duré, ça a un coût pour notre économie, ça a un coût pour nos travailleurs, et ça a un coût pour notre région, et il faut que ça s'arrête.

Alors, j'arrêterai ici, Mme la Présidente, sur la pertinence de ce projet de loi et je reviendrai sur le fond dans les étapes subséquentes. Merci de votre attention.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, Mme la Présidente. C'est assez rare que je vais commencer une allocution comme ça, mais, je vais dire, c'est à mon grand dam que je prends la parole aujourd'hui pour demander aux parlementaires d'adopter des règles spéciales qui vont nous permettre d'adopter une loi qui permette au secteur de la construction qui demeure encore en grève de revenir en grève...

Une voix : ...

Mme Maltais : De revenir au travail. Excusez-moi, il y a un brin de fatigue; on a travaillé très fort. Alors, de revenir au travail.

J'écoutais la députée de La Pinière, et elle parlait de marque de commerce. Je pense que la marque de commerce du gouvernement actuel, c'est le respect, le respect des gens, de leur travail, de ce qu'ils font quotidiennement, le respect des lois, le respect de la loi R-20 sur les relations de travail, comme nous avons respecté les gens dans le monde de l'éducation, en ayant une belle réussite, le Sommet sur l'éducation, contrairement à... puis je veux juste... Je serai brève là-dessus, je ne veux pas faire une guerre, mais je considère qu'il est plus facile et il est mieux pour une société de travailler dans le domaine du respect et de la négociation que dans la division, ce qui met pour moi... fait... met un point final à mon rappel historique. Le mois de juin, on s'en souvient.

Alors, nous devons arriver aujourd'hui à cette loi spéciale parce que, malheureusement, notre régime des relations de travail n'a pas donné l'effet escompté. Quel est cet effet escompté? Depuis 1993, 1993, depuis 20 ans maintenant, nous avons redonné aux parties en cause, c'est-à-dire les employeurs et les employés, les associations d'entrepreneurs et les associations d'employés... Nous leur avons redonné le pouvoir de gérer leur domaine, leur domaine de travail. Depuis, il y a eu quelques grèves, c'est arrivé : une semaine dans le résidentiel, deux semaines dans tel autre secteur. C'est arrivé déjà, c'est arrivé. Et, à chaque fois, on a donné le temps et la chance à la négociation. Cette année, les conventions collectives sont arrivées à leur fin le 30 avril. Les parties étaient sous un nouveau régime, la loi n °  30, qui les a obligés à, entre autres, avoir de nouveaux protocoles. Ça a été plus long que prévu, parce que, l'année dernière, rappelons-nous... ou, en décembre 2011, nous avons adopté la loi n ° 30 qui introduit de nouvelles façons de convenir ensemble de leur travail comme négociateurs. Alors, à cause de cela, ça a pris plus de temps que prévu.

...sont donc arrivés, depuis le 30 avril, au terme... La convention collective est arrivée à son terme depuis le 30 avril 2013. Donc, depuis, les travailleurs de la construction sont sur une convention collective qui est échue. Donc, leurs conditions de travail n'ont pas été mises à jour. Depuis le 30 avril, les conditions de travail des travailleurs de la construction n'ont pas été mises à jour, et il y a des négociations intensives depuis des mois maintenant.

J'en ai parlé tout à l'heure, Mme la Présidente, à la période de questions. J'ai dit qu'il y avait eu 38 rencontres, ce qui... dans le secteur institutionnel et commercial, industriel, dont on parle ce matin, pour lesquels on amène une loi sur le retour au travail, 38 rencontres. Évidemment, je ne compte même pas toutes les rencontres téléphoniques qu'il y a eu, là, les conversations téléphoniques, les envois de messages, de courriels, tout ce qui fait qu'on nourrit une conversation. Il y en a eu 38 depuis le 14 mars. La dernière avait lieu le 29 juin. Dans le secteur génie civil et voirie, qui a réglé, pour lequel on n'a pas besoin de loi spéciale, il y a eu 19 rencontres. Dans le secteur résidentiel, il y a eu 22 rencontres, et on a réglé. Donc, on voit qu'il y a eu une grande discussion dans le secteur de la construction, une grande discussion.

• (14 h 30) •

La grève a commencé le 17 juin. Après cinq jours ouvrables, cinq seulement, le secteur génie civil et voirie, un grand secteur, avait signé sa convention collective. Donc, à peu près 41 000 travailleurs de la construction sont revenus au travail. Sur le sixième jour de grève, à la fin du sixième jour de grève, le secteur du résidentiel est revenu au travail, 57 000 travailleurs, à peu près, sont revenus au travail. Donc, près de 100 000 travailleurs sont maintenant... ont renouvelé d'eux-mêmes leur convention collective. C'est important de le dire. C'est plus, là, de la moitié des travailleurs qui ont assumé  —  et des patrons, des syndiqués  —  qui ont assumé leurs responsabilités. Et ça, on y croit vraiment, on y croit profondément. Il faut que les gens assument leurs responsabilités. C'est ça, la loi R-20, c'est soit le régime de relations de travail du Québec qui...

Maintenant, il y a un secteur qui était encore en négociation jusqu'à hier, c'est le secteur institutionnel, commercial et industriel. Nous avons nommé un médiateur spécial. En fait, la première ministre et moi avons demandé à M. Normand Gauthier, médiateur spécial avec beaucoup d'expérience, de faire un dernier sprint la semaine dernière. Nous croyions que c'était possible. Hier, le médiateur spécial a appelé la première ministre et lui a dit : C'est dorénavant impossible. C'est terminé, ils ne peuvent plus avancer. Ils sont dans une impasse. Les gens qui ne sont plus capables de se parler, d'en arriver à un échange qui puisse être fructueux. Un négociateur, quelqu'un qui a travaillé pendant 22 ans dans le monde du travail, nous dit : C'est la première fois que je n'arrive pas à un règlement. C'est exceptionnel, la situation que nous vivons. C'est pourquoi nous avons besoin de mesures exceptionnelles.

Cette loi spéciale… J'en parlais avec une collègue tout à l'heure, pour un ministre, déposer une loi spéciale, ce n'est jamais de gaieté de coeur qu'on fait ça, là. Ce n'est pas ça, notre régime de relations de travail. Mais, maintenant, le domaine de la construction est un secteur économique important, c'est un secteur économique majeur. Et il y a des travailleurs aussi qui veulent rentrer au travail. Il y a des milliers, il y a près d'une centaine de milliers... 80 000 travailleurs qui veulent rentrer au travail. Ils veulent retrouver leur métier, leur travail. C'est leur fierté, c'est aussi leur gagne-pain. Ils le veulent, mais pas à n'importe quelles conditions, pas à n'importe quel prix, pas n'importe comment. Comme ils disent eux-mêmes, ils ne veulent pas rentrer à genoux. Puis les patrons, eux autres, ils ont négocié, ils ont été durement... ils ont travaillé très fort, les employeurs, pour essayer de se ramener à un régime qui les intéresse. Ils ont travaillé très fort, les deux équipes. Alors, il faut respecter aujourd'hui ces deux groupes.

Il faut leur offrir une porte de sortie, les laisser respirer un peu, adopter une loi spéciale respectueuse qui permette un retour pacifique sur les chantiers de nos dizaines de milliers de travailleurs. C'est important. C'est important que le protocole de réintroduction des gens, sur le retour au travail, là, il soit bien fait et pour qu'ils en viennent, peut-être à l'automne, à un retour aux négociations. Ça prendra peut-être quelque mois  — c'est ce que le négociateur nous a dit  —  mais probablement qu'à l'automne les gens pourront reprendre les négociations. Et il faut toujours savoir aujourd'hui, quand nous échangeons sur cette loi spéciale, que, la journée où une entente, une nouvelle entente sera signée entre les employés et les employeurs du secteur industriel, commercial et institutionnel, cette entente sera la nouvelle entente qui aura force de loi, ce sera la nouvelle entente qui régira leurs relations de travail. Donc, le projet de loi qui est sur la table leur donne le moyen de sortir de l'impasse, mais ils ont encore, s'ils le veulent, la responsabilité de régir leur milieu de travail, de régir leurs conditions de travail, d'en décider, et c'est très important. Nous croyons que nous en arriverons à une entente négociée. Le chemin que nous traçons, et pour lequel nous vous demandons de lever les règles aujourd'hui et d'en arriver à un règlement, le chemin que nous traçons est un chemin respectueux, respectueux des façons de faire dans le monde de travail. Le chemin que nous traçons, ce n'est pas, nous, de refaire la négociation. On ne s'est pas mis à jouer dans les conventions collectives, ce serait l'erreur…

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Il y a vraiment un bruit de fond très perceptible. Alors, si vous voulez jaser, peut-être plus bas, mais que je puisse, au moins, entendre la ministre. Merci.

Mme Maltais : Merci, Mme la Présidente. Le chemin que nous traçons, c'est le chemin du respect des deux parties. Depuis 1993, le gouvernement ne décrète plus les conventions collectives. Le gouvernement se fie à des gens qui négocient entre eux, à des négociateurs. La première ministre et moi avons suivi les négociations jour après jour et, dans les dernières semaines, même, je dirais, heure après heure. Nous savons où ils en étaient rendus. Et il y en a une évidence qui, elle, est visible, c'est que l'entente génie civil et voirie, cette entente-là, elle est d'usage du même niveau, en général, que l'entente dans les ICI. En génie civil et voirie, on a souvent des travailleurs qui sont dans le domaine ICI. Alors, historiquement, il y a toujours eu équilibre entre ces parties, entre ces secteurs de travail. Historiquement, il y a équilibre. Alors, toute la discussion que nous allons avoir aujourd'hui, il faut se garder ceci en tête : Est-ce qu'on se met à introduire, nous, comme parlementaires, des errances historiques? Est-ce qu'on se met à introduire du déséquilibre dans des secteurs du métier de la construction?

Ce qui a été patiemment travaillé, amené, négocié, équilibré… Depuis des années, pendant 20 ans, ils ont travaillé à leur secteur de façon respectueuse pour être sûrs de vraiment amener des... que chacun des secteurs soit productif, respectueux, que les travailleurs ne se sentent pas désavantagés et quittent, donc… Parce que ça arrive qu'il y en ait plusieurs sur le même chantier, hein, qui travaillent deux secteurs proches, génie civil et voirie. La voirie peut être proche d'un secteur qui travaille dans l'institutionnel, dans le commercial. On fait des rampes d'accès, on fait des… Imaginez-vous l'impact d'un déséquilibre.

Le secteur industriel, commercial, institutionnel est un de nos fleurons. C'est un de nos fleurons, les travailleurs sont considérés comme très productifs, très productifs, parmi les plus productifs en Amérique du Nord. Imaginez-vous que, suite à la discussion qu'on aurait aujourd'hui, on introduise un déséquilibre et qu'on frappe dans la productivité de ce fleuron. Ce serait jouer aux apprentis sorciers dans le domaine de la négociation. Alors, dans la discussion qu'on va avoir aujourd'hui, dans ce cadre, il faut bien comprendre que ce n'est pas anodin qu'on ait reproduit dans ce projet de loi là telle quelle la convention collective du passé parce que la convention collective du passé, elle a été négociée entre les parties, elle est issue d'une négociation et d'une signature.

L'autre élément fort sur lequel il y a une discussion aujourd'hui, c'est jusqu'à quel niveau on peut augmenter les salaires des employés. Mais, rappelez-vous ce que je viens de vous dire, introduire un point de déséquilibre entre deux secteurs de la construction serait nocif pour un de nos fleurons. Ce serait aussi, donc, nocif pour la productivité. Il y a des patrons qui nous regardent aujourd'hui, des patrons qui savent très bien où ils en étaient rendus dans la négociation. Moi, je peux vous dire, on était plus haut que l'IPC. Puis la preuve, c'est que génie civil et voirie a signé dans les taux qu'on a actuellement dans ce projet de loi là. Historiquement, ils sont en équilibre. Historiquement, ces deux secteurs signent sensiblement les mêmes taux. Historiquement. Alors, imaginez ce que c'est si nous, on commence à jouer aux apprentis sorciers.

C'est important, il y a 80 000 travailleurs qui nous regardent aujourd'hui. Ils savent qu'on va leur imposer un retour au travail mardi. Ces travailleurs sont dans le fleuron de l'ICI, parmi les plus productifs d'Amérique du Nord. Dans quel état d'esprit ils vont rentrer? Puis comment ils vont se sentir? Qu'est-ce qu'ils penseront de leur Assemblée nationale? Je vous invite à y penser et à y réfléchir, c'est important. Il y a une économie qui est en jeu, il y a des travailleurs qui sont en jeu, il y a des vies qui sont en jeu, des vies familiales. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Dominique Vien

Mme Vien : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui, en cette Assemblée, en cette belle journée du dimanche. Comme parlementaires, c'est un privilège que de pouvoir s'exprimer, de pouvoir prendre la parole et d'émettre notre point de vue, un point de vue qui est pertinent en provenance de l'opposition officielle, Mme la Présidente — d'autres collègues l'ont fait avant moi, d'autres le feront également — une position qui vient décrier, si vous voulez, Mme la Présidente, la situation dans laquelle on se trouve aujourd'hui en raison de l'incurie du gouvernement du Québec. Malheureusement, force est de constater que la non-compréhension de la situation et la lenteur à agir dans le dossier de la grève de la construction ont fait en sorte de nous plonger, comme le disait le collègue de Rivière-du-Loup ce matin, dans une impasse, les mots mêmes repris de la bouche du gouvernement ce matin, lors de la période de questions.

Mme la Présidente, l'industrie de la construction, c'est excessivement important. Je pense que vous en êtes très consciente comme tout le monde ici aujourd'hui. Selon la Commission de la construction du Québec, cette industrie, ça représente 51 milliards de dollars d'investissement, ce n'est pas rien. Ça représente 14 % du PIB ici, au Québec. Et, actuellement, ce sont près de 175 000 travailleurs qui oeuvrent... qui ont comme besogne, justement, d'oeuvrer à l'intérieur de cette importante industrie. Et ce qui, évidemment, nous occupe aujourd'hui, c'est le sort de ces 77 000 travailleurs qui sont sur les chantiers, des chantiers qui sont paralysés depuis deux semaines maintenant et qui... une grève qui, malheureusement, a plongé le Québec dans un… disons-le, dans un chaos.

• (14 h 40) •

Alors, ce n'est pas rien, c'est à la grandeur du Québec. C'est également dans les régions du Québec. Tout à l'heure, je pourrai vous donner des exemples plus avant dans différentes régions du Québec, Mme la Présidente. Mais, uniquement à titre indicatif, je pourrais vous parler du comté de Bellechasse. Notre collègue de La Pinière, tout à l'heure, nous parlait de la Montérégie dans sa globalité, dans son grand ensemble, de ce que peut représenter l'industrie de la construction. Dans Bellechasse, évidemment, Mme la Présidente, ce sont de grands aussi, mais aussi de petits entrepreneurs, et ce dont on parle peu et qui nous frappe de plein fouet dans Bellechasse, évidemment, ce sont ces 77 000 travailleurs qui ont été en grève, mais ce sont tous ces emplois indirects qui, également, ont été touchés et des hommes, des femmes, chez nous, comme ailleurs, qui ont perdu leur emploi. De façon temporaire, vous me direz, mais, quand même, qui ont perdu leur emploi parce qu'ils sont, si vous voulez, dans la queue de la tornade. Ce sont des emplois qui ne sont pas comptabilisés, mais qui écopent, eux aussi, de ce qui se passe actuellement au Québec.

Nous avons eu, au bureau de comté, l'occasion de parler à, par exemple, des quincailliers qui ont dû mettre à pied de façon temporaire des travailleurs de ce qu'on a l'habitude d'appeler dans la cour, hein, pour les matériaux de construction. Bien, je ne sais pas si les gens peuvent s'imaginer, par exemple, dans une quincaillerie à Sainte-Justine ou encore à Sainte-Claire, de mettre à pied cinq ou 10 hommes, ce que ça peut représenter si nous étions à Montréal. Alors, ça a touché de plein fouet l'industrie chez nous, ça a touché de plein fouet des régions comme la nôtre.

Je vais vous donner des exemples très concrets, Mme la Présidente, de ce que ça a occasionné comme troubles et de ce que ça occasionne encore aujourd'hui. Parce qu'on ne peut pas présumer de ce que fera la Chambre ici, mais on peut s'attendre à ce qu'il y ait une situation qui s'améliore grandement. En tout cas, c'est ce que nous souhaitons, bien évidemment. Mais je vais vous donner, Mme la Présidente, un exemple très concret de ce qui se passe chez nous, c'est toute une communauté de Saint-Lazare, chez nous, dans Bellechasse, qui s'est mobilisée pour construire des unités de logement pour des personnes aînées. Je le répète, c'est à Saint-Lazare, de l'argent public, de l'argent des contribuables de Saint-Lazare, des argents de la municipalité pour construire cet immeuble important de 18 unités. Bien, Mme la Présidente, tout ça, ça a été arrêté.

Pouvez-vous vous imaginer ce que ça peut représenter pour des personnes aînées, pour des personnes aînées, de ne pas pouvoir, peut-être, avoir accès à leur logement, toute l'inquiétude que ça suscite? Écoutez, on a eu des téléphones chez nous. On est bien, bien au courant aussi que des personnes aînées qui ont vendu leur maison voulaient continuer à demeurer à l'intérieur, le nouvel acheteur se trouvait un peu impacté par ça. C'est chaotique, Mme la Présidente, c'est chaotique et ça sème l'incertitude inutilement.

On pourrait aussi vous parler de l'entreprise agroalimentaire, à Sainte-Claire, Kerry, qui embauche quelque 200 personnes et qui, pour être un bon citoyen corporatif, a décidé de se mettre aux normes, à son entreprise, pour traiter notamment les eaux usées. Les travaux de réfection à la station d'épuration des eaux de cette entreprise-là, Mme la Présidente, bien, ça, c'est arrêté. Alors, ça, évidemment, ça crée de l'inconfort chez nous.

Des investissements, notamment dans la Fonderie Laforo, qui ont dû être arrêtés également. Chez PCM Innovation, à Sainte-Claire, où on fait de la fabrication et de la conception de prototypes de moules, d'outillage, etc., là aussi, encore une fois, on a commandé une machine en provenance de l'Italie, une énorme pièce, il a fallu... Il aurait fallu terminer les travaux avant d'accueillir cette machinerie-là. Alors, on a été obligé d'annuler le transport, on a été obligé d'annuler l'installation parce que les travaux de réparation pour accueillir cet outil-là n'ont pas pu être complétés, Mme la Présidente. Alors, je pense qu'on est tous assez intelligents, ici aujourd'hui, pour s'apercevoir des impacts que ça peut occasionner, des impacts que ça peut causer chez nous, Mme la Présidente.

C'est des mots durs quand on dit que c'est un gouvernement de manque de vision, c'est un gouvernement qui pose des gestes qui démontrent un petit peu de l'incompréhension, aucune sensibilité. Et je pense que, dans le dossier dans lequel on est, oui, ce sont des entreprises, mais il y a des hommes et des femmes en arrière de ça qui sont touchés de façon importante par la situation de la crise dans le monde de la construction actuellement. Et, évidemment, comme porte-parole de l'opposition officielle en matière de régions, Mme la Présidente, vous allez me permettre de soulever des décisions qui, depuis une dizaine de mois, donc depuis l'élection de ce gouvernement, ont fait mal aux régions. Et cette gouvernance péquiste nous amène à... c'est tout et n'importe quoi en même temps en termes de décisions actuellement, Mme la Présidente. On le voit, là, avec la crise de la construction.

Notre collègue de Chomedey l'a dit, l'a répété, je ne sais pas combien de questions il a pu poser au gouvernement, notamment pour que ce gouvernement s'implique, s'engage pour faire en sorte que ce conflit ne soit pas aussi long que nous le connaissons actuellement, demande d'un médiateur spécial, demande d'une adoption d'une loi spéciale. Écoutez, je pense que l'opposition officielle, il y a plusieurs jours maintenant, a tenté d'allumer certaines lampes, certaines lumières de l'autre côté, mais très inutilement.

Tout ça s'ajoute, bien entendu, aux nombreuses décisions qui ont été prises par le gouvernement actuellement et qui font preuve d'une insensibilité absolument sans nom pour les régions du Québec. Nos collègues en font souvent état, comme moi-même étant porte-parole en matière de régions, toutes les coupes qu'on a connues. On donnait l'exemple... À Rimouski, il n'y a pas si longtemps, dans le domaine de la santé, les minicentrales qui, finalement, ne verront jamais le jour. De mémoire de femme, c'est 300 millions d'investissements qui tombent à l'eau dans six municipalités qui, elles-mêmes, avaient décidé... Tu sais, on demande aux régions de se prendre en main, puis ils ont de beaux projets, puis on leur dit : Finalement, non, ça ne fonctionnera pas. C'est comme ça qu'on traite les régions actuellement, puis c'est avec une insensibilité absolument extraordinaire.

Des millions qui sont attendus au niveau de la santé, 400 millions où, encore une fois, de mémoire de femme, là… 400 millions, c'est en quelque part que ça va se couper, là. C'est certain qu'en quelque part en région il y a des gens qui vont être impactés, il y a des institutions qui vont être impactées. C'est sûr et certain, ça, Mme la Présidente.

• (14 h 50) •

L'abandon du Plan Nord, c'est une hérésie. Abandonner le Plan Nord… C'est un projet auquel tout le monde adhérait, que ce soit ici, au Québec, ou ailleurs, à l'étranger. Je veux dire, à un moment donné, Mme la Présidente, il faut nommer... un chat, c'est un chat. Puis je pense que le gouvernement du Québec, actuellement, fait fausse route dans plusieurs dossiers, et le dossier de la construction, cette gestion de ce dossier-là nous montre à quel point le gouvernement du Parti québécois est sur une bien mauvaise piste, là.

Alors, évidemment, on va être attentifs, comme opposition officielle, à tout ce qui va se dire aujourd'hui, à tout ce qui va se présenter. Nous avons des positions, de ce côté-ci, qui ne sont pas légères, qui sont, je pense, pertinentes et qui proviennent d'une réflexion, et vous pouvez être certaine, Mme la Présidente, que nous allons le faire... en fait, bien défendre notre point de vue, mais nous le ferons de façon très constructive, comme nous le faisons en tout temps, Mme la Présidente.

Alors, je terminerai en vous disant qu'évidemment, puisque nous sommes les gardiens des deniers publics, tout le dossier institutionnel dont il est question, hein, dans cette loi spéciale notamment, c'est ce qui touche les écoles, c'est ce qui touche les réfections des hôpitaux. Notre collègue de Laviolette, ce matin, nous parlait des grands chantiers qui sont mis en péril, qui ont été sous une secousse, là. Bien, ça, ça entre à l'intérieur de ça. Et ça, c'est des investissements qui sont faits à partir d'argent du public, d'argent des citoyens, et il est inévitable, Mme la Présidente, que ça aura des coûts importants, évidemment, dans ces chantiers-là, et qui sont payés en grande partie, sinon pour la totalité, par des deniers publics.

Alors, je m'arrête là-dessus, Mme la Présidente, en vous mentionnant, évidemment, que nous serons vigilants, nous serons alertes, évidemment, sur tout ce qui sera présenté aujourd'hui, mais nous le ferons, bien entendu, dans un esprit de collaboration, ce qui a été toujours, je pense... ce qui a représenté le Parti libéral du Québec. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Blainville.

M. Daniel Ratthé

M. Ratthé : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, si nous sommes ici aujourd'hui, en ce 30 juin, pour voter une loi spéciale, c'est que nous n'avons pas vraiment le choix, Mme la Présidente. Le 30 juin, habituellement, c'est une date où on atteint des sommets en termes de nombre de chantiers de construction. Le 30 juin est une date où on atteint également des sommets en termes d'investissements dans l'économie du Québec. Et, maintenant, le Parti québécois, le gouvernement constate, après plusieurs mois, qu'ils sont devant une impasse, eux-mêmes sont devant une impasse. Et, si nous sommes ici, Mme la Présidente, c'est que le gouvernement a fait preuve de laxisme dans ce dossier si important, dans cette industrie si névralgique pour notre économie. Alors que je reprends les propos de la ministre du Travail et du Conseil du trésor, depuis le 30 avril, des négociations ont lieu dans ce secteur d'activité. Et la ministre du Travail nous disait, entre autres, qu'il y avait eu 38 rencontres, 38, pour tenter de résoudre la situation.

On est en droit de se demander, Mme la Présidente, pourquoi avoir attendu 38 rencontres avant de nommer, par exemple, un médiateur, d'aider les deux parties à s'entendre. Pourtant, on avait des exemples sous les yeux. Mme la ministre nous disait tout à l'heure qu'au bout de 19 rencontres la voirie a réglé la situation, au bout de 22 rencontres, les gens du résidentiel ont réglé la situation. Ah non! on a préféré attendre que tout dégénère, et nous en sommes aujourd'hui devant cette réalité où nous n'avons pas le choix, Mme la Présidente, d'intervenir, de faire une loi spéciale.

J'entendais tout à l'heure la première ministre qui disait : Ce n'est pas le rôle du gouvernement d'intervenir dans les conventions collectives. Nommer un médiateur, Mme la Présidente, je pense — et, d'ailleurs, le gouvernement l'a fait — ce n'est pas nécessairement intervenir dans les conventions collectives. Si ce n'est pas le rôle du gouvernement d'intervenir dans les conventions collectives, la question que je me pose également  —  et j'aurai l'occasion de la poser à ce gouvernement : Comment se fait-il qu'on impose une convention ou un règlement sur une portée de quatre ans, Mme la Présidente? Alors, on peut sérieusement se poser la question. Alors, ce que je dis aujourd'hui, Mme la Présidente, c'est que je serai heureux de participer à ce travail. Je serai également en mode écoute, en mode également de collaboration. Mais il faut absolument trouver une solution, une solution pour faire en sorte que les négociations se poursuivent, une solution pour faire en sorte que les conditions de travail soient équitables, mais surtout une solution pour faire en sorte que la situation que nous vivons actuellement ne se reproduise plus et que nous puissions remettre l'économie du Québec sur les rails. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, cela met fin... Excusez, excusez! Ah! écoutez... Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Désolée, Mme la Présidente, je n'ai pas eu le sprigne assez rapide pour me lever et être... Au moment où vous avez dit : Y a-t-il un autre intervenant?, j'ai levé la tête, un peu comme tous les gens de ce côté-ci, mais c'est de ce côté-ci que nous allons prendre la parole.

Plusieurs d'entre nous se sont levés en disant : On est le 30 juin, Mme la Présidente. Je me souviens, on était dans cette Chambre il n'y a pas si longtemps, où on disait : Vous savez, on ne s'en va pas en vacances, on s'en va travailler dans nos bureaux de comté, et nous étions à la fois tristes et heureux. J'explique. Hein, on est heureux de retourner dans notre comté travailler avec notre monde, travailler pour nos citoyens et avec nos citoyens, cette fois-ci plus proches, puisqu'on est sur place, puis à la fois un peu tristes parce que, veux veux pas, le quotidien, le fait qu'on se fréquente, qu'on se voie, qu'on se salue, qu'on échange, ça nous fait toujours plaisir. Il se développe même parfois des complicités crasses entre nous, qui fait qu'on a beaucoup de plaisir, on se taquine, et tout, et tout. Alors, quand je suis partie, j'étais sûre de ne pas revenir. Du moins, pas revenir avant que l'été soit parti.

Au Québec, on aime bien parler de la météo, et je vous dirais qu'en ce moment la météo fait en sorte qu'on se demande si l'été est arrivé. Donc, c'est peut-être pour ça qu'on est encore ici. Mais non, on est ici parce qu'il faut prendre des décisions. J'aurais aimé être ici la semaine passée. J'aurais aimé prendre cette décision plus rapidement et je vous explique pourquoi. J'entends les mots souvent «raisonnable », «responsable ». Et ce sont des mots auxquels j'adhère parce que je pense que c'est, effectivement, important de prendre des décisions et d'être responsable et raisonnable.

Eh bien, Mme la Présidente, en ce moment, avec le conflit qui existe au Québec avec la construction, au mois de septembre il y a des élèves qui ne vont pas rentrer à l'école, et ils vont, tout simplement, recevoir une gentille petite lettre d'ici le mois de septembre pour leur dire que la rentrée sera retardée. Il y en a d'autres qui vont se faire annoncer que le trajet d'autobus qui avait été annoncé à la fin des classes va être changé, va être changé pour les diriger vers un autre établissement scolaire parce que le conflit qui existe en ce moment a une cause à effet importante pour le scolaire. Les commissions scolaires sont comme le Parlement du Québec. Ou, des fois, j'aime penser le contraire, le Parlement est un peu comme la commission scolaire, c'est-à-dire que les travaux à l'intérieur de la grande maison...

Une voix : ...

• (15 heures) •

Mme Charbonneau : ...s'arrêtent — à vos souhaits — s'arrêtent et font en sorte qu'on peut faire la rénovation, les améliorations, les... on agrandit, on construit une école, on fait des choses importantes. Mais là il n'y a rien qui se fait, il n'y a rien. Pourquoi? Parce qu'il y a une grève majeure au Québec qui fait en sorte que plusieurs corps de métier ne sont pas en oeuvre dans nos écoles au Québec, dans nos bâtiments scolaires qui… Normalement, à la fin août, il y a des fêtes dans les cours d'école. Vous le savez parce que, dans votre comté, c'est très actif au niveau des fêtes dans les cours d'école, et on fait en sorte que tout le monde se rejoint, tout le monde se retrouve.

Et, cette fois-ci, ça va être différent. Ça va être différent parce que le retard qu'on prend en construction, en rénovation, en amélioration du bâtiment… Que ce soit juste la mise aux normes, tous ces travaux et tous ces retards vont faire en sorte qu'on ne va pas pouvoir accueillir au moment propice ou au bon endroit… Parce que, pour les parents comme pour les enfants, l'école, c'est chez eux, ça leur appartient. D'ailleurs, on a tous l'expression : C'est mon école. Personne qui ne l'a achetée, c'est au gouvernement du Québec, mais on dit tous : C'est mon école. Alors, quand on dit à quelqu'un : Tu n'iras pas à cette école pour ta rentrée scolaire, tu vas aller là… Mais il y a aussi les corps de métier en construction qu'on a dans nos écoles, donc nos jeunes qui sont en formation professionnelle, qui s'en vont sur le marché du travail, qui vivent ce conflit avec autant d'impact que le travailleur lui-même dans sa journée.

Il est important de se rappeler qu'une grève, on peut… Et on se doit de le faire, il faut rappeler le travailleur, l'impact sur sa famille, l'impact... mais il ne faut pas oublier la communauté. Ça a un impact majeur sur la communauté, et ça fait en sorte que les répercussions vont beaucoup plus loin que juste : Il n'y a pas de travail qui se fait. Quand un jeune ne peut pas avoir accès dès la rentrée scolaire… bien, le message qu'on lui donne peut-être au départ, surtout s'il est déjà fragilisé, c'est que sa persévérance scolaire, elle ne va bien, bien plus loin que la persévérance des gens qui préparaient le terrain pour l'accueillir. Et ce n'est pas le message qu'on veut livrer à nos jeunes au Québec. On veut vraiment leur dire de persévérer, de maintenir leurs niveau scolaire, de continuer, d'aller jusqu'au secondaire V et de choisir un métier qui leur ressemble.

Donc, Mme la Présidente, il était temps, il était temps qu'on se voie et qu'on se parle. Il est, je vous dirais même, quelques semaines trop tard. D'ailleurs, dans La Presse, il y a eu un article, le 21 juin, où la commission scolaire de Laval disait qu'elle avait informé les parents que la rentrée scolaire pourrait être perturbée si la grève perdure. Plus de 60 chantiers sont en cours sur le territoire de Laval, dont la construction de deux nouvelles écoles. Le 21   juin, Mme la Présidente, il y a déjà de ça neuf jours. Alors, il est clair que la commission scolaire, avant sa fermeture, avant qu'elle ne ferme pour le congé de l'été, bien elle va sûrement faire parvenir à l'ensemble des parents de la commission scolaire une autre lettre, qui dit : Vous savez, on vous a dit que ça se pouvait que, eh bien, là, on vous avise que. Parce que, veux veux pas, si on rentre mardi au travail, bien j'ai mon congé de la construction qui est tout proche et qui fait en sorte que mes chantiers ne vont pas beaucoup plus avancer. Et rentrer dans une école, que ce soit pour enlever l'amiante, changer les fenêtres ou améliorer la cour d'école, ça ne se fait pas en disant : Bien, j'arrête aujourd'hui, je reprends ça demain, là. Non, il faut rentrer le matériel, il faut poser les gestes, il faut sécuriser les lieux.

Donc, la commission scolaire a déjà avisé. Je vous dirais que la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys aussi, le collège Saint-Louis; parce que, oui, ça ne touche pas que les écoles publiques, ça touche aussi les écoles privées. Je ne vous parle pas des cégeps et des universités, je suis sûre que les gens pourraient le faire aussi. Ça touche la commission scolaire de Montréal, d'ailleurs qui a un problème marquant sur les moisissures, et il y a déjà de la relocalisation d'élèves. Eh bien, là, on se demande un peu où est-ce qu'on va les placer puis comment on va s'organiser, parce qu'effectivement la perturbation en construction est majeure.

Donc, si j'ai pris ce temps de parole aujourd'hui pour vous aviser de cette inquiétude, c'est pour aussi vous faire remarquer l'impact que ça a sur l'ensemble de la communauté. Quand une grève se loge, ça ne touche pas que les parents, que les travailleurs et que les gens comme eux, ça touche l'ensemble de la communauté, et ça va aussi loin que l'école. Et c'est sûr que là je me lève, puis je vous dis : Je pourrais faire le lien avec la ville, parce que la ville a nécessairement et plus souvent qu'autrement, surtout en périphérie de Montréal et un petit peu plus loin, des locaux qui se louent à l'intérieur de nos écoles. Et là les camps de jour et les... Ça devient un petit peu plus problématique. Mais, ceci dit, je le dis le plus souvent que je peux, je fais confiance aux gens des commissions scolaires. Et je crois qu'il y aura là un rattrapage important.

Mais, comme députés de l'Assemblée nationale, ne soyez pas surpris si, dès la rentrée scolaire, les téléphones sonnent, les parents nous appellent. Parce que, souvent, on est leur dernier recours, ils ne pensent pas tout de suite à leurs commissaires scolaires, ils ne pensent pas tout de suite au conseil des commissaires, ils appellent le bureau de la députée et ils dénoncent le fait que, ah! tiens, je ne peux pas rentrer à la date que je pensais. Finalement, la garderie ne peut plus le prendre parce que là les contrats se finissent entre les uns et les autres. Et là le petit bout de chou de sept ans, sept ans et demi, il se retrouve entre deux chaises parce qu'il y a des retards ici puis il y a des fermetures là; et ça fait en sorte que je suis un peu mal prise.

Donc, Mme la Présidente, comme disait la ministre tantôt, au grand dam, nous sommes rentrés aujourd'hui. On est loin des vacances, puisqu'on était en train de travailler dans nos comtés. Probablement que, comme vous… Moi, j'ai dû laisser un petit mot sur la table ce matin, quand je suis partie à 5 h 15, pour dire : Je ne crois pas que je serai de retour pour souper. Tout est prêt, arrangez-vous. C'est un mot que je déteste laisser, mais je sais qu'ils sont assez vieux pour s'organiser. Après ce soir, j'espère que, les conflits qui vont survenir — il y en aura d'autres — on pourra prendre l'ensemble de l'impact que ça a sur la communauté… Parce que, pour nous, il est clair que l'impact va avoir un coût beaucoup plus perturbant qu'on peut le penser, dès la rentrée scolaire au mois de septembre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Fabre.

M. Gilles Ouimet

M. Ouimet (Fabre) : Merci, Mme la Présidente. Est-il possible de savoir combien de temps je dispose?

Une voix :

M. Ouimet (Fabre) : Combien?

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Sept minutes. Sept.

M. Ouimet (Fabre) : ...coupé, j'ai seulement que sept minutes.

Merci. Merci, Mme la Présidente. Écoutez, c'est pour moi mon baptême de feu, comme député, de participer à l'adoption... au débat sur un projet de loi dans un cadre de procédure d'exception. Depuis le 4 septembre, j'ai eu l'occasion d'entendre mes collègues qui ont beaucoup plus d'expérience me raconter des histoires fabuleuses d'anciennes périodes. Mais, tout de même, je n'étais pas plus empressé que ça de connaître cette expérience. Ceci dit, Mme la Présidente, j'estime que c'est notre devoir à tous, comme députés, de répondre présent à cette convocation du président de l'Assemblée... de la première ministre pour tenter de trouver une solution à une situation qui affecte les Québécois et les Québécoises et qui a des conséquences importantes au niveau économique.

Mes collègues en ont parlé, on en a fait mention à plusieurs reprises à la période de questions, lors de nos travaux, avant la pause estivale, on en a également fait mention, on y a référé à plusieurs... plusieurs de mes collègues en ont parlé aujourd'hui même : Cette situation commande, Mme la Présidente, une action de la part de l'Assemblée nationale. Et, à mon tour, je dois déplorer le fait que nous nous retrouvons le 30 juin dans une situation d'urgence pour discuter, débattre et trouver une solution à cette situation qui doit se terminer; et je pense que nous prendrons les mesures pour qu'elle se termine dès aujourd'hui.

Ceci dit, cette situation est triste, Mme la Présidente, et pas uniquement du point de vue économique, on a fait mention des conséquences pour l'économie du Québec, et je pense que c'est à juste titre qu'on a insisté sur cet aspect. Mais il faut également souligner, Mme la Présidente, les conséquences que la situation… la grève dans l'industrie de la construction, les conséquences que ça a pour les citoyens, les Québécois, que ce soient les travailleurs qui sont en grève, les membres de leurs familles, les communautés qui vivent et qui tirent des bénéfices des travailleurs dans une région, les propriétaires de résidences qui ont dû patienter et qui ont dû... qui ont eu... qui ont subi les contrecoups de cette grève, et maintenant les entrepreneurs et les grands chantiers qui sont toujours affectés. Cette situation, Mme la Présidente, ne peut plus durer.

Depuis le temps qu'on en a parlé, de cette situation, Mme la Présidente, cette situation était prévisible, et la question qui se pose : Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi d'attendre au 30 juin pour intervenir? La ministre du Travail nous a mentionné l'importance de la négociation, et je ne pense pas qu'il y a personne à l'Assemblée, à cette Assemblée, qui mette en doute l'importance, pour des parties, de négocier et d'en arriver à une solution. Mais, lorsqu'il est évident que nous nous dirigeons dans une impasse, il est de notre devoir d'agir. Et, en agissant, en prenant la décision responsable d'agir, ça ne veut pas dire, Mme la Présidente, qu'on remet en cause le droit fondamental... le droit de grève, qui est un droit fondamental.

• (15 h 10) •

La députée de Gouin a livré un vibrant plaidoyer pour nous décourager ou nous mettre en garde contre cette tentation d'adopter une loi spéciale et le message que ça enverrait à l'égard de l'importance du droit de grève. J'écoutais les propos de la députée de Gouin et je tiens à la rassurer que ses propos me rejoignent. Je défends, je crois qu'il est... ce droit de grève qui a été effectivement accordé, qui a été reconnu au terme d'une longue lutte par les travailleurs au fil des années, ce droit doit être préservé. Mais ce n'est pas un droit absolu, et, dans certaines situations, Mme la Présidente, il est nécessaire d'intervenir pour rétablir la paix et rétablir le travail, et je pense, malheureusement, Mme la Présidente, que nous sommes dans cette situation et qu'il était évident que nous serions dans cette situation depuis plusieurs jours, voire des semaines. Et c'est, je pense, à juste titre qu'on peut reprocher au gouvernement d'avoir fait le choix de retarder le débat sur le projet de loi que nous entreprenons en ce moment.

Ceci dit, Mme la Présidente, il me reste quelques minutes, je tiens absolument, je suis...  —  c'est ça qui arrive quand on est le dernier. Je dois absolument revenir sur la question de la collaboration, qui est un mot qu'on entend beaucoup depuis le début de la 40e législature, et c'est un mot qui me rejoint et qui me plaît. Je suis un fervent, un partisan de la collaboration, parce que je crois que c'est la façon de faire triompher l'intérêt collectif lorsque des personnes qui ont des points de vue opposés tentent de mettre en commun, de rechercher l'intérêt collectif par la discussion et la collaboration. Alors, j'en suis tout à fait, de cette idée de collaboration.

Cependant, je n'arrive pas à comprendre qu'on soit en train de discuter d'un projet de loi qui, en ce qui concerne l'opposition officielle et, je crois comprendre, la deuxième opposition... On a pris connaissance d'un projet de loi qui n'a pas été discuté au préalable. Le processus législatif d'exception fait en sorte qu'on ne peut pas suivre la procédure normale qui nous contraint à une certaine sagesse, parce que ce processus, qui est généralement assez long, a pour but de s'assurer qu'à terme nous adoptons les meilleures lois possible. Lorsque nous en venons à la fin, on n'a plus de temps pour débattre... Et donc il est nécessaire pour la collaboration. J'aurai l'occasion d'y revenir plus tard. Mme la Présidente, merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la leader adjointe de l'opposition.

Mme Thériault : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais savoir, parce que je vois qu'il n'y a pas d'autre intervenant, que ce soit du côté de la CAQ ou du gouvernement, combien de temps il reste qui n'a pas été imparti et de quelle manière vous allez le répartir entre les formations politiques.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors donc, M. le secrétaire va peut-être nous indiquer les temps restants. Je crois que c'est neuf minutes pour la CAQ et 22 minutes à la partie gouvernementale. Alors, je comprends que la partie gouvernementale n'a plus d'autre intervenant. Alors, nous allons procéder à la répartition de ce temps, et je comprends qu'il n'y a que l'opposition officielle qui veut bénéficier du temps. Donc, il reste 31 min 30 s. Est-ce que j'ai un intervenant, pour 31 min 30 s? Mme la députée de Hull.

Mme Vallée : De Gatineau.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Gatineau, excusez-moi.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Merci. Alors, Mme la Présidente, c'est un plaisir de vous retrouver, plaisir de retrouver les collègues. Évidemment, comme nous le disions et comme le disait si bien notre collègue de Mille-Îles, on aurait aimé vous retrouver à un autre moment donné ou peut-être dans d'autres circonstances. Parce qu'évidemment, revenir par un 30 juin, disons qu'il y avait, pour chacun d'entre nous... en tout cas, du moins de ce côté-ci de la table, de ce côté-ci de la Chambre, on avait peut-être des fêtes et des trucs à souligner dans nos circonscriptions, avec nos citoyens. Mais on va les souligner avec vous, avec les collègues de l'autre côté de la Chambre, puis on prendra le temps ensemble, ce soir, peut-être demain, de souligner la fête du Canada. Alors, on le fera ensemble, puis je trouve ça assez exceptionnel...

Des voix : ...

Mme Vallée : Alors, jamais je n'aurais pensé fêter la fête du Canada avec la première ministre, avec mes collègues du gouvernement, mais on le fera, et ce sera un plaisir.

Ceci étant dit, ce qui nous amène ici, c'est cette loi spéciale, et cette loi spéciale qui n'était malheureusement pas inévitable. C'est ça qui est le message et c'est ça qu'on doit retenir. C'est ce qui a fait que chacun d'entre nous avons dû quitter nos circonscriptions, certains hier, certains tôt ce matin, ce qui fait que chacun d'entre nous a dû quitter les citoyens. J'aurais bien aimé pouvoir participer à la remise des diplômes de la Cité étudiante de la Haute-Gatineau et souligner la graduation des élèves de Maniwaki et des environs hier. Malheureusement, j'ai pris la route, parce que, comme certains, comme notre collègue de Matane, j'ai plusieurs heures de route à faire, alors je me suis rendue ici.

Mais ce qui nous a amenés ici, c'est l'inaction du gouvernement pendant les semaines qui ont précédé, Mme la Présidente, parce que, depuis le mois de mai, depuis la fin mai, on pouvait voir le conflit se tramer, se dessiner. Depuis le mois... la fin mai, notre collègue de Chomedey se lève, immanquablement, pratiquement à toutes les périodes de questions, pour questionner la ministre du Travail sur les négociations, sur les pourparlers, sur l'état des choses, l'état de la situation dans le domaine de la construction, et, à chaque fois, Mme la Présidente, on nous rappelait la même ritournelle, qui devient finalement la chanson-thème de ce gouvernement : Tout va très bien, Madame la Marquise, tout va très bien. Alors, tout était au plus beau calme, tout allait bien de l'autre côté, les négociations allaient bon train. Pourtant, notre collègue de Chomedey levait le drapeau, il disait : Écoutez, ça ne va pas bien, on a de l'information à l'effet qu'il y a du sable dans l'engrenage et on aurait besoin d'un signe, d'une manifestation de volonté, de la part du gouvernement, de faire un petit peu avancer… de faire avancer les choses, de hâter les choses. Mais on ne faisait rien, on ne bougeait pas, on attendait que les choses se placent tranquillement, parce que peut-être qu'on avait d'autres trucs qu'on souhaitait voir. Dans le fond, il aurait été étonnant, hein, qu'on nous convoque ici il y a une semaine, jour pour jour. Ça aurait été... je ne sais pas, mais peut-être qu'on avait politiquement d'autres trucs qu'on souhaitait souligner plutôt qu'être à l'Assemblée nationale.

Cette grève-là qui a paralysé l'économie du Québec pendant près de trois semaines, cette grève-là aurait pu être évitée. Notre présence ici, à l'Assemblée nationale, aurait pu être évitée si on avait agi plus rapidement, si on avait agi avec beaucoup plus de volonté. Ce que ça a donné? Bien, dans les régions… Ma collègue de Bellechasse a fait état de certains comtés, mais, dans l'Outaouais, dans la circonscription de Gatineau, il y a eu énormément de chantiers qui ont été complètement arrêtés pendant cette grève-là : les chantiers de l'autoroute 5, les chantiers de plusieurs écoles, une école à Cantley. Je pense aussi à ma collègue de Hull qui voit certains projets d'école retardés et des projets tant attendus… qui ont été annoncés en grande pompe d'ailleurs. Le projet du Rapibus qui est attendu aussi pour l'automne, on aura peut-être la chance de rencontrer notre collègue ministre des Transports pour l'inauguration, on l'espère bien, mais on espère qu'on va pouvoir inaugurer à l'automne et que ce ne sera pas dans une tempête de neige qu'on va inaugurer Rapibus. Bien, ces chantiers-là ont été retardés.

Puis il y a des situations un petit peu déplorables aussi qui se sont produites pendant cette grève-là. Simplement une anecdote, dans ma circonscription, dans la municipalité de Val-des-Monts, il y a eu des échanges assez corsés entre des parents qui allaient reconduire des enfants à la garderie et des travailleurs qui manifestaient près d'un chantier de construction, d'un développement résidentiel. Alors, les parents ont été pris à partie, et ça a donné lieu à des échanges corsés, intervention policière et tout. Tout ça aurait pu être évité.

Ce qui aurait pu être évité aussi, Mme la Présidente, c'est que des milliers de travailleurs, des milliers de familles du Québec n'ont pas eu de revenu pendant un certain nombre de semaines, hein? C'est des revenus, c'est de l'argent qui ne rentre pas dans les poches. C'est des sommes supplémentaires que des employeurs, des propriétaires d'entreprise vont devoir débourser parce que leurs travaux de rénovation et d'agrandissement de leurs commerces n'ont pas pu être faits.

En Outaouais, on en a plusieurs, je pense à la Laiterie de l'Outaouais qui a des projets de construction, Laiterie de l'Outaouais qui est dans ma circonscription, ça va coûter combien à la Laiterie de l'Outaouais, ces retards-là? Ça va coûter combien pour le complexe Branchaud-Brière dans le comté de notre collègue de Chapleau, un complexe qui est attendu depuis des années et dont on entend parler depuis des années, qui est retardé aussi par cette grève-là? Parce qu'il y a des coûts, des grèves comme celle qu'on vit, des grèves comme celles qu'on a vécues ne se font pas à coût nul. Je comprends le droit des employés, le droit de grève, mais il y a aussi le droit, pour les citoyens, de ne pas avoir à débourser des sommes excédentaires.

• (15 h 20) •                                                                                                                         

Et c'est nous tous, c'est tous les citoyens du Québec qui vont devoir payer pour l'inaction du gouvernement, et ça, je trouve ça très, très, très décevant, Mme la Présidente. Je trouve ça triste que nous en soyons rendus ici, parce qu'on avait vu venir les choses, on savait qu'il y aurait une grève, on pouvait… Même si on n'avait pas les chiffres, même si on ne veut pas donner les chiffres, même si le ministre des Finances et le ministère des Finances ne s'entendent pas sur la valeur et l'équivalence des chiffres, on savait qu'il y aurait des coûts à cette grève-là et on aurait pu les éviter, on aurait pu poser des gestes de façon beaucoup plus proactive qu'on ne l'a fait. On est ici, on est ici, on va essayer de travailler ensemble de sorte qu'il y aura un terme à cette grève-là. L'objectif, évidemment, c'est de faire en sorte que tous les projets dont je vous ai parlé puissent reprendre, redémarrer. Mais il y aura quand même des effets et il y aura quand même des coûts, et ces coûts-là ne sont pas imputables à l'opposition, sont imputables au gouvernement, à l'inaction du gouvernement.

Et ce qui est important et ce qui est du devoir des parlementaires, c'est de trouver une approche équilibrée. Ça va être aussi de protéger l'économie du Québec, qui est dans une situation un peu précaire. Parce que non seulement, là, on a cette grève-là qui a eu des effets dévastateurs, mais il ne faut pas oublier non plus que, dans les mois qui l'ont précédée, notre économie n'a pas eu la vie facile. Il y a eu énormément d'arrêts de travaux. On a arrêté des chantiers dans le Nord, on a bousillé le Plan Nord, on a fait tout ça de l'autre côté de la Chambre. Et en plus il nous manquait des petites médailles, en fait de ralentissement économique, à mettre à notre veste. Alors, on a choisi de ne pas aller de l'avant. Hein, on va en ajouter, on va ajouter au ralentissement économique et on va laisser la grève perdurer le plus longtemps possible. Mais là ça devenait un petit peu difficile pour le gouvernement de vivre avec la pression, parce que, généralement, dans la société québécoise, dans la communauté, on ne souhaitait pas aller de l'avant avec cette grève-là et on souhaitait que le gouvernement pose un geste fort afin de faire en sorte que les travaux puissent reprendre et que les chantiers puissent commencer à redémarrer.

Alors, c'est un peu ce qui nous amène, tristes... je... La ritournelle, on l'a encore entendue aujourd'hui. Encore ce matin, on nous disait : Tout va bien, il n'y a pas de problème, vous exagérez. Mais, lorsque les parlementaires, les grands acteurs économiques tiennent le même discours, on est loin d'exagérer, Mme la Présidente. Je pense qu'on avait vu juste, on avait vu juste dès le mois de mai, on avait vu que ce conflit se dessinait. Et c'est à ce moment-là qu'il aurait fallu agir, on aurait dû agir dès le mois de mai. On aurait dû mettre en place un médiateur, un conciliateur. On aurait pu poser des gestes proactifs avant que la grève ne soit amorcée et avant qu'on ne soit dans une impasse comme celle qu'on a connue au cours des dernières semaines.

