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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 21 octobre 2015 - Vol. 44 N° 117

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner le 30e anniversaire du Groupe Brigil inc.

Mme Maryse Gaudreault

Souligner la Semaine québécoise du traumatisme craniocérébral

Mme Véronyque Tremblay

Rendre hommage à la population de Bécancour à l'occasion du 50e anniversaire de la ville

M. Donald Martel

Souligner la Semaine de la PME BDC

M. Jean-Denis Girard

Féliciter MM. Claude et Bernard Mercier pour leur engagement bénévole et communautaire

M. Gaétan Lelièvre

Souligner la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté

M. Sam Hamad

Rendre hommage à M. Claude Viau, instigateur d'une campagne de sensibilisation
à l'achat local

M. François Bonnardel

Féliciter Mme Marie-Andrée Boivin pour son film Femmes sourdes, dites-moi,
primé à Rome et à Toronto

M. Philippe Couillard

Rendre hommage à Mme Jacqueline Landreville pour son engagement bénévole

M. Bernard Drainville

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 491 Loi visant à mettre fin aux frais accessoires par la modification de
diverses dispositions législatives 

Mme Diane Lamarre

Mise aux voix

Dépôt de documents

Rapports annuels de certains ordres professionnels

Rapport annuel de la Société d'habitation

Réponses à des pétitions

Dépôt de pétitions

Augmenter les services de répit et le soutien financier aux familles d'enfants handicapés
de la région de la Montérégie


Questions et réponses orales

Hausse de la taxe de vente

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

M. Pierre Karl Péladeau

M. Philippe Couillard

Responsabilités du ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

M. Alexandre Cloutier

M. François Blais

Constitution d'un registre des armes à feu

M. Stéphane Bergeron

Mme Lise Thériault

M. Stéphane Bergeron

Mme Lise Thériault

M. Stéphane Bergeron

Mme Lise Thériault

Intentions du gouvernement concernant la hausse de la taxe de vente

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

M. François Legault

M. Philippe Couillard

Maintien des services de garde en milieu scolaire lors des journées de grève

M. Jean-François Roberge

M. François Blais

M. Jean-François Roberge

M. François Blais

M. Jean-François Roberge

M. François Blais

Mesures visant à améliorer la confiance du public dans le domaine de la justice

M. Stéphane Bédard

Mme Stéphanie Vallée

M. Stéphane Bédard

Mme Stéphanie Vallée

M. Stéphane Bédard

Mme Stéphanie Vallée

Programme d'aide et d'accompagnement social

Mme Françoise David

M. Sam Hamad

Mme Françoise David

M. Sam Hamad

Mme Françoise David

M. Sam Hamad

Grève à la Société des traversiers

M. Donald Martel

M. Martin Coiteux

M. Donald Martel

M. Sam Hamad

M. Donald Martel

Document déposé

M. Sam Hamad

Nominations au conseil d'administration du Centre intégré universitaire de santé et
de services sociaux du Saguenay
Lac-Saint-Jean

M. Alexandre Cloutier

M. Gaétan Barrette

M. Alexandre Cloutier

M. Gaétan Barrette

M. Alexandre Cloutier

M. Gaétan Barrette

Implantation de radars photo sur le réseau routier

M. Claude Surprenant

M. Robert Poëti

Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée le 6 octobre 2015 concernant les
questions inscrites au feuilleton de cette séance par le député de La Peltrie


Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Avis de sanction de projets de loi

Affaires du jour

Projet de loi n° 39        Loi donnant suite à la mise à jour sur la situation économique et financière
du Québec présentée le 2 décembre 2014 et modifiant diverses
dispositions législatives

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

M. Carlos J Leitão

M. Nicolas Marceau

Mise aux voix du rapport

Projet de loi n° 55          Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière
et gazière

Adoption

M. Luc Blanchette

M. Pascal Bérubé

M. Claude Surprenant

Mme Manon Massé

M. Luc Blanchette (réplique)

Mise aux voix

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande à la ministre de la Justice d'ordonner une enquête indépendante sur l'échec du procès SharQc, de témoigner ensuite en commission
parlementaire et de déposer un plan de correctifs à apporter au système judiciaire

M. Pascal Bérubé

Mme Stéphanie Vallée

M. Simon Jolin-Barrette

Document déposé

M. Sébastien Proulx

M. Stéphane Bédard

M. Gerry Sklavounos

M. Pascal Bérubé (réplique)

Mise aux voix

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, veuillez prendre place pour ceux que ça concerne.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous allons procéder à la rubrique Déclarations de députés, et je suis prêt à entendre la première déclaration, et je cède la parole à Mme la députée de Hull pour sa déclaration d'aujourd'hui. Mme la députée, à vous la parole.

Souligner le 30e anniversaire du Groupe Brigil inc.

Mme Maryse Gaudreault

Mme Gaudreault : Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais souligner aujourd'hui le 30e anniversaire d'une entreprise qui a bâti près de 10 000 unités de logement dans plus de 25 communautés de notre région, et cette histoire à succès vieille de 30 ans est celle de Gilles Desjardins et de son entreprise, Brigil.

Depuis 1985, Brigil ne cesse de surprendre par son innovation, sa créativité et son désir de bien servir la clientèle de l'Outaouais. Au fil des années, Gilles Desjardins a reçu la mention Employeur de l'année par le Regroupement des gens d'affaires de la Capitale-Nationale, et ce dernier a été décoré de l'Ordre de Gatineau. Brigil est l'une des rares entreprises à cumuler la Palme diamant de l'APCHQ et à avoir été désignée Employeur de l'année en se classant au 38e rang au Canada et au cinquième rang au Québec.

Fière partenaire de la qualité de vie est la signature de Brigil, mais cela s'applique aussi à son engagement communautaire. Gilles et sa famille ont investi plus de 1 million, à plus de 300 entreprises de l'Outaouais. Alors, pour Gilles Desjardins, c'était un rêve, aujourd'hui une réalité, une grande fierté pour l'Outaouais. Longue vie à Brigil!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, Mme la députée de Hull, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chauveau pour sa déclaration d'aujourd'hui. Mme la députée, à vous.

Souligner la Semaine québécoise du
traumatisme craniocérébral

Mme Véronyque Tremblay

Mme Tremblay : Merci, M. le Président. À titre d'adjointe parlementaire de la ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse et à la Santé publique, je tiens à souligner la 13e Semaine québécoise du traumatisme craniocérébral qui se tient jusqu'au 24 octobre.

Le traumatisme craniocérébral peut engendrer des séquelles différentes d'une personne à l'autre. Dans certains cas, les séquelles peuvent être visibles, pour d'autres, invisibles, mais chacune peut entraîner des conséquences dont la gravité et la durée sont variables. Des séquelles d'ordre physique, cognitif, affectif ou comportemental peuvent chambouler une vie entière.

Cette semaine vise à sensibiliser l'ensemble de la population aux effets collatéraux du traumatisme craniocérébral, les victimes autant que les familles. En cette semaine, j'ai aussi une pensée pour la journaliste Isabelle Richer qui, justement à la suite d'un accident de vélo cet été, a subi un traumatisme craniocérébral. Pour ceux qui souhaitent en connaître davantage sur cette semaine, bien, je vous invite à consulter le site Web du Regroupement des associations de personnes traumatisées cranio-cérébrales du Québec...

Le Vice-Président (M. Gendron) : 1 min 18 s, ce n'est pas le règlement. Le règlement, c'est une minute. Alors, qu'est-ce que vous voulez, je m'excuse, mais j'ai voulu faire appel au règlement par équité pour l'ensemble des collègues. Quelques secondes, je vais accepter, mais 1 min 18 s, là, ça commence à dépasser pas mal ce qui est prévu au règlement.

Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Nicolet-Bécancour pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député, à vous la parole.

Rendre hommage à la population de Bécancour
à l'occasion du 50e anniversaire de la ville

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, j'aimerais aujourd'hui rendre hommage aux citoyens de la ville de Bécancour, qui célèbrent ces jours-ci le 50e anniversaire de sa fondation. En octobre 1967, 11 corporations municipales ont uni leur destinée pour créer la plus grande ville au Québec, d'une superficie de 447 kilomètres carrés. L'ouverture du pont Laviolette enjambant le fleuve Saint-Laurent et la venue attendue de la cité de l'acier permettaient alors de nourrir les plus grands espoirs. Malheureusement, cette cité de l'acier n'a jamais vu le jour, et il a fallu déployer des trésors d'imagination et de créativité pour permettre à Bécancour de se développer. Elle y est arrivée grâce à la détermination et à la ténacité de ses bâtisseurs et dirigeants et des quelque 12 500 citoyens et citoyennes dynamiques qui l'habitent aujourd'hui.

Je salue les représentants ici présents de la ville de Bécancour et le maire, M. Jean-Guy Dubois, et je souhaite un bon 50e à tous les Bécancourois!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député, de votre déclaration. Et on souhaite la bienvenue à nos invités. Alors, bienvenue ici, à l'Assemblée nationale.

Je cède maintenant la parole à M. le député de Trois-Rivières pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député, à vous la parole.

Souligner la Semaine de la PME BDC

M. Jean-Denis Girard

M. Girard : Merci, M. le Président. C'est un grand honneur pour moi de souligner aujourd'hui la 36e édition de la Semaine de la PME. Cet événement significatif permet de reconnaître le dynamisme et la créativité des femmes et des hommes entrepreneurs du Québec. Leur contribution est essentielle au développement économique de nos régions et de tout le Québec.

À l'heure de la mondialisation, nos entreprises doivent miser sur l'innovation et la créativité afin de faire face à la compétition et saisir le maximum d'opportunités sur le marché mondial. Nos PME doivent faire tomber les barrières et oser la croissance. Comme en témoignent les nombreuses mesures d'appui mises en place depuis notre arrivée au gouvernement, nous sommes présents pour nos PME et nous continuerons de les accompagner sur le chemin de la croissance et de la prospérité.

Sur ce, je souhaite donc à tous nos entrepreneurs québécois une bonne Semaine de la PME 2015. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le député de Trois-Rivières, de votre déclaration d'aujourd'hui. Je cède maintenant la parole, pour la prochaine déclaration, à M. le député de Gaspé. Alors, à vous, M. le député de Gaspé.

Féliciter MM. Claude et Bernard Mercier pour
leur engagement bénévole et communautaire

M. Gaétan Lelièvre

M. Lelièvre : Merci, M. le Président. Je tiens aujourd'hui à souligner l'implication des frères Claude et Bernard Mercier, de la municipalité de Mont-Saint-Pierre en Gaspésie, qui se sont tous deux vu décerner des mentions nationales pour différentes réalisations au cours de leurs carrières.

Depuis plus de 40 ans, l'engagement de M. Claude Mercier s'est déployé à de multiples niveaux, que ce soit la mise sur pied en collaboration avec de nombreux bénévoles d'un carnaval d'hiver, d'un club de quad et du célèbre festival de vol libre de Mont-Saint-Pierre en juillet dernier. Il a reçu le prix ExcÉlan 2015 de l'Unité régionale de loisir et de sport de la Gaspésie à titre de personnalité de l'année à Mont-Saint-Pierre et en Gaspésie, lui qui oeuvre au développement des secteurs communautaire, culturel, sportif au sein de la Gaspésie.

Je souhaite également souligner l'engagement marqué de son frère, M. Bernard Mercier, qui s'est vu décerner notamment une récompense reconnaissant son apport à titre de bénévole pour la région Gaspésie—Les Îles en matière de véhicules hors route, et ce, très récemment, ici, au salon rouge.

Bravo à ces deux Gaspésiens, Claude et Bernard Mercier, pour leur implication et leur dévouement auprès de la communauté gaspésienne!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, M. le député de Gaspé, de votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Louis-Hébert pour sa déclaration.

Souligner la Journée internationale
pour l'élimination de la pauvreté

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, M. le Président. Je désire prendre un moment pour souligner la Journée internationale pour l'élimination de la pauvreté qui a eu lieu et se tient annuellement le 17 octobre dans le cadre de la Semaine de la solidarité.

Cette journée nous offre l'occasion de sensibiliser nos concitoyens aux difficultés vécues par les personnes en situation de pauvreté et exclusion sociale. Comme société, nous avons choisi d'aider ces personnes. En 2002, nous avons adopté à l'unanimité une loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Elles ont notamment permis de renforcer le filet social et de favoriser la mobilisation et la concertation des différents acteurs partout au Québec.

En terminant, M. le Président, je ne peux pas passer sous silence le travail remarquable que font quotidiennement les organismes communautaires et les personnes bénévoles sur le terrain. Leurs interventions de première ligne font partie intégrante de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale en permettant d'offrir un soutien concret à celles et ceux qui en ont besoin. Mes collègues députés sont aussi bien placés pour prendre la pleine mesure de la pauvreté que peuvent vivre certaines personnes dans leurs comtés. Je les invite à demeurer sensibles aux situations difficiles dont ils sont témoins. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci beaucoup, M. le député de Louis-Hébert, pour votre déclaration. Pour la prochaine déclaration, je cède la parole à M. le député de Granby. M. le député de Granby, à vous.

Rendre hommage à M. Claude Viau, instigateur
d'une campagne de sensibilisation à l'achat local

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. L'achat local est un sujet d'une importance capitale pour l'économie des régions, et Claude Viau, un commerçant établi à Granby depuis plus de 30 ans, a choisi de s'investir personnellement dans une solution et de faire bouger les choses. Armé de sa détermination, il a personnellement mandaté une firme de communication pour qu'elle élabore une campagne de sensibilisation à l'achat local, et ainsi freiner l'exode des dollars granbyens.

En plus de vouloir conscientiser la population à l'importance de l'achat local, cette campagne vise aussi à permettre aux gens d'affaires et aux professionnels de se réinventer pour mieux répondre aux attentes de plus en plus précises du consommateur, alors que son portefeuille, lui, est de moins en moins garni, une idée gagnante pour toute la communauté.

Claude, des instigateurs de projets comme toi, c'est exactement ce dont les villes comme Granby ont besoin pour garder leur économie saine. Je veux profiter de ce moment pour te féliciter et te remercier pour ton initiative, car il est vrai que l'achat local, c'est l'affaire de tous et que, la solution, c'est tous ensemble que nous la trouverons. Claude, encore une fois, merci!

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Granby, pour votre déclaration. Je cède la parole à M. le député de Roberval. M. le député de Roberval, à vous la parole.

Féliciter Mme Marie-Andrée Boivin pour
son film Femmes sourdes, dites-moi,
primé à Rome et à Toronto

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que j'offre mes félicitations à Mme Anne-Marie Boivin, cinéaste native de Dolbeau-Mistassini, qui s'est mérité le prix du meilleur documentaire au festival Cinedeaf de Rome et une mention honorable au Toronto International Deaf Film & Arts Festival pour son film documentaire Femmes sourdes, dites-moi.

Femmes sourdes, dites-moi relate l'histoire des femmes sourdes ayant fréquenté l'Institut des Soeurs de la Providence. Par ce documentaire, la cinéaste met en lumière les réalités et défis vécus par ces femmes. Ainsi, elle donne la parole aux femmes qui, comme elle, souffrent de l'absence d'ouïe pouvant affecter la parole.

Femme engagée, Mme Boivin souhaite par ce documentaire donner à ces femmes une tribune unique, une possibilité de s'exprimer et surtout être entendues. Empreint de sensibilité, le film primé, qui présente des entrevues réalisées avec des femmes sourdes, permet de sensibiliser la population en plus d'y faire connaître l'histoire des femmes sourdes du Québec, de l'oralisme ainsi que du langage des signes.

Enfin, Mme Boivin affirmait vouloir contribuer au sentiment de fierté de ces femmes par le rayonnement de son documentaire ainsi que les prix remportés à Rome et à Toronto. Nul doute que Mme Boivin y soit parvenue. Félicitations, Mme Boivin!

• (9 h 50) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Roberval, pour votre déclaration. Je cède maintenant la parole à M. le député de Marie-Victorin pour sa déclaration d'aujourd'hui. M. le député, à vous la parole.

Rendre hommage à Mme Jacqueline Landreville
pour son engagement bénévole

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à Mme Jacqueline Landreville, de Longueuil, qui s'est impliquée bénévolement pendant 47 ans. Au fil des ans, elle a oeuvré auprès des Filles d'Isabelle de la paroisse du Bon-Pasteur, du centre diocésain et à Vie nouvelle. Encore aujourd'hui, à 88 ans, elle est présente chaque semaine pour la distribution alimentaire du Partage Saint-Robert, et je suis sûr qu'on la verra bientôt à la guignolée ainsi qu'à la distribution des paniers de Noël.

Une perle rare, c'est une personne exceptionnelle, difficile à dénicher, et Mme Landreville est l'une de ces perles rares. Elle a la bonté de donner sans rien demander en retour, sauf l'assurance de faire du bien. Qui sait, peut-être que son bénévolat, c'est le secret de sa longévité, M. le Président. Qui sait?

Merci, Mme Landreville, de résister aux effets du temps en consacrant votre énergie à faire le bonheur tout autour de vous. On vous aime beaucoup, Jacqueline.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le député de Marie-Victorin, de votre déclaration. Et cette dernière déclaration met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Les travaux sont suspendus pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 1)

Le Président : Mesdames, messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Drainville : M. le Président, pouvez-vous appeler l'article b du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 491

Le Président : Bien sûr. Alors, à l'article b du feuilleton, Mme la députée de Taillon présente le projet de loi n° 491, Loi visant à mettre fin aux frais accessoires par la modification de diverses dispositions législatives. Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur l'assurance maladie afin de préciser qu'aucun paiement ne peut être réclamé d'une personne assurée, directement ou indirectement, pour des frais engagés aux fins de la dispensation de services assurés par un médecin.

Il prévoit notamment l'interdiction de rendre directement ou indirectement l'accès à un service assuré conditionnel à un paiement.

Ce projet de loi augmente les montants des amendes prévues pour les professionnels de la santé qui contreviennent aux dispositions portant sur la rémunération et sur la facturation des services médicaux.

Il permet à la Régie de l'assurance maladie du Québec d'aviser, par tout moyen qu'elle juge approprié, toute personne assurée de son droit au remboursement de la somme qu'elle a versée à un professionnel de la santé ou à un tiers à l'encontre de la Loi sur l'assurance maladie.

Le projet de loi augmente à trois ans le délai prévu pour transmettre une demande de remboursement à la régie.

Il permet également à la régie d'informer le professionnel de la santé ou le tiers du fait qu'il a reçu paiement d'une personne assurée à l'encontre de la Loi sur l'assurance maladie et de recouvrer cette somme ainsi que des frais d'administration prescrits indépendamment du remboursement.

Ce projet de loi modifie la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin de permettre à la régie d'ester en justice et d'intenter des procédures en injonction aux fins de la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec et de la Loi sur l'assurance maladie.

De plus, il augmente les pouvoirs d'enquête et d'inspection de la régie.

Enfin, ce projet de loi comporte diverses modifications de concordance.

Mise aux voix

Le Président : Merci. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, Mme la ministre de la Justice.

Rapports annuels de certains ordres professionnels

Mme Vallée : Alors, M. le Président, permettez-moi de déposer les rapports annuels des ordres professionnels suivants pour la période 2013-2014 : les rapports des agronomes, des architectes, des avocats, des infirmières et infirmiers auxiliaires, des orthophonistes et audiologistes, des physiothérapeutes, des technologues professionnels.

Pour la période 2014-2015 : les avocats, les architectes, les chimistes, les chiropraticiens, les comptables professionnels agréés, les conseillers en ressources humaines et en relations industrielles agréés, les conseillers et conseillères d'orientation, les dentistes, les diététistes, les ergothérapeutes, les évaluateurs agréés, les huissiers de justice, les hygiénistes dentaires, les infirmières et les infirmiers auxiliaires, les ingénieurs, les ingénieurs forestiers, les médecins, les optométristes, les orthophonistes et audiologistes, les pharmaciens, les podiatres, les psychoéducateurs et psychoéducatrices, les sages-femmes, les techniciens et techniciennes dentaires, les technologistes médicaux, les technologues en imagerie médicale, en radio-oncologie, en électrophysiologie médicale, les technologues professionnels, les traducteurs terminologues et interprètes agréés.

Bref, l'industrie forestière se porte bien.

Des voix : ...

Le Président : Ces documents sont déposés. Vous êtes sûre que vous n'en avez pas oublié? Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

Rapport annuel de la Société d'habitation

M. Moreau : Oui. Alors, haute technologie... Nous, on en a moins. Alors, en vertu de l'article 24 de la loi qui la régit, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel de gestion 2014-2015 de la Société d'habitation du Québec.

Le Président : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Fournier : Oui, M. le Président. Je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions présentées par le député de Chambly et de La Peltrie le 16 septembre, par le député de Chambly le 17 septembre, par la députée de Hull le 22 septembre et par le député de Jonquière le 23 septembre 2015.

Le Président : Alors, ces documents sont déposés.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, M. le député de Granby.

Augmenter les services de répit et le soutien financier
aux familles d'enfants handicapés de la
région de la Montérégie

M. Bonnardel : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 133 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que l'épuisement est une dure réalité dans la vie d'un parent ayant à sa charge un enfant handicapé;

«Considérant que la région de la Montérégie n'offre pas assez de services de répit aux parents de la région dans le besoin;

«Considérant que les subventions données par le gouvernement afin d'aider financièrement pour les répits ne sont pas suffisantes — 1 000 $ sur une période d'un an — et que les coûts de garde peuvent être très élevés;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, souhaitons donc que le gouvernement prenne plus en considération la situation des parents qui ont à leur charge un ou des enfants handicapés. Nous désirons aussi que plus de services de répit soient disponibles dans la région de la Montérégie et que plus d'argent soit donné aux familles pour les soutenir financièrement dans leurs démarches.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous annonce que tout de suite après la période des questions je vous ferai part d'une directive de la présidence concernant les questions écrites au feuilleton.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle.

Hausse de la taxe de vente

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : Merci, M. le Président. Donc, le gouvernement a répété à plusieurs reprises son intention d'augmenter la TVQ pour éventuellement financer une baisse d'impôt, et nous savons que cela pourrait survenir dès cet automne, puisque l'année fiscale se termine le 31 décembre pour les particuliers.

Or, huit associations qui représentent le secteur du commerce au détail ici, au Québec, mettent en garde le gouvernement contre des effets dévastateurs d'une troisième hausse de la TVQ en cinq ans. 480 000 emplois sont potentiellement affectés par cette décision. Les deux premières hausses se sont traduites par une croissance des ventes deux fois plus faible que prévu.

Alors que le Québec a déjà la taxe de vente la plus élevée en Amérique du Nord, le gouvernement est incapable de préciser comment il pourra endiguer les problèmes liés au commerce électronique transfrontalier, les eBay de ce monde. En 2012, c'est déjà un demi-milliard de pertes fiscales perdues. Aujourd'hui, ce montant est déjà plus élevé parce que les ventes par Internet augmentent de plus de 10 % par année sans qu'aucune taxe ne soit perçue.

Alors, qu'est-ce que le premier ministre répond aux huit associations de détaillants qui représentent 480 000 emplois? Le gouvernement n'a aucune solution à leur proposer pour endiguer le commerce. Alors, s'engage-t-il à ne pas augmenter la TVQ?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Ce que je comprends, bien sûr, encore une fois, comme ça a été le cas pour le libre-échange, auquel le Parti québécois s'oppose, comme c'est le cas également pour la baisse du fardeau fiscal, auquel il vient de nous dire qu'il s'oppose également, ce que je comprends, c'est que le Parti québécois ne veut pas qu'il y ait de discussion sur la base du rapport Godbout.

Nous, on retient de ça qu'il est possible de baisser de façon significative les impôts des gens, qu'il y ait plus d'argent dans leurs proches pour décider eux-mêmes, elles-mêmes qu'est-ce qu'ils et elles veulent faire avec. Ça me paraît une bonne position et de nature également à relancer notre économie.

Cependant, il a entièrement raison sur le fait que le commerce électronique échappe à la taxation, mais c'est une question qui est fort complexe. D'abord, ça se règle dans le cadre canadien — qu'il aime beaucoup, je le sais, il est attaché au cadre canadien, d'ailleurs c'est la raison pour laquelle, je crois, cette question vient aujourd'hui — mais également dans le cadre de négociations internationales qui, bien sûr, font intervenir de nombreux acteurs.

Alors, actuellement, il y a une réflexion, d'une part, sur le rapport de la commission Godbout. Notre collègue a participé à une commission parlementaire qui a permis d'entendre ses remarques et d'autres remarques également. D'autre part, il y a les conversations et des réflexions également sur cette question de la taxation du commerce électronique. Toutes les suggestions sont bienvenues, mais, comme d'habitude, ce n'est pas un problème qui se règle avec une baguette magique, il faut prendre le temps d'analyser correctement les options et s'assurer qu'aucune des options mises en place n'est contre-productive, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : M. le Président, le premier ministre veut nous convaincre que d'augmenter les taxes, c'est bon pour l'économie. Or, deux des concepteurs du modèle sur lequel le gouvernement s'appuie pour faire cette affirmation contestent les prétentions du gouvernement.

Alors, est-ce que le premier ministre s'engage à faire preuve de plus de transparence et à fournir à ces experts ainsi qu'à toute la population les informations qu'ils ont demandées sans succès au ministre des Finances?

• (10 h 10) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, on a écouté avec attention les représentations, les témoignages qui se sont faits en commission parlementaire, et, contrairement à ce que laisse entendre notre collègue, il n'y a pas de décision de prise. À ce que je sache, nous n'avons pas annoncé d'augmentation de taxe à la consommation. Cependant, nous voulons fermement baisser le fardeau fiscal.

On a déjà annoncé, d'ailleurs, dans les budgets précédents une abolition de la taxe santé qui va mener à un allègement fiscal considérable, surtout en impôt sur le revenu. Pourquoi? Parce que c'est l'impôt sur le revenu qui nuit le plus à la croissance économique, et à la croissance de notre économie, et également au revenu disponible des citoyens, comme c'est le cas pour la taxe sur la masse salariale pour les entreprises. Alors, nous, on avance de façon décidée vers une baisse la plus rapide possible du fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...et j'ose à peine lui demander ce que serait le fardeau fiscal des Québécois dans un Québec séparé, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : M. le Président, le problème, c'est que l'Agence des services frontaliers ne fait rien, Postes Canada ne fait rien, et le gouvernement du Québec ne contrôle ni les douanes, ni les postes, ni les banques qui émettent les cartes de crédit qui servent de paiement.

Au lieu de penser d'augmenter la TVQ, est-ce que le premier ministre peut nous dire quels gestes seront posés pour répondre au problème important soulevé par des milliers de détaillants et 480 000 emplois?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Le premier geste à poser, M. le Président, de la part de l'opposition officielle, c'est de renoncer à leur option parce que, quand on va faire face à 16 milliards de trou dans les dépenses publiques au Québec, quand on va faire face à une dette publique qui va approcher les 100 % du PIB alors que notre fardeau de paiement de dette est déjà de 30 millions par jour, on n'aura même plus...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Couillard : ...on n'aura... Je vois que ça les...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît, Mme la députée!

Des voix : ...

Le Président : M. le député de Verchères! Mme la députée! M. le premier ministre, à vous la parole.

M. Couillard : M. le Président, je vais continuer tous les jours à poser cette question et leur faire dire la vérité au châtiment terrible financier, et économique, qu'ils veulent imposer aux Québécois. On va tout faire pour empêcher cette catastrophe, M. le Président.

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition.

Des voix : ...

Le Président : Juste une seconde, une seconde...

Une voix : ...

Le Président : Une seconde, monsieur... Je vais essayer de rétablir l'ordre avant de vous donner la parole. M. le chef de l'opposition, c'est à vous la parole.

M. Pierre Karl Péladeau

M. Péladeau : M. le Président, le premier ministre parle d'un transfert fiscal de l'impôt vers les taxes depuis le mois d'août 2013. Il est au pouvoir depuis un an et demi, et le rapport Godbout lui a été remis le printemps dernier.

Comment explique-t-il qu'il n'y a rien de fait avec le gouvernement fédéral dans ce dossier? Comment peut-il encore augmenter la TVQ sans avoir de solution concrète à proposer pour les pertes fiscales et les pertes économiques liées à ce dossier?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Justement, si on écoutait la réponse, on pourrait peut-être l'entendre. M. le premier ministre. M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, encore une fois, on réfléchit à cette question importante avec comme objectif clair celui de diminuer le fardeau fiscal des Québécois pour que les Québécois et les Québécoises aient plus d'argent dans leurs poches. Pas par entêtement dogmatique, mais c'est parce que c'est la meilleure façon de faire croître notre économie. Et tout le monde s'entend, les économistes s'entendent que la taxe la plus nuisible ou le prélèvement fiscal le plus nuisible à la croissance économique, c'est l'impôt sur le revenu.

Maintenant, une fois ceci dit, effectivement, notre taxe est déjà élevée au Québec. Si elle était plus basse, on aurait plus de marge de manoeuvre pour envisager diverses hypothèses. On est très conscients du risque potentiel pour le commerce de détail, c'est pour ça qu'on prend notre temps pour bien analyser les hypothèses. Mais, M. le Président, il faut y revenir, il faut y revenir, avec 16 milliards de trou dans les finances publiques, comment est-ce qu'un Québec séparé...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...va s'en sortir, M. le Président?

Le Président : Principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Responsabilités du ministre de l'Éducation, de
l'Enseignement supérieur et de la Recherche

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, depuis sa nomination, le ministre de l'Éducation passe son temps à décharger ses responsabilités sur les autres. Il a accusé les parents d'instrumentaliser leurs enfants. Il a accusé les parents d'élèves en difficulté d'inventer — et je le cite — des pseudo-cas. Il a accusé les profs, il a accusé les commissions scolaires. Mais là, la semaine passée, il en a accusé une couche en accusant ses propres fonctionnaires et, écoutez bien ça, il les a accusés d'être lents, vieillots et de ne pas s'appuyer sur des données scientifiques.

Mais, évidemment, il y a des gens autour de lui qui ont dû dire au ministre que ça n'avait pas vraiment d'allure parce qu'il a senti le besoin de s'excuser. Mais, M. le Président, ça ne s'arrête pas là parce que le ministre en a ajouté une couche, puis là je vais vous le citer, il a dit qu'il ne travaille pas pour le ministère de l'Éducation, mais qu'il travaille plutôt pour le gouvernement libéral, qu'en gros, lui, sa job, ce n'est pas de défendre l'éducation au Québec, là, mais c'est plutôt de mettre en oeuvre les politiques du Conseil du trésor. Une autre déclaration maladroite, il a eu quelques jours pour y penser.

