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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 6 juin 1990 - Vol. 31 N° 33

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement


Journal des débats

 

(Onze heures vingt-quatre minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des équipements entreprend ses travaux. Le mandat de la commission à cette séance est de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Non, Mme la Présidente, il n'y a pas de remplacements.

La Présidente (Mme Bélanger): Le premier groupe à entendre ce matin, c'est la Société pour vaincre la pollution, représentée par M. Daniel Green. Vous êtes là, M. Green?

M. Green (Daniel): Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez 20 minutes pour faire votre exposé, pour suivre d'un débat, 20 minutes du côté ministériel et 20 minutes du côté de l'Opposition.

M. Green: Merci bien.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Green, vous avez la parole.

Société pour vaincre la pollution

M. Green: Merci. Alors, pour les législateurs qui ne connaissent pas la Société pour vaincre la pollution, on a été créé en 1970. On s'occupe de la problématique des toxiques dans l'environnement au Québec, donc, depuis plus de 20 ans. La Société pour vaincre la pollution a le plaisir aujourd'hui de venir présenter quelque chose qu'on avait proposé en 1988. On trouve ça très intéressant. La SVP propose quelque chose et le législateur voit qu'on avait raison et adopte un projet de loi. On est bien contents.

En 1988, la SVP, évidemment, a fait le bilan de la problématique de la contamination. Ici, au Québec, on a évidemment à peu près 300, 400 sites de déchets dangereux, on a à peu près 3500 établissements industriels. Avant Balmet, avant Eldorado à Duparquet, avant Saint-Amable, avant Saint-Basile, il y a eu évidemment des sites qui auraient pu nous dire qu'est-ce qu'on aurait pu faire pour éviter les Balmet, Saint-Amable, Eldorado, etc. Par exemple le site de LaSalle Coke, Gaz Métropolitain a acheté un terrain de LaSalle Coke, le terrain était contaminé par l'ancien propriétaire. Gaz Métropolitain se trouvait à hériter des déchets et puis il y a eu un déversement en tranchée. Il y a eu une enquête de la Sûreté du Québec. Ça s'est retrouvé en cour criminelle, un acte d'accusation, méfait privé, parce qu'il y a eu connivence entre Gaz Métropolitain et la compagnie. L'accusé a été libéré et Gaz Métropolitain a dû dépenser quelques millions de dollars pour nettoyer son terrain.

Je me souviens, quand j'ai rencontré le ministre de l'Environnement du temps, j'avais la cassette du jugement et j'ai dit: II faut que ça change, on ne peut plus permettre à des industriels de quitter leurs sites de déchets dangereux, de laisser ces sites de déchets dangereux être vendus au plus bas prenant et là se retrouver avec un développement domiciliaire. On l'a vu dans le cas de Sherwin Williams à Pointe Saint-Charles, un site fortement contaminé. On le vend à rabais. Le "développeur" l'achète. On construit des condos. On découvre que c'est contaminé. Le "développeur" n'a pas d'argent. Le projet arrête. Les gens qui ont acheté leur condo d'avance sont devant rien. Scandale! Je pense qu'on appuie, à la Société pour vaincre la pollution, l'initiative du gouvernement. On croit qu'il est temps et qu'il était temps que l'État du Québec se dote d'un même régime de protection des sols contaminés ou d'un programme d'intervention auprès des sites industriels contaminés de la même façon que d'autres sociétés l'ont fait dans le monde. On parle notamment des Pays-Bas, en Hollande par exemple, il y a un programme très sophistiqué. On parle d'un programme qui leur coûte, qui va leur coûter dans cinq ans autour de - tenez-vous bien - 5 000 000 000 $ pour décontaminer les sites. Aux États-Unis, on parle d'un programme de 8 000 000 000 $. Dans des États un peu plus petits, on parle de dépenses autour de 500 000 000 $ par an, dépensés par les compagnies pour nettoyer leur site.

Pourquoi est-il important, pour le gouvernement du Québec, d'adopter une telle réglementation? Par équité financière. Ça nous coûte très cher, nous, les payeurs de taxes, d'être obligés, après le fait, de venir décontaminer un site industriel quand le propriétaire soit fait faillite ou disparaît. Évidemment, le projet de loi tend vers cette direction. On parle d'identifier des activités qui peuvent polluer un terrain. On parle, avec des textes réglementaires assez techniques, des différentes substances qui peuvent contaminer. On demande, par exemple, la détermination d'un site, l'émission d'une ordonnance ordonnant au propriétaire du site de nettoyer et la publication d'un avis, le dépôt de l'avis au greffier, au Bureau du greffe municipal, etc. Autrement dit, ce qu'on tente de créer

actuellement au Québec, c'est qu'on essaie que tout le monde soit au courant quand il y a un site contaminé pour éviter des problèmes. Autrement dit, c'est qu'on... J'ai toujours dit qu'une façon de régler les problèmes de pollution au Québec, c'est d'augmenter la transparence de la connaissance des zones contaminées. Je pense que ce projet de loi, évidemment avec certaines modifications, pourrait donner justement le droit à tout Québécois, à toute Québécoise de savoir si elle ou il demeure à côté d'une activité industrielle qui risque de contaminer son droit à un environnement sain.

Plus spécifiquement, donc, dans le projet de loi, on avait dit, en 1988, qu'est-ce qu'un projet de loi de la sorte pourrait contenir? On avait mentionné que le ministère devait tenir une liste des activités susceptibles de polluer des terrains: c'est dans le projet de loi. On avait suggéré des éléments déclencheurs pour des activités du ministère, dans le but d'éviter des futures Balmet, des activités déclencheurs. C'est qu'une fois qu'on a établi la liste de toutes les compagnies, que ces compagnies listées soient obligées, finalement, d'aviser le ministère des fermetures. Il n'est pas clair dans le projet de loi que le ministère va avoir un système pour suivre ces compagnies susceptibles de contaminer des sols, et quand il y a un changement d'un régime administratif ou un changement d'un régime de propriétaire, etc., un élément déclencheur. Il faut qu'une lumière s'allume au ministère de l'Environnement, et cette lumière-là, pour une fois, ne sera pas une lumière parce que le feu est pris, mais ce sera une lumière qui va dire: Écoutez, il y a un changement autour du régime d'opération de cette compagnie-là. Il faut intervenir.

Donc, il faudrait trouver dans le projet de loi un élément déclencheur. C'est ce qu'on a fait au New Jersey. Il ne faut pas oublier que le New Jersey a un projet de loi similaire depuis 1983. Depuis 1983, on y a identifié tous les sites; toutes les industries sont codées et on demande aux industries, au niveau préalable, de déposer leur plan de décontamination à la fermeture de l'usine. L'État du New Jersey va même encore plus loin, il demande à un établissement industriel de déposer en garantie une somme d'argent qu'on pourrait évaluer comme étant le coût de ce qu'on appelle en anglais "decommissioning" ou le nettoyage finalement du site industriel. Il faudrait peut-être prévoir ça finalement dans votre projet de loi, dans notre projet de loi.

Organiser un régime où, finalement, le ministère aurait le pouvoir d'exiger des compagnies qui vont être listées comme des compagnies susceptibles de polluer les sols, au préalable, des sommes en garantie. Il y a des intervenants, je pense que c'étaient des DSC, qui ont parié par exemple d'une assurance environnementale. Le concept est bon. À la SVP, ça fait cinq ans qu'on propose la création d'un fonds d'intervention toxique au Québec ou un fonds d'intervention monétaire. On évalue qu'une ponction de 0,5 % sur la valeur des ventes du secteur pétrochimique et industriel au Québec pourrait générer dans les coffres du gouvernement du Québec, évidemment dans un fonds spécial, autour de 500 000 000 $ dans cinq ans. Ce n'est pas une taxe permanente; la taxe s'arrête. On appelle ça une clause crépusculaire dans notre proposition.

C'est ce que les États-Unis ont fait, les États-Unis sous Ronald Reagan. Maintenant, ils ont un fonds de 8 000 000 000 $ généré à peu près à 80 % par les producteurs de déchets dangereux. On est contents évidemment que le législateur ait déposé en même temps l'avant-projet de règlement. Très souvent, on parle... Vous savez, la protection de l'environnement est une activité législative très réglementaire, très technique. On parle de PPM, de concentration de substances. C'est intéressant que le ministère ait déposé... Je suis d'accord avec la classification en 15 points des établissements industriels qui doivent obligatoirement servir à dresser la liste finalement des compagnies susceptibles de produire des déchets dangereux et produire évidemment des sols contaminés.

Aux États-Unis et dans l'État du New Jersey, ils ont finalement un système où une compagnie qui a sur son terrain des déchets dangereux, un sol contaminé, cette compagnie est tout de suite mise en demeure. La formule d'ordonnance que vous proposez dans votre projet de loi ressemble à ce que les Américains font depuis quelques années. Par contre, ce qui se passe aux États-Unis - ça c'est très important et je pense que ça va beaucoup aider le ministère de l'Environnement, au niveau des appuis sur le terrain - l'Environment Protection Agency est obligée, une fois que la compagnie a dépose son plan de décontamination... L'Agence de protection de l'environnement est obligée de déposer son plan, ce qu'on demande à la compagnie de faire et ce plan-là est public. Non seulement il est public en vertu de la loi américaine, on doit tenir une séance d'information publique.

Dans votre projet de loi, j'ai trouvé ça intéressant que vous ayez, dans différents articles - 31.45, 31.48 et 31.50 - l'obligation de publier les avis d'ordonnance. Par contre, il y a un petit problème. Si on regarde une section de la loi concernant le programme de réduction des rejets industriels, le PRRI, dans la loi actuellement, il y a une section qui dit que ces avis ou ces ordonnances doivent aussi être publiés dans un quotidien de Montréal ou de Québec.

Première suggestion très précise: Ajouter à l'obligation de publication, pas seulement dans la région où se trouve le site contaminé, mais aussi dans les grands quotidiens québécois. Pourquoi? Vous savez, beaucoup de personnes critiquent que

le ministère utilise le bâton, qu'on veut mettre en prison les pollueurs, qu'on veut les battre, qu'on veut prendre toute la pile de la législation environnementale puis on va la lancer contre eux, parce qu'il y a beaucoup de lois. Puis, là, on commence à faire une surenchère de la violence qu'on veut faire contre nos pauvres pollueurs.

Je pense qu'il y a une autre façon de procéder. Évidemment, je suis pour poursuivre et utiliser la force de la loi. Mais il y a aussi les embarrasser publiquement. Si publier l'ordonnance dans le courrier de Saint-Télégraphe de Clic-Clac, ce n'est pas aussi fort que de publier l'ordonnance, l'avis que le terrain est contaminé dans La Presse, Le Devoir ou Le Soleil... Et je voudrais quand même y aller un peu plus fort. Établissez donc une grandeur réglementaire. J'ai vu que, par exemple, en Ontario, un juge a obligé un pollueur de prendre une page dans les journaux, je pense que c'était dans le Toronto Star, et de faire son mea culpa publiquement. Ça, j'ai l'impression que ça risque même de faire plus mal qu'une amende de 20 000 $, 30 000 $, 40 000 $ ou 500 000 $, parce que les clients de ces compagnies-là risquent de dire: Nous, on veut seulement avoir comme fournisseurs du monde propre. Nous aussi, on a notre réputation à protéger.

Alors, c'est peut-être une façon un peu cocasse d'amener les pollueurs à s'afficher publiquement et obligatoirement. On parle dans le projet de loi - et ce n'est pas clair - de plaintes assermentées. C'est-à-dire qu'un citoyen du Québec... Par exemple, à l'article 31.45, on dit que le ministère doit transmettre l'ordonnance, ordonnant à une compagnie à décontaminer son terrain, à celui qui a fait la plainte assermentée. Et je regarde la Loi sur la qualité de l'environnement. Je ne vois pas le régime de plaintes. Je vois que dans la Loi sur la qualité de l'environnement, on peut demander au ministère d'enquêter. Mais ce n'est pas évident, dans l'ensemble législatif de la protection de l'environnement au Québec, qu'il y ait un régime inscrit dans la loi de plaintes assermentées. Autrement dit, moi, Daniel Green, je me présente devant un commissaire d'assermentation. Je peux le faire sous forme d'un affidavit ou d'une plainte assermentée.

Il faudrait préciser. Peut-être une section, là, vu qu'on modifie la Loi sur la qualité de l'environnement. Pourquoi pas la modifier en mettant un article, une section qui pourrait définir le régime où un citoyen peut se plaindre, mais de façon un peu plus formelle par une plainte assermentée? Comme ça, ce serait... Un exemple: regardez la Loi sur la protection de l'environnement du Canada. Il y a un régime dans la loi qui codifie comment un citoyen - dans ce cas-là, c'est deux citoyens de plus de 18 ans - peut formuler une plainte assermentée auprès du ministère de l'Environne- ment et le ministre doit enquêter. J'aimerais évidemment voir le mot "doit" au lieu de "peut", parce que je pense que le ministère de l'Environnement est aussi imputable envers nous, les pollués.

Je pense qu'il y a aussi un problème assez fondamental, par contre, dans le projet de règlement, mais ce n'est pas trop grave. Ça pourrait être modifié. C'est qu'on parle très souvent, par exemple, du propriétaire du sol contaminé, on parle du propriétaire, du propriétaire. Par contre, au début, on parle, finalement, à l'article 31.42: Celui qui a émis. Alors, d'une part, on parle de l'émetteur des contaminants, celui qui a émis, déposé, et là, on parle du propriétaire. Malheureusement, comme on l'a vu si souvent au Québec, des fois, ce n'est pas les deux mêmes personnes. Donc, il faudrait une certaine corroboration par celui qui est propriétaire. Moi, personnellement, si j'étais de l'autre côté de la table, ce que je proposerais comme modification législative, c'est justement de dire... Et c'est ça que le New Jersey a fait dans sa loi sur les terrains industriels contaminés. On dit que même un propriétaire qui hérite d'un site contaminé, même si c'est son terrain, si on trouve, par exemple, en creusant, qu'il y a des sols contaminés un peu plus creux, sous un hangar qui est démoli, l'État du New Jersey peut prendre des recours contre celui qui a émis les contaminants. Autrement dit, il faudrait absolument établir au niveau du régime législatif au Québec de la responsabilisation, comme on dit, du berceau à la tombe et pas celle du déchet dangereux, mais plutôt celui du pollueur, de son berceau à sa tombe. Là, ce qui arrive, c'est que des pollueurs peuvent très bien vendre leurs terrains. Il y a des rumeurs - et peut-être que Conrad Anctil du ministère de l'Environnement pourrait corroborer ce que je vais dire - quand le ministère commence à pousser contre un propriétaire d'un terrain contaminé, des rumeurs circulaient qu'un propriétaire avait dit: Si vous me poussez trop, je vais vendre mon terrain à un assisté social, je vais le payer, lui donner 1000 $, il va acheter mon terrain pour 1 $ et ça va être à lui. Vu qu'il va être non solvable, vous allez être capable de ne rien faire avec lui.

Actuellement, il faudrait, je crois, modifider le régime du commerce des sites contaminés au Québec, comme on l'a fait un peu au New Jersey. Au New Jersey, une banque ne peut pas autoriser un prêt à un acheteur à moins que l'acheteur ne prouve avec un certificat attestant que le site est propre. Autrement dit, si moi je veux aller acheter un terrain au New Jersey et que je doive emprunter, faire un emprunt bancaire, je ne peux pas acheter le terrain. Il va même plus loin, l'État du New Jersey peut annuler un prêt bancaire si l'acheteur découvre qu'il y a eu contamination. Il ne faut pas oublier que, là, on parie de vices cachés, au Québec, et je pense qu'au niveau procédure civile, au Québec, on est

protégés contre des vices cachés.

Par contre, il faut faire attention. Celui qui a acheté le terrain de Sherwin Williams contaminé au plomb parce qu'il faisait de la peinture blanche, et avant on utilisait beaucoup de plomb dans la peinture blanche, l'acheteur voyant le prix demandé - à cheval donné, on ne regarde pas la bride, comme on dit - a signé. Sherwin Williams, c'est une compagnie qui sait ce qu'elle fait, a inclus dans son contrat: Vous prenez le terrain tel quel et je vous avertis qu'il risque d'être contaminé. Si vous acceptez ce risque-là, signez au bas de la ligne, et l'acheteur a signé. Alors, quand le vice n'est plus caché, quand, finalement, une compagnie qui connaît ce qu'elle a rejeté veut vendre à un développeur qui a peut-être une 12e année, qui, d'après moi, n'a pas fait son génie chimique - normalement, les développeurs immobiliers au Québec ne sont pas, malheureusement, tous des détenteurs de bac en génie chimique - il ne le sait pas et il l'achète de bonne foi, même si c'est écrit dans le contrat.

Donc, moi, je pense qu'il faudrait que l'État, dans ce cas-là, adopte dans le texte législatif une section qui protège l'acheteur ou, finalement, qui empêche le vendeur de vendre son terrain tant et aussi longtemps qu'il ne l'a pas décontaminé. Un autre point, une proposition que je fais au gouvernement, c'est que...

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, monsieur, s'il vous plaît, les vingt minutes sont écoulées.

M. Green: En conclusion, donc je vais aller...

(11 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le député de La Prairie, on peut...

M. Lazure (La Prairie): Ou on peut écourter sur notre temps, ou on peut lui donner chacun cinq minutes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va.

M. Green: O.K. Je vais essayer d'aller assez vite. Je pense que, finalement, il y a la question, et j'entendais le ministre le mentionner lors du dépôt du projet de loi, on dit que le ministère de l'Environnement va devenir, je dis les termes du ministre, le créancier privilégié, en cas de faillite. Ce n'est pas dans ce projet de loi là, ça. Je ne sais pas où c'est. Si c'est l'intention du législateur de dire que le ministère de l'Environnement va devenir le créancier privilégié en cas de faillite, bien, il me semble qu'il faudrait peut-être que ce soit indiqué dans un texte législatif, quelque part, peut-être au niveau de la loi des faillites. Je ne le sais pas, là, mais vous êtes le législateur, vous connaissez votre ensemble législatif mieux que moi. Mais je ne le vois pas dans ce projet de loi.

Je crois aussi, finalement, qu'il y a un point que je dois dire en terminant. Il y a beaucoup de personnes qui pensent que ça va coûter très cher à l'industrie québécoise, ce projet de loi. Moi, je vous dis que si on n'adopte pas un projet de loi de cette sorte-là, ça va coûter plus cher au législateur, à nous, au gouvernement du Québec. Vous allez voir. Votre ministre de l'Environnement va être obligé d'aller quêter au Conseil du trésor chaque fois qu'on découvre un site, et là, ce qui va arriver c'est que ça va coûter très cher, et qui va être blâmé, ultimement? Et qui va avoir les problèmes? Ça va être vous, les élus. Pourquoi accepter un tel fardeau de responsabilités quand ce n'est pas votre faute. C'est la faute des industriels, qui devraient être responsables. Au New Jersey, ça coûte, pour la surveillance des terrains contaminés, autour de 3 000 000 $ à 5 000 000 $. C'est plutôt 5 000 000 $ US, par année maintenant. Ils engagent à peu près 120 à 130 personnes. Ils sont capables de passer à peu près 12 000 à 13 000 sites, au début, mais après, c'est un rythme d'à peu près 500 sites par an. Ils envoient des factures aux compagnies. Ils récupèrent 2 500 000 $ à 3 000 000 $ par an, parce qu'ils ont un régime de facturation. Une compagnie dit: Écoutez, je veux fermer, ou j'ai des problèmes. Le ministère vient, il charge son temps. C'est une récupération du coût des opérations de surveillance. La facture est envoyée, c'est dans la loi du New Jersey. C'a permis au New Jersey, et là, c'est intéressant, finalement... On parle d'à peu près 500 000 000 $ par an de nettoyage, que les compagnies font. Et de plus, par année, les compagnies doivent poster autour de 30 000 000 $ en garantie. Autrement dit, ce que le New Jersey a fait, c'est de s'organiser pour que ça ne lui coûte plus une cenne, quand il est poigne avec un site de déchets dangereux. C'est ce qu'il a fait. Et c'est ça que je pense que le gouvernement du Québec devrait faire, pour éviter que votre ministre de l'Environnement soit obligé de cogner à la porte du Conseil du trésor chaque fois qu'on découvre un site. Autrement dit, le gouvernement se dégage des responsabilités financières, au niveau de la gestion d'un Québec contaminé. Ça revient aux pollueurs. Voilà le principe pollueur-payeur et voilà le principe que je demande au législateur d'adopter.

C'est sûr que les industriels vont crier au meurtre. Vous savez, je me souviens, au milieu de la révolution industrielle, quand on avait proposé d'abolir le travail des enfants dans les usines en Angleterre, les grands patrons, des industriels, en Angleterre, ont dit: Si vous abolissez le travail des enfants dans nos usines, vous aile/ luer dans l'oeuf la révolution industrielle. Ils l'ont fait, on est encore là. Alors, donc, comme je dis la révolution au niveau... La façon dont on approche l'environne-

ment, ce n'est pas de l'utopie. L'utopie, c'est le statu quo. C'est de penser qu'on va être capables de s'en sortir en ne faisant rien. La réalité, c'est le changement. Et c'est ça. J'espère que le législateur et j'espère que les deux partis, des deux côtés de la Chambre, auront le courage d'adopter un projet de loi 65 fort. Il y a de votre intérêt, de l'intérêt des Québécois, quoi que pourrait dire le Conseil du patronat du Québec.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Green. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, vous me permettrez, dans un premier temps, de remercier la Société pour vaincre la pollution et son porte-parole, M. Green, pour un exposé thématique assez complet quant au projet de loi. Je ne poserai pas de question dans ce qui semble nous rapprocher. Je tenterai de répondre à quelques interrogations que vous nous avez adressées et peut-être vous poser également quelques questions.

Je retiens, dans un premier temps, que l'aspect sur lequel on peut dégager une espèce d'entente, bien qu'elle ne soit pas pratiquée dans le quotidien aussi bien qu'on le souhaiterait, c'est tout l'aspect information quant aux sites comme tels. Nous partons d'une société qui a évolué au cours des dernières années. J'avais l'occasion, hier, au tout début de la commission parlementaire, dans un échange avec le député de La Prairie, de rappeler qu'encore, en 1984, à l'Assemblée nationale, des ministres de l'époque se levaient et justifiaient qu'il ne fallait pas rendre les informations publiques parce que ça pouvait risquer d'énerver la population quant à la localisation des terrains contaminés, etc. Nous sommes à peine six ans plus tard et nous tentons de renverser la machine. Un de mes prédécesseurs, M. Lincoln, a publié en 1988 la liste des sites contaminés en les catégorisant, etc. Nous sommes à remettre à jour cette liste. Elle sera republiée d'ici la fin de la session, d'ici la fin du mois de juin, et elle sera remise à jour. Donc, sur le plan gouvernemental, je tiens à vous assurer qu'il existe cette volonté-là de la communiquer bien que nous connaissions - et avant peut-être que le député de l'Opposition le souligne à juste titre - quelques ratés dans notre système. Je pense que le cas de l'est de Montréal qui est survenu, il y a quelques semaines, a connu sur le plan de la communication et l'information des ratés parce que les mentalités ne sont pas encore complètement changées au niveau du ministère de l'Environnement du Québec.

Le contenu du projet de loi. Nous prenons acte du fait que vous êtes d'accord avec l'approche de diviser en 15 catégories, etc. Et là-dessus, l'expertise de SVP nous intéresse parce que d'autres groupes ont critiqué et à juste titre - je pense qu'ils avaient le droit de le faire et tant qu'on n'a pas toutes les réponses, on n'est jamais satisfaits - les normes qui ont été modifiées dans certains cas. On prend donc pour acquis que SVP s'est penchée sur la liste, les modifications de normes, etc. et que vous vous en êtes déclarés satisfaits.

M. Green: Non, on est contents que le règlement ait été déposé. Il y a une procédure consultative sur le règlement. On n'est pas ici, je ne pense pas...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Non...

M. Green: ...dans cette enceinte...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous réservez vos commentaires pour ce moment-là.

M. Green: Oui, c'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Green: Dans le processus de consultation réglementaire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va. Nous retenons votre suggestion de publication. Nous modifierons dans le sens que vous souhaitez pour ajouter à la publication régionale la publication nationale. Je ne prends pas d'engagement quant à la dimension comme telle mais je retiens certains de vos propos.

La question de la plainte assermentée que vous avez soulevée, vous la retrouvez, comme vous l'avez indiqué, à l'article 31.45. Maintenant, elle découle d'une juxtaposition avec le libellé de l'article 25. On parle dans l'article 25 de la loi, qui est l'article général, de plaintes assermentées. Il y a corrélation et concordance sur le plan de l'assermentation de la plainte.

M. Green: Vous parlez de l'article 25 de la loi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De la loi. Autrement dit, les mêmes formalités se retrouvent là. Vous avez à l'article 25, troisième alinéa: "Le ministre transmet une copie de l'avis préalable à toute personne qui lui a soumis, relativement à l'objet de cet avis, une plainte assermentée."

M. Green: Oui, je comprends, mais encore une fois, le problème, c'est que même à l'article 25, la procédure de plainte assermentée n'est pas définie. C'est quoi, une plainte assermentée? Est-ce qu'il y a une formule prescrite? Je vous réfère...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'il s'agit d'une affirmation solennelle ou d'un

serment sur l'Évangile?

M. Green: On comprend ça, on comprend ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Green: Mais là, on parle du monde qui voit quelque chose. Je recommande au ministère de regarder le libellé de la loi canadienne sur la protection de l'environnement. Il y a trois ou quatre articles qui définissent très clairement... Il y a môme une formule prescrite qu'on peut même peut-être annexer. Autrement dit, rendre - comme disait Marcel Léger, il faut 6 000 000 d'inspecteurs de l'environnement - il faut rendre la chance à ces 6 000 000 d'inspecteurs de l'Environnement - le ministère a besoin de tous les inspecteurs qu'il peut aller chercher - donc, formaliser la procédure de la plainte assermentée dans le projet de loi. Vous avez une occasion de le faire maintenant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va. Votre opinion: si on s'inspire de ce qui est contenu dans la loi canadienne, on a une bonne source d'inspiration.

M. Green: Je crois que oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): vous avez parlé de la question de la définition ou de la distinction entre le propriétaire et le contamina-teur comme tel...

M. Green: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'il faudrait suivre, vous avez dit, du berceau à la tombe. Est-ce que le libellé des articles 31.42 et 31.43 ne répond pas à cette interrogation? Ce sont les pouvoirs d'ordonnance et de décontamination. À l'article 31.42, le libellé est le suivant: "Le ministre peut, lorsqu'il a des motifs raisonnables...

M. Green: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de croire qu'un contaminant est présent dans l'environnement dans une quantité ou une concentration supérieure à celle établie par règlement adopté en vertu du paragraphe a de 31.51, ordonner à toute personne ou municipalité qui y a émis, déposé, dégagé ou rejeté... On a ajouté la notion de propriétaire. Mais la notion de contaminateur, d'après les gens...

M. Green: C'est au niveau de la décontamination. C'est à partir de l'article 31.46. On ne parle plus d'émetteur, on parle de propriétaire. C'est ça qui m'inquiète un peu finalement au niveau de la décontamination et restauration. L'imputabilité du contaminateur à décontaminer n'est pas nécessairement la même que le propriétaire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais la responsabilité du contaminateur, telle que stipulée aux articles 31.42 et 31.43, entre autres, demeure et elle est plus lourde.

M. Green: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le cas du propriétaire comme tel, il assume une responsabilité, mais elle est moins lourde que le contaminateur. Mais l'effet de l'article 31.46 et suivants, ce n'est pas d'annihiler les pouvoirs d'ordonnance des articles 31.42 et 31.43, au contraire. Ça ajoute au cas où on ne puisse pas intervenir, parce qu'on ne peut pas l'identifier, etc.

M. Green: Mais... O.K.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est cumulatif.

M. Green: Oui, je comprends. Â la lecture du projet de loi, j'ai peur qu'on puisse jouer là-dedans et ça m'inquiète. Si on pouvait dans un énoncé très clair le dire ça, même si c'est redondant, Dieu sait...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Que c'est cumulatif sur le plan...

M. Green: Oui, que c'est cumulatif. Autrement dit, c'est que même si un propriétaire n'est pas le contaminateur, que le contaminateur... On parle aussi du contaminateur dans ce cas-ci. Parce que le propriétaire... Ce n'est pas clair que le propriétaire peut être l'un ou l'autre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Je saisis le point que vous voulez faire.

M. Green: Oui. Alors, il faudrait clarifier ça. Et vous savez, en étant avocat vous-même, qu'un texte de loi est vague.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a des gens qui vont tenter de passer a travers. Vous avez parié d'une notion que nous avons choisi de ne pas inclure, après reflexion - ça ne me fait rien de reprendre le débat publiquement avec vous - la question de protéger l'acheteur comme tel.

M. Green: Pas nécessairement protéger l'acheteur, mais plutôt éviter le transfert. Je vais plus loin que ça. Autrement dit, c'est qu'il faut... Bon, regardez. Quand un terrain change de vocation industrielle à commerciale ou résidentielle, on ne parle pas du même monde, pas du tout. On ne peut pas comparer Texaco au

développement immobilier Untel. Ce n'est pas la même chose. Puis la question finalement, c'est que, très souvent, le contaminateur a les reins plus solides économiquement que le propriétaire, spécialement quand il y a un changement de vocation du terrain. Alors, on pourrait dire: Bien, très souvent, les grands contaminateurs, ce sont les grandes sociétés industrielles. Et ces grandes sociétés industrielles ont de l'argent. Et aussi, elles ont quelque chose d'autre encore plus important, elles connaissent leur site. Elles savent comment le décontaminer, parce qu'elles l'ont contaminé elles-mêmes. Alors, il me semble, pour éviter le transfert des titres de propriété... C'est ça. Vous vous donnez des outils pour éviter le transfert. Moi, si je veux acheter un terrain, je demande un agent et il va aller à la municipalité. Et s'il y a un petit point rouge à côté du lot, le ministère va obliger de le mettre, le point rouge. Qu'est-ce qui se passe? Par contre, c'est déjà rendu un peu tard. Si on pouvait en amont arrêter, forcer, éviter que le contaminateur puisse vendre son terrain. Autrement dit, ce que je dis, c'est de tenter de trouver un moyen législatif pour dire - comme ils ont fait au New Jersey - on va vous rendre la vie tellement difficile, vous n'allez jamais être capable de vous débarasser de votre terrain. Ça reste, c'est à vous et ça va rester à vous tant et aussi longtemps que vous ne l'aurez pas décontaminé. (12 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne va peut-être pas aussi loin que le New Jersey, comme tel, mais le libellé de l'article 31.49 nous permet d'intervenir, à notre avis, et nous sommes ouverts à la discussion, avant, comme vous le mentionnez. "La personne ou la municipalité, propriétaire d'un sol à l'égard duquel le ministre a enregistré un avis en vertu de l'article 31.48, doit, avant de changer ou de modifier l'usage du sol.-.

M. Green: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...etc. Et si vous conjuguez avec le troisième alinéa, deuxièmement: "De même, la personne ou la municipalité qui exerce une activité qui, selon le règlement adopté en vertu du paragraphe b de l'article 31.51, contamine le sol, doit demander l'autorisation du ministre et lui fournir les documents mentionnés aux paragraphes 1° et 2° du premier alinéa ainsi que la description des travaux de démantèlement projetés avant de démanteler ses équipements ou ses bâtiments."

Donc, vous avez la question de modifier l'usage du sol et vous avez la question du démantèlement. Donc, on a pris une double couverture. On pourrait aller plus loin, en parlant même de modification, de changement de propriété, comme vous l'avez souligné dans votre exposé...

M. Green: Mais, en lisant le texte...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mais on ne va pas jusque là.

M. Green: ...législatif du New Jersey, c'est très clair, on ne peut pas s'y méprendre, on ne peut trouver une petite faille. O.K.? Par économie de papier et d'encre... Peut-être que le législateur pourrait exprimer son idée très clairement et puis, peut-être que tout le monde pourrait s'entendre et, particulièrement, un magistrat qui est sur le banc. Parce que, normalement, les magistrats au Québec, eux non plus n'ont pas fait leur génie chimique, en passant. J'ai remarqué ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Disons qu'il y a des évolutions jurisprudentielles qui, sans aller aussi loin qu'on le souhaitait, manifestent quand même une certaine tangente. Nous avons obtenu des ordonnances ou du soutien d'ordonnances...

M. Green: Oui, ça s'améliore.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de la Commission municipale, les tribunaux commencent...

M. Green: Oui, ça commence.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...tranquillement, ça commence, je pense. Il faut le souligner.

M. Green: Mais pour éviter ça, c'est que le problème est que, quand un texte est un peu vague, O.K., et quand ça ne saute pas aux yeux, comment voulez-vous, quand un texte ne saute pas aux yeux... Nul n'est censé ignorer la loi, mais il faudrait quand même que la loi soit compréhensible. Moi, j'aime dire que je suis un peu expert dans le domaine, je m'y perds, alors je m'imagine quelqu'un qui a une station de service, qui n'est pas dans le domaine.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais vous avez un peu raison. La commission parlementaire est saisie d'un projet de loi présentement, on sera saisi d'un autre projet de loi demain. Sur le plan de la clarté ou de la limpidité, sur le plan de la compréhension, je pense que, pour les législateurs qui en ont pris connaissance, au moment où on se parle, le projet de loi 60, comme tel, est d'une compréhension plus facile que le projet de loi 65, sur le plan de...

M. Green: C'est ça. Ça dépend qui l'a écrit, hein? Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a

toujours plusieurs auteurs, dans ces domaines-là. c'est peut-être ce qui cause des problèmes. vous avez parlé de la question de la créance privilégiée...

M. Green: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...à la toute fin. Ce que l'on ajoute, dans le projet de loi, ce sont des ajouts de pouvoirs ministériels d'ordonnance pour que le ministre ne se retrouve pas dans des situations comme la Balmet, où il ne peut pas intervenir, etc. Maintenant, la créance est garantie, les ordonnances font en sorte que, si le travail est effectué par le ministère de l'Environnement du Québec, H peut prendre une garantie sur sa créance et c'est par le biais du pouvoir d'ordonnance, combiné à l'article 113 de la loi, qui fait en sorte que la créance devient garantie. L'article 113 se lit comme suit: "Lorsque quiconque refuse ou néglige de faire une chose qui lui a été ordonnée en vertu de la présente loi, le ministre peut faire exécuter la chose aux frais du contrevenant et en recouvrer le coût de ce dernier avec intérêts et frais de la même manière que pour toute dette due au gouvernement. "Toute somme due au gouvernement en application du premier alinéa constitue une créance privilégiée sur les biens meubles et immeubles du contrevenant, qui prend rang immédiatement après les frais de justice."

M. Green: Donc, ce que vous dites, c'est que vous allez utiliser le texte législatif qui existe déjà...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Celui de l'article 113 nous apparaissait suffisamment clair...

M. Green: Oui, d'accord.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ..sauf qu'il ne pouvait pas s'appliquer parce qu'on n'avait pas le pouvoir de base qui était le pouvoir d'ordonnance...

M. Green: D'ordonnance. D'accord. Je comprends mieux, merci.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui donnait ouverture. Maintenant, vous nous avez également parlé - vous rejoignez, là, je pense, l'ensemble des intervenants - de la création d'un fonds de cautionnement, d'assurance, etc. Le ministère de l'Environnement du Québec intervient de façon graduée. Nous avons signé une entente fédérale-provinciale avec le gouvernement fédéral, au mois de novembre, quant aux sites orphelins, une entente que vous connaissez, 250 000 000 $ sur cinq ans. Nous avons présentement, devant l'Assemblée nationale du Québec, un projet de loi qui vise à appliquer le principe de pollueur-payeur et à donner plus de garanties, qui est le projet de loi qui est devant nous. Nous avons, comme recommandation d'à peu près tous les intervenants - et mon adjoint parlementaire, le député de Saguenay n'est pas ici présentement, mais il était avec nous toute la journée hier - eu l'occasion de discuter de cette possibilité de création d'un fonds et nous avons exprimé l'opinion qu'il s'agit d'une mesure complémentaire à la première, à la deuxième et il faut ajouter, parce que ce n'est pas complet tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas matérialisé cette question de façon - comme vous l'avez souligné - à ce que qui que ce soit qui soit ministre de l'Environnement du Québec ne se retrouve pas tous les mardis et mercredis au Conseil du trésor et au Conseil des ministres, à frapper à la porte, suite à une catastrophe qui était dans le journal du mardi, pour demander l'argent des contribuables et éviter ainsi l'application du principe pollueur-payeur. Parce que chaque fois qu'on fait ça, on ne récupère à peu près jamais rien.

M. Green: Si vous me permettez, M. le ministre, ce qui est intéressant et qu'on a vu aux États-Unis, par exemple, c'est que le fait que les compagnies soient obligées de verser, différents États ont commencé à dire: Prouvez-nous que vous allez bien gérer votre site ou que vous allez diminuer la production de déchets industriels et peut-être on va établir une échelle au niveau des perceptions. Donc, c'est un incitatif - incitatif parce que c'est fiscal - où finalement le "payeur de taxes" en paye moins parce qu'il fait un effort.

Il y a un point sur lequel je veux insister. Si jamais le Québec voit un jour la création de cette taxe spéciale de décontamination, il faudra absolument que ces montants soient versés dans un autre compte de banque que celui du fonds consolidé du Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce que prévoit la loi 60 en matière de récupération et de recyclage.

Oui, M. le député...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure (La Prairie): Merci, Mme la Présidente. Je salue les propos sages de M. Daniel Green, représentant de la Société pour vaincre la pollution, et je partage son opinion que sans la création d'un fonds quelconque, même si elle a l'air d'avoir beaucoup de dents, cette loi-ci va rester largement une utopie. Elle va rester largement une utopie, parce que même avec cette loi-là, on ne pourra pas...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va la retirer.

M. Lazure (La Prairie): Comme elle est, quant à moi, vous pouvez la retirer, si vous voulez une réponse.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez dit que vous étiez pour hier.

M. Lazure (La Prairie): Je vous ai dit hier qu'elle est incomplète. Il y a des bonnes choses dedans, mais elle est incomplète. Il faut absolument y ajouter cette notion d'un fonds. Le ministre a beau nous reparler à chaque jour du fonds fédéral-provincial de 200 000 000 $ sur cinq ans, donc 40 000 O00 $ par année, pour tout le Canada, il reste que ce n'est pas un fonds qui est fourni par les pollueurs. C'est un fonds du public, des gouvernements.

M. Green: Par les pollués.

M. Lazure (La Prairie): Ce dont vous parlez, ce dont je parle, d'autres groupes en ont parlé, c'est un fonds constitué par, appelons ça une taxe, appelons ça un prélèvement, selon les degrés de pollution de telle ou telle entreprise, mais il faut absolument qu'il y ait un fonds de constitué, pour que les pollueurs eux-mêmes paient. Sinon, si vous n'ajoutez pas cette notion fondamentale dans le projet de loi, je répète, le projet de loi est tellement incomplet qu'il ne changera pas grand-chose à la situation.

Je pose la question à M. Green. Même si on avait cette loi en vigueur aujourd'hui, qu'est-ce qu'on aurait pu faire de plus pour faire payer les propriétaires de Bal met?

M. Green: On ne pourrait pas. Ce qui est intéressant finalement avec...

M. Lazure (La Prairie): On ne pourrait pas?

M. Green: Non, on ne pourrait pas. M. Lazure (La Prairie): Merci.

M. Green: Ce qui est intéressant finalement, avec tout le principe de la taxe spéciale, c'est une imputabilité de la pollution auprès du producteur de cette pollution, au lieu que ce soit aux "payeurs de taxes" de toujours payer pour les erreurs des autres.

M. Lazure (La Prairie): Je pense qu'on n'aurait pas pu non plus au mois d'août quand ça s'est passé. Je ne sais ce que vous en pensez. Même si à l'époque, au mois d'août, on avait eu cette loi.

M. Green: Ça dépend. Il y a des éléments rétroactifs. Là, à savoir s'ils peuvent passer le test d'une cour supérieure, à savoir...

M. Lazure (la prairie): c'est ça, le ministère aurait passé quelques années en cour, jusqu'au niveau supérieur. il y aurait eu tout un... en tout cas.

M. Green: II ne faut pas oublier que pour une raison ou une autre, je ne sais pas, au niveau du Code de procédure civile québécois, celui du Common law, ils n'ont pas eu ce problème aux États-Unis où finalement l'EPA a dit à des compagnies: Moi, je travaille sur un site de la General Motors, ils ont arrêté de polluer en 1973. Pourtant ils doivent nettoyer maintenant, même avant que les lois soient adoptées. Alors, il y a des dispositions rétroactives et là, à savoir si ces dispositions rétroactives entrent dans notre régime législatif d'ici, au Québec, ça reste à voir. Évidemment, un juriste pourrait dire: Faisons un test, allons-y, mais, si on peut éviter de passer trois ou quatre ans en cour et si on peut adopter un texte vraiment hermétique, tant mieux!

M. Lazure (La Prairie): Les chiffres que vous nous fournissez sur les montants dépensés, soit au New Jersey ou en Hollande, c'est impressionnant, quand on les compare surtout aux montants que le ministère de l'Environnement a obtenus pour l'ensemble du Québec, pour décontaminer, 3 300 000 $, pour tout le Québec et, au bout d'un mois, il n'y en a plus de 3 300 000 $, parce que c'est utilisé juste pour la Balmet à Saint-Jean. Alors, là, on n'en a plus. Alors, ça, c'est drôlement urgent, ce fonds-là. Ce fonds-là est vraiment la clef de tout le reste.

