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(Onze heures douze minutes)
Le Président (M. Garon): À l'ordre, s'il vous
plaît! On est déjà 12 minutes en retard. À l'ordre,
s'il vous plaît! Les poignées de main peuvent se donner aussi bien
après la réunion qu'avant. Je déclare la séance de
la commission ouverte. Je rappelle le mandat de la commission: Poursuivre des
consultations particulières et tenir des auditions publiques dans le
cadre de l'étude du projet de loi 145, Loi modifiant diverses
dispositions législatives concernant les finances municipales.
Organisation des travaux
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme
Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière) est remplacée par M.
Léonard (Labelle), Mme Juneau (Johnson) par M. Bourdon
(Pointe-aux-Trembles) et M. Lazure (La Prairie) par Mme Marois (Taillon).
Le Président (M. Garon): M. le secrétaire,
pouvez-vous nous donner la lecture de l'horaire de la journée?
Le Secrétaire: L'ordre du jour appelle, en premier lieu,
la ville de Montréal, suivie, à la suspension cet
après-midi, du Conseil du patronat du Québec, de la
Confédération des syndicats nationaux, de la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, de
l'Union des producteurs agricoles, et en soirée, à compter de 20
heures, de la Société de transport de la Communauté
urbaine de Montréal, de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec, du Club automobile du Québec
et du groupe Transport 2000.
Le Président (M. Garon): J'aime autant vous dire que j'ai
l'intention d'appliquer le règlement de façon très stricte
parce que, hier, on n'a pas pu entendre les gens comme on avait dit qu'on les
entendrait, parce qu'on a pris du retard. J'ai l'intention de respecter
l'horaire scrupuleusement pour ne pas que ceux qui sont à la fin, on
n'ait plus de temps pour eux alors qu'on les a convoqués ici et qu'ils
arrivent et, en fin de soirée, qu'on ne sache pas s'il va y avoir des
consentements. Comme il n'y en a pas eu hier, on ne peut pas présumer
qu'il va y avoir des consentements et les gens qui ont été
convoqués ici n'ont pas été convoqués pour le
plaisir. Je vais demander immédiatement...
M. Ryan: M. le Président, si vous me permettez de diverger
d'opinion avec vous, je trouve qu'hier la journée s'est passée
bien correctement. Et, à la fin, on a entendu le point de vue de la
municipalité de Saint-Romuald, comme il devait être entendu.
Ça aurait pu être trois ou quatre minutes de plus, mais je ne vois
pas où est le problème. On va se soumettre à vos
directives quand même, mais il n'y a pas de problème dans mon
esprit.
Le Président (M. Garon): Je ne peux pas laisser accumuler
de retards parce qu'à ce moment-là, s'il y a une demi-heure,
trois quarts d'heure à la fin, eh bien! on ne peut laisser accumuler de
retards. C'est pour ça que je dis que je vais appliquer le
règlement strictement pour qu'on respecte l'horaire qu'on s'est
donné.
On se donne autant d'importance en refusant des consentements quand on a
invité des gens. Alors, je voudrais demander immédiatement aux
représentants de la ville de Montréal, qu'on a convoqués
à 11 heures pour une heure de délibération, d'exposer leur
point de vue et, ensuite, la partie ministérielle et l'Opposition
pourront poser des questions.
Auditions Ville de Montréal
M. Doré (Jean): M. le Président. Je suis
accompagné ce matin, je pense que vous l'avez reconnue, pour Mme
Léa Cousineau, présidente du comité exécutif de la
ville de Montréal. Peut-être pour vous dire que l'an dernier le
gouvernement du Québec avait annoncé son intention d'entreprendre
avec les municipalités des discussions sur la fiscalité et le
partage des responsabilités et, pour nous, Montréal, nous nous en
réjouissions, puisque nous avions là l'espoir qu'on pourrait
enfin trouver des solutions à des problèmes sérieux sur
lesquels on attire, depuis plusieurs années, l'attention du
gouvernement. Je souligne que, dans les documents qu'on vous a
déposés aujourd'hui, outre le mémoire, deux documents,
dont l'un s'appelle Population et fiscalité, édition de juin
1991, sont parmi les documents qui sont remis annuellement au gouvernement,
notamment au ministre des Affaires municipales.
D'abord, en raison, bien sûr, de l'indiscutable importance du
transport en commun, Montréal souhaitait pouvoir garantir la
stabilité de la contribution gouvernementale et aussi obtenir du
gouvernement, je dirais, qu'on puisse mettre à contribution ce que nous
appelions le quatrième partenaire, c'est-à-dire les automobi-
listes. Aussi, parce que les contribuables de
Montréal assument seuls le coût de services qui profitent à
l'ensemble de la région et souvent à l'ensemble du Québec,
on comptait trouver des moyens de rétablir l'équité et, en
même temps, le moment nous semblait venu de diversifier les ressources
fiscales montréalaises, la taxation foncière étant, de
toute évidence, inadéquate pour financer les activités
complexes d'une ville de 1 000 000 dans une région qui compte maintenant
près de trois fois ce nombre. Il y avait, il y a un an, à notre
point de vue, urgence d'agir en soutien à la métropole. Il y a
maintenant, à ce qu'il nous semble, urgence d'éviter
l'étranglement de Montréal, et je m'explique.
À l'heure actuelle, Montréal compte pour
moins de 15 % de la population du Québec, mais assume plus du quart des
dépenses municipales. En vertu du projet de réforme du
gouvernement du Québec, Montréal devrait absorber 40 % du montant
transféré aux municipalités, soit 105 000 000 $. Le
tableau dans la page qui suit illustre le chiffre que je viens d'avancer.
Montréal devra donc augmenter les taxes de 105 000 000 $ sans
nécessairement donner de services additionnels à sa population.
Or, les besoins de Montréal sont tels, et je vais tenter de les
résumer rapidement, que si nous avions pensé pouvoir aller
chercher nous-mêmes ces 105 000 000 $ sans conséquences
sérieuses, on l'aurait déjà fait. En effet, à la
fois parce que Montréal est une ville industrielle en reconversion, une
ville centre et une métropole, cela impose des dépenses qui sont
beaucoup plus importantes que celles d'autres municipalités.
Montréal, ville industrielle en reconversion
d'abord. On célébrera notre 350e anniversaire l'an prochain, ce
qui en fait une ville vieille selon les standards nord-américains. La
modernisation de nos infrastructures justifierait à elle seule d'aller
chercher ces 105 000 000 $ additionnels, ou en taxes additionnelles. 30 % de
notre réseau d'aqueduc a été construit avant 1920; 45 %
des ponts-tunnels avant la Deuxième Guerre mondiale; 50 % des routes et
trottoirs ont été construits avant 1950. Le total de la facture
pour rebâtir les infrastructures à Montréal: 1 900 000 000
$ sur 10 ans, comme l'atteste le document qui accompagne notre mémoire,
qui s'appelle Bâtir Montréal et qu'on a rendu public en novembre
1988.
Or, à l'analyse, Montréal ne peut pas
dépenser plus de 581 000 000 $ dans les 10 prochaines années sur
ce 1 900 000 000 $ pour remettre ses infrastructures en état sans
compromettre sa situation financière, c'est-à-dire sans augmenter
la spirale à la fols de l'endettement et des coûts d'augmentation
du crédit. Restauration des infrastructures industrielles aussi,
Montréal est une ville industrielle qui a vieilli, où beaucoup de
sites sont à décontaminer. Montréal doit faciliter la
modernisation de certains secteurs industriels, répondre aux besoins des
nouveaux secteurs en croissance, des quartiers complets doivent être
rebâtis du point de vue de leur tissu industriel. C'est le cas de l'est
et du sud-ouest et je passe sous silence, mais quand même, le fait que 25
000 000 de pieds carrés de terrain dans l'est de Montréal doivent
aussi subir d'abord la décontamination pour être remis en
valeur.
Montréal est non seulement une ville industrielle en
reconversion, mais c'est une ville centre. Il y a 400 000 personnes par jour
qui viennent travailler, magasiner, se divertir, étudier à
Montréal. Donc 200 000 véhicules empruntent nos rues. Plus de la
moitié des personnes, forcément, qui travaillent au centre-ville
sont des non-Montréalais. Je dirais que, de ce point de vue, nos
Infrastructures n'ont de local que leur financement. Avec cela, bien sûr,
les équipements au-delà des infrastructures comme les grands
parcs métropolitains, le mont Royal, les îles, les
équipements scientifiques, le Jardin botanique n'ont aussi de local que
leur financement. Montréal répond donc à tous les jours
aux besoins d'une population non résidente qui est supérieure
à celle de toutes les municipalités du Québec, sauf celle
de Montréal. Aucune autre ville du Québec ne doit absorber une
telle surcharge. Cette surcharge, Inévitablement, accélère
la détérioration de nos infrastructures et surtout
accélère le rythme de leur remplacement.
Montréal est non seulement une ville en
reconversion, une ville centre, mais aussi une métropole et, à
titre de métropole, comme tous les grands ensembles urbains, elle attire
une concentration de population supérieure, ayant des besoins plus
grands que la moyenne. C'est vrai pour Montréal comme pour n'Importe
quelle grande ville internationale. On reçoit 55 % de la population
immigrante du Québec. En nombre absolu aussi bien qu'en concentration
relative, Montréal est aux prises avec des problèmes de
pauvreté, des problèmes sociaux qui engendrent des coûts
additionnels du point de vue de la sécurité publique, notamment
ceux reliés à la drogue et à la prostitution.
Montréal, aussi, ne bénéficie pas toujours de politiques
gouvernementales, qui comportent des volets montréalais, pour faire face
à ses difficultés. À titre de métropole, non
seulement Montréal a-t-elle des populations en plus grand nombre mais
aussi, bien sûr, elle joue un rôle économique essentiel pour
tout le Québec. Elle est la seule ville qui a une concentration
suffisante de sièges sociaux, d'institutions financières, de
places d'affaires et d'entreprises pour nous permettre de nous Inscrire comme
société dans les grands circuits de l'activité
économique mondiale. Il n'y a pas une entreprise au Québec qui
veut émerger à l'échelle du continent ou de la
planète qui ne sente pas le besoin de se rapprocher de la Bourse, des
institutions financières, des services tertiaires des entreprises et, de
ce point de vue,
ça nécessite des services de base pour l'ensemble de cette
situation: urbanisme, sécurité publique, prévention, qui
coûtent plus cher. Il en va de même pour le caractère ou le
rôle culturel que doit jouer la métropole.
Bref, toutes nos obligations de ville centre, de métropole,
viennent s'ajouter à la nécessité, il ne faut jamais
l'oublier, d'abord et avant tout d'offrir aux Montréalais un milieu de
vie et de travail agréable. Et, en ce sens, dans un milieu urbain aussi
dense que Montréal, que ce soient les arbres le long des rues, les
parcs, les terrains de jeu, ce n'est pas du luxe. Ce sont des poumons qui, dans
certains cas, nous permettent de respirer autre chose que les gaz des tuyaux
d'échappement et d'être en contact avec autre chose que du
béton et de l'asphalte. Juste du point de vue de la gestion des
déchets, c'est des dizaines de millions qu'il va falloir dépenser
pour permettre à notre ville de disposer des déchets des
personnes qui l'habitent ou qui y travaillent, d'une manière
respectueuse de l'environnement. Montréal est une ville aussi
très diverse, 80 communautés culturelles la composent.
Ce n'est donc pas, en bref et je le fais rapidement, les raisons de
taxer qui manquent à Montréal. C'est les sources taxables qui
nous manquent. Où est-ce qu'on va trouver les sommes pour
répondre à tous ces besoins? Le problème pour
Montréal est d'autant plus épineux qu'on ne dispose pas d'outils
fiscaux qui mettent à contribution, notamment, les
bénéficiaires non montréalais des services que je viens de
décrire et, comme toutes les autres municipalités,
Montréal se finance à partir de l'assiette foncière. Or,
c'est 81 % de l'ensemble de nos revenus, l'assiette foncière, et, de ce
point de vue, l'effort fiscal des résidents et des entreprises de
Montréal est au-dessus de la moyenne québécoise. Si cette
moyenne est 100, l'indice de l'effort fiscal est de 119. Pourtant, le revenu
moyen des Montréalais est de 15 % inférieur à celui du
Québec et je pense que, çà les travaux du Conseil des
affaires sociales et de la famille l'ont bien démontré. La
population de Montréal a non seulement moins de revenus et est donc plus
pauvre, mais elle est plus vieille, en moins bonne santé.
Enfin, selon le ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, II y a
plus d'assistés sociaux à Montréal, trois fois plus, qu'il
n'y en a dans la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, la
Côte-Nord et l'Abitlbi-Témiscamingue réunies. Il y a plus
de personnes sous le seuil de pauvreté à Montréal, 300
000, que toute la population réunie du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Vous
allez me dire: Bien sûr, la population est plus pauvre, mais il reste les
entreprises. Eh bien! justement, ces entreprises actuellement ont
déjà un fardeau fiscal qui est le plus élevé du
Québec. Montréal n'utilise même pas au maximum la taxe
d'affaires que lui permettrait la loi actuelle. Et quand on regarde le tableau
de la page 9, on se rend compte que, pour l'ensemble des villes du
Québec, alors que le taux par 100 $ d'évaluation est de 3,13 $
pour les entreprises, il est de 4,96 $ à Montréal actuellement.
Je vous souligne, pour ajouter à la situation, que les rôles de
valeur locative indiquent qu'en 1991, à Montréal, 27 % des locaux
commerciaux sont vacants. Or, des locaux commerciaux vacants ne paient pas de
taxes. Les entreprises qui ferment ne paient pas de taxes non plus. Celles qui
déménagent les paient ailleurs et les édifices qu'elles
laissent derrière perdent de leur valeur et, souvent, il ne reste plus
qu'à les placarder.
Ce que je veux dire en résumé, M. le Président,
c'est que l'espace fiscal dont Montréal dispose, selon le gouvernement,
pour absorber ces 105 000 000 $ en taxes additionnelles, à notre point
de vue, n'existe que dans les documents gouvernementaux. Montréal est
donc aux prises avec une nécessité assez paradoxale: il nous faut
investir massivement tout en limitant les dépenses pour ne pas
surcharger une population et des entreprises qui paient déjà
trop. Et, là-dessus, je veux attirer l'attention des membres de la
commission sur la page 10. Le contrôle des dépenses à la
ville de Montréal est bien illustré par ce tableau. De 1980
à 1991, en croissance moyenne annuelle, alors que l'inflation s'est
accrue en moyenne de 6,1 %, les dépenses annuellement à
Montréal durant 11 ans se sont accrues en moyenne de 6,1 %; celles de
l'ensemble des municipalités du Québec de 7,3 %; celles du
gouvernement du Québec de 7,2 % et celles du gouvernement du Canada de
8,5 %. Donc, de ce point de vue là, non seulement y a-t-il
contrôle des dépenses, mais, en plus, cette performance est
d'autant plus remarquable que le niveau d'endettement de la ville, qui
était à 22,3 % en 1986, est maintenant à 16,6 % en 1991,
et ce, même si on a doublé les investissements dans les
infrastructures. On n'arrive pas à rattraper, on n'arrive pas à
investir suffisamment, mais on a quand même doublé.
Tout cela pour dire qu'on prend un retard qui devient de plus en plus
grand dans nos programmes de modernisation et que, tôt ou tard, il va
devenir impossible de réparer ce qui doit être remplacé. Je
laisse la présidente, peut-être, poursuivre la présentation
du mémoire, M. le Président, et je viendrai en conclusion.
Mme Cousineau (Léa): M. le Président, je le
répète, avec 15 % de la population, Montréal devra
absorber environ 40 % des transferts gouvernementaux - comme soutien à
la métropole on a déjà vu mieux - et le gouvernement nous
suggère de diriger l'essentiel de ce fardeau vers les entreprises.
Pourtant, il avait refusé en 1988 la demande de la communauté
urbaine de hausser temporairement le plafond de la taxe d'affaires pour contrer
une partie des transferts fiscaux vers le secteur résidentiel,
évoquant alors
le fardeau fiscal qu'il disait déjà trop lourd. Il est
pour le moins ironique de le voir accepter aujourd'hui sur une base permanente
ce qu'il refusait hier sur une base temporaire.
En augmentant le fardeau fiscal des municipalités desservies par
le transport en commun, et celles-là précisément, le
projet de réforme accentue de manière dangereuse le
déséquilibre fiscal, et je trouve important d'insister sur cette
notion de déséquilibre qui grève déjà
lourdement le développement des zones centrales au profit des zones
périphériques. Le tableau suivant illustre bien ce que je veux
dire. Si l'on compare ces villes à une ville voisine qui n'a pas de
transport public, on voit très bien comment l'impact est
différent: Montréal-Repentigny 15-0; Laval-Terrrebonne 17-0;
Longueuil-Saint-Bruno 21-0. Donc, au-delà du montant de la facture et de
son impact, le déséquilibre créé joue en
défaveur des villes qui ont un transport public. C'est là la
recette parfaite pour relancer l'étalement urbain. Est-ce que les
dernières années ne nous ont pas servi de leçon?
Le développement à saute-mouton de la région de
Montréal nous a coûté très cher comme
société. Il est évident pour nous que la région
devait se développer à l'extérieur de Montréal
aussi bien qu'à l'intérieur, le territoire montréalais
seul ne pouvant accommoder une population de 3 000 000 d'habitants et
l'ensemble des activités commerciales, industrielles et
institutionnelles qui correspondaient à sa population. Mais le manque de
vision d'ensemble a entraîné un gaspillage pour lequel nous avons
payé le gros prix. Alors qu'on fermait des écoles à
Montréal, il fallait en construire 50 kilomètres plus loin. Il a
fallu multiplier les routes, les ponts, les réseaux de services publics,
lesquels demeurent souvent sous-utilisés. Aujourd'hui, on doit prendre
acte d'une réalité, agir en conséquence avec ce qui existe
déjà, mais II faut arrêter ce type de développement.
Il est préférable de consolider et de densifier les territoires
déjà urbanisés, et de ne pas encourager comme le fait le
projet gouvernemental l'extension du développement sur de nouveaux
territoires.
Le gouvernement en plus se retire du financement des dépenses
d'opération du transport en commun, sous prétexte qu'il s'agit
là d'une responsabilité locale. Cette affirmation, quant à
nous, ne résiste pas à une analyse poussée. Le transport
en commun est un outil stratégique essentiel pour le
développement économique qui profite à toute la
région et à tout le Québec. Le bon fonctionnement de
l'ensemble des entreprises situées au centre-ville, mais aussi dans
toute la région métropolitaine, repose sur l'efficacité du
transport des personnes et des biens. Il est important de rappeler que les
sociétés de transport de la région de Montréal
transportent quotidiennement 1 000 000 d'usagers.
L'aménagement d'un milieu de vie urbain efficace, propre,
agréable, sans lequel l'étalement urbain se perpétuera
à coups de milliards de dollars en nouvelles infrastructures, requiert
un système de transport en commun que la population et, notamment, les
utilisateurs de l'automobile trouveront économique, rapide,
sécuritaire au point de changer leur mode de transport et d'adopter le
transport en commun. J'ajoute que la réduction de la pollution
causée par l'automobile passe aussi par le transport en commun; c'est
vite dit, mais il s'agit là d'un des enjeux majeurs auxquels notre
société est confrontée. Ces problématiques sont
suffisamment connues pour qu'il ne soit nécessaire d'élaborer
longuement. Le gouvernement ne peut tout simplement pas décider
d'ignorer ses responsabilités en ces matières qui concernent
l'ensemble de la société québécoise.
Le transport en commun est également essentiel pour ces personnes
qui, même si elles le voulaient, n'ont tout simplement pas les moyens
d'avoir une automobile: étudiants, personnes âgées,
personnes à faibles revenus. Je vous rappelle que c'est à 65 %
des femmes qui sont les utilisatrices du transport en commun, II y a là
une correspondance qui vaut la peine d'être remarquée. Que
feraient-elles, ces personnes, sans le métro et l'autobus? Pour elles,
le transport en commun joue un rôle très semblable à celui
des grands programmes sociaux. Et, en se retirant du financement des
dépenses d'opération du transport en commun, le gouvernement
oblige les municipalités à assumer une responsabilité de
redistribution de la richesse à partir d'une source foncièrement
régressive, si vous me pardonnez l'expression. (11 h 30)
Enfin, si les mots ont encore un sens, un domaine de
responsabilité locale n'affecte que la population du territoire
concerné. Montréal pourrait, bien sûr, décider de
moins souvent ramasser les déchets sur son territoire, décider de
restreindre les activités des horaires de ses bibliothèques, de
ses maisons de la culture, décider de ne plus mettre d'argent dans
l'entretien des parcs et des arénas, le Québec ne s'en trouverait
pas bouleversé. Mais iI en va tout autrement si le métro et les
autobus arrêtent de rouler. C'est toute la région
montréalaise qui est paralysée et l'économie de tout le
Québec en souffre assez rapidement.
D'ailleurs, souvenons-nous d'avant l'époque des services
essentiels, l'Assemblée nationale n'a jamais toléré plus
de quelques Jours l'arrêt du métro et des autobus a
Montréal, tant iI était évident que la vie quotidienne de
la moitié de la population du Québec s'en trouvait
bouleversée et que le gouvernement québécois se sentait
concerné. Bref, si le métro et les autobus de la STCUM ont un
impact purement local, on pourrait dire qu'il en est de même pour toutes
les autoroutes du Québec. Et si l'un ne s'applique pas à l'un,
l'autre ne s'applique pas à l'autre non plus.
De plus, le projet de réforme gouvernemental accentue encore la
dépendance de Montréal à l'endroit du champ foncier qui
n'est absolument pas adapté au financement des responsabilités
rattachées à son statut de métropole. Le foncier oblige
les propriétaires montréalais à financer les services et
les équipements dont bénéficient directement ou
indirectement tous les habitants de la région et même du
Québec. Ce fardeau se répercute inéquitablement sur les
loyers des entreprises et des contribuables. Qui plus est, le gouvernement
tronque sa propre réforme en décrétant en sa faveur un
régime d'exception sur les édifices publics et parapublics sur
lesquels il refuse «de payer la pleine valeur des "en-lieu" de taxes.
Le gouvernement a même été jusqu'à sabrer
dans les droits sur les divertissements. Pour Montréal, ces droits
représentent la seule forme de taxation permettant de mettre à
contribution les personnes de l'extérieur de Montréal, qui
assistent aux événements sportifs ou culturels sur notre
territoire. Je rappelle que 60 % des personnes qui fréquentent le Forum,
le Stade olympique, la Place des Arts ou tout autre lieu, les salles de
spectacles ou de cinéma proviennent de l'extérieur.
Les nombreuses exclusions que laisse soupçonner le projet de loi
multiplient les difficultés d'application, tout en introduisant une
bonne marge d'iniquité entre les catégories d'activité.
Lorsqu'on fait le lien avec l'entrée en vigueur de la TPS provinciale le
1er janvier prochain et la nervosité bien normale des milieux culturels
devant la surcharge de 8 % que cette deuxième TPS entraîhera sur
le prix des spectacles, on ne peut s'empêcher de voir dans cette
manoeuvre une expropriation pure et simple des municipalités d'un champ
de revenus que le gouvernement a décidé d'occuper
lui-même.
Le régime des exemptions de taxes foncières est
également extensionné pour ce qui concerne les organismes sans
but lucratif. Le projet de loi procède à des choix d'extension.
Il remet toute-fols la gestion des remises de subventions d'exemption aux
municipalités. Étant donné la concentration de tels
organismes à Montréal, y compris les sièges dits sociaux
de tous ces organismes, ce régime d'exemption de taxes foncières
constitue de nouvelles contraintes financières et administratives. Et,
à ce titre, on n'a pas encore terminé d'explorer la lourdeur de
cette administration de remboursement sous forme de subventions.
Il y aurait lieu, à tout le moins, de s'assurer que la loi ne
dépasse pas l'intention du législateur en permettant aux
organismes exempts de taxes d'affaires d'aller chercher plus que la partie de
la surtaxe foncière non résidentielle et aussi que l'exemption
donnée à la définition des organismes exempts soit revue
afin que cette dernière ne crée pas un manque à gagner
additionnel pour Montréal, parce que plus la définition est
large, plus la liste des organismes qui ne paieront pas les taxes s'allonge et,
à chaque fois, les revenus diminuent.
En plus de confiner Montréal au domaine foncier
déjà trop étroit, le projet de loi ouvre la porte à
l'incursion des commissions scolaires dans le nouveau champ de la surtaxe. Cela
n'est guère surprenant, étant donné le
précédent créé l'an dernier. Le gouvernement
invoquera-t-il bientôt ce nouveau champ fiscal disponible aux commissions
scolaires pour réduire encore sa participation à leur
financement, et non seulement nous réserver le champ foncier, mais
encore nous envoyer là un partenaire qui aurait besoin de l'utiliser
encore plus.
Bien sûr, parler du rôle de Montréal comme
métropole, ville centre et centre industriel nous oblige aussi à
parler des relations de la ville de Montréal avec le gouvernement du
Québec. Et si on fait abstraction, pour un moment, de la réforme
pour examiner la qualité des relations entre le gouvernement du
Québec et la ville de Montréal, le bilan n'est pas que
négatif, bien au contraire, mais il offre de beaux contrastes, certains
ministères ayant démontré beaucoup plus de talents que
d'autres dans la reconnaissance des réalités particulières
à Montréal.
Ainsi, dès les années soixante, le gouvernement du
Québec a, en quelque sorte, reconnu à Montréal un statut
particulier dans le champ social. Depuis cette période, en effet, la
ville a l'entière responsabilité d'administrer l'aide sociale sur
son territoire et reçoit du gouvernement du Québec une
compensation financière à cette fin. Signé au début
de 1990, le protocole d'entente qui lie la ville et le ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle s'inscrit encore plus dans cette même lignée.
Montréal administre maintenant l'ensemble des programmes et services
offerts en matière de sécurité du revenu, soit le volet de
l'aide financière, les mesures de scolarisation et le
développement de l'employabilité.
Dans le domaine des infrastructures à caractère
patrimonial et à vocation nationale, l'entente entre le ministère
des Affaires culturelles et la ville, relative à la mise en valeur du
Vieux-Montréal et d'autres sites classés historiques, a fait ses
preuves jusqu'à maintenant. La première entente conclue entre le
ministère et la ville sur la mise en valeur du Vieux-Montréal
date de 1979 et elle a été renouvelée en 1983 et en 1985.
En juin 1989, une nouvelle entente d'une durée de cinq ans était
signée et une enveloppe globale de 34 000 000 $ y était
affectée provenant moitié du ministère et moitié de
la ville. Plus récemment, dans une autre entente qui prenait effet
récemment, la ville de Montréal et le ministère des
Communautés culturelles et de l'Immigration ont convenu d'une
stratégie concertée concernant les immigrants investisseurs. Et
là, le gouvernement reconnaît non seulement la force d'attraction
de la métro-
pole des nouveaux arrivants, mais aussi la nécessité
d'agir en partenaire avec Montréal afin de mieux capter au profit de
toute la province les retombées de ce type d'immigration.
Dernièrement, le gouvernement du Québec accordait à
Montréal la maîtrise d'oeuvre dans la gestion du programme de
rénovation, le programme PRIL, une première au Québec, qui
permettra à la ville de moduler le programme selon les
problématiques particulières à son territoire: un cadre
bâti parmi les plus anciens en Amérique du Nord et le taux de
locataires le plus élevé au Québec. Lancé au
début de cette année également, le programme Mon taux, mon
toit a été conçu de telle sorte qu'il peut être
jumelé au programme municipal Habiter Montréal, lequel devrait
permettre la construction de plus de 1000 logements pour l'année en
cours.
Ces quelques exemptes de bonne compréhension et d'heureuse
complicité entre Québec et Montréal illustrent les
possibilités de réussite. Québec peut, et nous disons,
nous, "doit", inscrire la reconnaissance d'une spécificité
montréalaise dans toutes ses politiques et dans tous ses programmes,
sans immédiatement croire qu'une telle reconnaissance en enlève
aux autres régions du Québec. Il faut cesser de se conter des
histoires, il faut admettre que le Québec compte peu de milieux de vie
qui soient véritablement et pleinement urbains et il faut
reconnaître que l'agglomération montréalaise forme un cas
d'espèce. Il faut prendre conscience que les gains laborieux de quelques
adaptations de politiques et de programmes provinciaux aux
particularités montréalaises épuisent les intervenants et
laissent inévitablement entendre que le gouvernement provincial n'a pas
et ne semble pas trouver utile de se donner une vision claire et
conséquente de la place de la métropole au Québec.
Comme toute grande ville, Montréal recèle les
potentialités formidables d'un milieu en pleine effervescence, mais il
est tout aussi clair que Montréal est menacée par des bombes
à retardement semblables à celles qui explosent dans nombre de
métropoles occidentales. Il est bien entendu qu'il y a des
problèmes sérieux dans nombre de régions du Québec
et il n'est pas question de nier cette évidence pour nous. La question
n'a jamais été là. Ce qu'il faut absolument saisir une
fois pour toutes, c'est que les problèmes de Montréal sont d'une
amplitude telle qu'ils exigent des solutions adaptées au contexte de la
métropole. Si nous pouvions enfin admettre cette réalité,
nous reconnaîtrions sans peine qu'il n'est plus possible de calibrer les
ressources et les responsabilités dévolues à
Montréal en fonction des caractéristiques d'une administration
locale. Dans cette optique, le gouvernement du Québec doit se doter
d'une politique urbaine par laquelle il définira ce qu'il attend de sa
métropole.
Montréal et la région. En créant, en 1970, la
Communauté urbaine, le gouvernement du Québec répondait en
partie à des préoccupations de politique urbaine de nature
métropolitaine. Après 20 ans d'existence, malgré des
débuts difficiles, la Communauté témoigne de la
nécessité du geste posé alors. La formule fondée
sur le potentiel fiscal a contribué à introduire une plus grande
équité fiscale entre les partenaires de l'île de
Montréal quant au financement de certains services publics
métropolitains. Il ne faudrait pas que le projet de loi 145 vienne
remettre en question cette équité acquise sur le territoire de
l'île. Bien qu'Incomplète, cette solution offrait une
réponse à l'étalement urbain que l'on observait dans
l'agglomération au tournant des années soixante-dix. La solution
n'a pas subi de transformation substantielle depuis. Par contre,
l'étalement urbain connaît une nouvelle vigueur après une
période de légère accalmie. En effet, les études
basées sur les données du recensement de 1986 pouvaient laisser
croire à un ralentissement, voire à une disparition de
l'étalement urbain qui progressait au profit de la
périphérie et au détriment du centre. Or, il semble que
les données de 1986 reflétaient davantage les effets de la crise
économique du début des années quatre-vingt qu'un
renversement de tendance. Des signes permettent d'avancer que 1986 ne marquait
qu'une pause et que les municipalités de la couronne ont par la suite,
à nouveau, connu un afflux de nouveaux arrivants dans un contexte
où le volume global de la population métropolitaine demeurait
à peu près stable. À cet égard, une étude de
l'OPDQ qui paraîtra sous peu devrait remettre les pendules à
l'heure. En laissant aller les choses comme elles vont, le centre a perdu et va
vraisemblablement continuer à perdre de plus en plus de jeunes
ménages avec enfants au profit de la périphérie. Il en va
de même, en conséquence, des emplois manufacturiers. La
décentralisation des emplois manufacturiers et celle, moins
prononcée, des emplois tertiaires se font péniblement sentir dans
la ville centrale.
Donc, ces phénomènes laissent entrevoir l'amorce d'un
changement structurel qui se répercutera sur la distribution de l'emploi
à l'échelle régionale. Il n'est pas exclu que le
développement de la région de Montréal adopte
progressivement une forme éclatée. Encore aujourd'hui, on
connaît mal la dynamique de ce type de développement. Toutefois,
iI pourrait s'avérer nécessaire de redéfinir le rôle
de la ville centrale pour s'ajuster à cette nouvelle
réalité.
Ce qui est alarmant, ce ne sont pas tant les changements et la
désindustrialisatlon de la ville centrale que l'absence de politique
provinciale d'encadrement et d'accompagnement des changements structurels que
nous traversons actuellement. Et pourtant, les coûts économiques,
sociaux et environnementaux d'une telle évolution sont énormes.
On les retrace dans les bilans finan-
ciers des administrations publiques, tant locales que
québécoise, lorsqu'il faut reconstruire dans une
périphérie urbaine toujours plus éloignée les
services et les infrastructures qui existent déjà dans la ville
centrale. Aucune municipalité ne manipule la situation pour faire en
sorte que cette double stratégie de développement de certains
espaces régionaux et de dépérissement de certains autres
espaces centraux conduise l'agglomération dans un cul-de-sac. Par
contre, aucune Institution publique ne semble être en mesure de porter un
regard régional sur la situation montréalaise.
Il appartient au gouvernement du Québec de contribuer à
l'élaboration de formules d'arbitrage entre les stratégies de
développement dans l'agglomération montréalaise. Il lui
appartient surtout de donner une impulsion décisive aux forces
régionales pour que se développent les solutions
institutionnelles et fiscales adaptées à cette fin de
siècle dont la Communauté urbaine et, bien sûr, plus
récemment, le Conseil métropolitain de transport sont des
exemples.
M. Doré: M. le Président, je dirais, en conclusion,
si on résume un peu l'ensemble des constats, ce qu'on a fait ressortir
ou tenter de faire ressortir devant les membres de la commission et, bien
sûr, pour le gouvernement et l'Opposition, que Montréal est une
ville qui est coincée entre ses responsabilités comme ville
centre, comme métropole, comme ville industrielle en reconversion et ses
ressources ou son manque d'instruments pour y faire face. Elle devra, avec
moins de 15 % de la population du Québec, absorber 40 % du coût de
la solution imaginée par le gouvernement du Québec à ses
propres problèmes budgétaires.
Le projet gouvernemental met en cause la vitalité du transport en
commun sur l'île et dans la région. Il prive Montréal des
moyens nécessaires au soutien efficace du milieu culturel, notamment en
minant les assises du régime des droits sur les divertissements. Les
relations entre le gouvernement du Québec et la ville, quoique bonnes au
quotidien, sont marquées d'une ambiguïté persistante.
Montréal est traitée comme un quasi-gouvernement par les attentes
qui reposent sur elle, mais comme une des 1500 municipalités pour tout
le reste. La progression continue de l'étalement urbain au
détriment des zones centrales rend plus nécessaire que jamais,
à notre point de vue, une réflexion de fond sur la place de
Montréal dans sa région et sur les structures régionales
elles-mêmes.
De ce point de vue, les conclusions que l'on en tire sont les suivantes.
D'abord, et de façon immédiate, pour la ville, le gouvernement
devrait revoir l'ensemble du projet de loi qui est devant lui et, notamment,
les documents qui l'ont inspiré. La volonté persistante du
gouvernement d'aller de l'avant ne change en rien le caractère
Inacceptable du fardeau additionnel de 105 000 000 $ qu'il entend imposer aux
contribuables de Montréal, fardeau qui remet en cause aussi bien la
vitalité du transport en commun que la compétitivité d'un
bon nombre de nos entreprises, et la possibilité que tout cela constitue
une fuite en avant et une contribution à l'étalement.
En conséquence, nous demandons au gouvernement, d'abord,
d'affecter une partie du rendement de la taxe sur l'essence au financement du
transport en commun. Je m'explique. Il y a trois mois, lorsque nous avons
discuté, l'UMQ et l'UMRCQ, notamment, et l'UMQ après coup, avec
le gouvernement de cette question, nous avions suggéré deux
pistes: premièrement, de pouvoir mettre à contribution les
automobilistes par le biais de droits sur l'immatriculation et aussi d'examiner
la possibilité d'utiliser, pour financer un fonds du transport en
commun, la taxe sur l'essence. À l'époque, il y a trois mois, on
nous a dit: La proposition sur la taxe sur l'essence n'a proprement aucun sens.
Le fardeau imposé aux contribuables du Québec pour l'essence est
plus élevé que partout ailleurs en Amérique du Nord. Il
n'est pas question d'utiliser ça pour le transport en commun. Trois mois
plus tard, dans le budget, le gouvernement annonçait une hausse de 0,
045 $. Je ne peux pas croire que, dans ces 0, 045 $ de hausse, il n'y a pas une
petite portion qui puisse venir compléter ce que nous demandions
à l'époque. Nous demandions 90 000 000 $ sur les
immatriculations, le gouvernement a décidé de 50 000 000 $, mais
il me semble qu'il faille constituer un fonds de transport
supplémentaire à partir des ressources nouvelles tirées de
cette taxe sur l'essence. (11 h 45)
Deuxièmement, il nous semble aussi que le gouvernement devrait
maintenir un financement de base, notamment pour refléter les
retombées positives du transport en commun pour l'ensemble du
Québec, mais en reconnaissance aussi, il ne faut pas l'oublier, du
rôle social de ce service pour une partie importante de la population. Je
souligne que 50 % de la population de la ville de Montréal n'est pas
motorisée, alors que le taux de motorisation atteint souvent 2, 5
véhicules et plus par ménage en périphérie. Il y a
donc là une problématique qu'on ne peut pas négliger.
Par ailleurs, le projet de loi gouvernemental, on l'a souligné,
Mme la présidente l'a souligné, équivaut
littéralement à une expropriation du champ de la taxation sur les
droits sur les divertissements, qui, je le rappelle, sont payés à
60 % par des non-résidents. De ce point de vue, on demande que la ville
reçoive compensation pour les pertes qui sont encourues par la
disparition, à toutes fins pratiques, des droits sur les divertissements
ce qui, pour nous, signifie un manque à gagner pour cette année
d'une quinzaine de millions de dollars et, si l'économie reprend en
1992, autour plutôt de 18 000 000 $.
Enfin, compte tenu que la plupart des
établissements d'enseignement et de santé installés
à Montréal ont une vocation régionale, parfois même
québécoise, on demande que le gouvernement revienne sur sa
décision de ne pas payer ses taxes au complet pour le réseau des
universités et des collèges et le réseau de la
santé et des services sociaux. Je vous souligne qu'à toutes fins
pratiques il s'utilise, il se consomme trois fois plus d'eau potable à
l'Université de Montréal, compte tenu de la population
étudiante qui y passe tous les jours, qu'à la Place Ville-Marie.
Il n'y a donc pas de raison pour que, pour l'eau potable comme pour le
traitement des eaux usées, on ne paie pas là ses taxes comme
partout ailleurs.
Enfin, et je dirais que ça, c'est de façon
Immédiate, les discussions doivent se poursuivre, c'est trop important.
Si on parle d'avenir et d'un avenir le plus rapproché possible, je pense
que la démonstration faite par Mme la présidente autour des
enjeux pour Montréal: Montréal est parfois une ville, parfois une
île, parfois une région, dépendamment du point de vue
où l'on se place, cette ambiguïté n'est pas que
littéraire. Cette ambiguïté reflète, je pense, un
partage des responsabilités qui ne correspond pas aux ressources dont
dispose Montréal et contribue aussi à la persistance d'un
régime fiscal désuet. De ce point de vue, il faut que cette
situation-là soit modifiée et ce qu'on propose - je termine
là-dessus, M. le Président - c'est une démarche qui nous
permette de faire enfin un débat et d'adopter une politique urbaine pour
Montréal, sur la place de Montréal comme métropole du
Québec et au sein de la région de Montréal. Une
démarche qui doit avoir un caractère public, car les individus,
les groupes et les institutions doivent pouvoir se faire entendre; souvent, ils
se sentent interpellés et Us veulent se faire entendre.
C'est un processus qui devrait être empreint, selon nous, à
la fois de sérénité et de crédibilité pour
permettre précisément que l'on puisse en arriver à des
conclusions que le gouvernement du Québec pourra mettre en oeuvre. En ce
sens, on demande que, dès cet automne, une commission spéciale
sur le rôle de Montréal comme métropole du Québec,
sur ses responsabilités, sur les moyens dont elle dispose pour s'en
acquitter, soit mise en place; que fasse partie de cette commission
l'obligation de tenir des audiences publiques pour permettre à toute
personne, tout individu ou tout groupe de se faire entendre et, surtout, que
cette commission remette un rapport à la fin de 1992.
Je m'excuse de la longueur, M. le Président, mais voilà
substantiellement ce que nous voulions vous dire au nom de la commission ce
matin.
Le Président (M. Garon): Comme votre exposé a
duré 33 minutes et qu'il reste 27 minutes, je partage le temps
également entre le parti ministériel et l'Opposition: 13 minutes
et demie chacun. M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, avant que nous commencions,
étant donné que nous sommes au milieu de la journée et non
pas à la fin d'une épuisante journée comme hier, si
l'Opposition n'a pas d'objection, je consentirais à ce que nous allions
jusqu'à midi et demi au lieu de midi-midi et dix ou midi et quart, comme
vous aviez calculé, M. le Président.
Le Président (M. Garon): On pourrait peut-être
reprendre à 15 heures après la période de questions, au
lieu de 15 h 30.
M. Ryan: Non, j'ai proposé qu'on continue. Si vous ne
pouvez pas, dites-le-nous. J'ai fait une proposition et je la maintiens.
M. Dufour (Jonquière): Pour midi et demi, je n'ai pas
d'objection. Je pense qu'il y a un mémoire qui a assez de substance pour
en discuter quelque peu et, même, on n'épuisera pas le sujet,
sûrement.
M. Maciocia: Midi et demi, c'est 40 minutes, 20 minutes
chacun.
Le Président (M. Garon): Alors, 20 minutes chacun.
M. Ryan: S'il ne peut pas être là, on en mettra un
autre. C'est tout.
Une voix: On ne fera pas revenir les gens de Montréal
à 15 heures.
Le Président (M. Garon): Alors, 20 minutes chacun.
J'espère, M. le ministre, que vous ferez la même chose pour les
petites municipalités.
M. Bourdon: M. le Président, le ministre a proposé
qu'on continue jusqu'à midi et demi. L'Opposition officielle y
consent.
Le Président (M. Garon): C'est accepté. Il n'y a
pas d'objection. 20 minutes.
M. Bourdon: Alors, pour les plus petites municipalités, on
fera pareil, mais iI ne faut pas...
Le Président (M. Garon): Pardon?
M. Gauvin: On comprend mal les commentaires, M. le
Président.
Le Président (M. Garon): C'est parce que, hier, le
consentement a été refusé pour une ville qui était
ici et qui n'a pas eu son temps.
M. Dufour (Jonquière): C'est vrai que ça a
été...
Le Président (M. Garon): C'est pour ça que
je dis qu'il faut traiter les gens également.
M. Ryan: Je soulignerai seulement que cette ville qui
était ici, nous l'avons acceptée par exception, après que
la liste eut été complétée et que nous lui avons
accordé un traitement particulier. Nous l'avons reçue avec grand
plaisir. Nous avons entendu son point de vue. Nous aurons d'autres rencontres
avec elle à part ça, étant donné la
complexité du problème qui était soulevé, et les 10
minutes de plus qui auraient pu vous plaire n'auraient contribué
à éclairer le problème en aucune manière, tandis
que nous sommes dans un contexte entièrement différent
aujourd'hui, M. le Président.
Ceci étant dit, je veux saluer cordialement les autorités
de la ville de Montréal et les remercier de la contribution qu'elles
n'ont cessé d'apporter à la recherche que nous poursuivons
ensemble depuis de nombreux mois. Nous sommes en face d'une situation difficile
et j'ai souligné à maintes reprises qu'elle n'est pas exclusive
au Québec. C'est une situation qui s'inscrit dans une conjoncture plus
large, à laquelle n'échappent qu'un très petit nombre de
sociétés aujourd'hui. Nous assistons à un
phénomène de contraction des chances, des possibilités
dans le domaine économique, qui entraîne des conséquences
très sévères pour le secteur public. Aux
États-Unis, comme vous le savez, les journaux sont remplis tous les
jours d'articles décrivant la situation très pénible des
finances publiques à tous les niveaux, fédéral,
étatique et municipal. Nous avons vu par le dernier budget de l'Ontario
que la situation n'échappe pas non plus à une province riche
comme l'Ontario. Par conséquent, II existe des problèmes aigus au
Québec, mieux vaut en prendre acte que de chercher continuellement
à les reporter sur les épaules d'autrui, ça ne donne
rien.
Et j'ai constaté dans le mémoire de la ville de
Montréal - c'est la seule critique que je me permettrai d'en faire - que
tout le mémoire est rédigé en fonction des
problèmes de Montréal. C'est normal, mais je ne trouve pas du
tout dans le mémoire de disposition à partager cette
responsabilité plus large dont le gouvernement a la charge pour tout le
Québec. Je pense que c'est en partant d'une prémisse comme
celle-là que nous allons trouver des voies de rencontre quelque part,
qui permettront d'être équitable envers tout le monde.
Avant de discuter des propositions - j'en viendrai aux propositions
assez rapidement, parce que je pense qu'elles résument très bien
l'ensemble du mémoire - je voudrais simplement peut-être replacer
quelques chiffres, parce que j'ai l'Impression que nous nous comprenons mal sur
les chiffres. Vous avez dit dans votre mémoire que la ville de
Montréal se voit appelée à assumer 40 % du fardeau du
transfert, avec 15 % de la population. Moi, j'ai des chiffres devant moi qui ne
me tiennent pas tout à fait ce langage-là. On s'entend que la
part du transfert brut qui échoit à la ville de Montréal,
c'est 122 000 000 $. Ça, vous l'avez dans votre mémoire, on l'a
dans nos chiffres, il n'y a pas de problème là-dessus, 122 000
000 $. La partie qui sera financée à même les sources de
revenus, pour lesquelles les décisions et la responsabilité
politique sont assumées par Québec, c'est 55 000 000 $. C'est
facile à indiquer: immatriculation des véhicules de transport,
mutations immobilières, "en lieu" de taxes fédérales et
provinciales, les ajustements découlant de différentes autres
mesures et l'augmentation du produit des amendes; ça donne dans nos
livres 55 000 000 $. Alors, 122 000 000 $ moins 55 000 000 $, ça fait 67
000 000 $. C'est ça qui est le solde à financer, que nous
invitons la ville de Montréal à assumer, comme part de
responsabilité dans l'ensemble de l'opération. C'est ça
qui est demandé.
Et, ces 67 800 000 $, dans l'ensemble, ce que nous demandons à
l'ensemble des municipalités du Québec, c'est 252 000 000 $,
à financer par des décisions fiscales qu'elles devront prendre
elles-mêmes. Si je compte bien, ça fait 27 %. Vous allez me dire:
Comparé à une population de 15 %, il y a encore un écart.
Ça, là-dessus, sur les chiffres, je ne discute jamais. Quand ils
sont exacts, je les accepte, j'en prends mon parti. Excepté qu'il faut
tenir compte également de la valeur de l'évaluation
foncière, la richesse foncière de chacun. La richesse
foncière de la ville de Montréal, dans l'ensemble de la richesse
foncière du Québec, représente 20 %. Celle de l'ensemble
de la CUM, c'est 35 % par rapport à l'ensemble du Québec. Ici, il
y a un certain décalage, mais il faut bien considérer que les
revenus corporatifs à Montréal sont beaucoup plus
élevés proportionnellement que dans tout le reste du
Québec; par tête même, ils sont plus élevés.
si nous avons proposé que le gros du financement de ce solde qui reste
à assurer, de 67 800 000 $ en réalité - ça, c'est
une diminution, ce solde-là. entre parenthèses, j'ai
remarqué qu'il n'a pas été question beaucoup non plus dans
le mémoire des ajustements qui ont été faits par le
gouvernement. c'est peut-être de bonne guerre de ne pas le souligner
mais, à l'origine, le solde à financer pour la ville de
montréal était de 102 000 000 $ et, là, il est quand
même réduit à 67 800 000 $. il y a eu un ajustement
important de 33 %. on a tenu compte de bien des suggestions qui ont
été faites quand même. je ne le dis pas pour
récriminer, je le dis simplement pour que le tableau soit complet.
Si nous avons proposé que la majeure partie du fardeau
additionnel découlant de ces mesures soit assumée par
l'entreprise, c'est parce que nous estimions qu'à ce moment-ci il
n'était pas inéquitable de demander à l'entreprise
d'assumer une part, en tenant compte de tous les adoucissements dont elle a
bénéficié de la part du
gouvernement en matière fiscale au cours des dernières
années. L'entreprise a été traitée
compréhensiblement par le gouvernement du Québec depuis cinq ans.
Nous avons réduit considérablement l'écart de son fardeau
fiscal, par rapport à celui de l'Ontario. Nous l'avons réduit
considérablement par toutes sortes de mesures, qui visaient à lui
créer une situation plus concurrentielle en matière de
fiscalité. Ça, ce sont des bases. Je pense que les chiffres que
je viens d'évoquer nous donnent peut-être un tableau plus
précis de ce que sera la portée exacte des mesures qui sont
envisagées. Je pense que, si vous établissez maintenant en
pourcentage, à supposer que la ville de Montréal reporterait du
côté de l'entreprise, la totalité du fardeau de 67 800 000
$, ça ferait un accroissement du fardeau fiscal des entreprises dans la
ville de Montréal - fardeau fiscal total: fédéral,
provincial, municipal - nos techniciennes le diront tantôt, ça va
être 2 % et 3 %. Et, si la ville de Montréal transfère
cette responsabilité entièrement du côté des
entreprises, ça veut dire que, du côté de l'habitation
résidentielle, elle n'aura pas d'augmentation à instituer. C'est
ça qui est le résultat des calculs que nous avons faits.
Je vois que le maire est accompagné de nombreux conseillers que
je salue avec plaisir. Vous pouvez inventer une autre équation. Vous
pouvez partager le fardeau différemment, mais je pense que nous restons
dans un ordre de grandeur qui est fort raisonnable. Étant donné
le contexte où nous sommes... Si nous n'étions pas dans un
contexte de resserrement financier, économique extrêmement
étouffant pour tout le monde, on serait bien mieux. On ne parlerait pas
du tout de ces choses-là. Mais, étant donné le contexte
où nous sommes, je pense que le tableau n'est pas aussi déprimant
qu'on ne voudrait nous le laisser entendre.
J'en viens à quelques commentaires rapides sur les
recommandations qui complètent le mémoire à compter de la
page 25. La première recommandation demande qu'une partie du rendement
de la taxe sur l'essence soit affectée au financement du transport en
commun. Là, vous demandez explicitement au gouvernement d'augmenter son
déficit. Il est à 3 500 000 000 $. Vous lui demandez de le mettre
à 3 600 000 000 $ ou 3 700 000 000 $. Vous demandez au gouvernement de
prendre une décision budgétaire. Je vais la transmettre au
ministre des Finances fidèlement, mais je ne pense pas qu'il y ait des
chances qu'elle soit retenue pour la présente année. Je vais la
transmettre quand même. Et je crois qu'à la longue, si nous
entrions dans une période de détente économique plus
prononcée, peut-être que le ministre des Finances pourrait
regarder de ce côté-là, parce que c'est loin d'être
inacceptable en soi. C'est une proposition qui est intéressante, mais
dans le contexte où nous sommes aujourd'hui et maintenant, je ne vois
pas beaucoup de possibilités. Et j'ai l'Impression, si le ministre des
Finances avait dû le faire, iI l'eut fait à l'occasion de son
budget, parce que toutes ces suggestions lui avaient été
présentées antérieurement au budget.
Deuxièmement, maintenir une participation financière de
base au financement du transport en commun. Je pense que le gouvernement la
maintient par la voie des Immobilisations auxquelles il continuera de
participer de manière importante, par la voie des contributions
financières au transport adapté, par la voie de la contribution
qui sera demandée aux propriétaires de véhicules de
promenade dans toute la grande région métropolitaine de
recensement, par la contribution qu'il apporte, qu'il continue d'apporter au
Conseil métropolitain de transport en commun, contribution qui, pour la
présente année, est de 26 000 000 $. Je ne pense qu'il soit
question que le gouvernement se retire du transport en commun, mais il a
décidé, pour le financement des opérations ordinaires,
qu'il faut que les communautés concernées portent davantage leur
responsabilité. C'est sur ce point précis que porte la
décision gouvernementale. (12 heures)
Vous demandez, en troisième lieu, une compensation pour les
pertes encourues au titre de la disparition des droits sur les divertissements.
En logique, je pense que c'est difficile de contester une affirmation qui est
sous-jacente au mémoire. C'est évident que quand les deux
gouvernements, fédéral et provincial, ont décidé
d'augmenter la taxe de vente au détail, Ils ont implicitement
évacué un champ fiscal qui appartenait aux municipalités.
On le rétablit en partie dans les ajustements qui ont été
annoncés récemment pour les événements à
caractère récréatif, sauf ceux qui seront exemptés
par un éventuel règlement gouvernemental. Mais je sais que, pour
Montréal, iI y a un problème de ce côté-ci et nous
continuons de l'étudier. Nous continuons de l'examiner et je pense que
nous trouverons l'occasion d'en reparler avec vous au cours des prochaines
semaines.
En ce qui touche les "en lieu" de taxes, le gouvernement a fait
connaître sa décision de ramener les "en lieu" de taxes pour les
écoles primaires et secondaires à la moitié de leur niveau
actuel et de maintenir à leur niveau actuel les "en lieu" de taxes sur
les universités et collèges et les Immeubles des réseaux
de la santé et des services sociaux. C'est vrai que ces immeubles
reçoivent des services des municipalités mais, dans le cas des
écoles primaires et secondaires, nous avons fait faire des calculs pour
connaître le coût des services qui sont fournis à ces
Immeubles par les municipalités et le niveau de subvention que nous
avons retenu est supérieur, selon nos calculs, au niveau des
dépenses encourues. Nous ne prétendons pas que ce soit ce qu'il y
a de plus généreux. Non, je
n'ai pas de prétention de ce côté-là. Nous
avons veillé à faire ces calculs et je peux vous dire que ce que
nous avons retenu va au-delà des équations qui nous avalent
été remises.
En tout dernier lieu, j'ai pris note de la proposition recommandant la
création d'une commission spéciale sur le rôle de
Montréal comme métropole du Québec. Je pense que c'est
très Important. Il y en a seulement une métropole au
Québec, c'est Montréal. Actuellement, il existe un comité
ministériel qui doit veiller au développement économique
de Montréal. Je devrai, évidemment, transmettre au chef du
gouvernement la proposition que vous nous faites. Moi, personnellement, je
serais très heureux qu'il y eût un groupe de travail ou une
commission spéciale. Il s'agirait de déterminer des
modalités exactes de la structure de l'organisme et de son mandat. Je
pense que ça s'imposerait qu'on fasse le point sur le rôle, les
problèmes, les difficultés et le potentiel de Montréal
comme moteur de la vie au Québec, à bien des égards. Et
peut-être que ça nous aiderait à voir un certain nombre de
problèmes dans une perspective différente. Soyez assurés
que je transmettrai au gouvernement avec des commentaires favorables cette
recommandation qui nous est présentée.
M. Doré: En fait, si vous me permettez... Le
Président (M. Garon): M. le maire.
M. Doré: C'est évident que je ne veux pas entrer
dans une guerre de chiffres, mais je ne peux passer sous silence le fait... Je
réfère les membres de la commission à la page 3 du
mémoire qu'on a soumis. Effectivement, il peut y avoir des
différences d'évaluation entre l'impact gouvernemental, mais,
d'un autre côté, les chiffres sont les chiffres. Quand on
évalue, au chapitre du transport en commun, fa fin des subventions
d'exploitation, 151 400 000 $ pour le gouvernement - ça, c'est
tiré des chiffres du ministère - auxquels on ajoute l'obligation
maintenant aussi d'Insérer le maintien des actifs dans les
dépenses d'exploitation, 34 100 000 $, auxquels on soustrait la part
qu'on estime selon un mode de calcul qui n'est pas complètement
arrêté mais l'hypothèse de la redistribution des
contributions des automobilistes au chapitre des plaques d'immatriculation, 29
400 000 $, auxquels on ajoute le désengagement sur les trains de
banlieue et le plafonnement des subventions de transport adapté, il faut
bien voir qu'on est dans une situation... Le gouvernement plafonne les
subventions, mais, en même temps, fixe les règles
d'admissibilité. Or, les dépenses croissent de 11 % ou 12 % par
année de plus que ce que le gouvernement contribue. C'est 24,4 %. Total,
c'est 180 500 000 $ pour le transport en commun, la part de Montréal,
100 000 000 $, c'est-à-dire correspondant à une quote-part de
55,38 %, qui est la quote-part de Montréal au sein de la
Communauté urbaine.
