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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 21 septembre 2021 - Vol. 45 N° 206

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires du jour

Projet de loi n° 64 —  Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des
renseignements personnels

Adoption

M. Éric Caire

M. Marc Tanguay

M. Martin Ouellet

Mme Kathleen Weil

M. Mathieu Lévesque

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter l'entreprise Logistik Unicorp Inc. pour la signature d'un contrat avec la
Nouvelle-Zélande

M. Louis Lemieux

Souligner la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer

Mme Monique Sauvé

Souligner le 375e anniversaire de la seigneurie de la Rivière-du-Sud

Mme Marie-Eve Proulx

Souligner la Journée mondiale du tourisme

Mme Filomena Rotiroti

Rendre hommage à Mme Nicole Garceau, artiste multidisciplinaire et fondatrice du Festival de
contes et légendes en Abitibi-Témiscamingue

M. Pierre Dufour

Féliciter la Sûreté du Québec pour l'importante opération policière déployée dans la municipalité
de Sainte-Paule afin de retrouver un enfant victime d'enlèvement

M. Pascal Bérubé

Souligner le 50e anniversaire du Centre d'action bénévole de Saint-Hubert

M. Ian Lafrenière

Souligner le travail de Mobilisation 6600 Parc Nature MHM pour dénoncer le projet de
l'entreprise Ray-Mont Logistiques Montréal inc.

M. Alexandre Leduc

Féliciter Mme Ann-Renée Desbiens, médaillée d'or au Championnat mondial de hockey sur
glace féminin

Mme Émilie Foster

Déplorer le décès de la boxeuse Jeanette Zacarias Zapata

M. André Fortin

Dépôt de documents

Rapport annuel 2019-2020 résultant de la comparaison, du couplage ou de l'appariement des
fichiers de renseignements inscrits au plan d'utilisation de Revenu Québec et rapport annuel
de Financement-Québec

Rapports annuels du CIUSSS—Est-de-l'Île-de-Montréal et des CISSS de l'Outaouais et de la
Montérégie-Ouest

Rapports annuels sur l'entente-cadre nationale et déploiement des processus d'intervention
concertés et sur l'application du chapitre II de la Loi visant à lutter contre la maltraitance
envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité

Rapport annuel de la Commission des services juridiques

Rapport annuel du ministère des Affaires municipales et de l'Habitation

Plan stratégique 2021‑2026 de la Régie des marchés agricoles et alimentaires

Rapport annuel du Conseil consultatif de la lecture et du livre

Réponses à des pétitions

Rapport annuel du Commissaire à l'éthique et à la déontologie

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Dépôt de rapports de commissions

Modifications à la liste des présidents de séance

Questions et réponses orales

Mise en place d'une cellule de crise au sein du réseau de la santé

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Mme Dominique Anglade

M. François Legault

Rupture de services dans certains centres hospitaliers

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Mme Marie Montpetit

M. Christian Dubé

Manifestations de militants antivaccin aux abords des écoles et des hôpitaux

Mme Marwah Rizqy

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Marwah Rizqy

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Marwah Rizqy

M. Simon Jolin-Barrette

Position du premier ministre concernant le fédéralisme

M. Joël Arseneau

M. François Legault

M. Joël Arseneau

M. François Legault

M. Joël Arseneau

M. François Legault

Nationalisation des centres d'hébergement et de soins de longue durée privés

M. Sol Zanetti

Mme Marguerite Blais

M. Sol Zanetti

Mme Marguerite Blais

M. Sol Zanetti

Mme Marguerite Blais

Stratégie du gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques

Mme Isabelle Melançon

M. Eric Girard

Mme Isabelle Melançon

M. Jonatan Julien

Mme Isabelle Melançon

M. Ian Lafrenière

Projet de loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français

M. Pascal Bérubé

M. Simon Jolin-Barrette

M. Pascal Bérubé

M. Simon Jolin-Barrette

M. Pascal Bérubé

M. Simon Jolin-Barrette

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

M. Lionel Carmant

M. David Birnbaum

M. Lionel Carmant

M. David Birnbaum

M. Lionel Carmant

Pénurie de main-d'oeuvre dans les services de garde

M. Marc Tanguay

Mme Danielle McCann

M. Marc Tanguay

Mme Danielle McCann

M. Marc Tanguay

Mme Danielle McCann

Motions sans préavis

Souligner la conclusion d'une entente entre l'État de New York et Hydro-Québec pour la
réalisation du projet Champlain Hudson Power Express

Mise aux voix

Rappeler le droit de travailler en français au Québec et demander aux employeurs de contribuer
davantage à la protection et à la promotion de la langue française

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 64 —  Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des
renseignements personnels

Reprise du débat sur l'adoption

M. Frantz Benjamin

Mise aux voix

Projet de loi n° 92 —  Loi visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle
et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières

Adoption du principe

Mme Isabelle Charest

Mme Isabelle Melançon

Mme Lise Lavallée

Mme Monique Sauvé

M. Mathieu Lévesque

Mme Christine St-Pierre

Mme Christine Labrie

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures)

Le Vice-Président (M. Picard) : Mmes et MM. les députés, avant d'entreprendre nos travaux, nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Dans un premier temps, je tiens à faire remarquer à tous les parlementaires que nous devons porter le masque en couvrant le nez, s'il vous plaît.

Affaires du jour

M. le leader adjoint du gouvernement, pour le début de nos travaux.

M. Caire : Oui. Merci, M. le Président. Pourriez-vous appeler l'article 13, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 64

Adoption

Le Vice-Président (M. Picard) : À l'article 13, M. le ministre responsable de l'Accès à l'information et de la Protection des renseignements personnels propose l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Et je cède la parole à M. le ministre responsable de l'Accès à l'information.

M. Éric Caire

M. Caire : Merci, M. le Président. Adoption finale, M. le Président, d'un projet de loi qui aura été somme toute un marathon, ce qui s'explique assez facilement par l'importance du projet de loi.

Il y a certains éléments, d'entrée de jeu, M. le Président, que j'aimerais réitérer. J'en ai parlé brièvement à la prise en considération, mais je pense qu'à l'adoption finale ça vaut la peine de répéter ces éléments-là.

D'abord, sur le projet de loi en tant que tel, je pense que... même, je pense, j'affirme que la collaboration a été essentielle. On ne peut pas revoir un projet de loi comme celui-là, on ne peut pas... même si les travaux ont été longs, n'en demeure pas moins que, vu l'importance du projet de loi, à l'intérieur d'un même mandat... Et je prends à témoin Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui a été, à l'époque, responsable de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels et qui sait à quel point ce travail-là est un travail de fond, est un travail difficile.

Fédérer les gens, trouver les consensus, les compromis, ce n'est pas simple. C'est n'est pas simple, mais on y est arrivés, M. le Président, parce que, et exclusivement parce que tous les parlementaires se sont donné le mandat de moderniser notre loi sur la protection des renseignements personnels. L'accès à l'information, il faudra s'y attaquer, mais, pour l'instant, compte tenu des circonstances, il était urgent de revoir cette loi-là qui, au niveau du public, date des années 70, au niveau du privé date du début des années 90. Donc, il était clairement une haute priorité de revoir la protection des renseignements personnels.

M. le Président, et on y a fait référence, et tout le monde a assisté à ça, des événements malheureux qui se sont produits. On pense à Desjardins, évidemment, mais on pense aussi, dans une moindre mesure, à toutes les attaques qui ont lieu dans les entreprises privées, les entreprises publiques, qui laissent un peu sans défense les organismes privés, publics qui en sont les victimes.

Quel est le lien avec le p.l. n° 64? Bien, il faut comprendre, M. le Président, que la législation que nous avions adoptée, qui faisait école à l'époque et qui était extrêmement novatrice comme approche, bien, ça date d'une ère où c'était le papier qui était encore roi et maître dans nos communications, dans le stockage d'informations, l'archivage, etc.

Aujourd'hui, M. le Président, au XXIe siècle, c'est l'ère du numérique, c'est l'univers du numérique. La donnée transite, voyage, se stocke dans l'univers du numérique. M. le Président, ce que ça veut dire, c'est que nos informations, de façon générale, mais nos renseignements personnels ont pris une valeur inestimable, inestimable.

On est à une époque où de façon extrêmement rapide on peut collecter, on peut trier, on peut structurer et on peut analyser des volumes de données incroyables, ce qui était totalement impensable à l'époque où tout ça était gardé sur support papier. C'était impensable. Aujourd'hui, M. le Président, avec le stockage en infonuagique, c'est des volumes de données incroyables, impensables, qui, si on le comptabilisait en argent, représenteraient probablement des milliards de milliards de dollars. Ramenez ça en quantité d'informations, ça dépasse ce que l'être humain est capable de concevoir en termes de volumes. À tous les jours, M. le Président, à tous les jours le gouvernement du Québec à lui seul génère une quantité de données incroyable, mais l'infonuagique nous permet maintenant de conserver autant de données.

Notre capacité de stockage a augmenté, notre capacité à l'utiliser a augmenté, et, avec les applications d'intelligence artificielle, maintenant, on est en mesure de faire des analyses, de faire du profilage. On peut travailler sur ces campagnes électorales, on l'a vu, à tort ou à raison. On peut travailler sur des campagnes de marketing. On peut suivre à la trace un individu dans son cheminement sur le Net. À travers les médias sociaux, on peut aussi aller chercher des informations et monter le profil complet de quelqu'un.

Et ça, M. le Président, ça nous amène à une réflexion, parce que nos comportements n'ont pas suivi la réalité du numérique, et les comportements des entreprises, publiques ou privées, n'ont pas suivi... ou plutôt ont beaucoup suivi l'idée du numérique. Et on l'a vu, ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce y faisait référence, avec le scandale de Cambridge, mais il y en a eu d'autres, il y en a eu d'autres. On voit des organisations criminelles, maintenant, qui se lancent dans la cybercriminalité et qui, par la collecte de données et le troc de données, font des fortunes. On le voit aussi pour d'autres raisons qui sont tout à fait légitimes, des raisons commerciales qui sont légitimes, mais qui ne correspondent plus, M. le Président, qui ne correspondent plus à la réalité de la protection de nos renseignements personnels.

Alors, M. le Président, il fallait que l'Assemblée nationale, et j'insiste, l'Assemblée nationale... Oui, c'est l'initiative du gouvernement, mais c'est l'Assemblée nationale, ultimement, qui adoptera cette loi-là. Et l'Assemblée nationale du Québec se devait de moderniser sa loi sur la protection des renseignements personnels.

En commission parlementaire, j'ai eu l'occasion de discuter notamment avec le député de LaFontaine de certains comportements puis je veux les illustrer. Je pense que les gens vont reconnaître ces comportements-là où... M. le Président, vous allez à une boutique, vous voulez vous acheter une simple paire de jeans. Autrefois, on vous aurait dit : Bien, ça coûte tant, tu me paies, tu mets ça dans un sac, tu pars. Aujourd'hui, on va vous demander votre courriel, on va vous demander votre code postal et peut-être même votre numéro de téléphone. Pourquoi? Pourquoi, M. le Président, on demande ça? Qu'est-ce que ça à voir avec le fait que je veux acheter une paire de jeans, c'est tout? Bien, M. le Président, pourquoi? Parce qu'en plus de vous vendre une paire de jeans je collecte une information qui a une grande valeur pour moi, moi étant le commerçant. Ça me permet de profiler mon client. Ça permet d'interagir avec le client, de lui envoyer ma publicité, de lui texter ma publicité non sollicitée. Ça me permet de dégager des profils régionaux. Ça me permet de faire toutes sortes d'analyses qui me permettent, à moi, d'être beaucoup plus efficace dans ma capacité à vendre mes produits. Alors, l'intérêt du commerçant est évident. Mais votre intérêt à vous, M. le Président, il est où, là-dedans? C'est quoi, votre intérêt à recevoir cette publicité-là? C'est quoi, votre intérêt à vous faire profiler? C'est quoi, votre intérêt à vous faire dire : Bien, si jamais j'ai une promotion... Bien là on parle... évidemment, on reste dans l'univers tout à fait légitime du commerce, on ne parlera pas de ce qui est moins légitime.

Alors, M. le Président, c'était devenu une... c'est devenu une façon de faire. C'est devenu normal de vous demander des renseignements personnels parce que, du point de vue de l'entreprise, cette information-là, elle est précieuse, elle a une grande valeur. Mais ça ne se fait pas nécessairement pour le plus grand bénéfice de la population, M. le Président.

Et malheureusement notre loi sur la protection des renseignements personnels, qui a été pensée à une autre époque, était évidemment incapable de, comment dirais-je, réglementer ce qui est en train de devenir un véritable far west de la collecte du renseignement personnel. M. le Président, le p.l. n° 64 répond à ce besoin absolument vital, absolument nécessaire de réglementer cet univers-là où à peu près tout était permis.

Bon, évidemment, vous comprendrez, puis je suis sûr que c'est vrai pour l'ensemble des groupes d'opposition, vous comprendrez qu'il y a eu plusieurs représentations qui ont été faites pour nous dire que la loi était trop contraignante, qu'elle était trop sévère, que ce n'était pas nécessaire, qu'on aurait pu faire moins.

M. le Président, je suis désolé, mais, en mon âme et conscience, la loi fait très exactement ce qu'elle doit faire dans le contexte numérique du XXIe siècle, et j'en suis profondément convaincu. Et c'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, M. le Président, je demande à l'Assemblée nationale de l'adopter.

M. le Président, avec la loi n° 64, il y aura maintenant un responsable. Et, quand je parle de responsable... Puis je reviens un peu sur ce que le député de LaFontaine disait parce qu'il... Bon, le député de LaFontaine souhaitait qu'on amende le projet de loi pour dire que le premier dirigeant d'un organisme est imputable de l'application de la loi, mais, de la façon dont la loi est écrite, c'est implicite, c'est explicite. Les juristes sont formels, le premier dirigeant est responsable, est imputable de l'application et du respect de la loi dans son organisation. Ça, c'est nouveau, ça, c'est une première. Il y aura quelqu'un vers qui se tourner, si la loi n'est pas respectée, si la loi n'est pas appliquée. Ça fait peur, M. le Président. C'est sûr que ça fait peur, parce que, là, aujourd'hui, on peut mettre un nom et un titre sur la personne qui devra s'assurer que la loi que nous sommes à adopter soit appliquée et respectée. Alors, ça fait peur.

• (10 h 10) •

Il faudra aussi mettre en place soit un responsable ou un comité qui va permettre d'informer les citoyens. Ça, c'est une autre disposition qu'on met en place et qui m'apparaît fondamentale. Parce que, vous le savez, M. le Président, et ça, j'ai toujours beaucoup de plaisir, quand on va sur les différents sites, par exemple, puis où on vous parle de la politique de confidentialité, généralement on comprend que la personne qui a écrit ça est payée au mot, et elle a certainement tiré un revenu conséquent de son texte, parce que c'est long longtemps, ce n'est pas nécessairement convivial et pratique à lire. Et généralement... Je connais peu de gens qui se tapent le texte au complet et qui vont jusqu'à la fin. En fait, je n'en connais pas, mais je suis convaincu qu'il y en a, il y en a toujours, mais ils sont l'exception. Alors, M. le Président, on n'est pas né de la dernière pluie, on comprend que c'est un peu l'objectif, là, oui. Alors, aujourd'hui, M. le Président, on se dit : Bien, non, il y a des gens qui seront responsables d'informer les citoyens, de répondre à leurs questions, à leurs interrogations.

M. le Président, une autre notion qu'on apporte et qui est, pour moi, fondamentale, c'est la notion du consentement et du consentement explicite. Que quelqu'un vous demande vos renseignements personnels, ce n'est pas en soi mal, ou illégal, ou condamnable, mais encore faut-il qu'il vous le demande, encore faut-il qu'il vous explique ce qu'il veut faire avec, encore faut-il qu'il obtienne votre consentement et encore faut-il qu'il s'astreigne à utiliser ces renseignements-là pour les seuls motifs pour lesquels il les a collectés.

Ça, c'est ce que fait le projet de loi n° 64. Donc, le projet de loi n° 64 n'interdit pas de collecter des renseignements personnels. Ce n'est pas ça, l'objectif. Par contre, vous allez dire à la personne de qui vous collectez des informations pourquoi, qu'est-ce que vous allez faire avec et est-ce que cette personne-là est d'accord pour que vous le fassiez. Et vous allez devoir vous astreindre à ne les utiliser que pour les seules fins pour lesquelles vous les avez collectées.

Donc, moi, quand je vous demande votre code postal puis votre courriel, puis je vous demande : Pourquoi vous voulez ça?, puis vous me dites : Bien, pour vous envoyer la facture... O.K., tu as besoin du courriel, pas du code postal. Parfait. Alors, encore faut-il que vous ne vous serviez de cette information-là pour les seules fins d'envoyer une facture. Si vous dites : Ah, bien, en passant, je peux peut-être aussi m'en servir pour autre chose, pour des entreprises de marketing, par exemple, à qui je vais envoyer une liste de courriels que j'ai collectés en disant : Bien, moi, je suis tel magasin, j'ai collecté telle information, donc on s'entend qu'on peut envoyer des publicités ciblées aux individus en lien avec le profil d'entreprises qu'ils ont fréquentées, puis ça me fait un petit revenu, bien, non, désolé, ça ne marche pas de même, parce que ce n'est pas ça que vous avez dit à la personne et ce n'est pas pour ça que vous avez obtenu son consentement. Donc, ça, le projet de loi n° 64, il est clair là-dessus. Vous devez demander le consentement et vous devez expliquer ce que vous allez faire avec les renseignements personnels.

Il y a des exceptions, M. le Président, parce que toute règle générale a ses exceptions, évidemment. Donc, on peut transmettre des informations personnelles à autrui si c'est manifestement dans l'intérêt de la personne, si les fins pour lesquelles elles seront utilisées sont compatibles avec les fins pour lesquelles elles ont été collectées. Donc, la loi prévoit quand même des exceptions, comme à toute règle générale, mais je vous dirais que l'objectif, la cible, c'était de s'assurer que maintenant, quand on collecte des renseignements personnels, ça prend le consentement, ça prend une raison, ça prend une explication. Ce sera fait.

M. le Président, une autre disposition de la loi dont je ne suis pas peu fier, c'est le droit à l'effacement. Alors, on sait effectivement que sur Internet peuvent se retrouver des informations qui peuvent être préjudiciables aux individus qui sont concernés. Et il est normal et naturel qu'un individu puisse se prévaloir du droit à ce que ces informations-là soient retirées d'Internet parce qu'elles lui sont préjudiciables. Évidemment, on les a balisées, parce qu'il y a aussi la liberté d'expression, la liberté de presse qui rentraient en ligne compte. Et je pense, et ça a été souligné, je pense qu'on a trouvé le bon compromis entre ces différents intérêts là, et notamment le fait que, oui, il faut quand même qu'il y ait un préjudice pour la personne à ce que l'information se retrouve sur Internet. Mais, une fois ça déterminé, bien, la personne a le droit de voir ces informations-là désindexées et qu'on ne puisse plus y accéder. Donc, ça, c'est...

Il y a une disposition, M. le Président, qui existait dans le Règlement général de protection des données, qui est la loi qui a été adoptée par la Communauté européenne, et qui a servi de très forte inspiration au projet de loi n° 64. Je vous dirais que c'est, à peu de chose près, un copier-coller. Et c'était une disposition qui était réclamée, et on l'a vu, notamment par les victimes d'agression sexuelle, bon, enfants... on peut penser à des enfants qui auraient été abusés, etc. Donc, il était temps que le Québec se dote d'une disposition comme celle-là, M. le Président.

• (10 h 20) •

Un autre élément très important, toute la recherche au Québec, parce qu'on parle de protection des renseignements personnels, puis je pense que c'est fondamental, mais il ne faut pas perdre de vue que l'utilisation des renseignements personnels peut bénéficier à la collectivité et au niveau de la recherche notamment. Et c'était important pour nous de consulter les gens de l'écosystème pour s'assurer que le p.l. n° 64 ne devenait pas un... en fait pouvait même lever les cadenas qui étaient imposés quelquefois pour la recherche parce que ceci doit se faire évidemment au bénéfice de la société. Mais il y a des dispositions, dans la loi, qui veillent à la protection des renseignements personnels. Donc, effectivement, il faut que ce soit encadré, il faut que ce soit bien défini, ce qui doit être fait et ce qui ne peut être fait. Je pense qu'on l'a bien fait. Je pense qu'on a trouvé, encore là, des zones de compromis très intéressantes avec les milieux de recherche. Et donc le p.l. n° 64 peut aussi permettre l'utilisation de renseignements personnels quand ça se fait au bénéfice de la collectivité et de la communauté comme c'est le cas dans les dispositions que nous avons prises.

M. le Président, une loi comme celle-là serait inutile si elle n'avait pas de dents. Et ça, ça a fait frissonner, je dirais, quelques organisations, parce que, le p.l. n° 64, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il a des dents. Alors, on parle d'amendes qui peuvent aller jusqu'à 25 millions, dans le cas de sanctions administratives pécuniaires, ou 2 % du chiffre d'affaires, et qui peuvent, dans le cas des sanctions pénales, monter jusqu'à 4 % du chiffre d'affaires mondial.

Pour beaucoup, c'était présomptueux, de la part du Québec, de dire... Voyons donc, le Québec, nation de 8,5 millions d'habitants, seule en Amérique... Il faut bien comprendre que la loi que nous nous apprêtons à adopter sera, et de très loin, la plus sévère en Amérique. Elle calque effectivement ce qui se fait en Europe, mais, en Amérique, elle n'a pas son équivalent. On peut penser que c'est présomptueux. Moi, je pense que c'est précurseur. Moi, je pense que, comme je l'ai dit d'entrée d'intervention, il y a une culture un peu laxiste qui s'est installée. Je ne peux pas blâmer les entreprises, je ne peux pas blâmer les organisations, parce que la loi le permettait, et donc de le faire, c'était, à ce moment-là, je n'ose pas dire légitime, mais c'était légal. C'était au législateur, et c'est ce que nous faisons, de s'assurer que la loi soit modernisée. Maintenant que c'est chose faite, il y a une culture qui doit être changée. Cette culture-là de la collecte effrénée des renseignements personnels, elle doit être changée. Et malheureusement, M. le Président, soyons transparents, s'il n'y a pas de sanction conséquente, bien, c'est difficile de changer la culture.

Évidemment, beaucoup de représentations, beaucoup de... notamment dans le milieu des affaires, où on nous a dit : Aïe! un instant, là. Y avez-vous pensé? Oui, la réponse à cette question-là, c'est : Oui, on y a pensé. Oui, on en a discuté. Oui, les sanctions qui sont prévues par le p.l. n° 64 sont des sanctions qui sont extrêmement importantes. Mais aussi, M. le Président, ce que je tiens à dire, c'est que ce ne sera pas le premier réflexe d'aller vers les sanctions.

La loi prévoit, puis je vais... j'y reviens, là, tout de suite après, sur la Commission d'accès à l'information, mais la loi prévoit la philosophie, l'idée de la loi. Puis je pense qu'avec les collègues de LaFontaine, de Gouin, notamment, on a été très clairs là-dessus, et je pense que l'Assemblée nationale va parler d'une seule voix, on souhaite un accompagnement. On souhaite un accompagnement de nos ministères, de nos organismes, de nos entreprises. On ne souhaite pas que le premier réflexe soit de sortir le bâton. Il faut que ça se fasse lorsqu'on est clairement devant un cas où il y a de la mauvaise foi, ou pire encore, ou alors une incompétence crasse et dangereuse, là, ce qui, à mon avis, revient à peu près au même. Mais, une fois qu'on est dans cette zone-là, bien, il faut qu'on soit capable d'intervenir de façon musclée, et c'est ce que le projet de loi n° 64 va permettre de faire. Va permettre à qui? Bien, à la Commission d'accès à l'information, M. le Président, qui reste encore l'instance qui doit veiller à la bonne application de la loi.

Là-dessus, je salue les collègues. Il y a des modifications qui ont été apportées à la composition de la Commission d'accès à l'information, et, pour moi, M. le Président, ce n'est pas anodin. On a ajouté une vice-présidence. L'idée n'était pas de se lancer dans des structures, mais l'idée était d'envoyer un message très clair à la Commission d'accès à l'information, parce que cette vice-présidence-là, qui sera nommée aux deux tiers de l'Assemblée nationale, exige un profil TI, donc technologies de l'information, ce vice-président. Pourquoi? Bien, parce que d'entrée d'intervention, M. le Président, je l'ai dit, on est au XXIe siècle, cette loi-là doit nous amener au XXIe siècle, dans un univers numérique. Or, et ça a été reconnu, là, je ne pense pas insulter personne en disant que, la Commission d'accès à l'information, son profil de compétence en matière numérique reste à travailler. Je pense que la commission a fait la démonstration qu'au point de vue juridique, elle avait toute l'expertise nécessaire. Son volet juridique est bien nanti, bien doté en termes de nombre, mais aussi en termes d'expertise, et le tribunal d'accès à l'information fait un excellent travail. Par contre, la loi... le projet de loi n° 64, pardon, sur l'aspect de la surveillance, amène un fardeau supplémentaire... ou une responsabilité, pas un fardeau, c'est un mauvais choix de mot, une responsabilité supplémentaire à la Commission d'accès à l'information. Et clairement, pour remplir son mandat, son objectif, la commission doit développer un volet, une expertise en TI qu'elle ne possède pas, et ça, c'est incontournable.

Donc, oui, il y aura d'autres discussions, puis je suis convaincu que mon collègue de LaFontaine y fera référence, sur la dotation en matière de ressources financières, en matière de ressources humaines, on s'y attend, mais au premier chef, et ça, je nous en félicite, l'Assemblée nationale devait, d'une seule voix, envoyer un message très clair à la Commission d'accès à l'information : Le volet surveillance doit être renforcé, doit être renforcé. L'expertise TI doit être renforcée, et cette responsabilité-là qui vous incombe, sur la protection des renseignements personnels, elle est intimement liée, elle est indissociable d'une expertise TI, parce qu'aujourd'hui tout ça se passe dans l'univers numérique. On n'est plus, là, avec des classeurs puis des papiers, ce n'est pas ça, là, en tout cas de moins en moins.

Donc, pour ça, M. le Président, je pense que c'était une avancée importante. Et on a donné un pouvoir que la commission réclamait, un pouvoir très important, c'est un pouvoir d'émettre des directives qui sont ni plus ni moins que des ordres, des directives qui devront être suivies impérativement par les ministères, les organismes et les entreprises du Québec. Mais c'est un couteau à deux tranchants. Parce que, effectivement, la commission a un pouvoir de faire ça, ça met une obligation sur les organismes publics, les organismes privés, mais ça met aussi une obligation à la Commission d'accès à l'information de venir préciser des pans de la loi que la loi ne pouvait pas préciser, parce que ça prend une certaine souplesse, ça prend une certaine agilité, et qui vont se faire, au final, au bénéfice de ces mêmes organismes publics et privés. Pourquoi? Parce que la commission devra venir préciser quelles sont les attentes, quels sont les comportements qui sont corrects, qui sont attendus, quels sont les moyens qui doivent être mis en place pour assurer la protection des renseignements personnels, parce que la loi prescrit que c'est une responsabilité qui incombe à l'organisme qui collecte les renseignements, d'en assurer la protection à tous les niveaux. Alors, ça, la Commission d'accès à l'information pourra vérifier si c'est le cas, mais encore faut-il que la commission fasse part de ses attentes, fasse part de ce qui est attendu, ce qui est acceptable, ce qui est conforme, et ça, ça devient une protection pour les organismes publics et pour les organismes privés, parce que, si vous vous conformez à la directive, bien, la Commission d'accès à l'information serait bien mal venue de vous le reprocher. Alors, quand je dis que c'est un couteau à deux tranchants, bien, ça va obliger quand même la Commission d'accès à l'information, dans son rôle de surveillance, à être précise quant à ce qui doit être fait. Et c'est là où le volet TI doit aussi être renforcé, parce qu'encore faut-il que les attentes de la commission soient réalistes, soient applicables.

• (10 h 30) •

Je vous donne un exemple. Dans la loi, on disait que les informations personnelles devaient être désanonymisées de façon irréversible. M. le Président, c'est impossible. Vous pouvez bien le mettre dans la loi, si vous voulez, c'est impossible, il y aura toujours une façon de revenir en arrière, de faire de la rétro-ingénierie et de désanonymiser ce qui a été anonymisé. Alors, la loi dit quelque chose qui n'est pas possible. Elle ne le dit plus parce qu'on l'a retiré de la loi. Alors, si la Commission d'accès à l'information, par un manque d'expertise, s'adonnait à avoir ce genre de directive là, bien, écoutez, tout le monde lèverait la main en disant : Écoutez, c'est impossible, ce que vous demandez là, et à l'impossible nul n'est tenu.

Donc, il y a quand même, pour la commission, oui, de nouvelles responsabilités, oui, de nouveaux moyens, oui, de nouveaux pouvoirs. Je pense qu'il était nécessaire d'en arriver là. Je pense que, dans le contexte où la loi que nous allons adopter — parce que je comprends des collègues que c'est leur intention — va être beaucoup plus contraignante, va être beaucoup plus rigoureuse sur la collecte, l'utilisation, la communication, le transfert, le stockage et la suppression des renseignements personnels, donc, il était normal et conséquent que l'organisation responsable de s'assurer de l'application, de la bonne application de la loi se modernise au même titre que la loi. Ça, c'était, pour moi, incontournable.

Donc, M. le Président, je pourrais encore élaborer sur le sujet mais je voudrais conclure par des remerciements, d'abord mon collègue de Chapleau, collègue de Chapleau, d'entrée de jeu, à qui j'ai demandé de s'occuper du volet des partis politiques, et ce n'est pas une mince tâche, M. le Président, ce n'est pas une mince tâche, parce que les partis politiques ont des réalités qui leur sont propres, et les collègues, qui ont amené des bons points... Puis, oui, on a apporté des amendements, puis bravo au collègue de Chapleau, parce que c'était un travail de diplomatie, c'était un travail d'analyse, c'était un travail de discussion. Il fallait s'assurer que les partis politiques ne s'excluent pas de la loi, ne se donnent pas des privilèges que les partis politiques ne devraient pas avoir, mais il fallait aussi s'adapter, que la loi comprenne cette réalité-là, qui n'est pas la réalité d'une entreprise privée. Ce n'est pas la même réalité, donc la loi ne peut pas s'appliquer exactement de la même façon. Donc, collègue de Chapleau, un travail colossal qui a demandé beaucoup d'heures, de jours de discussions, de travail de fond, une excellente collaboration de la part de tous les partis politiques, M. le Président, qui a fait en sorte qu'on a été capables d'adopter ces articles-là.

Quelques mots pour mon collègue de LaFontaine. Bon, il a l'air déplaisant de même, au salon bleu, mais, quand on le connaît, c'est pire encore.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Caire : Non, ce n'est pas vrai, M. le Président, ça a été très agréable de travailler avec le député de LaFontaine, qui est un juriste, mais il a d'autres qualités, par ailleurs...

Une voix : ...

M. Caire : ... — aussi — et qui a apporté, je pense, l'oeil d'un juriste, une expertise juridique qui a été extrêmement profitable. D'ailleurs, je vais le taquiner un peu, si vous me permettez, M. le Président. Puis je vais le taquiner même si vous ne me le permettez pas. Non, ce n'est pas vrai, si vous ne le permettez pas, je ne ferai pas ça, voyons donc, vous le savez. Je peux? O.K. Parce que le député de LaFontaine, quand il est intervenu sur la prise en considération, a sorti quelques statistiques. Je salue Oscar, d'ailleurs, qui s'est tapé le boulot. C'est le député de LaFontaine qui récolte les fleurs, mais c'est Oscar qui s'est tapé le boulot, comme c'est chaque fois le cas pour nous tous, de toute façon. Et, sur le nombre d'amendements qui ont été déposés, le nombre d'amendements du gouvernement, de l'opposition officielle, et les amendements du gouvernement qui ont été adoptés, les amendements de l'opposition officielle qui ont été adoptés, bien, ce qu'il a oublié de vous dire, le coquin, c'est qu'il y a plusieurs amendements qu'il nous a proposés auxquels on a donné suite, évidemment, mais pour lesquels il nous a demandé de procéder à la rédaction, au dépôt, et donc à l'adoption, et pour lesquels nous avons la paternité, alors que le véritable géniteur intellectuel, c'est le député de LaFontaine. Donc, ça, ça viendrait, je pense, rééquilibrer un peu les statistiques.

Mais, ceci étant, M. le Président, une excellente collaboration. Oui, il y a eu un travail de fond. C'est une loi qui est quasi constitutionnelle, ce qui, je pense, explique amplement le nombre d'heures qu'on a passées à l'étudier. C'est une loi qui avait ses obstacles, qui avait ses contraintes, qui avait ses difficultés, pour lesquels il fallait trouver des compromis sans tomber dans la compromission. Ça a été fait.

Je veux saluer le chef du deuxième groupe d'opposition, le député de Gouin, qui a fait une bonne partie du parcours avec nous, lui aussi, contribution significative; le leader du troisième groupe d'opposition, le député de René-Lévesque, qui a participé, évidemment, à l'adoption... bien, en fait, à l'étude article par article, qui a contribué à le bonifier. Et je veux remercier, évidemment, tous les membres de la commission, dont son président, qui a eu la patience de nous écouter, quoique je pense que ces travaux-là n'ont pas été si compliqués que ça à gérer, il y avait quand même une entente assez conviviale. Député de La Pinière, dont je ne peux pas, évidemment, taire la participation, qui nous a édifiés de quelques-unes de ces envolées dont il a le secret, mais qui est toujours pertinent.

Et donc, M. le Président, c'est avec beaucoup, beaucoup, beaucoup de fierté, aujourd'hui, que je demande à l'Assemblée nationale d'adopter le projet de loi n° 64, de faire entrer le Québec au XXIe siècle en matière de protection des renseignements personnels et de faire en sorte que, des cauchemars comme on a vécus trop récemment — je n'ai pas besoin de les répéter, je pense que tout le monde sait à quoi je fais référence — bien, au Québec, ces cauchemars-là, on ne les vivra plus ou, si tant est qu'il y avait de nouveaux épisodes, ils seront sanctionnés. Et ça, M. le Président, je pense que c'est important de le dire. Je pense que les Québécois comprennent que le risque zéro n'existe pas. Par contre, la responsabilité zéro n'existe pas non plus. Et ça, ça fait partie des choses qui doivent et qui vont changer avec le projet de loi n° 64, la responsabilité zéro n'existera plus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. Je vais reprendre la balle au bond, du ministre. C'est un peu toujours le dilemme, dans nos statistiques : Est-ce que je lui donne l'amendement, qu'il va faire adopter, ou je le garde à mon compte puis je garde la paternité de tout cela? Mais néanmoins, M. le Président, même si tous les amendements suggérés au gouvernement, qui les ont, eux, déposés et fait adopter, nous étaient octroyés, c'est-à-dire apportés à notre crédit, on ne pourrait pas nous qualifier de Starbuck législatif. Alors, on ne serait pas à ce niveau de paternité là, M. le Président. Mais effectivement il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de travail en commission parlementaire.

Puis, tant qu'à être dans les statistiques, encore une fois, un projet de loi de 164 articles, le fait qu'il y ait eu 169 amendements et sous-amendements, ça démontre qu'il y a excessivement beaucoup de travail qui a été fait. Et, sur tous les amendements, les 169, bien, c'est 70 % qui ont été adoptés. Quand on parle de chiffres, ça peut être un peu réducteur mais ça peut être aussi révélateur pour ce que c'est : une vision d'ensemble qu'il y a beaucoup, beaucoup de travail qui a été fait, et ce, sur 20 jours en article par article. Donc, des amendements déposés par le gouvernement, il y en a eu quand même 97, tout près de 100, et ce qui représente 57 % de tous les amendements. Et nous, M. le Président, on a gardé la paternité de 23 amendements, et parce que, des amendements pour lesquels ils allaient voter contre, ils n'ont pas décidé de les présenter eux autres mêmes, à forte raison, alors on les a présentés, mais, sur les 23, il y en a quand même 12, 52 %, qui ont été adoptés.

Alors, vous dire aussi... Puis, sur 20 jours, si mon calcul est exact, c'est tout près de 96 heures, 96 heures en commission parlementaire. Honnêtement, je pense qu'on aurait de la difficulté... quiconque aurait de la difficulté à identifier quelque minute qui aurait été réellement de trop, perdue, inutile, là. Chaque moment... Puis des fois il y avait des moments, je vous dirais, d'humour, des moments où on était capables de se taquiner mutuellement mais qui faisaient bien cheminer, qui confirmaient, je pense, la bonne entente qu'il y avait à ce niveau-là, au niveau de l'article par article.

Mais, une fois que j'ai dit ça, ça ne veut pas dire qu'on était d'accord sur tout, je veux dire, il y a des amendements qui ont été refusés. J'aurai l'occasion, dans la deuxième partie de mon intervention, de faire état de ce que l'on peut appeler les actes manqués. Puis, je veux dire, ce n'est pas un reproche que je fais directement à sa personne, au ministre, le gouvernement fait des choix. Gouverner, c'est faire des choix. Les oppositions, évidemment, sont là pour avoir des visions complémentaires ou parfois opposées, et à un moment donné on dépose l'amendement, puis, s'il est refusé, il est refusé.