Dans le mémoire d'un des groupes, hier, je crois que c'était le Barreau, on proposait au ministre de ne pas utiliser seulement les normes qui sont prescrites, qui seront prescrites dans le règlement, là, mais de garder la notion de risque aussi, qui apparaît dans l'article 20 et dans l'article 115.1...

M. Green: Oui, oui.

M. Lazure (La Prairie): Vous êtes d'accord avec cette...

M. Green: Oui, susceptible, oui. Il faut faire très très attention quand on veut codifier la contamination de l'environnement. Par exemple, on peut... Qu'est-ce qu'on fait quand on a, sur un même site, trois substances toxiques qui agissent ensemble et créent un problème plus grand que simplement l'addition des concentrations légales qu'on pourrait trouver là? Alors, on est dans le domaine de la toxicologie environnementale, là, actuellement, et puis il est très difficile, des fois, de codifier. Souvent, il est plus simple et il est moins dangereux d'être

un peu plus large, de laisser à l'interprétation et de laisser les grands principes, parce que, là, se retrouver en cour, en train de se battre sur un PPM de plus ou de moins, ce n'est pas très amusant et ce n'est pas très efficace.

M. Lazure (La Prairie): Bon, alors j'espère que le ministre va bien prendre note de ce témoignage de SVP parce que cette notion de risque, il faut la conserver à tout prix et non pas se fier simplement à des chiffres qui, d'ailleurs, deviennent souvent discutables d'année en année, de six mois en six mois.

M. Green: Oui. Mais une proposition, par exemple, qu'on fait - et on le fait rarement au Québec - c'est l'obligation de revoir les normes une fois tous les cinq ans.

M. Lazure (La Prairie): Ou même... M. Green: Pas peut, mais l'obligation... M. Lazure (La Prairie): ...même plus... M. Green: ...de revoir...

M. Lazure (La Prairie): ...même, plus souvent.

M. Green: Et puis, j'ai toujours aussi... Si vous me permettez...

M. Lazure (La Prairie): Même aux deux ans.

M. Green: ...parce que là, c'est plein de législateurs autour de moi, le problème - vous le savez aussi bien que moi - c'est que, là, on a un avant-projet de règlement, O.K., puis on a l'occasion d'en discuter actuellement en commission parlementaire mais, très souvent, le législateur ne dépose pas !d projet réglementaire avec son projet de loi. Moi, je voudrais, par exemple, que, si ça commence à être une habitude du ministère - puis je l'appuie, je trouve que c'est une excellente approche... Mais il faudrait aussi, peut-être, prévoir, lors des discussions, que le législateur soit aussi exposé - parce qu'on parle de contaminants - aux discussions, parce que très souvent, en cour, on en discute à un PPM de plus ou de moins, à savoir: Est-ce qu'on expose ses enfants ou est-ce qu'on ne les expose pas au plomb, ou à l'arsenic, ou au cadmium? Donc, je ne sais pas comment on pourrait le faire au niveau de la formule parlementaire, mais, de pouvoir peut-être discuter des notions du risque, des choses comme ça, qu'on ne voit pas dans un texte législatif.

M. Lazure (la prairie): bien, il y a un groupe, hier, qui a proposé, qui a demandé au ministre que ça soit débattu en commission parlementaire, justement, puis le ministre a semblé dire oui, il me semble, il est ouvert à ça. Mme la Présidente, le député de Jonquière aurait une question à poser.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Merci, Mme la Présidente. M. Green a soulevé la question de la propriété de terrains et, actuellement, il y a des éléments qui me font penser à ce qui se passe sur le terrain. Qu'est-ce que vous pensez d'Hydro-Québec qui vend un terrain à une municipalité et qui se dégage de toute responsabilité concernant la contamination de son terrain? Comme les municipalité sont impliquées dans le processus puis dans la loi, comment Hydro-Québec peut-elle, comme corporation, se dégager de toute responsabilité? Et surtout, comment les municipalités s'engagent-elles dans une responsabilité aussi grande lorsque les propriétaires, les gens n'ont pas été consultés sur le terrain? Et ça se fait. Je pense que M. Green soulève un point intéressant. Comment pourrait-on régler un problème comme ça ou un cas comme ça dans un projet de loi semblable? (12 h 15)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis sur le temps de l'Opposition, ça me prend un consentement pour répondre.

M. Dufour: Oui, oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On n'a pas voulu, qu'il s'agisse d'Hydro-Québec, d'une municipalité ou d'une compagnie susceptible de contaminer, un "développeur" immobilier, s'immiscer dans la transaction comme telle entre les parties parce qu'on s'embarquait dans une foire où le ministère de l'Environnement n'a absolument pas les ressources pour suivre la joute. Ce qu'on a voulu faire, comme l'a souligné M. Green - ça mérite peut-être d'être clarifié - c'est de conserver contre le contaminateur, celui qui a contaminé, nos recours du berceau au cercueil. On a voulu, au cas où ces recours-là ne seraient pas suffisants ou qu'on l'échappe pour un détail technique quelconque, avoir des recours contre le propriétaire par la suite. On n'a pas voulu s'ingérer dans le contrat de transaction comme tel parce que, à ce moment-là, on n'en sortira plus sur le plan des concepts du droit civil et du suivi à accorder.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Mais comme les deux sont solvables, Hydro-Québec et les municipalités...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La loi permettrait...

M. Dufour: Laquelle allez-vous retenir, par

la loi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La loi permet de poursuivre celui qui a contaminé.

M. Green: Même si le contaminateur a vendu le terrain.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même s'il a vendu le terrain.

M. Dufour: Et même s'il y a une clause le dégageant de sa responsabilité?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II l'invoquera devant le tribunal en fonction... Il se retournera vers quelqu'un d'autre. Nous autres, le ministère de l'Environnement du Québec, on a la possibilité de poursuivre celui qui a contaminé. Il ira devant le tribunal, appellera en garantie, on ne veut pas, justement, s'embarquer dans le "deal" financier comme tel. Nous, ce qui nous intéresse, c'est que le terrain soit décontaminé et que celui qui l'a contaminé paie pour la décontamination.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure (La Prairie): Pour enchaîner là-dessus, pour reprendre la remarque de M. Green, il y aurait peut-être intérêt à dire plus clairement dans le texte de loi que même si c'est inscrit dans le contrat de vente, le contaminateur doit payer...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Notre loi est d'ordre public.

M. Lazure (La Prairie): Bien oui, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, je vais prendre un avis auprès des juristes du ministère.

M. Lazure (La Prairie): Oui. Les juristes ont toujours de la misère à écrire des textes de loi clairs et simples, malheureusement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les juristes devant les tribunaux disent que les médecins ont toujours de la difficulté à poser des diagnostics clairs et simples.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure (La Prairie): C'est vrai aussi, mais, moi, je n'essaie pas de jouer au médecin, dans le moment, je joue au parlementaire seulement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, ça, c'est encore pire!

M. Lazure (La Prairie): Le problème, c'est que le ministre, souvent, joue à l'avocat, il raisonne comme un avocat.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce doit être vrai, c'est mon psychiatre qui me le dit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure (La Prairie): II faut que les textes de loi soient beaucoup plus clairs, dans un langage limpide, un langage que le monde ordinaire va comprendre.

Je veux revenir sur une question soulevée par M. Green. Vous avez dit tantôt que les plans de décontamination devraient être rendus publics, ils devraient même être discutés en séance publique. Je suis tout à fait d'accord avec vous. On a de la misère avec le ministre à cet égard, les plans de décontamination. On lui demande, par exemple, depuis quelques jours, le plan de décontamination pour Montréal-Est. Quand va-t-il rendre public ce plan-là? Quand est-ce qu'il va le commencer? La population se réunit, elle s'est réunie lundi soir, encore, à Montréal, elle se pose des questions. Ce n'est pas seulement les parlementaires qui se posent des questions, on reflète souvent les questions que la population se pose. Dans un quartier, dans l'est de Montréal, c'est l'équivalent de la Balmet à Saint-Jean, actuellement. Moi, je n'arrive pas à avoir de réponse du ministre. S'il en a une à donner aujourd'hui, j'aimerais ça qu'il la donne.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux vous la donner tout de suite.

M. Lazure (La Prairie): Mais avant même que cette loi soit en vigueur, est-ce que le ministre pourrait s'engager, chaque fois qu'il va procéder à une décontamination soit lui-même ou par le biais du propriétaire, à rendre public ce plan de décontamination pour que la population le sache et puisse en avoir les détails devant elle?

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce que nous avons fait, M. le député, lorsque nous sommes intervenus à Saint-Jean-d'Iberville.

M. Lazure (La Prairie): Non, mais je parle de l'est de Montréal.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les autorités municipales ont été mises à contribution pour le rendre public. En ce qui concerne l'est de Montréal, je ne suis pas capable, aujourd'hui, de vous rendre public le plan de décontamination parce que nous sommes à effectuer les plans et devis de l'échantillonnage, et l'échantillonnage

doit nécessairement précéder le plan de décontamination. On ne décontamine pas sans procéder à un échantillonnage et à une caractérisât ion. C'est d'ailleurs les départements de santé communautaire qui nous ont demandé de procéder de la sorte; ils nous ont indiqué quel type d'échantillonnage ils souhaiteraient avoir.

Avec les résultats d'échantillonnage, le département de santé communautaire va décider, à partir de ces données informatiques - ils traitent ça dans leur système - s'il va procéder à des examens de taux de plomb dans le sang, etc., et on va décider par la suite s'il y a lieu de faire de la décontamination...

M. Lazure (La Prairie): Mme la Présidente...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mais je ne peux pas vous soumettre le plan de décontamination.

M. Lazure (La Prairie): Mme la Présidente, moi, ce que je demande... Je ne demande pas les détails du plan de décontamination, je demande l'échéancier. Je sais que vous êtes au stade de l'appel d'offres qui doit venir mais pourquoi ne déposez-vous pas, soit dans cette commission parlementaire ou à l'Assemblée, l'échéancier, eu égard au terrain de l'est de Montréal. Vous mettez tant de jours pour les appels d'offres, tant de semaines pour la décontamination et ensuite, s'il y a lieu, tant de jours pour les analyses. Informez donc la population mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on a fait, là.

M. Lazure (La Prairie): M. Green avait un commentaire.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Green.

M. Green: si on remarque ce qui s'est passé aux états-unis dans le régime "superfun" pour la décontamination des sites, il y a eu des interventions évidemment. là, on décontamine pourquoi? pourquoi est-ce qu'on décontamine un terrain? parce qu'on ne veut pas que le terrain pollue les gens qui demeurent autour. alors c'est pour les gens qu'on décontamine. suite à ça et suite à certaines actions en cours au début des années quatre-vingt, la loi sur la décontamination des terrains contaminés américains qui a été modifiée en 1986 a maintenant un régime très précis au niveau de l'information. le propriétaire ou le contaminateur doit déposer son plan d'échantillonnage. le propriétaire doit déposer son plan, les résultats. il doit les déposer et dans les bibliothèques et dans les bureaux des mairies, et non seulement ça, en vertu et grâce justement au système des 8 000 000 000 $ qu'ils ont, un groupe de citoyens a le droit d'avoir un montant forfaitaire de 50 000 $ pour engager des experts pour qu'ils puissent regarder ce que le pollueur avance. Alors, c'est un régime et on travaille avec ce régime-là dans un site américain qui contamine le Québec, le site de General Motors, et ça marche. Ça marche, disons que ce n'est pas facile de travailler avec General Motors, mais disons qu'il y a un processus d'accès à l'information, de participation du public, d'échange entre le public, le gouvernement - dans ce cas-ci l'Agence de la protection de l'environnement...

La Présidente (Mme Bélanger): II vous reste une minute, M. Green.

M. Green: ...la population...

La Présidente (Mme Bélanger): Une minute.

M. Green: Oui. ...et le pollueur.

M. Lazure (La Prairie): Moi, je veux simplement remercier, au nom de l'Opposition, M. Green...

La Présidente (Mme Bélanger): Bien, là, je m'excuse. M. le député de D'Arcy-McGee aurait une petite question mais il reste une minute pour conclure.

M. Lazure (La Prairie): Ah!

M. Libman: Une fois de plus, je suis d'accord avec le député de La Prairie sur la question du fonds mais pour être un peu plus précis, vous avez parlé de "decommissioning"...

M. Green: Oui.

M. Libman: ...tantôt. Voyez-vous le "decommissioning" comme une alternative aux amendes prévues dans ce projet de loi?

M. Green: La question, c'est qu'au niveau des mesures pénales, c'est s'ils ne font pas ce qu'ils doivent faire. Alors, moi... Il ne faut pas oublier que si on parle, par exemple, d'un site comme la General Motors, pour dépolluer leur site aux États-Unis, c'est 200 000 000 $ US. Alors très souvent ce qui arrive, c'est qu'il faudrait faire attention à ce que l'amende ne soit pas moins chère que les travaux de décontamination et c'est pourquoi...

La Présidente (Mme Bélanger): Alors en conclusion, s'il vous plaît.

M. Green: ...le régime américain..

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le député de La Prairie.

M. Libman: Alors vous croyez qu'il...

M. Green: Est-ce que je pourrais finir, madame, je ne sais pas, un petit point.

La Présidente (Mme Bélanger): Non. Bien là, écoutez, si on commence à perdre des minutes à chaque heure...

M. Green: C'est pour répondre à M. le député.

La Présidente (Mme Bélanger): ...on va finir très tard ce soir.

M. Green: Mais pour répondre à M. le député, c'est simplement pour dire qu'aux États-Unis ils ont des amendes par jour.

La Présidente (Mme Bélanger): D'accord, M. Green. M. Lazure.

M. Libman: Alors il ne faut pas avoir de plafond sur les amendes.

La Présidente (Mme Bélanger): Un instant! M. Lazure.

M. Lazure (La Prairie): Moi, je remercie tout simplement M. Green. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente. Je me joins à l'Opposition, à M. Libman et aux membres de la commission pour remercier M. Green de l'expertise qu'il a amenée par son témoignage devant cette commission parlementaire à l'ensemble de la commission.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors merci, M. Green, pour votre présentation.

M. Green: Merci.

UMQ

La Présidente (Mme Bélanger): Je demanderais à l'Union des municipalités du Québec de bien vouloir s'approcher à la table.

La commission de l'aménagement et des équipements vous souhaite la bienvenue. C'est M. Jean-Louis Desrosiers, maire de Mont-Joli et président de la l'UMQ qui va faire la présentation, et j'aimerais, pour le bénéfice du Journal des débats, que vous présentiez les personnes qui vous accompagnent.

M. Desrosiers (Jean-Louis): Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Mon voisin de gauche se nomme Jocelyn Lazure. C'est le maire de ville Mercier. Je suis Jean-Louis Desrosiers, maire de la ville de Mont-Joli et président de l'Union des municipalités du Québec. M. Roger Fetiand est maire de Longueuil et M. Jules Roy est pro-maire de Saint-Jean-sur-Richelieu. Accompagnent cette délégation aussi pour les besoins de la cause, derrière moi, M. Pierre Dion, directeur général adjoint de Saint-Jean-sur-Richelieu et M. Gilles Benoît, directeur des services Environnement, ville de Laval.

Il y aurait à la façon des Oies sauvages de Félix-Antoine Savard, tout un long discours à faire sur votre projet de loi. Nous ne le ferons pas. Nous avons fait un savant exercice avant de vous rencontrer, messieurs, dames, à l'effet de dire le plus rapidement possible ce qui devrait être dit. Rappelons brièvement que l'Union des municipalités du Québec représente 80 % de la population du Québec. Elle représente 85 % des budgets municipaux et 92 % des employés municipaux de la province de Québec.

Voilà une façon de vous dire que ce dont on va parler nous intéresse au premier chef. Rappelons brièvement des choses que vous savez fort bien, je ne lirai pas le mémoire, mais on sait que la politique du ministère au printemps 1988 a eu ses effets dont on peut voir les fruits: politiques non coercitives, politiques dont les techniques n'étaient pas suffisamment étanches, de telle façon que tout le monde se trouve un peu insatisfait de l'objectif visé et c'est pourquoi aujourd'hui on décide de faire mieux. Mais, entre-temps, il y avait quand même certains articles qui permettaient au ministre de pouvoir agir, ce qu'il n'a pas fait, non pas qu'on puisse critiquer le ministre de ne pas avoir agi, mais il pouvait ordonner aux propriétaires occupants de restaurer, de décontaminer, etc. Alors, voilà autant de choses qui auraient pu être faites, mais qui n'ont pas été faites.

La raison pour laquelle on croit que ça n'a pas été fait, c'est parce que l'ensemble de la réglementation, qui entourait la première approche gouvernementale au niveau de l'environnement, n'était pas suffisamment acéré, aiguisé, pointu, de telle façon que le cerbère qui garde le domicile n'était pas plus mauvais que la longueur de sa chaîne. En 1990, nous voyons qu'avec le projet 65, là on franchit une nouvelle étape, et ça presse. Voilà le premier message, Mme la Présidente. Ça presse tellement que ce matin on a mis les souliers achetés en Italie; ils sont très beaux, mais les bas sont percés. Il ne faudrait pas se laisser prendre aux souliers. Le projet de loi que nous avons devant nous est tellement plein de trous qu'il faudrait faire attention que la hâte qu'on doit avoir pour s'occuper des questions de l'environnement ne doit pas nous laisser berner à l'effet que, parce qu'on n'a pas pris les précautions qu'il fallait pour répondre à des besoins auxquels on doit répondre, en assumant une responsabilité qui est la vôtre et la nôtre. J'ai entendu parler avant moi - j'ai trouvé ça très intéressant, puis je m'excuse de ne pas

avoir la compétence en génie chimique - mais il n'y a personne dans ma paroisse qui a fait des reproches au curé de ne pas être un connaisseur des péchés, et pourtant, personne n'a contesté ses absolutions. Ceci étant dit, je pense qu'on peut quand môme parler de choses semblables.

Des voix: Ha, ha, hal

M. Desrosiers: Ce projet de loi qu'il faut adopter rapidement risque d'être adopté trop rapidement. Faisons attention. Trop rapidement, parce qu'une foule de choses dans ce projet de loi avec lequel nous sommes d'accord et nous allons vous les dire. Vous mettez en place le principe du pollueur-payeur. Bravo! Alors, ne discutons pas puisqu'on est d'accord. Mais, par la bande, on a envie de mettre un deuxième principe, c'est le propriétaire pollué qui pourrait être aussi payeur. Ah bien, non, là vous ne nous aurez pas. On ne sera pas d'accord, parce que là ce n'est plus un principe, c'est une application. Alors, le principe pollueur-payeur, oui, mais dans les modalités d'action, revoyons comment ça se passe.

Encore une fois, et je ne veux pas faire de reproches, je ne voudrais pas passer pour passer mon temps à redire les mêmes choses, Mme la Présidente, mais nous n'avons pas été consultés. On avait dit la première fois, lors de la fiscalité scolaire: Une fois n'est pas coutume, mais là, ça fait deux fois. Ça va faire trois fois. Il me semble qu'il devrait... Je n'en fais pas un plat, mais je le signale, c'est important. De toute façon, il semble que j'aie retenu un peu l'attention de M. le ministre: on a reçu la réglementation importante. Ce n'est pas une réglementation administrative, c'est une réglementation plus qu'administrative au niveau de l'environnement et on l'a eue le 30 mai. Vous voulez que je vous en parle aujourd'hui? Je na suis pas assez intelligent pour faire ça. Il n'y a pas de temps. Il faudrait mettre du temps. Les choses sont tellement importantes que nous prenons le temps de bien les faire. (12 h 30)

Alors, au niveau de la réglementation qui accompagne obligatoirement ce projet de loi, voilà un point vital, parce que si, dans un premier temps, on n'a pas pu avoir du succès avec la loi qui nous gouvernait au niveau de la qualité de l'environnement, si on veut avoir du succès demain, prenons ie temps de bien faire les choses, de bien corriger ce qui doit être corrigé. Le principe pollueur-payeur, oui, madame, on est d'accord.

Pour illustrer mon propos, j'aurai tantôt trois exemples à vous faire vivre. Je vais demander qu'est-ce qu'on fait quand on est propriétaire d'un terrain pollué et vous verrez comment on entend régler les problèmes. Je demanderai aussi: Qu'est-ce qu'on fait quand on s'est fait polluer par d'autres et que les résidents du coin en subissent les conséquences? Des choses que vous savez. Mais il est utile et nécessaire qu'on rappelle à cette auguste assemblée ce que nous vivons.

Et, troisièmement, on demandera à un autre de mes accompagnateurs: Qu'est-ce qu'on fait quand la nappe phréatique est polluée? Et, pourtant, dites-moi où on en parle, dans le projet de loi, de la nappe phréatique? Ça m'ap-paraît important. C'est des failles épouvantables! On en parle indirectement. Vous allez me trouver une astuce dans le projet de loi pour dire: C'est à telle ou telle place. Il faut tellement chercher qu'on n'est pas sûr. Pourquoi ne le dit-on pas carrément?

Là, je ne poserai pas de questions. Voilà, c'est la transparence dont on parlé avant moi. Je pense qu'on devrait, aujourd'hui, la mettre en place. C'est important, ces questions-là, nous en sommes. Parce qu'on n'a pas beaucoup de temps et que je veux que la période d'échanges soit la plus grande possible après, je vais essayer de restreindre mon laïus le plus court possible. Je passe rapidement à un ensemble de questions que vous pourrez lire dans le mémoire quant aux pouvoirs discrétionnaires, quant aux sites orphelins abandonnés, quant aux petits propriétaires, quant aux eaux contaminées, quant à la disposition des sols contaminés, quant aux études d'impact qu'on doit faire.

Voilà autant de questions intéressantes sur lesquelles nous avons donné des avis que vous aurez loisir de lire. Mais la tentation est grande, et ça m'apparaît important aussi, Mme la Présidente, d'attirer votre attention là-dessus, la tentation est grande au niveau du gouvernement de dire: Ma responsabilité se situe où? Peut-être pas une responsabilité financière, puisqu'on dit: C'est le pollueur qui paie, mais la responsabilité politique, vous l'avez. Et faisons attention. Il faut l'exercer. Responsabilité politique qui détermine ce qu'on doit faire, qui détermine comment on va le faire et qui détermine quelle surveillance on va y accorder.

Et si on avait, par hasard, lorsqu'on émet un permis, la capacité, en même temps, de déterminer quel genre de pollution ou de risque de pollution possible on pourrait avoir et qu'on l'identifiait, on pourrait, par ce même permis, qualifier cette personne, quel genre de contribution elle devrait donner au fonds qui lui servirait à protéger notre société contre l'environnement. On pourrait faire, en même temps, non seulement l'inventaire des gens qui veulent faire des choses chez nous qui risquent de contaminer notre société, d'une part, non seulement on saurait de quelle façon ils pourraient le faire, non seulement on saurait où ils le feraient mais, en plus, on saurait quelle tarification on devrait leur charger, de telle façon qu'on créerait un fonds qui pourrait nous servir à prendre soin de ces questions-là. Je pense que, là, on marquerait des

points.

La tentation est grande de penser que parce qu'on peut régler un problème de contamination de sols, alors que le propriétaire actuel, avec l'ancien propriétaire, s'entendent, pour la protection publique, que, premièrement, le sol doit être décontaminé, deuxièmement, que pour l'intérêt communautaire et le zonage de la municipalité ou de la ville en question, il y a intérêt pour la communauté à décontaminer, troisièmement, que la décontamination étant faite et étant partagée quant aux coûts financiers, il y aurait un plus-value au terrain.

Je dis: Bravo, si on a trouvé des solutions comme ça! Et, hier, vous avez entendu parler de règlement de situations de ce genre-là. Je me dis: Ça, ce n'est pas un principe; c'est une application. Ce n'est pas pareil.

Dans un deuxième temps, on pourrait dire que, lorsqu'on entend faire des poursuites ou prendre la capacité d'avoir des poursuites, poursuites qui, à certains égards, nous surprennent, si on réussissait à prouver que vous êtes 10 % coupable de la pollution d'un terrain, vous risquez d'avoir 100 % de la facture. C'est un drôle de principe, c'est achalant, ça. On se demande: C'est quoi, la logique qui sous-tend des questions semblables.

Nous, on a prétendu - et on l'affirme devant vous - qu'au niveau des municipalités, il y a un intérêt fiscal aussi. Et l'intérêt fiscal est le suivant: Lorsqu'on aura fini la carte des terrains contaminés, deux choses peuvent arriver, même trois choses peuvent arriver. Il peut ne rien arriver. C'est ce qu'on vous a dit hier dans certain cas. Il peut aussi arriver que le propriétaire du terrain dise: Moi, mon terrain, s'il vaut moins, vous allez l'évaluer à une moindre valeur et je vais payer moins de taxes. Ça devient important. Nous, c'est un souci qu'on a.

Non seulement il y a ce souci-là, mais il y en a un autre. C'est que s'il faut qu'en plus il y ait des résidences avoisinantes, il est très possible que les résidences avoisinantes nous disent: Bien, là, ma maison a perdu de la valeur, je vais faire diminuer mon évaluation. Alors, ça, c'est une question qui retient notre attention. On n'a pas d'élément de solution à ça, sauf le suivant. Si on identifie correctement le pollueur au départ, quant à l'émission du permis, si on le surveille dans son opération, s'il paie une tarification, on pourra se servir de ce fonds pour pouvoir redonner la vraie valeur au terrain et ramener les évaluations telles qu'elles sont.

Quant au fonds fédéral qui existe à ce niveau présentement, qui nous permet de tenir compte des sites orphelins, bon, les sites orphelins, voilà premièrement. Et les autres? Alors, de toute façon, le fonds fédéral ne répond pas à l'ensemble des questions auxquelles on doit répondre aujourd'hui. Il faut, de toute façon, c'est notre responsabilité politique, l'assumer et la responsabilité financière, la faire partager par une tarification par ceux qui en sont responsables.

Ça m'amène au dernier point, au niveau du rôle que pourrait jouer le ministère de l'Environnement quant à ce qui s'est passé et quant à ce qui se passera. Si on pouvait faire table rase de toute la pollution qui a été faite depuis un certain temps, qu'on ne connaît même pas et qu'on va découvrir au fur et à mesure, on peut plus facilement dire: Pour l'avenir, ceux qui vont polluer ou qui risquent de polluer paieront. Qui va payer pour le passé, pour celui qui est disparu? Parce que la, d'un crépuscule à l'autre, il y en a plusieurs qui sont disparus de la circulation ou qui, par toutes sortes d'astuces, ont réussi à se libérer d'obligations qu'ils avaient contractées sans trop le savoir ou ils aiment mieux ne pas le savoir. Alors, c'est autant de problèmes qu'il faut régler.

La procédure légale pour rechercher les ayants droit, vous la ferez si vous voulez. Moi, je pense que la voie n'est pas dans ce sens-là. On devrait dire collectivement au ministère: Voici, le passé a été écrit d'une certaine façon, avec une certaine réglementation, avec une certaine façon de voir, avec une certaine entente sociologique, bien, que notre gouvernement prenne en charge les opérations du passé, mais pour l'avenir, par exemple, non. Pour le passé, oui, mais pour l'avenir, non.

Je vais demander, Mme la Présidente - et je reviendrai dans un petit mot de la fin - d'abord à M. Roger Ferland de Longueuil, de vous exposer ce qu'on fait quand on hérite d'un héritage qu'on n'aime pas avoir.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Ferland.

M. Ferland (Roger): Mme la Présidente, il s'agit, pour la ville de Longueuil, d'un terrain que la ville a acquis, il y a quelques années. C'était un terrain qui avait été zone industriel et qui avait eu un usage industriel. Ce terrain a été redivisé, rezoné pour des fins résidentielles et, lors de travaux d'infrastructure, on s'est rendu compte, le contracteur a découvert un bassin de béton contenant de la créosote. Alors, évidemment, on a arrêté les travaux. On a avisé le ministère de l'Environnement, le bureau régional, et on nous a demandé de faire faire une expertise pour savoir quel était le contenu de ce réservoir. On a fait vider le réservoir, on a fait faire une étude préliminaire et, ensuite, on a dû clôturer le terrain. On a dû faire faire une étude de caractérisation pour connaître la vraie nature de ce qui restait dans le sol parce qu'en enlevant le bassin et son contenu, il reste que le sol était quand même contaminé parce qu'il y avait une faille dans le bassin et ça c'était répandu.

Alors, brièvement, ce qui est arrivé, c'est que la ville de Longueuil a dû assumer pour à peu près 300 000 $ d'études. Nous sommes

maintenant au point où nous devons négocier avec le ministère sur une méthode ou, enfin, sur un plan de décontamination. À première vue, il semble - enfin, ce que nous disent nos experts - que ça devrait coûter quelque part entre 1 000 000 $ et 1 500 000 $ pour décontaminer un très petit site. Comme nous sommes les propriétaires du terrain, on a quand même une responsabilité vis-à-vis de la sécurité publique. On ne peut pas laisser ça comme ça, donc, on doit faire quelque chose. Oui, on a des recours possibles contre le pollueur, contre l'ancien propriétaire, mais l'ancien propriétaire, à notre connaissance, il n'est pas le pollueur, et si on devait essayer de démontrer qu'il l'est, on aurait de la difficulté à faire la preuve. Il nous semble que c'est le propriétaire antérieur qui serait le vrai pollueur, mais celui-là est comme disparu dans la nature. Il a cessé ses opérations. C'était une petite entreprise de traitement de poteaux à la créosote, une entreprise familiale. Donc, c'est perdu. Il n'y a aucune façon pour nous, sur le plan légal, d'aller chercher le vrai coupable, ou celui qui, en tout cas selon nous, devrait payer. Alors nous sommes aux prises avec le problème, et ça m'amène à vous exprimer deux choses, par rapport au projet de loi actuel. D'abord, une inquiétude, et deuxièmement une objection.

L'inquiétude c'est que nous sommes au stade où nous sommes en négociation avec les gens du ministère à savoir jusqu'à quel degré devons-nous décontaminer le sol. Et actuellement, il y a une marge de manoeuvre dans le sens qu'on peut négocier. On reconnaît que si on l'amenait au niveau BC, on pourrait en refaire un site industriel, au niveau AB ça pourrait être un site résidentiel, etc. Mais quand je parlais de 1 000 000 $ ou 1 500 000 $ c'était pour l'amener au niveau BC. Si on devait l'amener au niveau AB, ce serait 500 000 $ de plus, approximativement. Alors, notre inquiétude, à la ville de Longueuil, c'est qu'on ne voit pas, dans la réglementation qui va accompagner le projet de loi, cette marge de manoeuvre et l'établissement de ces paliers qui nous permettraient de négocier avec le ministère jusqu'à quel point nous devrons décontaminer. Ce qu'on perçoit, c'est que le ministère nous dira, lui, jusqu'où il faut décontaminer, et il n'y a comme pas de marge de négociation ou pas de marge de manoeuvre. Ça c'est l'inquiétude.

L'objection, eh bien, évidemment, c'est que ce soit la ville qui doive assumer tous ces frais. En supposant qu'on doive payer 1 500 000 $ pour décontaminer, plus 300 000 $ d'étude de caractérisatlon, c'est 1 800 000 $ pour dépolluer un tout petit terrain. Et ce n'est pas nous les responsables. Bon, nous sommes propriétaires, c'est vrai, mais il nous semble que le projet de loi devrait prévoir, et on l'a déjà mentionné, un fonds qui serait alimenté par les industries polluantes, et que les frais de décontamination devraient être payés, assumés à même ce fonds. Voilà, en gros, la position de Longueuil.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le maire.

M. Desrosiers: j'aimerais, maintenant, mme la présidente, demander à m. jules roy, promaire de saint-jean-sur-richelieu, de bien vouloir vous faire part de son cas bien précis.

La Présidente (Mme Bélanger): II reste trois minutes pour votre temps d'intervention, et après le dialogue commence.

M. Desrosiers: D'accord. Est-ce qu'on peut vous demander, Mme la Présidente, puisqu'on va plus loin, là, on a besoin de présenter les trois cas. Je vais vous demander d'avoir du temps supplémentaire, autrement ça ne nous donnera rien, et je vais encore chialer.

La Présidente (Mme Bélanger): S'il y a consentement des deux...

M. Lazure (La Prairie): Oui, Mme la Présidente, je suis prêt à donner au moins cinq minutes, pour les maires, là. Le ministre aussi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous autres on n'a pas de problème. On donne ça de façon équitable.

M. Desrosiers: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors vous avez treize minutes pour compléter.

M. Roy (Jules): D'accord. Alors, Mme la Présidente, je vais y aller rapidement. C'est un peu beaucoup dans notre cour que ça se passe dans le moment, à Saint-Jean-sur-Richelieu, et, effectivement, on a vécu des émotions intenses depuis cinq ans. Ce sur quoi nous voulons insister, parce que effectivement, maintenant, il y a des gestes qui se posent, et l'avenir, aussi, vous voyez tout l'intérêt que nous avons pour l'avenir. Ce sur quoi nous voulons insister, c'est que nous avons vécu une situation où, pendant cinq ans, les gens ont été témoins et voyaient bien qu'il se passait quelque chose, et les citoyens réagissaient. Mais, finalement, on ne savait pas très bien ce qui se passait avec la Balmet, qui est arrivée le 7 août 1984, chez nous, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Et le premier point sur lequel on veut insister de façon très pratique, c'est que le ministère de l'Environnement, dans la prochaine loi et ses règlements, en même temps qu'il émet un certificat d'autorisation, qu'il puisse émettre une fiche personnalisée pour chaque industrie oeuvrant au Québec. Il faudrait que cette fiche établisse la nature des activités, les polluants qu'elle manipule, les

méthodes préventives pour qu'elle respecte l'environnement, l'air, l'eau et le sol. Et, ce qui est très important, c'est que cette fiche, et là il y a une question de transparence, qu'elle soit au vu et au su des gens qui travaillent dans cette usine là, parce que ce sont des alliés fort intéressants. Ils savent, eux, ce qui se passe. Et là, si on va chercher ça, ça va être probablement beaucoup plus rapide pour que nous soyons en mesure d'agir, parce que nous allons constater, effectivement, qu'il y a quelqu'un qui contamine.

Le deuxième point, parce que c'est beau d'avoir une loi, un règlement, on est un peu inquiets sur l'application de la loi, en se disant: est-ce qu'il y aura des effectifs suffisants pour visiter régulièrement ces usines-là. Est-ce qu'on va pouvoir vérifier, effectivement, si c'est conforme à la fiche personnalisée que le ministère pourrait émettre? Est-ce que les inspecteurs qui sont, effectivement la police verte, une autorité, pourront constater l'infraction, pourront agir, comme un policier pour un manquement au Code de la route? On voudrait qu'il y ait quelque chose de pratique, dans ça, qu'effectivement ils puissent agir. Et c'est sûr qu'on n'a pas l'expertise, dans une municipalité, et on ne peut pas agir, nos policiers ne peuvent pas le faire. Imaginez! j'écoutais tantôt ceux qui nous ont précédés. Ils n'ont pas l'expertise et l'expérience dans un domaine si important. (12 h 45)

Aussi, l'autre point, on trouve fort important qu'il y ait une meilleure concertation qui soit établie avec le service de la CSST. Ils sont déjà sur le terrain, ces gens-là de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Donc, la police verte et la CSST, il y a quelque chose à faire là. La première instance gouvernementale constate qu'il existe des maladies industrielles dans une usine polluante. Elle sait qu'il y a de l'intoxication. Alors, pourquoi ne pas faire un lien avec ces deux façons d'agir? Donc, il pourrait y avoir une demande d'enquête qui est adressée au bureau du ministère pour une enquête immédiate.

L'autre point sur lequel on veut insister, c'est que, oui, la notion pollueur-payeur, est-ce que la nouvelle loi va changer quelque chose? Est-ce que ça aurait changé quelque chose chez nous? Est-ce que, avec le fameux droit d'appel au tribunal administratif qui, finalement, a dit oui, on va paver, mais on n'ira pas plus loin, on ne forcera pas les pollueurs à aller plus loin? Qu'est-ce qui va se passer? On vient d'avoir une... Pour la forme, on a dit oui mais sur le fond, il n'y a rien de tranché, sauf que le droit d'appel ne nous a pas aidés.

Pour éviter que ce scénario se reproduise à nouveau, pour la question de propriétaires dirigeants, où s'en va-t-on avec ça? Est-ce que la municipalité va écoper de ça? On n'a vraiment pas les moyens d'écoper de ça. Une fois que le sol est rendu dans un état avancé de contamination, on voit que c'est grave, est-ce que la municipalité va pouvoir disposer des sommes nécessaires pour le travail de décontamination des sols? Votre loi va-t-elle effectivement obliger les agents pollueurs à contribuer à un fonds national, mais un fonds national où les gens vont devoir participer, un peu selon le modèle de la CSST, selon le degré de responsabilité?

L'enregistrement des sites contaminés pour nous, ça ne règle pas du tout notre problème quand les citoyens font pression et qu'ils nous disent: On veut changer la vocation de cette zone-là. On veut un parc récréatif, nous autres. Où peut-on se situer dans ça? On n'a certainement pas l'expertise et les fonds nécessaires pour des actions telles que la caractérisation des sols, la présentation à votre ministère d'un plan de décontamination seul. On peut collaborer, bien sûr, mais il y a quelque chose là, la recherche de solutions pour la disposition du sol contaminé.

En conclusion, ce qu'on trouve fort important et on n'a pas encore de réponse là-dessus, bien sûr que, sur les terrains privés, il va y avoir des fonds pour aider ces gens-là. Ça ne réglera peut-être pas la question du rôle d'évaluation, mais la décontamination du terrain même de la Balmet, est-ce qu'il y a quelqu'un qui va s'en occuper? Voilà.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Roy. M. le ministre.

M. Desrosiers: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Desrosiers.

M. Desrosiers: ...M. Jocelyn Lazure, maire de Mercier.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! Le cousin du...

Une voix: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien oui, consentement.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Lazure.

M. Lazure (Jocelyn): Merci, Mme la Présidente. D'abord, le cas de Mercier est un cas bien connu par toutes les personnes qui sont ici. J'en fais un bref historique. Rappelons qu'en 1968, en octobre plus précisément, la Régie des eaux, à l'époque, avait octroyé un permis à une compagnie qui était La Salle Oil Carriers pour entreposer des déchets liquides. C'était principalement des huiles usées. On en a entreposés pendant quatre ans, c'est-à-dire jusqu'en 1972, environ

45 000 000 de litres. On en a entreposé jusqu'au jour où un citoyen a ouvert son robinet et, littéralement, ce qui a coulé, c'était de l'huile plutôt que de l'eau. Or, grand branle-bas de combat au niveau du ministère, installation d'aqueduc en urgence. Avec les années, la contamination de la nappe s'est étendue à quatre autres municipalités. Au moment où on se parle, il y a donc cinq municipalités, comprenant Mercier, qui sont touchées par la contamination de la nappe phréatique. On est donc en face d'un problème qui a reçu, à l'époque, une autorisation du gouvernement, puisque c'était la Régie des eaux, et un problème face auquel le gouvernement n'a jamais voulu engager sa responsabilité bien qu'il ait, jusqu'en 1982, je pense, payé la totalité des installations d'aqueduc. On est en face d'un problème dont il n'est absolument pas question dans le projet de loi. On est en face d'un problème, comme je l'ai dit, qui a reçu une autorisation du gouvernement à l'époque contre l'avis de la municipalité. On est en face aussi d'un problème qu'on retrouvera, à mon sens, très souvent. Je ne pense pas que la nappe phréatique de la région de Mercier soit la seule polluée au Québec. Il y a probablement d'autres endroits, et vous en découvrirez probablement beaucoup dans l'avenir. On est probablement en face du problème de contamination le plus grave qui puisse exister puisque ça se passe dans le sol et que ce n'est pas facile de trouver des expertises, des techniciens qui connaissent très bien ça. C'est difficile à vérifier. Il n'y a pas de technique connue pour décontaminer cette eau-là. Le cas de Mercier est assez probant à cet effet-là. Le gouvernement y a installé, en 1985, une usine de décontamination de la nappe. Ça n'a pas donné les résultats qu'on croyait. Le problème reste entier, M. le ministre. Toute la population ne se satisfait pas d'une mesure de correction qui est de l'aqueduc. Ça ne règle pas le problème fondamental qui est la pollution de la nappe. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M Lazure. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, le plus brièvement possible, vous me permettrez de remercier l'Union des municipalités du Québec de sa présentation, remercier chacun des représentants qui ont livré des témoignages, des cas pratiques, des cas concrets et c'est ce qu'on tente de régler sur le plan environnemental. Je vais commencer par le commencement peut-être parce que j'ai déjà occupé la fonction de ministre des Affaires municipales et que j'ai toujours eu beaucoup de considération que j'ai conservée pour une assise qui s'appelle la table Québec-municipalités et reprendre un argument, entre autres, du nouveau président de l'Union des municipalités du Québec. Je rappellerai tout simplement au nouveau président que le 2 février, les relations étaient encore bonnes à l'époque entre le monde municipal et le gouvernement du Québec qu'il y a eu la tenue d'une table Québec-municipalités, que l'"item" 6.4 du procès-verbal de la table Québec-municipalités traite de la modification à la Loi sur la qualité de l'environnement et sur trois pages, on retrouve le procès-verbal. Il s'agissait là, à mon humble avis, je vous le soumets, d'un début de consultation que l'on poursuit.

