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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 20 mars 2019 - Vol. 45 N° 22

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Rendre hommage au jeune Jérémy Plourde, lauréat du prix Jeunesse par excellence en
philanthropie, moins de 18 ans

Mme Geneviève Guilbault

Saluer le travail des associations de baseball mineur de la circonscription de Deux-Montagnes

M. Benoit Charette

Féliciter l'entreprise Vestshell inc., lauréate du prix Performance Québec

Mme Paule Robitaille

Exprimer de la solidarité et du soutien envers les membres de la Légion royale canadienne
de Mascouche

M. Mathieu Lemay

Inviter les aînés à partager leur vision du Québec à venir

Mme Catherine Dorion

Souligner le travail de la Fondation Nouveaux Sentiers

M. Sylvain Lévesque

Souligner le succès du 10e Rendez-vous loup-marin

M. Joël Arseneau

Souligner le 35e anniversaire du Club Optimiste Saint-Rémi inc.

Mme Danielle McCann

Rendre hommage à MM. Claude Julien et Jocelyn Déry pour leur acte de bravoure

M. Simon Allaire

Rendre hommage à Mme Louise Scrimgeour pour son engagement bénévole

Mme Jennifer Maccarone

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 17 — Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile

M. François Bonnardel

Mise aux voix

Dépôt de documents

Rapport annuel et rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes du
CISSS—Abitibi-Témiscamingue

Réponses à des pétitions

Dépôt de pétitions

Mettre fin au projet de déploiement des maternelles quatre ans et valoriser les services
éducatifs à la petite enfance


Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée le 19 mars 2019 concernant
le statut des groupes parlementaires d'opposition et la répartition des mesures et des
temps de parole à la suite de la modification à la composition de l'Assemblée

Documents déposés

Questions et réponses orales

Gestion des trop-perçus d'Hydro-Québec

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

Orientations budgétaires du gouvernement

M. Gaétan Barrette

M. Christian Dubé

M. Gaétan Barrette

M. Christian Dubé

M. Gaétan Barrette

M. Christian Dubé

Réforme du système d'immigration

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Stratégie du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques

Mme Manon Massé

Document déposé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Lutte contre l'évasion fiscale

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. Eric Girard

Processus d'appel d'offres en matière de construction de maisons des aînés

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Mme Monique Sauvé

Mme Marguerite Blais

Protection du site patrimonial de l'Île-d'Orléans

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Projet de règlement encadrant les frais scolaires

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Aide financière aux parents d'enfants lourdement handicapés

Mme Jennifer Maccarone

M. Mathieu Lacombe

Mme Jennifer Maccarone

M. Mathieu Lacombe

Mme Jennifer Maccarone

Document déposé

M. Mathieu Lacombe

Motions sans préavis

Souligner la Journée internationale de la Francophonie

Mme Paule Robitaille

Mme Nadine Girault

M. Joël Arseneau

Mme Catherine Dorion

Mme Catherine Fournier

Mise aux voix

Rappeler aux directions d'établissement de santé l'importance de maintenir de hauts
standards éthiques et de défendre le caractère public des institutions de santé

Mise aux voix

Rendre hommage à la chanteuse Nicole Martin et offrir des condoléances à sa famille et
à ses proches

Mme Nathalie Roy

Mme Isabelle Melançon

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Vincent Marissal

Mme Catherine Fournier

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 10 —  Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement
d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale

Adoption du principe

M. Jean Boulet

Mme Monique Sauvé

M. Martin Ouellet

M. Alexandre Leduc

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

Mise aux voix

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de respecter son engagement
de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec

M. Gaétan Barrette

M. Jonatan Julien

Mme Marie Montpetit

M. Éric Girard

M. Sylvain Gaudreault

M. Louis-Charles Thouin

Mme Ruba Ghazal

M. Mathieu Lemay

M. Gaétan Barrette (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 9 — Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à
répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une
intégration réussie des personnes immigrantes

Adoption du principe

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi à tous et toutes.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Vous pouvez prendre place, car nous allons débuter notre séance avec les déclarations de députés. Et, sans plus tarder, je vais céder la parole à Mme la députée de Louis-Hébert.

Rendre hommage au jeune Jérémy Plourde, lauréat du prix Jeunesse
par excellence en philanthropie, moins de 18 ans

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. J'ai l'honneur de rendre hommage, aujourd'hui, à un citoyen unique de Louis-Hébert. Bienvenue à l'Assemblée nationale, M. Jérémy Plourde!

En dépit de son jeune âge, Jérémy n'en est pas à sa première distinction. En 2018, à l'âge de 16 ans, Jérémy est lauréat du prix Jeunesse par excellence en philanthropie décerné par l'Association des professionnels en philanthropie, aux côtés des Paul Desmarais junior et de l'entreprise Saputo. Ce prix lui est décerné pour la détermination, l'audace et le leadership dont il fait preuve pour les causes qui lui tiennent à coeur.

Étant lui-même Enfant Soleil, Jérémy s'est investi dans une dizaine de levées de fonds et a récolté plus de 178 000 $ au profit d'Opération Enfant Soleil. Jérémy est en effet atteint d'une maladie neuromusculaire et d'un déficit immunitaire qui entraînent de fréquentes hospitalisations, pouvant totaliser un mois par année. Malgré la maladie, Jérémy s'est fixé l'objectif de remettre à Opération Enfant Soleil, en juin prochain, la somme de 115 000 $, qu'il espère récolter à l'aide d'activités-bénéfice.

Mme la Présidente, je rends hommage à Jérémy aujourd'hui. Et j'invite les gens de Québec à se rendre en grand nombre au Centre Vidéotron, le 7 avril prochain, pour patiner en famille pour une bonne cause, celle de Jérémy.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Et nous souhaitons la plus chaleureuse des bienvenues à M. Plourde ici, à l'Assemblée nationale.

Pour la prochaine déclaration, je vais maintenant reconnaître M. le député de Deux-Montagnes.

Saluer le travail des associations de baseball mineur
de la circonscription de Deux-Montagnes

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. À l'occasion du 50e anniversaire de Baseball Québec, je tiens à saluer les associations de ma circonscription qui permettent à de jeunes filles et à de jeunes garçons de profiter de la belle saison en jouant au baseball.

L'association du baseball amateur de Saint-Eustache chapeaute les équipes des Bisons de même que l'équipe féminine régionale, les Rebelles, sans oublier le baseball adapté et les équipes de catégories Rally-Cap à junior. Je mentionne également les Red Sox des Laurentides et leurs équipes régionales de niveau AA. Enfin, on retrouve aussi l'association du baseball amateur du Lac-des-Deux-Montagnes avec ses équipes portant le nom des Cardinals ainsi que l'équipe féminine moustique A. Là aussi, on retrouve des équipes de Rally-Cap à junior.

Je conclus en remerciant le président de cette association, M. Yves Bourdon, ainsi que tous leurs fidèles bénévoles au fil des années, dont M. Éric Francoeur. Bonne saison à toutes et à tous! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est moi qui vous remercie, M. le député. Et maintenant je me tourne vers Mme la députée de Bourassa-Sauvé pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Féliciter l'entreprise Vestshell inc., lauréate
du prix Performance Québec

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Merci, Mme la Présidente. C'est avec fierté que je félicite la compagnie de Montréal-Nord Vestshell, qui a reçu le Prix performance Québec le 15 novembre 2018. C'est la plus haute distinction remise annuellement par le gouvernement du Québec aux entreprises privées qui se démarquent par la qualité de leur gestion et par leur performance globale.

La compagnie Vestshell se spécialise dans les pièces de précision en acier, en grande partie dans le domaine aérospatial, et là-bas une trentaine de ses employés ont rédigé une charte énonçant les valeurs de l'organisation, une charte qui engage aussi l'entreprise à opter pour le développement durable. L'initiative a stimulé les employés, et toute la dynamique de l'entreprise a changé.

Toutes mes félicitations à M. Gregory Laflamme, le directeur général, et à M. Joseph Laflamme, président de Vestshell, ainsi qu'aux 135 employés de cette belle équipe! Vous faites la fierté de Montréal-Nord. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Masson.

Exprimer de la solidarité et du soutien envers les membres
de la Légion royale canadienne de Mascouche

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Mme la Présidente, comme vous le savez, cette année, notre hiver fut très ardu, et les précipitations, abondantes. Cette neige a malheureusement fait céder le toit du bâtiment de la Légion canadienne de Mascouche, un remarquable organisme de ma circonscription. Cet édifice était l'un des seuls lieux de réunion pour les vétérans, les corps de police et les Forces armées de la région. Cet événement est d'autant plus malheureux que l'édifice était mis à la disposition de nombreux autres groupes et organismes communautaires, tels que les scouts, les cadets et les Alcooliques anonymes, qui devront maintenant relocaliser leurs activités.

Seulement quelques heures avant l'effondrement, l'édifice était bondé de membres de la légion, qui y tenaient une activité. Nous pouvons donc ainsi dire que l'organisme est chanceux dans sa malchance, car personne ne fut blessé dans cet effondrement.

Maintenant, l'heure est à la reconstruction. La légion a même l'intention de profiter de ces travaux pour améliorer ses installations. Ceci étant dit, nous sommes tous solidaires avec la légion de Mascouche. Et, comme le dit son président, M. Mario Miller, les périodes difficiles ne durent jamais longtemps et elles nous endurcissent. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Masson. Et maintenant je vais reconnaître Mme la députée de Taschereau pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Inviter les aînés à partager leur vision du Québec à venir

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Merci, Mme la Présidente. On parle souvent de la jeunesse du Québec, mais moi, je voudrais parler encore une fois, dans cette Chambre, de la vieillesse du Québec. Et je veux préciser que le mot «vieillesse» est un des plus beaux mots de la langue française, j'aime beaucoup le prononcer.

Et j'ai demandé aux vieux du Québec, la dernière fois, de m'écrire à mon adresse de députée pour me dire ce qu'ils aimeraient voir perdurer du Québec après leur mort. J'ai reçu des centaines de lettres, ce n'étaient pas des messages, c'étaient des lettres, qui étaient extrêmement émouvantes et qui parlaient, pour un grand nombre d'entre elles, de protéger la nature du Québec et de protéger la bienveillance du Québec, de protéger l'ouverture des gens, le climat; non seulement le climat de la nature, mais aussi le climat social.

Donc, ça a été tellement beau, ce que j'ai reçu, que je me suis dit : Je ne peux pas faire quelque chose d'autre qu'un recueil, où les plus beaux extraits de ces lettres-là seraient publiés. Donc, je veux dire à la vieillesse du Québec : Continuez de m'écrire, on est en train de rassembler ça et on va faire un superbe recueil. Alors, lâchez-vous lousse, allez-y, inspirez-vous. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, Mme la députée de Taschereau. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Chauveau.

Souligner le travail de la Fondation Nouveaux Sentiers

M. Sylvain Lévesque

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je veux souligner aujourd'hui l'excellent travail d'un organisme qui a pour objectif l'amélioration des conditions de vie des Premières Nations, notamment auprès des enfants, et qui est situé à Wendake, la Fondation Nouveaux Sentiers. Je rends hommage à l'équipe de cette fondation qui, depuis 2010, redistribue des fonds à des organismes qui soutiennent des initiatives pour enrayer diverses problématiques, comme par exemple la lutte à la pauvreté, et aussi pour encourager la persévérance scolaire, la pratique du sport et de loisirs.

Salutations à Mme Marie-Claude Cleary, directrice de la fondation, ainsi qu'au président, M. Mickel Robertson. Je souligne aussi la vision des fondateurs, MM. John Martin, Andrew T. Delisle et le regretté Aurélien Gill.

Travaillons ensemble à poursuivre cette oeuvre basée ici, à l'initiative des gens d'ici, pour les membres des Premières Nations partout au Québec. «Kwe.» Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Chauveau. Et nous vous souhaitons à vous aussi la bienvenue à l'Assemblée nationale.

Maintenant, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, la parole est à vous.

Souligner le succès du 10e Rendez-vous loup-marin

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. Il y a quelques jours se déroulait aux Îles-de-la-Madeleine la 10e édition du Rendez-vous loup-marin. Je tiens aujourd'hui à saluer dans cette Chambre cette initiative qui redonne année après année ses lettres de noblesse à la pratique centenaire de la chasse au phoque dans l'archipel.

Après des décennies de désinformation et de discours mensongers et parfois calomnieux envers les chasseurs madelinots, la communauté se lève et célèbre chaque année la chasse traditionnelle, conjuguée au présent et tournée vers l'avenir. Le Rendez-vous loup-marin, c'est à la fois l'occasion de proclamer la fierté de ce que nous sommes, mais aussi l'obligation de nous défendre, d'informer et de réclamer le respect qui nous est dû comme peuple de chasseurs, de pêcheurs, de gens de mer qui vivent en harmonie avec la nature environnante.

Je tiens à souligner le travail des organisateurs du Rendez-vous loup-marin, le Centre d'interprétation du phoque et l'association des chasseurs de phoque intracôtiers, qui célèbrent respectivement leur 25e et leur 35e anniversaire cette année. Grâce à vos efforts, notre communauté se dresse, droite et fière, l'industrie se relève, et l'avenir est prometteur.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Sanguinet.

Souligner le 35e anniversaire du Club
Optimiste Saint-Rémi inc.

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Merci, Mme la Présidente. C'est le Club Optimiste de Carignan qui a fondé et parrainé le club de Saint-Rémi. Le 1er février 1984, ils ont recruté 25 hommes impliqués dans la communauté, et encore aujourd'hui sept de ces 25 membres fondateurs sont encore actifs au sein du club. On y organise le carnaval de Saint-Rémi et Appréciation jeunesse. Les billets Opti-Voyages voient le jour, et c'est la principale source de financement pour effectuer toutes les activités jeunesse et les dons aux organismes. En 1985‑1986, le club accepte les femmes. En 1987, c'est la fondation du Club Octogone, club formé avec des jeunes. En 1990, le Club Opti-Jeunes est formé avec des jeunes superimpliqués. En 1993‑1994, la première sécurité sur roues et course de boîtes à savon. En 1994 et 1995, une première femme devient présidente. En 1995, le club devient maître d'oeuvre d'Opération Nez Rouge Saint-Rémi. Et le club a également remis 15 000 $ en dons à différents organismes.

En 2019, avec 36 membres dévoués, le Club Optimiste de Saint-Rémi a de quoi être fier des réalisations passées. C'est donc avec un immense plaisir que je leur souhaite une bonne continuité pour leur 35e anniversaire. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Sanguinet. Et maintenant, pour clore cette rubrique de déclarations de députés, je cède la parole à M. le député de Maskinongé.

Rendre hommage à MM. Claude Julien et Jocelyn Déry
pour leur acte de bravoure

M. Simon Allaire

M. Allaire : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je veux rendre hommage à deux citoyens de Sainte-Ursule, Claude Julien et Jocelyn Déry.

Le 22 novembre dernier, alors qu'ils se rendaient au travail, les deux hommes ont aperçu de la fumée s'échappant d'une résidence à Sainte-Angèle-de-Prémont. Instinctivement, ils ont immédiatement réagi afin de sauver les occupants, Réal et Rollande Rivard, âgés de 98 et 96 ans. Ils les ont sortis de la maison et mis en sécurité chez un voisin. En plus de sauver le couple de personnes âgées, ce jour-là, les deux héros ont également aidé les pompiers et notamment en gérant la circulation.

Si les deux hommes n'avaient pas réagi, ce jour-là, 15 minutes plus tard le feu aurait ravagé la résidence, et les occupants ne seraient plus là pour en témoigner aujourd'hui. C'est donc du fond du coeur, en mon nom, au nom de toute la communauté ainsi qu'au nom de mes collègues que je tiens aujourd'hui à souligner cet acte de bravoure. Claude Julien et Jocelyn Déry, cette date restera marquée dans nos mémoires, ce jour où votre courage a sauvé deux vies. Merci et bravo!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Maskinongé. Et j'avais fait erreur puisque ce sera Mme la députée de Westmount—Saint-Louis qui va clore cette rubrique de déclarations de députés. La parole est à vous.

Rendre hommage à Mme Louise Scrimgeour
pour son engagement bénévole

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. C'est un honneur pour moi de rendre hommage aujourd'hui à Mme Louise Scrimgeour, une figure emblématique avec 34 ans de bénévolat à son actif au Centre des femmes de Montréal, un organisme sans but lucratif établi depuis 1973 au coeur de ma circonscription de Westmount—Saint-Louis dont la mission consiste à offrir des services professionnels, éducatifs, de conseil et d'orientation pour les femmes à s'aider elles-mêmes.

Surnommée la mère Noël du centre, au fil des ans elle a fait le bonheur de plusieurs milliers d'enfants. Depuis 1985, elle consacre son temps lors des campagnes de Noël annuelles organisées par le Centre des femmes. Chaque année, début de décembre, mère Noël réapparaît au centre pour procéder au tri, à la réparation et l'emballage des jouets... son temps, lors des campagnes de Noël; des jouets généreusement offerts par la population de Montréal.

Félicitations et merci à Mme Scrimgeour pour votre générosité et votre engagement, qui a fait et qui continue de faire une différence dans la vie de milliers de familles montréalaises!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Et ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.

Et je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 54)

(Reprise à 10 h 1)

Le Président : Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir. J'en profite pour vous souhaiter un bon mercredi. Bon mercredi à toutes et à tous.

Nous poursuivons les affaires courantes. Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

Des voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement? Merci.

M. Jolin-Barrette : Bonjour, M. le Président, bonjour. Alors...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, alors, je suis...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Un peu de silence. On reprend notre calme. M. le leader du gouvernement, à vous la parole.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Je suis heureux de constater que mes collègues d'en face sont de bonne humeur aujourd'hui, on va passer une bonne journée.

Alors, M. le Président, je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 17

Le Président : À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile. M. le ministre.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, très heureux de déposer la loi n° 17, Loi concernant le transport rémunéré de personnes par automobile.

Ce projet de loi a pour objet la surveillance et le contrôle du transport rémunéré de personnes par automobile en vue d'assurer la sécurité des passagers et la transparence du prix des courses, et ce, dans une perspective d'équité. Il vise également à favoriser l'émergence de moyens technologiques et de modes de mobilité.

Plus précisément, le projet de loi prévoit que tout transport rémunéré de personnes par automobile doit être offert et effectué au moyen d'une automobile qualifiée conduite par un chauffeur qualifié, sauf dans le cas de certains transports que le projet de loi précise. À cette fin, il établit qu'une personne peut se qualifier comme chauffeur et qu'une automobile peut se qualifier pour être utilisée pour du transport de personnes soit en étant autorisée à ce titre par la Société de l'assurance automobile du Québec, soit en étant inscrite auprès d'un répondant d'un système de transport autorisé par la Commission des transports du Québec. Il prescrit les conditions et modalités applicables à une telle autorisation ou inscription.

Le projet de loi encadre l'autorisation, par la commission, d'un système de transport rémunéré de personnes par automobile. Il prévoit qu'un tel système regroupe plusieurs chauffeurs et automobiles sous la responsabilité d'une personne morale qui en est le répondant. Entre autres, il confère à ce répondant la responsabilité d'assurer la surveillance des chauffeurs et des automobiles inscrits auprès de lui.

Le projet de loi prévoit qu'une personne qui fournit des services de répartition de demandes de courses doit être enregistrée auprès de la commission.

Le projet de loi précise les obligations auxquelles sont tenus un chauffeur qualifié, un propriétaire d'une automobile qualifiée, un répondant ainsi qu'un répartiteur.

Le projet de loi renferme des dispositions relatives à la détermination du prix des courses et des autres frais qui peuvent être exigés des clients. Entre autres, il prescrit que le calcul du prix d'une course sera déterminé conformément aux tarifs établis par la commission, sauf si la demande de course est faite par certains moyens technologiques qui permettent au client d'en connaître le prix maximal et d'y consentir avant que le chauffeur ne soit informé de la demande. Il détermine également les sommes qui peuvent être exigées annuellement pour le maintien d'une autorisation octroyée par la société ou par la commission.

Par ailleurs, le projet de loi réserve la dénomination «taxi» aux automobiles utilisées pour offrir ou effectuer du transport de personnes lorsqu'une course peut être demandée autrement que par certains moyens technologiques et dont le prix sera fixé conformément aux tarifs établis par la commission. Il propose notamment que seul un taxi puisse effectuer une course lorsque le chauffeur est hélé, que la course est autrement demandée de personne à personne ou qu'elle est demandée oralement par téléphone. Il propose également diverses modalités particulières applicables au transport collectif et au covoiturage.

Le projet de loi comporte des dispositions relatives aux inspections et aux enquêtes, des dispositions pénales de même qu'un régime de sanctions administratives pécuniaires. Il renferme aussi des dispositions assurant le respect des principes d'équité procédurale dans le cadre des décisions prises par la société et la commission et donne aux personnes et aux groupements visés par une décision défavorable la possibilité de la contester devant le Tribunal administratif du Québec.

Le projet de loi donne le pouvoir au gouvernement de déléguer à certains organismes, dont les municipalités, les sociétés de transport en commun et l'Autorité régionale de transport métropolitain, l'application de certaines dispositions. Il confère par ailleurs à la ville de Montréal la compétence d'exercer certains pouvoirs qui peuvent être délégués à un tel organisme.

Enfin, le projet de loi abroge la Loi concernant les services de transport par taxi et modifie diverses dispositions à des fins de concordance. Il contient des dispositions transitoires concernant notamment le paiement d'une redevance, certains permis déjà délivrés ainsi que les services de transport rémunéré de personnes dont la mise en oeuvre est autorisée par un projet pilote.

Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : Oui, M. le Président. D'abord, oui, nous acceptons d'être saisis du projet de loi. Est-ce que le collègue leader du gouvernement peut s'engager à ce qu'on puisse tenir des consultations en ce sens? Et je tiens, par ailleurs, également à souligner, M. le Président, il y avait un briefing technique ce matin, nous aurions apprécié être présents; peut-être pour une prochaine fois, dans de telles circonstances. Merci.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Deux éléments. Oui, nous tiendrons des consultations. D'ailleurs, j'invite le leader de l'opposition officielle à nous faire parvenir leurs groupes.

Deuxième élément, au niveau du briefing technique, nous nous sommes engagés à tenir un briefing technique pour les députés d'opposition, comme ça se faisait à l'époque où le Parti libéral était au gouvernement. Alors, le briefing technique auquel le collègue fait référence était avec les journalistes, et donc il y aura un briefing technique spécifique pour les élus de chacune des formations politiques, comme c'est l'habitude et comme c'était l'habitude du Parti libéral lorsqu'il était au gouvernement.

Le Président : Alors, l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi. Donc, adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Rapport annuel et rapport sur l'application de la procédure
d'examen des plaintes du CISSS
—Abitibi-Témiscamingue

Mme McCann : M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport annuel 2017‑2018 sur l'application de la procédure des plaintes et de l'amélioration de la qualité des services, ainsi que le rapport annuel de gestion 2017‑2018 du Centre intégré de santé et services sociaux de l'Abitibi-Témiscamingue. Merci.

Le Président : Ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions déposées le 6 février 2019 par le député de Beauharnois et le 14 février 2019 par le député de LaFontaine. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont également déposés.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Joliette.

Mettre fin au projet de déploiement des maternelles quatre ans
et valoriser les services éducatifs à la petite enfance

Mme Hivon : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 31 990 pétitionnaires. Et je tiens à souligner la présence des instigatrices de cette pétition, qui sont dans nos tribunes. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les centres de la petite enfance et les services éducatifs en milieu familial basent leurs interventions sur le programme éducatif Accueillir la petite enfance, fondé notamment sur des principes d'apprentissage par le jeu;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial offrent un soutien à la parentalité, par des échanges quotidiens et de l'accompagnement personnalisé;

• (10 h 10) •

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial sont des environnements adaptés et sécuritaires — notamment parce qu'ils offrent du matériel éducatif spécialisé, la vérification d'absence d'empêchement et l'inspection régulière [des] modules[...] — et qu'ils constituent des milieux de vie ayant des impacts significatifs sur le développement global des enfants, grâce à des pratiques respectueuses du rythme individuel de chacun;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial offrent une plage horaire de 10 heures par jour et un service en continu pendant toute l'année;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial effectuent, dès le jour un, des observations permettant le dépistage précoce de troubles pouvant affecter le développement global des tout-petits;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec :

«De reconnaître l'expertise des CPE et des services éducatifs en milieu familial;

«De mettre fin au projet de déploiement universel [mur à mur] des maternelles quatre ans et de se concentrer sur l'accessibilité et le renforcement des milieux déjà existants qui sont aptes à soutenir l'acquisition des habiletés essentielles pour une entrée réussie à l'école à cinq ans.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Cet extrait de pétition est déposé. J'ai reçu une demande de Mme la députée de Joliette pour la présentation d'une pétition non conforme. Y a-t-il consentement pour la présentation de cette pétition? Consentement. Mme la députée.

Mme Hivon : Vous allez avoir un petit sentiment de déjà-vu. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 7 655 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les centres de la petite enfance et les services éducatifs en milieu familial basent leurs interventions sur le programme éducatif Accueillir la petite enfance, fondé notamment sur des principes d'apprentissage par le jeu;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial offrent un soutien à la parentalité, par des échanges quotidiens et de l'accompagnement personnalisé;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial sont des environnements adaptés et sécuritaires — notamment parce qu'ils offrent du matériel éducatif spécialisé, la vérification d'absence d'empêchement et l'inspection régulière de modules[...] — et qu'ils constituent des milieux de vie ayant des impacts significatifs sur le développement global des enfants, grâce à des pratiques respectueuses du rythme individuel de chacun;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial offrent une plage horaire de 10 heures par jour et un service en continu pendant toute l'année;

«Considérant que les CPE et les services éducatifs en milieu familial effectuent, dès le jour un, des observations permettant le dépistage précoce de troubles pouvant affecter le développement global des tout-petits;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec :

«De reconnaître l'expertise des CPE et des services éducatifs en milieu familial;

«De mettre fin au projet de déploiement universel [mur à mur] des maternelles quatre ans et de se concentrer sur l'accessibilité et le renforcement des milieux déjà existants qui sont aptes à soutenir l'acquisition des habiletés essentielles pour une entrée réussie à l'école à cinq ans.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Cet extrait de pétition est maintenant déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Décision de la présidence sur la demande de directive soulevée le 19 mars 2019
concernant le statut des groupes parlementaires d'opposition et la
répartition des mesures et des temps de parole à la suite de la
modification à la composition de l'Assemblée

Je suis maintenant prêt à rendre ma décision au sujet de la demande qui m'a été adressée hier par le leader du troisième groupe d'opposition à la suite de la décision de la députée de Marie-Victorin de siéger à titre de députée indépendante. Ces questions concernent le statut des deuxième et troisième groupes parlementaires actuellement reconnus, ainsi que la répartition des mesures et des temps de parole. Je tiens d'abord à féliciter les leaders des deuxième et troisième groupes d'opposition pour leurs arguments bien étoffés et qui ont bien fait ressortir toutes les dimensions de la question que je m'apprête à trancher aujourd'hui. Je remercie également le leader du gouvernement et de l'opposition officielle pour la qualité de leurs interventions. D'abord, permettez-moi un retour sur ces interventions.

D'emblée, le leader du troisième groupe d'opposition rappelle que, traditionnellement, les troupes parlementaires ou les groupes parlementaires d'opposition occupent un rang déterminé par le nombre de députés qui les composent. À ce sujet, il souligne que ce n'est que lorsque deux partis ont fait élire le même nombre de députés que le nombre de voix exprimées peut être pris en compte. Il soutient d'ailleurs que le rang des groupes est le seul élément de l'entente déterminé par le pourcentage des voix. Pour le reste, les droits conférés aux deux groupes sont égaux.

Selon lui, il serait déraisonnable que cette entente, intervenue en début de législature, fixe de manière définitive et finale le fonctionnement de l'Assemblée sans égard aux changements qui pourraient survenir dans sa composition en cours de législature. Il est donc d'avis que les rangs des groupes parlementaires doivent être revus.

Pour sa part, le leader du deuxième groupe d'opposition rappelle l'importance de la volonté démocratique exprimée par les citoyens lors des élections. Il affirme que le résultat des plus récentes élections générales est le facteur qui détermine la reconnaissance des groupes parlementaires. Selon lui, il en va de même du rang qu'occupent, entre eux, les groupes parlementaires d'opposition.

Il est donc d'avis que l'entente intervenue entre les partis au début de la législature, telle que rédigée, ne reconnaissait pas simplement le Parti québécois comme groupe parlementaire, mais expressément comme deuxième groupe d'opposition.

Selon lui, ce texte est clair, limpide et ne prête à aucune interprétation divergente. Il ajoute qu'une entente conclue à l'unanimité ne peut être modifiée par la présidence puisque l'Assemblée est seule compétente pour modifier ses règles de procédure.

Quant au leader du gouvernement, il rappelle que la reconnaissance des partis d'opposition à titre de groupes parlementaires a été consentie pour que tous les députés disposent des meilleurs outils pour faire leur travail.

De son point de vue, les résultats électoraux ont été pris en compte parce que le Parti québécois et Québec solidaire ont fait élire le même nombre de députés. Toujours selon lui, bien que l'un des objectifs de l'entente ait été de déroger au règlement, il n'a jamais été question de déroger aux règles relatives aux rangs des groupes parlementaires d'opposition. Il attire également l'attention de la présidence sur les impacts potentiels sur la répartition des mesures et des temps de parole.

Enfin, le leader de l'opposition officielle souligne l'aspect singulier de la situation dans l'histoire parlementaire. Il rappelle la nécessité pour la présidence de maintenir un équilibre entre les droits de tous les parlementaires. Il rappelle également le respect de la reconnaissance et de la composition de l'institution. Il nous convie à revoir notre règlement de manière globale et à éviter, à l'avenir, de travailler à la pièce. Il conclut en invitant la présidence à se prononcer sur la base de critères objectifs qui guideront les parlementaires dans le futur.

Je rappelle qu'au début de l'actuelle législature des discussions ont eu lieu et ont lieu entre les différents partis politiques représentés à l'Assemblée. Ces discussions ont mené à la conclusion d'une entente qui portait entre autres sur la notion de reconnaissance des partis comme groupes parlementaires et la répartition des mesures et des temps de parole.

La question dont je suis saisi aujourd'hui touche à ces deux aspects. Je compte donc les aborder successivement, en commençant par la répartition des mesures et des temps de parole.

Comme je l'indiquais dans la directive que j'ai rendue, et c'était le 29 novembre 2018, étant donné que la répartition des différentes mesures et des temps de parole prévue dans l'entente respecte les principes élaborés par la jurisprudence parlementaire en pareilles matières, la présidence a donné suite au désir exprimé unanimement par les groupes. J'ai toutefois précisé que, comme ce fut le cas par le passé, la présidence pourrait être amenée à ajuster cette répartition au cours de la législature advenant des changements dans la composition de l'Assemblée.

En effet, plusieurs articles de notre règlement confient à la présidence le devoir de répartir les mesures parlementaires et les temps de parole entre les groupes parlementaires, en tenant compte de la présence de députés indépendants. L'application de ces dispositions a d'ailleurs donné naissance à une jurisprudence parlementaire étoffée qui guide la présidence en début de la législature et au cours de celle-ci lorsque la composition de l'Assemblée est modifiée par la tenue d'élections partielles, par exemple, ou à la suite de l'arrivée de députés indépendants.

Ainsi, lorsque nécessaire, la présidence met à jour la répartition des mesures parlementaires et des temps de parole. C'est d'ailleurs ce que j'ai fait le 5 février 2019, alors que j'ai déposé des tableaux pour refléter les effets de l'élection de la députée de Roberval sur la répartition des déclarations de députés et des temps de parole lors des débats restreints.

En raison de mon rôle de gardien des droits et privilèges de tous les parlementaires, je me dois aujourd'hui de modifier à nouveau la répartition des mesures et des temps de parole afin d'octroyer des droits à la députée de Marie-Victorin, ce qu'elle me demande d'ailleurs dans sa lettre du 11 mars 2019.

La pratique observée depuis de nombreuses années à l'Assemblée veut que, lorsqu'un député membre d'un groupe parlementaire quitte celui-ci pour siéger comme indépendant, les mesures qui lui sont reconnues proviennent généralement du groupe auquel il appartenait jusqu'alors.

Suivant ce principe, les questions lors de la période des questions et les déclarations de députés qui pourront être utilisées par la députée de Marie-Victorin proviendront de celles dont bénéficie jusqu'à maintenant le groupe parlementaire formé par le Parti québécois. Pour ce qui est des débats restreints, le temps prévu pour la députée de Marie-Victorin sera équivalent à celui prévu pour le député indépendant de Chomedey. Comme dans le cas de ce dernier, ce temps est réduit de l'enveloppe globale et le reste du temps est réparti de la manière suivante : 50 % du temps est attribué au gouvernement, l'autre 50 % est attribué aux groupes d'opposition selon la proportion du nombre de sièges qu'ils détiennent. Je déposerai, d'ailleurs, à la fin de ma directive, les tableaux qui illustrent ces nouvelles répartitions.

• (10 h 20) •

J'en viens maintenant à la deuxième question dont je suis saisi, soit celle de la reconnaissance et du rang des groupes parlementaires d'opposition.

 Selon les termes de cette entente, les partis ont convenu de reconnaître, et je cite, «pour la durée de la 42e législature, le Parti québécois comme 2° groupe parlementaire d'opposition et Québec solidaire comme 3° groupe parlementaire d'opposition, et ce, malgré les dispositions de l'article 13 du Règlement de l'Assemblée nationale». Fin de la citation.

À la suite du dépôt de cette entente par le leader du gouvernement lors de la séance du 29 novembre 2018, l'Assemblée a adopté une modification temporaire à l'article 13 du règlement, qui prévoit ceci, et je cite à nouveau : «Tout parti politique représenté à l'Assemblée nationale à la suite des élections générales du 1er octobre 2018 constitue un groupe parlementaire.» Fin de la citation.

Or, à la suite de la décision de la députée de Marie-Victorin de siéger comme députée indépendante, le groupe parlementaire formé par le Parti québécois compte désormais moins de membres que le groupe parlementaire formé par Québec solidaire.

La question qui se pose est donc de savoir si, dans ces circonstances, le Parti québécois peut conserver son titre de deuxième groupe parlementaire d'opposition.

Il importe d'abord de différencier deux notions distinctes qui ont été abordées lors des plaidoiries, soit, d'une part, la reconnaissance d'un parti comme groupe parlementaire et, d'autre part, le rang qu'occupent les groupes parlementaires au sein de l'opposition.

Comme le mentionne le leader du deuxième groupe d'opposition, il est vrai que c'est le résultat des élections générales qui est déterminant quant à la reconnaissance d'un parti comme groupe parlementaire. À cet égard, on tient compte de la volonté exprimée par les électeurs. Ainsi, lorsqu'un parti politique respecte les critères établis à l'article 13 de notre règlement, soit d'avoir fait élire au moins 12 députés ou avoir obtenu au moins 20 % des voix lors des plus récentes élections générales, il forme un groupe parlementaire pour la durée de la législature, et ce, indépendamment des changements qui pourraient survenir en cours de législature. Concrètement, cela veut dire que, si un parti politique qui a fait élire 12 députés passe sous la barre des 12 députés en cours de législature, il continuera tout de même à être reconnu comme groupe parlementaire. Même chose pour un parti ayant obtenu 20 % des voix aux dernières élections qui continuerait d'être reconnu comme groupe parlementaire, même s'il perdait des... Même s'il perdait... ou si 12 députés décidaient de siéger sous la bannière d'un nouveau parti politique en cours de législature, ce dernier ne pourrait pas être reconnu comme groupe parlementaire, puisque ce parti n'aurait fait élire aucun député aux dernières élections générales ni obtenu aucun vote sous cette bannière.

Depuis 2009, il est arrivé à deux occasions que les partis représentés à l'Assemblée s'entendent pour changer les critères de reconnaissance comme groupe parlementaire afin de permettre à un parti qui ne répond pas aux critères prévus au règlement d'être tout de même considéré comme un groupe parlementaire pour la durée de la législature. C'est ce qui s'est fait au début de l'actuelle législature afin de reconnaître le Parti québécois et de reconnaître Québec solidaire comme groupes parlementaires. C'est aussi la même chose qui s'était produite pour reconnaître l'Action démocratique du Québec comme groupe parlementaire lors de la 39e législature.

Dans ces deux cas, c'est en référence aux résultats des élections générales que le statut de groupe parlementaire a été reconnu pour la durée de la législature.

C'est pourquoi, au cours de la 39e législature, l'Action démocratique du Québec a conservé son statut de groupe parlementaire lorsque deux députés ont quitté ce groupe pour siéger comme indépendants.

Cela explique aussi pourquoi l'Action démocratique du Québec a perdu son statut de groupe parlementaire lorsque ses députés, avec d'autres, ont décidé de siéger sous la bannière de la Coalition avenir Québec, qui n'avait fait élire aucun député aux élections générales.

À la lumière de ces principes et de ces précédents, il me semble évident que le Parti québécois doit continuer d'être reconnu comme groupe parlementaire, puisqu'il respecte toujours les critères établis pour la durée de la 42e législature.

Qu'en est-il maintenant du rang des groupes parlementaires au sein de l'opposition?

L'entente prévoit que, pour la durée de la 42e législature, sur la base des résultats électoraux du 1er octobre 2018, les partis politiques représentés à l'Assemblée conviennent de reconnaître le Parti québécois comme deuxième groupe parlementaire d'opposition et Québec solidaire comme troisième groupe parlementaire d'opposition.

Il importe ici de mentionner que l'ordre établi dans l'entente reflète la situation telle qu'elle existait alors, c'est-à-dire lorsque le Parti québécois et Québec solidaire étaient tous deux formés de 10 députés.

En effet, c'est uniquement en raison de cette égalité quant au nombre de députés élus lors des élections générales du 1er octobre 2018 qu'il a été décidé d'attribuer le statut de deuxième et de troisième groupe parlementaire d'opposition selon un critère objectif, soit celui du pourcentage de voix obtenu aux dernières élections.

À titre comparatif, le deuxième paragraphe de l'article 88 de la Loi sur l'Assemblée nationale réfère lui aussi au pourcentage de votes obtenus pour départager, en cas d'égalité de sièges, lequel des partis d'opposition pourra désigner un de ses députés pour être un membre du Bureau de l'Assemblée nationale.

L'entente du début de la législature a donc été conclue en fonction de la composition de l'Assemblée qui prévalait alors.

Maintenant, on peut difficilement prétendre que l'entente a pour effet de figer l'Assemblée dans l'état où elle était au début de la législature, et ce, sans égard aux changements à la composition de l'Assemblée pouvant survenir.

Il importe de préciser qu'une entente entre partis politiques est habituellement conclue au début de chaque législature. Une telle entente traite au besoin de la reconnaissance des groupes parlementaires, des budgets, des mesures de contrôle et de tout autre sujet que les partis désirent aborder. Comme je le mentionnais précédemment, la présidence doit régulièrement ajuster la répartition prévue dans l'entente en fonction de la composition de l'Assemblée.

De fait, une législature n'est pas figée pour quatre ans. Le règlement prévoit d'ailleurs à l'article 15, et je cite : «Le député qui quitte un groupe parlementaire sans adhérer à un autre groupe parlementaire siège à titre d'indépendant.

«Celui qui siège à titre d'indépendant peut adhérer à un groupe parlementaire.» Fin de la citation.

De même, tout député peut démissionner en cours de législature, ce qui donne lieu à une élection partielle, laquelle peut également avoir pour effet de modifier la composition de l'Assemblée.

Il serait donc contradictoire que le droit parlementaire permette des changements à la composition de l'Assemblée en cours de législature, tout en fixant cette dernière au stade où elle était en début de législature.

Au surplus, il serait également particulier de permettre — comme c'est le cas depuis toujours — des modifications par la présidence à la répartition des mesures de contrôle, qui font également partie de l'entente, tout en figeant le rang des groupes.

En effet, il serait difficilement justifiable qu'un parti qui compte désormais neuf députés occupe un rang supérieur à celui qui en compte 10.

Il est vrai que, lors de la 39e législature, l'Action démocratique du Québec avait conservé son statut de deuxième groupe parlementaire, et ce, même après avoir perdu deux de ses députés. Cependant, cela n'avait pas eu pour effet de remettre en cause son rang parmi les groupes d'opposition, puisqu'elle constituait déjà le groupe parlementaire le moins nombreux.

À cet égard, pour déterminer le rang qu'occupe un groupe parlementaire au sein de l'opposition, c'est le nombre de députés qui composent un groupe parlementaire qui est déterminant. C'est d'ailleurs ce critère qui est utilisé dans notre Assemblée depuis la 38e législature pour établir, parmi deux groupes d'opposition, lequel forme l'opposition officielle et lequel forme le deuxième groupe d'opposition.

Jamais, jamais la présidence n'a eu à trancher ce qui adviendrait si le deuxième groupe d'opposition devait dépasser en nombre de députés l'opposition officielle en cours de législature. Cependant, des présidents d'autres assemblées législatives canadiennes qui ont eu à se prononcer sur des questions similaires ont utilisé le critère du nombre de députés pour ce faire.

Par exemple, en 1994, la présidente de l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick a affirmé que c'est en fonction du nombre de sièges détenus par les partis qu'est déterminée la hiérarchie entre les partis au sein de l'opposition. De même, en 1996, la présidence de la Chambre des communes a affirmé que, pour ce qui est du statut d'opposition officielle et de deuxième parti d'opposition, c'est le nombre de sièges que détient un parti qui est le facteur déterminant.

Puisque le nombre de députés que compte un groupe parlementaire peut changer en cours de législature, il en est de même du statut d'un groupe au sein de l'opposition. C'est ainsi qu'en août 1997, à l'Assemblée législative de la Saskatchewan, le parti qui formait l'opposition officielle est devenu le deuxième groupe d'opposition. De même, en 1999 et en 2006, l'Assemblée législative du Yukon a vu le nombre de membres du deuxième groupe d'opposition dépasser celui de l'opposition officielle. Dans les deux cas, la présidence a reconnu que le groupe parlementaire comportant le plus de membres devait devenir l'opposition officielle, faisant ainsi changer le statut de ces partis d'opposition.

• (10 h 30) •

C'est pourquoi, dans la mesure où le Parti québécois compte désormais moins de députés que Québec solidaire, ce dernier parti sera dorénavant le deuxième groupe d'opposition et le Parti québécois sera le troisième groupe d'opposition.