Est-ce qu'il trouve qu'il est allé trop loin?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Alors, c'est une règle de base, je pense, hein, pour ceux qui ont connu la gouvernance, que, hein, nous sommes là pour représenter avant tout, hein, les parents, les contribuables, la population du Québec. Ça, je le mentionne souvent lorsque j'ai des rencontres avec différentes associations dans le milieu de l'éducation, avec différents partenaires, que le ministre de l'Éducation, il est à l'écoute, tout d'abord, des parents, du réseau scolaire, mais aussi de la population. Ça, c'est fondamental dans notre démarche. Quand on travaille avec les fonctionnaires, je leur rappelle aussi que nous sommes là, bien sûr, pour appuyer la fonction publique, nous avons besoin de la fonction publique. Et ceux qui connaissent mon cheminement, donc ma vie avant d'être en politique, savent très bien que mes liens avec la fonction publique... et la foi que j'ai dans notre fonction publique est très élevée. Cependant, je réitère pour mon collègue : Nous sommes là pour servir avant tout et en premier lieu la population et, quand on est ministre de l'Éducation, pour servir les enfants et leurs parents.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, ça va tellement mal dans nos écoles publiques, là, puis l'état de nos écoles est tellement délabré qu'hier, imaginez-vous donc, j'ai reçu un message d'un père de famille qui a pris ses propres pinceaux puis ses restants de peinture pour aller repeindre les murs de la classe de son enfant. Évidemment, le ministre ne peut pas connaître l'état de la situation dans toutes les écoles du Québec, mais certainement pas dans la commission scolaire de Montréal. En 236 jours comme ministre responsable de l'Éducation, il n'a pas encore mis les pieds dans la commission scolaire de Montréal.

Est-ce qu'il peut s'engager à enfin aller visiter une école?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Je remercie mon collègue, là, pour sa préoccupation pour la commission scolaire de Montréal. Il faut rappeler qu'il y a, quoi, là, 72 commissions scolaires au Québec, 2 700 établissements seulement dans le secteur public, je ne parle pas du secteur privé, je ne parle pas non plus des collèges, des cégeps et des universités. Donc, je comprends sa préoccupation, mais il faut aussi s'assurer d'être en contact avec l'ensemble du réseau. Il fait des jaloux aujourd'hui, hein, en parlant, en insistant sur une visite qu'il faudrait avancer à la commission scolaire de Montréal. Donc, l'essentiel, là, l'essentiel dans le travail que l'on fait en ce moment, là, c'est de rencontrer les acteurs du réseau...

Le Président : En terminant.

M. Blais : ...et de définir ce que sera la prochaine gouvernance.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, pour le ministre de l'Éducation, là, 1 milliard de budget, là, ce n'est pas assez pour lui, là, pour qu'il prenne un peu de temps pour aller voir ce qui se passe vraiment dans les écoles. C'est rendu que ce sont des parents qui, eux-mêmes, prennent leurs pinceaux, sortent la peinture, s'en vont peinturer, puis là j'ai même un petit mot de remerciement, là, que les élèves ont envoyé au père : «Un immense merci pour ce geste si généreux et surprenant de votre part.» Puis là c'est signé : Henrik, Joanie... C'est les élèves qui sont obligés... qui envoient des mots de remerciement aux parents.

Quand le ministre va enfin aller sur le terrain puis savoir ce qui se passe...

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Bien, je pense qu'il faudrait être un petit peu prudent, dans les propos de mon collègue, là, sur ce qui revient du terrain, là. Je comprends qu'il y a une préoccupation particulière de mes collègues d'en face pour la CSDM, mais je rappelle, là, tout simplement, là — et mes collègues vont être fâchés si je ne le rappelle pas — qu'il y a quand même 72 commissions scolaires, 2 700 établissements. Il faut s'assurer, là, qu'il y a une voix pour tout le monde.

Moi, j'ai la chance d'avoir plusieurs collègues ici qui sont à Montréal, qui me rappellent souvent qu'ils vont faire des visites dans les écoles, qui me parlent de la situation qu'ils y voient. Ils collaborent notamment lorsqu'on ouvre de nouvelles écoles, ils sont très, très présents, là, à Montréal. Donc, on n'a aucune, aucune leçon, je pense...

Le Président : En terminant.

M. Blais : ...à apprendre ici de nos collègues d'en face.

Le Président : Principale, M. le député de Verchères.

Constitution d'un registre des armes à feu

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, en juin dernier, nous avons eu confirmation que, malgré les nombreuses tentatives des conservateurs pour les détruire, les données québécoises du registre des armes à feu existent toujours. Le gouvernement fédéral s'est vu contraint de les remettre à la cour. Curieusement, le premier ministre du Québec a jeté l'éponge sans raison en ne mentionnant même pas la question du registre des armes à feu dans ses demandes aux chefs des partis fédéraux. En débat des chefs, le nouveau premier ministre désigné du Canada, Justin Trudeau, a affirmé que, même s'il n'allait pas recréer le registre des armes à feu, il allait au moins transmettre les données au gouvernement du Québec.

Puisque le gouvernement fédéral entend nous transmettre les données, la ministre de la Sécurité publique peut-elle s'engager à mettre en place rapidement le registre québécois?

• (10 h 20) •

Le Président : Mme la ministre de la Sécurité publique.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, je veux rassurer mon collègue. Nous avons annoncé — très rapidement, d'ailleurs — lorsque le dernier jugement est tombé, que le gouvernement du Québec mettrait sur pied son système d'enregistrement des armes à feu québécoises. Je réitère en cette Chambre que c'est la volonté du gouvernement, la volonté du premier ministre et que nous aurons l'occasion d'aller sous peu... de présenter quelque chose à la population. C'est une volonté qui est ferme de notre part, et il est évident que nous allons donner suite à cet engagement-là.

Le Président : Complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, j'entends la réponse de la ministre. Est-ce qu'on peut avoir une idée un peu plus précise des délais? Parce qu'il y avait eu une indication de la part du premier ministre à l'effet qu'on attendrait qu'on ait les moyens de le faire. Moi, je pense qu'il y a urgence et qu'on doit procéder rapidement avec la création du registre.

Le Président : Mme la ministre de la Sécurité publique.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : Oui. M. le Président, mon collègue n'est pas sans savoir qu'il y a quand même plusieurs étapes avant de déposer des projets de loi, notamment ici, à l'Assemblée nationale. Je suis parfaitement consciente aussi qu'il y a des irritants par rapport à un certain nombre de questions qui sont soulevées par la population, mais l'engagement du gouvernement, c'est d'aller de l'avant. Je pourrais lui répondre : Bientôt. Je pourrais lui dire que la session se termine aux alentours du 4 décembre, M. le Président, et que l'intention du gouvernement, c'est d'essayer de déposer un projet de loi dans les meilleurs délais, M. le Président. Mais on fait les choses correctement. Je pense qu'on ne peut pas économiser les réflexions alentour de la mise sur pied d'un registre pour que les données y soient...

Le Président : En terminant.

Mme Thériault : ...et que ça soit fait au moindre coût possible, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, la ministre nous parle d'un cadre législatif. Il existe déjà un cadre législatif dans l'éventualité où le gouvernement nous transférerait les données. Le gouvernement fédéral nous a dit qu'il allait nous transférer les données. Alors, on est prêts à procéder rapidement. La ministre doit être consciente que les données, elles existent, mais elles ne sont plus mises à jour. À chaque mois, chaque semaine, chaque jour de retard, ces données deviennent de moins en moins pertinentes. Plus on attend, plus ça coûtera cher.

Pourquoi la ministre retarde-t-elle, en raison de l'austérité, la mise en place du registre qui va...

Le Président : Mme la ministre de la Sécurité publique.

Mme Lise Thériault

Mme Thériault : M. le Président, évidemment, je comprends que le collègue fait référence au projet de loi qui avait été préparé par lui précédemment, lorsqu'il était ministre de la Sécurité publique. Ce que je tiens à dire, c'est que, même s'il y a un projet de loi qui a été préparé, il a dit lui-même que les données n'étaient plus à jour. On doit revoir les façons de faire, M. le Président, il y a différentes étapes. On ira de l'avant éventuellement avec un projet de loi. C'est un engagement qui est ferme de notre gouvernement, M. le Président. Je tiens à rassurer la population, rassurer mon collègue et ceux qui nous écoutent. Même s'il y a des données qui existent, les données ne sont plus à jour. Donc, ça change la donne, mais on va aller de l'avant, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Intentions du gouvernement concernant
la hausse de la taxe de vente

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le premier ministre a sûrement eu l'opportunité depuis hier de prendre connaissance des dernières prévisions de Desjardins. Parce qu'hier il n'avait pas l'air au courant, donc je lui rappelle qu'alors que son ministre des Finances a diminué de 2 % à 1,5 % les prévisions de croissance économique pour cette année Desjardins a descendu ça à 1,1 % pour le Québec. Au même moment, Desjardins a haussé les prévisions économiques pour l'Ontario de 1,8 % à 1,9 % pour l'année 2015. Donc, on voit que le Québec va dans la direction opposée de l'Ontario.

M. le Président, au moment où l'économie du Québec performe beaucoup moins bien qu'en Ontario, le premier ministre vient juste, là, il y a quelques minutes, de dire qu'il n'a pas pris sa décision concernant une augmentation de la TVQ. Imaginez-vous, M. le Président, au moment où l'économie du Québec tourne au ralenti, le premier ministre n'exclut pas d'augmenter la TVQ.

M. le Président, est-ce que le premier ministre peut, au moins, ce matin, là, mettre fin à l'incertitude puis s'engager à ne pas augmenter la TVQ?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : M. le Président, encore une fois, notre collègue est mélangé dans ses chiffres. En fait, Desjardins a baissé la prévision de croissance pour l'Ontario de façon très importante. Et, pour ce qui est des prévisions de croissance du Québec, il y a d'autres institutions financières qui sont plus optimistes que Desjardins. Et nous, on croit que 1,5 %, 1,6 %, compte tenu du ralentissement, notamment, de la demande asiatique, de l'impact du changement des cours du pétrole et autres éléments de l'économie mondiale, ça nous apparaît réaliste.

Je voudrais quand même rappeler à cette Chambre, M. le Président — et je pense que le collègue devrait s'en féliciter parce que c'est une réussite de tous les entrepreneurs du Québec — il s'est quand même créé 64 000 emplois depuis qu'on est arrivés au gouvernement : 70 % à temps plein, 90 % dans le secteur privé. Voilà le signe d'une économie qui reprend confiance. Voilà un signe d'une économie qui va vers la bonne direction. Plus d'investissements privés, plus de création d'emplois privés, c'est ce qui nous amènera vers la prospérité, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, c'est quand même incroyable, là, je l'invite à aller prendre connaissance de la dernière étude de Desjardins publiée il y a quelques jours, le Québec est rendu avec une prévision de 1,1 %, puis l'Ontario, il les a fait passer de 1,8 % à 1,9 % de croissance. Donc, ça ne va pas bien au Québec par rapport à l'Ontario.

Mais ma question est claire, là, puis il n'a pas répondu, elle est simple : Est-ce que le premier ministre exclut, oui ou non, d'augmenter la TVQ?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Ce qui est malheureux dans le discours de notre collègue, qui, pourtant, avait bien commencé, il y a quelques années, avec ses remarques sur l'économie du Québec et des finances publiques, c'est cette tendance presque désarmante à tout simplifier à outrance, à réduire les discussions au plus bas commun dénominateur.

Alors, je vais lui proposer un dénominateur plus élevé. Oui, il faut relancer l'économie du Québec, et la réduction du fardeau fiscal des Québécois est un des éléments — pas le seul, un des éléments — importants qu'il faut mettre en place. Et cette réduction du fardeau fiscal nette — plus d'argent dans les poches des gens — doit surtout se faire à partir de l'impôt sur le revenu, qui, on le sait, il le sait également, a une incidence plus négative sur la croissance que d'autres types de taxation.

Alors, il y aura un jour où le ministre des Finances va se lever en cette Chambre et va annoncer des façons nouvelles et plus accélérées, j'espère, de diminuer le fardeau fiscal des Québécois...

Le Président : En terminant.

M. Couillard : ...mais ce n'est pas aujourd'hui.

Le Président : M. le chef du deuxième groupe d'opposition en deuxième complémentaire.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, tous ceux qui nous écoutent viennent de comprendre que le premier ministre veut augmenter la TVQ. S'il ne voulait pas le faire, il l'aurait dit, là.

La question est simple, donc je lui donne une dernière chance : Est-ce que le premier ministre s'engage à ne pas augmenter la TVQ, oui ou non?

Le Président : M. le premier ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Ce qui explique l'échec historique de la formation politique de mon collègue, M. le Président, c'est sa tendance, que les Québécois voient très bien, à simplifier, encore une fois, à outrance les éléments, à amener, à réduire au plus bas commun dénominateur les discussions et à essayer de bloquer les débats.

Moi, je vais répéter ce que les Québécois et les Québécoises savent déjà et vont continuer à entendre de notre part : Nous allons baisser leur fardeau fiscal, nous allons faire en sorte qu'ils et elles aient plus d'argent dans leurs poches en commençant par la taxe santé, en allant surtout sur l'impôt sur le revenu, et l'effet net, encore une fois, c'est plus d'argent dans les poches des Québécois, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le député de Chambly.

Maintien des services de garde en milieu
scolaire lors des journées de grève

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, il y a des syndicats d'enseignants qui ont obtenu un mandat de grève pour le 28 octobre prochain. Mais attention! ce n'est pas tout le personnel des écoles visées qui ont obtenu le droit de grève. Les éducatrices de services de garde, elles, par exemple, ne seront pas en grève le 28 octobre prochain. Pourtant, les commissions scolaires, elles, ont annoncé qu'elles vont carrément fermer les écoles primaires ce jour-là, peu importe. Le gouvernement devrait agir, envoyer une directive claire pour que les services de garde soient ouverts. Mais non, le gouvernement préfère jouer les spectateurs, nous déposer tantôt une motion qui souhaite, qui demande à ce que peut-être, s'il vous plaît, là, les commissions scolaires ouvrent les services de garde.

Mais ce n'est pas d'une motion dont les parents ont besoin, c'est d'un service de garde ouvert pour pouvoir aller travailler. Est-ce que le ministre peut s'engager à ce que, quand il y a des journées de grève des enseignants, les services de garde soient ouverts pour permettre aux travailleurs et aux travailleuses d'aller travailler?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Alors, M. le Président, d'abord, je veux remercier mon collègue pour sa question, elle est extrêmement pertinente. Dans le contexte actuel, pensons-y bien, là...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! On a bien entendu la question, j'aimerais entendre la réponse. M. le ministre.

M. Blais : Dans le contexte actuel, je pense qu'il faut, hein, protéger les parents, protéger les enfants, hein, et s'assurer que les services de garde soient offerts. C'est le message que j'ai déjà livré. Donc, on a déjà agi, c'est le message que le ministère a déjà livré, il y a deux semaines, à l'ensemble des commissions scolaires, leur demandant de laisser ouverts leurs services, et nous, de notre côté, nous avons réitéré que nous allons financer ces journées de garde comme nous le finançons pour les autres journées pédagogiques.

Maintenant, ce que l'on veut faire aujourd'hui, c'est demander l'appui de l'ensemble, ici, des parlementaires pour nous appuyer dans cette démarche-là et faire en sorte que le message soit le plus clair possible. Il le sait très bien que le ministre n'a pas un pouvoir de directive au sens administratif du terme. C'est pour ça que nous travaillons avec des commissions scolaires et nous leur demandons de faire un effort pour laisser les services ouverts pour les prochains jours de grève.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je suis obligé de dire que c'est mou. J'ai une lettre de la commission scolaire Marie-Victorin ici qui dit que les services de garde vont être fermés. La commission scolaire, elle, elle l'a prise, sa décision : services de garde fermés.

Le gouvernement, lui, ne prend pas une décision, il fait une motion. Mais à quoi sert un gouvernement s'il refuse de gouverner? Là, le ministre de l'Éducation refuse de prendre une décision. Peut-être que la ministre de la Famille peut se lever puis prendre une décision, prendre un peu de leadership pour ouvrir les services de garde. Est-ce qu'elle va oser?

• (10 h 30) •

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Je rappelle à mon collègue, là, que nous sommes gouvernés par des lois aux dernières nouvelles, la Loi de l'instruction publique notamment, qui accorde un pouvoir de gestion et d'administration aux commissions scolaires dans les services qu'elles offrent aux élèves. Alors, ce que nous avons fait, là, nous avons pris les devants, nous avons offert aux commissions scolaires de financer ces journées-là pour faire en sorte que les services soient offerts.

Moi, je pense que le message que nous pouvons lancer aujourd'hui, c'est un message puissant pour s'assurer que, dans les meilleures situations possible, les services soient offerts aux élèves et aux parents dans les prochaines semaines.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chambly.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on va l'appuyer, la motion, là, qui souhaite que les services de garde soient ouverts. On n'est pas au gouvernement, parce que, si on y était, ce n'est pas une motion qu'on ferait, c'est une décision qu'on prendrait pour le bien-être des parents. Le ministre de l'Éducation ne peut pas prendre la décision. La ministre de la Famille n'ose même pas se lever. Est-ce que le ministre du Travail va s'assurer que les gens vont pouvoir aller travailler? Probablement pas. Est-ce que le premier ministre va faire quelque chose? Non, mais la motion, elle va passer.

Est-ce que le gouvernement peut s'engager à ouvrir les services de garde?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. François Blais

M. Blais : Alors, si jamais la CAQ était au pouvoir, hein — on travaille très fort pour que ça ne soit jamais le cas — il y aurait quand même des lois. Et, si on veut travailler à transformer ces lois, je l'invite : bientôt, on aura une réflexion, en commission parlementaire, bien entendu, sur la gouvernance du milieu scolaire.

Le Président : Principale, M. le député de Chicoutimi.

Mesures visant à améliorer la confiance du
public dans le domaine de la justice

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : M. le Président, la ministre de la Justice nous a dit hier que, dans le dossier SharQc, tout n'était pas noir. Eh bien, je vais lui dire la chose suivante : Le déraillement des mégaprocès depuis 2011 à aujourd'hui devrait lui avoir envoyé un message très clair, soit que notre système de justice n'a pas la capacité de traiter, dans des délais raisonnables, des dossiers lourds et complexes.

Jusqu'à maintenant, c'est le quart des 156 Hell's Angels originellement accusés qui ont obtenu un acquittement. Et on apprend que d'autres qui sont en attente de leurs sentences souhaitent retirer leur plaidoyer de culpabilité pour plaider la même chose qu'ont obtenue les autres qui ont été libérés. Et je vous ferai grâce, M. le Président, d'autres accusés qui ont été libérés strictement par l'écoulement du délai. Nous avons d'autres procédures qui sont en cours où les délais qui sont fixés pour les procédures sont très, très longs.

Concrètement, face à ces actes, qui brisent la confiance du public envers le système de justice, qu'est-ce qu'elle a fait, concrètement, pour éviter que d'autres accusés soient relâchés strictement à cause de l'écoulement des délais?

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, on fait beaucoup de bruit avec le dossier SharQc, et je tiens à réitérer évidemment que la décision qui a été rendue nous a secoués tous.

Ceci étant dit, quant au dossier SharQc, il demeure que deux dossiers sont pendants, alors j'invite... et je prends l'opportunité ce matin pour inviter les collègues parlementaires à la prudence quant au fait que nous avons toujours des dossiers qui sont pendants et qui concernent l'ensemble de la situation. Ceci étant dit, M. le Président, il y a eu, au fil des ans, des gestes concrets qui ont été posés par le gouvernement libéral. Rappelons-nous l'ajout de juges à la Cour supérieure pour permettre notamment de traiter plus rapidement les dossiers. Puisque les dossiers...

Des voix : ...

Mme Vallée : ... — j'entends, M. le Président, des voix — en Cour supérieure...

Une voix : ...

Mme Vallée : Bien oui! Bien oui, M. le Président, la Loi sur les tribunaux judiciaires prévoit que le gouvernement du Québec nomme... pas nomme, mais identifie le nombre de juges...

Des voix : ...

Mme Vallée : Oui. M. le chef de l'opposition aurait intérêt peut-être à s'éduquer davantage sur la question.

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : Ceci étant dit, M. le Président, nous avons haussé le nombre de juges, nous avons augmenté le nombre de salles.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : La ministre nous invite à ne pas parler du procès SharQc pour ne pas le faire avorter. Il y a une chose qui est sûre, c'est qu'on n'en a pas parlé dans les dernières semaines, et, malheureusement, les procès ont avorté. Donc, c'est le temps d'en parler, parce que le procès SharQc... bien, il y en a d'autres, procès en cour dont on voit les délais s'allonger. Puis ce qu'on voit de l'autre côté, c'est la ministre qui a ordonné des compressions au ministère de la Justice et principalement au niveau des procureurs.

Concrètement, qu'est-ce qu'elle a fait pour s'assurer que les délais sont respectés et que la population va retrouver confiance dans le système de justice? Et ça, ça inclut les policiers qui sont sur le terrain, qui risquent leur vie à tous les jours pour les Québécois.

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, la question de mon collègue nous permet de rétablir un certain nombre de faits.

Il y a un an, le bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales comptait 597 procureurs : 494 réguliers, 103 occasionnels. Cette année, en septembre 2015, nous avions 599 procureurs, dont 502 procureurs réguliers et 97 occasionnels. M. le Président, il n'y a pas de coupure dans le nombre de procureurs et il n'y a pas de coupure et de coupe dans le nombre de procureurs qui sont spécifiquement dédiés...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...à la lutte au crime organisé.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Chicoutimi.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Je suis content d'entendre la ministre, M. le Président, parce que, vendredi, elle n'était pas là et elle aurait dû être présente, comme première représentante de la justice au Québec, pour témoigner de son indignation et des correctifs qu'elle entend faire. Ce matin, je n'entends rien pour corriger la situation. Je vois les délais s'allonger. Je ne fais pas référence à des procédures, mais on fixe des procès jusqu'en 2019‑2020.

Ça va prendre combien de procès qui avortent avant que la ministre dépose un plan complet pour s'assurer que les procédures sont suivies, que les accusés sont devant les tribunaux et sont reconnus coupables pour...

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, c'est toujours étonnant d'entendre le parti de l'opposition nous demander ce que nous allons faire, parce que, de leur côté, lorsqu'ils étaient au pouvoir, rappelons-nous, dans les années 90, les années 2000, on a réduit le nombre de juges, on a réduit le nombre de juges à la Cour du Québec, on a réduit le nombre de juges à la Cour supérieure, et ça, ça a occasionné des délais terribles.

Nous avons rectifié la situation en 2012 alors que le leader actuel était ministre de la Justice. Il l'a augmenté, et ces effets se font sentir. Les juges qui avaient été augmentés ont été nommés l'an dernier, et les postes ont été comblés par le fédéral. Et donc nous aurons...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...nous avons plus de juges pour entendre les dossiers.

Le Président : Principale, Mme la députée de Gouin.

Programme d'aide et d'accompagnement social

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : M. le Président, lors de l'étude de crédits, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale nous confirmait qu'il y aurait des coupures de 2 millions de dollars au programme PAAS Action, qui passait de 16 millions à 14 millions. On apprend maintenant que seulement 12 millions seront consacrés à ce programme, qui vient en aide à des personnes recevant un chèque d'aide sociale et très éloignées du marché du travail. Mais ce n'est pas tout. Les organismes de mon comté m'appellent pour me dire qu'ils ne sont pas capables de remplir les places dédiées à PAAS Action, car Emploi-Québec leur réfère des participants au compte-goutte. Et, quand les groupes trouvent eux-mêmes des participants, Emploi-Québec les refuse, souvent. Depuis un an, le nombre de participants a diminué de 21 % au Québec.

Le ministre va-t-il intervenir pour permettre aux organismes communautaires de combler tous les postes disponibles et offrir un service d'insertion sociale qui bénéficie aux plus démunis d'entre nous?

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, M. le Président. Vous savez, pour nous, le travail est un des meilleurs moyens de favoriser l'autonomie économique et financière des citoyens, et surtout les citoyens qui sont en situation de pauvreté. Et aussi, évidemment, ce n'est pas une question économique et sociale, mais aussi c'est une question de dignité.

Vous savez, la collègue parle d'un programme de 14 millions, mais je dois la rappeler que nous investissons 800 millions, M. le Président, par année pour aider les personnes à trouver un emploi, pour les aider à faire la transition dans une situation de pauvreté pour améliorer leurs conditions à aller en emploi, M. le Président. D'ailleurs, j'aimerais souligner — un petit tableau pour comprendre — juste les groupes communautaires, M. le Président, ça, c'est les investissements que nous faisons, c'est presque 1 milliard de dollars d'investissement dans les groupes communautaires par rapport à ce qui se faisait dans le Parti québécois, leur frère siamois.

M. le Président, un autre élément. Quand elle dit que la clientèle baisse, M. le Président, quand elle dit «la clientèle baisse», c'est normal, c'est une courbe importante de montrer, les personnes à l'aide sociale au Québec, M. le Président. Regardez la baisse majeure, importante...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...de nombre de personnes en situation de pauvreté au Québec. C'est un succès de notre société, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : M. le Président, je n'en reviens juste pas de cette réponse-là, qui n'est pas du tout une réponse à ce que j'ai demandé. 12 millions au lieu des 14 millions, qui étaient déjà une coupure de 2 millions, des gens qui sont refusés dans des programmes parce qu'on estime — et je le sais — qu'on les trouve trop éloignés du marché du travail.

On parle de personnes ayant souvent des contraintes sévères à l'emploi, avec des déficiences, des handicaps, des problèmes de santé mentale. Qu'est-ce que le ministre va faire?

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : M. le Président, je prends les mots de ma collègue. Les gens qui sont en contraintes sévères, nous investissons 170 millions de dollars pour ces personnes-là, M. le Président, à plusieurs programmes, le PAAS, le programme qu'elle parle. On a d'autres programmes, M. le Président — c'est le contrat d'intégration au travail, c'est un autre programme aussi, des subventions aux entreprises adaptées, alors tous ces programmes-là — justement pour aider ces personnes-là à améliorer leur situation. Et nous travaillons avec eux, M. le Président.

Les résultats sont concrets. Encore une fois, M. le Président, le plus bas taux d'assistance sociale dans l'histoire du Québec est aujourd'hui, M. le Président. Pourquoi? Parce que nous travaillons fort. Parce que ces gens-là...

• (10 h 40) •

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...participent pour améliorer leur situation et améliorer leur sort de pauvreté.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Gouin.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : M. le Président, je répète, il s'agit ici de personnes très éloignées du marché du travail, ayant des contraintes sévères, de grandes difficultés personnelles, et le programme PAAS Action leur offre une valorisation, une faible rémunération mais qui est importante pour leur dignité.

Je veux savoir si le ministre est en train d'orchestrer la mort lente du programme.

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : M. le Président, j'ajoute encore qu'on a été le premier gouvernement au Canada de mettre en place une stratégie pour aider les personnes handicapées de retourner sur le marché de travail. C'est 95 millions de dollars investis pour aider ceux et celles qui veulent améliorer leurs conditions, veulent gagner leur dignité, M. le Président. On investit 170 millions de dollars pour les personnes en contraintes sévères. On les aide, on travaille avec eux, M. le Président. En même temps, il faut regarder, les programmes qu'on met en place, il faut que ça donne des résultats aussi, M. le Président.

Donc, nous travaillons ensemble avec les personnes en situation de pauvreté pour améliorer leurs conditions. Notre objectif...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...notre objectif commun ici, c'est gagner leur dignité.

Le Président : Principale, M. le député de Nicolet-Bécancour.

Grève à la Société des traversiers

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, après la ville de Lévis, la ville de Sorel, c'est maintenant au tour de la ville de Québec de demander que le gouvernement reconnaisse essentiels les services de traversier. Pendant ce temps, ce gouvernement est passif, ses ministres agissent en spectateurs. Le président du Conseil du trésor a confirmé hier qu'il ne ferait rien pour rétablir dès maintenant le service. De son côté, le ministre du Travail se sert de la Commission des relations de travail comme un paravent à son manque de leadership. Quant au ministre responsable de la Stratégie maritime, il est complètement absent de ce dossier. Chaque jour, les citoyens qui font les frais de ce conflit se sentent complètement abandonnés par le gouvernement, qui refuse de voir ce service comme essentiel.

Ma question est très simple : Est-ce que, oui ou non, ce gouvernement juge que le traversier est un service essentiel aux heures de pointe?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Martin Coiteux

M. Coiteux : Bien, M. le Président, c'est une question qui est importante, là, puis c'est certain que... Puis on n'a pas attendu les questions de l'opposition pour se préoccuper du sort des personnes qui sont affectées par le conflit.

Une voix : ...

M. Coiteux : On n'a pas attendu les questions, parce qu'on a passé notamment beaucoup de temps aux tables de négociation en fin de semaine dernière pour faire avancer la négociation. Le gouvernement a même, d'ailleurs, répondu à certaines demandes syndicales de façon responsable. Je répète encore une fois ce que j'ai dit hier : Si on nous demande ici d'aller négocier des choses irresponsables pour régler en 24 heures, on ne le fera pas.

Maintenant, grâce à cette action du gouvernement en fin de semaine dernière, les syndiqués sont, à l'heure actuelle, en train de voter sur les propositions gouvernementales et sur la suite des moyens de pression, le cas échéant. Alors, ça ne demandera pas une énorme patience, là, parce qu'ils vont terminer leur vote d'ici jeudi soir. On ne va pas refaire le droit du travail sur une banquette, ici, aujourd'hui, pendant la période des questions. On va suivre les lois, on va rester très attentifs puis on prendra les gestes qui s'imposeront, au moment opportun.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, est-ce que j'ai bien compris «c'est irresponsable de demander des services essentiels»? Le décret 139-2015, publié par...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Fournier : Question de règlement. On ne peut quand même pas faire dire au président du Conseil du trésor ce qu'il n'a pas dit. Il n'a jamais dit que c'était irresponsable, cela, il a dit que ce serait irresponsable de faire des mauvaises offres, de poser des gestes...

Le Président : M. le député, veuillez continuer.

M. Martel : Le décret 139-2015, publié par le ministre du Travail le 25 février dernier, stipule clairement qu'une grève dans le service de la STQ pourrait avoir pour effet de mettre en danger la santé et la sécurité publique. La Commission des relations du travail et le cabinet du ministre le confirment. Alors...

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Hamad : M. le Président?

Le Président : M. le ministre de l'Emploi.

M. Sam Hamad

M. Hamad : M. le Président, sincèrement, là, la coalition, absente de Québec, ils sont rendus des GES, vous savez, des gaz nocifs à l'environnement...

Des voix : ...

M. Hamad : ...c'est des gérants d'estrade simplistes, et je vais l'expliquer...

Des voix : ...

M. Hamad : ...l'expliquer.

Le Président : Oui. Monsieur...

Une voix : ...

Le Président : ...M. le leader. M. le ministre, pourriez-vous répondre à la question, s'il vous plaît?

M. Hamad : J'étais en train de répondre. M. le Président. Quand le député fait référence à un décret gouvernemental — puis, sa question, M. le Président, on va lui pardonner — ça démontre qu'il ne comprend pas le processus.

Le processus est le suivant : l'employeur fait une demande à un tribunal, un tribunal qui s'appelle la Commission des relations du travail, pour déterminer les services essentiels. Le tribunal accepte ou n'accepte pas, prend une décision...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...et cette décision-là est publiée par un décret pour dire : Voici qui sont les services essentiels.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Nicolet-Bécancour.

M. Donald Martel

M. Martel : M. le Président, peut-être que le ministre n'a pas lu son décret. Je le dépose ici. Ce décret-là reconnaît formellement tous les services de la STQ comme étant essentiels. Le Code du travail permet au gouvernement d'agir, mais il reste les bras croisés.

Pourquoi ce gouvernement s'entête-t-il? Pourquoi refuse-t-il de prendre parti pour les citoyens exaspérés par cette grève?

Document déposé

Le Président : D'abord, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt? Consentement. M. le ministre, s'il vous plaît, sur le sujet.

