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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 29 octobre 2020 - Vol. 45 N° 138

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Remercier les employés et les élus municipaux de la circonscription de Huntingdon pour leurs
efforts pendant la pandémie de COVID-19

Mme Claire IsaBelle

Souligner le 20e anniversaire de La Fondation du Grand Montréal

Mme Kathleen Weil

Souligner la Semaine nationale des proches aidants

M. Youri Chassin

Remercier les organismes communautaires de Montréal-Nord pour leurs efforts pendant la
pandémie de COVID-19

Mme Paule Robitaille

Rendre hommage à Mme Véronique Jean, fondatrice du Centre Ganga Yoga inc.

M. Richard Campeau

Souligner le 30e anniversaire de l'organisme Logis Rose-Virginie

M. Vincent Marissal

Féliciter Mme Julie Bédard, lauréate des Mercuriades

Mme Joëlle Boutin

Souligner le 125e anniversaire de l'entreprise Garant GP

Mme Marie-Eve Proulx

Souligner le 40e anniversaire de l'entreprise Groupe Aptas inc.

M. Luc Provençal

Rendre hommage à Mme Maria Tutino, mairesse sortante de la ville de Baie-d'Urfé

M. Gregory Kelley

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 69 — Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions
législatives

Mme Nathalie Roy

Mise aux voix

Dépôt de documents

Plan d'immigration du Québec pour l'année 2021

Réponses à des pétitions

Rapport du Vérificateur général intitulé NM F.-A.-Gauthier : conception et construction

Rapport d'enquête de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie au président de l'Assemblée
nationale au sujet de M. Pierre Fitzgibbon, ministre de l'Économie et de l'Innovation et député
de Terrebonne


Dépôt de rapports de commissions

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67 — Loi instaurant un nouveau régime
d'aménagement dans les zones inondables des lacs et des cours d'eau, octroyant
temporairement aux municipalités des pouvoirs visant à répondre à certains
besoins et modifiant diverses dispositions


Questions et réponses orales

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

M. Christian Dubé

M. David Birnbaum

M. Christian Dubé

M. David Birnbaum

M. Christian Dubé

Impact de la pandémie de COVID-19 sur le taux de décrochage scolaire

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Position du premier ministre concernant le fédéralisme

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

Protection des travailleurs de la santé

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Christian Dubé

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Christian Dubé

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Christian Dubé

Mesures d'aide directe aux entreprises

M. Carlos J. Leitão

Mme Marie-Eve Proulx

M. Carlos J. Leitão

Mme Marie-Eve Proulx

M. Carlos J. Leitão

Mme Marie-Eve Proulx

Mesures pour lutter contre la maltraitance envers les aînés

M. Harold LeBel

M. Christian Dubé

M. Harold LeBel

M. Christian Dubé

M. Harold LeBel

M. Christian Dubé

Modification du schéma d'aménagement et de développement de la MRC de Montcalm

Mme Marie-Claude Nichols

M. Jonatan Julien

Mme Marie-Claude Nichols

M. Jonatan Julien

M. Gaétan Barrette

M. Jonatan Julien

Rémunération de hauts dirigeants d'Investissement Québec

M. Monsef Derraji

Mme Marie-Eve Proulx

Suspension du Programme des personnes réfugiées à l'étranger

M. Gaétan Barrette

M. Jean Boulet

Motions sans préavis

Demander au gouvernement de mettre à la disposition du personnel des réseaux de l'éducation et
des services de garde éducatifs à l'enfance de l'équipement de protection adapté afin de
minimiser les impacts des mesures sanitaires prises dans ces milieux sur le
développement des enfants

Souligner le travail des équipes des unités de soins intensifs en période de crise sanitaire

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Avis de sanction du projet de loi n° 51 — Loi visant principalement à améliorer la flexibilité du
régime d'assurance parentale afin de favoriser la conciliation famille-travail 


Affaires du jour

Projet de loi n° 66 — Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure

Adoption du principe

Mme Sonia LeBel

M. Gaétan Barrette

M. Pierre Arcand

Débats de fin de séance

Modification du schéma d'aménagement et de développement de la MRC de Montcalm

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Andrée Laforest

Mme Marie-Claude Nichols (réplique)

Impact de la pandémie de COVID-19 sur le taux de décrochage scolaire

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy (réplique)

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

Mme Marguerite Blais

M. David Birnbaum (réplique)

Motions sans préavis (suite)

Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 71 — Loi sur les véhicules
hors route

Mise aux voix

Projet de loi n° 66 — Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Vincent Marissal

M. David Birnbaum

M. Sylvain Gaudreault

M. Frantz Benjamin

Mme Ruba Ghazal

M. Marc Tanguay

Mme Paule Robitaille

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bonjour. Bon jeudi. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous débutons nos travaux. Aux affaires courantes, à la rubrique de déclarations de députés, je reconnais la première intervenante, Mme la députée de Huntingdon.

Remercier les employés et les élus municipaux de la circonscription de
Huntingdon pour leurs efforts pendant la pandémie de COVID-19

Mme Claire IsaBelle

Mme IsaBelle : Mme la Présidente, la circonscription de Huntingdon comprend 28 municipalités réparties dans quatre MRC. Je désire exprimer toute mon admiration aux préfètes et préfets, aux mairesses et maires ainsi que leurs directions générales et leurs conseillères et conseillers pour leur gestion efficace des dossiers.

On dit que seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin. Alors, au printemps dernier, nous avons été à même de constater la véracité de ce proverbe africain. En effet, nous avons uni nos forces, nos idées en se rassemblant par le biais de conférences téléphoniques, dans le seul but de mieux servir notre population en ces temps exceptionnels.

Qui plus est, depuis septembre, ayant une limite d'accès à Internet, dans notre région, très limitée, des municipalités ont répondu favorablement à ma demande de coopération pour ouvrir les portes de leurs salles municipales afin de permettre à nos jeunes étudiantes et étudiants de suivre leurs formations en ligne.

Merci à vous toutes et tous pour votre dévouement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Souligner le 20e anniversaire de La Fondation du Grand Montréal

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, Mme la Présidente. À titre de première présidente-directrice générale de La Fondation du Grand Montréal, j'ai l'honneur de souligner le 20e anniversaire d'un organisme devenu un incontournable du monde de la philanthropie.

Au fil des ans, grâce à la création de centaines de fonds de dotation par de généreux donateurs ayant à coeur de multiples causes et le mieux-être de la collectivité, la FGM a distribué plus de 60 millions de dollars à plus de 1 200 organismes actifs dans tous les secteurs de la bienfaisance.

The FGM is a community foundation that connects generous donors to causes that matter through the creation of permanent endowment funds that provide a steady stream of revenue to support charitable organizations working for the vitality of the community.

Fière de ce grand mouvement d'entraide et de générosité, je salue tous les bénévoles et membres du personnel qui ont contribué, depuis 20 ans, au succès de la fondation. Félicitations et longue vie à La Fondation du Grand Montréal! Congratulations and long life to the Foundation of Greater Montréal!

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous poursuivons avec M. le député de Saint-Jérôme.

Souligner la Semaine nationale des proches aidants

M. Youri Chassin

M. Chassin : Merci, Mme la Présidente. Près d'un quart de la population québécoise agit en tant que proches aidants, et, chaque année, la première semaine de novembre leur est dédiée. J'aimerais donc profiter de mon temps de parole aujourd'hui pour souligner leur rôle ô combien important dans notre société.

Avec la pandémie qui nous touche tous, présentement, au Québec, le rôle de ces personnes s'est révélé d'autant plus essentiel, des personnes qui, avec beaucoup de courage, acceptent de faire de nombreux sacrifices dans le but d'améliorer la vie d'un de leurs proches. Leur dévouement doit nous servir d'exemple et nous rappeler à tous et toutes l'importance de l'entraide et de la compassion.

Je tiens à remercier plus particulièrement les organismes L'Appui, pour les proches aidants d'aînés, l'Entr'Aidants, La Halte des proches, la Maison Aloïs Alzheimer, Pallia-Vie, ainsi que Vigil'Ange, qui font un travail remarquable à Saint-Jérôme afin d'offrir du soutien aux proches aidants de notre région. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Remercier les organismes communautaires de Montréal-Nord
pour leurs efforts pendant la pandémie de COVID-19

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Mme la Présidente, ils sont là tous les jours en première ligne, ils servent, aident tous ceux et celles qui en ont besoin. À Montréal-Nord, nos organismes communautaires ont toujours joué un rôle fondamental, un rôle ingrat, que la pandémie a mis en lumière. Je voudrais, aujourd'hui, leur rendre hommage, les remercier du fond du coeur de leur dévouement sans bornes.

Nos organismes ont rivalisé de créativité pour s'adapter et aider nos citoyens, en pleine pandémie, et même au-delà. Dans mon comté, des conditions de vie trop souvent précaires ont été exacerbées par la pandémie. On assiste à une recrudescence de la violence dans certains quartiers de Montréal-Nord, et qui sème la crainte chez nos citoyens. Mais nos organismes communautaires sont toujours là pour les rassurer. Eux qui aident tant ont aussi besoin d'être aidés, d'être appuyés et d'avoir suffisamment de ressources pour poursuivre leurs actions soutenues et faire une différence.

Alors que la pandémie de COVID-19 a frappé mon comté, Bourassa-Sauvé, comme nulle part ailleurs au Québec, nos organismes sont plus nécessaires que jamais. Mon équipe et moi, Mme la Présidente, serons toujours là pour eux. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Bourget.

Rendre hommage à Mme Véronique Jean,
fondatrice du Centre Ganga Yoga inc.

M. Richard Campeau

M. Campeau : Merci, Mme la Présidente. La crise sanitaire nous montre l'importance de s'écouter et de prendre soin de soi.

Depuis 15 ans, Mme Véronique Jean est à la tête de Ganga Yoga, un organisme qui est basé dans mon comté. Suite à un voyage en Inde, elle décide de se mettre à la méditation. Elle offre ses services autant à Saint-Calixte qu'à Montréal. Elle enseigne le yoga depuis 20 ans, est accréditée auprès de nombreuses associations. Mme Jean est devenue, sans aucun doute, une référence du yoga dans l'est de Montréal. Son savoir, ses formations suivies en Inde font d'elle une personne-ressource en ce qui concerne la méditation. Ce centre offre une multitude de cours et de retraites méditatives, de formations, même pour les professeurs, à divers niveaux.

Les personnes comme Mme Jean sont importantes tant pour notre santé physique que mentale. Merci, Mme Jean, pour votre dévouement pour l'est de Montréal. On a besoin de gens comme vous, et encore plus aujourd'hui qu'auparavant. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de Rosemont.

Souligner le 30e anniversaire de l'organisme Logis Rose-Virginie

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je suis fier de souligner aujourd'hui le 30e anniversaire des Logis Rose-Virginie.

Cet organisme à but non lucratif vient en aide aux femmes en difficulté de 18 ans et plus. Cette résidence offre 21 logements supervisés à ces femmes pour une période pouvant aller jusqu'à trois ans et une aide professionnelle par un programme de réinsertion.

Logis Rose-Virginie aide les femmes en situation d'itinérance mais également celles à risque de le devenir ou de le redevenir. Malgré un financement largement insuffisant, cette équipe de femmes engagées offre un accompagnement rigoureux et sensible qui permet aux résidentes de s'outiller afin de trouver leur place vers une vie adulte autonome. Je salue ces femmes qui luttent avec courage et dignité vers des jours plus lumineux et je souhaite longue vie à cet organisme essentiel pour le quartier Rosemont.

En terminant, Mme la Présidente, je veux saluer Mme France Guillemette, la directrice, pour son engagement sans faille et sa vision pour l'organisme. Joyeux 30 ans!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Mme la députée de Jean-Talon, la parole est à vous.

Féliciter Mme Julie Bédard, lauréate des Mercuriades

Mme Joëlle Boutin

Mme Boutin : Merci, Mme la Présidente. Il y a quelques semaines, la Fédération des chambres de commerce du Québec a tenu son prestigieux concours d'affaires, les Mercuriades. Aujourd'hui, j'aimerais souligner le parcours inspirant d'une citoyenne de mon comté qui a récemment été sacrée Femme d'exception dans la catégorie Leadership‑PME. Ce prix vise à reconnaître le cheminement exceptionnel d'une femme d'affaires qui fait preuve d'audace et de leadership.

Je suis très fière de dire en cette Chambre que la députée... la lauréate, pardon, de cette année est Mme Julie Bédard, avocate, présidente de la Corporation Medicart, un réseau de médecine esthétique qui rayonne dans l'ensemble du Québec. Auparavant, elle a été la première femme à occuper le poste de présidente et chef de la direction à la Chambre de commerce et d'industrie de Québec, et ce n'est pas rien, Mme la Présidente, je tenais à le souligner. Lors de son mandat, elle a été l'instigatrice du programme Leadership au féminin, qui permet aux femmes d'affaires de participer à des formations enrichissantes et d'avoir accès à de nombreux réseaux de leaders influents.

Julie, je tiens à te féliciter personnellement pour ce prix prestigieux, pour ton dévouement, pour toute la passion que tu mets dans ta carrière. Tu m'inspires, personnellement, et tu inspires énormément de femmes au Québec. Continue de rayonner. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Mme la députée de Côte-du-Sud, la parole est à vous.

Souligner le 125e anniversaire de l'entreprise Garant GP

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de prendre ce moment pour vous parler d'une entreprise bien de chez nous, Garant, qui est basée à Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud.

Cette entreprise a été fondée en 1895 par M. Télesphore Garant. C'est à cette époque que M. Garant a érigé sa forge pour y fabriquer ses premiers outils de ferme. À la fin de la Première Guerre mondiale, son fils Alphonse s'est associé dans l'entreprise. Au fil des années, Garant est devenu une affaire de famille, où quatre générations se sont succédé. L'usine a pris de l'expansion en fabriquant une grande variété d'outils, entre autres des articles de jardinage, des pelles ou des balais à neige.

Aujourd'hui, la compagnie Garant se situe parmi les plus grands de l'industrie. Elle se démarque tant à l'international qu'au Canada ou au Québec, en plus de faire rayonner la région. C'est près de 400 employés qui participent à la renommée de l'entreprise.

En 2020, Garant célèbre son 125e anniversaire. Je profite de l'occasion pour saluer la ténacité et la persévérance de ces bâtisseurs d'avenir. Félicitations et longue vie à vous!

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Beauce-Nord.

Souligner le 40e anniversaire de l'entreprise Groupe Aptas inc.

M. Luc Provençal

M. Provençal : Merci, Mme la Présidente. L'année 2020 marque le 40e anniversaire d'une entreprise formidable de ma circonscription, Groupe Aptas, de Sainte-Marie.

Fondée en 1980, Groupe Aptas est une entreprise d'économie sociale qui compte aujourd'hui trois divisions : Cartonek, Environek et Dexterra. Elle offre une grande variété de produits et services, allant de la conception de boîtes ou de présentoirs en carton à l'impression grand format, la manutention, ainsi que le recyclage de matériel informatique et de tubulures d'érablière. Membre du Conseil québécois des entreprises adaptées, Groupe Aptas compte 135 employés, dont près de 70 % ont des limitations. D'ailleurs, cinq de ces employés comptent 40 ans de service cette année. Il s'agit de Lorraine St-Hilaire, Michel Turmel, Guy Audet, Adrien Boutin et Michel Leclerc, que je salue.

J'adresse mes hommages au président, M. Vital Labonté, et au directeur général, M. Lionel Bisson. Et je souhaite vous voir poursuivre votre mission encore longtemps. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Sans plus tarder, je cède la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

Rendre hommage à Mme Maria Tutino, mairesse
sortante de la ville de Baie-d'Urfé

M. Gregory Kelley

M. Kelley : Aujourd'hui, Mme la Présidente, je veux rendre hommage à Maria Tutino, qui a décidé, après 15 ans comme mairesse de Baie-d'Urfé, de prendre sa retraite.

Elle a entamé avec succès le processus de fusion de sa ville de Montréal. Elle a cultivé chez les résidents de Baie-d'Urfé une culture de bénévolat avec la création de Baie-d'Urfé Rescue Squad, Citizens on patrol. Elle a fait la protection de l'environnement et les services essentiels à sa ville et est particulièrement dévouée à la plantation des arbres.

A proud federalist and a community activist, my first activity as MNA was planting trees in a park with Maria. And, as she can remember, I showed up in a suit and in my dress shoes, and she was in her boots and jacket, and said, «Oh boy, kid, we have a lot to teach you!» She has always been good at gathering volunteers, particularly during the COVID crisis, to help seniors do grocery shopping, to make masks for the local school, and to help out seniors with whatever they need.

Thank you for being kind and decent, Maria, and thank you for your service to our community.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Ceci met fin à la rubrique de déclarations de députés.

Et je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 3)

Le Président : Mmes et MM. les députés, je vous souhaite un bon jeudi. Prenons quelques instants pour nous recueillir.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bonjour, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 69

Le Président : À l'article a du feuilleton, Mme la ministre de la Culture et des Communications présente le projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci beaucoup, M. le Président. Ce projet de loi modifie principalement la Loi sur le patrimoine culturel.

Le projet de loi prévoit notamment que le ministre de la Culture et des Communications doit élaborer une politique de consultation visant à favoriser la participation des personnes ou des organismes concernés par les orientations à privilégier en matière de connaissance, de protection, de mise en valeur et de transmission du patrimoine culturel, une méthode d'évaluation de l'intérêt patrimonial des immeubles et des sites ainsi qu'une grille de catégorisation des immeubles et des sites patrimoniaux classés. Il prévoit que ces documents, de même que la liste des éléments du patrimoine culturel qui sont à l'étude en vue d'une protection par le ministre ou par le gouvernement, doivent être rendus publics. Le projet de loi confirme la possibilité pour tout intéressé de proposer qu'un bien patrimonial fasse l'objet d'une protection prévue par cette loi. De plus, il crée la Table de concertation en matière de patrimoine immobilier gouvernemental afin de développer la cohésion gouvernementale et de favoriser l'exemplarité de l'État eu égard au patrimoine culturel immobilier gouvernemental.

Le projet de loi apporte des ajustements au régime d'autorisation, par le ministre, des actes réalisés dans les aires de protection d'un immeuble patrimonial classé ou à l'égard d'un bien ou d'un site patrimonial déclaré ou classé. Il prévoit entre autres qu'une demande d'autorisation doit comprendre les renseignements et les documents déterminés par règlement du ministre et donne à cet effet un délai de 90 jours pour rendre une décision, sauf exception. Il prévoit aussi que le ministre doit demander l'avis du Conseil du patrimoine culturel du Québec concernant des actes déterminés, notamment la démolition totale d'un bâtiment principal et la construction d'un nouveau bâtiment principal dans un site patrimonial déclaré ou classé. Le projet de loi donne également la possibilité au ministre, dans certains cas particuliers et à certaines conditions, d'autoriser un acte après qu'il a débuté ou qu'il a été achevé, incluant un acte qui aurait dû être autorisé en vertu de l'ancienne Loi sur les biens culturels.

Le projet de loi retire l'obligation pour le ministre d'établir des plans de conservation pour des immeubles et les sites patrimoniaux classés, de même que pour les sites patrimoniaux déclarés. Il détaille toutefois des éléments que le ministre peut considérer aux fins de l'analyse d'une demande d'autorisation concernant les biens patrimoniaux classés, les aires de protection et les sites patrimoniaux déclarés ou classés et crée l'obligation de catégoriser les immeubles et les sites patrimoniaux classés. De plus, il habilite le gouvernement à prendre, pour tout site patrimonial déclaré, un règlement déterminant les conditions de réalisation d'un acte qui doit faire l'objet d'une autorisation ou désignant des actes qui ne sont pas assujettis à l'obligation d'obtenir une autorisation. Le projet de loi crée également un mécanisme de révision de certaines décisions du ministre ainsi que la possibilité de contester une décision rendue en révision devant le Tribunal administratif du Québec.

Le projet de loi augmente les pouvoirs municipaux de protection du patrimoine. Il octroie ainsi à une municipalité régionale de comté, à l'instar d'une municipalité locale, le pouvoir de citer par règlement un bien patrimonial, incluant un site, et de constituer un conseil local de patrimoine pour la conseiller à ce sujet. Il lui donne aussi le pouvoir d'autoriser la réalisation de certains actes à l'égard de ce bien patrimonial et de prendre des ordonnances pour assurer la protection d'un bien susceptible de présenter une valeur patrimoniale. Le projet de loi prévoit l'adoption et la mise à jour, par une municipalité régionale de comté, d'un inventaire des immeubles présentant une valeur patrimoniale selon le mode de réalisation, de consignation et de diffusion prescrit par règlement du ministre. Il modifie de plus la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour moderniser les pouvoirs réglementaires des municipalités locales en matière de démolition et en élargir la portée, principalement à des fins de protection du patrimoine immobilier. Il prévoit à ce sujet qu'une municipalité locale est tenue de maintenir en vigueur un règlement relatif à la démolition d'immeubles visant minimalement les immeubles inscrits dans l'inventaire de la municipalité régionale de comté ainsi que ceux qui sont cités ou situés dans un site patrimonial cité. En conséquence, les autorisations données conformément à ce règlement deviennent les seules nécessaires en matière de démolition d'immeubles cités ou situés dans un site patrimonial cité. Le projet de loi introduit également à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme des règles particulières applicables à la démolition d'un immeuble patrimonial, dont la possibilité pour une municipalité régionale de comté de désavouer une autorisation de démolition accordée à l'égard d'un tel immeuble.

Le projet de loi précise qu'il n'est pas nécessaire d'obtenir une autorisation concernant la division, la subdivision et le morcellement d'un immeuble sur le plan d'un cadastre vertical. Il répute autorisées de telles opérations cadastrales faites sans autorisation avant sanction dans l'aire de protection d'un immeuble patrimonial classé ou dans un site patrimonial déclaré ou classé. Le projet de loi corrige aussi le défaut d'avoir obtenu, avant sa sanction, certaines autorisations qui étaient exigées par l'ancienne Loi sur les biens culturels ou par la Loi sur le patrimoine culturel.

Le projet de loi prévoit des dispositions visant à renforcer le partage d'informations entre le ministre et les municipalités relativement à la protection des biens patrimoniaux.

Enfin, il modifie des lois à des fins de concordance ou pour tenir compte des particularités de certaines municipalités et prévoit des dispositions transitoires. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Vous comprendrez qu'on souhaitera des consultations particulières sur le sujet qui vient d'être apporté par la ministre de la Culture.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Ce sera avec plaisir, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : En application de l'ordre spécial, j'invite les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la présentation de ce projet de loi, suivi des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

• (10 h 10) •

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Il est ainsi adopté.

Dépôt de documents

Nous en sommes à la rubrique Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.

Plan d'immigration du Québec pour l'année 2021

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose, au nom de ma collègue, le plan d'immigration Québec 2021. Merci, M. le Président.

Le Président : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement, à nouveau.

Réponses à des pétitions

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions présentées en Chambre le 27 mai par le député de Maskinongé, le 28 mai par la députée d'Argenteuil, le 16 septembre par la députée de Marie-Victorin et le 17 septembre par le député de Richelieu. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont déposés.

Rapport du Vérificateur général intitulé
NM F.-A.-Gauthier : conception et construction

Pour ma part, je dépose le rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2020-2021 intitulé NM F.-A.-Gauthier : conception et construction, audit particulier.

Rapport d'enquête de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie au président
de l'Assemblée nationale au sujet de M. Pierre Fitzgibbon, ministre de
l'Économie et de l'Innovation et député de Terrebonne

Toujours à la rubrique Dépôt de documents, en application de l'article 98 du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, je dépose également un rapport intitulé Rapport d'enquête de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie au président de l'Assemblée nationale au sujet de M. Pierre Fitzgibbon, ministre de l'Économie et de l'Innovation et député de Terrebonne.

Dans ce rapport, il est recommandé qu'une sanction soit imposée au ministre de l'Économie et de l'Innovation et député de Terrebonne. Conformément à l'article 102 du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, le député qui fait l'objet du rapport a le droit de répondre au cours de la période des affaires courantes réservée aux interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel en faisant une déclaration à l'Assemblée, d'une durée maximale de 20 minutes, dans les cinq jours de séance suivant le dépôt du rapport. À la séance suivant la réponse du député ou, à défaut, à l'expiration du délai prévu, l'Assemblée devra se prononcer sur ce rapport, en vertu de l'article 103 du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, je comprends qu'il y a consentement pour que je procède à un dépôt de rapports de commissions? Consentement.

Consultations particulières sur le projet de loi n° 67

Je dépose donc le rapport de la Commission de l'aménagement du territoire qui, les 21, 22, 27 et 28 octobre 2020, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le nouveau projet de loi n° 67, Loi instaurant un nouveau régime d'aménagement dans les zones inondables des lacs et des cours d'eau, octroyant temporairement aux municipalités des pouvoirs visant à répondre à certains besoins et modifiant diverses dispositions.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à la cheffe de l'opposition officielle.

Gestion de la pandémie de COVID-19

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, nous avons été les pires lors de la première vague et nous sommes encore les pires, au Canada, pour la deuxième vague. Le Québec a vécu des moments difficiles. Le premier ministre a lancé le 28 septembre le premier défi de 28 jours. Les Québécois se sont serré les coudes et ont suivi les consignes. Nous devons maintenant prolonger les efforts pour un autre 28 jours, puis après ça il va falloir qu'on évalue, dans 14 jours, où nous en sommes.

Le temps de la gestion au jour le jour n'est plus suffisant. Les gouvernements se préparent maintenant à vivre avec le virus pour une période beaucoup plus longue. Hier, le Dr Fauci, le directeur de l'Institut national des allergies et maladies infectieuses au ministère de la Santé américain, parle d'un semblant de retour autour de 2022. Le gouvernement va donc revoir sa stratégie, en conséquence, à plus long terme. Et on va le refaire en pensant aux entrepreneurs et aux employés, en pensant à nos patients, au personnel du réseau de la santé, pour nos jeunes, pour nos aînés, pour tous les Québécois, pour qu'on puisse apprendre à vivre au quotidien avec le virus.

Nous tendons la main, aujourd'hui, au premier ministre et nous lui proposons de travailler avec lui à construire un plan pour la prochaine année. Est-ce que le premier ministre acceptera cette main tendue?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, d'abord, la cheffe de l'opposition officielle répète la même phrase depuis plusieurs jours. Elle commence ses interventions en disant : Le Québec a été le pire durant la première vague, a été le pire durant la deuxième vague. J'invite la cheffe de l'opposition officielle à la prudence.

D'abord, il y a un rapport qui est sorti sur l'analyse de la mortalité en Ontario, préparé, entre autres, par des professeurs de la Western University et University of Toronto. Ce qu'on découvre ici, c'est que le nombre de décès, quand on le compare avec la moyenne des trois années précédentes en Ontario, est beaucoup plus élevé au printemps que le nombre de cas qui a été déclaré en Ontario pour les personnes atteintes de COVID. Donc, quand on compare, faisons attention dans la façon dont les décès sont déclarés.

Maintenant, elle dit qu'on est les pires durant la deuxième vague. Là, j'aimerais bien qu'elle nous donne un peu plus de chiffres. Quand on regarde actuellement la situation aux États-Unis, c'est deux fois pire qu'au Québec. Quand on regarde la situation en France, c'est cinq fois pire qu'au Québec. Donc, j'aimerais bien qu'elle nous explique, là, où elle prend ses comparaisons.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, selon toute vraisemblance, le Québec, comme partout, va devoir composer avec le virus pendant beaucoup plus longtemps qu'on l'aurait souhaité. Mais on va y arriver. On va y arriver parce qu'au Québec on est résilients. Mais, pour le faire, nous avons besoin d'une vision, nous avons besoin d'un plan pour la prochaine année.

Ma question était : Est-ce que le premier ministre accepte la main tendue et est-ce qu'il est d'accord pour qu'on ait un plan à long terme?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Content de voir que la cheffe de l'opposition officielle n'a pas répété qu'on est les pires durant la première vague et les pires durant la deuxième vague. Donc, je l'invite, encore une fois, si elle veut répéter ça à la prochaine période de questions, de nous arriver avec des données qui sont concluantes.

Maintenant, M. le Président, quand on regarde les mesures qui ont été mises en place par le gouvernement du Québec, c'est à peu près les mêmes mesures qu'on retrouve un peu partout dans le monde. Il n'y a pas de miracle, là. On a décidé, dans les zones rouges, de fermer les restaurants, de fermer les gyms, réduire les contacts. Bon, il y a des pays... Hier, le président Macron a annoncé encore plus de mesures.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Je reviens à la charge avec ma question, M. le Président. Le gouvernement doit certainement régler des enjeux à court terme, mais on doit également présenter aux Québécois un plan pour la prochaine année, une vision sur la relance économique, sur les écoles, sur notre système de santé. En 2022, on doit pouvoir savoir ce qui nous attend.

Est-ce que le premier ministre peut nous confirmer que les mesures à court terme, ce n'est plus suffisant, et qu'on doit présenter un plan sur le long terme? Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il accepte, oui ou non, notre main tendue pour ce plan de long terme?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la cheffe de l'opposition, la cheffe du Parti libéral du Québec, là, est à peu près la seule personne au monde qui dit : Moi, je ferais les choses différemment. Tout le monde a à peu près les mêmes mesures pour essayer de réduire les contacts. Les effets, bien honnêtement, sont meilleurs au Québec, on a des meilleurs résultats au Québec actuellement. On a réussi, depuis un mois, à maintenir le nombre de cas, alors que, dans les autres pays, on voit une explosion. Donc, c'est un succès. La cheffe de l'opposition officielle n'a aucune suggestion concrète à faire. Elle nous parle de plan, plan, plan, mais aucune suggestion.

Le Président : Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle. Vous êtes la seule à avoir la parole.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Une vingtaine de propositions qui ont été soumises par l'opposition officielle, M. le Président, notamment une en santé mentale qui m'apparaît fort pertinente. Le gouvernement doit élargir son niveau de préparation en fonction du fait que, quoi qu'il arrive, on va être ici pris avec le virus probablement jusqu'en 2022. Pour notre économie, pour notre santé, pour notre éducation, il nous faut faire en sorte qu'on arrête seulement de faire des mesures de court terme. Le gouvernement doit élargir son spectre : vision, prévisibilité, anticipation.

• (10 h 20) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, là, la cheffe du Parti libéral ne travaille plus chez McKinsey, là. On est en train de prendre des décisions importantes. Quand on regarde les suggestions, les suggestions du Parti libéral, augmenter le nombre de dépistages, augmenter le nombre d'infirmières, augmenter les services en santé mentale, empêcher les transferts, une chance qu'on a le Parti libéral pour nous dire de penser à ça! M. le Président, il n'y a rien de nouveau dans toutes les propositions qui ont été faites par le Parti libéral. J'entends... Et j'attends encore une nouvelle idée.

Le Président : Question principale. La parole appartient maintenant au député de D'Arcy-McGee.

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Nous avons des propositions, M. le Président. Sept psychologues sur 10 ont eu le retour d'anciens clients dont l'état s'est fragilisé en raison de la pandémie. La crise de santé mentale se poursuit, même si le ministre responsable a affirmé hier qu'il n'y a pas de crise. Les experts nous avisent de préparer pour le long terme. De toute évidence, le gouvernement préfère gérer à la petite semaine.

Le ministre responsable a annoncé 25 millions de dollars pour renforcer, bon, une petite porte d'entrée et uniquement pour les jeunes. Pour les autres Québécois, ça ne mènerait pas loin. Vous ne vous sentez pas bien? Appelez un numéro, et quelqu'un va vous répondre. Mais ensuite c'est trop peu, c'est peut-être trop difficile et long pour le public, a tranché l'Ordre des psychologues du Québec.

Nous sommes dans le huitième mois de cette pandémie, la CAQ parle de son annonce modeste comme un premier pas, un premier pas.

Où est le plan global pour répondre à tous les besoins?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, oui, certainement, avec plaisir, M. le Président, parce qu'effectivement mon collègue... Hier, le ministre délégué à la Santé a été très, très clair, ça fait partie d'un plan d'ensemble que l'on a préparé depuis très longtemps. Puis je vais vous nommer, pas une mesure, M. le Président, pas deux, pas trois, pas quatre, cinq mesures qui ont été annoncées dans les six derniers mois relativement à la santé mentale. Et à chaque fois... Celle d'hier vient compléter des mesures qui ont déjà été annoncées. J'en ai parlé plusieurs fois en Chambre, M. le Président, au cours des dernières semaines. Alors, qu'on ne vienne pas nous dire que la santé mentale, ce n'est pas important pour nous. On le sait, que c'est important. On le sait, que la santé mentale est mise à mal pour toute la clientèle québécoise, particulièrement... et c'est pour ça qu'on est venus compléter un pan de cette stratégie-là avec l'annonce qui a été faite hier sur la question des jeunes. Mais on va continuer à y penser.

Alors, de penser qu'on fait des petites mesures, lorsqu'on fait... on met 25 millions spécifiquement pour les jeunes, M. le Président... Je pense que c'est de voir qu'on a vraiment une vision à long terme pour la santé mentale.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : M. le Président, nous avons une proposition qui va avoir un impact instant, et réel, et en pérennité : l'implantation d'un programme d'accès universel à la psychothérapie, une solution structurante pour le long terme. Le mot «psychologue» ne sort pas, de toute évidence, de la bouche du ministre ou du ministre responsable. Ce gouvernement est-il prêt à investir dans notre idée, dans la santé mentale des Québécois pour aujourd'hui et pour demain?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, je pense aussi, M. le Président, qu'il est important de réaliser ce que mon collègue le ministre a expliqué hier. Ce n'est pas uniquement une question d'ajouter des psychologues. La santé mentale, c'est beaucoup plus large que ça, puis il y a un éventail de professionnels. Hier, par exemple, on a parlé des travailleurs sociaux, qu'il était important d'impliquer, des éducateurs, des psychoéducateurs, des psychologues, des infirmières et même des pédopsychiatres. Alors donc, de ramener cette discussion-là, M. le Président, uniquement aux psychologues, je pense que c'est, justement, faire preuve de vision... Les psychologues peuvent aider, mais il y a une foule d'autres professionnels, qui ont été nommés par mon collègue, qui sont importants.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : M. le Président, le premier ministre demande des propositions. Nous avons une proposition très claire : toujours radio silence. Nous avons aussi demandé un mandat d'initiative pour que tout le monde participe dans la confection des solutions en pérennité.

Est-ce que le gouvernement et les membres de la CAQ vont refuser cette main tendue une deuxième fois, qu'on discute ensemble, qu'on cherche des solutions ensemble, qu'on soit au rendez-vous pour les Québécois en détresse?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Très bien. Mais je pense que cet exercice-là de collaboration avec l'opposition a été, justement, commencé par mon collègue au cours des derniers mois. Je l'ai reflété... Écoutez, M. le Président, les gens peuvent dire, de l'autre côté, que ça n'existe pas, j'ai même des preuves que ça a été fait, que des gens, dont l'opposition, ont participé à ces discussions-là. Alors, à ce moment-là, M. le Président, on peut bien réfuter ces arguments-là, aujourd'hui, mais le ministre délégué à la Santé a eu des discussions avec l'opposition pour leur faire part de ce qui s'en venait, qu'on comprenait l'urgence de la situation.

Et, je le répète, M. le Président, cinq mesures ont été annoncées depuis le début de la pandémie. Alors, si ce n'est pas pour dire qu'on prend ça au sérieux...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : On le fait exactement, ce qu'on avait dit qu'on allait faire.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur le taux de décrochage scolaire

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, M. le Président. Au mois de mai dernier, le ministre de l'Éducation nous parlait de différents scénarios pour la rentrée scolaire 2020. Il était aussi question d'école en alternance. Alors, dès le mois de mai, on a parlé avec des experts, qui nous disaient : Il y a un danger avec l'école en alternance, ça se peut fortement aussi qu'un enfant qui est laissé seul à la maison puisse décrocher.

Et on a présenté ce tableau ici, en Chambre, je l'ai présenté. On voit clairement qu'à partir du secondaire III, IV et V c'est majoritairement là que les jeunes, malheureusement, décrochent.

Alors, ce que nous, on a proposé au ministre, c'est la chose suivante : l'école en alternance, oui, mais assurons-nous de mettre les enfants, si on divise les groupes, dans un autre lieu. Et Égide Royer avait même souligné cette approche en disant qu'effectivement, au lieu d'avoir un jeune tout seul chez lui, c'est préférable d'avoir un autre groupe dans un autre lieu, on a même dit les musées, et faisons appel aux jeunes étudiants à l'université qui veulent devenir des futurs enseignants. Aujourd'hui, les experts, encore, sonnent l'alarme et disent qu'il est fort possible que le décrochage va augmenter.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, bien sûr qu'on voudrait que toutes nos écoles soient ouvertes, au moment où on se parle, on voudrait qu'il n'y ait aucune classe fermée puis on voudrait que tous les élèves de secondaire III, IV, V soient à l'école à tous les jours, pas en alternance, mais il y a quelque chose qui s'appelle une pandémie mondiale de COVID qui nous force à prendre beaucoup de mesures sanitaires pour favoriser la distanciation, pour empêcher la propagation, pour garder nos écoles ouvertes pour que nos jeunes y aillent, oui, parfois un jour sur deux, en secondaire III, IV, V, en zone rouge, mais qu'ils aillent à l'école au moins un jour sur deux, qu'ils aient un contact continu, jour après jour, avec leurs enseignants.

C'est important de le mentionner parce que, la journée où les élèves sont à la maison, ils ne sont pas laissés à eux-mêmes, ils ne sont pas abandonnés en disant : Fais de la lecture. Ils gardent leurs horaires, ils continuent d'avoir des cours. Si à 8 h 30 ils avaient un cours de mathématiques, et qu'ils ne sont pas à l'école ce jour-là, bien, à 8 h 30, il y a un cours de mathématiques, ils voient leurs collègues, ils ont un contact avec leurs enseignants, ils sont capables d'échanger avec eux. Ce n'est pas comme être à l'école, mais c'est le plus proche de ce qu'on peut faire, considérant la situation pandémique, parce qu'on veut garder nos écoles ouvertes, on veut garder le lien essentiel...

Le Président : En terminant.

M. Roberge : ...enseignant-élève.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Au mois de mai, on vous l'a dit. Un jeune qui est à la maison, bien, c'est possible, là, qu'il n'ait pas une attention à 100 % avec son cours. Le ministre a été lui-même enseignant, il sait qu'on se promène dans sa classe puis qu'on s'assure, ah! est-ce que l'enfant est resté pris à un problème en particulier, on a une attention plus particulière quand on est dans une classe avec quelqu'un. Et ce n'est pas par hasard que même encore aujourd'hui Égide Royer dit : Faisons appel aux étudiants pour, justement, apporter ce support. Ayons une vision long terme, s'il vous plaît.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je vous ai parlé de la mesure en alternance qu'on a adoptée suite à des discussions, des recommandations de la Santé publique pour contrôler la pandémie et garder nos écoles ouvertes. Ceci dit, on ne fait pas de mur-à-mur. Les élèves en secondaire III, IV, V qui sont en classe spéciale, en classe d'adaptation, vont à l'école à tous les jours, ne sont pas touchés par cette mesure d'école en alternance. Les élèves qui ont des besoins vraiment particuliers, qui ont un plan d'intervention et qui vraiment pourraient subir des préjudices en allant à l'école seulement un jour sur deux parce qu'ils ont besoin d'un soutien plus continu, bien, ils vont à l'école à tous les jours, ils ne font pas l'alternance, même s'ils sont en III, IV, V, en zone rouge. Donc, on prend garde à faire le maximum et à ne pas appliquer partout du mur-à-mur à une solution qui pourrait, bien sûr...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : M. le Président, le meilleur filet de sécurité, ça reste l'éducation. Le tableau que je présente au ministre, là, c'était avant la pandémie. Là, maintenant, les gens le disent, là, malheureusement ça se peut qu'on reste plus longtemps dans cette pandémie mondiale. Or, nous, là, notre responsabilité, c'est de s'assurer dès maintenant d'avoir un plan, un plan de contingence, un plan de long terme, et s'assurer que... Si nos enseignants, les psychologues, les psychoéducateurs nous disent : Le risque de décrochage scolaire est vraiment grand, faisons quelque chose maintenant.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on ne fait pas quelque chose maintenant, on fait quelque chose depuis six mois. On n'a pas attendu, là, cette proposition-là. Puis on sait bien que les jeunes ont besoin d'un suivi, ils ont besoin d'accéder aux services des professionnels. On en a embauché 1 000 en deux ans, 1 000 professionnels de plus en deux ans. Regardez dans les précédents gouvernements, là, dans ceux qui viennent se lever pour nous dire quoi faire, là, eux autres, ils en mettaient à la porte, des professionnels, plus de 260 en une seule année, je pense que c'est 2016 ou 2017. On en a embauché 1 000 dans les deux dernières années. Alors, je pense qu'on fait vraiment le maximum et un peu plus pour prendre soin de nos élèves puis s'assurer de tous les mener vers la réussite.

• (10 h 30) •

Le Président : Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

Position du premier ministre concernant le fédéralisme

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, il y a 25 ans aujourd'hui, nous étions la veille d'une journée historique pour le Québec. Les militants du Parti québécois et des millions de Québécois ont alors fait le choix de se donner un nouveau pays, le Québec.

Nous sommes toujours d'avis que le Québec est capable et doit, dans son intérêt national, prendre seul toutes les décisions nécessaires à son développement pour notre grande nation, ce qui veut dire notamment voter toutes nos lois, percevoir l'ensemble de nos taxes et nos impôts, signer nos traités internationaux. Près de 50 % des Québécois ont fait ce choix responsable et normal pour un peuple.

L'option du Non l'ayant remporté de justesse et de façon fort questionnable, rappelons-le, nous pouvons légitimement nous questionner sur la réponse du Canada aux aspirations du Québec depuis ce temps.

Comme l'Assemblée nationale étant le lieu privilégié des grands débats sur l'avenir du Québec, je pose cette question : Est-ce que le premier ministre peut m'indiquer ce qui a changé, depuis 25 ans, dans la relation entre le Canada et le Québec et qui justifie maintenant son allégeance au fédéralisme canadien?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, j'aurais presque le goût de retourner la question au chef du Parti québécois : Qu'est-ce qui a changé pour justifier le fait que le nouveau chef du PQ s'engage à faire un référendum dans le prochain mandat? Qu'est-ce que qui est changé? Qu'est-ce que qui fait qu'il pense qu'il y a une majorité de Québécois qui vont appuyer le Oui dans un référendum?

Il y a une majorité de Québécois qui n'en veulent pas, de l'indépendance du Québec. Je sais que ça fait mal au chef parlementaire du Parti québécois, mais c'est ça, la situation. Il y a d'autres moyens de faire des gains. Il a raison, le Parti libéral, pendant 15 ans, n'a pas exigé d'avoir des pouvoirs de plus. On voit que la nouvelle cheffe, là, essaie de faire un virage, qui n'est pas très crédible. Mais M. le Président, le choix qu'on fait, nous, c'est de faire des gains avec Ottawa. On va insister sur les pouvoirs en immigration, puis déjà on a commencé à faire des gains, mais on veut en faire plus. On veut faire des gains du côté de la langue pour que la loi 101 s'applique aux compagnies à charte fédérale, il y a déjà des partis au fédéral qui sont d'accord avec nous.

Donc, c'est bien beau, de critiquer notre plan, mais c'est quoi, son plan? Faire un référendum? Faire la souveraineté? Faire un projet que la majorité des Québécois ne veulent pas? Se faire dire non une troisième fois? Quelle mauvaise idée!

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Ce qui est une mauvaise idée, c'est d'abandonner ses convictions pour le pouvoir. M. le Président, le premier ministre...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est prêter des intentions. Et surtout, le député de Matane-Matapédia, je sais qu'il est capable de faire plus de hauteur que ça. Alors, je pense que ce serait approprié qu'il retire ces propos-là.

Le Président : Je vais vous demander de poursuivre dans le débat, s'il vous plaît. M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Bérubé : Alors, M. le Président, j'ai posé la question de l'adhésion fédéraliste du premier ministre, il ne veut pas répéter ces termes. Je veux noter ici qu'il est le président du Conseil de la fédération canadienne, créé par le premier ministre Jean Charest. Ce n'est pas tout à fait la Société Saint-Jean-Baptiste. Alors, qu'il s'assume, qu'il s'assume comme fédéraliste. Nous, c'est clair, on est indépendantistes.

Qu'est-ce qui a changé? Est-ce que c'est le pétrole envoyé en Alberta? C'est l'ingérence dans les champs de compétence, le refus de protéger la langue...

Des voix : ...