Alors, Mme la Présidente, on travaillera de façon proactive, on travaillera en collaboration avec le gouvernement, parce que, de notre côté, c'est l'économie qui est notre priorité, et on espère pouvoir transmettre cette passion-là à nos collègues du gouvernement. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Évidemment, je suis très heureuse de prendre la parole à cette étape-ci. Vous savez qu'on doit évidemment prendre en considération les motions qui ont été déposées par le leader du gouvernement sur la pertinence de siéger en séances extraordinaires. J'aurai l'occasion, au cours des prochaines heures, d'aller probablement beaucoup plus en profondeur au niveau du sujet. Mais il m'apparaissait important à cette étape-ci de rappeler pourquoi nous sommes, par un dimanche, la veille de la fête du Canada, ici, en Chambre, au Parlement, en train de débattre de l'opportunité d'avoir une loi spéciale.

Vous savez, Mme la Présidente, vous comme moi, tous les collègues ici, on n'est pas encore en vacances, ça ne sera pas le cas pour la plupart d'entre nous avant les vacances de la construction. Nous savons tous que ce n'est pas parce qu'on n'est pas au parlement qu'on est en vacances. Vous le savez comme moi, on a des activités dans nos comtés. Demain, il y a des fêtes un peu tout partout, il y a des fêtes de quartier, nous avons tous été invités, évidemment. Et moi, je considère que… Ce qui est dommage, c'est que, lorsqu'on a changé nos horaires de parlementaires, on l'a fait en fonction qu'on puisse justement, nous, les députés, à la fin de la session, être dans nos comtés et faire les activités qu'on a à faire dans nos comtés avec nos commettants.

Mais, bref, soit dit en passant, il est évident que c'est important de refaire un petit peu l'histoire du où est-ce qu'on est partis, pourquoi nous sommes ici. Mon collègue le député de Chomedey, Mme la Présidente  —  vous vous en rappelez certainement  —  s'est levé à plusieurs reprises en Chambre, il l'a répété également ce matin, lors de la période de questions, pour poser des questions à la ministre du Travail sur le point des négociations des conventions collectives dans l'industrie de la construction. Vous savez comme moi que le domaine de la construction, c'est un domaine qui est particulier, parce qu'il y a quand même plus de 175 000 travailleurs qui y sont, qu'au Québec tous les travailleurs de la construction sont syndiqués, c'est vrai, et qu'ils sont répartis dans des grandes familles de secteur. Donc, on sait qu'il y a le résidentiel, donc tout ce qui s'appelle les maisons neuves, donc les gens qui attendaient leurs maisons pour le 1er juillet, qui malheureusement ont quand même eu neuf jours de grève avant d'avoir une entente. Il y a le secteur du génie civil et les grands chantiers, qu'on appelle, qui est l'autre secteur qui a eu une entente, eux aussi. Et le plus gros secteur, celui pour lequel on se trouve ici en fait, c'est ce qu'on appelle l'ICI : l'industriel, le commercial et l'institutionnel.

Mes collègues ont fait état que l'industrie de la construction, ça représente quand même 50 milliards de dollars par année. Et ce qu'il est important de se rappeler également, Mme la Présidente, c'est qu'au niveau du secteur ICI, donc dans la portion institutionnelle, c'est à peu près 70 % de l'argent qui y est investi qui est investi par des gouvernements. Donc, c'est le gouvernement du Québec, avec le CHUM, le CUSM, l'amphithéâtre, les rénovations d'écoles, les piscines qui sont sous l'égide des municipalités, ça peut être des parcs, des rénovations de parcs. Et tous ces travaux-là sont, pour le moment, évidemment, arrêtés.

Mon collègue le député de Chomedey fait un excellent travail comme critique de la ministre du Travail, et, lorsqu'il a posé les questions, c'est qu'il avait déjà des signaux des gens sur le terrain que, même s'il y avait des rencontres, il n'y avait pas grand-chose qui se disait là puis il n'y avait pas vraiment d'intention de négocier, Mme la Présidente; et on l'a senti venir. Donc, mon collègue a posé des questions à la ministre sur l'état des négos. Il s'est fait répondre : Tout va bien, tout est sous contrôle, il n'y a pas de problème, il faut les laisser négocier.

 Mon collègue a demandé, plus vers la fin de notre session, de nommer un médiateur, parce qu'on sait très bien qu'à un certain moment donné un conciliateur, c'est là pour faciliter les choses, mais, quand ça ne facilite pas, quand ça n'avance plus, juste de changer le joueur principal, qui est en plein milieu, qui tente de rapprocher les parties, de trouver des points d'entente, d'isoler certaines problématiques pour être capables d'avancer et de trouver des ententes, ça facilite drôlement l'avancement vers des règlements de convention collective. On l'a vu, ça a donné des résultats au niveau du résidentiel, ça en a donné au niveau du génie civil. Mais malheureusement, le plus gros secteur, où il y a quand même plus de 77 000 travailleurs, où le conflit, il n'est pas réglé, ça n'a pas avancé.

Donc, évidemment, c'est pour ça qu'on se retrouve aujourd'hui avec une loi spéciale devant nous, donc c'est pour ça qu'on siège et qu'on va pouvoir parlementer durant les prochaines heures. Je pense que ce matin le chef de notre majorité parlementaire a clairement indiqué que, puisque l'opposition avait réclamé une loi spéciale pour un retour au travail, il était de notre intention de collaborer avec le gouvernement pour pouvoir faire adopter la loi, évidemment.

Par contre, Mme la Présidente, je dois dire, ce que je trouve un peu dommage… Pour avoir été membre d'un gouvernement minoritaire, moi, je me souviens très bien qu'à l'époque les ministres qui avaient à déposer des projets de loi... Et moi, j'étais présidente de la Commission des institutions, je dois vous dire, beaucoup de projets de loi vont dans cette commission-là, et il y avait toujours beaucoup de discussions, de collaboration entre le gouvernement de l'époque, le gouvernement libéral, l'opposition officielle de l'époque, qui alors était la défunte ADQ, et même la deuxième opposition, qui était le Parti québécois, il y avait toujours des rencontres qui étaient fixées avant pour qu'on puisse discuter des projets de loi. Un coup que les groupes avaient été entendus, avant même de tomber dans l'étude article par article, on présentait à nos vis-à-vis les intentions de modifications qu'on pouvait apporter au projet de loi suite à ce que les groupes étaient venus faire comme représentations au Parlement. Donc, ça, Mme la Présidente, c'était vraiment de la collaboration.

• (15 h 30) •

Là, on nous a convoqués ici en loi spéciale. Mes collègues ont demandé à voir le projet de loi, évidemment, puis je pense que c'est correct aussi. Si on veut que le Parlement fonctionne bien, si on veut aller chercher la collaboration des oppositions, la moindre des choses, c'est de pouvoir nous expliquer qu'est-ce qu'il y a dans la loi exactement. Et j'entendais le député de Chauveau tout à l'heure faire état de la rencontre qu'il avait eue avec le gouvernement, où il mentionnait que finalement c'était juste la procédure, comment c'était pour se dérouler, et pas nécessairement l'essentiel du contenu du projet de loi, alors que, d'après ce qu'on a compris, d'après ce que la ministre du Travail a dit, c'était qu'elle avait parlé à la partie patronale, à la partie syndicale, et que tout le monde était d'accord. Bien là, on se rend compte maintenant, puisqu'il y a quand même des gros morceaux du projet de loi qui sont sur la table, que ce n'est pas tout à fait le cas non plus. Donc, vous comprendrez, Mme la Présidente, que nous, on veut bien collaborer comme opposition officielle, je pense que la CAQ aussi veut bien collaborer également, mais on va faire un travail de parlementaires sérieux.

On nous a rappelés, on est ici. Moi, personnellement, là, c'est bien évident que j'aimerais mieux être dans mon comté demain. J'ai une célébration, les gens m'attendent, je serais heureuse d'être avec eux. Mais, je vais vous dire, ça ne me dérange pas de rester ici, Mme la Présidente. Puis ce n'est pas la première fois. Il faut que je vous raconte, Mme la Présidente : Vous savez, moi, j'ai été élue en 2002, hein, en avril 2002, et il y a eu, l'été 2002, une loi spéciale, vous vous en rappelez, vous, je vois exactement votre non-verbal, et je suis sûre que les collègues qui étaient ici, à l'époque, se rappellent de cette loi-là. Je dois vous dire, Mme la Présidente, que, comme nouvelle élue, je m'en vais, j'ai travaillé fort au Parlement, je m'en vais en vacances avec mon conjoint de l'époque, mon fils, on loue un condo à Tremblant. Et qu'est-ce qui arrive, Mme la Présidente? En plein milieu des vacances de la construction, on rappelle tous les députés au Parlement pour voter une loi spéciale. Et est-ce que vous vous rappelez le sujet, Mme la Présidente? Vous vous en rappelez. Certains collègues ici ne le savent pas. Bien, on nous a rappelés pour voter une loi spéciale concernant le retour au travail des infirmières, en 2002, en pleines vacances de la construction. Et moi, je me souviens de la loi spéciale avec les amendes très salées qu'il y avait pour le syndicat, les pertes d'années d'ancienneté dans les fonds de pension pour les infirmières qui contrevenaient à la loi. Je me souviens qu'à l'époque Mario Dumont avait voté contre, parce qu'il était dans ce Parlement, et que nous aussi, nous avions voté contre évidemment.

Des précédentes… lois spéciales dans les relations du travail, ce n'est pas la première qu'on a devant nous; je vous ai parlé de celle-là, je peux vous parler de celle de 1999, Mme la Présidente. Et étrangement, en 2002, savez-vous qui était le ministre de la Santé? L'actuel chef de la CAQ. En 1999, autre loi spéciale, légiféré sur les conditions de travail, Mme la Présidente, savez-vous c'est qui, encore une fois? Les infirmières, en 1999, il faut s'en rappeler. Et qui était la ministre de la Santé de l'époque? L'actuelle première ministre, Mme la Présidente. Donc, vous voyez que, des lois spéciales pour légiférer sur les conditions de travail, ce n'est pas la première fois qu'on en a. Mais il y a quand même des circonstances, je dois l'avouer, qui sont différentes : les infirmières font partie de la fonction publique, et tout le monde a bien compris évidemment que les infirmières sont assujetties… avec des services essentiels, etc. Donc, le contexte est totalement différent.

Mais je vais remonter l'histoire, Mme la Présidente. Est-ce que vous savez qu'on a déjà voté une loi spéciale sur les relations du travail? En 1986, la Loi sur la reprise des travaux de construction. Qui a fait adopter cette loi-là, Mme la Présidente? L'ancien ministre du Travail, l'actuel député de Brome-Missisquoi. J'invite les députés à se procurer une copie de cette loi-là parce que celle-là parle vraiment des relations dans l'industrie de la construction, et c'est une loi de retour au travail mais c'était aussi une loi qui faisait en sorte que les syndicats et les patrons avaient l'obligation de se parler pour trouver une solution à long terme.

Donc, évidemment, Mme la Présidente, on est ici. Je suis convaincue que tout le monde va la voter, cette loi-là, Mme la Présidente. Mais ce qu'il faut comprendre également, c'est que le rôle de l'opposition, ce n'est pas un rôle juste de s'opposer pour le plaisir de s'opposer. On est beaucoup plus responsables que ça, Mme la présidente. Mes collègues qui sont ici, autant dans ma formation politique que dans le parti de la CAQ, et, j'imagine, les députés du Parti québécois vont aussi... doivent écouter, regarder, écouter ce que les autres nous disent, parce que mon chef parlementaire a pris la peine de demander ce matin : Est-ce que nous aurions la possibilité d'entendre les parties impliquées? Là, on va imposer une loi spéciale et on ne donnera pas l'occasion autant aux patrons qu'aux syndicats de venir nous exposer leurs visions sur la loi qui est devant nous, qui va gérer leurs conditions de travail, leur industrie, ce que les patrons vont devoir payer aux employés et les conditions de travail des employés, évidemment.

Mme la Présidente, vous comprendrez qu'il nous apparaissait et il nous apparaît encore fort opportun d'entendre les parties qui vont devoir vivre avec cette loi spéciale là. Donc, évidemment, la collaboration, oui, c'est l'opposition, mais la collaboration, ça se fait avec le gouvernement aussi, Mme la Présidente, tu sais. Nous, on veut bien danser le tango, mais il faut toujours bien qu'il y ait quelqu'un de l'autre côté qui soit disponible à dire : Bien, oui, c'est correct, tant qu'à faire une loi, on va faire la meilleure loi possible.

Et moi, je prétends, pour avoir été ministre, que le ministre, habituellement, quand il dépose sa loi, pense que c'est la meilleure loi, qu'il est entouré des meilleurs juristes et qu'il dépose la loi qui va tout régler. Puis, Mme la Présidente, savez-vous quoi? C'est normal. Je vous le dis, là, j'ai été ministre, c'est normal. On prend cette loi-là, on va la prendre dans les moindres recoins, mais on pense toujours que c'est la meilleure loi. Bien, un coup arrivés en commission parlementaire, quand on entend les groupes, quand on fait l'étude article par article, là on se rend compte que, des fois, ce n'était pas tout à fait la meilleure. Puis, quand c'est écrit que le comité ou la commission peut et doit, vous savez comme moi que ce n'est pas pareil. Et combien de projets de loi nous avons eu l'occasion d'étudier ici où c'était écrit « le comité peut » et que nous l'avons fait remplacer par «le comité doit »? Chaque mot a son importance.

Je veux tout simplement mentionner que, comme opposition officielle, on sera une opposition qui sera responsable. Parce qu'au-delà de la loi il y aura des travailleurs de l'industrie de la construction, il y aura des employeurs qui vont devoir vivre avec des conditions de travail, des conditions qui régissent leur industrie et qui leur auront été imposées.

Donc, évidemment, moi, je peux vous dire, j'ai des membres de ma famille qui travaillent dans l'industrie de la construction. Ce n'est pas tout le monde qui veut être en grève. Mais je comprends que tous les travailleurs veulent améliorer leurs conditions de salaire, leurs conditions de travail, c'est normal. Là, elle est où, la juste part? On aura l'occasion d'en discuter lors des autres débats. On aura des débats de cinq heures, il y a différentes étapes. Vous savez comme moi qu'on pourra en reparler de long en large.

J'aimerais soulever, toutefois… Tout à l'heure, la ministre du Travail a mentionné que les conventions ont été échues à la fin du mois d'avril, mais que puisqu'avec la loi n °  33, le projet de loi n °  33, qui est maintenant la loi n ° 30, nous avions changé aussi des choses dans le régime des négociations. C'est vrai qu'on a changé des choses, Mme la Présidente. Les donneurs d'ouvrage ont maintenant leur mot à dire. Avant, ils n'avaient pas leur mot à dire. Quand on a fait adopter le projet de loi n °  33, on voulait que les cinq syndicats de la construction soient assis ensemble pour éviter que deux plus gros joueurs ou deux ou trois joueurs décident des règles pour toute l'industrie. Ils sont tous assis ensemble. Tant mieux, Mme la Présidente, parce que, je peux vous dire que, quand on a fait adopter la loi, les syndicats n'étaient pas d'accord avec ça, jusqu'à temps qu'on comprenne que tous les syndicats défendent les droits des travailleurs. Ça, il n'y a pas de problème.

Mais ce que la ministre a omis de dire, c'est que, même si on a changé des choses au niveau de la loi, même si on a prolongé les conventions collectives de trois ans à quatre ans parce que les blitz de négos revenaient trop vite  —  et c'était une demande de l'industrie lorsqu'on a fait les consultations  —  ça ne change pas le fait que tout le monde voyait... Et ils savaient très bien qu'à la fin du mois d'avril il y avait une fin de convention collective. Et, en temps normal… Moi, je peux vous dire, quand je suis arrivée ministre du Travail, lors de la dernière négociation de la convention collective, mon collègue, le whip, qui est député, ici, de  — on a changé le nom de son comté — ...

Une voix : ...

Mme Thériault : …Lotbinière-Frontenac, était ministre du Travail lors de l'autre négociation. On n'a pas eu de grève, dans l'industrie de la construction, Mme la Présidente. Ni pour lui, ni pour moi, probablement pas pour le ministre avant non plus. Ce qu'on est capables de dire, c'est que le dernier conflit dans l'industrie de la construction remonte en 1986, quand le ministre du Travail de l'époque, c'était mon collègue de Brome-Missisquoi.

Donc, évidemment, Mme la Présidente, qu'est-ce que ça laisse entendre et qu'est-ce que l'on doit comprendre, c'est tout simplement qu'en temps normal les négociations se poursuivent dans chacun des secteurs quand même, indépendamment de la date, indépendamment qu'on soit arrivés à l'échéance des conventions collectives.

• (15 h 40) •

Moi, quand notre premier ministre, M. Charest, m'a nommée ministre du Travail… Je suis arrivée au début du mois d'août, à la fin du mois d'août il y a eu des perturbations sur les chantiers pendant à peu près quatre à cinq jours. Des plaintes ont été déposées, la Commission de la construction du Québec a fait son travail, ils ont documenté les plaintes. Il y a eu des amendes qui ont été imposées à ceux qui avaient perturbé les chantiers parce qu'en tout temps, grève ou pas grève, on n'a pas le droit de perturber les chantiers dans l'industrie de la construction, Mme la Présidente.

Mais je dois dire que, lorsque je suis arrivée, il y a eu des ententes finalement, parce qu'on va régler secteur par secteur et, après ça, on va régler ce qu'on appelle le normatif, exemple, le fonds de pension, O.K., qui est normé pour tout le monde. Ça fait que tu vas régler ce qui est au résidentiel, tu vas régler ce qui est aux grands chantiers au génie civil, puis après ça l'industriel, commercial, ils ont des conditions qui sont différentes, ils ne travaillent pas nécessairement dans les mêmes conditions non plus. Donc, on comprend qu'il y a des négos différentes et qu'après ça on s'entend sur ce qui vient chapeauter, qui touche les conventions collectives de tout le monde.

Historiquement, Mme la Présidente, est-ce que vous savez que, lorsque... peu importe au moment où on a une entente sur la table, les syndicats doivent la présenter à leurs membres? En présentant l'entente à leurs membres, ça prend à peu près un mois, faire tout le tour. O.K. Ça peut être trois semaines, ça peut être cinq semaines, on va... Correct, je vais dire un mois. Ça prend à peu près un mois, faire tout le tour pour faire entériner les ententes qui ont été proposées lors des négociations. Un coup que les ententes sont entérinées par tous les membres, elles sont signées et c'est là qu'entre en vigueur l'augmentation de salaire.

Donc, historiquement, les augmentations de salaire, les conventions collectives ont toutes été réglées en août ou en septembre, donc vraiment plus tard dans la saison. Pourquoi? Parce que, l'été, les travailleurs de la construction travaillent. Ne pensez pas qu'ils font 20 heures, Mme la Présidente; au contraire, c'est du sept jours sur sept, c'est du travail la fin de semaine, c'est du travail le soir. Il faut livrer les maisons de ceux qui les ont achetées. Les écoles, ça se rénove l'été, pas l'hiver, quand il n'y a pas de personnel dedans. Donc, évidemment, vous comprendrez que l'été est un temps très précieux pour nos travailleurs de la construction.

Et évidemment, quand la construction marche au Québec, c'est là qu'on va retrouver le plus gros nombre d'heures travaillées. Et plus vite on va ratifier les conventions collectives et qu'on va les accepter, plus vite l'augmentation de salaire va rentrer en application.

La question qu'on peut se poser, Mme la Présidente, c'est : Pourquoi avoir eu une grève à ce moment-ci, au mois de juin, alors qu'historiquement, depuis 1986, les conventions ont toutes été signées avec des ententes? Je comprends qu'on est fin juin, début juillet, qu'on a une loi spéciale. Je comprends très bien que, pour nous, au Parti libéral, l'économie, c'est important, que notre économie, elle est rattachée à l'industrie de la construction.

Moi, je peux vous dire, Mme la Présidente, que j'ai des travaux dans mon comté qui sont arrêtés. Allez aux Galeries d'Anjou, là, vous allez rester surprise de voir ce qui ne se fait pas présentement. Puis je vous parle des Galeries d'Anjou, je pourrais vous parler des écoles, je pourrais vous parler des grands chantiers qui ne fonctionnent pas, je peux vous parler des hôpitaux.

Moi, ce qui m'importe le plus, Mme la Présidente, c'est que notre économie puisse reprendre, parce que je suis consciente que, présentement, même des fournisseurs ont arrêté leur production et que ce n'est pas que les travailleurs de la construction qui sont touchés par ce conflit-là, qu'il y a beaucoup de victimes collatérales, mais qu'il y a aussi des personnes dans l'industrie qui veulent travailler, ils ont des familles à faire vivre.

Et tout le monde, au Québec, mérite de gagner un salaire décent, Mme la Présidente. Mais vous comprendrez qu'être ici un dimanche pour voter une loi spéciale l'opposition officielle entend bien faire son travail pour faire en sorte que les travailleurs de l'industrie aient quand même des conditions qui soient raisonnables et que notre économie puisse repartir. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, cela met fin au débat restreint. Je mets donc aux voix la motion de M. le leader du gouvernement fixant le cadre temporel de la séance extraordinaire conformément aux dispositions de l'article 26.1 du règlement de l'Assemblée nationale et qui se lit comme suit :

« Qu'en vue de procéder à la présentation et à toutes les autres étapes de l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, l'Assemblée se donne le cadre temporel suivant :

« Que l'Assemblée puisse siéger tous les jours à compter de 9 h 45 jusqu'à ce qu'elle ait terminé l'étude de l'affaire pour laquelle elle a été convoquée ou qu'elle décide d'ajourner ses travaux. »

Est-ce que, M. le leader adjoint...

M. Drainville : ...vote par appel nominal.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, que l'on appelle...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : On suspend nos travaux.

(Suspension de la séance à 15 h 45)

(Reprise à 15 h 59)

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, je fais lecture de la motion fixant le cadre temporel conformément aux dispositions de l'article 26.1 du règlement de l'Assemblée nationale :

« Qu'en vue de procéder à la présentation et à toutes les autres étapes de l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, l'Assemblée se donne le cadre temporel suivant :

«Que l'Assemblée puisse siéger tous les jours à compter de 9 h 45 jusqu'à ce qu'elle ait terminé l'étude de l'affaire pour laquelle elle a été convoquée ou qu'elle décide d'ajourner ses travaux. »

  Mise aux voix de la motion proposant de définir
le cadre temporel des séances extraordinaires

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

• (16 heures) •

Le Secrétaire adjoint : Mme Marois (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bédard (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Maltais (Taschereau), M. Duchesne (Borduas), M. Marceau (Rousseau), Mme Zakaïb (Richelieu), M. Hébert (Saint-François), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Trottier (Roberval), Mme Richard (Duplessis), M. Ferland (Ungava), M. Drainville (Marie-Victorin), Mme De Courcy (Crémazie), M. Leclair (Beauharnois), Mme Champagne (Champlain), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Kotto (Bourget), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Lisée (Rosemont), M. Blanchet (Johnson), Mme Hivon (Joliette), M. Breton (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Beaudoin (Mirabel), M. McKay (Repentigny), M. Bureau-Blouin (Laval-des-Rapides), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Pagé (Labelle), Mme Larouche (Abitibi-Est), Mme Bouillé (Iberville), M. Pelletier (Rimouski), Mme Gadoury-Hamelin (Masson), M. Villeneuve (Berthier), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe), M. Chapadeau (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Cardin (Sherbrooke), Mme Proulx (Sainte-Rose), M. Therrien (Sanguinet), M. Roy (Bonaventure), M. Claveau (Dubuc), M. Goyer (Deux-Montagnes), M. Richer (Argenteuil), M. Trudel (Saint-Maurice).

M. Fournier (Saint-Laurent), M. Moreau (Châteauguay), M. Bachand (Outremont), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Arcand (Mont-Royal), M. Dubourg (Viau), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme James (Nelligan), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme St-Amand (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Ouimet (Fabre), Mme Ménard (Laporte), Mme St-Pierre (Acadie), M. Ouellette (Chomedey), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Gaudreault (Hull), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Blais (Saint-Henri—Sainte-Anne), Mme Vallée (Gatineau), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Boulet (Laviolette), M. Carrière (Chapleau), M. Billette (Huntingdon), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Drolet (Jean-Lesage), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vien (Bellechasse), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Vallières (Richmond), M. Iracà (Papineau), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Bolduc (Mégantic), M. Rousselle (Vimont).

M. Legault (L'Assomption), M. Deltell (Chauveau), M. Bonnardel (Granby), Mme Roy (Montarville), M. Dubé (Lévis), Mme St-Laurent (Montmorency), M. Le Bouyonnec (La Prairie), M. Duchesneau (Saint-Jérôme), Mme Daneault (Groulx), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Trudel (Charlesbourg), M. Marcotte (Portneuf).

M. Ratthé (Blainville).

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Que les députés contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier).

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :              103

                          Contre :   2

                          Abstentions :       0

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, la motion est adoptée.

Mise aux voix de la motion proposant d'établir la procédure
législative d'exception en vue de procéder à la présentation
et aux autres étapes de l'étude du projet de loi n° 54

Je mets maintenant aux voix la motion de procédure d'exception présentée par M. le leader du gouvernement, qui se lit comme suit :

« Qu'en vue de procéder à la présentation et à toutes les autres étapes de l'étude du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, l'Assemblée établisse la procédure législative d'exception telle que prévue aux articles 182 à 184.2 et 257.1 à 257.10 du règlement;

« Qu'à tout moment de la séance le président puisse suspendre les travaux à la demande d'un ministre ou d'un leader adjoint du gouvernement. »

Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Bédard : Nous proposerions à nos collègues le même vote.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a consentement? Consentement? Consentement pour le même vote?

Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :              103

                          Contre :               2

                          Abstentions :       0

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Alors, la motion est adoptée.

Conformément au deuxième alinéa de l'article 27 du règlement, cela met fin à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

  Projet de loi n° 54

  Présentation

Alors, nous en sommes maintenant aux affaires du jour. Conformément à la motion que nous venons d'adopter, je cède la parole à Mme la ministre du Travail pour la présentation de son projet de loi. Mme la ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, Mme la Présidente. Alors, ce projet de loi prévoit la reprise et l'exécution normale des travaux interrompus en raison de la grève dans l'industrie de la construction.

Il prolonge jusqu'au 30 avril 2017 les conventions collectives 2010‑2013 régissant le secteur industriel et le secteur institutionnel et commercial de l'industrie de la construction, notamment en fixant les majorations des taux de salaire.

Il impose également des obligations particulières tant aux salariés et associations représentatives qu'aux employeurs et associations d'employeurs quant à la reprise et au maintien des travaux.

Enfin, le projet de loi détermine, en cas d'inexécution des obligations qu'il prévoit, des sanctions civiles et pénales.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Adopté.

M. Khadir : Sur division.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Sur division?

M. Khadir : Oui.

La Vice-Présidente (Mme Poirier) : Sur division.

Je suspends un moment.

(Suspension de la séance à 16 h 5)

(Reprise à 16 h 6) 

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Alors, nous allons maintenant procéder... Excusez, nous allons maintenant procéder…

Des voix : ...

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Nous allons maintenant procéder au débat sur l'adoption du principe du projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Je vous rappelle que, conformément au premier paragraphe de l'article 257.1, la durée de ce débat est limitée à cinq heures. La répartition du temps de parole se fera comme suit : 2 h 7 min...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! 2 h 7 min 19 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement; 1 h 57 min 53 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; 40 min 48 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 10 minutes sont allouées aux députés indépendants. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué aux groupes parlementaires en proportion de leur représentation à l'Assemblée. Enfin, mis à part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Nous n'avons pas l'habitude d'être à l'Assemblée nationale en plein été, le 30 juin, surtout un dimanche. Les circonstances nous y ont toutefois contraints. La loi spéciale n'était pas le choix du gouvernement, nous avons toujours privilégié une entente négociée. La première ministre et moi-même l'avons dit à plusieurs reprises, notre premier choix a toujours été la négociation. Nous avions la conviction qu'il s'agissait de l'option gagnante autant pour les travailleurs que pour les employeurs dans l'industrie de la construction et nous n'avons pas changé d'avis.

Toutefois, après neuf jours de grève, l'impasse persiste dans un secteur, le secteur institutionnel, commercial et industriel. Le médiateur spécial que nous avons nommé le 24 juin, M. Normand Gauthier, en est venu à la conclusion que les négociations sont dans un cul-de-sac, les parties ne peuvent plus avancer. Évidemment, le médiateur n'est pas un arbitre. Son travail n'est pas d'imposer, mais de proposer, de suggérer, de dénouer des impasses. Malgré cet état de situation dans le secteur industriel, commercial et institutionnel, il faut reconnaître que les efforts de négociation ont porté fruit dans les deux autres secteurs, génie civil et voirie ainsi que résidentiel. Environ 100 000 travailleurs ont ainsi mis fin à leur débrayage la semaine dernière. Je félicite les parties qui sont parvenues à une entente négociée. Je veux aussi saluer la contribution des conciliateurs du ministère du Travail, qui ont grandement aidé à la conclusion de ces deux premiers accords et je veux les nommer parce qu'ils méritent nos remerciements : d'abord, Mme Nadine Côté, qui s'occupait du secteur résidentiel, ainsi que M. Denis Giasson, qui s'occupait du secteur génie civil et voirie, tous les deux chapeautés par un coordonnateur, M. Julien Perron. À ces gens nous disons merci.

Le projet de loi que nous proposons aujourd'hui repose sur quelques principes très simples. D'ailleurs, je l'ai dit tout de suite, j'ai bien entendu ce que disaient les oppositions, ce qu'ils souhaitaient et ce que disaient chacune des deux parties de ce que pourrait être une loi spéciale. Ces principes sont assez simples. Le premier est évoqué principalement par l'opposition officielle : pas de recul sur le placement, sur le système de référence dans l'industrie de la construction. C'est assez étonnant comme principe évoqué parce que jamais il n'en a été question. Ça ne fait pas partie de la convention collective, ça ne faisait pas partie des discussions, des négociations. Maintenant, c'est clair, donc, ce grand principe, qui était la principale priorité de l'opposition officielle — c'est eux qui nous ramenaient ça constamment dans les dernières semaines — c'est maintenant... c'est clair, c'est respecté, il n'y a aucune allusion à quelque endroit que ce soit dans ce projet de loi au système de référence dans l'industrie de la construction. Donc, la grande priorité de l'opposition officielle, nous y répondons.

• (16 h 10) •

Les principes, maintenant, de base, les balises que nous nous sommes donnés, les voici. D'abord, un retour rapide. C'est pour ça que nous sommes ici aujourd'hui, un dimanche. Nous avons eu cinq jours de grève dans le secteur génie civil et voirie, six jours de grève dans le secteur résidentiel. Maintenant, nous en sommes à neuf jours de grève dans le secteur institutionnel, commercial et industriel. Neuf jours de grève, il est temps que ça finisse. Oui, évidemment, il y a des impacts pour la société. Il y a des impacts, bien sûr, pour l'économie québécoise, que nous pourrons chiffrer à la suite. On n'est pas d'accord ici sur les chiffres qui sont lancés, mais il est clair qu'il y a des impacts, et la société, comme nous, en a appelé à la négociation pour régler cette impasse, pour minimiser les impacts de la grève dans l'industrie de la construction, particulièrement dans ce dernier secteur. Donc, retour rapide, c'était un principe très important pour nous.

Ce projet de loi mentionne exactement la date à laquelle il y aurait retour sur les chantiers dans la construction dans ce secteur-là, c'est mardi matin, 6 h 30. Le fait d'être ici aujourd'hui, en ce dimanche, nous permet d'avoir une journée de battement potentielle entre l'adoption du projet de loi, si les parlementaires conviennent de l'adoption de ce projet de loi, et le retour au travail. Il y a un espace-temps, là. C'est pour ça qu'on tenait à venir ici, aujourd'hui, dimanche. Bien sûr, nous respectons la fête, le jour férié qu'il y a demain, mais il y avait aussi cette importance que j'ai entendue. Comprenez-moi bien, là, les entrepreneurs, les patrons, ils ont actuellement besoin de revenir sur les chantiers. Ils voient les grues vides, immobiles sur les lieux des travaux, ça les inquiète. L'autre chose, il y a des travailleurs qui profitent de l'été, des familles qui, enfin, voient leur gagne-pain être là, là. C'est l'été, l'industrie de la construction, normalement, bat son plein. Alors, ce principe du retour rapide, il était important, il est inscrit dans la loi.

Deuxième principe, la stabilité. La stabilité est importante. Dans notre industrie de la construction, suite aux discussions qu'il y a eu dans le passé, aux négociations, les conventions collectives sont passées d'une durée de trois ans à une durée de quatre ans. Pourquoi? C'est extrêmement complexe, négocier les conventions collectives de l'industrie de la construction, extrêmement complexe. Il y a énormément de clauses, il y a plein de métiers, il y a des secteurs différents, il y a des taux salariaux, il y a des primes, il y a des frais, il y a plein de choses qui sont introduites. Ces négociations-là sont, à chaque fois, ardues. Le fait de nous donner quatre ans permet maintenant  — parce que c'est ce qui existe dans tous les secteurs  — permet à l'industrie d'avoir une certaine stabilité et d'avoir des prévisions intéressantes. Dans les deux autres conventions collectives — génie civil et voirie, et résidentiel — on a réglé pour quatre ans, les conventions sont signées pour quatre ans. Si on adopte ce projet de loi là avec quatre ans, on s'assure donc du renouvellement de la prochaine convention collective… Dans ce secteur où nous imposons une convention, on s'assure de son renouvellement en même temps que les deux autres conventions collectives.

Alors, c'est important, ce délai de quatre ans, là. Il n'est pas sorti — j'ai une expression — de la cuisse de Jupiter…

Une voix:

Mme Maltais : Mais il n'est pas sorti de nulle part, il n'est pas sorti de notre chapeau et il est tout à fait conforme à la proposition de la loi n °  30 qui avait été déposée à l'époque par le Parti libéral. Ce quatre ans, il faisait partie de la loi n °  30. Donc, c'était une vision qu'avait à l'époque l'opposition officielle aussi, ce délai de quatre ans. Il faut savoir aussi que, si le délai est plus court et que la négociation arrive encore dans une impasse, nous nous retrouverons à nouveau en loi spéciale, en renouvellement, là. Alors, ce délai de quatre ans peut nous donner un espace-temps qui correspond exactement à la volonté qu'a déjà exprimée cette Assemblée nationale de laisser à cette industrie un délai de quatre ans pour travailler.

L'autre point, pas de déséquilibre, s'il vous plaît, pas de déséquilibre entre les secteurs et entre employeurs, employés. Je vais inviter les parlementaires à lire attentivement ce projet de loi là, qui est très court, et à remarquer à quel point, pour une clause qui interpelle les employés, il y a une clause qui interpelle les employeurs. J'ai vu — et toute l'équipe du ministère, sur les indications de la première ministre — j'ai vu à ce que, dans tout le projet de loi, chaque élément ait une correspondance. Il y a un équilibre dans ce projet de loi là. On parle des employeurs, on parle des employés. On parle des associations d'employeurs, on parle des associations d'employés. Cette notion d'équilibre, elle est majeure. Vous la retrouverez partout dans le projet de loi.

Deuxième élément qui nous parle de cet équilibre, c'est l'équilibre entre les secteurs. Et là j'en viens aux clauses salariales. Mais il faut comprendre le principe. On n'écrit pas une loi comme ça, avec des chiffres dans les airs comme ça, on se base sur des principes pour arriver à un projet de loi comme ça. Et, quand on décide de faire une loi spéciale, ces principes doivent être d'autant plus fondés, solides, importants, ils doivent être enracinés dans l'histoire de l'industrie. Le principe qu'il y a actuellement quant à la hausse salariale proposée, sur les taux horaires de salaire et sur les frais de déplacement  —  seulement là-dessus, seulement là-dessus, taux horaires de salaire et frais de déplacement  —  est ancré dans l'histoire de l'industrie de la construction et de l'équilibre entre les secteurs.

Résidentiel, génie civil et voirie, institutionnel, commercial et industriel, quatre secteurs, trois tables de négociation. Résidentiel a réglé. Je ne parlerai pas des taux de salaire du résidentiel parce qu'ils ne sont pas connus. C'est à l'association à aller sur le territoire. Je peux vous dire, toutefois, qu'elles correspondent à ce qu'on a actuellement sur la table, mutatis mutandis. Dans le niveau génie civil, voirie, historiquement il y a un effet miroir entre génie civil et voirie et institutionnel, commercial et industriel, le secteur ICI. Je vais l'appeler ICI, ça va être plus simple. Pourquoi il y a cet effet? Parce qu'il y a des travailleurs qui circulent d'un secteur à l'autre dans ce secteur. Imaginez, au même endroit, dans le même chantier, des gens pratiquant le même métier ou juste à côté, sur un autre chantier, pratiquant le même métier et payés à des conditions de travail différentes, payés à des conditions salariales différentes. Ça crée un déséquilibre dans nos relations de travail. Or, l'équilibre dans les relations de travail interemployés, interemployeurs et entre les employeurs et les employés est important. Ça a toujours guidé nos relations de travail au Québec. Il faut se fonder sur des principes qui nous ont guidés historiquement, et cette notion d'équilibre, d'effet miroir génie civil, voirie et secteur ICI, il a toujours été inscrit dans les conventions collectives.

Il y a eu un briefing technique tantôt pour les oppositions, et j'ai laissé les fonctionnaires du ministère expliquer ça, et ils ont eu tous les chiffres qui montrent à quel point il y a un équilibre entre ces secteurs d'habitude. Alors, voilà un des points où nous nous sommes fondés sur l'histoire pour le principe du projet de loi.

L'autre, un retour harmonieux au travail. Il est important qu'on assure la paix sociale. Il est important qu'on assure la paix sur les chantiers. J'ai parlé de retour rapide. Mais il ne faut pas seulement un retour rapide, il faut un retour harmonieux. Il faut que les gens qui se retrouvent sur les chantiers, là, ils soient contents de revenir. Ils ont hâte de revenir, les travailleurs. Moi, j'ai parlé, comme vous, probablement… sûrement, tout le monde, à beaucoup de travailleurs qui ont hâte de retourner au travail. Ils sont fiers de leur métier, et c'est le moment où, enfin, ils peuvent vivre de leur gagne-pain. C'est l'été. L'hiver, il y a plein de travaux qui ne peuvent pas se faire. Alors, ils ont hâte, ces gens-là, ces fiers travailleurs là, ces travailleuses-là — parce qu'il y en a quelques-unes, 1,4  %, 1,6 % — ces travailleurs et travailleuses, de rentrer sur les chantiers. Mais ils ne veulent pas rentrer à genoux, ils ne veulent pas rentrer à des conditions qui seraient désavantageuses. Savez-vous, cet automne, il y a eu une évaluation d'à combien serait le pourcentage moyen de salaire au Canada. L'augmentation pour 2013, 2,9 %, 2,9 %. Ici, il y a une convention collective qui a été signée en génie civil et voirie qui donne 2 %, 2 %. C'est ce qu'on a inscrit dans le projet de loi. Je pense que de dire… Actuellement, là, il faut regarder ça, là, puis il ne faut pas jeter de déséquilibre dans les relations pour permettre un retour harmonieux sur les chantiers.

• (16 h 20) •

Si vous saviez comment c'est important pour nos entrepreneurs au Québec, cette idée de paix sur les chantiers, d'harmonie. Si vous saviez comme on en entend régulièrement parler. Le secteur industriel, institutionnel et commercial est un des fleurons de l'économie québécoise. Ils sont bons, nos travailleurs. Ils sont bons, nos entrepreneurs. Sur le chantier, là, ils sont efficaces. Alors, cette idée de leur redonner la fierté de rentrer au travail, c'est une idée économique, ça s'appelle la productivité. On veut assurer que nos chantiers, que notre industrie de la construction conservent une productivité qui soit intéressante, qui soit la productivité qu'ils ont actuellement, remarquable. Alors, cette qualité qu'a notre industrie, on veut la conserver.

Et, enfin, un des grands principes sur lesquels nous avons fondé ce projet de loi, c'est que nous ne sommes pas des négociateurs de convention collective, cette Assemblée nationale n'est pas là pour régler les différends entre patrons et syndicats. Nous avons dû déposer une loi spéciale. Alors, comment se sortir de cette idée qu'on avait anciennement de décréter les conventions collectives? Comment s'en sortir tout en ramenant les gens sur les chantiers? Bien, c'était en nous fondant sur le fait qu'entre 2009 et 2012 il y a eu une convention collective de signée qui, à l'époque, a été saluée et par les patrons et par les syndicats comme une belle avancée.

Bien sûr, aujourd'hui, ces patrons, ces syndicats, ils voudraient... ils ont remis le métier... ils ont remis le pain sur la planche, ils ont remis la main à la pâte et ils ont essayé d'en faire quelque chose de mieux. Ils n'ont pas réussi, ils n'ont pas réussi à s'accorder. Mais, maintenant, nous, est-ce qu'on va décider de piger chacun de notre bord? Non, ce n'est pas l'esprit qu'on avait. Alors, ce qu'on a fait, on a pris l'ancienne convention collective et on la reconduit, tout simplement. Mais, ici, commencer à jouer aux négociateurs serait un danger. Il ne faut pas se substituer aux négociateurs. C'était l'esprit. Vous avez vraiment, là… On est à l'adoption du principe, bien je viens d'énumérer des principes. Vraiment, là, c'est ce qu'on est supposés faire ici comme parlementaires, bien comprendre les principes à partir desquels, maintenant, nous allons regarder article après article comment on a réussi à appliquer ces principes dans une loi. La loi est extrêmement simple, elle n'a pas beaucoup d'articles, vous verrez, mais chacun des mots qu'on a écrits est ancré dans les principes que je viens de vous énoncer.

Alors, chers collègues, je nous souhaite des travaux harmonieux, tout aussi harmonieux que, je l'espère, sera la rentrée des travailleurs de l'industrie de la construction dans le secteur ici mardi matin si nous parvenons à nous entendre. Je le souhaite vivement, c'est important. C'est un geste majeur qu'une loi spéciale. Ce n'est pas de gaieté de coeur qu'un ministre dépose une loi spéciale. Les relations de travail au Québec sont un domaine où on est très performants. Il n'y a pas beaucoup de grève au Québec, hein, c'est... Alors, protégeons ces relations de travail.

Je vous ai énoncé les principes : stabilité, pas de déséquilibre, respect des parties. Je vous invite à réfléchir à ces années magnifiques de paix sur les chantiers, de paix sociale, à ces grands principes qui nous guident depuis des années. Je vous invite à y réfléchir et à discuter de cette manière. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la ministre du Travail. Je cède maintenant la parole au député d'Outremont. M. le député.

M. Raymond Bachand

M. Bachand : Merci, M. le Président. Fait plaisir d'intervenir pour notre formation en début de cette adoption de principe de ce projet de loi n °  54. Et regardons le titre, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Il devrait se lire Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction et imposant des conditions de travail pour les quatre prochaines années parce que c'est ce que ce projet de loi fait.

Il y a dans ce projet, dans la situation qui est devant nous, M. le Président, deux grands principes, deux principes fondamentaux : l'importance d'ouvrir les chantiers par un retour au travail, et, disons-le, un retour au travail forcé, imposé par l'Assemblée nationale du Québec — et je parlerai pourquoi c'est important de faire ça à ce moment-ci et que ça aurait dû être fait avant; deuxièmement, le principe d'une entente négociée, de la négociation. Le projet de loi répond au premier principe. Le projet de loi viole le deuxième principe, M. le Président, et va contre tous les principes de négociation en relations de travail.

Premier principe, l'ouverture des chantiers par le retour au travail imposé par l'Assemblée nationale, pourquoi c'est important? Pourquoi, effectivement, mettre fin au droit de grève  — droit de lock-out aussi, d'ailleurs  — à ce moment-ci? Et quel est l'équilibre qu'on doit maintenir dans une société? Parce que je lis des gens qui nous disent : Oui, mais le droit de grève est important. Oui, c'est important, le droit de grève dans une société, et je le sais par mon passé aussi. Et c'est important aussi, le syndicalisme. Le syndicalisme a mené à l'avancement des travailleurs. Mais le droit d'un citoyen, le droit d'un groupe est limité par le droit des autres aussi. Il y a des limitations au droit de grève dans le secteur de la santé, il y en a dans le secteur du transport en commun.

Je comprends qu'ici nos collègues de Québec solidaire vont nous dire qu'on n'est pas dans le service public, mais, je regrette, on parle de 14 % de l'économie du Québec. Le secteur de la construction représente 14 % du produit intérieur brut du Québec. On parle de 30 millions de dollars de salaires par jour. Sur huit jours, on parle de plus de 250 millions de masse salariale dans l'industrie de la construction. On parle d'un impact secondaire dans tous les secteurs, il y en a… Il y a un de mes collègues  —  je pense que c'est mon collègue à côté de moi, ici  —  qui a parlé de RONA, des quincailleries, etc., mais ça a un impact dans tous les secteurs. Cette masse salariale là qui n'a pas été touchée par les travailleurs et leurs familles ne sera pas dépensée, il y a un impact global important dans toute l'économie. D'ailleurs, c'est pour ça, quand on dit que, quand la construction va, tout va dans une économie. Mais c'est particulièrement vrai…Ça fait maintenant deux semaines que ce secteur est paralysé, il faut que ça arrête.

Je devrais dire, M. le Président, qu'on n'en serait pas là si le gouvernement avait fait son travail, si la première ministre avait suivi de près, si la première ministre, qui est le chef du gouvernement, hein, voyant ce qui se passait, avait demandé à sa ministre du Travail... La ministre du Travail n'a pas agi au bon moment — et ça, c'est la marque de commerce du Parti québécois — elle a attendu. Mon collègue le député de Chomedey a demandé sans arrêt à la ministre du Travail : Qu'est-ce que vous faites? Il est temps que vous vous en mêliez, il est temps que la conciliation... imposez un médiateur. La ministre nous disait que tout va bien. La session achevait, le droit de grève commençait le lendemain, et qu'est-ce qui est arrivé? Bien, évidemment, il est arrivé ce qui est arrivé. La première ministre a choisi de laisser la grève aller, a choisi de laisser les parlementaires... Elle a fait le choix de partir en mission économique au Mexique. C'est un choix qu'elle a fait. C'est important, une mission économique, puis c'est important aussi pour les entrepreneurs, mais le timing est important. La première ministre a fait le choix de privilégier la mission plutôt que sa job au Québec, ici, de rappeler les parlementaires au travail et de mettre fin à ce conflit plus tôt, étant donné les dommages importants qu'il cause à notre économie.

Donc, on a un gouvernement qui n'a pas agi. Oui, on a une première ministre qui nous fait aussi les grands speechs moralisateurs en disant : Il faut laisser les parties négocier, hein? On a entendu ça encore aujourd'hui, ce matin, M. le Président. Ce n'est pas une entreprise comme les autres. Ce n'est pas un conflit de travail entre un employeur et un employé ordinaire. Il n'y a pas d'emplois ordinaires, mais on parle de 14 % de notre économie. Imposer le retour au travail, c'est souhaité par tous. D'ailleurs, ça va être souhaité, je pense, par presque toutes les formations politiques de cette Assemblée national., C'est souhaité, je vous dirais, par les travailleurs aussi, par leurs familles, par leurs parents.

Moi, oui, après le 15, je suis allé dans mon comté une semaine, puis je suis en vacances depuis ce temps-là, puis je me promène, puis je me promène. Là, j'ai remis ma cravate aujourd'hui, mais je parle aux travailleurs de la construction, je parle aux gens quand je fais le plein d'essence, quand je fais mon épicerie, quand je vais chez Canadian Tire, quand je vais — oui, mes enfants vont rire parce que c'est un des magasins que j'aime — chez RONA, quand je vais magasiner puis je me promène. Et les gens qui disent : Bien, qu'est-ce que vous attendez pour faire...  Bien, j'ai dit : On n'est plus au gouvernement.

Puis, deuxièmement, je dis : Qu'est-ce que vous faites dans la vie? Puis ce sont des travailleurs de la construction, ce sont des familles de travailleurs de la construction qui disent : Il est temps qu'on retourne au travail. On a besoin de retourner au travail pour nous, pour l'économie, pour nos entreprises, pour notre milieu. Les gens le souhaitent, les familles le souhaitent, les parents le souhaitent. On a combien d'écoles, là, qui vont être paralysées dans leur retour en classe? Parce que les moisissures, c'est important. Parce que les rénovations, c'est important. Parce qu'il y a de la construction de nouvelles écoles aussi qui sont annoncées. Tous les ans, il y en a qui sont annoncés, mais ça se fait pendant cette période-là. C'est très important dans notre économie, M. le Président. C'est donc le premier principe dans ce projet de loi là, l'importance de retourner au travail, nous sommes favorables à ce principe-là.

• (16 h 30) •

Je voudrais ajouter aussi sur l'importance dans l'économie, quand on parle de 14 %, on parle de 240 000 emplois générés.

Puis là je vais faire un petit côté partisan dans mon discours parce que je suis aussi critique des finances, M. le Président, puis ce qu'il se passe actuellement avec ce gouvernement, il y a choses incroyables. À la période de questions ce matin, je pose une question sur les finances publiques, il me répond sur d'autres sujets. La recette qu'on voit depuis quelques mois, malheureusement c'est de laisser les choses aller, de laisser les choses se détériorer, puis là d'intervenir puis d'essayer de réparer les pots cassés. La job d'un ministre des Finances, d'une ministre du Travail, la job d'un gouvernement, c'est d'anticiper les gestes, d'intervenir, de rapprocher les parties, d'essayer de stimuler l'économie. Ils ont fait la même chose dans la construction qu'ils ont faite globalement dans l'économie.

Qu'est-ce qui arrive? C'est quoi, l'impact sur les finances publiques? Parce que, les finances publiques, je sais que les Québécois s'intéressent à ça aussi. Puis l'impact sur les finances publiques, c'est que, dans le rapport que le ministère des Finances a déposé la semaine dernière, la semaine dernière, jeudi dernier, le rapport pour le 31 mars, ça démontre que le gouvernement va rater la cible de déficit de 245 millions, pas par rapport au budget, par rapport à la mise à jour que le ministre des Finances a faite au mois de mars. Puis la provision de 50 millions qui restait, il y en avait une de 250 millions, il y avait une réserve, il l'avait flambée, il en restait 50 millions, elle est flambée. Donc, au fond, il rate sa cible par 300 millions, M. le Président. Mais pourtant, il y a 10 jours, ça, c'est jeudi dernier... il y a deux semaines, en commission parlementaire, hein,  on s'est servi du règlement, le ministre des Finances a dû venir en commission parlementaire témoigner, il a passé deux heures et il a répété solennellement à plusieurs reprises que les revenus étaient au rendez-vous et que son déficit de 1,5 milliard serait respecté. Bien, aujourd'hui, les chiffres qu'on a ne sont pas ça.

Puis la conséquence de la grève dans la construction… parce qu'on sait que les revenus de l'État sont sous attaque depuis quelque temps, mais la construction va amplifier ça parce que ça réduit les investissements. Et, cette conséquence-là, dans la construction, qu'est-ce qu'ils nous disent, le gouvernement? On leur parle depuis le début : À combien évaluez-vous le coût dans l'économie? À combien évaluez-vous le coût pour les finances publiques? C'est quoi, la réponse? Pas de réponse. On ne veut pas répondre à ça. On va attendre de voir combien de jours ça dure avant de vous donner la réponse à ça. Ici, on a une loi spéciale aujourd'hui, on serait en droit d'avoir une réponse du gouvernement, de la ministre du Travail, du ministre des Finances. Pas de réponse à la question précise aujourd'hui. Qu'est-ce qu'il a fait, le ministre des Finances? Il s'est défilé puis il est parti sur un autre sujet complètement. La première ministre... Ça fait deux fois, au fond, qu'il révise à la baisse, le ministre des Finances, l'objectif de croissance du PIB. Puis là il ne sait pas c'est quoi, l'impact de la grève de la construction sur l'économie du Québec puis il ne sait pas est quoi l'impact sur les finances publiques.