• (10 h 40) •

Mais j'aurai l'occasion quand même, à ce stade-ci de l'adoption... Parce que le ministre a raison de dire que c'est une loi qui vient réformer de façon majeure l'encadrement des renseignements personnels dans le domaine public, privé et des partis politiques. Qui dit encadrement majeur dit rédaction nouvelle de plusieurs articles de loi avec, dans certains cas, des termes nouveaux. On me détrompera si j'ai tort, mais je pense que je pense que c'était la première fois qu'on parlait d'un concept d'anonymisation, je ne pense pas que c'était déjà dans un projet de loi puis dans une loi. Et Dieu sait que c'est un concept, le ministre en a parlé, qu'il faut comprendre, qu'il faut distinguer de l'incapacité à identifier. Donc, l'anonymisation, c'est réellement... ne vous permet pas... c'est irréversible, en théorie, mais, comme il l'a bien dit, en pratique, personne ne peut garantir l'anonymisation. C'est pour ça qu'autour de ce concept-là il y a eu un débat sur comment pourrons-nous faire que... comment pourrons-nous mettre, dans la loi, une rédaction qui fait en sorte que l'encadrement qui va présider à l'anonymisation soit le meilleur. Puis là on a introduit des concepts de meilleures pratiques, s'assurer que les personnes qui vont procéder à ça, tant dans le domaine public et dans le domaine privé également, devront utiliser et devront justifier, le cas échéant, devant la Commission d'accès à l'information le fait d'avoir utilisé les meilleures pratiques à jour au moment où ça a été fait et, par la suite, évidemment, de s'assurer que de telles applications sont à jour et que l'anonymisation est assurée, minimalement. Elle ne pourra jamais être garantie, mais est-ce qu'elle peut être à un niveau de confort suffisamment pour dire : Oui, on l'a fait selon les meilleures pratiques?

Les malfaiteurs pourront, dans certains cas, avoir un coup, peut-être deux coups d'avance devant l'expertise au sein des organismes privés mais aussi au sein des organismes publics. Alors, ça aussi, ça va appeler... Puis le ministre faisait, à raison, référence à ce qu'on avait déjà souligné dans le passé, la Commission d'accès à l'information devient réellement 2.0, là, elle devient, du jour au lendemain, une institution excessivement importante qui devra surveiller tout ce beau monde-là, qui devra s'assurer elle-même d'être à jour, selon les meilleurs standards, d'être, je le dirais ainsi, compétitive par rapport à ce qui se fait sur le terrain. Puis, pour être compétitif par rapport à ce qui se fait sur le terrain, il faut être prêt à mettre le prix. Puis là il y a des structures salariales, à la Commission d'accès à l'information, ce sera un défi, ça. Me Poitras, quand on l'a reçue aux crédits, on lui a posé la question, et l'équipe de TI, l'équipe de technologie était constituée d'une personne, à l'époque, et donc elle aura besoin de constituer une équipe de femmes et d'hommes qui seront, qui plus est, la crème de la crème aussi, parce que ce sera le chien de garde, ni plus ni moins, alors, ce sera le chien de garde, ni plus ni moins.

En France, au début du XXe siècle, à Paris, il s'est passé quelques mois où les policiers n'avaient pas d'automobiles, n'avaient pas de voitures, puis les cambrioleurs avaient des voitures. Et puis là il y a Clemenceau qui y a vu puis qui a mis sur pied ce qu'on appelait les «Brigades du Tigre» pour courir après les voleurs, parce que les voleurs allaient faire une banque, sautaient dans la voiture, puis il y avait les policiers qui étaient à vélo en arrière. Alors, on ne veut pas que la Commission d'accès à l'information soit le policier à vélo en arrière. Elle ne pourra pas toujours être en avant, elle ne pourra pas toujours être en avant, mais il faut qu'elle puisse être compétitive, je vais le dire de même, compétitive dans sa mission puis compétitive sur le terrain, être capable de dire à des gens : Bien, on vous a démasqués, on vous a débusqués, puis voici pourquoi, par a plus b égale c. Ça prend de l'expertise, puis l'expertise, il faut la rémunérer. Ça, c'est un défi de tous les gouvernements. Parce qu'à un moment donné, on va s'en reparler, c'est sûr, dans les prochains crédits, M. le ministre, on a un rendez-vous où en sera la Commission d'accès à l'information. On sait que les délais de mise en application de la loi, c'est essentiellement deux ans, donc elle a le temps de voir venir, mais ça va prendre des changements. Je ne le sais pas, ce que le ministre a en tête pour briser ces échelles salariales là, pour s'assurer qu'elles soient compétitives, mais, encore une fois, on ne veut pas que ça soit le policier à vélo derrière les malfaiteurs qui ont une automobile, comme à Paris au début du XXe siècle. On pourrait le comprendre pour une certaine période, mais, à un moment donné, elle devra rattraper le retard puis devra même être en avant.

Parce qu'une fois qu'on a dit ça, M. le Président, c'est qu'on a des impératifs, des encadrements, c'est défini, et il y a des pénalités au bout de cela, mais ce ne sera que théorique si on n'a pas la capacité, l'expertise, au sein de la Commission d'accès à l'information, ce ne serait que théorique parce qu'on ne les prendrait pas, les malfaiteurs. Et aussi ce n'est pas juste, oui, la répression, prendre la main dans le sac les malfaiteurs puis être capable de faire la démonstration devant un tribunal que, oui, voici ce qui s'est passé, et madame et monsieur en sont les architectes, condamnez-les à une pénalité, c'est une chose, mais la Commission d'accès à l'information, aussi, va devenir, en quelque sorte, la grande soeur, le grand frère de bien des responsables de l'encadrement des renseignements personnels au sein des organismes publics, privés et des partis politiques, grande soeur, grand frère en ce qu'elle pourra aussi conseiller. Puis qui dit conseiller, à un moment donné, ce ne sera pas juste conseiller juridique. Ça, l'expertise juridique, je pense qu'il n'y a pas réellement d'enjeux là-dessus, mais c'est l'expertise technique, que tout le monde s'arrache sur le terrain. Donc, grande soeur, grand frère, Commission d'accès à l'information, pour dire aux entreprises, puis aux organismes, puis aux partis politiques : Bien, ne faites pas ça comme ça, faites ça comme ça, puis êtes-vous au courant qu'il existe telle technologie? Puis, oui, on peut vous aider, c'est vous qui allez payer pour puis c'est vous qui allez l'exécuter, mais on peut vous mettre sur la piste, on peut vous mettre sur le coup. Bien, pour que la CAI puisse les mettre dans le coup, elle-même, elle doit être dans le coup.

Alors, fonction importante, oui, de répression, d'enquête, de vérification. Si je débarque là, moi, puis que je suis de la CAI, puis je ne connais pas ça, qu'est-ce que je vérifie? Probablement que je ne verrai rien aller. Alors, oui, enquête, vérification, le cas échéant, répression. Oui, conseillère, grande soeur, grand frère, la Commission d'accès à l'information, pour encadrer, aider et même rédiger des bulletins informatifs pour dire : Oui, la loi dit ça, ça, ça, et, techniquement, aussi vous pouvez, si ce n'est pas dans un bulletin formel, au moins avoir une sorte, je vous dirais, de conseiller, d'aviseur technique, jusqu'à un certain point. Je le sais, que ce n'est pas la CAI qui va être maître d'oeuvre, mais la CAI doit être capable de parler, minimalement, le même langage. Donc, en ce sens-là, il y a un gros défi pour la Commission d'accès à l'information. Et, si elle ne le rencontre pas, si elle n'est pas selon ces plus hauts standards là, tout ce qu'on a fait ne sera que théorique, tout ce qu'on a fait ne sera que théorique parce que, dans la mise en application, on ne pourra pas édifier le pont dont on a été les architectes avec le projet de loi. On a un magnifique pont, mais maintenant il faut faire en sorte qu'il prenne vie, qu'il prenne forme, puis ça, c'est la Commission d'accès à l'information qui en sera le maître d'oeuvre. Donc, fonction d'information, fonction d'enquête et de vérification puis, ultimement, imposer des pénalités.

La loi réforme dans les trois domaines, public, privé, partis politiques, nouveaux articles, nouvelle façon de faire pour la Commission d'accès à l'information. On va voir quelle vie elle aura, parce que, quand on fait une loi, en théorie, ça a de l'air bien, bien beau, mais, dans la pratique, sur le terrain, quelle est son application? On se rend compte que, ah! on n'avait pas pensé ça, l'intention du législateur, ce n'était pas pantoute qu'il y ait un trou gros de même puis que les gens contournent ça. On devra aller redonner des ajustements avant longtemps. Je pense, puis on me corrigera si j'ai tort, que ce rapport d'application là va venir, à partir de la sanction, dans les cinq ans. Mais, dans la mesure où l'entrée en vigueur est dans deux ans, on aura trois ans de mise en vigueur. Qu'à cela ne tienne, pendant les deux ans, on aura appris, probablement, des choses, mais essentiellement dans cinq ans. On aurait aimé avoir plus tôt que ça mais on comprend aussi que, si elle ne prend vie que dans deux ans, dans quatre ans, ça en aurait fait deux, puis dans trois ans, ça en aurait fait une, si d'aventure on avait dit que, le cinq ans, on le ramenait à quatre ou trois ans. Mais ça, ce ne sera pas anodin. Et, de toute façon, M. le Président, notre vie démocratique et parlementaire va nous permettre, comme je le disais un peu plus tôt, de revoir Me Poitras, présidente de la Commission d'accès à l'information... de la revoir aux crédits et peut-être même dans certains mandats d'initiative ou de contrôle des organismes publics, qui sait, peut-être à la Commission de l'administration publique.

Il faudra se donner les outils parlementaires, parce qu'on participe tous de cet objectif-là. Je veux dire, on a tous été scandalisés de ce qui s'est passé à Desjardins, plus de 3,6 millions de Québécois dont les renseignements personnels avaient été éventés. Alors, on a vu des cas où des organismes publics aussi l'ont échappé. Dans la vraie vie, là, M. le Président, là, c'est fascinant, puis je pense que ça, ça participe d'un non-dit, puis je suis certain que le ministre est parfaitement au courant de ça, des cyberattaques, là, il n'y en a pas à l'année longue, à la semaine longue, il y en a à la journée longue, public, privé. Des demandes de rançons, il y en a à la semaine longue pour les organismes publics et privés.

Le ministre aura été témoin d'entreprises qu'on connaît, que je ne nommerai pas, tout à fait légitimes, qui... À un moment donné, j'ai su à travers les branches qu'ils s'étaient fait hacker leur service de paie. Je ne sais pas s'il a entendu ça, le ministre. Je ne nommerai pas l'entreprise, mais, pendant... c'est peut-être sorti public, remarquez, puis je vais pécher par excès de, ce n'est pas sorti public... de conservatisme — en disant «conservatisme» je ne veux pas rappeler un mauvais souvenir, l'élection d'hier, au ministre, je referme la parenthèse — et, pendant deux, trois semaines, pas de service de paie, capharnaüm, les ressources humaines étaient débordées, les dirigeantes et dirigeants ont dû mettre la main à la pâte, puis gros problèmes. Et j'ai su le montant de la rançon, puis ce n'est pas compliqué : Payez la somme puis vous allez retrouver vos ressources humaines, vous allez retrouver votre circuit de paie puis vous allez reprendre le contrôle de votre entreprise. Ça, M. le Président, ça arrive à la semaine longue. Quand on a cela, ça expose les renseignements personnels, bien évidemment. Si j'ai accès à votre service de paie, j'ai accès à tout ce que l'employeur a comme renseignements personnels sur les employés. Et, si, comme malfaiteur, je ne veux pas uniquement me limiter à dire : Bien, j'ai pris en otage votre service de paie, payez, et on va faire en sorte de vous redonner accès, bien, foncièrement, les malfaiteurs ont accès à une foule de renseignements personnels. Les organismes publics aussi sont attaqués à la semaine longue.

• (10 h 50) •

Tout ça pour dire quoi, M. le Président? Tout ça pour dire que, oui, c'est une mise à niveau de la Commission d'accès à l'information. On ne veut pas qu'elle soit en bicycle à pédales, on veut qu'elle soit dans une voiture. Ce ne sera pas la Lamborghini, mais, si ça peut être une bonne auto, une bonne automobile, avec des pneus de secours, puis tout ce qu'il faut, puis de l'essence, puis en ordre... parce qu'il va falloir courir après les malfaiteurs. Oui, c'est un appel à la Commission d'accès à l'information, puis la barre, là, elle est très haute pour la Commission d'accès à l'information. Je touche du bois, on mise sur notre victoire puis sur notre succès collectif, mais ça va prendre des changements fondamentaux à la Commission d'accès à l'information, puis, à un moment donné, il y a des cadres, notamment salariaux, qu'il va peut-être falloir briser, il va falloir être compétitifs. Je referme la parenthèse.

Appel, donc, à des standards plus élevés de la CAI, mais aussi appel à des standards plus élevés aux organismes publics puis aux organismes privés. Je veux dire qu'il y a des malfaiteurs qui n'ont pas eu trop, trop de misère à rentrer dans le service de paie ou à rentrer dans certains... parce que c'est un peu tout croche, là, je veux dire, la manière dont un organisme public ou privé détient, conserve, entrepose et protège les renseignements personnels ou protège ses propres systèmes. Je veux dire, là, on met le cadran puis on va le mettre de bonne heure, il y en a qu'il va falloir qu'ils se réveillent, là. Puis ça veut dire, donc, davantage d'investissements, davantage d'investissements pour aller chercher, eux aussi, pas juste la CAI, mais eux aussi, aller chercher l'expertise pour dire : Bien, on va se prémunir comme ça, on va mettre des barrières, on va mettre des pare-feux. Puis on ne pourra pas être 100 % à l'abri d'une incursion malveillante, mais au moins on va être compétitifs, puis plutôt que se faire prendre une fois par année, bien, on va peut-être se faire prendre, mais une fois aux 10 ans puis on aura appris de nos poids et contrepoids technologiques à l'interne, ça, c'est important.

C'est donc un appel, un réveil aussi pour les organismes publics et privés, parce que, s'il advenait, jadis, avant l'adoption... ce sera bientôt jadis du projet de loi puis de sa mise en application, projet de loi n° 64, vous aviez une fuite de données, il n'y avait pas vraiment de conséquences. Là, il va y en avoir, des conséquences. Là, tu te dis, à un moment donné, comme décideur... puis, au premier titre, je prends l'exemple d'une entreprise privée, bien là, on peut faire face à des pénalités de dizaines de milliers de dollars, de centaines de milliers de dollars, de millions de dollars. À un moment donné, il y en a un qui va dire : O.K., moi... puis là loi nomme un responsable, c'est la plus haute autorité. Alors, ce n'est pas la troisième personne à partir de la gauche du deuxième rang, là, c'est la plus haute autorité, elle est responsable, tel que le dit la loi : «La personne ayant la plus haute autorité au sein d'un organisme public — ou privé — veille à y assurer le respect et la mise en oeuvre de la présente loi.» Nous, on voulait ajouter — puis ça participe un peu des actes manqués, puis je le dis en tout respect — «plus haute autorité en assure le respect et la mise en oeuvre de la présente loi», «et en est imputable», «et en est imputable». Alors, on a eu un débat de juristes. Que veut dire «imputable»? Dans quel autre contexte il est utilisé dans d'autres lois? Est-ce que c'est réellement ça, ici? Est-ce que c'est à propos? Est-ce que, aussi, «imputable», ça ajoute à son obligation qui est déjà d'assurer le respect puis la mise en oeuvre? Mais le fait de le dire, nous croyons, M. le Président, que ça aurait envoyé, de façon encore plus claire, parce que le législateur ne parle pas pour ne rien dire, un message très clair que tu en assures le respect et l'application et tu en réponds, tu en es imputable. Je pense même que le débat avait tourné autour d'un autre amendement où on a dit «et en répond», mais «en est imputable», c'était plus englobant. Et ça, malheureusement, donc, ça n'a pas été ajouté.

Je vous dirais, de façon candide, M. le Président, à la limite, si juridiquement la plus haute autorité, avec les mots «respect et application de la loi», n'aurait pas plus eu de devoirs et d'obligations, de responsabilités, je vous dirais que, même si... je ne le crois pas, mais, même si ça avait été le cas, je vous dirais que le fait de le dire dans la loi, de le déclarer dans la loi, là, la personne qui se fait dire : Bien, félicitations, vous êtes la nouvelle présidente de l'organisme ou de l'entreprise ou la plus haute dirigeante, voici vos choses à faire, la liste de choses à faire, puis, soit dit en passant, vous êtes responsable de l'application de la loi et vous en êtes imputable, là on envoie le bon drapeau, le drapeau avec la bonne couleur, là. La couleur, elle n'est pas rouge mais elle est jaune, ça veut dire : Vous êtes en charge de ça et, je reviens au début du point, si vous l'échappez, à ce moment-là, vous faites face... et, si la Commission d'accès à l'information est capable de démontrer, par son expertise nouvellement acquise, que vous avez réellement été négligent ou négligente par rapport à tel, tel, tel aspect, exemple, dans l'anonymisation, vous n'avez pas utilisé les derniers protocoles, les dernières façons de faire à jour, vous avez utilisé une vieille méthodologie d'il y a cinq ans... parce que cinq ans, dans le monde d'aujourd'hui, c'est vieux, même deux ans, trois ans, ça peut être vieux, bien, à ce moment-là, la Commission d'accès à l'information pourra déposer poursuite, et vous pourrez faire face à des pénalités, des amendes : 10 000 $, 100 000 $, millions de dollars. Plus haute autorité, vous en êtes imputable, vous, personnellement, si vous avez quelque chose, personnellement, à vous reprocher, mais sinon votre organisation et votre entreprise, le cas échéant, devra faire face à d'énormes pénalités.

Alors, c'est là où tu commences à réfléchir puis tu dis : Bon, bien, plutôt que d'être exposé... De toute façon, réputationellement parlant, les consommateurs puis les citoyens, là, ils ne veulent plus entendre parler de ça. Alors, bonne chance si votre entreprise doit divulguer... Parce que ça participe aussi d'un autre élément qui a été ajouté dans la loi, dans le projet de loi, l'obligation de divulgation, si votre entreprise a subi... est victime d'une fuite, vous devrez, de façon proactive, le communiquer. Ça se dit à l'article 63.7, nouveau, du projet de loi, et je le lis : «Un organisme public qui a des motifs de croire que s'est produit un incident de confidentialité — et ça, soit dit en passant, c'est miroir avec les organismes publics... privés, pardon, publics et privés ont une disposition au même effet — impliquant un renseignement personnel qu'il détient doit prendre les mesures raisonnables pour diminuer les risques qu'un préjudice soit causé et éviter que de nouveaux incidents de même nature ne se produisent.»

Deuxième alinéa : «Si l'incident présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé, l'organisme doit, avec diligence, aviser la commission — donc la Commission d'accès à l'information. Il doit également aviser toute personne dont un renseignement personnel est concerné par l'incident, à défaut de quoi la commission peut lui ordonner de le faire.»

Donc, obligation d'être proactif, obligation d'aviser la Commission d'accès à l'information. Puis là-dessus on a eu un échange, on a déposé un amendement qui n'avait pas été retenu, où l'on disait... puis, peut-être, ça participera un jour d'une révision de la loi, on avait dit : Plutôt que d'écrire et plutôt que de lire «si l'incident présente un risque qu'un préjudice sérieux soit causé», bien là, vous devez aviser la commission puis la personne concernée, «présente un risque de préjudice sérieux», nous, on disait : Enlevez le «sérieux» à «préjudice». Puis le «sérieux», on était même prêts à le mettre à «risque», «présente un risque sérieux qu'un préjudice». Parce que, lorsque vous dites «présente un risque d'un préjudice sérieux», c'est là qui est votre facteur où vous devez agir et aviser, «risque sérieux», vous devez vous-même l'évaluer. Alors, dans certains cas, malheureusement, il y en a qui vont dire : Bien, je ne pense pas que le fait d'avoir permis que soient éventés le nom, l'adresse, l'âge et le sexe de la personne, ça pourrait causer un préjudice sérieux, je n'avise pas.

• (11 heures) •

C'est l'analyse que devra faire la plus haute autorité ou les gens en charge de l'application de la loi au sein des organismes publics et privés. On voulait, on croyait bon de leur enlever cette obligation-là ou cette possibilité de se tromper sur le préjudice sérieux. On disait : S'il y a un préjudice, il doit aviser. Je veux dire, il y a eu une fuite, qui êtes-vous, en quelque sorte, pour dire : Bien, moi, je garantis que, oui, il va y avoir un préjudice mais il ne sera pas sérieux? On ne peut jamais le garantir. On ne peut même pas, je pense, avoir un niveau suffisamment confortable de prévisibilité pour l'assurer puis dire : Parfait, on n'avise pas. Alors, on voulait enlever le «sérieux», un risque qu'il y ait un préjudice, tu avises. Aussitôt qu'il a un risque qu'il y a un préjudice, tu avises. C'est presque... Si on fait une analogie avec les contrats d'assurance, les contrats d'assurance sont basés sur la plus grande foi. Ça veut dire que si, sur votre assurance de vie privée, l'assureur se rend compte que la personne décédée fumait puis elle ne l'avait pas déclaré, bien, l'assureur va nier couverture puis va rembourser à la succession les primes payées. Parce que c'est majeur, la personne fumait, et c'est considéré lorsque l'on fixe les primes d'assurance vie. C'est un choix personnel de fumer ou de ne pas fumer, mais il y a une conséquence au niveau des d'assurances vie, il faut le déclarer. Si vous ne l'avez pas déclaré, les contrats d'assurance, ils nieront couverture puis ils ne paieront pas, ils vont rembourser les primes. Le contrat est nul de nullité ab initio. Ils ne se sont pas rencontrés, au départ, sur le bon consentement, ils ne se sont pas entendus, vous auriez dû le dire. Ça, c'est le droit de l'assurance. En anglais, c'est «the utmost good faith», la plus grande bonne foi, vous devez être transparent et divulguer. Par analogie, moi, j'aurais aimé ça qu'on importe ce concept-là sans le faire, là, copier-coller, mais cette logique-là de dire : Ce n'est pas à moi de dire à mon assureur, bien, moi, je fume cinq cigarettes par mois, je ne me considère pas fumeur, je ne le déclare pas.

Ici, je reviens à mon point. Il y a un incident, il y a eu une fuite. Ce n'est pas à l'organisme ou à l'entreprise qui a fait l'objet de la fuite à dire : Oui, il y a eu une fuite, c'est sûr qu'il y a un risque de préjudice mais, attends un peu, il est-u sérieux, le préjudice? Je ne penserais pas. Parfait, je ne parle pas un mot, je ne dis rien à la commission, puis je ne dis rien à la personne. On voulait enlever ça parce que, je reviens à l'analogie, la protection des renseignements personnels devrait être qualifiée ou assimilable à une relation assureur-assuré, et vice versa, autrement dit, qu'il y ait une divulgation proactive, que les gens puissent être rassurés, qu'autrement dit, inquiétez-vous pas, s'il y a quoi que ce soit, vous allez être au courant. S'il y a quoi que ce soit, vous allez être au courant. En enlevant «sérieux», à ce moment-là, on aurait pu initier, mettre dans la loi cette logique-là. Ça n'a pas été fait, et c'est un des... que je me dois de souligner, une des occasions manquées au projet de loi.

Alors, ceci dit, je vais d'abord, dans un premier temps, M. le Président, souligner les avancements, on en a parlé, désigner, dans un premier temps, les avancements et, après ça, dans un deuxième temps, les occasions manquées.       Le fait de désigner une personne responsable, là s'arrête le lançage de balles, là, qui, qui, qui, de la patate chaude. La patate chaude, elle arrête là, là. C'est le plus haut responsable qui en répond, et le plus haut responsable doit identifier, dans les fonctions qui sont les siennes, les responsabilités qui sont les siennes. Il est aussi responsable, il ou elle, de l'accès aux documents, et responsable de la protection des renseignements personnels. Donc, c'est le plus haut responsable qui va encadrer puis s'assurer que soient bien encadrés l'accès aux renseignements et la protection.

On dit que ces deux responsabilités-là peuvent être déléguées par écrit, déléguées à une autre personne, peut-être même à deux autres personnes. Vous pouvez, hauts dirigeants... C'est sûr que, si vous avez un organisme qui emploie 600, plus, employés, puis vous avez des systèmes informatiques, vous avez des bases de données à ne plus finir, ce n'est pas vous qui allez faire, au jour le jour, la mise en application. Alors, vous pouvez, par écrit, déléguer. Mais qui dit déléguer... ça ne veut pas dire que vous allez vous sauver de vos responsabilités, ultimement. Vous pouvez déléguer à une personne responsable la responsabilité de l'accès aux documents, et à une autre, la responsabilité de la protection des renseignements personnels.

Et, au sein d'un organisme, public ou privé, un comité sur l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels est chargé du soutien à l'exercice de ces responsabilités. Autrement dit, il devra y avoir un comité. Puis ce n'est pas... Puis je ne pense pas qu'on aurait pu accuser le ministre de vouloir faire des comités puis des commissions, je ne pense pas que c'est l'image qu'il nous envoie, de vouloir multiplier les comités, les commissions, les réunions, et ainsi de suite, mais ça prend des gens qui se concertent, autour de la table, puis on l'a même dit dans le micro, parce que ça, c'est important, que les organismes pourraient s'adjoindre, le cas échéant, dans ce comité-là... où, là, ils vont dire : O.K., on a 600 employés, on a des bases de données à ne plus finir. Moi, je suis responsable de l'accès, parfait, moi, je suis responsable — un autre — de la protection des renseignements personnels, puis, autour de la table, on pourrait s'adjoindre des ressources externes. Alors, des gens qui, au privé, pourraient être à la fine pointe puis pourraient donner leurs expertises puis leurs mots à dire, puis conseiller, qui seraient rémunérés en l'espèce mais qui ne seraient pas cantonnés à... bien, dans ce comité-là, il y aura uniquement des gens qui sont déjà employés par l'organisme public ou privé. Vous pourrez vous adjoindre de cette expertise-là.

Donc, ça, en le disant, je pense et j'espère que, dans la très, très grande majorité des cas où le niveau sera suffisamment substantiel pour le justifier, bien, on va s'adjoindre de telles ressources externes. Parce que, cette expertise-là, on ne pourra jamais prétendre l'avoir à l'interne. Vous ne pourrez pas prétendre l'avoir à l'interne. Mais ça prend quelqu'un à l'interne qui va coordonner le tout, qui connaît la culture interne, qui sait comment ça fonctionne puis qui va être capable de la mettre en application. Et ça, probablement que ça risque, pour les organismes publics et privés, de palier à la course, là, parce qu'il va y en avoir plus qu'hier, moins que demain, là, on va se les arracher, là, les personnes expertes en le domaine, en la matière de protection des renseignements personnels, on va se les arracher. Alors, ça va permettre, je crois, d'avoir accès à cette expertise-là sans être cantonné à dire : Bien, non, mon comité d'experts doit être constitué exclusivement de personnes qui sont employées. Donc, on pourra aller à l'externe.

Donc, on identifie la personne ultimement responsable, la plus haute autorité. Puis c'est l'application d'un autre principe, hein? Si c'est important pour la personne qui est en haut, ça va être important pour tout le reste de la pyramide. Si ce n'est pas important, ce n'est pas important pour personne. Alors là, on envoie le bon signal, et ça aide, même à l'interne, je pense, que le bon signal soit envoyé, et on demande de la proactivité, puis la Commission d'accès à l'information sera toujours là, à côté.

Aussi, il y a eu des encadrements. Le droit d'accéder à nos renseignements personnels a été, je vous dirais, étayé. L'article 40 du Code civil du Québec dit : Vous avez droit d'avoir accès aux renseignements personnels qu'un organisme détient sur vous. Article 40, Code civil du Québec, c'est le droit commun, c'est très général. Là, dans la loi sur les organismes publics et dans la loi sur les organismes privés, il est étayé comment vous pourrez avoir accès : Aïe! dis-moi donc, j'aimerais savoir quels renseignements as-tu, toi, organisme, sur moi. Je veux que tu m'en communiques le contenu, et, le cas échéant, je peux demander et exiger que correctifs soient apportés parce que ça, ce n'est pas vrai, ça, c'est faux, et ainsi de suite. Et la Commission d'accès à l'information sera là, à côté, si jamais il y a un problème, l'organisme n'obtempère pas. Il y a des délais pour répondre à ça. Et, si c'est contesté, bien, on va aller devant la Commission d'accès à l'information. Alors, il y aura déjà là un canal de communication entre la personne visée par les renseignements personnels et l'organisme.

Ceci dit, il a été décidé, et je pense que c'est intéressant aussi, que ne participent pas de renseignements personnels les calculs, les analyses, les valeurs ajoutées que l'entreprise ou l'organisme a à partir de la donnée brute. Ainsi, notamment pour les compagnies d'assurance, si vous avez, par de savants calculs, déterminé que ma cote, moi, d'assurabilité est de tel niveau, basé sur la pondération que vous faites de mon âge, la pondération que vous faites de tels, tels, tels autres critères, bien, cette formule-là, ce calcul-là qui vous amène à dire : Bien, lui, on va l'assurer — je dis n'importe quel chiffre — à 1 200 $ par année, une assurance vie, versus un autre qui va être assuré à 1 000 $, ou ainsi de suite, alors, ça, la valeur ajoutée, pour protéger... Parce que c'est de bon aloi, protéger ce qui n'est pas un renseignement personnel, protéger ce qui participe aussi d'une décision, d'une capacité d'avoir des prix compétitifs. Bien, ça, c'est un secret commercial. Puis qui dit secret commercial... Ça existe, et il ne faut pas attaquer inutilement la capacité des entreprises de déterminer, notamment, entre autres, au niveau des assurances, de déterminer ce qui peut être une valeur ajoutée et un secret commercial, ce qui assure leur compétitivité puis leur... d'assurer leur continuité.

• (11 h 10) •

Ceci dit, on a eu un autre débat, puis ça, c'est peut-être une autre occasion manquée. On a eu un autre débat sur la qualification que nous aurions pu faire de «renseignements personnels». L'article 10 de la charte québécoise des droits et libertés précise que vous ne pouvez pas discriminer basé sur certains motifs, puis la liste n'est pas exhaustive, mais, quand même, on en nomme, basé sur le sexe, l'orientation sexuelle, la grossesse, et ainsi de suite, la religion. Ça, ce sont des motifs nommés à l'article 10 de la charte québécoise des droits et libertés. Vous ne pouvez pas discriminer là-dessus. Vous ne pouvez pas refuser de louer un appartement parce que madame est enceinte. On ne l'accepte pas, c'est de la discrimination, vous n'avez pas le droit de le faire.

On aurait aimé, comme dans le règlement européen... Parce qu'il y a un règlement européen, règlement général européen qui encadre les renseignements personnels, qui a été construit avec les pays membres, donc tout le monde est arrivé à la ligne d'arrivée en même temps, qui utilise cette qualification-là de «renseignements personnels», qui, par ailleurs, sont des motifs de discrimination listés dans les chartes protégeant les droits et libertés. Il est donc dit que ces renseignements personnels là sont décrétés comme étant sensibles, parce qu'identifiés comme pouvant permettre, le cas échéant, une discrimination. Ça ne veut pas dire que vous ne pourrez jamais les avoir. Ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas les utiliser mais, particulièrement ces renseignements personnels là, lorsqu'on parle, entre autres, du domaine pharmaceutique, du domaine médical, même du domaine de l'assurance, il faut faire attention. Il faut faire attention parce que beaucoup, beaucoup, beaucoup de renseignements personnels sont accumulés.

Et, au-delà du fait de dire : Bien, vous devrez avoir le consentement puis vous devrez vous assurer qu'il est bien protégé, que ce n'est pas n'importe qui qui a accès à ça, puis, s'il y a des fuites, vous le dites, puis à la fin vous devez le détruire ou l'anonymiser, ça, c'est le cycle de vie, mais qu'est-ce que vous en faites? On aurait pu ouvrir aussi tout un débat sur qu'est-ce que vous en faites, de ce renseignement personnel là. Allez-vous décider de ne pas contracter ou de ne pas faire d'offres de contracter à une certaine catégorie de citoyens basée sur un motif qui est discriminatoire et essentiellement discriminatoire? Votre décision est essentiellement basée sur un motif discriminatoire. L'utilisation, la pondération que vous faites d'un renseignement personnel, oui, je le sais, c'est un autre champ de ce que nous avions à gérer.

Je vous dirais, puis je ne veux pas être réducteur, là, mais on a fait de la tuyauterie, la gestion, l'entrée du renseignement personnel, son cycle de vie et sa fin, la destruction ou l'anonymisation. L'anonymisation, on ne pourra jamais remonter jusqu'à vous, mais ce sera des données qui seront conservées pour faire des études, des recherches, et ainsi de suite. On s'est assuré que le renseignement passe dans le bon tuyau, ce qui est mis dans le tuyau soit un renseignement pour lequel il y a eu un consentement précis et éclairé mais également la manière dont il est géré. Mais l'utilisation qui en est faite, du renseignement personnel... Puis je ne veux pas revenir, rouvrir tout un pan de débat puis me chicaner avec mes collègues, mais le ministre responsable de l'Économie... Puis certains vont dire : Oui, il avait raison, puis d'autres vont dire : Faites attention, on participe du deuxième groupe, là, faites attention, quand il avait dit : La base de données que l'on a dans le domaine de la santé, avec les pharmaceutiques, on va pouvoir les attirer, et ça, c'est «winner». Ça, c'est «winner», c'était l'expression... Encore une fois, je ne veux pas me chicaner, là, mais ce n'est pas anodin, puis qu'est-ce qui en sera fait, puis quel est... Puis on a eu des discussions, des échanges, là, durant les 20 jours, avec le ministre, là-dessus. Comment pouvons-nous protéger, oui, la mécanique puis la tuyauterie du renseignement personnel mais l'usage qu'on en fera? Il faudra s'assurer que ce ne soit pas discriminatoire.

Et, en ce sens-là, le règlement européen qui, tantôt, était notre modèle, bien, dans ce contexte de ce débat-là, n'a pas été notre modèle au sein du gouvernement. Et peut-être, je le souhaite, peut-être aurons-nous, lorsque nous revisiterons cette loi-là, l'occasion d'ajouter cette couche-là d'analyse. Et je le sais, que ça participe d'une autre nature, mais je pense que qui dit multitude de données... Est-ce qu'on peut... Parce que vous savez tout, tout, tout de moi, puis là on s'en va avec des renseignements personnels biométriques, là, aussi, là. Renseignements personnels biométriques. À la naissance, est-ce que moi, je suis plus susceptible de développer tel type de cancer, puis est-ce que ça, ça va vous permettre de dire : Bien, basé sur son état de santé... peut-être que l'état de santé pourrait être... Je ne pense pas que c'est un motif de discrimination, en vertu de l'article 10, c'est dans le «notamment», mais peut-être que les données biométriques pourraient être un élément discriminatoire.

Je le sais, qu'il y a eu un amendement où on parlait des données biométriques, puis le ministre me corrigera si j'ai tort, mais l'amendement a été adopté. Je pense que c'est... amendement de nos collègues de la deuxième opposition, où l'on disait... Et particulièrement je pense que, l'amendement à l'article 12, là, in fine, on se recroirait à l'article par article, M. le Président, mais à l'article 12 : «Pour l'application de la présente loi, un renseignement personnel est sensible lorsque, de par sa nature — et là on aurait fait ajouter "notamment médicale, biométrique et autrement intime" — ou en raison du contexte de son utilisation et de sa communication», on dit qu'il est particulièrement sensible. Alors, ça, ça aura été le compromis. Ça aura été le compromis. Mais nous pourrions aller plus de l'avant et étayer, et encadrer, et donner des balises d'encadrement dans la loi pour la Commission d'accès à l'information aussi de développer une voie qui, cette fois-là, n'est pas technique, n'est pas... Tu sais, on ne parle pas de «firewall» et de technologies de l'information mais sur les droits humains, sur les chartes des droits et libertés, de développer une branche, à la Commission d'accès à l'information, d'avocates et d'avocats qui sont expertes et experts en la matière, et de dire : Oui, qui plus est, dans la loi, il y a quelques articles qui encadrent ça... Et ce que vous faites, là, au-delà de... Le législateur arrête de parler quand il dit : L'utilisation de données médicales, biométriques ou autrement intimes, c'est sensible, puis là on arrête de parler. On aurait pu ajouter d'autres articles et dire : Lorsqu'il s'agit de tels renseignements, médicaux, biométriques et autrement intimes, non seulement vous devez avoir une attention particulière quant à la protection contre toute fuite, mais vous avez un encadrement qui est précisé quant à son utilisation, vous ne pouvez pas, sur un seul motif, par exemple, baser une décision de ne pas offrir de contrat pour tel type de personnes parce que vous avez accès à des données biométriques.

Moi, je pense qu'une personne qui, puis malheureusement on aura peut-être des cas... une personne qui, avec les recherches sur l'ADN, est plus susceptible de développer un cancer à 50 ans mérite qu'on lui fasse une offre pour assurer sa vie. On ne pourra pas vivre dans une société, M. le Président, où on va dire : Bien, médicalement, scientifiquement, l'enfant est né, vivant et viable, on a accès, pour x raisons... Puis là, évidemment, il y a tout l'aspect, là, est-ce qu'au départ il y avait consentement ou pas, mais prenons pour acquis que l'information est détenue — puis là je vous donne un cas extrême, là — est détenue de façon légale, est-ce que l'on peut baser et justifier, socialement — on ne l'a pas eu, ce débat-là — que l'on ne va pas contracter avec les personnes qui, à partir de 50 ans, sont plus susceptibles de développer un cancer, nous, assureurs, on va les éliminer de notre liste, on ne veut pas les assurer? À un moment donné, l'assurance, M. le Président, puis le... C'est quoi... En collectivité, vivre en collectivité, là, c'est partager les forces de tous pour pallier aux faiblesses de chacun et aux défis de chacun. Et le fondement même de l'assurance, c'est quoi? C'est le partage du risque. Puis il faut toujours envisager la société comme étant l'addition des forces de tous pour pallier aux défis et aux faiblesses individuels de chacun.