Le Président : M. le premier ministre. S'il vous plaît! À vous la parole, maintenant.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je veux paraphraser, là, parce que je n'ai pas en mémoire le texte exact, là, mais René Lévesque disait : Méfiez-vous des politiciens qui regardent le peuple de haut puis qui se disent : Moi, j'ai la vérité, mais le peuple ne comprend pas. Moi, j'ai pris acte, j'ai pris acte de ce que le peuple pense, puis j'invite le chef du Parti québécois à faire la même chose.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition. S'il vous plaît, votre attention à toutes et à tous.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Bon, alors, maintenant, M. le Président, le premier ministre se compare à René Lévesque. On est rendus là.

Je veux lui rapporter ses propres demandes à lui. Rapport d'impôt unique, c'est non. Rapatriement des budgets en culture, c'est non. Transferts en santé, c'est non. Plein contrôle de l'immigration, c'est non. Pendant la COVID, fermeture des frontières, c'est non. Lui, il accepte que le destin du Québec, ce soit de quémander sans arrêt au gouvernement fédéral ce qui nous revient. Il ne pense pas qu'on est capables, nous, le grand peuple québécois, de prendre en main nos affaires pour l'avenir du Québec, qu'on est capables, nous, comme les autres peuples du monde...

Le Président : M. le premier ministre, à vous la parole.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la solution du chef parlementaire du Parti québécois, c'est l'indépendance du Québec, un projet que les Québécois... que la majorité des Québécois ne veulent pas. C'est ça, son plan.

Donc, le nouveau chef du Parti québécois dit : Moi, je le sais, comment je vais faire des gains, je vais faire des gros gains, je vais passer par un référendum. Les Québécois n'en veulent pas. Quand va-t-il comprendre ça?

Le Président : Question principale, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

Protection des travailleurs de la santé

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Plus la pandémie avance, plus on connaît notre adversaire, plus la science nous dit comment le virus se propage. Aujourd'hui, la science nous dit de plus en plus que la transmission par aérosol, c'est de plus en plus probable, et le seul masque qui protège vraiment nos soignantes contre cette menace-là, bien, c'est le fameux N95. Sauf qu'au moment où on se parle, dans nos hôpitaux, dans nos CHSLD, on interdit aux soignantes d'en porter. Même quand les infirmières le paient de leur poche, on leur dit : Non, vous n'avez pas le droit de mettre ça sur votre lieu de travail.

M. le Président, 25 % de nos infections, au printemps, c'étaient des travailleuses dans le réseau de la santé. Il y en a 13 000 qui l'ont attrapé durant la première vague, 2 200 depuis le début de la deuxième vague, et ça continue à grimper. Aujourd'hui, c'est le principe de précaution qu'il faut appliquer. Notre devoir, le devoir du ministre de la Santé, c'est de protéger coûte que coûte ces femmes et ces hommes qui luttent contre la pandémie.

Est-ce que le ministre va leur garantir un N95 à chaque fois qu'ils travaillent avec un...

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, ça fait quelques fois que le député de Gouin revient avec ce point-là, puis j'aimerais clarifier les faits.

Les décisions qui ont été prises concernant les masques N95 pour nos employés ont été faites suite à des recommandations très claires de l'INSPQ, qui sont appuyées par des spécialistes. Et, par ces spécialistes-là, il a été très clair que les masques de protection, en ce moment, qui sont offerts à notre personnel sont appropriés, et non seulement sont appropriés, mais peuvent être préférables que les N95 dans certaines circonstances. Mais par contre il faut bien réaliser que les N95 sont rendus disponibles à notre personnel lorsque la situation l'exige, par exemple lorsqu'il y a des gouttelettes en suspension dans l'air, lors de chirurgies.

Donc, j'aimerais qu'on fasse attention, parce qu'il y a effectivement... et je n'ai pas peur de le dire, M. le Président, il y a des demandes syndicales qui incluent ces demandes-là en ce moment. J'apprécierais que le député de Gouin tienne compte de ce facteur-là. Mais je vous dirais que nous respectons l'opinion des spécialistes, et les masques...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...appropriés sont rendus disponibles au personnel, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le leader du deuxième groupe.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Ce que le ministre de la Santé ne semble pas réaliser, c'est que la science, par définition, ça évolue, et ce qui était vrai au printemps dernier n'est plus vrai aujourd'hui. La science, en ce moment, nous dit : Attention, la transmission par voie aérienne, là, c'est fort probable que ça existe. Le principe de précaution, ce que ça dit, c'est quoi? Ça dit qu'il faut faire tout en notre pouvoir pour minimiser les risques. Nos soignants et nos soignantes, ce n'est pas des gens qui sont jetables, c'est notre armée pour lutter contre la pandémie. Donnez-leur des N95.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, lorsque le député de Gouin... Puis je respecte le fait, là, qu'il revienne avec ce point-là parce qu'on a la même préoccupation, M. le Président, c'est la protection de nos employés. Alors, qu'il revienne avec ce sujet-là, encore une fois, je n'ai aucun problème avec ça. Puis je le répète, là, lorsqu'on dit «la science», la science, il faut faire attention... Et, nous, ce que nous avons fait, c'est que nous avons demandé des opinions spécifiques à l'INSPQ pour être capables de s'appuyer sur des décisions qui viennent de la base scientifique. Les opinions sont aussi récentes qu'en date du 22 septembre. Alors, on ne parle pas de quelque chose qui a été discuté il y a plusieurs, plusieurs mois, on parle d'opinions récentes qui nous permettent de dire qu'en ce moment les masques qui sont offerts à nos employés sont les bons masques, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le leader du deuxième groupe.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Le ministre de la Santé préfère, encore une fois, suivre l'exemple du premier ministre et pointer les syndicats. Moi, je lui parle de sa responsabilité à lui.

Il ne semble pas certain, il semble hésiter à reconnaître que la transmission par voie aérienne, c'est un risque de plus en plus documenté par la science. Ça fait qu'on va prendre la question par ce bout-là. Est-ce que le ministre de la Santé reconnaît que la transmission par voie aérienne est un risque réel?

• (10 h 40) •

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Bien, écoutez, M. le Président, si le député de Gouin pense qu'il a une meilleure connaissance que la Santé publique, il a une meilleure connaissance que l'INSPQ, que tous les spécialistes qu'on a consultés au cours des derniers mois, s'il pense que son opinion est meilleure puis il veut prendre un des points, par exemple que le virus se répand de telle façon, la réponse, c'est : M. le Président, on le voit, que ce virus-là est excessivement difficile à contrôler. Nous, je le répète, on se fie aux experts, à la science pour être capables de prendre les bonnes décisions, et, quand les masques N95 sont exigés par les scientifiques, on les rend disponibles...

Le Président : En terminant.

M. Dubé : ...on a tout fait pour le faire, M. le Président. Merci.

Le Président : Question principale, M. le député de Robert-Baldwin.

Mesures d'aide directe aux entreprises

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : M. le Président, je l'ai dit mardi, je le répète aujourd'hui, nous vivons présentement la pire crise économique des dernières décennies, crise qui a été déclenchée par une crise sanitaire, elle aussi, sans parallèle. Aux États-Unis, le Dr Fauci — notre cheffe l'a dit — l'a dit hier, qu'il n'y aura pas de retour à la normale avant 2022, un scénario semblable en Europe. Pas de retour à la normale jusqu'en 2022, ce n'est pas banal, comme dirait l'autre.

À la lueur de ces nouvelles, les entrepreneurs doivent pouvoir compter sur une certaine prévisibilité. Ce n'est pas viable pour les entreprises de se voir imposer des fermetures aux deux semaines, M. le Président.

Alors, est-ce que la CAQ peut arrêter de gérer au jour le jour et offrir un plan de soutien aux entreprises du Québec qui est prévisible, qui est intégré et qui est rigoureux?

Le Président : Mme la ministre déléguée au Développement régional.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. J'ai de la misère à saisir, là, la question de mon collègue de Robert-Baldwin quand il dit qu'on ne prévoit pas. Depuis six mois que nous sommes en crise sanitaire sans précédent, il vient de le mentionner lui-même. Comment voulez-vous qu'on prévoie plus que ce qu'on fait actuellement quand, au niveau économique, au niveau sanitaire, on évolue en même temps que la crise? On est agiles, c'est une qualité recherchée dans le contexte. On gère la crise, tant au niveau sanitaire qu'au niveau économique.

Au niveau économique, on a mis en place plusieurs programmes. Je ne les énumérerai pas de nouveau parce qu'il les connaît, là. Je pense qu'il va commencer à les connaître, là, ces programmes-là. C'est important, ce qu'on fait actuellement. On le fait pour les entrepreneurs, pour les entreprises. On est préoccupés par le sort des entreprises, M. le Président. Notre objectif est de les soutenir en fonction de l'évolution de la crise sanitaire.

Cette crise sanitaire qui a des répercussions sur l'économie, on la gère, on la soutient, on soutient particulièrement les entrepreneurs partout au Québec. Entre autres, il nous reste encore beaucoup de fonds via le PACTE, le programme pour soutenir les entreprises avec Investissement Québec, et, au niveau des MRC...

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Ça s'appelle gérer l'incertitude. Ça se fait, ça doit se faire, chose que ce gouvernement ne semble pas être capable de faire. Les entrepreneurs désirent une meilleure prévisibilité. Pas une prévisibilité absolue, bien sûr, il n'y en a pas, mais une meilleure prévisibilité des programmes. Ce sont les programmes qui ne sont pas prévisibles, M. le Président, et les changer, les règles du jeu, à chaque deux semaines, ça ne fonctionne pas non plus.

Pouvez-vous, s'il vous plaît, offrir une certaine prévisibilité à vos programmes?

Le Président : Mme la ministre déléguée au Développement régional.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. Je vais répéter à mon collègue de Robert-Baldwin les différents programmes, qui sont prévisibles, puisque les règles sont claires. Les zones évoluent, on ajuste nos programmes en conséquence.

Le programme pour les restaurateurs, les propriétaires de gym, on l'a ajusté en fonction des zones. Pour les zones rouges, les gens reçoivent l'aide, s'ils le désirent, s'ils en ont besoin, nous sommes là. Nous avons mis en place ce programme rapidement pour l'ajuster à la question de la crise sanitaire et nous continuons de le faire. Puis nous avons même accéléré la procédure d'acceptation des demandes pour s'ajuster aux besoins rapides des entrepreneurs.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : M. le Président, je ne veux pas rire, mais ça tombe bien, la réponse, parce qu'hier, hier nous avons appris que plusieurs entreprises qui avaient fait une demande pour recevoir l'aide des fonds du nouveau programme pour les entreprises en zone rouge, 27 jours plus tard, n'avaient rien reçu encore, pas un sou, 27 jours plus tard, de ce programme excellent du gouvernement.

Alors, comment le gouvernement peut-il expliquer l'échec de ce programme, qui devait pourtant venir en aide rapidement aux entreprises?

Le Président : Mme la ministre déléguée au Développement économique régional.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. Je suis curieuse de voir où prend le député de Robert‑Baldwin ses analyses puis ses évaluations de programmes lorsqu'on vient à peine de lancer le programme d'accompagnement pour les zones rouges, les restaurateurs et les gyms. Comment peut-il avoir ces résultats lorsque nous, nous avons l'information inverse? Les entrepreneurs, les propriétaires de restaurant sont satisfaits du programme, ils en bénéficient et l'utilisent, ce programme. Nous sommes là pour les accompagner, nous sommes à l'écoute des entrepreneurs. Nous ajustons le tir en fonction de la crise sanitaire sans précédent que nous traversons puis nous allons continuer de le faire jusqu'au bout, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le député de Rimouski.

Mesures pour lutter contre la maltraitance envers les aînés

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. 80 000, c'est le nombre de personnes aînées à domicile qui ont déclaré, au Québec, en 2019, avoir subi de la maltraitance, et cette étude ne prend pas en compte les personnes vivant en CHSLD. Voilà des données pour chiffrer le phénomène de la maltraitance chez les aînés, tirées d'une étude de l'Institut de la statistique du Québec commandée par le ministre de la Santé, et ces chiffres sont inquiétants. 60 000 personnes aînées ont déclaré avoir été victimes de maltraitance psychologique, ça veut dire du chantage affectif, de l'infantilisation, de l'humiliation, de menaces, et ça peut venir de personnes très proches. 10 000 ont déclaré avoir été victimes de maltraitance physique.

Quand j'ai lu le titre, 80 000 aînés au Québec qui ont vécu de la maltraitance, je n'étais pas fier, pas fier d'une société qui accepte ça. J'aimerais ça avoir la réaction du ministre de la Santé, qui a commandé l'étude.

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, encore une fois, j'apprécie beaucoup la question du député de Rimouski puis sa sensibilité aux aînés, qu'il partage avec ma collègue la ministre des Ainés et des Proches aidants. Pour nous, M. le Président, la maltraitance envers les aînés, c'est tolérance zéro. Puis je pense que j'aimerais rappeler, juste à titre d'exemple, pour le député, que la ministre s'est engagée à revoir toute la maltraitance de façon très rapide. Mais, à titre d'exemple concret, à titre d'exemple concret, j'aimerais rappeler aussi le projet de loi n° 52, qui vise à revoir, en fait, tout le processus de plaintes pour les résidents, qui est certainement un élément contre la maltraitance. Puis rappelez-vous comment ce... comment l'objectif, pardon, de ce projet de loi là, c'était de s'assurer que les personnes peuvent référer à quelqu'un d'indépendant dans leur CHSLD ou dans leur RPA. Et on a mis en place un projet de loi, puis j'espère qu'il sera accepté dans les prochains jours, parce que c'est la façon d'être en amont de la maltraitance, s'assurer que nos aînés sont bien traités dans les résidences pour aînés.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : J'aimerais rappeler au ministre les 80 000... Je l'ai dit en début de question, c'est 80 000 personnes qui ne vivent pas dans les CHSLD, 80 000 personnes aînées qui déclarent avoir subi de la maltraitance. Je n'ose imaginer... Puis ça, c'est en 2019. Imaginez en 2020, quand ces aînés-là étaient confinés, qu'ils étaient dépendants de tout le monde. Je n'ose imaginer ces chiffres. On parle de plus de 80 000? Je suis sûr qu'on parle du double. On doit faire quelque chose rapidement, aujourd'hui.

La proposition que je fais à court terme : Est-ce qu'on pourrait mettre tous les moyens nécessaires pour lancer une grande campagne contre la maltraitance avec les...

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, moi, je vais vous dire, j'ai énormément confiance dans notre ministre qui est responsable des Aînés et des Proches aidants parce qu'elle en a fait le combat de sa vie. Je donnais à titre d'exemple le projet de loi n° 52. J'aimerais aussi de dire qu'il y a plusieurs campagnes que l'on fait, présentement, sur la maltraitance. Je pense qu'on a invité récemment tous les aînés, puis je pense qu'on va le faire encore plus avec l'adoption du projet de loi, d'être capables de contacter facilement la nouvelle ligne que nous avons mise en place. Et je le répète pour les gens qui nous écoutent, parce qu'il y en a, des aînés qui pourraient vouloir utiliser le numéro de téléphone, qui est le 1 888 489-ABUS, a-b-u-s. Et je pense que c'est important de voir...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Rimouski.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Je peux comprendre le combat de sa vie, mais on parle de 80 000 personnes qui ne vivent pas en CHSLD, en 2019, qui disent avoir subi de la maltraitance. Imaginez si on rajoute ceux qui sont en CHSLD, imaginez ceux qui vivent la pandémie, c'est fou. Il faut agir vite, là. Il faut arrêter de dire que c'est des combats de notre vie, il faut bouger vite.

Je vous propose une campagne rapide, on investit rapidement aujourd'hui. Puis pourquoi pas créer le protecteur des aînés?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, moi, je prends la suggestion du député de Rimouski parce je sais qu'il a vraiment cette cause-là à coeur. On est prêts à travailler avec l'opposition. J'en ai parlé avec ma collègue la ministre responsable, on est prêts à travailler avec vous, parce que je sais que c'est une cause qui vous tient à coeur. Et, s'il faut faire des campagnes encore plus importantes au niveau des aînés, nous n'hésiterons pas à le faire, M. le Président. Puis je veux rassurer le député de Rimouski que, pour nous, la maltraitance des aînés, c'est tolérance zéro, puis on va le faire avec nos actions dans les prochaines semaines. Merci, M. le Président.

• (10 h 50) •

Le Président : Question principale, Mme la députée de Vaudreuil.

Modification du schéma d'aménagement et de
développement de la MRC de Montcalm

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci, M. le Président. C'est un fait bien réel, le gouvernement caquiste a autorisé le schéma de la MRC Montcalm, malgré, entre autres, les avis contraires de trois principaux ministères, des avis qui viennent dire que le schéma ne respecte pas les orientations prévues dans les lois et règlements qui visent à limiter l'étalement urbain. Des experts comme le Pr Pineau indiquent que ce nouvel aménagement est exactement ce qu'on ne doit pas faire. Par cette autorisation, cette décision politique, la ministre des Affaires municipales vient dire oui à l'étalement urbain, créant l'exaspération chez tous les acteurs, sauf la MRC Montcalm et le député de Rousseau.

Mais c'est quoi, l'impact à venir ailleurs au Québec? Pourquoi la ministre cautionne-t-elle l'étalement urbain?

Le Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui, merci, M. le Président. La modification au schéma d'aménagement, qui a été acceptée, a fait l'unanimité, en réalité, des intervenants qui ont été interpelés, MAPAQ, MAMH, ministère de l'Environnement. Et cette décision-là a été... à plusieurs reprises, il y a eu un «back-and-forth», monter, descendre, monter, descendre, justement, pour l'ajuster de manière fine. On est passés, à titre d'exemple, de 40 hectares à 13 hectares autorisés à l'intérieur du schéma d'aménagement.

On réitère également que cette modification-là, elle vise à répondre à des besoins. Il y a des gens qui émettent des besoins, qui déposent un schéma d'aménagement. Ce schéma d'aménagement là est analysé, est contrôlé, est validé et, finalement, est autorisé à un niveau raisonnable.

Alors, oui, on souhaite répondre à des besoins qui émanent, effectivement, de la communauté, des élus locaux, Bien, on ne se le cache pas. Alors, c'est ce qu'on fait. Et ici le schéma, ce n'est pas un dézonage...

Le Président : En terminant.

M. Julien : ...c'est un schéma d'aménagement qui est déposé.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Vaudreuil. Attentifs aux questions et réponses.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : La porte est ouverte, étalez vos besoins. L'attachée politique de la ministre nous dit, et je la cite : «Nous ne sommes plus sur une question d'étalement urbain, mais bien dans du développement régional qui affecte le secteur des Basses-Laurentides et du Bas-Lanaudière.» Fin de la citation. Par sa déclaration, est-ce qu'on doit comprendre que la nouvelle orientation du gouvernement caquiste, c'est le dézonage, le déboisement, les routes à ne plus finir, l'abandon des cibles GES? On vous laisse annoncer le reste.

Le Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui, merci, M. le Président. Bien, effectivement, là, encore là, dans la question, on parle de dézonage. Il n'y a pas de dézonage ici, c'est une modification au schéma d'aménagement. En réalité, là, tous les pouvoirs à la CPTAQ, là, sont maintenus. C'est eux, en réalité, qui vont regarder le dossier de manière pragmatique, de manière rigoureuse pour voir éventuellement s'il y a dézonage. Et, dans tous les cas de figure...

Je prends ici, parce que moi, je suis à la ville de Québec, les terrains des Soeurs de la Charité. Bien, on regarde, en fin de compte, il y a une proposition de la proposition de la ville de Québec sur un dézonage dans le schéma d'aménagement, une proposition. On la regarde, puis mon collègue de Jean-Lesage nous interpelle réglementaire par rapport à ses préoccupations, puis on l'écoute parce qu'il représente la communauté visée. Alors, c'est fait de manière pragmatique.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de La Pinière.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, dans La Presse, le maire Sainte-Anne-des-Plaines, M. Guy Charbonneau, pose la bonne question : «On se demande s'il n'y a pas des gens qui ont des intérêts particuliers.» Hier, la ministre a dit, et je cite : «...la MRC de Montcalm a vraiment bien fait son travail...» Donc, tous les maires qui se font dire non ont mal travaillé, ils ne sont pas bons.

Alors, pour les aider, quand la ministre va-t-elle publier son guide de contournement des lois et règlements du Québec?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Non, je pense que non. Et ça...

Des voix : ...

Le Président : Non, je comprends. S'il vous plaît! Non, non, mais je pense que, M. le député de La Pinière, on ne peut pas laisser entendre ce que vous dites. Alors, cette phrase-là, je vous demander de ne pas utiliser de tels propos, M. le député de La Pinière, ou de retirer ces propos, s'il vous plaît.

M. Barrette : Bon, je vais les retirer.

Le Président : Merci. Non, non, mais ce n'est pas une formulation acceptable. Je pense que c'est bien clair. Non. Et les propos ont été également retirés. Je vous remercie, M. le leader du gouvernement. Et je vais vous demander de poursuivre, s'il vous plaît, il vous restait quatre secondes. Prenez-vous votre quatre secondes, M. le député?

M. Barrette : Leur guide, le guide de, comment dirais-je...

Le Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Bien, écoutez, M. le Président, je n'ai pas eu connaissance de ce guide-là. Il paraît, en réalité, que ce guide-là avait été élaboré précédemment, on n'en a pas donné suite.

De manière claire, là, ce dossier-là, qu'on regarde de manière détaillée, il y a eu des analyses, il y a des dépôts préliminaires, il y a eu, en fin de compte... par tous les ministères et organismes. Justement, on a regardé le dossier puis on est venus le circonscrire aux besoins qui ont été élaborés dans le schéma d'aménagement. Oui, le travail a été bien fait, mais il y en a eu plusieurs versions qui ont été avancées, qui ont évolué pour arriver à l'acceptation sur la base de 13 hectares, 13 hectares, qui ont été analysées par tous les ministères et organismes. À la face même, il n'y a pas de conflit d'intérêts ici, quoi qu'en présume M. le député de La Pinière.

Le Président : En question principale, M. le député de Nelligan.

Rémunération de hauts dirigeants d'Investissement Québec

M. Monsef Derraji

M. Derraji : M. le Président, année après année, Investissement Québec offrait des primes à ses dirigeants, et toujours le rendement était au rendez-vous. Hier, nous avons tous été surpris de voir le ministre de l'Économie et Investissement Québec autoriser des bonis dans une année où le rendement était négatif. Pourtant, le ministre de l'Économie nous avait promis de mettre en place une politique de rémunération variable qui est basée sur le rendement. L'an dernier, une perte nette de 180 millions de dollars et un rendement négatif de 5,1 %. Pourtant, il y a quelqu'un quelque part qui a jugé que c'est très bon, donner 3,6 millions de dollars.

En 2016, le député de Granby disait qu'il était, et je cite, indécent et scandaleux qu'il y ait 3 millions de dollars en prime de rendement chez Investissement Québec, et les rendements, à l'époque, étaient positifs.

Aujourd'hui, M. le Président, est-ce que le député de Granby, toujours, trouve que c'est indécent et scandaleux qu'il y ait 3 millions de dollars en primes de rendement chez Investissement Québec? Est-ce qu'il va travailler avec moi pour rappeler à l'ordre son collègue ministre de l'Économie?

Le Président : Mme la ministre déléguée au Développement économique régional.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. La situation dont parle mon collègue de l'opposition est basée sur un programme strict et rigoureux de rémunération des employés. Il y a eu la transformation d'Investissement Québec au cours de la dernière année. Les programmes, actuellement, sont basés sur les 11 derniers mois de l'année, où il n'y avait pas de pandémie non plus.

La situation qui est occasionnée actuellement par la crise sanitaire commande que les personnes qui sont à l'emploi d'Investissement Québec redoublent d'efforts, travaillent extrêmement fort pour soutenir les entreprises, puis elles sont là pour bien soutenir les entreprises. Puis c'est à partir de ces données-là également qu'on paie les employés, qu'on rémunère puis qu'on donne les bonis. Puis c'est comparable aux autres institutions comparables, qu'on pense aux institutions financières, qu'on pense aux organismes, même, gouvernementaux. C'est des façons de faire, puis les libéraux doivent le connaître, qui sont normales dans ce genre d'organisation.

Donc, il faut penser aux efforts donnés dans ce contexte-là.

Le Président : En terminant.

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : C'est un contexte qui est difficile, donc on le reconnaît.

Le Président : Question principale, M. le député de La Pinière.

Suspension du Programme des personnes réfugiées à l'étranger

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, hier, la ministre de l'Immigration a édicté un décret annonçant la suspension du programme de parrainage pour les organismes communautaires de trois à cinq personnes. M. le Président, au moment où on se parle, ceux qui font bien leur travail, là, hein, se sentent salis par association, parce qu'on le suspend parce qu'il y aurait eu des malversations. C'est correct que la ministre fasse des inspections, des enquêtes. Maintenant, est-ce qu'on soupçonne l'évêché de Montréal d'avoir fait des malversations? La résultante de ça, évidemment, c'est moins d'immigration.

Alors, la question qui se pose actuellement, là : Est-ce que le ministère est incapable de faire son travail à un point tel qu'il faut punir tout le monde parce qu'un petit nombre n'a pas fait les choses correctement? La ministre va-t-elle faire la seule chose, le gros bon sens, qu'il y a à faire : maintenir le programme, qui fait l'envie de tous, à coût nul, et inspecter, enquêter seulement ceux qui sont soupçonnés de malversation?

• (11 heures) •

Le Président : M. le ministre du Travail et de la Solidarité sociale.

M. Jean Boulet

M. Boulet : Merci, M. le Président. Ce programme-là de parrainage collectif, il est essentiel et il contribue à la réputation de terre d'accueil, il permet aussi au Québec de respecter ses engagements humanitaires. Mais c'est un programme qui a été mis en place par le gouvernement précédent, et là il y a eu beaucoup de signalements, de fraudes, d'abus de personnes qui sont en situation, parfois, de vulnérabilité, et donc ça requiert une enquête. Et ce que nous faisons, simplement, c'est de suspendre temporairement ce programme-là, voir à faire enquête, obtenir les conclusions adéquates, mettre en place des recommandations pour s'assurer que ce programme-là, il est efficace et respectueux de la réputation du Québec à l'échelle internationale. Merci, M. le Président.

Le Président : Cela met fin...

Une voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Sans commentaire. Cela met fin à la période de questions et réponses orales.

Motions sans préavis

Nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, à cette étape, je reconnais Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme David : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Mercier, le chef du troisième groupe d'opposition, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que la langue de l'administration publique au Québec est le français et que celle-ci doit être exemplaire;

«Qu'elle souligne qu'il est du devoir de l'administration publique de valoriser et de promouvoir la langue française;

«Qu'elle exige du gouvernement de mettre en oeuvre sans délai, une nouvelle politique linguistique pour les ministères et [les] organismes, dans le respect des droits des Québécoises et des Québécois d'expression anglaise;

«Qu'elle demande au gouvernement de faire preuve d'exemplarité, en donnant au Conseil supérieur de la langue française des ressources additionnelles afin de jouer pleinement son rôle;

«Qu'elle réclame du gouvernement qu'il soutienne la ville de Montréal dans la création d'un poste de commissaire municipal à la langue française;

«Afin de renforcer l'utilisation du français en enseignement supérieur, qu'elle demande au Conseil supérieur de la langue française d'analyser, à tous les trois ans, les politiques linguistiques des collèges et [des] universités, et d'en faire rapport à l'Assemblée nationale;

«Qu'elle demande au gouvernement de mettre tout en oeuvre pour accompagner les établissements d'enseignement supérieur anglophones qui souhaiteraient bonifier leur offre de cours en français et leurs programmes d'immersion en français;

«Qu'elle rappelle que le député de Jacques-Cartier a présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 590, Loi modifiant la Charte de la langue française afin d'instaurer la gratuité des services d'enseignement du français pour toute personne qui réside au Québec;

«Qu'enfin, elle rappelle que le député de Jean-Lesage a présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 690, Loi modifiant la Charte de la langue française afin de préciser qu'elle s'applique aux entreprises privées qui exercent leurs activités dans un champ de compétence fédérale.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Je reconnais, à ce moment-ci...

Des voix : ...

Le Président : Mme la députée de Sherbrooke, la parole vous appartient. S'il vous plaît! Nous sommes attentifs. Mme la députée de Sherbrooke.

Demander au gouvernement de mettre à la disposition du personnel des réseaux de
l'éducation et des services de garde éducatifs à l'enfance de l'équipement de
protection adapté afin de minimiser les impacts des mesures sanitaires
prises dans ces milieux sur le développement des enfants

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je voudrais remercier d'abord les parlementaires pour leur souplesse d'hier, qui a porté fruit.

Donc, je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec le ministre de la Famille, la députée de Saint-Laurent, la députée de Joliette, la députée de Marie-Victorin, et le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale réitère l'importance que le personnel du réseau de l'éducation et des services de garde éducatifs à l'enfance ait accès à de l'équipement de protection adéquat dans le contexte de la pandémie de COVID-19, pour leur propre sécurité ainsi que celle des enfants;

«Qu'elle reconnaisse que le port prolongé du masque par le personnel, bien que nécessaire d'un point de vue de santé publique, peut avoir des impacts sur le développement des enfants, dans la mesure où il entrave l'association des mouvements de la bouche avec la voix de l'adulte, ainsi que la réciprocité des émotions, lesquelles sont reconnues comme nécessaires à l'apprentissage du langage et au développement socioaffectif des jeunes enfants, et encore davantage pour les enfants avec des besoins particuliers;

«Qu'elle rappelle que les enfants passent souvent plus de 35 heures par semaine à l'école ou en service de garde éducatifs à l'enfance, et qu'il importe de minimiser les impacts des mesures sanitaires prises dans ces milieux sur le développement des enfants;

«Qu'elle souligne que Santé Canada a homologué des masques de procédure avec fenêtre transparente;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de mettre à disposition du matériel de protection permettant à la fois de protéger le personnel et de prévenir les impacts du port prolongé du masque sur le développement des enfants, tels que des masques avec fenêtre transparente, pour les travailleurs et travailleuses du milieu de l'éducation et des services de garde éducatifs à l'enfance qui oeuvrent auprès des poupons et des enfants à besoins particuliers.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Le Président : Consentement, sans débat. Je vous demande maintenant vos votes respectifs, en commençant par M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Je reconnais maintenant Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de l'Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale souligne le 25e anniversaire du référendum du 30 octobre 1995 sur l'indépendance du Québec;

«Qu'elle rappelle le taux de participation historique de 93 % des électeurs québécois, ce qui en fait l'un des plus grands succès au monde en matière de démocratie;

«Qu'elle salue l'engagement profond et constant de la nation québécoise de poursuivre son développement et son accession à l'indépendance de la manière la plus pacifique qui soit;

«Qu'elle affirme que la quête d'indépendance du peuple québécois est un projet légitime qui transcende les époques et les générations;

«Qu'elle rappelle la nécessité pour une nation d'avoir le pouvoir exclusif d'adopter toutes ses lois, de prélever tous ses impôts et de conclure tous ses traités afin de veiller aux meilleurs intérêts de sa population et d'agir conformément à ses valeurs;

«Qu'elle affirme qu'en cette époque où la mondialisation doit coexister avec la volonté affirmée de préserver toute la diversité des cultures, des langues et des nations, le projet d'indépendance politique du Québec n'aura jamais été aussi pertinent pour lui permettre de participer pleinement aux débats qui façonnent l'humanité;

«Qu'elle affirme que le Québec est l'une des nations qui a le plus à offrir au monde pour réussir la transition énergétique, développer des énergies vertes, donc lutter contre les changements climatiques;

«Enfin, qu'elle s'engage à déployer toutes les énergies afin que cet aboutissement normal pour la nation normale du Québec, qui "ne pourra pas toujours ne pas arriver", se concrétise à la faveur d'un prochain rendez-vous des Québécois avec leur histoire.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Je reconnais maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Souligner le travail des équipes des unités de soins
intensifs en période de crise sanitaire

M. Dubé : Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement... en fait, une motion unanime, conjointement avec la députée de Maurice-Richard, le leader du deuxième groupe d'opposition, le député des Îles-de-la-Madeleine, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne le travail acharné de nos travailleurs de la santé qui sont au front aux unités de soins intensifs;

«Qu'elle reconnaisse le travail essentiel des équipes des unités de soins intensifs de nos hôpitaux, qui, jour après jour, permet de sauver des vies;

«Qu'elle rappelle que de nombreuses personnes atteintes de la COVID-19 sont aux prises avec des complications et doivent recevoir une plus grande intensité de soins, le plus rapidement possible;

«Qu'elle réitère que le respect des consignes sanitaires émises par la Santé publique permet de diminuer la charge de travail de ce personnel, et que la vie de nombreux citoyens est au coeur de nos efforts collectifs pour continuer d'assurer des soins intensifs de qualité;

«Qu'enfin, l'Assemblée nationale remercie tous les professionnels de nos unités de soins intensifs et reconnaisse leur travail en cette période de crise.»

Merci, M. le Président.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Le Président : Consentement, sans débat. Je vous invite à m'indiquer le vote de vos groupes respectifs. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du deuxième groupe d'opposition?

M. Nadeau-Dubois : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin?

Mme Fournier : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Je reconnais maintenant Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée de Marie-Victorin et le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale réaffirme que le BAPE est une institution dont nous devons être fiers.ères et que depuis sa création en 1978 le Québec est reconnu à travers le monde comme un précurseur en matière de protection de l'environnement;

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que le mandat du BAPE sur le projet GNL-Québec ne lui permet pas d'étudier le projet dans son entièreté en le restreignant uniquement à l'usine de liquéfaction du Saguenay—Lac-Saint-Jean;

«Qu'elle constate qu'un de ses commissaires provient de l'industrie pétrochimique ce qui soulève des soupçons de partialité;

«Qu'elle prenne acte de l'absence d'experts des différents ministères lors de la première partie de la commission du BAPE ce qui laissait le champ libre au promoteur pour répondre seul aux questions citoyennes;

«Qu'elle constate que des employés payés par le promoteur ont déposé un mémoire au même titre que les citoyen.nes;

«Que l'Assemblée nationale [affirme] que la crédibilité du processus est entachée et ainsi, qu'elle demande au gouvernement de mettre fin au BAPE actuel et de recommencer du début le processus d'évaluation environnementale du projet [de] GNL-Québec par le BAPE.» Merci.

• (11 h 10) •

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous en sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission des transports et de l'environnement poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 46, Loi modifiant la Loi sur la conservation du patrimoine naturel et d'autres dispositions, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, ainsi que le mardi 3 novembre 2020, de 10 heures à midi, à la salle du Conseil législatif;

La Commission des finances publiques entreprendra les consultations particulières sur le projet de loi n° 68, Loi visant principalement à permettre l'établissement de régimes de retraite à prestations cibles, aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 1 h 50 min, et de 15 heures à 17 h 25, ainsi que le mardi 3 novembre 2020, de 10 heures à 11 h 35, à la salle Pauline-Marois.

Le Président : Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des travaux des commissions? Consentement.

Pour ma part, je vous avise que la Commission de la santé et des services sociaux se réunira en séance de travail aujourd'hui, à midi, pour une durée de 30 minutes, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de poursuivre les discussions pour statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des Québécois.

Je vous avise également que la Commission des relations avec les citoyens se réunira en séance de travail aujourd'hui, à 13 h 30, pour une durée de 30 minutes, à la salle Pauline-Marois, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse de la pétition concernant l'ajout du trouble développemental de la coordination au formulaire de demande de supplément pour enfant handicapé.

Enfin, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail le mardi 3 novembre, de 11 heures à 11 h 30, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative concernant la détresse psychologique étudiante.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Simplement souligner que, suite à la demande du leader de l'opposition officielle de tenir des séances de travail pour les mandats d'initiative, comme nous nous étions engagés, c'est chose faite, chose due, aujourd'hui et mardi il y en aura.

Le Président : Je vous avise... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Simplement pour lever mon chapeau au leader du gouvernement, M. le Président.

Avis de sanction du projet de loi n° 51

Le Président : Je vous informe qu'il y aura sanction du projet de loi n° 51, Loi visant principalement à améliorer la flexibilité du régime d'assurance parentale afin de favoriser la conciliation famille-travail, aujourd'hui, à 14 heures, au bureau de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi 30 octobre 2020, M. le député de D'Arcy-McGee s'adressera à M. le ministre délégué à la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : La nécessité d'une couverture publique des soins de santé mentale au Québec.

Je vous avise, de plus, que l'interpellation prévue pour le vendredi 6 novembre 2020 portera sur le suivant suivant : Déclin de l'offre, depuis 2018, de nos services de garde éducatifs à l'enfance sous la mauvaise gouverne caquiste. M. le député LaFontaine s'adressera alors à M. le ministre de la Famille.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons passer aux affaires du jour.

Je suspends pour quelques instants. Merci à tous pour votre collaboration.

(Suspension de la séance à 11 h 13)

(Reprise à 11 h 21)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous reprenons les travaux. Aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Caire : Oui, merci, Mme la Présidente. Veuillez appeler l'article 7 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 66

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Donc, à l'article 7 du feuilleton, Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor propose l'adoption du principe du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Alors, je comprends que, Mme la ministre, vous allez débuter, alors je vous cède la parole.

Mme Sonia LeBel

Mme LeBel : Merci, Mme la Présidente. Effectivement, on est rendus aujourd'hui à l'adoption de principe du projet de loi n° 66. Je suis très heureuse d'être rendue à cette étape. On a quand même franchi une belle étape, celle des consultations particulières.

Ce projet de loi, comme vous l'avez mentionné, Mme la Présidente, concerne l'accélération de certains projets d'infrastructure, accélération qui est non seulement pertinente, mais nécessaire pour relancer l'économie, qui est mise à mal, là, par cette pandémie, qui est mondiale, je le rappelle.

Donc, je veux d'entrée de jeu, je pense, c'est important de le faire, remercier tous ceux et celles qui ont contribué en participant aux consultations particulières, en personne ou par dépôt d'un mémoire. Beaucoup d'enjeux, beaucoup de préoccupations, beaucoup d'éléments intéressants, importants ont été soulevés. Et, comme j'ai eu l'occasion de le mentionner pendant les consultations particulières, on va prendre la peine, le plus rapidement possible, naturellement, mais on va prendre la peine d'analyser toutes ces préoccupations-là, ces recommandations qui ont été soulevées par les différents participants, comme je le dis, que ce soit par le biais d'un mémoire ou en personne, pour bonifier ce projet de loi tout en maintenant nos objectifs.

Donc, au total, il y a eu, pendant quatre jours, 26 intervenants qui ont représenté l'industrie de la construction, les nations autochtones, les municipalités, les entreprises ou encore la cause environnementale. Ils ont pris le temps de venir nous faire part de leurs commentaires, leurs recommandations, et tout ça est dans le but d'en bonifier ce projet de loi. C'est un processus qui est essentiel et souvent très instructif. Je suis heureuse de constater qu'en général les groupes sont favorables à l'adoption des mesures pour accéder à la relance économique. Pensons notamment à l'Association de la construction du Québec, l'ACQ, la Fédération des chambres de commerce du Québec, la FCCQ, à l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, et la Fédération québécoise des municipalités, la FQM.

On a l'occasion de le mentionner à plusieurs reprises, mais, je pense, c'est important de toujours recadrer. On est dans une crise sanitaire qui est sans précédent. On nous parlait de gérer l'incertitude, ce matin. C'est exactement ça qu'il faut faire, gérer l'incertitude. Alors, prévoir dans l'incertitude, c'est quand même une tâche colossale, et c'est ce que nous tentons de faire au quotidien. Et on agit sur plusieurs fronts, et ça, sans compromis sur l'environnement, sans compromis par rapport à l'intégrité. On agit rapidement pour maintenir l'économie québécoise sur ses rails et, du même coup, protéger la santé, qui est notre priorité actuellement, préserver la qualité de vie et le pouvoir d'achat de la population. Ce n'est pas une mince tâche, c'est une question d'équilibre entre ces deux objectifs essentiels.

Le premier geste que nous avons posé a été d'investir. On l'a fait au printemps en devançant en 2020‑2021 des investissements de l'ordre de près de 3 milliards de dollars prévus au PQI, premier impact. Je l'ai dit, le projet de loi n° 66 est un des éléments dans un plan global de relance. Le projet de loi n° 66 n'a pas la prétention de porter sur ses épaules la relance économique du Québec, mais il fait partie des outils dont on doit se doter pour atteindre cet objectif. L'objectif du projet de loi est très simple : accélérer des processus sans nuire aux normes existantes. Les projets d'infrastructure retenus sont nettement identifiés dans une liste, et les mesures introduites sont temporaires. Cette liste est fermée et concerne spécifiquement 181 projets en annexe. Ainsi, tout est bien défini, circonscrit, précisé, encadré. Ces projets nous permettront de doter le Québec d'infrastructures modernes, à la hauteur des attentes des citoyens.

Il faut le dire. Non seulement, d'investir dans des infrastructures, ce n'est pas investir dans du béton, c'est investir dans notre économie, c'est investir dans notre avenir. Et c'est une méthode qui a été longtemps éprouvée, qui est encore reconnue comme étant efficace pour relancer l'économie. Vous savez, on a eu, pendant les consultations : 1 $ d'investi dans le monde de la construction, c'est souvent 1,60 $ de retombées pour le Québec. Donc, je pense qu'il faut... À dollar donné, c'est un endroit efficace où agir, surtout dans le contexte actuel que nous vivons, où notre économie a fort besoin de ce soutien.

Donc, ce sont de nouvelles écoles, Mme la Présidente, où des milliers d'enfants et leurs enseignants pourront évoluer dans un cadre agréable, des maisons des aînés à échelle humaine pour nos parents, et nos grands-parents, et nos proches. Ce sont des routes rénovées ou agrandies où tous pourront circuler de façon sécuritaire.

Les distances sont grandes, chez nous, il ne faut pas l'oublier. Oui, il faut travailler sur le transport en commun, il faut travailler sur l'électrification des transports, il faut travailler sur le désengorgement des routes également, mais il ne faut pas oublier que le Québec est grand. Il ne faut pas oublier nos régions, qui ont besoin encore de se déplacer plus que jamais, et il faut y pourvoir. Donc, le réseau routier est au coeur de nos vies, Mme la Présidente, il faut également l'entretenir adéquatement, et ça, même les groupes environnementaux ont consenti ce point.

Ce sont surtout plusieurs projets de transport collectif, il ne faut pas l'oublier, structurants, qui contribueront à la qualité de vie, à la qualité de l'environnement dans nos villes. En tout, c'est 181 projets prioritaires pour nos régions à l'ensemble du Québec qui pourront bénéficier de l'une ou l'autre des mesures d'accélérations. Je le dis souvent : Le projet de loi n° 66 fournit des outils, fournit quatre cartes, une carte en matière d'expropriation... Les quatre axes qui se déclinent, ce sont les quatre axes suivants : l'expropriation, le domaine de l'État, les autorisations environnementales et, finalement, l'urbanisme et l'aménagement du territoire.

Ce que le projet de loi fait, il dit : Voici quatre cartes qui vous permettent d'accélérer votre projet dans ces quatre domaines particuliers. Bien sûr, ce n'est pas les 181 projets qui vont jouer les quatre cartes, ce n'est pas les 181 projets qui ont besoin de ces quatre cartes-là. Ça dépend du projet, ça dépend de l'état d'avancement actuel des projets, parce qu'au moment de l'adoption du projet de loi n° 66, le cas échéant, les projets seront rendus à des étapes différentes. Présentement, les projets continuent de progresser. C'est sûr qu'on ne les a pas stoppés, mais ce qu'on veut faire avec le projet de 66, c'est de leur donner l'opportunité d'accélérer et qu'on arrive beaucoup plus rapidement à la mise en chantier, qui est l'étape où on peut bénéficier du maximum de retombées économiques.

En ce qui a trait à l'expropriation, Mme la Présidente, il y a une procédure allégée afin de libérer plus rapidement les biens nécessaires à la réalisation des projets. On aura l'occasion d'en parler plus en détail à l'étude détaillée. Pour ce qui est de l'occupation du domaine de l'État, certains projets d'infrastructure pourraient être réalisés sans délai sur le domaine de l'État. Pour l'environnement, on vient simplifier, accélérer des procédures administratives d'évaluation tout en conservant les mêmes objectifs de protection environnementale. Il est hors de question de déroger aux normes rigoureuses dont le Québec s'est doté. Il n'est pas question ici d'opposer économie et environnement. Je suis encore convaincue aujourd'hui qu'on peut accélérer des processus, Mme la Présidente, tout en respectant les normes et en respectant l'environnement. Donc, à l'inverse, il ne faut pas non plus opposer environnement à l'économie, surtout pas dans les temps que nous vivons aujourd'hui.

En ce qui concerne l'aménagement et l'urbanisme, certains délais pourraient être révisés pour les projets d'infrastructure identifiés à l'annexe et gérés par un mandataire de l'État, entre autres, ou pour ceux gérés par des organismes publics qui ne sont pas des mandataires de l'État. À titre d'exemple, on parle des... voyons, pardon, des commissions scolaires, des centres de services scolaires, ou des CISSS, ou des CIUSSS, pour les écoles, les maisons des aînés, à titre d'exemple.