Il y a eu des échanges d'informations et de documents depuis ce temps-là. La commission parlementaire également se veut un processus de consultation. Nous ne faisons pas cette commission parlementaire dans le but d'informer les gens de ce que nous avons déposé, mais dans le but de demander aux participants à la commission parlementaire quelles sont leurs suggestions ou leurs recommandations dans le but de bonifier la loi qui est devant nous? Il est toujours possible d'en faire davantage. Ce que j'ai de la misère à digérer, c'est de dire: II n'y a pas eu de consultations. Ce n'est peut-être pas suffisant. Ce n'est peut-être pas assez. Mais on ne peut pas dire que le ministre de l'Environnement du Québec n'a pas procédé avec la table Québec-municipalités à des consultations et que l'on ne continue pas aujourd'hui ce processus que nous avions amorcé a l'époque.

M. Desrosiers: Je me rends compte que ce n'est pas une question. C'est de valeur.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, mais c'est que vous ne m'en aviez pas adressé une non plus. Je réponds par un commentaire au commentaire que vous m'aviez adressé.

M. Desrosiers: Je vais vous en faire un, Mme la Présidente, pour mon ministre préféré. À la table Québec-municipalités, à la page 4, nous aussi, on en parle. Et on parle aussi de cette assise Québec-municipalités et on dit ce que vous avez dit. Donc, on dit la même chose. Mais entre-temps, il ne s'est rien passé. Aujourd'hui, on se réveille en commission parlementaire avec la réglementation qui gouverne ce projet de loi excessivement important qu'on a reçu le 30 mai.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai la page 4 et je ne comprends pas, parce que la page 4 de votre procès-verbal que j'ai, c'est: En terminant le ministre rappelle aux unions qu'un projet de règlement sur la disposition des neiges usées a été prépublié... On n'a pas la même page 4.

Une voix: C'est dans le mémoire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, le mémoire. Moi, j'ai le procès-verbal de la table Québec-municipalités.

M. Desrosiers: mais on dit la même chose sur ce que vous avez dit. c'est qu'entre deux, il ne s'est rien passé. aujourd'hui, on continue la consultation - je reprends vos termes - pas pour vous contredire, c'est pour préciser tous les deux notre pensée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Desrosiers: Et on est encore en consultation, bravo Moi, je me dis: Le projet n'est pas fini. On est en train de le préparer, le projet de loi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est exactement ça qui se passe.

M. Desrosiers: Très bien.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous parlez, à la page 3 de votre mémoire, cette fois-ci, d'une politique non coercitive. Au ministère de l'Environnement du Québec, à peu près dans tous les domaines, des déchets biomédicaux aux sols contaminés, c'est ce qu'on a, des politiques non coercitives avec les résultats qu'on a également des déchets biomédicaux qui se retrouvent un peu partout et des sols contaminés qui demeurent contaminés en causant les problèmes que l'on connaît et que l'on découvre chaque semaine. Donc, sur le plan de la législation et de la réglementation environnementale, nous sommes en retard et nous nous devons de procéder. On n'est plus à l'époque de publier des politiques qui expriment souvent - pour faire référence au curé de la paroisse que vous avez mentionné tantôt - de bons voeux pieux, mais qui ne reçoivent pas d'application pratique. Sans législation qui nous permette d'agir, nous n'avons même pas les outils de base pour agir.

M. Desrosiers: On dit la même chose. Voilà, au moins un point sur lequel on s'entend bien.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, il va y en avoir plusieurs. Il va...

M. Desrosiers: Et voilà pourquoi le projet de loi est si important, celui qu'on a devant nous autres.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsque nous avons préparé le projet de loi, nous avons eu à faire des choix que nous soumettons aujourd'hui, en consultation, sur des principes importants. On n'a pas eu de difficulté avec aucun organisme, au moment où nous nous parlons, quant au principe ou à l'application du principe pollueur-payeur comme tel à partir de la sanction du projet de loi. À peu près tout le monde est d'accord, même le Conseil du patronat. Même l'Association minière, que nous avons rencontrée hier soir tard, est d'accord avec l'application du principe pollueur-payeur pour l'avenir.

Tout le monde a des réserves pour l'application du principe pour le passé. Et, dépendant du niveau de réserve que l'on a, certains expriment des réserves, comme vous l'avez fait, sur l'application du principe, à un moment donné, propriétaire-payeur, également, qui est contenu dans le projet de loi. Tant et si bien que le projet de loi donne lieu à des réactions. Je pense que les titres des journaux, ce matin, étaient on ne peut plus justes, ou trop loin, ou pas assez, trop mous ou trop durs. Je pense que tout le monde a bien lu le projet de loi.

M. Lazure (La Prairie): Et incomplet.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'Opposition officielle va ajouter "incomplet". Et, dans le temps que j'étais dans l'Opposition officielle, quand j'étais satisfait de quelque chose, c'est ce que je disais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...c'est-à-dire, quand j'étais complètement satisfait d'un projet de loi, je disais: C'est incomplet, il faut aller plus loin. Et ça, on mettait ça dans le programme pour la prochaine élection, sauf que...

M. Lazure (La Prairie): Élaborez.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je vais dire au député de La Prairie qu'il a raison de souligner que ce n'est pas complet. Ce ne serait pas complet s'il n'y avait pas l'entente fédérale-provinciale qui ne règle, comme vous l'avez souligné tantôt, que les sites orphelins, pas d'autre chose que ça. Mais à partir, non pas du principe pollueur-payeur, à partir du principe pollué-payeur, vous avez le projet de loi qui vise à en régler un autre bout et vous avez, également, une nécessité - ça se dégage de votre intervention, de l'intervention des autres groupes, également - de créer un fonds de pollueur-payeur, également, pour en décontaminer davantage. Mais c'est tout complémentaire.

La meilleure façon que la situation actuelle persiste ou perdure, c'est de ne pas avoir signé l'entente fédérale-provinciale, de ne pas déposer de projet de loi et de ne pas commencer à penser et à mettre de l'avant un projet. Rien faire, là, ça, c'est la solution que l'Opposition souhaite, généralement. Parce que, quand un gouvernement ne fait rien, le peuple est mécontent. Quand vous êtes aux prises avec des problèmes, vous êtes tous des politiciens habiles, vous savez ça, et l'Opposition s'en réjouit. Nous, nous tentons de poser un pas de l'avant.

Maintenant, où nous avons besoin de la

collaboration du monde municipal, c'est que le pas soit posé dans la bonne direction et qu'il soit significatif. Là où j'ai une difficulté de départ, avec le mémoire de l'Union des municipalités du Québec, c'est lorsque vous dites: "Dans le cas de la Balmet, à Saint-Jean - M. Roy est là - vous aviez des pouvoirs, vous ne les avez pas utilisés." Moi, je suis prêt à prendre le blâme, si c'est le cas. Ça ne me dérange pas. Sauf que mon contentieux m'affirme, au ministère de l'Environnement du Québec, que tous les pouvoirs contenus dans toutes les lois québécoises ont été utilisés.

Si l'Union des municipalités du Québec a une expertise juridique qui va dans le sens contraire et qu'on n'a pas besoin d'un tel projet de loi, moi, je ne veux pas faire semblant de légiférer pour faire semblant de légiférer. J'ai d'autres problèmes à régler. J'ai une différence d'opinions fondamentale entre le contentieux du ministère de l'Environnement et les propos du président de l'Union des municipalités du Québec et ça m'apparaît capital comme point de départ.

M. Desrosiers: Vous avez parfaitement raison que c'est capital, là, mais il ne faut pas se perdre sur le sexe des anges. Tout le monde sait ce qu'ils sont, mais voyons les choses telles qu'elles sont. On avait une loi sur la protection de la qualité de l'environnement qui vous donnait certains pouvoirs: "le ministre peut". C'était accompagné de guides techniques d'opération. C'a donné quoi, cette ancienne façon de faire? C'a donné les résultats que nous avons. Voilà ce qu'on met en lumière. C'est pour ça que... Je trouve que la perception que je vous ai donnée n'est pas tout à fait la bonne. C'est que, parce que c'était comme ça, même si vous aviez des pouvoirs, il n'y avait pas un bon accompagnement au niveau de l'action à faire après. Et ce n'est pas le blâme sur le ministre, le ministre était empêtré, mais je sais bien que vous ne le prenez pas comme ça, puis ce n'est pas de même que je vous le sers non plus. Je veux dire que la loi que nous avions n'a pas produit de bons fruits, on coupe l'arbre. Ou on examine pourquoi le produit a de mauvais fruits, on a vu ça tantôt...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On tente.. M. Desrosiers: ...elle n'allait pas assez loin...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on tente...

M. Desrosiers: ...elle n'identifiait pas suffisamment. C'est ce qu'on est en train de faire cette fois-ci. (13 heures)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qu'on tente de faire, bien humblement, c'est d'ajouter à la loi qui existait, qui contenait certains pouvoirs d'ordonnance, dans certains cas bien spécifiques, des pouvoirs qui permettent au ministère d'intervenir dans des cas plus larges. Parce que le libellé de la loi, entre autres - et c'est M. le conseiller de Saint-Jean qui l'a mentionné - à partir du moment où le terrain de la Balmet a été recouvert d'asphalte, il n'émettait plus dans l'atmosphère de contaminants. Là le ministre se trouvait pieds et poings liés à regarder passer le train sans possibilité d'intervenir à cause du libellé de la loi, telle qu'elle existe présentement. À partir du moment où il n'y a plus d'émission de contaminants, il n'y a plus de situation d'urgence et le ministre ne peut plus intervenir. C'est ce que nous visons à corriger dans le présent projet de loi.

M. Desrosiers: On dit la même chose, bravo!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc on s'entend.

M. Desrosiers: Parce que l'ancienne loi ne permettait pas d'aller plus loin que vous pouviez aller. La nouvelle va permettre d'aller plus loin. C'est ce qu'on veut. Bravo!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La nappe d'eau phréatique. Vous avez soulevé là un point qui est majeur. Vous êtes le deuxième ou troisième groupe... Moi, je suis pour la limpidité. Ça ne doit pas être suffisamment limpide.

M. Desrosiers: Surtout au niveau de la nappe!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et la clarté. On me dit que le projet de loi comme tel vise, comme concept, l'environnement comme tel: "31.42 le ministre peut, lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire qu'un contaminant est présent dans l'environnement... Et, à chaque article, c'est le mot "environnement" qui est repris. Si on prend les définitions qui sont contenues à l'article 1 de la Loi sur la qualité de l'environnement, lorsqu'on parle de l'environnement, on parle de l'eau, et l'eau c'est l'eau de surface et l'eau souterraine, où qu'elle se trouve. Donc, il y a peut-être lieu de clarifier. On me dit qu'on couvre la nappe d'eau phréatique avec la définition qu'on a dans le projet de loi...

M. Desrosiers: Voici le message. Ce qu'on veut, M. le ministre, c'est que vous preniez note de cette recommandation. C'est que les gens à qui on a fait appel avant de parader devant vous nous ont dit: La pollution, celle dont on se méfie le moins, et celle dont on devrait se méfier le plus c'est la nappe phréatique. On voudrait l'entendre, le voir, le lire quelque part, s'il vous plaît.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. II y est

par référence. Il y a peut-être avantage à le clarifier.

M. Desrosiers: Oui, indirectement. C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez posé une autre situation d'apparence de manque d'équité ou de création d'injustice et ce n'est peut-être pas simplement en apparence, c'est peut-être en réalité aussi, lorsque vous avez dit. Quelqu'un va contaminer à 10 % et possiblement va être responsable de 100 % de la facture. On a là toute une problématique que je vous soumets pour fins de discussion. Lorsqu'on se retrouve dans une situation comme la Balmet à Saint-Jean, le problème ne se pose pas particulièrement parce que c'est une industrie isolée dans un coin. On sait que la source de contamination vient de là, etc. Si vous vous retrouvez dans l'est de Montréal - et on a eu un cas typique, il y a deux semaines - vous avez à proximité plusieurs industries, dans le même parc industriel, qui travaillent à partir des mêmes matières premières contaminantes, le plomb dans le cas qui nous intéresse. Là, si vous n'allez pas aussi loin qu'on est allés sur le plan du libellé du projet de loi, chacun dit que la contamination est due à l'autre et lui n'est responsable de rien finalement ou qu'il est responsable d'une infime partie et vous vous embarquez dans des procédures judiciaires qui ne vous permettent pas, sur le plan environnemental, de faire assumer une facture de décontamination. Mais je suis d'accord avec votre argument que ça peut apparaître, à première vue, fort comme approche.

M. Desrosiers: c'est comme quand on l'a mangée la première fois, est-ce que ça dépendait du pommier ou de celle qui nous l'a présentée?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Des deux. Peut-être pour en revenir aux exemples typiques, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps. Saint-Jean-sur-Richelieu. Je reprends à partir de l'expérience que vous avez vécue. Je prends au sérieux vos représentations. Vous dites: On n'a pas les employés pour faire le suivi. Je vous soumets bien humblement que toutes proportions gardées, la ville de Saint-Jean en a plus, toutes proportions gardées, que le ministère de l'Environnement sur le plan des effectifs. Je ne sais pas à combien est rendu votre corps policier, vos inspecteurs municipaux, etc. Moi, au ministère de l'Environnement, je suis en procédure d'embauché, mais au moment où on se parle, j'ai 26 enquêteurs pour l'ensemble de la province de Québec.

M. Desrosiers: On a eu une longue discussion là-dessus ce matin, M. le ministre, pour arriver à faire une position commune. On s'est demandé si c'était la municipalité qui serait la meilleure surveillante. En fait, c'est le citoyen.

Bon. 6 000 000. En plus, les municipalités, 1500. Après ça, vous tombez, vous autres, à 26. Ce n'est pas une grosse "gang" chez vous, mais en tout cas. On se demandait... Il faut faire attention, dans l'objectif politique de protection de la qualité de l'environnement, on sait bien que les municipalités y sont, comme le gouvernement du Québec, pour un. Mais il faut faire attention ne pas aller se ficher des responsabilités qu'on n'est pas capable d'assumer. C'est ça qu'on voulait mettre en lumière. D'ailleurs, celui qui est passé avant nous l'a dit très bien. Il faut s'y connaître pour aller faire de l'inspection. C'est ça qu'on veut surtout mettre en lumière. On se dit: Une grande municipalité peut peut-être le faire, mais, mon Dieu, pas une petite. On veut simplement attirer votre attention là-dessus.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): vous avez parlé de toute la question de bien ficher, là, l'entreprise, ses renseignements. on va faire davantage avec un programme que nous sommes à mettre sur pied à partir d'une loi qui a été votée en 1988, le programme de rejets industriels, etc. il va y avoir des progrès. mais à partir du moment où l'on entre à l'intérieur d'une usine - et vous avez raison de souligner que les employés sont généralement à peu près les meilleurs chiens de garde à condition qu'ils soient bien renseignés sur la nature des produits qu'ils manipulent - cette juridiction là - et vous l'avez souligné à un moment donné - relève de la commission de la santé et de la sécurité du travail depuis à peu près deux ans, et je le dis sous toutes réserves, parce que ce n'est pas en application stricte sur le terrain partout: la commission de la santé et de la sécurité du travail a signé un protocole d'entente avec l'ensemble des autres commissions en santé et sécurité des autres provinces canadiennes, du niveau fédéral, dans le cadre d'un programme qui s'appelle simdut et qui oblige la compagnie à révéler à ses employés, lorsqu'ils manipulent des substances qui peuvent porter atteinte à leur santé et à leur sécurité, le contenu des mesures, les mesures à prendre, etc. je pense qu'il y a là une source de renseignements qui pourrait, sur le plan municipal et environnemental, s'avérer fort utile. cette entente a été endossée par le patronat, par les syndicats, par les différents intervenants. on a là une source d'information...

M. Desrosiers: II y avait trois objectifs qu'on poursuivait dans ça. On pensait toujours à la municipalité qui risque d'hériter d'un terrain qui a été pollué par d'autres. On disait: Si on connaît, à l'émission du permis pour une fonction, la personne ou l'industrie qui va faire telle chose puis si, en plus, on connaît le risque de pollution, puis si, en plus, on lui charge une tarification pour le risque qu'elle nous fait prendre, là, on contrôle davantage. C'est dans ce sens-là qu'on allait.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour répondre brièvement au maire Feriand qui a soulevé un cas que je connaissais bien, là, parce qu'on a eu, quand j'étais à l'Habitation, des échanges sur le dossier, le problème que vous exposez, très pratique, porte sur le passé. Vous posez la question: le pollueur ou le contaminateur disparu. Qui dott payer? Présentement, c'est la municipalité qui est propriétaire du terrain; il ne s'agit pas d'un site qui est orphelin, au sens de la définition qu'on a donnée tantôt. Vous avez posé la question. Moi, comme réponse, je dis: Est-ce que c'est le propriétaire qui doit payer ou si c'est l'ensemble des contribuables de la province de Québec? C'est la seule question qui nous reste.

M. Feriand: Bien, quant à nous, ce n'est sûrement pas le propriétaire, parce que ce n'est pas nous les responsables. Ça devient un problème de société. À ce moment-là, je m'en remets au fonds industriel qu'on créerait.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et ça me rapproche du fonds industriel parce qu'on a adressé la question à ceux qui nous ont fait la suggestion: Est-ce que le fonds devrait strictement tenir compte des problèmes à venir ou des problèmes passés, comme celui de chez vous ou comme possiblement celui de la ville de Mercier?

M. Feriand: Bien, quant à moi, le fonds devrait tenir compte des problèmes à venir sûrement et, en grande partie, des problèmes passés également, parce que ce sont quand même les industries qui ont le plus pollué l'environnement dans le passé.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais là, les industries - et je vous le dis bien simplement - nous disent: C'est l'industrie, mais pas mon industrie. Je suis prêt à embarquer, là - et je vous fais le témoignage du Conseil du patronat, de l'Association des mines - je suis prêt à embarquer dans un fonds, mais pas pour nettoyer celui qui fabriquait les poteaux il y a 20 ans à Longueuil.

M. Desrosiers: Non non, dans notre esprit, M. le ministre, c'est une chose, c'est que ce fonds-là, la tarification nous permettait de lui donner des écus, puis l'autre partenaire, c'était vous, le gouvernement, qui mettiez aussi des écus dans notre fonds. Donc, on aurait pu, pour régler son problème, faire appel à ça. Je vous l'avais gardé comme surprise, je savais que ça vous ferait plaisir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien, vous vous adressez à un pauvre.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de La Prairie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure (La Prairie): Merci, Mme la Présidente. L'Opposition partage pas mal la vision de l'UMQ. L'Opposition est en désaccord avec le ministre quand il dit que le grand retard à reprendre était au plan législatif. Nous disons: Non, vous faites fausse route, M. le ministre. Le grand retard à reprendre est au plan des budgets et des effectifs, c'est là qu'il est à reprendre. En 1985-1986, le budget d'opération du ministère de l'Environnement était de 87 800 000 $. Soudain, en 1986-1987, changement de gouvernement - vous savez lequel - ça tombe à 70 400 000 $, une baisse de 24 % dans le budget d'opération, et ça a pris un certain temps, ça a pris une élection pour que le chef du parti du ministre promette 50 000 000 $, mais il ne l'a pas remplie, sa promesse, il a donné seulement 15 000 000 $, ce qui n'est que 12 % d'augmentation par rapport à l'an passé.

Ce que je veux dire, Mme la Présidente, c'est que le ministre s'entête depuis six mois à dire: Mon gros problème, c'est que je n'ai pas assez de dents. Tout le monde lui dit: Ce n'est pas ça le gros problème, le gros problème, c'est qu'il n'y a pas de mâchoire pour soutenir ses dents et la mâchoire, c'est les budgets, c'est les effectifs. J'espère qu'il va finir par comprendre ça, parce que tout le monde vient lui dire ça, et ça confirme ce que l'Opposition lui dit depuis cinq ou six mois.

Cela étant dit...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant ça, il n'avait pas de problème avec ses dents?

M. Lazure (La Prairie): Cela étant dit, il y a des suggestions excellentes qui ont été faites, en particulier la collaboration possible et plus active de la CSST. M. Roy, de Saint-Jean, nous dit, à bon droit: Les travailleurs pourraient devenir... L'idée de Marcel Léger que chacun des 6 000 000 de citoyens du Québec serait un enquêteur de l'environnement, c'est un peu utopique, mais, au moins, dans chaque entreprise...

Une voix:...

M. Lazure (La Prairie): C'était bien, c'était noble...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure (La Prairie): ...mais c'était utopique. On rétrécit un peu cette grande ambition et on dit: Chaque travailleur dans une usine qui est susceptible de polluer l'environnement peut devenir et doit devenir un surveillant de cet environnement. En enchaînant sur votre

idée, je pense qu'on devrait, M. le ministre, inclure dans votre projet de loi une disposition qui, à toutes fins pratiques, irait dans le sens de la loi 17 qui a créé la CSST, qui créerait un comité paritaire dans chaque usine, chaque lieu de travail susceptible de polluer, un comité paritaire d'employés et d'employeurs, un comité environnemental, un comité de l'environnement, comme on a un comité de santé et de sécurité du travail dans chaque lieu de travail. Moi, je trouve très prometteur...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça pourrait être le même comité...

M. Lazure (La Prairie): Ça pourrait être le même, mais j'aimerais que ce soit inscrit dans une loi sur l'environnement.

L'UMQ réitère, évidemment, comme plusieurs groupes, l'idée du fonds. L'idée du fonds, c'est capital. Tout le monde nous dit que même si la loi avait existé depuis un an ou deux, le gouvernement n'aurait pas pu récupérer, à la Balmet, auprès des propriétaires, plus qu'il ne le fait aujourd'hui parce qu'il y a toujours le recours aux faillites. Il y a une grande illusion dans le projet de loi du ministre, surtout dans ses paroles quand il dit: Dorénavant, ça va être strict au Québec, on va avoir la meilleure loi en Amérique, sinon au monde, et avec ça, il n'a pas les effectifs, il n'a pas les budgets et, en plus, il va toucher des propriétaires comme les municipalités. Il faut réviser la notion de propriétaire-payeur. C'est sûr qu'il faut nuancer la notion de propriétaire-payeur. On a eu des exemples, ce matin, dans le cas de Longueuil ou dans d'autres cas, il est bien évident que ce n'est pas parce que...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On peut la retirer aussi.

M. Lazure (La Prairie): Non, je ne parle pas de la retirer, je vous parie de la nuancer à la lumière des suggestions qui vous sont faites, puis à la lumière d'autres consultations que vous n'avez pas fartes et que vous devriez faire dans les semaines qui viennent. En dehors de la commission parlementaire, qui n'est pas le meilleur cadre pour les consultations, il devrait y avoir d'autres consultations plus suivies, plus assidues.

Le ministre, souvent, depuis quelque temps, a tendance à renvoyer ça aux municipalités. Il dit aux municipalités, un peu en riant, mais il y a un fond de sérieux là^dedans: Vous avez plus de personnel à Saint-Jean que j'en ai au ministère. C'est triste quand on entend le ministre dire ça parce que c'est lui qui a la responsabilité de faire respecter l'environnement, ce n'est pas le maire de Saint-Jean ou le pro-maire. Je pense que, là, il imite peut-être un peu d'autres collègues dans son Conseil des ministres qui ont pris l'habitude de pelleter dans la cour des municipalités, mais il va falloir que le ministre, au lieu de faire simplement une bataille pour passer son projet de loi au Conseil des ministres, fasse surtout une bataille pour augmenter ses budgets, augmenter ses effectifs et créer le fonds le plus tôt possible, indépendamment de la loi. Ça devrait être une priorité de créer ce fonds-là et, une fois qu'il sera créé, de l'inscrire aussi dans la loi.

Mercier. J'ai posé la question plusieurs fois au ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moins souvent que Mme la députée...

M. Lazure (La Prairie): Est-ce qu'il est prêt à s'engager à ce que la ville de Mercier soit déclarée site no 1 dans l'hypothèse où il y aurait des sommes d'argent pour des projets de recherche qui vont nous amener à trouver des façons de décontaminer la nappe phréatique? Le ministre, l'autre jour, s'est avancé. Il a dit: Oui, elle sera no 1, la ville de Mercier, mais à la condition qu'Ottawa accepte de la considérer comme site orphelin. Encore là, voyez-vous, on est conditionné par Ottawa, au bon vouloir d'Ottawa. C'est mince comme espoir pour les gens de la ville de Mercier.

M. Dufour: Ça achève, là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avez-vous eu des nouvelles? M. Parizeau a-t-il parlé...

M. Lazure (La Prairie): La nappe phréatique. Moi aussi je pense, Mme la Présidente, qu'il devrait y avoir une référence quelconque parce que c'est un type de pollution qui est trop souvent oublié. Alors en conclusion, moi, je veux féliciter les gens de l'UMQ pour leurs remarques bien pertinentes. Je veux leur dire que nous appuyons leurs revendications dans l'entreprise qu'ils ont, qui n'est pas facile, d'avoir une meilleure écoute de la part de ce gouvernement-ci. Alors je remercie les représentants de l'UMQ. Mon collègue...

M. Dufour: J'aurais une question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. J'ai remarqué que l'Union des municipalités n'a pas posé d'objection par rapport aux inspecteurs en environnement si ce n'est qu'à Saint-Jean, ils disent: On n'a peut-être pas l'expertise. Est-ce que vous croyez, et je pose ça au président de l'Union, que les municipalités seraient prêtes à envisager la possibilité d'agir comme inspecteurs en se servant de leurs inspecteurs en environnement - il y a le coût de

formation et il y a aussi le coût de ces gens-là - sans qu'il y ait une récupération de la part du gouvernement? Est-ce que vous êtes prêts à faire ça bénévolement ou parce que vous êtes engagés...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Par charité chrétienne.

M. Dufour: ...à cause du gouvernement, etc.?

M. Desrosiers: Moi, j'ai l'impression, Mme la Présidente, que tout le monde attend avec impatience la réponse que je vais donner à cette question-là. J'ai le choix d'avoir l'air innocent ou de ne pas avoir l'air innocent. Je ne la prends pas la job si on veut me la donner comme ça. C'est la première réponse que je devrais donner pour la mettre la plus syncopée possible mais sauf que de la même façon que je reproche... non, que je rappelle à mon gouvernement qu'il est responsable politiquement de la qualité de vie des citoyens, la municipalité ne peut pas faire l'autruche et dire qu'elle, elle n'est plus responsable. Donc, je me dis: J'ai une responsabilité politique; voilà le premier point. Comment je l'assume au point de vue économique? Ça, c'est une autre question. C'est dans les moyens d'action. Est-ce que j'ai la compétence pour le faire? J'ai la compétence pour le faire si, oui, on a mis en place la mécanique d'inventorier les industries qui s'installent, le genre de pollution qu'elles peuvent créer, la tarification à laquelle elles sont soumises. Il y a toute une série de préalables avant que, moi, je puisse être un partenaire au niveau du gouvernement. Si vous me demandez: Est-ce que j'accepte d'être un partenaire du gouvernement? C'est ce qu'on dit depuis tellement longtemps mais on se demandait s'il voulait de nous, non. Alors il semble bien... Je ferais remarquer à M. le ministre que c'est notre première parution publique depuis qu'on se chicane. Alors vous voyez que ça va bien.

M. Dufour:...

M. Desrosiers: C'a coûté cher.

La Présidente (Mme Bélanger): La pertinence, M. le députe de Jonquière, s'il vous plaît.

M. Dufour: Je pensais, Mme la Présidente, que le ministre avait ouvert un peu la porte parce qu'il parlait et mon collègue aussi a parié de comment appliquer la loi. Je n'accepte pas que vous me rappeliez à la pertinence. Je pense que j'étais très pertinent.

M. Lazure (La Prairie): C'est exact.

La Présidente (Mme Bélanger): On parie d'environnement.

M. Dufour: Bien, si ce n'est pas de l'environnement, les inspecteurs de l'environnement, c'est quoi? Voyons!

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Dufour: ...madame. Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Je regrette. Si vous n'avez pas besoin de présidente, je peux m'en aller.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dufour: Bien non, mais...

La Présidente (Mme Bélanger): Alors en conclusion.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, vous me permettrez, en conclusion, de remercier tout particulièrement l'Union des municipalités du Québec pour sa comparution. Comme le président l'a mentionné à la toute fin, il s'agit de la première comparution de l'Union des municipalités du Québec devant une commission parlementaire depuis un certain temps et que ce soit la cause environnementale qui ait été l'élément déclencheur, je pense que ça honore le monde municipal qui a une grande préoccupation pour la qualité de vie de ses citoyens.

M. Desrosiers: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure (La Prairie): Je veux aussi remercier les représentants de l'Union des municipalités. Je veux féliciter M. le président et lui souhaiter un mandat fertile. Je veux aussi le féliciter, lui et son exécutif, pour le choix des intervenants, le choix de ses collègues qui, chacun à sa façon, avait une histoire fascinante à raconter et j'espère que le ministre saura trouver des réponses aux questions qui ont été soulevées par les quatre représentants de l'Union.

M. Desrosiers: En conclusion, Mme la Présidente, nous vous remercions de nous avoir reçus. Nous disons au ministre, au gouvernement et aux législateurs: Nous avons besoin de cette loi, prenons le temps de bien la faire. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors les membres de la commission vous remercient de votre participation, MM. les membres de l'Union

des municipalités du Québec, et la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 20)

(Reprise à 15 h 11)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement.

J'inviterais le groupe de l'Union québécoise pour la conservation de la nature à bien vouloir s'approcher à la table. Bienvenue, messieurs. Pour le bénéfice du Journal des débats si vous voulez bien vous identifier et présenter la personne qui vous accompagne.

UQCN

M. Simard (Christian): Mon nom est Christian Simard. Je suis directeur général de l'Union québécoise pour la conservation de la nature. À ma gauche, Jean-Marc Tardif, qui est directeur administratif de l'Union québécoise pour la conservation de la nature et chargé de projet sur les dossiers.

La Présidente (Mme Bélanger): Nous vous souhaitons la bienvenue. Vous avez 20 minutes pour faire votre exposé et poursuivre après avec un débat du côté ministériel, 20 minutes, et du côté de l'Opposition, 20 minutes, pour un total d'une heure.

M. Simard: Je vous remercie. L'Union québécoise pour la conservation de la nature, qu'on appelle UQCN, tient à remercier les membres de la commission de l'aménagement et des équipements pour l'occasion qui lui est offerte d'exprimer ses positions sur le projet de loi 65 et sur l'importante question des sols contaminés. Nous voudrions remercier particulièrement M. Pierre Paradis, ministre de l'Environnement, d'avoir mis sur pied ce processus de consultation.

Les actions et les interventions de l'UQCN prennent assise sur les trois grands principes énoncés par la stratégie mondiale de la conservation. Ces principes sont les suivants: le maintien des processus écologiques essentiels à la vie, la préservation des diversités génétiques et l'utilisation durable des ressources (espèces et écosystèmes).

L'UQCN adhère également à la notion de développement durable tel que définie dans le rapport Brundtland et parfois un peu mal utilisée. L'UQCN oeuvre particulièrement à la définition et à la mise en place d'une stratégie québécoise de la conservation. L'organisme compte plus de 100 regroupements affiliés représentant plus de 60 000 personnes. L'UQCN publie également le magazine sur la nature et l'environnement Franc-Nord.

Sur la base des principes énoncés ci-haut, l'UQCN se réjouit que le gouvernement propose une législation sur les sols contaminés qui viendra s'intégrer à l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement. Ce projet de loi 65 vient combler une importante lacune car l'actuelle politique de réhabilitation des terrains contaminés ne repose sur aucun cadre législatif et réglementaire, si ce n'est dans certains cas par le biais du règlement sur les déchets dangereux. Enfin, la politique en cours pénalise ceux qui veulent s'y conformer car ils doivent fournir des apports financiers et humains importants alors que les corporations qui ignorent la même politique peuvent continuer d'opérer et de transiger sans aucune pénalité. Cette loi aura pour effet de faire cesser, du moins en partie, cette situation intolérable.

Dans les prochaines minutes, nous ferons l'analyse du présent projet de loi ainsi que du projet de règlement l'accompagnant et nous émettrons certaines recommandations visant à l'améliorer et à le rendre plus efficace, nous l'espérons, en regard des principes de conservation de l'environnement défendus par l'UQCN et qui ont l'appui de larges couches de la population québécoise.

La problématique des sols contaminés au Québec. Le seul inventaire sérieux réalisé en matière de sites contaminés l'a été par le groupe d'étude et de restauration des lieux d'élimination des déchets, le fameux GERLED. Celui-ci a fait l'inventaire de 1095 sites, dont 333 ont été reconnus comme ayant un potentiel de risque pour la santé ou l'environnement. Tous reconnaissent cependant que l'inventaire de GERLED ne répertorie qu'une infime partie des sols contaminés au Québec. Comme nous le rappelle la commission Charbonneau dans son document "Orientations" de mars 1990, l'inventaire du GERLED n'a considéré ni les sols contaminés par les déversements illicites, ni les terrains industriels anciens ou actuels pollués par des pratiques d'élimination dépassées ou des déversements accidentels, ni les terrains recouverts de matériaux de remblai contaminés.

Nous devons constater que nous ne connaissons pas encore, aujourd'hui, la nature exacte et l'ampleur du phénomène des sols contaminés au Québec. Nous connaissons la toxicité des contaminants mais nous ignorons jusqu'à quel point l'environnement et la santé des Québécois sont menacés.

L'approche normative et l'approche écosys-témique. L'approche normative dicte des critères préétablis. L'approche retenue par l'actuelle politique de réhabilitation des sols contaminés et

par le projet de loi, en fait, qui est sous-tendu par le projet de loi 65, est une approche normative qui utilise des critères préétablis au-delà desquels un site est considéré comme contaminé. Cette approche ne tient pas compte du degré de sensibilité d'un site par rapport à un autre. Ainsi, la norme est la même, que le sol contaminé soit situé dans une cuvette géologique étanche ou bien sur un terrain perméable en contact avec la nappe phréatique. L'approche normative dite de "critères préétablis" permet cependant une interprétation simple des résultats qui permet d'agir rapidement au besoin. Encore faut-il que la liste des contaminants soit la plus exhaustive possible et que les normes correspondent aux plus récentes connaissances sur la toxicité des produits, ce qui implique une remise à jour régulière.

Et là-dessus, j'aimerais dire aussi que la toxicité des produits, il ne faut pas seulement regarder ça en fonction de la santé humaine mais en fonction de l'environnement, de la faune et de la flore qui, tôt ou tard, auront une influence sur la santé humaine. Et le degré de sensibilité par rapport à l'environnement est plus grand encore qu'au niveau de la santé humaine et il faut absolument tenir compte de ce fait-là.

À cet égard, le projet de règlement qui accompagne la loi est très inquiétant car on y retrouve beaucoup moins de contaminants que dans la politique de réhabilitation des sols. En fait, le règlement est beaucoup moins contaminé que les sols, si j'ose dire, ou que la politique, c'est-à-dire qu'il n'y a pas.. Le "listing" dans le règlement est beaucoup plus faible que celui dans la politique. Mais nous y reviendrons un petit peu plus loin parce qu'on s'explique difficilement ce genre de manque.

L'approche écosystémique ou l'analyse de risques. Lorsqu'un sol est contaminé, c'est qu'il contient des substances qui peuvent s'avérer dommageables pour l'écosystème naturel et/ou humain. Le degré de contamination d'un site et la nécessité de le décontaminer peuvent être abordés sous l'angle des risques pour l'environnement. L'analyse de risques est une approche écosystémique où le milieu est analysé (eau air-sol), les contaminants présents de même que les biorécepteurs, c'est-à-dire les espèces vivantes présentes dans le milieu qui peuvent être affectées.

L'UQCN est favorable à cette approche largement utilisée aux États-Unis car elle tient compte de la sensibilité des milieux. On peut en effet se retrouver dans une situation où un ou plusieurs contaminants peuvent être présents dans une concentration au sol qui est plus faible que les critères habituels mais peut s'avérer fortement toxiques pour le milieu simplement parce que le milieu absorbe à ce moment-là l'ensemble des contaminants. Il y aurait lieu de cumuler les deux approches pour s'assurer que les travaux de décontamination permettent un réel assainissement du milieu Nous formulerons une recommandation à cet effet en conclusion.

Une loi ou un projet de loi qui comporte encore de grandes lacunes L'Union québécoise pour la conservation de la nature est d'accord, nous l'avons dit, avec le principe du projet de loi. L'absence quasi totale de cadre législatif et réglementaire sur la question des sols cautionnait des situations inacceptables et comportait des risques sérieux pour l'environnement et la santé publique.

Telle qu'elle est rédigée, la loi comporte cependant des lacunes très importantes. Voilà celles que nous avons identifiées: La loi donne beaucoup de latitude au ministre de l'Environnement et n'encadre pas suffisamment son action, notamment au niveau des délais indiqués dans les ordonnances ou les avis (article 31.42), des échéanciers de réalisation des programmes de restauration (31.43) Cette dernière situation risque d'aboutir sur des programmes de restauration s'étendant sur plusieurs années et ne pourra plus permettre ou plus difficilement au ministre d'agir advenant la découverte de faits nouveaux sur la toxicité et les effets nocifs de certains contaminants. C'est-à-dire que si un programme de réhabilitation est en cours sur une dizaine d'années ou sur cinq ans mais qu'à la lumière de nouveaux faits, il y a lieu d'agir assez rapidement, les tribunaux ou les propriétaires des lieux peuvent arguer à ce moment-là qu'il y a un programme de restauration; même s'il est insuffisant, il est en cours et, à ce moment-là, ça limite la portée de la loi.

Même si le projet de loi 65 permettait au ministre de s'inscrire comme créancier privilégié en cas de faillite, ce qui apparaît dans la loi, cela permettrait, même lorsque les actifs sont insuffisants, au responsable ou au propriétaire d'un site contaminé de se soustraire à ses obligations. Le projet de loi ne permettrait pas d'éviter la répétition de cas comme celui de la compagnie Balmet, par exemple. C'est-à-dire que si vos actifs sont plus faibles que le coût de décontamination et que vous déclarez faillite, vous avez beau être créancier privilégié, cela ne règle absolument pas le problème.

Dans les cas où le propriétaire du sol n'est pas responsable de la contamination, le projet de loi prévoit des travaux de restauration et de décontamination uniquement lorsque le propriétaire doit changer ou modifier l'usage du sol. Cela aura pour effet, dans plusieurs cas, de maintenir, parfois pendant de longues périodes, des situations de contamination intolérables pour l'environnement et la santé publique. De plus, le projet de loi ne précise pas si la restauration doit être faite sur la portion de sol dont on désire modifier ou changer l'usage ou sur l'ensemble du sol contaminé, terrains adjacents compris.

Le projet de loi 65 ne permet pas de lever le voile corporatif et la possibilité de poursuivre

personnellement les responsables de la contamination qui pourraient être tentés de déclarer faillite pour se soustraire à l'obligation. Cette situation peut avoir pour effet de multiplier les sites orphelins ou de transférer aux municipalités ou au gouvernement les obligations et responsabilités qui auraient normalement dû incomber au pollueur.

L'actuel projet de loi n'est pas accompagné de toute la réglementation prévue à l'article 31.51, ce qui limite sa compréhension et notre capacité d'en analyser la portée réelle, notamment au niveau des modes de gestion et de l'argent aussi que ça sous-tend, surtout des usines de traitement, des lieux d'enfouissement et des normes de localisation de ceux-ci.

Outre la publication des ordonnances et la possibilité pour la personne ou la municipalité visée par l'ordonnance de faire des représentations (article 31.44), le projet de loi ne semble pas soumettre les programmes de restauration et de décontamination ainsi que le choix des technologies de traitement des lieux d'enfouissement au Règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. Aucune audience publique n'est prévue pour les activités ayant un potentiel de risque élevé pour l'environnement, alors que l'implantation ou l'agrandissement d'un lieu d'élimination de déchets toxiques est soumis à l'article t de ce même règlement et peut faire l'objet d'un examen public. Après vérification dans le Règlement sur l'évaluation et l'examen des études d'impact, nous avons constaté qu'il y avait effectivement un trou à ce niveau-là et que ça pourrait être une dangereuse voie d'accès à l'utilisation de méthodes de traitement de sites contaminés pour traiter des déchets dangereux et pour se soustraire à un processus d'examen public pour construire des équipements.

Un projet de règlement inacceptable dans sa forme actuelle. Le projet de règlement sur la contamination de l'environnement qui accompagnait le projet de loi nous apparaît incomplet et inacceptable dans sa forme actuelle. Si on compare la liste des contaminants qu'il contient à celle incluse dans "Politique de réhabilitation des sols contaminés", on s'aperçoit, notamment, que seulement 8 des 14 métaux listés dans la politique se retrouvent dans le projet de règlement. Parmi les oubliés, notons le cobalt et le molybdène. Vous savez que certains cobalts sont radioactifs. Est-ce que ces métaux auraient perdu soudainement leur toxicité? Ce dégrossissement est effectué dans plusieurs classes de contaminants et on se demande ce qui le justifie.

Dans la politique, on considérait un sol contaminé au plomb lorsqu'il contenait une concentration supérieure à 200 ppm. Dans le règlement, la concentration doit être supérieure à 500 ppm pour que le sol soit considéré contaminé au plomb. Les coûts reliés à la réhabilitation semblent être à l'origine de ce changement majeur, alors que c'est un choix dangereux si l'on considère les risques pour la santé publique ou pour l'environnement si le site est situé à proximité de résidences.