Quand on regarde les autres transferts, les compensations tenant lieu de
taxes constituent une perte de 9 200 000 $. On perd de l'argent puisqu'on avait
50 % de revenus d'immeubles du primaire et du secondaire. On tombe à 25
%. C'est 9 200 000 $. Les droits sur les divertissements, c'était 15 000
000 $. On calcule qu'on pourrait, selon l'hypothèse qu'on a faite ici,
garder 50 %. Mais, encore la, avec toutes les raisons données par la
présidente, l'inéquité, les exceptions et tout ça,
on pense que ça va être difficile de le maintenir, mais dans
l'hypothèse où on jouerait l'option qui nous est offerte, 7 800
000 $. Les immatriculations, il faut les payer, les véhicules
municipaux, c'est une somme de 700 000 $. Enfin, l'élargissement des "en
lieu" de taxes - là, je me réfère à la note 6 - la
définition telle qu'elle est faite actuellement dans le projet de loi
nous donne lieu de croire que ça va nous coûter 4 000 000 $ au
total. La définition est tellement large que tout le monde va s'y
engouffrer et qu'on va devoir retourner 4 000 000 $ de revenus qu'on
perçoit actuellement. total: 122 900 000 $. desquels nous soustrayons
les droits sur les mutations immobilières. là-dessus, le
gouvernement les évalue pour montréal à 15 300 000 $, nous
les évaluons à 18 700 000 $. mais on ne calcule pas les amendes,
d'abord, parce que je ne considère pas que c'est de la fiscalité
et, deuxièmement, parce qu'on les a déjà
comptabilisées. dans le budget de 1991, les amendes du code de la
sécurité routière sont déjà
comptabilisées comme revenus additionnels. tout ce qui n'est pas
comptabilisé, et ce que je serais prêt à admettre, c'est
les "en lieu" de taxes qui viendraient du fédéral, si on applique
la surtaxe et, là-dessus, on évalue qu'ils sont de l'ordre
d'à peu près 4 000 000 $ à 5 000 000 $. donc, la facture
à montréal est toujours autour de 105 000 000 $ moins,
peut-être, dépendant de l'application de la surtaxe si le
fédéral décidait de toutes les payer, dans
l'hypothèse... et les surtaxes foncières. on n'utilisera pas les
taxes d'affaires. on va maintenir le rôle locatif. le gouvernement a fait
une estimation que la surtaxe fédérale générait 11
000 000 $ si nous décidions d'abolir éventuellement le rôle
de la valeur locative et de transférer ça sur une surtaxe
foncière. nous n'avons pas l'intention d'abolir le rôle de valeur
locative. nous allons maintenir une taxe d'affaires et nous utiliserons la
surtaxe foncière, ce qui veut dire qu'il y a peut-être un 4 000
000 $. donc, de ce point de vue là, je veux juste dire que ces
chiffres-là, on ne les a pas inventés. ils sont une
réalité. on peut en débattre, mais je pense que c'est
important de pouvoir... ils sont, je pense, assez bien justifiés.
Je dis simplement ceci, M. le ministre, sur la question de la taxe sur
l'essence. En fait, la taxe sur l'essence ou l'immatriculation, au
départ, les municipalités demandaient 45 $ pour
l'immatriculation, 90 000 000 $. Vous avez décidé que
c'était 50 $. Ça pourrait être 40 $, 45 $. Vous pouvez
revenir sur cette décision-là. C'est des droits perçus
auprès des automobilistes. L'idée, c'est de créer un fonds
financé par les automobilistes, dont une partie pourrait venir des
droits d'immatriculation, une partie de la taxe d'essence pour financer le
transport en commun et développer un partenariat, quatrième
partenaire, et de maintenir une contribution minimale au chapitre des tarifs
réduits pour, notamment, inciter à les maintenir dans des
régions où les populations en dépendent, notamment, et ont
besoin de ces éléments-là pour la mobilité. Je
pense, notamment, au vieillissement de notre population, au resserrement des
règles sur la conduite automobile qui prive de plus en plus de gens de
leur droit de conduire et qui doivent utiliser le transport en commun pour se
déplacer. À ce chapitre-là, c'est l'idée d'un fonds
qu'on veut alimenter.
En ce qui concerne les revenus corporatifs, j'aimerais ça voir
les chiffres du gouvernement parce que c'est toujours difficile de discuter de
documents qu'on n'a pas vus, mais il y a une chose qui me frappe. Ce qui me
frappe, M. le ministre, c'est qu'indépendamment des chiffres qu'on peut
se donner, il y a déjà un déséquilibre. 4,96 $ les
100 $ d'évaluation, c'est la réalité du taux
uniformisé à Montréal. Et c'est 3,13 $ pour le reste du
Québec. Le danger, c'est le déséquilibre entre
Montréal et les villes qui ont le transport en commun et la
périphérie. C'est ça, le danger.
Et je veux juste vous souligner une chose. Ce qui me frappe dans le
projet de loi 145, c'est l'espèce de contradiction de base entre deux
approches. Quand il s'agit de la police, on a voulu imposer aux
municipalités du Québec une tarification pour compenser celles
qui l'avaient déjà parce qu'il y avait un problème
d'équité qui se posait. Pourquoi une ville avait un fardeau
fiscal plus élevé parce qu'elle se dotait de la police, alors que
l'autre qui aurait dû en avoir ne le faisait pas et elle faisait une
compétition? On a dit: Ça n'a pas de bon sens. D'abord, le
gouvernement doit pouvoir payer les services policiers, il faut rétablir
l'équilibre. Mais dans le cas du transport en commun, c'est le principe
inverse qui fonctionne. En renvoyant la facture du transport en commun, ce
qu'on fait, c'est qu'on accroît le fardeau des villes qui l'utilisent au
profit des villes de la périphérie qui ne le paient pas. Et on va
forcément rendre plus intéressante la possibilité des
entreprises, quand elles ont besoin de se relocaliser, d'aller dans les villes
périphériques.
Le Président (M. Garon): Alors...
M. Doré: Je me limite à ça comme remarques,
M. le Président, mais il me semble que c'est des éléments
qui doivent être pris en compte dans la réflexion qui se poursuit
au niveau du gouvernement.
Le Président (M. Garon): Alors, comme le temps
dévolu au parti ministériel est même dépassé
d'une minute, je donne la parole au député de Jonquière
comme porte-parole de l'Opposition officielle pour 21 minutes.
M. Dufour (Jonquière): Oui. Je vous remercie, M. le
Président. En écoutant le mémoire de la ville de
Montréal, II y a une constante qui se dégage. L'ensemble des
Intervenants qu'on reçoit depuis hier en audience nous dit
carrément que la réforme a été mal
préparée et qu'elle ne répond pas ni aux voeux des
municipalités ni aux voeux de l'ensemble des contribuables du
Québec. Et je prends pour acquis - ou pour exemple - que le ministre
nous a dit tout à l'heure: M. le maire, si on n'avait pas ça, le
déficit gouvernemental, qu'est-ce que vous en pensez?
Donc, je pense que le chat commence à sortir du sac. On vient de
dire à tout le monde que, dans le fond, le partage d'un nouvel
équilibre, c'est un équilibre pour le gouvernement, c'est un
délestage de facture vis-à-vis des municipalités. Il me
semble que c'est un aveu de taille qu'on reçoit ce matin de la part du
ministre des Affaires municipales parce que. effectivement, c'est une question
de court de caisse pour le gouvernement. Ce qui fait que ce n'est pas
surprenant qu'on ne s'entendra jamais sur les chiffres. D'un côté,
le gouvernement dit: Je prends une part de responsabilité de la
réforme parce que, mol, je taxe à votre place, et les
municipalités, je suis bien conscient qu'elles sont proches des gens et
qu'elles vivent avec ces gens-là. À chaque fois que le
gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral qui,
à mon sens, est un gouvernement de trop, viennent piger dans les poches
des contribuables, ils viennent d'enlever une marge de manoeuvre aux
municipalités. Je pense que les municipalités ne vivent pas en
dehors de la réalité de tous les jours, que la taxe vienne de
l'un ou de l'autre, mordu par un chien ou mordu par un chat, c'est mordu
pareil. Et la municipalité qui est prise pour vivre avec les
contribuables se rend bien compte que ces gens-là sont d'autant
apprauvis. Il y a des chiffres qui demandent de la réflexion, qui vont
porter à réflexion; 30 % de pauvreté dans la région
de Montréal, les problèmes qui sont bien démontrés,
à mon point de vue, concernant les responsabilités municipales,
tout ça fait qu'effectivement il y a certainement une réflexion
intense à faire de ce côté-là.
Mais je voudrais aussi ne pas passer sous silence la question du
transport en commun. Le transport en commun, là aussi, il y a
unanimité. Le gouvernement du Québec qui se targue d'être
semblable au gouvernement de l'Ontario... Et je me demande souvent pourquoi on
a deux gouver-
nements, on devrait peut-être avoir un seul gouvernement ontarlen
pour le Québec aussi, cela en sauverait un. Le mémoire de la
Communauté urbaine de l'Outaouais, qui nous a été
déposé, mais qui n'a pas été défendu par des
Intervenants, nous dit bien, en ce qui concerne le transport en commun: Le
gouvernement, loin de s'aligner sur les autres provinces, cette fois,
décide de se retirer de ce champ d'action, réalisant certes des
économies substantielles à court terme, mais négligeant
les impacts négatifs d'une telle décision tant sur le plan de
l'environnement que des besoins accrus en réseau routier, qui risquent
de découler de la diminution des services du transport en commun et...
Est-ce qu'on peut parler d'étalement urbain? On peut reprendre le
mémoire de la ville de Montréal, le mémoire de la ville de
Québec et, effectivement, on va retrouver à travers ça un
certain nombre d'éléments qui font que c'est un
désengagement purement et simplement que le gouvernement du
Québec impose à ses municipalités. En fait, c'est un
problème qui est loin d'être réglé, à mon
point de vue, d'autant plus que pour payer une partie de ces
dépenses-là on parle de se servir des taxes sur le stationnement.
Il y a eu une démonstration évidente, à mon point de vue,
hier, que ces taxes-là sont difficilement applicables et que ça
va causer des iniquités d'une municipalité à l'autre, donc
une distorsion.
Le fait qu'on cherche à empêcher l'étalement urbain
par le transport en commun, voilà justement une mesure qui va
complètement à l'encontre de toute la philosophie qui sous-tend
le transport en commun comme tel. Voilà en gros cette importance de
maintenir le transport en commun. Je comprends que, bien sûr, pour la
ville de Montréal, même s'il y avait un autobus de ville une fois
de temps en temps, je pense que ce n'est pas une raison suffisante pour priver
les gens de Montréal du transport en commun.
Je sais que j'ai de mes collèges qui brûlent aussi de poser
des questions. Donc, je me contenterai seulement d'une question, pas parce
qu'on a des chances d'échanger à des forums qui pourraient
être autres qu'ici parce que, effectivement, j'ai l'impression que le
forum qu'on a ici ce matin, le ministre nous a bien annoncé les
règles du jeu hier matin, d'entrée de jeu... Il nous a bien dit
que les objectifs avaient été adoptés par
l'Assemblée nationale, il n'a pas dit que c'était sur division,
mais en tout cas, sur division, et que les modalités, iI était
pour en discuter. Ça fait que supposons que cette volonté se
maintienne, comment pensez-vous que le transport en commun, dans l'état
actuel des choses, avec les propositions qui sont sur la table, iI va se
comporter dans une région comme Montréal, avec les effets que
vous allez avoir à vivre?
M. Doré: Si vous permettez, M. le Prési- dent, je
vais demander à Mme la présidente de fournir la réponse au
critique de l'Opposition. (12 h 15)
Mme Cousineau: M. le Président, là-dessus, notre
réponse est la même qui apparaît clairement dans le
mémoire de la Communauté urbaine et les décisions prises
par les élus de la communauté en séance spéciale
pour cette question. Nous entendons maintenir quasi à titre de service
fondamental et essentiel le transport en commun sur le territoire de la
Communauté urbaine. Nous ne voulons pas, nous refusons de mettre en
cause les besoins des individus, Montréalais et Montréalaises,
qui sont les utilisateurs du transport en commun, et aussi de mettre en cause
la santé économique de la ville par un affaiblissement ou une
disparition du transport en commun.
Donc, la contrepartie, c'est une nécessaire imposition aux
secteurs non-résidentiels, puisque c'est là qu'on nous indique
d'aller chercher les fonds qui nous manqueront. Par ailleurs, le secteur
résidentiel sera aussi touché par l'ensemble des autres mesures,
parce que, étrangement, dans ce projet qui doit nous fournir de nouveaux
champs de taxation, on nous en retire au passage quelques-uns, et les
non-résidentiels devront supporter de leur côté un certain
nombre d'ajouts quant au manque à gagner pour la ville.
Dans le cas du stationnement, si vous permettez, je reviendrais à
une de vos remarques. Nous n'avons justement pas fait état pour nous de
revenus venant des stationnements, essentiellement parce que la mesure telle
que proposée actuellement est inapplicable à Montréal.
Elle supposerait le consentement de tous les intervenants, ceux de la
Communauté urbaine et ceux de la région, nord et sud. Or, nous
savons actuellement qu'un tel consentement n'existe pas. Alors, à moins
qu'elle ne soit une perception qui pourrait être faite par la
Société de transport, ou même par le Conseil
métropolitain, imposée sur l'ensemble du territoire à
toutes les villes concernées, autrement, ce n'est encore qu'un ajout au
déséquilibre entre la position concurrentielle de Montréal
par rapport aux autres villes. Donc, pour nous, le stationnement qui
était une mesure que nous avions souhaité voir appliquer devient
inapplicable et inaccessible telle que proposée actuellement. Et c'est
pour ça que ça n'apparaît pas dans nos propositions de
revenus.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Alors, je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue
à M. le maire, à Mme la présidente du comité
exécutif, de même qu'aux nombreux conseillers et
conseillères - j'en ai compté une quinzaine - qui assistent, dont
les trois conseillères...
Mme Cousineau: II y en a 25, M. le député.
M. Bourdon: II y en a25.
Mme Cousineau: La presque totalité.
M. Bourdon: Alors, quand on connaît des gens assez
intimement, on finit par ne plus les compter, dont les trois
conseillères de mon comté de Pointe-aux-Trembles. Je voudrais
féliciter la ville pour son mémoire qui résume bien
l'état de la question, je pense, et je voudrais profiter de mon
intervention pour faire un appel au ministre, pour qu'il tente de raisonner les
gens du ministère des Finances.
Je pense que ce qui est devant nous, c'est un projet de transfert de
responsabilités du gouvernement du Québec, qui n'est pas
acceptable pour Montréal, qui est une ville qui connaissait
déjà de grandes difficultés.
Je voudrais ajouter, M. le Président, que quand il y a plusieurs
milliers d'itinérants dans une ville nordique, c'est qu'il y a des
problèmes sociaux qui ont une acuité phénoménale.
À cet égard, il y a un rapport récent de l'OPDQ qui
révèle qu'il y a sur l'île de Montréal 188 000
sans-emploi, ça veut dire 500 000 de population de touchés sur un
total de 1 650 000. Puis on sait que c'est Montréal qui a le plus gros
fardeau du sous-emploi.
Je voudrais dire, sur le transport en commun, que c'est une
évidence que les autorités municipales prennent la bonne
décision en disant: on ne le coupera pas, alors que sur la rive sud, on
parle de couper et de privatiser, ce qui va avoir des conséquences
très adverses pour la rive sud et pour Laval qui sont dans le même
bateau.
Et, M. le Président, quand le ministre dit - il le disait hier
aussi - que les entreprises, on est capables de les taxer encore un peu, bien,
la Chambre de commerce, hier soir, parlait au nom des commerces qui sont en
difficulté, et puis le taux de vacance des commerces à
Montréal, selon le mémoire de la ville de Montréal,
l'illustre. C'est parce que les entreprises ne sont pas toutes riches et, dans
le commerce, il y a une situation actuellement qui est assez
catastrophique.
L'idée d'une commission sur le rôle de Montréal, je
l'appuie d'emblée. Il me semble qu'il faut un débat public sur la
place de la métropole, parce que si la métropole plie les genoux,
c'est le pays au complet qui va être frappé et qui va s'en trouver
influencé. Puis à cet égard, M. le Président, je
voudrais qu'on comprenne, du côté du gouvernement, qu'il n'y a
aucune commune mesure entre les difficultés que les Montréalaises
et les Montréalais vont traverser et la récupération de
100 000 000 $ dans le premier exercice financier que le gouvernement va faire
avec ça. Et, à cet égard, M. le Président, c'est
une question que je veux adresser au maire et aux représentants de
Montréal: Sentez-vous, dans ce qui est proposé par le
gouvernement, une vision de l'avenir de la métropole ou bien une
nécessité de joindre les deux bouts?
Mme Cousineau: Avant de laisser la parole à M. le maire,
je voudrais juste, M. le ministre, saisir l'occasion qui m'est donnée
pour réagir à ce que vous avez appelé votre reproche
mineur. Vous dites: Vous nous présentez un point de vue de
Montréalais. Or, vous entendre dire ça, pour moi, c'est entendre
que je n'ai pas réussi à vous convaincre que, lorsque je vous
parle des problèmes de Montréal, je pense que je vous parle des
problèmes du Québec. C'est l'essentiel de notre demande et quand
on demande une commission, pour nous, c'est un lieu où l'on pourrait
partager ce que je crois profondément partageable et déjà
en partie partagé, c'est-à-dire une vision de Montréal et
de la métropole qui fasse que lorsqu'on en parle, on parle aussi du
Québec et qu'on parle pleinement du Québec.
M. Doré: Si je peux me permettre de tenter de
répondre à votre question, je pense que ce qui nous manque
par-delà ce que Mme la prési-dente vient de dire, c'est, je
dirais, une politique urbaine pour Montréal. Le ministre, avec raison,
j'ai ici des extraits du New York Times,de l'article qu'il a
cité fréquemment, de vendredi dernier, où on examine la
situation des villes américaines et leur fiscalité... Je suis
aussi beaucoup la situation américaine parce que nous vivons sur le
même continent et qu'il y a des signes précurseurs, avant-coureurs
de ce qui se passe dans les villes américaines qui peuvent se passer
chez nous. Ce qui m'apparaît évident, c'est que si nous ne voulons
pas avoir à contrôler ce que l'on a appelé dans le document
"des bombes à retardement", si nous ne voulons pas, à terme,
asphyxier le centre de la région et, à terme, affecter la
vitalité de la région et du Québec, il me semble qu'il
faut faire ce travail de réflexion ouverte. Le ministre était
ouvert à ça parce que le ministre nous a déjà dit:
Mol, la problématique des villes centres, notamment de Montréal,
je suis prêt à en discuter avec le ministère. Ce qu'on dit
aujourd'hui, essentiellement, c'est que plutôt que d'avoir une approche,
je dirais, particulière Montréal-ministère, nous
souhaitons avoir une approche plus globale pour que le débat se fasse.
Il y a beaucoup de gens qui veulent se faire entendre à Montréal
et ce sont des gens de la région qui ont des choses à dire
là-dessus, des gens des régions du Québec
également. Qu'on clarifie une fois pour toutes cette question de la
métropole et de son rôle, le rôle important qu'elle joue
pour tout le Québec et des ressources dont elle a besoin pour faire face
aux défis qui sont les siens.
Je vais me permettre une remarque, M. le Président, et je pense
qu'elle ne se veut pas méchante du tout, mais ça illustre ce que
je viens de dire. Lorsque, en 1989, à quatre jours d'une
élection, le gouvernement a souscrit à une
démarche faite à l'échelle de la région par
la concertation de créer un organisme métropolitain du transport
en commun, il a souscrit à quelque chose qui était novateur et il
a décidé d'assumer le paiement - enfin, il avait deux
possibilités, ou les villes contribuent à régler les
problèmes de ce qu'on appelait les chevauchements interréseaux,
je n'utiliserai pas l'autre terme qui hérissait certains de mes
collègues - et le gouvernement a dit: Bien, on va plutôt partager,
organiser un système et on va y contribuer. Ça me semblait
être un pas dans le bon sens. On développe une conscience
régionale sur le transport en commun. On voulait, sur cette
foulée-là, en développer une davantage sur la promotion
économique, touristique et ainsi de suite. Mais cela dit, ça ne
s'inscrit pas dans une politique. C'était appuyer une volonté qui
était là.
Lorsque, dans le projet gouvernemental, on nous annonce que les
contributions au CMTC, on va y mettre fin en 1994, parce que c'est ça
qu'on nous dit, bien, je dis: C'est peut-être l'absence d'une politique
urbaine pour Montréal qui amène une telle conclusion et, de ce
point de vue là, il y a une urgence, non seulement à ce qu'on
évite l'étranglement de la métropole parce qu'elle n'a pas
les ressources pour faire face aux défis qui sont les siens, mais que
l'on puisse globalement, à l'échelle de la région, se
donner une politique urbaine pour Montréal parce qu'on en a besoin et
parce que seul le gouvernement peut le faire. La ville de Montréal ne
peut pas le faire seule. La ville de Montréal et les partenaires,
malgré les bonnes relations qu'on peut développer, ne peuvent pas
le faire, l'éclatement de la région est difficile. Je le dis
souvent à mon collègue de Toronto, lorsqu'il concerte sa
région, il met 7 personnes autour de la table. Lorsque le maire de
Montréal veut concerter sa région, ça en prend 50. Bien,
il y a quelque chose là qui fait qu'il me semble qu'il faut
éventuellement se doter d'une politique urbaine pour Montréal et
c'est le plaidoyer qu'on fait aujourd'hui.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président. D'abord, mes
salutations au maire, à Mme Cousineau, à tous ceux qui
représentent Montréal aujourd'hui. Je voudrais simplement
rappeler au départ que les municipalités sont des institutions
politiques qui ont un rôle politique à jouer même si elles
ne sont pas des gouvernements, mais qu'elles disposent de pouvoirs importants,
dont l'aménagement, les pouvoirs en termes de fiscalité, donc les
moyens de réaliser leurs perspectives, qu'elles doivent assurer des
services aux citoyens.
J'ai l'Impression que le projet que nous avons actuellement
procède d'impératifs surtout fiscaux et qui n'ont pas
été pensés en termes de perspectives pour les
municipalités. Je comprends, le ministre arrive dans son
ministère et il s'est fait vendre une commande à assurer par ses
collègues en termes d'équilibres financiers. Mais je pense que,
pour me raccrocher d'ailleurs à ce qu'on vient de discuter, une
commission sur les perspectives de Montréal, c'est majeur. Nous avions,
à l'époque, en 1982, modifié la Communauté urbaine
de Montréal, dans notre esprit, c'était la ville de
Montréal qui était la locomotive. Aujourd'hui, quand on analyse
les retombées du projet de loi, j'ai l'impression que, par le biais de
la fiscalité, on vient de la freiner considérablement. Je ne dis
pas que ce sont des intérêts avoués, mais les
conséquences sont celles-là, ça va freiner, c'est
évident. Et on se retrouve finalement à "clencher" la
métropole, la Communauté urbaine, pour des raisons
d'équilibres fiscaux au gouvernement, alors qu'il faudrait penser les
choses à l'inverse. À mon avis, la fiscalité, c'est un des
moyens les plus puissants d'assurer les perspectives d'un milieu.
Or, qu'est-ce qui arrive à Montréal? Le chiffre le plus
déterminant pour moi que j'entends ce matin, c'est que 40 % des
transferts du budget du gouvernement vont être assurés par la
ville de Montréal. C'est considérable. Et je pense, M. le
ministre, qu'il faut faire bien attention d'exprimer de telles données
en pourcentage d'augmentation de la fiscalité, parce que les
décisions des citoyens se prennent à la marge. Pour eux, il est
entendu qu'ils doivent payer un certain montant de taxes. Mais si, à un
endroit ou à un autre, ils doivent payer 10 % de plus, ils vont y penser
déjà. Mais s'ils doivent payer 75 % de plus de taxes, là,
la décision est déjà prise d'avance.
C'est fondamental. Moi, j'ai toujours pensé qu'il y a une
réalité qu'il faut vraiment prendre en considération: la
population du Québec est stable, mais la population de Montréal
ne bouge pas et même diminue, a décru de façon
significative, alors que les villes de la couronne ont augmenté de
façon significative. Et l'autre tableau que vous avez, c'est celui de la
page 12, où les décisions à la marge dans l'avenir vont se
prendre en faveur des villes de la couronne et, donc, vous venez de
créer une pression considérable à l'étalement
urbain. Je partage absolument ce point de vue.
Prenez le transport en commun, arrivons à ce point, les
municipalités de la couronne ne le paient pas, mais la ville de
Montréal le paie. À qui ça sert, le transport en commun?
Je pense qu'il faudrait se poser cette question. Ça sert beaucoup aussi
aux gens de la couronne, à IHe Laval, à la rive sud, mais ils ne
partagent pas un fardeau équitable là-dessus. Et je dirais aussi
une chose qui défavorise Montréal, même par rapport aux
villes de la banlieue, mais encore plus par rapport aux villes de la couronne,
à mon avis, si vous voulez toucher à la fiscalité, il
faudrait
peut-être toucher à certains éléments. Les
critères de partage du coût du transport en commun sont
importants, mais quand on prend strictement le potentiel fiscal, cela inclut la
valeur des terrains dans Montréal. Or, au centre-ville, les terrains ont
une valeur considérable, de sorte que les Montréalais, par
tête de pipe, sont amenés à payer plus que les autres. Ils
ne l'utilisent pas nécessairement plus, mais si le prix de votre terrain
au centre-ville est 4 ou 10 fois ce qu'il est ailleurs, dans une autre
municipalité de banlieue, même dans le territoire de la
Communauté urbaine, à ce moment-là, Montréal est
amenée à payer plus, toutes proportions gardées.
Alors, c'est encore bien pire quand on arrive dans les villes de la
couronne qui n'assument aucun coût du transport en commun. Donc, la
fiscalité vient de créer un déséquilibre en
défaveur de Montréal. C'est un facteur majeur et il me semble
que, si vous voulez transférer des responsabilités, il faut avoir
la perspective, en termes d'aménagement, des conséquences de ce
qu'on fait. Donc, il faudrait se poser des questions sur les critères de
répartition des coûts des services communautaires sur l'île
de Montréal. Il y a la police, ily a...
Le Président (M. Garon): Je vais être obligé
de vous demander de terminer, parce qu'on a déjà
dépassé l'heure, 12 h 30. J'ai laissé aller pour donner le
même temps de chaque côté, 21 minutes chacun. Je suis
obligé de suspendre les travaux de la commission.
M. Léonard: Ça prendrait une commission, M. le
Président, pour échanger...
Le Président (M. Garon): Alors, je suspends les travaux de
la commission jusqu'après les affaires courantes, à 15 h 30.
(Suspension de la séance à 12 h 31)
(Reprise 15 h 37)
Le Président (M. Garon): S'il vous plaît!
Conformément au mandat qui nous a été confié par
l'Assemblée nationale, je déclare la séance de la
commission ouverte et j'appelle immédiatement le Conseil du patronat du
Québec. Pardon. Auparavant, il y a remplacement, qu'on m'a dit, avec le
consentement, c'est possible, puisque le député de Rimouski a
dû quitter pour cause de maladie dans sa famille et il sera
remplacé par...
Le Secrétaire: M. Dauphin (Marquette) remplace M. Tremblay
(Rimouski).
Le Président (M. Garon): Est-ce qu'il a consentement?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Garon): Consentement. Donc, le Conseil du
patronat, pendant une période de 45 minutes, va nous donner son point de
vue sur la loi 145. Et, selon les règles habituelles, vous avez 15
minutes pour exposer votre point de vue, 15 minutes pour les
députés ministériels, 15 minutes pour l'Opposition
officielle. Si vous en prenez plus que vous ne pouvez le faire, ce sera
réduit d'autant du temps des deux partis. Si vous en prenez moins,
ça ajoutera au temps où ils pourront vous poser des questions ou
faire des commentaires. M. Dufour, à vous la parole, si vous voulez nous
présenter les gens qui vous accompagnent.
Conseil du patronat du Québec
M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Prési-dent. Mes
collègues: à gauche, M. Claude Chabot, président de
l'Association des propriétaires de cinémas du Québec et
président-directeur général de la chaîne
Cinéplex Odéon; à ma toute droite, Jacques Garon,
directeur de la recherche au Conseil du patronat et, à ma droite, M. Guy
Laflamme, président des Industries de la Rive-Sud et président du
conseil d'administration du CPQ.
Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous remercier de
nous recevoir et de nous donner l'occasion de vous présenter
brièvement notre opinion sur cet Important dossier. Déjà,
quand on avait rencontré M. Gérard D. Lévesque, deux ou
trois mois avant la présentation du budget, on avait dit à M.
Levesque notre inquiétude sur ce dossier-là, parce qu'on savait
déjà un peu ce qui s'amenait. Et nous lui avions dit que
ça ne pourrait pas faire autrement que de se répercuter sur la
santé financière des entreprises et des particuliers.
Vous vous rappelez que le dernier budget de M. Levesque, avec certaines
modifications, faisait déjà un fardeau fiscal de 320 000 000 $ de
plus aux entreprises. Et on considérait déjà ça
comme excessivement important. Depuis, il y a eu justement le dernier budget du
ministre des Finances du 2 mai 1991, qui est venu confirmer la gravité
de la situation financière du Québec. Et il y a eu encore,
à ce moment-là, un autre montant de 100 000 000 $ qui est venu
s'ajouter au fardeau fiscal des entreprises, sans oublier bien sûr, les
taxes indirectes qui rejoindront les particuliers.
De plus, le transfert proposé de plusieurs centaines de millions
aux municipalités par le projet de loi 145 qui n'était pas dans
le budget de M. Levesque, il faut rappeler que ça sera financé en
très grande partie par l'Impôt foncier non résidentiel et
ça arrive à un moment où on traverse une récession
économique qui est très sérieuse. On sait tous que... On
peut en témoigner à partir des niveaux record de faillite
d'entreprises et de particuliers, du taux de chômage qui est
excessivement élevé. Notre témoignage, cet
après-midi, M. le Président, n'a pas pour objectif d'analyser les
articles de ce projet de loi un par un. C'est le lot des spécialistes.
Ils le feront bien. C'est de vous présenter notre vision de ce projet de
loi de façon très générale et nous le faisons en
trois volets.
Le premier volet est la présentation de notre analyse
financière de ce projet-là. Contrairement à ce qui est dit
sur la place publique, ce n'est pas vrai - je m'excuse de la façon dont
je le dis - que c'est un transfert de seulement 236 600 000 $. C'est un
transfert réel de 400 000 000 $ comme on le décrit dans les deux
pages qui sont là. S'il y a des erreurs de présentation, nous
aimerions le savoir. Mais en ce qui nous concerne, la façon dont on
présente les chiffres à la population nous laisse perplexes. Et
quant à nous, cette façon de présenter les chiffres ne
donne pas l'heure juste aux contribuables quant à la facture qu'ils
devront assumer. Donc, quant à nous, il est inexact de parler de 236 000
000 $. Il faut vraiment parler de 400 000 000 $. deuxième volet de notre
préoccupation, c'est ce qu'on appelle les problèmes que
soulève le projet de loi. déjà, lorsque le
ministère avait annoncé ses couleurs en décembre 1990, le
copimm à montréal avait estimé que 70 % des coûts de
la réforme seraient absorbés par les entreprises. c'était
384 000 000 $ des 545 000 000 $ dont on parlait au départ. il n'est donc
pas étonnant que le milieu des affaires se soit immédiatement
inquiété. en effet, sous le couvert d'une réforme de la
fiscalité municipale, on assistait en réalité à un
transfert massif de factures en direction des entreprises, ce qui risque fort
de réduire la rentabilité et, donc, la
compétitivité de ces dernières. les modifications
annoncées à la mi-mal ont certes soulagé en partie les
entreprises, le gouvernement décidant d'assumer 77 900 000 $ de la
facture originale et en transférant nommément une autre partie
aux particuliers, quoique dans ce dernier cas - nous insistons pour le dire -
la facture revient inévitablement à plus ou moins long terme aux
entreprises qui sont les principales créatrices de richesse. mais le
problème demeure toujours majeur pour les entreprises, m. le
président. malgré les adoucissements annoncés, elles
feront toujours les frais pour l'essentiel de la réforme. et on vous
donne un certain nombre d'exemples concrets, notamment sur le territoire de la
communauté urbaine et, hier soir, la cum disait carrément que
c'était en moyenne une augmentation de 13,1 % qu'il fallait
prévoir et on parlait même, dans certains cas, d'une augmentation
de 20 %, ce qui est énorme. est-ce le temps, donc, d'alourdir le fardeau
fiscal des entreprises après les dernières taxes annoncées
par m. gérard d. levesque, après les nouveaux coûts de la
réforme des normes du travail, les hausses inévitables de
cotisation à la CSST, etc.?
Signalons par ailleurs - et c'est une préoccupation majeure que
l'on a - M. le Président, qu'en transférant le fardeau du
financement des dépenses de fonctionnement du transport en commun aux
entreprises, le gouvernement crée une nouvelle charge fiscale dont sont
exemptées les entreprises situées au-delà des
municipalités desservies par le transport en commun, notamment
Montréal et Québec. On pourrait ainsi provoquer la
désindustrialisation de certaines zones urbaines en incitant les
entreprises à s'établir en périphérie pour
échapper à une fiscalité municipale de plus en plus
lourde. Ajoutons encore que les entreprises subiraient de plus une importante
augmentation de leurs taxes d'affaires.
Soulignons enfin, M. le Président, que le législateur
devrait, s'il doit faire cette reforme, au moins en profiter pour
considérer la possibilité, dans le cadre notamment de l'article
32, d'exclure clairement du rôle d'évaluation les
équipements servant à la protection de l'environnement.
Troisième volet et c'est encore un volet majeur, on s'en va vers
un système, mais de plus en plus complexe. Le projet de loi 145 semble
accorder beaucoup de latitude aux municipalités en proposant notamment
la coexistence de trois régimes de taxes d'affaires: valeur locative,
surtaxe foncière, permis d'affaires. Les municipalités auraient
donc la possibilité de taxer dans trois champs différents. Non
seulement le système deviendrait-il alors moins transparent et
inéquitable dans plusieurs cas, mais il serait également
inefficace car nul doute que des coûts administratifs additionnels seront
générés par l'opportunisme fiscal toujours possible dans
le choix des mesures retenues: taxe optionnelle sur le stationnement,
étalement des valeurs, droits sur les divertissements dont on vous
parlera dans deux minutes avec le témoignage de l'Association des
propriétaires de cinémas, la révision du rôle, la
réouverture des baux, etc. Il faut, par ailleurs, noter d'autres
problèmes, dont l'absence généralisée
d'informations à l'heure actuelle sur le nombre, la superficie, la
valeur des terrains de stationnement. En matière de voirie locale
également, aucune évaluation quantitative et qualitative de
l'état du réseau routier ne semble avoir été
présentée aux municipalités avant de leur faire le
transfert.
Ces quelques considérations - et on pourrait en ajouter beaucoup
d'autres - révèlent une certaine inquiétude au sujet des
mesures proposées tant quant à leur incidence financière
qu'à leur incidence administrative sur les municipalités.
La situation financière difficile du gouvernement, M. le
Président, ne nous apparaît pas une raison suffisante pour
l'exempter d'analyser en profondeur les impacts et les retombées des
mesures fiscales qu'il entend prendre à l'égard
des municipalités sans par ailleurs les avoir mises
véritablement dans le coup.
En conclusion, nous sommes convaincus que les enjeux de la
réforme proposée sont majeurs, d'où l'importance
d'éviter d'agir de façon précipitée. On se rappelle
la réforme de 1980. Plusieurs d'entre nous, ici, l'avons vécue,
cette réforme de 1980. Elle avait fait l'objet de discussions durant
plus de deux ans, ce qui témoigne, malgré tout et malgré
toute la bonne volonté possible, des difficultés qui sont
inhérentes à un dossier comme celui-là.
En raison, donc, de l'impact considérable qu'auraient les mesures
envisagées et sur les entreprises et sur les municipalités, nous
croyons toujours nécessaire de procéder à l'examen
approfondi de ce dossier, de concert avec les élus locaux et les
responsables des services publics, avant que les orientations gouvernementales
actuelles ne deviennent loi.
Et nous transmettons d'ailleurs au ministre un message qui est un
message un peu surprenant de la part d'une organisation comme la nôtre
qui, de façon habituelle, s'oppose à toute hausse des
déficits gouvernementaux. Si la réforme était
reportée, c'est un manque à gagner pour le gouvernement de plus
ou moins 100 000 000 $ pour l'année qui s'en vient. Janvier,
février, mars, à toutes fins pratiques. Nous considérons
que les répercussions, M. le ministre, seront telles, de cette
réforme-là, que nous sommes prêts à assumer un
déficit supplémentaire de 100 000 000 $ si vous acceptez de vous
asseoir avec les municipalités à l'automne pour essayer de voir
de façon permanente le règlement de ce problème-là.
Dans les contacts que nous avons eus avec les entreprises... Evidemment, vous
pouvez toujours réduire vos dépenses, mais vous nous dites que ce
n'est pas possible. Alors, compte tenu du fardeau fiscal que nous assumerons de
toute façon par le transfert, que nous assumerons en plus dans les
années qui viennent, je vous dis que c'est une proposition, en ce qui
nous concerne, qu'on est prêt à mettre sur la table.
On estime, finalement, que le report de l'adoption du projet de loi
permettrait trois choses: réaménager le cadre fiscal de
façon qu'il réponde plus adéquatement aux
préoccupations à la fois du gouvernement et des
municipalités; deuxièmement, améliorer
l'équité et l'efficacité de la fiscalité municipale
et, troisièmement, ne pas alourdir encore le fardeau fiscal des
entreprises de façon à s'assurer qu'elles demeurent
concurrentielles. Quand on parle d'entreprises, c'est beaucoup d'entreprises
surtout sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal.
Au conseil, nous avons 126 associations patronales qui nous ont donné le
mandat d'être très fermes dans la position que nous prenons. Elles
n'y voient que des inconvénients. Nous aurions pu en faire
témoigner plusieurs. Nous avons convenu de n'en faire témoigner
qu'une qui s'exprime à ce moment-ci par l'Intermédiaire du
président de l'Association des propriétaires de
cinémas.
M. Chabot (Claude): Bonjour, M. le Président. Je me
présente, Claude Chabot. Je suis président de l'Association des
propriétaires de cinémas du Québec qui regroupe environ 90
% des salles de cinéma au Québec et qui regroupe, entre autres,
les deux grandes chaînes pan-canadiennes, soit Famous Players et
Cinéplex Odéon, mais également le plus grand parc de
salles Indépendantes en Amérique du Nord et nous en sommes
très fiers. Environ 30 % des salles de cinéma exploitées
au Québec appartiennent à des Québécois et sont
indépendantes.
M. le Président, nous demandons aujourd'hui à M. Ryan de
bien respecter ses engagements publics et de retirer complètement et non
de transférer à la venue de la TVQ la taxe sur les
divertissements, dite taxe d'amusement. Je vais rapidement vous dire le
pourquoi de la chose: Par son prix d'entrée, par sa
disponibilité, soit en étant présent en région et
en zone urbaine, par la "diversion" des produits offerts - Je devrais dire "la
diversité", parce qu'au cinéma on peut voir toutes sortes de
trucs - le cinéma en salle est le seul divertissement culturel
accessible à toutes les couches de la population. Les dernières
statistiques montrent que plus d'une personne sur deux, 53 % pour dire
exactement, assiste au moins une fois par an à une représentation
de cinéma en salle. Le cinéma en salle fait partie des industries
culturelles du Québec et a été depuis plus de 10 ans
hautement subventionné à tous les niveaux par la
Société générale des Industries culturelles. De
nombreux millions ont été investis pour redorer le parc de salles
Indépendantes, surtout en région. Actuellement, il y a plus de 50
écrans de salles de cinéma qui sont en construction et la plupart
de ces écrans-là sont subventionnés par le gouvernement.
On a également subventionné la production de films au
Québec et tout ça est mis en cause avec une triple taxation.
Nous devons considérer cette triple taxation comme une
concurrence déloyale à notre Industrie. En effet, le
cinéma qui est vu chez sol par la location de vidéocassettes dans
des clubs vidéo n'a pas à affranchir cette taxe d'amusement de 10
% ni, par le fait même, la télévision à péage
que plusieurs d'entre vous doivent recevoir sur leur petit écran. Il
s'agit, encore une fois, de montrer que si cette taxe d'amusement était
transférée aux municipalités et appliquée
dès 1992, le taux de taxation d'un billet de cinéma
dépasserait l'ordre de 25 % et serait le plus important en
Amérique du Nord.
Si vous allez de l'avant avec ce projet de transfert de taxes munipales,
vous allez créer, M. Ryan, une instabilité économique dans
notre milieu, qui va réduire ou freiner tout investissement pour un
nouveau parc de salles. Vous allez
anéantir en un an tout au plus les bienfaits créés
par les millions déjà dépensés par l'État
afin de redorer ce parc de salles de cinéma.
Nous croyons, en terminant, que le résultat final sera une baisse
de fréquentation de plus de 20 % de spectateurs. M. Ryan, le
cinéma en salles est une industrie excessivement fragile. On vous prie
d'y faire attention. Merci beaucoup.
M. Dufour (Ghislain): Alors, M. le Président, ça
termine, je pense qu'on a pris exactement 15 minutes; on n'a pas grugé
sur le temps de personne.
Le Président (M. Garon): Vous avez même pris 23
secondes de moins.
Une voix: On peut continuer.
Le Président (M. Garon): Ha, ha, ha! Alors, la parole
maintenant est au ministre des Affaires municipales.
M. Ryan:... la discipline, parce que j'attendais un chiffre qu'on
doit me donner qui va me permettre de compléter mon intervention
tantôt.
Il me fait plaisir de saluer la délégation du Conseil du
patronat du Québec et de lui dire que nous apprécions vivement
l'intérêt qu'elle porte au projet que définit le projet de
loi 145. Nous aurions souhaité des commentaires plus empreints de
compréhension à l'endroit des bienfaits qu'apportera cette
législation, à tout le moins pour la santé des finances
publiques, et nous prenons acte des observations du Conseil du patronat du
Québec.
Et avant d'en venir à des considérations plus
précices, je voudrais discuter de deux aspects plus
généraux de la présentation qui vient de nous être
faite. Tout d'abord, précisons bien qu'en ce qui touche les
municipalités, quand nous parlons de 236 000 000 $, je voudrais qu'on
précise exatement de quoi il s'agit. Je pense qu'on va s'entendre, il
n'y aura pas de discussion là-dessus parce que les chiffres doivent
normalement être les mêmes pour tous les esprits de bonne foi. Nous
disons qu'il y a une facture totale de 477 000 000 $ au départ que le
gouvernement a allégé de 78 000 000 $ pour la ramener à
400 000 000 $; je pense que, là-dessus, il n'y a pas de discussion entre
nous? Ça va.
Ensuite, le gouvernement va procurer, par des décisions prises
par lui-même ou par l'Assemblée nationale, aux
municipalités des revenus d'appoint d'une valeur de 149 000 000 $, la
contribution des automobilistes au financement du transport en commun,
l'augmentation des revenus relatifs aux infractions au Code de la
sécurité routière, 20 000 000 $, plus 50 000 000 $; en
plus, il y a les droits ajustés sur les mutations immobilières.
En tout, ça fait 78 000 000 $, ça. Alors, 78 000 000 $ plus 50
000 000 $, ça fait 128 000 000 $, plus 20 000 000 $, ça fait 149
000 000 $. Les municipalités n'ont pas à bouger, elles n'ont
qu'à ouvrir la caisse et l'argent va entrer. Elles n'ont pas de
décision politique à prendre, c'est clair.
C'est dans ce sens-là que nous parions d'un résidu de 252
000 000 $. Vous, vous parlez à partir du point de vue des entreprises et
des contrats. Nous sommes d'accord là-dessus, nous sommes d'accord. Mais
ça revient à dire, si je vous comprends bien, M. Dufour, que vous
auriez préféré qu'on porte le déficit à 3
600 000 000 $ au lieu de 3 500 000 000 $. Il fallait bien mettre une limite
quelque part.
À partir du moment où le ministre des Finances met cette
limite-là à 3 500 000 000 $, il faut bien qu'on s'organise pour
que le reste fonctionne. Si vous nous demandez de refaire le budget, on peut
dire qu'on va essayer de l'améliorer pour l'année prochaine. Mais
on le fait une fois dans l'année et, après ça, il faut que
chaque ministre tire ses conclusions et marche. Et moi, je trouve que c'est
ça qui... Votre proposition nous ramène à cette
demande-là. Je la respecte, mais je suis obligé de vous dire tout
de suite, pour ne pas qu'il y ait de malentendu entre nous, qu'elle a peu de
chances d'être retenue.
C'est vrai...
M. Dufour (Ghislain): Est-ce qu'on peut réagir à
ça, M. Ryan, ou...
M. Ryan: Pardon?
M. Dufour (Ghislain): Est-ce qu'on peut réagir à
ça?
M. Ryan: J'aimerais peut-être mieux finir... M. Dufour
(Ghislain): O. K.
M. Ryan:... parce qu'il y a un président qui est un petit
peu Intolérant quant à ce qui touche le temps, et je voudrais au
moins finir...
Le Président (M. Garon): II est juste.
M. Ryan: Ha, ha, ha! Je voudrais au moins juste finir les
commentaires que j'ai à faire là-dessus. On peut discuter
à partir de là: bien, vous n'auriez pas dû le mettre sur
tel point, vous auriez dû le mettre sur un autre point, sur l'impôt
sur le revenu, la taxe de vente, tout ça... On peut faire toutes les
propositions qu'on voudra, mais le gouvernement a estimé que c'est
là que devait s'arrêter l'hémorragie déficitaire
dans cette période très difficile.
Deuxièmement, je pense que c'est important de s'entendre sur
l'ampleur de l'effort qui est demandé. J'ai démontré au
maire de Montréal ce matin, même s'il n'a pas voulu l'admettre,
que le fardeau réel, pour la ville de Montréal, nous l'estimons
à 68 000 000 $. C'est bien loin, ça, des 200 000 000 $, 300 000
000 $, 400 000 000 $
qu'on a fait miroiter dans l'esprit des citoyens. Pour l'ensemble du
Québec, c'est 236 000 000 $ plus 15 000 000 $. Je vais revenir sur la
question des droits sur les événements culturels dont a
parlé M. Claude Chabot tantôt.
À supposer que nous transférions tout ça du
côté de l'impôt foncier sur les entreprises, l'augmentation
de la charge pour les entreprises de la région de Montréal, de
l'île de Montréal, ça représenterait un
accroissement de leur fardeau fiscal de 2, 4 %, le fardeau fiscal total.
Et tous ceux qui ont regardé ça avec nous se rendent
compte que ce n'est pas aussi énorme que l'a dit une certaine
propagande, en tout cas. On peut toujours dire que ça serait mieux 0,
c'est entendu, ça serait mieux -2. J'aimerais mieux -2, moi. Mais il
faut quand même qu'on soit réaliste et qu'on regarde l'idée
de l'importance.
Puis si on prend ça à l'ensemble du Québec, ce qui
est impossible, à l'échelle de l'ensemble du Québec,
ça va être impossible d'appliquer tous ces montants-là
à l'impôt sur les entreprises, parce que vous allez dans des
villages de 1000 personnes, 500 personnes, il y a un magasin
général, il y a une petite boutique de ceci, de réparation
d'automobiles, ou de ceci ou de cela, ils n'ont pas les moyens d'aller chercher
beaucoup d'argent de ce côté-là. Il va falloir qu'ils
aillent en chercher sur le foncier général. Et même la
majeure partie, dans un bon nombre de municipalités de petite taille,
devra être puisée de ce côté-là.
On a fait les calculs, ce que ça représenterait
d'augmentation sur le compte de taxes moyen, dans chaque municipalité du
Québec. Il y a certains ajustements que nous continuons de faire, mais
notre objectif, c'est de ramener le montant à un niveau raisonnable,
à un niveau acceptable. Puis si nous allons de ce
côté-là, en partie, d'abord les 236 000 000 $ qui sont
demandés aux municipalités, ça représente
très peu par rapport au déficit du gouvernement pour la
présente année. Le déficit va être de 3 500 000 000
$. 236 000 000 $ sur 3 500 000 000 $, ça fait à peu près 7
%. C'est ça, la partie que nous demandons aux municipalités,
d'assumer sous forme de charge fiscale accrue, dont elles auraient la
responsabilité politique. Et nous l'avons réduite au minimum,
encore une fois. Mais je voudrais vous poser une question à ce
sujet-là: Est-ce que vous ne trouvez pas qu'avec ces précisions,
situer le problème dans sa juste perspective, selon moi, le gouvernement
fait un choix qui est à tout le moins défendable dans la
conjoncture où nous sommes? (16 heures)
M. Dufour (Ghislain): II y a un certain nombre de commentaires,
M. le ministre. Vous avez précisé vous-même, et je
l'apprécie, que nous ne représentons pas ici l'Union des
municipalités, les MRC ou la Communauté urbaine, nous parlons de
façon provinciale des entreprises qui peuvent être
concernées par le dossier et, à cet égard-là, c'est
400 000 000 $ parce que si ce ne sont pas les entreprises qui paient, ce seront
les particuliers et, je l'ai dit dans ma présentation - ça
revient toujours, dans le fond, à la pale du vendredi - si tu augmentes
les Impôts fonciers, c'est évident que les entreprises vont
être mises à contribution à un moment donné. C'est
400 000 000 $ que les entreprises devront absorber. Évidemment, vous
posez la question des choix politiques et elle est bien posée, vous la
posez vous-même. Sauf qu'il faut faire les bons choix politiques à
un moment donné et ce n'est peut-être pas le meilleur qui a
été fait.
Il aurait peut-être pu y avoir des baisses dans d'autres secteurs
et peut-être y avoir ici une considération plus importante, par
exemple, pour le transport en commun. Vous dites que c'est seulement 68 000 000
$, je ne sais pas, ce n'est pas ce que nous dit la STCUM puis elle vous le dira
ce soir. Sauf que le désengagement total du gouvernement dans le
transport en commun, pour nous, n'est pas acceptable parce que les entreprises
ont besoin du transport en commun, les citoyens, évidemment, mais ce
sont des travailleurs aussi, ces mêmes citoyens-là.
Dans ce sens-là, il faut bien que vous compreniez aussi la
proposition qu'on vous faisait tout à l'heure d'ajouter 100 000 000 $:
on l'accompagnait d'une réserve fondamentale, M. Ryan, qui était
de dire: Vous vous asseyez avec les municipalités à l'automne et
vous solutionnez de façon permanente ce problème-là. On
est prêt à mettre 100 000 000 $ additionnels dans le
déficit, si vous le réglez de façon permanente parce qu'on
pense que le système cafétéria que vous proposez
actuellement aux municipalités va nous coûter pas mal plus
à long terme que ce qui est sur la table aujourd'hui.
Alors, c'est évident que ce sont des choix politiques qu'on doit
faire mais ce n'est probablement pas le meilleur choix que vous faites quand
vous vous êtes désengagé notamment du transport en
commun.
M. Ryan: Maintenant peut-être un petit mot à propos
des divertissements culturels. Là, ce que M. Chabot remet en cause, si
je comprends bien, c'est la taxe sur les produits et services et la taxe de
vente du Québec. C'est là qu'est l'origine du problème. Et
quand le gouvernement, dans ses propositions du 14 décembre, avait
décidé d'abolir les droits sur les divertissements culturels,
c'est parce qu'il se rendait compte de l'impact considérable de la TPS
et de la TVQ sur les spectacles ou les promoteurs d'événements
culturels. Mais là, les municipalités ont protesté puis,
dans l'ensemble de propositions que le gouvernement faisait aux
municipalités, iI y avait des solutions de rechange. Il y a un groupe
qui est venu nous voir et qui nous a dit: De tout ce que vous proposez aux
municipalités, c'est un
potentiel fiscal supérieur à 500 000 000 $. puis nous
l'admettons, c'est vrai. si, théoriquement, tout ce qui est
proposé était utilisé à 100 %, ce qui n'arrive
pratiquement jamais, ce qui n'est sûrement pas arrivé dans le cas
de l'impôt foncier depuis 10 ans. on disait: ça fait partie du
"package" ç% c'est tout l'ensemble.
Mais là, il y a eu des protestations vociférantes puis on
nous a dit: Vous allez nous enlever l'argent dont on se sert pour aider la vie
culturelle dans nos territoires. Puis, on nous a présenté toutes
sortes d'arguments auxquels nous avons été sensibles puis
là, nous avons dit: Nous allons le rétablir, ce
programme-là, droits sur les événements culturels, sur le
divertissement, en prévoyant cependant que certains divertissements
pourront être exemptés sur réglementation gouvernementale.
C'est là qu'arrive le problème des salles de cinéma.
Seront-elles incluses dans la réglementation gouvernementale qui
acceptera certaines formes de divertissement, des droits que les
municipalités pourront toucher? La question est ouverte, puis c'est pour
ça que les arguments que vous pouvez nous présenter
là-dessus nous intéressent. Nous les écoutons avec
attention. Mais la question n'est pas décidée.
M. Chabot: On va vous remettre, M. Ryan, dans les jours à
venir, un dossier encore plus complet sur le sujet. Je vous remercie de
l'attention que vous portez au problème. Il n'en demeure pas moins que
j'espère que vous êtes conscient qu'il est carrément
injuste que cette industrie-là soit plus taxée que d'autres
Industries concurrentielles à cette industrie-là, et que, quand
on arrive à parler de 26 % de taxes, finalement, dans une Industrie qui
est déjà boiteuse, vous le savez, puisque sans ça vous ne
seriez pas à leur donner des subventions énormes, c'est vraiment
engager un processus final à plus ou moins court terme pour cette
industrie-là.
Et si ce n'était pas cela, on ne serait pas aujourd'hui en train
de brailler, parce que tantôt vous faisiez la remarque qu'on était
assez braillard de nature, il ne reste pas moins qu'en 1984 on avait
été condamné par tous les journaux comme une industrie du
passé qui ne survivrait pas à la venue des nouveaux moyens de
communication, la vidéocassette; on est encore là aujourd'hui.
Mais, s'il vous plaît, ne poussez pas trop fort, parce qu'on va vraiment
disparaître.
M. Ryan: Très bien, j'en ai pris note, soyez assuré
que la ministre des Affaires culturelles, si le ministre des Affaires
municipales avait la moindre tentation de l'oublier, elle le lui rap-pelerait
toujours avec la vivacité que vous lui connaissez comme moi.
M. Chabot: Merci.
M. Ryan: Juste un dernier point, parce que la demande centrale du
mémoire porte sur un moratoire. M. Dufour nous dit, avec toute son
amabilité: Reportez donc ça à demain. Nous ne pouvons pas
reporter ça à demain, M. Dufour, parce que c'est maintenant que
l'action doit se poursuivre en faveur du redressement des finances publiques,
et pas dans six mois. Puis cet exercice-ci a des implications
considérables, nous en convenons, et des implications dont les principes
n'ont été mis en question par personne. On peut discuter de la
méthode qu'on aurait aimée, très bien, ça. Mais les
grands objectifs de fond qui sont poursuivis par la réforme, il n'y a
personne qui peut les remettre en question sérieusement.