• (11 h 30) •

Le projet de loi prévoit aussi des mesures visant à faciliter les paiements aux entreprises pour les contrats et sous-contrats publics pour les projets d'infrastructure identifiés de moins de 20 millions de dollars sur la liste des 181 projets. En bref, on veut s'assurer que les entreprises qui réalisent les travaux découlant de ces projets sont payées dans des délais raisonnables. On a eu beaucoup de commentaires sur ce sujet-là. D'ailleurs, il y a un projet pilote pour informer les gens qui a été mis en place en 2018 et qui se termine l'année prochaine. On aura l'occasion d'analyser les succès de ce projet pilote ou non et de voir comment on peut améliorer les mesures qui ont été mises en place et, par la suite, songer à rendre ces mesures pérennes. Ça faisait partie d'une recommandation de la commission Charbonneau. C'est important pour les entreprises, surtout les petites entreprises, d'avoir des liquidités rapidement pour pouvoir survivre et également pour être capables de ne pas avoir à se tourner vers d'autres sources de financement, qui, des fois, peuvent les mettre dans des situations plus ou moins idéales, disons-le, pour ne pas dire douteuses.

Tout ceci s'articule autour de valeurs et de principes qui sont absolument non négociables, Mme la Présidente. D'ailleurs, l'Autorité des marchés publics, l'organisme indépendant chargé de la surveillance, aura le loisir d'exercer sa pleine compétence. Dans le cadre de la nouvelle loi, l'AMP se verra confier un pouvoir de surveillance accru. Le bureau de l'Inspecteur général de même que la Vérificatrice générale s'en sont déclarés satisfaits. Il y a des ajustements à faire, mais ils s'en sont déclarés satisfaits. Elle aura la responsabilité d'examiner les processus d'adjudication et d'exécution des contrats et sous-contrats publics de tous les projets d'infrastructures identifiés à l'annexe du projet de loi. L'AMP aura le pouvoir d'ordonner à des organismes publics d'apporter des correctifs pour assurer la bonne exécution des contrats. L'AMP pourra même suspendre l'exécution ou résilier les contrats si elle constate des manquements graves.

Naturellement, d'aucuns diraient : Pourquoi donner le pouvoir de suspendre un contrat alors que vous voulez accélérer un projet d'infrastructure? Je pense que ce n'est pas... on ne parle pas de la même chose ici. Si le contrat ne se déroule pas adéquatement, s'il y a de la malversation ou s'il est vicié, je pense qu'il est dans l'intérêt des Québécois que ce contrat-là ne se poursuive pas et que les correctifs nécessaires soient apportés. Encore une fois, je pense qu'au nom de l'intégrité, c'est le principe qui doit prévaloir sur ça. Elle pourra utiliser ses pouvoirs comme elle l'entend, en toute liberté. C'est cette notion d'indépendance là qui est importante et le fait que le seul élément déclencheur, pour l'AMP, de se partir une enquête, sur les 181 projets, c'est d'avoir envie de le faire. La transparence et l'intégrité sont au coeur de la démarche gouvernementale, Mme la Présidente, je vous l'assure, d'autant plus que le projet de loi prévoit maintenant une reddition de comptes semestrielle que chacun des projets bénéficiant des mesures d'accélération... et de leur état d'avancement.

En juin dernier, certains groupes se sont montrés préoccupés au regard de la protection de l'environnement. On a entendu encore certaines doléances, mais on en a tenu compte. Il y a des avancées, des pas en avant qui ont été faits entre les deux moutures du projet de loi. Il y a encore des commentaires dont on va... qu'on va analyser. Le projet de loi prévoit que, le ministre de l'Environnement, par contre, il faut le remettre, là, il faut recadrer les choses, le projet de loi prévoit que le ministre de l'Environnement publiera une reddition de comptes sur des projets bénéficiant des mesures d'accélération. Ça avait été demandé par les groupes, on a introduit cette notion-là dans le projet de loi n° 66. C'était une demande, on y a accédé.

Nous allons même plus loin en accompagnant les promoteurs pendant toute la durée de la réalisation du projet. Donc, oui, on accélère les processus, mais on ne laisse pas tomber l'environnement, les normes environnementales, on va accompagner ces projets-là qui sont accélérés.

Et c'est un des avantages d'avoir une liste clairement ciblée, identifiée. Il n'y a pas de cachettes, là, tout le monde le sait, au Québec présentement, quels sont les 181 projets qui peuvent potentiellement bénéficier des mesures d'accélération en environnement. 181 projets sur des milliers de projets au Québec, 181 projets vers lesquels les projecteurs non seulement de l'AMP et de l'environnement seront tournés, 181 projets que les observateurs environnementalistes pourront avoir dans leur lorgnette, où ils pourront lever les drapeaux rouges au fur et à mesure, et on sera à l'écoute. 181 projets qu'on va suivre pas à pas, c'est l'avantage. Et c'était une demande, d'ailleurs, des groupes environnementaux, avoir une liste fermée, de faire cette accélération-là pour des cas bien précis, et on a répondu à cette demande-là parce qu'elle était pleine de bon sens.

Nous allons même plus loin en accompagnant les promoteurs, je l'ai dit, pendant la durée, puis c'est important, mais le ministre de l'Environnement, vous devez le comprendre, Mme la Présidente, aura tous les pouvoirs nécessaires. La Loi sur la qualité de l'environnement continue de s'appliquer. Le ministre conserve tous ses pouvoirs, en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui existent déjà, et il les conserve eut égard aux 181 projets de la liste. Ainsi, l'ensemble des recours, sanctions, amendes et mesures prévues par la Loi sur la qualité de l'environnement demeurent applicables. Bref, l'objectif est d'accélérer des projets sans compromis sur la protection de l'environnement. Et je demeure convaincue qu'au Québec on peut se permettre, on est capables d'accélérer des processus sur 181 projets au maximum et ainsi arriver à nos fins tout en protégeant la qualité de l'environnement.

Tout comme mes collègues, j'ai aussi entendu certains enjeux environnementaux, je l'ai mentionné tantôt, qui ont été encore soulevés, entre autres par la Vérificatrice générale, l'Ordre des ingénieurs et différents autres groupes environnementaux qui sont venus nous entretenir. J'ai donc demandé à mon équipe d'analyser ce qu'il était possible d'améliorer, à l'intérieur du projet de loi n° 66, pour s'assurer encore plus et rassurer que nous ne nuisons pas aux normes environnementales, tout en maintenant l'objectif d'accélérer les processus.

Mme la Présidente, avec le projet de loi n° 66, notre objectif est très clair : stimuler l'économie en accélérant des projets d'infrastructure comme des écoles, des maisons des aînés, des projets de transport, notamment. Notre gouvernement fait preuve d'ouverture et de souplesse dans les moyens pour y parvenir. On est dans une situation exceptionnelle, on a besoin de mesures exceptionnelles. Nous devons adopter un projet de loi qui atteint cet objectif, Mme la Présidente, tout en respectant les attentes de nos concitoyens, notamment en matière d'environnement et d'intégrité. Nous devons agir sur deux fronts, il faut le rappeler : combattre le virus et renforcer notre économie. Ce projet de loi est un geste fort afin de minimiser les effets négatifs de la pandémie et doter le Québec d'infrastructures modernes. Je compte sur mes collègues parlementaires pour y travailler de façon constructive. Et je dois dire, Mme la Présidente, que, jusqu'à présent, c'est ce que j'ai constaté pendant les consultations particulières. Innovons, modernisons nos façons de faire dans l'intérêt supérieur de notre nation. Remettons-nous au travail, Mme la Présidente, parce qu'il est temps d'agir, les Québécois ont hâte que ces projets aillent de l'avant. Alors, je propose l'adoption du principe. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi n° 66? Oui, M. le député de La Pinière, la parole est à vous.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de saluer, en premier lieu, la présidente du Conseil du trésor, qui, contrairement à d'autres, est venue défendre son projet de loi. C'est très honorable de sa part de le faire. J'aurais pu utiliser : C'est normal de le faire, mais, dans les circonstances actuelles, je dois dire, en plus, honorable, parce qu'elle l'a fait.

Je la remercie aussi de son dernier commentaire. C'est vrai que nous avons eu, à date, des relations globales qui étaient très agréables et constructives. Et je pense que, sur le plan parlementaire, c'est comme ça que ça doit se faire. Ça ne se fait pas toujours de même, mais, dans le cas présent, ça s'est fait comme ça, tout comme je l'avais vécu avec le leader adjoint dans son projet de loi, comme quoi on peut travailler ensemble de façon constructive.

La ministre l'a dit, la présidente du Conseil du trésor, elle l'a dit avec justesse, évidemment, nous sommes à l'étape de l'adoption du principe. Je prends toujours un moment, Mme la Présidente, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, pour un peu mettre les choses en contexte.

Évidemment, l'adoption de principe, c'est le moment où on accepte le principe du projet de loi. En français plus régulier, ça veut dire : Bien oui, là, il y a lieu d'avoir une loi pour ça. Ce n'est pas parfait, ça ne veut pas dire que, quand on vote pour l'adoption de principe, on est pour l'adoption finale, mais ça veut dire que, là, il y a quelque chose qui est présenté, qui a une valeur à laquelle il y a lieu de s'adresser. C'est important que les gens comprennent ça parce que, des fois, ils nous regardent aller puis ils se disent : Comment ça se fait qu'ils disent une chose là, puis une autre chose après?

• (11 h 40) •

Bon, c'est d'autant plus important, Mme la Présidente, que le projet de loi n° 66 est l'évolution du projet de loi n° 61 qui, lui, n'a pas franchi l'étape de l'adoption du principe, très important. Alors, je rappelle à tout le monde, Mme la Présidente, et ça, au bénéfice, au crédit de la présidente du Conseil du trésor, je vous rappelle qu'à l'adoption du principe le projet de loi n° 61 a été battu, arrêté, jeté aux poubelles par l'actuelle présidente du Conseil du trésor. Mais il a été arrêté et battu à plate couture pourquoi? Parce que son prédécesseur avait choisi — et c'est important, là, le mot «principe» — de construire un projet de loi qui, de par la lecture, sa lecture de tous les observateurs compétents du Québec qui sont venus en commissions particulières, publiques, ils sont venus dire que c'était un projet de loi qui était abusif, abusif, il faut le souligner à grands traits, abusif en matière de pouvoir excessif que l'ancien président du Conseil du trésor se donnait et donnait à l'État.

Je vais rappeler, parce qu'il faut le rappeler, que le président du Conseil du trésor, en fin de point de presse, lorsqu'il a présenté son projet de loi n° 61, avait évoqué, avait espéré — puis s'était probablement échappé, mais des fois, quand on s'échappe, on dit la vérité — espéré que les dispositions de 61 soient permanentes. Alors, le sapin n'a pas passé. Tout le monde s'est levé, et ici, au salon bleu, nous avons arrêté un des projets de loi... Puis, écoutez, je n'ai pas une expérience de 100 ans, là, d'abord parce que je n'ai pas 100 ans et, deuxièmement, parce que je ne l'aurai pas, jamais. Alors, il a été arrêté, puis c'était la bonne chose à faire. Non, je ne pense pas que je vais l'avoir, là, vous pouvez rire, mais je ne pense pas que je vais me rendre là. Bien, je le sais, on ne sait jamais, mais disons que je me repose, j'appuie ma réflexion, bien, tu sais, ma conclusion de mon expérience professionnelle. Vous ne pouvez pas contester ça. Alors... Puis je ne demanderai pas à mes collègues s'ils le souhaitent, mais je ne pense pas qu'ils le souhaitent.

Des voix : ...

M. Barrette : Non, je ne leur ai pas demandé. Ils ont dit non, mais ils aimeraient ça pareil.

Des voix : ...

M. Barrette : Non plus? Bon. Au contraire? Bon, bien, il y en a un au moins qui serait content. Alors, de l'histoire que, moi, je connais, on n'a jamais vu un projet de loi aussi abusif que ça.

Bon, alors, quand je vois aujourd'hui la présidente du Conseil du trésor se présenter devant nous avec une nouvelle mouture, ce n'est pas simplement une nouvelle mouture, c'est un désaveu de ce qu'avait fait le président du Conseil du trésor précédent. Mais, comme je lui ai dit si souvent en consultation : Oui, mais elle fait partie d'un gouvernement, hein? Il y a quelqu'un, en quelque part, qui a laissé passer ça. Quand on écrit un projet de loi, les gens ne savent pas ça, mais c'est débattu, là. Dans le gouvernement, il y a un comité de législation, il y a des experts qui viennent dire des choses. Puis je soupçonne, Mme la Présidente, je soupçonne qu'au Comité de législation... je n'en ai pas la preuve, mais le Comité de législation, c'est censé être une entité d'experts légistes neutres vis-à-vis le corpus législatif, ils ont comme rôle, eux autres, là, de dire : Faites attention, là, ce que vous écrivez dans tel paragraphe, tel chapitre de votre projet de loi, ça va à l'encontre de telle chose, ça ouvre les portes à d'autre chose, ça pourrait susciter tel débat, et ainsi de suite. Je soupçonne le Comité de législation d'avoir dit : Faites attention, votre projet de loi est abusif. Et, Mme la Présidente, il a été déposé pareil. Ce n'est pas rien, ça, ce n'est pas rien. Je ne vois pas de comité de législation, dans un gouvernement, ne pas avoir levé certains drapeaux, ne pas avoir exprimé certaines réserves face à 61. Bon, on arrive à 66. Donc, comme je le disais, le mérite revient à la présidente du Conseil du trésor. Elle a nettoyé ce qui était inacceptable de 61, et on la salue pour ça.

Maintenant, dans les consultations de 66, on a appris quelque chose de 61 d'additionnel. C'est une variante de l'abus, et je m'explique. Et c'est resté dans 66. C'est peut-être la tache principale, si on veut regarder ça de cet angle-là, de 66.

Toutes les Premières Nations qui sont venues nous voir, ils sont trois groupes qui sont venus nous voir, ils sont venus nous dire d'une seule voix, d'une seule voix qu'elles n'ont pas été consultées adéquatement, selon les règles en place actuellement, pour 66. Évidemment, je n'ai pas raté l'occasion de poser la question : Oui, mais, quand il y a eu 61, avez-vous été consultés? La réponse a été : Non, moins que 66. 66, ce n'était pas adéquat, et, 61, c'était pire. Alors là, ces gens-là étaient relativement insultés, ils se sont sentis méprisés, parce qu'il y a des règles qui sont établies, au Québec, dans nos relations avec les Premières Nations, et ces règles-là, manifestement, selon leur point de vue, et j'ai tendance à leur donner raison, n'ont pas été respectées.

Ce matin, on m'a reproché d'utiliser un mot méchant, «contournement». Bien là, c'est ce qu'on a fait, mais, Mme la Présidente, je ne le reprononcerai pas ici parce que... mais, vous savez, je le trouve très approprié, parce que «contournement», ça demeure un terme de voirie, alors... on peut contourner des routes, des obstacles, des lois. Mais apparemment, au salon bleu, un tel terme est mal reçu. C'est quand même extraordinaire. Mais c'est la vie dans laquelle on vit au salon bleu du gouvernement du Québec, du Parlement du Québec, pas juste le gouvernement, on est plusieurs parlementaires ici. Bon.

Alors, ça, c'est pour les Premières Nations, et on y reviendra un petit peu plus tard, mais c'est d'autant plus important, Mme la Présidente, parce que c'est sûr que les Premières Nations sont venues exprimer leur insatisfaction sur la base de la procédure, et on les comprend, mais elles sont quand même venues critiquer le projet de loi sur son essence ou, du moins, une partie des ingrédients du projet de loi, à savoir toute la question environnementale.

Bon, allons maintenant au coeur du sujet, là, qui est 66. On a reçu 24 groupes, Mme la Présidente, 24, en réalité 26, parce que deux des groupes sont venus ensemble. En fait, il y a quatre groupes qui sont venus en paires. Donc, on a reçu 26 groupes qui sont venus s'exprimer et exprimer leur satisfaction et insatisfaction par rapport au projet de loi n° 66.

Comme la ministre a fait ce qu'elle devait faire, on comprend que la présidente du Conseil du trésor, compte tenu de sa carrière professionnelle, avocate, procureur, commission Charbonneau et maintenant politique, il y a une ligne, là, réputationnelle qu'elle a souhaité sans aucun doute ne pas se voir entachée. J'aurais fait la même chose. Alors, nettoyage de 66... de 61, pardon, pour arriver à 66.

Et là elle nous dépose un projet de loi pour lequel 26 groupes viennent, et elle nous dit, elle en est contente, je la comprends, que ça a été reçu favorablement. Attention, attention, ce n'est pas compliqué, Mme la Présidente, là, c'est un projet de loi qui est essentiellement bipolaire, au sens de deux pôles. Alors, n'importe qui qui est venu nous voir, sans exception, qui est un donneur d'ouvrage est venu avec des louanges dithyrambiques. Bien, c'est sûr. Puis, à l'autre bout, il n'y avait que des gens qui avaient un intérêt environnemental. Bien, 100 % des gens qui sont venus ont émis des critiques plus moins importantes.

Il y a une chose qui est vraie : il n'y a personne qui a contesté la validité de la relance économique. D'ailleurs, on n'a pas entendu personne dans les oppositions, nous inclus, critiquer le fait que ça avait un impact de relance économique. Il y a une chose qui est importante, Mme la Présidente, c'est l'histoire qui est en cours ici. Comment on peut avoir une chose rose et moins rose ou même pas rose du tout?

• (11 h 50) •

Je l'ai dit, là, 66 découle de 61, c'est 61 nettoyé. Quand on a présenté 61, là, c'était la fin du monde : pas de 61, pas de relance économique, pas de 61, catastrophe au Québec, à un point tel que le premier ministre, tout le monde le sait ici, a fait le tour de toutes les régions du Québec pendant l'été en prononçant ces mots-là — moi, j'ai des gens qui les ont entendus en personne : Le Parti libéral, et particulièrement Gaétan Barrette, empêche la relance économique du Québec en empêchant le 61 de passer. Bon, évidemment que, quand il se promenait d'une région à l'autre, il oubliait de dire que tout le monde était contre, sauf les donneurs d'ouvrage. Il oubliait ça. Je le mentionne pour montrer à quel point il y a un élément politique là-dedans. Et ce qui m'amuse beaucoup, puis je vous le dis, ça m'amuse, Mme la Présidente, on vient d'entendre, on vient d'entendre la présidente du Conseil du trésor nous dire : Les projets sont en cours. Au printemps puis cet été : Les projets sont arrêtés. Rendu au mois d'octobre : Les projets sont en cours. Qui dit vrai? Ou plutôt qui fait de la politique? Ou plutôt qui tente d'influencer d'autres personnes?

Seigneur! que j'aurais pu utiliser un mot non parlementaire ici. Regardez, là, j'ai réfléchi puis je ne l'ai pas dit. C'est pour vous, Mme la Présidente, je ne voulais pas vous déranger, mais Dieu sait si j'aurais pu en utiliser plusieurs, et des synonymes, tout autant non parlementaires les uns que les autres. Mais, non, je me suis retenu. Mais c'est ça qui s'est passé pareil, Mme la Présidente. Cet été, là, au printemps et en été, ça a été la danse, le concert, c'était tellement bruyant qu'à Saint-Lambert ils chialaient contre le bruit — c'est une caricature — de : Ils arrêtent le développement économique du Québec pendant une crise sanitaire. Et la présidente du Conseil du trésor nous dit aujourd'hui que les projets sont tous en cours. En cours. En cours, j'imagine, ce n'est pas devant un juge, ça doit vouloir dire «en train de se faire faire». C'est quand même extraordinaire, n'est-ce pas, Mme la Présidente? Alors, non, comme je le disais moi-même au printemps dans certains points de presse dynamiques, il n'y a aucun projet là-dedans, là, qui était arrêté, zéro, je ne retiens rien, aucun, et c'est confirmé aujourd'hui. Alors, à un moment donné, on peut se demander à quoi ça sert, cette affaire-là. Pourquoi passons-nous tant de temps au Parlement pour un projet de loi qui n'est pas nécessaire? Et je vous dirais, Mme la Présidente, qu'à peu près tout le monde est venu nous dire qu'il n'était pas nécessaire et, à certains égards, il était nuisible. J'y reviendrai un petit peu plus tard dans ma présentation.

Maintenant qu'on a établi ça... Puis je vais prendre un exemple parce que c'est celui-là que je prends très, très souvent, là, puis c'est bien important. Mme la Présidente, pour lancer un projet aussi simple qu'une maison des aînés, ça ne prend qu'une seule décision, une seule, une seule : le nombre de lits de la maison des aînés. C'est tout. Monsieur madame le, la présidente du centre intégré de santé et de services sociaux de la région X, vous avez l'autorisation de construire une maison des aînés de 48 places — c'est toujours un multiple de ça — à Saint-Quelque-Chose, sur votre territoire, pour 48 places. C'est normé, c'est tant. Grosso modo, c'est 400 000 $ par place. Voici votre budget, go! C'est terminé. Terminé. La lettre a un paragraphe, un seul, pas deux, pas trois... Ah! Bien oui, il y en a deux : Veuillez recevoir, monsieur, madame la présidente, l'expression de... C'est vrai, il y a deux paragraphes. C'est tout. Ça prend juste ça. Puis savez-vous quoi, Mme la Présidente? Bien, ça a été fait, au printemps, tout le monde le sait. Je me suis amusé, moi, à appeler tous les CISSS du Québec et les CIUSSS : Puis, comment ça avance, votre maison? Bien, ça avance, on a acquis nos terrains, on sait où ça va être, on a commencé les plans et devis, et ainsi de suite. Pas besoin d'un projet de loi pour accélérer ça, pas besoin.

Les écoles, c'est la même chose, Mme la Présidente. Au moment où on se parle, les projets n'avancent pas. Pas parce qu'il n'y a pas la loi n° 66, ce n'est pas pour ça, parce qu'il y a — on va qualifier ça poliment ainsi — des débats entre les commissions scolaires et les villes, parce que, même si le centre de services, qui a remplacé, avec la loi n° 40, la commission scolaire, a le pouvoir d'exproprier, ce n'est pas toujours aisé, d'exproprier. Ce n'est pas toujours simple, d'arriver dans une ville puis de dire... Puis je vais prendre l'exemple de mon collègue de La Peltrie. Le centre de services vient dans sa ville puis dit au maire : Bien là, je vais prendre ton parc puis je vais en faire une école. Oui, bien, c'est parce que les gens qui vivent autour du parc, ils disent : Minute, là, on a un parc, nous autres là, là, expropriez d'autre chose. Oui, mais, les autres choses, c'est parce que c'est peut-être des habitations où du monde reste dedans. Comme quoi la vie n'est pas simple, même si on donne un pouvoir. Et c'est ce qui fait qu'actuellement, dans le monde scolaire, tous les merveilleux projets qu'on a dans la loi n° 66, projet de loi n° 66, bien, ils n'avancent pas; pas parce que le projet de loi n'a pas été adopté, ils n'avancent pas parce que localement, politiquement, ce n'est pas si simple que ça, ce n'est pas si simple que ça.

Alors là, on continue puis on se dit : Bien, coudon, pourquoi on fait ça? Bien, évidemment, c'est pour les routes. C'est évident, c'est pour les routes. Tous les autres sujets, là, c'est simple comme bonjour, simple, simple, simple. En santé, c'est simple, il y a 81 projets. 81. Il y en a 39 en éducation. Il y en a 52 dans la voirie, il y en a huit dans ce qu'on appelle la SQI. Je vous les nomme, Mme la Présidente — il y en a un chez vous, je pense : palais de justice, poste de police, des affaires de même. Bon, ça prend... Pourquoi qu'on a besoin d'une loi pour faire ça, on a besoin d'une loi pour certains projets de voirie? En fait, ce n'est pas vrai qu'on a besoin d'une loi, on n'en a pas besoin, mais le projet de loi n° 66, il est fait pour ça. Et, de l'aveu même de la ministre, c'est une dizaine de projets, une dizaine, puis probablement même pas 10 sur les 52 de la voirie, sur les 181 du projet de loi. Aïe! C'est quelque chose en titi, là! On fait une loi essentiellement pour 10 projets spécifiques. On va y revenir.

Je fais un pas de recul. La ministre nous l'a dit à l'instant, là, pour elle... Puis là j'ai apprécié le commentaire qu'elle avait fait parce que c'est une nuance importante. Son prédécesseur, ainsi que le premier ministre, au printemps, ce n'est pas compliqué, la relance économique dépendait de ça. C'était ça, la relance économique. Bien, on sait tous, là, tous ceux qui sont un peu familiers avec l'économie, qui suivent ça même de loin, savent que la relance économique, ce n'est pas que les infrastructures, d'une part, en réalité, c'est une fraction d'un programme de relance économique. Et, dans le cas présent, c'est une petite fraction de la relance économique. Et on attend toujours, on en parle un peu plus ces jours-ci, on attend toujours un vrai plan de relance économique.

Ça fait que, là, le discours a changé, là aussi. C'était tout ou rien, là, c'était ça, juste ça. Mais là on commence à mettre d'autre chose. On le voit dans les médias, là, la relance économique, il y a d'autre chose, là, il y a des mines, il y a ci, il y a ça, mais il y a aussi les infrastructures. C'est vrai que c'est quand même... ça a un effet positif dans la relance économique. Manifestement, pas partout au Québec, plus dans certains comtés qui ont une couleur confortable, bon, attention, mais peut-être moins que d'autres, ça dépend, on ne sait pas, c'est selon l'observation, l'appréciation de l'observateur, mais c'est ça qu'on a, là, actuellement, on a des projets qui sont ciblés d'une façon que je qualifierai d'intéressée, on va dire ça comme ça. Voilà. Alors, la ministre nous dit un certain nombre de choses, elle nous dit que son projet de loi n'oppose pas l'économie à l'environnement, que son projet de loi est basé sur quatre grands axes, on va y revenir. Et même elle, quand elle prend des exemples, elle l'a fait à l'instant, là, elle prend des exemples routiers, de déplacement, des régions. On va faire le tour de tout ça, O.K.?

• (12 heures) •

Alors, Mme la Présidente, on va rentrer dans le dossier. On va y aller selon ses axes, à la ministre, et on va décortiquer ça un peu. Je vais commencer par le premier. Et là je vais saluer le travail de la ministre. Pour 61, j'avais déposé un amendement très précis, et je peux vous dire d'entrée de jeu que je vais maintenir ma position. J'ai déposé un amendement sur 61 qui a été intégré partiellement dans 66, et l'amendement que j'ai déposé traitait des pouvoirs de l'Autorité des marchés publics. La raison était très simple, je mets les choses en contexte pour ceux qui nous écoutent.

À Montréal et à Laval, on a une entité qui s'appelle, pour chacune de ces deux villes-là, le BIG, le bureau d'investigation générale. Ces deux BIG là ont des pouvoirs. Le BIG, par exemple, à Montréal a un pouvoir d'inspection, de surveillance, d'enquête de tout contrat public sur le territoire de l'île de Montréal, c'est comme ça que c'est. Mais il y a des contrats, Mme la Présidente, là, que, sur 61, j'ai regardé ça puis j'ai dit : Bien non, des contrats, il y en a ailleurs. Il y en a à Québec, il y en a à Lévis, il y en a à Trois-Rivières, il y en a à Sept-Îles, il y en a à Rouyn‑Noranda. Comment ça se fait que, dans une province qui a vécu la commission Charbonneau, qui a émis des recommandations qui allaient dans le sens de la création d'un BIG, qui a été créé... comment ça se fait que, dans notre province, on segmente cet intérêt-là en territoires? Pourquoi on souhaite surveiller des contrats publics pour éviter et la collusion et la corruption à Montréal et à Laval, puis pourquoi on ne veut pas faire ça ailleurs? Est-ce qu'on considère que la collusion et la corruption sont des maladies qui n'ont contaminé que Montréal et Laval? Bien, à sa face même, la réponse, évidemment, c'est non. Alors, il y a lieu d'avoir une entité qui puisse faire la même chose sur le reste du territoire du Québec.

Or, il y a une entité qui a été créée récemment, qui est l'AMP, et, dans 61, j'avais déposé un amendement par lequel je souhaitais que l'AMP, qui a le devoir, je dirais, qui a le mandat de faire ce travail-là sur tout le territoire du Québec, à l'extérieur de Montréal et de Laval, puisse le faire avec la même autorité, donc, avec les mêmes leviers. C'est simple, puis je pense que c'est sensé.

Alors, la ministre, la présidente du Conseil du trésor a acquiescé à cette demande-là et elle a introduit dans le projet de loi ces pouvoirs-là mais incomplètement. Je m'explique.

Quand moi, j'ai déposé mon amendement, c'était dans un esprit global et permanent. C'est important. «Global», bon, on s'entend, ce que ça veut dire. Dans le cas présent, c'est partout en dehors de Montréal et de Laval. Parfait. Mais «permanent», c'est ça que ça veut dire, là, permanent : à la suite de la commission Charbonneau, Mme la Présidente, le BIG, là, il n'a pas eu un mandat temporaire, il est là pour toujours, même chose à Laval. Alors, pourquoi ce ne serait pas le cas ailleurs? Un, les pouvoirs. Deux, permanents.

Or, dans 66, les pouvoirs sont temporaires. Pourquoi? Parce que le projet de loi est un projet de loi fini dans la portée et dans le temps. La ministre l'a répété, là, puis ce n'est pas un reproche que je fais, la ministre l'a reporté... l'a mentionné à des dizaines de reprises. Elle l'a dit, là : Ce projet de loi là existe temporairement, sur une période de temps x, cinq ans. Après cinq ans, il y a une date de péremption, là, ça ne s'applique plus. Tout ce qui est dans le projet de loi dure cinq ans et a une portée limitée, j'insiste, là, limitée aux 181 projets. Je n'ai pas souhaité que l'AMP ait des pouvoirs similaires au BIG seulement pour 181 projets et seulement pour cinq ans.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, que, dans l'étude détaillée, nous aurons à déposer des amendements. D'abord, je vais encore une fois la remercier d'avoir fait ce pas-là, mais je vais demander le pas complet, c'est-à-dire que les pouvoirs accrus de l'AMP ne soient pas limités aux 181 projets mais soient étendus à la grandeur du Québec, hors Montréal, hors Québec... Laval, pardon, et qu'ils soient permanents. Ça tombe sous le sens. Je pense que ce serait une erreur, et une faiblesse, et une porte ouverte, oui, potentiellement, à l'intensification de plus de collusion, corruption dans le Québec, je le pense. Alors, ce dossier-là, là, on va le pousser jusqu'au bout.

La ministre nous a dit tantôt que la Vérificatrice générale était bien d'accord, elle avait regardé ça puis elle était satisfaite. Non, non. Elle a émis des réserves, et a émis des réserves qui sont les mêmes que j'avais exprimées quand j'avais demandé les mêmes... ces pouvoirs-là pour l'AMP. Les réserves sont les suivantes, et c'est très important, Mme la Présidente : Le BIG n'a pas besoin de déclencheur pour débarquer sur un chantier et faire son enquête, ses vérifications, et ainsi de suite. Elle n'a besoin de rien, elle est autonome, elle n'a pas besoin de signalement. Elle peut débarquer... Et d'ailleurs le BIG, au 66... 61, pardon, et ils sont revenus le dire au 66, leur pouvoir de dissuasion dépend essentiellement de ça. Un, ils sont bons, mais ils peuvent venir sans déclencheur. Ils n'ont même pas besoin d'un coup de téléphone anonyme, ils n'ont pas besoin d'un article de journal, ils n'ont besoin de rien. Ils regardent ça, là, puis ils se disent : J'ai vu passer un camion, là, puis... Ils l'ont raconté comme ça. À un moment donné, ils font des filatures. Ils peuvent débarquer n'importe quand. Ça, c'est très dissuasif.

Alors, la Vérificatrice générale l'a dit, ça, c'est une faiblesse, parce que ce n'est pas clair dans le texte de loi actuel, 66, que le déclenchement n'ait besoin de rien. Alors, ça, on va se battre là-dessus, c'est bien clair. Puis je pense que tout le monde qui nous écoute va être d'accord avec ça.

L'autre élément sur l'AMP, Mme la Présidente, c'est qu'il n'est pas clair dans le projet de loi n° 66 que l'AMP puisse débarquer aussi dans les portions de contrats qui sont d'ordre municipal. 66 est un projet de loi qui traite de contrats donnés par l'État. Or, un contrat donné par l'État, ce n'est pas la même juridiction qu'un contrat donné par une ville. Mais un contrat donné par l'État peut avoir des connexions avec des contrats de sous-traitants donnés par du municipal.

• (12 h 10) •

Je donne encore une fois le même exemple. Dans les 181 projets, il y a l'hôpital de Vaudreuil. L'hôpital de Vaudreuil, Mme la Présidente, que vous connaissez, c'est un coin de la région de Montréal que vous connaissez bien, je pense, bien, il est à la jonction de deux autoroutes sur un terrain contaminé, impropre à la culture, sur lequel un hôpital va être construit après décontamination, hein? Alors, ça, je dis ça, Mme la Présidente, pour le bénéfice de la ministre des Affaires municipales. Ce qu'elle fait actuellement, là, dans Montcalm, ce n'est pas la même affaire que Vaudreuil. Dans Montcalm, là, vous et moi mangeons, là, des légumes qui viennent de là-bas, et à Vaudreuil c'est une ancienne station d'essence contaminée, là, on ne va pas là pique-niquer, là, pas la même affaire. Mais apparemment qu'elle n'a pas compris ça. Mais ça, c'est une autre chose. Mais, Mme la Présidente, à Vaudreuil, après décontamination, il y a un hôpital qui va se construire. Il est dans le cham. Il n'y a pas d'égout, il n'y a pas d'eau, il n'y a pas de voie d'accès, il n'y a pas d'électricité, il n'y a rien de ça, là, il n'y a rien. C'est un terrain vague en friche. Ce n'est même pas beau. Alors, Mme la Présidente, il y aura donc des contrats municipaux qui vont être donnés en lien — obligatoirement, on ne peut pas avoir un hôpital sans égout, là — avec la construction de l'hôpital. Bien, dans l'état actuel du projet de loi, même la Vérificatrice générale le souhaite, ce n'est pas clair, là... En fait, en réalité, ils ne pourront pas, l'AMP, débarquer dans la partie municipale pour faire ces enquêtes. Moi, je pense que c'est important, parce qu'il va y avoir de la voirie là-dedans.

Et il y a un groupe qui est venu nous voir, Mme la Présidente, l'association des camionneurs en vrac. Vrac, on sait ce que ça veut dire, là, dans la voirie, c'est des camions qui amènent la terre et l'asphalte et qui retirent les matières qui doivent être extraites. Ce monde-là sont venus nous dire qu'actuellement, là, il y en avait à la tonne, de la collusion et de la corruption, et qu'il y aurait moyen d'arrêter ça si on ramenait certaines provisions qui étaient en vigueur précédemment et qui ont été annulées à cause d'un jugement. Ce n'est pas le gouvernement, c'est un jugement. Il y a donc lieu de s'adresser à ça, et on va le faire.

Je vois que j'ai deux collègues qui sont très intéressés. Moi, je suis très content qu'ils soient intéressés et qu'ils me suivent avec assiduité. Et je vois avec joie, vous n'avez pas idée comment ça me fait plaisir... Alors, Mme la Présidente, l'AMP, c'est ça, les éléments à propos desquels on va se battre.

Un autre élément, la ministre y a fait référence, la question de l'application prolongée du projet de loi... pardon, du projet pilote sur les paiements rapides. Il y a une cinquantaine de projets, actuellement, qui sont en vigueur, qui font l'objet d'un projet de loi que nous avions commencé, qui fait en sorte que les donneurs d'ouvrage... pas les donneurs d'ouvrage, mais les entrepreneurs qui font les travaux demandés par les demandeurs d'ouvrage sont payés dans les temps requis. Ça, Mme la Présidente, là, rarement un sujet a-t-il fait autant l'unanimité dans une commission parlementaire que ce sujet-là. Et les donneurs d'ouvrage, et les exécutants, et les gens de l'environnement, tout le monde était d'accord pour dire : Ça marche, cette affaire-là. Il faut non seulement la continuer, il faut la pérenniser.

Alors, dans le projet de loi, quelle surprise on a eue quand on a constaté qu'on limitait l'application du projet pilote aux contrats de moins de 20 millions de dollars! Alors, je répète, Mme la Présidente, les donneurs d'ouvrage sont contents, les entrepreneurs sont contents et le réclament, et même les environnementalistes sont d'accord. Alors, pourquoi mettre une limite de moins de 20 millions? L'association des entrepreneurs, des constructeurs de routes sont venus nous dire : Bon, on regarde les projets, là, puis la plupart sont au-dessus de 20 millions. Alors, vous avez ici une mesure qui était un projet pilote, qui l'est encore et qui clairement, là, a des effets bénéfiques pour tout le monde. Bien, normalement, dans un monde normal, Mme la Présidente, savez-vous ce qu'on fait?

Je vais faire un aparté. Puis ça, c'est vrai, là, ce que je vais vous dire. Correct? Je vais vous le dire dans les deux sens. Je vais vous expliquer comment ça marche, la recherche en vaccins, par exemple.

Au moment où on se parle, là, tout le monde veut un vaccin, tout le monde regarde ça puis tout le monde voit l'industrie travailler pour sortir un vaccin, et tout le monde entend dire : Les compagnies font des essais, ont commencé à faire des essais cliniques. Bien, voici comment ça marche : en plein milieu du protocole, si on trouve qu'un vaccin, un candidat vaccin, un qu'on analyse, là, a vraiment des effets secondaires nuls... pas nuls mais importants, le vaccin est déclaré nul, puis c'est fini, là, on arrête le projet pilote. Bien, les recherches, c'est comme un projet pilote, c'est pareil. On se met un protocole, on le suit, puis on l'observe dans son déroulement. Alors, un vaccin, là, pour lequel on verrait des complications importantes à la phase I, à la phase II, on n'ira pas à la phase III, on va arrêter la recherche.

Mais l'inverse est aussi vrai, Mme la Présidente, O.K.? Un vaccin, un médicament pour lequel on fait une analyse, une étude, dont on suit un protocole strict, si on voit, là, qu'il n'y a pas de complication puis qu'il y a un taux de succès de 100 % à chaque étape, il va s'en aller à la commercialisation très, très rapidement, quasiment sur-le-champ. Et ça, j'ai vu ça, sur le plan éthique, on arrête le protocole parce que le taux de succès est tellement extraordinaire qu'on ne peut pas passer à côté de ça.

Alors là, nous, on a un projet pilote sur les paiements rapides, que tout le monde dit que c'est un succès, et on ne le pérennise pas maintenant, on le laisse continuer encore un an puis on ne l'étend pas aux contrats de plus de 20 millions de dollars. C'est, Mme la Présidente, complètement incompréhensible, complètement, là. Il n'y a personne, là, puis je l'ai demandé... À tout le monde à qui j'ai demandé : Bien, voyez-vous, une raison administrative, intellectuelle, procédurale, «name it», là, pourquoi on ne l'étend pas aux plus de 20 millions?, bien, il n'y a personne qui a été capable de répondre à ça. La ministre non plus d'ailleurs. Alors, ça, c'est un autre enjeu que l'on va voir.

Arrive, là, évidemment, la question suivante, je dirais, qui est la question qui tue...

Ah! Je fais un recul parce que j'ai oublié un élément sur ce qui est de l'AMP. L'AMP aurait aussi un rôle de vérification, de reddition de comptes. Ça, c'est un sujet qui, normalement, devrait intéresser... ou du moins qui, dans le passé, lorsqu'ils étaient de notre côté, les intéressait beaucoup, au gouvernement, la reddition de comptes. Bien, j'ai posé une question : Pourquoi on fait une reddition de comptes, dans des projets accélérés, aux six mois? Pourquoi pas aux trois mois? Mme la Présidente, la Vérificatrice générale a posé la même question. Alors, manifestement, là, il y a un enjeu que je pense qui devrait être corrigé à l'étude détaillée.

Bon, ça m'amène, comme je l'ai dit il y a un instant, à la question ou le sujet qui tue. Je pense que c'est un sujet... On ne peut pas parler d'un projet de loi de cet ordre-là sans parler d'environnement. Mme la Présidente, là, l'environnement, là, c'était, les consultations qu'on a eues, magnifique, vraiment magnifique, parce que les gens s'entendaient sur le fond, ne s'entendaient pas sur la forme, soulevaient les mêmes choses, voyaient les mêmes solutions, mais, manifestement, il n'y avait pas de volonté de les appliquer. Et non seulement il n'y avait pas de volonté de les appliquer, mais on regardait ça, là, puis on disait : Coudon, là, c'est quoi cette affaire-là?

Bon, on va commencer par le début, Mme la Présidente, en environnement, là. La quasi-totalité des projets qui sont là n'ont pas d'enjeu environnemental. Ils n'en ont pas. Maisons des aînés, là, refaire un CHSLD, construire une école sur l'île de Montréal et même ailleurs, il n'y a pas vraiment d'enjeu environnemental, là. Ça peut arriver, là, je ne dis pas qu'il n'y en a pas, mais c'est exceptionnel. On se demande donc pourquoi il y a tant d'emphase là-dessus. Je vais y revenir.

Les gens sont venus, là, puis ils ont dit, là, puis même les environnementalistes disent : On est pour les projets, on est pour les accélérer, mais on voudrait que les normes soient respectées. O.K. La ministre répond... Elle l'a dit, ce n'est pas une réponse, elle l'a dit spontanément elle-même dans ses allocutions. Moi aussi... Et sa phrase était : Moi, là, j'en ai contre la procédure, pas contre la norme, je veux accélérer. Puis elle l'a dit encore ce matin, ce n'est pas son intention, de toucher à la norme, à la valeur de l'évaluation environnementale. Bien, le problème, il est exactement là. Il est là. Est-ce que ce qui est proposé touche ou non à la valeur de l'évaluation environnementale? Bien, la réponse, c'est oui, et ça a été bien démontré. Je vais le redémontrer pendant quelques instants.

Mais, Mme la Présidente, ce qui est probablement encore le plus important, c'est que tout le monde, sans exception, même les exaltés, là, les heureux du projet de loi n° 66, sont tous venus nous dire que le problème, pour ce qui est de la durée de procédure des évaluations environnementales, ne vient que d'une seule source : l'État lui-même. Tout le monde. Tout le monde est venu nous dire, avec un exemple différent — ça a fait beaucoup d'exemples, là, après 26 groupes — tout le monde est venu avec un exemple pour nous dire : Bien oui, mais au gouvernement, là, ils n'ont pas la main-d'oeuvre suffisante pour livrer la marchandise, ils n'ont pas la main-d'oeuvre. Bien, si on n'a pas la main-d'oeuvre, c'est sûr que ça prend du temps. Si ça prend du temps, ça veut dire qu'un gouvernement peut considérer que c'est ralenti. Mais si on mettait la main-d'oeuvre, on n'aurait pas besoin de faire ce projet de loi là, et, si on fait le projet de loi, c'est parce qu'il y a quelque chose qu'on ne veut pas faire. C'est simple de même. Quand la Vérificatrice générale, les groupes environnementaux, les municipalités, les entrepreneurs viennent tous nous dire d'une seule voix que ce qu'ils voient sur le terrain, c'est un problème de main-d'oeuvre et qu'on ne s'en occupe pas, je pense qu'il y a lieu de penser, pour n'importe quel observateur, que l'environnement, ce n'est pas une priorité pour ce gouvernement-là. C'est clair.

• (12 h 20) •

Je l'ai dit et je le redis, là, si ce gouvernement, parce qu'il trouve un intérêt dans la défense de la langue française, engage 50 personnes à pied levé pour l'Office québécois de la langue française, dites-moi, quelqu'un, pourquoi il n'y a pas un tel effort d'embauche à l'environnement. Expliquez-moi ça, là, quelqu'un. J'aimerais, là, parce que des fois ça arrive, que des députés se lèvent, du côté gouvernemental, pour défendre le projet de loi de leur ministre. J'aimerais ça qu'il y en ait un ou une qui se lève et qui aborde le dossier exclusivement sur cet angle-là : Pourquoi l'État ne procède-t-il pas à l'embauche appropriée dans le secteur de l'environnement?

On ne l'aura pas, la réponse à ça, Mme la Présidente. On ne l'aura pas, mais c'est la question à laquelle il faut répondre. Tout le monde qui est venu nous voir, tout le monde est venu nous dire : S'il y avait des équipes dédiées au gouvernement pour nous accompagner, on le sait, que ça irait plus vite. Embauche... Est-ce qu'il manque de talents en matière environnementale, biologie, ingénieur, peu importe, est-ce qu'il manque de talent au Québec? Bien non. Le Québec, là, foisonne de talents dans tous les secteurs. Pourquoi on ne les utilise pas? Alors, quand il y a un intérêt politique, comme la langue française, 50 employés d'une shot; quand c'est l'environnement, non, c'est non. Pour le projet de loi n° 61, le BAPE est venu nous dire, puis je vais le répéter jusqu'à tant que j'arrête de faire de la politique, le BAPE a dit : Un BAPE, ça ne dure jamais plus que quatre mois; en moyenne, c'est deux mois. Notre problème, au BAPE, c'est quand on doit avoir à notre disposition les documents requis. Ça prend du temps. La plupart du temps, ils sont mal faits, il faut les faire refaire.