Documents déposés

Je dépose maintenant les tableaux illustrant les changements dans la répartition des mesures et des temps de parole de même que l'attribution des sièges aux fins du diagramme. Les changements découlant de ces modifications à la répartition des mesures ainsi que le nouveau diagramme seront effectifs à compter de demain. Merci.

Réaction, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Ouellet : M. le Président, nous prenons acte de votre décision et nous tenons quand même à rappeler que le Parti québécois a fait élire 10 députés et obtenu 17 % des votes le 1er octobre dernier, soit plus que Québec solidaire.

Pour nous, cette décision ne change en rien la représentation que nous aurons des citoyens et citoyennes qui nous ont tous élus. Que ce soit du siège de la deuxième opposition ou de la troisième opposition, nous continuerons à les défendre sans relâche. Nous serons la première force de proposition officielle. Les élus du Parti québécois continueront de porter la voix de tous les Québécois à l'Assemblée nationale, qu'ils soient parmi les 700 000 qui ont voté pour nous ou non. Et les citoyens de René-Lévesque, que je représente, mais de Matane-Matapédia, de Joliette, de Duplessis, de Rimouski, de Jonquière, de Bonaventure, de Gaspé et des Îles-de-la-Madeleine pourront toujours compter sur le Parti québécois pour être défendus avec la même vigueur. Et nous sommes et nous serons toujours la voix pour l'indépendance du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Je voulais simplement prendre l'occasion, M. le Président, pour vous remercier pour votre décision étoffée et rapide. Je vous remercie d'avoir traité cette question-là avec diligence. On était dans un entredeux un peu sensible. Merci d'en avoir tenu compte dans la rapidité de votre prise de décision.

Le Président : Merci, M. le leader du troisième groupe d'opposition. Y a-t-il d'autres interventions?

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales. Je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Gestion des trop-perçus d'Hydro-Québec

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, nous avons encore assisté hier à un festival d'improvisation caquiste.

À l'opposition, la CAQ a promis un chèque de près de 1,5 milliard aux clients d'Hydro-Québec, et, à son arrivée au pouvoir, le premier ministre change d'avis. En fait, il dit que ça n'a même pas été un engagement. En février, le premier ministre promet maintenant de baisser les tarifs de 1,1 % et hier il change encore une fois son fusil d'épaule. Son nouvel engagement, c'est de ne pas augmenter les tarifs plus que l'inflation. Dans les couloirs, M. le Président, le premier ministre véhicule aussi une autre version. C'est maintenant le P.D.G. d'Hydro lui-même qui va proposer des solutions pour en prendre un peu moins dans les poches des contribuables. Mais mon passage préféré, si on veut, de cette rocambolesque saga, c'est qu'au même moment son ministre de l'Énergie propageait dans les couloirs de l'Assemblée qu'il irait à l'encontre d'une décision de la Régie de l'énergie. M. le Président, la Régie de l'énergie, c'est un tribunal. La liste des positions du premier ministre bafouées par un de ses ministres continue de s'allonger.

Est-ce que le premier ministre et son ministre peuvent cesser cette pathétique improvisation, respecter l'engagement pour lequel ils ont été élus et rembourser 1,4 milliard aux clients d'Hydro-Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, durant les années du gouvernement libéral, Hydro-Québec a facturé 1,5 milliard de dollars de trop aux clients d'Hydro-Québec, 1,5 milliard.

Durant la campagne électorale, la CAQ a proposé de remettre aux citoyens 1,7 milliard mais de la façon suivante : un, en réduisant les taxes scolaires; deux, en réduisant les tarifs de garderie; et, trois, en augmentant les allocations familiales. C'est le choix qu'on a fait. Je l'assume. C'est certain qu'il y a des personnes qui ne sont pas concernées par ces trois propositions qui se disent : J'aimerais bien avoir quelque chose d'Hydro-Québec. Donc, j'ai compris ce message de la population, même si notre engagement était ultraclair, que les fonds seraient remis dans le portefeuille par les trois moyens que je viens de mentionner. Donc, j'ai demandé au ministre des Ressources naturelles et au président d'Hydro-Québec de faire un effort particulier, additionnel au cours de la prochaine année pour être capables de donner une compensation aux clients d'Hydro-Québec, qui n'ont pas été traités correctement par le gouvernement libéral en particulier en 2014 et en 2015. C'est ça, la situation. Nos engagements électoraux...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...on va tous les tenir et on va même en faire plus.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, le monde du premier ministre, c'est un monde où on ne semble pas avoir besoin de se soucier ni des engagements, ni de la réalité, ni des décisions des tribunaux. Hier, la population n'a pas compris grand-chose dans les propos du premier ministre.

Est-ce qu'il peut expliquer encore une fois à la population comment ils vont être remboursés?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, ce qu'on a proposé aux citoyens très clairement durant la campagne électorale, c'est de remettre l'équivalent de 1,7 milliard de dollars en réduisant les taxes scolaires, en réduisant les tarifs de garderie et en augmentant les allocations familiales. On a commencé à le faire. On va continuer à le faire demain dans le budget qui va être déposé.

Par contre, et je demande un peu de patience au chef de l'opposition officielle, j'ai demandé à Hydro-Québec de nous faire une proposition pour en faire encore plus concernant les clients d'Hydro-Québec.

Le Président : En terminant.

M. Legault : On va être capables de répondre clairement, d'ici quelques mois, à cette question.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, ce que la population avait compris, et ce qu'ils ont entendu de la bouche du premier ministre, et ce qu'ils ont compris, c'est qu'ils ont compris qu'ils auraient un chèque.

Et c'est pour ça que ma question, elle est très simple, parce qu'il y a la Régie de l'énergie dans ce dossier-là également : Comment vous allez outrepasser la Régie de l'énergie pour tenir votre engagement et rembourser les clients d'Hydro-Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, je sais que le chef de l'opposition officielle a été ministre des Ressources naturelles, s'est parfois... je ne dirai pas le mot «caché», mais dissimulé derrière la Régie de l'énergie. Je pense que le gouvernement peut être capable de dire à la Régie de l'énergie, de dire à Hydro-Québec d'en faire plus pour aider les clients d'Hydro-Québec. C'est ce qu'on va faire, puis vous allez avoir les détails d'ici quelques mois.

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, je pense qu'on écoute les réponses aujourd'hui, et le premier ministre entretient la confusion pour la simple et bonne raison qu'il ne remboursera pas les Québécois. Il n'en fera pas, de chèque, directement aux Québécois. Cet après-midi, d'ailleurs, on va présenter une motion en ce sens.

Est-ce que vous allez vraiment vous lever en cette Chambre pour voter contre notre motion et, du même coup, renier encore une fois un de vos engagements?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, ce qui est clair, c'est que, durant la campagne électorale, la CAQ a été le seul parti à proposer de remettre 1,7 milliard de dollars dans le portefeuille des Québécois. Le Parti libéral ne proposait rien concernant Hydro-Québec. Même chose pour les deux autres partis. C'est assez spécial de voir que, cet après-midi... flip-flop total de trois partis qui maintenant veulent qu'on remette 1,5 milliard dans le portefeuille des Québécois, alors que ça n'a jamais été mentionné pendant la campagne électorale.

Le Président : Question principale, M. le député de La Pinière.

Orientations budgétaires du gouvernement

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, le gouvernement dispose, aujourd'hui, de marges de manoeuvre budgétaires historiques. La réalité est simple : d'un côté, tout le monde s'entend sur une chose, les engagements électoraux de la CAQ dépassent largement ce que permettent les finances publiques — et le permettront; de l'autre côté, on vit dans un monde où la notion économique de prévisibilité devient fondamentale partout, incluant au public, particulièrement là où on dispense des services. La prévisibilité, M. le Président, c'est une équation à deux paramètres, pas trois, pas quatre, deux : un, les revenus, donc les crédits; deux, les dépenses, donc les services. Et les dépenses, c'est l'addition des coûts de système et des nouveaux services.

Est-ce que le président du Conseil du trésor peut s'engager aujourd'hui à ce que les crédits qu'il déposera demain identifieront et garantiront la couverture minimale des coûts de système?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, j'apprécie énormément la question de mon collègue, parce que je pense qu'on va pouvoir démontrer en temps et lieu, c'est-à-dire demain, hein, que notre ministre des Finances va présenter un budget qui non seulement respecte nos engagements, mais qui respecte aussi des principes de prévisibilité et de bonne gestion des finances publiques.

Il serait prématuré pour moi de prendre d'autres engagements de ce que nous allons dire demain. Mais je vous prierais de bien écouter demain et de vous assurer que tous les engagements que nous avons pris seront même peut-être un peu dépassés, ce qui serait à la grande surprise non seulement de tous les citoyens, mais de mes collègues en face ici. Alors, je vous demanderais d'être patient. Je sais que des fois c'est difficile pour l'autre côté. Mais aujourd'hui on a travaillé énormément à déposer un budget qui va être extraordinaire, puis je vous demanderais d'être patient jusqu'à demain. Merci.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Pas de réponse. Et on ne les croit pas. Pourquoi? Parce que le premier ministre lui-même, hier, a avoué que, si on avait acquiescé à ses demandes répétées de rembourser les trop-perçus d'Hydro-Québec d'un coup, il aurait fallu couper dans les services en santé, en éducation, partout. Il l'a avoué, mais il ne l'avait pas dit quand il était dans l'opposition.

Alors, pourquoi, aujourd'hui, s'objecter à identifier et déposer demain les coûts de système de tous les ministères? Le président du Conseil du trésor a-t-il peur de la transparence?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor, la parole vous appartient.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je pense qu'on va rester très zen ici, là. Je pense, M. le Président, que c'est peut-être difficile d'attendre pour la première opposition en ce moment. C'est très difficile d'attendre. Pendant toutes ces dernières années, je ne suis pas sûr que c'est le gouvernement de l'époque qui était le plus transparent dans l'information financière. Moi, je vous rappelle, M. le Président, que j'étais ici de 2012 à 2014 et j'ai fait des demandes très spécifiques sur la transparence de l'information financière qui n'ont jamais été respectées par l'autre côté. Alors, aujourd'hui, je ne pense pas qu'on a de leçons à recevoir de personne. Et mon collègue, demain, pourra montrer la différence dans la transparence de l'information financière.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, en 2003, l'actuel président du Conseil du trésor exprimait, dans la revue L'Actualité, sa frustration face à l'opacité gouvernementale. À une question, il a répondu qu'il souhaitait un gouvernement ouvert, dans lequel toutes les données seraient accessibles. Bonne idée!

Le problème, M. le Président, c'est qu'aujourd'hui je lui demande de marquer l'histoire, je lui demande de s'engager, ici, aujourd'hui, au salon bleu, tant par honnêteté que transparence, à ce que demain, avec les crédits, il identifiera et divulguera les coûts de système pour tous les ministères.

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Christian Dubé

M. Dubé : M. le Président, je vais répéter ce que j'ai dit l'autre fois lorsqu'il y a eu l'interpellation de mon collègue : On ne peut pas faire dans trois mois ce qu'ils n'ont pas été capables de faire dans 15 ans. Ça, c'est la première chose. Mais on a quatre ans pour montrer la différence en termes de gestion. Et, encore une fois, je les invite à attendre à demain. On a un document qui s'appelle... Je m'excuse, M. le Président. On a un document qui s'appelle la Stratégie de gestion des dépenses, qui a plus de 60 pages, dans lequel on explique exactement ce qu'on doit faire dans les quatre prochaines années. Soyez patients, vous allez... amuser demain.

Le Président : Question principale...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! La parole appartient maintenant à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Réforme du système d'immigration

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Alors, depuis le dépôt du projet de loi sur l'immigration, on a tenté, en vain, d'obtenir des réponses, mais on ne les a pas eues. Alors, à la question : Quels sont les taux de rétention par catégories d'immigrants?, aucune réponse. À la question : Combien de dossiers allaient être traités dans le nouveau système?, aucune réponse. Est-ce qu'il y a une entente avec le fédéral sur les seuils d'immigration? Aucune réponse. Alors, on a décidé de faire une demande d'accès à l'information avec la question suivante : Est-ce qu'on peut obtenir la région de provenance des immigrants que nous allons accueillir sur notre territoire? Hier, après plus de quatre semaines d'attente, on obtient la réponse suivante : Nous vous informons que les plans annuels du ministère ne comprennent pas ces tableaux. Pourtant, M. le Président, en 2013, 2014, 2015, 2016, 2017, 2018, ces informations étaient disponibles.

M. le Président, j'ai une question : Qu'est-ce qui s'est passé en 2019?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, on a déposé le plan annuel en matière d'immigration le 4 décembre dernier. Et je comprends que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne s'oppose à ce que le Québec prenne un pas de recul relativement au nombre d'immigrants qu'on accueille pour faire en sorte de mieux réformer le système d'immigration. Et d'ailleurs c'est ce que je fais avec le projet de loi n° 9, et je souhaite avoir votre collaboration pour le projet de loi n° 9, parce que, peu importe la provenance des gens du monde entier, ce qu'on veut, nous, du côté de la CAQ, c'est donner l'opportunité, peu importe la provenance des gens, d'intégrer le Québec, de venir travailler, de venir s'établir avec leurs familles en fonction des besoins du marché du travail.

Donc, pour nous, la provenance, la langue parlée à l'origine n'a pas l'importance qui est requise par le Parti libéral, qui mettait un frein à l'entrée. Nous, ce qu'on dit, c'est : Vous avez des compétences, vous répondez aux besoins du marché du travail. Nous, comme gouvernement, on va s'assurer que vous soyez bien intégrés, et que vous puissiez apprendre le français, et que vous puissiez vous franciser. Ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne nous invite à faire, c'est de faire en sorte de sélectionner les gens en fonction des différentes régions du monde. Alors, honnêtement, c'est son choix. Moi, ce que je dis...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...c'est qu'on veut avoir les meilleurs talents, peu importe la provenance des gens. C'est comme ça qu'on est faits. On est ouverts, nous, de ce côté-ci.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, ce que j'invite le ministre de l'Immigration à faire, ça fait preuve de transparence, c'est de donner des informations qui sont données par les gouvernements précédents. Mais, avec les réponses qu'on obtient, on est mieux de reformuler les questions. Ma question, c'était : Que s'est-il passé en 2019? Bien, en 2019, la CAQ a déposé un projet qui était improvisé, mal ficelé, avec beaucoup de questions auxquelles on refuse de répondre.

M. le Président, est-ce que de ne pas fournir des informations qui ont été partagées par les autres gouvernements, c'est la définition du leader du gouvernement de faire fonctionner le Parlement?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je suis heureux d'entendre la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne dire qu'elle veut faire fonctionner le Parlement. Si c'est son désir, là, on va avoir la chance de faire fonctionner le Parlement ensemble, mais, à ce jour, M. le Président, l'expérience que j'ai vécue parfois avec l'opposition officielle, c'est... comment je pourrais dire, ce n'est pas la définition que je me donne de faire fonctionner le Parlement.

M. le Président, l'important lorsqu'on est au Parlement, c'est qu'on puisse débattre, de façon sérieuse et de façon sereine, des différents projets de loi qui sont déposés, mais c'est surtout d'amener les changements qui sont requis pour améliorer le système d'immigration. Et, dans le cadre du projet de loi n° 9, c'est ce que je fais. J'espère avoir votre collaboration pour faire fonctionner le Parlement.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, encore, pour faire fonctionner le Parlement, on a besoin d'obtenir des réponses à des questions. On n'obtient aucune réponse. M. le Président, dans le site transparent sur l'agenda du ministre, on remarque que le ministre de l'Immigration fait plusieurs allocutions, on n'est pas surpris, mais aucune rencontre avec des experts, des scientifiques, alors qu'il souhaite aussi un projet, encore une fois, qui est mal maîtrisé.

Est-ce que le ministre peut nous confirmer qu'il a eu au moins des rencontres avec des experts du domaine dans les derniers mois? Et, s'il y en a eu, quand est-ce qu'elles étaient et avec qui elles étaient, ces rencontres-là?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je sais que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne s'intéresse beaucoup à ce que je fais, et d'ailleurs on a entendu des gens en commission parlementaire pour qu'ils puissent commenter le projet de loi n° 9. Et, vous savez, parmi les groupes qu'on a reçus en commission parlementaire, 20 des 22 groupes provenaient de la liste du Parti libéral du Québec. Donc, j'ai entendu ces groupes-là.

Et surtout on va débuter éventuellement, j'espère, l'étude détaillée du projet de loi, dépendamment de la rapidité avec laquelle la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne va vouloir l'étudier en étude détaillée, parce que, là, on est à la veille d'adopter le principe, dépendamment de la rapidité, parce que c'est ça, la question, M. le Président. Si on veut faire fonctionner le Parlement, il faut pouvoir adopter les projets de loi et il faut pouvoir aller en étude détaillée.

Alors, tout dépendamment du temps que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne va prendre au niveau de l'adoption de principe, nous pourrons étudier de façon plus approfondie le projet de loi n° 9.

Le Président : Question principale, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Stratégie du gouvernement en matière de lutte
contre les changements climatiques

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Hier, je demandais au premier ministre de répondre oui ou non aux trois revendications des jeunes Québécois concernant la lutte aux changements climatiques. Trois fois non. Ce n'est pas la première fois que le premier ministre dit non, d'ailleurs. Depuis qu'il est élu, ça fait plusieurs fois, plusieurs propositions que je mets sur la table en disant : Voilà des propositions, voilà comment nous voulons collaborer avec vous pour lutter contre les changements climatiques. J'ai fait des propositions sur une question de loi-cadre, de doubler les investissements en transport collectif, d'en réduire, d'ailleurs, les tarifs de moitié, de doubler le budget du ministère de l'Environnement, réformer le Code de la construction pour permettre le bois d'oeuvre, et j'en passe. Et hier le premier ministre m'a demandé si on avait un plan. Bien, il le sait bien, qu'on en a un, plan. On n'arrête pas d'en parler, de ce plan-là, d'ailleurs un plan salué par l'ensemble de la société civile. Je vais le déposer aujourd'hui, ce plan-là. Bref, ce n'est pas les propositions qui manquent depuis le début. Malheureusement, il appert que la volonté politique manque.

M. le Président, j'aimerais vraiment savoir ce que le premier ministre priorise : Est-ce que c'est effectivement une opération de relations publiques ou c'est un réel engagement à lutter contre les changements climatiques?

• (10 h 50) •

Le Président : Consentement pour le dépôt des documents? Consentement.

Document déposé

Document déposé. M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, demain, mon collègue le ministre des Finances va déposer le premier budget d'un gouvernement de la CAQ. Il y aura des mesures concernant l'environnement. Il y aura des mesures aussi, quand on parle du PQI, pour des investissements, entre autres, dans le transport en commun en fonction de notre capacité de payer. Je sais que Québec solidaire souhaite qu'on utilise tout le Fonds des générations pour investir dans le transport en commun. On ne pense pas que c'est une bonne idée, quand on parle d'équité entre les générations, d'aller dans cette direction-là.

M. le Président, le Québec a déjà les émissions de GES les plus basses en Amérique du Nord grâce à l'hydroélectricité. On veut en faire plus, entre autres, du côté de l'électrification des transports, parce qu'on est doublement gagnants avec l'électrification des transports : non seulement on fait des gains au point de vue environnemental, mais on se débarrasse du pétrole, qu'on ne produit pas au Québec, puis on le remplace par de l'électricité, qu'on a en grandes quantités au Québec. Donc, soyez patients, vous allez avoir des belles réponses demain dans le budget.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Écoutez, la patience, elle n'a plus beaucoup de place, là. La planète, à chaque jour... c'est une heure qui est trop tard. Alors, demain, certes, c'est le budget, c'est une journée cruciale, on s'entend. Les jeunes et les moins jeunes ont d'ailleurs des attentes très élevées et ils ont raison.

Est-ce que le premier ministre peut nous assurer que le budget va nous donner des mesures structurantes, mais, plus que ça, on ne va pas juste savoir combien ça va coûter, mais on va savoir aussi combien de GES ça va diminuer?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la cheffe de Québec solidaire vient de nous dire qu'elle avait un plan. J'aurais le goût de lui demander : Quelle est la diminution de GES qui est prévue dans son plan d'ici 2020? J'aimerais qu'elle nous dise, étant donné qu'elle suppose qu'elle a un plan... Dans son plan, combien y a-t-il de diminution de GES? Est-ce qu'elle peut répondre juste à cette question-là?

Le Président : Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Mme Manon Massé

Mme Massé : ...ce n'est pas moi, là, qui est au gouvernement, on s'entend, hein?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Mme Massé : Alors, vous le lirez, M. le...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Massé : Vous le lirez, parce que ça fait quand même longtemps que je vous l'offre, ce plan-là. Hier, vous ne saviez pas que les universités investissaient en hydrocarbures. Alors, vous le savez maintenant. Et d'ailleurs, juste l'Université de Montréal, certains estiment que c'est à plusieurs milliards.

Est-ce que — répondez aux jeunes par oui ou non — vous vous engagez à faire en sorte que les établissements d'enseignement retirent leurs investissements fossiles?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, d'abord, je salue l'Université Laval, qui a un engagement extraordinaire, de désinvestir complètement dans les énergies fossiles. Je salue aussi le régime de retraite de l'Université de Montréal, la Fondation de l'Université Concordia, le régime de retraite de l'Université du Québec, qui ont signé le principe pour des investissements responsables. Donc, ça chemine du côté des universités. Je pense que mon collègue le ministre de l'Éducation va continuer de faire des efforts. Évidemment que ce sont surtout les professeurs qui investissent dans les fonds de retraite. Donc, ils ont le choix d'où sont investis ces fonds-là, mais on va les encourager.

Le Président : Question principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Lutte contre l'évasion fiscale

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, on est en pleine semaine de budget, en pleine semaine des impôts. Je pense que chacun des Québécois qui remplit son rapport d'impôt sur l'argent durement gagné souhaite que le gouvernement fasse plus sur les centaines de millions de dollars qui nous échappent dans les paradis fiscaux. À titre de force de proposition, le Parti québécois souhaite soumettre trois mesures au premier ministre. Il peut compter sur notre pleine adhésion s'il souhaite les mettre en place.

La première : Est-il prêt à mettre fin aux conventions qui légalisent l'évasion fiscale dans les paradis fiscaux?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bon. Je sais que le Parti québécois est souverainiste et puis qu'il souhaiterait que le Québec soit un pays. Le chef de la deuxième ou troisième... là, dépendamment des jours, sait très bien aussi qu'il doit y avoir des ententes avec le gouvernement fédéral pour les conventions qui sont signées avec d'autres pays. Le ministre des Finances est très sensible à l'évasion fiscale. Il y a des gestes qu'on va poser, entre autres, pour collecter la taxe de vente pour ceux qui vendent des produits aux Québécois mais qui viennent de l'extérieur du Québec. Donc, à l'intérieur des possibilités qu'on a, le gouvernement du Québec, on va continuer de faire des efforts pour lutter contre l'évasion fiscale puis on va continuer d'en discuter avec le gouvernement fédéral. Il y a une ouverture de ce côté-là. Donc, on va continuer d'y travailler.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, on veut plus qu'il soit sensible ou ouvert, on veut qu'il agisse, et je n'ai pas entendu ça de façon claire de la part du premier ministre. Deuxième proposition. Les grandes multinationales utilisent parfois des manoeuvres comptables pour déplacer des profits à l'étranger afin d'éviter de payer de l'impôt au Québec.

Est-ce que le premier ministre accepte d'instaurer une taxe sur les profits détournés pour récupérer ces millions qui nous échappent?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, encore là, on sait très bien qu'une partie des impôts corporatifs dépendent des ententes qui sont signées avec les autres pays. Ces ententes-là sont discutées, négociées, signées par le gouvernement fédéral. Donc, à l'intérieur des compétences qu'on a, on veut essayer d'éviter ces façons de ne pas déclarer tous ces revenus par les entreprises québécoises. Le ministre des Finances est en place depuis quelques mois. C'est un domaine dans lequel il veut travailler.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, le premier ministre fait la démonstration qu'en étant une province dans le régime fédéral il n'a pas la capacité d'agir dans le sens des demandes des Québécois. Il vient d'en faire deux fois la démonstration.

Troisième proposition qu'on lui fait : Est-ce que le premier ministre peut demander avec moi à la Caisse de dépôt de sortir graduellement les milliards qu'elle détient dans les paradis fiscaux? Ça, il peut faire ça dans le régime d'une province.

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Au niveau de l'évasion fiscale, il faut travailler à l'international, et il y a un plan qui est en place, au gouvernement du Québec, qui a été amorcé par le gouvernement précédent. Le gouvernement pose des gestes, M. le Président, et nous en ajoutons, et, bien sûr, ce qu'on veut, c'est que l'assiette fiscale soit le plus élargie possible pour moins taxer les citoyens, puis ça, c'est important.

Quant à la Caisse de dépôt, ce problème a déjà été souligné à la Caisse de dépôt, et la Caisse de dépôt est une entité qui est indépendante dans ses choix des investissements. Nous leur avons souligné l'importance de ce problème, et c'est à eux de prendre les bonnes décisions.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Fabre.

Processus d'appel d'offres en matière de
construction de maisons des aînés

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, aujourd'hui encore, je suis à la recherche de la vérité. Aujourd'hui encore, je me retrouve devant plusieurs contradictions. Lors de la dernière campagne électorale, la CAQ s'est engagée à construire des maisons des aînés. Dans un article de La Presse du 20 novembre dernier, on peut lire ceci : «...la députée de Prévost affirme qu'elle a déjà commencé — déjà commencé — à rencontrer des architectes pour la construction, d'ici quatre ans, d'une trentaine de maisons des aînés.» Je le répète, M. le Président : article du 20 novembre dernier. Quand le gouvernement a-t-il lancé son appel d'offres pour construire une toute première maison des aînés à Sainte-Élisabeth, dans la région de Lanaudière? Réponse : le 21 janvier, deux mois plus tard.

M. le Président, ma question est tellement simple : Est-ce que la ministre des Aînés a, oui ou non, rencontré des firmes d'architectes au sujet des maisons des aînés avant le lancement de l'appel d'offres?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Alors, on a un magnifique programme concernant les maisons des aînés qui sera déployé très prochainement, parce que les maisons des aînés, ce n'est pas de la brique, ce n'est pas du bois, c'est un concept, c'est une philosophie à l'intérieur, c'est des soins que nous allons donner différemment.

Alors, tout le monde est enjoué par rapport à avoir une maison des aînés sur son territoire. Aucune maison des aînés ne sera officiellement annoncée tant et aussi longtemps que le premier ministre du Québec n'aura pas fait l'annonce officielle avec le concept, avec la philosophie. Et nous avons d'ailleurs, M. le Président, demandé une évaluation populationnelle à savoir où nous étions en mesure de mettre les maisons des aînés pour combler les 2 600 places que nous devons faire d'ici 2021.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : M. le Président, la ministre est tellement enjouée qu'elle a rencontré des architectes avant l'appel d'offres. C'est ce que j'entends. Nous avons fait une demande d'accès à l'information pour savoir qui la ministre avait rencontré pour ses maisons des aînés alors que l'appel d'offres pour les services professionnels en architecture n'avait pas encore été lancé. Nous avons eu la réponse : «Nous regrettons de vous informer que nos recherches n'ont permis de repérer aucun document répondant à votre demande d'accès.»

M. le Président, pourquoi la ministre a affirmé et justifié à La Presse qu'elle a rencontré des...

• (11 heures) •

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, ce n'est pas une question d'architecte, ce n'est pas une question de constructeur. De toute façon, à toutes les fois que je rencontre des gens concernant les maisons des aînés, je m'assure que le sous-ministre aux infrastructures soit présent, parce que c'est lui qui doit s'occuper de tout ce qui concerne la construction des maisons des aînés. Moi, je me préoccupe de ce qu'il y aura à l'intérieur des maisons des aînés, concernant les soins, concernant les dimensions, concernant une approche nouvelle que jamais le gouvernement qui était en place auparavant n'a daigné faire.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Blais (Prévost) : On faisait des CHSLD d'un point de vue hospitalier...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Blais (Prévost) : Et maintenant nous allons faire des maisons où tout ce qui ressemble à un hôpital sera camouflé.

Le Président : Deuxième complémentaire, en demandant votre attention, s'il vous plaît. On reste attentifs aux questions et aux réponses. Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Écoutez, je suis tellement perplexe. Là, j'essaie de me remettre un peu des réponses de la ministre. Il y a une chose qui est dite de son côté, il y a d'autres choses qu'on apprend. D'accord, on ne parlera pas d'architecte. On a fouillé plus loin. On a été voir à l'agenda transparent de la ministre. Effectivement, avant le 20 novembre, il n'y a pas eu de rencontre concernant la maison des aînés. M. le Président, qui dit vrai? On ne parlera pas d'architecte, mais on parlera de rencontre. C'est ce qu'elle a affirmé à La Presse canadienne le 20 novembre.

Alors donc, est-ce que la ministre des Aînés peut déposer la liste des personnes qu'elle a rencontrées?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Il y a une personne que j'ai rencontrée, M. le Président, qui s'appelle Philippe Voyer. Philippe Voyer, c'est un professeur à l'Université Laval, c'est un infirmier et c'est une personne qui est la...

Une voix : ...

Mme Blais (Prévost) : Non, non, ce n'est pas un architecte, c'est un infirmier. Et cette personne-là possède les capacités de nous dire comment on peut construire nos maisons des aînés, non pas dans le sens de la construction comme telle. Parce que vous savez bien, M. le Président, qu'à Montréal on ne peut pas faire une même construction qu'à Sainte-Élisabeth, qui requiert 42 places, comparativement à Montréal pour 200 places. Mais c'est la philosophie que nous allons mettre à l'intérieur de ces maisons, parce que, maintenant, il y a plus de 80 % qui vivent en CHSLD qui sont atteints de maladies cognitives...

Le Président : Question principale, une question principale, Mme la députée de Taschereau.

Protection du site patrimonial de l'Île-d'Orléans

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Il y a des centaines de résidents de l'île d'Orléans qui sont dans un état d'exaspération avancé par rapport au ministère de la Culture. Et là, je précise, c'est des résidents qui ont choisi l'île pour son caractère patrimonial et qui tiennent très, très fort, comme nous tous, à ce patrimoine-là. Sauf que, là, depuis des années, ils sont pognés dans une situation absurde chaque fois qu'ils veulent changer une poignée de porte sur leurs maisons. On parle d'exigences intrusives du directeur du patrimoine, de constats d'infraction qui n'ont même pas de lien avec la conservation, de trip de pouvoir, d'irritants bureaucratiques qui rendent le monde complètement fou. Il y a, quelque part au ministère de la Culture, un zèle excessif et absurde sur l'île d'Orléans, par rapport à l'île d'Orléans.

Alors, ma question est pour la ministre de la Culture : Qu'en sera-t-il de ce zèle-là quand son collègue des Transports va vouloir faire passer un troisième lien, une autoroute à quatre voies sur cette superbe et unique île patrimoniale?

Le Président : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais remercier, remercier, ce matin, ma collègue de Taschereau pour sa question. Ce qu'elle soulève à l'égard de l'île d'Orléans, qui, comme vous le savez, est déclarée site patrimonial, toute l'île au complet, ça me préoccupe grandement, tout comme elle, depuis mon arrivée en poste au ministère. Et d'ailleurs, depuis mon arrivée en poste au ministère, j'apprends beaucoup, beaucoup de choses sur ce qui a été fait ou sur ce qui n'a été pas fait par l'ancien gouvernement libéral...

Des voix : ...

Mme Roy : Attendez, là, vous allez apprendre quelque chose. Ça va être très intéressant.

Le Président : Je demande, s'il vous plaît, votre attention. Les questions sont importantes, les réponses, tout autant. Je vous entends, du côté... Je vous vois et je vous entends surtout. Alors, s'il vous plaît, silence!

Mme Roy : Alors, oui, et je pense que c'est important de bien expliquer aux gens qui nous écoutent et vous expliquer également, Mme la députée, que cet article dont vous faites mention, eh bien, ma collègue la députée, ici, de Côte-de-Beaupré m'a saisie de ce problème-là aussitôt que nous sommes entrés en poste. Et nous y travaillons, nous avons rencontré des gens, nous travaillons là-dessus. C'est extrêmement important. Il y a eu plusieurs rencontres.

Mais ce que je vous dis qu'il est important de comprendre dans ce dossier, c'est qu'il y a une loi qui a été adoptée en 2011 par une ancienne ministre de la Culture et qui est entrée en vigueur en 2012, lors du règne du gouvernement libéral, et, croyez-le ou non, Mme la députée, cette Loi du patrimoine culturel n'a même pas de règlement...

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : M. le Président, je vois que la ministre de la Culture tient beaucoup au patrimoine de l'Île-d'Orléans. Je vais juste répéter ma question, parce que vous n'avez pas eu le temps de me donner la réponse.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Dorion : Comment réagira la ministre de la Culture quand son collègue des Transports va vouloir faire passer une autoroute à quatre voies sur l'une de nos plus belles îles patrimoniales au Québec?

Le Président : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Inquiétez-vous pas, vous allez avoir une excellente réponse en deuxième complémentaire, parce que c'est important d'expliquer aux gens, c'est important d'expliquer aux gens que, ce qui se passe sur l'île d'Orléans, l'ancien Parti libéral et les anciennes ministres de la Culture en ont été saisis. Nous avons découvert, Mme la députée, en fouillant, que, cette problématique-là, les sous-ministres en poste avaient une étude, avaient une réponse, avaient des solutions à apporter, les citoyens. Et qu'est-ce qu'ils ont fait? Absolument rien. Ils se sont assis dessus. C'est épouvantable.

Donc, on est dans l'action, on agit pour aider les gens. Et, pour être tout à fait transparente — ils aiment ce mot-là, venant d'eux, c'est assez ironique — nous y travaillons actuellement avec la députée et les joueurs du milieu pour trouver une solution patrimoniale importante.

Le Président : Deuxième complémentaire.

Des voix : ...

Le Président : Encore une fois, faut-il que je vous rappelle que j'aimerais avoir un peu de silence, s'il vous plaît, pour bien entendre ce qui se dit. La parole n'appartient qu'à la députée de Taschereau.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Merci. Je vois qu'ils sont en lien, eux aussi, à travers leurs députés, avec les citoyens de l'île d'Orléans qui, je ne le sais pas s'ils vous l'ont dit, mais se sentent pris en otages parce que leur pont est vraiment dû. Ils ne peuvent... Ce pont-là a été repoussé pour voir ce qu'on va faire avec le troisième lien. Ces gens-là sont sur l'île pour les 42 milles de choses tranquilles dont parle Félix Leclerc.

Qu'est-ce que la ministre va dire au ministre des Transports quand il va vouloir faire passer une cicatrice en asphalte au beau milieu de notre plus belle île patrimoniale?

Le Président : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci, M. le Président. Alors, je ne sais pas où Mme la députée a pris le tracé, là, parce que, pour le moment, il n'y a rien de fait. Moi, j'attends de voir ce qu'il va se passer à cet égard-là. Cependant, je veux rassurer la population, l'île d'Orléans est une île extraordinaire qui est protégée, et je serai là pour s'assurer que la Loi sur le patrimoine culturel soit protégée. Et j'ai d'ailleurs des discussions actuellement puisqu'il y a des hypothèses, hein? Vous en soulevez. Dans les médias, on voit toutes sortes de choses. Alors, il y a des discussions, actuellement, qui sont en cours avec les différents ministres qui seront impliqués dans les dossiers de développement routier. Mais vous comprenez que l'Île-d'Orléans, elle est protégée, on va la protéger, et les citoyens vont y trouver leur compte. Mais, actuellement, il faut dire qu'il y a un problème, il a été causé par les anciens ministres de la Culture.

Le Président : Question...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Projet de règlement encadrant les frais scolaires

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : M. le Président, nous avons commencé cette semaine les consultations qui portent sur le projet de loi n° 12. Ce projet de loi est tellement... est très attendu tant par les parents que le réseau de l'éducation, car il a pour objectif de venir préciser les frais qui peuvent être chargés aux parents ou ceux qui ne peuvent pas être chargés aux parents. L'objectif du ministre est de clarifier la situation, et pourtant rien n'est clair, on est en plein brouillard. On ne sait pas qu'est-ce qui pourrait être une sortie éducative. Est-ce qu'aller, par exemple, au magasin Apple est une sortie éducative? Est-ce qu'amener nos jeunes au Cosmodôme, c'est une sortie éducative? Est-ce qu'on peut charger pour une sortie éducative? Est-ce qu'un transport pour la sortie éducative... est-il chargé aux parents ou pas? Bref, il y a une seule personne qui le sait aujourd'hui, c'est le ministre de l'Éducation, car il a un règlement. Toutes les personnes qui sont venues à présent en commission nous ont demandé de voir ce règlement.

Aujourd'hui, je demande encore de faire preuve de transparence, au ministre de l'Éducation, de nous déposer maintenant son règlement pour qu'on puisse enfin vraiment savoir qu'est-ce qui nous attend pour la rentrée.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Le projet de loi n° 12, c'est très important parce qu'on vient régler un problème qui dure depuis trop longtemps. En 2007, la commission des droits de la personne et de la jeunesse déposait un rapport accablant disant qu'il y avait malversation et qu'il y avait des pratiques illégales de facturation de frais aux parents. 2008, 2009, 2010, 2011 — ah, tiens! — 2012, 2013, 2014 — woups! — 2015, 2016. Les gouvernements se sont succédé, il n'y a personne qui n'a rien fait, sauf le précédent ministre, qui a déposé une directive en juin que personne n'a compris, qui a eu un seul impact, il y a eu moins de sorties scolaires cette année que les années passées, parce que les directions d'école ne savaient plus qu'est-ce qui pouvait être facturé, qu'est-ce qui ne pouvait pas être facturé.

Notre obligation, c'est de s'assurer qu'il y a de la clarté, que les jeunes fassent des sorties culturelles et des sorties pédagogiques évidemment, que tout le monde sache à quoi s'en tenir et, surtout, qu'il n'y ait pas une autre poursuite, un autre recours collectif, qui nous a coûté 153 millions de dollars. Parce que la négligence et le flou des précédents gouvernements, c'est ça que ça a causé, une perte de 153 millions de dollars, qui n'a pas été ni pour des services aux élèves en difficulté ni pour des sorties éducatives et pédagogiques...

Le Président : En terminant.

M. Roberge : ...on va régler ça.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Le ministre de l'Éducation a bien raison, il faut faire preuve de clarté. Et pourtant son projet de loi manque de clarté. Hier, la commission anglophone nous disait : Ça ne sera pas 153 millions que ça va coûter, le prochain recours collectif, ça va être des milliards, si vous faites une règle de trois. Aujourd'hui, qu'est-ce qui m'inquiète encore plus, c'est qu'il y a un article 15, dans son projet de loi n° 12, qui donne un superpouvoir à notre superministre de l'Éducation, puis lui, tout seul dans son coin, va pouvoir écrire un projet de règlement sans que personne ne soit consulté, et ce, contrairement à la Loi sur les règlements.

Faites preuve de transparence, déposez le règlement.

• (11 h 10) •

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, le règlement, on est en train de l'élaborer à la lumière des consultations. Puis on tient compte de ce que les gens disent. Il y a eu des consultations auprès des partenaires en décembre. Le regroupement MESS-partenaires, donc les directions, les directions des commissions scolaires, mais aussi les directions d'école, les syndicats, tout ce monde-là a été rencontré. Après, en janvier, on a tenu une consultation publique. 33 000 Québécois sont allés nous dire ce qu'ils en pensaient, ce qu'ils souhaitaient qui soit gratuit et ceux pour lesquels ils étaient d'accord de payer. Alors, on a tenu compte de tout ça. On a rédigé un projet de loi. On continue de consulter aujourd'hui, hier, puis on va améliorer le projet de loi et le projet de règlement suite aux consultations. C'est très transparent.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Habituellement, M. le Président, quand on consulte, c'est dans le but de rédiger un projet de loi. Je suis contente qu'il ait consulté, d'ailleurs à portes closes, plusieurs partenaires. Mais par la suite il refuse de nous déposer son règlement. C'est tous les partenaires qui demandent de voir le règlement. Parce que, lorsqu'on se présente ici pour être consulté, c'est qu'on veut le savoir. Pour être plus claire : on ne veut pas juste le savoir, on veut le voir. Déposez, s'il vous plaît, votre règlement.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Bien, si vous voulez, je peux déposer le crayon avec lequel j'écrirai le règlement...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Roberge : ...parce que le règlement n'est pas encore écrit à 100 %. À un moment donné, je veux bien être transparent...

Des voix : ...

Le Président : Encore une fois... non, mais, je m'excuse, encore une fois... Ça fait trois ou quatre fois, là, je pense qu'on a de la difficulté à s'entendre, vous et moi. Calme. Écoute. La parole appartient au ministre de l'Éducation.

M. Roberge : M. le Président, le projet de règlement n'est pas écrit au complet, on est en train de l'écrire, c'est un travail en co-construction. Les gens veulent de la transparence, on vous le dit, on a livré nos grands principes au moment du dépôt du projet de loi. Voici nos grandes orientations. Et là qu'est-ce qu'on fait? On écoute les partenaires, on consulte 33 000 Québécois, et, lors des consultations particulières, il y a des gens qui nous disent : Ça, ça devrait être dans le projet de règlement, vous devriez le mettre; ça, vous ne devriez pas le mettre. Et qu'est-ce qu'on fait? On prend des notes. Quand on aura davantage d'information, on sera transparents, on la diffusera...

Le Président : En terminant.

M. Roberge : ...et on continuera à dialoguer, parce qu'on a un devoir, c'est celui d'adopter des règles claires pour septembre prochain.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Aide financière aux parents d'enfants lourdement handicapés

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : ...M. le Président. Vendredi dernier, j'ai eu l'occasion de rencontrer deux organisations que le gouvernement connaît très bien : Parents jusqu'au bout! et L'Étoile de Pacho. Ces parents militent depuis plusieurs années pour les familles avec des enfants lourdement handicapés. Le 6 septembre, le chef de la CAQ, aujourd'hui premier ministre, leur a dit, et je le cite : «Si les Québécois nous font confiance le 1er octobre prochain, on va être là pour vous.» Leur engagement était clair : 22 millions de dollars par année, de plus, dès cette année, pour le programme d'aide financière pour les parents d'enfants lourdement handicapés mineurs. Leur cadre financier aussi était très clair.

M. le Président, à quelques heures du budget, est-ce que le ministre de la Famille peut les rassurer? Est-ce qu'il a vraiment à coeur les intérêts des familles avec des enfants lourdement handicapés?