La première ministre a parlé d'un coût de quelques dizaines de millions de dollars… quelques dizaines de millions, comme si, quelques dizaines de millions, ce n'était pas important. C'est important, quelques dizaines de millions, parce que, quelques dizaines de millions, là, quand on regarde les coupures qu'ils ont faites dans les garderies, quand on regarde l'aide sociale, je pense qu'on ne peut pas se priver de quelques dizaines de millions de dollars. Puis le véritable estimé de ces deux semaines de grève est probablement une perte pour le trésor public d'une centaine de millions, M. le Président. C'est irresponsable d'avoir laissé ce secteur-là paralysé de façon si longue. La ministre du Travail, au fond, a mal fait son travail. Malheureusement, j'ai le regret de dire : La nomination d'un médiateur, ça aurait dû être fait une semaine avant l'ajournement des travaux, et on aurait été là pour fondamentalement constater les échecs de la négociation.

M. le Président, voilà toutes les raisons qui font que sur... nous allons voter pour le principe du projet de loi et sur le premier principe qui est dans ce projet de loi là, c'est-à-dire : il faut que les chantiers rouvrent, il faut que le Québec se remette au travail, c'est souhaité par la plupart des députés de cette Chambre, c'est souhaité par la population, c'est souhaité par les gens, moi, que je rencontre un peu partout, c'est souhaité par les travailleurs, c'est souhaité aussi par les entrepreneurs, par l'ensemble du secteur économique du Québec. M. le Président, il y a une deuxième question dans ce projet de loi, c'est : À quelles conditions les gens rentrent au travail? Et là on est en désaccord avec le projet de loi, M. le Président. On est en désaccord parce que le projet de loi impose des conditions à long terme.

Et là je vous parlais de deux principes, le principe, dans les relations de travail, il y a un droit de grève, on force un retour au travail, on impose un retour du travail. Mais, l'autre principe, qui est, au fond, la négociation et l'entente négociée, nous, on veut laisser de l'espace à ça, à ce principe-là. On veut laisser aux syndicats et à la partie patronale de l'espace pour pouvoir négocier une convention collective. Quand la ministre du Travail nous propose dans son projet de loi de fermer cet espace pour les quatre prochaines années… Parce que c'est ça qu'elle propose. Oui, oui, il y a une petite phrase qui dit que n'importe quand les parties peuvent négocier autre chose, là. Mais ça, c'est parce que juridiquement elle est obligée d'avoir cette phrase-là. Ça, c'est une... En général, dans le Code du travail, hein, les gens ont toujours le droit de négocier. Si la loi dit : Voici les conditions pour quatre ans, il faut mettre une phrase en disant : Non, non, vous avez le droit de vous entendre.

Ce qu'on a devant nous, c'est un projet de loi qui impose pendant quatre ans les conditions de travail dans le secteur de la construction, dans le secteur industriel et institutionnel. C'est le choix du gouvernement, ce n'est pas notre choix. On pense que ce n'est pas sage, ça, M. le Président. On pense que ce n'est pas à nous, comme parlementaires, à choisir les conditions de travail. Parce que c'est ça que le projet de loi fait, et c'est très compliqué, le projet de loi fait le choix de maintenir toutes les clauses normatives en disant : On continue pendant quatre ans, toutes les clauses normatives sont maintenues pendant quatre ans. Devaient-elles être changées? Si le Québec est l'endroit le plus productif de la planète, à peu près, comme la ministre du Travail le laisse entendre, les patrons, ils vont tous accepter de refaire, de prolonger ces clauses-là, puis les syndicats vont peut-être dire : Ils en donnent trop, puis ils vont vouloir négocier autre chose. On doit laisser les gens négocier cette partie-là. Si c'était une si bonne convention collective, que la ministre dit, bien, c'est parfait, on la prend, on n'intervient pas dedans — il ne faut pas jouer à l'apprenti sorcier — on la prolonge d'un an — ça pourrait être six mois, ça pourrait être un an — en disant : Donnons-nous le temps, donnons-leur le temps de négocier. Le principe, c'est la négociation dans les relations de travail. Vous n'avez pas réussi dans les délais légaux qui vous étaient prescrits? On va vous... C'est tellement important pour l'économie du Québec, pour les familles du Québec qu'on vous impose de retourner au travail, mais on ne vous l'impose pas pour les quatre ans. Votre droit de grève, votre droit de lock-out continue à exister, on le suspend fondamentalement pendant une période de temps. Le projet de loi bafoue la négociation, M. le Président. La négociation, c'est ce qui doit être privilégié dans une société.

Alors, nous allons nous opposer à cette partie-là, nous allons bien sûr déposer des amendements pour que cette prolongation forcée ne soit pas plus qu'un an, et moi, j'ai confiance qu'en faisant ça on donne la chance aux parties de négocier. Deuxièmement, on ne crée pas un déséquilibre dans le rapport patronal-syndical, parce que le projet de loi, en imposant pendant quatre ans, crée un déséquilibre dans le rapport de force patronal-syndical.

À cela la ministre, tout à l'heure, a répliqué en disant : La stabilité. Moi, je veux une stabilité, dit-elle, pour les quatre prochaines années. Moi, je pense que, quand on rentre contre le principe de la libre négociation des relations de travail, le principe de la responsabilité des parties... La confiance dans la responsabilité des parties est un principe très, très, très important. Et, si on assure une stabilité pour le prochain six mois, pour les prochains 12 mois, on a fait notre travail comme législateurs, puis, oui, si dans un an il y a des problèmes, bien, on le refera encore, notre travail, et on regardera ça. Mais on pourrait faire ce que la ministre du Travail n'a pas fait, on pourrait les convoquer en commission parlementaire. Nous avons demandé au gouvernement : Est-ce qu'on peut les entendre aujourd'hui? Vous nous demandez d'adopter une loi spéciale. Est-ce qu'on peut juste... Ce n'était pas compliqué, vous leur avez parlé. Nous, vous nous avez négligés, les partis d'opposition, on ne savait pas ce qu'il y avait dans la loi, mais les autres parties, vous leur avez dit, hein, puis donc ils le savent. Ou ils auraient pu leur dire : On dépose une loi spéciale, venez donc dans les estrades à l'Assemblée, ici, dans les tribunes, peut-être que les parlementaires aimeraient vous entendre. Non, ils n'ont pas fait ça, ils sont contre.

Un ministre du Travail qui fait son travail, M. le Président, depuis... a toutes sortes d'outils à sa disposition dans la panoplie législative. Il peut, dans ses lois actuelles, imposer la conciliation, il peut nommer des médiateurs. Ils l'ont fait très tardivement, puis il n'a pas eu grand temps pour sa médiation, la pression était énorme sur lui. Il peut convoquer... On peut... D'ailleurs, nous, les partis d'opposition, comme on est majoritaires, on pourrait effectivement convoquer les parties, qu'elles viennent expliquer à la population québécoise en commission parlementaire qu'est-ce qui les sépare. Il y a beaucoup d'outils à la disposition d'un gouvernement pour travailler et en arriver que, d'ici un an — plus vite, je le souhaite, plus vite — d'ici un an, il y ait une convention collective négociée. Mais moi, je fais confiance au sens de responsabilité des parties, M. le Président, et que la stabilité va être assurée.

Deuxièmement, la ministre du Travail parle de la paix sociale. La première ministre, je ne sais pas si elle en a parlé ce matin, mais la ministre du Travail en a reparlé ce matin aussi, et le retour harmonieux. Elle m'inquiète lorsqu'elle dit ça, elle m'inquiète profondément quand elle dit ça. C'est comme si soit qu'elle sait des choses qu'on ne sait pas, hein, ou soit qu'elle ne fait pas confiance au monde. Moi, je crois au sens de responsabilité des travailleurs. Moi, je crois au sens de responsabilité des syndicats. Moi, je crois au sens de responsabilité qu'à partir de mardi prochain, à partir du moment où la convention collective, c'est la même qui continue à s'appliquer pour la prochaine année, avec une augmentation salariale au coût de la vie et qu'il n'y a pas de déséquilibre fondamental entre les secteurs, moi, je ne vois pas… tous les arguments de la ministre tombent à l'eau, parce que sinon c'est comme : elle n'a pas confiance aux travailleurs. Moi, je m'excuse, mais, oui, il y a déjà eu des troubles au Québec dans les choses, il y a déjà eu des dérapages, mais on est dans une ère aujourd'hui, en général, de leaders syndicaux responsables. Et je vois mon collègue de l'autre parti, de l'autre côté de la Chambre, le député de Rouyn, c'est ça?

• (16 h 40) •

M. Chapadeau : Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

M. Bachand : Rouyn-Noranda, qui est ici, qui connaît bien aussi... Et je suis sûr qu'il devait être inquiet devant les propos de sa collègue la ministre du Travail, parce qu'il connaît bien le milieu syndical, il connaît bien le milieu de la FTQ. Puis moi, je pense qu'il n'est pas inquiet que le retour au travail, la semaine prochaine, va se faire de façon harmonieuse et dans la paix sociale. Parce que, sur le fond des choses, ce n'est pas comme si on prenait la convention collective, on la déchirait puis rentrer à moins 20 %. Peut-être que, malgré le sens des responsabilités, il pourrait y avoir un petit peu de trouble. Mais, à partir du moment où tu continues les mêmes conditions de travail avec une indexation, M. le Président, de mettre en doute la paix sociale — parce que c'est le mot qu'elle a utilisé — et le retour harmonieux au travail, moi, si je suis un travailleur, je serais insulté. En tout cas, moi, ça m'insulte comme citoyen québécois, parce que moi, j'en connais du monde dans ce milieu-là puis je pense que ces gens-là ont à coeur leur chantier, ont à coeur leur entreprise, ils ont à coeur leur entrepreneur. Ils sont fiers du travail qu'ils font, ils savent que c'est important puis, quand ils rentrent sur un chantier, ils font bien leur travail, de façon générale.

Alors, je ne suis pas inquiet de ça et ce n'est pas le fait qu'on fasse ça quatre ans plutôt… un an, M. le Président, qui change fondamentalement cet aspect-là des choses. Mais ce que ça change, fondamentalement, c'est le respect ou le non-respect du droit à la négociation et de l'entente négociée. Alors, on est ici dans un domaine de relations de travail, où les gens doivent négocier. Pour l'intérêt public, on leur dit : Il faut que vous rentriez au travail. On impose un retour de travail, mais, pour le même intérêt public et le fondement de nos lois, au fond, qui est basé sur la libre négociation des relations de travail, nous vous disons, M. le Président, que ça ne devrait pas être une convention imposée de force par l'Assemblée nationale pour quatre ans, mais qu'il faut donner une période aux parties pour pouvoir continuer, poursuivre la négociation avec le travail qu'un ministre du Travail devrait faire : des médiations, le rôle de l'Assemblée nationale, des experts, un comité, s'il y a des questions de fond que les gens ne comprennent pas, bien, on va s'arranger que l'information circule, M. le Président, mais qu'un projet de loi qui imposerait ce retour au travail pour une période de six mois ou d'un an nous semblerait beaucoup plus responsable qu'un déséquilibre imposé, tel que le projet de loi… qui est mal libellé. Parce que, si c'était un an, ce serait un bon libellé, M. le Président, ce serait la Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Comme on impose les conditions, comme la ministre veut imposer les conditions de travail pour quatre ans, bien elle devrait le dire dans son titre, dans son libellé du projet de loi.

Alors, voilà, M. le Président, les grands commentaires que nous allons faire sur le principe du projet de loi. Nous sommes d'accord avec un retour imposé, malheureusement. Ça aurait dû être fait plus vite. Par ailleurs, nous pensons qu'il devrait y avoir une libre négociation et que cette période devrait être limitée, et donc on indique déjà nos couleurs sur le deuxième bloc de débats. Quand on rentrera dans l'article par l'article, bien sûr nous déposerons un amendement pour que cette poursuite, prolongation de la convention collective ne soit pas sur une période de quatre ans mais soit sur une période plus courte. Et j'espère que, dans un grand élan d'harmonie, aujourd'hui, nous pourrons avoir l'unanimité de l'Assemblée nationale sur ça et terminer notre travail, dans l'intérêt de tous les Québécois, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député d'Outremont. Alors, M. le député... par alternance, M. le député de Lévis.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir aujourd'hui de prendre la parole sur ce projet de loi qui est très important pour le Québec, et particulièrement en ce beau dimanche après-midi du mois de juin, encore  — o n sera au mois de juillet très bientôt  —  et je suis certain que tous les parlementaires qui sont ici aujourd'hui le sont pour une raison. C'est en raison de l'importance de ce que nous allons vivre dans les prochaines minutes et ce que l'industrie de la construction vit depuis plusieurs semaines.

Il faut se rappeler pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Je pense que tout le monde le sait, mais il faut mettre en contexte qu'est-ce qui arrive à l'industrie de la construction ces temps-ci. Nous sommes devant nos téléviseurs, pour la plupart d'entre nous, quelques fois par jour, à regarder la commission Charbonneau qui a fait son travail suite au travail de l'UPAC, suite au travail des différentes instances judiciaires. Mais un des grands blessés, au cours des derniers mois, de cette commission, c'est l'industrie de la construction. Alors, quand est arrivé... Et malheureusement l'industrie, qu'elle soit tout à fait responsable ou en partie responsable de tous les torts qu'on lui afflige aujourd'hui, et de tous les intervenants qui ont participé à cette descente aux enfers de l'industrie de la construction… mon point aujourd'hui n'est pas de faire ce procès, parce que d'ailleurs il se fait, et malheureusement l'industrie de la construction, elle en paie le prix, M. le Président, tous les jours depuis plusieurs mois.

Mais j'aimerais vous rappeler, M. le Président, que, lorsque nous étions en Chambre, ici, vers la mi-mai et que nous avons commencé à parler de l'échéancier du renouvellement des conventions collectives dans l'industrie de la construction, on était effectivement à la mi-mai, et la grande préoccupation de tout le monde, lorsqu'on a commencé à voir cette fameuse date du 17 juin sur le radar, les gens ont commencé à se dire, et ça, c'est venu particulièrement des deux oppositions... c'était de dire : Écoutez, qu'est-ce qu'on fait si jamais le règlement qu'on souhaite tous avoir ne sera pas au rendez-vous, c'est-à-dire le règlement que tous souhaitaient et que l'on souhaite encore aujourd'hui, qui était vu pour le 17 juin? Pourquoi nous étions si préoccupés, et nous particulièrement, au niveau de la coalition ? T out à l'heure, je vous reviendrais avec quelques dates clés, mais ce qui a été important, c'était... nous disions que l'industrie n'avait pas les moyens, parce que déjà affaiblie, comme je viens de le mentionner, par tout ce qu'on trouvait à tous les jours, et on en trouve encore, et on va en trouver encore…

Alors, pour moi, ça me fait penser malheureusement, excusez mon expression, mais… quelque chose qu'on trouve par terre, qu'on veut rejeter, puis on se dit : Bien, au lieu de le sauver, est-ce qu'on devrait l'écraser? Puis malheureusement, souvent, les gens de l'industrie se disent : Mon Dieu! Au lieu de se faire aider au moment où l'industrie vit un moment très difficile, on n'est pas en train de l'aider. Et nous, on voulait prévoir un plan B qui allait pouvoir donner une solution à cette industrie-là. Rapidement, M. le Président, nous avons pris une position qui était la pire solution pour l'industrie, même de considérer d'avoir une grève. On peut bien en faire un débat, à savoir : Est-ce que c'est une industrie, est-ce que c'est un service essentiel, quel est le rôle du gouvernement? Mais, à se regarder tous ensemble aujourd'hui, plus de 105 députés qui sont venus un beau dimanche, c'est parce que c'est un problème grave pour une industrie qui est déjà malade. Et c'est pour ça, M. le Président, qu'il faut absolument revenir à l'objectif qui nous regroupe aujourd'hui, qui nous rassemble aujourd'hui, à savoir de rouvrir les chantiers qui n'ont pas été ouverts au cours des dernières semaines. C'est ça, l'objectif que nous avons, M. le Président, aujourd'hui. Et, en dehors de toute partisanerie, il faut s'entendre. Et j'espère que tous les partis présents ici, à l'Assemblée, ont le même objectif, c'est que, le plus rapidement possible, dans le respect de tous, nous puissions rouvrir les chantiers du ou des secteurs qui n'ont pas encore convenu d'ententes.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais vous dire que… j'écoutais tout à l'heure la ministre parler de certains principes, et dont le principe qui m'a le plus surpris dans les dernières minutes, c'est en fait le principe de ne pas se substituer aux négociateurs. Alors, je souscris au fait que je trouve un peu surprenant, dans la même présentation, de nous dire que le gouvernement ne veut pas se substituer aux négociateurs et qu'on est à proposer une nouvelle convention, de la reconduire pour une période de quatre ans. Si ce n'est pas se substituer aux négociateurs que de mettre un projet de loi spéciale pour une période de quatre ans, je dois vous dire que j'ai besoin de relire mon dictionnaire quelques fois parce que je suis très, très loin de penser que c'est la bonne façon de procéder. Et j'aimerais rappeler quelques éléments très importants.

• (16 h 50) •

Premièrement, dans certains éléments qui ont été avancés par le gouvernement au cours des derniers jours, une des raisons pour forcer des conditions, et c'est le deuxième point, parce qu'on parle de quatre ans et d'arriver avec des conditions monétaires pour ces quatre années-là… J'aimerais faire la distinction importante, après avoir parlé à plusieurs représentants de l'industrie, donc c'est pratique et non théorique ce que je vous dis là… Il y a des grandes différences entre les trois secteurs, au niveau du génie civil, au niveau du résidentiel et de l'industriel et commercial qui n'est pas réglé.

Lorsqu'on dit — et je ne veux pas mettre les mots dans la bouche des personnes qui l'ont dit, je pense qu'elles vont se reconnaître dans les prochaines minutes — lorsqu'on dit que, parce que le génie civil s'est entendu après quelques jours de négociation, que le résidentiel s'est aussi entendu, alors il est tout à fait normal de niveler au niveau des augmentations de salaire, et je le répète, pour quatre ans parce que ces deux premiers secteurs là se sont entendus au cours des dernières semaines, j'aimerais vous rappeler, et c'est mon point, mon principal propos, qu'il y a des différences notables entre le génie civil, par exemple, et l'industriel et commercial.

Nous avons vu, et nous comprenons tous très bien, que les principaux donneurs d'ordres dans le génie civil, c'est le gouvernement. Alors, le gouvernement qui négocie avec lui-même pour donner des augmentations, bien ça donne ce que ça donne. Et probablement qu'il n'a peut-être pas eu la même rigueur dans la négociation des salaires pour la période de quatre ans que nous pourrions retrouver autrement. C'est malheureux, mais, des fois, il faut avoir le courage de dire les vraies choses, et c'est un élément excessivement important de cette négociation-là.

Deuxièmement, la principale différence, et il y en a qui n'aiment pas ce que je vais dire mais c'est très important, dans le génie civil il y a une autre différence très importante avec l'industriel et le commercial, c'est le nombre de demandes qu'il y avait de ces mêmes entrepreneurs là, ou plutôt de donneurs d'ordres dans le cas de l'Hydro-Québec et des autres entreprises gouvernementales. J'aimerais mettre tout le monde au défi, ici, de donner le nombre de demandes qu'il y avait à l'extérieur du monétaire dans ce premier secteur là. Est-ce que c'est 100, 150, 50, 20 ou une? Bien, vous avez la réponse du dernier élément que je viens de vous donner. Alors qu'au moment où les négociations ont été établies cette seule demande là a été laissée tomber au début, et nous sommes... les gens ne se sont que focussés sur le monétaire. Alors, quand on va vouloir faire un parallèle entre les donneurs d'ordres du génie civil et de l'industriel et du commercial, qu'il y avait plus de 100 demandes du côté normatif, j'aimerais vous dire qu'il y a des différences excessivement importantes, pour ne nommer que celles-là, entre le génie civil et l'industriel.

Du côté du résidentiel, c'est une dynamique tout à fait différente aussi : nous avons beaucoup de donneurs d'ordres mais principalement de petites entreprises. On le sait, comment ça fonctionne dans le résidentiel, ces gens-là ont, entre autres, des caractéristiques importantes où la période de l'été est très importante, et, la fenêtre où ils doivent performer pour les clients, que ce soient des résidences privées, des condos, des blocs appartements, ces gens-là ont une fenêtre très courte et ont beaucoup moins de pouvoir de négociation, parce qu'au contraire des deux autres secteurs qui peuvent bien souvent faire des travaux à l'intérieur, comme par exemple dans l'industriel et le commercial…

Donc, j'aimerais vous dire que c'est beaucoup de niveler par le bas et de simplifier de façon tout à fait théorique de faire la similitude entre les trois secteurs et de dire : Étant donné qu'il y a eu une négociation qui a été à succès négociée dans quelques jours entre les deux premiers secteurs, on devrait souscrire et mettre l'augmentation des taux ou des taux semblables, alors que, dans le troisième cas, comme je viens d'expliquer, les demandes de la partie patronale sont énormément importantes en termes non seulement de quantité, de nombre, mais aussi d'importance pour que cette industrie, ce secteur-là puisse rester compétitif.

J'aimerais aussi vous donner, M. le Président, et je vais le faire avec beaucoup de délicatesse, certaines surprises de la façon dont les négociations… ou, je dirais, les autres membres parlementaires de l'opposition ont été tenus informés dans le cadre des négociations. Nous avons eu, au cours des dernières semaines, et je prendrais à titre d'exemple quelques dates, du vendredi 14 juin ou du lundi 17 juin, M. le Président… où des membres, ici, de l'Assemblée ont posé à la ministre des questions très claires à savoir quelle était l'état des négociations. Et je me souviens souvent avoir entendu dire : Écoutez, il n'y a pas de problème, faites-vous-en pas. Il n'a pas raison de parler de loi spéciale. Les négociations, tout va très bien. On l'entend souvent, mais particulièrement pour l'industrie de la construction. Je peux vous dire que tout le monde est resté très surpris lorsque, le 17 juin, la date fatidique, tout le monde s'est rendu compte que ce n'était pas tout à fait le cas, et ce qu'on s'était fait dire, que les négociations avaient commencé vers la mi-mai, que ça avançait normalement, bien on s'est rendu compte, en parlant, nous, directement avec des intervenants du secteur, que c'était très, très loin de la réalité, et je pèse mes mots pour essayer de respecter le plus possible les mots à choisir dans cette Assemblée.

Deuxièmement, j'en ai eu encore une preuve encore plus claire hier, et je tiens à vous le mentionner, M. le Président, lorsque la ministre a dit hier qu'elle avait présenté la proposition, les grandes lignes de la proposition aux deux parties et que les parties semblaient satisfaites et soulagées. Nous avons fait... parce que nous avons un contact de façon pratique avec ces gens-là, et je peux vous dire que, pour encore surveiller mes mots, ils étaient un peu surpris, pour dire le moindre, d'entendre qu'ils étaient soulagés de la proposition qui allait être faite.

Alors, aujourd'hui, j'aimerais vous dire que, si le gouvernement a la même transparence dans les négociations qu'il a avec l'Assemblée nationale, c'est peut-être pour ça aujourd'hui que nous sommes ici, en ce beau dimanche après- midi, et que j'aimerais demander, M. le Président, à avoir un plus grand respect envers notre Assemblée nationale pour quelque chose d'aussi important qu'une négociation avec 175 000 travailleurs, où nous n'avons pas été informés, et, malheureusement, je ne peux pas dire des mots plus graves que ce que je viens de dire, mais nous n'avons vraiment pas été informés de la réalité. Et je vais le répéter aussi souvent qu'il m'en plaira parce que nous n'avons pas été informés de la réalité.

Alors, je voudrais, pour préciser mon point, parler de l'évolution des négociations. Du côté de notre parti, le lundi 17 juin, nous avons demandé un ultimatum de 48 heures aux parties, sinon il devait y avoir une loi spéciale. Et nous avons donné le temps nécessaire, même avant de parler d'une loi spéciale, d'un 48 heures pour que les parties puissent piger à l'intérieur de ce délai de 48 heures un dernier espoir de négociation, parce que nous, nous comprenions que les négociations avaient commencé depuis longtemps. Rappelez-vous de ce qu'on s'est fait dire.

Le gouvernement exclut le recours — je suis toujours le 17 juin — le gouvernement exclut le recours à une loi spéciale. Mme Maltais déclare — et je vous le souligne, M. le Président — ...Mme la ministre du Travail, je m'excuse...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : ...Voilà. Faites attention, s'il vous plaît. Merci.

M. Dubé : Mon photocopieur, M. le Président, je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Poursuivez, M. le...

• (17 heures) •

M. Dubé : Alors, j'ai un carton jaune, mon collègue, ici, de Fabre m'a dit. Alors, je m'excuse, M. le Président, ce n'était vraiment pas voulu.

Alors, Mme la ministre du Travail déclare, le 17 juin : Il n'y a pas de loi spéciale, il n'y en a pas en préparation. On se souvient de la... Il n'y en a pas dans les cartons, il n'y en a pas dans ma vision, il n'y en a pas dans ma tête, et il faut que ça se règle par la négociation. Et ça a été même repris en différé plusieurs fois avec plusieurs journaux et postes de télévision. En même temps, le Parti libéral disait qu'il juge trop tôt pour parler d'une loi spéciale, mais dénonce le gouvernement qui a laissé traîner le dossier. Ça, c'était dans Le Soleil.

Je saute quelques jours pour aller au mercredi 19 juin. Nous avons suggéré, parce qu'il faut... Et, nous l'avons bien dit, en négociation, il n'y a rien de pire que de ne pas respecter les délais que l'on met sur la table lorsqu'on commence à négocier. Alors, deux jours plus tard, tel que prévu, qui était le 48 heures d'ultimatum que nous avions donné, nous avons suggéré au gouvernement, maintenant, d'appliquer les lois de la condition de la loi spéciale que nous avons reconduite encore aujourd'hui, à savoir une loi spéciale qui mettrait en place une négociation... Merci beaucoup, M. le Président, c'est apprécié parce que c'est difficile, des fois, de garder le focus quand les gens parlent en même temps, merci beaucoup, je l'apprécie. Alors, la loi spéciale que nous avons demandée, elle était très claire : les gens retournaient au travail après l'ultimatum, et la négociation continue pendant ce temps-là. La première ministre a bien dit qu'elle n'excluait plus, à ce moment-là, le recours à une loi spéciale, ce qui était un changement important, mais qu'elle a dit : S'il n'y a pas de règlement dans deux semaines, à un moment donné, il faudra poser des gestes. Donc, on commençait déjà, et, plus tard, elle a dit : Bien, à ce moment-là, ce sera la semaine prochaine. Et ce que je veux vous dire, M. le Président, c'est juste pour étayer mon point, non seulement nous n'avons pas eu l'heure juste, mais ce gouvernement a agi en amateur dans une négociation avec 175 000 personnes, et, aujourd'hui, le pire, c'est que nous sommes, aujourd'hui, à essayer de rattraper et de remplacer les pots cassés alors que ça a été fait en amateur, pour dire le moindre.

Alors, aujourd'hui, ce que j'aimerais que l'on regarde de façon très pratique, M. le Président, c'est d'avoir un règlement qui est le plus juste pour tous. Nous avons la chance aujourd'hui… et c'est pour ça que j'arrête dans mes exemples, parce que, plus on va donner, moins ça va devenir possible de travailler de façon constructive. Comment aujourd'hui on peut trouver un arrangement qui est juste, qui est non partisan?

Et je tiens à saluer les membres de l'opposition officielle qui se sont ralliés, dans les dernières heures, à notre proposition, parce que nous avons en tête de trouver une solution qui fasse l'affaire de tous. Et j'espère qu'au cours des prochaines heures le groupe ministériel en fera de même, parce qu'en fait, lorsqu'on regarde ce que nous aurons à proposer au cours des prochaines semaines et des prochaines heures, je vous dirais, M. le Président, c'est vraiment des amendements qui sont assez simples...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : M. le député, je vous arrête quelques secondes. Écoutez, si c'est possible, là... Il y a des bruits de fond constamment, si c'est possible de baisser le ton ou d'aller parler à l'extérieur... Continuez, M. le député de Lévis.

M. Dubé : J'apprécie beaucoup, ça me prouve le respect que vous avez envers cette Chambre, ce qui n'est pas le cas de tout le monde ici, M. le Président. Merci.

Alors, je reviens sur les amendements que nous allons demander...

Des voix :

M. Dubé : Alors je vais continuer, M. le Président...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le whip adjoint. M. le whip, excusez, j'apprécierais si c'était plus calme, s'il vous plaît. Merci. M. le député de Lévis.

M. Dubé : Encore une fois, j'apprécie beaucoup votre intervention, M. le Président. Alors, j'allais dire, avant d'être interrompu deux fois, que nous allons proposer des amendements…

Des voix :

M. Dubé : On se calme. Alors, nous allons proposer des amendements qui vont être très clairs pour un retour au travail rapide, mais qui vont consister en deux choses, c'est-à-dire : une loi spéciale qui va être applicable pour un an pour donner la chance aux parties de compléter leurs négociations qui, je le souhaite, M. le Président, vont être les plus rapides possible  — l aissez-les nous surprendre et en arriver à une entente négociée à l'intérieur de ces délais-là; et, deuxièmement, ce qui est non négligeable, à l'intérieur de cette année-là, de trouver des accommodements. Et j'espère que les membres, ici, pourront le trouver de façon correcte pour protéger le pouvoir d'achat des travailleurs à l'intérieur de cette négociation-là.

Vous savez, j'aimerais dire, en concluant, M. le Président, que la vision que nous avons, c'est de mettre en place les conditions pour que l'on puisse repartir, tout le monde, dans les prochaines heures, en ayant mis les conditions gagnantes pour l'industrie de la construction. Je vous l'ai dit au début de mon intervention, nous avons une industrie de la construction qui vit des moments très difficiles pour des raisons qui sont hors de la grève, je ne veux pas les répéter, mais il y a aussi la grève . Et je crois que, si nous faisons une saine gestion de notre temps dans les prochaines heures, nous pouvons mettre… rétablir un rapport de force qui doit être juste pour tous et redonner la fierté, autant aux travailleurs qu'aux entrepreneurs, de dire qu'ils font partie d'une des industries les plus importantes au Québec et qu'au cours des prochaines semaines nous pouvons reprendre le boulot dans l'industrie de la construction. Et j'espère, M. le Président, que, dans les prochaines heures, nous pourrons faire tout ce travail pour eux, mais au-dessus de la partisanerie politique. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Lévis. Je cède maintenant la parole au député de Mercier. M. le député.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Merci, M. le Président. Les interventions de Québec solidaire entourant le débat qui concerne le projet de loi qui touche le conflit dans le secteur de la construction sont destinées d'abord et avant tout à protéger les acquis du monde du travail, les acquis des travailleurs, des acquis qui ont été obtenus de chaudes luttes en raison... des luttes qu'ont menées des générations de travailleurs et d'employés dans différents secteurs de la société, notamment et principalement dans le secteur de la construction. On peut revenir sur cette histoire jusqu'au front commun de 1972, qui est ce qui nous concerne... en ce qui nous concerne aujourd'hui.

Nous constatons que le secteur patronal, dans le domaine de la construction, cherche par tous les moyens à faire reculer les conditions de travail qui ont assuré, pendant des années et des années, non seulement une relative paix dans les relations de travail, mais aussi la force d'un secteur — ce n'est pas nos dires, c'est les dires de l'industrie de la construction elle-même — une grande force de ce secteur qui réside dans sa productivité et dans les bonnes conditions qu'elle offre à des travailleurs réussissant ici à attirer vers elle des compétences qui assurent par le fait même sa compétitivité et sa productivité.

Et, parlant de productivité, pour des gens  — par exemple, je pense à l'opposition officielle  — qui, souvent, invoquent cet argument-là, je trouve quand même déplorable qu'on perde autant de temps dans des interventions qui, malheureusement, n'ont que pour seul objectif de retarder les procédures. Je pense que les interventions devraient se centrer sur le fond du débat, et, parce que le fond du débat nous intéresse, je voudrais d'abord intervenir sur une réponse qu'a offerte le leader de la partie gouvernementale, le président du Conseil du trésor, à l'endroit de ma collègue la députée de Gouin parlant du droit de grève.

Il est sûr que le droit de grève en tant que tel n'est pas un droit fondamental reconnu par les chartes. Mais le droit d'association est au centre des droits reconnus dans notre société pour assurer qu'une société démocratique respecte ses travailleurs. Et le droit d'association, s'il y a un intérêt pour les travailleurs de s'associer, c'est pour avoir la capacité de négocier des conditions dignes de travail. Et un des outils les plus importants lorsqu'on est assis dans une négociation pour régler de manière civilisée un conflit qui survient entre des employeurs et des employés dans le domaine où les travailleurs n'ont rien d'autre que la force de leur travail comme levier, le droit de grève devient l'élément central de ce qui doit découler de leur droit fondamental qui est le droit d'association.

Donc, lorsque nous, on dit : Le droit de grève est un droit quasi fondamental, c'est parce que c'est au centre de l'intérêt que portent les travailleurs pour le droit de s'associer qui est un droit fondamental. C'est dans cette perspective-là que nous croyons qu'une loi spéciale, lorsque le gouvernement annonce... Évidemment, on a eu quelques tergiversations, mais il était clair que la première ministre avait montré l'intention du gouvernement de recourir à une loi spéciale. À partir du moment où il y a une loi spéciale, connaissant la mauvaise foi, malheureusement, qui a caractérisé le comportement de la partie patronale à la table de négociation, il était clair qu'une bonne partie du rapport de force des travailleurs était ainsi défaite, était ainsi brisée, ce qui explique pourquoi on en est là aujourd'hui.

Quoi qu'il en soit, nous trouvons déplorable que, dans les conditions actuelles, alors que les travailleurs disent qu'une loi spéciale ne protège pas fondamentalement leurs intérêts, n'est pas dans l'intérêt de la société et des travailleurs, dans ces circonstances qui... Malgré tout, on a sur la table quand même une loi spéciale que présente le gouvernement, qui démontre sa volonté de régler ce conflit-là par la force. Nous trouvons tout à fait déplorable que le Parti libéral veuille en profiter pour assener des reculs dans la qualité de ce qui fait les conditions de travail actuellement dignes pour les travailleurs du Québec, dans les normes qui les régissent et dans les conditions qui entourent leurs conditions de travail.

Un élément essentiel aussi dans ce débat-là, c'est la reconnaissance que, si on accepte que les travailleurs font la grève, on accepte l'idée avant tout que, dans le fond, on donne le moyen à des travailleurs d'améliorer leurs conditions de vie. Et, à chaque fois qu'il y a un secteur de la société... un secteur du travail réussit à garantir des bonnes conditions salariales, des bonnes conditions de travail, c'est l'ensemble de la société qui en profite. Ceux, donc, qui font aujourd'hui la grève, qui sont encore en grève, ils ne sont pas en grève uniquement pour eux, pour leur intérêt, pour leurs jobs à eux, ils sont en grève pour assurer de bonnes conditions de travail pour l'ensemble de la société parce que, lorsqu'un secteur a des gains, ça a des incidences sur les autres secteurs. Ça augmente, ça pousse vers le haut les conditions de travail, d'emploi et de salaire de l'ensemble des travailleurs du Québec.

Alors, pour cette raison-là, nous en appelons à la solidarité de l'ensemble du mouvement ouvrier, de l'ensemble du mouvement syndical, de l'ensemble de la population pour reconnaître, dans les négociations qui sont en train d'être menées par le secteur de la construction, une défense non seulement du travail… des travailleurs de la construction, mais de l'ensemble des travailleurs québécois. Alors, nous refuserons tout recul, notamment sur les éléments, dans le projet de loi actuel, qui garantissent qu'au moins au cours des quatre prochaines années, sur le plan salarial, une partie des demandes des travailleurs de la santé va être rencontrée, et nous allons nous opposer à toute tentative de la part de l'opposition officielle ou de la Coalition avenir Québec d'amoindrir au minimum la portée... le plancher de base que garantit cette loi spéciale. Merci beaucoup, M. le Président.

• (17 h 10) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Mercier. Je cède maintenant la parole au député de Rousseau, le ministre des Finances. M. le ministre.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Oui. Merci, M. le Président. Alors, écoutez, j'interviens, comme d'autres l'ont dit, non pas par plaisir, mais parce que c'est nécessaire. J'interviens donc sur le principe du projet de loi n °  54 qui est un projet de loi, M. le Président, qui est équilibré, un projet de loi raisonnable, un projet de loi juste et aussi, je pense, un projet de loi qui arrive au bon moment, c'est-à-dire ni trop tôt ni trop tard. Alors, je vais essayer d'élaborer un peu sur tous ces aspects-là.

Première des choses, je pense, c'est la question du moment où intervient le gouvernement dans ce conflit de travail qui est survenu dans le secteur de la construction. Nous avons choisi, il y a deux semaines, de laisser aller la négociation, de laisser les parties continuer à se parler. Certains nous demandaient d'intervenir rapidement et de déposer une loi spéciale rapidement. Cela aurait été une erreur, et on le constate à l'évidence aujourd'hui puisqu'entre il y a deux semaines et aujourd'hui deux secteurs sont parvenus à conclure une entente. Et, vous le savez, M. le Président, je n'ai pas besoin... Vous qui êtes un homme expérimenté, vous savez très bien qu'une entente négociée, c'est toujours supérieur à une entente qui nous... pas une entente mais un règlement qui nous est imposé. Et donc, donc, l'histoire, ce que nous avons pu constater ces deux dernières semaines, nous enseigne que nous avons vu juste il y a deux semaines, lorsque nous avons choisi de laisser passer encore un peu de temps, de donner encore une chance à la négociation. Donc, premièrement, il ne fallait pas le faire trop tôt.

Deuxièmement, évidemment, il ne faut pas le faire non plus trop tard, et trop tard, ce serait de continuer à attendre alors que les parties ont reconnu qu'il y avait impasse. L'impasse a été constatée, l'impasse a été constatée, oui, puis, à partir du moment où une impasse est constatée, il nous faut agir. Nous ne pouvons pas laisser perdurer un conflit sans espoir de règlement dans un secteur économique aussi important que celui de la construction. 

Or, simplement pour qu'on comprenne bien, là, donc, dans le secteur résidentiel, dans le secteur du génie civil, on est parvenus à une entente négociée. C'était la chose à faire. Mais, aujourd'hui, nous constatons qu'il n'y a pas d'entente dans le secteur industriel, dans le secteur commercial, dans le secteur institutionnel. La grève dure depuis neuf jours, on parle de 80 000 travailleurs, et il est grandement temps de trouver une solution à ce conflit, cela a assez duré.

Alors, le projet de loi n °  54 que la ministre du Travail a déposé est un projet de loi essentiellement qui fait en sorte que les travailleurs retournent au travail, qu'il y a un retour au travail. Il n'y a pas, dans ce projet de loi, de volonté du gouvernement d'introduire des dispositions pointues, des clauses normatives, des éléments qui avaient été l'objet de négociations pendant la fameuse négociation. Il n'y a pas cette volonté du gouvernement. Au contraire, ce que nous faisons, ce que nous faisons et qui est, selon moi, la chose sage à faire, c'est de reconduire la convention collective existante. Et j'insiste là-dessus, M. le Président, la convention collective existante, elle est le fruit d'une négociation qui a été couronnée de succès il y a quelques années. C'était donc une négociation pour laquelle il y avait eu un succès. C'est donc un règlement convenu. C'est important, là, ça n'avait pas été imposé par quelqu'un, là. Donc, on prend ça, et la seule chose qu'on fait, la seule chose qu'on fait, c'est ajouter le minimum nécessaire pour que ce soit acceptable aux parties, c'est-à-dire introduire des dispositions d'augmentation de salaire qui correspondent à celles qui ont été convenues pour d'autres secteurs. C'est le moins qu'on pouvait faire, puis c'est le plus qu'on pouvait faire en même temps. C'est exactement ce qu'il fallait faire et c'est ce que nous avons effectivement choisi de faire. Il n'était pas question pour nous d'aller dans la liste des demandes syndicales ou d'aller dans la liste des demandes patronales et de prendre les éléments de cela puis de les mettre dans la nouvelle loi. Ça n'était pas possible, ça n'était pas raisonnable, ça n'était pas sage et ça n'était surtout pas ce que doit faire un gouvernement.

Donc, on a fait ce… la loi prévoit précisément ce qu'il faut faire, et nous ne prenons pas la place des négociateurs. Nous prenons la convention collective actuelle, nous introduisons des augmentations de salaire correspondant à celles qui ont été convenues dans les autres secteurs, point, rien de plus. Rien de plus, M. le Président.

Et je voudrais ajouter un autre élément qui est important, c'est qu'une fois que la loi spéciale aura été adoptée, une fois qu'elle aura été adoptée, il sera possible aux parties de se réunir, de convenir d'un nouveau terme, d'une nouvelle convention collective, et ces nouveaux… les choses qui seront convenues prendront la place de l'ancienne convention collective. Donc, il n'y a pas… ce n'est pas la fin de la négociation, M. le Président. La négociation pourra se poursuivre, devrait se poursuivre, et je souhaite, quant à moi, qu'elle se poursuive, M. le Président. Alors, je ne voudrais pas qu'on comprenne mal. Il n'y a rien là-dedans qui arrête la négociation, bien au contraire, O.K.?

M. le Président, la loi qui est déposée, le projet de loi qui est déposé fait donc le moins qui pouvait être fait et le plus qui pouvait être fait en même temps et il assure un retour au travail pour les parties, un retour au travail serein, un retour au travail dans le respect, qui va faire en sorte que les chantiers vont fonctionner correctement mardi matin. Ce n'est quand même pas rien, là. Si on se mettait à faire ce qui a été suggéré par les autres partis, ce qui en résulterait — puis c'est important de bien le comprendre — c'est que, mardi matin, il y aurait des gens frustrés, il y aurait des gens de mauvaise humeur qui rentreraient au travail. C'est ça qui arriverait, et ça, ce n'est pas souhaitable. C'est important que tout le monde entre au travail dans de bonnes dispositions et c'est important que ces bonnes dispositions là puissent être utilisées pour la suite des choses entre autres dans la négociation qui pourrait se continuer dans les prochains mois, dans les prochaines années.

Alors, je le dis parce que le fait que le secteur de la construction continue de progresser au Québec, ça repose entre autres sur un climat de travail sain, serein. La productivité des travailleurs, là, ça... Les travailleurs vont être d'autant plus productifs qu'ils ont l'impression qu'on les a respectés. Moi, je pense que ça, c'est quelque chose de très, très important. Vous savez, quand on parle de productivité — puis c'est un mot qui est très à la mode — j'aimerais qu'on sache ici que la productivité évidemment ça s'explique entre autres par la machinerie, ça s'explique entre autres par la scolarisation, ça s'explique entre autres par la formation des gens, mais ça s'explique aussi mal : il y a un 50 % de la productivité qui est incompris, qu'on n'arrive pas à expliquer. Ce 50 %, là, qu'on n'arrive pas à expliquer, c'est quoi? C'est l'ingéniosité des travailleurs qui sont devant leur métier, qui sont devant leur poste de travail puis qui trouvent des meilleures façons pour faire en sorte que l'entreprise réussisse à faire mieux. Ce 50 % d'inexplicable, il a plus de chances de se matérialiser si les travailleurs rentrent au travail dans de bonnes dispositions, si les employeurs aussi reçoivent des travailleurs qui sont de bonne humeur. Alors, M. le Président, je pense que c'est important de le dire, le respect, la sérénité, c'est important, et le projet de loi que nous avons déposé assure cela.

Deux autres points que je veux ajouter qui me semblent fort importants — mais je vois le temps qui file — la stabilité et la prévisibilité qui sont prévues dans le projet de loi sont essentielles puis sont fondamentales. Le projet de loi prévoit un renouvellement, donc, de la convention collective pour quatre ans. Là, j'ai entendu les collègues parler de six mois puis de un an, et j'ai peine à croire que des gens raisonnables puissent souhaiter que nous retombions dans le même psychodrame qu'on vient de vivre dans six mois ou dans un an. Je dirais… Écoutez, j'en reste bouche bée, vous le constatez. J'ai de la misère à comprendre ça, je n'en reviens pas. La prévisibilité et la stabilité, c'est important pour l'économie, c'est important dans tous les secteurs de notre économie, et c'est important dans le secteur de la construction. Et là, là, ils n'ont pas l'air de se rendre compte de ça.

• (17 h 20) •

Par ailleurs, je le réitère, les parties vont pouvoir continuer à négocier pendant les prochains mois, pendant les prochaines années. Il n'y a rien qui va arrêter. Alors, plutôt que de mettre une date de tombée de six mois, comme le proposent les autres partis, ou de un an, comme le proposent les autres partis, moi, je leur suggère au contraire de laisser à la négociation le temps de faire son oeuvre puis laisser aux travailleurs et aux entrepreneurs le soin de trouver un règlement qui soit bon et juste pour eux.

Autre point important : le projet de loi prévoit  — et, encore une fois, c'est le seul élément qu'on a ajouté à la convention collective actuelle  — que les dispositions concernant les salaires calquent, sont un calque de ce qui a été convenu dans le secteur du génie civil. Pourquoi? Pourquoi? Bien, au moins deux raisons. La première raison, c'est que ces secteurs-là sont liés. Historiquement les taux de croissance des salaires dans un secteur ont été les mêmes que dans l'autre. Et là on ne fait que reproduire cela dans ce projet de loi. Donc, on augmente les niveaux de salaire dans le secteur de l'industrie, commerce et institutionnel au même rythme que dans le génie civil.

Deuxièmement, il y a des travailleurs qui oeuvrent dans les deux. Il y a des travailleurs qui oeuvrent dans le secteur du génie civil puis qui en même temps ou à d'autres moments, dans la même semaine ou dans le même mois, vont oeuvrer dans le secteur institutionnel, commercial et industriel. Alors, d'avoir des écarts d'augmentation de salaire, ça va faire en sorte qu'il y a un secteur qui va se vider au profit de l'autre. Alors, on ne peut pas faire ça, là, ce n'est pas si simple que ça, là, on ne peut pas tout d'un coup briser un équilibre qui était en place, et donc, M. le Président, c'est nécessaire de s'assurer que la croissance des salaires dans les deux secteurs est la même. Ce n'est pas compliqué, mais j'ai l'impression que ce genre de chose là échappe à mes amis des autres partis, de l'opposition.

M. le Président, il me reste très peu de temps, alors je m'arrête avec un petit point très, très rapide. C'est sur l'impact, parce qu'il y a eu beaucoup de choses qui ont été dites sur l'impact de la grève, sur l'impact des neuf jours de grève sur l'économie du Québec, sur les finances publiques du Québec. Là, je vais être très, très simple, là. Il y a tellement de chiffres farfelus qui ont circulé que je ne vais pas tous les reprendre. Je veux simplement dire une chose extrêmement simple : On a eu une grève de neuf jours, et il est tout à fait concevable que les coûts qui ont été encourus soient résorbés par la reprise de ces travaux-là dans les prochains jours, dans les prochaines semaines et dans les prochains mois. Les travaux qui étaient à réaliser, ils n'ont pas disparu tout d'un coup, ils sont encore à réaliser, puis il y a des moments dans l'année où il y a moins de travail habituellement, et il y aura toujours moyen de réaliser les travaux qu'on n'a pas pu réaliser maintenant un peu plus tard. Alors, de prétendre qu'il y a des coûts importants, je pense qu'il y a de l'exagération, et on pourra mesurer correctement ces coûts-là une fois que le temps se sera passé puis qu'on pourra constater si effectivement il y a des choses qui n'ont pas été réalisées et qui auraient pu l'être.

Alors, M. le Président, là, je vais m'arrêter là-dessus, mais je pense qu'on a un projet de loi, donc, qui est équilibré, qui est raisonnable, qui assure un grand équilibre, qui arrive au bon moment. M. le Président, j'invite les gens à adopter le principe de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le ministre des Finances. Alors, je cède maintenant la parole au député de Louis-Hébert. M. le député, la parole est à vous.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, M. le Président. J'ai écouté attentivement le ministre des Finances et je vais lui répondre tantôt, mais, si nous sommes là, ici, aujourd'hui, M. le Président, c'est parce que le secteur de la construction, c'est un secteur important dans l'économie du Québec. On parle d'un chiffre d'affaires de 51 à 52 milliards de dollars et un estimé d'à peu près 14 % de notre PIB, donc c'est un secteur majeur qui couvre l'ensemble des activités. Et, je me rappelle, mon collègue le député d'Outremont, l'ancien ministre des Finances, il a bien dit : Quand la construction va, tout va. Donc, c'est un secteur névralgique pour l'économie du Québec, et on ne peut pas le prendre à la légère.

J'ai eu l'honneur, M. le Président, d'être ministre au gouvernement pour plusieurs ministères, et le rôle d'un ministre, c'est surveiller les activités importantes qui ont un impact sur l'économie du Québec, entre autres. Donc, comme ministre des Finances, comme ministre du Travail, c'est un des mandats importants, parce que, les dossiers faciles, les dossiers simples, il y a un ministère qui va s'en occuper. Mais, lorsqu'on voit un conflit dans le domaine de la construction qui s'en vient, c'est comme le bateau qui s'en va vers l'iceberg, M. le Président, et je suis le capitaine du bateau. Évidemment, je surveille où je m'en vais, et je le regarde attentivement, et je prends les mesures et les précautions nécessaires avant de rentrer dans l'iceberg, ce que malheureusement ce gouvernement-là n'a pas fait, n'a pas fait. C'est parce que les négociations, depuis avril, étaient en cours, et on sentait qu'il y avait des problèmes.

Et il y a une erreur, M. le Président. J'entends les ministres parler : Secteur résidentiel, secteur génie civil, secteur commercial et industriel, c'est pareil. Ce n'est pas pareil, M. le Président, parce que le marché est complètement différent entre le secteur résidentiel et entre le secteur commercial et le secteur génie civil et voirie, M. le Président. Ce n'est pas les mêmes secteurs, ce n'est pas le même marché. Pourquoi? Parce qu'ils sont limités dans le temps — par exemple, le secteur résidentiel, M. le Président — et ce n'est pas la même main-d'oeuvre nécessairement. Et, historiquement, lorsqu'on revient sur les augmentations des salaires dans le secteur résidentiel et dans la voirie, M. le Président, et dans le commercial, elles ne sont pas les mêmes. Pourquoi? Parce que ce n'est pas les mêmes contextes. Si c'était tout pareil, M. le Président, pourquoi on n'aurait pas une convention collective pour les trois secteurs?, ce qui n'est pas le cas. Chaque secteur a ses complexités, chaque secteur a ses négociations. Donc, en partant, le gouvernement a manqué encore une fois le bateau.

Et là je reviens... L'objectif, aujourd'hui, c'est deux choses, M. le Président. Il faut que le ministre des Finances sache que l'objectif, aujourd'hui, c'est : retour au travail mais aussi négociation. Il faut que les deux parties soient en position de revoir, de vouloir, de s'asseoir et de négocier pour avoir une convention collective. Si on met des conditions dans le projet de loi qui n'encouragent pas les deux parties à négocier, M. le Président, on manque notre bateau encore une fois. Là, la chance que le gouvernement a, M. le Président, c'est qu'il y a une opposition en face du gouvernement qui est en train de lui dire qu'est-ce qu'il faut éviter, de ne pas faire la gaffe deux fois encore, M. le Président.