Nous nous disons: Mieux vaut procéder maintenant avec ce point de
fond parce que, après cette année, la conjoncture politique ne se
prêtera plus à de tels exercices avant les prochaines
élections générales. C'est mon interprétation, je
pense qu'il faut frapper quand c'est le temps, il faut agir quand lés
choses sont prêtes. Là, ça fait un an et demi qu'on discute
ça, ça ne fait pas seulement six mois, ça fait un an et
demi. Tout le monde a eu le temps de donner son opinion en masse, puis le
gouvernement a eu tout le temps voulu pour rectifier son tir, si on lui avait
fait la preuve qu'il était complètement dans les patates. Mais
dans les proportions, somme toute, raisonnablement limitées que
revêt de facto le projet - puis on s'entend sur les chiffres, il n'y a
pas de discussion - je ne peux pas vous laisser entrevoir que je ferai une
proposition semblable au gouvernement. Vous avez d'autres recours.
M. Dufour (Ghislain): Nous laisser entendre que?
M. Ryan: Que je ferai une proposition semblable à ia
vôtre au gouvernement, en faveur d'un moratoire.
M. Dufour (Ghislain): On sera déçu, parce qu'on
pense que ce dossier-là, c'est vrai, vous avez raison de dire qu'il a
beaucoup été discuté. Vous avez raison aussi dans
l'argumentation quand vous dites que certaines sociétés de
transport, par exemple, pour ne pas en nommer - vous les avez nommées,
vous savez à quoi je fais référence - seront
peut-être plus prudentes dans l'évaluation de leurs coûts.
Nous aussi, on a réagi très mal lorsqu'on a donné la
semaine de quatre jours dans le public alors que le privé ne l'a pas,
que ce sont les travailleurs du privé qui la paient. Bon, on a ce genre
de réaction là, on a ce genre de réaction là quant
à certaines dépenses municipales. Ça, là-dessus,
vous avez parfaitement raison, on ne critique pas là-dessus.
On discute la facture de 400 000 000 $, ou prenez simplement les 50 000
000 $. Comment les
municipalités vont se répartir ça entre elles? Moi,
je demeure à Boucherville, je passe par Longueuil, je prends le pont
Jacques-Cartier, puis j'entre en ville. Ça va être quoi, ma
quote-part? On entend ça tous les matins des conseillers municipaux, M.
le ministre, qui sont nos membres aussi. C'est parce que c'est le même
monde, là, qui trouve que ça va être absolument non
gérable, c'est une réforme complexe. Et, dans ce sens-là,
est-ce qu'il faut y aller rapidement, quand c'est difficile, c'est
complexe?
Je comprends parfaitement le problème des finances publiques, ce
n'est pas à nous que vous allez dire ça et, dans ce
sens-là, on partage la préoccupation de l'assainissement des
finances publiques au niveau municipal, au niveau provincial, puis il faudrait
ajouter le fédéral. Mais il reste quand même qu'un meilleur
débat aurait été souhaitable, et nous le souhaitons
encore.
Le Président (M. Garon): Comme le temps dévolu au
parti ministériel est écoulé, c'est maintenant le tour de
l'Opposition officielle.
M. Dufour (Jonquière): Merci, M. le Président, le
ministre vient de le dire, il faut frapper quand c'est le temps. Je pense que
ce n'est pas nous autres qui lui avons arraché les paroles de la bouche,
c'est lui-même qui a dit: iI faut frapper quand c'est le temps. Je pense
que le Conseil dit: iI faut le faire, parce que... C'est une des rares fois que
le Conseil du patronat et l'Opposition officielle sont sur la même
longueur d'onde. Il n'y a pas de désaccord dans le fait de dire que la
réforme est prématurée, qu'elle est mal ficelée,
qu'elle cause des problèmes, puis qu'elle s'inscrit avec tous les
intervenants.
M. le ministre, on va l'investir de la mission d'un missionnaire, du
missionnariat, parce qu'il va être obligé de la vendre, sa
réforme, et chaque groupe qui a passé ici depuis hier, que ce
soit l'Union des municipalités, la Communauté urbaine, la Chambre
de commerce, l'Institut de développement urbain du Québec, la
ville de Québec, la Chambre de commerce de Montréal
métropolitain, le Conseil québécois de commerce du
détail - avec une nuance... la Fédération des policiers,
mais encore, ils avaient beaucoup à redire sur la réforme -
Saint-Romuald, qui était, au point de vue... la Communauté
urbaine de Montréal, la ville de Montréal et vous autres... Je
pense qu'on est rendu à un bon nombre, ça commence à
être représentatif. Il semble que la façon de compter soit
différente dépendamment du côté où on est.
Moi, j'ai toujours pensé que, globalement, c'est toujours la même
poche du contribuable.
Je veux juste vous dire qu'il y a un article, ici, qui dit que la
famille moyenne paie à Ottawa 1530 $ de plus qu'en 1984. Je serais
curieux de savoir, au Québec, ce qu'on paie depuis 1985. On ne parlera
pas de 1984, on va laisser les problèmes où ils doivent
être et bien placés. 1530 $ de plus. c'est certainement autant au
point de vue du québec. les contribuables, ils le disent: on n'en a
plus, d'argent. les entreprises, vous le dites: on n'en a plus. et je trouve
que vous avez une offre importante ou raisonnable à l'effet que: on est
peut-être prêts à mettre des 100 000 000 $ sur la table, on
ne chiquera pas la guenille, là, et refaites vos devoirs. et nous
autres, on pense que oui, ça doit être fait comme ça. on le
sait qu'il y a peut-être un manque à gagner chez le gouvernement
mais ça fait déjà un bout de temps qu'on voyait venir la
récession. ce matin, il y a quelque chose qui nous a frappés dans
le mémoire de la ville de montréal. imaginez-vous, depuis hier,
on entendait cet argument du ministre. aie! écoutez un peu, à la
ville de montréal, ils sont mieux placés que nous autres, ils ont
sum - eux autres - l'augmentation du coût de la vie pour l'augmentation
des dépenses et québec n'a pas été capable de
contenir ça. donc, dans les dernières années, le
gouvernement du canada était à 8, 5 %. le gouvernement du
québec à 7, 2 %, l'ensemble des municipalités à 7,
3 %, montréal à 6, 1 %. et montréal est venue nous dire:
avec les 30 % de chômeurs et la pauvreté, etc. - et c'est le maire
de la ville de montréal qui nous dit ça - on a contenu nos
dépenses au maximum, tant qu'on a pu, mais ce ne sont pas les besoins
qui manquent. bien là, on vient de le pénaliser parce qu'on lui a
dit: aïe! t'as une marge de manoeuvre dans ton budget; la preuve, c'est
que le tien a été moins élevé que les autres.
Je ne sais pas si c'est la prime à l'excellence, je ne sais pas
si on appelle ça la variation qualité-prix. Moi, je suis un peu
estomaqué de voir les calculs qu'on est en train de faire, là. Ce
sont des calculs absolument mercantiles parce qu'on n'en parle plus, de la
réforme, on parle d'un délestage de taxes sur le dos des
entreprises et des gens.
Et vous avez touché juste, dans votre mémoire, lorsque
vous avez parlé de la réforme de 1980. La transparence et la
neutralité... C'est vrai que ce n'était pas une réforme
parfaite, mais tout le monde s'y reconnaissait. Il n'y a personne qui pouvait
dire: La taxe, est-ce qu'elle est Imposée par Québec ou la
municipalité? C'était clair, le champ de taxation était
bien identifié. Et encore là, iI y a peut-être eu des abus
mais on ne corrige pas une chose qui va bien, où tout le monde s'entend,
par un fouillis où personne ne va se comprendre. Et je vous dis:
Honnêtement, je suis malheureux de ce qui se passe parce que j'ai
travaillé, moi, à la réforme, et il y en a d'autres, ici,
autour de la table. Ils étaient des artisans de cette
réforme-là. Et on avait pensé avoir trouvé,
peut-être pas la pierre philosophale, mais au moins, on a pensé
qu'on avait trouvé quelque chose à quoi les gens pouvaient
s'identifier. Et là, on vient de tout foutre ça en l'air, que ce
soit le transport en
commun ou les autres. je voudrais juste... je vais vous poser quelques
questions, bien sûr, et la première, ce serait: qu'est-ce que vous
pensez, par exemple, de la façon... vous venez présenter un
mémoire, vous mettez 100 000 000 $ sur la table et vous demandez vn
moratoire au ministre. ça fait deux jours qu'on entend la même
chose de la plupart des intervenants et le ministre demeure inflexible. mol, je
vous demande: comment vous vous sentez vis-à-vis des propositions?
ça coûte quelque chose, préparer un mémoire, vous
venez ici, ce n'est pas pour le fun. est-ce que vous vous attendiez à ce
que le ministre varie d'un iota ou si c'est juste une parade qu'on est en train
de faire pour... et là, je vous demande une opinion, vous n'êtes
peut-être pas obligé de répondre mais... en tout cas, moi,
je vous dis: si j'étais à votre place, là...
M. Dufour (Ghislain): Ha, ha, ha!
M. Dufour (Jonquière): Écoutez un peu. Moi, je veux
bien tuer du temps, là, mais je trouve ça "toffe".
M. Dufour (Ghislain): Maintenant, j'ai fait beaucoup de
commissions parlementaires. C'est très rare que je suis sorti avec une
réponse à mes préoccupations, quel que soit le
gouvernement. Alors, dans ce sens-là, j'ai au moins quelque chose de
correct de la part de M. Ryan vis-à-vis des propriétaires de
cinémas. Parce que le point qu'on a fait...
M. Dufour (Jonquière): Mais ce n'est pas sûr que
ça va être correct.
M. Dufour (Ghislain): ...que le cinéma était partie
de la culture et que, par réglementation au moins, c'est un secteur qui
peut être satisfait de la démarche qu'on fait. Evidemment,
qu'est-ce que vous voulez, c'est évident que le ministre a le dernier
mot. Je le connais, c'est un habile stratège, ce n'est pas à nous
qu'il va dire aujourd'hui qu'il est déjà prêt à
faire des compromis. Il va au moins attendre la fin de la commission. Mais je
suis sûr qu'à la fin de la commission, ça aura
cheminé. (16 h 15)
M. Dufour (jonquière): mais vis-à-vis du transport
en commun, vous n'avez pas voulu entrer dans les détails, bien
sûr, mais il y a une taxe qui est proposée, qui s'appelle la taxe
sur le stationnement. sous toutes ses faces, moi, je pense que c'est
inapplicable. montréal a insisté là-dessus, la ville de
québec a insisté. on parle plutôt d'une taxe à
caractère régional, à cause des inéquités,
des espaces, des coûts supplémentaires pour les petits commerces.
c'est ça qui va arriver, les petites entreprises, on va les
étouffer. ça, on en est convaincus. puis il y a une
récession économique en même temps.
M. Dufour (Ghislain): Nous non plus, on n'est pas d'accord avec
la taxe sur le stationnement, je vous le dis. Et ça, c'est le genre de
taxe dont le coût est transféré de façon automatique
à l'entreprise, parce que c'est évident que ça va
être comme n'importe où ailleurs, quand on veut attirer le client,
on donne un bon de stationnement; on va l'assumer en presque totalité.
Je ne pense pas, je n'ai pas vu le mémoire du Conseil
québécois du commerce du détail, mais il devrait
carrément s'opposer à une taxe sur le stationnement parce que ce
sera excessivement difficile de l'appliquer, ce sera non gérable et
c'est un coût carrément transféré aux entreprises.
Alors, ça, on n'est pas d'accord avec ça.
M. Dufour (Jonquière): Peut-être un point, à
la page 6 du mémoire. C'est peut-être... Ça peut sembler
pas important, mais, moi, je pense que c'est un élément important
que vous soulevez en disant: Dans le cadre de l'article 32 ou de tout autre
à convenir, d'exclure clairement du rôle d'évaluation les
équipements servant à la protection de l'environnement. Sur quoi
vous basez-vous pour...
M. Dufour (Ghislain): Alors, je suis très heureux que vous
souleviez ça parce que, dans la discussion avec M. Ryan, on n'a pas
abordé ce point-là.
M. Dufour (Jonquière): Mais vous comprenez pourquoi. Ha,
ha, ha!
M. Dufour (Ghislain): C'est tout le contenu de l'article 32, dans
le fond, qui est très difficile à comprendre si on n'est pas un
fiscaliste, où on semble régler le problème des
raffineries. Sauf que le problème de l'article 65.1 de la loi actuelle,
qu'on veut régler en partie par l'article 32, ne concerne pas que les
raffineries. Il concerne les forestières, il concerne les
minières, il concerne la pétrochimie. C'est un débat que
le projet de loi, quant à nous, si on comprend bien, ne règle
pas. Il règle le problème des raffineries pour l'essentiel. C'est
peut-être heureux que ça n'ait pas été
réglé parce que c'est un dossier très complexe. Donc,
c'est un ajout, M. Dufour, que l'on fait quand on parle de ça.
On est en demande, nous, auprès du ministre des Finances, depuis
je ne sais plus combien d'années, trois, quatre ans, pour dire: On est
d'accord avec la protection de l'environnement. Il faut que nos entreprises,
pour le futur en tout cas, s'ajustent à une réalité,
à une technicité moderne, etc., mais ça, ça demande
de l'argent. Alors, il faut que les entreprises investissent dans la nouvelle
technologie pour la protection de l'environnement.
Alors, la demande que l'on a faite ici, n'ayant pas, à ce jour,
reçu le support de M. Levesque, on la transfère au ministre ici
parce
que cette taxation-là, elle se fait par les municipalités
au niveau de l'impôt foncier, en très grande partie. Et on dit
dans les débats que vous avez pensé exclure du rôle
d'évaluation, mais clairement, les équipements servant à
la protection de l'environnement. Actuellement, les entreprises, comme vous le
savez, ont des difficultés économiques énormes, on est
exigeant au niveau de la protection de l'environnement, donnons-leur - j'ai
juste l'expression anglaise, un "free ride* - une chance de réduire
leurs coûts de production.
Je pense que le gouvernement, dans le dernier discours inaugural,
soulevait cette possibilité d'aider les entreprises, justement au niveau
de l'équipement de protection de l'environnement. Voici une belle
occasion de le faire.
Mme Marois: Merci, M. le Président. S'il vous plaît,
moi, j'aimerais ça que le ministre soit un peu sensible, effectivement,
à vos arguments qui viennent s'ajouter - à votre argumentation
d'ailleurs - à ceux qu'ont proposés un bon nombre d'intervenants
jusqu'à maintenant. Dans le fond, ce qui lui est dit, c'est: Nous avons
atteint un délicat équilibre, nous sommes prêts à le
revoir, cet équilibre, et nous sommes conscients que le gouvernement a
des problèmes. Il n'y a pas un intervenant qui n'a pas dit: On est
prêts a travailler avec le ministre, sauf qu'on dit: Le moment n'est pas
pertinent et, moi, je vais en remettre là-dessus. Parce que je sais
qu'on a haussé d'une façon assez significative les taxes aux
entreprises depuis deux ans. On prévoit, une croissance, une baisse
plutôt du produit intérieur brut de l'ordre de 1, 4 % cette
année. On va être en plein début de reprise et on va encore
contribuer à saccager l'économie par une telle taxe.
Alors, il y a la pertinence du moment, il y a la pertinence des moyens
et, à ce propos, j'aimerais que vous illustriez un peu cette notion de
cafétéria parce que vous utilisez ce terme-là en disant:
On aura le droit de choisir à peu près n'importe quel
système. J'aimerais ça que vous illustriez ça, mais je
vais terminer ma phrase en disant: Pertinence du moment, des moyens et
inadéquation dans la façon de faire parce que effectivement, il y
a devant nous de la bonne volonté de la part de tous les intervenants de
dire: Nous allons regarder en profondeur cette question-là, et nous
sommes prêts à dire: Oui, il y a une contribution de notre part
à apporter, mais on ne veut pas se faire Imposer d'une façon
absolument inacceptable une nouvelle façon de prélever la taxe,
de nouveaux outils qui vont être complètement inacceptables sur le
territoire en termes d'équité. Et c'est ça qui est dit au
ministre, dans le fond. Moi, j'aimerais qu'il soit sensible un petit peu
à ces questions que vous soulevez et que d'autres avant vous ont
soulevées: cafétéria.
M. Dufour (Ghislain): II est question de
cafétéria... Je comprends que le ministre ne veuille pas non plus
Imposer aux municipalités des choix très stricts. On comprend
ça, d'une part, mais, d'autre part, il laisse aux municipalités
un certain nombre de choix: le choix pouvant donc varier d'une
municipalité à l'autre, certaines y allant plus
allègrement du côté de l'Impôt foncier des
particuliers, d'autres, des entreprises. Il n'est pas sûr qu'à
Laval ils feront une taxe sur le divertissement, genre cinéma, parce
qu'il y a bien des divertissements. Une autre pourra y aller d'une taxe
optionnelle sur le stationnement parce qu'elle est optionnelle. C'est ce que
l'on appelle le système cafétéria, qui fait que ça
va être très complexe et qu'à un moment donné, dans
la décision d'une entreprise de s'Installer à quelque part ou
pas, elle devra tenir compte de ça, surtout, soit dit en passant, du
transport en commun, parce que c'est là que va être l'essentiel de
la facture.
Or, on plaide, nous, on l'a dit publiquement, on l'a
présenté sous forme de mémoire au maire Doré il n'y
a pas tellement longtemps, l'économie du Québec va quand
l'économie de la Communauté urbaine va. C'est là que se
fait le développement et c'est là que c'est
généré, en tout cas pour la périphérie de
Montréal. Il ne faudrait pas assister à un étalement
urbain, à un transfert d'entreprises vers l'extérieur, ce serait
dommageable. Je ne veux pas jouer à la catastrophe, là, et dire
que ça va être le cataclysme. Je ne dis pas ça, là,
mais tous ceux qui regardent ce dossier-là, les municipalités et
les conseillers municipaux, puis je vous rappelle que bon nombre de ces
gens-là viennent de nos milieux, et les gens d'affaires, les
conseillers, nous disent tous: II y a un risque d'un transfert vers les
périphéries. Et ce ne serait pas positif, en tout cas pour la
Communauté urbaine de Montréal.
M. Léonard: M. le Président...
Le Président (M. Garon): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci. M. le Président. MM. les membres
du Conseil du patronat, je prends note d'abord de ce moratoire, et je voudrais
vous questionner là-dessus, mais avant, je voudrais prendre acte du
plaidoyer, en tout cas de la reconnaissance que vous faites de l'Importance du
transport en commun et des dangers de l'étalement. Et ça je pense
que je n'ai pas entendu ça très très souvent de la part du
Conseil du patronat, ça me paraît, en tout cas...
M. Dufour (Ghislain): On n'en a jamais discuté.
M. Léonard: C'est peut-être ce qui est
arrivé, mais c'est parce que c'est très important, et je pense
que ça a des conséquences pour
l'avenir. Vous demandez un moratoire, et je voudrais établir une
relation avec certains éléments du discours sur le budget. Je
suppose que vous avez lu que l'an prochain le gouvernement entendait faire des
compressions budgétaires de 1 224 000 000 $, et donc je comprends que
vous avez compris que ce qui est annoncé cette année, c'est le
début d'autre chose aussi et, en quelque sorte, ça risque
d'être la queue du dragon. Je suppose que vous pensez, et que vous vous
êtes posé la question, à savoir si dans le montant de 1 224
000 000 $ il y en avait encore 200 000 000 $, 300 000 000 $, 400 000 000 $ ou
500 000 000 $ qui revenaient aux municipalités. La question de fond,
finalement, sur une période de temps, c'est: Est-ce qu'il y aura un
transfert significatif, pour ne pas dire massif, des sources d'Impôt sur
le revenu vers la prise en charge par les institutions locales, en termes
d'impôt foncier? Et quel en est l'impact sur les entreprises du
Québec?
M. Dufour (Ghlslaln): On a déjà assez de
misère à absorber ce qui se passe aujourd'hui qu'on n'a pas
regardé tellement ce que sera la réalité avec le 1 200 000
000 $, M. Léonard. Mais là-dessus, je dois établir un
principe qu'on a chez nous, c'est que le transfert des responsabilités
vers les municipalités, on est totalement d'accord, on se comprend bien
là-dessus.
M. Léonard: Oui, c'est correct.
M. Dufour (Ghlslain): Ce à quoi on s'attendrait, si tu
prends 400 000 000 $ et que tu coupes, bien, à ce moment-là,
c'est qu'on réduise d'autant les dépenses, en haut, parce que
sinon on pale deux fois. Ce n'est pas 400 000 000 $, c'est 800 000 000 $, dans
le fond. Alors, c'est ça le problème, et c'est évident
qu'on peut être inquiet pour le futur. Le gouvernement n'a d'aucune
façon indiqué où II ferait ses coupures. Je peux
comprendre qu'au gouvernement, ce sera difficile au niveau des arbitrages mais
c'est évident qu'on aura encore l'argument, l'an prochain, que parce
qu'il y a moins d'argent qui vient du fédéral, on est
obligé d'en donner moins aux municipalités. Ça, je pense
que ça fera partie du discours politique de l'an prochain. On peut
s'attendre à ça.
Le Président (M. Garon): On veut remercier les
représentants du Conseil du patronat puisque le temps dévolu aux
deux partis est écoulé,
M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Merci, M. le
ministre et...
Le Président (M. Garon): J'appelle immédiatement
les Intervenants représentant la Confédération des
syndicats nationaux à la table des délibérations.
Alors, comme les Intervenants de la Con- fédération des
syndicats nationaux sont arrivés avec M. Larose, je lui demanderais de
nous présenter nos invités en lui rappelant qu'il a 45 minutes au
total, comprenant normalement un tiers du temps, 15 minutes, pour
l'intervention de la Confédération, 15 minutes pour le parti
ministériel, 15 minutes pour le parti de l'Opposition. Maintenant, vous
pouvez prendre plus de temps, mais il sera soustrait des interventions des deux
partis politiques et, si vous en prenez moins, on ajoutera autant de temps
à leurs interventions dans une proportion égale. À vous,
M. Larose.
Confédération des syndicats
nationaux
M. Larose (Gérald): Merci, M. le Président. Alors,
je vous présente à ma droite, Mme Claudette Carbonneau qui est la
secrétaire générale du Conseil central de Montréal;
à ma gauche, M. François Juneau qui est le secrétaire
général de la Fédération des employés des
services publics affiliés à la CSN.
On vous a fait parvenir tardivement ce matin un mémoire de 25, 26
pages construit en trois volets comprenant celui, d'abord, de camper la
réforme du ministre, ensuite, un deuxième volet qui en critique
les principaux éléments et un troisième volet qui y va
d'une proposition alternative pour rencontrer des objectifs
économiques.
On sait que la réforme touche trois secteurs d'activité:
celui de la sécurité, celui de la voirie, celui du transport en
commun. On vous dit d'entrée de jeu que ce qui nous intéresse en
très haute priorité, c'est plutôt le transport en commun
et, donc, l'ensemble de l'analyse et des propositions fait davantage
référence à ce secteur-là. (16 h 30)
Comment qualifier la proposition du ministre? Je ne voudrais pas
être indélicat et employer des mots qui sont trop chargés,
mais il est évident que cette proposition est une proposition
rétrograde, réactionnaire, qui va à contresens, même
en terre d'Amérique. On rappelle qu'il y a au moins 30 États des
États-Unis et la province de l'Ontario qui investissent maintenant dans
le transport en commun, et particulièrement les 30 États des
États-Unis, pendant plusieurs années, ont abandonné cette
activité-là, et maintenant ils en découvrent les vertus
notamment économiques.
Ce n'est pas vrai que l'avenir des grandes agglomérations est
faite d'une proposition comme celle que le ministre avance. Ce n'est pas vrai
que la proposition rencontre des conceptions qu'on peut avoir du
développement urbain, notamment au chapitre de l'étalement et
surtout des infrastructures que cet étalement oblige, avec des
coûts économiques et sociaux très importants. Ce n'est pas
vrai que cette proposition rencontre des préoccupations
d'environné-
ment. Quand on sait qu'un plus grand achalandage des automobilistes
entraîne du bruit et de la pollution qui entraînent des
problèmes de sécurité, de santé, de vieillissement,
pas rien que du personnel mais aussi des bâtiments et des
infrastructures.
Ce n'est pas vrai qu'une proposition comme celle du ministre rencontre
des critères économiques. La valorisation du transport
privé, ou la dévalorisation du transport public, est un
coût économique brut important pour la société. Ce
n'est pas vrai non plus que la proposition du ministre rencontre des objectifs
d'équité sociale. Il faut se rendre compte que, dans la seule
région métropolitaine, 25 % des ménages sont sans auto, 33
% des ménages sont sans auto sur le territoire de la Communauté
urbaine, 40 % des ménages sont sans auto dans la ville de
Montréal, 59 % des ménages sont sans auto à la
périphérie du centre-ville de Montréal et 62 % des
ménages sont sans auto au centre-ville de Montréal.
La réforme du ministre ne rencontre certainement pas des
objectifs d'équité. En même temps que la réforme du
ministre ne peut pas rencontrer des objectifs de développement
économique qui supposent qu'on fait toute une série de gestes
pour maintenir dans les centres urbains à la fois des facilités
pour la localisation des entreprises, mais en même temps une
main-d'oeuvre jeune qui, au lieu de déserter, demeure dans les grandes
agglomérations. Et au chapitre de la fiscalité, si on est
d'accord pour dire que la fiscalité devrait normalement refléter
des choix que nous faisons comme société, si on accorde à
la fiscalité le pouvoir d'influencer les comportements individuels et
collectifs, si pour nous la fiscalité est aussi un instrument de
redistribution de la richesse dans une société en même
temps qu'un outil de promotion du développement économique, nous
pensons que la grille fiscale derrière la proposition que le ministre
supporte est absolument régressive et contre-productive.
À ce chapitre, le problème demeure, pour cette commission
comme pour bien d'autres commissions ou d'autres débats: Quand
allons-nous pouvoir faire le vrai débat sur la fiscalité, en
prenant le problème par le gros bout, et non pas par une série de
petits bouts? Dans ce sens-là, la CSN est d'avis qu'il n'y a plus de
solution dans la rationalisation des dépenses. La seule rationalisation
qui n'a pas été faite jusqu'à maintenant, c'est celle du
chevauchement des juridictions fédérales-provinciales. Les
finances publiques, et la crise endémique des finances publiques font la
preuve aujourd'hui qu'il y a précisément un gouvernement de trop
- les Québécois savent un peu lequel - et qu'il y a
peut-être effectivement quelques centaines de milliards de dollars qui
traînent dans ce type de chevauchements.
Mais en dehors de ça, il n'y a pas de solution miracle, le
problème demeure un problème de revenus, et ce n'est pas une
maladie honteuse que de parler des impôts et des taxes. Ce qui l'est un
peu plus, c'est le caractèro inéquitable de ces mêmes
impôts et de ces mômes taxes. De cela, nous voudrions discuter un
jour globalement. C'est ce qui nous amène à vous faire une
série de propositions, M. le ministre, qui visent deux objectifs:
d'abord, maintenir un financement national de ce service public essentiel
qu'est le transport en commun et vous faire une proposition qui a aussi des
caractéristiques d'incitatif et de valorisation du transport en commun.
D'abord, iI est proposé que la carte mensuelle, ce qu'on appelle la CAM
dans la région de Montréal mais la CAL ailleurs, que la carte
mensuelle soit déductible pour les entreprises qui la paient pour leurs
employés en même temps que pour les individus qui s'en
prévalent. Nous n'avons pas chiffré cette proposition. Elle
viendra en bonus par rapport aux 262 000 000 $ que nous vous proposons d'aller
chercher par d'autres méthodes.
La deuxième proposition, oui, une taxe sur le stationnement
chargée aux entreprises et aux centres commerciaux à l'exception
du stationnement résidentiel et des parcs Incitant à
l'utilisation du transport en commun. Ça génère, tout de
go, 100 000 000 $. Oui, nous proposons également un relèvement du
prix de l'immatriculation, pour les voitures privées, de 30 $, pour les
voitures commerciales, de 75 $. Nous rappelons que les choix valorisant le
transport public qu'il nous faut faire doivent se faire aussi en mettant une
certaine pression sur le transport privé et que, collectivement,
l'ensemble des sommes que nous mettons dans le transport privé: routes,
autoroutes, ponts, asphalte précédée de ciment, ajout
d'asphalte pour boucher les trous, bref, nous dépensons
énormément pour le transport privé, beaucoup moins pour le
transport public.
Nous proposons que vous déviiez ou que vous soustrayiez, dans le
dernier budget, l'équivalent de un sou sur l'essence pour le consacrer
au transport en commun. Ça génère 80 000 000 $. En
même temps, relever à une situation antérieure la part des
municipalités ce qui ajoute 42 000 000 $. Je précise qu'au
chapitre de l'immatriculation nous souhaitons que ce soft l'ensemble des
voitures du Québec pour qu'on puisse, pour les territoires non desservis
par le transport en commun, consacrer 32 000 000 $ de ce relèvement par
l'immatriculation à la voirie municipale.
Bref, il y a moyen de traiter cette question d'une autre façon
que celle qui nous est proposée, de le faire de façon plus
équitable, plus efficace et surtout en ayant un Incitatif valorisant le
transport en commun plutôt que le transport privé,
c'est-à-dire de mettre une pression qui va le dégrader davantage
entraînant une inéquité plus grande au plan social et
au
plan économique. Je vous remercie.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de rencontrer
la délégation de la CSN. Vous avez son président, M.
Larose, dont les interventions dans nos débats publics sont toujours
marquées du signe de l'engagement, de la poursuite d'objectifs sociaux
et politiques parfois contestables mais toujours défendus avec
sincérité. Je pense bien qu'on l'apprécie. Dans les
remarques que vous avez faites, M. Larose, il y a une question qui m'a
étonné au début. Vous avez dit d'une manière
globale: II n'y a plus de solution dans la rationalisation des dépenses.
Il faut couper un palier de gouvernement. Il y en a un de trop. Des fois, quand
j'entends cet argument-là, je vous pose la question bien simplement
Comment ça se fait qu'aux États-Unis ils ont également
trois paliers de gouvernement et il n'y a personne qui essaie de trouver une
solution magique de ce côté-là? Comment expliquez-vous
ça, si c'est aussi évident, que ce ne le soit pas, dans le pays
qui est juste à côté de nous autres?
M. Larose: Pour faire, dans le cadre d'un débat qui
pourrait durer plusieurs heures, une réponse assez courte, je vais vous
dire que la Fédération américaine est une
fédération qui s'est beaucoup centralisée parce que d'une
composition multlculturelle, le dénominateur commun est largement
partagé, II n'y a donc pas ce type de chevauchements entre deux paliers
de gouvernement. Au Canada et au Québec, il y a là deux
sociétés qui veulent posséder leurs propres instruments.
Alors, dans ce sens-là, je pense qu'il y a beaucoup moins de
chevauchements, d'empiétements, de gaspillage et surtout de paralysie
organisée comme nous le connaissons ici au Canada, que les
Américains, qui, avec leur sens pratique aussi, n'ont pas.
M. Ryan: Regardez, J'accepte la deuxième partie de
l'explication, mais la première, je pense qu'elle ne résiste pas
à l'examen. Il y a beaucoup plus de chevauchements dans un domaine comme
l'éducation et la sécurité sociale aux États-Unis
même qu'au Canada.
M. Larose: Oui, mais...
M. Ryan: Mais je ne veux pas poursuivre le débat
là-dessus...
M. Larose: Mais je veux quand même poursuivre un petit peu
pour vous dire qu'aux États-Unis II n'y a pas ce type de problème
où vous avez une société, un peuple qui est dominé
par un autre; la composition sociale, elle est essentiellement un "melting
pot"...
M. Ryan: En tout cas...
M. Larose: ...et dans ce sens-là...
M. Ryan: En tout cas...
M. Larose: ...le sens pragmatique prend le dessus et il n'y a pas
ce type de tiraillements que nous connaissons.
M. Ryan: En tout cas, chercher une explication, là,
à nos problèmes de discipline budgétaire et
financière là-dedans, moi, je vous dis que je ne souscris pas
à ce genre d'argumentation là, c'est ce que je voulais vous dire
bien simplement.
M. Larose: Mais vous allez reconnaître, mon cher ministre,
que dans le seul domaine de la formation professionnelle dans un secteur que
vous connaissez, par le biais de l'éducation, la formation
professionnelle, ça fuit de partout dans une inefficacité
légendaire, c'est un cafouillis milliardaire.
M. Ryan: Ça, je ne veux pas ouvrir le débat
là-dessus, on pourrait citer bien d'autres exemples pour que ça
fonctionne. On reprendra ce débat-là une autre fois, mais comme
vous l'avez invoqué comme solution globale...
M. Larose: Pas beaucoup de monde est venu vous faire des
démonstrations de l'efficacité du régime quand on a
siégé ici pendant cinq mois...
M. Ryan: Mais, en tout cas, on fera le débat, on va le
continuer, le débat, sur d'autres tribunes. Mais c'est parce que vous
l'aviez soulevé vous-même que je vous posais la question. On a un
exemple à côté de chez nous dont personne n'a pratiquement
parlé dans vos travaux. Vous avez soulevé une possibilité
de plusieurs sources de revenus alternatives en comparaison avec celles dont on
parle. Vous parlez de la taxe sur le stationnement: Est-ce que vous êtes
informé des objections qui ont été soulevées
à l'encontre de cette forme de taxation par à peu près
tous les organismes qui se sont présentés devant la
commission?
M. Larose: Je... Quelque peu, oui.
M. Ryan: On l'a inscrite, nous autres, dans le projet de loi,
comme une mesure qui serait facultative pour les municipalités, on
n'osait pas l'imposer, inutile de vous le dire. Mais là, vous autres,
vous proposez de l'instituer à l'état de mesure obligatoire et je
trouve que, je ne sais pas, j'ai l'impression qu'il y a des difficultés
pratiques dont vous n'êtes pas conscient, surtout dès qu'on sort
du territoire de la ville de Montréal. Je ne sais pas si vous avez des
remarques à me faire là-dessus.
M. Larose: Bien, écoutez, sans être un
spécialiste de la perception sur les stationnements, nous proposons que,
systématiquement, pour toutes les entreprises, les institutions, les
centres commerciaux qui ont des parcs de stationnement, eh bien, qu'il leur
soit chargé par place de stationnement un montant de 40 sous. La CSN a
120 places de stationnement, eh bien, multipliez les 120 places de
stationnement par 40 sous, et vous chargerez à la CSN la somme totale.
Alors, ce qu'on peut faire avec la CSN, on devrait le faire avec Les Galeries
d'Anjou, avec Johnson et Johnson et l'ensemble des institutions et
entreprises.
M. Ryan: Très bien. Ensuite, vous parlez de
l'immatriculation des véhicules de promenade que vous voudriez instituer
à l'échelle de tout le Québec, une partie du rendement
étant réservée à l'amélioration de la voirie
locale à travers le territoire. C'est une idée qui est
très intéressante et inutile de vous dire que le gouvernement l'a
explorée longuement. Pour l'avenir, c'est une idée qui offre des
possibilités. Le ministre des Finances ne l'a pas retenue cette
année, étant donnée l'appréciation qu'il avait des
problèmes que ça peut poser si on l'étend à
l'ensemble du Québec, puis, étant donné le lien qu'il a
voulu établir entre les droits perçus sur l'immatriculation des
véhicules automobiles et une contribution des propriétaires de
voitures de promenade au transport en commun, il a pris les régions de
recensement qui constituent des zones métropolitaines entendues dans un
sens plus large, cependant que ce qu'on définit ordinairement. (16 h
45)
Les véhicules commerciaux, ce qu'on nous a dit, ça a tout
été regardé, mais c'est bon que vous nous
présentiez ces propositions-là. J'y suis extrêmement
intéressé. On nous a dit que ce n'était pas le moment de
frapper les véhicules commerciaux qui sont grevés de charges
très lourdes déjà. J'enregistre la possibilité.
Vous parlez ensuite d'une contribution municipale, 42 000 000 $,
ça... Nous autres, la contribution que nous demandons aux
municipalités d'aller chercher, c'est 252 000 000 $, en tout là,
pour tout le Québec. Il y aurait 42 000 000 $ qu'on pourrait trouver
ici, mais encore là il faudrait qu'elles aillent le chercher à
même leurs sources de revenus, j'imagine. Comment pourraient-elles le
financer d'après vous?
M. Larose: D'abord je voudrais faire un petit commentaire sur la
réticence que vous auriez à relever le prix de l'immatriculation
pour les véhicules commerciaux. Vous savez que les 10, 12, 15, 16, 18
essieux, d'abord ça vaut plusieurs milliers de dollars. Une
contravention, disons que... Je ne sais plus s'il y en a beaucoup de moins de
50 $, 60 $ et 100 $. En fait, ce qu'on propose, c'est l'équivalent d'une
contraven- tion par année. Disons qu'on ne pense pas égorger
aucun véhicule commercial en relevant, en proposant semblable
relèvement de l'Immatriculation.
Sur le relèvement, ou la part des municipalités, nous
avons observé qu'il y a eu baisse de la participation des
municipalités dans le transport en commun, vraisemblablement à la
faveur de l'implication du gouvernement québécois dans le
financement et le développement. On proposerait qu'ils fassent des
efforts équivalant à ce qu'ils faisaient antérieurement,
précisément pour valoriser cet outil collectif, et ça
serait à même les revenus généraux des
municipalités.
M. Ryan: Une dernière question. Dans votre mémoire,
vous signalez que la part relative des entreprises au financement de
l'État québécois a diminué ces dernières
années. Vous le soulignez opportunément, il y a une diminution de
deux points de pourcentage dans leur contribution aux recettes de
l'État.
La proposition gouvernementale, si on la prend dans ses données
fondamentales, constitue à demander aux entreprises d'accepter un
certain rééquilibrage, et un rééquilibrage modeste
de ce côté-là. Est-ce que vous avez des objections à
cela, fondamentalement, ou à ce qu'on demande une contribution
légèrement accrue des entreprises au financement de la
collectivité?
M. Larose: Au contraire, nous sommes d'accord que dans une
réforme de la fiscalité et dans un certain nombre de
décisions à prendre, d'ici à ce qu'il y en ait une
véritable, il y ait relèvement de la participation des
entreprises à l'ensemble de l'activité de la
société, ou des activités de l'État.
Nous en avons beaucoup, par ailleurs, contre votre proposition qui a
pour effet de développer l'iniquité entre les
municipalités. Je ne sais pas, vous êtes citoyen d'Outremont,
où il n'y a pas beaucoup d'entreprises.
M. Ryan: De Montréal.
M. Larose:ah! montréal, o. k. on me dit que je suis
d'anjou, mais je suis à la limite, je suis à montréal moi
aussi. alors il y a un certain nombre de villes...
M. Ryan: Autrefois.
M. Larose:... qui ne sont pas pourvues d'entreprises. Alors faire
un transfert à la fiscalité municipale soi-disant pour rejoindre
les entreprises, eh bien, il y en a plus dans certaines municipalités et
moins dans d'autres. Si le prélèvement était fait à
partir, je dirais, des profits, du volume d'affaires, ou d'autres types de
critères comme ceux-là, au plan national, ça
n'encouragerait pas non plus la délocalisation ou le transfert d'un
certain nombre d'entreprises.
Alors dans ce sens-là, on pense que c'est mieux d'avoir une
source provinciale de financement, y compris pour les entreprises.
Le Président (M. Garon): Alors M. le député
de Jonquière.
M. Dufour (Jonquière): D'abord sur le contexte du
mémoire, je pense qu'il y a une recherche Importante qui a
été faite. Ça apporte une contribution
intéressante. Je sais bien que le ministre est coulé dans le
béton, mais il me semble qu'il y a des avenues, des perspectives, qu'il
y a un certain nombre de recommandations qui sont faites, qui peuvent, au
moins, avoir le mérite d'avoir été pensées puis
avoir été écrites et il devrait y avoir au moins en
contrepartie, de la part du ministre, une étude exhaustive des
propositions que vous faites. Il y en a qui sont difficiles à appliquer
mais je veux juste dire, par exemple, que sur la taxe sur le stationnement,
vous la proposez, mais c'est pour tout le monde. La difficulté qu'on
avait, à venir jusqu'à maintenant, c'est: Comment on peut la
prélever puis quand elle est sortie de la municipalité comme
telle, à qui on rend des comptes, parce que s'il y a une taxe,
normalement, on a un pouvoir qui va avec? Je veux dire, la
représentation et la taxation, ce sont deux choses qui sont
mariées ensemble. Donc, en gros, il y a beaucoup de choses qu'on peut
partager ensemble. C'est sûr et évident que le gouvernement se
trouve... Ça ne réglera peut-être pas tous les
problèmes, mais au moins on saurait où ils sont. Ça aurait
au moins cet avantage de bien cibler les problèmes avec lesquels on
vit.
Pour en revenir à votre mémoire, vous nous parlez du
fardeau fiscal qui s'accroît sans cesse vis-à-vis de l'ensemble
des particuliers et des entreprises, taxes scolaires, etc. Est-ce que vous
pourriez développer quelque peu ce volet-là?
M. Larose: Dans le mémoire, on souligne - le ministre y
faisait allusion tantôt - qu'il y a eu un déplacement sur le plan
de la fiscalité. Si on prend la réforme du fédéral,
accompagnée aussi des éléments de réforme du
provincial, il est clair qu'il y a eu un double déplacement. Le premier,
c'est que dans les revenus générés par les individus il y
en a moins maintenant sur les revenus, II y en a plus sur la consommation. Et
ce seul transfert-là rend les taxes beaucoup plus régressives au
sens où proportionnellement les petites gens, ceux qui gagnent de petits
salaires, paient proportionnellement plus que ceux qui gagnent davantage.
Deuxième déplacement: Oui, il y a eu un déplacement
de la contribution des entreprises, qui contribuent moins à l'assiette
fiscale. Nous, on pense qu'il va falloir à un moment donné que,
collectivement, on ait le courage de faire un vrai débat sur les revenus
de l'État. Je le disais tantôt, au plan de la rationalisation, des
coupu- res, des compressions, on est à l'os sur tous les aspects.
Beaucoup d'efforts ont été faits à ce niveau-là. On
ne peut plus, à moins de mettre en péril les outils collectifs
eux-mêmes, à moins de vouloir pomper de façon
délibérée, à même les salariés, et
c'est ce qui se fait de plus en plus.
Eh bien, il va falloir qu'on regarde l'assiette fiscale, il va falloir
qu'on regarde les revenus. Et, comme je le disais tantôt, je pense que,
là-dessus, on est plus équipé qu'on ne l'était en
regardant déjà ce qu'on génère comme revenus parce
que ça s'adonne que comme contribuables, à la fois au municipal,
au provincial et au fédéral, on génère quand
même passablement de revenus pour l'État. Le seul bout qui nous
reste à rationaliser, je le disais tantôt, ça demeure celui
du chevauchement de deux paliers et ça, c'est clair que,
là-dessus, le bouchon de la baignoire est levé depuis longtemps,
ça fuit et il y a beaucoup de ressources qui sont gaspillées
à ce niveau-là.
M. Dufour (Jonquière): Cette approche que vous avez
vis-à-vis des taxes, vous parlez aussi pour l'entreprise... Les petites
entreprises qu'on a rencontrées nous disent: On n'est plus capables.
À cause de la récession actuelle - parce que la réforme,
ce n'est pas pour dans 10 ans - elle est là. La petite entreprise, vous
nous dites, l'entreprise en général, vous n'avez pas parlé
de la petite ou de la... Vous n'avez pas fait de nuance. Est-ce que vous pensez
qu'elles sont correctes, les petites PME, de nous dire: On ne peut plus en
absorber, en tout cas, au moins pour le moment?
M. Larose: Précisément, ça me surprendrait
que ce soit le volume de taxes qui étouffe les PME. C'est davantage les
taux d'intérêt par les temps qui courent. Ce sont les banques qui
font les fermetures, ce n'est pas l'État, avec les taxes sur la petite
et la moyenne entreprise. Encore qu'on peut dire que la répartition de
l'assiette fiscale, à l'intérieur de tout le champ des
entreprises, pourrait vraisemblablement être plus équitable
également.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, je veux d'abord remercier la
CSN de sa contribution à ce débat-là. Et je trouve
intéressant que la Centrale pose la question de la fiscalité en
tant que telle. Peut-être que du côté du Conseil du
patronat, quand on pense au 1 250 000 000 $ que le gouvernement pense aller
récupérer l'an prochain aussi, comme les milieux d'affaires,
comme les milieux syndicaux notent que le gouvernement a tendance à
prélever de façon brusque et sans trop s'embarrasser de
considérations... Ce que je veux dire, c'est qu'au plan fiscal le
gouvernement ressemble un peu à un tank dans une foule
de civils, un jour de Saint-Jean. À un moment, nous, de
l'Opposition, on voit bien qu'il y a des pieds qui se retrouvent meurtris. Ce
que j'entends par là, c'est que pour que le Conseil du patronat propose
tout de go au ministre d'augmenter le déficit de 100 000 000 $ cette
année, ce qui n'est pas la manière habituelle du CPQ, il se pose
peut-être des problèmes pour l'an prochain et la prochaine
ponction qui va venir.
À cet égard-là, j'observe avec intérêt
que vous dites: Le prélèvement sur les entreprises, c'est une
chose, mais ce qui est devant nous, c'est prélever des entreprises qui
sont dans la ville centre et qui vont être incitées à
déménager vers la périphérie. Je remarque que le
tableau revient partout: des comparaisons entre Laval et Terrebonne,
Montréal et Repentigny et Longueuil et Saint-Bruno. C'est frappant. Et
il y a des débats à faire sur ia question suivante: Est-ce qu'il
faut prélever sur l'ensemble des entreprises? Mais quand on
prélève sur l'ensemble des entreprises, il y a l'ensemble de la
qualité de payer qui est en cause. Alors que quand on dit: Allez donc
à Saint-Bruno plutôt qu'à Montréal-Est, ça va
vous coûter 1 500 000 $ de taxes municipales de moins par année,
il y a là un facteur qui est important, je pense, en économie
libérale.
Par ailleurs, comme c'est l'impôt foncier qu'on se trouve à
privilégier, il y a accessoirement dans le débat que l'industrie
du vêtement à Montréal, qui a perdu 40 % de ses emplois
depuis un an, paie peut-être pas mal plus de taxes foncières que,
disons, la corporation financière Power ou la Caisse de
dépôt et placement du Québec. Au pied carré, sur le
sens commun, l'industrie du vêtement, ça occupe pas mal de
bâtisses qui paient pas mal d'impôts fonciers.
Et la ville de Montréal - c'est la question que je vais vous
poser - disait: Retardez l'adoption, différez l'adoption de la loi 145
et créez une commission sur l'avenir de la métropole, en tant que
telle. On pourrait penser que ça pourrait être ses relations avec
la périphérie, avec la couronne, avec le reste du Québec,
mais est-ce que c'est une suggestion de la ville de Montréal que vous
estimez digne d'intérêt et qui pourrait amener quelque chose au
débat à faire sur: Où vont les finances publiques et
où vont les ressources publiques, et comment on contribue?
M. Larose: Moi, si j'étais attentif à l'ensemble
des prestations, à venir jusqu'à maintenant, bien du monde veut
acheter du temps. M. Dufour, c'est ça qu'il a dit essentiellement dans
sa présentation tantôt. Il aime mieux "toffer" une augmentation de
100 000 000 $. II est capable de l'endurer - et, effectivement, il y a
là une générosité qu'on ne lui connaissait pas
antérieurement, ça doit donner un peu la couleur du projet du
ministre - II préfère plutôt ça que de se farcir la
proposition du ministre. En fait, la proposition du ministre va avoir pour
effet de nous reculer et, quand on va vouloir restaurer les affaires, ça
va être un chemin à redéfaire pour pouvoir ensuite
construire quelque chose.
Alors, si le Conseil du patronat s'exprime dans ce sens-là, si la
ville de Montréal s'exprime dans ce sens-là, je ne sais pas si
j'ai été inattentif, mais j'ai trouvé le ministre bien
seul dans toute cette opération. Et je me trouve plutôt en
agréable compagnie quand on défend les positions que je
défends. À mon avis, contrairement à ce qu'on se disait
avant qu'on commence, s'il y a quelqu'un qui fait erreur, ça ne se peut
pas que ça soit tous ceux qui viennent ici. J'ai l'impression, M. le
ministre, qu'il faut peut-être retourner ça... voir ça par
leur jardin plutôt que par la porte d'en avant.
Une voix: Retourner la crêpe.
M. Larose: II y aurait peut-être moyen de découvrir
des vertus à un certain nombre de propositions qui vous ont
été proposées. (17 heures)
M. Bourdon: Maintenant, je voudrais vous sonder sur un autre
aspect. On parle d'étalement urbain et le phénomène c'est
qu'il y a 7 000 000 de population au Québec et on est en train
d'agrandir considérablement le territoire qu'on occupe. Je ne parle pas
des régions rurales; on a aussi, à l'autre bout, un
problème de "ruralité" qui est de plus en plus souligné,
mais je prends Québec, ici. On est en train d'envisager de fermer au
moins deux écoles sur quatre, et iI s'en construit une dizaine en
périphérie de Québec et en couronne de Québec.
Alors, iI y a quelqu'un qui pale en bout de ligne. Je pense que les milieux
d'affaires... Il y avait la Chambre de commerce de Montréal
également qui, au nom de toutes les chambres de commerce de l'île,
soulignait hier, dans le fond, que l'étalement urbain des entreprises et
des Individus, ça remplace quasiment l'ancien adage "Au dernier vivant
les biens"; là, c'est "Au dernier vivant les taxes". Il y a de la
désertion fiscale qui se fait vers d'autres lieux plus sereins, et iI
doit même y avoir des membres de la CSN qui, dans un moment
d'égoïsme compréhensible, se disent: Bien, je vais aller
où je pale moins de taxes, parce que l'État m'y encourage.
À cet égard-là, pensez vous que le gouvernement a une
vision des manières de combattre l'étalement urbain et pensez
vous qu'en mettant la hache dans le zonage agricole il a fait un pas dans la
bonne direction à cet égard-là?
M. Larose: Je n'oserais pas porter un jugement global. Je le
porte seulement à la lumière de la proposition du ministre. Je
pense que ça ne figure pas du tout dans le portrait. Au minimum, il n'y
a aucune considération à ce chapitre-là, et c'est dans ce
sens-là que je dis que cette réforme, c'est un contresens. C'est
même... On recule. Et il faut que le ministre
s'empêche de reculer, au minimum. On va même l'applaudir
s'il décide de faire du sur place un bout de temps, le temps qu'on
décide de prendre ça autrement. C'est le minimum qu'il devrait
faire. Et je ne sais pas... Ce n'est peut-être pas à nous de faire
un plaidoyer pour Montréal, mais les problèmes s'accumulent,
là. Longtemps, on disait que personne ne faisait quelque chose pour
Montréal. La, ceux qui en font le font contre Montréal ou contre
les centres urbains. C'est quand même le bout! Il faudrait, si on ne veut
rien faire, il faudrait au minimum ne pas contribuer à la
dégradation davantage.
M. Léonard: M. le Président...
Le Président (M. Garon): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: ...moi, j'ai enregistré au passage que
vous étiez d'accord pour une implication du gouvernement du
Québec dans le financement du transport en commun. Je pense qu'il y en a
eu une importante jusqu'ici; elle n'est pas complète, les pourcentages
ont pu varier, mais elle a été assez importante. J'ai tendance
à mettre les sources de revenus, de fiscalité en particulier,
avec le contrôle des coûts dans une institution comme
celle-là. Si c'était financé en totalité par le
gouvernement du Québec, je craindrais qu'il n'y ait une explosion des
coûts, parce qu'il serait très loin de ses citoyens. Une
régie de transport financée en exclusivité par le
gouvernement du Québec serait très loin des citoyens. Un des
éléments majeurs qui avait présidé à la
réforme, c'est qu'il y avait un certain équilibre entre
financement du Québec et impôts fonciers parce qu'il y a des
impacts d'aménagement évidents en ce qui concerne le transport en
commun et les usagers. Au fond, ce qui est remis en cause, c'est
l'équilibre entre les différentes sources.
Est-ce que vous dites que l'équilibre actuel devrait être
maintenu? Ou dans quelle direction ça devrait aller, à terme, si
on doit retoucher à ça? Je pense, encore une fois, que quand les
usagers, ceux qui ont des propriétés, sont impliqués dans
le financement, ça implique des freins qu'on ne peut pas retrouver au
niveau du gouvernement du Québec. Je ne veux pas en pelleter dans la
cour du ministre, je pense qu'on a une discussion et c'est vous qui avez
affirmé ça. J'aimerais que vous élaboriez
là-dessus.
M. Larose: Je vais demander à Claudette.
Mme Carbonneau (Claudette): Je pense qu'essentiellement le type
d'hypothèse qu'on soumet aujourd'hui à la commission vise
à retrouver à peu près l'équilibre qu'on
connaissait au tournant des années quatre-vingt où, au fond,
l'ensemble de la question avait été réfléchi
à la faveur de la réforme de la fiscalité municipale.
Et c'était un des moments où, effectivement, le
gouvernement du Québec avait eu à faire le point et à
jauger la pertinence et la nécessité de son engagement financier
en regard du transport en commun. C'est d'ailleurs pourquoi, au niveau de la
cinquième alternative, oui, on constate qu'il y a eu, au fil des ans, un
glissement du financement municipal à ce service public. Ce qu'on
propose, essentiellement, c'est de retrouver l'équilibre qu'on
connaissait dans les années quatre-vingt.
Par ailleurs, quand on fait référence un peu à ce
type de partage, je pense qu'il est important aussi de dire quelques mots sur
le troisième partenaire, l'usager. Plusieurs données
socio-économiques ont été fournies à cette
commission, notamment en regard des taux de pauvreté dans la
région de Montréal. Moi, je pense que ça milite en faveur
de ne pas hausser de façon extraordinaire les tarifs. Par ailleurs, je
pense qu'il faut être conscient aussi, même d'un point de vue
strictement économique, qu'il y a des seuils à ne pas
dépasser du côté des hausses de tarifs, d'autant plus que
le transport en commun est une industrie fort vulnérable qui a des
compétiteurs qui ont le vent dans les voiles; l'automobile... Au fond,
toutes les enquêtes nous démontrent à quel point le nombre
d'automobiles grandit chez les ménages qui en ont les moyens. Alors, il
y a là une compétition féroce. Il y a aussi tout le
phénomène du vieillissement de la population. Au contraire, moi,
je pense qu'il faut rendre le transport en commun à la fois comme
qualité de services, mais aussi en termes de coûts, en termes de
tarification, comme une alternative intéressante pour maintenir les
clientèles actuelles et en développer de nouvelles. C'est la
seule voie de solution parce que, autrement, on va devoir maintenir les
services de transport en commun et le coût marginal par
déplacement va devenir astronomique; ça m'ap-paraît
même être, d'un point de vue économique, un gouffre sans
fond.
Le Président (M. Garon): Alors, le temps de l'Opposition
étant écoulé, il reste quatre minutes, six minutes,
pardon, au ministre.
M. Ryan: Je voudrais souligner une chose le plus clairement
possible. Le gouvernement ne propose pas un désengagement de la
collectivité envers le transport en commun. Il propose plutôt un
déplacement d'accent dans la responsabilité. Il dit, par exemple:
Pour le transport en commun dans la région de Montréal, que la
puissance publique aille chercher une partie un peu plus élevée
des revenus nécessaires qu'elle ne le fait actuellement - la puissance
publique locale - de manière qu'elle soit peut-être plus
consciente des coûts que ça entraîne et de la discipline
qu'il faut introduire là-dedans pour qu'on fonctionne sur une base un
peu plus économique qu'on ne l'a fait ces dernières
années.