M. Sam Hamad

M. Hamad : ...décevant, M. le Président, décevant d'introduire la population en erreur puis penser qu'on fait ça. Le processus est simple, M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : M. le ministre.

Des voix : ...

Le Président : M. le ministre, s'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président : Non, non, je vous ai demandé de vous asseoir. M. le ministre, là, je vous demanderais d'abord de faire en sorte d'éviter de blesser vos collègues, d'éviter de faire en sorte de... encore une fois, d'éviter de blesser vos collègues. S'il vous plaît, veuillez répondre à la question.

M. Hamad : M. le Président, c'est un décret qui reflète une décision de la Commission des relations de travail, ce n'est pas un décret que le gouvernemental décide quels sont les services essentiels. Nous avons, au Québec, un tribunal qui décide qui sont les services essentiels suite à une entente ou une proposition par les syndicats et par les patrons, M. le Président. C'est exactement ce qui est déterminé par le décret où le député en parle, M. le Président.

Il faut comprendre qu'ici, au Québec, M. le Président, les services essentiels... il y a une commission, l'ancienne commission des services essentiels. Aujourd'hui...

Le Président : En terminant.

M. Hamad : ...c'est la Commission des relations de travail, c'est un tribunal indépendant du gouvernement, qui décide.

Le Président : Principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Nominations au conseil d'administration du Centre
intégré universitaire de santé et de services
sociaux du Saguenay
—Lac-Saint-Jean

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, on sait que le gouvernement libéral, là, ne comprend absolument rien à la réalité des régions puis que tout ce qu'ils veulent, là, c'est de centraliser les pouvoirs. Hier, on a un autre un bel exemple de l'incompréhension du gouvernement actuel. Le ministre de la Santé nous a dit, là, que, pour lui, il n'y avait rien de grave dans le fait que les gens de Dolbeau ne soient pas représentés au nouveau conseil d'administration à Chicoutimi, à 140 kilomètres. 140 kilomètres, là, c'est la distance entre Québec puis Shawinigan.

Les gens du Saguenay—Lac-Saint-Jean, ce qu'ils veulent, c'est une représentation régionale qui soit juste. Les gens de Dolbeau, là, ce qu'ils veulent, c'est pouvoir parler à des gens qui comprennent leur réalité. On sent plus, là, qu'il y a des nouvelles coupes qui s'en viennent.

Est-ce que le député de Roberval peut se lever, défendre les gens de chez nous puis s'assurer qu'on a une représentation des gens du Lac-Saint-Jean?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Alors, M. le Président, puisque le député aime beaucoup faire des citations, je vais me citer moi-même encore une fois. N'ayant pas dit que je ne trouvais rien de grave, n'ayant pas dit que je ne trouvais rien de grave, j'ai par contre dit que j'avais respecté la loi, la loi qui prévoit que les nominations des membres indépendants soient faites par un comité indépendant qui fait une sélection, qui la présente au ministre, le ministre choisissant; la loi aussi, M. le Président, exigeant que tous les RLS, les réseaux locaux de services, soient représentés au conseil d'administration. Et les réseaux locaux sont évidemment des sous-divisions de la région, et il se trouve que tous les réseaux locaux sont représentés sur le conseil d'administration et notamment la présidente, M. le Président, vient de Roberval. La loi ne prévoit pas qu'il y ait par installation un représentant. La loi a été respectée.

Le Parti québécois, M. le Président, m'a reproché à tour de bras — à tour de bras — d'avoir trop de pouvoirs, et là on me demande d'exercer un pouvoir contre la loi...

Le Président : En terminant.

M. Barrette : ...pour qu'un individu soit sur le conseil d'administration. M. le Président, c'est...

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : Bien, M. le Président, je n'en reviens carrément pas de la réponse du ministre, là. Il vient de nous dire : On a quelqu'un de Roberval, mais moi, je vous parle du monde de Dolbeau. Il est-u conscient que c'est deux MRC qui sont différentes?

Qu'est-ce que vous répondez au préfet de la MRC de Maria-Chapdelaine, là, Pierre Boivin, qui sort en disant : Nous, ce qu'on veut, là, c'est des gens qui comprennent notre réalité? Après ça, ce n'est pas fini, tu as le maire de Dolbeau-Mistassini qui dit : Encore une fois, le Lac-Saint-Jean a été oublié. Après ça, tu as le personnel de l'hôpital qui sort, puis vous, vous nous dites qu'ils ont déjà un représentant. La réalité du terrain, elle n'est pas...

• (10 h 50) •

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, je suis très étonné de la sortie du député. Ce qu'il me demande, c'est de ne pas respecter la loi, et il me critique parce que j'ai appliqué la loi. Et non seulement il me critique parce que j'ai appliqué la loi, il réclame que je ne la respecte pas.

Je peux comprendre que je sois un rebelle professionnel, là, mais ici, en Chambre, M. le Président, il me semble que je dois avoir une espèce de réserve parlementaire, certainement ministérielle et certainement de respecter la loi, qui, dans le cas présent, M. le Président, a été respectée. Et son RLS de l'endroit dont il parle est représenté, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier : M. le Président, aujourd'hui ce n'est pas moi qui critique le gouvernement, aujourd'hui je suis le porte-voix d'un milieu. Je suis le porte-voix de gens, là, qui trouvent que ça n'a juste pas de bons sens que leur hôpital, sur lequel avant il y avait un conseil d'administration, il y avait un conseil d'établissement, il y avait des gens qui les représentaient... Puis ces gens-là, aujourd'hui, là, ils ont l'impression qu'ils ne seront pas défendus dans un nouveau conseil d'administration qui se retrouve à 140 kilomètres.

M. le Président, la moindre des choses, là, c'est qu'il y ait une représentation territoriale qui soit équitable. Le député de Roberval peut-il se lever et défendre les gens de chez nous?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, je comprends que, comme députés, on doit représenter notre population et je vois que le député le fait avec énergie, mais il me semble qu'il devrait exercer aussi ce que l'on pourrait appeler une espèce de jugement parlementaire et expliquer à ses constituants que, bien, il y a des lois et les lois sont ce qu'elles sont et, dans le cas présent, la loi a été respectée. Et je ferai remarquer au collègue, M. le Président, que je n'ai jamais entendu personne, dans la région à laquelle il fait référence, contester la construction, la délimitation de son RLS. Son RLS, son réseau local de services, a été et est représenté, M. le Président.

Le Président : En principale, M. le député de Groulx.

Implantation de radars photo sur le réseau routier

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : M. le Président, dans le cadre de nouveaux projets pilotes, les automobilistes du Québec, de la Montérégie, de Laval et de Gatineau ont vu apparaître, lundi dernier, des dizaines de nouveaux photoradars mobiles dans 129 nouveaux emplacements. Plusieurs automobilistes se questionnent sur le choix des emplacements de ces photoradars, qui sont de véritables trappes à tickets. En effet, ils ne sont pas nécessairement installés là où il y a le plus d'accidents de la route. À Québec, par exemple, selon une compilation effectuée par Radio-Canada, seulement sept des 25 artères où surviennent le plus grand nombre d'accidents sont maintenant surveillées par des photoradars. Le gouvernement a même payé des publicités à la radio pour justifier la multiplication des photoradars.

M. le Président, le ministre des Transports doit prouver que les photoradars ne sont pas des trappes à tickets. Il a entre les mains un rapport qui justifie la sélection de chacun des sites. Je pense que le ministre des Transports fait de l'excès de vitesse dans l'implantation des photoradars.

Peut-il ralentir et nous rendre public le rapport du comité d'experts sur les sélections des sites où il y a maintenant des photoradars, M. le Président?

Le Président : M. le ministre des Transports.

M. Robert Poëti

M. Poëti : M. le Président, écoutez, il y a une chose qui est claire, pour les excès de vitesse, il est tombé sur la mauvaise personne, ça, c'est sûr. Mais, si on fait de l'excès de vitesse sur les photoradars, vraiment, là, je suis surpris. Est-ce que le député me dit, M. le Président, qu'on va trop vite pour assurer la sécurité des citoyens? Est-ce que le député me dit que le meilleur bilan à vie de la Société d'assurance automobile du Québec n'est pas efficace? Il y avait 2 300 morts sur nos routes, M. le Président, il n'y a pas si longtemps; on est sous la barre des 400 décès. Un décès, un blessé, c'est un de trop. Mais c'est un bilan exceptionnel.

L'utilisation des photoradars n'est qu'un outil pour l'ensemble, évidemment, des intervenants, et notre entente de toujours aviser les citoyens, de discuter avec les villes des endroits choisis par des experts est toujours présente. Et, quand ils ne sont pas efficaces ou ils ne répondent pas aux attentes, on les retire, M. le Président. Alors, notre engagement avec les photoradars... Et je tiens à préciser aussi qu'ils sont toujours annoncés et qu'on voit toujours les panneaux qui les annoncent. Alors là, je me demande, M. le Président, qu'est-ce que le député veut, exactement.

Le Président : Alors, cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée
le 6 octobre 2015 concernant les questions inscrites au
feuilleton de cette séance par le député de La Peltrie

Et je vous ramène à ce que je vous disais tout à l'heure, à la directive de la présidence. Je suis maintenant prêt à rendre la directive sur la question soulevée au premier vice-président par le leader adjoint du gouvernement concernant des questions écrites qui ont été rendues publiques avant leur parution au feuilleton.

Le 6 octobre dernier, le leader adjoint du gouvernement portait à l'attention de la présidence un article du quotidien Le Soleil publié le matin même vers 5 heures. Cet article reprend textuellement et intégralement plusieurs questions écrites du député de La Peltrie inscrites au feuilleton de la séance paru un peu plus tard le même jour. Sur la base de cet article, il a demandé à la présidence de rendre une directive afin de déterminer si le fait de rendre publiques des questions écrites avant leur parution au feuilleton constituait un manquement au règlement.

Selon le leader adjoint du gouvernement, il importe que les parlementaires soient les premiers informés du contenu des questions écrites au même titre qu'ils doivent être les premiers informés du contenu des projets de loi, du discours inaugural, du discours du budget. Il insiste sur le fait que ce principe, qui s'applique au gouvernement, devrait s'appliquer de la même manière à l'opposition. Ainsi, rien n'empêcherait un groupe parlementaire de dévoiler sa stratégie pour la période des questions ou le sujet de ses questions, mais il serait interdit de dévoiler le texte des questions à partir du moment où il a été décidé d'inscrire ces questions au feuilleton. Dans ce cas, le député devrait respecter les règles parlementaires.

Selon le leader du deuxième groupe d'opposition, l'interdiction de rendre public un projet de loi avant sa présentation à l'Assemblée ne s'appliquerait pas aux questions écrites. Il arriverait d'ailleurs, occasionnellement, que les députés de l'opposition, en se faisant questionner par des journalistes, dévoilent les questions qu'ils ont l'intention de poser. Le ministre concerné sait alors ce sur quoi il sera questionné. Le leader du deuxième groupe d'opposition affirme de plus que les questions écrites constituent un moyen de contrôle de l'action du gouvernement dont les députés disposent et demande à la présidence de considérer les impacts que la directive pourrait avoir sur la liberté de parole des députés.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Selon le leader de l'opposition officielle, aucune règle ne vient interdire la diffusion des questions écrites dans les médias. En référant à l'article 314 du règlement, qui renvoie aux règles relatives aux questions orales, il soutient que les députés ont le droit de dévoiler aux journalistes le sujet de leurs questions orales et même d'en dévoiler le libellé. Au même titre, selon lui, les députés auraient le droit de dévoiler leurs questions écrites avant leur parution au feuilleton.

Afin de répondre à cette question, il me semble important de rappeler quelques éléments concernant le feuilleton. Le Feuilleton et préavis est une publication parlementaire énumérant les affaires que l'Assemblée peut prendre en considération et contenant divers autres renseignements. Il est publié vers 8 heures chaque jour où l'Assemblée siège, et son contenu est confidentiel jusqu'à ce moment. Il a notamment pour but d'informer les députés des affaires qui peuvent faire l'objet d'un débat afin que ceux-ci ne soient pas pris par surprise. Le feuilleton se divise en plusieurs parties, dont l'une d'elles énumère la liste des questions écrites adressées au gouvernement.

Comme les leaders l'ont mentionné, la jurisprudence est muette sur le fait de dévoiler le contenu des questions écrites au feuilleton avant leur parution. Des décisions cependant ont été rendues concernant le fait de rendre public un projet de loi avant sa présentation à l'Assemblée. À ce sujet, la jurisprudence est claire : un député peut informer les citoyens des grandes orientations contenues dans un projet de loi.

Toutefois, comme je l'ai mentionné dans une décision rendue le 13 juin 2014, et je cite, «ce sont les députés qui doivent être informés les premiers des détails d'un projet de loi, pas les journalistes et ce, en tout respect pour le rôle fondamental que jouent ces derniers dans notre démocratie». Un député peut certes dévoiler le sujet d'un projet de loi qu'il a l'intention de présenter. Il peut également en dévoiler les grandes lignes. Par contre, il doit garder en tête que les membres de l'Assemblée doivent être les premiers saisis du texte des projets de loi sur lesquels ils devront se prononcer. Il en va du respect du rôle du législateur.

Qu'en est-il des questions écrites au feuilleton? Aucun précédent ne porte précisément sur le fait de divulguer le contenu d'une question écrite. Toutefois, compte tenu que les questions écrites doivent être inscrites au feuilleton et que le feuilleton est confidentiel jusqu'à ce qu'il soit publié, le texte d'une question écrite ne peut pas être divulgué avant la parution du feuilleton. Ainsi, qu'ils soient ou non membres du Conseil exécutif, tous les députés en sont informés au même moment. Par contre, tout comme pour un projet de loi, rien n'empêcherait un député de traiter du sujet d'une question écrite.

Voilà l'objet de ma réflexion sur le sujet. Est-ce qu'il y a des commentaires? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, nous en sommes à la rubrique des motions sans préavis, et je reconnais un membre du groupe formant l'opposition officielle pour la présentation de sa motion sans préavis. Et je cède la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean. M. le député, à vous.

M. Cloutier : M. le Président, je demande le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Gouin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale souligne que le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche n'a pas encore visité d'école de la commission scolaire de Montréal;

«Qu'elle lui demande d'aller sur le terrain et de visiter des écoles primaires et secondaires de la commission scolaire de Montréal.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Il n'y a...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Il n'y a pas de consentement.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : S'il vous plaît! Il n'y a pas de consentement, donc on passe à l'étape suivante.

Des voix : ...

• (11 heures) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : On va passer à l'étape suivante quand j'aurai l'attention de cette Chambre.

Un membre du deuxième groupe de l'opposition. M. le député de Borduas, pour la présentation de votre motion sans préavis.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec le député de Chicoutimi :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement qu'indépendamment de tout développement futur dans le dossier, il rende public dès que possible les conclusions de l'enquête interne lancée par la [Directrice] des poursuites criminelles et pénales sur le mégaprocès SharQc.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, il y a consentement ou pas? Il n'y a pas consentement. Merci.

M. Sklavounos : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, c'est ce qu'il faut dire. Je reconnais maintenant un membre du groupe formant le gouvernement et je reconnais M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche pour la présentation de sa motion. M. le ministre, à vous la parole.

M. Blais : Merci bien, M. le Président. Alors, je cite... je sollicite, pardon, le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Chambly :

«Que l'Assemblée nationale demande formellement aux commissions scolaires, à l'instar du gouvernement, d'ouvrir leurs services de garde lors des journées de grèves des enseignantes et [des] enseignants;

«Qu'elle rappelle que le gouvernement a offert un financement supplémentaire aux commissions scolaires afin qu'elles puissent opérer les services de garde lors de ces journées et ainsi accommoder les parents.»

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je l'ai entendue, la députée de Gouin s'est levée, il n'y a pas consentement pour débattre de cette motion.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, il n'y a pas de consentement. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, pour la présentation de votre motion, à vous la parole.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Terrebonne :

«Que l'Assemblée nationale du Québec salue la volonté du nouveau gouvernement canadien de mettre fin à l'isolement canadien à l'international sur la question de la lutte aux changements climatiques;

«Qu'elle rappelle que la cible actuelle de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada est nettement insuffisante pour respecter le principe de justice climatique et pour assurer la contribution canadienne à limiter la hausse globale de la température à 2 degrés d'ici 2100;

«Qu'elle presse le nouveau gouvernement du Canada de remplir rapidement son engagement électoral de supprimer graduellement les subventions accordées à la production de combustibles fossiles; et

«Qu'elle souligne l'engagement et les compétences du Québec en cette matière.» Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : M. le leader du gouvernement. Bien, il vous appartient de vous le lever puis le dire parce qu'il faut l'entendre. Alors, y a-t-il consentement ou pas?

M. Sklavounos : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ça, c'est clair. Il n'y a pas de consentement. Merci.

Les motions sans préavis sont maintenant terminées.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous en sommes maintenant aux avis du gouvernement, et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement. S'il vous plaît, M. le leader adjoint du gouvernement, pour entendre vos avis.

M. Sklavounos : Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations particulières sur le document de consultation intitulé Cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre du Québec pour 2030 aujourd'hui, après les affaires courantes pour une durée de 1 h 30 min et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra, quant à elle, l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 20, Loi édictant la Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des institutions poursuivra, elle, l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Finalement, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 54, Loi visant l'amélioration de la situation juridique de l'animal, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement.

Pour ma part, je vous avise que la Commission de l'administration publique se réunira en séance de travail, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May. L'objectif de la séance, c'est de préparer l'audition de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec sur la gestion administrative et l'audition de la Commission de la fonction publique du Québec sur sa gestion administrative et ses engagements financiers.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes à la rubrique Renseignements sur les travaux de cette Assemblée. Je n'en vois pas, de demande.

Avis de sanction de projets de loi

Alors, je vous informe cependant qu'il y aura sanction du projet de loi n° 48, Loi modernisant la gouvernance du Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec, et du projet de loi n° 13, Loi donnant suite au discours sur le budget du 4 juin 2014 et à certaines autres mesures fiscales, aujourd'hui, à 16 heures, au bureau du lieutenant-gouverneur.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et je cède à nouveau la parole à M. le leader adjoint du gouvernement pour qu'il nous indique les travaux. M le leader.

M. Sklavounos : Merci, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article 12 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 39

Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, à l'article 12 du feuilleton de ce jour, nous allons prendre en considération le rapport de la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 39, Loi donnant suite à la mise à jour sur la situation économique et financière du Québec présentée le 2 décembre 2014 et modifiant diverses dispositions législatives.

Je suis prêt à entendre les interventions s'il y en a. M. le ministre des Finances me souligne que oui. Alors, à vous la parole, M. le ministre des Finances.

M. Carlos J Leitão

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, je soumets à cette Assemblée, en vue de sa prise en considération, le rapport de la Commission des finances publiques concernant le projet de loi n° 39, intitulé Loi donnant suite à la mise à jour sur la situation économique et financière du Québec présentée le 2 décembre 2014 et modifiant diverses dispositions législatives.

Le projet de loi n° 39 a été présenté le 14 mai 2015 et le principe en a été adopté le 7 octobre 2015. La Commission des finances publiques en a fait l'étude détaillée le 8 octobre 2015 et en a adopté les 195 articles ainsi que quelques amendements. Le rapport de la commission a été déposé le 20 octobre 2015.

M. le Président, ce projet de loi modifie sept lois, dont la Loi sur les impôts, la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec et la Loi sur la taxe de vente, afin de donner suite principalement à des mesures fiscales qui ont été annoncées à l'occasion de la mise à jour de la situation économique et financière du Québec le 2 décembre 2014 et dans les bulletins d'information publiés en 2014.

Ce projet de loi contient plusieurs mesures. Dans ce contexte, M. le Président, et par souci de concision, je ne traiterai ici que de quelques mesures principales :

1° la bonification de la déduction additionnelle pour les frais de transport des petites et moyennes entreprises manufacturières;

2° bonification de 800 000 $ à 1 million de dollars de l'exonération cumulative des gains en capital sur les biens agricoles et de pêche;

3° l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable temporaire à l'égard des intérêts payables dans le cadre d'un financement obtenu en vertu de la Formule prêteur-vendeur de La Financière agricole du Québec;

4° la bonification temporaire du crédit d'impôt pour la production cinématographique ou télévisuelle québécoise.

De plus, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin notamment de réduire le taux de cotisation au Fonds des services de santé pour les petites et moyennes entreprises des secteurs primaire et manufacturier; deuxièmement, de réduire temporairement la cotisation au Fonds des services de santé des petites et moyennes entreprises pour les emplois à plein temps créés dans le secteur des sciences naturelles et appliquées.

Finalement, le projet de loi modifie aussi la Loi sur l'administration fiscale, la Loi sur les impôts et la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu et à la Loi sur la taxe d'accise par des projets de loi fédéraux sanctionnés en 2013 et en 2014.

Donc, en conclusion, M. le Président, j'invite les membres de cette Assemblée à adopter le rapport de la Commission des finances publiques sur l'étude détaillée du projet de loi n° 39. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le ministre des Finances, de votre déclaration. Et on serait prêts à entendre n'importe quel autre... Le député de Rousseau arrive, porte-parole de l'opposition officielle en ces matières. Donc, je vais lui laisser la parole. Et, comme c'est le rapport, donc ça veut dire que ça a été abordé à plusieurs reprises, il va rapidement tomber dans le sujet. Alors, M. le député de Rousseau, à vous la parole pour les quelques minutes que je sais que vous allez prendre.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : M. le Président, ça va être très, très simple. Le projet de loi n° 39, dont on examine présentement le rapport... enfin, la prise en considération du rapport de la commission, c'est une loi qui donne suite à la mise à jour qui a été présentée par mon collègue le ministre des Finances en décembre 2014.

Écoutez, je vais vous faire ça simple. La mise à jour ne comportait pas que des choses ou que des mesures avec lesquelles on était en désaccord, mais je dirais que l'ensemble de l'oeuvre nous déplaisait, ce qui fait que nous étions, à l'époque, opposés aux principes sous-jacents à cette mise à jour et puis aux mesures en général qui étaient introduites. Il faut voir qu'en particulier il y avait des mesures qui augmentaient le fardeau fiscal des Québécois. À ce jour, on sait que les Québécois ont vu leur fardeau fiscal augmenter de 1 500 $, là, dans la classe moyenne.

Alors, M. le Président, nous étions en désaccord à l'époque, vous ne serez pas surpris de m'entendre dire que nous sommes en désaccord, évidemment, avec le rapport de la commission puis en désaccord avec l'adoption. Alors, pour l'instant, simplement vous dire que nous allons voter contre cette prise en considération. Merci.

• (11 h 10) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Rousseau, de cette longue intervention. Et nous allons procéder au prochain intervenant, s'il y en a. Alors, je ne vois pas de demandeur de parole. Non? Ça va.

Mise aux voix du rapport

Alors, est-ce à dire que le rapport de la Commission des finances publiques portant sur le projet de loi n° 39, Loi donnant suite à la mise à jour sur la situation économique et financière du Québec présentée le 2 décembre 2014 et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté sur division. Alors, M. le leader adjoint, pour la poursuite de nos travaux.

M. Sklavounos : L'article 13, s'il vous plaît, M. le Président.

Projet de loi n° 55

Adoption

Le Vice-Président (M. Gendron) : À l'article 13 du feuilleton de ce jour, c'est M. le ministre délégué aux Mines qui propose l'adoption du projet de loi n° 55 — c'est-à-dire la dernière étape — Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière.

Je suis prêt à entendre des interventions, s'il y en a. Je vois M. le ministre délégué. À vous la parole, M. le ministre.

M. Luc Blanchette

M. Blanchette : Merci, M. le Président. Je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui pour cette étape menant à l'adoption du projet de loi n° 55, la Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière. Nous avons franchi toutes les étapes nécessaires en vue de l'adoption de ce projet, et je dois avouer que je suis fier de constater l'efficacité avec laquelle l'ensemble de ces travaux se sont déroulés.

Le projet de loi n° 55 vise à accroître la transparence des paiements des sociétés minières, pétrolières et gazières aux différents ordres de gouvernement et aux communautés autochtones à moyen terme, après la période transitoire, bien sûr. Les dispositions de ce projet de loi reflètent la volonté des Québécois et des Québécoises de bénéficier d'une meilleure transparence des activités minières sur le territoire. Elles s'inscrivent aussi dans un courant mondial, dans une volonté globale de contrer la corruption associée aux activités d'extraction des ressources naturelles.

En effet, les États-Unis et l'Union européenne ont adopté, à la suite de la crise financière de 2008, des mesures permettant de favoriser la transparence et de lutter contre la corruption dans ces secteurs d'activité. En 2010, les États-Unis ont adopté la loi Dodd-Frank, qui contient une disposition obligeant les sociétés extractives à divulguer les paiements en nature ou en espèces qu'elles versent au gouvernement fédéral américain ou à un gouvernement étranger. La commission américaine des valeurs mobilières a récemment annoncé qu'une réglementation relative à l'obligation de divulguer les paiements faits par les entreprises minières, pétrolières et gazières inscrites en bourse serait imposée... c'est-à-dire, elle serait proposée au printemps 2016.

De son côté, l'Union européenne a adopté une directive sur l'harmonisation des obligations de transparence, qui est entrée en vigueur en décembre 2013. La directive s'applique aux entreprises minières, pétrolières, gazières et forestières, dans leur cas inscrites en bourse, et aux entreprises privées de grande taille oeuvrant dans ces secteurs d'activité. Les pays de l'Union européenne... les pays de l'Union européenne, oui, ont jusqu'à décembre 2015 pour s'y conformer. Déjà, la France et la Grande-Bretagne ont adopté des lois conformes à la directive.

Lors de la rencontre du G8 qui s'est tenue en juin 2013, le premier ministre du Canada s'était engagé à établir au plus tard en juin 2015 des normes de déclaration obligatoire pour les sociétés minières, gazières et pétrolières, et ce, dans le but d'accroître la reddition de comptes de ces sociétés en ce qui a trait aux paiements qu'elles font aux différents ordres de gouvernement au Canada et à l'étranger. Le gouvernement du Canada a donné suite à son engagement en juin 2015 avec l'entrée en vigueur de la Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif. Ce nouveau régime fédéral a été établi au Canada dans le but de renforcer l'intégrité des entreprises extractives canadiennes et de s'assurer que les citoyens et citoyennes des pays dotés de ressources naturelles soient mieux informés et profitent des retombées de ces projets dans leurs pays. Le nouveau régime fédéral vise en outre à ce que les règles soient équitables pour les sociétés minières, pétrolières et gazières qui exercent des activités au Canada et à l'étranger et que les investissements de ces sociétés puissent avoir lieu dans un climat de stabilité et de certitude. Comme le développement des ressources naturelles est une compétence exclusive des provinces, le gouvernement fédéral a indiqué qu'il était ouvert à ce que les provinces adoptent des normes équivalentes.

Lors de la Conférence des ministres de l'Énergie et des Mines qui s'est tenue à Sudbury en août 2014, le ministre québécois de l'Énergie et des Ressources naturelles, mon collègue, a déclaré que le gouvernement du Québec adopterait son propre projet de loi sur la transparence. Des dispositions portant sur la transparence avaient d'ailleurs été adoptées en décembre 2013 dans la Loi modifiant la Loi sur les mines. En déposant son propre projet de loi cette année, le Québec a choisi d'affirmer et d'exercer pleinement ses compétences en matière de ressources naturelles. Par cette initiative, le Québec deviendra ainsi la seule province canadienne à exiger de telles mesures de transparence aux entreprises oeuvrant dans ces secteurs.

Le projet de loi que nous avons déposé oblige les entreprises minières, pétrolières et gazières à déclarer les paiements en espèces ou en nature qu'elles font aux différents ordres de gouvernement, aux organismes gouvernementaux, à leurs mandataires, à une municipalité ou à une communauté autochtone, et ce, pour chacun des projets et des pays dans lesquels elles ont des activités. En vertu de ce projet de loi, les entreprises devront ainsi déclarer les paiements de 100 000 $ et plus par catégorie de paiement qu'elles font aux différents ordres de gouvernement. Et ces catégories de paiement sont les suivantes : les taxes et impôts sur les revenus, les redevances, les frais de nature réglementaire, les paiements pour la construction et l'amélioration des infrastructures, les droits associés à la production tels que les droits fixés en pourcentage de la production, les primes telles que les primes de signature ou les primes associées à la découverte d'un gisement ou à la production et enfin les dividendes versés en lieu et place des droits de production ou des redevances. Cette déclaration devra être publique pendant une période de cinq ans suivant sa production par les entreprises visées.

Les exigences de ce projet de loi s'appliqueront aux entreprises d'exploration et d'exploitation minière, pétrolière et gazière qui sont inscrites à la cote d'une bourse de valeurs canadiennes et dont le siège social est au Québec, ou encore qui possèdent un établissement au Québec, qui y exercent des activités, ou qui y possèdent des actifs et qui répondent à deux des trois critères suivants, soit posséder des actifs de 20 millions, générer des revenus de 40 millions ou encore employer en moyenne 250 personnes ou plus.

Quelques mots sur la mise en oeuvre du projet de loi. La responsabilité de ce projet de loi sera confiée au ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles alors que son administration reviendra à l'Autorité des marchés financiers. Le projet de loi prévoit également les pouvoirs d'enquête dont dispose l'autorité afin de réaliser ce mandat ainsi que les sanctions administratives et pécuniaires et les dispositions pénales.

De plus, le projet de loi permettra au ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles de conclure une entente avec un autre État ou avec l'un de ses organismes chargés de la mise en oeuvre d'exigences similaires. En vertu d'une telle entente, il sera possible d'échanger des renseignements jugés utiles. Chaque année, l'Autorité des marchés financiers aura à produire et à transmettre au ministre un rapport de ses activités relatives à l'administration de la loi, après quoi le ministre déposera ce rapport à l'Assemblée nationale.

En outre, le projet de loi prévoit des dispositions transitoires quant à l'application de la loi pour les paiements en espèces ou en nature à des communautés autochtones. Ainsi, la loi s'appliquerait à ces communautés à compter du 1er juin 2017, soit la même échéance que celle fixée par la loi fédérale. Afin que les mesures de cette loi québécoise se synchronisent avec celles de la loi fédérale, qui sont entrées en vigueur le 1er juin dernier, nous espérons adopter le projet de loi dans les heures qui viennent.

Il est important de souligner que les dispositions de la Loi sur les mines concernant la divulgation publique de la quantité et de la valeur du minerai extrait et de l'impôt minier demeurent inchangées, restent dans la Loi sur les mines sous la responsabilité du ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles. Il faut savoir que la loi québécoise sera harmonisée avec celles des pays du G8 et évidemment avec celle du gouvernement fédéral afin d'éviter toute forme de duplication.

Le projet de loi prévoit également que les exigences d'un autre gouvernement pourront être reconnues comme un substitut acceptable aux exigences prévues par la loi québécoise, et ce, lorsqu'elles permettent d'atteindre les mêmes objectifs. Ainsi, les entreprises n'auront à faire qu'une seule déclaration lorsque ces lois seront déclarées équivalentes. Plusieurs États disposent en effet de lois semblables à celle que nous avons déposée au Québec en matière de transparence, pensons à la Grande-Bretagne, à la France ou encore à la Norvège.