En voulez-vous un exemple, Mme la Présidente? Il y a deux semaines, le BAPE a sommé... a été obligé de sommer le ministère des Transports pour qu'il dépose les grandes lignes de son projet de troisième lien pour qu'il puisse terminer son étude sur le tramway à Québec. Le BAPE, à qui on reproche des délais indus, est obligé d'aller sur la place publique, pour respecter ses délais, de sommer un ministère de déposer les documents requis pour qu'il puisse faire son travail. CQFD, une fois que j'ai dit ça, CQFD, là, sur Twitter, je me suis fait ramasser parce que c'est une autre génération, ce qu'il fallait démontrer. Ceux qui nous écoutent, par exemple, ils sont plus de ma génération, ils savent ce que ça veut dire.

Alors, ici, au moment où on se parle, là, on a un projet de loi qui vise à contourner la turpitude gouvernementale. On est lents parce qu'on n'embauche pas, on ne va pas corriger notre affaire, on va faire une loi pour passer à côté. Simple de même, puis c'est triste en quelque part, parce qu'on a des bonnes règles, qui ne sont pas abusives, qui, si elles sont appliquées, sont à la satisfaction de tous, mais on ne les applique pas. Parce que quoi? On n'embauche pas.

En réalité, Mme la Présidente, je vais vous soumettre cette hypothèse-ci : Est-ce que ça se pourrait qu'on fasse un projet de loi n° 66 en accéléré justement pour ne pas embaucher de façon permanente? On fait ces projets-là, là, puis, après ça, on n'en aura plus besoin. Moi, je pense que ça se peut. Et là, là, je vous dis, je n'ai pas le droit de le faire, là... Le député de La Peltrie ne s'est pas levé, je n'en peux plus, là. Je l'invite à se lever parce qu'au moment où je parle, là, je prête des intentions. Je prête volontairement des intentions. Moi, je suis convaincu qu'on veut juste ne pas embaucher de façon permanente parce que ça coûte de l'argent. À la place, on fait une loi, là, pour accélérer des projets.

La ministre nous l'a dit elle-même, puis je vais vous dire mon opinion là-dessus, Mme la Présidente, vous allez aimer ça : C'est important pour nous autres, c'est des projets qui étaient au PQI. C'est important. On a un gros PQI, 135 milliards de dollars. Malheureusement, elle oublie de nous dire qu'il y en a 48 qui ne sont pas financés. Ce n'est pas à elle de nous le dire, mais elle pourrait nous le rappeler, et je vais le faire, qu'on va avoir un méchant déficit, là. Le 12 novembre, attendez-vous à ce que le déficit, ce ne soit plus 15 milliards, là. Ça va être plus que ça. On va se rapprocher du 20 puis peut-être plus, ce qui annonce qu'il y a des projets qui ne se feront pas dans le futur, ce qui annonce que, hein, dans le futur, il y a peut-être des promesses qui ne seront pas remplies, hein?

C'est pour ça que le ministre des Transports... Sympathique. Je l'aime bien, moi, je m'entends bien avec lui. On a fait une loi ensemble, hein? Il a annoncé le pont de l'île d'Orléans sans budget, le troisième lien sans budget, 48 milliards sur 135 non budgétés. Alors, faisons-les au plus sacrant, là, nos 161 projets, parce que notre vie électorale, là, elle dépend de ça. Mais, aïe! on ne va quand même pas embaucher du monde à l'Environnement pour faire des équipes dédiées. Voyons donc! On est, nous autres, à droite, on n'est pas à gauche, là. Je pense que c'est une mauvaise lecture de la situation actuelle.

Dans l'environnement, Mme la Présidente, je ne veux pas faire un débat environnemental à tout finir, mais tout le monde est venu nous dire, Mme la Présidente, que l'État québécois, c'est transpartisan, a fait des travaux qui nous amènent à la mise en place d'un règlement qui s'appelle le REAFIE. C'est un programme d'évaluation des impacts environnementaux. Ça a été fait pour accélérer les projets en accélérant les procédures. Il devait être mis en application en décembre de cette année. On vient le court-circuiter.

Savez-vous c'est quoi, le REAFIE, Mme la Présidente? Moi, je ne connaissais pas vraiment ça parce que ce n'était pas moi, le... de ce domaine-là. C'est un document exhaustif, 168 pages, dans lequel on vient catégoriser tout ce qui existe comme activités humaines, essentiellement. C'est un dictionnaire, un dictionnaire d'activités humaines : construction, ceci, cela, construction d'immeubles, en ville, pas en ville, routes, autoroutes. Tout est là-dedans, tout, tout, tout est là, hein, traitement des eaux, tout est là. Et là, là, tous les projets et même les sections de projets sont catégorisés, catégorisés risque élevés, risques modérés, risques faibles. Et, pour chacun des risques, il y a une procédure, je vous le donne en mille, accélérée. On a fait un règlement pour accélérer la procédure et là on arrive avec un projet de loi qui vient le court-circuiter. Pourquoi? Là, je veux dire, tout le monde est venu nous dire : Pourquoi vous faites ça? Vous avez déjà ce qu'il faut. La réponse, on l'a eue. Bien, c'est parce que nous autres, là, on veut faire passer les risques modérés à risques faibles. Alors, toute la gang de l'environnement qui a travaillé pendant trois, quatre ans, là, sur le REAFIE, officiellement, viennent d'avoir... ont la réponse, ils ont travaillé pour rien. Le règlement, il va être «by-passé» pour les 181 projets. Écoutez, là, moi, il me semble que ça ne fait pas bien, bien, bien sérieux, là. On avait l'outil qui faisait ce que l'on souhaite et on le court-circuite. Et non seulement on le court-circuite dans son essence, mais, en plus, Mme la Présidente, on vient diminuer les analyses d'impact environnemental.

Je vous prends en témoin puis je prends tous les collègues à témoin, là, si un projet à risque modéré est classé, déclassé, à risque faible et que la procédure qui lui est attachée est appliquée, il y a fort logiquement à penser et à conclure que l'analyse du risque faible est moins exhaustive que le risque modéré. Bien oui, c'est sûr que c'est comme ça. Et il est raisonnable de conclure que, bien là, c'est parce qu'on vient de diminuer la norme. Alors, quand la ministre dit : On ne change pas les normes, c'est vrai. Elle ne change pas la norme du risque modéré de l'analyse, elle ne change pas la norme de l'analyse pour le risque faible, elle ne change pas la norme de l'analyse pour le risque élevé, elle change le projet de catégorie. Ce n'est pas la même affaire. Ce n'est pas la même chose.

• (12 h 30) •

Alors, on a ce qu'il faut. C'est décembre que c'est en application. Le projet de loi, s'il est adopté, a des chances raisonnables d'être adopté en décembre. J'essaie de sonder le regard du leader adjoint, j'imagine qu'il souhaite lui aussi que ce soit adopté en décembre. Je sonde, je sonde, je sonde. Je pense que ça va être en décembre. Alors, en décembre arrive en application officiellement, légalement, le REAFIE qui fait ce que 66 veut faire. Alors, pourquoi? Bien, c'est parce qu'on veut se débarrasser de quelque chose. Ça fait que les environnementalistes qui sont venus nous voir, en quelque part, ils ont raison de chialer. Puis je ne dis pas ça méchamment, chers environnementalistes, là, je voulais dire critiquer. Vous avez le droit de critiquer, parce que c'est critiquable. Ça fait que regardez, là, à date, là, dans tout ce que je vous dis, là, je suis obligé de conclure que le projet de loi n° 66, c'est de la politique et rien de plus que ça. C'est poche.

Ça m'amène à l'autre sujet, l'autre sujet qui est important, l'État... pas l'État, mais les expropriations, les expropriations. Là, Mme la Présidente, là, les expropriations, là, même moi, je trouvais qu'il fallait faire quelque chose avec ça. Ceux qui ont une expertise en expropriation sont tous d'accord. Je ne suis pas un expert, là, je vous le dis, là, je suis loin, loin, loin d'être expert en expropriation, mais le sens commun, en général, est aussi bon qu'un expert — ce n'est pas toujours, mais souvent — ce n'est pas parfait, la Loi sur l'expropriation, puis elle mériterait d'être modernisée, revue, améliorée, revisitée, réécrite, selon bien du monde.

J'avais dit à la ministre, au printemps, j'ai dit : L'expropriation, c'est un problème. Même moi, je trouve qu'il y a des motifs d'expropriation qui sont complètement frivoles. Puis il y a des gens qui sont venus nous dire qu'il y a des gens qui se servaient de la Loi de l'expropriation pour faire de la négociation à fins spéculatives, lucratives, puis c'est vrai, il faut régler ça, il faut régler ça.

Mais il y a une chose qui se passe, dans le projet de loi actuel, qui a été bien expliquée par un avocat expert en expropriation, ils ont... Puis ça, c'est un petit peu compliqué, là, suivez-moi, Mme la Présidente, ce n'est pas comme... tout le monde ne pense pas en ces termes-là. Moi non plus, d'ailleurs. Il y a le législatif, nous autres ici, puis il y a le judiciaire, la cour. L'un n'est pas censé influencer l'autre, on s'entend-u? En français, là, le gouvernement fait des lois, mais ce n'est pas lui qui juge. Le juge juge. On a fait une loi, on a mis une intention, puis le juge juge, puis ce n'est pas le législateur qui vient se mêler de ce que le juge fait. Bien, dans ce projet de loi là, le législateur, il vient se mêler de ce que le juge fait, et ça, ce n'est pas théoriquement constitutionnel. Il y a, Mme la Présidente, actuellement, des causes qui sont devant la cour, ils sont devant un juge, les gens plaident, et le projet de loi n° 66 vient arrêter la procédure.

Que le projet de loi vienne dire : À partir de maintenant, regardez, là, il n'y en a plus de contestation, là, vous avez ci, vous avez ça, là, bon, c'est comme ça, parfait, c'est comme une limite de vitesse. S'il n'y avait pas de limite de vitesse, puis là on en met une... Le législateur a le droit de faire ça, mais, dans notre société de droit, le législateur, normalement, dans notre constitution, n'est pas censé avoir le pouvoir de débarquer à la cour puis dire : Votre cause qui est en train d'être entendue, je l'arrête. C'est pire, Mme la Présidente. Ce n'est pas : Je l'arrête puis je prends position pour un, pour l'autre, ou j'arrive et je décrète une indemnité, non, ce n'est pas une situation où on tranche la poire en deux. Il n'y a plus de poire, c'est fini, ça arrête ça. Alors, ça, c'est anormal.

C'est la même chose pour l'environnement. Dans l'environnement, ce que l'on fait, c'est qu'on dit : On va faire la procédure environnementale comme il faut, comme avant, mais on ne la fait pas dans la même séquence. Normalement, on fait les analyses et on fait la pelleté de terre. Là, c'est : On commence les travaux puis on va faire l'analyse pendant les travaux. Bien, voyons donc! C'est abusif. Ça ne fonctionne pas, ça, là, là.

Alors, on est ici, là, avec des éléments tant dans les expropriations que dans l'environnement, où l'intention qui est amenée devant nous est correcte, mais l'application n'est pas correcte. Et tout le débat est là. C'est un débat d'apparence depuis le début : On a besoin de ça, sans ça le Québec ne se sortira pas... C'était faux. Le Parti libéral, il bloque tout. C'est faux. Les projets sont en cours. On va respecter les normes... Non. Ce n'est pas vrai. Les expropriations, on est corrects, tout le monde est couvert puis il n'y a personne qui va être lésé. Non. Et les experts sont venus nous dire ça.

Alors, quand on regarde ça, Mme la Présidente, là, il y a beaucoup, beaucoup de matière à débattre. C'est clair. Est-ce que, Mme la Présidente, ça fait en sorte qu'il n'y a pas lieu d'accepter le principe du projet de loi? Non, ça ne fait pas ça. On n'est pas dans 61, on n'est pas dans l'abus. Alors, c'est sûr qu'on va être en faveur du principe du projet de loi, qu'il ne faudra pas confondre avec l'acceptation du projet de loi tel qu'il est écrit actuellement.

Puis il y a d'autres éléments sur lesquels je pourrais débattre. Il me reste très peu de temps, il me reste deux minutes, Mme la Présidente, je vais les prendre pareil.

Il y a des projets politiques là-dedans, là. Quand on dit qu'il faut, pour l'économie du Québec, prolonger l'autoroute 25, hein, prolonger l'autoroute 25, et en même temps faire du changement de schéma d'aménagement là où la 25 passe pour, évidemment, amener du monde là, si ça, ce n'est pas... Elle est où, l'urgence, là? Il n'y a pas d'urgence.

Écoutez, Mme la Présidente, on s'est donné des normes, là, et le projet de loi n° 66 devient un outil qui nous permet de passer à côté des normes qu'on s'est données. Ce n'est pas écrit dans le projet de loi, ça. Puis je comprends la ministre, quand on était en consultations particulières : Mon projet de loi, il est fermé, fermé, fermé, ça ne touche à rien d'autre, on ne touchera à rien d'autre. Moi, je vous donne un exemple qui fait que c'est peut-être fermé, mais ça amène à autre chose. On ne pourra pas en débattre, je fais exprès, là, de prendre la dernière minute pour renchérir sur le fait qu'actuellement il y a une connexion entre certains projets de loi et certaines politiques qui sont mises de l'avant de la part du gouvernement. Là, je pense qu'il y en a plein qui se lèveraient... Oui, oui, mais tous les gouvernements font ça. Non. En général, on le fait de façon ouverte. Là, c'est fait de façon silencieuse.

Puis je le sais, là, on l'a vu hier, là, on ne peut pas critiquer le gouvernement, là. Puis je tiens à dire à tout le monde : Je n'annonce pas de désordre citoyen au Québec, je ne fais qu'exprimer une critique. Je le sais, que ça ne se fait pas. Je remercie les gens en face de moi de ne pas monter sur leur table actuellement pour me critiquer en disant que je fais un appel à la révolution. Mais on est ici, Mme la Présidente, vous allez être d'accord, pour débattre. On va débattre. Je pense, je viens de le faire de façon constructive. C'est un projet de loi pour lequel on va voter le principe favorablement, mais on s'attend à ce que le climat que l'on a, constructif, à date, continue, pour le bénéfice du bon peuple.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député.

Je tiens à vous informer que trois débats de fin de séance se tiendront aujourd'hui, à 13 heures, en application de l'ordre spécial. Le premier débat portera sur une question adressée par Mme la députée Vaudreuil à la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation concernant le cautionnement par le gouvernement caquiste de l'étalement urbain dans le dossier du schéma d'aménagement de la MRC de Montcalm. Le deuxième débat portera sur une question adressée par Mme la députée de Saint-Laurent au ministre de l'Éducation concernant les risques importants de décrochage scolaire dus à la pandémie de la COVID-19. Le troisième débat portera sur une question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee au ministre de la Santé et des Services sociaux concernant la nécessité d'agir avec vigueur pour préserver la santé mentale des Québécois.

Et je suis prête à entendre un autre intervenant. M. le député de Mont-Royal—Outremont, la parole est à vous.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Évidemment, je suis très heureux de prendre la parole sur ce projet de loi, le projet de loi sur l'accélération de certains projets d'infrastructures. Et, comme l'a mentionné tout à l'heure le député de La Pinière, nous allons, bien sûr, voter pour le principe. On est en faveur qu'on puisse accélérer les projets d'infrastructures. On est un parti économique, on veut que les choses avancent, on veut créer des emplois. Et, particulièrement en cette période de pandémie, les emplois sont très importants

D'ailleurs, durant la commission parlementaire, j'ai même eu un échange intéressant avec le député de Saint‑Jérôme, qui est un fin statisticien, et qui m'a dit que, même dans une période comme 2018, je crois, 2018, je pense que c'étaient les derniers chiffres, on était dans une forte période économique et, durant cette forte période économique, en 2018, bon, bien, il y a eu, au Québec, plus d'investissements publics que d'investissements privés.

• (12 h 40) •

Je pense qu'on est un des rares États en Amérique du Nord où il y a plus d'investissements publics que d'investissements privés. Alors, c'est bien, d'avoir des investissements publics, mais là imaginez-vous, en période de pandémie, dans quelle situation on se retrouve. On va se retrouver avec, aussi, des investissements encore plus considérables au niveau des investissements publics, et là l'écart entre le privé et le public va certainement, au cours des prochaines années, être important.

Alors, c'est pour ça que, sur le principe, on n'est pas opposés à ce projet de loi. Là où on a certaines réserves, des réserves très importantes, c'est qu'on ne veut pas que ce projet de loi soit la base d'une façon de faire pour le gouvernement pour les prochaines années. On le sait, on a vu plusieurs projets de loi où le gouvernement a remis en cause un certain nombre d'organismes, hein? Il y a eu la Régie de l'énergie dans certains projets de loi, il y a eu le BAPE dans d'autres projets de loi, il y a eu différentes interventions de la part du gouvernement pour dire que certains organismes, là, il fallait leur enlever un petit peu de pouvoir parce que c'est un peu trop contraignant.

Alors, ce projet de loi là, dans le fond, aborde plusieurs choses, la question des paiements, par exemple. Ce qui était scandaleux dans ce projet de loi, en passant, c'est le fait que l'État paie moins vite que les promoteurs privés, que les gens qui, évidemment, font les projets. Alors, ça, je pense que c'est quelque chose qui devra être corrigé au cours des prochaines années si on veut que ça fonctionne mieux. Mais ce projet de loi, essentiellement, je vous dirais qu'il y a deux éléments.

Le premier élément avait été mentionné dans l'ancien projet de loi, le n° 61, par l'ancien président du Conseil du trésor, qui avait, à ce moment-là, parlé de la ligne bleue. Je pense que, quand on parle de clauses relatives à l'expropriation, ce dont on parle, c'est la question de la ligne bleue, et ce qu'on dit, c'est qu'on ne veut pas que les projets de la ligne bleue prennent des années et que ce soit interminable. On veut bien que ça se fasse de façon plus rapide, on veut bien qu'un propriétaire ne fasse pas bloquer tout le processus pendant une longue période, on est tous d'accord avec ça. On est tous d'accord avec ce principe-là, encore faut-il que les processus d'expropriation se fassent d'une façon quand même correcte et non pas une façon injuste.

Et on le sait, c'est quoi, l'enjeu, principalement. Il y a quelques enjeux individuels au niveau du processus d'expropriation, mais un des enjeux importants qui touchent ce projet de loi, c'est ce qu'il se passe aux Galeries d'Anjou, à Montréal. Actuellement, il y a la volonté de la ville de Montréal et de la Société de transport de Montréal de prendre une grande partie du projet de la ligne bleue, de faire une station de métro. Les gens, évidemment, sont tous d'accord qu'il y ait une station de métro aux Galeries d'Anjou. Mais là ils ont rajouté des stationnements incitatifs, qui fait en sorte que, là, il y a beaucoup de plaintes à ce niveau-là, parce que les gens disent : Écoutez, on veut avoir une place quand même pour être capables de stationner. Les marchands disent : Nous, on va perdre de l'argent, on va... il va y avoir un enjeu.

Et ce qui est très sérieux aussi dans ça, c'est qu'au niveau de l'expropriation, au cours de la dernière année, il y a eu des décisions juridiques. On a voulu exproprier une partie d'un centre d'achats qui s'appelle le centre d'achats Le Boulevard, et là, bien, il y a un juge qui a dit : Écoutez, vous ne pouvez pas exproprier une partie d'un centre d'achats, vous devez exproprier tout le centre d'achats. Alors, je pense qu'actuellement, dans le projet de la ligne bleue, qui est un projet très important pour l'est de Montréal, bien, c'est important qu'on essaie, autant que possible, de favoriser les discussions entre les parties.

Ce projet de loi, évidemment, va viser à accélérer les processus d'expropriation. Et une des questions qui s'est posée, pendant ce projet de loi, c'est la question, évidemment, des gens qui ont déjà entamé des procédures. Ces gens-là, la loi va venir défaire ces procédures-là. Là, vous allez avoir une autre plainte comme quoi cette loi-là va être inconstitutionnelle, et là on risque de retarder le projet. C'est ça qui risque de se produire avec ce projet de loi là.

Alors, je pense que la question de l'expropriation, c'est une question qui est délicate. Évidemment, on va devoir changer, possiblement au fil des années, un certain nombre de choses dans ce domaine, mais, essentiellement, en grande partie, je dirais que ça touche, évidemment, la question de l'est de Montréal et des Galeries d'Anjou. Je pense que c'est clair que c'est ce qu'il se passe.

L'autre élément aussi qui est très important, c'est évidemment la question de l'environnement. Et là-dessus, Mme la Présidente, à un moment donné, les commentaires que j'ai entendus de la part d'à peu près tout le monde sur la question environnementale, c'est essentiellement : À un moment donné, il y a une limite. À un moment donné, là, ça suffit.

Je tiens à vous rappeler, moi, j'ai exercé la fonction de ministre de l'Environnement de 2010 à 2012. J'étais là, toutes les entreprises venaient nous voir en nous disant : Écoutez, les règles environnementales, ça prend trop de temps, les décisions sont trop longues, etc. Durant cette période, on avait eu de grandes réunions au ministère pour dire : Il faut être plus efficaces, il faut donner les réponses plus rapides. On avait également travaillé à améliorer de façon importante le niveau de décision. Ça, ça s'est produit entre 2010 et 2012. Par la suite, il y a eu encore des discussions et, suite à ces discussions-là, notre gouvernement, à l'époque, avait présenté un projet de loi dans lequel on avançait les choses de façon plus rapide. Il y avait certaines des demandes qui étaient exigées par le ministère de l'Environnement et qui ont été enlevées. Les projets qui avaient des risques peu importants, bien c'était le «fast track», parce qu'on jugeait que ces projets-là étaient des risques peu importants.

Le gouvernement actuel, le gouvernement de la CAQ arrive au pouvoir et là, le député de La Pinière en a parlé, se met à parler du nouveau règlement en matière d'environnement, qui, là aussi, accélère un certain nombre de choses. Donc, à trois reprises au cours des 10 dernières années, le ministère de l'Environnement a été impliqué et a dû modifier ses règlements. Il y a eu un projet de loi. Tout le monde a dit : Est-ce qu'on peut avancer de façon plus importante et plus rapide? On comprend tous ces éléments-là, mais encore faut-il qu'il faut travailler correctement.

Alors, ce qu'on retrouve actuellement dans ce projet de loi, on retrouve une situation quand même qui est... qui commence à être particulièrement inquiétante, et ça, tout le monde nous l'a dit. En fait, ce que ce projet de loi... ce dont on parle, c'est la... il y a le mot «soustraction» qui a l'air à revenir souvent dans le projet de loi : soustraction de certaines procédures, soustraction de certaines demandes, etc., des soustractions en matière environnementale. Ce projet de loi, donc, permet à ce gouvernement de ne pas adopter et appliquer certaines dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement. Et là, le député de La Pinière en parlait tout à l'heure, on parle du risque modéré, du risque élevé. Il y a toutes sortes de demandes qui sont faites en ce sens-là.

Et, également, il y a une autre chose qui est très importante, dans ce projet de loi là, et qui a fait un peu bondir tout le monde, c'est que... J'avais parlé, tout à l'heure, des pouvoirs qu'on a enlevés à la Régie de l'énergie. Entre autres, bien, on a enlevé certains pouvoirs au BAPE. Le BAPE va devenir... Le mot le dit, Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Le BAPE ne sera plus aussi public qu'il l'est, puisque le BAPE ne sera pas systématiquement tenu de tenir des audiences publiques.

Et je vais simplement prendre un extrait, Mme la Présidente... Évidemment, je n'ai pas besoin de vous dire que les groupes environnementaux sont intervenus. Et les groupes environnementaux avaient le discours, évidemment, à l'effet que c'était inacceptable. Bon. Mais moi, je tiens le discours également de l'Ordre des ingénieurs, qui sont quand même des gens qui ont une fine connaissance des différents dossiers qui sont devant nous.

• (12 h 50) •

En fait, ce qu'ils disent, essentiellement, c'est que «le délai moyen de traitement des dossiers relatifs aux autorisations [...] était, en 2019, de 185 jours. Pourtant, disent-ils, les travaux du Réseau express métropolitain, qui n'ont bénéficié d'aucune mesure d'accélération en matière environnementale, ont été autorisés [...] plus rapidement et l'évaluation du projet par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement s'est terminée [même] en avance.

«En ce sens, l'Ordre [des ingénieurs] croit qu'il pourrait être plus efficace, particulièrement à long terme, d'apporter des améliorations [entre autres] aux processus de travail — et surtout à la quantité de gens qui y travaillent — [au] ministère de l'Environnement. Cet effort aurait [...] l'avantage de pouvoir bénéficier [également pour les] projets d'investissement privé.»

Par contre, en matière environnementale, l'ordre nous dit, c'est «que le principe de précaution milite en faveur d'exiger une autorisation pour tout travail ou [...] toute intervention [particulièrement] dans un milieu humide ou [encore près des milieux hydriques]». Je pense que cela est éminemment clair, Mme la Présidente, et, encore une fois, on a beaucoup de difficultés à comprendre parfois de quelle façon le gouvernement veut intervenir.

Je pense qu'il a été clairement démontré qu'il manquait de personnel au ministère de l'Environnement, qu'il manque de personnel, entre autres, au ministère des Transports, et que le gouvernement doit se concentrer là-dessus. Si, encore une fois, il n'y a pas, au niveau de certaines décisions, s'il y a un temps trop long pour certaines décisions, il est clair que c'est parce que ce n'est pas nécessairement les procédures, ça fait trois fois en 10 ans qu'elles ont été révisées, elles... comme on le disait tout à l'heure, il va y avoir un nouveau règlement du ministre de l'Environnement qui sera en vigueur très bientôt, qui ré-ré-révise ces décisions-là. Alors, je pense que ce n'est pas là qu'est le véritable problème.

Même chose, hier, au niveau de... J'entendais hier, lorsque le maire de Québec est intervenu sur le projet de loi n° 67, il disait : Écoutez, je ne sais pas ce qui retarde actuellement, parce que toutes les autorisations environnementales ont été faites, tout a été fait sur le plan environnemental. Donc là, dans le cas du tramway de Québec, entre autres, ce n'est pas la question environnementale qui est en cause au moment où on se parle.

Alors, c'est clair qu'en termes d'enjeu, Mme la Présidente, certaines de ces mesures d'accélération vont réduire, donc, le caractère transparent, le caractère public, Mme la Présidente, du BAPE, et, entre autres, ça va avoir pour effet d'affaiblir la qualité, la rigueur de certaines évaluations, des impacts environnementaux, nous éloignant de l'approche préventive au profit de la compensation pour des dommages évitables une fois qu'ils sont constatés et une fois, Mme la Présidente, qu'ils sont tout à fait irréversibles.

Alors, je pense que c'est bien important de comprendre, et je pense que tous les députés ici, au niveau de l'opposition, auront l'occasion de le dire à plusieurs reprises, c'est certainement cette faiblesse sur le plan environnemental qui est la cause... une grande partie, en tout cas, de la cause des problèmes de ce projet de loi.

Et j'espère que la présidente du Conseil du trésor aura l'occasion, Mme la Présidente, de, véritablement, être en mesure d'apporter certains correctifs à ce projet de loi, parce que, comme l'a mentionné le député de La Pinière tout à l'heure, sur 181 projets qui sont devant nous, il y en a plusieurs qui n'ont pas besoin nécessairement d'avoir des mesures d'accélération en matière d'environnement, puisque ça va de soi que, quand on construit une école en milieu urbain, à moins qu'on soit sur un terrain contaminé ou qu'il y ait des enjeux particuliers... Mais, en général, ce n'est pas le cas. Donc, la très vaste majorité de ces projets-là n'ont pas, Mme la Présidente, d'élément environnemental qui devrait normalement poser problème. Et, s'ils ne posent pas problème, pourquoi on a besoin d'éliminer certaines de ces procédures-là? Alors, je pense que c'est bien important de pouvoir mentionner ces éléments-là, Mme la Présidente.

Maintenant, dans ce projet de loi qui est devant nous, aussi, il est clair que ce projet de loi contient plusieurs autres éléments. On a parlé, tout à l'heure, des paiements, qui étaient importants. Ces paiements sont... c'est quelque chose qui doit être révisé, et particulièrement je pense qu'on va vouloir, de notre côté, en tout cas, s'assurer que le gouvernement... Imaginez-vous. Le gouvernement parle d'améliorer les paiements, et le premier responsable des retards dans le domaine des paiements, c'est l'État lui-même. C'est l'État qui, depuis quelques années, tous gouvernements confondus, d'ailleurs, retarde le paiement par rapport à certains projets. Alors, c'est clair que ces éléments-là vont devoir être... on va devoir y toucher.

L'autre élément qui est très faible au niveau de ce projet de loi, et là je dois vous le dire, on l'a entendu à plusieurs reprises, c'est toute la question des autochtones. Je pense qu'il y a des projets au pont Mercier, il y a des projets près, entre autres, de la réserve de Kahnawake et il y a d'autres projets également qui ne seront pas loin de certaines réserves, certains territoires, et les autochtones nous ont tous dit qu'ils voulaient avoir des consultations. Ce qu'ils nous ont dit, Mme la Présidente, c'est qu'encore une fois ils n'ont pas été consultés correctement. J'ai l'impression que... et c'est la question que j'ai posée à plusieurs des chefs qui étaient là, j'ai l'impression que le nouveau ministre des Affaires autochtones va devoir, Mme la Présidente, s'occuper de ça, il va falloir qu'il y ait véritablement une consultation particulière au niveau des autochtones. Et, évidemment, comme vous le savez, les relations que nous avons avec les communautés autochtones se font, Mme la Présidente, de nation à nation.

Alors, c'est une volonté qui est, de notre part, en tout cas, d'être constructifs dans ce projet de loi. On veut que ce projet de loi, s'il doit être adopté, soit un projet de loi qui soit le plus juste possible. C'est un projet de loi également qui... on ne veut pas, d'une part, que ce projet de loi porte à une utilisation abusive de la procédure d'expropriation. On ne veut pas que ce projet de loi fasse en sorte qu'il y a une utilisation abusive de certaines dérogations en matière environnementale. Et, encore une fois, il appartiendra aussi au gouvernement à nous expliquer... parce que la présidente du Conseil du trésor nous l'a dit à plusieurs reprises : Écoutez, c'est une fiche qui est figée un peu dans le temps. Il y a 181 projets, il n'y en aura pas d'autre. On est quand même surpris de voir que certains projets, comme par exemple l'agrandissement du Centre hospitalier universitaire à Sherbrooke, une maison des aînés à Rivière-du-Loup, certains projets d'espaces modulaires dans les hôpitaux ont été retirés. J'imagine que la présidente du Conseil du trésor pourra nous expliquer pourquoi exactement certains de ces projets ont été retirés. Mais il est clair que nous allons prendre le temps de bien étudier le projet. Nous voulons entendre les divers groupes... nous avons entendu les divers groupes à ce sujet, et, encore une fois, il y a plusieurs détails qui sont importants et dont on voudra, encore une fois, discuter.

Alors, Mme la Présidente, je termine en disant simplement que nous avons fait déjà une partie de l'exercice et que nous serons présents pour l'étudier, ce projet, article par article. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député.

Alors, je suspends les travaux quelques instants pour permettre de désinfecter et puis pour passer aux débats de fin de séance.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 13 h 3)

Débats de fin de séance

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous sommes aux débats de fin de séance. Tel qu'annoncé précédemment, nous avons trois débats de fin de séance. Et le premier débat portera sur une question adressée par Mme la députée de Vaudreuil — vous pouvez vous asseoir — à la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation concernant le cautionnement par le gouvernement caquiste de l'étalement urbain dans le dossier du schéma d'aménagement de la MRC de Montcalm.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a ensuite droit à une réplique de deux minutes.

Donc, Mme la députée de Vaudreuil, je vous cède la parole pour une durée de cinq minutes.

Modification du schéma d'aménagement et de
développement de la MRC de Montcalm

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis contente de participer à ce débat de fin de séance puisque, vous le savez, là, le dézonage de la MRC Montcalm, là, fait couler vraiment beaucoup d'encre ces temps-ci.

Donc, ayant oeuvré dans le monde municipal, j'ai moi-même jeté un coup d'oeil, évidemment, aux différents articles, parce qu'on fait des revues de presse à tous les matins, mais j'ai jeté un coup d'oeil sur les différents documents dans ce dossier-là, tant la cartographie mais tant les résolutions, aussi, puis les avis qui ont été émis dans ce dossier-là. Donc, vous comprendrez que c'est avec beaucoup d'étonnement que j'ai pris connaissance d'un avis favorable, d'un avis favorable qui a été autorisé, qui a été donné par la ministre des Affaires municipales.

Mon grand étonnement vient surtout... est surtout relié à l'orientation 10, parce que l'orientation 10... Ce qu'il faut savoir, c'est que l'orientation 10, c'est la principale orientation du gouvernement puis c'est ce qui est au coeur de cette affaire-là. L'orientation 10, depuis 2001, elle impose aux MRC, entre autres, de consolider le développement, et les services, et les équipements dans un secteur principal. Et ce qu'on rencontre dans le dossier de la MRC Montcalm, c'est que ça va tout à fait contre l'orientation 10.

Et je ne suis pas la seule à le dire, il y a plusieurs experts qui l'ont dit. Il y a même des sous-ministres qui ont... puis je vais nommer l'ex-sous-ministre du MAMH, M. Croteau, qui jugeait, lui aussi, que la MRC empruntait la mauvaise voie pour la réglementation, selon un document qui été émis. Il y a eu des avis, il y a eu la CMM qui a publié une résolution, le 5 décembre 2019, en disant, entre autres, que la décision va à l'encontre de l'orientation n° 10 de l'addenda modifiant les orientations gouvernementales en matière... en lien, entre autres, avec le territoire de la CMM et les municipalités limitrophes, et que cette décision a été rendue malgré que, le 19 juin 2015 et le 24 mai 2018, le ministère des Affaires municipales et de l'Habitation a transmis un avis de non-conformité aux orientations gouvernementales en matière d'aménagement du territoire, et plus particulièrement aux attentes de l'orientation n° 10, à la MRC de Montcalm. Donc, vous comprendrez tout notre étonnement relativement à ce dossier-là.

Et il faut lire aussi les experts, dont M. Pineau, qui est un professeur aux HEC Montréal, qui nous disait : Écoutez, c'est incroyable, de donner un avis positif à ça. On va utiliser le mot, puis on n'aime pas ça le dire, mais c'est de l'étalement urbain. Et l'étalement urbain n'a jamais fait partie des orientations des gouvernements précédents, et l'orientation 10 est contre l'étalement urbain.

Je me permets même d'y aller d'un commentaire personnel, mais, quand j'ai vu l'approbation... Je vais être très franche, là, je la comprends, la cartographie, puis je comprends la bonne foi de la ministre, de dire : Bien oui, c'est logique. C'est vrai que c'est logique, c'est vrai. C'est 10 municipalités dans la MRC de Montcalm qui veulent toutes développer un petit peu plus dans leurs périmètres urbains. Mais ils sont en zone agricole, c'est ça, la problématique, alors qu'il aurait été possible de développer à... je ne me souviens pas, là, plus au nord, je pense que c'est Saint-Calixte, où c'est en zone blanche.

Donc, je la comprends, cette logique-là, de dire : On va agrandir un peu plus chaque périmètre urbain, comme ça on va en donner un petit peu, tout le monde va être content, puis, bien, ça va moins chialer. Parce que, les municipalités, on essaie de prévoir, d'avoir des visions à long terme en fonction des statistiques qu'on nous donne. Donc, quand on nous dit qu'on va avoir 5 000 citoyens de plus dans 10 ans, bien, on essaie de déposer un nouveau plan qui va tenir compte de ça. Mais il y en a plein, là, à travers le Québec, qui ont déposé des plans comme ça, qui demandent justement d'en avoir un peu plus, un peu plus, d'agrandir le périmètre urbain. Ici, on est en zone agricole puis on a dit oui.

Puis vous allez me dire que ce n'est pas beaucoup, c'est 0,3 hectare par année, six, sept, huit maisons. Par année, sur 10 ans, ce n'est pas beaucoup, mais on vient quand même jouer dans du zonage agricole. Puis c'est là, mon inquiétude, c'est qu'un avis favorable comme celui-là, bien, c'est un précédent, puis on rouvre la porte à d'autres demandes comme ça. J'en connais plein, de municipalités, de MRC à travers le Québec qui doivent dire : Bien, c'est le fun!

Ça fait que moi, je me demande : Est-ce que c'est ça, la vision du nouveau... du gouvernement caquiste, est-ce que c'est de donner des avis favorables à l'étalement urbain?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation. Et je vous rappelle que vous avez un temps de parole de cinq minutes.

Mme Andrée Laforest

Mme Laforest : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis, encore une fois, très heureuse de discuter et de défendre le schéma d'aménagement de Montcalm. Vous comprendrez que c'est une modification de schéma d'aménagement, et ce qui n'entraîne aucun hectare, dans le schéma d'aménagement, dans la zone agricole. Alors, c'est important de redire, c'est la CPTAQ qui va s'occuper de dézoner, s'il y a des projets dans la MRC de Montcalm.

Tous les ministères concernés et décisionnels, dont le MAPAQ, l'Environnement, Énergie et, évidemment, le MAMH, étaient en faveur de la modification, c'est important de le dire, parce que, oui, il y a des avis qu'on a eus, il y a des recommandations qu'on a eues, qu'on va prendre en compte, mais les décisions se donnaient par les quatre ministères principaux que j'ai nommés tantôt.

• (13 h 10) •

Pour la MRC de Montcalm, ils ont réduit, évidemment, parce que nous, on leur a dit : Si vous ne passez pas de 40 à 13 hectares, par exemple, pour l'affectation commerciale, ça ne passera pas. Et la MRC de Montcalm a suivi nos recommandations parce que je l'avais déjà refusée, dans le passé, leur demande.

Moi, je voudrais juste présenter la carte. Ici, c'est la MRC de Montcalm, Mme la Présidente. Ici, là, on a Montcalm. En haut, là, c'est Joliette. L'autre côté, on parle de Terrebonne, Mascouche, Laval et Montréal. Alors, regardez comment on est loin. Si on regarde à la Place Ville-Marie, à Montréal, on est à 70 kilomètres de la Place Ville‑Marie, quand on parle de la MRC de Montcalm. Je comprends que la CMM donne son avis, mais la CMM ne peut pas être responsable et ne peut pas gérer, disons, jusqu'à Québec, ça n'a pas de bon sens, là. On est rendu en dehors de la CMM, avec Montcalm. Puis là on parle plus de développement régional. Ça, ça touche un petit peu le développement régional. Parce que, c'est vrai, on est un gouvernement de région. On travaille avec tous les députés de tous les partis confondus. Même ma collègue, je travaille avec elle pour une modification de schéma d'aménagement, puis ça va me faire plaisir de l'aider, si tout est légal puis si tous les ministères sont en faveur, évidemment.

Alors, c'est important de savoir qu'on a écouté l'Institut de la statistique, parce qu'eux nous on dit oui, 5 000 personnes de plus à Montcalm dans les 10 prochaines années, mais, plus que ça, 8 000 en 15 ans. Alors, les 8 000 personnes qui veulent aller à Montcalm en 15 ans, où on va les placer? On n'aura pas d'endroit pour les héberger. Alors, c'est important de voir qu'il faut penser à plus long terme.

Moi, ce que je veux aussi mentionner, ce qui est vraiment important, c'est que mon rôle est d'être conforme aux orientations gouvernementales en aménagement du territoire. Et ça, c'est mon rôle. Puis, oui, j'ai été concernée pour l'acceptation du schéma d'aménagement de Montcalm.

L'autre chose aussi : la CMM qui a fait parvenir son avis. Je comprends tout à fait la CMM, parce qu'on a reçu aussi l'avis de la FQM, qui a été... on a reçu un communiqué le 16 janvier 2020, et la FQM disait justement que Montcalm était un des rares territoires, dans la zone agricole, qui a été agrandi au niveau des zones agricoles. Et elle a vu sa superficie de terres exploitées par l'agriculture croître à 418 hectares. Alors, c'est important. Puis je note aussi que les préfets d'Argenteuil, Autray, Pays-d'en-Haut, Beauharnois-Salaberry, Pierre-De Saurel, Haut-Richelieu, Rouville, Joliette, La Vallée-du-Richelieu, Maskoutains, Vaudreuil-Soulanges et Montcalm étaient, évidemment, à même ce communiqué.

Qu'est-ce qui est sensible, là, présentement, c'est l'aménagement du territoire. Comme je le dis, la loi a 40 ans, et les dernières modifications importantes ont eu lieu il y a 25 ans. On y touche, oui, à l'aménagement du territoire, mais c'est normal, notre gouvernement est un gouvernement de région, c'est important de travailler notre territoire. C'est important aussi, comme le mentionnait ma collègue... qui a tout à fait raison de parler d'étalement urbain. Quand on parle d'étalement urbain, là, ça touche énormément d'enjeux : le transport, la famille, le travail, les infrastructures dans les municipalités. Par contre, il faut trouver un équilibre raisonnable entre le développement durable et l'occupation du territoire. C'est très complexe, mais on va le faire, nous, parce qu'on veut vraiment favoriser le regroupement des services, le partage dans la communauté. On veut regrouper les services d'incendie, les matières résiduelles, on y pense, les infrastructures sportives, ça fait partie aussi de notre vision. Alors, on va respecter les projections démographiques, les orientations gouvernementales et le potentiel d'accueil aussi, Mme la Présidente.

J'aimerais terminer que, si on regarde avec toutes les inondations, oui, on est un gouvernement fort pour le territoire, oui, on change les choses, oui, on se déplace dans les régions. Mais, pour revenir à la CMM, à titre d'information, le pourcentage des résidents des couronnes qui travaillent en dehors de la CMM — parce qu'on dit que les gens de Montcalm travaillent tous à Montréal, ce qui est complètement faux — bien, dans la partie nord, il y en a 80,7 %, dans la partie sud il y a 80,6 %, puis ces gens-là travaillent à Terrebonne et à Mascouche.

Alors, c'est important de revoir notre territoire. Je suis avec une collègue extraordinaire, parce qu'avec les inondations elle est très concernée, elle nous aide également. Alors, je pense que, oui, il y a les inondations, il y a le territoire, on y est.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Vaudreuil pour son droit de réplique de deux minutes. Allez-y, Mme la députée.

Mme Marie-Claude Nichols (réplique)

Mme Nichols : Oui, merci, Mme la Présidente. Bien, ça a le mérite d'être clair, ça a le mérite d'être clair. Ce que je comprends, c'est que ça va être... on va y aller à la pièce, on va prendre municipalité par municipalité, MRC par MRC, on va regarder ce qu'ils veulent puis on va s'arranger pour que ça arrive. Parce que ce qui est fait là, c'est de l'étalement urbain, puis on nous dit : Bien, c'est correct, c'est correct. Ce n'est pas vrai que tout le monde travaille à Montréal, ce n'est pas vrai... Moi, je vous invite à consulter les experts. Mais, comme vous le dites, on travaille ensemble, on pourra le regarder ensemble, ça va me faire plaisir.

Je veux tout de même citer Marcel Groleau, qui est président de l'UPA, qui a dit, dans les consultations très récentes sur le projet de loi n° 67, le 22 octobre dernier... il nous a dit : «Nous, on avait réagi, on comprenait mal que ce schéma d'aménagement soit autorisé. On ne connaît pas tous les tenants et aboutissants, mais on comprend mal qu'il soit autorisé.» Donc, évidemment, là, ça soulève un tollé. Ici, on parle de l'UPA, mais ça soulève aussi un tollé, là, des municipalités environnantes sur qui... ça passe à travers certains territoires pour se rendre dans la MRC Montcalm.

Donc, moi, je vous le dis, c'est un précédent, ça rouvre la porte. Ça rouvre la porte, puis je trouve que, dans tout ça, bien, on oublie de concilier aussi... Parce qu'on n'a pas nécessairement le temps d'embarquer dans le sujet précisément, mais il y a des aires de protection autour des périmètres urbains. Ces aires de protection là, là, bien, on vient réduire les utilisations. Les fermes, il va falloir réduire le nombre de fermes bovines, il va falloir réduire le nombre d'animaux pour ne pas nuire, pour essayer de concilier le résidentiel et l'agriculture. Et je trouve ça tellement dommage, tous les impacts qu'il y a autour de ça.

