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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 1 octobre 2020 - Vol. 45 N° 129

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner le Mois de la sensibilisation à la cybersécurité

M. Ian Lafrenière

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme Projaide inc.

M. Frantz Benjamin

Souligner la Journée internationale des personnes âgées

M. Sylvain Lévesque

Saluer le courage et la détermination des étudiants des cégeps et des universités en temps
de pandémie

Mme Agnès Grondin

Rendre hommage à Mme Denise Gentil, fondatrice et ex-présidente de la Fondation Paul-Pineault
pour soulager l'alzheimer

M. Pascal Bérubé

Rendre hommage à M. Hermann Charest pour sa contribution au monde des médias et des
communications

Mme Émilie Foster

Souligner le Mois du patrimoine hispanique

M. Andrés Fontecilla

Rendre hommage au personnel de soutien en milieu scolaire pour ses efforts en temps de
pandémie

Mme Lucie Lecours

Souligner le travail de l'organisme Centraide Outaouais

M. Mathieu Lacombe

Dépôt de documents

Rapports annuels de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, de certains
CISSS, du CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal, du CHU Sainte-Justine, de l'Institut de la
statistique, de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, de la Régie des marchés
agricoles et alimentaires et rapports annuels et rapports d'application de la procédure
d'examen des plaintes des CISSS de Laval et de la Côte-Nord et du Centre hospitalier
de l'Université de Montréal

Rapport annuel d'Élections Québec et de la Commission de la représentation électorale
accompagné d'une lettre du Directeur général des élections


Dépôt de rapports de commissions

Étude détaillée du projet de loi n° 50 — Loi concernant la location d'une partie des forces
hydrauliques de la rivière Shipshaw

Consultations particulières sur le projet de loi n° 56 — Loi visant à reconnaître et à soutenir
les personnes proches aidantes et modifiant diverses dispositions législatives


Questions et réponses orales

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Gestion de la pandémie dans les réseaux scolaire et des services de garde

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

M. Marc Tanguay

M. Mathieu Lacombe

M. Marc Tanguay

M. Mathieu Lacombe

Relations du gouvernement avec les communautés autochtones

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

M. Gregory Kelley

Mme Sylvie D'Amours

Participation des laboratoires privés à l'analyse des tests de dépistage du coronavirus

M. Sol Zanetti

M. Christian Dubé

M. Sol Zanetti

M. Christian Dubé

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Christian Dubé

Restrictions liées aux activités culturelles

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Nathalie Roy

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Nathalie Roy

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Nathalie Roy

Recours aux agences de placement privées dans le réseau de la santé

Mme Marie Montpetit

M. Jean Boulet

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

État de situation des demandeurs d'asile au Québec

M. Andrés Fontecilla

M. Jean Boulet

M. Andrés Fontecilla

M. Jean Boulet

Mme Manon Massé

M. Jean Boulet

Accès aux soins de santé en Gaspésie

M. Sylvain Roy

M. Christian Dubé

M. Sylvain Roy

M. Christian Dubé

M. Sylvain Roy

M. Christian Dubé

Impact de la pandémie de coronavirus sur les prestataires de l'aide de dernier recours

Mme Paule Robitaille

M. Jean Boulet

Mme Paule Robitaille

M. Jean Boulet

Mme Paule Robitaille

M. Jean Boulet

Motions sans préavis

Rappeler aux membres de l'Assemblée leur devoir de promotion de la langue française et leur
demander de prononcer leurs allocutions devant la Tribune de la presse en français, sauf
exception

Mise aux voix

Souligner la Journée de commémoration des femmes et des filles autochtones disparues et
assassinées

Mise aux voix

Demander au premier ministre de s'entendre dans les meilleurs délais avec les autorités autochtones
sur les définitions des dispositions et des principes de la Déclaration des Nations unies sur les droits
des peuples autochtones afin d'élaborer et d'adopter les modifications législatives nécessaires

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. Pascal Bérubé

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 64 —  Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des
renseignements personnels

Adoption du principe

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

M. Vincent Marissal

Mme Kathleen Weil

M. Gabriel Nadeau-Dubois

Mme Marwah Rizqy

M. Gaétan Barrette

M. Frantz Benjamin

M. Martin Ouellet

M. Gregory Kelley

Mme Marie-Claude Nichols

Débats de fin de séance

Relations du gouvernement avec les communautés autochtones

M. Gregory Kelley

Mme Geneviève Guilbault

M. Gregory Kelley (réplique)

Gestion de la pandémie dans les réseaux scolaire et des services de garde

Mme Marwah Rizqy

M. Éric Caire

Mme Marwah Rizqy (réplique)

Impact de la pandémie de coronavirus sur les prestataires de l'aide de dernier recours

Mme Paule Robitaille

M. Jean Boulet

Mme Paule Robitaille (réplique)

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante et une minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon jeudi. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

À la rubrique des déclarations de députés, je cède la parole à M. le député de Vachon.

Souligner le Mois de la sensibilisation à la cybersécurité

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je me lève, aujourd'hui, pour souligner le mois de la cybersécurité, qui débute aujourd'hui même.

Chaque année, en octobre, une campagne nationale est lancée pour sensibiliser, pour tous nous sensibiliser à l'importance de la cybersécurité, à l'importance de bien nous protéger. Cette année, la campagne sera axée sur cinq thématiques. Faire le point sur le nombre d'appareils connectés qu'on possède. Il y aura aussi la semaine du téléphone, la semaine des ordinateurs, la semaine du réseau wifi et la semaine des appareils intelligents, des appareils connectés.

En tant qu'ex-policier, mais surtout en tant que député et président de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, je vous confirme que le recrutement de nos jeunes se fait bel et bien dans le confort de nos foyers, sur leurs appareils intelligents, dans les médias sociaux. Intéressons-nous à ce que font nos jeunes sur le Web. En tant que papa de deux jeunes filles, je ne peux pas m'empêcher de penser à tous ceux et celles qui se sont fait embarquer dans ce fléau. Et c'est d'ailleurs pour ça que les quatre partis, on travaille ensemble pour y lutter.

Mesdames et messieurs, chers collègues, soyons cybersécures. Merci, madame.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous poursuivons avec M. le député de Viau.

Souligner le 25e anniversaire de l'organisme Projaide inc.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Ce qui fait de nos collectivités des lieux remplis d'humanité, c'est, avant tout, notre capacité à aider et soutenir les personnes les plus vulnérables. À ce titre, j'aimerais souligner le travail de Projaide, un organisme de ma circonscription qui porte concrètement ces valeurs depuis 25 ans.

Fondé à Montréal en 1995, Projaide vient en aide aux personnes vivant dans le dénuement, avec une incapacité physique, que ce soit au moyen d'une banque alimentaire ou d'une aide matérielle. Malgré les conditions difficiles, Projaide continue à assister les Micheloises et les Michelois, leurs services restent ouverts aux résidents du quartier de Saint-Michel, et, à ce jour, grâce à une équipe formidable, Projaide nourrit 200 familles chaque semaine.

Merci à Mmes Isabelle Tremblay, Louise Caluori, Angela Gosselin, Clara Amegandjin, Francine Sheehy, à MM. Pietro Ferrara, Gilles Fayette, Roncarly Fleurestil et tous les bénévoles de Projaide. Merci à Projaide pour ses 25 ans de soutien aux familles de la circonscription de Viau. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Chauveau.

Souligner la Journée internationale des personnes âgées

M. Sylvain Lévesque

M. Lévesque (Chauveau) : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, c'est la journée internationale pour les personnes âgées, journée du 1er octobre, décrétée par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1990.

Cette 29e journée passera à l'histoire au Québec comme ailleurs dans le monde, car elle sera bien différente pour nos personnes âgées. Les activités organisées pour l'occasion se tiendront en mode virtuel. Et je tiens à saluer nos aînés, qui se sont vite adaptés à cette nouvelle réalité, comme quoi il n'y a pas d'âge pour apprendre.

Mme la Présidente, permettez-moi de souligner l'apport important des aînés de la circonscription de Chauveau à notre communauté. Ils sont des piliers, ont façonné l'histoire de chaque municipalité, et, grâce à eux, nos enfants ont un héritage qu'ils pourront, à leur tour, retransmettre à leurs descendants.

Aujourd'hui, j'invite chaque citoyen à remercier une personne âgée et à lui exprimer sa chaleur et son affection à travers cette période difficile. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, Mme la députée d'Argenteuil, la parole est à vous.

Saluer le courage et la détermination des étudiants des cégeps
et des universités en temps de pandémie

Mme Agnès Grondin

Mme Grondin : Merci, Mme la Présidente. Depuis la rentrée des classes, mes enfants Éloi et Anouk s'installent devant leurs écrans d'ordinateur où, comme des milliers d'autres étudiants du cégep et de l'université, ils passeront plusieurs heures à suivre leurs cours en ligne.

La liste des inconvénients peut être longue. Celle des arguments pour un retour en classe, tout autant. Mais aujourd'hui j'ai plutôt envie de saluer la détermination, la capacité d'adaptation et la discipline personnelle des étudiants et étudiantes du Québec. Anouk, Éloi et tous les autres, je suis fière de vous. Le Québec vous encourage à persévérer.

On a toujours le choix de voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. Moi, je choisis le verre à moitié plein. Je suis persuadée que les défis auxquels vous êtes confrontés aujourd'hui vous permettront de développer des aptitudes très utiles demain.

À ceux et à celles qui ont fait le choix de mettre leurs études sur pause, quelles qu'en soient les raisons, je vous encourage à ne pas perdre de vue vos rêves. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Matane-Matapédia, la parole est à vous.

Rendre hommage à Mme Denise Gentil, fondatrice et
ex-présidente de la Fondation Paul-Pineault
pour soulager l'alzheimer

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la Présidente, aujourd'hui, je tiens à souligner l'engagement exceptionnel de Mme Denise Gentil, qui, 15 ans après avoir créé la Fondation Paul-Pineault pour soulager l'alzheimer, a annoncé qu'elle cédait sa place.

Tout au long de sa présidence, elle aura permis à la fondation de soutenir l'importante mission de la Maison J.‑Arthur‑Desjardins, une résidence offrant des soins spécialisés à neuf personnes atteintes d'alzheimer et offrant un service de répit et un centre de jour pour les familles dont les proches sont atteints de cette terrible maladie.

 Au cours de toutes ces années, Mme Gentil a multiplié les levées de fonds et sensibilisé et mobilisé des centaines de personnes à cette cause importante. Persévérante et infatigable, elle a surmonté de nombreux obstacles afin de permettre à la fondation et à la maison de soutenir les patients et les membres de leurs familles.

Mme Gentil, je vous remercie pour votre travail et votre implication active auprès des personnes touchées par la maladie d'Alzheimer. Vous pouvez être fière de tout ce que vous avez accompli au cours de ces 15 dernières années. Vous avez grandement contribué à améliorer le quotidien des personnes malades ainsi que celui de tous leurs proches. Vous étiez une grande mairesse pour Matane, vous êtes une grande personne pour les personnes atteintes d'alzheimer. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, la parole est à vous.

Rendre hommage à M. Hermann Charest pour sa contribution
au monde des médias et des communications

Mme Émilie Foster

Mme Foster : Mme la Présidente, aujourd'hui, j'aimerais saluer le départ à la retraite d'un communicateur engagé, dévoué mais surtout passionné : Hermann Charest.

Sa carrière s'est déroulée auprès de nombreux médias, et ce, partout à travers la province. Il a notamment occupé le poste de directeur général pour Corus Média à Québec. En matière de communications, il a touché à beaucoup de domaines, de l'animation au placement publicitaire, en passant par la création, la vente, la direction. Ce vaste univers l'a préparé à terminer sa fructueuse carrière à la barre de la télévision communautaire de Charlevoix-Ouest.

J'ai eu l'immense privilège de m'entretenir avec lui dans le cadre d'une entrevue. C'est un être jovial, optimiste, très humain, un homme que l'on admire spontanément. Fort de ses expériences et compétences, il a su amener l'organisation exactement là où elle devait aller. Vraiment, nous lui devons assurément la notoriété dont jouit la télé communautaire aujourd'hui.

Alors, M. Charest, je vous remercie pour votre legs à Charlevoix et je vous souhaite une excellente retraite.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je suis prête à céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion.

Souligner le Mois du patrimoine hispanique

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Je souhaite souligner, aujourd'hui, le Mois du patrimoine hispanique au Québec.

La communauté hispano-québécoise est une multitude riche et diverse, nourrie par plusieurs sources venues d'un continent grand comme le monde. Né au Chili, je suis moi-même issu de l'une de ces sources. Comme d'autres avant moi, j'ai trouvé ici une nouvelle maison, que je chéris et que je bâtis continuellement à mon tour.

La crise sans précédent que nous traversons a eu au moins le mérite de nous prouver que nous sommes tous et toutes reliés par des fils invisibles. Le Québec, c'est notre maison commune, et, si nous voulons la protéger et la rendre plus solide, c'est ensemble que nous réussirons. Je suis fier de constater la solidarité dont nous faisons preuve et le courage qui nous a toujours permis de faire face aux défis.

Le mois d'octobre est notre mois, le Mois du patrimoine hispanique, au Québec. Profitons de ce mois pour célébrer tout ce que nous avons déjà bâti ici mais aussi pour prendre conscience de ce que nous pouvons encore apporter aux fondations de cette belle et solide demeure qui est aussi la nôtre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée des Plaines.

Rendre hommage au personnel de soutien en milieu
scolaire pour ses efforts en temps de pandémie

Mme Lucie Lecours

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. À l'instar du ministre de l'Éducation, qui l'a fait la semaine dernière par l'entremise d'une publication sur ses réseaux sociaux, je tiens à souligner haut et fort l'implication du personnel de soutien dans nos écoles.

Vous savez, le succès du fonctionnement de nos établissements scolaires, en ces moments difficiles, repose sur un grand nombre d'acteurs. Il y a ceux que nous connaissons tous, les enseignants et les directions, mais en arrière-plan se trouvent des piliers dont on entend peu parler et qui, pourtant, contribuent à offrir un environnement sain à nos jeunes.

Je décide donc aujourd'hui de rendre hommage au personnel de soutien des écoles de ma circonscription, ces secrétaires, concierges, responsables de services de garde, de cafétérias, techniciens en éducation spécialisée, et j'en passe, ces gens dévoués qui à chaque jour se représentent avec le souci d'offrir à nos jeunes un milieu scolaire où il fait bon s'épanouir. Du fond du coeur, je vous remercie. Votre apport, en plus d'être essentiel en ces temps de pandémie, permet à nos élèves d'être ce qu'ils sont, des enfants. Merci.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Alors, pour conclure cette déclaration de députés, je vais céder la parole à M. le député de Papineau.

Souligner le travail de l'organisme Centraide Outaouais

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est avec fierté, ce matin, que je tiens à reconnaître le travail exceptionnel que fait à chaque année Centraide Outaouais pour mobiliser les gens et rassembler les ressources afin d'améliorer la qualité de vie des personnes plus vulnérables et contribuer au développement de notre collectivité.

Pour réussir cette mission, l'organisme doit, bien sûr, recueillir des fonds pour venir en aide aux différents organismes communautaires de ma région. Et c'est sous le leadership incontestable de Mme Nathalie Lepage et de Bob Rioux, deux figures bien connues dans notre communauté, qu'ils ont réussi, en s'adaptant aux différentes consignes de la Santé publique, à recueillir, l'année dernière, plus de 3,5 millions de dollars.

Et les besoins sont grandissants. C'est sous le thème de Jamais indifférents que l'organisme a lancé sa 76e campagne de financement annuelle. Les gens de chez nous ont été grandement touchés par différentes catastrophes dans les dernières années, on pense aux inondations, à la tornade, et, à travers tout ça, on a démontré beaucoup d'entraide. Donc, j'invite tous ceux qui sont capables de donner à le faire, car, en Outaouais, nous ne sommes, effectivement, jamais indifférents. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, MM., Mmes les députés. Ceci met fin à la rubrique de déclarations de députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 1)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Vous pouvez prendre place.

Alors, nous poursuivons les affaires courantes.

Et aujourd'hui il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Et, à la rubrique de dépôt de documents, je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

Rapports annuels de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, de
certains CISSS, du CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal, du CHU Sainte-Justine, de
l'Institut de la statistique, de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour,
de la Régie des marchés agricoles et alimentaires et rapports annuels et rapports
d'application de la procédure d'examen des plaintes des CISSS de Laval
et de la Côte-Nord et du Centre hospitalier de l'Université de Montréal

M. Jolin-Barrette : Bonjour, Mme la Présidente. Permettez-moi de déposer, au nom de mes collègues, les documents suivants : les rapports annuels de gestion 2019-2020 de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux, des CISSS de Montérégie-Centre, de la Montérégie-Ouest, et de l'Outaouais, et de Laval, du CHU de Sainte-Justine, du CHUM, du CIUSSS du Nord-de-l'Île-de-Montréal, de l'Institut de la statistique du Québec, ainsi que les rapports annuels 2019-2020 de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour et de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, le rapport de gestion 2019-2020 du CISSS de la Côte-Nord, les rapports annuels 2019-2020 sur l'application de la procédure d'examen des plaintes et de l'amélioration de la qualité des services des CISSS de la Côte-Nord et de Laval, le rapport annuel 2019-2020 de la commission locale... de la commissaire locale aux plaintes et à la qualité des services du Centre hospitalier de l'Université de Montréal. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Ces documents sont déposés.

Rapport annuel d'Élections Québec et de la Commission de la
représentation électorale accompagné d'une lettre
du Directeur général des élections

Pour ma part, je dépose le rapport annuel de gestion 2019-2020 d'Élections Québec et de la Commission de la représentation électorale ainsi qu'une lettre que m'a adressée le Directeur général des élections et président de la Commission de la représentation électorale, M. Pierre Reid, concernant ce rapport.

Dépôt de rapports de commissions

Toujours à la rubrique de dépôt de rapports, je comprends qu'il y a consentement pour que je procède à des dépôts de rapports de commissions. Y a-t-il consentement?

Des voix : Consentement.

Étude détaillée du projet de loi n° 50

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Consentement. Alors, je dépose donc le rapport de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles qui, les 29 et 30 septembre 2020, a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 50, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. La commission a adopté le texte du projet de loi avec des amendements.

Consultations particulières sur
le projet de loi n° 56

Je dépose également le rapport de la Commission des relations avec les citoyens qui, les 23, 24, 29 et 30 septembre 2020, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 56, Loi visant à reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes et modifiant diverses dispositions législatives.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Mme la Présidente, le gouvernement avait la responsabilité d'être prêt. Les Québécois s'attendaient à ce que le gouvernement arrive en deuxième vague avec des hypothèses, des scénarios, des messages clairs. Nous sommes aujourd'hui jeudi, et, après une multitude de conférences de presse du gouvernement, de points de presse, les Québécois ne comprennent toujours pas où on s'en va. Il y a eu de nouvelles consignes, mais il reste des milliers de questions qui sont sans réponse, des questions que nous recevons tous, ici, dans nos circonscriptions.

Cet été, le gouvernement avait deux devoirs : le premier, d'être prêt, et, le deuxième, de transmettre de l'information claire aux Québécois. Et, objectivement, les Québécois se demandent : Comment en sommes-nous arrivés là? Qu'a fait le gouvernement cet été? Une spécialiste du stress, Marie-France Marin, docteure en neurosciences, a affirmé hier au Devoir que la population québécoise est déjà à bout des effets de la seconde vague de la COVID-19.

M. le Président... Mme la Présidente, le premier ministre peut-il expliquer aux Québécois pourquoi les ministres de son gouvernement n'ont pas profité de l'été pour préparer la deuxième vague?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, hier, le gouvernement de l'Ontario a déposé son plan pour les différents ministères pour la deuxième vague. Hier soir, je me suis amusé à lire le plan de l'Ontario puis j'étais content de voir que tout ce qui est dans le plan de l'Ontario, ça avait été déjà déposé depuis plusieurs semaines, même, dans certains cas, des mois, par les différents ministères, incluant, évidemment, le ministère de la Santé.

La cheffe de l'opposition officielle nous dit : Il y a beaucoup de consignes. On est d'accord. C'est la même chose partout dans le monde.

Maintenant, elle nous dit qu'elle ne comprend pas certaines consignes. Je suis prêt à répondre à ses questions.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Mme la Présidente, ce n'est pas à moi que le premier ministre va répondre, c'est aux Québécois en général. Ce matin, dans La Presse, l'éditorialiste disait : «Quand on ferme les musées, les galeries et les bibliothèques, alors là c'est totalement incompréhensible.» Ce n'est pas moi qui le dis. Aujourd'hui, c'est le milieu de la culture qui sort et qui dit : Nous ne comprenons pas. C'est l'ensemble des Québécois qui ont de la misère à suivre le gouvernement.

Quand le gouvernement va-t-il se ressaisir?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, on a vu, au cours des dernières semaines, des derniers jours, plus de 800 cas par jour. On est passé d'une centaine d'hospitalisations à plus de 250. Aujourd'hui, on a 16 nouveaux décès. Mme la Présidente, c'est malheureux, mais on doit réduire nos activités sociales. On a fermé les musées. Et, Mme la Présidente, ce que je comprends, c'est que la cheffe du Parti libéral n'est pas d'accord avec la fermeture des musées. Moi, je pense, c'est malheureux, mais c'était la chose à faire.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Ce qu'on aimerait comprendre, Mme la Présidente, c'est pourquoi nous ne sommes pas prêts. Hier, en cette Chambre, on a posé la question au ministre de l'Économie, à savoir quel était le plan pour les petites entreprises qu'on était en train de fermer. La réponse du ministre, et je le cite : «J'ai travaillé depuis deux jours avec mes collègues pour mettre en place un programme d'aide.» Deux jours, Mme la Présidente. Avec sa candeur habituelle, il a même répété les deux jours plus tard dans la question.

Mme la Présidente, pourquoi le ministre de l'Économie n'était pas prêt à présenter des programmes pour les entreprises?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, Mme la Présidente, on a tous noté que la cheffe du Parti libéral n'a plus de question à poser sur les consignes en santé, donc elle nous parle d'économie.

Mme la Présidente, j'ai eu l'occasion, hier soir, avec une cinquantaine de présidents, présidentes d'entreprise du Québec, d'échanger sur les mesures qu'on a mises en place. Jusqu'à présent, toutes les personnes se sont dites satisfaites. Cet après-midi, avec le ministre de l'Économie, on va annoncer des mesures pour les restaurants, pour les bars. Demain, la ministre de la Culture va annoncer des mesures pour les théâtres.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Legault : Qu'est-ce que la cheffe du Parti libéral veut de plus?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Troisième complémentaire.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Hier, Mme la Présidente, questionné à savoir s'il allait ajouter des mesures dans les écoles, dans les zones rouges, le premier ministre a répondu la chose suivante : qu'il allait regarder cela dans les prochains jours et les prochaines semaines. Je comprends donc que, pour le premier ministre, il n'existe pas de scénario spécifique concernant les écoles dans les zones rouges.

Vous savez, Mme la Présidente, les Québécois savent déjà qu'on est en train de construire l'avion en plein vol, mais est-ce que le premier ministre peut nous dire au moins qu'il y a un pilote?

• (10 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, je l'ai dit à plusieurs reprises, toutes les recommandations des responsables de la santé publique pour nos écoles sont appliquées actuellement. On ne peut pas exclure que, dans les prochaines semaines, il y ait de nouvelles consignes pour les écoles, mais aujourd'hui toutes les consignes qui sont recommandées par la Santé publique dans nos écoles sont appliquées. Donc, je ne vois vraiment pas, là, où s'en va la cheffe de l'opposition officielle. Je ne vois pas pourquoi elle essaie de faire peur au monde.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Vous savez qu'on ne peut prêter des intentions ici, en cette Chambre. Je vous demanderais de rappeler cette consigne au premier ministre.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, le premier ministre exprime dans sa réponse une opinion, son opinion, M. le Président, et la teneur des questions de la cheffe de l'opposition officielle fait en sorte que ça prête à amener à cette conclusion-ci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Alors, Mme la cheffe de l'opposition officielle joue son rôle ici comme nous tous.

Alors, je suis prête à reconnaître la prochaine personne qui va poser une question, et ce sera Mme la députée de Saint-Laurent.

Gestion de la pandémie dans les réseaux
scolaire et des services de garde

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. La meilleure façon de rassurer les parents, c'est d'avoir des consignes claires. Que ce soit dans les garderies ou dans les écoles, les directives de la Santé publique, elles tardent et elles ne sont toujours pas claires.

Je vais vous parler du petit Olivier. Les parents d'Oliver reçoivent l'appel de la Santé publique un samedi pour qu'Olivier se fasse tester, chose qui est faite; neuf jours plus tard, reçoivent finalement le diagnostic, il est testé positif au coronavirus.

Olivier a un frère et une soeur, ses frère et soeur vont dans d'autres écoles. Eux sont restés à l'école, donc risque de contamination dans les autres écoles. La maman du petit Olivier demande : Est-ce que je dois faire tester mes enfants? Ah non! De toute façon, l'isolement pour eux aussi est terminé, il termine aujourd'hui pour Olivier et ses frère et soeur. D'accord. Le lendemain, non, finalement ils doivent être testés... pas besoin d'être testés, ils doivent continuer un isolement jusqu'au 15 octobre, donc deux semaines supplémentaires.

Est-ce qu'on peut avoir un corridor sanitaire scolaire qui est clair et efficace dès maintenant?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Mme la Présidente, ma collègue commence sa question en disant qu'il n'y a pas de consignes claires. Je pense malheureusement que c'est inexact. On a rendu public, sur Internet, un site Internet avec un questions-réponses, aide au diagnostic pour que les parents puissent savoir : Est-ce que je devrais demander un test ou pas? Est-ce que je devrais garder mon enfant à la maison en observation pendant 24 heures, 48 heures ou pas? S'ils ne sont pas certains, ils ont un numéro de téléphone où ils peuvent appeler pour recevoir ce soutien. Et il y a ce corridor de services parce que chaque direction d'école est informée pour savoir à quel endroit se rendre, à quel endroit référer des parents ou des élèves qui doivent obtenir des soins ou, évidemment, obtenir des tests.

C'est vrai qu'à certains égards ça a été un peu long avant d'avoir les résultats des tests. Mon collègue à la Santé travaille très fort pour qu'on ait les tests plus rapidement, les résultats des tests plus rapidement. Mais vous comprenez qu'avec la hausse des tests — on teste beaucoup, beaucoup, beaucoup plus parce que c'est une excellente façon de lutter contre le virus — bien, on a ce nouveau de défi qu'on est en train de relever.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, Mme la Présidente. Alors, continuons. Pour nos écoles mais également pour nos garderies, les directives sont absentes. Je viens d'entendre le ministre, on vient d'entendre le ministre de l'Éducation, il dit : Effectivement, ça peut être, dans certains cas, un peu long. 48 heures, pour une garderie, est-ce que je garde ou pas mon enfant, Mme la Présidente, dans le contexte de COVID, ce n'est pas un peu long, c'est un échec.

Il y a des parents, Mme la Présidente, dans le réseau ici, dans la Capitale-Nationale, CPE Jardin bleu Québec, Maison des enfants, qui n'avaient pas de directives claires. Des parents ont envoyé les enfants, d'autres les ont gardés à la maison. C'est un échec. Comment l'explique-t-il?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, dans le plan qu'on a présenté pour nos services de garde éducatifs, déjà, à la fin du mois d'août, pas il y a deux jours, à la fin du mois d'août, on s'est pris d'avance, on a clairement spécifié que, lorsque les CPE, les garderies, les services, aussi, en milieu familial auraient des questions au sujet d'éclosions, de cas de COVID, il y aurait une ligne directe pour pouvoir parler à quelqu'un à la Santé publique régionale.

Dans le cas de la Capitale-Nationale, visiblement, il y a un problème. Évidemment, le délai qui a été rapporté ce matin, il est inacceptable. Avec mon collègue le ministre de la Santé, bien sûr, on va y voir. Par contre, il faut vraiment souligner que, dans la majorité des cas... Vous voyez un cas problématique ce matin. Il y a plus qu'une région au Québec, et, dans la majorité des cas...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Lacombe : ...cette ligne fonctionne et nous permet de mieux protéger nos tout-petits.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Mme la Présidente, on vient d'entendre le ministre de la Famille dire : Il y a un problème dans la Capitale-Nationale. Il a raison, il y a un gros problème dans la Capitale-Nationale. Ça touche directement des parents d'enfants, qui ne savent pas s'ils doivent envoyer leurs enfants à la garderie ou non. Il y a des parents, Mme la Présidente, qui, lundi, ont envoyé leur enfant à la garderie, sachant qu'il y avait une éducatrice qui avait été testée positive à la COVID. Lundi, l'enfant a passé toute la journée à la garderie, mardi également, et finalement ils ont eu la réponse mardi soir, en soirée.

Il y a un grave problème, ce n'est pas selon les standards qui est attendu en pandémie. Va-t-il le corriger?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Famille.

M. Mathieu Lacombe

M. Lacombe : Merci, Mme la Présidente. D'abord, honnêtement, ce matin, je veux dire, on ne commencera pas à faire peur au monde. Ça va bien dans nos services de garde éducatifs à l'enfance...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est...

M. Fortin : Mme la Présidente, je n'ai pas besoin de faire ce rappel-là plus qu'une fois. On vient de faire le rappel au premier ministre de ne pas prêter des intentions. Le député... le ministre de la Famille fait exactement la même chose avec les mêmes propos.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Alors, je... Ça va. Je suis déjà intervenue sur cette même situation. Je vais vous inviter à la prudence, M. le ministre, et à poursuivre.

M. Lacombe : D'accord. Donc, Mme la Présidente, je vais vous dire, je ne veux pas que les parents s'alarment ce matin. Ça va bien dans nos services de garde éducatifs à l'enfance. Depuis le début de la crise, depuis la mi-mars, on a 173 cas seulement dans nos services de garde éducatifs, 173 seulement, donc, vraiment, disons aux parents que ça va bien dans nos services de garde éducatifs.

Maintenant, quand il y a des situations à améliorer, bien sûr qu'on va les améliorer. On a un problème avec une ligne téléphonique à Québec, on va régler le problème, bien sûr, parce qu'on peut toujours s'améliorer. Mais en ce moment ça va bien...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Maintenant, je vais céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

Relations du gouvernement avec les communautés autochtones

M. Gregory Kelley

M. Kelley : L'abandon du projet éolien Apuiat, l'absence du premier ministre à plusieurs rencontres importantes, les propos incendiaires du premier ministre envers les Mohawks lors de la crise ferroviaire, le manque de dialogue dans numéreux dossiers, comme le projet de loi C-92, la situation d'itinérance urbaine non maîtrisée, l'abdication de ses responsabilités ministérielles dans le dossier de chasse dans l'Abitibi, l'exclusion des partenaires autochtones du comité sur le racisme, aucune consultation sur la relance économique. Mme la Présidente, 91 % des répondants pensent que l'État québécois a un rôle important à jouer dans l'atteinte et le maintien de l'égalité entre les Premières Nations et les Québécois non autochtones. Ça, c'est dans un sondage.

Une question pour la ministre des Affaires autochtones : Pendant deux ans, est-ce qu'elle est fière de son bilan?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il une réponse? Alors, voilà, Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : Merci, Mme la Présidente. J'attendais la question à tout ce qui a été dit par mon collègue. Mais, le bilan, il peut le retrouver à chaque fois qu'on parle dans les commissions, commission de... la commission des crédits, où il a déjà posé des questions à ce sujet, par des appels téléphoniques, avec lesquels on a discuté pendant 15 à 20 minutes sur chaque sujet. Et, tous les sujets qui ont été apportés par mon collègue, bien, j'ai travaillé sur tous ces sujets-là. Alors, le bilan, effectivement, mon bilan, c'est que je suis présente puis que je travaille avec les autochtones et pour les autochtones. Voilà, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Le 19 mars 2018, devant la commission Viens, l'infirmière Jolianne Ottawa a dit le suivant : «Ça, je l'ai remarqué beaucoup plus ces dernières années, là, je [...] dirais, peut-être les derniers cinq, six, sept ans, là, que j'ai remarqué beaucoup que les gens évitaient, ou allaient consulter à Joliette puis...» C'est évident. À l'hôpital de Joliette, il y a eu un problème.

Je veux savoir ce gouvernement a fait quoi, depuis 2018, de régler les enjeux à l'hôpital de Joliette.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : Mme la Présidente, je veux vous rassurer, j'en ai fait plus en deux ans que 15 ans de Parti libéral, puis il faudrait qu'il prenne un petit 5 à 7 avec son père pour vérifier ce que je dis. Les rapports... Le rapport Viens n'est pas le premier rapport...

Des voix : ...

Mme D'Amours : Le rapport Viens n'est pas le premier rapport qui a été déposé, et rien n'a été fait depuis ce temps. Donc...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant, Mme la ministre. S'il vous plaît! Il y a une personne qui a la parole, et c'est Mme la ministre responsable des Affaires autochtones, et j'ai de la difficulté à entendre sa réponse. Alors, s'il vous plaît, Mme la ministre, veuillez poursuivre.

Mme D'Amours : Mme la Présidente, depuis deux ans, on travaille... En fait, ça fait deux ans qu'on est élus. Le rapport, ça fait un an qu'il a été déposé, il a été déposé le 30 septembre. Avec l'accord de l'APNQL, les chefs autochtones, nous avions une rencontre qui était cédulée le 17 octobre, qui a eu lieu...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

Mme D'Amours : ...le 27 octobre, qui a eu... 27 janvier, qui a eu lieu aussi. Donc, voilà.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : L'ancien gouvernement a fondé un cégep à Odanak pour les enfants autochtones. L'ancien ministre des Affaires autochtones était toujours présent pour la remise des diplômes, mais ce ministre-ci a refusé l'invitation cette année. Pour la première fois, aucune présence du gouvernement pour la remise des diplômes des enfants étudiants autochtones.

Je demande : Est-ce que ce gouvernement et ce premier ministre a toujours confiance dans sa ministre?

• (10 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la ministre responsable des Affaires autochtones.

Mme Sylvie D'Amours

Mme D'Amours : Je rappelle à mon collègue, Mme la Présidente, que je vis dans une zone rouge, présentement, qui a déjà été rouge, mais qu'on ne l'appelait pas comme ça à l'époque, et j'ai respecté les déplacements, qu'il était interdit... ou fortement recommandé de rester dans chacune de nos régions, donc j'ai fait ça. Les communautés autochtones, c'est les communautés les plus touchées au niveau de la santé, et ils doivent...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant, Mme la ministre. Je vous demande... S'il vous plaît! J'ai de la difficulté à entendre la réponse. S'il vous plaît, veuillez permettre à la ministre de répondre à la question. Mme la ministre.

Mme D'Amours : Mme la Présidente, je fais un travail, depuis deux ans, de collaboration, je travaille main dans la main avec tous les autochtones, y compris les organisations sociales, les organisations qui sont à Montréal, dans les centres urbains, à Québec aussi...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

Mme D'Amours : ...à Trois-Rivières, à Sept-Îles. Donc, j'ai une très bonne relation.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je suis maintenant prête à reconnaître le prochain intervenant. La question viendra de M. le député de Jean-Lesage.

Participation des laboratoires privés à l'analyse
des tests de dépistage du coronavirus

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, le dépistage rapide, rapide, en temps de pandémie, là, c'est le nerf de la guerre, et en ce moment on perd la bataille. Sept jours de délai moyen en Outaouais. Des ados qui restent à la maison neuf jours pour recevoir un test positif. Des gens sans nouvelles de leurs résultats après 14 jours. On manque de capacité de laboratoire pour tester rapidement les gens. Il y a des enfants qui manquent l'école, il y a des gens qui ont eu des contacts avec des personnes à risque, et qui sont vraiment à risque, et, pendant ce temps-là, il y a des capacités de laboratoires privés qui servent à tester des hommes d'affaires qui veulent prendre l'avion sans avoir à s'isoler trop longtemps. Les riches coupent la file, Mme la Présidente, et ça nous affaiblit tous dans notre lutte contre la pandémie.

Le ministre de la Santé a le pouvoir de réquisitionner les capacités des laboratoires privés. Va-t-il le faire?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, Mme la Présidente, premièrement, j'apprécie toujours les questions du député de Jean-Lesage parce que ses questions nous permettent de voir comment on a avancé dans les différents engagements qu'on avait pris sur les cliniques de dépistage.

Premièrement, la question des laboratoires privés, nous avons signé plus d'une dizaine d'ententes, au cours des dernières semaines, avec des laboratoires privés, justement pour augmenter notre capacité. Parce que le député fait très bien de dire que nous avons besoin de capacité additionnelle. Je vous rappelle que notre engagement était, il n'y a pas si longtemps, de faire environ 15 000 dépistages par jour, et maintenant on est rendus à environ 35 000, qu'on fait, dans les dernières journées. Imaginez-vous, on a dépassé les engagements de presque deux fois.

Alors, j'aimerais rassurer le député de Jean-Lesage que non seulement les laboratoires privés font partie de notre plan, mais on augmente la capacité. En ce moment, notre capacité est à peu près de 25 000 tests par jour, c'est énorme par rapport à l'engagement, mais il y a des journées, je l'explique, qu'on devrait en avoir à peu près 35 000. On va continuer de prendre des laboratoires privés pour augmenter notre capacité et donner un meilleur service. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Le ministre de la Santé nous dit qu'il va aller négocier un par un avec des laboratoires privés pour leur demander, s'il vous plaît, de contribuer à la stratégie publique de dépistage. Depuis quand c'est optionnel de contribuer à la stratégie publique et de lutter contre le coronavirus? Depuis quand? Quand ils ont fermé les milieux du théâtre, les arts et les restaurants, est-ce qu'ils leur ont demandé la permission? Est-ce qu'ils ont négocié avec eux? Non. Puis ce n'est pas optionnel.

Pourquoi le ministre de la Santé laisse les labos privés s'enrichir...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, j'aimerais faire un parallèle. Je pense que la portion des laboratoires privés qui fait partie de notre stratégie est quand même excessivement minime par rapport à... les 75 centres de dépistage, 77, pour être exact, qui fait partie des centres de dépistage du gouvernement, alors cette stratégie-là d'utiliser les laboratoires privés, pour moi, elle est complémentaire. Puis il faut s'assurer que les laboratoires privés sont capables de donner la même qualité de services que nous avons avec notre propre réseau.

Alors, je rassurerais le député de Jean-Lesage que nous y travaillons. Il nous reste encore probablement une dizaine d'ententes à signer au cours des prochaines semaines. Mais c'est toujours la même chose...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Dubé : ...il faut garder un équilibre, puis c'est ce que nous faisons, présentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Mme la Présidente, le premier ministre appelle les Québécois à être solidaires. Il a dit, dans son dernier point de presse : «On est tous dans le même bateau.» Je suis désolé, ce n'est pas vrai. Il y a des riches qui coupent la file, qui paient 200 $ pour avoir un résultat en 24 heures pendant que le monde ordinaire attend pendant deux semaines pour avoir leur résultat. La solidarité, c'est pour tout le monde.

Pourquoi le premier ministre accepte qu'il y ait un système de dépistage à deux vitesses? Pourquoi est-ce qu'il accepte qu'il y ait deux classes de citoyens au Québec?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Mme la Présidente, je vais répéter, puis je pense que c'est important que les gens comprennent bien, qu'on a travaillé... et je vais le répéter plusieurs fois, parce qu'on s'est préparés pour être capables de s'ajuster le plus rapidement possible, mais, le fait que l'on ait une capacité, aujourd'hui, de 25 000 tests, c'est ça qu'on est capables d'analyser aujourd'hui. Et, lorsqu'on a des journées à 35 000, je peux vous dire que notre situation, aujourd'hui, elle est beaucoup plus envieuse que celle de l'Ontario, qui a des délais encore plus longs et des délais qui sont astronomiques.

Alors, j'aimerais répéter au député que nous faisons tout ce qu'il faut pour bien servir nos gens. On a décomposé la partie... le processus de dépistage en trois et on va s'améliorer. Et, je vous le dis, on est là-dessus. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : La prochaine principale, Mme la députée de Gaspé.

Restrictions liées aux activités culturelles

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Mme la Présidente, le milieu culturel est atterré. Tout, absolument tout a été mis en place dans les lieux culturels pour accueillir le public en toute sécurité. La distanciation, le port du masque, les consignes de déplacement ont été respectés à la lettre. D'ailleurs, selon les informations, aucune éclosion n'est liée directement à la fréquentation d'un lieu culturel. Tout comme les acteurs du milieu, je me demande sincèrement sur quelles bases, sur quelles données la décision de fermer les lieux culturels a été prise. On est passés du vert au rouge. Hier, il y avait des spectacles, des expositions, et, aujourd'hui, plus rien.

Est-ce que la ministre de la Culture se rend compte des efforts faits par le milieu culturel? A-t-elle vu les avis de la Santé publique? Et qu'a-t-elle fait pour défendre son milieu?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je remercie la députée pour sa question. Oui, j'ai vu tous les efforts qui ont été faits. D'ailleurs, je salue les efforts qui ont été faits par les artistes, les artisans, le milieu. Nous sommes jeudi. Moi-même, ce soir, je devais être au Théâtre du Rideau vert pour la première. Je salue les artistes, les artisans, l'équipe magnifique qui est là-bas. Je sais qu'ils ont fait des efforts extraordinaires, qu'ils ont suivi les mesures, que la clientèle qui se présente dans ces institutions est une clientèle paisible.

Mais là n'est pas le problème, Mme la Présidente. Le problème est qu'actuellement nous faisons face à une pandémie. On nous dit de demeurer chez nous, de ne pas sortir, de ne pas aller faire la fête ou ne serait-ce que des soupers avec des amis à l'extérieur, d'être deux personnes à la maison maximum. Si vous êtes seul, vous avez droit d'avoir une personne chez vous. Et comment peut-on, d'un même souffle, dire aux gens : Allez au théâtre, allez au cinéma?

Et ça me brise le coeur. La décision que nous avons prise lundi affecte beaucoup de monde. Mais le problème, le problème de la COVID, est plus grand que nous. Actuellement... Et j'entendais M. le premier ministre nous dire, tout à l'heure : 16 décès aujourd'hui.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

Mme Roy : Alors, c'est pour ça qu'on se bat, on se bat contre une maladie. Et je suis là pour le milieu.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : La ministre a demandé au milieu culturel de se réinventer, ce qu'il a fait. On sait l'importance de la culture, surtout dans la période difficile qu'on vit. Le Dr Arruda a rappelé lui-même à maintes reprises l'importance de la culture pour la population, et un gouvernement soi-disant nationaliste devrait bien savoir ça. Les lieux culturels ont été fermés en premier et rouverts en dernier dans la première vague. La ministre peut-elle nous convaincre que fermer les lieux culturels était l'ultime solution?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Oui. Si la députée de Gaspé a la réponse, a l'ultime solution, j'aimerais bien qu'elle la partage avec nous. Nous gérons une pandémie. Ceci n'a jamais été vu, Mme la Présidente, dans ce Parlement. Nous faisons tout en notre pouvoir pour préserver la santé et la sécurité des gens. Et surtout, tout à l'heure, les gens de la banquette avant nous parlaient des craintes dans les écoles, dans le système de la santé. C'est pour ça que nous devons restreindre nos rassemblements, même s'ils sont beaux, s'ils font du bien à l'âme, Mme la députée, je suis tout à fait d'accord avec vous. Je suis là, je serai là. D'ailleurs, demain, nous ferons une annonce extrêmement importante pour soutenir le milieu.

Cet été, si nous avions fait comme les États-Unis...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

Mme Roy : ...il n'y aurait eu absolument rien de culturel. Et ce n'est pas ce qu'on voulait, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En deuxième complémentaire, Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Des aides seront annoncées pour les restaurants et les bars. Rien, encore, pour le milieu culturel. Pour les diffuseurs, c'est depuis mars qu'on attend. Il y a déjà des baisses de revenus énormes pour ces lieux culturels, les artistes, les artisans. Est-ce que la ministre peut les rassurer et garantir qu'il y aura des compensations, pas des prêts, là, de l'aide directe?

• (10 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci, Mme la Présidente. Et je vous remercie pour votre question parce que ça va me donner l'occasion de vous dire que, de l'argent direct, il y en a, il y en a eu, il y en aura d'autre. Elle a été annoncée tout au long de l'année, vous n'avez peut-être pas vu passer ces communiqués. Il y en a une bonne quinzaine, je vous invite à les lire.

Et, madame, vous me parlez des diffuseurs — je m'adresse à la présidente, mais j'entends ma collègue députée — il y a un 20 millions de dollars qui a été annoncé, mis sur la table, donné pour les diffuseurs, pour les aider, parce que nous pouvions avoir des représentations, entre autres, à faire ces nouvelles représentations, à s'adapter aux nouvelles consignes. Un autre 8 millions de dollars a été mis sur la table pour des entreprises qui, elles, ne sont pas couvertes, d'habitude, par la SODEC, le CALQ ni le ministère de la Culture.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

Mme Roy : Donc, nous sommes là avec de l'argent, et il y en aura d'autres. L'argent s'est rendu, madame.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Maintenant, je vais céder la parole à Mme la députée de Maurice-Richard.

Recours aux agences de placement privées
dans le réseau de la santé

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Mme la Présidente, depuis le début de la pandémie, on assiste à une explosion du recours aux agences de placement, et la situation, elle est très, très préoccupante. On assiste à la multiplication de réseaux parallèles qui engagent des gens au noir pour les revendre au réseau public à gros prix. On est rendus avec des réseaux, là, de pimps de la santé, des recruteurs qui vont dans la rue débaucher des infirmières, des préposés, puis qui prennent une cote sur leur salaire, des recruteurs qui exploitent des travailleurs sans papiers au noir, qui n'ont aucune formation pour aller travailler dans notre réseau public.