Le Président : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci, M. le Président. Je peux assurément vous rassurer. Je peux assurément vous dire qu'on a à coeur ces familles qui vivent, et ça, il faut le dire, des enjeux très particuliers, qui mettent tout leur coeur pour s'assurer que leurs enfants puissent vivre convenablement avec leurs handicaps. Donc, on s'est engagés, en tant que gouvernement, à en faire plus.

Parce que, vous savez, le programme qui existe actuellement — il en existe un — il est compliqué, il n'est pas assez généreux, et nous, on s'est engagés à aller de l'avant pour l'améliorer. Vous savez, c'est un programme qui a été créé sous les précédents gouvernements, et nous, bien, on juge qu'on peut en faire plus, c'est ce qu'on s'est engagés à faire, on s'est engagés auprès des parents. Et, je vous dis très franchement, on n'a pas l'intention de reculer, on a l'intention de respecter tous nos engagements. Donc, à tous les parents qui nous écoutent aujourd'hui qui vivent avec un enfant handicapé, je vous dis : J'ai donné le mandat très précis à Retraite Québec de revoir ce programme-là pour qu'il soit plus accessible, plus généreux, et que ce ne soit pas tout ou rien, comme c'est le cas présentement.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Je n'entends toujours pas de confirmation. Lorsqu'il a pris son engagement, le premier ministre était entouré des candidats de Prévost, Saguenay, de Lévis, Taillon et Soulanges. Selon lui, c'était la meilleure équipe pour soutenir les 36 000 familles d'enfants handicapés. C'est maintenant le temps de tenir parole. Votre gouvernement a pris des engagements très clairs face aux familles qui vivent avec des enfants handicapés qui sont mineurs ou majeurs.

M. le Président, est-ce que le gouvernement va tenir parole et confirmer que l'argent, concrètement, serait au rendez-vous?

Le Président : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : M. le Président, évidemment on ne fera pas le budget avant le budget. J'invite ma collègue à être patiente. Comme le président du Conseil du trésor l'a mentionné tantôt, il y aura un budget qui sera présenté demain. Ce que je peux vous dire, c'est qu'on a l'intention de respecter nos engagements. C'est plus qu'une intention, on va respecter nos engagements. Le programme qui existe actuellement ne fonctionne pas. Il y a des parents qui reçoivent très peu, il y a des parents qui reçoivent beaucoup. Entre les deux, il n'y a rien. Donc, nous, on veut que les enfants qui se trouvent entre les deux puissent recevoir un soutien qui est convenable, que leurs parents puissent avoir accès à des fonds. On s'est engagés à le faire. Je le répète, on va le faire. J'ai donné expressément le mandat à Retraite Québec de revoir ce programme-là. Ce sera fait. Ce sera plus accessible, plus généreux.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : M. le Président, je n'entends toujours pas : Oui, 22 millions de dollars. Ces deux organismes ne sont pas les seuls à être inquiets. Parents pour toujours, qui représente les parents qui prennent soin de leurs enfants handicapés d'âge majeur, sont, eux, déçus et même frustrés. Lors d'une rencontre avec le ministre de la Famille, le 8 mars dernier, le ministre leur a clairement dit qu'il n'y aura rien dans le budget.

Si c'était une priorité, si c'était une urgence, pourquoi le ministre de la Famille et son gouvernement ont déjà renié leur parole? Et je dépose la lettre qui a été publiée.

Document déposé

Le Président : Consentement pour le dépôt du document? Consentement. Réponse, M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : M. le Président, bon, je peux répéter qu'il y aura un budget demain, je pense qu'on est tous conscients qu'il y aura un budget demain, donc j'invite ma collègue à être patiente.

L'autre chose que je veux mentionner, il faut bien comprendre, il faut faire la distinction, deux choses. Les enfants mineurs, donc, évidemment les enfants sont mineurs, il faut aider les parents à ce niveau-là, donc il y a une première chose. La deuxième partie, c'est d'aider ces enfants-là qui deviennent majeurs. Donc, c'est important de faire la distinction dans tout ça.

Moi, je vous dis, j'ai donné le mandat très précis à Retraite Québec de revoir le programme qui s'adresse aux enfants. On a l'intention de tenir tous nos engagements.

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales. Merci à tous.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, comme...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Nous allons poursuivre. S'il vous plaît!

Motions sans préavis

Comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je vais céder la parole à un membre formant l'opposition officielle, et ce sera Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Souligner la Journée internationale de la Francophonie

Mme Robitaille : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, le député des Îles-de-la-Madeleine, la députée de Taschereau, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin.

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée internationale de la Francophonie qui se tient aujourd'hui le 20 mars;

«Qu'elle rappelle que la survie de la langue française hors Québec doit être une priorité, et qu'à cet effet nous devons unir nos forces pour le français;

«Qu'elle réaffirme son attachement à la promotion de la langue française, aux valeurs de [la] démocratie et de justice ainsi qu'aux institutions de la Francophonie internationale;

«Qu'elle rappelle que le Québec est membre à part entière de l'Organisation internationale de la Francophonie;

«Que l'Assemblée nationale félicite les échanges tant culturels, sociaux, scientifiques que sportifs entre le Québec et tous les autres États [francophiles] et [francophones] afin de nourrir les liens qui nous unissent et, par là, rendre la francophonie plus forte et plus prospère et, du même coup, promouvoir la créativité, la culture, le savoir et la spécificité du Québec.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Alors, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : Oui. Alors, il y a consentement pour un débat de deux minutes par intervenant, dans l'ordre suivant : la députée de Bourassa-Sauvé, la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, le député des Îles-de-la-Madeleine, la députée de Taschereau et la députée de Marie-Victorin.

• (11 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader adjoint. Alors, je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Merci. Ce matin, Mme la Présidente, on va se faire plaisir. On va parler de la francophonie, on va parler de la place du Québec dans la Francophonie, ce que l'on a accompli depuis plus de 50 ans, et puis l'importance de maintenir notre place dans cette grande famille à tous les niveaux.

Quand j'étais toute petite, à Québec, en 1974, il y a eu la Super Francofête. Il n'y en a peut-être pas beaucoup ici qui étaient... Bon, il y en a qui étaient certainement nés à cette époque-là. Mais c'était un superparty, c'était notre Woodstock de la francophonie, et il y avait 100 000 personnes de partout dans la francophonie qui étaient à Québec, et ça a marqué l'imaginaire des Québécois. Ça a été le début des échanges avec tous nos partenaires de la francophonie au sens large, de la France, de la Belgique, de tout le continent africain francophone, ça a porté des fruits multiples.

La Francophonie, Mme la Présidente, nous a propulsés. C'est parmi cette grande famille qu'on a d'abord fait valoir la nation distincte que nous sommes. Grâce à la grande famille de la Francophonie, on est l'État fédéré sans doute le plus présent sur la scène internationale. Aujourd'hui, on est un État à part entière de l'Organisation internationale de la Francophonie, on est son cinquième bailleur de fonds sur 88 États. Ce n'est pas rien. L'Organisation internationale de la Francophonie, c'est quand même un bassin de 1 milliard de personnes.

Grâce à nos assises dans la Francophonie, le Québec a pris sa place dans le monde. On a maintenant 31 représentations dans 18 pays. On a signé 800 accords internationaux. On a une représentation à l'UNESCO depuis 2006. En 2016, on a créé un poste d'émissaire aux droits de la personne — j'espère qu'on va le combler — et aussi un émissaire à l'environnement. Il ne faut pas perdre ces acquis, il faut continuer à être le leader que l'on est. Le Québec doit demeurer le vaisseau amiral de la protection de la langue française en Amérique, et, en particulier au Canada, on doit défendre nos frères et nos soeurs... on doit défendre nos frères et nos soeurs francophones dans la francophonie.

Et, bon, c'est pour toutes ces raisons que notre parti tient mordicus à ces Jeux de la Francophonie qui auront lieu en 2021, on tient mordicus à ce qu'on appuie la candidature de Sherbrooke lors de ces jeux parce que, comme la Super Francofête, c'est des événements fantastiques qui réunissent tout le monde dans la francophonie, des milliers de personnes qui se rassemblent chez nous pour faire vivre la francophonie. C'est une occasion merveilleuse pour rassembler les francophones de partout, nourrir la force de la langue française partout dans le monde. On sait aussi que c'est l'occasion pour le Québec de montrer son leadership encore une fois dans le monde francophone.

La CAQ, sur ce projet, reste muette, et on espère très, très fort que ça sera une priorité de ce gouvernement, parce que la Francophonie, ce n'est pas juste une affaire de deal, ce n'est pas juste une affaire de commerce, c'est beaucoup plus que ça. La Francophonie, c'est une force à l'échelle de la planète à laquelle nous nous devons de continuer de participer sur tous les fronts.

Alors, pour terminer, très, très rapidement, j'aimerais citer une strophe de la chanson d'Yves Duteil à Félix Leclerc :

«C'est une langue belle à qui sait la défendre

«Elle offre des trésors de richesse infinie

«Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre

«Et la force qu'il faut pour vivre en harmonie.»

Alors, longue vie à la francophonie. Merci à tous.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre des Relations internationales et de la Francophonie.

Mme Nadine Girault

Mme Girault : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, 20 mars, on célèbre le fait français, cette langue commune qui nous unit et dont nous sommes si fiers. Le Québec est membre de plein droit de l'Organisation internationale de la Francophonie et contribue avec ses membres à la promotion de la langue française, la paix et l'éducation.

Le français, c'est la cinquième langue la plus parlée dans le monde, avec une belle croissance de 10 % de locuteurs depuis 2014. C'est aussi la quatrième langue la plus utilisée dans le monde numérique. Bref, on a de quoi être fiers de notre langue.

Et c'est dans cet esprit que le gouvernement souhaite affirmer son leadership. Près de 10 jours seulement après l'élection du nouveau gouvernement, le premier ministre s'est fait un devoir de participer au Sommet de la Francophonie à Erevan. J'ai aussi rencontré la secrétaire générale de l'OIF lors de mon passage à Paris, avec laquelle j'ai eu un entretien privé très dynamique. D'emblée, on s'est positionnés en chef de file dans la modernisation de l'OIF.

Dans ce contexte, on se doit de réfléchir sur l'avenir et avoir un plan pour le futur. Le français, c'est bien plus qu'une langue d'usage, c'est un véritable vecteur de croissance et, oui, de croissance économique aussi. Permettez-moi de vous rappeler que la langue française est la langue officielle de 32 États et gouvernements et qu'elle rejoint 300 millions de locuteurs dans le monde. L'espace francophone représente donc un marché à fort potentiel. C'est là que le Québec peut démontrer toute l'étendue du leadership dont il fait preuve.

Le mandat que le premier ministre m'a confié est de donner une impulsion économique au MRIF, dans lequel la francophonie... celle-ci prendra la forme d'une toute nouvelle vision pour l'Afrique. On ne peut pas se dire leader en francophonie si on ignore le dynamisme de ce continent. Sur 88 pays membres de l'OIF, 34 sont situés en Afrique. En 2100, 40 % de la population mondiale y sera située, 30 % de celle-ci aura moins de 35 ans. Nous allons bâtir sur ces liens que nous développerons depuis des décennies sur le continent africain, mais aussi au sein de l'OIF.

Je tiens à souligner à tous les Québécois et à souhaiter à tous les Québécois et aux Québécoises une excellente journée de la Francophonie. Soyons fiers de notre langue ici comme à l'étranger. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. La motion déposée aujourd'hui parle de l'importance de lutter pour la survie de la langue française hors Québec. Malheureusement, les événements des derniers mois nous prouvent que nous devons toujours rester vigilants et solidaires des provinces voisines quant au maintien et à la défense des droits des francophones.

Mais nous ne pourrions minimiser cependant l'importance et la vigilance nécessaire au quotidien pour assurer la vitalité et la pérennité du français ici même, au Québec. Notre langue, c'est ce qui nous distingue en tant que peuple. C'est ce qui marque notre singularité, notre signature. Depuis plus de 400 ans, c'est elle qui forge l'identité et la culture québécoises. C'est la langue française qui, en grande partie, nous différencie du reste de l'Amérique du Nord. Nous avons donc le devoir de la protéger, d'en faire la promotion, de la partager et de la faire aimer à travers nos actions, à travers notre monde culturel, à travers les artistes, à travers notre rôle politique également. C'est la responsabilité de chaque citoyen, bien sûr, mais c'est aussi celle du gouvernement et de ses institutions. Je souhaite d'ailleurs vivement qu'il fasse les efforts requis, qu'il pose les gestes qui mettront fin au laisser-faire et à un certain jovialisme quant à l'avenir de la langue française au Québec. Entre autres choses, la loi 101, une loi historique, a grandement besoin d'être renforcée. Il faut agir maintenant.

Par ailleurs, nous avons raison d'exprimer aujourd'hui, bien entendu, notre grande fierté dans le fait d'appartenir à la Francophonie. Ce groupe de 88 États a bien plus qu'une langue en partage, on l'a mentionné, il a aussi comme priorité de promouvoir la paix, la démocratie, les droits de la personne, ce qui l'honore. Je souhaite évidemment que le Québec y demeure un acteur de premier plan et qu'un jour il y occupe toute la place qui lui revient.

N'oublions pas également la situation à laquelle font face, on en parlait tout à l'heure, nos voisins franco-ontariens. Affichons-leur notre soutien. Pour notre part, nous continuerons à lutter à leurs côtés. Nous demeurons engagés à faire rayonner la langue française partout, en toutes occasions.

À toutes et à tous, bonne Journée internationale de la Francophonie. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Taschereau.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : En cette Journée internationale de la Francophonie, on célèbre le français dans le monde, mais donc on célèbre les Français dans toutes leurs particularités locales, dans toute la diversité que la langue française peut avoir. Alors, j'aimerais aujourd'hui qu'on se gâte un peu et j'aimerais célébrer la langue québécoise, notre français local à nous. J'aimerais remercier les générations qui m'ont précédée pour avoir réussi à débarrasser, à travers les années, à débarrasser les Québécois de la honte de leur langue, qui est magnifique, qui n'est pas une langue de dictionnaire et de Grevisse, qui est une langue vivante dont la beauté résonne jusqu'au tréfonds de notre magnifique territoire, dans le moindre «truck stop», dans le moindre petit resto de patate de bord de route. Et, pour faire résonner cette langue ici, je voudrais vous citer des extraits des écrits de la poète outaouaise Marjolaine Beauchamp, qui accumule les prix littéraires, qui a fait notre fierté à l'étranger, en France notamment. Et je vous invite à écouter la beauté de cette langue assumée, qui s'avance telle qu'elle est, sans honte. Ça s'appelle On s'fait une brigade.

«On s'fait une brigade de toutes croches, de filles rongées d'insomnies, diagonales, pognées entre deux shots de tempra, un hot chicken, trois pots cassés, cinq appels déclinés, une visite de prison[...].

«On s'fait une brigade de mères HLM en joggings puis en leggings qui coupent sur leur loyer pour pogner une trampoline, un cerceau, un hamster, une trottinette, un fidget spinner[...].

«Toujours deboutte à l'arrêt d'bus matin et soir, malgré le frette, la neige, pour accompagner leurs p'tits mongols de jello bleu puis de concerta en faisant des babailles, une smoke à la main.

«Des mères pas braillardes pour cinq cennes, des mères avec le dos large comme un boulevard déneigé, puissantes comme une catastrophe naturelle[...].

«On s'fait une brigade de poquées, de survivantes aux voisins pervers, aux "rides" de taxi mal accompagnées, aux mononc' sales, aux centres jeunesse[...].

«On s'fait une brigade de filles trop folles pour être voulues, trop fulgurantes pour être toutes seules, que tout l'monde aime à un bras de distance

«Qui font des festins avec trois ingrédients, qui dorment six heures, [...]qui charrient des canots

«Qui parlent un ton trop haut, un peu trop mal.

«Des filles de promesses tenues, crissement pas fiables, mais si loyales

«Des filles qui partent des feux en pleine pluie, des filles aux cheveux lousses, ultraviolettes, autodidactes et irrévérencieuses.

«[On s'fait une brigade,] on s'fait ça maintenant

«On se reposera plus tard.» Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : Mme la Présidente, à mon tour de souligner la Journée internationale de la Francophonie, cette célébration de notre langue qui nous rend si fiers au Québec. Cette journée est d'autant plus importante qu'elle doit nous rappeler que la survie du français hors Québec, dans les communautés francophones du reste de l'Amérique du Nord, est menacée. Les exemples dans l'actualité récente sont probants. On n'a qu'à penser au combat d'Amanda Simard en Ontario pour s'en convaincre.

Il faut toutefois reconnaître qu'ici même au Québec un certain déclin du français est observable. C'est une situation préoccupante, et il est important de réaffirmer l'importance pour le Québec de protéger et de promouvoir sa langue officielle et commune. Pour ça, ça prend aussi des moyens. Et, en ce sens, j'espère qu'il y aura dans le prochain budget les sommes nécessaires pour nous garantir le droit à la francisation parce que l'avenir de notre langue ici, au Québec, et ailleurs en Amérique, passe par notre capacité à la transmettre à tous ceux qui vivent sur notre territoire, à leur donner le goût de notre langue, cette langue qui est le ciment de notre identité collective, cette langue qui nous rapproche et qui nous permet de mieux se comprendre. Elle est aussi une autre manière de penser, de voir le monde. Elle nous permet d'affirmer, et d'afficher notre spécificité et de dire à tous ceux qui viennent s'installer ici pour vivre en tant que Québécois : Vous êtes ici chez vous.

La langue est le socle fondamental de notre identité collective. Nous devons donc poser tous les gestes nécessaires pour que les générations à venir puissent s'épanouir en français. Et, de mon point de vue, cela passe inévitablement par faire du Québec un pays, un fort symbole pour la diversité culturelle à l'échelle de la planète.

L'indépendance nous permettrait de renforcer notre position et de devenir un véritable phare de la francophonie internationale. Le Québec deviendrait en effet, en termes de superficie, le plus grand pays francophone à l'échelle de la planète. Cela nous permettrait d'accentuer et de faciliter nos partenariats avec les pays et régions francophones en pleine croissance, comme plusieurs le sont sur le continent africain. L'avenir de la francophonie se trouve justement là-bas.

En 2050, l'Organisation internationale de la Francophonie prévoit que les Africains compteront pour 85 % des locuteurs francophones de la planète et pour 90 % des jeunes francophones âgés de 15 à 29 ans. De plus, la croissance démographique est actuellement telle en Afrique qu'on prévoit que le nombre de francophones triplera d'ici 2050 pour grimper à plus de 750 millions de locuteurs de langue première. La langue française deviendrait ainsi possiblement la langue la plus parlée au monde, avant l'anglais, le mandarin et l'espagnol. Notre héritage francophone est donc un atout économique immense. Il nous permettra sans aucun doute de tirer notre épingle du jeu encore plus efficacement qu'aujourd'hui, pour autant qu'on s'en donne les moyens.

Comme l'a déjà dit Gérard Bouchard, c'est à nous d'assurer l'avenir de notre langue, saisissons-en la pleine mesure. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mise aux voix

Alors, cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Je vais maintenant reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition, et ce sera M. le député de René-Lévesque.

M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter conjointement avec le député de La Pinière, la députée de Mercier, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale donne le mandat à la Vérificatrice générale d'enquêter sur le processus d'achat des navires F.-A.-Gauthier et NM Appolo, ainsi que sur la gestion du dossier par la Société des traversiers du Québec.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement. Maintenant, je vais...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : S'il vous plaît! Nous allons maintenant passer...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Veuillez éviter de vous interpeler d'un côté et de l'autre, s'il vous plaît!

Nous en sommes maintenant toujours à la rubrique des motions sans préavis, et je vais céder la parole à un membre du troisième groupe d'opposition, et ce sera M. le député de Gouin.

Rappeler aux directions d'établissement de santé l'importance
de maintenir de hauts standards éthiques et de défendre
le caractère public des institutions de santé

M. Nadeau-Dubois : On va changer de sujet, Mme la Présidente, ça va faire du bien à tout le monde. Alors, je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la ministre de la Santé et des Services sociaux, le député de Pontiac, le député de Jonquière, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rappelle aux directions des établissements de santé qu'elles doivent, en tant qu'organismes parapublics, maintenir de hauts standards éthiques et éviter les conflits ou les apparences de conflits d'intérêts avec les entreprises privées;

«Qu'elle rappelle aux dirigeants de ces établissements que leur mission première est de servir l'intérêt public et de garantir des soins de qualité à la population, et que pour se faire, ces dirigeants doivent défendre en tout temps le caractère public des institutions de santé et protéger celles-ci de l'influence indue des entreprises privées.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : Alors, il y a consentement, sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais de faire parvenir une copie de cette motion à la direction ainsi qu'au conseil d'administration du Centre universitaire de santé McGill et une autre copie de cette même motion à la direction de Power Corporation. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien, M. le député, ce sera fait.

Maintenant, nous allons passer à la prochaine motion sans préavis, et je vais céder la parole à un membre formant le gouvernement, et ce sera Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Rendre hommage à la chanteuse Nicole Martin et offrir
des condoléances à sa famille
et à ses proches

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Eh bien, je demande le consentement pour déposer la motion suivante conjointement avec la députée de Verdun, la députée de Gaspé, le député de Rosemont, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rende hommage à Mme Nicole Martin, unique et inoubliable voix du Québec, et qu'elle reconnaisse son immense contribution à la chanson québécoise à travers sa brillante carrière, et;

«Que l'Assemblée nationale transmette à la famille et aux proches de Mme Nicole Martin, au nom de la nation québécoise, ses plus sincères condoléances pour la perte de cette femme au talent remarquable qui a marqué notre culture au cours des 50 dernières années.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

• (11 h 40) •

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, il y a consentement pour un débat de deux minutes par intervenant dans l'ordre suivant : la ministre de la Culture et des Communications, la députée de Verdun, la députée de Gaspé, le député de Rosemont et la députée de Marie-Victorin.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Alors, Mme la ministre de la Culture et des Communications, je vous recède la parole.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. On apprenait avec tristesse, il y a quelques jours à peine, qu'une des plus riches et des plus somptueuses voix du Québec s'est malheureusement éteinte en février dernier.

Nicole Martin était née à Donnacona, près de Québec. Elle a ensuite vécu pendant de nombreuses années dans notre capitale. C'est d'ailleurs ici, à Québec même, que tout a commencé pour elle professionnellement alors qu'elle n'avait que 14 ans. Le reste de l'histoire, vous le connaissez, nous la connaissons toute, cette histoire, elle est de notoriété publique. Nicole Martin a marqué la scène musicale des années 70 et 80 en enchaînant succès après succès, berçant et faisant danser des générations de Québécois. À la radio, on n'entendait qu'elle. Si on voulait résumer en seulement quelques mots l'immense contribution de Nicole Martin à la culture québécoise, on pourrait commencer par : Il était une fois une femme qui a rendu les gens heureux.

Nicole Martin, Mme la Présidente, c'est 50 années d'amour et de fidélité réciproques entre elle et le public québécois. C'est plus de 20 albums, dont certains ont récolté les plus grands honneurs en étant certifiés platine, double et même triple platine. C'est un succès international auprès des publics du Québec, du Canada, de la France et même du Japon, Mme la Présidente. C'est un rayonnement planétaire qui a suscité fierté et admiration.

Nicole Martin, c'est enfin une étoile qui s'éteint et qui va nous manquer. Une icône de la chanson populaire dont les innombrables succès, de Laisse-moi partir à Il était une fois des gens heureux en passant par Bonsoir tristesse et Oui paraît-il, ses chansons, ses succès résonneront pour encore longtemps dans nos têtes et, naturellement, dans nos coeurs.

En terminant, ayons tous une pensée toute particulière, toute spéciale pour ses proches qui l'ont accompagnée à travers son éprouvant combat contre la maladie.

À vous tous, nous vous transmettons nos plus sincères condoléances. Et à vous, Mme Martin, où que vous soyez, le Québec tout entier vous dit merci. Merci pour tous ces bons moments. Nous vous laissons partir, mais nous vous promettons de ne jamais vous oublier. Merci pour tout. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre de la Culture. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Verdun.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est dans un message rempli d'amour et d'émotion que nous apprenions, samedi dernier, le décès de Nicole Martin. En effet, le mari et impresario de Nicole Martin, M. Lee Abbott, annonçait que la grande dame de la chanson nous avait quittés le 19 février dernier à la suite d'une maladie fulgurante. À l'annonce de son décès, c'est toute la communauté artistique qui a réagi au départ de cette femme. Et aujourd'hui c'est l'Assemblée nationale du Québec qui rend hommage à celle qui a connu une carrière de 50 ans, qui a lancé, comme le disait la ministre un peu avant, plus d'une vingtaine d'albums auxquels ont participé les plus grands compositeurs et paroliers, dont Stéphane Venne, Pierre Létourneau, et Luc Plamondon.

Née à Donnacona, Nicole Martin a grandi ici, à Québec. À peine âgée de 14 ans, elle saura conquérir le Québec en participant à différents concours amateurs à travers la province puis dans les cabarets de la capitale nationale. À 25 ans, sa carrière sera propulsée sur la scène internationale, en France puis au Japon. Depuis ce temps, le succès de Nicole Martin ne s'est pas démenti avec ses tournées incessantes et l'amour inconditionnel de son public. Elle a su marquer bien des générations grâce à sa grande voix qui restera toujours dans nos vies, dans nos coeurs. Ses plus grands succès, comme Il était une fois des gens heureux, Laisse-moi partir, Tes yeux, Bonsoir tristesse, et La première nuit demeureront des classiques de notre culture québécoise.

Âgée de seulement 69 ans, Nicole Martin nous a quittés trop tôt. Avant de mourir, Nicole Martin a demandé à son conjoint de dire merci à ses admirateurs qui l'ont suivie tout au cours de ces années. Aujourd'hui, c'est à nous de vous dire merci pour tous les beaux moments que vous nous avez offerts tout au long de votre brillante carrière grâce à votre talent remarquable, grâce à votre voix unique.

Je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à son conjoint, Lee Abbott, à sa famille et ses très nombreux amis. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Verdun. Maintenant, je vais reconnaître Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Mme la Présidente, merci de me donner l'occasion de souligner la vie et l'oeuvre de Mme Nicole Martin, l'une des grandes voix du Québec, un nom avec lequel le grand public est tout à fait familier, lui qui a été prononcé avec respect et admiration un nombre incalculable de fois depuis des décennies.

Nicole Martin n'était pas qu'une brillante interprète. Elle était l'incarnation même de ce qu'est le terme «artiste». Elle a voué sa vie à la chanson en participant activement à toutes les étapes de production. Son plus grand bonheur était d'émouvoir son public, ce qu'elle réussissait à faire sans difficulté. Sa voix, qu'on peut reconnaître parmi un millier d'autres, restera à jamais associée à certaines des plus grandes chansons d'amour que les Québécois ont fredonnées. Elle aura connu le succès dans son pays natal, mais aussi à l'étranger, notamment en France et au Japon. En fait, sa voix unique, puissante et profonde traversait les cultures, apportant à chacun un sentiment de sérénité et de réconfort. Il y a fort à parier qu'elle continuera de réchauffer les coeurs.

Au nom de ma formation politique, j'offre à la famille et à tous les proches de Mme Nicole Martin mes plus sincères condoléances. Nous la laissons partir, mais je vous assure qu'elle ne sera jamais oubliée.

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Gaspé. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Lors d'une entrevue à Radio-Canada, Nicole Martin a déjà dit : «Moi, je ne voulais pas être une vedette, je voulais être une artiste.» On peut dire que c'est mission accomplie.

Si on connaît davantage Nicole Martin comme interprète, elle a également oeuvré comme auteure, compositrice, réalisatrice, productrice et animatrice. Elle s'intéressait à toutes les facettes de son art. Elle a marqué le Québec par son charme, par son souffle, par sa voix suave. Elle avait une profonde affection pour son public, qui le lui rendait bien. Elle a toujours dit qu'elle avait été influencée par sa famille, passionnée de musique, qui transportait ses instruments, piano, accordéon, guitare, banjo et batterie jusque dans les piqueniques. C'est très tôt qu'elle a développé son amour de la chanson. On ne peut donc que souligner l'importance d'encourager la culture dès le plus jeune âge, de rendre accessible cet univers artistique qui ouvre sur les possibles.

Nicole Martin était une grande dame dans le paysage québécois qui a fait sa place en tant que femme dans un milieu à l'époque essentiellement masculin. Son décès prématuré nous attriste beaucoup. Cela nous rappelle aussi que le temps passe, que les technologies changent, que la musique s'est peut-être dématérialisée, mais que les grandes voix et les légendes restent.

Nous offrons nos plus sincères condoléances à son conjoint, Lee Abbott, à sa famille, à ses proches et à ses très nombreux admirateurs et admiratrices. Vous qui chantiez Laisse-moi partir avec tant d'émotion, on vous laisse partir en paix, Mme Martin. Et nous continuerons de fredonner un des plus célèbres et un des plus beaux vers d'oreille que l'on ait connu au Québec, Il était une fois des gens heureux. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Rosemont. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : Mme la Présidente, on ne peut qu'être admiratif devant une femme comme Nicole Martin. Une femme qui, pendant plus de 50 ans, est devenue une intime pour des millions d'entre nous. Grâce à sa voix exceptionnelle, elle a su se tailler une place de choix dans les foyers et dans les coeurs des Québécois. Merci pour ces moments émouvants que vous nous avez fait vivre et que vous continuerez de nous faire vivre.

Mon âge trahit le fait que je n'ai certes pas pu vivre l'apogée de la carrière de Nicole Martin, mais ce que je sais, c'est qu'elle a réussi à transcender le temps puisque j'écoute aujourd'hui du Nicole Martin téléchargé sur mon téléphone et j'en suis très fière.

• (11 h 50) •

En terminant, je tiens à saluer les proches et la famille de Mme Martin, son mari, M. Abbott, et leur assurer une nouvelle fois que sa musique, ses paroles et sa douce voix seront à jamais gravées dans notre mémoire collective.

En mon nom personnel et au nom de tous mes concitoyens de Marie-Victorin, je vous offre mes plus sincères condoléances. Merci.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin. Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Alors, je vais vous inviter à vous lever et à vous joindre à moi pour que nous puissions observer une minute de silence à la mémoire de Mme Nicole Martin.

• (11 h 51  11 h 52) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, vous pouvez vous asseoir.

Alors, nous en sommes toujours à la rubrique des motions sans préavis. Y a-t-il d'autres motions sans préavis? Ce n'est pas le cas.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, je vais maintenant passer à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Merci. Alors, Mme la Présidente, alors, j'avise cette Assemblée que la Commission de la culture et de l'éducation poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 12, Loi visant à préciser la portée du droit à la gratuité scolaire et à permettre l'encadrement de certaines contributions financières pouvant être exigées, aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 1 h 30 min, et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et

La Commission de la santé et des services sociaux entreprendra les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 7, Loi concernant certaines conditions de travail applicables aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux, aujourd'hui, de 15 heures à 16 h 45, à la salle du Conseil législatif. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader adjoint.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Et maintenant nous en sommes à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Et, s'il n'y a pas de demande de renseignement, pour ma part, moi, je vous informe qu'aujourd'hui à 14 heures, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, aura lieu la sanction des projets de loi suivants : le projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière, et le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-dépôts.

Affaires du jour

Maintenant, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons passer aux affaires du jour, et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 6 du feuilleton.

Projet de loi n° 10

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. À l'article 6 du feuilleton, M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale. Et, sans plus tarder, je vais céder la parole à M. le ministre du Travail.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, chères équipes de mon ministère et de mon cabinet, groupes qui sont venus en commission parlementaire... important de les mentionner : Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, Centrale des syndicats démocratiques, Confédération des syndicats nationaux, Conseil du patronat du Québec, Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, Centrale des syndicats du Québec, Fédération des chambres de commerce du Québec, Conseil du statut de la femme, Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, groupes ou citoyens qui nous ont soumis des mémoires, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre de l'adoption de principe du projet de loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale.

La Loi sur l'équité salariale vise à corriger des écarts salariaux en des catégories d'emplois à prédominance féminine et des catégories d'emplois à prépondérance masculine dans une même entreprise.

Avant d'aller plus loin, je crois qu'il est nécessaire de faire la distinction entre l'égalité salariale et l'équité salariale. Le principe de l'égalité salariale repose sur la notion d'un salaire égal pour un travail égal. Par exemple, deux personnes faisant le même travail depuis le même nombre d'années, avec un rendement égal, doivent recevoir le même salaire. Le principe de l'équité salariale, quant à lui, exige un salaire égal pour un travail différent, mais équivalent. Ainsi, dans la même entreprise, des personnes occupant un emploi à prépondérance féminine doivent recevoir un salaire égal à celui des personnes occupant un emploi à prépondérance masculine, mais évalué comme étant équivalent. Par exemple, l'emploi de femme de chambre pourrait avoir la même valeur que l'emploi de portier.

La loi prévoit une démarche proactive en deux étapes : la réalisation d'un exercice initial d'équité salariale, l'évaluation du maintien de l'équité salariale.

La loi vise les employeurs qui emploient en moyenne annuellement 10 personnes salariées ou plus, soit plus de 35 000 entreprises au Québec. Les employeurs assujettis à la loi doivent réaliser un exercice initial d'équité salariale qui consiste à déterminer s'il y a des écarts salariaux entre les personnes salariées de sexe différent exerçant un emploi équivalent.

Ils doivent ensuite évaluer le maintien de l'équité salariale tous les cinq ans. Cette étape d'évaluation consiste à déterminer s'il y a eu création de nouveaux écarts entre les personnes salariées de sexe différent exerçant un emploi équivalent pendant cette période de cinq ans et déterminer les ajustements salariaux pour corriger ces écarts. Le présent projet de loi concerne principalement cette étape d'évaluation.

La Loi sur l'équité salariale est entrée en vigueur le 21 novembre 1997. Le 28 mai 2009, la Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale est sanctionnée. Elle prévoit depuis une évaluation quinquennale du maintien de l'équité salariale, qui comporte notamment les éléments suivants. L'article 76.3 de la loi décrit quels renseignements l'employeur doit donner à ses salariés à l'occasion de l'affichage. L'employeur doit notamment fournir la liste des événements survenus ayant généré des ajustements, sans être tenu de mentionner la date de ces événements et la nature des ajustements requis.

L'article 76.5 de la loi prévoit que les ajustements salariaux s'appliquent à compter de l'affichage seulement.

Le 22 janvier 2014, la Cour supérieure du Québec a déclaré ces deux articles inconstitutionnels. Le 12 octobre 2016, la Cour d'appel du Québec a maintenu le jugement, tout en déclarant également que l'article 103.1, alinéa deux, de la loi était lui aussi inconstitutionnel.

Le 10 mai 2018, la Cour suprême du Canada a confirmé la décision de la Cour d'appel du Québec. Cette décision a été rendue sous le motif que ces dispositions créent un régime discriminatoire envers les femmes puisqu'elles ne prévoient pas la correction des écarts salariaux à partir de la date des événements ayant mené à ces écarts.

Le gouvernement du Québec a jusqu'au 10 mai 2019 pour apporter les modifications à la loi, sans quoi le cadre législatif nécessaire à l'évaluation du maintien de l'équité salariale sera incomplet.

• (12 heures) •

Les modifications législatives proposées se regroupent en quatre thèmes. Premièrement, rendre le processus d'évaluation de l'équité salariale conforme à la décision de la Cour suprême du Canada; deuxièmement, favoriser la participation des personnes salariées lors d'une évaluation du maintien de l'équité salariale; troisièmement, encadrer le traitement d'une plainte; quatrièmement, améliorer les éléments de mise en oeuvre de la loi.

Les changements comportés comportent des avantages pour les personnes salariées. Ils permettront aux personnes salariées de faire valoir leurs droits plus efficacement en ayant accès à davantage d'information concernant les travaux d'évaluation du maintien de l'équité salariale. En précisant que les écarts salariaux doivent être compensés à compter du moment de leur apparition et non seulement à compter de la date de l'affichage des résultats finaux de l'évaluation, cela permettra aux personnes salariées de recevoir une indemnité forfaitaire qui compense la période pendant laquelle elles ont subi une inéquité salariale. Que ce soit en assistant les personnes salariées souhaitant porter plainte ou en assistant les employeurs pour la mise en oeuvre des nouvelles dispositions de la loi, la Commission des normes, de l'équité, santé et sécurité du travail jouera un rôle de premier plan dans l'application de cette loi. Je suis convaincu qu'elle saura s'acquitter de ce mandat avec brio.

Ce projet de loi comporte également des avantages pour les employeurs. En définissant la portée de l'évaluation du maintien de l'équité salariale, cela permet d'apporter les précisions nécessaires pour faciliter le processus tout en laissant une souplesse aux employeurs sur les moyens pour réaliser leur obligation. En obligeant l'utilisation d'un formulaire prescrit par la CNESST, l'information qui appuie une plainte est uniformisée, permettant d'en faciliter la transmission à l'employeur concerné. En permettant des modalités pour le traitement regroupé des plaintes en conciliation et la possibilité d'échanger avec plusieurs associations accréditées pour conclure une entente globale, cela permet de structurer les discussions et de faciliter le règlement des plaintes. En abolissant l'avis d'affichage et en harmonisant aux cinq ans la date à laquelle débutent les affichages, cela permet de diminuer les exigences administratives des employeurs.

Finalement, rappelons qu'en vertu de l'article 130 de la loi le ministre doit, au plus tard le 28 mai 2019, faire au gouvernement un rapport sur la mise en oeuvre de la loi et sur l'opportunité de la maintenir en vigueur ou de la modifier. Ce rapport est déposé par le ministre dans les 15 jours suivants à l'Assemblée nationale ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux. J'entends respecter ce délai légal. Ainsi, toutes les bonifications proposées lors des consultations et de l'étude détaillée seront prises en considération pour ce rapport. D'ailleurs, il présentera des pistes de réflexion et des recommandations pour l'avenir.

Je rappelle que ce projet de loi concerne principalement l'étape de l'évaluation du maintien de l'équité salariale. Je demande la collaboration de tous mes collègues députés afin que les démarches devant nous mener à l'adoption de ce projet de loi aillent rondement. Il s'agit d'une loi d'ordre public concernant les intérêts fondamentaux de l'État et de la collectivité. Nous avons la responsabilité de travailler ensemble pour le bien commun. Vous pouvez être assurés que nous sommes à l'écoute pour faire en sorte que ce projet de loi réponde aux attentes des groupes et des autres partis. Nous devrons toutefois être efficaces avec le temps que nous aurons.

Les modifications proposées permettront de poursuivre la lutte contre la discrimination systémique à l'égard des emplois traditionnellement ou majoritairement féminins, augmentant ainsi, par rapport à la situation actuelle, le revenu net des personnes salariées concernées. Elles favoriseront l'atteinte de conditions de travail équitables pour l'ensemble des travailleuses et des travailleurs. Le gouvernement croit fermement que pour un emploi équivalent, c'est un salaire égal. Nous nous assurons que les femmes aient plein accès à leurs droits. C'est pourquoi je propose l'adoption de principe du projet de loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Et maintenant, pour la prochaine intervention, je vais céder la parole à Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je veux vous informer que j'interviens cet après-midi, ou ce matin, enfin, à titre de porte-parole de notre formation politique en remplacement de mon très cher collègue de Vimont. Je suis très fière d'être une femme en cette Chambre et de pouvoir m'exprimer aujourd'hui sur le principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien sur l'équité salariale. C'est un enjeu de société auquel je suis bien évidemment fort sensible — je sais que, Mme la Présidente, vous l'êtes aussi — un enjeu qui nous touche de près, les femmes du Québec, qui touche, encore aujourd'hui, trop de femmes au Québec.

Dans un premier temps, j'aimerais saluer mon cher collègue de Vimont, porte-parole de l'opposition officielle pour le dossier du travail, qui sera très bientôt de retour et en pleine forme, je le sais. Je souhaite également saluer le ministre de l'Emploi, du Travail et de la Solidarité sociale, ses collègues, les collègues des deuxième et troisième oppositions, le député de René-Lévesque et d'Hochelaga-Maisonneuve, qui ont, tout comme moi, le privilège d'assister aux consultations particulières. Je ne veux pas oublier non plus de saluer la députée de Huntingdon, qui a présidé avec brio ses premiers travaux de commission parlementaire.

Un peu comme dans un épisode de Columbo, je vais vous révéler la fin du propos en tout début de mon allocution. M. le Président, je désire informer le ministre qu'au nom de l'opposition officielle et de mes collègues j'offre notre collaboration à faire avancer avec lui le projet de loi n° 10. Pour cette fois, et je dis bien pour cette fois, et pour ce dossier qui nous tient tous à coeur, il peut compter sur notre appui sincère. Ça ne nous empêchera pas, Mme la Présidente, d'être très vigilants à lui rappeler, au cours de l'étude détaillée, certains enjeux. Au fil de l'étude, oui, il y aura ces préoccupations qui ont été nommées, mais, encore une fois, il pourra compter sur notre collaboration. Nous serons en mode ouverture et nous serons en mode compromis.

Dans un premier temps, Mme la Présidente, je veux revenir un peu sur l'histoire du dossier de l'équité salariale, parce que c'est une très belle histoire, et je vais vous dire que c'est une très belle histoire, bien qu'inachevée. Et en me préparant pour ce dossier et l'allocution d'aujourd'hui, j'ai parcouru l'Internet et je me suis mise à relire des articles, entre autres, sur le 20e anniversaire, il y a quelques années, de la Loi sur l'équité salariale. Et j'ai pu un peu me réapproprier, je vous dirais, avec beaucoup d'émotion le parcours de ces grands acteurs politiques, de ces grandes femmes politiques qui ont lutté pendant des années. Il y avait des obstacles, il y avait une société à changer, et leur témoignage, je trouve qu'on a avantage à le relire, ce récit de cette lutte qui a duré si longtemps avec, au coeur de cette lutte, bien sûr, des grands personnages. Alors donc, rappelons-nous tous ensemble. Et ça, évidemment, je voulais un peu le souligner. Je voulais nous donner un peu un devoir collectif de se dire que, s'il y a cette avancée, si nous en sommes aujourd'hui à travailler sur l'évaluation du maintien de l'équité salariale, il faut se rappeler tous ensemble l'histoire que nous avons bien à coeur.