• (11 h 20) •

Lorsque la loi québécoise sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière entrera en vigueur, certaines entreprises qui sont déjà assujetties aux lois européennes n'auront donc pas à produire d'autre déclaration, ou deux déclarations si vous préférez. Par exemple, il suffit de penser à Glencore ou à Rio Tinto, toutes deux des entreprises multinationales qui possèdent des installations au Québec et qui sont en même temps cotées dans une bourse européenne.

Tout au long du processus de consultation, nous avons réalisé une importante somme de travail. La consultation particulière qui a été menée nous a permis de recueillir et d'analyser les commentaires. Grâce à la contribution des groupes qui nous ont fait part de leurs préoccupations, de leur appui, le projet de loi n° 55 a été amélioré. Je vous informe, M. le Président, qu'on a adopté une quinzaine d'amendements à ce projet de loi.

Au terme des travaux de consultations particulières qui se sont déroulées les 18 et 19 août dernier, des modifications ont été apportées au projet de loi. Permettez-moi, M. le Président, de vous résumer la liste des principales améliorations que nous avons apportées à la version préliminaire : l'ajout des fiducies à la liste des entités assujetties aux obligations prévues par le projet de loi, la présomption que les paiements faits à des organismes sont faits au gouvernement pour lequel cet organisme exerce des attributions, la présomption que le paiement fait par tout intermédiaire pour le compte d'un assujetti est fait par celui-ci, le pouvoir octroyé à l'Autorité des marchés financiers d'exiger une vérification par un auditeur indépendant en l'absence de déclaration, l'obligation pour le ministre responsable de déposer à l'Assemblée nationale un rapport quinquennal sur l'application de la loi. D'autres amendements mineurs ont aussi été apportés au projet de loi de façon à en préciser certains points.

Grâce à toutes les modalités prévues à ce projet de loi, les informations liées aux paiements effectués aux organismes publics par les entreprises du Québec seront désormais rendues publiques. C'est là que le mot «transparence» prend tout son sens. Grâce à l'ensemble de ces mesures législatives, les citoyens et les citoyennes du Québec seront dorénavant mieux informés sur les contributions versées par les sociétés minières, pétrolières et gazières à l'ensemble des ministères et organismes publics qui oeuvrent sur le territoire québécois.

Le Québec a déjà une réputation enviable dans le monde en matière de mise en valeur des ressources naturelles. Dois-je vous rappeler, M. le Président, que le Québec occupe le sixième rang sur les 122 juridictions minières en matière d'attractivité des investissements? Avec ce projet de loi, nous affirmons encore une fois notre compétence et nous confirmons notre statut de leader du développement responsable de nos ressources naturelles. Avec ce projet de loi, nous posons également un autre jalon qui mènera à une meilleure acceptabilité sociale des projets de mise en valeur des ressources naturelles. En effet, ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de la Loi sur les mines et en droite ligne avec le chantier sur l'acceptabilité sociale, des projets que mène présentement mon collègue le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

La transparence est un élément essentiel de l'acceptabilité sociale; c'est pourquoi, avec ce projet de loi, nous donnons aux citoyens et citoyennes et aux sociétés minières, pétrolières et gazières un nouvel outil pour établir et maintenir des relations ouvertes et harmonieuses en vue du développement des ressources naturelles profitable pour tous. De façon générale, ces industries trouveront également leur compte, puisque leur apport à l'économie québécoise sera clairement établi. Il y aura un cadre législatif plus stable, plus clair et surtout une meilleure prévisibilité.

Je ne doute pas un instant que cet exercice sera constructif. En bout de ligne, ce sera notamment l'industrie minière québécoise, les communautés locales ainsi que l'ensemble des Québécois et Québécoises qui en tireront les bénéfices. Je suis personnellement très fier de ce projet de loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière. Je suis profondément convaincu que les dispositions qu'il prévoit s'avéreront des outils pour l'ensemble des Québécois et Québécoises, y compris pour les entreprises visées par ce projet. D'un côté, la population sera mieux en mesure d'évaluer et de comprendre l'importance de l'apport économique et social des industries minière, pétrolière et gazière. Ces industries sont encore méconnues dans la plupart des régions du Québec, et il y a encore beaucoup de préjugés à leur endroit. Le fait d'avoir accès à de l'information factuelle sur leur contribution aux divers gouvernements devrait permettre aux citoyens et citoyennes de se faire une idée plus juste de ce secteur économique. De leur côté, les entreprises visées par le projet de loi, en faisant preuve de plus de transparence, y gagneront en acceptabilité sociale. En se basant sur les faits, il est plus facile d'établir un lien de confiance avec la population. En bout de ligne, je le dis et je le répète, ce seront l'industrie minière québécoise, les communautés locales et l'ensemble des Québécois et Québécoises qui en profiteront.

En conclusion — c'est souvent la partie préférée de tout le monde — pour conclure, M. le Président, j'aimerais prendre le temps de remercier encore une fois les fonctionnaires, professionnels et légistes du ministère ainsi que ceux de l'Autorité des marchés financiers, qui ont fait un travail exceptionnel. Les travaux de l'Assemblée sont une étape importante dans la vie d'un projet de loi, mais il ne faut pas oublier tout le travail qui doit être fait par notre fonction publique avant le dépôt d'un projet de loi en cette Chambre.

Je remercie également les collègues de l'opposition pour leur collaboration lors des travaux de la commission. Nous ne sommes pas toujours d'accord, mais les échanges ont toujours été très courtois tout au long des étapes de ce projet de loi, et je les en remercie, le député de Matane-Matapédia, de Groulx et de Mirabel, qui ont suivi nos dossiers.

Enfin, merci spécial à mes collègues députés ministériels, le député de Dubuc, d'Abitibi-Est, Ungava, Mégantic, Îles-de-la-Madeleine, j'espère que je n'en oublie pas, oui, le député de Saint-Maurice également. Puis un merci spécial parce que piloter un projet de loi était une première expérience pour moi, et je veux les en remercier de leur appui.

M. le Président, nous sommes maintenant prêts à passer à l'adoption du projet de loi n° 55. Cette étape est cruciale si nous souhaitons que la population du Québec profite rapidement des bénéfices de cette nouvelle loi. Je sollicite maintenant la collaboration de mes collègues en cette Assemblée pour adopter le projet de loi n° 55. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, M. le ministre délégué aux Mines, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat, je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en ces matières, M. le député de Matane-Matapédia. À vous, M. le député.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Avant l'adoption du projet de loi, quelques mots — je sais que ce projet de loi vous intéresse, vous êtes un député de l'Abitibi, ça intéresse l'ensemble de l'industrie minière — je veux rappeler un certain nombre d'éléments. D'abord, ce projet de loi, c'est la suite du projet de loi sur les mines d'un gouvernement du Parti québécois et ce projet de loi a été adopté avec le Parti libéral du Québec et la Coalition avenir Québec. Ça, je veux le dire pour les gens qui s'imaginent que le Parti québécois ne s'intéresse pas à l'industrie minière. Alors, ce projet de loi, il a été adopté à la quasi-unanimité par l'Assemblée nationale, c'est bon de le rappeler. C'est une des suites, et l'objectif, c'était l'harmonisation avec notamment la législation canadienne.

Là, on s'est mis au travail, on a proposé des amendements, notamment en fonction de ce que la Vérificatrice générale nous a dit, ça n'a pas été accepté. Le ministre dit : Il y a des amendements qui ont été faits. Oui, les siens, avec la majorité gouvernementale, je veux le rappeler. Alors, je veux bien croire qu'il y a eu des amendements, mais c'est lui qui en a été l'initiateur, il a la majorité. Puis ça va être de même pendant tout le mandat, ils ont la majorité. Alors, on peut dire ce qu'on veut, on peut aller en commission parlementaire, on peut parler ici, mais ils ont la majorité, je veux que les gens comprennent ça, mais on se lève pour dire ce qu'on en pense.

On pense que le projet de loi était perfectible, qu'on aurait pu être à l'avant-garde, qu'on aurait pu être bien meilleurs que ça. On ne le sera pas. Donc, c'est une déception, c'est une occasion manquée. Mais, en même temps, cette pièce législative, elle est attendue, le ministre l'a indiqué, puis on est responsables, puis on n'est pas idéologiques là-dessus, on est pragmatiques. En tout cas, moi, les ressources naturelles, M. le Président, puis je sais que vous êtes sensible à ça, j'ai une approche pragmatique, pas idéologique. Alors, on aurait pu faire mieux, je l'ai proposé au ministre, ça ne s'est pas fait, c'est malheureux, je leur ai dit ici, ça avait été écrit à quelque part. Puis, quand les gens se pencheront sur les résultats, dans cinq ans, du projet de loi n° 55, bien, peut-être qu'ils se souviendront que le député de Matane-Matapédia a dit un certain nombre d'éléments qui se sont peut-être réalisés, puis, si ce n'est pas le cas, tant mieux si ça fonctionne bien, on ne veut pas la politique du pire.

Je veux rappeler également que notre formation politique s'intéresse grandement à notre potentiel énergétique. On a parlé beaucoup des mines, il y a le pétrolier puis il y a le gazier aussi. L'objectif, c'est de s'enrichir, mais pas à l'encontre de l'environnement, pas à l'encontre des populations, pas à l'encontre de l'emploi, pas à l'encontre de nos valeurs les plus profondes. J'ai entendu également hier la porte-parole de Québec solidaire indiquer un certain nombre de ses appréhensions puis indiquer la participation de QS au débat. À moins d'avis contraire, moi, je ne me souviens pas qu'il y ait eu une participation pour le projet de loi n° 55 d'un ou d'une représentante de Québec solidaire. J'ai entendu ça, peut-être que la porte-parole pourra corriger, moi, je n'ai pas souvenir de ça. Si c'est le cas, je retire mes propos, mais je n'ai pas souvenir de ça.

Alors, notre position, elle est claire. J'ai assuré le ministre de notre pleine participation au débat, ça s'est bien déroulé avec l'ensemble des collègues, je veux les saluer, les collègues qui ont participé au débat, du gouvernement, de la deuxième opposition. Je veux saluer le président de la commission. Le député de Côte-du-Sud, là, qui est un sympathique personnage, il fait bien ça, et je veux le saluer, parce que c'est fluide, hein, ce n'est pas trop sévère, il favorise les échanges, je veux lui rendre hommage. Député qui a aussi un pied dans le Bas-Saint-Laurent avec le Kamouraska, je le salue, et il connaît mon amitié pour lui.

• (11 h 30) •

Je veux saluer également le personnel de la commission parce que, si on est capables de faire les travaux, c'est qu'il y a des gens qui préparent ça d'avance. Le personnel de la commission et des commissions, c'est un personnel fantastique qui ont des connaissances, qui connaissent la jurisprudence, qui sont là pour nous assister. C'est des gens extrêmement précieux dans notre fonctionnement à l'Assemblée nationale du Québec.

Pour la suite des travaux, pour ce qui est des ressources naturelles — ça s'adresse à la fois au ministre délégué aux Mines puis ça s'adresse au ministre des Ressources naturelles — j'espère qu'on va consulter beaucoup, qu'on va tenir compte des avis divergents, qu'on va avoir les meilleures pièces législatives possible. C'est extrêmement important. Puis, quand je parle de consulter les gens, moi aussi, je trouve que les communautés autochtones n'ont pas été suffisamment consultées. J'espère que ça sera corrigé. Ils ne sont pas de bonne humeur, puis avec raison. On a reçu des avis, on a reçu des lettres qui s'adressaient au ministre. Pas sûr que le ministre des Affaires autochtones n'est pas sensible à ça, qu'il n'a pas envoyé des avis au ministre délégué aux Mines. C'est important.

Ce territoire-là, on l'a en partage, en partage avec les nations autochtones, qui ont été reconnues, d'ailleurs. M. le Président, vous étiez là en 1985, les 11 nations autochtones, les peuples autochtones ont été reconnus par un gouvernement du Parti québécois, puis vous étiez déjà à l'époque un ministre dans le gouvernement de M. Lévesque et le gouvernement de M. Johnson. Et, depuis ce temps-là, bien, il me semble qu'on a une meilleure relation avec les autochtones, mais cette meilleure relation là, elle doit apparaître quand ça compte. Puis là, sur le projet de loi n° 55, ça compte beaucoup pour eux parce qu'ils ont des craintes : notamment, que le gouvernement fédéral quel qu'il soit, y compris le nouveau gouvernement libéral à Ottawa, puisse les pénaliser si on rend publiques un certain nombre d'ententes qui ont été convenues avec les entreprises, qu'il retire des montants équivalents, ils ont peur de ça. Ils ont peur également que ça crée une confusion dans leurs communautés. C'est très légitime.

Ultimement, nous, on pense que toutes les entreprises qui font de l'exploration puis de l'exploitation sur le territoire du Québec auraient été assujetties. Là, je veux que les gens qui nous écoutent comprennent qu'il y a des entreprises qui vont s'en tirer à bon compte. Eux autres, là, ils ne seront pas analysés puis ils vont pouvoir faire pas mal ce qu'ils veulent; le projet de loi ne les vise pas. Puis on a parlé des seuils également à partir desquels on allait commencer à regarder l'action des entreprises : là, il y a de la fragmentation des contrats puis des seuils. Autrement dit, là, tant que tu n'atteins pas 100 000 $, là, tu passes en dessous du radar.

Moi, j'ai eu cette expérience-là comme parlementaire à la Commission de l'administration publique où on réalisait souvent que les contrats, ça ne donnait pas 100 000 $, ça donnait pas loin de 100 000 $, alors on peut les fragmenter puis en donner plusieurs. Moi, j'ai vu ça en Gaspésie, avec un ancien ministre libéral, là, qui avait eu un contrat en bas de 100 000 $, ça fait que ça avait passé en dessous du radar. Ça, ce n'était pas souhaitable, puis je ne sais pas ça bénéficie à qui puis qui va se réjouir de ça. Je peux vous dire que les gens qui vont se réjouir des failles du projet de loi, ils ne vont pas émettre de communiqué, eux autres, suite à l'adoption. Ils vont se parler entre eux autres, ils vont dire : Bonne affaire pour nous autres, bonne affaire pour nos actionnaires. Nous, le Parti québécois, on ne fonctionne pas selon les actionnaires. Les actionnaires du Québec, c'est l'ensemble des citoyens québécois qui détiennent ce territoire, qui en sont les fiduciaires, qui devraient en être les partenaires et les premiers bénéficiaires. C'est comme ça qu'on voit ça.

Des fois, je dis au gouvernement : Si vous n'écoutez pas l'opposition, écoutez les gens qu'on représente, qui ne peuvent pas être dans cette Chambre. Puis, dans le cas présent du projet de loi n° 55, fait peut-être inusité pour plusieurs, l'Association minière du Québec, une association qui représente plusieurs entreprises, promoteurs, nous a demandé de resserrer la loi. C'est rare que tu voies ça. Puis ça n'a pas été fait. Alors, pourquoi? Je n'ai pas obtenu toutes les explications qui étaient nécessaires.

Je conclus en disant au ministre que je suis heureux qu'on complète notre législation en matière de ressources naturelles. Je suis heureux qu'il fasse du projet de loi sur les mines également une assise solide pour la poursuite de son mandat. Je veux le répéter parce que... Puis je veux rendre hommage à ma collègue la députée de Vachon qui, souvent, a été critiquée, été critiquée parce qu'elle voulait faire respecter essentiellement ce que je viens de dire, le bien commun. Et, ultimement, son projet de loi, dans un gouvernement minoritaire — il faut le rappeler, j'en étais membre — bien, le Parti libéral s'est rallié malgré toutes ses critiques — puis je ne fais pas de politique avec ça, je l'en remercie, c'était la chose à faire, et la Coalition avenir Québec aussi. Alors, c'était un projet de loi qui a été adopté et on en a fait une meilleure pièce législative parce qu'on a été capables de prendre les bonnes idées de tout le monde puis trouver une voie de passage. Ça fait des bonnes législations, les gouvernements minoritaires, souvent.

Là, notre gouvernement majoritaire, le problème qu'on a, c'est que... Puis c'est un problème, moi, que j'ai vécu. Depuis 2007, je suis à l'Assemblée nationale. À partir du moment où le gouvernement a une majorité, il est extrêmement rare qu'il recule. Ça s'applique au gouvernement québécois actuel, ça s'applique à ce qu'on propose en Chambre, ça s'applique également à ce que les groupes proposent. Souvent, il y a de l'idéologie derrière ça ou la volonté de dire : On a foncé, on n'a pas reculé. Puis ça va être comme ça aussi à Ottawa, M. le Président.

Alors, moi, je souhaite que ce nouveau ton que le premier ministre a annoncé lors de son assermentation, en 2014 puisse vouloir dire parfois que, même dans un gouvernement majoritaire, on puisse écouter l'opposition, on puisse dire : Vous n'avez pas tout le temps tort, vous avez de bonnes idées, puis on va travailler ensemble. Puis, vous savez, comme parlementaires, on est tellement heureux quand on arrive à saluer nos collègues puis dire : On a adopté des projets de loi ensemble, à l'unanimité ou à la majorité, puis on a bien travaillé ensemble, puis ça crée tellement un esprit de corps intéressant à l'Assemblée nationale. Les gens qui nous écoutent ont parfois l'impression qu'on est totalement dans des antagonismes. La période de questions contribue un peu à ça, mais, pour le reste, on a une sincère affection pour l'ensemble des collègues qui sont ici pour respecter leur population, qui sont ici pour contribuer, pour contribuer à la chose publique.

Ce qui nous manque, c'est un gouvernement, des fois, qui peut dire qu'il est dans l'erreur. Puis il n'y a pas... Ce n'est pas une grande faiblesse d'avouer qu'on peut faire les choses différemment. Puis, dans le projet de loi n° 55, il ne manquait pas grand-chose pour qu'on soit pleinement enthousiastes.

Ceci étant dit, on est des gens responsables, on est des gens pragmatiques. J'offre au gouvernement notre appui pour ce projet de loi. On va voter en faveur, mais il sait et vous savez maintenant qu'on aurait pu faire mieux et qu'on est déçus. Mais, bon, on va aller de l'avant puis on va être vigilants pour les prochaines pièces législatives, puis on va collaborer pour avoir des bonnes pièces législatives puis pour le bénéfice non pas des actionnaires des entreprises, mais pour l'ensemble des Québécois, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le député de Matane-Matapédia. Et, pour la poursuite du débat, je cède la parole à M. le député de Groulx toujours sur l'étape finale de ce projet de loi. M. le député de Groulx, à vous la parole.

M. Claude Surprenant

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, c'est avec un grand plaisir que je participe aujourd'hui au salon bleu à l'adoption finale du projet de loi n° 55 intitulé Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière.

Avant toute chose, je tiens à vous saluer, M. le Président, remercier le ministre délégué aux Mines ainsi que toute son équipe. On ne le souligne pas assez, mais les ministres sont souvent entourés de plusieurs experts lors des commissions parlementaires, et ce fut notamment le cas lors de l'étude détaillée de ce projet de loi. Tous ont su répondre à nos questions pointues, et merci à eux. Je salue également le député de Matane-Matapédia, qui a proposé des amendements intéressants, même si nous ne les avons pas toujours appuyés, car, oui, en tant que porte-parole du secteur minier pour la Coalition avenir Québec, j'ai suivi avec grand intérêt les discussions et j'ai proposé de nombreux amendements dans le but d'assurer le plein essor de nos ressources naturelles.

Vous savez, la coalition a été fondée avec comme mission de relancer notre économie. Le Québec doit relever de grands défis économiques, et le secteur minier est appelé à contribuer à la relance tant souhaitée de notre économie. Mais tous les Québécois doivent pouvoir tirer profit de cette relance. C'est ainsi que nous appuyons les principes de transparence mis de l'avant pour le gouvernement.

Je tiens à rappeler les grandes lignes du projet de loi n° 55 — donc, je le répète — Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière. Ce projet de loi vise les entreprises des secteurs minier, gazier, pétrolier, à l'exception des entreprises du secteur des pipelines. Les entreprises concernées font l'objet de titres inscrits à la cote d'une bourse canadienne, ont leur siège social au Québec et, selon leurs états financiers consolidés, remplissent au moins deux des conditions suivantes : posséder des actifs d'une valeur d'au moins 20 millions de dollars; générer des revenus d'au moins 40 millions de dollars; et employer en moyenne au moins 250 personnes.

La loi qu'on s'apprête à adopter forcera les compagnies minières, pétrolières et gazières de rendre publiques, à compter du 1er juin 2017, les quantités de minerai extraites. Ces demandes sont majeures. Elles assureront la déclaration publique de tout paiement en espèces ou en nature des entreprises du secteur minier, comme les taxes et les impôts, les frais comme ceux de location et de droit d'accès, les droits découlant de la production, les dividendes, les primes et les sommes versées pour la construction ou l'amélioration d'infrastructures. Mais surtout les entreprises minières seront forcées de faire connaître toutes les redevances qu'elles versent au gouvernement, à un organisme établi par au moins deux gouvernements, à une municipalité ou l'Administration régionale Kativik et à une nation autochtone. Il s'agit d'une grande avancée puisque les communautés autochtones ont toujours préféré garder leurs ententes confidentielles.

• (11 h 40) •

Il faut dire que ces mesures s'inscrivent dans un contexte mondial. En effet, Québec souhaite emboîter le pas aux États membres du G7 qui ont exigé de nouveaux standards de transparence en 2008 dans le but de décourager et de détecter la corruption ainsi qu'à favoriser l'acceptabilité sociale des projets. M. le Président, nous ne pouvons qu'appuyer le ministre dans ses intentions. Cette transparence n'est pas simplement souhaitable, elle est essentielle.

De nombreux groupes et associations oeuvrant dans le secteur minier nous ont partagé des statistiques plutôt inquiétantes, comme le fait que, pour l'instant, sur les 25 mines en activité au Québec, seulement trois avaient accepté de divulguer les accords. On voit bien qu'il y avait lieu d'agir. Au nom de ma formation politique, je me suis battu pour que tous les accords et ententes soient dorénavant publics. Alors, on avance, le projet de loi resserre les choses, mais on pourra avancer encore plus ultérieurement.

Or, à l'heure actuelle, il existe des ententes secrètes en vertu desquelles des entreprises d'exploration ou d'exploitation des ressources naturelles versent à des municipalités, à des organismes publics ou encore à des communautés autochtones des contributions en argent comptant ou en nature. C'est inacceptable et plus pensable aujourd'hui, en 2015. Les Québécois sont en droit de savoir ce qui se passe sur leurs terres.

Les autochtones, particulièrement, ont toujours voulu conserver le secret au sujet des ententes avec les firmes minières. Il nous est, à l'heure actuelle, impossible de connaître l'ampleur des sommes qui leur sont versées pour compenser l'accès aux ressources dans leurs territoires. Heureusement, le p.l. n° 55 viendra changer cela, et j'en suis satisfait.

Alors, comme bon parlementaire, j'ai questionné et fait plusieurs propositions au ministre afin de bonifier le projet de loi. Certaines demandes ont été prises en considération; d'autres, non. Les réponses fournies par l'équipe ministérielle ont été sommes toutes acceptables.

Un autre point que nous avons débattu est le rôle qu'occupera l'Autorité des marchés financiers. L'AMF doit avoir une marge de manoeuvre et assurer le respect des exigences. En effet, le p.l. n° 55 attribue plus de pouvoir d'enquête à l'Autorité des marchés financiers, qui pourra exiger la communication de tout document ou renseignement jugé utile à l'application du projet de loi. L'AMF produira à son tour annuellement au ministre un rapport de ses activités relatives au projet de loi.

M. le Président, en ce qui concerne la CAQ, nous sommes en faveur des grandes lignes de ce projet de loi. Nous sommes satisfaits du travail effectué lors de cette étude détaillée et nous sommes satisfaits des mesures apportées par le gouvernement. Je tiens donc à informer le ministre délégué aux Mines de notre appui au projet de loi n° 55. Il s'agit pour le Québec de s'adapter aux nouvelles normes adoptées partout dans le monde. Il faut que toute l'industrie fasse preuve de transparence comme c'est d'ailleurs le cas ailleurs dans le monde. La Coalition avenir Québec a toujours souhaité plus de transparence et de garanties financières dans l'industrie minière. Rappelons-nous du travail mené en 2013 par ma formation politique pour l'adoption de la Loi sur les mines lorsque l'ancien gouvernement siégeait.

Alors, je vous remercie, M. le Président, et réitère l'appui de ma formation politique au projet de loi n° 55.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Groulx, de votre intervention. Et, pour la poursuite du débat sur ce projet de loi, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. À vous la parole, Mme la députée.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Au moment du dépôt de ce projet de loi, Québec solidaire avait accueilli positivement le principe qu'il contenait. Après tout, qui peut être contre une transparence accrue pour des entreprises privées et afin de lutter contre la corruption, à plus forte raison les compagnies pétrolières, gazières et minières? Le processus législatif qui nous amène aujourd'hui à voter sur ce projet de loi nous a permis d'en apprendre davantage sur les intentions du ministre délégué aux Mines mais surtout de comprendre les causes de l'apparente timidité de l'ensemble du gouvernement. Québec solidaire a donc appuyé le principe du projet de loi mais votera aujourd'hui contre son adoption, puisqu'il ne va nettement pas assez loin. Nous expliquerons plus loin pourquoi, mais prenons ici un pas de recul pour rappeler quelles sont les attentes de la population et des communautés face aux entreprises minières, pétrolières et gazières.

Au Québec comme partout dans le monde, qui est en train, d'ailleurs, de... qui joue sur le terrain de jeu des multinationales, la même attitude de ces secteurs industriels intimide les gouvernements, qui n'osent pas mettre fin aux privilèges qui sont les leurs, parce qu'il n'est pas exagéré ici de parler de privilèges, taillés sur mesure pour une industrie qui a le bras long. Comme nous l'apprenait d'ailleurs le chercheur Alain Deneault l'an dernier, et je le cite, «il y a à peu près 80 paradis fiscaux dans le monde, et chacun a sa vocation propre. [...]Le Canada a développé sa niche dans le domaine de l'énergie et des mines», notamment par «la mise en place de fiducies de revenus non imposables», selon une «logique proprement offshore».

Rappelons-le, les entreprises qui oeuvrent dans d'autres secteurs que celui de l'extraction de ressources naturelles non renouvelables n'ont pas droit à un traitement de faveur comparable. Les ressources naturelles, à plus forte raison les ressources naturelles non renouvelables, appartiennent au peuple québécois, on s'entend tous là-dessus ici. Les ressources naturelles, comptez sur moi, ne se sauveront pas d'elles-mêmes.

Lors des consultations et de l'étude détaillée, on a bien compris que le projet de loi n° 55 s'inscrit dans un courant mondial qui se veut une réaction normale aux abus des entreprises minières, pétrolières et gazières. Les abus sont devenus à ce point criants que les pays du G8 qui ont encore un certain rapport de force avec les entreprises minières, pétrolières et gazières en sont rendus à colmater les pires brèches. Nous n'en sommes évidemment pas là au Québec. On peut difficilement comparer l'attitude de ces entreprises quand elles oeuvrent ici, sur le territoire, avec les comportements ignobles qu'elles ont lorsqu'elles opèrent en Afrique du Sud... en Afrique ou en Amérique du Sud. Il n'est par contre pas exagéré de dire qu'elles agissent dans la même logique.

Nous pouvons voir leur vrai visage quand les projets miniers, gaziers et pétroliers sèment la controverse ou quand elles mènent à des prises de parole fortes. Parlez-en aux citoyens et citoyennes qui se battent contre les gaz de schiste, qui veulent protéger Anticosti au saccage, qui ne veulent pas voir la Gaspésie s'engager dans la production d'hydrocarbures : partout, les mêmes stratégies d'entreprises avec leur armée de firmes de communication, de lobbyistes et d'avocats. Au Québec, nous avons vu jusqu'où de telles entreprises sont prêtes à aller pour arriver à leur but. Les cas les plus récents sont bien connus, je parle de TransCanada et d'Enbridge. Ce monde ne veut rien savoir d'un gouvernement qui se tient debout. Ce que ces entreprises veulent, ce sont des gouvernements fantoches.

On pourrait penser que ce sont toutes d'immenses multinationales qui opèrent ainsi, M. le Président. Le cas de Restigouche, en Gaspésie, nous a bien démontré qu'il n'en est rien. La compagnie Gastem démontre que les attitudes antidémocratiques ne sont pas propres uniquement aux entreprises étrangères. Quand ça ne fait pas leur affaire, ils poursuivent les États, les municipalités. Pour ces compagnies, la démocratie est un sale problème et elles jouent du violon quand les gouvernements veulent leur poser des conditions. Ces compagnies doivent rendre des comptes, elles doivent respecter les processus d'évaluation environnementale. Évidemment, leurs armées de lobbyistes feront tout en leur pouvoir pour empêcher que les communautés aient voix au chapitre et pèsent dans les décisions. Et je suis fascinée de voir l'aveuglément de mes collègues, tous partis confondus, face à l'attitude de ces entreprises.

Est-ce que le projet de loi n° 55 est la réponse appropriée face aux agissements de ces lobbys? Québec solidaire considère que non. Les commentaires du ministre délégué aux Mines en commission parlementaire sont venus confirmer que le Parti libéral conserve son préjugé favorable face à des entreprises qui ont une lourde pente, M. le Président, à remonter face à leur crédibilité. Le Parlement du Canada a déjà adopté des mesures en ce sens, qui sont en application depuis juin dernier. Le projet de loi n° 55 s'inscrit dans cette initiative internationale pour freiner un tant soit peu les ardeurs des entreprises minières, pétrolières et gazières. Et je ne parle pas ici des gaz à effet de serre; ça serait tout un autre sujet. L'objectif du G8 atterrit donc à l'Assemblée nationale du Québec pour que nous adoptions une loi comparable à celles déjà adoptées ou sur le point d'être adoptées aux États-Unis, au Canada ou en Europe.

L'occasion aurait été belle pour que le Québec s'impose comme un modèle et exerce pleinement ses compétences en matière de ressources naturelles. C'est indignant de voir l'ensemble des fuites des capitaux alors qu'on est en train de déstructurer complètement notre filet de sécurité social. Le Québec a raté cette occasion, puisque le Parti libéral a insisté, pour qu'on se donne une loi équivalente — le Parti libéral et d'autres de nos collègues — à celle qui a été adoptée par d'autres juridictions. Quand on n'ose pas aller plus loin que ce qui se fait ailleurs, on nie la souveraineté du Québec sur ses ressources. Et j'en suis profondément désolée.

• (11 h 50) •

Le projet de loi n° 55 a été amélioré. Le ministre a lui-même présenté des amendements. Il a fait preuve d'une certaine ouverture sur les commentaires entendus lors des consultations, mais il demeure inflexible sur l'idée que son projet de loi doit être l'équivalent de ce qui se fait ailleurs. Depuis quand on se compare au moins?

L'étude détaillée a par contre entraîné un recul important. Mes collègues en ont parlé, la première version du projet de loi forçait les entreprises minières, pétrolières et gazières à produire une déclaration à l'Autorité des marchés financiers pour dévoiler les paiements qu'elles font aux pouvoirs publics. Le seuil était déjà assez élevé, de 100 000 $, peu importe le type de paiement. L'étude détaillée a malheureusement mené à un recul important en morcelant ce seuil. Il y aura désormais huit catégories, et moins d'entreprises seront soumises aux obligations de transparence. Vous savez, la position de Québec solidaire, puisqu'on parle ici de nos ressources naturelles, puisqu'on parle ici de notre portefeuille collectif, aurait été en faveur de la transparence pour l'ensemble des entreprises minières, gazières et pétrolières, bien sûr.