Le ministre peut-il faire preuve de transparence et déposer en cette Chambre le nombre d'agences avec lesquelles le réseau de la santé a des contrats et combien de travailleurs du réseau de la santé sont présentement engagés via ces agences?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci. Oui, Mme la Présidente, ça me donne l'occasion de rappeler que, le 1er janvier 2020, est entré en vigueur un règlement sur les agences de placement et les agences de recrutement de travailleurs étrangers temporaires qui impose notamment à toutes les agences d'obtenir un permis de la part de la CNESST. À ce jour, il y a 841 permis qui ont été délivrés, 63 dans le domaine de la santé et des services sociaux. Il y a eu 643 interventions, dont 90 dans le secteur de la santé et des services sociaux.

C'est des travailleurs vulnérables, on s'en occupe. Ils jouent un rôle fondamental, notamment dans le domaine de la santé. Et la CNESST fait aussi d'autres types d'interventions, de manière téléphonique, de façon à protéger ces travailleurs-là qui jouent un rôle essentiel. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Merci, Mme la Présidente. Je n'entends évidemment pas de réponse de la part du ministre de la Santé, qui, je comprends, par son absence de réponse, nous confirme qu'il n'a aucune idée, à l'heure actuelle, ni du nombre d'agences ni du nombre de travailleurs de la santé. D'ailleurs, le réseau, à l'heure actuelle, refuse de rendre disponible cette information-là, refuse de dire combien ils sont payés.

On parle de transparence. Je pense que la moindre des choses, ce serait que le ministre s'informe, nous dépose cette information et, surtout, mette un moratoire sur ces pratiques dangereuses.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Mme la Présidente, je pense que ce n'est peut-être pas habituel pour l'ancien gouvernement que les ministres travaillent ensemble sur des problèmes complexes. Alors, moi, je n'ai aucun problème à travailler de concert avec mon collègue au Travail. Puis je pense que c'est important que la population comprenne que, dans les enjeux que nous vivons par la pandémie, plusieurs ministères travaillent ensemble pour trouver des solutions communes. Puis j'apprécie beaucoup le travail qui est fait, en ce moment, avec mon collègue là-dessus parce que ce n'est pas un enjeu facile.

Du côté du ministère de la Santé, j'aimerais rappeler qu'au mois de mai, en plein milieu de la pandémie, nous avons publié un arrêté, qui est l'arrêté 38, l'arrêté 38, qui donne à chacun des P.D.G. dans tous les centres régionaux, qu'on appelle les CISSS ou les CIUSSS...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Dubé : ...qui donne la possibilité de revoir ces ententes-là. Puis je pourrai continuer là-dessus, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En deuxième complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Merci, Mme la Présidente. Ce qu'on apprend, là, c'est qu'au printemps dernier, en pleine pandémie, il y a des travailleurs qui ont été ramassés dans la rue, payés au noir, sans formation, puis qui ont été envoyés comme aides de service dans les CHSLD. On le sait très bien, que c'est... un vecteur de la propagation, c'est le transfert de personnel, et ces gens-là ont été envoyés d'un CHSLD à l'autre où il y avait des zones rouges.

Donc, j'aimerais ça savoir comment le ministre va s'assurer d'empêcher le transfert quand il ne sait pas combien il y en a puis qu'en plus de ça ces gens-là sont payés au noir.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Avec plaisir, Mme la Présidente. J'aimerais rappeler à la... Puis je n'ai pas eu le temps de compléter ma réponse, tout à l'heure, mais l'arrêt 38 demandait deux choses, demandait de s'assurer, aux P.D.G., qu'ils puissent baisser... qu'ils pouvaient baisser les prix, parce qu'il y avait des prix qui étaient astronomiques, qui n'étaient pas acceptables, mais, deuxièmement, deuxièmement, Mme la Présidente, qu'ils devaient s'assurer que toutes les règles de PCI, donc de protection et contrôle des infections, étaient mises en place.

Alors, quand la députée de Maurice-Richard dit : Comment on va s'assurer?, bien, c'est déjà dans notre plan, on a déjà demandé cette exigence-là aux P.D.G. dans le plan que nous avons déposé. Alors, je pense que toutes les mesures sont en place. Et nous allons travailler avec les P.D.G. pour s'assurer que ces mesures de protection... Parce que ce qui est important, c'est la santé de nos gens qui sont dans les CHSLD, et c'est là-dessus qu'on travaille. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, je cède la parole à M. le député de Laurier-Dorion.

État de situation des demandeurs d'asile au Québec

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Mme la Présidente, la deuxième vague est arrivée, et nos CHSLD continuent de manquer de bras. La pénurie de main-d'oeuvre est tellement critique que le ministre de la Santé n'arrive pas à mettre fin aux mouvements de personnes et aux agences de placement privées. Pendant ce temps-là, il y a des gens qui veulent aider dans notre système de santé, des travailleurs essentiels, demandeurs d'asile. Ils ont été partout, pendant la première vague, à risquer leur vie pour le Québec. Seulement dans notre système de santé, ils sont des centaines, voire des milliers. Pas besoin de faire un site Je contribue, ces Québécois et Québécoises veulent déjà contribuer. Mais la CAQ leur ferme la porte au nez.

Le ministre de la Santé va-t-il demander de l'aide à sa collègue de l'Immigration? Va-t-il lui demander de régulariser tous les anges gardiens qui travaillent dans nos services essentiels?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Encore une fois, une nouvelle occasion d'exprimer notre immense empathie, comme gouvernement, pour ceux qui sont des demandeurs d'asile. Vous savez que ça relève d'Ottawa. Vous savez que ma collègue est en communication constante avec son homologue à Ottawa. On a mis en place un programme spécial pour les demandeurs d'asile, on veut s'assurer qu'ils soient accueillis avec humanité, dignité et respect, et soyez convaincus que ma collègue travaille avec intensité pour atteindre cet objectif. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : C'est très bien qu'on veuille assurer le respect de ces gens qui ont risqué leur vie, là. Je vais vous donner un exemple concret, Mme la Présidente, celui de Mamadou Konaté. Il a travaillé en CHSLD, durant la première vague, en zone rouge, il a contracté la COVID. Malgré cela, il est retourné travailler. Sa demande d'asile ayant été refusée et parce que le premier ministre ne veut pas le régulariser, il est en prison, actuellement, il attend de se faire déporter vers la Côte d'Ivoire.

Pourquoi le ministre de la Santé se prive-t-il volontairement de son aide?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Évidemment, et mon collègue le sait très bien, le processus de renvoi relève d'Ottawa. Vous savez que l'immigration, c'est un domaine qui est partagé. Souvent, il y a des programmes qui sont gérés par Ottawa et par Québec.

Le cas de M. Konaté, qui est un ressortissant ivoirien, il a travaillé comme préposé au ménage dans un CHSLD depuis 2006, encore une fois, on suit ce dossier-là. Ma collègue est extrêmement au fait des derniers développements concernant ce monsieur, à qui, encore une fois, on va accorder toute l'attention qui s'impose. Mais on a les mains liées aussi à certains égards. On ne peut pas s'occuper d'un processus...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Boulet : ...qui relève d'un autre niveau de gouvernement. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En deuxième complémentaire, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Mme la Présidente, je m'adresse au premier ministre. C'est lui, Mamadou Konaté. Cet homme-là nous a dit la semaine dernière : Dès que je sors de prison, je retourne travailler en CHSLD. Le Québec a besoin de son aide, le Québec a besoin de tout le monde qui sont prêts à mettre l'épaule à la roue.

Mme la Présidente, pourquoi le premier ministre laisse un homme en prison alors que c'est nos aînés qui en ont besoin?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente, merci encore une fois. Je reconnais en ma collègue, encore une fois, son empathie pour les personnes qui vivent le sort de M. Konaté. Je le répète, c'est un ressortissant ivoirien, il était chez nous, il est un demandeur d'asile. Malheureusement, on a les mains un peu liées dans ce dossier-là. Mais sachez que ma collègue, encore une fois, est en communication constante avec le ministre de l'Immigration à Ottawa, et on va tout faire ce qui s'impose pour aider M. Konaté, dans la limite de nos pouvoirs. Merci, Mme la Présidente.

• (10 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Maintenant, pour la prochaine principale, M. le député de Bonaventure.

Accès aux soins de santé en Gaspésie

M. Sylvain Roy

M. Roy : Mme la Présidente, un mystère plane au-dessus de la baie des Chaleurs, on y recenserait le plus de cas de COVID par 100 000 habitants au Québec. Je vous explique ce mystère.

Les enjeux de l'Hôpital de Maria refont surface de manière permanente depuis des années — personnel épuisé, ruptures de services, intimidation — sont connus du ministère.

Une partie des citoyens d'Avignon, trop loin de Maria, doivent se tourner vers Campbellton, au Nouveau-Brunswick, pour avoir des services de santé. Le problème, c'est qu'à Campbellton les services se détériorent : fermeture de l'urgence, discrimination pour les patients du Québec, interdiction d'accès aux soins ambulatoires. Bref, la clientèle déserte Campbellton pour s'orienter vers Maria. Résultat des courses : l'Hôpital de Maria est surutilisé, avec un lit pour 560 habitants, un des plus hauts taux au Québec.

Cette médecine de brousse attachée avec de la broche est un accident qui se cherchait un coin de rue. La crise actuelle des cas de COVID était prévisible, car l'offre de services avait déjà atteint un point de rupture bien avant la pandémie.

Qu'est-ce que le ministre va faire pour régler le mystère de la baie des Chaleurs?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, je pense que le... Mme la Présidente, j'apprécie tellement l'exemple du député ici, parce que, lorsqu'on disait qu'on avait, même, l'enjeu d'un système de santé qui était très fragile même avant la COVID, c'est exactement ce que le député vient de nous dire, exactement ce qu'il vient de nous dire, que ce n'est pas uniquement parce qu'on a eu une première vague puis ce n'est pas uniquement parce qu'on a une deuxième vague, mais on avait un système qui avait été mis à mal, un système de santé qui était fragile. Alors, imaginez-vous, en ce moment, la situation que nos citoyens vivent non seulement à cause de la première vague... Puis notre personnel de santé est fatigué, on a eu un printemps qui a été excessivement difficile. On est au début d'une deuxième vague et on a un personnel qui est encore très difficile... qui est dans des conditions très difficiles.

Alors, moi, j'aimerais que les gens prennent acte de la question du député. Puis, quand on voit encore dans les rues des gens qui se posent des questions : Est-ce que la COVID existe vraiment?, puis qu'on a demandé aux citoyens de faire un effort, bien, c'est pour le personnel de santé à Maria que c'est important, parce que nous devons les aider à passer à travers cette vague-là. Merci, M. le député.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, M. le député de Bonaventure.

M. Sylvain Roy

M. Roy : Mme la Présidente, le ministère de la Santé est au courant qu'il y a trois mois nous avons proposé une solution pour désengorger Maria et nous sécuriser par rapport à la détérioration des services au Nouveau‑Brunswick. La solution, c'est l'implantation d'un service d'urgence à Matapédia et l'ajout de lits à Maria pour répondre à la moyenne québécoise de lits par patients.

Est-ce que le ministre va donner une directive aux CISSS pour qu'ils règlent la problématique en ouvrant une urgence à Matapédia et en ajoutant des lits à Maria?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Merci. Puis je continue d'apprécier la question, parce que le député comprend très bien que, la solution qu'il propose, qui pourrait être intéressante, il faut avoir le personnel pour mettre dans l'établissement. On peut ouvrir des salles d'urgence, on peut ouvrir des salles qui vont permettre de traiter les patients, mais il faut qu'il y ait du personnel soignant, il faut qu'il y ait des médecins, et c'est ça, notre enjeu, en ce moment. Et, on le redit à chaque fois, nous avons besoin de mieux travailler avec notre personnel infirmier.

Puis, je vous donne à titre d'exemple, nous sommes en pleine négociation avec la fédération des infirmières. J'espère que nous pourrons avoir un règlement, parce que, lorsque nous aurons un règlement, avec la stabilisation, non seulement, des ressources, bien, on sera capables de mettre le bon personnel dans les bons établissements...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Dubé : ...pour régler ces problèmes-là. Mais les gens doivent reconnaître qu'on a un enjeu majeur de personnel.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire, M. le député de Bonaventure.

M. Sylvain Roy

M. Roy : Mme la Présidente, si on donne des conditions humaines de travail au personnel, il va se présenter. À Maria, le personnel est à bout de souffle. Ils ne sont plus capables de donner le service parce qu'ils sont épuisés et sont intimidés.

Ceci étant dit, je reviens à la question. Ça nous prend une urgence à Matapédia et un ajout de lits et les services qui vont avec pour soutenir le personnel en place, qui n'est plus capable de répondre à la demande.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : ...ce qui me permet, Mme la Présidente, de compléter ma réponse parce que le député reconnaît bien que ça nous prend du personnel, puis, pour avoir du personnel, il faut être capable de finaliser l'entente que nous avons... qui est en train d'être négociée avec ma collègue du Conseil du trésor.

Je comprends l'impatience du député, puis on a tous la même impatience, on aimerait que la négociation du personnel infirmier, avec la FIIQ, notamment, la fédération des infirmières du Québec, soit derrière nous le plus rapidement possible pour attaquer la deuxième vague, et c'est ce que ma collègue travaille jour et nuit, je dirais, ces temps-ci. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Maintenant, je vais céder à la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Impact de la pandémie de coronavirus sur les
prestataires de l'aide de dernier recours

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Mme la Présidente, la pandémie a eu des impacts importants sur toute la société, en particulier sur nos plus démunis, nos plus fragiles. Tout a augmenté : le poulet, les légumes, le panier d'épicerie, les livraisons de l'épicerie. Les livraisons de la pharmacie augmentent aussi. Les rabais sont moins nombreux. Il faut dépenser plus pour acheter des produits sanitaires, des masques, du gel désinfectant. Un rien déraille le budget des plus vulnérables. Un rien déraille la vie de nos plus vulnérables.

Depuis mars, le ministre de la Solidarité sociale fait la sourde oreille aux demandes des personnes assistées sociales. Et pourtant, Mme la Présidente, ça presse. À Montréal, à Québec, on le voit : de plus en plus de gens dans la précarité, de plus en plus de gens qui basculent dans la rue, de plus en plus d'itinérance.

Le ministre, Mme la Présidente, doit annoncer une aide d'urgence pour les personnes les plus fragiles de notre société.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais profiter de l'occasion pour saluer ma nouvelle porte-parole de l'opposition officielle dans les affaires de solidarité sociale. On se connaît, on s'est rencontrés. Je pense qu'on va approfondir notre relation au fil du temps, mais j'ai remarqué rapidement qu'elle était extrêmement préoccupée par le sort des personnes à faibles revenus, les personnes socialement vulnérables, et on partage le même intérêt. D'ailleurs, je lui ai donné l'information sur toutes les mesures d'assouplissement qu'on a mises en place depuis le début de la pandémie pour venir en aide aux personnes, notamment, assistées sociales et les personnes qui reçoivent des prestations de solidarité sociale. Il y a des augmentations, il y a eu des allègements extrêmement importants. Je suis en communication constante avec, notamment, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, et on a été très actifs avec Je Bénévole, on a fait un appel à la solidarité avec la Fédération des centres d'action bénévole du Québec. Ça a donné lieu à plus de 20 000 arrimages entre des personnes qui voulaient faire du bénévolat et les besoins des organismes communautaires, notamment les banques alimentaires.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : En terminant.

M. Boulet : Nous sommes présents. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Première complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Mme la Présidente, le ministre parle d'assouplissements, il parle des organismes communautaires. Tout ça, c'est très, très bien, mais ce n'est pas de la charité qu'ils veulent, ces gens-là, ils veulent une aide directe pour vivre une vie digne. Je sais que mon collègue est ministre de l'Emploi, ministre du Travail, ministre responsable de la région de la Mauricie, mais il est aussi ministre de la Solidarité sociale, je l'entends. Est-ce qu'il peut annoncer, là, une aide d'urgence maintenant, à nos plus vulnérables?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Souvenez-vous, je réitère à ma collègue que nous avons reconduit les allocations pour l'aide temporaire à l'emploi. On a suspendu toutes les sanctions qui devaient s'appliquer pour ces personnes-là, on a réduit au minimum les demandes administratives les concernant, un formulaire d'aide financière en ligne, les activités de recouvrement ont été suspendues. Oui, on analyse l'augmentation du panier de consommation à l'échelle canadienne. Vous savez que c'est un indice socioéconomique qui nous est donné par Statistique Canada. Et on fait et on va continuer de faire ce qui s'impose pour eux. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : J'entends le ministre, mais là c'est un cri du coeur, aujourd'hui, justement, du Collectif pour un Québec sans pauvreté, des organismes qui portent la voix de ces plus démunis là. Ils veulent une aide d'urgence maintenant, une aide directe, et on attend le ministre.

Est-ce qu'il peut aujourd'hui nous dire qu'il va répondre aux demandes du Collectif pour un Québec sans pauvreté?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le ministre.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Encore une fois, merci pour la question. Des millions pour les banques alimentaires, pour le Programme de soutien à l'action bénévole, pour les organismes d'hébergement des femmes victimes de violence, pour le Club des petits déjeuners, une aide d'urgence pour les besoins financiers supplémentaires exprimés par les organismes communautaires. Et vous savez qu'on est en action pour mettre en place un plan d'action gouvernemental pour l'action communautaire, qui est inexistant, Mme la Présidente, depuis 2004 que les organismes communautaires et les personnes à faibles revenus ont des attentes. Il y a eu des millions pour les personnes en itinérance. On a un inventaire et on a fait ce qui s'imposait. Merci, Mme la Présidente.

• (10 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le ministre. Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

Et nous allons maintenant passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je vais céder la parole à M. le ministre responsable de la Langue française.

Rappeler aux membres de l'Assemblée leur devoir de promotion de la
langue française et leur demander de prononcer leurs allocutions
devant la Tribune de la presse en français, sauf exception

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Marguerite-Bourgeoys, la députée de Mercier, le chef du troisième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale réitère que la seule langue officielle du Québec est la langue française;

«Que l'Assemblée nationale réitère que la langue française permet au peuple québécois d'exprimer son identité;

«Que l'Assemblée nationale réitère que la langue française est notamment la langue de l'État et des communications au Québec;

«Que l'Assemblée nationale insiste sur le devoir des élus de la nation québécoise de promouvoir, de valoriser et de défendre l'utilisation de la langue française;

«Que l'Assemblée nationale rappelle que les allocutions des membres de l'Assemblée nationale avec la Tribune de la presse du Parlement du Québec devraient être faites, comme le veut l'usage et la tradition, en français, sauf exception pour des raisons de sécurité et de santé publique.» Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée... Il faut faire le vote, même si c'est consensuel? Alors, très bien.

Alors, en application de l'ordre spécial, je vais inviter les leaders parlementaires à nous donner le vote de leurs groupes, en commençant par M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, en conséquence, la motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente. Est-ce que ce serait possible d'envoyer une copie de la motion à la Tribune de la presse, Mme la Présidente, s'il vous plaît?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, ce sera fait.

Nous en sommes maintenant à la prochaine motion sans préavis, et je vais céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

Souligner la Journée de commémoration des femmes et
des filles autochtones disparues et assassinées

M. Kelley : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la ministre responsable des Affaires autochtones, la cheffe du deuxième groupe d'opposition, le chef du troisième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée de commémoration pour les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées qui se tiendra le 4 octobre prochain;

«Qu'elle souligne qu'il y a maintenant plus d'un an, étaient déposés deux rapports d'enquête fondamentaux mettant [la] lumière [sur] plusieurs injustices vécues par les autochtones et proposant l'urgence d'instaurer des actions concrètes;

«Qu'elle affirme que plusieurs appels à la justice du rapport d'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées restent encore à être mis en application;

«Qu'elle affirme également qu'il reste la majorité des appels à l'action du rapport de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec restent à compléter;

«Qu'elle affirme qu'il y a lieu d'intensifier le travail pour la mise en application de ces appels à la justice et à l'action en collaboration avec les partenaires autochtones;

«Qu'elle rappelle que la mort tragique de Joyce Echaquan cette semaine est l'exemple concret que nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir afin d'offrir aux peuples autochtones toute la dignité qui leur revient de droit;

«[Enfin, que] les membres de l'Assemblée nationale observent une minute de silence en mémoire de toutes les femmes et [les] filles autochtones disparues ou assassinées et leurs familles.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, nous allons passer au vote selon l'ordre d'application de l'ordre spécial, et je suis prête à reconnaître le représentant de l'opposition officielle. M. le leader?

M. Fortin : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du deuxième groupe... Ah! Pardon. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Et, en conséquence, la motion est adoptée. Et je vous invite à vous lever pour que nous puissions observer une minute de silence à la mémoire des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées.

• (10 h 55    10 h 56) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Vous pourrez vous rasseoir.

Et nous en sommes maintenant à la troisième motion sans préavis, et je vais céder la parole à Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.

Demander au premier ministre de s'entendre dans les meilleurs délais avec les autorités
autochtones sur les définitions des dispositions et des principes de la Déclaration
des Nations unies sur les droits des peuples autochtones afin d'élaborer
et d'adopter les modifications législatives nécessaires

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec le premier ministre, avec le député de Jacques-Cartier, le chef du troisième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rappelle qu'il y a un an, elle recevait le rapport de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec comportant 142 appels à l'action;

«Qu'elle rappelle que le gouvernement s'est engagé, le 8 octobre 2019 à reconnaître les principes et à négocier la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones;

«Qu'elle souligne que selon le sondage Léger publié le 12 août dernier, 91 % des [répondants] pensent que l'État québécois a un rôle important à jouer dans l'atteinte et le maintien de l'égalité entre les Premières Nations, les Inuit et les Québécois [et Québécoises];

«Qu'elle souligne que le plan d'action de [l'Association] des premières nations du Québec et du Labrador sur le racisme et la discrimination, rendu public le 29 septembre, nous rappelle l'importance de travailler en alliance avec les peuples autochtones et qu'il invite l'ensemble de la société québécoise et ses institutions à poser des gestes concrets afin d'en arriver à un meilleur vivre ensemble;

«Qu'elle rappelle que ces alliances sont nécessaires pour que ces gestes créent un lien de confiance et brisent la méfiance;

«Qu'elle prenne acte que le rapport de la Commission d'enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec, dans son appel à l'action [n°] 3, appelle le gouvernement à procéder, en collaboration avec les autorités autochtones, à l'élaboration et à l'adoption d'une loi garantissant la prise en compte des dispositions de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones dans le corpus législatif relevant de ses compétences; et

«Que par conséquent, l'Assemblée nationale du Québec demande au premier ministre du Québec de s'entendre dans les meilleurs délais possible avec les autorités autochtones sur les définitions des dispositions et des principes de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones afin d'élaborer et d'adopter les modifications législatives nécessaires.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Un petit correctif amical à la lecture de ma collègue : la motion est présentée conjointement avec la cheffe de l'opposition officielle.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Merci. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, il y aurait consentement pour un débat de deux minutes par intervenant dans l'ordre suivant : la cheffe du deuxième groupe d'opposition, le premier ministre du Québec, le député de Jacques‑Cartier ainsi que le chef du troisième groupe d'opposition.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Je vais vous recéder la parole, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition.

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. En fait... Oups!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui? Y a-t-il eu une erreur?

M. Jolin-Barrette : ...en fait, j'avais l'information...

• (11 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Merci. Alors, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, la parole est à vous.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente. En fait, je suis très heureuse qu'on dépose ensemble cette motion aujourd'hui. Pourquoi? Bien, parce que je pense que, depuis un an, ce que j'entends, dans l'enceinte du Parlement du Québec, c'est une volonté réelle de faire en sorte que les choses changent dans nos relations avec les Premières Nations, nos relations avec les Inuits. Et, bien sûr, dans les derniers temps, dans les derniers mois, il y a eu beaucoup d'insatisfaction nommée de la part des Premières Nations à l'effet que notre chef, que le chef de notre État à nous, c'est-à-dire le premier ministre du Québec, n'était pas nécessairement toujours au rendez-vous. Et je pense qu'aujourd'hui ce qu'il vient nous dire, c'est qu'il est prêt à être au rendez-vous. Et ça, ça me rend heureuse.

Ça me rend heureuse pourquoi? Bien, d'une part, parce que, vous savez, c'est difficile, lorsqu'on construit une maison, de commencer par installer les fenêtres ou même le toit, si on n'a pas installé les fondations. Si on n'a pas construit les murs, c'est difficile d'installer une fenêtre.

Alors, je pense que, depuis le dépôt du rapport ENFFADA, le dépôt du rapport Viens, il y a eu du travail qui a été fait pour essayer d'installer des fenêtres, mais le fondement n'est pas là, les fondations n'étaient pas là. Et c'est quoi, les fondations? Bien, les fondations, c'est la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Pourquoi? Bien, parce que ça nous donne le cadre, ça nous donne, bien, les fondations de la maison. Et ça, ce n'est pas rien. Et ça, bien sûr, ce n'est que de nation à nation, de chef à chef qu'on peut arriver à déterminer qu'est-ce qui est écrit là-dedans, c'est quoi, le sens de ces mots-là. Par exemple, quand on parle de consentement libre et éclairé, est-ce qu'on parle d'un droit de veto? Je pense que ça a le mérite d'être clarifié. Et c'est à ça que ma motion invite le Québec, et les Premières Nations, et les Inuits, à s'entendre sur le sens des mots, pour essayer d'éviter, disons, des situations difficiles, embêtantes.

Et je pense que, lorsque l'APNQL nous appelle à un plan d'action pour lutter contre le racisme et la discrimination auprès des Premières Nations, ils nous appellent aussi à faire en sorte que tout le monde, on mette l'épaule à la roue, tous les Québécois et toutes les Québécoises, toutes les institutions et, bien sûr, l'Assemblée nationale.

Et, je vous dirais, d'entrée de jeu, puisque ça me laisse... ça me donne de l'espoir que, par cette motion, on pose une première pierre pour atteindre la recommandation n° 3 du rapport Viens, qui est à l'effet de donner un cadre législatif à cette déclaration des droits des Premières Nations, eh bien, cette première pierre là m'amène tout de suite à annoncer qu'il y a la recommandation 4 du rapport Viens qui nous dit qu'il faut commencer à ramasser du «data», parce qu'on ne connaît pas les Premières Nations. Et on a avantage à les connaître beaucoup mieux, parce qu'ils ont tellement à nous apprendre, Mme la Présidente.

Et je terminerais en disant : Je suis contente que le premier ministre a accepté ma main tendue, ce matin, parce que je vois les autres chefs des autres provinces canadiennes qui n'hésitent pas — je pense à M. Ford — qui n'hésitent pas à s'asseoir avec les Premières Nations pour donner des enlignements, et qu'à partir de ce moment-là, bien, ce travail-là va permettre d'enligner l'ensemble du travail de l'Exécutif du gouvernement du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition. Maintenant, je cède la parole à M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, merci, Mme la Présidente. Ça fait deux ans aujourd'hui que j'ai été choisi pour être premier ministre du Québec, et j'avais dit, durant la campagne électorale, que je souhaitais avoir une entente avec chacune des nations, avec chacune des Premières Nations et des Inuits. Et j'ai effectivement rapidement, à Wendake, rencontré les chefs des différentes nations, 11 nations, et je leur ai dit que je voulais signer une entente, un peu comme le gouvernement du Parti québécois l'avait fait avec les Cris, d'être capable de le faire avec chacune des nations. Bon, il y a des chefs qui m'ont dit : C'est plus compliqué que ça. Nous, on représente 54 communautés, donc, idéalement, il faudrait faire 54 ententes avec chacune des communautés. On a dit : Très bien. La ministre des Affaires autochtones a eu des rencontres. Il y a eu aussi des rencontres techniques.

Entre-temps, on a eu le rapport Viens et les recommandations du rapport Viens. Puis, je peux vous dire, là, je les lis et les relis régulièrement, puis on avance sur les recommandations.

D'abord, il y a plusieurs recommandations qui touchent les logements sociaux. On vient de faire une entente, enfin, avec le gouvernement fédéral pour nous donner des moyens, ça va nous permettre d'agir de ce côté-là. Il y a des recommandations qui touchent aux services de traduction. On travaille, actuellement, puis c'est avancé, sur les services de traduction. On a demandé aussi la création de postes d'agent de liaison, c'est en marche d'être fait, même il y a certains postes qui ont été créés.

Il y a évidemment toute la question de la formation, puis, quand on regarde, puis je ne peux pas ne pas prendre quelques secondes pour rappeler les événements terribles à Joliette, à l'hôpital de Joliette, on a une responsabilité, effectivement, de donner une formation à tous les employés des réseaux, éducation, santé et autres, pour lutter contre ce genre de préjugés contre les personnes autochtones. Et actuellement on a de prêtes ces formations, on commence à les mettre en place.

Je suis toujours dans les recommandations du rapport Viens. Il y a une série de recommandations sur comment on traite les détenus dans les centres de détention. Il doit y avoir des activités qui sont sécurisantes, culturellement, pour les autochtones.

Ma collègue travaille sur des annonces qu'on devrait faire dans les prochaines semaines concernant les services de répit. On a aussi travaillé très fort, avec mon collègue le ministre délégué à la Santé, sur toute la question de la protection de la jeunesse. Donc, il y a du travail qui se fait de ce côté-là.

On a, dans le dernier budget, Mme la Présidente, mis 200 millions de dollars de côté. Le défi, c'est que, pour faire des ententes, il faut être deux parties. Bon, pour toutes sortes de raisons, il y a des nations qui refusent de rencontrer la ministre, voudraient que je négocie avec les 54 communautés. Je pense, tout le monde va comprendre que je ne peux pas commencer à entreprendre des ententes, moi-même, avec 54 communautés. Mais le 200 millions, il est disponible pour ajouter des services. Donc, ce qu'on veut, c'est un partenaire qui vient s'asseoir avec la ministre puis qu'on puisse avancer, parce qu'on n'ira pas de façon unilatérale décider : Bien, voici comment on utilise le 200 millions. Je veux avoir l'accord des différentes nations, des différentes communautés. Je rencontre demain le chef Ghislain Picard. J'espère qu'on va être capable, à partir de là, de donner un nouvel élan pour qu'on puisse continuer l'application des recommandations, parce qu'effectivement ce qui s'est passé à Joliette, ça nous montre qu'il y a une urgence d'agir pour lutter contre la discrimination, puis en particulier envers les peuples autochtones. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le premier ministre. Et maintenant je cède la parole à Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, Mme la Présidente. Quand j'ai vu les images, suite au décès de Joyce Echaquan, j'ai trouvé ça, Mme la Présidente, absolument insupportable, comme tout le monde, comme tout le monde ici, insupportable et insoutenable. Et, lorsque je lisais les commentaires de son mari, et qu'il y avait son fils de huit ans qui se promenait, puis qu'on apprenait, en lisant, en écoutant l'entrevue, qu'il ne savait pas encore que sa mère était décédée, je me suis dit : Ce petit garçon là va apprendre deux choses. Il va apprendre que sa mère est partie, puis un jour il va apprendre comment ça s'est produit. Et je me disais : C'est ça aussi, notre devoir de réconciliation.

Le soir, en appelant à la maison les enfants, je me suis dit : Est-ce que je vais leur en parler ou pas? Et c'est ma fille de 12 ans qui m'a dit : Est-ce que tu as vu? Est-ce que tu as vu ce qui s'est passé? Est-ce que tu as vu le vidéo? C'est pour eux qu'on bâtit le Québec de demain, c'est pour que cette réconciliation commence avec nos plus jeunes. Michel Audet, aujourd'hui, disait : Ça commence par l'éducation, c'est ça qui devrait être notre priorité.

Ce qui s'est passé à Joliette, Mme la Présidente, ça nous renvoie au visage tout le travail que nous avons à faire pour offrir aux peuples autochtones toute la dignité qui leur revient, tout le respect qui leur revient. Cette dignité, ce respect, on le doit aux Abénaquis, aux Algonquins, aux Attikameks, aux Cris, aux Malécites, aux Micmacs, aux Innus, aux Naskapis, aux Hurons-Wendat, aux Mohawks et aux Inuits. On le doit à toutes ces nations autochtones. Et collectivement nous devons nous assurer qu'il y ait cette réconciliation et qu'on soit capables d'avoir un dialogue positif pour la suite des choses, Mme la Présidente.

À 125 ici, dans cette Chambre, 125 députés, nous avons collectivement une obligation de résultat, et, Mme la Présidente, je suis convaincue que nous en sommes capables. Merci.

• (11 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la cheffe de l'opposition officielle. Et maintenant je cède la parole à M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la Présidente, il y a quelque chose de brisé dans notre société : la confiance, la confiance que les peuples autochtones ont à l'égard des autorités, des institutions, voire de la population québécoise.

Ce sentiment est, bien sûr, exacerbé, depuis quelques jours, depuis les événements tragiques qui ont mené au décès de Mme Joyce Echaquan à l'hôpital de Joliette. Armée d'un grand courage, elle sera parvenue, dans un ultime geste, à nous livrer un témoignage cru, difficile, authentique. Elle nous a montré à tous ce qu'elle subissait, de l'agressivité, des insultes, du racisme, alors qu'elle était sans défense, en détresse, de la part de supposées professionnelles de soins... ou d'anciennes professionnelles de soins, maintenant.

Ce drame bouleverse le Québec, avec raison. Depuis mardi, on a, bien sûr, entendu toutes les femmes et les hommes de bonne volonté exprimer leur dégoût, leur indignation et adresser leurs condoléances à la famille et aux proches, que je sais sincères. Je leur réitère les miennes. D'ailleurs, vous n'auriez jamais dû avoir à vivre ça. C'est un échec collectif d'une infinie tristesse.

Si quelques sceptiques doutaient encore de l'urgence d'agir lors du dépôt du rapport de la commission Viens, la mort ignoble de Joyce Echaquan vient de les confondre. Cet événement commande qu'on mette oeuvre sans plus de délai les appels à l'action 74 et 75, qui portent sur la sécurisation culturelle dans les services de santé.

J'invite d'ailleurs le gouvernement à relire attentivement le rapport Viens, car il dicte le chemin. Il représente les premiers jalons du parcours menant à la réconciliation durable entre les peuples. Idéalement, il mettrait un terme aux tergiversations, aux consultations, aux belles paroles, qui ont assez duré, tout le monde en conviendra. Il contient les ingrédients nécessaires pour mettre un terme définitif à notre incapacité collective à régler ce problème de fond, soit l'injustice dont sont trop souvent victimes les membres des Premières Nations et de la nation inuite.

Un geste fort serait aussi de se mettre résolument en marche vers la mise en oeuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. En 2018, le Parti québécois s'est engagé à la ratifier. C'est une affirmation importante, qui n'en demeure pas moins symbolique si d'autres actions concrètes ne sont pas lancées. Nous devons amorcer un véritable rapprochement, de réelles discussions, faire de vrais pas les uns vers les autres. Il ne faut pas juste entendre, il faut écouter; pas juste voir, il faut bien regarder. Nous devons cesser de décevoir fois après fois les Québécoises et les Québécois, autochtones et non autochtones, qui réclament et qui sont prêts pour un meilleur vivre-ensemble.

Et, en terminant, une demande pour le gouvernement du Québec. Hier, le député de Vachon, sur différentes tribunes, est venu renforcer le message de la ministre des Affaires autochtones, il nous a tous demandé de ne pas faire de politique. Soit. Alors, ma demande au premier ministre, qui a créé le groupe des sept, qui va travailler sur la discrimination des minorités visibles et autochtones et qui ne compte que des députés de la Coalition avenir Québec, je lui demande aujourd'hui de permettre qu'on ajoute un ou une représentante de chacune des formations de l'opposition de l'Assemblée nationale. Et là on aura l'assurance que ce n'est pas la politique qui va guider notre action, mais le rassemblement nécessaire pour l'avenir des Premières Nations. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

Mise aux voix

Alors, en application de l'ordre spécial, j'inviterais maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur cette motion, en commençant par M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. En conséquence, la motion est adoptée.

Nous sommes toujours à la rubrique des motions sans préavis, et je vais maintenant céder la parole à M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Bérubé : Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la cheffe du deuxième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale souligne qu'il y a 50 ans, en octobre 1970, pas moins de 497 Québécoises et Québécois ont été injustement arrêtés et emprisonnés, et 36 000 personnes ont fait l'objet d'une perquisition abusive en raison de leur allégeance politique indépendantiste.

«Qu'elle demande des excuses officielles de la part du premier ministre du Canada, ainsi que l'ouverture complète des archives de toutes les institutions fédérales impliquées dans ces tristes événements, et ce, afin de faire, une fois pour toutes, la lumière sur cette période trouble de notre histoire.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le chef du troisième groupe d'opposition. M. le leader du gouvernement, vous voulez intervenir... Non, je dois poser une question. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en sommes maintenant à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions, et je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie et du travail entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 51, Loi visant principalement à améliorer la flexibilité du régime d'assurance parentale afin de faciliter la conciliation famille-travail, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland, ainsi que le mardi 6 octobre 2020, de 10 heures à midi, aux salles Louis-Joseph-Papineau et Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 53, Loi sur les agents d'évaluation du crédit, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, ainsi que le mardi 6 octobre 2020, de 10 heures à midi, à la salle du Conseil législatif;

La Commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 45, Loi concernant principalement la nomination et le mandat des coroners et du coroner en chef, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, ainsi que le mardi 6 octobre 2020, de 10 heures à midi, à la salle Pauline‑Marois;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 52, Loi visant à renforcer le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements privés, le mardi 6 octobre 2020, de 10 heures à midi, à la salle Marie‑Claire-Kirkland. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bon, alors, merci beaucoup, M. le leader.

Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs se réunira en séance de travail virtuelle afin d'organiser les travaux de la commission, le vendredi 2 octobre, de 9 heures à midi, et le mardi 6 octobre, de 8 h 30 à 10 heures.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Et, s'il n'y a pas de question, moi, je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi 2 octobre 2020, M. le député de Rimouski s'adressera à Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants sur le sujet suivant : La nécessité de tenir une enquête publique indépendante sur la gestion de la pandémie de la COVID-19 dans les CHSLD.

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

Et je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 19)

(Reprise à 11 h 28)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, bonjour. Nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour.

Et, avant de débuter, j'ai un débat de fin de séance à annoncer. Alors, en plus du débat de fin de séance annoncé hier, je vous informe que deux autres débats de fin de séance se tiendront aujourd'hui. Le deuxième débat portera sur une question adressée par Mme la députée de Saint-Laurent au ministre de l'Éducation au sujet des délais de dépistage dans le milieu scolaire et la nécessité d'un corridor sanitaire scolaire. Le troisième débat portera sur une question par Mme la députée de Bourassa-Sauvé au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale au sujet de l'absence d'aide en lien avec la hausse du coût de la vie en situation de pandémie de COVID-19 pour les personnes les plus vulnérables de notre société.

Alors, M. le leader du gouvernement, pour la suite des travaux.

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Pourriez-vous appeler l'article 7 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 64

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, M. le leader de l'opposition officielle, M. le leader du deuxième groupe d'opposition, M. le leader du troisième groupe d'opposition, vous avez... M. le leader adjoint du gouvernement, avez-vous des indications? Ah! je pense que c'est une petite erreur dans mes feuilles. À l'article 7 du feuilleton, c'est bien ça?

M. Caire : Appeler le projet de loi n° 64, Mme la Présidente, le débat sur le principe du projet de loi n° 64, Mme la Présidente.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, juste un petit instant.

M. Caire : Et, là-dessus, peut-être reconnaître M. le ministre de la Justice pour son intervention.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon, bien, M. le ministre de la Justice, pour votre intervention. Et je vais avoir le temps de changer ça. Merci.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, les récentes fuites de données qui ont compromis la confidentialité des renseignements personnels d'un grand nombre de Québécois et de Québécoises ont soulevé de nombreuses inquiétudes relatives à la vie privée des citoyens et des citoyennes. Notre gouvernement a attaqué rapidement cette problématique, et ce, sur trois fronts.

Premièrement, le projet de loi n° 53, la Loi sur les agents d'évaluation du crédit, introduit notamment un gel de sécurité, la note explicative et l'alerte de sécurité, des mesures qui aideront à mieux protéger les citoyens et les citoyennes contre de potentielles fraudes liées à la fuite de données personnelles.

Ensuite, notre gouvernement a déposé une politique gouvernementale en matière de cybersécurité. Enfin, le 12 juin dernier, notre gouvernement présentait avec fierté le projet de loi n° 64. Cette pièce législative est un élément crucial de la réponse de notre gouvernement afin de moderniser et de renforcer la protection des renseignements personnels.

Ce projet de loi vise une révision de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et du volet protection des renseignements personnels de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et de la protection des renseignements personnels.

Le projet de loi n° 64 vise particulièrement à favoriser le contrôle du citoyen sur ses renseignements ainsi que la confidentialité de ces derniers, à rehausser la responsabilisation des entreprises, à moderniser les règles applicables au consentement ainsi que les pouvoirs et les fonctions de la Commission d'accès à l'information, et finalement à encadrer les partis politiques.

Le projet de loi représente une avancée réelle en matière de protection des renseignements personnels pour les citoyens et les citoyennes. Afin de renforcer le contrôle des citoyens et des citoyennes sur leurs renseignements personnels, il est proposé d'inclure un droit à la portabilité. Ce droit permet aux personnes d'obtenir les renseignements personnels qu'ils ont fournis sur un support technologique structuré et couramment utilisé. À la demande de la personne, ces renseignements pourront également être communiqués à toute autre personne et tout autre organisme autorisé par la loi à recueillir un tel renseignement.

Les capacités actuelles de recherche dans un contexte technologique, notamment par le biais de moteurs de recherche, ainsi que la permanence de l'information publiée en ligne soulèvent de nombreux enjeux en matière de protection de la vie privée. Le projet de loi propose donc un encadrement et un droit au déférencement. Une personne pourrait se faire désindexer un hyperlien rattaché à son nom, c'est-à-dire de faire retirer le lien hypertexte d'un moteur de recherche ou faire cesser la diffusion d'un renseignement personnel qui la concerne lorsque sa diffusion contrevient à la loi ou à une ordonnance judiciaire. La personne concernée pourrait faire de même ou faire déplacer le lien hypertexte si la diffusion du renseignement lui cause un préjudice grave relatif au droit ou au respect de sa réputation et de sa vie privée.

Par ailleurs, dans le contexte technologique d'aujourd'hui, nous sommes conscients que les décisions ne sont pas toutes prises par des êtres humains. Les décisions fondées exclusivement sur un traitement automatisé de renseignements personnels sont de plus en plus fréquentes et sont susceptibles d'affecter les personnes. Il s'avère dès lors nécessaire de moderniser les lois sur la protection des renseignements personnels pour favoriser la transparence du processus décisionnel pour que les personnes puissent garder le contrôle sur leurs renseignements personnels et pour s'assurer que la bonne décision soit rendue.

Il est proposé, dans un premier temps, que les organisations aient l'obligation d'informer la personne concernée lorsque ses renseignements personnels sont utilisés pour rendre une décision fondée exclusivement sur un traitement automatisé. La personne concernée pourra également connaître les renseignements utilisés par l'organisation ayant mené à la décision.

De plus, l'organisation devrait fournir les raisons ainsi que les principaux facteurs et paramètres qui auront permis de rendre la décision et informer la personne concernée de son droit de faire rectifier les renseignements personnels utilisés pour rendre cette décision. Cette orientation permet une transparence sans nuire au secret industriel. Finalement, dans le secteur privé, il est proposé que la personne concernée ait l'occasion de présenter ses observations à un membre du personnel de l'entreprise en mesure de réviser la décision.

Dans l'objectif de responsabiliser davantage les organismes publics, les entreprises et les partis politiques, le projet de loi introduit dans la loi, de façon explicite, le principe selon lequel chaque organisation est responsable de la protection des renseignements personnels qu'elle détient. Aux fins de l'exercice de cette responsabilité, il est proposé que chaque organisation ait l'obligation d'adopter les règles encadrant sa gouvernance à l'égard de la collecte, de l'utilisation, de la communication, de la conservation et de la destruction des renseignements personnels.

Le projet de loi vient corriger une lacune et encadre la conservation et la destruction des renseignements personnels détenus par les entreprises en les obligeant à détruire ou à anonymiser un renseignement personnel lorsque les fins pour lesquelles il a été recueilli sont accomplies. Le projet de loi propose une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée soit exigée pour tout projet de système d'information ou de prestation électronique de services impliquant des renseignements personnels. Ainsi, les systèmes d'information ou de prestation électronique de services des organismes publics, des entreprises et des partis politiques seraient conçus, dès le départ, en tenant compte de la protection des renseignements personnels, ce qui devrait diminuer de manière importante les risques de fuite de données personnelles.

Le principe de protection par défaut implique que les données à caractère personnel soient automatiquement protégées sans qu'aucune action supplémentaire ne soit requise de la part d'un particulier. Ainsi, lorsqu'un produit ou un service, par exemple un média social, offre des paramètres de confidentialité, ces paramètres doivent, au départ, assurer le plus haut niveau de confidentialité. Par la suite, la modification de ces paramètres doit nécessiter une intervention de la personne concernée dans l'objectif de renforcer la confidentialité. Le projet de loi inclut le principe de protection par défaut dans la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

De plus, il est proposé, d'une part, d'ajouter une obligation voulant que le consentement soit demandé en termes simples et clairs. En outre, le consentement à l'utilisation ou à la communication des renseignements personnels devrait être demandé de façon distincte pour chaque fin et séparément de toute information communiquée aux personnes, notamment le consentement à la relation contractuelle. Ces exigences permettront aux citoyens et aux citoyennes de prendre plus facilement connaissance des informations fournies par les organisations et ainsi favoriser un consentement éclairé.

Certains renseignements dits sensibles nécessitent un degré important de protection considérant les attentes plus élevées en matière de vie privée. Bien que les attentes en matière de vie privée liées à un renseignement personnel dépendent du contexte, certains renseignements sont généralement reconnus comme sensibles, notamment les renseignements de santé et ceux d'ordre financier. Il est proposé de renforcer le contrôle des personnes en exigeant un consentement exprès pour l'utilisation de ces renseignements à d'autres fins sur la base d'un consentement. Il en est de même pour une communication de ces renseignements avec consentement.