• (12 h 10) •

Alors, c'est un peu le premier élément de mon propos, revenir avec émotion sur cette histoire de la Loi sur l'équité salariale et de ce grand dossier. Et ensuite je vais revenir sur le contexte, Mme la Présidente, celui qui guide le projet de loi du ministre, le projet de loi n° 10, qui s'inscrit, finalement, dans une obligation de donner suite au jugement de la Cour suprême. Je vais terminer mon propos en survolant les présentations, bien sûr, qui ont été entendues lors des consultations et les enjeux qui nous ont été soulevés et que nous devrons porter par la suite. J'ai fait un travail assez exhaustif, en respect des groupes qui ont fait une réflexion tout à fait exceptionnelle, une réflexion qu'ils nous ont transmise lors de leurs présentations en consultations particulières. Et, lorsque j'aborderai cette question des consultations, je veux aussi qu'on renomme le privilège que nous avons tous, les collègues de tous partis confondus, à entendre l'ampleur, et la qualité, et la rigueur des propos qui nous sont amenés, qui nous nourrissent toujours pour la suite. Avec l'expérience que l'on a et que l'on prend en cette Chambre et en commission parlementaire, on réalise l'importance de cette étape que sont les consultations particulières.

Alors, aujourd'hui, nous allons parler de l'évaluation du maintien. Tantôt, je parlais de l'histoire, alors pensons-y un instant. On est rendus non seulement à l'émergence d'une culture d'équité salariale, mais on est passés à l'étape du maintien et aujourd'hui on se préoccupe de l'évaluation du maintien. Que de chemin parcouru, que de pas franchis, mais gardons la vigilance qui s'impose pour la suite, parce qu'il faut que l'équité salariale, ça soit maintenu et protégé, protégé dans le temps, protégé dans la culture de toute organisation. Ce que je viens de dire, c'est très bien résumé dans le mémoire et la présentation, entre autres, du Conseil du patronat, qui écrit ceci : «Depuis l'adoption de la loi en 1996, de grandes avancées ont été faites, mais il reste du chemin à parcourir.» Voilà qui est très vrai.

Allons-y donc avec le contexte, on se lance. La Loi sur l'équité salariale, on le sait, a été adoptée en 1996. Le 12 février dernier, le ministre de l'Emploi, du Travail et de la Solidarité sociale a déposé son projet de loi n° 10. En fait, ce projet de loi, c'est une réponse au jugement de la Cour suprême du Canada avec, il l'a nommée tantôt, la prescription d'une échéance très précise, soit un an après le jugement, donc l'échéance du 10 mai 2019. Qu'est-ce que veut le projet de loi? Le projet de loi veut favoriser l'atteinte de conditions de travail équitables, évidemment, on le sait, pour l'ensemble des travailleuses et travailleurs du Québec en se préoccupant d'abord et avant tout de l'évaluation du maintien de l'équité salariale. C'est, bien sûr, la pierre angulaire.

La Cour suprême avait, en effet... et là, soyez bien rassurés, je ne m'improviserai pas juriste, parce qu'il y a quelques interprétations qui ont cours quant à ce jugement, mais il faut bien savoir que la Cour suprême a rendu son jugement le 10 mai en maintenant un jugement qui était rendu précédemment par la Cour d'appel du Québec et qui venait invalider trois, trois des chapitres de la Loi sur l'équité salariale qui traitaient de l'obligation de maintenir l'équité salariale. Alors, le plus haut tribunal du pays a jugé que ces dispositions étaient inconstitutionnelles, puisqu'elles portent atteinte au droit à l'égalité des femmes en les privant de réclamer des ajustements rétroactifs afin de réduire les écarts entre hommes et femmes.

En respect de la conformité au jugement rendu, bien des éléments sont au coeur de l'écriture du projet de loi. Il y a la participation des salariés à l'évaluation du maintien, il y a, le ministre en a parlé, l'encadrement, la gestion des plaintes, qui sont des éléments très présents. Avec le projet de loi n° 10, les employeurs de 10 employés ou plus devront indemniser des milliers de travailleuses et de travailleurs de façon rétroactive pour les écarts de salaire avec leurs collègues masculins.

En fait, si j'avais à résumer le projet de loi n° 10, c'est, finalement, une volonté de rendre le processus d'évaluation de l'équité salariale conforme à la décision, je viens de le nommer, et favoriser de façon importante, une nouvelle façon, je dirais, la participation des salariés lors de tout ce processus d'évaluation du maintien. Et, concrètement, le projet de loi oblige même certains employeurs qui décident de faire seuls l'évaluation du maintien de l'équité salariale à réaliser un véritable processus de participation, donc ça vient, bien sûr, camper ça.

Le projet de loi prévoit aussi que l'employeur doit rendre compte, lors de l'affichage... Donc, toute la notion de l'information qui devra désormais être affichée en vue pour les salariés, donc, c'est revisité dans le cadre du projet de loi. Alors, l'employeur doit en rendre compte lors de l'affichage des résultats de son évaluation en inscrivant la date de début des événements ayant généré un ajustement et sa date de fin. Il y a l'aspect aussi du rôle, dans le projet de loi, de la CNESST, alors, avec l'obligation pour elle d'assister, d'accompagner les salariés qui désirent déposer une plainte. Alors, le processus de traitement est ainsi modifié.

Je veux maintenant... Après vous avoir parlé de cette première étape de mon propos, le contexte, allons-y avec ce qui a été présenté lors des consultations particulières. Et, si vous me le permettez, Mme la Présidente, j'aimerais y aller avec trois premiers commentaires généraux.

On va commencer par l'aspect négatif, comme ça, ça va être réglé. Vous savez, c'est toujours un privilège, hein, je veux le dire, ça fait trois ans et demi que je siège, hein, sur les commissions, et c'est toujours un privilège alors, encore une fois... Mais là je devance un peu parce que je vous parle du positif. On va vraiment régler l'aspect négatif. Il faut le dire et le redire, malheureusement, plusieurs groupes nous ont mentionné le très, très court délai entre l'invitation qu'ils ont reçue et leur présence en commission, peu de temps pour se préparer, peu de temps pour rédiger l'ensemble de leurs réflexions sur le projet de loi. Voilà pour le point négatif.

Comme j'aime les histoires qui se terminent bien, alors je saute tout de suite aux deux points positifs, on y va. Donc, le premier aspect, c'est la qualité des mémoires et des présentations, évidemment. Je peux vous dire que chaque groupe, malgré le court délai, nous a livré des arguments très rigoureux, très bien préparés, des positions affirmées en toute franchise et des positions bien documentées avec une analyse très, très fine du projet de loi. Alors, je veux les remercier tous. Ils ont été nommés par le ministre, donc je ne renommerai pas chacun des groupes, mais je les ai bien en tête pour les avoir écoutés attentivement, et, vraiment, ils nous ont livré une qualité de présentation en commission parlementaire.

Dernier point très positif et important pour moi, ça, c'est un point qui me tient très à coeur, et c'est la représentativité. Quand on a devant nous la majorité ou une grande diversité d'angles des propos, on est à même d'être bien nourris pour la suite des choses. C'est une opinion qui me tient... en tout cas, c'est une pensée qui me tient bien à coeur. Alors, c'est l'éclairage qu'on a, c'est la qualité de l'éclairage pour les futurs débats d'étude détaillée et, vraiment, c'est de pouvoir recevoir et d'écouter presque l'ensemble des préoccupations des citoyens, des acteurs de la société civile en lien avec, évidemment, le projet de loi qui est déposé. Alors, je suis heureuse, Mme la Présidente, de constater que nous avons été témoins, à la CET, à la Commission économie, travail, des propos syndicaux, patronaux, des groupes d'expertise, des groupes de défense de droits. Et à eux tous, ils ont déjà beaucoup, beaucoup apporté sur le débat de l'évaluation du maintien de l'équité salariale.

Mme la Présidente, allons maintenant vers des commentaires plus spécifiques. Alors, je nous propose d'adresser ce bilan enjeu par enjeu. J'en ai identifié sept principaux. J'espère de tout coeur être respectueuse de ce que nous avons entendu, j'y travaillerai. Mais je veux vous dire que la façon dont j'ai abordé l'écoute des groupes lors de cette commission, je me suis ramenée un petit peu dans un rôle que j'ai eu dans ma vie, dans mon ancienne vie. Ça ne me rajeunit pas, mais je m'assume. Alors, j'ai été, pendant plus d'une décennie, présidente du Conseil régional des partenaires du marché du travail, et il y avait autour de la table... et ça a été une expérience extraordinaire pour moi, et, pendant toutes ces années, j'avais autour de la table des représentants syndicaux, patronaux, les acteurs de l'éducation, le communautaire, les gens, bien sûr, représentant Emploi-Québec, qui est devenu Services Québec. Et, à chaque réunion, l'enjeu, c'était de trouver l'équilibre, à nous tous, travailler à un plan d'action, s'assurer de l'adéquation entre les mesures qui étaient nécessaires pour répondre aux besoins du marché du travail. Alors, je me suis mise un peu dans cette ancienne peau là pour me dire : Ne soyons pas juste dans une écoute active, mais soyons très neutres à entendre les propos de tous les partis, parce qu'honnêtement il y a des groupes qui étaient dans des opinions très divergentes par rapport à d'autres groupes. Donc, quels qu'étaient les partis représentés en termes de représentants de la société civile, il fallait que je me mette dans cette neutralité-là, et c'est ce que j'ai tenté de faire, et pour moi, ça a été une expérience, encore une fois, très agréable.

• (12 h 20) •

Alors, allons-y avec le premier enjeu, très important, celui de la rétroactivité. Jusqu'où on y va, finalement? C'est ça, la grande question. C'est la grande question au coeur du principe du projet de loi n° 10. Alors, il y a l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux... Vous me permettrez, Mme la Présidente, de nommer leur nom une fois et ensuite de glisser vers l'acronyme, je pense que ça sera plus simple, en tout respect. Alors, cette alliance que je nommerai maintenant l'APTS, voilà, alors l'APTS souhaite en effet que le principe de maintien en continu s'applique aussi pour le passé de façon bien affirmée, de façon à ce que tout ajustement salarial soit dû à compter de l'événement qui y donne droit. Mais ils ne sont pas les seuls. Il y a eu le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, le CIAFT, le Conseil du statut de la femme, la CSN et d'autres groupes qui ont joigné les rangs à bien défendre cette position-là qui mérite d'être clarifiée quand on regarde le texte du projet de loi. Premier enjeu.

Deuxième enjeu, le montant forfaitaire. La question est : Est-ce qu'on y va vers un montant forfaitaire ou on y va vers un réajustement salarial? Nous avons entendu plusieurs groupes nommer leur malaise quant au choix, dans le libellé du projet de loi, de nommer une indemnité forfaitaire qui risque, elle, de pénaliser financièrement les femmes en excluant certains avantages sociaux comme, bien sûr, les montants de pension. Alors, c'est une préoccupation qui a été nommée. Et, bien sûr, les groupes qui ont nommé leur malaise favorisent plutôt l'ajustement salarial, ça va de soi, tel que c'était déjà prévu au projet initial de la Loi sur l'équité salariale lors des exercices initiaux. Alors, entre autres, il y a, bon, l'APTS, il y a la CSN, la Centrale des syndicats démocratiques, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et d'autres qui sont de cet avis. Deuxième enjeu.

Le troisième, la lourdeur administrative. C'est un enjeu qui nous a été nommé, Mme la Présidente, davantage par les représentants patronaux. C'est un enjeu fort important parce que qui dit durabilité dans le temps d'une culture d'équité salariale dans chacune des entreprises dit aussi un processus qui, oui, est transparent et, oui, est détaillé, mais aussi réaliste en fonction du quotidien des entreprises. C'est ce qui nous a été nommé. Alors, afin d'assurer un processus durable de maintien de l'équité salariale, dans le fond, il faut la juste part financière, mais il faut aussi une application des processus qui est attentive aux réalités des entreprises. Alors, si la Fédération des chambres de commerce du Québec et la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante portent le message, elles ne sont pas seules. Le Conseil du patronat déplore ouvertement la complexité administrative à prévoir et l'impact pour les petites et moyennes entreprises du Québec, qui sont fort nombreuses, on le sait. D'ailleurs, M. Yves-Thomas Dorval a dit ceci : «Devant les modalités proposées[...], des préoccupations demeurent quant à la complexité du processus, la lourdeur administrative de l'exercice de maintien et les coûts inhérents importants.» Chacun de ces messagers patronaux pour les plus petites entreprises ont souhaité également... la grande majorité, en tout cas, d'entre eux ont souhaité rehausser le seuil d'exemption et faire passer ce seuil de 10 à 50 employés.

Sautons maintenant à l'autre enjeu, celui de la période d'évaluation. Est-ce qu'on doit évaluer la qualité du maintien de l'équité salariale aux trois ans ou aux cinq ans? Les avis ont été bien partagés. Alors que le projet de loi prévoit l'horizon quinquennal, on a entendu plusieurs groupes venir nommer l'avantage d'une période de trois ans. Puis en même temps il y en a qui nous ont nommés qu'à travers ce trois ans, bien, il y a des exercices d'affichage et il y a une continuité d'information qui est importante. Pourtant, pourtant, fait à noter, la révision du processus d'évaluation du maintien n'est pas remise en cause dans l'arrêt de la Cour suprême, mais tous les groupes ou à peu près tous les groupes nous en ont parlé. Chose certaine, plusieurs représentants des entreprises nous rappellent l'importance d'un processus souple, on revient à la lourdeur administrative. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante souhaite même exprimer l'importance d'une plus grande flexibilité pour l'employeur dans la détermination de la durée des périodes auxquelles il est tenu de procéder à l'évaluation et aux affichages. Donc, en tenant compte de la réalité du point de départ de l'évaluation, est-ce qu'on peut un peu jouer dans certains horizons et ne pas mettre ça de façon statutaire? C'est un peu la demande qu'ils font.

Autre élément d'enjeu, l'affichage. Et là je vous dirais qu'il y a vraiment un tronc commun entre les groupes qui sont venus représenter, donc les groupes syndicaux, et les groupes patronaux, et défense de droits également. Je pense que tout le monde était d'accord pour dire : Il faut que ce soit bonifié, il faut que l'affichage soit plus détaillé, plus transparent, qu'il y ait plus d'information. Le projet de loi le prévoit aussi, alors, mais qui dit affichage bonifié, oui, dit transparence, mais dit aussi prudence, une certaine prudence sur la confidentialité de certaines informations.

L'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés nous met d'ailleurs en garde, nous disent ceci, que la transparence absolue peut entraîner des conflits dans le climat de travail. Et la Fédération des chambres de commerce du Québec en remet encore en parlant spécifiquement même du risque de diffusion de documents qui permettraient d'identifier la rémunération de certains employés. Donc, entre les deux, on peut dire, le coeur balance. Oui, on bonifie l'affichage, mais jusqu'où on va dans l'information qu'on y met? Il faut faire attention, donc, il peut y avoir des éléments qui sont plus sensibles. Quoi qu'il en soit, il faut retenir à tout prix ce tronc commun, cette volonté de mieux diffuser l'information aux employés et l'information plus détaillée sur les événements qui sont liés à différents plans d'action d'une entreprise et du profil des postes.

D'un groupe entendu à l'autre, Mme la Présidente, la liste d'information requise à l'affichage varie. C'est là où il y aura un compromis à trouver, à mon avis, au-delà de l'affichage interne, et ça, c'est très intéressant. La Fédération des chambres de commerce du Québec s'est prononcée aussi sur l'importance, et ils ont été presque les seuls à le nommer, l'affichage externe, le projet de loi, lorsqu'il sera adopté, comment on va prévoir la diffusion de l'application du projet de loi à l'ensemble des entreprises. Donc, oui, l'affichage à l'interne, mais préoccupons-nous aussi de l'application de cette loi et de l'affichage et de l'information qui va être diffusée de façon externe.

Autre enjeu, je l'ai survolé tantôt, on en a parlé, très important, la participation au processus, donc l'obligation que les employeurs qui le faisaient seuls doivent faire émerger un véritable processus de participation. Les représentants syndicaux sont venus nous dire... et ils se sont tous exprimés sur l'obligation de la mise en place d'un comité paritaire de maintien de l'équité salariale. L'APTS prévoit aussi... quand vient le temps de regarder un peu à quoi ça pourrait ressembler dans son mode de fonctionnement, bien, elle vient nous dire que : Pourquoi ne pas y aller de pouvoirs et de modalités qui seraient un peu calquées sur celles d'un comité qui était prévu, un comité initial d'équité salariale? Alors, voilà une proposition qui est très opérationnelle et très réaliste.

La CNESST et la gestion des plaintes, mon septième enjeu que je veux souligner aujourd'hui. Plusieurs intervenants ont souhaité voir le rôle et le mandat de la CNESST élargi. Alors que le Conseil du patronat nomme la nécessité d'un accompagnement des employeurs — très important, l'accompagnement des employeurs — le Conseil du statut de la femme et l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés rappellent l'importance que, si on élargit le rôle et le mandat de la CNESST, on est à même d'y trouver les ressources financières et humaines nécessaires pour bien jouer le rôle. Dans sa recommandation 7, la Fédération des chambres de commerce du Québec désire doter la CNESST d'un processus préliminaire, un premier filtre, une première étape dans la réception de la gestion des plaintes afin d'écarter un grand nombre de plaintes qui, finalement, sont rejetées non pas par mauvaise foi, loin de là le propos qu'ils amènent, mais des plaintes qui sont rejetées souvent en lien avec une méconnaissance des modalités et des définitions des principes d'équité salariale. Alors, si on peut, en termes de conformité, ajouter une étape de plus, c'est ce que propose la Fédération des chambres de commerce.

• (12 h 30) •

Parlons maintenant de la CNESST, de la gestion de plaintes, toujours dans ce dernier enjeu. La FCEI, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante recommande un principe important avec même l'ajout d'un paragraphe à l'article 101, en stipulant qu'à toutes les étapes du processus de traitement d'une plainte la CNESST doit accorder la présomption d'innocence et un traitement équitable à l'employeur, ainsi que de tenir compte de ses commentaires au même titre que ceux formulés par le salarié et en leur accordant le même traitement. C'est une question d'équité dans l'équité, finalement, alors donc, de rendre justice aux deux points de vue, alors le salarié qui porte plainte mais aussi l'employeur avec sa propre version. Donc, c'est un mécanisme qui est proposé par la fédération, la FCEI.

La CSQ, quant à la gestion des plaintes, exclut la possibilité — et ils ne sont pas seuls — de regrouper les plaintes parce que, pour eux, il faut laisser à tout prix l'individualité à chaque démarche. Chaque salarié, dans sa propre situation qui l'amène à porter plainte, a une réalité individuelle particulière, et, pour la CSQ, la CSN aussi et d'autres groupes, c'est fort important. La CSN a même ajouté, il faut le rappeler, que le processus de plainte doit rester volontaire.

Voilà pour ce qui est de mon... un petit peu mon survol. J'ai voulu, donc, rendre justice aux différents enjeux qui nous ont été soulevés par l'ensemble des groupes en consultations particulières. Il y en a d'autres, il y en a d'autres que je vais peut-être oublier, même en y ajoutant quelques-uns. Alors, il y a l'étalement des versements, il y a la durée de conservation des informations. Il y a aussi l'importance des mesures transitoires. Ça, c'est très important.

Alors donc, quand on regarde les mémoires, quand on entend les présentations qui nous ont été faites, on peut dire que, selon les enjeux, il y a certaines positions qui s'opposent, mais, parce que je suis une fille pleine d'optimisme, il me semble entendre aussi des réalités qui sont réconciliables, il me semble entendre aussi des points de vue souvent complémentaires les uns des autres et des zones de compromis possibles.

Mme la Présidente, me permettez-vous d'être un peu délinquante — ce ne sera pas la première fois — et de faire deux conclusions plutôt qu'une seule? Je pense que vous me dites oui, alors merci.

Ma première conclusion : Les citoyens du Québec qui suivent de près nos travaux apprécient lorsqu'il y a un bon ton, des rapprochements transpartisans. D'ailleurs, on en a été témoins avec le dossier de violence sexuelle cette semaine, hier. Il y a aussi le rappel, et il faut le faire, que la majorité des lois, des projets de loi qui sont adoptés en cette Chambre le sont à l'unanimité. Ma première conclusion, c'est de me permettre d'en parler un peu, parce que nous en parlons souvent trop peu.

Alors, cet instant que je veux prendre, c'est de pouvoir vous parler du travail en commission parlementaire. C'est une tribune où très souvent nous sommes tous témoins d'échanges constructifs entre les collègues des différents partis politiques. Les consultations particulières du projet de loi n° 10 se sont déroulées dans ce bon ton, dans une convivialité entre tous les collègues, il faut le dire. Ça ne fera pas, peut-être, une grande nouvelle, mais je trouve important de se rappeler que ça existe. Sans présumer de la suite, le climat laisse augurer des prochaines étapes dans un ton propice aux échanges, à faire avancer le maintien d'une culture d'équité salariale au Québec. J'ai aimé vous en parler, Mme la Présidente. Merci.

Ma deuxième et dernière conclusion — il n'y en aura pas trois, là, je vous rassure, il y en a une deuxième et finale : Le gouvernement du Québec a l'obligation de répondre au jugement de la Cour suprême et d'entendre le délai du 10 mai prochain. Il a aussi l'obligation d'être attentif à l'écoute des réflexions et aux arguments bien fondés des groupes qui sont venus en consultations particulières. Je ne me trompe certainement pas en affirmant que nous avons tous un objectif commun : contribuer concrètement au maintien d'une culture d'équité salariale. De 1996 jusqu'à aujourd'hui, de nos valeurs libérales de justice sociale et de respect des libertés individuelles, il nous faudra tous ensemble, avec le ministre de l'Emploi, du Travail et de la Solidarité sociale, trouver l'équilibre fragile entre la juste attribution financière, la participation active au processus d'évaluation du maintien, la transparence et la simplification des mesures, trouver l'équilibre pour les travailleuses et travailleurs du Québec et l'entreprise ambassadrice d'une équité salariale qui doit perdurer dans le temps, à travers l'impact financier, la recherche du compromis et l'obligation légale.

Je n'ai pas dit que ce sera facile, mais l'ingrédient fondamental de la réussite est la volonté collective, et je sens qu'elle est au rendez-vous. Nous avons déjà fait des grands pas, Mme la Présidente, depuis 1996. Continuons.

Comme membre de la Commission de l'économie et du travail, et membre de l'équipe libérale de l'opposition officielle, et aujourd'hui porte-parole, je confirme au ministre qu'il peut compter sur notre appui pour le principe du projet de loi n° 10. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Fabre, de cette intervention. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de René-Lévesque.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Content de vous retrouver en ce salon bleu pour plaider mon premier principe.

Le projet de loi donne suite à une décision de la Cour suprême qui est venue reconnaître, en mai 2018, comme inconstitutionnelle la non-rétroactivité de l'exercice de maintien de l'équité salariale.

Essentiellement, Mme la Présidente, nous sommes évidemment favorables pour l'équité salariale ainsi que de lutter contre la discrimination systémique. Cela passe par un meilleur exercice de maintien de l'équité salariale, et c'est ce que le projet de loi vient corriger. Nous souscrivons aux grands objectifs poursuivis par le gouvernement.

Cependant, il est devenu clair pour nous qu'il ne va peut-être pas assez loin. Un meilleur exercice de maintien ne devrait ni alourdir la tâche des employeurs ni celle des personnes qui sont victimes d'une injustice. Le projet de loi demeure flou à cet effet.

Le projet de loi est très technique, aussi. Nous accrochons sur certaines dispositions, notamment celles qui font en sorte que, malgré les modifications, la loi demeurerait inconstitutionnelle en ce qui a trait à la rétroactivité pour les personnes qui ont porté plainte avant la date de sanction de la loi, depuis 2009. Essentiellement, le message qui est envoyé à ces femmes est qu'en oeuvrant sur le marché du travail elles doivent vivre avec le fait qu'elles ne sont pas équitablement rémunérées.

Ici, on a eu des discussions avec le ministre lors de la consultation. On a des groupes qui sont venus aussi plaider cette partie juridique là possible. Donc, je suis bien conscient, Mme la Présidente, que nous aurons l'opportunité d'aller plus profondément sur cette question-là pour s'assurer que, si nous adoptons une pièce législative, ce n'est pas comme ce qui est arrivé en 2009, se faire battre et rebattre par la Cour suprême comme étant quelque chose, encore une fois, d'anticonstitutionnel.

Nous sommes à l'écoute de plusieurs groupes qui proposent de réduire la périodicité de l'exercice d'équité salariale, qui est actuellement évaluée à tous les cinq ans.

L'indemnité forfaitaire versus l'ajustement salarial, on en a parlé beaucoup, et, si on ne rectifie pas le salaire par le biais d'un ajustement salarial mais en accordant une somme forfaitaire, il est, à notre avis, une façon de perpétuer la discrimination systémique et va carrément à l'encontre de l'objet même du projet de loi. Donc, assurément, on voudra voir apparaître peut-être des amendements pour s'assurer... Parce que le ministre a été quand même plus clair que la disposition dans le projet de loi en question, mais il reste quand même une zone grise. Donc, j'espère qu'on aura l'opportunité d'échanger et d'amender ce projet de loi là pour que, dans le cas du montant forfaitaire — aussi on appelle ça un ajustement salarial — l'ensemble des sommes qui sont dévolues à la salariée qui a été victime de discrimination puisse lui être remis, c'est-à-dire le salaire mais aussi les avantages sociaux, les vacances, les primes relatives, exemple, dans certains cas, à la rétention mais même aussi les primes relatives aux régimes de retraite.

De plus, certains employeurs qui ont l'obligation décident de faire leur évaluation de maintien de l'équité salariale. Cette proposition de certains groupes de fonctionner par comités paritaires à l'image des comités qui existent lors de l'exercice de l'équité salariale, déjà prévu par la loi, nous semble adéquate dans une perspective d'allègement de l'exercice. Cela permettrait notamment d'assurer la participation réelle des travailleurs et travailleuses, surtout, aux décisions et de réduire le nombre de plaintes et le coût des longues contestations.

Par rapport à l'étalement des versements, bien qu'il offre une certaine marge de manoeuvre aux employeurs, il est important de garder en tête que cela n'encourage pas le maintien de l'équité salariale en continu. Et ça, je pense que le ministre a aussi entendu ces arguments-là lors de la consultation particulière des groupes.

• (12 h 40) •

Je réitère donc, Mme la Présidente, que nous sommes en faveur du principe du projet de loi. En 1996, Mme la Présidente, c'est le Parti québécois qui avait fait adopter la Loi sur l'équité salariale, c'est donc un enjeu de première importance pour nous. Notre programme de campagne électorale promettait de réactualiser et d'assumer... pardon, et d'assurer la mise en oeuvre de la loi, particulièrement dans les milieux non syndiqués et les entreprises à charte fédérales. De plus, l'écart salarial entre les hommes et les femmes continue de s'accroître de 3 $ de l'heure en faveur de l'homme en 2018.

Évidemment, notre souhait serait que le gouvernement reconnaisse l'importance d'aller un peu plus loin que les recommandations de la Cour suprême afin d'éliminer les discriminations systémiques une fois pour toutes. Cependant, nous reconnaissons bien la volonté du ministre de vouloir d'abord améliorer la loi avec l'octroi d'un ajustement salarial à la date de l'événement causant l'injustice et non à la date de l'évaluation du maintien. C'est l'occasion d'envoyer un message clair aux milliers de femmes qui n'ont pu bénéficier d'un salaire égal à ceux de leurs homologues masculins. Le Québec se doit d'être un leader dans l'égalité entre les femmes et les hommes, et c'est une question de droit fondamentale.

Donc, Mme la Présidente, c'est ce qui clôt mon intervention sur le principe. Nous avons bien hâte de la suite en étude détaillée pour voir de quelle façon nous pourrons donner un second souffle à la pièce législative pour aller un peu plus loin en matière de maintien de l'équité salariale et donner confiance aussi aux femmes qui ont mené ce combat-là, qui s'est rendu jusqu'en Cour suprême, comme je le rappelle.

Évidemment, il y a une chose qui nous pend au bout du nez, Mme la Présidente, c'est la date du 17 mai... 10, hein, pardon, 10 mai 2018, puisque c'est à ce moment-là que le jugement va prendre force de loi. Donc, nous avions un an entre le jugement et le fait qu'on a levé ce jugement-là pour nous permettre, à l'Assemblée nationale, de corriger l'anticonstitutionnalité de cette loi-là, donc il faut faire vite, il faut faire bien. Alors, la partie gouvernementale pourra compter sur notre collaboration pour poser les bonnes questions, proposer des amendements pour améliorer la pièce législative, mais assurément nous sommes... et c'est dans l'intérêt de tous d'adopter ce projet de loi là pour le 10 mai 2018. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de René-Lévesque. Et maintenant je vais reconnaître M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui au nom de mon groupe parlementaire sur le projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale.

J'aimerais commencer par remercier l'ensemble des groupes qui sont venus nous entendre... en fait, qui sont venus nous parler, et nous les avons entendus, bien sûr, en commission. Et j'aimerais remercier mes différents collègues qui ont participé aux échanges, très intéressants. Nous aurons certainement l'occasion d'avoir davantage d'échanges dans les prochaines semaines.

Nous en sommes donc à nous prononcer, aujourd'hui, quant à l'adoption du principe de ce projet de loi. Évidemment, ça pose la question de la définition dudit principe. Et, dans le cas présent, nous sommes prêts à admettre que l'idée, le principe du projet de loi n° 10 est, tel que le proclame son titre, d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale. Notre formation politique soutient fermement ce principe, et nous allons conséquemment voter en faveur à cette étape-ci du processus législatif.

Cela dit, nous tenons à affirmer dès maintenant et avertir le ministre que c'est justement parce que nous soutenons fermement le principe de l'équité salariale que le projet de loi n° 10 nous semble devoir être significativement bonifié si nous voulons que ses effets soient à la hauteur de ses prétentions.

En effet, ce projet de loi se veut la réponse gouvernementale à un arrêt de la Cour suprême ayant jugé discriminatoire le mécanisme actuel de maintien de l'équité salariale en vigueur depuis 2009. Ce mécanisme prévoyait que soit tenu tous les cinq ans un exercice de maintien de l'équité salariale et que les écarts qui se seraient creusés dans l'intervalle ne soient corrigés que pour l'avenir seulement. Les femmes discriminées devaient donc éventuellement supporter sans compensation des écarts pouvant subsister pendant plusieurs années. La Cour suprême a donc déclaré invalides les dispositions législatives instituant ce mécanisme discriminatoire et a donné un an au gouvernement pour corriger la situation.

Mme la Présidente, lorsqu'une disposition législative est déclarée invalide, cela a un effet ab initio, dès le départ. C'est un peu comme — situation peut-être loufoque mais imaginaire — si un gouvernement ultraconservateur passait une loi déclarant criminel de s'embrasser en public et que les gens qui étaient mis en prison en vertu de cette loi... Si, trois ans plus tard, les tribunaux déclaraient que cette loi était inconstitutionnelle, on ne va pas dire aux gens condamnés : Dommage! vous allez rester en prison. Ce serait absurde. Alors, le mécanisme actuel de maintien de l'équité salariale a donc été jugé invalide depuis 2009, et la Cour suprême n'a pas donné une amnistie au gouvernement pour la période écoulée depuis ce temps.

Or, dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 10 fait tout le contraire. S'il corrige pour l'avenir l'effet discriminatoire déclaré invalide par la Cour suprême, il ne comprend pas d'ajustement pour l'exercice de maintien déjà réalisé et prévoit que les plaintes déjà déposées seront toujours soumises à l'ancien régime. Avec une telle approche, plusieurs intervenants en commission l'ont mentionné, le gouvernement se magasine une nouvelle ronde de contestations judiciaires dont il ne sortira certainement pas gagnant.

Jusqu'à maintenant, le ministre ne semble pas vouloir entendre raison. Pourquoi, Mme la Présidente? Serait-ce en raison d'un avis favorable aux employeurs plutôt qu'aux travailleuses? Serait-ce parce que le gouvernement est lui-même un des plus grands employeurs du Québec? Pourtant, certaines estimations préliminaires évaluent à moins de 1 % de la masse salariale globale le coût des ajustements pouvant découler d'une rétroactivité à 2009. Et, quand bien même ce serait davantage, pour la formation que je représente, il est temps de proclamer haut et fort qu'au Québec on ne lésine pas avec les droits fondamentaux des femmes.

Ce n'est pas le seul enjeu soulevé en consultation autour du projet de loi n° 10, il y en a plusieurs que je vais évoquer.

D'abord, plusieurs ont également souligné, notamment la FIQ, que l'indemnité forfaitaire rétroactive prévue au projet de loi ne couvre que le salaire perdu. Ce n'est donc pas une modalité acceptable, puisqu'elle ne dédommage pas les femmes lésées au plan des cotisations à l'assurance-emploi, aux fonds de pension et autres avantages sociaux.

Un autre enjeu concerne la périodicité des exercices de maintien. Un fort consensus se dégage à l'effet qu'il serait préférable que les exercices de maintien se tiennent aux trois ans plutôt qu'aux cinq ans. Ça faciliterait le travail pour les gens qui ont à faire cette tâche, qui, il faut le reconnaître, est quand même assez lourde.

Plusieurs, dont la CSD, ont dénoncé le maintien de la possibilité pour les employeurs de réaliser l'exercice de maintien seuls. Presque tous considèrent que le processus de participation proposé par le ministre est insuffisant et qu'il faut de réels comités de maintien impliquant les travailleurs et les travailleuses.

Je tiens aussi à mentionner la proposition du Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail d'obliger tout employeur à fournir une formation aux travailleurs et travailleuses impliqués dans de tels comités. Nous croyons que cela mérite d'être envisagé, plus particulièrement dans les milieux non syndiqués.

Tous les groupes entendus ont mentionné la nécessité de mieux définir la notion d'événement à la source d'un écart à compenser. Plus de clarté apportera une meilleure application de la loi et réduira les sources de litige.

Nous devons également aborder la question des écarts ayant existé mais ayant été résorbés entre deux exercices de maintien. Ce n'est pas parce qu'une injustice n'existe plus au moment où l'on tient l'exercice qu'il n'y a pas lieu de compenser pour la période pendant laquelle les femmes concernées ont été lésées.

Il y a également l'enjeu de l'étalement des versements rétroactifs. On peut comprendre que certaines entreprises plus fragiles peuvent avoir besoin d'un accommodement, mais doit-on permettre à toutes les entreprises d'étaler de plein droit pendant quatre ans? Nous sommes loin d'en être convaincus.

Par ailleurs, qu'arrivera-t-il aux personnes ayant vécu une discrimination mais n'étant plus en emploi quand vient le temps d'apporter des ajustements? Il faudra minimalement prévoir une obligation pour l'employeur de faire des efforts raisonnables pour les rejoindre.

Le projet de loi touche aussi les enjeux relatifs à la conciliation en cas de litige. Celle-ci doit-elle être obligatoire? Cela ne faisait pas forcément consensus.

On doit aussi parler du problème soulevé par la CSN, pour qui le fait qu'un accord de conciliation signé par une association accréditée majoritaire puisse être imposé à toutes les associations accréditées, cela constituerait une atteinte à la liberté d'association. Le projet de loi permettrait de regrouper des plaintes de même nature afin d'en accélérer le traitement. Toutefois, les individus concernés conserveraient le droit d'exercer un droit de retrait. Ne devrait-on pas accorder le même droit aux associations accréditées? C'est ce que demandaient les acteurs syndicaux, notamment la CSQ.

Le projet de loi prévoit allonger d'un an, donc à six ans plutôt que cinq, le délai de conservation des données utilisées dans le cadre d'un exercice de maintien. Or, on le voit, on ne sait jamais si de telles données pourront s'avérer utiles par la suite, la CSD faisant ainsi valoir que, considérant les moyens technologiques à notre disposition en 2019, il pourrait y avoir lieu de conserver ces données pour toute la vie d'une entreprise.

Certains intervenants ont souligné les difficultés induites par le fait que les exercices de maintien utilisent parfois une méthodologie différente de celle utilisée lors de l'exercice initial. La FTQ demandait donc que la loi prévoie que, sauf exception, la même méthodologie soit utilisée dans les deux cas. Il nous semble que cela mérite d'être sérieusement considéré.

Ainsi, à la lumière des problématiques et enjeux soulevés, il apparaît clairement que nous aurons beaucoup de pain sur la planche afin de rendre le projet de loi conforme aux attentes de la Cour suprême, de la société civile et surtout des femmes du Québec. Et, Mme la Présidente, nous prendrons le temps de faire ce travail malgré le délai qui nous est imparti.

Cela étant dit, tel qu'annoncé d'entrée de jeu, étant compris comme la volonté d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale au Québec, nous voterons en faveur du principe du projet de loi n° 10, Mme la Présidente. Cela dit, je le répète, il doit y avoir d'importantes modifications pour obtenir notre appui à l'adoption finale du projet de loi. Il en tient donc à la responsabilité du ministre de procéder ainsi. Et j'ai hâte de procéder, moi, à l'étude détaillée, avec lui et avec l'ensemble des collègues, du projet de loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Y a-t-il d'autres interventions dans le cadre de ce débat? Il n'y en a pas.

Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

M. Schneeberger : Alors, Mme la Présidente, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale, soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour son étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Pour la suite de nos travaux, M. le leader adjoint du gouvernement.

• (12 h 50) •

M. Schneeberger : Alors, oui, compte tenu de l'heure, je vous demande de suspendre les travaux jusqu'à 15 heures.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à... D'abord, j'ai besoin d'un consentement pour permettre la suspension de nos travaux. Il y a consentement?

Alors, je suspends nos travaux jusqu'à 15 heures afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une affaire inscrite par les députés de l'opposition. Je vous souhaite un bon début d'après-midi.

Les travaux sont suspendus.

(Suspension de la séance à 12 h 51)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Picard) : Bon après-midi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard
de dollars aux clients d'Hydro-Québec

À l'article 16 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de La Pinière présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la motion inscrite par M. le député de La Pinière s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour ses répliques; 53 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement; 32 min 19 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; 10 min 2 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition; et 11 min 9 s sont allouées au troisième groupe d'opposition. Chaque député indépendant dispose d'un temps de parole de 1 min 30 s; toutefois, lorsqu'un seul député indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps de parole de deux minutes. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps.

Enfin, je rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes, à partir de maintenant, pour en aviser la présidence. Et je cède maintenant la parole à M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président. Alors, comme vous l'avez rappelé avec justesse, la motion que nous avons déposée, dont je suis le porte-parole, M. le Président, elle se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec.»

M. le Président, là, aujourd'hui, j'ai une petite tristesse quand même parce que cette motion aurait dû être déposée par mon collègue qui, malheureusement, ne peut être avec nous aujourd'hui pour des raisons personnelles, mais je tiens à souligner tout l'appui que j'ai de sa part. Il ne pouvait être ici, aujourd'hui, avec nous, mais je comprends que je n'ai pas le droit de souligner l'absence d'un député, mais, de mon côté, je pense que je peux le faire.

Mais c'est important, M. le Président, parce que mon collègue a été très, très, très actif dans ce dossier-là. Et, aujourd'hui, je peux vous assurer, parce que ce que nous avons communiqué par les réseaux sociaux, il est bien d'accord avec la position que nous défendons aujourd'hui, à savoir, M. le Président, que nous vivons, sans aucun doute — il n'y a pas de doute, moi, je n'ai aucun doute — on vit un triste moment parlementaire. Pourquoi? Parce que, M. le Président, quand on regarde cette histoire-là, là, c'est une mauvaise fable, j'aurais pu la commencer en disant : Il était une fois non pas un petit chaperon rouge, mais un chef de l'opposition qui s'est transfiguré en prenant le pouvoir, mais je veux simplement parler, M. le Président, de ce qui s'est passé dans l'histoire très récente de ce dossier-là.

M. le Président, là, il y a un mot qui est rendu banal, c'est tellement banal, là, aujourd'hui, qu'on n'en revient pas, mais je vais le prononcer pareil. Cynisme. Il n'y a plus de sens, M. le Président. Moi, j'entends, là, tous les politiciens, puis certainement, à plus forte raison, la députation caquiste. Mais, écoutez, là, on arrive au pouvoir, puis un des premiers gestes qui est posé, c'est la quintessence, l'Oscar, le maximum, l'explosion du cynisme, c'en est gênant, M. le Président, c'est gênant. Je suis obligé de parler de ça, alors que j'aimerais bien mieux faire comme tout le monde qui va en politique, faire des débats de vrais enjeux de société, hein, débattre de sujets sur des argumentaires rationnels, même si on n'est pas d'accord, pour en arriver, à la fin, à des décisions, prendre des positions, passer des lois qui vont faire avancer la société.

En lieu et place, qu'est-ce qu'on fait? On discute du trop-perçu d'Hydro-Québec et de la façon de le gérer en fonction de ce qui a été exprimé avec véhémence pendant les quatre dernières années. Parce que c'est de ça qu'il s'agit, M. le Président. Quand est-ce que ça va changer? Je ne sais pas. Mais, aujourd'hui, bien, je prends ce temps de parlementaire là pour démontrer à quel point c'est une mauvaise histoire, c'est triste.

Un jeune parti qui se comporte en trop vieux à la première occasion, c'est gênant. On n'aurait pas fait ça, nous autres, je peux vous le garantir.

Alors, qu'est-ce qu'on a entendu, M. le Président? On a entendu, pendant les quatre dernières années, le chef du gouvernement actuel, qui était le chef de l'opposition à l'époque, se lever en Chambre, fois après fois, pour identifier, quantifier ce qu'il a appelé, lui, un trop-perçu auprès de la population du Québec.

Bon, déjà là, il y a quand même quelques éléments qui sont imprécis, mais on ne lui tient même pas rigueur, M. le Président. Ce n'est pas juste les contribuables s'il y a un trop-perçu, il y en a aussi dans les entreprises, petites, moyennes et grandes, il y a un trop-perçu. C'est un fait.

Puis on ne peut même pas dire, M. le Président, que c'est de la mauvaise foi de la part d'Hydro-Québec, hein? Il y a eu une problématique technologique, correct. La problématique technologique a entraîné un trop-perçu, très bien. Ils s'en sont aperçu, encore mieux. La CAQ l'a vu. Bon, on ne peut pas leur reprocher d'avoir vu quelque chose. On l'a vu, nous autres aussi. Mais on peut leur reprocher une chose, par exemple, M. le Président, c'est de ne pas avoir agi correctement face à ça.