Si on prend... on regarde les gestes de ce gouvernement-là, quand il touche à quelque chose dans l'économie, ça va aller mal puis, quand il ne touche pas, ça va aller mal encore. Ça va mal partout. Et, pour ça, ils ont créé une nouvelle cassette : Tout va bien, M. le Président. La nouvelle cassette de ce gouvernement-là : Tout va bien. Lorsque nous avons questionné la ministre du Travail sur le conflit : Inquiétez-vous pas, tout va bien, tout va bien. Je ne sais pas où ça allait bien, peut-être dans son bureau, mais, en dehors de son bureau, M. le Président, ce n'était pas le cas.

Et ce qui est surprenant aussi, M. le Président, lorsque vous voyez un conflit majeur de 51 milliards de dollars qui s'en vient en face, ça correspond à 1 milliard par semaine d'investissements. Ce matin, lorsque nous avons posé la question à la ministre du Travail sur 1 milliard, elle émettait des doutes. 1 milliard, ça vient d'un calcul simple : 52 milliards divisés par 52 semaines, ça donne 1 milliard. Si elle veut vérifier l'agenda ou le calendrier, demande à la ministre… du calendrier, il y a le calendrier tous les jours, il peut lui dire qu'il y a 52 semaines, donc c'est 1 milliard par semaine. Ça, il faut qu'ils le sachent. Ça fait deux semaines, c'est 2 milliards de moins d'activité économique.

Qu'est-ce que ça fait, 2 milliards de moins, M. le Président? Quand la shop est fermée, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire qu'il n'y a pas de salaires qui se paient. Ça veut dire : Il faut que l'entrepreneur, les organisations paient l'électricité, paient les taxes en attendant que ces gens-là vont aller au travail. Ça, c'est des coûts pour le monde qui sont en grève, M. le Président, pour les entreprises. Vous savez, dans un chantier de construction, il y a des achats locaux. Il faut aller à la quincaillerie acheter des clous, des marteaux pour faire les chantiers de construction. Il me semble que c'est simple, M. le Président. Ça, ça affecte les quincailleries. C'est 70 millions de pertes pour les quincailleries au Québec. Ils n'ont pas fait ce calcul-là, M. le Président.

C'est surprenant, quand on lui pose des questions, la ministre déléguée à la banque de Babel et à la politique de livre blanc, de future politique industrielle — ils l'appellent livre blanc, M. le Président — qu'est-ce qu'elle a dit, elle, quand tu as posé la question sur la grève? Elle dit : Ça ne coûte rien à l'État. À l'État ça ne coûte rien. Puis elle dit : On ne dépense rien. M. le Président, c'est vraiment, vraiment une logique simple mais très simpliste, M. le Président. Quand une shop est fermée, M. le Président, puis vous êtes encore le propriétaire, il y a des taxes à payer, il y a l'électricité à payer, il y a le chauffage à payer, il y a du monde encore dans le bureau qui sont là parce que vous ne pouvez pas mettre le monde dehors puis les rentrer le lendemain. C'est simple, quand il y a une grève, M. le Président, il y a quelqu'un qui paie pareil. Il n'y a pas une grève... Je n'ai jamais vu, dans mon expérience, une grève qui ne coûte rien à personne. Ça, c'est la première personne dans l'équipe économique de ce gouvernement-là.

On s'en va à la ministre du Travail, maintenant, voir qu'est-ce qui se passe dans l'autre ministère à côté. Bien, elle, elle répond : Ça ne sert à rien actuellement d'évaluer... ça ne donne rien d'évaluer les coûts. M. le Président, vous êtes le capitaine du bateau, c'est important d'évaluer tout ce qui se passe autour de vous, de voir la direction, d'évaluer les possibilités. Puis là, évidemment, une des possibilités, savoir s'il y a une grève demain matin dans cette industrie de 52 milliards, quels sont les coûts de notre gouvernement. Puis on n'a jamais entendu le président du Conseil du trésor, pas un mot. C'est lui qui contrôle, normalement, les dépenses. Il devrait savoir au moins... Il y a un événement potentiel qui s'en vient. Combien ça coûte? Pas de réponse.

• (17 h 30) •

Troisième joueur dans ce gouvernement, c'est le ministre des Finances. Il dit : Là, là, dérangez-moi pas, là, avec ces chiffres-là, là, je n'ai pas le temps, on parlera après. Ce qu'il a dit dans ses propres mots, M. le Président : Je ne vais pas embarquer dans la question de l'impact. Une fois que ce sera derrière nous, on en parlera. Tu sais, en voulant dire, M. le Président : On va fêter puis on verra après le compte, avec la carte de crédit, que je reçois plus tard, puis on verra combien ça coûte. Et là la boss, ce qu'elle dit, la première ministre : Nous ne l'avons pas systématiquement évalué. Bien, j'espère que vous allez évaluer un jour. Vous vous en allez dans un iceberg en face, M. le Président; j'espère que vous allez savoir combien. Et là nous, l'opposition, M. le Président, on essaie de faire un effort, parce que là on voit… Encore une fois, ils ne savent même pas combien ça coûte. Là, on a parlé de quincaillerie, on a parlé des frais fixes pour les entrepreneurs, facile à comprendre, là. La shop est là, elle est fermée, mais il faut qu'elle maintienne en vie, la shop, donc il faut payer les taxes, il faut payer l'électricité, il faut payer les employés administratifs qui sont là, parce qu'un jour on souhaite de revenir travailler. Ce monde-là, on ne peut pas les mettre dehors puis les appeler après, ça ne marche pas de même.

Là, il y a d'autres coûts, M. le Président. Quand c'est 1 milliard de dollars par semaine qui ne sont pas injectés dans l'économie, ça veut dire qu'il y a des salaires de moins, qui ne sont pas payés à des gens qui méritent d'être payés, parce que ces gens-là n'ont pas travaillé. Ces gens-là, ils ont prévu, ils ont des dépenses, ils ont des obligations, des familles puis ils attendent après leurs salaires pour payer des choses, M. le Président. Ça, ça correspond à combien? Ça correspond à 250 millions. La CAQ disait 230, on n'est pas loin, c'est 250 millions de salaires par semaine qui n'étaient pas payés à des familles du Québec. Ça, c'est-u assez important, 250 millions? Moi, je pense que oui, M. le Président. Même 1 million en salaires, pour des familles, c'est important, parce que, vous le savez comme moi, une famille, ils ont des obligations. Les travailleurs de construction, c'est comme toutes les personnes au Québec, ont des obligations. Il faut qu'ils paient leurs factures, il faut qu'ils paient leur pain, puis de ne pas avoir des salaires, M. le Président, c'est très important, c'est quelque chose de majeur.

Après ça, M. le Président, l'État... le ministre des Finances, mon collègue le député d'Outremont, il l'a dit... J'étais avec lui, M. le Président, et j'ai vu mon collègue poser des questions au ministre des Finances à plusieurs reprises en lui disant : Êtes-vous sûr que vous allez avoir les revenus escomptés dans votre deuxième révision? Parce qu'ils ont fait un budget au mois de novembre, il a été obligé de le réviser au mois de mars. Il a posé la question : Pensez-vous que vous allez avoir les mêmes revenus que prévu? À plusieurs reprises, il a répondu : Oui, il n'y a pas de problème. Encore la cassette : Pas de problème, ça va bien; c'est la cassette Ça va bien.

Et là on attend que la session termine, M. le Président, et que les députés ne sont plus à l'Assemblée nationale, et le ministère des Finances sort son rapport mensuel des opérations financières. C'est quoi, un rapport mensuel des opérations financières? C'est comme un bilan, c'est comme un état financier du gouvernement où on sort les revenus, les dépenses, les prévisions. Ça donne un portrait des finances de l'État pour une période donnée de l'année. Et là on constate, à la lecture de ce document-là, qui est sorti après l'Assemblée nationale, bien sûr, peut-être pour ne pas avoir des questions, là… on s'aperçoit qu'il y a encore des manques de revenus par rapport à ce qu'on a révisé pour une deuxième fois. Et là on ne parle pas de 10, 15, 20 millions, M. le Président, on parle de centaines de millions de dollars.

Donc, le ministre des Finances, il doit être nerveux, parce qu'il regarde ça, il n'y a pas de revenu qui rentre, M. le Président. Oui, 100 millions, première fois, 250 millions, deuxième fois, puis là, là, les dépenses, en plus, sont... Évidemment, ils disent qu'ils dépensent moins. Je comprends, ils ne font rien. Quand vous ne faites rien, M. le Président, qu'est-ce qui arrive? Vous ne dépensez pas. Ils ne font rien pour l'économie du Québec, ils ne font rien pour la recherche et le développement, ils ne font rien pour l'exportation. C'est sûr qu'ils ne dépensent pas. C'est sûr qu'ils pensent qu'ils respectent... Puis en plus, quand il faut dépenser, ils font dépenser ça par les citoyens, M. le Président. On a vu ça avec les commissions scolaires : au lieu de couper, bien, je coupe dans la commission scolaire, puis le citoyen paie, à la fin, la facture. Ça fait que ce n'est pas une grosse épreuve, là, de Jeux olympiques, M. le Président.

Alors là, les dépenses sont là, puis, les revenus, il y en a moins. Il y en a moins, de revenus, et il n'est pas inquiet, tout va bien. Encore la cassette, M. le Président : Tout va bien, Madame la Marquise. On a 1 milliard de moins en revenus, ce n'est pas grave, on va se rattraper.

M. le Président, la situation est critique. Et en plus, lorsqu'il manque de revenus, le ministre des Finances, pas capable de dire combien il manque de revenus à l'État, parce que le 1 milliard d'activité économique, M. le Président… Les gens, quand ils achètent des choses, paient des taxes, paient la TPS, TVQ, ces taxes-là, c'est des entrées de fonds pour le gouvernement. Donc, s'il y a une grève, il n'y a pas 1 milliard d'activité par semaine, il y a moins de TPS, TVQ qui rentrent dans les poches du gouvernement. Et c'est important parce que c'est 14  %, 15 % du PIB, donc ça peut être 15 % de l'ensemble des activités économiques qui génèrent des revenus à l'État, et là ce n'est pas grave. On ne le sait pas encore, leurs chiffres. M. le Président, c'est dangereux.

Et, en plus, M. le Président, lorsqu'on regarde les deux navires amiraux de ce gouvernement-là, quand ils ont présenté leur budget, le premier, c'était la banque de Babel. On connaît l'histoire, la banque de Babel, c'est terminé pour nous, la banque de Babel. Mais il y a encore de l'espoir l'autre côté. Mais je pense, encore une fois… On leur répond encore une fois pour lui dire : Oubliez ça, la banque de Babel.

Le deuxième navire amiral de ce gouvernement-là, c'était quoi, M. le Président? C'était le crédit d'investissement de 300 millions pour les projets de 300 millions et plus. Nous avons posé la question au ministre des Finances : Combien de projets il y a eu, actuellement, qui étaient admis à ce crédit de 300 millions, M. le Président? Il n'y a aucun projet. Ça fait quand même novembre, décembre, janvier, février, mars, avril, mai, juin. Ça fait huit mois, M. le Président, il reste quatre mois pour leur année financière, ils n'ont pas eu encore un projet pour les crédits d'investissement de 300 millions et plus. Et ça, c'était le deuxième navire amiral, M. le Président. Il coule encore, le deuxième, puis on voit l'état de la situation de l'économie.

M. le Président, ce matin, le ministre des Finances s'est levé pour dire qu'il y avait 80 000 emplois, au Québec, de plus. Nous avons posé la question au ministre des Finances, qui était entouré par 30 hauts fonctionnaires autour de lui, du ministère des Finances  — il y avait à peu près 3 millions de masse salariale autour de lui  — la question était simple : Aujourd'hui, M. le ministre des Finances, le mois de mai, on ne veut pas la journée exacte, combien de personnes sont au travail au Québec, M. le Président? Il n'était pas capable de répondre. Il a viré pour demander à ses 30 hauts fonctionnaires pour avoir la réponse, et finalement n'a pas répondu. On lui a demandé : Après le mois de janvier, M. le Président, en 2013, le mois de janvier, il y en avait combien, au Québec, qui étaient sur le marché du travail? Il n'a pas voulu répondre. Il a dit : Allez voir les statistiques, l'institut des statistiques.

M. le Président, mois de janvier 2013, si on compare janvier 2013 avec mai 2013, combien d'emplois, vous pensez, qui ont été créés au Québec? Zéro, M. le Président, zéro emploi pendant que l'Ontario ont créé 40 000 emplois. M. le Président, si je suis ministre des Finances, je suis membre de ce gouvernement-là, je n'ai pas besoin de regarder 15 chiffres, là : zéro création d'emploi depuis janvier, croissance économique à la baisse, les revenus à la baisse, les investissements à la baisse. Les projets se cancellent un après l'autre, M. le Président, un après l'autre, des projets économiques se cancellent. Les gens ne veulent pas investir. Là, j'espère que je commence à sonner des cloches quelque part quand je dis que ça va mal, là. Mais non, la nouvelle cassette : Tout va bien.

Et, de l'autre côté, on laisse aller, on laisser aller un conflit important qui a un impact direct, M. le Président. Mon collègue le député d'Outremont, il l'a bien dit : Ce n'est pas un conflit dans une entreprise, là, privée ou publique, c'est un conflit qui touche l'ensemble de l'industrie, qui touche en plus la sous-traitance. Chaque job en construction, M. le Président, si ma mémoire est bonne, il y en a trois qui dépendent de cette job-là, donc on peut dire quatre total, M. le Président. Et, pour l'ensemble du Québec, c'est énorme.

Alors là, on le voyait venir, M. le Président. Puis je suis convaincu que les experts du ministère du Travail, ils connaissent ça, ils le savent que ce conflit-là peut, peut-être... Il y a une possibilité, M. le Président, même si on n'est pas convaincu ou certain qu'il va y avoir des problèmes de grève après, mais au moins qu'on se prépare d'avance. C'était quoi, la réponse, M. le Président? Bien là, on n'a pas le temps, là, on s'en va au Mexique, là, on s'en va au Mexique rencontrer les Mexicains puis on va faire un peu de ça. Puis là, là, on rencontre les Mexicains, M. le Président, puis on jase d'économie. Puis, c'est drôle, hein, j'aimerais ça savoir la valeur des contrats qui ont été signés au Mexique. Quelle est la valeur... C'est drôle, la première fois que je vois ça depuis des années, M. le Président, avec toute la publicité autour du voyage au Mexique, il n'y a pas un communiqué de presse qui a mentionné quelle est la valeur des contrats. On a parlé de 11 contrats signés. Est-ce que c'est 50 millions? 11 contrats, minimum, pour justifier le voyage de la première ministre, avec tout le fla-fla qu'on a fait, M. le Président, avec la ministre responsable de la tour de Babel, puis tous les ministres étaient autour d'elle. M. le Président, est-ce que...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Oui, M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : L'article 35, là, hein? Je pense que ça suffit, là. Un ton plus respectueux, je pense, s'impose, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : D'accord. Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel...

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : Merci, M. le Président. Vous savez très bien comme moi que le député de Louis-Hébert a présentement un ton qui est très respectueux. Vous savez également, il y a beaucoup de jurisprudence par rapport au contenu du discours qu'un député peut faire en Chambre. Puis, effectivement, si le député de Marie-Victorin n'aime pas les propos, bien qu'il aille faire un tour, puis il reviendra après, M. le Président.

Des voix :

• (17 h 40) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Marie-Victorin.

M. Drainville : M. le Président , il faut appeler les collègues de cette Chambre par leur titre : quand ils sont députés, on les appelle par le titre que porte le comté et, quand il s'agit d'un collègue ministériel, on prend le titre de son ministère, et ce n'est visiblement pas ce qu'a fait le député de Louis-Hébert.

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Non, non. Mais là je vais inviter tout le monde à continuer dans le respect, là. Ça s'est bien passé depuis le début de l'adoption de principe, alors je vous invite à continuer dans le respect. Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : Je serai très respectueuse, M. le Président. Vous savez très bien que, oui, effectivement, on peut les appeler les ministres responsables de leurs dossiers, mais le plus beau titre, à mon avis, est celui de député. Il devrait en être fier.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Mais vous comprendrez qu'on ne fera pas un débat là-dessus, là. Je vais passer la parole au député de Louis-Hébert. Continuez, M. le député.

M. Hamad : Merci, M. le Président. Je reviens aux propos du ministre des Finances. Les propos... J'entends quelqu'un qui parle, monsieur. C'est le député d'Ungava, je pense, hein? Je l'entends, M. le Président. J'entends encore, je l'entends encore. O.K.

Alors, M. le Président, le ministre des Finances qui disait… il disait que « là, ce qu'on a amené dans ce projet de loi là, on a pris la convention collective qui existait avant et on l'a mise, on l'a incluse dans le projet de loi » . M. le Président, le ministre des Finances doit savoir que, s'il y a eu des négociations, c'est parce que la convention collective précédente, échue n'est plus... ne veulent plus l'appliquer. Les deux parties d'ailleurs, nous avons appris, dans le briefing avec le ministère du Travail, que les deux parties ont fait des demandes importantes pour avoir une nouvelle convention collective et ne se sont pas entendues là-dessus, mais il est clair pour les deux parties que l'ancienne convention collective n'est pas à jour pour eux, M. le Président. Donc, quand le ministre des Finances aujourd'hui est fier de dire : J'ai pris la convention collective qui a été signée avant pour la mettre en application, bien, bien sûr ce n'est pas ce qu'ils visent, les employeurs et les travailleurs, M. le Président.

Deuxième élément, dans le projet de loi, M. le Président, il est très important, en fait, l'article 11 et 12. Dans le projet de loi, l'article 11 et 12… L'article 11, en fait, ce que le gouvernement propose, c'est que les conventions collectives expirées le 30 avril 2013, elles soient allongées jusqu'au 30 avril 2007. Mais là ce qui intervient, le gouvernement, là-dessus, M. le Président, c'est en mettant des augmentations salariales prévues pour les quatre prochaines années. On a dit aujourd'hui : L'objectif… Normalement, ce projet de loi, c'est deux objectifs. Le premier, c'est le retour des travailleurs, puis le deuxième, c'est la reprise des négociations. Lorsque le gouvernement intervient puis impose des augmentations salariales sur quatre ans, M. le Président… ne favorise pas nécessairement la reprise des négociations, parce qu'il intervient, et, dans une négociation, comme je l'avais appris au ministère du Travail, M. le Président, il faut que les deux parties négocient à armes égales, M. le Président. Il ne faut pas qu'une partie soit favorisée plus que l'autre, parce qu'il n'y aura pas de négociation à ce niveau-là, lorsqu'une partie est favorisée par rapport à l'autre.

Le rôle du gouvernement, ce n'est pas favoriser une partie par rapport à l'autre. Le rôle du gouvernement, c'est permettre aux deux parties de revenir vers les négociations. Et, le fait d'imposer des augmentations salariales sur quatre ans, je pense que cet équilibre-là n'existe plus, par cette intervention-là que le gouvernement a faite. Même si... Et, par hasard, M. le Président, les augmentations qui sont là sont exactement ce qui a été négocié avec la voirie et le génie civil. Il faut noter, M. le Président, que, depuis 2010, les augmentations pour la voirie et le génie civil étaient toujours plus importantes que les augmentations pour l'industriel et le commercial. Donc, ce n'est pas un exemple de dire qu'on a pris l'exemple de voirie et génie civil, parce qu'historiquement ce n'est pas les mêmes.

La réponse qu'il nous donne, le gouvernement : Oui, cette augmentation-là n'est pas applicable partout, M. le Président. Cependant, cette augmentation-là qui est indiquée dans le projet de loi, M. le Président, amène un déséquilibre à la négociation, et si, ici, comme parlementaires, nous souhaitons le retour à la négociation, bien il est important de permettre aux deux parties d'avoir la motivation de revenir négocier. Et on doit leur faire confiance. Il est clair, aujourd'hui... Ils n'ont pas réussi à s'entendre, mais ça ne signifie pas que, demain matin, ils ne s'entendront pas sur une nouvelle convention collective. Cependant, nous devons encourager ces... les deux parties à discuter et à signer une nouvelle entente de convention collective.

M. le Président, je pense que le gouvernement, dans une situation où il est actuellement, il devrait faire ses devoirs. Ses devoirs commencent par savoir l'impact économique qu'il a... que le Québec a eu, que les Québécois, M. le Président, ont eu suite à ces grèves-là. Pourquoi savoir ça, M. le Président? C'est pour pouvoir mettre les mesures en place pour répondre aux pertes d'emploi, pour répondre aux pertes de revenus. Et évidemment, dans la situation où le gouvernement déjà manque de revenus dans ses prévisions, je pense qu'il devrait agir d'une façon encore plus importante et plus ciblée.

Alors, en terminant, M. le Président, le gouvernement ne doit pas prendre la place de la négociation, mais plutôt aider de créer un encouragement à négocier, que les deux parties négocient. Et nous trouvons que l'article 11, actuellement, ne va pas dans cette direction-là, et, probablement, nous serons contre cet article-là. Et nous souhaitons travailler avec le gouvernement et la deuxième opposition dans le but de trouver les meilleures solutions qui respectent deux principes : le retour et la reprise des négociations. Merci.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Alors, merci, M. le député de Louis-Hébert. Je cède maintenant la parole au député de La Prairie, en rappelant, en précisant qu'il reste 23 min 30 s à votre formation politique. M. le député de La Prairie.

M. Stéphane Le Bouyonnec

M. Le Bouyonnec : Merci, M. le Président. Alors, écoutez, d'abord pour aller au plus court en ce qui a trait à nos demandes d'amendement à cette loi spéciale, nous réitérons que la priorité, pour nous, c'est le retour au travail. Et, le retour au travail étant la priorité, il devient important de ne pas alourdir cette loi avec des éléments additionnels qui font en sorte qu'on s'interroge sur l'intention réelle du gouvernement. Si on convient ici, en cette Chambre, que l'économie du Québec ne peut pas souffrir davantage d'une grève dans l'industrie de la construction, qui représente 1/7 de l'économie du Québec, eh bien on doit aussi accepter le fait que, si nous souhaitons tous avoir un règlement négocié, et je crois comprendre que c'était la volonté du gouvernement pour retarder justement le rappel de la Chambre ou de retarder le moment auquel nous aurions une loi spéciale pour forcer le retour au travail ou maintenir la présence au travail, c'est parce que nous souhaitions tous, et nous les premiers, d'avoir un règlement négocié. Or, je n'ai pas du tout été épaté par la séance de briefing technique de la fonction publique auquel nous avons été conviés, parce qu'en réalité, sous le couvert de confidentialité et d'éthique, nous n'avons pas pu obtenir de réponses satisfaisantes à nos questions. Et ces questions- là, c'était simple, c'était : Pourquoi, à sa face même, avons-nous un projet de loi qui ne ramène aucun élément demandé par la partie patronale et avons-nous les questions salariales, donc les questions monétaires, issues des demandes syndicales, fixées pour une période de quatre ans et à des taux qui dépassent largement l'indice des prix à la consommation?

Alors, maintenant, la question, c'est : Avec une telle loi spéciale, si elle devait être adoptée sans amendement, avons-nous là réellement des motivations pour que les parties puissent se rasseoir et obtenir une entente négociée? Et, vous savez, il n'y a pas que la Coalition avenir Québec qui pense que la loi, c'est un peu comme la tour de Pise : elle penche du côté syndical. Et encore une fois on fait face à une situation où, lorsqu'on nous dit : Croyez-nous de bonne foi, et là je reviens à ma session de briefing technique, croyez-nous de bonne foi, c'est vraiment égalitaire… Et on entendait Mme la ministre, tout à l'heure, du Travail, indiquer qu'à chaque article visant les syndicats il y avait un article visant la partie patronale. Moi, je lui rappellerais qu'il y a, au centre même de ce projet de loi là, il y a justement une distorsion, et la distorsion, là, c'est les sommes accordées aux employés de la construction industrielle.

• (17 h 50) •

J'aimerais, M. le Président, vous lire un communiqué de presse que la Fédération des chambres de commerce du Québec vient d'émettre, pour simplement dire qu'il n'y a pas que la CAQ qui rêve. Rappelons que la Fédération des chambres de commerce, c'est 150 chambres de commerce à travers le Québec, c'est 60 000 entreprises. Et là ce communiqué prévoit justement cette espèce d'incohérence gouvernementale. Et elle dit : « Dans ce contexte, la [fédération] demande à l'Assemblée nationale d'adopter une loi spéciale qui fixe plutôt les conditions de travail dans l'industrie de la construction pour la prochaine année seulement et qui exige des parties qu'elles retournent à la table [des] négociations pour conclure une entente pour les trois années suivantes. »

Je poursuis, parce que ça devient encore plus intéressant : «La loi spéciale devrait prévoir des augmentations salariales pour les travailleurs de la construction qui se limitent à l'indice des prix à la consommation, et ce, pour la prochaine année [seulement]. "De cette façon, le pouvoir d'achat des salariés serait préservé et les parties seraient dans l'obligation de retourner à la table de négociation…" »

« La loi spéciale proposée ce matin par le gouvernement prend clairement partie pour les syndicats — ce n'est pas la Coalition avenir Québec qui dit ça, c'est la Fédération des chambres de commerce — et ne donne suite à aucune demande faite par la partie patronale dans le cadre des négociations. » Et là je pense que, comme nous l'avons fait, la Fédération des chambres de commerce souligne l'incohérence gouvernementale, parce que, d'un côté, le gouvernement indique ne pas vouloir s'impliquer, négocier, bricoler une convention collective et s'impliquer dans le normatif, mais en même temps fixe les conditions salariales des employés.

« Il est compréhensible que le gouvernement ne veuille pas s'ingérer dans la partie normative de la convention[...]. C'est pour cette raison qu'il aurait dû limiter les augmentations salariales à l'IPC. À la place, le projet actuel donne suite aux demandes syndicales sans que les employeurs puissent y trouver leur compte. De plus, en fixant des conditions salariales généreuses — j'insiste, généreuses — pour les syndiqués pour les quatre prochaines années, le gouvernement s'assure malheureusement de ne donner aucune raison à l'Alliance syndicale de se rasseoir à la table [de négociation] et de conclure des aménagements au niveau des conditions normatives. »

Et je vais poursuivre sur un élément qui, aussi, est un élément très important pour nous et qui se retrouve à l'intérieur du communiqué de la Fédération des chambres de commerce : « "Ce sont les contribuables qui seront les premiers à payer la facture puisque le gouvernement est le principal donneur d'ordres dans le secteur institutionnel et commercial. Uniquement pour les chantiers du CHUM et du CUSM, les coûts supplémentaires [sont] considérables…" »

Depuis longtemps, depuis des mois, nous le disons, le Québécois moyen n'a plus de capacité de payer davantage, que ça soit au niveau des taxes des commissions scolaires, que ça soit au niveau de l'augmentation des tarifs, au niveau de l'augmentation des impôts. Nous savons très bien que, si nous sommes trop généreux pour une période de quatre ans, les Québécois, le payeur de taxes va être celui qui en souffrira le plus.

En bout de course, lorsque nous voyons les nouvelles… La ville de Montréal en ce moment, une autre étude qui vient de sortir, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui indique — c'est tout frais — que Montréal... d'ailleurs Montréal que le gouvernement a refusé de mettre en tutelle, que, si nous avions eu, dans le fond, les mêmes types de régimes entre le privé puis le public, Montréal aurait économisé presque 1 milliard de dollars dans les dernières années, compte tenu que le niveau des avantages sociaux et des salaires de la fonction publique montréalaise est 43 % supérieur et que les coûts, les coûts d'administration de Montréal ont tout simplement augmenté d'une manière vertigineuse dans les cinq dernières années.

Les exemples sont nombreux. Nous avons vu la même chose avec les reportages concernant l'Hydro-Québec et les régimes de pension. À quel moment cela va-t-il s'arrêter? À quel moment le gouvernement, sachant qu'il a manqué sa cible par presque 250 millions du déficit, à 1 750  000 selon les dernières données du mois de mars, et que, compte tenu du ralentissement économique, la baisse des revenus d'impôt, entre autres des particuliers, n'aura probablement pas l'occasion de se rattraper bientôt, surtout pas avec la grève que nous avons connue dans la construction, eh bien à quel moment le gouvernement va-t-il accepter de considérer qu'il ne peut pas octroyer sans étude comparative, sans non plus donner de la flexibilité à la partie patronale, des augmentations salariales comme celles qu'on voit dans le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui?

En définitive, nous réitérons la position de la Coalition avenir Québec, à savoir que nous souhaitons une loi, qui ne soit pas... qui ne dépasse pas un an, pour forcer le retour au travail, mais nous souhaitons une entente négociée. Et, pour faire en sorte que les parties soient sincèrement motivées à le faire, il faudrait que les hausses prévues ne servent qu'à protéger le pouvoir d'achat des travailleurs. Et le meilleur barème que nous puissions avoir à cet effet, c'est simplement de se coller sur l'indice des prix à la consommation.

Et, M. le Président, en terminant, j'aimerais rappeler, en cette Chambre, que le modèle québécois, tôt ou tard, il faut peut-être commencer à le revoir. Dans la négociation que nous avons vue entre la partie patronale et la partie syndicale, oui, c'est vrai que les patrons ont tablé des demandes pour avoir davantage de flexibilité, mais je rappellerais qu'il n'y a pas beaucoup de juridictions au monde où une convention collective ne se négocie pas entre une compagnie et son syndicat, mais c'est tous les employés d'un secteur donné; et on se retrouve devant des psychodrames. Et on sait très bien qu'avec les organisations syndicales, à chaque fois que nous avons une concession, il est impossible par la suite de la revoir, et nous arrivons avec des coûts de construction au Québec qui sont beaucoup plus importants que nos voisins, que ça soit l'Ontario, que ça soit les États-Unis. Et ça, ça nous coûte cher, à nous, ça nuit à notre productivité, ça nuit à la possibilité, pour les Québécois, d'attirer des entreprises. Et, un jour ou l'autre, il faudra bien qu'on s'assoie ensemble à l'Assemblée nationale pour adresser ce genre de problème là. Et ça commence peut-être aujourd'hui avec une meilleure approche sur le projet de loi n ° 54. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de La Prairie. Alors, je cède maintenant la parole au député de Blainville, en vous rappelant, M. le député de Blainville, qu'il reste 3 min 30 s aux députés indépendants. M. le député de Blainville.

M. Daniel Ratthé

M. Ratthé : Merci, M. le Président. Je vais tenter de les utiliser à bon escient. Et j'allais dire : Que de temps perdu au cours des derniers jours, semaines et mois, puisque, si je reprends les paroles de la ministre du Travail, à la fin du mois d'avril, les négociations ont débuté, il y a eu 38 rencontres, et, pendant ces 38 rencontres là, on le mentionnait, il y a eu des signaux d'alarme qui ont été donnés un peu partout dans le domaine de la construction, et on n'a rien fait. On n'a pas voulu, au bout d'une vingtaine de rencontres peut-être, comme les deux autres secteurs, demander à un médiateur de s'impliquer. On a eu droit à un déni catégorique sur une loi spéciale, puis, ensuite de ça, on a eu droit à un peut-être, par la suite on a eu droit à 48 heures, à une semaine, à deux semaines. Et pourtant, ici, en Chambre, tous les membres de l'opposition se posaient de sérieuses questions sur la situation qui prévalait dans le domaine de la construction et surtout au niveau des négociations.

M. le Président, je demeure dans un quartier en plein développement, j'ai au moins une dizaine de maisons qui entourent la mienne aujourd'hui, et je peux vous dire qu'au cours des dernières semaines il ne s'est pas passé grand- chose sur les chantiers de construction, on le sait. Et ça a des conséquences très graves, très graves, sur les familles qui devaient emménager. Pour beaucoup d'entre elles, une première maison, c'est important. Et aujourd'hui… bien, demain, il y a de fortes chances qu'une grande majorité de ces familles-là ne puissent pas entrer dans leurs maisons et doivent prendre des mesures autres. Il me semble que ça aurait été un signal qui aurait pu faire en sorte que le gouvernement aille plus vite dans le déploiement d'un médiateur, dans l'envoi d'un médiateur. Il me semble que, quand on a vu qu'après quatre, cinq jours, cinq jours dans le premier cas, six jours dans le deuxième cas, on avait réglé une situation, deux secteurs de la construction avaient réglé une situation, il me semble qu'on aurait pu prendre une décision d'envoyer tout de suite un message clair au troisième secteur. Et évidemment on n'avait pas eu le choix, mais on aurait peut-être eu cinq jours, six jours... Il y a une semaine, on aurait pu être ici, plutôt que maintenant, à la dernière minute, pour voter une loi spéciale, M. le Président. Non, plutôt que ça, on a laissé… préféré se détériorer la situation.

Alors, pourtant, ce qu'on nous dit, c'est qu'on ne voulait pas s'immiscer dans les négociations, qu'on ne voulait pas imposer des règlements de travail. Pourtant, quand on regarde le projet de loi, maintenant on impose une entente pour les quatre prochaines années, on impose un taux d'augmentation pour les quatre prochaines années. Ça, c'est assez étonnant, M. le Président, quand on regarde ça, ce taux d'imposition, alors qu'on souhaite… Et on ne met pas d'obligation de résultat, on souhaite que les parties se réunissent. Pas d'échéancier, pas de calendrier, pas d'obligation de résultat, on espère qu'ils vont se réunir à nouveau. On espère qu'ils vont négocier en disant : On ne veut pas s'immiscer, mais, de l'autre côté, on leur impose des conditions de travail, à tout le moins des taux d'augmentation année après année. Et, à mon sens, si on ne voulait vraiment pas s'immiscer, bien je pense qu'il fallait faire les choses autrement. Et un réel geste de non-gérance de la part du gouvernement aurait été plutôt de ne pas imposer des conditions pour les quatre prochaines années et encore moins des taux d'augmentation salariale pour les quatre prochaines années.

Alors, M. le Président, le temps s'écoule assez rapidement, je pense que mon temps est presque écoulé, ce que je souhaite, c'est que nous en arrivions finalement à une entente au bout de nos travaux, une entente qui favorisera les deux parties, autant la partie patronale que syndicale. Et je ne pense pas, M. le Président, que de donner ou d'imposer des conditions pour les quatre prochaines années soit la solution qu'il faille valoriser. Merci, M. le Président.

• (18 heures) •

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Blainville. À ce moment-ci, j'aimerais rappeler le temps qu'il reste pour chacun des groupes : pour le gouvernement, 1 h 36 min, pour l'opposition officielle, 1 h 12 min 30 s, et le deuxième groupe d'opposition, 13 min 30 s. M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Gilles Chapadeau

M. Chapadeau : Merci, M. le Président. Écoutez, c'est avec un brin d'émotion, d'un peu de nervosité aussi que j'interviens sur ce projet de loi là, un brin d'émotion parce que je viens — et je pense que ça a été mentionné à quelques reprises — du monde des travailleurs. Les 30 dernières années, avant mon entrée en politique, je les ai passées dans ce monde-là, dans le monde des travailleurs. Et, évidemment, me retrouver ici, à l'Assemblée nationale aujourd'hui… avec fierté que je le fais, parce que je représente encore des travailleurs dans mon comté, des familles… Mais je me retrouve ici comme député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue et adjoint parlementaire à la ministre du Travail.

J'aimerais, dans un premier temps, M. le Président, saluer le travail des gens de l'équipe du ministère du Travail. Quand j'entendais les oppositions parler d'improvisation, j'ai vu, j'ai été témoin au cours des dernières semaines de l'ardeur, de l'acharnement et de la volonté tant de la ministre que des gens qui l'entourent pour en arriver à une solution négociée dans l'ensemble des cas. Ils ont été présents tout au cours du processus. Ils ont mis en place, et la ministre a mis en place tous les éléments nécessaires pour permettre à ce qu'il y ait une entente, évidemment. Et ça a porté fruit, il y a 100 000 travailleurs qui sont retournés au travail avec une entente négociée. Donc, l'énergie qui a été mise par l'ensemble des gens du ministère, par la ministre a porté fruit. Et ça a été reconnu d'ailleurs, ça a été reconnu dans un article duDroit qui disait : Une patience payante. Donc, oui, être patients, mais on s'en retrouve aujourd'hui avec 100 000 travailleurs qui ont une entente négociée. Depuis le début... Et je me souviens du discours d'ouverture de la première ministre du Québec, qui disait : Notre gouvernement va être un gouvernement de dialogue. Alors, c'est dans cet esprit-là, dans l'esprit du respect des parties qu'on a amorcé... on a travaillé dans ce dossier-là.

Et, quand j'entendais tantôt des espèces de leçons de crise, de gestion de crise, je me rappelais la crise étudiante. Aujourd'hui, et heureusement, c'est derrière nous parce qu'il y a eu un sommet sur l'éducation supérieure. Il y a des chantiers qui sont en cours, il y a du travail qui se fait. Je pense au régime de redevances minières. Oui, ça a tardé, mais on est atterris avec quelque chose qui fait l'ensemble… l'affaire des parties, qui fait l'affaire des entreprises, qui fait l'affaire des travailleurs, qui assure des emplois. Dans un comté comme le mien, vous comprendrez que ça a été un sujet assez délicat. Mais le résultat final en est un qui plaît à l'ensemble des intervenants. Donc, l'esprit du dialogue, c'est ce qui nous anime, et, franchement, de recevoir ce genre de leçon là, ça me fatigue un peu. Il fallait quand même que je le soulève, parce que je pense qu'on n'a pas trop de leçons à recevoir sur ce côté-là.

Évidemment, les oppositions auraient souhaité une intervention rapide. Mais une intervention rapide... Il faut quand même respecter les parties en place. Et les parties étaient à négocier, les parties étaient à la table de négociation, et il y avait tout lieu de croire ou d'espérer qu'il y aurait finalement une entente négociée. Depuis 26 ans, il y a une paix industrielle dans ce secteur-là, et, compte tenu que les gens étaient assis à la table de négociation, je pense qu'il y avait lieu de croire qu'on pouvait en arriver à une solution négociée, et la preuve, c'est que ça a fonctionné pour deux secteurs.

Je vous disais : C'était avec un brin d'émotion, mais en même temps beaucoup de fierté. Beaucoup de fierté, pourquoi? Parce que je sens que le gouvernement que je représente aujourd'hui a respecté les parties, l'ensemble des parties, tant les travailleurs que les employeurs. Et, si je me lève aujourd'hui puis que je suis fier de le faire… Évidemment, j'aurais souhaité qu'on n'ait pas à intervenir avec une loi spéciale. Mais, quand je regarde le contenu de la loi, c'est une loi responsable qui invite les patrons et les syndicats à poursuivre la négociation, contrairement à ce qui a été dit aujourd'hui. À travers du projet de loi, il y a une possibilité, ils peuvent retourner se parler, ils peuvent continuer de se parler jusqu'à ce qu'ils s'entendent. Et je suis particulièrement heureux de voir qu'il y a une augmentation de salaire qui est prévue, ce qui s'est appliqué dans les autres conventions collectives qui ont été signées.

Je veux juste rappeler, pour ceux qui ne le savent pas, mais, il n'y a pas de rétroactivité dans le secteur de la construction. Donc, la convention collective s'est terminée en avril, et là, on est en juin. Les nouvelles mesures s'appliqueraient le 2 juillet, mais pendant cette période-là, il n'y a pas de rétroactivité. Donc, je pense que c'est important. Il y a eu des pertes salariales à cause de la grève, il y a des pertes aussi à cause de la rétroactivité. Du fait qu'il n'y a pas de rétroactivité, je pense que c'est important qu'il y ait cette augmentation de salaire là. Donc, à mon avis, puis là où je me sens confortable, c'est sur ces éléments-là, c'est le fait que, bien, les travailleurs et les travailleuses — il n'y a pas assez de travailleuses, en passant, dans la construction, il devrait en avoir plus... mais les travailleurs... et il en existe, des travailleuses dans la construction — vont... ceux qui sont... vont bénéficier des mêmes augmentations salariales de ce qui a été signé avec les autres secteurs. Donc, moi, ça m'apparaît tout à fait juste et correct que les travailleurs qui vont entrer au travail puissent le faire avec une augmentation de salaire.

La ministre a mentionné ce matin, à la période des questions, à quel point était important le retour sur les chantiers… se fasse rapidement, mais que ce retour soit productif. Moi, au cours des dernières semaines, j'ai parlé aux travailleurs, mais j'ai parlé aussi aux employeurs. Et ce que les employeurs cherchaient, ce que les entrepreneurs cherchaient, ou ce qu'ils ne cherchaient pas, c'est une loi spéciale. Ils ne souhaitaient pas une loi spéciale. Ils souhaitaient de voir les travailleurs rentrer avec une convention collective négociée. C'est ça, le souhait des gens que j'ai rencontrés dans mon comté, tant des employeurs que des travailleurs, parce qu'ils voulaient avoir des gens qui soient heureux, qui soient... rentrent au travail avec le sentiment d'avoir été respectés. Et là où je me sens confortable avec le projet de loi qui est déposé, j'ai l'impression... Puis j'invite l'ensemble des parlementaires à respecter ces travailleurs-là. Vous savez,  le travail sur la construction, c'est un travail qui est difficile. Mme la première ministre en parlait ce matin, des intempéries, elle parlait des conditions dans lesquelles les travailleurs travaillent. Moi... C'est les gens qui sont appelés… Puis surtout dans le secteur qui nous concerne aujourd'hui, c'est des gens qui sont souvent loin de leurs familles. Donc, j'invite le respect... Le respect, ce serait de leur donner ce qui a été signé dans les autres conventions collectives.

Nos travailleurs de la construction, c'est des gens qui sont bien formés. Les travailleurs de la construction, le secteur de la construction au Québec, il a une réputation... en Amérique du Nord, les travailleurs ont la réputation d'être les meilleurs. D'ailleurs, on a des travailleurs de la construction qui sont en Alberta puis ailleurs dans le monde parce qu'on a une main-d'oeuvre qui est bien formée, parce qu'on a des gens qui ont le coeur au travail. Donc, quand on a des gens comme ça... Puis on le sait que, le retour au travail, il faut que ça se fasse de façon productive. Puis, quand j'ai parlé aux entrepreneurs, ils m'ont dit : Gilles, on espère, nous, que ça va se faire et que ça va se faire dans le respect. Et c'est ça, la volonté des gens, des entrepreneurs que j'ai rencontrés de mon coin de... de mon comté, qui souhaitaient franchement avoir une entente négociée. Les gens sont fiers du travail qu'ils font, ce sont des gens fiers. Et on n'a qu'à voir le travail qui est fait. Tout ce que les gens veulent, c'est continuer de bâtir, c'est continuer de construire.

Et moi, je veux saluer aussi, parce que le temps file, mais je veux saluer la façon dont ça s'est passé durant ce conflit-là : dans le calme, comme dans les rues aujourd'hui, là, pas comme dans les rues en 2012, là, mais comme dans les rues aujourd'hui, à l'image de ce que c'est aujourd'hui, en 2013, sous notre gouvernement. Ça s'est passé dans le calme, l'ensemble des chantiers, puis ça impliquait quand même 175 000 personnes. Ce n'est pas évident, mais ça s'est passé dans le calme. Donc, je veux saluer les patrons, mais je veux saluer aussi les syndicats, je veux saluer les travailleurs, ceux qui étaient impliqués dans ce conflit-là pour la façon dont ils se sont comportés, de façon, à mon avis, exemplaire.

Donc, je n'ai pas de doute. Ce matin, j'entendais des représentants syndicaux qui disaient : Nous, on va respecter la loi. Je n'ai pas de doute qu'ils vont respecter la loi, je n'ai pas de doute que ça va bien se passer, mais il faut que ça se passe dans le respect, et, dans le respect, ça serait à tout le moins de leur donner les augmentations salariales qui sont prévues, qui ont été signées dans les autres conventions collectives. Ça, ça serait de démontrer du respect envers les travailleurs et les travailleuses de la construction. Et je souhaite... J'appelle l'ensemble des parlementaires à démontrer ce respect-là envers ces travailleurs-là, qui sont importants pour l'économie du Québec. Le secteur de la construction est important pour l'économie du Québec. Si c'était important, c'est parce qu'il y a des travailleurs, il y a des bras en arrière de ça. Il y a des gens... Il y a du génie. Il y a des gens intelligents. Il y a des gens qui mettent tout en oeuvre à tous les jours pour faire le meilleur travail possible. Merci, M. le Président.

• (18 h 10) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. M. le whip en chef de l'opposition officielle et député de Lotbinière-Frontenac, à vous la parole.

M. Laurent Lessard

M. Lessard : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour d'intervenir sur ce projet de loi, donc une loi spéciale qui appelle tous les députés de l'Assemblée nationale en cette fin de semaine de juin, donc 30 juin qui, faut-il le rappeler, demain, hein, 1er juillet, donc grand déménagement au Québec, donc des unités résidentielles. Pour connaître les impacts, M. le Président, demain, il y en a qui se cassent la tête, s'ils vont pouvoir rentrer dans leur logement, puisqu'à cause de l'action ou de l'inaction du gouvernement à régler une crise anticipée, prévue et prévisible… donc n'a pas pris les actions appropriées pour faire en sorte que demain il y a des mères de famille puis des pères de famille, des individus, des personnes seules, personnes âgées qui ne trouveront pas le logement approprié puisque d'avoir fait éterniser, donc, le problème de la construction dans la négociation, fait en sorte qu'il y a des retards. Donc la personne va quitter son logement pour lequel elle a résilié son bail et, demain, elle va être… se frapper donc à une porte close puisque le chantier de construction ne sera pas livré.

Ce qu'on leur envoie comme avis actuellement, c'est : N'oubliez pas d'aller entreposer vos affaires ailleurs. Donc, du déménagement, du camionnage, de l'entreposage, des frais additionnels, du redéménagement éventuellement de... Probablement qu'on invite tous les Québécois à… de loger leur monde et leurs familles en tendant la main pour leur trouver une solution temporaire parce que demain la vraie vie commence. C'est : Il faut que tu déménages puis il faut que tu fasses tes changements d'adresse. Puis les immeubles ne sont pas livrés à cause de ce conflit qui a perduré.

J'ai entendu le collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, là, qui parlait aussi du respect et du calme. C'est tellement calme dans le comté de Frontenac que... parce que les travailleurs sont tous rentrés chez eux. Il y a actuellement près de 300 mégawatts de construction d'énergie éolienne. Et, sur 600, 700 travailleurs de chantier, ils sont tous retournés chez eux puisque le travail n'est pas disponible. Et ce n'est toujours pas réglé. Donc, ça, c'est un calme qui ne nous satisfait pas dans notre comté puisqu'ils ont arrêté de consommer et aller dans les restaurations. Ils ont cancellé les chambres et pensions. Les roulottes de chantier sont vacantes actuellement. Donc, un impact économique très mesurable, très senti dans la ville, très senti sur la location de camions, sur la location d'équipements, sur l'éclairage, sur les services donnés aux personnes, etc. Donc, c'est très, très mesurable.

L'autre aspect, je l'entendais, lui qui est un ancien syndicaliste, parler de respect. Curieusement, un syndicaliste qui parle de respect dans une loi spéciale qui impose des conditions de travail... Honnêtement, par chance que j'étais assis, j'ai failli tomber. C'est à peu près tout le contraire de… Ce que demande normalement un syndicaliste, c'est de négocier, de respecter son droit à faire son travail de représentation de ses membres, et non pas de se voir imposer une convention collective taillée sur mesure, c'est-à-dire sur la mesure des trois dernières années… je vais revenir au texte… mais surtout dans la démarche. Alors, actuellement, je pense que la ministre du Travail n'avait pas lu complètement bien la situation. Mon collègue, donc, député de...

Une voix :

M. Lessard : Non. Qui est critique chez nous en matière de travail, donc, dans le secteur de Laval…

Une voix :

M. Lessard : Chomedey, alors  —  excusez-moi  —  donc avait envoyé des signaux très, très clairs à la ministre. Il me semble que les conditions étaient parfaites pour avoir un conflit, à savoir un maximum de chantiers ouverts avec un maximum de travailleurs dans des grands chantiers. Donc, lorsque tu les démobilises, c'est coûteux d'y retourner. Alors, tu es obligé de fermer le chantier par métier, par corps de métier, de protéger ton chantier, les mettre dans l'avion, les retourner chez eux. Grands déplacements. Grands déménagements. Ce qui fait que la séquence de reprise ne peut être qu'ordonnée sur des semaines pour s'assurer d'une reprise normale lorsque tu déplaces 1 500, 1 700 personnes; nous prenons en exemple La Romaine.

Deuxièmement, de toute évidence, les travailleurs, eux autres, savaient très bien ce qu'ils allaient faire. Ils ont livré la paie de vacances, ils ont dit aux travailleurs : Cassez-vous pas la tête, de toute façon, le gouvernement ne regarde pas vers où on s'en va. On va vous donner votre chèque, partez à la maison, quittez vos emplois, partez du Nord à travailler, venez-vous en au Sud pour ne pas travailler, allez-vous-en en vacances à quelque part, parce que, de toute évidence, vous ne retournerez pas dans le Nord avant les vacances de la construction, avant… Donc, on ne va pas remobiliser tout ce monde-là à remonter dans le Nord en avion ou en hélicoptère... D'ailleurs on a vu que Pascan — mon collègue de Louis- Hébert en a parlé — a, donc, congédié tous ses pilotes, une bonne partie de ses pilotes, sa main-d'oeuvre d'entretien, etc., parce que, de toute évidence, le choix, c'est de ne pas y retourner.

Les autres signaux évidents : RONA. RONA  —  c'est un moteur, hein, il fournit des matériaux au secteur résidentiel principalement  —  a dit : De toute évidence, le conflit ne va pas se régler dans le temps utile, je vais donc faire des mises à pied. Les fabricants comme Permacon, les grandes cimenteries ont décidé, devant la lecture de ce qu'ils voyaient, devant la gestion du conflit, de faire des mises à pied, de fermer les opérations, parce que... pour limiter les pertes.

Alors, dans le secteur des pertes, que ce soit le ministre des Finances, la première ministre du Québec, que ce soit la ministre responsable de la Politique industrielle, tout le monde minimise actuellement en disant : Ah, ce n'est pas des milliards, rassurez-vous, là. Des milliards, ça fait peur. Mais il y a des pertes, c'est sûr, c'est évident. Du monde qui ne travaille pas, qui ne livre pas des chantiers, ça fait en sorte que le propriétaire du chantier, le responsable du chantier, il passe son temps maintenant pas à gérer sa main-d'oeuvre et à fournir le bien utile en temps réglementaire; il est dans ses pénalités, il est retourné voir sa caution, il est retourné voir son banquier. Et, chaque jour qu'il dépasse est, en fonction du chantier, des sommes colossales d'intérêts ou de renégociation pour s'assurer que son chantier demeure assuré. Ça, c'est le contexte dans lequel on est.

Chez nous, demain, les personnes inaptes, 25 à 30 personnes inaptes ne recevront pas leur logement sous supervision de... avec l'Office municipal d'habitation et l'hôpital. Ces personnes-là étaient dans la ville de Thetford, donc dans des logements, ils ont quitté, envoyé un avis pour aller dans des logements supervisés. Demain, ces personnes-là doivent être prises en charge par toute autre personne ou organisme parce que les logements ne seront pas là.