Par ailleurs, les jeunes sont avides de nouvelles technologies et grands utilisateurs d'Internet. Ils y partagent des vidéos, des photos, des opinions et d'autres renseignements personnels. Les personnes mineures devraient bénéficier d'une protection particulière à l'égard de la collecte, de l'utilisation et de la communication de leurs renseignements personnels. Il est proposé d'exiger que, pour les jeunes de moins de 14 ans, la collecte, l'utilisation et la communication de leurs renseignements personnels nécessitent le consentement du titulaire de l'autorité parentale.

Par ailleurs, il est proposé de conférer à la Commission d'accès à l'information le pouvoir d'émettre des sanctions administratives pécuniaires et pénales importantes. Ces sanctions doivent être assez élevées pour mener les entreprises à modifier leurs pratiques ou à investir dans la sécurité de l'information afin de mieux protéger les renseignements personnels des citoyens et des citoyennes.

Ensuite, le projet de loi propose d'assujettir les renseignements personnels détenus sur les électeurs par les entités autorisées, incluant les partis politiques, à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Les partis politiques seraient donc visés par les règles applicables aux entreprises mentionnées précédemment ainsi qu'au pouvoir de surveillance de la Commission d'accès à l'information. Cependant, pour tenir compte de leurs particularités, certaines dispositions de cette loi ne leur seraient pas applicables et seraient remplacées par des dispositions spécifiques prévues à la Loi électorale.

Les consultations particulières se sont tenues les deux dernières semaines, nous ont permis d'entendre des intervenants provenant de divers horizons, avec des points de vue variés, venus nous partager leur expertise et leur opinion sur cette importante pièce législative. La commission a également reçu plusieurs mémoires provenant d'autres groupes ou personnes. Leurs différentes opinions et leurs nombreuses recommandations nous permettront de nourrir notre réflexion et mieux nous outiller avant l'amorce de l'étude article par article du projet de loi. Je les remercie une fois de plus pour leur apport. J'ai été à leur écoute et je reste toujours disposé à bonifier le projet de loi.

Il ressort de ces consultations une volonté unanime de moderniser les lois en matière de protection des renseignements personnels. Tous constatent que le gouvernement devait agir étant donné la désuétude des lois actuelles. Notre gouvernement s'est attelé à produire une importante réforme des lois en matière de protection des renseignements personnels qui s'inspire des plus récentes lois ailleurs dans le monde et des meilleures pratiques en ce domaine.

Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Daniel Therrien, a d'ailleurs estimé qu'il s'agissait, de façon générale, d'un excellent projet de loi. M. Therrien a invité le gouvernement à aller de l'avant et devenir une référence en la matière au Canada.

Bien sûr, la protection des renseignements personnels est un domaine complexe. Plusieurs visions peuvent donc s'opposer, et, bien souvent, il n'y a pas de solution parfaite pour répondre à une problématique. Nous aurons l'occasion très certainement de bonifier notre réflexion et le projet de loi. Certains disent que certaines mesures du projet de loi s'avèrent insuffisantes. D'autres considèrent que certaines mesures vont trop loin. J'y vois là une démonstration que ce projet de loi en est un équilibré, qui permettra d'assurer la protection des renseignements personnels sans nuire aux organismes publics, aux entreprises et aux partis politiques.

À la suite des fuites de données qui ont compromis la confidentialité des renseignements personnels de nombreux Québécois, plusieurs ont réclamé que le gouvernement intervienne afin de moderniser et de renforcer ses lois en matière de protection des renseignements personnels. Les citoyennes et les citoyens sont préoccupés par la protection de leurs renseignements personnels, et on peut comprendre les difficultés qu'une personne vit à la suite d'un vol d'identité.

Maintenant, ils s'attendent à ce que nous assumions la responsabilité qui nous incombe comme élus de légiférer afin de moderniser et de renforcer la protection des renseignements personnels. Il est maintenant temps d'aller de l'avant avec l'étude de ce projet de loi, qui, s'il reçoit l'aval des députés, constituera une avancée majeure pour la protection des renseignements personnels des citoyens et des citoyennes du Québec. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine, la parole est à vous.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je suis heureux de m'inscrire dans le débat quant au principe, nous en sommes rendus à l'adoption du principe du projet de loi n° 64, principe, Mme la Présidente, pour lequel, évidemment, nous allons voter pour, de l'opposition officielle.

Mais il est important ici de prendre le temps, parce qu'il s'agit d'enjeux excessivement importants, de prendre le temps d'identifier, je vous dirais, le contexte dans lequel le projet de loi s'inscrit, de regarder aussi un petit peu en arrière par rapport à l'action gouvernementale. Puis vous allez me permettre, évidemment, de parler de l'action gouvernementale dans ce dossier qui est la protection des renseignements personnels, comment le gouvernement a-t-il agi.

Et il est important, quand on regarde ça, Mme la Présidente, de constater qu'effectivement, si le passé est garant de l'avenir... Et, le ministre, j'entends son appel à ce que l'on travaille tous ensemble dans la collaboration pour adopter le projet de loi. Mais, chose certaine, si le passé est garant de l'avenir, il pourrait y avoir certains écueils, Mme la Présidente, et je le dis en tout respect. Nous aurons, bien évidemment, de nombreux amendements, des amendements... et j'aurai l'occasion, dans le temps qui m'est imparti, de vous démontrer, de vous souligner, devrais-je dire, les différents concepts, les différents enjeux concernant le projet de loi n° 64.

Alors, projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Le projet de loi a été présenté le 12 juin dernier, Mme la Présidente. Évidemment, il est nécessaire de moderniser nos règles, au moment où les incidents de confidentialité ont pris de l'ampleur et démontrent que les Québécoises et les Québécois, je vais le dire comme ça, ont, pour beaucoup, Mme la Présidente, perdu confiance, perdu confiance quant au sérieux avec lequel les entreprises privées, les organismes publics... et peut-être même, dans certains cas, Mme la Présidente, il y a eu des questions partis politiques, j'y reviendrai, mais ce sont là les trois domaines pour lesquels les citoyens et les citoyennes, dans plusieurs cas, ont perdu confiance. Et, en ce sens-là, il est important de rétablir cette confiance-là, mais, au-delà du fait de rétablir une confiance, oui, ça prend des mesures législatives, oui, le projet de loi n° 64 va dans cette direction-là, mais nous aurons l'occasion, dans le temps, encore une fois, qui m'est imparti, de cibler les différents défis, les différents enjeux.

Certains auraient pu dire, Mme la Présidente, et j'en suis, que probablement le gouvernement aurait pu être bien avisé de... plutôt que de déposer un seul projet de loi, projet de loi n° 64, qui traite de ces trois grands pas là, de ces trois grands pans là, le gouvernement aurait été peut-être été bien avisé de déposer trois projets de loi distincts, parce que, quand on parle d'entreprises privées, de leur réalité, vous allez voir dans mon intervention qu'il y a beaucoup de copier-coller avec l'autre chapitre, l'autre domaine d'application qui sont les organismes publics. Alors, probablement que le gouvernement aurait été bien avisé de déposer trois projets de loi, un projet de loi pour les organismes publics.

Et, quand on pense aux organismes publics, Mme la Présidente, ils sont en quelque sorte, je vais le dire de même, les serviteurs de l'État, les organismes publics sont là pour servir le citoyen, gérer les services que l'on offre aux citoyens de façon efficace, respectueuse et en ligne avec les politiques mises de l'avant par le gouvernement élu. Les organismes publics doivent évidemment respecter toutes les lois et tout le corpus juridique et réglementaire qui l'encadre. Et, l'organisme public, que ce soit la Régie de l'assurance maladie du Québec, la Société d'assurance automobile du Québec, le ministre de la Famille, peu importe, tous les ministères, tous les organismes publics et parapublics également, Mme la Présidente, quand on pense à nos hôpitaux, quand on pense à tous les... alors c'est près d'un demi-million de Québécoises et Québécois qui travaillent au sein de la fonction publique et parapublique, on dit à peu près 50 000, 60 000 fonctionnaires, donc, engagés directement par l'État et près d'un demi-million, si on calcule l'entièreté des personnes, des citoyens et citoyennes qui travaillent dans les réseaux, réseau scolaire, réseau, donc, de l'éducation et réseau, également, de la santé, donc, les organismes publics, qui ont leurs propres lois, qui ont leur propre logique, qui ont des objectifs qui ne sont pas ceux, évidemment, de faire du profit, aucun de ces organismes-là n'a comme objectif de faire du profit, mais, avec le budget qui lui est donné, qui lui est accordé, remplir sa mission, qui est de servir le peuple québécois.

Alors, quand on dit : Dans cette mission-là, vous allez vous assurer, entre autres... Et c'est là où, oui, le projet de loi n° 64 vient préciser leurs obligations : Vous allez vous assurer de collecter les renseignements personnels, uniquement ceux qui sont nécessaires à votre mission, pour remplir votre mission, vous allez demander — puis on reviendra sur ce concept-là — le consentement des Québécoises et des Québécois quant à la collecte, utilisation et conservation de ces renseignements-là. Et là il y a tout un... puis on va y revenir, il y a tout un débat par rapport à la nature du consentement. Est-ce que le consentement est général ou est-ce qu'il doit être de façon spécifique? Il y a tout l'aspect aussi, lorsque l'on ouvre le chantier, je vous dirais, du consentement. Est-ce que le consentement peut être implicite? Si j'ai donné un consentement à la Régie de l'assurance maladie pour avoir tel service, j'ai dû donner tel renseignement, je consens à ce qu'évidemment ils conservent et qu'ils traitent ces renseignements personnels là, la Régie de l'assurance maladie du Québec, dans mon dossier. Est-ce que ça veut dire que la Régie de l'assurance maladie du Québec peut aussi, en conservant puis en ayant dans ses dossiers ces renseignements-là, l'utiliser pour d'autres fins?

Alors, les organismes publics, on le voit, oui, il y a des similitudes avec la sphère privée, les entreprises. Oui, c'est les mêmes concepts que nous devons préciser, autrement dit des concepts de... définir le renseignement personnel. Puis, quand on dit «donnée», la donnée, ce n'est pas tout à fait le renseignement personnel, parce que, lorsque vous parlez de renseignements personnels, c'est quoi, une définition simple d'un renseignement personnel, là, un renseignement personnel, c'est toute information qui permet d'identifier une personne, alors nom, prénom, date de naissance, adresse. Et là il y en a même qui sont... on va rajouter un autre niveau, Mme la Présidente, de discussion, il y en a qui sont hautement sensibles. Le numéro d'assurance sociale, y a-tu de quoi de plus direct et efficace qu'un numéro d'assurance sociale pour cibler une personne, de dire : Bien, c'est elle dont on parle? Parce que, je veux dire, on a tous des nom et prénom, on n'a pas l'exclusivité de nos nom et prénom. Sur la rue, l'adresse, nous n'avons pas, évidemment, l'exclusivité, dans bien des cas, de la rue. Il y a plusieurs adresses, des dizaines et des dizaines de maisons. Alors, mon nom, la ville et la rue où je demeure sont des renseignements personnels, mais ne sont peut-être pas qualifiables de sensibles. En tout cas, assurément pas hautement sensibles. Par contre, ma date de naissance, Mme la Présidente, mon numéro d'assurance sociale, mon numéro de permis de conduire sont des renseignements où, là, si vous les avez, puis vous voulez savoir de qui vous parlez, vous n'allez pas vous tromper, vous n'allez pas vous tromper. Puis il y a même l'aspect, également, puis c'est un autre chantier...

Puis, vous voyez, Mme la Présidente, là, vous dites : Bon, bien, le député de LaFontaine, il a l'air à tirer dans toutes les directions, bien, ce n'est pas de tirer dans toutes les directions, c'est de d'abord définir les concepts, avant de dire : Comme législateurs, là, on prend le crayon du législateur puis on rédige une loi. Il faut connaître ces concepts-là, il faut les définir, parce qu'après, Mme la Présidente, après, l'organisme public, il va être chargé de s'assurer, puis ça va être écrit dans la loi, de mettre un système qui s'assure de collecter uniquement la bonne information pour les fins de sa mission, de demander un consentement et de conserver trace de ce consentement-là; si le renseignement sort de l'organisme, de faire une évaluation du risque par rapport à la sensibilité du renseignement, par rapport à la mission et par rapport au consentement donné; et, par la suite, de conserver, pour la durée de temps justifiée, le renseignement. Après, vous devez l'éliminer.

• (11 h 50) •

Bien, ça, ces concepts-là, oui, copier-coller, on les retrouve également dans la sphère privée, mais, dans la sphère publique, pour rester dans ce domaine-là, les décideurs, les hommes et les femmes qui auront à prendre des décisions par rapport à la gestion, je dirais — puis là j'englobe tout ça, là, ces facteurs-là — des renseignements personnels, eux, vont être responsables. Eux, si la loi n'est pas claire, pourraient être responsables, imaginez, puis on ne veut pas les mettre dans cette situation-là, d'être chargés, donc, d'appliquer une loi qui serait trop vague, qui porterait à interprétation, qui ferait en sorte que des citoyens ne connaîtraient pas, parce que ça n'aurait pas été suffisamment bien expliqué, par exemple, leurs droits et les conséquences du consentement qu'ils donnent, ce que ça veut dire, parce que ça n'aurait pas été, en amont, bien expliqué. Et le consommateur pourra... ou le... ici, ce n'est pas le consommateur, c'est le citoyen qui demande un service de l'État, pourrait, à ce moment-là se plaindre. Il y aurait vérification, il y aurait enquête. Et, si le décideur de l'organisme public n'a pas ce niveau-là de, concept important, prévisibilité, savoir ce que le législateur veut faire, bien, à ce moment-là, on aura passé à côté de l'objectif. Alors, Mme la Présidente, il faut bien définir les concepts.

Et ça, cet aspect de prévisibilité là, Mme la Présidente, ça a été dit, puis on en parlera dans mon intervention, également dans le domaine privé. Puis pourquoi c'est important, Mme la Présidente? Oui, c'est d'abord et avant tout important parce que l'on veut que la loi fonctionne. On veut que les dirigeants et dirigeantes dans la sphère publique, on veut que les dirigeants et dirigeantes dans le domaine privé... Puis on aura le débat également au niveau des partis politiques, parce qu'il y aura un resserrement au niveau des partis politiques, tel que proposé dans la loi. On fera le débat là-dessus. On veut... Premier objectif, pourquoi c'est important que ce soit clair, on veut que toutes ces personnes qui ont des décisions à prendre, de la gestion à faire par rapport aux renseignements personnels puissent le faire de façon effective, et que la loi atteigne son objectif, et que, je reviens au début de mon intervention, les citoyens et citoyennes regagnent, je vous dirais, un niveau de confiance, qui a été affectée, un niveau de confiance qui fait en sorte que nous n'avons plus, aujourd'hui, à 100 % la conviction que notre vie privée est protégée. Donc, ces concepts-là sont importants. On veut atteindre l'objectif de la loi, que ce soit un niveau de confiance, mais qu'effectivement, sur le terrain, il y ait une protection efficace des renseignements personnels.

Et ultimement aussi, Mme la Présidente... Parce qu'il y a un autre pan dont je ne vous ai pas encore parlé. On parle d'accorder davantage de pouvoirs à la Commission d'accès à l'information. La Commission d'accès à l'information, telle qu'on la connaît aujourd'hui, par rapport à la loi sur l'accès à l'information, a des pouvoirs bien définis, des pouvoirs précis, des pouvoirs limités, dirons-nous. Là, la Commission d'accès à l'information, Mme la Présidente, serait ni plus ni moins que l'entité chargée de faire respecter l'application de la loi québécoise dans tous ces chapitres-là, tant au niveau public, tant au niveau privé, tant au niveau des partis politiques.

Le DGEQ est venu nous voir. Moi, j'étais un peu surpris, mais c'est correct. Et je lui ai posé la question... en tout cas, quelqu'un lui a posé la question, puis il a confirmé, lui, le DGEQ : Effectivement, c'est bien, que vous resserriez les renseignements que les partis politiques peuvent collecter puis la gestion par les partis politiques des renseignements personnels, c'est très bien, vous allez le faire, puis c'est très bien aussi... Du même souffle, le DGEQ a dit : C'est très bien que ce soit la Commission d'accès à l'information qui gère les partis politiques par rapport à ça. Alors, d'habitude, quand on entend... Puis ce n'est pas un reproche, là. C'est juste que, socialement, collectivement, on est en train, donc, de créer et on va créer, si d'aventure, le projet de loi n° 64 était adopté... Évidemment, il y aura beaucoup de débats, il y aura des amendements. On est en train de créer une supercommission d'accès à l'information, qui va être, et ça a été soulevé également, un organisme qui, au départ... pour lequel on va demander : Informez les gens, informez les décideurs. Parce que, quand on vous dit, dans la loi, Mme la Présidente, puis je peux vous donner un exemple, quand on vous dit dans la loi, article 27, page 19... Là, on est dans la section des organismes publics. Article 27 introduit un nouvel article, article 70.1, je vous en fais la lecture. Et ça, ça touche les organismes publics puis ça vise directement à définir les responsabilités de la personne qui est chargée de la gestion des renseignements personnels. Allons voir, nouvel article 70.1, pour les organismes publics :

«70.1. Avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel, un organisme public doit procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée.» Donc, vous devez procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. O.K. On va continuer de lire pour savoir ce que ça veut dire : «Il doit notamment — notamment, remarquez, ce n'est pas exclusivement — tenir compte des éléments suivants — là on en nomme quatre :

«1° la sensibilité du renseignement;

«2° la finalité de son utilisation;

«3° les mesures de protection dont le renseignement bénéficierait;

«4° le régime juridique applicable dans l'État où ce renseignement serait communiqué...»

Donc, vous êtes dirigeant, dirigeante d'un organisme public, vous vous apprêtez à envoyer de l'information, des renseignements personnels sur des citoyens, citoyennes, Québécois, Québécoises, ou sur des citoyens... Je veux dire, l'obligation de protéger le renseignement, Mme la Présidente, va au-delà de la simple citoyenneté. Je veux dire, on a tous, en tout cas, en pays canadien, accès aux droits et libertés, à la protection des droits et libertés. Que vous soyez citoyen, résident permanent ou que vous soyez de passage, ce n'est pas vrai que l'État canadien ou l'État québécois pourrait prendre prétexte de cette distinction-là pour bafouer vos droits et libertés. Alors, je reviens. Avant, pour une dirigeante, un dirigeant, que d'envoyer à l'extérieur du Québec des renseignements sur des individus, des personnes, des renseignements personnels... Puis ce n'est pas obligé d'être le genre de décision qu'on prend une fois aux deux ans, l'entièreté de ma filière, les 100 000 dossiers, ça peut être sur deux, trois, 20 personnes. Bien, avant de faire ça, donc, la décision, l'analyse pourrait revenir plus souvent qu'une décision — je vais prendre la phrase consacrée dans le domaine privé — hors du cours normal des affaires. Bien, ça pourrait être une décision... Dans certains organismes, peut-être c'est le genre de décision qui arriverait plus régulièrement, aux mois, aux semaines, peut-être même plus d'une fois dans une semaine.

Là, vous allez me dire : Oui, mais probablement que ce sera le même cheminement. Oui, mais pas nécessairement, de un. Et, de deux, votre analyse devra quand même être, je vous dirais, permanente, constante, parce que la loi vous oblige à faire de telles analyses dans tous les cas où vous allez communiquer. Il y a peut-être un des quatre facteurs, qui ne sont pas exclusifs parce que c'est «notamment», qui, en cours de route, a changé par rapport au même cheminement que vous avez fait faire aux informations il y a un mois.

Tout ça pour vous dire, Mme la Présidente, que, si vous êtes la personne qui doit décider cela, qu'est-ce qui vous dit que vous êtes à la bonne place? Qu'est-ce qui vous confirme que votre analyse, votre évaluation est la bonne, qu'effectivement vous avez bien considéré la sensibilité du renseignement personnel?

J'ai parlé, un peu plus tôt... j'ai donné des exemples : nom, prénom, ville, ville de résidence, ville de naissance, date de naissance. Woups! Ça commence à être un peu plus sensible, mais la date de naissance, en soi, Mme la Présidente, n'est pas une information sensible, c'est une date de calendrier. Mais, si vous prenez une date de calendrier qui est la date de naissance puis vous ajoutez un nom, prénom, là, ça devient, par l'addition des deux, de l'information sensible.

Numéro d'assurance sociale, ça, là, c'est l'alerte rouge, Mme la Présidente. Il est même, au niveau... dans le secteur privé, il est même désormais déconseillé de demander le numéro d'assurance sociale, déconseillé. Puis, avant de demander le numéro d'assurance sociale, assurez-vous que vous en avez réellement besoin, parce qu'après, je vais le dire de même, là, après, vous allez être pris avec l'information. Vous allez être pris avec l'information parce que, si d'aventure, il y a une fuite ou que vous êtes piraté, vous allez être responsable d'avoir donné accès ou de ne pas avoir empêché un tiers mal intentionné d'avoir accès à de l'information hautement sensible. Puis ça en a découlé quoi, pour les entreprises privées, en aura découlé quoi? Bien, peut-être un vol d'identité, et ainsi de suite. On l'a vu dans Desjardins. Quand vous avez de l'information, vous avez une responsabilité.

• (12 heures) •

Alors, je reviens aux organismes publics. L'article 27 du projet de loi, 70.1., avant de communiquer à l'extérieur du Québec un renseignement personnel vous devez procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. On vous en nomme quatre. Vous devez, avant de prendre cette décision-là, compléter cette analyse-là. Et là, Mme la Présidente, aussi puissante sera-t-elle, la Commission d'accès à l'information, ce n'est pas vrai que la Commission d'accès à l'information... Elle peut vous aider, elle peut vous épauler. Il y aura sûrement, puis ça, ce sera à créer, un service d'aviseurs juridiques, de conseillers juridiques, tant pour le public que pour le privé, puis même tant pour le parti politique, qui va vous aider à dire, oui, vous êtes à la bonne place ou pas. Mais, au-delà de cela, Mme la Présidente, vous n'aurez pas l'obligation, dans tous les cas d'espèce, d'aller faire valider votre analyse par la Commission d'accès à l'information. Et, en ce sens-là, vous allez prendre sur vous la responsabilité d'envoyer l'information. Et peut-être que, plus tard, après examen, s'il arrive quelque chose, on pourra retourner dans votre dossier, sortir votre analyse puis vous dire : Ah! bien là, rien qu'à voir, on voit bien, hein, la vision 2020, après les faits. Ou, le quart-arrière du lundi matin, pourquoi il a lancé le ballon? Pourquoi il n'a pas couru avec? Bien, à ce moment-là, on pourrait vous dire : Tu n'aurais pas dû faire ça, ton analyse n'est pas bonne sous cet angle-là, donc, on t'a pris en défaut. Plus important, il y a des citoyens qui ont été lésés puis qui ont peut-être eu des dommages suite à cet... évidemment, parce que, si le dossier est remonté puis s'il y a un problème, c'est parce qu'il y a des citoyens qui se seront plaints puis qui auront subi des dommages. Non seulement on viendra vous pointer du doigt, Mme la Présidente, mais aussi la loi — évidemment, le ministre a de la suite dans les idées, puis c'est correct, la loi, on est d'accord avec ça, mais... on fera le débat par rapport à l'ampleur, et tout ça — vient imposer de sévères pénalités, sévères pénalités qui vont s'appliquer également... autant dans le domaine privé des entreprises que dans le domaine public.

Et des pénalités, Mme la Présidente, ça, c'est un autre élément qui milite en faveur, oui, qu'il faille légiférer pour protéger davantage, au Québec, la protection, donc... les renseignements personnels. C'est qu'on se dit, entre autres : Bien, écoute, c'est quoi, les conséquences? Il n'y a pas de conséquence. Puis les quelques pénalités qu'on pouvait peut-être vous imposer, c'étaient des montants dérisoires, des montants tellement dérisoires, Mme la Présidente, qu'ils faisaient en sorte de confirmer, dans leur perception, les Québécoises, Québécois victimes, que, finalement, je suis fondé de ne pas donner ma confiance à ce système-là, je veux dire, on n'est pas protégés. Parce qu'en bout de piste, si vous vous faites prendre, la pénalité est tellement dérisoire qu'il n'y a pas d'incitatif en amont, pour une entreprise privée, d'avoir des systèmes hermétiques. C'est comme si, pour brûler une lumière rouge, on vous donnait une amende de 2 $, Mme la Présidente. Je ne veux pas souligner la mauvaise foi de certains, mais ce ne serait pas dissuasif.

Alors, oui, il y aura des pénalités qui vont être très substantiellement augmentées. Donc, vous, en amont, vous êtes de bonne foi, vous faites une analyse. Tel que rédigé, moi, comme législateur, Mme la Présidente, on peut bien dès maintenant aller en article par article, on lit ça, puis théoriquement, théoriquement, ça regarde bien, théoriquement, ça tient la route, parfait, mais, dans les faits, même moi, législateur, je ne voudrais être dans les bottines de la personne qui devrait faire une telle évaluation.

Et on dit : Une fois que vous avez fait ça, la communication peut s'effectuer si l'évaluation démontre que le renseignement bénéficierait d'une protection équivalant à celle prévue à la présente loi. Donc, une fois que vous avez fait, vous, dans votre coin, cette analyse-là, bien, une fois que votre analyse, telle que rédigée, démontre que le renseignement va être protégé, bien, allez-y, mais vous êtes toute seule, tout le temps toute seule. Alors, vous êtes dans votre coin, vous faites votre analyse puis après ça, vous posez votre crayon, vous poussez votre feuille, vous reculez un peu de votre chaise, vous regardez ça, puis vous dites : Bah! Parfait, j'ai la démonstration. Mais c'est vous-même qui l'aurez rédigée.

On peut bien également imposer aux organismes à l'interne, aux organismes privés également d'avoir des poids et contrepoids. Il y a l'obligation d'avoir, évidemment dans la loi, des responsables. C'était en inféré, mon intervention, des responsables, on va identifier des personnes au sein des organismes publics, au sein des organismes privés puis au sein des partis politiques. La personne responsable, là, ce n'est pas vrai que, s'il arrive de quoi qui n'est pas correct, que tout le monde va se regarder puis que les doigts vont partir dans toutes les directions. Il va y en avoir une, personne responsable. La loi le dit déjà, d'entrée de jeu, que l'organisme ne l'ait pas identifiée, la personne responsable, bien, ça sera le plus haut dirigeant qui va être responsable. Alors, si le plus haut dirigeant, ça lui tente, lui, de répondre à ces questions puis d'appliquer la loi dans son organisme, bien, la loi lui dit : Parfait, allez-y, faites-le, mais vous allez répondre de vos gestes. Vous allez répondre de vos décisions puis vous nous ferez montre que votre analyse tenait la route. Alors, évidemment, dans la très, très grande majorité des cas, c'est ce qui est prévisible, le haut dirigeant ou la haute dirigeante va identifier une personne, en matière privée c'est souvent la personne qui est en charge de la conformité, et qui sera également responsable de cela. Aussi, pas une personne responsable toute seule mais un comité, un comité qui va agir sur deux aspects.

Et là j'y vais de mémoire, on me corrigera si j'ai tort, il y aura un aspect au niveau de la conservation, comme : Où mettons-nous l'information? Sur des systèmes informatiques? Parfait. Qui a accès aux systèmes informatiques? Ah! Bien, ce n'est pas compliqué, on est 208 employés, puis tous les employés ont accès à cette information-là, ce n'est pas sécurisé. Ah oui? Donc, conservation de l'information, le comité qui va être créé aura deux objectifs. Assurez-vous que la conservation, l'accès, la sécurité du renseignement personnel sera préservé, sera assuré. Premier aspect, conservation. Deuxième aspect : utilisation. L'utilisation, ça veut dire que... Même s'il y a un nombre restreint d'employés qui ont accès à l'information, est-ce qu'ils utilisent l'information exclusivement pour atteindre les objectifs pour lesquels le consentement initial, ab initio, a été donné par le citoyen? Si c'est pour une utilisation autre que celle pour laquelle le consentement avait été donné initialement, X rouge, Mme la Présidente, on n'a pas le droit de faire ça. Alors, il y aura un comité à l'interne, et ça, ça amène un changement de culture.

Puis ça, ça apporte un autre débat intéressant, Mme la Présidente. Il y a quelques mois, je ne me rappelle pas où précisément, je pense que c'était dans La Presse, c'était dans La Presse, je pense, c'était une lettre d'opinion, oui, si vous voulez, je pourrai vous dire le nom et la date, Mme la Présidente, après des recherches, on avait souligné, après analyse, je pense que c'était au printemps dernier, que les entreprises n'évaluent pas suffisamment la valeur des données qu'ils ont en leur sein. Autrement dit, lorsqu'il y a vente d'entreprise, on va chiffrer l'entrepôt, on va chiffrer les meubles, les immeubles, le stock, on va chiffrer les comptes à recevoir, on va analyser, évidemment, toute la dépréciation des camions, on va chiffrer également toute la propriété intellectuelle... Depuis plusieurs années, on chiffre la propriété intellectuelle. Vous avez des droits de licence, vous pouvez utiliser tel système pour 10 ans, vous avez payé tant, puis à l'époque, quand vous l'avez négocié, ça valait moins qu'aujourd'hui, mais votre contrat est encore bon pour 10 ans. Quand vous achetez la compagnie, bien, ça, ça a une valeur, il va falloir payer pour ça, parce que, si moi, je suis un compétiteur qui veut acheter cette entreprise-là, puis qu'en ayant ces droits d'utilisation de telle, telle licence qu'il a acquise il y a cinq ans et qui est encore bon pour 10 ans, et qui est négocié sur un prix inférieur au marché... Ça, ça un prix. Puis peut-être, Mme la Présidente, que je vais acheter toute la compagnie à cause de ça, parce que moi, je veux développer ce champ-là. Mais je vais tout prendre. Je vais prendre le terrain, les bâtiments, les meubles, les camions. Je vais tout prendre. Puis les employés qui seront... évidemment qui auront toujours un lien d'emploi avec l'entreprise que je vais acheter, les employés, eux, bien, on discutera quant à leur avenir, je vais essayer de les garder. On va essayer d'imaginer l'avenir différemment parce que, moi, c'est cette partie-là qui m'intéresse, c'est la propriété intellectuelle, c'est cette utilisation de licence là pendant 10 ans, puis moi, je vais être capable de négocier. Alors, il y a tout ça. Mais, au niveau des données, Mme la Présidente, trop rarement, très rarement, je dirais, c'est la perception que j'ai, on me détrompera si... Et j'ai eu cette conversation-là, entre autres, avec les représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec, la FCCQ. Je leur ai demandé : Est-ce que vos membres chiffrent, octroient, accordent une valeur juste, suffisante... ou est-ce qu'ils ne le font pas pantoute, par rapport à la donnée qu'ils ont?

• (12 h 10) •

Vous achetez l'entreprise, Mme la Présidente, je continue mon exemple, vous allez avoir 12 ordinateurs, dans la PME, puis vous allez évaluer les ordinateurs, vous allez dire : Bon, bien, ça, mettons que ça vaut... On fait ce qu'on appelle une vérification diligente, on va tout évaluer. Puis évidemment j'ai fait ça dans une autre vie, Mme la Présidente. Quand on fait ce qu'on appelle en anglais une «due diligence», une vérification diligente, évidemment, on va aller lire vers la fin des contrats, d'habitude. Un contrat de 36 paragraphes, allez voir au paragraphe... pas au paragraphe mais à la section 31, 32, 33, vers la fin, ce qu'ils appellent des «non-assignment clause». «Non-assignment clause», ça, ça veut dire que, si l'entreprise est vendue, bien, le contrat, il tombe. Alors, si moi, je l'achète pour avoir l'opportunité d'avoir cette licence-là, bien, je vais aller voir si, en achetant la compagnie... y a-tu une clause de non-transfert. S'il n'y a pas de clause de non-transfert, parfait, je bénéficierai du contrat. Le contrat, je serai donc le cocontractant, par la force de l'achat de l'entreprise. Tout ça pour vous dire que, et je reprends mon exemple des ordinateurs, il y a 12 ordinateurs dans l'entreprise, tout est calculé, les tables, les chaises, les meubles, les immeubles, les terrains, les comptes à recevoir, la propriété intellectuelle. Mais qu'est-ce qu'il y a dans les ordinateurs? Quelle est la valeur de ça? Peut-être aussi qu'implicitement, dans les négociations, si c'est une entreprise qui vend directement à la population, son fichier client a une valeur, je le sais, aussi, qu'en achetant la compagnie j'achète aussi le fichier client. Mais toute autre information, Mme la Présidente, ça va participer des négociations, mais ce ne sera pas les éléments premiers, dans bien des cas, quand on parle, entre autres, de PME. Quand on parle de PME, là, ce n'est pas vrai qu'on va mettre trois, quatre avocats, avocates dans une salle de conférence pendant une semaine pour aller lire les contrats puis aller faire l'évaluation. Puis il y aura une vérification diligente, mais elle ne sera pas à ce niveau-là.

Les renseignements personnels, bref, Mme la Présidente, puis ça participe du bris de confiance, je fais affaire avec une entreprise X pour un service très précis, je lui donne mon nom, mon adresse, ma date de naissance, je donne d'autres renseignements personnels, si c'est pour des soins, si c'est pour quelque chose, je donne tous ces renseignements personnels là, je reçois le soin, je paie ma facture, et à ce moment-là on est quittes, mais, cette information-là, si l'entreprise est vendue, l'information demeure toujours. C'est comme un courriel. On nous a dit très tôt, avec l'apparition des courriels : Faites attention, parce que, quand un courriel est expédié, vous ne le contrôlez plus, puis il y en a qui s'en sont mordu les doigts, là. Quand vous cliquez Envoi, vous ne contrôlez plus l'information. Bien, moi, quand je fais : O.K., d'accord, pour un service très précis, je te donne toutes ces informations-là... Consentement? Bien oui, consentement, je comprends que tu en as besoin, puis ça, ça... Quand je fais O.K., consentement, quelle assurance ai-je que, ces informations-là, une fois que le service est terminé... qu'ils vont les détruire? Bien, normalement, ils devraient les détruire, Mme la Présidente. Normalement, ils devraient les détruire et ne devraient pas les garder. Puis c'est un réflexe, puis là je suis dans le domaine privé, puis je suis même dans le domaine public, c'est un réflexe : Bien, pourquoi détruire ce qui ne prend pas de place ou si peu, peut-être qu'un jour ce sera utile?, et faire en sorte de conserver ça.

Là, il faut avoir le débat sur la durée de conservation puis il faut préciser les règles par lesquelles l'entreprise, le dirigeant d'organisme public doit, devra, de façon proactive, éliminer, détruire définitivement une information.

Puis là on avait des débats dans les consultations, Mme la Présidente, au niveau de l'information et de la destruction quand on parlait d'un autre concept qui est d'anonymiser, faire en sorte qu'il y ait des renseignements personnels de détenus, mais que l'on ne puisse pas identifier tel individu, tel individu, tel individu, ce sont des renseignements généraux, populationnels, par exemple, et qui font en sorte que l'on ne peut pas identifier d'individu. On nous a dit que, même, techniquement vous ne pourriez jamais avoir une assurance que l'anonymisation — puis, vous voyez, on crée des nouveaux mots parce qu'on conçoit qu'il y a de nouveaux concepts — donc, cette anonymisation-là soit effective. On vient vous dire que vous ne pourrez jamais à 100 % être sûrs, il y aura toujours moyen de recréer les liens, les noeuds que vous avez détachés, il y aura toujours moyen d'aller les recréer. Et là, encore une fois, des gens peu scrupuleux, pas soucieux de l'application de la loi puis du respect de la vie privée des Québécoises et Québécois pourront utiliser cette information-là.

Bref, Mme la Présidente, tout ça, rappelons-nous d'où nous venons. D'où nous venons? Puis là j'y vais de mémoire, je ne pense pas me tromper, mais, j'y vais de mémoire, on vient de mai 2018 avec Analytica, l'utilisation de Facebook, Cambridge Analytica, mai 2018, utilisation de Facebook par des intérêts malveillants étrangers pour deux cas d'application : venir attaquer un processus démocratique qui s'appelait, pour la Grande-Bretagne, le référendum du Brexit et qui s'appelait, pour les États-Unis, l'élection présidentielle. Pas l'actuelle, la dernière. Donc, Cambridge Analytica, on a pu voir... Là, j'en suis sur le chapitre des partis politiques, mai 2018, le scandale a éclaté. Il y a eu utilisation — puis c'est un autre concept que les représentants des consommateurs sont venus nous dire — une utilisation de tout ce que vous laissez comme information. Et je peux le résumer en deux mots : profilage numérique. Votre utilisation de Facebook, votre utilisation des réseaux sociaux, ce que vous commentez, ce que vous aimez, ce que vous n'aimez pas, les sites que vous visitez, les recherches d'information que vous faites par rapport à tel, tel, tel produit, cette somme immense d'informations sur votre ordinateur, via votre cellulaire également, sur toute plateforme, lorsque vous... Et on y va à tous les jours, je pourrais même dire, Mme la Présidente, entre 9 heures et 5 heures puis même plus tard le soir, on y va à toutes les heures, on laisse des éléments d'information qui ont été colligés par des intérêts internationaux malveillants. Et ça a été scientifiquement démontré, il y a eu un matraquage publicitaire, il y a eu une manipulation de l'information qui a eu un effet, puis je pense que l'effet ne sera jamais clairement démontré à 100 %, à la virgule près, mais ça a eu un impact dans le Brexit puis ça a eu un impact de l'élection présidentielle, la dernière, aux États-Unis.

Là, on s'est dit collectivement, nous, au Québec, on s'est collectivement... En mai, je me rappelle, Mme la Présidente, nous étions au gouvernement, alors temps jadis et temps glorieux. On a eu, à ce moment-là, une réflexion à faire sur : Bien, au Québec, les partis politiques, quelle information les partis politiques ont sur les gens? Au Québec, on n'a pas d'encadrement. Je me rappelle, c'est ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce, notre actuelle collègue de Notre-Dame-de-Grâce, qui était la ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, qui avait à travailler, évidemment, avec le Directeur général des élections. Et il y a même une motion qui avait été débattue en cette Chambre, une motion qui faisait en sorte de demander au Directeur général des élections d'aller voir dans les partis politiques provinciaux, au Québec, pour voir quelle information détiennent-ils, quelle utilisation en font-ils, puis le reste, là, la conservation, depuis quand, et ainsi de suite. Le Directeur général des élections avait dit : Bien, je n'ai pas compétence en vertu de la loi pour faire ça. Vous pouvez bien adopter une motion unanime à l'Assemblée nationale... Puis Dieu sait que je suis de ceux qui veut absolument qu'on donne suite aux motions de l'Assemblée nationale, mais le DGEQ avait raison. Une motion de l'Assemblée nationale, ce n'est pas une habilitation législative pour lui permettre d'aller cogner à la porte d'un parti politique, je veux dire. Tu m'ouvres tous tes dossiers. Ah oui, M. le DGEQ? Heureux de vous voir, de un. De deux, en vertu de quoi? En vertu d'une motion unanime de l'Assemblée nationale. Je ne pense pas que la rencontre va durer bien longtemps. Il le savait et il nous avait dit : Ça prend des modifications législatives. Là, il y avait eu tout un débat. Il faut resserrer, bref, Mme la Présidente, et c'est ce que fait le projet de loi n° 64.

C'est de là où on vient, c'est comme ça que j'ai commencé ce nouveau chapitre de mon intervention, d'où on vient. Pour les partis politiques, il faut s'assurer de donner les pouvoirs, et c'est là ma surprise, à laquelle j'ai fait référence un peu plus tôt, où le DGEQ, lui, est prêt à ce que ce soit donné à ce que sera la supercommission d'accès à l'information. Ce ne sera pas le DGEQ, avec son expertise, son expertise fine des partis politiques, de la réalité des partis politiques, ce n'est pas lui qui va s'assurer de l'encadrement des partis politiques, tel que rédigé dans le projet de loi n° 64, mais ce serait la Commission d'accès à l'information. Donc, on vient de là. Mai 2018, Cambridge Analytica, partis politiques.

On vient également, par rapport... Mme la Présidente, on arrive de juin 2019, Desjardins. Quand je dis Desjardins puis fuite de renseignements personnels, tout le monde sait ce que ça implique. Moi-même, Mme la Présidente, je suis un membre de Desjardins, donc je fais partie... La dernière fois que j'ai regardé les chiffres, là, c'est 2,7 millions de citoyennes et citoyens qui auraient fait l'objet de cette fuite-là. Alors, moi aussi, comme tout le monde, je suis sauté sur le téléphone, j'ai sauté sur Internet pour essayer de me mettre en... de me protéger avec Equifax. Alors, on a tous fait ça. Puis, après ça, une fois que tu as fait ça, tu te dis, oui : Quelle information me concernant a été transférée? Elle est où, cette information-là? Est-ce qu'on peut s'assurer que c'est endigué, qu'il n'y a pas eu de fuite? Pourquoi Desjardins a été victime de ce piratage-là? Évidemment, c'était... puis sous toutes réserves, là, je ne veux pas m'immiscer dans les processus, mais c'était clairement reconnu que c'était un des employés, donc ça venait de l'interne, qui avait fait en sorte que l'information avait quitté Desjardins. Bien, moi, mon niveau de confiance, une fois que vous avez tout fait ça, là, je vous dis que le niveau de confiance demeure quand même très, très, très ébranlé. Et c'est pour ça que c'est important, donc, juin 2019, de dire : On arrive de là. C'était Desjardins. Puis, Desjardins, je vais y revenir dans trois minutes, Mme la Présidente, je vais compléter le deuxième élément.

Après juin 2019, juillet 2019, là, on a eu la fuite, notamment, au niveau d'organismes publics, Revenu Québec, juillet 2019. Donc, on s'est rendu compte qu'aussi les organismes publics, bien évidemment, les organismes publics faisaient en sorte de colliger énormément d'informations, ils ont presque tout nous concernant, si on fait la somme de tout ce qu'ils ont, et qu'ils n'étaient pas exempts d'échapper la balle, puis qu'il y ait des fuites, et qu'il fallait resserrer également pour les organismes publics cette... il fallait resserrer les obligations législatives.

• (12 h 20) •

Donc, Cambridge Analytica, mai 2018. Desjardins, juin 2019. Juillet 2019, Revenu Québec, organisme public également victime de piratage ou victime de fuites, qui est beaucoup plus englobant que piratage. «Piratage» présume... vient de l'extérieur. «Fuite» englobe l'extérieur et l'intérieur, d'un ou d'une employé mal intentionné. Ça, Mme la Présidente, c'est important de constater qu'on vient de là. Bris de confiance sur ces trois sphères-là.

Aux questions qu'ils ont posées en Chambre, on se disait : Mais quand est-ce que le gouvernement va légiférer? Quand est-ce que le gouvernement va légiférer? Élections, octobre 2018, partis politiques, nécessaire resserrement. On le savait depuis mai. Là, on se disait : Bien, déposez un projet de loi pour resserrer la protection des renseignements personnels que les politiques ont sur les citoyens québécois. Puis on a eu l'occasion de questionner, Mme la Présidente, tout ce temps. Puis là on nous disait : Bien, on travaille sur un ou des projets de loi. Je me rappelle, je posais la question à la ministre de la Justice de l'époque, actuelle présidente du Conseil du trésor, je lui disais : Allez-vous déposer un projet de loi pour protéger les renseignements personnels sur les... pour la protection des renseignements personnels chez les partis politiques? Oui, on travaille sur un ou des projets de loi. Même ligne de question pour mes collègues, de Saint-Laurent, entre autres, Mme la Présidente, qui avait eu l'occasion de poser énormément de questions. Le collègue de Robert-Baldwin également a posé énormément de questions dans le contexte de Desjardins : Allez-vous déposer une loi pour renforcer la protection des renseignements personnels dans le domaine... dans la sphère privée? Oui, un ou des projets de loi, un ou des projets de loi. Puis, quand est arrivé Revenu Québec, juillet 2018, puis après ça on avait vu que dans les dossiers de santé également il y avait eu des fuites, là, c'étaient les organismes publics, là, on nous disait : Oui, un ou des projets de loi, un ou des projets de loi s'en viennent.

Le projet de loi est arrivé, Mme la Présidente, en juin dernier, juin 2020, mais un an avant était arrivé Desjardins, et là... Puis ça, je pense que c'est important, puis vous allez me permettre de faire cette... de dire ce que j'ai à dire par rapport à ça. Projet de loi a été déposé, j'y vais de mémoire, le 12 juin dernier, projet de loi n° 64. Ce n'est pas des projets de loi, c'est un projet de loi. Et, moi, à l'époque, quand je posais des questions, quand je travaillais dans le dossier, ce que je disais, c'est qu'il devait y avoir une approche distincte, parce que ce n'est pas vrai que l'on peut mettre dans le même panier la mercantilisation puis l'objectif ultime pour une entreprise qui est de faire du profit, puis c'est bien correct quand elle le fait en respectant tout le monde puis toutes les règles, la logique mercantiliste d'une entreprise... ce n'est pas la même logique qu'un organisme public, organisme public qui, par ailleurs, puis ça, c'est même un quatrième pan, pourrait participer à de la recherche, on aurait pu même imaginer un quatrième projet de loi, Mme la Présidente, sur l'encadrement de la recherche. Puis je vais vous en parler également dans le temps qui m'est imparti, la nécessité de s'assurer que les chercheurs et chercheuses puissent être qualifiés de la sorte, dans la mesure où il est clairement... et qu'ils aient accès à des renseignements personnels innombrables sur la population québécoise, des citoyens et citoyennes, que les chercheurs, chercheuses le fassent dans l'intérêt public, que ce ne soient pas des chercheurs, chercheuses qui, par la porte d'en arrière, viennent favoriser des pharmaceutiques, ou des compagnies d'assurance, ou que sais-je. Alors, s'assurer également...