Nous ne passerons pas sous silence un autre enjeu que ce projet de loi... qu'il s'appliquera aux nations autochtones pour les forcer à rendre publiques leurs ententes. Il y a un grave problème. De nation à nation, on se parle avant d'établir des projets de loi. Alors, nous sommes déçus, ça ne s'est pas passé à l'avant. Le ministre me rassurait hier en me disant que les discussions ont lieu présentement, alors je vais prendre sa parole, mais vous comprendrez qu'un chat échaudé craint l'eau froide, et nous serons toujours du côté des Premières Nations en matière de souveraineté de ces peuples.

M. le Président, voici donc les raisons pour lesquelles Québec solidaire votera contre ce projet de loi. C'est un projet de loi sur la transparence qui vient légitimer l'opacité en permettant à trop d'entreprises de passer sous le radar. Face aux agissements des entreprises minières, pétrolières et gazières, il est vraiment temps de mettre fin à des privilèges hérités d'une autre époque. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, on vous remercie, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, de votre intervention. Et le ministre se lève, donc il veut solliciter son droit de réplique, ce qui est prévu au règlement. Alors, je vous cède la parole, M. le ministre délégué aux Mines, pour votre droit de réplique.

M. Luc Blanchette (réplique)

M. Blanchette : Merci, M. le Président. Quelques rappels importants. Je l'ai dit hier, mais je le redis aujourd'hui, les ressources naturelles appartiennent à tous les Québécois, toutes les Québécoises, c'est un principe reconnu. Rappeler mon mandat aussi, qui est, oui, de partir de nouvelles mines mais dans le respect de l'environnement et de l'acceptabilité sociale. Je tiens à le faire puisqu'on a soulevé un certain nombre d'inquiétudes à cet effet-là.

Concernant les communautés autochtones, je leur assure toute ma collaboration. Et, oui, il y aura des consultations, il y aura des visites, il y en a d'ailleurs une qui est prévue prochainement. Ce dossier-là n'est pas clos. On a une période transitoire qui prévoit jusqu'en juin 2017 un certain nombre d'échanges et de consultations.

Sur le 100 000 $, je tiens à revenir. Les catégories sont aussi importantes que tout simplement une accumulation, c'est-à-dire une sommation de toutes les façons de faire, mais ce n'est pas des chiffres avec lesquels on peut faire passer d'une catégorie à l'autre, ce n'est pas comme ça que ça se fait, c'est sur des taxes qui se rapportent donc, dans le fond, à une catégorie en particulier, les redevances qui forment une autre catégorie et les travaux de construction et d'amélioration, donc, en nature qui forment également d'autres catégories. Tout ça pour dire que les 100 000 $, ce n'est pas quelque chose qui va être nécessairement transférable d'une place à l'autre.

La raison principale, on l'a largement expliquée en commission parlementaire au moment de l'étude détaillée, c'est vraiment une question de lourdeur administrative. Qu'est-ce que ça donnerait d'aller consulter des entreprises qui donnent peu ou pas ou qui seraient en bas du seuil du 100 000 $? On a demandé à l'Association de l'exploration minière un 10 000 $. On dit que ce n'est pas nécessairement les entreprises qui donnent le plus grand nombre de redevances, c'est pour ça qu'on les a exclues. Le Parti québécois souhaitait qu'on aille jusqu'à 1 $ de redevances, ce qui serait, dans le fond, une tracasserie administrative puisqu'on ferait... on obligerait 250 entreprises à compléter ce type de formulaire pour très peu de résultats.

Les amendements qu'on a apportés, contrairement à ce que mon collègue de Matane-Matapédia disait, ne proviennent pas juste de la partie ministérielle, ils proviennent surtout et principalement des échanges qu'on a eus lors des consultations particulières avec les entreprises. C'est ce genre d'adaptation là qu'on a fait.

L'équivalence et la comparabilité, elle est importante puisque, si au Québec on reçoit des questionnaires à peu près similaires, ces questionnaires-là peuvent être comparés : C'est-u un 33 millions pour le Québec, et en Norvège, une entreprise norvégienne qui fait des opérations au Québec, il y aurait un 40, 60, un 80 millions? Il faut que les choses soient effectivement comparables.

Par ailleurs, une des recommandations de la Vérificatrice générale est à l'effet qu'on pourrait faire des améliorations au projet de loi, ce qu'on va faire aux cinq ans. Donc, il y aura des choses de perfectibles. Pour rassurer ma collègue de Sainte-Marie—Saint-Jacques, les autorités des marchés financiers auront un pouvoir d'enquête et pourront même enquêter des entreprises qui ont refusé... fait une déclaration, qu'ils pensaient qu'eux autres étaient exclus de ça. On pourrait faire enquête auprès d'un auditeur pour s'assurer que cette entreprise-là ne devienne pas une assujettie.

Dernière chose, et je termine avec ça, je complète ma réflexion là-dessus, écoutez, le secteur pétrolier, minier et gazier est essentiel, est important au Québec. On souhaite avoir un terreau fertile aux investissements. Quand on a pris pouvoir, le gouvernement libéral, on est passés de la 18e, qui était l'année 2013, en termes d'attraction des investissements, à la sixième position mondiale, sixième sur 122 juridictions minières.

Donc, ce n'est pas rien, mais c'est clair que tout ce qui concerne la lourdeur administrative, le respect de l'environnement, l'acceptabilité sociale fera partie de nos valeurs fondamentales. Et c'est la raison pour laquelle je suis assez fier de ce projet de loi là qui va accroître une transparence, parce que les gens, les Québécois, les Québécoises ont le droit de savoir quelles sont les redevances versées par nos gouvernements... pas par nos gouvernements, mais par nos entreprises. Je vous souhaite une bonne journée, M. le Président, et merci beaucoup.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, cette dernière intervention met fin aux débats de l'adoption finale du projet de loi n° 55. Est-ce que le projet de loi n° 55, Loi sur les mesures de transparence dans l'industrie minière, pétrolière et gazière, est adopté?

Des voix : Adopté.

Une voix : Sur division.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté sur division. M. le leader adjoint, pour la poursuite de nos travaux.

M. Sklavounos : Oui, merci, M. le Président. Je vous demanderais de suspendre jusqu'à 15 heures pour la tenue du débat inscrit par les députés de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Adopté. Alors, en conséquence, nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures cet après-midi. Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 11 h 57)

(Reprise à 15 h 4)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon après-midi à vous tous. Vous pouvez prendre place.

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande à la ministre de la Justice
d'ordonner une enquête indépendante sur l'échec du procès SharQc,
de témoigner ensuite en commission parlementaire et de déposer
un plan de correctifs à apporter au système judiciaire

Alors, nous en sommes aux affaires du jour, et, à l'article 36 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de Matane-Matapédia présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale déclare que l'arrêt récent des procédures judiciaires concernant cinq membres des Hell's Angels dans le cadre du procès SharQc est un fiasco qui mine la crédibilité de la formule des "mégaprocès", un outil important pour lutter contre le crime organisé;

«Qu'elle prenne acte du fait que le juge James L. Brunton a blâmé les procureurs du Directeur des poursuites criminelles et pénales dans sa décision;

«Qu'elle note également que les forces policières québécoises ont travaillé pendant des années pour accumuler une preuve suffisante permettant de porter des accusations graves contre ces individus fortement criminalisés et que l'État du Québec y a consacré des ressources financières importantes;

«Qu'elle constate que ce fiasco survient alors que le gouvernement libéral a décidé de couper 40 % des procureurs luttant contre le crime organisé et que le gouvernement libéral n'a pas tenu son engagement de réinvestir dans les ressources du Directeur des poursuites criminelles et pénales;

«Qu'elle souligne qu'il s'agit d'une situation grave, qu'une enquête interne du DPCP n'est pas suffisante pour rétablir la confiance de la population québécoise et qu'il est du devoir de la ministre de la Justice, ultime responsable de l'administration de la justice au Québec, d'ordonner une enquête indépendante;

«Enfin, qu'à la suite de cette enquête, l'Assemblée nationale exige de la ministre de la Justice qu'elle témoigne en commission parlementaire afin d'expliquer les raisons ayant conduit à l'échec du procès SharQc, et qu'à cette occasion, elle dépose un plan de correctifs à apporter au système judiciaire afin qu'une telle situation ne se reproduise plus.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur cette motion s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, environ 51 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, environ 30 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et environ 21 minutes sont allouées au deuxième groupe d'opposition, sept minutes sont allouées aux députés indépendants, sous réserve d'un maximum de deux minutes pour la députée d'Arthabaska. Et, dans ce cadre, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires, selon les proportions établies précédemment. Enfin, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Et, sans plus tarder, je cède la parole à l'auteur de cette motion, M. le député de Matane-Matapédia.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Les enjeux de sécurité publique et de justice sont des enjeux importants pour la population du Québec, importants dans une démocratie. Parce qu'il est question du mégaprocès SharQc, revenons à l'origine. L'idée de SharQc provient de l'opération Printemps 2001. À l'époque, de lourdes sentences avaient été imposées aux défunts Nomads, membres d'élite des Hell's Angels. En avril 2009, suite à l'opération SharQc, tous les Hell's Angels du Québec ont été mis en prison, sauf deux.

156 accusés. Huit ans après l'opération Printemps 2001 — c'est la plus grande rafle antimotards nord-américaine — se sont alors ouverts des mégaprocès visant à faire condamner ces 156 coaccusés. Certes, il y eut 104 plaidoyers de culpabilité sur 156 coaccusés et des peines allant parfois jusqu'à 25 ans. En effet, plusieurs experts affirment que la poursuite publique espérait que les accusés soient impressionnés par la preuve et plaident rapidement coupables, mais, visiblement, ce ne sont pas ces résultats dont on se rappellera. Ça ne s'est pas passé ainsi pour des dizaines d'autres coaccusés; s'il y eut 104 condamnations, cela n'excuse pas, de près ou de loin, l'échec de l'administration de la justice dans l'ensemble des mégaprocès.

En mai 2011, l'un de ces mégaprocès SharQc a avorté en Cour supérieure et a créé l'effet d'une bombe dans le système judiciaire. La raison principale : les avocats de la poursuite avaient mal évalué la capacité du système judiciaire de traiter des dossiers aussi lourds et complexes. Le juge de Cour supérieure James L. Brunton a indiqué, dans son jugement dévastateur, que «la poursuite ne disposait d'aucun plan réaliste quant à la manière de procéder pour ces accusations dans un délai raisonnable». Le juge avait écorché au passage le ministère de la Justice ainsi que le Directeur des poursuites criminelles et pénales, le DPCP. En 2014, la Cour suprême a confirmé l'arrêt des procédures avec les mêmes arguments. Résultat, 31 des 156 Hell's Angels coaccusés ont filé entre les mailles du filet.

Un autre incident : on a tous vu la libération de ces motards par la suite. Au cours des derniers mois, nous avons appris que plus d'une vingtaine de motards accusés dans l'opération SharQc, en 2009, ont plaidé à des accusations réduites de complot pour meurtre pour ensuite être libérés, des motards dangereux qui sont ressortis du système judiciaire, non pas parce que le système judiciaire les avait trouvés non coupables, mais parce que plusieurs juges ont conclu qu'une justice pleine et entière ne pouvait être garantie par les coaccusés.

Est-ce la fin de ce fiasco, on aurait pu l'espérer, et qu'une réflexion en profondeur soit faite? En 2015, le juge Brunton rend son jugement pour cinq autres coaccusés et met fin aux poursuites criminelles qui les visaient. Je souligne que les passages suivants, qu'ils sont ni plus ni moins que dévastateurs pour le ministère de la Justice et le DPCP : «La cour n'a aucune hésitation à conclure qu'elle est devant un grave abus de procédure. Cet abus va au-delà de la négligence ou même des actions vexatoires. Il constitue une attaque sur les principes fondamentaux d'équité que doit bénéficier toute poursuite criminelle. [...]préjudiciable à l'intégrité d'un système de justice.»

Visiblement, aucune leçon n'a été retenue depuis 2011. Le travail des policiers, qui ont, pour certains, risqué leur vie pour faire échec au crime organisé, a été purement et simplement réduit à néant.

• (15 h 10) •

Le procès de Gilles Vaillancourt, l'ex-maire de Laval, et de la trentaine de coaccusés pour gangstérisme va-t-il avoir le même destin? On peut commencer à le croire puisque, déjà, on sait que le procès n'aura lieu qu'en 2019. Qu'en sera-t-il de la divulgation de la preuve, de la gestion des délais? Va-t-on revivre le même cauchemar ou va-t-on tirer des leçons et mettre en oeuvre un plan d'action avec des correctifs? La ministre de la Justice va-t-elle rester les bras croisés jusqu'à ce que Gilles Vaillancourt et ses coaccusés s'en tirent tous avec un non-lieu en raison de délais déraisonnables?

Il y a un manque de ressources au DPCP, et c'est lié notamment à l'austérité libérale. Les procureurs de la couronne sont de moins en moins nombreux, moins bien payés que leurs collègues des autres provinces, de plus en plus surchargés et souvent inexpérimentés, selon l'Association des avocats de défense du Québec. Après le fiasco de SharQc en 2011, l'actuel leader du gouvernement avait déclaré, en point de presse, main sur le coeur : «...il n'y a aucun compromis qui peut être fait à l'égard des moyens offerts aux poursuivants.» Il parlait alors autant des ressources financières qu'humaines. Or, après une loi spéciale contre les procureurs de l'État en 2011, l'actuel leader du gouvernement avait promis un plan de réinvestissement au DPCP. Résultat du plan de réinvestissement selon l'étude des crédits 2015‑2016 : seulement 54, c'est-à-dire 40 %, des 126 embauches ont été livrées, et rien dans les deux derniers budgets. Alors, ça, c'est pour l'information de la ministre. Depuis 2012‑2013, aucune ressource supplémentaire n'a été ajoutée aux effectifs du DPCP pour compléter le plan de réorganisation du travail des procureurs aux poursuites criminelles et pénales. On plafonne à 154 ressources supplémentaires au lieu des 126 promis en 2012, échelonnées sur trois ans, dont 85 techniciens en droit et 41 postes administratifs. Pourtant, en 2014‑2015 et en 2015‑2016, il n'y a aucune nouvelle ressource.

Une nouvelle choquante encore plus récente : Québec a réduit d'environ 40 % le nombre de ses procureurs affectés à la lutte contre le crime organisé et restructure complètement ses équipes spécialisées dans ce domaine. Le nombre total de procureurs des bureaux spécialisés va passer ainsi de 110 à 60. La Directrice des poursuites criminelles et pénales justifie cette décision en parlant, et je cite, d'«un contexte budgétaire désormais restreint».

Comme le dit le journaliste enquêteur Daniel Renaud dans un article du 17 octobre dernier — je le cite : «La DPCP a beau dire que l'effectif sera le même et que des dossiers seront envoyés en région où seront cantonnés des procureurs d'expérience spécialisés dans la lutte contre le crime organisé, on se demande, à travers leurs autres tâches, ce qu'ils feront face à des avocats de la défense chevronnés brandissant des requêtes étoffées.»

Mme la Présidente, beaucoup de gens prennent des notes sur le fiasco de SharQc, et ça va certainement influencer la suite en ce qui a trait aux mégaprocès. Rappelons-nous que la même austérité a frappé le DPCP et l'a empêché de recevoir les réinvestissements nécessaires promis par l'actuel leader du gouvernement alors ministre. Les mêmes recettes mènent aux mêmes conséquences.

Donc, nous avons besoin d'une réforme urgente dans la gestion des mégaprocès, des mégaprocès qui sont des procès d'envergure compte tenu notamment de la nature des gens qui sont accusés, et on parle ici d'une grande organisation, les Hell's Angels. Une enquête publique indépendante et une commission parlementaire pour entendre la ministre de la Justice nous apparaissent nécessaires. C'est clair, il y a une perte de confiance des justiciables québécois à la vue de la mauvaise administration de la justice. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond avec l'administration de la poursuite au DPCP, plusieurs l'auront observé, des juges et du système de justice criminelle et pénale. On peut parler d'une véritable crise de confiance envers notre système judiciaire, ce qui est peu rassurant quant à notre démocratie. L'incapacité de notre système de justice à juger et à condamner des criminels hautement dangereux demande que la ministre de la Justice fasse quelque chose. Non seulement une réflexion sérieuse est nécessaire au sein du ministère de la Justice, de la magistrature et du DPCP, mais des propositions concrètes doivent être mises sur la table par la ministre. Une coordination avec sa collègue de la Sécurité publique est plus qu'urgente et nécessaire.

Par exemple, au nombre des problèmes, nous lui soumettons l'incapacité du système de justice à assumer des procès avec une preuve aussi volumineuse, premier élément; deuxième, mauvais ciblage des chefs d'accusation portés contre ces criminels. Enfin, et je cite ici le journaliste Yves Boisvert : «Manoeuvres et procédurite aiguës des avocats de la défense, eux ont compris comment faire en sorte que ça déraille.» Voir des criminels hautement dangereux s'en sortir en raison des faiblesses de notre système de justice requiert d'entendre la ministre de la Justice sur le sujet, puis j'expliquerai tout à l'heure pourquoi elle est en mesure de le faire, avec des précédents. Une réflexion sérieuse au ministère de la Justice, à la magistrature et du DPCP doit être amorcée. Des propositions concrètes doivent être mises sur la table par la ministre elle-même. Par respect pour les enquêteurs et les policiers qui ont travaillé pendant des années pour accumuler une preuve suffisante permettant de porter des accusations graves contre des individus fortement criminalisés, la ministre de la Justice doit elle-même faire la lumière sur les événements qui ont mené au fiasco du procès SharQc et agir afin qu'une telle situation ne se reproduise plus, d'autant plus que d'autres mégaprocès pointent à l'horizon. Il est plus que temps qu'elle assume ses responsabilités et qu'elle explique aux Québécois les raisons qui ont amené à cet échec lamentable, c'est sa responsabilité que nous lui demandons d'assumer. Elle doit se saisir du dossier et résoudre l'impasse à laquelle les mégaprocès font face. Les résultats sont médiocres. Dès que les enquêtes policières sont transférées au système de justice, il faut des résultats.

Un des résultats du fiasco de SharQc, c'est la démobilisation de l'ensemble des policiers et des enquêteurs qui ont cumulé de la preuve et qui sentent que leur travail n'a servi à rien, qui sont démobilisés, qui se sentent floués par ce qui s'est passé, et ce n'est pas de bon augure pour l' «intacité» des futures enquêtes. La ministre de la Justice est restée muette jusqu'à présent et a plutôt commandé une enquête interne au DPCP. Ce n'est pas suffisant.

D'ailleurs, je noterai que rien, rien ne nous indique que le rapport d'enquête interne sera rendu public. Je n'ai pas entendu Me Murphy le dire, ni la ministre. Alors, ça, c'est une donnée qu'on aimerait obtenir.

Ce n'est pas cette enquête interne au DPCP qui va régler le problème et ramener la confiance dans le système judiciaire, ça doit être des réformes structurelles dans l'administration de la justice. C'est pour cela que le Parti québécois demande deux actions, deux étapes, et à la première responsable de la justice au Québec, la ministre de la Justice. Donc, voici nos deux propositions : un, elle doit commander une enquête indépendante sur le fiasco des mégaprocès SharQc; la deuxième, elle doit témoigner en commission parlementaire afin d'expliquer les raisons ayant conduit à l'échec du procès SharQc et qu'à cette occasion elle dépose un plan de correctifs à apporter au système judiciaire afin qu'une telle situation ne se reproduise plus.

En conclusion, Mme la Présidente, le choix de cette motion du mercredi par le Parti québécois s'imposait. Le système de justice, la sécurité publique sont des enjeux extrêmement importants pour la population. C'est lié à la sécurité de la population mais aussi à l'assurance que des gens qui ont commis des crimes puissent être condamnés.

Dans le cas des Hell's Angels, on se souviendra de la guerre des motards. Pas besoin de rappeler ça au député de Chomedey, qui a vécu de près cet épisode sinistre de l'histoire du Québec, où il y a eu énormément de morts... des motards extrêmement dangereux qui ont fait parfois d'innocentes victimes, qui s'adonnent au trafic de la drogue, du prêt usuraire, de la prostitution, de l'extorsion. Cette organisation qui sévit partout dans le monde est bien présente au Québec depuis des années. Cette organisation a énormément de moyens, a des ramifications internationales, étudie le système de justice, étudie les failles et parfois est plus rapide que le système de justice à s'adapter, dispose des meilleurs avocats de la défense et est la grande gagnante du fiasco de l'opération SharQc. Les cinq criminels qui ont été libérés ont été surpris, mais ont été rassurés de voir qu'il existait une faille, qu'on leur permette de quitter le pénitencier en toute liberté. Les grands perdants : le système de justice, les policiers, les enquêteurs qui ont cumulé de la preuve, tous ceux qui ont consacré leur vie à la justice, à la protection du public, des gens qui chaque matin sont fiers de leur travail, sont fiers de leur vocation, qui ont décidé de faire la différence et souvent au péril de leur vie, qui ont décidé de dire à leurs familles que... Ces femmes et ces hommes ont décidé de dire à leurs familles qu'ils faisaient un métier dangereux, un métier où il n'y a aucune garantie sur l'espérance de vie, un métier où ils risquent d'être blessés, ils risquent d'être suivis, ils risquent d'être intimidés, mais ils l'ont quand même fait, puis on leur doit une gratitude, on doit une gratitude à ces personnes qui sont les ouvriers de ce procès, qui ont rendu... qui ont déposé la preuve. Et j'imagine toutes ces personnes à qui, évidemment, on ne peut pas... avec qui on ne peut pas discuter, mais qui nous écoutent peut-être aujourd'hui, qui ont suivi dans les journaux, qui ont suivi les déclarations de la ministre, qui ont suivi nos interventions, qui ont suivi les commentaires de la population et qui se disent : Il me semble qu'on est capables de faire quelque chose, qu'il y a des moments dans l'histoire du Québec qui commandent l'intervention d'un ministre ou de la ministre de la Justice.

• (15 h 20) •

Il y a des précédents, Mme la Présidente. Il y a une capacité d'intervenir qui est celle de la ministre quand le devoir le commande. Et, à titre d'exemple, lorsqu'on regarde la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales, on regarde l'article 24... Je vais en faire la lecture :

«Lorsqu'une poursuite soulève, à son avis, des questions d'intérêt général qui dépassent celles habituellement soulevées dans les poursuites criminelles et pénales, le Procureur général peut, après en avoir avisé le directeur, y intervenir, en première instance ou en appel, sans autre formalité.»

Mme la Présidente, je suis convaincu que la population du Québec non seulement comprendrait, mais souhaiterait que la ministre de la Justice, qui n'a pas abusé de son pouvoir politique jusqu'à maintenant, c'est le moins qu'on puisse dire, puisse rassurer la population quant à l'issue du procès SharQc.

Si vendredi dernier Me Annick Murphy n'était pas intervenue, celle qui est à la tête du DPCP, qu'est-ce qui serait arrivé? Est-ce que la ministre aurait décidé d'intervenir? Je n'ai pas d'indication à cet effet, mais j'en doute. Alors, cette enquête est une formalité, évidemment. Ça fait partie des procédures. Est-ce que le rapport sera rendu public? On ne le sait pas. Et, même s'il était rendu public, est-ce que ça sera suffisant? J'en doute. Est-ce qu'on devrait avoir une enquête indépendante? Je crois que oui, compte tenu de la nature, la nature des accusations qui sont portées contre ces dangereux criminels.

Les Hell's Angels, c'est une des plus grandes organisations criminelles au Québec avec la mafia, avec les gangs de rue. Cette organisation-là fait des victimes. Elle a fait des victimes par les armes, elle a fait des victimes par la nature des activités dans laquelle elle est impliquée. C'est le propre du crime organisé. Pour obtenir tous ces profits, bien, ça prend des efforts considérables pour bousculer des gens et d'innocentes victimes.

Aujourd'hui, je me lève au nom de ma formation politique pour réclamer justice, pour réclamer de la ministre qu'elle rassure la population du Québec, qu'elle rassure le système de justice, qu'elle envoie le message aux policiers et aux enquêteurs qui, au péril de leur vie, ont ramassé de la preuve, qu'ils sont importants et leur travail n'a pas été fait en vain. Et c'est pour ça que je me lève aujourd'hui et c'est pour ça que je demande à l'ensemble de la Chambre d'appuyer une proposition qui s'impose d'elle-même, celle de rassurer la population sur une de nos institutions les plus fondamentales en démocratie, la justice, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Matane-Matapédia. Et, pour la prochaine intervention, je vais maintenant reconnaître Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : 1valleMme la Présidente, finalement, ce qu'on nous présente aujourd'hui comme motion, c'est un amalgame d'affirmations, des affirmations de toutes sortes, qui partent dans toutes les directions. Certaines des affirmations du collègue sont clairement, catégoriquement inexactes. Et je vais saisir l'opportunité qui m'est présentée cet après-midi pour corriger les faits. La Directrice des poursuites criminelles et pénales l'a fait vendredi, et nous l'avons fait à plusieurs reprises, mais les collègues préfèrent se boucher les oreilles, ignorer la vérité. Bref, la conséquence de tout ça, c'est qu'il rapporte des propos inexacts et qu'ils induisent malheureusement les gens dans l'erreur. Je trouve...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, un instant. M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Je vous invite à porter attention aux propos de la ministre qui indique qu'on induit en erreur la population. Il m'apparaît que c'est abusif.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bon, il ne faudrait pas imputer des motifs à vos collègues, Mme la ministre. Alors, je vous demande de poursuivre.

Mme Vallée : Je n'impute pas de motifs, Mme la Présidente, et permettez-moi de faire la démonstration de ce que certaines affirmations qui ont été répétées à moult reprises par le député de Matane s'avèrent complètement inexactes, point. C'est aussi simple que ça.

Ceci étant dit, c'est aussi particulièrement évocateur, Mme la Présidente, que la motion soit présentée par le porte-parole en matière de sécurité publique et non par le porte-parole en matière de justice, hein? On tente de politiser le processus judiciaire, de politiser la Directrice des poursuites criminelles et pénales, et il semble évidemment qu'il y a un malaise à l'intérieur du caucus de l'autre côté de la Chambre.

On semble oublier, Mme la Présidente... Mme la Présidente, avec respect, j'ai écouté l'allocution du collègue dans le respect et je m'attends au même respect du collègue. Alors, on semble oublier, Mme la Présidente, lorsqu'on fait état du dossier SharQc, et je l'ai mentionné à deux reprises, même à plusieurs reprises, la décision qui a été rendue par le juge Brunton, c'est une décision qui nous a secoués. Ce n'est pas la décision qui était souhaitée. Ce n'est pas du tout ce que l'on souhaitait dans ce dossier-là, évidemment.

Mais malgré tout, si on met de côté cette décision-là, rappelons-nous que, dans cette grande opération d'envergure, il y a quand même 104 plaidoyers de culpabilité qui ont été enregistrés pour des peines qui varient entre cinq ans et des peines à perpétuité, 104 plaidoyers de culpabilité. Il y a, au moment où on se parle, Mme la Présidente, deux dossiers qui sont toujours pendants, d'où l'importance d'une certaine prudence dans les propos qui sont tenus dans cette enceinte. Il y a également près de neuf mandats d'arrestation qui sont toujours pendants, et les propos tenus en cette Chambre pourraient avoir une incidence sur ces dossiers également. Alors, nous avons un devoir, une responsabilité de mener ces échanges en considérant ces faits, Mme la Présidente, nous avons la responsabilité de ne pas poser des gestes, porter des paroles qui pourraient avoir un impact que nous ne souhaitons pas tant sur les mandats d'arrestation qui sont pendants que sur les dossiers qui sont aussi pendants. Alors, évidemment, la prudence s'impose.

Mais il n'y a personne ici, dans cette Chambre, Mme la Présidente, qui est heureux de l'issue du procès. Je suis préoccupée, puis, à titre de ministre de la Justice, Mme la Présidente, mon rôle est évidemment de m'assurer que la lumière soit faite sur les circonstances qui ont conduit à la décision du 9 octobre dernier et que des correctifs puissent être apportés pour éviter que ça se reproduise.

J'ai fait part de mes préoccupations à Me Murphy, qui est la Directrice des poursuites criminelles et pénales, j'ai échangé avec elle entre le 9 octobre et vendredi dernier. Rappelons-nous qu'entre le 9 octobre et le 16 octobre le bureau, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, évaluait la possibilité de porter le dossier, le jugement en appel. Le 16 octobre dernier, Me Murphy a choisi de sortir de sa réserve habituelle pour annoncer, d'une part, qu'elle n'entendait pas... que les équipes, après une évaluation sérieuse, rigoureuse, n'entendaient pas porter le dossier en appel puisqu'il comportait, le dossier... En fait, les motifs de la décision se basaient sur des questions de fait, des questions factuelles. La Directrice des poursuites criminelles a choisi de ne pas porter le dossier en appel. Elle m'a fait part, préalablement à sa sortie, du plan de match qu'elle avait, c'est-à-dire, d'une part, de lancer une enquête administrative qui sera présidée par Me Lortie, qui permettrait de faire la lumière sur les circonstances qui ont retardé la communication des éléments de preuve. Et c'est une enquête qui est menée par un procureur d'expérience, Me Lortie, qui compte 34 années de carrière à la poursuite, qui a été membre de la fonction publique à titre de sous-ministre associé aux Affaires correctionnelles au ministère de la Sécurité publique. Et Me Lortie remettra ses conclusions au plus tard le 18 décembre. Il va faire également une recommandation quant à la possibilité de rendre publiques ses conclusions, compte tenu des procédures judiciaires qui sont toujours en cours.

Alors, Mme la Présidente, oui, l'objectif est la transparence, oui, l'objectif est permettre de rendre publiques les conclusions mais évidemment sous réserve des dossiers qui sont pendants, pas question de contaminer des dossiers qui sont toujours devant les tribunaux et de créer une autre situation problématique. Évidemment, on entend, là, l'opposition qui nous demande de rendre public l'ensemble du rapport, sans égard pour les procédures qui sont en cours, mais ce serait une attitude qui serait carrément irresponsable, Mme la Présidente, et qui pourrait faire avorter des affaires en cours. On doit laisser la justice suivre son cours.

• (15 h 30) •

Dans un deuxième temps, Mme la Présidente, parce que je reviens au plan d'action de Me Murphy, il a été annoncé la mise en place d'un comité d'examen, un comité d'examen qui aura le mandat d'entreprendre une réflexion sur la gestion des mégaprocès par la poursuite. Ces recommandations, Mme la Présidente, vont porter sur l'organisation du travail au sein des équipes des procureurs, l'organisation du travail entre les policiers et la poursuite, l'établissement des priorités opérationnelles, le nombre d'accusés et de chefs d'accusation, la période qui sera couverte par l'acte d'accusation. Dans le cadre du mandat qui a été confié à Me Michel Bouchard, le comité aura à consulter, entre autres, la magistrature, le Barreau du Québec, l'Association québécoise des avocats et avocates de la défense ainsi que les corps policiers, bien entendu. L'examen que fera le comité de la gestion des mégaprocès va tenir compte des obstacles et des défis qui ont été rencontrés dans le dossier SharQc afin que nous puissions en tirer des leçons, c'est bien clair. Le comité sera présenté... présidé, comme je l'ai mentionné, par Me Michel Bouchard, dont la réputation n'est plus à faire. Me Bouchard a notamment occupé les fonctions de sous-ministre aux ministères de la Justice du Québec et du Canada. Il a présidé de nombreux comités, dont le Comité directeur sur l'accès et l'efficacité en matière de justice criminelle et pénale qui a conduit à d'importantes modifications du Code criminel en 2011.