Puis, comme je le dis, bien, écoutez, ça rouvre la porte à d'autres dossiers comme cela, puis je me demande sincèrement où s'en va le Québec alors que, dans le dossier... comme le 67, oui, parce que la vision à long terme, c'est important. Puis c'était ça, le communiqué des maires, quand vous avez cité, entre autres, le maire de Vaudreuil‑Soulanges, là. C'était ça, le communiqué des maires, c'est qu'on veut une vision à long terme.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de Vaudreuil. Donc, nous allons procéder au deuxième débat de fin de séance, qui portera sur une question adressée par Mme la députée de Saint-Laurent au ministre de l'Éducation concernant les risques importants de décrochage scolaire dus à la pandémie de la COVID-19. Mme la députée de Saint-Laurent, vous pouvez y aller pour une durée de cinq minutes.

Impact de la pandémie de COVID-19 sur le taux de décrochage scolaire

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, j'aimerais souligner que le ministre de l'Éducation et moi, on s'entend : le meilleur endroit pour nos enfants, c'est à l'école. Le meilleur filet de protection sociale qu'on peut offrir aux enfants, c'est l'école. Là-dessus, là, on est tous les deux d'accord. Et surtout, moi, je le sais, parce que ça fait maintenant deux ans que je travaille avec le ministre, il aime passionnément l'école. Ça, je le sais. Et...Ah! Merci. Je reçois des applaudissements de notre ministre. Et, lorsque je me suis levée en cette Chambre, au mois de mai, puis qu'on a parlé de décrochage scolaire, je sais qu'il a réfléchi. Je sais que, ça, il veut lutter. Puis il n'a pas besoin de me convaincre du contraire : Non, non, non, Marwah, le décrochage, ça ne me préoccupe pas, je sais qu'il est préoccupé. Je sais que, quand je lui cite des experts, il est d'accord. Je sais que, quand je lui présente mon tableau avec les chiffres... Puis tantôt vous me parliez de statistiques, vous aimez les statistiques. Puis je sais que vous aimez aussi mes tableaux, là, vous n'êtes pas insensible à mes tableaux. Quand je vous dis que, secondaire III, IV, V, 75 % des élèves sont à risque de décrochage, et qu'en fait c'est eux qui décrochent, je sais que vous me croyez. Ça, je le sais. Je sais aussi que, quand vous entendez des experts, vous dites : O.K., qu'est-ce que qu'on fait? Puis, Égide Royer, vous lui avez parlé aussi, avec lui, il nous parle à tous.

J'ai envie de vous parler d'une autre experte. «J'aime mes amis, j'aime parler avec eux et échanger. C'est sûr que, quand on est en ligne, on est tout seul devant un ordinateur.» Et cette experte, c'est Laurianne Jolie, élève de troisième secondaire. Pourquoi que je vous en parle? Moi, j'ai été professeure à l'université, je n'ai pas la même expérience que mon collègue le ministre de l'Éducation, mais je sais que lui a été enseignant et je sais, là... je peux l'imaginer dans sa classe en train de passer à travers les bureaux puis regarder si tout le monde suit. Je le sais, j'ai fait de la suppléance, puis je n'aurai jamais toute son expérience, mais je sais que c'est important d'aller de bureau en bureau pour s'assurer que tout le monde a suivi puis qu'on n'a pas décroché, qu'on ne s'est pas remis loin, là, dans sa classe, puis que, là, tout à coup, on n'a pas perdu le fil. Et j'essaie, là, du haut de mes 35 ans, de me remettre dans les souliers d'une personne qui a 14 ans, puis qu'à 14 ans on lui dit : À cause de la mautadite pandémie, là, tu ne pourras pas aller tous les jours à l'école, mais, en plus de ça, tu n'auras pas accès non plus à tes amis, que, là, tu rentres dans une autre minibulle, puis qu'en plus de ça, bien, ça se peut que Noël, il va être plate, peut-être, puis qu'en plus de ça, ton sport, tu ne l'auras pas. Je mets tout ça, là, dans ma tête d'un enfant de 14 ans, je le sais, que le risque de décrochage est plus élevé. Puis, si j'ai un doute, j'ai un paquet d'experts qui me le disent.

Ce que moi, je propose au ministre depuis le mois de mai... Puis je sais que ce n'est pas facile à faire, je sais qu'on ne pourra pas claquer des doigts puis dire : Ça va arriver, parce que la députée de Saint-Laurent l'a dit ça va arriver. Je le sais, que ça ne marche pas de même. Mais je sais que, quand on se concerte, on est capables de faire des affaires. On l'a fait notamment pour les repas à l'école au mois de mars, quand on n'avait pas réfléchi qu'en fermant les écoles il y a plein d'enfants qui ont la mesure alimentaire puis qui ne mangeront pas plus le lundi, le 16 mars, parce que l'école sera fermée. Ça a pris quelques semaines de mettre ça en place, mais ça a été fait. Et là je me suis dit, là : Si, les enfants, on est capables de les déplacer dans l'alternance, pour respecter, évidemment, la Santé publique... Ça, on est tous les deux d'accord, là, on va respecter toujours les consignes de la Santé publique. Mais, dans le principe de l'alternance, au mois de mai, l'idée ne venait pas de moi, elle venait de plusieurs experts à qui j'ai parlé, ils disent : Si on est capables de mettre ces enfants... Disons que, le groupe A, lundi qu'il est à l'école, bien, le groupe B, au lieu d'être à la maison, il serait dans un autre lieu. Cet autre lieu, là, on peut être créatifs, on peut faire preuve d'ambition. Disons que c'est, par exemple, un musée, le Musée des beaux-arts, très beau, et qu'on en fait un lieu inspirant. Ça peut être aussi une salle de spectacle, ça peut être même une salle de conférence.

• (13 h 20) •

Et là vous allez me dire : Oui, mais, députée de Saint-Laurent, on manque de monde. Vous avez raison, et j'ai pensé à ça. Qui qu'on appelle quand on manque de monde? Mais, vous savez, on a plusieurs facultés, partout au Québec, qui préparent les enseignants de demain, des étudiants de... — pardon, j'allais dire «secondaire», pardon — des étudiants de troisième année, quatrième année au baccalauréat en éducation et adaptation scolaire. Est-ce qu'on peut les appeler pour venir nous donner un coup de main? Et, aujourd'hui encore, Égide Royer, dans l'article de Radio-Canada, sous la plume de Jean-Philippe Robillard, en parle. Pouvons-nous appeler en renfort ces étudiants, pas pour devenir des enseignants, mais pour être, là, l'adulte responsable qui va s'assurer qu'il n'y en a pas un, là, derrière son écran d'ordinateur qui a décroché?

Alors, moi, Mme la Présidente, je sais que mon vis-à-vis a le même souci que moi. Et je sais que ce ne sera pas pour demain matin, mais est-ce qu'on peut travailler ensemble pour trouver une solution plus à long terme? Parce que, malheureusement, il y a trop d'experts qui nous disent : Bien, ça se peut qu'on soit pris avec la pandémie plus longtemps qu'on le souhaite. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, Mme la Présidente. Donc, ma collègue aborde la question du décrochage scolaire. Elle nous parle des élèves de secondaire III, IV, V qui, en zone rouge, suite à des directives, là, qui nous viennent de la Santé publique, doivent fréquenter l'école un jour sur deux. Je l'ai déjà dit, mais je vais le rappeler encore, les élèves sont un jour en classe, en groupe-classe, en groupe-bulle, hein, c'est fidèle à ce qui se passe à peu près partout en Occident, là, dans le réseau scolaire, et le lendemain sont à la maison, mais reçoivent des services éducatifs, gardent le même horaire, ont les mêmes cours avec le même enseignant mais à travers des outils technologiques, qu'on est capables de prêter si les familles n'en ont pas. Puis je précise qu'on prête aussi le réseau Internet avec des clés LTS si la famille n'a pas accès à Internet. Il y a certains enjeux, au Québec, où il n'y a pas de connectivité, mais, disons, là, de manière générale, on y va comme ça. Et, s'il n'y a pas de connectivité du tout, bien, on permet aux jeunes d'aller à l'école. Il n'est pas question pour nous de laisser des jeunes à eux-mêmes un jour sur deux, en disant : Débrouille-toi, fais tes lectures, pas de contact avec les profs. C'est exclu, ça, d'accord? Tous les jours, nos jeunes sont accompagnés.

Bon, ma collègue l'a dit, on est tous les deux d'accord pour dire que c'est un plan B. Ça peut être un très bon plan B. Ça peut être un moyen plan B, selon ma collègue. Le plan A, c'est que tout le monde va à l'école à tous les jours, c'est certain.

Ma collègue arrive avec une proposition. Intéressant, on peut débattre de ça. Est-ce que, le jour où ils ne peuvent pas être en classe avec leur enseignant, plutôt que d'être à la maison puis d'avoir accès à leur enseignant via un outil technologique, ils pourraient être assis dans un autre local que chez eux, regarder le même cours, participer au même cours, mais être dans un autre local, pour avoir un autre adulte qui pourrait peut-être circuler, un surveillant d'élèves, un enseignant, etc.? Ce n'est pas farfelu. Ça pourrait être une idée intéressante, difficilement applicable à la grandeur du Québec. Je veux dire, ce n'est pas évident d'être capable d'avoir... Tu sais, on parle de 60 % des élèves du Québec... du secondaire, hein? Secondaire III, IV, V, là, on touche 60 % des élèves du secondaire au Québec. Trouver des locaux avec toujours deux mètres ou... enfin, non, avec suffisamment d'endroits pour qu'ils s'installent, la connectivité, avoir des gens...

Ce n'est pas aussi simple que ça, de dire : Bien, c'est facile, on a juste à demander aux gens qui sont étudiants dans les facultés de sciences de l'éducation. Bien, ils sont étudiants, justement, hein? Ils ont des cours, ils étudient à temps plein. Puis, quand on étudie à temps plein, ce n'est pas juste le temps de cours, là. Souvent, à l'université, tu as autant de temps de travail que de temps de cours. Donc, si tu as cinq cours de trois heures, tu as 15 heures de cours, bien, tu as minimum 15 heures de travaux à faire aussi. Des fois, c'est de jour. Ma collègue dit : Oui, est-ce qu'on pourrait les déplacer de soir? On discute pour voir si ce n'est pas possible, dans les prochaines sessions, parce qu'on est au milieu de la session d'automne, de voir avec les facultés des sciences de l'éducation si on ne peut pas libérer le talent un peu des étudiants puis leur permettre de prêter main-forte au réseau scolaire. J'ai eu plusieurs conversations avec ma collègue la ministre de l'Enseignement supérieur à ce sujet-là. C'est sûr que c'est sur la table, pas nécessairement pour en faire des surveillants d'élèves pendant des séances comme ça, mais pour qu'ils puissent prêter main-forte au réseau scolaire de plein de façons : on peut faire du tutorat, on peut faire du mentorat, on peut faire de l'aide aux élèves en difficulté, on peut faire de l'accompagnement en classe pour être deux enseignants, on peut faire de la suppléance. C'est certain que ce sont des gens... surtout rendus en troisième année, quatrième année de baccalauréat, c'est des gens qui ont beaucoup de compétences, qui peuvent contribuer.

Ceci dit, des mesures pour favoriser la réussite scolaire, parce que ma collègue s'inquiète du décrochage scolaire, on en a mis beaucoup en place depuis le début de la pandémie puis depuis le début du mandat. Je vais donner quelques chiffres puis, après ça, je vais expliquer ce qu'il y a derrière ces chiffres-là — il me reste 1 min 5 s, Mme la Présidente, on est bons : 18,7 millions, 7,3 millions, 10 millions, 41 millions. Mais c'est quoi, derrière ces investissements-là? 18,7 millions pour embaucher 350 nouveaux professionnels qui vont être là à temps plein cette année et les années qui suivent pour les élèves, essentiellement, qui sont à risque de décrocher, là, les élèves vulnérables. 7,3 millions pour les classes spéciales, les classes d'adaptation. Qui s'adressent à qui? Aux élèves vulnérables, ceux qui sont beaucoup plus nombreux que les autres à décrocher. 10 millions supplémentaires pour qui? Pour le raccrochage, pour ceux qu'on a peut-être échappés, en passant par nos organismes communautaires, parce que le réseau scolaire ne peut pas tout faire, donc vraiment financer, pas juste demander des choses puis pelleter ça sur le dos des organismes communautaires, mais les financer puis faire des partenariats avec eux. 41 millions de dollars qui étaient destinés vraiment au parascolaire, mais qu'on permet aux écoles d'utiliser différemment pour faire une bonification de services aux élèves vulnérables, sachant que, cette année, malheureusement il n'y a pas autant de parascolaire qu'on voudrait. Donc, on est très actifs et proactifs pour lutter contre le décrochage, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je vous cède la parole, Mme la députée de Saint-Laurent, pour votre droit de réplique.

Mme Marwah Rizqy (réplique)

Mme Rizqy : Merci beaucoup. Je suis contente d'entendre le ministre nous dire qu'il va effectivement vérifier avec les différentes facultés d'éducation à travers le Québec comment qu'on peut justement profiter du talent... et surtout on sait que ces futurs enseignants, bien, ils vont évidemment venir nous donner un grand coup de main.

Moi, ce que j'aimerais... Je rappelle au ministre que présentement, oui, effectivement, de l'argent, c'est bien, mais c'est vraiment ce contact humain. Et là, dans sa réponse, je comprends, il me dit : Ça va être difficile, Mme la députée de Saint-Laurent, parce que c'est 60 % des élèves du secondaire qui sont touchés. Alors, je vais faire du judo avec lui, alors une contre-proposition, M. le ministre : Est-ce qu'on pourrait avoir dès maintenant du tutorat mais pour les élèves en plus grande difficulté, pour la journée où est-ce qu'ils sont à la maison en alternance? Comme ça, au moins, tout de suite, on n'attendra pas, alors ça veut dire qu'on identifie tout de suite les élèves qui sont plus vulnérables, plus à risque de décrochage scolaire. Et d'ailleurs, quand qu'on a voulu rouvrir les écoles au mois de mai, c'était d'abord et avant tout pour les élèves en grande difficulté, les plus vulnérables. Alors, je pense qu'à court terme ça pourrait être une bonne solution, un compromis.

Donc, je comprends qu'il n'y aurait peut-être pas du tutorat pour tout le monde, j'en suis, puis je peux comprendre, mais, si on est capable d'aller cibler, là, dès maintenant, et je vais reprendre, si vous permettez, l'expression du ministre de la Santé, un «SWAT team» pour les élèves plus vulnérables, je pense qu'on va être capable de s'assurer de réduire les risques de décrochage scolaire. Parce que je ne veux pas, et ça, je ne veux pas et je sais que le ministre non plus ne veut pas... Certains experts parlaient de plus... d'une augmentation de 3 000 à 4 000 décrocheurs avec la pandémie. Si on est capables juste de les identifier puis d'avoir un service de tutorat pour eux, je pense qu'on va faire quelque chose de bien ensemble. Merci, Mme la Présidente.

• (13 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de Saint-Laurent. Maintenant, nous allons procéder au troisième débat de fin de séance, qui portera sur une question adressée par M. le député de D'Arcy-McGee à la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, en remplacement du ministre de la Santé et des Services sociaux, concernant la nécessité d'agir avec vigueur pour préserver la santé mentale des Québécois. Puis, M. le député de D'Arcy-McGee, la parole est à vous.

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Je constate la présence de la ministre responsable des Aînés, pour qui j'ai la plus grande estime. Je constate aussi que ce n'est pas le ministre responsable de la Santé mentale.

Je me permets de prendre quelques secondes, on ne peut jamais faire ça trop souvent, malgré le fait que le gouvernement ne semble pas être à l'écoute, pour parler de l'ampleur de la crise devant nous en tout ce qui a trait à la santé mentale dans cette période, qui continue, qui perdure, de la pandémie.

60 % des jeunes rapportent qu'ils sont en détresse. 34 % des enseignants et enseignantes du Québec nous disent qu'ils songent à quitter cette noble profession, dû au stress déclenché par la pandémie. 20 % de plus de Québécois et Québécoises, peut-être à tort, demandent des ordonnances pour les antidépresseurs quand ce n'est pas nécessairement l'intervention d'indiquée. On constate maintenant que la double proportion des membres de la communauté québécoise d'expression anglaise rapportent de la détresse puis de l'anxiété, ainsi que les immigrants, ainsi que les travailleuses, travailleurs de la première ligne. Y a-t-il quelque chose de plus sérieux que ça? Pas pour parler des aînés, qui ont vécu le confinement et, de toutes fins pratiques, actuellement, sont en quelque part en confinement aussi, qu'ils ne peuvent pas embrasser, voir leurs petits-enfants.

Donc, l'ampleur, l'ampleur de la crise devrait être évidente. Malgré ça, le ministre responsable a insisté hier qu'il n'y a pas de crise; qui a parlé de son intervention modeste, intéressante, auprès des jeunes, un investissement de 25 millions de dollars. Lui-même, il a constaté plus tôt, dans cette Chambre, et je le cite, que «les conséquences psychosociales spécifiques à la pandémie de la COVID-19 sont actuellement inconnues». Bon, voilà tout le sens de notre demande, refusée il y a quelques minutes par les députés de la CAQ, pour mandat d'initiative, pour que toute l'expertise qu'on a au Québec soit ramassée en enquête publique pour qu'on cherche ensemble, qu'on cherche ensemble les solutions.

Une seule dimension de cette dynamique, c'est de connaître l'étendue du problème, de connaître l'impact de nos réponses jusqu'à date. Et là-dessus le ministre a affirmé une diminution des listes d'attente. En même temps, la Vérificatrice générale voit ça d'un autre oeil dans son rapport d'il y a quelques semaines, et je la cite : Le MSSS se contente de fournir des indicateurs sur sa capacité théorique «plutôt que de fournir des données sur les services réellement reçus par les usagers». Elle continue, et je la cite à nouveau : «Il n'existe actuellement aucun système d'information permettant d'avoir une vue complète de tous les services de santé mentale reçus par un même patient, et donc de suivre son cheminement.»

Diminution des listes d'attente, Mme la Présidente? Des témoignages de toutes sortes. Là, l'organisme Tel‑Aide, qui croule de ses appels, en hausse d'environ 25 %, Écoute Entraide qui a dû essayer de former, a triplé le nombre d'intervenants. La ligne Info-Social 8-1-1 qui parle d'avoir reçu 6 700 appels du 13 septembre au 10 octobre, soit une hausse de quelque 260 % par rapport à l'année dernière. À la centrale de la ligne d'aide gouvernementale à Montréal, l'équipe de 37 travailleurs sociaux peine à répondre au volume d'appels. Dans la première vague, on pouvait avoir constamment 100, 150 appels en attente, avec les temps d'attente qui pouvaient atteindre une heure facilement.

Nous parlons du monde en détresse, Mme la Présidente. Dans ces situations, on n'appelle pas pour savoir si notre électroménager va être livré à temps, on parle des gens en détresse. On parle aussi, selon des experts mondiaux, maintenant, que malheureusement nous sommes en pandémie pour une bonne période, une bonne période, ce qui implique des réponses en pérennité, des plans d'action cohérents, pas des actions à la pièce à chaque semaine. Est-ce que ce gouvernement va être au rendez-vous avec cette pandémie qui va perdurer?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Merci, Mme la Présidente. Je suis très... je suis contente, malgré que ce soit un sujet extrêmement chargé, extrêmement délicat, extrêmement important, d'être ici pour dialoguer avec le député de D'Arcy‑McGee. J'aime beaucoup cette personne, c'est un gentleman, alors je pense qu'on pourrait travailler ensemble. Ce n'est pas mon dossier, la santé mentale, mais, mais, mais, c'est aussi mon dossier, c'est notre dossier. C'est un dossier qui devrait dépasser toute partisanerie politique, parce que la santé mentale, c'est quelque chose de... on en parle, mais à une époque on ne voulait pas en parler, c'était tabou.

Et, en mai 2019, il y a eu un forum sur les jeunes et la santé mentale avec le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux et la ministre de la Santé et des Services sociaux de l'époque, et le 29 octobre 2019 se terminaient deux journées de forum. J'y ai pris part parce que c'est important aussi qu'on parle de la santé mentale de nos personnes aînées. Et, le 29 octobre, la ministre de la Santé et des Services sociaux a annoncé que le Québec se doterait d'une stratégie québécoise de prévention du suicide. Le suicide aussi, c'est important, dans ce cas-là, parce que bien souvent, quand on est en détresse psychologique, on passe à l'acte, et il ne faut pas passer à l'acte, alors l'Organisation mondiale de la santé préconise de mettre en place une telle stratégie. Il y a eu, en 2016 — je vais vous donner le chiffre — 1 046 personnes qui se sont suicidées au Québec, c'est trop. Une personne, c'est trop.

On a annoncé aussi, le 19 octobre, qu'on mettait en place une stratégie en santé mentale, et qu'on faisait un projet avec cinq CISSS et CIUSSS, cinq établissements, et qu'on voulait le déployer à la grandeur du Québec. Entre autres, on a eu le Centre intégré universitaire de la santé et des services sociaux de la Capitale-Nationale, de l'Est-de-l'Île-de-Montréal, de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec, de Chaudière-Appalaches, du Centre intégré de santé et des services sociaux de l'Outaouais. Il se peut que le déploiement soit retardé à cause de la COVID. La COVID, ça a freiné beaucoup de choses. Par contre, pendant la COVID, nous avons annoncé 31,1 millions de dollars en santé mentale justement pour être en mesure d'accompagner les personnes qui sont atteintes de détresse psychologique.

Le député de D'Arcy-McGee parlait du ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, qui a annoncé hier un 25 millions de dollars pour les jeunes. Il a aussi rehaussé la ligne Tel-Jeunes pour 1,4 million. Il y a eu aussi un montant de 17,6 millions de dollars pour les organismes communautaires qui travaillent au niveau de la solitude, de l'isolement, de la détresse; 14 millions de dollars pour accompagner les personnes qui oeuvrent en santé, puis ce montant-là n'a pas été touché encore. Parfois, on ne veut pas consulter non plus. C'est incroyable, on a 14 millions, là, pour le personnel. Oui, mon collègue a mentionné en Chambre qu'il y avait une diminution des cas, mais il ne faut pas perdre de vue qu'avec la COVID il n'y a personne qui est à l'abri de développer une maladie mentale au cours de sa vie, une personne sur cinq va développer une maladie mentale au cours de sa vie.

• (13 h 40) •

J'aimerais lui dire qu'au-delà de ça, en tant que ministre responsable des Aînés, nous avons commencé à mettre en place des projets de gériatrie et de gérontologie sociale. Nous avons actuellement trois projets pilotes, un quatrième va se déployer, et nous voulons le faire à l'intérieur du Québec. Pourquoi? Pour briser cette solitude, pour briser cet isolement envers les personnes âgées. Alors, on a investi 4 millions de dollars en gériatrie sociale, et ça, c'est récurrent. On a aussi investi 6,8 millions pour les intervenants de milieu. La députée de Fabre aime beaucoup ces travailleurs de milieu, ces travailleurs de rang, ces travailleurs de HLM, justement ça vient en aide à la détresse psychologique. Un 5 millions pour la ligne Aide Abus Aînés. On a des coordonnateurs à la maltraitance. Si j'additionne, Mme la Présidente, tous ces montants, parce que l'argent aussi parle, on arrive avec un montant considérable de 105 millions de dollars, en très peu de temps, investi pour soutenir nos personnes en santé mentale.

Mais, si le député de D'Arcy-McGee a des projets bien particuliers, moi, je suis très ouverte à ce qu'on puisse se rencontrer et qu'on puisse travailler ensemble pour améliorer les conditions de vie de nos personnes au Québec dans ces temps difficiles de COVID-19.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à M. le député de D'Arcy-McGee pour son droit de réplique de deux minutes.

M. David Birnbaum (réplique)

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. 300 millions de dollars, voilà un chiffre que je mentionne avec fierté. On parle de la santé mentale des Québécois en détresse. Ça, c'est le chiffre fort probablement nécessaire et en pérennité si on implantait notre proposition de l'accès public universel à la psychothérapie. C'est ça qui est de mise, c'est ça qui est nécessaire, pas les petits programmes ici à la pièce, qui touchent aux jeunes — il faut — qui ignorent, en quelque part, des autres cibles et qui ne sont pas basés sur les données probantes ni de la recherche ni de l'évaluation.

C'est fascinant, ça fait six questions que j'ai posées en Chambre depuis le dernier mois sur ce sujet, troisième débat de fin de séance, un débat du mercredi, des 43 lettres que j'ai reçues des ordres des psychologues, pédiatres, d'infirmières, infirmiers à l'appui de nos gestes, et, dans toutes ces interventions du côté ministériel, il me semble que je n'entends jamais le mot «psychologue», «psychologue». Ce n'est pas quelqu'un au bout d'un téléphone, qui va mettre quelqu'un en attente, qui va faire la chose quand nous sommes en détresse. Alors, voilà, nous avons une proposition concrète. Radio silence, jusqu'à date, du côté ministériel. J'espère que ça va changer.

Deuxième chose, deuxième chose, comme je dis, je viens de sortir d'une rencontre en commission où les députés, du côté ministériel, m'ont très déçu. Ils ont dit non à notre demande d'initiative pour qu'on étudie ensemble, ensemble avec les experts, à la... au Québec, l'étendue du problème de la santé mentale. La réponse a été non. Est-ce qu'on n'a pas le goût, l'obligation d'avoir des informations à jour et à date? Le monde du Québec attend une réponse là-dessus.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le député.

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 42)

(Reprise à 15 heures)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon après-midi. Vous pouvez prendre place. Et nous allons poursuivre nos travaux. Et, avant de poursuivre le débat, je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement pour déroger à l'article 53.7° et 84.1 de notre règlement afin de déposer une motion de consultations particulières donnant suite à une entente entre les leaders et les députés indépendants.

Motions sans préavis (suite)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement. Avant de procéder au vote, je constate qu'il y a un groupe parlementaire...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Pardon? Ah! Il faut lire la motion, bien évidemment. Alors, je vous recède la parole.

Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 71

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Donc, je fais motion, conformément à l'article 146 du règlement de l'Assemblée nationale, afin :

«Que la Commission des transports et de l'environnement, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 71, Loi sur les véhicules hors route, procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques le mardi 10 novembre 2020, de 10 heures à 11 h 55, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 55 et de 19 h 30 à [21 heures] et le mercredi 11 novembre 2020 après les affaires courantes jusqu'à 13 h 05 et de 15 heures à 18 h 15;

«Qu'à cette fin, la commission entende les personnes et organismes suivants : Fédération québécoise des clubs quad, Fédération des clubs de motoneigistes du Québec, UMQ, FQM, Bombardier Produits récréatifs, Mathieu Santerre, citoyen, Centre québécois du droit de l'environnement, Assemblée des premières nations Québec‑Labrador, Union des producteurs agricoles, Conseil de l'industrie forestière du Québec, les pourvoiries du Québec, Gouvernement de la nation crie, Société Makivik;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la [façon] suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 1 minute au deuxième groupe d'opposition et 1 minute au troisième groupe d'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 11 minutes 40 secondes pour l'opposition officielle, 2 minutes 55 secondes pour le deuxième groupe d'opposition et 2 minutes 55 secondes pour le troisième groupe d'opposition;

«Que les témoins auditionnés puissent l'être par visioconférence;

«Qu'une suspension de 5 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et organisme;

«Que le ministre des Transports soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, il y a consentement pour la présentation de cette motion? Consentement.

Mise aux voix

Alors, nous allons procéder à la mise aux voix selon... c'est-à-dire au vote selon l'application de l'ordre spécial. Alors, je vous demande de voter pour votre groupe parlementaire, en commençant par M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Caire : Pour, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Derraji : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Rosemont?

M. Marissal : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Rimouski?

M. LeBel : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée.

Projet de loi n° 66

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, nous reprenons nos travaux, et l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Et je suis prête à reconnaître le prochain intervenant, qui sera M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Alors, on en est donc au principe de 66, projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure. Ça, c'est son nom au long. À la CFP, il a un petit nom plus intime, on l'appelle la loi sur la relance économique, puis c'est généralement comme ça qu'il a été présenté, c'est généralement comme ça qu'on veut le présenter, du côté du gouvernement surtout. Et je vous dirais que d'emblée, d'entrée de jeu, d'un point de vue sémantique, moi, ça me pose un petit problème, parce que moi, j'aime beaucoup les mots, j'ai gagné ma vie avec les mots toute ma vie, puis, la façon dont c'est présenté, c'est comme si c'était la seule façon de relancer l'économie et que ne pas adopter ce projet de loi là serait se mettre dans le chemin de la relance de l'économie. Bon, je ne ferai pas mon Bernard Pivot ici aujourd'hui, là, je ne vais pas jouer sur les mots tout l'après-midi, mais il n'y a personne ici, il n'y a pas une seule des 125 personnes qui siègent ici qui est contre la relance de l'économie au Québec, pas une seule. On peut ne pas s'entendre sur la façon, sur les moyens soit législatifs, soit sur... même sur les projets... Tu sais, moi, par exemple, là, j'ai un modeste projet qui attend depuis 20 ans, dans mon comté, qui s'appelle l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Il n'est pas dans la liste. Je n'ai pas négocié la liste, je ne négocierai pas la liste, on n'embarquera pas là-dedans. Donc, on peut ne pas s'entendre. J'aurais aimé ça voir apparaître une école secondaire publique dans l'est de Montréal. Je suis fin, là, je ne dis même pas pour Rosement précisément, là, dans l'est de Montréal. Ce n'est pas dans l'annexe non plus. Soit, on ne s'entend pas nécessairement sur la liste, on ne s'entend pas nécessairement sur les moyens, mais, sur le mot, là, sur l'intention, est-ce qu'on peut, tout le monde, être assez de bonne foi pour se dire qu'il n'y a personne ici qui est contre la relance économique du Québec? Puis là on voit cette bobine-là, là, de ce film, là, tourner en boucle depuis maintenant le mois de juin, là, et je le dis gentiment à mes amis du gouvernement, plein de sorties publiques, là, documentées, où on nous dit, on dit aux gens que l'opposition s'oppose à la relance économique du Québec. Bien, ce n'est pas vrai. Que ce soit dit, là, ce n'est pas vrai.

Après ça, projet de loi n° 66, là, je vais prendre probablement la prochaine demi-heure pour vous dire ce que j'en pense, ce n'est pas que positif, mais, sur la relance économique du Québec, bien franchement, nous sommes pour. Nous étions pour en juin et, franchement, on pensait même qu'on pensait qu'on pourrait commencer plus rapidement parce qu'on avait une petite accalmie. La deuxième vague nous a frappés de plein fouet, nous sommes encore dans le tourbillon de la deuxième vague. Certains parlent déjà d'une troisième vague possible. Là, on a hâte que la relance économique parte pour vrai, là.

Alors, tout cela étant dit, là, on a des questions sur le projet de loi n° 66. On a beaucoup de questions sur le projet de loi n° 66. On en avait beaucoup sur le projet de loi n° 61, le défunt projet de loi n° 61 qui avait été déposé le printemps dernier, à peu près la même formule, à quelques exemptions notables, mais sur la formule de l'annexe avec les projets, puis l'idée qui était derrière le projet était sensiblement la même. Il y avait un certain nombre de choses qui clochaient, je passe rapidement sur 61, mais ça met la table à 66. Les deux sont presque siamois. En tout cas, l'un est certainement issu de l'autre. Il y avait des choses qui clochaient dans 61, à commencer par le fameux article 50 qui était problématique, aux dires même, à l'époque, de l'ancienne ministre de la Justice qui est maintenant porteuse du projet de loi n° 66, la présidente du Conseil du trésor, que je salue d'ailleurs au passage et dont je salue l'ouverture en commission parlementaire.

On a fait, depuis deux semaines... on a entendu, je devrais dire, depuis deux semaines, 24 groupes ou témoins. 24, en ce qui me concerne, c'est un record. Et je ne suis pas ici depuis longtemps, mais, la charge de travail étant ce qu'elle est, je mène plusieurs projets de loi en même temps. Puis, 24 groupes, on les a tous entendus, questionnés, il n'y a pas eu de coin rond là-dedans. Donc, alors, je salue l'ouverture de la ministre, au moins, pour les consultations particulières et les débats qui ont déjà commencé autour du projet de loi n° 66.

Mais, avant d'aller dans 66, revenons brièvement à 61. Ce qui clochait précisément, l'article 50, je l'ai dit, c'était notamment l'octroi de contrats publics. Il y avait là une ouverture béante vers ce qu'on craignait être un possible retour vers la corruption, la collusion. En fait, il y avait quelque chose là-dedans qui était décrié assez généralement. Et là on avait vraiment l'impression qu'on voulait aller beaucoup trop vite, et qu'on confondait vitesse et précipitation, et que, ce faisant, crise économique, relance économique, beaucoup d'argent public sur la table, évidemment, ça pourrait attirer toutes sortes de gens alléchés par ce paquet de fric et de contrats gouvernementaux. Alors, heureusement, on a fermé cette porte-là, heureusement. Heureusement, on a fermé cette porte-là. On a retiré les projets... les articles de loi qui étaient problématiques en matière d'octroi de contrats publics. C'est une bonne chose, il faut le dire, il faut le dire. On l'a dit quand 66 a été déposé, je le redis aujourd'hui. Et on a un regard différent sur 66 par rapport à ça, justement.

Il y avait des problèmes aussi avec l'évaluation environnementale, l'accélération ou même le fait d'outrepasser certaines évaluations environnementales, dans 61. Ça, malheureusement, on a fait du copier-coller de 61, puis ça s'est retrouvé dans 66. Je dis «malheureusement» parce qu'en ce qui nous concerne c'est le même problème, c'est le même problème. On aura des contrats bien donnés, bien menés, souhaitons-le, mais on passe encore outre certaines évaluations environnementales, on accélère la tenue de certaines évaluations environnementales, notamment en matière de consultations publiques. Et ça, c'est malheureux. Ça, ce n'est certainement pas une avancée, Mme la Présidente, je vous dirais même que c'est un recul. C'est un recul certain parce que, depuis sa naissance, si je ne m'abuse, autour de 1979, le BAPE, on ne peut pas dire qu'il a beaucoup gagné de plumes. Il en a plutôt perdu. Et, de gouvernement en gouvernement, on a amenuisé sa portée, on a réduit son pouvoir, si bien qu'en ce qui me concerne le BAPE, là, c'est comme le strict minimum de ce qui reste d'évaluation environnementale.

• (15 h 10) •

Alors, si on tire une autre torpille vers le BAPE, il ne restera pas grand-chose à la fin, et, pour nous, c'est dangereux. Je pense, et ça a été dit à maintes reprises dans les consultations, par toutes sortes de groupes, autant les groupes partisans du projet de loi n° 66 que les opposants, ça a été dit, les consultations... L'Ordre des ingénieurs, Mme la Présidente, nous a dit ça, est généralement favorable au projet de loi n° 66, et qu'il n'avait pas beaucoup d'amendements précis à apporter, sinon des trucs techniques, disait, à propos des auditions publiques, des consultations publiques en environnement, que ça fait partie intégrante de l'acceptabilité sociale. Puis l'acceptabilité sociale, même si c'est difficile à dire, ça revient beaucoup dans le discours, dans le discours public, dans le discours du gouvernement, et c'est tant mieux, dans le discours de nous tous ici, et c'est tant mieux, parce qu'il est vrai que les populations se sont éveillées, se sont éduquées. Il y a eu plusieurs ratés, en matière d'environnement, et maintenant il est vrai que l'acceptabilité sociale fait partie de nos moeurs politiques et sociales. Moi, je le dis, l'Ordre des ingénieurs le dit, d'autres groupes sont venus nous le dire, alors, que de faire faire sauter cette étape-là dans certains projets, sous prétexte de les accélérer, quant à moi, c'est un recul et ce n'est pas acceptable.

En me préparant pour venir ici et en suivant les audiences en consultations particulières du projet de loi n° 66, je me suis mis à penser que, si d'aventure, le gouvernement avait eu les moyens parlementaires d'adopter 61, je ne serais pas ici en train de parler de 66. 61 serait devenu une loi à la fin du mois de juin, puis ça, j'avoue que ça me fait un peu freaker, parce que, notamment en matière de contrats publics, il y avait un recul là-dedans qui nous ramenait vraiment avant Charbonneau et qui nous préparait à un autre Charbonneau, commission Charbonneau, j'entends. Alors, parfois, l'opposition a du bon. Je pense que, dans ce cas-ci, on a fait oeuvre utile, parce qu'il est vrai que le projet n° 66 est tout de même mieux que 61, certainement en matière d'octroi de contrats publics.

Je ne voudrais pas que vous vous mépreniez. Je ne trouve pas que 66 est parfait, au contraire. Il y a encore des choses qui clochent dans 66, je l'ai dit, notamment en matière d'évaluations environnementales. En matière d'évaluations environnementales, on le voit, par exemple, en ce moment, et ce n'est pas dans 66, mais je veux parler du BAPE ici, avec les audiences publiques autour du projet GNL à Saguenay. Peut-on imaginer que ce projet-là continuerait d'aller de l'avant sans qu'on n'ait de consultation publique? Moi, j'ai du mal à l'imaginer. J'entends, je lis, je lis tout là-dessus. Je lis les partisans du projet, il y a des gens qui voient des vertus économiques, il y a des gens qui considèrent que c'est une horreur environnementale.

Dans le spectre, là, on a un bel échantillon, mais, si on n'a pas de consultation publique, on va lire quelques articles de journaux, quelques vox pop, pour ce que ça vaut, les vox pop sur les rues principales de toutes les villes du Québec, mais la consultation publique a cette particularité de réunir des gens qui ont dû mettre du jus de cerveau, puis s'asseoir, puis écrire des mémoires, faire des recherches. Parce que ce n'est pas long que les mémoires futiles sont démasqués rapidement, là. Les gens se présentent avec des mémoires, avec des positions documentées. Après ça, c'est «up for debate», comme on dit, c'est dans l'air, puis on en débat. D'ailleurs, c'est ça qu'on fait, nous autres, ici, avec les consultations particulières. Je viens d'en parler sur 66, 24 groupes.

Moi, je ne peux pas imaginer étudier un projet comme ça ou n'importe quel projet de loi sans avoir des consultations particulières. Bien, c'est l'équivalent au BAPE des consultations publiques, où des gens mettent au jeu des idées, des craintes, des espoirs, des ambitions, puis, à la fin, on fait la somme de tout ça. On voudrait un résultat le plus neutre possible, objectif, basé sur la science. Alors, sous prétexte que nous devons relancer l'économie, qui, en passant, en matière de construction, fonctionne déjà pas si mal, Mme la Présidente... Ça repart. Tant mieux d'ailleurs, parce qu'on avait dû fermer les chantiers pendant six semaines, ce que d'autres n'ont pas fait, dont l'Ontario. Mais ça repart, là, ça repart, au Québec. Oui, il manque de main-d'oeuvre, certaines régions, et il faut plus de projets, d'accord, soit. Mais d'appuyer sur le bouton accélération en disant : Si on ne le fait pas, si on maintient le BAPE, ces projets-là ne se feront pas, ça ne tient pas la route. Je trouve que ça ne tient pas la route, et les groupes très crédibles sont venus nous dire que ça ne tenait pas la route. Le problème avec les évaluations environnementales se répercute aussi dans les MRC puisqu'on aura une facilité plus grande à contourner les schémas d'aménagement. On a parlé de ça ici, encore ce matin, là, à la période de questions, là, schémas d'aménagement, MRC.

Moi, là, d'aussi loin que je me rappelle, Mme la Présidente, là, on parle de ça, au Québec. Je me souviens, moi, j'ai commencé... Je suis fatigant avec ma carrière de journaliste, là, mais c'est parce que j'ai fait juste ça dans ma vie, ça fait qu'il faut bien que j'en parle. Ce n'est pas vrai, j'ai été pâtissier-boulanger au début de ma jeune carrière, ça a été mon premier métier. J'aurais peut-être dû continuer, d'ailleurs, ça aurait peut-être été plus doux que la carrière de journaliste. Mais, bon, bref, je m'égare. J'ai commencé ma carrière de journaliste, ça ne me rajeunira pas, je pense, c'était en 1990, à La Voix de l'Est de Granby, le plus petit quotidien au Québec, qui est toujours là, vaillant, qui veille au grain, et déjà on parlait systématiquement... Je pense qu'il n'y avait pas une journée où il n'y avait pas le mot, l'acronyme, je devrais dire, MRC dans un des articles de La Voix de l'Est. C'était assez nouveau comme patente. On essayait de mettre des gens en commun, les regroupements, des regroupements d'achats, notamment, mais aussi de développement. Bon. Puis Granby, je comprends que c'est pas mal une des plus belles villes du Québec, là, mais ce n'est quand même pas une métropole, là. Puis déjà, à l'époque, on s'interrogeait beaucoup là-dessus, on s'interrogeait beaucoup sur du développement. Il y avait des gens dans le coin, notamment, je me souviens très bien, là, à Bromont, qui avaient de grandes ambitions, puis des fois ça heurtait déjà ce qu'il y avait comme embryon de groupes environnementalistes parce que, ça aussi, ça commençait à l'époque, puis on voulait protéger les montagnes, on voulait protéger les cours d'eau. Pas bien loin de Granby, il y a Brome-Missisquoi, puis la vallée de Brome-Missisquoi, puis la baie de Brome-Missisquoi qui a des sacrés problèmes environnementaux depuis très longtemps.

Bref, ces MRC sont des créatures utiles de décisions, et on leur a demandé de faire des schémas d'aménagement, justement, pour ne pas que ce soit chaotique, pour ne pas que ce soit une entreprise de qui va tirer le plus fort pour avoir le plus d'investissement dans son coin, qui va passer outre les milieux humides, les montagnes, par exemple, parce que ça fait des beaux développements immobiliers sur des montagnes, on le sait.

• (15 h 20) •

Alors, on s'est donné cet outil-là qui est utile et, dans le projet de loi n° 66, malheureusement, on va jouer dans les schémas d'aménagement, on va pouvoir aller jouer plus facilement dans les schémas d'aménagement. Je pense, par exemple, à ce fameux principe en environnement d'éviter, de minimiser et de compenser. Ça veut dire qu'en général, vous le savez, Mme la Présidente, si on peut éviter de toucher un lieu fragile, on ne touche pas. C'est le principe de précaution. Ensuite, si on doit le toucher, il faut minimiser. Puis, si on n'arrive pas totalement à minimiser, puisqu'évidemment on ne peut pas minimiser à zéro, bien, il faut compenser.

Ce que disent les règlements et la loi en ce moment, c'est qu'on compense dans l'ensemble d'une MRC. Ça a l'air vraiment technique, là, mais ça ne l'est pas tant que ça. Ce que la loi dit en ce moment, c'est qu'on compense, donc on va chercher un autre milieu qu'on protège, parce qu'on en a abîmé un autre, de façon équivalente, en superficie équivalente, donc ce qu'on dit en ce moment, c'est dans une MRC. Une MRC, là, c'est gros, gros, gros comme ça. Là, ce qu'on va pouvoir faire, c'est dans une municipalité. Bien, c'est quand même pas mal plus petit, là, puis ça se pourrait que, dans la municipalité en question, il n'y ait pas le territoire, le terrain requis pour compenser.

Ça, c'est une perte. C'est une perte, parce que, déjà, éviter, minimiser et compenser, c'est une mesure d'atténuation parce qu'on fait quelque chose dans un milieu humide ou dans un écosystème puis on veut compenser. Alors, je ne vois pas comment ça peut être une avancée, d'autant qu'on sait qu'en vertu de notre fiscalité municipale, le nerf de la guerre pour les municipalités, c'est le développement immobilier. C'est là que sont les taxes, c'est là que sont les revenus. Puis je ne les blâme pas, le système est fait de même. Alors, on se retrouve évidemment avec de l'étalement urbain qui va être favorisé par ça de fil en aiguille, petit développement par petit développement.

Vous savez, moi, il y a quelques années, là, une vingtaine d'années, Saint-Jérôme, là, c'était loin de Montréal. Souvenez-vous de l'aéroport de Mirabel. On trouvait que ça n'avait pas de bon sens tellement que c'était loin de Montréal. C'était loin de Montréal. On disait : Ils sont donc bien malades d'avoir mis un aéroport si loin de Montréal, ça ne marchera jamais, c'est bien trop loin. Mirabel, aujourd'hui, là, franchement, là, on dit que c'est la deuxième banlieue de Montréal, mais moi, pour circuler régulièrement, là, entre les Laurentides puis Montréal, c'est la première banlieue maintenant de Montréal. C'est le premier cercle autour de Montréal. On est quand même à, quoi, 40, 45 kilomètres de Montréal. C'est ça, l'étalement urbain. Maintenant, des gens qui vivent à Saint-Jérôme, qui travaillent tous les jours à Montréal, là, il y en a 13 à la douzaine. Avant, tu avais ton chalet à Saint-Jérôme.