Quand on engage le débat sur le désengagement du public,
je pense qu'on est à côté de la voie parce que ce n'est pas
ça qui est l'objet du projet de loi. L'objet du projet de loi, c'est de
dire aux municipalités: Nous vous invitons à porter une partie un
peu plus substantielle du fardeau financier et fiscal de décisions que,
politiquement, vous revendiquez à juste titre pour vous-mêmes.
C'est ça qui est le fond de l'affaire. Et je vous dis une chose, parce
qu'on amplifie et on fait toutes sortes de théories, et j'en suis, j'en
suis. Mais il faut revenir, il faut atterrir à un moment donné.
On peut bien dire: On va remettre ça dans un an et tout. Ça ne
règle rien, ça. On fait ça continuellement en politique
à propos de combien de choses.
On a fait des calculs. On a fait quatre hypothèses, nous autres.
À supposer que tout le coût additionnel du transport en commun
soit assumé par les entreprises sous la forme d'une surtaxe sur le
non-résidentiel, combien ça coûterait? On a fait une
hypothèse, à supposer que ce soit 50-50, le résidentiel et
le non-résidentiel, trois quarts, un quart, etc. Je vais prendre une
hypothèse. Si c'était moitié-moitié pour l'ensemble
du Québec, savez-vous ce que ça traduit comme fardeau fiscal,
l'ensemble de la réforme? Ça représenterait, pour le
résidentiel, un accroissement de 2, 9 % et pour le
non-résidentiel, un accroissement de 5, 9 % pour l'ensemble si
c'était réparti comme ça. Ça ne peut pas être
réparti comme ça parce que, dans les grandes villes où il
y a une richesse foncière industrielle et commerciale plus
élevée, il y aura une partie plus importante du fardeau qui devra
aller du côté des entreprises tandis que dans les petites
municipalités, comme je l'ai dit tantôt, ça sera l'inverse;
et là, l'augmentation du fardeau fiscal résidentiel sera
légèrement supérieure à 3, 9 %. Avec tous les
mécanismes égalisateurs que le gouvernement introduit dans le
programme, dont certains ont été rendus publics et d'autres le
seront au cours des prochains jours avant l'ajournement des travaux
parlementaires, je pense que nous arriverons à une répartition
des charges qui ne sera pas du tout de l'ordre qu'on essaie de faire voir.
Encore une fois, je pense qu'à ce moment-ci, pourvu que ce soit
bien dosé, il est normal de demander une certaine part additionnelle aux
entreprises, puis on ne les grève pas d'une manière
démesurée. Je vais vous donner un exemple. Pour I'île de
Montréal, l'accroissement du fardeau fiscal des entreprises que
représenterait la proposition gouvernementale telle que définie
dans le projet de loi, sur l'ensemble du fardeau fiscal que portent les
entreprises - fédéral, provincial, municipal - serait d'à
peu près 2, 4 %, 2, 4 %. Pour le transport en commun... J'en suis, moi,
du transport en commun, mais si les gens ne sont même pas prêts
à faire des efforts de cet ordre-là, il y a un gros
problème au pays de Landerneau, il y a un gros problème.
Ça veut dire qu'il y a une érosion du sens de la
responsabilité qui va nous conduire très loin.
Le sens de la proposition gouvernementale, encore une fois - et je ne
veux pas faire de dogmatisme avec ça - c'est tout simplement de nous
inviter ensemble à un peu plus de réalisme. J'ai remarqué
que, dans le mémoire de la CSN, tout le problème des coûts
dans le transport en commun n'est pas abordé du tout. Il y a un
problème, là. Les grèves des dernières
années, 20 grèves dans 20 ans, ça a coûté
énormément d'argent, ça; ça a coûté
énormément de prestige au transport en commun aussi. Il faut
comprendre ce problème-là également. Combien de fois on a
été obligé d'intervenir, à Québec, par des
lois spéciales? Mais on n'en veut plus, de ça. On n'en veut plus
de ça, puis je pense qu'on a raison. Il faudra qu'aux plans local et
régional on porte un peu plus de responsabilité et, cette partie
du fardeau, je pense que personne ne peut l'éluder, pas plus la CSN que
les autres.
M. Larose: M. le ministre, je voudrais vous corriger très
humblement sur un point: Quand vous essayez de faire une relation entre les
grèves et une dégradation d'un service public ou, règle
générale, quand on nous dit que des grèves, ça
entraîne des problèmes au niveau de la productivité, on
peut se rappeler qu'aux beaux jours du syndicalisme combatif, où nous
battions tous les records de grèves, le Canada était le
troisième pays le plus compétitif au monde et qu'aujourd'hui,
alors qu'on est en train de battre des records de non-grève, on est
rendu le treizième. Il n'y a pas de relation, première des
choses. deuxième des choses, le problème, ce n'est pas le volume
d'argent; le problème, c'est un problème d'iniquité entre
les municipalités. on pourra trouver tous les moyens d'aller chercher de
l'argent par l'impôt foncier ou autrement, mais si on produit une
structure inéquitable d'une municipalité par rapport à
l'autre on aggrave le problème, qui est déjà très
grave. à l'intérieur même d'une organisation publique de
transport, ça peut varier de 21 $ à 92 $ par tête de pipe.
c'est déjà passablement inéquitable. ce qu'on vous dit,
c'est que votre proposition, loin d'améliorer la situation, va nous
approfondir davantage. si ce n'était qu'une question de volume,
ça, on peut trouver des méthodes pour l'avoir. mais quand vous
nous proposez un truc qui est inéquitable, on ne pourra pas marcher
là-dedans. (17 h 15)
Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. le
Président. Le temps des deux partis étant écoulé,
je dois vous remercier de votre participation aux travaux de la commission. Je
vais inviter les représentants, maintenant, de la
Fédération des travailleurs du Québec à venir
prendre place à la table des délibérations.
Alors, M. Daoust - M. le Président - si
vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent;
également, vous avez 45 minutes, c'est-à-dire 15 minutes pour
votre exposé, normalement, 15 minutes pour le parti ministériel
et 15 minutes pour l'Opposition. Ce que vous prenez en plus sera soustrait des
deux partis et ce que vous prenez en moins leur sera ajouté.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec
M. Daoust (Fernand): Merci beaucoup, M. le Président. Je
vous présente cette délégation qui m'accompagne. Je
commence à votre droite: Henri Massé, directeur
québécois du Syndicat canadien de la fonction publique, Guy
Cousineau, secrétaire général du Conseil des travailleurs
et des travailleuses du Montréal métropolitain, Clément
Godbout, secrétaire général de la FTQ, Claude Ducharme,
directeur québécois des Travailleurs canadiens de l'automobile
et, enfin, Normand Fraser, directeur adjoint du Syndicat canadien de la
fonction publique.
M. le Président, mesdames, messieurs, M. le ministre, vous ne
vous surprendrez pas si, en tout premier lieu, nous vous disons que la FTQ
souhaite que le gouvernement retire ce projet de loi. C'est au nom de ses 450
000 membres qu'elle le fait - qui sont des citoyens et des citoyennes des
municipalités du Québec - et aussi des quelque 32 000
employés des différentes municipalités et des
sociétés de transport qui sont syndiqués à
l'intérieur des syndicats de la FTQ. Nous voulons exprimer notre
vigoureuse opposition à ce projet de loi. Nous joignons notre voix
à ce concert quasi unanime au Québec qui s'oppose à ce
transfert pur et simple des obligations financières du gouvernement du
Québec aux municipalités.
La seule rationalité de ce transfert substantiel est de
répondre aux besoins pressants du gouvernement au niveau des finances
publiques. Il nous semble que le gouvernement a complètement
ignoré les impacts économiques et sociaux de sa réforme et
s'est départi de ses responsabilités d'une façon
cavalière aux dépens des municipalités. Et, en bout de
ligne, qu'on le veuille ou non, ce seront toujours les contribuables qui feront
les frais d'une telle réforme. Cependant, ce n'est pas Québec qui
en portera l'odieux, mais les municipalités qui devront trouver des
solutions pour combler l'inévitable déséquilibre financier
qui résultera de la réforme.
Que feront les municipalités? Malgré les adoucissements
apportés à cette réforme le 24 mai dernier, le
gouvernement du Québec refile tout de même un fardeau financier
que nous estimons à 334 000 000 $ aux municipalités. Il est clair
que ces transferts de dépenses sont permanents et qu'ils
s'intensifieront dans les années à venir. Les
municipalités n'auront pas d'autre choix que de combler le manque
à gagner en coupant dans les services à la population ou en la
taxant davantage. Dans l'un ou l'autre cas, les conséquences seront
désastreuses pour la qualité de vie des citoyens et des
citoyennes du Québec.
Le transport en commun nous préoccupe au plus haut point. Les
coupures de subventions dans le transport en commun comptent pour près
des deux tiers des transferts de dépenses aux municipalités.
C'est là que l'impact de la réforme sera le plus lourd. Il en
coûtera 266 000 000 $ de plus pour financer les opérations des
organismes publics de transport en commun. Nous savons que le gouvernement
souhaite adoucir la facture et qu'il permettra d'appliquer un droit additionnel
dans 194 municipalités pour les plaques d'immatriculation,
municipalités, vous le savez, qu'on retrouve dans les 6
agglomérations où se retrouvent les 9 organismes publics de
transport en commun. Il compte ainsi répartir 50 000 000 $ aux
sociétés de transport. Il ne restera que 216 000 000 $ à
financer, ce qui est tout de même un montant imposant.
Le désengagement de l'État du financement des
opérations et de l'entretien des équipements met en péril
les services de transport en commun dans les grandes municipalités. De
façon immédiate, on s'attend à ce que les
municipalités coupent dans le service, en particulier dans la
fréquence des autobus et du métro, dans les périodes hors
pointe. Le temps d'attente risque d'être allongé d'autant. Enfin,
certaines lignes moins fréquentées seront probablement
abandonnées. Les sociétés de transport ont
déjà annoncé des augmentations de tarifs pour combler le
manque à gagner. Par exemple, à la STCUM, on prévoit, on
annonce, on parle de deux hausses de tarif de 8,5 % chacune, le 1er juillet qui
vient et le 1er janvier de 1992.
Dans un pareil contexte, il ne sera plus question de penser au
développement du transport au commun, ce qui nous préoccupe au
plus haut point. En effet, si Québec continue de financer les
équipements, les municipalités devront assumer seules les
coûts supplémentaires d'entretien de ces nouveaux
équipements. Il est fort probable que ces coupures dans la
qualité des services, de concert avec des augmentations tarifaires,
exercent un effet dissuasif sur les usagers et les usagères du transport
en commun. L'analyse avantages-coûts de chacun des modes de transport
rendra sans doute l'automobile plus attrayante. On risque aussi d'aggraver
l'engorgement du réseau routier. Pensons aux impacts environnementaux.
Pensons à l'encombrement des villes et à la pollution
atmosphérique qui seront les conséquences de la
détérioration des services de transport en commun.
Pour ce qui est des autres services, dans les petites
municipalités, la voirie et les services policiers seront
désormais à la charge des municipalités. Ces
dernières devront entretenir par leurs propres moyens 137 000
kilomètres de routes. On peut donc s'attendre à ce que des
tronçons entiers soient abandonnés alors que d'autres
deviendront graduellement impraticables faute d'entretien suffisant. Dans un
pays au climat rigoureux, où la population est relativement
dispersée, les routes sont un moyen de communication indispensable et
leur entretien, une condition de sécurité. On n'a pas à
insister là-dessus, je pense que c'est évident. Dans les grandes
villes qui offrent une plus vaste gamme de services, les coupures risquent
d'entraîner des diminutions significatives de services. Devra-t-on
réduire de deux à une par semaine la fréquence de collecte
des ordures ménagères? Devra-t-on abandonner l'entretien des
parcs? Devra-t-on fermer des piscines, des arénas, des
bibliothèques ou des maisons de la culture? Ce sont ces services et bien
d'autres qui font la qualité de la vie urbaine et quant aux
infrastructures comme les rues, les réseaux d'aqueduc et d'égout,
faudra-t-il attendre les bris majeurs pour les remettre en état?
Le financement. Pour financer ces dépenses traditionnellement
prises en charge par le gouvernement du Québec, le ministre ouvre de
nouveaux champs de taxation aux municipalités. Théoriquement, ces
nouveaux revenus leur permettraient de récupérer une part des
dépenses nouvelles qui vont leur échoir. C'est en permettant aux
municipalités de lever une taxe sur le stationnement et une surtaxe sur
les immeubles non résidentiels que le gouvernement compte aider les
municipalités à sortir du trou. À combien
s'élèveront les revenus de ces nouvelles taxes? À peu de
choses pour les municipalités qui n'ont qu'un nombre restreint de places
de stationnement, c'est évident, et peu d'immeubles non
résidentiels. Enfin, pour toutes les municipalités, l'impôt
foncier sera sans doute la plus sûre façon d'obtenir les revenus
nécessaires pour combler le manque à gagner. La tentation sera
grande de facturer de plus en plus de services offerts aux usagers et aux
usagères.
Une fiscalité de plus en plus inéquitable. Par sa
réforme de la fiscalité municipale, le gouvernement du
Québec nous entraîne encore davantage sur la voie de
l'inéquité en matière de fiscalité. Après
l'élargissement de l'assiette de la taxe de vente du Québec,
après l'annonce de l'impôt-services dans les services de
santé, le transfert des dépenses de Québec aux
municipalités oriente la fiscalité dans un sens régressif.
En effet, l'impôt sur le revenu risque de voir sa part diminuer dans les
recettes fiscales au profit des taxes à la consommation et des taxes
foncières plus régressives. Ce sont les taxes foncières
qui seront vraisemblablement les plus touchées suite au transfert des
dépenses. Or, la richesse foncière d'une municipalité ne
reflète pas la capacité réelle de payer de ses citoyens.
Nous nous appuyons sur un article de M. Chias-son, dans le journal Les
affaires du 13 avril dernier. En fait, ce ne seront pas
nécessairement les contribuables les plus riches qui assumeront
l'essentiel du fardeau fiscal supplémentaire qui leur sera
imposé.
Bref, les augmentations de taxes de toute nature reliées à
la consommation ou à la valeur de la propriété et la
tarification de services qui étaient gratuits auparavant font en sorte
que le fardeau fiscal est de plus en plus indépendant du revenu. Le
transfert en cascade du financement des services publics du
fédéral aux provinces par les coupures dans les programmes
conjoints ot des provinces aux municipalités par la réforme de la
fiscalité municipale se déversera en bout de piste sur les
contribuables qui verront non seulement l'ensemble de leurs taxes augmenter,
mais surtout qui seront traités de façon moins équitable
que par le passé.
Il nous semble étrange, au moment où le ministre des
Finances est fort critique à l'égard de ce que le gouvernement
fédéral fait subir aux provinces et au Québec en refilant
des dépenses à ce palier gouvernemental dans notre pays, qu'ici,
le Québec s'impose un mimétisme que, par ailleurs, II
dénonce à d'autres niveaux, en faisant la même chose
à l'égard des municipalités. Ce n'est pas une logique
implacable qui caractérise à ce moment-ci le gouvernement du
Québec. On trouve ça étrange que ce type de comportement
soit véhiculé par un homme dont on dit qu'il a une logique
implacable, le ministre des Affaires municipales.
Un autre désengagement de l'État: l'État renonce
à son rôle régulateur de l'économie et à son
rôle redlstrlbutrf au niveau social Ce désengagement conduit
à une augmentation dramatique du fossé entre les riches et les
pauvres, entre ceux qui ont un emploi régulier et ceux qui chôment
ou qui passent d'un emploi précaire à l'autre, entre ceux qui
peuvent acquérir une résidence secondaire et ceux qui sont sans
abri. Le filet de la sécurité sociale est troué et
l'individualisme est à l'honneur. La réforme de la
fiscalité municipale va dans ce sens puisqu'elle privera la plupart des
municipalités du Québec de ressources suffisantes pour offrir les
services Indispensables. Dans les faits, cette réforme signifie que
certaines municipalités seront privées de services faute de
pouvoir se les payer, ce qui accroîtra les disparités qui existent
déjà entre elles.
Recommandations: À cause de l'ensemble des impacts
négatifs qui résulteront inévitablement de la
réforme de la fiscalité municipale proposée par le
gouvernement et parce que cette réforme repose essentiellement sur les
impératifs financiers du gouvernement, la FTQ recommande que cette loi,
ce projet de loi soit retiré et que le gouvernement du Québec
continue de financer les municipalités de façon à assurer
une certaine équité intermunicipale; que le gouvernement du
Québec assure un financement centralisé du transport en commun et
qu'il se donne une véritable politique de transport en commun; enfin,
que le gouvernement du Québec mette sur
pied une commission d'étude qui aurait pour mandat d'analyser
l'ensemble des mesures fiscales au Québec pour: établir le
fardeau fiscal total de chaque groupe de revenus; estimer la part de l'ensemble
des recettes fiscales qui vient de l'impôt sur le revenu, des taxes
à la consommation, des taxes foncières et des frais
imposés aux usagers et aux usagères pour les services publics;
établir des comparaisons entre les municipalités au point de vue
du fardeau fiscal, des services dispensés et des revenus de la
population; proposer une réforme globale de la fiscalité
fondée sur les principes d'équité et de redistribution de
la richesse.
Je souhaiterais à ce moment-ci, M. le Président, si vous
nous le permettez, demander à Henri Massé, le directeur du
Syndicat canadien de la fonction publique au Québec et aussi un des
vice-présidents de la FTQ de nous dire quelques mots. (17 h 30)
M. Massé (Henri): M. le Président, c'est un bref
message, au nom des travailleurs et des travailleuses du secteur des
municipalités et du transport en commun que je voudrais vous livrer. M.
le ministre, on vous a toujours reconnu un très grand rigorisme
intellectuel. On vous a toujours reconnu un attachement profond aux valeurs
démocratiques. Mais il y a certains faits qui nous inquiètent un
peu, plus particulièrement au moment où on se parle.
Hier, suite à une demande de l'Union des municipalités de
permettre de décréter les conditions de travail de ces
salariés-là, dans le secteur des villes et dans le secteur du
transport en commun, nous trouvons que votre réponse, en tout cas, n'a
pas été tout à fait assez claire. Il y a encore une
espèce d'épée de Damoclès qui pend au-dessus de la
tête de ces travailleurs et travailleuses-là, en disant, bon,
bien, si la négociation ne porte pas ses fruits, il y a toujours
possibilité de légiférer. Et on voudrait vous rappeler, M.
le ministre, que cette épée de Damoclès, ce genre de
menace dans le secteur public, dans le secteur du transport en commun, dans le
secteur des municipalités, est contraire au droit de la libre
négociation. On veut vous livrer le message parce qu'on pense que votre
gouvernement, par ses menaces aussi dans le secteur public - où il y a
eu une entente dernièrement - par ses menaces de
légiférer, sert de mauvais exemple pour les autres employeurs au
Québec. Et on pense que toute solution entre les employeurs, que
ça soit du privé ou du secteur public, doit passer par la libre
négociation. Si on veut, M. le ministre, que les lois qui servent
d'encadrement à la libre négociation, le Code du travail,
conservent ou, je dirais plutôt, retrouvent une certaine valeur ou une
certaine force morale pour encadrer nos relations, il faudrait que le
gouvernement donne l'exemple.
En terminant, M. le ministre, c'est une impression... Je ne voudrais pas
vous corriger, mais c'est une impression qu'on voudrait corriger. On a vu
quelques déclarations publiques de votre part en disant: Bon, si les
municipalités ou les commissions de transport sont capables de se payer
des réductions d'heures de travail, elles sont capables aussi de!
À ce niveau-là, on pourra vous soumettre des études. Les
heures de travail dans le transport en commun, les heures de travail dans les
municipalités, même à 37 heures et demie, parce que la
plupart, c'est 40 heures, mais quand on réussit à les
réduire à 37 heures et demie, ce n'est pas plus
généreux que dans le secteur privé parce qu'on a fait des
études dans les entreprises privées de 500 employés et
plus, et souvent, officiellement, ces gens-là travaillent 40 heures,
mais dans les faits c'est 37 heures et demie parce qu'ils ont une demi-heure
payée pour la période du repas.
Donc, ce qu'on fait dans le secteur public, dans les
municipalités, dans le transport, au moment où on se parle, c'est
tout simplement de suivre une tendance qui est assez sérieuse du
côté du secteur privé. C'est le message qu'on avait
à vous livrer de la part des travailleurs du transport et des
municipalités.
Le Président (M. Garon): Alors, à vous la parole,
M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'ai écouté avec
attention l'intervention que vient de faire la Fédération des
travailleurs du Québec. Je veux exprimer mon appréciation
à M. Daoust et à ses collègues pour leur présence
à nos travaux.
Avant de traiter du sujet central, je voudrais dire un mot de ce que
vient de traiter M. Massé. Vous avez bien pris connaissance de la
réponse que nous avons donnée aujourd'hui à la
requête de l'Union des municipalités du Québec. Je pense
que vous l'avez bien résumée tantôt. Nous leur avons dit:
II y a le principe de la libre négociation qui doit s'appliquer dans
votre cas; nous vous invitons à négocier sincèrement et
loyalement. S'il y avait des problèmes qui s'avéraient
impossibles de solution, à ce moment-là, vous pouvez venir nous
voir et nous verrons s'il y a opportunité d'envisager une intervention
législative, nous l'avons dit. Mais nous n'avons pas pris d'engagement
de ce côté-là et nous préférons donner toute
sa chance normale à la libre négociation qui est le principe
fondamental de rétablissement des conditions de travail pour les
travailleurs réunis en association syndicale au Québec.
Si nous avons une certaine préoccupation de ce
côté-ci, elle vient de faits que vous connaissez bien. Dans les
municipalités qui possèdent une population de 25 000 ou plus,
l'écart salarial est d'à peu près 27 % par rapport au
secteur public provincial, 27 %. Et l'écart entre le secteur public
provincial et le secteur privé, dans ses meilleures entreprises, celles
qui ont plus de 500 employés, reste encore réel. Il y a un
rapport qui est sorti ces jours derniers de l'Institut de la
rémunération. Il reste encore un écart de ce
côté-là, à plus forte raison, celui qu'on observe du
côté des municipalités est encore plus grand. Puis
ça, c'a été établi par de nombreuses statistiques
puis quand le gouvernement veut inviter les municipalités à
participer à l'effort de renforcement, de redressement des finances
publiques, qui est une urgence incontestable puis incontournable, je pense
qu'il ne peut pas fermer les yeux sur ce problème-là.
Les municipalités nous disent: Bien, nous sommes des corps
publics, puis nous n'avons pas les moyens dont dispose le gouvernement quand un
problème est complètement hors de solution; nous vous demandons
de considérer la possibilité de faire une intervention si elle
s'avérait nécessaire. Mais je suis convaincu que si l'esprit dont
nous avons été témoins au cours des derniers mois, et dont
je me réjouis, se manifeste dans ce secteur-ci, pareille intervention ne
sera pas nécessaire. Nous ferons tout ce que nous pourrons pour que les
problèmes se règlent par les voies normales, vous pouvez y
compter.
J'en profite pour exprimer mon appréciation à titre de
membre du gouvernement pour la manière dont a été
réglé le problème de ralentissement de la hausse de la
rémunération dans le secteur public québécois pour
les mois à venir. Je pense que le premier ministre et le
président du Conseil du trésor ont exprimé leur
appréciation à maintes reprises, puis je vous dis que si des
ententes de même nature pouvaient se conclure dans le secteur municipal
pour la période que nous traversons, qui est une période
brève et limitée, je pense que ça contribuerait
énormément, d'abord, à aider à franchir cette
étape que nous demandons aux municipalités de franchir,
deuxièmement, à faire les discussions qui doivent être
poursuivies, de toute évidence.
Je vais donner juste une nouvelle statistique que je n'ai pas
donnée jusqu'à maintenant parce que mes collaborateurs qui sont
en arrière, ils travaillent continuellement pendant que nous discutons
et je leur propose toujours de nouvelles équations. Là,
tantôt, j'ai fait quatre hypothèses avec la CSN et je pense que
ça va poursuivre le débat avec vous, M. Daoust, et vos
collègues. J'avais dit: On peut faire une hypothèse en vertu de
laquelle le montant qui reste à financer, qui est 252 000 000 $, quand
on enlève les sources de revenus qui vont venir de décisions du
gouvernement, pour lesquelles les élus municipaux n'ont, par
conséquent, aucunement à s'inquiéter, si on
répartissait ce montant-là uniquement sur la taxe foncière
générale, qu'est-ce que ça donnerait? Si on le
répartissait uniquement sur le non-résidentiel foncier, qu'est-ce
que ça donnerait? Si on répartissait ça 50-50, qu'est-ce
que ça donnerait? C'est assez Intéressant. Si on le
répartissait uniquement sur le foncier général qui
regroupe à la fois le résidentiel et le non-résidentiel -
c'est la taxe foncière de base - ça donnerait finalement, pour
tout le Québec - on a une évaluation de 252 000 000 000 $ au
Québec, ça ne peut pas mieux tomber comme coïncidence, c'est
252 000 000 $ qu'on cherche - ça veut dire 0,10 $ les 100 $
d'évaluation à travers tout le Québec. Si on appliquait
ça, "across the board", partout, 0,10 $ les 100 $ d'évaluation,
ça veut dire que pour une propriété d'une valeur de 100
000 $, ça serait 100 $; une propriété de 50 000 000 $, 50
$. On pourrait continuer, 300 000 $, 300 $.
Je pense que ça nous donne une Idée, quand même, de
l'ordre de grandeur dans lequel nous évoluons. J'ai vu toutes sortes de
thèses sur la détérioration de ceci et de cela. Mais si on
regarde ça froidement, on est dans un ordre de grandeur qui est
très modeste comparé à ce que sont les finances publiques
aujourd'hui. Puis le gouvernement l'a voulu ainsi; II a voulu que ça
reste une chose modeste. Évidemment, quand on tire un
élément puis qu'on le met en épingle en oubliant tout le
reste de la fiscalité, ça prend une autre tournure. Ça,
c'est ce que je vous propose puis, évidemment, si on prend d'autres
hypothèses... Je vais en prendre une, mais seulement pour les fins de
l'Illustration puis je vais passer à autre chose après ça.
Si nous prenions 50-50, ça donnerait un accroissement du fardeau
résidentiel de 2,9 % et du fardeau non résidentiel de 5,9 %. Je
trouve que ça serait un équilibre qui aurait de l'allure. Vous
savez que nous laissons le choix aux municipalités. Ce sont les
municipalités qui vont décider de l'alliage qu'elles feront entre
les différentes sources de revenus. La taxe sur le stationnement, vous
en avez parlé; d'après ce que j'ai entendu ici, II n'y a pas gros
de potentiel là-dedans. On la laissera peut-être à
l'état facultatif, ce n'est pas décidé. Le gouvernement
tranchera au cours des prochains jours. Mais II n'y a pas gros de potentiel
là-dedans à court terme. Dès qu'on sort du territoire de
Montréal, II n'y a personne qui veut entendre parler de ça.
Alors, ça voudra dire qu'il faudra le prendre sur le
non-résidentiel, sous forme de surtaxe, à ce moment-là,
c'est aussi simple que ça.
Moi, ce que je veux vous signaler, c'est qu'à mon humble avis -
puis je ne pense pas avoir perdu le nord - nous sommes dans un ordre de
grandeur qui est plutôt raisonnable et fort modeste étant
donné ce que sont les besoins du gouvernement aujourd'hui. Puis la seule
alternative à tout ce que le gouvernement a mis sur la table, c'est un
accroissement du déficit. Un accroissement du déficit, n'allez
surtout pas demander conseil à l'Opposition en cette matière, ils
vont vous dire: Allez-y! Leur chef l'a déjà dit. Je n'ai pas fait
de partlsanerle jusqu'à maintenant, mais ça, je pense qu'il y a
certains faits qui sont de notoriété commune, qu'on peut
évoquer sans faire de partlsanerle.
Et nous autres, si vous regardez le dossier
depuis six ans, cette année, nous avons été
obligés d'augmenter le déficit. Comparé à l'Ontario
qui est une province au moins 25 % plus riche, nous avons augmenté le
déficit à 3 500 000 000 $. Eux autres l'ont porté
à, je pense, 9 000 000 000 $. Déjà, le ministre des
Finances a annoncé qu'il faut revenir à notre trajectoire. Et je
dis ici, pour l'édification de la députée de Taillon, en
toute amitié, que l'augmentation des dépenses publiques au
Québec, les quatre années avant 1990-1991, c'a été
à un rythme à peu près de 1 % supérieur à
l'inflation, chaque année. Ça veut dire qu'on les a
contrôlés beaucoup depuis cinq ans, malgré l'augmentation
des coûts de la santé qui a dépassé ia moyenne.
Ça veut dire que sur tout le reste, on a fait ça.
Tantôt M. Daoust, vous avez parlé - je vais terminer par
ça - vous avez dit: Oui, mais il ne pourra pas être question de
développement dans le transport en commun. Ça fait cinq ans, pour
nous autres au gouvernement, qu'il n'en est pas question. On se fait dire
à chaque année, quand on fait les budgets: Ne présentez
pas de plan de développement, ça ne pourra pas marcher. Les
députés le savent. Et quand on veut faire un peu de
développement, il faut le prendre à même d'autres
programmes, à même d'autres sources de revenus qu'on avait. C'est
comme ça qu'on a fonctionné. C'est pour ça qu'on est bien
placé pour tenir un langage austère. On l'a pratiqué. Et
on constate qu'il faut le pratiquer encore davantage, parce que, avec tous les
éléments qui sont insérés dans la structure des
finances publiques, ça va prendre beaucoup de temps avant d'avoir
ramené le Québec sur la voie de la santé
financière, en matière de finances publiques. Alors, je vous pose
le problème: Trouvez-vous que cet ordre de grandeur dont je parle, M.
Daoust, 0,10 $ par 100 $ d'évaluation, c'est ça qui va ruiner la
province de Québec, la population et les entreprises?
M. Daoust: C'est toujours des questions - je m'excuse - un peu
piégées. Évidemment, écoutez, ce n'est pas la
catastrophe, tel que vous présentez le problème, de nous dire:
Ça coûterait 0,10 $ les 100 $ d'évaluation, si
c'était généralisé. Boni C'est une augmentation -
pris d'une autre façon - vous l'avez mentionné, de 2,9 % ou 5,9
%, pour le résidentiel ou le non-résidentiel. Mais quand on se
place à un autre lieu, qui n'est pas le vôtre évidemment,
et qu'on volt l'avalanche de taxes qui nous tombe dessus... La TPS, c'est tout
récent et vous savez quelle opposition ça a pu susciter, mais les
gens s'en souviennent et la subissent. Bientôt, la TVQ s'appliquera sur
les services. La TVQ s'applique maintenant sur des biens de consommation qui,
dans le passé, ne voyaient pas une taxe de vente
québécoise les affecter. Je pense aux vêtements et à
d'autres secteurs aussi. Alors, il y a un effet cumulatif de tous ces efforts
fiscaux qu'on demande aux concitoyens et qui produit, d'après ce que
l'on sait, des campagnes de protestation et de fortes inquiétudes.
Vous avez dit que ça va prendre encore beaucoup de temps pour
assainir les finances publiques au Québec et qu'il y a
déjà des mouvements qui sont amorcés. Nous,
fondamentalement, ce qu'on ne cesse de répéter, on l'a dit ici,
on l'a dit ailleurs, on le dira à d'autres endroits: C'est qu'on
souhaiterait tellement qu'il y ait un examen rigoureux, méticuleux,
démocratique - inévitablement, en partant par des commissions
parlementaires - en épousant peut-être des modèles qu'on a
connus récemment, mais où toute la population du Québec
serait appelée à réfléchir, à cheminer,
à se solidariser à l'égard des grands problèmes des
finances publiques. Bon! On le dit dans notre document: Établir le
fardeau fiscal de chaque groupe de revenus, voir quelles sont les taxes qui
sont régressives. C'en est une taxe qui est régressive,
ça, qu'on le veuille ou non. Vous ne me ferez pas admettre le contraire.
Vous nous dites qu'elle n'est pas trop régressive, mais c'est tout de
même une taxe qui est régressive. (17 h 45)
C'est tout cet examen-là qu'on souhaiterait tellement faire, et
peut-être dire: Bon, écoutez, se lancer là-dedans, c'est un
exercice qui va prendre des mois et des mois. Je pense qu'on a l'habitude au
Québec d'aborder et d'analyser les problèmes comme ceux-là
relativement rapidement. Je vous concède que c'est un problème
d'une très grande complexité. Il n'est pas simple, et il faudrait
se préparer adéquatement, donner tout le temps voulu aux gens
pour intervenir, mais il me semble que c'est là la direction dans
laquelle un gouvernement comme le vôtre devrait s'engager. Il faut les
assainir, les finances publiques. Il y a des débats de
société indispensables. Il y a des divergences de vues. Tout le
monde vient ici se chamailler ou vous critiquer dans une très large
mesure pour ce qui est de ce projet de loi là. On le souhaiterait
tellement, plutôt que de le prendre par le bout où vous le prenez
en essayant de nous dire: Écoutez, c'est peu dans le fond, et ça
ne devrait pas peser très lourd dans la poche des contribuables. On ne
peut pas se laisser entraîner là-dedans, M. le ministre, parce
qu'on sait fort bien que ce n'est pas là qu'est la solution. Ça
met en danger, je ne sais pas, des orientations et ça nous permet de
contester la façon dont ça s'est fait politiquement.
Et ce qui nous agace un peu, comme je l'ai dit - je sais que vous
êtes toujours attentif, mais je veux le répéter - le
fédéral l'a fait. Vous avez été critique par
solidarité; le ministre des Finances, votre collègue, n'a pas
mâché ses mots: "Pelleter ça dans la cour du voisin." C'est
l'expression qui est devenue classique au Québec. Et voilà que
vous vous autorisez de je ne sais trop quoi, d'un état des finances
publiques qui n'est pas à son meilleur, pour dire: Bon, on va
refiler ça aux municipalités, sans qu'il y ait eu une
espèce de préparation, un effort de conviction et un débat
qui aurait pu être alimenté d'une façon différente
de la façon dont il l'est à ce moment-ci.
Le Président (M. Garon): Je vous remercie M. Daoust. Comme
le temps dévolu au parti ministériel est terminé, je donne
la parole au député de Jonquière et, à ce
moment-là, vous pourrez sans doute compléter sur une
interrogation qui viendra, j'en suis convaincu.
M. Dufour (Jonquière): Oui, merci, M. le Président.
C'est rafraîchissant d'entendre parler des gens qui... Des fois on pense,
nous, qu'on est bien correct dans nos affaires, mais il y a aussi des gens qui,
à l'extérieur, voient ce qui se passe. C'est un peu
rafraîchissant pour l'Opposition de savoir que ce n'est pas 250 000 000 $
qu'on va chercher, c'est 400 000 000 $ et qu'avec l'augmentation des taxes, les
contribuables, ce n'est pas des tiroirs qu'on peut découper en morceaux
et les séparer. Là on parle de 0,10 $, ça va bien, c'est
ça. Et un autre tantôt, on vous parle de ça, et un autre
tantôt, c'est autre chose. En fin de compte, il faut bien comprendre que
la poche du contribuable n'a pas 150 porte-monnaie, elle en a un. Des fois, il
y en a deux, mais ça en prend deux pour en faire un. C'est ça que
ça veut dire assez souvent, parce que quand les deux travaillent, c'est
ça que ça fait. Donc, les 0,10 $, c'est plus que ça un
peu, parce qu'il n'a pas parlé d'enlever la taxe sur l'immatriculation,
les mutations immobilières et allons-y. Il y en a beaucoup de ces
taxes-là et moi, je pense que c'est une question qui était
piégée. Vous avez très bien répondu, d'ailleurs, et
moi je trouve que c'est de même qu'il faut faire. On ne peut pas se
laisser entraîner dans ça, et c'est là dessus... Ça
ne coûte jamais rien. Si je vous dis demain matin que ça vous
coûte 50 $ pour manger, mais ce n'est pas pour l'année, c'est pour
un repas, c'est un peu plus cher. Si je vous dis que c'est pour la semaine,
c'est peut-être pas pire, mais à force d'en mettre, ça
finit par... C'est la théorie du verre qui est plein d'eau. C'est la
goutte qui vient de le faire déborder, ce verre-là.
Et je pense que vous avez résumé aussi, effectivement,
l'article qui nous dit qu'une famille moyenne paie à Ottawa 1530 $ de
plus qu'en 1984; une famille moyenne. Le Québec, vous pensez qu'en 1985,
il n'a rien chargé? Je veux bien croire que c'est des bons
administrateurs. Il n'a pas fait de partisanerie, je vais essayer de ne pas en
faire non plus. Il faut rétablir la vérité. Le budget du
Québec était de 25 000 000 000 $ en 1985; en 1991, c'était
38 000 000 000 $. Les 13 000 000 000 $, vous pensez que c'est juste l'effet de
la bonne administration? Il y a quelqu'un qui doit avoir payé quelque
part. Nous autres, on le sent qu'il y a quelqu'un qui a payé. Ils ont
été le chercher quelque part. Ce n'est pas juste de la bonne
administration, on a vidé toutes les sociétés
d'État de leurs revenus. C'est ça qui a baissé le
déficit. C'est facile de faire un chiffre comptable de 500 000 000 $
à Hydro-Québec, et d'aller siphonner la caisse de
l'assurance-automoblle et le reste et le reste. Je pense qu'on ne vous apprend
pas ça. Vous le savez comme nous autres. On le voit bien. Ils en ont
pris pour un coup parce qu'on la voyait venir, la dépression, et ils ne
l'ont pas vue. C'est ça, le drame qu'on vit actuellement.
Moi, j'aimerais que vous élaboriez, M. Daoust, d'abord sur la
question de l'augmentation ou les dangers qui nous guettent en augmentant ces
coûts-là, de diminution de services. Vous qui êtes
habitués à travailler avec des travailleurs et ces
gens-là, comment vous les percevez, ces pertes ou ces diminutions de
services ou les dangers qui nous guettent par rapport à ces
augmentations de taxes successives? Est-ce que vous pourriez élaborer
quelque peu par rapport à ça? On n'avait pas de mémoire;
on est obligés de suivre un peu à la sauvette, là.
M. Daoust: Bien, écoutez, ça saute aux yeux
qu'à un moment donné, que ce soit à la STCUM ou dans une
municipalité... STCUM, écoutez, qui va être obligée
de trouver quelque part, en quelque lieu ces montants d'argent là, elle
va faire des choix politiques. Bon, il n'est pas exclu de penser que... Je
pense bien que les gens les plus intimement mêlés dans le secteur
pourraient vous en parler abondamment. On coupe ici, on coupe là. On
fait en sorte que le transport en commun devienne moins un attrait et qu'il se
détériore. Et ça, là, encore une fols, ça a
des effets cumulatifs. Quand on perd 1 % du public passager, ça
crée des drames au point de vue revenus, et ça crée toutes
sortes de difficultés.
Bon, l'entretien des routes, c'est la même histoire. Dans les
municipalités qui vont être obligées maintenant
d'entretenir les routes, on sait fort bien qu'il y a un tas de routes qui ne
seront pas entretenues de façon adéquate et ça, on en
connaît les conséquences. C'est au point de vue
sécurité publique que ça peut avoir les effets les plus
désastreux. Ça ne se comptabilise pas facilement, mais un nombre
plus grand d'accidents va créer des problèmes et des coûts
à l'ensemble de la collectivité québécoise, qu'on
ne peut pas facilement évaluer. Il en est de même de tous ces
services-là, qu'est-ce que vous voulez? Et il y a tout le
phénomène à l'égard des villes, de
l'étalement urbain, de cette espèce d'exode qui est amorcé
depuis tellement d'années et qu'on favorise en faisant en sorte que le
transport en commun à Montréal, par exemple, et ailleurs, subisse
une détérioration. Ça a des conséquences qui ne
sont pas faciles à évaluer - d'autres qui viendront devant vous
un peu plus tard pourront peut-être le faire - mais
qui provoqueront des faiblesses dans le service qui est rendu à
l'ensemble de la population, en fait, qu'ils soient des contribuables
municipaux ou des usagers ou des usagères du transport en commun.
Peut-être que d'autres, Guy Cousineau ou Henri...
M. Godbout (Clément): Moi, je pense qu'effectivement la
réforme va causer des problèmes dans certaines
municipalités, certaines réglons. Je pense que l'analyse et la
présentation du ministre, lorsqu'il nous dit que c'est 0,15 $ les 100 $
d'évaluation... 0,10 $ d'évaluation sur l'ensemble du
Québec, il fait abstraction... J'aimerais que ces gens qui travaillent
en arrière nous disent ce que ça veut dire pour la région
de Montréal, parce que la réforme touche inéquitablement
l'ensemble de la province. Il y a des municipalités où,
effectivement, ça va avoir un effet moins grand que sur d'autres, sauf
que lorsqu'on regarde l'effet sur la région de Montréal, quand on
regarde les possibilités de taxation à Montréal
même, on a des problèmes parce que, là, ce n'est
plus 0,10 $ des 100 $ qu'on va toucher.
Et, si les municipalités sont incapables d'aller chercher dans
les budgets la fiscalité pour aller payer la facture du transport en
commun, qui va s'élever pour elles à 200 000 000 $ de plus l'an
prochain, elles vont être obligées d'aller les chercher quelque
part, soit sur les usagers et les usagères du transport en commun, soit
de le payer par la taxe foncière, que ce soit industrielle ou que ce
soit générale. Si elles ne le font pas et si elles veulent
continuer à maintenir le service comme il est là actuellement,
elles vont être obligées de couper dans d'autres services.
On sait déjà - les villes l'ont annoncé - que leur
capacité de taxation pour le transport en commun, elles ne vont pas y
toucher, donc, c'est une baisse de services. Si c'est une baisse de services,
ça veut dire qu'à long terme et même à moyen terme,
c'est une détérioration du service. Et à Montréal,
dans la grande région de Montréal, on a besoin d'améliorer
le service. Il faut trouver du financement pour rendre le service de transport
en commun de plus en plus attrayant. Le fait que vous vous retiriez comme vous
le faites du transport en commun actuellement va faire en sorte que ça
va empêcher les sociétés de transport d'améliorer
les services. Et en n'améliorant pas les services, la clientèle
va diminuer et ça va toujours aller de pire en pire dans cette
situation-là.
Donc, quand vous nous dites que c'est 0,10 $, ce n'est pas 0,10 $ pour
les résidents et les propriétaires de Montréal, ce n'est
pas 0,10 $ pour ceux de Verdun et ce n'est pas 0,10 $ pour les autres. Je
trouve qu'il faut aussi le regarder et ne pas mettre des chiffres qui jettent
de la poudre aux yeux, en disant: 0,10 $... Si c'était une taxe
provinciale, vous pourriez dire qu'effec- tivement la province va demander un
effort supplémentaire de 0,01 $, 0,02 $ ou 2 $ par année à
tous les citoyens et là, on pourrait peut-être dire: Oui, c'est un
effort supplémentaire qu'on demande aux contribuables pour donner de
meilleurs services dans l'ensemble des villes ou dans l'ensemble des services
de transport en commun. Mais ce n'est pas ça que vous faites; vous nous
remettez le fardeau très localement tandis que le transport en commun,
dans une région comme celle de Montréal, c'est un service
régional qui profite à l'ensemble de la province. Un
développement autour du transport en commun et des services publics va
nous aider à aider au développement de la grande région de
Montréal et pas uniquement sur le territoire de la STCUM ou de la STL ou
de la STRSM. Et là-dedans, on n'a pas, dans votre financement, la
capacité de récupérer de l'argent. Et tant et aussi
longtemps que ce ne seront pas des taxes provinciales qui vont aider à
appuyer le transport en commun... Pas uniquement dans son développement
parce que, dans son développement, actuellement, à chaque fois
que vous payez les infrastructures... On n'aura plus les moyens de se les
donner, on ne pourra pas les utiliser.
M. Massé: Un autre impact majeur, ça va être
le freinage que ça va occasionner au renouvellement de l'infrastructure:
nos ponts, nos routes, nos réseaux d'aqueduc et d'égout. Tout le
monde reconnaît, au Québec - et même, c'est un
problème qui est à la grandeur du Canada, au moment où on
se parle - que ça prendrait une vingtaine de milliards, aujourd'hui, au
moment où on se parle, pour renouveler l'infrastructure municipale.
C'est évident que ça va porter un dur coup, tout le monde le
reconnaît. Il y a déjà eu une conférence des
premiers ministres, en 1989, où ils disaient: II faut absolument que les
trois paliers de gouvernement - provincial, fédéral - mettent de
l'argent pour renouveler l'infrastructure. Tout le monde est d'accord
là-dessus, la Fédération canadienne des
municipalités, tout le monde. Le problème que ça va
occasionner, c'est que le réseau va devenir dans un état de plus
en plus lamentable. Il y a des villes, au Québec, au moment où on
se parle, où il y a des fuites d'eau où on perd jusqu'à 30
%, 40 % de l'eau traitée. Ça occasionne aussi des
problèmes d'environnement, des problèmes de coûts parce que
l'eau qui est traitée entraîne des coûts. Et ça, on
pense que la réforme du ministre va porter un coup très dur au
renouvellement de l'infrastructure. On a l'impression qu'on va peut-être
s'en aller dans une situation où on ne pourra pas... Un jour, on ne
pourra plus s'en sortir; c'est une espèce de cul-de-sac
épouvantable.
M. Cousineau (Guy): Oui. Moi, j'aimerais peut-être ajouter
quelque chose et dire au
ministre que, finalement, 0, 10 $ les 100 $... C'est quoi, 242 000 000 $
par rapport à 35 000 000 000 $? L'objectif que vous visez, ce n'est pas
d'arrêter à 242 000 000 $. L'objectif va plus loin que ça
et, malheureusement, ça accroche les plus pauvres au passage, les plus
démunis. En même temps que ça accroche les gens les plus
mal pris, c'est une dégradation un peu généralisée
de notre qualité de vie. Parce que, quand on regarde ce qui se passe,
c'est qu'on voit, depuis un bout de temps, la taxe sur la consommation qui
frappe dur, qui ne lâche pas et qui n'a pas l'intention de lâcher.
On voit la taxe sur les stationnements - tout à l'heure, on en a
parlé - on voit la taxe sur le transport en commun. Comment voulez-vous
que les communautés urbaines ou les autres aillent chercher des revenus?
Nécessairement, ils vont aller les chercher dans les poches des gens,
des travailleurs. Et ceux qui utilisent le service en commun, ce sont ceux qui
n'ont pas d'auto. Ils n'ont pas tous un conducteur privé, ceux qui vont
travailler le matin et ce sont eux autres qui se font accrocher au passage. Le
budget du Québec, si je ne me trompe pas, est aux alentours de 35 000
000 000 $? Bon. 242 000 000 $...
Ce n'est pas un "one-shot deal" qui nous est proposé - il faut le
voir - je pense que c'est une stratégie à moyen et long termes
qui va faire en sorte qu'on va passer la facture de plus en plus importante aux
municipalités. On va leur demander de se développer, mais les
problèmes de Québec, Montréal, Hull et Sherbrooke ne sont
pas nécessairement les problèmes de Radisson ou de
Desmaraisville. À un moment donné, il faut regarder comment
grandit la société, comment elle fonctionne. Je pense que le
problème, tel que proposé, accroche mal au passage ceux qui n'ont
pas besoin de se faire accrocher à ce moment-ci. Et c'est pour ça
que, dans notre mémoire, à la toute fin, on vous recommande
humblement de réfléchir de façon très très
poussée sur une commission d'étude qui va plus loin. Que des gens
de bonne foi s'assoient et regardent de quelle façon ça peut
s'arranger en fonction des réalités régionales, des
réalités qu'il y a entre les municipalités et en fonction
des besoins de toute une population qui utilise le transport en commun car, de
toute façon, on devra leur passer la facture si on ne fait pas
attention. (18 heures)
Et c'est ça qui, pour moi, en tout cas, me dérange au plus
haut niveau, parce que les municipalités ne sont pas capables de le
regarder toutes de la même façon. Et les 0, 10 $... On peut
répondre facilement en disant: Bien, écoutez, pourquoi 240 000
000 $ ou 250 000 000 $ ou 400 000 000 $, le cas échéant, sur 38
000 000 000 $? Alors, c'est toute une philosophie qu'il faut regarder et cette
philosophie-là vise, en tout cas va accrocher du monde au passage qu'il
ne faut pas qu'ils soient accrochés parce qu'ils n'en ont pas besoin et
|e pense qu'en plus de ça, ça dénote une orientation qui
est inquiétante à long terme.
Mme Marois: Oui...
Le Président (M. Garon): Mme la députée de
Taillon, il reste une minute.
Mme Marois: II reste une minute. C'est tout simplement... Le
ministre, effectivement, est intervenu pour reprendre des propos que j'avais
tenus hier. Si nous avions appliqué les mêmes règles
comptables au déficit du gouvernement libéral que celles qui
s'appliquaient au déficit du gouvernement du Parti
québécois, c'est 554 000 000 $, par exemple, qu'on aurait
dû ajouter au déficit de 1987-1988. Alors, je pense que, sur
ça, les affirmations que je faisais hier restent pertinentes et justes.
Cela étant dit, la loi des moyennes, effectivement, a un effet de
nivellement qui cache des différences majeures et qui fait en sorte
qu'on se retrouve devant un projet qui crée de l'inéquité.
Ce projet est de l'improvisation et, la meilleure preuve, c'est que le
ministre, sans arrêt, nous dit: Je me tourne vers mes fonctionnaires pour
évaluer de nouvelles avenues, etc. Alors, je me dis que cela signifie,
si on est à quelques semaines de l'adoption de la loi pour ne pas dire
quelques jours, ça signifie sûrement qu'il y a des recherches qui
ne se sont pas faites, qu'il y a des gens qui ne se sont pas fait entendre, qui
se font entendre actuellement...
Le Président (M. Garon): Alors...
Mme Marois:... et qui j'espère influenceront le
ministre.
Le Président (M. Garon): Alors, |e remercie les
représentants de la Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec. Le temps alloué à toutes les
parties étant écoulé, je me vols dans l'obligation de vous
dire merci et de demander aux représentants de l'Union des producteurs
agricoles de s'approcher de la table des délibérations.
Je demanderais aux membres, aux députés de regagner leur
siège parce que tantôt... Je demanderais aux députés
de regagner leur siège. Je demanderais au ministre de donner l'exemple
et de gagner son siège. À l'ordre! Il est déjà 18 h
5. À l'ordre!
M. le président de l'UPA, vous avez 45 minutes. Si vous voulez
présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez 15 minutes, 15
minutes au parti ministériel, 15 minutes à l'Opposition. SI vous
en prenez plus, on va soustraire le temps en plus du temps qui leur est
alloué et, si vous en prenez moins, on va leur accorder le surplus.
À vous la parole.
Union des producteurs agricoles
M. Proulx (Jacques): Merci, M. le Président. Je vous
présenterais Mme Andrée Lagacé qui est avec moi, qui est
agro-économiste et qui travaille à notre service d'étude
et de recherche. Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames et
messieurs, je voudrais, au départ, vous dire que le présent point
de vue de l'UPA reflète davantage les appréhensions du monde
rural face à l'ensemble des mesures proposées par le nouveau
partage Québec-municipalités qu'il ne porte plus
spécifiquement sur le projet de loi 145.
La tenue en février 1991 des États généraux
du monde rural est révélatrice de la préoccupation des
Québécois et des Québécoises de préserver le
milieu rural qui vit présentement des problèmes graves de
déclin sur les plans démographique, social, économique et
culturel. 1200 personnes, regroupant quelque 160 organismes, se sont
réunies et se sont déclarées solidaires et conscientes de
leur responsabilité de prendre en main le développement
général et, en particulier, celui du milieu rural. Toutefois, la
relance du monde rural repose avant tout sur son dynamisme économique,
c'est-à-dire sa capacité à générer
richesses, emplois, quantité et qualité de services, somme toute,
une qualité de vie comparable à celle des citoyens
rassemblés dans les centres urbains. Pour réaliser cette relance,
on a démontré la nécessité de
rééquilibrer les pouvoirs actuels du haut vers le bas. En effet,
il revient au pouvoir local de gérer les ressources du milieu,
d'orienter le développement rural selon des besoins définis en
concertation avec les principaux agents socio-économiques locaux. Le
milieu rural a affirmé sa volonté de se prendre en main sans
attendre l'intervention financière de l'État. Par contre, le
partenariat est essentiel à tous les niveaux pour un
développement concerté et judicieux des ressources du milieu. Les
différents paliers de gouvernement sont appelés à
collaborer pour freiner l'exode et à contribuer au développement
économique des régions.
Nous constatons que le projet de loi 145 va à rencontre des
principes de concertation et de solidarité énoncés lors
des états généraux et nuit à la volonté de
relance des économies locales. M. le ministre, on a l'impression que
vous procédez de façon unilatérale, sans consultation
valable avec les municipalités, sur une base strictement comptable et
budgétaire pour refiler une facture que le gouvernement ne voulait
simplement plus assurer. Cette façon de procéder, sans
égard aux répercussions sur les municipalités rurales
à faible densité de population, manque de vision et de sens des
responsabilités face à ces populations qui seront durement
touchées. Il y aura une différence encore plus nette dans le
niveau des services aux citoyens selon qu'ils habitent en milieu urbain ou en
milieu rural.
Comme il a été spécifié
précédemment, la volonté des gens vivant en région
d'y demeurer et de prendre en main leur destinée est sans conteste. Le
nouveau partage des responsabilités Québec-municipalités
que vous proposez mine le souci d'équité qui avait prévalu
jusqu'à présent et qui permettait, peu importe la richesse
foncière d'une municipalité de jouir d'un minimum de services. Si
on prend comme exemple une municipalité rurale type de 1000 habitants,
certaines municipalités affichent une richesse foncière
uniformisée de plus de 42 000 000 $ (l'exemple de Montebello), d'autres,
telle la municipalité de Béarn au Témiscamingue, montrent
une valeur de richesse foncière d'environ 18 500 000 $. On comprend
rapidement que l'impact du transfert des charges n'aura pas le même effet
sur les deux municipalités. Le fardeau supplémentaire des
contribuables sera moindre à Montebello, environ 9 %, qu'à
Béarn au Témiscamingue, plus de 25 %, où les taux globaux
actuels de taxation sont semblables. De plus, la majorité des
municipalités rurales du Québec ne pourront profiter de
l'ouverture des nouveaux champs fiscaux annoncés. Les
municipalités rurales se caractérisent pour la plupart par une
faible structure industrielle et commerciale et ne peuvent à ce titre
répartir les charges fiscales supplémentaires sur d'autres
secteurs que le résidentiel. Les jeunes régions abondantes en
ressources naturelles, mais faibles en population souffriront tout
particulièrement. Plus spécifiquement, la prise en charge de
l'entretien et de la réfection de la voirie locale par les
municipalités rurales induira des effets variables d'une
municipalité à l'autre, selon la longueur du réseau
à entretenir et l'état actuel du réseau routier. Nul
besoin d'être devin pour prédire que les municipalités
ayant une faible richesse foncière et un long réseau de voirie
tertiaire à entretenir cesseront éventuellement l'entretien de
rangs et de routes locales et remettront aux calandes grecques leur
réfection.