La CAQ, M. le Président, et je pense que ça vous rappelle des souvenirs, parce que vous étiez voisin de banquette avec votre collègue députée, la députée de Saint-Hyacinthe... Puis on l'a vue, là, se démener, là, avec beaucoup d'énergie, puis je la félicite. Elle a été une bonne députée. Elle est allée partout. Elle a fait une pétition. On l'a vu se promener avec une boîte, 48 000 signatures, dans le froid dehors, s'en aller vers Hydro-Québec : On veut que ce soit remboursé, M. le Président. Écoutez, là, le spectacle était extraordinaire, il fallait l'écouter.

Puis là on revenait en Chambre et là on se levait, là, et on voyait l'air grave du chef de l'opposition, se lever : Baba, baba, baba, il y a des trop-perçus et il faut les rembourser. La députée de Saint-Hyacinthe, qui prenait le relais et qui demandait la même chose...

Puis c'était tellement un bon film, M. le Président, il y avait des épisodes. Et puis l'épisode, c'était le nouveau chiffre, parce que des trop-perçus... parce que c'est un problème technologique. Il y en avait toujours un nouveau à chaque année. Des fois, c'était plus qu'une fois par année. Puis nous autres, on était là puis on se disait : Wow! À la prochaine session, ça va être quel chiffre? Moi-même, M. le Président, dans l'épisode final de la saga, quand j'étais rendu à entendre 1,4 milliard, bien, j'étais quasiment... ça m'impressionnait, 1,4 milliard de dollars. C'est comme les séries, hein, quand ça ne finit plus, là. C'est comme dans Perdus dans l'espace quand j'étais petit, là, ça finit, là, puis on se dit : Ah! enfin, ils ont tout fait comme problèmes. Bien non! la saison d'après, il y avait encore un problème. Alors, là, on était perdus des chiffres qui grossissaient tout le temps, l'hélium bureaucratique, M. le Président, on n'en pouvait plus.

Alors, là, M. le Président, même si les gens, dans la population en général, là, ceux qui nous écoutent aujourd'hui, n'écoutent pas les travaux parlementaires, ils lisent, des fois, un... journaux puis ils lisent des chroniques. Hein, les chroniques, là, eux autres aussi, ils aiment ça, les chroniqueurs. Quand ils peuvent trouver une affaire de même, là, ils sautent là-dessus et ils en font des chroniques. C'est correct, c'est leur job. Alors, les chroniques en question ont mentionné, à plusieurs reprises, dans diverses années, là, c'était un... Il y a un instant, ma collègue me montrait la pile d'articles de journaux, qui remontent à 2015, où on traite de ça. Le monde savait qu'il y avait ça. Et vous savez quoi? Bien, le monde a commencé à être peut-être un petit peu irrité. Et, quand ils entendaient le chef de l'opposition officielle demander, là, avec énergie, tonitruant, là : Wa! Wa! On va rembourser. Bien oui, M. le Président, c'est parce que ça n'arrivait pas.

Alors, notre population, quand elle a regardé ça, bien, elle a eu, à un moment donné, une campagne électorale, c'est correct, et il n'y a pas eu d'engagement formel, c'est vrai. Le premier ministre actuel n'a pas écrit, sur son autobus : On va rembourser... Mais tout le monde a compris qu'implicitement c'est ça qu'il allait faire. M. le Président, là, si, en politique, on n'est pas capables de faire la différence entre ce qui est implicite et explicite, et qu'on joue avec ça, il y a un problème, parce que c'est ce qui s'est passé.

• (15 h 10) •

La CAQ a construit un discours politique pour se faire élire sur la base de ça, en partie, en sachant qu'il n'allait pas le mettre, il n'allait pas le mettre dans son programme électoral, mais en sachant aussi, M. le Président, que ça allait rentrer dans la tête du monde et que le monde allait penser qu'ils allaient le faire. Ça, M. le Président, là, pour moi, ce n'est pas compliqué, c'est : ce que je viens de dire explique pourquoi, dans le sondage Léger de cette semaine, 92 % de la population s'attend à ce que les remboursements soient là. 92 %, M. le Président, c'est un score de la Corée du Nord, de l'ancienne Union soviétique, hein, de d'autres pays, là, dans lesquels tout le monde est voté à la très forte majorité, il y a juste un nom sur le bulletin de vote.

Là, écoutez, 92 %, qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président? Ça veut dire que les gens qui ont été sondés l'ont entendu. Ils ont entendu ce sujet-là, là, hein? Ce n'est pas un hasard. Puis non seulement ils l'ont entendu, ils l'ont tellement entendu qu'ils se sont fait une opinion. Et ils y ont cru, ils ont cru que le premier ministre, qui ne l'a pas dit, implicitement le disait et qu'il allait le faire. Ça, là, dans la catégorie manipulation, là, c'est sûrement un chapitre de Machiavel. Il va falloir que je le relise, là, M. le Président, je suis sûr que c'est un des chapitres de Machiavel. Parler, parler, parler, ne rien annoncer, se faire élire puis ne pas le faire. Yé! Extraordinaire, là.

Mais, mais 92 %, c'est un score... c'est impossible d'avoir ça, là. Moi, demain matin, là, je me demande si les Canadiens, quand ils vont gagner la coupe Stanley, je ne sais pas quand, je suis sûr qu'à la fin, là, on n'aura pas 92 % de satisfaction des séries. Il va y avoir plus de monde qui vont dire : Oui, ils ont été chanceux, tata, tata. Bon, c'est correct, ça n'arrivera pas.

Mais ça, c'est le contraire, hein, de ce qui a été dit à la CAQ pendant quatre ans, hein? On en a parlé puis on ne le fait pas. Alors, 92 %, ça signifie ça, M. le Président. La majorité de la population du Québec l'a entendu bien, bien, bien des fois. Et, dans le discours, c'était clair pour la population que le gouvernement de la CAQ, une fois rendu au pouvoir, si ça arrivait, allait le faire.

Alors, ils sont arrivés au pouvoir, et la première chose que le premier ministre actuel dit, c'est qu'il ne le fera pas. Ça, c'est la première chose qu'il dit, pire, M. le Président, avec un beau grand sourire. Parce que moi, je remarque toujours ça, là, quand le premier ministre se lève, là, puis qu'il nous regarde, là, avec un petit sourire narquois, là, hein, bien, ça, là, je me mets dans la peau de la population puis je me dis : Ce n'est pas correct, cette attitude-là, là. À un moment donné, il a des limites à tout. Alors, combien de fois j'ai vu le premier ministre se lever avec son sourire narquois, dire : On ne l'a pas promis, ha, ha, ha! Franchement, M. le Président. On ne l'a pas promis. Bien, c'est pour ça, le 92 %. C'est pour ça.

Mais, en fin politicien qu'il est, bien, il a été obligé, évidemment, de réagir au sondage. C'est quelque chose, quand même, là. On ne le met pas dans notre... dans notre programme électoral, on n'en fait pas un engagement, mais, quand il y a un sondage qui est défavorable, bien là, on réagit. Ah! c'est intéressant. Message à la population : s'il y a quelque chose à la CAQ que vous n'aimez pas, allez dans la rue, ils vont plier. Alors, si ce gouvernement-là est un gouvernement qui gère selon les sondages, bien, préparons-nous un drôle de mandat. Parce que c'est ce qui se passe actuellement. Message aux propriétaires de permis de taxi, là : prenez la rue. Prenez la rue. Le premier ministre vous l'a dit, là : Répondez à des sondages, manifestez-vous, la CAQ va plier.

Dans le cas présent, M. le Président, on n'est pas fâchés, on n'est pas fâchés. Pour une fois, là, que la CAQ va faire ce qu'ils disent qu'ils vont faire, pour une fois qu'ils ne reculent pas, bien, c'est un changement. Mais, en réalité, ils ont comme reculé, puis là ils reculent du recul, le recul du recul étant d'avancer. Bien, écoutez, on va prendre ce qui passe, c'est comme ça.

Mais, M. le Président, qu'est-ce qu'il pense aujourd'hui exactement? Bien, il fallait écouter hier, là, parce qu'hier il y a eu un moment de télévision extraordinaire. Il y a eu un moment de télévision, M. le Président, je vous le dis, là, une chance... j'étais devant ma télévision puis j'étais content parce que j'avais la fonction de rembobiner, là, je ne l'enregistrais pas, mais je pouvais regarder, reculer puis avancer, reculer puis avancer, alors j'ai fait ça avec l'explication cosmique que nous a donnée le ministre des Ressources naturelles et de l'Énergie. M. le Président, c'était extraordinaire, mais vraiment extraordinaire.

Là, aujourd'hui, là, j'aimerais vraiment, là, mais vraiment tenter... Et j'en fais un sondage officiel : Est-ce que quelqu'un, au Québec, a compris ce que le ministre de l'Énergie voulait dire dans son plan? Y a-tu quelqu'un, en quelque part, à part de la CAQ... Puis, même à ça, je pourrais leur lancer le défi, là. On va exclure le ministre, parce que, lui, on le sait que ce n'est pas clair, parce que, si ce qui se conçoit bien s'énonce bien, je ne suis pas sûr que c'est clair dans sa tête aussi, parce qu'on n'a pas compris. Je regarde mon collègue et puis je lui dis, là : Clairement, là, personne n'a rien compris.

D'ailleurs, aujourd'hui, j'ai fait un point de presse là-dessus, M. le Président, et j'ai demandé à quelques journalistes qui étaient là : Avez-vous compris? Alors, vous savez, les journalistes, ils ne prennent pas de position, c'est normal, mais, à en juger par leurs sourires, eux autres, ils font partie de mon club, ils n'ont pas compris, là.

Alors, écoutez, je l'ai dit à la caméra, je le dis ici — on a moins d'audience, mais l'audience qui nous écoute parle à d'autres : Parlez-en! Parlez-en, parlez-en, parlez-en! Essayez de voir si quelqu'un, dans votre entourage, comprend quelque chose au plan de la CAQ pour le remboursement du trop-perçu d'Hydro-Québec. Bonne chance!

Parce que la chose qui nous a été proposée, là, c'est d'un flou, là, un flou, M. le Président, là. Écoutez, là, les tempêtes de neige qu'on a eues cet hiver, c'était la Floride en plein soleil, là, avec aucun nuage, là. C'est incompréhensible, ce qui a été proposé.

Mais non seulement c'est incompréhensible, ça ressemble même à une technique pour faire en sorte que ça ne soit pas visible, une technique qui va faire en sorte qu'on ne pourra pas en faire un suivi. Moi, M. le Président, on ne peut pas le faire, là, mais, aujourd'hui, mon rêve, là, de ce moment présent, c'est d'avoir, devant moi, la Vérificatrice générale et lui demander : Mme la vérificatrice, pensez-vous que vous pouvez suivre une affaire de même? Je suis sûr qu'elle ne peut pas, je suis convaincu qu'elle ne peut pas.

On nous propose une affaire, là, qui n'est pas claire, qui est une espèce de patente alambiquée écrite au coin d'une table le jour du sondage et qui ne prévoit pas la possibilité qu'on puisse en faire un suivi rationnel et faire la démonstration qu'au fil des prochaines années, bien, il y aura un suivi qui va faire la démonstration que le citoyen a bel et bien récupéré 1,4 milliard de dollars. M. le Président, ce n'est juste pas possible, parce que ce qu'il nous annonce, c'est : Bon, bien, écoutez, là, là, là, je m'en vais vous arriver avec une formule — vous voyez, une formule, une formule — puis, dans la formule, là, il va y avoir des augmentations, on le sait, d'Hydro-Québec, là, périodiquement parlant, puis on va déduire de ça une affaire de même, là, peut-être le tarif, puis ça, ça va être équivalent au remboursement. Oui, mais minute, là. Bien, c'est parce que le tarif aurait pu être inférieur par définition. Donc, ça pourrait vouloir dire que, dans le fond, on va l'augmenter pour le soustraire et faire accroire au monde que ce qui a été augmenté artificiellement pour le soustraire, bien, ça sera dans l'inflation, c'est un remboursement.

M. le Président, c'est du grand n'importe quoi, c'est clair, absolument, alors que ce que la population souhaitait et souhaite encore, c'est très simple : ils veulent recevoir de l'Hydro-Québec un bout de papier à fond bleu avec un fleur-de-lis marqué en haut, à gauche, gouvernement du Québec, avec en bas, à droite, un chiffre, M. le Président, avec des chiffres à gauche du point, là; ils ne peuvent en mettre même aucun à droite du point, mais qu'il y en ait à gauche. C'est juste ça qu'ils veulent. Et le ministre ne propose pas ça, et le premier ministre non plus. Bien, c'est ça qui est gênant, M. le Président.

Et j'écoutais mon chef ce matin qui ramenait, qui rajoutait une chose très intéressante à laquelle je n'avais pas pensé moi-même — bien oui, c'est vrai — parce que le grand plan de la CAQ, hein, la grande formule de la CAQ doit être approuvée par la Régie de l'énergie, sur laquelle notre ministre n'a aucune autorité légale. M. le Président, c'est-u assez fort, hein? Regardez, là. Mesdames et messieurs, l'organisation qui va gérer les chiffres desquels il va y avoir une soustraction qui va faire que vous allez avoir un remboursement, je n'ai aucune autorité dessus, mais ils vont faire ce qu'on leur dit, et puis vous allez avoir un remboursement. Nous croyez-vous? M. le Président, croyez-vous ça? Bien, vous n'êtes pas obligé de répondre, M. le Président. Mais moi, je pense qu'il n'y a pas grand monde qui croit que ça va aboutir à quelque chose. Je ne pense pas, vraiment, vraiment, vraiment pas. Alors, ça, c'est ça que je trouve malheureux. C'est malheureux, M. le Président.

• (15 h 20) •

Mais il y a toujours, sur tous les sundaes, une cerise, tout le temps, tout le temps, tout le temps. Alors, la cerise sur ce sundae-ci, c'est, comme j'ai dit ce matin, et je vais le répéter, parce que ça fait tellement du bien de le répéter... M. le Président, là, rire du monde, là, c'est comme ça. Le premier ministre, hier, s'est levé et a dit que, si on remboursait le trop-perçu comme lui-même l'a demandé pendant quatre ans, si on remboursait le trop-perçu, il faudrait couper dans les services. Écoutez, M. le Président, y a-tu quelqu'un qui a entendu cette mise en garde là dans l'opposition pendant quatre ans? Jamais. Jamais, jamais, jamais.

Mais là il n'aurait pas dû dire ça, le premier ministre. Parce que, là, le premier ministre, en admettant que c'est une affaire qui n'est pas faisable quant à la situation budgétaire du Québec, qui, en passant, M. le Président, est pleine de surplus, en disant ça, bien, il annonce qu'il va y avoir des problèmes dans les prochaines années. 1,4 milliard, là, dans les trois prochaines années, c'est plus de 400 millions de dollars de moins dans les budgets, dans les coffres, soit d'Hydro-Québec, soit du gouvernement du Québec. Il y a quelqu'un en quelque part qui va subir un tort budgétaire. C'est ça, là. D'un côté, le premier ministre nous dit qu'on ne peut pas le rembourser d'un coup. On va nous obliger à couper des services. Là, on ne comprend pas l'algèbre, là, parce qu'il y a des surplus à n'en plus finir grâce à nous autres. Mais il oublie de nous dire qu'il va y avoir un impact sur son budget si la formule qu'on ne comprend pas du ministre donne vraiment ces réductions-là. Hydro-Québec va avoir un manque à gagner manifestement. Il va avoir un trou dans son budget de 400 millions de dollars au moins pendant trois ans, ou bien donc le gouvernement du Québec va avoir un trou dans son budget de l'équivalent.

C'est qui qui va payer pour ça? Le budget, M. le Président, il est écrit. On sait comment ça marche, là. Le gouvernement, là, aujourd'hui, il essaie de nous faire accroire qu'il travaille encore jusqu'à demain. Bien non. Il est imprimé, le budget. Il est dans du plastique. Il va être distribué demain. C'est terminé. Sur le coin de la table, là, sur le coin de la table, on a décidé d'une formule qui va faire en sorte qu'en quelque part, soit Hydro-Québec soit dans le fonds consolidé, il va y avoir un trou de 400 millions pendant les trois prochaines années, 350 millions pendant les quatre prochaines années, alors que les gens voulaient avoir leur chèque maintenant. Puis le commun des mortels qui nous écoute, là, il regarde ça puis il dit : Bien oui, mais ils en ont, des surplus. Ils n'arrêtent pas de dire qu'ils ont des surplus. Ils vont faire quoi avec les surplus? On va le voir demain. Mais, en réalité, M. le Président, là, cette histoire-là est une mauvaise histoire qui alimente le cynisme de la population à bon droit.

Le monde a raison de ne pas être content de la CAQ aujourd'hui. On commence à le voir, ça aussi, dans les sondages. Les gens commencent à réaliser que la CAQ recule, recule, recule. Puis, quand on pense qu'ils ont fait une promesse, bien là ils se cachent en disant : Bien non, bien non, bien non. Vous avez l'impression qu'on a fait une promesse? Bien non. Vous ne vous êtes pas rendu compte qu'on en a juste parlé. Vous avez été offusqué de la chose? On est bien contents, c'était juste pour prendre le pouvoir. On ne fera rien avec ça. Ah! bien, vous avez chialé dans un sondage avec un gros, gros score négatif? O.K. Là, c'est correct, là. Là, vous nous avez pris. O.K. O.K. C'est comme jouer à la tag. Oui, mais là c'est parce que ça coûte quelque chose, ça, là, là. Hein? Vous êtes donc pris. Et ils réagissent comme ça. Ce n'est pas très, très, très élégant.

Alors, aujourd'hui, M. le Président, là, je ne pense pas que la population québécoise est heureuse. Puis elle a raison de ne pas être heureuse parce que l'immense majorité des gens, peu importe leur origine, leur langue, leur ville... Quand on fait un sondage dans ces firmes-là, là, on sonde partout. On ne sonde pas dans un quartier x, dans une ville y. On sonde le Québec. Aujourd'hui, partout, au Québec, on n'est pas contents de la décision de la CAQ. Et la CAQ, la seule chose qu'ils trouvent à dire, c'est : On ne l'avait pas promis. Franchement. Puis regardez la belle formule qu'on vous a proposée. Tout va bien aller. Refranchement.

C'est ça, la réalité. Et, M. le Président, là, je peux vous dire une chose. Il y a des votes ici, là, sur cette question-là, là. Il y a un paquet de monde qui se sont déjà levés. Et, une chose qui est certaine, il y a une liste de députés qui étaient ici à l'époque, qui sont encore ici aujourd'hui, qui ont tous pris une position claire là-dessus. Et, aujourd'hui, bien, ils sont tous solidaires de cette décision-là, qui est loin, loin, loin d'être élégante.

Il n'est pas trop tard. Il n'est pas trop tard. La CAQ peut très bien revenir à la bonne place. La CAQ peut très bien se lever demain matin et dire : Bon. O.K., là, on a compris. C'est vrai que ça n'a pas bien, bien d'allure. Je m'excuse, ou nous nous excusons. Et, dans votre cas, ce serait : Nous nous excusons et nous allons vous rembourser les trop-perçus maintenant.

Pourquoi ce serait si difficile à faire? C'est-u une question d'orgueil politique? C'est-u ça? Où est la gêne? Qu'est-ce qui empêche la CAQ, son chef, de dire : Écoutez, là, j'ai réagi à chaud en faisant une formule bidon sur le coin d'une table en début de semaine. J'ai réfléchi. La nuit portant conseil, ça tombe bien, j'ai eu plusieurs nuits, je me lève ce matin et je vous annonce que je vais vous rembourser. Qu'est-ce qu'il y a de difficile là-dedans? Une chose, là, qui passerait très bien.

Écoutez, je me retiens, je ne devrais même pas leur donner ce conseil-là, c'est bon pour eux autres. Je devrais leur dire : Continuez dans cette direction-là. Go! Go! Go! Descendez plus bas. Mais non, hein? Dans mon esprit de collaboration reconnu parlementaire, M. le Président, là, je leur fais une suggestion constructive, très constructive. Changez votre direction, tout simplement, et remboursez les trop-perçus, tout simplement. La population va être heureuse. Tiens! Je vais vous faire un deal. Je vais vous applaudir. Je vais faire ça, je vais vous dire : Bravo! Vous avez bien fait de renverser votre décision et payer les gens maintenant. C'est la chose à faire.

Alors, est-ce que ça va arriver, M. le Président? Je ne sais pas. Mais, dans ce dossier-là, il y a tellement de choses qui ont mal été que, bon, un imprévu de plus, ça va être juste un bon imprévu de plus. Bien, c'est comme gagner à la loto, sauf que, là, c'est les citoyens qui vont gagner dans le dossier des trop-perçus.

En passant, M. le Président, qu'on ne vienne pas me dire, comme quelqu'un a insinué aujourd'hui dans des conversations que j'ai eues de couloir, qu'on ne vienne pas me dire que c'est compliqué à faire, hein? Moi, j'ai répondu la chose suivante : Vous savez, M. le Président, là, les trop-perçus d'Hydro-Québec, là, 1,4 milliard, c'est une addition. Ce n'est pas compliqué, là. C'est une addition de trop-perçus par compteur. Le gouvernement l'a, ce chiffre-là. Hydro-Québec l'a, ce chiffre-là. Il l'a avec le nom du compteur, le numéro du compteur, l'adresse du compteur, ils ont tout ça.

Je vois, M. le Président, imaginez-vous, là, je vois le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles faire non de la tête.

Bien, voyons donc. Les surplus, c'est quoi, là? C'est de même, là, ils sont apparus comme ça. On estime qu'on a trop perçu. Bien non. C'est sûr que les compteurs, ce sont... le relèvement des lectures des compteurs, c'est sûr qu'il y a eu des erreurs qui ce sont... parce que les compteurs marchent sur des estimés. Bien oui. Mais l'erreur a été constatée parce que l'estimé ne fittait pas avec la lecture réelle. C'est ça qui s'est passé.

Je l'entends, M. le Président, dire : Voyons. Bien, oui, voyons. C'est parce que le voyons va dans l'autre sens. La réalité, là, c'est que le trop-perçu, il n'a pas été inventé : Bonjour, je suis président d'Hydro-Québec, là, puis là j'ai regardé ça à matin puis j'estime que c'est 1,4 milliard. Bien, voyons donc. M. le Président, là, ça a été déterminé parce qu'on sait tous que nos compteurs sont précis. On sait tous qu'à un moment donné il y a quelqu'un qui va venir le lire, puis que les petites roulettes qui tournent, ils montrent des chiffres, puis les chiffres, ils sont inscrits, puis ils sont mis dans un registre, puis, à la fin, on additionne tout ça, et puis ça fait un trop-perçu, et là ça fait la crise actuelle. Ce n'est pas compliqué.

Mais, M. le Président, là, si Hydro-Québec est capable de nous envoyer une facture, quand on a un paiement en retard, à notre adresse avec des petits chiffres qui nous disent notre consommation, bien, ils sont capables de regarder nos trop-perçus puis de nous l'envoyer. Ce qu'ils ont besoin, Hydro-Québec, c'est une consigne. Et la consigne ne peut pas venir de 50 personnes, elle peut venir du premier ministre, qui dit à son ministre : T'envoies la consigne à Hydro-Québec : Tu rembourses. Là, le président d'Hydro-Québec va appeler, il va dire : Oui, mais là ça va faire un trou dans mon budget. Il dit : Oui, mais c'est parce que t'avais rien qu'à faire marcher tes affaires comme du monde avant.

Mais, même ça, je ne le reproche pas. C'est une nouvelle technologie. Il y a eu des hauts, il y a eu des bas. Alors, s'il y a eu un trop-perçu, ça n'a sûrement pas mis Hydro-Québec dans le trou. Il y a un trop-perçu. Mais il ne devait pas l'avoir, ce trop-perçu-là. Donc, ils peuvent très bien faire un pas de recul et le rembourser. Ça n'a aucun impact d'affaires sur Hydro-Québec. Ça peut avoir un impact d'affaires... pas d'affaires, mais de fonds consolidé de budget et de distribution des crédits dans le gouvernement du Québec, mais c'est ça que vous avez voulu pendant quatre ans.

• (15 h 30) •

En fait, M. le Président, qu'est-ce qu'elle fait, la CAQ? Elle s'est prise à son propre piège puis elle essaie de s'en sortir vivante. Pas sûr que ça va marcher. Mais c'est ça qu'elle fait, la CAQ, M. le Président. Elle s'est prise à son propre piège. C'est celui qui a crié au loup, et là le loup, il est là. Il est là, là, pour de vrai. Puis là ils sont pris avec une décision.

Alors, moi, M. le Président, la proposition que je fais, c'est une proposition qui est simple : Allez-y. Allez-y, remboursez. Remboursez maintenant. Vous allez être populaires, O.K.? Remboursez maintenant, vous allez être populaires. Mais faites-le pas pour la popularité, faites-le pour la rigueur politique, la rigueur intellectuelle, mieux encore, l'honnêteté, un drôle de concept. Bien, ça, c'est un concept, M. le Président, qui est très obscur. Ça ne marche pas encore partout, l'honnêteté. C'est simple, l'honnêteté. Moi, j'ai déjà expérimenté ça. J'ai dit ça à matin à un journaliste : Ça m'est déjà arrivé, moi. Ça m'est même déjà arrivé avec le gouvernement, hein? On m'a envoyé un avis, là, de cotisation de quelques dollars, M. le Président. Je me suis trompé dans mon chèque. J'ai envoyé quelques dollars de plus, quelques dollars. On était dans les 4 $, 5 $. On m'a renvoyé un chèque de la différence, un vrai beau chèque bleu. Gouvernement du Québec, fleur-de-lis. Je l'ai encaissé. Tout le monde est content.

Bien, imaginez-vous, les ordinateurs du ministère du Revenu, comment bons ils sont. Je n'en reviens pas. C'est extraordinaire. Ils ne doivent pas avoir les mêmes ordinateurs à Hydro-Québec, mais ça... Ah! non, mais probablement qu'ils les ont. Mais, au ministère de l'Énergie, ça, c'est une autre affaire. Et, au cabinet du premier ministre, bien là c'est là où on est à l'autel de l'obscurité. Là, on est là, là, puis là il se prend toutes sortes de décisions bizarres. Puis là il y en a eu une de bizarre cette semaine, et on peut la renverser. Est-ce que la CAQ va le faire? Mais on va le voir. On va le voir, M. le Président, dans les prochains jours, peut-être même demain. Peut-être qu'il y a une surprise demain. Ça serait le fun. Mais notre position, elle est très claire, M. le Président. À force d'en parler, à force d'avoir pris tant de temps et d'énergie sur ce sujet-là, à un point tel que, même sans engagement, la population croit que c'est ça qu'ils voulaient faire, bien, M. le Président, je pense que la population n'est pas folle, elle a compris. Alors, que la CAQ agisse, soit honnête et rembourse les citoyens.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de La Pinière.

Je vous avise que les députés indépendants ne participeront pas au débat. Avant de céder la parole à M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, je vous indique que votre groupe a 52 min 50 s.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui, merci, M. le Président. Écoutez, j'ai entendu plusieurs choses.

Premièrement, j'étais surpris de voir que c'était mon collègue de La Pinière, là, qui allait faire, en réalité, l'ensemble de la discussion sur cette motion, mais je suis heureux. Je suis heureux parce que c'est quelqu'un de bon conseil, et j'en ai retenu quelques-uns que je vais garder, comme conseils, qui sont importants pour moi. Je pense que le député de La Pinière, mon collègue, nous a mis en garde de ne pas faire comme les vieux partis et de ne pas en devenir un. Donc, on va garder cette notion-là et faire bien attention, bien attention de ne pas le devenir puisqu'effectivement le cynisme nous guette, et il ne faudrait pas refaire les erreurs du passé. Alors, merci pour le bon conseil.

Deuxièmement, par rapport à la complexité, alors, effectivement, là, j'ai bien vu que ça pouvait paraître complexe parce que, sur la fin, ça s'est gâché un peu quand on parlait d'erreurs de compteurs, mesures. Pourtant, le chef de l'opposition, qui était dans des fonctions similaires aux miennes, doit bien concevoir qu'est-ce qu'est l'écart de rendement. Il aurait peut-être dû le préciser à son collègue député de La Pinière. L'écart de rendement, c'est un rendement attendu d'Hydro-Québec, fixé par la Régie de l'énergie. Et, à la fin de l'année, sur des revenus, quand même, de 14 milliards, il peut arriver que les revenus-dépenses aient un écart par rapport à ce qui a été statué par la Régie de l'énergie. Alors, on attendait un rendement de 8 %, on obtient 9 %, et ce pourcentage-là constitue l'écart de rendement qui est dû à tous les revenus et non seulement les revenus résidentiels sur les compteurs.

Donc, ce n'est pas une mécanique. En réalité, c'est un écart de rendement financier. Et il y a un mécanisme, effectivement, qui est en place à la Régie de l'énergie, mécanisme mis en place en 2014. Et là on se fait bien avertir par l'opposition, M. le Président : Écoutez, c'est un tribunal administratif. S'il vous plaît, ne vous ingérez pas. Pourtant, en 2015‑2016, le mécanisme d'écart de rendement a été suspendu pour atteindre les objectifs de la rigueur financière du Parti libéral. Ça doit être la Régie de l'énergie qui a pris cette décision-là en disant : Bon, on met un mécanisme en place qui est logique, mais, pour atteindre, en fin de compte, la vigueur financière énoncée par le Parti libéral, on ne la mettra pas en place. Probablement que c'est comme ça qu'ils ont réfléchi à l'époque, la Régie de l'énergie. Alors, effectivement, je pense qu'il y a des orientations qui peuvent être données.

Maintenant, pour la complexité, parce qu'encore là on mentionnait... on avait regardé un peu qu'est-ce qui était sorti hier, puis c'était complexe, mais je vais essayer de le répéter, puis vous en conviendrez après ça, si c'est complexe. Écart de rendement, le premier pour cent, la moitié va au payeur, en fin de compte, d'électricité, les contribuables, l'autre moitié reste à Hydro-Québec. Si l'écart dépasse 1 %, 75 % vont aux contribuables, 25 % restent chez Hydro-Québec. Ça, c'est le mécanisme mis en place en 2014, qui n'a pas été appliquée en 2015‑2016, qui a fait en sorte, en réalité, que les contribuables n'ont pas reçu l'argent, effectivement, et c'est lui qui était en place et c'est lui qu'on veut réformer, M. le Président. C'est lui qu'on veut réformer en disant : Dorénavant, les écarts de rendement vont être redistribués à la clientèle d'Hydro-Québec. C'est complexe? Je vais répéter. Dorénavant, les écarts de rendement observés vont être redistribués à la clientèle d'Hydro-Québec. Ce n'est pas complexe, hein? C'est à peu près une dizaine de mots, puis c'est ça qu'on va faire.

Bon, maintenant, je suis surpris que le député de La Pinière nous demande de rembourser aux clients d'Hydro-Québec 1,4 milliard. Selon le député, il s'agirait d'un engagement électoral pris par la CAQ. Ce qui est effectivement inexact. J'ai été très étonné d'entendre la motion du député de La Pinière car, si on se fie aux propos qui ont été prononcés dans cette Chambre par son ancien chef, et qui était premier ministre à l'époque, le 15 mars 2015, M. Couillard nous disait : «M. le Président — je cite — non seulement cette somme — en parlant des écarts de rendement — appartient aux Québécois et aux Québécoises, mais elle leur a été complètement retournée puisque c'est ce qui a permis de maintenir les services publics...»

Ah! donc, ça a été retourné parce que ça a permis de maintenir les services publics. O.K. Donc, selon l'ancien premier ministre, 100 % des trop-perçus ont déjà été retournés. O.K. Alors, M. le Président, ce que je ne comprends pas, c'est... Je pense qu'il y a un petit problème de cohérence par rapport à la motion avancée aujourd'hui par le parti d'opposition.

Et, d'un autre côté, en 2017, l'actuel chef de l'opposition officielle, le ministre des Ressources naturelles de l'époque, déclarait pour sa part, et je cite encore, que «la société d'État avait imposé des tarifs plus élevés pendant des années et que [l'écart de rendement accumulé avait] servi à combler le déficit». Et, toujours en 2017, M. le Président, le député de Mont-Royal—Outremont déclarait : «...l'équilibre budgétaire étant atteint, [les] trop-perçus [vont] cesser et [...] seront retournés au consommateur.» Et pour conclure : «...il n'est pas question d'envoyer un chèque à chaque client.» Alors, encore là, le papier avec le drapeau puis le chèque, là, ce n'est pas le mécanisme de remboursement. Le mécanisme de remboursement se fait sur la base tarifaire. C'est beaucoup moins de frais administratifs et beaucoup plus simple.

Mais ce qui est important pour la population, c'est d'avoir un gouvernement à l'écoute, un gouvernement responsable. Ainsi, notre gouvernement, contrairement aux gouvernements libéraux et contrairement à aux gouvernements péquistes qui nous ont précédé, est un gouvernement à l'écoute de ses concitoyens, est un gouvernement qui a décidé d'agir. Alors, parlez-moi pas de recul, on a décidé d'avancer, d'avancer en corrigeant le tir. C'est pourquoi le premier ministre a annoncé hier qu'il m'avait confié le mandat, le mandat de travailler afin de trouver le meilleur scénario — il n'y a pas 56 options — qui va s'assurer de retourner 100 % des écarts de rendement à la clientèle. Alors, c'est ce qu'on va faire.

Le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles et Hydro-Québec travaillent d'ailleurs, là, depuis quelque temps déjà à l'élaboration des scénarios qui, je le répète, M. le Président, l'objectif est clair, qui permettront d'atteindre ce but-là, qui est de retourner 100 % des écarts de rendement à la clientèle d'Hydro-Québec. Alors, on a bien compris que le statu quo, le statu quo qui avait été instauré en 2014 est inacceptable, et c'est pourquoi nous allons agir, que nous allons agir, contrairement à nos collègues de l'opposition.

• (15 h 40) •

Maintenant, revenons dans le passé un peu. Ce passé, comme vous le savez, on ne peut pas l'effacer, et malheureusement on souhaiterait le réécrire, mais on ne peut pas le réécrire non plus, M. le Président. Alors, le Vérificateur général du Québec a dévoilé qu'entre 2005 et 2017 Hydro-Québec a réalisé à plusieurs reprises un taux de rendement — alors, ce n'est pas les compteurs, là, c'est un taux de rendement financier — supérieur à celui déterminé par la Régie de l'énergie. Et, au cours de cette période, les deux divisions d'Hydro-Québec ont réalisé près de 1,5 milliard de plus que le rendement déterminé. Ça s'est passé entre 2005 et 2017, sur une période de 12 ans, 1,5 milliard d'écart de rendement positif pour Hydro-Québec.

Permettez-moi d'abord d'apporter une précision sur ce qu'on qualifie d'écart de rendement, ce que certains appellent les trop-perçus. Comme je le disais tantôt, mais je vais le redire, là, pour être sûr qu'on se comprend bien, ça correspond entre l'écart entre le coût projeté — c'est-à-dire, on fait un budget, on pense qu'au début de l'année ça va nous coûter tant, là, alors ça va fixer les tarifs, ça — et ce qui va réellement se matérialiser à la fin de l'année, donc coûts-revenus. À la fin de l'année, on a fait mieux, on a baissé les coûts, et les revenus ont été plus élevés. Il y a eu un écart entre nos prévisions. On rembourse cet écart-là, qui avait été admis par la Régie de l'énergie. Ce n'est pas très complexe. Encore là, il ne faut pas aller mesurer chacun des compteurs, là, puis ce n'est pas parce qu'il y a un problème dans les compteurs, contrairement à ce que M. le député de La Pinière mentionne.

Alors, j'aimerais rappeler qu'en 2014, là, je le redis, en 2014, la Régie de l'énergie a introduit un mécanisme de traitement des écarts de rendement en vertu de la disposition 48.1 de la Loi sur la Régie de l'énergie, qui visait à assurer en fin de compte un gain d'efficience pour Hydro-Québec. C'est ce qu'on lit dans les documents. Alors, ça faisait en sorte qu'il y a eu des intervenants, plusieurs intervenants, des experts, des chercheurs, des consultants, diverses associations, qui sont venus mentionner quel était le meilleur mécanisme d'écart de rendement dans cette perspective-là. Et, lors des audiences tenues par la régie, il a été développé une formule qui établissait un rendement autorisé par Hydro-Québec et des gains découlant s'ils étaient positifs ou négatifs.

Alors, comme la régie l'a expliqué à l'époque, elle considérait que l'effort d'efficience d'Hydro-Québec devait surtout se faire en proposant des mesures dans le cadre des dossiers tarifaires pour en faire bénéficier la clientèle dès que possible. Alors, la régie l'a dit. La régie a mis en place le mécanisme : sur le premier pour cent, moitié-moitié clientèle, Hydro-Québec, sur les pour cent excédentaires, 75 % pour la clientèle, 25 % pour Hydro-Québec. Mais naturellement ça a fait en sorte que les écarts se sont crus et qu'ils ont augmenté. La régie considérait à l'époque que la clientèle était alors en droit de bénéficier d'une part prépondérante, prépondérante, des écarts de rendement, et c'est ce qu'ils ont fait.

Je tiens toutefois à préciser, M. le Président, que le mécanisme de traitement des écarts, qui n'était pas parfait puisqu'on va le corriger, mais qui avait certaines vertus de retourner de l'argent à la clientèle, a été suspendu entre 2014 et 2016 par le Parti libéral du Québec. D'ailleurs, je réitère que je suis surpris que le Parti libéral du Québec ait pris la décision de suspendre ce mécanisme d'écart de rendement. Je pensais que c'était la Régie de l'énergie qui prenait ces décisions-là, un tribunal administratif indépendant. Je suis très surpris qu'il ait pris cette décision-là. Il faut croire qu'à l'époque il prenait des décisions à cet effet-là.

O.K. Alors, le Parti libéral du Québec a décidé que l'écart de rendement ne serait pas versé à la clientèle, qu'il allait être conservé par la société d'État, remis dans les dividendes et dans les bénéfices pour réussir à atteindre les objectifs du Parti libéral de rigueur financière. Donc, ça a été la période des grandes coupures, ça a été la période des grandes restrictions. Puis on s'est dit : Bien, pourquoi ne pas aussi garder les écarts de rendement puisqu'en réalité on peut le faire?

Alors, aujourd'hui, quand le Parti libéral suggère une motion, ils disent que notre parti a pris des engagements qu'on n'a jamais pris et qu'on devrait retourner l'argent des 12 années passées sur leur régime. Non, bien, écoutez, là, ce n'est pas sérieux, M. le Président, ce n'est pas sérieux. Nous, on s'engage à corriger de manière prospective. Mais ce serait comme de venir dire : Pendant 12 ans, nous autres, là, on ne s'en est pas occupé, puis prenez donc la bouchée d'un coup. Bien, voyons donc! Financièrement, ça ne se peut pas. Mais, encore là, le député de La Pinière, qui a des très grandes connaissances dans son domaine, encore là, du domaine financier, permettez-moi de douter de son expérience, à l'effet que ce n'est pas possible de faire ça, de corriger, en fin de compte, 12 ans d'incurie en une période d'un an. Bien non, ça ne se peut pas, ça. Ça aurait dû être fait dès le début, ça aurait dû être fait tout du long, ça aurait dû être appliqué à chaque année, ce qui n'a pas été fait, et ce qui a creusé un écart de 1,5 milliard sur la période.

Alors, on parle ici, là, juste pour la période qui a été suspendue après l'application du mécanisme, là, 2014, la régie dit : Voici un mécanisme, 2015‑2016, on ne l'applique pas. 421 millions qui n'a pas été retourné à la clientèle, 421 millions. Puis aujourd'hui, bien, ils nous demandent de rembourser 1,5 milliard, 1,4 milliard, de retourner ça aux contribuables. Alors, de manière prospective, on va corriger la situation puis on va bien le faire, mais on ne peut pas corriger tout le passé d'un parti qui n'a pas pris cette décision-là. Et après ça on nous parle de cynisme et... de dire que c'est gênant, oui.

De plus, rappelons-nous que, pour les années antérieures à l'introduction de ce mécanisme de traitement des écarts, les deux divisions d'Hydro-Québec ont réalisé des écarts de rendement favorable totalisant des centaines de millions. C'est quand on prend ces sommes-là qu'on obtient 1,4 milliard d'écarts de rendement. Ces écarts de rendement ont été dénoncés, effectivement, dénoncés de manière véhémente, M. le Président. Mais il n'y a pas eu de geste de posé par le gouvernement de l'époque.

Mais ça a été dénoncé pour deux raisons, principalement. Premièrement, le Parti québécois — on va changer de parti — le Parti québécois, qui avait pourtant été saisi, lui aussi, de la problématique lors de la courte, courte période où il a assumé le pouvoir, n'a jamais, n'a jamais cru bon agir en bon gouvernement en trouvant une solution pour que cet argent retourne aux clients d'Hydro-Québec. Ils ont plutôt opté pour s'accaparer cette cagnotte par le biais des dividendes versés par Hydro-Québec. Donc, eux aussi, ils le savaient, eux aussi étaient conscients des écarts de rendement, M. le Président, qu'il y avait chez Hydro-Québec. Ils n'ont pas le choix, en réalité, de la redistribuer à la clientèle. Ils se sont accaparé cette cagnotte.

Deuxièmement, même si les libéraux ont cru bon de demander... Ils l'ont demandé, je ne peux pas leur reprocher ça, c'est un beau geste. Ils l'ont demandé. Ils ont dit à la Régie de l'énergie : Intervenez. Bien là, ils interviennent avec la Régie de l'énergie : Intervenez et proposez-nous une façon pour que les Québécois puissent participer au partage des écarts de rendement. Ils l'ont demandé. Puis, une fois que le mécanisme a été livré : Bon, on ne le fera pas, mais on sait que ça existe. Donc, ils l'ont demandé, il a été développé, puis, une fois qu'ils l'ont eu : Oui, aïe! retourner 50 % à la clientèle, ça ne nous permettra pas de boucler notre budget, avec la rigueur, oui. Alors, ils ne l'ont pas appliqué. Et aujourd'hui ceux-là mêmes nous demandent, M. le Président, ceux-là mêmes qui ont refusé d'appliquer le mécanisme existant, nous disent : Ça serait le fun que vous retourniez 1,5 milliard que nous autres, on n'a jamais retourné pendant 12 ans. Voyons! Ça ne se peut pas, ça. Ce n'est pas sérieux. Ce n'est pas sérieux.