Il y a un des spécialistes qui est venu nous voir — et là j'y vais de mémoire — c'est Jocelyn Maclure qui est venu nous voir. M. Maclure est venu nous voir. Il préside un comité d'éthique. Il est venu nous voir la semaine... bien, cette semaine, on a terminé les auditions, il est venu nous dire, entre autres, tout le défi, le parcours du combattant que représente la recherche au Québec. C'est énormément de paperasse. Et un autre chercheur, pas M. Maclure mais un autre, est venu nous dire que, quand vous faites un projet de recherche, vous voulez avoir accès à la donnée, bien, la première année consiste à vous faire reconnaître ce titre-là. Donc, il y a de la paperasse, c'est long, puis tout ça. Alors, comment pourrions-nous atteindre l'objectif de s'assurer que, oui, on va donner accès à telle personne à des centaines de milliers de renseignements personnels, mais cette personne-là va travailler dans l'intérêt public? Parce que l'organisme public a beaucoup d'information, puis, pour avoir des analyses qui nous fassent cheminer collectivement, des études, des recherches, on veut lui donner accès, puis on va faire en sorte que ça ne prenne pas un an, puis, dans certains cas, ça prenait plus qu'un an, mais qu'il soit qualifié, effectivement, on a toutes les assurances que c'est une recherche sérieuse, dans l'intérêt public.

Puis ma collègue de Saint-Laurent pourra vous en parler mieux que moi, il y a deux cas canadiens où vous aviez des chercheurs qui, ultimement, ont fait bifurquer la donnée puis le résultat de leurs recherches dans le domaine privé pour soutenir des intérêts privés. Ça, ce n'est pas correct, il faut interdire ça, s'assurer que ce soit dans l'intérêt public. Pas obligé de prendre plus d'un an, pas obligé de faire en sorte que le chercheur ou la chercheuse consacre la première année de son projet et plus de recherche à essayer de se faire reconnaître, mais s'assurer que ce soit fait.

Également, donc, il y a, je viens d'en parler, le domaine privé, les organismes publics, toute la sphère de la recherche qui découle des organismes publics, Mme la Présidente, c'est un autre pan qu'il va falloir préciser et étayer, et les partis politiques... Il y en a trois, assurément : partis politiques, public, privé. Peut-être le domaine de la recherche, trois ou quatre facilement. Là, après Desjardins, puis je prends cet exemple, là, juin 2019, 12 juin 2020, un an après, on arrive avec le projet de loi, qui met tout le monde, tous les domaines dans le même panier.

Desjardins, on a voulu consulter, Mme la Présidente, pour Desjardins, puis ça, c'est un point important que je veux faire : on a trouvé, dans les consultations sur le projet de loi n° 64, le même aspect réfractaire à la consultation du gouvernement. Le gouvernement a, puis ce n'est pas des intentions que je prête, limité les consultations, et c'est un euphémisme, a, quant à moi, trop limité les consultations. Pourquoi, Mme la Présidente? Quand j'entends que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse nous dit, le 15 septembre : «Compte tenu des délais trop courts pour produire notre mémoire sur ce projet de loi...» Fin de la citation. Elle expliquait ainsi pourquoi elle ne pouvait pas venir en auditions, en consultations, Commission des droits de la personne et de la jeunesse, délai trop court. Ils ont déposé un mémoire ou ils vont le faire, mais ils ne sont pas venus en auditions parce que les délais étaient trop courts. Même chose pour le Barreau, le lendemain, le 16 septembre : «Compte tenu des délais trop serrés...» C'est ce qu'ils disaient. Puis, même chose, la Protectrice du citoyen, je la cite : «Au moment où cette invitation a été reçue, l'analyse du projet de loi n'était pas complétée.» Fin de la citation.

Quand, dans un projet de loi aussi important, Mme la Présidente... On a terminé les consultations mardi soir, à 21 h 10. Je demande à la secrétaire, que je salue, très efficace, en CI, je lui dis : On a reçu combien de mémoires, là, dans les dernières heures? Elle me dit : On a reçu, dans les 48 dernières heures — elle me disait ça mardi soir — une trentaine de mémoires. Bien, ça, Mme la Présidente, comme législateur, quand je ne suis pas... On pourrait nous dire : Bien voyons! ces trois organismes-là, là, la Commission des droits de la personne, le Barreau du Québec, Protectrice du citoyen, vous aurez leurs mémoires, vous lirez le mémoire, quand on n'a pas le bénéfice de les entendre, quand on n'a pas le bénéfice de les questionner, de tester des hypothèses, ce n'est pas du tout la même chose. Quand eux nous disent : Le délai est trop court... Parce que c'est bien beau, négocier, Mme la Présidente... Puis c'est important de le dire parce que ça participe de l'économie du projet de loi n° 64, public, privé, partis politiques, de faire ça tout en même temps, trop vite. Puis honnêtement je le dis, puis, vous allez dire, c'est peut-être un cri du coeur, oui, c'est un cri du coeur, je trouve qu'on ne fait pas une bonne job de législateurs quand on est compressés comme ça dans le temps, quand les mémoires s'accumulent, s'accumulent, s'accumulent.

Il y aura un article par article qui sera convoqué, on sera là, on va travailler, mais, quand il y a même des organismes... Il y avait des plages où il y a eu des désistements puis des organismes qui avaient levé la main puis qui avaient dit : Bien, on aimerait ça être entendus. Bien, finalement on a décidé — «on» est du côté du leader du gouvernement — de ne pas combler les plages pour les auditions puis de faire en sorte qu'on n'a pas entendu l'Association canadienne des compagnies d'assurance des personnes, l'Association pour la santé publique du Québec, le consortium pour l'accès aux données en santé du Québec, le Commisaire à la santé et au bien-être, l'Association canadienne du marketing, le Conseil canadien du commerce de détail, et j'en passe. L'Institut généalogique Drouin, eux, ils étaient à la porte de la commission. Non seulement ils avaient été suggérés dans les listes des oppositions, ils étaient à la porte de la commission puis ils disaient : On lève la main, on veut être entendus, on veut être entendus. Le Commissaire de la santé du Québec, vous savez, qui a été recréé par la Coalition avenir Québec, Mme la Présidente, le Commissaire à la santé du Québec, qui a été recréé par la Coalition avenir Québec du Québec, a envoyé un courriel à la secrétaire de la commission en disant : Je réitère mon désir d'être entendu à la commission. Il était à la porte, dans la fenêtre. Nous, on était en dedans, là, puis on avait les bras croisés. Il y avait trois places, à un moment donné, qui se sont libérées dans l'horaire. Bien, on s'est croisé les bras puis on n'a pas travaillé durant ces heures-là, et tout ce monde-là était à l'extérieur, cognait dans les portes, dans les vitres, voulait venir donner leur opinion. Ça ne s'est pas fait.

• (12 h 30) •

Bref, quand on prend ce qui aurait être facilement trois projets de loi puis qu'on en fait un, quand on fait des consultations bien, bien vite, si bien que Barreau du Québec, Protecteur du citoyen, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse... quand ces trois-là notamment nous disent : Les délais sont trop courts, on ne peut pas aller vous voir, vous nous lirez plus tard, on n'est pas suffisamment efficaces sur des enjeux excessivement importants, Mme la Présidente.

Et ça, là, je vois qui le temps file, je pourrais passer de longues minutes sur toute la saga, je vais appeler ça la saga, pour donner suite à ce qui s'est passé avec Desjardins, juin 2019.

Dès le 21 juin 2019, le collègue de Laurier-Dorion voulait qu'on fasse un mandat d'initiative. Bien, il y a eu une séance de travail; le gouvernement a dit non. On voulait entendre, suite à la fuite de Desjardins, un an avant le dépôt du projet de loi... on voulait entendre ensemble, en commission parlementaire, de façon non partisane, Desjardins sur : Coudon, qu'est-ce qui s'est passé? Ils sont où, les écueils? Puis, vous reconnaissez les erreurs, comment ferions-nous, si d'aventure nous légiférions, comment pourrions-nous fermer toutes ces portes-là? Puis également entendre d'autres personnes, entendre d'autres organismes. On voulait entendre, évidemment, à l'époque, Capital One, TransUnion, Revenu Québec, Option Consommateurs, Union des consommateurs, la Sûreté du Québec, le SPVM, le SCRS, conseil canadien de l'identité et de l'authentification numériques, le centre d'étude en économie CDE. Bref, un an avant le dépôt du projet de loi, 12 juin 2020, lendemain de Desjardins, collègue de Laurier-Dorion lève la main, dit : On veut faire une commission parlementaire sur trois jours, Mme la Présidente, on est capables de faire ça les lundis puis les vendredis. Le gouvernement a dit non. Première fois.

9 juillet, collègue de René-Lévesque revient à la charge, fuite des données personnelles des membres de Desjardins. Il y a eu deux séances de travail; le gouvernement a dit non pour la deuxième fois.

Le 1er novembre 2019, mon collègue de Robert-Baldwin et, le même jour, collègue de René-Lévesque ont levé la main : On veut faire une commission parlementaire. Le gouvernement a dit... Le gouvernement n'a jamais appelé... la commission n'a jamais été appelée pour siéger en séance de travail. Le gouvernement a imposé par motion, ce qui ne s'était pas fait depuis 16 ans, a imposé par motion une commission excessivement limitée pour entendre six personnes une journée de temps. Donc, pour diminuer la pression, ça a été fait, encore une fois, de façon excessivement rapide. Puis le gouvernement pouvait dire, après ça : Bien, cochez la case, cochez la case, il y a eu des consultations. Mais c'était nettement insuffisant. Et nous étions déjà, Mme la Présidente, en novembre. Juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre, on était plus de cinq mois après, près de six mois après les faits. Et ça a été excessivement expédié, expéditif.

Donc, par la suite, Mme la Présidente, il y a eu même un débat. Les quelque six groupes qui ont été entendus, il y a deux séances de travail. Nous avions fait des propositions de recommandation, elles ont toutes été rejetées.

En somme, ce qui s'est passé dans le dossier de Desjardins, on a perdu un an de parlementaires, sauf lorsqu'il y a eu discussions par rapport aux six organismes qui ont été imposés par le gouvernement, et qui était nettement insuffisant, on a, point de vue parlementaire, de temps de réflexion, perdu toute cette année-là. Un an après, juin 2020, j'entends le ministre qui dit : Je suis fier, on fait avancer le Québec, puis c'est nécessaire. Oui, c'est nécessaire, mais je ne suis pas fier du processus qui a mené à la rédaction de ce projet de loi là. Je me questionne fondamentalement sur l'approche qui est de dire : On va tout mettre ça dans le même panier, tous ces chapitres-là. Je ne suis pas fier non plus, in concreto, par rapport au projet de loi n° 64, de la façon excessivement expéditive... On a expédié, expéditive, là, c'était FedEx, là, c'était Purolator, là, c'était... nommez-les, là, on a expédié les consultations pour faire en sorte de vite, vite, vite aller travailler sur l'article par article. On va le faire, le travail, Mme la Présidente, on est versatiles, vous nous connaissez une volonté de faire, et de bien faire. Mais, lorsque l'on nous a dit, mardi soir : Ah oui! en passant, il y a 30 mémoires qui ont été déposés dans les 48 dernières heures, ce n'est pas juste de lire les mémoires, puis d'essayer de rafistoler des amendements, puis d'essayer d'améliorer un projet de loi. C'est une approche, c'est un mode de gestion qui, je pense, n'est pas à la hauteur du désir des Québécois de se refaire redonner confiance, d'être justifiés d'accorder leur confiance puis d'avoir la certitude qu'il y a des encadrements effectifs pour la gestion des données personnelles.

Et là, Mme la Présidente, il y a évidemment, dans ce dossier-là, énormément de concepts qui devront être précisés. Une information sensible, le projet de loi, à l'article 12, pour les organismes publics, et à l'article 102, pour les organismes privés, on vient offrir la même définition. Puis ça peut être conceptuellement recevable, de l'expression «sensible», mais, à quelque part, Mme la Présidente, lorsque le projet de loi, dans son approche, fait systématiquement du copier-coller, je pense qu'on passe à côté d'éléments fondamentaux. On fait même du copier-coller, Mme la Présidente, avec... et ça, je le sais, qu'il y a l'exemple de la Colombie-Britannique, avec les partis politiques, on fait du copier-coller en disant : Bien, tout le régime des entreprises privées, copier-coller au régime des partis politiques.

Je veux bien croire, Mme la Présidente, mais, quand, conceptuellement, le projet de loi fait une distinction entre l'utilisation de données pour des fins de recherche ou de politique publique, mais qu'on ne fait pas une telle distinction au niveau des partis politiques puis qu'on les assimile au mercantilisme, qui est tout à fait justifiable, dans notre système capitaliste, d'une entreprise privée, quand on dit : Bien, vous, les partis politiques, on va vous considérer comme des partis... comme des PME puis des grandes entreprises, bien, je pense qu'on fait l'économie d'une réflexion, on fait l'économie de débats puis on fait même l'économie, je vous dirais, d'une certaine efficacité de notre démocratie. Parce qu'à quelque part, les partis politiques, leur travail, c'est d'aller rejoindre les gens, de s'intéresser aux gens, de communiquer avec les gens. Oui, ils vont être encadrés, oui, il faut qu'ils soient encadrés, mais je pense qu'on fait les coins ronds. Et ça, en tout respect, je le déplore.

Moi, je trouve que mon travail de député est d'autant plus diminué dans son efficacité, quand on compresse bien, bien, bien vite les consultations, quand on met tout ça dans un projet de loi fourre-tout, en tout respect. Un projet de loi... Bien, en ce sens, Mme la Présidente, vous allez faire avancer le Québec un grand pas en avant, en 165 articles, parce que vous allez régler le domaine des organismes publics, vous allez régler le domaine des organismes privés, vous allez régler les partis politiques puis vous allez régler le domaine de la recherche, qui est, en soi, un univers à considérer qui est excessivement prometteur. Comment pourrions-nous utiliser la donnée de façon responsable, de façon respectueuse des droits et libertés de chacun pour déterminer, pour asseoir une réflexion quant aux politiques publiques que nous allons mettre de l'avant? Une fois que j'ai dit ça, il me semble que je viens de résumer tout l'univers, tout le champ de la recherche, recherche privée mais recherche publique. Puis on veut que la recherche publique soit publique, ne soit pas là pour des intérêts privés.

Évidemment, on aura l'occasion de parler, Mme la Présidente... Puis là le temps me manque, malheureusement. Je pourrais demander le consentement pour me refaire octroyer une heure supplémentaire puis je la prendrais, là. Je n'ai pas eu l'occasion de vous parler du règlement, qui est le phare, qui est un peu le la donné en la matière par le conseil européen, le RGPD, le règlement européen qui vient encadrer, pour tous les pays européens, les renseignements personnels, leur utilisation, et ainsi de suite. Et, eux, là-dedans, c'est un autre pan que je n'ai pas eu le temps de parler, Mme la Présidente, eux parlent, notamment à l'article 9, du traitement des données et des renseignements personnels de manière à ce que soit assuré le respect des droits et libertés. Oui, avoir des renseignements, il y en a plus qu'hier, moins que demain, mais comment faire en sorte que les offres de services ne seront pas discriminatoires, que les médicaments seront là, que les couvertures d'assurance offertes seront là, et ainsi de suite? Ça, c'est tout un pan que nous devrons, Mme la Présidente, étayer.

Et vous, tout comme vous ne pouvez pas améliorer ce que vous ne mesurez pas, vous ne pourrez jamais, comme législateur, avoir la certitude d'avoir atteint votre cible si, au départ, vous n'avez pas défini vos termes, si vous n'avez pas délimité tout l'énorme carré de sable dans chacun de ces quatre champs-là, et vous assurer que vous allez répondre à des besoins précis, parce que ce n'est pas vrai, Mme la Présidente, que la présidente d'un organisme public a les mêmes missions et visions qu'un dirigeant de grande entreprise ou un chef de parti politique, puis, les mettre dans le même bain, je trouve ça un peu court et réducteur.

On aurait pu parler, puis on aura l'occasion de le faire, des énormes pouvoirs in concreto de la Commission d'accès à l'information. Bien, il va falloir qu'elle soit très proactive également pour guider tout ce beau monde là dans leurs nouvelles obligations.

Bref, on va voter en faveur du principe. Il y a énormément de travail à faire, puis on va essayer, dans ce contexte-là, de faire avancer le Québec pareil. Merci.

• (12 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je suis prête à céder la parole à M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je crois que j'ai 20 minutes, ce qui devrait, pour le bénéfice des collègues et peut-être du collègue qui m'aurait suivi... ce qui devrait nous mener à la pause de 13 heures. Je le dis par courtoisie, parce que, des fois, comme nous ne sommes pas nombreux, dans le deuxième et troisième groupe d'opposition, à l'occasion nous sommes obligés de faire quelques acrobaties pour nous rendre d'une commission à l'autre. D'ailleurs, j'arrive tout juste de l'autre côté, du salon rouge, où nous sommes en train d'étudier le projet de loi n° 53, qui est comme le frère — je n'allais pas dire le petit frère, parce que ça minimiserait 53 — 53 est comme le frère de 64... ou la soeur, c'est comme vous voulez, parce qu'on est dans le domaine des renseignements personnels, parce qu'on est dans le domaine de la protection des renseignements personnels, parce qu'on est dans la discipline des entreprises ou des organismes qui cueillent, qui récoltent nos renseignements personnels, qui les utilisent. Alors, il y a un lien là, entre les deux projets de loi. Et d'ailleurs c'est sans surprise qu'à l'occasion, quand on questionne le ministre des Finances, qui pilote le projet de loi n° 53, on se fait répondre : Ah non! Ça, c'est 64. Et je présume que, dans 64, à l'occasion, il y a un jeu d'aller-retour aussi. Les collègues sur le projet de loi n° 64 doivent se dire : Non, non, ça, c'est 53.

Alors, pour ceux et celles qui ne sont pas familiers à ce point avec les nombreux projets de loi que l'on débat ici, 53, c'est sur les agences de crédit, un pan extrêmement important puisque les agences de crédit sont au coeur de millions d'échanges et, on nous dit même, de centaines de milliers d'échanges au Canada tous les jours entre les institutions financières, les institutions prêteuses et les citoyens, justement, pour que les institutions prêteuses aient des renseignements en temps réel sur les gens qui veulent accéder au crédit.

C'est un projet de loi, je le disais, là, que je ne veux certainement pas minimiser. Tout comme le 64, nous allons appuyer pour le moment. Nous sommes au principe. Nous avons appuyé le principe de 53. Nous appuyons aussi le principe de 64 parce que c'est quelque chose qu'on attendait depuis longtemps. Le projet de loi n° 64, comprenez-moi bien, Mme la Présidente, est loin d'être parfait, la perfection n'est pas de ce monde, mais on apprécie et on salue le geste du gouvernement d'avoir déposé rapidement dans son mandat, en tout cas, un projet de loi là-dessus, sur la protection des renseignements personnels, sur l'utilisation des renseignements personnels. Et, comme je le dis, il est loin d'être parfait, mais on va saisir la main tendue du ministre, qui est maintenant en charge de ce projet de loi, pour essayer de l'améliorer au bénéfice de tout le monde, au bénéfice de tout le monde.

C'est ce qu'on fait aussi de l'autre côté, ici, du corridor, dans le salon rouge, au projet de loi n° 53, qui est, lui aussi, imparfait et qu'on tente d'améliorer pour le bénéfice de tout le monde, parce qu'on vit dans un nouveau monde, et je ne parle pas ici de la pandémie — pour une fois, ça fera du bien de parler de d'autre chose — on vit dans un nouveau monde où, on va se le dire franchement, on a été complètement dépassés, on a été complètement dépassés, à gauche, à droite, en avant, par-dessus, les géants du Web nous ont complètement dépassés, avec une efficacité, ma foi, qui soit suscite l'admiration, soit fait froid dans le dos. Et on se retrouve aujourd'hui dans un monde où ce qu'on appelle les réseaux sociaux jouent non seulement un rôle incroyablement important, mais qui a une amplitude exponentielle et qui a une influence sur notre vie chaque jour, à chaque heure, de ce qu'on achète, de ce qu'on regarde, de ce qu'on consomme, des décisions qu'on prend, même parfois des amis qu'on choisit ou qu'on ne choisit pas, de notre orientation politique, qui diffère... on a vu notamment toutes les manipulations qui ont été faites, notamment, aux États-Unis. Ces géants sont devenus des pieuvres multitentaculaires... ça, c'est un euphémisme — une pieuvre, c'est nécessairement multitentaculaire, excusez-la — des pieuvres, une pieuvre, une énorme pieuvre que l'on tente de combattre, mais il semblerait qu'elle ait cette capacité, qu'elles ont cette capacité, ces pieuvres, de se démultiplier. Et il ne faut pas croire que des géants comme Google, comme Facebook, qui, à deux, valent maintenant plus de 500 milliards en capitalisation... il ne faut pas croire que ces entreprises sont devenues richissimes au-delà de tout ce qu'on a connu auparavant en vous permettant d'aller chercher la dernière recette de Ricardo ou de partager vos photos de chats. C'est beaucoup plus lourd que ça, c'est beaucoup plus insidieux que ça. Et, oui, si, au départ, l'idée de partager vos photos de chats, de vos enfants ou la recette de votre tarte aux pommes était charmante, ce n'était, après tout, qu'une autre façon nouvelle et plus efficace de communiquer. Cette pieuvre multitentaculaire est devenue un outil extrêmement efficace de contrôle des populations, parce que ces business fonctionnent essentiellement sur la cueillette et l'utilisation des données.

Souvenons-nous, au début, il y a — il faut que je fasse attention, je vieillis, là — peut-être une dizaine d'années, peut-être plus, quand sont apparues les premières applications de navigation, Google Maps ou autres, on avait tous des GPS, là, qu'on mettait, là, sur une suce dans le parebrise, on les a tous jetés, finalement, parce que c'était passé, ça a été rapidement passé date, si vous me passez l'expression. Et, après ça, avec nos téléphones intelligents, on s'est tous mis à avoir des applications de navigation, à tel point que, moi, il m'arrive souvent, puis je suis sûr que mes collègues ici partagent mon sentiment... il m'arrive souvent d'aller du point A au point B en me disant : Mais comment je faisais avant? Puis c'est rendu tellement... On est un peu chien de Pavlov, des fois, puis les géants du Web comptent là-dessus. C'est rendu, des fois, que je fais des trajets que je connais pourtant, là, je vais quand même aller dans mon GPS, sur Google Maps ou autres, et je vais quand même aller vérifier comment me rendre à Sainte-Brigitte de Stanbridge. Pourtant, je suis allé 100 fois, peut-être. Alors, c'est ça qui est insidieux, avec ces géants-là.

Et, souvenez-vous, au début on était fascinés par ça parce que, chemin faisant... ou on marchait dans le Vieux‑Québec, puis là, tout d'un coup, notre application nous disait : Toi, tu apprécies les savons faits main. C'est donc bien extraordinaire! À 20 mètres d'ici, en tournant à droite, tu vas avoir une shop de savon fait main. C'est extraordinaire! On me guide, on me prend par la main. Mais on m'amène surtout là où l'application veut m'amener, là où Google, Facebook et les autres veulent m'amener. Puis, à la fin, quand on y réfléchit bien, si on leur donne tous les pouvoirs de nous prendre la main, parfois jusque dans l'urne, où on va faire un X, parce qu'on a été tellement «brainwashés» par une répétition incessante d'information, là, il y un problème, là, on a un problème démocratique lourd, quand on n'est plus capable de prendre nos décisions, quand notre libre arbitre se trouve édulcoré par des applications. George Orwell, s'il était de ce monde, pâlirait, parce que, même si son livre était un chef-d'oeuvre, 1984, en regardant ce qui se passe aujourd'hui, on est rendus dans une autre dimension, on est rendus complètement dans une autre dimension.

Ça, c'est pour le portrait général. Je m'en tiendrai d'ailleurs au portrait général, puisque ce n'est pas moi qui débattrai du projet mais bien le député de Gouin, malheureusement, je dirais, pas que... pas malheureusement que mon collègue de Gouin soit là, malheureusement que moi, je ne puisse pas y être, parce que c'est quelque chose qui me fascine. C'est toujours quelque chose qui me fascinait, dans mon ancienne vie, c'est quelque chose qui me fascine aujourd'hui.

Pour la petite histoire, avant la pandémie, j'avais volontairement formé une espèce de petit groupe de geeks, passez-moi l'expression, de gens beaucoup plus jeunes que moi qui connaissent ça pas mal plus que moi, qui sont superallumés là-dedans. Et puis on se faisait des réunions, à raison de deux ou trois fois par mois, pour essayer de mieux comprendre, notamment, le fameux RGPD en Europe, qui est comme la bible, qui est comme la référence législative en matière de contrôle et de protection des données. J'ai appris énormément là-dedans et j'ai l'impression pourtant que je n'ai probablement pas 2 % de la connaissance totale de ce devant quoi nous sommes.

• (12 h 50) •

Revenons à la protection des données. Et, je vous le disais, on parle de ça beaucoup aussi de l'autre côté, au projet de loi n° 53, comment on protège les gens qui donnent, volontairement ou non, leurs données, comment on discipline les entreprises qui utilisent, bien ou mal, nos données. Ça ne s'invente pas. Hier soir, Mme la Présidente, j'étais chez moi en train de lire, faire mes devoirs — attendez, j'y arrive — et, vers 23 h 18, je reçois ce texto, d'un numéro de téléphone dans le 418, qui dit : «Appuyez sur[...] — et là il y a une adresse — pour réactiver votre carte AccèsD», avec les quatre derniers chiffres de ma carte AccèsD. Ce sont les bons quatre derniers chiffres de ma carte AccèsD. Bon, évidemment, je ne suis pas totalement idiot, je n'ai pas appuyé là-dessus, j'ai compris la leçon, mais ça ne s'invente pas, là, hier soir, à 23 h 19. J'ai passé la journée, l'autre côté, à étudier un projet de loi qui parle de ça. Puis AccèsD, ça vous fait penser à quoi? D pour Desjardins. Je suis un des heureux élus, un qui s'est fait subtiliser ses données chez Desjardins, comme quoi on est rendus à 6 millions ou 4 millions de nos concitoyens et concitoyennes. Alors, vous voyez qu'on est dans ce monde-là. Et le rempart de la population, à supposer que vous n'appuyez pas là-dessus, là... Mais combien de gens vont appuyer là-dessus? Ça a l'air sérieux. Tu as un numéro de téléphone, il y a un lien. Ça parle de ma carte AccèsD puis ça a mon numéro. Bien, combien de gens vont appuyer là-dessus? Bon, un certain nombre. Combien de gens vont faire comme moi et signaler avoir reçu ça? Pas tant, je ne pense pas. On n'a pas le temps. On est pressés. Puis c'est rendu presque banal. Sur le coup, hier soir, j'ai souri, tout seul, chez moi, j'ai trouvé ça très drôle. Puis, après ça, j'ai dit : Bien non, ce n'est pas drôle pantoute, c'est vraiment d'une ironie presque sadique. Alors, je me suis dit : Par contre, bien, continuons le travail ici, continuons le travail ici, avec 64, avec 53, dans la plus grande ouverture possible, parce que ce genre d'hameçonnage, là... C'est joli, «hameçonnage», je trouve ça trop joli pour ce que ça fait. Là, c'est de l'escroquerie 2.0... ou même on est peut-être rendu à 4.0 ou 5.0, je ne sais trop. Ça fait mal. Ça fait mal à l'économie. Ça fait mal aux gens.

Moi, je me rappelle, ici, il y a quelque temps, d'avoir présenté ici, aux médias de la Tribune, une dame qui avait été victime de vol d'identité, qui a vécu et qui vit toujours... D'ailleurs, ça va mieux maintenant, là, puis elle a été prise en main, puis je pense que sa situation a été comprise, puis j'ai la modeste prétention de croire que ça l'a un peu aidée qu'on publicise sa situation puis qu'on sensibilise plus de monde. Mais cette femme vit un véritable enfer depuis des années. Elle s'est fait arrêter au volant de son auto, elle s'est fait passer les menottes puis amener au poste parce qu'on disait qu'elle avait volé son auto, parce que quelqu'un avait volé son identité. Je ne vous dis pas, là, les dépressions, les médicaments. Essayez donc de vous trouver un logement, surtout ces temps-ci, dans les grandes villes du Québec, avec la pénurie de logements. Vous parliez, Mme la Présidente, récemment du taux d'occupation à Saint-Hyacinthe. Ce n'est pas juste à Montréal, là, essayez donc de vous trouver un logement quand vous n'avez plus d'identité.

Alors, on a, nous, ici, je pense, le devoir de mettre... Il n'y aura jamais de mur coupe-feu complet, il n'y en aura jamais, je pense qu'il faut qu'on se dise ça, là, mais on a le devoir, au moins, de dessiner les plans des murs coupe-feu, de les construire et de s'assurer, surtout, qu'on ait, en temps réel, une modernisation de nos murs coupe-feu. Alors, je sais que mon collègue de Gouin... puis je suis pas mal sûr que les autres membres de l'opposition qui siègent sur 64 vous diront la même chose, on saisit la main tendue puis on veut absolument améliorer ce projet de loi là. Je ne rentre pas, volontairement, dans tous les détails, mais il y a quand même quelques éléments.

En 2011, par exemple, déjà, le rapport quinquennal de la Commission de l'accès à l'information disait que nos lois étaient obsolètes ou dépassées. 2011. On sait que ces lois, qui étaient de bonnes lois à l'époque, qui sont toujours de bonnes lois mais visiblement imparfaites, ont été adoptées dans les années 80 et 90. Les gens qui ont mon âge et plus se rappelleront qu'en 80 puis 90, Facebook, Google n'existaient pas, nous n'avions pas de téléphone intelligent. Je me souviens, en 1995, la campagne référendaire, qui était la première que je couvrais, Le Soleilm'avait donné — je travaillais pour Le Soleil — m'avait fourni un téléphone cellulaire qui venait dans une mallette tellement il était gros. Je vous jure, c'était tout sauf intelligent, cette affaire-là, ça faisait à peine des téléphones. Alors, évidemment, il n'y avait pas ça au moment où on a voté les lois qui sont les remparts pour la protection des renseignements personnels, et c'est pour ça qu'il faut les revoir.

Je le disais tout à l'heure, ce qu'on appelle les GAFAM, là, Google, Apple, Facebook, Amazon et même Microsoft, qu'on avait rajouté, sont devenus des bêtes multitentaculaires qui sont partout, qui sont extrêmement puissantes, tellement qu'aux États-Unis, vous avez suivi les débats comme moi, au congrès, Mark Zuckerberg a presque une carte de membre au congrès, là, il y va trois, quatre fois par année parce qu'il est à la tête d'une affaire tellement immense que les élus, les Américains, sont obligés de se poser des questions du genre : Faudrait-il démanteler Facebook? C'est rendu immense, là.

Permettez-moi une analogie douteuse, là, mais ça me rappelle, dans les années 90, quand Pablo Escobar, baron de la drogue — et je ne fais pas de lien avec Escobar et Zuckerberg, je le dis tout de suite — quand Pablo Escobar était devenu tellement riche grâce au trafic de la drogue qu'il avait dit au gouvernement colombien : Vous me foutez la paix, puis je règle la dette du pays. Il était rendu tellement gros, tellement immense, tellement incontrôlable. Le parallèle s'arrête là entre Escobar et Zuckerberg, mais Zuckerberg et Facebook sont rendus tellement gros qu'ils peuvent dicter une partie des politiques aux États-Unis, et qu'ils sont tellement gros qu'on est obligés de penser à peut-être les démanteler parce qu'ils prennent trop de place et qu'ils sont trop puissants.

Il y a quelque chose que ce projet de loi là touche, mais ne touche pas suffisamment, c'est justement cet aspect de cueillette et d'utilisation des données. Et le principal problème de ce projet de loi là, puis ça, vous allez l'entendre ad nauseam, c'est qu'il repose essentiellement sur la question du consentement individuel. Consentement individuel, ça le dit : Des individus, ce qui est évidemment extrêmement difficile à contrôler, ne serait-ce que parce que, on va se le dire, l'éducation de ce qu'on appelle l'hygiène numérique n'est pas au point.

Moi, je le vois en particulier avec les quatre jeunes que j'ai à la maison. Il faut régulièrement intervenir, s'assurer qu'est-ce qu'ils font avec leurs réseaux sociaux, est-ce qu'ils sont... donner des accès, est-ce que... puis là je ne parle même pas de tomber dans un réseau de pédophiles, là, ce qui serait évidemment une horreur absolue, là, c'est plus subtil que ça. As-tu donné des renseignements? Est-ce que tu es en train de fournir quelque chose qui pourrait éventuellement se retourner contre toi? Parce qu'on le dit souvent, puis j'ai eu l'occasion de le dire ici, on dit souvent que les données personnelles, c'est le nouvel or noir, c'est le nouveau pétrole. Bon, là, je vais me répéter pour les gens qui étaient déjà ici quand j'ai fait cette analogie-là ou cette métaphore, mais elle n'est même pas de moi, elle est de Jim Balsillie, l'ancien P.D.G. de Research In Motion, là, les fameux Blackberry, qui disait récemment : Les données personnelles, ce n'est pas le nouveau pétrole, ce n'est pas le nouvel or noir, c'est de l'uranium enrichi, parce que c'est radioactif et les répercussions des renseignements personnels durent dans le temps beaucoup plus longtemps et ont une ramification, une ampleur beaucoup plus grande que du simple pétrole. Alors, effectivement, la raison pour laquelle les géants du Web sont tellement intéressés par nos renseignements personnels, ce n'est pas pour voir les photos de nos chats, ce n'est pas pour nous permettre de trouver la dernière recette de Ricardo. C'est qu'on fait du profilage avec ça, on nous dirige avec ça, on est capable de nous manipuler avec ça.

Alors, toute cette longue histoire pour vous dire qu'on a beaucoup de pain sur la planche. Et je salue le sérieux du projet de loi n° 64, je souhaite qu'on puisse l'améliorer, on saisit donc la main tendue à le faire. Et je souhaite surtout qu'on réalise tous et toutes à quel point c'est important de le faire.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député de Rosemont...

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...si vous souhaitez reprendre lorsqu'on va reprendre les travaux...

Écoutez, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Picard) : Veuillez vous asseoir.

L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Et je reconnais Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour, heureuse de m'exprimer dans le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 64, déposé le 12 juin, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels.

Et, comme son nom l'indique, le projet de loi propose de moderniser la loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé, d'une part, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, d'autre part, et prévoit aussi que les partis politiques soient soumis à certaines dispositions de la loi dans le secteur privé, alors qu'ils ne sont actuellement soumis à aucune loi de ce genre. D'ailleurs, je vous dirais, M. le Président, seule la Colombie-Britannique a un régime de la sorte. Donc, on peut dire qu'ils sont... qu'ils nous offrent un modèle qui pourrait nous inspirer dans nos débats.

Alors, le 22, 23, 24 et 29 septembre dernier, nous avons entendu 18 groupes et intervenants en consultations particulières, et 49 mémoires qui ont été déposés. Malheureusement, des organismes importants n'ont pu participer par manque de temps, alors que ce manque de temps est directement attribuable au ministre lui-même, qui non seulement pilote le dossier mais est aussi leader parlementaire du gouvernement. Il y avait des plages horaires pour écouter ces intervenants.

Et je vous donne des exemples d'organismes importants qu'on n'a pas pu entendre. Et c'est franchement désolant, M. le Président, et je trouve ça, évidemment, comme personne... bien, une députée, alors que notre rôle, c'est d'écouter la population, et surtout les experts, sur un enjeu aussi important, et on sait que ça fait 25 ans depuis que la loi n'a pas été modifiée de façon importante, il aurait été important... Alors, je vous nomme les organismes, justement, très importants qu'on n'a pas pu entendre. La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, bon, s'est désistée le 15 septembre, compte tenu des délais trop courts pour produire leur mémoire sur ce projet de loi. Imaginez-vous, le Barreau du Québec s'est désisté le 16 septembre dernier, compte tenu des détails très serrés, selon eux, alors qu'il y a des dispositions légales très importantes et des sanctions pénales, des régimes juridiques très complexes. Il y a plusieurs avocats parmi nous, mais ce n'est pas... On ne compte pas sur les expertises des députés, mais surtout des expertises, oui, au ministère, mais aussi qui existent dans la population, des institutions importantes qui doivent avoir voix au chapitre. La Protectrice du citoyen avait confirmé sa présence, mais a finalement décliné l'invitation il y a deux jours, et je cite, «car, au moment où cette invitation a été reçue, l'analyse du projet de loi n'était pas complétée». Ces organismes ont transmis les mémoires à la commission, et on va évidemment analyser leurs mémoires, mais il aurait été vraiment d'une grande pertinence de les entendre et de les questionner.

Et ce matin mon collègue le député de LaFontaine a souligné qu'en 24 heures 30 mémoires ont été déposés. Et ça, c'est dans les dernières 24 heures. Les gens veulent avoir voix au chapitre, ils veulent être entendus. Et je vous dirais que nous, on aurait voulu les entendre. Je pense que, tous les députés, ça aurait enrichi le débat, parce qu'il y a une volonté d'avoir la meilleure loi possible. Alors, c'est une grande déception.

Et je rajouterai, M. le Président, que c'est une grande complexité, ce domaine, ce sujet. Et il y a des expertises qui existent, dans la société québécoise. Donc, il y a une importance d'avoir la meilleure loi sur le sujet, donc il aurait fallu, d'une part, combler les plages horaires. Il y avait des plages horaires disponibles que certains groupes auraient pu combler, et on aurait pu en rajouter d'autres pour les entendre et bénéficier de leurs points de vue. Il s'agit d'un sujet qui mérite de prendre le temps de bien faire les choses. Évidemment, nous allons bien analyser leurs propos pour amener les correctifs et amendements nécessaires au projet de loi.

Quant au contexte dans lequel ce projet de loi est là devant nous, les objectifs du projet de loi sont, d'une part, de responsabiliser les organisations qui utilisent nos renseignements personnels et, d'autre part, de donner aux citoyens le plein contrôle de leurs renseignements, ces renseignements, là, qui sont colligés par ces grandes organisations mais qui appartiennent, à la base, évidemment, à des individus. Donc, l'objectif, c'est de leur donner contrôle. C'est un droit fondamental, essentiellement.

Évidemment, M. le Président, il y avait une urgence d'agir. On le comprend, il y avait une urgence d'agir. D'une part, la loi qui encadre l'utilisation des données personnelles date de 1994, donc un quart de siècle. Et depuis les choses ont bien changé. Notamment, le phénomène de l'utilisation de données massives, big data, est devenu pratique courante, comportant ainsi d'importants risques pour les utilisateurs. Et, d'autre part, nous avons vécu ces dernières années des événements très préoccupants concernant la fuite de données personnelles, pensons aux fuites de données de Desjardins, de Capital One, de Revenu Québec, et j'en passe, et l'usage de données personnelles avec ce que j'appellerais un consentement vicié, pensons au scandale Cambridge Analytica.

L'autre élément de contexte, évidemment, est ce que j'appellerais l'asymétrie juridique en matière de protection des renseignements personnels entre, d'une part, l'Union européenne et, d'autre part, le Québec, le Canada, les autres provinces et, à quelque part aussi, l'Amérique du Nord en général. Et, depuis que l'Union européenne a adopté le Règlement général sur la protection des données, qu'on appelle le RGPD, ce règlement est véritablement devenu la référence, la norme internationale, le «gold standard» des protections des lois légiférant la protection des renseignements personnels, et qui inclut aussi, et c'est important de le souligner, des sanctions beaucoup plus sévères en cas d'infraction.

Alors, qu'est-ce qu'on a entendu des groupes et experts qui sont venus en consultation? Je n'irai pas dans tous les détails, mais quelques éléments importants. Donc, tous ont compris l'impératif de protéger les renseignements personnels, tous se sentent interpelés, autant les organismes publics que privés, les entreprises aussi. Je veux dire, il y avait vraiment un consensus sur cet élément-là. Aussi, je vous dirais, le fait d'avoir des sanctions musclées, on a senti quand même que les gens comprenaient l'importance de ça, mais j'apporterais les débats... je vais partager avec vous certains débats qu'on a eus autour de cette question de sanctions qu'on n'a jamais vues avant ici, au Québec, pour un domaine de droit de ce genre.

Et, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, la société était ébranlée. Tout le monde a fait référence à ces fuites importantes ces dernières années, donc il fallait agir. Les intervenants avaient néanmoins beaucoup de recommandations pour améliorer ou renforcer le projet de loi. Et, bien qu'on a pu entendre beaucoup qui étaient là, on va vraiment s'assurer de bien lire, parce qu'il y a vraiment des mémoires que j'ai pu lire, sans la présence, évidemment, de l'intervenant, très, très riches, avec des précautions, une analyse profonde, le pourquoi, qu'est-ce qu'on entend par ceci ou cela, beaucoup de juristes, parce que c'est un domaine complexe. Alors, c'est sûr qu'on va faire le travail qui était attendu de nous comme députés pour amener leurs points de vue et leurs préoccupations lorsqu'on fera l'étude détaillée.

• (15 h 10) •

Sur la question du modèle européen comme inspiration du projet de loi, là aussi, il y avait beaucoup d'échanges sur cette question. Donc, d'une part, il y en a plusieurs qui ont prôné que le Québec harmonise la loi québécoise à l'éventuelle loi canadienne et d'autres lois provinciales, je vous dirais, les groupes économiques surtout, Conseil du patronat, la fédération des entreprises indépendantes, le milieu, essentiellement la fédération canadienne... le Bureau d'assurance du Canada. Ça revenait souvent, ce milieu-là, parce que ça leur cause des problèmes très, très concrets. Mais les chercheurs, ceux qui connaissent bien la loi européenne, les penseurs et d'autres, Option Consommateurs, préoccupés par le consommateur, le citoyen, sont pas mal d'accord avec les grandes orientations. Oui, des modifications à beaucoup de choses, néanmoins, mais c'était quand même un débat intéressant sur le modèle européen et comment le Québec doit agir alors que le gouvernement s'apprête, très, très bientôt, à adopter une nouvelle loi. Donc, c'est un débat qu'on aura certainement quand on va faire l'analyse article par article.

Mais je pense qu'on a senti généralement que le Québec, bien, le ministre, évidemment, on était tous... Bien, est-ce que... En tout cas, attendre qu'une autre province ou attendre que le gouvernement fédéral agisse, ce n'est pas la façon de faire. Généralement, au Québec, on aime être précurseur, on aime, comment dire... on va dire, en anglais, «push the envelope», ça veut dire «aller de l'avant», et qu'on puisse suivre les normes. Comme je le disais, le règlement européen est devenu le standard, maintenant. Alors, on peut s'en inspirer tout en écoutant nos experts ici, du Québec, et d'autres, mais il va falloir être sensibles à ça. Et j'y reviendrai.

Donc, parmi les mesures que le projet de loi propose, permettez-moi d'en souligner certaines. Le projet de loi précise les exigences en matière de consentement à l'utilisation d'un renseignement personnel. Il resserre aussi les conditions en vertu desquelles un organisme ou une entreprise peut communiquer un renseignement personnel sans consentement aux fins d'études ou de recherche, au bénéfice d'un proche parent décédé ou aux fins de la conclusion d'une transaction commerciale.

Les organismes publics et les entreprises qui utilisent des technologies permettant d'identifier, de localiser, de profiler et de prendre une décision sur un traitement uniquement automatisé devront en informer clairement les personnes. Les entreprises devront s'assurer que les paramètres de sécurité de leurs produits ou services technologiques assurent, par défaut, le plus haut niveau de confidentialité possible.

Le projet de loi précise les obligations quant à la conservation des renseignements personnels et la possibilité de les anonymiser. Le projet de loi prévoit aussi le droit d'exiger que cesse la diffusion d'un renseignement personnel notamment en désindexant un hyperlien rattaché à son nom, ce qu'on appelle aussi le droit à l'oubli. Il octroie des pouvoirs plus importants à la Commission d'accès à l'information, la CAI, notamment en matière d'enquête et d'accusation.

Les sanctions, maintenant, M. le Président. Le projet de loi prévoit des sanctions dans le cas des entreprises fautives. Les sanctions peuvent aller jusqu'à 25 millions de dollars ou 4 % du chiffre d'affaires mondial si ce dernier montant est plus élevé. L'amende minimale prévue sera de 15 000 $. Dans le cas d'un particulier, on prévoit une amende entre 5 000 $ et 50 000 $. Évidemment, les groupes qui sont venus en commission parlementaire ont proposé beaucoup d'amendements, et nous allons les analyser de façon sérieuse pour renforcer ce projet de loi.

Pour ce qui est de la CAI, pour revenir sur la Commission d'accès à l'information, on a eu beaucoup d'échanges sur le besoin d'avoir un organisme qui est déjà très compétent, très crédible, qui joue un rôle majeur et central en ce qui concerne la protection des renseignements personnels, comment faire en sorte pour que cet organisme puisse jouer le rôle qui sera exigé de lui et donc comment lui donner les moyens, autant financiers que ressources, au niveau des ressources... au plan des ressources humaines nécessaires, pour vraiment mettre en oeuvre cette réforme. C'est une réforme très complexe, avec des inspirations qu'on pourrait avoir, dans l'application, d'un peu partout, mais, je dirais, beaucoup de l'Europe, c'est sûr, mais aussi, même, au niveau fédéral, il y a déjà des guides, ils ont de l'avance sur nous sur ces questions-là. Donc, je pense que, pour la CAI, ça va venir rassurer la population. Et tous ceux qui devront se conformer à la loi, que la CAI puisse aussi les épauler. Donc, il est nécessaire que la CAI ait les moyens de ses nouvelles fonctions, plus de ressources financières et humaines et une expertise à développer. Ça, c'est évident.

On a eu l'occasion d'échanger avec la CAI. Ils sont venus en commission parlementaire avec un mémoire d'une centaine de pages, très réfléchi. La présidente a pu répondre à toutes les questions extrêmement complexes. Et à cette question, si vous avez besoin d'aller chercher des ressources pour, justement, combler peut-être des besoins que vous avez dans l'organisation, elle a dit qu'on le fait déjà, de toute façon. On est obligé d'être agile et rapide parce qu'on vit dans un contexte où la science, et les connaissances, et l'informatique est en constante évolution et où les risques, évidemment, sont aussi en constante évolution. Et les risques pour l'individu, l'utilisateur, le citoyen qu'on veut protéger, les risques aussi sont évidemment en croissance.