L'estimation des charges financières supplémentaires
incombant aux municipalités en raison de la prise en charge du
réseau local a été basée sur un montant moyen de
3000 $ par kilomètre de route. Or, cette estimation a été
réalisée sans que le ministère des Transports ne soit
véritablement au fait de l'état du réseau de voirie
locale, ce qu'il s'apprête à faire au cours de l'année
1991. On peut supposer que la facture sera plus salée que celle
déjà annoncée dans la volumineuse étude de
simulation d'impacts produite par le MAM. Certes, des mesures compensatoires
transitoires pour les premières années d'application de la
réforme sont prévues pour limiter à 25 % la hausse
probable du taux de taxation, mais il s'agit, comme le terme le dit, de mesures
transitoires. Nombre de municipalités rurales dépassent à
l'heure actuelle, selon les prévisions du MAM, ce pourcentage
d'augmentation. Comment les municipalités rurales assumeront-elles cette
charge supplémentaire,
sinon en coupant davantage dans les services? Autre chose pour le moins
inquiétante est le fait que la gestion du programme d'aide à
l'amélioration du réseau local fait l'objet d'un mécanisme
discrétionnaire et arbitraire d'attribution de la part des
députés, ce qui laisse place au quéman-dage de la part des
élus municipaux et donne libre cours au marchandage politique, et ce,
sur le dos des contribuables qui n'auront pas été chanceux
à ce jeu d'influence. Quant à la tarification des services
policiers de la Sûreté du Québec, il faudrait pour le moins
que le service dispensé soit amélioré. Plusieurs
municipalités sont insatisfaites du service actuel offert. Pourquoi
payer pour un service sur lequel on n'a aucun contrôle, et qui est, par
ailleurs, déficient? En hypothéquant l'avenir des routes locales,
celles-là mêmes qui desservent tantôt une ferme,
tantôt une industrie locale, qui permettent aux enfants des agriculteurs
de se rendre à l'école du village, ou la distribution du
courrier, on sape le dynamisme déjà précaire des
régions rurales. Somme toute, tout concourt à
l'accélaration du processus de régression du tissu rural.
Le nouveau partage des responsabilités
Québec-municipalités aura pour effet d'augmenter
substantiellement les taux de taxation des municipalités rurales dans
lesquelles se situent les exploitations agricoles. Une fois terminées
les mesures transitoires, et malgré la péréquation
profitant aux plus petites municipalités, le taux de taxation pourrait
doubler par rapport à ce qu'il est présentement. Ceci veut dire
que les producteurs et productrices agricoles devront assumer un coût
jusqu'à deux fois plus élevé pour leurs taxes
foncières, augmentant ainsi leur coût de production. Ceci,
additionné de tous les autres coûts supplémentaires qu'ils
ont à assumer, concourt à diminuer leur
compétitivité sur les marchés locaux, nationaux et
internationaux. Étant donné que les prix ne peuvent être
augmentés pour maintenir cette compétitivité, ce sont les
producteurs et productrices qui devront assumer ces augmentations de
coûts à même leur marge bénéficiaire
déjà très limitée. De plus, étant
donné que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation rembourse une partie de ces taxes municipales aux
agriculteurs et aux agricultrices, le MAPAQ verra son budget gonfler. À
plus ou moins brève échéance, ceci aura des
répercussions négatives sur l'ensemble des autres programmes du
ministère, étant donné que le budget est constamment la
cible de coupures. Les membres de l'UPA voient d'un très mauvais oeil
ces changements qu'apporte le projet de loi 145. En plus
d'accélérer le phénomène de l'exode rural, il
augmente le fardeau fiscal foncier des fermes.
Tout le milieu rural, et en particulier le milieu agricole, voit avec
appréhension la mise en application du projet de loi. Les États
généraux du monde rural et les divers mémoires
présentés à la Commission Bélanger-Campeau ont
clairement exprimé la nécessité d'une
décentralisation du haut vers le bas, d'une pratique renouvelée
de la gestion des services publics et du développement du territoire.
Or, la réforme proposée tend à renforcer certains axes de
croissance et à accentuer les phénomènes de
dépeuplement et de dévltalisation des régions en
alourdissant la charge fiscale des contribuables des régions rurales et
en confrontant l'usure lente et inexorable de la qualité et de la
quantité de services offerts. Bref, on s'apprête à aller
à rencontre d'une véritable décentralisation du pouvoir
décisionnel et du pouvoir de dépenser, et ce, en partenariat avec
les divers niveaux politiques. l'upa demande donc de surseoir à cette
réforme tant que l'ensemble des intervenants ne seront pas parvenus
à des solutions acceptables et où l'avenir des régions
sera pris en compte. la réforme proposée s'établit dans un
climat de bousculade. on ne bouleverse pas des pratiques de gestion bien
implantées, sans prévoir une période d'adaptation, de
transition et de réajustement, et ceci, dans un souci de réussite
et d'efficacité. au demeurant, avant de procéder à toute
modification importante, on se doit de connaître l'ampleur et la nature
exacte de ces modifications autant au niveau économique, social et
culturel. on fausse la donne, lorsqu'on ne prend en compte qu'un seul
élément du problème, en l'occurrence ici, le
problème du déficit budgétaire. merci, m. le
président. (18 h 15)
Le Président (M. Garon): Alors, M. le ministre.
M. Ryan: Alors, M. le Président, il me fait plaisir de
saluer, M. Proulx, le président de l'UPA, et la personne qui
l'accompagne. Mol, j'ai écouté avec intérêt
l'intervention que vous avez faite, M. Proulx. Vous me permettrez de vous
rappeler certains éléments de la réforme qui me paraissent
Importants. Le mot "réforme", je n'y tiens point outre mesure. Il s'agit
d'un effort de redressement, de recherche d'un équilibre meilleur dans
les responsabilités. Nous n'avons pas de prétention à
faire de grandes réformes. On en a fait beaucoup, il y a un certain
nombre d'années, puis on s'aperçoit après coup, que
ça coûte plus cher que les gens ne l'avalent pensé quand
ils les faisaient. C'est pour ça qu'on est beaucoup plus
réservé aujourd'hui avec ces mots-là, moi en tout cas. Et
qu'on parle d'un effort de redressement ou de définition d'un
équilibre plus réaliste, j'en suis à 100 %.
J'ai rappelé tantôt devant la FTQ l'Impact global de la
réforme. À un moment donné, il faut bien avoir un chiffre
qui résume tout le plus simplement possible. On en a donné
plusieurs jusqu'à maintenant, on va continuer d'en donner. Dans le
programme que nous avons inscrit dans le projet de loi 145, il y a un certain
nombre
d'atténuations ou d'ajustements qui sont pris en charge par le
gouvernement. Sur le programme initial, il y en a pour 78 000 000 $.
Ceux-là, on ne les compte pas, ils sont pris en charge par le
gouvernement à même ses fonds généraux. En plus, il
y a une autre somme de 149 000 000 $ qui sera procurée aux
municipalités par des mesures arrêtées par le gouvernement
ou l'Assemblée nationale. Je vous donne, à titre d'exemple, les
deux principales. Les frais de participation au transport en commun pour les
propriétaires de véhicules automobiles dont la résidence
se situe à l'intérieur d'un territoire métropolitain au
sens du recensement fédéral, il y en a pour 50 000 000 $. Il y a
des droits ajustés sur les transactions immobilières, il y en a
pour 78 000 000 $ ici. En plus, il y a des revenus accrus découlant de
l'augmentation du montant des amendes sur les infractions au Code de la
sécurité routière. Il y en a pour 20 000 000 $. Alors,
vous additionnez les trois, ça fait 148 000 000 $ ou 149 000 000 $.
Ça, je ne pense pas que ça soit radicalement injuste. Puis,
justement, il y a un principe que le gouvernement pose que je tiens à
souligner, parce qu'on en a point parlé jusqu'à maintenant. Cette
mesure s'applique même dans les municipalités qui sont à la
périphérie des grandes zones urbaines. L'automobiliste qui
réside à Sainte-Thérèse, à Mascouche,
à Saint-Eustache, à Repentigny, à Le Gardeur, va payer ce
montant-là. Puis allez voir la réaction des maires ou des
porte-parole municipaux de ces endroits-là, ils vont vous dire: C'est
effrayant, ils nous font payer, puis on n'a pas de service pour ça. Le
gouvernement considère que ces personnes bénéficient des
services du transport en commun dans la région métropolitaine et
leur demande une participation. On pourrait dire: Au lieu de 30 $, ça
aurait pu être 40 $, ça aurait pu être 50 $. On commence
avec un montant de 30 $, ce n'est pas un montant éternel; il est inscrit
dans la loi cependant. Le gouvernement ne pourra jouer avec ce montant
facilement. Mais, il y a quand même un geste qui est fait, qui est
très significatif. On ne voulait pas que ce fardeau soit porté
uniquement par les résidents de la zone métropolitaine
immédiate.
Mais, là, il reste les 252 000 000 $ que les municipalités
devront aller chercher avec des mesures qu'elles Institueront
elles-mêmes. Comme on a une évaluation totale au Québec de
252 000 000 000 $, ça veut dire que ça fait 10 cents les 100 $
d'évaluation. Il n'y a personne qui va dire qu'on égorge la
population du Québec avec ça. Je pense que, si quelqu'un dit
ça, il mérite d'être dénoncé comme une
personne qui n'est pas sérieuse. 10 cents du 100 $ d'évaluation!
En plus, M. Proulx, en plus, il y a des mesures d'égalisation qui sont
inscrites dans le programme gouvernemental. Le programme de
péréquation qui bénéficie déjà
surtout aux petites municipalités, dont vous vous préoccupez
à juste titre, va être amélioré. Nous allons
l'améliorer considérablement afin que ses effets bienfaisants
soient plus largement répartis. En plus, nous introduisons dans nos
méthodes de calcul des éléments qui vont permettre de
maintenir un taux maximum de contribution per capita qui sera exigée des
contribuables de ces municipalités à faible population. Quand on
aura vu tout l'ensemble - il y a d'autres éléments qu'on
introduira en cours de route, on est pas obligé de tous les donner en
même temps, parce que là on écoute, on est à la
recherche de suggestions qui permettraient d'améliorer le projet de loi.
Je vous dis une chose, entre parenthèses, le principe, c'est
adopté ça. L'Assemblée a voté il y a deux jours et
on ne recommencera pas. Quand vous adoptez une chose à votre
congrès, vous autres, vous ne revenez pas deux semaines après,
vous dites: On vit avec. Même si des fois la discussion peut être
discutable, là, l'Assemblée nationale s'est prononcée par
ses voies régulières hier soir, avant-hier soir. Ça passe
vite en commission parlementaire, on ne s'en aperçoit pas. Alors,
ça, c'est réglé. Puis, à moins d'un miracle qui
pourrait arriver pour l'Opposition, je ne pense pas que le gouvernement change,
ça va de soi. On essaie d'améliorer.
Vous dites: Le ministère des Transports ne connaît pas
l'état des chemins. De grâce! Je pense qu'ils connaissent
très bien l'état des chemins. Mon bureau régional à
Lachute, le bureau régional à Saint-Jérôme
connaissent parfaitement l'état des chemins dans la région des
Laurentides, M. Proulx. Le bureau de Saint-Hyacinthe, c'est la même
chose. Le bureau de Sherbrooke... Il n'y a pas un bureau qui n'est pas au
courant de l'état de ses chemins. Le député de Labelle a
été ministre des Transports déjà et il se souvient,
on faisait des réunions ensemble pour la région des Laurentides.
Le sous-ministre venait et tous les chemins qu'on portait à son
attention, il allait les voir lui-même dans les jours qui
précédaient la réunion et tout. Et les officiers
régionaux du ministère étaient parfaitement au courant de
ça. Il faut quand même arrêter de charroyer. Ce qui n'est
pas acquis, c'est un consensus. C'est peut-être que les autorités
municipales ont une appréciation différente de l'état des
chemins. C'est pour ça qu'on a dit: On va leur donner quelques mois pour
se consulter, pour discuter de ça, et peut-être qu'il y a un point
qui avait été mal apprécié par nos bureaux
régionaux. Ils pourront corriger là-dessus. Ils pourront
enregistrer, porter à l'attention du ministre qui, lui, n'est pas au
courant de tout. Mais d'aller laisser entendre que le ministère ne
serait pas au courant de l'état des chemins, je pense que c'est
parfaitement irréel. C'est parfaitement irréel.
Ceci étant dit, je voudrais vous poser une question. Pour les
cultivateurs qui bénéficient déjà d'avantages
fiscaux importants, que la société reconnaît comme
étant justifiés, à cause
de la contribution qu'ils apportent au maintien de la
société, avez-vous fait des études sur l'impact pour les
cultivateurs des mesures envisagées? Disons qu'on prend une moyenne de
0,10 $ par 100 $ d'évaluation. Ça va être un peu
inférieur à ça dans les petites municipalités et
légèrement supérieur dans les grandes
municipalités. Je voudrais demander à M. Proulx si des
études ont été faites pour essayer d'établir
l'impact pour un foyer agricole à 0,10 $ les 100 $ d'évaluation -
mettez même peut-être entre 0,08 $ et 0,10 $ - ce que ça va
représenter, si on calcule que 70 % de l'augmentation va être
assumée par le gouvernement. Il ne reste pas grand-chose.
M. Proulx: Écoutez, M. le ministre, premièrement,
je trouve bien drôle... Parce que c'est assez rare que les ministres nous
arrivent - un ministre quel qu'il soit - avec des augmentations énormes.
Tu as une pilule amère, d'habitude tu envoies un peu de miel avec pour
l'avaler. Je trouve bien drôle, parce que c'est toujours à peu
près autour de... On mesure jusqu'où on peut étirer
l'élastique sans que ça crie trop et, là, on met
ça. C'est évident, quand vous dites 10 sous, un peu comme M.
Daoust a répondu tout à l'heure, quand on fait l'addition des 10
sous au bout de l'année que chacun des ministères demande, que
c'est là que ça commence à faire un montant
appréciable.
Mais ceci étant dit, je vous dirais que, quand vous soulevez...
Avez-vous fait des calculs sur l'impact que ça va avoir sur les
agriculteurs, parce qu'on nous remet, et c'est reconnu à juste titre, 70
%? C'est évident que, chez les agriculteurs, ça ne touchera pas
d'une façon brutale, instantanément, mais il ne faudrait oublier
qu'ils en paient une partie. Ils paient une partie, qui, elle, risque, comme on
l'a dit dans ça... et encore une fois, je le dis: C'est une
évaluation globale qu'on a faite de la loi. Qu'on en passe des morceaux
aujourd'hui et d'autres morceaux l'année prochaine, il y a quand
même un coût à toutes les propositions qui sont là,
qu'on les passe toutes à cette heure ou plus tard.
Oui, il y a un impact; il y a un impact non seulement chez les
agriculteurs et les agricultrices, mais il y a un impact sur le
ministère de l'Agriculture et dans le budget du ministère de
l'Agriculture. Vous n'êtes pas le seul ministère où il faut
que vous rationalisiez, où il faut que vous ameniez des coupures. Vos
collègues ont le même mandat. Au fur et à mesure que la
partie que vous nous remettez remonte, ça grossit le budget du
ministère. On sait très bien que, rapidement, ça va
être pris en compte et que ça va faire en sorte que les
restrictions vont toucher le budget global. On va être obligé...
Parce que le taux de taxation sera énorme, ce seront des montants
énormes qui vont être remis aux producteurs et ça va faire
en sorte qu'on va être obligé d'éliminer encore plus de
programmes qui existent à l'heure actuelle et qui vont nous toucher
indirectement, mais de façon aussi brutale sous d'autres aspects.
Vous m'avez parlé tout à l'heure de la question des
nouveaux champs fiscaux. Je vous rappellerai que la plupart qui ont
été mis de l'avant à l'heure actuelle ne rapportent pas
grand chose dans le monde agricole: les mutations immobilières dans le
milieu rural, ce n'est pas avec ça que tu achètes le pain et le
beurre. D'autant plus que les entreprises agricoles sont exemptées la
plupart du temps, ça ne fera pas de gros surplus dans les
municipalités. Les mesures de péréquation sont très
constestées à l'heure actuelle et encore très
Inéquitables.
Je voudrais revenir quand même sur votre affirmation de
l'évaluation du ministère des Transports. Je sais que vous, les
députés, êtes bien au courant des problèmes de
routes. Ce n'est pas certain que le ministère qui décide, lui,
est bien au courant. Deuxième chose, je vous rappellerai qu'il y a
à peine trois ans, si ma mémoire est bonne, c'est votre
collègue le ministre Côté qui avait affirmé que
ça prendrait au moins 10 000 000 000 $, pas pour reconstruire les
routes, mais uniquement pour les remettre dans un état carrossable.
J'Imagine qu'au rythme de l'inflation et de la détérioration,
c'est rendu probablement pas mal plus haut que ça. Alors, mon
affirmation sur le ministère des Transports qui ne connaît pas
l'état des routes, je continue à la maintenir et je suis
persuadé que les députés et les ministres connaissent plus
l'état des routes, particulièrement ceux qui sont de
comtés ruraux, que le ministère des Transports. S'il le
connaît si bien que ça, il devrait avoir la décence
à l'heure actuelle de réparer une bonne partie de ces routes dans
le milieu rural. Juste une petite anecdote, M. le ministre; dans ma
municipalité et la municipalité voisine qui n'a pas encore aucune
sortie en asphalte et où, au cours du printemps dernier et après
plusieurs printemps, la route a été bloquée, II restait
une sortie pour ce village-là. Je comprends qu'on n'est pas au
ministère de la voirie, mais juste pour dire que, s'il connaît si
bien la situation des routes, le ministère des Transports, il devrait
trouver le moyen de les réparer un peu.
Le Président (M. Garon): II vous reste 2 minutes et
demie.
M. Ryan: J'ai noté une petite chose que vous avez dite et
qui m'a intéressée, M. Proulx. Vous avez dit que le
député connaît mieux l'état de ses routes que le
ministère des Transports. Remarquez bien que je ne souscris pas
nécessairement à ce que vous venez de dire, mais je souscris
entièrement à votre affirmation selon laquelle le
député est en général très Informé de
l'état de ses routes. S'il ne voulait pas l'être, il y aurait bien
du monde pour le lui rappeller tout le temps. C'est justement une des raisons
qui
nous porte à conférer un rôle au
député dans les décisions qui seront prises pour
l'amélioration de la voirie locale, parce qu'il est
particulièrement bien placé pour le faire.
Je voudrais vous demander: dans votre expérience, le
député joue déjà un rôle actuellement, il est
responsable de faire des suggestions au gouvernement pour l'amélioration
de la voirie locale dans son comté, dans les comtés ruraux,
entendez-vous beaucoup de plaintes sur la manière dont le
député s'acquitte de sa responsabilité?
M. Proulx: Ce n'est pas ça que j'attaque, M. le
ministre.
M. Ryan: Merci. Merci, c'est correct.
M. Proulx: Ce que j'attaque, c'est qu'on revient à des
pratiques extrêmement dangereuses: remettre des budgets
discrétionnaires aux députés pour les routes.
Écoutez! Vous avez été probablement un des personnages le
plus à dénoncer ces pratiques douteuses dans les années
qu'on se rappelle. Vous savez très bien, l'humain étant ce qu'il
est, ce qui va arriver. Pour moi, ça ne l'empêche pas de bien
connaître les routes que de ne pas avoir un budget
discrétionnaire, mais justement de composer avec les gens
responsables.
M. Ryan: Je connais aussi ce qui arrive quand des fonctionnaires
décident sans tenir compte de l'avis des députés.
M. Proulx: C'est ça, il faudrait trouver un bon "mlx", M.
le ministre, un partenariat entre les deux.
M. Ryan: C'est ça, on va essayer de trouver un
équilibre. On s'entend très bien. (18 h 30)
Le Président (M. Garon): Alors là, il est 18 h 30.
Normalement, on doit ajourner à moins que vous ne me demandiez de finir.
Actuellement, le temps, à toutes fins pratiques, il reste 30 secondes au
parti ministériel...
M. Ryan: M. le Président, je voudrais proposer qu'on
termine la séance avec l'UPA pour pouvoir la libérer et on
consent volontiers à 15 minutes d'extension.
M. Dufour (Jonquière): ...ni avec l'idée que, si on
avait commencé à l'heure, on aurait fini à l'heure.
Le Président (M. Garon): C'est ça que j'ai dit tout
à l'heure.
M. Dufour (Jonquière): J'étais là.
M. Ryan: II est encore tôt, M. le Président.
M. Dufour (Jonquière): C'est accordé. Non, non, moi
je suis prêt a continuer.
Le Président (M. Garon): Alors, vous avez 15 minutes.
M. Dufour (Jonquière): Merci, M. le Président.
D'abord, je veux vous remercier de la présentation de votre
mémoire. C'est vrai qu'on n'est pas enterré dans les chiffres,
mais vous avez démontré suffisamment l'importance de la
ruralité ou des problèmes que les milieux vivent au
Québec. Il y a une prise en main qui doit se faire et je pense que, de
ce côté-là, Québec - je parle du Québec, pas
nécessairement du gouvernement actuel, mais je parle du Québec
comme tel - on a manqué un peu le bateau, parce que nos régions
souffrent d'anémie. Elles sont en frais de mourir. Et c'est le message
que vous nous transmettez.
Le problème qu'on a avec cette réforme-là, c'est
que le ministre essaie de la justifier. Quand les gens viennent parler de leurs
problèmes, il essaie de leur transférer ses problèmes.
C'est un peu ça qui vient: Regardez comme j'ai des problèmes,
mais ça ne vous en enlève pas. C'est le phénomène:
Quand je me regarde, je me console et, quand je vous regarde, je me
désole. C'est un peu ça qu'il essaie de dire. Si vous autres,
vous n'avez pas de problèmes, nous autres, on en a. Mais je pense que,
lorsqu'on parle du 0,10 $ sur l'évaluation, il ne faut pas être un
grand devin. Vous l'avez démontré hors de tout doute. Il y a des
municipalités qui vont augmenter de plus de 25 % de coût de
taxation. Elles vont augmenter de plus de 25 %. C'est tellement vrai ce que
vous dites que c'est confirmé, parce que, dans les propositions du
ministre, on tient compte que les municipalités ne doivent pas augmenter
plus de 25 % de leur taxation. Il va y avoir des mesures compensatoires. C'est
ça qu'on est en frais de proposer. Et le drame dans tout ce
phénomène-là, c'est qu'on va être obligé
d'appliquer la médecine du cas par cas. C'est définitif que le
gouvernement, le ministre des Affaires municipales en tête, va être
le plus grand dispensateur des biens de l'État à travers le
territoire. Ça va être du cas par cas continuel. On commence
actuellement, parce qu'à chaque groupe qui se présente, le
ministre est obligé de justifier ou d'essayer de justifier ses
propositions. Tout le monde nous dit la même chose: Pourriez-vous faire
un moratoire et vous retirer, et faire un exercice véritable de
concertation? On n'a pas vécu ça. Le ministre vous a dit et vous
a répété, il l'a dit au début de la... Ça ne
veut pas dire qu'if a de la suite dans les idées, par exemple.
Ça, on ne peut pas lui enlever ça. Mais il a dit au début:
Les objectifs sont fixés, à cette heure parions des
modalités. Il l'a dit à l'Assemblée nationale. Il l'a
répété d'entrée de jeu et il vient de vous le dire
encore une fois.
Ce n'est pas facile de faire un exercice si, au départ, et moi,
je trouve ça complètement difficile parce que le ministre dit:
Moi, je suis campé sur mes positions et il ne vous reste plus rien
qu'à payer et dites-moi comment on va le... Dites-moi... Vous êtes
de futurs... Vous avez la cigarette du condamné et dites-moi, si c'est
un cigare ou une cigarette que vous voulez fumer. Je pense qu'une cigarette,
c'est mauvais. Ce serait plutôt un pendu, parce qu'il choisit sa sorte de
corde. C'est un peu ça qu'on est en frais de faire. Je pense que c'est
vraiment... C'est difficile pour nous autres, c'est difficile pour vous autres,
parce qu'on est des gens de région et on sent bien que les
régions, on est en frais de les faire mourir. On est en frais de faire
mourir les centres et les régions. Je me demande si ce n'est pas tout le
Québec qui est en frais de se mourir et si on n'a pas choisi une
façon délibérée de le faire, pour nous
empêcher d'avoir des rêves et d'avoir des désirs, et nous
dire qu'on est des pas capables. C'est à peu près ça qu'on
est en frais de faire. Ce n'est pas une question comptable. Il y a
peut-être d'autres solutions. Il y en a qui nous en ont proposées.
Il y a même des gens d'affaires qui sont venus dire la même chose
que vous autres ou à peu près. On est prêts à mettre
100 000 000 $ sur la table et on va vivre avec. Concertons-nous et travaillons
pour savoir s'il n'y a pas d'autres moyens de s'en sortir. Ça a
été fait déjà dans le passé. Je ne veux pas
tout prendre le temps, parce que j'ai un de mes collègues qui, je sais,
meurt d'envie de vous poser des questions, mais il y en a plusieurs qui
m'intéressent. Mais quand vous nous dites: Le MAPAQ verra son budget
gonflé et ça va avoir des répercussions... Je vais juste
prendre cet aspect-là, parce que je vous ai dit tout à l'heure
que je serais obligé de partir rapidement. De quelle façon
sentez-vous que le MAPAQ va voir son budget gonfler et, en même temps,
que ça va avoir des répercussions négatives? De quelle
façon êtes-vous capable de m'expliquer ça?
M. Proulx: Écoutez, c'est assez simple. Le MAPAQ, à
l'avenir, va avoir la totalité du budget pour la remise des 70 %. Alors,
plus le montant de taxe va augmenter, plus il va avoir besoin d'argent pour
remettre cette partie-là. Et quand les ministres négocient ou en
tout cas discutent leur budget, leurs besoins, c'est évident qu'ils ne
le prennent pas rien que morceau par morceau, c'est un budget global. Je sais
qu'ils le répartissent ensuite entre différents dossiers,
différents programmes, différentes politiques, ainsi de suite.
C'est évident, dans des années de restriction, de rationalisation
comme on dit, que le budget doit subir une croissance qui doit respecter un peu
la croissance qui a été édictée pour l'ensemble du
gouvernement, où il va y avoir des priorités de mises. À
partir de là, notre grande crainte, à ce niveau-là, c'est
devant l'augmentation effrénée des taxes, du coût, des
besoins, c'est qu'elle va faire en sorte que la partie des 70 % et la partie
quand ça dépasse les 475, ainsi de suite, toutes les remises
à 100 % et 70 %, ça va représenter un montant qui va
justement grossir très rapidement. Et commentl
Devant des restrictions, ça veut dire que le ministre de
l'Agriculture aura le choix ou de couper dans les parties qu'il remet au niveau
des taxes, ou de couper dans d'autres programmes qui sont prioritaires. On le
fait déjà énormément, on sait qu'il y a eu
énormément de coupures au cours des dernières
années. C'est là notre grande crainte et elle est
justifiée, notre crainte. Parce qu'on sait très bien qu'on n'est
pas dans des années d'augmentation effrenée des dépenses,
et c'est sûr, qu'on soit taxé directement ou Indirectement,
ça va être rien que de donner d'une main pour retirer de l'autre.
Nous, on est persuadés que ça va avoir une influence. D'ailleurs,
ce n'est pas pour rien qu'on a eu énormément et qu'on continue
à avoir des réticences que toute la partie des 70 % et des 100 %
soit à l'avenir au niveau du ministère de l'Agriculture.
Mme Lagacé (Andrée): pour compléter avec des
chiffres, je ne sais pas si je peux intervenir, mais, pour le budget de
1991-1992, ii y a déjà une augmentation de 10 000 000 $ sur 40
000 000 $, par rapport à 1990-1991, à cause de l'augmentation des
taxes scolaires simplement. alors, si les taxes municipales augmentent aussi,
c'est évident que le budget va augmenter, en plus du rapatriement du
budget du ministère des affaires municipales, qui fait que ce
budget-là va être regardé en premier pour être
coupé.
Le Président (M. Garon): M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: J'écoutais parler le ministre, tout à
l'heure, puis le ministre agit pareil comme s'il était le seul
ministère du Québec, qui gère tout, qui fait tout en
disant: Un petit 0, 10 $ de plus par 100 $ d'évaluation, qui n'est pas
capable de payer ça? Je signale au ministre en passant... Je ne parle
pas pour moi, M. le ministre, mais je veux vous signaler que vous n'êtes
pas le seul ministère au Québec qui existe, qui va chercher, puis
qui va percevoir des taxes et des Impôts. Hier soir et cet avant-midi,
nous étions justement dans une autre salle de cette auguste
bâtisse pour étudier un autre projet de loi qui va avoir des
incidences financières au niveau des milieux ruraux, au niveau des
agriculteurs entre autres; c'est le projet de loi 142 sur le remboursement des
taxes foncières. Je prends les chiffres que votre collègue a
donné et, en coûts supplémentaires que cette réforme
va occasionner, tel que votre collègue nous les a donnés c'est
au-delà de 600 000 $. De mémoire, c'est 680 000 $, je pense,
qu'il a dit, puis il a avoué que ça coûterait ça de
plus aux agriculteurs. Ça
fait que, prenez votre petit 0,10 $ prenez les 680 000 $ que votre
collègue a affirmé hier à la commission, mettez ça
ensemble, ça finit... C'est le total qui compte, vous savez.
Vous vous êtes beaucoup préoccupés pour essayer de
partager l'effort fiscal au niveau du transport en commun, entre autres, au
niveau d'une périphérie, une zone urbaine, essayer de partager
ça le plus possible. Mais quel effort faites-vous pour essayer de faire
partager justement cet effort-là que vous allez demander aux milieux
ruraux, qui, eux, dans l'avenir, auront à supporter tout l'entretien de
leur réseau routier et en même temps qui devront partager l'effort
collectif en tant que Québécois pour entretenir les autoroutes,
puis les routes régionales? Puis, quand viendra le temps de leurs rangs
à eux autres: Arrangez-vous tout seuls, faites comme vous voudrez. Quel
effort que le ministre peut faire? Quelle solution que le ministre peut
apporter pour aider ces gens-là dans les milieux ruraux? Actuellement,
il y a une motivation très forte, très grande, pour essayer
d'occuper le territoire, et avec des réformes comme vous amenez
là, ce n'est rien de motivant pour être en mesure de l'occuper ce
territoire-là.
Il faut regarder aussi les conséquences. Je vais donner l'exemple
du ministère des Transports chez nous, du district 34. Au lieu d'avoir
1800 kilomètres de routes à entretenir, ils vont tomber juste
à 600 kilomètres de routes. Il va y avoir un nombre
considérable d'employés au ministère des Transports
où il n'y aura plus de jobs pour eux autres, là. Trouvez-vous-en
ailleurs, de l'ouvrage, quelque part. Et le ministère des Transports
crée ou maintient une activité économique importante dans
certains milieux qui suscite, justement, ou qui maintient en place des
services. Ça peut maintenir un commerce, un magasin
général ou je ne sais pas trop quoi. Et on est rendu, là,
avec toutes ces réformes qu'on fait là, qu'on est en train
d'atteindre un niveau de déséquilibre où il ne sera plus
justifiable de maintenir un magasin général ou un
commerçant quelconque dans un milieu et de donner des services. Les gens
s'en vont en ville. Et dans les campagnes, il n'y a pas seulement des
agriculteurs, il y a d'autre monde qui n'ont pas de remboursements, eux
autres.
M. Ryan: D'autres sortes de remboursements.
M. Baril: Comment?
M. Ryan: D'autres sortes de remboursements. Remboursement
d'impôt foncier, ça existe; soutien au logement, ça
existe.
Le Président (M. Garon): À l'ordre. La parole est
au député d'Arthabaska.
M. Baril: Au niveau des résidents non-agriculteurs, il n'y
a pas grand... En tout cas, je n'en connais pas tellement des remboursements
d'impôt foncier aux niveaux de résidents des campagnes qui ne sont
pas agriculteurs. Eux, ils paient peut-être moins cher de taxes, mais ils
ont moins de services que ceux et celles qui restent en ville. Aussi, il y a un
niveau de taxes à atteindre. Puisqu'ils ont moins de services, il faut
qu'ils en paient moins, des taxes. Et avec votre réforme, ils vont payer
plus de taxes et il y en a un certain nombre qui, comparativement à ce
qu'ils paient, vont préférer s'en aller en ville. Ils vont encore
faire une pression sur la zone urbaine - agrandir la zone urbaine - ils vont
faire une pression sur le zonage agricole. Je sais que le temps passe vite,
là, mais j'aimerais avoir l'opinion de l'Union des producteurs
agricoles, à savoir s'ils ont... Je sais que ça se fait vite et
qu'il y a beaucoup de choses qui se bousculent en même temps. Est-ce que
vous avez fait un parallèle entre la loi 142 et la loi 145 qui touchent
ces deux mesures fiscales?
Je vais finir là-dessus. M. le ministre, ce que votre
collègue nous a dit, que les agriculteurs paieraient en surplus quelque
600 000 $ de plus, ça, c'est avant votre réforme. Donc, dans
plusieurs municipalités, ça va faire plus que doubler les taxes.
Donc, les 600 000 $ qu'elles ont de plus à payer, elles vont l'avoir
encore beaucoup plus après votre réforme qu'elles ne l'ont
présentement, là. J'aimerais ça savoir si, vous autres,
vous avez pu faire un peu le parallèle entre les deux.
M. Proulx: Oui. C'est évident qu'on a fait certains
parallèles, parce que ce sont justement deux lois qui touchent
directement les agriculteurs et les agricultrices. C'est le monde rural. On n'a
pas chiffré, en fait. Je pense qu'on a donné des chiffres, tout
à l'heure, sur la partie de la loi dont on parle présentement.
L'autre loi, elle amène beaucoup de bouleversements aussi et, justement,
il y a beaucoup d'inconnues dans ça. On nous propose une multitude de
choses, à l'heure actuelle, on en passe une partie, le reste est
à venir, on l'oublie dans les calculs, etc. Je ne suis pas capable de
vous donner de chiffres, mais c'est évident qu'il y a un
parallèle et que ça touche doublement les producteurs et les
productrices agricoles, avec les inquiétudes que j'ai soulevées,
tout à l'heure, par rapport au budget, et quelle influence ça va
avoir sur le développement de certains secteurs et ainsi de suite.
Mais moi, je veux revenir compléter en vous disant, encore une
fois, qu'il serait bon de se rappeler que le monde rural, au Québec,
c'est rien que 1 200 000 personnes qui occupent 95 % du territoire habitable au
Québec. Ils ont la responsabilité de l'entretenir et de le
surveiller. Alors, je pense que c'est important qu'on tienne compte de
ça. Ce n'est pas pour essayer de
minimiser les coûts dans l'urbain - aux villes - ce n'est pas
ça. Sauf que ça peut paraître drôle pour l'urbain, la
question de la voirie. Ça peut paraître être insignifiant de
parler de la voirie, mais, quand je vous dis qu'on a à entretenir
ça sur 95 % du territoire, qu'on est peu de payeurs, ça va avoir
des impacts énormes. Et ensuite, il y a aussi tous les autres services
dont on est déjà très démunis. Alors, la
ruralité, c'est de plus en plus important. Vous êtes, pour
plusieurs d'entre vous autres, des députés de ce milieu-là
et vous en savez quelque chose.
M. Baril: M. le Président...
Le Président (M. Garon): II vous reste une minute. Je
pense que c'est aussi bien de conclure.
M. Baril: Oui, je vais conclure, ça ne sera pas long.
J'entends dire: Les maires sont contents. Je suis étonné
d'entendre ça, à chaque fois que je l'entends. J'ai des maires de
mon comté qui ne sont pas plus bizarres que d'autres maires au niveau du
Québec et il y a des maires de petites municipalités qui ont une
inquiétude épouvantable, parce que, à cause de la
quantité ou du kilométrage de rangs qu'ils vont avoir à
entretenir dans tes années qui viennent, ils pensent de pouvoir, de
vouloir se fusionner avec d'autres municipalités, mais le
problème, c'est que les autres municipalités n'en veulent pas.
Elles n'en veulent pas, parce qu'elles ont déjà de la
misère à vivre elles-mêmes. Elles disent: Avec ce qu'on va
avoir à entretenir, on ne sera jamais capable d'arriver. On n'est pas
pour en prendre une pire que nous autres pour venir encore rempirer notre
affaire. Et c'est ça le drame au Québec. Il y a des
municipalités qui sont vouées à l'extermination avec cette
réforme-là. Personne ne va vouloir d'eux autres. Je regrette, M.
le Président, que mon temps soit fini, parce que j'aurais pu convaincre
la députée de Mégantic-Compton sur ce qu'elle disait.
Mme Bélanger: Je regrette, parce que j'aurais
essayé de vous convaincre moi aussi, M. le député
d'Arthabaska.
Le Président (M. Garon): Alors, si vous n'avez pas
réussi à vous convaincre, vous avez l'heure du souper pour tenter
de le faire, le succès étant le fruit toujours du dernier essai.
Alors, je suspends les travaux de la commission à 20 heures. Merci, M.
Proulx.
(Suspension de la séance à 18 h 46)
(Reprise à 20 h 9)
Le Président (M. Garon): La commission reprend ses
travaux. J'inviterais M. Robert
Perreault, président du conseil d'administration qui est ici,
à nous présenter les gens qui l'accompagnent. Comme vous avez une
heure à votre disposition, normalement, on partage le temps ainsi: 20
minutes pour l'exposé des Intervenants, 20 minutes pour la partie
ministérielle et 20 minutes pour l'Opposition. Si vous prenez plus que
vos 20 minutes, on le déduit également des deux
côtés. SI vous en prenez moins, on l'ajoute dans la même
proportion. Alors, la parole est à vous, M. Perreault.
Société de transport de la
Communauté urbaine de Montréal
M. Perreault (Robert): M. le Président, mesdames et
messieurs, M. le ministre, je vous remercie bien sûr de l'occasion que
vous nous fournissez de faire un certain nombre de commentaires sur le projet
de loi 145 que vous étudiez présentement. Mme Louise Roy, qui est
présidente-directrice générale de la Société
do transport de la Communauté urbaine de Montréal, m'accompagne.
M. Savard, le vice-président, s'est excusé. Malheureusement,
à la dernière minute, il a été empêché
de se présenter. Le plus simple, M. le Président, je pense bien,
c'est que je vous lise assez rapidement le mémoire que nous avons
présenté. Je pense qu'il vous est parvenu à la toute
dernière minute. Donc, peut-être que les membres n'ont pas eu le
temps d'en prendre connaissance et, en le parcourant rapidement, c'est
peut-être la meilleure façon d'en prendre connaissance.
M. le Président, le projet de loi 145, qui est à
l'étude devant cette commission, vient concrétiser la
volonté du gouvernement du Québec de se retirer du financement
des opérations des sociétés de transport en commun. Il
s'agit d'un geste dont, je pense, on peut dire que la brutalité et
l'ampleur pourraient avoir des effets pervers sur l'avenir du transport en
commun.
D'ailleurs, on s'est posé la question comme société
de transport si on se présentait devant cette commission, puisqu'on
principe le projet de loi concerne les municipalités et le gouvernement
du Québec du point de vue de la fiscalité municipale, mais il est
bien évident que les impacts de ce projet de loi risquent de nous
toucher. De plus, je dirais que le retrait gouvernemental, malheureusement, ne
prend quant à nous nullement en compte - d'aucune façon - les
besoins de relance et de développement du transport en commun,
particulièrement dans la région métropolitaine.
À notre avis, et c'est l'essentiel de ce qu'on veut vous dire, le
gouvernement doit continuer à financer les opérations de
transport en commun, comme d'ailleurs la grande majorité des autres
gouvernements supérieurs le font pour leurs grands centres urbains. Il
doit, en outre, reconnaître la dimension régionale du transport en
commun et maintenir une base de financement
équitable, contrairement à ta diversité fiscale
dont il fait la promotion dans le présent projet de loi.
J'ai dit que le retrait du gouvernement du financement du transport en
commun était un geste relativement brutal, et pour trois raisons.
À notre avis, d'une part, parce que la précipitation dans
laquelle nous sommes placés devant les conséquences de ce retrait
est lourde de conséquences pour nous. Bien sûr, il faut se
rappeler que les principaux éléments de ce projet de loi sont
connus depuis à peine quelques mois. La loi 145 est en cours d'adoption
et le gouvernement compte dans le fond sur la mise en oeuvre de tout ça
dès janvier 1992, c'est-à-dire, à toutes fins pratiques,
pour nous, en fait d'ici trois mois en termes d'implications, puisque les
budgets de nos sociétés de transport de même que ceux des
municipalités se concluent dès cet automne.
J'ai dit brutal aussi, compte tenu des sommes qu'il implique et qui sont
majeures pour la Société de transport de la Communauté
urbaine de Montréal. Pour l'année 1992, on sait qu'à
travers le Québec il s'agit d'un montant de l'ordre de 290 000 000 $
pour le transport en commun, dont 200 000 000 $, soit à toutes fins
pratiques 70 %, concernent uniquement la Communauté urbaine de
Montréal. Sur notre budget à nous, cela représente,
à toutes fins pratiques, près de 30 % de notre budget.
Enfin, je dirais que ce retrait est brutal en quelque sorte, parce qu'il
est imposé par le gouvernement qui, jusqu'à maintenant,
malheureusement - et j'espère qu'on pourra entendre le ministre
là-dessus - s'est montré assez insensible aux
représentations qui, me semble-t-il, sont assez unanimes de l'ensemble
des élus municipaux du Québec, des milieux d'affaires, des
mouvements syndicaux, des groupes de pression de la région de
Montréal. Rarement on a vu un tel consensus par rapport à un
projet de loi.
Après trois mois de débat, il est clair, quant à
nous, que cette réforme menace directement la place du transport en
commun dans les villes, en particulier dans la région de
Montréal. C'est une affirmation qui pourrait surprendre, en effet. Dans
le fond, le gouvernement dit aux municipalités: II n'y a pas de
problème, au sens suivant: Remplacez-moi, taxez davantage. Vous pouvez
le faire. Semble-t-il qu'il y a un champ foncier qui pourrait être
exploité, en particulier dans divers secteurs non résidentiels.
Évidemment, s'il s'agit simplement pour nous, comme
société de transport, de remplacer un dollar par quatre trente
sous, II n'y a pas de problème. Cependant, on doit quand même dire
qu'au-delà des arguments évoqués à l'effet que la
marge de taxation existe au niveau municipal, la STCUM risque de se retrouver,
dans les faits, face à une difficulté réelle de financer
les services à la population. Difficulté réelle, comme l'a
démontré la dernière séance spéciale du
conseil de la CUM où les élus municipaux de la région
de
Montréal ont une fois encore repoussé le retrait
gouvernemental. Difficulté très concrète aussi dans la
mesure où les décisions concernant le service à offrir le
1er janvier 1992 devront être prises dès la fin du mois
d'août. Difficulté d'autant plus grande, comme on l'a dit
tantôt, que les montants en cause sont considérables. Alors, c'est
bien évident que les élus municipaux ont aujourd'hui des choix
difficiles à faire, à très court terme. Leur marge de
manoeuvre est faible et il est difficile, dans un contexte comme
celui-là, de prévoir comment le transport en commun pourra sortir
gagnant de cette réforme.
À titre d'illustration - parce que, souvent, dans le fond, quand
on parle de sommes semblables, on a de la misère à comprendre la
nature de notre problème - les conséquences d'une coupure de 200
000 000 $ dans les services sont très importantes. Je donne juste
quelques scénarios. 200 000 000 $, c'est 60 % des heures de service
offertes sur le réseau de surface. 200 000 000 $, c'est fermer le
métro, les services de transport adapté, une ligne de train de
banlieue. 200 000 000 $, c'est couper 40 % des services offerts sur les
réseaux d'autobus et de métro. Même si on me disait: Bien
oui, mais vous ne couperez pas 200 000 000 $, les villes vont remplacer le
gouvernement en partie, il n'y a pas tant de problèmes que ça,
juste à titre d'exemple, couper 50 000 000 $, ce qui est le quart du
problème, dans le service, cela revient, à toutes fins pratiques,
à s'engager clairement dans un scénario de décroissance:
abandon de lignes de trains de banlieue ou coupure, par exemple, de 30 % du
service de métro. Il n'est même pas nécessaire d'aller
jusqu'à 50 000 000 $ pour commencer à menacer le transport en
commun. Chaque année, nous nous heurtons, lorsque nous tentons de
rationaliser notre réseau de surface, à des oppositions
évidentes de la clientèle qui nous demande davantage de services
et non pas moins de services, surtout dans la région
métropolitaine de Montréal.
Au cours du dernier débat, un certain nombre de personnes, dont
des représentants du gouvernement, ont évoqué un certain
nombre de solutions plus ou moins miracles pour régler ce
problème-là. Ça me semble important, ici, tout de suite,
d'aller au devant de ce qui nous semble un peu certains mythes. La
première question, c'est: Pourquoi ne pas diminuer les coûts? Dans
le fond, est-ce qu'il y aurait moyen de diminuer les coûts, à la
STCUM, sans couper dans le service? Sûrement. Là-dessus, sans
hésitation. Je dois dire que les efforts de la STCUM se poursuivent dans
ce sens-là. Mais pour autant, je pense bien qu'il ne faut pas croire que
la marge de manoeuvre est de cet ordre de grandeur, surtout à court
terme. Par exemple, à la STCUM, au cours des cinq dernières
années, des compressions de dépenses ont été
effectuées pour près de 50 000 000 $ sur notre budget
d'opération. L'évolution de nos coûts est relativement
con-
trôlée, puisque, de 1985 à 1990, les dépenses
consacrées aux services d'autobus et de métro ont augmenté
à peu près au rythme de l'inflation, à peine quelque 0,5 %
au-dessus de l'inflation, soit, je pense, en deçà des
augmentations moyennes du budget du gouvernement du Québec.
L'augmentation salariale a été, en moyenne, de 4,9 %. Nous avons,
de plus, demandé à nos employés un effort pour
réduire la charge qui s'en vient et nous avons annoncé notre
volonté de réduire les coûts de 25 000 000 $ pour 1992.
C'est important, 25 000 000 $. Pour vous donner un exemple, si nous appliquions
à la STCUM les mesures que le gouvernement du Québec a
négociées avec ses employés au plan de la formule du gel
des salaires, ça ne représenterait, à toutes fins
pratiques, que 12 000 000 $ à 13 000 000 $. Donc, nous avons
demandé à nos employés deux fois cet effort,
au-delà des moyens particuliers. Nous venons de décider le gel
des salaires des gestionnaires et des employés non syndiqués, des
allocations versées aux membres du conseil d'administration, le gel de
l'embauche, l'abolition des postes temporaires, l'abolition des emplois
d'été, aussi bien qu'un certain nombre de coupures dans les
achats de biens et de services. Je le disais tantôt, on a demandé
un certain nombre d'efforts à nos organisations syndicales et, à
date, au moins l'une d'entre elles a indiqué qu'elle pouvait
éventuellement en débattre avec nous.
C'est évident, dans ce contexte-là, qu'une
réduction des dépenses de la Société ne permet pas
de résoudre le problème du financement tel qu'il est posé,
compte tenu de son ampleur, par le retrait gouvernemental. Vous me direz: Oui,
mais un deuxième levier dont on peut disposer, c'est la tarification.
Dans le fond, vous pouvez aller chercher plus de revenus du côté
de vos voyageurs. On entend souvent dire: Les tarifs de la STCUM sont trop bas.
C'est vrai que notre carte mensuelle ne coûte que 35 $, elle sera quand
même à 38 $ le 1er juillet, à 41 $ au mois de janvier
prochain. Faut-il rappeler, de ce point de vue là, qu'il s'agira quand
même, en dedans de 12 mois, d'une augmentation de l'ordre de 25 % de
notre principal type de transport? On nous évoque souvent l'exemple de
Toronto, où la carte est à 56,50 $. Encore une fois, il faut
faire attention en ces matières. Nous vendons pratiquement presque 3 000
000 de cartes mensuelles au tarif que nous projetons, alors qu'une
région comme Toronto, qui, en principe, a un bassin beaucoup plus grand
- dans le fond, Toronto pourrait facilement vendre une fois et demie ce que
nous vendons - n'en vend que 1 500 000. Dans le fond, tout ce que ça
reflète, c'est qu'en ces matières il ne faut pas prendre les
chiffres pour ce qu'ils sont. Il faut analyser dans le fond la nature des choix
tarifaires qui sont faits.
De ce point de vue là, peut-être que le meilleur
indicateur, c'est le ratio d'autofinancement. Je tiens à le dire et
à le répéter, parce que là-dessus je pense que ce
n'est pas toujours bien connu. À la STCUM, ce ratio d'autofinancement
est probablement l'un des plus élevés au Québec avec 40 %
des revenus. Si l'on exclut le service ferroviaire, qui est un
phénomène un peu particulier, qui ne nous permet pas de nous
comparer avec les autres sociétés de transport, mais même
en incluant la dette du métro, nous allons chercher 40 % de nos revenus
auprès de nos usagers.
Toute hausse de tarifs, d'autre part, au-dessus de l'inflation
entraîne une diminution de l'achalandage. Alors, où serait la
logique, dans le fond, qui consisterait à soutenir le transport en
commun par des hausses de tarifs qui ne feraient que réduire son
Importance relative par rapport à l'automobile? Bien sûr, il peut
y avoir une certaine marge au niveau des tarifs - je pense que notre
récente hausse le démontre - mais c'est bien évident qu'il
n'y a pas là la marge pour trouver 200 000 000 $. Je donne un exemple.
La hausse que nous avons annoncée générera au total une
perte d'achalandage d'environ 3 %, ce qui nous semble dans le fond le maximum
tolérable si l'on ne veut pas s'engager sur la voie de la
décroissance du transport public. Toute hausse supplémentaire, et
ça aussi II faut le dire et le redire - il me semble que c'est important
- aurait, en outre, pour effet d'augmenter de façon Importante le
transfert fiscal qui s'opérera sur ceux de nos concitoyens dont les
revenus sont les moins élevés: les femmes, les jeunes, les
immigrants et les gagne-petit. Là-dessus, j'ai eu l'occasion d'indiquer
dans certains articles récemment que, à notre avis, la
tarification a des limites comme moyen de financer un service public comme le
transport en commun, lorsque cette tarification touche Indistinctement de ses
revenus une clientèle qui est parmi celles qui sont les moins
fortunées.
Quand on regarde le projet de loi, on est obligé de dire que,
pour nous, les perspectives gouvernementales dans ce projet sont, à
notre avis, fort limitées. Essentiellement, l'objectif du gouvernement,
c'est de réduire les dépenses qui figurent à son budget en
les transférant au niveau municipal. Je dois dire là-dessus
personnellement que je peux comprendre que le gouvernement du Québec ait
des problèmes financiers. Je pense que ces problèmes sont
réels. Nous ne les nions pas, loin de là, mais II nous semble que
la méthode retenue par le gouvernement du Québec pour les
régler, notamment en s'attaquant aux services de transport public, est
éminemment discutable. Dans le fond, les questions qui se posent sont
les suivantes: Est-ce que le gouvernement connaît - je n'en suis pas
sûr - et reconnaît le rôle du transport en commun dans la
ville de Montréal et la région sur l'activité
économique, sur l'environnement, sur le développement social de
la région de Montréal? Est-ce que le gouvernement reconnaît
le levier très particulier que constitue le transport public pour
favoriser le contrôle du développement urbain? Est-ce qu'il
comprend bien ce rôle particulier? Est-ce qu'il comprend bien
également le fait que ce service est l'un des rares services publics
municipaux en concurrence directe avec l'automobile, avec donc un concurrent?
Également, a-t-ll bien analysé les défis de
développement qui se posent à toute entreprise en situation
concurrente? J'ai un peu l'Impression depuis cinq ans qu'il ne nous a pas
été souvent possible de discuter à fond de ces questions
avec le gouvernement du Québec. Pour nous, c'est clair, la
stratégie de l'avenir, c'est d'améliorer la constance, la
ponctualité, l'information à la clientèle, la desserte du
centre-ville, des zones industrielles et des destinations locales. Nous avons
même annoncé l'automne dernier un projet de plan de relance et
nous avions souhaité obtenir du gouvernement du Québec un appui
pour en quelque sorte développer des ressources nouvelles.
Malheureusement, au lieu de ça, le gouvernement du Québec - et le
projet de loi en fait état - ne tient nullement compte de ces besoins et
menace à toutes fins pratiques notre capacité de faire face
à la situation et de relever le défi de la concurrence de
l'automobile.
Ceci dit, je dois dire, je pense bien qu'il serait Injuste de ne pas
relever dans le projet de loi 145 un aspect qui nous semble fort positif. La
loi prévoit la création d'un fonds de contribution des
automobilistes au transport en commun et je dois dire là-dessus qu'en ce
qui nous concerne le principe est excellent. Il était temps que le
gouvernement procède dans ce sens-là. Ce principe peut être
effectivement prometteur, s'il est enraciné fortement dans la machine
gouvernementale. De ce point de vue là, la loi appelle certains
commentaires qui sont les suivants: compte tenu des problèmes
soulevés et de l'ampleur des sommes, est-ce qu'on ne pourrait pas penser
à ce que ce fonds soit alimenté par d'autres sources que
simplement la contribution sur les immatriculations? Nous avions parlé,
nous parlons toujours, je pense que plusieurs autres Intervenants parlent
toujours d'une taxe sur l'essence. Ça demeure quand même un des
moyens privilégiés par beaucoup de pays dans le monde occidental
pour financer le transport public. Et le gouvernement nous avait dit: Ce n'est
pas pensable. Malheureusement, on a vu que ce qui n'est pas pensable pour
certains peut l'être pour d'autres, mais il reste quand même que le
choix des moyens n'est pas indifférent du point de vue des
finalités à atteindre et une taxe sur l'essence envole un message
clair aux automobilistes, particulièrement en zone urbaine, par rapport
à l'utilisation de l'automobile privée. D'autre part, on doit
dire également qu'on n'est pas certain dans le projet de loi, on n'a pas
de garantie encore, il n'y a pas eu d'affirmation du gouvernement
là-dessus, que le fonds ainsi créé ne servira pas tout
simplement à remplacer la contribution du gouvernement au niveau des
programmes d'immobilisation. D'autres aspects, notamment l'article 234, qui
modifie l'article 12 de la Loi sur le ministère des Transports,
précise que les intérêts produits vont aller ailleurs. On
peut juste dire que, s'il n'y a pas de petits profits pour le gouvernement, il
n'y a pas non plus de petits profits pour les sociétés de
transport. Il me semble qu'à partir du moment où on crée
un fonds, les revenus qui en proviennent devraient être consacrés
aux raisons pour lesquelles ce fonds est créé. D'autre part, on
n'a aucune garantie que ce fonds va évoluer au cours des prochaines
années au rythme des besoins, ne fut-ce qu'au rythme de l'inflation et
c'est une question qui nous préoccupe. Et, de ce point de vue là,
le taux de 30 $ nous semble insuffisant, à tout le moins il devrait
être indexé. Et je dois dire enfin que, peut-être, une des
questions qui nous préoccupent beaucoup, c'est la façon dont
éventuellement - et la loi ne dit rien là-dessus - le
gouvernement entend réglementer tout ça pour répartir
entre les diverses sociétés de la région
métropolitaine de Montréal le produit de ce fonds. Ça peut
faire la différence pour la STCUM entre 18 000 000 $ par année ou
30 000 000 $, 29 000 000 $ par année. Il nous semble clair quant
à nous que les modalités qui devraient être retenues ne
devraient pas pénaliser une société de transport plus
qu'une autre par rapport au retrait du gouvernement du Québec, mais
devrait être fonction du prorata de ce retrait.
La très grande majorité des sociétés de
transport qui desservent les grandes villes des pays industrialisés
peuvent compter sur un apport financier des gouvernements des paliers
supérieurs. Cette pratique généralisée n'est pas
fortuite. Les impacts associés au transport en commun débordent
largement les frontières d'une municipalité ou d'une
région. Au Canada, huit gouvernements provinciaux sur dix, les
exceptions étant Terre-Neuve et le Nouveau-Brunswick, contribuent
directement au financement des opérations des transporteurs publics. Aux
États-Unis, 38 États américains qui représentent 78
% de la population américaine font de même. En Europe, la
participation des instances supralo-cales est aussi la norme, y compris au
budget d'exploitation. Partout, le système politique a trouvé une
justification à cette participation.