Et là, avec les renseignements personnels, c'est un autre pan. Peut-être que ce sera une autre pièce législative, peut-être que ce sera... mais, la charte québécoise des droits et libertés, on ne peut pas en faire une loi, là, d'application très, très précise, c'est les principes généraux. Peut-être qu'il y aura une pièce législative à déposer, un jour, qui va viser les organismes publics et privés, au même titre, pour dire : Bien, voici, on va étayer l'article 10, puis les renseignements... L'article 63.3, là... Excusez-moi. L'article de la loi, exemple, sur les organismes publics, c'est l'article 59, où on dit notamment : Médical, biométrique et autrement intime, c'est sensible, là, on va ajouter peut-être une loi, qui sait? Je suis convaincu qu'on aura l'occasion d'y aller avant longtemps. Je referme la parenthèse.

Donc, les différents pouvoirs de la Commission d'accès à l'information, on en a parlé. Resserrement des dispositions pénales, là, honnêtement, là, la loi a des dents, là, longues de même. On s'est assurés, ceci dit, dans l'application de la peine : PME, vous avez mal fait, vous n'avez pas respecté la loi, un de vos employés n'a pas respecté la loi, vous êtes responsable des gestes de votre employé. PME, on va vous condamner à 1 million de dollars, on s'est assurés, dans les critères, ça relève ultimement de la discrétion de la personne qui va en juger. C'est-u une amende de 1 million, ou de 100 000 $, ou de 10 000 $ pour la PME? Mais on s'est assurés, de façon générale, il y a un article qui donne les balises, d'ajouter, par amendement — et ça, c'est un des amendements que l'on a proposés, un de ceux que l'on a proposé puis que le ministre a travaillé là-dessus, puis le lendemain il nous est revenu avec une rédaction, puis ça nous allait — de s'assurer, je le dis de même, de considérer la capacité de payer, la taille de l'entreprise, le cas échéant, pour ne pas... Puis on a eu le débat, de dire : Mais il va sans dire, oui, il va sans dire, mais, en le disant, ça va aller mieux aussi, alors de le mettre comme balise. Et, si d'aventure une pénalité serait tout à fait hors norme par rapport à la grosseur de la PME, vous venez de tuer carrément la viabilité financière de l'entreprise en lui imposant 1 million de dollars. Oui, ce qu'ils ont fait... ce n'est pas correct ce qu'ils ont fait mais, quand même, 1 million de dollars, là, on va fermer les portes, ça finit là, ils vont faire faillite. Ils vont mettre ça dans les créances puis ça va être le syndic de faillite qui va fermer la shop. Ce n'est pas ça qu'on veut. Le fait de le dire dans la loi vient baliser la discrétion judiciaire quant à l'imposition de pénalités.

• (11 h 20) •

Et, si d'aventure on vous impose 1 million, puis vous dites : Bien, voyons donc! j'ai fait la démonstration, lorsque j'étais rendu sur sentence, à plaider que je n'avais pas la capacité du tout, du tout, mon chiffre d'affaires, c'est 2 millions, on me charge 1 million, mon profit, c'est 5 %, à ce moment-là il y aurait peut-être lieu d'y avoir un débat en appel sur la pénalité. Et le fait de l'avoir marqué dans la loi, bien, ça va permettre, en appel, de dire : Bien, oui, le législateur, il n'a pas parlé pour ne rien dire, encore une fois, puis la pénalité est importante. Parce qu'encore une fois on ne veut pas que ça soit un bâton dans les roues de tout le monde, tout le temps, on veut que ce soit une responsabilité qui soit prise en considération très sérieusement. Puis ceux qui ont mal fait, là, bien, vous allez vous faire taper sur les doigts, puis faites attention parce que va va vous coûter cher. Vous allez avoir la capacité de payer mais vous allez vous en rappeler longtemps. Puis, à un moment donné vous allez faire le calcul : Bien, regarde donc ça, plutôt que payer 100 000 $, si je l'avais dépensé, le 100 000 $, pour avoir des pare-feux puis d'avoir une expertise externe... Je pense que, de toute façon, là, après avoir payé un 100 000 $ à l'État, là, il va falloir que je l'investisse. Alors, c'est une logique économique qui est forcée mais c'est une logique économique qui vient donner des dents à ce que le législateur veut sur le terrain, la protection des renseignements personnels.

En ce qui concerne les organismes privés, on a eu l'occasion d'apporter également des amendements, notamment pour ce qui est de la sollicitation à des organismes philanthropiques. La sollicitation pour des organismes philanthropiques fait en sorte que vous pouvez recevoir un appel d'un organisme qui fait de la sollicitation pour vous, prospection commerciale et philanthropique. Alors, on a eu une révision de ces règles pour venir encadrer ça. Si vous ne voulez plus être sur la liste d'appel, bien, vous pouvez le dire, puis ça se termine là, et la personne ne pourra pas continuer de vous contacter. Ça, ça a été un autre avancement au niveau privé.

Également, M. le Président, on va parler au niveau des partis politiques, les avancements. Au niveau des partis politiques, puis le ministre a raison de souligner le travail du collègue de Chapleau qui nous a réunis, ça, cette partie-là, adjoint parlementaire du ministre, le collègue de Chapleau a pris cette portion-là, parce qu'encore une fois on avait grief au principe du fait qu'on faisait trois projets de loi en un : public, privé puis partis politiques. Oui, il y a plusieurs similitudes entre public et privé, mais ce n'est pas 100 % copier-coller. Mais il y avait peut-être une logique de travailler ça ensemble, on l'a fait. Ça a pris plus de temps, mais on l'a fait. Au début, on aurait peut-être pu penser trois projets de loi, mais ça a été fait comme ça. Mais, pour ce qui est de partis politiques, on ne pouvait pas faire copier-coller des organismes privés, de l'encadrement, puis dire : Bien, ça va être la même chose, le même régime pour les partis politiques. Les partis politiques, avec les discussions, le collègue de Chapleau... Et là il y a eu des rencontres, parce qu'on a dit qu'on a siégé longtemps, 20 jours, mais il y a eu au moins trois rencontres, au moins trois rencontres de concertation, d'analyse, de discussions, de propositions par rapport aux partis politiques pour en arriver, quand on a réouvert les micros ici, le 24 août... pour dire : Bien, voici, on s'est entendus là-dessus, là-dessus, et le dire dans le micro, quelle était l'intention du législateur, puis expliquer ce qu'on faisait.

Les partis politiques, dans la première mouture, puis ce n'est pas un reproche, parce qu'à un moment donné on est là pour le bonifier aussi, il était dit que les partis politiques, évidemment, doivent obtenir le consentement de la personne lorsqu'ils collectent des renseignements autres que la liste électorale. Les partis politiques ont accès, de facto, à la liste électorale, tout comme les candidats indépendants et les députés indépendants. Il y a 24 partis politiques d'inscrits, la dernière fois que j'ai vérifié, il y a trois semaines. Sur le site du Directeur général des élections, il y en a 24. Il y en a qui sont plus grands que d'autres. Il y en a qui ont plus de membres que d'autres, et il y en a qui ont plus de personnel que d'autres qui peuvent ne pas en avoir du tout, du tout, puis d'avoir un bénévole, puis c'est la cheffe du parti politique. Je ne le sais pas, mais c'est des partis politiques qui sont beaucoup plus petits. Alors, on devait avoir des règles qui permettent un encadrement, mais qui leur permettent, eux autres aussi, d'avoir une vie démocratique puis de présenter des candidats puis des candidates, peut-être pas dans les 125 comtés, parce que, Dieu sait, je pense qu'il y en a juste cinq, six, partis politiques qui peuvent prétendre présenter 125 candidats dans tous les comtés. Les autres, bien, ils font ce qu'ils peuvent, mais ils ont le droit d'exister, puis c'est important, puis ce qu'ils apportent comme vision au débat démocratique est excessivement important.

Vous êtes parti politique, le Directeur général des élections vous donne vos lettres patentes, si vous me permettez l'expression du XIXe siècle, peut-être même avant, puis vous avez accès à la liste électorale. Tous les partis politiques ont accès à la liste électorale. Il y a un petit peu plus de 6,2 millions d'électeurs, pour lesquels nous avons le nom, le prénom, l'adresse, le sexe puis la date de naissance. Bien, ça, il faut encadrer ça. Il faut encadrer ça parce que ce sont des renseignements personnels qui vous identifient, là. Votre nom, votre adresse, votre âge puis votre sexe, c'est déjà beaucoup. Et ça, vous ne voulez pas que cette information-là circule puis soit donnée à n'importe qui, vous voulez une protection minimale. C'est pour ça que le Directeur général des élections, quand il donne la liste électorale à un parti politique puis qu'il en donne accès aux députés élus, vous signez une déclaration par laquelle vous allez tout faire pour en garder le secret, l'utilisation, vous pouvez l'utiliser pour ça, ça, ça, puis vous ne donnerez accès qu'à des personnes de confiance, et ainsi de suite.

Ce qui était dit, pour ce qui est des partis politiques, c'est qu'ils pouvaient utiliser des renseignements personnels, donc la liste électorale et tout autre renseignement, avec un consentement suffisant, que vous pourrez ramasser sur les électeurs, collecter. Vous pouviez, dans la première mouture, les utiliser uniquement s'ils étaient nécessaires pour des fins électorales ou pour des fins de financement politique. Alors, entre les élections et entre les activités de financement, il y a ce qu'on appelle la vie politique des partis politiques, les activités politiques. On a fait, par amendement, ajouter «activités politiques» parce qu'on ne voulait pas être cantonnés ou cantonner les partis politiques uniquement aux 34 jours, 35 jours de l'élection ou peut-être même les quelques semaines ou mois qui précèdent, et aux activités de financement. Entre-temps, entre... Dans les quatre ans d'une élection à l'autre, il y a bien des activités, il y a des congrès de jeunes, il y a des colloques de réflexion, il y a du militantisme terrain qui se fait, il y a des activités à l'année longue. Et ça, il fallait s'assurer que ce soit transmis dans la loi. Donc, ça, ça aura été également une autre avancée.

Maintenant, au niveau des occasions manquées, M. le Président, le principe d'imputabilité, j'en ai parlé, l'important, également, M. le Président, de devoir procéder, quant à nous, à l'évaluation de la conformité. Et ça, ça a fait l'objet d'un amendement que nous avons déposé en article par article et d'un amendement que nous avons déposé en vertu de 252 de notre règlement dans le contexte de la prise en considération, mais qui a été rejeté, un amendement qui visait... Parce que la loi dit, pour les organismes publics et les organismes privés : Vous devez vous assurer, lorsque vous lancez de nouveaux systèmes informatiques, de la conformité de ces systèmes-là par rapport aux obligations de la loi, mais la loi n'est pas rétroactive. Au jour de la mise en vigueur de la loi, tous les systèmes actuels au sein des organismes publics et privés n'ont pas à faire l'objet d'une telle vérification de conformité.

Et ça, ce n'est pas peu dire, parce que du jour au lendemain de la mise en vigueur de la loi 100 % des données dans les systèmes informatiques ou des systèmes informatiques ne seront pas analysés et vérifiés. Il n'y a pas d'obligation de dire : Bon, bien, que sont nos systèmes informatiques? Est-ce que nous avons suffisamment de pare-feu, et ainsi de suite. Je le sais, que s'il y a des incidents puis il y a des tapes sur les doigts qui doivent se donner par la suite, ce sera pris en compte, mais nous aurions cru et souhaité... nous aurions cru valable, et nécessaire, et souhaité que soit mise dans la loi une obligation, puis c'est de même qu'on l'avait verbalisé : «Un organisme public doit dans les six mois de la sanction de la loi, procéder à une évaluation quant à la conformité à la présente loi, de tout système [informatique] ou de prestation électronique de services impliquant la collecte, l'utilisation, la communication, la conservation ou la destruction de renseignements personnels.» L'obligation, dans les six mois de la loi, de faire ce qu'on appelle une vérification diligente de conformité.

Ça, ça aurait été, je pense, le minimum pour savoir. Puis bien des organismes publics et privés se seraient rendu compte qu'on n'était pas si pire, mais après ça, wow! oui, on n'était pas si pire pour ça, ça, mais ça et ça, aïe! une chance que le bateau est sur la grève, parce que, si on le met à l'eau, là, s'il est à risque, l'eau va rentrer. Alors, il faut, de façon proactive, travailler là-dessus. Même si je n'avais pas prévu que mon système allait être modifié ou changé, ça va être le même système, j'ai fait une vérification diligente, il y a des dangers, il y a des risques, je vais y pallier. Là, la loi fait en sorte que vous n'avez pas à faire cette obligation de vérifier vos systèmes, de un, et, de deux, vous avez l'obligation de vous assurer que vos systèmes ne prennent pas l'eau pour l'avenir. Bien, j'aimerais ça savoir, parce que ce système-là, défectueux, est-ce qu'il va être en fonction encore pendant deux ans, cinq ans, 10 ans? Puis je ne voudrais pas qu'une fois que le tuyau ou que le bateau prenne l'eau, on se dise : Ah! O.K., on va le colmater. Il ne faudrait pas attendre ça. Alors, de la proactivité.

• (11 h 30) •

Je le sais, que des organismes... Pour avoir été, dans une vie antérieure, au sein d'une grande organisation, des systèmes informatiques, il y en a, il y en a, il y en a. Ils ne se parlent pas, ce n'est pas la même technologie. Il y a des archaïsmes là-dedans. Tantôt vous avez la donnée sous forme de traitement de texte, tantôt vous avez la donnée sous forme de chiffrier, tantôt vous avez la donnée sous forme de chiffrier, tantôt vous avez la donnée sous forme de document PDF. Le document PDF, là, vous ne pouvez pas faire grand-chose avec ça si vous essayez de faire des transferts de données, c'est un document. Mais, quand même, nous croyons qu'il aurait été bon et nécessaire, occasion manquée, de s'assurer que de telles vérifications diligentes se fassent.

Autre élément également, délai de prescription pour les recours. Des délais de prescription pour le recours... Oui, il y a eu un amendement qui faisait en sorte que le délai de prescription... Si vous faites un acte fautif aujourd'hui, la prescription est passée de trois ans à cinq ans. Alors, aujourd'hui, vous faites une coche mal taillée, vous avez une obligation, en vertu de la loi, de protéger les renseignements personnels, vous ne le faites pas, oublie ça, puis de façon... de mauvaise foi, là, un acte répréhensible, je m'en fous, je le fais aujourd'hui. La prescription, ça veut dire qu'on va pouvoir vous poursuivre pour ça puis vous imposer une pénalité, le cas échéant, si ça ne fait pas plus que cinq ans que l'acte a été posé, le geste fautif a été posé. Si ça fait plus de cinq ans, c'est prescrit. Avant, c'était trois ans. Par amendement on a mis ça à cinq ans.

Nous, ce que nous disions : Au-delà du délai, que ce soit trois ans, cinq ans, sept ans, nous aurions aimé introduire la même logique que la commission Charbonneau avait demandée, notamment pour le Commissaire au lobbyisme, et qui a été inscrite dans la loi, dans cette législature, c'est le projet de loi n° 6, qui fait en sorte qu'on ne va pas faire partir le délai de prescription... qu'il soit de trois ans, cinq ans ou sept ans, on ne va pas le faire partir de l'acte fautif, mais on va le faire partir, le délai de prescription, du moment où le régulateur est au courant que tu as fait quelque chose de pas correct. Parce que vous pourriez l'apprendre au-delà de trois ans ou cinq ans, puis, du jour au lendemain, la Commission d'accès à l'information apprend cela, bien, c'est prescrit. Oui, mais je viens de l'apprendre, je l'ai appris aujourd'hui. Bien, c'est prescrit, vous ne pouvez rien faire.

À l'époque, le Commissaire au lobbyisme devait... la prescription, c'était d'un an de l'acte reproché. Le Commissaire au lobbyisme nous l'a dit, la même journée il apprenait deux choses, il apprenait qu'un acte fautif avait été commis, un, et, deux, il apprenait que c'était prescrit. Il ne pouvait rien faire. Alors, c'était : Du délai commence... à partir du moment où le régulateur est informé du fait. Et là pas obligé d'avoir sept ans, pas obligé d'avoir cinq ans, vous pouvez avoir un trois ans. Pour le Commissaire au lobbyisme, je pense que c'est rendu à cinq ans, ce qui est quand même beaucoup. Mais, quand même, donc, il a le temps de se faire une tête en trois, cinq ans, puis dire : Est-ce que je poursuis ou pas? Il a surtout le temps de faire une enquête digne de ce nom, et ça, c'est important.

Dernier élément, M. le Président, et ça, ce n'est pas anodin, ça, c'est peut-être un acte manqué majeur, on en a discuté, mais finalement ça ne se fera pas : les partis politiques provinciaux sont couverts, mais pas les partis politiques municipaux. Les partis politiques provinciaux doivent respecter toutes les obligations de la loi, aller chercher le consentement puis ne pas utiliser la liste électorale. Si vous êtes un parti politique provincial, si vous êtes un candidat, au niveau provincial, indépendant ou si vous êtes un député indépendant, vous devez respecter la loi. Partis politiques municipaux, il n'y en a pas dans toutes les municipalités. Il y en a dans les plus grandes, mais, dans plusieurs municipalités, notamment les plus petites, il n'y en a pas nécessairement, c'est des candidatures indépendantes. On aurait pu très bien dire : Au niveau municipal, on l'impose à tous les partis politiques municipaux, à tous les candidats, à quelque poste que ce soit, municipaux indépendants et à tous les élus indépendants. Pourquoi? Parce qu'ils ont accès à la liste électorale.

Donc, un candidat indépendant à la mairie d'une municipalité de 10 000 voteurs va avoir, du jour au lendemain, accès à la liste électorale des 10 000 voteurs de sa municipalité, il est candidat à la mairie, indépendant. J'aurais aimé, on aurait aimé qu'il y ait un encadrement : Vous ne pouvez pas utiliser cette liste-là. Oui, le Directeur général des élections va lui faire signer une obligation, mais toute la protection de la grande soeur, grand frère qui est la Commission d'accès à l'information, l'oeil, le regard ne sera pas applicable, malheureusement, au niveau municipal, puis je pense qu'on a passé à travers une belle occasion. Oui, ça aurait été peut-être un petit peu plus compliqué au niveau de la législation, mais il aurait été de bon aloi et justifié, encore une fois.

Puis, ceci dit, le délai de mise en vigueur pour les partis politiques, c'est dans deux ans. Alors, ça n'aurait pas été dans les jambes des partis politiques présentement, mais on se serait assurés que, dans deux ans au maximum, il y aurait lieu d'avoir un encadrement tout à fait justifié pour les grandes et petites municipalités. Puis ça n'empêche en rien les candidatures indépendantes, les candidatures de partis politiques, mais ça vient assurer puis ça vient étayer... assurer l'encadrement au niveau municipal aussi.

Puis Dieu sait qu'il y a beaucoup, beaucoup de personnes qui sont candidates, candidats. Bien, il faut envoyer le bon signal, il faut que la CAI, le cas échéant, la Commission d'accès à l'information, puisse leur dire : Bien là, faites attention, j'ai appris des choses, puis on vient faire des vérifications. Ça n'aurait pas alourdi puis ça n'aurait pas affecté la démocratie, au même titre que ça ne l'affectera pas pour les plus petits partis politiques provinciaux, aussi petits soient-ils, peut-être même juste un seul dirigeant bénévole d'un organisme.

Alors, M. le Président, vous me permettrez, oui, de remercier mon collègue de La Pinière, avec lequel j'ai eu l'occasion de travailler sur l'article par article, ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce également, qui était là notamment, je m'en rappelle, lors des auditions, qui va prendre la parole, j'ai hâte de l'entendre, sur l'adoption finale du projet de loi n° 64, et mon collègue de Viau également, qui aura l'occasion de parler du projet de loi n° 64 et de sa vision des choses.

Vous me permettrez de remercier et de saluer le ministre, je pense qu'on a travaillé très, très... de façon constructive, comme vous l'avez vu, pas d'accord sur tout, mais, sur la finalité de l'encadrement, nous nous rejoignons, collègue de Chapleau et tous les autres collègues du gouvernement, de la banquette ministérielle, et des oppositions également, saluer notre président... J'allais le nommer par son nom. Vous voyez ce que ça fait quand on siège longtemps ensemble. Mais je pense qu'il a le tour avec nous autres. Il a le tour pour nous ramener puis il a le tour pour nous laisser aller, puis, en fin de compte, tout le monde y gagne parce qu'on est efficaces. Puis de saluer Me Miville-Deschênes, qui a travaillé étroitement avec nous et qui nous a permis, parfois, de ne pas commettre certaines erreurs en nous donnant la bonne réponse.

Alors, merci, M. le Président. On va voter en faveur, mais il y aura encore du travail à faire. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de LaFontaine. Je cède maintenant la parole au leader du troisième groupe d'opposition et député de René-Lévesque.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est avec grand plaisir aujourd'hui que je prends la parole au nom de ma formation politique, le Parti québécois, sur le projet de loi n° 64.

On l'a dit et on l'a redit, on était dus pour ce grand chantier, M. le Président. Depuis une vingtaine d'années, le régime québécois sur la protection des renseignements personnels est resté pratiquement inchangé.

Les données, c'est une des principales richesses du XXIe siècle. Pour le gouvernement, c'est une façon d'orienter ses politiques publiques, aussi, afin qu'elles soient plus efficientes. Pour les entreprises, ça peut être une façon de répondre plus efficacement aussi aux besoins des consommateurs. On doit cependant s'assurer que ce ne soit pas une calamité pour les citoyens.

Alors que la loi est demeurée inchangée, les fuites de données se sont multipliées au Québec et partout ailleurs. On peut donner quelques exemples. Les Québécois ont connu une fuite de données chez Capital One, une fuite chez Desjardins et, pour certains, un incident de sécurité chez Revenu Québec et au ministère de l'Éducation. Dès la fuite chez Desjardins, le Parti québécois a fait preuve de leadership en demandant une commission parlementaire pour se pencher sur cette problématique. On l'a obtenu, M. le Président, de peine et de misère. Mais plusieurs solutions ont été présentées par les experts.

Au Parti québécois, on a aussi contribué à cette réflexion en faisant des propositions pour prévenir les fuites de données et en réformant la loi sur la protection des renseignements personnels. On a également proposé la mise en place de mesures de sécurité pour protéger le dossier de crédit des citoyens, qu'ils soient victimes ou non d'une fuite de données. La mise en place de cette dernière mesure a fait l'objet du projet de loi n° 53, auquel j'ai pu contribuer, comme plusieurs de mes collègues. Quant à l'autre volet, celui de la réforme de la loi sur la protection des renseignements personnels, on est dans le dernier droit vers son adoption, pour le projet de loi n° 64.

Le nouveau régime n'est pas parfait, mais il demeure une avancée significative. L'Assemblée nationale doit envoyer un signal fort en adoptant ce projet de loi : le bar ouvert des données personnelles, M. le Président, c'est terminé. Ceux qui les collectent, les utilisent et les commercialisent ont des obligations à remplir. Le rehaussement des amendes est fondamental pour donner des dents à ce nouveau cadre législatif, et on y est parvenus, mais le temps nous dira si, finalement, M. le Président, c'est suffisant. Nous ne devons pas, comme parlementaires, hésiter à renforcer ces amendes si on se rend compte qu'on doit faire davantage.

Je voudrais également revenir sur la notion de consentement. Elle est centrale et ne devra pas demeurer théorique. On doit s'assurer que ceux dont la collecte des données... exercent un consentement libre et éclairé. Des campagnes d'information pourraient notamment être mises en place. Et le ministre a été à l'écoute de nos préoccupations et de ceux qui se sont déplacés en commission parlementaire. Il y avait un consensus pour mettre en place un cadre législatif pour être plus favorable aux consommateurs, aux usagers et à la protection des renseignements personnels.

• (11 h 40) •

Ça, M. le Président, c'est la partie la plus juridique du travail qu'on a fait. Si vous me permettez, j'aimerais prendre un côté plus humain du travail qui a été fait en commission parlementaire, mais notamment du côté de ma formation politique.

M. le Président, ça va faire six ans en novembre que je suis à l'Assemblée nationale. Et souvent on se demande, qu'on soit dans l'opposition ou au gouvernement, de quelle façon on peut avoir un impact sur la vie des gens. Lors de mon premier mandat à l'élection partielle de 2015, j'ai entendu le cri du coeur de Caroline Lamarre. Caroline Lamarre était une employée victime d'agression sexuelle pour laquelle son agresseur a été condamné. Son agresseur était le maire de la municipalité. Or, malgré la condamnation, le maire pouvait siéger encore au conseil de ville de Baie-Trinité. Vous voyez un peu l'aberration dans laquelle la victime était placée. Elle voulait exercer son droit de travail, mais, parce que la loi manquait de mordant, malheureusement, le maire en question pouvait continuer à siéger et avoir tous les bénéfices de son poste de maire.

Donc, j'ai été sensibilisé par Caroline et mon CALACS, Lumière boréale, du côté de la Côte-Nord. Et on a fait les représentations, c'était le gouvernement libéral à l'époque, c'était Martin Coiteux qui était ministre des Affaires municipales, et on a fait les représentations, on a fait changer la loi, M. le Président. Pourquoi je vous dis ça? Parce que c'est un des engagements pour lequel je suis le plus fier, c'est-à-dire que, même dans l'opposition, lorsqu'il y a une injustice qui est commise envers les femmes, il y a moyen de changer les lois. Et c'est ce qu'on a fait, M. le Président, aussi dans le projet de loi n° 64.

Je vais vous lire une partie de l'article qui a paru dans Le Devoir le 14 mai 2021 : «En 2017, Véronique Pronovost brisait le silence dans les pages du Devoir, racontant comment un de ses professeurs l'avait embrassée contre son gré. L'étudiante de l'UQAM avait porté plainte et avait obtenu gain de cause. Mais elle conservait un "sentiment d'injustice et d'incompréhension", car elle n'avait jamais su si le professeur avait été sanctionné pour son geste.

«"J'ai porté plainte pour protéger la prochaine génération d'étudiantes, mais, si ce n'est jamais connu par personne, tu ne protèges personne[...]. J'ai fait ça pour quoi? Je n'ai aucun sentiment de justice. Et pourtant j'ai gagné."

«[...]Véronique milite [et a milité] pour faire changer la loi, qui, jusqu'à tout récemment, protégeait la vie privée des agresseurs en empêchant les établissements de révéler les sanctions aux victimes.»

M. le Président, c'est la deuxième fois que je suis sensibilisé à des modifications législatives par des victimes. J'ai discuté avec Mme Pronovost, j'avais discuté avec Mme Lamarre, et, lors du projet de loi n° 64, on a proposé des amendements, qui ont été acceptés par le ministre, justement pour donner un peu plus... pas plus, donner toute la transparence dans les établissements d'enseignement. Ces propositions-là étaient venues d'un collectif, Québec contre les violences sexuelles, et du Collectif opposé à la culture du viol. Grosso modo, on ne révolutionne pas la loi, là, tout ce qu'on fait, c'est qu'on permet à une personne victime de savoir si son agresseur a été, oui ou non, sanctionné. Et ça, M. le Président, ça fait l'énorme différence.

Donc, M. le Président, comme je vous disais tout à l'heure, ça fait six ans que je suis à l'Assemblée nationale, je suis extrêmement sensibilisé aux droits des femmes et surtout à lutter contre les violences faites aux femmes. Samedi dernier, il y avait une marche, chez nous, à Baie-Comeau, ça faisait 40 ans qu'on célébrait les mouvements contre les violences faites aux femmes. J'ai rencontré les groupes communautaires, j'ai rencontré mon CALACS aussi. Et on a eu même la visite de bikers qui roulent partout au Québec, et même à travers le monde, pour lutter contre les abus faits envers les enfants.

Et, M. le Président, je suis extrêmement fier, aujourd'hui, que l'Assemblée nationale va pouvoir adopter un projet de loi qui va donner beaucoup plus de transparence et surtout beaucoup plus d'outils aux victimes, encore trop grandes, d'agression sexuelle et de violence sexuelle.

Donc, M. le Président, je ne pensais pas faire ça dans ma carrière plus d'une fois, ça fait deux fois qu'on le fait. Et, s'il faut le faire encore une troisième fois, une quatrième fois, à chaque fois qu'une personne va venir nous rencontrer pour nous dire : Dans la loi, il y a un préjudice qui fait que les victimes sont moins bien traitées que les agresseurs, sachez que, M. le Président, le Parti québécois sera là pour modifier les lois, et le député de René-Lévesque sera là pour porter leurs voix. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, M. le Président. Donc, à mon tour de prendre la parole, et nous voilà, donc, à la dernière étape de cet important projet de loi, donc l'étude du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels, donc, soit l'adoption finale. Le projet de loi vise à moderniser, d'une part, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et, d'autre part, la loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé. Il prévoit aussi que les partis politiques soient soumis à certaines dispositions de la loi dans le secteur privé.

Je tiens, d'entrée de jeu, encore une fois, à réitérer l'excellent travail de nos deux collègues les députés de LaFontaine et de La Pinière. Et d'ailleurs je crois qu'on a eu vraiment un cours 101 sur ce projet de loi, et tous ceux intéressés par la question auraient intérêt à réécouter, d'ailleurs, les allocutions du ministre mais aussi du député de LaFontaine, car nos députés ont, évidemment comme d'autres députés, amené des amendements pour renforcer la loi et bonifier le projet de loi.

Encore une fois je le répéterai, mais à plusieurs reprises ça a été répété, la bonne entente. Oui, il y a des déceptions, on y viendra, mon collègue en a bien parlé. Mais, au-delà de ça, cet esprit de collaboration qui a régné pendant des jours et des... bien, des heures et des heures, et des jours et des jours, pendant longtemps... mais c'est sûr que c'est la nature de la bête, une bête qu'on aime et qu'on apprivoise quand on vient ici, à l'Assemblée nationale, ça fait partie de notre travail, et c'est un travail extrêmement stimulant, mais on a vu aussi que tout le monde a pris ça à coeur

 Donc, j'ai vu les amendements des oppositions, nos propres amendements, j'ai écouté les deux allocutions du ministre, et je tiens encore une fois à le souligner.

Donc, comme d'autres qui l'ont souligné, le contexte de ce projet de loi, c'est important de s'en rappeler, parce qu'on est capables de prendre la pleine mesure de l'importance du travail qui a été fait par les parlementaires... donc des scandales concernant des fuites de données personnelles, quelque chose de très, très, très sérieux. Quand on pense à ceux qui sont victimes de vol d'identité... Je ne sais pas si vous avez déjà eu, M. le Président, l'occasion de parler avec quelqu'un qui a vécu ça ou lu l'expérience de quelqu'un qui vit ça, c'est plus que dérangeant, là, c'est un affront, et les solutions à ça ne sont pas évidentes. Alors, parmi, donc, ces scandales : Desjardins, Capital One, Revenu Québec, Cambridge Analytica.

Alors que les incidents de confidentialité prennent de l'ampleur, la nécessité de garantir la sécurité des renseignements personnels des Québécois est évidemment devenue prioritaire, et les outils législatifs pour encadrer la protection des données n'étaient plus adaptés à cette nouvelle réalité, et les lois québécoises manquaient clairement de mordant. Et ce domaine des données, c'est évidemment un peu comme une course contre la montre, une course contre la montre, et ça va continuer à être une course contre la montre. On y viendra quand on parle des pouvoirs qu'on devra donner, donc, à la CAI et l'expertise qu'on devra s'assurer... ou que la CAI devra aller chercher, parce que l'innovation... Et puis Montréal est un centre d'innovation. On est bien fiers de cette innovation. Il y a des domaines où... Moi, je l'ai vécu dans la commission parlementaire sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Je vous dirais à quel point c'est tellement perturbant, bouleversant, de voir que cette expertise... Je ne parle pas des grandes firmes qui travaillent là-dedans, mais ceux qui en profitent pour exploiter nos jeunes, nos enfants, d'autres humains. Et donc on a eu l'occasion d'explorer ce domaine. Et je vous dirais que ça a été vraiment un cauchemar, là, de le comprendre. Mais ici on parle d'autre chose, mais il y a un lien quand même. Et, cette course contre la montre, je le répète, parce que ça va prendre, pour l'État québécois, d'avoir beaucoup d'expertise.

Alors, l'autre phénomène important, c'est, en mai 2018, l'Union européenne qui a mis en vigueur le Règlement général sur la protection des données. Et on a eu l'occasion de mieux comprendre ce règlement lors de la consultation. Et c'est devenu, donc, évidemment, en anglais on parlerait de «gold standard», la référence, la norme internationale. Et j'ai écouté le ministre qui dit que, maintenant, avec notre projet de loi, on serait les plus forts en Amérique du Nord, si je comprends bien, qui est une bonne chose. J'imagine que ce règlement nous a inspirés aussi. Il y a certainement des différences.

Il aurait fallu participer à tout le travail que vous avez fait pour bien comprendre, mais, le résultat, j'en suis vraiment satisfaite, très satisfaite, très contente. Parce que, comme le ministre l'a souligné, j'ai eu ce dossier-là. Et c'était vraiment au moment de ces catastrophes que j'étais ministre, puis on se disait : Qu'est-ce qu'on va faire? On savait qu'il fallait réformer la loi. Alors, je suis très contente de pouvoir en savoir un peu plus. J'ai écouté avec tellement d'attention, bon, les discours pour mieux comprendre. Alors, je pense qu'on a beaucoup de matière pour tous ceux, dans la société québécoise, qui voudront comprendre... d'écouter ces allocutions du ministre, évidemment, et de mon collègue le député de LaFontaine.

• (11 h 50) •

J'aimerais revenir sur la question des consultations. J'étais là quand le ministre a dit : Bien, oui, il y a des groupes importants qui n'ont pas été écoutés et qui n'ont pas pu participer physiquement aux échanges et à faire une présentation. Donc, il y a eu la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse qui s'est désistée, compte tenu des délais trop courts. Donc, ils parlaient d'un manque de temps, que le gouvernement est allé trop rapidement pour qu'ils puissent préparer leur mémoire. Il y avait le Barreau du Québec qui s'est désisté, compte tenu des délais très serrés, la Protectrice du citoyen qui avait confirmé sa présence mais qui a dû finalement décliner l'invitation. Et le ministre disait : Oui, mais on a quand même tenu compte de leurs recommandations. Oui, c'est bien, mais c'est la moitié de la richesse qu'on va aller chercher en faisant ça. Et, pour les parlementaires, moi, c'est 13 ans que je suis là, bien, c'est toujours un moment vraiment intéressant, pour nous, d'écouter ces experts. On se sent privilégiés de pouvoir avoir cette expertise ici, au Québec, autant les organismes gouvernementaux, paragouvernementaux que le Barreau, la Commission des droits de la personne, etc., parce que cette période-là de réflexion peut nous amener très loin, plus loin qu'on pense. Et ce n'est pas juste en lisant, c'est que ça va déclencher une réflexion, les autres vont poser des questions, les députés vont poser des questions, et c'est de la matière très riche quand on arrive au moment de faire l'article par article et, essentiellement, d'amener des propositions.

Donc, je pense qu'il faut toujours qu'un gouvernement s'assure que ces grands joueurs aient le temps de préparer leurs mémoires. Ce n'est pas nécessairement le ministre qui contrôle l'agenda, je comprends bien, mais qu'il y ait un effort collectif au niveau gouvernemental de s'assurer que ces voix soient entendues.

Bon, les avancées du projet de loi. M. le Président, le projet de loi, évidemment, porteur d'avancées importantes en matière de protection des renseignements personnels, bon, il rend imputables les organismes privés et publics par la nomination d'un responsable de la gestion de la protection des renseignements personnels. Ça a été salué. Il précise les exigences en matière de consentement, qui doit être libre et éclairé. Je me rappelle beaucoup de discussions que j'ai pu avoir avec des fonctionnaires sur toute cette question de consentement libre et éclairé lors de la divulgation des renseignements personnels. Par ailleurs, il précise que l'organisme privé ou public devra détailler le cadre dans lequel ces données seront utilisées, donc déjà une avancée importante. Il met en place un processus de réponse aux incidents de sécurité, prévoit l'obligation de produire une déclaration de ces incidents en cas de préjudice sérieux. Il précise le droit au déréférencement, soit pour un individu d'exiger, dans certains cas, la fin de la diffusion — une minute! le temps passe vite — d'un renseignement personnel qui le concerne ou que soit désindexé tout hyperlien rattaché à son nom permettant d'accéder à ce renseignement par un moyen technologique.

Bon, je n'ai pas le temps de dire tout ce que j'aurais voulu dire avec le peu de temps qui reste. Tout ceci étant dit... Bien, la CAI, quelques secondes sur la CAI, évidemment qui joue un rôle vraiment important et qui a les pouvoirs, mais qui aura besoin, le ministre l'a souligné, mon collègue l'a souligné, des talents, les talents qu'il va falloir aller rechercher là où il faut les rechercher, et c'est peut-être au-delà de nos frontières, dans ce domaine c'est souvent au-delà de nos frontières qu'il faut aller chercher ce talent, et donc des investissements importants pour que la CAI puisse mener à bien ce projet de loi renouvelé, modernisé, renforcé.