Donc, il est en effet nécessaire que la CAI ait les moyens de ses nouvelles fonctions, plus de ressources, comme je le disais, bon, notamment pour produire des guides et accompagner les organismes publics et privés, grandes et toutes petites, ou petites, ou toutes petites, face aux nouvelles obligations qu'on propose de leur imposer, effectuer, le cas échéant, avec diligence, les vérifications et enquêtes nécessaires, produire en continu des études étoffées sur les enjeux touchant la protection effective des renseignements personnels, ça, c'est une recommandation d'Option Consommateurs.

Le projet de loi révise les obligations imposées aux agents de renseignements personnels et prévoit la possibilité pour la CAI d'imposer des sanctions administratives pécuniaires ainsi que des modalités de recouvrement et de réclamation des sommes dues. Il propose également d'accorder beaucoup plus de responsabilités et de pouvoirs à la CAI.

Et j'aimerais citer...c'est une professeure de l'Université d'Ottawa vraiment experte dans le domaine, présidente d'une chaire de recherche internationale, Mme Céline Castets-Renard, et je la cite : «Le règlement général sur la protection des données est très lourd et complexe, et le législateur européen — donc, elle parle du règlement européen qui est devenu le modèle, si on veut, est très complexe — a prévu des mesures d'accompagnement[...] — et ils appellent ça, et je la cite, "soft law", droit souple — pour aider les petites entreprises et organismes publics à se mettre en conformité.» Et elle dit : «Si le législateur québécois veut adopter une législation suffisamment efficace, il doit aussi penser à aider les petites entreprises», et, je rajouterais, moyennes entreprises, qui ont aussi exprimé un certain niveau d'inquiétude, je vous dirais, par rapport à la conformité à cette loi éventuelle, et à se mettre en conformité... pour se mettre en conformité avec l'aide de la CAI, «qui doit être dotée des moyens et pouvoirs de le faire».

Et moi, j'ai eu l'occasion de lui poser cette question, parce que ça revenait souvent, cette question d'accompagnement, et j'ai bien senti que les entreprises n'étaient pas... les petites entreprises, les moyennes entreprises n'étaient pas présentes pour dire qu'ils ne sont pas capables de gérer ça puis qu'ils ne sont pas d'accord avec l'intention de ce projet de loi, ils comprennent, mais que c'est difficile pour les petites entreprises. Et on sait que ce n'est pas les petites entreprises qui sont dans la mire des gouvernements, c'est les grands, c'est les grands qui, évidemment, font en sorte que souvent les renseignements privés ne sont pas protégés.

Alors, pour conclure, M. le Président, c'est un projet de loi bien complexe, et nous aurions pu bénéficier de plus d'intervenants, surtout les experts. Je vous le dis, j'ai lu des mémoires très complexes. Et, quand on arrive dans le droit international et les possibilités des grandes entreprises de transférer... Et c'est vraiment ça, la pression. Pourquoi est-ce qu'on a une loi sur la table maintenant et pourquoi est-ce que le Canada est en train de réviser sa loi, c'est parce qu'il y a des contraintes, maintenant, en vertu du règlement européen, qui fait en sorte que, si la loi de l'autre site n'est pas à niveau, bien, ils ne pourront pas transférer des renseignements personnels, parce qu'il n'y a pas assez de sécurité. Ça, on le trouve... je l'ai trouvé en lisant les mémoires qui ont été déposés.

Alors, il y aura évidemment des amendements à apporter pour améliorer le projet de loi. Il doit être efficace, durable, et qui produira des effets escomptés. Donc, en terminant, M. le Président, nous voterons pour le principe du projet de loi. Merci, M. le Président.

• (15 h 20) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Gouin.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Je suis très content d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi n° 64. Mais, avant de vous faire part de mes remarques sur le projet de loi, je vais quand même me permettre de trouver ça dommage... de mettre le doigt sur deux déceptions qui sont les nôtres, à Québec solidaire.

La première déception, c'est de constater que les délais dans lequel la consultation parlementaire, dans lequel les auditions parlementaires se sont tenues, ça a été des délais très courts, ce qui a fait en sorte que, plusieurs groupes qu'on souhaitait entendre puis qui auraient été extrêmement pertinents d'entendre dans le cadre du projet de loi n° 64, on n'a pas pu les entendre. Et je ne parle pas de l'Association de ringuette de Blainville, bien que je n'aie rien contre l'Association de ringuette de Blainville. Je parle du Barreau du Québec, je parle de la commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec, des chiens de garde institutionnels importants au Québec. Ce n'est vraiment rien ni contre Blainville ni contre la ringuette, c'est juste que c'est un projet de loi sur la protection des renseignements personnels, c'est des acteurs superimportants dans la société civile québécoise. Et d'avoir fait des consultations sur un enjeu aussi explosif que celui-là sans avoir entendu ces gens-là, c'est vraiment dommage.

Et je pense que le processus parlementaire sort perdant de ce genre d'absences là. Et c'est peut-être des absences qu'on peut se permettre dans des projets de loi plus techniques, des projets de loi plus ciblés. Tous les projets de loi sont importants, mais ils ont quand même des ampleurs différentes. Le projet de loi n° 64, M. le Président, c'est un projet de loi qui est attendu depuis des décennies au Québec, un projet de loi, par ailleurs, dont nous avons salué le dépôt. C'est tout à l'honneur du gouvernement d'avoir eu le courage de mettre de l'avant ce projet de loi là. Et donc c'était d'autant plus important de faire une consultation parlementaire la plus large possible pour entendre les intervenants qu'on avait besoin d'entendre.

Et, comme c'est trop souvent le cas, il y a eu un empressement de procéder le plus vite possible aux consultations particulières, qui a fait en sorte que ces groupes-là nous ont dit : On veut venir, on a quelque chose à dire, mais on n'a pas le temps, c'est trop vite. Désolés, on ne viendra pas, on n'aura pas de mémoire. C'est vraiment dommage. On l'a déploré plusieurs fois. Je m'en voudrais de ne pas débuter mon intervention d'aujourd'hui en le déplorant.

Puis, deuxième déception, M. le Président... Plus tôt aujourd'hui, j'ai pris connaissance de l'intervention du ministre de la Justice qui porte ce projet de loi là. Je veux dire, c'est un projet de loi extrêmement important. Selon ce que j'entends, ça a été un travail énorme de son auteure initiale, l'actuelle présidente du Conseil du trésor, c'est un projet de loi qui engage l'ensemble des organismes publics. Je peux m'imaginer comment, dans la machine, ça a été compliqué, à prendre les commentaires de tous et chacun. On me parle même de quelques années de travail. Et on a eu... Ah! On me le confirme. On ne dira pas d'où ça vient. Et d'entendre tantôt le ministre de la Justice faire une intervention de neuf minutes et de manière expéditive nous lire, grosso modo, une espèce de reprise des notes explicatives du projet de loi, sans nous parler de ce qui s'est passé en commission parlementaire, nous débiter ça en lisant pratiquement les notes explicatives, j'avais presque l'impression qu'il y avait un chronomètre qui roulait pour être sûr de faire ça le plus vite possible, et bang! j'ai de la difficulté, M. le Président, à ne pas voir là un manque de considération de l'Assemblée puis pour l'importance de ce projet de loi là.

J'espère qu'on va entendre d'autres députés du gouvernement sur ce projet de loi là. Parce que ça aussi, ça commence à devenir une habitude : une intervention du ministre, et ensuite plus aucun commentaire. Le gouvernement dispose d'une majorité significative en Chambre, il y a plein de députés compétents, pertinents, éloquents qui pourraient, qui pourraient prendre la parole sur les projets de loi du gouvernement, puis, selon ce qu'on remarque, dans les dernières semaines, c'est en train de devenir une habitude, de faire une seule intervention, souvent très brève. C'est même arrivé, la semaine passée, qu'il n'y ait pratiquement pas d'intervention d'un ministre. On me le confirme, hein, une autre affaire qu'on me confirme. Donc, pas d'intervention d'un ministre, bing! bang! juste les oppositions. C'est dommage qu'on traite avec autant de légèreté des pièces législatives qui vont transformer la vie des Québécois et des Québécoises.

Et moi, tantôt, entre neuf et 10 minutes, expédier la chose, je trouve que ça a manqué de richesse, puis surtout que je sais que le ministre de la Justice est un homme intelligent, qui, par moments, ne manque pas de verve et souvent a beaucoup de choses à dire, je le sais parce que ça nous est arrivé d'échanger de manière sportive, alors que, là, sur un projet de loi aussi important et pertinent que celui-là, moi, j'ai eu l'impression qu'on expédiait cette intervention-là comme si, bon, puisqu'il faut bien le faire, faisons-le. Puis je trouve ça dommage parce que... C'est sans doute ma candeur et ma naïveté qui parlent, mais moi, je pense que, quand on dit des choses ici, les deux pieds sur le tapis du salon bleu, ça veut dire quelque chose, puis qu'en démocratie, oui, il y a le moment où la majorité s'exprime, mais il y a aussi une vertu à la délibération, il y a une vertu à l'échange d'idées.

Je trouve qu'il y en a de moins en moins, il y en a de moins en moins, de cette démocratie délibérative, dans les dernières semaines. Et moi, j'invite les députés du gouvernement à participer à ce débat-là, à participer à ce débat-là, à prendre la parole après moi pour qu'on les entende, les arguments, les visions. Il y a d'autres députés que le ministre de la Justice qui ont participé à la commission parlementaire, j'aimerais ça qu'on les entende, j'aimerais ça qu'on entende leurs réflexions. C'est sans doute naïf de ma part, M. le Président, mais il me semble que ça fait partie des principes qui gouvernent cette institution-là que d'avoir des échanges, puis pas juste d'exprimer sa majorité, mais de laisser une chance à l'échange d'idées, puis ce serait rafraîchissant, après les dernières semaines qu'on a vécues, que, sur ce projet de loi là, qui est tellement important, on ait de réels échanges puis qu'on soit capables de se répondre.

Ce plaidoyer... bien, en fait, ces deux déceptions vous étant partagées, M. le Président, c'est des déceptions sur la forme, sur la manière de procéder avec ce projet de loi là, j'ai envie de prendre l'essentiel du temps qui m'est imparti pour vous parler du fond de la question, ne serait-ce que pour être cohérent avec moi-même.

On parle aujourd'hui de l'adoption du principe de ce projet de loi là. Quel est le principe de ce projet de loi? Bien, c'est de réformer l'encadrement juridique de la protection des renseignements personnels des Québécois et des Québécoises. Nous allons voter en faveur de ce principe parce que, bien qu'il soit imparfait et tout à fait perfectible, ce projet de loi, il est attendu depuis extrêmement longtemps, extrêmement longtemps. C'est un projet de loi qui, malgré son incomplétude, pose les jalons d'un débat public qu'on escamote depuis très longtemps, très longtemps.

Ce débat-là, c'est : Quels moyens est-ce qu'on se donne collectivement pour reprendre le contrôle sur nos renseignements personnels, des renseignements personnels qui nous appartiennent. Comment on fait pour protéger le plus adéquatement possible ces renseignements-là et diminuer l'emprise de certains acteurs sociaux, notamment les entreprises privées, sur ces données personnelles? Au cours des dernières années, il y a eu, au Québec, de nombreuses fuites de données, de nombreuses fuites de renseignements personnels. La plus connue, bien sûr, c'est Desjardins. Mais il y a eu Capital One, Revenu Québec, l'Industrielle Alliance, Equifax, le ministère de l'Éducation, la RAMQ, Facebook, la liste est très, très, très longue, et, à chaque fois, ces fuites-là ont mis à jour la fragilité d'entreprises et d'institutions, parfois ont mis en lumière aussi la négligence de certains en matière de protection des renseignements personnels.

• (15 h 30) •

Selon le commissaire à la protection de la vie privée au Canada, c'est la vaste majorité des Canadiens qui auraient fait l'objet d'un bris de sécurité dans au moins une entreprise. En fait, ses estimations, là, juste pour être exact, là, c'est qu'entre le 1er novembre 2018 et le 31 octobre 2019 28 millions de Canadiens auraient été touchés par une atteinte à la protection de leurs données. 28 millions de Canadiens entre le 1er novembre 2018 et le 31 octobre 2019. Cette statistique-là, à elle seule, M. le Président, nous donne une idée des trous béants dans le filet que nous avons mis en place pour protéger les renseignements personnels au Québec puis au Canada. 28 millions de personnes entre le 1er octobre 2018 puis le 31 octobre 2019, au moins une fuite. Plusieurs de ces gens-là ont sans doute été l'objet de plusieurs fuites.

Ça fait longtemps qu'on sait qu'il faut faire quelque chose devant cette situation inquiétante. Il y a déjà, en 2011, la Commission d'accès à l'information qui, dans son rapport quinquennal, signalait l'urgence de moderniser nos lois de protection des données personnelles. Pourquoi? Parce que ces lois-là, elles ont été adoptées dans les années 80, dans les années 90, et c'est un euphémisme que de dire qu'elles sont tombées en désuétude. Les avancées technologiques des dernières décennies ont rendu ces lois-là absolument insuffisantes pour protéger la vie privée des Québécois, des Québécoises. Et c'est pour ça que, ce projet de loi là, on a salué son dépôt, parce que c'est attendu depuis tellement longtemps, et là on a un gouvernement qui, au moins, met au jeu une proposition. J'aurai l'occasion plus tard de parler de ce qu'on souhaite améliorer à l'intérieur, parce qu'il y a des grandes améliorations à faire, mais juste d'avoir fait ce geste, c'est quelque chose qu'il faut souligner positivement. Je m'en voudrais de ne pas le faire aujourd'hui.

Dans quel monde vivons-nous, M. le Président? Bien, on vit à l'ère du big data, à l'ère des GAFAM. On vit à l'ère d'un développement effréné, d'un développement, qui est dur à suivre, de l'intelligence artificielle. Et on ne peut pas laisser ces phénomènes-là prendre de l'importance sans s'assurer que ça se fasse dans un cadre légal approprié puis un cadre légal plus contraignant, un cadre légal qui a plus de mordant que ce qu'on a actuellement. Dans son mémoire qu'il nous a présenté lors des consultations particulières, la Ligue des droits et libertés mettait, je pense, le doigt sur le bobo, le doigt sur le principal problème, et je veux les citer : «Le siphonnage massif des données sur les réseaux sociaux, la reconnaissance faciale, l'Internet des objets, les systèmes de localisation GPS, les [données] dopées à l'intelligence artificielle, les capteurs de données des villes intelligentes, les assistants vocaux aux noms rassurants : tout cet attirail d'encerclement se développe sans contrôle ni débat public...»

J'aurais pu ressortir aujourd'hui, M. le Président, toute une série d'articles qui ont été publiés dans les dernières années et qui parlent, par exemple, de jouets intelligents pour enfants dont on s'est rendu compte qu'ils enregistraient ce qui se passait autour d'eux pour mieux cibler les parents à l'aide de certaines publicités. On pourrait parler de scandales au sujet de certains assistants vocaux, on s'est rendu compte qu'il y avait captation des conversations. On pourrait parler des pratiques, par exemple, de manipulation des prix chez Amazon, où la recherche avance et découvre de plus en plus qu'il y a affichage de prix différencié selon les consommateurs, selon leur profil, selon leur localisation géographique, selon leur historique de recherche. Là, vous voyez ici, ça, dans nos lois de la consommation traditionnelle, c'est des pratiques de profilage, des pratiques discriminatoires qui sont interdites dans nos lois sur la protection du consommateur. Et là on se rend compte que, dans le domaine du numérique, il y a des pratiques qu'on interdit par ailleurs dans le vrai monde qui réapparaissent.

La vérité, c'est qu'on assiste à l'essor et à la consolidation fulgurante d'une industrie dont le modèle d'affaires est basé sur la surveillance en continu, l'extraction et l'accumulation massive d'informations personnelles. Pourquoi? En vue de leur commercialisation. Et ça, ça nous oblige à être extrêmement vigilants et à mettre des moyens de contrôle efficaces en place le plus rapidement possible.

Juste pour vous donner une idée, M. le Président, en l'an 2000, Google et Facebook ne valaient à peu près rien, c'est des entreprises qui commençaient. Aujourd'hui, elles valent près de 500 milliards de dollars, en 20 ans. Et, ces entreprises-là, il faut se défaire de l'idée selon laquelle ce sont de simples interfaces sur Internet. Google, par exemple, ce n'est pas un simple moteur de recherche, puis Facebook, ce n'est pas juste une plateforme où on partage des photos ou des articles avec nos amis. Ces entreprises-là, leur modèle d'affaires, c'est quoi? Et, en fait, quel est leur pain et leur beurre? Bien, leur pain et leur beurre, c'est la traque des moindres faits et gestes des internautes sur le Web, l'accumulation de quantités phénoménales de données personnelles, de façon souvent intrusive, en vue de leur commercialisation.

Puis un des éléments, je pense, qu'il faut réaliser, c'est qu'il est faux de croire que ces entreprises-là collectent seulement les données dont elles ont besoin pour certaines opérations commerciales spécifiques, précises. Souvent, on va penser : Oui, Google, par exemple, va enregistrer ma localisation géographique, quand je fais une recherche, c'est documenté que c'est une pratique chez Google, mais c'est pour mon bien comme consommateur parce que c'est pour me présenter les publicités qui me concernent, puisque ce serait, par exemple, dans mon État, dans ma municipalité, dans ma ville, dans mon quartier, etc. Par contre, ce que la recherche découvre de plus en plus, c'est que ces entreprises-là, notamment Google, collectent une panoplie de données dont souvent les fins commerciales ne sont même pas encore connues. Donc, il y a notamment des chercheurs qui commencent à découvrir que Google, depuis sa fondation... bien, depuis son tournant vers la publicité ciblée, là, en 2000, 2001, récolte beaucoup plus de données que ce qu'ils sont réellement capables de monétiser ou de commercialiser puisqu'ils font le pari, sans doute gagnant, qu'un jour les algorithmes d'intelligence artificielle auront avancé à un point tel que ce qui aujourd'hui n'est pas commercialisable va le devenir. Et donc les chercheurs sont en train de documenter ce phénomène, donc, d'entreprises qui se disent : Bon, il y a des types de données qu'on ne sait pas vraiment encore comment on va faire de l'argent avec, autrement dit comment on va les vendre à des annonceurs, mais on ne prendra pas de chance, on va lancer le filet le plus large possible, collecter le plus de données possible, et l'avancement de la technologie va faire en sorte qu'un jour il y aura un marché pour ces données-là.

Ça, c'est des recherches scientifiques récentes qui découvrent que le modèle d'affaires, donc, de ces entreprises, ce n'est pas : On collecte des données... ce n'est pas une collecte chirurgicale de données, de certaines données pour servir certaines fins commerciales spécifiques, au contraire c'est une logique de captation généralisée de l'ensemble de l'activité des internautes, en se disant : Bon, il y a une bonne partie de ça qu'on ne sait pas comment le monétiser, comment le transformer en produits commerciaux, mais au moins on l'aura en banque dans nos serveurs, et, le jour où nos algorithmes auront avancé suffisamment, on pourra faire des inférences qu'on ne peut pas faire aujourd'hui, et donc on pourra, à ce moment-là, les commercialiser.

Donc, le modèle d'affaires de ces entreprises-là, c'est la collecte massive et permanente, continue de données personnelles. Et l'objectif principal de ça, c'est la mise sur pied de profils publicitaires qui permettent de cibler les individus de manière de plus en plus intrusive, de plus en plus précise. Les algorithmes de prédiction comportementale de ces entreprises-là avancent très rapidement, et dorénavant on est à un niveau... on améliore les algorithmes à une vitesse telle qu'on est de plus en plus capable de prédire efficacement le comportement des individus en ligne et dans le vrai monde, hein? Parce que c'est ça qu'il faut rappeler, ces algorithmes-là de prédiction comportementale ne comportent pas juste... ne ciblent pas seulement les comportements en ligne, on est également capable de comprendre ce qui se passe dans la vie réelle des individus. Il y a des recherches qui ont, par exemple, démontré que Google et Facebook sont capables, par exemple, d'inférer qu'une femme est enceinte en se basant sur une inférence entre plusieurs types de comportements en ligne. Elle a cherché ceci, elle s'est géolocalisée dans tel magasin, etc., et donc on accumule des données, et ça nous permet de prédire, avec une efficacité redoutable, par exemple, dans l'exemple que je vous donne, qu'une femme est enceinte. Imaginez-vous si, à partir de ça, on est capable de transiger avec, par exemple, une compagnie d'assurance. Elle pourrait être intéressée à savoir l'historique médical d'une personne. Là, je vous donne un exemple d'abus potentiel, mais c'est ça, dorénavant, le monde dans lequel nous vivons. Il ne s'agit de tomber dans une théorie du complot, il s'agit juste d'être conscients de quel est le monde, l'univers numérique dans lequel nous vivons.

• (15 h 40) •

Pour le dire simplement, puis pour reprendre les mots du ministre de l'Économie, les données personnelles, c'est vrai, c'est une mine d'or, pour ces entreprises-là, et c'est une ressource économique... Je vois le ministre des Ressources naturelles qui semble avoir beaucoup de choses à dire sur mon intervention, ça fait que je vais prendre une métaphore qu'il va comprendre. Les données, c'est un peu comme une ressource naturelle, par exemple les ressources minières. Les entreprises minières extraient du minerai, et c'est à partir de cette extraction-là qu'ils font leurs opérations commerciales, ils paient une redevance, on peut la juger suffisante ou insuffisante, mais, bon, ils paient quand même une redevance, et c'est avec ça qu'ils font du profit. Bon, bien, la donnée personnelle, en 2020, c'est aussi une ressource, une ressource économique à partir de laquelle ces entreprises-là construisent des modèles d'affaires et font de l'argent. C'est donc normal, tout comme on réglemente l'exploitation des ressources naturelles... On ne laisse pas les entreprises forestières couper autant d'arbres qu'ils le veulent, on ne laisse pas les entreprises minières faire ce qu'elles veulent, elles sont réglementées, bien, il est tout à fait normal de faire la même chose avec cette nouvelle ressource que sont les données personnelles, et c'est ce que vient faire le projet de loi n° 64. En déposant ce projet de loi là, le gouvernement de la Coalition avenir Québec dit : On reconnaît que c'est une ressource économique, on reconnaît qu'il y a là un phénomène à encadrer, et on dépose un projet de loi pour l'encadrer.

Le projet de loi, d'ailleurs, s'inspire largement de ce qui a été fait en Union européenne en 2016. En 2016, l'Union européenne a adopté le Règlement général sur la protection des données, le fameux RGPD, pour les intimes, qui constitue le cadre juridique qui est généralement reconnu comme étant le plus moderne et le plus avancé en matière de protection des renseignements personnels. Et le projet de loi n° 64 s'inspire très largement du RGPD, il y a même des sections qui sont pratiquement du copier-coller. Puis ce n'est pas une critique, parce que c'est un très bon... en fait, c'est plutôt un assez bon règlement, le RGPD. Donc, nous, c'est quelque chose qu'on a salué, que l'auteure de ce projet de loi, l'actuelle présidente du Conseil du trésor, se soit inspirée aussi fortement du RGPD dans sa rédaction de son projet de loi n° 64. Donc, ça, c'est un élément qu'on l'on salue. Donc, le projet de loi n° 64 s'inspire largement du RGPD, et c'est une bonne chose.

Par contre, il y a un angle mort au projet de loi n° 64, et cet angle-mort, c'est précisément ce dont je viens de vous parler, c'est-à-dire la question du modèle d'affaires des entreprises dont l'activité est fondée sur la collecte et la commercialisation massives des données. On a un projet de loi qui est un projet de loi pour améliorer l'encadrement de la collecte des renseignements personnels, pour améliorer la gouvernance des entreprises qui collectent et stockent des renseignements personnels, on a un projet de loi qui vient renforcer les pouvoirs — et parfois les modifier — de la Commission d'accès à l'information, mais c'est un projet de loi qui laisse un peu dans l'ombre toute cette question du modèle d'affaires basé sur l'exploitation des données personnelles. À la lumière des consultations puis des représentations qui nous ont été faites en commission parlementaire, M. le Président, j'ai envie de vous exposer les quatre axes d'intervention qui seront ceux de ma formation politique lors de l'étude détaillée parce que, pour nous, il y a quatre grands enjeux qui méritent d'être améliorés ou introduits, en fait, dans le projet de loi.

Ce premier enjeu, c'est la question du consentement et de la confidentialité. Le projet de loi introduit plusieurs nouvelles obligations pour les organismes publics et pour les entreprises privées en matière de consentement et en matière de confidentialité. D'abord, le projet de loi introduit un concept qui est important, qui est limité, par contre, on va y venir, mais qui est important, celui de consentement manifeste, libre, éclairé, sollicité à des fins spécifiques et de façon distincte à toute autre information communiquée. Donc là, on vient dire aux entreprises puis aux organismes publics : Quand vous demandez le consentement d'un individu pour collecter ses données, il faut que vous preniez les moyens de vous assurer que c'est un vrai consentement, et on le définit : un consentement manifeste, un consentement libre, éclairé sollicité à des fins spécifiques. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire : Vous ne pouvez pas mettre une phrase en bas qui dit : Je consens à ce que vous me preniez toute donnée pour faire n'importe quoi. Autrement dit, les entreprises et les organismes publics auront la responsabilité de préciser pour quelles fins spécifiques elles collectent des données, puis elles devront le faire de façon distincte à toute autre forme d'information communiquée. Ça, ça veut dire : on ne pourra plus envoyer un formulaire où on pose 43 questions aux gens puis il y en a une au milieu qui porte sur les renseignements personnels, il va falloir avoir une communication qui fait en sorte que les individus répondent à la question spécifique de leur collecte de renseignements personnels. Puis ça, c'est important pour s'assurer que le consentement sur la collecte des renseignements personnels ne soit pas noyé dans tellement d'information que les gens, au fond, ne savent pas à quoi ils consentent. Je pense qu'il faut se réjouir de ces obligations-là, c'est en effet une bonne nouvelle.

Le projet de loi prévoit aussi un droit à retirer le consentement. Ça, c'est généralement considéré comme... en fait, c'est généralement admis que le consentement, pour être valide, il faut être capable de le retirer. On ne peut pas dire oui, et ensuite c'est pour la vie. Donc, le projet de loi prévoit qu'on puisse retirer le consentement, c'est très important. Donc, tout ça, c'est des bonnes nouvelles.

Par contre, il faut faire attention — puis ça, ça a été mentionné en commission parlementaire — à ne pas faire du consentement le pilier de notre approche en matière d'encadrement des renseignements personnels parce que, si on fait preuve de pragmatisme et de réalisme, on sait bien que ce consentement-là, très souvent, il est illusoire. Il est souvent illusoire, il est souvent vicié parce qu'il repose souvent sur une asymétrie de pouvoir très importante entre l'individu qui donne le consentement, un citoyen ou une citoyenne lambda, et les énormes organisations que sont les Google et Facebook de ce monde, qui ont des plateformes extrêmement populaires, souvent essentielles pour la vie sociale ou la vie professionnelle. Et donc on demande à quelqu'un : Est-ce que tu acceptes d'utiliser Gmail?, par exemple, est-ce que les gens ont vraiment le choix et est-ce que ce consentement-là est vraiment éclairé? À peu près tous les experts qui sont venus nous voir en commission parlementaire, des associations patronales jusqu'aux associations de défense de droits, nous ont mis en garde contre une approche trop basée sur le consentement, qui serait illusoire puis qui ferait porter sur les épaules des individus un fardeau beaucoup trop lourd.

Il y a toutes sortes d'études, M. le Président, qui ont été publiées sur qu'est-ce que ça voudrait dire vraiment lire tous les contrats de services qui nous sont présentés, et puis là il y a plusieurs chiffres qui circulent. J'ai notamment vu un article qui parlait de 250 heures par année qu'il faudrait consacrer si on voulait lire chaque contrat de services qui nous est présenté quand on va sur un site Internet, quand on télécharge une application, quand on fait un achat en ligne, etc. 250 heures par année, je pense que cette statistique-là à elle seule montre bien que c'est illusoire de penser que les gens vont faire ça et que, donc, on ne peut pas tout miser sur le consentement pour protéger les citoyens et citoyennes. C'est un peu court comme approche. Il faut donc aller plus loin que le consentement, aller au-delà du consentement dans notre approche en matière de protection des renseignements personnels parce que, si on mise tout sur le consentement, la réalité, c'est que les grandes entreprises vont pouvoir continuer à exiger des consommateurs qu'ils consentent, entre gros guillemets, à la captation continue de leurs données à des fins commerciales pour pouvoir utiliser leurs services, et on sait bien que cette asymétrie de pouvoir fait en sorte que ce ne sera pas un consentement réel.

Qu'est-ce qu'on fait, donc? Bien, il y a plusieurs questions qui nous apparaissent, suite à cette commission... suite à cette consultation particulière, pardon, pour aller plus loin que cette question-là. Est-ce qu'il faudrait, par exemple, inclure... dans le champ des informations à divulguer par défaut à la personne concernée par une collecte de données, lui dire exactement la nature et le type de renseignements qui vont être recueillis sur elle, donc pas juste : Consentez-vous à ce qu'on capte des données?, mais : Consentez-vous à ce qu'on capte ces données-ci, ces données-là dans cet objectif-ci, cet objectif-là?

• (15 h 50) •

L'autre question, c'est : Comment on va s'assurer que cette demande de consentement là soit faite de manière réaliste pour les individus? Comment on va s'assurer que ça ne puisse plus seulement être par un simple clic qu'une personne... souvent un clic qui suit d'énormes paragraphes absolument incompréhensibles pour le commun des mortels, qu'on recueille le consentement? Comment on va faire pour que les gens comprennent? Les gens qui ont une littératie limitée, une littératie numérique limitée, comment on va aller chercher, chez ces gens-là, un consentement vraiment éclairé? Ça, j'avoue qu'il va falloir en discuter et y réfléchir pendant l'étude détaillée parce que ce n'est pas gagné du tout, et il n'y a pas personne ici, dans la salle, qui peut dire qu'on a tous lu, disposition par disposition, tous les contrats de services qui nous sont présentés quand on télécharge une application ou qu'on fait un achat en ligne, c'est juste irréaliste. Il n'y a personne qui s'impose ce fardeau-là. Donc, comment on sort de ça? Ça, je pense que c'est une question qu'il va falloir absolument répondre durant l'étude détaillée.

Ensuite, il va falloir trouver une manière d'offrir aux personnes qui utilisent des services technologiques le choix et, j'ai envie de dire, le droit de refuser d'être pisté par défaut, hein? C'est ce qu'on appelle... c'est ce que le projet de loi appelle le plus haut niveau de confidentialité par défaut. Parfois, on parle de «privacy by design». Le concept est introduit dans le projet de loi — ça, c'est plutôt une bonne nouvelle — mais il est plus ou moins défini. Il va falloir sans aucun doute le définir, le raffiner pour s'assurer exactement de quoi on parle quand on parle du plus haut niveau de confidentialité par défaut. Quelles vont être réellement les obligations des entreprises à cet égard-là pour que ce droit de ne pas être pisté, de ne pas être surveillé soit réel, soit garanti? Et la position de Québec solidaire, c'est qu'il devrait être garanti par défaut et non l'inverse. Voilà trois éléments, sur la question du consentement et de la confidentialité, qu'il va falloir approfondir en étude détaillée.

Deuxième axe d'intervention pour ma formation politique, c'est toute la question de l'utilisation des données personnelles à des fins commerciales. Je le disais plus tôt, on ne peut pas se limiter au consentement. On ne peut pas juste dire : Bon, bien, si les entreprises demandent la permission, alors elles peuvent tout faire. Dans une société de droit, il est généralement admis qu'au-delà du consentement il y a des actes, il y a des gestes qui ne sont pas souhaitables. Il y a des pratiques qui sont illégales, que les individus y consentent ou non, hein? Il y a plein de gestes dans notre société que les entreprises ou les individus ne peuvent pas poser même s'ils sont consentants. On ne peut pas consentir à un acte illégal, par exemple, hein? C'est un des principes de base du droit. Donc, il va falloir approfondir cette question-là dans le projet de loi, comment on encadre les pratiques commerciales des entreprises postconsentement parce que, même si on mettait en place un régime de consentement beaucoup plus précis, beaucoup plus raffiné, beaucoup plus cohérent, cette question-là resterait quand même en suspens. Une fois que les entreprises ont eu le consentement, qu'est-ce qu'elles ont le droit de faire ou de ne pas faire avec les données personnelles des Québécois? Parce que, là, il faut le rappeler, la collecte des données, la collecte massive de données, ça ne s'effectue pas seulement à partir de nos téléphones intelligents ou de notre ordinateur, ça se fait dorénavant, par exemple, avec tous les appareils qu'on achète qui sont connectés à l'Internet, qu'on appelle parfois l'Internet des objets. Il y a de la collecte de données, souvent, qui est implicite à l'utilisation de ces objets, ça peut être des appareils domestiques, des caméras. Il y a maintenant des automobiles, des voitures qui captent des données, des assistants vocaux, des jouets intelligents qu'on donne à nos enfants qui captent de la donnée, certains même qui font de la reconnaissance faciale à notre insu. D'ailleurs, la reconnaissance faciale pour des fins commerciales, c'est un phénomène qui est en expansion au Québec. Donc, comment on encadre ces pratiques-là? En ce moment, dans le projet de loi, il y a un trou à cet égard-là. On ne spécifie pas exactement quel type de collecte, quel type de surveillance est légitime puis laquelle est illégitime.

Bon, on peut avoir un débat sur ce qu'on souhaite permettre ou pas, mais il y a un élément qui est ressorti lors des consultations particulières puis qui m'apparaît important, c'est la question des enfants. On a depuis longtemps reconnu, au Québec, qu'il était illégal de faire de la publicité destinée aux enfants. Pourtant, sur la collecte des données, pour le moment, on ne l'interdit pas. Il est donc tout à fait possible pour les entreprises de collecter, par exemple par des jouets intelligents, des données sur les enfants. Est-ce qu'on souhaite ça, au Québec? Excellente question. Puis pas juste une question de second ordre dans une commission parlementaire un peu anodine, là, c'est une question de société fondamentale.

Même chose pour la reconnaissance faciale. Il y a eu des scandales dans les dernières années. On sait, par exemple, que le groupe immobilier Oxford Properties, qui détient plusieurs centres commerciaux au Québec, notamment le Quartier Dix30, qui a reconnu l'an dernier qu'il avait recours à des caméras qui font de la reconnaissance faciale et qui font du profilage commercial. Donc, ce promoteur immobilier l'a reconnu ouvertement. Bon, ça permet quoi, là, ce genre de pratique commerciale là? Bien, ça permet de reconnaître, par reconnaissance faciale, l'âge, le sexe, parfois même l'humeur des consommateurs, de cerner leur comportement, de mesurer l'achalandage, ou même, ça va jusque-là maintenant, d'ajuster les promotions en magasin selon ce qu'on capte à l'intérieur des centres commerciaux avec la reconnaissance faciale. C'est quand même des évolutions technologiques significatives. L'argument peut être présenté que c'est tout à fait légitime pour les entreprises de faire ça. Moi, je suis capable d'entendre cet argument-là, puis on peut en débattre. Ça pose néanmoins des enjeux éthiques, des enjeux politiques, voire des enjeux philosophiques qui sont très importants. De dire qu'on va moduler les promotions en magasin à partir de ce qu'on va déduire de l'humeur des gens ou de leur sexe grâce à de la reconnaissance faciale pose des questions, notamment, en matière de discrimination, bref, et puis en matière de profilage. Donc, rien de banal, rien, rien, rien de banal quand on parle de ces choses-là. Et le projet de loi n° 64 devra nous servir à éclaircir ces enjeux puis à tracer la ligne entre ce qu'on souhaite, au Québec, entre ce qu'on trouve socialement acceptable puis socialement inacceptable.

Puis, en terminant là-dessus, j'oubliais un élément, il y a même des études qui démontrent que les prix et les promotions qui sont annoncés en ligne, lorsqu'on fait des achats en ligne, sont modulés en fonction de certaines caractéristiques des consommateurs. Il y a même eu notamment, aux États-Unis, un scandale au moment où on s'est rendu compte qu'Amazon avait désactivé la fonction de livraison en un jour... Amazon a une fonction pour livrer les paquets en un jour. Ils l'avaient désactivée pour un quartier qui était à écrasante majorité afro-américaine, parce qu'on avait calculé qu'il y avait beaucoup moins de profits à faire avec ces gens-là.

Donc là, ça commence à être des pratiques commerciales particulières, c'est-à-dire on va moduler les offres de services qu'on fait selon si les gens sont riches ou pauvres. Puis souvent, ça, aux États-Unis, ça peut vouloir dire de quelle couleur leur peau est. Ça pose des grosses questions éthiques. Puis là ça, c'est des pratiques d'Amazon qui sont documentées, là. Ce n'est pas des théories du complot, c'est des recherches scientifiques qui ont démontré que c'est des pratiques commerciales qui existent. Est-ce qu'on veut ça, au Québec, que des entreprises puissent dire... On a entendu que, par exemple, le ministre des Ressources naturelles a fait une recherche sur Internet parce qu'il était intéressé d'aller en voyage. Il a, mettons, tapé sur Google «voyage en Italie». Là, il va sur un site pour acheter un billet d'avion... En fait, non, je recommence. Il va sur un site, sur un billet d'avion, pour voir un voyage en Italie, il voit un prix. Plus tard dans la journée, il va faire des... Aïe! Ce n'est pas trop cher. Il va faire des recherches sur Internet, «voyage en Italie», il clique sur certains liens, retourne sur le site de billets d'avion : le prix a monté, et là pas en vertu de la tarification dynamique que font les compagnies d'aviation, mais parce qu'il y a eu surveillance de son activité en ligne, et là on tente, après ça, de lui vendre un billet plus cher.

• (16 heures) •

Je prends l'exemple du ministre des Ressources naturelles, mais c'est l'exemple qu'a donné le ministre de la Justice lui-même lors de la commission parlementaire pour dire : Ça commence à être particulier, ça, comme pratiques commerciales. Donc, est-ce qu'on souhaite ces pratiques-là, au Québec? Est-ce qu'on juge que c'est des pratiques commerciales loyales? Énorme question, énorme question parce que ce n'est pas des pratiques qui seraient légales, ça, si ce n'était pas en ligne. Mais là c'est sur Internet, ça fait que c'est correct? Pas sûr de ça du tout. Ça ouvre d'énormes questions sur le profilage, sur la discrimination dans le domaine de la consommation.

Et ces enjeux-là, dont je viens de donner quelques exemples, on ne les adresse pas directement dans la version actuelle du projet de loi. Et ça nous apparaît un élément, ça, à améliorer dans le projet de loi, comment on fait pour limiter ces pratiques commerciales, qui sont particulièrement, comment dire, douteuses, c'est le moins qu'on puisse dire. En tout cas, elles méritent un réel débat de société.

Et ce que le projet de loi fait en ce moment, c'est encadrer de façon, en effet, plus rigoureuse qu'actuellement la manière dont on va pouvoir collecter les renseignements personnels. On octroie des nouveaux droits aux citoyens pour consentir ou non, retirer le consentement, mais on ne va pas jusqu'à régir les pratiques commerciales puis l'usage qui est fait des données elles-mêmes.

 D'ailleurs, lors de son passage en commission parlementaire, la Commission d'accès à l'information — ce n'est pas les effroyables gauchistes de Québec solidaire, M. le Président, qui disent ça — a soulevé des questionnements importants exactement là-dessus en disant : En matière de profilage, là, il faut étoffer le projet de loi. Il n'y a pas grand-chose qui vient baliser ces pratiques commerciales là.

Même chose, puis là je pourrais continuer à donner d'autres exemples, mais le profilage biométrique, la collecte de données génétiques, la collecte de données à caractère intime, par exemple si une femme est enceinte ou non, est-ce qu'une entreprise devrait pouvoir collecter ça dans sa base de données? Le fait d'avoir une maladie, par exemple, le fait de faire une recherche sur Internet d'un certain type de médicament parce qu'on pense être atteint d'une maladie, est-ce qu'une entreprise devrait pouvoir capter ce renseignement-là? Est-ce qu'une entreprise devrait pouvoir capter ce renseignement-là et le vendre à une compagnie d'assurances avec laquelle on pourrait vouloir contracter?

L'ampleur de ces phénomènes-là, M. le Président, nous force à se poser des questions éthiques et politiques très profondes. Il va falloir avoir une commission parlementaire sérieuse et rigoureuse pour aller au bout de ces éléments-là, au bout de ces enjeux-là.

On pourrait également parler de la question de la définition du renseignement personnel. Qu'est-ce qu'un renseignement personnel? En ce moment, le projet de loi nous propose une définition assez restrictive du renseignement personnel. On nous dit, grosso modo, qu'un renseignement personnel c'est un renseignement qui permet d'identifier quelqu'un.

Bien, tu sais, collecter un renseignement sur, par exemple, la couleur des yeux de quelqu'un par reconnaissance faciale, mettons, moi, j'ai les yeux bleus, ça ne permet pas de m'identifier directement. Pourtant, c'est une donnée biométrique assez intrusive. Est-ce qu'une entreprise devrait avoir le droit de collecter cette information-là sur moi? Le fait qu'une femme est enceinte, pour reprendre mon exemple, ça ne permet pas d'identifier directement la personne, mais, si on croise avec d'autres données, par contre, là, peut-être... Et, surtout, est-ce que les entreprises devraient avoir le droit de collecter ce genre de données? Tu sais, un employeur n'a pas le droit de demander ça à quelqu'un dans une entrevue d'embauche, hein, on a mis des règles pour ne pas que ça arrive. Mais, sur Internet en ce moment, rien ne l'empêche, rien ne l'interdit.

Donc, qu'est-ce qu'un renseignement personnel? Cette question-là, elle a l'air d'une technicalité juridicolégale, mais, si on définit mal ce qu'est un renseignement personnel, c'est tout l'édifice de protection des renseignements personnels qui s'écroule parce qu'il y a plein de renseignements qui vont être à l'extérieur du périmètre du projet de loi. Donc, ça aussi, sur la question des pratiques commerciales, il va falloir s'attarder à définir ce qu'est un renseignement personnel parce que, si on le définit de manière trop restrictive, il y a plein de choses qui vont tomber à l'extérieur de l'emprise du projet de loi.

Qu'en est-il des données personnelles indirectes ou inférées, hein? Les algorithmes d'intelligence artificielle, maintenant, permettent, à partir de données personnelles réelles qu'on a collectées chez les individus, d'inférer d'autres renseignements. Donc, je collecte le renseignement a, b, c et, grâce à un algorithme prédictif d'intelligence artificielle, je déduis d. Mais d, est-ce que c'est, lui aussi, un renseignement personnel? Est-ce que la loi s'applique à la donnée qui a été inférée des données premières qui ont été collectées ou est-ce que, puisqu'elle est juste inférée, bien, elle tombe en dehors du champ de l'application de la loi?

Ça, également, ce n'est pas précisé actuellement dans le projet de loi. Ça va faire partie de ce qu'on va devoir travailler en étude détaillée, qu'est-ce qu'on fait non seulement avec les données qu'on collecte, mais qu'est-ce qu'on fait avec les données qui sont inférées à partir de celles que l'on collecte. Énorme question. Énorme question, M. le Président.

Troisième axe d'intervention de ma formation politique dans le cadre de ce projet de loi là, les pouvoirs de la Commission d'accès à l'information. Ça, ça a été dit par à peu près tout le monde qui est venu en commission parlementaire. C'est un projet de loi qui octroie des nouveaux pouvoirs à la Commission d'accès à l'information. Elle va être dorénavant chargée de recevoir les avis de bris de sécurité. Quand une entreprise ou un organisme public est l'objet d'une fuite, c'est la CAI qui va recevoir cet avis. La CAI va devoir surveiller l'application des nouvelles normes en matière de protection des renseignements personnels. C'est la CAI qui va être responsable d'imposer des sanctions aux entreprises contrevenantes, parce que ça, c'est un des... je parlais, dans les derniers temps, plus des éléments à bonifier, mais, s'il y a bien un élément qui est intéressant dans le projet de loi, c'est les sanctions. On a importé, à peu près copier-coller, les sanctions du RGPD, et ça peut aller jusqu'à plusieurs, plusieurs, plusieurs dizaines de millions de dollars pour les grandes entreprises qui font preuve de négligence en matière de protection des renseignements personnels. C'est la CAI qui va être responsable d'administrer ces ressources-là.

En ce moment, la CAI, si elle doit se battre contre des avocats de Google, elle n'a pas exactement, en ce moment, assez de ressources, hein? Probablement que le budget du contentieux de Google, juste le contentieux de Google, ça doit être plusieurs centaines de fois le budget total de la CAI. Ça fait qu'il y a certainement une bonification à faire à la Commission d'accès à l'information pour lui donner les moyens de se coltailler, si nécessaire, avec les géants du Web qui vont être impactés par ce projet de loi n° 64.

En ce moment, il manque déjà de l'argent à la CAI, je m'en voudrais de ne pas le mentionner. Dans son rapport annuel de gestion, en 2018‑2019, la CAI rappelait que le délai moyen d'un dossier est de 602 jours à compter du moment où il y a le dépôt d'une plainte relative à la protection des renseignements personnels. 600 jours de délai. Ça, c'est avant le dépôt du projet de loi n° 64, qui va lui donner de nouvelles responsabilités. Pour nous, il apparaît absolument incontournable qu'avec ces nouvelles responsabilités là viennent des nouvelles ressources pour que la CAI soit capable de faire son travail. Bref, les dispositions de la loi qui donnent des nouveaux pouvoirs à la CAI sont intéressantes, mais c'est des pouvoirs qui vont rester absolument illusoires et voire fictifs si ça ne vient pas avec des ressources supplémentaires.