Alors, ça s'est développé comme ça. O.K. Est-ce que c'est une fatalité? Non, je ne crois pas. Est-ce qu'on doit favoriser à tout crin le développement et l'étalement urbain? Absolument pas, parce que malheureusement ça fait plus d'autos sur les routes, ça fait plus de routes. Et ainsi va la vie qui va, c'est comme ça qu'on continue. Alors, moi, je ne pense pas qu'on doit aller jouer dans les schémas d'aménagement de façon trop rapide, trop facile, de façon accélérée qui va permettre malheureusement de repousser encore un petit peu la banlieue. Tu sais, bientôt, Mont-Tremblant—Montréal, là, ça va être comme se rendre de Rosemont au centre-ville de Montréal. À un moment donné, il va falloir qu'on s'arrête, là, il va falloir qu'on construise là où il y a du monde qui vit puis qu'on protège nos aires protégées. C'est un peu ça aussi le développement durable. En fait, c'est beaucoup ça.

Ce qui cloche aussi dans 66, et ça nous a été dit, c'est le peu de considération qui a été accordée aux autochtones, aux Premières Nations, qui sont venus nous le dire d'ailleurs. Puis on a poussé pour que des groupes autochtones, des Premières Nations ou pour que le chef Picard soit entendu à la commission. Que ce soient les Innus dans le coin de Sept-Îles — bien, je ne me risquerai pas à prononcer le nom de leur territoire, je ne voudrais pas les insulter davantage — que ce soient les Mohawks de Kahnawake, ils sont venus nous dire... le chef Picard est venu nous dire aussi quelque chose qu'on entend depuis trop longtemps ici puis beaucoup trop souvent : Ils n'ont pas été consultés, ils n'ont pas été entendus. Ça a été dit. Vous pouvez aller les relire, les mémoires, vous pouvez réécouter, là, si ce n'est pas déjà fait. Ils ne sont pas venus se plaindre, là, ils sont venus dire : On ne nous a pas consultés, on nous est passé par-dessus encore une fois. Et les gouvernements, dont le nôtre, ne respectent pas ses devoirs constitutionnels. C'est aussi simple et cru que ça.

Et, au-delà des devoirs constitutionnels, il y a ce bon vieux principe de négocier de nation à nation qui voudrait qu'au moins on les entende. Ils ont fait des pieds et des mains pour être invités au projet de loi n° 61, ils n'ont pas été invités, si ce n'est que le chef Picard est arrivé à la fin parce qu'on a beaucoup, beaucoup insisté. «On» inclut modestement la personne qui parle, d'autres que moi l'ont fait aussi. Donc, chef Picard est venu à la toute fin, en catastrophe. On lui a dit : Oui, oui, oui, on va vous écouter.

Le projet de loi n° 61 est mort, donc rebelote, les autochtones reprennent la plume, mauvais jeu de mots, reprennent leur ordinateur et réécrivent des lettres, des missives, des missives au bureau du premier ministre en disant : Là, cette fois-ci, j'espère qu'on va être écoutés. Est-ce qu'on pourrait être écoutés? Est-ce que nous pourrions avoir voix au chapitre? Pourriez-vous nous dire ce que vous voulez faire comme projet, quel territoire ça touche, comment nous, on peut être compensés ou mis à partie, parce qu'il y a des gens qui travaillent aussi, il y a des gens qui ont peut-être des idées, quoique c'est leur territoire, donc il est naturel que de les consulter. On leur a répondu : Oui, oui, oui, vos récriminations, vos demandes sont entendues, nous prenons en considération vos demandes. Ça s'est arrêté là. Il n'y a pas eu d'autre chose, il n'y a pas eu d'autre négociation.

Puis ça, ça se vérifie, là. Ça se vérifie, là, sur le terrain, là, ce n'est pas une vue de l'esprit, là, un territoire immense dont on connaît moins bien les dimensions ni les propriétés. Le pont Mercier, dans l'ouest de Montréal, là, le pont Mercier, ça passe directement sur le territoire mohawk de Kahnawake. On ne peut pas être plus dessus, là. Ça passe même au-dessus puis dessus. Là, si on ne l'a pas vu, si on n'a pas vu pont Mercier, Kahnawake, c'est parce qu'on ne veut pas le voir, là. C'est qu'on ne veut pas le voir, puis ce n'est pas parce qu'il n'y a pas eu de problème dans ce coin-là, là, dans un passé pas si lointain.

Le chef Montour, des Mohawks, est venu nous dire ça, nous dire : J'ai fait des demandes, j'ai réclamé qu'on soit entendus, nous n'avons pas été entendus en amont. Ils arrivent, mais le projet de loi est déjà écrit, puisqu'on l'étudie, donc il est écrit puis il a été présenté. Alors, moi, je vous le note parce que c'est certainement quelque chose qui va revenir dans l'actualité dans les prochains mois. Les Mohawks de Kahnawake, appuyés par l'Assemblée des premières nations de Québec et Labrador, demandent le retrait pur et simple du projet du pont Mercier de l'annexe I du projet de loi n° 66. Et comment pourrait-il en être autrement de leur demande? Ça n'a pas été négocié, ils se retrouvent avec ça, ils n'ont pas eu leur mot à dire.

Je ne suis pas en train de prétendre que ça aurait été simple, là, que quelqu'un au bureau du premier ministre ou que le nouveau ministre des Affaires autochtones a juste à prendre le téléphone puis à appeler le chef Montour, c'est réglé, c'est bon, on reconstruit le pont Mercier. Non, mais c'est parce que les relations avec les autochtones, elles ont été complexifiées et franchement amochées par des décennies et même davantage de négligence. On n'a pas pris soin de cette relation-là, et ce qu'on a fait là... Vous savez, là, vous êtes, Mme la Présidente, chers collègues, aussi élus que moi ici. Vous représentez du monde puis vous représentez le peuple du Québec. Ce n'est pas gratifiant, même par visioconférence, là. C'est peut-être moins intimidant, parce qu'on n'a pas le fameux «eye contact» aussi fort par visioconférence, mais ce n'est pas gratifiant, là. Moi, je n'ai pas trouvé ça gratifiant d'être là, là, puis de me faire dire ça encore une fois par des Premières Nations qu'on pile sur leurs traités, puis sur les principes, puis tout ça, le respect qu'on devrait avoir mutuellement. Il faut qu'on arrête ça, là, pas de farce, là. Il faut vraiment qu'on se remette les yeux en face des trous, qu'on considère que ces gens-là sont des partenaires à part entière. Je ne peux pas croire qu'on va encore continuer ce genre de modèle de relation. Il y a quelque chose de terriblement désolant là-dedans.

• (15 h 30) •

On parle de plus en plus, Mme la Présidente, dans les grands projets puis dans... même dans les projets, puis on devrait en parler d'ailleurs dans les projets de relance économique, d'écoconditionnalité, à savoir qu'un projet ne devrait pas recevoir de fonds publics ni l'aval ou le feu vert, s'il ne respecte pas et ne remplit pas certains critères environnementaux. C'est assez nouveau. Moi, j'aime beaucoup. Ça me parle. Je trouve qu'il y a quelque chose là-dedans qui, en plus, est essentiel, là, dans la crise climatique. Mais moi, je pense qu'on devrait avoir aussi une autochtoconditionnalité. On ne devrait pas continuer de faire des projets puis de lancer des projets, puis des projets de loi, là, comme 66, sans la consultation préalable avec les Premières Nations. Autochtoconditionnalité. Je pense que c'est un principe qu'on devrait appliquer ici, qui nous éviterait d'avoir honte à chaque fois qu'on fait une consultation puis qu'on vient se faire dire, encore une fois, qu'on n'a pas respecté nos devoirs constitutionnels puis qu'on passe par-dessus des peuples. Enfin, je trouve ça un peu gênant.

Ce qui manque aussi dans le projet de loi n° 66, c'est ce qu'on appelle une relance solidaire, verte et durable. Puis ça, ce n'est pas Québec solidaire qui a inventé ça. Il y a le mot «solidaire» là-dedans, là, mais nous ne sommes pas l'unique détenteur des droits d'auteur sur le mot «solidaire». Ça vient notamment de G15+. Ça vient notamment d'un groupe, de G15+. Puis, si vous voulez de la bonne lecture de chevet sur ce qu'aurait pu être le projet de loi n° 66 ou comment l'améliorer, parce qu'on est juste au début, là, on a espoir qu'on puisse l'améliorer, bien, allez lire le mémoire de G15+. Ce n'est pas très long. En plus, ils ont bien packagé ça, ils ont mis leurs cinq recommandations. D'abord, cinq recommandations, c'est une bonne idée parce que trop, c'est comme pas assez, puis, quand il y en a cinq bonnes, tu n'as pas besoin d'en avoir 25 autres. Ils en ont cinq bonnes, cinq bonnes recommandations. Je vous invite à aller lire ça. Je ne vous les lirai pas toutes parce que ce serait beaucoup trop long. Mais je veux juste vous dire, si vous ne le savez pas, puis je pense que la plupart des gens ici le savent mais c'est important pour moi de le dire, quand je vous dis qu'on parle d'une relance solidaire, verte et durable, là, que ce n'est pas un slogan inventé, là, à la permanence de Québec solidaire, ça vient de ces gens-là.

Je vous donne la composition du G15+. Fondation David-Suzuki. Bon, là, vous allez me dire : Groupe environnementaliste, la gauche, Québec solidaire, vous êtes pas mal tous dans la même gang, là. C'est ce qu'on appelle les «usual suspects», en anglais. O.K., mettons que la Fondation David-Suzuki... Le Conseil du patronat du Québec. Woups! Là, on vient sérieusement de s'éloigner des talles de Québec solidaire. La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, Chantier de l'économie sociale, COPTICOM, Ordre des urbanistes du Québec, Propulsion Québec, Vivre en ville, Équiterre, AGRTQ, Écotech, j'en passe... Fédération des chambres de commerce du Québec. Eux autres non plus, ils n'ont pas de carte de membre de Québec solidaire.

Tout ça pour dire qu'on a, dans ce marasme épouvantable, là, qui nous est tombé dessus — je parle de la pandémie — une occasion en or de relancer l'économie, mais différemment, de faire autrement que ce qu'on a toujours fait. Puis G15+, c'est ça qu'ils sont venus nous dire. C'est ça qu'ils sont venus nous dire, avec des idées de développement durable, d'écoconditionnalité, de grilles d'analyse de projets, d'investissements pas juste dans la brique et le mortier mais d'investissements aussi dans l'économie sociale, dans l'économie circulaire, dans l'économie verte et durable. Moi, je vous invite, en tout cas, je vous invite vraiment à aller regarder ça parce que, moi, je pense que c'est là, l'avenir, puis les sociétés qui vont le mieux s'en sortir, là, au cours des 20 prochaines années, 30 prochaines années, là, c'est celles qui adopteront ces principes-là.

66 n'est pas fermé, là, on fait juste commencer à l'étudier. Évidemment, vous me voyez venir, c'est sûr que nous pousserons vers ça et d'autres choses, mais nous pousserons assurément vers ça. Mais malheureusement, pour le moment, Mme la Présidente, dans son état actuel, 66 est assez étriqué. C'est essentiellement une liste de projets d'infrastructure... Qui ont du mérite, hein, cela dit, ils ont du mérite. Je ne m'opposerai certainement pas aux maisons des aînés, certainement jamais à une école. J'en veux, des écoles. Bon, les routes, on peut discuter, là, je suis moins parlable, mais, cela dit, 66, c'est d'abord et avant tout une annexe avec 181 projets dont certains ont besoin d'une accélération, soit par le BAPE ou pas de BAPE — en fait, avec pas de BAPE — ou avec expropriation. Essentiellement, la ligne bleue du métro de Montréal, on va se le dire, pour l'expropriation, c'est surtout pour ça. Nous avions demandé un projet de loi distinct sur la ligne bleue pour en finir avec le prolongement de la ligne, puis je pense qu'on aurait pu le dépolitiser puis régler ça comme ça. Le projet de loi englobe le prolongement de la ligne bleue. Je ne cracherai jamais dans la soupe du prolongement de la ligne bleue, là, puis imaginez, aujourd'hui à Montréal, prolonger de cinq à six, sept kilomètres une ligne de métro, c'est difficile d'imaginer qu'on fera ça sans aucune expropriation, c'est difficile, puis c'est difficile d'imaginer que toutes les expropriations se passent superbien, tu sais, il y a un huissier qui vient cogner chez vous un matin, qui dit : Aïe! on va t'exproprier, puis le lendemain, il y a quelqu'un qui t'amène un chèque, puis tu t'en vas tout content. Bien non! Turcot aussi, il y a eu beaucoup d'expropriations, puis il y a eu des cas malheureux. Moi, j'ai vu des reportages de gens, là, qui ont vécu là toute leur vie, dans Saint-Henri, puis qui étaient heureux, puis c'était chez eux, puis qui pleuraient parce qu'il fallait qu'ils partent. Bon, ça, c'est le malheur des expropriations, mais l'expropriation, quand c'est bien fait, avec respect, compensation juste et possibilité d'appel, ce qu'il faut quand même maintenir, si c'est fait pour le bien commun, bien, soit. Puis ce n'est pas un député de Montréal qui va vous dire que le prolongement de la ligne bleue est contre le bien commun. C'est contre le bon sens que ça n'a pas déjà été fait, mais c'est certainement un projet qui est pour le bien commun.

Il y a quelque chose aussi qui cloche dans le projet de loi n° 66. Ce n'est pas écrit, mais ça cloche. C'est le sous-texte. Le sous-texte du projet de loi n° 66, puis ça a été dit textuellement par des partisans du projet de loi n° 66, c'est qu'en fait le projet de loi n° 66, c'est la porte ouverte, c'est la zone d'expérience pour accélérer certains projets, notamment sans consultation publique du BAPE, parfois sans BAPE pantoute. Donc, c'est une zone d'expérience qui nous permettrait éventuellement d'étendre ça ailleurs, dans d'autres projets. Puis là, on a un problème avec ça, Mme la Présidente, parce que quand on prend la liste des 181 projets, on ne le sait pas exactement, lesquels ont besoin des mesures d'exception de 66. C'est un peu absurde, là, parce que, là, on travaille... comme disent les Anglais, là, on fait du «shadow boxing», là, on ne sait pas contre qui on se bat puis qu'est-ce qu'on doit définir là-dedans. Je vous l'ai dit, c'est très clair pour le projet de la ligne bleue, c'est de l'expropriation. Ça prend l'expropriation puis c'est pour ça que ça a été fait, c'est pour ça qu'il y a cet article-là. Très bien, ça, c'est clair comme de l'eau de roche. Mais, sinon, parmi les 180 autres projets, lesquels auront besoin de mesures d'accélération? Il y en a deux qui sont nommés. La 117 puis la 30, les routes 117 et 30. Ça, c'est clair, c'est nommé, mais le reste, on le demande. On ne l'a pas. On ne l'a pas, la liste. Alors, ça peut être bien des projets.

Je comprends que l'agrandissement du CHSLD Jeanne-Le Ber, dans Hochelaga-Maisonneuve, ça ne demandera pas un BAPE puis ne demandera pas une accélération de quoi que ce soit, c'est intra-muros. Le building, il est déjà là, il est construit depuis je ne sais pas combien d'années. Ça, ça va. Ça, je comprends ça. La construction d'une maison des aînés dans un endroit qui n'est pas marécageux, qui n'est pas protégé, bien, encore là, pas besoin de 66. Mais quels projets ont besoin de 66? Je ne le sais pas.

• (15 h 40) •

Hier, le ministre... avant-hier, en fait, le ministre des Transports a fait une sortie pour annoncer des investissements majeurs pour l'autoroute 15, avec des voies réservées. Je me réserverai les commentaires pour plus tard sur ce projet-là précisément, mais le ministre des Transports a ajouté, puis ça m'a interloqué, il a ajouté aux journalistes : C'est pour ça qu'il faut absolument qu'on adopte 66, puis c'est pour ça qu'il faut que l'opposition comprenne que la relance économique et des grands projets de l'infrastructure passent par 66. Et là, il a nommé les autoroutes 13, 19, 25, 440, 640 et les routes 116 et 132, qui sont effectivement des projets dans l'annexe I. Mais lesquels auront besoin de mesures d'accélération en vertu de 66, et à quelle hauteur? Je ne sais pas. Je suis capricieux, là, mais moi, j'étudie ce projet de loi là, puis j'aimerais ça le savoir, puis je ne le sais pas, je ne le sais pas. Alors, je ne sais pas trop sur quel pied danser.

Puis il se trouve qu'il y a un nombre important de témoins qui sont venus nous dire que pour eux, pour eux, les analyses environnementales, comme le BAPE, ils ne l'ont pas dit comme ça, mais je vais résumer, ce sont... c'est essentiellement de la bureaucratie tatillonne. Ça, c'est mes mots à moi. Un des mots que j'ai beaucoup entendus, c'est «délai». Il y a trop de délais, c'est trop long. Alors, ils font l'équation, puis ils ont bien le droit, là, que l'évaluation environnementale égale nécessairement «délai» et qu'évidemment, si on peut sauter par-dessus ces délais-là, bien ça ira plus vite puis on sera plus heureux. Moi, je trouve que c'est une pente savonneuse, là, vraiment, vraiment glissante, là, sur laquelle on ne devrait pas vraiment s'engager, là, parce qu'entre vous et moi, si on doit attendre quelques semaines, quelques mois de plus pour aller chercher toutes les autorisations voulues avant de se lancer dans quelque chose qu'on ne pourra pas débâtir, parce qu'une fois qu'une route est construite, c'est assez difficile à... on ne peut pas la rouler puis repartir avec, là, la route est là puis on vit avec... Puis on en a vu des fiascos au Québec au fil des années, quand on a voulu aller trop vite, ou quand le BAPE n'existait pas, ou quand le BAPE a été contourné, ou n'a pas fait réellement son travail. Alors, on vient nous dire essentiellement : Tout ce qui est mesure d'évaluation environnementale, là, c'est, tu sais, ce que les Anglais appellent du «red tape». On se prend les pieds dedans, ce n'est pas nécessaire puis c'est fatiguant, on peut-u passer par-dessus? Ça, ce sont les partisans du projet de loi qui disent ça. Mais les opposants au projet de loi disent évidemment : Bien non, ne coupez pas les évaluations environnementales, surtout pas les consultations publiques, c'est essentiel, c'est essentiel.

Donc, il y a dichotomie entre les deux positions, mais il y a une chose qui est revenue, par contre, qui fait l'unanimité, je pense qu'on l'a entendu de 20 des 24 groupes, là, opposants au projet de loi comme partisans du projet de loi, c'est qu'on manque de monde sur le terrain pour faire appliquer les lois et les règlements environnementaux. Même la présidente du Conseil du trésor le reconnaît. De toute façon, c'est dur à nier, là. Il y a eu combien de rapports, dans les trois dernières années, de la Vérificatrice générale là-dessus? On manque de monde au MTQ, surtout en région, on manque de monde en environnement, on manque d'évaluateurs agréés, parce qu'avant d'aller exproprier quelqu'un, on essaie d'avoir une évaluation assez juste de ce qu'on veut exproprier. On manque de monde. Mais prenons juste le cas de l'environnement, on manque de monde. Je pense qu'il n'y a personne ici qui dirait : Le député de Rosemont, il dit n'importe quoi, ce n'est pas vrai qu'on manque... On manque de monde, c'est un fait, c'est comme qu'il va faire noir à soir, là, on manque de monde sur le terrain, tout le monde le dit, c'est clair.

Alors, les partisans du projet de loi n° 66 sont venus nous dire : Bon, bien, on manque de monde, ça fait qu'on ne le fera pas. On passe par-dessus, ça va aller plus vite. Les opposants du projet de loi n° 66 disent : Bien non, engageons du monde, engageons du monde, on ne va pas liquéfier nos lois parce qu'on ne s'est pas donné les moyens de les appliquer, me semble que ça n'a pas de bon sens, c'est se tirer dans le pied. On a voté au fil des décennies ici des lois environnementales qu'on devrait vouloir faire appliquer. C'était ça, l'esprit quand on les adoptées, ces lois-là, mais là, parce qu'on ne s'est pas donné les moyens, on va les contourner. Bien, je ne le sais pas, pour moi, il y a une logique là-dedans qui ne tient absolument pas la route.

Je vais donc sous peu m'arrêter là-dessus. Moi, j'ai parlé, la semaine dernière... Et je pense que ça a piqué la présidente du Conseil du trésor, mais je ne l'ai pas fait pour ça. Des fois, on dit des choses, puis ça crée des réactions. Puis des fois on dit des choses, puis les médias le ramassent, puis ça devient bien, bien gros. Des fois, on dit quelque chose de bien, bien gros, puis ça passe inaperçu. J'ai évalué, dans une envolée lyrique, que le projet de loi n° 66, en fait, c'est un cheval de Troie. C'est mon idée, que j'ai développée depuis tout à l'heure ici. C'est un cheval de Troie, en ce sens que, sous le couvert de la relance économique, pour laquelle nous sommes tous et toutes d'accord, nous voulons faire passer en douce une réduction, notamment, des processus d'évaluation environnementale. Vraisemblablement, pour pouvoir dire après : Voyez donc! Ça a donc bien marché! C'est facile de même, sauf qu'on aura perdu d'aventure des évaluations environnementales, puis ça, au risque de me répéter, pour moi, ce n'est pas une avancée. Alors, la présidente du Conseil du trésor, qui a été un petit peu piquée par ma remarque, m'a fait savoir, en commission parlementaire, qu'elle ne chevauchait pas de cheval de Troie. C'est bien ça qui m'inquiète, c'est qu'elle est dedans. C'est le principe du cheval de Troie, c'est qu'on n'est pas dessus, on est dedans, mais, cela dit, sur cette boutade, Mme la Présidente, je ne veux pas prêter de mauvaises intentions à la présidente du Conseil du trésor. L'ambiance au projet de loi n° 66 est bonne, elle est constructive, mon approche est constructive. Je répète qu'on a eu 24 témoins, et là-dedans, quand on passe toutes les idées au tamis, il reste des beaux gros morceaux que nous devrions considérer.

Alors, j'offre ma collaboration. La présidente du Conseil du trésor sait qu'elle peut compter sur ça. J'espère qu'on sera capables de s'entendre et j'espère surtout, là, qu'à la fin on ne se retrouvera pas devant cette absurdité de mettre développement, économie, relance économique d'un bord, puis protection de l'environnement de l'autre. Ça fait tellement longtemps qu'on le dit ici, là, que ça va de pair puis que ça doit aller de pair, il est plus que temps qu'on joigne les actes à la parole.

Alors, à ce moment-ci, puisque nous sommes au principe, évidemment, nous ne pouvons pas approuver ce projet de loi, du moins à l'étape du principe. Mais je répète, pour la suite, qu'on est bien parlables. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Rosemont. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Au risque de me trouver à un autre bout du cheval de Troie qui est compromettant, je crois que je vais laisser la métaphore à côté. Mais, bon, voilà un débat qui est assez sérieux. J'apprécie l'opportunité d'intervenir lors de ce débat sur le principe du projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Accélération signifie peut-être arrondir des coins, arrondir des coins. On se rappelle qu'il faut être très, très prudent dans une telle instance, Mme la Présidente. Je me permets de nous rappeler, comme a fait mon collègue le député de La Pinière dans le même débat, que l'adoption de principe signifie l'acceptation, ce qui va être le cas pour notre formation, d'un débat sur la pertinence d'un débat sur les contenus d'un projet de loi. Mais ça nous réserve évidemment toute la marge de manoeuvre pour faire tous nos plus grands efforts pour que ce soit amélioré. Et ça nous réserve le droit de nous prononcer aux autres instances sur le processus, sur le cheminement de ce projet de loi.

Maintenant, on va se rappeler que ce n'est pas le projet de loi n° 61. Et c'est important qu'on se rappelle de ça. Ce projet de loi a été raisonnablement et correctement retiré, retiré suite à une opposition assez unifiée, dont notre formation en opposition officielle a été très, très présente pour des raisons très importantes, et très responsables, et raisonnables. Je me permets de me rappeler la réaction du premier ministre à cette opposition.

And I think it's important because we were, as we remain, in an unprecedented crisis, this pandemic before us. And the Premier of Québec's reaction to our opposition to this project and to that of so many important groups representing our civil society was that our opposition was irresponsible, that it was standing in the way of absolutely essential economic development, and, pretty much, there was a suggestion, in this very serious context, I'm only exaggerating a bit, but that the world as we know it was going to be put in danger by our presumably irresponsible behavior. Pretty important, I think, to remember that that kind of intervention, with respect, and in and of itself, was probably irresponsible.

• (15 h 50) •

Notre formation, dans son opposition, dans son opposition, était pleinement consciente de notre responsabilité collective de veiller à la survie même et à l'épanouissement de notre développement durable, de notre économie. C'est pourquoi, durant tout ce temps-là et aujourd'hui toujours, nous nous donnons la tâche d'avoir des propositions structurantes sur le développement économique, sur le bon déroulement de notre économie. Ça, c'est un fait.

En bonne connaissance de cause, de nos responsabilités collectives pour à la fois protéger la règle du droit, le développement durable, la «due diligence», comme on dit, et l'économie, nous avons jugé... et on a été, comme je dis, accompagnés par plusieurs, plusieurs des groupes, la plupart, qui se sont présentés devant les audiences parlementaires sur le 61, et nos interventions ont été de l'ordre très responsable. Bon, le gouvernement, de façon responsable, et à son honneur, l'a constaté. Et, Mme la Présidente, on se trouve aujourd'hui devant un autre projet de loi, le 66, qui a l'air d'avoir constaté qu'il y avait de quoi à faire de différent.

Donc, nous avons un projet qui est beaucoup plus conscient de l'importance, oui, dans une situation exceptionnelle, de rendre l'économie et le développement faisable et des fois, oui, oui, oui, de le faire accélérer de façon responsable, mais jamais, mais jamais de le faire avec une carte blanche. Donc, si je peux me permettre de faire le bilan de quelques-unes de ces dispositions qui vont, en sorte, accélérer les travaux d'infrastructure surtout, il faut le faire, et il faut comprendre que, si on parle, à quelque part, des dérogations, des dérogations et pas des principes de base, toujours — on n'est plus devant le 61, on est devant le 66 — toujours que ça se fasse avec de la prudence.

Bon, les genres de dérogations qu'on va permettre avec ce projet de loi : une procédure d'expropriation allégée, la possibilité d'entreprendre des travaux sur une partie du domaine de l'État avant l'obtention des droits requis, de l'aménagement de certains processus applicables en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, et une soustraction de l'application des dispositions de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour les interventions gouvernementales, et ainsi que des allègements à la procédure d'obtention d'une autorisation municipale. Bon, comme je dis, je me permets de constater que n'est pas des choses anodines. C'est des choses réelles et sérieuses, et très, très recevables et discutables. Nous ne sommes pas en période normale, donc, pour faire en sorte qu'il y a cette accélération qui est normale et nécessaire peut-être, et là, je ne le caractériserai pas comme de couper des coins, ce n'est pas de façon responsable et éclairée. Est-ce qu'on peut permettre des dérogations? La question très légitime s'impose.

La prudence s'impose aussi, bon, donc une des raisons pourquoi nous serions très vigilants dans les étapes qu'il reste à franchir sur ce projet de loi devant nous... la prudence s'impose aussi quand on parle d'une autre prévision, où «le projet de loi attribue notamment à l'Autorité des marchés publics la fonction d'examiner le processus d'adjudication [et] d'attribution des contrats publics qui découlent d'un projet d'infrastructure lorsque l'organisme public concerné n'apparaît pas agir en conformité avec le code normatif». Celle-ci peut ordonner la suspension ou la résiliation d'un contrat adjugé, mais son pouvoir se limite à une recommandation dans le cas d'un projet sous l'autorité d'un organisme municipal. Bon, rédigé de façon prudente, j'en conviens, à surveiller comme il faut aussi. Finalement, on note que ces genres de dérogations, si vous voulez, sont nécessaires en ce qui a trait aux cas des expropriations possibles, en ce qui a trait à la ligne bleue du métro, bon exemple où nous avons l'intérêt assez partagé de voir s'il y a un équilibre ajusté, à quelque part, qui s'impose dans ce contexte actuel.

Qu'on se rappelle les choses, et je reviens à notre opposition antérieure, les choses qui ne sont plus dans le projet de loi devant nous, une liste assez importante, qui valide, en quelque part, si c'était nécessaire, l'opposition à l'ancien projet de loi. Voilà quelques concepts qui sont disparus. La prolongation indéfinie de l'état d'urgence sanitaire; on ne l'a pas faite, et... The sky did not fall. Life as we know it went on. La possibilité d'ajouter des projets d'infrastructure à la liste dans les deux prochaines années. Bon, c'est disparu aussi et à juste titre. Les disponibilités permettant de revoir l'ensemble des contrats accordés par les municipalités. Comment ça aurait été nécessaire? Tout simplement parce qu'on est devant une pandémie, prétexte assez discutable, disons, mais, à juste titre, ce n'est plus dans le projet devant nous. Deux autres choses qui ne sont plus là, la possibilité de modifier toute loi au nom de la pandémie de COVID-19. Comme on dit en anglais: «There are a number of trucks I could have driven through that provision, and some that would have been poorly directed.» Et l'immunité de poursuite judiciaire, je crois que je voyais quelques membres de l'opposition qui ont rougi un petit peu à la lecture de cette prévision au début. Mais, une autre fois, là, on parle d'un projet de loi qui est réaliste dans son approche et à examiner de proche, mais on est devant un projet de loi qui est bien intéressant dans le contexte actuel et loin du projet de loi qui a été retiré.

• (16 heures) •

En ce qui a trait aux expropriations, la loi permettrait au ministre des Transports du Québec, qui est déjà responsable de la Loi sur les expropriations, d'accélérer le processus qui prévoit actuellement une signification d'expropriation et un avis d'expropriation, mais, maintenant, il n'y aurait qu'un avis, qui inclura le montant de l'offre, la date à compléter de laquelle il serait pris possession du bien, l'obligation pour l'exproprié, le locataire et l'occupant, de bonne foi, d'avoir quitté les lieux avant la date de prise de possession, soit 30 jours. Bon, prudence, une autre fois, qui s'impose, mais des ajustements qui peuvent se justifier à la grande lumière, et on va contribuer à cette lumière-là avec notre examen aux autres étapes de notre débat ici. Là, parmi les regroupements qui avaient de la difficulté avec l'ancienne loi ainsi que le projet de loi devant nous, Mme la Présidente, il y en a plusieurs intervenants très connus et très crédibles sur l'environnement. Et on se donne la fierté, de ce côté de la Chambre ainsi que le côté ministériel, d'être très conscient, très conscient, et, avec chaque mois qui passe, davantage conscients de nos obligations en tout ce qui a trait au développement durable, chacun avec notre approche. Mais je prends pour acquis que le gouvernement se donne cette préoccupation à chaque reprise et à chaque moment qu'on parle de l'économie et développement économique. Pas de coin à tourner rond là-dessus.

Là, il y a des lumières ambres qui restent clignotantes devant le projet de loi n° 66, qui va permettre au gouvernement de ne pas appliquer des dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement. Et, pour certains projets dont le risque d'environnement est modéré ou élevé, le ministère de l'Environnement pourrait se contenter de relevés photographiques et de la documentation fournis par le promoteur du projet — ouf! — afin de valider l'étude d'impact environnemental du promoteur plutôt que de mener sa propre contre-expertise. Le BAPE ne serait pas systématiquement tenu de tenir des audiences publiques. Je ne vous cache pas que, Mme la Présidente, j'ai de la difficulté à comprendre tout de suite comment ce genre de dérogation soit très nécessaire pour qu'on avance sur un des projets en annexe à ce projet de loi. Je me permettrais de dire une autre fois tout simplement que ça va être la prudence extrême qui va s'imposer.

Deuxième exemple : en ce qui a trait à l'environnement, dans le cas des terrains contaminés, la possibilité pour le promoteur d'obtenir des approbations pour chaque étape des travaux de décontamination ouvre la voie à une dynamique de fait accompli et place le ministère de l'Environnement dans une situation où il découvrira des risques à la dernière étape, une fois des sommes importantes engagées, dont des risques qu'il aurait découverts au point de départ en vertu des lois et règlements actuels.

Alors, tout cela pour dire, les dispositions qui touchent à l'environnement vont être gardées, par nous et par d'autres, très en vue. Parce qu'on note, quand on parle de l'environnement, qu'il y a des mesures d'accélération qui réduiront, comme je viens dire et de d'autres façons aussi, le caractère transparent et public du travail justement du BAPE, bon, et l'objectif d'éviter de nouvelles pertes nettes dans les superficies totales de milieux humides. À titre d'exemple assez probant, serait quasi impossible à atteindre si ces dispositions font école. C'est une mise en garde importante, on a des discussions, justement, à ce sujet actuellement, alors il faudrait être prudent.

En ce qui a trait à l'Autorité des marchés financiers, la loi ajoute à son autorité aux outils d'enquête de disponibles à l'égard des 181 projets dans l'annexe du présent projet de loi, mais les pouvoirs de l'AMP ne sont pas assez extensifs pour... que ceux du Bureau de l'inspecteur général à Montréal. Ce manque d'équivalence nous trouble et ne s'applique pas aux autres projets du PQI ni au-delà d'un horizon de cinq ans. Donc, un MP n'aurait qu'un pouvoir de recommandation quant aux travaux connexes sous la responsabilité d'un acteur municipal.

Donc, ça peut inviter quelques questions. Et là, davantage, Mme la Présidente, ceux qui nous invitent à poser ces questions-là, il y a des limites d'identifier, sur l'échéancier, l'étendue et le droit de regard de ce projet de loi. Question très simple : Pourquoi, pourquoi, si on ne peut pas — et, moi, j'ai des grandes difficultés à le faire — si on ne peut pas identifier clairement pourquoi ces nouvelles interrogations soient nécessaires dans le court terme... On dit, en anglais, je ne veux être trop dramatique, mais... «Is there a smoking gun somewhere?» Si nous avions trouvé le juste équilibre, pourquoi ça ne marche pas pour le long terme? Alors, une question qui sème quelques doutes.

Bon, juste dans le petit temps qu'il me reste, je me permets de faire allusion à quelques-unes des interventions qui ont été faites. Évidemment, avec grande crédibilité, on peut toujours réinvoquer les observations de la Vérificatrice générale. Ce n'est pas rien. Et, premièrement, elle s'est démontrée défavorable. On peut le qualifier comme moins défavorable qu'elle l'était devant le projet de loi n° 61, mais il reste que... Et, parmi ses réticences, elle a identifié l'exemple que j'ai donné des terrains contaminés et le fait que le projet risque de rendre impossible la tâche de savoir si un site a été entièrement ou adéquatement réhabilité. Ce n'est pas rien. Et c'est la Vérificatrice générale.

Bon, il ne me reste pas grand temps, mais ce n'est pas pour minimiser l'importance qu'à nouveau, à nouveau, les représentants de nos Premières Nations et nos communautés inuites, de façon assez claire, ont dénoncé le manque de consultations. Donc, nous avons du travail du travail devant nous et nous serons au rendez-vous. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Et maintenant je vais reconnaître M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de m'exprimer sur l'adoption du principe du projet de loi n° 66, la Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

On a travaillé très fort jusqu'à maintenant dans les auditions publiques. En commission parlementaire, on a reçu au-delà d'une vingtaine de groupes. J'aurai l'occasion de faire référence à certains d'entre eux dans mon allocution.

On a quand même constaté, de notre côté, une évolution par rapport au projet de loi n° 61. Vous savez, nous vivons une crise sanitaire et économique absolument inédite, absolument unique, absolument historique, de sorte que d'investir dans des infrastructures publiques demeure une bonne manière de relancer l'économie, soutenir l'économie. Nous sommes d'accord avec ça. La différence, c'est que nous voulons avoir une relance économique en investissant dans des infrastructures qui nous permettent de faire un saut, les physiciens diraient un saut quantique, donc de faire un saut vers autre chose, vers un autre type de système, vers une autre économie, et de profiter de cette occasion, de cette opportunité qui est une crise que personne n'a souhaitée pour faire un pas important vers une économie tournée vers la lutte contre la crise climatique, tournée vers l'environnement, tournée vers des infrastructures vertes. On aura l'occasion d'en reparler un petit peu plus tard, Mme la Présidente, mais, pour nous, il y a là une occasion historique à saisir pour faire un pas vraiment différent vers un autre type de système économique. Et les possibilités sont énormes, dans les infrastructures vertes, puis j'aurai l'occasion d'en reparler tout à l'heure.

• (16 h 10) •

Quand je vous dis qu'il y a eu quand même des avancées par rapport au projet de loi n° 61, qui a été rejeté, qui est mort au feuilleton lors de la dernière session, au printemps dernier, on sait que le gouvernement avait choisi de l'annoncer à la dernière minute, avait choisi de pousser la machine au max, avait choisi de bousculer les règles parlementaires, et il est arrivé ce qu'il est arrivé, avec une quasi-unanimité des groupes, incluant le Vérificateur général, incluant le bureau du... le BIG, du côté de Montréal, donc, le comité de suivi également de la commission Charbonneau, qui avait dénoncé le projet de loi n° 61.

Alors, le gouvernement a refait ses devoirs, entre temps, il y a eu un changement de ministre du côté du Conseil du trésor, et le gouvernement a refait ses devoirs en déposant ce projet de loi n° 66. Et l'ironie, d'une certaine manière, d'un point de vue d'opinion publique, de notre point de vue, bien, ça nous donne raison, c'est que le gouvernement a abandonné un certain nombre de choses entre le projet de loi n° 61 et le n° 66, donc entre cinq, hein, 61 plus cinq donne 66, là, hein, il s'est passé quelque chose, là, où le gouvernement a abandonné des choses. Notamment, le pouvoir de contourner la Loi sur les contrats des organismes publics, il a abandonné ça. Tout le monde était contre ça. Le gouvernement a abandonné le pouvoir de changer par règlement, et ça, c'était très fort. Moi, ça m'a fait coller au plafond, là, ici, puis le plafond est quand même assez haut, alors imaginez comment j'ai sauté.

Le gouvernement, entre le n° 61 puis le n° 66, a abandonné le pouvoir de changer par règlement toutes les lois et tous les règlements du Québec — c'était tout un pouvoir — également la prolongation très, très longue de l'urgence sanitaire, et il a abandonné également l'immunité de poursuite du gouvernement, des ministres, des organismes publics et de toute autre personne qui agissait dans le cadre du projet de loi. Donc, il a abandonné tout ça entre le n° 61 puis le n° 66, là, il a abandonné tout ça.

Alors, on reconnaît qu'il y a là une amélioration tout à fait notable dans les mesures exceptionnelles pour relancer l'économie en investissant sur des infrastructures puis on reconnaît également que, de ce fait, de ce fait, le gouvernement nous donne raison, à nous, mais à plusieurs intervenants, citoyens, à plusieurs groupes, à plusieurs institutions importantes, qui sont venus plaider durant le projet de loi n° 61. Le gouvernement nous donne raison. Il s'est passé une épiphanie, je dirais, durant l'été, de sorte que le gouvernement a déposé le projet de loi n° 66 en évacuant ces quelques éléments et d'autres que je viens de vous nommer.

Le gouvernement a aussi ajouté un certain nombre de choses pour lesquelles nous sommes d'accord, donc, entre le n° 61 et le n° 66, entre autres, la surveillance des contrats publics et des mesures d'accélération, ce sera surveillé par l'Autorité des marchés publics, l'AMP, alors on est d'accord avec ça; entre autres d'avoir le pouvoir qui est dévolu normalement aux commissions d'enquête en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête, ce sera alloué à l'Autorité des marchés publics, l'AMP.

Nous, on avait demandé, lors des débats sur le projet de loi n° 61, que ce soit entre les mains du VG, le Vérificateur général, mais le gouvernement a choisi de l'accorder à l'Autorité des marchés publics. On est favorables à ça. Je sais que l'opposition officielle avait fait aussi cette demande. Donc, le reconnaît. L'objectif, c'est d'avancer, puis, là-dessus, on reconnaît que le gouvernement a avancé pour le bien de la transparence, de la lutte contre la corruption, d'éviter la collusion, de la saine gestion des finances publiques, la saine gestion de nos impôts puis de nos taxes à travers une surveillance des contrats publics qui sera effectuée par l'AMP. On est d'accord avec ça.

Donc, le gouvernement a abandonné des choses qui étaient absolument inacceptables, je les ai nommées tout à l'heure, il en a ajouté, entre autres sur la surveillance des contrats publics, puis il a conservé un certain nombre de choses, entre autres les dispositions sur la ligne bleue. On est d'accord avec ça. La ligne bleue, ça fait longtemps qu'on en parle, ça fait longtemps que les gens de l'est de Montréal attendent après ça, la ligne bleue. Moi-même, comme ministre, en 2013, comme ministre des Transports, j'ai eu l'occasion de faire avancer les travaux de la ligne bleue en faisant une annonce. Malheureusement, ça n'a pas beaucoup avancé depuis ce moment-là avec l'arrivée du gouvernement de M. Couillard. Mais il reste que la ligne bleue est prioritaire, puis il y a des dispositions sur la ligne bleue que nous appuyons. On va voir dans le détail, quand on sera à l'étude détaillée, mais il reste que, globalement, on est d'accord avec ça.

Donc, le gouvernement retranche par rapport à 61, ajoute par rapport à 61, garde des choses par rapport à 61 et précise aussi un certain nombre de choses, notamment sur la question de l'expropriation, où, par exemple, les expropriés, à travers le projet de loi n° 66, pourront au moins contester le montant qu'ils recevront en contrepartie de leur expropriation. Alors, ça aussi, on est d'accord avec ça, mais on a reçu des spécialistes, entre autres Me Nikolas Blanchette qui a amené des questions intéressantes et importantes lors des auditions publiques sur, entre autres, le fait que, dès le lendemain de l'adoption éventuelle du projet de loi n° 66, il pourrait y avoir des contestations judiciaires. Alors, on va préciser ça durant l'étude détaillée, on va faire un travail sérieux là-dessus.

Donc, globalement, il y a des nouvelles choses. On est dans un projet de loi... on ne peut même pas dire dans un projet de loi n° 61 amélioré plus, plus, avec granules bleues, là, on n'est même pas là-dedans, parce qu'il y a trop de différences. On est vraiment dans un nouveau projet de loi, dont le principe, et c'est ce dont on parle aujourd'hui, concerne l'accélération de certains projets d'infrastructure dans un contexte de crise unique.

Peut-être une dernière chose avant de passer à un autre sujet, là, que je voulais préciser quand même aussi, c'est la fameuse liste fermée, la liste des projets, il y a 181 projets qui sont listés, je ne sais pas si ça se dit, listés, mais, en tout cas, qui sont dans une liste à l'annexe I. Et la ministre a dit à plusieurs reprises que cette liste des projets d'infrastructure est fermée. Donc, contrairement à ce qu'on avait dans le projet de loi n° 61, il y avait des possibilités, là, de jouer dans la liste; là, ce n'est pas le cas, selon ce que la ministre nous dit, en tout cas, on trouvera une manière de le repréciser davantage lors de l'étude détaillée, mais cette liste est fermée. On pourrait y revenir tout à l'heure, sur le fond des choses en ce qui concerne cette liste, Mme la Présidente. Donc, sur ces éléments, globalement, on est d'accord et on est favorables.

Là où le bât blesse, et il blesse pas à peu près, c'est sur les questions d'environnement, sur les questions d'environnement. On fait face, Mme la Présidente, à un gouvernement du XXe siècle. On fait face à un gouvernement qui oppose encore environnement et économie. On fait face à un gouvernement qui n'a pas compris que l'économie est un... que l'environnement, pardon, est un levier de création de richesse, d'investissement dans des infrastructures, une occasion également de faire les choses différemment, une occasion de marquer plusieurs coups en même temps, un peu comme quand on lance un caillou dans l'eau, là, j'ai fait ça en Gaspésie, cet été, là, tu sais, il fait plusieurs bonds. Alors, le gouvernement aurait pu faire plusieurs bonds avec un projet de loi de relance de l'économie puis de relance d'infrastructure en investissant dans des infrastructures vertes, dans des infrastructures durables, en envoyant un signal qu'il n'y aura pas de retour à la normale, mais «anormal», dans un seul mot, anormal étant le fait qu'on oppose trop souvent encore environnement et économie.

On le sait, que ce gouvernement, depuis son élection, en 2018, se fait beaucoup pousser dans le dos par des jeunes, par des manifestations historiques, en septembre l'année passée, 500 000 personnes dans les rues du Québec, surtout à Montréal, pour réclamer des actions fortes en matière de lutte contre les changements climatiques. On le sait, que c'est un gouvernement qui a été élu alors que, malheureusement, il n'y avait presque rien dans sa plateforme en environnement, presque rien. On le sait, que c'est un gouvernement qui a été obligé de tricoter plusieurs choses, notamment avec le projet de loi n° 44, qui est devenu une loi, on en reparlera, pour essayer de se donner un côté vert. Mais là il y avait une occasion de vraiment marquer la différence en disant : Bien, on va relancer l'économie en investissant dans des projets verts, en investissant en environnement et, du coup, d'investir pour les générations futures.