Alors, évidemment, nous voterons pour le projet de loi, je pense que c'est évident. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député de Chapleau.

M. Mathieu Lévesque

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. J'en profite pour vous saluer, saluer également le ministre, et également l'ensemble des collègues ici, bonjour, et également les collègues de l'opposition. Bien heureux de vous retrouver, là, pour prendre la parole aujourd'hui à l'occasion de l'adoption finale du projet de loi n° 64. Puis, un peu à l'instar du ministre, je tiens à remercier évidemment les intervenants qui ont participé aux consultations particulières tenues en septembre 2020. Et, plus particulièrement, j'aimerais remercier les représentants de tous les partis politiques ainsi que les députés de l'opposition qui ont contribué aux travaux spécifiques ayant permis de trouver un consensus relativement à l'encadrement des renseignements personnels détenus par les partis politiques provinciaux, par les députés indépendants et par les candidats indépendants.

Et donc la fameuse question de l'assujettissement des partis politiques à un régime de protection des renseignements personnels date quand même de plusieurs années. On se souviendra du scandale de Cambridge Analytica, qui a mis en lumière, évidemment, les risques importants qui étaient liés à l'utilisation des renseignements personnels à des fins de microciblage politique, auquel, évidemment, faisait face le processus démocratique. On a agi, à la lumière de ce scandale, afin d'éviter que les citoyens soient pris dans des stratagèmes et des algorithmes qui sont puissants et qui peuvent se nourrir à base de mégadonnées, utilisées, évidemment, sans le consentement de ces personnes.

À la suite de scandales, le Directeur général des élections du Québec a déposé, en 2019, un rapport dans lequel il recommandait d'assujettir les partis politiques provinciaux à un encadrement législatif en matière de protection des renseignements personnels. Et il était également venu nous entretenir de cette question-là en consultations particulières, M. le Président. Et donc nous avons décidé d'agir, évidemment en collaboration avec l'ensemble des collègues.

Donc, comme je le disais, on donne suite aux recommandations-phares sur l'assujettissement des partis politiques à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Le projet de loi n° 64 contient certaines exceptions, qui ont été adoptées de façon consensuelle par les députés présents et qui visent à adapter les exigences à la réalité des partis politiques pour leur électorat. Ces distinctions sont nécessaires, considérant le rôle central, on le sait tous, des partis politiques dans la vie démocratique de notre nation.

À la suite de l'adoption de ce projet de loi, les partis politiques devront notamment désigner un responsable de la protection des renseignements personnels. Ils vont devoir obtenir le consentement des personnes avant de collecter ou d'utiliser leurs renseignements personnels et, évidemment, seront soumis à des limites à l'égard de leurs communications. Ils vont avoir également l'obligation d'aviser les personnes concernées en cas d'incident de confidentialité. Puis ils seront soumis à la surveillance de la CAI, donc la Commission d'accès à l'information.

Il y a quelques exceptions, telles que la conversion... la conservation, pardon, des renseignements personnels qui ont pour objectif d'atteindre un équilibre entre la protection et, évidemment, la capacité électorale et de fonctionnement des partis politiques, leur rôle principal. Donc, il y a eu certains ajustements, pour les partis politiques, qui ont été insérés dans le projet de loi.

Donc, c'est un jalon important, non seulement pour la protection des renseignements personnels, mais également pour le maintien des valeurs démocratiques, qui sont à la base, évidemment, de notre société. Puis il permet de combler une lacune importante, tout en donnant aux partis politiques l'opportunité de poursuivre leur travail.

Je sais qu'on l'a peut-être mentionné également, la question des partis politiques municipaux. Évidemment, il y a quand même certaines obligations, là, qui s'appliquent aux partis politiques municipaux, puis je pense que c'est important de les rappeler puis d'en discuter, là, notamment en matière d'informations qui sont encadrées par la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, qui prévoient expressément certaines obligations pour les partis politiques municipaux et aux candidats, notamment un devoir de transparence en vertu de l'article 368, donc que les partis politiques et les candidats doivent fournir sur demande au Directeur général des élections, dans un délai de 30 jours, tous renseignements qui sont requis et demandés par le DGEQ; l'obligation, évidemment, selon l'article 108, pour une candidate ou un candidat qui se désisterait de remettre la liste électorale au DGEQ; évidemment, aussi, là, l'article 159.1, qui vise une interdiction à quiconque d'utiliser, de communiquer ou de permettre que soit communiqué à d'autres fins que celles prévues par la loi un renseignement contenu dans une liste électorale ou référendaire ou dans une liste de personnes habiles à voter ayant le droit d'être inscrites sur une liste référendaire, ou de communiquer ou de permettre que soit communiqué un tel renseignement à quiconque n'y a légalement pas droit. Et donc, en cas de défaut de respecter ces obligations, le DGEQ peut, en vertu de l'article 404, retirer soit son autorisation au parti ou au candidat indépendant. Et donc il y a quand même une distinction à faire dans la réalité des partis politiques municipaux et provinciaux.

Et donc, évidemment, plusieurs partis politiques au municipal n'ont pas nécessairement les ressources financières et humaines importantes. Ils ne pourraient pas, nécessairement, répondre à ces obligations-là. Et donc nous croyons évidemment que les mesures existantes sont déjà assez exigeantes pour les petites organisations politiques, évidemment, qu'elles sont suffisantes pour répondre au besoin de transparence nécessaire. Et évidemment le fait d'assujettir ces intervenants en partie à la Loi sur la protection des renseignements personnels pourrait créer de lourdes obligations pour ceux-ci, et ça pourrait évidemment décourager des gens de se décourager des élections municipales, donc ça pourrait créer un enjeu démocratique. On le sait, il y a plusieurs candidats qui sont élus, donc, qui sont élus, là, sans opposition, et donc il y a comme un enjeu démocratique à ce qu'ils puissent aller se présenter. Donc, ça, c'est un enjeu qui est assez important, là, pour notre vitalité démocratique municipale, et donc évidemment on cherche activement des candidats. Donc, c'est toutes des réalités qui doivent être prises en compte lorsqu'on veut légiférer sur les partis politiques municipaux.

Et donc, en terminant, évidemment, je réitère, là, que je suis extrêmement fier du travail qui a été accompli au sein de la Commission des institutions et du résultat qui en découle. À ce titre, j'aimerais d'abord remercier les gens du SAIRID, qui ont fait un travail vraiment formidable, également l'ensemble de l'équipe du ministre. Le ministre, je le remercie de sa confiance, qui m'a permis de bien travailler sur ce projet de loi et d'avoir un pan sur lequel...

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député de Chapleau, je dois malheureusement vous interrompre parce qu'il est midi.

M. Lévesque (Chapleau) : Ah! Il me reste... D'accord.

Le Vice-Président (M. Picard) : Et est-ce que vous comptez poursuivre lors de la reprise?

M. Lévesque (Chapleau) : Il me resterait une phrase à dire, si je pouvais avoir un consentement, ça me prendrait deux secondes.

Le Vice-Président (M. Picard) : Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix : Consentement.

Le Vice-Président (M. Picard) : Consentement. Allez-y.

• (12 heures) •

M. Lévesque (Chapleau) : Et évidemment je remercie les directeurs généraux des différents partis. Et chapeau, également, spécial à Brigitte Legault, notre directrice!

Et donc je crois qu'évidemment ce sera assurément un modèle à suivre, le projet de loi n° 64. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Chapleau.

Compte tenu de l'heure et afin de permettre cet après-midi la tenue des affaires courantes, le présent débat sur l'adoption du projet de loi n° 64 est ajourné.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 13 h 40.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 13 h 40)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon mardi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous allons débuter notre séance avec la rubrique des déclarations de députés, et la première déclaration sera celle de M. le député de Saint-Jean.

Féliciter l'entreprise Logistik Unicorp Inc. pour la signature
d'un contrat avec la Nouvelle-Zélande

M. Louis Lemieux

M. Lemieux : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est plus qu'un coup de chapeau ou une tape dans le dos, c'est de la reconnaissance que je veux transmettre aujourd'hui à une multinationale de chez nous. Oui, oui, il y a une multinationale avec 325 employés à son siège social de Saint-Jean-sur-Richelieu, et, d'ailleurs, 2 000 autres répartis dans six pays.

Je vous parle de Logistik Unicorp, qui s'est spécialisée dans la fabrication d'uniformes et qui vient d'annoncer un contrat d'une centaine de millions de dollars pour habiller les forces armées néo-zélandaises pour les 16 prochaines années. Logistik fournit déjà les uniformes des armées françaises, allemandes et canadiennes.

Et c'est d'autant plus important, Mme la Présidente, que le Haut-Richelieu vient tout juste de franchir la première des trois étapes du processus de reconnaissance par le gouvernement du Québec du statut de zone d'innovation, dans ce cas-ci zone d'innovation en sécurité civile et publique.

C'est avec des forces vives économiques et ambitieuses comme Logistik Unicorp que le Haut-Richelieu peut espérer s'imposer pour innover. Et ce ne sont pas les ambitions et les gens d'affaires et entrepreneurs qui manquent, et je les salue et les remercie. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Fabre.

Souligner la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Mme la Présidente, le 21 septembre, c'est une journée bien spéciale depuis 1994, alors permettez-moi de souligner la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer, qui se déroule aujourd'hui.

Vous savez, au Québec, il y a plus de 152 000 personnes qui sont atteintes de cette maladie ou d'un trouble neurocognitif. Dans 15 ans, ils seront 260 000 à en souffrir. Mais, bien au-delà des chiffres, il y a l'humain, il y a l'aîné, les proches et sa famille, car, si le nombre de personnes atteintes est impressionnant, le nombre de proches aidants à leurs côtés l'est tout autant. Pour chaque personne atteinte, il y a un à trois proches aidants auprès d'eux.

Mme la Présidente, en cette Journée mondiale de la maladie de l'Alzheimer, permettez-moi reconnaître directement ces milliers d'hommes et de femmes qui prennent soin de leurs proches touchés par la maladie. Merci pour votre bonté, pour votre dévouement. Et n'oubliez jamais que le quotidien de vos proches que vous aimez est plus doux, plus beau grâce à vous. Merci à vous tous pour votre humanité. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Fabre. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Côte-du-Sud.

Souligner le 375e anniversaire de la seigneurie de la Rivière-du-Sud

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, Mme la Présidente. Je tiens à souligner le 375e anniversaire de la seigneurie de la Rivière-du-Sud, qui comprend les municipalités de Montmagny, Saint-Pierre et de l'Isle-aux-Grues.

De souligner la fête d'une seigneurie au Québec nous indique la richesse de l'histoire associée à cette région. C'est le 5 mai 1646 que la Compagnie de la Nouvelle-France cède à Charles Huault les terres et les îles comprises entre Berthier-sur-Mer et Cap-Saint-Ignace. Fait intéressant, c'est à cet homme que nous devons la tradition des feux de la Saint-Jean.

Cette région a connu des événements et des personnages qui ont marqué l'histoire du Québec, en 1776, par exemple, la bataille de Saint-Pierre, entre loyalistes et patriotes, ou encore la Grosse-Île, qui a accueilli pendant des années les immigrants pour des quarantaines, des personnages tels Étienne-Paschal Taché, ancien premier ministre, ou encore son fils, Eugène-Étienne, qui a conçu, ici, les plans de l'hôtel du Parlement. Je pense aussi à l'abbé Maurice Proulx, enseignant et premier cinéaste de la ruralité, ou encore Renaud Cyr, grand chef qui a marqué l'histoire culinaire du Québec.

Notre région est riche en histoire, et je souhaite à tous les citoyens de très heureuses festivités et je nous souhaite également 375 ans d'histoire supplémentaires.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Maintenant, je reconnais Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger.

Souligner la Journée mondiale du tourisme

Mme Filomena Rotiroti

Mme Rotiroti : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, aujourd'hui, de souligner la Journée mondiale du tourisme, qui aura lieu le 27 septembre prochain.

Depuis 1980, l'Organisation mondiale du tourisme des Nations unies souligne l'apport important de l'industrie touristique, tant au niveau économique et social et culturel partout dans le monde.

Le secteur du tourisme, comme beaucoup d'autres, a été durement touché par la pandémie de la COVID-19 au Québec et ailleurs. C'est d'ailleurs sous le thème le Tourisme pour une croissance inclusive que se tiendra cette journée. L'objectif est de mettre en lumière la capacité de tourisme à favoriser le développement inclusif et son rôle dans la promotion du respect et les opportunités qu'il offre à des milliers de personnes dans le monde.

Je veux aussi profiter de cette occasion pour souligner le travail essentiel de tous les Québécois et Québécoises qui oeuvrent de près ou de loin dans l'industrie touristique. Ils sont plus de 400 000 chez nous. Merci de contribuer au rayonnement du Québec.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger. Maintenant, je cède la parole à M. le député d'Abitibi-Est.

Rendre hommage à Mme Nicole Garceau, artiste multidisciplinaire
et fondatrice du Festival de contes et légendes
en Abitibi-Témiscamingue

M. Pierre Dufour

M. Dufour : Merci, Mme la Présidente. J'ai le plaisir, aujourd'hui, d'honorer, avec ma minute de député, une dame passionnée du domaine culturel. Toujours présente et impliquée dans le milieu culturel abitibien, Mme Nicole Garceau est une de ces pionnières de la région qui a su développer les activités culturelles chez nous.

Artiste multidisciplinaire, ayant fait quelques présences cinématographiques, dans Némésis, de Marc-André Forcier, ou La donation, de Bernard Émond, c'est le théâtre qui a occupé une grande partie de sa vie. Metteuse en scène, artiste, professeure, etc., nommez un poste, elle les a tous faits. Elle fut même gestionnaire d'une auberge dans le site classé patrimonial du village minier de Bourlamaque.

Fondatrice du Festival des contes et légendes en Abitibi-Témiscamingue, en 2003, notre septuagénaire y est toujours active, sa voix y résonne encore. Par le biais de ce festival, elle fait découvrir des artistes de tous les genres provenant de partout à travers le monde, un festival à ne pas manquer, du 28 septembre au 30 octobre, à Val-d'Or. Merci, Mme Garceau, d'agrémenter le paysage culturel.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

Féliciter la Sûreté du Québec pour l'importante opération policière
déployée dans la municipalité de Sainte-Paule afin de
retrouver un enfant victime d'enlèvement

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la Présidente, le 31 août dernier, une alerte AMBER a été déclenchée dans la petite collectivité de Sainte-Paule, en Matanie, quand un père a pris la fuite avec son garçon âgé de trois ans.

Une importante opération policière a alors été déployée dans cette municipalité de moins de 300 habitants. Pendant cinq jours, les autorités ont ratissé sans relâche une zone dense et montagneuse avant de localiser l'enfant et le père. Ce fut alors un soulagement pour les citoyens de ma région.

Je tiens à partager mes plus sincères remerciements aux hommes et aux femmes impliqués dans la plus longue alerte AMBER de l'histoire du Québec. Il est important de souligner le déploiement et le travail exceptionnel des policiers de la Sûreté du Québec, sous le commandement de M. Benoit Dubé, directeur des enquêtes criminelles, et de M. André Santerre, directeur général adjoint exécutif. Je veux également saluer la participation de l'escadron 430 des hélicoptères tactiques de Valcartier.

Par votre travail et votre professionnalisme, vous avez sauvé un enfant. Au nom de la population de ma région, je vous exprime ma plus profonde gratitude. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Et maintenant je reconnais M. le député de Vachon.

Souligner le 50e anniversaire du Centre
d'action bénévole de Saint-Hubert

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vais commencer par remercier mon collègue pour sa déclaration.

Mme la Présidente, comme vous le savez, les organismes communautaires sont au coeur de nos communautés. Aujourd'hui, j'aimerais souligner le 50e anniversaire d'un organisme fort important de ma circonscription, le Centre d'action bénévole de Saint-Hubert.

Ce sont 177 bénévoles qui réalisent près de 10 000 heures d'implication, que ce soit avec les cliniques d'impôt, l'accompagnement de nos aînés pour les rendez-vous médicaux ou même la livraison de plus de 17 000 repas avec la popote roulante. En plus d'être impliqué dans la communauté sur différentes tables, comme celle du développement social de Saint-Hubert, le CAB, c'est aussi des projets comme Bonhomme à lunettes, un service d'opticien mobile, ou encore le prêt de matériel orthopédique.

En 50 ans, Mme la Présidente, il y a eu bien des changements. D'une douzaine de bénéficiaires des repas, il y en a plus de 241 aujourd'hui. J'ai même eu le plaisir, récemment, dans les derniers jours, d'assister au lancement du nouveau véhicule électrique de l'organisme. Eux aussi, ils passent au vert.

En terminant, Mme la Présidente, je veux remercier une directrice générale en or, Mme Aurélie Condrain-Morel, de même que toute son équipe, dévouée pour la cause. Merci d'être là au quotidien pour nos concitoyens de Saint-Hubert.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Vachon. Et je cède maintenant la parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

Souligner le travail de Mobilisation 6600 Parc Nature MHM
pour dénoncer le projet de l'entreprise
Ray-Mont Logistiques Montréal inc.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Hochelaga-Maisonneuve a un historique de dépossession. La désindustrialisation progressive a laissé un héritage de précarité financière et de terrains contaminés dans l'est de Montréal. Les espaces verts, eux, sont beaucoup plus rares.

Je souhaite aujourd'hui souligner le travail extraordinaire d'une mobilisation citoyenne dans ma circonscription.

Devant l'arrivée de l'entreprise Ray-Mont Logistiques, qui projette de construire à un jet de pierre des maisons la plus grande plateforme de transport intermodal en Amérique du Nord, le groupe Mobilisation 6600 MHM Parc Nature lui tient tête avec sérieux et détermination.

Composé majoritairement de femmes, le groupe organise des actions ludiques, familiales et grand public. Samedi dernier a eu lieu une manifestation où près de 1 000 personnes ont marché pour dénoncer ce projet et demander à ce que l'entreprise quitte leur quartier. Cette manifestation est le fruit d'années de travail acharné de citoyens et de citoyennes qui souhaitent un avenir meilleur pour Hochelaga-Maisonneuve.

Je tiens aujourd'hui à remercier et à féliciter la Mobilisation 6600, qui nous démontre que la lutte aux changements climatiques, ce n'est pas seulement l'atteinte de cibles fixées par des dirigeants politiques, c'est aussi la lutte pour préserver nos espaces verts.

Hochelaga-Maisonneuve s'organise et a le droit de décider de son avenir. Merci.

• (13 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Féliciter Mme Ann-Renée Desbiens, médaillée d'or au
Championnat mondial de hockey sur glace féminin

Mme Émilie Foster

Mme Foster : Merci, Mme la Présidente. Nous avons dans la région une grande athlète féminine, un véritable modèle pour les générations présentes et à venir.

Originaire de La Malbaie, Ann-Renée Desbiens a appris à patiner à l'âge de trois ans, et à cinq ans déjà elle découvrait le hockey avec ses frères et soeurs. Ann-Renée vient d'une famille de hockeyeurs. Pas surprenant qu'elle soit aujourd'hui la fierté de toute une région, d'une province et même d'un pays pour ses talents de gardienne de but.

Jusqu'à présent, elle avait gagné de multiples prix, dont trois médailles d'argent à l'international. L'une d'entre elles a été conquise aux Jeux olympiques de PyeongChang en 2018.

Le 31 août dernier, Ann-Renée Desbiens a réalisé son rêve, celui d'être championne du monde et de remporter cet honneur en arborant les couleurs de son pays, le Canada. C'était sa première médaille d'or, celle pour laquelle elle s'est donnée corps et âme depuis sa plus tendre enfance.

Ann-Renée, on est tellement fiers de toi! Tu es un exemple de persévérance. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Et maintenant, pour clore cette rubrique de déclarations de députés, je cède la parole à M. le député de Pontiac.

Déplorer le décès de la boxeuse Jeanette Zacarias Zapata

M. André Fortin

M. Fortin : Oui. Merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir de faire cette déclaration au nom de mon collègue de Marquette.

Mme la Présidente, le 28 août dernier se tenait à Montréal un gala de boxe auquel prenait part l'athlète mexicaine Jeanette Zacarias Zapata. Nous avons tous vu les images troublantes de la fin du combat. Le 2 septembre, on nous annonçait la triste nouvelle du décès de la jeune boxeuse mexicaine, âgée de seulement 18 ans.

Mme la Présidente, en tant que société, il est de notre devoir de protéger nos jeunes athlètes ainsi que ceux qui viennent les affronter lors de compétitions en sol québécois. Nous devons tout mettre en oeuvre afin d'éviter que de tels drames se reproduisent. La science entourant la pratique des sports a beaucoup évolué au cours des dernières années. Mme la Présidente, il est aussi temps, il est aussi grand temps d'en faire évoluer la pratique.

En terminant, je crois également qu'il est important d'avoir une pensée pour Marie-Pier Houle, qui, comme athlète, vit des moments très difficiles présentement. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.

Et je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 52)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président : Mmes, MM. les députés, bonjour. Bon début de semaine. Content de vous revoir. Prenons quelques instants pour nous recueillir.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Mmes et MM. les députés, juste avant de commencer, je signale que certains collègues reviennent, on les voit. D'abord, bienvenue, Mme la ministre responsable des Aînés, content de vous revoir.

Et permettez-moi aussi de signaler une première à l'Assemblée nationale. Je dois dire que deux de nos collègues, la fin de semaine dernière, se sont mariés. Je reconnais le député... la députée de Saint-Laurent d'abord, madame, M. le député de Jacques-Cartier également. Ils se sont mariés en fin de semaine. Alors, très content. Félicitations! Puis beaucoup, beaucoup de bonheur également.

Alors, nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre des Finances.

Rapport annuel 2019-2020 résultant de la comparaison, du couplage ou de
l'appariement des fichiers de renseignements inscrits au plan d'utilisation
de Revenu Québec et rapport annuel de Financement-Québec

M. Girard (Groulx) : M. le Président, je dépose le rapport d'activité 2019‑2020 résultant de la comparaison, du couplage ou de l'appariement des fichiers de renseignements inscrits au plan d'utilisation ainsi que le rapport d'activité 2020‑2021 de Financement-Québec. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont déposés. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Rapports annuels du CIUSSS—Est-de-l'Île-de-Montréal et
des CISSS de l'Outaouais et de la Montérégie-Ouest

M. Dubé : Alors, oui, bonjour, M. le Président. Je dépose le rapport annuel de gestion 2020‑2021 du CIUSSS de l'Est-de-Montréal ainsi que les rapports annuels de gestion 2020‑2021 du CISSS de l'Outaouais et de la Montérégie-Ouest. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont déposés. Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Rapports annuels sur l'entente-cadre nationale et déploiement des processus
d'intervention concertés et sur l'application du chapitre II de la Loi visant
à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre
personne majeure en situation de vulnérabilité

Mme Blais (Prévost) : Merci, M. le Président. Permettez-moi de déposer le rapport annuel 2020‑2021 de l'entente-cadre nationale et déploiement des processus d'intervention concertés pour lutter contre la maltraitance envers les personnes aînés, ainsi que le rapport annuel 2020‑2021 de la Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité, chapitre II, Politique de lutte contre la maltraitance. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont déposés. M. le ministre de la Justice.

Rapport annuel de la Commission des services juridiques

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose le rapport annuel de gestion 2020‑2021 de la Commission des services juridiques. Merci, M. le Président.

Le Président : Ce document est déposé. Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.

Rapport annuel du ministère des Affaires
municipales et de l'Habitation

Mme Laforest : Oui, merci, M. le Président. Je dépose le rapport annuel de gestion 2020‑2021 du ministère des Affaires municipales et de l'Habitation. Alors, merci, M. le Président.

Le Président : Ce document est déposé. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Plan stratégique 2021‑2026 de la Régie des
marchés agricoles et alimentaires

M. Lamontagne : Oui, M. le Président. Je dépose le plan stratégique 2021‑2026 de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président : Ce document est également déposé. Enfin, Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Rapport annuel du Conseil consultatif de la lecture et du livre

Mme Roy : Oui, bonjour, M. le Président. Alors, je dépose le rapport d'activité 2020‑2021 du Conseil consultatif de la lecture et du livre. Merci, M. le Président.

Le Président : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des pétitions

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions présentées en Chambre le 27 avril par la députée de Sherbrooke, le 29 avril par la députée de Joliette, le 11 mai par le député de Rosemont et les 12 mai et 10 juin par le député de LaFontaine. Merci.

Le Président : Merci. Ces documents sont donc déposés.

Rapport annuel du Commissaire à l'éthique et à la déontologie

Pour ma part, je dépose le rapport d'activité 2020‑2021 du Commissaire à l'éthique et à la déontologie.

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

J'ai également reçu préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose, évidemment, le texte de ce préavis.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 4.4 des règles de fonctionnement afin de déposer un rapport du comité directeur de la Commission de l'Assemblée nationale? Consentement.

Modifications à la liste des présidents de séance

Je dépose donc le rapport du comité directeur de la Commission de l'Assemblée nationale qui s'est tenu le 17 septembre 2021 afin de modifier la liste des présidents de séance.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole à la cheffe de l'opposition officielle.

Mise en place d'une cellule de crise au sein du réseau de la santé

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Les Québécois ont droit d'avoir accès à des soins de santé de qualité partout sur le territoire. Aujourd'hui, je sais que le premier ministre a perdu ses élections, mais également il a perdu le contrôle sur ce qui se passe sur le terrain en matière de santé. Ce qu'on voit aujourd'hui, on ne l'a jamais vu avant : des fermetures d'urgences à Gatineau, à Salaberry-de-Valleyfield, à Saint-Eustache, à Senneterre. On voit des gens qui sont obligés d'aller accoucher en Ontario parce qu'ils n'ont pas de soins au Témiscamingue, M. le Président. On voit des parents qui sont obligés d'amener leurs enfants parcourir des centaines de kilomètres pour obtenir des soins pédiatriques parce qu'ils ne peuvent pas être traités dans leur région, M. le Président.

La semaine dernière, on a vu un ministre de la Santé qui nous a dit être surpris par l'ampleur de la situation, il ne l'avait pas vu venir, mais, sur le terrain, M. le Président, il n'y a personne qui est surpris. Il n'y a personne qui est surpris parce que ça fait des mois qu'ils parlent puis qu'ils veulent être entendus sur les enjeux qu'il y a et qu'il faut trouver des solutions concrètes. Aujourd'hui, ce qu'on a besoin de faire, c'est de ramener les solutions qui émanent du terrain et de faire en sorte que le gouvernement applique ces mesures-là.

Est-ce que, oui ou non, le premier ministre va donner suite à notre proposition de créer une cellule de crise qui va faire en sorte que les solutions qui ont été proposées puissent être mises en application tout de suite?

• (14 h 10) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, on vit, depuis un an et demi, une pandémie qui est mondiale. Ce n'est pas seulement au Québec, là, je parle avec mes homologues des autres provinces, je regarde ce qui se passe aux États-Unis, partout les hôpitaux débordent, partout le personnel est épuisé, quitte les réseaux de la santé. Donc, M. le Président, c'est la même chose qui se passe, actuellement, au Québec.

La cheffe de l'opposition officielle revient avec ses propositions. J'aime bien quand elle fait des propositions, entre autres les propositions de ratios. Ce sont ces propositions-là qui ont été retenues, entre autres, dans la nouvelle convention collective qui a été acceptée par la FIQ, les syndicats. Le problème qu'on a, M. le Président, c'est qu'on peut augmenter les ratios, augmenter le nombre de postes permanents affichés, mais actuellement on n'arrive pas à combler ces postes-là. C'est vrai, là, puis je peux vous dire, je parlais avec mes collègues des autres provinces, tout le monde a le même problème. Mon collègue le ministre de la Santé est en train de préparer un plan pour appliquer plus rapidement la nouvelle convention collective, qui va nous aider, et ajouter aussi des incitatifs financiers pour ramener dans le réseau des infirmières. Mais, M. le Président, je suis ouvert à toutes les suggestions pour trouver des infirmières additionnelles pour le réseau de la santé.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Le premier ministre nous dit : Le ministre est en train de préparer un plan. Le problème, c'est qu'il y a... depuis des mois qu'on est en train de parler des enjeux. Moi, M. le Président, là, je pense au petit Alexis, aujourd'hui. Il a cinq ans. Il ne peut pas marcher, le petit Alexis, parce que ça fait deux ans qu'il attend d'avoir une chirurgie. Puis honnêtement ça vient me chercher, puis je pense que ça vient chercher beaucoup de parents ici, en cette Chambre.

Que répond le premier ministre au petit Alexis? Est-ce que le premier ministre est fier de voir ce qui se passe présentement sur le terrain?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la situation qu'on vit depuis un an et demi, puis en particulier avec cette quatrième vague, qui s'ajoute aux trois premières... Moi aussi, ça vient me chercher, quand on me dit : Dans certains hôpitaux, on n'a pas assez de personnel pour soigner les patients réguliers. Vous l'avez vu, en Alberta ils ont tout reporté les chirurgies qui ne sont pas urgentes.

M. le Président, je le rappelle, on a signé une convention collective. Ça a été difficile de signer cette convention-là. Elle prévoit, entre autres, qu'une fois appliquée il n'y aura plus de temps supplémentaire obligatoire, on n'utilisera plus les agences privées, mais ça prend un certain temps avant d'y arriver.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, vous savez c'est quoi, l'enjeu? C'est que, quand on arrive en amont pour présenter des propositions au premier ministre, il nous dit : Ah! bien, on n'a pas vraiment besoin de ça, mais, quand on arrive au pied du mur, il dit : Ah! bien, finalement, c'est une proposition, peut-être qu'on devrait la considérer, et il est tard. Le projet des ratios, ça fait deux ans qu'il est sur la table. Pourquoi est-ce qu'il n'a pas été mis en application? Aujourd'hui, il est tard. On demande à ce qu'il y ait une cellule de crise mise en place.

Est-ce que, oui ou non, il peut reconnaître que c'est la bonne proposition et qu'on devrait aller de l'avant avec cette proposition?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, M. le Président, c'est une bonne proposition, de dire : On va mettre en place un comité de crise, mais ce comité-là existe déjà. On s'est réunis ce matin, on se réunit encore cet après-midi. Donc, M. le Président, l'équipe, au ministère de la Santé, à la Santé publique... Et puis, quand on a besoin de l'aide de la présidente du Conseil du trésor ou du ministre de l'Emploi, on fait appel à leurs besoins. Mais, M. le Président, moi-même, avec le ministre de la Santé, on est presque jour et nuit là-dedans. Donc, le comité de crise existe déjà, M. le Président. On a mis sur la table des propositions. Le ministre de la Santé est en train d'en discuter...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...avec, entre autres, la présidente de la FIQ, parce qu'il ne faut pas faire ça n'importe comment.

Le Président : Troisième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, le comité de crise, là, ce n'est pas les ministres qui se réunissent entre eux, c'est avoir des gens du terrain qui participent à ce comité-là pour faire émaner les solutions. Ce que j'ai vu la semaine passée, c'est un ministre qui a été surpris. Ce que j'ai vu la semaine passée, M. le Président, c'est un ministre qui ne l'a pas vu venir, c'est un ministre qui nous a dit qu'il fallait avoir des solutions temporaires, pendant qu'un autre ministre nous disait qu'il fallait avoir des solutions permanentes. C'est un premier ministre qui est venu ici, en cette Chambre, et qui a dit une chose et son contraire, M. le Président.

On a besoin d'avoir une cellule de crise qui inclut bien plus que des ministres du gouvernement actuel. Quand est-ce qu'on va passer à l'action?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, au printemps dernier, on pensait que l'été s'en venait, que la situation s'améliorerait, puis partout dans le monde, partout dans le monde, sauf la cheffe de l'opposition officielle, qui, elle, avait vu venir la quatrième vague dès le printemps dernier. M. le Président, je le sais, que c'est une voyante, mais effectivement on a eu cette quatrième vague, qui fait très mal, M. le Président. On a eu un succès avec la campagne de vaccination, on va avoir un succès pour régler les autres problèmes dans le réseau.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Maurice-Richard.

Rupture de services dans certains centres hospitaliers

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Bien, écoutez, M. le Président, peut-être que, nous, ce qu'on souhaiterait, c'est que le ministre, il soit un petit peu plus voyant, un petit peu plus clairvoyant puis un petit peu plus à l'écoute du terrain, parce que, la situation qui est en train de se produire présentement, là, je ne comprends pas qu'on puisse en être surpris quand au printemps il y avait des sit-in dans tous les hôpitaux du Québec avec des infirmières qui hurlaient leur détresse, leur souffrance, qui disaient qu'elles étaient au bout du rouleau et qu'elles ne pourraient plus tenir aussi longtemps dans cette situation-là. Donc, je ne vois pas en quoi, en ce moment, on peut être surpris.

Là, il y a eu des fermetures, dans les dernières semaines, à Valleyfield, à Senneterre, à Gatineau, à Coaticook, à Port-Cartier, à Saint-Eustache, des fermetures d'urgences, des fermetures de soins intensifs, de pédiatrie. Ce n'est pas banal, M. le Président, ce n'est pas mineur.

Moi, cette fin de semaine, j'étais en Montérégie-Ouest, à Soulanges, dans le comté de l'adjointe parlementaire du ministre de la Santé. J'aimerais ça l'entendre me dire ce qu'elle répond à ses citoyens qui, en ce moment, ne peuvent pas se faire soigner ni à Valleyfield ni à Lakeshore, doivent aller en Ontario, à Hawkesbury.

Qu'est-ce que le premier ministre va faire pour répondre à ces citoyens-là?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, je pense que je vais reprendre quelques commentaires du premier ministre, premièrement, sur le fait qu'il faut bien réaliser l'ampleur de la pandémie. Quand on dit, tout à l'heure, que c'est rendu la quatrième vague, ce n'est pas uniquement au Québec qu'on a le problème d'infirmières que l'on vit, là. Prenez juste quelques minutes pour aller voir les nouvelles de ce qui se passe en Ontario, en Colombie-Britannique, en Alberta, aux États-Unis. Tout le monde a les mêmes enjeux. On est rendus à notre quatrième vague, on a épuisé notre personnel de santé. Alors, c'est sûr qu'on n'est pas les seuls, M. le Président, à vivre cet enjeu-là.

Maintenant, ce qu'on a bien dit, puis ce qu'on a fait au cours des derniers mois, c'est qu'on s'est préparés pour être capables, en collaboration avec ma collègue du Trésor, d'arriver avec une convention collective qui tient compte de ce que les infirmières ont besoin pour être capables de travailler dans un meilleur environnement, M. le Président. Donc, maintenant que la convention a été définie, puis je la remercie encore pour le travail qui a été fait, maintenant c'est à nous à faire atterrir ça sur le terrain, et c'est ce qu'on va annoncer jeudi prochain, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je me répète, M. le Président, mais ce qu'on demande au gouvernement, là, ce n'est pas d'être voyant, ce n'est pas d'avoir une boule de cristal, c'est d'être prévoyant. La situation que l'on vit à l'heure actuelle, elle était prévisible, les infirmières vous l'ont dit. Les projets ratios, on les a mis en place en 2017, sous notre gouvernement. Vous avez fait le choix de ne pas les appliquer en 2018, quand vous êtes rentrés au pouvoir. Ça, c'est votre décision.

Et là j'aimerais ça entendre aussi le ministre de l'Abitibi, le ministre responsable de la Foresterie. Qu'est-ce qu'il dit, en ce moment, à ces travailleurs forestiers qui sont inquiets de la fermeture de l'urgence de Senneterre?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, je pense que j'aimerais que les députés de l'opposition, et particulièrement du côté de l'ancien gouvernement libéral, se rappellent combien d'années ils n'ont rien fait pour régler les problèmes qu'on avait déjà quand on est embarqués au gouvernement. Ça, je pense que c'est important de le réaliser, parce que tous les problèmes que l'on a de main-d'oeuvre indépendante, c'est-à-dire des agences de placement, les enjeux que l'on a avec le temps supplémentaire obligatoire, les enjeux qu'on a d'horaires qui sont gérés par les CIUSSS plutôt que d'être faits localement, ce n'est pas nous qui avons fait ça, M. le Président, ce sont... l'inaction libérale, qui a laissé perdurer un système de santé qu'on a pris à la dérive, M. le Président.

Le Président : En terminant.

M. Dubé : Donc, je pense qu'on est en train de travailler dessus, on l'a montré, on va continuer à le faire.

• (14 h 20) •

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Donc, ce que j'entends, c'est que le ministre, il est au courant de la situation depuis le jour 1 de son arrivée au pouvoir. On ne peut pas dire tout et son contraire. Soit il était au courant, soit il ne l'était pas. S'il était au courant, il avait juste à agir, ce qu'il n'a pas fait. Là, en ce moment, en Ontario, là, ils prennent les patients de l'Abitibi, du Témiscamingue, de Soulanges, de Vaudreuil, de Gatineau. Ça, ce n'est pas une situation qui est normale, ce n'est pas une situation qui est acceptable et ce n'est certainement pas une situation dont le premier ministre devrait être fier, à l'heure actuelle, quand je l'entends parler de son grand nationalisme et de sa fierté d'être Québécois.

Est-ce qu'ils vont prendre la main qu'on leur tend et mettre en place une cellule de crise pour régler ces problèmes-là?