Donc, c'est des drames, parce que, le toit, le premier toit, c'est important, c'est ta sécurité. Alors donc, je pense qu'il faut admettre qu'il y a eu des conséquences assez importantes, tant sur le plan humain, pour la famille, pour l'école, le choix des écoles... Tu amènes ta famille, tu amènes tes enfants, M. le Président. Demain matin, tu veux que... Bon, parce que la rentrée des classes, ça se planifie, ton logement, on ne sait pas quand est-ce qu'il va être livré, ton inscription scolaire est remise en question... On n'a pas besoin de ça.

Deuxièmement, dans le secteur institutionnel, commercial, ce secteur-là est, de l'économie, fort important. Et la ministre nous dit : Bien là, ils sont arrivés à une impasse, on a nommé un négociateur spécial. Ils nous disent que ça ne se fait plus. On rappelle la Chambre, on convoque tout le monde.

Et, j'ai entendu ça depuis un certain temps, là, ils semblent dire : Bien, voici, on les respecte. On les respecte tellement qu'on leur impose leur convention. On impose la convention... Je vais la lire, pour ceux qui nous écoutent, qui suivent ça depuis le début. L'article 11 dit : « Les conventions collectives expirées... » « Conventions collectives expirées », M. le Président, savez-vous c'est quoi? C'est des conventions qui ont été négociées. Le ministre des Finances, il dit : Bien, elles avaient été négociées, on les a reprises, on les a remises dedans. En voulant dire : Ça sera ça, votre négociation nouvelle. Quand c'est expiré, c'est que ça ne tient plus. Et, si les parties n'ont pas été capables de s'entendre sur des mesures qu'ils pensaient dépassées, parce que le patron est en demande, le syndicat est en demande, et, dans une nouvelle convention, autant du côté salarial, du côté normatif, les avantages, les... les assurances collectives, les fonds de pension, les frais de déplacement, les frais de chambre et pension, les frais... Vous savez, là, un travailleur, c'est des chantiers temporaires pour une certaine durée, puis, après ça, ils vont travailler ailleurs. C'est ça, l'industrie de la construction, c'est autant de déplacements qu'il y a de chantiers.

• (18 h 20) •

Alors, ils disent : Pas de problème, on prend la convention. Tu sais, il le dit comme ça. Celles qui étaient expirées, dont ils ne veulent plus et applicable au secteur industriel et institutionnel, commercial, sont renouvelées, alors, avec tout ce qu'il y a dedans, là, tout ce que je vous ai mentionné, là, des... et lie les parties jusqu'au 30 avril 2017. Non seulement ils ne sont plus satisfaits de cette convention-là, mais ils leur disent en plus : Elle va être renouvelée pour les quatre prochaines années, et, en passant, on va vous donner les augmentations salariales prévues : 2 %, 2,1 %, 2,2 %, 2,3 %, un total de 8,6 %, qui est plus élevé que le secteur résidentiel, lui, qui avait réussi à s'entendre. Il y a 100 000 travailleurs qui ont réussi à s'entendre sur des augmentations de 7,3 %. Et j'entendais, de l'autre bord, dire… La première ministre disait : Une entente négociée, c'est mieux qu'une loi qui les impose. Bien, dans le cas qui nous concerne, bien, ce n'est pas vrai. Parce que dans le cas qui nous concerne, le secteur résidentiel passe pour les enfants, qui sont allés s'amuser à essayer de négocier puis à tirer des avantages sur différents aspects de leurs négociations. Ils concluent, on arrive en Chambre ici... Là, ils vont soumettre ça à leurs travailleurs, là, bientôt, là. Ils ont fait une entente de principe puis là il faut qu'ils aillent faire ratifier tout ça. Ils concluent, ils arrivent en Chambre, les autres ont passé à travers un processus, ils ne se sont pas entendus. Bien, résultat net, le résultat net sur l'aspect salarial est plus élevé que l'autre gang qui n'a pas… qui a négocié.

Savez-vous le résultat, qu'est-ce qui va arriver si ça doit rester comme ça? Bien, je vous prévois une affaire : Les 75 000 qui sont dans le secteur commercial, institutionnel et industriel, qui vont avoir plus, ça va faire en sorte que les 100 000 autres, M. le Président, et je peux vous l'assurer, quand ils vont aller pour ratifier, ils vont dire : Non, non, non. Vous êtes en train de nous soumettre un cadre qui comprend des augmentations salariales moins importantes que ceux qui se sont fait imposer la loi? Bien, je vous dis, à partir du moment que, si on règle de cette façon-là, par imposition des conditions salariales, les 100 000 autres sont dans le chemin demain matin. Ils sortent puis eux autres s'en vont en grève parce qu'eux autres, ils ont encore le droit de grève.

Dans la loi spéciale, dans les relations de travail, ça impose des conditions salariales. Ça ne règle pas les relations de travail, ce n'est pas des relations de travail. Ils leur disent : Oui, oui, oui. Le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue a dit : Oui, mais ils vont continuer de pouvoir s'entendre. M. le Président, dans une loi spéciale, savez-vous qu'est-ce que ça sous-tend? Ça impose, la convention, ça règle le salarial puis le normatif puis, en plus, ça leur dit, dans les lois, parce qu'il y a d'autres articles que l'article 11 : Tu n'as pas le droit de lock‑out puis tu n'as pas le droit de grève pendant les quatre prochaines années. Mais, en passant, continue de négocier. Ah! Oui, oui. Ah! Ça, tu as le droit de jaser, là, c'est écrit : Si tu veux, si les parties veulent s'entendre sur ce qu'ils ne s'entendaient pas puis ce qu'on leur impose. Puis on leur dit : C'est pour quatre ans, mais, en partant, quand tu ne seras pas content parce que l'autre ne veut pas entendre ta négociation, bien, je veux rien que t'aviser que tu n'as plus le droit de grève. Puis, je veux rien que t'aviser, tu n'as plus le droit de lock‑out non plus, même si tu veux leur imposer une certaine façon de faire.

Quand tu n'as plus le droit de lock‑out puis tu n'as plus le droit de grève, ça s'appelle comment? Ça s'appelle du jasage. Tu as le droit de jaser sans contrainte, sans prévalence de tes droits. Tu n'en n'as plus, de droits. Ce n'est pas des relations de travail tel que le prévoit dans le Code du travail. On suspend ces droits-là pour imposer une convention à 75 000 puis on dit aux 100 000 autres : Vous avez le droit, vous autres, de continuer de faire la grève. Alors, je trouve ça un peu aberrant. C'est pour ça que la proposition...

Et pourquoi ça fait 27 ans qu'ils n'ont pas demandé à l'État de déterminer une loi spéciale? Parce que la dernière fois qu'ils l'ont fait, hein… C'est pour ça qu'il y avait une paix. C'est qu'ils se sont dit : Oui, on est bien mieux de s'entendre parce que la dernière fois, le ministre, qui était ministre du Travail à ce moment-là, député de Brome-Missisquoi, ministre d'un gouvernement libéral, a dit : Pas de problème. Vous voulez vous en remettre à l'État pour régler vos négociations? On va vous en faire une, loi. La première loi, c'est que vous allez retourner travailler. Ça, on est pour ça. Demain matin, il y a trop de conséquences pour le Québec. Mon collègue d'Outremont, ancien ministre des Finances, en a fait une très belle, démonstration sur les conséquences, les impacts quotidiens et les objectifs, donc, qui ne sont pas atteints au niveau de l'atteinte des revenus de l'État. Donc, si ce n'est pas atteint, on est pour le retour au travail. Mais, dans cette loi- là, ils ont dit : Tu vas retourner travailler, mais tu vas retourner négocier, puis je te donne un an. Voici, je t'assure que, dans la prochaine année, tes conditions de travail, je t'assure... Puis là la proposition du chef du Parti libéral du Québec… Il dit : On est pour les familles aussi, on est pour les familles. Les travailleurs sont pris en otage là-dedans, puis on est pour le maintien de leur pouvoir d'achat, donc on va parler d'indexer leurs salaires à l'indice des prix à la consommation de la prochaine année, mais vous allez retourner négocier.

C'est pour ça qu'il n'y a jamais eu de loi spéciale depuis ce temps-là, parce qu'on a cru dans la capacité des parties de régler leurs propres conflits sur une base négociée. Alors, c'est le devoir le plus important qui a été donné dans une ancienne loi spéciale datant de 1986, et c'est l'esprit de la loi donc qu'on veut bonifier, améliorer et amener les parties... Puis il manque des chapitres dans cette loi-là si on y croit. On n'imposera pas les conditions de travail, on va leur donner le cadre, un, pour retourner travailler, et, deux, de retourner aux tables de négociation. Puis on va donner un cadre qui va dire : Voici ce que vous devez faire pour respecter le fait qu'il y aura des négociations jusqu'à la date permise.

Alors donc, dans ce sens-là, je pense que ça respecte mieux l'esprit de ce que sont les relations de travail au Québec. Et les relations de travail au Québec, ça vient aussi dénoncer un aspect de cette convention-là, qui a l'air à dire : Écoutez, vous ne vous entendez pas, je vais faire mieux que ça, je vais vous donner un gros bonbon, je vais vous geler ça... je vais vous augmenter pendant les quatre prochaines années, je vais vous maintenir les mêmes conditions qu'il y avait à la dernière, puis vous pourrez aller jaser pour la forme parce que c'est ce que dit à peu près l'article 12 là-dedans. Alors donc, je pense que, sur le plan productif, le plan du respect des parties, je pense que la proposition libérale amène cette adhésion-là. Je pense que la CAQ va dans le même sens, se joint à nous là-dedans, et ça nous donnera donc une meilleure façon de travailler au Québec.

Puis, en passant, si c'était prévisible, je pense que la ministre du Travail aurait dû prévoir les coups avant, poser des gestes qui allaient régler cette situation-là, qui amène tous les Québécois à payer encore plus cher. Puis, en tout cas, honnêtement, quand ils vont recommencer à travailler, ils vont y aller en double, hein? Si les chantiers rouvrent aujourd'hui, c'est du salaire en double, c'est des frais additionnels, c'est non prévu, etc. Je pense qu'on aurait pu se passer de ça parce qu'honnêtement le Québec, actuellement, le marché de l'emploi au Québec reste difficile. Le marché du travail, au Québec, a supporté les quatre dernières années, les trois dernières années amplement pour la diminution aux États-Unis. Les États-Unis ne montent pas... n'ouvrent pas le marché à la vitesse dont on espérait. Ça s'essouffle au Québec, mais je pense qu'actuellement, là, il faut être capable de régler ce litige-là. Le retour au travail, c'est la façon dont on veut le faire, et les modifications pour bonifier le projet de loi donc seront dans ce sens-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Lotbinière-Frontenac. Je cède maintenant la parole à M. le député de Granby pour son intervention. Merci, M. le député.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir au nom de ma formation politique sur le projet de loi n °  54, cette loi spéciale sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Pour ceux qui viennent de se joindre à nous, bien, on est ici depuis ce matin pour débattre de cette loi spéciale, trouver une solution, un terrain d'entente pour prévoir la reprise puis l'exécution normale des travaux qui ont été interrompus en raison de la grève dans l'industrie de la construction le 17 juin dernier.

Pourquoi on en est là aujourd'hui, en ce dimanche, M. le Président? Je pense que, quand on regarde la situation très froidement, on pouvait certainement imaginer, dans les deux dernières semaines à l'Assemblée nationale, qu'il y aurait une grève. Oui, je suis persuadé que ce plan de match, autant du côté de l'alliance syndicale, puis peut-être même du Conseil du patronat… On a décidé de commencer à négocier peut-être sur le tard. Autant le collègue du Parti libéral de Chomedey, autant mon collègue de Lévis ont commencé à poser des questions deux semaines avant la fin de la session à la ministre du Travail en lui disant : On s'en va où? Est-ce que les négociations vont bien? On vient de commencer à négocier, mais pourtant on sait déjà qu'on s'en allait vers une date butoir où on allait paralyser le Québec assez, assez rondement et rapidement en imposant une grève donc dans le domaine de la construction.

• (18 h 30) •

Et, soudainement, M. le Président, l'Assemblée nationale, la session se termine le 14 juin ou à peu près, et, bizarrement, le 17 juin, le lundi, il y a grève, les négociations sont rompues. Bizarrement, les employés du domaine de la construction reçoivent leurs paies de vacances quelques jours plus tard. Il faut bien comprendre que ces employés reçoivent leurs paies de vacances par ordre alphabétique. Donc, c'est un processus de sept, 10, 15 jours, donc pas trop de stress de la part des gars. On s'en va en grève, on reçoit le chèque de vacances. Est-ce que cette vacance va durer deux, trois, quatre semaines? On ne le sait pas trop, mais il y a une chose qui était certaine, M. le Président, c'est que, dans tout ça, le gouvernement n'a pas mis ses culottes, parce qu'on savait et on pouvait très bien prévoir au début du mois de juin qu'on s'en allait vers cette grève. Et on s'en allait vers cette grève pourquoi? Parce que l'Assemblée nationale terminait sa session, il n'y aurait certainement pas de loi spéciale. Du côté de l'Alliance syndicale, on ne pouvait même pas imaginer qu'on rappellerait les députés à l'Assemblée nationale un 30 juin. Et, dans ce contexte, bien l'inaction et l'improvisation du gouvernement nous amènent aujourd'hui, deux semaines plus tard, à essayer de trouver un terrain d'entente sur cette loi spéciale que le Parti québécois veut faire adopter par tous les parlementaires ici, à l'Assemblée nationale.

Et, quand on regarde ce projet de loi, M. le Président, on essaie de comprendre et de trouver un équilibre. Mon collègue de Lévis l'a bien expliqué tantôt. Oui, il y a eu entente du côté du génie civil, il y a eu entente du côté du résidentiel, et là on est arrivés, dans le domaine institutionnel, commercial et industriel, à ne pas trouver de terrain d'entente. Pourquoi? Parce qu'il y avait peut-être trop de clauses normatives à revoir, un système qui était peut-être rendu un peu archaïque, on disait : On peut peut-être faire un peu de ménage dans tout ça, s'y attarder, prendre notre temps. Bien, c'est certain que, si on a commencé les négos sur le tard, à deux semaines de la fin de la session, bien on n'aura certainement pas réussi , puis ça le prouve aujourd'hui , à trouver un terrain d'entente, surtout, comme mon collègue de Lévis l'a encore une fois mentionné, que, le problème des clauses normatives, dans le dossier résidentiel et du génie civil, bien il y en avait peut-être une, puis on l'a retirée, puis on s'est entendus sur les clauses salariales.

Et, quand on regarde ce projet de loi, M. le Président, ça ne prend pas un grand stratège, ça ne prend pas de grands juristes, demain matin, pour s'asseoir, dire : Bien, les négociations sont rompues, on va prendre du 2 %, du 2,1  %, puis on va renouveler ça pour quatre ans, puis on dit : Bingo, c'est fini, on s'en va à la maison. Ah! Alors, quand on regarde ça, on se dit : C'est à la satisfaction de qui? C'est simple : les clauses normatives, on n'y touche pas. Donc, patronat, ACQ, assoyez-vous là, on s'en reparle dans quatre ans, puis, de l'autre côté, bien l'Alliance syndicale dit : Merci, bonjour, on a nos augmentations. Et, les acquis, c'est vrai qu'on n'y touche pas, mais on ne revoit même pas et on ne modernise surtout pas, surtout pas nos lois. Et mon collègue le disait tantôt : Pourquoi, quand on regarde le dossier des éoliennes, une éolienne coûte 250 000 $ au Québec puis, ailleurs au Canada, coûte 150 000 $? Il y a des questions à se poser. Pourquoi les grands projets au Québec coûtent beaucoup plus cher ici qu'ailleurs? Il y a des questions à se poser.

Alors, aujourd'hui, quand on regarde ce projet de loi, cette loi spéciale, on se dit une chose : Est-ce qu'elle est favorable à quelqu'un, à une association? Assurément, assurément, et c'est là que le bât blesse, parce qu'où on en est aujourd'hui au Québec, bien, il faut être capables de s'asseoir respectueusement et de trouver un terrain d'entente pour rendre le Québec plus performant, plus performant. On a les meilleurs travailleurs. Ça, on en convient. Maintenant, est-ce qu'on peut moderniser nos lois et les rendre encore plus performantes pour que le Québec puisse se tirer d'affaire vis-à-vis les autres provinces puis vis-à-vis le monde entier? Ça, c'est une autre paire de manches, parce que, quand on a les deux pieds dans le ciment, oh boy! c'est tough à bouger. C'est un peu ce que le Québec vit dans son système de santé, dans son système d'éducation, dans ses lois du travail. Et là le Parti québécois dit : On gèle tout ça quatre ans. Quatre ans. Pensez-vous deux petites secondes que l'Alliance syndicale va cogner à la porte de l'ACQ, du Conseil du patronat, dire : Bien, ça vous tente-tu, on va placoter, on va regarder, voir ce qu'on pourrait peut-être faire dans les quatre prochaines années pour essayer de moderniser nos lois? Jamais. Jamais ça ne va se passer comme ça. Jamais ça ne va se passer comme ça parce qu'on va s'asseoir encore sur des acquis qu'eux possèdent, puis, de l'autre côté, bien le Conseil du patronat, l'ACQ et tout ce monde-là vont attendre quatre ans à savoir est-ce qu'un jour ou l'autre le Québec va moderniser ses lois.

Et on est là aujourd'hui pourquoi? Pour adopter cette loi. Et mon collègue de Lévis l'a mentionné plus qu'une fois, très poliment, il n'a même pas réussi à obtenir une rencontre de 30 minutes avec un café avec la ministre du Travail pour être capables de discuter puis de comprendre ce qu'on pouvait mettre dans ce projet de loi, pas un 15 minutes. Ça aurait été la moindre des choses. Parce que ce que le gouvernement, M. le Président, n'a pas compris, c'est qu'il est minoritaire, minoritaire, en majuscules, minoritaire, donc discussion avec les deux oppositions pour trouver un terrain d'entente satisfaisant pour le domaine de la construction et tous les travailleurs du Québec. C'est ça, M. le Président, la réalité : minoritaire.

Donc, mon collègue de Lévis, respectueusement, a bien fait ce matin de le mentionner plus qu'une fois qu'il aurait fallu que la ministre du Travail, minimalement, s'assoie avec mon collègue, s'assoie avec le collègue des Finances, s'il le faut, aussi pour qu'on soit capables de trouver une entente satisfaisante pour tous les partis, pour tous les Québécois, pour l'économie du Québec.

Et aujourd'hui on n'en est pas là. Alors là, le Parti québécois, le gouvernement, là, est un peu pris, en se disant : Comment on va se débrouiller dans les prochaines heures pour être capables de sauver la face? C'est un peu ça qui est la situation, là. Comment on va se débrouiller pour sauver la face, face à ce projet de loi spéciale, pour ramener les travailleurs dans la paix mardi matin? Comme si, mardi matin, là, la guerre était prise sur les chantiers de construction. Non, la guerre ne sera pas prise. Mais le gouvernement, encore une fois, a agi en amateur. Son inaction, son amateurisme nous amènent aujourd'hui à avoir ce projet de loi spéciale sans qu'on ait pu en discuter, sans qu'on ait pu s'asseoir, les trois partis principaux à l'Assemblée nationale, incluant, s'il le faut, Québec solidaire, pour trouver une solution. J'ai bien dit  «incluant, s'il le faut ».

Alors, M. le Président, donc, c'est indéniable qu'aujourd'hui on va se coucher tard, c'est certain, pour essayer de trouver une solution, un terrain d'entente avec le gouvernement, les deux oppositions. Et on a posé plusieurs questions ce matin à la première ministre. J'en ai posé à la ministre des Ressources naturelles. Parce qu'au final ce projet de loi est important pour le Québec, ça, c'est indéniable, il y a des millions, des centaines de millions de dollars qui ont été perdus depuis les deux dernières semaines en termes de revenus, en termes de salaires pour les employés… et principalement pour un dossier que je connais un peu, celui d'Hydro-Québec.

La ministre des Ressources naturelles, je lui ai posé une question très importante ce matin, à savoir : Est-ce qu'elle a demandé à Thierry Vandal d'évaluer les impacts économiques de cette grève sur les chantiers d'Hydro-Québec? Juste pour la Romaine, M. le Président, juste pour la Romaine, c'est 1 600 travailleurs qu'on a mis dans des avions pour les ramener au sud en leur disant : On ne sait pas trop quand est-ce que vous allez revenir sur le chantier. 1 600 travailleurs. Et je vous mets au défi, ceux qui nous écoutent… On nous a dit que le salaire moyen était à 35 000 $ dans le domaine de la construction. Pas mal certain, moi, que ceux qui travaillent à la Romaine, ou même ailleurs, c'est peut-être le double, sinon le triple du 35 000 $. Alors, ça, c'est beaucoup de taxes, c'est beaucoup d'impôts qui sont redonnés au gouvernement, que ces familles ont de besoin.

Comme je vous ai dit tantôt, le scénario était idéal, M. le Président. La session de l'Assemblée nationale se termine le 14. Pouf! soudainement, on s'en va en grève le 17. Mon collègue a posé des questions pendant deux semaines. Même le collègue là-bas, qui se lève debout, du Parti libéral, en a posé, lui aussi, pendant deux semaines. Et la ministre leur a dit : Ne vous inquiétez pas, on s'en occupe, tout va bien aller. Non. Bien, aujourd'hui, on est à une loi spéciale, le 30 juin, la veille de la fête du Canada, à adopter une loi spéciale dans le domaine de la construction. Oui, bien qui l'aurait imaginé? En sept ans, je ne l'aurais jamais imaginé, à l'Assemblée nationale, d'être ici le 30 juin. Mais c'est notre boulot, on va le faire, puis on va le faire dans le meilleur intérêt de tous les Québécois, avec des parlementaires qui vont vouloir trouver une solution pour satisfaire les deux parties.

Et, je le disais, M. le Président, chez Hydro-Québec seulement, il n'y a pas juste la Romaine, il y a des dizaines de chantiers à gauche et à droite au Québec. Et il y a un coût relié à ça. Il y a des centrales qui ne seront pas en opération à temps et il y a un coût relié à ça. Mais Hydro-Québec, M. le Président, ce n'est pas grave, pas grave si on arrête deux, trois semaines. C'est quoi, 1, 2, 5, 10, 15, 20 millions de plus? Au final, qui va payer? Le contribuable.

• (18 h 40) •

Le Parti québécois a voulu faire adopter sournoisement, à la fin de la session, le projet de loi n° 25, que mon collègue a défendu, où on a parlé, M. le Président, de donner la possibilité de signer des contrats de gré à gré dans le domaine éolien. Le Parti libéral disait : Non, non, nous autres aussi, on est d'accord avec la Coalition avenir Québec, ça n'a pas de mautadit bon sens. J'ai vu le ministre des Finances se lever, dire : Ça n'a pas d'allure. Et, dans l'énoncé qu'on avait en main, M. le Président, et que mon collègue a eu la veille, ou même le soir même de cette commission parlementaire au salon des présidents, il y avait un impact tarifaire. Oui, on donnait donc la possibilité de signer des contrats de gré à gré pour la première fois, pour accélérer le processus puis mettre de côté ce que le Québec connaît, peut-être pas le mieux, mais l'appel d'offres plus bas soumissionnaire. Mais l'impact tarifaire qui était relié à ça, de 1,9 %, était refilé à qui? Le contribuable. Celui qui nous écoute. Celui qui paie sa taxe santé, celui qui paie un système d'éducation, la moitié de ses impôts, qui n'a peut-être pas de médecin de famille.

Et là la ministre des Ressources naturelles ne répond pas ce matin en me disant… ou en se disant : Je n'ai peut-être pas pensé d'appeler Thierry Vandal pour lui demander le coût relié à cette grève dans le domaine de la construction juste pour Hydro-Québec. Parce que c'est des dizaines, je suis persuadé, des dizaines de millions de dollars qui ont été perdus depuis deux semaines. Et cette facture sera refilée à qui? Au contribuable québécois, dans les prochains mois, dans les prochaines années, parce que c'est la seule façon que le Parti québécois a trouvée, la seule façon au lieu de s'attaquer aux vraies choses. Et je n'embarquerai pas plus longtemps sur ce débat, M. le Président, mais, au final, on doit trouver une solution, oui, pour ramener ces travailleurs mardi matin sur les chantiers, que la paix sociale continue. Et elle va continuer. Moi, je n'y vois pas de danger du tout.

Maintenant, il est hors de question qu'on accepte de cette façon ce projet de loi, de la façon qu'il a été proposé par le Parti québécois, si adopté. Aucune façon. On va signer une entente, j'en suis persuadé, avec le Parti libéral et, s'il le faut, avec le Parti québécois pour que cette durée de convention dure un an, que les augmentations de salaire soient reliées à l'indice des prix à la consommation, et que ces gens de l'ACQ, du Conseil du patronat, de l'Alliance syndicale puissent s'asseoir et puissent discuter pendant un an pour trouver une solution, et qu'on n'en arrive pas encore une fois à une date butoir à deux semaines d'avis pour retourner en grève. Ça, la ministre doit mettre ses culottes, doit nécessairement dire rapidement : Il faut que vous commenciez à négocier pour qu'on trouve un terrain d'entente le plus rapidement possible, pour l'intérêt et le bénéfice de tous les Québécois et de notre économie. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Granby. Je vais aller du côté ministériel maintenant et je vais céder la parole à M. le ministre responsable des Relations internationales. M. le ministre.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : M. le Président, merci. Comme plusieurs autres avant moi, je peux dire que ce n'est pas de gaieté de coeur que nous sommes ici aujourd'hui pour essayer de mettre un terme de façon non négociée à un conflit de travail.

Je suis un parlementaire relativement récent, mais j'ai quand même été frappé par la légèreté avec laquelle un certain nombre de mes collègues ici ont traité du droit de grève, du droit de grève, et, à les entendre, on aurait l'impression que c'est un élément superflu, nuisible et qu'il convient d'abandonner. Enfin, c'est la conclusion à laquelle je suis obligé d'en venir, parce qu'évidemment une grève, c'est toujours un échec, c'est l'échec d'une négociation, et c'est la volonté, une grève ou un lock-out, d'exercer un rapport de force, d'exercer de la force, d'exercer de la force sur l'autre mais aussi de se départir d'un certain nombre d'avantages. Dans ce cas-ci, il n'y a pas de rétroactivité, donc c'est des pertes salariales d'un côté. Lorsque les entrepreneurs se sont fait donner un pouvoir de lock-out, ils pensaient bien que ce n'était pas une bonne idée d'aller en lock-out, c'est pour un rapport de force. La société québécoise, comme les sociétés démocratiques, a déterminé que cet échec, ce prolongement de la négociation dans un rapport de force était un droit qui découle du droit d'association, et, pendant des années, au Québec, ce droit-là a été utilisé assez largement, puis, plus récemment, beaucoup moins, dans des circonstances exceptionnelles. Et la nature du débat qu'on a entendu ici, de la part des oppositions en particulier, m'a un peu frappé, parce que c'est comme si cet extraordinaire gain de pouvoir, lorsqu'on est contraint ou lorsqu'on détermine qu'il faut cesser le travail ou il faut cesser le travail de l'autre pour essayer d'arriver à une conclusion… que ce gain avait perdu de sa valeur, avait beaucoup perdu de sa valeur dans les propos des oppositions.

Bon, par exemple, pour la CAQ, le droit de grève ou de lock-out, maintenant, si j'ai bien compris, c'est un droit chronométré, c'est un droit qui ne doit exister que pour 48 heures. Alors, je suis un peu juriste de formation, je n'avais jamais vu, dans les ententes internationales, dans les chartes, l'idée d'un droit chronométré, qu'à l'avance, avant même que la première heure de grève n'ait lieu, un gouvernement de la CAQ, si un jour on a le malheur d'avoir ça, dirait : Écoutez, maintenant, le droit de grève, c'est un droit chronométré; vous avez le droit de grève de 48 heures, et ensuite l'État va intervenir. Alors, pour moi, c'est une dégradation de la reconnaissance d'un droit important, le droit de grève ou de lock-out, qui découle du droit d'association.

Du côté du Parti libéral, on a eu droit à la menace préventive, la menace préventive de suspendre ou d'éliminer ce droit. Avant même que la grève ne commence, avant même qu'on soit arrivés au moment de la date butoir pour la fin des négociations, le Parti libéral du Québec nous disait ici : Comment se fait-il que vous n'avez pas déjà commencé à écrire la loi spéciale? La négociation avait cours, la ministre du Travail l'a indiqué tout à l'heure, tous les jours il y avait des négociations, des rencontres de négociation, il y avait de la conciliation, il y avait de la médiation, mais, pour le Parti libéral, il aurait fallu, à l'avance, dire : Vous savez quoi? Nous n'allons pas respecter votre droit de grève. Nous n'allons pas respecter votre droit de lock-out. Nous vous disons à l'avance que nous devrions… Nous, si nous étions au pouvoir, disait le Parti libéral, nous écririons tout de suite la loi spéciale. Donc, c'était une suspension préventive du droit de grève.

Et combien de jours auraient-ils laissé passer avant de l'imposer? Bien, ils ne l'ont pas dit tout de suite, mais finalement ils ont dit : Cinq jours. Cinq jours, quoi qu'il arrive. Donc, c'est un droit de grève de cinq jours. Donc, on devrait, si le Parti libéral voulait être logique, dire : Bien, maintenant, on va changer nos lois pour dire : Les salariés ont le droit de grève cinq jours, et les patrons ont le droit de lock-out cinq jours, parce que ce n'était pas du tout modulé par l'évolution de la situation. C'était comme ça, c'était en soi.

Et puis, les deux, à la CAQ et au Parti libéral du Québec, il y a un autre concept qui semble émerger, c'est le droit de grève tarifé. Évidemment, une grève, c'est une perturbation, c'est une perturbation d'une partie de l'économie, c'est une perturbation des conditions salariales ou des revenus des entreprises. Mais, à entendre les questions qui sont posées sur le coût de la grève… Est-ce que la grève a un coût? Certainement. Pouvons-nous l'évaluer aujourd'hui? Non. Mais c'était tellement important pour eux de dire le coût de la grève et l'impact que ça a sur tel ou tel secteur que c'est comme s'il y avait un chiffre au-delà duquel la grève n'était pas légitime. Alors, j'aimerais bien savoir c'est quoi, ce chiffre. Est-ce que c'est 1 milliard par semaine? Est-ce que c'est 100 millions, a dit le député d'Outremont? Est-ce que c'est 50 millions? Est-ce qu'il y a un chiffre à partir duquel le droit de grève devrait être retiré de l'exercice des droits démocratiques des Québécois? Parce que, finalement, on a beaucoup entendu ça, donc, qu'il y avait une valeur maximale... enfin, laquelle, on ne sait pas, mais que, parce qu'il y a des coûts à un droit de grève, on ne… devrait intervenir immédiatement par loi spéciale. Bien, dans ce cas-là, on va dire qu'il n'y a pas de droit de grève, parce qu'il y a toujours un coût à la grève. Il y a toujours un coût à la grève.

Alors, c'est pourquoi ça m'a semblé un peu excessif, cette idée, donc, qu'on a le droit chronométré, la menace préventive, le droit tarifé à la grève. Et nos collègues de Québec solidaire, pour eux, c'est le droit qui est indéfini. Alors, ils ont voté contre le principe même du fait qu'on ait cette discussion ici. C'est leur droit, bien sûr, mais le droit de grève existe, il ne faudrait en aucun cas intervenir.

Alors, comment est-ce que nous, on intervient là-dedans? Bien, on essaie de ne pas être excessifs. Et je pense que, du côté de la CAQ, on commence à avoir un genre de marque de commerce d'interventions excessives, alors donc, c'est : dès qu'on pense qu'il y aura une grève, il faut une loi spéciale dans les 48 heures, quoi qu'il arrive. Ça me paraît excessif. Il y a un problème, il y a un problème…

Une voix :

M. Lisée  : Oui, vous donnez 48 heures de négociation, et, quoi qu'il arrive, bien, sauf s'il y a entente, on va faire un droit de grève. Bien, ça me paraît excessif.

Même chose pour Montréal : une tutelle. Encore aujourd'hui, j'étais surpris d'entendre le député de La Prairie dire : Le gouvernement n'a pas voulu mettre de tutelle à Montréal. Mais, je veux dire, là, il y a quand même eu désignation d'un nouveau maire, plusieurs candidats, l'institution a fonctionné. J'aurais pensé qu'il se serait rendu compte, a posteriori, que c'était une mauvaise idée demander une tutelle. Mais non, excessifs, toujours. Et, de la même façon, ils avaient voulu que l'Assemblée nationale légifère directement, unilatéralement, pour modifier la gouvernance de Montréal avant même qu'il y ait des élections où ce sera un sujet qui sera au centre de l'élection. Donc, on commence à être habitués à ces réactions excessives.

Alors, qu'est-ce qui a motivé le dosage qui a guidé l'action du gouvernement dans le conflit de la construction? Bien, d'abord, savoir que, depuis 1993, depuis 20 ans, le respect du droit de grève et de lock-out fait partie de la gouvernance québécoise des conflits dans la construction. Depuis 1993, les négociations ont eu lieu sans que le gouvernement intervienne, ni en faisant des menaces préventives ni en disant que le droit de grève était chronométré, en permettant à ce que les choses se déroulent.

Il y a eu trois cas, M. le Président, où il y a eu des grèves. Il y a eu une grève en 1995, une journée de lock-out, une journée de lock-out dans le résidentiel. En 1996, il y a eu deux semaines dans le secteur résidentiel, pas de loi spéciale, 1995, une journée de lock-out, pas de loi spéciale, un règlement négocié, et, en 2001, une semaine de grève, secteur génie civil et voirie, pas de loi spéciale, règlement négocié. Alors, avec la proposition de la CAQ, dans deux cas, de toute évidence, il y aurait eu une loi spéciale avant la fin des négociations. Dans le cas du Parti libéral, en 1996, il y aurait eu une loi spéciale après cinq jours, donc on n'aurait pas eu de règlement négocié. Alors, voilà. La légèreté avec laquelle les deux oppositions traitent le droit de grève est assez troublante, je trouve ça troublant.

• (18 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Oui, une question de règlement, M. le leader de la deuxième opposition?

M. Deltell : 35.6 ° . J'ai laissé beaucoup de chances au ministre afin qu'il puisse donner l'heure juste concernant notre position, qui est la suivante, c'est-à-dire : oui pour 48 heures de négociations...

Des voix : ...

M. Deltell : Attendez un peu…

Le Vice-Président (M. Ouimet) : M. le leader de la deuxième opposition, ce n'est pas une question de règlement, là. Vous êtes en train d'expliquer les interventions et le positionnement de votre formation politique. Alors, s'il y a un accroc au règlement, je vais me lever, mais ce n'est pas le cas. Alors, veuillez poursuivre, M. le ministre.

M. Lisée : Je dirais à mon estimé collègue : Je n'ai pas besoin de modifier la position de la CAQ pour la critiquer. La CAQ a dit : On vous donne 48 heures pour négocier, ensuite loi spéciale, on espère que vous allez régler dans les 48 heures.

Des voix :

M. Lisée : Écoutez...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Écoutez, il y a une seule personne qui a la parole, et c'est le ministre des Relations internationales. Alors, je vous invite à ne pas l'interrompre. M. le ministre.

M. Lisée : Le respect du droit de grève et de la façon dont, depuis 20 ans, nous avons respecté le droit de grève et de lock-out et la négociation, ce n'est pas de dire que ce droit est chronométré. Quel est le résultat de ça? Quel est le résultat de ça? Bien, le résultat, c'est qu'on a complètement modifié le coût des conflits de travail au Québec et en Ontario. Avant, il y avait deux fois plus de jours de grève et de lock-out perdus au Québec qu'en Ontario. Depuis, il y en a trois fois moins qu'en Ontario, trois fois moins de jours de grève et de lock-out perdus dans l'industrie de la construction qu'en Ontario depuis 1993, depuis qu'on respecte la négociation, depuis qu'on n'est pas légers avec le droit de grève et de lock-out. Et c'est seulement lorsque, grâce à notre dosage, il y a eu entente dans deux secteurs et que, dans le troisième, il y a un réel blocage… Il y a une impasse, les deux parties disent : Il y a une impasse, le médiateur spécial dit qu'il y a une impasse  —  et là je me tourne vers mes amis de Québec solidaire  — q uand il y a une impasse telle, là c'est la responsabilité du gouvernement de dire : Nous constatons l'échec de la négociation, et donc nous allons intervenir dans le respect de la capacité de négocier des parties, qui pourront ensuite négocier entre eux. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le ministre des Relations internationales. M. le leader de la deuxième opposition, sur une question de règlement.

M. Deltell : ...l'article 213.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'article 213, je ne sais pas, à ce moment-ci, s'il s'applique dans le cadre d'une mesure d'exception. Je vais vérifier, je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 54)

(Reprise à 18 h 57)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée reprend ses travaux. Donc, M. le leader de la deuxième opposition, vous pouvez poser votre question en vertu de 213. Alors, M. le ministre, acceptez-vous une question, une... Alors, le ministre refuse. Très bien.

Alors, je cède la parole au prochain intervenant et je reconnais M. le député de Chomedey et porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations de travail. M. le député de Chomedey.

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir, M. le Président, de prendre la parole pour cette adoption de principe dans le cadre de la loi spéciale, dans le cadre du projet de loi n ° 54.

Je pense, M. le Président, que la première question qu'il faut se poser : Pourquoi, dimanche 30 juin, on est ici et pourquoi on est rendus à presque 19 heures? Probablement qu'on va faire un autre tour d'horloge aussi avant qu'on soit avancés, avant que la loi spéciale puisse être adoptée. Je pense qu'il faut effectivement se poser la question, M. le Président : Pourquoi?

Et je vous dirai que, déjà, il y a plus d'un mois, lors d'une interpellation, un vendredi matin, j'avais interpellé la ministre du Travail sur les négociations dans l'industrie de la construction, parce que ce qu'on voyait, ce qu'on entendait, ce qu'on avait comme information, M. le Président, nous amenait à penser… ce qu'on avait comme pouls de la situation nous amenait à penser qu'il y avait lieu de s'inquiéter. Ça fait que, déjà, le 31 mai et les jours subséquents, on a interrogé la ministre du Travail, j'ai posé des questions à la ministre du Travail pour essayer de voir avec elle si elle partageait la même vision de la situation que celle qui était véhiculée et qui était sur le terrain à ce moment-là.

Force est d'admettre, aujourd'hui, on en a un très bel exemple, mais, en cours de semaine, qu'au ministère du Travail et au niveau de la ministre, on voyait les choses très différemment. Si bien, M. le Président, que, la veille de l'ajournement pour l'été, j'ai posé ma question à la première ministre, et la réponse de la première ministre a été dans le sens de la ministre du Travail : Il n'y avait pas de problème, il fallait les laisser négocier, ça s'était toujours réglé puis c'était pour se régler encore. Et donc on avait, je pense, une vision très jovialiste de ce qui se passait. Et probablement, aujourd'hui on en a, je pense, une preuve éloquente, on n'avait aucune idée de ce qui se passait sur le terrain.

• (19 heures) •

Je me souviens de certains échanges que nous avons eus avec la ministre du Travail, et même il y a eu certains échanges à micro fermé à l'effet que ça négociait. Et je lui disais que ça ne négociait pas. Il faudrait peut-être s'entendre sur la définition du mot « négocier » . Normalement, une négociation, ça va se faire entre deux personnes. Quand tu es tout seul à une table, ou quand tu n'es pas à la table, ou quand tu ne te présentes pas à la table, ou quand il n'y a pas de rencontres qui sont cédulées et qu'il n'y a pas de négociation qui se fait, tu ne peux pas mettre ces journées-là dans le cadre ou dans une fiche synthèse et dire : Voici, ça a été une journée de négociation. Il y a eu beaucoup de journées qu'il n'y a pas eu de négociation. Et on avait cette information-là sur le terrain. Et on avait tout lieu de s'inquiéter, M. le Président.

On a essayé d'amener la ministre, au cours de ces journées-là... et on aurait pensé que la ministre aurait pu poser certains gestes. Parce qu'en partant du moment où on la sensibilise à une situation, on aurait pu penser qu'elle aurait été voir, qu'elle aurait posé des questions, qu'elle aurait pu nommer un médiateur. Parce qu'on savait que la ministre avait refusé, le 10 mai, M. le Président  —  ça fait déjà quelques semaines  —  de reconduire le mandat du négociateur. Et je me souviens très bien lui avoir posé la question par rapport à son négociateur et je me souviens très bien de la réponse : Bien, monsieur le négociateur, M. Perron… c'est-à-dire le médiateur, M. Perron, il en fait cinq, il en a réglé cinq, il a toujours réglé ses affaires, il va les régler encore. Alors, pourquoi ne pas renouveler son mandat? La loi lui permet de renouveler une fois son mandat. Il y avait même une demande patronale à cet effet-là trois jours avant que la ministre décide de ne pas renouveler le mandat du médiateur. Donc, M. le Président, autant d'éléments ou autant d'informations au niveau du ministère et, j'espère, au niveau de la ministre, qui l'informaient d'une situation qui pourrait… et qui semblait de plus en plus problématique.

Donc, je le mentionnais, elle aurait pu nommer un médiateur spécial. On lui a demandé, elle aurait pu. Parce que combien de fois qu'on lui a demandé la question du médiateur? On lui a demandé, la question de la loi spéciale, si elle y avait même songé. Et souvenez-vous, M. le Président, que la réponse de la ministre, ça a été non, que ce n'était pas dans les cartons du gouvernement. Et je pense qu'on a pris la situation vraiment à la légère. Ça a amené, M. le Président, une détérioration de la situation. Ça a amené que l'Alliance syndicale a décidé de recourir à son droit de grève, a même annoncé... Je me souviens, le 14 juin, avoir dit à la ministre : Les avis de grève sont donnés. Oui, oui, c'est normal, ça va se régler. Regarde, ils ont jusqu'à dimanche soir, ça va se régler. Ce n'est pas grave, ça, les avis de grève. Ça fait que je pense, M. le Président, que c'est... on avait sous-estimé, du côté du ministère, la situation. Et ça aurait été important que la ministre prenne cette situation-là beaucoup plus au sérieux.

Là, on a entendu plein de choses. Il y a eu une grève générale qui a été déclenchée depuis le 17 juin. L'économie du Québec, je lui ai dit, à la ministre, en cours de période de questions, l'industrie de la construction, les heures travaillées ont reculé. Le secteur de la construction, si vous avez des maisons à vendre ou si vous connaissez des amis, M. le Président, ce n'est pas le bon temps. Je regardais les statistiques. Dans les derniers jours, la location des maisons, je veux dire, autant, au cours des dernières années, il y avait de l'espace, autant il y avait une rareté, là on ne réussit pas à louer. Et le taux d'inoccupation des logements va aller en grandissant. Il y a un problème. Ça a changé dans le secteur, M. le Président.

Et c'est pour ça que je vous dis : On a sous-estimé. Je ne sais pas à quel niveau, mais on a sous-estimé, au gouvernement et au ministère, cette situation-là. Pour la ministre, tout allait bien. Et même en cours de grève, M. le Président, on a entendu la ministre dire que, par rapport à différentes situations  — parce qu'il y a des gens qui ont continué à rentrer dans certains secteurs  —  c'était normal que ça brasse. Ça brasse, normalement, dans la construction et ça brasse, normalement, dans les grèves. Je pense qu'on banalisait peut-être un peu la situation, et, sans autoriser, ça donnait une impression aux gens qui recouraient à ce genre de méthode là que c'était correct parce que c'était normal. Et, si on banalise, M. le Président, effectivement, ce n'est pas difficile de perdre le contrôle.

Première semaine de grève, deux, trois jours après le début de la grève, on a mentionné... M. Couillard a mentionné, notre chef a mentionné qu'il faudrait effectivement nommer un médiateur spécial, il faudrait avoir une date butoir au vendredi soir et que, s'il n'y avait pas d'entente à ce moment-là, il faudrait que la première ministre convoque l'Assemblée nationale. On était le 19 juin. On a perdu une autre semaine, M. le Président, on a perdu une autre semaine de grève pour… Finalement, le 24 juin, la première ministre nous a annoncé la nomination d'un médiateur spécial, lequel médiateur spécial avait été demandé par les parties, et cette demande-là avait eu une fin de non-recevoir de la ministre, M. le Président, parce que c'était trop long, nommer un médiateur spécial, c'est trop compliqué. Mais, le 24 juin, la première ministre nommait un médiateur spécial pour essayer de ramener les deux parties et essayer de régler le conflit.

Ça, c'était le 24 juin. On est le 30, on est à l'Assemblée nationale, on travaille sur une loi spéciale parce qu'on ne s'en est pas occupé, parce qu'on a laissé la situation se détériorer. Et aujourd'hui on a 77 000 personnes qui sont encore en grève et l'économie du Québec qui ne va pas bien, l'économie du Québec qui est fragile, le milieu de la construction qui est très fragile. Ça prend une loi spéciale  — comme le titre l'indique, la reprise des travaux dans l'industrie de la construction  —  pour ramener tout le monde au travail. Il faut regarder quand même, parce que la proposition que le chef du Parti libéral, M. Couillard, avait faite le 19, c'est que… un médiateur spécial, une loi spéciale, si on ne parvenait pas… mais une loi spéciale n'empêchait pas la négociation entre les parties. Il fallait garder un équilibre, il fallait garder un rapport de force, mais il faut forcer les gens à s'asseoir.

Vous savez, M. le Président, depuis le début des négociations, en aucun moment les chefs syndicaux ne se sont assis à la table des négociations. Ah, vous allez peut-être me dire que c'est une façon de négocier, mais normalement, quand tu veux que les choses se règlent, tu assis les boss à la même table, tu assis les décideurs à la même table. Puis, dans beaucoup de cas… Peut-être que 2013, c'est une nouvelle mouture, c'est une nouvelle façon de faire les choses, mais, dans beaucoup d'autres cas, M. le Président, au cours des années antérieures, ça s'est réglé entre les boss, ça s'est réglé entre les patrons. Et, M. le Président, ça n'a pas été fait, et en aucun moment depuis le début du conflit les chefs syndicaux n'ont été assis à la même table que les patrons pour faire avancer.

On peut bien dire tout ce que c'est qu'on veut, vous savez, il y a toujours deux côtés à une médaille, les patrons peuvent avoir des torts, les syndicats peuvent avoir des torts. Nous, comme élus du peuple, M. le Président, on veut que l'industrie de la construction continue de fleurir, on veut que l'industrie de la construction retourne au travail, on veut que les gens continuent de négocier entre les syndicats et les patrons. On veut protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et on veut qu'il y ait un équilibre dans les négociations, M. le Président.

• (19 h 10) •

Donc, aujourd'hui, on est ici pour la loi spéciale, et je pense que, cette loi-là, M. le Président, telle qu'elle est rédigée... On a un petit problème avec cette loi-là telle que rédigée parce que cette loi-là déséquilibre le rapport de force. Cette loi-là impose à un des secteurs, à une des parties des conditions, qui est à l'encontre de ce que normalement on devrait faire. On veut que ces gens-là s'assoient et puissent en arriver à une entente négociée comme c'est arrivé dans le secteur résidentiel, comme c'est arrivé dans le secteur du génie, et on veut que, dans ce secteur-là aussi, ça puisse en arriver à une négociation qui va déboucher sur une entente qui va être négociée, mais on veut, pour l'économie du Québec… Parce qu'on pourra toujours avoir une guerre de chiffres : C'est-u 10 millions, 100 millions, 1 milliard? Dépendant à qui tu parles, dépendant où tu vas, dépendant dans quel secteur tu vas être... Il n'y a pas eu d'études économiques qui ont été faites par le gouvernement; ça va arriver après. Ça fait qu'après le gouvernement va nous dire comment ça va nous coûter, quelles factures ils vont remonter, qu'est-ce qu'ils vont nous couper parce qu'en quelque part on a laissé aller une situation.

Ça fait que, dans sa forme actuelle… C'est sûr, M. le Président, qu'il y a des articles de loi, et particulièrement un article, on aura l'opportunité d'en discuter dans l'étude article par article... Puis on aura probablement un amendement à proposer. Dans sa forme actuelle... On ne veut pas bloquer la loi, mais on veut être capables, comme le disait M. Couillard ce matin, de la bonifier, parce qu'on veut qu'il y ait un équilibre et on veut qu'il y ait un rapport de force dans les négociations entre les deux parties. On a un peu de difficulté avec le quatre ans, M. le Président. On veut que les deux parties s'assoient à la table et on veut suivre... Vous savez, l'Assemblée nationale, a des outils pour être capable de suivre les... pas juste les négociations, mais les rapports entre les deux parties.

Ce matin, le député de Saint-Laurent a mentionné qu'on aurait souhaité entendre les deux parties dans le cadre de l'étude de la loi spéciale parce qu'effectivement il y a deux côtés à une médaille. Et, en partant du moment où on veut encadrer cette loi spéciale là au cours de la prochaine année, on va effectivement poser des questions et on va effectivement suivre le déroulement pour s'assurer qu'on ne se retrouvera pas, dans un an d'ici, avec la même situation qu'on a aujourd'hui en se disant : Ah! Ça va se régler. Ça s'est toujours réglé, ça va se régler.

Je pense que ça va prendre plus que de la bonne volonté, et il va falloir effectivement que tous les élus de cette Assemblée mettent l'épaule à la roue et qu'on suive le déroulement des négociations qu'on veut les plus sereines possible dans l'intérêt de tous les Québécois. Parce qu'on ne veut pas que... On veut le retour au travail, on ne veut pas que l'économie du Québec soit mise encore plus à mal qu'elle l'est présentement. Et probablement que, mardi... je ne veux pas présumer de rien, mais, normalement, mardi, tous les employés de l'industrie de la construction, et, à plus ou moins brève échéance, tous ceux qui ont perdu leur emploi, qui sont dans ce qu'on appelle des dommages collatéraux, dans différents domaines, autant dans les grands centres que dans les différentes régions du Québec... Parce qu'il y a beaucoup de gens, M. le Président, qui sont tributaires de l'industrie de la construction. Donc, c'est sûr qu'on va suivre tous ces éléments-là, M. le Président.

J'entendais aussi la ministre, et on a entendu toutes sortes de choses depuis qu'on est ici ce matin... que probablement que la ministre pourrait retirer son projet de loi. Je m'excuse, M. le Président, mais c'est de l'improvisation, ça encore, M. le Président, puis je le disais ce matin, c'est de l'irresponsabilité. On est rendus là. On ne peut pas se permettre que, demain, l'industrie de la construction, 77 000 travailleurs soient encore en grève, les dommages collatéraux continuent d'exister et qu'on continue d'empiler sur la facture économique... Parce que, pour l'économie des Québécois, je pense que c'est une grève qui a trop duré, c'est une grève qui aura été inutile, M. le Président.

Et ce n'est pas qu'on n'en aura pas parlé et ce n'est pas qu'on n'en aura pas... attiré l'attention de la ministre du Travail et de la première ministre. Ça a été fait, M. le Président. Et là on est dans une situation qu'il faut que les travailleurs de la construction retournent au travail dans les meilleures conditions possible en les obligeant, au cours de la prochaine année, à s'asseoir à une table pour en arriver à une entente qui sera négociée, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption de principe du projet de loi? S'il n'y a pas d'autres intervenants… Alors, cela met fin au débat sur l'adoption du principe du projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction.

Mise aux voix

Je mets donc aux voix la motion de Mme la ministre du Travail proposant l'adoption du principe du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Cette motion... M. le leader du gouvernement.