Dans la politique, on considérait la sommation ou, si vous voulez, le portrait d'ensemble d'une catégorie de contaminants comme un critère de contamination des sols. Ainsi, chacun des HAP pourraient individuellement respecter la norme, mais si le total des HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) dépassait 20 ppm de matière sèche, on considérerait le sol contaminé. Cet aspect important est éliminé dans toutes les catégories par le projet de règlement. C'est un peu inquiétant. De même, les activités identifiées susceptibles... Je ne sais pas si on comprend bien au niveau de la somme des contaminants. Vous avez plusieurs produits qui, individuellement, peuvent respecter une norme, mais se retrouver en une somme assez importante dans un site et justifier sa décontamination.

De même, les activités identifiées susceptibles de contaminer le sol semblent moins exhaustives dans la politique, notamment en ce qui a trait à l'épandage des sédiments contaminés ou à des boues d'usines d'épuration. Qu'est-ce qui justifie les omissions, sinon des manques de concordance entre différentes politiques?

Conclusions et recommandations. Plus de temps et de moyens auraient été nécessaires à notre organisme pour faire une analyse plus poussée du projet de loi 65. Comme vous le savez, l'UQCN n'a reçu, cette année, du ministère de l'Environnement, que 3000 $ de subvention discrétionnaire. L'an passé, elle avait obtenue 11 000 $. Et on avait fait des demandes répétées, depuis ce temps, de subvention discrétionnaire au ministre de l'Environnement. Sauf que, comme nous avons très peu d'argent, souvent, nous ne pouvons pas pousser nos analyses de projets autant que nous aimerions et participer pleinement aux consultations.

Une voix: ...en récession.

M. Simard: Oui, mais certains clubs de golf sont moins touchés par la récession! Nous considérons, cependant, que ce projet de loi mérite des améliorations importantes s'il ne veut pas ajouter à la confusion créée par une absence de gestion intégrée des déchets solides au Québec. Voilà quelques recommandations susceptibles de colmater les brèches les plus importantes.

L'UQCN recommande la création d'un fonds auquel contribuerait obligatoirement les organismes dont les activités contaminent le sol. La contribution pourrait être modulée selon le degré de contamination générée par la catégorie d'industries ou d'activités contaminantes données. Ce fonds devrait accumuler des sommes suffisantes pour assurer la décontamination des sites orphelins ou abandonnés. En fait, on est très

favorable à une recommandation du type formulé par les DSC, hier, au niveau d'un fonds semblable à la CSST. Et on pense que ce fonds-là pourrait môme servir à des propriétaires privés, genre propriétaires de "bungalow" qui, en totale bonne foi, se seraient installés sur des sites contaminés et en totale ignorance de cause et pour ne pas qu'ils soient soumis à la dureté de la politique, le fonds pourrait couvrir ce genre de cas particulier où une personne, en toute bonne foi, s'est bâtie sur un terrain loti sur un site contaminé. Ce serait une des possibilités.

L'UQCN recommande de soumettre à l'examen public les programmes de restauration et de décontamination. La création ou l'utilisation d'usines de traitement ou des lieux d'enfouissement devrait être notamment soumise au Règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. C'est fondamental. Il y a besoin de transparence et d'examens publics, sinon, on craint que des situations vraiment inacceptables se poursuivent encore pendant plusieurs années.

L'UQCN recommande de revoir l'actuel projet de règlement afin que soient pris en compte un plus grand nombre de contaminants et l'effet cumulatif de ces contaminants. Ça, c'est au niveau du règlement.

Autre recommandation. L'UQCN recommande que soit intégrée dans le règlement sur la contamination de l'environnement, dans le projet de règlement présoumis, l'approche de l'analyse de risques reliés à la sensibilité du milieu et que celle-ci prévale sur l'approche normative lorsque le risque s'avère élevé pour un milieu donné et ce, mâme si les normes sont respectées. C'est un peu sur la sensibilité dont je vous ai parlé tout à l'heure, la sensibilité de certains milieux, de certains animaux ou de certaines espèces de la faune ou de la flore.

L'UQCN recommande, si ce n'est fait, de consulter officiellement la Commission d'enquête sur les déchets dangereux avant de mettre en force son projet de loi. On sait que la Commission a été consultée, mais on aimerait que cette consultation soit rendue publique, de même qu'une consultation éventuelle - on ne sait pas si elle a eu lieu - avec le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, qui sont des joueurs majeurs dans ce dossier-là, et la question des sols contaminés est examinée par la commission Charbonneau.

L'UQCN recommande que soit rendu public, dans les plus brefs délais, avant l'adoption de la loi, le projet de règlement concernant les modes de gestion des sols contaminés, les usines de traitement et leurs lieux d'enfouissement, et que ce projet de règlement fasse l'objet de consultations publiques.

J'aimerais terminer sur une note. En fait, on a encore à travailler énormément sur le curatif de situations inacceptables du passé. On pense que la création d'un fonds sous forme de contribution obligatoire des entreprises ou municipalités ou de ceux qui opèrent des activités contaminantes permettrait une certaine sagesse, c'est-à-dire inciterait les tenants de ces activités-là, comme ça se fait en santé et sécurité du travail, à améliorer leurs procédures et leurs procédés de fabrication et leurs procédés d'utilisation des sols pour aller vers un rejet zéro sur les sols de contaminants. Je crois que l'aspect du fonds de contribution aux industries contaminantes est une source de sagesse pour ces entreprises-là et devrait être considéré sur une option de réduction à la source. Je vous remercie de votre attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Simard. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez de remercier l'Union québécoise pour la conservation de la nature ainsi que ses porte-parole pour le mémoire qu'ils nous ont présenté. Je passerai brièvement sur l'introduction pour tomber rapidement dans la problématique des sols contaminés au Québec.

J'attirerai l'attention de l'Union sur ie paragraphe qui débute au bas de la page 3 et qui se termine au haut de la page 4: "À cet égard, le projet de règlement qui accompagne la loi est très inquiétant car on y retrouve beaucoup moins de contaminants que dans la politique de réhabilitation des sols et un relâchement de certains critères pour des raisons obscures". Je pense qu'il s'agit là d'un énoncé qui est fondamental. Moi, je ne sais pas pourquoi, sur le plan technique, on a laissé tomber, on n'a pas eu de commission parlementaire sur le règlement, on en a suggéré une, etc. Moi, je n'ai pas d'objection à en inclure ou à en exclure; personnellement, je ne suis pas un spécialiste en la matière; le ministère de l'Environnement peut compter sur des spécialistes. Pour le plomb, à ce qu'on m'indique, parce que vous le soulevez à titre d'exemple, on en a tenu compte, suite au cas de la Balmet, aux recommandations de la Commission royale d'enquête. C'est ce qu'on m'indique. Quant aux autres éléments...

Une voix: Une Commission royale d'enquête?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, la Commission royale d'enquête du fédéral.

Une voix: Sur qui? Sur quoi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le plomb.

M. Simard: Est-ce que c'est possible de faire déposer cette chose-là. Parce que, hier, c'est curieux...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, c'est certainement public.

M. Simard: II a été mentionné à la commission, hier, que c'était une recommandation du Centre de toxicologie du Québec.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et aussi, les deux. Les deux ont été mentionnés. Je me souviens d'avoir mentionné la Commission royale d'enquête et le Centre...

M. Simard: Mais je me suis renseigné auprès du Centre de toxicologie du Québec récemment, c'est-à-dire quelques minutes avant la commission, et on me confirme qu'il n'y a pas eu d'avis sur le projet de règlement et que la seule allusion possible, mais qui aurait été, à ce moment-là, peut-être utilisée hors contexte, c'était le fait que, dans le cas de la Balmet, la norme de 200 à 500 ppm avait été utilisée pour évaluer les incidences sur les aires de jeux, au même titre que certains autres facteurs. Semble-t-il qu'au niveau du Centre de toxicologie du Québec, en tout cas, l'objection ne tienne pas. La Commission royale d'enquête, là, c'est la première fois... J'aimerais, si c'était possible, que ce document-là soit mis à la connaissance de tout te monde. (15 h 30)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On le déposera à la commission. On est ici pour ça, finalement, pour se contre-interroger et faire la lumière sur ces éléments. Le rapport sera déposé. Maintenant, quant à l'aspect du Centre de toxicologie, je vais relire ce que vous avez dit dans les épreuves, parce que l'information qu'on m'a communiquée, c'est que c'était un des éléments aussi qui avaient amené les fonctionnaires à conclure à cette décision.

M. Simard: Parce que, dans une discussion récente avec M. Nantel, notamment, il me disait que ce qui est contenu dans les documents, le seul document dont il puisse avoir mémoire que le Centre ait produit là-dessus, ne pouvait pas s'appliquer comme un avis sur un règlement ou un argument quelconque pour exclure, diminuer ou augmenter les concentrations nécessaires pour considérer un sol contaminé au plomb. Je vous donne ça pour la gouverne de la commission, bien entendu.

Excusez. Un petit point aussi, il y a des cas comme le cobalt et le molybdène qui ont été signalés aussi qui sont quand même inquiétants. C'est seulement ce que j'avais à souligner.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut rendre justice aux gens qui m'ont fourni l'information. Ils n'ont jamais prétendu que le Centre de toxicologie avait été consulté sur le règlement. Dans le cadre du dossier de la Balmet, le Centre aurait exprimé son accord sur la norme de 500. C'est ça?

M. Simard: Enfin, c'est ce que m'a dit M. Nantel.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ainsi que les DSC.

M. Simard: Ce n'est pas l'interprétation que M. Nantel m'a dite tout à l'heure.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je vous donne ça, comme ça m'est acheminé, aussi ouvertement. Si ce n'est pas le cas, ça fait partie du débat, les gens pourront prendre connaissance des galées, nous écrire des lettres dénonçant le fait que ce n'est pas exact ce qu'on leur dit. C'est l'avantage d'une commission parlementaire.

M. Simard: D'accord. Est-ce que vous avez d'autres...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'approche écosystémique ou l'analyse des risques. Vous êtes parmi les groupes qui nous recommandent de conserver une approche de risques plutôt qu'une approche normative comme telle. Je n'ai pas, là, de choix dogmatique à ce niveau-là. Les recommandations que j'ai eues, c'est que, sur le plan juridique, c'est plus facile d'appliquer une approche normative. Maintenant, les groupes qui comparaissent devant nous nous suggèrent de maintenir une approche de risques. Il semble que les communautés satellites, qu'il s'agisse des communautés dans les autres provinces canadiennes ou aux États-Unis, maintiennent une approche de risques. Bien qu'on soit une société distincte, sur le plan environnemental-Une voix: De moins en moins depuis hier.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De moins en moins depuis hier? Vous avez eu des téléphones? J'aurais tendance sur le plan environnemental, étant donné qu'il n'y a pas de frontières, à avoir une même approche que les voisins. Maintenant, il faudrait qu'elle soit applicable. Vous, ce que vous souhaitez, c'est qu'on maintienne celle de risques.

M. Simard: J'ai l'impression que, dans la question des sols contaminés, on a avantage à mettre une ceinture et des bretelles. C'est-à-dire que je pense qu'on devrait avoir...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On m'a déconseillé ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Simard: En tout cas, c'est sûr que c'est peut-être un excès de prudence en ce qui

concerne des pantalons, mais en ce qui concerne la santé et le bien-être de l'environnement, je pense qu'on peut justifier l'utilisation. Le désavantage de l'analyse de risques, le seul désavantage, c'est que, dépendant du groupe d'experts réalisant l'analyse de risques, si vous n'avez pas une qualité standard de groupe d'experts, ou l'argent nécessaire ou le temps voulu, la qualité de l'analyse de risques, il y a un aspect subjectif là-dedans, tandis que l'approche normative est stricte. Parfois, elle manque de subtilité et parfois, même, elle n'est pas vraiment appropriée et on peut décontaminer un lieu selon l'approche normative et ne pas régler le problème. Donc, l'aspect d'intégrer, et notre recommandation va dans le sens d'intégrer l'approche écosystémique ou l'analyse de risques à l'approche réglementaire. Et, dans les cas où l'analyse de risques a des recommandations sur un milieu très sensible de décontamination, parce que le milieu est sensible, et même si c'est en deçà, à ce moment-là ça pourrait prévaloir. Je ne suis pas un expert en rédaction de règlement, mais je pense que ce genre de chose a été expérimente au New Jersey. Je pense que ça se fait et que c'est possible.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais revenir sur la question de créancier privilégié, à moins que vous ayez été... Est-ce que vous étiez présent cet avant-midi, parce que j'ai eu l'occasion, sur la question...

M. Simard: Ça va pour ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va? O.K.

M. Simard: Au niveau du créancier privilégié, c'est clair que vous avez la possibilité d'être créancier privilégié, d'après ce que je comprends. C'est pour ça que j'ai passé vite sur ce sujet-là. Mais sur la créance privilégiée, la seule chose que j'aimerais soumettre à votre attention, c'est que ça ne peut pas régler la question des sites orphelins ou des faillites. Si vous avez un problème d'actifs, c'est-à-dire si la banque passe avant vous, pas nécessairement, mais si vous avez un problème d'actifs...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, nous passons...

M. Simard: ...même si vous passez avant la banque, si vos actifs valent 100 000 $ et la décontamination coûte 3 000 000 $, bien, là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): et voilà, et si la valeur résiduelle du terrain, à partir du moment où il n'y a rien, il n'y a rien... on ne sort pas de...

M. Simard: C'est ça. Ça ne règle pas la question de l'orphelinat.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va. La question du voile corporatif, vous y revenez. La Fondation québécoise en environnement nous a fait une suggestion positive hier. J'avais indiqué que, sur le plan des principes, elle était retenue. Vous revenez sur le même sujet. Je vous indique la même chose.

La question de la création du fonds, vous allez dans le sens des autres intervenants.

M. Simard: La formule est à définir, là, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va. Mais ça va dans le sens d'une application plus...

M. Simard: Tout à fait dans le sens des DSC, notamment, hier.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne peux pas passer sous silence, non plus, la question des subventions discrétionnaires au ministère de l'Environnement du Québec. J'ai demandé cette année, et je l'avais indiqué à l'Assemblée nationale, qu'il y ait des programmes normes, qu'on appelle, pour les groupes communautaires. Je tiens à vous indiquer que les subventions discrétionnaires qui ont été accordées depuis que je suis ministre de l'Environnement vont dans le sens des subventions qui étaient accordées par mes prédécesseurs. J'ai ici des listes même d'autres ministres d'autres formations politiques. Si vous en voulez des copies, ça me fera plaisir de vous les fournir, qu'il s'agisse de Marcel Léger ou d'Adrien Ouellette Je pense que même j'ai resserré, s'il y a quelque chose, les critères d'allocation. Maintenant, j'ai déjà offert à l'Union québécoise, et je l'offre aux groupes écologiques également, une approche de style de contrat de services, c'est-à-dire des projets qui aident à l'avancement de la cause de l'environnement que nous pouvons contacter à l'extérieur et, dans ce sens-là, à l'intérieur des budgets qui sont alloués au ministère de l'Environnement du Québec, je demeure très ouvert. Maintenant, les budgets discrétionnaires des ministres ont toujours été, depuis qu'ils existent, utilisés dans le sens que vous savez et je ne pense pas que ce soit contraire à la loi, au règlement ou aux objets pour lesquels ils sont mis à la disposition des élus qui occupent des fonctions ministérielles.

M. Simard: Un petit commentaire là-dessus. Je prends bonne note de vos propositions, notamment au niveau des projets spécifiques ou des ententes de services, ce à quoi on ne s'oppose pas. Mais j'aimerais quand même soumettre à votre attention le fait que lorsque nous participons, par exemple, à des séances de consultation comme celle-ci, ou celle sur l'énergie il y a deux semaines, ou éventuellement celle sur le recyclage, eh bien, les projets ou les

ententes de services ne couvrent pas ce genre d'intervention de groupe comme le nôtre et il ne faudrait pas abandonner l'idée d'une subvention de base à des organismes qui leur permette de faire leur travail d'avancement ou d'amélioration de projets de loi ou de politiques gouvernementales. Il ne faudrait pas que ce soft substitué, mais bien ajouté à.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que c'est encore là, autant sur le plan de ces sources de financement que sur le plan de l'environnement, une question d'équilibre. J'ai déjà eu à indiquer à des groupes écologiques que, comme ministre de l'Environnement, je ne souhaitais jamais que le budget, et ce n'est pas le cas en ce qui concerne votre Union, loin de là...

M. Simard: Oui, très loin.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je ne voulais jamais que la subvention gouvernementale, de quelque nature qu'elle soit, représente plus de 50 % du budget de fonctionnement d'un organisme communautaire parce que j'aurais l'impression, à ce moment-là, que l'organisme est contrôlé par le gouvernement et ça lui enlève, sur le plan financier, la marge de manoeuvre qui lui est absolument nécessaire pour se permettre de critiquer ouvertement le gouvernement ou de le féliciter ouvertement.

M. Simard: Oui. Avec une subvention de 3000 $ sur un budget de plus de 700 000 $, notre indépendance d'esprit est vraiment totale.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais j'ai dit que ça ne s'appliquait pas.

M. Simard: Mais je vous remercie de vos notes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce que vous êtes une organisation importante.

M. Simard: Bon, c'est ça. Sur la question des audiences publiques, M. le ministre... Je m'excuse, Mme la Présidente. Est-ce que je peux parler... En fait, je fais un peu directement ce que je ne devrais pas faire. Mais, M. le ministre, sur la question de l'examen public des sols contaminés, cette importante question de soumettre ou non à l'examen public la question du traitement, des lieux d'enfouissement, des normes de localisation ou même des programmes de restauration prévus dans la loi, dans le sens du règlement sur l'évaluation et l'examen des études d'impact, nous voyons que, dans l'article t du règlement sur l'évaluation et l'examen des études d'impact, il n'y a pas de... Ce sont les déchets toxiques, mais ce ne sont pas les sols contaminés, d'après les consultations, qu'on a vus, et on trouverait très dangereux qu'ils ne soient pas... Est-ce que vous avez l'intention d'apporter une modification en ce sens qui est, pour nous, fondamentale?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un des plus grands dangers qui guettent un ministre de l'Environnement, c'est de répondre oui à toutes les demandes. Sur le plan des audiences publiques, je concentre actuellement mes énergies pour tenter de soumettre aux audiences publiques les grands projets industriels. C'est dans ce sens-là que les énergies sont concentrées. Dès que cet aspect-là sera réglé, nous serons en mesure de franchir une autre étape. Mais si je vous disais: Oui, on va tout faire en matière d'audiences publiques dans tout, je risquerais de me retrouver avec le même bilan que celui avec lequel s'est retrouvé un de mes prédécesseurs qui a dû quitter, j'imagine, en 1985, à la suite d'une élection. J'ai décidé de concentrer le focus et les énergies pour que le gouvernement mette en application l'article 2n. Je sais qu'on a déjà obtenu le support utile et quasiment indispensable de l'Union que vous représentez, nous continuons d'avoir besoin de ce support, mais si je tente, demain matin, de mettre tout en application d'un coup sec, je ne réussirai rien. Je pense que nous avons progressé dans l'article 2n, nous n'avons pas encore l'aboutissement. J'ai cette qualité ou ce défaut d'être très tenace et de bien cibler mes priorités, je ne voudrais pas, demain matin, me contenter d'un prix de consolation à un niveau décisionnel supérieur. Je pense qu'à partir du moment où nous aurons soumis les grands projets industriels nous pourrons soumettre d'autres éléments. D'ailleurs, j'ai déjà eu des offres de soumettre d'autres petits éléments au lieu et place de grands projets industriels et je ne suis pas prêt, comme ministre responsable de l'Environnement au Québec, à me contenter d'autres éléments.

La Présidente (Mme Bélanger): Est-ce que vous avez fini, M. le ministre?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour le moment.

La Présidente (Mme Bélanger): Pour le moment. Alors, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Puisque le ministre a jugé bon de retourner dans l'histoire ancienne concernant les fonds discrétionnaires, je ne conteste pas ce dont il nous parie, mais ce qu'il faut lui rappeler, c'est que, s'il retourne en arrière, à l'année 1985-1986, au gouvernement du Parti québécois, le budget d'opération était de 87 800 000 $. Dès l'année suivante, il accuse...

Une voix: ...apprendre par coeur.

M. Lazure: ...une baisse de 24 %. Mais vous devriez l'apprendre par coeur. Ça baisse à 70 000 000 $. Puis, vos collègues ministériels aussi, c'est important de savoir ça. Ce gouvernement arrive, le budget a monté, pendant les cinq, six ans qui ont précédé, graduellement, depuis la création du ministère en 1979, il monte graduellement jusqu'à un sommet de 87 000 000 $ en 1985-1986. Eux arrivent, bang! Une chute de 24 % à 70 000 000 $ et, de peine et de misère, là, le ministre est allé chercher 15 000 000 $, une augmentation de 12 %. Ce que je veux dire par là, c'est que, si on a une abondance de fonds, à ce moment-là, peut-être que le ministre peut être plus large dans l'attribution de son fonds discrétionnaire à des clubs de hockey, à des clubs de golf, mais à une époque où il se plaint d'avoir si peu de fonds, il y a 26 enquêteurs seulement au ministère de l'Environnement. À une époque où il y a si peu de fonds, on trouve scandaleux qu'il prenne des milliers de dollars pour donner ça à un club de golf de son comté ou à un club de hockey de son comté, ce qu'il a fait. Bon!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous allez m'obliger à donner des noms, hein!

M. Lazure: Alors, je reviens au mémoire de l'UQCN, qui est un excellent mémoire, que l'Opposition endosse, pas parce que c'est le jeu de l'Opposition de le faire, mais parce que chacune des conclusions - il y en a cinq ou six, là: deux, quatre, six - est tout à fait cohérente puis, quant à nous, très valable. Le fonds, on l'a évoqué dès le premier jour, on l'a même évoqué, l'Opposition, avant que la commission commence. On a proposé au ministre, il y a déjà quelque temps, de créer un fonds, indépendamment de cette loi, un fonds pour la décontamination des sols, surtout orphelins, parce que, dans son budget pour 1990-1991, il a eu la grosse somme de 3 000 000 $ pour la décontamination des sols dans tout le Québec et, d'un coup, avec la Balmet de Saint-Jean, son fonds est parti, il n'y a plus rien, là. Alors, c'est évident qu'il faut profiter de ce projet de loi pour créer un nouveau fonds et, un peu à la façon de la CSST, qui soit prélevé auprès des entreprises susceptibles d'être polluantes et selon un système de mérite et de démérite, selon un système de cotisations qui pourrait varier, en plus ou en moins, selon que l'industrie se détériore ou s'améliore au point de vue de l'environnement. (15 h 45)

Votre demande de rendre publics aussi les programmes de restauration, nous l'avons faite, on continue de la faire. On pense que ça devrait aussi être dans le projet de loi. Vos remarques sur les effets cumulatifs des contaminants, on endosse la pertinence de ça. J'en viens à un point encore plus important. Le ministre semble dire: Est-ce qu'on prend les normes qui apparaissent dans les règlements ou si on prend la notion de risque? Il faut prendre les deux, à mon avis. Vous ajoutez, vous, à la notion de risque la notion d'un milieu sensible, plus ou moins sensible. Je pense que c'est une nuance intéressante. Moi, ça me paraît évident qu'il faut...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Une question pendant qu'on est là-dessus.

M. Lazure: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les deux, au niveau de la réglementation et de la législation?

M. Lazure: II faut garder dans la réglementation... Si vous me posez la question à moi - M. Simard pourra répondre pour lui tantôt - pour moi, il faut garder dans la réglementation des barèmes, des pourcentages. Mais il faut que ces pourcentages, ces barèmes soient discutés par les experts en commission parlementaire. Bon, ça c'est une chose. Mais dans le projet de loi aussi il faut garder la notion de risque. Il faut garder les deux.

Finalement, M. le ministre, l'UQCN confirme que, même si votre loi avait été en vigueur il y a quelque temps, on aurait eu le même désastre au point de vue financier - je parle, à la Balmet - que maintenant. Cette loi, qui se dit... Oui, ils le disent en toutes lettres dans leur mémoire. À quelle page. M. Simard, en parlez-vous de ça?

M. Simard: On en parle. C'est un exemple qu'on donne, notamment, au niveau de la créance privilégiée. Je vais vous trouver la page.

M. Lazure: Je l'ai vu tantôt. Vous l'avez lu tantôt.

M. Simard: en fait, l'exemple donné est le cas où - je ne crois pas qu'au niveau de la balmet, c'est notre estimation qu'on avait faite - il y a les actifs suffisants, éventuellement, dans une créance privilégiée, pour couvrir les coûts. dans ce cas-ci, le problème n'aurait pas... si, actuellement, la loi avait été opérationnelle...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À l'époque.

M. Simard: C'est-à-dire si elle avait été opérationnelle à l'époque, bien sûr, elle aurait permis quand même la possibilité de faire une faillite et une récupération d'actifs insuffisants, nous croyons, pour régler le problème de la restauration. C'est-à-dire qu'on n'aurait pas pu nécessairement, avec l'utilisation de l'arme de la

faillite, récupérer les sommes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II ne peut pas affirmer ça. Ils se sont fait refuser une faillite parce que les créanciers...

M. Lazure: C'est exact, c'est ce qu'on dit, nous autres, depuis le début.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je me demande... Si vous me permettez, on peut éclairer, tirer l'affaire au clair. Vous dites: ils auraient eu la possibilité de faire une faillite. Cette possibilité leur a été refusée, si je peux m'exprimer ainsi, le 23 mai dernier parce que les créanciers qui, dans certains cas, étaient des créanciers liés ont accepté un paiement moindre. Si vous vous replacez dans la situation financière de la Balmet au mois d'août 1989, est-ce que vous pouvez me donner l'état financier de la Balmet au mois d'août 1989?

M. Simard: Non, j'avoue que je ne peux pas vous le donner au mois d'août...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous ne le savez pas?

M. Simard: Non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K. Ça va. Vous êtes comme M. Lazure.

M. Lazure: Mais, Mme la Présidente, pour répondre au ministre, c'est bien évident que si cette loi avait existé, à ce moment-là, ils auraient éclaré faillite. Ils étaient prêts à déclarer faillite ou ne pas déclarer faillite selon...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Possiblement. La loi les aurait possiblement mis en faillite.

M. Lazure: Bien sûr.

M. Simard: C'était dans cet esprit-là, sans analyser les états financiers.

M. Lazure: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O. K. Ça va. C'est plus acceptable, oui.

M. Lazure: Au fond, l'UQCN confirme ce que...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a une grosse différence.

M. Lazure: mais l'uqcn confirme que c'est une loi qui, malgré ses apparences, peut n'être qu'un tigre de papier, finalement, parce que, d'une part...

Une voix:... la retirer.

M. Lazure: Non, non, il ne s'agit pas de la retirer, M. le ministre. Il s'agit de la compléter et de l'améliorer. Ce n'est pas la loi du tout ou rien. Il faut l'améliorer. Il faut l'améliorer beaucoup, notamment, par le fonds des industries polluantes, mais aussi par l'ajout, dans votre budget ministériel, d'effectifs, l'ajout d'argent de façon massive. Sinon, la meilleure des lois va rester inopérante si vous continuez à n'avoir que 26 enquêteurs ou 26 inspecteurs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez raison.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je dis: II a raison, et il termine.

Une voix: Ça finit bien. La Présidente (Mme Bélanger): Ça va? M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va. M. Lazure: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Est-ce que vous voulez remercier?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mme la Présidente, au nom du ministère de l'Environnement du Québec, à l'Union québécoise pour la conservation de la faune, nos remerciements. Nous n'avons pas eu le temps de procéder à chacun des éléments de recommandation que vous nous avez faits quant au libellé comme tel. Je tiens cependant à assurer l'Union que son travail n'a pas été fait en vain et que, sur le plan du libellé final du projet de loi, chacun des éléments sur lesquels vous avez attiré notre attention sera pris en considération. Je ne dis pas "retenu". Parfois, il faut retenir; parfois, il faut rejeter, mais nous le prendrons en considération et nous vous remercions des efforts que vous avez déployés.

M. Simard: Je vous remercie beaucoup. Je remercie les membres de la commission.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Au nom de l'Opposition, merci pour vos propositions tout à fait éclairantes qui vont aider le ministre à améliorer son projet de loi, et on se félicite de vous avoir ajouté à la liste des groupements invités à cette commission. On remercie le ministre d'avoir accepté notre suggestion. Merci.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est fait en collaboration comme le projet dé loi actuel.

M. Lazure: C'est ça.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Stmard et M. Tardif, nous vous remercions pour votre participation.

M. Simard: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Nous suspendons les travaux pour une couple de minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 51)

(Reprise à 15 h 58)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demanderais à la Confédération des syndicats nationaux de bien vouloir s'approcher à la table.

Alors, bienvenue, messieurs. M. Larose, je vous demanderais de présenter les personnes qui vous accompagnent.

CSN

M. Larose (Gérald): merci, mme la présidente. je vous présente, à ma gauche, m. pierre bonnet, qui est adjoint à l'exécutif de la csn, et, à ma droite, m. roger laroche, qui est vice-président au conseil central de montréal.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Larose, ce n'est sûrement pas la première fois que vous venez en commission parlementaire, en consultation. Alors, vous avez 20 minutes pour faire votre exposé et un débat de 40 minutes, réparties en parts égales pour chacun des groupes parlementaire, suivra.

M. Larose: Merci bien, Mme la Présidente. Ce n'est effectivement pas la première fois, mais c'est toujours aussi impressionnant de débattre de ces questions importantes, et je ne voudrais pas qu'on m'entraîne sur le golf, je suis un amateur de golf.

Une voix: ...une subvention, en voulez-vous une?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pas moi, on n'a pas eu l'occasion...

M. Larose: Même si je découvre de plus en plus que, apparemment, c'est un sport très polluant, pour l'entretien que ça exige...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, ils utilisent des herbicides.

M. Larose: ...pour les engrais, les pesticides, etc. Ce qui est un peu irritant, effectivement, mais le temps de pratiquer un autre sport...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On va leur donner une subvention pour qu'ils viennent aux engrais...

M. Larose: Je ne sais pas si on vous a fait parvenir copie d'un mémoire.

M. Lazure: Non.

M. Larose: Alors, je vais demander à Pierre de mettre à la disposition de la commission un petit texte de sept ou huit pages, de huit pages, que je résumerai. Alors, dans ce sens-là, peut-être qu'on n'aura pas besoin des 20 minutes de présentation.

Alors, comme vous le savez, la CSN sort de son 55e congrès. Avec l'emploi, le développement économique du Québec, aussi avec des préoccupations quant à une plus grande prise dans les milieux de travail, aussi avec les préoccupations touchant le futur industriel et le futur constitutionnel du Québec, le 55e congrès s'est aussi emparé de la question de l'environnement et du développement durable. Chez nous, ces questions-là sont, oui, des questions de principe, mais ça doit être, d'abord et avant tout, des questions de pratique et d'action.

La CSN, pour une, adhère au rapport Brundtland de la Commission mondiale sur l'environnement et le développement qui est intitulé "Notre avenir à tous", et je voudrais vous citer deux passages qui peuvent cadrer la réflexion de cet après-midi. En effet, il est stipulé en introduction à ce rapport que "l'environnement ne peut être séparé des actions, des ambitions et des besoins de la personne humaine... l'environnement est le lieu où chacun de nous vit et le développement est ce que nous essayons de faire pour améliorer notre sort à l'intérieur de ce même lieu. Les deux sont inséparables." Et c'est dans cet esprit que le dernier congrès de la CSN a adopté une résolution qui se lit comme suit: "Promouvoir et contribuer davantage à ce que le coût inhérent à un tel développement et à l'assainissement soit socialement et équitablement réparti en tenant compte du principe de la notion de pollueur-payeur et aussi du principe de l'élimination de la pollution à la source."

Dès lors, nous accueillons donc favorablement le projet de loi 65 et les motifs qui le sous-tendent tels qu'ils sont énoncés dans les notes explicatives au projet qui "...a pour objet de modifier la Loi sur la qualité de l'environnement afin de permettre au ministre de l'Environnement, lorsqu'il a des motifs de croire qu'un contaminant est présent dans l'environnement, d'ordonner au responsable de la contamination de lui fournir une étude de caractérisation et un

programme de décontamination ou de restauration de l'environnement contaminé. Par ailleurs, lorsqu'il constate la présence d'un contaminant dans l'environnement, il peut également rendre une ordonnance enjoignant au responsable de ramasser, d'enlever, de recueillir ou de neutraliser le contaminant et de décontaminer ou restaurer l'environnement".

Alors, nous sommes tout à fait d'accord pour que le ministre se donne des pouvoirs accrus, même s'il en avait un certain nombre dans la Loi sur la qualité de l'environnement, notamment, on rappelle les articles 2b et 2c. Souvent, il ne surfit pas d'avoir des pouvoirs, c'est la volonté et l'environnement qui peuvent favoriser qu'on les applique ou pas et, dans ce sens-là, ces préoccupations-là ne seront jamais que le fait d'un seul homme ou d'un seul ministre. Ça doit devenir une volonté politique d'une Assemblée ou d'un gouvernement.

Je vous amène à la page 4 immédiatement pour citer un autre passage avant d'entrer directement dans la critique d'un certain nombre d'articles du projet de loi. "Pour pouvoir anticiper et prévenir les agressions contre l'environnement, il faut tenir compte de la dimension écologique des décisions, au même titre que des dimensions économique, commerciale, énergétique, agricole et autres. Il faut examiner cet aspect des politiques à l'occasion des mêmes réunions et devant les mêmes instances nationales et internationales. Cette indispensable réorientation constitue l'un des grands défis des années 90 et au-delà. Pour la réaliser, il faudra des changements et des réformes considérables (...) ces changements s'imposent à tous les pays, grands ou petits, riches ou pauvres." À notre avis - et, dans ce sens-là, les débats qui se passent devant la commission sont éclairants - bon nombre ou un certain camp vont vouloir dissocier la préoccupation de l'environnement de la préoccupation de l'économie, alors que, notamment au chapitre du développement durable, il faut savoir intégrer et lier toutes ces questions-là. Ce qu'on ne paie pas aujourd'hui risque de nous coûter très cher demain. Et il y a des économies qu'on fait en environnement aujourd'hui qui s'avèrent être des factures extraordinaires pour la société dans les années qui suivent. Alors, c'est dans ce sens-là qu'à la CSN on travaille la question de l'environnement.

Et j'arrive sur un certain nombre de points soulevés dans le projet de loi. Nous, on a des difficultés avec la définition des sols. On sait que c'est déjà inclus dans la définition de l'environnement, mais on voudrait voir incluse la question des eaux souterraines, des nappes phréatiques. On sait qu'au Québec il y a encore 25 % de la population qui tire son eau potable directement, sans traitement ou presque, des nappes phréatiques. Alors, il faudrait inclure dans la définition la question des eaux souterraines et des nappes phréatiques.

Je vous amène à l'article 31.49 où il y a une obligation qui est faite au propriétaire de ne restaurer que dans les seuls cas de modification de l'usage du sol, d'excavation, de construction ou de démantèlement. On précise que l'obligation est faite dans ces circonstances-là. Nous, on a l'impression que ça risque d'être, en fait, un encouragement à l'abandon en état inactif d'un site contaminé et donc que c'est dans tous les cas de figure que l'obligation devrait lui être faite de fournir un certain nombre de choses au ministre. Alors, c'est pour ça qu'on propose une modification et même on s'est forcé un peu pour vous donner un libellé très précis où on fait disparaître les particularités disant que c'est en cas de modification de l'usage du sol, etc.. Faire enlever ça pour le remplacer, pas le remplacer, mais le faire tout simplement disparaître de telle sorte que l'obligation existe en tout temps et non pas quand il y a des travaux à venir.

À l'article 31.49 2°, on souhaiterait voir un ajout, parce qu'on y parle encore des travaux, de modifications. On y ajouterait, nous, plutôt la phrase "en vue d'en rétablir le caractère multi-fonctionnel d'utilisation", de telle sorte qu'il n'y aurait pas de passe-passe, parce que ce n'est pas une excavation, parce que ce n'est pas un démantèlement, etc. C'est dans le cas d'un rétablissement du caractère multifonctionnel d'utilisation du sol.

On a aussi un problème, toujours sur la définition des sols. On sait que, dans les règlements, les distinctions réglementaires ne sont pas très claires entre sol contaminé, déchets dangereux et matière contaminée. On pense qu'il faudrait être beaucoup plus précis et tous les sols qui sont contaminés ou qui ont les caractéristiques de l'annexe 2, qui parle des déchets dangereux, eh bien, ceux-là devraient être considérés comme déchets dangereux.

Un cinquième élément où nous apportons une critique; c'est à l'article 31.51c où il y a un pouvoir discrétionnaire de donné au ministre de déterminer des normes de localisation, d'exploitation et d'entretien des sites d'enfouissement et des usines de traitement des sols contaminés. Nous entretenons la crainte, surtout en vertu, je dirais, d'une zone très grise entre sols contaminés, déchets dangereux, matières contaminées, que si on voit une usine se développer pour traiter des sols contaminés, eh bien, que, tranquillement, on glisse du côté des déchets dangereux, et ainsi on pourrait "by-passer" la réglementation qui exige, notamment, des audiences, etc, mais un certain nombre d'exigences qui existent pour les déchets dangereux. C'est pour ça qu'on proposerait, nous, que le pouvoir discrétionnaire du ministre se limite seulement aux installations temporaires, mobiles, in situ, disent les Anglais, de telle sorte qu'on ne pourrait pas se faire avoir par la façon dont je décrivais tantôt, de telle sorte que pour les

installations permanentes, on aurait les mêmes exigences que pour le traitement des déchets dangereux.

Ce sont là quelques remarques pour ce projet de loi. Je me résume en disant qu'il y a là un bon pas; nous, on a une approche positive de ce projet de loi. Comme je le disais tantôt, on veut que ça couvre aussi les eaux souterraines et la nappe phréatique. On veut que le ministre puisse ordonner des choses sans que ce soit lié à des opérations particulières de restauration des sols. Et les deux autres éléments, c'est concernant la clarification des sols contaminés par rapport aux déchets dangereux et à l'installation des usines de traitement de ces mêmes sols contaminés. Ça résumerait un peu notre appréciation du projet de loi.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. Larose. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, vous me permettrez de remercier la CSN, son président, les gens qui l'accompagnent. Vous vous êtes donné la peine d'adresser des questions et, comme vous l'avez souligné à juste titre, vous vous êtes donné également la peine de nous suggérer un libellé d'articles de façon à préciser, et nous l'apprécions toujours. Lorsque nous retenons l'idée exprimée, nous avons à la fois la source d'inspiration législative et, dans le cas des libellés que vous soumettez, ils sont clairs. Quand c'est clair, c'est plus facile à appliquer, parce que c'est plus facile à comprendre par la population. Je ne suis pas tellement surpris de la position de la CSN. Ça s'inscrit, comme vous l'avez indiqué, M. Larose, dans la foulée des décisions que vous avez prises à l'occasion de votre 55e congrès annuel, à l'occasion duquel vous avez pris d'autres sages décisions, dont la réélection du président.

Vous nous reprochez un petit peu de ne pas aller assez loin, lorsqu'on prend le mémoire dans son ensemble. Vous dites au gouvernement: Vous auriez pu, finalement, tant qu'à légiférer, aller un peu plus loin. Nous avons entendu hier le Conseil du patronat du Québec qui disait: Vous êtes peut-être allés un peu trop loin dans ce que vous nous suggérez comme projet de loi. Nous tentons de rechercher cet équilibre. Au niveau de l'appréciation globale du projet de loi 65, vous parlez de l'article 2, 2b, 2c, qui contient déjà des pouvoirs. Mais vous ajoutez, à la page 4, que c'est peut-être utile d'apporter des clarifications. Moi, ce que les gens du contentieux au ministère me disent, c'est qu'on n'en avait pas de pouvoir d'intervention, dans certains cas. Entre autres le cas le plus connu, le plus pratique d'intervention où on n'avait pas de pouvoir pour forcer la décontamination comme telle, c'était le cas de la Balmet, à Saint-Jean-sur-Richelieu On m'affirme, au contentieux, que tous les pouvoirs contenus à la loi avaient été exercés, donc qu'il fallait, entre autres, en ajouter pour pouvoir intervenir dans des cas comme celui de la Balmet. Mais vous avez raison de souligner également que ça ne prend pas seulement des pouvoirs contenus dans une loi, ça prend une volonté de les mettre en application et, là-dessus, je suis d'accord avec la CSN. Mais ce n'est pas toujours facile.

Un des cas difficiles sur lesquels j'ai eu à rendre une ordonnance depuis que je suis ministre de l'Environnement a été le cas de la compagnie Norton, à Trois-Rivières, où la centaine de travailleurs qui ont perdu leur emploi suite à la fermeture de l'usine qui a fermé suite à une ordonnance émise par le ministère de l'Environnement du Québec étaient des syndiqués de la CSN. Nous avons eu des discussions avec les représentants du syndicat local, mais quelle que soit la flamme environnementale qui anime ces personnes, lorsque c'est leur gagne-pain, leur soutien de famille, finalement, qui s'évanouit, ça place tous les décideurs dans une situation qui est difficile et qui est même pénible parfois sur le plan humain. Donc, même si la volonté est là, elle n'est pas toujours, dans des circonstances bien particulières, facile à appliquer dans le quotidien. (16 h 15)

Maintenant, je tiens à dire que la CSN a eu dans ce dossier-là, comme dans d'autres dossiers où j'ai eu à échanger avec la CSN, une attitude responsable face à la société québécoise.