Au mandat du comité de Me Bouchard, j'ai ajouté, vendredi dernier, la nécessité de faire des recommandations quant à la planification des ressources judiciaires pour assurer la tenue des mégaprocès à l'intérieur de délais raisonnables. J'ai également annoncé vendredi que, suite aux recommandations du comité d'examen, j'élaborerais une orientation à l'intention du Directeur des poursuites criminelles et pénales dans la gestion des mégaprocès. En toute transparence, celle-ci sera publiée à la Gazette officielle, conformément à la loi.

Mme la Présidente, on souhaite que la lumière soit faite mais pas au détriment des dossiers qui sont toujours en cours. Le maintien de la confiance du public en ses institutions, c'est au coeur de mes préoccupations comme ministre de la Justice, et je sais que cette préoccupation-là, elle est partagée par l'ensemble de mes collègues. C'est pour ça que je ne comprends pas l'acharnement des députés de l'opposition sur cette question. Parce qu'il ne faut pas oublier que le DPCP est une institution indépendante. Les rôles respectifs du Directeur des poursuites criminelles et de la ministre de la Justice sont définis dans la loi, et il revient au Directeur des poursuites criminelles et pénales d'agir comme poursuivant en matière criminelle et pénale, suivant les dispositions de la loi. Il appartient cependant à la ministre de la Justice de fixer les orientations et de prendre les mesures générales concernant la conduite des affaires, et c'est ça que j'ai annoncé, c'est ça que nous allons faire, Mme la Présidente. Alors, lorsque le collègue de Matane-Matapédia dit que j'avais les bras croisés, que je n'étais pas là, au contraire nous avons travaillé, nous avons mis en place un plan qui respecte, qui respecte les juridictions de chacun et les rôles que chacun doit jouer dans le respect de la justice. C'est un principe fondamental, tout ça, Mme la Présidente, notre démocratie repose sur la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire.

Le collègue citait d'éminents journalistes. Permettez-moi de citer Yves Boisvert, chroniqueur dans La Presse, qui disait dans un autre dossier tout à fait : «Les élus n'ont pas à dicter ou à paraître dicter les ordres aux procureurs...»

D'ailleurs, mon prédécesseur, le député de Chambly à l'époque, M. Bertrand St-Arnaud, qui était ministre de la Justice, avait, lui aussi, trop de respect pour l'indépendance judiciaire pour laisser le politique et la pression populaire influencer la justice. Alors, à quelques reprises, d'ailleurs, dans un autre dossier complètement différent, un dossier d'agression sexuelle, il avait choisi de garder une saine distance, de ne pas substituer son appréciation à celle des procureurs chevronnés.

Alors, permettez-moi aussi... Et je pense qu'il est à propos aujourd'hui de citer les propos de l'éminent juge en chef associé de la Cour supérieure, le juge Pidgeon, le juge Robert Pidgeon, qui, l'an dernier, en 2014, lors de la rentrée judiciaire, s'exprimait comme suit, il disait : «Au Canada — oui, parce que nous sommes au Canada — la séparation des pouvoirs et son corollaire, l'indépendance judiciaire, garantissent aux citoyens qu'ils seront jugés par un tribunal impartial. En fait, c'est la raison d'être de l'indépendance judiciaire. Malheureusement, dans le feu de l'action, il arrive que l'on oublie ces règles de base essentielles à toute démocratie. C'est le cas lorsque les actions ont pour effet de remettre en question l'existence même de la séparation des pouvoirs.» J'aimerais simplement rappeler cette notion de base à notre collègue.

Et, en plus de l'indépendance des magistrats, Mme la Présidente, les citoyens québécois peuvent également compter sur l'indépendance du Directeur des poursuites criminelles et pénales, de l'institution qui est présente, qui a été créée afin d'assurer l'absence d'intervention politique dans la gestion des poursuites et dans la stratégie judiciaire. Alors, ce que le député nous demande, Mme la Présidente, c'est de se mettre les deux mains dans le DPCP et de faire fi de toute la question des dossiers qui sont actuellement pendants.

Mme la Présidente, c'est certain que nous avons une préoccupation très claire de s'attaquer au crime organisé, de s'attaquer à cette criminalité-là qui cause un préjudice sérieux à notre démocratie. Mais, ceci étant dit, il y a une façon de le faire. Vous savez, et je reviens sur les allégués qu'on fait rouler chez l'opposition, on prétend que la Directrice des poursuites criminelles et pénales a coupé son nombre de procureurs luttant dans le crime organisé, a coupé de 40 % les effectifs. Ce matin, à la période des questions, Mme la Présidente, j'ai rappelé aux collègues qu'en 2014 on comptait, au sein de l'institution du Directeur des poursuites criminelles et pénales, 597 procureurs réguliers, donc à temps plein. Savez-vous comment il y en a en 2015, Mme la Présidente? 599. Ce n'est pas moins 40 %, ça.

Alors, ce que le collègue allègue, ce n'est pas exact. Ce n'est simplement pas exact. Il n'y a pas de coupe dans les équipes du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Il y a eu une réorganisation administrative qui a été annoncée pour améliorer l'efficacité et l'organisation du travail dans l'ensemble de l'institution. Tout à fait normal, tout à fait normal qu'après huit ans d'existence on revoie les façons de faire, qu'on repense, qu'on prenne acte de ce qui va bien, et qu'on prenne acte des difficultés, et qu'on y voit. C'est une façon responsable d'agir.

Alors, la directrice a annoncé l'unification de trois bureaux pour créer des équipes qui seront multidisciplinaires, qui sont adaptées à la nouvelle criminalité qui se profile et qui va aussi permettre une organisation du travail qui sera plus efficace. J'ai obtenu l'assurance, Mme la Présidente, de la Directrice des poursuites criminelles et pénales que tous les dossiers en lien avec la criminalité organisée vont continuer d'être traités avec la même rigueur, par les mêmes procureurs d'expérience, et ça, sur l'ensemble du territoire du Québec. Mme la Présidente, moi, je trouve ça rassurant de savoir que des procureurs d'expérience, qui, auparavant, étaient concentrés à Montréal ou Québec, pourront aller prêter main-forte à leurs collègues qui sont dispersés en région, pourront prêter main-forte et transmettre leur savoir aux équipes. Parce que la criminalité organisée, Mme la Présidente, malheureusement elle évolue. Elle n'est pas qu'à Montréal, elle n'est pas qu'à Québec, elle est partout, malheureusement, sur le territoire, et il est impératif d'y voir et de veiller à ce que les procureurs...

Mon collègue mentionnait tout à l'heure... il faisait référence aux dossiers qui avaient été menés par des procureurs inexpérimentés. Il a attaqué de front le travail des procureurs du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Il est normal, Mme la Présidente, que de plus jeunes s'intègrent à une organisation, mais justement le travail de la Directrice des poursuites criminelles et pénales, de réorganisation, va permettre aux procureurs expérimentés d'accompagner les nouveaux venus dans l'équipe.

Des voix : ...

• (15 h 40) •

Mme Vallée : J'écoutais le collègue avec attention, je m'attends au même respect, Mme la Présidente. Alors, tous les procureurs permanents vont conserver leur emploi, et c'est ce qui est mentionné. Alors, la réorganisation administrative, elle va faciliter la collaboration, la concertation au sein des équipes. Elle va permettre une plus grande proximité avec les acteurs du milieu en opérant à partir des différents palais de justice. Ça aussi, Mme la Présidente, au cours des dernières années, il a été établi qu'il y avait un peu de travail en silo.

Et il y a des commentaires. La Directrice des poursuites criminelles et pénales a aussi établi cette réorganisation-là en fonction des commentaires qui lui ont été formulés par les partenaires, les partenaires qui sont aussi les corps policiers. Je regarde le collègue de Chomedey parce qu'évidemment on ne peut penser à ces dossiers sans penser au collègue de Chomedey qui justement jouit d'une expertise quand même assez extraordinaire dans le domaine.

Alors, Mme la Présidente, la Directrice des poursuites criminelles et pénales a fait le point la semaine dernière, lorsqu'elle a annoncé, d'une part, qu'elle n'entendait pas aller en appel, porter en appel le jugement du 9 octobre dernier et qu'elle mettait en place deux comités : la commission de révision interne et le comité mené par Me Bouchard. Elle a aussi tenu à faire le point sur tout ce qui était véhiculé et qui était inexact concernant les alléguées coupures de 40 %. Elle a mentionné clairement que ce n'était pas fondé. Elle a fait une déclaration très claire quant aux objectifs de sa réorganisation administrative.

Alors, évidemment, il faut se fier sur les vrais chiffres. Donc, pour l'exercice 2014-2015, à l'emploi du DPCP, 597 procureurs : 494 réguliers, 103 occasionnels, et, en date d'hier, 599 procureurs : 502 réguliers, 97 occasionnels.

Et je vais citer quelques extraits du communiqué qui a été diffusé le 29 septembre dernier, puisque, clairement, certains collègues en cette Chambre ne se sont pas donné la peine de lire :

«...le DPCP constate que de fausses informations sont véhiculées quant à son impact sur la lutte au crime organisé.»

«Le DPCP tient à préciser qu'il ne diminuera pas son action envers la lutte au crime organisé. Il est faux de prétendre que cette nouvelle structure aura un impact négatif dans le traitement des dossiers.»

«...le changement apporté renforce son action...»

«...contrairement à ce que certains médias ont rapporté voulant que le DPCP ait réduit de 40 % le nombre de ses procureurs affectés à la lutte contre le crime organisé, il est important de préciser qu'aucun procureur régulier ne perdra son emploi. Les procureurs expérimentés continueront de traiter les dossiers de criminalité organisée[...]. La présence du DPCP au Québec, en matière de crime organisé, sera ainsi mieux répartie.»

«[Le DPCP] est présent partout au Québec — Mme la Présidente — il maintient ses effectifs, son expertise spécialisée ainsi que son offre de services aux partenaires.»

Encore dernièrement, lors du point de presse du 16 octobre dernier, Me Murphy a réitéré que ce véhicule... ce qui est véhiculé est, encore là, inexact, et je cite sa déclaration : «Avec le temps, les enjeux de société ont évolué, tout comme les priorités des forces policières.

«La spécialisation pointue et en silo de ces bureaux, autrefois nécessaire, est devenue maintenant un obstacle à leur efficacité et surtout à leur adaptabilité aux nouveaux phénomènes de criminalité [ou] aux priorités [...] qui s'en suivent.

«L'unification de ces bureaux permettra de s'attaquer de façon plus efficace non seulement à la criminalité organisée traditionnelle, mais également aux phénomènes émergents de criminalité organisée.»

La Directrice des poursuites criminelles et pénales est convaincue que ces changements vont entraîner «une synergie et une polyvalence des équipes, un meilleur partage de l'expertise, une meilleure cohérence dans les interventions, un gain de productivité et une plus grande agilité afin de répondre à la hausse ou à la baisse de certains types de dossiers qui nous sont [fournis] par les policiers».

«Aucun poste régulier n'est retranché ou aboli, et l'expertise en matière de criminalité organisée est maintenue dans un cadre administratif différent et allégé qui répond aux exigences d'aujourd'hui.»

Bref, c'est une réorganisation administrative qui vise à améliorer l'organisation du travail dans l'ensemble de l'institution, et cette réorganisation a été annoncée pour créer des équipes multidisciplinaires et une organisation du travail plus efficace.

Évidemment, parfois, lorsqu'on change, il y a toujours une adaptation qui se fait au changement. Le changement, parfois, est peut-être synonyme de craintes pour certains, mais moi, j'ai confiance, Mme la Présidente, parce que ces dossiers, tous les dossiers en lien avec la criminalité organisée vont continuer d'être traités, comme on le mentionnait, avec rigueur et par des procureurs d'expérience, et ça, pour moi, c'est extrêmement important.

Mme la Présidente, vous savez, ce que le... En fait, le message qui est lancé par le collègue, c'est une attaque frontale envers l'institution du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales a pris ses responsabilités, a mis en place une organisation et des mesures qui vont nous permettre de faire la lumière sans politiser des dossiers hautement délicats, hautement préoccupants, et va permettre... Nous entendons donner suite aux recommandations qui seront formulées dans le cadre des enquêtes. Mme la Présidente, je pense qu'il est important de traiter ces dossiers-là avec le plus grand sérieux, dans le respect des compétences de chacun.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la ministre de la Justice. Et, pour la prochaine intervention, je cède la parole à M. le député de Borduas et porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Vous savez, du côté de notre formation politique, on est intervenus assez rapidement dans ce dossier parce qu'on trouve que c'est un dossier d'une grande importance. Et ce qui est véhiculé est fort préoccupant, notamment au niveau du plan de restructuration du Directeur des poursuites criminelles et pénales, notamment suite à l'arrêt des procédures dans le dossier SharQc.

Et, Mme la Présidente, je comprends que, du côté gouvernemental, on porte toutes sortes d'allégations du côté des deux oppositions. Ce que nous avons offert à la ministre, d'une façon très responsable et d'une façon très transparente, ça a été d'écrire au président de la Commission des institutions, Mme la Présidente, afin de convoquer un mandat d'initiative qui porterait sur les ressources allouées au Directeur des poursuites criminelles et pénales et du plan du gouvernement dans le cadre de la lutte contre le crime organisé.

Ce qu'on souhaite, Mme la Présidente, c'est que la Commission des institutions se réunisse, qu'on se dote d'un mandat d'initiative et qu'on puisse véritablement entendre les différents acteurs du milieu de la justice qui luttent contre le crime organisé jour après jour, qui déploient des ressources, des efforts, qui mettent en jeu leur sécurité parfois, et ils travaillent d'arrache-pied à rendre le Québec plus sécuritaire.

La ministre nous a répondu hier, lors du débat de fin de séance, qu'elle n'avait aucune incidence sur cette commission, que les membres en étaient souverains. Dois-je lui rappeler, Mme la Présidente, que les membres du Parti libéral de cette commission, de la Commission des institutions, sont majoritaires et que, vous le savez comme moi, lorsqu'il y a une commission et qu'elle prend une décision, on se réfère tout de même au ministre préalablement avant d'aller en commission? Et c'est bien malheureux, Mme la Présidente, dans le cadre de notre système parlementaire, que les députés ministériels ne puissent pas voter en leur âme et conscience. Et c'est pour ça qu'on a besoin d'une réforme, monsieur... Mme la Présidente, vous me pardonnerez...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader.

M. Sklavounos : J'ai entendu le collègue prêter des motifs, prêter des motifs, aussi partager avec l'Assemblée nationale un fonctionnement. Je ne sais pas comment il est au courant de comment ça fonctionne, comment il peut attribuer cette façon de fonctionner à chacun des députés. Moi, je crois qu'il faut présumer de la totale indépendance de chacun des députés qui siègent à une commission parlementaire. Et le collègue doit être prudent...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, M. le député a le droit à son opinion. Je vais lui demander d'avoir un peu de... de présenter un peu plus de prudence et de ne pas imputer de motifs. Et maintenant je vous cède la parole pour la suite de votre intervention.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Je remercie le leader adjoint de son intervention, ça m'a rappelé des souvenirs. Je me souviens, Mme la Présidente, que le leader de ma formation politique avait justement posé une question en cette Chambre, notamment lors de l'étude des derniers crédits budgétaires, au mois de mai 2015, Mme la Présidente, et, c'est bizarre, on avait trouvé une feuille avec les questions que les députés libéraux ministériels devaient poser au ministre...

M. Sklavounos : Mme la Présidente, là on est rendus...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le...

M. Sklavounos : ...hors sujet, je me pose...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Monsieur...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Je vais inviter M. Borduas à revenir...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : ...M. le député de Borduas à revenir sur le sujet du jour, sur cette motion, et je vous invite à poursuivre.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Bien, écoutez, le sujet est directement lié, parce que ce que je vous disais, Mme la Présidente, c'est qu'on doit modifier nos façons de faire, modifier les façons de faire du parlementarisme. Et je pense que c'est important que la fonction de député, Mme la Présidente, soit valorisée. Et j'invite la ministre de la Justice et j'invite ses collègues parlementaires, la partie ministérielle, qui vont siéger à la Commission des institutions de se saisir de ce mandat d'initiative là, parce que ça va permettre à tous les parlementaires québécois et à la population de retrouver confiance dans l'institution du Directeur des poursuites criminelles et pénales, dans l'administration de la preuve qui est faite devant les procès, et surtout dans la lutte contre le crime organisé.

Mme la Présidente, je me suis levé au cours des dernières semaines à plusieurs reprises en cette Chambre pour questionner la ministre sur les orientations du gouvernement. La Directrice des poursuites criminelles et pénales a annoncé un plan de restructuration au cours des dernières semaines. Le 23 septembre 2015, elle a envoyé une note interne au personnel du Directeur des poursuites criminelles et pénales annonçant un plan de restructuration. Au deuxième paragraphe, elle indique : «Au siège social à Québec, le Bureau des relations publiques et de l'information, le Bureau des affaires extérieures et le Bureau du recrutement et de la formation, contrairement aux prévisions faites en 2012, sont restés partiellement dotés, et la situation actuelle ne permet pas de prévoir l'ajout de ressources à court ou à moyen terme. Cette situation entrave le développement de leur mission et nécessite que leur mandat soit réorienté vers d'autres bureaux afin de maximiser l'utilisation des ressources en place.»

Ensuite, Mme la Présidente, à la page 2, on indique : Plusieurs postes... Et c'est la Directrice des poursuites criminelles et pénales qui signe l'avis : Plusieurs postes occupant... «Plusieurs personnes occupant des postes réguliers dans les bureaux abolis ou fermés devront être réaffectées dans d'autres bureaux, ce qui aura pour conséquence de mettre fin à certains emplois occasionnels.»

Donc, Mme la Présidente, ce n'est pas l'opposition qui véhicule cette information-là, c'est la Directrice des poursuites criminelles et pénales dans la note qu'elle a envoyée à ses propres employés. Il y a des procureurs occasionnels qui vont être coupés.

Mme la Présidente, lorsque la ministre dit : Il n'y aura pas de réduction de procureurs, ce que je lui dis, c'est : Faisons venir la Directrice des poursuites criminelles et pénales en commission parlementaire pour qu'elle puisse nous expliquer son plan. Comment va-t-on lutter efficacement? Est-ce qu'il lui manque de ressources pour lutter contre le crime organisé? Parce qu'à la lecture de sa note interne, Mme la Présidente, on constate que le contexte budgétaire restreint est un des facteurs. Est-ce que le gouvernement libéral asphyxie le DPCP par des coupures? Est-ce que les ressources qui sont données au Directeur des poursuites criminelles et pénales sont suffisantes pour mener la lutte contre le crime organisé? Comment est-ce que le Directeur des poursuites criminelles et pénales va faire pour lutter efficacement contre les motards qui sont libérés présentement?

• (15 h 50) •

M. Sklavounos : Je suis désolé d'interrompre mon collègue, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Il fait référence, dans sa... J'aimerais qu'on ait le dépôt. Il l'a citée textuellement. Je me demande s'il aurait d'objections à déposer cette note-là pour qu'on puisse en prendre connaissance. Je pense que, dans la transparence du débat, ça nous aiderait à formuler des répliques à ce sujet.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, y a-t-il consentement pour le dépôt de ce document? Oui?

M. Jolin-Barrette : ...Mme la Présidente, de le déposer, si vous permettez, à la fin de mon intervention?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Merci. Allez-y, M. le député.

M. Jolin-Barrette : Vous savez, Mme la Présidente, de ce côté-ci de la Chambre, on veut collaborer, puis on n'a surtout rien à cacher pour la population québécoise, c'est pour ça qu'on veut convoquer la Directrice des poursuites criminelles et pénales en commission parlementaire, et pas juste elle, l'ensemble des intervenants du milieu de la justice qui luttent jour après jour contre le crime organisé, pour connaître quels sont les outils, les ressources qu'ils ont de besoin.

L'autre élément, Mme la Présidente, qui est fort préoccupant : j'entends la ministre dire, à de multiples reprises, que le nombre de procureurs n'a pas été diminué au Directeur des poursuites criminelles et pénales. Dans le rapport annuel, dans le rapport annuel de gestion 2014-2015, qui constitue une photo de l'état du Directeur des poursuites criminelles et pénales au 31 mars 2015 — donc, la ministre réfère à la page 37 de ce rapport qui a été déposé il y a quelques semaines — effectivement, dans le rapport, qui prend une photo au 31 mars 2015, il y a les procureurs indiqués par Mme la ministre de la Justice. Cependant, Mme la Présidente, ce qu'il faut faire, il faut faire le corollaire. Il faut lire le rapport annuel de gestion en même temps que l'avis interne qui a été envoyé par la Directrice des poursuites criminelles à son personnel pour dire : C'était ça, la situation, mais maintenant ça va être ça, la situation. Donc, le plan n'est pas encore en vigueur. C'est quelque chose qui a été annoncé. Donc, lorsque la ministre nous répète sans cesse que le nombre de procureurs n'a pas été diminué, présentement c'est peut-être le cas, mais ce qui arrive, Mme la Présidente, c'est que ça s'en vient.

Donc, nous, ce qu'on vous dit, c'est que... Comment est-ce qu'on fait pour lutter efficacement contre le crime organisé? La directrice annonce un plan, c'est important qu'on l'entende pour savoir pourquoi elle a besoin d'un plan de restructuration, où va-t-elle affecter les procureurs, combien de procureurs vont être coupés, combien de procureurs vont être bumpés aussi, Mme la Présidente. Vous me permettrez d'utiliser ce langage parce que vous savez que, par le jeu des conventions collectives, il y a certains procureurs occasionnels qui vont perdre leur emploi.

L'autre élément, Mme la Présidente, qui est important, c'est que le DPCP avait des bureaux régionaux spécialisés, et, dans le cadre de ces bureaux régionaux là, il y a des procureurs qui étaient spécialisés, qui consacraient leur carrière à la lutte contre le crime organisé. Le message qu'on leur envoie, c'est : Retournez au palais de justice et vous ne ferez plus uniquement des dossiers de crime organisé. Et, lorsqu'on connaît la tâche d'un procureur de la couronne en matière de crime organisé, on sait que ce type de dossiers là requiert énormément de temps, Mme la Présidente, et ça ne sera pas possible, pour ces procureurs-là, s'ils ne sont pas libérés pour faire exclusivement du crime organisé, de mener aussi efficacement leurs dossiers de crime organisé. Ils vont se retrouver avec un chariot, au palais de justice, à peut-être faire du volume, à avoir certains autres dossiers et en même temps devoir faire du crime organisé, sans nécessairement, Mme la Présidente, avoir les mêmes protections. Est-ce que ces procureurs-là vont conserver leur système d'alarme à la maison? Parce que, vous savez, faire de la grande criminalité, ce n'est pas la même chose que de faire une salle à volume au palais de justice.

L'ensemble des crimes sont importants au Québec, mais il y a des conditions particulières, Mme la Présidente, lorsqu'on fait des dossiers de crime organisé, et c'est important que les procureurs qui vont être à Saint-Jérôme, là, ils ne soient pas seuls au palais de justice et qu'ils doivent appeler... prendre un téléphone rouge et appeler à Montréal pour dire : Bien là, est-ce que je vais avoir des ressources supplémentaires?

Et surtout, Mme la Présidente, une des raisons pourquoi il serait intéressant d'entendre la Directrice des poursuites criminelles et pénales sur son plan de restructuration, c'est de savoir : Est-ce qu'il est précipité? Est-ce que c'est suite aux coupures du gouvernement? Et aussi est-ce qu'il va réellement y avoir une économie de coûts? Parce que, si vos procureurs de Montréal, qui vont être centralisés à Montréal, vont devoir prendre le véhicule et monter à tout bout de champ à Saint-Jérôme, ou à Québec, ou à Sherbrooke, ou à Trois-Rivières... Parce que c'est là que sont les chapitres du crime organisé, Mme la Présidente. Puis, vous savez, on a libéré des accusés la semaine dernière par un arrêt des procédures pour plusieurs raisons qui sont énoncées dans le jugement Berger contre la Reine en arrêt des procédures.

Mais, ceci étant dit, Mme la Présidente, la question de la gestion au niveau du Directeur des poursuites criminelles et pénales est préoccupante. Et nous avons offert à la ministre et nous avons offert à cette Assemblée un outil parlementaire pour redonner confiance aux Québécois dans le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Parce que ce n'est pas la première fois que le directeur est écorché. Et c'est important qu'on puisse s'assurer que la lutte que ces procureurs, que les corps policier et que les différents intervenants du milieu de la justice... soit couronnée de succès dans la lutte contre le crime organisé.

Vous me permettez, Mme la Présidente, de revenir également sur un élément. La ministre de la Justice a annoncé à de multiples reprises en cette Chambre que 104 plaidoyers de culpabilité ont été enregistrés. Parfois, certains plaidoyers de culpabilité ont été enregistrés à des accusations réduites. Ça, il faut le mentionner, Mme la Présidente. Il s'agit du «plea bargaining», ça fait partie du système de droit criminel. Cependant, Mme la Présidente, il faut s'assurer aussi de dire cette information-là. Et c'est possible aussi que des accusés, des gens qui ont plaidé coupables présentent des requêtes en rétractation de plaidoyer de culpabilité dû au comportement du DPCP dans son administration de la preuve par rapport aux mégaprocès aussi.

Il y a un raisonnement, il y a un questionnement, on doit faire une réflexion par rapport à l'ensemble de ces mégaprocès, et une commission parlementaire nous permettrait de réfléchir là-dessus. Parce que, vous savez, Mme la Présidente, on a consacré des millions et des millions de dollars pour les mégaprocès, pour les enquêtes policières, il faut s'assurer d'avoir de l'efficience et de l'efficacité lorsqu'on lutte contre le crime organisé et surtout que les ressources soient attribuées au bon endroit.

C'est important, Mme la Présidente, de faire une analyse de ces mégaprocès-là, et de la façon dont sont nées les enquêtes, et surtout dont la façon est administrée la preuve. Parce que, dans le jugement de l'honorable juge Brunton dans l'affaire Berger contre la Reine, justement, qui a amené à l'arrêt des procédures, le juge est assez cinglant : «...l'inférence que la cour a tirée à l'effet que la non-divulgation faisait sciemment partie d'un désir de gagner à tout prix convainc la cour que l'État a adopté une conduite choquant le sens du franc-jeu et de la décence de la société et que la continuation du procès, malgré l'importance de la criminalité alléguée, serait préjudiciable à l'intégrité du système de justice.»

On a une réflexion à avoir, Mme la Présidente, et c'est fondamental que les parlementaires puissent se réunir et donner suite à notre demande de commission parlementaire pour entendre la Directrice des poursuites criminelles et pénales et les divers intervenants du milieu de la justice, notamment les associations de procureurs, également, qui, à tous les jours, se battent pour emprisonner les criminels, Mme la Présidente. Et nous souhaitons qu'il y ait de l'action du côté du gouvernement, qu'on réalise que la lutte contre le crime organisé, c'est une lutte de tous les instants. On ne doit pas diminuer les effectifs pour avoir davantage de criminels dans les rues. On doit augmenter les effectifs, Mme la Présidente, pour lutter efficacement contre le crime ou à tout le moins utiliser les ressources qu'on a actuellement pour réussir à mener ce combat.

Et, Mme la Présidente, ce n'est pas comme si le ministre de la Justice... bien, en fait, je vous dirais, Mme la Présidente, l'ancien ministre de la Justice, qui est actuellement ministre de la Réforme des institutions démocratiques et leader du gouvernement, ce n'est pas comme s'il n'y avait pas eu d'information, d'éléments de réflexion qui avaient été portés à la connaissance du gouvernement libéral, Mme la Présidente. Dès 2011, dans un autre jugement du juge Brunton, encore une fois, dans le dossier des mégaprocès, Auclair contre la Reine, rendu le 9 juin 2011, où il y a eu un arrêt des procédures contre des accusés en matière de gangstérisme et trafic de stupéfiants, le juge évaluait, en fonction du choix du DPCP pour la conduite du mégaprocès, que les délais allaient être amenés jusqu'à juin 2023. C'est assez long, et on peut prévoir qu'un avocat de la défense allait présenter une requête en arrêt des procédures.

Un autre élément sur lequel j'amène votre réflexion, Mme la Présidente : dans le dossier Vaillancourt à Laval, les Québécois sont choqués, Mme la Présidente. Et, Mme la Présidente, quelle a été la date fixée pour la cour? Je crois, 2018, 2019, peut-être? C'est le temps d'entamer une réflexion pour éviter que les voleurs, les gens qui ne respectent pas les règles de la société, ne puissent pas s'en sortir. C'est fondamental puis c'est le rôle de la ministre de la Justice, Mme la Présidente, de s'assurer que la loi va s'appliquer et que les criminels vont se retrouver en prison et qu'ils ne pourront pas utiliser une procédure...

• (16 heures) •

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, un instant, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Petit rappel. Comme les procureurs de la couronne n'ont pas de cause à gagner, la ministre de la Justice n'a pas de cause à gagner non plus, et la ministre de la Justice doit éviter de commenter des dossiers qui sont devant les tribunaux. Mais le collègue, avocat, membre du Barreau, connaissant bien le règlement, doit également être très prudent ici. L'immunité dont il bénéficie ici, à l'Assemblée nationale, il ne peut pas en abuser pour souhaiter des verdicts dans des dossiers criminels qui sont en train de se dérouler en ce moment. Il doit être prudent et...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader adjoint du... M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Bonnardel : C'est la quatrième fois que le leader adjoint se lève. Ce que mon collègue mentionne depuis le début de son intervention, depuis 17 minutes, ce sont des faits. Mon collègue est en train de donner un cours 101 au leader adjoint sur le fonctionnement du DPCP et le système de justice. Je lui permettrais et je lui demanderais d'être respectueux sur le temps que mon collègue a et qu'il le laisse faire son intervention parce qu'il n'a émis aucun...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, justement, il ne reste que quelques minutes à l'intervention de M. le député de Borduas. Et je vous invite à la prudence, M. le député, oui, parce qu'il y a des cas qui sont toujours devant la cour. Alors, poursuivez, il ne vous reste que quelques minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Donc, comme je le disais, dès 2011, le gouvernement libéral avait été interpellé par la justice qu'il y avait un problème dans la gestion des mégaprocès. Qu'est-ce que le gouvernement libéral a fait? Il est resté les bras croisés. On sait qu'en matière d'activisme, sur ce point-là, ce n'est pas la plus grande force du gouvernement libéral, hein, d'intervenir puis de mettre les bandits derrière les barreaux.

Cependant, Mme la Présidente, ce qu'il faut dire, c'est que, lors de l'étude des crédits, la dernière étude des crédits, on avait déjà souligné, Mme la Présidente, à la ministre qu'il y avait une problématique avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales et les mégaprocès. C'était ma collègue de Montarville, à l'époque porte-parole en matière de justice, qui l'avait fait à juste titre, et la ministre avait dit : Bien, on y réfléchit, il y a des discussions avec le Barreau et avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales. C'est le temps de prendre action, Mme la Présidente. Il doit y avoir de la transparence, on doit lutter contre le crime organisé efficacement, on consacre des ressources importantes.