Le Président : M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je pense, M. le Président, qu'on a montré, depuis le début de la pandémie, qu'on pouvait réagir, qu'on pouvait adopter les meilleures pratiques de gestion, d'avoir des équipes tactiques sur certains sujets. On l'a montré avec la vaccination, on l'a montré avec un plan de deuxième vague, qui a été exemplaire, M. le Président. On est sur le terrain, on choisit les équipes qu'il faut faire. Une autre cellule de crise, une autre structure à la libérale, ce n'est pas comme ça qu'on va régler nos problèmes, M. le Président. On va continuer d'être sur le terrain. On discute avec nos P.D.G. tous les jours, toutes les semaines pour être sûrs que les solutions qu'on met en pratique... Je pense qu'on a montré à la population qu'on est capables d'être les meilleurs gestionnaires au niveau de la pandémie, et on va continuer à le faire, M. le Président. Merci.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Manifestations de militants antivaccin aux
abords des écoles
et des hôpitaux

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : M. le Président, il n'y a rien de plus beau que d'entendre le rire des enfants qui lézarde les murs d'une école. Mais dernièrement des antivaccins ont décidé de troubler la paix et la quiétude des élèves : 1er septembre, école primaire Notre-Dame; 9 septembre, école secondaire Louis-Riel; 10 septembre, école secondaire Louis-Joseph; 14 septembre, école secondaire Robert-Gravel; et aujourd'hui, 21 septembre, l'école Henri-Bourassa. J'ai vu des antivaccins invectiver des enfants, des mineurs. Ils sont allés jusqu'à les filmer, en violation de leur droit à la vie privée.

Aujourd'hui, j'ai vraiment deux demandes et je sollicite vraiment toute votre attention. Vous avez le pouvoir de demander une injonction dès lors qu'une manifestation est annoncée sur les réseaux sociaux. Faites-le avant que ça dégénère.

Deuxième affaire, j'ai préparé un petit projet de loi pour empêcher toute manifestation antivaccin, anti-mesures sanitaires aux abords des écoles primaires et secondaires.

Le Président : Alors, M. le leader du gouvernement, ministre de la Justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Les manifestations autour des écoles, autour des hôpitaux par les antivaccins sont complètement inacceptables. On l'a dit, on l'a dénoncé, M. le Président. Il faut que les enfants qui vont à l'école pour s'instruire puissent le faire dans un lieu exempt de cette influence néfaste. Les enfants n'ont rien demandé, M. le Président, ils sont là pour apprendre. Et on a été une des seules juridictions, M. le Président, à maintenir les écoles ouvertes durant la pandémie le plus possible, justement pour la santé mentale des jeunes, justement pour faire en sorte qu'ils puissent maintenir un environnement social, parce qu'on sait à quel point ça a été difficile, la pandémie. Il y a beaucoup de gens qui se sont isolés. Mais l'école, c'est le coeur, c'est le foyer, lorsqu'on est un enfant, lorsqu'on est un adolescent, de faire en sorte de pouvoir continuer de s'épanouir, et on veut maintenir ça. Alors, ces comportements-là sont intolérables.

On est en train, présentement, M. le Président, d'analyser toutes les options pour faire cesser ce genre de comportements, qui sont complètement inadmissibles dans notre société. Il faut être clairs, M. le Président, les gens ont le droit de manifester, ont le droit d'être en désaccord avec les mesures qui sont mises en place pour protéger la santé de la population, mais ça ne va pas se faire sur le dos des enfants...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...et surtout pas des soignants, M. le Président. Alors, on est très clairs, très fermes. On regarde toutes les options, présentement.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : On est tous d'accord, ici, on est 125 qui sommes d'accord. Mais on ne peut plus simplement tweeter notre indignation, on doit passer à l'action. C'est la cinquième manifestation. On peut aller demander une injonction au tribunal. C'est à ça que je vous demande de vous engager aujourd'hui.

Le projet de loi, j'ai eu le temps de l'écrire. Je vous le donne. Pour qui? Pour les enfants. Prenez-le. Je suis prête à travailler ce soir, cette nuit, demain. On doit protéger les enfants avant que ça dégénère.

Le Président : Je vais vous demander de vous adresser, évidemment, toujours à la présidence, hein, la règle que l'on connaît bien. M. le ministre de la Justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, toutes les options sont sur la table, présentement. Et, je tiens à rassurer la population, les corps de police sont disponibles pour vérifier, pour s'assurer que tout se fasse de façon sécuritaire, M. le Président. Et, comme je l'ai dit, M. le Président, les gens ont le droit de manifester, mais pas à proximité des écoles, pas à proximité des hôpitaux. Les gens, nos travailleurs de la santé, M. le Président, qui se lèvent à tous les matins pour maintenir le réseau de santé, pour s'assurer de soigner les gens, M. le Président, ils doivent le faire en toute quiétude. Même chose pour les enfants.

Alors, M. le Président, au cours des prochains jours, le gouvernement prendra des décisions relativement à ces différents événements.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Une chose qui est sûre, la sécurité de la population, la sécurité des enfants et des usagers est assurée.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Les enfants, nos mineurs, n'ont pas à subir les remontrances des antivaccins. J'appelle le premier ministre à s'engager aujourd'hui à dire, oui, qu'il va tenter d'obtenir une injonction dès lors qu'une manifestation est annoncée. Il a les pouvoirs de le faire.

Deuxièmement, il est là, le projet de loi. Je vous l'ai envoyé par courriel. Prenez-le. Je suis prête à travailler avec vous, on est tous prêts à travailler avec vous, peu importe l'heure de la journée. Mais on ne pourra pas attendre avant que ça dégénère.

Le Président : M. le ministre de la Justice.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, je le réitère, ces manifestations-là sont complètement inadmissibles à proximité des lieux où les enfants vont à l'école, même chose pour les soignants également.

Alors, M. le Président, les services de police sont là pour encadrer le tout, présentement, M. le Président, et le gouvernement regarde toutes les options qui sont sur la table. Et je prends bonne note de la proposition de la députée de Saint-Laurent d'adopter un projet de loi particulier relativement à ces événements-là.

Également, juste vous dire, M. le Président, que l'ensemble des services de sécurité sont disponibles et que le tout est vérifié pour assurer la sécurité des enfants, assurer la sécurité du personnel, des soignants.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je peux vous assurer qu'on est extrêmement vigilants à ce niveau-là.

Le Président : Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

Position du premier ministre concernant le fédéralisme

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : M. le Président, plusieurs analystes jugent, ce matin, que le premier ministre du Québec est le grand perdant des élections fédérales d'hier soir. Évidemment, le premier ministre est sûrement le dernier surpris face à sa défaite. Après tout, son fédéralisme n'offrait aux Québécoises et aux Québécois que la moins pire des options. Ce n'est pas exactement ce qu'on appelle un plan de match gagnant.

Et, pour ajouter l'insulte à l'injure, il y a le député libéral fédéral de Louis-Hébert, Joël Lightbound, qui a dit ceci, et je cite : «[Le premier ministre du Québec] a le droit à ses valeurs de droite conservatrice, les Québécois ont rejeté ces valeurs de droite conservatrice ce soir.»

En fait, si le Bloc québécois n'existait pas, les fédéralistes auraient beau jeu de se targuer et de dire que les Québécois acceptent l'ingérence du fédéral dans les normes pour les CHSLD, par exemple, ou les Québécois acceptent la mise en tutelle du gouvernement du Québec en laissant le pouvoir de dépenser fédéral abuser. Mais, non, il y a une autre voie, et cette voie-là, pour éviter de se faire dicter nos décisions par le fédéral, c'est, bien entendu, l'indépendance.

M. le Président, est-ce que le premier ministre admet que son fédéralisme mène le Québec dans l'impasse, dans un cul-de-sac? Est-ce qu'il admet qu'aucun des scénarios possibles, hier soir, ne permettait au Québec de sortir gagnant de l'élection fédérale?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, j'ai eu l'occasion de le dire tantôt, ce qu'on voit avec l'élection d'hier soir, c'est un autre gouvernement minoritaire. C'est la confirmation que les partis ne peuvent pas, à Ottawa, avoir un gouvernement majoritaire sans un plus grand appui des Québécois.

M. le Président, je ne suis pas d'accord, évidemment, avec ce que M. Lightbound a dit. Notre parti, c'est un parti nationaliste, pragmatique. Donc, on a investi de façon historique du côté de l'éducation. Hier, on a fait une entente historique avec New York qui va nous permettre de retirer l'équivalent de 1 million d'autos. Il n'y a jamais personne ici, là, qui en fait autant pour l'environnement. La santé, c'est la même chose.

Des voix : ...

M. Legault : Non, mais donnez-moi un exemple, là.

Donc, M. le Président, la solution du Parti québécois, c'est de faire un référendum sur la souveraineté, c'est leur proposition. Nous, on pense qu'avec l'appui des Québécois, qui veulent plus d'autonomie, on est capables, on va y arriver avec Ottawa.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : M. le Président, peut-être que s'entendre avec les États-Unis pour vendre de l'électricité, ça devrait donner l'idée au premier ministre qu'on pourrait s'entendre sur plein d'autres choses et parler en notre propre nom sur la scène internationale. Mais non. Depuis trois ans, le gouvernement doit plier les genoux, se tourner vers Justin Trudeau, qui ferme la porte à chacune de nos revendications : pas de pouvoirs accrus en immigration, pas de rapport d'impôt unique, pas de transfert de points d'impôt et, pire encore, multiplication des empiètements du fédéral dans nos champs de compétence.

Après avoir brûlé les ponts, qu'est-ce qu'il entend faire, le premier ministre?

• (14 h 30) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je rappelle la même chose que j'ai dite au chef parlementaire du troisième groupe d'opposition la semaine dernière. Depuis trois ans, malgré les demandes de conditions, du côté du gouvernement fédéral, on a réussi à signer des ententes sans condition sur le logement social, sur les services de garde, sur la formation de la main-d'oeuvre, sur le transport en commun, sur l'aéronautique, sur Internet haute vitesse, sur les demandeurs d'asile, sur la gestion de l'offre, sur la lutte à l'itinérance, sur la relance sécuritaire.

Donc, M. le Président, je pourrais continuer.

Le Président : En terminant.

M. Legault : On a réussi, avec l'appui des Québécois, à faire des gains. On va continuer à en faire.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : M. le Président, le premier ministre se vante ici de conclure des ententes administratives à Ottawa, mais pourtant le premier ministre avait mis sa tête sur le billot pour obtenir des vrais pouvoirs, des vrais changements constitutionnels. Le plan de la CAQ, il est perdant pour les Québécoises et les Québécois. Le plan stratégique du gouvernement dans ses relations avec le Canada, c'est toujours celui de Jean-Marc Fournier : Québécois, notre façon d'être Canadiens.

Le fédéralisme du premier ministre, M. le Président, c'est celui de Philippe Couillard, et il ne mène nulle part.

Le Président : M. le premier ministre, à vous la parole. S'il vous plaît! Tous attentifs. S'il vous plaît!

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, la majorité des Québécois ont voté bleu, O.K.? Je sais que ce n'est pas le cas des libéraux et leurs petits amis au Parti libéral du Canada, mais la majorité des Québécois ont voté bleu. La majorité des Québécois sont d'accord pour que le Québec ait plus d'autonomie à l'intérieur du Canada. Ça, c'est notre position. Vous, c'est un référendum sur la souveraineté. Laissons les Québécois choisir.

Le Président : Et on continue toujours à s'adresser à la présidence. M. le député de Jean-Lesage.

Nationalisation des centres d'hébergement
et de soins de longue durée privés

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, M. le Président. Après deux semaines d'enquête sur la tragédie du CHSLD Herron, ce qu'on a entendu, on peut dire, c'est profondément choquant et ça soulève des questions importantes. Pourquoi est-ce que le manque de personnel était jusqu'à 20 fois pire au Herron qu'au public? La différence entre les 140 employés qu'ils étaient censés avoir puis les 80 employés qu'ils avaient, cette différence-là allait dans les poches de qui?

Ce qui s'est passé, là, ce n'est pas juste une erreur de communication, il y avait un propriétaire en haut qui voulait continuer à empocher des chèques de 10 000 $ par mois sans prendre les responsabilités qui allaient avec.

Évidemment, il y a les bons propriétaires, mais, comme on le voit, manifestement il y en a d'exécrables. Puis, dans notre système, bien, c'est le profit qui gouverne puis les aînés qui paient. Le système, il est complètement pourri.

Est-ce que la ministre des Aînés va avoir le courage de le démanteler et de nationaliser les CHSLD?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Je suis d'accord avec le député. Je lui ai déjà dit, d'ailleurs, lors de l'étude des crédits.

Revenons au CHSLD Herron. C'est une page triste de notre histoire, c'est une page noire de notre histoire. C'est tout à fait une histoire d'horreur. Et je tiens à dire aux familles qui ont perdu des aînés dans ces conditions-là combien c'est triste et inacceptable et qu'on ne veut plus que ça se reproduise.

Maintenant, j'ai déposé un projet de loi pour contrer la maltraitance, et dans ce projet de loi là, entre autres, il y a un levier pour permettre aux établissements d'arriver plus tôt dans les établissements privés. Ça, il y a eu une grande difficulté pour que l'établissement, le CIUSSS de l'Ouest-de-l'Île-de-Montréal, puisse obtenir les dossiers, puisse entrer dans le CHSLD et prendre ce CHSLD là en main.

L'ex-ministre de la Santé a fait faire une enquête au mois d'avril, et il y a eu des recommandations. Et, ces recommandations-là, on est tous en train de les mettre en place. Entre autres, on est en train de conventionner les CHSLD. Et je remercie le Trésor, parce qu'il y a un moratoire depuis les années 80, ce n'est pas si simple que ça, mais, d'ici le mois d'octobre, on va arriver avec de bonnes nouvelles.

Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : Alors, oui, on va conventionner les CHSLD privés.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Quand j'entends qu'il n'y a aucune accusation criminelle qui va être portée contre les propriétaires de Herron, ça me met en furie.

Est-ce qu'il y a une justice, au Québec, pour les aînés ou est-ce que tout le monde peut les exploiter puis siphonner leur retraite pour se faire du profit? Qui c'est qui va payer pour ça?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : M. le Président, si on ne voulait pas aider les aînés, on ne serait pas en train de développer des maisons des aînés qui seront publiques. On ne serait pas en train de dire qu'on va rénover 23 CHSLD publiquement. On ne serait pas en train de dire qu'on va conventionner les CHSLD pour faire en sorte que les employés des CHSLD privés qui seront conventionnés puissent avoir un salaire assez équivalent aux salaires du privé. On ne serait pas en train de faire ça. On en a conventionné, des CHSLD, on va arriver au mois d'octobre avec de bonnes nouvelles, mais ça prend du temps parce qu'il faut ajuster les choses.

Oui, on veut s'en aller avec le public...

Le Président : En terminant.

Mme Blais (Prévost) : ...sinon la décision des maisons des aînés aurait été privé, et c'est public.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Moi, je pense, en ce moment, aux propriétaires du CHSLD privé Herron puis je me dis qu'ils doivent trouver ça pas pire, ils doivent se frotter les mains avec leurs millions, ils doivent se dire que, finalement, ils ont bien fait, parce qu'ils vont s'en tirer.

C'est-u ça qu'on doit comprendre?

Le Président : Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Vous savez qu'il y a actuellement une enquête qui est faite par la coroner Géhane Kamel, et elle n'est pas terminée. Il faut aussi la laisser terminer. Elle va nous donner aussi des recommandations à appliquer.

Maintenant, la semaine prochaine, on commence une consultation sur un projet de loi sur la maltraitance où il y aura aussi des sanctions pénales. Alors, je pense qu'il faut regarder ça dans l'ensemble.

Puis il faut être sévères envers les personnes qui ne respectent pas les droits de nos personnes aînées. Les aînés ont le droit d'avoir le respect, de vieillir dans la dignité et d'obtenir des soins de qualité.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Verdun.

Stratégie du gouvernement en matière de lutte
contre les changements climatiques

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : M. le Président, les scientifiques sont unanimes, il y a urgence d'agir, donc, en matière de lutte aux changements climatiques. Les Québécois sont inquiets et constatent l'inaction du gouvernement caquiste. C'est pourquoi notre cheffe a fait des propositions concrètes et audacieuses pour accélérer le virage vert du Québec : d'abord, renoncer à toute forme d'exploration et d'exploitation du pétrole et du gaz naturel au Québec, retirer la Caisse de dépôt et placement de l'industrie des énergies fossiles d'ici cinq ans et déposer un projet de loi pour atteindre la carboneutralité en 2050.

La planète et les générations à venir n'ont plus le temps d'attendre. Le temps n'est plus aux mesurettes de transition. Ça prend des actions concrètes, ça prend des actions ciblées.

Est-ce que le gouvernement s'engage à retirer la Caisse de dépôt et placement des énergies fossiles d'ici cinq ans, oui ou non?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Merci pour la question. Alors, la lutte aux changements climatiques, c'est, évidemment, extrêmement important, et la Caisse de dépôt faire preuve de leadership en investissements responsables. Elle est déjà en action avec l'augmentation des actifs sobres en carbone, avec la réduction de l'intensité du portefeuille intensif en énergie, avec la diminution en dollars absolus des investissements. Alors donc, il n'est pas souhaitable de politiser le débat, de nuire à l'indépendance de la caisse et son rôle de fiduciaire.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Verdun. Tous attentifs aux questions et réponses, s'il vous plaît.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Ça prend de l'ambition pour l'environnement, et ce n'est pas ce que j'entends actuellement.

Le premier ministre aime ça quand on fait des propositions. On en a une autre, proposition. Est-ce que le gouvernement compte renoncer à toutes les formes d'exploration, d'exploitation du pétrole et du gaz naturel au Québec, oui ou non?

Le Président : M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui. Merci, M. le Président. Naturellement, là, ça ressemble beaucoup à la question de la semaine dernière, donc je vais avoir la réponse qui ressemble à la réponse de la semaine dernière. Essentiellement...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Julien : Essentiellement, au Québec actuellement, M. le Président, vous n'êtes pas sans le savoir, sinon je vous l'apprends, qu'il n'y a pas de projet d'exploration, qu'il n'y a pas de projet d'exploitation de gaz d'aucune façon au Québec actuellement. On applique une loi qui a été adoptée en septembre 2018, avec un règlement sous-jacent, qui définit clairement dans quelles conditions ça pourrait se faire. On défend cette loi-là. Et naturellement, actuellement, on regarde toutes les possibilités pour la renforcer, parce qu'en justice elle est attaquée. Et, le cas échéant, on sera là pour veiller à la protection de l'environnement.

• (14 h 40) •

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Verdun.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Manque d'ambition. Le bilan de la CAQ, là, c'est plus de routes, plus d'autoroutes, moins de transport en commun, abolition de Transition énergétique Québec, abandon des cibles de réduction des GES, abandon du Comité-conseil sur les changements climatiques. Si on avait écouté la CAQ, là, on aurait foré à Anticosti. D'ailleurs, le ministre l'a reconnu au micro d'Antoine Robitaille, il nous a donné raison. Il a dit qu'ils manquaient de vision, du côté de la CAQ.

Est-ce que le gouvernement s'engage à atteindre la carboneutralité en 2050?

Le Président : M. le ministre responsable des Affaires autochtones.

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Merci à ma collègue pour sa question. Et, quand on parle de retirer un million de véhicules de la circulation, je n'appelle pas ça une mesurette, j'appelle ça une mesure qui est vraiment intéressante. Et, je vous dirais, M. le Président, ce qu'il y a de bien là-dedans, c'est un bel exemple concret qu'on veut avancer nation à nation. On ne se met pas en opposition avec l'environnement. Et hier ce qu'on a vu, c'est une grande cheffe mohawk qui était très heureuse de cette annonce, une annonce qui est bonne pour l'environnement. Et aujourd'hui, M. le Président, je suis très fier de me lever dans cette Chambre pour dire qu'on travaille pour l'environnement. Merci, M. le Président.

Le Président : Question principale...

Des voix : ...

Le Président : Question principale, M. le député de Matane-Matapédia.

Projet de loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : On perd l'habitude, hein?

M. le Président, aujourd'hui, la situation de la langue française au Québec est à un point critique, particulièrement à Montréal mais aussi dans ses couronnes. Le français devient peu à peu une langue seconde. Le poids démographique des francophones n'est jamais descendu sous 80 % depuis 1871; on est à 78 %.

Alors que le Québec a besoin de mesures fortes et courageuses, le projet de loi n° 96 ne fournit aucun objectif à atteindre concernant les transferts linguistiques et sur le renversement du déclin. Le ministre l'a mentionné, le projet de loi n° 96, il est consensuel. Ce qui serait souhaitable, c'est de poser les gestes nécessaires pour renverser le déclin.

Comment le ministre peut-il prétendre que son projet va assez loin et qu'il renversera la tendance lorsque les cégeps ne sont pas appliqués à la loi 101, le français à l'embauche n'est pas interdit... l'anglais à l'embauche, et l'immigration francophone n'est pas une priorité?

Le Président : M. le ministre responsable de la Langue française.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je suis heureux, avec le projet de loi, d'avoir éveillé ou réveillé le Parti québécois, M. le Président, parce que durant des années, M. le Président, à l'époque où ils étaient au pouvoir, ils avaient la possibilité de protéger, de promouvoir et de valoriser la langue française, ce qu'ils n'ont pas fait, M. le Président.

Par la suite, vous avez eu le Parti libéral, M. le Président, qui ne voulait absolument pas toucher au dossier de la langue française, il ne voulait pas mettre les mesures nécessaires, malgré le déclin du français, M. le Président. Et savez-vous le plus grave là-dedans, M. le Président? Du côté du Parti libéral, durant des années au pouvoir, ils ont caché les études de l'Office québécois de la langue française, M. le Président.

Le Président : Je vais vous demander, évidemment... Je pense que vous avez assez d'expérience et que vous connaissez les règles dans cet élément-là, M. le ministre responsable de la Langue française. Je vous demande de retirer ces propos, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je retire. Le Parti libéral a refusé de rendre publiques des études. Ma collègue la ministre de la Culture, dès 2018, a rendu publiques des études que ça faisait sept ans qu'elles n'étaient pas disponibles, M. le Président, puis elles traînaient dans les cartons de l'OQLF, M. le Président. Comment est-ce que vous appelez ça? Je me pose la question.

Mais, une chose qui est sûre, avec le projet de loi n° 96, M. le Président, on va s'assurer de faire en sorte de protéger le français, M. le Président, de faire en sorte que la langue française soit valorisée. Et surtout on fait un bond en avant, M. le Président, pour qu'au Québec...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...la langue officielle et commune, ce soit le français, et qu'on puisse continuer de vivre en français au Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Matane-Matapédia.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, jamais un parti, dans l'histoire du Québec, n'a été aussi courageux sur la langue que le Parti québécois, les oeuvres en témoignent. Lorsqu'il y a eu le projet de loi n° 14 du gouvernement Marois, la CAQ était contre parce que ça allait trop loin. Pour nous, c'est une conviction sincère, ce n'est pas un dossier comme les autres, ce n'est pas un calcul politique pour avoir l'air nationalistes.

Alors, si le leader de l'opposition et ministre veut se comparer à Camille Laurin, qu'il fasse preuve du même courage. Il n'essayait pas de convaincre les libéraux, il essayait de poser les gestes nécessaires à l'avenir de la nation québécoise.

Le Président : M. le ministre responsable de la Langue française.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il n'y a qu'un seul parti qui propose d'inscrire l'existence de la nation québécoise dans la Loi constitutionnelle de 1867, d'inscrire notre caractère francophone. Durant des années, M. le Président, on a demandé la permission aux autres de dire qui on était. Nous, on ne demande pas la permission à personne, on dit qui on est, M. le Président, sans complexe.

Et, le projet de loi n° 96, on débute l'étude aujourd'hui, en commission parlementaire, en entendant les différents groupes. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse travailler en collaboration, ensemble, et non pas en division, M. le Président, pour faire en sorte d'améliorer la protection associée à la langue française. Il va falloir, au cours des prochaines semaines, M. le Président, travailler sérieusement pour mieux protéger notre langue et faire en sorte qu'elle puisse, dans le futur...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Matane-Matapédia.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, si on est sérieux dans cet enjeu, on n'a pas besoin d'avoir à tout prix l'appui du Parti libéral du Québec, qui a voté contre la loi 101 en 1977, du Parti libéral du Canada, du Parti conservateur et de tous les lobbys anglophones. On pose des gestes courageux et difficiles parce que c'est important. Et c'est ça que j'aimerais voir. Et, si vous voulez vous comparer à Camille Laurin, on veut voir les oeuvres.

Le Président : M. le ministre responsable de la Langue française.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je trouve ça ironique. Savez-vous pourquoi? Le Parti québécois, en 2002, a adopté la loi n° 104, l'article 1, pour que les communications de l'État québécois se fassent exclusivement en français avec les entreprises. Le PQ a été au pouvoir durant ces années-là, entre 2013 et 2014, ils ne l'ont pas fait. Qu'est-ce que j'ai fait cette année, M. le Président? J'ai pris le décret pour le mettre en vigueur, M. le Président. Ça faisait 20 ans que ça n'avait pas été fait, M. le Président.

Alors, le député de Matane-Matapédia peut bien donner des leçons, mais nous, on agit, M. le Président. À partir du moment où il y a un enjeu, la situation du français est en déclin, particulièrement dans la grande région métropolitaine de Montréal, il faut agir. Et on agit grâce au projet de loi n° 96, M. le Président, sur la langue du travail, la langue du commerce, la langue des affaires, la langue normale des études. Et j'espère bien qu'il va nous aider, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.

Accès aux services en santé mentale

M. David Birnbaum

M.  Birnbaum : M. le Président, personne n'est à l'abri des problèmes de santé mentale. Comme beaucoup de Québécois, nous avons suivi l'histoire du joueur de hockey Jonathan Drouin. Jeune, en santé, talentueux et populaire, qui pouvait se douter que derrière la façade se trouvaient l'anxiété et l'insomnie? C'est la preuve que cela peut arriver à tout le monde. D'ailleurs, je me joins sûrement aux membres de cette Assemblée en saluant le courage et la détermination de Jonathan Drouin.

Heureusement, M. Drouin nous apprend qu'il a eu accès aux services dont il avait besoin pour s'en sortir et il est de retour au travail. C'est la bonne nouvelle. Mais, pour les autres Québécois qui ont des troubles de santé mentale, est-ce normal qu'ils ne reçoivent souvent qu'un appel de courtoisie, qu'ils doivent attendre deux ans pour consulter un psychologue, deux ans pour recevoir des soins nécessaires pour s'en sortir, reprendre une vie normale?

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Bien, merci beaucoup, M. le Président. Heureux de me lever pour la première fois cette année. Alors, merci à mon collègue de D'Arcy-McGee.

Alors, j'aimerais qu'il se souvienne d'un chiffre, aujourd'hui, M. le Président. On a regardé les données du programme que je vous parle, là, le Programme québécois pour les troubles mentaux, programme qui inclut l'interdisciplinarité, que tout le monde est impliqué dans les services de santé mentale. Dans les cinq régions pilotes, M. le Président, entre août 2019 et août 2021, malgré l'augmentation liée à la pandémie, la diminution des listes d'attente a été de 53 %, dans ces régions, M. le Président.

Alors là, je travaille très fort pour répandre le programme à travers le Québec. Et j'ai fait le tour des régions pendant cet été, M. le Président, et je peux vous dire une chose : il n'y a personne qui attend deux ans tout seul à la maison. Même les listes d'attente en services spécialisés, les gens sont pris en charge par les équipes de soins du Programme québécois pour les troubles mentaux, M. le Président. Il y a de l'accompagnement qui se fait. Et, les gens, au Québec actuellement, les services en santé mentale, n'ont jamais été aussi efficaces : un coup de téléphone, 8-1-1, Info-Social, option 2, vous avez de l'aide. Équipe de crise, services d'urgence, consultations téléphoniques, consultations en personne, M. le Président, on est au rendez-vous.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M.  Birnbaum : Bon, est-ce que... Ils vont se rappeler de quelques chiffres, oui, quelques chiffres : 250 000 personnes au Québec n'ont pas les moyens de consulter au privé, 250 000 personnes au Québec doivent attendre deux ans pour consulter au public.

Soyons réels. Au Parti libéral du Québec, nous avons proposé d'investir 300 millions de dollars pour que ces personnes puissent consulter au privé avec leur carte-soleil. Le ministre n'a investi, d'autres chiffres, que 7 millions de dollars au bénéfice de quelque 300 personnes sur...

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, à vous la parole.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, M. le Président. Bien, je vais mettre à jour les chiffres, là, c'est 1 200 personnes qui ont été référées vers le privé. Mais même au privé il n'y a pas de place, ils sont occupés, M. le Président. Il faut trouver d'autres solutions pour améliorer l'accès aux services en santé, et c'est l'interdisciplinarité, l'utilisation des infirmières, des ergothérapeutes, des psychoéducateurs, pas juste le psychologue et le psychiatre. Donc, encore une fois, j'invite à utiliser toutes les ressources qui sont disponibles.

Aussi, c'est important de dire que le but du programme, c'est de justement libérer le chemin vers le psychologue pour que celui qui en a besoin absolument, dépression chronique, troubles de l'humeur, puisse avoir accès directement au psychologue dans les plus brefs délais.

Le Président : En terminant.

M. Carmant : Et c'est vers ça qu'on travaille, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. David Birnbaum

M.  Birnbaum : Vers ça. Vers ça. Maintenant, nous sommes dans une crise de santé mentale. Troubles dépressifs ou troubles anxieux, oui, deux ans d'attente. Troubles obsessifs ou bipolaires, deux ans pour voir un psychiatre. Fillette de trois ans abusée sexuellement, deux ans pour avoir une place à Marie-Vincent.

Après trois ans en poste, le ministre est-il satisfait de ce bilan-ci?

• (14 h 50) •

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : M. le Président, tout le monde a accès à des services actuellement. Ça, c'est déjà un grand plus. Maintenant, si on veut avoir des services ultraspécialisés, il faut que ces gens qui donnent ces services ultraspécialisés n'aient pas à faire tout le reste, M. le Président. C'est le principe de base de notre programme. Donc, il faut libérer le temps des psychiatres, il faut libérer le temps des psychologues spécialisés, qui voient tous les problèmes.

Et, la détresse psychologique, le problème de santé mentale n'égale pas troubles mentaux. Puis ça, c'est une des choses qu'on doit retenir de cette pandémie. C'est deux choses différentes. Les problèmes de santé mentale doivent être pris en charge en première ligne...

Le Président : En terminant.

M. Carmant : ...par les équipes qu'on est en train de bâtir pour libérer la deuxième ligne. Merci, M. le Président.

Le Président : Question principale, M. le député de LaFontaine.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! On est attentifs aux questions. Merci.

Pénurie de main-d'oeuvre dans les services de garde

M. Marc Tanguay

M.  Tanguay : Alors, M. le Président, nous connaissons tous la crise dans les services de garde. 51 000 familles sont inscrites sur la liste. D'avoir une place en service de garde, en 2021, c'est presque mission impossible. Mais, même là, lorsqu'une famille gagne à la loterie et a une place, il n'y a aucune garantie qu'elle pourra avoir accès aux services tel qu'il se doit. Une nouvelle réalité apparaît désormais dans nos services de garde, c'est la rupture de services, et le premier critère, le premier facteur, c'est la pénurie d'éducatrices.

Radio-Canada, en juin dernier, faisait des reportages et a recueilli le témoignage de Mme Mélissa Tremblay, une maman de Saint-Hyacinthe, et je la cite : «À 7 h 10, le CPE nous a informés que ce serait bien de garder notre enfant à la maison, parce qu'il n'y avait pas suffisamment d'éducatrices présentes pour s'occuper de façon sécuritaire de chacun des groupes.» Fin de la citation.

On a entendu le premier ministre se targuer de... dire qu'il n'était pas voyant. On ne lui demande pas d'être Nostradamus, M. le Président. Il va manquer 13 000 éducatrices en cinq ans. Pourquoi n'en formeront-ils juste 2 400?

Le Président : Mme la ministre de l'Enseignement supérieur.

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Oui, merci, M. le Président. Écoutez, M. le Président, ça me fait plaisir de répondre à la question, pour la première fois, moi aussi, cette session-ci, pour mon collègue ministre de la Famille, d'autant plus que le sujet, là, des services en milieu de garde, pour moi c'est archi-important, pour les femmes et pour toute la société québécoise.

Donc, comme ministre de l'Enseignement supérieur, j'ai aussi un rôle important à jouer, parce qu'au niveau de l'Enseignement supérieur nous formons les éducatrices en milieu de garde. M. le Président, nous travaillons d'arrache-pied, actuellement, avec le ministre du Travail et de l'Emploi, avec le ministre de la Famille, avec mon équipe pour former davantage d'éducatrices en milieu familial.

Le ministre de la Famille a déjà annoncé un budget de 64 millions pour aider les CPE et les garderies à faire face à la pénurie de main-d'oeuvre et il travaille d'arrache-pied pour mettre en place son plan. Et nous travaillons avec lui, les autres ministres.

Il a aussi ajouté 200 millions de dollars pour aider...

Le Président : En terminant.

Mme McCann : ...les garderies en milieu familial, pour stopper l'hémorragie qu'il y avait à l'époque.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M.  Tanguay : Alors, allons constater le stoppage de l'hémorragie en milieu familial. Le 10 septembre dernier, sur la page Facebook du ministre, le témoigne de Mme Chantal Boucher, je la cite : «Cher M. le ministre, je vous annonce aujourd'hui que je ferme mes portes. Je commençais ma cinquième année en tant qu'éducatrice en milieu familial. Vous n'avez pas pris soin de nous. C'est à cause de vous, aujourd'hui, que six familles doivent se retourner de bord et chercher encore, en sachant pertinemment que les places sont rares.»

Pourquoi abandonner les familles du Québec?

Le Président : Mme la ministre de l'Enseignement supérieur.

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Bien, M. le Président, je pense que les actions qui ont été prises par le ministre de la Famille depuis qu'il est en poste sont extrêmement nombreuses, et il y en aura d'autres. Il va présenter une réforme très costaude de tout le dossier des milieux de garde prochainement.

Alors, M. le Président, je pense qu'on peut dire que le ministre de la Famille n'a pas ménagé son énergie, n'a pas ménagé ses heures de travail pour régler les problèmes dans les services de garde, des problèmes, malheureusement, qu'il a hérités du précédent gouvernement.

Alors, il continue d'y avoir des changements profonds, il y en aura d'autres, dans les services de garde...

Le Président : En terminant.

Mme McCann : ...et nous allons travailler avec lui.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M.  Tanguay : M. le Président, c'est la même chose qu'avec la santé. S'ils disent, M. le Président, puis ils plaident que c'est des problèmes qui ont été négligés, quand ils sont arrivés au pouvoir, il y a trois ans, pourquoi ils n'ont pas déposé leurs solutions? Pourquoi il nous dit qu'à la dernière année, la quatrième année, il va déposer un projet de loi pour y voir?

Pourquoi et comment peut-il expliquer... Elle a parlé du 45 millions, du 65 millions. Ça, ça va en former 2 400 dans trois ans. Il en manque 13 000 dans cinq ans.

Le Président : Mme la ministre déléguée à l'Enseignement supérieur.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Bien, j'attendais la fin, là. Oui. Et on va ouvrir 37 000 nouvelles places en service de garde dans les prochaines années. Alors, il va y avoir beaucoup plus de places en service de garde et il va y avoir beaucoup plus d'éducatrices en service de garde, on va faire des annonces dans ce sens-là. Donc, un problème important qui va être réglé dans le futur prochain, M. le Président.

Le Président : Et cela met donc fin — s'il vous plaît! — à la période de questions et réponses orales.

Motions sans préavis

Nous passons... Je vous demande votre attention, on continue. Nous passons à la rubrique des motions sans préavis, et je reconnais M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve, le député de Bonaventure, le député de Chomedey, la députée de Marie-Victorin et le député de Rimouski, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse les impacts potentiels sur la santé et l'environnement qu'aura dans l'est de Montréal le projet de l'entreprise Ray-Mont Logistiques qui vise à transformer la friche Viauville en plateforme de transbordement de conteneurs, notamment sur le plan de la qualité de l'air, des îlots de chaleur, des vibrations et du bruit;

«Qu'elle rappelle que, selon ce qui est prévu, quelque 10 000 conteneurs pourront être entreposés sur le site, et les résidents du secteur verront y transiter pas moins de 1 000 camions et 100 wagons de train quotidiennement;

«Qu'elle souligne l'importance de l'acceptabilité sociale et de la lutte contre les changements climatiques dans l'élaboration d'un tel projet industriel, prévu à proximité d'un quartier résidentiel et d'un CHSLD;

«En conséquence, que l'Assemblée nationale demande au ministre de l'Environnement de mandater, en vertu de l'article 31.1.1 de la Loi sur la qualité de l'environnement, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement pour évaluer le projet de l'entreprise Ray-Mont Logistiques, et ce, dès le dépôt d'un avis de projet.» Merci.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles.