La responsabilité est partagée et la raison pour laquelle
elle l'est, c'est qu'il y a des fondements économiques
indéniables à ce partage des responsabilités. Il faut
dire, là-dessus, que les mécanismes de marchés sont
insuffisants pour assurer le financement d'activités
générant des externalités au plan économique. Je
pense que tout le monde va être d'accord pour dire que le transport en
commun est essentiel à la vitalité des grands centres urbains et
il faut rappeler que, dans le cas de Montréal, c'est plus de 1 000 000
de personnes par jour qui utilisent ce service-là. C'est beaucoup plus
que la totalité de
la population du Québec qui utilise les routes et autoroutes du
Québec, je pense bien, de façon régulière.
Il faut rappeler aussi, parce qu'on ne le dit peut-être pas assez
souvent, que, malgré ses défauts, ça demeure un des
systèmes les plus performants en Amérique du Nord. De fait, 30 %
des déplacements motorisés dans la région de
Montréal sont faits via le transport public et 60 % pour les trajets
à destination du centre-ville. Pour ce qui est du ratio du coût
par personne transportée, nous nous situons nettement, à part
Toronto, à l'avant-garde des sociétés en Amérique
du Nord.
On a parlé du rôle économique, du rôle social
du transport public concernant la mobilité des jeunes, les personnes
âgées, les foyers sans automobile. C'est quand même un foyer
sur deux à Montréal, c'est un foyer sur trois dans la
communauté qui n'ont pas d'autre choix que le transport public. Et je
pense bien aussi que le transport public, c'est un choix de
société. On a souvent parlé de la congestion, de la
consommation démesurée de l'énergie et de la pollution
causées par l'automobile; ça demeure des responsabilités
gouvernementales que ces questions et, s'il y a un des dossiers
environnementaux de l'avenir, c'est bien le dossier du transport public dans
les grandes agglomérations urbaines. On ne peut pas dire qu'il s'agit
là d'un dossier strictement local au sens de la responsabilité de
chacune des municipalités. Et, bien sûr, aussi, il y a dans les
transferts financiers qui sont opérés par les tarifs
réduits une responsabilité sociale qui nous semble davantage
relever des fonctions gouvernementales finançabes à même
les impôts sur les revenus qu'à partir de taxes
régressives. Je signale juste, par exemple, que nous, on calcule que les
coûts liés à ces transferts sociaux sont de l'ordre de 55
000 000 $ par année pour la STCUM. Le seul transport scolaire
représente pour nous des coûts de l'ordre de 25 000 000 $ par
année. (20 h 30)
Plus largement, et je pourrais peut-être achever là-dessus,
il nous semble que le projet qui est sur la table remet en question un certain
nombre d'acquis du côté des règles du jeu en matière
de fiscalité municipale et ces acquis risquent, à terme, et c'est
pour ça qu'on en parle, de nous toucher comme société de
transport.
Le ministre propose une loi habilitante qui donne divers pouvoirs aux
municipalités. Le tout est optionnel, chaque municipalité pouvant
décider de procéder à la levée de fonds comme elle
l'entend. Tout ça est fondé, bien sûr, sur un principe
valable d'autonomie municipale qui, à première vue, va dans le
sens des intérêts locaux. Mais, là encore, le gouvernement
met de côté, à notre avis, certaines considérations
qui sont peut-être complexes, mais qui ont quand même le
mérite d'être conformes à la réalité. Le
transport en commun n'est pas un dossier local. Ceux qui disent ça,
à mon avis, se trompent profondément. L'expérience du
législateur des 20 dernières années est claire. Le
transport en commun est, au mieux, un dossier régional, sûrement
pour l'avenir, un dossier métropolitain et, dans tous les cas, le
gouvernement national a un rôle important à jouer.
Les déplacements des personnes ne s'embarrassent, ni des limites
des municipalités, ni des frontières physiques de l'île de
Montréal. D'ailleurs, je pense que la création du Conseil
métropolitain du transport en commun qui a reçu l'appui et l'aval
du gouvernement du Québec était un bon indice du sens dans lequel
il fallait aller pour l'avenir. Il me semble que le gouvernement, dans la
philosophie générale du projet de loi qui est sur la table, fait
fi de ces principes et remet en question carrément les 20
dernières années de l'histoire de l'évolution de la
communauté urbaine et du transport public. Ça nous semble
là une des façons de paralyser l'avenir du transport en
retournant au morcellement des processus de décision.
En effet, comment va se faire la prise de décision sur des
questions comme le niveau de service, le niveau de tarification, si,
finalement, chaque municipalité développe sa propre logique
fiscale? À un moment donné, je pense que les contribuables ne s'y
retrouveront plus et on va rendre très difficile le processus de
décision. Au lieu d'introduire le type de diversité qu'on
Introduit, la logique du service du transport public à caractère
régional devrait Imposer, a notre avis, cohérence et un minimum
d'homogénéité.
Plus largement, la loi appelle, de façon un petit peu Indirecte,
mais, à notre avis, lancinante, à une remise en question du
partage des coûts entre les municipalités. On suggère, dans
le fond, un peu de payer selon le bénéfice reçu, sur la
base de la consommation du service. Mais, encore une fois, un tel principe ou
de tels principes, dans la mesure où l'entité municipale qui a la
responsabilité ou l'entité régionale, je veux dire,
où cette entité n'est pas clairement définie, je pense, va
risquer de provoquer plusieurs problèmes dans l'avenir. Je le dis et le
redis, je pense que c'est Important de le dire, la logique du transport en
commun n'est pas une logique locale. C'est une logique au moins à
caractère régional et, même là, je pense que, dans
le cas de la région de Montréal, le cadre actuel de la
communauté urbaine est même étroit par rapport aux
réalités quotidiennes.
Je dirais, en terminant, M. le Président, qu'évidemment on
peut peut-être s'étonner à première vue que notre
réaction soit si vive. On peut bien sûr souhaiter que les
municipalités prendront le relai du gouvernement du Québec. On
pourrait, à la limite, dire: C'est leur problème. Il reste quand
même que nous ne remplirions pas notre mandat si nous n'Indiquions pas
les questions que ça soulève pour le transport public.
Je terminerai en disant que, si on résume ce que sont nos
préoccupations et ce que nous souhaitons voir se produire, d'une part,
il nous semble évident que le gouvernement doit demeurer présent
dans le financement du transport public pour les raisons qu'on a dites. Je
dirais à la limite, il doit y demeurer de façon absolument
évidente, compte tenu d'un certain nombre d'enjeux économiques de
même que, particulièrement, du point de vue des transferts
sociaux. Que l'idée de créer un fonds en faveur du transport
public nous semble une bonne idée. Cependant, ce fonds est
insatisfaisant et insuffisant. Il devrait être complété par
des ressources sur l'essence. Il faudrait s'assurer que le financement des
sociétés de transport ira au prorata du retrait du gouvernement
du Québec. Je dirais également que les règles du jeu qui
sont présentées devraient être corrigées pour
permettre des processus de décision à caractère
régional et, enfin, que le gouvernement ne peut pas ignorer les enjeux
de développement du transport public dans la région de
Montréal et faire comme si ça ne faisait pas partie du
débat, alors que, depuis cinq ans, nous discutons une question de
financement avec le gouvernement et que cette question du développement
est justement au coeur de nos préoccupations. Je vous remercie.
Le Président (M. Garon): Je vous remercie, M. Perreault.
Alors, la parole est au ministre pour une période de 17 minutes.
M. Ryan: Votre générosité augmente à
mesure que l'heure avance, M. le Président. Je vous remercie.
Le Président (M. Garon): Non, c'est parce qu'il y a une
heure. M. Perreault a pris 26 minutes et il reste 34 minutes à diviser
en deux.
M. Ryan: On m'avait prévenu, M. le Président, que
M. Perreault, selon un style qu'on lui prête, aurait une charge à
fond de train ce soir. J'ai trouvé son mémoire extrêmement
modéré dans le ton. Je l'en remercie. Un vrai baume sur nos
plaies du jour. On a eu d'autres mémoires qui étaient beaucoup
plus catégoriques, je dirais, ou... Pardon?
Une voix:...
M. Ryan: On est capable d'en prendre, M. le député
de Pointe-aux-Trembles. Vous prenez votre voyage. Je vous rappelle bien
simplement - mais comme vous ne l'avez pas radicalement mis en cause et qu'on
doit discuter de ça plutôt avec les représentants des
municipalités proprement dites, je n'aborderai pas ce sujet longuement
ce soir - que l'Assemblée nationale, quelque impression que l'Opposition
puisse chercher à vous donner plus tard dans cet échange, a pris
la décision avant-hier soir d'approuver le principe et les objectifs du
projet de loi 145. Il s'agit d'une décision sur laquelle
l'Assemblée nationale dans sa souveraineté pourrait toujours
revenir. Il faudrait que cette souveraineté passe par le canal de la
majorité et je n'ai aucune indication de semblable miracle à
l'horizon prochain.
Ceci étant dit, je ne le dis pas par suffisance. Je le dis, parce
qu'une fois qu'un débat s'est prolongé pendant un bon bout de
temps il faut bien qu'on passe à l'action. C'est pour ça que la
démocratie existe. Si c'était seulement pour permettre des
débats interminables, ça conduirait rapidement à
l'impuissance et à la ruine. Il faudra décider mais la
contribution qu'on apporte ici nous intéresse au plus haut point quand
même, et encore davantage évidemment maintenant que le principe
est déjà approuvé par l'Assemblée nationale, quand
elle traite des modalités concrètes dont devra s'entourer la
réforme.
Je voudrais rappeler quelques données de base très
rapidement. D'abord, je l'ai dit cet après-midi, puis je ne pense pas
que personne puisse le contester que, si on prend ça à
l'échelle de tout le Québec, l'impact moyen de la réforme,
ça va être 0, 10 $ les 100 $ d'évaluation ce qui est
demandé aux municipalités. Ce qui est demandé aux
municipalités. Je ne parle pas de ce que fait le gouvernement.
Ça, ça entre dans notre bilan général dont
l'électorat se portera juge à la prochaine élection. Mais
ce qui est demandé aux municipalités, c'est un effort: 252 000
000 $ et, comme l'évaluation totale du Québec est de 252 000 000
000 $ suivant nos calculs, la division est bien simple à faire.
Ça fait 0, 10 $ par 100 $ d'évaluation. Ça varie. Je vous
dirai franchement, sur l'île de Montréal, suivant nos calculs,
c'est 0, 14 $. 14 cents!
Je vais vous donner des chiffres. Le transfert brut pour l'ensemble de
la CUM, c'est 210 000 000$, dont 185 000 000$ pour le transport en commun. Les
revenus que nous procurons aux municipalités par des décisions
dont le gouvernement ou l'Assemblée nationale assume la
responsabilité seront de l'ordre, suivant nos calculs, de 96 000 000 $.
immatriculation des véhicules de transport automobile, de promenade, 29
000 000 $; mutations immobilières, 30 000 000 $ et quelque chose;
ajustement dans les "en-lieu" de taxes, il y en a ici pour 18 000 000 $.
Ça, c'est seulement une partie. Ça pourrait être plus que
ça, si jamais on changeait complètement la taxe sur la valeur
locative pour une surtaxe sur le non-résidentiel. En tout cas, ça
fait en tout 114 000 000 $ qu'il reste à financer, dont 109 000 000 $
pour le transport en commun. Le vrai montant pour le transport en commun sur
toute l'île de Montréal, c'est 109 000 000 $.
Vous pouvez faire signe que non, M. Perreault, mais vous viendrez faire
votre dé-
monstration, ça nous intéressera. Mais ces
calculs-là, nous les faisons, nous autres, depuis sept mois. Puis,
franchement, j'ai suivi la manière dont ils étaient faits et je
n'ai aucune crainte quant à leur réfutation éventuelle et,
si elle devait être faite, je m'inclinerais, parce que devant les
chiffres, je ne suis jamais buté. Mais ça, c'est le chiffre que
nous vous donnons. Je les ai donnés au maire Doré ce matin. Ce
n'est pas des protestations qui vont me faire changer d'idée, ce serait
des démonstrations en bonne et due forme. Et là-dessus, quand on
répartit la part de la ville de Montréal, c'est 67 800 000 $ d'un
côté, 46 900 000 $ de l'autre; pour l'ensemble du solde à
financer de 114 000 000 $. Pour le transport en commun 69 000 000 $, 39 000 000
$.
Je fais une hypothèse. Nous autres, nous disons: Vous avez trois
grandes sources auxquelles vous pouvez recourir pour trouver cette
différence. Il y a l'impôt foncier général, il y a
la surtaxe sur le non-résidentiel que nous proposons ou un ajustement
dans le taux maximum de la taxe sur la valeur locative. Ça va être
alternatif, au choix des municipalités. Puis, troisièmement, une
augmentation possible des revenus en provenance des voyageurs, des usagers du
service. Je constate, en prenant connaissance de vos états financiers,
que la contribution des voyageurs est d'à peu près 33 %, 34 %
pour vos prévisions de cette année, au budget de fonctionnement.
33 % à 34 %. Ça veut dire que, sur chaque piastre qui est
dépensée par le Société de transport de la
Communauté urbaine de Montréal, il y a 0, 33 $ qui sont
payés par l'usager et 0, 67 $, 0, 66 $ par d'autres, par les villes
concernées et, jusqu'à maintenant, dans une proportion
importante, par le gouvernement du Québec.
La question que je vous pose... Les autres formes de taxation, on va les
discuter au niveau approprié, mais, comme vous êtes ici pour la
Société de transport de la CUM, je vous fais deux remarques. Je
remarque que les dépenses de la Société de transport ont
augmenté pas mal plus vite que celles du gouvernement au cours des cinq
dernières années - je ne vous en fais pas de reproche, je fais
une constatation très simple - alors que, si j'ai bien compris, il y a
une certaine diminution dans l'achalandage. Est-ce qu'il y a quelque chose qui
peut être fait de votre côté pour contenir davantage le
rythme d'augmentation des dépenses et, deuxièmement, pour
accroître la participation du voyageur-usager au financement du transport
en commun?
M. Perreault: Là-dessus, M. le ministre, vous allez voir
que nos réactions sont rarement à l'emporte-pièce, puisque
nous avons déjà travaillé sur cette question avec, me
semble-t-il, beaucoup de rationalité. Si ma mémoire est bonne,
vous-même évoquiez à l'Assemblée nationale qu'une
augmentation de 10 % des revenus d'usagers était un chiffre qui vous
semblait acceptable, malgré le contexte de la récession. Je vous
signale que c'est l'objectif que nous avons retenu pour l'an prochain. Sur
notre principal titre de transport, qui est la carte régionale,
ça représentera quand même, sur ce titre, 25 % en un an,
donc, du côté des usagers. Nous calculons que nous perdrons, ce
faisant, 3 % de notre achalandage, parce que, faut-il le rappeler...
On nous cite - je vais vous donner un exemple - l'exemple de Londres. On
oublie de dire que Londres a perdu 16 % de clientèle, lorsqu'elle a
commencé à privatiser et à faire sauter sa politique
tarifaire. Il y a des limites à ce qu'on est capable d'aller chercher du
côté de nos usagers. Nous pensons qu'avec ce que nous avons mis
sur la table - et en ce sens-là, on rejoint ce que vous-même avez
évoqué à l'Assemblée nationale - c'est le
maximum.
Du côté de nos dépenses, M. le ministre, je vous
dirais, je ne connais pas beaucoup d'administrations publiques, ni même
celle du gouvernement du Québec, qui ont, par exemple, fermé des
postes, gelé l'embauche, gelé tous les salaires des cadres,
coupé depuis cinq ans dans leur budget de dépenses. Je vous
signale que, depuis cinq ans, année après année, nous
avons complété notre budget avec des dépenses
Inférieures à nos prévisions, pour faire face au manque
à gagner des revenus. Nous nous sommes fixés, pour l'année
prochaine, sans toucher aux services... Parce que, évidemment, je vous
le dis très clairement, si on touche aux services, nous pouvons couper
650 000 000 $. Mais à partir du moment où on ne veut pas toucher
aux services, on s'est fixé un objectif de 25 000 000 $ et, encore une
fois, comme ordre de grandeur, pour bien comprendre l'ampleur de l'effort,
c'est plus du double de l'entente que le gouvernement du Québec a faite
avec ses employés syndiqués, comme effort financier. Alors, je ne
sais pas comment on peut faire plus sans toucher aux services. (20 h 45)
M. Ryan: Dans les cinq dernières années,
l'augmentation moyenne des dépenses a été à peu
près de 7, 5 %, par année.
M. Perreautt: Vous avez raison. Mais il faut juste bien
comprendre ceci, M. le ministre, là-dessus: 85 % de notre budget, c'est
l'exploitation métro-autobus. Ce sont des choses sur lesquelles nous
avons une prise directe, parce que nous pouvons modifier l'offre, corriger
notre organisation, etc. Ce budget a augmenté, en moyenne, de 1985
à 1991, de 5, 2 % par année. Il y a trois postes
budgétaires, dans notre budget, qui montent plus vite que l'inflation.
Un de ces postes, ce sont les Immobilisations. Il faut comprendre ceci, aussi -
c'est Important de le savoir - autrefois, les immobilisations... Je donne
l'exemple des immobilisations sur le train de
banlieue de Deux-Montagnes. Autrefois, ces immobilisations
étaient transférées sur le budget de la Communauté
urbaine de Montréal. Ce n'est plus le cas, c'est sur le budget de la
STCUM que ça figure. On a donc dans notre budget une augmentation des
dépenses d'immobilisations pour l'année prochaine qui va
dépasser les 20 %. Je pense qu'elle est de l'ordre de 23 % ou...
Une voix: C'est autour de 16 %.
M. Perreault: Autour de 16 %, pardon. Le budget du transport
adapté, M. le ministre, c'est les normes du gouvernement du
Québec qui nous amènent à reconnaître des personnes
pour le transport adapté. Avec la désinstitutionnalisation qui,
Je pense, est souhaitable, il reste quand même que l'évolution de
nos dépenses est de l'ordre de 11 % par année. Le gouvernement a
limité sa contribution à 4,5 %. Il continue dans ce
secteur-là, effectivement, mais il limite l'évolution de sa
contribution à 4,5 %, tout en continuant à maintenir les
critères qui font qu'on doit admettre de plus en plus de gens. C'est le
deuxième poste qui nous coince.
Le troisième, c'est les contrats signés en 1980 avec le CN
et le CP et pour lesquels, justement, nous avons demandé au gouvernement
du Québec sa collaboration pour créer une corporation distincte,
pour nous permettre d'être en concurrence avec le CN et le CP, ce que ne
nous permet pas actuellement la législation fédérale.
Alors, pour le reste des budgets, c'est-à-dire les 85 % que nous
contrôlons directement, eh bien, là-dessus, l'évolution de
nos dépenses a été de 5,2 % au cours des cinq
dernières années.
M. Ryan: Maintenant, si vous augmentez les tarifs de l'ordre de
10 % au cours de la prochaine année, ça va rapporter combien,
ça?
M. Perreault: Si nous augmentons nos revenus-voyageurs de 10 %,
ça va nous rapporter 22 000 000 $. Là-dessus, au niveau des
politiques de tarifs comme telles - ce sont divers produits, nos tarifs - la
carte régionale, elle, augmentera au total de l'ordre de 16 % dans les
six derniers mois, fa carte régulière, les autres tarifs vont
varier entre 7 % et 10 %, dépendamment des tarifs particuliers.
M. Ryan: combien peut-on soustraire du montant de 109 000 000 $?
à partir de ces 22 000 000 $, ii y en a une partie qui va être
appliquée aux 109 000 000 $.
M. Perreault: Là, vous prenez le montant de 109 000 000 $,
M. le ministre, moi, je...
M. Ryan: Si vous nous arrivez avec des plans de
développement de toutes sortes en plus, là, ça ne
marche.
M. Perreault: je vais vous poser une question, m. ryan. est-ce
que le problème est strictement un problème... est-ce que l'enjeu
est un enjeu budgétaire?
M. Ryan: Oui.
M. Perreault: Bien, je vais vous dire ceci. Oui, vous avez
raison. Je vais vous dire: II n'y a jamais eu autant d'argent dans la
région de Montréal pour les questions de transport. Il y a plus
de déplacements qu'il n'y en avait dans le passé. On se retrouve
avec des ménages avec 2 ou 2,3 voitures par ménage; ça
coûte de 15 000 $ à 18 000 $ par année, mettre 2,3 voitures
par ménage sur la route. Il y a donc des ressources pour les questions
de transport. Ce qui manque, me semble-t-il, c'est la volonté politique
de "prioriser" et je croyais qu'on l'avait trouvée avec l'entente qui a
été signée à Laval il y a un an ou deux ans,
à la veille des élections... Ce qui manque, me semble-t-il, c'est
la volonté politique de "prioriser" les ressources, de faire les bons
choix, parce qu'il ne manque pas nécessairement de moyens.
M. Ryan: mais ça, m. perreault, les gens du secteur de
l'immigration vont nous dire ça, ceux de l'éducation disent la
même chose, ceux de la santé disent la même chose, ceux de
la voirie disent la même chose, on n'est pas plus avancé une fois
qu'on a dit ça. on n'est pas plus avancé...
M. Perreault: M. Ryan, j'ai reconnu les problèmes
budgétaires du gouvernement...
M. Ryan: Et je vous ai posé...
M. Perreault: ...je pense qu'on ne peut pas les nier.
M. Ryan: C'est correct, je l'apprécie, je
l'apprécie. J'apprécie le ton général de
l'échange, soyez sans inquiétude là-dessus. Mais la
question que je vous posais: Sur les 22 000 000 $ $ qui m'intéressent
spécialement, combien vont pouvoir être affectés aux 109
000 000 $? C'est ça qui m'intéresse.
M. Perreault: Bien, je veux dire que la totalité des 22
000 000 $ va être affectée à notre problème
d'équilibre budgétaire.
M. Ryan: Oui. Ça veut dire que ça réduit
d'autant la subvention qui devra venir des municipalités sous forme de
revenus fiscaux accrus.
M. Perreault: Mais c'est déjà intégré
dans le document que nous avons rendu public à la Communauté
urbaine.
M. Ryan: Oui. Vous l'intégrerez dans l'ensemble,
ça, c'est...
M. Perreault: Je pense qu'on vous a remis une copie de ce
document...
M. Ryan: Bien oui, j'ai tous ces documents-là.
M. Perreault:... c'est déjà intégré
dans le calcul.
Mme Roy (Louise): Si je peux me permettre peut-être, M. le
ministre, de compléter cette information-là, c'est que la
projection du budget de la Société pour l'année 1992, au
chapitre de nos dépenses courantes, est une projection d'environ 5 %
d'augmentation pour l'an prochain. Si on ajoute à ça le besoin de
dépenses au niveau du maintien de nos actifs et de la relance du
transport en commun, on arrive avec un écart entre les dépenses
et les revenus anticipés, compte tenu du retrait du gouvernement, mais
des nouvelles sources aussi de financement mises à la disposition qui
vont faire en sorte que la facture pour les municipalités, y incluant
les 25 000 000 $ de dépenses que nous allons couper en 1992 et ce qu'on
a demandé à nos syndicats...
M. Perreault:... y incluant les 20 000 000 $...
Mme Roy:... leur participation, incluant les augmentations de 22
000 000 $ additionnels au niveau des revenus-voyageurs, la facture qui reste
aux municipalités est de 200 000 000 $. Et je pense que ça, quand
vous, vous partez uniquement de votre retrait, vous ne prenez pas en compte les
écarts réels entre l'évolution des dépenses et les
revenus dont la société va disposer l'an prochain. Je pense que
c'est un point qui est important et qu'il va falloir comprendre.
M. Ryan: Mais d'après les données que j'ai
reçues de vous, la contribution des municipalités était de
158 000 000 $ l'année passée...
Mme Roy: C'est ça. Et elle va...
M. Ryan: Vous l'avez budgétée à 158 000 000
$. Pour arriver à 200 000 000 $, vous ajoutez une partie du montant dont
j'ai parlé tantôt.
M. Perreault: Non, mais je pense, M. le ministre, que vous
devriez peut-être aller dans le document, je ne sais pas si vous avez le
résumé, mais... À la partie du document qui s'appelle
"Problématique et orientations" et qui fait la synthèse, dans le
scénario de départ, on partait tout simplement d'une
hypothèse où "toutes choses étant égales par
ailleurs" et on arrive à la fin à "quel est l'écart?"
L'écart est de 200 000 000 $. Et c'est à partir de cet
écart qu'il faut combler...
M. Ryan: En tout cas, on va vérifier. J'aime mieux l'autre
méthode, J'aime mieux la méthode inductive que la méthode
globale - vieille déformation.
Juste une dernière question, M. Perreault, à propos du
fonds de participation des automobilistes au financement du transport en
commun, vous avez formulé des Inquiétudes concernant les
critères de répartition entre les organismes publics de transport
en commun et vous avez exprimé, si j'ai bien compris, une
préférence pour un mode de partage qui serait aligné sur
la manière dont était partagée la subvention
gouvernementale qui ne sera pas renouvelée l'an prochain. Est-ce que
c'est une proposition permanente, ça, que vous formulez ou une
proposition transitoire? Ça me semble qu'adopter ça de
manière permanente serait plutôt dépourvu de
rationalité. Je comprends comme mode transitoire, je n'aurais pas
d'objection à le recommander à mon collègue, le ministre
des Transports, mais j'aimerais que vous me disiez comment vous voyez ça
sur une base un petit peu plus longue.
M. Perreault: Nous, dans le fond, ce qu'on dit, c'est qu'il faut
établir un critère qui permet d'atteindre l'objectif, l'objectif
étant de donner l'équité aux sociétés de
transport en termes d'une contribution qui est au prorata du retrait
gouvernemental. Il y a plusieurs critères qui permettent d'y arriver.
C'est le sens de notre démarche et de notre... D'autre part, il faudrait
s'assurer que...
Le Président (M. Garon): Alors, le temps dévolu au
parti ministériel étant écoulé, je passe maintenant
la parole au député de Jonquière.
M. Dufour (Jonquière): Oui, d'entrée de jeu,
j'aimerais peut-être demander au ministre des Affaires municipales qui
cite toujours ses chiffres... Pour nous, ça a l'air à
évoluer, c'est comme la Bourse, ça évolue selon les
humeurs, le temps qui a été imparti et on ne les a pas en main.
Alors, nous autres, on a l'Impression que c'est comme à la roulette. Si
on sort le bon numéro, vous l'avez. Bon. On en entend parler, mais on ne
les a pas en main. Je ne sais pas si le ministre pourrait les déposer,
au moins on pourrait y avoir accès.
M. Ryan: Un peu plus tard.
M. Dufour (Jonquière): Un peu plus tard. Voyez-vous, c'est
Dieu le Père, il vient de nous dire ça. Eh bien, on va respecter
ça. Le ministre a le droit d'en faire ce qu'il voudra. Moi, je veux
juste vous rappeler que, bien sûr, depuis que la situation est
commencée, depuis le début
des audiences, le ministre a en fait évolué un peu dans sa
pensée. Au départ, il nous parlait de "responsabiliser les
élus", quand je lui ai démontré que, dans le dictionnaire,
responsabilité, ça voulait dire celui qui décide, celui
qui prend les décisions, il n'y a personne qui a été
capable de me répondre qui prenait les décisions et qui pouvait
être décideur. Donc, la notion de responsabiliser ou de
responsabilité est disparue du paysage et, là, on parle d'argent.
C'est vraiment un cours de caisse qui préoccupe le ministre des Affaires
municipales. C'est évident que, lorsqu'on l'a interrogé à
l'Assemblée nationale et qu'on a discuté, il a dit des affaires.
C'est sûr que c'était de notoriété publique que les
administrateurs municipaux ne connaissent pas beaucoup le transport en commun
et c'est des gens, s'ils ne dilapident pas les biens des citoyens, c'est qu'ils
ne les administrent pas très bien: les autobus vides, les semaines de
quatre jours, les grèves, manque de contrôle... Il me semble que,
dans les questionnements, ça ressemble à ça. Vous
n'êtes peut-être pas allé au fond des choses. Vous
n'êtes peut-être pas allé assez loin. Je n'entends jamais
parler d'étalement urbain. Je n'entends jamais parler de principes.
Pourquoi est-ce qu'il y a du transport en commun? Il doit y avoir une raison.
C'est l'étalement urbain. C'est l'économie d'énergie.
C'est les problèmes environnementaux. Il me semble que ça, c'est
fondamental. On entend souvent aussi comparer avec l'Ontario. Ils y font les
choses autrement que nous autres. Le ministre veut nous rendre semblables
à l'Ontario. C'est ça. C'est un objectif. Mais il oublie quelque
chose, c'est que l'Ontario investit dans le transport en commun. Il ne
désinvestit pas, il investit. Mais, là, ça ne compte plus.
Les comparaisons, quand elles font son affaire, c'est bien.
L'autre phénomène aussi que je déplore, moi, je
pensais, même si on adoptait un principe sur division à
l'Assemblée nationale, que la commission parlementaire était dans
le but d'éclairer, de faire évoluer la situation. Depuis deux
jours, j'entends le ministre nous dire: Les principes sont adoptés.
C'est 400 000 000 $ que je veux et, le reste, c'est des modalités. Si
vous avez des "petits guédis" à nous proposer, on va suivre
ça. On va essayer de s'arranger avec ça. Ça fait plusieurs
fois qu'il répète ça. Et c'est juste 0, 10 $. Ça ne
compte pas beaucoup 0, 10 $. Ça, par-dessus le voyage, quand le verre
d'eau est plein, la goutte qui fait répandre, c'est la première
ou la dernière? Il me semble que la taxation c'est un peu tout
ça. C'est l'addition des montants de taxes qu'ils ont faite, 3 319 000
000 $ depuis deux ans. De bons administrateurs. 3 500 000 $ de
déficit... Ils n'ont pas fait comme les autres. Ils ont
été siphonné les régies, Régie de
l'assurance automobile, etc. L'électricité, ce n'est pas grave,
c'est la faute du Parti québécois. C'est la faute du PQ.
Mais il y a quelque chose là-dedans. Moi, ça me semble que
ça crève les yeux. Il y a quelque chose à faire. Quand on
n'est pas correct, ce n'est pas faute reconnaître qu'on a fait une petite
erreur. Moi, je ne lui en voudrais pas au ministre, s'il me disait à
soir: J'ai le goût de retirer un peu ma loi, d'aller voir un peu et de
discuter avec les gens. Il me semble que c'est une perte de temps ce qu'on fait
là. Moi, il me semble qu'on est en frais de jouir de la
démocratie. C'est une parodie qu'on est en frais de faire là. On
reçoit des gens et on discute avec eux autres plus ou moins. On a de
beaux mémoires. On ne les fouillera pas, vos mémoires.
Faites-vous-en pas. Moi, je les regarde et vous avez tout dit presque. Vous
avez dit des choses intéressantes. Ce n'est pas une question de savoir:
Je vous aime ou je ne vous aime pas. Demandez-moi pas ça. Ce n'est pas
une question d'amour. C'est une question: c'est quoi qu'on veut pour notre
société? Le gouvernement a décidé. Il a fait des
choix. Il a dit: Le transport adapté, vous allez le faire. Les personnes
âgées, c'est votre rôle. Et les enfants, c'est vous autres.
Ça, c'est un rôle social. Les villes, les municipalités, ce
n'est pas ça leur rôle. Ce n'est pas la répartition des
richesses. Vous l'avez dit: C'est le bénéfice reçu, c'est
ça. C'est l'argent qu'on collecte pour le bénéfice
reçu. C'est ça que ça apporte. C'est un bien dont on
dispose. Quand on fait du transport en commun, ça dépasse les
cadres. Il y a un rôle social à jouer.
La réforme a été proposée en 1990. Ça
a pris plus d'un an à en décider, à la discuter et
à lui donner des effets. Et c'est évident que ce n'est pas
parfait. Si c'était parfait, on aurait le déplacement juste par
ubiquité, on aurait juste à dire: Je veux aller à telle
place et c'est fait. On n'a pas besoin de transport en commun, plus rien. Et
ça, si on veut rêver par imagination, ça se pourrait. Mais
ça, ce n'est pas en l'an 1991. On a encore le goût de se
déplacer et d'aller voir.
Il y a des équipements culturels, des équipements
économiques, il y a des industries, il y a des entreprises. Je ne vous
ferai pas de dessin, vous connaissez ça bien mieux que moi. Je
n'essaierai pas de vous convaincre que le transport en commun, c'est important
et c'est nécessaire. Ce n'est pas vrai que c'est 0, 10 $, c'est 400 000
000 $ qu'on cherche, pas 200 000 000 $. C'est 400 000 000 $ et cet
argent-là vient des contribuables, quels qu'ils soient. Et, dans la
réforme, il y a des pans qui sont inapplicables. Et ça va avoir
des effets néfastes, pervers qui remettent en cause tous les principes
de la fiscalité. La neutralité, la transparence, ça
n'existe plus.
En fait, je pense que j'aurais aimé que le ministre nous dise...
Moi, j'aurais aimé ça de sa part qu'il nous dise: Oui, la
commission parlementaire, ça me semble un instrument pour faire
évoluer, pour aller voir ce qui se passe,
parce que ce qu'on n'a pas fait avant on doit le faire après.
C'est drôle, à chaque fois qu'on questionnait, on demandait au
ministre: Oui, mais il semble que tout le monde est contre vous. Bien non.
Quand je parle avec des gens, ils me disent: Oui, ça a bien du bon sens.
Mais, savez-vous, qu'on ne rencontre pas le même monde? Parce que
ça fait deux jours qu'on rencontre du monde en public et il n'y en a pas
un qui dit qu'il est d'accord. Ça fait qu'il doit y avoir quelque chose.
Ou j'ai perdu la mémoire ou j'entends mal. Ou je ne comprends pas. Bien,
il y a des éléments qui viennent tout me chambarder. Moi, je dois
dire, je suis mêlé là, parce que je ne sais pas qui dit
vrai. Et quand on parle de déficit ou quand on parle de manque à
gagner, le ministre dit: II n'y a pas grand-chose là-dedans, c'est juste
0, 10 $. Comme si les gens étaient des petits morceaux et, chaque fois
qu'on les rencontre, ce n'est jamais la même personne, ça fait
qu'on pourrait toujours en mettre. Le petit bonhomme... ça monte comme
on veut. (21 heures)
Ceci étant dit, c'est évident qu'il y a aussi des
principes qui, à travers ça, sont mis en cause. Vous faites un
certain nombre de propositions, lesquelles devraient être mises en cause,
au moins être regardées. On les examinera sûrement si le
ministre persiste; on n'a pas bien, bien le choix. Quand vous nous parlez que
ça va... Quand vous nous dites que le développement
économique et les enjeux régionaux vont être remis en
cause, comment... Pouvez-vous élaborer quelque peu par rapport à
ça? Après ça, mes collègues pourront continuer.
M. Perreault: Ce que je trouve étonnant, c'est que, d'une
certaine façon, en Amérique du Nord, on a la chance, au
Québec, d'avoir un atout considérable, celui que... S'il y a
quelque chose qu'on fait du point de vue économique, c'est du transport
en commun. Si on a un fleuron économique important, c'est bien les
compagnies qui se sont spécialisées et créé une
vocation internationale dans le secteur du transport.
Au lieu d'avoir une stratégie à long terme qui mise
là-dessus et qui, en même temps, facilite l'organisation des
transports dans la région métropolitaine, je veux dire qu'on
risque actuellement... Je n'arrive pas à comprendre comment la
stratégie industrielle du gouvernement du Québec ne passe pas
aussi par le transport public. Quand on regarde des sociétés
extrêmement avancées du point de vue de la
compétitivité internationale qui sont, par exemple, les pays qui
sont en train de faire l'Europe de 1993, c'est considérable, les
stratégies industrielles à terme du point de vue du transport
public. On a ici des atouts importants là-dessus. Au lieu de s'en servir
et de se servir du Québec comme un champ d'application, il faut voir le
succès de Bombardier; c'est parti du métro de
Montréal en bonne partie. Ça, c'est une des choses qu'on
veut dire du point de vue économique, sans parler du fait que 70 % des
gens qui utilisent le transport public, c'est pour des motifs de travail. Plus
de 50 % ou 60 % de ces gens-là n'ont pas d'alternative, n'ont pas de
voiture. Ce n'est quand même pas un détail. Ce n'est pas juste une
responsabilité municipale quand on parle de ça.
L'autre question que j'ai soulevée du point de vue du processus
de décision, c'est qu'on oublie parfois que, dans le cas de la
Communauté urbaine, c'est 29 municipalités qui ont des
réalités très différentes, et renvoyer le processus
de décision à des choix locaux risque de nous créer des
problèmes, même si, en théorie, les municipalités
peuvent toujours s'entendre. Il y a des réalités très
concrètes. Lorsque vous avez un ménage sur deux dans la ville de
Montréal, par exemple, qui n'a pas de voiture, quand vous avez 2, 3
voitures dans les ménages de banlieue, quand vous avez 75 % de votre
population qui sont locataires et que vous avez, ailleurs, 60 % ou 65 % des
gens qui sont propriétaires, c'est évident que l'espèce de
cafétéria fiscale qu'on nous propose va créer à
terme des problèmes majeurs pour prendre des décisions.
Le dernier point que je dirais, c'est que, du point de vue
métropolitain - et, quant à moi, c'est ce que je trouve qui fait
le plus mal dans ce projet de loi - on avait, de peine et de misère,
commencé de façon très timide, trop timide, à faire
un effort pour doter la région métropolitaine d'une organisation
qui transcende les barrières géopolitiques du fleuve
Saint-Laurent. Là, dans le fond, on nous renvoie des choix
stratégiques qui vont être différents d'une MRC à
l'autre et, a mon avis, à terme, on ne vient pas de rendre service
à personne. C'est un des gros problèmes de ce projet de loi,
alors qu'on doit, au contraire, bâtir des pro|ets de loi, et le
gouvernement a un rôle pour ça, qui viennent appuyer les
volontés de convergence plutôt que de stimuler les
Intérêts locaux. Je veux dire qu'on va se retrouver avec une
espèce de balcanisation du processus de décision et le transport
public est l'antithèse de ça. C'est vraiment des choix à
caractère régional.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, je voudrais juste souligner
que le budget d'immobilisations est en cause aussi dans le débat qu'on a
sur le transport en commun à Montréal. Apparemment, le
prolongement du métro vers Laval, c'est en l'an 2000, celui dans l'est,
c'est on ne sait pas quand, et la modernisation du train de banlieue
Deux-Montagnes-centre-ville, ce n'est pas pour tout de suite. Est-ce qu'on peut
savoir si les trains de banlieue sont un moyen de transport coûteux et,
s'il n'y en a pas dans l'est et pas
plus de métro dans l'est qu'il y en a, est-ce uniquement parce
que l'est est composé de francophones?
M. Perreault: Je vais répondre à la première
question. La deuxième, c'est un débat qui n'est pas celui de la
société. Pour ce qui est de la première question, je vous
dirai que, bien sûr, le transport par train est plus coûteux que le
transport par autobus-métro. En gros, autobus et métro, quand
vous analysez ça sur 40 ans, ça revient à peu près
au même coût, un peu plus cher le métro. Les trains sont
actuellement, dans l'état actuel d'organisation du territoire,
pratiquement cinq fois plus coûteux. Les trains demeurent quand
même des instruments lourds à terme. Ceci dit, la ligne, par
exemple, vers Rigaud a connu un très grand succès d'achalandage
depuis qu'elle est modernisée, sauf que les trains, ça renvoie...
C'est justement le genre de problème qu'on soulève. Lorsque vous
parlez d'avenir et que vous parlez, par exemple, de développement des
réseaux de trains, à l'évidence ce n'est pas un dossier
municipal. À l'évidence, ce n'est même pas un dossier de la
Communauté urbaine. C'est déjà un dossier qui
dépasse les limites du Conseil métropolitain du transport et qui
se rend jusqu'à la rive nord. C'est dans ce sens-là, nous
semble-t-il, qu'il faut rechercher à organiser le transport dans la
région de Montréal. Le projet de loi, de ce point de vue
là, crée des problèmes majeurs.
M. Bourdon: Ce que je voudrais ajouter, c'est que c'est
très pertinent ce que vous disiez quant à une stratégie
industrielle reliée au transport en commun parce que la STCUM, on oublie
facilement que c'est aussi 8000 emplois à Montréal et un des plus
gros employeurs de Montréal. C'est paradoxal de voir qu'on favorise
indûment, me semble-t-il, le développement de l'automobile qu'on
importe à 90 % de l'Ontario et que, pour ce qui est des rames de
métro, des trains à grande vitesse et des avions, on en produit,
mais pour l'exportation. C'est un produit qu'on ne serait pas capables de
consommer nous-mêmes. Alors, on importe notre civilisation automobile et
on exporte des moyens de transport efficaces.
M. Perreault: Mais c'est au coeur, à mon avis, d'une
analyse économique du problème. Je pense que la difficulté
vient du fait que probablement le gouvernement du Québec veut
bâtir un modèle pour tout le Québec. Il est probable que le
problème de l'utilisation de la voiture se pose différemment dans
certaines régions du Québec. S'il y a une place où la
question se pose réellement, c'est dans le cas de la région
métropolitaine de Montréal sûrement. Peut-être
ailleurs, mais sûrement là et, à mon avis, on adopte des
formules, je ne dirais pas A mari mare usque ad mare, mais...
M. Bourdon: Et, ce qui ne simplifie pas le problème, c'est
que le fédéral a à peu près aboli le transport des
passagers par train au Québec et que, pour ce qui est de l'avion, ce
merveilleux gouvernement nous a ramenés à l'avion à
hélice et ça coûte plus cher d'aller à Val-d'Or
qu'à Paris. Alors, à cet égard-là, je peux
comprendre le reste du Québec de trouver que, le transport en commun,
c'est comme manqué en général dans toutes et chacune des
régions et, à Montréal, ça marchait relativement.
Vous faites état de vos performances. On a décidé que la
médiocrité s'étendrait sur Montréal aussi.
Pour ce qui est du transport scolaire, est-ce que vous pouvez nous
donner une idée de ce qui est dépensé par la STCUM, le
transport scolaire, le transport adapté, qui sont des mandats du
gouvernement?
Mme Roy: Peut-être sur le transport scolaire. D'abord, il
faut dire que la STCUM sur un territoire urbain remplit le rôle des
autobus jaunes en milieu rural. Donc, pour les étudiants qui ont entre 6
et 17 ans, pour nous, ça veut dire à tous les jours transporter
près de 70 000 personnes. Et, pour transporter ces 70 000 personnes par
jour, ça prend 350 véhicules additionnels. Donc, c'est ce qui
fait que, sur une base annuelle, ça coûte entre 20 000 000 $ et 25
000 000 $ par année à l'entreprise pour faire du transport
scolaire. Quand on dit ça, ça veut dire qu'à l'heure de
pointe, le matin, c'est des autobus en plus; donc, on se substitue par
là à des gens qui normalement, en milieu rural, sont
subventionnés pour faire du transport scolaire et c'est des coûts
qu'on assume. Évidemment, je ne parle pas des coûts que les
parents doivent encourir pour payer évidemment les cartes à tarif
réduit et tout ça.
En partant de tarification réduite, ça aussi, c'est une
dimension sociale parce que les tarifs réduits pour les personnes
âgées et pour les étudiants, les rabais qu'on consent,
c'est aussi une fonction sociale qu'on joue. Et ça, c'est près de
40 000 000 $ sur une base annuelle pour la Société de transport,
les coûts des tarifs réduits pour l'année 1990 en tout
cas.
Si on additionne à ça le coût du transport
adapté qui, pour les années qu'on vit actuellement, connaît
une pression très forte à la hausse, on contribue beaucoup
à la mobilité des personnes qui, actuellement, n'ont pas d'autres
moyens. C'est près de 800 000 déplacements par année qu'on
fait. C'est énorme. L'enveloppe qu'on y consacre est autour de 15 000
000 $ et est en augmentation de 10 % à 15 % par année.
Évidemment, c'est des besoins qui s'expriment et on y répond, on
essaie d'y répondre le plus adéquatement possible, mais la
demande augmente de plus en plus.
M. Bourdon: II y a une question qui me vient à l'esprit
ici. C'est qu'en régions, on
estime généralement que l'essence payée par les
particuliers pour leur voiture ou par les utilisateurs commerciaux, je pense
aux camions, sert à l'entretien et au développement des routes et
d'après le député de Lévis, pas autant que ce
serait souhaitable. Mais ce que j'ajouterais, c'est combien la STCUM
verse-t-elle en taxes sur l'essence pour des rues qui ne sont pas payées
par Québec? C'est assez connu et je ne parle pas encore du boulevard
Henri-Bourassa.
M. Perreault: Je n'ai pas le chiffre en mémoire. C'est
sûrement quelques millions. Je n'ai pas le chiffre en mémoire.
Le Président (M. Garon): Alors, je voudrais remercier M.
Perreault et Mme Roy d'être venus nous rencontrer. Et, comme le temps
dévolu à chaque partie est écoulé, j'espère
que vous avez réussi à convaincre le ministre de votre point de
vue.
M. Perreault: J'espère, M. le Président, qu'on a
convaincu les deux côtés de la Chambre de notre point de vue.
Le Président (M. Garon): C'est encore mieux. Merci. Je
demanderais aux représentants de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec de s'approcher à la table des
délibérations.
Alors, comme il ne faut plus prendre de retard si nous voulons avoir
terminé à minuit, je demanderais au président de la
délégation - je pensais que c'était M. Larose, mais je
pense qu'il n'est pas là - de nous dire qui dirige la
délégation et quels sont les gens qui l'accompagnent. Comme vous
avez une heure, alors les mêmes règles s'appliquent que pour les
autres, c'est-à-dire que vous avez normalement 20 minutes pour exposer
votre point de vue, 20 minutes de discussion avec le ministre et 20 minutes
avec l'Opposition. Ce que vous prenez en plus est soustrait des deux parties et
ce que vous prenez en moins est ajouté. Moi, je ne vous donnerais pas
d'autre directive. À vous la parole.
Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec
Mme Leclerc (Marie): Merci, M. Garon. Alors, je suis Marie
Leclerc, du conseil d'administration de la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec. Je représente la ville de
Québec à l'intérieur de ce conseil d'administration et je
remplace M. Claude Larose qui a dû s'absenter pour des raisons de
santé. Vous comprendrez, à la lecture de ce
mémoire-là, qu'il a travaillé énormément ces
derniers mois. J'ai avec moi M. Michel Rivard, président de la
Communauté urbaine de Québec et membre du conseil
d'administration de la CTCUQ; M. Raynald Blouin, directeur
général de la CTCUQ;
M. Claude Jean, notre consultant qui nous a aidés à
étudier le projet de loi.
Notre texte, en fait, comprend trois grandes parties: une
première qui consiste en des commentaires généraux sur le
projet de loi, une autre qui analyse des impacts spécifiques de ce
projet de loi et qui s'applique à la CTCUQ particulièrement,
ainsi qu'éventuellement des aménagements qui pourraient
être acceptables et, enfin, une dernière partie qui concerne
d'autres actions ou d'autres rôles que joue le gouvernement comme
employeur, par exemple, ou gestionnaire de fonds publics et qui ont aussi un
impact sur le transport en commun à Québec, en particulier. (21 h
15)
D'abord, des commentaires généraux sur ce projet de loi.
Le projet de loi 145, qui donne suite à la volonté du
gouvernement du Québec de ne plus contribuer aux dépenses
d'exploitation des organismes publics de transport, menace très
sérieusement la mise en oeuvre du plan de relance préparé
minutieusement par la CTCUQ pour accroître l'utilisation du transport en
commun dans la région de Québec et contribuer ainsi à
préserver la qualité de vie recherchée par ses
résidents. Veuillez noter que ce plan-là a été
accueilli très favorablement par la communauté, par l'ensemble
des municipalités pour sa créativité, pour sa pertinence
et aussi pour son audace. Il a été aussi présenté
au ministre des Transports, M. Elkas, qui lui-même y a vu beaucoup de
suggestions très heureuses.
Ce projet de loi comporte donc des dispositions qui engendreront des
problèmes majeurs pour le financement et le développement de
notre réseau régional de transport en commun. Il traduit un
désengagement financier radical du gouvernement du Québec qui
nous apparaît incompréhensible et inadmissible face au rôle
de plus en plus Important qu'est appelé à |ouer le transport en
commun pour la réduction de la pollution de l'air et du gaspillage
d'énergie causés par la surutilisaton de l'automobile en milieu
urbain. Aujourd'hui, nous sommes la Journée mondiale de l'environnement
et je pense que ce propos est particulièrement percutant en ce sens.
C'est l'essentiel du message que nous désirons transmettre le
plus clairement possible aux membres de votre commission, non seulement au nom
du conseil d'administration de la CTCUQ, mais aussi au nom des élus
municipaux de la Communauté urbaine de Québec, des nombreux
organismes et groupes de la région qui ont manifesté leur accord
et leur soutien aux orientations et aux actions que nous envisageons pour les
années à venir.
Le plan d'action triennal que nous venons de dévoiler dans la
région de Québec est Issu d'une démarche de consultations
publiques entreprises en octobre dernier pour dégager des orientations
et des stratégies de desserte par
transport en commun appropriées aux besoins et aux attentes de la
population régionale. Un consensus régional s'est établi
sur la nécessité de développer le transport en commun et
d'accroître son rôle et son importance, non seulement pour
répondre plus adéquatement aux besoins de déplacement,
mais aussi pour contribuer à un environnement sain, à
l'économie d'énergie, à un aménagement urbain
rationnel et au développement social et économique qui sont les
composantes essentielles de la qualité de vie recherchée pour les
générations actuelles et futures.
Le plan d'action proposé par la CTCUQ contient des changements
substantiels et plusieurs mesures innovatrices pour améliorer la
rapidité et l'efficacité de notre service et offrir ainsi une
alternative réelle à l'automobile, principalement pour les
déplacements liés au travail et aux études. Notre plan
d'action comporte aussi d'importantes mesures de rationalisation de nos
ressources et de notre réseau qui nous permettent d'apporter les
améliorations requises en maintenant le budget de notre entreprise
à son niveau actuel en dollars constants.
Nous sommes déterminés à relever le défi de
faire mieux et plus avec les ressources limitées qui sont à notre
disposition actuellement. Mais voilà qu'avec le retrait de la
contribution gouvernementale à l'exploitation des réseaux de
transport en commun, la CTCUQ voit ses ressources financières
amputées d'un montant de 20 000 000 $ à compter de 1992. C'est un
montant considérable, qui représente près du quart de
notre budget d'opération.
Nous nous retrouvons soudainement devant un manque à gagner
équivalent à la somme des revenus perçus de nos usagers ou
à la quote-part globale payée par les municipalités que
nous desservons. S'il devait être supporté par les usagers, iI
nous faudrait doubler les tarifs. S'il devait être absorbé par les
municipalités, il faudrait également doubler leur contribution.
Ces deux perspectives ne peuvent être considérées sans
entraîner, dans le premier cas, des effets désastreux sur
l'achalandage et, dans le deuxième cas, un tollé
général des contribuables. Même en optant pour une
répartition du manque à gagner, on se retrouve devant une
augmentation de la contribution des usagers et des municipalités qui
dépasse un seuil raisonnable en l'espace d'un an.
Comme nous le disions au début de notre exposé, le projet
de loi 145 compromet gravement la réalisation du plan de relance de la
CTCUQ. Nous croyons fermement à ce plan de relance qui correspond au
mandat clair qui nous a été donné par les élus
municipaux et les organismes socio-économiques de la région de
Québec de développer le transport en commun et non d'en
gérer la décroissance, ce qui signifierait le
dépérissement à plus ou moins long terme de ce service
public essentiel à plusieurs milliers de personnes résidant sur
le territoire desservi par la CTCUQ.
La CTCUQ demande donc au gouvernement de reconsidérer son
implication financière dans le transport en commun et d'assumer les
responsabilités sociales et environnementales qui lui incombent dans ce
domaine. Couper les fonds au transport en commun, c'est laisser se
perpétuer l'utilisation abusive de l'automobile et ses effets nocifs sur
l'environnement et la qualité de vie des gens, particulièrement
dans les quartiers centraux. Les pouvoirs publics auront à en payer les
coûts un jour ou l'autre, ne l'oublions pas. Nous croyons qu'il s'agit
là d'un enjeu majeur pour la collectivité. Nous déplorons
que la logique gouvernementale en regard du financement du transport en commun
ne tienne pas compte de la problématique environnementale et
énergétique reliée à ce mode de transport
collectif.
Tout en étant conscients, nous aussi, des problèmes
financiers que connaît le gouvernement du Québec, nous ne
comprenons pas qu'il aille à contre-courant, en matière de
transport urbain, en devenant l'un des seuls gouvernements de palier
supérieur en Amérique du Nord à cesser de contribuer au
fonctionnement des réseaux de transport en commun. Nous ne sommes pas
les seuls à ne pas comprendre, puisque son projet de réforme a
suscité une opposition massive de la part des organismes municipaux, des
milieux d'affaires, des groupes écologiques ainsi que du monde patronal
et syndical. On a rarement vu un si large consensus sur l'importance de
sauvegarder et de développer le transport en commun, tant pour des
considérations sociales et environnementales que pour des
considérations économiques. Nous demandons donc au gouvernement
de retirer ou d'amender le projet de loi 145 dans le sens du maintien d'une
contribution financière substantielle au transport en commun.
Deuxième partie, les commentaires sur certaines mesures
prévues au projet de loi. Dans l'hypothèse où,
malheureusement, le gouvernement maintiendrait sa position face au financement
du transport en commun, nous tenons à émettre des commentaires
sur un certain nombre de mesures qui nous paraissent inapplicables ou
inacceptables, s'il fallait les imposer.
Alors, pour ce qui est de la répartition de la quote-part des
municipalités. Comme le champ d'activité du transport en commun
est de nature régionale, les décisions relatives à son
financement devraient également être prises au niveau
régional. En raison des modifications proposées à la Loi
sur la Communauté urbaine de Québec par l'article 207 du projet
de loi 145, la répartition proposée risquerait de susciter des
tensions et d'accroître les écarts fiscaux entre les
municipalités. À titre d'exemple, le pouvoir d'imposer une taxe
aux propriétaires de stationnements risque d'être inapplicable si
toutes les municipalités ne sont pas d'accord pour l'utiliser. En effet,
la municipalité qui s'en prévaudrait viendrait
accroître de façon importante les charges fiscales de son
secteur non résidentiel, avec tout ce que cela implique au niveau des
activités d'affaires. On retrouverait la même situation par
l'utilisation de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels,
puisqu'il y a déjà des écarts importants à ce
chapitre et qu'il n'y a pas intérêt à élargir
davantage cet écart.
Suivant la proposition de la ville de Québec que vous avez eue
hier soir et, je crois, qui a été assez bien accueillie, la CTCUQ
croit qu'il serait approprié que le législateur amende le projet
de loi 145 de façon à ce que, par règlement, la
décision de taxer les stationnements et les immeubles non
résidentiels soit prise au niveau régional et que les
municipalités aient l'obligation d'imposer et de percevoir ces taxes
suivant les taux et les bases prédéterminés par le niveau
régional.