Alors, à l'époque, si on se souvient bien, on s'est félicité de la création, en 2014, du mécanisme — on a dit bravo! — qui semblait être équitable pour s'attaquer à la problématique. Mais, oh! oh! surprise, les libéraux ont préféré ne pas le mettre en place, ne pas l'appliquer, privant ainsi la clientèle d'Hydro-Québec d'une solution qui, à l'époque... eux-mêmes jugeaient équitable. Le gouvernement libéral a préféré détourner ses fonds pour appliquer son plan d'austérité, de rigueur budgétaire, dont l'un des principaux artisans était nul autre que le député de La Pinière, ministre de la Santé de l'époque. Mais aujourd'hui les deux partis ayant formé les précédents gouvernements tentent de dissimuler leur erreur. Mais, encore là, «erreur», pour moi, ce n'est pas le bon terme. Ce n'est pas des erreurs parce qu'une erreur, ça voudrait dire : Bien, je n'étais pas au courant, c'est une... Je m'excuse, c'est une erreur. Non, c'est un détournement de fonds. C'est pour corriger une inertie, en fin de compte, une inertie, mais une inertie consciente. On connaît le mécanisme, il nous a été présenté, il existe. Ah! ce n'est pas pire, on ne le fait pas. C'est ça. Ce n'est pas une erreur, ça. Quand c'est volontaire, je ne qualifie pas ça d'erreur. Quand c'est volontairement, on ne peut pas dire que c'est une erreur, on dit que c'est une décision, qui était la mauvaise, mais c'est une décision, M. le Président, qui a été prise à l'époque.

• (15 h 50) •

Et, encore là, je réitère, ce n'est pas crédible. Vous nous demandez... L'opposition nous demande de corriger 12 ans d'incurie, 12 ans d'inertie, puis dire : Bien, faites-le, remboursez 1,4 milliard de dollars que nous, on n'a jamais accepté de rembourser. Voyons! Je ne comprends pas c'est quoi, la cohérence entre les deux discours.

Nous, l'engagement qu'on a pris, c'est de corriger la situation, et, dès l'an prochain, la situation va être corrigée. Et ça ne sera pas 50 % ni 75 % des montants qui vont être... Tous les écarts de rendement vont être retournés à la clientèle, M. le Président. C'est fini, ce temps-là. Mais demandez-nous pas de retourner en arrière, 12 ans d'un gouvernement qui n'a pas pris les bonnes décisions, pour dire : Bien, on va les corriger, nous autres, d'un coup cette année. Bien non, ça ne se peut pas. Ce n'est pas sérieux.

Nous avons fait des choix, on ne peut pas revenir en arrière sur ces sommes. Mais, pour le futur, M. le Président, des options vont être mises de l'avant, vont être mises en place pour s'assurer que les écarts soient remis à 100 % à la clientèle. Donnez-nous quelques mois parce qu'il n'y a pas 56 options, en passant, il y a deux, trois options potentielles. On les analyse actuellement puis on va arriver avec la meilleure, mais qui aura toujours le même objectif et le même résultat, c'est que les écarts de rendement vont être retournés à la clientèle en totalité. Je le répète et je vais être clair : À partir de maintenant, c'est l'ensemble des écarts de rendement qui seront retournés aux contribuables, 100 %.

La hausse tarifaire d'Hydro-Québec aussi, ça... C'est à côté, là. Il y a deux choses qu'on dit. Ça, c'est une chose. La hausse tarifaire d'Hydro-Québec ne dépassera jamais l'inflation. La hausse tarifaire d'Hydro-Québec, sous notre gouvernement, ne dépassera jamais l'inflation, naturellement, sans considérer le remboursement des écarts de rendement. Inflation, puis après ça on applique les écarts de rendement en plus, là. Donc, c'est deux choses qu'on prend position puis qu'on dit aujourd'hui. Donc, contrairement au précédent gouvernement, 100 % des écarts de rendement vont être retournés, et jamais de hausse tarifaire au-dessus de l'inflation. Alors, ça, c'est enregistré, c'est dit, ça va être ça.

Notre objectif, c'est que, dès l'an prochain, ce mécanisme soit mis en place. Nous nous sommes engagés à remettre plus d'argent aux Québécois et aux Québécoises et nous le ferons. Comme je vous l'ai dit, nous sommes à revoir divers scénarios avec le ministère, avec Hydro-Québec, et on va les appliquer dès l'an prochain. Je sais qu'on peut compter sur la collaboration assurée d'Hydro-Québec pour appuyer les démarches de notre gouvernement. Et Hydro-Québec... ils sont excellents, Hydro-Québec. Mais, à la fin, Hydro-Québec, ils appliquent des lois, ils appliquent des règlements, ils appliquent des tarifications faites par la régie. C'est au gouvernement de donner les bonnes orientations. C'est au gouvernement de prendre les bonnes décisions, ce qui n'a pas été fait dans le passé, bien qu'ils avaient le choix de le faire. Ils ont refusé de le faire. Le mécanisme existait, ils ont passé outre le mécanisme. Ils n'ont pas voulu, en fin de compte, retourner l'argent de la clientèle, et aujourd'hui ceux-là, ceux-là mêmes qui n'ont pas voulu, viennent nous dire aujourd'hui qu'il y a du cynisme. Allô! C'est sûr qu'il y a du cynisme. Ce cynisme-là a été créé depuis 15 ans au Québec. Il est temps qu'on corrige ça.

Je veux que les Québécois aient confiance en leur institution. Je tiens à souligner qu'Hydro-Québec effectue de l'excellent travail dans sa gestion, qu'il s'efforce d'offrir le meilleur service qui soit à sa clientèle. Je ne veux pas que la population de Québec perde cela de vue. Ici, ce n'est pas Hydro-Québec qui est visé, c'est les choix gouvernementaux, c'est les choix du gouvernement, puis on va les corriger, ces mauvais choix là. Hydro-Québec est capable d'assurer une gestion efficiente au bénéfice de tous les Québécois. C'est ce qui nous permet ici de bénéficier de tarifs parmi les plus bas, les plus bas au monde, les tarifs électriques. M. le Président, quand on dit que les tarifs d'Hydro-Québec, c'est les plus bas, là, à Montréal, là, pour 100 $, là, Winnipeg, 123 $, Vancouver, 156 $, Miami, 171 $, Toronto, 181 $, New York, 417 $, Boston, 432 $. Au Québec, c'est ici qu'on paie les meilleurs tarifs pour notre électricité, mais c'est ici que ça nous appartient aussi. On doit s'assurer que ça retourne à la clientèle puis on va y travailler.

Dans le contexte économique que nous connaissons, où chaque dollar est important, M. le Président, il est essentiel que l'équilibre budgétaire des familles... cette performance est digne de mention. Et j'ai effectué plusieurs tournées dans les régions. La semaine dernière, j'étais en Abitibi en début de semaine, Côte-Nord mercredi, jeudi, vendredi. Et honnêtement ce que j'ai vu... Puis je peux vous l'affirmer, M. le Président, parce que j'ai fait des dizaines de rencontres, un horaire assez bien chargé, je peux affirmer que les enjeux spécifiques des gens vivant dans les régions sont sérieux et importants et que notre gouvernement, il déploie tous les efforts de soutien possible. J'ai rencontré de nombreux travailleurs et des gens impliqués dans leur milieu qui ont à coeur, qui ont à coeur, en fin de compte, leur région.

Pourquoi je vous dis ça aujourd'hui, M. le Président? Pourquoi je parle des régions? Parce que je me suis fait également parler de leurs préoccupations face aux écarts de rendement. Eh oui! On nous en a parlé. Et, quand je parle à mes collègues, qui ont profité des deux dernières semaines de relâche parlementaire pour aller dans leur région, dans leur circonscription, ils se sont fait parler des enjeux d'écarts de rendement. Tout un chacun s'en est fait beaucoup parler. Et, quand on reçoit ce message-là, un message clair, on est là, nous, pour écouter les Québécois et les Québécoises. Ça, là, honnêtement, pour ceux qui ne le savent pas, là, je le répète, ça, c'est notre fonds de commerce à la CAQ, contrairement à d'autres partis. Notre fonds de commerce, c'est d'être à l'écoute des Québécois puis des Québécoises.

Alors, on agit. On agit cette semaine. On va redresser la situation pour s'assurer que les écarts de rendement soient remboursés à tous les Québécois, à toutes les Québécoises, clientèle d'Hydro-Québec. C'est ce qu'on va faire, puis on va tenir nos engagements. Alors, parlez-moi pas de recul. C'est un sacré pas en avant. Ça n'a jamais été fait par les gouvernements antérieurement. Non seulement ils n'ont même pas appliqué le mécanisme en place, ils ont refusé de le faire. Nous, on regarde en avant puis on va le faire de manière correcte et adéquate. Là, aujourd'hui, je m'engage sous peu, et je le répète, que le mécanisme permettra de retourner 100 % des écarts de rendement à la clientèle.

Je vais toutefois préciser également que la démarche entreprise ne doit pas être vue, et je le répète, comme un désaveu envers la société Hydro-Québec. Hydro-Québec a toujours respecté les décisions de la Régie de l'énergie et les orientations gouvernementales. À partir du moment où les orientations étaient mauvaises, à partir du moment où les décisions gouvernementales n'étaient pas dans la bonne direction... Hydro-Québec répond aux orientations gouvernementales. Donc, on leur donnera les bonnes orientations. Hydro-Québec agira adéquatement.

Aujourd'hui, M. le Président, j'aimerais vous préciser que notre gouvernement est le premier et le seul à avoir décidé d'agir. Je reviens là-dessus car il me semble évident que les précédents gouvernements n'ont jamais eu de véritable volonté d'appliquer, en fin de compte, de manière adéquate les mécanismes d'écarts de rendement, si ce n'est en fin de terme, en fin de mandat, une fois, une fois avec l'impact financier, cette année en plus. On l'applique, mais l'impact est là. Donc, jamais, jamais... Nous, on va le faire, puis on va le faire à 100 %, M. le Président. Notre gouvernement se fera présenter des propositions rapidement. On prendra une décision.

Et, à la conclusion, l'objectif est clair, le résultat sera le même : 100 % des écarts de rendement sera remis à la clientèle dès l'an prochain. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant Mme la députée de Maurice-Richard. Il reste deux minutes à votre groupe.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Je serai brève, mon collègue ayant été très inspiré dans son intervention, et, de toute façon, je partage pleinement l'ensemble de ses propos.

Et je partage notamment la partie de ses propos où il dit : Il a un peu de difficulté à suivre les propos du ministre. Puis, encore maintenant, c'est encore pire qu'il y a 15 minutes ou 20 minutes. Je comprends, à la lumière de ce qu'il vient de dire, avec un engagement qui est très ferme et qui était ferme hier, qui ne l'était plus ce matin, mais là qui a l'air d'être encore ferme, je comprends qu'à la fin de la journée il va voter avec l'ensemble de ses collègues sur la motion qu'on présente parce que, je veux dire, mot pour mot, ce qu'il vient de dire, c'est qu'il s'engage à rembourser les trop-perçus aux Québécois. La motion que l'on a déposée dit exactement ce libellé. Donc, je comprends, et s'ils veulent être cohérents, que, lorsqu'il y aura le vote, c'est de cette façon qu'ils procéderont comme formation politique. Et, si ce n'est pas le cas, nous aurons certainement d'autres questions à poser parce que le flou et le brouillard sur leur position continuera de s'épaissir, et on ne peut pas dire tout et son contraire à chaque intervention.

Et mon collègue de La Pinière l'a mentionné parce que... par rapport au cynisme qui est entretenu par la population. Je pense que ce genre de comportement... On a eu une opposition qui a été devant nous... un premier... quelqu'un qui est premier ministre aujourd'hui qui, pendant quatre ans, a décrié, a accusé, a dénoncé, a déposé des pétitions, créé des sites Internet, des publicités, et aujourd'hui il vient nous dire, finalement, que ce n'était pas vraiment un engagement qui avait été pris. Donc, je comprends, à la lumière de l'intervention qui vient d'être faite par le ministre, que c'est un autre changement de position. Et on verra si effectivement, lors du vote, c'est bien la position qui sera maintenue ou pas. Merci.

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Éric Girard

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous mes collègues.

Aujourd'hui, j'aimerais prendre le temps qui m'est donné pour rectifier certaines choses sur Hydro-Québec, parce que je crois que les perceptions qu'on peut parfois avoir de cette société d'État sont en décalage avec sa réalité.

Ce qu'on appelle les trop-perçus d'Hydro-Québec, je crois qu'on gagnerait tous à les appeler écarts de rendement, pour comprendre ce qu'ils sont vraiment. Les tarifs de l'électricité produite par Hydro-Québec ne sont pas déterminés de manière arbitraire par la société d'État elle-même, ça n'aurait aucun bon sens. Non, M. le Président, c'est un organisme gouvernemental qui s'appelle la Régie de l'énergie qui est responsable de réguler les tarifs. À chaque année, Hydro-Québec doit aller se présenter là pour plaider des hausses de tarifs. Ces hausses-là doivent être justifiées par l'évaluation des coûts qui seront engendrés par Hydro-Québec pour fournir l'électricité à leurs clients, les Québécois, pendant l'année suivante.

La Régie de l'énergie a une mission de régulation économique et elle est redevable des contribuables. On va justement la recevoir à la CAPERN plus tard cette année. Vous comprendrez qu'elle n'aurait pas avantage à faillir à sa mission principale, à la raison même de son existence.

Le travail de la régie, M. le Président, peut d'ailleurs être observé dans les augmentations plus raisonnables des tarifs d'Hydro-Québec dans les dernières années. Depuis quatre ans, les hausses de tarifs ont été d'un niveau égal ou inférieur à l'inflation, on parle d'augmentations variant de 0,3 % à 0,9 % au maximum sur cette période. L'exercice de régulation qui doit être fait, M. le Président, la Régie de l'énergie le fait.

Ce qui peut causer des trop-perçus, c'est quand Hydro-Québec se rend compte, à la fin d'un exercice financier, qu'il a surestimé ses dépenses pour l'année, c'est quand Hydro-Québec se rend compte que ça a coûté moins cher que prévu pour offrir son service à ses clients. Quand il y a des trop-perçus, c'est parce que le rendement d'Hydro-Québec a été meilleur que prévu. C'est un signe que la société d'État va bien.

Hier, j'entendais ma collègue de Mercier dire qu'elle croyait qu'Hydro devrait pouvoir prévoir avec exactitude le montant réel des tarifs d'électricité au moment de son audition devant la Régie de l'énergie. Cette audition-là a lieu un an et demi avant la fin de l'exercice financier, ce serait pratiquement impossible de savoir avec exactitude combien les services vont coûter 20 mois plus tard. Et c'est ce qui explique les écarts de rendement.

M. le Président, le budget annuel d'Hydro-Québec Distribution est de 12 milliards de dollars. Les écarts de rendement des dernières années n'ont été en moyenne que de 1 %. Autrement dit, les prévisions d'Hydro-Québec se sont avérées justes à 99 %. On s'entend pour dire que toutes les entreprises sont susceptibles d'afficher des écarts entre les prévisions budgétaires et les résultats de fin d'année et que l'écart de 1 % d'Hydro-Québec n'est pas aberrant. Ce qu'il reste à faire, dans ce temps-là, c'est de voir ce qu'on fait avec l'argent issu des écarts de rendement.

M. le Président, en 2014, la Régie de l'énergie avait proposé un mécanisme de traitement des écarts de rendement qui visait à assurer des gains d'efficacité chez Hydro-Québec. Ce qui était prévu, c'est que la moitié des trop-perçus soit remise aux contribuables sous la forme d'ajustements tarifaires et que l'autre soit remise au gouvernement sous la forme de dividendes, tel que le prévoit la Loi sur Hydro-Québec. Ce mécanisme a été ignoré par le Parti libéral en 2014 et 2015. Ils préféraient prélever 100 % des écarts de rendement pour atteindre leur fameux équilibre budgétaire aussi vite que possible. L'austérité libérale, c'était ça, le choix de ne rien remettre dans les poches des contribuables. C'est seulement en 2016 que le mécanisme a réellement été mis en place.

Les gouvernements libéraux, en plus de ne rien faire sur le dossier des trop-perçus pendant des années, ont pris deux années complètes pour accepter la proposition de la Régie de l'énergie. La chose comique dans tout ça, M. le Président, c'est que la proposition de la régie faisait suite à une demande du gouvernement de Mme Pauline Marois. Ça va loin, ça va loin. Le député de La Pinière n'est peut-être pas au courant que la seule chose qui avait changé dans ce dossier en 15 ans n'était même pas l'idée de son gouvernement. C'est un peu gênant.

Le gouvernement actuel est au fait des préoccupations des Québécois, et on réalise que c'est important pour eux qu'on prenne des décisions sur ce qui doit être fait de l'argent issu des écarts de rendement d'Hydro-Québec. D'abord et avant tout, on veut éviter de répéter les erreurs des gouvernements du passé. Les trop-perçus, qui s'élèvent à 1,4 milliard de dollars, ont été prélevés sans remise en question par ces gouvernements, dont certains des membres qui sont ici aujourd'hui ont le cran d'essayer de nous refiler la faute. Ça fait de nombreuses années que les écarts de rendement positifs d'Hydro-Québec s'accumulent. C'est, encore une fois, mon gouvernement qui doit réparer les pots cassés par l'inaction et les mauvaises décisions que certains de nos homologues refusent de reconnaître. M. le Président, notre volonté, au gouvernement, c'est de trouver un moyen pour que les clients d'Hydro-Québec ne soient plus pénalisés par des écarts de rendement. Et je vais répéter pour mes collègues de l'opposition officielle, pour qu'ils comprennent bien encore : Notre volonté, au gouvernement, c'est de trouver un moyen pour que les clients d'Hydro-Québec ne soient plus pénalisés par des écarts de rendement. Ça ne prendra pas 15 ans.

Le statu quo est inacceptable. C'est pourquoi nous regardons présentement les différents scénarios qui peuvent être envisagés afin que les écarts de rendement soient remis à la clientèle de la société d'État, qu'il y ait une décision d'un gouvernement responsable. L'action qui va être prise aura le même but que plusieurs autres des actions de mon gouvernement, soit de remettre de l'argent dans le portefeuille des Québécois.

Une voix : ...

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Vous n'êtes pas habitués à ça? On a déjà annoncé, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député, un instant. Il n'y a pas d'interpellation, s'il vous plaît, là. Tantôt on a écouté tout le monde. On écoute le... Donc, M. le député, vous pouvez reprendre.

• (16 h 10) •

M. Girard (Lac-Saint-Jean) : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je disais, on a déjà annoncé la mise en place d'un taux unique de taxe scolaire, la diminution des tarifs de garderie et l'augmentation des allocations familiales. Vous pouvez être certains que nos citoyens auront plus d'argent dans leurs poches que sous le régime libéral.

Vous voyez donc, M. le Président, que nous souhaitons tracer une ligne claire entre le présent gouvernement et ceux des dernières années. Nous ne sommes pas parfaits, mais nous sommes à l'écoute de la population et nous avons le désir de bien faire les choses pour servir les Québécois et Québécoises.

Les excédents d'Hydro-Québec, nous voulons qu'ils servent les intérêts des Québécois. Par le passé, nous nous sommes donné une société d'État qui nous permet aujourd'hui d'avoir des tarifs d'électricité les plus bas en Amérique du Nord. Oui, ce geste nationaliste a grandement contribué à l'émergence du Québec depuis. Nous agirons pour s'assurer qu'il continue à en faire bénéficier sa population en prenant les bonnes décisions. C'est ça, un gouvernement responsable, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Nous poursuivons avec M. le député de Jonquière... (panne de son) ...55 s pour votre groupe.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir d'être ici pour parler de la motion suivante, déposée par le député de La Pinière :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec.»

D'abord, je dois vous dire que nous sommes favorables à cette motion, M. le Président. Nous aurions aimé la présenter nous-mêmes, mais, dans cette situation-là, nous sommes des alliés objectifs avec l'opposition officielle, bien que nous soyons étonnés de cette proposition faite par le gouvernement... pardon, par l'opposition libérale, cette proposition de motion du mercredi, parce que, quand on relit, par exemple, les échanges entre l'opposition de la CAQ, avant la dernière élection, et le gouvernement libéral et qui est maintenant dans l'opposition officielle, nous n'avions pas, à ce moment-là, un gouvernement qui était enclin et qui voulait rembourser les trop-perçus, au contraire. Même le ministre de l'Énergie, qui est devenu chef de l'opposition officielle, disait, par exemple, le 6 avril, en jouant visiblement sur une patinoire qu'il sentait mince : «Il y a donc un remboursement des trop-perçus qui va se faire sous forme, évidemment, d'analyse de la Régie de l'énergie, et ça va se refléter dans les tarifs futurs d'Hydro-Québec.» Alors, on voit bien qu'il... ce gouvernement, à l'époque, cherchait à se défiler pour ne pas rembourser les trop-perçus. Alors, nous sommes étonnés de ce soudain empressement, engagement, défense sur le remboursement des trop-perçus. Mais, enfin, nous sommes ici pour nous prononcer sur cette motion que nous avons devant nous.

Il y a quand même quelque chose d'important, M. le Président, parce qu'on fait face à un nouveau gouvernement, qui a fait de ce remboursement des trop-perçus d'Hydro-Québec, évalués à 1,4, 1,5 milliard en 2017... il en a fait un combat important, en a fait un combat de tous les instants, en a fait un combat médiatique, qui a mobilisé des citoyens, a mobilisé des gens qui ont signé de toute bonne foi une pétition qui a récolté quasiment 50 000 noms en 2017. Et moi, je me souviens de ces images de la députée de Saint-Hyacinthe, qui allait tambour battant au ministère de l'Énergie déposer des caisses de signatures, de pétitions signées réclamant le remboursement des trop-perçus. Et son chef, heureux des retombées médiatiques de cette stratégie, son chef, qui est devenu depuis premier ministre, en remettait allègrement, se levait ici. Et là on ne parle pas, M. le Président, d'opération politique du siècle dernier. On parle de gestes politiques qui ont été posés par la Coalition avenir Québec et par ses députés, en premier lieu, évidemment, le chef et la députée de Saint-Hyacinthe, il n'y a même pas deux ans, M. le Président, il n'y a même pas deux ans.

Entre-temps, depuis ce temps-là, bien, on a eu une campagne électorale, où des citoyens se sont dit : Bien, on va voter pour la Coalition avenir Québec parce qu'eux, ils veulent brasser Hydro-Québec. Ça, en soi, on pourrait en discuter longuement. Hydro-Québec, on l'aime. Hydro-Québec, c'est dans notre ADN. Hydro-Québec représente historiquement et même identitairement la capacité collective des Québécois de contrôler leur économie, leur énergie, leurs pleins pouvoirs. Mais, vu qu'on l'aime, bien, il faut aussi être capable de la brasser puis de la remettre à l'ordre. Souvent, on dit qu'Hydro-Québec est, souvent, un État dans l'État, alors il faut qu'on soit capable de la remettre à l'ordre.

Je me souviens, M. le Président, vous étiez avec moi en cette Assemblée, je crois que c'est 2010 où on a adopté un ordre de l'Assemblée nationale pour qu'Hydro-Québec remette ses contrats à l'Assemblée nationale, parce qu'Hydro-Québec ne voulait pas. Vous vous en souvenez sûrement. Je vous vois hocher du bonnet. Je regarde dans l'Assemblée, on est peut-être juste les deux, ce n'est pas drôle, à se souvenir de ça parce qu'on y était. Ce n'est pas drôle pour moi, en tout cas, peu importe. Et on a réussi. L'Assemblée s'est tenue debout, puis on a fait en sorte qu'Hydro-Québec débarque. Je me souviens, les camions reculaient avec des palettes de contrats pour que l'Assemblée nationale puisse les analyser. Alors, c'est correct de brasser Hydro-Québec.

Et vous imaginez le cynisme de la population, qui dit : Oui, il faut brasser Hydro-Québec, il y a des trop-perçus, on va les rembourser. Première chose que ce gouvernement fait, cinq mois après son élection, après avoir joué fortement les médias là-dessus, avec les médias fait des effets de toge pour aller déposer au bureau du ministre de l'Énergie de l'époque, qui est devenu chef de l'opposition officielle, des caisses et des caisses de signatures, première chose que le gouvernement fait, c'est : Non, notre promesse globale, c'était de remettre de l'argent dans les poches des familles, et il y a toutes sortes d'autres manières, soi-disant, pour le faire. Alors, c'est profondément cynique, M. le Président, profondément cynique. Profondément. Alors là, on demande un petit peu... pas un petit peu, on demande beaucoup de cohérence.

Et ce n'était pas nuancé, là. La députée de Saint-Hyacinthe, le 5 avril 2017, ça ne fait même pas deux ans, dit : «Le gouvernement libéral a imposé une taxe déguisée — une taxe déguisée, c'est moi qui insiste — aux clients d'Hydro-Québec pour payer ses dépenses et atteindre plus rapidement son équilibre budgétaire.» Et là, dans un élan, elle dit : «Quand le gouvernement va-t-il rembourser l'argent pris dans les poches des clients d'Hydro-Québec?» Le lendemain, le 6 avril, elle en rajoute, la députée de Saint-Hyacinthe, je la cite : «...une entreprise privée qui surfacturerait ses clients, on fait face à deux possibilités : soit l'entreprise est malhonnête, soit l'entreprise s'est trompée de bonne foi. Si l'entreprise s'est trompée, il y a une seule chose à faire : elle fait parvenir un chèque accompagné d'une note d'excuse.» Et là elle dit : «...est-ce que le gouvernement libéral va faire la seule chose digne à faire : rembourser les Québécois et présenter ses excuses?» Ce n'est pas rien, M. le Président. Ça ne fait pas deux ans de ça, là, on ne parle pas d'une déclaration des années 70. Elle disait, toujours le 6 avril : «...le ministre essaie de justifier l'injustifiable. [...]Est-ce que le gouvernement va faire comme [il] a fait avec les crédits d'impôt pour les aînés, reculer, rembourser et présenter ses excuses?» Alors, c'est... Puis là j'en saute, là, parce que je vois le temps passer, mais c'est comme ça sans fin. Même chose dans les déclarations dans les médias, là.

Alors, M. le Président, on voit bien, là, que la stratégie du gouvernement actuel est d'essayer de sauver la chèvre puis le chou à cause du sondage dans Le Journal de Québec d'hier, 92 % des Québécois qui disent qu'Hydro-Québec devrait rembourser les trop-perçus, on le voit bien, là. Mais ce n'est pas clair, hein? Il joue sur les mots, comme le faisait l'ancien ministre de l'Énergie devenu chef de l'opposition officielle, en disant : Bien, écoutez, on va le faire pour le futur. Mais quel futur? Est-ce que c'est le futur juste de la prochaine année ou le futur à long terme? Le gouvernement, le ministre de l'Énergie, le premier ministre ne le disent pas vraiment. Tout ce qu'on sait, c'est : Vous allez avoir un plan de match dans quelques mois.

Donc, ce qui est choquant et profondément cynique, c'est que le gouvernement, tout de suite, est tombé dans les griffes de cet État, dans l'État qui s'appelle Hydro-Québec, alors que, s'il y a une place où on doit se tenir debout, parce qu'on l'aime, Hydro-Québec, mais on l'aime parce que c'est les Québécois qui en sont les actionnaires, bien, c'est bien ici, à l'Assemblée nationale, avec le gouvernement. Bien non. Ils se sont tout de suite fait embobiner, tout de suite fait embobiner.

Donc, M. le Président, la seule chose qu'il nous reste à faire, nous, comme députés, c'est d'appuyer cette motion. J'espère que le gouvernement et les députés du gouvernement feront de même, parce que ce n'est pas juste une question de rembourser les trop-perçus. Oui, c'est important. Ce sont des trop-perçus, puis il y en a d'autres ici qui les ont bien expliqués, le mécanisme des trop-perçus. Mais c'est aussi d'envoyer un signal que, pour Hydro-Québec, c'est l'Assemblée nationale, c'est le gouvernement qui mène, ce n'est pas Hydro-Québec elle-même. Merci, M. le Président.

• (16 h 20) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Merci, M. le député. Je cède la parole à M. le député de Rousseau.

M. Louis-Charles Thouin

M. Thouin : M. le Président, nous sommes interpelés aujourd'hui par l'opposition officielle, qui nous reproche de ne pas avoir de solution miracle à un problème qu'ils ont créé, un problème qu'ils ont laissé aller, un problème qui les a servis.

Je n'apprendrai rien à personne aujourd'hui, c'est un problème complexe. Comme l'a expliqué précédemment mon collègue député de Lac-Saint-Jean, les trop-perçus, ce sont les résultats d'un écart de rendement positif d'Hydro-Québec. C'est l'argent qu'Hydro-Québec a dépensé de moins que ce qu'il avait prévu et qu'il remet au gouvernement sous la forme de dividendes et aux contribuables sous la forme d'ajustements tarifaires.

Il faut mettre les choses dans leur contexte. Le précédent gouvernement a décidé d'affecter la totalité des trop-perçus d'Hydro-Québec au budget de l'État, et ce, tout en sabrant drastiquement, du même souffle, dans les services aux citoyens. En résumé, plus de revenus pour moins de services. Les libéraux ont même tenté de convaincre les Québécois qu'ils ne pouvaient pas agir autrement. Nous prouvons actuellement qu'on peut faire autrement, qu'on peut faire plus et qu'on peut faire mieux. Peut-être que l'ancien gouvernement commencera bientôt à réaliser qu'en politique, lorsqu'on n'est plus cru, c'est qu'on est cuit.

M. le Président, on ne peut pas refaire le passé, mais on peut changer l'avenir, et l'avenir dure longtemps. Malgré notre opposition, suite à l'élection, les trop-perçus d'Hydro-Québec avaient été intégrés au budget de l'État, à partir duquel tous les partis ont bâti leur cadre financier de campagne. Jamais, jamais, dans notre cadre financier, notre cadre financier n'a prévu de refaire le passé.

Notre premier geste fut d'annoncer des réinvestissements importants de ces sommes provenant en partie des trop-perçus dans le filet social, en santé et en éducation. Bref, de faire exactement le contraire de ce que le gouvernement libéral avait fait.

Le deuxième geste a été de décider de rembourser un important pourcentage des trop-perçus, en respect avec la règle de la Régie de l'énergie actuellement en vigueur, et de mettre un plafond qui empêcherait Hydro-Québec d'augmenter les tarifs au-delà de l'IPC, l'indice des prix à la consommation. Nous respectons la règle.

Le troisième geste, très important, qui vient d'être annoncé hier, propose qu'à l'avenir 100 % des trop-perçus puissent être remboursés aux clients d'Hydro-Québec. Nous sommes à l'écoute des Québécois. Nous réglons ce dossier pour que ça n'arrive plus.

M. le Président, en laissant aller le problème, non seulement le Parti libéral a abandonné son devoir de travailler pour les intérêts des citoyens, des contribuables, mais il a aussi laissé empirer une situation déplorable, qui tend à ternir l'image d'Hydro-Québec. Quand on pense à Hydro-Québec, on ne devrait pas seulement penser à la tarification, on devrait aussi penser à la force économique de cette société d'État, ce qu'elle représente pour le Québec. Quand on pense à Hydro-Québec, on devrait penser à ces grands projets d'ingénierie qui ont créé au Québec une expertise incomparable en matière d'hydroélectricité, une expertise qui est recherchée et respectée à travers le monde. Quand on pense à Hydro-Québec, au lieu de juste penser aux trop-perçus, face auxquels le gouvernement libéral a été complètement inactif, on devrait aussi penser avec fierté au fait que nous sommes la province canadienne qui émet le moins de gaz à effet de serre par habitant, et de loin dans les meilleures sociétés en Amérique du Nord, à cet effet, et ce, c'est en grande partie grâce à Hydro-Québec, qui produit depuis des décennies, bien avant que l'environnement et le climat deviennent des enjeux partout à travers le monde, de l'énergie propre et renouvelable. M. le Président, Hydro-Québec est un véritable fleuron pour le Québec, et, malheureusement, depuis quelque temps, on parle beaucoup d'Hydro-Québec pour critiquer la société d'État.

Au risque de nous répéter, notre gouvernement a déjà retourné beaucoup d'argent dans le portefeuille des Québécois, et nous allons continuer à le faire. C'est jour de budget, demain. Les Québécois pourront constater encore une fois que nous sommes un gouvernement à leur écoute. Les Québécois auront plus d'argent dans leurs poches que sous le régime libéral.

M. le Président, Hydro-Québec a mauvaise presse, ces temps-ci, à cause des trop-perçus. Évidemment, c'est une situation déplorable. Cependant, je crois qu'il est pertinent de rappeler que les Québécois sont ceux qui paient le moins pour de l'électricité en Amérique du Nord, je crois qu'il est important de se le rappeler. M. le Président, le ministre l'a souligné tantôt. À titre d'exemple, pour une facture d'électricité de 100 $ au Québec, un citoyen de Vancouver paiera 156 $, un citoyen de Toronto paiera 181 $ et, à Charlottetown, 236 $. Et ça, c'est juste au Canada, parce que la situation est encore moins reluisante aux États-Unis. Pour la même facture de 100 $ d'électricité au Québec, ce serait 392 $ à San Francisco, 427 $ à New York et 442 $ à Boston.

M. le Président, les Québécois ne sont pas chanceux de payer les tarifs d'électricité les moins chers en Amérique du Nord, ce n'est pas de la chance. Les Québécois ont pris la décision de nationaliser l'électricité. Les Québécois ont construit ce fleuron et aujourd'hui ils en récoltent les bénéfices.

M. le Président, comprenez-moi bien, je ne suis pas en train de dire que ce n'est pas grave si les Québécois ont payé des trop-perçus pendant les années libérales. Au contraire, c'est inacceptable, M. le Président. On doit blâmer le Parti libéral pour cette inaction et on doit s'assurer que ça n'arrivera plus. C'est d'ailleurs ce que notre gouvernement a fait en annonçant qu'à partir de maintenant, s'il y avait des trop-perçus par Hydro-Québec, nous allons les rembourser. Nous sommes un gouvernement à l'écoute de la population et nous défendrons les contribuables québécois.

M. le Président, notre collègue député de La Pinière nous interpelle aujourd'hui sur les trop-perçus d'Hydro-Québec, plus de 1,5 milliard en trop-perçus de 2008 à 2016. J'aimerais rappeler à notre collègue que c'était son parti qui était au pouvoir pendant la majorité de ces années. Notez au passage que le PQ, bien au fait de la situation, lors de son court passage au gouvernement, n'a rien fait de plus que les libéraux. C'est surréaliste d'entendre le député de La Pinière plaider aujourd'hui pour les contribuables alors qu'il était de ce côté de la Chambre pendant quatre ans. Il était un des ministres les plus influents de ce gouvernement et il n'a rien fait à ce moment, il n'a rien dit.

En conclusion, M. le Président, c'est le Parti libéral qui a profité des trop-perçus d'Hydro-Québec pendant qu'il sabrait à coups de milliards dans les programmes sociaux, en éducation et en santé. Pendant que les compteurs tournaient, les libéraux sont restés les bras croisés. Merci, M. le Président

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Mercier. Vous avez une période de 11 minutes.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Donc, j'annonce tout de suite que nous allons appuyer cette motion; pas parce qu'on n'aime pas Hydro-Québec ou qu'on veut le critiquer, mais parce qu'on veut que le gouvernement caquiste respecte son engagement.

Un sondage révélait cette semaine que 92 % de la population québécoise souhaite que les trop-perçus de 1,4 milliard accumulés par Hydro-Québec leur soient remboursés. Le premier ministre tente aujourd'hui par tous les moyens de nous faire croire qu'il ne l'a jamais promis. Alors que le premier ministre était de l'autre côté de la Chambre, il se levait à tous les jours pour vilipender le gouvernement libéral. Il avait même qualifié ces trop-perçus de taxe déguisée et sournoise et même de vol. Sa porte-parole en matière d'énergie de l'époque, la députée de Saint-Hyacinthe, concluait dans les pages de La Presse, et je cite : «Le temps est donc venu de rembourser les Québécois.» Celle-ci avait même déposé une pétition de près de 50 000 noms pour... de gens qui exigeaient un tel remboursement.

La CAQ a fait son pain et son beurre en dénonçant les hausses de tarifs et de taxes. Maintenant au gouvernement, elle trahit la confiance que lui a accordée cette population. Depuis que la CAQ tient les rênes du pouvoir entre ses mains, est-ce qu'elle a oublié les ménages à faibles revenus, les gens de la classe moyenne dans lesquels elle veut mettre beaucoup d'argent dans ses poches?

Il en a rajouté hier en disant que ce n'était pas dans son cadre financier et que, donc, ce n'était pas une promesse électorale. Permettez-moi, M. le Président, de qualifier une telle attitude de tragicomédie, c'est-à-dire qu'on déchire sa chemise quand on est dans l'opposition pour ensuite retourner sa veste une fois qu'on est au pouvoir. Cette attitude alimente encore une fois le cynisme des Québécois pas seulement envers le gouvernement, mais envers toute la classe politique.

• (16 h 30) •

Devant le tollé provoqué par sa désinvolture, le premier ministre est revenu sur sa position hier. Il promet maintenant que 100 % des trop-perçus seront remis aux clients d'Hydro-Québec dans les années suivantes. Il mentionne que plus tard, un jour, dans quelques années, on ne le sait pas, on finira bien par peut-être remettre les 1,5 milliard de trop-perçus par des augmentations de moins en moins grandes et, des fois, même par une diminution. Par quel mécanisme? Quand ça va être fait? Ça, on ne le sait pas. Ça sent l'improvisation.

Je suis satisfaite par contre d'entendre le premier ministre et le ministre de l'Énergie parler d'un remboursement de 100 % des trop-perçus d'Hydro-Québec. D'ailleurs, c'est quelque chose que j'avais proposé et, en fait, c'est tout simplement le strict minimum. La proposition du gouvernement, si elle se concrétise, c'est rembourser aux consommateurs l'argent qu'Hydro-Québec prendra en trop dans le futur. Ça devrait aller de soi. En fait, il s'agit simplement d'exécuter une décision de la Régie de l'énergie, parce que chaque dollar qu'empoche Hydro-Québec au-delà du plafond fixé par la Régie de l'énergie, bien, c'est un dollar de plus qui est facturé sans autorisation.

Malgré l'enjeu... En fait, l'enjeu, oui, des trop-perçus est important, mais ce n'est pas le seul. Même avant d'engranger des sommes en trop, Hydro-Québec se fait aussi accorder de fortes hausses de tarifs. Ça fait des années que notre société d'État est la vache à lait de l'État québécois. Regardons, par exemple, l'année en cours. Selon les calculs de l'Union des consommateurs, sur la base stricte de la croissance du coût du service, les clients domestiques, ça, c'est tout le monde, tout nous autres, bien, on aurait droit à une baisse de 0,5 % de notre tarif, alors que les clients LG, ça, c'est les grosses industries très énergivores, eh bien, elles devraient assumer une juste hausse de 2,6 %. En réalité, ça fait des années qu'il y a une injustice, que c'est beaucoup plus avantageux pour les grandes industries, celles qui ont le tarif LG, que pour les consommateurs. Quand est-ce qu'on va arrêter d'abuser de la confiance des Québécois?

En fait, ce qu'on voit au travers des années, c'est que les tarifs élevés sont devenus une forme de taxe déguisée, une taxe régressive qui affecte davantage les ménages à faibles revenus. C'est simple, moins une personne a de revenus, plus sa facture d'électricité accapare une part plus importante de son budget. Et évidemment, dans la majorité des gens, malheureusement, ces ménages-là vivent dans des appartements qui sont mal isolés, donc ils ont de la difficulté à économiser sur leurs factures d'électricité. Pendant ce temps, les grandes industries négocient des tarifs très avantageux en secret, comme par exemple les alumineries. En fait, les alumineries comme ABI se servent de ces ententes pour, on l'a vu récemment, suspendre leurs paiements quand ils placent leurs employés en lock-out. Les entreprises de données informatiques, parmi lesquelles des serveurs de cryptomonnaie, gaspillent de précieux mégawatts produits par nos rivières harnachées pour faire de la spéculation monétaire.

M. le Président, nous avons fait le choix historique au Québec, et ça a été souligné par certains collègues ici, de miser sur nos ressources abondantes pour offrir une énergie abordable à la population. Hydro-Québec a permis de développer le Québec et assurer une équité sociale, et nous en sommes tous fiers. Mais ce qu'il est important de noter, c'est que ne n'est pas un moyen pour financer le gouvernement. Pour ça, bien, on a des taxes et de l'impôt sur le revenu. Il est temps de mettre un frein à cette logique qui a fait qu'Hydro-Québec est au service des grands patrons industriels et du Conseil du trésor. Hydro-Québec appartient à tout le monde.

Et je finirai là-dessus, le premier ministre a rencontré récemment l'actrice et dramaturge Christine Beaulieu, et, pour faire un clin d'oeil à sa pièce de théâtre, qui connaît actuellement un énorme succès... Moi, je vais aller la voir ce dimanche... en fait, ce samedi, j'espère que... je ne sais pas si le premier ministre est allé la voir, j'invite aussi le ministre de l'Énergie à aller la voir. Et j'ai envie qu'on scande collectivement, tout le monde ensemble : J'aime Hydro, mais pas ses trop-perçus. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Masson.

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour d'intervenir sur la motion du député de La Pinière et ce qu'il a demandé, et je le cite :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec.»

Donc, je ne sais pas c'est quoi, les nouvelles qui sont lues par l'opposition officielle, M. le Président, mais je vous assure que notre formation politique, elle n'a jamais promis de rembourser les 1,4 milliard de trop-perçus par Hydro-Québec sous le gouvernement libéral. Une fois de plus, ça ne sera pas, malheureusement, la dernière... mais les libéraux essaient de nous mettre des mots dans la bouche en affirmant des choses qu'on n'a jamais dites. Ils essaient de semer la confusion. Puis, dans l'esprit de la population, c'est important que les gens, ils comprennent c'est quoi, les fruits, là, pourquoi qu'ils nous font porter cet odieux, ils nous font mettre des mots dans notre bouche qu'on n'a pas mis.

Moi, j'ai des questions pour vous, M. le Président. Est-ce qu'on a dénoncé l'inaction du gouvernement libéral relativement aux trop-perçus par Hydro-Québec lorsqu'on était à l'opposition? La réponse, c'est oui. Est-ce qu'on a demandé à l'ancien gouvernement libéral de rembourser aux Québécois les trop-perçus par Hydro-Québec lorsqu'on était à l'opposition? La réponse, c'est encore oui. Mais est-ce qu'on a promis de rembourser aux Québécois les trop-perçus par Hydro-Québec sous le gouvernement libéral? Bien, la réponse, c'est non, M. le Président. Puis je vais vous expliquer ça.