Quelques éléments de réflexion en rafale sur la Commission d'accès à l'information avant de passer au quatrième et dernier aspect que je voulais aborder. Pourquoi ne pas donner encore davantage de pouvoirs à la CAI, notamment en matière de surveillance, en matière d'audit, en matière d'enquête? Un des problèmes que nous avons actuellement en matière de renseignements, des renseignements personnels, c'est qu'il y a très peu de... beaucoup... en fait, les institutions publiques connaissent très mal quelles sont exactement les pratiques des entreprises qui collectent massivement des données, hein? Les algorithmes à partir desquels travaillent ces entreprises-là sont... c'est des algorithmes très avancés technologiquement, qui avancent rapidement, et souvent les institutions publiques ne savent juste pas ce que font ces entreprises-là avec les données qu'elles récoltent chez les citoyens et les citoyennes.

Pourquoi ne pas donner à la CAI le pouvoir — c'est une recommandation qui nous a été faite en commission parlementaire — d'aller dans les entreprises, d'ouvrir la boîte noire et de regarder le traitement qui est fait des données des individus? Je pense qu'il y a là une piste intéressante pour encadrer les pratiques, parce qu'on ne peut pas encadrer les pratiques si on ne les connaît pas. Puis c'est un de nos problèmes en ce moment, on ne les connaît pas ou on les connaît très mal.

On ne sera pas capable de déterminer si le traitement des données porte préjudice aux citoyens et citoyennes du Québec si on ne sait pas quel est le traitement de ces données-là et donner à la Commission d'accès à l'information des pouvoirs d'enquête, de surveillance, d'audit, bref, des moyens d'aller voir dans les entreprises comment ça se passe. Si on ne fait pas ça, on va rester longtemps dans le noir sur ce qui se passe vraiment avec nos données personnelles.

• (16 h 10) •

Est-ce qu'on ne pourrait pas donner à la CAI, par exemple, le pouvoir — c'est une deuxième idée — de faire retirer certains produits ou certains biens du marché s'ils représentent un risque en matière de protection de la vie privée? Ça me semble... On parlait des jouets intelligents plus tôt, là, des jouets intelligents qui collectent des données personnelles auprès de nos enfants. Est-ce que la CAI ne pourrait pas avoir un pouvoir de retirer certains produits si on juge, après examen et enquête, que ces produits-là sont dangereux pour la vie privée? C'est le genre de piste de solution qu'on va vouloir explorer lors de la commission parlementaire.

Quatrièmement et dernièrement, le projet de loi porte également sur l'encadrement des données personnelles au sein des partis politiques. Les partis politiques collectent des données, c'est bien connu. Le projet de loi vient modifier la Loi électorale pour assujettir les partis politiques aux dispositions de la loi sur le secteur privé. C'est une approche, donc, de dire : On applique la loi sur les entreprises privées aux partis politiques. C'est une approche qui peut être questionnée, je pense, et ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Commission de l'éthique en science et technologie, qui a soulevé des questionnements en disant : Bien sûr qu'il faut encadrer l'usage que les partis politiques font des données personnelles des Québécois, il faut d'ailleurs sans doute le resserrer, et je suis d'accord, mais est-ce que, pour prendre un exemple fort, Google et le Parti vert devraient être soumis aux mêmes obligations légales?

La réponse de la Commission de l'éthique en science et technologie, c'était de dire : Bien, attention, il faut peut-être considérer la finalité sociale des organisations. Est-ce qu'un organisme sans but lucratif, c'est la même chose qu'une multinationale? Est-ce qu'un organisme sans but lucratif, c'est la même chose qu'un organisme public? Est-ce que c'est la même chose qu'un parti politique? La Commission de l'éthique en science et technologie nous invitait à peut-être faire des distinctions entre ces choses-là puis à développer des cadres juridiques qui s'adaptent à la finalité sociale des organisations. À ce stade-ci, moi, je ne suis pas prêt à dire où est-ce que ça devrait être plus exigeant et moins exigeant, mais ce que les experts en cybersécurité, en technologie et en éthique de la Commission de l'éthique en science et technologie nous ont dit, c'est : Il faut réfléchir à adapter les cadres légaux puis les cadres réglementaires en fonction de la nature des organisations, en fonction de la finalité des organisations. Est-ce que l'État, c'est la même chose qu'une entreprise privée? Non. Est-ce qu'un parti, c'est la même chose qu'un OSBL? Non. Est-ce qu'un OSBL, c'est la... Est-ce que le «one size fits all» est vraiment la bonne approche? En tout cas, la Commission d'éthique en science et technologie, à la commission parlementaire, disait : Peut-être réfléchir à avoir des cadres particuliers selon les situations.

Je pourrais donner un autre exemple. Est-ce que les PME, c'est comme Google? Bien sûr que non. Ils n'ont pas les mêmes moyens, ils n'ont pas les mêmes ressources, ils n'ont pas les mêmes pratiques. Bref, il y a une réflexion à faire sur quels cadres légaux et réglementaires voulons-nous appliquer à quel type d'organisation. Par exemple, il y a des organismes sans but lucratif, des groupes communautaires, qui font signer des pétitions pour une mobilisation citoyenne. Est-ce qu'il faut demander exactement la même chose exactement de la même manière à ce groupe communautaire qu'à une mégaentreprise multinationale? Il me semble que c'est une question intéressante. Vous comprenez que, si je la pose, c'est qu'il m'apparaît qu'on gagnerait à adapter notre cadre juridique selon le type d'organisation, sinon on risque d'être beaucoup trop contraignants dans certains cas ou vraiment pas assez contraignants dans d'autres. Et je pense que la question des partis politiques, on doit la réfléchir dans ce cadre-là. À quoi ça sert, un parti politique? Quels types de données ça collecte? Quels sont les risques spécifiques liés au type de pratique d'un parti? Et comment on encadre cela avec notre cadre légal par rapport à quel est le type de collecte, le type de données, le type de traitement d'autres types d'organisations? Il y a sans doute des dispositions qui peuvent être partout les mêmes, mais j'ai le pressentiment qu'il y a d'autres dispositions qui gagneraient à être flexibilisées selon le type d'organisation.

En terminant, M. le Président, parce que c'était le quatrième axe d'intervention dont je voulais vous parler, la question des partis politiques, en terminant, j'attire votre attention sur un concept fondamental qui était dans le RGPD et qui est absent du projet de loi n° 64, c'est le concept de champ d'application territorial. L'Internet ne connaît pas de frontière, c'est une banalité que de dire ça. Mais actuellement, justement, il n'y a rien, dans la loi sur le secteur privé, là, en matière de protection des renseignements personnels, qui précise comment s'applique la loi à une entreprise étrangère qui a des activités au Québec sans y avoir d'établissement physique. C'est pas mal un des nerfs de la guerre, si vous voulez mon avis, puis la loi, en ce moment, ne précise pas ça.

Dans le RGPD, il y a des dispositions claires là-dessus. Dans sa version québécoise, beaucoup moins. Je pense qu'il y a là matière à réflexion. Comment on fait pour être équitable? Comment on fait pour ne pas demander à des entreprises québécoises... Comment on fait pour ne pas... voilà, de ne pas imposer à des entreprises de chez nous de très fortes exigences en matière de protection de la vie privée qu'on n'imposerait pas à des entreprises étrangères ou même à une entreprise ontarienne? Ça, c'est une question de vie privée, puis il y a aussi une question économique et d'équité. Comment on ne désavantage pas certaines entreprises par rapport à d'autres? Comment on s'assure qu'il y ait un cadre légal relativement harmonisé pour l'ensemble des entreprises avec lesquelles transigent les Québécois et les Québécoises? Et, sur le Net, ce n'est pas juste des entreprises québécoises, c'est un euphémisme. Alors, comment on clarifie le champ d'application de la loi aux entreprises canadiennes, aux entreprises québécoises, notamment, et aux entreprises étrangères, celles qui n'ont pas d'établissement au Québec?

Il y a ici une question fondamentale qui est celle de notre... ce qu'on pourrait appeler de notre souveraineté numérique, notre autodétermination numérique. Jusqu'où sommes-nous capables, comme législateurs, comme représentants du peuple québécois, de protéger les droits et libertés numériques de nos concitoyens, concitoyennes? Comment on fait pour affirmer, même dans le domaine du numérique, la souveraineté du Parlement du Québec en matière de protection des consommateurs parce que c'est une compétence québécoise, comment on fait ça? Grande question. Je vous mentirais, M. le Président, si je vous disais que j'ai la réponse à cette question-là, tout comme je vous mentirais si je vous disais que j'ai la réponse à l'ensemble des interrogations que j'ai soulevées dans les dernières 50 minutes.

Bref, je vais m'arrêter ici, mais ce que je souhaitais faire, c'est donner... Puis je n'avais même pas prévu... je ne pensais pas que ça me prendrait une heure, mais ça montre à quel point ce projet de loi là, il est important, à quel point il embrasse large, à quel point ça couvre plein de domaines de la vie quotidienne des Québécois, des Québécoises. C'est un projet de loi qui mérite d'être étudié rigoureusement, en détail, de manière constructive. Vous avez mon engagement, M. le Président, que c'est ce que ma formation politique va faire : réfléchir avec les collègues des oppositions et avec le ministre de la Justice sur comment on met en place un cadre juridique qui va protéger le mieux possible les libertés fondamentales des Québécois et des Québécoises. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Je me demandais si l'appel à la participation qui avait été lancé par le leader du deuxième groupe de l'opposition avait trouvé écho chez un des députés présents. Et je vois que peut-être le ministre délégué à la Transformation numérique a failli entendre cet appel, et il me fait signe qu'il a... Je ne sais pas si ça a été... un peu comme un gentleman il s'est dit : Je vais laisser la députée de Saint-Laurent... et qu'il va profiter, dès que j'aurai terminé... il va pouvoir se lever puis pouvoir nous donner des indications par rapport au projet de loi n° 64... Parce que je ne pourrais jamais croire que le ministre délégué à la Transformation numérique n'a pas quelques mots à nous adresser, étant donné que lui et moi avons échangé quand même beaucoup, notamment dans les crédits, sur le dossier qu'il travaille, c'est-à-dire l'identité numérique, qui comprend notamment des aspects de biométrie. Alors, je serais vraiment, vraiment étonnée qu'il n'ait pas un mot à dire sur le projet de loi n° 64. Alors, j'espère que ce message sera entendu.

Effectivement, il y a des groupes qu'on aurait bien aimé entendre. M. le Président, vous savez que, lorsque les consultations particulières ont terminé, il y a quand même 30 mémoires qui ont été reçus après, hein? C'est énorme. Ça montre tout l'intérêt que les gens considèrent à ce projet de loi. Je trouve dommage qu'on n'a pas été en mesure d'entendre certains groupes. Évidemment, on veut toujours entendre le plus de personnes possible. Ça nourrit nos réflexions, ça fait qu'on peut bonifier un projet de loi. Mais je trouve ça particulier qu'on n'a pas été en mesure d'entendre le Barreau du Québec. Et ce n'est pas la première fois que ça se produit. Le Barreau du Québec, qui a pour mission de protéger le public d'abord et avant tout, n'a pas pu se présenter, et je cite, compte tenu des délais très serrés. Je comprends que le ministre de la Justice est un homme pressé...

(Interruption)

Mme Rizqy : À vos souhaits. Par contre, ça vaut la peine de prendre son temps pour entendre le Barreau du Québec. On aurait pu, je crois, offrir un délai supplémentaire, notamment quand que, par la suite, c'est la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, et je cite, compte tenu des délais trop courts pour produire notre mémoire sur ce projet de loi, a dû, elle aussi, se désister.

• (16 h 20) •

La Protectrice du citoyen avait confirmé sa présence. Et savez-vous quoi, M. le Président? Elle a dû décliner. Et pourquoi? Je cite : «Au moment où cette invitation a été reçue, l'analyse du projet de loi n'était pas complétée, et, en conséquence, aucune décision n'avait encore été prise quant à notre participation.» Fin de la citation.

Alors, c'est quand même, là, des organismes qu'en définitive, là, leur mission principale, c'est la protection du public. Lorsque nos remparts de société en matière de protection des renseignements personnels des citoyens sont dans l'incapacité de se présenter devant nous parce qu'on ne leur donne pas le temps requis, moi, ça me parle et ça m'inquiète, M. le Président. Mais, je vous l'ai dit, c'est parce que ce n'est pas la première fois que ça arrive.

J'espère qu'on prendra bonne note qu'on est capables, oui, d'avancer, mais peut-être qu'on n'est pas obligés d'avancer au rythme militaire imposé par le ministre de la Justice, là. Je sais que c'est un homme pressé, mais, des fois, il faut savoir prendre son temps pour faire les choses correctement. Alors, M. le Président, ça, c'est la première affaire que j'aimerais discuter avec vous. C'est fait.

Maintenant, la deuxième. Je suis très étonnée d'une autre affaire. Et là je sais que le ministre délégué à la Transformation numérique aura une attention très particulière à ce que je vais dire. On s'en est parlé, je me suis levée en Chambre à plusieurs reprises sur la question de la reconnaissance faciale. On a demandé un moratoire.

En pleine pandémie, M. le Président, pouvez-vous croire que la Sûreté du Québec est allée en appel d'offres? En pleine pandémie mondiale. Le Québec est sur pause, puis la Sûreté du Québec, elle : Laissez faire la pause, on s'en va en appel d'offres sur un sujet hautement contesté, la reconnaissance faciale. Évidemment, en pleine pandémie, vous comprendrez que ça ne s'est pas bousculé aux portes pour soumissionner. Alors, une, une seule entreprise, étrangère, a soumissionné pour un contrat d'environ 4,5 millions de dollars.

Je me suis relevée en Chambre, j'ai demandé à nouveau qu'il y ait un moratoire, pas parce que je veux faire empêcher la Sûreté du Québec ou toute autre entreprise, organisme public, parapublic ou entreprise d'utiliser le logiciel parce que ça ne me tente pas. M. le Président, c'est qu'ailleurs dans le monde des endroits qui ont expérimenté le logiciel de reconnaissance faciale, ils se sont rendu compte qu'il avait un biais discriminatoire.

Personnellement, j'aurais cru que, lorsque le journaliste Tristan Péloquin avait filmé les députés caquistes sortir de leur caucus, il avait même fait un article là-dessus... Vous auriez dû réagir, là. Ils ont dit que j'étais dans votre caucus. Juste ça, ça aurait dû vous alarmer, dire : Bien non, on ne veut surtout pas que la députée de Saint-Laurent soit dans notre caucus. Là, deux fois, j'étais dans leur caucus. Ça, c'est une erreur majeure. Le député de Sainte-Rose me fait un sourire. Mais non, vous auriez dû réagir. Il dit : On la trouve sympathique. Mais, de l'autre côté de la Chambre, pas de notre côté, ça, ça aurait dû vous alarmer, de savoir que le logiciel me confondait avec la vice-première ministre. Parce que le logiciel comporte des biais discriminatoires, il est moins efficace pour les peaux plus foncées. Donc, moi, je ne suis pas une peau noire, je suis une peau basanée, alors, par erreur, on m'a confondue. Et le logiciel, plus votre peau est foncée, plus a des erreurs.

Alors, moi, au fond, c'était quand même comique. Donc, moi et le député de Sainte-Rose, on est capables d'en rire. Mais qu'est-ce qui est moins drôle, c'est lorsque que c'est la police qui se trompe, c'est lorsque vous vous faites arrêter à répétition parce qu'il y a un logiciel qui dit : Ah! c'est elle. Ou, par exemple, dans le cas du député de Sainte‑Rose, qui, lui aussi... Je crois que lui puis moi, on a presque le même pigment, je pense. Je vois par son sourire qu'il me le confirme. Oui? Pas pire? Il y a un rapprochement. Alors, il y a ici une similarité. Mais je sais que ça, c'est un sujet très sensible et je sais que le député de Sainte-Rose, là-dessus, il peut comprendre que, oui, nous, on peut en rire, lorsque c'est une erreur de personne dans un caucus, mais, lorsqu'il y a des arrestations policières, là, il y a vraiment, là, une action judiciaire, la personne est menottée, elle est arrêtée et elle doit faire face à la musique, alors que la personne est innocente... Et, dans le cas des personnes de couleur, plus particulièrement pour les personnes noires, bien, c'est quelque chose qu'elles vivent déjà. Je sais que plusieurs n'aiment pas le terme «racisme systémique». Je le sais, qu'il y en a qui sont même... qui ont une allergie à ça, le racisme systémique, je comprends. Mais le problème, avec le logiciel de reconnaissance faciale, il automatise ces biais. Donc, c'est une discrimination systémique de par le logiciel.

Savez-vous quoi, M. le Président? San Francisco, qui est comme le bassin de toutes les nouvelles technologies ou presque, ça a été la première ville a carrément interdire l'usage de la reconnaissance faciale non seulement par les corps de police, mais également pour toute autre entité, que ce soit gouvernemental, parapublic ou corps de police. C'est interdit. Par la suite, d'autres villes ont emboîté le pas.

Plus près de chez nous, au Canada, face à toute la polémique qui a été soulevée par ce logiciel, l'une des entreprises qui était fournisseur de la GRC, donc le corps de police fédéral, a décidé de ne plus fournir ce service à la GRC. Donc, d'un côté, on a les Américains qui pèsent sur les freins, on a la GRC qui pèse sur les freins, mais, chez nous, la Sûreté du Québec, en pleine pandémie, et permettez-moi, parce que je ne vise personne ici — je sais que vous avez un petit peu de difficulté à vous lever, je vais en profiter, M. le leader adjoint — en catimini, là, la Sûreté du Québec a signé le contrat, pas plus tard que la semaine passée. Vous me la permettez, hein, celle-ci, juste cette fois-ci. Merci. J'aime ça, la bonne collaboration. C'est un jeudi, fin d'après-midi.

Alors, c'est là que j'ai un problème. Et je connais très bien le ministre délégué à la Transformation numérique. C'est un homme, habituellement, d'une droiture! Il a même raflé, vous savez, le terme de shérif de la CAQ. Ce n'est pas rien, ça. Alors, à tout seigneur tout honneur, moi, je demande au shérif de la CAQ, avec tous les pouvoirs qui lui sont aussi délégués : Peut-il utiliser tout son poids politique pour faire reculer la Sûreté du Québec? S'il le fait, écoutez, je suis prête à relever, moi-même, un défi. Donc, vous voyez? Donnant, donnant. Vous pouvez même dire c'est quoi, le défi. Je suis partante, parce que je crois sincèrement...

Une voix : ...

Mme Rizqy : Bien non! Pas ça, là, M. le Président. Alors, vous comprendrez que ça, ça serait... vraiment, là, on pourrait voir le shérif de la CAQ vraiment utiliser tout son poids politique pour dire qu'effectivement ça va trop loin.

Et la Sûreté du Québec n'a pas consulté. La Sûreté du Québec était au courant qu'il y avait le projet de loi n° 64. La Sûreté du Québec était parfaitement au courant qu'on s'en venait avec un projet de loi. Alors, je crois qu'ici c'est important que l'Assemblée nationale du Québec réagit, réagit fortement et demande tout simplement d'annuler ce contrat-là.

Il n'y a aucune raison aujourd'hui qui justifie que la Sûreté du Québec va de l'avant avec ce contrat, et fasse de la reconnaissance faciale, et utilise ce logiciel pour la simple et bonne raison qu'on sait que, premièrement, il y a des déficiences, deuxièmement, un risque de surveillance de masse. Et d'ailleurs, on l'a entendu avec la Quadrature du Net, lors des consultations particulières dans un autre dossier, celui de... le traçage.

Alors, moi, à ce stade-ci, je ne peux pas croire que le shérif de la CAQ, le ministre délégué à la Transformation numérique n'interviendra pas dans ce dossier. Je serais un petit peu déçue, parce que moi, je le sais, que c'est un homme qui est capable d'utiliser tous ses leviers politiques. Ça, j'en suis convaincue. Ça, c'est une autre...

Une voix : ...

Mme Rizqy : Ah! bien non, je ne le surestime pas. Je sais que c'est homme de grande conviction, quand même.

Alors, autre chose, M. le Président, si vous permettez... Ah! je vois mon collègue le député de La Pinière entrer parmi nous.

• (16 h 30) •

Le Vice-Président (M. Picard) : ...Mme la députée, continuez, s'il vous plaît.

Mme Rizqy : Oui. Alors, non seulement j'aimerais bien qu'il y ait un moratoire pour le logiciel de reconnaissance faciale, non seulement pour les corps de police, mais également pour le secteur privé. C'est très troublant de savoir à quel point nous sommes observés à notre insu pour nous dire qu'est-ce qu'on veut, comment qu'on le veut puis nous vendre davantage de bébelles, puis, oui, je dis des bébelles. Alors là, à un moment donné, il faut envoyer un signal très clair puis dire : Ça va faire. Vous avez le droit, évidemment, les entreprises, de commercer, mais vos pratiques commerciales doivent être encadrées, puis le meilleur endroit pour encadrer les pratiques commerciales, c'est ici, à l'Assemblée nationale.

Dans le projet de loi n° 64, il y a une affaire que j'aimerais voir, M. le Président : l'encadrement envers les enfants. Comment se fait-il qu'aujourd'hui il y a des jouets vendus à des enfants qui enregistrent qu'est-ce qui se dit? Donc, vous achetez un toutou à votre gamin, et, à votre insu, bien, il enregistre qu'est-ce qui se passe dans la maison, une violation importante de la vie privée. Vous savez, nous, on a des lois au Québec, hein? Il y en a une aussi qui dit qu'on ne peut pas faire de publicité aux enfants de 13 ans ou moins.

Alors, vous comprendrez que non seulement, ici, une violation de la vie privée, mais, pire que ça, c'est qu'on sait qu'au fond, là, ils veulent savoir qu'est-ce qu'on se dit dans la maison pour nous vendre d'autres affaires, pour faire de la publicité, peut-être aux parents ou peut-être à l'enfant. Alors, ça, M. le Président, j'espère que ce sera vraiment observé dans le projet de loi n° 64 et qu'on aura un encadrement beaucoup, beaucoup plus soutenu, et ça, pour le bien, évidemment, des enfants, ce sont leurs droits à eux.

Surveillance. Donnez-moi juste une seconde, M. le Président, je veux être sûre de ne rien oublier parce que j'ai beaucoup à couvrir. Vous savez, je suis aussi au p.l. n° 53 qui se déroule en ce moment au salon rouge. Alors, je suis sortie du projet de loi n° 53 qui, lui, c'est sur le verrou. Mais pourquoi je parle du p.l. n° 53? C'est que le p.l. n° 53 et le p.l. n° 64 se font en parallèle. Les deux ont été faits beaucoup en réaction après l'affaire Desjardins, vol de données massif, mais il n'y a pas que Desjardins. Il y a eu plusieurs autres fuites de données très, très importantes, et c'est le temps qu'on s'assure qu'autant le secteur privé que le secteur public, lorsqu'on veut avoir la donnée... mais qu'on la protège correctement.

Et c'est important que les peines, les amendes soient efficaces. Alors, je vois ici que, oui, il va y avoir un ajustement au niveau des peines. L'argent, c'est une chose, mais, quand vous vous appelez Facebook ou Amazon, le danger avec ces peines-là, c'est que, pour eux, là, 25 millions, ce n'est pas grand-chose, ils le font en 15 minutes. C'est vrai, là. Alors, quand on a une entreprise mégalomane comme Facebook, une mégaentreprise... Moi, je les appelle affectueusement des supranationales, c'est-à-dire qu'elles opèrent partout, ne paient pas d'impôt nulle part, puis personne ne les légifère. Elles sont trop grandes, ces entreprises.

Bien, à ce stade-ci, peut-être qu'il faudrait réfléchir à avoir des peines planchers, c'est-à-dire qu'on sait combien qu'on va payer au minimum, pas au maximum, parce que, du moment où vous connaissez votre plafond, bien, souvent, vous allez faire le calcul suivant : Combien me coûte l'infraction versus quel est mon profit? Si votre profit, là, est de 1 milliard de dollars versus perte, 25 millions, bien, vous allez faire inévitablement l'infraction, payer votre 25 millions. Donc, c'est, au fond, un droit à l'infraction que ces entreprises-là s'achètent. Alors, c'est pour ça que ça prend une peine plancher.

Et le parallèle que je fais, puis j'espère que le ministre délégué va le retenir : l'environnement. L'environnement, rappelez-vous, il y a une certaine époque, c'étaient des peines avec des plafonds, donc un maximum. Alors là, ça pouvait être tentant de dire : Je ne vais peut-être pas me conformer, je vais faire du profit. Je vois le ministre, il me regarde avec un beau sourire. J'aime ça. Alors, vous me suivez dans mon raisonnement, ça veut dire, vous êtes très attentif. Alors, quand on a modifié puis qu'il y a eu des peines planchers, ah, bien là, ça a changé le comportement des entreprises. Elles se sont rendu compte qu'elles savent au minimum combien ça va leur coûter, l'infraction. Elles ne connaissent pas le maximum, et ça, c'est important.

Pour ce qui est de discussions avec le gouvernement fédéral pour les modifications au niveau du Code criminel, c'est très bien. Vous pouvez évidemment compter sur notre collaboration, parce que je sais que, des fois, vos discussions ne sont pas au beau fixe. Alors, Parti libéral du Québec, Parti libéral du Canada, en ce moment, peut-être qu'on pourrait vous aider, parce qu'effectivement il faut faire des modifications au niveau du Code criminel, parce que, dans le cas, par exemple, de l'affaire Desjardins, là, M. le Président, j'espère que vous êtes bien assis sur le trône, l'individu, si jamais un jour, un, est accusé et, deux, condamné : cinq ans moins un jour, là, pour tous les dommages que cette personne a faits. Je ne vous dirai pas ce que moi, j'en pense, évidemment, mais je pense qu'on est capables de faire beaucoup mieux en matière de dissuasion. Puis, quand on regarde ailleurs dans le monde, que ce soit en Europe ou aux États-Unis, les peines en matière de crimes financiers sont vraiment sévères, et je crois que ce serait vraiment le temps, là, que le Canada emboîte le pas là-dessus, parce que, sinon, là, on n'est vraiment pas sortis de l'auberge.

L'équipe mixte d'enquête, on en a parlé, ça pourrait être très intéressant. Alors, j'espère qu'il y aura ça, donc, une équipe mixte d'enquête. Ça a été déjà déposé, dans la dernière législature, par le gouvernement libéral. Je crois que ça pourrait vraiment être utile. Mais savez-vous qu'est-ce qui pourrait être encore plus utile, M. le Président? Bien, vous savez, je suis aussi porte-parole de l'éducation, donc je crois beaucoup à l'éducation, notamment la littératie numérique. Ça, ce serait grandement utile. Je crois que c'est très important que les gens maîtrisent davantage les enjeux. Qu'est-ce qu'un consentement libre et éclairé? À quoi je consens lorsque je clique O.K.? J'accepte quoi exactement? Souvent, là, on parle de consentement, mais il n'est pas libre et éclairé parce que les gens ne savent même pas à quoi qu'ils vont consentir... ou sinon ils ont comme 14 pages à lire pour consentir.

Alors, là-dessus, la littératie numérique, ça, j'espère qu'on va pouvoir travailler ensemble, hein, la collaboration. Et ça peut commencer très tôt dans les écoles, la littératie numérique. Des outils, aussi, gratuits pour les adultes. Ce n'est pas tout le monde qui est à l'aise avec Internet. Alors, je crois que ça, on pourrait avoir une belle avancée québécoise, une formule, là, qui va permettre aux citoyens de vraiment s'assurer de bien comprendre tous les enjeux du Net; peut-être pas tout, hein, mais quand même, le mieux possible.

Alors, je m'en voudrais de ne pas faire un petit clin d'oeil à Bruno Guglielminetti, de Mon Carnet. Demain, c'est sa 200e édition de son podcast Mon Carnet. Et souvent, là-dedans, on apprend plein d'affaires très utiles, d'ailleurs.

Alors, M. le Président, en conclusion, parce que je sais que vous êtes tous ici, cet après-midi, bien assis sur votre chaise pour entendre les propos de mon collègue de La Pinière... Oui, oui, habituellement, on le sait, quand le député de La Pinière fait son allocution, tout à coup, tout à coup, l'après-midi devient beaucoup moins morose et beaucoup plus drôle. Alors, M. le Président, merci pour votre attention et votre écoute. Merci à mes collègues. Et je cède la parole à mon collègue le député de La Pinière.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée de Saint-Laurent. Je vais céder la parole à M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Je ne sais pas si aujourd'hui je vais être à la hauteur de ma réputation, M. le Président, mais j'avais déjà annoncé à l'avance au ministre délégué à la Transformation numérique qu'aujourd'hui j'allais peut-être être moins excitant. Mais qui sait? On ne sait jamais. Ma batterie vient de tomber à terre, en plus, M. le Président, c'est épouvantable. Non, je viens d'ouvrir. C'est le fun, ça. Alors, je vais mettre mon mot de passe.

M. le Président, c'est une journée qui est très particulière... Pardon?

Une voix : ...

• (16 h 40) •

M. Barrette : Vous savez, M. le Président, c'est quand même assez intéressant, aujourd'hui, on travaille d'une façon un petit peu différente, là, on est souvent en travailler de notre bureau, puis on écoute nos collègues, et puis des fois c'est très intéressant. Puis aujourd'hui, je vais vous dire une chose, c'est très, très intéressant. Je pense qu'aujourd'hui ceux qui ont écouté nos travaux ont appris beaucoup de choses. Même moi, M. le Président, je vais l'avouer, j'apprends des choses. Puis aujourd'hui j'ai trouvé ça bien le fun, j'ai appris plein d'affaires des collègues. Ma collègue de Saint-Laurent, qui est toujours, elle aussi, très dynamique, on en apprend toujours d'elle, et c'est encore le cas aujourd'hui. Puis là je ne parle pas de questions pigmentaires, parce que, là, moi, c'est un petit peu plus pâle, ce n'est pas la même affaire.

Mais il y a une chose, par contre, sur laquelle je veux revenir, et, pour moi, c'est important. Nous célébrons aujourd'hui — en tout cas, en face, ils le célèbrent — le deuxième anniversaire du mandat de la CAQ. Ils sont heureux. Alors, on va remettre les choses en perspective pour comprendre les propos que je viens de tenir, M. le Président.

Rappelons que ce gouvernement est mené par un premier ministre qui a dit, au début de son mandat, que, le Parlement, essentiellement, là, hein, on perdait notre temps. Il fallait réformer ça, c'était important. Il fallait tellement réformer ça, M. le Président, que l'actuel leader, ministre de la Justice, a déposé un projet de réforme parlementaire. Et moi, je l'ai déjà commenté, M. le Président, ce projet-là, parce que ce que j'y ai vu d'abord, c'est un exercice pour faire taire les oppositions.

Et, M. le Président, là, je vais vous dire une chose, là, O.K.? Ce que je vois, depuis la rentrée parlementaire, là, depuis cette session-ci, là, bien, c'est quasiment dégradant. Puis je vais m'expliquer, M. le Président, je vais être très clair. Vous n'avez qu'à écouter le leader lorsqu'il fait l'annonce des travaux parlementaires, quand vous vous levez, à la fin : il nous défile ça, là, à une vitesse tellement grande que, maintenant, les journalistes le notent. Aujourd'hui, un journaliste, M. Cormier, l'a noté. Je lui ai répondu. Et il a écrit son tweet au moment où il y avait la lecture des travaux de la journée.

Le collègue de Québec solidaire, il y a quelques minutes, l'a relevé pour le projet de loi que le ministre a à défendre : pas vraiment de passion, pas de persuasion, un robot qui nous lit... hein, un «robocall», là on est rendus, là, qu'on a des robo-interventions, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Picard) : ...du gouvernement.

M. Caire : M. le Président, je pense qu'on n'a pas à tenir des propos blessants en cette Chambre. Je suis convaincu que le député de La Pinière va être capable de captiver son auditoire sans être blessant.

M. Barrette : M. le Président, j'ai parlé de «robocall». C'est une image.

Le Vice-Président (M. Picard) : Oui, mais il faut éviter les débats. Soyez prudent, M. le député de La Pinière...

M. Barrette : ...bien raison, mais il n'en reste pas moins que ça a été débité à une vitesse telle, sans passion, froidement, froidement, puis on passe au sujet suivant.

Moi, ce matin, là, et cet après-midi, ce que j'ai entendu, ce sont des parlementaires, de ce côté-ci, venir tenir un argumentaire qui était basé sur la raison, tenter de persuader tout le monde, particulièrement la partie gouvernementale, que ce projet de loi là, aussi bon soit-il, mérite d'être amélioré, le faire avec une certaine passion, le faire avec rigueur. Il me semble que c'est à ça qu'on devrait s'attendre de la partie gouvernementale.

Ce n'est pas la première fois, c'est une tendance, puis je peux vous dire, mon rêve éveillé en ce moment présent, là, j'aimerais donc ça, là, qu'il y ait plus qu'un journaliste qui s'attarde à ça, parce qu'à un moment donné, là, la vie parlementaire, ça sert à quelque chose, et là on a l'impression que ça ne sert à rien du bord de la partie gouvernementale. Fin de cet intervalle-ci, mais il faut le noter pareil. Il faut le noter pareil, si c'est ça, la réforme parlementaire, ça n'ira pas bien dans le futur au Québec.

Maintenant, je vais joindre ma voix à ceux et celles qui ont déploré que le projet de loi est mené tambour battant sans qu'on puisse entendre tous les gens qui auraient dû être entendus dans cette commission parlementaire ci, même s'il y avait des places de libres. C'est quelque chose, M. le Président.

Puis il y a un événement qui me touche particulièrement. Je ne reviendrai pas sur les explications que j'ai données, dans l'ancienne législature, sur le Commissaire à la santé et au bien-être. En face, à plusieurs reprises, incluant dans cette législature-ci, on m'a critiqué ou fait des allusions critiques à cet effet-là. M. le Président, comment peut-on expliquer que la partie gouvernementale — et, celui qui mène les travaux, ça s'adonne-tu pas que c'est le leader, qui défend le projet de loi — ait refusé d'entendre la Commissaire à la santé et au bien-être qu'ils ont ramenée avec grand éclat? Et j'imagine que, s'ils l'ont ramenée, la fonction, c'est parce qu'ils y croyaient. Alors, comment peut-on expliquer qu'on refuse de l'entendre à deux reprises, alors qu'il y avait du temps de libre? Et c'est encore pire, M. le Président, quand le temps était libre, la commission était cédulée, et on s'est tourné les pouces. C'est fort, ça.

M. le Président, je cite le courriel de la commissaire, c'est le deuxième. «Nous désirons vous signaler que nous souhaitons toujours comparaître à la Commission des institutions à propos du projet de loi n° 64. Nous constatons qu'une plage s'est libérée pour la séance du mardi 29 septembre. Nous sommes prêts à y participer.» Et ça continue : «Considérant la fonction d'appréciation de la performance du système de santé et de services sociaux du CSBE, il est indéniable que l'accès à un large éventail de données dénominalisées ou anonymisées est un élément primordial pour remplir le mandat que nous confie notre loi constitutive. Nous souhaitons suggérer que ce projet de loi, avant son adoption, fasse l'objet de certaines précisions et modifications — j'insiste — avant qu'il soit possible au CSBE de réaliser son mandat, mais aussi afin de favoriser la performance du système de santé et des services sociaux.»

Vous connaissez la chanson, hein? On l'a mis au monde, il faudrait peut-être l'écouter. Bien là, là, on ne l'entend pas. C'est fort. Puis ça peut-u être plus fort que ça, M. le Président? Alors, quand je dis qu'ici, là, il y a un gouvernement qui, encore une fois, hein, voit la vie parlementaire d'un angle qui est ce que j'ai décrit précédemment et qu'il l'applique, là... Ça, c'est clair, là. Ça ne peut pas être plus clair que ça. Je n'en reviens pas. Je n'en reviens absolument pas. Bon, qu'est-ce que vous voulez, M. le Président, comme il y en a qui disent, hein, ça m'a été dit récemment, c'est comme ça que ça marche, un parlement au Québec. Les gens jugeront, mais, sur cet événement-là, là, M. le Président, je pense qu'il y a lieu de critiquer abondamment.

Bon, M. le Président, venons-en au projet de loi comme tel. Mes collègues l'ont dit, puis je le dis sincèrement, est-ce que moi, si j'ai à voter, je vais voter en faveur du projet de loi? Oui, lorsqu'il sera amélioré. Mais sur le principe du projet de loi? Certainement. Il n'y a pas de doute là-dessus. Les collègues l'ont évoqué, peu importe la formation politique, c'est un projet de loi qui était attendu depuis longtemps. On le souhaitait, puis c'est tout à fait normal qu'on soit rendu là. Bon. Mais le problème avec les projets de loi, c'est toujours la même chose, et les lois en général, ça, c'est un, je dirais... j'allais dire un travers, mais ce n'est pas vraiment un travers, c'est rare que les lois sont en avance sur la société. C'est rare.

Alors, c'est assez difficile de faire une loi en se disant : Dans cinq ans, je pense qu'il va se passer telle chose. J'écris une loi en prévision de ça. Alors là, on arrive dans une situation où on est un peu, je dirais, d'autres diraient pas mal, en retard sur l'état de la situation de la circulation de la donnée dans notre société. Mais ce n'est pas parce qu'on est en retard qu'on ne doit rien faire et ce n'est pas parce qu'on est en retard qu'on ne doit pas corriger notre retard.

Ce qui résume aujourd'hui ma pensée, M. le Président, sur le projet de loi, c'est qu'il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup d'excellentes intentions là-dedans qui sont rédigées comme ça : Est-ce que, vraiment, on aura les moyens d'atteindre la finalité de ce que l'on souhaite? Il y a une chose qui est certaine, peu importe les organisations, qu'elles soient gouvernementales, ou privées, ou politiques... et je mets la politique de côté, M. le Président, je ne m'adresserai pas à ça, je vais m'adresser seulement à public et privé. Pourquoi? Parce que c'est ce qui m'intéresse aujourd'hui d'abord, premièrement. Et, deuxièmement, les deux parties sont pas mal similaires, là, un est pas mal copié dans l'autre, là, il n'y a pas beaucoup de différence dans le texte.

Je regarde le ministre délégué à la Transformation numérique. Il en a besoin de ce projet de loi là. Il en a besoin. J'irais même jusqu'à dire, là, puis je ne sais pas s'il va hocher de la tête, mais tout ce qu'il a en tête, tout ce qu'il a déposé à date, s'il n'y a pas cette loi-là, il y a un péril dans sa demeure. On va dire... Il hoche de la tête. On a la même lecture. Et du côté gouvernemental, M. le Président, je ne peux pas ne pas faire autrement que de constater qu'il y aura là un alourdissement bureaucratique, puis on va vivre avec parce que... Oui, bien, je vois, là, ce n'est plus un hochement de haut en bas, c'est un hochement de droite à gauche. Alors, je vois... Mais il n'en reste pas moins qu'on devra mettre en place des comités, puis des ci, puis des ça, puis je vais y revenir. Puis je ne le conteste pas, je ne le critique pas, il va falloir faire ça, M. le Président. Mais ça a des limites, tout comme ça aura des limites du côté d'une entreprise privée.

Loin de moi l'intention de critiquer le projet de loi qui vise en sorte que, dans la vraie vie, au quotidien, là, toutes les organisations publiques et privées qui ont à traiter de la donnée se dotent de protocoles, les rendent publics, que le citoyen y ait accès, puisse retirer, altérer ceci et ainsi de suite. C'est parfait, ça. On n'a pas de problème avec ça, et c'est la raison pour laquelle, sur le principe, on est en faveur.

Est-ce que ça, ça va se traduire, dans les faits, d'une façon aussi fonctionnelle que ça nous est décrit dans le projet de loi? Bon, c'est l'avenir qui va le dire, mais il y a quand même, là, un alourdissement. Est-ce qu'on peut l'alléger, là? Là, ça devient une espèce de pléonasme, ce que je dis là, là, mais il y a quand même une certaine lourdeur qui va être induite. Mais des fois, dans la vie, là, des règlements sont nécessaires, puis on les met en place, parce que là, dans ce domaine-là, on est rendus là.

• (16 h 50) •

Là où j'ai certains problèmes, M. le Président, ou certaines interrogations... je ne dirais pas problèmes, je dirais interrogations. Bon, je viens de dire qu'il y a beaucoup d'intentions là-dedans. Est-ce que ça va bien se réaliser? On verra, O.K.? Puis c'est correct, il y a un exercice qui va se faire. Il y a certains éléments, par exemple, qui m'interpellent. O.K.? Et mes collègues en ont parlé, je vais en parler d'une façon un petit peu différente, il y aura la question du consentement. Bon, les autres en ont parlé, la fameuse question du consentement. On consent à quoi? Bien, je vais donner un exemple, M. le Président, de choses que j'aurais aimé voir. Ici et là, nous tous et toutes, et je m'inclus, est-ce que... C'est quand la dernière fois que vous avez installé une application, et je m'inclus, à propos de laquelle on a lu les 44 pages de consentement avant de cliquer la petite case? Est-ce que le ministre délégué peut me dire, du coin de l'oeil, juste de même, oui, à toutes les fois, il lit les 44 pages? Évidemment, la réponse, c'est non.

Et ce qui m'achale... j'allais dire ce qui me bogue, ce qui est tout à fait approprié dans le monde informatique. Ce qui me bogue dans cette affaire-là, c'est qu'aujourd'hui, on le sait, quand on ne consent pas aux conditions, bien là, il y a une page qui apparaît et qui nous dit : Oui, bien là, l'application pourrait ne pas marcher. Il n'y a rien, dans le projet de loi, là, qui traite de ça. Il n'y a absolument rien. Je l'ai encore lu avant de venir ici, là, j'avais du temps de libre. Alors, je vous écoutais, puis je lisais ça en même temps, puis je cherchais une place qui dit : Bien, dans la loi, là, au Québec, quand vous allez refuser de consentir à certaines conditions, ce qu'on vous vend ou ce qu'on vous installe va fonctionner à sa pleine capacité. C'est banal, ça, mais ça, c'est une chose qui devrait être, à mon avis, dans une loi. Comment peut-on... Et là évidemment, le consentement, c'est tout un dilemme, cette affaire-là. Je le disais il y a quelques instants, il y a beaucoup de bonnes intentions, mais les moyens sont-ils là?

Bon, un autre moyen, le consentement. Je sais que mon collègue le ministre délégué, il connaît ça, là. Il connaît ça, vraiment ça, puis je suis content qu'il soit là. Bien, si je ne consens pas puis que l'application ne fonctionne pas à sa pleine capacité... Bon, mettons que je consens, parce que je veux avoir l'application à sa pleine capacité, bon, est-ce qu'il y aura... En fait, je vais mieux poser ma question. Ce qui est caché, que je n'ai pas lu dans les 44 pages de consentement, à laquelle... en bas de laquelle je dis «check», je mets mon crochet, qu'est-ce qui est caché là-dedans? Je ne le vois pas nécessairement.

Est-ce qu'il y aura, par exemple... Là, c'est une question que je pose, ce n'est pas dans le projet de loi. Est-ce qu'un organisme quelconque va déposer des guides qui vont faire en sorte que, dans un consentement au Québec, là, bien, il y a des choses qui doivent être là, ne pas être là? Le formulaire de consentement peut-il cacher... Est-ce qu'on va regarder quelque chose? Il va-tu y avoir quelqu'un qui va faire un formulaire de consentement standard? Moi, je pense que ce n'est probablement même pas possible. Je pense que ce n'est pas possible. C'est peut-être possible, mais je pense que ce n'est peut-être pas possible.

Ça veut dire qu'on va toujours se retrouver, en quelque part, avec une case cochée, avec des affaires qui sont là, mais nous, on ne les aura pas toutes lues ou, si on les lit, on ne les aura pas nécessairement comprises. Parce que ça m'est quand même déjà arrivé de toutes les lire, là, au début, début, début de ma vie, disons, informatique, là, comme tout le monde en a eu une. Puis, à moment donné, on arrête de lire ça, là. Mais qu'est-ce qui est caché là-dedans? On fait quoi au bout de ça? La loi va s'adresser à ça comment? Peut-elle s'y adresser? La conséquence qui vient de ça, est-ce qu'on peut gérer ça un coup qu'on a fait «check» en bas? Une affaire simple, hein, très simple, mais on ne parle pas de ça.

Je vous donne un autre exemple de chose banale, M. le Président, là. C'est banal, on fait des lois. Voulez-vous bien m'expliquer pourquoi on peut poursuivre, si j'ai bien compris l'article en question... attendez une minute, je vais aller le retrouver, là. L'article, si j'ai bien lu, là, 65, qui change 164.2, on a trois ans après la perpétration pour pouvoir faire une poursuite. Pourquoi ce n'est pas trois ans après la prise de connaissance? C'est une question qui est légitime. Trois ans, là, ça veut dire qu'on postule que trois ans, c'était assez de temps pour le citoyen pour se rendre compte qu'il y a eu une faute et, après ça, entrer dans la procédure de plainte, poursuite et ainsi de suite. Celle-là, là, c'est un autre exemple de mystère pour moi. J'en ai d'autres, exemples, là, mais il y a plein d'éléments comme ça dans le projet de loi... puis on est au principe. C'est bien correct, là, on peut le mentionner maintenant puis on va en traiter pendant l'étude détaillée, mais il y a des éléments comme ça. Et je reviens sur ce que je dis. Les intentions qui sont là, là, elles sont bonnes. Est-ce qu'on aura les moyens de nos intentions?

Bon, je vous donne un autre exemple. Si on y traite un petit peu, dans la loi, on le traite... La compagnie est vendue, elle a une base de données, vend sa base... pas la base comme telle, mais vend la compagnie. Le repreneur est à l'étranger. Là, bon, évidemment, c'est écrit dans la loi qu'il faut que ce soit la même affaire. Oui, mais c'est quoi, notre pouvoir, là-dedans, de pouvoir faire ces vérifications-là?