Vous proposez que les dispositions prévues s'appliquent explicitement aux eaux souterraines et a la nappe phréatique. Vous n'êtes pas le seul groupe. La proposition nous revient à répétition. Nous avions l'impression que notre libellé couvrait la nappe phréatique, mais étant donné que ça fait plusieurs groupes qui reviennent à la charge, nous allons apporter des clarifications pour être certains que le projet de loi couvre et les eaux souterraines et la nappe phréatique. Nous vous remercions de cette suggestion.

Vous traitez un peu plus loin du caractère multifonctionnel d'utilisation. Et là, nous avons eu des représentations qui ont varié. Certains témoignages nous suggéraient plutôt d'ajuster nos normes à l'utilisation du terrain, c'est-à-dire que si vous avez une utilisation industrielle, vous êtes un peu moins sévère, ou commerciale et jusqu'à résidentielle. Est-ce que vous avez évalué cet aspect-là d'avoir une approche qui est sectorialisée? Vous avez retenu, après réflexion, une approche multifonctionnelle où le même taux de décontamination doit s'appliquer partout? Est-ce que vous avez analysé l'approche résidentielle, commerciale et industrielle avant d'en arriver à nous recommander le caractère multifonctionnel d'utilisation?

J'aimerais également vous entendre sur la question d'un fonds de décontamination. Ça n'a pas été traité comme tel dans le mémoire, mais plusieurs groupes nous en ont fait la suggestion,

qu'il s'agisse d'un fonds sous forme d'assurance, sous forme de cautionnement, sous forme de tarification, style Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je souhaiterais avoir le point de vue de la CSN sur cette possibilité.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Larose.

M. Larose: Je vais commencer par la deuxième question. On ne l'a pas abordée, nous, dans notre mémoire parce qu'on travaille, je dirais, sur d'autres mémoires, notamment à la faveur de la commission Charbonneau. Alors, on va aussi s'y présenter vers la fin du mois de juin où nous développons toute la question du fonds. C'est d'abord une position qui a déjà quelques années chez nous. Le congrès, si je me souviens bien, de 1986 avait abordé carrément la question de la création d'un fonds de dépollution. Je voudrais peut-être donner un contexte un petit peu plus large. Nous, on pense qu'une intervention en environnement doit être une intervention, je dirais, à multivolets et ça doit venir de plusieurs sources, pour arriver, je dirais, en bout de ligne, à faire en sorte que les éléments producteurs de pollution soient à ce point responsabilisés que, lorsqu'ils cogitent, qu'ils pensent des procédés de production, déjà, ils conçoivent ces mêmes procédés-là, l'utilisation de la matière première, les déchets, les rejets, etc, que tout ça soit conçu pour une élimination à la source.

Bon, il est clair - et on connaît notre société, on connaît les éléments de base du fonctionnement de cette société-là - que si les gens ne sont pas ou les producteurs ne sont pas responsabilisés, y compris au plan économique, ils vont chercher à passer la facture n'importe où et ils ne seront jamais mis en demeure de repenser tout leur système de production. Nous, on y va sur l'élément où il faut d'abord responsabiliser, y compris par le fait qu'ils doivent cotiser, qu'ils doivent alimenter un fonds de dépollution, d'abord parce qu'il y a des dégâts accumulés et plusieurs "fly-by-night", la Balmet étant un cas récent, mais qui ont laissé, je dirais, comme héritage à la société des choses assez scandaleuses. Alors, qu'il y ait un fonds alimenté par les sociétés et qui doit être alimenté à partir d'une évaluation de la charge polluante que ces entreprises-là font. Alors, c'est peut-être un peu le modèle CSST, parce que c'est un peu ça, les secteurs à risques et sur la base d'expériences sont appelés à cotiser davantage que les autres. Mais on pense qu'il faudrait que ce fonds-là soit alimenté de cette façon-là, vraisemblablement aussi avec une contribution, dans un premier temps, pour éponger ou réparer des situations produites antérieurement. Alors, une contribution d'une source publique de l'État se justifie dans ce cas-là. Bon, c'est clair et je ne pense pas que vous êtes...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): En fait, M. Larose, pendant qu'on est dans ce sujet-là, on va assez loin avec ce qu'on appelle le pollueur-payeur où celui qui a contaminé doit décontaminer. Vous avez semblé, dans votre mémoire, vouloir suggérer que les mêmes responsabilités de décontamination s'appliquent aux propriétaires, que ce soit le propriétaire-payeur. Et comme on a entendu certains groupes surtout patronaux prétendre que ça allait un peu loin comme principe, le pollueur-payeur - on pouvait toujours l'avaler lorsqu'on était du côté du patronat - le propriétaire-payeur, il semblait y avoir beaucoup de réserve. Et vous, ce que vous nous suggérez, c'est d'y aller encore plus loin qu'on y va dans le présent projet de loi en fonction du propriétaire-payeur. J'aimerais que vous...

M. Larose: c'est parce que le propriétaire est souvent celui qui gère sa cour. s'il y a des pollueurs, il peut ne pas être lui-même le pollueur, bien, c'est à lui de régler ses comptes avec ses locataires, si je peux dire. mais dans ce sens-là, je pense, pour qu'il ne se fasse pas n'importe quoi non plus dans la cour du propriétaire, ii faut qu'il se sente responsabilisé à ce niveau-là.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. On reviendra sur cette notion-là tantôt. Moi, je veux féliciter le président et ses collègues pour la présentation qu'ils viennent de nous offrir. J'ai noté, avant d'arriver à des points particuliers, un commentaire général à la page 4. Le ministre n'y a pas fait allusion. Je pense que c'est utile d'y faire allusion. Vous dites que le fait que ces pouvoirs ministériels existent déjà, mais qu'ils sont fort peu utilisés, nous interroge sur l'efficacité réelle qu'aura l'élargissement des moyens d'intervention du ministère de l'Environnement. Effectivement, en réponse à ma question ce matin, le ministre admettait que, depuis sept mois, huit mois qu'il est en fonction, il y a eu exactement huit ordonnances en tout de prises, ce qui n'est pas tellement... Ce n'est pas beaucoup sur huit mois, une ordonnance par mois. Il faudrait étudier les ordonnances et quelle envergure que ça avait. J'ai...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On peut s'engager à vous fournir l'étude.

M. Lazure: Vous les sortirez, les huit. Ça serait intéressant de les regarder. Mais il reste qu'effectivement, pour les utiliser, les pouvoirs, ça prend des effectifs, ça prend du personnel, ça prend de l'argent - je n'y reviens pas, je l'ai dit à plusieurs reprises - mais ça prend aussi une volonté politique de la part de tout le gouvernement et non pas seulement du ministre de

l'Environnement. Et là, moi, je ne peux que concourir aux commentaires que vous faites. Vous dites: Votre inquiétude provient du fait que le gouvernement actuel ne cherche pas à concrétiser ce que la Commission mondiale sur l'environnement qualifie de réorientation indispensable. Et là, vous donnez la citation où il faut que les dimensions économique, commerciale, énergétique, agricole et autres soient constamment connectées, si on veut, avec la préoccupation environnementale. Je pense qu'il est évident c'est un des problèmes majeurs de ce gouvernement. Et l'exemple le plus flagrant de ça, c'est le fait que l'article n qui n'est toujours pas en vigueur, cet article-là actuellement, parce qu'il n'est pas en vigueur, permet une situation un peu ridicule où le Bureau d'audiences publiques fait plein d'audiences publiques sur l'agrandissement d'une marina de 300 000 $, 400 000 $, ou un bout de chemin qui va coûter 1 000 000 $ ou 2 000 000 $, et ne fait pas d'audiences publiques quand il s'agit de grands projets industriels qui vont coûter 1 000 000 000 $ ou 500 000 000 $. Et si on faisait mieux travailler le Bureau d'audiences publiques, on ferait de la prévention dans bien des cas, parce que c'est avant que l'entreprise s'installe dans le paysage qu'on peut prévenir, qu'on peut empêcher l'entreprise en question d'installer des équipements ou des procédés qui sont trop polluants. Le gouvernement actuel se prive d'un instrument de prévention qui serait extrêmement utile.

Quant aux recommandations particulières, je peux vous dire, M. Larose, que l'Opposition les endosse à peu près intégralement. Elles sont tout à fait pertinentes, en particulier en ce qui concerne la nappe phréatique, mais aussi, là, votre suggestion quant aux installations mobiles, et non pas toutes les installations Ça nous apparaît important de faire la distinction.

J'ai une couple de questions. Le ministre a posé la première que je voulais poser, sur le fonds. Vous avez répondu. Donc, je dois comprendre que vous êtes favorables à un tel fonds, évidemment. La deuxième question. Ce matin, les gens de l'Union des municipalités du Québec, l'UMQ, nous ont présenté un mémoire et un des délégués, à un moment donné, un conseiller de Saint-Jean-sur-le-Richelieu, M. Roy, le pro-maire, nous faisait remarquer qu'on aurait avantage à donner plus de responsabilités aux employés dans une entreprise, quant à la surveillance de l'environnement. Inspiré par ça, moi, j'ai soulevé la question: Est-ce qu'il ne serait pas concevable que les comités actuels de santé et sécurité au travail, prévus par la loi 17, qui fonctionnent assez bien, en général, se voient donner un mandat additionnel, ou encore créer un nouveau comité parallèle, soit l'une ou l'autre de ces deux formules, mais, à tout événement, qu'il y ait, confié par la loi, à un comité paritaire employeur-employés syndiqués, la responsabilité de surveiller l'environnement par rapport au fonctionnement de l'usine, disons, que ce soit une papetière ou peu importe le genre d'entreprise? Quelle serait votre réaction à une telle formule, à une telle suggestion?

M. Larose: Le débat qui se fait chez nous fait beaucoup d'analogies entre la pratique syndicale, parce qu'on est une organisation syndicale, en matière de santé et sécurité et la pratique qu'on doit développer en matière d'environnement. On sait qu'en matière de santé et sécurité, notre orientation fondamentale, c'est d'arriver, non pas, je dirais, à réparer et à défendre le monde - ça on le fait un coup qu'ils sont blessés - c'est d'arriver à avoir des procédés de travail qui éliminent à la source et le danger et les matières toxiques qui peuvent agresser la santé.

En environnement, on doit penser des choses exactement de la même façon. Je suis convaincu que, dans la Norton, y compris syndi-calement, moi, je suis prêt à aller jusque là, s'il y avait eu une conscience dans l'entreprise pour faire en sorte qu'effectivement, on règle, plusieurs années auparavant, ces questions-là, à la source, on ne serait pas arrivé à la catastrophe qu'on connaît. Alors, dans ce sens-là, il est important de pouvoir, je dirais, pratiquer, en environnement, un peu comme on l'a fait en santé et sécurité

Maintenant, quant à une proposition d'un comité, nous, ce qu'on met à l'étude et qu'on va terminer pour les fins de la commission Charbon-neau, ce qu'on est en train d'étudier, c'est l'existence d'un comité dans l'entreprise sur les charges polluantes, c'est-à dire un comité qui serait chargé non seulement de connaître, d'analyser, d'évaluer, mais d'être à même d'avoir un bon diagnostic et, deuxièmement, qu'il soit responsable, je dirais, de l'élimination de cette charge polluante (16 h 30)

Quelle est la place des travailleurs et des travailleuses dans ce comité-là? Il est évident que, nous, on ne voudra jamais être responsabilisés, au sens où, s'il y a des poursuites, ce sont les travailleurs qui seraient poursuivis pour des décisions qu'ils ne prennent jamais, de toute façon. Parce que les procédés de production, on peut faire des suggestions, mais ça ne se négocie pas, hein? En tout cas, pas encore. Dans le 55e congrès, on suggère un certain nombre de choses pour avoir davantage de prise, mais disons que ce n'est pas ça. Alors, on ne visera pas une responsabilité légale, OK ? Mais, pour les organisations syndicales qui veulent peser de tout leur poids sur un certain nombre de décisions qui doivent être prises dans l'entreprise, on va certainement demander à être présents pour pouvoir influencer les travaux des comités. Alors, dans ce sens-là, oui, nous, on va être ouverts à ces possibilités-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous permettez, peut-être?

M. Larose: Oui, oui.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pendant qu'on est sur le sujet, pour ne pas qu'on s'en éloigne et qu'on l'oublie, est-ce que vous êtes satisfaits de ce qui a été mis en place, à certains endroits, en matière de santé et sécurité au travail, le procédé qu'on appelle SIMDUT, qui renseigne les travailleurs sur le contenu de ce qu'ils manipulent, les façons de prévenir s'il y a accident, etc.? Est-ce que c'est un processus qui, sur le plan de l'information aux travailleurs, est satisfaisant?

M. Larose: C'est très incomplet, au moment où on se parle, mais je dirais qu'il y a là les éléments de base pour la circulation d'une information minimale quant aux produits agresseurs, toxiques, etc.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: pour poursuivre un peu dans la même veine, là, je vois qu'on est un peu sur la même longueur d'onde, mais j'irais un petft peu plus loin. est-ce que vous ne croyez pas que le comité santé et sécurité au travail pourrait être... on peut considérer que la plupart des inconvénients dus à la pollution créée sort par les équipements ou peu importe, par l'air ambiant, ont des répercussions sur la santé des travailleurs. c'est extrêmement difficile de dissocier les problèmes environnementaux, en lieu de travail, des problèmes de santé et sécurité. c'est extrêmement difficile. alors, c'est dans ce sens-là. peut-être qu'il s'agirait d'élargir le concept de santé pour y introduire la notion environnementale.

M. Larose: Moi, je pense qu'on pourrait peut-être débattre assez longtemps l'aspect organisationnel, comment on organise ces choses-là. Mais c'est évident que, je dirais, les agresseurs sont les mêmes en environnement qu'en santé et sécurité. C'est évident. Alors, dans ce sens-là, déjà, il y a tout un travail d'harmonisation des normes en environnement par rapport à celles qui existent en matière de santé et sécurité. Ça, c'est un travail qui n'est pas fait encore, mais on pourrait très largement s'inspirer, pour faire ce travail, d'harmonisation. Mais je vous dirai, pour ma part, qu'en matière de santé et sécurité dans les entreprises et les institutions c'est déjà tout un champ à couvrir pour ceux qui assument ces responsabilités-là, notamment aux chapitres de la prévention, de la défense, des recours qui sont très complexes.

Très concrètement, nous, on ne se verrait pas rajouter, je dirais, tout de go une responsabilité développée en environnement; il va falloir, je dirais, qu'on mette d'autre monde à l'ouvrage. Mais c'est évident que ce monde-là va travailler. Ce qu'on est en train de discuter avec notre propre monde, c'est que cette responsabilité-là soit identifiée à l'intérieur de la structure syndicale. Ça peut être quelqu'un de l'exécutif, quelqu'un du conseil syndical, un comité ad hoc qui, effectivement, va certainement travailler, en termes d'échange d'informations, avec le Comité de santé et sécurité. Mais on a comme l'impression, dans un premier temps, qu'il va falloir que ce soit du monde, je dirais, pas spécialisé, mais plus préoccupé sur le volet de l'environnement.

M. Lazure: Est-ce que vous auriez objection à ce que, dans la loi, il y ait un article qui prévoie un tel comité, avec un échéancier qui soit réaliste, après toutes les consultations normales, patronales, syndicales, etc.? Mais est-ce que vous seriez contre le fait que cette nouvelle loi, qui amende la loi actuelle, prévoie dorénavant un tel comité, encore une fois, là, quitte à discuter plus tard des modalités du comité, mais l'existence d'un comité quelconque qui serait formé au moins moitié-moitié d'employés et d'employeurs et qui serait consacré à la surveillance de l'environnement? Sans responsabilité, vous avez raison; ce n'est pas à ce comité-là que doit incomber la responsabilité.

M. Larose: Roger.

M. Laroche (Roger): Le problème qu'il y a actuellement, lorsqu'on fait des comparaisons purement entre la santé et sécurité et l'environnement, c'est qu'il y a un troisième partenaire en environnement que sont les citoyens. En santé et sécurité, on règle les problèmes entre nous autres, parce que c'est à l'intérieur de la boîte que ça se passe. C'est le travailleur qui est directement interpellé par le problème. Avoir un comité qui reprendrait exactement ou à peu près le modèle santé et sécurité pose des problèmes à ce niveau-là. Il faut être réaliste. Il faut que les citoyens soient inclus aussi. À Norton, si, il y a plusieurs années, le groupe des citoyens, les travailleurs et l'employeur s'étaient assis et s'étaient parlé, on n'aurait peut-être pas eu le problème non plus. Il y a ça qui est différent de la santé et sécurité tout simplement. Alors, ça cause toujours le problème à savoir quelle forme on va avoir au niveau des comités, à cause de cette participation des citoyens qu'on n'exclut absolument pas, au contraire.

M. Lazure: Mais je ne comprends pas très bien. Pouvez-vous m'expliciter un peu? Parce que là, moi, je pariais d'un milieu de travail plus ou

moins fermé. Je ne parlais pas, bon, d'émanation par l'air, disons, de la cheminée de la Noranda, des choses comme ça. Là, je comprendrais que ça touche aussi toute la population, pas seulement les employés. Mais je parlais des équipements et de l'ambiance dans le milieu de travail, ce qui ne touche pas normalement les citoyens qui vivent dans le voisinage.

M. Laroche: C'est très difficile... M. Lazure: De séparer les deux?

M. Laroche: ...de ne pas toucher aux citoyens; même s'il n'y a pas émanation ou autre, il y a les procédés de production. Lorsqu'on veut la réduction à la source des déchets, des produits qui pourraient être recyclés ou d'autres, il y a toujours un lien directement ou indirectement avec la population à peu de chose près. Des usines fermées...

M. Larose: En fait, nous, ce qu'on va viser, c'est que dans chaque lieu de travail il y ait un comité - enfin, on trouvera le nom - mais qu'il y ait des personnes responsables, mandatées d'abord pour évaluer la charge polluante et, deuxièmement, pour proposer des moyens pour la diminuer.

M. Lazure: Je pense que ça, ça rejoint l'essentiel de ma préoccupation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais peut-être, M. Lazure, si vous me permettez une petite précision là-dessus...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Lazure: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand vous dites ça, M. Larose, à partir du moment où vous avez des comités de santé et sécurité et qu'ils détectent une charge polluante qui est menaçante pour la santé du travailleur, est-ce qu'il n'y a pas déjà intervention de la CSST?

M. Larose: Oui. Mais, en vertu du danger imminent pour les travailleurs et les travailleuses, et il y a toute...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. M. Larose: ...une série de mécaniques.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et c'est là qu'on rejoint l'argument que là où il y a une différence, c'est lorsque la population autour peut être affectée directement ou indirectement.

M. Larose: Parce que la charge polluante, ce dont il faut être conscient, c'est qu'elle n'existe pas rien que pour les travailleurs et les travailleuses. Une usine qui pollue la rivière qui passe juste à côté... D'ailleurs, dans la pratique très concrète, c'est souvent les gens qui sont sur le bord de la rivière qui commencent à gueuler, hein?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. M. Larose: Alors c'est dans ce sens-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ou sur le bord du lac.

M. Larose: Ou sur le bord du lac. Mais on a réglé un certain nombre de problèmes là-dessus, quand même.

M. Lazure: Je pense que la formule que vous venez tout juste de décrire correspond un peu aux inquiétudes qu'on avait et je pense que ça jouerait un rôle important dans...

M. Larose: Mais ça, je ne le sais pas. Vous posiez la question: Est-ce que ça doit être inclus dans le présent projet de loi ou dans un autre projet de loi? Je vous dirai que nous, on n'a pas réfléchi à ça parce qu'on débat ça dans le cadre de la commission Charbonneau. Mais moi, il m'apparaitrait important qu'assez rapidement il y ait un minimum de mécanismes de définis pour que les travailleurs et les travailleuses puissent s'impliquer sur ces questions-là. Est-ce qu'on doit le faire dans une loi plus large? J'avoue que nous, on n'a pas complété tout à fait nos travaux mais je pense... Parce que ça va vite dans ce domaine-là. La conscience populaire, il n'y a pas 10 ans, pour ceux qui se préoccupaient d'environnement, c'étaient tous des granolas un peu nostalgiques mais, pour aujourd'hui, quelqu'un qui n'a pas affilé ses patins sur ces questions-là, il passe pour...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un retardé. M. Larose: ...un retardé ou un dinosaure. Des voix: Ma, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Dubuc.

M. Morin: Moi, j'aurais une question. J'aimerais avoir votre point de vue sur non pas... Ce n'est pas le comité, moi, qui me paraît être utile dans l'immédiat. Mais que penseriez-vous, par exemple, d'une mesure - je ne sais pas si ce serait à même cette loi-là ou autrement - mais une mesure qui aurait pour effet de protéger un certain nombre de travailleurs qui ont comme tâche d'appliquer certaines normes exigées par le ministre de l'Environnement, des normes d'émis-

sion, que ce soit au niveau de l'air, au niveau de l'eau? Vous n'êtes pas sans savoir qu'il peut y avoir certaines pressions de la part de l'employeur sur certains travailleurs qui ont à produire des rapports, à faire des prélèvements parce que, quand bien même le ministre de l'Environnement ou le ministère arrive à l'occasion pour faire ses vérifications, pour voir si l'entreprise est conforme aux normes, vous comprendrez qu'il y a beaucoup de places, hein, alors que, là, il y a une dimension, parce que je l'ai fait moi-même. C'est différent aujourd'hui, bien sûr, on est beaucoup plus subtil, mais il a été un temps, justement, où l'employeur n'hésitait pas à dire à l'employé que ce qui s'était produit en termes de pollution était exceptionnel, qu'il ne devait pas en être tenu compte dans le rapport, etc.

Alors, je pense que le temps serait peut-être venu, parce que, par la négociation, je sais que ce ne serait pas facile d'obtenir une telle protection. Mais il y a beaucoup d'employés qui ont à établir les rapports, à faire les analyses et qui... À partir du moment où le gouvernement voudra y mettre des dents, bien, si on veut que ça ait les effets recherchés, il faudra donc qu'on s'assure que ceux qui sont à la base des analyses aient un minimum de protection. Alors, moi, c'est le point de vue que je vous apporte; je ne sais pas ce que vous en pensez.

M. Larose: Bien, vous avez tout à fait raison. Nous, on va souhaiter que les travailleurs et les travailleuses qui s'impliquent en environnement aient d'abord une totale liberté de faire les prélèvements, de conduire des analyses, etc., ce qu'on appelle la liberté d'enquête syndicale, quand ce sont des représentants syndicaux.

Deuxièmement, oui, qu'ils aient une certaine immunité ou une certaine protection pour que, si ces personnes-là mettent en évidence des charges polluantes que le pollueur souhaiterait plutôt cacher ou dissimuler, bien, elles ne soient pas susceptibles d'être victimes de représailles. Alors, dans ce sens-là, un peu comme le représentant à la prévention en matière de santé et sécurité, il faudra que ces gens-là aient ce type de liberté et de protection. Parce que, racontons-nous pas d'histoire, hein, c'est évident que les employeurs sont peut-être plus ouverts à cause du rapport de forces public sur la question de l'environnement, mais, quand tout ça se transforme en espèce sonnante et trébuchante, Dieu sait que les esprits se referment passablement. En ces matières, le rapport de forces devra être direct dans les entreprises et dans les institutions et, si on veut voir une volonté politique s'appliquer jusque dans les entreprises et les institutions, il va falloir outiller le monde des travailleurs et des travailleuses de cette façon-là.

M. Lazure: Oui, l'exemple classique, quand vous parlez de protection et de liberté totale, c'est le cas des jeunes camionneurs qui, au début des travaux de la commission Charbonneau, voulaient dénoncer leur employeur qui leur faisait déverser des choses toxiques et à qui la commission n'a pas voulu accorder une protection. Je pense que, bon, c'est peut-être dans la colonne des erreurs de la commission, là, à ses départs, mais ça dénote quand même un état d'esprit, il faut que les travailleurs se sentent protégés et c'est dans cet esprit-là que moi, je serais tenté de faire en sorte qu'un jour, je ne sais pas quand, peut-être pas cette fois-ci, mais qu'un jour cette protection-là, pour les travailleurs, soit inscrite dans une loi de l'environnement.

M. Larose: Bien, il le faudra absolument. En tout cas, les travailleurs vont l'exiger parce que, ce dont il faut être conscient, c'est que les travailleurs qui vont être soucieux de garantir l'avenir de leur propre entreprise sont de plus en plus conscients que, s'il n'y a pas un certain nombre de décisions qui se prennent aujourd'hui pour contrer les charges polluantes, demain, c'est la population environnante qui va les forcer à prendre ces décisions-là et vraisemblablement à fermer des entreprises. Alors, les travailleurs sont beaucoup plus conscients et veulent voir des décisions être prises aujourd'hui pour assurer leur propre avenir.

M. Lazure: O.K., merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça va?

Alors, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): oui, mme la présidente, vous me permettrez de remercier la confédération des syndicats nationaux, m. larose, m. bonnet et m. laroche. c'est un mémoire qui est allé un petit peu plus loin que d'autres dans le libellé, entre autres, et même dans sa philosophie en ce qui concerne le propriétaire-payeur. le ministère avait, dans une première rédaction du projet de loi, été quasiment aussi loin que vous le suggérez en ce qui concerne les propriétaires-payeurs. nous sommes revenus au libellé que nous avons devant nous aujourd'hui, mais nous avons manifesté, au début de la commission, que nous étions prêts à faire preuve de flexibilité si les gens se faisaient convaincants. il y a des gens qui vous ont précédés qui ont tenté de nous convaincre dans l'autre sens, que nous allions trop loin. vous tentez de nous ramener là où nous étions au début. c'est une matière à réflexion, sur laquelle nous nous pencherons très sérieusement.

M. Larose: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui. Sur cette question-là,

cependant, Mme la Présidente, je pense qu'il y a eu un quiproquo, il y a peut-être un malentendu, parce que, quand le ministre a posé la question à M. Larose, tantôt, sur le propriétaire, je ne suis pas sûr qu'ils se soient bien entendus. L'esprit de la question, c'était dans le cas où la pollution a été créée il y a plusieurs années par les anciens propriétaires et où, disons, le terrain appartient maintenant à une municipalité, comme c'est le cas à ville LaSalle ou à Longueuil; est-ce que, à ce moment-là, c'est le propriétaire actuel, à savoir la municipalité, qui doit payer la décontamination? C'était ça, le sens de la question. Je n'étais pas sûr si vous l'aviez comprise dans ce sens-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Juste pour que la question soit bien claire, que le propriétaire soit une municipalité, un individu, ou n'importe quoi...

M. Lazure: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... on ne faisait pas de distinction dans l'échange qu'on a eu...

M. Lazure: Oui, oui.

(16 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'était le propriétaire-payeur comme notion.

M. Larose: Si je veux être très clair, à partir d'aujourd'hui - enfin, à partir du moment où la loi est promulguée - ça devrait couvrir aussi les propriétaires. Pour les situations antérieures, nous, le fonds qu'on propose et la contribution de l'État, plus particulièrement, c'est précisément pour liquider un passé qui est, je dirais, un peu collectif aussi.

M. Lazure: C'est ça, c'est ça.

M. Larose: Alors, dans ce sens-là...

M. Lazure: C'est ça. Alors je pense que ça nous satisfait, mais je pense que ça clarifie les choses. Merci beaucoup, M. Larose et ses collègues de la CSN.

M. Larose: O. K. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M Larose, les membres de la commission vous remercient de votre participation.

Je demanderais à l'Institut de développement urbain du Québec de bien vouloir s'approcher à la table.

À l'ordre, s'il vous plaît! L'Institut de développement urbain du Québec est représenté par M. Paul Massicotte. Nous vous souhaitons la bienvenue. M. Massicotte, est-ce que vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent?

Institut de développement urbain

M. Massicotte (Paul): Ça me fait plaisir, Mme la Présidente M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, mon nom est Paul Massicotte, je suis président de l'Institut de développement urbain, l'IDU. À ma gauche, j'ai Cameron Charlebois, qui est vice-président des affaires publiques de l'IDU et aussi vice-président de l'IDU. À ma droite, c'est Pierre B Meunier, qui est président du comité de l'environnement. Et, à mon extrême droite, c est Marion Howard, qui est directrice générale de l'IDU

La Présidente (Mme Bélanger): vous con- naissez les règles du jeu, 20 minutes pour l'exposé et 40 minutes réparties entre les deux groupes parlementaires m. massicotte.

M. Massicotte: C'est avec plaisir que l'Institut de développement urbain du Québec, l'IDU, accepte de participer au processus de consultation sur le projet de loi 65 Nous remercions le ministère de l'Environnement de nous avoir invités. Juste pour faire un commentaire de l'IDU, l'IDU, c'est un organisme indépendant sans but lucratif qui regroupe des promoteurs, des propriétaires, des constructeurs d'immeubles et de complexes industriels, commerciaux et résidentiels, des professionnels et des conseillers oeuvrant dans des domaines connexes, ainsi que des institutions financières. Tous ont un intérêt commun dans les divers aspects de la planification, de l'aménagement et du réaménagement urbain du Québec. Si vous voulez, je vais lire le sommaire qui, je crois, vient juste d'être remis. Je vais le lire, si vous me le permettez

C'est de façon positive que l'Institut de développement urbain du Québec accueille le projet de loi 65 intitulé Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement En effet, ce projet de loi permettra au ministère de l'Environnement de prendre les différentes mesures imposées par l'importance de la situation environnementale au Québec et ainsi de protéger le public des conséquences souvent désastreuses tant environnementales que sociales et économiques.

Un tel projet constitue un défi de taille à relever et sa mise en application nécessite un support adéquat de ressources financières, humaines, administratives et technologiques. Conséquemment, ce défi souligne la nécessité et l'importance de créer un processus de collaboration entre le ministère et les membres de l'IDU. En effet, ce n'est que par l'engagement réciproque honnête et sans équivoque des acteurs du développement, de la politique et de l'activité industrielle que nous pourrons relever avec succès les défis environnementaux auxquels nous sommes confrontés.

II est essentiel que ces différents acteurs,

tels les "développeurs", constructeurs et professionnels, participent activement au processus décisionnel par le biais de tables rondes, de comités consultatifs ou d'autres institutions similaires où ils pourront mettre à contribution leur expérience pratique dans l'élaboration de normes techniques viables.

Depuis l'adoption de la Loi sur la qualité de l'environnement en 1972, les pouvoirs du ministre ont augmenté de façon substantielle. C'est ainsi que le ministre assume des pouvoirs d'enquêtes, de poursuites et d'ordonnances équivalant à des pouvoirs quasi judiciaires. L'IDU souhaite que l'exercice discrétionnaire des pouvoirs du ministre soit adéquatement encadré.

L'IDU souhaite qu'on apporte certaines modifications qui faciliteront l'application équitable, claire et uniforme du projet de loi. C'est dans cet esprit que DDL) offre sa collaboration au ministère de l'Environnement dans la mise au point des mécanismes d'application pratiques et réalistes.

L'IDU, organisme indépendant sans but lucratif, regroupe des promoteurs, des propriétaires, des constructeurs d'immeubles et de complexes industriels, commerciaux et résidentiels, des professionnels, des conseillers oeuvrant dans des domaines connexes, ainsi que des institutions financières. Tous ces membres ont à coeur la protection de l'environnement du Québec et sont prêts à mettre toute leur énergie dans une collaboration étroite et concrète avec le ministère de l'Environnement.

Nos propositions traitent de trois sujets, le premier étant les ressources, deuxièmement, la facilité d'application et, troisièmement, un commentaire sur la publicité. Pour commencer, nos commentaires sur les ressources. a) but recherché. l'objectif que vise le gouvernement dans son projet de loi 65 est de fournir au ministre de l'environnement l'encadrement législatif nécessaire à la réalisation de ses objectifs en matière de réhabilitation des terrains contaminés. pour ce faire, certains pouvoirs sont octroyés au ministre, lui permettant d'ordonner aux personnes responsables de l'émission d'un contaminant dans l'environnement ou aux propriétaires d'un sol contaminé, selon le cas, d'entreprendre les travaux nécessaires à la décontamination ou à la restauration de l'environnement, ainsi que le pouvoir d'approuver, avec ou sans modification, tous travaux de décontamination ou de restauration. b) ressources financières et administratives. l'octroi de ces pouvoirs entraîne par voie de conséquence l'obligation pour le ministre d'approuver chacun des programmes de décontamination ou de restauration qui lui seront présentés par les personnes tenues d'exécuter ces travaux. afin d'être en mesure de répondre adéquatement à la demande et d'évaluer chacun des programmes de décontamination qui lui seront soumis pour approbation, il est impératif que le ministre dispose d'une infrastructure suffisante et adéquate. Il serait en effet peu souhaitable que l'obtention des commentaires ou l'approbation du ministre soient soumises à des délais qui compromettent la réalisation des projets de revalorisation des terrains contaminés ou le réemploi optimal d'anciens terrains industriels.

L'IDU souhaite donc que le gouvernement du Québec s'engage de façon concrète en consacrant une enveloppe budgétaire précise à l'usage exclusif du ministère de l'Environnement, afin que ce dernier se dote de toutes les ressources humaines, techniques, technologiques et administratives nécessaires à l'exécution de son mandat. c) fonds de décontamination. on devrait considérer la mise sur pied d'un fonds de décontamination servant à financer des programmes de décontamination de terrains contaminés: premièrement, dans les cas d'insolvabilité ou de faillite des responsables de la contamination; deuxièmement, dans les cas d'incapacité d'assumer les coûts de décontamination par le propriétaire du terrain contaminé ou par le responsable de la contamination. le financement d'un tel fonds devrait être assumé par la collectivité. d) incitatifs fiscaux. il pourrait être utile d'obtenir des ministères des finances des deux gouvernements une modification aux lois d'impôt sur le revenu fédérale et provinciale précisant que les montants déboursés ou encourus aux fins de décontamination d'un site peuvent être déduits dans le calcul du revenu et non pas capitalisés. il serait de plus souhaitable que le gouvernement du québec étudie la possibilité d'introduire par une modification à la loi sur les impôts certains incitatifs fiscaux destinés à réduire l'impact financier associé aux travaux de décontamination ou de revalorisation des terrains contaminés.

Ces incitatifs pourraient permettre également au public de participer aux travaux de décontamination par le biais d'une société en commandite. Les citoyens pourraient faire l'acquisition du terrain décontaminé ou des parts de la société en commandite pour un prix équivalant à sa valeur marchande. Les investisseurs souscriraient à une ou à des parts de la société qui se porterait acquéreur d'un terrain contaminé. Cette société affecterait les fonds ainsi recueillis à la décontamination du terrain visé par le projet. Ces fonds constitueraient une dépense pour la société et il en résulterait une perte en fin d'année, laquelle serait répartie entre les membres au prorata de leur participation. Une fois le terrain décontaminé, un acheteur éventuel pourrait faire l'acquisition des parts de la société en commandite pour un prix équivalant à sa valeur.

La deuxième partie de nos commentaires est sur la facilité d'application. a) Comité consultatif. L'IDU souhaite que les règlements adoptés en vertu de l'article 31.51

du projet de loi établissent des normes précises, uniformes et surtout équitables. Ces normes devront être faciles à appliquer et à comprendre autant par les fonctionnaires responsables que par les investisseurs et promoteurs immobiliers qui doivent pouvoir connaître clairement l'étendue de leurs droits et de leurs responsabilités. À cet égard, l'IDU propose la création d'un comité consultatif ad hoc formé de représentants des différents secteurs visés par la mise en vigueur du projet de loi et des règlements qui en découlent.

Les représentants des "développeurs", promoteurs, industriels et prêteurs pourraient, dans un premier temps, formuler des suggestions pour l'élaboration des règlements et, dans un second temps, identifier les problèmes soulevés par l'application de la loi et des règlements et proposer des moyens pratiques de les résoudre de façon efficace. Un tel mécanisme permettrait de développer une communication et une collaboration plus étroites entre le ministre de l'Environnement et les principaux protagonistes du développement. L'apport de l'expérience concrète et pratique de ces derniers pourrait faciliter la mise en place des différents mécanismes de décontamination. b) délai raisonnable. l'article 31. 42, troisième alinéa, du projet de loi se lit comme suit: "le ministre approuve, avec ou sans modification, les travaux de décontamination ou de restauration projetés et l'échéancier de leur réalisation. " le ministère devrait être tenu d'approuver dans les 30 jours les travaux de décontamination ou de restauration que doit exécuter la personne ou la municipalité qui a émis, déposé, dégagé ou rejeté des contaminants. un délai indu tels plusieurs mois ou même des années causerait un fardeau beaucoup trop lourd à supporter pour toute partie à un développement, tant au niveau de ses ressources qu'au niveau financier. conséquemment, pour être en mesure de respecter un délai raisonnable, le ministre doit pouvoir compter sur l'appui et l'encadrement d'un nombre suffisant de fonctionnaires compétents pouvant répondre à la demande qui sera, on le sait, de plus en plus forte. cette même remarque s'applique à l'alinéa 3 de l'article 31. 49.

(17 heures) c) effet des ordonnances sur le propriétaire. le responsable de la contamination visé par les ordonnances prévues aux articles 31. 42 et 31. 43 du projet de loi peut être une autre personne que le propriétaire du terrain contaminé. dans un tel cas, le propriétaire risque d'être sérieusement affecté par l'ordonnance et les mesures prévues. en conséquence, lorsque le propriétaire d'un terrain contaminé et le responsable de la contamination sont des personnes différentes, l'idu suggère que le ministre envoie au propriétaire du terrain contaminé un avis en vertu de l'article 31. 44, puisqu'il est également une personne concernée, et que lui soit égale- ment donnée la possibilité de faire des représentations dans un délai imparti L'IDU suggère de plus que, dans un tel cas, le propriétaire du terrain contaminé puisse en appeler de l'ordonnance en vertu de l'article 96 de la Loi sur la qualité de l'environnement comme s'il était lui même visé par cette ordonnance. d) droit de contestation. le propriétaire d'un terrain qui reçoit la signification d'un avis de contamination en vertu de l'article 31. 46 du projet de loi devrait pouvoir contester la pertinence de cet avis, en tout ou en partie, devant une autorité indépendante du ministère, comme la commission municipale. il va sans dire que les effets d'un tel avis, pour un propriétaire immobilier, peuvent être considérables et entraîner une perte de financement ou une perte de valeur de son terrain. celui-ci devrait donc pouvoir, s'il estime l'avis du ministère injustifié, en contester la pertinence. e) normalisation. toute ordonnance émise par le ministre en vertu de l'article 31. 42 ou 31. 43 du projet de loi peut, en effet, créer des situations où il est techniquement ou financièrement impossible de décontaminer ou de restaurer un site à cause de l'absence actuelle, au québec, d'un réseau de sites d'enfouissement ou d'usines de traitement de sols contaminés. toute stratégie de gestion des terrains contaminés doit donc contenir les solutions au traitement et à la disposition des sols fortement contaminés la réglementation prévue à l'article 31. 51 doit également permettre la mise en place d'usines de traitement ou de lieux d'enfouissement de sols contaminés et ne pas simplement limiter ou rendre presque impossible le développement de ces avenues. il faut à tout prix éviter une situation similaire à celle des déchets dangereux, comme les bpc.

Les règlements prévus à l'article 31. 51a du projet de loi doivent être normalisés et, ainsi, prendre en considération les différentes caractéristiques des sols naturels que l'on trouve au Québec. L'article 31. 51b prévoit également décrire les activités dont l'exercice contamine le sol. Toutes activités industrielles et commerciales peuvent contaminer le sol si celles-ci ne sont pas gérées de façon responsable et selon la réglementation prévue. On peut également affirmer que même les activités industrielles faisant une utilisation intensive de produits chimiques peuvent s'exercer sans contaminer les sols, si les précautions nécessaires sont prises La contamination du sol résulte donc beaucoup plus de la gestion d'une entreprise que de sa nature

Finalement, il incombe au ministère d'assurer que les terrains qui auront été contaminés selon les critères prévus dans la réglementation ne seront pas réévalués si ladite réglementation devait être modifiée, à moins qu'il n'y ait toujours un risque à la santé humaine Les sites qui auront été décontaminés devront en effet

être certifiés comme étant décontaminés et non sujets à réexamen. Si une telle garantie ne peut être obtenue pour un site décontaminé, l'incertitude dont celui-ci fera continuellement l'objet constituera une entrave à toute transaction.

Finalement, nos commentaires sur la troisième partie de notre proposition, c'est sur la publicité. a) Enregistrement. L'IDU s'interroge sur la nécessité d'enregistrer l'avis de contamination tel que prévu aux articles 31. 47 et 31. 48. Une telle mesure risque d'imposer un fardeau additionnel aux propriétaires ou aux créanciers investisseurs qui ne sont pas nécessairement responsables de la contamination des sols. On peut s'interroger sur la nécessité d'un tel enregistrement qui stigmatise un immeuble, même une fois la radiation effectuée. On peut craindre, en effet, que l'enregistrement ne diminue la valeur de l'immeuble et n'éloigne tout investisseur éventuel, affectant ainsi de façon significative le propriétaire, le promoteur et le financier tout en ne favorisant pas la décontamination des sols concernés.