Notre formation politique, elle a promis... Qu'est-ce qu'elle a promis? C'est ça que vous voulez savoir. Dans le fond, là, on a promis de mettre fin aux façons de faire libérales, puis c'est ce qu'on va faire, M. le Président. Puis, pour démontrer ce que j'affirme, il est important que je vous fasse un petit historique, une mise en contexte de la situation. Premièrement, si on regarde de 2005 à 2013, Hydro-Québec, et Distribution, ainsi qu'Hydro-Québec TransÉnergie, ils ont réalisé des écarts de rendement favorables totalisant plus de 1,3 milliard de dollars. En 2014, la Régie de l'énergie a introduit un mécanisme de traitement des écarts de rendement en vertu des dispositions de la Loi sur la Régie de l'énergie. C'est important qu'on comprenne ça, M. le Président, parce que ce mécanisme, il prévoit de partager à des parts égales les écarts de rendement entre les consommateurs et Hydro-Québec. Pourquoi est-ce que ce mécanisme-là, il existe? Dans le fond, l'objectif du mécanisme, c'est que, d'une part, on veut encourager Hydro-Québec à améliorer sa productivité, puis on veut lui permettre aussi de conserver une partie des efforts qu'elle a faits en gains de productivité dans leur rendement. Puis, d'une autre part, on veut aussi pouvoir redistribuer l'autre partie des gains aux consommateurs. C'est pour ça que le mécanisme a été mis en place. Maintenant, moi, c'est ce que j'appelle un système gagnant-gagnant. Ça fait que, si on peut se rappeler de cette logique-là, on va comprendre la suite.

Ça fait que c'est dans cette perspective-là que, le 13 juin 2014, la Régie de l'énergie a décidé d'initier une procédure en vue de l'établissement d'un mécanisme de réglementation incitative pour assurer la réalisation de gains d'efficience par Hydro-Québec. Ça, c'est très astucieux, M. le Président, parce qu'on ne veut pas toujours être obligés de construire des nouveaux barrages puis des nouvelles éoliennes, puis, tu sais, on ne veut pas toujours dire : Bien, il va falloir qu'on ait plus d'électricité parce que nos demandes... Non, on veut avoir de l'efficacité sur ce qu'on a actuellement. Le mécanisme est en place pour ça.

Depuis la mise en application du mécanisme, par exemple, c'est quoi qu'on a eu comme écarts de... dans les écarts de rendement? Bien, les écarts de rendement positifs chez Hydro-Québec ont totalisé près de 450 millions de dollars. Toutefois, plutôt que rembourser à la clientèle en suivant les ratios établis par la Régie de l'énergie, qu'est-ce que l'ancien gouvernement a fait? Bien, eux autres, là, ils ont décidé que les montants, là, qui étaient utilisés par Hydro-Québec pour favoriser le retour à l'équilibre budgétaire... Ils ont utilisé les trop-perçus pour faire un retour à l'équilibre budgétaire. En effet, alors que le mécanisme de traitement des écarts de rendement établi par la Régie de l'énergie aurait été applicable à compter de 2014 et pris en compte pour un éventuel retour à la clientèle à partir de 2016, l'ancien gouvernement libéral, lui, il a suspendu le mécanisme suite à la mise en oeuvre de certaines dispositions de son discours sur le budget du 4 juin 2014. Ça, c'est des faits, M. le Président. Ça fait que, là, dans le fond, là, pourquoi... Je ne comprends pas pourquoi qu'ils ont fait ça, mais, bon, c'était leur décision, c'est une décision que l'ancien gouvernement a prise. Puis il faut le croire, M. le Président, parce que c'est ça qu'ils ont fait.

• (16 h 40) •

Alors, l'ancien gouvernement, il a fait de la politique avec l'argent qui devait revenir de plein droit aux Québécois pour réaliser l'équilibre budgétaire promis. Puis aujourd'hui le député de La Pinière nous fait une motion parce qu'il voudrait que, là, on puisse faire qu'est-ce qu'eux, ils n'ont pas fait lorsqu'ils étaient au gouvernement. Alors, malgré ça, malgré le fait que la décision a été rendue par la Régie de l'énergie, elle a été prise après que cette dernière ait été consulter des experts, ils ont consulté des groupes, des chercheurs, bien, l'ancien gouvernement libéral, lui, a volontairement omis d'appliquer cette décision. C'est incroyable, hein? C'est vraiment ça qui est arrivé.

Ce qui s'est produit, c'est totalement inacceptable. Puis moi, je peux vous garantir que notre gouvernement, il n'agira pas ainsi, M. le Président. Vous l'avez entendu de la part du ministre de l'Énergie, là, il y a des choses qui s'en viennent, là, croyez-nous sur parole, vous pouvez compter sur nous, notre formation politique, elle va respecter sa promesse de mettre fin aux façons de faire libérales en respectant et en appliquant la décision rendue par la Régie de l'énergie en 2014. On va même bonifier le mécanisme, parce qu'on veut redonner l'entièreté aux citoyens.

Mais malheureusement, M. le Président, ma formation politique, elle a pris le pouvoir juste le 1er octobre 2018. Ça fait qu'il y a un principe dans la vie, c'est qu'on contrôle ce qu'on contrôle. Ça fait qu'il faut comprendre, le 1er octobre 2018, c'est une date à retenir, M. le Président, ce n'est pas nous qui avaient le pouvoir en 2014. Ça, c'est le passé. C'est une ancienne façon de faire. Ça fait qu'on ne peut pas rouvrir les états financiers pour réparer les erreurs commises par les libéraux. Si on doit rouvrir les états financiers du gouvernement à chaque fois qu'on voudrait corriger les erreurs des libéraux, M. le Président, on devrait réécrire l'histoire des 15 dernières années. Ça ne tient pas la route, là. Je pense que mes collègues vont convenir avec moi que ça ne serait vraiment pas productif, puis ça ferait en sorte qu'on ne pourrait pas faire avancer le menu législatif.

Alors, non, malheureusement, on ne va pas rembourser aux Québécois les écarts de rendement perçus par Hydro-Québec sous le gouvernement libéral, mais, tel que mentionné par le premier ministre hier, on va faire en sorte que cette injustice ne se reproduise pas sous un gouvernement caquiste. À l'avenir, on va appliquer le mécanisme de remboursement des trop-perçus établi par la Régie de l'énergie et on va faire en sorte de remettre dans le portefeuille des Québécois l'argent qui leur est dû. Et c'est de cette façon qu'on va respecter notre promesse, M. le Président, point final. C'est un fait, on ne peut pas changer le passé, mais on peut agir pour le futur. Et notre gouvernement va travailler d'arrache-pied, depuis le début de son mandat, pour s'assurer que le futur du Québec soit prospère.

Par ailleurs, M. le Président, les assises les plus importantes de ces actes se concrétiseront suite au dépôt de notre budget demain. Je vous invite à être patient. Encore une seule journée. Si on regarde l'heure, là, à ce moment-ci, là, ça va déjà faire 40 minutes que le discours du budget est en train de se lire si on se reporte 24 heures. Donc, on va pouvoir... À défaut de pouvoir corriger les erreurs du passé, on va prendre acte pour enrichir le Québec au cours des prochaines années et, par le fait même, de manière directe, on va enrichir les Québécois en remettant l'argent dans leur portefeuille. C'est ça qu'on veut faire. C'est ça qu'on s'est engagé à faire, M. le Président. Puis croyez-moi, cette promesse-là, elle va être tenue.

Ceci étant dit, j'aimerais que vous me permettiez de profiter du temps qui m'est alloué aujourd'hui pour vous faire une autre mise en situation. Je vais vous parler du potentiel important de développement économique que représente notre production verte d'électricité en matière d'exportation. Ça, c'est un projet porteur pour notre environnement à tous. C'est planétaire. Les gaz à effet de serre, ils ne sont pas juste par-dessus le Québec, là. Ils sont partout sur notre planète. On vit sur la même planète. Ça fait que la lutte aux changements climatiques, c'est notre priorité. Puis on le sait, c'est inéluctable, malgré les embûches auxquels on doit faire face, nos voisins canadiens et américains, ils ont grandement besoin de l'électricité produite par nos barrages hydroélectriques, pas juste pour faire face à la demande croissante liée à leur croissance économique, mais aussi et surtout pour satisfaire aux attentes de leur situation en matière de lutte aux changements climatiques, qui, tout comme les Québécois... On s'attend que leurs gouvernements respectifs puis leurs entreprises, ils fassent un important virage vert puis qu'ils délaissent progressivement la production d'électricité qui est produite à partir de centrales thermiques, au pétrole, ou au charbon, ou aux centrales au gaz naturel, voire même les centrales nucléaires — on a juste à penser à l'Ontario, l'Ontario, là, c'est le deux tiers de la production totale d'électricité, encore aujourd'hui, qui est faite grâce à ces types d'énergie que je vous ai cités — afin de remplacer cette énergie par de l'énergie propre, notre électricité. C'est ça qu'on veut faire. On veut que notre hydroélectricité remplace leur énergie qui est faite à partir de produits issus du pétrole, entre autres.

D'ailleurs, si on parle d'exportation d'électricité, mes collègues d'en face ainsi que les gens qui nous écoutent présentement, ils savent déjà probablement qu'Hydro-Québec, il dispose de sa propre bourse pour fixer les prix de l'électricité destinée à l'exportation. C'est important de comprendre ça. Ils possèdent leur propre bourse pour fixer les prix de l'électricité destinée à l'exportation. On appelle ça le parquet de transactions. C'est là-dedans que transitent toutes les transactions qui sont faites à l'extérieur du Québec. Bien, imaginez-vous un instant, là, dans une salle remplie d'écrans, où c'est qu'il y a une cinquantaine d'employés d'Hydro-Québec qui sont en train de regarder toutes les données. Bien, c'est ça, c'est grâce à ce savoir-faire-là que notre société d'État, elle génère pas loin de 1 milliard de dollars chaque année en profits, grâce à l'exportation de notre hydroélectricité propre, M. le Président. On peut envisager encore un potentiel énorme d'exportation si tous nos voisins, les États, les provinces décident aussi de faire ce virage-là puis d'utiliser de l'hydroélectricité qui est produite ici, en sol québécois. Mais c'est aussi des entreprises qu'on attire puis qu'on va attirer sur notre territoire québécois parce qu'on a de l'énergie propre, parce que ces entreprises-là, ils recherchent ce type d'énergie là pour satisfaire leurs actionnaires.

Un autre bel exemple d'un nouveau secteur qui se développe rapidement, c'est celui des centres de données qui, on le sait, ils développent... ils consomment énormément d'électricité. On en a déjà des dizaines d'implantés en sol québécois, mais on peut aller en chercher des dizaines d'autres grâce à nos tarifs compétitifs, mais surtout à notre électricité. C'est notre richesse, c'est notre or bleu, M. le Président. Car on ne pense pas toujours à ça, mais, quand on fait une simple recherche, là, sur le Web, puis qu'on regarde, là, c'est qui qui consomme de l'énergie, puis qui n'est pas nécessairement propre ailleurs dans le monde... Mais, au Québec, ce n'est pas le cas, on a de l'énergie propre. Les Internets, là, ils sont sensibles à ça. C'est ça qui fait que plusieurs entreprises de l'étranger, ils veulent venir s'établir ici, au Québec, grâce à notre hydroélectricité. Alors, c'est un aspect qu'ils considèrent, voilà. Les géants, là, si on fait juste nommer quelques géants de l'industrie, là, des gens comme Amazon, Ericsson, Google, ils ont ouvert à Montréal d'importants centres de données. Ces entreprises ont choisi le Québec, car elles sont des grandes consommatrices d'électricité, elles sont également soucieuses de leur empreinte carbone. C'est ça que j'essaie de vous dire depuis tantôt, M. le Président.

J'aimerais aussi vous parler des nouvelles offres de la tarification dynamique qui sont proposées par Hydro-Québec à compter de l'hiver 2019-2020. Ça, c'est ce qu'on appelle le crédit hivernal ainsi que le tarif flexible G, le Flex G. Donc, les clients qui sont intéressés, c'est nouveau, là, M. le Président, ils vont pouvoir s'inscrire sur une base entièrement volontaire. Donc, sur une base volontaire, ils vont pouvoir s'inscrire au nouveau tarif Flex G, de crédit hivernal. Ceux qui ne sont pas intéressés, ils vont pouvoir conserver leur tarif de base sans aucun changement. Les deux offres de tarification dynamique, là, O.K., dynamique, ça implique que ça module, donc ça va permettre aux clients inscrits de réaliser des économies en période hivernale, soit ce qu'on considère, nous, entre le 1er décembre et le 31 mars, s'ils décident de modifier la façon qu'ils consomment l'électricité. Pourquoi qu'on fait ça? Pour avoir des gains de productivité et des gains d'efficacité, parce qu'on veut réduire le pic total de consommation de l'ensemble des Québécois en période de pointe. Donc, c'est quoi, une période de pointe? Bien, c'est entre 6 heures et 9 heures, le matin, ainsi qu'entre 16 heures et 20 heures, dans l'après-midi. Puis ça, ils vont pouvoir le faire pour un maximum de 100 heures par hiver.

M. le Président, 30 secondes? C'est ça? O.K. Parfait. Bien, écoutez, en conclusion, là, on a entendu le message des Québécois. Notre premier ministre, il a demandé au ministre de l'Énergie ainsi qu'au P.D.G. d'Hydro-Québec de regarder différents scénarios. Ça, c'est un fait. Notre volonté est claire, on va retourner l'argent aux Québécois. On va trouver un moyen pour que la clientèle d'Hydro-Québec, elle ne soit plus pénalisée par des écarts de rendement, plus jamais. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de La Pinière pour sa réplique de 10 minutes.

M. Gaétan Barrette (réplique)

M. Barrette : Alors, M. le Président, à défaut d'être drôle, c'est distrayant. Alors, M. le Président, c'est vraiment quelque chose d'absolument, là, extraordinaire, et je vais revenir sur un certain nombre d'éléments.

Alors, d'abord, pour le député de Charlesbourg, c'est un bel effort, c'est un très bel effort de nous reprocher de demander des remboursements. M. le Président, le député de Jonquière l'a démontré d'une façon claire, nette et précise, je ne reprendrai pas ses citations, surtout que le député de Masson l'a admis lui-même, que la CAQ a demandé des remboursements. Alors, quand le député de Charlesbourg se lève et me reproche de parler de remboursements, il reproche à son gouvernement de l'avoir fait dans l'opposition. Il dénigre ses collègues, puis je pense qu'il ne s'en rend même pas compte.

M. le Président, quand le député de Lac-Saint-Jean... oui, Lac-Saint-Jean a parlé, bien, j'ai compris pourquoi il était climatosceptique. M. le Président, là, le député de Rousseau nous a dit, puis c'est vraiment très intéressant, qu'Hydro-Québec avait mauvaise presse à cause des trop-perçus. Hydro-Québec a mauvaise presse à cause de la CAQ. Ça fait quatre ans que vous parlez de trop-perçus. Ce n'est pas nous, là, qui parlons de ça, c'est vous autres qui parlez de ça. Et, quand, M. le Président, et quand, M. le Président, le député de Masson nous dit qu'il ne corrigera pas les erreurs du passé, ce qu'il qualifie d'erreurs, M. le Président, c'est ce qui a généré, entre autres, les surplus dont ils bénéficient aujourd'hui, se vantent et déposeront demain un budget sans évidemment identifier les coûts de système.

• (16 h 50) •

Alors, M. le Président, là, à la CAQ, vous pourriez garder une petite gêne. C'est vous, c'est vous qui avez mis ça sur la table. Nous n'avons pas eu l'intention, puis je ne l'ai pas encore aujourd'hui, d'opposer notre discours à celui de la CAQ. J'oppose la CAQ à la CAQ. J'oppose la CAQ de l'opposition à la CAQ au pouvoir. C'est vous qui avez fait ce discours-là. C'est vous qui avez créé cette situation-là. C'est vous qui êtes responsables de l'état de l'opinion publique aujourd'hui et c'est vous qui ne répondez pas à la population.

Quand j'entends chacun des députés se lever à tour de rôle dire : Nous sommes à l'écoute de la population. Bien, voyons donc! La population, elle a parlé dans un sondage. La population a compris le message de la CAQ dans l'opposition, et la CAQ n'a pas écouté la population, parce que, si elle avait écouté la population, elle aurait fait du remboursement un engagement formel de sa campagne électorale et elle ne l'a pas fait. Elle en parle aujourd'hui, M. le Président, de cette décision-là, parce qu'il y a eu un sondage après avoir été sourd à l'insatisfaction de la population. C'est ça, la réalité. Alors, le député de Charlesbourg peut se lever et être comme son chef, avec beaucoup de sourires et d'effets de toge dire que «les libéraux, c'est ci, c'est ça, gnagna, on va faire ci, on va faire ça», bien, c'est bien plate, là, vous le faites parce qu'il y a eu un sondage. C'est juste pour ça que vous le faites. Puis vous parlez pendant deux heures de temps pour masquer ça. Vous n'avez pas entendu la population. Vous ne l'avez pas écoutée. Vous n'en avez pas fait un engagement et aujourd'hui vous réagissez à un sondage.

Et là, là, j'ai entendu, M. le Président, des tentatives de dissertation sur les écarts de rendement. Bien, oui, on sait ce que c'est, un écart de rendement. On sait tout ça. Mais la réalité, M. le Président, c'est que la population, un, ne le comprend pas et, deux, dans les faits, il n'y a absolument rien qui va démontrer qu'ils auront vu la couleur de cet argent-là dans leurs poches. Je vais prendre un exemple bien simple. Ça, tout le monde va le comprendre. Hydro-Québec Distribution, M. le Président, là, c'est l'électricité qui part des barrages qui se rend aux domiciles des gens, aux entreprises. Hydro-Québec Distribution, ça a des revenus de plus de 12 milliards de dollars. Un congé d'un seul mois dans la prochaine année les rembourserait, et ils verraient, les citoyens, l'argent revenir dans leurs poches. Mieux, M. le Président, mieux, si on leur remboursait cette année ce trop-perçu-là par un congé d'un mois, Hydro-Québec, sur la base des états financiers de l'année dernière, qui devraient se reproduire cette année, il a plu, il a neigé, il y a des barrages, il va avoir de l'électricité, les revenus vont être là, bien, avec 1,5 milliard de moins, Hydro-Québec est encore positif dans son bilan financier. Il fait de l'argent. Tant mieux!

Alors, quand le député de Charlesbourg se lève et fanfaronne, puis je le dis à dessein, en disant : On ne peut pas le faire, c'est bien trop compliqué, bien, non, ce n'est pas compliqué! C'est bien simple. C'est bien simple. Ça ne demande pas de lettre, ça ne demande pas de chèque, ça demande un congé d'un mois. Vous pouvez faire ça. Ce n'est pas compliqué, ça. Oui, oui, vous pourriez mettre dans la lettre du compte d'électricité : Monsieur madame, parce qu'il y a eu des trop-perçus, on vous donne un congé d'un mois. Puis Hydro-Québec va être encore dans le vert. Pas dans le rouge. Dans le noir si vous préférez. Et c'est ça, la réalité.

Alors, à un moment donné, prenez vos responsabilités. Vous ne pouvez pas arrêter... vous ne pouvez pas arriver aujourd'hui et dire : C'est vous autres, vous ne devriez pas parler de ça. Je le répète, on oppose la CAQ d'aujourd'hui à la CAQ de l'opposition. Vous avez tenu un discours, vous vous êtes trahis vous-mêmes et, parce qu'il y a un sondage, vous essayez de vous en sortir par une mécanique qui ne garantit aucunement, aucunement que les citoyens vont voir ça dans leurs poches. Le comble de l'humour aujourd'hui est venu du député de Masson quand il nous a dit... Puis c'est le boutte du boutte, là, le député de Masson nous a dit : Nous autres, on ne veut pas être obligés de construire des barrages. M. le Président, le chef de l'opposition aujourd'hui premier ministre a passé toute sa carrière à parler de nouveaux barrages. Franchement, c'est beau, là, rire du monde, puis c'est le fun, j'ai du fun avec vous autres, j'espère que vous en avez avec moi, mais, quand on parle de cynisme, c'est ça. À un moment donné, là, on peut-u regarder les faits tels qu'ils sont puis prendre la bonne décision? Ça se fait. Vous ne l'avez pas fait et vous choisissez aujourd'hui une solution de coin de table pour satisfaire vos ambitions électoralistes.

Bien, oui, là, demain, vous allez avoir un budget. Vous êtes mieux de ne pas le rater parce qu'avec l'état des finances publiques qu'on vous a laissé, si vous ratez ça, là, hum! je vais en faire, des commentaires, hein, je vais en faire. À matin, là, le président du Conseil du trésor a refusé... Puis j'ai bien vu qu'il était inconfortable. Le député de Lac-Saint-Jean, là, qui nous faisait une dissertation, là, sur les écarts de rendement, je vais vous en faire une, dissertation, moi, sur les coûts de système. Moi, je peux vous dire un chiffre pour chacun des ministères, je peux vous dire, à la lecture d'une seule page, là où vous allez livrer la marchandise ou non. Les coûts de système, là, contrairement à ce que le président du Conseil du trésor a dit, hein, il les sait, parce qu'il ne peut pas établir un budget sans le savoir. Puis aujourd'hui, là, il a refusé de les divulguer. Demain. Hein, ça, c'est la réalité.

Alors, c'est exactement ça, M. le Président, la CAQ. Quand on est dans l'opposition, on veut, on veut, on veut. Rembourser... Écoutez, M. le Président, on en faisait des pancartes : Libéraux, remboursez! Le député de Charlesbourg : Pourquoi faire vous nous demandez de rembourser, nous autres, on n'a pas... Bien, voyons donc! C'est vous autres qui avez parlé de ça. C'est n'importe quoi, vraiment n'importe quoi.

Alors, la réalité, M. le Président, elle est très simple, très, très simple, hein? La CAQ a choisi d'écouter un sondage. La population va s'en rappeler. La population ne sera pas contente. Et c'est sûr que tous les partis d'opposition vont vous suivre à la trace, vont vouloir voir la démonstration du vrai argent dans les vraies poches des citoyens. Puis on ne le verra pas. Moi, je vois déjà, déjà, déjà, maintenant, là, pendant les trois prochaines années : Ah oui! Bien, nous autres, on aurait augmenté de 3 % les tarifs d'électricité, puis finalement c'est limité à l'inflation, ça va être 1,7 %. Bien, voilà, on vient de rembourser x pour cent. Je le vois, là, c'est tellement simple, cette affaire-là, à faire. Cet écran de fumée là, là, c'est tellement facile à faire. C'est ça qui va se passer, si vous avez du guts, là, vraiment, là... Parce que, là, ce n'est pas compliqué. Le député de Charlesbourg nous disait que lui, il connaissait ça, les affaires, il connaît ça. Parfait, hein, c'est comme à l'hôtel : réservez trois nuits, vous en avez une quatrième gratuite. Donnez un mois de congé, sur la facture d'Hydro-Québec, aux citoyens du Québec et puis vous allez rembourser la totalité du 1,4 milliard dans Hydro-Québec Distribution. Faites ça, c'est simple! Simple, simple, simple, hein, c'est bien simple. À la fin, là, vous allez dire : Oui, mais là Hydro-Québec Distribution va être perdant. Oui, mais Hydro-Québec au total va demeurer gagnant.

Vous bénéficiez de ce que l'on a fait. Ce n'étaient pas les erreurs du passé. Vous ne le reconnaissez pas, tout comme vous ne reconnaissez pas ne pas avoir entendu la population mais avoir entendu un sondage. À votre place...

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de La Pinière.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de M. le député de La Pinière, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement caquiste de respecter son engagement de rembourser 1,4 milliard de dollars aux clients d'Hydro-Québec.»

 Cette motion est-elle adoptée? Oui, Mme la députée de Verdun.

Mme Melançon : Je demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Picard) : Oui, M. le leader.

M. Schneeberger : M. le Président, alors je demanderais de reporter le vote à demain, jeudi, lors de la prochaine période des affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Alors, conformément à la demande du leader du gouvernement, le vote sur la motion de M. le député de La Pinière sera tenu à la période des affaires courantes de demain. M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, je vous demande d'appeler l'article 5 du feuilleton.

Projet de loi n° 9

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Picard) : Oui. À l'article 5 du feuilleton, M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion propose l'adoption du principe du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.

Y a-t-il des interventions? M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de vous voir, M. le Président, pour vous parler de l'adoption du principe du projet de loi n° 9 que j'ai déposé, la Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes. Un nouveau pas dans la bonne direction sera franchi aujourd'hui, Mme la Présidente — je vous salue.

Je souhaite remercier les différentes organisations et les élus qui ont participé aux consultations particulières sur le projet de loi au cours des dernières semaines. Votre contribution témoigne de l'importance que vous accordez à l'avenir des personnes immigrantes qui choisissent de s'établir au Québec, et je partage cette priorité. Le gouvernement également partage cette priorité.

• (17 heures) •

D'entrée de jeu, un consensus émane des divers échanges tenus lors de cette commission : le système actuel d'immigration est déficient. Regardons, notamment, les taux de chômage et de surqualification, qui demeurent encore élevés chez les nouveaux arrivants. Le système doit être réformé afin d'assurer une meilleure intégration des personnes immigrantes, et c'est ce que nous faisons avec le projet de loi n° 9. Avec le projet de loi n° 9, nous venons mettre en place les assises légales pour y parvenir. Nous prévoyons, notamment, renforcer l'action du Québec en matière de francisation, mettre en place un parcours personnalisé axé sur les besoins réels des nouveaux arrivants afin de bien planifier leur arrivée, mieux accompagner les entreprises qui font appel à des travailleurs issus de l'immigration pour favoriser un établissement durable en emploi et en société, mieux coordonner les services offerts par les différents partenaires du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion pour qu'ils soient bien connus et facilement accessibles et surtout, surtout mieux sélectionner les candidats à l'immigration en arrimant leurs profils aux besoins du marché du travail dans toutes les régions du Québec, dans toutes les entreprises du Québec.

La pénurie de main-d'oeuvre existe et elle concerne toutes les régions du Québec. Nous l'avons entendu durant la dernière commission parlementaire, durant les auditions particulières que nous avons tenues les dernières semaines, elle afflige bon nombre d'entreprises, cette pénurie de main-d'oeuvre, qu'on parle de restaurants, d'hôtels, ou de PME, ou de plus grandes entreprises également sur l'ensemble du territoire québécois. Certaines doivent abandonner des projets et refuser de nouveaux contrats, alors que d'autres doivent raccourcir leurs horaires. Ça, ça signifie, Mme la Présidente, qu'on freine le développement économique du Québec, et il faut que ça cesse, parce que c'est nécessaire que les entreprises des différentes régions, les municipalités puissent compter sur des gens pour assurer la vitalité du territoire québécois dans toutes les régions du Québec, et c'est ce que fait le projet de loi n° 9, d'autant plus qu'on se retrouve avec une situation qui a été léguée par le précédent gouvernement, qui fait en sorte que la pénurie de main-d'oeuvre n'a pas été comblée, et il faut y répondre, et on s'y attarde sérieusement.

L'immigration fait partie des solutions au manque de main-d'oeuvre. C'est pourquoi nous voulons passer à l'utilisation du système basé sur la déclaration d'intérêt le plus rapidement possible. Ce dernier, le système de déclaration d'intérêt, nous permettra, à terme, de mieux arrimer le profil des immigrants avec les besoins du marché du travail tout en réduisant le délai de traitement des dossiers de 36 mois à six mois.

En ce qui concerne les dossiers des personnes immigrantes ayant présenté leurs demandes alors qu'elles se trouvaient sur le territoire québécois, plusieurs intervenants ont émis leur volonté que ces derniers soient traités de façon prioritaire, puisqu'il est possible que ces personnes soient toujours au Québec et qu'elles occupent un emploi. C'est précisément ce que nous nous sommes engagés à faire dès l'adoption du projet de loi. Nous avons d'ailleurs déposé une motion en ce sens le 28 février dernier. Et j'invite, Mme la Présidente, comme je l'ai dit à de multiples reprises en cette Chambre, et à chaque fois que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne me questionnait sur le sujet, à inviter les gens à déclarer leur intérêt dans le nouveau système Arrima de façon à faire en sorte que les gens soient sélectionnés maintenant en fonction de leurs profils et en fonction des besoins du marché du travail qu'on a ici, au Québec.

Le projet de loi n° 9 prévoit également la réintroduction d'un pouvoir historique qui a été abandonné par le précédent gouvernement libéral lors de l'adoption du projet de loi n° 77 en 2016. Il s'agit d'un pouvoir habilitant permettant au gouvernement du Québec de déterminer, par règlement, des conditions grevant la résidence permanente des personnes sélectionnées. Ce pouvoir nous permettra, par exemple, de favoriser la sélection de candidats dont le profil socioprofessionnel et/ou le projet d'affaires répond aux besoins régionaux ou sectoriels de main-d'oeuvre ou bien mène à l'établissement d'entreprises en région. C'est aussi un véhicule intéressant qui pourrait nous permettre d'assurer la francisation et l'apprentissage des valeurs québécoises par les personnes immigrantes et d'en favoriser une intégration réussie.

Mme la Présidente, vous me permettrez de dire également que c'est la première fois de ma vie de parlementaire et, je pense, de ma vie en général que je constate qu'un gouvernement du Québec qui a précédé le nôtre a abandonné un pouvoir qui était inscrit dans nos lois.

Et vous me permettrez de faire un aparté, Mme la Présidente, à l'effet que, lorsqu'on est élu au Québec, ici, à l'Assemblée nationale, peu importe la couleur de notre formation politique, la priorité sera toujours de défendre les intérêts du Québec et d'assurer le maximum de pouvoirs pour la nation québécoise et le maximum de pouvoirs pour ce Parlement et le gouvernement des Québécois et des Québécoises. Et c'est ce que j'ai constaté à mon arrivée au ministère de l'Immigration, c'est que le précédent gouvernement avait abdiqué un pouvoir qui avait été chèrement acquis, notamment suite à l'échec de l'accord du lac Meech. Alors, ici même, Mme la Présidente, en 1990, il y a un certain premier ministre libéral, qui s'appelait Robert Bourassa, qui a dit, du siège à côté du mien, que le Québec est une société distincte et doit pouvoir assurer son épanouissement, Mme la Présidente. Et vous pouvez être certains que notre formation politique va toujours travailler en ce sens-là et qu'elle va toujours lutter contre des formations politiques qui voudraient réduire le pouvoir, le poids du Québec dans la fédération canadienne. Jamais nous ne tolérerons un tel comportement, et ce qui a été fait en 2016 est totalement inadmissible et inacceptable.

Et honnêtement, Mme la Présidente, c'est pour ça, notamment, que je réintroduis le pouvoir associé à la résidence permanente pour s'assurer que, lorsque le Québec a la juridiction pour sélectionner son immigration économique, elle puisse le faire tout au long du prolongement des compétences du Québec. C'est la doctrine que nous avons en matière de relations internationales. Tout le monde s'en réclame. Sous le précédent gouvernement, la députée de l'Acadie, alors qu'elle était ministre des Relations internationales, à l'occasion du 50e anniversaire du ministère des Relations internationales, nous disait : La doctrine Gérin-Lajoie, qui avait été instaurée par feu M. Paul Gérin-Lajoie, qui faisait en sorte que le Québec à l'international exerce ses compétences dans le prolongement de son champ de compétence, bien, c'est la même optique que nous avons relativement aux compétences internes du gouvernement du Québec à l'intérieur de la fédération canadienne. Et là-dessus, Mme la Présidente, je serai intraitable, parce que, lorsqu'il est question de défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises à l'intérieur de la fédération canadienne, il n'y a aucun parti qui peut justifier, de quelconque façon que ce soit, de céder certains pouvoirs, d'abandonner certains pouvoirs et d'abdiquer certains pouvoirs comme cela a été fait au cours des dernières années. Et, honnêtement, j'ai bien hâte de pouvoir réintroduire ce pouvoir-là dans le projet de loi n° 9 comme nous le faisons.

Alors, Mme la Présidente, notre objectif est clair, c'est de mieux sélectionner les personnes immigrantes et leur offrir la possibilité d'occuper un emploi qui correspond réellement à leurs compétences et à leurs aspirations. Il n'est pas respectueux d'accueillir au Québec des personnes qui ne réussissent pas à occuper un emploi dans leurs domaines de formation. Nous voulons au contraire que les personnes immigrantes sentent qu'elles sont véritablement partie prenante de la société québécoise. Le temps des déceptions est derrière nous et doit être derrière nous, Mme la Présidente, parce que les choses vont changer au Québec et les choses vont changer pour les gens qui choisissent d'immigrer au Québec.

En terminant, Mme la Présidente, je souhaite saluer et remercier encore une fois tous les participants qui, au cours des auditions particulières de la commission parlementaire des relations avec les citoyens, ont fait entendre leur voix, et ce, d'une manière constructive. Bien que nos visions puissent différer par moments, je suis persuadé que nous partageons un objectif commun et qui est de trouver des solutions concrètes et durables afin que les personnes immigrantes puissent réaliser leurs projets de vie au Québec tout en contribuant à la société québécoise. L'immigration est une richesse pour le Québec, et, cette richesse, on doit et on va en prendre soin. Le projet de loi n° 9 va nous permettre de réaliser cet engagement.

Une fois de plus, Mme la Présidente, j'invite les partis d'opposition à la collaboration nécessaire pour faire adopter rapidement le projet de loi n° 9 parce qu'il en va de la réforme du système d'immigration et il en va également de permettre de s'assurer que les personnes qui vont venir au Québec puissent se développer à la hauteur de leur plein potentiel. Alors, Mme la Présidente, au cours des prochaines semaines, nous pourrons procéder à l'étude détaillée et nous pourrons tous ensemble s'assurer que le ministère de l'Immigration dispose maintenant d'un pouvoir de coordination, qu'il puisse développer des ressources à partir de l'étranger pour assurer l'intégration, la francisation des personnes immigrantes et qu'il puisse également, à partir du moment où les personnes immigrantes sont sur le territoire québécois, développer des outils et un parcours personnalisés pour s'assurer que les personnes immigrantes qui sont sur le territoire québécois puissent s'intégrer dans l'ensemble de nos collectivités sur l'ensemble du territoire québécois, et notamment en assurant une régionalisation, parce que, ça, Mme la Présidente, c'est une des difficultés qui est présentement au niveau du portrait de l'immigration. Il faut s'assurer d'avoir une immigration dans toutes les régions du Québec, parce que les besoins de main-d'oeuvre, les besoins des entreprises sont présents dans toutes les régions, et il faut également travailler avec les communautés, avec les collectivités de façon à s'assurer à ce qu'elles aient les outils pour accueillir ces personnes immigrantes. C'est ça au Québec, Mme la Présidente : on est ouverts, on est accueillants, on va déployer les ressources pour s'assurer d'avoir un accueil respectueux pour le choix courageux que les personnes immigrantes font de choisir le Québec.

Alors, Mme la Présidente, j'invite les partis d'opposition à collaborer avec nous pour une adoption rapide du projet de loi de façon à faire en sorte de faire un pas en avant dans le système d'immigration et d'enfin pouvoir avancer au Québec et de pouvoir réformer le système au bénéfice des personnes immigrantes. Je vous remercie.

• (17 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je suis prête à reconnaître un membre de l'opposition officielle. Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, la parole est à vous.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci infiniment, Mme la Présidente. Alors, je me lève ici, en cette Chambre, pour présenter nos perspectives par rapport au projet de loi n° 9.

D'entrée de jeu, j'aimerais commencer en disant que, dans les années déjà... on parle de 1992, 1993, 1994, lorsque je rentrais à l'université et que je faisais partie de différents groupes qui prenaient des positions publiques, on parlait, à l'époque, de pénurie de main-d'oeuvre. La question des pénuries de main-d'oeuvre, elle n'est certainement pas nouvelle, et, s'il y a quelqu'un en cette Chambre qui était préoccupé par cet enjeu, c'est bien moi. Et dans les dernières années, lorsque nous étions au gouvernement — lorsque j'entends mon collègue en face, le ministre de l'Immigration, dire que personne ne s'en préoccupait et que c'est arrivé par hasard... absolument pas — il y a eu de multiples initiatives qui ont été mises de l'avant justement pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre.

Quelques exemples. La pénurie de main-d'oeuvre ne se réglera pas seulement avec l'immigration, elle peut se régler avec l'automatisation, avec l'innovation, et c'est la raison pour laquelle, dans le dernier gouvernement, nous avons investi de manière significative, voire historique dans les domaines de la robotisation et de l'automatisation, notamment avec le manufacturier innovant, avec des résultats très tangibles. Alors, lorsque j'entends le discours du ministre de l'Immigration arriver puis dire : Il n'y a rien qui a été fait, c'est faux. Il y avait même eu tout un forum qui avait été organisé, le forum sur la main-d'oeuvre, justement pour stimuler les solutions par rapport à la pénurie de main-d'oeuvre. Alors, il faut quand même prendre un peu de perspective puis reconnaître le travail qui a été effectué.

Alors, Mme la Présidente, je remercie le ministre de l'Immigration pour sa présentation. Dans ses commentaires initialement, il dit qu'il souhaite plus de régionalisation, plus d'intégration. Nous en sommes, nous sommes d'accord avec l'objectif de dire qu'on veut plus de régionalisation, plus de francisation, plus d'intégration dans les différentes régions du Québec. Cela dit, certainement pas de la manière dont on a travaillé depuis que nous sommes revenus en Chambre avec le dépôt du projet de loi n° 9.

Déjà, on constate au sein de la formation politique qu'est la CAQ un manque de compréhension de ce que c'est que le processus d'immigration. Et, à preuve, j'aimerais quand même revenir un peu en arrière sur ce qu'on disait en campagne électorale, parce que ça témoigne du manque de connaissances qui existe au sein du gouvernement quant à l'immigration.

Alors, quand on avait demandé au premier ministre actuel, qui était alors en campagne électorale, comment l'immigration au Québec et au Canada était réellement gérée, il a dit : C'est un peu flou. Le chef caquiste, qui voulait réduire le nombre d'immigrants dans la province, a été incapable de décrire avec précision le fonctionnement du système actuellement en place. Au cours des débats des chefs même, le premier ministre a évoqué la possibilité d'expulser des gens qui ne sont pas encore citoyens québécois si ces derniers ne réussissent pas des tests de valeurs et des tests de français après trois années dans la province. Or, le statut de citoyen, au Québec, n'existe pas. On a alors interrogé le premier ministre, et sa réponse a été : Bien, on regarde actuellement, il y a des personnes qui ont besoin peut-être d'une enquête, et puis, quand c'est la sélection économique, on regarde les qualifications pour voir si ça répond aux besoins. Quand ils sont au Québec, ça donne des points de parler français. C'est un peu flou, mais c'est à peu près ça. Voilà comment répond le premier ministre à des questions qui sont quand même assez fondamentales lorsque l'on décide de faire des politiques publiques. Comment devient-on citoyen? Encore une fois, c'est un peu flou, et, de manière générale, on est avec des pourcentages et puis on va vous revenir sur la question. Alors, lorsque l'on parle, en campagne électorale, comme ça sur un enjeu aussi important, on se serait attendus, avec tous les commentaires que la Coalition avenir Québec a reçus pendant cette campagne, qu'ils arrivent... comme gouvernement, qu'ils soient imprégnés du fait qu'il y a des enjeux importants qu'ils ne maîtrisent pas et, lorsqu'ils déposent un projet de loi, que ce projet de loi soit ficelé, que ce projet de loi soit maîtrisé et qu'ils sachent exactement où ils s'en vont. Mais, non, Mme la Présidente, ce n'est pas ce que nous avons observé.

Alors, ce qui s'est produit, c'est que nous avons eu un dépôt du projet de loi n° 9. Et, dès le dépôt du projet de loi n° 9, Mme la Présidente, nous avons dit quoi? Nous avons dit que ce projet était antiéconomique, qu'il n'était pas très humain par rapport aux gens qui sont touchés par ça, qu'il ne répondait pas aux besoins, même si, et je dois le reconnaître, il y a des éléments avec lesquels nous sommes d'accord. Mais, dans une politique plus divisive qui est menée par le ministre de l'Immigration, on refuse de reconnaître qu'il y a des enjeux majeurs dans le projet de loi qui a été déposé.

Au moment même du projet de loi, nous sommes allés présenter nos perspectives, nous avons dit que faire en sorte d'éliminer les 18 000 dossiers n'était pas une solution acceptable, nous avons dit qu'accoler une condition à la résidence permanente n'était pas acceptable. Mais tout de suite, au moment même de présenter notre perspective, on a fait un point de presse, parce que quelques jours... premier jour, deuxième jour, troisième jour, plus tard, il y avait déjà des gens qui commençaient à recevoir des messages et qui commençaient à nous écrire. Je suis députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, Mme la Présidente. Comme députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, le vendredi, quand je suis rentrée dans mon bureau de comté, j'avais déjà des dizaines de messages de personnes qui me disaient que ce projet de loi allait détruire les projets qu'ils avaient mis de l'avant, qu'ils ne comprenaient pas la position du gouvernement. On a voulu se renseigner. Ma collègue, ici présente, de Bourassa-Sauvé m'a même appelée le jour même. Je me souviens encore, elle a appelé et elle m'a dit : Il y a vraiment quelque chose qui se passe, on a des messages qui continuent de rentrer parce que les gens sont très craintifs par rapport au projet de loi qui est déposé.

C'est la raison pour laquelle, le dimanche, avec différents acteurs, nous nous sommes présentés et nous avons dit : Il faut traiter l'ensemble des 18 000 dossiers. Non seulement nous avons dit qu'il fallait traiter l'ensemble des 18 000 dossiers, mais on a demandé à ce que le gouvernement regarde bien ce qu'il était en train d'être proposé et réagisse rapidement. Ce qu'on nous a dit : Nous allons envoyer des communications, nous allons envoyer un courriel. Bien, les gens, ils ont reçu le courriel, Mme la Présidente. Ils l'ont reçu, le courriel, et, honnêtement, ce qui y était écrit, c'était d'une manière cavalière, tant et si bien que même le ministre de l'Immigration lui-même a reconnu qu'il devrait refaire des communications, envoyer, ma foi, peut-être un second courriel, peut-être un appel, parce qu'il voyait bien qu'ils étaient en train de l'échapper par rapport aux 18 000 dossiers. Mais, au-delà de ça, il y a eu beaucoup de cafouillage au niveau de la notion de ces 18 000 dossiers, et j'y reviendrai par la suite.