Mais le plus important, Mme la Présidente, c'est de dire aux intervenants du milieu de la justice, les secrétaires juridiques, les techniciens juridiques, les procureurs, les gens qui sont en soutien aux procureurs, les policiers, les gens qui travaillent dans les postes de police, dans les forces constabulaires, que leur travail est important et que le politique, ici, va les supporter, va appuyer leur travail, et va être conséquent avec les jugements des tribunaux, et va répondre à la réalité à laquelle est confrontée la structure des mégaprocès. Peut-être que les mégaprocès n'étaient pas le meilleur choix, Mme la Présidente, mais on est au moment où on doit réfléchir et surtout on doit entendre le Directeur des poursuites criminelles et pénales en commission parlementaire.

Et j'entendais le collègue leader adjoint dire que la ministre ne devait pas s'impliquer énormément dans la gestion des dossiers. On lui offre une porte de sortie honorable. Elle ne siège pas sur la Commission des institutions, elle ne sera pas en conflit d'intérêts, et les parlementaires pourront entendre, et faire une vraie réflexion, et faire des recommandations au gouvernement, de façon à ce qu'on lutte efficacement contre le crime organisé. Parce que ce qui est arrivé dans le procès SharQc, Mme la Présidente, c'est préoccupant. Ce qui est arrivé avec le plan de restructuration... on a besoin de savoir, on a besoin d'un plan de transparence, et, Mme la Présidente, il n'y a pas d'économie à faire sur le dos des procureurs qui luttent contre le crime organisé et il n'y a pas d'économie à faire dans la lutte contre le crime organisé parce que ça va coûter beaucoup plus cher à la société québécoise si on ne s'en occupe pas puis on laisse les bandits en liberté. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Borduas. Et, M. le leader adjoint du gouvernement, vous avez un appel au règlement?

M. Sklavounos : Oui, ce n'est pas pour prendre la parole, c'est juste sur le sujet de cette note que le collègue s'était engagé à déposer, je n'ai pas entendu le dépôt. Alors, je lui rappelle son engagement envers cette Chambre, Mme la Présidente, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. M. le député fait le dépôt à l'instant et... Vous le déposez? Très bien.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, allez-y.

M. Jolin-Barrette : Ça va me faire grand plaisir de déposer la note interne. Je suis convaincu d'ailleurs, Mme la Présidente, que la ministre avait déjà cette note-là et...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est correct, M. le député, on vous demande de déposer le document et...

Une voix : ...

Document déposé

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous n'avez plus de temps, M. le député. Vous avez terminé votre intervention. Alors, vous faites le dépôt.

Et c'est le temps maintenant de procéder à la prochaine intervention. Et, sans plus tarder, je vais reconnaître M. le député de Jean-Talon.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. C'est un plaisir pour moi d'intervenir aujourd'hui dans cette motion du mercredi, d'abord parce que c'est parmi les premières occasions que j'ai depuis le retour à l'Assemblée nationale, et je suis très heureux d'avoir l'occasion de le faire parce que, qu'on le veuille ou non, qu'on soit d'accord ou pas, que les positions divergent, c'est des sujets qui, je pense, méritent qu'on s'y attarde. Il y a des discussions, bien sûr, à avoir, il y a des opinions à partager, il y a, bien sûr, une façon de les dire, et j'espère qu'on sera capables de retrouver d'ici la fin la sérénité qui d'ordinaire est toujours au rendez-vous, mais une chose est certaine, c'est que je pense que les gens sont intéressés, et c'est important qu'on puisse avoir l'occasion de discuter de sujets qui ne sont pas dans le cadre de nos travaux réguliers. C'était mon introduction.

D'abord, peut-être se rappeler ce que c'est, pour ceux qui nous écoutent, une motion du mercredi. C'est effectivement un outil à la disposition de l'opposition, quelle qu'elle soit, pour pouvoir amener des enjeux, proposer des sujets, faire avancer des dossiers qui nous sont proches, parfois même de la législation. C'est important. C'est dans le cadre du règlement. C'est respecté, c'est respecté par tous les parlementaires, y compris par ceux qui forment le gouvernement, et tous y sont présents et participent à l'exercice démocratique lorsqu'il a lieu, chaque mercredi.

Dans le cas qui nous occupe, il y a des événements qui sont arrivés de façon ponctuelle et en parallèle qui nécessitent effectivement des explications, nécessitent qu'on en parle, qu'on en discute ou nécessitent parfois que d'autres s'y intéressent. Et on ne remet pas en question, la ministre l'a dit, il y a des choses qui doivent être dites sur ce qui s'est passé dans les dernières semaines, voire les dernières années, dans ces procès-là.

La problématique aujourd'hui, et c'est ce qui fait que vous aurez compris que notre formation politique ne sera pas en accord avec la motion aujourd'hui, c'est qu'on a tenté, je pense — et le collègue de Matane sait toute l'estime que j'ai pour lui, alors je le dis respectueusement — de mettre bien des affaires en même temps, on a tenté d'obtenir des gains politiques plutôt que de vouloir pousser de l'avant ce qu'il faut faire, c'est-à-dire de valoriser l'exercice de la justice. Il sait toute l'estime que j'ai pour lui de toute façon. Alors, l'intention, l'intention véritable m'a semblé, et comme le dit la ministre, un paquet d'amalgames, pour la raison fort simple qu'on a pris des événements qui sont séparés et on a tenté d'en faire un contexte et, dans certains cas, même une crise.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, Mme la leader adjointe de l'opposition officielle.

Mme Maltais : Je pense qu'il y a eu beaucoup d'interventions ici. Ça serait le fun qu'on revienne au débat, qu'on cesse de prêter des intentions au collègue, qui a fait un très beau plaidoyer, tout simple. Notre collègue connaît déjà les deux côtés de la Chambre, il a déjà été à l'ADQ, là il est rendu au Parti libéral, alors on aimerait ça qu'il réapprenne à vivre doucement dans l'Assemblée nationale.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, je vais inviter M. le député de Jean-Talon à... Je vous invite à la prudence. Et poursuivez votre intervention sur le sujet de la motion, s'il vous plaît.

• (16 h 10) •

M. Proulx : Bien sûr, Mme la Présidente. Un commentaire pour la collègue quand même : Je me suis déjà trouvé beaucoup plus énervé que je ne l'étais à ce moment-ci, et vous aussi, j'imagine, effectivement.

Je reviens au contexte dans lequel on est. C'est important de s'exprimer sur l'enjeu. La ministre l'a dit, il y a eu des événements qui méritent notre attention et qui ont, dans l'espace public, suscité des questions.

D'abord, l'arrêt des procédures est préoccupant, la ministre l'a dit à plusieurs reprises depuis le jugement. Et, indépendamment de la déclaration qui a été faite par la directrice du DPCP, la ministre a dit : Je veux que la lumière soit faite, mais je veux que la lumière soit faite dans le respect des compétences de chacun et surtout de l'indépendance de nos différentes institutions, indépendance qui existe en raison de la séparation des pouvoirs qui caractérisent chacune d'entre elles.

Je disais tout à l'heure... et je ne reviendrai pas sur l'opportunité et la nécessité des motions du mercredi ou des exercices comme nous faisons aujourd'hui, mais il n'en demeure pas moins que je pense, et je le dis très respectueusement, qu'on ne peut pas... et surtout je pense qu'il faut être très prudents lorsqu'on essaie parfois de faire de la politique avec des événements qui méritent d'être traités d'une autre façon. C'était le commentaire politique sur la démarche.

Il faut remettre les choses en perspective. On a parlé de la séparation. Je ne pense pas qu'on a besoin ici... Et tous les collègues sont au courant de ça, peu importe d'où on vient, quelle est notre formation ou le temps qu'on est ici, tous les collègues savent que le législatif, l'exécutif et le judiciaire jouissent d'une séparation protégée qui fait en sorte qu'on ne doit pas interférer dans l'un et dans l'autre. C'est l'assise de notre système démocratique. C'est les outils et c'est surtout la fondation de ce qui caractérise le système dans lequel on évolue et c'est ce qui fait qu'on est capables, nous, aujourd'hui, de porter parfois des préoccupations. On est capables de prendre des décisions lorsqu'on a la capacité de le faire, lorsqu'on est dans le législatif ou dans l'exécutif, mais jamais, au grand jamais, il ne faut aller se mettre les deux mains dans le judiciaire, comme l'a exprimé la ministre tout à l'heure.

Dans le cas qui nous occupe, il faut rappeler une chose, le DPCP a été créé pour renforcer cette indépendance-là. Je vais non pas faire la lecture complète et totale de ce qui a été fait aux crédits, mais, pour ceux que ça intéresse, Mme la Présidente, lors des crédits de mai dernier, il y a des questions qui ont été posées à Me Murphy la directrice de la DPCP, par notamment le collègue de Chomedey qui lui demandait de s'exprimer sur ce qu'est ou ce qui lui apparaît... ou, dans le fond, de nous expliquer où elle en est avec cette indépendance-là, de nous expliquer quels sont les... des exemples, si vous voulez, de cette indépendance-là, pour que les gens comprennent ce que ça veut dire.

Alors, Me Murphy dit... et là, bien entendu, je prends quelques extraits pour l'imager, Mme la Présidente, mais elle dit : La directrice, donc, peut nommer son personnel, ses procureurs — ça aussi, c'est une garantie d'indépendance importante — mais elle dit également que le directeur a été créé pour renforcer la confiance du public dans le système de justice pénale. C'est toujours vrai aujourd'hui. La loi sur le directeur offre plusieurs garanties d'indépendance. Je pourrais vous en énumérer, comme le processus de nomination des dirigeants, qui est un processus transparent, l'inamovibilité des dirigeants. Il y a un dirigeant des poursuites criminelles et pénales, il y a la directrice, directeur adjoint, et il y a l'indépendance financière de ces dirigeants-là, la prestation de serment, l'exclusivité des fonctions et le fait qu'on ne peut pas être membre d'un parti politique, et autres. Elle a donné des exemples comme ceux-là pour faire la démonstration qu'elle se retrouvait dans un espace où, indépendamment des orientations — et j'en parlerai dans quelques instants — qui peuvent être données par la ministre, elle a la capacité et surtout l'indépendance pour agir dans l'espace qui est le sien et dans le mandat qui est le sien.

Dans le contexte... Et j'écoutais tout à l'heure le collègue député de Matane dire que la ministre n'avait pas abusé de son pouvoir politique et qu'elle devait le faire. Dans ce cadre-là précisément, il faut que les gens nous comprennent, la façon de travailler est la suivante : la ministre peut faire des orientations. Et, si vous allez sur le site du DPCP, par exemple, exercice que j'ai fait ce matin, bien, vous les verrez, elles sont là, ces différentes directives là, elles sont inscrites, et c'est des orientations, là, qui sont très transparentes, qui paraissent à la Gazette officielle. Ce n'est pas des mots qu'on envoie ou un coup de téléphone pour dire : Voici la nouvelle façon de travailler. Non. On s'est dotés d'un système qui fait qu'on est transparents aujourd'hui, et, si on a une orientation à donner, alors, si l'exécutif, et la ministre, là, qui est investie du pouvoir, veut donner une orientation, elle peut le faire. Comment? Elle le peut le faire en écrivant. Alors, c'est par écrit qu'elle le fait, c'est diffusé et inscrit à la Gazette officielle et ça se retrouve dans les orientations du DPCP.

Dans le débat qui nous occupe, je vous ai dit d'entrée de jeu que moi, je pense que c'est correct de parler de ces choses-là, c'est correct d'exprimer qu'on a de l'incompréhension face à la décision qui a été rendue, c'est correct qu'on soit, à la limite, choqués de voir ça, dans le public, parfois parce qu'on ne comprend pas trop comment les choses fonctionnent, et là c'est notre travail et le travail du DPCP de protéger l'institution et de l'expliquer, mais parfois aussi parce qu'il faut aller vers ce qui a été mis en place par le DPCP, c'est-à-dire une réflexion, une enquête qui va nous amener à des recommandations et éventuellement à des changements pour que les choses évoluent autrement, pour qu'on ne refasse plus ce qui s'est passé.

Mais là où je pense que c'est notre... Et notre rôle, comme élu, c'est d'être prudent là-dedans pour deux choses. La première, parce que tous ici, je pense, vont partager l'avis que je vais donner, qui n'est pas le mien, dans le fond, qui est l'assise de l'ensemble de nos institutions : s'il n'y a pas la confiance du public dans ces institutions-là, elles ne pourront pas fonctionner. Si elles ne pourront pas fonctionner, Mme la Présidente, on se retrouve avec un système qui ne marche pas. Dans le contexte actuel, au bout d'un débat comme celui-là, quel qu'il soit, là, que ce soit par une motion, que ce soit dans des débats, que ce soit en commission, on est dans la situation suivante où il faut que la confiance du public soit envers l'institution, indépendante, qui agit par elle-même, sans ingérence politique, mais il faut aussi que le concitoyen, le citoyen, le public ait aussi confiance dans son législatif. Et là je parle des législateurs, je parle de nous, qui ne devons pas aller là où il ne faut pas.

Alors, ce qu'a fait la ministre dans le débat de l'arrêt des procédures, c'est tout à fait conforme à ce qu'il faut faire. Elle a respecté son rôle, le rôle du DPCP. Elle a agi rapidement, elle a agi prudemment, parce qu'elle doit le faire, mais elle y a mis toute la conviction nécessaire, parce que, qu'est-ce que vous voulez, elle a donné ses préoccupations, elle a transmis ses préoccupations au DPCP, le DPCP qui, lui, n'a pas traîné, Mme la Présidente. Rapidement, il y a eu une déclaration de faite, déclaration qu'on pourrait quasiment qualifier, et je pense que c'est les mots qu'elle utilise, d'exceptionnelle, parce qu'on n'a pas l'habitude de voir la directrice dans l'espace public. Bien entendu, c'est des gens qui sont dans l'ombre habituellement, ils ne sont pas dans la lumière comme le sont les politiciens. Mais rapidement la directrice a exposé un plan.

Alors, trois choses. La première, c'est qu'il y a eu évaluation si on devait ou non aller en appel. La ministre en a parlé, la chose a été dite et entendue, ils n'iront pas. La deuxième, c'est de nommer un président d'une enquête, Me Lortie, qui va faire cette enquête administrative là, qui est importante, à laquelle la ministre a proposé une bonification, de pouvoir aller faire une planification financière pour, à l'avenir, être en mesure de tenir des grands procès et le faire, comme le souhaitent tout le monde et les collègues, dans les délais raisonnables qui nous permettraient de les tenir et de sauvegarder, si vous voulez, le processus. Alors, ça, c'était la chose à faire, c'était ce qu'il fallait faire maintenant. Et je suis convaincu, moi, également, comme l'a été la ministre et comme d'autres observateurs qui, je pense, regardent ça de façon objective, c'était également ce qu'il fallait faire de la part du DPCP, parce que, si, éventuellement, les choses doivent être faites différemment, ce qui est fort possible... Vous aurez compris, à la lecture du jugement, qu'il y a des choses qui ont été écrites là-dedans qui nécessitent qu'on s'y arrête et que le DPCP se questionne. Mais, je vais dire, ça va inévitablement, dans un délai qui est quand même raisonnable... Dans le cas de Me Lortie, vous savez, le rapport, à moins que je me trompe, sera sur la table du DPCP pour décembre 2015.

Alors, dans les faits, je veux dire, il y a une réflexion, il y aura de l'analyse, il y aura des recommandations, il y aura, par la suite, vraisemblablement, parce que c'est ce que je comprends à la fois de ce que j'ai entendu de la ministre et du DPCP, des choses qui seront portées à la connaissance du public, mais peut-être d'autres qui ne le seront pas, non pas parce que le DPCP veut cacher des choses, mais parce que c'est dans l'ordre des choses lui-même. Alors, c'est respecter et c'est surtout protéger des enquêtes en cours que d'agir ainsi. Il faut, encore une fois, de la prudence et préserver nos différentes institutions.

• (16 h 20) •

Il a été question, et c'est là qu'on s'inscrit en faux, je pense, avec la position des collègues dans la motion aujourd'hui... Il a été longuement question de la réorganisation. Et je peux comprendre les collègues de dire : Écoutez, on a une situation particulière aujourd'hui, l'arrêt des procédures. On a une réorganisation sur le terrain et on prétend — c'est la prétention des collègues de l'opposition — que cette réorganisation-là affaiblit, dans le fond, le DPCP. Je pense que la ministre a été claire, le DPCP, elle-même, a profité de son point de presse sur... et de sa déclaration, pardon, sur l'arrêt des procédures pour dire : Je vais profiter de l'occasion pour remettre les pendules à l'heure parce qu'il y a des choses fausses qui ont été dites. Vous aurez remarqué qu'elle n'a pas lié les deux événements, elle a dit : Je profite de l'occasion parce que c'est rare que je me présente à vous pour le faire. Alors, elle a dit que les choses n'étaient pas comme on l'a entendu depuis quelques jours, voire quelques semaines, à l'effet que les effectifs vont diminuer, à l'effet que la protection du public va être affaiblie, à l'effet que le travail des procureurs va également être affaibli. Il est question d'efficacité, il est question de mieux organiser les effectifs sur le terrain. Il est question dans certains cas, et c'est la compréhension que j'ai eue de certaines lectures que j'en ai faites, de rapprocher les procureurs des palais de justice plutôt que de les garder dans des centres ou à l'extérieur des juridictions où ils iront travailler. Mais jamais, et c'est la conviction que j'ai à la lecture... et ce que j'ai entendu, jamais il n'a été question de mettre en péril l'expertise de ces procureurs-là, le travail, qu'ils ont à faire dans les enquêtes, de conseil et d'accompagnement des différents autres corps, procureurs ou policiers, au cours des différentes enquêtes.

Alors, je pense qu'on peut affirmer ici que la réorganisation n'a pas été faite pour des raisons budgétaires, n'a pas été faite, comme ils l'ont dit, pour des raisons de dogme ou de rigueur. Elle a été faite pour de l'efficacité, parce que la DPCP, avec son expertise et son équipe, a choisi et a identifié les lacunes qu'elle avait ou en tout cas ce qu'elle croyait être une meilleure organisation pour ces différents services.

Je n'ai pas besoin de vous reciter ce qui a été dit par la ministre également, je ne veux pas m'étendre là-dessus trop longtemps, mais, vous avez vu, les effectifs n'ont pas changé. Dans les faits, les procureurs expérimentés sont encore au rendez-vous. Alors, dans ce contexte-là, il ne faut pas affirmer des choses qui ne sont pas vraies, il ne faut pas faire des amalgames qui ne sont pas possibles de faire et il ne faut surtout pas laisser sous-entendre que la réorganisation qui est en cours vient affecter ce qui s'est passé avec le procès...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! Un instant, M. le député. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Bonnardel : Vous avez bien entendu le député, Mme la ministre... Mme la Présidente, pardon, qui a quand même un peu d'expérience parlementaire, prêter des intentions sur des allégations ou des commentaires que soit mon collègue...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. M. le leader adjoint du gouvernement, on va...

M. Sklavounos : ...collègue de la CAQ d'être prudent dans ses propos. Mon collègue rappelle ce fait-là simplement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup. Veuillez poursuivre, M. le député de Jean-Talon.

M. Proulx : Oui. Bien, Mme la Présidente, pour éviter que le débat se poursuive, si j'ai prêté une intention, je m'en excuse, ce n'était pas, et vous me permettrez de me répéter, mon intention. J'ai factuellement, je pense, énoncé ce que j'ai entendu. Je l'ai effectivement qualifié. Je pense que ce n'est pas la façon de faire, je pense que ce n'est pas correct, je pense que ça ne nous mène nulle part et surtout que c'est périlleux de vouloir faire ça ainsi, de faire ces raccourcis-là, mais ça, c'est une appréciation très personnelle que je fais, et soyez assurée que je ne la porte pas à quelqu'un en particulier.

Je poursuis dans le contexte du rôle qui est le nôtre. Et je pense que c'est ça qu'il est nécessaire d'expliquer aujourd'hui. La ministre a été très claire, là. Dans la démarche qui est proposée par la DPCP et qui aura lieu, dans la façon, dans le rôle et dans les pouvoirs de la ministre, elle a dit : J'ai fait part de mes préoccupations, je veux un plan. Elle a reçu un plan, est satisfaite du plan. Le plan va nous amener rapidement à des recommandations et éventuellement, un petit peu plus tard, même à un autre rapport qui viendra avec le comité d'examen sur les pratiques. Mais la ministre a également dit que, s'il devait y avoir de nouvelles orientations, ou une nouvelle orientation gouvernementale dans un cas comme celui-là, une orientation telle que vous les trouvez, là... Puis pour être certain que tout le monde comprenne puis que personne ne s'enfarge dans les mots, vous les trouvez sur le site Web du DPCP, il n'y a rien de sorcier si vous cherchez. Alors, elle a dit : Si on doit agir, par la suite, on le fera.

Mais ce qu'il ne faut pas faire lorsqu'on est un législateur qui respecte ses institutions, qui assure l'indépendance de ses institutions et qui veut conserver la confiance du public envers son rôle et son travail, c'est de décider d'avance ce qui s'est passé, de porter un jugement sur ce qui s'est fait à l'intérieur de l'institution du DPCP, c'est de vouloir écrire avant les autres les recommandations et/ou conclusions ou c'est de convenir dès maintenant que c'est pour x ou y raison que les choses se sont passées comme elles se sont passées. Je pense que ça, c'est outrepasser notre rôle. Mais ce n'est pas abandonner le nôtre qui est d'assurer la confiance du public dans nos institutions, c'est de supporter les forces policières, les procureurs, la communauté juridique dans la lutte à la criminalité, d'assurer le DPCP qu'il aura les ressources nécessaires pour pouvoir travailler. Ce n'est pas abdiquer son rôle, ça, que de respecter les façons de faire et de s'assurer que le DPCP puisse faire son enquête, sa réflexion avec lucidité, avec indépendance et, surtout, dans le contexte où il n'y aura pas de pression politique changeante en fonction des événements ou des jours qui passent, Mme la Présidente.

Moi, je vous l'ai dit d'entrée de jeu, j'étais content qu'on ait l'occasion de parler de ça, bien sûr pas en accord avec la façon dont les collègues des oppositions le font. Mais il y a une chose qui est claire, par exemple, c'est qu'on peut se satisfaire, d'abord, qu'on a respecté les façons de faire, du côté du gouvernement : on a agi rapidement dans les circonstances, ça n'a pas traîné des jours, des semaines, puis on s'est demandé quoi faire, là. Rapidement, le contact a été pris, les préoccupations ont été données. On peut se satisfaire de voir le DPCP et la directrice du DPCP protéger son institution, agir, venir sur la place publique, ce qui s'est fait très rarement — et je pense que c'était la première occasion pour elle de le faire — expliquer la situation, en quoi elle était exceptionnelle et en quoi il fallait poser des gestes maintenant, et finalement prendre le temps nécessaire, mais agir avec diligence pour que, lorsque le rapport sera connu de la DPC, lorsque ce qu'il nous sera possible pour nous de connaître, nous le connaîtrons, lorsque le public aura accès à ce qu'il est possible d'avoir accès, on sera capables ensemble de dire : Bien, voilà, ils ont fait le travail correctement, ils ont identifié les solutions qu'il faut mettre de l'avant, et ensuite on pourra, entre parlementaires, en discuter et prendre une décision.

Mais l'objectif de départ, la raison pour laquelle cette séparation des pouvoirs a eu lieu, la raison pour laquelle le DPCP a été créé, la raison pour laquelle on a supporté la lutte à la criminalité, ça, ça ne change pas. Ce n'est pas parce qu'il est arrivé ce qui est arrivé qu'on va cesser de le faire. On n'abandonne pas nos missions, on veut s'assurer que nos missions soient toujours à l'ordre du jour et soient toujours d'actualité, mais on ne le fera pas en décidant d'avance ou en ayant la prétention, si vous me prêtez l'expression — et je le dis encore respectueusement — de savoir ce qui s'est réellement passé et pourquoi les choses ont évolué comme elles ont évolué. Ça, c'est un rôle qui ne m'appartient pas, de faire de la présomption de ce qui est arrivé. Mon rôle à moi, c'est de m'assurer... Et, comme législateur, mon rôle de député... et surtout celui de la ministre qui nous représente dans le cadre de la justice au Québec, c'est de s'assurer que ceux qui ont le pouvoir d'agir le fassent, qu'ils le fassent rapidement et qu'ils nous mettent au fait des incidents ou, en tout cas, de ce qui s'est passé dans le cas de l'arrêt des procédures.

Je termine, dans le cadre de la réorganisation, en vous disant que je suis convaincu que tous et chacun... Puis de la vigilance, il y en a ici, dans cette Assemblée, Mme la Présidente. Ces choses-là seront suivies. Mais soyez assurée d'une chose, et je pense que la DPCP... je ne lui ai pas parlé, mais je suis convaincu que, si elle entend ce qu'on dit, puis si elle a entendu ce qui s'est dit, et surtout si elle a lu la raison pour laquelle existe le rôle qu'elle occupe aujourd'hui, elle sait très bien qu'il n'y a pas de compromis à faire sur la lutte à la criminalité, il n'y a pas de compromis à faire sur la sécurité des gens et il n'y a pas de compromis à faire dans la confiance envers nos institutions.

Alors, dans ce contexte-là, j'ai la conviction, moi, que la réorganisation qu'elle fait, elle le fait pour les bonnes raisons, pour de l'efficience et de l'efficacité sur l'ensemble du territoire du Québec. Je vous remercie.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Jean-Talon. Juste un instant, M. le député de Borduas, vous avez une question?

M. Jolin-Barrette : Oui, une question de règlement, Mme la Présidente. L'article 213. Je souhaiterais poser une question au collègue de Jean-Talon s'il accepte.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien, alors M. le député de Jean-Talon, est-ce que vous acceptez une question de votre collègue?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, non. Alors, nous allons passer au prochain intervenant. Je cède la parole à M. le député de Chicoutimi, qui est aussi le porte-parole en matière de justice, tout ça en vous indiquant qu'il vous reste un temps de parole de 14 min 25 s.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Merci, M. le Président. Le député de Jean-Talon évoque le droit au silence. Je pense que c'est peut-être le mieux qu'il peut faire en ce moment. D'ailleurs, avant d'intervenir, vous me permettrez de faire quelques commentaires.

Le premier, c'est lorsque le député de Jean-Talon fait référence à la séparation des pouvoirs. Écoutez, je ne ferai pas un grand tour de ce qu'est la séparation des pouvoirs, mais on n'est pas là-dedans, là. La séparation des pouvoirs, c'est entre le législatif et le judiciaire. Le judiciaire, c'est un juge qui décide devant un tribunal qu'est-ce qui arrive entre deux parties, ou trois, ou 20 parties. C'est ça, le judiciaire. Le travail d'un procureur, lui, savez-vous d'où ça vient, M. le Président? C'est un des premiers pouvoirs régaliens, porter des accusations. Ce pouvoir, il est inhérent à la fonction même d'un gouvernement. Imaginez-vous, c'est la base même. Et je suis assez bien placé pour vous le dire, M. le Président, mon père a fait cette fonction pendant neuf ans, il était procureur général, imaginez-vous. Puis le titre de procureur général a en soi une valeur, c'est celui de porter ou refuser de porter des accusations.

• (16 h 30) •

Puis je vais donner un exemple bien précis à mon collègue de Jean-Talon. Dans le cas de l'avortement, mon père est celui qui a décriminalisé l'avortement. Comment il a fait? Il n'avait pas le pouvoir de changer le Code criminel à Ottawa, nous ne sommes pas dans un pays souverain, vous le savez, Mme la Présidente. Par contre, il a le pouvoir, en vertu de l'administration de la justice, de porter ou non des accusations. Quand M. Morgentaler a été acquitté par deux ou trois jurys de façon consécutive et que la Cour d'appel renversait les décisions des tribunaux de première instance, lui-même, avocat criminel qui avait plaidé devant des cours, et peu importe son opinion sur l'avortement, il avait décidé qu'il était inacceptable qu'un jury qui reconnaît une personne innocente puisse être contesté par un tribunal d'appel. Il avait décidé, dans son rôle de Procureur général, de cesser que tout Procureur général au Québec... tous les procureurs généraux ne pouvaient maintenant porter des accusations contre le Dr Henry Morgentaler. Voilà, le travail d'un procureur général.

Et quelqu'un va me dire qu'il a agi en dehors de son pouvoir? Bien, voyons, son pouvoir, il était reconnu, il était exercé et il était justifié parce qu'il a dû le faire devant la population et dire : Voici ma décision comme Procureur général. Voici ce que je décide pour les femmes, pour l'égalité, pour le respect des tribunaux, pour le respect des jurys, pour le respect de notre société.

Alors, de me plaider la séparation des pouvoirs aujourd'hui, c'est tout sauf de la séparation des pouvoirs, Mme la Présidente, en tout respect. Je pense que même, au contraire, on devrait s'enorgueillir d'avoir un procureur général qui répond devant la population. De dire que le DPCP, c'est la première fois qu'il vient parler de ces décisions devant la population, je pense que c'est une erreur, c'est une erreur fondamentale. Comment les gens peuvent avoir confiance dans la justice quand la première règle de la justice, c'est sa transparence, c'est le fait que ça soit connu de tous et chacun.

Avant, ici, dans cette Assemblée, il y avait quelqu'un qui répondait des actes des procureurs généraux, ça a toujours été le cas pendant des décennies de façon séculaire, et je pense qu'on aurait dû peut-être, effectivement, le maintenir face à la situation qu'on est actuellement. On a fait un choix à un moment donné, et je vais y revenir, j'étais présent dans cette commission quand on a créé le DPCP, mais ce n'était surtout pas pour enlever cette responsabilité fondamentale du ministre de la Justice comme premier responsable de la justice au Québec, au contraire. Et, si le DPCP, peu importe qui il est, doit répondre des actes qui sont commis par son procureur, en aucun temps ceci n'enlève la responsabilité à la personne qui a la responsabilité d'être ministre de la Justice. C'est vrai pour elle, mais c'est vrai pour chacun des ministres, chacune des ministres, Mme la Présidente. Nous sommes les premiers répondants des actes... et surtout des actes des personnes qui relèvent directement de nous.

Et j'y reviendrai encore un peu plus loin, mais le fait d'avoir été absente, je pense que c'est une erreur, une erreur fondamentale qui déconsidère la perception de la justice par la population. Le fait que ces gens soient remis en liberté, c'est en soi une injustice. Le fait qu'ils n'aient pas ou peu d'explications compréhensibles a un impact double, soit celui de la... pour la personne, pour le public, de diminuer leur confiance dans le système de justice. Alors, quand on me dit que moi, ici, je dois m'assurer de maintenir cette confiance, je suis d'accord. Alors, comment on doit le faire? Par des actes précis, par des décisions qui renforcent les pouvoirs des procureurs généraux partout sur le territoire, Mme la Présidente.