De plus, l'enregistrement de l'avis au Bureau d'enregistrement créerait une duplication du mécanisme de publicité déjà prévu à la Loi sur la qualité de l'environnement, soit le registre du ministre décrit à l'article 118. 5. L'article 118. 5 oblige le ministre à tenir un registre de tous les documents officiels émanant du ministère de l'Environnement. Ce registre comprend, entre autres, les certificats d'autorisation, les permis, les ordonnances, ainsi que tous les documents officiels émanant du ministère de l'Environnement.

Le projet de loi 65 modifie l'article 118. 5 de telle sorte qu'il inclut dorénavant: "m) toutes les études de caractérisation et tous les programmes de décontamination ou de restauration demandés en vertu des articles 31. 42 ou 31. 49; "n) tous les avis signifiés par le ministre concernant l'article 31. 46. "

Ce registre est accessible à tous les bureaux régionaux du ministère de l'Environnement du Québec. Il semble, selon l'IDU, que ce registre, qui est sous le contrôle du ministre, est le meilleur outil disponible pour assurer la publicité recherchée par l'article 31. 46. Tous les renseignements officiels concernant l'environnement devraient être accessibles en un seul registre. La duplication de registres, celui prévu à l'article 115. 1 et l'Index des immeubles du Bureau d'enregistrement, ne devrait pas être encouragée. De plus, si le ministre le désire, il pourrait rendre son registre de l'article 118. 5 disponible ailleurs qu'aux seuls bureaux régionaux du ministère de l'Environnement. Le ministre pourrait facilement s'assurer que ce registre soit disponible via l'informatique dans tous les Bureaux d'enregistrement du Québec. b) Radiation. Une fois le sol décontaminé à sa satisfaction, le ministre doit en demander la radiation au registraire du Bureau de la division de l'enregistrement concerné. L'IDU croit non seulement que cette radiation devrait être réalisée, mais qu'il faudrait prévoir un mécanisme qui permettrait d'éliminer totalement toute mention de contamination à l'Index des immeubles, suite à la décontamination et à la radiation de l'avis. Il faudrait donc assurer la radiation totale de l'avis au Bureau d'enregistrement et de la mention de l'avis ou de programme de décontamination prévus au registre du ministre de l'article 118. 5 de la Loi sur la qualité de l'environnement.

Conclusion. Tous reconnaissent l'importance du défi à relever en matière d'environnement, en général, et de terrains contaminés, en particulier. Conscient de sa responsabilité, l'IDU offre au ministre sa collaboration et souhaite la mise sur pied de mécanismes efficaces visant à faciliter et à développer la collaboration entre l'IDU et le ministère de l'Environnement. Merci.

Le Président (M. LeSage): Merci, monsieur. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants de votre groupe qui voudraient adresser la parole aux membres de la commission?

M. Charlebois (Cameron): Oui. Cameron Charlebois. Si je me permettais, juste un bref commentaire. C'est évident que nous nous concentrons surtout sur les sols contaminés. On est des promoteurs et des propriétaires de bâtiments et de sites. Si j'étais pour élever notre discussion à un niveau peut-être relativement plus philosophique, ce qui nous inquiète généralement ou globalement, c'est le fait que la plupart de nos membres sont des promoteurs dans des grandes villes, surtout Montréal, et on prône que l'on procède avec beaucoup d'attention, parce que, en fin de compte, avec différentes interventions et des différences politiques concernant le développement urbain à Québec, on peut parler du zonage agricole, on peut parier de différentes initiatives qui viennent à rencontre - qu'on met en jeu - possiblement et implicitement, du développement urbain ou de la planification du développement urbain.

Si on ne contrôle pas bien, si on n'encadre pas bien les mesures de décontamination des sols et que l'on ne donne pas des portes de sortie pour des vraies solutions praticables, on arrivera à voir des promoteurs, ceux qui doivent développer et accommoder le développement économique de nos centres urbains, chercher des sites qui ne sont pas dangereux, qui ne sont pas stigmatisés, qui n'ont pas de problème dans leur histoire ou dans la perception, ça va mettre la pression ailleurs que sur les parties des villes qui devraient être développées, notamment des anciennes zones industrielles et ça pourrait porter atteinte à des zones agricoles ou à d'autres endroits qu'on voudrait préserver pour d'autres

fins que le redéveloppement urbain. Alors, sur le plan plus global et plus philosophique, c'est de là que vient notre intervention, en quelque sorte, parce que ça va devenir de plus en plus... Le plus loin qu'on va dans ce sens-là, c'est que les embêtements pour les promoteurs et les situations de non-solution vont se répandre et ça va embêter effectivement tout le développement urbain. Merci.

Le Président (M. LeSage): Merci M. Char-lebois. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je remercie l'Institut de développement urbain, son président, M. Massicotte, ainsi que les gens qui l'accompagnent, pour avoir pris le temps de nous présenter un mémoire qui est étoffé.

À la page 4 du mémoire, l'IDU s'inquiète de certains pouvoirs qu'assume le ministre de l'Environnement, c'est-à-dire les pouvoirs d'enquêtes, de poursuites et d'ordonnances, et l'IDU prétend que ces pouvoirs sont des pouvoirs quasi judiciaires et souhaiterait que l'exercice discrétionnaire de ces pouvoirs soit adéquatement encadré. Est-ce que l'encadrement par la Commission municipale du Québec, qui est un tribunal administratif quasi judiciaire, s'est avéré insuffisant, suivant l'expérience que vous avez déjà vécue dans le passé?

M. Massicotte: Pierre, peux-tu faire un commentaire?

M. Meunier (Pierre B.): Ce qu'on peut suggérer ou ce qu'on peut constater, je pense, c'est certaines observations qui vous ont été faites par d'autres intervenants et qu'on a lues dans les journaux, à savoir, par exemple, le cumul du pouvoir d'enquête, du pouvoir de poursuite et du pouvoir d'ordonnance qui est un pouvoir quasi judiciaire. Le ministre, s'il a des motifs raisonnables, c'est lui qui a des motifs raisonnables, c'est lui qui émet l'ordonnance. C'est lui qui constate que le terrain est contaminé au-delà de la norme qui est prévue par règlement et c'est lui qui émet l'ordonnance d'enlever et de décontaminer. Il n'y a pas d'audition avant. Je comprends qu'il y a une possibilité de faire des représentations, mais il n'y a pas d'audition auparavant devant une partie qui est indépendante. Le ministre a, lui, le rôle de faire enquête et de rendre la décision en même temps. Alors, c'est un peu ça. Je comprends que la Commission municipale exerce un encadrement comme elle l'a toujours fait depuis nombre d'années, mais c'est a posteriori, ce n'est pas a priori.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans le fond, sans copier exactement, vous souhaiteriez que ce type d'ordonnance là soit rendu par un organisme à la place d'être rendu par un ministre style Commission de protection du territoire agricole, Commission de protection de l'environnement, etc.

M. Meunier: Je pense que c'est une possibilité qui mériterait d'être envisagée sérieusement.

M. Charlebois: Peut-être que je pourrais - excusez-moi - ajouter aussi que, d'après ce que je comprends, l'encadrement fourni par la Commission municipale ne permet pas de contester la pertinence de l'avis ou la pertinence de l'ordonnance. Et c'est une autre chose que nous soulevons, ici, c'est d'avoir la chance de vraiment vérifier, de valider ou même de contester la pertinence de l'avis émis par le ministre ou par tout autre organisme apte à faire ça.

M. Meunier: En fait, ça nous permet d'enchaîner et peut-être de revenir à certains éléments que nous mentionnons à notre mémoire. Dans le cas de l'ordonnance, si la personne qui est l'objet de l'ordonnance est une personne différente, si la personne qui a contaminé n'est pas la même que la personne qui est propriétaire, le propriétaire, lui, risque d'être affecté, risque d'avoir des motifs à invoquer au moment de l'audition de l'appel devant la Commission municipale, si appel il y a. Mais il se peut fort bien qu'il n'y ait même pas d'appel et que lui ait eu, pour ses raisons propres, des motifs à faire valoir devant la Commission municipale. Alors, si l'ordonnance est contestée, il ne peut pas y aller et, si l'ordonnance n'est pas contestée, bien, a fortiori, il peut encore moins y aller. Alors, dans les deux cas, on dit: Le propriétaire devrait avoir la faculté de se faire entendre. Merci.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va. C'est une suggestion que nous retenons. Nous la retrouvions plus loin dans votre mémoire, page 8 ou 9.

M. Meunier: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La question d'un fonds de décontamination, je vais laisser, tantôt, mon adjoint parlementaire, M. Maltais, peut-être échanger avec vous sur le sujet. Nous avons vu la question des droits de contestation. L'enregistrement comme tel. À la page 9 du mémoire, deuxième paragraphe avant le bas de la page, vous dites: On peut craindre en effet que l'enregistrement ne diminue la valeur de l'immeuble et n'éloigne tout investisseur éventuel, etc. Les gens qui ont réfléchi, au ministère de l'Environnement, sur cette notion m'ont assuré que le fait d'enregistrer un terrain comme étant contaminé ne diminue pas la valeur du terrain. Ça ne fait qu'affirmer la valeur réelle du terrain. Le fait de cacher la contamination peut avoir

l'effet d'augmenter artificiellement...

M. Lazure: Et temporairement... (17 h 15)

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... la valeur réelle du terrain. Le fait de cacher la contamination peut avoir l'effet d'augmenter artificiellement et temporairement la valeur du terrain, parce qu'on le cache. Mais le fait que ce soit connu qu'il est contaminé, ça représente la vraie valeur du terrain. C'est ce qu'on me dit. Est-ce que vous partagez l'aboutissement de cette réflexion?

M. Massicotte: Disons que ce n'est pas une question de faits, parce que les faits, tu peux toujours les obtenir d'après le registre d'environnement. C'est une question d'impression. C'est que c'est vrai que les experts qui regardent au Bureau d'enregistrement et voient qu'il y a un problème de pollution de l'environnement et que c'est nettoyé peuvent dire que ça augmente la valeur. Mais un créancier ou bien un banquier qui voit ça, même si c'est marqué qu'il n'y a plus de problème, ça va être difficile de les convaincre, parce que les gens ont assez peur de la pollution, et c'est comme un peu l'amiante. On peut argumenter bien longtemps si l'amiante, c'est bien ou pas bien, mais essaye de louer un édifice où il y a de l'amiante. Même si tu peux prouver par des études qu'il n'y pas de difficulté, pas de négatif, tu ne peux pas louer l'édifice. Et c'est de ça qu'on s'inquiète un peu. Ce n'est pas une question de faits, c'est une question de peur que, sur le titre, effectivement, peut-être 20 ou 30 ans plus tard, les créanciers soient éventuellement devenus plus sophistiqués comme peuple et comme experts; on croit que ça peut causer des problèmes. Les données sont toujours disponibles quand même.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, si c'a été décontaminé, le créancier inquiet peut procéder à une nouvelle caractérisation et s'autorassurer.

M. Meunier: Mais, de toute façon, la publicité sur la contamination comme telle, je ne pense pas qu'on s'"objecte" à ça. Ce qu'on dit, c'est qu'il existe déjà des véhicules prévus dans la loi pour faire connaître à la population en général tous les renseignements officiels pertinents en matière d'environnement. Et ça, c'est le registre du ministre qui existe à l'article 118. 5.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous et moi savons ça, mais je ne suis pas persuadé que tous mes électeurs, ni les électeurs du député de La Prairie ni ceux du député de Saguenay soient au courant de ce dont on se parle, là. Mais ils sont tous au courant du Bureau d'enregistrement, par exemple.

M. Meunier: Ils sont tous au courant du Bureau d'enregistrement, mais le Bureau d'enregistrement sert une fin, le registre du ministre sert une autre fin. Ce qu'on vous dit, c'est: Si vous voulez - et ce serait peut-être une bonne idée, de toute façon, en soi - donner et accentuer l'information disponible aux justiciables, bien, mettez-la à la disposition de la population, via les bureaux d'enregistrement, et ça peut se faire aujourd'hui, par l'informatique. Mettez votre registre disponible aux bureaux d'enregistrement, et là, vous aurez une source d'information complète en matière d'environnement.

M. Charlebois: J'aimerais enchaîner, si vous le permettez. Il faut regarder l'emploi du Bureau d'enregistrement comme étant...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez, c'est parce que votre suggestion suscite de l'intérêt, d'un côté comme de l'autre de la table. On tente de bien la comprendre et je tentais d'expliquer au député de La Prairie que ce que vous suggérez, c'est un terminal d'ordinateur, au Bureau d'enregistrement, qui donnerait les renseignements contenus au registre du ministre de l'Environnement quand à un terrain. Ça empêcherait l'impact psychologique postérieur, une fois la décontamination...

M. Meunier: C'est ça, c'est l'idée.

M. Charlebois: Effectivement. Et, de toute façon, si vous permettez l'accès au registre, vous ne le permettrez pas simplement pour les avis de contamination. Vous allez le permettre, j'imagine, pour l'ensemble du registre, ce qui aurait pour effet de faciliter l'accessibilité aux informations, aux documents officiels du ministère de l'Environnement.

M. Lazure: C'est quand il deviendra transparent, ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiens à rassurer le député de La Prairie, je m'éloigne de plus en plus de la politique adoptée par un des mes prédécesseurs, en 1984...

M. Lazure: Dr Goldbloom! Le bon Dr Goldbloom.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... tel qu'il l'avait spécifié à l'Assemblée nationale.

M. Lazure: II ne faut pas renseigner la population!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va pour

le moment.

M. Charlebois: Effectivement, ça nous inquiète significativement de voir que juste un aliéna dans le titre d'une propriété affecte toute l'autre ou une partie de l'autre, quand on fait la subdivision d'un terrain pour faire 200 condominiums, et que, sur les titres de chacun de ces condominiums-là, il y a une mention de contamination à perpétuité, qui n'a pas de sens en soi, à l'égard du condominium. On ne pense pas que ce soit une technique qui règle le problème de l'accès à l'information ni à la transparence. Alors, on prône une autre technique, qui est effectivement l'implantation des terminaux dans chacun des bureaux d'enregistrement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Oui, Mme la Présidente, j'aimerais parler un petit peu à la page 6, des Incitatifs fiscaux. Lorsque vous achetez un terrain, présentement, ou une bande de terrains - vous êtes des "développeurs", vous ne les achetez pas un à la fois, vous les achetez en quantité importante - est-ce que, avant de signer l'acte notarié, vous faites faire une expertise du terrain, présentement?

M. Massicotte: Aujourd'hui, j'imagine que la plupart des promoteurs le font...

M. Maltais: La plupart des promoteurs le font?

M. Massicotte: ...sauf si on est certain qu'on achète un terrain vacant qui a été une ferme pendant 30 à 40 années. Si on est certain qu'il n'y a pas de risque, peut-être que non.

M. Maltais: O.K.

M. Massicotte: Mais si on a...

M. Maltais: Moi, je comprends bien, et surtout au dernier paragraphe où vous dites: Les investisseurs souscriraient a une ou à des parts de la société - là, vous parlez de votre société en commandite - qui se porterait acquéreur d'un terrain contaminé. Bon, bien, vous avez toute la formule comptable des pertes et des revenus. Mais quel serait l'intérêt du citoyen ordinaire d'acheter de telles parts? Pour subir une perte? Pour réduire son impôt?

M. Massicotte: C'est ça, éventuellement pour faire un gain, un gain en capital.

M. Maltais: Pensez-vous que ça peut "pogner" dans le public?

M. Massicotte: Écoutez...

M. Maltais: Pensez-vous que la "waitress" qui gagne 3,85 $ l'heure dans un restaurant va dire: Moi, je vais acheter des parts de la société en commandite de l'Association des "développeurs" de Montréal dans le but de perdre de l'argent et dans le but d'avoir une déduction fiscale de 200 $ à 300 $? Je me mets dans la peau du public; le plus petit, pas le plus gros. Les plus gros, ils sont là, présentement, les plus petits ne sont pas là. Moi, ce que j'aimerais savoir, c'est: Où est-ce que vous faites... Parce que le projet de loi 65 concrétise une chose: le pollueur-payeur. Là-dedans, vous n'avez pas l'air d'un incitatif, vous vous protégez et je vous comprends, vous êtes des hommes d'affaires. Mais où est le Jos. Public qui va trouver son intérêt là-dedans? Moi, c'est ça que j'essaie de comprendre.

M. Massicotte: Comme décision, attitude logique, au point de vue de l'investisseur? C'est ça, la question? Au point de vue...

M. Maltais: Oui, ouf.

M. Massicotte: Bien, c'est bien simple, j'assume que, à la revente du terrain, il va revendre son terrain plus cher que le prix original, plus le coût de décontamination... Si tu veux, son gain temporaire c'est que, quand les coûts de décontamination ont été encourus, c'est déductible au point de vue de l'impôt. Étant donné que c'est déductible, j'assume que le prix de revente du terrain et le coût pour le programme de décontamination vont être moins élevés que si l'acquéreur ou, si tu veux, le contracteur qui le décontamine n'a pas d'incitation fiscale pantoute...

M. Maltais: O.K.

M. Massicotte: ...parce que ça devrait faire partie du paquet.

M. Maltais: Oui, je comprends bien le sens de votre mémoire, pour cet article-là, mais moi, ce que j'ai de la misère à me rentrer dans la tête, et vous allez bien vouloir me l'expliquer parce que je n'ai sans doute pas bien compris, c'est que le principe de la loi 65, c'est le pollueur-payeur et celui, bien sûr, qui a pollué a une responsabilité vis-à-vis de la société. Le promoteur a une responsabilité de ne pas acheter des terrains contaminés puisqu'il ne sera pas capable de construire dessus. Alors...

M. Massicotte: Sur ça, j'étais d'accord... M. Maltais: Vous êtes en accord.

M. Massicotte: ...si le pollueur est encore là, tant mieux, sauf que, de temps en temps, il nous arrive tous d'être propriétaires d'un terrain qui est pollué, puis ce n'est pas nous autres qui l'avons pollué...

M. Maltais: Non, non, je comprends.

M. Massicotte: ...puis là, tu te demandes, s'il y a un programme fiscal qui pourrait encourager certaines personnes à dépolluer, si peut-être ça serait bon pour la société.

M. Maltais: Ah! c'est une...

M. Meunier: Si vous me permettez, là, je comprends très bien votre point de vue et je ne pense pas qu'on s'inscrive en faux à l'égard de votre point de vue. Ce qu'on dit, c'est que le coût de décontamination de l'ensemble du parc - et puis on ne le dit peut-être pas aussi clairement, là - des terrains contaminés au Québec représente plusieurs centaines de millions de dollars. Les responsables ne sont pas tous identifiés ou facilement identifiables ou n'ont pas, s'ils le sont, tous les moyens. Certains sont en situation de faillite, en situation d'insolvabilité, en situation d'incapacité. On suggère des moyens pour financer le décontamination de ces cas-là. Maintenant, ces moyens-là, ça peut être un fonds de décontamination, ça peut être des incitatifs fiscaux, les incitatifs fiscaux ou les abris fiscaux. Les incitatifs fiscaux s'adressent, premièrement, possiblement aux "développeurs" eux-mêmes ou à ceux qui font la décontamination, mais peuvent s'adresser aussi à des gens du public par le biais des sociétés en commandite. Et les abris fiscaux, jusqu'à maintenant, sont intéressants, que ce soit dans le film, que ce soit dans l'exploration minière, mais peut-être pas pour l'ensemble de la population.

M. Maltais: O.K. Vous êtes des "développeurs". Vous avez dit au tout début que vous étiez particulièrement à Montréal, mais j'imagine que parmi vos membres il y en a qui sont à Toronto, qui sont à Ottawa, qui sont à Calgary, à Winnipeg ou en B.C. et même aux États-Unis. Comment ça se passe ailleurs? Comment ça se passe à Toronto?

M. Massicotte: C'est pas mal semblable à ici, d'après mon expérience, mais je n'ai pas été... Je souhaite ne pas avoir l'expérience. Je ne suis pas préparé à un sol contaminé à Toronto.

M. Maltais: Non, vous n'êtes pas allé vous mettre les pieds là-dedans?

M. Massicotte: J'espère que non et disons qu'on espère tous ne pas le faire, mais de temps en temps on l'est, le propriétaire. Puis on ne le sait pas. Quand vous posez la question à savoir si on fait toujours des tests avant qu'on achète le terrain, c'est que, oui, aujourd'hui, on en fait presque toujours, mais souvent... C'est bien récent, cette expérience-là. Il y a trois ou quatre ans, on ne faisait pas de test, c'est-à-dire qu'il n'y en avait pas.

M. Maltais: Est-ce que vous sentez, par exemple... Vous êtes dans le monde de l'immobilier, donc vous avez des financiers que vous côtoyez régulièrement. Lorsque M. X achète un lot de terrains de, je ne sais pas, moi, 500 000 $ ou 1 000 000 $, est-ce que le prêteur, le bailleur de fonds n'a pas un petit déjeuner avec vous autres pour dire: T'es-tu assuré que tout est en règle de ce côté-là? As-tu fait des expertises? Est-ce que de plus en plus les bailleurs de fonds s'inquiètent d'une chose dont, il faut le dire, il y a 5,6 ou 10 ans, personne ne se préoccupait?

M. Massicotte: Laissez faire 5 à 10 ans, disons même: II faut. Dans notre cas précis, ça n'a pas passé. Tous nos prêteurs hypothécaires, il y en a deux ou trois qui nous ont appelés et on s'est assis ensemble pour décider de toutes les clauses, si vous voulez... Quand vous prêtez de l'argent, il y a toute une clause, aujourd'hui, de plus en plus, où vous garantissez que le sol n'est pas pollué et ça inquiète beaucoup, beaucoup les prêteurs. Nous autres, on a eu de la chance. Ça fait peut-être quatre à cinq mois, peut-être six mois, on était acquéreurs du terrain de Petro-Canada à Anjou, où Petro-Canada nous a garanti que le soi n'était pas contaminé, mais il faut vous dire qu'avant de fermer la transaction on s'est assis avec tous nos prêteurs pour s'assurer qu'ils étaient eux-mêmes très satisfaits du programme de décontamination, parce que c'est quelque chose qui nous inquiète beaucoup. Même si vous avez tous les tests qui démontrent que vous n'avez pas de problème, ils ont peur.

M. Maltais: Je pense que vous êtes des hommes d'affaires et, si vous avez une bande de terrains qui, supposons, valait 1 000 000 $, non contaminée, sachant qu'elle est contaminée, vous pouvez l'avoir peut-être pour 50 000 $ ou 60 000 $ et revenir après et dire: II faudrait la décontaminer, c'est un beau coin pour bâtir des condominiums. Ça "peut-u" arriver, ça?

M. Massicotte: Ça peut arriver. M. Maltais: Oui.

M. Massicotte: Aussi, ce qu'il peut arriver, c'est que vous soyez propriétaire d'un morceau de terrain - l'exemple en particulier de Petro-Canada - qui vaut, disons, 35 000 000 $, 40 000 000 $.

M. Maltais: Oui.

M. Massicotte: Mais il faut réaliser qu'elle ne le savait pas quand elle a commencé le programme de décontamination, mais le programme comme tel a coûté près de 40 000 000 $. À tout refaire, vous laissez votre terrain là, vous ne faites rien. C'est pour ça qu'il faut être un peu conscient de tous les...

M. Maltais: non, c'est bien sûr que c'est un problème de taille qu'on a au québec, la décontamination des sols, et le projet de loi vise à éliminer, à l'avenir, à partir de l'approbation de la loi, la contamination future. mais il reste que le problème passé, on ne le guérira pas demain matin. Écoutez, moi, les rabattements fiscaux, je peux trouver ça... Pour vous autres, ça peut être une solution. Il faut toujours penser, par exemple, au petit propriétaire d'une station d'essence qui va se réveiller avec le même problème, à un moment donné. Le petit dépanneur avec un petit poste d'essence bien ordinaire, lui n'aura pas les moyens non plus. L'étape qu'on devra regarder comme gouvernement ou comme société, plutôt comme société, c'est, bien sûr, à propos de la contamination qui a été faite, dans quelle mesure on aura les moyens de la défaire et à quelle vitesse. Je comprends qu'à l'île de Montréal les terrains, là, écoutez, on regrette, mais c'est bâti pas mal et, si vous voulez revenir sur le vieux terrain, c'est bien sûr que ça représente un problème, mais... Écoutez, moi, je pense que c'est une belle tentative de votre part. C'est très astucieux.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Vous êtes donc bien pressée, vous!

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Alors je vous remercie, messieurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente.

Je vais suivre l'ordre de votre pagination. Mon premier commentaire, c'est sur la page 5, Ressources financières et administratives. Ça ne surprendra pas le ministre que je vous dise que je suis parfaitement d'accord avec vous. Il faut absolument qu'il y ait des ressources plus massives, financières et en personnel, et que le gouvernement démontre sa volonté politique de faire plus que d'avoir un projet de loi qui est impressionnant sur papier mais qui ne serait appliqué. (17 h 30)

Deuxièmement, vous dites, il faudrait peut-être que les délais soient limités dans le temps. A ma connaissance, vous êtes un des premiers groupes à soulever cette question-là. Si on prend l'article 31. 42, par exemple, le premier là, à la page 4, vers la fin de l'article, le ministre approuve, avec ou sans modification, les travaux de décontamination. Si je comprends bien l'esprit de votre remarque, c'est qu'il devrait peut-être y avoir dans le projet de loi un délai maximum, approuvé, disons, dans un délai de trois semaines, quatre semaines, peu importe là, est-ce que c'est ça l'esprit de...

M. Massicotte: C'est dans l'esprit, oui c'est bien.

M. Lazure: Bon! Moi, je pense que c'est à retenir ça, M. le ministre. Il y a avantage parfois, connaissant la nature humaine un peu, il y a avantage, peut-être, à s'imposer des délais maximums, hein! Vous êtes plutôt sympathique à ça là?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): je n'ai pas toujours le réflexe d'imposer des obligations aux citoyens et de ne pas s'en imposer, il faut maintenir l'équilibre...

M. Lazure: C'est pour ça que je vous le rappelle, ça serait sage d'en mettre un là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, je n'ai pas de...

M. Lazure:... Par exemple, si on l'avait ça, ça vous permettrait d'accélérer la décontamination de Montréal-Est, d'approuver son propre plan rapidement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais on a accumulé tellement de retards pendant une décennie entre 1976 et 1985...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Surtout de 1972 à 1976 quand le bon docteur Goldbloom s'occupait de l'environnement et qu'il disait: II ne faut pas faire peur au monde. Il l'a dit en 1989 encore.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, je n'ai rien contre les docteurs qui s'occupent de l'environnement.

M. Lazure:... Lui, il ne change pas d'idée.

Deuxième remarque, Mme la Présidente, à la page 6, le fonds de décontamination. Vous dites: Le financement d'un tel fonds devrait être assumé par la collectivité, mais voulez-vous être un peu plus explicite, c'est qui la collectivité là, pour le fonds?

M. Massicotte: C'est la province et tous les citoyens, le gouvernement provincial.

M. Lazure: Ouais! Ça, c'est un peu trop simple ça. Mais on sait qu'ils n'en ont pas d'argent, c'est ça la situation actuelle. Vous ne pouvez pas dire que c'est quand même satisfaisant. Il a 3 000 000 $, lui, pour toute l'année, pour la décontamination. Il les a déjà gaspillés, il les a déjà utilisés, pardon...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure:... Utilisés, mes excuses! Il les a déjà utilisés pour un seul site, la Balmet de Saint-Jean. C'est fini, il n'y a plus d'argent pour le reste de l'année. Alors, qu'est-ce que vous voulez? La collectivité! Si pour vous, collectivité égale gouvernement du Québec, on n'ira pas loin au Québec. Alors, il faut absolument que ce fonds-là, ça soit, d'abord et avant tout, un fonds constitué un peu à la manière du fonds de compensation de la CSST, que ça soit constitué, d'abord et avant tout, par les entreprises qui sont polluantes à des degrés divers, avec des taux de perception qui varieraient selon le degré de pollution. La troisième remarque, à la page 7, vous proposez la création d'un comité consultatif concernant les règlements, les normes. Moi, je pense que c'est une bonne idée... Non, non, très éclectique là, un comité qui représenterait...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): on l'a fait, on l'accueille favorablement, parce qu'on le fait déjà dans le projet de rejets industriels. chaque secteur d'activités économiques a un comité technique qui avise le ministère et, en matière de sol contaminé, c'est quelque chose qui est envisageable.

M. Lazure: Bravo!

M. Meunier: Ce n'est pas uniquement sur les projets de loi, c'est un comité qu'on souhaiterait voir durer et sur lequel on pourrait échanger sur les expériences de mises en application de la loi et du règlement de façon à ce qu'on puisse faire part, autrement qu'à l'occasion d'une commission parlementaire, au ministère ou au ministre, de nos commentaires, de nos difficultés et de nos suggestions pour améliorer le fonctionnement. Je dis, nos suggestions, mais on dit tous les acteurs impliqués dans le développement immobilier.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Un comité ad hoc permanent de révision.

M. Meunier: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... Parce que les normes changent souvent etc.. On découvre de nouveaux produits.

M. Lazure: Bon! Je pense que c'est pertinent, ça serait utile. Et la suivante, c'est à la page 8, au bas de la page vous dites: La réglementation prévue à l'article 31. 51 doit également permettre la mise en place d'usines de traitement ou de lieux d'enfouissement de sols contaminés etc. Je pense, M. le ministre, qu'on devrait... Je ne sais pas si c'est dans la réglementation que ça devrait apparaître, moi, je trouve ça absolument inquiétant et inacceptable que les entreprises qui vont vouloir faire de la décontamination soient obligées, si on excepte les banlieues de Montréal, de dépenser des sommes importantes pour envoyer ça à Sarnia ou ailleurs. Ça n'a pas de bon sens. Il faudrait que, là aussi, le ministre exerce plus de leadership. Je ne dis pas que c'est la tâche du ministère de dire: On va ouvrir un site dans la région de Québec, on va en ouvrir un autre dans les Cantons de l'Est, mais je dis que c'est la responsabilité du ministre de faire en sorte - qu'il ne le fasse pas lui-même - de faire faire ou de d'assurer qu'au Québec on va avoir des sites d'enfouissement des sols contaminés. On n'en a pas actuellement, ou presque pas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je peux peut-être répliquer immédiatement.

M. Lazure: Le ministre convient que ça n'a pas de bon sens de demander...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça n'a pas de bon sens qu'il n'y en ait pas.

M. Lazure:... à nos gens d'envoyer ça à Sarnia.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça n'a pas de bon sens qu'il n'y en ait pas, sauf qu'il faut être prudent dans le nombre de sites ou les volumes qui sont à la disposition sur le plan de l'enfouissement. Parce que l'enfouissement comme tel est la dernière méthode. C'est-à-dire que vous ne réglez pas le problème par enfouissement...

M. Lazure: Non, Mme la Présidente, ce n'est pas ça...

M. Paradis (Brome-Missisquoi):... nous préférons mettre la pression sur la décontamination.

M. Lazure: Je ne veux pas partir le débat là-dessus. Je suis très conscient de ça. Mais cela étant dit, mettez la priorité où vous voulez, et ça correspond à la mienne, il reste que ça va prendre des trous...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me donnez beaucoup de marge.

M. Lazure: ...sur la question des sols contaminés seulement. Mais il reste qu'on a besoin au Québec d'un certain nombre de trous. Un, deux, trois, quatre, je ne le sais pas. Mais c'est vous autres au ministère de l'Environnement qui devriez le savoir. Vous devriez, le sachant, faire en sorte que les municipalités le sachent, que le monde patronal le sache, que le monde syndical, que tout le monde le sache. Et dire: On va faire en sorte qu'il va y avoir quatre lieux au Québec, dans les quatre "coins" cardinaux, peu importe où, mais il ne faut pas, dans cette matière comme dans d'autres, que vous pratiquiez la politique du laisser-faire qui a été trop longtemps la politique de votre parti en matière d'environnement ou en d'autres matières. Il faut que vous soyez plus interventionnistes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Où on s'est trompés, c'est quand on a suivi les politiques que vous avez instaurées, on l'admet.

M. Lazure: Bon. Alors je reprends mon droit de parole pour conclure, Mme la Présidente. J'ai fait l'essentiel de mes remarques. Je vois qu'elles sont bien accueillies par le ministre. Je veux remercier les représentants de l'Institut de développement urbain du Québec pour leur mémoire. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement, un point d'information parce que vous l'avez souligné, nous avons déjà souligné une espèce d'accord de principe. À l'article 6 du projet de loi il y a une coquille. Il faut lire 31.46, je pense que vous l'aviez vu, à la place de 31.45. Cela étant dit, pour une présentation sur le plan technique qui est quasi irréprochable, au nom du ministère de l'Environnement du Québec, à votre association sans but lucratif, nos remerciements.

La Présidente (Mme Bélanger): Au nom des membres de la commission nous vous remercions de votre participation.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 39)

(Reprise à 20 h 12)

La Présidente (Mme Bélanger): A l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Le mandat de la commission pour cette séance est de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. Je demanderais au Centre québécois du droit à l'environnement de bien vouloir prendre place à la table.

Alors le Centre du droit à l'environnement est représenté par M. Michel Bélanger, directeur. Je demanderais à M. Bélanger de présenter la personne qui l'accompagne.

Centre québécois du droit à l'environnement

M. Bélanger (Michel): Oui. Je voudrais d'abord vous remercier de nous avoir invités ce soir. Ce soir, je vais être accompagné de Me Lome Giroux, professeur à l'Université Laval, qui est également membre de notre conseil d'administration.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, vous avez 20 minutes pour faire votre exposé, qui sera suivi de 40 minutes réparties entre le groupe ministériel, 20 minutes, et 20 minutes pour le groupe de l'Opposition.

M. Bélanger (Michel): D'accord, merci beaucoup. Je voudrais...

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez un mémoire?

M. Bélanger (Michel): Oui, c'est ça. Je vais vous déposer tout de suite une copie des mémoires et également, M. Arsenault... Je voudrais également vous remettre une lettre de la Chambre des notaires qui m'a mandaté. D'abord, elle s'excuse de ne pouvoir être ici ce soir et, d'une façon générale, elle endosse les conclusions contenues au mémoire du Centre québécois du droit à l'environnement, insistant particulièrement sur les modalités d'enregistrement. Donc, c'est une lettre signée par le président de la Chambre, Jacques Taschereau.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est déposé. Alors, M. Bélanger, vous avez la parole.

M. Bélanger (Michel): D'accord, merci. D'abord, un mot sur le Centre québécois du droit à l'environnement, pour vous le présenter. C'est un organisme à but non lucratif, multidisciplinai-re, c'est-à-dire qui regroupe non pas seulement des juristes, mais des gens de différentes disciplines qui oeuvrent en matière d'environnement. Le Centre a comme vocation et objectifs prin-

cipaux, d'une part, de favoriser une concertation entre les différents intervenants du milieu de l'environnement, pour promouvoir le développement du droit à l'environnement dans une certaine perspective de développement et de conservation.

Deuxièmement, c'est de favoriser une participation publique au processus de décision et également l'accès à la justice des citoyens dans ce domaine. Dans cette optique, le projet de loi nous a semblé assez intéressant, d'une part, parce que, au niveau de la participation publique, effectivement, on a fait fi, on écarte pratiquement totalement la participation du public dans la détermination des objectifs ou des normes qui y sont établies. D'une part, on a un problème effectivement de sol contaminé, ça, il ne faut pas se le cacher. Le projet de loi a établi des normes de concentration de façon objective sans tenir compte nécessairement des caractéristiques et du risque potentiel que présentaient les terrains, ce qui est un choix tout à fait compréhensible aussi, qui facilite également l'administration de ce régime-là.

Donc, si on se pose la question à savoir qu'est-ce qui est visé, c'est effectivement très large, tout ce qui est visé. C'est indépendamment du risque que les terrains comportent, qu'ils peuvent comporter, pour la santé humaine ou l'environnement en général. Toutefois, étant donné l'état de la science, des méthodes d'évaluation, de la pondération du risque et des choix de société et des choix inhérents à tout le processus de décisions, on déplore un peu un processus qui viendrait caractériser les sites de façon arbitraire comme celui-là, sans nécessairement impliquer d'une certaine façon la participation publique et, particulièrement, à défaut de l'avoir considéré au niveau de la caractérisation des sites, il faudrait, à notre avis, à tout le moins, prévoir des facteurs plus que j'appellerais autres ou subjectifs, comme les propriétés écotoxicologiques du terrain, les caractéristiques géologiques, la proximité, le zonage, la présence humaine ou même l'exploitation agricole autour, donc particulièrement au niveau de la décontamination des sols.

Dans ce processus-là de caractérisation et de détermination des critères de décontamination, une participation publique devrait, à notre avis, être nécessaire.

Finalement, on aboutit aussi à l'autre question: quoi décontaminer, mais qui doit payer? Je pense que c'est une des questions les plus controversées. Juste faire un bref rappel des règles actuellement parce qu'il ne faut pas non plus se scandaliser outre mesure à certains égards de retomber sur des pollueurs ou des propriétaires qui, déjà, à l'égard de l'état actuel de la loi, seraient couverts d'une certaine façon.

Si on prend la Loi sur la qualité de l'environnement qui établit les normes de façon statutaire ou même, à défaut de normes, comme on l'a vu dernièrement avec le jugement de la Cour d'appel, à défaut de normes réglementaires, tout ce qui serait susceptible de contaminer l'environnement, à ce moment-là, indépendamment de la faute de la personne, cette personne-là serait tenue à répondre des critères de décontamination, c'est-à-dire pour remédier à son acte fautif.

Bien entendu, dans un tel cas, en vertu des articles 20 et 22 de la Loi sur la qualité de l'environnement, il y a toujours une défense d'exigences raisonnables qui est possible à l'individu. Donc, démontrer sa non-négligence finalement.

Au niveau du Code civil, ça serait important aussi de se rappeler que toutes les notions de troubles de voisinage qui existent depuis des années, bien antérieurement à la Loi sur la qualité de l'environnement, ont toujours considéré que la balance des inconvénients soufferts par un voisin faisaient en sorte qu'il pouvait demander un dédommagement ou la cessation de ces activités-là.

Ici, bon, il y a une controverse doctrinale entre les auteurs, mais ce qui est visé, c'est le concept de faute. Le voisin a beau n'avoir commis aucune faute, si, par l'activité de son terrain qui serait contaminé, il causait des dommages à des tiers, à ce moment-là, la faute ici, c'est l'inconvénient qui dépasse les normes de voisinage normal.

Donc, on peut constater que ces deux lois-là, d'une façon ou d'une autre, considèrent à certains égards un type de faute ou, du moins, un inconvénient ou, encore, un dommage, mais le projet de loi auquel on a à faire face aujourd'hui, qu'on a à analyser, fait fi de tous les éléments de faute et de dommage, ce qui peut poser, effectivement, des problèmes de principe, pas nécessairement des problèmes juridiques, et ça, j'y tiens, mais des problèmes de principe certains.

Maintenant, pour analyser de façon plus concrète peut-être certaines dispositions du projet de loi, j'aimerais peut-être m'arrêter d'abord aux deux premiers articles, 31.42 et 31.43. D'une part, on définit ici l'environnement ou on fait allusion à l'environnement dont le terme défini selon la loi actuellement couvre à la fois l'eau, l'air, le sol. On trouve ça très large. Considérant notamment des difficultés techniques que présenterait la décontamination de l'eau ou de l'air, la possibilité d'être incohérents avec des régimes municipaux qui visent à tendre à la réduction de ces rejets-là, provinciaux, également; également, l'absence de normes de concentration au projet de règlement, qui est un document de travail qu'on a, mais qui m'a l'air d'être fait essentiellement pour les sols, je n'ai pas l'impression que la concentration va varier selon qu'on est dans un milieu liquide ou gazeux.

Donc, selon tous ces paramètres et les complications que ça peut apporter d'essayer de

décontaminer l'air et l'eau, je m'en tiendrais ou je suggérerais qu'on s'en tienne surtout aux sols au niveau d'un projet de loi. C'est déjà assez compliqué comme ça. Au niveau de la définition de contaminant, simplement mentionner que j'ai souligné le fait que la façon dont les normes ont été déterminées, c'est un choix qui peut être fait et qui peut faciliter, effectivement, l'application du régime. Il faudrait faire attention, par exemple, que la définition du projet de loi ne vienne pas en contradiction avec la définition qui existe dans la loi actuellement. Une définition par concentration et par normes pourrait être contraire à la définition qui existe déjà qui donne un élément beaucoup plus subjectif et qui constitue tous les éléments susceptibles d'altérer de quelque manière que ce soit la qualité de l'environnement. Et cette définition doit toujours rester dans la loi. Donc, de part et d'autre il faudrait aménager. D'une part, des normes fixes, et d'autre part, le terme contaminant est défini par ailleurs dans la loi comme étant ce qui a été susceptible d'affecter.

Un mot sur la rétroactivité. Je pense que c'est, effectivement, un problème qui a été abordé beaucoup, qui peut poser des problèmes dans la mesure où la disposition à laquelle on a affaire est effectivement une disposition d'ordre pénal. Ce dont nous doutons en partie. Ce qui peut être vrai et ce qui peut être faux également. Ça mériterait une étude approfondie.