La loi, telle qu'elle est écrite, il y a un miroir, là. Ce qui se passe dans l'entreprise privée puis ce qui se passe dans le gouvernement, c'est à peu près la même chose en termes de textes législatifs. Il n'y a pas beaucoup de différences. Il y en a, là, quelques-unes, mais il n'y en a pas beaucoup. La partie privée m'interpelle un peu. La partie publique, je pense que ça va bien se passer, avec quelques ajustements, mais du côté privé, ça, j'ai encore beaucoup, beaucoup d'interrogations.

J'écoutais des gens faire référence à un paquet de choses potentielles. J'écoutais tantôt, parce que ça ne fait pas longtemps qu'il a parlé avant moi, le collègue de Gouin. Bien, c'est bien plate, là, mais tout ce qu'il a mentionné, le «peut-être qu'un jour», ça se fait tout déjà, là, ça, ce qu'il a dit. Alors, comment va-t-il... Non, mais ça se fait tout, là. Tout ce qui a été mentionné, là, ça se fait au moment où on se parle, et ça, c'est clair, clair, clair.

Alors, comme le projet de loi va-t-il s'adresser à ça? Comment le projet de loi peut-il embarquer sur un bateau, un train en marche et changer sa direction? Ça, c'est tout un élément qu'on va avoir à traiter pendant l'étude détaillée. Mais peut-être qu'on l'aurait mieux traité, M. le Président, si on avait entendu les gens qui auraient dû être entendus, comme la commissaire, comme le Barreau ou comme d'autres personnes qui ont été énumérées. On a manqué des opportunités, je le déplore. Ceci dit, le projet de loi, c'est un bon projet de loi pour le principe. On verra à la fin.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de La Pinière. D'autres interventions? M. le député de Viau.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci. Merci, M. le Président. M. le Président, écoutez, je ne serai pas trop long, mais je compte prendre tout mon temps quand même par rapport à mon intervention.

Écoutez, M. le Président, un peu plus tôt ce matin, lors de la séance du jour, unanimement, il y a eu cette motion qui visait, entre autres, à rappeler comment et combien nous, comme société, nous avons à faire davantage dans nos relations avec les Premières Nations. Et cette motion, M. le Président, me rappelait même le rôle, notre rôle, comme parlementaires, au sein de cette Assemblée nationale. Que ce soit du côté du gouvernement, du côté de l'opposition officielle ou des autres oppositions, notre rôle, c'est de travailler à réduire les inégalités, pas les creuser. Et cette motion venait nous rappeler, justement, l'importance de travailler sur la réduction des inégalités, notamment avec les Premières Nations.

• (17 heures) •

Et nous avons aujourd'hui un projet de loi devant nous, le projet de loi modernisant les dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Ce projet de loi, M. le Président, évidemment, on aura long à dire pour ce qui a trait au potentiel, j'ai bien dit le potentiel, que présente ce projet de loi en termes de creusement des inégalités. Mais avant d'y arriver, le projet de loi, M. le Président, c'est un projet de loi... ce que je dois commencer par déplorer, je dois déplorer que seulement une vingtaine d'organismes... lorsqu'on mesure l'importance de ce projet de loi, que ce soit par rapport aux organismes publics, par rapport aux entreprises privées et même par rapport aux partis politiques, que ce soient seulement une vingtaine d'organismes qui aient été reçus en consultation.

Et je vais en souligner en particulier, ce qui m'apparaît être un manquement par rapport aux consultations, dire qu'un projet de loi qui concerne la protection des renseignements personnels, M. le Président, que les membres de cette commission-là n'ont pas eu l'opportunité de pouvoir échanger avec la Commission des droits de la personne. Et la raison? La Commission des droits de la personne s'est désistée, compte tenu des délais trop courts pour produire leur mémoire sur ce projet de loi. Je trouve ça inacceptable. Je trouve ça inacceptable parce que — et je vais vous en parler un peu plus tard — c'est un projet de loi qui concerne justement plusieurs aspects relatifs aux droits de la personne. Donc, ne pas donner l'opportunité à cette instance qu'est la Commission des droits de la personne, dont son mandat même, au coeur de son mandat, c'est les enjeux relatifs aux droits de la personne, de pouvoir échanger avec les membres de la commission, c'est inacceptable.

La même chose pour le Barreau du Québec. Et j'ai eu l'occasion, M. le Président, de travailler sur d'autres projets de loi et j'ai pu mesurer l'importance du rôle du Barreau du Québec à travers les mémoires qu'il présente. Et ne pas offrir cette opportunité au Barreau du Québec, qui est une instance qui est là pour défendre les Québécoises et les Québécois au niveau du droit, donc, me paraît inacceptable, et d'autant plus la raison qui est donnée encore. Là encore, M. le Président, ce sont les délais trop serrés.

Alors, ma première question : Est-ce que, quand vient le temps de parler de la protection des renseignements personnels, est-ce qu'on ne doit pas prendre le temps qu'il faut lorsque vient le temps de parler de la protection des renseignements personnels des Québécoises et des Québécois? Je pose cette question, M. le Président, puisque nous l'avons vu au cours des derniers mois, ce qui s'est passé ici, au Québec, en termes de différentes problématiques reliées justement à l'accès malheureux, frauduleux aux renseignements personnels des Québécoises et des Québécois. Nous avons vu ce qui s'est passé au Québec, et je crois que la ministre a raté une occasion, le gouvernement a raté une belle occasion de faire preuve de prudence et de responsabilité en ne permettant pas, justement, en ne donnant pas l'occasion à ces organismes-là de pouvoir échanger avec l'ensemble des membres de la commission. Et ça, malheureusement, on doit le déplorer.

M. le Président, quand vient le temps de parler des renseignements personnels, la première question que je me suis posée, mais qu'est-ce qu'un renseignement personnel? Qu'est-ce qu'un renseignement personnel sensible? Et, en faisant mes recherches, j'ai retrouvé des définitions qui me semblent intéressantes. Et, là encore, il faudra... Je m'attends à ce que, lors de l'étude détaillée, les membres de la commission puissent aborder ces questions-là. Et j'en fais une référence, M. le Président, notamment du règlement européen général de la protection des données, l'article 4, qui donne une définition assez claire, il me semble, des données qui sont à caractère personnel. Et ça, je pense que ça peut être une bonne base de discussion, je trouve, qui me semble intéressante.

On parle de «données à caractère personnel», M. le Président, «toute information se rapportant à une personne identifiée ou identifiable; est réputée être une personne physique identifiable une personne physique qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un identifiant, tel qu'un nom, un numéro d'identification, des données de localisation, un identifiant en ligne ou à un ou plusieurs éléments spécifiques propres à son identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale». Je pense que, là, on peut quand même voir à ce qu'on puisse avancer dans cette réflexion sur cette définition.

M. le Président, quand vient le temps de parler de protection des renseignements personnels, vous conviendrez avec moi, M. le Président, que les enjeux pour un organisme public et les enjeux pour une entreprise privée ne sont pas les mêmes. Ce ne sont pas les mêmes enjeux puisqu'à la base, de manière générale, les organismes publics, leur objectif, ce n'est pas de faire du profit à tout prix. Bon. Une entreprise privée, son objectif, c'est de faire des profits. Donc, vous conviendrez avec moi, M. le Président, que ce soit pour des questions d'accès, de gestion, de contrôle, de protection des données, il aurait été souhaitable qu'on puisse faire cette nuance, cette différence.

Tout comme d'ailleurs, je crois, il y a actuellement un projet de loi en cours, M. le Président, qui est le projet de loi n° 53. C'est le projet de loi sur les agents d'évaluation de crédit. C'est un projet de loi qui est en cours. Il aurait été préférable effectivement, donc, qu'on puisse regarder ça de manière séquencée, mais avec des modalités clairement et pleinement différentes.

Et je fais la nuance, la différence, M. le Président, entre le public et le privé, mais il y a aussi la différence à faire aussi au niveau des partis politiques. Il y a des différences à faire au niveau des partis politiques aussi quand on parle d'accès aux données, quand on parle de contrôle et de protection des données personnelles. Il y a des différences à faire, et ça, il faut déplorer que ces nuances-là n'apparaissent pas, mais j'espère que lors de l'étude détaillée de ce projet de loi... Nous, en tout cas, du côté de l'opposition officielle... Et j'en profite d'ailleurs, M. le Président, pour remercier mon collègue le député de LaFontaine, donc, et je sais qu'il aura d'excellentes propositions à faire dans le cadre des études détaillées de ce projet de loi.

M. le Président, je disais, en début d'intervention, que notre rôle au sein de cette Asemblée, c'est le rôle aussi qui incombe au gouvernement, aussi bien l'opposition officielle, aussi bien aux autres oppositions, ce n'est pas de creuser les inégalités, mais bien de les réduire. Et voilà, je me permets, M. le Président, de prendre la parole pour parler de quelques réalités. Quand vient le temps de parler, par exemple, des questions... Comment assurer le consentement des données, comment assurer le consentement des données lorsqu'on sait, par exemple, que, souvent, ce sont les personnes les plus vulnérables qui sont les plus susceptibles d'être victimes, plus qu'à leur tour, d'abus? Et je pense entre autres aux personnes âgées, M. le Président, je pense aux personnes âgées, je pense aux personnes qui vivent avec un handicap.

Dans ma circonscription, la circonscription de Viau, j'ai ce grand bonheur d'avoir dans ma circonscription, M. le Président, la Maison des sourds. Et je tiens à les remercier car, au cours des dernières années, ce sont des personnes, des femmes et des hommes qui m'ont aidé, M. le Président, à mieux saisir les enjeux de justice sociale, les enjeux d'égalité, de véritable égalité, les enjeux d'équité. Et, à chaque jour, lorsque j'ai la chance d'aller les voir, ces femmes et ces hommes à la Maison des sourds, ils et elles me parlent de leurs difficultés à avoir accès à des services, des services même gouvernementaux, M. le Président. Il y a beaucoup de barrières. Et je crois que nous avons là... nous aurons, en tout cas, je l'espère, lors de l'étude détaillée de ce projet de loi, l'occasion de se pencher sur la réalité des personnes vulnérables. Nous n'avons pas le droit de les laisser de côté quand vient le temps de parler aussi de la protection de leurs renseignements personnels, des mécanismes de consentement pour ces personnes-là. C'est une responsabilité que nous avons.

• (17 h 10) •

Un autre groupe, M. le Président, un autre groupe qui m'intéresse particulièrement puisque, dans une autre vie, il y a quelques années, j'ai été bénévole, M. le Président. J'étais bénévole dans des organismes communautaires qui accompagnaient notamment des personnes analphabètes. Et, vous savez, la réalité des personnes analphabètes au Québec, c'est une réalité souvent, M. le Président, qu'on a tendance à glisser sous la table, sous le tapis, mais c'est une réalité québécoise qui nous demande que chaque geste que nous posons, que chaque geste que nous posons, que ce soit à travers les projets de loi, les politiques, les programmes, les directives... que nous puissions avoir cette sensibilité-là par rapport à la réalité des personnes analphabètes.

Selon la Fondation, M. le Président, de l'alphabétisation, 19 % des Québécois sont analphabètes de niveau 1. Donc, on parle de niveau, au niveau de la littératie. Et, M. le Président, à ces chiffres-là, 34,3 % de plus éprouvent de grandes difficultés. Nous avons cette responsabilité, M. le Président, de ne pas laisser ces personnes de côté non plus, ce sont des Québécoises et des Québécois. Nous avons la responsabilité morale, M. le Président, quand vient le temps de parler des enjeux relatifs à la protection des renseignements personnels, de penser aussi à ces personnes.

Un autre aspect, M. le Président, qui m'interpelle beaucoup dans ce projet de loi... nous avons souvent, malheureusement ou heureusement, M. le Président, dans mon cas à moi, heureusement, nous avons souvent, heureusement, M. le Président, des multiples vies, et, dans une autre de mes vies, j'ai oeuvré beaucoup sous des enjeux relatifs au profilage, notamment le profilage racial. J'ai eu en 2003 à coprésider le premier groupe de travail sur le profilage racial à Montréal qui a été mis en place par le CRARR, qui est un organisme de défense des droits. Et, par la suite, comme président du Conseil interculturel de Montréal, un des premiers avis que ce conseil-là a déposé, c'est un avis sur la problématique du profilage racial à Montréal. Et des avis sur ce sujet-là, il y en a plusieurs, et c'est un problème qui ronge, M. le Président, notre société, pas seulement à Montréal, pas seulement à Québec, mais dans toutes nos villes. Et je le répète encore, M. le Président, nous avons cette responsabilité de ne pas creuser des inégalités mais plutôt de réduire les inégalités.

Et, sur l'enjeu du profilage racial, M. le Président, et je sais que ma collègue, la députée de Saint-Laurent, avant moi, l'a répété, mais permettez, M. le Président, que j'apporte ici mon grain de sel puisque je sais de quoi je parle, et croyez-moi, M. le Président, je sais de quoi je parle. Lorsqu'on... La technologie, M. le Président, la technologie, c'est un outil important pour le développement de nos sociétés, mais lorsque la technologie devient un outil pour renforcer la discrimination, c'est néfaste. Pas seulement pour les victimes, pas seulement pour les groupes ciblés, mais pour nous tous. Comme société, nous ne grandissons pas à avoir un Québécois ou une Québécoise victime de discrimination. Et l'enjeu des algorithmes, de la reconnaissance faciale, du traçage numérique, ça a été démontré maintes et maintes fois, ce sont des enjeux... ce sont des outils qui peuvent être des outils où il y a des pratiques de discrimination.

Souffrez, M. le Président, que je partage avec vous un article, et un article qui n'est pas banal, ça vient du MIT, Technology review, sous la plume du professeur Charlton McIlwain, qui est professeur de médias, culture et communications à New York University. Le titre de cet article, M. le Président : Of course technology perpetuates racism. It was designed that way. Et là il nous présente la réalité des Afro-Américains aux États-Unis : «Black Americans have seen technology used to target them again and again. Stopping it means looking at the problem differently.

«Both wreak physical and psychological violence. Both disproportionately kill and debilitate black and brown people. And both are animated by technology that we design, repurpose, and deploy — whether it's contact tracing, facial recognition, or social media.

«We often call on technology to help solve problems. But when society defines frames, and represents people of color as “the problem”, the solutions often do more harm than good. We've designed facial recognition technologies that target criminal suspects on the basis of skin color. We've trained automated risk profiling systems that disproportionately identify Latinx people as illegal immigrants. We've devised credit scoring algorithms that disproportionately identify black people as risks and prevent them from buying homes, getting loans, or finding jobs.

«So the question we have to confront is whether we will continue to design and deploy tools to serve the interest of racism...»

Je pense que, là, M. le Président, je parle du risque pour la discrimination raciale, pour le racisme, mais j'aurais pu parler aussi de sexisme. J'aurais pu parler des risques reliés à l'âgisme aussi, M. le Président. J'aurais pu parler des risques reliés à l'homophobie aussi, M. le Président. Autant d'enjeux importants qui doivent nous forcer.

Et là j'interpelle le ministre responsable du Numérique. Je l'interpelle afin qu'il puisse s'assurer, au nom de toutes les Québécoises et de tous les Québécois, et j'interpelle chacun de vous, chacun de vous, c'est de votre responsabilité, la lutte contre la discrimination ne peut pas être l'affaire seulement que des victimes, c'est la responsabilité de tous et de toutes que de s'assurer que les lois que nous mettons en place ne deviennent pas des outils de discrimination.

M. le Président, pour terminer, j'aurais pu aborder les enjeux... J'ai parlé des enjeux reliés à la discrimination par rapport aux gens, mais qu'en est-il quand l'algorithme permettrait, par exemple, de discriminer des territoires, des populations? Par exemple, est-ce que Montréal-Nord, est-ce que Saint-Michel, est-ce que Québec... Est-ce qu'il y a des territoires qui peuvent être discriminés? Bien, la réponse est oui, M. le Président, la réponse est oui. Est-ce qu'il y a des régions en entier, au Québec, qui peuvent être discriminées par une mauvaise utilisation de ces outils-là? La réponse est oui, M. le Président. Et, comme la réponse est oui, nous avons le devoir et la responsabilité d'éviter tout ça. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Viau. Je reconnais maintenant M. le député de René-Lévesque.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de prendre la parole sur le projet de loi n° 64. Je sors à l'instant de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 53, loi qu'on est en train de débattre pour édicter un nouveau cadre juridique pour encadrer le travail des agents d'évaluation, et plusieurs discussions intéressantes que nous avons au projet de loi n° 53 vont transparaître aussi dans les discussions et les dispositions que nous allons probablement adopter dans le projet de loi n° 64 parce que, lorsqu'on parle de renseignements personnels, je pense que, M. le Président, vous êtes d'accord qu'il y a à boire et à manger à titre de faits et d'exemples malheureux que le Québec et les Québécois et Québécoises ont pu subir dans les dernières années.

Donc, M. le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom de ma formation politique sur le projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Le régime juridique québécois sur la protection des renseignements personnels n'a pas été mis à jour depuis près de 20 ans. Or, si les dernières années nous ont appris une chose dans le domaine, c'est bien que l'émergence des nouvelles technologies, l'omniprésence de l'univers informatique, les appareils intelligents qui collectent nos informations à notre insu, et des outils de reconnaissance faciale, jumelés au développement de l'intelligence artificielle qui participe à la collecte, l'analyse et le partage de ces données personnelles et biométriques pour monter des profils d'utilisateur pour les influencer, et, bien évidemment, la vente de ces données imposent plus que jamais la modernisation urgente de nos lois.

• (17 h 20) •

Le scandale de Cambridge Analytica, la fuite de données personnelles colossale chez Desjardins, la fuite au ministère de l'Éducation en début d'année et au sein même du ministère de la Justice au mois d'août sont des signaux très inquiétants. Dans le cas de Cambridge Analytica, nous avons vu comment des entreprises et des géants numériques sont en mesure de colliger des renseignements qui, pris isolément, peuvent sembler banals, mais qui promettent... qui permettent, pardon, de carrément faire du profilage des habitudes de chaque citoyen, lorsqu'ils sont croisés et analysés, au point de permettre d'influencer leurs habitudes de consommation, mais, plus inquiétant encore, leurs comportements politiques et sociaux.

Du côté de Desjardins, nous avons vu à quel point les institutions financières connaissent nos vies, nos habitudes d'achat et nos situations financières, ce qui peut paraître normal dans leur cas, mais que même les institutions aussi puissantes et solides financièrement, qui ne lésinent pas avec les moyens pour protéger ces données, ne sont pas à l'abri d'individus malveillants. Au ministère de l'Éducation, c'est le 27 juillet 2020 que les enseignants touchés par la fuite de leurs renseignements personnels ont reçu les instructions et les ressources pour réagir et se protéger des effets d'une fuite dont le ministère avait été informé dès le 19 février. Que nous soyons dirigeants d'une entreprise qui collige des données, d'un géant du Web, d'une institution financière, même d'un ministère, nous avons tous en commun aussi d'être des consommateurs, des utilisateurs des médias sociaux et les nouvelles technologies et nous sommes tous susceptibles d'être victimes d'une fuite de données.

Survivre à un vol de notre identité est un drame de tous les instants, surtout lorsque les victimes doivent elles-mêmes faire les démarches auprès des entreprises et des institutions financières ou encore auprès des gouvernements pour faire corriger la situation et limiter les effets néfastes sur leur vie quotidienne. Ayant donc toujours à l'esprit l'intérêt des victimes de ces vols de données et les manoeuvres de profilage pendant les travaux du projet de loi n° 64, nous sommes prêts à appuyer le principe du projet de loi n° 64, et à travailler à cette modernisation, et à collaborer au bénéfice de la protection des renseignements personnels des Québécois.

Les nouvelles tendances, comme le démontre la nouvelle réglementation en vigueur dans l'Union européenne, sont plus favorables aux consommateurs, aux usagers et à la protection de leurs renseignements personnels. Nous croyons que le projet de loi devrait grandement s'inspirer des standards mis en place par l'Union européenne en 2016 et en 2018.

En matière de consentement et des droits des citoyens, la notion de consentement par les utilisateurs est essentielle. Non seulement il doit être libre et éclairé, mais il doit permettre une véritable liberté de choix avant d'accéder à un site Web ou à une application. Nous avons donc hâte de procéder à l'étude détaillée pour bien comprendre comment ce choix, ce consentement pourrait être exercé concrètement par les usagers et les citoyens.

La notion de consentement devrait être comprise par les citoyens et bien appliquée, d'autant plus que chaque citoyen n'a pas les mêmes compétences avec les nouvelles technologies et ne sont donc pas exposés de manière égale aux risques de profilage et de collecte abusive de leurs données. Il faudra garder cette réalité à l'oeil et, pourquoi pas, envisager une véritable campagne de sensibilisation de nos concitoyens à la protection de leurs données et à les sensibiliser sur l'importance de bien protéger leur vie privée, eux qui sont malheureusement trop souvent acculés à un choix qui n'en est pas un, celui de cliquer sur «accepter entièrement les dispositions de confidentialité ou de collecte de données», imposé par chaque site Web, sans quoi ils ne peuvent y avoir accès.

Nous croyons qu'une véritable liberté de choix doit permettre au citoyen de facilement refuser toute transmission de données, sans pour autant être privé de services par l'entremise... par les entreprises, pardon, et organismes, en particulier dans le monde numérique. Nous croyons aussi important d'examiner la nature des données demandées pour s'assurer qu'elles soient en lien avec les activités de l'entreprise, et non une partie de pêche. Le bar ouvert en matière de collecte, d'utilisation ou de commercialisation des données personnelles est terminé. Il faut mieux protéger les gens.

Enfin, le droit pour un citoyen d'exiger la fin de la diffusion de renseignements le concernant nous semble être une avancée importante vers une forme de droit à l'oubli. Nous pourrons mieux cerner la portée de ce concept lors de l'étude détaillée.

Sur les entreprises et PME, maintenant, certains groupes d'entreprises et de PME sont inquiets de subir un alourdissement réglementaire dans la gestion des renseignements personnels. Nous comprenons les préoccupations des entreprises, et en particulier pour les petites entreprises qui ont peu de personnel. Une solution possible est de fournir un service d'accompagnement adéquat aux petites entreprises, par la Commission d'accès à l'information, notamment, pour s'assurer qu'ils s'y prennent de la bonne façon pour respecter les nouvelles normes. Après tout, nous présumons évidemment de leur bonne foi dans leur désir de respecter le droit à la vie privée de leurs clients et usagers.

Nous sommes également conscients que la réalité d'affaires du Québec implique une étroite collaboration avec nos voisins nord-américains, incluant des échanges de données personnelles. Dans un monde idéal, effectivement, l'harmonie serait parfaite entre les diverses juridictions, elle offrirait une tout autre protection des données personnelles. Nous croyons cependant que le Québec peut jouer un rôle de leader dans le domaine et ne devrait pas attendre après les autres juridictions pour agir. Nous croyons cependant qu'ici encore c'est l'intérêt des utilisateurs, des consommateurs qui doit guider notre travail avant tout.

Un mot sur les amendes plus importantes que nous espérons... seront dissuasives. Le rehaussement des amendes est important. Il faut que les conséquences soient sérieuses pour que les entreprises fassent de réels efforts pour protéger les données des utilisateurs puisque ce sont ces derniers qui subissent en premier les conséquences d'une éventuelle fuite de données. Encore une fois, le message doit être clair : le bar ouvert est fermé, et la négligence sera sanctionnée. Le meilleur moyen d'y arriver, c'est de rendre les bonnes pratiques plus rentables à la négligence et les amendes pour y parvenir.

Des amendes importantes peuvent non seulement persuader les entreprises et organismes à se doter de mesures de protection des renseignements personnels très fortes, mais nous croyons aussi qu'elles peuvent dissuader la collecte de renseignements sensibles en soi. Détenir de tels renseignements pourrait s'avérer un risque important en cas de fuite, et donc des gestionnaires aguerris et avisés devraient avoir tendance à réduire au maximum la quantité de données colligées pour réduire ce risque justement. Dans tous les cas, ce sera les utilisateurs, les citoyens qui en sortiront gagnants.

En conclusion, un court mot sur la réforme de la modernisation de la loi sur l'accès à l'information. Nous comprenons l'urgence de moderniser le volet de protection des renseignements personnels, mais cela ne doit pas oublier le besoin de moderniser le volet sur l'accès à l'information. Quand nous savons que les délais sont limités à 20 ou 30 jours dans la loi sur l'accès à l'information, mais que nous voyons que ce refus à des demandes pourtant simples sont communiqués après six, 10, voire 12 mois, nous avons de sérieuses interrogations sur l'efficacité de la présente loi et ne pouvons que demander au ministre de procéder ici aussi à une modernisation dans les meilleurs délais. Après tout, une plus grande transparence gouvernementale est gage d'une meilleure confiance envers nos institutions, en particulier avec la montée des mouvements complotistes en temps de pandémie.

Alors, M. le Président, nous avons bien hâte d'aller travailler en étude détaillée. Il est temps que cette loi soit modernisée, et je suis convaincu que l'ensemble des parlementaires voudront faire un travail diligent pour s'assurer de modifier cette loi qui respectera les attentes des Québécois et Québécoises et qui les protégera mieux face aux différents mouvements avec lesquels on fait face présentement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Pour la suite, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci beaucoup, M. le Président. C'est un plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour parler le projet de loi n° 64. Et, une des premières choses que j'ai faites, j'ai fait juste une petite revue de presse. Puis je veux continuer sur le même thème que mon collègue, que c'était une bonne chose qu'on ait mis des amendes qui sont pas mal sérieuses, à 25 millions de dollars. Je pense que c'est une bonne nouvelle pour les Québécois. Et ça va toujours être difficile, parce que les données personnelles de Québécois, c'est une vraie mine d'or. Et ce n'est pas juste nous mais partout en Amérique du Nord puis partout dans le monde qu'on a vu des entreprises comme Facebook qui sont bien, bien d'accord de payer une amende de 1 milliard de dollars parce qu'il sait qu'ils sont capables de faire des milliards de dollars avec des données personnelles des personnes. Alors, c'est une bonne chose, mais, quand même, il faut toujours être prudents puis avoir un bon cadre législatif pour éviter qu'il y ait des fuites des données. Alors, je pense, ça, c'est pourquoi... et je sais que c'est pourquoi notre formation politique est favorable à ce projet de loi.

Mais il y a toujours le travail à faire. Puis j'ai regardé tous les différents commentaires qui étaient faits par les différents groupes, qui sont pas mal tous favorables à ce projet de loi, mais avec certaines réserves. Mais je sais que c'est un travail énorme. Et ce n'est pas facile d'encadrer un sujet qui a vraiment évolué depuis des années. Et puis on regarde juste les technologies, encore, on arrive avec quelque chose que c'est difficile pour une Assemblée ou un Parlement de faire des lois sur quelque chose qui a évolué très... plus rapidement que nous. Et ça, c'est juste la réalité parce qu'on peut vraiment regarder juste le modèle des affaires de beaucoup d'entreprises qui veut faire l'argent avec nos données personnelles, et ça, c'est toujours difficile pour une législation de combattre contre quand les gens veulent faire l'argent avec quelque chose comme ça parce qu'on trouve la motivation, les façons de détourner les lois qui existent déjà pour faire un profit sur le dos de nous. Alors, je pense que c'est important qu'on avance la discussion puis l'étude détaillée, mais, quand même, il y a toujours une façon aussi de faire les choses correctement.

• (17 h 30) •

Il ne faut pas aller trop vite, vite, vite. Alors, c'est pourquoi, quand j'ai vu aussi que, malheureusement, il y a un des groupes qui n'était pas capable de présenter devant nous en commission, dans les audiences publiques, pour exprimer leur position en personne puis de répondre à des questions des députés ici, à l'Assemblée nationale... Alors, on peut regarder la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui ont dit... Compte tenu des délais trop serrés pour eux autres, ils n'étaient pas capables de présenter devant des élus. Même pour le Barreau du Québec, qui a aussi levé le même enjeu, compte tenu des délais très serrés, puis la Protectrice du citoyen, encore, a eu difficulté de préparer un mémoire et d'être présente pour les audiences publiques. Bref, ça, c'est la façon que le leader du gouvernement a décidé de gérer les choses, puis on vit avec ça. Mais, quand même, juste, je pense, c'est important toujours d'avoir l'occasion, particulièrement avec ces trois groupes-là qui sont vraiment les chiens de garde de nos droits... alors, c'est important, je pense, juste de souligner ça, M. le Président.

Mais, je pense, c'est juste aussi important de regarder un petit peu les différents groupes qui ont eu des réserves, et juste soulever leurs préoccupations et répéter ça, ici, en Chambre, alors que les gens qui ont manqué ça, qui... écoutez-nous présentement, pour bien comprendre... des différents groupes très, très importants dans notre société.

Alors, si on regarde la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, ils ont vraiment soulevé une préoccupation avec un fardeau supplémentaire. Alors, c'est toujours important de juste rappeler, oui, si on modifie des lois puis on met des contraintes sur certains éléments, que nos petites entreprises ont la capacité de, oui, embaucher des personnes qui peuvent les choses, puis implémenter des règlements d'une façon correcte.

Quand même, le Conseil de patronat du Québec, c'était Karl Blackburn et la Me Karolyne Gagnon, qui a dit... a été faveur le projet de loi avec certaines réserves. Alors, ils ont sûrement salué la volonté du... moderniser l'encadrement des renseignements personnels.

Mais il y a des différences significatives avec la loi fédérale. Ça, c'est toujours un enjeu aussi. On fait notre part ici, mais est-ce que le gouvernement du Canada et le gouvernement fédéral fait la même chose? Est-ce qu'ils font entre eux des projets de loi miroirs? Tout ça, des fois, ça peut devenir complexe quand on partage certains domaines de juridiction.

Une autre chose, une surestimation des coûts réels engendrés par la réforme qui... des tables de... la possibilité contractuelle, s'entendre sur les façons de faire disparaître... implicite des permis sous-entend... lors du consentement exprès n'est pas précis.

Alors, je peux répéter, il y a aussi Pierre-Luc Déziel, professeur de l'Université Laval, qui a soulevé certaines réserves encore pour la recherche universitaire. Alors, je veux... j'espère que tout le monde regarde ces personnes qui ont parlé ça, regardez qu'est-ce qu'ils ont dit, et que, pendant l'étude détaillée, on va faire les ajustements nécessaires. Mais je sais que le leader adjoint du gouvernement est toujours disponible pour travailler fort pendant l'étude détaillée, pour s'assurer que le projet de loi est bien correct puis réponde les demandes des citoyens.

I do want to just come back and touch a little bit on what was brought up by many of my colleagues about facial recognition, and it made me actually think about a recent podcast that I heard on the New York Times, because we sort of cited some examples, but it was an extremely interesting podcast: a man from Detroit who, one day, had the police arrive at his house, basically kick in the door, the SWAT team, and arrest him, and he was a businessman, had a family, always respected the laws, never had more than a speeding ticket in his life, and he was hauled off to jail because he was accused of committing a homicide. And, for him, he was absolutely shocked. He couldn't understand how this had happened. His wife and his kids had to see him literally dragged into a police car, brought off.

There was a lot of questions about this case in particular too, how the Detroit police force really did not give him his due process, even when there was arrestation, what was this all about. So, anyways, he ended spending some time in prison. The news came out that they had arrested someone in this crime that was committed. He didn't know all of this at the time because he was in prison, but eventually it dawned on him, once he was able to speak to a lawyer, and they reviewed the case, that the person that they were looking for was not the person that was in jail. And the Detroit police force had actually used the facial recognition technology, had identified somebody who had committed multiple crimes in the Detroit area and pegged it on him because the technology matched them up, but, as it turned out, the other person ended already being in the correctional system, he was already in jail for crimes he had committed. But, this person had his name put out there, that he was arrested for homicide. His business reputation was ruined, his family's reputation was ruined. And all that happened just because the police were eager to arrest someone, figure something out, and they did have this technology that placed them sort of looking the same, so we're going to go with that.

Case was thrown out, he didn't have to go to jail. That's all fine and good, but it's just a good example too that it could happen here, in Québec, that, if we go too quick with the facial recognition technology with the Sûreté du Québec, who I know is very eager to put that into place...We do have to just hold on. Is this technology... And, again, my colleague from Viau really described it quite clearly, how there are tons of cases of discrimination, particularly, I know, against Black women, but this technology just seems to discriminate against them most.

So, of course, I'm like everyone else here, I want to catch criminals, I want to put those who commit serious crimes and serious offenses behind bars, our police forces definitely need all the tools necessary, but we don't have tools before them that can lead them to arrest the wrong person and literally ruin their lives, even if at the end of the day it's proven all they.. the technology is wrong, it's OK. We all know that, if you're are brought before the court for a crime that was committed that is serious, you could definitely, of course, have some serious consequences to your reputation, and it's just not something that we want to put our citizens through.

I do want to also just come back a little bit to what I was saying before about... There is this... you know, again, going to Netflix, there is a documentary out there right now that really outlines Facebook and other social media sites and how they use algorithms, and it was fascinating just to see. Sometimes, I think... somebody can think, you know, I think this way, I've seen it on Facebook, everyone must support me, I know our Premier, on occasion, has said a lot of things on Facebook, says how great I'm doing, but there is this... the algorithms can actually mean that, you know, somebody who thinks differently from you politically or on different issues will have a completely different Facebook page from you, and that's because they are able to use your data of what you like and make sure that kind of repeats.

And I still find it amazing. You know, you can turn these things off but, for example, on Instagram, if you're... sometimes I feel like... I'm thinking about it, like, I'm going to go buy a new pair of running shoes, and all of a sudden, in my Facebook and Instagram feed, I have all these advertisements for running shoes. Or, if you do a search on Google, and you're saying, «Hey, you know, I want to, again, buy a house», all of a sudden you have realtor advertisements coming up on all your different sites. But, I mean, who would have thought that Google would create this great search engine and never want to make money off of it? I mean, of course they wanted to make money and of course they knew the exact way to do it was to track what you are researching and then fit that in with companies who are willing to pay for that data and willing to flood you with advertisement.

And, again, that's one way. I mean, these advertisements for, you know, shoes, for cooking equipment, and for restaurants, is that the end of the world? Perhaps not. But it can become more seriously... when we are looking at political use of those statistics. And, you know, the UK elections was a great example, the election in the United States in 2016. And I know that's something here that this is going to address, I know that the DGEQ spoke at length about their preoccupations, what they think could be added in, but I don't think we can underestimate the power of social media and the impact it can have on elections.

So, of course, putting some stricter laws around that and some powers for us here as political parties to make sure that we're always being responsible when we are, again, using social media for campaigns to express our points with citizens, it's done correctly, but that's really going to be an enormous work for the Government. And it's going to be an enormous work going forward. And I think that's the thing that really does concern me, is that, again, the technology, the drive for companies to make money, the drive with the business model, it's hard for legislators to always keep up. And I wouldn't be too surprized if we'll be back in here in two years, four years, revising this law again and again as we try to keep up with these mega technology giants, who also, in a lot of ways, can go out there and hire lawyers that can go out there and hire the best minds to, again, once I said, try to get around the laws and try to find ways to avoid what legislation is trying to do. And, you know, we're really trying to protect the citizens who might not, on a daily basis, think about their personal data and might not think about how Government is protecting it, and so are just going about their business routinely, which, of course, is normal. So, that's why we have the duty here to all work together and do our due diligence, to protect the citizens of Québec.

• (17 h 40) •

So, on that point, again, I just want to reiterate that, in the next coming steps we're studying this bill, there's a lot of groups that are favorable, but they do have certain reserves. It's going to be very important that again, if we're often thinking of the really big players, the banks, the social media companies, whatever it may be, that they're the ones we're targeting, but not putting too much burden on the small companies too that... with all this regulation and laws that we're putting into place, that it's going to cost them too much money, they're going to be forced to hire more people. Look, that has to happen to make sure that things are put up fine, but just make sure that the cost on the smaller and medium businesses isn't too, too much, especially during the current context of the pandemic and the economic uncertainty going forward when we adopt this law, that it's not too, too much for those who are already just struggling to get through weekly, monthly and for sure very uncertain about the future on the horizon.

So, Mr. Speaker, I'm not going to take any more of your time.

Et merci beaucoup pour m'écouter aujourd'hui. Puis c'est sûr que je sais que mon collègue le député... Marc Tanguay, c'est le député de...

Une voix : ...

M. Kelley : LaFontaine, c'est ça, le député de LaFontaine. C'est une longue semaine, hein? Le député de LaFontaine va travailler avec le ministre puis avec ses collègues pour s'assurer qu'on a un bon projet de loi qui vient encadrer puis qui respecte qu'est-ce que tous les groupes ont dit en commission dans les audiences publiques, puis on va arriver avec quelque chose pour nos citoyens du Québec. Alors, merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. D'autres interventions? Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Alors, on parlait du député de LaFontaine. Donc, le député de LaFontaine, le porte-parole du dossier, m'a demandé d'intervenir, enfin, il est venu me voir dans mon bureau pour me dire : Marie-Claude... — non, je ne suis pas supposée de le dire — Mme la députée de Vaudreuil, en tant que députée porte-parole aux affaires municipales, est-ce que tu te sens concernée par le projet de loi n° 64? Alors, j'ai regardé le projet de loi n° 64, j'ai fait : Ouf! C'est assez technique, merci, là. Pour ceux qui nous suivent, là, j'ai trouvé ça... moi, je vous le dis d'emblée, là, j'ai trouvé ça superlourd. C'est un projet de loi, là, qui propose de moderniser plusieurs lois : la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, et assujettissant les partis politiques autorisés aux dispositions de la loi dans le secteur privé.

Donc, évidemment, comme je vous disais, c'est très technique, de la façon dont c'est traité, et je fais une déclaration tout de suite, je ne suis pas très, très, très calée, ou je n'ai pas beaucoup de notions, ou, en fait, je suis loin d'être l'experte dans dans tout qu'est-ce qui concerne la protection des données, bien que j'ai participé, cet été, à la commission, puis j'ai entendu, en auditions, plusieurs experts en lien avec l'application COVID. Donc, j'ai vu qu'il y avait vraiment des experts en cybersécurité qui sont vraiment à la coche, comme on dit. Mais moi, je ne suis pas là, mais ce n'est pas grave, je suis comme une petite éponge, là, je prends toutes ces informations-là puis j'arrive quand même à me faire une tête dans tout ça.

Mais je peux comprendre que ceux qui sont à la maison, qui écoutent le projet de loi et qui écoutent les représentations, ils doivent se dire : Ouf! C'est quoi, ça, là? C'est vraiment... c'est un gros projet de loi, mais combien important, parce que ceux à la maison, quand on leur dit : Bien, c'est de la protection de vos données, bien, c'est sûr que ça allume un petit clignotant rouge. Quand on parle de Desjardins ou quand on parle de Capital One ou on parle de Revenu Québec, c'est sûr que, là, là, les citoyens se sentent touchés. Alors, nous, ici, en tant que législateurs, bien, on essaie de se développer une certaine expertise pour pouvoir intervenir. Évidemment, on le fait, chacun, respectivement, là, entre autres, pour les citoyens de nos comtés.

Donc, je vais mettre mes lunettes de porte-parole aux affaires municipales et... en fait, j'ai mis mes lunettes de porte-parole aux affaires municipales quand j'ai regardé ce projet de loi là. Je suis une ancienne mairesse, une ancienne préfète, et je le sais, que c'est déjà arrivé dans les municipalités, j'ai lu beaucoup d'articles et je vois qu'on fait souvent référence à des programmes qu'on a ou des logiciels qu'on a, dans les villes, et je me rends compte qu'on n'est pas si bien protégés que ça dans le monde municipal.

Il y a une chose que je veux dire, là, d'emblée, c'est que, oui, c'est complexe, mais il faut prendre le temps de le traiter, donc il ne faut pas négliger ce projet de loi là, il faut vraiment prendre le temps de décortiquer tout ça puis s'imprégner de qu'est-ce que disent les experts. Puis, s'il faut aller chercher des avis juridiques, allons les chercher. Comme je dis, on est des législateurs, mais on n'a pas... Ce n'est pas tout le monde ici, ce n'est pas les 125 députés qui sont des experts en cybersécurité.

Oui, il y a une nécessité de moderniser les règles, ça, c'est bien clair, on l'a vu, puis je pense que, pour les Québécois, on doit d'ailleurs en faire définitivement une priorité, une priorité, parce que la sécurité des renseignements personnels, c'est important. Ça fait presque partie de notre ADN, hein? C'est des données, on le sait... Écoutez, je pense que même rendu... Notre téléphone, ça fait partie de notre ADN, ça fait partie de nous-mêmes. Si on le perd pendant 15 minutes, des fois, on se dit : Mon doux, tout est dans mon téléphone. Mais notre téléphone est rempli de données. Donc, quand je parle qu'il faut protéger, bien, oui, il faut protéger ces renseignements personnels là.

Il y a des outils législatifs, disons-le, là, qu'il y a des outils législatifs pour encadrer la protection des données, mais ces outils-là ont besoin d'être adaptés, adaptés à la situation aujourd'hui, adaptés en 2020. Il y a plusieurs technologies qui sont rendues désuètes.

Donc, je pense... Puis là je vais faire référence aux villes, mais je ne veux pas leur causer non plus de préjudice, mais, dans le monde municipal, là, il y a définitivement certains logiciels ou certaines villes qui ne seront pas nécessairement à niveau au niveau de l'informatique, de la protection des données. Puis je trouve ça particulier, mais...

En fait, j'ai une inquiétude, parce que ça ne fait pas partie de la mission d'une ville ou, en fait, les villes... je ne veux pas dire qu'ils n'ont pas les compétences, parce qu'ils peuvent les acquérir ou ils peuvent les donner à l'extérieur en mandat, mais ça ne fait pas... Vous savez, une ville, bien sûr, ça ne fait pas juste gérer les vidanges puis l'eau potable, là, c'est beaucoup plus que ça, ce sont des gouvernements de proximité, ce sont des institutions qui prennent des décisions importantes pour les citoyens. Mais je pense que, même si on va au conseil municipal pendant une rencontre puis on va leur plaider l'importance de la cybersécurité, ça se pourrait bien que le maire, la bouche lui tombe puis fasse : Euh, je ne sais pas où on s'en va avec ça, là. Et moi la première, là.

Donc, je ne sais pas comment on peut leur apporter ça, mais il faut ne pas les oublier. Puis là je m'excuse, M. le Président, mais je regardais M. le ministre, parce que les municipalités, c'est important, et il ne faut pas les oublier.

Je vois qu'on a, entre autres, là, dans les consultations, là, on n'a pas eu... Je pense, ça aurait vraiment été pertinent de rencontrer l'UMQ, L'Union des municipalités du Québec, la FQM, la Fédération québécoise des municipalités. Ils n'ont pas été entendus lors des consultations particulières, puis je trouve ça dommage parce qu'eux autres aussi sont touchés par les vols de données. Je vais donner quelques... Je vais vous transmettre, tantôt, quelques exemples.

Mais ils sont touchés, puis ils sont touchés, puis, veux veux pas, ils ont la responsabilité de protéger les données de leurs citoyens. Donc, comment on peut les sensibiliser, puis surtout ne pas les oublier dans ce projet de loi là, leur donner des outils? Bien sûr, il y aura peut-être un partenariat à faire avec la ministre des Affaires municipales, mais, en fait, c'est superimportant.

Donc, quand je dis qu'il y a eu des petites... selon moi, des consultations insuffisantes, bien, je fais référence, entre autres, à l'UMQ, la FQM, des petites municipalités, des plus grosses municipalités. Ça aussi, c'est un enjeu. Les plus petites municipalités ont peut-être encore moins les moyens de se protéger ou peut-être aussi moins d'intérêt parce qu'ils se disent : Bien, au prix que ça va coûter, bien, moi, j'ai moins d'intérêt, j'aime mieux mettre mes sous ailleurs, fait que... Et peut-être aussi prévoir des programmes pour les aider à acquérir des façons de mieux se protéger.

Les grosses municipalités, je ne sais pas pourquoi, mais on dirait que ça va de soi. Tu sais, on parle à Montréal, Québec, Gatineau... oui, mais on dirait... tu sais, comme citoyens, on se dit : Bien, ça va de soi, c'est une plus grosse municipalité, ils protègent nos données. Bien, ce n'est peut-être pas vrai non plus.

Donc, c'est pour ça, je pense, qu'on a une grande part de responsabilité de se retourner vers les villes, les municipalités puis de ne peut-être pas leur imposer, mais, en fait, les sensibiliser, ça, c'est... il faut clairement les sensibiliser puis il faut clairement en tenir compte et parler d'eux aussi, parce que, quand on parle d'eux... bien, quand on parle de nous, habituellement, ça marque un certain intérêt puis on a une oreille plus attentive.

Donc, il y a d'autres groupes majeurs aussi qui auraient pu participer mais qui ont souligné avoir un manque de temps, puis je fais référence au Barreau. Moi, j'aurais bien aimé entendre le Barreau sur ce sujet-là. Ils se sont désistés, puis leur argument, c'était : Compte tenu des délais très serrés. La même chose, la Protectrice du citoyen, qui avait confirmé sa présence, mais qui, je pense, la veille, a décliné l'invitation parce que ce qu'elle disait, aussi, c'est qu'elle n'avait pas le temps d'analyser tout le projet de loi. Ça fait que ça, je trouve ça quand même dommage, intéressant parce qu'il y a eu beaucoup de mémoires de déposés, mais je trouve ça dommage parce qu'on se prive de belles expertises qui ne peuvent que bonifier la protection de nos citoyens.

• (17 h 50) •

Je veux vous parler, comme je disais un petit peu plus tôt, de certaines problématiques dans nos municipalités, des problématiques qu'il ne faut pas négliger. Et je fais... je regardais... je faisais une petite revue de presse pour voir, là, les municipalités, qui est touché, puis comment étaient touchées. Puis je me rends compte qu'en 2020, bien, les municipalités veulent aussi être «up to date with», être technologique ou... ça fait qu'il y a de plus en plus d'applications qui sont utilisées par les municipalités.