• (16 h 20) •

On le sait, là, on n'arrête pas de le dire, il y a beaucoup de jeunes qui sont traumatisés, des jeunes puis des moins jeunes, mais je veux penser particulièrement aux jeunes, traumatisés par la situation actuelle, qui est traumatisante. Puis il y a plusieurs de ces jeunes-là qui vivaient et qui vivent déjà de l'écoanxiété, considérant le risque climatique. Alors, le gouvernement aurait pu dire : Bien, au moins, on va donner du souffle, on va donner de l'espoir, on va mettre une lumière au bout du tunnel pour montrer à cette jeunesse québécoise traumatisée par la crise de la COVID qu'on a compris le message puis qu'on va faire les choses différemment. Mais, malheureusement, le gouvernement n'a pas compris le message et, malheureusement, il ne fait pas les choses différemment en matière d'environnement. Il est encore dans une opposition classique environnement puis économie, ce que je déplore.

Comment ça se matérialise dans le projet de loi n° 66? Ça se matérialise de plusieurs manières. C'est qu'il contourne des règles environnementales sous prétexte qu'encore une fois c'est l'environnement qui ralentit, sous prétexte que c'est l'environnement qui ralentit. Est-ce que l'environnement... Puis là, quand on dit «l'environnement», il faut sous-entendre, dans l'esprit de bien des gens, le ministère de l'Environnement, parce que c'est le ministère de l'Environnement qui ralentit... Démonstration n'est pas faite. Je veux dire, il y a beaucoup de possibilités de ralentissement. Des fois, c'est dans les municipalités. Des fois, c'est vrai, c'est dans le ministère de l'Environnement qu'il y a beaucoup de bureaucratie. Des fois, c'est au ministère des Affaires municipales. Mais là, encore une fois, parce que c'est un gouvernement du XXe siècle, pouf! il tape sur l'environnement, comme si c'était que le mauvais élève, comme si c'était que l'élément défectueux, alors que, je le répète, l'environnement est un levier pour faire de la croissance économique. Savez-vous que, selon EnviroCompétences, qui est une table de main-d'oeuvre, là, en environnement créée en vertu du ministère de l'Emploi et du Travail, les emplois en environnement, entre 2006 et 2016, ont crû de 20 % par rapport à une croissance de 5,7 % à peu près dans l'ensemble des autres secteurs.

Donc, les emplois en environnement croissent... Ça se dit, ça? Oui. Les emplois en environnement croissent quatre fois plus vite que les emplois dans les secteurs traditionnels. Donc, il y a de l'emploi là-dedans, il y a du travail à faire, il y a même des pépines possibles, hein, parce qu'on est toujours impressionnés par des pépines dans un chantier, là, mais, en environnement, oui, on peut le faire aussi.

Donc, le gouvernement a encore ciblé l'environnement comme étant le problème, et ça, bien, nous, on n'accepte pas ça. C'est là, là, vraiment, que nous, on décroche par rapport au projet de loi n° 66. On décroche parce que le gouvernement abdique ses responsabilités en matière d'environnement, alors que, si on a une occasion de faire les choses différentes, différemment, si on a une occasion de corriger ce qui est anormal pour créer un nouveau monde normal incluant le respect de l'environnement, bien, le gouvernement de la CAQ n'est pas là.

Exemple, exemple, le fameux REAFIE, le fameux REAFIE, R-E-A-F-I-E, pour le Règlement sur l'encadrement d'activités en fonction de leur impact sur l'environnement, ça, c'est le règlement de mise en application de la vaste réforme de la loi n° 102, qui venait réformer de fond en comble la Loi sur la qualité de l'environnement. Puis je vois mon collègue de Masson. Là, je peux le dire parce qu'il est en Chambre. On avait travaillé 86 heures au projet de loi n° 102, avec l'ancien ministre David Heurtel pour réformer la Loi sur la qualité de l'environnement, pour réduire les délais, pour avoir moins de bureaucratie autour des certificats d'autorisation. On a passé des heures avec David Heurtel. Ça, c'est 2017, puis on est rendus en 2020. Le règlement d'application de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui découle de la réforme du projet de loi n° 102, n'est toujours pas en vigueur, ce règlement d'application, toujours pas. Il a été adopté finalement en septembre, il y a quelques semaines, puis il va rentrer en vigueur en décembre, après trois ans d'adoption de la loi n° 102, qui réforme le régime de protection de l'environnement au Québec. Trois ans.

Est-ce qu'il est parfait, le REAFIE? La réponse, c'est non, mais au moins il change les choses, au moins il fait avancer, au moins il vise à réduire les délais en toute matière avec les trois critères de risque pour les projets, de risque relié à l'environnement, risque faible, risque modéré, risque élevé. Alors, c'était ça, le but de la loi n° 102, et le règlement, le REAFIE, s'applique en vertu de cette loi. Alors, il vient d'être adopté et d'être mis en application.

Bonne fin de semaine, Mme la Présidente.

Une voix : Merci beaucoup.

M. Gaudreault : M. le Président, je salue votre changement de genre. On va prendre un terme à la mode.

Alors donc, ce règlement vient d'être adopté puis il va être mis en vigueur en 2017. Ça, ça a été long. Là, je suis d'accord avec tout le monde pour dire que ça a été long, trois ans, depuis l'adoption de la loi n° 102. Bien là, c'est de la faute du gouvernement, là. Une fois que la loi est adoptée ici, à l'Assemblée nationale, l'adoption des règlements, la rédaction puis l'adoption des règlements, c'est entre les mains du gouvernement, puis ça fait deux ans que ce gouvernement-là est en place. Deux ans. Le règlement pour accélérer les choses en matière d'environnement, il a été adopté il y a quelques semaines, en septembre, puis il va rentrer en vigueur en décembre.

Et que fait le gouvernement avec le projet de loi n° 66? Il crée un régime parallèle en matière d'environnement. Il ne donne même pas la chance à ce... j'allais dire un autre mot, mais à ce satané règlement qu'on attend depuis trois ans, il ne lui donne même pas la chance d'être appliqué, non, il crée tout de suite un régime parallèle, confusion, alors qu'en environnement, là, tout le monde a besoin de clarté. Puis on sait que c'est un gouvernement ici, là, qui dit aux deux maux prévisibilité, en parlant du monde des affaires, on a besoin de prévisibilité, bien là c'est zéro prévisibilité.

Parce que la prévisibilité en matière d'environnement pour les entreprises, c'est que, depuis trois ans, on attendait le REAFIE, le REAFIE vient d'arriver. Il n'est même pas encore arrivé totalement, il va arriver en vigueur en décembre. Bien, le gouvernement brise la prévisibilité, parce qu'il crée un régime parallèle, via le projet de loi n° 66, en matière d'environnement. Comment? Par exemple, le régime d'évaluation, avec le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, moins de BAPE. Le projet de loi n° 66 vient retirer l'initiative de la part des mains des citoyens pour les placer entre les mains du ministre pour les projets de l'annexe I. Il permet au ministre d'en limiter le mandat, du BAPE, puis, carrément, sur deux projets, le projet des routes 117 et de l'autoroute 30, il retire complètement le BAPE. Ça, c'est l'article 52 qui dit ça.

Réduit les exigences environnementales également. Le projet de loi remplace le processus d'autorisation environnementale pour les projets de risque modéré — j'insiste sur «modéré» — par une déclaration de projet qui est pareille à la déclaration de conformité qui est pour les projets à risques faibles. Je vous disais tantôt, M. le Président, que, dans la loi n° 102 qu'on a adoptée en 2017 et qui se traduit dans le REAFIE, le fameux règlement, on a qualifié les risques en environnement de trois manières, trois étapes, trois marches : risques faibles, risques modérés, risques élevés. Bon, bien, avec le projet de loi n° 66, ce qu'on est en train de faire, c'est qu'on met les risques modérés au même niveau que les risques faibles en appelant ça une déclaration de projet. Déjà qu'on avait une déclaration de conformité, là, le gouvernement, par une nouvelle formulation, appelle les projets à risques modérés déclaration de projet, qui les ramènent au même niveau qu'un projet à risque faible.

• (16 h 30) •

Ne venez pas me dire que c'est de la prévisibilité pour les entrepreneurs, qui connaissaient très bien le projet de loi n° 102, qui attendaient le règlement d'application. Le règlement d'application arrive puis, là, on leur dit : Non, non. On recrée un autre régime parallèle pour les projets à risques modérés, qui vont devenir des risques faibles. Qu'on ne vienne pas me dire qu'on maintient les mêmes rigueurs puis les mêmes standards en matière d'environnement, M. le Président. La réponse, c'est non. Il y a bien du monde qui connaisse ça plus que moi, plus que vous, plus que tout le monde, qui sont venus nous le dire en commission parlementaire, et confirmé, confirmé par le Vérificateur général et le Commissaire au développement durable, pas pire, ça, qui ont dit : Non, ce n'est pas vrai qu'on respecte les mêmes standards en environnement.

Alors, qu'on est dans une situation où on doit faire les choses différemment tout en relançant l'économie, j'en suis. Mais, qu'on doit faire les choses différemment pour respecter l'environnement pour les générations futures, bien, le gouvernement passe à côté. Alors, ça, c'est la réalité des exigences en environnement. Le CQDE, le Centre québécois du droit de l'environnement, est venu nous le dire dans un mémoire fouillé, un mémoire très sérieux, il est venu nous le dire en commission parlementaire. Je vous invite à le lire, M. le Président, le mémoire, si vous ne l'avez pas encore fait.

L'autre élément, c'est en matière d'aménagement et d'urbanisme. Le projet de loi va permettre de contourner les plans d'aménagement et d'urbanisme. Si la municipalité n'a pas délivré les autorisations à l'organisme public après 45 jours, le projet d'infrastructure est réputé avoir obtenu toutes les autorisations municipales requises et être conforme à la réglementation d'urbanisme en vigueur. On vient de vivre tout un épisode dans la MRC de Montcalm. Alors, imaginez ce que ça pourrait signifier. Ça, c'est l'article 54, entre les articles 54 et 61, en fait. Cette disposition, ça pourrait servir, par exemple, à construire des maisons des aînés en plein boisé, alors que c'est un boisé qui est protégé ou qui peut être un milieu vert. On sait comment on a besoin maintenant de lieux pour éviter les îlots de chaleur. Dans les municipalités, les boisés sont importants. Bon, bien, ça, ça pourrait permettre ça, parce que la ville va être poussée dans le temps, il va y avoir des projets, puis elle ne sera pas capable de donner son autorisation.

Donc, il y a beaucoup d'éléments en matière d'environnement qui causent problème, M. le Président. Et je pense que ça vient handicaper de façon importante le projet de loi n° 66, et c'est un sérieux problème.

Il y a différentes façons de régler les situations à l'Environnement. Je vous le disais tout à l'heure, moi, je ne suis pas prêt à dire qu'il n'y a pas de problème au ministère de l'Environnement. Quand on parlait, tout à l'heure, des retards, là, dans l'exécution des projets au Québec, oui, il y a la bureaucratie, oui...

Puis, en passant, la bureaucratie, hein, c'est facile de dire ça, «c'est la bureaucratie», mais, quand ça vient de temps de cibler précisément c'est où, là, ah! là, il y a toujours une bonne raison de dire : Non, non, ça, il faut garder ci, il faut garder ça. Tu sais, la bureaucratie, moi, ça me fait penser un peu au monstre du Loch Ness : tout le monde en parle, mais il n'y a jamais personne qui l'a vu. Alors, c'est un peu la même chose avec la bureaucratie, tu sais, c'est le monstre du Loch Ness, au Québec.

Mais, quand on regarde les choses de façon un petit peu plus précise, on s'aperçoit qu'il y a moyen d'avancer, et ça, c'est vrai au ministère de l'Environnement. Au ministère de l'Environnement, on a besoin de plus de ressources. On dit qu'il faut relancer l'emploi aussi en matière de relance économique. Bon, bien, il y aurait des emplois, là, au ministère de l'Environnement. On n'est pas les seuls à le dire. Équiterre et la Fondation David-Suzuki nous ont dit que le vrai problème réside davantage dans la capacité du ministère de l'Environnement à livrer la marchandise avec les ressources disponibles. Tu sais, le problème n'est pas le règlement, c'est le nombre de personnes pour appliquer le règlement. Puis ça, ce n'est pas la première fois qu'on le dit, là. Moi, je me suis levé à plusieurs reprises ici, ou en commission parlementaire, ou à l'étude des crédits pour dire : Ça nous prend plus de ressources au ministère de l'Environnement. Alors, ça, c'est un élément important.

Le CQDE aussi le dit, le Centre québécois de droit sur l'environnement : «...le CQDE propose de mettre en place une équipe dédiée qui serait chargée de l'analyse exclusive des autorisations des projets visés à l'annexe I. Une telle équipe pourrait être composée d'analystes régionaux chargés de l'analyse des demandes d'autorisation ministérielle...» Donc, un genre de «task force», hein, une équipe dédiée dans les régions. Et, selon les projets dans l'annexe I, par régions, bien là, cette équipe dédiée devrait pousser la machine pour faire respecter les règlements en matière d'environnement, dont le fameux REAFIE dont je vous parlais. Donc, l'ajout de ressources au ministère de l'Environnement, bien important.

L'autre élément sur lequel je veux intervenir, et ça, je l'ai dit à plusieurs reprises, je l'ai dit encore, je pense, c'est hier ou avant-hier, par Twitter, parce que je retweetais une nouvelle sur les réalités sur les déversements d'eaux usées, entre autres à Longueuil, qui devient la ville, au Québec, où il y a le plus grand problème de déversement d'eaux usées... Et ça, c'est un bel exemple d'investissement possible en infrastructure verte, qui contribuerait à relancer l'économie, à faire travailler du monde aussi puis à solutionner les problèmes en amont puis en aval, c'est le cas de le dire, sur la gestion des eaux usées.

Je voudrais vous citer le regroupement des conseils régionaux de l'environnement, qui parle justement de l'assainissement des eaux et du chantier sur l'eau propre. Alors, je vous cite son mémoire : «La relance économique telle que proposée par le gouvernement mise sur de grands chantiers d'infrastructures. Il y a là une occasion de mettre en oeuvre un grand chantier sur l'eau propre. Un projet réfléchi en fonction des enjeux d'adaptation aux changements climatiques et selon les principes d'infrastructures vertes, en cohérence avec les notions de capacité de support des milieux naturels et d'aménagement du territoire. Le Québec pourrait ainsi devenir un chef de file dans la gestion de ses eaux en optimisant les ouvrages d'assainissement.»

Écoutez bien, M. le Président : «Selon une étude d'impact économique portant sur le Règlement sur les ouvrages municipaux d'assainissement des eaux usées, un chantier qui permettrait de répondre aux normes de la Stratégie pancanadienne pour la gestion des effluents d'eaux usées municipales et diminuer les risques liés aux rejets des stations d'épuration nécessiterait un investissement de 10 milliards de dollars sur une période de 30 ans — 10 milliards de dollars sur une période de 30 ans. En repoussant à plus tard ce chantier, le Québec retarde les bénéfices sociaux, économiques et environnementaux qu'il pourrait en tirer.»

Vous voulez des investissements? Vous voulez des gars puis des filles de la construction qui travaillent? Vous voulez des pépines dans nos municipalités? Vous voulez des tuyaux? Assainissement des eaux, mégachantiers. Qu'on ne vienne pas me dire : Ah! c'est parce que ce sont des infrastructures municipales. C'est qui qui paie, vous pensez, M. le Président, en bonne partie? C'est le gouvernement du Québec, par le Programme d'assainissement des eaux. Il y a des petites municipalités, moi, dans ma région, là, qui déversent encore leurs eaux usées dans le Saguenay, elles ne sont pas capables de payer leurs systèmes de traitement des eaux usées. C'est le gouvernement du Québec qui les finance à 90 %, 95 %. Je veux dire, quand on est rendu là, là, après tout ce qu'on a fait comme mesures exceptionnelles dans la gestion de la pandémie, si c'est juste une question entre la gestion des municipalités puis la gestion du gouvernement du Québec, je pense qu'on est capables de s'entendre. Et la FQM et l'UMQ nous ont dit en commission parlementaire : Excellente idée. On est prêts à contribuer puis à travailler avec le gouvernement pour accélérer la gestion des eaux usées.

Qu'on ne vienne pas me dire que c'est de l'obstruction systématique de la part de l'opposition ou de la part des groupes environnementaux, ce sont des suggestions, des alternatives. Avant de faire du béton puis de l'asphalte, comme il y a dans l'annexe I, est-ce qu'on peut regarder les projets en environnement constructifs, qui vont permettre de changer les choses? Notre plus grande ressource, M. le Président, pour la vie, c'est l'eau, puis le Québec, on est formidablement bien dotés de ça. Juste le Québec, en lui, là, en lui-même, on a 3 % des réserves d'eau douce au monde. 3 %. Il y a des pays qui se battent pour avoir accès à de l'eau potable, ils se battent avec d'autres pays ou la population se bat entre elle pour avoir accès à l'eau potable. Nous, on a ça à portée de main. On a juste à investir pour qu'elle soit encore meilleure, qu'on soit assurés que chacune de nos populations, chacun des citoyens dans les municipalités ait accès à de l'eau potable. On a le moyen, on a les projets qui attendent, on a une occasion formidable pour aller de l'avant, on a des municipalités qui sont prêtes à embarquer, on a des groupes environnementaux qui applaudiraient demain matin, puis le gouvernement n'a pas de projet d'assainissement de l'eau potable dans sa liste de l'annexe I. Occasion ratée. C'est une occasion ratée, le gouvernement pourrait faire les choses différemment.

• (16 h 40) •

D'autres éléments qui touchent l'environnement, mais de la mauvaise façon, c'est qu'on vient tout juste d'étudier et d'adopter le projet de loi n° 44 sur la gouvernance climatique. Moi, j'ai étudié ça cet été, là, on était ici en plein mois de juillet avec le ministre de l'Environnement, puis on l'a fait avancer, puis il a été adopté, le vote final, la semaine passée, je crois, il a eu la sanction, tout. Mais là il est déjà contourné. Cette nouvelle loi, là, qui vient de naître... Puis je ne veux pas refaire le débat sur cette loi-là, au final on a voté contre parce que, je l'ai dit, c'était aussi une occasion ratée, ça devient quasiment mon slogan, c'était une occasion ratée de faire plus en matière d'environnement. Mais, bon, je ne veux pas refaire ce débat-là. Le projet de loi n° 44 est devenu une loi sur la gouvernance climatique, dans laquelle le ministre de l'Environnement a un pouvoir qui est une drôle d'amanchure parce qu'il a un pouvoir supérieur aux autres ministres en matière d'environnement, mais il n'a pas de moyens pour l'exécuter. En tout cas... Mais, peu importe, là, il a un pouvoir de conseil et d'avis en matière d'environnement sur les projets d'infrastructure. Bien là, c'est contourné, là, avec le projet de loi n° 66.

C'est hallucinant de voir ça. On vient d'adopter un projet de loi sur la gouvernance climatique avec une commission... un comité d'experts scientifiques pour venir conseiller le ministre sur les meilleurs gestes à poser en matière de changements climatiques, puis on a un nouveau pouvoir qui est donné au ministre, qui le met un petit peu plus... bien, je ne peux pas dire au-dessus, mais, en tout cas, un rôle conseil et aviseur auprès de ses collègues ministres autour de la table du Conseil des ministres pour dire : Non, non, ce n'est pas une bonne idée d'aller vers ça, selon le conseil scientifique qui m'accompagne, ça ne respecte pas nos cibles de réduction de gaz à effet de serre, ça n'a pas un bon impact pour l'environnement. Il est déjà contourné. C'est un nouveau pouvoir accordé par la loi n° 44, qui est encore verte, là, c'est le cas de le dire, qui vient tout juste d'être adoptée. Bien, le projet de loi n° 66, qui, lui, n'est même pas encore adopté, vient déjà contourner ce qu'on vient de faire avec la loi n° 44. Cohérence, belle cohérence. Quand je disais tantôt... Les entrepreneurs qu'on rencontre à tous les jours, ils nous disent quoi? «On veut de la prévisibilité.» Bien là, zéro prévisibilité, toujours en vertu des 181 projets dans l'annexe I.

Donc, vous voyez, même là-dessus, le gouvernement ne respecte même pas sa propre loi, qu'il vient d'adopter. Donc, ça ne va pas bien du côté de l'environnement avec le projet de loi n° 66.

Il y a aussi, dans le projet de loi n° 66, dans l'annexe I... ce n'est pas en matière d'environnement, mais il y a les projets d'infrastructure nos 117 et 120 qui sont dans l'annexe I. 117, c'est l'agrandissement du collège Dawson. 120, c'est l'aménagement, sur une partie du site de l'Hôpital Royal Victoria, du Centre universitaire de santé McGill. Particulièrement en ce qui concerne l'agrandissement du collège Dawson, vous comprenez que nous, on n'est pas d'accord avec ça. Parce que c'est le cercle vicieux. Plus le cégep a des capacités d'accueillir des élèves francophones qui viennent à un cégep anglais, bien, plus il y a des étudiants qui vont y aller puis qui vont s'angliciser.

Vous vous souvenez sûrement de la publicité de la saucisse Hygrade : «Plus elle est fraîche, plus on en mange. Plus on en mange, plus elle est fraîche.» Moi, je me souviens de ça, là. Je sais qu'il y a des députés plus jeunes que moi ici qui ne se souviennent peut-être pas de ça. Ah! c'est ça, je vois le député de Beauce-Sud. Ça, c'est très typique à la génération X, et plus vieux que X, là, pour les saucisses Hygrade, là, mais, moi, je m'en souviens très bien, tout le monde parlait de ça. C'est le principe de la saucisse Hygrade. Bien, l'agrandissement du collège Dawson, c'est ça. Plus on agrandit le collège... Vous aussi, ça ne vous dit rien, députée de Charlevoix? Non? Lui, le député de Chauveau? Bien, le député de Saint-Jean, ça doit être lui qui a pensé à la pub, alors...

Une voix : ...

M. Gaudreault : Non, mais je nomme les députés par leurs titres, M. le Président.

Donc, le collège Dawson, c'est ça : plus on agrandit le collège Dawson, plus il y a d'étudiants. Plus il y a d'étudiants, plus on a besoin d'agrandir le collège Dawson. Ça fait que le principe de la saucisse Hygrade s'applique pour le collège Dawson, puis ça entraîne plus d'anglicisation de nos jeunes à Montréal. Ça fait que la meilleure chose à faire, c'est de ne pas acheter de saucisse, donc de retirer le... — je n'ai rien contre la saucisse, M. le Président, mais je me sers de la métaphore — c'est de retirer l'agrandissement du collège Dawson de la liste des 181 projets.

Alors, voilà, M. le Président, le problème. J'ai fait un long laïus sur l'environnement, mais c'est le principal problème qu'on a.

Donc, face à ça, qu'est-ce qu'on fait? C'est le dilemme cornélien auquel nous sommes confrontés comme parlementaires. Est-ce qu'on doit relancer l'économie? Est-ce qu'on doit investir dans les infrastructures? Bien sûr. Parce qu'on est dans une situation économique exceptionnelle qui fait en sorte qu'on doit relancer puis, le monde... mettre des gens au travail. Bien sûr.

Est-ce qu'on est d'accord avec le fait que le gouvernement a reconnu ses erreurs par rapport au projet de loi n° 61? Bien sûr. Sur la question, par exemple, du... Sur la question de la surveillance des contrats qui sont accélérés, sur la question, par exemple, que le gouvernement a retiré son pouvoir de changer par règlement les lois puis les autres règlements, comme il y avait dans le projet de loi n° 61, on est d'accord avec ça. Mais, tu sais, à un moment donné, par exemple, un jour pair, on dit : Ah! on va être d'accord avec le projet de loi, le jour impair, on dit : Non, les...

Ah oui! C'est vrai, j'avais oublié ça. Je vois le député de La Peltrie. On pourrait ressortir... Je l'avais déposé, le calendrier, M. le Président, des jours pairs et des jours impairs. Donc, il est dans les archives de l'Assemblée nationale. Ça s'appliquerait bien. Ça s'appliquerait bien, le calendrier des jours pairs puis des jours impairs de la CAQ. On est le quoi aujourd'hui? 29. Jour impair. Je maintiens le suspense, à savoir si on vote pour ou contre, si on est pair ou impair, par rapport au principe. J'aimerais ça que le ministre délégué aux Infrastructures numériques aille rechercher le calendrier pour nous dire dans quel sens qu'on devrait voter, dans quel sens qu'on devrait voter.

Alors, je vous donne la réponse. Pour l'adoption du principe, nous allons voter pour parce que nous sommes un jour impair, mais ne prenez pas ça pour acquis. Est-ce que le vote final sera un jour pair ou un jour impair? Et, d'ici là...

Une voix : ...

M. Gaudreault : Comment?

Une voix : ...

M. Gaudreault : D'ici là, il y a des commissions parlementaires qui vont se tenir des jours pairs, des jours impairs.

On fait des blagues, M. le Président, mais, sérieusement, on va travailler fort. Et j'espère que la ministre présidente du Conseil du trésor nous écoute, parce qu'on va faire des amendements. On va faire des amendements. Sur l'environnement, là, c'est inacceptable. C'est inacceptable, ce qui est proposé. Alors, on va travailler parce qu'on est de bonne foi, comme toujours, parce qu'on veut faire avancer les choses dans un contexte difficile pour l'économie québécoise. On va faire avancer les choses dans le souci du respect de l'environnement puis dans le souci du développement du Québec. On a annoncé nos couleurs, il y a des amendements qui vont venir.

Il ne faut pas que la ministre pense que ça va passer comme du beurre dans le poêle, là. On va travailler fort puis on va faire des amendements pour améliorer les choses en matière d'environnement. Plus que pour améliorer, c'est pour mettre des conditions incontournables. Je vais continuer de plaider sur l'assainissement des eaux, je vais continuer de plaider sur l'assainissement des eaux. Si la ministre dit : On va inclure des projets d'assainissement des eaux dans l'annexe I, bravo! On sera là pour l'appuyer, on va le faire, mais on va travailler.

• (16 h 50) •

Donc, on va voter pour le principe, mais soyez assurés qu'on sera intraitables sur la question du respect de l'environnement. On est trop dans un moment critique, pas juste comme nation québécoise, mais comme planète, comme élus qui doivent se préoccuper des générations futures. On a une occasion unique de faire les choses différemment. Alors, nous, on est constructifs. On va essayer de se saisir de cette occasion pour avancer. Moi, chaque gain en matière de protection de l'environnement et du développement économique, qui sont intimement reliés, pour moi, c'est un gain pour le Québec puis c'est ça qu'on va faire. On va travailler dans ce sens-là. Puis ce n'est pas vrai qu'on va laisser passer des choses.

Alors, si le gouvernement est prêt à écouter, si le gouvernement veut vraiment tendre la main et l'oreille pour respecter l'environnement, moi, je pense qu'on serait capables de faire une belle chose. Parce qu'on a au moins changé des affaires, là, par rapport au n° 61, en termes de gouvernance sur les contrats publics, etc. Mais ce n'est pas vrai qu'on va s'asseoir en se croisant les bras, en disant : Il n'y a rien à faire puis... Non, non, moi, je veux travailler avec ouverture, on va le faire, mais toujours dans le souci de protéger l'environnement.

Alors, il y a différentes façons qu'on aurait pu agir, mais là c'est celle-ci qu'on a choisie, donc de voter pour le principe, de s'asseoir avec la ministre en commission parlementaire, de faire des amendements. Puis je pense que le monde vont nous suivre. Puis il y aurait beaucoup de groupes en environnement, des groupes, des... le Vérificateur général qui diraient bravo. Alors, on a une occasion de faire ça ensemble.

Donc, M. le Président, c'est ce que je voulais vous dire aujourd'hui. Alors, on va travailler dans cet esprit, puis on verra si la règle des jours pairs et des jours impairs change ou se vérifie, au final, mais ça, c'est entre les mains du gouvernement. Nous, on va faire des propositions pour protéger l'environnement dans ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Viau.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci. Merci, M. le Président. Donc, M. le Président, au moment où je vous parle, donc, se tient la Commission des transports et de l'environnement, sur laquelle commission je siège d'ailleurs, où nous traitons actuellement d'un projet de loi important, le projet de loi sur la conservation du patrimoine naturel. Et j'aurai, à quelques reprises dans le cadre de cette intervention, M. le Président, à faire un parallèle entre ce qui se passe dans nos travaux et par rapport à ce projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi n° 66, Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure.

Vous savez, dans le projet de loi n° 46, M. le Président, dont je vous parle, auquel je fais allusion, nous abordons des concepts, des enjeux importants et intéressants pour le Québec. Nous parlons d'aires protégées. Nous parlons d'aires marines protégées. Nous parlons de paysages humanisés. Nous parlons aussi de terres humides, aussi. Et j'aurai à y revenir, M. le Président. Et c'est un projet de loi, donc, que nous sommes en train de travailler.

Et là, comme le collègue de Jonquière, je n'ai malheureusement pas eu le grand plaisir de siéger sur la commission lors des consultations particulières pour le projet de loi n° 66, mais par contre nous avons le bonheur de siéger ensemble sur le projet de loi, donc, sur la conservation du patrimoine naturel. Et un des premiers parallèles que je vais faire, M. le Président, c'est lorsqu'on entend parler de tous les sujets ayant trait aux Premières Nations. Dans le projet de loi n° 46, que nous sommes en train d'étudier, nous avons reçu des mémoires d'au moins cinq communautés autochtones. Ajoutez à cela l'Assemblée des Premières Nations. Et ces communautés-là ont été unanimes pour déplorer non seulement l'absence de consultation de la part du gouvernement dans ce projet de loi, mais l'oubli des enjeux ayant trait aux communautés autochtones lorsque vient le temps de parler de protection du patrimoine naturel. Voilà, à mon sens, ce qui est pire qu'un oubli. C'est carrément... Le mot n'est pas parlementaire, M. le Président. J'y reviendrai.

Et, dans ce projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi n° 66, M. le Président, je commence par le Mohawk Council of Kahnawake, qui déplore le niveau adéquat des consultations avec les communautés autochtones, qui affirme que le projet de loi n° 66 et en particulier l'inclusion de la réfection du pont Mercier dans l'annexe sont des violations des ententes de nation à nation et des droits territoriaux des Premières Nations, qui dénonce aussi l'affaiblissement des garde-fous environnementaux. Et, lorsque je poursuis au niveau des mémoires, toujours, l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador rappelle, dans un mémoire, que ce projet de loi fait fi des droits ancestraux, et jamais, jamais ils n'ont été consultés. Et le conseil innu va dans le même sens, M. le Président, ils n'ont pas été adéquatement consultés et ils déplorent l'absence de projet autochtone dans l'annexe. Et j'aurais pu, M. le Président, reprendre mot pour mot ce que vous venez d'entendre comme extrait, comme citation dans le cadre du projet de loi n° 66 et l'appliquer également au projet de loi n° 46. Ce sont les mêmes reproches qu'on adresse au gouvernement. Et ce même gouvernement, M. le Président, ce même gouvernement qui, à chaque semaine, nous annonce leurs intentions, nous fait des déclarations d'intention sur leurs volontés de mieux faire, sur leurs volontés de rétablir les ponts avec les Premières Nations et les communautés autochtones, et voilà, et voilà encore, une fois de plus, les égarements, les manquements de ce gouvernement envers ce qu'il convient d'appeler ses obligations de gouvernement. Et il faut déplorer, il faut déplorer que tout ce qu'on a entendu jusqu'à présent, dans cette Chambre, dans les points de presse, de ce gouvernement ne sont que des voeux pieux, puisque les actes, les gestes ne suivent pas les engagements. Et j'espère que le nouveau ministre des Affaires autochtones de ce gouvernement... j'espère qu'il a pris acte des mémoires qui ont été déposées dans le cadre du projet de loi n° 66 et aussi des mémoires qui ont été déposées dans le cadre du projet de loi n° 46, aussi, car il y a un coup de barre sérieux à donner à ce niveau-là.

M. le Président, avant que j'aille plus loin, permettez que je prenne le temps de remercier les groupes qui ont participé aux consultations, car ces groupes-là étaient nombreux. Parmi ces groupes, il y avait bien sûr des groupes du secteur économique, mais il y avait aussi des groupes environnementaux. Et, sur les groupes environnementaux, j'y reviendrai tout à l'heure, puisqu'à titre de porte-parole de l'opposition officielle des dossiers environnementaux vous comprendrez, M. le Président, que je vais m'attarder davantage sur ce que les groupes environnementaux nous ont dit, ont partagé avec nous lors de ces consultations.

Je veux remercier aussi, je tiens à remercier mon collègue le député de La Pinière, qui, dans ce dossier, fait un travail extraordinaire en mettant en lumière, en soulignant ce qui est dit dans ce projet de loi et qui relève d'une incohérence de ce gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques et de ce qui n'est pas dit aussi. Parce que le projet de loi dit des choses qui sont, il faut le dire, tout simplement des antithèses de tout ce que ce gouvernement nous dit en matière de lutte contre les changements climatiques. Mais le gouvernement, dans son projet de loi, il y a des choses aussi qui ne sont pas dites mais qu'il faut souligner comme étant révélateur de ce comportement.

C'est un projet de loi, M. le Président, qui prévoit plusieurs dispositions permettant l'accélération de différents travaux d'infrastructure, une procédure d'expropriation allégée, la possibilité d'entreprendre des travaux sur une partie du domaine de l'État avant l'obtention des droits requis, l'aménagement de certains processus applicables en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, une soustraction de l'application des dispositions de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour des interventions gouvernementales, ainsi que des allègements à la procédure d'obtention d'une autorisation municipale.

• (17 heures) •

M. le Président, le député de Viau qui vous parle est un ancien élu municipal. J'ai siégé à la ville de Montréal, M. le Président, de 2009 jusqu'à 2018, et donc vous comprendrez que j'ai été un témoin privilégié de ce que la ville de Montréal a connu, de ce que la ville de Montréal aura connu comme problématiques reliées aux enjeux de probité, reliées aux enjeux de corruption. Mais, M. le Président, je dois ici reconnaître le travail aussi qui a été effectué par cette ville pour amener des corrections, notamment lorsqu'en juin 2014, lorsque l'ex-maire de Montréal, M. Denis Coderre, donc, avec son conseil municipal, a travaillé fort, ont travaillé fort afin d'amener le BIG, le Bureau de l'inspecteur général, à Montréal via une modification de la charte municipale. Cela a permis, pour la ville de Montréal, à bien des égards, de retrouver une erre d'aller pour ce qui est de sa réputation, de retrouver une erre d'aller en matière de probité, et le BIG, je dois le dire, je dois le souligner, a fait un travail extraordinaire pour accompagner les élus municipaux, pour accompagner le conseil municipal, donc, en matière de tout ce qui concerne l'octroi des contrats.

Mais ce même BIG, M. le Président, est venu, lors des consultations particulières, nous rappeler... nous prévenir, en fait, nous prévenir, puisqu'après tout prévenir vaut toujours mieux que guérir, ce même BIG est venu nous rappeler sur la nécessité d'améliorer la loi sur la protection des lanceurs d'alerte. Ce même BIG est venu nous rappeler aussi des démarches aléatoires pour que l'AMP, l'Autorité des marchés, puisse véritablement avoir les mêmes pouvoirs que le BIG. Et ça, M. le Président, comme ancien élu de la ville de Montréal, je m'en voudrais de ne pas le souligner, de ne pas le rappeler au gouvernement, car c'est un projet de loi qui, dans sa confection même, mérite d'être amélioré, d'être profondément amélioré.

M. le Président, il y a un deuxième enjeu que j'aurais pu aborder, mais je ne serai pas trop long sur cet enjeu, c'est l'enjeu des expropriations, puisque c'est un projet de loi qui permettrait au ministre des Transports, qui est responsable de la loi sur les expropriations, d'accélérer le processus, qui voit actuellement une signification d'expropriation et un avis d'expropriation... Maintenant, il n'y aurait qu'un avis qui inclurait le montant de l'offre, la date à compter de laquelle il sera pris possession du bien, l'obligation pour l'exproprié, le locataire et l'occupant... Contrairement à la loi actuelle, M. le Président, il sera impossible pour un citoyen de contester l'expropriation, et le ministre des Transports pourra aussi déléguer ce pouvoir. Je crois que, là aussi, nous avons des questions à nous poser aussi, comme élus. Il y a des questions à se poser aussi, car les intentions, toutes bonnes qu'elles soient, M. le Président, ne peuvent et ne doivent pas avoir pour effet de brimer les droits des citoyens. Nous sommes, chacun ici présents dans cette Chambre, des représentantes et des représentants des citoyens du Québec, et il faut constamment nous le rappeler quand vient le temps pour nous de produire, de faire nos lois et bientôt, éventuellement, de les modifier.

Évidemment, M. le Président, un autre aspect important de ce projet de loi, c'est un projet de loi qui ouvre la porte aussi... et la ministre devra nous expliquer, d'ailleurs, pourquoi les dispositions de son projet de loi sont limitées dans le temps et dans le nombre de projets, quand bien même elles ne font, selon elle, aucun compromis avec la protection de l'environnement, justement la compromission sur le secteur de l'environnement.

M. le Président, ça fait bientôt... ça fait déjà, pas bientôt, ça fait déjà deux ans de cette législation, et un des sujets qui a été âprement et très souvent abordé en ce salon bleu, c'est la question de la lutte contre les changements climatiques. Que de motions, de déclarations d'intentions ont été formulées par ce gouvernement nous annonçant qu'il y aura un engagement éventuel, il y a un engagement à faire de la lutte contre les changements climatiques une véritable priorité, comme nous le demande, d'ailleurs, comme nous l'a demandé l'ensemble de la société québécoise, et je pense ici aux jeunes en particulier, je pense ici aux jeunes, aux jeunes de toutes les régions du Québec. Et je vois mon collègue responsable des dossiers jeunesse et je suis sûr qu'il va être d'accord avec moi que c'est une des priorités, c'est une des priorités soulignées par les jeunes du Québec, que nous devons faire mieux pour la planète. La crise climatique, ce n'est pas une vue de l'esprit, M. le Président, c'est une réalité.

Et, lorsque vous avez, M. le Président, en commission, un organisme comme le Centre québécois du droit de l'environnement... Le Centre québécois du droit de l'environnement, ce n'est pas des personnes... c'est des experts, c'est des personnes qui ont décidé de mettre à profit leur connaissance du droit, mais sur les questions de l'environnement, sur les enjeux de lutte contre les changements climatiques, sur les enjeux de protection de l'environnement. Lorsque nous avons un centre comme le Centre québécois du droit de l'environnement, M. le Président, qui vient rappeler au gouvernement que garantir la possibilité pour le public de demander la tenue d'audiences publiques pour tout projet soulevant des préoccupations dès lors que la demande n'est pas jugée frivole... le projet de loi n° 66 a pour effet de créer un régime en tout point similaire applicable aux activités à risques faibles en vertu de la loi québécoise sur l'environnement. Le projet de loi n° 66 semble reposer sur cette prémisse que les délais entourant la planification des travaux et l'autorisation des travaux sont considérés comme étant trop longs. Une question se pose dès lors : Si l'objectif est d'accélérer les délais de traitement des demandes, la solution ne devrait-elle pas être administrative?

Justement, sur plusieurs des projets, M. le Président, sur plusieurs des projets, probablement une quinzaine de projets, j'ai l'impression, M. le Président, qu'il est de l'intention du gouvernement de transgresser les exigences environnementales. Or, voilà le geste à ne pas poser. Or, en consultations particulières, un groupe comme le Centre québécois du droit de l'environnement propose des pistes, des avenues au gouvernement pour lui dire qu'il ne faut pas s'attaquer aux règlements en place, il ne faut pas s'attaquer aux exigences réglementaires en place, il faut plutôt voir de manière administrative comment s'y conformer.

Et le Centre québécois du droit de l'environnement n'est pas le seul, M. le Président. J'aurais pu parler aussi d'Équiterre, de la Fondation David-Suzuki, qui souhaitent tout simplement le retrait de toutes les dispositions environnementales du p.l. n° 66, car, selon eux, les entraves au niveau de l'environnement sont trop grandes.

• (17 h 10) •

Mais je vais m'attarder, M. le Président, si vous me permettez, à un regroupement que j'ai souvent nommé ici, parce que je considère que c'est un acteur important lorsque vient le temps pour nous de parler des enjeux environnementaux, car c'est un acteur qui se retrouve sur l'ensemble du territoire québécois avec ses... comme regroupement, comme organisation, c'est le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, qui, depuis plus de 30 ans, ce regroupement, travaille dans toutes les régions du Québec, accompagne les conseils régionaux environnementaux, régionaux justement, sur les enjeux environnementaux. Le regroupement, M. le Président, demande le lancement d'un chantier sur l'adaptation des infrastructures aux changements climatiques. Le regroupement déplore, M. le Président, que le gouvernement perçoive le respect des règlements environnementaux comme un frein à la relance. Et justement, à l'inverse, l'environnement devrait être utilisé comme un levier de changement et faire partie intégrante d'une relance verte.

Et je parle, M. le Président, du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, même la Vérificatrice générale, M. le Président, même la Vérificatrice générale s'est mise de la partie pour rappeler au gouvernement qu'il souhaite que l'Autorité des marchés publics ait les mêmes pouvoirs de surveillance pour les projets municipaux en matière de probité. Toute la première échéance de reddition de comptes très éloignée... s'inquiète de la fiabilité des données qui sont transmises. Et la Vérificatrice générale, M. le Président, s'inquiète aussi de voir que l'obligation de vérifier au préalable si les impacts environnementaux peuvent être entièrement évités ou disparus.

M. le Président, sur les 181 projets, dans le cadre de ce projet de loi, il y en a un où c'est marqué «école à Laval». On sait qu'il va y avoir une école à Laval, on ne sait pas où. Par contre, ce que je sais, M. le Président, ce que je sais, M. le Président, c'est que ville de Laval dispose... c'est une municipalité où il y a beaucoup de terres humides, où l'acquisition des terres humides a été et est encore un enjeu important non seulement pour les Lavalloises et les Lavallois, mais devrait l'être pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois, cet enjeu-là.

Alors, voilà autant d'enjeux que, comme porte-parole des dossiers d'environnement, je déplore. Je déplore ce projet de loi, donc, au niveau des entraves environnementales que ça pourrait amener. Et, oui, M. le Président, nous comptons bien amener plusieurs amendements à ce projet de loi, et j'espère que la présidente du Conseil du trésor sera en mode collaboration afin de pouvoir faire un projet de loi, si possible, qui permettrait d'accélérer des projets, mais sans porter ombrage, sans porter atteinte à cette volonté québécoise de lutter, et de manière effective, contre les changements climatiques. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Viau. Je reconnais maintenant Mme la députée de Mercier.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Je trouvais important d'intervenir sur ce projet de loi, le projet de loi n° 66 sur la relance économique, parce que, bien, moi, je suis porte-parole de mon parti en matière d'environnement. Il y a d'autres aspects dans le projet de loi, que ce soient les nouveaux pouvoirs à l'Autorité des marchés publics ou l'octroi de contrats publics et d'autres éléments dont je ne vais pas parler durant mon intervention. Il y a le député de Rosemont, qui est, donc, responsable du dossier, qui suit le projet de loi et qui est déjà intervenu sur ces éléments-là, qui va pouvoir aussi, dans l'étude détaillée, poser toutes les questions puis s'assurer que tout ce sera fait dans les règles de l'art, si c'est possible. Moi, donc, comme je le disais, je trouvais que c'était important d'intervenir sur l'aspect environnemental, les exigences environnementales qui vont être bafouées si toutes les mesures qui sont contenues dans le projet de loi n° 66 seront adoptées telles quelles, ça, c'est sûr et certain.

Et donc j'ai pris connaissance des différents mémoires des organismes qui sont intervenus lors des consultations particulières et j'ai écouté quelques audiences aussi, et laissez-moi vous dire que je suis extrêmement inquiète. Dès l'analyse préliminaire du projet de loi n° 66, toutes ces organisations-là, surtout des organisations environnementales, écologistes reconnues et connues ici, au Québec, ont parlé de leurs inquiétudes et du fait qu'il y avait d'autres solutions, il y avait des alternatives pour atteindre l'objectif du gouvernement sans passer par les dispositions qui sont inscrites au projet de loi n° 66, et donc je vais revenir plus tard sur ces solutions-là, et ces possibilités-là, et sur peut-être mon idée sur la raison pour laquelle le gouvernement n'irait pas vers ces solutions alternatives et préférerait garder le projet de loi n° 66, peut-être. Dans la conclusion, je vais en parler.