Si on s'entend pour dire que c'est une disposition d'ordre pénal, effectivement, il y a des risques de se faire opposer la Charte, éventuellement, l'article 11g entre autres. Mais on invoque, entre autres, l'ordonnance qui suit un non-respect des dispositions du projet de loi. L'ordonnance serait de nature pénale et ce qui est pénal, c'est de ne pas s'être plié à l'ordonnance, et non pas nécessairement de ne pas avoir respecté les modalités des articles en cause, 31.42, 31.43. Donc, d'une part, ce n'est pas nécessairement une disposition d'ordre pénal à laquelle s'appliqueraient les Chartes canadienne ou québécoise au niveau des modalités de justice fondamentale.

Au niveau de l'article 7, qui garantit un droit à la sécurité et à la vie dans la Charte canadienne, ça non plus ce n'est pas évident qu'il s'appliquerait dans les faits en cause parce que, notamment, ça nous prend une peine d'emprisonnement. Donc, il faudrait absolument embarquer dans l'ordonnance les dirigeants directement. Si on s'adresse à la compagnie, une compagnie ne peut pas se prévaloir, et la Cour suprême l'a rappelé dernièrement encore, de l'article 7 de la Charte. D'autre part, si on invoquait des préjudices économiques, l'article 7 ne s'applique pas non plus. On ne peut pas défendre et subir une perte économique indépendamment de l'injustice qui peut être causée par les textes de loi.

Possiblement l'article 6 de la Charte québécoise garantissant un droit à la jouissance des biens pourrait s'appliquer ici, c'est-à-dire j'ai joui de ma propriété à une époque où aucune norme ne m'était imposée. Aujourd'hui, tout d'un coup, on revient à rebours pour poser des restrictions qui n'existaient pas à l'époque. S'il y a rétroactivité, après consultation d'experts dans le domaine, ça serait une quasi-rétroactivité aussi parce qu'on a un double élément dans l'infraction. D'une part, un responsable. Ça nous prend une personne contaminée, donc, ça exclut la contamination naturelle quand on pense, entre autres, au radon. Donc, effectivement, on ne pourrait pas forcer la décontamination naturelle. C'est un peu normal. On ne peut pas s'adresser à personne.

D'autre part, ça prend également la présence actuelle du contaminant, c'est-à-dire que si on a contaminé il y a longtemps et que c'est parti dans l'eau, ou qu'on ne retrouve pas de trace, on ne pourrait pas. Le fait de cette présence actuelle fait en sorte que l'infraction est d'une certaine façon contemporaine et ferait en sorte qu'on n'aurait pas nécessairement une rétroactivité.

Le fart d'exclure des responsables antérieurement à 1972 - je prends 1972 parce que c'est la date d'entrée en vigueur de la Loi sur la qualité de l'environnement - comme étant une prise de conscience peut-être sociale de l'importance de l'environnement... D'abord, pour nous autres, c'est une date qui serait très arbitraire, d'une part, et ça créerait d'autres problèmes. Entre autres, qu'est-ce qu'on appliquerait? Quel régime on appliquerait à ceux qui existent, ceux qui ont contaminé avant 1972. Ensuite, on ne pense pas qu'il serait plus justifiable d'imposer à une personne qui, après 1972, a respecté les normes parce qu'il y avait des nouvelles normes et qu'il les a respectées.

Donc, une personne qui aurait respecté ces normes-là après 1972, ça ne devrait pas être plus justifiable de lui demander rétroactivement de nettoyer son terrain nécessairement. Et c'est surtout à ce niveau-là que la rétroactivité, peut-être, si on peut parler de rétroactivité, a toute son importance, et sur les principes. Effectivement, sur les principes, outre l'aspect juridique potentiel, ça pose au niveau de l'équité et du droit de la justice naturelle en général des problèmes sérieux.

Maintenant, l'incompatibilité avec les dispositions actuelles de la loi. On a de fortes réserves sur l'application du projet de loi dans l'état qu'il est là, avec les dispositions qui existent actuellement, qui visent à réduire ou à gérer la contamination active. On pense, entres autres, aux certificats d'autorisation de l'article 22 qui autorise, finalement, les gens à polluer, à l'article 116.2, le programme d'assainissement, où on va autoriser, dans une certaine mesure, une personne à réduire ses rejets, etc. Comment, en parallèle, peut-on avoir un régime qui va éven-

tuellement obliger ces mêmes personnes à décontaminer (es mêmes terrains sur lesquels on les a autorisées finalement à rejeter? À un moment donné, il y a quelque chose qui ne marchera pas.

Au niveau de l'émission de l'ordonnance de décontaminer, la publication de l'ordonnance après qu'elle sort émise pose certains problèmes de publicité et de participation publique parce que ça sous-entend... Selon le projet de loi, une négociation peut avoir eu lieu avec le responsable potentiel de cette négociation-là avant que l'ordonnance soit émise, avec la pollution, c'est-à-dire. Qui connaîtra les refus d'une ordonnance, dans l'hypothèse où, suite à ces négociations-là, il n'y a pas émission d'ordonnance? Le fart que la publication et toute mesure de publicité ne suivent simplement qu'après que l'ordonnance soit émise pose un certain problème à notre égard.

On invoque également une procédure de plainte. On parle de plaignant sans voir mentionné en vertu de quelle procédure de plainte il était question. Est-ce qu'on parie de la procédure 117 de la Loi sur la qualité de l'environnement? Si c'est le cas, il y aurait peut-être lieu d'aménager les dispositions en conséquence.

Enfin, la responsabilité du propriétaire, ça pose également d'autres problèmes. Ici, il faut bien comprendre qu'on responsabilise le propriétaire en tant que tel. Ce n'est simplement qu'un sursis qu'on lui donne, le fait de changer son usage. On ne l'oblige pas à décontaminer aujourd'hui, sauf que dès le changement d'usage, il va être appelé à décontaminer son site. Il faut bien comprendre que si on s'adresse au propriétaire, c'est qu'on n'a pas nécessairement trouvé le responsable. Parce que le fait de se retourner, en vertu de l'article 31.49, sur le propriétaire n'empêche pas le ministre d'ordonner au responsable de la contamination qui peut ne plus être propriétaire depuis longtemps. Donc, on a deux régimes en paralllèle, ce qui permettrait d'avancer également qu'une personne qui a été responsable dans le passé, on pourrait la forcer de décontaminer alors qu'elle n'est pas propriétaire. L'immeuble pourrait prendre une plus-value, une augmentation de valeur et est-ce que ce serait de l'enrichissement sans cause qu'on pourrait qualifier entre les mains de l'actuel propriétaire? Ça pourrait poser certains problèmes à cet égard-là.

Finalement, l'enregistrement de l'avis de l'ordonnance. Étant donné l'importance des conséquences d'un enregistrement sur la valeur de la propriété, c'est inévitable que la propriété va chuter de valeur. Étant donné, justement, l'importance de ça, on pense qu'un préavis de 15 jours est nécessaire, d'une part. Et, d'autre part, dès que la contamination est connue, l'ordonnance et l'avis devraient être enregistrés obligatoirement. À défaut d'enregistrer, ça pourrait constituer sur les immeubles des charges occultes, des charges administratives qu'on appelle, qui permettraient à tout acquéreur et même au propriétaire d'appeler en garantie son propre vendeur pour cause d'éviction, selon les principes de garantie légale des articles 15.08 et suivants du Code civil. Donc, pour éviter ces conflits et assurer une protection au public - parce que c'est dans ce but-là qu'existe l'enregistrement, il ne faudrait pas l'oublier - on devrait rendre l'enregistrement obligatoire dès qu'on est certain que le terrain est contaminé.

Un autre élément. Il y a un processus de radiation de l'avis au propriétaire. Il faudrait bien se demander pourquoi radier. Et dans l'hypothèse où on n'a pas de critères de décontamination fixes, ça va être selon la volonté du ministre, la procédure qui va être appliquée. Donc, à ce moment-là, on peut se demander qui va être au courant, quel processus a été suivi. Ce qu'on invoque, au nom du Centre, c'est qu'un avis de décontamination soit enregistré et non une radiation de l'ordonnance ou de l'avis. C'est-à-dire un avis de décontamination qui énoncerait en vertu de quelle politique ou quel processus on a appliqué, selon quelles normes, et surtout, si on applique les règles de la politique de réhabilitation des terrains contaminés, selon quels critères et en vertu de quel usage. Donc, un avis de décontamination serait nécessaire.

Il y aurait eu beaucoup de choses à dire. Je vais passer la parole à mon collègue, Me Giroux.

M. Giroux (Lorne): Mme la Présidente, nous avons également relevé-La Présidente (Mme Bélanger): M. Giroux? M. Giroux: Oui. La Présidente (Mme Bélanger): D'accord.

M. Giroux: Nous avons également relevé certains problèmes qui n'apparaissent pas nécessairement, certaines questions qui n'apparaissent pas nécessairement dans notre mémoire écrit, mais qui sont susceptibles d'affecter l'efficacité du projet de loi. Par exemple, il nous semble qu'il va y avoir des problèmes pour assurer la relation entre le projet de loi dans sa version actuelle et la politique de décontamination qui est déjà en vigueur, que le gouvernement a déjà publiée il y a un certain temps. (20 h 30)

Le projet de loi abroge certains paragraphes de l'article 31 qui permettaient l'exercice d'un pouvoir réglementaire en ce qui concerne la politique de décontamination. Le danger que nous voyons avec la formulation actuelle du projet de loi c'est que, étant donné que l'article 31.51 détermine un seuil de contamination et si on lit ensemble les articles du projet de loi, notamment l'article 31.50 qui oblige le ministre à radier l'enregistrement une fois que ce seuil a été baissé, il nous apparaît qu'il va être impossible, dans le texte actuel du projet de loi, de moduler

les ordonnances quant au niveau de décontamination qui doit être atteint. En d'autres termes, ceux qui vont recevoir les ordonnances vont être en mesure de faire valoir le fait qu'à partir du moment où on est en bas de la norme on ne peut pas moduler l'ordonnance quant à des niveaux différents de décontamination suivant les usages qui seraient envisagés.

Et nous estimons que le fait d'abroger le pouvoir réglementaire, d'avoir abrogé les paragraphes o, p, q, r, de l'article 31, va avoir un effet qui va rendre ça beaucoup plus mécanique et va empêcher une modulation du niveau de décontamination. Il y a également des difficultés qui vont se poser dans l'intégration de ce régime-là avec d'autres régimes qui sont prévus à la loi et au pouvoir réglementaire. Si on regarde le projet de règlement qui a été publié pour fins de discussion, le projet de règlement détermine, dans le cadre de l'article 31.49, différentes activités qui sont réputées être une cause de contamination. Là-dedans on va trouver, par exemple, l'exercice d'activités minières. Or, il va y avoir des problèmes de contradiction potentielle entre cette exigence-là de l'article 31.49 vis-à-vis l'activité minière et les dispositions de la loi qui ont pour effet de soustraire tous les résidus miniers de la notion de déchet. En d'autres termes, il va y avoir beaucoup de litiges qui vont être engendrés au niveau des ordonnances résultant du fait qu'il y a une mauvaise intégration potentielle des dispositions de ce régime-là avec le régime général.

Je vous donne un autre exemple, Mme la Présidente, si on tient compte, par exemple, qu'une exigence de décontamination du sol peut être imposée dans le cadre de l'exercice des activités de recyclage de récupération, il va y avoir des contradictions entre cette obligation-là alors que le texte actuel du règlement sur les déchets dangereux, dans les articles 50 ou 54, n'impose même pas l'obligation de décontaminer le sol à celui qui exerce cette activité et qui cesse d'exploiter son entreprise. Or, il y a... A notre avis, on devrait regarder de façon plus attentive l'intégration du régime qui est mis sur pied ici avec l'ensemble des dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement et des régimes réglementaires.

On a fait beaucoup mention également - et les médias en ont parlé ce matin - des problèmes relatifs à l'exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre. Il y a une tendance récente dans la législation québécoise à favoriser l'exercice du pouvoir d'ordonnance ministérielle lorsque des difficultés se présentent en matière de contamination environnementale. Je ne voudrais pas... Il n'est pas suffisant de dire que ça donne beaucoup de discrétion au ministre, par conséquent ça devrait être évité. Je pense qu'on peut étudier ça de façon un petit peu plus nuancée en faisant valoir les arguments suivants: il est bien certain que dans le régime qui est mis sur pied par le projet de loi 65...

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion, M. Giroux.

Une voix: II pourrait continuer un peu.

M. Giroux: Oui.. Merci beaucoup, madame, messieurs.

La Présidente (Mme Bélanger): Continuez, M. Giroux.

M. Giroux: Dans le projet de loi actuel, le régime repose sur l'exercice du pouvoir d'ordonnance du ministre. Présumément, celui qui fait l'objet d'une ordonnance, s'il ne se conforme pas à l'ordonnance, peut ensuite être poursuivi au pénal. Il y a également l'article 113 qui n'indique pas si le ministre, lorsque son ordonnance n'est pas respectée, peut décider lui-même de faire les travaux et ensuite de bénéficier du privilège qui est conféré par l'article. La difficulté que nous voyons ici, c'est que si à aucun moment on ne s'adresse aux tribunaux ordinaires, comme c'est le cas, par exemple, dans le cadre de l'article 85 de la Loi sur la protection du territoire agricole... Dans la Loi sur la protection du territoire agricole, il existe un pouvoir d'ordonnance de la commission. Ce pouvoir d'ordonnance-là est également sujet à un double appel de nature administrative. Au bout du compte, la commission peut s'adresser à la Cour supérieure et obtenir une ordonnance de la Cour. Si un régime comme ça n'est pas présent dans cette loi-ci, nous craignons que ceux qui vont recevoir les ordonnances soient tentés d'exercer les contrôles judiciaires dès le début du processus en questionnant, par exemple, la suffisance des motifs du ministre d'agir par ordonnance.

Nous sommes d'avis qu'il y a plus de danger que le système soit bloque en ne prévoyant pas un recours de nature "injonction" devant la Cour supérieure qu'en prévoyant un recours de nature expéditive comme c'est le cas, par exemple, dans l'article 85 de la Loi sur la protection du territoire agricole ou encore dans le cadre de l'article 227 de la Loi sur l'aménagement. Et nous ne sommes pas certains que les désavantages d'agir par injonction sont plus grands que les avantages qui apparaissent d'agir par ordonnance. Mais nous sommes pratiquement convaincus que l'exercice à outrance du contrôle judiciaire va permettre de paralyser le système qui est prévu au niveau des ordonnances.

Enfin, dernier point, un point beaucoup plus technique. Lorsqu'on lit l'article 31.49... L'article 31.49 prévoit un premier alinéa qui concerne un propriétaire. Et ce qui met en vigueur, si vous voulez, le régime du premier alinéa, c'est l'enregistrement d'un avis. Si on lit le deuxième alinéa qui commence pas les mots "de même la personne ou la municipalité", il n'est pas certain.

avec le texte actuel, que le... On ne sait pas si le deuxième alinéa dépend de la nécessité préalable d'un avis enregistré ou si le deuxième alinéa existe de façon autonome, parce que, par la suite, les alinéas précédents font référence à cet alinéa-là et là, ce n'est pas clair. Je ne sais pas ce que vous aviez à l'esprit, mais il nous apparaît qu'on devrait clarifier, si vous maintenez le régime actuel, le deuxième alinéa de l'article 31.49. Maintenant, il y a d'autres points, mais nous préférons, si vous voulez, les prendre à la suite de questions. Nous vous remercions de votre attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Giroux. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez de remercier le Centre québécois du droit à l'environnement. Le travail que vous effectuez, on le sait, est fait bénévolement. Vous êtes un groupement neutre. Vos avis juridiques et autres que vous exprimez sont compris par le ministère dans un tel sens de neutralité. Vous recherchez une saine application du projet de loi.

Vous soulevez plusieurs points techniques. Je n'aurai pas le temps de tous les reprendre en commission parlementaire. Cependant, ce que je tiens à vous assurer, c'est que les points de droit que vous soulevez seront soumis au jurisconsulte du gouvernement de façon à être pris en considération dans les modifications que nous aurons à apporter au libellé du projet de loi.

Quant aux aspects de choix politique que nous effectuons dans le projet de loi, à la première page de votre mémoire, sous le titre "portée du projet de loi, définition de l'environnement", vous nous indiquez que le projet de loi qui couvre à la fois les aspects eau, air sol devraient se limiter à la couverture de la décontamination du sol. Nous sommes conscients des difficultés d'application quant à l'eau. Nous avons eu l'occasion de traiter de toute la question de la nappe phréatique, entre autres, avec d'autres intervenants. On est dans un domaine d'application très complexe, et quant à l'air, également. C'est le sol qui, d'abord et avant tout, était visé, mais nous ne voulions pas, parce que les technologies évoluent rapidement, les instruments de mesure également évoluent rapidement, les outils à la disposition de l'environnement évoluent rapidement, avoir un projet de loi qui se limite strictement au sol et devoir revenir par la suite pour la nappe phréatique, pour l'air etc.

M. Giroux: La difficulté qui se pose ici, M. le ministre, c'est que, étant donné le caractère extrêmement large de l'article 31.42, il y a une difficulté qui nous apparaît comme étant à plus long terme, c'est que les termes de cet article-là pourraient permettre à un plaideur d'invoquer que ce régime-là déplace d'autres régimes de la loi, notamment le régime de l'article 20. À partir du moment où il y a des règlements qui déterminent des seuils de contamination pour les fins de l'application de cet article, ça va être difficile au ministère de faire appliquer ensuite les règlements sectoriels qui déterminent, par exemple, des niveaux de qualité de l'air et de l'eau et surtout depuis la décision de la Cour d'appel dans l'affaire Alex Couture, ça risque de déplacer les régimes généraux prévus à la loi et nous sommes d'avis qu'en le laissant de façon trop générique, le ministère va se nuire dans d'autres aspects de son contrôle environnemental.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Je prends note de votre argumentation et surtout à la lumière de la décision récente de la Cour d'appel dans Alex Couture, nous allons réévaluer l'approche. Maintenant nous tentons de favoriser une approche intégrée eau-air-sol de façon à ce que les intervenants ne déplacent pas le contaminant. Il y a trop de facilité, à un moment donné, sur le plan technique à tenter de s'échapper lorsque nous avons une approche sectorielle. Si on réglemente l'air, vous condensez le tout, ça devient de l'eau. On réglemente l'air et l'eau, vous drainez le tout et ça devient dans le sol. On a vécu trop d'expériences dans le passé qui ont permis à des gens de s'échapper quand l'approche du ministère n'était pas intégrée, sauf que révolution jurisprudentielle nous oblige à tenir compte de ces nouveaux éléments.

La question de la rétroactivité et de la compatibilité aux Chartes des droits et libertés, vous faites une analyse qui est intéressante. Elle va plus loin que les analyses qui nous ont été présentées par d'autres organismes. Est-ce que je trahis votre interprétation, votre pensée, je m'en éloigne trop si, à la lecture de ce chapitre, j'en viens à la conclusion que le libellé actuel permet une interprétation par les tribunaux qui est susceptible d'une interprétation conforme aux Chartes.

M. Giroux: C'est bien possible, oui. Il est possible, dans la mesure où si on prend, par exemple, certaines décisions qui ont été rendues par la Cour suprême en ce qui concerne la Loi sur la protection du territoire agricole, il pourrait être soumis que la loi s'applique immédiatement pour le futur, même si elle tient compte de conditions qui ont existé dans le passé. Mais il y a un autre problème de politique ici, qui se situe à un autre niveau, surtout à partir de 1972. Il y a des entreprises, par exemple, qui se sont engagées soit dans le régime de l'article 22 ou dans le régime de l'article 116.2.

Nous sommes d'avis que l'entreprise peut être assujettie à des normes sévères en matière de contrôle environnemental, mais elle a besoin de sécurité juridique. Le problème ici, c'est que,

si ce projet de loi était adopté comme ça, il y aurait un risque que l'on dise au gouvernement. Nous n'acceptons pas de nous engager dans des systèmes actuels si vous risquez ultérieurement de changer les règles du jeu ex post facto. Ça, c'est un problème de politique générale qu'il faut évaluer par rapport au problème qui doit être réglé.

M. Bélanger (Michel): Je voudrais aussi ajouter simplement que les dispositions, dans la mesure où c'est des dispositions d'ordre pénal, et c'est une grosse distinction qui devra être plaidée également, et c'est vrai qu'on pourrait facilement dire que ce qu'on a entendu faire ici, c'est de crtminattser, finalement, ceux qui ont pollué dans le passé, c'est le fait de dire qu'on joue sur l'ordonnance lorsqu'on ordonne de. Mais si ce qu'on ordonne, c'est d'avoir contaminé dans le passé, alors que la contamination existe toujours, un régime qui s'approcherait beaucoup plus d'un régime, je n'ai pas eu le temps de me rendre et qu'on privilégierait, c'est celui qui favoriserait l'article 115.2 qui est essentiellement un régime d'application civile, c'est-à-dire que vous payez la note et vous remboursez chez le contrevenant. Ce régime-là, d'abord, qui est d'une efficacité environnementale beaucoup mieux, pourrait passer beaucoup plus facilement le test des Chartes. C'est le caractère pénal.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Donc, sur le plan de la sécurité juridique, on devrait s'éloigner de tout ce qui est d'aspect pénal pour ce qui est antérieur à la mise en application de la loi.

M. Bélanger (Michel): Je pense que oui et j'irais encore plus loin pour débloquer un petit peu. Même au niveau de la simple application des ordonnances comme il en existe actuellement avec des principes de responsabilité stricte, comme ils ont été énoncés par l'arrêt Sault-Sainte-Marie, dans un avenir prochain, ils risqueraient même d'être remis en question à la lumière de certains jugements de la Cour suprême dernièrement.

M. Giroux: Maintenant, il y a un autre aspect à ça, si vous me le permettez, M. le ministre. C'est qu'il y a beaucoup d'énergies qui vont être dépensées ici pour régler des situations passées. Il n'est pas certain que, compte tenu des énergies, même au niveau juridique, qui vont être engagées, on soit capables de récupérer des vrais responsables, s'il en est, l'ensemble des coûts. (20 h 45)

Nous, on ne voudrait pas que trop d'énergie, trop d'attention soit mise sur la décontamination au détriment de mesures de prévention, notamment, le régime d'évaluation des impacts qui, s'il avait été en place dans le passé, aurait pu éviter beaucoup de ces problèmes-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Exact. Je veux toucher globalement toute la question de l'ordonnance sous émission ministérielle. Je vous dirai que, personnellement, je suis très mal à l'aise avec ces pouvoirs de nature ministérielle qui permettent a un ministre d'émettre des ordonnances. Notre rôle de membre de l'exécutif frôle drôlement l'accomplissement en même temps de pouvoirs quasi judiciaires, etc. Normalement, ce type d'ordonnance est émis lorsqu'on parle d'autres secteurs d'activité gouvernementale par des commissions, des régies, etc., où les règles de justice naturelle sont appliquées de façon beaucoup plus rigoureuse qu'une simple ordonnance ministérielle avec 15 jours pour faire des représentations à un ministre par la poste.

Nous sommes pris pour le moment avec cette difficulté. Je ne dis pas que c'est pour toujours. Possiblement qu'au ministère de l'Environnement on aurait avantage à considérer également que nos pouvoirs quasi judiciaires soient exercés de façon plus conforme aux règles de justice naturelle par la création d'une régie, d'une commission de l'environnement, etc. Mais, dans l'intervalle, est-ce que vous êtes d'opinion que le fait qu'il y ait des droits d'appel qui sont quand même suffisamment simples sur le plan de la procédure devant la Commission municipale du Québec, c'est suffisant ou est-ce que vous êtes d'opinion que même la Commission municipale du Québec, étant donné qu'on prend des décisions qui peuvent aller jusqu'à des décisions qui pourraient possiblement, et là je plaiderais de l'autre côté de la clôture, s'apparenter à des injonctions ne devraient pas immédiatement être transférées, pour le moins, pour fins d'homologation devant la Cour supérieure?

M. Giroux: C'est un peu ce dont on a parlé tout à l'heure. La pire des hypothèses ici, au point de vue juridique, ce serait qu'un justiciable qui fait face à une ordonnance prenne l'ensemble des dispositions et plaide l'article 96 de la loi constitutionnelle. Là, vraiment, il y aurait une paralysie complète du système.

Maintenant, il peut y avoir un moyen terme, à notre avis, qui est un peu celui que l'on retrouve dans la Loi sur la protection du territoire agricole où, à partir d'un pouvoir d'ordonnance, on va devant la Cour supérieure lorsque cette ordonnance-là n'est pas respectée. Nous soumettons avec beaucoup de respect et beaucoup de modestie qu'il y a peut-être un trop grand emploi des procédures pénales ultérieurement et qu'on n'a peut-être pas suffisamment exploré le régime de l'injonction.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais vous comprenez qu'en envisageant cette voie, ce n'est pas simplement l'ordonnance en fonction des amendements dont on discute présentement qui

est affectée, c'est l'ensemble du pouvoir d'ordonnance du ministre de l'Environnement.

M. Giroux: Oui. Moi, je pense que les risques d'utilisation à outrance du contrôle judiciaire, ça mériterait d'être exploré, un peu réduit si, au moins, le justiciable savait qu'en cas de contravention on va devant la Cour supérieure pour faire sanctionner.

Maintenant, il y a différentes options qui sont possibles. Celle-là a été employée et si on regarde la jurisprudence qui a été rendue en vertu de la Loi sur la protection du territoire agricole, je pense que les tribunaux ont établi un équilibre entre la protection des droits de l'administré qui jouit de beaucoup de moyens de défense et, en même temps, une efficacité du système à cause du caractère relativement expéditrf de ces recours-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Vous parlez brièvement de la création d'un fonds de réserve à la page 7 de votre mémoire. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage sur qui devrait cotiser à ce fonds de réserve et quelle utilisation devrait-on faire de l'argent dans le fonds de réserve, une utilisation pour l'avenir, pour le passé?

M. Bélanger (Michel): Ce débat-là, c'est la poule et l'oeuf parce que, à partir du moment où... Parce que qui devrait cotiser dans le fonds ou qui devrait rembourser? Si on se fiait un petit peu au système américain. Parce que, à partir du moment où on s'entend que devront payer les pollueurs, indépendamment de la date où ils ont pollué, à ce moment-là, on récupère sur ces gens-là. La constitution d'un fonds de réserve a deux fonctions principales. Ou on crée un "no-fault", c'est-à-dire qu'on indemnise toute la question de la contamination passée, chaque fois qu'il y a une décontamination, comme ça, on évite toutes les questions de faute, de dommage potentiel et tout ça, avec une politique de gestion de ces sols par priorité, qu'est-ce qui est le plus pressé. À ce moment-là, effectivement, il faut contribuer dans ce fonds-là et ça, ça va soulever d'autres questions.

Ça va être du "grinchement" de dents, mais ce qui est bien important, et on le mentionne au niveau du principe pollueur-payeur, à la fin, il faudrait faire attention de ne pas intégrer ou appeler le principe pollueur-payeur lorsqu'on l'applique à de la décontamination. Parce que ce principe pollueur-payeur, selon ce qu'on comprend, nous, c'est un incitatif aux industriels futurs à réduire la production de contamination, à changer leurs habitudes de production, finalement, à décontaminer dans une optique de futur. Si, à ces mêmes personnes, on va imposer une taxe pour nettoyer ce qui s'est passé dans le passé, on va court-circuiter les objectifs que le principe pollueur-payeur devrait viser à la base.

Donc, à ce moment-là, il faut que ce soit clair. Si on veut éventuellement - et on souhaite - qu'une taxe à la pollution soit imposée pour réduire la pollution future, il faudrait que ce soit un régime parallèle et clairement identifié qui s'attaquerait à la décontamination passée. Donc, finalement, deux taxes...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais je voudrais bien comprendre le régime passé. Pour l'avenir, les lumières s'allument à peu près aux quatre coins de la salle, sauf que, quant à la décontamination passée, nous avons des difficultés d'éclairage.

M. Bélanger (Michel): La décontamination passée ne fera pas l'unanimité, et même au niveau des consultations qu'on a faites à l'interne, ça ne fait pas l'unanimité non plus, mais, d'une façon générale, il y a une question de justice sociale. C'est des erreurs, de l'ignorance ou quoi que ce soit qui a causé la situation passée. À notre avis, ça devrait probablement être une taxe générale que les citoyens vont payer pour le confort, de toute façon, qu'ils ont atteint aujourd'hui du cumul de ces erreurs. S'il y avait encore des entreprises à risque qui étaient susceptibles de contaminer dans le futur, à défaut d'une taxe à la pollution, il faudrait également percevoir une taxe en parallèle à ces entreprises potentiellement plus risquées. Mais, en soi, si on veut décontaminer le passé et qu'on crée un "superfund", une des options qui nous semblent le plus équitable serait de percevoir une taxe générale.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lorsqu'on parle - et j'adresse la question, je ne l'ai pas adressée à personne encore - d'une telle taxe, est-ce que vous la verriez plus en fonction du niveau d'activités polluantes ou au niveau du capital de l'entreprise qui exerce des activités polluantes?

M. Bélanger (Michel): Non, parce que, encore une fois, ça s'adresse à la décontamination passée. Ce processus-là pourrait très bien s'envisager. C'est tout à fait le scheme, les raisonnements qui devraient tenir à un principe pollueur-payeur pour ceux qui contaminent en ce moment effectivement. Et, pour décontaminer le passé, il y aurait... parce que ça va créer d'autres injustices si on s'attache à ces mêmes critères.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais sur le plan pratique, on va se parier franchement, quels que soient le gouvernement, au niveau du gouvernement de la province de Québec, vous avez une situation budgétaire gouvernementale. Lorsque vous voulez intervenir pour l'avenir, comme on se l'est dit, vous avez des solutions possibles. Vous avez actuellement des terrains qui

sont contaminés et nous en publions une liste dans le QERLED. Il y en a d'autres, nous remettons le GERLED à jour. Ce sont des centaines de millions de dollars, au bas mot, qui sont impliqués de façon réaliste et de façon pratique. Je ne pense pas, quel que soit le gouvernement au Québec qui assume ces responsabilités, que les disponibilités financières soient là présentement. À moins qu'on ne m'indique qu'il y a changement d'une politique fiscale monétaire, que le gouvernement du Québec a gagné la Loto-Québec, ces centaines de millions de dollars ne m'apparaissent pas comme étant disponibles sur le plan du trésor public avant X temps. On fait quoi dans l'intervalle?

M. Giroux: Écoutez, M. le ministre. Nous vous remercions de nous avoir posé la question. On n'est certainement pas capables de donner une réponse simpliste à un problème si complexe. Mais il y a certains jalons qui peuvent être portés. Nous avons dit que beaucoup d'énergies peuvent être dépensées pour tenter de récupérer des sommes. Le problème éthique de récupérer des sommes auprès de ceux qui ont agi en vertu d'un régime qui était différent dans le passé, il va se poser aussi bien lorsqu'on va déterminer la base d'une fiscalité permettant de créer le fonds. En d'autres termes, les motifs éthiques qui font qu'on a de la difficulté à rejoindre ceux qui ont causé la contamination parce qu'ils l'ont peut-être causée à l'époque de façon très légale, existent aussi bien lorsqu'on doit se demander quelle est la base de la fiscalité que l'on va utiliser pour créer le fonds.

En d'autres termes, ces gens-là vont vous servir le même argument en disant: Pourquoi devrions-nous supporter une taxe qui est fondée sur une utilisation passée, qui, à l'époque, pouvait être parfaitement légale et même autorisée par le ministère de l'Environnement? Et le problème, nous ne croyons pas que l'on puisse trouver des solutions très simplistes à un problème qui est très complexe.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...parlementaire, tantôt, vous n'avez pas mentionné... M. Giroux, non? Me Giroux? Ça va.

M. Lazure: Je constate qu'il y a beaucoup beaucoup de matière dans ce mémoire. Je vais commencer par le dernier point qui a été soulevé par le ministre, la question du fonds. Bon. C'est bien sûr que quant à l'avenir, il n'y a pas de difficulté. Mais quant au passé, il y a différentes formules. Une formule c'est que l'État, donc l'ensemble de la société, assume 100 % des coûts. Une autre formule, c'est que l'État, avec la participation des industries polluantes actuelles, par un fonds conjoint, assume ces coûts-là. Le ministre a répété à plusieurs reprises, hier et aujourd'hui, que c'est des sommes faramineuses et qu'il faudrait gagner Loto-Québec pour pouvoir assumer ça, mais je veux lui faire remarquer qu'il y a 10 ans à peine, au temps du gouvernement du Parti québécois il y a des sommes énormes que l'État a engagées pour la dépollution de nos cours d'eau, l'assainissement des eaux. On n'a pas attendu de former un fonds des entreprises, ni entreprise seule, ni entreprise conjointe avec le gouvernement, le gouvernement a pris ses responsabilités. Il y a quoi actuellement? Peut-être 4 000 000 000 $, 5 000 000 000 $ d'engagés. Laissez-moi terminer, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne peux pas parce que les entreprises ne sont absolument pas admissibles, les entreprises qui polluent, au programme de la Société québécoise d'assainissement des eaux.

M. Lazure: Non, je connais le programme. Laissez-moi terminer.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Lazure: Vous allez comprendre mieux si vous m'écoutez.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Parce qu'il y a des gens qui vont penser que...

M. Lazure: non, écoutez-moi, vous allez comprendre. le gouvernement, par les fonds publics, a décidé de poser un geste spectaculaire important pour commencer la dépollution des cours d'eau au québec. le québec avait un retard immense par rapport à l'ontario, par exemple.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II l'a toujours.

M. Lazure: II l'a, mais il est quand même moins énorme, le retard, maintenant qu'il y a 10 ans, M. le ministre. J'espère que vous allez l'admettre. Mais c'est évident que ce programme-là ne s'appliquait pas de façon spécifique à des entreprises. Il s'appliquait à l'environnement aquatique, si on veut. Peu importe qui avait causé la pollution.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non plus. Je m'excuse. Vous n'avez pas le droit de dire ça

M. Lazure: Écoutez, Mme la Présidente, voulez-vous rappeler le ministre à l'ordre et me laisser parler?

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous

plait, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le règlement est très large. On peut dire même des choses qui ne sont pas exactes. On corrigera tantôt.

M. Lazure: Non, non. Vous parlerez à votre tour.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le programme d'assainissement des eaux...

M. Lazure: On ne va pas s'enfarger là dans des discussions d'avocasseries, M. le ministre. Admettez que le gouvernement, à un moment donné, en 1978-1979, a signé des protocoles avec les municipalités pour des centaines de millions de dollars dans le but de dépolluer les cours d'eau du Québec. Bon. On peut, par voie de comparaison, imaginer que pour le passé, un gouvernement qui aurait la volonté politique de faire quelque chose en environnement, surtout en matière de sols contaminés, pourrait créer un fonds semblable. C'est par voie de comparaison que j'ai voulu un peu dédramatiser l'aspect toujours excessif que le ministre nous présente quand il s'agit de créer un fonds avec les deniers publics. Ce n'est pas impensable et ce n'est pas tout à fait aberrant comme il le laisse entendre.

Maintenant, dans les remarques que vous faites au tout début, vous parlez beaucoup de la participation du public. Cette participation du public, si je comprends bien, vous la voyez en particulier à deux moments privilégiés - et là, je suis au bas de la page 4 - lorsqu'il s'agit de déterminer les critères pour la caractérisation des sols. J'aimerais ça que vous nous donniez un peu plus de détails. Comment voyez-vous ça? Vous voyez ça par des audiences publiques ou quoi? (21 heures)

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bélanger.

M. Bélanger (Michel): c'est bien entendu que le processus ne devrait pas être trop lourd. mais à notre avis, une participation publique ou, du moins, un "input" du public à chaque décontamination selon la pièce, à notre avis, créerait beaucoup plus de difficultés que d'établir et de positionner ces choix-là, ces normes et ces critères-là définitivement ou, du moins, d'une façon ouverte une première fois. oui, sous forme d'audiences publiques, s'il le faut. oe toute façon, ce sont des choix qui restent arbitraires. on a eu le projet de règlement assez récemment. on a quand même pu faire une consultation plus ou moins avec des scientifiques à cet égard-là, un peu, déjà. à certains niveaux, certaines normes, effectivement, sont trop élevées et d'autres peu élevées. et on se demande sur quelle base, dans quel scheme et selon quelle caractéristique ces normes-là ont été établies.

Parce qu'il y a des choix de valeur. Finalement, ce sont des normes en vertu desquelles on va exposer les citoyens.

Ce qui est surprenant, c'est lorsqu'on voit la politique des sols contaminés qui détermine des catégories selon la proximité et qu'ici nous n'avons qu'une seule concentration qui, à mon avis, selon ce que j'ai compris, s'appliquerait tant à la caractérisation des sites qu'à la décontamination. Donc, on fait fi d'une série de paramètres qui auraient été nécessaires. Et en bout de ligne, de toute façon, étant donné l'incertitude scientifique, on va exposer des gens à des risques; ça, c'est sûr. Mais cette balance de risque là mériterait, à mon avis, d'être discutée ouvertement. Et ce n'est pas dit que ça va être à un niveau trop technique nécessairement, pour que les citoyens aient leur mot à dire. Mais, à tout le moins, on va les avoir consultés. Il me semble que c'est fondamental.

M. Lazure: Je pense que vous pouvez compter que l'Opposition partage tout à fait vos vues là-dessus, autant à ce stade-là qu'au stade ultérieur, à la page 5, la page suivante, quand vous dites: "Pour les mêmes raisons, nous avons invoqué, relativement aux critères d'identification, des terrains potentiellement contaminés. Il serait souhaitable de prévoir également une participation du public dans la détermination des niveaux de décontamination scientifiquement et socialement acceptables." Moi, je trouve que votre remarque est tout à fait judicieuse. Il ne s'agit pas simplement d'avoir des normes, des barèmes qui soient scientifiquement acceptables, mais il faut que ce soit socialement acceptable. Et vous êtes un des rares groupes, je pense, qui a fait ressortir très bien cet aspect social. Et j'espère que le ministre va en prendre bonne note et trouver le moyen d'inclure ce concept-là. Ça rejoint d'ailleurs la remarque que vous faisiez sur les audiences publiques, tantôt. Parce qu'une des meilleures façons de faire la prévention des sols contaminés, c'est de faire en sorte que, dans tous les grands projets, il y ait des audiences publiques.

Dernière remarque. Moi, Mme la Présidente, je ne pensais pas me retrouver en bonne compagnie comme ça. Parce que ça fait des mois que je dis au ministre qu'il a, dans la loi actuelle, à peu près tous les pouvoirs qui sont nécessaires pour intervenir. Vous semblez confirmer cette opinion quand vous évoquez 115.1 et 25. Vous dites même à certains moments, si je vous comprends bien, que 115.1 serait préférable, comme mode d'intervention, au projet de loi proposé.

M. Bélanger (Michel): D'une certaine façon, oui. Et à mon avis, on aurait appliqué 115.1 dans le cas de la Balmet, avec la preuve finalement de la susceptibilité de contaminer. Parce que c'est sûr qu'on garde toujours un critère subjec-

ttf ou, en tout cas, des éléments de preuve nécessaires du côté de la couronne. Mais c'est tout simplement d'un point de vue d'efficacité environnementale, c'est un petit peu le principe d'un "superfund" ou d'un fonds. Finalement, c'est là que 115. 1 le reproduisait. C'est que le ministre prenne la décision de nettoyer, se donne les moyens financiers de nettoyer et, après ça, se retourne contre le responsable. L'article 115. 1 prévoyait en plus de la solidarité, s'il y avait plusieurs responsables. La Balmet, pour prendre cet exemple-là - parce que je pense que c'était assez contemporain lorsque le projet de loi a été écrit - nous aurait servi l'argument qu'elle n'a pas été la seule à avoir contaminé donc... Et même dans le projet de loi, comme il est écrit là, on parle de responsable en tout ou en partie. Il va y avoir la bataille: dans quelle partie, moi, j'y ai contribué? C'est sûr que c'est une puérilité. Avec la solidarité, comme il était mentionné à 115. 1, ça allait. La seule chose par exemple que 115. 1 ne prévoit pas, c'est la faillite; chose que 113 prévoyait avec l'ordonnance.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on a utilisé.

M. Bélanger (Michel): C'est ce que 113 prévoyait au niveau de l'ordonnance.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que c'est ce qu'on a utilisé, 115. 1, dans le cas de la Balmet et c'est insuffisant.

M. Lazure: Non, mais il ajoute 116, lui là. M. Bélanger (Michel): Non, 113. M. Lazure: 113.

M. Bélanger (Michel): 113 avec... M. Lazure: 113...

M. Bélanger (Michel): Ça serait d'aménager ces articles-là.

M. Giroux: 113 présuppose effectivement une ordonnance ou encore une obligation prévue à la loi.

M. Bélanger (Michel): C'est ça. M. Giroux: L'autre aspect de...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être, pour qu'on se comprenne... Je pense que c'est important... Vous avez soulevé un point, M. le député de La Prairie sur lequel il faudrait... Nous avons effectivement, dans le cas de la Balmet, utilisé 115. 1 mais on n'a pas pu, en utilisant 115. 1, utiliser l'aspect "créance privilégiée" parce que ce n'était pas précédé d'une ordonnance et que nous n'avions pas les pouvoirs législatifs d'intervenir par ordonnance. Ce que l'on corrige avec le présent projet de loi.