Je vais donner, par exemple... j'en ai quelques-unes, là, mais je pourrais donner, par exemple, je pense, c'était Rivière-du-Loup, Rivière-du-Loup, qui propose une application mobile gratuite pour pouvoir communiquer directement avec leurs citoyens. Mais une application mobile gratuite pour communiquer directement avec leurs citoyens, on le sait, ça a fait jaser, mais ce n'est pas... en 2018, là, je présume qu'il y a eu beaucoup d'ajustements depuis, mais... puis c'était pour communiquer avec les citoyens, mais c'était sous forme de sondages. Donc, il y avait des sondages ou encore pour signaler un bris. Quand il y avait un bris d'aqueduc, bien, on prenait l'application puis on pouvait connecter directement avec la ville. Puis l'utilisateur, bien, pouvait aussi recevoir de l'information relativement aux travaux publics, aux activités municipales, puis tout ça. Bien, il y a eu des problèmes avec cette application-là, il y a beaucoup de problèmes avec cette application-là. Puis j'imagine que la ville avait aussi déboursé des sommes d'argent importantes.

En 2020, on a beaucoup de municipalités aussi qui veulent donner accès, à leurs citoyens, à leur compte en ligne, leur compte de taxes municipales. Je peux donner l'exemple de Baie-Comeau. Permettre de consulter ton compte de taxes en ligne, oui, ça peut être quelque chose de rapide, ça peut être quelque chose qui est, j'imagine, alléchant, mais... ou quelque chose d'intéressant, pour un citoyen, d'aller voir son compte de taxes. Reste que c'est une plateforme où il y a beaucoup de données personnelles qui sont transmises. Donc, j'ai encore une difficulté avec cette plateforme-là puisque ce n'est pas superbien encadré par les municipalités.

La même chose... Je parlais des poubelles. Bien, il y a une municipalité qui a dit : Bien, fini le casse-tête des poubelles. On utilise un outil, rappel par messagerie texte pour la collecte de recyclage, pour les matières organiques, pour la matière des déchets, on vous envoie des textos. Bien, encore là, il y a des données personnelles qui circulent, puis est-ce qu'elles sont bien protégées?

C'est ça, ma question. Ma question, c'est : Les municipalités protègent-elles bien vos données personnelles? Moi, les exemples que j'ai vus, que j'ai lus, c'est non. Alors, il faut leur donner... il faut les sensibiliser puis leur donner évidemment les moyens.

Je suis inquiète parce que ces données-là... Ça a été démontré que les données citoyennes sont dispersées un peu partout dans le monde, puis, quand je dis dispersées un peu partout dans le monde, je fais référence...

Moi, j'ai été mairesse à Notre-Dame-de-l'Île-Perrot, la plus belle municipalité au Québec, évidemment, dans le comté de Vaudreuil. C'est la première plus belle municipalité au Québec. Je vois tout le monde qui me font des gros yeux, mais... Puis les municipalités, on travaille souvent... bien, on fait des appels d'offres, puis il y a une entreprise qui s'appelle PG Solutions. C'est une entreprise, là, qui est renommée dans les municipalités, puis qui est tout le temps... qui met leurs logiciels à jour, puis ils viennent l'installer, ils offrent des services aux municipalités. Puis il n'y en a pas tant que ça, des entreprises comme ça qui offrent ce genre de service là aux villes. Puis, des fois, c'est une plus petite ville, qui n'a pas les mêmes besoins que la grande ville, mais PG, ils offrent une certaine diversité. C'est une entreprise avec laquelle moi, j'ai travaillé puis, écoutez, moi, sincèrement, là... Je pense, ça fait 35 ans que PG est dans le monde municipal, donc leur réputation n'est plus à faire.

Mais reste que... est-ce que, comme municipalité... Moi, je n'ai pas eu ce réflexe-là comme mairesse. On engage PG. Je n'ai pas eu le réflexe de dire : Bien, est-ce que PG protège les données de mes citoyens? Ou est-ce que tel logiciel que la ville, on acquiert, protège les données des citoyens? On ne l'a pas, ce réflexe-là.

Tu sais, on se dit : Bien, faut être performant, faut... Le citoyen veut voir son compte de taxes en ligne ou son compteur d'eau. Nous, on avait des compteurs d'eau. Bon, bien, il veut voir son compteur d'eau parce que, s'il peut diminuer sa consommation d'eau, il va payer moins cher. Ça fait que là, bon, il peut voir sa consommation d'eau en ligne.

Bon. O.K. C'est bien plaisant, c'est de l'information instantanée, ça nous met à jour sur-le-champ, mais des fois ce n'est pas la... On n'y pense pas, à ça, comme élus d'une municipalité. Ce n'est pas notre premier réflexe. Notre premier réflexe, c'est le service aux citoyens. C'est qu'est-ce qu'on peut offrir, qu'est-ce qu'on peut faire différent des autres villes. Donc, ce n'est pas nécessairement notre premier réflexe de dire : Bien, est-ce que les données de nos citoyens sont protégées?

Puis, dans ce sens-là, je me demande : Est-ce que les données collectées appartiennent aux municipalités? Il me semble que ça aussi, ça doit être un des réflexes. Quand j'utilise tel logiciel, je ramasse plusieurs données. Qui a la responsabilité de ces données-là? Est-ce que c'est la mairesse? Moi, je dis que non, là, mais qui a la responsabilité des données de... Qui est responsable s'il y a un vol de données dans une municipalité? Est-ce que c'est le logiciel? Est-ce que c'est les élus? Est-ce que c'est la D.G. qui en a fait la recommandation? Est-ce que... C'est hypercomplexe, à qui appartiennent ces données-là. Donc, je pense que c'est quelque chose qu'il va falloir aussi définir.

Je n'ai pas vu de jurisprudence qui est venue déterminer. Puis j'en ai fait, de la recherche, là, mais je n'ai pas vu de jurisprudence qui est venue déterminer ces points-là, mais je trouve que c'est quand même quelque chose qui est important.

Il y a un professeur... j'ai lu, il y a un professeur de l'Université Laval, Richard Khoury, et je m'excuse si je ne le prononce pas correctement, mais qui disait que la ville doit avoir une expertise en sécurité informatique à l'interne pour contrôler les processus de protection des entreprises avec lesquelles elle fait affaire.

Alors, bon, je suis bien d'accord. Je trouve que c'est une excellente recommandation, mais, je le réitère, ce n'est pas toutes les municipalités qui ont les moyens d'avoir un expert en informatique. Souvent, bien, c'est... Souvent, c'est la trésorière, qui, bien, elle, est habituée en informatique, qui a travaillé dans une autre ville, qui a une certaine expérience, qui va être responsable des logiciels ou qui va être responsable de l'informatique, donc...

Puis ce n'est pas non plus... Il ne faut juste pas oublier que ce n'est pas parce qu'on a un écrit, dans un contrat, qui dit que nos données personnelles sont protégées que c'est vrai. Je pense qu'il faut vérifier avec l'entreprise, avec la compagnie comment ça s'applique, puis je pense qu'il faut aller... Avec tout qu'est-ce qu'on a vu dans les dernières années, je pense qu'il faut aller un petit peu plus loin et, comme je dis, il va falloir développer, à savoir qui va être responsable. Évidemment, mieux protéger, et, de un, mais, deux, tu sais, savoir s'il arrive quelque chose, qui est le responsable et comment on peut récupérer le tout.

C'est la ville de Châteauguay qui... c'est quand même assez récent, en mars, oui, c'est ça, en mars 2020, il y a des pirates informatiques qui ont tenu la ville de Châteauguay en otage pendant cinq jours. On est en 2020, quand je dis que nos villes ne sont pas super bien protégées... Et je ne fais aucun reproche, là, à la ville de Châteauguay, là, au contraire, comme je vous dis, en tant que maire, ce n'est pas notre premier réflexe de dire : Quand j'ai tel ou tel programme, est-ce qu'on est protégés? Je ne pense pas qu'on le fasse d'emblée. Mais je pense que, quand des choses comme ça arrivent, je suis pas mal certaine que le maire de Châteauguay va en avoir parlé à ses collègues, à la MRC, à ses collègues ou va en avoir parlé un peu partout. Puis je suis pas mal sûre que le budget d'après, il va y avoir un poste budgétaire attribué spécifiquement pour la protection informatique.

Bien, je vous raconte le cas de Châteauguay, parce que je me disais : Câline, on est en 2020. Je le sais, que ça peut arriver quand... nous autres, là, sur nos téléphones, malgré que l'Assemblée nationale a certains moyens pour nous protéger évidemment. Mais les municipalités, quand je dis : On pense qu'on est protégés, bien, Châteauguay ne l'était pas. Parce qu'il y a des pirates informatiques qui ont tenu en otage cinq jours. La ville était incapable d'accéder à ses données parce que ça rendait toutes les données illisibles à cause d'un logiciel malveillant. C'était un logiciel qui venait de Russie, qui s'appelait... je ne sais pas si je vais le prononcer comme il faut, là, Ryuk, R-y-u-k. Et c'est un logiciel... bien, c'est un logiciel pirate évidemment. Là, je suis contente, le ministre me fait signe de la tête, donc vous êtes au courant de ce... vous êtes évidemment au courant de ce dossier-là. Donc, c'est un programme qui a infiltré le réseau de la ville avant de crypter tous les fichiers. Puis ça, c'est arrivé un mercredi soir et ça a duré comme ça pendant cinq jours, la ville n'avait plus accès à ses données. Puis tous les serveurs ont été contaminés, sauf un serveur qui n'était pas contaminé. Puis, quand, cinq jours plus tard, ils ont décidé d'essayer le serveur qui était propre, non contaminé, il l'est devenu instantané. Donc, ils se sont retrouvés avec aucune donnée lisible, aucune... C'est terrible, là, pour une municipalité, d'en arriver là. Donc...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Vaudreuil, compte tenu de l'heure, je dois vous interrompre, parce que nous... Je vais suspendre les travaux pour la tenue des débats de fin de séance. Vous pourrez poursuivre lorsque le débat reprendra.

Donc, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 18 h 5)

Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Picard) : Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux trois débats de fin de séance.

Le premier débat portera sur une question adressée par M. le député de Jacques-Cartier à la ministre de la Sécurité publique au sujet de l'absence de respect du gouvernement caquiste envers les communautés autochtones.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a ensuite un droit de réplique de deux minutes.

M. le député de Jacques-Cartier, je vous cède la parole pour les cinq prochaines minutes.

Relations du gouvernement avec les communautés autochtones

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Merci beaucoup, M. le Président. C'est sûr que c'était une semaine chargée ici, à Québec, au Québec. Puis je sais que beaucoup de la population était complètement outrée par qu'est-ce qu'ils ont vu tard lundi soir, qu'est-ce qui s'est passé, à Joyce Echaquan, qui... On connaît tous l'histoire. C'était une vidéo qu'il était très difficile de regarder. Les propos qui étaient lancés par l'infirmière et par les autres travailleurs, là, c'est sûr que c'était inacceptable. Mais, quand même, il y a toujours de la colère sur le terrain puis des gens... Et encore ça tombe sur la même semaine qu'on fête l'anniversaire du dépôt du rapport de la commission Viens, alors c'était dans l'actualité que les gens ont commencé de regarder, bien, nous sommes rendus où après un an puis après, oui, le rapport de la commission Viens mais aussi le rapport de l'ENFFADA, le gouvernement fédéral, qui a parlé des femmes assassinées puis disparues.

Alors, moi, je veux juste revenir, je pense que le premier ministre a parlé... la vice-première ministre a parlé des actions que le gouvernement a prises, mais c'est sûr qu'il y a toujours des éléments qui restent sur la table. J'entends ça, j'ai écouté aujourd'hui le cousin de Joyce, sur CBC Radio, qui a demandé qu'il y ait une enquête criminelle, que les personnes qui sont vraiment mises responsables pour qu'est-ce qu'ils croient que c'est un crime, qui est un meurtre. Ce n'est pas moi qui dis ça, c'est la famille de Joyce qui dit ça. Je sais que ce n'est pas pareil, mais je sais qu'avec nos CHSLD on a lancé des enquêtes criminelles. J'espère qu'on, peut-être, peut faire ça ici, dans ce cas ici, parce que je pense que souvent il y a de l'évidence qui démontre que peut-être un crime a été commis par les personnes. Alors, bref, je pense que c'est une chose qui est demandée par la famille et par plusieurs Québécois aussi, parce que, quand même, si l'infirmière a été mise dehors, est-ce qu'elle va trouver un emploi dans une autre clinique? Est-ce qu'elle va trouver un autre emploi dans un autre hôpital au Québec? C'est une chose, de mettre quelqu'un dehors, mais, quand il y a une conséquence d'une vie, je pense que ça prend plus, M. le Président.

• (18 h 10) •

Et l'autre chose que je veux juste souligner encore, c'était qu'est-ce qui a été dit devant la commission Viens par les Attikameks et par une infirmière, Jolianne Ottawa, qui a clairement dit qu'elle, et pas juste elle mais plusieurs autres Attikameks essaient de trouver d'autres soins pour aller... d'avoir des services en santé et des services sociaux parce qu'ils trouvent que le traitement des Attikameks à l'hôpital de Joliette était, oui, raciste, discriminatoire puis un manque de respect complet. Puis, entre cette présentation de l'infirmière, on aussi entendu plusieurs autres Attikameks qui ont dit : Quand même, dans la dernière année, là, on allait là puis on était maltraités. Mais une autre chose qu'il est très important juste de répéter du témoignage de Jolianne Ottawa, c'est le fait que, quand même, la formation, dans le coin, qui a été faite au cégep, et on traite ainsi un autochtone qui est diabétique, c'est parce qu'il prend trop d'alcool, probablement, ça, c'est dans la formation qu'elle a reçue, c'est elle, qui est une Attikamek, c'est elle, qui est une femme, qui a fait la formation, elle dit que ce n'est pas vrai, il y a d'autres problèmes de santé qui sont liés à ça, mais ça, c'est la façon que les personnes sont formées, non autochtones.

Alors, j'espère que ça, c'est des choses qu'on est capables de régler rapidement, parce que c'est sûr que Joyce mérite justice. Mais la réalité est que c'est un problème qui se répète trop souvent partout au Canada et, oui, au Québec. Alors, ça, c'est pourquoi je veux entendre la vice-première ministre sur c'est quoi, le plan de match, de régler les enjeux, le système de santé, dans tous les autres soins, mais aussi si une enquête criminelle est possible dans le cas de Joyce Echaquan. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Mme la ministre de la Sécurité publique, je vous cède la parole pour un temps maximum de cinq minutes.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui, merci, M. le Président. Alors, merci au collègue de Jacques-Cartier pour l'intervention, qui met très bien la table, je trouve, là, à la situation... bien, à mon intervention à moi, bien sûr, sur le même sujet, mais qui reprend un peu, je me permettrais de dire, le fait qu'on a été scandalisés, cette semaine. Je pense qu'on a tous été scandalisés, les 125 ici, et probablement bien d'autres membres de la société, M. le Président, par rapport à ce qui est arrivé, la vidéo qu'on a tous péniblement regardée, tout ce qui s'en est suivi comme débats, échanges. Je lisais ce matin un article qui s'intitulait L'horreur ordinaire et je trouve que ça résumait bien, un petit peu, ce qu'on a vu sur cette vidéo-là, qui était, encore une fois, pénible et qui est complètement inacceptable dans notre société, en 2020, au Québec; où que ce soit, d'ailleurs, dans le monde, là, mais ici on est au Québec, donc on va parler pour le Québec. Et ça n'a pas de bon sens, M. le Président, ce qu'on a vu cette semaine. Je veux être très, très claire là-dessus, là. Puis je le dis au nom de mon gouvernement, mais je le dis au nom de tout le monde, là, tout le monde est scandalisé par ce qui est arrivé.

Il y a deux enquêtes qui sont en cours, comme on le sait, une du CISSS, une du coroner. La police, les services de police collaborent avec le coroner dans le cadre de l'investigation, donc il y a déjà aussi un apport des services de police. Ça ne changera rien à ce qui est arrivé, je vais être claire là-dessus, là, ce ne sera jamais moins scandaleux, ce qui est arrivé. On aura beau faire toutes les enquêtes et avoir tous les rapports sur les circonstances, ça ne changera rien aux événements, malheureusement, et ça ne ramènera pas Mme Echaquan. Mais néanmoins ça va peut-être apporter un éclairage supplémentaire, ne serait-ce que pour les survivants, sur ce qui s'est produit cette journée-là, et peut-être aussi faire des recommandations, dans le cas du rapport du coroner, du moins, et peut-être aussi du CISSS, sur la façon dont on pourrait éviter des décès semblables.

Et, M. le Président, on était déjà en action avant cet incident-là, mais je pense que cet incident-là nous a tous remis à l'esprit l'urgence d'agir en matière de racisme au Québec, de racisme sur tous les fronts. Là, il est question d'un racisme envers les communautés autochtones, il y a aussi d'autres types de racisme qui se vivent au Québec. Et, comme vous le savez, on a un groupe d'action contre le racisme, et je veux rappeler que ce groupe d'action là contre le racisme accorde une attention privilégiée, une attention spécifique à la réalité autochtone. Il y a eu des rencontres avec les groupes autochtones et il y aura des recommandations spécifiquement dédiées aussi à la réalité autochtone dans le plan qui sera déposé, fort probablement, en novembre.

Il y a également d'autres actions qui ont été entreprises, entre autres, à la suite de la commission Viens, dont on a célébré le premier anniversaire cette année. Tout n'a pas été fait. Il y avait 142 appels à l'action, dans cette commission-là, qui touchaient le gouvernement du Québec, les services publics, et tout n'a pas été fait. Je veux être transparente là-dessus, il n'y a personne qui a la prétention que tout a été fait. Et d'ailleurs il n'y a personne qui a la prétention qu'on va pouvoir réparer 150 ans de problèmes, et d'injustices, et peut-être de mauvaise compréhension mutuelle ou peut-être de manque d'ouverture aussi à plusieurs occasions de notre nation envers d'autres nations, mais il n'y a personne qui va pouvoir réparer ça en un an, ça, ce n'est pas la prétention qu'on a non plus. La prétention qu'on a, c'est d'au moins initier la démarche de réconciliation qu'on se doit de faire dans le cadre de laquelle il y a plusieurs choses qui se doivent d'être réglées dans les services de santé, dans les services d'éducation, dans les services policiers aussi, de justice, dans les services sociaux en général. Il y a une foule de choses, M. le Président, qui se doivent d'être améliorées, et on est déjà en action là-dessus, comme je l'ai dit.

Ce qu'on souhaite faire toutefois, on souhaite le faire dans une démarche de priorisation commune. Dans les 142 appels à l'action, il y en a environ une cinquantaine qui sont déjà faits ou en voie d'être faits. Mais, pour le reste, on veut dialoguer, on veut, ensemble, avec les Premières Nations et les Inuits, déterminer qu'est-ce qui est prioritaire là-dedans parce qu'on ne pourra pas tout faire en même temps. Donc, c'est ça qu'on est en train de faire, M. le Président, on veut le faire dans le respect mutuel, on veut le faire dans l'intercompréhension, on veut vraiment le faire de nation à nation.

Donc, il y a eu déjà des rencontres en octobre 2019 et en janvier 2020. Avec la pandémie, c'est sûr que ça a déboussolé beaucoup de choses, dont celle-là, mais ma collègue des Affaires autochtones est en communication constante pour qu'on puisse, dès que possible, reprendre ce dialogue-là et poursuivre les échanges en vue de réaliser les recommandations, les appels à l'action qui nous ont été faits.

200 millions de dollars qui a été mis au budget pour des actions, est-ce que ça va tout régler? Probablement pas. Le député de Jacques-Cartier le disait, on parle d'actions qui sont déjà faites, mais il y a encore des actions sur la table et, c'est vrai, c'est très vrai, il y a encore énormément de choses à faire, mais il faut le faire correctement, il faut le faire dans le respect, il faut le faire aussi en fonction de ce qui sont des priorités pour eux et pas seulement pour nous.

Donc, M. le Président, soyez assuré que le gouvernement du Québec en fait une grande priorité. C'en était déjà une, mais d'autant plus cette semaine, à la lumière des événements terribles qui se sont produits. Je vais terminer en réitérant toutes mes sympathies à la famille de Mme Echaquan.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Jacques-Cartier, je vous cède la parole pour votre droit de réplique de deux minutes.

M. Gregory Kelley (réplique)

M. Kelley : Merci, M. le Président. Et merci, Mme la vice-première ministre, pour votre réponse. J'espère que, pour nous, comme une société, c'est un moment où tout le monde va faire qu'est-ce que c'est leur devoir, d'avoir un meilleur respect pour les peuples autochtones.

On ne peut pas changer notre histoire. Si on regarde la peinture au-dessus de nous, il y a un autochtone sur ses genoux devant les Européens. C'est possible que ça fait partie de notre histoire, mais je sais que ce n'est pas partie de notre avenir. Mais ça, c'est un legs que nous avons, puis ça va prendre un grand, grand travail de ce gouvernement, du prochain gouvernement, de tous les gouvernements de continuer à faire quelque chose, de réparer toute cette histoire-là. Quand les peuples autochtones étaient ici avant que les Européens arrivent, ils ont eu leur propre système de gouvernance. Ils ont signé des traités de paix avec nous, des wampums avec des gouvernements français, avec le roi français, avec le roi et la reine d'Angleterre. C'est tout parti d'où on est arrivés ici aujourd'hui.

Mais juste pour dire que ça ne va jamais être facile, mais j'espère que, ceux qui font la formation des personnes dans la fonction publique du Québec, dans les institutions de la santé et des services sociaux, de la protection de la jeunesse, quand même, dans le système de l'éducation, il y a un changement. Et je sais qu'il y a plusieurs appels à l'action, que, quand même, dans une pandémie, on est capables de mettre en place si c'est les cours, en éducation, le système... changer les cours, changer les curriculums qui existent présentement, si c'est changer la formation. Ces choses, on est capables de faire quand même à notre domicile et quand même par Zoom, des discussions, comme les fonctionnaires...

Mais je sais que, maintenant, on a une tâche devant nous. Et j'espère que le gouvernement va répondre au cri du coeur de plusieurs autochtones et des Québécois qui veulent plus et demandent plus de respect pour les autochtones du Québec. Merci, M. le Président.

• (18 h 20) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Jacques-Cartier.

Nous allons maintenant procéder au deuxième débat, qui portera sur une question adressée par Mme la députée de Saint-Laurent au ministre de la Transformation numérique gouvernementale, en remplacement du ministre de l'Éducation, au sujet des délais de dépistage dans le milieu scolaire et la nécessité d'un corridor sanitaire scolaire. Mme la députée de Saint-Laurent, vous disposez d'un maximum de cinq minutes.

Gestion de la pandémie dans les réseaux
scolaire et des services de garde

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : C'est difficile de se lever après un sujet aussi sensible, aussi émotif alors qu'on tous vu, évidemment, cette vidéo. J'ai bien entendu le message de la vice-première ministre. Même en éducation, il y aura quelque chose qui devra être fait.

On vit dans une ère assez particulière, M. le Président, avec la pandémie mondiale. On a tous été bousculés par la COVID-19. Moi-même, j'ai changé. Puis je vous dirai qu'on observe des comportements, au Québec, que je ne soupçonnais pas un jour de voir. Oui, il y a de la désinformation, oui, il y a des complotistes maintenant, et tout le monde dit puis s'entendent sur une chose : l'éducation, l'éducation, l'éducation, puis j'y crois. Et, plus que jamais, on va devoir miser sur notre éducation.

Mais, même en ce moment, notre réseau scolaire a besoin d'une attention particulière. Il y a de plus en plus d'enfants qui, malheureusement, manquent l'école parce qu'ils sont en attente de leur test de dépistage. On voit des délais de cinq jours, c'est une chose, neuf jours, c'est autre chose. Neuf jours ouvrables, ça commence à être beaucoup, surtout que, par la suite...

Ce matin, je donnais l'exemple, au ministre de l'Éducation, du petit Olivier, que sa mère, lorsqu'elle a reçu l'appel de la Santé publique un samedi matin, elle est allée tester son fils, Olivier. Olivier et ses parents ont attendu neuf jours, et, dans cette attente-là, la directive qu'ils ont reçue de la Santé publique, c'est que ce n'était pas nécessaire, pour les deux autres enfants, donc frère et soeur du petit Olivier, qui vont des écoles différentes d'Olivier... eux pouvaient aller à l'école, au risque de contaminer les autres enfants si jamais il s'avérait qu'Olivier était positif. Finalement, Olivier a testé positif. Les parents essaient de rejoindre la ligne de Santé publique, il y a des heures et des heures... Donc, vous comprendrez, M. le Président qu'après deux heures ou trois heures d'attente c'est normal que la maman du petit Olivier raccroche. Finalement, quand on réussi à avoir la ligne, on se fait dire : Non, pas besoin d'isoler les autres enfants, donc le frère et la soeur du petit Olivier, ils peuvent retourner à l'école. La mère trouvait ça particulier. Le lendemain, la Santé publique la rappelle et dit : Ah non, finalement, vous devez faire isoler les enfants pour un autre 14 jours. Donc, ça fait quand même beaucoup de jours pour manquer l'école. Lorsqu'on additionne entre le moment où est-ce que l'enfant se fait tester, recevoir le test, plus une période d'isolement, là, tu sais, on est rendus, quoi, à 25 jours? Ça commence à faire beaucoup.

Et je le dis parce que, d'entrée de jeu, et je l'ai déjà répété au ministre de l'Éducation, moi, je ne m'attends pas à des miracles avec la COVID-19, là. Je le sais, ça nous a frappés de plein fouet. Alors, c'est pour ça que j'ai collaboré puis, au mois d'août, j'ai proposé... puis ça ne venait même pas de mon cru, là, je vous le dis, j'ai copié une idée, et je l'ai même dit, ça vient de l'Ontario, c'est les équipes dédiées de santé publique pour le réseau scolaire, pour en faire une priorité parce qu'on a besoin que l'école fonctionne, on a besoin que nos enfants soient à l'école de façon sécuritaire. Et l'Ontario ont décidé d'avoir une équipe de santé publique qui n'est pas composée uniquement d'infirmières, parce qu'on sait qu'on en manque, mais ils sont allés aussi faire appel aux hygiénistes, ça, on en a davantage. Et leur rôle, c'est vraiment de diminuer les propagations dans les écoles, de contrôler les éclosions, d'être la première ligne pour répondre aux questions non seulement des directions d'école, mais aussi des parents. Et le ministre de la Santé ainsi que le ministre de l'Éducation, les deux ont dit : C'est une bonne idée, on l'aime, on ouvre la porte... non, pardon, on ne ferme pas la porte, pour citer correctement. Ça, c'était au mois d'août. Finalement, la rentrée scolaire commence, je réitère encore cette proposition, on me dit de patienter. J'ai patienté, puis finalement j'ai entendu, il y a à peu près une semaine et demie ou deux semaines, les avocats du gouvernement dire : Bien, il n'y en aura pas, là, au tribunal, là, donc ils n'ont pas l'intention de le faire.

Ce mardi, le ministre, en fin de débat de séance, il m'a dit : Moi, je suis toujours intéressé à le faire, j'y travaille. Aujourd'hui, on est le 1er octobre, j'aimerais vraiment qu'on y travaille pour de vrai. Je crois qu'on est capables de le faire, qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire. Ça, j'y crois. Puis il faut le faire avant qu'on arrive, vous savez, à l'alerte maximale rouge puis que, malheureusement, on doit faire ce qu'on a fait avec les restaurants, puis dire : Bien, malheureusement, on doit fermer les écoles. Moi, je ne veux pas arriver là puis je sais que le premier ministre du Québec ne veut pas arriver là, je sais que le ministre de l'Éducation ne veut pas arriver là. Mais donnons-nous les moyens de ne pas arriver là. Je crois que le corridor sanitaire scolaire serait bénéfique pour tous. Allez-vous donner suite?

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. M. le ministre de la Transformation numérique gouvernementale, je vous cède la parole pour un maximum de cinq minutes.

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. À mon tour, peut-être, de raconter peut-être une petite anecdote, parce qu'effectivement mes enfants, il y a peu de temps, ont commencé à avoir des symptômes. Et donc, évidemment, le protocole se met en place, les enfants vont se faire tester, et là on est en confinement en attendant du résultat. Donc, oui, je comprends cette situation-là, ils l'ont vécue. Évidemment, pour les enfants, c'est un moment de bonheur; pour les parents, un peu moins.

Mais, ceci étant dit, plus sérieusement, je comprends parfaitement la situation qui est décrite par la députée de Saint-Laurent, et le ministre de l'Éducation la comprend parfaitement. Mais, vous savez, M. le Président, gouverner le réseau de l'éducation en temps normal, ce n'est pas simple, mais en temps de pandémie, ça l'est encore moins. Et le ministre de l'Éducation a mis en place, je pense...

Puis, ceci étant dit, je veux répondre d'entrée de jeu à l'interrogation de la députée de Saint-Laurent. Non, l'idée des corridors de services est loin d'être abandonnée, et, oui, le ministre de l'Éducation m'a reconfirmé cette volonté qu'il avait d'essayer de les mettre en place tel que prescrit. Parce qu'il y a quand même des choses, là, qui ont été faites et qui vont dans ce sens-là, notamment le fait que des centres... chaque école s'est vu attitrer un centre de dépistage spécifique, chaque école a des rencontres régulières avec les directions de santé publique régionales. Donc, il y a déjà une prise en charge qui va dans le sens de ce que la députée de Saint-Laurent appelle les corridors de services qui ont été mis en place déjà par le ministre de l'Éducation.

Évidemment, il faut aussi comprendre que ça ne dépend pas exclusivement que de l'Éducation. On le sait, il y a le ministère de la Santé, le réseau de la santé qui a aussi le mandat d'augmenter significativement le nombre de tests. Et, M. le Président, je pense qu'il faut aussi souligner ce qui se fait de bien, parce qu'on comprend qu'il y a des choses qui sont à améliorer, mais, quand on passe de 5 000 à 30 000 tests par jour, bien, on a fait quelque chose qui était bien, là. Et là on parlait de 581 écoles, M. le Président, où il y avait eu un test positif — et on ne parle pas d'éclosion, mais de test positif — mais, malgré tout, le nombre de classes qu'on doit fermer ou le nombre d'écoles qu'on doit fermer est quand même relativement limité si on regarde, évidemment, l'ensemble du portrait, l'ensemble des écoles. Donc, les mesures qui ont été mises en place, que ce soient les bulles-classes, notamment les mesures d'hygiène, de distanciation, ces mesures-là donnent quand même des résultats.

Bon, oui, récemment, il y a une augmentation des cas de tests positifs, mais ce dont on se rend compte, c'est que c'est de la contamination communautaire. Ce ne sont pas des écoles... pardon, ce ne sont pas des éclosions à même les écoles, donc, c'est vraiment la contagion communautaire, d'où l'appel que le ministre de la Santé, le ministre de l'Éducation et le premier ministre ont fait aux Québécois de ne pas abdiquer, de ne pas baisser les bras, de continuer à respecter les mesures de distanciation, les mesures qui sont mises en place par la Santé publique pour s'assurer de diminuer ces éclosions-là communautaires, cette propagation, devrais-je dire, communautaire qui va avoir un impact direct sur les écoles.

Parallèlement à ça, je pense que la députée de Saint-Laurent est au courant, le ministre de l'Éducation l'a annoncé, un 85 millions supplémentaire qui a été investi pour mettre en place différentes mesures qui vont, encore une fois, aider à limiter, voire endiguer la propagation dans nos écoles, notamment un 25 millions où on va pouvoir mettre en place plus de surveillance pour s'assurer que les mesures d'hygiène et les mesures de prévention de la propagation sont bien respectées, une somme de 15 millions aussi, qui a été annoncée par le ministre de l'Éducation pour s'assurer, notamment au niveau de la ventilation des écoles, et tout ça, de la qualité de l'air, s'assurer, là, qu'on travaillait de ce côté-là aussi parce qu'on comprend que c'est un facteur de propagation.

Donc, le corridor de services à proprement parler, il y a du travail à faire. Le ministre de l'Éducation continue à y travailler, continue à y croire. Mais, parallèlement à ça, il y a des choses, il y a plusieurs choses qui ont été faites. Puis, si on pose un regard objectif sur la situation, compte tenu des augmentations de cas, compte tenu de cet équilibre qu'on cherche à trouver entre garder les enfants à l'école et assurer leur sécurité, je pense que le travail qui a été fait jusqu'à date a été bien fait. Est-ce que c'est parfait? Non. Mais c'est la raison pour laquelle, au quotidien, le ministre de l'Éducation et ses équipes, en collaboration avec la Direction de la santé publique, cherchent à mettre en place de nouveaux moyens pour s'assurer qu'on garde nos jeunes à l'école parce que, vous l'avez dit, Mme la députée, le succès, pour les enfants, ça passe par l'éducation.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Laurent, je vous cède la parole pour votre droit de réplique de deux minutes.

Mme Marwah Rizqy (réplique)

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. D'entrée de jeu, j'aimerais souligner à mon collègue le ministre, vous avez raison, ce n'est pas parfait. Puis moi, je ne vous demanderais jamais la perfection, encore moins en période de pandémie. C'est pour ça qu'on est vraiment en mode collaboration, puis je l'ai été, en éducation, là, d'entrée de jeu, depuis le début, avec le ministre.

Par contre, j'aimerais juste souligner une chose. Quand j'ai écouté l'émission Enquête jeudi dernier, il y avait un constat qui était fait par les médecins qui étaient dans ces entrevues qui étaient faites par Madeleine Roy, c'est comme si nos décisions... on sait qu'est-ce qu'on doit faire, mais il y avait une semaine ou deux semaines de délai. Puis je vous donne un exemple, ventilation dans les écoles, j'en ai parlé au ministre de l'Éducation cet été parce que j'ai vu que l'Ontario avait mis 50 millions additionnels que pour la ventilation. Il dit : Parfait, il dit, oui, c'est vrai, on devrait regarder. Finalement, l'annonce a été faite samedi dernier. C'est six semaines plus tard. Et ce n'est pas un reproche, parce que je le sais qu'il y a des impératifs, mais je sais aussi qu'on est capables d'aller plus vite quand on veut, puis c'est mon souhait qu'on aille plus vite.

La clinique de dépistage mobile, j'en ai parlé au ministre cet été. Finalement, on l'a fait à certains endroits, puis mardi, je l'ai même félicité... mardi, je l'ai félicité, j'ai dit : Bravo! Vous l'avez faite, la clinique de dépistage mobile, mais ce n'est pas rendu automatique. Il me dit : C'est quand même mon souhait que ce soit automatique, on y travaille.

• (18 h 30) •

Maintenant, moi, je vous soumets, là, que, lorsqu'on a déconfiné, rien n'était obligatoire. Donc, on a ouvert les salles de spectacle, les bars, ce n'était pas obligatoire, vous n'étiez pas obligés d'y aller. Mais l'école, c'est le seul aspect de notre société qui est devenu obligatoire dans le déconfinement. Alors, c'est pour ça que je pense qu'on leur doit, à tout le moins, de les prioriser.

Puis aujourd'hui, on pouvait lire dans LeJournal de Montréal, encore une fois il y a une école de Québec qui a une éclosion, c'est plus de 1 000 élèves, puis ils ne sont pas priorisés pour le dépistage, donc ils leur ont dit : Maximum cinq jours pour recevoir les résultats.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Nous allons maintenant procéder au troisième débat, qui portera sur une question adressée par Mme la députée de Bourassa-Sauvé au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale au sujet de l'absence d'aide en lien avec la hausse du coût de la vie en situation de pandémie de COVID-19 pour les personnes les plus vulnérables de notre société. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, je vous cède la parole pour une durée maximale de cinq minutes.

Impact de la pandémie de coronavirus sur les
prestataires de l'aide de dernier recours

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Merci, M. le Président. C'est important de prendre le temps, comme disait ma collègue de Saint-Laurent, la pandémie... Évidemment, on n'est pas parfait, on n'est pas parfait, on essaie de répondre, on essaie de s'adapter, mais on entre maintenant dans une deuxième vague, on a vécu cette première vague, et là on rentre dans une deuxième vague. J'aimerais vous parler de nos plus vulnérables, de nos plus démunis, des gens qui reçoivent l'assistance sociale. La pandémie a frappé tout le monde, mais ces gens-là sont extrêmement fragiles, et un rien peut dérailler leur vie.

M. le Président, je sais le ministre à l'écoute et je sais que le ministre a l'empathie. Le ministre n'est peut-être pas tout seul non plus, et je veux lui donner des arguments. Je veux l'aider à plaider la cause de nos plus démunis devant le Conseil du trésor, devant sa collègue qui représente le Conseil du trésor, devant son premier ministre.

Vous savez, durant la pandémie, vous le vivez, vos proches le vivent, tout a augmenté, hein? Les denrées de base ont augmenté, le panier d'épicerie a augmenté, les livraisons ont augmenté. Si vous commandez votre épicerie au téléphone, puis on vous livre ça chez vous, ça coûte de l'argent. Même chose pour les médicaments, même chose pour la commande qu'on fait à la pharmacie, ils vont venir livrer, ça va coûter de l'argent.

Les gens qui sont dans le besoin, les gens qui sont des prestataires d'aide sociale ou de solidarité sociale ont vécu comme tout le monde, mais peut-être des fois à la puissance 10 l'inquiétude que nous, on a vécue. Parce que la pauvreté, ça va aussi avec beaucoup d'anxiété. Et donc ces gens-là, en plus d'avoir à vivre, à survivre dans un contexte très difficile, ils étaient confinés à la maison, avaient peut-être, avant, droit à des ressources communautaires, avaient peut-être un ami qui les amenait à l'épicerie, là, maintenant... en tout cas, durant le confinement, le sérieux confinement, là, de mars et d'avril, ils avaient perdu tout ça. Et, même encore, c'est difficile, et puis ils peuvent perdre leur balance. En plus, maintenant, il faut s'acheter du désinfectant, des produits sanitaires, donc c'est très, très lourd et ça coûte de l'argent. Donc, ces gens-là... Et moi, je plaide et j'espère que le ministre va voir ça comme moi, mais il nous faut absolument une aide d'urgence, d'une aide d'urgence directe à ces gens-là.

Le ministre, quand je lui ai posé la question ce matin, m'a dit : Mais on a fait plein de choses, on a des assouplissements, par exemple, on a facilité la vie de nos prestataires d'aide sociale. Bien, j'ai parlé aux gens du Collectif pour un Québec sans pauvreté aujourd'hui, et, ils me faisaient la remarque, en fait les assouplissements, la majorité des assouplissements sont finis. Le recouvrement de la dette, là, n'est plus suspendu. Le programme Objectif emploi, bien, il l'avait prolongé, il avait prolongé les allocations de participation, c'est fini. Le renouvellement automatique, là, des demandes de contraintes temporaires à l'emploi, c'est fini. Alors, la vie est encore plus compliquée.

Et là le ministre perdure et continue à faire la sourde oreille. Ces gens-là, avant, pouvaient... Vous savez, quand on est sur l'aide sociale, on peut arrondir nos fins de mois, faire un petit 200 $ de plus par mois. Bien là, on ne peut plus le faire, ou c'est extrêmement difficile de faire ça. Essayez, vous, M. le Président, de vivre sur 690 $ par mois. 690 $ par mois, c'est une somme qui est pensée pour un retour à l'emploi. Et là le marché du travail est complètement perturbé. Alors, ces gens-là n'ont pas ça. Et puis même chose pour les prestataires de solidarité sociale, ces gens-là n'ont pas le petit plus qu'ils avaient avant. De là la nécessité d'une aide directe.

On dirait que le gouvernement agit comme si la crise était finie pour les prestataires d'aide sociale, comme si eux, de toute façon, ils sont déjà pauvres, donc ce n'est pas grave. On le voit à Montréal, on le voit à Québec, on a une société qui s'appauvrit, on a des gens qui basculent dans une pauvreté extrême, qui basculent dans la rue. Et donc il faut absolument leur venir en aide, il faut une aide directe à ces gens-là. Et j'espère que le ministre va comprendre.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, je vous cède la parole pour un temps maximum de cinq minutes.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, M. le Président. Je pense que, depuis qu'on se connaît tous les deux, ma collègue de Bourassa-Sauvé et moi, on réalise qu'on a une sensibilité commune. Moi aussi, je reconnais sa grande empathie. Et je sais comment plaider auprès de mes collègues. Et tous connaissent mon intérêt profond pour soutenir du mieux possible les personnes à faibles revenus et pour lutter aussi contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

Le 13 octobre prochain, je rencontre, pour la troisième fois, le front commun qui représente les personnes assistées sociales au Québec. Et ils me font part de leurs représentations puis de leurs préoccupations, particulièrement en contexte pandémique, où je sais que plusieurs problématiques humaines et sociales se sont exacerbées.

J'ai annoncé récemment, le 2 septembre dernier, d'ailleurs, à Trois-Rivières, une augmentation de 2 millions de dollars pour les organismes de défense collective des droits ainsi que les corporations de développement communautaire, partout au Québec, pour leur permettre de mieux confronter les incidences découlant de la pandémie. Et vous savez qu'on a maintenu leur financement pendant la pandémie même si le niveau d'activités pour plusieurs de ces organismes communautaires n'était pas le niveau nécessairement régulier.

On a annoncé, je le rappelle et je l'ai mentionné ce matin, 2 millions de dollars pour les banques alimentaires. Je suis moi-même allé dans des banques alimentaires pendant la période pandémique et j'ai constaté à quel point il y avait eu une recrudescence, une augmentation du nombre de personnes qui profitent du réseau des banques alimentaires disséminées partout au Québec pour le bénéfice des personnes qui ont des besoins ou qui vivent dans l'insécurité alimentaire. Il y avait aussi des prestataires d'aide financière de dernier recours, notamment ceux qui reçoivent des prestations de solidarité sociale, c'est-à-dire des personnes qui ont des contraintes sévères à l'emploi.

On a investi 4,5 millions de dollars pour le Club des petits déjeuners, ça, c'est pour permettre à nos petits qui vivent dans des quartiers défavorisés ou qui vivent pauvrement de pouvoir manger sainement à tous les matins; 10,2 millions de dollars additionnels au Programme de soutien à l'action bénévole pour permettre aux députés de s'engager, de s'impliquer auprès des organismes communautaires partout au Québec; 2,5 millions pour les organismes d'hébergement pour femmes victimes de violence. Mes collègues m'en parlent, du côté gouvernemental, il y a eu aussi une augmentation des problématiques de violence conjugale et de problématiques entre des personnes qui vivent sous le même toit.

On a octroyé aussi une aide d'urgence de 20 millions de dollars pour répondre aux besoins financiers des organismes communautaires. La députée de Bourassa-Sauvé le sait, elle m'en a parlé. Il y a beaucoup de pauvreté à Montréal-Nord, dans son comté. Il y avait des campements d'itinérants. Je sais que l'itinérance s'est accrue, puis l'itinérance ne se vit pas de la même façon pour les hommes que pour les femmes. On a, notre gouvernement, investi 21,4 millions de dollars en itinérance, dont près de la moitié à Montréal. On a investi en santé mentale 31 millions de dollars pour rehausser aussi l'accès aux services psychosociaux et aux services en santé mentale dans le contexte particulier de la pandémie. La dépendance au jeu, les ressources d'hébergement en dépendance ont bénéficié d'un 3 millions de dollars additionnel, qu'elles soient publiques ou privées.

Les mesures d'assouplissement, je sais que certaines ont pris fin, mais sachez, chers collègues, à quel point c'était attendu avec énormément d'impatience au début de la pandémie. Allocations pour contraintes temporaires ou permanentes à l'emploi, même s'il n'y avait pas de nouveaux certificats médicaux prolongeant la contrainte médicale, on a continué à verser les prestations.

On a fait tout ce qui s'imposait, on est à l'écoute, et la porte n'est pas fermée. Il y a des rencontres, et on fera tout ce qui est nécessaire pour soutenir les gens qui vivent dans la pauvreté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, votre droit de réplique de deux minutes.

Mme Paule Robitaille (réplique)

Mme Robitaille : M. le Président, on n'est pas sortis de la pandémie, là. La première vague a frappé dur nos plus démunis, puis la deuxième vague, elle va frapper encore plus dur, parce que justement, ça a fait mal, ça a coûté cher. Ça a coûté cher aussi d'un point de vue de santé mentale, ça a coûté cher sur tous les fronts. Et, probablement que, si on avait un prestataire d'aide sociale ou une prestataire de solidarité sociale ici aujourd'hui, il dirait au ministre : On ne veut pas de charité. C'est très bien, là, de donner aux organismes communautaires, et il le faut, mais ce n'est pas aux organismes communautaires de gérer tout ça nécessairement. Ils sont déjà débordés, ils sont déjà tellement essoufflés. Ce qu'ils nous disent, les prestataires d'aide sociale, ils nous disent : On a droit à une... On veut une aide directe comme les chômeurs ont reçu une aide directe, comme les entreprises reçoivent une aide directe. C'est une question de dignité humaine. Donnez-nous une aide directe, et, à partir de là, on pourra aller chercher ce masque-là qui nous manque, on pourra aller chercher ce désinfectant-là qui nous manque, on pourra acheter ce poulet-là qu'on a besoin pour faire le souper pour toute la famille. Et donc c'est important...

Et ça peut prendre toutes sortes de formes, là, M. le Président. Ça peut être un crédit d'impôt de solidarité bonifié, par exemple, et qui ne recouvrirait pas juste des prestataires d'aide sociale, mais aussi des familles, des gens qui vivent dans une grande précarité et qui ne reçoivent pas nécessairement des prestations d'aide sociale. Ça peut être ce crédit d'impôt de solidarité. Ça peut être une allocation, par exemple, comme en Ontario ou en Colombie-Britannique... Et là j'entends le ministre qui va dire : Ah! oui, mais... Oui, mais, en Ontario et en Colombie-Britannique, ils sont aussi généreux que nous. C'est des pistes de solution.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée.

Ajournement

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au mardi 6 octobre 2020, à 13 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 43)