M. Drainville : Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, qu'on appelle les députés.

• (19 h 15  — 19 h 26) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, je mets donc aux voix la motion de Mme la ministre du Travail proposant l'adoption du principe du projet de loi n° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : Mme Marois (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bédard (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Maltais (Taschereau), M. Duchesne (Borduas), M. Marceau (Rousseau), Mme Zakaïb (Richelieu), alain bernier M. Hébert (Saint-François), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Trottier (Roberval), Mme Richard (Duplessis), M. Ferland (Ungava), M. Drainville (Marie-Victorin), Mme De Courcy (Crémazie), M. Leclair (Beauharnois), Mme Champagne (Champlain), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Kotto (Bourget), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Lisée (Rosemont), M. Blanchet (Johnson), Mme Hivon (Joliette), M. Breton (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Beaudoin (Mirabel), M. McKay (Repentigny), M. Bureau-Blouin (Laval-des-Rapides), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Pagé (Labelle), Mme Larouche (Abitibi-Est), Mme Bouillé (Iberville), M. Pelletier (Rimouski), Mme Gadoury-Hamelin (Masson), M. Villeneuve (Berthier), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe), M. Chapadeau (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Cardin (Sherbrooke), Mme Proulx (Sainte-Rose), M. Therrien (Sanguinet), M. Roy (Bonaventure), M. Claveau (Dubuc), M. Goyer (Deux-Montagnes), M. Richer (Argenteuil), M. Trudel (Saint-Maurice).

M. Fournier (Saint-Laurent), M. Moreau (Châteauguay), M. Bachand (Outremont), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Arcand (Mont-Royal), M. Dubourg (Viau), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme James (Nelligan), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme St-Amand (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Ouimet (Fabre), Mme Ménard (Laporte), Mme St-Pierre (Acadie), M. Ouellette (Chomedey), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Gaudreault (Hull), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Blais (Saint-Henri—Sainte-Anne), Mme Vallée (Gatineau), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Boulet (Laviolette), M. Carrière (Chapleau), M. Billette (Huntingdon), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Drolet (Jean-Lesage), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vien (Bellechasse), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Vallières (Richmond), M. Iracà (Papineau), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Bolduc (Mégantic), M. Rousselle (Vimont).

M. Legault (L'Assomption), M. Deltell (Chauveau), M. Bonnardel (Granby), Mme Roy (Montarville), M. Dubé (Lévis), Mme St-Laurent (Montmorency), M. Duchesneau (Saint-Jérôme), Mme Daneault (Groulx), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Trudel (Charlesbourg), M. Marcotte (Portneuf).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Khadir (Mercier).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le Secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :              102

                          Contre :               1

                          Abstentions :       0

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, la motion est adoptée et, en conséquence, le principe du projet de loi n° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, est adopté.

Alors, M. le leader du gouvernement, n'avez-vous pas une demande de suspension à ce moment-ci?

M. Bédard : À la demande de l'opposition, et de consentement, nous proposerions, effectivement, une suspension d'une dizaine... 10 à 15 minutes, et… à la demande, entre autres, du porte-parole, et nous souhaiterions revenir ici, selon les dispositions que nous avons convenues quant à l'étude détaillée, M. le Président. Donc, de consentement, pour laisser au porte-parole le soin de nous revenir frais et dispos.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, très bien. Nous suspendons les travaux jusqu'à 20 h 45, et...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : 19 h 45, 19 h 45, et nous nous transformerons en assemblée plénière. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 19 h 30)

(Reprise à 19 h 56)

Commission plénière

M. Ouimet (Marquette) (président de la commission plénière) : Alors, nous sommes réunis en commission plénière pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction.

Et je vous rappelle que l'étude détaillée en commission plénière est d'une durée de cinq heures, tel que prévu au deuxième paragraphe de l'article 257.1 du règlement.

Remarques préliminaires

Alors, Mme la ministre du Travail, à ce moment-ci je crois que vous souhaitez faire quelques remarques préliminaires, je vous cède la parole.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : Merci, M. le Président. Quelques remarques préliminaires très brèves, d'abord pour vous saluer et vous remercier de votre collaboration habituelle, qui se fera sentir, j'en suis sûre, ainsi que mes collègues les critiques de l'opposition officielle et les collègues de la deuxième opposition. Mais je voudrais saluer particulièrement les collègues qui m'accompagnent, un, l'adjoint parlementaire au Travail, le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, qui est à ma gauche, qui connaît très bien ce secteur et qui a été extrêmement attentif à la rédaction du projet de loi, avec qui nous avons collaboré de très près, et aussi la collègue de Sainte-Rose, l'adjointe parlementaire en matière de condition féminine, qui aussi m'accompagne dans bien des travaux dans d'autres domaines, les députés de Berthier et de Sanguinet, qui sont avec nous, qui ont accepté de venir compléter ces travaux.

Je veux saluer aussi et présenter toute l'équipe du ministère qui est avec moi, les sous-ministres, sous-ministres adjoints, les légistes qui sont ici, les fonctionnaires de la Commission de la construction du Québec. Il y en a deux qui sont venus ici au cas où il y aurait des particularités ou des explications plus pointues à aller chercher. Alors, j'ai demandé que ces gens-là nous accompagnent ce soir. J'ai failli dire cette nuit parce qu'il est d'usage de se rendre jusqu'à la nuit, mais là on peut dire ce soir.

Je veux saluer aussi mon chef de cabinet et l'attaché politique qui, vraiment, collaborent sur la section Travail. Je les remercie de leur présence. Et ils sont tous et toutes à notre service pour le bien commun pour faire que les travailleurs de la construction, les entreprises de la construction dans le secteur ICI puissent continuer à prospérer, à croître et à grandir dans l'harmonie et dans la paix. Merci.

Le Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la ministre la ministre du Travail, pour ces remarques. M. le député de Chomedey également, porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail, je vous cède la parole pour vos remarques préliminaires.

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Merci, M. le Président. À mon tour de souligner la présence de la ministre, des gens qui l'accompagnent ce soir. Je veux aussi prendre quelques minutes pour souligner la présence de mon collègue d'Outremont, mon collègue de Jean-Lesage, ma collègue d'Anjou—Louis-Riel et tous mes autres collègues qui sont avec moi ce soir et qui nous supporteront au cours de nos travaux, ainsi que les gens de la recherche.

Je veux aussi, Mme la Présidente… Ça change vite. Ça change vite, vite, vite, je veux dire, c'est… C'est ça. Je veux aussi dire, Mme la Présidente, que nous venons de voter pour l'adoption de principe de cette loi spéciale parce qu'il y a trois grands principes qui nous guident, Mme la Présidente. Le premier principe, c'est la reprise des travailleurs de la construction, on veut que tout le milieu de la construction soit de retour au travail le plus tôt possible, et le plus tôt possible étant mardi le 2 juillet. C'est le premier principe qui nous guide parce que l'économie du Québec, Mme la Présidente, ne peut pas se passer de son industrie de la construction et de ses travailleurs de la construction. Ça va aussi permettre à tous les gens qui sont en dommages collatéraux à cette grève de la construction de pouvoir récupérer leur emploi.

• (20 heures) •

Le deuxième principe qui nous guide, c'est l'équilibre dans les débats, le rapport de force entre les deux parties parce que  — ça nous amène au troisième principe  — on veut que… par l'adoption de cette loi spéciale là, créer une pression, inciter les deux parties à une négociation, Mme la Présidente. Et, pour nous, c'est très important, et c'est pour ça que, ces trois principes-là, je prends la peine de vous les énoncer à ce stage-ci, même si on est aux remarques préliminaires, de façon à informer la présidence que, lors de l'étude des différents articles, nous nous proposons de déposer un amendement, Mme la Présidente, à l'article 11 que je me permettrai de déposer immédiatement pour que la commission en prenne connaissance. Et on fera le débat lorsque nous serons rendus à l'article 11, mais, pour ne pas prendre Mme la ministre, son personnel et la présidence de la commission au dépourvu, je me permets de déposer immédiatement cet amendement. Et je me permettrais de le lire à ce stage-ci, et on aura les discussions appropriées quand on arrivera à l'article 11. L'amendement se lirait comme suit :

L'article 11 du projet de loi est modifié par le remplacement, au premier alinéa, des mots « 30 avril 2017 » par les mots «30 juin 2014 »;

Au deuxième paragraphe, le remplacement... Au deuxième, c'est ça, deuxième paragraphe, le remplacement, au paragraphe 1 ° du deuxième alinéa, des mots «30 avril 2014 » par les mots «30 juin 2014 »;

Au troisième paragraphe, par la suppression des paragraphes 2 °, 3 ° et 4 ° du deuxième alinéa.

C'est l'amendement qu'on entend déposer, Mme la Présidente, que je vous transmets à l'instant. Et, comme je vous ai dit, on en fera la discussion... vous regarderez pour la recevabilité, puis on en fera la discussion en temps et lieu, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, on considère qu'à ce moment-ci c'est un document qui est déposé. Et, lorsqu'on en viendra au débat, ça deviendra un amendement de votre proposition.

Des voix:

La Présidente (Mme Poirier) : Merci. Alors, M. le député de Lévis, pour vos remarques préliminaires.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, vous n'avez pas à vous inquiéter, Mme la Présidente, je vais être rapide. Et je veux vous resaluer parce qu'il me semble qu'on vous voit souvent aujourd'hui. Et ce n'est pas un défaut. Alors, merci de nous accompagner dans cette autre étape de ce projet de loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Alors, merci d'être là.

Je voudrais saluer aussi non seulement Mme la ministre... Parce que je sais que ce n'est pas un moment facile, et c'est un dossier dans lequel elle a mis beaucoup d'énergie dans les dernières semaines. Puis, je pense que d'être rendus où on est aujourd'hui, nous allons tous travailler ensemble pour une bonne cause dans les prochaines heures, j'espère, et c'est pour ça que mes commentaires vont être très rapides.

On a tous comme objectif... Mon collègue l'a dit tout à l'heure, notre objectif, c'est une reprise des travaux pour les gens de la construction, pour... non seulement pour eux, mais pour tous les citoyens du Québec et l'économie en général. On est tous conscients de la teneur maintenant du projet de loi. Il y a des éléments sur lesquels on va s'entendre très rapidement, qui sont des éléments, je dirais, plus de nature mécanique. Il y a quand même deux principes sur lesquels on va discuter plus longtemps. Nous avons déjà fait connaître dans nos remarques tout à l'heure dans l'acceptation de principe que, sur le temps d'application de quatre ans, nous trouvions ça trop long et nous favorisons une approche sur un an. Et, deuxièmement, sur les taux d'application… je dirais, les taux salariaux applicables pour cette période-là, on va avoir le temps d'y revenir.

Mais j'aimerais terminer en disant que nous sommes tous ici, des deux côtés de la Chambre, de l'Assemblée, pour... en fait, pour l'intérêt du bien commun de tout le monde, de tous les citoyens, et je suis certain qu'on va travailler encore, comme à l'habitude, dans des dossiers difficiles, en collaboration et en mettant la partisanerie de côté. Alors, je suis certain que nous allons faire tous les efforts pour un déroulement quand même agréable pour tout le monde. Alors, je vous remercie et je nous souhaite une bonne soirée, pour ne pas dire une bonne nuit.

Étude détaillée

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député de Lévis. Alors, nous allons maintenant procéder. Alors, Mme la ministre, on va débuter par la lecture de l'article 1.

Mme Maltais : Oui, Mme la Présidente. Alors, article 1 :

«1. La présente loi s'applique aux employeurs, aux salariés, aux associations et aux travaux dans le secteur industriel et le secteur institutionnel et commercial, visés par la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

« À moins que le contexte n'indique un sens différent, la définition prévue aux articles 1 et 1.1 de cette loi s'applique à la présente loi. »

Alors, c'est un article qui décrit le champ d'application de la loi, ayant principalement pour but de mettre fin à la grève en cours. La loi s'applique donc — et c'est précis, là — aux deux secteurs toujours en grève, à savoir les secteurs industriel, institutionnel et commercial, et ça précise que les mots et expressions qui y sont utilisés doivent recevoir la même interprétation que la loi R-20 lorsqu'ils y sont définis. Donc, le secteur industriel, secteur institutionnel et commercial sont respectivement décrits dans la loi R-20.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Donc, si je vous suis, Mme la Présidente, je ne pense pas que ce soit intentionnel, mais quand vous... Au premier paragraphe, on inscrit : « La présente loi s'applique aux employeurs, aux salariés, aux associations », on inclut toutes les associations. Si je me fie au deuxième paragraphe, on dit : «À moins que le contexte n'indique un sens différent, les définitions prévues aux articles 1 et 1.1 de cette loi s'appliquent à la présente loi. » Parce que, si on regarde R-20, si on va à l'article 1, si je vais à la définition, à 1-A, d' «association », je ne retrouve pas les associations d'entrepreneurs, je ne retrouve pas les associations sectorielles d'employeurs. Est-ce que le deuxième paragraphe englobe tout ça, Mme la Présidente, ou est-ce qu'on ne devrait pas préciser à l'article 1, quand on parle des associations… on ne devrait pas mentionner les associations sectorielles d'employeurs? Parce que, on va le voir plus bas, Mme la Présidente, on a pris la peine de l'indiquer aux articles plus bas. 6, 7, on a parlé des associations sectorielles d'employeurs, que je ne retrouve pas à l'article 1. Ça fait que j'aurais besoin, Mme la Présidente, que l'on m'éclaire.

Mme Maltais : ...simplement que c'est le terme générique qui s'inscrit, qui, ensuite, englobe tous les autres types d'associations à cet endroit-là parce que c'est l'article qui présente la loi, donc qui englobe toutes les associations, les salariés, les employeurs et les travaux dans ce secteur-là. Donc, comme c'est l'article générique, qui indique à qui s'adresse la loi en général, c'est donc le mot « associations » qui englobe tous les types d'associations comme tous les types d'employeurs, tous les types de salariés. Article générique, mot générique.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Donc, Mme la Présidente, je comprends bien que, dans la loi R-20, tous les paragraphes, là, de 1a jusqu'à 1y, plus 1,1, dans l'article 1, au deuxième paragraphe, ça veut dire que tout ce qui est là… Pour les besoins — et je ne vous fais pas répéter, Mme la Présidente — pour les besoins de la cause, c'est une loi spéciale. Et, quand, à un moment donné, il y aura une interprétation judiciaire quelconque si jamais il y a contestation, on sera très pointilleux sur les petits détails. Donc, je veux bien m'assurer de comprendre que le deuxième paragraphe de l'article 1 comprend ce que je viens de dire, de 1a à 1y et 1.1 du chapitre R-20 qui est en vigueur présentement, donc ça comprend les associations d'entrepreneurs, les associations sectorielles d'employeurs, les associations représentatives, etc. Et, comme la ministre l'a mentionné, Mme la Présidente, le mot «associations » comprend tout ça, mais je veux juste m'en assurer et je suis sûr, à voir le sourire de Me Poisson, là, qu'il va être très rassurant, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a un complément de réponse, Mme la ministre?

Mme Maltais : Le député a compris.

La Présidente (Mme Poirier) : Excellent.

M. Ouellette : …pas d'autres questions, on...

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres questions, d'autres interventions? Il n'y a pas d'autres interventions? Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 2.

Mme Maltais : « Un salarié doit, à compter de 6 h 30 le mardi 2 juillet 2013, se présenter au travail conformément à son horaire habituel et aux autres conditions de travail qui lui sont applicables. »

Alors, c'est un article qui prévoit la reprise des travaux de construction dans les deux secteurs concernés. Ces travaux devront reprendre à partir de 6 h 30  —  et là j'ai fait indiquer la date, j'y tiens — le mardi 2 juillet, selon l'horaire habituel de travail des salariés, bien sûr. C'est important de le dire parce que ça indique à partir de quelle heure les gens peuvent rentrer. Maintenant, si, dans leur horaire, ils rentrent à 7 h 30, à 8 heures, ça dépend de leur horaire habituel, ce n'est pas une imposition de 6 h 30. Et les autres conditions qui s'appliquent à eux, comme le port d'un casque de sécurité et de lunettes, de vêtements de travail appropriés, donc, les autres conditions de travail, s'appliquent toujours. Évidemment, si on met «à partir de 6 h 30 », c'est que c'est l'heure la plus matinale qui a été répertoriée dans les conventions.

• (20 h 10) •

Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y avait une intervention? M. le député de Chomedey, il n'y pas d'intervention? Il n'y a pas d'intervention? M. le député de Chauveau? M. le député de Lévis?

M. Deltell : Bien, en fait, peut-être juste une précision, pourquoi 6 h 30... Oui. Merci, Mme la Présidente. Désolé. Pourquoi 6 h 30? Est-ce que c'est reconnu dans les conventions comme quoi c'est à 6 h 30 que la journée commence?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Parce que, Mme la Présidente, dans toutes les conventions qui sont répertoriées dans ce secteur, il n'y a pas de travaux avant 6 h 30. Donc, si on veut réouvrir les chantiers, on l'ouvre aux chantiers dans les conditions usuelles de travail.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Non? Est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 3. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 3. Un salarié doit, à compter de 6 h 30 le mardi 2 juillet 2013, accomplir tous les devoirs attachés à ses fonctions, conformément aux conditions de travail qui lui sont applicables, sans arrêt, ralentissement, diminution ou altération de ses activités normales.

«Il ne peut refuser, comme partie à une action concertée, de fournir ses services à un employeur. »

C'est un article qui vient interdire tout moyen de pression affectant leur rendement aux salariés qui se présenteront sur les lieux de travail conformément à l'article 2. Et, évidemment, quand on dit : Un employé ne peut refuser de fournir ses services à un employeur, on parle de dans une action concertée. Il s'agit de s'assurer que les gens rentrent au travail individuellement, qu'ils aient les conditions de travail habituelles, qu'ils accomplissent leurs devoirs, leurs fonctions habituelles aux conditions de travail. On vérifie que les conditions de travail qui leur sont applicables seront bel et bien appliquées. Ça les protège en même temps. Mais on précise qu'il ne doit pas y avoir d'action concertée pour refuser du travail.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'intervention? Est-ce que l'article 3 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 4. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 4. Il est interdit à une association représentative, à ses dirigeants et à ses représentants de déclarer une grève, de la poursuivre ou de participer à toute autre forme d'action concertée si l'action concertée implique une contravention à l'article 2 ou à l'article 3 par des salariés qu'elle représente. »

Donc, c'est un article qui vise les associations de salariés, ce qu'on appelle communément les syndicats, qui ont le pouvoir de déclencher une grève et de la poursuivre. Ça interdit la grève ou toute autre forme d'action collective qui empêche le travail des salariés ou lui nuit. C'est le type d'article qu'on ajoute dans une loi de retour au travail simplement pour vérifier qu'il n'y ait pas de signal de grève aux salariés.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a des interventions?

Alors, est-ce que l'article 4 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 5. Mme la ministre.

Mme Maltais : « Toute association représentative doit prendre les moyens appropriés pour amener les salariés qu'elle représente à se conformer aux articles 2 et 3 et à ne pas contrevenir aux articles 9 et 10.

« Elle doit notamment, avant 6 h 30 le mardi 2 juillet 2013, communiquer [...] aux salariés qu'elle représente la teneur de la présente loi et transmettre au ministre du Travail une attestation de cette communication. »

Donc, c'est une disposition qui vise les associations de salariés. Il leur est enjoint, évidemment, d'encourager le respect de la loi par leurs salariés. Ils doivent le faire savoir et doivent notamment faire connaître la loi à leurs salariés.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui. Juste une question. Je suis d'accord avec le principe, bien sûr, là, puis ça va dans la foulée des choses. Est-ce que c'est une rédaction standard? Moi, je suis juste curieux parce que, quand on a un syndicat d'infirmières dans un hôpital, c'est une chose, mais là l'obligation de... C'est une obligation de résultat ou une obligation de moyens, maître? Parce que, quand on demande à l'association de communiquer publiquement aux salariés, il y en a 70 000 ou 80 000, c'est quoi, la nature de l'obligation qui leur est imposée ici pour que ça soit... Quelle est l'interprétation raisonnable, au fond, qui est faite de ça juridiquement dans le passé?

Mme Maltais : Communiquer publiquement, ça peut être par voie de communiqué, par Facebook, parTwitter, par Internet, par site. Il y a tous les moyens de communication modernes. Mais il ne s'agit pas de les rejoindre individuellement, mais de faire l'effort nécessaire pour faire savoir que leurs travailleurs doivent entrer. Évidemment, il y a aussi toujours un battage médiatique autour d'une loi spéciale. Croyez-moi, je crois que les salariés vont savoir qu'ils peuvent rentrer sur les chantiers mardi matin.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que l'article 5 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 6. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 6. Un employeur doit, à compter de 6 h 30 le mardi 2 juillet 2013, prendre les moyens appropriés pour assurer la reprise des travaux interrompus en raison de la grève. »

Alors, c'est un article qui est le pendant de l'obligation faite aux salariés de reprendre le travail. Il oblige les employeurs à rendre leurs chantiers accessibles et opérationnels. Vous allez voir, ce type de disposition, autrement dit, on envoie un message à tout le monde : C'est l'ouverture des chantiers, vous avez tous des obligations. On veut que vous vouliez... Vous voulez être productifs, préparez les choses pour que vos salariés puissent faire le travail.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : …Mme la Présidente, on n'a pas senti le besoin de répéter l'obligation. Je comprends que, pour l'employeur, il faut qu'il prenne les moyens appropriés, mais il n'y aura pas d'obligation d'aviser le ministère ou de... Je me demandais si, étant donné que… Dans les commentaires, on dit que c'est le pendant de l'obligation faite aux salariés, mais ils n'ont pas les mêmes obligations que les salariés vont avoir, de communiquer publiquement puis de transmettre au ministère du Travail une attestation de cette communication-là. Est-ce qu'on ne devrait pas créer la même obligation aux employeurs ou, en partant du moment où vous ne l'avez pas indiqué dans la loi, il doit y avoir une raison que Mme la Présidente, vous allez nous nous partager dans les prochaines secondes?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Tout à fait. C'est que, là, si vous voyez l'article 5, c'est dans les associations représentatives qui doivent communiquer à leurs salariés. Alors, si vous allez à l'article 8, vous allez voir que les associations d'employeurs et les associations sectorielles d'employeurs ont la même obligation que vous venez de nommer.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui, j'ai une... Il y a des pendants qu'on fait, puis c'est logique de les faire, mais un employeur spécifique dans un chantier spécifique qui, à cause de l'interruption, ça lui prend trois jours à remettre... à faire venir de l'équipement qui est parti, qui est disparu, puis il peut juste ouvrir deux jobs, et non pas 200 ce jour-là, est-il en infraction de la loi?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Il a pris les moyens appropriés. Les moyens appropriés, je pense que c'est... Il n'y a pas d'intention de pénaliser les gens, c'est un article de... C'est véritablement qu'ils prennent les moyens appropriés, et je pense que... À compter de mardi, de 6 h 30, le mardi. Ce «à compter de » ne crée pas une obligation d'être prêt et opérationnel à 6 h 30, le matin, même si je trouve, moi, que les employeurs ont intérêt à être, au maximum, prêts. Mais c'est : À compter de mardi, prendre les moyens appropriés. Je pense qu'il y a là une souplesse qui leur permet de travailler dans des marges opérationnelles.

M. Bachand : Je vais reprendre ma question différemment.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Un exemple qui n'est peut-être pas, là… qu'on invente, mais, par exemple, je suis dans le Grand Nord, j'ai une petite opération de «fly-in/fly-out », tout le monde est parti, tout le monde a évacué, les vacances commencent dans… C'est quelle date, les vacances de la...

Une voix : Le 17.

M. Bachand : Elles commencent le 17, et, pour des raisons purement de rentabilité qu'on prendrait tous, je décide, bien, non, je vais recommencer au début d'août. Est-ce que je suis en violation de la loi?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : O.K. Alors, à ce moment-là, il faut revenir à l'article 2 parce qu'à l'article 2 l'employeur reprend selon son horaire habituel. Alors, si l'entrepreneur dit que l'horaire habituel va commencer à telle date, c'est O.K. Il n'y a pas d'obligation aux employeurs de commencer les travaux s'ils ne sont pas obligés, s'ils ne peuvent pas prendre les moyens appropriés, si c'est impossible.

La Présidente (Mme Poirier) : Monsieur...

Mme Maltais : Ils ont intérêt à recommencer le plus tôt possible.

M. Bachand : Bien sûr, des travaux interrompus, ça coûte une fortune.

Mme Maltais : Et ça s'appelle le droit de gestion aussi.

M. Bachand : Mais ma question, c'est : Est-ce que le droit de gestion est supprimé par la rédaction technique de l'article? C'est ma question, au fond.

Mme Maltais : Pas du tout.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

• (20 h 20) •

M. Hamad : Oui, merci. Si je comprends l'article 6 tel qu'écrit, là, prend « les moyens appropriés pour assurer la reprise des travaux » , correct. C'est votre explication qui met en doute quelque chose. Ce que vous avez dit dans le texte, c'est rendre les chantiers accessibles et opérationnels. Opérationnel, là, un chantier fermé… Ça prend des travailleurs pour rendre le chantier opérationnel. Là, vous demandez à l'employeur de rendre le chantier opérationnel, il a besoin de ses travailleurs. Moi, je pense qu'il faut enlever l'opérationnel, c'est rendre le chantier accessible puis ouvrir les chantiers pour permettre aux travailleurs d'arriver. Il a toujours l'obligation, l'employeur, de respecter santé et sécurité parce qu'il ne peut pas rentrer les travailleurs si ce n'est pas sécuritaire. Mais « opérationnel » , là, ça peut imposer actuellement des travaux parce que, probablement, avant de partir, ils ont fait des travaux pour fermer le chantier. Mais, pour faire les travaux, rendre opérationnel, ça prend de la main-d'oeuvre.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Ce n'est pas dans la loi, c'est dans mon explication. «Les moyens appropriés », là, c'est qu'à compter de mardi matin il y a des travailleurs qui rentrent puis il y a des entrepreneurs qui doivent prendre les moyens appropriés pour reprendre leurs travaux. Mais c'est « à compter de » . S'il ne peut pas ouvrir son chantier ou qu'il n'est pas tout à fait... C'est : Il a l'espace…

M. Hamad : Mme la Présidente…

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Parce que vos explications font partie de la loi, il ne faut pas oublier ça. Et, donc, le mot «opérationnel », ce n'est pas ça qu'on veut dire, on veut dire rendre accessibles les chantiers pour les travailleurs. On s'entend, vous êtes d'accord avec ça?

Mme Maltais : Oui.

M. Hamad : O.K.

M. Deltell : ...je ne suis pas très familier avec le monde de la construction, mais, advenant qu'il y ait des entrepreneurs… des cadres d'entreprises, entrepreneurs, veuillent préparer le terrain demain pour être sûrs que les travaux reprennent à 6 h 30 le 2 juillet, est-ce qu'ils pourraient le faire tel que c'est stipulé, tel que la loi est rédigée?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Oui. C'est une loi de retour au travail pour… Et, je vais vous revenir à l'article 1, s'adresse aux employés, tatata, tatata, et s'adresse aux employeurs et visés... Et, ensuite, à 2: « Un salarié doit [...] se présenter au travail... » C'est... Voyons, là, j'ai un peu de fatigue qui fait que je parle vite et que je vous explique mal. On vise les travaux interrompus en fonction d'une grève. Si les cadres ne font pas la grève, ils ne sont pas visés par cette loi. Ce qu'on vise, c'est les employés et les travaux interrompus par la grève.

M. Deltell : Techniquement, demain, il pourrait y avoir du mouvement sur les chantiers, mais ce ne seraient pas travailleurs syndiqués qui sont affectés par la grève.

Mme Maltais : À moins que...

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : À moins que des travailleurs... On sait qu'il y a des travailleurs qui sont rentrés travailler même pendant la grève, là. Il n'y a pas de ligne... il n'y a pas de scabs dans le monde de la construction. Alors, s'il y a des gens qui veulent entrer avant, libre à eux. Mais, à compter de 6 h 30, il n'y a plus de grève, donc il y a un retour sur les chantiers.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres questions, d'autres commentaires? Est-ce que l'article 6 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 7. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 7. Il est interdit à l'association d'employeurs ou à une association sectorielle d'employeurs de déclarer un lock-out ou de le poursuivre ou de participer à toute autre forme d'action concertée si l'action concertée empêche les salariés de se conformer aux prescriptions de l'article 3. »

Alors, ça assure la reprise des travaux en interdisant le lock-out. On interdit la grève, on interdit le lock-out, simplement pour la reprise des travaux. Quelqu'un ne pourrait pas décréter un lock-out parce qu'il y a reprise des travaux.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey...

Mme Maltais : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Oui, excusez.

Mme Maltais : Permettez-moi, il y a un amendement. J'aimerais déposer un amendement, on en a plusieurs copies. Ça s'inscrirait comme suit : L'article 7 du projet de loi est modifié par la suppression de «à l'association d'employeurs ou » parce qu'en vertu de l'article 45.4 de la loi R-20 c'est seulement l'association sectorielle qui peut déclarer un lock-out. Donc, on enlève « à l'association d'employeurs ou » parce que ça va donner : « Il est interdit à une association sectorielle d'employeurs... »

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, juste un moment. Je voudrais juste m'assurer que les gens aient copie de l'amendement.

Des voix:

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, on va commencer. Puisqu'il y a un dépôt d'amendement, nous allons commencer par débattre de l'amendement. Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors, j'ai expliqué, Mme la Présidente, que, quand on parle de droit de lock-out, on ne vise pas les associations d'employeurs dans R-20, on vise les associations sectorielles d'employeurs. Ce sont seulement ces associations qui peuvent décréter le lock-out. Donc, on enlève «associations d'employeurs ».

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Oui. Je vous disais, Mme la Présidente, que Mme la ministre venait de m'enlever les mots de la bouche parce qu'effectivement je m'étais pris une note et je m'étais mis en marge de la loi, effectivement, 45.4 parce que l'association d'employeurs, qui pourrait être l'Alliance syndicale, n'a pas de... c'est une personne morale, là, n'a pas d'autorité pour ce genre de chose là. Donc, nous accueillons cet amendement-là. Nous l'aurions proposé, on nous a pris de vitesse, Mme la Présidente. Mais on est dans le même sens que l'amendement proposé par la ministre.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, on revient à l'article 7. Est-ce qu'il y a des commentaires à l'article 7? L'article 7 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 8. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 8. L'association d'employeurs et les associations sectorielles d'employeurs doivent prendre les moyens appropriés pour amener les employeurs qu'elles représentent à se conformer à l'article 6 et à ne pas contrevenir aux articles 9 et 10.

«Elles doivent notamment, avant 6 h 30 le mardi 2 juillet 2013, communiquer publiquement aux employeurs qu'elles représentent la teneur de la présente loi et transmettre au ministre du Travail une attestation de cette communication. »

Voici donc le pendant, version employeurs, de l'article que nous avons étudié tout à l'heure.

La Présidente (Mme Poirier) : Interventions?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : ...aussi, pour la présence de l'association d'employeurs, c'est correct que ça soit là?

Mme Maltais : Tout à fait, parce que, là, on veut aussi que les associations d'employeurs transmettent les informations aux entreprises qui sont membres de leur association. Alors, je pense que, tout à l'heure, on spécifiait parce qu'on parlait d'un droit de lockout, qui ne visait qu'une seule des deux associations, mais, quand il s'agit de communiquer, je pense que ça vaut la peine, là, de les inscrire.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Est-ce que, Mme la Présidente, on ne devrait pas créer à l'association d'employeurs les mêmes obligations qu'on a créées à l'article 5 aux associations représentatives quant à leur obligation de transmettre au ministre du Travail une attestation de cette communication ou des moyens appropriés?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Bien, je crois que c'est là, Mme la Présidente, je viens de le lire.

Une voix : ...

Mme Maltais : Oui.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que l'article 8 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 9. Mme la ministre.

Mme Maltais : «9. Nul ne peut, par omission ou autrement, faire obstacle ou nuire de quelque manière à la reprise des travaux de construction ou à l'exécution par les salariés de leur prestation de travail relative à ces travaux, ni contribuer directement ou indirectement à ralentir, à altérer ou à retarder l'exécution de cette prestation. »

Alors, il s'agit d'une disposition générale qui s'adresse à toute personne, mais vraiment toute personne. Donc, on ne parle pas seulement d'employeurs et de salariés, là, toute personne. On s'assure principalement de viser toute personne qui ne serait pas déjà visée par les dispositions précédentes de manière, encore une fois, à s'assurer de la reprise des travaux.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a des commentaires? Est-ce que l'article 9 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Article 10. Mme la ministre.

Mme Maltais : « 10. Nul ne peut entraver l'accès d'une personne à un chantier auquel elle a le droit d'accéder pour y exercer ses fonctions. »

Alors, ça vise plus largement l'accès aux chantiers pour les gens qui y travaillent. Outre les salariés, c'est un article qui pourrait viser plus largement des employeurs, des cadres, du personnel d'enquête ou encore des professionnels. Les gens de la Commission de la construction du Québec, par exemple, devront avoir accès aux chantiers. Les livreurs devront avoir accès aux chantiers. Donc, c'est important parce que c'est tout le groupe de soutien aux travaux. Pour s'assurer que ça fonctionne bien, on… vraiment l'accès général aux chantiers.

La Présidente (Mme Poirier) : Y a-t-il des interventions? M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui. Je suis d'accord avec cet article, Mme la Présidente. Je note avec ironie, même si l'analogie n'est pas parfaite, que ça veut dire que, si, par exemple, Québec solidaire, qui s'oppose à cette loi, voulait organiser des manifestations massives empêchant l'accès aux chantiers, comme le même article se retrouvait dans la loi qui empêchait quiconque... un étudiant d'accéder à son établissement d'éducation, sur lequel vous étiez violemment contre, mais, ici, on a la même interdiction à quiconque, au fond, dans la société de faire une manif et qui entraverait l'accès d'une personne à un chantier. Je pense que ça va dans l'esprit de la loi et de repartir l'industrie de la construction. Je note l'ironie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Oui, Mme la ministre.

Mme Maltais : Mme la Présidente, moi, quand j'ai fait de l'humour, ce même commentaire, je l'appliquais à l'article 9.

La Présidente (Mme Poirier) : ...commentaires? Est-ce que l'article 10 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Article 11.

• (20 h 30) •

Mme Maltais : Mme la Présidente, je crois qu'il est convenu de suspendre… On a convenu entre nous de suspendre les articles 11 et 12, la partie Conditions de travail, pour y revenir à la fin. Alors, est-ce que... Si les gens y consentent, on suspendrait 11 et 12 pour y revenir.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, il y a consentement pour suspendre les articles 11 et 12? Alors, passons à l'article 13.

Mme Maltais : Article 13 :

«13. L'association représentative est responsable du préjudice causé à l'occasion d'une contravention à l'article 2 ou à l'article 3 par des salariés qu'elle représente, à moins qu'il ne soit établi que le préjudice n'est pas attribuable à la contravention ou que celle-ci ne fait pas partie d'une action concertée.

« Toute personne qui subit un préjudice en raison d'un acte posé en contravention de l'article 2 ou de l'article 3 peut s'adresser au tribunal compétent pour obtenir réparation. »

Alors, c'est un article qui établit la responsabilité civile syndicale à la suite de grève ou d'autres actions concertées illégales. Comme ça, on facilite les poursuites en responsabilité civile à l'encontre des associations syndicales en évitant d'avoir à faire la preuve de la faute propre à l'association et du lien de causalité entre cette faute et le dommage subi.

L'association ne peut tenter d'exonérer sa responsabilité en alléguant qu'elle n'est pas à l'origine de l'action concertée ou qu'elle n'en est pas un acteur. C'est un article qui est d'usage, je crois, dans une loi de retour au travail.

M. Ouellette : …toujours la question usuelle : Est-ce que c'est une rédaction standard par rapport à d'autres lois? Une rédaction standard par rapport à d'autres lois?

Mme Maltais : ...rédaction très standard.

M. Ouellette : O.K. Pas de commentaire, pas d'autre commentaire, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : L'article 13 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Article 14. Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors : «14. L'association d'employeurs et les associations sectorielles d'employeurs sont responsables du préjudice causé à l'occasion d'une contravention à l'article 6 par des employeurs qu'elles représentent, à moins qu'il ne soit établi que le préjudice n'est pas attribuable à la contravention.

« Toute personne qui subit un préjudice en raison d'un acte posé en contravention de l'article 6 peut s'adresser au tribunal compétent pour obtenir réparation. »

Alors, encore une fois, c'est un article qui correspond à ce qu'on a fait aux associations d'employés, de salariés, on le fait pour les associations d'employeurs. On leur impose à toutes les deux des obligations. Pourquoi? Parce que c'est une loi de retour au travail qui est sur la table parce que les deux , les deux, les employeurs et les salariés , n'ont pas réussi à s'entendre, donc on impose les mêmes obligations aux deux parties.

La Présidente (Mme Poirier) : L'article 14 est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 15, Mme la ministre.

Mme Maltais : «15. Quiconque contrevient à une disposition des articles 2 à 10 commet une infraction et est passible, pour chaque jour ou partie de jour pendant lequel dure la contravention, d'une amende :

«1 ° de 100 $ à 500 $ s'il s'agit d'un salarié ou d'une personne physique non visée au paragraphe 2 ° ou 3 °;

« 2 ° de 7 000 $ à 35 000 $ s'il s'agit d'un dirigeant, employé ou représentant d'une association représentative ou d'une association de salariés affiliée à une association représentative ou d'un dirigeant ou représentant d'un employeur, de l'association d'employeurs ou d'une association sectorielle d'employeurs;

« 3 ° de 25 000 $ à 125 000 $ s'il s'agit d'une association représentative, d'une association de salariés affiliée à une association représentative, d'un employeur, de l'association d'employeurs ou d'une association sectorielle d'employeurs. »

Alors, c'est un article qui prévoit des amendes pénales en cas de contravention aux dispositions de la loi. Elles fluctuent selon qu'il s'agit de personnes physiques ou morales ainsi que selon le niveau de responsabilité des personnes. On s'est assuré que, dans ce cas-là, ça corresponde au niveau de contravention habituel dans ce type de loi.

M. Ouellette : ...Mme la Présidente, j'aurais aimé savoir de la ministre, un peu plus en profondeur, sur quelle loi est-ce qu'on s'est basés pour ces amendes-là, considérant, considérant que c'est la coutume maintenant, dans la majorité des projets de loi qu'on adopte ici, à l'Assemblée nationale, que les amendes aient un effet dissuasif.

Et je me fais particulièrement... et mes collègues, je pense qu'on se fait tous un point d'honneur de faire en sorte que les amendes encouragent le respect de la loi. Et, si on va dans le milieu de la construction… Et c'est pour ça que je veux avoir un peu plus de détails de la part de la ministre, parce que, si on va dans le milieu de la construction et qu'on reprend uniquement les amendes de R-20, aux articles 112, 113 et 113.1, elles sont de beaucoup supérieures aux amendes qu'il y a dans le projet de loi n°  54. Ça fait que c'est pour ça que, Mme la Présidente, je me permettais de demander à la ministre le fondement juridique que les éminences du ministère de la Justice se sont basées pour en arriver à...

Vous savez, 100 $ à 500 $, c'est une petite collecte, puis, pour avoir du fun, 500 $, ce n'est pas cher. On a même vu qu'il y a eu des collectes et des dons qui se sont organisés pour payer les amendes de gens qui ont perturbé le climat social au cours des derniers mois, des dernières années. Donc, il faut que ça ait un effet dissuasif, et, comme on est dans le milieu de la construction, je vous soumets respectueusement pour vérification ou réflexion de la part de la ministre, Mme la Présidente, que les amendes de R-20 sont de beaucoup supérieures. Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir cette réflexion-là quand la ministre m'aura donné le fondement de pourquoi on est arrivés avec des amendes si basses?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors, Mme la Présidente, tout simplement ceci. D'abord, R-20 existe toujours. Alors, quelqu'un qui ferait de l'intimidation, par exemple… Et, si on veut empêcher quelqu'un d'entrer au travail, comprenez-moi bien, il y a toujours ce type de comportement . T outes ces choses-là sont déjà là. Donc, ces amendes-là pourraient même se cumuler. Mais, spécifiquement dans les lois de retour au travail, nous avons ce type d'amendes. Je vais vous les nommer. C'est à l'article 39 de la loi du secteur public, où on a forcé le retour au travail du secteur public en 2005. C'est à l'article 24 de la Loi sur les... ou le retour des médecins spécialistes en 2006 et à l'article 23 de la loi quand on a fait la loi pour le retour au travail des juristes de l'État, en 2011. Donc, c'est... Mais il faut bien comprendre que ça, c'est... Voici ce niveau d'amendes là, ce sont ces amendes-là.

Mais il faut bien comprendre qu'en plus R-20 s'applique toujours. Donc, tout ce qui est harcèlement, intimidation sur un chantier ou à l'entrée d'un chantier, ça s'ajoute, donc c'est pour ça qu'on peut se dire qu'on est dans les cadres juridiques habituels. Et il faut comprendre qu'on est déjà dans un domaine extrêmement balisé, là. Il y a eu des lois contre l'intimidation ici qui sont intervenues, qui ont été adoptées à l'unanimité, il y a des amendes sévères, donc ça s'ajoute.

Ceci dit, 100 $ à 500 $, ça vise une personne, un salarié, alors c'est quand même... Moi, 500 $ pour un salarié, là, c'est dur. Si vous en avez deux, trois, ça commence à... puis à s'ajouter à R-20 ça commence à être lourd.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de... J'avais le député de Lévis qui a levé la main, si ça ne vous dérange pas, avant, M. le député de Louis-Hébert. Un ou l'autre, là, mais M. le député de Lévis avait levé la main.

Une voix :

M. Dubé : C'est gentil. Mme la Présidente, je viens de voir pour chaque jour, mais, si... Est-ce qu'il y a un ajustement pour récidive ou pas?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Non, Mme la Présidente, il n'y a pas d'ajustement pour récidive. Écoutez, là, on n'a pas commencé à faire des récidives...

Une voix : ...

Mme Maltais : Non, non, non, ça, je n'ai jamais vu ça dans une loi de retour au travail. Mais c'est chaque jour ou partie de jour.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert. Ah! Excusez. Oui, allez-y.

M. Dubé : Donc, la même personne, la deuxième journée, c'est le même montant…

Mme Maltais : ...même montant. L'avant-midi, l'après-midi, le soir...

M. Dubé : Donc, la récidive et le fait qu'on...

Mme Maltais :...il commence à y en avoir, là, ça s'additionne.

M. Dubé : Merci, ça répond à ma question. Merci.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député de Lévis. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Si je comprends bien  —  je vais prendre l'article 1, là  —  si je fais la grève, je décide de faire la grève avec une gang dans un chantier, je paie jusqu'à 500 $ par jour?

Mme Maltais : ...oui.

M. Hamad : Ça, c'est le maximum?

Mme Maltais : Oui, par jour, mais, si vous le faites... ou partie de jour. Puis, si en plus vous faites de... Il faut comprendre qu'à côté vous faites la grève, mais qu'en plus... dans une action concertée, mais en plus c'est que, là, ça va toucher les dirigeants de l'association, l'association elle-même, parce que, s'il y a une action concertée, on frappe à trois niveaux, là. Donc, ça devient extrêmement lourd.

M. Hamad : Les articles...

Une voix :

Mme Maltais : S'il y a de l'intimidation en plus? Bien là c'est R-20 qui s'applique. Vous comprenez? Il y a une mécanique d'escalade aussi, là.

M. Hamad : ...là, on a des articles bien définis, 2 à 10, puis 2 à 10 sont bien définis : tel geste, tel geste, tel geste. Alors, faire la grève, mettons, pourquoi qu'on met ça à 500 $? Parce que… C'est-u une grève moins importante qu'une autre, c'est 100 $, puis l'autre grève, c'est 500 $, 300 $, 400 $? Alors, cette marge de manoeuvre là n'est pas nécessaire parce qu'il y a des gestes posés. Le geste posé, peu importe, s'il fait la grève, c'est tel montant, au lieu de jouer... de donner une marge entre 100 $ et 500 $; la même chose pour les autres gestes, là. Puis, en général, est-ce qu'on met 100 $ à 500 $? Souvent, ce qu'on donne, c'est 100 $, on ne donne pas 500 $. Alors, y a-t-il une... Comment on va mesurer la gravité d'une grève de 100 $ à 500 $?

• (20 h 40) •

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Mme la Présidente, il est d'usage de laisser une marge de manoeuvre au juge. C'est le juge qui peut, comme cela, juger de la gravité du méfait, de la contravention à la loi. Si la contravention est légère, il peut aller vers une amende plus légère, mais, si la contravention est plus grave… Ça lui donne la marge de manoeuvre. Alors, c'est d'usage de laisser une marge de manoeuvre au juge pour qu'il accorde l'amende selon la gravité des faits.

M. Hamad  : Mais…

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

Mme Maltais : Attention! Il y a une grève. Mais...

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais  : …vous-même, mon cher ami, avez inscrit cela dans des lois de retour au travail. Je vous invite à revoir votre propre rationnel de l'époque parce que ça a toujours été comme ça dans les lois de retour au travail.

M. Hamad  : …les grèves…

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Je reviens sur les grèves, là. Est-ce qu'il y a une grève moins importante qu'une autre grève?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Il y a des facteurs aggravants qui doivent appartenir au juge. Le juge doit pouvoir juger des facteurs aggravants. Ça existe dans nos lois, le facteur aggravant, et c'est à la disposition des juges de juger de cela.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de… Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais revenir sur la question que mon collègue le député de Chomedey a posée. Quand on regarde les amendes, à l'article 1, on dit « de 100 $ à 500 $ s'il s'agit d'un salarié ou d'une personne physique non visée au paragraphe 2 ° ou 3 ° ». Ça, c'est la loi qu'on vient d'avoir.

Mme la Présidente, j'aurais pu vous lire exactement la même chose qui a été adoptée en 1986 : « De 100 $ à 500 $ s'il s'agit d'un salarié ou d'une autre personne physique non visée au paragraphe 2 ° » , qui est la loi qui, à l'époque, avait été adoptée par l'ancien ministre du Travail, mon collègue de Brome-Missisquoi. Et, entre 1986 et aujourd'hui, il y a exactement 27 années qui s'écoulent, et les amendes qu'on entend dans ce projet de loi là, pour une personne, c'est exactement le même montant.

Fait encore plus troublant, Mme la Présidente, lorsqu'on parle d'un dirigeant ici, dans la loi qui a été déposée devant nous, deuxième alinéa, c'est « de 7 000 $ à 35 000 $ s'il s'agit d'un dirigeant, employé ou représentant d'une association représentative ou d'une association de salariés affiliée à une association représentative ou d'un dirigeant ou représentant d'un employeur, de l'association d'employeurs ou d'une association sectorielle d'employeurs ».

Mme la Présidente, dans l'article 2 de l'époque, O.K.  —  là, je viens de vous parler de 7 000 $ à 35 000 $  —  voilà 27 ans, en 1986, l'amende était entre 10 000 $ et 50 000 $. Donc, on a baissé un montant d'amende ici et, dans la loi, ce qu'on y lisait : s'il s'agit d'une personne qui — parce que c'est encore mieux balisé — qui, le 13 juin 1986, était un dirigeant, délégué de chantier, agent d'affaires, ou représentant d'une association représentative, union, syndicat, fédération, confédération, centrale, ou conseil… ou était un employeur, ou un dirigeant, ou représentant d'un employeur, de l'association d'employeurs, ou d'une association d'entrepreneurs, ou qui l'est devenu par la suite.

Je comprends qu'entre 1986 et 2003 il y a des termes qui ont changé au niveau notamment des appellations des associations, mais mon questionnement, c'est que, là-dedans, il est nommément écrit, exemple, « un gérant d'affaires », O.K., ce qu'on appelle les gérants de chantier, là. Je ne nommerai pas personne, je ne ferai pas de référence, mais est-ce qu'il est normal... Et de là mon questionnement et le questionnement de mon collègue, c'est : Où on a pris l'inspiration pour fixer le montant des amendes, alors que, dans le cas d'une personne physique, qui n'a pas de responsabilité, c'est le même niveau de montants d'amendes aujourd'hui qu'il y avait en 1986? Il n'y a pas eu d'indexation, on n'a pas augmenté rien. Et, quand on regarde le point 2 ° , bien, à ce moment-là, il y a une diminution, même, comparativement aux montants qui ont été imposés à l'époque. Je comprends que le juge doit avoir toute la latitude, mais il y a une différence entre partir à un certain montant, là. Entre 10 000 $, bien, on baisse à 7 000 $, tu sais? Puis le plafond, qui est à 50 000 $, est baissé à 35 000 $.

Ça fait que j'aimerais juste qu'on nous explique. Parce que, quand on prend le troisième alinéa, bien là, à ce moment-là, dans la loi qu'on a devant nous, c'est de 25 000 $ à 125 000 $; dans celle qu'il y avait en 1986, c'est 20 000 $ à 100 000 $. Donc, je ne retrouve absolument aucune logique — ça, c'est pour les associations, hein, c'est les syndicats et les associations d'entrepreneurs — donc je ne trouve absolument aucune logique au niveau du montant d'amende. Dans un certain cas, c'est le même niveau qu'en 1986; dans un autre cas, les amendes ont été baissées; et, dans l'autre, elles ont été augmentées.

Donc, j'aimerais juste qu'on m'éclaire parce qu'il me semble effectivement... Je comprends très bien que R-20 s'applique, mais on est dans une loi spéciale. Une loi spéciale, mon collègue a bien expliqué que c'était fait pour dissuader les gens qui seraient tentés malheureusement de contourner la loi. Il me semble que ça doit être plus sévère. Et j'ai un fort questionnement entre le fait que n'importe qui pourrait effectivement, même s'il n'est pas représentant syndical... qu'on demande à une personne : Tu t'en vas sur un chantier puis, bon, tu fermes le chantier, puis il s'en va sur un autre chantier puis il en ferme un autre. À 100 $ la copie, Mme la Présidente, ça, c'est… s'il se fait prendre, s'il est accusé, on peut recommencer longtemps, puis effectivement c'est vrai qu'on peut se cotiser pour payer les amendes qui pourraient être imposées.

Donc, ma question, je pense qu'elle est tout à fait légitime. Et il me semble qu'on aurait peut-être pu s'inspirer de ce qui a été fait en 1986 dans une loi qui est pourtant similaire, dans un même contexte, dans le même champ de compétence, évidemment, puisque c'est le domaine de la construction, et j'aimerais qu'on essaie de m'expliquer une certaine logique par rapport aux amendes et voir si on ne peut pas peut-être les adapter au goût de 2013, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la députée. Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors, je vais demander à la députée de revenir à son propre rationnel quand elle était membre du gouvernement libéral et qu'elle a voté, en 2011, ça ne fait pas si longtemps, les mêmes clauses, les mêmes dispositions pénales et les mêmes montants. Article 23, projet de loi n °  135, qui a été adopté, Loi assurant la continuité de la prestation des services juridiques au sein du gouvernement et de certains organismes publics. Nous retrouvons, en 2011, les mêmes montants qui s'adressent à des associations, qui s'adressent à des représentants.