Alors, on nous dépose ce projet de loi, et ce qui est en filigrane dans ce projet de loi là, c'est toute la question des seuils d'immigration, les fameux seuils d'immigration. On veut ramener les seuils à 40 000. Pourquoi 40 000? Personne ne le sait, personne n'est capable d'expliquer la raison pour laquelle on passe de 52 000 à 40 000, si ce n'est qu'on a tiré ce chiffre d'un chapeau, si ce n'est que, dès le départ, avec la CAQ, ils avaient décidé que le chiffre était de 40 000. Il y a des années de ça, mais ce n'est pas grave. On n'a pas besoin de s'adapter à des réalités actuelles. On utilise le 40 000 de manière totalement arbitraire. Il y a une étude qui est sortie, l'IRIS, parce que le slogan de la campagne par rapport à ça, c'était de dire : On va en prendre moins pour en prendre soin. Merci, Mme la Présidente, de le mentionner, c'est apprécié. On va en prendre moins mais en prendre soin. On constate que ça n'a rien à voir, les deux ne sont même pas liés. Si on fait des recherches scientifiques, le rapport de l'IRIS démontre bien qu'il n'y a pas de lien de cause à effet. Dans le fond, encore une fois, on prend des décisions sur un coin de table, on sort des chiffres sur un coin de table et on pense que c'est comme ça qu'on devrait faire des politiques publiques. Je le répète à des gens. Vous savez, j'ai étudié en génie. Je répète souvent à des gens qu'on devrait toujours baser nos positions et nos idées sur des faits, sur des chiffres, sur des éléments qui sont avérés, pas des sentiments puis des impressions. Parce que, Mme la Présidente, vous en avez, des sentiments puis des impressions, moi aussi, mais fort heureusement, de manière générale, on ne prend pas des décisions que basé là-dessus, parce que, sinon, on induit la population en erreur.

Alors, dans le chiffre de 40 000, qui est le seuil qui a été proposé, j'aimerais mentionner deux éléments qui m'apparaissent essentiels. 40 000 est tellement un chiffre arbitraire qu'il y a trois catégories pour les seuils d'immigration : immigration économique, immigration avec le regroupement familial et l'immigration en matière de réfugiés.

• (17 h 20) •

Initialement, on nous a dit : Bien, on va descendre à 40 000, mais ça va être dans les trois catégories, de manière proportionnelle. Pourquoi proportionnelle, sur quelle base? Est-ce qu'il y en a un qui a une rétention meilleure que l'autre? Ça, on ne le sait pas. Mais on va le faire de manière proportionnelle. Puis, à un moment donné, au gouvernement, quelqu'un s'est rendu compte que, bien, dans le fond, il y a deux catégories qui ne sont pas sous notre contrôle, dans le fond, il y a deux catégories qui relèvent du fédéral. Zut! Que faisons-nous alors? Au lieu de se dire : Bon, bien, la catégorie économique, on sait qu'elle est importante, on est en pénurie de main-d'oeuvre, etc., on va vraiment se concentrer là-dessus, ils se disent : Bien non, on va pénaliser le Québec deux fois. On va pénaliser le Québec en disant : On va réduire de manière arbitraire le chiffre, premièrement, sans donnée, sans expert, sans science, on le réduit, puis, en plus, parce qu'on n'est pas capables de négocier avec le fédéral, on va imposer une réduction, dans la catégorie économique, équivalente à ce que l'on aurait aimé faire du côté des réfugiés et du côté du regroupement familial. Finalement, on s'est dit : Dans le fond, on va juste maintenir le 40 000 puis on va voir comment ça va fonctionner.

Hier, Mme la Présidente, j'étais en Chambre, je me suis levée pour poser la question suivante au ministre de l'Immigration : Avez-vous une entente avec le fédéral pour garantir les chiffres par rapport au regroupement familial, les chiffres par rapport aux réfugiés? Je suis quand même habituée maintenant aux non-réponses de mon collègue d'en face. Évidemment, je n'en ai pas eu, je n'en ai pas eu. Il n'y a pas d'entente. On ne sait pas où on s'en va. Dans le fond, on ne sait pas où on s'en va, on a juste des chiffres, le 40 000, puis tout le reste ne compte pas, c'est l'obsession de l'atteinte de ce chiffre-là qui prime. Et c'est véritablement ça, l'enjeu. C'est véritablement ça, l'enjeu, dans la manière de faire les politiques publiques.

On a entendu à plusieurs reprises, et là je peux même le citer, on a entendu à plusieurs reprises le premier ministre dire : On a dépassé notre capacité d'intégration — ça, c'est une opinion, une impression, un sentiment, pas des faits — que cela ne donne pas de bons résultats — encore une fois, une opinion — on perd 26 % des gens qui viennent au Québec. Ça, ce n'est même plus une opinion, c'est juste faux, c'est juste faux. Au Québec, le taux de rétention est environ à 84 %. Il n'a jamais été à 74 %, comme ça a été maintenu, et répété, et répété ad nauseam en campagne, des chiffres qui sont inexacts. Pourquoi? Parce qu'on les trouve bons puis on pense que ça justifie les approches que l'on met de l'avant. La fin justifie les moyens. Mais c'est absurde que d'utiliser ces chiffres, qui n'ont pas de valeur scientifique. Il y a 15 % de chômage. Ça aussi, je l'ai entendu. Bon, d'abord, il n'y a pas 15 % de chômage. Même quand vous prenez les zéro à cinq ans en immigration, il n'y a pas 15 % de chômage. Pourtant, c'est ces chiffres-là qui ont mis de l'avant pour proposer des politiques publiques. Ça n'a aucun sens. Et je pense que, si on veut pouvoir améliorer les choses, parce que, dans le fond, on est, ici, des parlementaires puis nous voulons amener un progrès dans la société, on veut faire avancer les choses... je pense que, fondamentalement, on doit prendre un peu de recul puis se dire : Voilà la manière dont on souhaite travailler, voilà la manière dont on souhaite avancer, et cette manière-là doit faire en sorte qu'on se base minimalement sur les mêmes informations.

Un autre exemple de ça, Mme la Présidente, c'est la question que j'ai posée aujourd'hui au ministre de l'Immigration : Pourquoi ne pas partager la provenance des gens qui vont venir s'établir sur le territoire québécois? Pourquoi ne pas partager cette information, quand elle a été partagée en 2011, en 2012, en 2013, en 2014, en 2015, en 2016, en 2017, en 2018? Peu importent les gouvernements, elle a toujours été disponible. Pourquoi ne pas le faire? Pourquoi ce manque de transparence? Il n'y a pas de raison, sinon qu'on semble manquer d'assurance par rapport à ce que l'on fait. Mais c'est sûr qu'on manque d'assurance par rapport à ce qu'on fait lorsqu'on va de l'avant de manière précipitée et de manière improvisée. Alors, ce que je souhaite dans l'étude du projet de loi, parce qu'on va regarder le projet de loi plus détaillé par la suite, que l'on puisse justement rentrer dans le fond des choses, que l'on puisse justement discuter mais de manière constructive.

Mme la Présidente, dans la question du projet de loi n° 9, un des éléments les plus épineux, c'est, bien sûr, celui qui touche les 18 000 dossiers. Pourquoi il est épineux? Parce que je pense que le gouvernement n'a pas pris la pleine mesure de ce qu'il avançait lorsqu'il a décidé de déposer son projet de loi.

Premièrement, laissez-moi revenir sur le fait qu'il y a 18 000 dossiers. Pourquoi existe-t-il un inventaire? En fait, depuis 2011, il existe... même avant 2011. Il a toujours existé un inventaire de dossiers, et j'utilise le mot «inventaire» sachant fort bien que l'on parle de gens ici, qu'on ne parle pas simplement de dossiers, mais on parle de gens qui sont touchés par ça, des familles, des hommes, des femmes, des enfants qui sont touchés par ça. Le terme qu'on utilise, c'est un terme un peu bureaucratique, de dire «inventaire», mais c'est le terme qui est utilisé, et ces inventaires-là étaient de l'ordre de 95 000 en 2011. À partir de 2011, ces inventaires ont diminué en même temps qu'on avait de nouveaux dossiers qui étaient traités. Et, année après année, ça a diminué jusqu'à atteindre 18 000 dossiers l'année dernière. J'aimerais mentionner qu'en 2018 c'est 20 000 dossiers qui ont été traités. Donc, il y avait plus de 40 000 dossiers, à l'époque, que nous avions... enfin, 40 000 dossiers environ qu'il y avait l'année précédente. Pourquoi je vous dis ça? C'est pour vous dire qu'à l'intérieur du ministère ils avaient parfaitement la capacité de traiter l'ensemble des 18 000 dossiers. Alors, on nous a dit : Ces 18 000 dossiers, ma foi, ça va être difficile de les traiter. Ça va prendre du temps, ça va prendre trois ans, deux ans, enfin, on a sorti toutes sortes de chiffres, évidemment, basés sur des opinions, des sentiments, des impressions, pas basés sur les faits. Mais, quand on est allés regarder, on a constaté que le ministère était capable de procéder et d'aller de l'avant. Alors, on se retrouve avec le 18 000, et le ministre de l'Immigration a dit : Bien là, j'ai un legs devant moi, je ne savais pas que j'aurais eu ce legs-là, je suis vraiment surpris, étonné. Attendez, les chiffres, là, ils sont disponibles année après année, là. Peu importe le côté de la Chambre dans lequel tu te retrouves, tu sais très bien que celui qui suit le dossier de l'immigration voit le chiffre d'inventaire, c'est un chiffre qui est public. On n'a qu'à aller sur Google, ce n'est pas très compliqué, on n'a qu'à aller sur Google pour trouver ces informations. Ce n'était pas la mer à boire. Alors, ils le découvrent. Bien, de deux choses l'une : tu le découvres parce que tu n'as pas suivi le dossier pendant toutes ces années-là, mais, si tu n'as pas suivi tes dossiers pendant toutes ces années-là, comment est-ce que tu peux arriver avec des politiques publiques importantes, un projet de loi aussi important sans avoir la maîtrise de ces chiffres-là? C'est particulièrement inquiétant.

Alors, on se retrouve, du jour au lendemain, à dire : 18 000 dossiers. Je pense sincèrement que le gouvernement ne pensait pas qu'il y avait des gens qui étaient sur le territoire québécois quand ils ont pris cette décision-là, ne pensait pas qu'il allait y avoir une réaction aussi vive, a complètement sous-estimé l'impact tant humain qu'économique. Et là nous avons eu des gens pour s'exprimer, et ce n'était pas l'opposition, ce n'était pas l'opposition qui s'exprimait, c'étaient des gens, des citoyens. Alors, les mots utilisés : «On se sent trahis», confient des candidats à l'immigration travaillant déjà au Québec. «Trahison, abandon, traitement inhumain». Ce n'est pas l'opposition qui dit ça, hein, ce sont des gens, des candidats. «J'ai fait tout comme il faut, je travaille, je paie des impôts, je suis les règles, j'ai appris le français, je me suis intégrée, mais on me dit maintenant de tout recommencer», déplore, à la voix tremblante, Fernanda Pérez Gay Juárez. Âgée de 30 ans, cette docteure en neurosciences à l'Université McGill a quitté le Mexique en 2013 pour terminer ses études à Montréal. Après avoir profité d'un permis d'études, elle a déposé une demande de certificat de sélection en 2018. Jeudi, vers 13 heures, un courriel provenant du ministère de l'Immigration l'a informée de la suspension du traitement de son dossier jusqu'à ce que les travaux parlementaires soient terminés. Mme la Présidente, le message est le suivant : «Le ministère...» Elle ouvre le document et se dit : Ah! j'ai peut-être une réponse. Elle ouvre le document et elle lit : «Le ministère vous informe qu'en raison du dépôt, à l'Assemblée nationale, du projet de loi visant à accroître la prospérité — puis je vous épargne le nom du projet de loi, qui est extrêmement long — il cesse de rendre des décisions dans le cadre du Programme régulier de travailleurs qualifiés, et ce, jusqu'à ce que les travaux parlementaires soient terminés.»

Je pense que le ministre de l'Immigration, au premier chef, ne prend pas la pleine mesure de ce que ça veut dire que de passer à travers ce processus-là. Vous savez, immigrer, c'est un processus qui est complexe, prend du temps, tu dois décider de le faire, tu dois engager des procédures. Il y a un accompagnement aussi. Tu dis que tu quittes ton pays. Et, en général, les gens quittent leur pays pas parce qu'ils y sont bien puis qu'ils y sont heureux, les gens quittent leur pays parce qu'ils veulent un meilleur avenir, les gens quittent leur pays parce qu'ils n'ont pas le choix, pour des raisons politiques, comme ça a été le cas pour mes parents. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles on quitte son pays, mais le processus est long, difficile, ardu. Et de se faire balancer en plein visage un courriel de la sorte témoigne de l'incompréhension de ce que vivent les personnes qui sont touchées par ça.

Mais on est gentil, au ministère de l'Immigration, on écrit : «Rappelons que vous pouvez créer un compte dans Arrima et déposer gratuitement et en tout temps une déclaration d'intérêt.» Mais ça, c'est sympathique quand même, hein?

• (17 h 30) •

Alors, ils peuvent déposer une déclaration d'intérêt, et le ministre de l'Immigration l'a même répété lui-même tout à l'heure, mais je ne pense pas que le ministre de l'Immigration a essayé de rentrer dans le système Arrima, parce que, les gens de mon comté de Saint-Henri—Sainte-Anne, il y en a qui ont essayé; ce n'est pas si facile, ce n'est pas tout le monde qui se qualifie. Et on rentre, et je vais utiliser les termes du ministre lui-même, dans une espèce de piscine où il y a plus de 90 000 dossiers, probablement qu'on en a plus de 100 000 aujourd'hui. Et puis on nous annonce en plus que, dans les 100 000 dossiers qu'il y a là, probablement qu'on va en traiter, je ne sais pas, moi... vous pensiez, 50 000, peut-être que vous pensiez 40 000. Eh non! on a pour objectif de traiter 400 dossiers. C'est rire du monde, Mme la Présidente. C'est rire du monde de dire aux gens aujourd'hui : Allez déposer vos dossiers dans Arrima, mais nous n'en traitons que 400 dans la prochaine année. Mais, ma foi, est-ce que ça a un sens d'aller dire ça à des gens et de penser que c'est une façon respectueuse de le faire? Le ministre de l'Immigration parle souvent de manière respectueuse de traiter les gens. Je ne vois pas en quoi cette manière de faire est respectueuse des gens. Je ne vois pas en quoi est-ce qu'on a trouvé une solution au problème qui a été mentionné.

Ce qui est difficile à comprendre dans ce dossier, particulièrement cet élément des 18 000 dossiers, c'est : Pourquoi s'entêter, pourquoi s'entêter? La solution est toute simple. Il y a un nouveau système qu'on veut mettre en place, on espère qu'il sera en place le plus tôt possible, le plus rapidement possible, qu'il va nous permettre de faire un meilleur arrimage, tout le monde est d'accord avec ça. Pourquoi ne pas traiter les 18 000 dossiers maintenant? Un n'empêche pas l'autre. On peut à la fois traiter les 18 000 dossiers dans l'ancien système et à la fois lancer le nouveau système. Un n'empêche pas l'autre, les deux peuvent totalement fonctionner en symbiose. On nous a dit que la loi nous empêchait de le faire. Faux : la loi ne nous empêche pas de le faire. On disait : Ça va être long. Faux : on a su démontrer que, l'année dernière, 20 000 dossiers avaient été traités, donc on est capable de le faire.

On nous trouve toutes sortes d'arguments, mais le pire, mais le pire, et c'est là que je me suis dit : Pourtant, ça, c'est un raisonnement qui devrait tenir avec la CAQ, ça coûte 19 millions de fermer ces dossiers-là, mais ça en coûterait 4 millions, de les traiter. 19 millions, 4 millions pour les traiter. Il n'y a aucune manière de justifier le non-traitement de ces 18 000 dossiers. Alors, évidemment, les experts l'ont dit, l'opposition est sortie, les citoyens ont réagi, rien n'y fait. Apparemment, ce n'est pas un problème. On n'a pas besoin de traiter les 18 000 dossiers tout de suite.

Eh bien, il y avait une promesse qui avait été faite le 29 janvier dernier par le premier ministre que les 18 000 dossiers allaient être traités, promesse qui n'a pas été respectée au moment où il décide de ne pas traiter ces 18 000 dossiers là. Alors, qu'est-ce qu'il a fallu faire, Mme la Présidente? Arriva ce qui devait arriver, à un moment donné les citoyens se sont dit : Bien, si le gouvernement refuse d'écouter ce que nous avons à dire, si le gouvernement persiste et signe, bien, nous allons prendre d'autres moyens, nous allons prendre d'autres moyens pour y arriver. Alors, ils ont décidé de poursuivre le gouvernement. L'AQAADI a décidé d'aller de l'avant avec une poursuite du gouvernement, et ils ont...

Une voix : ...

Mme Anglade : Oui, Mme la Présidente, oui, merci.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Excusez-moi, je vous demanderais de garder le silence pendant que la collègue parle parce que...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, c'est ça, c'est un petit peu déconcentrant. Merci.

Mme Anglade : Merci, Mme la Présidente, du rappel.

Alors, ce que je disais, c'est que, lorsque l'on parle de ces 18 000 dossiers là, la population n'a pas eu d'autre choix, avec l'association québécoise des avocats et des avocates en immigration du Québec, de poursuivre le gouvernement, d'engendrer des frais pour dire au gouvernement : Cela n'a pas de sens.

Le gouvernement n'a pas reculé à ce moment-là. Ils se sont retrouvés devant les tribunaux à devoir répondre de leurs agissements. Lorsqu'il y a eu la réponse de la cour, qu'a dit la cour? La cour, sur tous les points, a donné raison à l'association, à l'AQAADI. Elle a même dit, c'est quand même rare, je ne sais pas si vous avez lu, elle a même dit à un moment donné : Le ministère a tort, a tort, et la demande d'injonction a été acceptée. Donc, ils ont dû reculer non pas parce qu'ils pensaient que c'était la bonne chose à faire, non pas parce qu'ils avaient décidé d'écouter, non pas parce que les messages qu'ils avaient reçus dans leurs bureaux de comté respectifs les avaient particulièrement émus, parce que la cour l'exigeait. On va respecter l'ordre de la cour. Bien, évidemment, ils vont respecter l'ordre de la cour, ils n'ont pas le choix. Mais est-ce qu'on a besoin de se rendre jusque-là?

Lorsque nous étions en commission parlementaire, Mme la Présidente, il y a quelque chose qui m'a beaucoup marqué, c'est que les gens sont venus pour dire : Ne vous attendez pas à ce qu'il n'y ait pas d'autres poursuites, il va y en avoir d'autres. Pourquoi il va y en avoir d'autres? Si on refuse de traiter les 18 000 dossiers, d'autres personnes vont se présenter et vouloir, eux également, avoir un traitement équitable. La Protectrice du citoyen nous a même dit : Si j'étais le gouvernement, je leur recommanderais fortement, s'ils souhaitent ne pas traiter les dossiers, minimalement, au-delà de rembourser les frais, de rembourser d'autres frais qui vont être associés avec les demandes qui ont été présentées, d'autres frais.

Alors, je pense qu'il va falloir, dans les prochaines étapes de l'adoption du projet de loi, qu'on soit plus à l'écoute, Mme la Présidente, qu'on soit plus à l'écoute de ce qui est dit, de ce qui est présenté et qu'on ne soit pas obligés d'aller de manière extrêmement rapide sur l'ensemble de ces dossiers, parce que la précipitation... être agile, c'est bien, être rapide, c'est bien, la précipitation est bien mauvaise conseillère. Et, dans ce cas, on a pu voir à quel point cette précipitation n'avait pas servi les intérêts.

Alors, j'espère qu'on n'aura pas à se retrouver devant les tribunaux une nouvelle fois et j'espère que la compréhension du ministre de l'Immigration va au-delà du simple fait qu'on a été devant le tribunal. Je pense qu'on comprend que c'est des gens qui sont touchés par ça. Ce sont des mères, des pères de famille. Parfois ce sont des gens qui sont à l'extérieur du Québec, mais souvent qui ont un lien déjà ici. Je pense à la famille, justement, qui avait déjà décidé de s'établir sur la Côte-Nord, des gens qui ont des liens, qui sont déjà venus travailler et qui souhaitent venir ici.

D'ailleurs, Mme la Présidente, j'aimerais juste mentionner que pas plus tard qu'aujourd'hui, sur le site Web du journal Le Monde, là, ça vient de sortir, le titre, à l'international, du journal Le Monde, c'est Cafouillage au Québec sur l'accueil des étrangers. Là, là, ça vient de sortir. «Quelque 18 000 demandes de résidence permanente, qui représentent 50 000 personnes, sont en souffrance après une décision du gouvernement de durcir les admissions.» Ça, peut-être que ça va intéresser la ministre responsable de nos affaires internationales, hein? C'est un enjeu aussi par rapport à ce que les gens perçoivent du Québec. Ça aussi, c'est un enjeu. Et je vous signale que ce type d'article là, ce n'est pas le premier, ce ne sera pas le dernier non plus, et ça s'est fait en l'espace de quelques semaines seulement. Alors, j'invite mes collègues au gouvernement à aller lire ça. Une réputation, ça se bâtit sur le long terme. Alors, avoir des articles comme ça dans les médias, ça ne sert pas les intérêts du Québec, et je pense qu'on devrait en prendre acte et, lorsque l'on va étudier davantage les questions relatives à l'immigration, qu'on va comprendre les impacts et les incidences que ça peut avoir.

• (17 h 40) •

Mme la Présidente, dans le projet de loi... parce qu'au-delà des enjeux de seuil, au-delà des 18 000 dossiers qui nous ont beaucoup, beaucoup préoccupés, il y a également la question de la résidence permanente. La résidence permanente, c'est quelque chose qui est de juridiction fédérale. La résidence permanente, c'est ce qui permet à quelqu'un de s'établir ici, en sol canadien, et je le spécifie, et de pouvoir aller où elle souhaite. Il n'y a pas de contrainte à cette résidence permanente une fois qu'on l'a obtenue. Je parlais de transparence, tout à l'heure. Je pense qu'il est très clair que l'objectif du gouvernement, l'objectif non avoué ou avoué à demi-mot, c'est de faire en sorte que les gens qui obtiennent une résidence permanente puissent avoir des tests de valeur, ou puissent avoir des tests avant, ou puissent avoir une épée de Damoclès qui fasse en sorte que, lorsqu'ils sont installés quelque part, s'ils décident de déménager, ils pourraient se voir éliminer la résidence permanente. Ça, c'est un enjeu qui est fondamental. Ce n'est pas enjeu banal, c'est fondamental. Pourquoi c'est fondamental? Parce que ça ne relève pas du Québec. Et ça va favoriser qui exactement? Qui va être favorisé par ça? Des gens qui ont envie d'aller s'établir en Ontario vont préférer aller s'établir en Ontario si la résidence permanente ici est conditionnelle, c'est bien évident.

Vous savez, j'ai travaillé pendant plusieurs années sur l'attraction des investissements étrangers, et une des choses, pour l'attraction des investissements indirects étrangers... enfin, une des choses, il y avait trois éléments fondamentaux qui font en sorte que les gens décident d'investir dans une région géographique particulière : les coûts, l'accès aux marchés puis le talent. Mais la question du talent revient de manière fréquente. La question du talent est quelque chose que les présidents et présidentes d'entreprise nous répètent. Bien, le talent, ce qu'ils veulent savoir, c'est qu'ils sont capables d'attirer les meilleurs. Mais, quand vous allez attirer les meilleurs, s'ils ont la capacité d'avoir une résidence permanente plus rapidement en Ontario, plus rapidement en Colombie-Britannique, plus rapidement au Nouveau-Brunswick, pourquoi viendraient-ils au Québec, premièrement? Mais deuxièmement, si, en plus de prendre plus de temps pour venir au Québec, on impose une condition supplémentaire même lorsqu'on a l'obtention de la résidence permanente, bien là, vous venez de vous enlever vous-même la possibilité d'être attractif.

Moi, ce que je souhaite, Mme la Présidente, c'est que le Québec soit une terre d'accueil ouverte sur le monde. Ce que je souhaite, c'est qu'on soit capables d'attirer les meilleurs, les meilleurs joueurs sur la planète, qu'ils viennent s'établir ici, chez nous. Ce dont je rêve tout le temps, c'est de faire en sorte que ce Québec, qui existe au nord d'un continent, les gens disent : Voici un endroit de rêve où j'aimerais aller m'établir et où il fait bon vivre. Mais, pour ça, encore faut-il que l'on prenne la pleine mesure de certains éléments qui sont proposés. Et malheureusement, dans le cas qui nous occupe, sur la question de la résidence permanente, on sent que le gouvernement n'a pas été en mesure de comprendre les impacts sur les gens et les impacts par rapport à cette résidence permanente.

Alors, je le redis, en aucun cas nous ne devrions faire en sorte que le Québec devienne moins attractif qu'ailleurs dans les autres provinces, et surtout quand la logique en arrière est de dire que, si on fait ça, on va être mieux en mesure d'intégrer. Or, on constate la chose suivante, c'est qu'il n'y a pas de lien de cause à effet, l'IRIS l'a démontré, mais également qu'on amène des propositions qui ne tiennent pas la route et qui nécessitent une négociation avec le fédéral. Or, lorsqu'il y a eu le dépôt du projet de loi, il y a eu une fin de non-recevoir du fédéral quant à la modification par rapport à la résidence permanente parce qu'ils se disent : Une fois que je donne la résidence permanente, que vous soyez au Québec, que vous soyez en Colombie-Britannique, peu importe, ça n'a pas d'importance, on veut que tout le monde soit des citoyens à part entière. Et nous aussi, comme Québécois, c'est ce que l'on souhaite. On souhaite que nous ayons des citoyens à part entière sur l'ensemble de notre territoire comme ailleurs dans le reste du Canada.

Alors, l'enjeu de résidence permanente, dans l'étude détaillée du projet de loi, va également faire partie des éléments que nous allons discuter en détail parce que c'est quelque chose qui nous préoccupe beaucoup. Et je sais que ma collègue la députée de Bourassa-Sauvé est particulièrement préoccupée par cet enjeu et qu'elle est particulièrement préoccupée par les impacts, au niveau international, que ça va causer. Et il y en aura, on en est déjà témoins.

Mme la Présidente, heureusement, nous avons eu la chance de recevoir des groupes qui sont venus nous parler, qui sont venus discuter avec nous des enjeux que présentait le projet de loi. Et je pense qu'il est important de pouvoir un peu présenter ce que l'on retient de ce que ces groupes sont venus nous dire en commission parlementaire. Alors, vous allez me permettre de parler d'un certain nombre d'entre eux.

D'abord, nous avons reçu le Conseil du patronat. J'aimerais dire d'entrée de jeu, parce qu'il y a eu des échanges par rapport à ça où on a dit : Bien, voilà qui est accepté en commission parlementaire, voilà qui n'est pas accepté. Mais vous savez quoi? On est contents d'avoir des commissions parlementaires, mais il faut laisser le soin aux gens de bien pouvoir faire leur travail. Or, ce qui s'est produit, c'est qu'à deux jours d'avis on a invité des groupes qui ont dû se désister parce qu'ils n'étaient pas en mesure de venir à Québec. On a eu des groupes qui n'étaient pas en mesure de se préparer adéquatement pour venir présenter leurs perspectives. Je pense qu'il est très important, lorsqu'on fait un projet de loi, de nous assurer qu'au moins on donne minimalement une semaine aux gens pour se préparer, minimalement, pour qu'ils puissent venir et donner le meilleur de leur performance, le meilleur d'eux-mêmes pour que nous, nous soyons plus éclairés comme parlementaires et comme législateurs dans les mesures que l'on prend. Ça n'a pas été le cas. Ça n'a pas été le cas. Mais au moins nous avons eu des groupes qui sont venus, puis je pense que ça vaut la peine de présenter un peu les perspectives qui nous ont été partagées.

Nous avons d'abord rencontré le Conseil du patronat. Et le Conseil du patronat nous a dit la chose suivante : 118 000 postes vacants dans l'immédiat, on parle d'environ 1,5 million de postes à combler au cours des 10 prochaines années. On a à peu près 54 % de ces postes-là à combler et qui vont être comblés par les jeunes, mais il reste 46 % des besoins de main-d'oeuvre à combler. Il semble particulier qu'il n'y ait pas de CSQ qui soient octroyés alors que nous sommes en pénurie de main-d'oeuvre. Là encore, il y avait beaucoup d'incompréhension par rapport au projet de loi, mais la question de ne pas émettre des CSQ est revenue, et ça a été véritablement un enjeu pour le Conseil du patronat.

D'autre part, c'était mentionné, est-ce qu'on va imposer de nouvelles règles? On a déjà un fardeau de réglementation majeur au Québec, il ne faudrait pas en ajouter. Or, dans le projet de loi, ce que l'on constate, c'est qu'il y a un volet qui parle de la résidence permanente et du fait que l'on veut avoir plus de pouvoirs sur la manière dont elle a été octroyée, de la manière de gérer cette résidence permanente là. Mais on s'octroie un nouveau droit d'avoir de l'impact sur les employeurs et de leur dire : Si on n'est pas en mesure d'avoir les pleins droits que l'on souhaite avoir de la part du fédéral, on va les imposer aux employeurs. Ils ont mis une pression supplémentaire sur les employeurs. Est-ce que c'est réellement la bonne manière de faire? Clairement, nous avons ici un Conseil du patronat qui ne semble pas répondre favorablement à cette approche.

Alors, il va y avoir, selon eux, des gens qui travaillent déjà... et un des problèmes qui a été mentionné par le Conseil du patronat, c'est toute la question d'incertitude. Dans le milieu d'affaires, ce que l'on souhaite avoir, c'est d'abord d'avoir de la prévisibilité. Or, l'incertitude qui a été amenée par le projet de loi — est-ce que les dossiers vont être traités, est-ce qu'ils ne le seront pas — ça, ça reste un enjeu.

Je reconnais par ailleurs que, dans les commentaires du Conseil du patronat, toute la question du meilleur arrimage entre les rôles existants en sol québécois et les besoins... et l'attraction d'immigrants ou de travailleurs étrangers, ça, ils le soulignent, ils en sont contents. Nous aussi, nous en sommes contents. Pourquoi? Parce qu'Arrima, qui est le nouveau système, n'a pas été mis en place récemment, il a été mis en place l'année dernière sous le gouvernement libéral. Ça a été mis, sous le gouvernement libéral, en place pourquoi? Parce qu'on s'était dit, déjà à l'époque, qu'il fallait trouver un meilleur mécanisme pour arrimer les besoins du marché du travail avec la main-d'oeuvre. Alors, il y a quand même cet élément-là qui est positif. Mais il faut reconnaître, d'un autre côté, que cet élément-là, il a quand même été porté par le gouvernement précédent.

Il y a eu, évidemment, dans ceux qui sont venus nous voir, l'association québécoise des avocats en droit de l'immigration. Alors, en droit de l'immigration, vous comprendrez qu'eux vivent directement avec des gens qui sont touchés par ces enjeux d'immigration, et voilà ce qu'ils nous disent : «...si on veut ajouter des conditions à la résidence permanente, [...]on est d'avis que ce serait potentiellement en violation avec l'article 6.(2) de la Charte canadienne et on est d'avis que, si quelqu'un [vit] sur le territoire québécois ou canadien, [qu'il se retrouve] à Chibougamau, [...]à Val-d'Or, à Rouyn, [...]à Gaspé, [il est dans son plein] droit de le faire. Et, s'il veut changer de ville de résidence, on ne peut pas lui dire qu'il va perdre son statut...»

Un des enjeux qu'on a avec le projet de loi actuel, c'est qu'on parle de résidence permanente, mais on ne sait pas de quoi auront l'air les règlements. Or, ce sont les règlements qui sont particulièrement importants parce que ces règlements-là vont pouvoir nous dire : Est-ce qu'il va y avoir un test de valeurs? Si oui, quand est-ce qu'il va avoir lieu? Si oui, quel sera ce test des valeurs? Quelles seront les questions qui vont y être posées? Comment les examens vont être administrés? Comment est-ce que les gens qui ne réussissent pas vont pouvoir le reprendre par... et plein de détails qui doivent découler de ça, pour qu'on puisse, comme législateurs, réellement prendre une décision éclairée par rapport au projet de loi n° 9.

Or, encore une fois, cette incertitude qui plane et qui reste alimentée par le ministre de l'Immigration, qui ne répond pas aux questions... Et ça, c'est véritablement un enjeu, parce que, vous savez, il y a des ministres aiment répondre aux questions, il y a des ministres qui répondent en détail aux questions, mais là le ministre de l'Immigration, dans son entêtement, refuse d'y répondre, et c'est ce qui fait en sorte que ça complique la manière d'étudier le projet de loi.

• (17 h 50) •

Nous avons également eu la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Vous savez, quand on parle de pénurie de main-d'oeuvre au Québec, 33 % des emplois qui sont à combler demandent une qualification importante, 66 %, c'est une qualification moins importante. En fait, je fais des chiffres ronds, mais c'est un tiers, deux tiers, environ. Donc, pour la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ce qu'ils souhaitent avoir, c'est avoir des gens qui répondent directement aux besoins de main-d'oeuvre pour des emplois qui sont moins qualifiés. Ça a suscité également beaucoup de débats. Pourquoi? Parce qu'à terme ce qu'il faut comprendre, c'est que, même si quelqu'un vient combler un emploi de manière temporaire, même si cet emploi-là, il est comblé, supposons qu'il y ait de l'automatisation et de la robotisation et que cet emploi soit coupé, il y aura encore des emplois qui vont être créés, mais il faut que cette personne-là soit en mesure d'occuper d'autres fonctions. Donc, il y a aussi une manière de regarder la situation en disant : On ne peut pas... Il y a définitivement un meilleur arrimage à faire, ça, c'est fondamental. Mais, au-delà de ce meilleur arrimage là, on veut avoir des gens qui veulent s'intégrer, qui puissent occuper différentes fonctions également. Donc, il va falloir doser. On ne peut pas juste faire exactement le un pour un, il va falloir qu'on soit capables de doser dans la sélection des immigrants que l'on souhaite avoir.

Alors, la fédération de l'entreprise indépendante est venue présenter son opinion. Mais, à la question suivante : Combien de dossiers dans le nouveau système Arrima est-ce qu'on devrait traiter cette année?, on apprenait que c'était 400, on apprenait que c'était 400, alors la réponse est quand même assez intéressante, puisque la présidente de l'organisme nous dit : Que ce soit 400, que ce soit 4 000, que ce soit 10 000, je pense que ce n'est pas suffisant. On parle de 400, elle dit que 10 000, ce n'est pas suffisant. Est-ce que vous voyez l'écart important? Il y a un besoin qui est criant, mais, pour des raisons idéologiques, on s'obstine et, encore une fois, pas basé sur des données, on s'obstine à maintenir certains chiffres.

Un autre organisme qui est venu nous voir, c'est l'organisme qui s'appelle Montréal International, un organisme que je connais bien. Et le président de Montréal International a dit quelque chose d'intéressant, il dit : «Je pense qu'il faudrait être non-entendant ou non-voyant pour ne pas voir ce qui se passe dans l'actualité et poser l'hypothèse [qu'aujourd'hui la décision du gouvernement,] ça nuit, c'est clair.» C'est clair. Parce que des articles comme je viens de le mentionner font en sorte que ça nuit à l'image du Québec, et eux sont préoccupés par ça. Ils ne peuvent pas répondre exactement sur l'impact... Ça faisait environ trois semaines que le projet de loi avait été déposé, ils ne pouvaient pas répondre directement sur l'impact par rapport à la capacité d'attraction, mais c'est quelque chose qu'ils vont suivre. Ça demande des ressources additionnelles ou, en fait, des ressources particulières pour regarder ce qui se passe. Mais toute la presse internationale négative inquiète une organisation comme Montréal International, ça, c'est certain, c'est ce qu'ils disent. Et, encore une fois, on suit de très, très près cette couverture de presse là. Elle a été très, très bonne au cours des dernières années — pas précisé que c'était sous le gouvernement libéral, mais je vais me le permettre — on va déployer beaucoup d'efforts pour s'assurer qu'elle demeure positive. Alors, nous, on souhaite également que cette image demeure positive et qu'on continue à aller dans un sens constructif.

On a eu, évidemment, la ville de Montréal qui est venue nous rencontrer et qui nous a dit : Nous, ce qui est important, c'est qu'on veut faire le travail de manière personnalisée, et c'est important de traiter les dossiers. Alors, il y a deux choses qui sont dites. Il y a un parcours particulier et personnalisé qui est amené dans le projet de loi qui est intéressant. Je pense que ce volet-là amène un accompagnement de la personne qui est nécessaire au moment où on se parle. Je pense que ça, ça devrait être encouragé, et ça fait partie du projet de loi, donc, ça, c'est une bonne chose. Je pense que les gens le reconnaissent, de manière générale. En fait, dans le projet de loi, tout ce qui fait consensus fait largement consensus, et tout ce qui est critiqué est largement critiqué. En fait, il y a vraiment des éléments qu'il y a peu de personnes qui se retrouvent un peu entre les deux. Il y a clairement des éléments qu'on devrait éliminer dans le projet de loi qui a été présenté.

Il y a également un autre organisme qui est venu nous rencontrer qui s'appelle La Maisonnée. Alors, une des choses qu'ils ont soulignées et qui a retenu mon attention, c'est qu'on fait beaucoup... on impose beaucoup aux requérants. Le fardeau est beaucoup sur le requérant par rapport à la société de manière plus large, ou le gouvernement, ou bien le ministère en particulier, et ils ont une grande crainte, notamment, par rapport à l'accélération des traitements des dossiers, encore une fois, les 18 000 dossiers. Ça, je peux vous dire que c'est revenu très, très, très fréquemment.

Évidemment, on a également reçu le Barreau du Québec. Le Barreau du Québec est venu nous rencontrer, et leur perspective est la suivante : On affecte le droit de gagner sa vie du résident permanent, puisque dépendamment... encore une fois, parce qu'on ne les connaît pas, les conditions qui vont être mises en place, ça fait en sorte que les gens pourraient être désavantagés par rapport à un résident permanent d'une autre province. Par exemple, le seul fait de son statut pourrait avoir un impact, et c'est là qu'on va avoir un impact sur le droit de gagner sa vie. «Respecter un employeur qui souhaite embaucher un résident permanent», et là il décline la chose en disant : «...je vous propose de remplacer ça par "citoyen canadien", [et] voyons que ça se donne[...] : un processus discriminatoire parce que, là, on favorise des citoyens canadiens au détriment des résidents permanents [et] d'autres personnes.» Alors, ils vont dans la description de montrer à quel point le projet de loi est discriminatoire, et ouvre la voie à des contestations importantes, et, de toute façon, ne répondrait pas à nos propres chartes. Donc, ça, ça représente réellement un problème, et ça, c'est le Barreau du Québec qui est venu présenter ça.

Il y a un autre groupe qui est venu présenter, celui des Manufacturiers exportateurs du Québec. Vous savez, Mme la Présidente, 80 % de ce que nous faisons nous l'exportons, donc nous sommes une société exportatrice. Et bien des projets, d'ailleurs le ministre l'a souligné lui-même, bien des projets en matière d'exportation ne se font pas parce que nous n'avons pas suffisamment de main-d'oeuvre, il nous manque de personnes qualifiées pour effectuer des projets. Et combien de fois, peu importe les régions du Québec dans lesquelles on se trouve, ils nous disent : Si j'étais capable d'embaucher 10 personnes de plus, j'embaucherais les 10 personnes de plus? Mais ils ne le font pas parce qu'ils ne trouvent pas le monde.

Alors, évidemment, lorsqu'ils viennent nous présenter, en commission parlementaire, leur situation, leur situation est très claire, c'est de dire : Le plus rapidement possible, amenons des personnes qui puissent travailler. Donc, ils ne comprennent pas non plus l'idée de ne pas vouloir traiter des dossiers rapidement. Je vous dirais que la pression était extrêmement forte sur le nouveau système qu'on appelle Arrima parce que cette pression-là vient de la pénurie de main-d'oeuvre, mais fait en sorte qu'on a besoin de livrer la marchandise à l'autre bout, mais entre-temps on serait quand même capables de traiter un certain nombre de dossiers.

Les manufacturiers représentent 60 % des besoins qui sont non spécialisés, j'en parlais tout à l'heure, et ils reconnaissent que, dans les 18 000 dossiers, il y en a certainement un certain nombre qui pourrait répondre à leurs besoins. Ils ne sont pas capables de dire combien, mais certainement un nombre important. On n'avait, à une époque, presque pas de pénurie de main-d'oeuvre. 50 000 pénuries de main-d'oeuvre aujourd'hui, on est rendus à 118 000 postes à pourvoir au Québec. Ça va aller en augmentant, Mme la Présidente, si on n'est pas capables de prendre des décisions qui sont en fonction de ces besoins. Je vous dirais que, de manière générale, l'opinion des Manufacturiers exportateurs, c'est d'agir avec rapidité, célérité. Ils s'attendent à ce que le système Arrima soit en place et que, rapidement, il y ait des gens qui soient sélectionnés. Malheureusement, ça ne semble pas être l'intérêt ou la volonté du ministre.

Nous avons eu d'autres personnes qui se sont présentées. Nous avons eu Me Stéphane Handfield, qui est venu présenter ses perspectives également, Mme la Présidente. Le commentaire de Me Handfield est on ne peut plus clair, puis je vais vous le lire textuellement : Le gouvernement s'en va dans le mur avec ce projet de loi sous sa forme actuelle. Le gouvernement s'en va dans un mur avec ce projet de loi sous sa forme actuelle. Le deuxième point qu'il a mentionné, c'est, évidemment, par rapport aux 18 000 dossiers : Les 18 000 dossiers vont être jetés à la poubelle, et on parle de personnes. Et ce ne sont pas juste de dossiers, on parle de 45 000, 50 000 personnes. «Jamais le ministère de l'Immigration n'a laissé sous-entendre à ces candidats à l'immigration qu'un jour, si les délais devaient [être étendus]...»

Ajournement

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la députée, je dois vous interrompre.

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain, jeudi 21 mars 2019, à 9 h 40, et bien sûr vous pourrez prendre le temps qu'il vous reste de parole lors de la reprise des travaux. Merci.

(Fin de la séance à 18 heures)