Donc, comme le disait mon collègue le député de Rosemont, le projet de loi n° 66 est un cheval de Troie. Il a tout à fait raison de dire ça parce que le gouvernement, en ouvrant la porte à réduire les exigences environnementales — contrairement à ce qu'il dit, mais, dans les faits, c'est ça qui va arriver — bien, il joue à un jeu très dangereux, très, très dangereux, il crée des précédents en nous faisant croire, comme le disait la ministre, que ce sont là des mesures exceptionnelles pour une situation exceptionnelle. Tout le monde est d'accord qu'on vit aujourd'hui dans une situation exceptionnelle, mais ce n'est pas une raison pour réduire les exigences environnementales. Il y en a d'autres et il y a des mesures exceptionnelles qui doivent être prises, mais pas uniquement en matière environnementale, dans d'autres cas, notamment des mesures exceptionnelles, qui ne devraient pas être exceptionnelles, mais, par exemple, en traitant mieux les travailleurs de la santé, parce qu'ils sont en train de tomber comme des mouches, des mesures exceptionnelles en embauchant encore plus de psychologues pour s'occuper de nos jeunes, comme ça avait été annoncé hier par le ministre délégué à la Santé, mais aussi pour toute la population qui souffre en ce moment et de ne pas leur proposer des autosoins ou de ne pas dire qu'en ce moment tout va bien dans le meilleur des mondes parce que ce n'est pas vrai, c'est faire du déni.

Là, il y a des choses et des mesures exceptionnelles qui peuvent être prises, mais pas en matière environnementale parce que, je l'ai dit à plusieurs reprises, je vais le répéter, le virus qu'on vit aujourd'hui, il faut qu'il nous donne... cette pandémie-là, cette crise sanitaire, il faut qu'elle nous donne des leçons pour l'avenir parce que les changements climatiques, puis la crise climatique, puis la crise de la biodiversité, et la perte de la biodiversité et ses conséquences qu'on va vivre dans le futur, c'est en quelque sorte le virus de demain. Ça va être le virus des changements climatiques, juste pour faire image, pour que les gens sachent à quel point c'est catastrophique, et c'est une situation extrêmement importante dont on doit se préoccuper aujourd'hui, et ne pas attendre à plus tard, et à payer le prix, comme on est en train de le faire aujourd'hui.

Il faut que la pandémie soit un message et soit aussi une leçon pour nous. Et en ce moment on a l'impression qu'en matière d'environnement on ne fait pas les parallèles qui doivent être faits, on ne fait pas les comparaisons qui doivent être faites. On fait, au contraire, le contraire. Ça veut dire qu'on est en train de dire : Bien, l'environnement, nous n'allons pas en tenir compte maintenant parce qu'on veut s'occuper de la crise sanitaire et de la relance économique et, de toute façon, on paiera plus tard. Puis c'est exactement ce qui a été fait, par exemple, pour les CHSLD dans notre système de santé, où on n'investissait pas assez dans le passé — ça, ce n'est pas uniquement... je ne parle pas, évidemment, du gouvernement actuel, mais des gouvernements précédents — on n'investissait pas assez, et aujourd'hui on est en train de payer le prix. C'est la même chose qui est en train d'être faite avec le projet de loi n° 66.

Donc, pour aller vers les éléments plus préoccupants... Et en fait ce que je dois dire aussi, si on est si inquiets, c'est qu'il y a une addition des décisions qui sont prises par le gouvernement, que ce soient différents projets de loi qui ont été pris récemment, le projet de loi n° 44, sur la gouvernance climatique, qui malheureusement a été adopté, et d'autres mesures qui sont prises par le gouvernement qui affaiblissent l'environnement. Et tout ça, ça s'additionne puis ça fait un cocktail explosif, et le projet de loi n° 66 vient s'ajouter à ça.

Donc, les éléments plus préoccupants, c'est les mesures d'accélération en matière environnementale qui affaiblissent nos processus actuels. Il y a deux projets autoroutiers qui sont inscrits dans le projet de loi qui sont complètement exclus des autorisations environnementales, totalement. Ça n'a pas lieu d'être. Il y a eu beaucoup de groupes qui ont dit qu'on devrait enlever ces mesures-là pour ces projets-là, les faire quand même, mais sans enlever toute mesure environnementale, ou, par exemple, le BAPE, ou autre.

Un des éléments aussi très importants que le CQDE a mentionné, c'est de traiter les projets avec risques modérés... ça, c'est pour les demandes d'autorisation qui sont demandées, de les traiter comme si c'étaient des projets à risques faibles ou négligeables, donc un projet qui doit être... qui est traité en temps normal en dehors du projet de loi n° 66 avec le cadre légal actuel comme des projets avec des risques modérés, de dire : Non, ce n'est plus des risques... on va faire semblant comme si ces projets-là n'avaient pas des risques modérés sur l'environnement, on va faire comme s'ils avaient des risques négligeables, négligeables ou faibles, et ça va être les mesures liées à ce genre de projet là qu'on va imposer. C'est contourner les normes.

• (17 h 20) •

Il y a aussi un autre élément important, les règles habituelles sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire sont contournées. On l'a vu avec la MRC de Montcalm, où on contourne les experts et l'avis des experts des différents ministères pour continuer à construire des bungalows toujours plus loin en faisant du dézonage. Donc, on contourne l'esprit de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Il y a aussi un autre élément qui est fondamental, on affaiblit le BAPE, et ça aussi, c'est une pente dangereuse qu'emprunte le gouvernement. Le gouvernement, avec son projet de loi, veut restreindre les consultations du BAPE et les fermer à la population en invitant que des experts et qui seront choisis par le ministre. Et ça, c'est ce qu'on appelle des consultations restreintes du BAPE. Ça, ça a commencé depuis 2018, ça a été, donc, introduit, les consultations ciblées, on sait qui est-ce qu'on veut entendre, et c'est le ministre qui les choisit. Et ça, c'est un grave affaiblissement de l'institution très, très importante qu'est le bureau... donc, le BAPE, le bureau, j'oublie... d'audiences publiques en environnement. Le BAPE existe depuis 1978, qu'il a été introduit et il doit faire partie de notre fierté. On doit être fiers de ça parce qu'on était vus comme des précurseurs, à l'époque, alors qu'aujourd'hui le message qu'envoie le gouvernement, c'est que le BAPE puis faire des consultations, c'est une perte de temps, on devrait contourner ça, on devrait faire ça rapidement, sans demander l'avis de tous les citoyens qui sont... qui vont avoir des impacts sur leur milieu de vie et sur l'environnement, et ça, c'est très, très grave. C'est vraiment une pente dangereuse que le gouvernement... une porte que le gouvernement ouvre en ce moment. Et aussi ce qui est grave, c'est que le ministre jouit d'un pouvoir discrétionnaire pour décider de qui participera aux audiences du BAPE. Et, ça aussi, on lui donne là un pouvoir beaucoup trop important et on contourne l'esprit dans lequel le BAPE a été créé.

Vous savez, on ne fait pas juste critiquer, on a aussi des propositions. J'avais proposé et j'avais soumis un projet de loi, l'année passée, le projet de loi n° 199, dont l'objectif n'est pas d'affaiblir le BAPE, au contraire, parce qu'à travers le temps il y a eu beaucoup de fois ou de projets où on jouait un petit peu sur les règles pour ne pas avoir des consultations du BAPE. Ça a été fait à travers le temps. Et une des raisons pour lesquelles j'ai déposé ce projet de loi, le projet de loi n° 199, c'était pour éviter cet affaiblissement du BAPE que, là, avec le projet de loi n° 66, on voit qu'on y va avec la totale. C'est un projet pilote pour commencer quelque chose qui est dangereux puis peut-être l'appliquer dans le futur, si le gouvernement trouve que c'est plaisant de tout le temps le contourner et de dire : Bien, on va le faire sur d'autres projets que seulement le projet de loi n° 66.

Donc, le projet de loi que j'ai déposé, son objectif était de rendre le BAPE plus indépendant, notamment en permettant à l'Assemblée nationale de nommer le président aux deux tiers, de lui donner aussi plus de pouvoirs pour que le BAPE puisse ne pas attendre uniquement les mandats du ministre de l'Environnement, mais, de par son propre chef, dire : Bien, on devrait, sur telle ou telle question qui est très, très préoccupante, tenir un BAPE générique, par exemple, de son propre chef, sans attendre le mandat du ministre.

Un autre élément aussi important pour... que le projet de loi que j'ai déposé, qu'il contient, c'est d'instaurer le droit d'initiative citoyenne. Si les citoyens trouvent qu'il y a un projet qui vient à côté de chez... qui affecte leur milieu, leur voisinage, et qu'ils sont extrêmement préoccupés, et qu'ils veulent faire des représentations auprès du gouvernement, une façon aussi d'y arriver, c'est de signer une pétition. S'il y a 10 000 pétitionnaires qui la signent, eh bien, il pourrait y avoir des consultations du BAPE. C'est ça aussi qui est important, quand on affaiblit le BAPE, ce qu'on affaiblit aussi, M. le Président, c'est notre démocratie parce que le BAPE est un outil démocratique.

Il y a certains éléments aussi que le conseil québécois du droit de l'environnement, qui vient souvent dans les consultations particulières, qui fait souvent... les gens qui travaillent dans cet organisme-là font... ce sont des juristes et ils font des propositions toujours extrêmement pertinentes et des présentations très intéressantes. Et, dans leur intervention et dans l'échange qu'ils ont eu avec la ministre, la ministre leur disait : Inquiétez-vous pas, nous nous entendons sur les normes, nous ne voulons pas affecter et affaiblir les normes environnementales, tout ce qu'on veut, c'est accélérer les processus. M. le Président, c'est faux, ce projet de loi ne fait pas qu'accélérer les processus, il affaiblit les normes environnementales. Parce que, si on veut vraiment juste et uniquement accélérer les processus, il y aurait d'autres solutions pour y arriver, notamment en embauchant, par exemple, plus de personnes, pas en affaiblissant les normes. Donc, par exemple, en traitant, dans le processus d'évaluation environnementale, les projets à risques modérés comme des projets à risques faibles ou négligeables, on réduit les normes, on demande moins d'exigences au promoteur, on lui demande moins d'exigences. Donc, en ayant moins d'exigences, on est en train d'affaiblir les normes, on ne fait pas qu'accélérer le processus.

Il y a aussi un élément extrêmement important que le conseil du droit de l'environnement a apporté, c'est un nouveau règlement qui a été adopté par le gouvernement, dont nous avons été critiques et dont aussi le centre québécois de l'environnement a été critique, c'est le Règlement sur l'encadrement d'activités en fonction de leur impact sur l'environnement, ce qu'on appelle le REAFIE. Il a été adopté, donc, par le Conseil des ministres et va commencer à s'appliquer au mois de décembre. Et l'objectif premier de ce règlement-là était justement d'accélérer les processus pour tous les projets, pas seulement ceux qui... Je veux dire, le REAFIE a été adopté avant le projet de loi n° 66 et il était en discussion aussi avant même le projet de loi n° 61. Donc, il était là, on ne l'a pas laissé vivre et/ou le tester pour dire : Est-ce qu'il permet réellement d'accélérer les processus? Non, on décide pour ces projets-là, pour les 180, 181 projets dans le projet de loi n° 66, de dire : On ne va pas utiliser le REAFIE qui vient d'être adopté, on va mettre d'autres mesures d'accélération encore plus alors qu'on vient juste d'adopter ce règlement-là.

Et d'ailleurs il y a eu... En fait, un des éléments aussi importants est cette idée-là d'affaiblir. Pourquoi est-ce qu'on la mentionne et je la dis? Ce n'est pas uniquement une lubie, c'était vraiment un souhait du premier ministre lors de la dernière campagne électorale, c'est ce qu'il disait. C'était en septembre 2018, donc juste avant les élections, le 1er octobre, où il disait : «Quand je rencontre les compagnies minières, c'est unanime. Si on leur demande un changement qu'on peut faire pour les aider, c'est de réduire les délais d'autorisation, entre autres en environnement, et avoir des réponses plus rapides du ministère des Ressources naturelles. Ce qu'on veut dire, c'est que les délais sont longs. On ne parle pas de réduire les exigences, on parle de réduire les délais.» Ça, c'est ce qu'il a répondu quand on lui a posé des questions sur le BAPE. «Dans le secteur minier, les délais se comptent en années au Québec, alors qu'ailleurs dans le monde [ça se compte] en [...] mois.»

Dans le REAFIE, les critiques qui ont été faites par le conseil québécois de droit de l'environnement, c'était que les activités d'exploration minière étaient classées comme... d'exploration, et non pas d'exploitation, étaient classées comme faibles ou négligeables, alors que, normalement, juste avant ce REAFIE là, ce règlement-là, elles étaient classées comme à risques modérés. Donc, le REAFIE faisait déjà ce que le premier ministre souhaitait, et là on va encore à un pas plus loin.

Donc, comme je le disais, c'est l'accumulation de toutes ces entraves qu'on fait à l'environnement avec ce projet de loi n° 66, avec le projet de loi n° 44, qui concentrent tous les pouvoirs dans les mains du ministre de l'Environnement et du ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles et qui abolit Transition énergétique Québec, qui abolit le Conseil de gestion du Fonds vert, qui abolit tous les contre-pouvoirs pour laisser le champ libre au gouvernement d'agir comme il veut en matière environnementale... Le règlement dont je viens de parler, tout ça, ça fait un cocktail explosif, et c'est pour ça que nous sommes extrêmement inquiets.

Il y a aussi toute la question de la nature des projets. Statistique Canada le disait, il y a eu, depuis deux ans, beaucoup plus de routes que de projets de transport en commun, ça, c'est sûr. Et, avec ce projet de loi là, on vient d'en ajouter encore plus, alors qu'on le sait que, pour l'environnement, ce qu'il faut, ce n'est pas plus d'étalement, c'est plus de densification. La ligne bleue, on a demandé au gouvernement : Pourquoi est-ce que vous ne faites pas — à Québec solidaire — une loi spécifique pour la ligne bleue au lieu de l'introduire dans le projet de loi n° 66 et de la rendre conditionnelle... de rendre la réalisation de la ligne bleue, qui attend depuis 40 ans, du prolongement de la ligne bleue... de la rendre conditionnelle à l'adoption du projet de loi n° 66? Le projet de loi n° 66, c'est cette année qu'il est arrivé, c'est récent, alors que la ligne bleue attend depuis 40 ans. Pourquoi est-ce que, quand il s'agit de routes, l'argent public, on y va à fond la caisse sans se poser de questions puis, quand il s'agit de transport, par exemple, de la ligne bleue, de transport collectif, du tramway, là on met des bâtons dans les roues puis on dit que c'est l'environnement en plus qui ne permet pas à ces projets-là d'avancer?

• (17 h 30) •

Dans le temps qu'il me reste, je vais amener des solutions parce que, comme je le dis, on est propositionnels. Ce qui est important, c'est que, dans le projet de loi, on spécifie que toutes les mesures pour tous les articles qui sont contenus dans le projet de loi, ils ne s'appliquent que pour les projets qui sont à l'annexe. Parce qu'en ce moment il y a un flou, et ce n'est pas identifié dans tous les articles. Et donc ce que ça veut dire, c'est que ça ouvre la porte à ce que des projets qui ne sont pas à l'annexe ou qu'on décide d'ajouter à l'annexe, ces mesures d'affaiblissement de l'environnement soient appliquées à ces autres projets-là que les 181. Donc, il y a vraiment un dangereux précédent parce qu'on laisse aussi les entrepreneurs vivre avec des projets où est-ce que les règles environnementales ne sont pas respectées. Ça va être difficile après, parce que ces projets-là durent quelques années, ça va être difficile après de leur dire : Bien, là, il y a des exigences, et c'est différent. Et ils vont vouloir qu'on continue à lâcher prise en matière environnementale.

Il faudrait aussi embaucher plus de personnel au ministère des Transports du Québec. La Vérificatrice générale l'a mentionné, elle l'a répété, elle l'a dit dans son rapport au début de l'année, au printemps, le rapport de la Vérificatrice générale, il y a un manque d'expertise au sein du ministère. Donc, embauchons plus de personnes.

Et moi, ce que j'ai l'impression et ce que je sens, c'est qu'au lieu de faire toutes ces mesures-là, notamment en embauchant plus de personnes pour accélérer, le message que le gouvernement veut envoyer, et c'est ça le message qu'il veut envoyer, c'est que l'environnement, c'est un boulet pour la relance économique. Et ça, c'est faux, M. le Président, malgré les belles paroles que le ministre de l'Environnement essaie de nous faire croire. On juge aux actes. Et le projet de loi n° 66 va exactement dans la direction contraire, de dire qu'au contraire on a besoin d'une relance économique verte, on a besoin d'une relance économique juste, et non pas une relance économique qui bafoue l'environnement. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vais reprendre la balle au bond de la collègue de Mercier pour m'inscrire dans le débat sur le principe du projet de loi n° 66. Nous aussi, M. le Président, on était en mode proposition pour ce qui est de la première mouture du projet de loi n° 66, le projet de loi n° 61. En toute bonne foi, on avait fait la proposition qu'il soit carrément retiré. Et le gouvernement a donné suite à cette proposition-là. Alors, comme vous voyez, on est capable, nous aussi, d'être en mode collaborateur, positif, proposition. Puis je vois que mon collègue de La Peltrie... J'ai au moins été capable de rentrer en compétition avec son iPad et j'ai pu susciter une réaction de sa part. Alors, voyez-vous, on est capables d'être positif puis de proposer des choses tangibles.

Alors, moi, M. le Président, je veux parler du projet de loi n° 61 parce que c'est de là qu'on vient. Puis ce n'est pas anodin parce que le n° 66 a été proposé comme étant une suite logique du n° 61, comme étant un lendemain du n° 61. Je vais revenir sur le n° 61 parce qu'on vient de là. Le deuxième élément sur lequel j'aimerais porter votre attention, c'est au niveau de l'expropriation. Et là je vais citer quand même un mémoire d'une personne, d'un avocat, Me Nikolas Blanchette de Fasken qui est venu témoigner lors des auditions, le 27 octobre dernier, dans le contexte du projet de loi n° 66. Puis ce qu'il dit est basé entre autres sur l'état du droit, et qui relève de l'expropriation et de nos tribunaux qui peuvent évidemment réviser, dans certains contextes, et d'un écueil qui pourrait être constitutionnel, qui est soumis dans le projet de loi n° 66. Et mon troisième point, après retour sur 61, expropriation, bien, je vais parler de l'environnement, ça ne va pas vous surprendre, M. le Président.

Alors, d'où venons-nous? Le projet de loi n° 61 avait été déposé quelque 10 jours avant le vendredi 12 juin, qui était la fin de notre session parlementaire, qui comptait trois semaines, la dernière semaine de mai et les deux premières de juin. Le projet de loi, de façon plus précise, avait été proposé, avait été présenté le 3 juin par le président du Conseil du trésor de l'époque, qui aujourd'hui est devenu ministre de la Santé, et, à l'époque, la ministre de la Justice est devenue présidente du Conseil du trésor. Donc, l'actuel ministre de la Santé, au moment, 3 juin, où il est président du Conseil du trésor, a déposé le projet de loi n° 61.

Et, le projet de loi n° 61, on nous disait : Bien là, il faut l'adopter à la vitesse grand V, parce que le titre parlait de lui-même, Loi visant la relance de l'économie du Québec et l'atténuation des conséquences de l'état d'urgence sanitaire déclaré le 13 mars 2020 en raison de la pandémie de la COVID-2019. Donc, c'est un projet de loi qui devait être adopté, M. le Président, de façon expéditive. Il fallait s'entendre absolument pour que les délais soient réduits, qu'on puisse... Puis là il y a une analogie, vous me voyez venir, sur l'esprit du projet de loi n° 66. Quand on dit «délais veulent dire perte de temps», moi, je ne pense pas. Je vous ouvre une parenthèse. Je ne pense pas qu'il faille moins de BAPE puis de protection en environnement. Je pense qu'il faut mieux de BAPE puis de protection en environnement, et il y a moyen de faire ça.

Donc, quand on vous dit «délais», les délais — puis autre analogie, donc — les délais parlementaires sont des délais qui nous empêchent de danser en rond, nous empêchent d'agir puis nous... bien, qu'est-ce qu'on veut faire, que... Voulons-nous agir? Que voulons-nous réaliser? Dans notre société, il y a des poids et contrepoids qui peuvent être améliorés, tout est perfectible, mais, en ce sens-là, le projet de loi n° 61 prévoyait... Puis ça, M. le Président, vous vous en rappelez, le projet de loi n° 61, là, les oppositions, là, on ne comprenait pas. On était, semble-t-il, selon le gouvernement, là, déconnectés, puis que ça prenait absolument ça. Mais le projet de loi, rappelez-vous, il prévoyait aussi trois choses qui ont été retirées par la suite.

Il prévoyait une prolongation indéfinie de l'état d'urgence sanitaire. Donc, l'état d'urgence sanitaire, décrété en vertu des articles 119 et suivants de la Loi sur la santé publique, je pense, c'est 122 et 123, on peut déclarer l'état d'urgence, bien, donne, à toutes fins pratiques, énormément, énormément de pouvoir au gouvernement. Avec le projet de loi n° 61, on voulait, au moins pour deux ans, prolonger l'état d'urgence sanitaire.

Deuxième élément, la possibilité de modifier toute autre loi au nom de la pandémie. Autrement dit, par règlement, que le gouvernement ou que le ministre ait le crayon du législateur, alors que tout ce qu'on fait là, bien, c'est pour essentiellement aussi, pas exclusivement, adopter des lois après en avoir débattu et après avoir entendu les gens qui sont venus nous parler.

Et le troisième élément, M. le Président, visait une immunité de poursuite judiciaire en droit civil. Que ce soit votre voisin, que ce soit votre cocontractant, en droit civil, vous avez des recours judiciaires. Si quelqu'un vous fait un tort, vous allez devant la justice, vous avez à démontrer trois choses : la faute, le dommage puis le lien de causalité. La faute, le voisin est venu chez moi et a brisé ma clôture. Ça, c'est la faute. Le dommage, bien, c'est le coût de la clôture que j'ai dû refaire, preuve à l'appui, voici, preuve, la facture : Ça m'a coûté 4 000 $ refaire l'entièreté de ma clôture. Donc, faute, dommage, puis le lien de causalité, bien, ce qu'il a fait a créé la faute, a créé le dommage. Il est là, le lien de causalité. Une fois que j'ai fait ça, selon la prépondérance des probabilités — ce n'est pas hors de tout doute raisonnable, ça, c'est le droit criminel — selon la prépondérance des probabilités, autrement dit, il est plus probable que ce soit effectivement ça, le cas, bien, ma preuve, mon fardeau est rencontré, puis il doit payer. C'est la même chose, M. le Président, donc, en matière contractuelle. J'ai voulu acheter une table, vous me l'avez livrée, mais la table n'est pas du tout, par rapport au contrat, n'est pas du tout... la qualité. J'ai payé une table à 5 000 $ ou à 2 000 $ ou à 500 $, peu importe, je n'ai pas la valeur de ma table, bien, je vais vous poursuivre. Puis, donc, il y a donc une responsabilité contractuelle puis une responsabilité extracontractuelle. Dans le Code civil, extracontractuel, c'est 1457, puis tout de suite après, 1458, l'article, c'est responsabilité contractuelle.

Le gouvernement, quand il agit, il vous exproprie, le gouvernement est un acteur qui n'est pas à l'abri des poursuites. Le gouvernement qui décide, du jour au lendemain, de ne pas vous donner votre permis, de vous exproprier, de passer des règlements qui sont réellement spécifiques à votre usine, à votre industrie juste pour vous exproprier de façon indirecte ou pour vous causer du tort, bien, vous avez le droit de lever la main, d'aller devant les tribunaux, puis de dire : Bien, là, je poursuis le gouvernement. Donc, je demande une injonction en Cour supérieure pour qu'il arrête le processus d'expropriation.

Puis on va voir, dans ce cas-là, qu'il y a l'article 44 de la Loi sur l'expropriation qui le prévoit déjà. Vous y allez selon l'article 44, mais, vous aurez toujours un pouvoir — puis j'y reviendrai de façon plus précise — en vertu de l'article 34 du Code de procédure civile. Vous avez toujours un processus en matière de vérification et de contestation judiciaire en Cour supérieure. Même chose, donc, quand le gouvernement commet une faute — faute, dommage et causalité — je peux le poursuivre.

Dans le projet de loi n° 61, on disait : Pour tous ces pouvoirs-là, état d'urgence quasi permanent, pouvoir d'aller très, très, très vite, notamment en matière d'expropriation, il y avait à la toute... et également pouvoir d'amender toutes les lois selon ce qu'on veut par règlement, il y avait une immunité de poursuite judiciaire. Autrement dit, dans le projet de loi n° 61, M. le Président, c'était très clair : «Le gouvernement — mais pas juste le gouvernement — un ministre, un organisme public ou toute autre personne ne peut être poursuivi en justice pour un acte accompli de bonne foi dans l'exercice de pouvoirs prévus [dans] la présente loi ou dans l'exécution...»

• (17 h 40) •

Là, avec le temps qui file, là, je pourrais vous passer des extraits de journaux de la tournée du premier ministre, qui était, le 16 juin... ou en juin, en Beauce, M. le Président, qui était par la suite, en juillet... On voit des articles ici, là, du premier ministre qui était rendu au Lac-Saint-Jean. Par la suite, en août, évidemment, on a eu l'occasion, à travers un article, dans Le Devoir, de Mylène Crête, de souligner le fait que — et je cite l'article — «le gouvernement avait alors accusé les partis d'opposition de lui faire perdre toute une saison de construction pour avancer 202 projets d'infrastructure un peu partout au Québec, comme des maisons des aînés...» Le premier ministre faisait la tournée du Québec, la Beauce, Saguenay—Lac-Saint-Jean, et j'en passe, d'autres régions, pour dire : Ça n'a pas de bon sens, ça prend le projet de loi n° 61, il faut qu'il soit adopté. Ils n'ont pas voulu qu'il soit adopté, ils n'ont pas voulu modifier la procédure parlementaire. Ça prend absolument ça, sinon on ne sera pas capables de faire la relance, sinon il va y avoir des torts irréparables, et ainsi de suite. On disait... Le gouvernement disait : Il y a 202 projets. Ça, on a besoin de ça, notamment pour les maisons des aînés.

Or, on a vu, en août, lors du débat des crédits : «...la ministre — présidente du Conseil du trésor — n'a pas été en mesure de déterminer [...] quels projets parmi les 48 maisons des aînés inscrits dans l'annexe de ce projet de loi auraient pu être accélérés avec son adoption, lors d'échanges animés avec le député de l'opposition officielle», député de La Pinière. Je ne sais pas pourquoi — fin de la citation — la journaliste a parlé d'échanges animés. Quand je pense à mon collègue de La Pinière, rarement on pourrait lui accoler une telle qualification. Mais, peu importe, je suis certain que la journaliste a très bien fait son travail. Peut-être qu'une fois de temps en temps mon collègue, des fois, il peut s'animer. Ça, on peut peut-être le pense. Mais tout ça pour vous dire que ça prenait absolument ça, il fallait...

Puis là, vous allez dire, bien, on pourrait me faire un 210, hein, M. le Président, la pertinence, ce n'est pas pertinent. Le député de LaFontaine, il parle de 61, puis on est sur le 66. Parce que c'est de là qu'on vient. Le 66, c'est le petit frère ou la petite soeur du 61; l'esprit de 66, c'est l'esprit de 61. Il fallait aller bien vite, il fallait faire en sorte que, ça, si on ne l'a pas, là, ça ne marche pas. Puis vous, vous êtes des empêcheurs de danser en rond, puis vous ne comprenez pas, puis vous nuisez au Québec, vous nuisez aux Québécois, vous nuisez aux régions. Puis là, écoutez, M. le Président, là, on avait tous les défauts de la terre. Bien, quand on veut aller trop vite, quand on veut aller trop vite, M. le Président, c'est ça que ça donne.

Et les trois éléments que je vous ai dits, qui faisaient partie des principaux écueils, parce qu'il y en avait bien d'autres, ont été retirés du projet de loi. Autrement dit, terminée, la prolongation indéfinie de l'état d'urgence sanitaire, terminée, la possibilité de modifier toutes les lois par règlement, puis terminée, l'immunité de poursuite judiciaire. Donc, un gros coup de balai a été fait dans le n° 61 pour nous donner le n° 66. Mais il en reste encore beaucoup, beaucoup de coups de balai à donner dans le projet de loi n° 66, puis c'est ce à quoi on va, selon les délais parlementaires, ce à quoi on va s'atteler pour faire en sorte de faire un débat qui tienne la route.

C'était important de faire cette genèse-là, très courte, sur le n° 61 parce qu'encore une fois le premier ministre, après sa tournée du Québec et des régions, ne comprenait pas pourquoi... Mais je pense qu'avec la rédaction la preuve est dans le pouding. C'était, entre autres, pour ça. Mais, une fois qu'on a dit ça, on n'a pas tout dit. Ça, c'était mon premier point, de trois.

Mon deuxième point, de trois. L'avocat Nikolas Blanchette, de chez Fasken Martineau DuMoulin, est venu, et est spécialisé en droit de l'expropriation au Québec depuis une dizaine d'années. Il exerce, donc, au sein du cabinet Fasken Martineau DuMoulin. Et moi, son mémoire... Il est venu témoigner. Puis mon collègue de La Pinière, qui aura été, en tout temps, utile, selon les informations que j'ai, accompagné de notre autre collègue de Mont-Royal—Outremont, lors des auditions, a eu longuement l'occasion de questionner l'avocat.

Et là c'est important de voir l'écueil majeur qui est inclus dans le projet de loi n° 66. Le projet de loi n° 66 dit... Puis là je pourrais faire des citations, je pourrais rendre ça compliqué, mais je vais essayer de me rendre intelligible. Le projet de loi n° 66 dit : On exproprie. Quand on exproprie, pour les 181 projets listés dans l'annexe I, quand on exproprie, la possibilité de contester, en vertu de l'article 44 de la Loi sur l'expropriation, n'existe plus, pas de contestation judiciaire. Le gouvernement exproprie, vous ne pouvez plus, en vertu de 44 de la Loi sur l'expropriation, contester. L'avocat spécialisé en droit de l'expropriation vous dit : La loi de l'expropriation, par 44, vous donne un chemin bien précis, vous donne une porte ouverte pour aller en Cour supérieure. Vous déposez un recours en vertu de l'article 44 puis là vous contestez l'expropriation. Le gouvernement dit : Cette porte-là, je la referme. Mais là l'avocat, il dit : Bien là, tout n'aura pas été dit parce que dans le Code de procédure civile, il y a l'article 34, et il y a l'article 529, et ça, c'est constitutionnel, qui donnent à la Cour supérieure, cour de droit commun au Québec, le pouvoir de réviser toute décision d'un organisme public sur les personnes morales de droit public. Ça, c'est 34. 529 : «La Cour supérieure saisie d'un pourvoi en contrôle judiciaire peut, selon l'objet du pourvoi, prononcer l'une ou l'autre des conclusions suivantes :

«1° déclarer inapplicable, invalide [...] inopérante une disposition d'une loi du Québec[...] — ou toute autre règle de droit :

2° [...]réviser ou annuler [...] décision prise par un organisme...»

Ça, le projet de loi n° 66 dit : Je ferme la porte du 44 qui vous permet, Loi sur l'expropriation, d'aller en Cour supérieure. Et, en ce sens-là, la Cour supérieure... Donc, c'est comme si le législateur arrêterait de parler, mais il y aurait toujours un recours en vertu du pouvoir général de la Cour supérieure, articles 34 et 529.

Mais là vous pourriez me dire : Oui, bien, ça, c'est bien beau, ça. Ça, c'est bien beau, ça, mais ça va être interprété par les... De un, on ne veut pas se rendre, hein? On est capables, on est législateurs, on est capables d'écrire la loi le mieux possible du premier coup. On n'a pas besoin de contestation judiciaire. Puis on pourrait dire : Bah! ça va être interprété que, s'ils ferment la porte sur le 44, ils fermaient la porte aussi sur le 29... sur le 34, pardon, puis le 529 du code de procédure... Non, si ce n'est pas dit, la porte n'est pas fermée. Et, si c'est dit, il y a une décision de la Cour supérieure, du juge Michel Yergeau de la Cour supérieure qui dit : Bien, quand on l'interprète, cette décision-là, qui a été appliquée au REM, qui, en vertu de la loi sur le REM, à son article 6, on fermait une telle porte... Mais le juge, en obiter, a dit : Bien, ça, ça n'enlèverait pas, de toute façon, le pouvoir constitutionnel de contester en vertu du pouvoir général de la Cour supérieure des décisions prises en matière d'expropriation.

Alors, une fois qu'on sait ça, il y a un trou immense dans le projet de loi n° 66. Si c'est ça, le législateur, ce que le gouvernement nous propose de faire, bien là, il va dire : Ah! bien, on va déposer un amendement, puis on va fermer la porte du 44, puis on va fermer la porte du pouvoir général de contestation de la cour devant la Cour supérieure, pouvoir général de réviser les décisions de tout organisme public de la Cour supérieure. Si c'est ça, l'intention, puis je veux dire, on va déposer un amendement, puis on va fermer cette porte-là, bien, M. le Président, ce serait inconstitutionnel. Il y aura un débat sur la constitutionnalité, première instance; deuxième instance, Cour d'appel, puis Cour suprême. Ça, c'est écrit dans le ciel parce que c'est, en matière constitutionnelle, M. le Président, un élément fondamental, et ça participe de nos droits en vertu notamment de la Constitution canadienne qui nous gouverne.

«Retirer le pouvoir de contester en vertu de l'article 44 de la loi n'a pas pour effet de retirer le pouvoir général de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure.» Paragraphe 87 du jugement : «L'article 8 — j'ai dit 6, tantôt, c'est l'article 8 — rend inapplicable à une expropriation réalisée dans le cadre de la construction du REM le moyen procédural spécifique énoncé à l'article 44, Loi d'expropriation, lequel a pour effet corollaire de suspendre ipso facto les procédures d'expropriation. Que le législateur retire ce moyen ne gomme pas pour autant le pouvoir général de surveillance et de contrôle des décisions de l'État. Ce pouvoir inhérent demeure, et l'exproprié peut s'en prévaloir.»

Alors, deux choses, l'une, le gouvernement pense pouvoir enlever le pouvoir de contestation, on ferme la porte du 44. Ça n'arrivera pas, parce qu'il va y avoir possibilité d'y aller directement, en Cour supérieure. Le gouvernement dit : À ce moment-là... Puis faites attention, M. le Président, parce que la Loi sur l'expropriation est une loi procédurale, une loi procédurale qui fait en sorte que les délais sont déjà réduits par rapport à la coutume des délais de la Cour supérieure quand vous faites un 34 ou un 526.

Alors, M. le Président, si on veut accélérer les délais puis on ferme la porte du 44, il va rester quand même le pouvoir général, et là ce que dit, entre autres, l'avocat spécialisé, c'est que les délais risquent d'être encore plus longs. Soit vous fermez la porte à la contestation puis vous pensez qu'il n'y aura pas de contestation, mais, ce faisant, si vous la fermez complètement, vous allez avoir un débat judiciaire sur la non-constitutionnalité de ce que vous faites. Si vous pensez faire ça puis que finalement vous ne contestez pas ça puis que la personne peut le faire par en arrière, vous venez d'allonger les délais. Vous venez de faire le contraire de votre intention. Alors, quand le législateur, M. le Président... Puis je comprends qu'il y a eu la mouture du 61, et ça faisait partie des éléments qui avaient été... qui auraient pu être soulevés... l'avocat spécialisé nous dit que c'était essentiellement le même article qu'on retrouvait dans le 61 que dans le 66. Alors, en ce sens-là, M. le Président, je pense que c'est important de mentionner un écueil majeur en matière d'expropriation.

• (17 h 50) •

Autre élément, on dit, dans le projet de loi n° 66, que c'est le ministre qui va faire une évaluation, c'est le ministre qui va fixer l'indemnité provisionnelle dans le cas visé. C'est le ministre et ce ne serait plus le tribunal spécialisé, le Tribunal administratif du Québec qui ferait cette évaluation de la provision sommaire en cas d'expropriation. Donc, il vient de dire : Faites attention, c'est une autre décision qui va pouvoir être contestée. Le ministre n'a pas prétention d'avoir l'expertise du TAQ pour déterminer de telles évaluations provisionnelles, et c'est retirer... Quand on veut, des fois, aller plus vite... Vous savez, dans la vraie vie de tous les jours, là, que ce soit pour n'importe quoi, on fait une tâche sur le terrain, n'importe quoi, quand on dit : Je vais aller plus vite, je vais aller plus vite, des fois, on se rend compte que ça va prendre plus de temps. On est mieux de prendre notre temps puis de le faire comme il faut plutôt que d'essayer d'aller plus vite, de presser, puis de faire ça tout croche, puis finalement on se rend compte que c'est mal fait puis qu'il faut recommencer, on a perdu du temps.

Alors, quand le ministre va déterminer cela, ce sera contestable. Il n'a pas l'expertise pour faire ça. Puis il y a déjà un processus où le tribunal peut, lui, par décision, dire : Bien, de façon provisionnelle, voici votre indemnité, puis, pour le reste, on continuera le débat, et les travaux peuvent aller de l'avant. C'est un autre élément qui a été mentionné, M. le Président. Ça, c'était mon deuxième point de trois.

Puis, évidemment, pour les quelques secondes qu'il me reste, je ferai miens tous les propos tenus par mon collègue de Viau, qui est notre porte-parole en matière d'environnement, qui, essentiellement, et c'est de même, moi, que je vais vous le résumer... qui est un cri du coeur : Il ne faut pas, en 2020... L'environnement, ça a été un enjeu, dans la dernière campagne électorale. Ça, on en a beaucoup discuté. Ça ne prend pas moins de BAPE, moins de protection de l'environnement. Ça prend mieux de BAPE, mieux de protection de l'environnement. Puis c'est ce à quoi on aura l'occasion de déposer, en ce sens-là, de nombreux amendements. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de LaFontaine. Je reconnais Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : Bon après-midi, M. le Président. J'écoutais mon collègue de LaFontaine. Il parlait de l'esprit de la loi, l'esprit du projet de loi n° 66. Le projet de loi n° 66, la Loi concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, quelle saga, M. le Président, quelle saga pour en arriver là, pour en arriver là. Combien de temps, combien d'énergie pour en arriver là?

Et j'écoutais mon collègue de La Pinière ce matin, puis finalement ce qu'il dit, brièvement, ce qu'il dit, le collègue de La Pinière, c'est que, bon, c'est bien beau, c'est 181 projets, 181 projets, mais que, finalement, la grande majorité de ces projets-là sont déjà en marche, qu'on n'avait pas vraiment besoin d'un projet de loi pour que ces projets-là aboutissent, procèdent comme ils devaient procéder, comme il faudrait qu'ils procèdent.

Mon collègue de LaFontaine parle de l'esprit de la loi, l'esprit de ce projet de loi n° 66. On va revenir en arrière. Je pense qu'il faut un peu voir le contexte qui a amené à ce projet de loi là. Je suis très consciente, là, M. le Président, je pense que je finis la semaine, hein, il nous reste à peu près, quoi, cinq minutes, environ? Cinq minutes, O.K. Bon, bien, je vais... Ça va être le hors-d'oeuvre, on va continuer la semaine prochaine.

Mais il y a quelque chose qui me dérange, M. le Président, il y a quelque chose qui me dérange. Depuis que ce gouvernement-là est au pouvoir, bien, on a eu combien de bâillons, hein? Quatre? Quatre. Quatre bâillons. Quatre bâillons. Ensuite, et dans la même foulée, réfléchissez, là, on a eu le projet de loi n° 34, hein, qui réduisait les pouvoirs de la Régie de l'énergie, qui abolissait... On n'abolit pas le contre-pouvoir, mais on l'affaiblit grandement. Ensuite, il y a eu le projet de loi n° 40. Carrément, là, on abolit les commissions scolaires. Un autre contre-pouvoir qu'on abolit, là, d'une façon musclée. Ensuite, il y a le projet de loi n° 44. Encore une fois, projet de loi n° 44, là, on abolit le conseil du Fonds vert. Ensuite, on abolit aussi TEQ, Transition énergie Québec, hein? Deux éléments, on l'abolit, on envoie ça au ministre. On envoie tous ces millions-là... C'est lui, ce sont les ministres de l'Énergie et de l'Environnement qui vont gérer ça. On a aboli des contre-pouvoirs.

Et là pandémie, pandémie oblige, urgence oblige, à, quoi, deux semaines avant la fin des travaux, deux semaines, même pas, une dizaine de jours, on nous arrive avec le projet de loi n° 61, le projet de loi n° 61 qui devait être la grande relance économique, hein? Sans projet n° 61, il n'y avait pas de relance économique. Et là on disait : Il nous faut ça parce que, sans ça, on ne peut pas relancer l'économie du Québec.

Alors, nous, l'opposition, les oppositions, à la lumière des consultations, on s'est dit : Bien non, ce n'est pas possible. On ne peut pas aller avec un projet de loi comme celui-là, qui escamote tout, encore une fois, qui remet en question les contre-pouvoirs, les balises, les garde-fous puis qui veut aller le plus vite possible. Et puis, étrangement, hein, la majorité, quoi, 200, 201 de ces projets-là, hein, la grande majorité de ces projets-là, c'était dans ces circonscriptions électorales caquistes. Ah! quel hasard! Quel hasard!

Alors là, il y a évidemment les groupes qui sont venus en consultations, qui étaient contre, il y a nous aussi, qui portaient leurs voix, et il y a évidemment les journalistes. Paul Journet — j'ai un petit peu de temps? — Paul Journet, je le cite dans un éditorial : «Le gouvernement caquiste ne fait pas qu'avancer plus vite. Il s'attaque carrément aux contre-pouvoirs — ce n'est pas juste moi qui l'ai dit, il s'attaque carrément aux contre-pouvoirs — et même à une certaine idée de la démocratie.» Quand même, une certaine idée de la démocratie.

«La loi proposée ratisserait large, très large.

«Le gouvernement renouvellerait l'état d'urgence pour une période indéterminée — ce n'est pas grave, indéterminée. Il pourrait changer les lois par règlement. Il mettrait les ministres à l'abri de poursuites judiciaires — mon collègue en a parlé. Il empêcherait les citoyens de contester une expropriation — tiens, tiens. Et il pourrait aussi déroger à la Loi sur les contrats des organismes publics, par exemple en concluant des ententes de gré à gré.

«En d'autres mots, le gouvernement se mettrait à l'abri de l'opposition et des citoyens.»

Et là, comme ça, la charge est grande, là, hein? Dans les médias, Le Devoir, La Presse, même Le Journal de Québec, Le Journal de Montréal, tout le monde a relevé les critiques. Radio-Canada, LCN, on en a tous parlé. On était tous outrés. Et nous, les oppositions, on se faisait accuser de vouloir freiner la relance économique. Moi, j'aimerais saluer le travail des oppositions, mais en particulier de mon collègue de La Pinière, qui a défendu la voix de la démocratie et qui a défendu le plus élémentaire de ce qui est le travail démocratique, le travail législatif, parce qu'on voulait nous envoyer en bâillon encore avec cette affaire-là, hein? Alors, finalement... Et puis là, là, même le premier ministre a fait une tournée en région. Temps, énergie, argent, là, parce que, là, tu as le premier ministre qui se promène en région puis qui dit : On a besoin de ce projet de loi là, on a besoin de ça pour la relance économique. Et puis finalement, hein, à la fin de la session, la nouvelle présidente du Conseil du trésor, une femme, a eu la grande sagesse de dire : «Je fais table rase [...] on repart avec des bases plus nettes. Pour moi, c'était plus efficace et plus simple de repartir d'une nouvelle mouture, mais qui va rencontrer les mêmes objectifs.» Ah! Qui va rencontrer les mêmes objectifs. On y reviendra la semaine prochaine, mais elle a vu, elle, elle a vu ces lacunes béantes, très, très, très troublantes, et puis elle a dit : On n'a pas le choix, on fait table rase, on recommence. Mais malheureusement, le projet de loi n° 66 n'est pas parfait, n'est pas du tout parfait, il y a des grandes, grandes, grandes faiblesses.

M. le Président, est-ce que j'ai encore du temps? Encore? Ah oui? O.K.

Alors là, nouvelle mouture, rédige le projet de loi, appelle les différents groupes pour consultation, et là, malgré tout ce qu'on a vécu, là, durant la dernière année relativement aux nations autochtones, il n'y a pratiquement pas de groupes des Premières Nations qui sont invités. En fait, dans le projet de loi n° 61, il n'y avait aucun groupe des Premières Nations qui avait été invité. C'est incompréhensible parce que ça touche les Premières Nations, évidemment, dans leur plus profond. Et là, deuxième exercice...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée... Donc, je comprends que vous allez poursuivre lors de la reprise du débat. Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Ajournement

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au mardi 3 novembre 2020, à 13 h 40.

(Fin de la séance à 18 heures)