Souligner la conclusion d'une entente entre l'État de
New York et Hydro-Québec pour la réalisation
du projet Champlain Hudson Power Express

M. Julien : Oui. M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Mont-Royal—Outremont, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, le député de Bonaventure, le député de Rimouski et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que le 20 septembre dernier la gouverneure de l'État de New York a annoncé que le projet Champlain Hudson Power Express — CHPE — d'Hydro-Québec a été retenu pour la livraison d'hydroélectricité au coeur de la ville de New York et qu'il s'agit du plus gros contrat d'exportation d'électricité jamais signé par Hydro-Québec;

«Qu'elle souligne que cet apport de 1 250 mégawatts d'énergie propre alimentera plus d'un million de foyers et remplacera progressivement, dès 2025, les énergies fossiles qui représentent actuellement plus de 85 % des approvisionnements en électricité de la région;

«Qu'elle affirme que cette entente avec New York, c'est d'abord la reconnaissance de l'expertise québécoise dans le domaine des énergies renouvelables et de l'hydroélectricité;

«Qu'elle rappelle que le gouvernement a multiplé les gestes concrets pour rendre possible ce contrat, notamment c'est sous sa gouverne, le 16 octobre 2020, que l'électricité du Québec a été reconnue par l'État de New York comme étant une énergie propre;

«Qu'elle rappelle que le gouvernement travaille depuis près de 3 ans à faire du Québec la batterie verte du nord-est de l'Amérique et que cette nouvelle représente un pas majeur pour la réalisation de cette vision, une contribution importante du Québec pour réduire [les] GES;

«En terminant, que l'Assemblée nationale se réjouisse de ce partenariat historique qui permettra à Hydro-Québec d'être au coeur du plus grand projet de transition énergétique en Amérique.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Je vous demande maintenant de m'indiquer le vote de vos groupes sur cette motion, suivi des députés indépendants. M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?

Mme Labrie : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée d'Iberville?

Mme Samson : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Mme la députée de Verdun, à vous la parole.

• (15 heures) •

Mme Melançon : Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, le député de Jonquière, le député de Chomedey, la députée de Marie-Victorin, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :

«Que l'Assemblée nationale réitère l'importance de mettre en place des mesures fortes et audacieuses afin de lutter contre les changements climatiques;

«Qu'elle constate qu'il existe un consensus scientifique sur l'urgence d'agir afin d'éviter les conséquences graves des changements climatiques comme une augmentation de l'intensité des feux de forêt, des vagues de chaleur, de l'érosion des berges et des tempêtes plus violentes;

«Qu'elle souligne que ces efforts s'accompagnent d'un devoir d'exemplarité de l'État et que le développement économique doit considérer les impacts environnementaux et sociaux [dans] ses décisions;

«Qu'elle ajoute que la Caisse de dépôt et placement du Québec doit refléter les valeurs des Québécoises et des Québécois et que l'argent des Québécois ne doit plus servir à financer des énergies fossiles et notamment l'expansion des sables bitumineux;

«Qu'en conséquence, elle demande à la Caisse de dépôt et placement du Québec de se retirer de l'industrie des énergies fossiles dans un horizon de cinq ans.»

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.

Le Président : Pas de consentement. Mme la députée de Mercier.

Rappeler le droit de travailler en français au Québec et demander aux
employeurs de contribuer davantage à la protection et
à la promotion de la langue française

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la motion suivante conjointement avec le ministre responsable de la Langue française, le député de Matane-Matapédia, le député de Chomedey, la députée de Marie-Victorin, le député de Bonaventure et le député de Rimouski :

«Que l'Assemblée nationale rappelle le droit de travailler en français au Québec;

«Qu'elle rappelle que l'usage de la langue française est un moteur d'émancipation [des] Québécoises et [des] Québécois, en plus de favoriser l'égalité des chances et la justice sociale;

«Que l'Assemblée nationale demande à tous les employeurs du Québec de contribuer davantage à la protection et la promotion de la langue française au travail;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'interdire l'exigence de l'anglais lors de l'embauche, à moins que l'accomplissement de la tâche nécessite une telle connaissance; même alors, l'employeur doit, au préalable, avoir pris tous les moyens raisonnables pour éviter d'imposer une telle exigence.» Merci.

Le Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolin-Barrette : Consentement, sans débat, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Consentement, sans débat. Et, à ce moment-ci, vos votes respectifs, s'il vous plaît. D'abord, Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?

Mme Labrie : Pour.

Le Président : M. le leader du gouvernement?

M. Jolin-Barrette : Pour.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle?

M. Fortin : Pour.

Le Président : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

Le Président : M. le député de Chomedey?

M. Ouellette : Pour.

Le Président : Mme la députée d'Iberville?

Mme Samson : Pour.

Le Président : Cette motion est donc adoptée. Nous passons à la rubrique Avis touchant les travaux des...

Une voix : ...

Le Président : Je m'excuse. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui, simplement une chose. Je veux juste m'assurer, M. le Président, que la députée de Marguerite-Bourgeoys était bien indiquée comme étant conjointe sur cette motion. Merci, M. le Président.

Le Président : Alors, ce sera indiqué au procès-verbal. Merci.

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions. Parole au leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle du Conseil législatif;

La Commission de la culture et de l'éducation poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 3 h 30 min, à la salle Pauline-Marois;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 99, Loi modifiant principalement la Loi sur les produits alimentaires, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, à la salle Marie-Claire-Kirkland;

La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 49, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale et diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 19 h 15, aux salles Louis-Joseph-Papineau et Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci.

Le Président : Merci.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Oui. Merci, M. le Président. Je veux juste intervenir rapidement, là, et avoir l'orientation privilégiée par le leader du gouvernement sur tant le débat sur le principe que les consultations du projet de loi n° 92 qu'il a déposé la semaine dernière.

Évidemment, le projet de loi n° 92, M. le Président, c'est la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale. Le leader du gouvernement nous a demandé, la semaine dernière, de procéder avec le principe du projet de loi dès aujourd'hui. Évidemment, M. le Président, que tout le monde, là, tout le monde convient que ce projet de loi là doit être adopté rapidement, parce que c'est un projet de loi pour lequel il y a des enjeux majeurs, des enjeux de société majeurs. Cependant, on veut faire les choses correctement.

Et, à défaut de les faire dans l'ordre habituel, nous aimerions quand même avoir une confirmation de la part du leader du gouvernement par rapport à la liste de groupes que nous lui avons soumis pour la consultation. Habituellement, on s'entendrait sur ces groupes-là avant le débat sur le principe. Aujourd'hui, puisqu'on inverse les choses, il serait utile pour nous d'avoir une certaine confirmation de la part du leader sur les groupes qu'on lui a soumis. Il y a des groupes très importants qui ont été mentionnés, je fais référence, entre autres, à la question des maisons d'hébergement pour femmes, mais, chacun des groupes qu'on lui a soumis, on l'a fait pour une raison. On l'a fait pour entendre leur expertise, pour entendre leur réalité, pour entendre l'impact que le projet de loi pourrait avoir chez les gens qu'ils représentent.

Alors, j'aimerais une indication claire, avant de débuter le principe, que le leader comprend bien l'importance des demandes qu'on lui a fait parvenir par rapport aux groupes qui doivent être entendus en consultations.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, plusieurs éléments. Je peux rassurer le collègue de l'opposition officielle que je comprends toujours bien les demandes des oppositions. Et d'ailleurs j'ai pris la peine, personnellement, M. le Président, de contacter chacun des leaders des oppositions vendredi pour leur indiquer que je souhaitais faire le principe du projet de loi n° 92, tel que le permet l'article 237 de notre règlement, dès maintenant au salon bleu, parce qu'on avait la possibilité de le faire et dans un souci de faire en sorte de pouvoir adopter rapidement le projet de loi n° 92, qui, je le rappelle, vise la création d'un tribunal spécialisé pour les victimes de violence sexuelle et conjugale. Puisqu'on avait du temps au salon bleu cette semaine, j'ai souhaité qu'on fasse cette étape-là à ce moment-ci.

Et j'ai indiqué aux oppositions que nous allions, oui, bien sûr, tenir des consultations. Et, comme à l'habitude, les collègues nous ont envoyé une liste de groupes. Dans le fond, la collègue de la deuxième opposition ne nous a envoyé qu'un seul groupe, parce qu'elle réalise l'importance d'adopter rapidement ce projet de loi; les autres collègues nous ont envoyé plusieurs autres groupes, M. le Président. Et, comme à l'habitude, on va s'entendre sur une liste de groupes à convoquer, M. le Président, comme c'est toujours le cas, habituellement, M. le Président.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Je n'ai pas beaucoup aimé le sous-entendu du leader du gouvernement lorsqu'il dit que la députée de Québec solidaire a envoyé un seul groupe parce qu'elle réalise l'importance d'adopter le projet de loi rapidement. M. le Président, on ne demande pas grand-chose, là, on demande une quinzaine de groupes. Le Parti québécois a demandé des groupes également. Ces groupes-là, ils doivent être entendus, ce sont des groupes qui vivent la réalité, qui vivent sur... à tous les jours avec des femmes qui sont des femmes battues, des femmes qui ont été victimes de violence sexuelle. M. le Président, d'avoir une quinzaine de groupes, d'avoir deux jours, deux jours, pour un projet de loi majeur, projet de loi qui va créer un tribunal spécialisé, M. le Président, si ça, c'est la vision du leader du gouvernement de retarder des travaux, honnêtement je pense qu'on a besoin de se parler plus souvent, je pense qu'il a besoin, lui-même, de parler à ces groupes-là et que la consultation va lui faire du bien.

Le Président : M. le leader du gouvernement, quelque chose à ajouter?

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président, parce que c'est quand même important, le point dont on débat aujourd'hui. M. le Président, ça ne change pas nos usages et nos pratiques. Normalement, on fait les consultations en premier. Actuellement, on a de l'espace au salon bleu pour adopter le principe. Est-ce que le Parti libéral est contre le principe d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et violence conjugale? Je ne le crois pas, d'accord? Partant de ce moment-là, on ne s'enfargera pas dans les fleurs du tapis, M. le Président.

J'ai dit à tous mes collègues : On va tenir des consultations. De quelle façon ça fonctionne, les consultations, M. le Président? On écrit un courriel aux oppositions, on leur dit : Quels groupes voulez-vous entendre? Ils nous envoient une liste de groupes, M. le Président. Même chose pour la deuxième, la troisième opposition, M. le Président. Par la suite, on fait des propositions et on s'entend ensemble, M. le Président, sur les groupes à convenir. Et c'est ce que nous allons faire cette semaine. Nous avons reçu hier les groupes du Parti libéral, M. le Président.

Alors, il n'y a aucune inquiétude à avoir, M. le Président, on ne s'enfarge pas dans les fleurs du tapis, cette semaine, en début de session. On va réussir à s'entendre, à tenir des consultations. J'ai même déjà indiqué la semaine dans laquelle je souhaitais entendre les groupes, M. le Président, dans la semaine du 19 octobre, dès que ça va être possible de le faire, M. le Président. Alors, il n'y en a pas, là, d'enjeu, M. le Président.

Le Président : Un dernier mot, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Fortin : Sous-entendu malheureux n° 2 de la part du leader du gouvernement. Je comprends qu'on s'est levé de mauvais poil ce matin, du côté du gouvernement, mais, quand même, bien honnêtement, là... La première fois, de dire qu'on tentait de retarder les consultations, c'est une chose. De dire qu'on est contre le principe, alors qu'il sait que tout le monde ici, en cette Chambre, est pour le principe...

M. le Président, tout ce qu'on veut, tout ce qu'on veut, c'est s'assurer que les groupes qui doivent être entendus avant qu'on crée un tribunal spécialisé en la matière puissent l'être. Je demande au leader une certaine attention envers ces groupes-là, qui méritent d'être entendus et qui doivent être entendus.

• (15 h 10) •

Le Président : Je vous ai donc laissé échanger, sur un sujet important, comme le veut le règlement, mais je crois que la suite des échanges se fera à travers vos négociations. Et je vous laisserai donc échanger sur les documents que vous avez reçus et la suite des choses.

Je vous informe, toujours à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. La motion se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale réaffirme qu'aucun projet d'exploitation et de transport d'hydrocarbure n'a obtenu l'acceptabilité sociale au Québec;

«Qu'elle exprime ses inquiétudes de voir l'augmentation de la production pétrolière et gazière de l'Ouest canadien venir miner les efforts mondiaux de lutte contre les changements climatiques;

«Que l'Assemblée nationale exige du nouveau gouvernement canadien qu'il interrompe toute subvention aux entreprises pétrolières et gazières avec l'argent des Québécois et Québécoises.»

Affaires du jour

Sur ce, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour.

Et je suspends les travaux pour quelques instants. Merci à toutes et à tous.

(Suspension de la séance à 15 h 11)

(Reprise à 15 h 20)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et, pour en connaître la nature — vous pouvez vous asseoir, merci — je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Caire : Merci, Mme la Présidente. Pourriez-vous appeler l'article 13 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi n° 64

Reprise du débat sur l'adoption

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 13 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui sur l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Alors, le prochain intervenant sera M. le député de Viau.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Encore un plaisir d'intervenir sur ce projet de loi, donc, sur ce projet de loi, un projet de loi important, puisque, lorsqu'on sait l'importance que prend dans notre société toutes les questions relatives à l'accès aux renseignements personnels, à la protection des renseignements personnels surtout, donc, on comprendra que ce projet de loi n° 64, c'est un projet de loi important. Et, là-dessus, nous l'avions bien compris, nous, du côté l'opposition officielle.

Et je tiens encore une fois... et j'ai eu l'opportunité de le faire il y a quelques jours, je tiens encore à saluer le travail de notre porte-parole dans ce dossier, le député de LaFontaine, donc, qui est un parlementaire studieux, aguerri, mais aussi qui maîtrise très bien ces enjeux-là et qui a fait un travail extraordinaire.

Je tiens aussi à saluer le travail de tous les parlementaires membres de la commission qui ont eu à étudier en étude détaillée, qui ont eu à faire les commissions parlementaires, donc, sur ce projet de loi là. Et je comprends, à la lumière de ce qui m'a été rapporté comme ambiance de travail, que ça a été une ambiance extraordinaire.

Ça a été une ambiance de travail aussi quand on sait que ce projet de loi là, il y a eu quelque 169 amendements, quelque 169 amendements qui ont été apportés, donc. Et ces amendements-là, c'est le fruit d'une collaboration, donc, d'une part, du gouvernement et, d'autre part, aussi de la part de l'opposition officielle.

Et donc ce projet de loi, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels, c'est un projet de loi, Mme la Présidente... Il y a des éléments en particulier sur lesquels je vais peut-être m'attarder, puisque c'est un vaste projet de loi, mais, 10 minutes pour en parler, vous comprendrez que ce ne serait pas suffisant.

Ce projet de loi là, donc, donne la possibilité aux organismes publics et aux entreprises qui utilisent des technologies leur permettant d'identifier, de localiser, de profiler et de prendre... En fait, ce n'est pas le projet de loi, le projet de loi précise, plus, encadre, donc, l'aspect qui touche... Les organismes publics et les entreprises qui utilisent des technologies permettant d'identifier, de localiser, de profiler, de prendre une décision sur un traitement uniquement automatisé devront en informer clairement les personnes, et ça, c'est important. Ça, c'est important parce que, que de fois... Au cours de la dernière année, par exemple, j'ai eu des citoyens même dans ma circonscription qui ont eu à me poser des questions sur l'utilisation qui est faite de certains renseignements qu'on leur demande soit par téléphone, etc., pour savoir quel usage qui est fait de ces informations-là, où est-ce que ces informations-là sont déposées, où est-ce que ces informations-là sont conservées. Donc, alors, ce projet de loi là apporte justement des éléments de réponse dans l'encadrement, encadrement plus important, plus serré. En même temps aussi, les entreprises devront s'assurer que les paramètres de sécurité de leurs produits ou services technologiques assurent par défaut le plus haut niveau de confidentialité possible. Ça aussi, c'est un élément très important.

Octroyant aussi des pouvoirs plus importants à la Commission d'accès à l'information, notamment en matière d'enquête et d'accusation. Il est important pour nous de savoir que l'instance qui sera responsable de veiller à l'application de cette loi, donc, puisse avoir les moyens nécessaires, donc, les moyens légaux nécessaires pour pouvoir, justement, assurer la protection des renseignements personnels. Et ces moyens-là, qu'il s'agit dans le domaine du public ou du privé, ce sont des moyens importants.

Et, parlant du public ou du privé, Mme la Présidente, c'est un projet de loi qui... Il y a trois grands pans, trois grands pans que touche ce projet de loi là : le pan public, le pan privé, et aussi, un troisième pan que j'ajouterai, celui des partis politiques.

Et j'ai eu la chance de le dire, mais je pense qu'il n'est pas inopportun de le rappeler à nouveau, cette avancée importante, qui a été réalisée dans le cadre de ce projet de loi, dans le cadre du travail en commission... Et là-dessus je me dois tout de suite de jeter un coup d'oeil en direction de mon collègue le député de LaFontaine pour saluer, justement, son apport et sa grande contribution, donc, sur le fait de reconnaître la spécificité des activités politiques aussi, et ça, sans minimiser, évidemment, l'apport, dans l'étude détaillée, de toutes les personnes qui ont eu à travailler. Mais je sais, je connais, justement, je connais l'importance de son apport dans le cadre de ce dossier.

On vient rappeler qu'un parti politique n'est pas une entreprise privée comme tant d'autres. Un parti politique, c'est un organe démocratique d'expression de notre liberté et des aspirations des gens qui y adhèrent, et, par conséquent, l'ajout du principe des activités politiques m'apparaît comme étant un apport important, un apport très, très important dans le cadre de ce projet de loi.

Il y a eu des avancements, il y a eu des avancées, que ce soit au niveau du public ou du privé. J'en ai mentionné quelques-uns il y a quelques jours, auparavant, mais il y a d'autres que j'aimerais souligner en termes d'apport, en termes d'avancée, au niveau du public et du privé.

Au niveau du public, donc, il y a cette obligation d'anonymiser des renseignements lors de la conservation, c'est une avancée aussi, et révision des différents pouvoirs de la Commission d'accès à l'information, notamment au niveau des sanctions administratives.

Et aussi, je tiens à le rappeler, quand vient le temps de parler des pouvoirs qu'on donne en matière d'enquête, etc., c'est important aussi de savoir que, dans le secteur privé, il y a cette imputabilité. «L'imputabilité», c'est un mot important, et surtout quand vient le temps de parler de protection des renseignements personnels, de savoir, par exemple, dans une entreprise, qui est imputable, qui est responsable, qui est responsable, donc, parce que la pire des choses qui pourrait arriver, c'est de savoir que, dans une boîte, dans une entreprise, bien, quand vient le temps de mener une enquête, on ne sait pas qui en est le responsable, qui est imputable. Alors, savoir que cette imputabilité-là va à la plus haute instance de la direction, ça, c'est quelque chose d'important.

Au niveau du public, au niveau du public, il y a un amendement qui a été fait aussi, je... Il faut le souligner, cet amendement-là, c'est un amendement qui a été adopté afin que ce soit, justement, la direction générale d'un ordre professionnel qui soit imputable. Et ça, c'est un amendement important. Donc, l'imputabilité.

Un autre amendement important, aussi au niveau du public, qui a été adopté, c'est un amendement exigeant aux organismes de prendre des mesures afin de limiter la réidentification. Une expérience que, peut-être, sûrement plusieurs de mes collègues ici, vous avez déjà vécue ou connue, c'est, chez vous, un soir, après le souper ou avant le souper, vous recevez un appel d'un organisme — toujours de bonne foi, ce sont des organismes de bienfaisance, organismes de charité — qui vous demande des informations, et là vous commencez à donner des informations, et vous vous apercevez que ces organismes-là détenaient déjà des éléments d'information à votre sujet.

Alors, je pense qu'au niveau des organismes philanthropiques, justement, il y a un meilleur encadrement qui permettra, justement, à l'ensemble des Québécoises et des Québécois d'avoir une meilleure prise sur le type d'information, donc, qui est détenue à leur sujet et aussi sur leur capacité et aussi leur possibilité à faire corriger, rectifier ou enlever certaines de ces informations-là. Et ça, c'est quelque chose de très important.

Il y a eu des occasions manquées, mais... Et, les occasions manquées, j'ai eu l'opportunité de les rappeler. Je persiste encore, je persiste encore à croire que... Oui, il y a eu des mémoires déposés, entre autres par la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, mais un sujet aussi important, un sujet aussi important, un projet de loi aussi important comme ce projet de loi là, il aurait été nécessaire... Pour avoir fait d'autres projets de loi, Mme la Présidente, j'ai pu mesurer la différence qu'il y a entre lorsque vous recevez un mémoire... Bien sûr, vous pouvez vous inspirer des mémoires. Il y a des mémoires fort pertinents. Vous pouvez vous inspirer des mémoires, mais, quand vous avez l'opportunité de pouvoir échanger avec un organisme, quand vous avez l'opportunité de pouvoir discuter, de pouvoir partager, de pouvoir questionner, je pense que le travail va beaucoup plus loin. Et, en ce sens-là, je pense qu'il aurait été sage, et le mot «sage» n'est pas trop fort, je crois, dans les circonstances, considérant l'impact d'un tel projet de loi, que la commission des droits de la personne, de la jeunesse soit entendue en commission parlementaire.

Alors, pour terminer, donc, merci à toutes celles et ceux qui ont travaillé sur ce projet de loi, que ce soient les parlementaires, dans un premier temps. Merci aussi aux personnes dont on ne voit pas toujours... on n'entend pas toujours les noms, c'est-à-dire celles et ceux qui ont travaillé en coulisse, que ce soit le personnel du greffier qui ont accompagné, et le personnel des partis politiques aussi, évidemment, et tous les avocats qui ont permis à ce projet de loi là, et nous l'espérons, et nous verrons aux consignes qui seront données, éventuellement à être adopté. Merci, Mme la Présidente.

• (15 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Viau. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, il n'y en a pas.

Et, avant de procéder au vote, je souhaite vous aviser qu'en application de l'ordre spécial j'ai été informée de l'intention de M. le député de Pontiac de ne pas prendre part au vote sur l'adoption de ce projet de loi.

J'invite maintenant les parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modernisant les dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels.

Je constate que l'un des groupes parlementaires n'est pas représenté pour la mise aux voix, alors je vais suspendre nos travaux pour un maximum de 10 minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 31)

(Reprise à 15 h 34)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous reprenons nos travaux.

Mise aux voix

Et j'invite maintenant les parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur l'adoption du projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Mme la ministre déléguée à l'Éducation?

Mme Charest : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de LaFontaine?

M. Tanguay : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du troisième groupe d'opposition?

M. Ouellet : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, Mme la ministre, avez-vous une indication pour le vote des députés indépendants?

Mme Charest : Oui, le vote du député de Chomedey : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Et, en conséquence le projet de loi n° 64, Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels, est adopté.

Mme la ministre, je vous recède la parole.

Mme Charest : Oui, Mme la Présidente. Je vous demande d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Projet de loi n° 92

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : À l'article 3 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 92, Loi visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières. Y a-t-il des interventions? Mme la ministre.

Mme Isabelle Charest

Mme Charest : Oui. Merci, Mme la Présidente. C'est avec beaucoup de fébrilité, d'humilité, de satisfaction que j'interviens aujourd'hui pour l'adoption du principe de ce projet de loi, qui, évidemment, est très important. Et tout de suite, d'entrée de jeu, je souhaite féliciter et remercier mon collègue le ministre de la Justice pour avoir pris ce dossier-là vraiment avec grand intérêt et l'avoir, bien, en fait, mené tellement bien qu'on est là moins d'un an après le dépôt des recommandations, Rebâtir la confiance, du rapport du comité d'experts Rebâtir la confiance, on peut présenter ce projet de loi, qui est, en fait, la pierre angulaire de ce rapport et ses 190 recommandations.

Alors, évidemment, satisfaite, soulagée aussi, parce qu'on sait malheureusement qu'encore aujourd'hui, en 2021, les principales victimes des violences sexuelles, des violences conjugales sont les femmes. Donc, vous comprenez qu'en termes... ou en tant que responsable de la condition féminine, bien, c'est un enjeu qui me préoccupe énormément, mais c'est un dossier, évidemment, qui me touche très fortement.

Je veux aussi faire l'éloge de ce travail d'équipe qui a été si important. Et vous me permettrez de nommer ma prédécesseure dans les fonctions au comité transpartisan, la prédécesseure aussi de mon collègue à la Justice, qui est maintenant présidente du Conseil du trésor, qui a eu, je dirais, l'audace de réunir ensemble plusieurs députés pour faire en sorte, justement, de pouvoir écouter les victimes de violence sexuelle et de violence conjugale, mais pouvoir redonner confiance en ce système de justice pour ces personnes, pour ces femmes qui, malheureusement, en plus d'avoir été victimes d'atrocités, se retrouvaient dans un système où elles n'avaient pas l'impression d'être entendues, d'être écoutées, de pouvoir entamer leur processus de guérison et de réparation.

Alors, bravo à ma collègue qui est maintenant présidente du Conseil du trésor! Bravo aussi aux collègues qui ont apporté leur regard, leur engouement pour le dossier, évidemment, leur rigueur et leur travail, notamment la députée de Joliette, la députée de Marguerite-Bourgeoys qui était aussi dans les débuts des travaux, la députée de Sherbrooke, la députée de Verdun! Alors, je pense que c'est un travail d'équipe, et on peut s'en féliciter, parce que c'est un rapport important, qui, on le souhaite, va faire en sorte, justement, d'aider les victimes dans ce processus de guérison que je nommais tantôt.

C'est un enjeu qui est immense, qui est important, qui demande énormément de travail, qui demande un travail transversal, je le disais tantôt, 190 recommandations qui viennent brasser les structures d'un système judiciaire mais aussi tout ce qui est l'accompagnement des victimes de violence conjugale et, encore une fois, grâce à un travail important qui a été fait par tous les acteurs, par les différents ministères. Et là aussi je me permets de féliciter et de remercier mes collègues ministres qui ont pris ce dossier-là très à coeur. Et, encore une fois, on peut aujourd'hui se réjouir de ce premier jalon qui est déposé pour pouvoir avancer ce dossier qui est si important et qui, je pense, va faire une grande, grande différence dans la réalité, dans la vie de ces personnes qui sont victimes de ces crimes insidieux et évidemment en arriver à un processus de guérison.

Alors, encore une fois, je tiens à féliciter l'aboutissement de ce travail qui s'est fait pendant les derniers mois. Le travail, évidemment, n'est pas terminé, parce que, oui, évidemment, on a ce projet de loi là qui est fort important, mais il en reste encore beaucoup à faire. Et je peux vous assurer que le gouvernement s'affaire et continuera à s'affairer pour faire en sorte que les victimes de violence sexuelle, de violence conjugale puissent entamer une guérison, une réparation, mais aussi retrouver confiance en ce système de justice.

Alors, merci, Mme la Présidente. Et, encore une fois, félicitations à mon collègue dans ce dossier! Merci.

• (15 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la ministre responsable de la Condition féminine. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Verdun.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Heureuse de vous retrouver. Permettez-moi de débuter en saluant la ministre de la Condition féminine. Ça fait plaisir de vous revoir.

Ça fait plaisir aussi de reparler de cet important dossier, qui est un dossier qui nous a... bien, qui nous a tous chavirés, qui nous a tous chavirés, en pleine pandémie notamment. On se rappelle des nombreux féminicides, malheureusement, avec lesquels on doit composer en ces temps de pandémie, mais pas uniquement en ces temps de pandémie. On ne doit pas négliger le fait que, malheureusement, trop de femmes, au Québec, sont victimes de violence conjugale et de violence sexuelle.

Je me lève aujourd'hui, Mme la Présidente, avec, moi aussi, beaucoup de fébrilité. Et je suis d'accord avec la ministre de la Condition féminine, elle sera contente d'entendre que je suis d'accord avec elle, parce que c'est aux victimes auxquelles on pense aujourd'hui encore, ici, au salon bleu. C'est dans cette optique-là, d'ailleurs, que nous avons travaillé avec le comité transpartisan pour pouvoir présenter, en décembre dernier, le rapport Rebâtir la confiance. C'est aux victimes à qui on pensait lorsque chacune des recommandations ont aussi été mises de l'avant.

Et aujourd'hui encore, j'espère vraiment de tout coeur qu'avec un projet de loi comme le projet de loi n° 92, qui vise à créer le tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle, de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières, qu'elles vont trouver, les victimes, un réconfort. Qu'elles vont savoir que des parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec ont entendu. Qu'elles vont aussi comprendre, les victimes, qu'on veut justement leur permettre de faciliter tout le parcours lorsqu'on est une victime de violence conjugale, de violence sexuelle.

On a entendu des histoires terribles. D'ailleurs, il n'y a pas très longtemps, il y a moins d'un mois, j'ai reçu un appel d'une mère d'une victime de violence conjugale qui me témoignait de toute la violence que sa fille a subie le samedi. Elle m'a appelée le dimanche. Cette fille-là a été victime d'une tentative de meurtre par son conjoint. Et là c'est la peur pour toute la famille, pas uniquement pour la femme, mais aussi pour des enfants qui sont dans le couple, pour la famille proche de la victime. Et aujourd'hui c'est à elle à qui j'espère que le message se rendra pour lui dire : On arrive à une étape très importante, parce que le principe, lorsqu'on est d'accord avec un principe... et je vous le dis à l'avance, Mme la Présidente, nous sommes d'accord avec le principe, nous voterons pour le principe de ce projet de loi. Non pas qu'on va fermer les yeux sur chaque article, puis j'ai des questions qui seront tout à fait à-propos, hein? On veut, bien sûr, assurer une collaboration. D'ailleurs, je l'ai dit au ministre de la Justice et je tiens à le remercier aujourd'hui, je vais le faire devant caméra, parce qu'il m'a téléphoné, en août dernier, pour me dire qu'il était pour déposer son projet de loi. Il m'a d'ailleurs appelée le matin même en me disant : Est-ce que tu as vu, c'est au feuilleton, je vais déposer le projet de loi? C'est chouette. C'est chouette, et j'espère que d'autres ministres vont prendre aussi des notes, parce que c'est bien de pouvoir travailler en collaboration comme ça. Et je lui ai déjà dit au téléphone que j'étais pour collaborer de façon rigoureuse, de façon rigoureuse parce qu'il ne faut rien laisser au hasard, et on est là pour améliorer le projet de loi.

Alors, j'espère que la maman et sa fille m'entendent aujourd'hui pour me dire que ce qu'on souhaite avec le projet de loi qu'on va étudier dans les prochains jours, dans l'article par article, bien, ça va faciliter leur parcours, parce que c'est un parcours de la combattante qui s'amorce, après avoir été une victime, de faire face... d'aller auprès des policiers, de s'exprimer, de dire ce qu'on a vécu, de revivre le drame, et par la suite avec les procureurs, puis ensuite devant le monstre, parce que c'est comme ça souvent qu'on appelle les conjoints violents. C'est Ingrid Falaise qui nous a bien appris la leçon. Être à la cour devant celui qu'on a aimé pour le dénoncer pour de la violence qu'il nous a faite, ça doit être terriblement, terriblement difficile. Et c'est à elle puis ces victimes auxquelles je pense cet après-midi.

Alors, voilà, c'était mon petit moment pour dire aux victimes qu'elles ne sont pas seules, qu'il y a 125 députés. Et je ne veux pas prendre... Je pense qu'on a eu des discussions, de toute façon, avec les oppositions aussi. On est 125 députés à l'Assemblée nationale à vouloir améliorer la situation pour les victimes, et c'est dans ces moments-là où je trouve que le salon bleu est très noble. C'est dans ces moments-là où je trouve qu'on regagne, bien sûr, la confiance du public, qu'on regagne l'écoute aussi du public. Mais, comme je vous dis, Mme la Présidente, bien sûr, j'aurai des questions, mais, sur le principe, nous serons d'accord.

Donc, en août dernier, le ministre de la Justice a annoncé qu'il irait de l'avant avec la création du tribunal spécialisé, chose que j'ai saluée dans les médias, que j'ai saluée sur les réseaux sociaux. Et je veux juste qu'on rappelle que la création, donc, de ce tribunal spécialisé là vient des différentes vagues, notamment le #metoo, parce qu'on a vu beaucoup de dénonciations sur les réseaux sociaux.

Et j'entendais le premier ministre rappeler aux femmes, de dire : On doit, bien sûr, crier haut et fort, dénoncer ces actes, lorsqu'il y a de la violence conjugale, lorsqu'il y a des violences sexuelles, mais on doit quand même donner à César ce qui revient à César. Et j'aimerais saluer, là-dessus, la proposition de la députée de Joliette, qui a été la première à parler de ce tribunal spécialisé. Et, lorsque la présidente du Conseil du trésor, en mars 2019, a mis sur pied... et qui était ministre de la Condition féminine — ça, c'est la joie des remaniements — elle avait mis sur pied, donc, un comité transpartisan dans lequel faisait partie notamment la députée de Joliette, la députée de Sherbrooke, la députée de Marguerite-Bourgeoys, et la ministre du Conseil du trésor qui était, à l'époque, ministre de la Condition féminine. Il y a eu remaniement, la ministre de la Condition féminine a... intégré, pardon, dis-je, le groupe, et j'ai eu le bonheur, à mon tour, de me joindre à elles, avec un s, et nous avons travaillé, disons-le, rondement. On voulait rapidement pouvoir déposer... et là j'ai presque besoin d'un... parce qu'il est lourd, ce rapport. Il est imposant, ce rapport, et je veux le montrer parce qu'il y a du travail dans ce rapport. Vous ne pouvez pas imaginer.

• (15 h 50) •

Mais on n'était pas seules. Il y avait des membres, et on n'a malheureusement pas souvent l'occasion de remercier ceux et celles qui ont travaillé, donc, sur ce rapport. Permettez-moi de prendre une minute du temps qui m'est alloué pour, bien sûr, remercier Cathy Allen, Éliane Beaulieu, Jean-Marc Bouchard, Hélène Cadrin, Elizabeth Corte, Julie Desrosiers — toutes deux coprésidentes, donc, de ce rapport — Michel Dorais, Annick Dumont, Maggie Frenette, Arlène Gaudreault, Sylvain Guertin, Jocelyne Jolin, Melpa Kamataros, Simon Lapierre, Sabrina Lemeltier, Danielle Mongeau, Pierre Picard, Jean-Thierry Popieul, Marine Sarrazin, Deborah Trent et Patricia Tuslane, qui ont donc travaillé et ont mis énormément d'énergie. Il y avait les deux coordonnatrices, là, Catherine Rousseau et Delphine Matte, et la collaboratrice à la rédaction, Martine Bérubé.

Le travail qu'il y a à l'intérieur de ça, non seulement c'est très... On a fait le tour de la question, on va dire ça comme ça. On a soulevé chacune des pierres pour arriver à 190 recommandations. Mais aujourd'hui, ce qui nous intéresse dans ce rapport, qui s'intitule Rebâtir la confiance, c'est pour redonner confiance aux victimes de faire des plaintes, d'entrer à l'intérieur du processus judiciaire. Plusieurs l'ont boudé. Plusieurs se sont heurtés à une machine lourde dans laquelle elles étaient victimes à nouveau. C'est comme ça qu'ils ont nommé les choses.

Mais aujourd'hui je voudrais, Mme la Présidente, qu'on puisse se rapporter au chapitre 12 de ce rapport, parce que c'est véritablement le chapitre 12 qui fait foi du projet de loi, finalement, qui est présenté par la banquette ministérielle, chapitre 12 qui parle d'instaurer un tribunal spécialisé en matière d'agression sexuelle et de violence conjugale, dans lequel il y a plusieurs recommandations.

Et, dans le projet de loi qui est présenté par le ministre de la Justice, on effleure certaines recommandations de ce chapitre 12. Et, vous allez voir, on a certaines questions à poser, à savoir pourquoi est-ce qu'on n'est pas allés plus loin, pourquoi est-ce qu'on n'a pas intégré d'autres recommandations, alors qu'on va ouvrir... le projet de loi, là, va créer une division de tribunal spécialisé, puis là on va ouvrir différentes lois pour pouvoir y arriver. Alors, pourquoi est-ce qu'on s'est arrêté à un si beau moment? Mais ça, on aura l'occasion, bien sûr, d'en discuter à l'extérieur du principe.

Je tiens à vous dire aussi, Mme la Présidente... Parce que parfois il y a plusieurs choses qui se passent en parallèle, puis les gens ont de la difficulté à nous suivre. Je veux vous rappeler qu'il a aussi été déposé, en décembre 2020, le rapport de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Un peu plus tard, ma collègue d'Acadie va pouvoir revenir sur les différentes recommandations qui sont à l'intérieur de ce rapport-là et dans lesquelles on parle aussi de tribunal spécialisé, mais qui ne se retrouvent malheureusement pas à l'intérieur du projet de loi n° 92. Et, lorsqu'il y a eu ce rapport formidable, bien, on a entendu des victimes, dont une qui s'appelle Lau Ga. Je ne sais pas si vous vous rappelez, Mme la Présidente. Et, lorsque le ministre a annoncé qu'il y avait un projet de loi pour un tribunal spécialisé pour la violence conjugale et les violences sexuelles, elle s'est demandé : Et moi, qui est une victime d'exploitation sexuelle, est-ce que j'aurai droit, moi aussi, de profiter d'un tribunal spécialisé? On n'a pas ces réponses actuellement, et j'invite les équipes du ministre, qui sont probablement à l'écoute, ce sera dans les questions. Donc, on n'est pas en train de vouloir cacher quelque interrogation que ce soit. Pour nous, c'est important qu'on puisse faire le tour de cette question une fois pour toutes, alors que l'occasion est tellement belle de le faire.