M. Lazure: C'est-à-dire que si la compagnie fait faillite, c'est un coup d'épée dans l'eau. Votre nouvelle loi ne réglera rien.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah, nous n'avons aucun pouvoir, que ce soit un gouvernement du Parti québécois ou un gouvernement du Parti libéral, en vertu de la Loi sur la faillite qui relève du Parlement du Canada.

M. Lazure: S'il y a d'autres mécanismes tels que le cautionnement, le fonds? Il y a d'autres mécanismes à part d'avoir une loi...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, oui, assurance, etc.

M. Lazure:... avec des grosses dents. Bien oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.

M. Bélanger (Michel): Mais il y a aussi le fait que 115. 1, s'il avait été appliqué, outre le fait de la créance privilégiée... C'est qu'on parle de créance privilégiée. L'importance de la créance privilégiée, c'est que même si le gars sacre son camp, on peut quand même se rembourser. Mais 115. 1 fait en sorte que quand même le terrain est décontaminé, O. K. c'est aux frais de l'État et on ne peut plus courir après. Mais c'est juste une question de cents.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Voilà. C'est aux frais de l'État.

M. Lazure: Mais je peux lire, Mme la Présidente, ce que je lis à la page 7.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lisez ce que vous lisez!

M. Lazure: Toutefois l'article 115. 1 - le ministre va bien écouter cette fois-ci - l'article 115. 1 est, quant à nous, le mécanisme d'intervention que devrait privilégier le ministère. " C'est clair. C'est ce qu'on lui dit de faire nous autres depuis longtemps.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on a fait!

M. Lazure: Mais il passait son temps à nous dire: Ma loi n'a pas assez de dents.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ça.

M. Lazure: Mais vous l'avez fait très peu de fois.

M. Giroux: Mme la Présidente, si vous nous permettez...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On l'a fait dans le cas de Balmet.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, M. Giroux.

M. Giroux: La seule chose que nous aimerions ajouter, ici c'est que, dans la mesure du possible, un des objectifs d'un régime juridique de contrôle environnemental, c'est la cohérence. Et nous estimons qu'à long terme, ça va avoir des effets maléfiques de créer pour chaque problème un régime particulier. Dans toute la mesure du possible, nous croyons que les amendements qui sont toujours nécessaires doivent, autant que possible, s'intégrer à l'intérieur du cadre des mécanismes généraux prévus par la loi.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez complètement raison.

M. Lazure: Vous avez raison. Absolument. Seulement, encore une fois, on est d'accord tout à fait.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je veux juste vous spécifier que c'est en vertu de 115.1 qu'à toutes les semaines je vais au Conseil des ministres pour réparer les pots cassés. À chaque semaine on utilise...

M. Lazure: Oui, mais au lieu de faire ça, justement, vos courses hebdomadaires, vous devriez vous efforcer...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que j'ai suivi...

M. Lazure: ...de demander une fois pour toutes au Conseil des ministres de respecter ses engagements électoraux et d'ajouter 35 000 000 $ pour commencer à former un fonds.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À partir de ce moment-là, ce n'est plus le pollueur-payeur. C'est le pollué-payeur.

M. Lazure: Non, non. On parle du passé là. M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Lazure: Ce n'est pas l'un ou l'autre. Vous pouvez constituer un fonds, commencer à constituer un fonds pour le passé et, en même temps, commencer à construire un nouveau fonds industriel, des industries, des entreprises polluantes. Et, en même temps, utiliser la loi au maximum. Mais, Mme la Présidente, je conclus en disant que les gens du Centre québécois du droit à l'environnement nous éclairent et éclairent le ministre aussi. J'espère qu'il va en tenir compte dans la reprise - parce que le projet de loi a besoin d'être repris de façon majeure parce qu'il est incomplet. Il y a des bonnes choses dedans mais il est incomplet. Et le Centre du droit sème des doutes dans mon esprit, surtout par les dernières remarques. Et c'est à se demander si, au lieu de présenter un nouveau projet de loi, on ne devrait pas tout simplement raffermir et améliorer quelques articles dans la loi actuelle.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on fait.

M. Lazure: Mais là, ce n'est pas quelques articles parce que c'est toute une nouvelle loi que vous présentez comme la loi qui aura les meilleures dents au monde pratiquement. Mais en réalité, on devra reprendre la discussion parce qu'il y a aussi à part du fonds, toute la discussion sur la notion de risque, la notion de milieu sensible telle qu'elle nous a été présentée cet après-midi qui doivent s'ajouter, ces deux notions-là, aux barèmes et aux règlements. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente. Vous me permettrez de remercier le Centre québécois du droit à l'environnement. Je profite de l'occasion pour indiquer à Me Giroux que je suis d'accord avec ses derniers propos. Ce que l'on fait au ministère de l'Environnement du Québec sur le plan de la législation depuis peut-être un peu trop longtemps, c'est qu'à chaque fois que l'on est confrontés avec un problème dans le quotidien, nous tentons de modifier la loi de base en créant une solution ad hoc au problème, ce qui fait en sorte qu'à force d'ajouter des corrections ad hoc, nous nous trouvons dans un régime législatif qui devient à la fois difficile à comprendre pour le justiciable, pour celui qui a des droits, et difficile à interpréter pour les tribunaux. Je pense que notre Loi sur la qualité de l'environnement a besoin d'une refonte, qu'elle soit révisée dans son ensemble.

Dans l'intervalle, je ne peux continuer, et c'est le choix politique que j'ai fait, que me reproche publiquement le député de La Prairie, mais qui va endosser le principe publiquement probablement également à l'Assemblée nationale, mais ce n'est pas une façon de travailler à long terme. C'est une façon de régler des problèmes à court terme avec des complications que l'on crée et je suis conscient de ce phénomène.

Le projet de loi qui est devant nous ne contient que 16 articles et il vise à nous donner des pouvoirs que nous aurions souhaité avoir pour intervenir dans le cas de la Balmet et

d'autres cas spécifiques qui surviennent de façon hebdomadaire.

On avait le choix d'utiliser 115. 1 comme nous a recommandé de le faire le député de La Prairie. On l'a fait. On l'a fait dans le cas de la Balmet, on l'a fait dans le cas de Duparquet, on le fait dans le cas de l'est de Montréal, on le fait dans chaque cas. Mais, à chaque fois, c'est le principe pollué-payeur qui s'applique. Si on suivait les recommandations du député de La Prairie, on prendrait dé l'argent dans le fonds consolidé du revenu et on participerait à la création d'un fonds. Mais cet argent-là, c'est l'argent des pollués également. Mais ça, ce choix politique-là, nous, on ne l'a pas encore fait. On ne prétend pas que la technique est la meilleure, mais on prétend que si elle s'applique avec un minimum d'efficacité, parce qu'il y a des embûches que vous soulignez à juste titre, au moins, nous pourrons, dans certains cas, appliquer le principe de pollueur-payeur.

Encore une fois, pour les mises en garde que vous nous avez adressées quant au libellé de certains articles et également quant à l'application de certains principes qui sous-tendent le projet de loi pour le temps que vous y avez consacré bénévolement, au nom du ministère de l'Environnement du Québec, merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je ne veux pas m'engager dans un débat avec ministre, mais sur la Balmet, ce n'est pas si simple qu'il l'a dit parce qu'il n'a pas utilisé 115. 1 à fond. S'il l'avait utilisé à fond, il aurait décontaminé, quitte à se faire payer. Il n'a pas décontaminé, il a mis de l'asphalte, il a laissé la compagnie mettre de l'asphalte...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est la compagnie qui a mis de l'asphalte.

M. Lazure:... sur le terrain de la Balmet. Ça a été très compliqué. Puis, même son ministère a fait une entente hors cour pour que ce qui avait été ordonné ne soit pas appliqué. Vous le savez fort bien, M. le ministre. Alors, Balmet, c'est très complexe.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ne rebrassez pas ça, vous là. On va être ensemble là...

La Présidente (Mme Bélanger): D'accord.

M. Lazure: Alors, en attendant, messieurs du Centre québécois du droit à l'environnement, bravo, merci.

M. Giroux: Merci beaucoup, madame.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bélanger,

M. Giroux, nous vous remercions de votre participation.

On va suspendre deux minutes, le temps que nos invités prennent place.

(Suspension de la séance à 21 h 14)

(Reprise à 21 h 17)

La Présidente (Mme' Bélanger): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux. Nous avons comme invitée l'Association pétrolière du Québec, représentée par M. Gérard Bétournay. M. Bétournay, si vous voulez bien présenter les invités qui vous accompagnent.

Association pétrolière du Québec

M. Bétournay (Gérard): C'est bien, Mme la Présidente. M. le ministre, mesdames et messieurs, je veux, premièrement, vous remercier de l'opportunité que vous nous offrez de faire connaître le point de vue des membres de l'Association pétrolière du Québec sur le projet de loi 65. À titre de président du conseil d'administration de l'APQ, permettez-moi de vous présenter les membres de notre délégation. J'ai à ma droite immédiate, M. Jean Côté, qui est second vice-président de notre conseil et occupe les fonctions de directeur général des affaires publiques et aussi gouvernementales chez Esso L'Impériale. Carl Lussier, qui est président de notre comité des affaires environnementales, et ses fonctions chez Petro-Canada sont celles de directeur environnement, prévention, hygiène industrielle pour l'Est du Canada. J'ai aussi Luc Baillargeon, qui est directeur environnement, et prévention et hygiène à la raffinerie de Petro-Canada à Montréal-Est. Et, finalement, M. René Migliérina, qui est vice-président exécutif de notre association et en gère la permanence.

Pour ma part, j'occupe les fonctions de vice-président, vente et marketing chez la pétrolière Sergaz.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez 20 minutes, M. Bétournay, pour faire votre présentation.

M. Bétournay: Merci, madame. Quelques mots maintenant sur l'Association pétrolière du Québec, qui est un organisme à but non lucratif fondé en 1959. L'APQ compte neuf membres qui sont les principales sociétés pétrolières du Québec. Je suis sûr que vous les connaissez toutes. Ce sont Petro-Canada, Ultramar, Shell, Esso, Sunoco, Sergaz, Calex, Olco et Sonic de la Coopérative fédérée de Québec. L'APQ coordonne la mise en commun des ressources de ses membres dans les domaines législatif et environnemental. Elle contribue à l'harmonisation des

points de vue sur des mesures telles que le projet de loi 65 dont je vais vous entretenir pendant quelques minutes avant de passer la parole à M. Jean Côté.

Mes commentaires sont de deux ordres. Tout d'abord, parions des terrains contaminés de l'industrie pétrolière. Nos membres n'ont jamais nié qu'ils étaient propriétaires de terrains contaminés, ni qu'il existe plusieurs sites d'enfouissement maintenant fermés et contaminés, entre autres, par des résidus de fonds de réservoirs pétroliers. Il ne s'est déroulé rien d'illégal ou de mystérieux dans le processus de contamination. Nos terrains ont été contaminés graduellement sur des périodes de dizaines d'années et surtout dans le passé alors que la technologie était beaucoup moins avancée. En ce qui a trait aux sites d'enfouissement, la pratique d'y déposer les fonds sablonneux des réservoirs pétroliers a cessé depuis bientôt 10 ans. Celle-ci remontait au début de l'industrie et s'effectuait alors de façon très connue, légale et publique, avec la sanction du prédécesseur du ministère de l'Environnement. Donc, nous admettons le problème des sols contaminés chez nos membres et nous sommes anxieux de le résoudre.

Ce qui m'amène au deuxième volet de mon intervention, lequel concerne notre attitude envers l'introduction du projet de loi 65. Oui, nous sommes satisfaits que le ministre de l'Environnement propose un cadre législatif qui permettra et facilitera, nous l'espérons, la décontamination des sols du Québec. Il est bien sûr que nous remplirons ce soir notre rôle en formulant des critiques constructives et raisonnables. Mais essentiellement, notre réaction est positive. Nous admettons qu'il existe une situation améliorée et nous désirons participer activement à la solution, à condition que les outils législatifs soient adéquats.

Je laisse maintenant le soin à Jean Côté de vous entretenir.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Côté.

M. Côté (Jean): L'Association pétrolière du Québec est particulièrement heureuse d'avoir été invitée à présenter ses vues et commentaires sur cet important projet de loi. La qualité de l'environnement figure en tête de liste des préoccupations majeures de tous les citoyens au Québec. L'industrie pétrolière s'est engagée fermement à respecter l'environnement dans ses opérations et à faire en sorte que toutes les mesures possibles soient prises pour concrétiser cet engagement.

Notre intervention s'inscrit à l'intérieur de cette dynamique. L'Association ne peut que souscrire aux visées gouvernementales prévoyant de nouvelles mesures pour mieux protéger l'environnement. Elle estime surtout comme extrêmement saine la démarche voulant faire intervenir dès le départ certains organismes.

Ceux-ci pourront enrichir les réflexions du législateur en vue de la rédaction finale de la loi 65.

Nous voudrions également souligner à cette commission certains éléments clés de notre philosophie. Ils consistent à garder dans une juste perspective les possibilités techniques versus les coûts engendrés par la mise en oeuvre de ces dernières. L'Association est convaincue qu'il faut regarder avec réalisme cette dualité, et ce non seulement à l'intérieur du projet de loi actuel, mais encore dans toutes les orientations environnementales.

Nous sommes d'avis que l'objectif ultime prévoyant le déploiement complet de tout l'arsenal des moyens technologiques pour protéger l'environnement est éminemment souhaitable. Cependant, dans le contexte actuel, nous croyons que toute la flexibilité sur les moyens à utiliser pour parvenir aux résultats finaux devrait être laissée à ceux qui doivent oeuvrer sur le terrain.

L'Association tient à souligner que l'industrie pétrolière supporte depuis plusieurs années la notion pollueur-payeur. À cet égard, les politiques internes de plusieurs de nos membres sont plus exigeantes que les lois et les normes en vigueur. Il y a cependant lieu de se demander si le principe de pollueur-payeur doit s'appliquer rétroactivement à des gestes légaux qui ont été posés dans le passé. De plus, l'industrie entend assumer sa large part de responsabilité au niveau des huiles usées. D'ailleurs, celle-ci a rendu publique récemment sa politique concernant cet important problème, source de pollution.

À l'initiative de l'industrie pétrolière s'est tenu, au mois de mai, à Winnipeg, un colloque d'envergure nationale sur le problème des sols contaminés à travers le pays. Le Québec était fort bien représenté par plusieurs professionnels du ministère de l'Environnement, dont un sous-ministre adjoint, et par un représentant du ministère de l'Énergie. Les participants se sont entendus sur la nécessité de créer des centres régionaux de collecte et de traitement des sols contaminés aux hydrocarbures. Un comité d'étude formé de représentants du gouvernement et de l'industrie se penchera sous peu sur ce projet.

Nous nous réjouissons que ce projet de loi, de même que tous les règlements qui en découlent, permette de cibler d'une façon concrète cet important problème de sols contaminés. Depuis de nombreuses années, l'industrie pétrolière déplorait cette situation. Celle-ci provient du fait que le ministère ne considère pas les sols contaminés aux hydrocarbures comme des déchets dangereux. Le fait surtout que, très souvent, les sols contaminés se trouvaient placés sous la juridiction du règlement sur les déchets dangereux nous semblait pour le moins inadéquat.

Nous voudrions exposer par un exemple précis les problèmes qu'engendrerait cette situation. Dans le cadre d'une réfection majeure

d'une station-service, à LaSalle, au printemps 1989, l'un de nos membres s'est vu obligé d'éliminer des sols contaminés par des hydrocarbures chez Stablex, à un prix très élevé et surtout non nécessaire. La confusion qui existe au niveau de la réglementation sur les déchets et, à plus forte raison, l'absence de réglementation sur les sols contaminés sont les causes principales de cette onéreuse expérience.

Nous croyons que cela aurait pu être évité si la réglementation existante était plus précise au niveau des sols contaminés par les hydrocarbures, à savoir que ceux-ci ne sont pas des déchets dangereux. Encore mieux, il n'y aurait pas eu de confusion s'il avait existé un règlement sur les sols contaminés. Cet exemple, survenu en l'absence d'une législation claire et précise, nous amène d'une façon plus générale à aborder l'impact économique de tous ces dossiers.

L'Association tient à rappeler à la commission que les réalités économiques sont à la base même du fonctionnement normal des industries. Dans le cadre du libre-échange et de la globalisation des marchés, la notion de compétitivité doit être incluse dans toute décision. Non seulement devons-nous constamment nous assurer d'être compétitifs sur nos marchés domestiques, mais il faut aussi s'assurer de l'être dans une perspective nord-américaine et internationale. Nous souhaitons que cette commission s'assure que les recommandations qu'elle transmettra au législateur ne constitue pas un frein à la compétitivité de l'industrie. Il est essentiel que cette commission considère l'impact socio-économique de toute réglementation. Il ne faudrait pas décourager l'expansion, l'injection de nouveaux capitaux et même provoquer la fermeture d'entreprises.

D'une façon plus particulière, nous aimerions apporter certains commentaires sur les articles de ce projet de loi. Ainsi, à l'article 31.42, on y fait mention que le ministre peut, lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire... Nous recommandons que le mot "probables" soit ajouté après "raisonnables".

À l'article 31.43, la notion de prendre toutes les mesures qu'il lui indique pour décontaminer nous semble nettement exagérée. Il nous semblerait plus réaliste que la personne visée soit responsable de décontaminer selon les normes reconnues. En laissant le choix des moyens à la personne visée, on permettrait une plus grande flexibilité dans les techniques employées. On pourrait même assister à l'utilisation de technologies nouvelles.

En ce qui a trait à ces deux articles, nous voudrions qu'il y ait une limitation à l'utilisation du pouvoir discrétionnaire prévu dans la loi. Ce pouvoir ne devrait être invoqué que s'il y a un élément de danger et de risque sur la vie, la santé et la sécurité de l'être humain.

Un autre point qui mérite d'être souligné dans ces articles a trait à l'emploi de l'expression "en tout et en partie". Nous recommandons que ces articles soient modifiés de façon que tous ceux qui ont participé à la contamination d'un site soient responsables dans la proportion qu'ils l'ont contaminé.

Nous recommandons également que le service des enquêtes identifie tous les pollueurs du site visé afin que la capacité de payer d'un pollueur ne devienne pas le seul critère d'assignation des responsabilités.

Il est essentiel que la loi tienne compte du fait que le pollueur a pu exercer une activité selon les lois, normes et pratiques de l'époque. D'ailleurs, la Commission d'enquête sur les déchets dangereux s'interroge sur ce même phénomène. Et je cite: "Peut-on tenir responsables des dommages actuels des entreprises qui ont agi en conformité avec les normes de l'époque et leur imposer les coûts majeurs des travaux de restauration à effectuer?"

À l'article 31.45, l'Association s'inquiète qu'une information publique puisse circuler avant même que les faits soient prouvés. Nous recommandons que cette information ne soit rendue publique qu'une fois la preuve clairement établie de cette contamination.

L'artide 31.51 donne au gouvernement le pouvoir d'adopter des règlements. À cet égard, voici certains commentaires. La réglementation sur la quantité et la concentration de contaminants qui dépasseraient les normes indiquées devrait avoir de la souplesse et de la flexibilité afin de tenir compte de l'utilisation présente et ultérieure du site.

Un site qui servirait à des fins de santé ou récréatives devrait être soumis à des critères plus sévères qu'un site industriel et commercial. Nous pensons, entre autres, à des sites de raffinerie dans l'est de Montréal. (21 h 30)

Nous sommes très préoccupés par le fait que le document de travail du projet de règlement sur la contamination de l'environnement reflète un seul et unique critère plutôt que les critères A, B et C qui étaient contenus dans la politique de réhabilitation des terrains contaminés publiée en février 1988.

Dans un tel contexte, les travaux effectués de récente date pour la décontamination de sites selon cette politique dépasseraient encore les niveaux acceptables de contamination proposés dans le projet de règlement sur la contamination de l'environnement.

La réglementation devrait également tenir compte des éléments de risque qui peuvent être supportés par le milieu concerné. Ainsi, un site industriel situé à proximité d'un secteur résidentiel ou encore près d'un tronçon de métro comporte un facteur de risque plus élevé qu'un terrain situé dans un parc industriel éloigné d'un centre urbain.

Quant à la détermination des activités dont

l'exercice contamine le sol, nous recommandons que la liste des contaminants et non l'activité détermine la contamination du soi. En ce qui a trait au mode de gestion des sols contaminés, nous ne pouvons concevoir que le ministère puisse spécifier le mode de traitement requis pour ces derniers. Encore une fois, le responsable de la contamination devrait être redevable du résultat selon des normes définies et reconnues, mais non des moyens à utiliser.

En terminant, nous désirons attirer l'attention de la commission sur trois préoccupations majeures qui inquiètent particulièrement les membres de l'industrie pétrolière. Le pouvoir discrétionnaire contenu dans le projet de loi fait en sorte que le ministre a pleine liberté de choisir, parmi ceux qui auraient participé à la contamination d'un site et d'ordonner la réhabilitation sans égard au partage proportionnel des coûts. La qualité rétroactive de la loi ne tient pas compte du fait que l'individu ou l'entreprise respectait les lois et les normes en vigueur à l'époque. Le fait de ramener les trois critères de la présente politique de réhabilitation des sols en un seul nous semble trop restrictif. Cette situation ne tient pas compte des facteurs de risque et de l'usage futur des terrains commerciaux et industriels.

Les membres de l'Association souscrivent aux objectifs du projet de loi. Par contre, l'Association exprime de sérieuses réserves sur certains articles de ce projet de loi ainsi que sur la sévérité des critères prévus dans le projet de réglementation. Nous espérons que le législateur tiendra compte de nos préoccupations et de nos recommandations. Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Côté. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, dans un premier temps, mes remerciements à l'Association pétrolière du Québec pour son mémoire. Vous fartes preuve de transparence lorsque, à la page 3 de votre mémoire, vous admettez très clairement que le problème de sols contaminés chez vos membres existe et que vous êtes anxieux de le résoudre. Admettre la problématique, c'est déjà un pas dans la bonne direction et ce n'est pas le lot de tous et chacun qui se sont présentés devant cette commission parlementaire.

Vous ajoutez, à la page 4: II nous faut garder dans une juste perspective les possibilités techniques versus les coûts engendrés par la mise en oeuvre de ces dernières. Il y a une balise, lorsque la santé de la population est en jeu, le facteur coût doit disparaître sur le plan de l'intervention. Lorsqu'il n'y a pas de raison de santé invoquée, il faut tenter d'atteindre l'objectif. Je voulais simplement faire un bref commentaire sur cette affirmation de l'Association.

M. Côté (Jean): II y a quand même un coût raisonnable, vis-à-vis du coût, seul. Les moyens finalement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous savez... Je ne sais pas si le député de Saint-Jean est encore parmi nous...

Des voix: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II est encore parmi nous. Il a été présent tout au long de nos travaux. Quand vous avez, suite à une contamination, des enfants avec un taux de plombémie dans le sang... Et je ne connais pas les conséquences et je ne pourrais pas vous les expliquer aussi longtemps que le Dr Lazure pourrait probablement le faire, mais, sur le plan des coûts, vous avez peut-être économisé à court terme, mais sur le plan des coûts pour la société, pour les individus impliqués, je n'ai pas vu de chiffres encore qui pouvaient me permettre de ralentir mes élans d'intervention.

M. Bétournay: mais mon intervention était sur les méthodes de dépollution qui peuvent peut-être être moins coûteuses d'une part, si le pollueur choisit ses méthodes lui-même et dépollue.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'y reviendrai plus tard. Vous soulevez là un point très intéressant.

M. Bétournay: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À la page 5: "L'Association tient à souligner que l'industrie pétrolière supporte depuis plusieurs années la notion de pollueur-payeur." Vous le réaffirmez. "Il y a cependant lieu de se demander si le principe de pollueur-payeur doit s'appliquer rétroactivement à des gestes légaux qui ont été posés dans le passé." Je vais vous laisser le temps d'y revenir tantôt, parce qu'il s'agit de la grosse question. Ce n'est pas facile comme législateur d'y répondre. Ce n'est pas facile comme citoyen corporatif visé par une telle législation de répondre à cette question. Je dis: C'est la grosse question en arrière de l'actuel projet de loi et j'aimerais vous entendre davantage quant à cette question spécifique.

À la page 6, le fait que, très souvent, les sols contaminés se trouvaient à être placés sous la juridiction du règlement sur les déchets dangereux nous semblait pour le moins inadéquat. Je pense qu'on va dans le même sens. Nos orientations convergent.

À la page 8, vous commencez une analyse plus spécifique des articles du projet de loi comme tel. Le premier que vous abordez, l'article 31.42. Vous êtes le deuxième groupe à nous faire cette remarque. Vous souhaiteriez que nous

ajoutions au motif ministériel la notion de probable, en plus de la notion de raisonnable. Je pense que ce serait ajouter un peu plus d'équilibre dans le projet de loi et nous allons donner instruction aux légistes du ministère de procéder dans le sens que vous nous indiquez.

L'article suivant: "À l'article 31.43, la notion de prendre toutes les mesures qu'il lui indique pour décontaminer nous semble nettement exagérée. Il nous semblerait plus réaliste que la personne visée soit responsable de décontaminer selon les normes reconnues. En laissant le choix des moyens à la personne visée, on permettrait une plus grande flexibilité dans les techniques employées. On pourrait même assister à l'utilisation de technologies nouvelles." Je pense que vous avez raison. Là encore, nous tenterons d'apporter des modifications qui vont aller dans le sens de vos recommandations. Ce n'est pas aussi évident pour les paragraphes qui suivent. Donc, je les saute plus rapidement.

A la page 11, vous indiquez: "Nous sommes très préoccupés par le fait que le document de travail du projet de règlement sur la contamination de l'environnement reflète un seul et unique critère plutôt que les critères A, B et C qui étaient contenus dans "Politique de réhabilitation des terrains contaminés" publié en février 1988." Je suis également préoccupé. Je n'ai pas arrêté de décision, mais vous n'êtes pas le premier groupe à nous le souligner sur le plan d'une application pratique. Je pense qu'il faut avoir une approche pragmatique à ce niveau-là. C'est une suggestion que nous trouvons intéressante.

Une dernière question qui rejoint peut-être la grosse question qu'on a laissée en suspens. Plusieurs groupes nous ont parlé de la possibilité de création d'un fonds de décontamination, de cautionnement, d'assurance, de façon à appliquer le principe pollueur-payeur. Certains nous en ont parlé de façon prospective, c'est-à-dire strictement pour l'avenir; d'autres nous ont indiqué qu'il y aurait une possibilité d'application pour la décontamination passée. Là-dessus également, j'aimerais avoir plus d'explication ou de réaction de la part de l'Association pétrolière.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M le ministre. Est-ce que vous voulez répliquer ou si on passe à M. le député de La Prairie?

M. Bétournay: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Est ce qu'il y a des remarques à faire, suite aux remarques du ministre?

M. Bétournay: Oui, absolument. Je vais répondre à une partie et je vais demander à mes confrères de m'assister là-dessus.

Évidemment, le principe pollueur-payeur est adopté chez nous, à l'Association. À l'avenir, et même les sites connus non orphelins par les pétrolières qui ont déjà contaminé vont les décontaminer. Le problème qui se pose aujourd'hui, c'est les sites orphelins ou les sites qui ont été pollués par plusieurs parties dans le passé. Comment va-ton les dépolluer? Qui va payer le coût? Effectivement, on sait qu'il y a un fonds fédéral de 250 000 000 $ en réserve.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Fédéral-provincial?

M. Bétournay: Oui, fédéral-provincial. On pourrait certainement commencer à s'en servir, on a les sites, on a identifié les sites, mais on n'est pas tout à fait d'accord sur un fonds qui va être payé par qui? Par les pollueurs de l'avenir, c'est réglé. Les pollueurs du passé, c'est qui? Donc, c'est le public en général. Est-ce une taxe cachée? Comment va-ton collecter cet argent-là? Je ne suis pas certain qu'on soit arrivés à une entente là-dessus au niveau de l'Association et même au niveau du public. Peut-être que Jean Côté...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut être une question de précision. Là où la plus-value du terrain demeure positive après décontamination ou après absorption des coûts de décontamination, sur le plan pratique, même sans législation. Il y a des pétrolières - et on l'a donné à titre d'exemple au cours des travaux de cette commission - qui ont déjà passé à l'action Là où...

M. Bétournay: La plus-value pourrait peut-être être réglée par le gain de capital. Finalement, il faut que ce soit payé quand même, le gain de capital sur un terrain Les terrains pollués du passé, surtout par je dirais des inconnus, dans le sens de beaucoup de personnes non identifiables, spécifiquement, je ne vois pas pourquoi ce serait le dernier qui est le propriétaire du terrain aujourd'hui qui devrait payer pour tout ce qui s'est fait dans la légalité dans le passé.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même dans le cas où il ne l'a pas payé trop cher?

M. Bétournay: Même dans le cas où le propriétaire... C'est un risque qu'il a pris dans le temps, mais il va payer son gain de capital sur son terrain Non? Jean, tu pourrais peut-être ajouter quelque chose là-dessus.

M. Côté (Jean): Ce qui est des fois difficile, c'est que lorsqu'on fait partie d'une industrie, on vit peut-être un peu la culture d'une industrie. Et, surtout, une industrie comme la nôtre ne devrait pas nécessairement s'attendre... et on ne s'attend pas que nos critères s'appliquent à des gros et que les critères qui sont bons pour les gros s'appliquent aux petits. On indiquait, un peu plus tôt, qu'on était d'accord avec le principe

pollueur-payeur et que l'industrie, d'une façon générale - ou la majorité des membres de l'industrie - se trouve à avoir des critères qui dépassent... des critères internes ou des politiques internes qui dépassent, de loin, les lois et les exigences. Essentiellement, une compagnie nationale a tendance à adopter, comme minimum, le critère le plus sévère, quel qu'il soit. Si ça s'adonne à être le critère, ici, au Québec, ça s'applique partout, même dans une province où c'est beaucoup moins sévère.

On accepte... Le débat sur la question des terrains est difficile, des fois, parce que j'ai assisté à plusieurs représentations dans les deux jours qui viennent de passer et on dirait qu'on parle comme si tous les sites pollués étaient les mêmes puis on ne fait pas de distinction, si on parle de sites qui appartiennent au propriétaire, comme des sites qui nous appartiennent, ou des sites qui appartiennent à une troisième partie où on a peut-être contribué. C'est important de comprendre que, d'une façon très générale, l'industrie ne se préoccupe pas tellement de ses propres sites. Si on les a contaminés, on va régler le problème nous-mêmes, avec notre propre argent, que ce soit un problème qui est survenu il y a 3 ans ou il y a 50 ans.

Vous avez eu l'exemple du maire de la ville d'Anjou, des actions de Petro-Canada. Vous vous souvenez peut-être de Rivière-des-Prairies. Il y a eu très peu d'hésitation. En effet, lorsqu'on parle d'hésitation, on prend nos responsabilités. Où il y a une hésitation, c'est qu'on n'est pas nécessairement d'accord sur le critère qu'on doit suivre pour la correction et les moyens qu'on doit utiliser. Si c'est un terrain industriel, puis qu'on nous demande de le corriger, de l'assainir puis qu'on veut qu'on le ramène à un niveau qui serait propice pour une station agricole quand on sait que ça va toujours servir dans l'industrie pétrochimique - disons dans l'est de Montréal - c'est totalement illogique, parce que les coûts... Vous n'avez qu'à regarder les critères A et B ou B et C et la différence entre ces critères-là est, disons, un multiple de cinq ou plus. Vous pouvez multiplier les coûts de cette même façon-là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Ma première question, c'est à la page 6. Vous parlez un peu d'un colloque qui a été tenu à Winnipeg où les participants se seraient entendus sur la nécessité de créer des centres régionaux de collecte et de traitement des sols contaminés aux hydrocarbures. Est-ce que vous pouvez - vous dites qu'il y a un comité d'étude formé de représentants du gouvernement et de l'industrie - nous en parler un peu plus de ça?

M. Bétournay: Oui, je vais demander à M.

Migliérina d'en parier, s'il vous plaît. (21 h 45)

M. Migliérina (René): Certainement, Mme la Présidente et Dr Lazure. Ce colloque avait justement pour but d'arriver à un front commun sur le problème des sols contaminés. À l'invitation de l'industrie pétrolière, les représentants de 13 ministères de l'Environnement à travers le Canada ont été invités. Et nous avons eu des sessions régionales. Nous mentionnons que nous avions un sous-ministre adjoint de l'Environnement qui était présent, des représentants du ministère de l'Environnement, du ministère de l'Énergie et des Ressources. Après avoir étudié le problème, nous avons convenu que ça ferait probablement avancer le dossier s'il y avait un comité conjoint formé des deux ministères, de l'industrie pétrolière et des groupes de pression, si nécessaire, comme la Fondation québécoise en environnement. Ce comité-là aurait déjà eu sa première réunion si le projet de loi 65 n'avait pas été introduit et, là, nous avons décidé d'attendre. Mais vraiment, les objectifs de ce comité étaient de faire tous les efforts nécessaires qui pourraient permettre à l'industrie pétrolière de décontaminer, ce qu'elle veut faire, c'est-à-dire qu'il y a un cadre législatif, ce que le projet de loi 65 va donner, et il est aussi important que des méthodes de décontamination soient approuvées parce qu'il y a un besoin, là.

M. Lazure: Mais comment voyez-vous la mise sur pied de ces centres régionaux pour le Québec? La mise sur pied et le financement de ces centres-là, est-ce que vous voyez ça comme une entreprise conjointe avec l'industrie et le gouvernement, l'industrie seule ou quoi?

M. Migliérina: II y a déjà une proposition et je crois que M. Côté est très familier avec.

M. Côté (Jean): Disons que la compagnie Texaco avait obtenu un certificat d'autorisation pour procéder à la décontamination du site de son ancienne raffinerie. Esso, comme vous le savez, est devenue acquéreur de Texaco et, depuis un an, on essaie d'en arriver à un point où on pourrait avoir une entente qui nous permettrait, avec certains partenaires, de construire une usine thermique dans le but de traiter les sols contaminés. Dans l'est de Montréal, on retrouve dans les endroits où il y avait anciennement des raffineries, entre autres, à peu près 25 % de tout le sol contaminé aux hydrocarbures dans la province. On peut parler de problème, mais que fait-on avec des sommes énormes, des tonnes et des tonnes de sol contaminé qui n'est pas un déchet dangereux? Ce n'est pas un déchet dangereux, mais est-ce qu'on l'envoie par camion en Ontario, à Sarnia, à 400 $ ou 500 $ la tonne ou est-ce qu'on s'organise pour régler notre problème ici peut-être à 125 $ ou 150 $ la

tonne?

M. Lazure: J'ai soulevé la question cet après-midi.

M. Côté (Jean): Mais, tout de même...

M. Lazure: Je pense que ça n'a pas d'allure que nos industriels soient obligés d'expédier ça à Sarnia et c'est pour ça que je me suis arrêté à ce projet de centre. Est-ce que le ministre peut nous en parler un peu? Est-ce qu'il est au courant de ces projets de centres régionaux de collecte et de traitement?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, c'est un dossier qui est au ministère depuis... Moi, je suis là depuis sept mois. Je pense qu'au moins un mois après mon arrivée, c'était sur mon bureau. Maintenant, il faut être prudent, et je le répète. L'enfouissement est la dernière des solutions. Ce dont on parle, c'est un site de traitement thermique de façon à décontaminer et nous privilégions de loin la décontamination versus l'enfouissement.

M. Côté (Jean): Et remettre le sol exacte ment dans son état original.

M. Lazure: Oui, on n'a pas de chicane là-dessus. On en a assez d'autres.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Lesquelles? Il ne nous en reste quasiment plus.

M. Lazure: Mais cela étant dit, vous dites que ça fait six mois...

M. Côté (Jean): Si vous me le permettez, je devrais ajouter que j'ai parlé à un de mes confrères à Toronto, aujourd'hui, qui me disait, disons, dans les tous derniers jours, que le dossier avançait à un très bon rythme.

M. Lazure: Vous avez su ça de Toronto.

M. Côté (Jean): J'ai su ça d'un confrère de Montréal qui était à Toronto, qui aurait été ici aujourd'hui, M. Marchand, mais qui devait s'absenter. Il est de Montréal, mais il était en réunion d'urgence à Toronto.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme M. Parizeau appelle à Ottawa ou se fait appeler.

M. Lazure: Mais je n'ai rien entendu. M. le ministre, est-ce que vous pouvez nous mettre au fait, toujours dans l'optique de transparence? Où est-ce que vous en êtes? Vous dites que ça fait six mois que vous avez le dossier au ministère.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pourrais vérifier spécifiquement le dossier.

M. Lazure: Mais, en attendant, est-ce que je peux vous demander un peu plus de détails? Pourquoi des nouvelles de Toronto? Attendez-vous des nouvelles de Québec aussi?

M. Bétournay: Non, mais c'est parce que le type était... Il lui a parlé par téléphone, il était à Toronto. C'est un type de Montréal.

M. Lazure: Oui.

M. Bétournay: Je dois ajouter que le procédé thermique n'est pas encore une méthode réellement approuvée...

M. Lazure: D'accord.

M. Bétournay:... c'est une méthode connue, testée...

M. Lazure: Expérimentale.

M. Bétournay:... mais ce n'est pas approuvé comme méthode. Alors on attend des approbations et on pourra commencer.

M. Lazure: C'est ce que vous attendez du ministère de l'Environnement?

M. Bétournay: On attend... Oui, je suppose, du ministère, Jean, ou...

M. Lazure: Vous attendez un certificat d'autorisation?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tut, tut, tut!

M. Bétournay: Non.

M. Côté (Jean): Non, non.

M. Lazure: Non? Alors, dites-nous le donc, M. le ministre?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II faut qu'on s'entende clairement. Ce qu'on m'indique du côté des fonctionnaires, c'est que la réunion à Toronto portait possiblement là-dessus, aussi, aujourd'hui, dans le but que vous nous déposiez un projet détaillé auquel nous pourrons réagir dans les meilleurs délais. Je le souhaite.

M. Bétournay: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.

M. Bétournay: Et approuver cette méthode, et on pourra débuter.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est-à-dire qu'il y a eu vente de pétrolières. Le projet a

fait l'objet de discussions, il y a eu des présentations faites, mais une demande formelle, présentement, n'a pas été déposée comme telle pour approbation par le ministère.

M. Côté (Jean): C'est exact.

M. Lazure: Vous avez l'intention d'en déposer une bientôt?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est ce qu'on me dit.

M. Côté (Jean): Nous avons certainement l'intention de déposer une demande quelconque. Je ne peux pas vous donner exactement le "timing", je n'ai pas participé à la réunion.

M. Lazure: Mais ce procédé thermique, est-ce qu'il est utilisé ailleurs, en Europe, actuellement?

M. Côté (Jean): II est certainement utilisé dans l'Ouest. Cari, je pense que tu es en mesure...

M. Lazure: Dans l'Ouest?

M. Lussier (Cari): Oui, il est utilisé d'une façon courante dans l'Ouest et aussi aux États-Unis.

M. Lazure: Pour les sols contaminés aux hydrocarbures.

M. Lussier: Pour les sols contaminés et les déchets dangereux.

M. Lazure: Et les déchets dangereux.

M. Lussier: Selon le type d'incinérateur qui va être construit à Montréal-Est, selon le choix que la compagnie Esso va faire pour ce type d'installation-là.

M. Lazure: Comment le ministère voit-il une telle demande, en principe?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On la voit quand on la reçoit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: J'ai dit en principe. Elle est un peu facile, celle-là. Ce n'est pas votre meilleure. Il est tard.

Qu'est-ce que vous pensez du procédé soi-disant thermique?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que c'était là un des principes qui sous-tendaient le mémoire de l'Association, sur le plan de la technologie comme telle, de laisser une marge de manoeuvre à l'industrie, en autant que le sol qui en sorte soit décontaminé, ne soit plus contaminé aux hydrocarbures. C'est dans ce sens-là que le ministère de l'Environnement est intéressé à intervenir. C'est le résultat en laissant le soin des choix technologiques aux industries qui peuvent innover, en apporter de nouvelles, améliorer les technologies existantes, etc. Tout ce que nous tenons à nous assurer, c'est que, une fois que le traitement ou le procédé a fait son oeuvre, le sol ne soit plus contaminé.

M. Lazure: À votre connaissance, monsieur qui semble au courant de l'expérience dans l'Ouest, est-ce qu'une telle méthode pourrait être utilisée pour des sols qui sont contaminés à autre chose, par exemple, comme à l'arsenic?

M. Lussier: Tout dépend du type d'incinérateur que vous allez utiliser et de la température de l'opération, vous pouvez décontaminer différentes terres qui ont été contaminées avec différents produits chimiques. Encore là, c'est une question de température, d'efficacité de système de traitement. C'est un choix de technologie.

M. Lazure: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, seulement pour remercier l'Association pétrolière. Nous vous avons donné des indications d'ouverture quant à certains articles du projet de loi. Quant aux autres articles comme tels, pour obtenir une réaction favorable, nous aurions besoin de plus d'éclaircissements. Sentez-vous à l'aise de compléter s'il y a un des articles sur lesquels vous insistez pour obtenir certaines modifications. Nous demeurons ouverts à des représentations additionnelles, en vous remerciant du soin que vous avez mis à la préparation de votre mémoire et en vous réitérant que vous avez fait preuve de transparence en admettant votre niveau de responsabilité dans le dossier.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Les remerciements de l'Opposition à l'Association pétrolière.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Alors, au nom des membres de la commission, nous vous remercions de votre participation.

La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 55)

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