La CTCUQ comprend que le projet de loi 145 attribuerait au gouvernement
le versement à la municipalité locale de la taxe perçue
auprès des propriétaires de stationnements à
l'égard des immeubles appartenant à la couronne et à la
Société immobilière du Québec. Nous comprenons
également qu'il y aurait versement de cette taxe pour les stationnements
non résidentiels, à savoir, notamment, les stationnements non
résidentiels des immeubles appartenant à la Corporation
d'hébergement du Québec, à un établissement public
régi en vertu de la Loi sur les services de santé et les services
sociaux, etc. Nous espérons avoir bien compris. La CTCUQ recommande que
des pressions soient effectuées aussi auprès du gouvernement
fédéral afin qu'il verse la taxe applicable aux
propriétaires de stationnements non résidentiels. la
compréhension du projet de loi 145 nous amène à conclure
que cette taxe ne constituerait pas une taxe foncière. il ne s'agirait
donc pas d'une créance privilégiée. pour la ctcuq, il
apparaîtrait normal que cette taxe puisse constituer une créance
privilégiée l'affectant à l'immeuble à
l'égard duquel elle est imposée. notamment, en vertu du dernier
alinéa de l'article 244.23, il existerait un risque potentiel que la
taxe ne puisse être perçue auprès de l'exploitant. dans la
même veine, la ctcuq croit que le législateur devrait instaurer
des règles empêchant le morcellement d'un stationnement entre
divers propriétaires, de façon à éviter
l'application de la taxe par un scénario voulant qu'un vaste
stationnement soit divisé en parcelles inférieures à une
superficie de 500 mètres carrés appartenant à plusieurs
propriétaires distincts pour éviter le paiement de cette
taxe.
Pour ce qui est du fonds des contributions des automobilistes au
transport en commun, advenant, encore une fois, que le projet de loi 145 entre
en vigueur, le gouvernement prévoit par diverses mesures la constitution
d'un fonds de contributions des automobilistes au transport en commun. Nous
croyons qu'à plusieurs égards les mesures annoncées sont
insuffisantes et potentiellement sources de problèmes. Nous nous
réjouissons que le gouvernement se soit rendu à la demande des
organismes de transport public pour que les automobilistes participent au
financement du transport en commun. La CTCUQ est également d'accord avec
le territoire déterminé par le projet de loi parce qu'il permet
de s'assurer que la grande majorité des navetteurs, qui viennent
quotidiennement sur son territoire, sera mise à contribution. Cependant,
nous demandons à l'Assemblée nationale du Québec de
prévoir que le montant de 30 $ de frais additionnels d'immatriculation
pour les véhicules de promenade constitue une contribution minimale. Le
règlement prévu à l'article 88.3 de la Loi sur les
transports, édicté par l'article 267 du projet de loi 145, ne
devrait pouvoir être utilisé que pour augmenter le montant de
cette contribution. Cette participation financière des automobilistes
est pleinement justifiée par le fait qu'ils sont des
bénéficiaires indirects de l'utilisation du transport en commun,
puisque la densité de circulation s'en trouve diminuée. La CTCUQ
croit que la contribution des automobilistes au financement du transport en
commun devrait même être supérieure et que le gouvernement
aurait dû verser aux organismes de transport en commun l'augmentation de
la taxe sur l'essence comprise dans son dernier budget.
Certains organismes prétendent que les automobilistes sont
surtaxés, mais les études sur lesquelles ils s'appuient ne
tiennent pas compte des coûts indirects reliés à
l'automobile, tels que les dépenses d'administration, les frais sociaux
reliés aux accidents, les services policiers, etc. Ces études
n'incluent pas non plus les coûts reliés à la pollution et
d'autres nuisances urbaines. Si on additionnait aussi les dépenses des
municipalités pour assurer la circulation automobile, on obtiendrait des
coûts encore plus importants qui doivent être assumés par
l'ensemble de la population et non seulement par les automobilistes.
D'autre part, nous croyons, vous voudrions nous assurer des
modalités de partage du fonds entre les organismes de transport y ayant
droit. Nous souhaitons que le gouvernement précise, dès
maintenant, ces modalités. En conséquence, nous suggérons
que le gouvernement modifie le projet de loi 145 s'il doit être
adopté pour prévoir que le montant du fonds attribuable à
la région de Québec soit réparti entre les organismes
publics de transport en commun au prorata de l'impact financier qu'aurait sur
ces organismes la fin des subventions d'exploitation jusqu'alors prévues
au programme d'aide gouvernementale au transport en commun.
La CTCUQ est surprise que la Société de l'assurance
automobile du Québec puisse, d'une part, prélever un montant
équivalent à 2 % des contributions perçues à titre
de frais d'administration et que, d'autre part, en vertu de
l'article 12.24 de la Loi sur le ministère des Transports, l'on
indique que les intérêts produits par les sommes versées
dans les fonds n'en font pas partie. Pour la CTCUQ, il apparaît que si le
gouvernement veut véritablement créer un fonds d'aide au
transport en commun, il est logique et juste que les intérêts
produits par ce fonds en fassent partie et soient partagés entre les
organismes publics de transport en commun qui y ont droit et que la retenue de
2 % pour frais d'administration soit abolie. (21 h 30)
Dans le même sens, nous ne voyons pas en vertu de quoi le ministre
des Finances devrait payer à même le fonds, en cas d'insuffisance
du fonds consolidé du revenu, les sommes requises pour
l'exécution d'un jugement rendu contre la couronne. Pour la CTCUQ, les
sommes versées dans le fonds ne devraient être utilisées
qu'au seul et unique bénéfice des organismes publics de transport
en commun sans que le gouvernement n'ait, de quelque façon que ce soit,
la possibilité de retirer du fonds quelque somme que ce soit.
Pour ce qui est du transport scolaire, on sait que le gouvernement du
Québec verse actuellement une subvention de 50 $ par mois par
étudiant aux commissions scolaires pour le transport de leurs
étudiants du primaire et du secondaire. Or, la CTCUQ a conclu avec
certaines commissions scolaires des ententes de transport d'écoliers
à un tarif de 24 $ par mois par étudiant, lequel est
assumé à 30 % par l'étudiant pour tenir compte du fait que
le laissez-passer est utilisé en dehors du cadre de transport
scolaire.
Ainsi, la CTCUQ, par le biais de ces ententes, assure le transport de
6600 élèves à l'intérieur de son territoire. Dans
la mesure où le gouvernement se retirerait du financement des
opérations de la CTCUQ, nous considérons que les
municipalités n'ont pas à absorber de coût
supplémentaire généré par le transport scolaire. La
CTCUQ demande donc au gouvernement de mettre en oeuvre, avant le 1er janvier
1992, une politique faisant en sorte qu'elle puisse être
remboursée selon les mêmes taux et les mêmes montants que
les subventions versées par le gouvernement pour le transport scolaire
effectué par les véhicules d'écoliers.
Pour ce qui est du financement des organismes municipaux et
intermunicipaux et des corporations intermunicipales de transport, advenant
l'entrée en vigueur du projet de loi, la CTCUQ s'interroge sur les
intentions du gouvernement relativement aux subventions à l'exploitation
des corporations municipales et intermunicipales de transport et ce qu'il
adviendrait des subventions à l'égard des municipalités
locales qui organiseraient par elles-mêmes un service municipal de
transport en commun. En effet, si on examine le tableau 4 apparaissant à
la page 107 du document "Vers un nouvel équilibre", on se rend compte
que seulement les organismes publics de transport ci-mentionnés
apparaissent visés par cette mesure.
Comment le gouvernement compte-t-il inciter les municipalités
à rester au sein des organismes publics de transport plutôt que
d'organiser sur d'autres bases leur service de transport en commun? Le
gouvernement a-t-il l'intention d'assurer un traitement équitable aux
commissions de transport par rapport aux corporations municipales et
intermunicipales de transport?
Quant aux subventions aux immobilisations, dans le cadre du programme
d'aide gouvernementale au transport en commun, le gouvernement provincial
défraie, en partie, certaines dépenses d'immobilisations. Or, le
document "Vers un nouvel équilibre" annonce que le gouvernement aurait
l'intention de continuer de participer de façon importante aux
dépenses d'investissement.
La CTCUQ demande au gouvernement d'indiquer clairement s'il entend
maintenir le programme actuel de subventions aux immobilisations et, dans la
négative, d'indiquer d'ores et déjà les changements qu'il
entend apporter à cette facette du financement des organismes publics de
transport en commun.
Pour ce qui du règlement sur le lieu de résidence des
détenteurs de laissez-passer, le gouvernement du Québec a
promulgué un décret, en 1985, modifiant la politique d'aide
gouvernementale au transport en commun relativement au financement des
réductions de tarif consenties aux usagers de laissez-passer utilisant
deux réseaux de transport. Il y est stipulé que "pour être
éligible aux subventions du présent programme d'aide, toute
autorité responsable de l'organisation du transport en commun doit
émettre ses titres de transport indépendamment du lieu de
résidence de ses utilisateurs".
Dans l'hypothèse du retrait des subventions à
l'exploitation, la CTCUQ trouverait inéquitable pour les contribuables
de son territoire d'assumer des dépenses d'exploitation pour les usagers
qui n'y résident pas.
La CTCUQ demande donc au gouvernement d'établir, avant janvier
1992, une politique lui permettant d'être remboursée pour les
dépenses d'exploitation générées par les usagers
qui résident hors de son territoire ou encore d'établir une
tarification différente pour ces usagers.
Maintenant, la dernière section comporte différentes
remarques sur le comportement du gouvernement à titre d'employeur et de
gestionnaire des fonds publics et qui s'appliquent très
spécifiquement à la région de Québec. Il n'y a pas
que le désengagement financier du gouvernement du Québec qui
défavorise le développement du transport en commun, il y a aussi
sa politique de stationnement à titre d'employeur et sa politique de
gestion des fonds publics consacrés au transport des personnes. Dans les
deux cas, il existe une inéquité importante à
l'égard des utilisateurs de transport en commun par rapport
aux automobilistes.
Pour ce qui est de la politique de stationnement, une première
inéquité se retrouve dans les subventions cachées
consenties aux fonctionnaires automobilistes par lesquelles ils
bénéficient d'un stationnement à un prix de beaucoup
inférieur au prix du marché et au coût réel. Selon
des données de la société Parc-Auto qui gère
environ 15 000 places de stationnement dans la région de Québec,
plus de 9000 sont occupées par des fonctionnaires de différents
ministères provinciaux. De ce nombre, 6400 employés
bénéficient d'un stationnement Intérieur pour lequel ils
ne paient qu'un tarif mensuel de 33 $, alors que le coût de revient d'une
place de stationnement, en incluant les frais d'opération et
d'amortissement, varie de 200 $ à 250 $ par mois. Chacun des
fonctionnaires reçoit donc en moyenne du gouvernement une subvention
annuelle de plus de 2000 $ pour stationner sa voiture, laquelle n'est pas
considérée comme un avantage imposable, de surcroît.
Au total, le gouvernement subventionne le stationnement intérieur
fourni à ses employés pour le montant d'environ 15 000 000 $, et
ce, seulement dans la région de Québec. Si on inclut les
stationnements des régies, sociétés d'État et
organismes parapublics, on peut évaluer que les subventions
accordées à l'ensemble de ces employés automobilistes
atteignent la somme de 20 000 000 $, soit le même montant de subventions
que le gouvernement s'apprête à retrancher aux 70 000 usagers
quotidiens de la CTCUQ.
Par le poids déterminant qu'il exerce sur les coûts de
stationnement dans la région, le gouvernement se comporte, à
titre d'employeur, comme notre principal concurrent en maintenant ces tarifs
dérisoires qui encouragent l'utilisation massive de l'automobile.
Comment convaincre les automobilistes d'opter pour le transport en commun
lorsqu'il leur en coûte moins cher pour stationner leur voiture au
centre-ville que pour se procurer un laissez-passer d'autobus? À titre
comparatif, le coût mensuel du stationnement pour les fonctionnaires
gouvernementaux à Toronto et à Ottawa varie de 100 $ à 150
$ par mois.
Il importe que le gouvernement mette fin à cette utilisation de
fonds publics qui cause un préjudice aux utilisateurs de transport en
commun. Il nous apparaît injustifiable et pour le moins paradoxal que,
d'un côté, le gouvernement coupe radicalement sa contribution au
transport en commun et que, de l'autre côté, il subventionne
généreusement le stationnement pour ses employés. Nous
apprécierions que le gouvernement indique s'il a l'intention de revoir
sa politique de stationnement.
Enfin, pour ce qui est de la répartition des investissements
à titre de gestionnaire des fonds publics. L'automobile jouit d'un
traitement de faveur dans la région de Québec sur le plan des
conditions de circulation et de stationnement.
Depuis 25 ans, des sommes considérables ont été
investies, notamment par le gouvernement du Québec, pour la construction
d'autoroutes et de boulevards et l'aménagement de parcs de
stationnement. Selon nos sources, la région détiendrait un record
de kilomètres d'autoroutes per caplta au Canada, sinon en
Amérique du Nord.
Nous demandons au gouvernement de donnor l'exemple afin de freiner
l'utilisation démesurée des fonds publics et de l'espace urbain
lui-même pour l'élargissement de routes et l'extension de parcs de
stationnement. On se doit de prendre davantage en considération le
transport en commun pour régler des problèmes de densité
de circulation et d'accessibilité, ce qui permettrait une
répartition plus équitable et plus rationnelle des
investissements entre le transport collectif et le transport individuel par
auto.
À titre d'exemple, pour régler des problèmes
d'engorgement sur le pont Pierre-Laporte, le gouvernement du Québec
s'apprête à investir 12 000 000 $ pour rendre la circulation sur
le pont de Québec à sens unique. Nous croyons que l'implantation
d'un parc d'incitation sur la rive sud combinée à une voie
réservée pour autobus sur le pont Pierre-Laporte constituerait
une solution moins coûteuse et probablement plus efficace, tout en
contribuant à réduire le flot d'automobiles dans les quartiers
centres de Sainte-Foy, de Sillery et de Québec.
Nous invitons donc le gouvernement à reconsidérer tous ses
projets d'investissement dans le réseau routier de la région de
Québec, dans la perspective de réallouer ses investissements pour
le développement d'Infrastructures ou d'équipements permettant de
rendre le transport en commun plus attrayant et plus efficace.
En conclusion, quelques mots sur notre plan, le plan de transport
régional. En fait, il est essentiel que le gouvernement et les
municipalités de la Communauté urbaine de Québec
coordonnent leurs actions en matière d'aménagé ment et de
transport afin d'assurer une meilleure planification et une plus grande
rationalisation des ressources qui y sont consacrées. Nous estimons
qu'il est urgent d'établir un plan de transport régional auquel
la CTCUQ serait heureuse elle-même d'apporter son entière
collaboration.
C'était notre mémoire. Vous comprendrez qu'il y a un
certain nombre de questions qui sont soulevées qui nous sont
fondamentales et sur lesquelles nous aimerions que vous nous éclairiez.
Nous sommes prêts aussi à répondre aux vôtres,
évidemment.
Le Président (M. Garon): M. le ministre, à vous la
parole.
M. Ryan: Voulez-vous, vous me préviendrez quand il me
restera cinq minutes, s'il vous plaît? Lui, il va le faire. Si vous ne
voulez pas, il va le faire.
Le Président (M. Garon): comme mme leclerc a pris 27
minutes, il reste 33 minutes, à diviser en deux. ça veut dire
16,5 minutes chacun.
M. Ryan: C'est ça. Voulez-vous me prévenir quand il
me restera cinq minutes? Lui, il ne le fera pas. O.K. Merci, M. le
Président.
Je voudrais vous remercier tout d'abord, Mme Leclerc, pour l'excellent
mémoire que vous avez soumis à notre attention. Je dois vous dire
que, de tous les mémoires dont j'ai pris connaissance jusqu'à
maintenant, c'est celui qui apporte le plus de problèmes réels
à l'attention du gouvernement et surtout le plus de
considérations pertinentes dans le cadre de l'horizon à
l'intérieur duquel se situe le mandat de la commission.
Le mandat de la commission, n'en déplaise à nos amis de
l'Opposition et à certains visiteurs que nous avons eus, n'est pas de
remettre en question la décision qui a été prise
avant-hier par l'Assemblée nationale, mais de voir comment sa
réalisation pourrait s'accomplir dans les meilleures conditions
possible, y compris par le truchement de modifications ou de précisions
apportées au projet de loi. Si le gouvernement avait voulu faire
l'exercice que préconisait plus tôt un porte-parole de
l'Opposition, il aurait tenu séance de la commission parlementaire avant
même l'adoption du principe. À ce moment-là, l'horizon
eût été plus large. Mais la commission parlementaire se
réunit après le débat de principe et l'adoption du
principe par l'Assemblée nationale. Par conséquent, nous sommes
encore davantage intéressés par les considérations qui se
rattachent directement au mandat de la commission.
Vous avez formulé, au début de votre mémoire, un
jugement sévère sur la ligne de conduite du gouvernement. J'en
prends acte. C'était tout à fait légitime que vous le
fassiez, mais vous n'avez pas passé votre temps à faire ga et je
vous en félicite de tout coeur. J'entreprendrai immédiatement la
discussion des points fort pertinents que vous avez soulevés dans votre
mémoire et, encore une fois, pour lesquels je vous exprime ma vive
appréciation, même si, sur chacun, je suis loin d'avoir
l'assurance de pouvoir vous donner satisfaction à 100 %. Mais on va les
discuter très rapidement et on pourra continuer la discussion
par-delà cette séance-ci, si ça peut être utile.
J'apprécie au plus haut point cette démarche qui invite le
gouvernement à préciser sa politique, toujours dans le cadre du
projet de loi 145.
D'abord, je ne peux pas souscrire à votre première
proposition contenue à la page 4 de votre mémoire et voulant que,
le transport en commun étant considéré par vous comme une
responsabilité régionale, les décisions de nature fiscale
devraient également être prises au niveau régional. Ce
n'est pas une proposition hérétique en bonne démocratie,
loin de là. Mais, dans le cadre actuel de développement de nos
institu- tions, je ne pense pas que ce soit une chose possible. En
conséquence, si elle n'est pas possible, je pense qu'elle est
difficilement désirable à court terme. Par conséquent, il
faudra que les organismes intermunicipaux continuent de fixer des quotes-parts,
des contributions des municipalités et que ces dernières
arrêtent les moyens par lesquels elles se procureront les revenus dont
elles auront besoin pour financer, outre leurs autres dépenses, leurs
contributions aux organismes communs, y compris les organismes de transport en
commun. C'est la réaction que m'inspire votre proposition, mais c'est
bon qu'elle soit là. Je pense que ça s'inscrit dans le dossier,
la recherche qui continue. Mais là, on parle dans un horizon assez
immédiat, et je ne veux pas engendrer d'illusions non plus ou faire
croire des choses que nous ne pourrions pas livrer par la suite. C'est surtout
ça qu'est mon objectif.
La taxation sur les stationnements, nous examinons cette question. De
nombreuses objections nous ont été soumises à rencontre de
la proposition voulant que les municipalités soient laissées
libres d'instituer une taxe sur les stationnements. Nous examinons cette
question. J'ai vu ce que vous dites à ce sujet-là. Je ne peux pas
vous en dire davantage ce soir. C'est une question sur laquelle je suis
personnellement perplexe quant aux recommandations que je devrais soumettre au
gouvernement à la suite des auditions de la commission parlementaire.
(21 h 45)
Ensuite, vous continuez, à la page 5. Vous parlez de la surtaxe
sur le non-résidentiel dont vous voudriez qu'elle soit
considérée comme une créance privilégiée. Je
vais consulter nos conseillers juridiques là-dessus. Je ne suis pas en
mesure de vous répondre ce soir. A priori, je pense que ce serait une
créance privilégiée. Mais je vais prendre avis, je prends
note de votre observation. Je ne prétends pas vous apporter une
réponse ce soir. Mais nous en prenons note. C'est une question qu'il est
important de préciser avant que nous ne soyons davantage
engagés.
À la page 6, je constate que vous acceptez l'idée d'une
participation des automobilistes de l'agglomération immédiatement
concernée et de l'agglomération plus large au financement du
transport en commun. Je pense que, là-dessus, vos vues coïncident
avec celles du gouvernement. Je ne puis que vous en remercier et m'en
réjouir.
En ce qui touche la répartition annuelle des recettes qui seront
versées dans le fonds, j'ai pris bonne note de votre observation qui
rejoint celle de la Société de transport de la CUM.
Peut-être que, pour le début, la formule que vous proposez sera
bonne. À la longue, toutes les formules historiques de financement ou de
répartition de fonds deviennent des sources d'embarras pour le
gouvernement et les organismes qui les gardent trop longtemps. Mais peut-
être que, comme transition, c'est une formule qu'on pourra
regarder de près. J'espère que vous serez là quand nous
discuterons ces articles en commission parlementaire. Je souhaiterais que les
principales sociétés de transport fussent présentes,
peut-être les principales villes concernées aussi, pour qu'on
puisse vraiment aller plus en profondeur là-dessus.
Il y a des points particuliers sur lesquels je ne m'arrête pas,
faute de temps. J'en viens au transport scolaire. Le transport scolaire,
d'après ce que je comprends, mais je peux me tromper... Si je fais
erreur, il y a M. Hinse, un fonctionnaire du ministère des Transports,
qui est ici et qui pourra me corriger, puis vous aussi qui avez
l'expérience directe. Il arrive, sous le système actuel, que le
gouvernement verse une contribution aux commissions scolaires pour le transport
de leurs étudiants de niveaux primaire et secondaire. La CTCUQ a une
entente avec certaines commissions scolaires de son territoire, en vertu de
laquelle elle transporte les écoliers à un tarif de 24 $ par mois
par étudiant, lequel est assumé à 30 % par
l'étudiant. Ça, c'est pour tenir compte du fait qu'il se sert de
son laissez-passer pour beaucoup d'autres activités que les
activités scolaires.
Mais ça, c'est l'entente actuelle: 24 $. Ce n'est pas un montant
qui est gelé dans le ciment. Je ne veux pas vous faire de suggestion
à cet égard, mais ce sont des choses qui sont négociables.
Il y a un inconvénient actuellement: quand une modification intervient
dans le montant, l'ajustement de la subvention vient six mois plus tard.
Là, il y a quelque chose à travailler. On regardera ça
avec vous. Il faut qu'on ait certains critères qui empêchent les
augmentations inconsidérées. Mais vous nous soumettez un point
qui soulève des questions. On va se pencher sur ces questions-là,
et je vous remercie de l'avoir soulevé.
Ensuite, subventions aux immobilisations. Vous savez ce qui est
arrivé récemment. Il y a eu des indiscrétions dans les
journaux. On a prétendu qu'un mémoire aurait été
soumis au gouvernement par le ministère des Transports concernant les
plans du ministère en matière d'immobilisation. Pour le moment,
moi, je ne suis pas au courant de ce document. Mais je réitère ce
que nous avons affirmé à maintes reprises, depuis le début
des travaux de la commission, que le gouvernement n'entend pas se
désengager en ce qui touche les subventions relatives aux
immobilisations des organismes de transport en commun. Il entend maintenir son
engagement et même, possiblement, l'améliorer.
Nous aurons l'occasion - je parle nous du gouvernement, par
l'intermédiaire du ministère des Transports - de préciser,
dans un avenir que je souhaite plutôt rapproché, les intentions
précises du gouvernement, mais je suis en mesure de vous dire ce soir
que le gouvernement n'a pas d'arrière-pensée de
désengagement ou de fuite dans ce domaine. J'ai pris note de votre
question sur les détenteurs de laissez-passer, qui ne sont pas des
résidents. En bonne logique, je pense que vous avez raison. Vu que le
voyageur ne paie qu'une partie minoritaire du coût de son transport, s'il
n'est pas de la région, les contribuables vont contribuer au financement
par des taxes et tout. Il serait normal qu'il soit Invité à
fournir sa contribution d'une autre manière.
Vous nous posez un problème que nous allons regarder avec vous
autres attentivement. C'est une question, je pense, qui est tout à fait
pertinente. Je termine ces remarques en parlant des gens qui
bénéficient de subventions gouvernementales, quand ils sont
à l'emploi du gouvernement, pour fins de stationnement. On a
été saisi de ce problème à plusieurs reprises ces
derniers temps, mais, là. vous le faites avec une précision qui
m'instruit moi-même parce que je n'étais pas au courant de
certaines modalités. J'en apprends tous les jours. C'est pour ça
qu'on vient en commission. On ne change pas les grandes orientations tous les
jours, mais on s'instruit tous les jours, surtout en écoutant des gens
comme vous autres.
C'est très intéressant, ce que vous nous apportez
là, et j'en ai déjà causé avec des collaborateurs
qui sont en arrière de moi. On va faire faire un examen de ce
problème. Je crois qu'il y a des clauses qui sont inscrites dans des
conventions collectives. Si on avait ça dans les conventions
collectives, au Moyen Age, ça ne veut pas dire qu'on doit l'avoir tout
le temps, même si c'est la position syndicale: il y a un avantage
gagné une fois, on est supposé jamais le perdre. Le
député de Pointe-aux-Trembles a défendu cette thèse
peu réaliste pendant de nombreuses années.
On aura l'occasion d'étudier ce point-là. Je pense que
vous posez un problème au gouvernement, un problème de
cohérence, un problème de logique. Je vous avoue que le point de
vue que vous exprimez suscite une réaction sympathique chez moi et je
m'en ferai l'écho auprès de mes collègues.
Je crois avoir terminé mes observations. J'ajoute juste un point.
Dans l'ensemble, il y a eu un ajustement important dans le plan du
gouvernement. Les premières données que nous avons
communiquées en février dernier entraî naient un solde
à financer. Une fois que tout avait été fait dans
l'opération, le solde à finan cer qui était requis des
villes de la Communauté urbaine de Québec était de 26 800
000 $. Avoc les ajustements que nous avons faits au mois do mai, le solde
à financer va être de 12 819 000 $ II y a, par conséquent,
une amélioration con skJérable, une amélioration de plus
de 50 % dans le solde net à financer par des revenus propre ment
municipaux ou par des augmentations ou des ajustements de tarifs. Je vous dis
juste ça et je pense que j'ai fait faire la transposition en termes
d'augmentation du taux de taxation, à
supposer que ce solde devrait être puisé entièrement
dans des revenus fiscaux. Je vous assure que l'augmentation pour les villes de
la Communauté urbaine de Québec... Si vous acceptez les villes
qui n'avaient pas de service de police, qui vivaient policièrement aux
dépens du reste du Québec depuis des années - il y en a
trois ou quatre - si vous acceptez celles-là, je vous avertis que le
taux d'augmentation est très, très modeste. Ça va
même être inférieur à 0,10 $ par 100 $
d'évaluation. Ça va déplaire à l'Opposition qui
voudrait que ce soit plus gros que ça pour que ses arguments paraissent
plus sérieux. À mesure que nous avançons, la balloune se
dégonfle. On va constater, à mesure que nous approchons du terme,
que la signification réelle de tout ceci est beaucoup plus raisonnable
et modérée qu'on ne le pensait, puis vos considérations
encore une fois nous aident dans ça. Je reviendrai tantôt avec
d'autres considérations, après avoir entendu le reste de
l'échange.
Le Président (M. Garon): Alors, la parole est au
député de Jonquière.
M. Dufour (Jonquière): Oui, M. le Président. Je
comprends que le ministre reprend son souffle, parce qu'il semblerait que votre
mémoire soit beaucoup plus positif que les autres. Ça fait que je
vous dis d'avance: Vous venez d'avoir la bénédiction. Ça
va vous mettre beaucoup plus riche. Je me demande s'il y a un problème
à Québec. J'ai l'impression que Québec ne vit pas le
même problème que Montréal, puis ne vit pas les mêmes
problèmes que si c'est le transport qu'on rencontre. Par rapport
à ce que j'ai lu et à ce que j'ai entendu, c'est que votre
problème n'est pas insoluble. Il semblerait que si le gouvernement prend
quelques mesures vis-à-vis les fonctionnaires, vis-à-vis des
automobilistes, vous allez à peu près régler votre
problème. Il y aurait suffisamment de revenus dans ces sources-là
pour régler le problème de la Commission de transport de
Québec, si j'ai bien lu votre mémoire. Votre problème doit
être un petit peu plus grand que ça. Je suis convaincu qu'il est
un peu plus grand que ça et ce n'est pas cette mesure-là...
D'ailleurs, on n'a pas l'assurance qu'elle peut être retenue parce que,
le fait de constater... On a eu plusieurs personnes qui nous ont
suggéré dos avonues pour régler leur problème, mais
le ministre ne los a pas retenues, de quelque façon que co soit. Des
avenues, II y en avait d'autres, il y en a d'autres qui nous en ont
suggérées. Mais celles que vous présentez semblent faire
moins mal un peu, par rapport à ce qu'on a vu à venir
jusqu'à maintenant. C'est évident que les principes qui sont en
cause... Je ne vois pas que cette réforme-là va changer
radicalement votre manière de faire. Moi, j'ai cru comprendre que
Montréal avait un problème pratiquement insoluble, et
c'était une question de vie ou de mort. Quant à vous autres, vous
semblez nous dire:
Même s'il y a des problèmes, on pourrait probablement
s'arranger pour vivre avec; c'est un peu ça. Je pense que je fais une
analyse très grossière, mais ça me semble un peu dire
ça. Ce qui n'empêche pas qu'il y a des questions que vous avez
posées auxquelles on n'a pas répondu. Le ministre dit: Je
manquais de temps ou il n'a pas pris le temps.
Quand vous parlez, à votre page 5, d'aller au gouvernement
fédéral pour s'assurer qu'ils vont payer des taxes, vous savez
bien que c'est un rêve en couleur. Le ministre ne demandera pas au
fédéral, ils ne se parlent pas, pas plus que, nous autres, on
parlait dans le temps. Je pense qu'on parlait plus avec le
fédéral. On est loin de le savoir, d'autant plus qu'on n'est
même pas sûr, même si on a des articles de journaux, je n'ai
vu aucune garantie formelle que le fédéral paierait ses "en lieu"
de taxes au même titre que dans les autres provinces. Je ne suis pas
convaincu de ça, je ne l'ai pas vu. Le ministre a des chiffres et il les
garde pour lui. Voilà un bel exemple d'information qu'il donne à
l'Opposition et aux autres. C'est évident que le pouvoir, c'est de
contrôler l'information; il la contrôle et la distribue comme il
veut, au compte-gouttes. Il ne faut pas être impressionné par
cette façon de faire. On s'habitue et on peut travailler pareil. Nous
autres, on dit: On va chercher de l'argent dans les poches des contribuables.
Quand vous dites: Ça peut morceler les lots de stationnement,
effectivement, ça peut se faire. Le ministre ne s'est pas engagé,
il n'a pas dit quoi que ce soit. Ça, ça me semble une
volonté politique. S'il dit: On peut le faire, ne vous en faites pas, on
s'en charge, on va surveiller quand ça va passer, les articles. On va
lui dire: Wo! arrêtons là. C'est évident que ça,
c'est une formule, si on le fait. Mais il y a une chose qui semble
évidente depuis le début, c'est que la taxe sur les
stationnements semble inapplicable, à moins qu'on ne le fasse d'une
façon régionale. Ça, c'est loin d'être
assuré, à cause des problèmes d'autonomie municipale.
Seulement, si on le fait ou si on laisse pleine autonomie là-dessus,
c'est qu'on accentue les écarts entre les endroits, d'un endroit
à l'autre. Donc, encore là, par rapport à ça, je
pense que la partie est loin d'être gagnée. Effectivement, on aura
beau en discuter... C'est évident que les suggestions que vous faites
là auraient pu se faire ailleurs. Si le ministre avait voulu bonifier
son projet de loi et avait voulu discuter avec les commissions de transport, il
avait tous les moyens possibles, avant cette commission parlementaire, de le
faire. Si c'était sa marge de manoeuvre pour dire: Voyez-vous, notre
commission parlementaire est efficace, elle a été
intéressante, les gens sont venus nous apporter des suggestions. Mais,
ces suggestions-là, on aurait pu les avoir ailleurs, parce que, moi, je
suis convaincu que les commissions de transport se seraient fait un plaisir de
discuter et d'échan-
ger par rapport à ça.
Ce qui m'amène à vous poser la question parce qu'en dehors
des automobilistes, je vois bien que c'est les gens qui sont
complètement visés. Le Gub automobile, le CAA, va venir se
présenter ce soir, donc il donnera son point de vue, on va
l'écouter très attentivement.
Je voudrais vous ramener sur le transport scolaire avant de passer la
parole à un ou deux de mes collègues, tout dépendra. La
commission scolaire, que je sache, vous nous dites qu'elle reçoit une
subvention de 50 $ par mois par étudiant. La Commission de transport a
négocié des ententes à 24 $ par étudiant, dont 30 %
sont payés par l'étudiant. Si je comprends bien, la commission
scolaire fait à peu près 34 $ avec un transport. Ça, ce
n'est pas dénoncé et vous vous êtes plies à
ça. Le gouvernement, ça n'a pas l'air à le
déranger. Je pensais que lorsque le gouvernement donnait une subvention
qui était ciblée pour quelque chose, il fallait qu'elle soit
employée là. Moi, en tout cas, à moins qu'il n'y art des
changements terribles de faits, selon ma connaissance des dossiers quels qu'ils
soient, vis-à-vis du gouvernement, s'il donne une subvention, tu es
obligé de rendre des comptes pour la subvention qu'il te donne.
Ça doit être fait en fonction de l'objet pour lequel on l'a
donnée. Les commissions scolaires actuellement font environ 33 $, 34 $
clair par mois, et cette situation-là est au vu et au su du
gouvernement, puis personne ne la dénonce. De quelle façon les
commissions scolaires peuvent négocier ça et de quelle
façon le gouvernement peut se faire le complice d'une situation comme
ça? C'est une subvention à la commission scolaire ou au
transport? Moi, je ne comprends plus. (22 heures)
Je vous adresse ça là, parce que c'est vous autres qui
négociez. Moi, je ne suis pas...
Mme Leclerc: C'est une question.
M. Rivard (Michel): c'est une subvention au transport. c'est une
subvention au scolaire, définitivement, puisqu'on veut que la situation
change.
Mme Leclerc: Mais ce que ça pose comme question aussi
quand on pense à renégocier cette situation-là,
évidemment, ce qui est important, c'est de la renégocier avec le
gouvernement du Québec parce que si on pense la renégocier avec
les commissions scolaires, je pense que la réponse est claire: les
commissions scolaires n'ont aucun moyen actuellement pour payer ça. On
sait très bien ce qu'ils vont faire. Ils vont taxer davantage. Alors, je
pense c'est vraiment clair que c'est une responsabilité du gouvernement
québécois que de reconnaître sa responsabilité
là-dedans et de voir qui en fait les frais. C'est nous, les commissions
de transport. Ça, c'est majeur et c'est évident que c'est une
responsabilité très bien identifiée.
M. Dufour (Jonquière): Mais est-ce que c'est seulement la
commission... la CTCUQ qui subit ça, ces aléas-là?
Mme Leclerc: Ça semble se ressemblor dans les autres
commissions de transport. À Montréal, c'est aussi le cas. Ils en
ont parlé tout à l'heure.
M. Dufour (Jonquière): Oui, mais pas aussi clairement. Il
me semble que vous autres, ça devient quelque chose de bien, bien... En
tout cas, c'est plus clairement exprimé. Et ces 34 $ que la commission
scolaire garde, vous n'avez aucun moyen de le dénoncer ou de le
négocier quelque part? Parce que, au fond, c'est comme... Pourquoi
d'abord le gouvernement donnerait 50 $? Est-ce que c'est pour du transport ou
si c'est une subvention pour autre chose que du transport?
M. Blouin (Raynald): M. Dufour, dans le temps qu'on avait
accepté de transporter les étudiants à 24 $,
c'était dû au fait qu'on retirait une subvention du
ministère des Transports pour le manque à gagner, qui
était 40 % du manque à gagner, qui était la tarification
d'une personne adulte. Mais, avec le retrait du gouvernement provincial,
ça arrive à dire que maintenant on transporte les
étudiants à 24 $ par mois clair, pas d'ajout, contrairement
à lorsque les commis sions scolaires donnent ces transports-là
aux jaunes, ils paient aux Jaunes de 50 $ à 55 $ par étudiant par
mois. Mais ça, c'est provincial, c'est à l'intérieur de
toutes les commissions de transport, que cette situation-là se
retrouve.
Mme Leclerc: et évidemment, la commission scolaire peut
tout simplement baisser ses normes et décider de jouer avec ça
pour économiser davantage. ça a suscité sans doute un
achalandage pertinent dans les commissions de transport d'écoliers,
mais, par contre, on finit par en faire les frais de façon
complètement récurrente et permanente. c'est vraiment à
questionner aujourd'hui dans une situation aussi coriace. je pense qu'il faut
remettre ça en cause.
Mme Marois: M. le Président.
Le Président (M. Garon): Mme la députée.
Mme Marois: Merci. Je pense en fait que le fait que vous
proposiez un certain nombre de solutions semble atténuer un peu le
problème, mais moi, je le comprends comme étant aussi important
relativement que celui que vit Montréal ou que vivent d'autres
communautés à travers le Québec.
Je voudrais revenir sur une des propositions très précises
que vous faites à votre mémoire à la page 4. Le ministre
semblait assez sceptique
ou, du moins, ne pas vouloir recevoir cette proposition-là,
à savoir que si jamais le législateur devait
persévérer dans sa volonté d'adopter le projet de loi 145,
vous dites: La décision de taxer les stationnements et les immeubles non
résidentiels devra être prise au niveau régional. Ça
m'apparaît particulièrement intéressant parce que c'est une
notion de responsabilisation régionale et je pense que c'est vers
ça que l'on va depuis un bon moment.
Est-ce que vous en avez évalué la faisabilité?
Est-ce que ça a été discuté entre les
différentes municipalités concernées pour essayer de
convaincre le ministre? Peut-être que ça pourrait nous aider
à cet égard-là.
Mme Leclerc: Je soutiens, Mme Marois, qu'effectivement c'est une
question fondamentale, c'est une des solutions de base de nos propositions et
c'est le secret d'une recette qui peut-être va pouvoir fitter, pouvoir
s'appliquer. C'est évident que c'est une des premières
revendications qu'on fait, comme aménagement. Et M. Rivard,
président de la Communauté urbaine, va vous préciser en
quoi justement le travail est en train de nous confirmer nos doutes
là-dessus.
M. Rivard (Michel): Madame, effectivement, on en a discuté
longuement lors d'une dernière réunion du conseil
exécutif. Il y a consensus majoritaire pour que ce soit réparti
de façon régionale. Mais, en toute franchise, je dois vous dire
qu'il y a trois villes qui ont démontré leur désaccord.
Entre autres, Sainte-Foy, tout le monde admet que Sainte-Foy a une situation
financière très enviable, et je comprends qu'elle aura
peut-être des façons différentes de taxer ses citoyens.
Alors, c'est ce qui nous amène à le demander via la CTCUQ, et
demain moi, je serai ici à 10 heures et il fait partie de mon
mémoire de demander également que ce soit régional. Les
trois villes ont démontré leur désaccord. Celle qui
insistait le plus, bien sûr, c'est Sainte-Foy.
Mme Marois: Qui représente, si on considère...
M. Rivard (Michel): 22 % de la quote-part... Mme Marois:
D'accord.
M. Rivard (Michel): ...et qui représente 75 000 de
population sur un total de 480 000 000 $.
Mme Marois: Bon, d'accord. Toute proportion étant
gardée.
Mme Leclerc: Mais ce n'est pas la position de Québec, qui
par ailleurs ferait un effort particulier dans cette situation-là.
Ça suppose aussi, par exemple, si des villes ne sont pas d'accord avec
cette position-là, un désengage- ment à court terme. C'est
clair que certaines municipalités vont dire: Non, non, non. Je ne veux
pas faire plus pour le transport en commun parce qu'elles ne veulent pas
alourdir le fardeau de leurs entreprises, par exemple.
Alors, c'est clair que c'est un énorme risque qui est
provoqué par en haut. Et c'est vraiment fondamental cette
question-là, on y tient de façon beaucoup plus prioritaire que
sur d'autres plans.
Mme Marois: Merci. Merci, M. le Président.
Mme Leclerc: J'aimerais aussi revenir peut-être sur le
préambule - si vous permettez, M. le Président, est-ce que j'ai
droit - que M. Ryan faisait effectivement; nous, la première
réaction que vous avez eue, M. le ministre...
Le Président (M. Garon): D'ailleurs, elle est finie
l'intervention. Ils veulent que ce soit votre tour.
M. Ryan: Je veux dire qu'ils ont interrompu le porte-parole de la
Société de transport de la CUQ.
Mme Marois: C'est parce que la porte-parole de la Commission de
transport de Québec, vous répondait, souhaitait intervenir sur
une de vos interventions. J'imagine que vous êtes aussi
intéressé que moi à l'entendre.
M. Ryan: Mais je pensais qu'elle allait tirer de mon intervention
des leçons qui vous auraient intéressée.
Mme Marois: Pardon?
M. Ryan: Je vous le dirai après. Elle avait la parole
et... c'est dégueulasse.
Mme Leclerc: M. Ryan, ce que je voulais vous dire surtout sur
votre première réflexion, à partir de notre
mémoire, qu'on apprécie, c'est évidemment, comme vous le
dites, une première réaction qui dit qu'on ne peut pas accepter
cette proposition globale là...
Le Président (M. Garon): On ne commencera pas ça,
là. Alors, comme je ne veux pas avoir de bataille de temps, là,
l'Opposition disait qu'elle avait fini d'interroger. Alors, la parole est au
ministre.
Mme Leclerc: Je ne peux pas ...
Le Président (M. Garon): Je vais me retrouver avec une
bataille. Ils vont dire que ce n'est pas sur leur temps. Alors...
Mme Leclerc: Alors, peut-être que M. Ryan me donnera
l'occasion de lui répondre quelque
chose de particulier, qui n'est pas nécessairement...
M. Ryan: M. le Président, combien me reste t-il de
temps?
Le Président (M. Garon): II vous restait 3 minutes et 15
secondes.
M. Ryan: Là, je suis prêt à les partager avec
Mme Leclerc.
Mme Leclerc: Vous êtes bien bon, monsieur.
M. Ryan: Je n'ai pas entendu ça souvent aujourd'hui.
Des voix: Ha, ha, ha! Mme Leclerc: Moitié,
moitié. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Je vais vous donner tout mon temps.
Mme Leclerc: Est-ce que je commence ou vous commencez, M.
Ryan?
Le Président (M. Garon): II n'est jamais trop tard pour
commencer.
Mme Leclerc: Bon. Allons-y donc, si on veut y aller. Simplement
pour vous dire, M. Ryan, que dans la situation dans laquelle nous nous
retrouvons, nous avons actuellement un plan d'action extrêmement
énergique et, je crois, très pertinent. Nous ne pourrons pas nous
payer un métro, ni un système de technologie particulière
dans la région de Québec. Ce n'est pas dans nos moyens et notre
population ne le justifierait peut-être pas. Cependant, nous voulons
vraiment faire un redressement et améliorer notre service et aller
chercher une nouvelle clientèle. Notre plan d'action, je peux
déposer une synthèse sur ce plan d'action là, il est
particulièrement, je pense, consistant et cohérent.
Et le faire à ressources constantes, actuellement, ça
tient de l'exploit. Mais le faire avec une coupure de 20 000 000 $, ça
tient du miracle. C'est le seul message que je voulais passer. Et
qu'effectivement, dans notre région, c'est possible d'appliquer des
formules nouvelles et de faire en sorte que ça redevienne populaire, le
transport en commun, que ça soit un bon système et
qu'effectivement on ait une ville avec une qualité de vie
particulière et recherchée. Dieu sait si on le recherche!
Cependant, dans une situation comme celle qui semble s'imposer, eh bien,
ça devient vraiment très particulier, et les commentaires qu'on
vous fait sur les mesures potentiellement applicables pour améliorer
votre proposition nous permettront, dans le fond, de faire ce plan d'action
avec un minimum do cohérence et un minimum de cadre; mais autre ment, ce
plan d'action, ça va être toute une gymnastique.
M. Ryan: Je suis informé de ce plan d'action que vous avez
mis de l'avant et je vous encourage fortement. Mon collègue, le ministre
des Transports, en est très heureux aussi et soyez assurées que
nous examinons toutes vos suggestions en essayant de trouver des
éléments qui permettraient d'améliorer l'appui que nous
apportons à votre travail.
Je voudrais juste terminer sur un point. À propos de la
contribution du gouvernement fédéral, dans l'hypothèse
où des municipalités voudront instituer la surtaxe sur le
non-résidentiel que nous proposons, nous ne sommes pas allés voir
le fédéral à ce sujet-là. Ce n'est pas notre
manière. Les contacts ont eu lieu au plan technique. Mais quand le
Québec agit dans les domaines de sa compétence, il n'a pas
à aller s'assurer de la bénédiction du grand frère
fédéral avant d'agir. Il agit après s'être
assuré qu'au point de vue juridique sa position est solide. nous avons
fait toutes les vérifications et, après que nous eûmes
annoncé nos intontions, le président du conseil du trésor
fédéral, député de la région de
québec, ici, m. loiselle, a déclaré publiquement dans une
entrevue au droit que le gouvernement fédéral n'entendait pas se
soustraire à ses obligations normales au québec et que, dans la
mesure où il ne sera pas taxé plus que les autres, il assumerait
ses responsabilités en tenant compte des nouvelles orientations
contenues dans le plan: et moi, j'ai pris ça pour une parole
sérieuse et responsable. en temps et lieu, vous enverrez vos factures
respectives si vous choisissez cette voie-là et, nous autres, nous
serons là pour vous épauler.
Souvent, il y a de la collaboration avec le gouvernement
fédéral. Avec eux, on penserait que tout est mauvais, tout est
noir. Encore aujourd'hui, moi - je finis par ça - j'ai eu une rencontre
à midi. Oui, c'est ça qu'on entend toujours. Toujours! J'ai eu
une rencontre à midi avec mon homologue dans le secteur de la
sécurité publique. Il y a bien des points que nous
régions. On n'en parle plus parce que ça marche beaucoup mieux
maintenant, du côté des autochtones en particulier, mais nous
travaillons et, depuis que nous avons décidé de travailler
ensemble véritablement, ça va fichument mieux que quand on se
parle par la voie des journaux et des dénonciations, tellement
familières à l'Opposition qui ne vit que d'hérésie
dans ces questions-là.
Le Président (M. Garon): Alors, comme lo temps est
écoulé...
M. Ryan: Alors, madame, comptez que cette partie-là du
programme est une partie sérieuse.
Le Président (M. Garon): Alors, le temps du parti
ministériel étant écoulé, il reste trois minutes
à l'Opposition.
M. Dufour (Jonquière): Oui. Je voudrais tout d'abord
demander: Dans le plan de relance que vous avez proposé, dans
l'état actuel des choses et avec les 20 000 000 $ qui sont ou pas sur la
table est-ce que vous pensez que ça le met en danger, votre plan de
relance, ou si vous pouvez le faire sans ça?
Mme Leclerc: Bien moi, je suis prise avec un dilemme. Quand vous
me posez une question comme ça, je n'ai certainement pas envie de dire
à la population qu'on ne fera pas notre relance et qu'on ne fera pas
notre plan d'action tel qu'on nous dit de le faire actuellement, parce qu'on a
beaucoup d'appui. Il y a un très fort consensus qui se dégage. Il
y a même beaucoup d'enthousiasme. C'est un besoin qui est
manifesté et ce processus-là se fait dans beaucoup, je dirais, de
bonne volonté mutuelle. Alors, je n'ai pas envie de dire qu'on ne fera
pas notre plan d'action, c'est clair. C'est clair, par contre, que ces
contraintes-là sont très difficiles à contourner. Il
faudra imaginer les sources qui vont nous permettre de continuer à faire
ce qu'on faisait avec les maigres moyens qu'on avait déjà. C'est
ça, le problème; c'est ça, le dilemme. Je ne sais pas si
M. Blouin veut ajouter quelque chose.
M. Blouin: Comme dans notre mémoire on a demandé
des ajustements, justement au projet de loi, pour nous permettre, pour nous
donner un petit peu... on pourrait dire de la flexibilité dans
l'exercice de nos pouvoirs respectifs locaux, je pense qu'avec nos amendements,
malgré le lourd fardeau, on pourrait quand même un peu sauver
notre peau tout au moins pour réaliser le projet de relance.
M. Dufour (Jonquière): Peut-être juste le point des
subventions fédérales. Un gouvernement cassé... Même
si le ministre dit ça sur le journal, moi, je peux dire: C'est une
source anonyme. Je ne suis pas obligé de croire ça. J'aimerais
que le ministre nous fasse part, à un moment donné, d'une lettre,
d'un engagement officiel du gouvernement fédéral. Là, on
va croire ça bien correct et on va dire: C'est vraiment un engagement du
gouvernement. On ne sait pas comment il paiera, mais, en tout cas, s'il
s'engage par lettre, on aimerait qu'il les dépose un de ces jours.
Ça complète nos interventions. Je voudrais peut-être on
terminant vous demander de souhaiter les meilleurs voeux de prompt
rétablissement à M. Larose et dire qu'il nous a manqué,
mais qu'il a tout de même été remplacé
adéquatement. (22 h 15)
Mme Leclerc: Merci, monsieur.
Le Président (M. Garon): Je veux remercier ¦ les
intervenants et, comme la période s'achevait de toute façon, je
vous souhaite de passer une excellente fin de soirée. Et je demande
au...
À l'ordre! J'appelle les intervenants du Club automobile. Les
intervenants du Club automobile, M. MacDonald, je vais vous demander si vous
voulez présenter les gens qui vous accompagnent. Vous avez 45 minutes,
c'est-à-dire 15 minutes, normalement, pour exposer votre point de vue,
15 minutes pour le ministre pour poser des questions, 15 minutes pour le parti
de l'Opposition également. Si vous en prenez plus, je vais soustraire
également ce que vous allez prendre en plus des 15 minutes. Si vous en
prenez moins, je vais ajouter la partie que vous ne prendrez pas à
chacun des intervenants dans une proportion égale.
Club automobile du Québec
M. MacDonald (Jacques): Merci, M. le Président. Je me
présente: Jacques MacDonald, président du conseil
d'administration du CAA Québec. M'accompagnent M. Robert Darbelnet,
président-directeur général de l'organisme, Mme Paula
Landry, directrice de la recherche, et M. Claude Pinault, directeur
général adjoint aux communications.
Nous voulons d'abord vous remercier de nous permettre de faire valoir le
point de vue de notre organisme sur un sujet qui touche de façon
particulière ses membres ainsi que les automobilistes
québécois en général.
D'abord, quelques mots sur le CAA-Québec. Créé en
1904, le CAA-Québec était un organisme sans but lucratif,
chapeauté par un conseil d'administration composé
d'administrateurs bénévoles. La mission du Club est d'offrir
à ses membres automobilistes voyageurs et consommateurs des services de
haute qualité visant à assurer leur sécurité et
faciliter leur mobilité, en harmonie avec l'environnement. De cette
mission découlent des principes directeurs dont celui de faire valoir
auprès des pouvoirs publics les intérêts de nos membres et
du public en général. Conséquemment, et je voudrais
insister sur ce point, la démarche d'aujourd'hui n'est motivée
que par une seule et unique préoccupation, soit la protection des
intérêts de nos membres.
Nous voudrions attirer l'attention des membres de la commission sur
trois mots contenus dans notre mission et qui seront la clé de
voûte de toute notre présentation; il s'agit des mots
"mobilité", "harmonie" et "environnement".
Lorsque nous parlons de mobilité de nos membres, nous entendons,
au sens large, leur capacité de pouvoir se déplacer avec le moins
de contraintes possible, d'où les notions d'accessibilité et de
libre choix du mode de transport, de temps et de qualité des
infrastructures routières. Par "harmonie", nous entendons la recherche
d'un équilibre, d'une compatibilité dans la rencontre d'un
objectif commun. À cet égard,
nous croyons qu'il est possible de rechercher une harmonie entre les
différents modes de transport.
Finalement, cette recherche de mobilité en harmonie avec
l'environnement témoigne de la volonté des automobilistes de
participer à la solution des problèmes que connaissent
particulièrement nos grandes villes. En ce sens, on peut même
affirmer qu'il y a une communauté de pensée quant à
l'objectif et que les points de divergence se situent au niveau des moyens pour
y arriver.
Et pour vous parler de la nature exacte de nos divergences, je
cède la parole à M. Darbel-net.
M. Darbelnet (Robert): Merci, M. Mac-Donald. Notre
présence aujourd'hui témoigne de notre profonde divergence quant
aux moyens que le gouvernement s'obstine à employer pour financer le
transport en commun. Quant à l'objet visant à favoriser l'usage
du transport en commun là où c'est pratiquement possible dans le
respect du libre choix et des besoins distincts de la population, nous y sommes
favorables, mais pas à n'importe quel prix. Certainement pas en
utilisant une approche dissuasive qui ne cherche qu'à pénaliser
l'automobiliste.
On dit souvent que lorsqu'on se regarde, on se désole, et que
lorsqu'on se compare, on se console. Eh bien, ce vieil adage connaît une
application québécoise bien particulière lorsqu'on
considère les taxes de toutes natures et de toutes provenances qui
s'abattent sur les automobilistes. Au Québec, lorsque les automobilistes
se comparent, ils sont encore plus désolés que lorsqu'ils se
regardent. Si le Québec cherche à se distinguer, c'est bien, mais
dans le cas des taxes à l'automobiliste, il a fait carrément
fausse route et, pire encore, il s'aventure tête baissée dans un
cul-de-sac.
Ainsi, un simple coup d'oeil sur ce que paient les automobilistes des
autres provinces du Canada nous permet de constater que l'automobiliste
québécois est grand perdant en remportant la première
place au chapitre des coûts d'immatriculation. Il paie 126 % de plus que
la moyenne canadienne et 445 % de plus que l'automobiliste manitobain, par
exemple. Si l'on ajoute cette dernière augmentation de 30 $ des droits
d'immatriculation à toutes les autres augmentations de droits et de
taxes présentes et à venir, on a la nette impression qu'un
segment de la population, les automobilistes, se fait littéralement
lyncher par les gouvernements.
En effet, au seul chapitre des droits d'immatriculation, c'est une
hausse de 118 % par rapport à ce qu'on payait il n'y a pas même un
an. Ce chiffre doit de plus grimper à 145 % d'ici avril 1994.
Maintenant, au chapitre des taxes sur l'essence, le dernier budget du ministre
des Finances du Québec porte encore un coup de massue aux
automobilistes: 34 % d'augmentation entre mai 1991 et janvier 1992.
Paradoxalement,
M. Levesque, lors de son discours sur le budget du 2 mai dernier, se
disait préoccupé par la compétitivité fiscale des
Québécois en regard dos Canadiens. Si la notion de
compétitivité fiscale et même d'équité
fiscale est vraiment ce que cherche le gouvernement, il lui faudra conserver
à l'esprit certains principes fondamentaux qui devraient éclairer
son jugement. Ces mêmes principes devraient aussi intéresser ceux
qui ne cherchent ni plus ni moins que la disparition de l'automobile en milieu
urbain. Ces principes peuvent être groupés en cinq
énoncés.
Premièrement, l'automobile est un symptôme des
problèmes que vivent nos grandes villes et non la cause de ceux-ci.
L'exode urbain (.-l suburbain a été engendré par l'absence
Deuxièmement, derrière le volant de ces automobiles se
trouvent des citoyens, travailleurs et consommateurs, qui sont conscients des
problèmes que vivent nos sociétés modernes et qui exercent
des choix quant aux modes de transport qu'ils utilisent en fonction de leurs
besoins.
Troisièmement, la promotion d'un mode do transport par rapport
à un autre doit découler d'une stratégie de marketing
faisant valoir les attributs et les bénéfices reliés
à l'utilisation d'un tel mode de transport par rapport à un
autre, comme pour tout bien de consommation. Ainsi, le consommateur doit
pouvoir évaluer le rapport qualité-prix et choisir librement le
mode qui convient le mieux à ses besoins. S'il y a un problème au
niveau de la demande, c'est l'offre qu'il faut modifier et non le
consommateur.