Il y a aussi un autre rapport, Mme la Présidente, et je tiens à rappeler que, dans ce rapport, c'est 58 recommandations qu'il y a. Donc, 190 recommandations, 58 recommandations. Mais il y a aussi le rapport Laurent, le rapport, donc, sur la Commission spéciale des droits des enfants et de la protection de la jeunesse, un rapport... Je vois la députée de Repentigny qui a travaillé sur cet important rapport aussi. Et dans le rapport, à la recommandation 2.3, elle pourra me reprendre si je fais fausse route, il est dit qu'on doit reconnaître les impacts des conflits familiaux et de la violence conjugale sur les enfants. Et la recommandation 2.3 vise à mieux soutenir et accompagner les mères victimes de violence conjugale pour mieux protéger les enfants, outiller les intervenants de la DPJ justement pour mieux comprendre les situations de conflit sévères de séparation, de violence conjugale vécues par les mères, les enfants qui séjournent dans les maisons d'hébergement afin d'offrir un accompagnement adapté. Là aussi, il y a une forme de silence à l'intérieur du projet de loi. Il serait intéressant qu'on puisse peut-être faire le lien, parce que c'est une grande boucle. C'est une grande boucle, puis je pense que c'est le temps de le faire, alors que nous serons en pleine discussion.

Mais revenons au projet de loi n° 92, si vous me permettez, Mme la Présidente. C'est un projet de loi qui est assez court, hein, parce qu'il y a 14 articles dans lesquels, principalement, on parle des programmes de perfectionnement pour les juges, et on parle, bien sûr, du Conseil de la magistrature. Pour le reste, on parle beaucoup d'habilitations réglementaires. Ça veut dire que tout se retrouvera à l'intérieur des règlements, autant du côté des projets pilotes, parce que c'est ce que le ministre a annoncé, les projets pilotes, que l'échéancier, que la formation. Et ça, je tiens à le dire ici, c'est une habitude que le gouvernement caquiste nous fait subir, je vais dire ça comme ça, puis je le dis avec beaucoup d'amitié, parce que je le sais, je l'ai vécu avec la ministre de la Culture lorsqu'il était question de patrimoine, je l'ai vécu avec la ministre de l'Habitation lorsqu'il était question de ses projets de loi. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de projets de loi où on y va sur un cadre très large, puis le reste, c'est par règlement. Puis malheureusement, les règlements... les élus des oppositions, de l'opposition officielle, bien, on n'est pas consultés pour les règlements. Et, dans le cas présent, ces règlements-là vont devenir tellement, mais tellement importants, tellement importants que, pour moi, il est important qu'on puisse entendre les groupes, les groupes qui nous ont accompagnés dans la rédaction de Rebâtir la confiance, des groupes de femmes. Et ça me ferait plaisir de vous donner la liste des groupes que nous avons proposés au gouvernement. Tout à l'heure, là, on a vu une... je ne sais pas si on peut appeler ça une prise de bec, là, mais nous, on a fait des propositions au ministre de la Justice, qui est aussi leader du gouvernement, quant aux groupes que nous souhaiterions entendre, parce que, tout au long de l'écriture du rapport, des 190 recommandations, on a été accompagnés par un comité, on a été accompagnés par des experts. Parce que, pour faire un peu plus rapide, tout à l'heure je ne vous ai pas donné ce que chacun des membres a comme pedigree, mais ils en connaissent beaucoup plus que nous tous, 125, réunis en ce salon bleu.

• (16 heures) •

Et donc je ne comprends pas qu'on puisse prétendre, du côté de la banquette ministérielle et du leader, qui est aussi ministre de la Justice, tout à l'heure qui disait : Bien, du côté de Québec solidaire, eux autres, ils veulent juste deux groupes, puis eux autres, ils ont compris qu'il fallait que ça aille vite, vite, vite. Je ne pense pas qu'on soit à deux jours, je ne pense pas qu'on soit à deux jours où on puisse se permettre d'échapper des informations importantes qui feraient, malheureusement, que le projet de loi va être moins bon, parce que le travail, ici, qu'on a faire à l'Assemblée nationale, comme législateurs et comme législatrices, c'est bien sûr d'offrir le meilleur projet de loi possible pour permettre des bons projets pilotes, pour permettre, par la suite, que ce soit étendu partout dans le Québec, et le plus rapidement possible. Parce que moi, je suis inquiète, il va y avoir des iniquités, et entre régions et entre victimes.

Alors, c'est pourquoi, moi, j'ai demandé, dans le fond, à mon leader, que j'aime beaucoup, de transmettre 15 demandes — 15 demandes, là, on peut faire ça rondement : le Barreau du Québec, le Conseil de la magistrature, Mme Rachel Gagnon, professeure au Département des sciences juridiques de l'UQAM, Mme Elizabeth Corte, qui a été juge en chef de la Cour du Québec de 2009 à 2016 et qui était donc coprésidente, comme je vous le disais tout à l'heure, du rapport Rebâtir la confiance avec Mme Julie Desrosiers, qui est chercheuse et professeure titulaire à la Faculté de droit de l'Université Laval et, donc, elle aussi, coprésidente du rapport Rebâtir la confiance, Sylvain Guertin, qui est enquêteur spécialisé en matière d'agressions sexuelles et aux crimes majeurs, directeur adjoint à la Direction des enquêtes criminelles à la Sûreté du Québec, Me Roxane Roussel, spécialiste en droit familial, Me Sophie Gagnon, de Juripop, Me Annick Dumont, procureure aux poursuites criminelles et pénales, Mme Jocelyne Jolin, SOS Violence conjugale.

Vous allez me permettre une petite seconde. SOS Violence conjugale, je le demande aux collègues très gentiment, n'hésitez pas à mettre le numéro de téléphone de SOS Violence conjugale quand vous le pouvez sur vos réseaux sociaux. C'est un numéro qui est important. C'est un numéro qui peut sauver des vies. Ils font un travail extraordinaire. Et, tout à l'heure, je vous parlais notamment de la maman de la victime qui m'a téléphoné. Ils ont eu un service impeccable avec SOS Violence conjugale. Je tiens à le dire. Souvent, on voit ce qui ne fonctionne pas, mais on omet aussi de dire, trop souvent, ce qui fonctionne bien. Alors, aux gens de SOS Violence conjugale, merci et chapeau!

Mme Gaelle... Fedida, pardonnez-moi, de l'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale. Mmes Louise Riendeau et Chantal Arseneault, du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale. Mélanie Walsh, directrice générale de l'Auberge Madeleine et partenaire dans le Partenariat pour la prévention et la lutte à l'itinérance des femmes, regroupant cinq maisons. Mme Manon Monastesse, directrice de la fédération des femmes... d'hébergement pour femmes. Et Mmes Josée Mensales et Diane Veillette, formatrices du programme Les Survivantes. Sans oublier, sans oublier Patricia Tulasne, membre des Courageuses. C'est la liste que nous avons proposée au gouvernement.

Comme je le dis, on n'est pas là pour ralentir quoi que ce soit, on est là pour les entendre, pour voir eux, là, dans ce qui a été déposé, qu'est-ce qui sera là... Parce que, je vous le rappelle, Mme la Présidente, si on n'est pas en mesure d'obtenir l'éclairage, la sagesse, la connaissance de ces groupes pour le projet de loi, comprenez-moi bien, tout le reste qui passera par règlement, elles ne seront pas... ces groupes-là ne seront pas demandés, là, pour savoir qu'est-ce qu'on doit faire puis comment on doit le faire. C'est pour ça qu'on doit les entendre rapidement à l'intérieur du processus. Et c'est pourquoi notre leader s'est levé tout à l'heure pour poser la question au leader du gouvernement, à savoir qu'est-ce qu'il en est, parce que, là, on y va avec le principe, puis moi, je suis très d'accord avec ça puis je pense que personne ne s'objecte à ça, mais on doit pouvoir entendre les groupes pour avoir le meilleur projet de loi possible.

Et les groupes le demandent, hein? Les groupes l'ont demandé. J'ai sorti un article du Devoir du 16 septembre dernier, et le titre est assez parlant : Le téléphone, on attend qu'il sonne. Alors, ce sont les groupes d'aide aux femmes qui veulent être consultés dans la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence conjugale et sexuelle. Elles ont des choses à dire. Nous avons le devoir de les entendre, de les écouter, pour pouvoir bonifier le projet de loi.

Je le disais tout à l'heure, là, tout le monde attend qu'on puisse être inclus dans le processus menant à la création, le téléphone, on attend qu'il sonne. La Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, elle, s'est dit tout à fait disposée à partager son expertise, c'est ce qu'on veut qu'elles viennent faire, ici, venir partager leur expertise pour être sûr qu'on n'échappe personne. Je le disais, d'entrée de jeu, je le disais, en introduction, être victime et franchir chacune des étapes de ce processus-là, c'est extrêmement difficile. Donc, pourquoi ne pas entendre ces gens-là?

Et il y a Juripop, avec Me Gagnon, qui dit... à son avis, il n'y a pas que les juges qui auraient besoin de formation pour mieux comprendre la réalité des victimes de la violence conjugale et sexuelle. Bien, c'est parfait, qu'elle vienne nous le répéter, parce qu'à l'intérieur du rapport Rebâtir la confiance il est question des procureurs, une formation pour les policiers. On se doit, donc, de pouvoir entendre ceux et celles qui vont nous rappeler aussi l'urgence, bien sûr, de mettre sur pied le tribunal spécialisé mais aussi de ne pas laisser tomber les 189 autres recommandations, et ça, c'est bien qu'on puisse le faire. Et, le ministre et son équipe, j'imagine qu'ils ont été en mesure de tout lire, mais, entre lire quelque chose et entendre un groupe, souvent, souvent, il y a un fossé de mieux comprendre, de pouvoir poser les questions. Je vous le dis, on ne veut pas avoir trois semaines de consultations, on n'est pas là-dedans, on est dans 15 groupes, ça peut aller rondement.

J'ai regardé, aussi, les groupes qui ont été proposés par les autres oppositions. Du côté du Parti québécois, je laisserai la députée de Joliette nous parler des groupes, mais je vais vous le dire, là, eux autres, ils ont 20 groupes, puis, là-dedans, nos 15 groupes sont là, donc on est tout près de quelque chose. Et, du côté de Québec solidaire, bien, il y a un groupe qui fait aussi partie de notre groupe. Formidable! Vous voyez, on est quand même... tout le monde a pas mal une vision similaire quant aux groupes que nous devons entendre.

• (16 h 10) •

J'ai lu un papier sur les victimes aussi. Quand on parle des victimes, c'est certain, hein, on devient... bien, c'est troublant, c'est troublant lorsqu'on entend les victimes, lorsqu'elles nous expliquent le processus. Je lisais dans Le Journal de Montréal, pour ne pas le nommer, le 16 septembre dernier : Des victimes veulent que le parcours soit moins ardu. C'est exactement ce à quoi nous travaillons avec le projet de loi n° 92. Il y a Geneviève Plante qui a témoigné, là, et qui nous dit : «Témoigner devant mon agresseur, mais aussi devant tout plein de personnes dans la salle de cour, c'était vraiment stressant. Je racontais des détails très personnels — écoutez ça, Mme la Présidente, là — j'avais l'impression de me déshabiller devant une salle pleine d'inconnus.» Je ne pense pas qu'on ne souhaite être, personne, à la place de Mme Plante.

Il ne faut pas oublier les hommes aussi, parce qu'il y a des hommes qui sont victimes de violence sexuelle, de violence conjugale. Il y a des hommes qui témoignaient en disant : «J'aurais aimé avoir accès à ce tribunal», en parlant du tribunal spécialisé. «Les victimes, on est comme une bébelle dans le processus judiciaire. Tout le monde sait comment le système fonctionne, sauf nous.» Terrible, quand on reçoit ça.

C'est pour ça qu'on a besoin du tribunal spécialisé puis c'est pour ça que moi, je n'ai pas envie de me tromper lorsque je vais faire la législation pour cet important projet de loi. Et c'est pour ça qu'on a besoin des groupes. Et c'est pourquoi on a fait cette demande au gouvernement.

Et je tiens à mentionner une chose, parce que, dans le projet de loi n° 92, il est beaucoup question, donc, des juges, de la formation des juges. C'est de ça dont il est question à l'intérieur du projet de loi. Et vous allez me permettre de trouver simplement la page, Mme la Présidente. C'est un programme de perfectionnement sur la réalité relative à la violence sexuelle et à la violence conjugale établi par le Conseil de la magistrature. C'est de ça dont il est question principalement dans ce projet de loi là, parce que le reste, ce sera beaucoup par règlement.

Et je sais qu'il y a des réticences du côté de la magistrature mais je veux quand même vous souligner, Mme la Présidente, que la juge retraitée Nicole Gibeault voit de bon oeil la formation obligatoire des magistrats : «Il faut être sûr d'avoir tout le monde sur le même pied d'égalité, tant les jeunes juges que ceux qui ont 70 ans et qui n'ont pas eu les mêmes formations.» Ça, c'est une juge. C'est une juge à la retraite qui nous dit ça. Et je vous le disais, on a Elizabeth Corte qui était juge en chef, qui était coprésidente du rapport, et qui sait, et qui sait très, très bien la réalité de la magistrature. Mais bien sûr qu'on veut entendre, comme je vous le disais précédemment, on veut entendre les gens issus du monde, bien sûr, de la magistrature, avec le Barreau puis avec le Conseil de la magistrature mais on veut aussi entendre les groupes de femmes, celles qui travaillent au quotidien avec les victimes sur le terrain pour s'assurer qu'on ne laisse rien au hasard.

Ça, c'était le point que je souhaitais faire et que je souhaitais... Je souhaitais être entendue par le gouvernement là-dessus, parce que tout à l'heure j'ai senti que... bien, j'ai senti le leader très offusqué qu'on pose la question, mais, comme on n'y allait pas dans l'ordre dit habituel, on voulait juste être sûrs de ne pas partir avec le principe puis qu'après ça tout puisse débouler, parce qu'on a déjà vu des lapins sortir du chapeau du leader puis on n'avait pas envie d'être pris au dépourvu. Donc, moi, j'aime bien les choses claires. On a eu une réponse, j'apprécie le tout. Et j'ai noté, tout à l'heure, je ne me rappelle pas où, là, mais c'était à quelque part au mois d'octobre que le ministre serait disposé à entendre des groupes. Tant mieux!

Je comprends que le ministre, bien sûr, est très occupé, et on sait qu'il est sur d'autres projets de loi en même temps, mais il faut faire l'étude de ce projet de loi là avec beaucoup, beaucoup, beaucoup de rigueur. Il y a trop d'âmes meurtries qui ont malheureusement fait les frais du processus judiciaire. Puis on veut pouvoir rétablir la situation. On veut être en mesure d'attacher correctement les fils pour s'assurer que les victimes vont être mieux accompagnées tout au long. Parce que, dans le fond, là, lorsqu'on parle de ce tribunal spécialisé, on ne parle pas de béton, hein, ici, je pense qu'il faut quand même être clair là-dessus, on parle vraiment de l'accompagnement de la victime, que la victime, là, elle ne soit pas barouettée d'un procureur à un autre, puis de recommencer ton histoire, puis viens réexpliquer. Il faut que tout le monde puisse, dans un même élan, dans le fond, entourer la victime, que ce ne soit pas à la victime de dire : Ah! d'accord, là, je suis allée à telle porte; c'est quoi, la prochaine porte? Parce que le parcours n'est pas clair, vous l'avez entendu, tout à l'heure, là, je donnais des exemples de victimes qui se sentaient comme des bébelles du système. Il ne faut pas que ce soit ça. Donc, c'est ça, le tribunal spécialisé.

C'est aussi de permettre aux femmes de ne pas croiser, nécessairement, l'agresseur. Je ne sais pas si vous êtes déjà allés dans un palais de justice. Moi, la première fois que je suis allée, là, aïe! les genoux, là, claquaient ensemble, là, puis j'étais juste témoin dans une miniaffaire, c'était intimidant. Ça fait qu'imaginez quand on est une victime puis qu'on entre, là, dans ce palais de justice là, qui n'est pas tellement chaleureux, puis qu'on arrive face à face avec l'agresseur. J'imagine une victime, j'imagine les parents, j'imagine les frustrations, j'imagine le découragement, puis j'imagine que c'est pour ça qu'il y a plein de femmes qui ont décidé de ne plus rentrer dans le processus puis dire : Bien, moi, là, bien sûr, je vais aller décrier, je vais faire mon #metoo, mais uniquement sur les réseaux sociaux. Mais on a un processus judiciaire qui doit mieux encadrer ces femmes-là, et c'est ça, le tribunal spécialisé. Je tiens à le dire parce que plusieurs personnes m'ont dit : Bien là, des tribunaux, on en a assez, là, pas obligé de faire encore du béton. Ce n'est pas du béton dont il est question, je tiens à le dire, c'est de l'accompagnement.

Je le disais, tout à l'heure, le travail sera fait de façon très rigoureuse du côté de l'opposition officielle. J'ai de nombreuses questions, et je le disais tout à l'heure, là, je ne ferai pas ça à la cachette, là, j'ai déjà dit au ministre là où j'avais certaines interrogations. Je vous en ai fait part. Je vous ai fait part de certaines interrogations, il y a des enjeux. Les enjeux sont assez simples, là. On va créer des inéquités sur le territoire, le territoire est immense. Des projets pilotes, il y en aura combien? Je ne sais pas. Dans quelles régions? Je ne sais pas. Donc, la femme victime de violence conjugale, qui se retrouve à Verdun, pourrait peut-être, s'il y a un projet de loi dans ma région, avoir un accompagnement avec tous ceux et celles qui font partie, habituellement, de l'accompagnement des victimes. Mais la victime qui, elle, est à Baie-Comeau, et, si le projet de loi du ministre n'inclut pas Baie-Comeau, elle, bien, elle ira trouver son propre parcours, elle devra continuer, malheureusement, à essayer de trouver sa place puis ne pas se sentir comme une bébelle. Cette inéquité-là, dans un projet de loi, ça me chicote, ça me fait peur.

Puis c'est quoi, la durée du projet pilote? Je ne le sais pas, ce n'est pas indiqué, ce sera dans le règlement. Puis après combien de temps est-ce qu'on entend mettre sur pied l'ensemble des régions? Je ne le sais pas, ce n'est pas indiqué. L'échéancier n'est pas connu. Et, lorsqu'on laisse plein de place à plein d'inconnu, bien, des fois, c'est une façon de ne pas arriver à étendre le tribunal spécialisé partout sur le territoire du Québec, et on en a besoin. Donc, ça, moi, c'est dans des enjeux, donc le district judiciaire et puis l'iniquité pour les victimes.

Le projet de loi, aussi, je vous le disais tout à l'heure, là, il a beaucoup d'habilitations réglementaires, puis malheureusement les modalités à un règlement ne sont pas adoptées avec la contribution des parlementaires. Ça, c'est fait dans un ministère, à porte close. Bien sûr, là, il va y avoir la Gazette, puis on pourra peut-être arriver avec certaines propositions, mais je trouve qu'on travaille un peu à l'envers. Si on se donnait un peu de temps pour pouvoir introduire, à l'intérieur des règlements, tous ces cadres où il y a des interrogations, notamment l'échéancier, je pense que nous serions gagnants.

• (16 h 20) •

Il y a l'obligation, je vous le disais tout à l'heure, l'obligation pour les juges de suivre une formation qui dépendra de la collaboration du Conseil de la magistrature, en vertu de l'indépendance judiciaire. Et là je vais laisser, tout à l'heure, le soin à mon collègue de pouvoir vous parler plus de la magistrature parce qu'il connaît ça tellement, tellement mieux que moi. Mais c'est dommage qu'on n'ait pas saisi l'opportunité d'introduire, à ce moment-là, toute la formation pour les policiers, les procureurs. Je vous parlais du chapitre 12 de Rebâtir la confiance, du rapport, tout à l'heure. Très honnêtement, là, je pense qu'il y avait pas mal de recommandations qu'on aurait pu ici retrouver, introduire. Il n'y a rien qui empêchait le ministre de le faire, et je trouve qu'on manque là une très, très belle occasion. Et je tiens à le dire, et ce n'est pas une critique du tout, du tout, du tout pour les corps policiers, mais ce ne sont pas tous les patrouilleurs qui sont formés pour recevoir une plainte en violence conjugale ou en violence sexuelle, et on a lu des histoires d'horreur, vous les avez lues tout comme moi. Tu sais, un policier qui a demandé à une victime si elle avait aimé ça, son viol, si elle avait joui, c'est un manque de connaissances. C'est pour ça qu'on parle de formation, bien sûr, pour les patrouilleurs, c'est pour ça qu'on demande aussi qu'il y ait des escouades spécialisées pour les enquêteurs en crimes sexuels, bien entendu, et je pense que là on aurait pu introduire plus de recommandations à l'intérieur du projet de loi. Mais ça, on pourra y revenir dans une autre étape, pour les projets de loi.

Est-ce qu'on aurait pu aller plus rapidement quant à l'idée de dire : Bien, on ne va pas avec des projets pilotes puis on va l'étendre? Je sais, et on en a discuté lorsque nous étions sur le rapport, que d'un district judiciaire à un autre on n'a pas le même nombre d'accompagnateurs. Ce n'est pas tous les groupes qui travaillent aussi facilement les uns avec les autres d'un district à un autre. Mais moi, je pense qu'on doit être ambitieux pour les victimes. Elles ont suffisamment attendu, elles ont suffisamment souffert, et je pense qu'on peut aller un peu plus vite. Et j'espère que le ministre de la Justice... non, je suis certaine que le ministre de la Justice ne voudra pas uniquement faire un petit crochet en disant «check». Je pense qu'il veut véritablement aller plus loin, je l'avais déjà entendu sur le sujet. Et je tiens à redire ici, Mme la Présidente, qu'il aura mon entière collaboration. Je veux qu'on aille un peu plus loin. Puis peut-être qu'il y a des... peut-être que, malheureusement, le ministre est aux prises avec un cadre dans lequel il ne peut pas aller. Il l'expliquera. Mais il y a un bout où moi, j'ai... Je n'ai pas été ministre de la Justice, il pourra sans doute nous expliquer le pourquoi du comment, mais je l'invite aussi à se présenter, dans les prochaines étapes, avec l'ouverture de vouloir bonifier, de pouvoir améliorer le projet de loi qui nous est proposé.

Et je suis persuadée, là, le député de LaFontaine va pouvoir l'exprimer un peu plus tard aujourd'hui, je comprends que ce n'est pas simple, et qu'il marche parfois sur des oeufs, le ministre de la Justice. On va être là pour l'appuyer. Je ne veux pas qu'il ait peur. Je ne veux pas qu'il se mette des barrières en croyant qu'on ne sera pas là pour l'épauler, en disant : Ah! non, c'est sûr que là, il y a peut-être un ou deux groupes qui ne seront pas d'accord. Non, non, moi, je veux lui dire, là, et je vais regarder la caméra : Je serai là pour l'appuyer s'il veut aller encore plus loin parce que je pense que les victimes, les victimes ont besoin de ce projet de loi là plus que jamais.

On a entendu plein d'histoires. On ne souhaite pas ça aux pires de nos ennemis. Vous avez des filles, vous avez des petites-filles, Mme la Présidente. Moi, j'ai ma fille, j'ai mon fils aussi, à qui je parle souvent droit dans les yeux en disant... prendre soin des gens qui nous entourent. Mais je pense qu'il y a malheureusement trop de victimes qui n'ont pas eu ce nid douillet là pour pouvoir, malheureusement, se les poser après avoir été en relation toxique, parfois, avec des hommes qui prétendaient les aimer.

Je vais m'arrêter ici, Mme la Présidente, parce que je sais qu'il y a d'autres collègues qui veulent, bien sûr, intervenir, mais sachez une chose, puis, dans le fond, là, du laïus que j'ai fait aujourd'hui, que je vous livre avec mon coeur, mon âme, avec mes tripes, dans le fond, c'est de pouvoir vous dire : Ne pensons pas qu'il y a des barrières. Je pense qu'on peut faire tomber les barrières, parce que, les 125 élus dans cette Assemblée nationale, je pense que tout le monde est d'accord, le temps est venu à ce que les victimes puissent être entendues. On a fait beaucoup de travail, trois rapports, il est temps que les recommandations puissent, bien sûr, atterrir. Et vous allez pouvoir compter sur mon entière collaboration. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Verdun. Et notre prochaine intervenante sera Mme la députée de Repentigny.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis très contente de prendre la parole aujourd'hui concernant l'adoption de principe du projet de loi n° 92, Loi visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières.

Cette loi représente une grande avancée pour les victimes d'agression sexuelle et de violence conjugale au Québec. En créant un tribunal spécialisé en pareilles matières, on veut que ces victimes reprennent confiance en notre système de justice. On veut leur offrir des services mieux adaptés à leurs besoins avant, pendant et après le processus judiciaire. Surtout, on ne veut plus que cette étape représente un fardeau supplémentaire après tout ce qu'elles ont vécu, et je dis bien «elles» parce que ces victimes, ces survivantes sont très majoritairement des femmes.

La judiciarisation de leurs histoires d'horreur ne doit plus être un parcours du combattant. Ça doit être un parcours vers une quête de justice et ultimement vers la guérison, et, pour ce faire, il faut remettre la personne victime au centre du processus judiciaire. C'est là l'avancée majeure dont je vous parlais plus tôt, un changement de paradigme qui permettra à ces femmes d'être mieux soutenues et outillées tout au long de cette bataille qu'elles mènent, parce que c'est une bataille, et qu'en ce moment le fonctionnement du système fait en sorte qu'elles ont le sentiment qu'elles ne partent pas sur le même pied d'égalité que leurs agresseurs. Et il faut régler ça, il faut que ça change.

Avant de procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 92, et d'aller plus loin dans le travail qui nous attend, j'aimerais vous partager pourquoi, à mes yeux, cette loi viendra redonner espoir aux victimes et aux survivantes ainsi qu'à la société qui veut, elle aussi, un système mieux adapté à la réalité d'aujourd'hui. On veut, toutes et tous, un monde plus juste et plus égalitaire.

• (16 h 30) •

Vous ne serez pas surprise que je retourne en 2017, à la législature où nous avons travaillé ensemble. Alors que le chef de ma formation politique me confiait le rôle de porte-parole en santé publique et en condition féminine, au début de 2017, je me suis alors questionnée sur ce que je pouvais apporter dans chacune de ces responsabilités afin d'y amener ma couleur. Je me revois au printemps 2017, tout juste avant le Grand Prix du Canada se tenant à Montréal. J'étais dans ma cuisine en train de lire La Presse et je suis tombée sur un reportage concernant le problème de la prostitution juvénile. Pour moi, ce fut une révélation, et je peux vous assurer, Mme la Présidente, que c'était un choc.

Ce fut le début de tout, le début d'une réalité qui m'a habitée pendant des années et qui m'habite encore aujourd'hui. J'ai lu et relu cette série d'articles. Ça me faisait mal. Je vous en parle, et ça me fait encore mal. Comment accepter, Mme la Présidente, qu'on tatoue le nom d'un proxénète sur le corps d'une femme pour indiquer qu'elle lui appartient? Comment accepter qu'on vende des femmes une fois qu'elles ne nous servent plus, comme s'il s'agissait d'une simple marchandise sans âme? Comment accepter qu'on organise des viols collectifs pour désensibiliser les femmes et les amener ainsi vers les réseaux prostitutionnels? Tout ça au XXIe siècle ici, au Québec. On parle de barbarie, de violence extrême, de sadisme à l'endroit des femmes. Je venais d'ouvrir une boîte de Pandore qui contenait bien plus de maux que je ne pouvais encore l'imaginer à ce moment-là.

À la fin de la session, au printemps 2017, avant mon retour dans mon comté, j'ai décidé d'aller visiter les représentantes de La Maison de Marthe à Québec. Cette maison a été fondée par une très grande dame, une très grande féministe, une femme d'une très grande bienveillance, soit Rose Dufour. Je voulais en savoir plus, je devais en savoir plus. Mme Dufour a consacré les 20 dernières années aux femmes désirant sortir du milieu prostitutionnel. Elle est devenue une sommité reconnue notamment pour ses travaux de recherche sur le sujet. Elle fut ma deuxième révélation.

Lors de cette visite à La Maison de Marthe, j'ai rencontré une femme qui a vécu pendant 30 ans dans le milieu prostitutionnel. En échangeant avec elle, j'ai appris que, toute jeune, elle avait été agressée sexuellement à plusieurs reprises par l'amoureux de sa mère avec l'assentiment de cette dernière. Ces agressions ont eu pour effet de changer sa vie et son parcours, blessée, mais surtout délaissée par une femme qui aurait dû la protéger.

De retour à mon bureau de comté, j'ai alors entamé sans relâche un travail de recherche pour en savoir un peu plus sur cette réalité. J'y ai consacré mes journées, mes soirées et parfois mes fins de semaine. Plus j'avançais dans mes recherches, et plus j'étais choquée. C'est devenu une obsession. Mon travail m'a aussi amenée à rencontrer plusieurs spécialistes, intervenants, organisations, experts, notamment des représentantes du projet MOBILIS en Montérégie et deux policières du SPVM instigatrices du projet Les Survivantes. D'ailleurs, j'ai assisté à une de leurs conférences qui a duré quatre heures. Et la dernière heure, c'était encore le témoignage d'une survivante abusée par son grand-père à la connaissance de sa mère, vendue dans des réseaux de pédophilie.

J'ai entendu et lu des témoignages de victimes. J'ai écouté de nombreux documentaires sur le sujet. J'ai lu des livres, des rapports, des travaux de recherche et des articles dans les journaux. À la fin de tout ce travail se dessinait déjà ce qui devait être mon plan de lutte à l'exploitation sexuelle des mineurs, dévoilé en mars 2018. J'y faisais des recommandations qui, par bonheur, se sont retrouvées dans le rapport déposé en décembre 2020. J'ai été rassurée car les recommandations étaient en droite ligne avec les constats que j'avais faits au cours des années 2017, 2018, tout au long des rencontres et de mes travaux.

Toute cette parenthèse pour revenir au dépôt du projet de loi n° 92. Pourquoi? Parce que toutes ces victimes d'exploitation ont vécu des agressions sexuelles de façon récurrente, parce que, pour elles, chacune de leurs rencontres avec des clients était un viol répétitif, tellement que, lors de ces viols, j'ai appris qu'elles vivaient un phénomène de décorporalisation pour ne plus le sentir, leur corps, un mécanisme d'autodéfense, une façon de s'évader de ce drame qui se répétait pour elles jour après jour. Parce que plusieurs d'entre elles ont aussi été victimes d'inceste et de viol alors qu'elles étaient mineures, ces actes ont changé le rapport à leur corps à tout jamais et les ont amenées à entrer dans un milieu qui perpétuait ces agressions vécues dans leur enfance. Parce que, pour certaines de ces femmes, leur proxénète était leur amoureux et que ce dernier les convainquait habilement d'entrer dans ce milieu prostitutionnel. Elles le faisaient, à la base, par amour pour lui, amour qu'elles croyaient réciproque jusqu'à ce qu'elles se retrouvent prises dans cet enfer.

Commençait alors le cycle de la violence conjugale. Une violence extrême suivie d'une période de lune de miel les amena à retourner bien malgré elle dans ce milieu. Un cycle infernal qui ne semblait jamais avoir de fin.

Je sais que des histoires comme elle, comme celle que je vous raconte, vous en avez déjà entendu. Heureusement, on en parle encore beaucoup dans la sphère publique, et c'est important. Mais n'oubliez pas que nous ne sommes pas dans la fiction, que derrière ces histoires se trouvent des femmes, des filles et des enfants qui continuent à être victimes d'une violence inouïe, qui se font agresser, violer. Ces actes sont parfois filmés et ces images distribuées à leur insu encore ici, au Québec, au XXIe siècle.

Pensez à cette jeune femme, Clémentine, qui, avec courage, dans le balado Sugar baby : pire idée de ma vie, a levé le voile sur toute l'horreur qu'elle a vécue. Cette jeune femme a été torturée, violentée, violée, agressée.

Ce genre d'atrocités, on en voit donc beaucoup dans les milieux prostitutionnels, mais ça existe aussi dans les maisons, dans les quartiers qui nous entourent, dans des endroits que l'on croit sécuritaires et qui ne le sont malheureusement pas toujours. Je vous ai exposé la réalité des victimes d'exploitation, mais le spectre de la violence sexuelle et la violence conjugale est large, bien plus large, et il fait beaucoup de victimes, plus qu'on ne le pense, parce que la majorité des ces victimes hésitent à dénoncer leur agresseur, et ça ne doit plus se produire, pas chez nous, pas au XXIe siècle.

Pour ce faire, nous devons mieux entourer ces victimes de bienveillance. Il faut les rassurer, les écouter, les aider. Elles et ils ont besoin d'être entendus, ils et elles ont besoin de nommer, et tout ça dans un milieu sécurisant, réconfortant, rassurant.

Oui, la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et violence conjugale est nécessaire, mais la formation des juges l'est tout autant. Ce genre de crime est particulier en soi parce qu'il se passe souvent dans un contexte d'intimité. Combien de victimes tiennent à leur agresseur malgré tout parce qu'elles ont été habilement manipulées? Combien de victimes pensent même avoir commis ces gestes volontairement alors qu'elles étaient sous la contrainte? Pour poser un regard éclairé, les juges doivent comprendre toute la psychologie qui se cache derrière leur parcours, et les victimes doivent pouvoir se sentir écoutées et comprises.

Oui, il faudrait miser sur la formation des juges, mais aussi sur la formation continue. Depuis 2017, j'ai écouté, appris et mieux compris et j'apprends encore aujourd'hui car je continue de suivre ce dossier de près puisqu'il m'habite encore.

Je salue donc le dépôt de cette loi qui fait suite au rapport du Comité d'experts sur l'accompagnement des victimes d'agressions sexuelles et de violences conjugales déposé en décembre 2020. Pour moi, cette loi jettera les bases d'un système plus ancré dans notre réalité actuelle et surtout plus à l'image de ce que nous voulons au Québec en termes de justice. Comme je l'ai dit tantôt, on veut toutes et tous un monde plus juste et plus égalitaire. Pour moi, le projet de loi n° 92 est la promesse d'une avancée majeure, il me remplit d'espoir pour l'avenir. Merci beaucoup.

• (16 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Repentigny. Et maintenant je cède la parole à Mme la députée de Fabre.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, c'est un grand privilège, je vais le dire comme ça, pour moi d'intervenir aujourd'hui... cette intervention sur le principe du projet de loi n° 92, Loi visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières.

Je suis très fière et très privilégiée, parce que, bien sûr, nous sommes tellement sensibles à tout ce qui arrive à ces femmes, ces femmes qui font l'actualité, qui vivent ces drames, ces victimes de violence, de pouvoir intervenir et d'être, en toute humilité, aussi bien entourée par des femmes de mon équipe mais tous les parlementaires, des femmes, des hommes qui sont le coeur très présent à vouloir changer les choses pour ces femmes. Je pense, bien sûr, à ma chère collègue porte-parole de Verdun, qui a, tantôt, dans un élan très passionné, nommé toute la volonté à appuyer ce projet de loi, mais aussi parlé de la réalité de ces femmes, parce qu'on n'est pas en train, comme elle le dit si bien, de parler ici de béton, mais on est vraiment en train de parler d'accompagnement de ces femmes, de sécurité de ces femmes qui ont le courage, le courage de penser peut-être à s'en sortir. Alors, clairement, je pense à elles.

Je pense aussi à tous les collègues, les parlementaires qui ont travaillé à de nombreuses commissions mais deux particulièrement. On pense, bien sûr, aux jeunes, alors je pense à ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, mais aussi, les collègues, au niveau de la violence sexuelle, je pense à ma collègue de l'Acadie, je pense à ma collègue aussi de Notre-Dame-de-Grâce, et mon collègue de Vimont aussi, et l'ensemble des parlementaires qui ont travaillé à se dire ensemble et collectivement, de façon non partisane : Assez, c'est assez.

Et, quand je vois l'ensemble des rapports et des recommandations et qu'aujourd'hui nous sommes devant une de ces recommandations qui fait partie du rapport du comité d'experts et des parlementaires Rebâtir la confiance, on est en train de parler, bien sûr, d'une des recommandations parmi les nombreuses recommandations, il y en a plus de 190, c'est la 156e, c'est une recommandation qui est forte, bien évidemment.

Alors, je suis aujourd'hui forte et fière de pouvoir avoir le privilège de parler au nom de ces femmes et avec cette équipe extraordinaire de gens qui veulent faire une grande différence et faire en sorte qu'on n'entende plus ce qu'on entend à la télévision et ce que l'on constate aussi sur le terrain. Parce que tous, tous en cette Chambre, nous sommes d'abord et avant tout des députés sur le terrain, à l'écoute de nos citoyens et malheureusement témoins de ces drames qui nous remuent le coeur à chaque fois.

On ne peut pas contester, bien sûr, ce projet de loi, on ne peut que dire : Voilà une bonne nouvelle. On ne peut pas être contre la vertu, on ne peut pas être contre une recommandation de ce rapport excessivement éloquent et porteur. On ne peut pas non plus contester qu'il y a un sérieux coup de barre à donner à notre système de justice au Québec, alors que, comme le nommait ma collègue, les victimes ont témoigné bien trop souvent de tout ce parcours ardu, humiliant, plein de stress, sans dignité, qui fait en sorte que ces victimes revivent encore un autre drame. Alors, il faut changer les choses. Il faut faire en sorte qu'on entoure ces victimes non seulement d'un accompagnement, mais d'une dignité, d'une humanité et d'un respect.