Sur les mots « agent d'affaires » , je voudrais simplement dire que, dans la loi R-20, on les qualifie parfois d'agents d'affaires, parfois de représentants, mais le terme « représentant » inclut les agents d'affaires, donc ils sont inclus dans la loi; que la députée ne s'inquiète pas.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : Oui. Mme la Présidente, je comprends que ma collègue… Mme la ministre me dit qu'elle s'est inspirée d'une loi qui avait été votée pour les juristes de l'État. Je veux simplement faire remarquer à Mme la ministre que les juristes de l'État savent exactement la teneur des lois, et le contexte entre les juristes qui pratiquent dans nos tribunaux, dans nos ministères ou au Parlement, un petit peu tout partout, ce n'est pas tout à fait le même contexte que sur un chantier de construction où on a eu de nombreux exemples par rapport à la violence et à l'intimidation.

Si je fais juste me référer à la loi R-20, à l'article 113, déjà là les amendes sont très dissuasives, elles ont été augmentées considérablement. Et il m'appert... Je pense que c'est vraiment important, le fait que c'est une loi spéciale, pour dissuader les gens de faire de la violence sur les chantiers, peu importe que ce soient des représentants syndicaux ou des représentants patronaux. Si on fait une loi spéciale, est-ce qu'on peut faire une loi spéciale qui a des dents? Est-ce qu'on peut tenir compte du contexte de la construction? Et peut-on, au minimum, ne pas aller plus bas que qu'est-ce qui a été fait en 1986 et indexer ce qui a été fait en 1986 dans le même contexte?

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

• (20 h 50) •

Mme Maltais : Mme la Présidente, alors je vais la référer à la loi votée par son propre gouvernement et par son chef, son chef Philippe Couillard, loi sur la prestation de services de santé par les médecins spécialistes. Puis ça, ce n'est pas vieux, là, cette loi-là. Un médecin, ça gagne pas mal plus cher qu'un travailleur de la construction. 100 $ à 500 $ s'il s'agit d'une personne. Une fédération de médecins spécialistes, ça gagne pas mal plus cher qu'une association, hein, 25 000 $ à 125 000 $. On est dans les mêmes ordres de grandeur. On n'a pas voulu faire de différence.

Puis, en plus, je vais vous dire quelque chose, là. Les travailleurs, les associations de travailleurs, les associations d'employeurs, ils veulent rentrer, là. On leur propose un cadre de retour au travail. Moi, je trouve que… Et je regarde mon collègue de Chomedey. Je trouve que d'envoyer des signaux revanchards ou comme quoi on est plus durs envers eux qu'envers d'autres, comme la Fédération des médecins spécialistes ou les médecins... Moi, pénaliser plus un travailleur de la construction qu'un médecin spécialiste, je ne nous comprendrais pas. Je ne nous comprendrais pas, sachant qu'en plus tout ceci se cumule à R-20, et, s'il y a le moindre geste d'intimidation, c'est couvert par R-20 puis les amendes s'accumulent. Alors, je ne vois pas pourquoi on traiterait… on punirait plus durement...  E t ce n'est pas dans notre manière de travailler , p unir plus durement un travailleur de la construction qu'un médecin spécialiste. Je ne crois pas que ce soit sage.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : …Mme la Présidente, je vais me permettre de faire une autre intervention. Je comprends très bien qu'un travailleur, au Québec, c'est un travailleur, peu importe dans le domaine auquel il oeuvre, que ce soit un médecin, que ce soit une infirmière, que ce soit un juriste, que ce soit un travailleur de la construction. Je pense que, oui, effectivement, il y a des lois, au niveau des relations du travail, qui ont été faites.

Mais je pourrais sortir d'autres exemples à la ministre où, alors que... Lorsque les infirmières… Comme j'en ai parlé cet après-midi, on a voté une loi spéciale en 2002. Les infirmières, il y avait des amendes supplémentaires qui avaient été imposées au syndicat puis il y avait des amendes qui étaient imposées aux infirmières, où on allait chercher directement dans le fonds de pension. Donc, je comprends très bien que chaque loi spéciale peut avoir un contexte qui est totalement différent.

Là où je veux en venir, Mme la Présidente, moi, je pense que, si tout le monde respecte les lois, là, les amendes, on n'en aura pas de besoin. Et je souhaite de tout mon coeur que tout le monde respecte les lois, que les travailleurs retournent sur les chantiers, je souhaite qu'il n'y ait pas de grabuge. Vous savez que je n'ai jamais endossé l'intimidation qu'il pouvait y avoir sur les chantiers. Mon point est — et je pense que c'est facile à comprendre, et de là la première question de mon collègue : Pourquoi, en 1986, l'amende pour un individu était de 100 $ à 500 $ et qu'aujourd'hui c'est le même montant? Au même titre que, dans le deuxième alinéa, les amendes… Et là, à ce moment-là, on parle d'un dirigeant qui occupe une fonction et qui doit donner l'exemple, que ce soit un employeur ou un représentant syndical, Mme la Présidente. En 1986, les amendes étaient entre 10 000 $ et 50 000 $. Aujourd'hui, on a une loi devant nous qui est de 7 000 $ à 35 000 $. À ce que je sache, des cotisations, que ce soit par l'association d'entrepreneurs ou les cotisations syndicales, il y en a dans les coffres de tout le monde. Bien, moi, je ne veux pas pénaliser, mais je vais reprendre les propos de mon collègue le député de Chomedey sur le principe de dire qu'on veut que ce soit dissuasif, que les gens n'y pensent même pas. C'est aussi simple que ça. Et mon questionnement est tout à fait légitime : Pourquoi, en 1986, c'était de 10 000 $ à 50 000 $ et qu'aujourd'hui c'est de 7 000 $ à 35 000 $? Je vois qu'au niveau des grandes associations, là on a augmenté. Pourtant, à l'époque, c'était de 20 000 $ à 100 000 $, et on est rendus de 25 000 $ à 125 000 $. Félicitations! Bravo! Il y a eu une indexation.

Donc, mon questionnement est tout à fait légitime, à savoir : Pourquoi on n'a pas au moins le niveau de 1986, comme on l'a pour le travailleur? Mon but, ce n'est pas d'augmenter substantiellement les amendes tout partout, c'est juste d'être conséquents. On a un point où on est au même niveau, l'autre point où on a baissé, exemple, pour un représentant syndical, ou un délégué de chantier, ou un représentant d'une association d'entrepreneurs, et à l'autre on l'a augmenté. Bien, je veux juste qu'on m'explique, que je puisse comprendre.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre du Travail.

Mme Maltais : Écoutez, j'ai la même réponse. En 2005, le gouvernement libéral, même, même chose. Alors, nous avons suivi le modèle des dernières fois.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la députée d'Anjou—Louis-Riel.

Mme Thériault : Bien, je vais juste me permettre de conclure, Mme la Présidente, que ce n'est absolument pas la même chose, le domaine de la construction étant un domaine où l'intimidation sur les chantiers, elle est présente et on doit la dissuader, la décourager. Et je trouve bien particulière la remarque que la ministre me fait lorsqu'elle compare les différentes lois spéciales, alors qu'on a une loi ici qui touche exactement le même domaine et qu'on a baissé volontairement les montants d'amende et qu'il y en a d'autres qui ont été augmentés. Je pense juste qu'on a tourné les coins un petit peu ronds, Mme la Présidente, avec tout le respect que j'ai pour les juristes de l'État, surtout ceux du ministère du Travail, que je connais très bien. Mais, je me dis, quand on part une loi spéciale, on va chercher les bonnes bases. Et ici il y en avait une, base, qu'on n'a pas respectée, et je suis en droit de m'interroger, tout simplement.

9<R>La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Oui, je me permettrai une autre intervention, Mme la Présidente, parce qu'effectivement on nous a mentionné une loi de 2005, de 2006 et une de 1986 aussi, de 2011. Et c'est un peu ce qui nous guette. Et je me permettrais un commentaire pour les gens... pas juste les gens qui nous écoutent, mais aussi pour ceux qui viendront consulter nos débats, quand il y aura un quelconque intérêt à venir les consulter. On a toujours le même débat, à l'étude de chacune des lois, sur les précédents et sur les... qu'est-ce qui a été écrit dans d'autres lois. O.K.?

Et là l'autre débat que nous avons, c'est toujours le même débat par rapport à l'indexation. Et là il y a un côté qui parle qu'il ne devrait pas y avoir indexation parce qu'on nous sort un paquet de références où est-ce que ça n'a pas été indexé. Et, d'un autre côté, on essaie d'avoir l'indexation. Vous en avez un très bel exemple avec la loi R-20, les amendes étaient de 1 000 $ à 2 000 $; elles sont rendues à 1 014 $, 2 028 $, etc. Il y a une indexation qui se fait. Et c'est toujours le même débat à chaque loi.

Puis, à chaque fois qu'on met comme point de référence la loi de 2005, ce n'est pas le même argent en 2013, on est rendus ailleurs. La loi de 2006, ce n'est pas le même argent, ça n'a pas la même valeur, la loi de 1986 aussi. C'est toujours le même débat parce qu'on nous ressort des points de référence qui nous emmènent des discussions, très souvent, qui sont et qui peuvent être, dans certains cas, stériles.

Mme la ministre, Mme la Présidente, nous mentionnait tantôt que la loi R-20 continue de s'appliquer. Je sais, par pratique ou par expérience que, dans certains cas... et les tribunaux ont tendance à prendre, pour une infraction similaire, la peine la moins élevée. Donc, vous arrivez avec une infraction qui est couverte par l'article 15, pour un salarié, de 100 $ à 500 $, alors que R-20 va toucher 1 014 $ à 2 028 $. Il y a peut-être des chances, à certains égards, qu'on va porter plainte en vertu de la loi qui sera la moins pénalisante. Et je pense que c'était tout simplement qu'un point que je voulais faire, Mme la Présidente, qu'on crée deux régimes, et on crée deux poids, deux mesures, et on crée un régime particulier. Et je pense que l'exemple de ma collègue d'Anjou—Louis-Riel, pour la loi de 1986, est assez éloquent, mais je n'en ferai pas un point de discussion, ce n'est tout simplement qu'un point d'information.

Et je pense que c'est important qu'on ait cette discussion-là parce qu'on aura, lors d'une prochaine loi, encore le même débat sur l'indexation, où est-ce qu'on a pris les montant des amendes, et on aura cette même discussion là, et ça refera partie du même débat. Je n'aurai pas d'autre commentaire à ce stage-ci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que l'article 15 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 16, Mme la ministre.

Mme Maltais : « 16. Commet une infraction quiconque aide ou, par une incitation, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre, amène une autre personne à commettre une infraction visée par la présente loi.

« Une personne déclarée coupable en vertu du présent article est passible de la même peine que celle prévue pour l'infraction qu'elle a aidé ou amené à commettre. »

Alors, c'est un article qui prévoit que la personne qui ne contrevient pas à la loi mais incite  — j'insiste sur « incite »  —  une autre personne à le faire est passible des mêmes peines que si elle avait elle-même contrevenu à la loi. Si vous me demandez si c'est le même libellé que dans les autres lois de retour au travail, je vous dis non. J'ai personnellement vu à changer un mot. Le mot «incitation » remplace le mot «encouragement ». Avant, c'était écrit «un encouragement ». Ça avait soulevé des débats ici, dont j'avais fait partie. Il y avait quelque chose de très vague dans le mot « encouragement » , tandis qu'une incitation, c'est très clair, une incitation, c'est volontaire, on incite à faire quelque chose. Un encouragement, il y avait un petit flou là-dedans que je trouvais juridiquement moins intéressant qu'une incitation. Soyons clairs. Voilà.

La Présidente (Mme Poirier) : Y a-t-il... M. le député de Chomedey.

• (21 heures) •

M. Ouellette :  J'aurais un commentaire, Mme la Présidente. Quand je relis l'article : « Commet une infraction quiconque aide ou, par une incitation, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre, amène une autre personne à commettre une infraction visée par la présente loi » , on ne pourrait... Est-ce qu'on pourrait enlever le mot « autre » , Mme la Présidente? Quiconque est en infraction amène une personne… Pourquoi est-ce que, juridiquement, on doit avoir le mot « autre » dans cette phrase, Mme la Présidente?

Mme Maltais : Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : On peut amener un amendement, mais ce serait vraiment... On peut... On pourrait l'enlever, on peut le garder, on peut prendre plus de temps pour faire un amendement, on peut le laisser là, ça ne me fait rien, là, moi, on peut l'enlever, «autre », il n'y a pas de problème. On me dit : Juridiquement, ça ne fera pas de problème. On va le préparer, si vous voulez, on va préparer l'amendement.

La Présidente (Mme Poirier) : Donc, nous suspendons... Est-ce qu'il y a d'autres commentaires concernant l'article 16? Alors, on va suspendre l'article 16. Article 17.

Mme Maltais : 17. La Commission de la construction du Québec surveille l'application des dispositions de la présente loi. Elle possède, à cet égard, les pouvoirs que lui attribue la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a des commentaires?

Mme Maltais : C'est une disposition qui confère des pouvoirs extraordinaires à la Commission de la construction, soit celle d'enquêter sur d'éventuelles contraventions à cette loi.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : ...pas ma force, là, mais «commet une infraction quiconque aide ». Le «ou », après, est-ce que c'est nécessaire?

Une voix : Pas nécessaire.

Mme Maltais : On est rendus à l'article 17.

M. Ouellette : 17, qu'on est rendus.

Des voix : ...

Mme Maltais : Quand on reviendra à 16, on regardera 16.

La Présidente (Mme Poirier) : ...l'article 17, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 18.

Mme Maltais : 18. Le ministre du Travail est responsable de l'application de la présente loi.

C'est une loi qui est sous la responsabilité de la ministre du Travail, mais le vieil archaïsme que sont nos lois fait que, malgré tous les travaux que je fais auprès du Secrétariat à la législation, je n'ai toujours pas réussi à les convaincre. Ce que nous savons tous, c'est qu'à dire que, bien souvent, le féminin inclut le masculin.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que vous avez un commentaire, M. le député de Louis-Hébert?

M. Hamad : De consentement, on peut tout faire, je pense.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Mme la Présidente, dans le même esprit du commentaire de Mme la ministre, simplement dire qu'il est probable qu'un jour ou l'autre il y ait un remaniement ministériel et que Mme la ministre actuelle soit appelée à d'autres fonctions et qu'un homme occupe sa fonction actuelle, donc « le ministre » risque d'être applicable à ce moment-là.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chauveau, je… votre commentaire, il est dur. Je me le permets. M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : ...si on peut revenir au 16, pour revenir au point...

La Présidente (Mme Poirier) : On va commencer par finir le 17, si ça ne vous dérange pas... 18, excusez-moi, on va finir 18. Alors, est-ce que l'article 18 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Au masculin. Alors, on revient à l'article 16. Alors, je vous lis l'article 16, l'amendement : Supprimer, dans le premier alinéa, le mot «autre ».

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Je voudrais juste disposer de l'amendement, M. le député de Louis-Hébert, s'il vous plaît.

M. Ouellette : On ne l'a pas lu, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, je viens de vous le lire, M. le député de Chomedey. Alors : Supprimer, dans le premier alinéa, le mot «autre ».

Alors, est-ce qu'il... l'amendement est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. On revient à l'article 16. M. le député de Louis-Hébert, je sens que vous brûlez d'impatience.

M. Hamad : Alors, le mot «commet une infraction quiconque aide ou ». Le «ou », là...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : ...ça fait : « Commet une infraction quiconque aide ou, [...] amène une personne à commettre... » Si vous enlevez les exemples, vous avez «ou amène », c'est… donc, le «ou » est pertinent.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui, c'est parce qu'un de nos adjoints nous soulève une question, là. Quand… «Commet une infraction quiconque[...], par une incitation, un conseil, un consentement, une autorisation [...] un ordre, amène une [...] personne à commettre une infraction… » Le fait qu'on ne dise pas «une personne ou une association », c'est parce que, juridiquement… Est-ce que, maître, le mot « association » est inclus dans le mot générique de « personne » ? C'est pour ça que vous avez mis « personne » ou ça devrait être « personne ou association » ? Non, mais les juristes, je sais, n'aiment pas mettre des mots redondants. Si le mot « personne » est générique... Puis peut-être que c'est un oubli puis ça devrait être mis. Je pose la question.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Mme la Présidente, « personne » ici, d'après les juristes, inclut « personne physique ou morale ».

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres commentaires? Est-ce que l'article 16 est adopté tel que modifié?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Est-ce que l'article 19, Mme la ministre, vous pouvez nous en faire la lecture?

Mme Maltais : 19. La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).

La Présidente (Mme Poirier) : Pas de commentaire? Est-ce que l'article est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Article 19, adopté.

Mme Maltais : …possible de suspendre nos travaux pour que nous échangions un peu en dehors de l'Assemblée sur la teneur des articles 11 et 12, afin de mieux préparer nos travaux et leur continuation?

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 21 h 6)

(Reprise à 22 h 1)

La Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît. Nous allons reprendre nos travaux. Alors, nous en sommes à l'article 11. Mme la ministre, 11… l'article 11.

Mme Maltais : «11. Les conventions collectives expirées le 30 avril 2013, applicables au secteur industriel et au secteur institutionnel et commercial, sont renouvelées et lient les parties jusqu'au 30 avril 2017, compte tenu des adaptations nécessaires.

«Toutefois, les taux de salaire applicables aux salariés sont majorés de la façon suivante :

«1 ° 2 % du (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi) au 30 avril 2014;

«2 ° 2,1 % du 1er mai 2014 au 30 avril 2015;

«3 ° 2,2 % du 1er mai 2015 au 30 avril 2016;

«4 ° 2,3 % du 1er mai 2016 au 30 avril 2017.

«Les majorations prévues au deuxième alinéa s'appliquent également aux frais de déplacement applicables. »

Alors, Mme la Présidente, ce que nous avons ici, c'est un projet de loi et un article qui sont fondés sur les principes que j'ai énoncés lors de l'adoption du principe. Un, la stabilité, la stabilité. Les gens sortent d'une période difficile. Ils viennent de tenter de resigner leur convention collective, ils l'ont ratée. Ils ont besoin de temps.

Deux, les augmentations qui sont ici sont fondées sur la dernière négociation, qui est la négociation miroir en général, c'est-à-dire des augmentations fondées sur ce qui a été voté en génie civil et voirie, ce qui a été signé.

Trois, vous remarquerez que ces conventions se terminent comme toutes les conventions collectives, et les augmentations de salaire arrivent au 30 avril. Et ce n'est pas anodin. Sortir de la date du 30 avril, c'est une erreur fondamentale dans une loi qui touche... quand on touche à R-20 et aux relations de travail. Voilà pourquoi, Mme la Présidente, nous proposons la paix, l'harmonie, la stabilité et le respect tant des patrons que des travailleurs et des travailleuses. Il est temps de retrouver la paix sociale. Il est temps de redonner harmonie, paix sur les chantiers québécois.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Oui, Mme la Présidente. Comme je vous l'avais mentionné dans mes remarques préliminaires, à ce stage-ci, Mme la Présidente, j'aimerais officiellement déposer un amendement à l'article 11. Et je pense que vous en avez une copie entre les mains. Vous me permettrez, Mme la Présidente, de le lire.

L'article 11 du projet de loi est modifié par :

1 ° le remplacement, au premier alinéa, des mots «30 avril 2017 » par les mots «30 juin 2014 »;

2 ° le remplacement, au paragraphe 1 ° du deuxième alinéa, des mots « 30 avril 2014 » par les mots « 30 juin 2014 »;

3 ° la suppression des paragraphes 2 °, 3 °, 4 ° du deuxième alinéa.

Vous en avez une copie, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Poirier) : J'ai la copie en tant que telle. Est-ce que vous avez une explication à donner, un complément, s'il vous plaît?

M. Ouellette : Oui, Mme la Présidente. L'explication que je donnerais, et j'en ai parlé dans les remarques préliminaires : il est très important, pour l'opposition officielle, qu'il y ait un retour des travailleurs sur les chantiers le plus tôt possible, donc le plus tôt possible étant normalement le 2 juillet, mardi le 2 juillet, et c'est dans l'intérêt des contribuables et surtout dans... en tenant compte de la capacité de payer des contribuables.

L'autre élément qui est très important, Mme la Présidente… et c'est pour ça que nous avons gardé, au deuxième paragraphe, le 2 %, parce qu'on veut protéger, Mme la Présidente, le pouvoir d'achat des travailleurs. Et, quand on parle de protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et on parle du 2 %, c'est un 2 % qui s'applique uniquement au salaire de base, ce n'est pas un 2 % qui s'applique à toutes les primes et à tout l'ensemble des négociations. C'est qu'on veut protéger le pouvoir d'achat des travailleurs, donc c'est un 2 % — je me permettrais l'anglicisme —  «flat » sur le salaire de base des travailleurs.

Et j'écoutais Mme la ministre nous parler de paix dans le milieu de la construction. Je pense que la meilleure paix qu'on puisse souhaiter dans le milieu de la construction, c'est une reprise des négociations entre la partie patronale et la partie syndicale dans le but d'en arriver à une convention négociée. Et je vous dirais, Mme la Présidente, qu'avec la date au 30 juin 2014 nous forçons et nous mettons de la pression sur les deux parties pour que celles-ci s'entendent dans une convention collective et s'entendent sur différentes clauses normatives qui bonifieront l'amendement que nous avons déposé ce soir, que... Je répète, Mme la Présidente, le 2 % qu'on introduit pour protéger le pouvoir d'achat des travailleurs, c'est un 2 % de base sur le salaire de base. Ça ne touche aucunement, le but de cet amendement, toutes les primes qui pourraient s'y rattacher. C'est l'explication que j'avais à donner sur l'amendement à l'article 11, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors, Mme la Présidente, j'ai déjà dit tout à l'heure, dans un des principes que nous abordons aujourd'hui, qu'il n'était pas temps de jouer aux apprentis sorciers avec une loi spéciale. C'est quelque chose d'extrêmement important. La loi R-20, la Loi sur les relations de travail, prévoit que les conventions collectives se terminent toutes en même temps. Elles se terminent le 30 avril et se termineront même le 30 avril 2017. Donc, toute convention collective qui arrive avant cette échéance se retrouve en négociation avant les autres. C'est un problème avec lequel on peut peut-être vivre, mais le problème que nous amène l'amendement du député, il est tout autre.

En faisant se terminer une convention collective au 30 juin 2014, il y a deux problèmes. Le premier, on a tenté de l'expliquer aux gens de l'opposition. Ils viennent de sortir d'une négociation extrêmement difficile, et nous allons leur imposer de rentrer sur les chantiers. Le climat social, c'est la productivité dans un chantier. Ils et elles ont besoin de temps pour se remettre de la négociation. Il faut les ramener à la table, oui, nous sommes tous d'accord, mais les ramener de façon précipitée au 30... en 2014, déjà, 30 juin 2014, c'est déjà un problème. Mais, le 30 avril 2014... le 30 juin 2014, on sort des cartons du 30 avril.

Nous avons ici une convention collective qui n'expirera pas en même temps que les autres conventions collectives. Nous avons donc devant nous un tronc commun à négocier. Qu'est-ce que le tronc commun? Chacun des secteurs négocie sa part, ses conventions, et tout, mais ensuite il y a une négociation pour l'ensemble des secteurs. Les gens qui partent, là, négocier le tronc commun, les régimes de retraite, toutes ces choses-là, se retrouvent avec des conventions collectives qui se terminent à des dates différentes.

• (22 h 10) •

Passe encore de cette erreur, erreur, erreur qu'est en train de faire le député de Chomedey, je vais lui en montrer une autre que je trouve encore plus énorme. Pour une convention collective se terminant à la date que demande le député, 30 juin 2014, je demande de référer aux lois du travail, à la loi R-20, l'article 29 : La Commission de la construction du Québec doit, au plus tard le 31 mai 2013, publier le nom des associations. On est en retard, ça ne marche pas. La loi R-20 est bafouée par ce que vous faites, parce que vous mettez sur la charge de la CCQ d'être en retard déjà de… mois sur le travail de maraudage. Article 31 : Les associations peuvent faire de la publicité et solliciter des salariés — du maraudage — à compter du 1er juin 2013. Saviez-vous que vous nous proposez que le maraudage soit commencé depuis un mois? Vous rendez-vous compte de l'irréalisme de cette situation que je vous ai expliquée et à laquelle vous ne voulez absolument pas porter d'attention? Le maraudage devrait être... La liste des associations pour le maraudage devrait être publiée par la Commission de la construction, de qui vous êtes si fiers depuis deux mois. Le maraudage devrait être commencé depuis un mois.

Article 32 : À compter du 1er juillet 2013  —  demain  —  les salariés peuvent voter pour l'association représentative. Voter pour l'association représentative. Voilà ce que vous proposez et, malgré le moment qu'on a pris pour suspendre pour que je vous explique comment ça marche dans la construction, que je vous rappelle comment c'est, la loi sur les codes du travail, vous êtes en train de proposer quelque chose qui met la Commission de la construction en contravention et qui provoque, demain matin  —  demain matin  —  le maraudage dans le secteur ICI. C'est ça que vous appelez la paix sociale? Provoquer le maraudage, d'ores et déjà? C'est ça, votre paix sociale? Voici : articles 29, 31, 32 de la loi R-20.

Je vous propose un sous-amendement qui vous permettra de vous extirper du pétrin dans lequel vous mettez l'industrie de la construction. Mme la Présidente, je dépose un sous-amendement. Alors, sous-amendement à l'article 11 :

Remplacer, dans le paragraphe 1° proposé par l'amendement, les mots «30 juin 2014 » par «30 avril 2015 ».

Remplacer les paragraphes 2° et 3 ° proposés par l'amendement par les suivants :

2 ° le remplacement, dans le paragraphe 1 ° du deuxième alinéa, de « 30 avril 2014 » par « 26 avril 2014 »  —  voilà qui nous permettra de régler un premier problème;

3 ° le remplacement, dans le paragraphe 2 ° du deuxième alinéa, de «du 1er mai 2014 au 30 avril 2015 » par «à compter du 27 avril 2014 »; et

4 ° la suppression des paragraphes 3 ° et 4 ° du deuxième alinéa.

Ce que je vous propose, autrement dit, c'est que, pour éviter le problème, le problème que crée votre amendement, et votre amendement crée un problème en vertu de la loi R-20… pour éviter ce problème, on coupe la poire en deux. Nous, on croit que l'harmonie et la stabilité, c'est quatre ans. Vous, vous dites : Non, on compresse le monde, on veut aller plus rapidement. Entendons-nous à mi-chemin : je vous propose un sous-amendement qui nous ramène aux mêmes dates que les autres conventions collectives, 30 avril, mais, comme vous voulez que ce soit plus tôt, je dis «30 avril 2015 ».

Résultat de ce sous-amendement : premièrement, on respecte les dates de conventions, on respecte la loi R-20, on respecte nos propres lois, que nous adoptons ici, à l'Assemblée nationale, on respecte la Commission de la construction. Et, en plus, on permet ce délai que nous réclame le médiateur en chef, que nous avons nommé, qui dit : Laissez-leur un peu de temps pour régulariser la situation.

C'est le premier commentaire, et je propose... C'est vraiment, là... Regardez le pas qu'on vient de faire, là. Nous autres, on est prêts à faire une convention collective qui ne dure que 18 mois à peu près, mais, Seigneur, évitons, évitons nous-mêmes de placer les gens en contravention de nos propres lois! On est en train de...

Je comprends, là, que l'opposition est un peu maître du jeu, ce soir, puis qu'elle est majoritaire. Vous savez à quel point j'ai été respectueuse, et je vous ai expliqué les principes, j'ai travaillé avec vous. Mais là, là, ce que vous êtes en train de faire, c'est nuire à l'économie québécoise…

Des voix :

Mme Maltais : …parce que — c'est ce que je crois — parce que vous êtes en train…

La Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît, Mme la ministre! Mme la ministre, s'il vous plaît.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Juste un moment, s'il vous plaît, là. Je veux bien croire que nous sommes nombreux, que l'on ait des réactions, mais je vais nous demander à ce qu'on puisse continuer dans le calme.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Et le calme, s'il vous plaît. Merci. Mme la ministre, vous pouvez poursuivre.

Mme Maltais : Merci. C'est un plaidoyer, simplement, là. Écoutez, il y a une industrie qui est fragilisée. Il y a une... Là, là, on dit aux travailleurs québécois : Demain matin... Mardi matin, de gré ou de force, avec des amendes à la clé, vous rentrez au travail. On dit aux associations syndicales et patronales : On vous donne les conditions pour rentrer au travail, de gré ou de force, avec amendes à la clé. Mais là, en plus, imaginez-vous donc que, là, on est en train de créer un problème.

On essaie de régler des problèmes. Une loi spéciale, c'est là pour régler des problèmes. Mais qu'une loi spéciale vienne créer un problème, vienne, au contraire de ramener l'harmonie, défaire l'harmonie, c'est le contraire du type de travail qu'on doit faire ici comme parlementaires. Je vous demande une dernière fois de considérer ce sous-amendement par respect, par respect pour nos conventions, pour nos lois, pour nos institutions comme la Commission de la construction du Québec, que vous mettez dans le trouble, et par respect pour les associations patronales et syndicales. Elles aussi, je ne suis pas sûre que demain matin ça leur tente d'être en maraudage.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a un autre... M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci, Mme la Présidente. Je comprends que présentement la discussion porte sur le sous-amendement, là, on n'est pas sur l'amendement à l'article 11.

La Présidente (Mme Poirier) : …sur le sous-amendement.

M. Ouellette : À ce stage-ci, j'ai écouté la ministre, Mme la Présidente, et je n'aurai pas d'autre commentaire à faire sur son sous-amendement.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : D'accord, juste un moment. Est-ce qu'il y a une autre intervention, M. le député de Lévis?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : D'accord. Mme la ministre.

Mme Maltais : Alors, je note que la Coalition avenir Québec n'a pas plus de commentaires sur le fait d'adopter des dispositions qui sont tout à fait en contravention avec nos lois et qui aussi font que nous avons entre les mains un problème.

J'ajouterai quelque chose. Tout le long de la journée, j'ai entendu parler de ne pas briser le rapport de force, c'est revenu souvent, alors ce que je veux faire, c'est vous dire ceci : En changeant la date du 30 avril pour le 30 juin, j'espère... je n'ose croire, je n'ose croire que vous êtes conscients  —  c'est pour ça que je vais le dire comme ça  —  que vous brisez ce fameux rapport de force, parce que les autres secteurs sont... leurs conventions collectives se terminent le 30 avril, et ce secteur-là, l'ICI, se terminera fin juin, donc les droits de grève se transportent ailleurs, à l'automne, à l'automne, bris du rapport de force dans ce secteur.

C'est un choix que vous faites, ce n'est pas le choix que nous faisons. Il s'agit là d'un biais. C'est le premier biais qui est introduit dans cette loi. Jamais, tout au long de la journée, nous n'avons accepté d'introduire des biais dans cette loi spéciale. Vous porterez ce fardeau. Si vous ne le réalisez pas, là, réalisez-le. Vous porterez le fardeau d'introduire un biais dans cette loi spéciale.

La Présidente (Mme Poirier) : S'il vous plaît.

Mme Maltais : D'accord. Mme la Présidente, je considère donc  — je le répéterai de belle façon  — que les deux oppositions introduisent pour la première fois de toute la journée un biais, un biais en faveur du patronat dans cette loi. Je n'ose croire qu'ils le font de façon consciente.

Alors, puisqu'ils le réalisent, peuvent-ils maintenant accepter ce sous-amendement qui nous extirpe de ces problèmes dont nous n'avons pas besoin actuellement ni dans cette loi spéciale ni dans l'industrie de la construction? Aujourd'hui, les travailleurs, ils sont prêts à rentrer, ils rentrent, ils sont d'accord, mais, si on commence à jouer dans les conventions collectives et à jouer dans le rapport de force... Je pense, Mme la Présidente, que nous ne devons pas le faire et que c'est là faire porter à cette loi spéciale un poids qu'elle ne devrait pas porter.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Lévis.

M. Dubé : Je n'ai pas de commentaire, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Alors, vous me permettrez... Je me permettrai ce commentaire à ce stage-ci, Mme la Présidente : Je pense que, les trois raisons que nous avons mentionnées, je vais m'inscrire en faux sur les raisons qui ont été invoquées par la ministre, Mme la Présidente. On veut qu'il y ait un retour des travailleurs sur les chantiers, on veut protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et on veut qu'il y ait une reprise des négociations entre les patrons et les syndicats, sans privilégier ni un côté ni un autre, Mme la Présidente.

À ce stage-ci, Mme la Présidente, je demande le vote nominal sur le sous-amendement de la ministre.

• (22 h 20) •

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, avant de procéder à l'appel nominal, conformément au deuxième alinéa de l'article 114.2 de notre règlement, j'invite les personnes présentes autres que les députés à se retirer jusqu'à ce que le résultat du vote soit proclamé. Un moment. Mme la députée de Gouin.

Mme David : Merci, Mme la Présidente. Je pense que vous ne m'aviez pas vue. Est-ce que je peux intervenir à ce moment-ci sur le sous-amendement?

La Présidente (Mme Poirier) : Non, le vote est demandé. Le vote est demandé, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement...

Mme David : Mais j'avais… Ça faisait cinq minutes...

La Présidente (Mme Poirier) : Excusez. Il y a consentement? Il y a consentement? Il y a consentement. Mme la députée de Gouin.

Mme David : Merci, Mme la Présidente. J'ai eu l'occasion, de même que mon collègue, de donner aujourd'hui mon opinion sur l'idée même d'une loi spéciale. Mais, à ce stade-ci de la journée et de la soirée, je pense qu'on va se parler concrètement de ce qui est sur la table. Il y a donc un amendement et un sous-amendement. Je vais parler en faveur du sous-amendement. Et la raison pour laquelle je vais le faire, outre les questions techniques qui ont été invoquées et que je crois tout à fait sérieuses, la raison pour laquelle je pense que nous devons adopter le sous-amendement, accepter l'idée du sous-amendement, c'est qu'il faut travailler ici dans un esprit de compromis. Oui, c'est moi qui vous le dis, moi qui suis contre l'idée même d'une loi spéciale. Il y a des moments où il faut savoir débattre dans le meilleur intérêt de toutes les parties concernées, y compris des travailleurs.

Si on accepte cette idée que tout doit se terminer... tout est en application, mais uniquement jusqu'au 30 avril 2014, en plus des problèmes... ou du 30 juin 2014, en plus des problèmes techniques qui ont été soulevés, ce que je veux dire, c'est que, clairement, on est en train de prendre le parti des employeurs. Il faut que cela soit clair. Ceux-ci nous répètent depuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines, qu'ils veulent une loi spéciale. Ils nous répètent que ce qu'ils veulent, ce sont des reculs, des reculs importants pour les travailleurs, par exemple, dans le paiement de leur temps supplémentaire, passer du temps double au temps simple le samedi. Ils veulent de la flexibilité dans les embauches, ce qui, soit dit en passant, défavorise les travailleurs des régions. Il me semble qu'on devrait tous se sentir concernés. Ils souhaitent des horaires brisés à l'intérieur de plages qui vont de 5 h 30 le matin à 19 heures le soir, ce qui n'est pas exactement formidable pour la conciliation travail-famille, qui devrait aussi nous intéresser. Ça, ce sont les demandes de la partie patronale. On n'est pas ici devant une partie patronale qui propose des améliorations aux conditions de travail des gens, on est devant une partie patronale qui, en fait, ne propose que des reculs.

Et là ce qu'on irait faire, c'est qu'on dirait à ces gens-là : Non seulement vous avez eu une loi spéciale  —  vous la vouliez, vous l'avez  — mais, en plus, bien, d'ici quelques mois, c'est reparti, c'est reparti. Parce que je ne peux pas m'imaginer que, tout de suite, loi spéciale, les gens retournent au travail, et là tous ces gens-là, épuisés, tannés, fatigués, ils vont se remettre à négocier de bon coeur, et tout va être réglé d'ici le printemps prochain. J'aimerais ça qu'on soit juste un petit peu réalistes, là, hein, si on veut se parler concrètement dans le blanc des yeux. Ce n'est pas possible, ce n'est pas vrai. Mais le danger là-dedans, c'est que, si certains pensent que c'est vrai puis que c'est possible, c'est parce que, dans le fond, ils sont prêts à considérer que, le printemps prochain, tout recommence. Mais c'est vrai qu'avec une loi spéciale à la clé, encore là, les employeurs, ça ne les dérange pas, bien entendu, parce que, si on est rendus maintenant que, dans la construction, après trois jours et, bien pire, deux semaines de grève, il faut absolument une loi spéciale, j'aimerais bien ça, savoir qu'est-ce qu'il reste comme rapport de force aux travailleurs dans les mois qui viennent. Je pense que ce n'est pas sérieux.

Au point de départ, j'aurais beaucoup souhaité qu'on adopte la proposition du gouvernement, qui était de reconduire, puisqu'il y avait cette loi spéciale... Encore une fois, je le répète, sur le principe, on était en désaccord. Mais, une fois qu'elle est sur la table, le quatre ans, nous, faisait notre affaire. Mais, dans un esprit de conciliation — parce que je pense que c'est là qu'on est rendus — je demande vraiment à mes collègues des deux partis d'opposition de faire le pas que la partie ministérielle leur demande. La partie ministérielle concède deux ans et, dans le fond, elle demande aux oppositions de lui donner un an de plus que ce que les oppositions veulent actuellement donner. Franchement, là, il me semble que ça, ça devrait être possible dans un esprit non partisan, dans un esprit de gens qui veulent régler un problème, le régler convenablement, correctement, pour le bien-être des travailleurs et de toute l'industrie de la construction. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, avant de procéder à l'appel nominal, je vous répète que, conformément au deuxième alinéa de l'article 114.2 de notre règlement, j'invite les personnes présentes autres que les députés à se retirer jusqu'à ce que le résultat du vote soit proclamé. Et j'inviterais les députés à regagner leurs sièges.

Qu'on appelle les députés. On suspend les travaux.

(Suspension de la séance à 22 h 26)

(Reprise à 22 h 31)

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous reprenons notre débat. Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Je répète. Je vais le répéter pour être bien sûre qu'on s'est tous bien compris. Alors, que les députés en faveur de ce sous-amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : Mme Marois (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bédard (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Maltais (Taschereau), M. Duchesne (Borduas), M. Marceau (Rousseau), Mme Zakaïb (Richelieu), M. Hébert (Saint-François), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Trottier (Roberval), Mme Richard (Duplessis), M. Ferland (Ungava), M. Drainville (Marie-Victorin), Mme De Courcy (Crémazie), M. Leclair (Beauharnois), Mme Champagne (Champlain), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Kotto (Bourget), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Lisée (Rosemont), M. Blanchet (Johnson), Mme Hivon (Joliette), M. Breton (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Beaudoin (Mirabel), M. McKay (Repentigny), M. Bureau-Blouin (Laval-des-Rapides), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Pagé (Labelle), Mme Larouche (Abitibi-Est), Mme Bouillé (Iberville), M. Pelletier (Rimouski), Mme Gadoury-Hamelin (Masson), M. Villeneuve (Berthier), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe), M. Chapadeau (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Cardin (Sherbrooke), Mme Proulx (Sainte- Rose), M. Therrien (Sanguinet), M. Roy (Bonaventure), M. Claveau (Dubuc), M. Goyer (Deux-Montagnes), M. Richer (Argenteuil), M. Trudel (Saint-Maurice).

Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier).

La Présidente (Mme Poirier) : Que les députés contre ce sous-amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Fournier (Saint-Laurent), M. Moreau (Châteauguay), M. Bachand (Outremont), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Arcand (Mont-Royal), M. Dubourg (Viau), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme James (Nelligan), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme St-Amand (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Ouimet (Fabre), Mme Ménard (Laporte), Mme St-Pierre (Acadie), M. Ouellette (Chomedey), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Gaudreault (Hull), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Blais (Saint-Henri—Sainte-Anne), Mme Vallée (Gatineau), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Boulet (Laviolette), M. Carrière (Chapleau), M. Billette (Huntingdon), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Drolet (Jean-Lesage), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), M. Kelley (Jacques- Cartier), Mme Vien (Bellechasse), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Vallières (Richmond), M. Iracà (Papineau), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Bolduc (Mégantic), M. Rousselle (Vimont).

M. Legault (L'Assomption), M. Deltell (Chauveau), M. Bonnardel (Granby), Mme Roy (Montarville), M. Dubé (Lévis), Mme St-Laurent (Montmorency), M. Duchesneau (Saint-Jérôme), Mme Daneault (Groulx), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Trudel (Charlesbourg), M. Marcotte (Portneuf).

M. Ratthé (Blainville).

La Présidente (Mme Poirier) : Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire.

Le Secrétaire : Pour :   49

                          Contre :56

                          Abstentions :      0

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, 49 pour, 56 contre, aucune abstention. Alors, l'amendement est rejeté... Le sous-amendement est rejeté.

Alors, j'invite maintenant les personnes autres que les députés qui s'étaient retirés avant le vote par appel nominal à revenir dans la salle de l'Assemblée.

Alors, nous allons suspendre un moment.

(Suspension de la séance à 22 h 35)

(Reprise à 22 h 40)

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous reprenons nos travaux. Alors, nous en sommes maintenant à l'amendement proposé par le député de Chomedey. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Lévis.

M. Dubé : Merci beaucoup, Mme la Présidente. En fait, ce que j'aimerais mentionner en entrée de jeu sur le point de l'amendement tel que présenté : il faut se rappeler, il y a plusieurs semaines, pour faire un peu la genèse des événements, que nous avions proposé d'avoir un moratoire, si je peux dire, pour expliquer... sur la négociation, pour s'assurer qu'il y aurait d'emblée un retour rapide aux négociations et que les partis auraient un an pour convenir d'une convention. À la lumière des dernières semaines, je pense qu'on se confirme que ça aurait été une approche beaucoup plus pragmatique et je pense que le temps nous le dira encore une fois, dans les prochaines semaines, parce qu'on a entendu souvent que les parties étaient très proches d'une entente. Alors, on pourra voir, dans les prochaines semaines, le déroulement de tout ça.

Mais on avait plusieurs objectifs, Mme la Présidente, que je veux rappeler, histoire de s'assurer qu'on voulait minimiser les interruptions dans les chantiers. On l'a assez dit au cours des derniers jours, comment c'était important, l'industrie de la construction au Québec, et, en sus, avec tout ce que l'industrie vit présentement, qui sont des problèmes autres que ceux de la grève, il fallait garder — il ne faut pas avoir peur des mots — un rapport de force juste et équitable entre les entrepreneurs et les employés. Et c'est d'ailleurs l'objectif d'une négociation, c'est de garder un rapport de force sain, et c'est pour ça que nous avons toujours privilégié une entente négociée.

Si je fais référence à l'amendement que nous avons aujourd'hui, Mme la Présidente, c'est que les objectifs que nous avions il y a quelques semaines, quand nous avons fait la première proposition, nous les avons encore aujourd'hui et nous les retrouvons exactement dans l'amendement qui est proposé.

Au cours des deux derniers jours, j'ai donné l'opportunité à la ministre du Travail de nous faire participer aux discussions, ce qui n'a pas été le cas. Je n'en ferai pas un procès d'intention mais la nature des discussions qu'on a eues dans les dernières minutes me donnent à penser qu'on aurait peut-être eu un différent dimanche si le parti de l'opposition... ou les deux partis de l'opposition auraient été traités autrement, et je pense qu'il faut s'en souvenir dans les prochains mois parce que ce gouvernement-là minoritaire va continuer. Et il y a deux façons de travailler, et celle qui a été choisie par la ministre du Travail, bien, malheureusement nous amène des fois à prendre des décisions qui sont malheureuses parce qu'on n'a pas participé à la lumière... ou à la hauteur de ce qu'on aurait pu collaborer. Et ça, il faut le reconnaître et, malgré l'ouverture d'esprit que nous avons donné, que nous avons offert, nous n'avons pas eu cette ouverture-là, alors nous allons vivre avec.

Au contraire, aujourd'hui, lorsque nous avons proposé... notre proposition, pardon, nous avons dit qu'un des éléments était de protéger le pouvoir d'achat des travailleurs. Alors, dans ce principe-là, nous avons dit... Et, lorsque nous avons entendu les libéraux, dans la journée aujourd'hui, proposer, par exemple, l'indice des prix à la consommation pour s'assurer qu'à travers la négociation qui allait continuer durant cette période-là de un an... que l'indice des prix à la consommation, nous trouvions que c'était une idée intéressante, qui d'ailleurs est une bonne pratique dans bien des conventions collectives parce que les gens sont habitués à travailler avec cet indice-là, et nous étions confortables. Pour montrer qu'il y a de l'évolution... Il y a eu de l'évolution dans la position de la première opposition, ce qui fait que, durant la journée, ce fameux indice des prix à la consommation a évolué jusqu'à 2 %, qui était en fait le montant indiqué dans le projet de loi du groupe gouvernemental. Et je vous dirais aujourd'hui que je vous ferais peut-être une comparaison un peu intéressante, mais qui m'a été suggérée quelques fois durant la journée lorsqu'on avait à débattre, pour nous, si on acquiesçait à la demande de donner 2 % fixe plutôt que de laisser l'indice des prix à la consommation pour répondre à notre objectif de protéger le pouvoir d'achat des travailleurs durant cette période de négociation. En fait, c'est comme un peu lorsqu'on a à choisir une hypothèque à taux fixe ou à taux variable. Il faut décider quel genre de protection on veut avoir. Et, dans ce sens-là, je continue à penser aujourd'hui que certains travailleurs, dépendamment de ce qui va se passer dans la prochaine année, auraient pu être mieux protégés avec des indices des prix à la consommation. Mais, en même temps, dépendamment des... Puis on peut même penser aux indices des prix à la consommation qui sont mis par le ministère des Finances pour la prochaine année. Ils sont en ce moment de 1,9 %, alors on peut voir qu'on n'est pas très, très loin un de l'autre. Et justement, pour se rallier et faciliter les négociations que nous sommes en train de terminer, nous avons décidé de nous rallier à la proposition fixe de 2 %, qui, selon nous, faisait beaucoup de sens.

Alors, en quelque sorte, je n'irai pas trop dans le détail pour expliquer, Mme la Présidente, que nous sommes non seulement en faveur avec cet amendement-là, mais il respecte en tous points les principes que nous avions mis sur la table il y a plusieurs semaines. Malheureusement, nous avons eu à vivre... pas nous, mais les citoyens du Québec, les contribuables, les travailleurs, à travers une grève qui a été très dispendieuse et souvent coûteuse pour des familles, pour des entreprises et pour tout le Québec au complet. Il est temps d'y mettre fin et de trouver une solution qui va être pratique pour tout le monde dans les prochaines semaines. Et, encore une fois, je le redis : Un an, c'est plus que raisonnable pour en arriver à une solution négociée au moment où nous en sommes si les rapports que nous avons eus de la négociation sont ce qu'ils sont en réalité. Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député de Lévis. Mme la ministre.

Mme Maltais : Est-ce qu'on est sur l'amendement ou sur l'article?

La Présidente (Mme Poirier) : Sur l'amendement.

Mme Maltais : Je reviendrai sur l'article, Mme la Présidente, puisque le député vient de faire un long plaidoyer pour l'article proposé par le gouvernement.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Je voulais juste rappeler les principes qui nous guident ici, de notre côté, à l'opposition officielle. Nous avons trois principes, et l'amendement qui est apporté, c'est exactement dans la direction pour respecter les trois principes. Le premier principe, pour nous, c'est très important, c'est le retour au travail, c'est l'ouverture des chantiers de construction le plus rapidement possible. Et évidemment ce principe-là doit respecter aussi la capacité du citoyen, du contribuable de payer.

Le deuxième principe pour nous : quand même, il faut respecter les travailleurs et respecter le pouvoir d'achat des travailleurs. Et, pour ça, nous avons amené un amendement qui amène une augmentation de 2 %, dans ce sens exact, respecter la capacité de pouvoir d'achat des travailleurs.

Le troisième, c'est le but ultime, en fait. Le but ultime, pour nous, c'est qu'il y ait une négociation le plus rapidement possible et — notre grand souhait — que cette négociation-là amène une entente très rapide. C'est là où nous différons ensemble avec la négociation et l'échéancier qu'on peut mettre sur place pour atteindre cet objectif-là.

Maintenant, pourquoi... En fait, notre objectif : que cette loi-là soit la plus temporaire possible. Ce n'est pas une nouvelle convention collective qu'on veut, mais plutôt on veut un moyen qui dit, qui envoie des messages clairs aux deux parties également pour dire que vous, deux parties, vous avez échoué dans la négociation, on comprend, mais maintenant vous avez, les deux parties, le devoir de recommencer à négocier une nouvelle entente. Donc, l'objectif, ce n'est pas avoir une convention collective, une loi qui s'applique pendant quatre ans parce qu'on retarde le problème pendant quatre ans. L'objectif, c'est mettre des échéances serrées qui... quand même, faisables et permettent aux parties de s'entendre le plus rapidement possible.

Et aussi l'objectif ici, à l'Assemblée nationale, bien sûr, ce n'est pas imposer une convention collective à ces deux parties-là, mais plutôt les sensibiliser à l'importance, maintenant, après l'échec de leur négociation... Et je suis convaincu, ceux qui ont négocié des conventions collectives le savent, que ça arrive à une période d'échec, mais ils ont su aussi, dans le temps, de reprendre les négociations. Peut-être dans une semaine, peut-être dans deux, mais, un jour, il faut qu'ils reprennent les négociations, puisque, d'abord, c'est leur job de négocier, deuxièmement, parce qu'ils n'ont pas le choix de revenir à la table et négocier.

• (22 h 50) •

Maintenant, l'état psychologique des négociateurs, on comprend, mais à un moment donné, il y a une obligation de résultat des deux parties. Alors, l'Assemblée nationale, le message qu'elle envoie aujourd'hui, ce que nous souhaitons par l'amendement, c'est qu'on comprend qu'il y a un échec dans la négociation, mais on souhaite fortement que vous allez négocier, puis on ne veut pas aucune raison, aucune raison qui permet aux deux parties de retarder, ou de trouver des raisons de retarder une négociation, ou de briser l'équilibre entre les deux parties. Et cet équilibre-là, pour nous, est très important.

Mme la Présidente, c'est que, dans l'article 11 qui était avant, on proposait sur quatre ans, et quatre ans, c'est très long pour donner ces échéances-là, et quatre ans, c'est long pour permettre à dire... pour envoyer un message clair de l'Assemblée nationale aux négociateurs, c'est-à-dire les deux parties, pour négocier. Nous croyons qu'un an c'est une période assez longue. Mais, quand la ministre soulève les problèmes, les problèmes sur le tronc commun, le problème de date de 30 avril, le problème de l'état psychologique des négociateurs, nous lui disons, pour répondre à ses arguments, il y a une réponse à ces trois arguments-là, la réponse est simple, c'est : Réglez votre convention collective avant ces échéances-là. Alors, ce n'est pas compliqué. Si on part avec l'idée qu'ils ne régleront pas avant le 30 avril, bien, on peut voir plein de problèmes. Mais le message qui arrive ici avec l'amendement de dire : Si vous réglez avant le 30 avril, il n'y en a plus, de problème, le 30 avril, il n'y en a plus de problème. Et, dans l'autre élément, de dire : L'état psychologique des négociateurs, on comprend, c'est des êtres humains comme nous, mais à un moment donné il faut revenir, il faut revenir. Puis on donne un an pour ces négociateurs-là qu'ils reviennent à la table et négocier. Et c'est vu ailleurs d'ailleurs. On se rappelle, à plusieurs conflits de travail, il y a eu ces expériences-là. Des fois, on change le médiateur, on change le négociateur, mais on finit par avoir une entente dans la majorité des cas. Il arrive des échecs mais, aujourd'hui, ce que nous envoyons comme message, ce que nous souhaitons envoyer comme message aux négociateurs aux deux parties : Vous n'avez pas le choix de s'entendre, et vous avez un délai pour s'entendre. Puis je pense que le problème de tronc commun, le 30 avril, donne une autre pression additionnelle aux négociateurs de dire : Bien, vous savez, s'entendre avant si vous voyez des gros problèmes pour arriver au 30 avril.