Vous me permettrez aussi, quand on a créé le DPCP, on l'a créé dans des conditions... Souvenez-vous, c'était l'ancien ministre de la Justice qui avait été présent, M. Marc Bellemare. Et, par la suite, le gouvernement a proposé lui-même, pour se protéger lui-même, avait proposé la création du DPCP. Yvon Marcoux était ministre de la Justice, je me souviens. J'avais manifesté des craintes par rapport au fait que le ministre devait continuer à répondre des actes et assumer sa responsabilité. À l'époque, on me disait : Non, il n'y avait pas de problème. Et là on me dit aujourd'hui qu'il est indépendant, il est indépendant, le DPCP, puis que c'est une institution en soi.

Eh bien, je vais vous raconter une petite anecdote, ça va prendre une minute. Mais on avait prévu une personne pour la nommer d'un commun accord, c'était l'ancien sous-ministre aux affaires criminelles au ministère de la Justice. On l'avait convenu, là, de visu. Vous irez au rapport de la commission, nous l'avions dit dans le micro : Voici la personne — nous l'avions indiqué dans le texte — et la première personne qui sera DPCP sera cette personne. Savez-vous ce que le gouvernement a fait pour vraiment illustrer à quel point il respecte cette institution? Lorsqu'il a mis en vigueur le projet de loi par décret, il a suspendu les mots qui concernent la nomination du sous-ministre. Imaginez-vous, c'est la première fois de ma vie que j'ai vu cela. Et la dernière, parce qu'après ça j'ai changé chaque article de mise en vigueur. Alors, quand on plaide aujourd'hui que les procureurs... que le DPCP est indépendant puis qu'on veut protéger l'institution, bien, on a bien mal commencé, on a fait exactement le contraire, on l'a torpillée.

La troisième, c'est que, par la suite, on a adopté une loi spéciale contre les procureurs. Je ne sais pas si vous étiez là, Mme la Présidente, je pense que oui. Moi, j'étais présent cette nuit-là, où j'ai vu ici, dans cette enceinte, les procureurs de partout au Québec exprimer leur honte de faire partie d'un système de justice où ils étaient victimes, qu'ils n'étaient pas considérés, qu'on n'avait même pas négocié une minute avec eux, on leur avait imposé injustement des conditions inacceptables qui ne tenaient pas compte de leur réalité de travail à tous les jours. Imaginez-vous! Puis aujourd'hui on vient me plaider le respect de l'institution. J'étais là, moi, sur cette table, ici, à plaider et en disant au gouvernement : Vous faites une erreur fondamentale. Erreur qui nous a coûté cher, Mme la Présidente, très cher. Très cher, parce qu'on a brisé... Et il y a eu beaucoup de démissions de procureurs par la suite, de gens d'expérience outrés par l'attitude du gouvernement. Donc, en matière de leçon d'indépendance, on reviendra.

Ceci dit, pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui? Parce qu'en plus tout cela se fait sur fond de choix budgétaires qui ont un impact sur la réalité des procureurs sur le terrain. Ça, c'est concret, Mme la Présidente, et la ministre de la Justice doit assumer cette responsabilité. Les choix budgétaires, ce n'est pas le DPCP, là, c'est la ministre de la Justice, en collaboration — et je le sais très bien, j'ai été là — avec le président du Conseil du trésor, qui détermine les choix budgétaires et qui dit : Voici comment on va arbitrer les restrictions qu'on fait. Et je suis bien placé pour vous le dire parce que, le 18 mois que j'ai été là, en aucun temps je n'ai demandé un effort budgétaire qui allait à l'encontre des recommandations du rapport Dicaire, qui avait été déposé, je pense, en 2011. À aucun moment, ils ne trouveront rien où j'ai demandé de diminuer de quelque façon que ce soit les efforts qui étaient faits par les procureurs généraux de façon budgétaire dans leur lutte quotidienne contre le crime organisé, mais l'ensemble des crimes commis sur notre territoire. J'ai maintenu, dans un contexte budgétaire difficile, ces montants qui étaient accordés et ces engagements qui avaient été pris à l'égard de gens qui le méritent bien.

Alors, on est sur fond de choix budgétaires qui impactent, qui ont un effet à tous les jours sur des équipes qui, malheureusement, des fois, ne se sentent pas assez appuyées. Pourquoi on est ici? Parce que ce qui est arrivé est grave. Est-ce que c'est une crise? Non, ce n'est pas une crise, c'est quelque chose, Mme la Présidente, qui fait en sorte que, pour le public, il perd peu à peu confiance dans son système de justice. Et ça, c'est grave. Ça, c'est très grave. Puis on n'attendra pas une crise où tout le monde va dire que le système de justice ne répond plus aux attentes de la population. Nous sommes face à des gens... dans une situation où des criminels notoires ont été accusés et, dans certains cas, trop de cas, ont été relâchés pour des motifs qui n'ont rien à voir avec une défense liée aux actes commis, mais bien par soit l'écoulement du temps ou, dans le cas des derniers qui ont été relâchés, dû à une communication de la preuve qui n'a pas rencontré les standards de la justice. Cela demande, pour les procureurs, mais pour tout le monde, d'avoir un éclairage indépendant.

Quand on a un problème comme ça, la pire des choses, c'est de l'enterrer. On ne demande pas la tête de personne, là. Ce qu'on dit, c'est qu'au contraire on devrait mettre la lumière sur ces événements, les comprendre, voir où on a manqué, et pourquoi, et comment on peut corriger, et cela, au vu et au su de tout le monde. Oui, des parlementaires, mais de toute la population, mais aussi des procureurs. Peut-être que même ce rapport indépendant qui serait déposé, peut-être, aussi, pourrait faire émerger d'autres problématiques qui sont liées à la pratique des procureurs de la couronne. Peut-être qu'on y verrait encore une fois, malheureusement, un manque de ressources qui fait en sorte que leurs tâches sont plus difficiles à accomplir. Parce que, quand on voit une lutte organisée qu'on a faite au crime organisé suite aux événements qu'on connaît... Vous étiez là, au tournant des années 2000, on a décidé, comme société, de donner des moyens ultimes à nos pouvoirs policiers, mais aussi à nos procureurs pour leur permettre de lutter efficacement contre les groupes criminalisés. Eh bien, il ne faudrait pas, par manque de ressources, qu'on aille à l'encontre de ce qu'on a décidé ensemble.

• (16 h 40) •

Moi, j'ai vécu une époque où ces groupes de motards avaient pignon sur rue. Ils étaient même dans mon rang, dans le rang Saint-Paul, Mme la Présidente. Incroyable, hein? On leur permettait d'être présents, d'avoir leur local sur nos rues, près de nos familles, c'était inacceptable. La société s'est réveillée peut-être trop tard pour ce jeune qui était décédé, souvenez-vous, à Montréal, une victime de notre manque d'action.

Les procureurs, aujourd'hui, ce qu'ils veulent... Ils sont face à des groupes hautement organisés et ils ont besoin de notre soutien, ils ont besoin de l'appui de la ministre. Pas seulement de la DPCP, ils ont besoin de l'appui de la ministre pour dire : Nous avons besoin de moyens, et quelqu'un doit nous défendre. Si ce n'est pas la ministre, qui va le faire? Ces gens-là n'iront pas en groupe devant le bureau du président du Conseil du trésor, comme on voit actuellement, réclamer des moyens. Ils n'ont même pas le temps, Mme la Présidente, et ce n'est pas leur fonction. N'attendons pas cela, Mme la Présidente. C'est à elle à aller sur le terrain, à les rencontrer. Et ça aurait été une occasion formidable de réunir les principaux membres de ces équipes, que ce soit au niveau de la lutte organisée, mais même sur l'ensemble du territoire pour comprendre leur réalité et leurs besoins, et peut-être même de se donner des arguments supplémentaires lorsque vient le temps de négocier avec le président du Conseil du trésor ou son secrétaire, que j'apprécie d'ailleurs beaucoup, quand vient le temps de discuter de choix budgétaires qui impactent leur réalité. J'aurais aimé voir la ministre à cette conférence de presse et prendre ses responsabilités.

On n'attendra pas, Mme la Présidente, qu'il y ait d'autres criminels accusés qui soient relâchés pour des motifs qui sont liés à autre chose, qui sont liés à des questions de procédure, entre autres, de délais. J'ai posé la question aujourd'hui, Mme la Présidente. Pourquoi? Parce que je m'inquiète. Je vois ces accusations qui sont portées avec les délais qu'on anticipe actuellement. Les procureurs de la défense se préparent, c'est évident, pour invoquer ces délais. Alors, je n'irai pas vous dire que c'est la faute des juges parce que, là, j'aurais un problème, Mme la Présidente, de séparation des pouvoirs. Il y a une chose qui est claire, c'est que, si on ne donne pas plus de moyens à ces procureurs d'agir, on risque d'avoir encore plus de requêtes en rejet de procédure à cause des délais, parce qu'on n'a pas suivi les règles ou parce qu'on n'a pas suivi, dans le cas précis, les règles de communication de la preuve. Il faut, pour ramener la confiance... La première règle pour ramener la confiance, Mme la Présidente, c'est la lumière, sortir le problème, le montrer. Pas pour pointer des gens du doigt, pour, après ça, y apporter une solution concrète qui va faire en sorte que les gens disent : Oui, quand il y a des accusations de portées, quand on agit, on le fait avec les moyens suffisants pour faire en sorte que — et c'est un beau terme — justice soit rendue.

Ce que je m'attends de la ministre, c'est qu'elle prenne conscience du problème, qu'elle n'attende pas. Et, si elle ne vote pas aujourd'hui avec nous, elle peut, dans les prochains jours, dans les prochaines semaines, nous accorder ce que, je pense, les procureurs sont en droit d'attendre de la population, soit qu'on fasse toute la lumière sur ces événements et qu'en même temps on donne une voix à ces procureurs qui ont besoin de l'appui de la population et de sa ministre de la Justice. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Chicoutimi. M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Sklavounos : Oui, je vais prendre la parole, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Ah! O.K. Très bien. Vous m'avez un peu confuse. Alors, à vous la parole, M. le leader adjoint.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Et je vous rappelle qu'il vous reste un temps de parole de 5 min 55 s. Merci.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos : Je vais aller directement, Mme la Présidente. J'ai écouté attentivement toutes les interventions ici, en cette Chambre, je vais simplement... Je sais que notre collègue qui vient de prendre la parole, il a porté le chapeau de fils d'un ancien procureur général et ministre de la Justice, et il nous a parlé de la séparation des pouvoirs, et je dois dire que, strictement et techniquement, sa définition de la séparation des pouvoirs était correcte. Par la suite, il nous a parlé de l'indépendance du DPCP et il nous a donné l'exemple de son père qui aurait donné une orientation qui est une directive qu'on peut toujours donner, puisque c'est l'administration de la justice. Malgré que le droit criminel est de compétence fédérale, l'administration de la justice, et donc la façon, le quotidien de mener ça revient au provincial, il y a manière de donner des directives.

Cependant, ce que son père n'a jamais fait, c'est de s'immiscer dans la gestion d'enquêtes en cours pendant qu'on était au stade de ramasser, recueillir de la preuve, pendant qu'on était au stade d'amener les dossiers devant les tribunaux, pendant qu'on était au stade de prendre des décisions stratégiques pour pouvoir mettre en accusation des personnes. Et il ne s'immisçait pas parce qu'imaginez-vous ce que ça aurait eu comme perception dans le public, alors que le collègue nous a parlé de la perception de l'administration de la justice.

Un procureur général, un ministre de la Justice peut orienter la politique, peut aussi accorder, comme on dit, on le sait, au niveau budgétaire, des ressources. Et c'est dommage que le collègue ne nous a pas rappelé que, lorsqu'il était président du Conseil du trésor, il y a un budget qui a été déposé par ce gouvernement-là sans les crédits budgétaires, qui nous auraient permis de faire le débat sur ce qui a été alloué comme ressources à la justice, entre autres. Mais ce qu'il est très important de dire ici, que, lorsque le fils d'un ancien procureur général et ministre de la Justice commente une décision judiciaire en disant que c'est injuste que ces gens-là aient été remis en liberté, moi, je ne suis pas sûr. Je ne vais pas appeler son père. Je ne sais pas s'il écoute, mais je me demande ce que dirait son père lorsqu'on commente de cette façon une décision des tribunaux pour lesquels on ne le porte pas en appel. Alors, à quelque part, il doit y avoir une décision à quelque part...

Mme Maltais : Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Maltais : Oui. Je sais que le leader adjoint s'avance dans un domaine qu'il connaît très peu, c'est-à-dire le domaine judiciaire. Je sais que la ministre lui a remis des notes qu'il est en train d'essayer de comprendre et de décortiquer au fil et au temps qu'il parle, mais de là, Mme la Présidente, à aller dire...

Une voix : ...

Mme Maltais : ... — un instant, ce ne sera pas long — de là à aller dire qu'on ne peut pas commenter une décision qui a déjà été prise... En plus, ce n'est pas ça que dit la motion. Ça fait que, là, qu'il se démêle, puis après...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bon. Alors, ce n'est pas une question de règlement, Mme la leader adjointe. Je vous invite à poursuivre, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Rapidement. Rapidement, Mme la Présidente, Barreau 1999, stagiaire au ministre de la Justice fédéral, avocat pendant quatre ans au bureau de l'aide juridique ayant fait plus que 3 000 dossiers, deux ans et demi en pratique privée, je connais le droit criminel beaucoup plus que mon estimée collègue leader adjointe. Mais ce n'est pas ça, la question. La question, c'est que nous sommes en train de commenter un dossier pour lequel il y a encore des possibilités, il y a encore des possibilités, il y a encore des choses qui peuvent se passer devant les tribunaux. On doit être très, très, très, prudents.

La ministre, il y a deux choses qu'on a apprises et qu'on a entendues, il y a deux questions : la gestion des dossiers, puisqu'on a invoqué les délais déraisonnables et des jugements dans le passé, et le dossier récent de l'arrêt des procédures, où on dit qu'il y a eu un manquement au niveau de l'obligation de la couronne de divulguer. Je ne veux pas faire la leçon à personne, la décision Stinchcombe, c'est la décision de base, clé récente qui nous dit qu'on ne peut pas faire un procès contre une personne qui est présumée innocente en tendant une embuscade, on doit faire la pleine divulgation, ce qui pourrait favoriser la cause de la poursuite et ce qui pourrait défavoriser la cause.

Alors, à ces deux sujets, on a une réponse pour chacun des deux sujets. Au niveau du traitement des dossiers de la gestion, on a une enquête qui va nous dire comment mieux organiser. C'est ce que la ministre peut faire d'où elle est située. Et, au niveau de l'arrêt des procédures, il y a une enquête interne. Pourquoi interne? Parce qu'il y a des décisions stratégiques qui peuvent se prendre, puis il y a d'autres enquêtes qui sont en cours, et nous sommes mal placés ici pour prendre ces décisions et mettre nos mains dans des dossiers ou d'autres dossiers peuvent être en train de rouler. Ça fait que c'est très difficile de nous asseoir ici ou de se lever ici et de dire : Il faut mettre les ressources là exactement comme ça. Si le dossier est injuste, nous n'avons pas ces connaissances, nous n'avons pas ces compétences. Moi, je crois que la ministre a pris la décision responsable. Il faut respecter cette décision-là et...

• (16 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Et je suis maintenant prête à céder la parole à l'auteur de cette motion pour sa réplique, M. le député de Matane-Matapédia, et vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes.

M. Pascal Bérubé (réplique)

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. À mon tour de répliquer à tout ce que j'ai entendu. D'abord, indiquer à la ministre que la raison pour laquelle c'est le porte-parole en sécurité publique qui propose la motion, c'est qu'il y a un impact en sécurité publique. Lorsqu'on parle des Hell's Angels, on parle de criminels dangereux, bien organisés, qui ont un impact sur la sécurité du public, et ça inquiète la police, ça inquiète les enquêteurs et ça inquiète les parlementaires, et j'aimerais que ce soit partagé.

La ministre nous dit également : Pourquoi ce n'est pas le porte-parole en matière de justice qui intervient? Je pense qu'elle a eu droit à une intervention extrêmement éloquente du député de Chicoutimi qui lui démontre qu'elle a un pouvoir d'intervention.

Elle nous dit également qu'on fait des amalgames, qu'on utilise l'information qui circule, qui n'est pas nécessairement la bonne. C'est ce qu'elle nous a indiqué. Bien, je lui indique que, si elle fait référence au texte de Daniel Renaud, de La Presse, qui indique une baisse du nombre de procureurs, il maintient sa version. J'ai eu un échange avec lui il y a quelques minutes sur Twitter, il maintient sa version.

Et, dans la note que le DPCP a envoyée le 23 septembre 2015 aux membres du personnel, Me Murphy indique la chose suivante, et je cite : «En raison de ces changements, plusieurs postes de procureurs en chef et certains de procureurs en chef adjoints seront abolis. Ces personnes ont déjà été rencontrées et informées des changements. Plusieurs personnes occupant des postes réguliers dans les bureaux abolis ou fermés devront être réaffectées dans d'autres bureaux, ce qui aura pour conséquence de mettre fin à certains emplois occasionnels — d'ailleurs, ça pose la question des occasionnels, qu'est-ce qui va arriver avec ces ressources. Ces derniers seront informés dans les meilleurs délais.»

Donc, Mme la Présidente, de mon siège, j'ai confirmation que le nombre de procureurs diminuera. Et cette note qui a été évoquée par mon collègue de Borduas, que nous avons également en notre possession, nous indique, contrairement à ce que la ministre indique, qu'il y aura une baisse du nombre d'effectifs et qu'on ne sait pas à quoi ils seront occupés dans les régions. Des sources nous indiquent que, dans certains cas, ça va être la lutte contre le tabac de contrebande, par exemple, ils vont être affectés à ça.

Et moi, j'aimerais bien savoir, quand la ministre parle de la très grande criminalité, de quoi on parle parce que les procureurs nous posent la question, puis ils n'ont pas la réponse. Est-ce normal que Me Murphy nous indique qu'il n'y aura pas d'impact sur la lutte au crime organisé? Bien oui, on entend la même chose du ministère de l'Éducation. Il y a des coupures, est-ce que le ministre va nous dire qu'il y a un impact? Bien non, on va faire les choses différemment puis on va atteindre les mêmes objectifs. Bien sûr que non. Est-ce que les impacts, les effets cumulés de la baisse du nombre de procureurs, confirmée dans une note interne du DPCP, ajoutée avec la démobilisation des policiers et des enquêteurs suite au fiasco de SharQc, auront un impact sur la lutte au crime organisé? La réponse, c'est oui.

Alors, la ministre nous a indiqué qu'il n'y avait pas de quoi s'inquiéter. Elle ne nous a jamais parlé des chiffres qui ont été avancés par Daniel Renaud, de La Presse, et qu'il maintient il y a quelques minutes à peine. Donc, il y aura moins de procureurs, mais la ministre prétend qu'il n'y aura pas d'impact. Mais ce n'est certainement pas l'avis des procureurs, des gens qui luttent contre le crime organisé.

Je vais vous lire également un certain nombre de questionnements que Daniel Renaud a, et je le partage avec la Chambre. Je lui pose la question : «La ministre remet en question votre article dans La Presse.» Alors, il dit : «Les responsables ont dit, eux, même aux procureurs que le bureau unifié comptera 50 procureurs plutôt que 110.» Ensuite, il dit : «Québec se défend en disant que les autres feront du crime organisé en région, mais qu'est-ce qui va advenir des procureurs non permanents?» Ça, c'est une autre question qui est importante.

Ensuite, il dit... puis il me demande, parce que je suis en Chambre, de poser la question à la ministre. Alors, je vais le faire au nom du bien commun, lui demander ce que ça veut dire, la criminalité très organisée, les procureurs aimeraient le savoir. Et les procureurs se sont fait dire — et c'est Daniel Renaud qui nous le dit — ils pourraient maintenant faire des dossiers de tabac, traite de personnes et terrorisme. Et quelle place, enfin, aura le crime organisé et la corruption? Toujours pas de réponse.

Donc, de l'incertitude suite à l'unification des trois bureaux, une confirmation de la baisse du nombre de procureurs, aucune confirmation du rôle qu'ils auront à jouer en région, loin de leurs équipes qui étaient constituées puis qui donnaient des résultats dans le cumul de la preuve dans cette enquête-là. Donc, évidemment qu'il y aura un impact.

Je reviens sur le rôle de la ministre. J'ai lu tout à l'heure un article, l'article 24, qui indique que la ministre peut jouer ce rôle de rassurer le public, de faire en sorte qu'on obtienne toute la lumière possible, possible sur un événement d'envergure qui commande ce pouvoir de la ministre. Et, je pense, c'en est un. Lorsqu'on parle des Hell's Angels, quand qu'on parle du nombre d'accusations, de la nature des accusations, des attentes du public, je pense que ça le commande. Quand la ministre nous indique que le DPCP est indépendant, bien sûr je n'ai jamais dit que la ministre avait des liens étroits avec le DPCP, je n'ai jamais dit ça, il est indépendant.

Il y aura un rapport qui va être rendu public vraisemblablement en décembre. Moi, comme parlementaire, je n'ai aucune assurance que je vais en obtenir copie. La ministre ne l'a pas demandé non plus. Je n'ai pas entendu que, formellement, elle demande dans son intervention une copie du rapport. Est-ce que la ministre, elle, va l'obtenir? Je ne le sais pas non plus. Mais chose certaine, que ça soit ce cas ou que ça soit le cas de l'enquête qui a été commandée suite à l'évasion du centre de détention de Québec à Orsainville, dans les deux cas, on avait besoin — puis c'est moi qui ai posé les questions — on avait besoin de faire toute la lumière. Il y a des zones qui sont restées floues, ce n'est pas vrai que ça allait à l'encontre d'autres enquêtes. Dans le cas du centre de détention de Québec, il y a tellement de caviardage qu'il y a plein d'éléments qu'on ne saura jamais. Je suis convaincu, puis d'autres analystes également, que ça n'allait pas à l'encontre de l'enquête. De toute façon, pour ce que ça a donné, il est encore possible de s'évader du centre de détention de Québec, ça a été démontré récemment.

Mais, pour revenir au cas qui est celui qui nous occupe présentement, est-ce qu'il y a une crise quant à une institution fondamentale qui est les mégaprocès? Est-ce que les policiers, est-ce que les enquêteurs, est-ce que les procureurs qui ont participé à cette cause sont inquiets du message qui est envoyé? La réponse, c'est oui. Est-ce que quelqu'un peut intervenir dans cette Chambre pour rassurer le public? Une seule personne, Mme la Présidente, c'est la Procureure générale, la ministre de la Justice. Est-ce qu'il y a des gagnants au fiasco de SharQc? Oui, le crime organisé, les Hell's Angels. Est-ce que cette faille, si elle n'est pas colmatée, si on ne l'a pas comprise, va servir à nouveau à des membres du crime organisé pour s'en sortir, faire libérer des dangereux criminels? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'on nous observe présentement? Il n'y a pas seulement les analystes judiciaires, pas seulement les procureurs, mais également des avocats de la défense qui vont écouter très attentivement ce qui se dit ici, puis ils vont surtout être capables de calibrer la réponse que l'État est capable de donner lorsqu'il y a des failles dans les mégaprocès. La réponse, c'est oui également. Est-ce qu'il y a des criminels qui s'intéressent davantage aux débats de l'Assemblée nationale avec la nature des échanges qu'on a présentement? Probablement, oui aussi. Il y a beaucoup d'intérêts en jeu.

Mais chose certaine, le rôle des parlementaires, ce n'est pas seulement pour les missions essentielles de l'État que sont l'éducation, la santé et les autres affaires sociales, c'est aussi de jouer un rôle en matière de justice par l'affectation des ressources, par la ministre qui est responsable ou le ministre responsable de l'administration de la justice, de s'assurer que le choix qui est fait par le premier ministre de désigner cette personne est le meilleur choix possible pour gérer ça au Québec. Et, dans le cas présent, il nous apparaît que la ministre aurait pu intervenir. Puis je suis convaincu que je ne suis pas le seul à envoyer ce message-là, convaincu que le ministre, cette institution du ministère de la Justice, peut jouer un rôle encore plus grand. Je suis convaincu — puis c'est drôle, on a une élection partielle qui nous le rappelle — que, si le député de Fabre était encore ici, il nous dirait la même chose, convaincu de ça. Je vous invite à vous informer auprès de lui.

Je suis convaincu d'une chose, que la justice, c'est une grande institution qui est liée à a démocratie, qui fait en sorte que, dans nos grandes institutions, on a... Oui, on a parlé de la séparation des pouvoirs, mais ils sont tous importants, et que personne ne reprocherait à la ministre de jouer, dans des moments très clés de notre vie collective — puis ça, c'en est un — un rôle pour rassurer le public.

Si Me Murphy n'avait pas demandé une enquête interne vendredi dernier, qu'est-ce qui serait arrivé? Est-ce que la ministre aurait décidé de pallier cette situation en commandant une enquête? Ça, je n'ai pas entendu ça. Si c'est le cas, on pourra me le rappeler.

Tout à l'heure, la ministre a dit que je dévalorisais l'institution du DPCP, notamment avec les jeunes procureurs. Je la mets au défi de citer l'extrait où j'ai parlé de ça. Je la mets au défi, sinon de retirer ses paroles. Je n'ai jamais dit ça. Par contre, j'ai dit des choses qui sont évoquées partout dans le système de justice puis dans la lutte du crime organisé, puis c'est la même chose pour le député de Borduas. On a posé des questions légitimes, des questions que les parlementaires peuvent poser parce qu'ils ont le privilège d'être ici face à la ministre.

Et les deux demandes qu'on a essentiellement, puis je les réitère, c'est qu'avec les pouvoirs qui lui sont consentis, des pouvoirs importants — puis ce n'est pas pour rien que j'ai dit qu'on ne peut pas seulement jouir des privilèges de siéger au Conseil des ministres, mais ne pas assumer pleinement ses responsabilités — on veut qu'elle commande une enquête indépendante sur le fiasco des mégaprocès SharQc, d'autant plus qu'il y en a d'autres qui s'en viennent, mais aussi qu'elle témoigne en commission parlementaire afin d'expliquer les raisons ayant conduit à l'échec du procès SharQc et qu'elle dépose un plan de correctifs à apporter au système judiciaire et qu'une telle situation ne se reproduise plus.

Je suis convaincu que toute la communauté juridique et de la lutte au crime organisé va l'applaudir et vont lui dire que c'était la bonne chose à faire. Puis elle est capable de le faire, la ministre, puis elle peut faire ce choix-là, puis on va l'applaudir, nous aussi, puis on va être partenaires là-dedans.

Je suis convaincu que l'institution de l'Assemblée nationale aura joué un grand rôle pour protéger la justice au Québec et faire en sorte que les gens conservent la confiance qu'ils devraient avoir envers...

• (17 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Matane-Matapédia.

Mise aux voix

Alors, je vais maintenant mettre aux voix la motion, votre motion, M. le député, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale déclare que l'arrêt récent des procédures judiciaires concernant cinq membres des Hell's Angels dans le cadre du procès SharQc est un fiasco qui mine la crédibilité de la formule des "mégaprocès", un outil important pour lutter contre le crime organisé;

«Qu'elle prenne acte du fait que le juge James L. Brunton a blâmé les procureurs du Directeur des poursuites criminelles et pénales dans sa décision;

«Qu'elle note également que les forces policières québécoises ont travaillé pendant des années pour accumuler une preuve suffisante permettant de porter des accusations graves contre ces individus fortement criminalisés et que l'État du Québec y a consacré des ressources financières importantes;

«Qu'elle constate que ce fiasco survient alors que le gouvernement libéral a décidé de couper 40 % des procureurs luttant contre le crime organisé et que le gouvernement libéral n'a pas tenu son engagement de réinvestir dans les ressources du Directeur des poursuites criminelles et pénales;

«Qu'elle souligne qu'il s'agit d'une situation grave, qu'une enquête interne du DPCP n'est pas suffisante pour rétablir la confiance de la population québécoise et qu'il est du devoir de la ministre de la Justice, ultime responsable de l'administration de la justice au Québec, d'ordonner une enquête indépendante;

«Enfin, qu'à la suite de cette enquête, l'Assemblée nationale exige de la ministre de la Justice qu'elle témoigne en commission parlementaire afin d'expliquer les raisons ayant conduit à l'échec du procès SharQc, et qu'à cette occasion, elle dépose un plan de correctifs à apporter au système judiciaire afin qu'une telle situation ne se reproduise plus.»

Et cette motion est-elle adoptée? Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Maltais : Et nous vous demandons un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, qu'on appelle les députés pour un vote par appel nominal.

(17 h 3 — 17 h 13) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, j'aimerais que vous preniez place, s'il vous plaît!

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : J'aimerais que vous preniez place, s'il vous plaît, puisque nous allons procéder à la mise aux voix de la motion de M. le député de Matane-Matapédia, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale déclare que l'arrêt récent des procédures judiciaires concernant cinq membres des Hell's Angels dans le cadre du procès SharQc est un fiasco qui mine la crédibilité de la formule des "mégaprocès", un outil important pour lutter contre le crime organisé;

«Qu'elle prenne acte du fait que le juge James L. Brunton a blâmé les procureurs du Directeur des poursuites criminelles et pénales dans sa décision;

«Qu'elle note également que les forces policières québécoises ont travaillé pendant des années pour accumuler une preuve suffisante permettant de porter des accusations graves contre ces individus fortement criminalisés et que l'État du Québec y a consacré des ressources financières importantes;

«Qu'elle constate que ce fiasco survient alors que le gouvernement libéral a décidé de couper 40 % des procureurs luttant contre le crime organisé et que le gouvernement libéral n'a pas tenu son engagement de réinvestir dans les ressources du Directeur des poursuites criminelles et pénales;

«Qu'elle souligne qu'il s'agit d'une situation grave, qu'une enquête interne du DPCP n'est pas suffisante pour rétablir la confiance de la population québécoise et qu'il est du devoir de la ministre de la Justice, ultime responsable de l'administration de la justice au Québec, d'ordonner une enquête indépendante;

«Enfin, qu'à la suite de cette enquête, l'Assemblée nationale exige de la ministre de la Justice qu'elle témoigne en commission parlementaire afin d'expliquer les raisons ayant conduit à l'échec du procès SharQc, et qu'à cette occasion, elle dépose un plan de correctifs à apporter au système judiciaire afin qu'une telle situation ne se reproduise plus.»

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaudreault (Jonquière), M. Therrien (Sanguinet), Mme Maltais (Taschereau), Mme Hivon (Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Leclair (Beauharnois), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget).

M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay (Masson), Mme Lavallée (Repentigny), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Paradis (Lévis), M. Jolin-Barrette (Borduas).

Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe : M. Fournier (Saint-Laurent), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. D'Amour (Rivière-du-Loup—Témiscouata), Mme Vallée (Gatineau), M. Lessard (Lotbinière-Frontenac), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Blais (Charlesbourg), M. Reid (Orford), Mme Boulet (Laviolette), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Proulx (Jean-Talon), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Fortin (Sherbrooke), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des abstentions? Alors, Mme la secrétaire générale, pour le résultat du vote.

La Secrétaire : Pour :         40

                     Contre :           55

                     Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée. Et, pour la suite des travaux, M. le leader adjoint du gouvernement.

Ajournement

M. Sklavounos : Mme la Présidente, je fais motion pour ajourner à demain, 9 h 40, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Les travaux sont ajournés au jeudi 22 octobre, à 9 h 40. Bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 17 h 19)