Je sais que, dans ce travail qui est ce travail de parlementaire, et j'espère... Plus tôt dans la journée, j'ai entendu le leader du gouvernement nommer la volonté de pouvoir entendre les groupes, mais, en même temps, les groupes ne sont pas encore confirmés. J'espère de tout coeur, et de tout coeur, qu'il y aura toute cette possibilité et cet espace pour qu'on entende les premiers témoins des drames, les groupes communautaires, en particulier les maisons d'hébergement, mais tous ces acteurs qui sont au premier plan, d'être là au moment de la crise de ces victimes, au moment de leur assurer la sécurité.

Et je sais qu'on a fait des annonces, je sais que le gouvernement fait des annonces, mais, en même temps, nous, quand on est sur le terrain, l'impact, il faut qu'il soit réellement là, parce que cette volonté d'avoir ce projet de loi pour créer un tribunal spécialisé, c'est, bien sûr, une très bonne nouvelle, mais le temps manque, et il faut agir avec urgence, parce que la violence se poursuit. Et, avec le confinement, avec la COVID, la violence, elle est exacerbée dans les maisons et auprès de ces victimes.

Alors, il faut trouver d'autres mesures. Il y en a 190 dans le rapport. Alors, on ne manque pas d'idées et de recommandations fortes. Mais moi, je vous dirai que, dans le chapitre 2, où on parle de l'accompagnement psychosocial, il faut s'assurer qu'entre-temps, dans l'agir maintenant et rapidement, au-delà des annonces et des montants, il faut que l'argent descende sur le terrain, sur le terrain, sur le terrain.

Vous savez, dans ce travail constructif qu'on fait en commission parlementaire, je sais qu'il y aura des questions, parce qu'au-delà de la vertu, de la recommandation et de ce projet de loi il y a bien des détails qui nous manquent. Et on dit : Le diable est dans les détails, mais, pour que ça se concrétise de la bonne façon, il faut qu'on pose des questions. Alors, il faudra voir, dans les questions qui seront posées par ma collègue et par l'ensemble des collègues... il faudra y voir toujours, toujours cette volonté de faire en sorte que le déploiement de ce nouveau tribunal se passe de la meilleure façon pour les victimes.

Où seront les projets pilotes? Est-ce qu'on le sait? On ne le sait pas. Est-ce que si, comme elle le mentionnait, certaines régions sont privilégiées par l'expérience pilote, d'autres seront dans une situation d'inéquité, les citoyens seront dans une inéquité? Il faut le savoir. Quel est le calendrier de réalisation? Quels seront les critères pour choisir les emplacements des projets pilotes? Vous savez, un projet pilote, c'est fabuleux. Je suis la première à être d'accord avec ces expériences qui permettent un déploiement absolument harmonieux à travers tout le Québec, mais encore faut-il qu'ils ne mettent pas de côté des clientèles fragiles, des femmes fragiles qui vivent les mêmes situations d'une région à l'autre. Alors, ces questions-là, elles mériteront d'être posées, parce que la réglementation va suivre et comment ça va être appliqué, mais on n'a aucune idée à quoi ça va ressembler. Alors, ça, je pense que c'est assez fondamental.

La formation des juges aussi, c'est très, très, très important, mais, encore là, on n'a pas de garantie que ça va se passer, parce qu'il y a bien des approbations qui doivent venir avant. La Fédération des maisons d'hébergement, d'ailleurs, le disait : Avec des gens mieux formés, dès le début, la parole des victimes ne sera pas remise en cause. Ça ne veut pas dire qu'elles auront gain de cause, mais au moins elles seront soutenues et entendues. Cette sensibilité, cette compréhension des enjeux que vivent les personnes qui sont victimes de violence conjugale ou de violence sexuelle, la formation, c'est une clé absolument importante. Alors, il faudra qu'il y ait des garanties, il faudra que ça soit au coeur du déploiement.

Donc, les questions seront là dans un but constructif et non pas dans la critique pour faire en sorte que ce projet de loi avance, que ce projet de loi voie le jour et qu'entre-temps, s'il vous plaît, on puisse envisage aussi des solutions qui sont avec la solution de l'urgence, avec la solution... la volonté d'agir. Il faut ajouter d'autres mesures. Il faut s'assurer que ce n'est pas la seule recommandation qui est mise en place, bien qu'elle soit pilier, bien qu'elle soit porteuse. Il faut vraiment se préoccuper de l'ici et maintenant.

Est-ce que c'est suffisant? Moi, vous savez, j'entendais les témoignages des collègues et qui nous touchent beaucoup. J'ai été 19 ans dans le domaine de l'intervention auprès des jeunes et j'ai malheureusement vu de ces drames, de ces jeunes femmes en amour, qui sont en couple, et qui sont victimes de violence, et qui sont dans le déni total. Et, vous savez, avant même qu'on pense au système de justice, il faut sortir ces jeunes femmes là, il faut les sortir de la situation de violence. Elles sont complètement dans la résistance, et ça demande un accompagnement soutenu, ça demande une intervention de tous, et ça prend du temps, et ça prend vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup d'humanité et d'expertise.

• (16 h 50) •

Et c'est pour ça que, l'intervention psychosociale, je ne lâcherai pas le morceau, et je sais que ma collègue ne lâchera pas le morceau, elle le fait déjà de façon absolument extraordinaire, parce qu'il faut vraiment dire à toutes ces victimes et celles qui ne se reconnaissent pas encore victimes, il faut dire à ces femmes, à ces personnes qui vivent de la violence : Le courage, il est difficile, mais, le courage, je l'ai avec toi, et tu n'es pas seule, on est avec toi. Et ça, c'est avant le tribunal, et ça, c'est dans le quotidien, et ça, c'est dans l'urgence de sécuriser. Alors, est-ce que c'est suffisant, le projet de loi? Non, ce n'est pas suffisant.

Je vais vous parler, maintenant, et je vais le faire aussi avec beaucoup d'émotion... Je veux vous parler de Julie. Julie, c'était une jeune maman — elle est toujours jeune, mais elle était plus jeune — une jeune maman de mon comté qui a vécu la violence conjugale et qui a pris tout son courage à deux mains avec ses deux bébés sous le bras, sans diplôme d'études secondaires et sans argent, elle a pris le courage et elle a fui ce foyer de violence. Je ne peux même pas, Mme la Présidente, imaginer tout le courage qu'elle a eu, je ne peux même pas m'imaginer ça, mais elle a repris sa vie en main. Elle a quitté et elle a repris sa vie en main. Imaginez. Elle est retournée sur les bancs d'école, elle a été chercher son diplôme. Elle a occupé des emplois fort intéressants en administration et elle s'est occupée de ses enfants. Elle a fui la violence pour protéger ses enfants et elle a repris sa vie en main. Et, quand elle avait ces postes, ces emplois en administration, elle se disait : Ce n'est pas suffisant, il faut que je fasse plus.

Aujourd'hui, Julie est la coordonnatrice de ma maison d'hébergement dans mon comté et à tous les jours elle aide ces femmes qui vivent la violence qu'elle-même a vécue. Et, vous savez, elle a travaillé fort parce que, le jour où elle est devenue coordonnatrice, les nuits blanches... Elle a lu tout ce qu'elle avait à lire, elle voulait être à la hauteur. Imaginez. Et, quand elle s'est retrouvée coordonnatrice, la COVID arrivait. Alors, non seulement elle devait protéger ces femmes, mais en plus il fallait qu'elle protège ces femmes et de la violence, et de la pandémie, et de la COVID. Mais elle y est parvenue.

Alors, moi, quand je pense à Julie, qui nous inspire, qui doit nous inspirer, j'ai le goût de dire à tous les parlementaires... Et je sais que les gens dans cette Chambre ont du coeur. Ce sont des gens de terrain, sensibles à toutes ces mauvaises nouvelles qu'on entend et qui nous déchirent le coeur à chaque fois. J'ai le goût de vous dire aujourd'hui : J'ai le goût que, Julie, son courage soit au coeur de tous les travaux qui vont suivre, que le courage de toutes ces Julie du Québec soit au coeur des travaux qui vont suivre et qu'ensemble on trouve des solutions pour maintenant et pour plus tard, pour ne plus jamais qu'elles vivent ce qu'elles ont à vivre, pour qu'on soit capables, comme Julie, de dire à toutes ces femmes : Tu n'es pas seule, on est là. Je prends une partie de mon courage et je te le donne, on va faire ça ensemble. On va sécuriser les enfants et on va faire en sorte que tu vas pouvoir être dans un environnement où tu es bien, en sécurité, où tu reprends ta vie en main. Je nous souhaite toutes les Julie pour la suite des choses. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Fabre. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Chapleau.

M. Mathieu Lévesque

M. Lévesque (Chapleau) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour. Bonjour également, là, aux collègues de la partie ministérielle, également aux collègues de l'opposition. Un touchant témoignage.

Donc, je suis très heureux d'être ici, là, pour représenter le ministre de la Justice afin de procéder évidemment à l'adoption, là, du principe du projet de loi n° 92, qui vise la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières. J'en profite donc pour le remercier pour cette opportunité et également de sa confiance.

Je suis vraiment fier de pouvoir m'exprimer sur cet important projet de loi qui était attendu et réclamé, Mme la Présidente, par de nombreuses personnes victimes ainsi que par les divers groupes oeuvrant auprès d'elles. Le gouvernement a rapidement mis en branle une série de mesures concertées pour venir en aide aux victimes de violence sexuelle ou de violence conjugale, suivant ainsi un bon nombre des recommandations formulées dans le rapport Rebâtir la confiance, qui a été déposé en décembre dernier. Le projet de loi n° 92 s'inscrit dans cette volonté d'apporter une aide concrète aux personnes victimes et répond à plusieurs recommandations du rapport, évidemment, par le comité d'experts sur l'accompagnement des personnes victimes d'agression sexuelle et de violence conjugale.

Comme vous le savez, à la suite du dépôt de ce rapport, le ministre a décidé de mettre rapidement sur pied, en février dernier, un groupe de travail portant sur le concept de tribunal spécialisé en violence sexuelle et en violence conjugale. Son mandat était d'évaluer et déterminer les éléments nécessaires à la mise en place d'un tel tribunal spécialisé au Québec. Et, comme le recommande, justement, le groupe de travail, nous proposons de procéder d'abord par l'implantation de projets pilotes dans certains districts judiciaires du Québec. Ces projets pilotes permettront de répondre aux besoins spécifiques des personnes victimes de violence sexuelle et de violence conjugale. Cette période d'essai est nécessaire, évidemment, avant de déployer le tribunal dans l'ensemble ou du moins sur l'ensemble du territoire québécois, le but étant de tester et d'ajuster au fil du temps l'ensemble des mesures qui vont être spécifiques à ce tribunal, voire même d'en ajouter certaines au besoin. La mise en oeuvre de ces projets pilotes sera l'occasion de revoir chacune des étapes du parcours judiciaire des personnes victimes de ces types de violence. À l'heure actuelle, le nombre de personnes victimes qui se détournent du système de justice par manque de confiance est trop élevé. Nous avons confiance que ces projets pilotes permettront aux personnes victimes de se sentir, justement, en confiance, sécurisées et appuyées tout au long de leur parcours judiciaire. Par exemple, nous prévoyons adapter les salles d'attente et les salles des victimes afin de les rendre plus accueillantes et sécurisantes. De plus, en réaménageant les aires de circulation dans les palais de justice, nous souhaitons évidemment permettre à la personne victime de ne pas croiser l'accusé à l'extérieur de la salle d'audience. Nous améliorerons aussi considérablement l'accessibilité des dispositifs d'aide au témoignage. On pense, entre autres, au paravent qui permet à la personne victime de témoigner sans voir l'accusé, aux salles de visiocomparution et à l'accompagnement par une personne de confiance. Le tribunal spécialisé va permettre que les salles d'audience soient exclusivement réservées aux causes de violence sexuelle et de violence conjugale, ce qui va évidemment favoriser un sentiment de stabilité chez les différents acteurs tout en facilitant la gestion des différents dossiers.

Ces mesures s'ajoutent d'ailleurs aux annonces d'investissements majeurs au DPCP qui vont permettre l'embauche de procureurs entièrement et uniquement attitrés, c'est-à-dire, aux causes de violence sexuelle et conjugale, ce qui va rendre notamment possible le principe de la poursuite verticale. Grâce à ces mesures, les personnes victimes bénéficieront d'une plus grande stabilité, soit un seul procureur et une seule salle d'audience tout au long des procédures, accompagnées par la même personne qui, souvent, va permettre de créer un lien de confiance avec la victime. C'est souvent ce qui est reproché d'ailleurs actuellement face au système de justice, qui peut paraître un peu froid. Et donc on veut permettre justement à ces victimes d'être bien accompagnées, d'être dans un milieu qui est sécuritaire où elles peuvent justement s'exprimer et faire valoir leurs droits.

L'autre importante mesure présentée dans ce projet de loi est évidemment l'introduction d'une formation obligatoire des juges en matière de violence sexuelle et violence conjugale. Cette formation obligatoire serait applicable à l'ensemble des candidats à la fonction de juge et des juges retraités qui désirent exercer de nouveau des fonctions judiciaires. Ainsi, tout comme le personnel judiciaire et les procureurs de la couronne, les juges seront mieux formés sur les réalités propres, évidemment, qui concernent les violences sexuelles et la violence conjugale. Nous devons donc adapter nos tribunaux pour que les personnes victimes de violence sexuelle et de violence conjugale s'y sentent en sécurité, et en confiance, et aussi bien accompagnées.

Nous comptons sur la collaboration de tous nos collègues, évidemment, dans ce dossier prioritaire pour le gouvernement comme pour l'ensemble la population québécoise. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

• (17 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Chapleau. Maintenant, la prochaine intervention sera celle de Mme la députée de l'Acadie.

Mme Christine St-Pierre

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. Il me fait un grand plaisir de prendre la parole en cette Chambre pour parler du projet de loi n° 92, projet de loi qui est très important, on le sait, et je pense que tout le monde est conscient qu'il faut aller de l'avant avec ce projet de loi.

Cependant... Bien sûr, lorsqu'on regarde le fait que le projet de loi a été déposé, je pense que tout le monde a applaudi cette décision-là du gouvernement de faire ce pas en faveur des victimes de violence conjugale et victimes de violence sexuelle. Cependant, il faut aussi faire en sorte qu'on regarde plus dans le détail qu'est-ce qui n'a pas été proposé dans le projet de loi. Et ma collègue, la députée de Verdun l'a très bien exprimé tout à l'heure, il y a des zones d'ombre, il y a des éléments qui suscitent encore des questions et il y a des interrogations aussi quant à la poursuite des travaux que va effectuer ce tribunal spécialisé.

Tout d'abord, le projet de loi, bien sûr, établit le fait qu'il y aura le tribunal, et, bien sûr, on s'en réjouit, mais le projet de loi ne donne pas d'échéancier, parle de projets pilotes, projets pilotes qui vont durer combien de temps? À quel moment on va étendre le tribunal spécialisé à la grandeur de la province? On est silencieux là-dessus, et je pense que c'est sur cette question-là qu'il faut insister, Mme la Présidente. Il faut insister pour que ça aille de l'avant. Il faut insister pour avoir le plus d'information possible sur la réalisation de ce projet.

On en a parlé, bien sûr, de Rebâtir la confiance, et tout à l'heure, lorsque j'écoutais ma collègue de Verdun montrer le rapport de Rebâtir la confiance, en fait, je ne l'avais pas vu imprimé, je l'avais bien sûr vu sur Internet, mais ça ne donne pas l'idée de l'ampleur de la brique. 190 recommandations, un travail incroyable, un travail qui a été fait de façon très rigoureuse et très minutieuse. Et ce rapport-là, bien sûr, ne doit pas se retrouver sur les tablettes. Il y a 190 recommandations, le projet de loi est l'une de ces recommandations.

Il y a eu aussi, on en a parlé beaucoup, j'ai eu l'honneur d'être vice-présidente de la commission, c'est le rapport de la commission sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Ma collègue de Repentigny a beaucoup travaillé dans ce dossier-là, a beaucoup plaidé pour qu'il y ait la création de cette Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Tout à l'heure, je l'écoutais dire qu'elle se réjouissait que plusieurs de ses idées se sont retrouvées dans les recommandations. Cependant, dans le projet de loi, on ne fait pas référence aux victimes d'exploitation sexuelle. Les victimes d'exploitation sexuelle ne sont pas nommément nommées dans le projet de loi. Et je pense que ça, il faut qu'on le retrouve. Il faut qu'on retrouve les victimes d'exploitation sexuelle. On parle de violence sexuelle, on parle de violence conjugale, mais les victimes d'exploitation sexuelle doivent se retrouver dans ce projet de loi. Elles doivent se retrouver, pourquoi? Parce qu'elles aussi, ces victimes-là, elles ont besoin d'entendre un message positif et d'entendre le message que le gouvernement a compris leur réalité. Et ma collègue de Repentigny a très, très, très bien décrit, tout à l'heure, ce qui se passe quand une personne, une jeune femme, puis il y a des garçons aussi, et qu'une jeune femme ou un jeune garçon est victime d'exploitation sexuelle. C'est une violence sexuelle. Elle est victime d'un proxénète et elle doit, elle aussi, être accompagnée.

Et je peux vous parler du cas de Lau Ga, qui a été largement publicisé, Lau Ga qui a dénoncé son proxénète au mois de février 2020. Lau Ga a pris tout son courage... elle a pris son courage et elle est allée voir la police, parce que, si elle ne le faisait pas, elle allait être assassinée, elle allait mourir.

Je l'ai rencontrée cet été, on a pris le lunch ensemble, et j'avais devant moi une jeune femme vraiment impressionnante, déterminée, qui veut s'en sortir, qui veut se bâtir un avenir, mais qui, malheureusement, ne se sent pas accompagnée. Elle ne se sent pas accompagnée dans le processus judiciaire.

Et tenez-vous bien, Mme la Présidente, savez-vous à quel moment le procès va avoir lieu? Savez-vous? Non? Bien, je vous le dis, à quel moment, ce ne sera pas avant le mois d'avril 2022. Deux ans plus tard, le procès va avoir lieu. Pendant deux ans, elle, elle est là, accompagnée du mieux... les procureurs l'accompagnent du mieux qu'ils le peuvent, mais il n'y a personne pour l'accompagner. Alors, elle vit avec ce stress-là, elle vit avec l'importance de se rebâtir un avenir, elle vit avec le stress qu'elle va témoigner uniquement au mois d'avril 2022.

Mettons-nous dans sa peau. Et elle a dit : Moi, là, je voudrais que ça aille plus vite puis je voudrais être mieux accompagnée. Donc, moi, je dis à ma collègue de Repentigny, qui a énormément d'influence auprès du caucus, je lui dis qu'elle aille regarder le ministre de la Justice dans les yeux, là, puis qu'elle lui dise : Jeune homme, le terme «exploitation sexuelle» doit se retrouver dans ce projet de loi. C'est important. Puis je pense que les 58 recommandations du rapport que nous avons déposé, 58 recommandations unanimes, donc, tout le monde a pris connaissance... ceux de la commission, bien sûr, mais ensuite les collègues ont pris connaissance du rapport, et je pense qu'il faut absolument faire en sorte qu'on puisse donner à cette victime-là, Lau Ga, mais les autres aussi cet espoir d'être bien accompagnée.

Le projet de loi, aussi, a amené certains commentaires de la part des groupes de femmes, et il y a eu... bien sûr, il a été bien accueilli, mais on se pose des questions. Ma collègue en a parlé tout à l'heure, les groupes d'aide aux femmes veulent être consultés dans la création du tribunal spécialisé en matière de violences conjugales et sexuelles. Elles disent qu'elles doivent être consultées, qu'on leur a donné l'engagement qu'elles seraient consultées puis qu'elles n'ont pas l'impression qu'elles vont être consultées. Ça, il faut absolument corriger cet état de fait là.

Il y a également les Femmes autochtones qui ont levé un petit peu... ont levé le drapeau, là, les femmes... Mme Viviane Michel, elle dit : Toutefois, il doit y avoir une reddition de comptes quant aux recommandations de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, reddition de comptes de la commission Viens, il faut également qu'il y ait une reddition de comptes du rapport Rebâtir la confiance. Et elle dit : 11 des 190 recommandations de ce dernier rapport, qui a mené au projet de loi n° 92, visant spécifiquement ou mentionnant les populations autochtones...

Alors, il faut absolument qu'on retrouve aussi quelque chose qui envoie un message aux femmes autochtones, et de faire en sorte que les femmes autochtones soient adéquatement informées, dans leur langue, sur leurs droits et le système de justice, qu'elles soient accompagnées lors du processus judiciaire et qu'elles soient protégées des représailles. Tout cela fait partie des enjeux prioritaires identifiés par Mme Michel. Donc, il y a là aussi un drapeau qui dit : Bon, bien, qu'est-ce qu'on fait dans les cas de violence du côté des femmes autochtones pour satisfaire leurs attentes? Il faut tenir compte de tout cela.

Mais ce qui, moi, me préoccupe, et je crains... mais je me dis : Bon, il y a quand même des intentions derrière le projet de loi, je crains qu'on se retrouve avec des règlements qui n'ont pas été abondamment discutés avec les personnes qui sont concernées. Je crains qu'on se retrouve avec un projet de loi qui soit, à sa face même, un beau projet de loi, mais, quand on va dans le détail, et le diable est dans les détails, quand on va dans le détail, on se dit : Un instant, qu'est-ce qui va arriver? Combien de projets pilotes? Combien de temps, ces projets pilotes? Quelles sont les dates des projets pilotes et à quel moment? Quel est l'échéancier du gouvernement? En fait, c'est quoi, le tableau de bord? C'est quoi, la feuille de route? À quel moment on va mettre en place les projets de loi... les projets pilotes? Où on va mettre en... Quels sont les endroits où on va mettre en place ces projets pilotes? Comment on va les établir, ces projets pilotes? Et ensuite à quel moment, quel est l'échéancier pour établir à la grandeur du Québec ce tribunal spécialisé? Ça, on n'a pas de réponse, et moi, ça m'inquiète un peu parce que je crains qu'on dise : Bien, on va le faire, le projet de loi est là, on va définir les projets pilotes, mais attendez, on ne donnera pas de détails parce que ça ne vous regarde pas, puis on va mettre ça dans les règlements, puis les règlements, bien, on les adopte en Conseil des ministres, puis après ça, bien, vous avez quelques jours pour les commenter, puis on va tenir compte de vos commentaires, peut-être, peut-être pas, peut-être que oui, peut-être que non, puis après ça, on va mettre ça en marche.

Ça ne peut pas fonctionner comme ça parce qu'on parle de rebâtir la confiance, puis rebâtir la confiance, ça veut dire de la transparence. Rebâtir la confiance, ça veut dire une feuille de route, ça veut dire : Voici comment nous allons le faire. Et je pense qu'on doit absolument éclairer ceux et celles qui croient dans ces tribunaux, qui croient dans cette formule. On doit les éclairer sur la suite des choses.

• (17 h 10) •

Une grande partie du projet de loi touche les juges. Je veux bien qu'on touche la formation des juges puis s'engager à prendre une formation. Puis c'est très important que les juges comprennent que, de temps en temps, il faut qu'ils aillent sur le terrain voir comment ça se passe puis entendre un peu les témoignages de ceux qui vivent ou qui aident ces personnes qui sont victimes de violence sexuelle, mais il manque un volet, à mon avis, dans ce projet de loi là, qui touche véritablement les détails de ces projets pilotes, et comment on va les mettre en place, et avec quels moyens, quels sont les moyens aussi qu'on va déployer.

Puis les régions, chaque... il y a des régions qui ont des réalités différentes. Comment on va les choisir, ces régions-là? Qui va décider quelles régions on va privilégier par rapport à une autre? Et ma collègue l'a si bien dit, ça veut dire qu'il va y avoir, dans une région, des victimes qui n'auront pas d'accompagnement, donc qui vont avoir moins de services que d'autres victimes dans des régions où il va y avoir ces projets pilotes, où il va y avoir l'accompagnement.

Moi, je pense que le gouvernement devrait le faire dans l'ensemble du Québec, en donnant les moyens, en donnant les ressources et en faisant en sorte qu'on s'assure que tout ce processus-là soit accessible à toutes les victimes le plus rapidement possible. Et ce n'est pas ce qu'on retrouve dans ce projet de loi. Je pense qu'on doit absolument se dire : Nous avons la volonté de le faire, on a dit qu'on le ferait. Les victimes ont mis leur espoir en nous, et il faut absolument qu'on leur donne l'heure juste. C'est une question d'heure juste.

Puis je fais une autre petite parenthèse sur le rapport sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Le rapport, le 3 octobre, va avoir 10 mois, 10 mois. Bien, en 10 mois, 58 recommandations, il y a très, très peu de recommandations qui touchent les victimes, qui touchent la sensibilisation, qui touchent la prévention. On a parlé de répression, il y a eu des sommes qui ont été investies en répression. On a parlé des tribunaux, mais on n'a pas les détails. Mais tout l'accompagnement, l'accompagnement des victimes, l'accompagnement des parents, comment on les aide à se refaire une vie, comment on les accompagne dans l'hébergement, tout ça a été vraiment détaillé pendant les travaux de la commission, en long et en large.

10 mois plus tard, c'est la ministre de la Sécurité publique et vice-première ministre qui a eu le mandat du premier ministre de mettre en application le rapport, avec tous ses collègues ministres qui sont identifiés dans le rapport, parce qu'il y a beaucoup de recommandations qui touchent plusieurs ministres, puis, bien, on attend. On attend toujours. Alors, je compte sur ma collègue la députée de Repentigny pour donner un petit coup de barre à ses collègues, et je pense qu'elle sera capable de le faire de façon très claire. Je compte sur elle.

L'autre chose qui m'intrigue un peu aussi, mais je ne suis pas une experte, mais je veux juste soulever la question, puis je pense que c'est important de le faire, le projet de loi parle de violence sexuelle et conjugale, et le ministre, lors du point de presse, a dit : Près d'un crime sur la personne sur trois est commis dans un contexte de violence conjugale. Un crime sur la personne sur trois au Québec est commis dans un contexte de violence conjugale. Donc, j'ai demandé à ce qu'on me sorte les statistiques de combien de crimes sur la personne sont commis, au Québec, ont été commis, au Québec, dans les années antérieures. On m'a donné les statistiques... On a les statistiques 2018‑2019. 2019, il y a eu 87 691 crimes contre la personne au Québec. Le ministre dit : Il y a un crime sur la personne sur trois qui est commis dans un contexte de violence conjugale. Ça veut dire qu'il y aurait 30 000 crimes, au Québec, commis dans un contexte de violence conjugale. C'est énorme. Ça, c'était pour 2019. Alors, ça va prendre énormément d'énergie. Ça va prendre beaucoup de moyens pour mettre en place ces tribunaux spécialisés. J'espère qu'on va y arriver. Je le souhaite ardemment. Mais la quantité ici de... le nombre... le volume est vraiment, vraiment important. Alors, il doit y avoir des réponses à ces questions-là.

Et on voit aussi, je fais une autre parenthèse... on voit qu'entre 2018 et 2019 les crimes contre la personne ont énormément augmenté, on parle de 5 000 crimes de plus en 2019 par rapport en 2018. Alors, il y a un phénomène d'augmentation de la violence, augmentation de violence conjugale, très certainement. Et la pandémie a sûrement exacerbé aussi des tensions et a pu... a mené, on le sait, c'est documenté, a mené à des cas de violence conjugale... à plus de cas de violence conjugale.

Donc, ça va être... le travail va être énorme, et on veut que ce travail-là porte fruit. On veut que le projet de loi puisse aboutir correctement, mais on veut aussi que ça ne demeure pas que des bonnes intentions. Un message, on voit le titre dans le journal, c'est beau, beau, beau, un pas vers le tribunal spécialisé, le tribunal spécial spécialisé est créé, la loi est adoptée, puis après ça on passe à autre chose. Et ça, je crains cela.

Alors, je l'aurai dit ici, devant ce micro, à l'Assemblée nationale. Je l'aurai dit devant tous mes collègues de l'Assemblée nationale. Je ne dis pas que j'ai une boule de cristal puis que je suis plus fine qu'une autre, ce n'est pas le cas, mais je pense qu'il faut soulever ces questions-là, et c'est le rôle de l'opposition officielle.

Puis ça va être le rôle de ma collègue la députée de Verdun, qui est responsable du dossier de la condition féminine, et elle va vraiment amener, en commission parlementaire, à l'article par article, ces sujets-là pour qu'on ait le plus de détails possible. Et je pense qu'elle l'a très bien exprimé tout à l'heure, il faut absolument en savoir plus sur l'application de la loi, les détails, comment tout ça va se faire, parce que c'est une question de transparence, c'est une question de confiance. Les victimes ont mis leur confiance en nous, les parlementaires. Les victimes s'attendent à plus que ce projet de loi, qui est un excellent pas, qui est un bon pas dans la bonne direction, mais les victimes s'attendent à plus, et moi, je m'attends à plus.

Et j'aimerais, à la fin de ce processus-là, dire mission accomplie, dire au ministre : Vous avez compris le message. Les collègues qui nous entendent ici, en commission, à l'Assemblée nationale, vont aussi pouvoir lui dire à quel point ils ont compris, eux aussi, que le projet de loi doit aller plus loin, parce que les victimes le méritent puis les victimes s'attendent à ce qu'on continue de travailler pour elles.

Je termine en disant que... et ça a été évidemment beaucoup élaboré, puis je pense à Patricia Tulasne, beaucoup élaboré dans Rebâtir la confiance. Ici, on parle, lorsque les accusations sont déposées, on parle de causes qui ont été analysées par le directeur des poursuites pénales et criminelles, mais, avant ça, si le directeur des poursuites pénales et criminelles décide qu'il n'y a pas de dépôt d'accusation, il y a tout l'accompagnement de la victime dans le processus d'enquête policière. Et ça, Mme la Présidente, il faut absolument qu'on trouve le moyen de mieux accompagner les victimes lorsqu'elles sont dans le processus d'enquête policière, parce qu'on voit des victimes qui ressortent de ce processus-là excessivement déprimées, déçues, parce qu'elles ont l'impression qu'on n'a pas cru, on n'a pas cru leur histoire, on n'a pas cru ce qu'elles avaient vécu parce qu'il n'y a pas d'accusation de portée, et il va falloir qu'un jour on réponde à ces questions-là.

Alors, je vous remercie beaucoup. Je pense que c'est un projet de loi majeur. Et nous comptons sur l'ensemble des députés pour pouvoir le bonifier et envoyer ce message aux victimes : Nous vous croyons, nous, à l'Assemblée nationale. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, Mme la Présidente. Je suis vraiment heureuse de pouvoir prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi là, déposé par le ministre de la Justice récemment.

C'est quand même une démarche exceptionnelle à laquelle on a assisté dans les dernières années, la création du comité transpartisan, du comité d'experts, qui ont décidé de travailler ensemble vraiment en réunissant toutes les formations politiques pour rétablir la confiance des victimes envers le système de justice.

À ce moment-là, on voulait répondre à l'appel à l'aide, en fait, à la grande détresse des victimes de violence sexuelle, de violence conjugale qui dénonçaient, sur les réseaux sociaux, toute la douleur qu'elles avaient eue à traverser le système de justice. Plusieurs ont témoigné que ce processus-là avait été aussi pire, sinon pire que l'agression qu'elles avaient subie.

Et, pour moi comme pour mes collègues, c'était vraiment inadmissible de constater ça, à quel point les victimes étaient revictimisées à travers leur passage dans le système de justice, à quel point elles avaient perdu espoir, perdu confiance envers ce système-là. Puis la raison pour laquelle on s'est réunis ensemble, avec mes collègues, c'est vraiment dans l'objectif de reconstruire cette confiance-là. Donc, on a réuni une vingtaine d'experts pour proposer des réponses à l'appel à l'aide des victimes, et ça a été vraiment des mois de travail.

• (17 h 20) •

Juste un petit rappel, là, de ce qui a mené au projet de loi qu'on va étudier prochainement. D'abord, oui, il y a eu une vingtaine d'experts qui ont été réunis, d'experts et d'expertes. Ensuite, ce comité-là a voulu aller prendre le pouls vraiment de tous les acteurs sur le terrain des victimes.

Donc, il y a eu 11 jours d'audience dans cinq villes du Québec : à Sept-Îles, Gatineau, Montréal, Rouyn-Noranda, Québec. Des audiences ont eu lieu, lors desquelles il y a une centaine d'organismes qui sont venus témoigner des problèmes vécus dans le système de justice ou à travers tout le processus vécu par les victimes, qui ont proposé des pistes de solution. Il y a 56 mémoires qui ont été déposés. Il y a une consultation Web, qui a duré plus d'un mois aussi, à laquelle plus de 1 500 victimes ont participé. C'est de ça dont on parle quand on parle du rapport Rebâtir la confiance. C'est sur ça que ça repose. Aussi, l'analyse de plusieurs rapports qui avaient été déposés et malheureusement souvent tablettés dans les dernières années, des rapports en lien avec les violences sexuelles et conjugales, qui ont été épluchés pour finalement rédiger les 190 recommandations qui ont été déposées dans le rapport, là, en décembre dernier.

Donc, c'est dire à quel point, là, ça repose sur des bases extrêmement solides, un travail très rigoureux qui a déjà été effectué en amont. Ça fait déjà neuf mois que ce rapport-là a été déposé, et les milliers de victimes au Québec attendaient avec impatience que le gouvernement se mette au travail pour appliquer les recommandations.

Alors, je ne vous surprendrai pas en vous disant qu'on accueille très, très positivement ce projet de loi là qui vise à mettre en place des tribunaux spécialisés et aussi à imposer une formation aux juges. Je suis certaine qu'on va réussir à adopter ce projet de loi là rapidement pour qu'ensuite le ministre de la Justice puisse entreprendre ce très grand chantier de longue haleine avec la collaboration de tous les acteurs impliqués, qui vont devoir être impliqués, là, à chaque étape du processus.

Mais, évidemment, les tribunaux spécialisés, c'est une fraction du travail qui doit être accompli pour que ça change. Il ne suffira pas de les créer. Pour qu'un tribunal soit vraiment spécialisé, il faut une intégration des services, et ça, ça ne relève pas nécessairement seulement du ministre de la Justice, par exemple. Il faut aussi travailler sur le traitement des plaintes en amont du système de justice, comme en a parlé ma collègue, là. Avant qu'on se rende aux tribunaux, il faut également améliorer les services qui sont offerts, l'accompagnement et la formation de tous les intervenants.

Donc, ce n'est pas seulement par les tribunaux spécialisés que ça va passer. C'est seulement un maillon de toute la chaîne, là, dont on est en train de parler avec ce projet de loi là, et j'espère vraiment que c'est le premier pas. J'espère que ce n'est qu'un seul pas, là, dans toute la démarche qui doit être faite, parce que, pour la rétablir, la confiance, il va falloir mettre en oeuvre les 190 recommandations. Puis les victimes, elles s'en souviennent que le premier ministre, ici, au salon bleu, a pris position en faveur de la mise en oeuvre des 190 recommandations. Les victimes s'en souviennent, elles vont surveiller ça de près, avec beaucoup d'assiduité.

Donc, nous, ici, on s'attend à ce qu'il y ait des suites au rapport, mais des milliers de victimes et leurs alliés partout à travers le Québec s'attendent aussi à ça. Et ça va prendre un suivi un petit peu plus serré, je pense, parce que les victimes veulent savoir où on en est pour chacune des 190 recommandations. Elles voient, de temps à autre, que certains pas sont franchis. Par exemple, elles applaudissent le dépôt de ce projet de loi, mais il y a encore un flou important sur bon nombre des recommandations et aussi sur l'échéancier que se donne le gouvernement pour mettre en oeuvre l'ensemble des recommandations.

Donc, moi, je voudrais lancer une invitation au gouvernement, là, aujourd'hui, d'être transparent sur la mise en oeuvre de l'ensemble des recommandations du rapport, de nous dire, de dire aux victimes, de rendre accessible cette information-là, à savoir où on en est pour chacune des mesures, combien de temps on pense que ça va prendre pour chacune des mesures, pour que les victimes sachent à quoi s'en tenir puis qu'on puisse vraiment travailler à rebâtir cette confiance-là, qu'elles n'aient pas à multiplier les courriels, les demandes d'information, poser des questions tout le temps pour savoir où on en est. Vraiment, pour rebâtir la confiance, ça passe par davantage de transparence.

Donc, c'est un appel que je lance au gouvernement. Je suis convaincue que les différents ministres concernés par le rapport sont au travail, mais on a besoin de savoir comment il avance, ce travail-là. Je vous remercie.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Mme la Présidente, afin de permettre à la députée de Joliette de prendre la parole, étant donné qu'elle a dû s'absenter, là, pour des raisons familiales, conformément aux dispositions de l'article 100 du règlement, je fais motion afin d'ajourner le débat sur le principe du projet de loi n° 92, Loi visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces matières. Voilà.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Donc, en application de l'ordre spécial, je vais inviter maintenant les leaders de chaque formation politique à m'indiquer le vote pour leurs formations pour cette motion. M. le leader du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Mme la députée de Verdun?

Mme Melançon : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Mme la leader de la deuxième opposition?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Donc, cette motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

Ajournement

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, je fais motion afin d'ajourner nos travaux à demain, mercredi, 9 h 40.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, nous allons refaire le même processus, nous allons voter. M. le leader du gouvernement?

M. Schneeberger : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Mme la députée de Verdun?

Mme Melançon : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?

Mme Labrie : Pour.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie.

En conséquence, nous ajournons nos travaux au mercredi 22 septembre 2021, à 9 h 40. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 26)