Il y a un respect aussi important dans la négociation, c'est garder l'équilibre entre les deux parties. Et garder l'équilibre entre deux parties, c'est en fait ne pas donner un avantage à quelqu'un par rapport à l'autre mais maintenir les deux parties dans le même niveau pour permettre à ces deux parties-là de négocier. L'article 11, tel qu'il a été présenté avant, ne faisait pas cet avantage-là, selon nous. La durée était trop longue. Et, je l'ai dit, je l'ai mentionné tantôt, donc il fallait réduire les durées puis maintenir l'équilibre entre le patronat et les syndiqués. D'ailleurs, ce qui nous a surpris dans le briefing technique... Ça, on n'a pas su, bien sûr, et c'est tout à fait normal, c'est quoi, les demandes des deux parties. Mais ce qu'il était surprenant de voir, c'est que les syndicats ont demandé... il y avait une centaine de demandes et, le patronat, il y avait 69 demandes, si ma mémoire est bonne des chiffres que nous avons obtenus. Et, dans ces demandes-là, ce qu'on a compris par la présentation nous avons eue, ils n'étaient pas loin. Ils n'étaient pas loin. Il restait quelques affaires. Je ne sais pas combien, le nombre, mais ce qu'on a compris, qu'ils n'étaient pas loin. Alors, partons qu'ils n'étaient pas loin, puis disons qu'on prend le temps, qu'on revient au niveau psychologique, puisque, ça a l'air, le niveau psychologique est important pour le négociateur, mais on revient au point de départ peut-être. Mais, quand même, je pense que les deux parties doivent comprendre que, peut-être, il faut trouver une solution entre les deux.

Pour nous, le plus important dans cette loi-là, c'est le contribuable, parce que le contribuable... à la fin de la journée aujourd'hui, lorsqu'on va adopter le projet de loi, il va y avoir des impacts dans les poches du contribuable. Et, pour nous, le respect de la capacité de payer du contribuable, elle est importante. C'est là l'intervention qui vient dans cette direction-là. Et, en même temps, évidemment, nous avons une contrainte que nous avons respectée, c'est de respecter le pouvoir d'achat des travailleurs. Et, lorsqu'on a parlé d'IPC, évidemment les spécialistes IPC peuvent nous parler de « conference board » , parler des prévisions d'IPC, des banques. Et nous avons opté pour travailler avec les recommandations du ministère des Finances. D'ailleurs, le ministère des Finances, dans la mise à jour qui a été faite au mois de mars, recommandait 1,9  % . Alors là, on n'était pas loin de 2  % . Et ce 2 % vient... parce que, pour une précision de 0,1 % qui respecte la capacité de payer de nos travailleurs, nous trouvons que le chiffre était très raisonnable, puisque c'est le gouvernement qui réfère dans ces chiffres sur le IPC de 1,9  % en 2014. Donc, nous avons référé... nous avons respecté notre parole, c'est-à-dire IPC, ministère des Finances, 1,9  % . Finalement, c'est 2 %. C'est à peu près le même chiffre. C'est en faveur des travailleurs. Donc, c'était pour nous très important.

On peut voir des problèmes. On peut voir tous les problèmes dans la montagne d'en face puis on n'atteindra jamais cette montagne-là ou on ne sera jamais capables de traverser la montagne. Mais je pense que le fait de mettre des dates encore plus serrées, le fait d'avoir la contrainte du tronc commun le 30 avril, je pense, c'est plutôt un élément pour encourager les deux parties à régler avant.

Maintenant, pour le maraudage... Mais de toute façon, le maraudage, ils vont travailler pour le régler. Puis, à Commission de la construction, ils travailleront plus fort que d'habitude, puis ils sont capables de travailler plus fort que d'habitude pour mettre les règles puis avancer en avant pour régler leurs problèmes.

La clé, la solution demeure dans les mains des deux parties qui négocient. L'Assemblée nationale, le message qu'elle envoie : Vous devrez reprendre vos négociations, vous devrez s'entendre le plus rapidement possible. Et, si vous avez une entente le plus rapidement possible, le problème est réglé. Puis surtout, surtout, évidemment, sur le plan économique pour le Québec, c'est très important de régler ce problème-là. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député. Mme la députée de Gouin.

Mme David : Merci, Mme la Présidente. Donc, très brièvement cette fois-ci, je suis frappée, en écoutant mon collègue le député de Louis-Hébert d'entendre certains mots, des mots comme « équilibre » , des mots comme « deux parties égales » . Mais, avec l'amendement qui est sur la table, je me permets de réaffirmer que c'est tout le contraire que nous faisons. Nous ne serons plus, si nous avons déjà été, devant deux parties égales, nous allons être devant deux parties inégales, et il n'y aura pas équilibre dans les rapports de force. Et je continue de penser, pour des raisons à la fois politiques et techniques, que c'est une très mauvaise idée que de voter en faveur de cet amendement.

Je pense même que cet amendement, si jamais il devait être adopté... Et là je ne veux pas trop m'enfarger dans des procédures que je ne connais pas encore extrêmement bien, mais il me semble que ça devrait amener la partie ministérielle à réfléchir. Cet après-midi, j'ai entendu de mes oreilles la ministre du Travail dire : En bas d'un an... ou si on veut m'obliger à ce que cette loi spéciale s'applique dans un délai de un an, je vais la retirer. Je lui demande de réfléchir à cette possibilité, parce que, vraiment, si cet amendement est adopté, et je finis là-dessus, on est vraiment devant un régime de négociation qui est tronqué, qui n'en est plus un et qui affaiblit considérablement l'une des deux parties. Merci.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député d'Outremont.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, M. le député de Chauveau.

M. Deltell : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, rapidement, je tiens à rappeler que l'amendement qui est sur la table ici reprend essentiellement ce que nous avons proposé il y a deux semaines, c'est-à-dire un retour au travail et avec une négociation active entre les deux parties. Notre proposition initiale ne touchait pas à la question salariale, parce qu'on ne voulait pas se mettre le doigt dans l'engrenage, mais c'est ça, la vie politique, et on peut évoluer, puis on peut être attentifs aux propositions qui sont faites par les autres partis, et c'est ce qui fait qu'on peut trouver un terrain d'entente.

Donc, on a été bien heureux d'apprendre ce matin... ce midi plutôt, que le Parti libéral était d'accord avec l'essence de notre proposition, c'est-à-dire un an, et retour au travail, et négociation. Par contre, ils ont proposé la question de l'indice du prix à la consommation, donc on avait... on touchait à la question salariale. Mais on est d'accord avec leur position, qui, finalement, a évolué elle aussi, concernant le 2 % qui, du reste, Mme la Présidente, reprend intégralement ce qui est inscrit dans la loi initiale de la ministre. Donc, c'est finalement un compromis qui rejoint toutes les positions : la position de la coalition initiale, l'accord donné par le Parti libéral à notre proposition et la première mouture de la loi présentée par le gouvernement actuel. Donc, c'est un compromis qui, à mon point de vue, couvre tous les angles.

Maintenant, Mme la Présidente, sans vouloir jouer au gérant d'estrade, je pense que, même si le projet n'est pas encore adopté, on peut commencer à tirer certaines leçons, certaines leçons qui font en sorte qu'on peut se... parce que le gouvernement va survivre à cette loi-là, et le gouvernement minoritaire va continuer à procéder. Moi, je pense, Mme la Présidente, qu'on doit retenir de cet épisode-là que, lorsqu'on est face à une grève, on ne peut pas changer six fois d'idée en l'espace de 10 jours sur une date butoir, parce que ça, ça fait perdre toute crédibilité au processus de négociation. Il faut rappeler que le gouvernement d'abord, il n'était pas question de loi spéciale, après ça, c'était 15 jours, après ça, c'était le plus vite possible, après ça, c'était mardi, après ça, c'est vendredi, puis, finalement, on se retrouve dimanche, et bientôt lundi le 1er juillet, fête du Canada, pour voter cette loi-là. Je pense qu'il y a eu une évolution qui, malheureusement, ne donnait pas un signal clair sur l'intention gouvernementale qu'il y ait une entente.

• (23 heures) •

Dans un second temps, Mme la Présidente, je pense que vraiment le gouvernement devrait apprendre à travailler en situation de gouvernement minoritaire. Vous savez, on peut reprocher bien des choses au gouvernement du premier ministre Jean Charest, mais, en 2007-2008, il savait comment gouverner en termes de gouvernement minoritaire. Il cherchait les consensus avec l'un ou avec l'autre pour, après ça, présenter une loi. Dans le cas présent, non. Et malheureusement les appels du pied que nous avons fait pour apprendre de quoi on allait discuter aujourd'hui n'ont pas été suivis, avec le résultat qu'on se retrouve aujourd'hui avec une loi où on doit proposer des amendements, et c'est dommage.

Donc, Mme la Présidente, de façon la plus sobre possible, j'invite tout le monde à prendre conscience de ce qui se passe aujourd'hui et d'en tirer les leçons conséquentes pour la suite des choses. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député d'Outremont.

M. Bachand : Oui, merci, Mme la Présidente. Brièvement, sur l'article 11 du projet de loi et l'amendement, je vais vous expliquer pourquoi l'article 11, tel que proposé par le gouvernement, est vraiment inadéquat, et j'appuierai l'amendement de mon collègue de Chomedey.

Nous avons deux grands éléments dans ce projet de loi là. Le premier, c'est un retour au travail le 2, mardi le 2; c'est réglé, c'est fait. Le deuxième, c'est : À quelles conditions? Et là le gouvernement propose, à son article 11, fondamentalement, de violer le droit à la négociation. Il fait des grands speechs sur la négociation, des grands discours, mais il impose des conditions de travail pour quatre ans, donc il met de côté le droit à la négociation, qui est le droit fondamental qu'on veut respecter pour les quatre prochaines années.

Nous, dans l'amendement de mon collègue le député de Chomedey, ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas une nouvelle négociation. J'ai entendu aujourd'hui des arguments pour donner le temps aux parties de reprendre leurs équipes, de refaire leurs forces, de revenir à la table. Ils sont à la table, ils sont là, ils peuvent finir ça en trois semaines, s'ils le veulent. Si le ministère du Travail avait... la ministre avait fait son travail correctement, il n'y aura peut-être même pas eu de grève, parce que le médiateur  —  puis à la demande de ce que mon collègue de Chomedey demandait tous les jours  — s'il avait été nommé je ne sais pas combien de temps avant, ça serait probablement réglé aujourd'hui, Mme la Présidente. On n'est pas là.

Qu'est-ce qu'on fait, donc, comme législateurs, sur les conditions dans lesquelles doivent vivre les employeurs et les travailleurs au cours des prochaines semaines? Ce n'est sûrement pas de leur imposer un régime pour les quatre prochaines années. Ça, ça vient complètement défaire le principe de base dans notre économie du droit du travail.

Alors, l'amendement de mon collègue, c'est dire : Non, ça, ce n'est pas bon, faisons-le pour un an. Je vous dirais que, même, je trouve que c'est long, un an. Personnellement, je trouve que c'est long, un an. On a eu des discussions, mais, un an, c'est convenable. Mais j'espère que ça soit réglé cet automne, au fond, puis là tous les autres problèmes vont disparaître. Parce que c'est la même négociation qui doit continuer. Là, ils prennent une pause. Et ça va leur permettre, le fait que le monde travaille, de prendre une pause.

Je ne comprends pas ma collègue la députée de Gouin qui dit que ça, ça déséquilibre, alors que la proposition gouvernementale est un équilibre. Je comprends qu'elle soit contre le projet de loi complètement pour laisser la grève aller, ça, elle a le droit, c'est son opinion, et je la respecte  —  je ne la partage pas, je la respecte  —  mais de dire que le gouvernement, qui impose une convention collective, dans la proposition du gouvernement, en faisant le statu quo sur le normatif et 2 % sur le salaire, que ça vient... ça, ça serait un équilibre, puis que nous, on dit : Non, continuez pendant maximum 12 mois mais négociez… On ne déséquilibre pas, on dit : Négociez, négociez les 12 prochains mois.

Je terminerai en reprenant deux arguments de la ministre, qui a parlé... elle n'en a pas reparlé ce soir, peut-être que... qui parlait de paix sociale et de retour harmonieux. Moi, je crois au sens des responsabilités des travailleurs, des syndicats, des employeurs qui sont là. Je ne suis pas inquiet pour la paix sociale sur les chantiers. Les condition, c'est leur propre convention collective qui continue, puis le 2 % garanti, au fond le coût de la vie. Après ça, ils pourront négocier autre chose. Il n'y a pas de quoi finalement voir quelque chose qui empêche les gens… Au contraire, de continuer de négocier, ça encourage leurs syndicats et les employeurs.

Deuxièmement, elle nous parle de stabilité, de l'importance de la stabilité. De la part de ce gouvernement-là, c'est... On ne reprendra pas des grands débats, là, il est presque minuit, mais on reprendra ça à un autre moment donné. Mais moi, je crois au sens des responsabilités des parties. Dans une industrie qui n'a pas connu de grève depuis 25 ans, ils n'ont pas de leçons... on n'a pas de leçons à leur donner sur la stabilité. Je pense que ça fait 25 ans qu'ils négocient des conventions collectives — c'est ça, à peu près 25 ans qu'ils négocient des conventions collectives  —  ils n'ont pas de leçons à recevoir d'aucun député de l'Assemblée nationale, là, sur la stabilité. Ils sont matures, ils sont professionnels, ils réussissent à le faire de ce côté-là.

Il y a des problèmes ailleurs dans l'industrie de la construction, O.K., des problèmes de placement, de violence, etc.; ça, c'est d'autres choses qui doivent être réglées. Mais, au niveau de la stabilité, finalement, des conventions collectives, ils ont démontré qu'ils sont capables de le faire depuis 25 ans. Parfois, ça dérape. On leur a dit, il y a deux semaines : Non, non, c'est tellement important pour l'économie du Québec, c'est 14 % du PIB, c'est toute... c'est 150 000 familles qui sont touchées, vous retournez au travail. Mais je ne suis pas inquiet de la stabilité du système de relations de travail dans la construction parce qu'on leur donne un an pour arriver à une entente — j'espère que ça va durer juste trois mois — plutôt qu'imposer ça sur quatre ans. Le passé est garant, au fond, de l'avenir. Et moi, j'ai confiance en leur sens des responsabilités.

Voilà pourquoi je pense que c'est fondamental, l'amendement de mon collègue de Chomedey, parce qu'il vient remettre en place le deuxième grand principe qui est la négociation, que le projet de loi de la ministre bafouait. D'ailleurs, si on adoptait l'article 11 de la ministre tel quel, il faudrait, Mme la Présidente, changer le titre du projet de loi parce que le titre du projet de loi dit : Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Il faudrait dire, si on veut être très transparent : Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction et imposant des conditions de travail pour les quatre prochaines années. Ce n'est pas dans le titre et ce n'est pas notre intention, de ce côté-ci de la Chambre. C'est pour ça que je voterai pour l'amendement de mon collègue de Chomedey.

La Présidente (Mme Poirier) : M. le député de Blainville.

M. Ratthé : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, je dois également abonder dans le sens des collègues de l'opposition et être d'accord avec l'amendement du député de Chomedey. Vous savez, Mme la Présidente, ce projet de loi là ne se veut pas une substitution à une convention collective. Ce projet de loi là, non plus, ne se veut pas un répit, une pause pour que les négociateurs se refassent une santé, si on peut dire, ou le moral, ou, encore pire, donc, qu'ils attendent 21 mois, comme le proposait dans son sous-amendement la ministre tout à l'heure, donc jusqu'au 30 avril 2015 avant de pouvoir effectivement trouver une solution à un conflit qui a assez duré, un conflit qui, je le rappelle, la ministre nous l'a mentionné, a débuté le 30 avril. Il y a eu 38 rencontres, il y a eu des... Elle ajoutait même : 38 rencontres, c'est peu à côté du nombre de téléphones, de courriels qui a pu s'échanger.

Je pense que l'objectif de la loi, il est simple, et les collègues l'ont bien identifié. L'objectif de la loi, c'est, d'une part, de permettre aux travailleurs de retourner sur les chantiers. Plusieurs d'entre eux veulent retourner sur les chantiers, veulent reprendre leur travail. L'objectif de la loi est également de protéger le pouvoir d'achat de ces personnes-là et, également, l'objectif est de faire en sorte que les négociations reprennent le plus rapidement possible. Il ne s'agit pas de prendre une pause de six mois, de huit mois, de un an. Il s'agit de faire en sorte que, par la loi que nous allons voter aujourd'hui… ou demain matin, dans quelques heures, en fait, que cette loi-là soit un incitatif, Mme la Présidente, pour que les négociations reprennent le plus rapidement possible, pour que finalement le petit peu de terrain qu'il reste à trouver un terrain d'entente, donc, qu'on puisse le régler le plus rapidement possible tout en permettant en parallèle aux travailleurs et aux travailleuses de la construction de reprendre leur travail.

Donc, il ne s'agit pas de mettre en place une loi et de dire : Bon, bien, quand cette loi-là viendra à échéance, le 30 juin de l'an prochain, donc, on reprendra les négociations, on reprendra donc les conditions. Puis ça ne pourra pas marcher parce qu'il n'y aura pas de tronc commun. Mme la Présidente, l'objectif est clair, il a toujours été clair du côté de l'opposition, l'objectif est simple, il s'agit de retourner les gens au travail et parallèlement, au même moment où les gens vont travailler, de permettre que les négociations continuent, non pas prennent une pause, non pas prennent un temps d'arrêt, mais que les négociations continuent afin de faire en sorte que, dans les plus brefs délais possible  — et on le souhaite, que ce soit dans les plus brefs délais possible  — bien avant le 30 avril 2014, donc dans les plus brefs délais possible, les négociations aboutissent sur une convention collective négociée entre les deux parties. Et je suis convaincu qu'en adoptant cette loi-là c'est les objectifs que nous pourrons atteindre. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci, M. le député de Blainville. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, je vais mettre aux voix l'amendement du député de Chauveau. Par appel nominal?

Des voix :

La Présidente (Mme Poirier) : Excusez. Excusez. Alors, le député de... Il est tard, hein, je pense. Alors, M. le député de Chomedey.

Une voix :

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, qu'on appelle les députés.

Alors, avant de procéder à l'appel du vote nominal, conformément au deuxième alinéa de l'article 114.2 de notre règlement, j'invite les personnes présentes autres que les députés à se retirer jusqu'à ce que le résultat du vote soit proclamé. Et j'inviterais les députés à regagner leur siège.

Et je suspends pour un moment.

(Suspension de la séance à 23 h 10)

(Reprise à 23 h 18)

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous reprenons nos travaux. Alors, je mets aux voix l'amendement du député de Chomedey. Que les députés en faveur de cet amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Fournier (Saint-Laurent), M. Moreau (Châteauguay), M. Bachand (Outremont), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Arcand (Mont-Royal), M. Dubourg (Viau), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme James (Nelligan), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme St-Amand (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Ouimet (Fabre), Mme Ménard (Laporte), Mme St-Pierre (Acadie), M. Ouellette (Chomedey), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Gaudreault (Hull), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Blais (Saint-Henri—Sainte-Anne), Mme Vallée (Gatineau), M. Bolduc (Jean-Talon), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Boulet (Laviolette), M. Carrière (Chapleau), M. Billette (Huntingdon), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Drolet (Jean-Lesage), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Gautrin (Verdun), M. Kelley (Jacques- Cartier), Mme Vien (Bellechasse), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Marsan (Robert- Baldwin), M. Marcoux (Vaudreuil), Mme Vallières (Richmond), M. Iracà (Papineau), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Bolduc (Mégantic), M. Rousselle (Vimont).

M. Legault (L'Assomption), M. Deltell (Chauveau), M. Bonnardel (Granby), Mme Roy (Montarville), M. Dubé (Lévis), Mme St-Laurent (Montmorency), M. Duchesneau (Saint-Jérôme), Mme Daneault (Groulx), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Trudel (Charlesbourg), M. Marcotte (Portneuf).

M. Ratthé (Blainville).

La Présidente (Mme Poirier) : Il est interdit de prendre des photos à l'intérieur, Mme la députée de Richmond.

Alors, que les députés contre cet amendement veuillent bien se lever.

• (23 h 20) •

Le Secrétaire adjoint : Mme Marois (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bédard (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Maltais (Taschereau), M. Duchesne (Borduas), M. Marceau (Rousseau), Mme Zakaïb (Richelieu), M. Hébert (Saint-François), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Trottier (Roberval), Mme Richard (Duplessis), M. Ferland (Ungava), M. Drainville (Marie-Victorin), Mme De Courcy (Crémazie), M. Leclair (Beauharnois), Mme Champagne (Champlain), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Kotto (Bourget), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Ouellet (Vachon), M. Lisée (Rosemont), M. Blanchet (Johnson), Mme Hivon (Joliette), M. Breton (Sainte-Marie—Saint-Jacques), Mme Beaudoin (Mirabel), M. McKay (Repentigny), M. Bureau-Blouin (Laval-des-Rapides), M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Pagé (Labelle), Mme Larouche (Abitibi-Est), Mme Bouillé (Iberville), M. Pelletier (Rimouski), Mme Gadoury-Hamelin (Masson), M. Villeneuve (Berthier), M. Pelletier (Saint-Hyacinthe), M. Chapadeau (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Cardin (Sherbrooke), Mme Proulx (Sainte-Rose), M. Therrien (Sanguinet), M. Roy (Bonaventure), M. Claveau (Dubuc), M. Goyer (Deux-Montagnes), M. Richer (Argenteuil), M. Trudel (Saint-Maurice).

Mme David (Gouin).

La Présidente (Mme Poirier) : Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire.

Le Secrétaire : Pour :   57

                          Contre :48

                          Abstention :       0

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, 57 pour, 48 contre, aucune abstention. Alors, l'amendement est adopté.

Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Nous revenons à l'article 11.

Des voix :

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, nous en sommes à l'article 11. Mme la ministre.

Mme Maltais : Écoutez, Mme la Présidente, je sais que quelques collègues, en ce moment, bougent  —  non pas quittent, mais bougent  —  sur le parquet, mais ce que je voudrais dire d'abord, c'est qu'il y a quelque chose d'essentiel pour nous dans cet article 11 qui n'a pas été touché par les deux oppositions, qui ont fini par se ranger à notre opinion. Tout au long de la journée, nous avons plaidé pour une chose : protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et des travailleuses de la construction, protéger les familles, protéger ces gens qui se dévouent corps et âme dans un métier qui n'est pas toujours facile.

La proposition qui est contenue dans cet article, ce fameux 2 % d'augmentation sur les taux de salaire et les frais de déplacement — parce qu'on a inclus les frais de déplacement, qui sont de véritables frais — cette proposition, dès le début, nous l'avons mise sur la table. Je suis très heureuse de voir qu'enfin les deux oppositions se sont rendues à l'avis du gouvernement, d'autant que cette opinion était fondée en plus, dès le départ, sur cette idée qu'il doit y avoir un miroir entre génie civil et voirie, et le secteur ICI parce qu'il y a des travailleurs qui peuvent... il ne faut pas créer de déséquilibre entre les deux. Alors, je dis… C'est même tellement important pour nous, tellement important pour nous que, pour nous, c'est véritablement le coeur de cet article 11. Il était... C'était majeur. Bravo, je suis contente que les deux oppositions aient adhéré à cette vision du gouvernement de protéger le pouvoir d'achat des travailleurs et des travailleuses.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Chomedey? M. le député de Louis-Hébert.

M. Hamad : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Excusez, juste un moment parce que vous n'avez pas de micro, M. le député de Louis-Hébert.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Alors, on y va, M. le député de Louis-Hébert.

Des voix :

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'on fait un autre essai, M. le député de Louis-Hébert?

Des voix :

La Présidente (Mme Poirier) : À la place de la députée de Notre-Dame-de-Grâce?

M. Hamad : Là, y est-u correct? Oui. Oui. Merci, Mme la Présidente. En fait, je veux remercier la ministre de ses paroles, mais juste lui rappeler que c'était notre position dès le départ. Notre position respectait trois principes, et je vais les répéter, les trois principes, Mme la Présidente. Le premier principe, notre objectif, c'est le retour au travail pour les chantiers, l'ouverture des chantiers le plus rapidement possible, tout en respectant la capacité des citoyens de payer. Notre deuxième principe était important aussi, c'est respecter le pouvoir d'achat des travailleurs. Pour ça, nous avons proposé le 2 %. Et le troisième principe, c'était la reprise des négociations le plus rapidement possible, et c'est là qu'était la divergence entre notre position et la position du gouvernement. La position du gouvernement dans la proposition initiale, à l'article 11, c'est quatre ans, et nous avons proposé un an. Justement, nous ne voulons pas avoir une loi qui est permanente, nous voulons avoir une loi temporaire pour reprendre les négociations et permettre aux parties de s'entendre le plus rapidement possible.

La Présidente (Mme Poirier) : Merci. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Mme la Présidente, j'ai entendu effectivement les commentaires de la ministre et je veux tout simplement réitérer que, dans l'amendement que nous avons déposé et qui a été adopté, j'ai toujours fait référence à 2 % d'augmentation sur le salaire de base, sans prime, et je pense que ça a toujours été très clair. Et notre amendement touchait uniquement les trois points, en supprimant les paragraphes 2 °, 3 ° et 4 °, et on n'a pas touché à autre chose.

Donc, je veux juste que ça soit clair que, tant et aussi longtemps qu'il n'y aurait pas une entente négociée, c'est 2 % d'augmentation sur le salaire de base sans qu'on touche aux primes toutes autres. Donc, ce n'est pas le contrat ou ce n'est pas les mêmes ententes que le génie civil, parce que le génie, dans leur contrat, ils ont une panoplie de primes, à part du 2 %. Donc, il faut que ça soit très clair. C'est l'amendement qui a été adopté, et on n'a pas touché le paragraphe pour les frais de déplacement applicables, Mme la Présidente. Ça n'a pas fait l'objet d'un amendement.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que l'article 11, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Article 12.

Mme Maltais : «12. Les parties peuvent convenir en tout temps de modifications à la convention collective ainsi renouvelée, y compris aux majorations prévues au deuxième alinéa de l'article 11. »

Ceci dit donc que, comme je le prétends depuis le début de cette journée, la négociation peut se continuer demain matin et que nous n'avions pas besoin d'ajouter autre chose, c'était déjà dans la loi.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce qu'il y a des commentaires, des interventions? M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Le seul commentaire que je vous ferai, c'est qu'à ce stage-ci et à cette heure-ci, je n'aurai pas de commentaire, Mme la Présidente. Et on est prêts pour le vote.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poirier) : Excusez-moi. M. le député de Chomedey, j'aimerais ça vous entendre.

M. Ouellette : Je n'ai pas de commentaire, Mme la Présidente, on est prêts pour le vote.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que l'article 12 est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Est-ce que les intitulés des sections et sous-sections sont adoptés?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. Est-ce que les motions d'ajustement des références sont adoptées?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix : Adopté.

La Présidente (Mme Poirier) : Adopté. La commission ayant complété ses travaux, je remercie ceux et celles qui y ont participé.

Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants.

Et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

(Suspension de la séance à 23 h 30)

(Reprise à 23 h 37)

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Alors, Mme la députée.

Mme Champagne (présidente de la commission plénière) : Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire part que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction, et qu'elle l'a adopté avec des amendements.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, Mme la députée. Alors, pour poursuivre...

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Oui, s'il vous plaît. Merci, Mme la députée. Pour poursuivre, M. le leader du gouvernement.

M. Bédard : À ce moment-ci  — c omme disait l'autre, à ce stage-ci  —  M. le Président, ce que nous souhaiterions, c'est... de consentement, nous suspendrions une vingtaine de minutes, de façon à ce que les prochaines étapes se déroulent de façon accélérée et que nous retrouvions... à l'étape finale, lors de l'adoption finale du projet de loi, évidemment tout en passant l'étape du dépôt... pas du dépôt, mais de l'adoption du rapport. Mais nous avons convenu que nous parlions chacun notre tour lors de l'adoption finale.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : D'accord. Alors donc, je comprends, M. le leader du gouvernement, qu'il y a consentement pour qu'on suspende pendant 20 minutes et qu'au retour il y aura... nous mettrons aux voix le rapport de la commission.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Ça va? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Deltell : Alors, M. le Président, si j'ai bien compris, on se retrouve le jour du Canada, c'est bien ça?

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Il va manquer deux minutes, M. le... D'accord, alors nous suspendons pour 20 minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 38)

(Reprise à 0 h 4)

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Votre attention, s'il vous plaît. Alors, nous reprenons nos travaux.

Prise en considération du rapport de la
commission plénière qui en a fait l'étude détaillée

L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission plénière sur le projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'intervention. Alors, s'il n'y a pas d'intervention, cela met fin à la prise en considération du rapport de la commission plénière sur le projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction.

Mise aux voix du rapport

Je mets maintenant aux voix le rapport de la commission plénière sur le projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Ce rapport est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Adopté.

Adoption

Nous en sommes maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi. Mme la ministre du Travail propose l'adoption du projet de loi n °  54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Je vous rappelle que, conformément au paragraphe 4 ° de l'article 257.1, la durée du débat sur l'adoption du projet de loi est de une heure. La répartition du temps de parole pour ce débat restreint a été établie comme suit : 25 min 28 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 23 min 35 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 8 min 58 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, deux minutes sont allouées aux députés indépendants. Dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué aux groupes parlementaires en proportion de leur représentation à l'Assemblée. Enfin, mis à part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Y a-t-il des interventions? Mme la ministre du Travail.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais : M. le Président, je serai brève, car il est temps maintenant de clore, je crois, la discussion, les échanges autour de ce projet de loi spécial. Quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, il restera de l'histoire de cette négociation dans l'industrie de la construction des faits inéluctables. Grâce à la stratégie que nous avons adoptée de miser d'abord sur la négociation, deux secteurs sur trois ont signé une entente négociée; les travailleurs de ces secteurs vivent maintenant dans des conditions qu'ils ont eux-mêmes choisies, signées, générées. 100 000 travailleurs... près de 100 000 travailleurs, avant l'adoption, avant le dernier geste que nous allons poser ce soir, sont d'ores et déjà revenus au travail grâce à une stratégie qui était celle de la responsabilité, l'importance de la négociation entre travailleurs et employeurs de leur propre convention collective.

Maintenant, un secteur restait à régler. Il fallait agir. Alors, nous avons su prendre cette responsabilité, qui est très lourde, de déposer une loi spéciale. Il est assez exceptionnel qu'aujourd'hui, alors que nous déposons une loi spéciale, aucun travailleur ne soit venu protester devant l'Assemblée nationale, aucun. C'est tout à fait exceptionnel. Et pourquoi est-ce que c'est comme ça? Parce que nous avons su introduire dans la loi que nous avons présentée une notion essentielle : le respect des travailleurs et des travailleuses, le respect de l'équilibre entre les patrons et les employés. Ce respect, il s'introduit particulièrement dans l'article 11, où nous avons demandé qu'en renouvelant la convention collective existante, celle qui avait déjà été le résultat d'une négociation, on ajoutait une augmentation de salaire équivalente à leurs collègues dans les autres secteurs. Ce geste était important, et c'est ce qui assure, j'en suis sûre, la paix, la paix sur les chantiers et sur cette rentrée au travail des travailleurs, à qui je souhaite bonne chance.

Dernière chose, je suis sûre que les Québécois apprécient, j'en suis sûre, le nouveau départ que nous apportons. Il manque toutefois un ingrédient qui, à mon sens, aurait été essentiel, mais que l'opposition nous a refusé, c'est-à-dire d'introduire de la stabilité dans cette industrie. Nous verrons où nous en serons l'année prochaine, à la même date. Je nous souhaite, à tous et à toutes, que nous retrouvions de la stabilité dans cette industrie. Nous avons ici, dans cette loi, un ingrédient qui n'y est pas, nous souhaitons le retrouver un jour. En attendant, que les Québécois apprécient ce geste responsable et courageux du gouvernement qui est mené par la première ministre, qui a mené cette négociation de main ferme et responsable. Merci.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la ministre du Travail. Je cède maintenant la parole au député de Châteauguay. M. le député.

• (0 h 10) •

Des voix : Chomedey.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Chomedey. Excusez-moi.

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : M. le Président, je suis passé par Chauveau ce soir. Là, je suis rendu à Châteauguay. Donc, on est rendus à Chomedey.

Merci, M. le Président. Je suis très heureux de prendre la parole à cette étape-ci, M. le Président. Je pense que ça a été une très longue journée. On est aujourd'hui le 1er juillet, on est aujourd'hui le 1er juillet, M. le Président, et, comme je l'ai mentionné lors de l'adoption de principe, je pense qu'on aurait pu effectivement s'éviter d'être ici le 1er juillet pour une loi spéciale si les signaux d'alarme que nous avions envoyés au gouvernement à plusieurs reprises avant la fin des travaux pour la session d'été avaient été reçus et qu'on avait effectivement pu avoir la même lecture que nous avions sur le terrain à ce moment-là.

Je suis très heureux, M. le Président, aussi qu'on ait pu apporter notre contribution. On a dit qu'on était pour être collaboratifs et très... qu'on bonifierait le projet de loi. C'est ce que nous avons fait, M. le Président, avec l'article 11. Et, pour avoir parlé, au cours de la journée, à toutes les parties impliquées, je pense qu'il y a un nouveau départ qui se donne pour les parties impliquées dans l'industrie de la construction. Les travailleurs vont être de retour au travail mardi le 2 juillet, et les parties vont se rasseoir, M. le Président, pour en arriver à une convention négociée, comme c'était le voeu de tout le monde qui était alentour de la table, et je pense que ça leur donne un souffle nouveau.

Ce sera tous mes commentaires, M. le Président, à ce « stage » -ci  —  étant donné que ça a fait très rire l'Assemblée. Ça va repermettre certains tweets de nos collègues du gouvernement à ce « stage » -ci, je le répète une troisième fois, en cette journée du 1er juillet. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le député de Chomedey. M. le député de Lévis, à vous la parole.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, pour une promesse que je voudrais faire, M. le Président, c'est être le plus bref possible. J'aimerais peut-être me contenter de dire simplement, M. le Président, que nous avons dit, au cours des, je ne sais pas, 24 dernières heures et les nombreuses dernières journées, sur ce sujet, différentes choses, à savoir : On aurait peut-être dû procéder d'une certaine façon, on aurait peut-être dû faire autrement. Mais aujourd'hui le point n'est pas à faire le procès des derniers jours, mais plutôt de prendre acte où nous en sommes ce soir.

Et je pense que nous pouvons tous conclure que les objectifs que nous nous étions fixés en cette Assemblée, c'est d'accomplir, premièrement, le retour au travail des gens de la construction qui n'y étaient pas parvenus par voie de négociation dans les dernières semaines et de trouver la meilleure façon de leur donner le meilleur environnement et de le supporter pour que ces gens-là puissent retourner au travail en respectant un équilibre entre les parties.

Et je pense que, comme Assemblée, nous pouvons être très fiers, malgré quelques petits soubresauts dans les dernières heures, d'avoir accompli cet objectif, parce que, Mme la ministre l'a bien dit, nous sommes aujourd'hui à avoir réussi cet objectif-là, et mardi, c'est-à-dire demain, nos collègues pourront le faire avec la tête haute, parce que nous avons réussi à le faire de façon organisée et dans... j'allais dire l'allégresse, c'est peut-être un peu fort, mais dans une certaines harmonie, et il faut le reconnaître. Alors, je pense qu'on doit prendre acte que ça a été peut-être des fois difficile, mais nous avons quand même accompli notre objectif.

Nous l'avons dit tout à l'heure, nous devons peut-être prendre certains éléments des derniers jours pour apprendre de cette leçon, comment nous pouvons mieux travailler ensemble. Parce que nous aurons la chance de revenir en septembre, même, pour certains d'entre nous, nous allons revenir en août, et, en août, nous aurons à attaquer certains petits sujets faciles, comme les régimes de retraite, alors nous devons vraiment travailler ensemble. Et je pense que nous avons démontré à nos concitoyens, au cours des dernières heures, que nous pouvions travailler ensemble pour le bien de la population. Et je suis certain que chacun d'entre nous va pouvoir partir dans les prochains jours rencontrer ses concitoyens et dire que nous avons fait le bon travail pour nos concitoyens. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David : Oui, merci, M. le Président. Alors, en ce qui me concerne, ce n'est certainement pas avec allégresse que je termine cette journée et ce début de nuit. Et j'annonce, ce qui ne sera une surprise pour personne, je l'imagine, que mon collègue et moi, nous allons voter contre ce projet de loi.

L'adoption d'une loi spéciale, ça n'est jamais une nouvelle intéressante, ça n'est jamais une bonne nouvelle en matière de relations de travail. Une loi spéciale, ça signifie l'échec d'une négociation. Une loi spéciale, c'est un accroc à un droit démocratique qui s'appelle le droit d'association, assorti du droit de grève. Je ne pense pas que les travailleurs de la construction aient beaucoup de motifs de réjouissances aujourd'hui.

Il y en a plusieurs ici qui semblent souhaiter qu'une véritable négociation soit s'engage, selon les dires de certains, ou se poursuive, selon les dires d'autres. Eh bien, moi aussi, je souhaite qu'il y ait une véritable négociation. Mais, pour ça, il va falloir que la partie patronale renonce à tous les reculs qu'elle veut imposer aux travailleurs, des reculs qui, dans certains cas, attaquent des droits acquis depuis plus de 40 ans. Les demandes patronales quant à la flexibilité du temps de travail, quant à la flexibilité de la main-d'oeuvre sont des demandes qui ne pourront être acceptées par les travailleurs, et ça, tout le monde le sait dans cette Chambre.

Alors, j'imagine que nous serons de retour tous ensemble quelque part le printemps prochain pour rediscuter d'une situation de crise. Je déplore en particulier, d'ailleurs, l'amendement qui a été soutenu par les deux partis d'opposition et qui finalement a été adopté. Je pense qu'il aurait mieux valu adopter un délai de deux ans, comme c'était finalement proposé. Et je réitère, enfin, l'appui de Québec solidaire à la libre négociation, au droit d'association et au droit de grève. Merci.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la députée de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois : Merci, M. le Président. Nous nous apprêtons à accomplir quelque chose de très important pour le Québec. Nous pouvons désormais en donner l'assurance aux Québécois : les chantiers de construction seront tous ouverts dès mardi matin, et nous devons nous en réjouir.

Je déplore toutefois que l'opposition nous ait privés de l'occasion de garantir la paix et la stabilité sur les chantiers dans un avenir prévisible. Nous avons tenté d'en arriver à un compromis avec l'opposition pour permettre cette nécessaire harmonie entre les travailleurs et les entrepreneurs. Malheureusement, le chef du Parti libéral, Philippe Couillard, a refusé d'appuyer une solution qui nous aurait assuré une stabilité économique pour les quatre prochaines années. Nous pourrions sortir d'ici ce soir avec la certitude de soutenir la productivité sur les chantiers jusqu'en 2017. Malheureusement, à cause de motifs qui n'ont rien à voir avec l'intérêt du Québec, cette stabilité n'est assurée que pour un an. Tant et si bien que les quelques députés d'opposition que j'ai entendus déplorer devoir travailler un dimanche d'été pourraient bien se retrouver ici à pareille date en 2014.

Mais, pour l'instant, pour l'instant, M. le Président, notre principal objectif, il est atteint. Le retour au travail se fera dès mardi. Depuis le début du conflit, le gouvernement a agi avec sagesse pour que ce retour puisse se faire dans l'harmonie. Je veux d'ailleurs saluer les efforts de la ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale pour aider à régler ce conflit.

• (0 h 20) •

Il fallait donner du temps à la négociation. Un gouvernement responsable ne se précipite pas pour adopter une loi spéciale au premier jour d'un conflit. L'approche du gouvernement a été couronnée de succès dans deux des trois secteurs concernés. Des ententes ont été conclues dans le secteur résidentiel de même que dans celui du génie civil et des travaux routiers. Des milliers de travailleurs, des centaines d'entrepreneurs en sont satisfaits. Cela nous assure un climat de travail serein sur ces chantiers. C'est bien la preuve qu'il était sage, qu'il était raisonnable de donner du temps aux parties pour qu'elles s'entendent. Dans l'autre secteur, celui de la construction industrielle, commerciale et institutionnelle, les négociations étaient dans l'impasse. Il nous fallait donc agir, mais, encore une fois, de façon à ce que les chantiers puissent reprendre sereinement.

Ce n'est pas évident de faire adopter une telle loi pour un gouvernement minoritaire. Nous en avons vu les limites aujourd'hui alors que nous avons été contraints d'accepter une solution temporaire. Nous pensons qu'il aurait été dans l'intérêt de tous de laisser le temps faire son oeuvre pour qu'un climat plus propice puisse s'installer en vue des prochaines négociations. Cela aurait servi l'intérêt général. À cause des choix des oppositions, nous courons le risque d'être bientôt replongés dans un conflit, de revenir à la case départ. Ce n'est pas ce que nous souhaitons.

Malgré tout, nous préservons, pour l'instant, les relations de travail dans un secteur crucial de notre économie. Cette prolongation de l'ancienne convention collective, bien qu'insuffisante, est juste et responsable. L'économie québécoise pourra continuer sur sa lancée. Dès mardi matin, le travail reprendra sur les chantiers. Nous mettrons tout en oeuvre pour permettre aux parties de poursuivre leurs négociations cette année. Bref, l'objectif du gouvernement est atteint, M. le Président. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, Mme la première ministre. Je reconnais maintenant M. le chef de l'opposition, M. le député de Saint-Laurent.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Merci, M. le Président. À ce moment-ci, quelques mots pour préciser, pour l'opposition officielle, les principes qui guidaient notre conduite et qui nous ont amenés à ce qu'un projet de loi qui permet la réouverture des chantiers soit adopté. Le premier principe, c'était évidemment de souhaiter que l'Assemblée puisse se réunir — nous l'aurions souhaité plus tôt — puisse se réunir pour que les chantiers rouvrent à nouveau, que les travailleurs puissent y travailler, que les logements qui étaient attendus puissent être livrés. Et maintenant, à la fin de cette journée, cet objectif-là est atteint.

Un des éléments importants pour nous était de nous assurer de la protection du pouvoir d'achat des travailleurs. Et la proposition d'amendement qui a été faite par notre collègue de Chomedey visait justement à assurer cet élément, avec un autre élément de principe fort important quand on souhaite une négociation, ce que tous les gens de cette Assemblée ont souvent réitéré : l'importance de l'équilibre dans le rapport entre les parties. Comment arriver à cet équilibre s'il fallait que, dans un projet de loi, il y ait déjà quatre années de décidées à l'avance, alors qu'on souhaite une négociation? Alors, comment y arriver en permettant que les travailleurs puissent voir leur pouvoir d'achat protégé? L'amendement de notre collègue de Chomedey est venu permettre cette opportunité donnée aux parties de négocier.

On nous a dit, du côté du gouvernement, qu'ils n'auraient pas assez de une année, considérant l'état de la situation dans les négociations. M. le Président, à entendre parfois le gouvernement, on apprend qu'ils ont réussi à avoir des ententes dans certains secteurs. Parfois, cela a pris deux semaines de plus que ce qui aurait été souhaité, trois semaines de plus que ce qui aurait souhaité. Il y a des ententes qui ont pu être conclues. Dans les prochaines semaines et les prochains mois, les parties vont bénéficier d'une loi qui protège l'équilibre entre les uns et les autres, ont un incitatif pour en arriver à une entente négociée, ce qui était le principe de base de tous les parlementaires depuis le début.

Et, bien avant même qu'il y ait une grève, lorsque mon collègue de Chomedey a commencé à poser des questions, à intervenir et demander au gouvernement d'agir, de poser des gestes, déjà c'était pour favoriser la présence d'un gouvernement dynamique qui accompagne la négociation pour en arriver à une entente. C'est de ça dont il était question aujourd'hui, après deux semaines de grève. Nous avons au moins pu en arriver à un projet de loi qui rouvre les chantiers, permet aux travailleurs d'y travailler. À cette fin de journée, je pense qu'on aura tous conclu, ceux qui auront suivi les travaux, que cette Assemblée, de façon générale, je ne vise aucun parti, je les vise tous, ont travaillé de manière constructive. À la fin, le résultat nous donne un projet de loi qui donne effet à la volonté que nous avons exprimée dès ce matin, à la première occasion, d'avoir une Assemblée qui travaille ensemble, de façon constructive, pour avoir un projet de loi. Vous me permettrez, à cet égard, M. le Président, de remercier de façon particulière le député de Chomedey, qui a porté cet amendement qui a rallié la majorité de cette Assemblée pour que nous ayons ce projet de loi.

Pour la suite des choses, M. le Président, je crois pouvoir dire que, puisque nous avons tous appris des dernières semaines, l'histoire ne se termine pas là. Les parties sont invitées à reprendre la discussion, et évidemment, si mon collègue de Chomedey reprenait la parole tout de suite, il dirait qu'il revient aussi au gouvernement de ne pas perdre de vue qu'il peut avoir une action dynamique auprès des parties pour assurer le soutien et s'assurer d'un résultat qui va être à l'avantage des travailleurs, des entrepreneurs, de l'économie du Québec.

Je prends à la volée les remarques de la première ministre qui disait tantôt que l'élan économique du Québec pourra être repris avec la réouverture des chantiers. Entendre la première ministre parler d'élan économique à être repris… Déjà, qu'elle dise le mot « économie » , cela me fait un peu plaisir, M. le Président, je dois le dire, je dois le dire. Je sens bien que cela fait réagir de l'autre côté, mais il me semble bien important de préciser que, lorsqu'on a les résultats que l'on connaît actuellement en matière économique, il n'est pas abusif de souhaiter… En toute démocratie, j'accepte que vous ne partagiez pas mon point de vue, acceptez que j'en aie un et que nous soyons plusieurs à avoir ce point de vue. Je crois qu'il y a, de la part du gouvernement, un travail important à faire pour recentrer les priorités du côté de l'économie et je crois que, cette avancée que la première ministre nous a faite à l'effet qu'il y aurait maintenant un élan économique, nous allons souhaiter que cela puisse se faire.

Un mot pour nos amis de Québec solidaire qui auraient souhaité qu'il n'y ait pas de loi spéciale, mais en même temps nous ont proposé que celle-ci dure deux années plutôt qu'une. J'ai noté au passage une certaine incohérence, que je comprendrai peut-être un peu plus tard, mais, disons que, pour l'instant, celle-ci permet de nous donner, pour l'ensemble du Québec, une loi avec un amendement qui permet de donner aux parties la capacité de reprendre les discussions. Et, assez étonnamment, peut-être, M. le Président  —  pour vous qui n'avez pas eu à suivre les échos hors de cette Chambre, vous étiez ici à écouter ce que les parlementaires avaient à dire — hors de cette Chambre, ceux qui étaient intéressés par le projet de loi, que soient-ils les parties patronales ou les parties syndicales, je vous dirais, M. le Président  —  vous vous en apercevrez dans les prochains jours  —  que les échos qu'ils font de la solution trouvée par cette Assemblée sont des échos favorables et qu'ils sauront, de façon responsable, reprendre les négociations, dans l'intérêt des uns et des autres et de tout le Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. Je cède maintenant la parole au chef de la deuxième opposition, M. le...

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, il est tard, mais au moins la journée se termine sur une bonne note. On a réussi ce soir à adopter une loi spéciale qui va permettre aux deux parties de véritablement négocier sans aucun sacrifice, pour les prochains jours, les prochaines semaines, pour l'économie du Québec et les travailleurs de la construction. Je veux rappeler, et je pense qu'il faut rendre à César ce qui appartient à César, c'est le député de Lévis… Je m'excuse, là, c'est le député de Lévis qui, le 19 juin dernier… Ce n'est pas...

Des voix : ...

• (0 h 30) •

M. Legault : Oui. M. le Président, c'est le député de Lévis qui a eu l'idée, et je le dis clairement : Ce n'est pas moi, ce n'est pas le leader, c'est le député de Lévis, après deux jours de grève, qui a suggéré cette solution de dire : On va reconduire pour un an les conditions actuelles puis on va demander aux parties de continuer à négocier. Et, contrairement à ce qu'a dit la première ministre, si on avait adopté une telle position après deux jours de grève, donc le mercredi de la première semaine, ça aurait permis aux deux groupes, c'est-à-dire le résidentiel et le génie civil, de signer une entente parce que c'est ce qui était prévu, que les parties continuent de négocier.

Or, M. le Président, je pense qu'il faut le dire, les tergiversations de la première ministre ont fait perdre des centaines de millions de dollars aux Québécois pour les deux semaines de la grève. Et le summum a été atteint aujourd'hui, M. le Président, avec la présentation d'un projet de loi mal ficelé, un bricolage, M. le Président. Et je veux mentionner que le député de Lévis, pas plus tard qu'hier matin, a appelé la ministre de l'Emploi pour lui offrir de travailler ensemble à faire le projet de loi, et finalement elle a refusé, M. le Président. Dans un gouvernement minoritaire… et heureusement qu'on a un gouvernement minoritaire, on a été capables de régler le problème qui avait été causé par ce bricolage.

Maintenant, M. le Président, je veux dire que je suis heureux que Philippe Couillard et le Parti libéral se soient ralliés à la proposition du député de Lévis, parce que je pense que  — même le député de Chomedey va l'admettre, là  — c'est le député de Lévis qui a été le premier à faire cette proposition. Donc, M. le Président...

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! On va...

M. Legault :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît, on va permettre à M. le député de terminer, là, s'il vous plaît.

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît!

M. Legault : M. le Président , je souhaite maintenant, sincèrement, qu'au cours des prochains mois les deux parties réussissent à avoir une entente qui va être au bénéfice et des travailleurs de la construction et de l'économie du Québec, M. le Président, parce que c'est ça qui est important : avoir une entente qui soit équilibrée.

Donc, M. le Président, je pense qu'on a une bonne loi ce soir, on a une entente qui permet aux parties de véritablement négocier. Je comprends que les négociations ont été difficiles la dernière semaine, donc il va peut-être y avoir une petite pause, mais on espère qu'au cours des prochaines semaines, des prochains mois, on arrive à une entente.

Et, sur ce, bien, je veux souhaiter un bon été à tout le monde.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Merci. Merci, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! Il nous reste quelques minutes. Alors, j'imagine que c'était la dernière intervention. Ceci met fin au débat.

Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix la motion de Mme la ministre du Travail proposant l'adoption du projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Adopté. Sur division? Sur division. Alors…

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : S'il vous plaît! La motion est adoptée. En conséquence, le projet de loi n ° 54, Loi sur la reprise des travaux dans l'industrie de la construction est adopté.

Ajournement au 17 septembre 2013

L'Assemblée ayant terminé l'étude de l'affaire pour laquelle elle a été convoquée, j'ajourne les travaux, en vous souhaitant un bel été, au mardi...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Un instant! Un instant! Un instant!

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Un instant! Je n'ai pas terminé!

Des voix :

Le Vice-Président (M. Cousineau) : Attendez la date! J'ajourne les travaux au mardi, le 17 septembre 2013, à 13 h 45. Bonnes vacances!

(Fin de la séance à 0 h 34)