Quatrièmement, les Québécois n'ont pas tous les
mêmes besoins, pas plus d'ailleurs qu'ils ne chaussent ou portent la
même taille. Aussi, faut-il tenir compte de la réalité des
travailleurs d'aujourd'hui au niveau des besoins de transport. En ce sens, les
horaires de travail ne sont pas tous les mêmes. Selon Statistique Canada,
dans 50 % des ménages québécois, les deux conjoints
travaillent pour avoir accès, entre autres, a la
propriété. Ceux-ci doivent composer avec des contraintes dont
l'importance est souvent banali sée, sinon oubliée, par les
décideurs publics.
Cinquièmement, le fait de posséder aujour d'hui un
véhicule automobile ou deux n'est pas indicateur de richesse et encore
moins l'apanage d'une élite de la société.
Voici, regroupés en quatre constats, comment ces principes
fondamentaux interviennent dans la réalité quotidienne des
citoyens dans
leur rôle d'automobiliste.
Premier constat: un nombre important de Québécois ont
besoin de leur véhicule. Il est un fait incontestable, le
phénomène de l'étalement urbain a engendré un plus
grand usage de l'automobile comme mode de transport, le plus pratique, rrpide,
disponible et flexible pour se rendre au travail. Les politiques d'habitation
ainsi que d'urbanisme n'ont pu répondre adéquatement aux besoins
des citoyens et ceux-ci se sont installés dans les zones urbaines
donnant ainsi naissance à un autre phénomène, le
"navet-tisme". Dans tout cela, les structures de transport en commun n'ont pas
su s'adapter et suivre les citoyens. La racine du mal réside dans le
fait qu'au Québec la question du transport en commun intervient
après qu'on a conçu les plans d'urbanisme et non, comme cela
devrait être, être intégrée a priori dans la
planification urbaine. Aujourd'hui on se retrouve avec des problèmes de
financement du transport en commun, parce que la clientèle n'est pas
suffisante pour lui permettre de vivre. Au lieu de régler les
problèmes de fond (rationalisation, productivité,
réduction des coûts, harmonisation des politiques d'habitation,
etc.), on n'a rien trouvé de mieux que de fausser les règles du
jeu de l'offre et de la demande et on s'est acheté des clients en
faisant porter aux récalcitrants la camisole de force en fibre de
taxes.
Cette vente à pression ne convainc pas l'acheteur ainsi contraint
et les effets ne peuvent être qu'à court terme parce qu'à
courte vue. Ainsi, certains croient que pour accroître le nombre
d'usagers du transport en commun, il faut rendre prohibitif ce qu'il en
coûte pour circuler en automobile. Eh bien, rassurez-vous, l'écart
des coûts qui existe entre l'automobile et le transport en commun a
atteint des proportions incroyables, et nous considérons qu'il
relève du mépris et de l'inconscience de vouloir taxer davantage
l'automobiliste.
Aujourd'hui il en coûte 38 $ par mois à un citoyen
montréalais qui opte pour une carte mensuelle de la
Société de transport. En optant pour l'automobile, ses frais vont
s'élever à plus de 315 $ pour la même période. Cet
écart est plus que substantiel puisque l'automobiliste paie en
réalité huit fois plus qu'un usager du transport en commun.
Alors, direz-vous, pourquoi payer si cher, alors que l'autobus ou le
métro sont si abordables? Ce n'est pas que les consommateurs
automobilistes ne savent pas compter, ou encore n'ont pas le souci de
l'économie; c'est tout simplement parce qu'en tant que consommateurs
avertis ils jugent que l'on ne leur offre pas une alternative qui
réponde à leurs besoins variés et distincts. En somme, ils
n'ont tout simplement pas le choix de faire usage de leur véhicule.
Avec cette tendance que l'on a d'apporter des solutions faciles à
des problèmes complexes, et où les mesures employées
présupposent de façon erronée qu'une seule grandeur fera
pour tous, on oublie, dans le cas des automobilistes, que ceux-ci se regroupent
en quatre catégories distinctes.
Le premier type d'automobilistes est constitué de ceux qui
utilisent leur véhicule pour se rendre au travail et laissent ainsi
dormir leur véhicule dans un stationnement. Ce groupe constitue,
à notre point de vue, une clientèle cible que l'on peut
intéresser à un mode de transport alternatif (trains de banlieue,
autobus, métro, covoiturage, stationnement incitatif, etc.).
Le deuxième type d'automobilistes est constitué de ceux
qui ont besoin de faire usage de leur véhicule dans le cadre de leur
travail. On n'a pas, dans ces circonstances, à pénaliser ce
groupe qui travaille avec son automobile. (22 h 30)
Le troisième type est constitué des touristes qui visitent
le Québec en automobile et il faut donc leur rendre attrayant et
abordable l'accès à nos produits touristiques du type "Les
grandes villes à découvrir" dont le ministère du Tourisme
fait la promotion, d'ailleurs, avec raison.
Finalement, un quatrième type d'automobilistes, qui concerne de
façon plus aiguë la ville de Montréal, est constitué
de ceux qui ne font que transiter par Montréal pour se rendre ailleurs.
C'est le trafic transcanadien. Si on avait, à l'instar des grandes
villes américaines, fait construire une route de ceinture dans le cas
des grands centres urbains, on n'aurait pas aggravé le
problème.
À notre point de vue, le projet de loi 145 témoigne de
cette même continuité dans la recherche de mesures qui ne tiennent
pas compte de la réalité des automobilistes et qui
privilégient une approche punitive plutôt qu'incitative à
l'égard des autres modes de transport alternatifs. Ainsi, l'augmentation
de 30 $ des droits d'immatriculation pour les gens résidant dans des
zones dites desservies par une société de transport en commun
constitue une mesure qui a fait preuve d'une absence de discernement. Ce n'est
pas parce qu'un citoyen réside dans une zone qui fait partie d'un
territoire administrativement desservi par une société de
transport en commun qu'il y a, dans les faits, une ligne d'autobus qui y passe.
En somme, ce projet de loi ne tient même pas compte de
l'accessibilité du service.
Deuxième constat: l'automobile n'est pas un signe de richesse. Ce
projet de loi, pas plus que toutes les autres taxes qui fusent de partout, ne
tient compte de la capacité de payer des gens. D'ailleurs, cette
augmentation de 30 $ des droits d'immatriculation touche d'abord la possession
d'un véhicule et, en ce sens, cette augmentation est régressive,
car elle ne tient pas compte de la capacité de payer de celui qui
possède une automobile. Rappelons que, selon Statistique Canada, le
tiers des ménages québécois dont le revenu total ne
dépasse pas 10 000 $ possèdent une automobile. Parmi les familles
dont le revenu
se situe entre 10 000 $ et 15 000 $, près de la moitié des
familles possèdent une automobile. Et enfin, des familles gagnant entre
15 000 $ et 20 000 $ par année, il y en a les deux tiers qui
possèdent une automobile. Au surplus, cette hausse des droits
d'immatriculation nous apparaît discriminatoire et injuste à
l'égard de ceux qui n'ont pas d'autre choix que d'utiliser leur
automobile. Ainsi, contrairement à toutes les taxes à la
consommation pour lesquelles le consommateur a le choix de consommer ou pas, la
hausse des droits d'immatriculation est considérée comme une taxe
s'appliquant à un produit pour lequel la demande est non
élastique. Il vous faudrait, à toutes fins pratiques, vendre
votre voiture ou déménager pour éviter cette taxe.
Troisième constat: le transport en commun est un bien collectif.
Nous croyons, comme l'ont fait valoir certains maires pour justifier le retrait
du secteur privé dans le domaine du transport en commun, que ce dernier
est un bien collectif. Corollaire logique, c'est donc collectivement que nous
devons supporter le transport en commun. La collectivité ne se limite
pas à l'automobiliste. Curieusement, les problèmes que vivent les
grandes sociétés de transport ne sont pas uniquement
reliés à des problèmes de faible achalandage. À
notre avis, les efforts de rationalisation, de réduction des
coûts, d'accroissement de la productivité ainsi que de
qualité sont préalables à tout effort de soutien financier
additionnel. Pour s'en convaincre, rappelons-nous que certains maires ont dit,
lorsque le moment est venu de se faire refiler la facture du transport en
commun: Non merci, c'est trop cher. On en a même entendu dire: Ça
ne vaut pas ce prix-là.
Quatrième constat: les automobilistes payent déjà
trop de taxes. Savez-vous tout ce que payent les automobilistes
québécois? Voici une brève énumération
éloquente des différentes sources d'où proviennent les
sommes d'argent que versent les automobilistes québécois au
gouvernement, soit directement, soit indirectement: taxe sur les carburants: 1
245 000 000 $; droits d'immatriculation et permis: 549 000 000 $; taxe de vente
pour véhicules automobiles neufs et usagés, garages,
pièces et accessoires: 789 000 000 $; taxe sur l'assurance automobile
gouvernementale à 8 % et privée à 5 %: 157 000 000 $;
prélèvement - on pourrait dire "siphonnage" - des surplus de la
Société de l'assurance automobile du Québec, dont nos avis
juridiques disent d'ailleurs que ce sont des prélèvements
illégaux: 264 000 000 $; et la réforme dont il est question ici
qui aura, pour les trois premiers mois de 1992, l'effet d'aller chercher un
autre 13 000 000 $ chez les automobilistes, pour un total de 3 017 000 000
$.
À ceux qui croient que les automobilistes devraient contribuer
davantage au financement du transport en commun, nous répondons et nous
continuerons de répondre, tant et aussi long- temps que la
démonstration n'aura pas été faite que les sommes
déjà versées par les automobilistes sont insuffisantes:
Non. En ce moment, les Québécois paient plus de 3 000 000 000 $
en taxes, annuellement, pour utiliser leur automobile. Pire encore, de cette
somme faramineuse, à peine 35 % revient aux automobilistes.
Quand on constate l'état lamentable de nos routes, le moins qu'on
puisse dire, c'est qu'on est loin d'en avoir pour notre argent. Si certains
croient encore que les automobilistes ne contribuent pas suffisamment sur le
plan financier, les chiffres suivants risquent de vous renverser. Pour les fins
de cet exercice, nous avons comparé, d'une part, les taxes payées
par les automobilistes et, d'autre part, les dépenses gouvernementales,
incluant le budget total des dépenses d'opération de plusieurs
ministères, tel que prévu au budget de 1991-1992. Il s'agit de
ministères auxquels l'automobile est associée, à tort ou
à raison, de près ou de loin.
Ainsi, les 3 000 000 000 $ en taxes versés par les automobilistes
suffiraient pour payer toutes les dépenses du gouvernement du
Québec pour 1991-1992 reliées à la construction du
réseau routier et à l'entretien des infrastructures de transport.
Tout le coût du fonctionnement des services de transport en commun, le
service de la dette du métro et de divers autres équipe ments, le
budget total du ministère de l'Environnement, le budget total du
ministère du Tourisme, le budget total du ministère de
l'Énergie et des Ressources et toutes les autres dépenses du
ministère des Transports, pour un total de 2 974 000 000 $. à
l'instar d'une populaire chaîne de restaurants, nous ajouterons qu'il
reste encore de la monnaie: 43 000 000 $. bref, l'automobiliste paie
déjà non seulement pour le transport en commun, mais pour bien
plus encore. en ce sens, la création dans le cadre du présent
projet de loi d'un fonds de contribution des automobilistes au transport en
commun est tout à fait outrageante et grotesque. pourtant, en
dépit des sommes versées, l'état du réseau routier
demeure et continue d'entraîner des dépenses
énergétiques coûteuses et inutiles.
En conclusion, nous croyons que le projet de loi apparaît tout
à fait discriminatoire pour les automobilistes. Nous considérons
également que ce n'est pas en fractionnant les responsabilités et
en changeant de percepteur que sera solutionné le problème du
transport en commun. Depuis trop longtemps, les automobilistes arrondissent les
fins de mois des gouvernements. Pendant ce temps, les élus s'accusent
mutuellement de pelleter des dépenses dans la cour de l'autre. À
leur tour, cependant, ils en soufflent de façon éhontée
chez les automobilistes. Aujourd'hui, nous vous disons: De grâce, n'en
jetez plus! La cour est pleine. En conséquence, nous vous demandons de
retirer du projet de loi les dispositions créant ce fonds des
contributions
des automobilistes au transport en commun. Merci.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, les porte-parole du Club
automobile du Québec m'ont désappointé, à titre de
membre du Club. J'ai l'honneur de faire partie de votre auguste
société depuis de nombreuses années et j'en reçois
d'excellents services. Je pensais qu'on était dans une
société où les membres étaient consultés,
mais je comprends qu'on ne vous a pas donné beaucoup de temps.
C'est des blagues que je fais. C'est vrai que je suis assuré chez
vous et vous donnez un très bon service. Je vous en remercie.
Il y a une chose que vous n'avez peut-être pas notée dans
votre mémoire; c'est juste une question de détail avant de
commencer. Vous n'avez pas mentionné la réduction de 16 $ qui a
été annoncée dans le prix d'immatriculation, du certificat
d'immatriculation, par le ministère des Finances dans son dernier
budget. Est-ce que ça vous a échappé?
M. Darbelnet: Ça ne nous a pas échappé, mais
nous croyons que l'ensemble des autres augmentations qui ont été
annoncées par la même occasion ont eu pour effet d'éliminer
tout le bénéfice qui était contenu dans cette modeste
disposition de réduction.
M. Ryan: Juste une minute. Il y a peut-être eu d'autres
ajouts, je ne le sais pas. Je pense qu'on ne se comprend pas bien. Mais moi,
j'avais compris, en écoutant le ministre des Finances, qu'il a
réduit les droits d'immatriculation de 16 $ et si, ensuite, une
décision est prise à travers ce projet de loi 145 de les
augmenter de 30 $, ça va faire une augmentation nette de 16 $, à
moins que je ne sache plus compter-
Une voix: De 14 $.
M. Ryan: De 14 $. Je ne veux pas vous induire en erreur, mais
c'est dans le dernier discours sur le budget.
M. Darbelnet: On parle bien des droits d'immatriculation?
M. Ryan: Oui.
M. Darbelnet: Alors, je serais porté à vous
référer, à moins que notre document soit incomplet, ce qui
m'étonnerait du moins à cet égard... Vous y trouverez un
tableau faisant état de l'évolution des droits d'immatriculation
au Québec, pour différents types de véhicules. Ça
se trouve à la page 5 du mémoire que nous avons
présenté. Pour les véhicules de 1350 kilogrammes et moins
qui, soit dit en passant, sont 72 % des véhicules en circulation, le
coût de l'immatriculation est passé de 55 $ au mois d'août
1990 à 90 $ au mois de septembre 1990. Avec la réforme dont il
est question ici aujourd'hui, il s'ajoutera un autre montant de 30 $ qui
portera le tout à 120 $, ce qui représente une augmentation de
118 % par rapport à ce que c'était en août 1990.
M. Ryan: Selon moi, il manque une colonne. Il aurait fallu
ajouter: mai 1991 ou fin d'avril 1991, 74 $, moins 16 $ et, après
ça, plus 30 $. Il manque une colonne, tout simplement. C'est juste une
question de précision. Je ne voudrais pas que le ministre des Finances
pense que le ministre des Affaires municipales ne s'était pas
aperçu de cette réduction qu'il avait annoncée avec
beaucoup d'autres augmentations.
M. Darbelnet: J'ai l'impression que les 16 $ de rabais auxquels
vous faites allusion sont, en fait, une diminution de la portion "prime
d'assurances". Notre tableau ne traite que des droits d'immatriculation.
M. Ryan: Regardez, je vais vous lire l'extrait du discours sur le
budget, pour que les choses soient claires entre nous: "À compter du 1er
août prochain, les contributions d'assurance automobile payables lors de
l'émission et du renouvellement de l'immatriculation d'un
véhicule de promenade seront réduites de 99 $ à 85 $."
M. Darbelnet: C'est ça. Alors, c'est bien la portion
"assurances" et non la partie "immatriculation".
M. Ryan: Très bien. Ça va.
M. Darbelnet: Alors, l'ensemble de cet exercice nous a fait
sauver les 16 $ auxquels vous faites allusion. Par la même occasion, on a
rajouté à peu près 0,05 $ sur la taxe sur l'essence. Vous
nous parlez aujourd'hui de 30 $ de plus. Je pense que, tout compte fait, on n'a
pas été très gagnants dans cet exercice.
M. Ryan: Connaissant les besoins du gouvernement, je sais qu'il
fallait faire des choses comme celle-là. C'était seulement un
souci de précision introductoire. Je comprends le point de vue que votre
organisme exprime. Moi-même, je ne suis pas de ceux qui veulent accabler
l'automobiliste pour toutes sortes de motifs, souvent plus artificiels et
moralisateurs que réels et fondés sur une saine conception de
toutes les dimensions de la fonction de l'automobile dans notre
société. Nous avons choisi ce modèle de
société, on aurait pu en choisir un autre. Mais une fois qu'on a
accepté les avantages, il faut accepter les inconvénients. Il
faut avoir les deux. Nous nous rendons compte que c'est la même personne
qui paie, qu'elle soit père de famille,
propriétaire d'un véhicule, travailleur dont le revenu est
en partie retenu à la source par le gouvernement, consommateur qui va
payer la taxe de vente. C'est la même personne, au bout de la ligne.
On est tous des personnes, ici, qui contribuons au Trésor public
de différentes manières. Il appartient au gouvernement et
à l'Assemblée nationale de déterminer les modes suivant
lesquels la contribution du citoyen sera fournie au Trésor public. La
société détermine ces besoins. Elle le fait sous une forme
souvent insidieuse, sous la forme de représentations de toutes sortes
qui sont faites au gouvernement, de revendications, de demandes incessantes et
innombrables. Les gouvernements ont souvent la mauvaise fortune de céder
pour de mauvais motifs et d'accumuler, par conséquent, les obligations.
Ça marche pendant un temps. Aussi longtemps que le crédit est
bon, on pense que tout va bien. Et qu'arrivent des temps économiques
plus difficiles et un gravement du crédit qui devient trop lourd,
là, on s'aperçoit que deux et deux, ça fait toujours
quatre, sous toutes les latitudes, à toutes les époques. C'est
ça qu'est la grande leçon que le gouvernement est obligé
de tirer de l'expérience des 20 dernières années.
On est obligé de se rendre compte qu'il faut recommencer à
apprendre les additions simples. On était rendus avec des ordinateurs et
on ne savait même plus que deux et deux faisaient quatre. On est en train
de retourner à la base. Le gouvernement doit faire des choix pour
rétrécir cette marge déficitaire qui était en train
de nous étrangler tous. Il fait des choix qui sont discutables. Quand on
a décidé de collaborer avec le gouvernement fédéral
pour la réforme de la taxe de vente, plus qu'une taxe nouvelle, c'est
une réforme de taxes existantes, finalement, qui entraîne, on le
verra un peu plus tard, un supplément de revenus pour les gouvernements.
Je n'en connais pas l'ampleur moi-même parce qu'il y a toutes sortes de
chiffres qui circulent là-dessus, mais il est évident qu'on est
sujets à critique. (22 h 45)
C'est bon qu'on ait une critique comme celle que vous nous apportez
aujourd'hui. Le rationnel derrière ça est le suivant: c'est qu'on
voyait qu'il y aurait obligation ressentie par le gouvernement, à tort
ou à travers, de se dégager de ses obligations concernant le
financement du fonctionnement du transport en commun. Là, on a eu toutes
sortes de représentations. On a discuté. On est venu à la
conclusion que l'automobiliste, qui vient dans les centres urbains pour son
gagne-pain en particulier, pour d'autres activités aussi,
bénéficie du transport en commun parce qu'il peut circuler plus
librement, étant donné que le transport en commun est là.
La preuve de ceci nous est fournie par les temps où il y a arrêt
de travail dans le transport en commun. Nous savons, à Montréal
par exemple, que lorsqu'il y a arrêt de travail, toute la vie
économique est paralysée. Moi, j'ai vécu un très
grand nombre de grèves du transport en commun à Montréal,
à titre de journaliste, ensuite d'homme politique. Nous savons combien
tout est paralysé pendant ces temps-là. Donc, on a la preuve que
l'automobiliste en bénéficie.
On s'est dit: Vu ce qui arrive, on va lui demander une contribution
modeste. Vous dites qu'il fournit, en moyenne, par année au
gouvernement, sous une forme ou l'autre, 3000 $. Alors, ce qui est
demandé ici, de 3000 $, c'est 1 %, un ajout de 1 % à ce qu'il
fournit déjà. Je ne pense pas qu'il y ait matière à
croisade, ni à une intervention à caractère doctrinal ou
dogmatique.
On peut être en désaccord. Nous autres, nous avons
pensé que c'était bon. C'est un moyen aussi pour inviter les gens
qui vivent dans la périphérie des centres métropolitains
à contribuer. Sous le régime actuel, les gens qui vivent - je
vais vous donner un exemple de la région de Montréal, que je
connais mieux - à Saint-Eustache, à Sainte-Thérèse,
à Boisbriand, à Mascouche, à Terrebonne, à
Repentlgny, à Le Gardeur, ils s'en tirent très bien, eux autres.
Ils s'en tirent très bien. Ils encourent des dépenses pour venir
à Montréal, mais les statistiques du recensement nous indiquent
que plus de la moitié de ces personnes, propriétaires d'une
automobile, viennent chercher leur gagne-pain dans le centre-ville ou dans le
centre de la région urbaine. On se dit: Qu'ils paient une modeste
contribution, équivalant à 1 %, au gouvernement pour cette
fin-là. Ce n'est pas une injustice et nous avons maintenu la
contribution à un niveau bien inférieur à ce que nous
suggéraient un grand nombre d'élus municipaux. Nous l'avons fait
en étant bien conscients de ce que vous dites. Soyez assuré qu'il
n'est pas du tout dans mes pensées de faire au gouvernement des
propositions insensées à ce sujet.
Quand on parle, en particulier, de ceux qui restent en dehors des
centres métropolitains, ils encourent des dépenses aussi. Ces
gens-là, on ne leur fournit rien pour le transport. Ils sont
obligés de payer leur transport automobile. Ils paient leur essence et
tout. Il faut penser à tout ça. Quand on traite du
phénomène de l'étalement urbain, s'ils s'en vont du centre
de la métropole pour vivre à Sainte-Thérèse,
à Saint-Janvier ou à Saint-Augustin, ce n'est pas uniquement par
caprice, c'est parce qu'ils veulent avoir des conditions meilleures pour
élever une famille et tout. Il faut être compréhensif
à cet endroit-là. Je pense qu'il faut cesser d'ôtro
purement moralisateur.
Dans ce sons-là, j'accueille avec beaucoup de respect les
présentations que vous nous faites Je ne pense pas que nous puissions
changer l'orientation pour ce moment-ci, à moins... Si vous avez
d'autres suggestions à nous faire pour le financement du transport en
commun, je suis intéressé à les écouter.
M. Darbelnet: Je pense que notre message principal, c'est que
l'automobiliste paie déjà intégralement la facture du
transport en commun par le biais de l'ensemble des taxes que l'automobiliste
paie, qui couvrent, comme on vous l'a indiqué, non seulement tout ce
qu'il en coûte pour le transport en commun, mais toute une série
d'autres dépenses aussi. En ce sens-là, suggérer à
l'automobiliste qu'il doit contribuer 30 $ à ce qu'il en coûte
pour le transport en commun, c'est un petit peu difficile à accepter
puisqu'on paie déjà intégralement la facture, à
toutes fins pratiques.
M. Ryan: Mais là, ce n'est pas notre avis. Nous
considérons que l'automobiliste contribue non seulement pour les fins
fonctionnelles dont vous avez parlé, mais pour les besoins
généraux du gouvernement aussi. Nous autres, nous estimons que la
contribution n'est pas excessive, étant donné l'ensemble des
obligations auxquelles doit faire face le gouvernement, mais ça, c'est
un débat que je ne veux pas prolonger indûment. Je respecte votre
point de vue sans le partager entièrement.
M. MacDonald: Nous sommes dans la même position, M. le
ministre. Nous respectons ce que vous dites aussi, sans partager
nécessairement votre opinion. Il n'en demeure pas moins que le point sur
lequel nous voulons surtout insister, c'est que ce montant de 30 $ est venu
à l'intérieur de votre réforme, mais qu'il est venu
s'ajouter à beaucoup d'autres taxes dans les dernières
années, en particulier à d'autres augmentations depuis un an pour
les automobilistes, à tous les niveaux, comme on l'a remarqué.
C'est un autre montant de 30 $ pour le 1er janvier prochain.
Il y a déjà des précédents. Est-ce que
ça en sera un autre? C'est ça, le problème. Les recherches
ont été faites à même les chiffres du gouvernement,
soit dit en passant; je ne pense pas que nous exagérions en vous disant
qu'effectivement les automobilistes, d'une façon ou d'une autre, paient
3 000 000 000 $ par année, parce qu'ils sont automobilistes. Ce sont
aussi des gens qui, comme vous l'avez si bien dit, sont des citoyens comme nous
autres, qui, comme tout le monde, paient aussi leurs impôts, qui paient
déjà beaucoup d'autres taxes, municipales ou autres, mais qui
paient aussi, parce qu'ils sont automobilistes, tous ces montants additionnels.
Quand on en voit venir d'autres et qu'on les voit venir de la façon drue
dont elles viennent, vous avez la position que nous avons là.
Le Président (M. Garon): Alors, le temps pour la partie
ministérielle étant écoulé, j'invite le
député de Jonquière à prendre la parole.
M. Dufour (Jonquière): Merci, M. le Président. Au
début de l'intervention, le ministre des
Affaires municipales a parlé de consultation; j'ai passé
proche de le prendre au sérieux, mais comme il a ri et qu'il ne rit pas
tellement souvent, j'ai bien compris qu'il voulait badiner. Je pense que la
consultation, si elle n'a pas existe de votre côté, elle n'est pas
plus forte de ce côté que de l'autre bord.
Du moins pour ce projet de loi, à ce que je sache, depuis deux
jours, ce qu'on entend, c'est qu'il y a des gens... On a réussi un tour
de force que jamais personne n'a réalisé au Québec; pour
les Québécois, être unanime contre quelque chose, c'est
assez rare. D'habitude on a des... Et tout le monde est contre pour des raisons
différentes. C'est un tour de force. Il y a juste le ministre des
Affaires municipales qui a réussi ça à ce jour. Je pense
qu'il faut lui donner ça. Au moins, c'est vrai qu'il aime ça
alimenter la polémique et qu'il vit là-dedans.
Il va engraisser ces temps-ci parce qu'il en a à manger et
à boire, hein? Il y en a pour tout le temps qu'on a... En fait, les
problèmes que vous soulevez par rapport au transport en commun,
effectivement, c'est par rapport aux taxes des automobilistes, les taxes en
tout cas qui sont mises pour ceux qui utilisent le transport routier, parce
qu'il n'y a pas juste les automobilistes, il y a aussi les camionneurs. Et
puis, bon... Mettons que tous les utilisateurs des routes, en fait, paient des
taxes qui, effectivement, veulent dire 3 000 000 000 $ par année.
Et le problème qu'on a, c'est que le gouvernement s'assure de
ça pour des choses autres que celles qui concernent ceux qui les paient.
Et on est habitué. On a attendu six ans; on avait prélevé
de la Régie de l'assurance automobile tant de millions, pour les routes.
Et on avait augmenté, c'était pour les routes. Mais savez-vous
qu'on manque de routes, qu'on ne voit l'argent nulle part sur les routes.
Effectivement, ça devient agaçant, ça devient aussi
agressant de savoir qu'il y a autant de taxes qui sont prélevées.
La démonstration est évidente. Mon collègue qui est
président de la commission a fait la démonstration à tour
de bras, tant et plus qu'il y a plus d'argent qui est prélevé des
utilisateurs des routes que l'argent qu'on y investit.
En principe, oui, on devrait se servir des taxes pour les routes. Oui,
on pourrait s'en servir pour l'environnement parce que ça pollue.
Ça pourrait aussi être une partie du transport en commun. Mais
l'espace n'existe pratiquement plus; à force de presser le citron, il
n'y a plus de jus. Et le gens qui se servent d'automobiles sont
obligés... Il y en a qui, effectivement, en ont besoin. Je me sens
attaqué moi aussi un peu. Je prends l'automobile de chez moi pour venir
à Québec; le transport en commun, ça n'a pas de bon sens
dans mon cas. Toute la semaine, je laisse mon automobile près de mon
condo. Je ne pollue pas, en tout cas, moins. Mais je n'ai pas besoin de mon
automobile. Je vais peut-être la louer si ça continue parce que je
commence à me
sentir coupable pas mal fort par rapport à ce qui se dit ici,
là.
Mais je ne vous blâme pas. Effectivement, c'est vrai. J'aurais
été en droit de penser dans les cinq dernières
années que les montants d'argent qui nous étaient
prélevés comme automobilistes devaient servir à quelque
chose. Mais est-ce que ça va servir vraiment pour le transport en commun
quand on coupe les subventions comme on fait là? Je ne suis même
pas sûr parce qu'il n'y en a pas suffisamment. Ce qu'on enlève
d'une main, on ne le donne pas de l'autre. Donc, il y a un problème
quelque part. J'ai de la misère à faire le lien. Le ministre nous
dit: En temps difficiles, il faut se serrer la ceinture. Et en temps un peu
plus faciles, parce qu'il me semble que cette année, on a la crise
économique et c'a pris du temps avant qu'il l'avoue... On a vécu
ces six dernières années, il me semble que ça n'allait pas
mal. Pourtant, j'entendais le même message du gouvernement.
C'est difficile, ça va mal parce qu'il y avait 10 % de
chômage. Il ne prenait pas de mesures pour réparer le
chômage. Et nous autres, on disait: II va arriver une crise quelque part
là. Non, non, ça va bien. Parce que changer de gouvernement,
ça veut dire que tout va bien, que c'est la baguette magique, que
ça ne se produit pas. Dans les faits, ça ne s'est pas produit
puis en réalité, c'est vrai, il y a une crise économique
aujourd'hui mais il n'y en avait pas voilà deux ans, il n'y en avait pas
voilà trois ans, il n'y en avait pas voilà quatre ans. Et
pourtant, on se faisait siphonner pareil. Donc, c'était un moyen d'aller
chercher des fonds supplémentaires parce que, ne vous en faites plus, la
responsabilité des élus municipaux n'existe plus depuis le
conseil que le Petit Robert nous donne comme définition de
quelqu'un qui est responsable c'est celui qui décide. Dans la question
de cette réforme, c'est le gouvernement qui décide; le
gouvernement demeure responsable de la réforme. C'est lui qui
décide des enjeux, c'est lui qui décide les montants puis c'est
lui qui donne ses diktats aux municipalités. Donc, ne rêvez pas en
couleur, ça n'existe plus. Donc, c'est un cours de caisse et le
gouvernement a décidé qu'il prélevait, puis il dit
comment. Un, tu taxes puis on te l'enlève. Puis quelles que soient les
façons de s'y prendre, c'est toujours l'automobiliste ou le contribuable
qui finit par écoper.
Cela étant dit, je pense que ça résume un peu mon
point de vue là-dessus et je voudrais juste vous poser cette question
puisque j'ai des collègues qui vont continuer à en poser. Il y a
peut-être un point que vous soulevez. Votre premier constat, et
ça, je ne sais pas comment le faire, vous allez certainement pouvoir me
l'exprimer. La racine du mal réside dans le fait qu'au Québec, la
question du transport en commun intervient après qu'on a conçu
des plans d'urbanisme et non comme cela devrait, être
intégrée, a priori, dans la planification urbaine.
Est-ce que vous connaissez des endroits où ils n'ont pas à
faire face à ces questions là, aussi crucialement qu'on a
à y faire face aujourd'hui? Parce que, dans le fond, je pourrais bien
dire: C'est le problème du transport en commun. Puis j'ai de la
difficulté à faire les liens, parce que d'un côté on
s'attaque au transport en commun, puis c'est un cours de caisse. Puis on s'en
va dans des places pour aller chercher de l'argent puis ça ne devrait
pas être là. Tu sais, dans le fond, un gouvernement a une source
de taxation, mais il ne peut pas piger dans tout. Là, il pige à
toutes les autres. Partout où il se passe quelque chose, il va le
chercher, jusque les intérêts de certains montants en tout
cas.
Je trouve que ça devient de plus en plus complexe parce que,
comment peut-on vous demander de faire une planification quand, moi, je sais
que le but avoué, c'est d'aller chercher de l'argent? Ce n'est pas pour
améliorer le transport en commun, c'est pour remplacer les sources qui
manquent quelque part que le gouvernement a prélevé. Est-ce que
vous connaissez des endroits où on fait de la planification comme vous
semblez nous le dire?
M. Pinault (Claude): précisément non. je pense que
ce qu'on a vu et ce qu'on a entendu de diverses sources d'urbanistes urbains,
c'est un constat, qu'on construit des villes et que, par la suite, on se dit:
bien, coudon, il nous faudrait bien le transport en commun. et pendant ce
temps-là, les gens sont allés un peu plus loin s'installer puis
on se retrouve avec un "gap", si vous me passez l'expression, entre
l'infrastructure de transport en commun existante et où résident
les gens et, entre les deux, il n'y a rien. mais il y a des routes et on prend
les routes, et le transport en commun ne peut pas rejoindre ça à
des coûts vraiment réalisables.
Donc, on se retrouve avec un problème qui n'a presque pas de
solution. Est-ce qu'on peut vraiment avancer notre transport en commun vers ces
zones suburbaines oui ou non? Et si oui, à quel coût?
Généralement, c'est non. Et qu'est-ce qu'on dit? On dit: Bien,
vous prenez l'auto C'est évident, ce n'est pas autre chose et, si vous
la prenez, vous êtes fautif parce que vous devriez prendre le transport
en commun. Alors, c'est un discours qui nous fait tourner en rond. Donc, sans
avoir un exemple précis, je pense que ça ne relève pas de
la fabulation de dire que généralement, les plus grands
problèmes de nos grandes villes, c'est de se retrouver à faire
des plans d'urbanisme et un jour de dire: Bien, on devrait peut-être
penser à un transport en commun. Alors que, sans faire un cours de
cuisine, j'imagine que lorsqu'on décide de faire un gâteau, on va
décider tout de suite de mettre la poudre à pâte, pas
après, si ça n'a pas levé.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, ce que je voudrais dire
à nos amis du Club automobile: Je suis membre, moi aussi, puis je n'ai
pas été consulté plus que le ministre, mais je ne vous en
fais pas reproche et grief. Vous défendez les intérêts des
automobilistes que vous représentez et ça m'apparaît
très légitime. Je regardais votre tableau de la page 18 où
vous avez fait l'exercice de calculer ce que les automobilistes paient et vous
dites: Dans ce qu'on donne, il y aurait de quoi maintenir intégralement
les subventions au transport en commun. Vous parlez du 279 000 000 $ d'avant la
réforme. Puis, je vous sens un peu comme quelqu'un qui donne au
téléthon puis ça ne se rend pas vraiment aux victimes de
la distrophie musculaire ou à d'autres. C'est qu'entre les deux, le
gouvernement est intervenu lourdement, puis on a eu l'occasion de le
dénoncer. (23 heures)
Lo député de Lévis, par exemple, qui est critique
en matière de transport, a fait un débat très vigoureux
sur les 625 000 000 $ de la Société d'assurance automobile qui
ont été versés au fonds consolidé et ce
n'était pas juste parce que les automobilistes étaient
concernés. Il y avait, quant à nous de l'Opposition, le principe
que quand on prélève une prime d'assurance et que l'assurance se
met à être moins coûteuse, on ne devrait pas financer autre
chose avec ça parce que dans le contrat social, lors de la
réforme de l'assurance automobile, on disait: Si les gens ont un bon
comportement en auto et que le nombre d'accidents diminue, ils vont payer moins
de primes. Et là on a eu un rabais de primes récent, mais un peu
tardif et bien inférieur aux 625 000 000 $ que le gouvernement est
allé prélever.
Maintenant, pourquoi le gouvernement taxe-t il autant les
automobilistes? Ma première réponse serait: C'est parce qu'il y
en a beaucoup. Et comme il y en a beaucoup, le gouvernement se dit: Un petit
montant qui a l'air de rien multiplié par 4 000 000 d'automobilistes
à peu près ça, finit par représenter des sommes
considérables. Cela dit, je ne pense pas que... D'abord, il y a une
partie fort notable de la population du Québec qui n'a pas d'autre choix
de mode de transport que l'automobile. Quand on se retrouve dans Charlevoix,
aux Éboulements, ça fait 10 ans qu'ils ont levé un petit
autobus Voyageur qui les reliait de La Malbaie à Baie-Saint-Paul en
passant par le long de la mer. Et il y a bien des régions où si
tu n'as pas d'auto, tu n'existes pas et tu n'as pas de mobilité. C'est
une réalité.
Mais, par ailleurs, il y a une disproportion dans la possession
d'automobiles. Vous avez raison de dire que maintenant c'est un moyen de
transport de masse, l'automobile, mais il reste que dans les limites de la
ville de Montréal, il y a une demi-voiture par ménage et, dans
les banlieues de Montréal, il y a deux voitures et demie par
ménage. Et on peut imaginer que les Montréalais qui
possèdent 150 000 autos reçoivent matin et soir la visite de 400
000 autos. Alors, ça fait pas mal de visite dans Montréal et
ça pose un grand nombre de problèmes pour la ville centre qui
accueille. Et par ailleurs, ce n'est pas en coupant le transport qu'on rend
l'alternative du transport en commun plus alléchante pour les
automobilistes. Par exemple, je connais des gens qui possèdent... Et ce
n'est pas sans issue parce que 55 % des gens qui empruntent le métro de
Montréal ont une auto. Ils ont une automobile et ils
préfèrent le métro parce qu'il n'est pas trop loin de leur
lieu de résidence. Et c'est un facteur. La ligne Rigaud-centre-ville de
train de banlieue est très fréquentée, très
empruntée, parce que le train est un moyen de transport rapide et
confortable.
Alors, d'une certaine façon, je dis ça parce qu'on a
gardé du catholicisme, qui a déjà été
dominant au Québec, un certain manichéisme, et je ne pense pas
que la question soit toute tranchée, le bien contre le mal. Mais on peut
penser que les 150 000 propriétaires d'automobiles de Montréal,
qui reçoivent la visite de 400 000 propriétaires d'automobiles de
la banlieue, se disent: Y a-t-il moyen que chacun contribue? Et le ministre a
parfaitement raison de dire qu'il suffit d'avoir une grève de transport
à Montréal - et on en a eu plus que notre part, le ministre a
raison et je tiens à l'assurer que je ne suis pas personnellement
responsable - il a suffi qu'on en ait une vingtaine de grèves du
transport, avant les années quatre-vingt, je dois dire, plus que
maintenant, pour voir que sans le métro, il y a comme une paralysie de
la ville de Montréal qui s'installe de façon directe.
Maintenant, un dernier point. Je pense que l'État a par ailleurs
un manque de ressources et ce n'est pas pour le plaisir sadique de taxer sans
doute qu'il taxe. C'est la manière de taxer qui, quant à nous,
est discutable. Selon notre analyse des derniers budgets, un des
problèmes, c'est qu'il y a près de 20 % de la population qui ne
travaillent pas et qui ne paient pas de taxes et que, si on était plus
nombreux à payer des taxes et impôts, peut-être qu'on en
paierait moins.
Le Président (M. Garon): Alors, le temps dévolu aux
deux partis pour les interventions étant écoulé, je
remercie les représentants du Club automobile du Québec de leur
présentation, d'être venus nous rencontrer à cette heure
aussi tardive. Et je vais demander aux gens de Transport 2000 de se
préparer pour leur intervention.
Nous allons inviter les gens de Transport 2000 à s'approcher de
la table des intervenants. Est-ce qu'ils sont là?
Alors, comme le temps dévolu à Transport 2000 est de 45
minutes, M. Parisien, vous
avez 15 minutes pour exposer votre point de vue; le ministre aura 15
minutes pour vous interroger de même que 15 minutes aux
représentants de l'Opposition. Si vous prenez moins de 15 minutes, ils
auront autant de temps en plus; si vous en prenez plus, ils auront autant de
temps en moins.
Transport 2000
M. Parisien (Normand): Alors, on va tenter d'être le plus
bref possible. M. le Président, M. Guy Chartrand, qui est le
président de notre association, prie la commission de bien vouloir
excuser son absence. Un empêchement de dernière heure fait en
sorte qu'il reste à Montréal. Alors, c'est à regret qu'il
est absent ce soir.
Le Président (M. Garon): J'espère qu'il n'a pas
manqué le train.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Parisien: Non, comme il n'y a pas de train, ça n'a pas
été difficile de le rater, puis, avant l'an 2000, on risque de ne
pas en voir l'avènement, au train où vont les choses actuellement
dans ce dossier.
C'est un plaisir de vous voir à nouveau. C'est devenu une
tradition, M. le Président, mais dans d'autres dossiers
évidemment. On a traité de différentes questions qui nous
préoccupent tous. Sans plus tarder, je suis Normand Parisien,
directeur-coordonnateur pour l'association, en l'absence de Guy Chartrand.
Nous remercions vivement les membres de la commission pour l'attention
qu'ils porteront, malgré l'heure tardive, au contenu du présent
mémoire. D'ailleurs, nous étions anxieux d'exposer aux
élus de cette auguste Assemblée nos préoccupations envers
ce dossier qui demeure d'une importance capitale, à savoir le
financement du transport en commun. Transport 2000 Québec, association
sans but lucratif, obtenait sa charte constitutive en 1977. Organisme
d'intérêt public, l'association regroupe sous le même
chapiteau des individus de toute situation sociale, usagers des transports en
commun et même quelques automobilistes, des associations, des syndicats,
entreprises et municipalités qui partagent les objectifs fondamentaux
suivants que nous nous sommes fixés: promouvoir l'interrela-tion de
l'usage des transports et la planification en cette matière, la
protection de l'environnement et l'usage efficace des ressources concernant
l'éducation populaire et la recherche dans ce domaine.
Je voudrais mentionner que le thème de notre mémoire est
largement inspiré d'une citation toute récente, et elle va comme
suit. "Dans un monde de compétition où l'efficacité doit
être atteinte dans la durée, l'État est le garant
indispensable de la continuité, de la coopération entre les
acteurs de la vie économi- que et de la nécessaire
solidarité sociale. Ce n'est pas en se retirant mais en se renouvelant
que l'État se rend efficace." Cette proposition, qui émane de
l'ex-premier ministre français, nous apparaît tout à fait
symptomatique de l'absenco totale de vision qui caractérise actuellement
plusieurs gouvernements occidentaux. De plus, nous ne croyons pas nous tromper
en portant le même diagnostic sur l'actuel projet de réforme de la
fiscalité municipale. Donc, sous le couvert d'une problématique
fiscale, le gouvernement dissimule d'importants enjeux qui demeurent de son
ressort dans le secteur des transports: un, efficacité
économique; deux, équité sociale; trois, conservation de
l'énergie et, quatre, protection de l'environnement. Or, nous sommes
d'avis que le seul ministère des Affaires municipales ne possède
pas la légitimité pour gérer l'ensemble de ces dossiers.
S'il est un secteur dans lequel l'État doit demeurer actif, c'est bien
celui du transport, à plus forte raison celui du transport en commun,
pour les raisons qui précèdent. la crise des finances publiques
est un argument régulièrement invoqué par le gouvernement
pour justifier ce qu'il est maintenant convenu d'appeler un délestage
pur et simple des responsabilités qui lui sont imparties, outre le
caractère essentiellement local du transport en commun, ce qui n'est
d'ailleurs pas du tout évident. aussi, c'est pour cette raison que nous
avons suggéré, le 15 février dernier, que le ministre des
finances prélève une taxe spéciale sur le carburant. il
fallait régler un problème, alors on a tenté d'ouvrir des
voies de solution contre toute attente, puisqu'une résistance semblait
toujours opposer ce genre de mesures à certaines questions de
fiscalité. le discours sur le budget du 2 mai nous apprend que quelque
248 000 000 $ seront versés, des cette année, au trésor
public, grâce à une telle surtaxe. précisons que cette
entrée de fonds était imprévue par le gouvernement et que
les besoins courants qu'il estimait pour le transport en commun
s'élèveraient à 277 000 000 $ pour les
sociétés de transport urbain, en 1992.
Mais qu'a fait le gouvernement? Il a pris le fruit de cette taxe et il
l'a mis dans ses poches. On avait suggéré qu'une part importante
aille au financement du transport en commun et, en régions, là
où il n'y a pas de transport en commun, qu'on puisse financer la
réfection du réseau routier. En ce qui concerne le taux de
récupération...
Le Président (M. Garon): À l'ordre! On a fait venir
M. Parisien à 23 heures; au moins, on devrait l'écouter.
M. Parisien: En ce qui concerne le taux de
récupération des coûts d'exploitation des
sociétés de transport, la situation québécoise est
loin d'être aussi alarmante que le laisse entendre le ministre des
Affaires municipales. Aux États-Unis
et en Europe, ce taux varie généralement de 20 % à
40 %. Aux États-Unis, cette proportion se situerait même
fréquemment dans une fourchette de 20 % à 25 %. N'oublions pas,
par ailleurs, que même le gouvernement fédéral
américain finance les immobilisations du transport en commun urbain.
À l'inverse, seuls les pays d'Extrême-Orient ne financent pas
directement le transport en commun. De toute façon, les promoteurs
exploitants du secteur privé parviennent à rentabiliser leurs
opérations en raison de restrictions majeures dans l'utilisation de
l'automobile.
Enfin, nous jugeons que le gouvernement n'a aucun mandat de sabrer
complètement les ressources financières allouées au
fonctionnement du transport en commun. Nous n'écartons aucunement
l'arrivée d'un quatrième partenaire, automobilistes ou
entreprises; nous suggérons une telle éventualité depuis
déjà quelques années. Par conséquent, nous
continuons à rejeter la démarche réductionniste de
l'actuel projet de loi. Le gouvernement ne peut abdiquer ses
responsabilités et le nouveau partage doit globalement comporter
l'équilibre suivant au niveau de l'exploitation. Pour assurer une
certaine sécurité financière, il faut que ce financement
soit diversifié et les usagers devraient, dans une certaine proportion
de 35 %, contribuer aux coûts d'exploitation, les municipalités 25
%, le gouvernement 20 %, automobilistes et entreprises 20 %. C'est à
titre indicatif puisque cette assiette est de nature à différer
d'un réseau à un autre en fonction de la population, des
aménagements, etc. (23 h 15)
Du côté environnemental, la proposition gouvernementale
à l'origine du projet de loi ignore complètement la contribution
des transports en commun dans la protection de l'environnement. Aussi, la
tendance récente qui consiste à taxer la propriété
de l'automobile nous apparaît-elle injuste et inefficace.
L'effet de serre qui apparaît de plus en plus comme la menace la
plus sérieuse à l'échelle planétaire, qui fera
d'ailleurs l'objet d'une conférence mondiale à Rio en juin 1992,
résulte non pas de la possession des voitures, mais bien de
l'utilisation qu'on en fait. Sur ce plan, le droit d'immatriculation est
simplement une taxe antiécologique puisqu'il ne comporte aucun effet
quant aux décisions de l'usager de la route d'utiliser ou non la voiture
de manière intensive. Donc, un juste partage modal entre le transport
public et le transport privé commande une meilleure évaluation
des décisions publiques en matière de prélèvements
fiscaux.
Nous appréhendons également que d'autres
sociétés de transport que celles localisées dans le Grand
Montréal et le Grand Québec mettent tout simplement fin à
leur exploitation. Le gouvernement ne peut régler des problèmes
en en créant d'autres. Une concertation à tous les niveaux doit
être établie pour offrir des transports publics viables à
la population.
À ce titre, rien n'est plus éloquent comme
témoignage que cette lettre, puisqu'elle fait référence
à des expériences étrangères où on a
trouvé des solutions viables à ce genre de problème. Car,
vous savez, en matière de protection de l'environnement, les
frontières nationales se révèlent tout à fait
fictives. Combien de temps reste-t-il, M. le Président?
Le Président (M. Garon): Ah! Vous avez le temps que vous
voulez. Là, vous avez pris 10 minutes et 12 secondes.
M. Parisien: Ah bon! Alors, je pourrai compléter dans le
temps qui nous est imparti. Il y a une lettre, ici, qui s'adresse au premier
ministre du Québec. Elle reprend un peu tous ces thèmes et montre
la façon dont la Suisse a pu être un modèle, avec une
population à peu près comparable à celle du Québec.
"M. le Premier ministre, "Sans vouloir nous immiscer dans les affaires
intérieures de votre pays, nous tenons néanmoins à
apporter notre témoignage sur les efforts nécessaires à
consentir en matière de transport en commun. "En Suisse, le niveau des
transports urbains peut être considéré comme très
satisfaisant comparé aux pays européens nous entourant.
Particulièrement sur le plan urbain, des efforts importants ont
été consentis depuis 10, 15 ans avec des programmes s'articulant
autour des points suivants: "1. Augmentation des fréquences et
extensions des lignes. "2. Modernisation des véhicules et des
infrastructures. "3. Création de communautés tarifaires au sein
d'une agglomération et également entre agglomérations.
Vente d'abonnements dit écologiques ouvrant à l'usager et
à bas pris l'ensemble des moyens de transports d'une région. "4.
Accent mis sur les systèmes électriques et en site propre:
nouvelles lignes de trams, électrification de lignes d'autobus. "Cet
effort a permis une augmentation impressionnante du nombre de passagers et une
revalorisation de l'image de marque des transports en commun. "Ce
résultat n'a été possible que par l'effort financier
consenti non seulement par les communes mais également par les cantons,
aussi bien sous forme d'investissements pour les infrastructures que de
subventionnement pour les abonnements bon marché ou de couverture des
déficits. "Nonobstant le soutien à tous niveaux aux transports
publics, l'élargissement de l'effort financier des transports urbains au
plan régional (province, canton) ou national est très important.
En effet: "1. Avec l'accroissement de la taille des agglomérations et
les échanges entre villes, la
frontière tend à s'effacer entre déplacements
purement locaux et ceux à plus longues distances. "2. L'existence de
transports urbains de qualité est un facteur d'attractivité pour
les visiteurs étrangers. "3. la pollution résultant du trafic
automobile est un problème qui concerne l'ensemble d'un pays et ne peut
donc être combattue que par un effort national correspondant. en suisse,
les cantons, pour réduire la pollution de l'air, sont en train
d'appliquer des plans de mesures prévoyant des réductions de la
circulation automobile et, parallèlement, un développement massif
des transports en commun. par exemple, à genève, il est
prévu de réduire la circulation de 30 % à 40 % en l'espace
de 10 ans et, dans le même temps, d'augmenter de 50 % l'offre en
matière de transport en commun par la création de plusieurs
lignes de tramway. "C'est également le garant de tarifs suffisamment
bas, gage d'attractivité des transports en commun et de réduction
des inégalités dues aux différences de capacité
financière entre communes, efforts qui, globalement, sont payants pour
la communauté, puisque les coûts sociaux résultant du
trafic automobile, bruits, accidents, pollution, espace et énergie
gaspillée sont ainsi réduits. "Enfin, le développement des
transports en commun permet de réduire le gaspillage
énergétique résultant de l'utilisation massive de
l'automobile, objectif dépassant évidemment le cadre local, en
considération de quoi nous ne pouvons qu'apporter notre soutien aux
organisations qui demandent à votre gouvernement de reporter sa
décision. "En espérant que cette lettre pourra contribuer d'une
manière positive au débat sur les transports au Québec,
nous vous prions d'agréer, M. le Premier ministre, l'expression de notre
parfaite considération. "
Ça s'ajoute à des lettres en provenance de France, de
l'Ontario et des États-Unis qui sont des associations analogues.
Pour conclure, M. le Président, nos élus doivent
maintenant faire des choix cruciaux. Nous engageons-nous pleinement dans le
XXIe siècle sur le même pied que les autres nations
industrialisées ou régresserons-nous de 30 ans en matière
de choix public des transports? Selon nous, l'actuelle réforme prend
davantage l'allure d'une contre-réforme, par exemple, en l'absence d'un
gouvernement régional pour Montréal, tel que cela existe à
Bruxelles notamment, où il vient d'y avoir une réforme
constitutionnelle, où il y a un gouvernement pour Bruxelles capitale.
Tel que cela existe à Bruxelles... Les mesures envisagées par le
ministre sont parfaitement inappropriées pour le financement du
transport en commun.
En conséquence, faute d'amendements significatifs au projet de
loi du ministre, l'adop- tion de celui-ci doit être définitivement
écartée par les membres de l'Assemblée nationale. M.
Claude Ryan, un homme responsable et pondéré par tradition, doit
convaincre ses conseillers do refaire leurs devoirs.
Alors, voilà, M. le Président, l'essentiel du message que
l'association de citoyens Transport 2000 désire livrer aux élus
du peuple qui nous représentent à l'Assemblée
nationale.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, j'accepte volontiers le jugement
que Transport 2000 a porté sur ma personne, mais j'ai du mal à
assumer la vocation difficile qu'il voudrait me confier dans la deuxième
partie...
Une voix:... long voyage.
M. Ryan:... de sa proposition. Blague à part, je voudrais
dire à Transport 2000 que nous sommes bien contents de rencontrer ce
groupe qui se consacre à la promotion du transport sous toutes ses
formes au Québec depuis de nombreuses années, qui porte un
intérêt particulier aux problèmes du transport en commun,
dont nous lui sommes redevables.
Je voudrais signaler à l'attention du représentant de
Transport 2000, M. Parisien, que dans cette entreprise législative et
financière, le ministre des Affaires municipales n'agit pas de son seul
chef. Il a fait partie d'un comité interministériel qui a
examiné toutes les questions relatives a la fiscalité au cours
des derniers mois. Il a fait partie également du comité
ministériel chargé de la révision des programmes à
l'intérieur du gouvernement au cours des deux dernières
années. Avec lui, au comité qui a préparé la
présente entreprise, siégeaient le ministre des Finances, le
président du Conseil du trésor, le ministre des Affaires
culturelles, le ministre de l'Environnement, le ministre do l'Éducation
et le ministre de la Sécurité publique. Il y avait huit
ministères représentés au sein du comité qui a
travaillé ces questions sous la présidence du ministre des
Affaires municipales. Le mandat avait été confié,
d'ailleurs, au ministre des Affaires municipales qui a
précédé celuici.
Alors, il faut bien un porte-ballon quand on arrive à
l'Assemblée nationale et celui qui est désigné à ce
titre est celui qui est lo plus immédiatement et le plus largement
concerne par les objets dont traite un projet législatif ou financier.
Je pense que la légitimité, du moins en ce qui touche le
gouvernement, est assez solidement assurée dans ce cas-ci. On ne sait
jamais ce qui arrivera le lendemain. Mais dans ce cas-ci, jusqu'à ce
soir, elle est bien assurée. Seuls les assauts
répétés de l'Opposition et de nos critiques pourraient
réussir à l'ébranler dans un
avenir prévisible. Vous essayez loyalement, et c'est votre
rôle de le faire aussi; nous l'apprécions et nous le prenons en
bonne part. Alors, je vous remercie d'avoir quand même posé cette
question-là qui nous permet d'apporter des précisions utiles
à l'exercice que nous poursuivons ensemble.
Il y avait un deuxième point sur lequel je voulais vous poser une
question. Vous dites, au bas de la page 6 de votre mémoire: "Sur ce
plan, le droit d'immatriculation est une taxe antiécologique."
"Antiéeologique", j'ai trouvé ça un peu fort. J'aimerais
que vous me fournissiez des explications. En quoi c'est antiécologique
de demander au propriétaire d'un véhicule de promenade de verser
une contribution fort modeste au financement du transport en commun urbain dont
il est largement le bénéficiaire?
M. Parisien: Oui, M. le ministre, ça paraît
en effet étrange pour une association comme la nôtre, mais elle
cherche à régler les problèmes globalement. Si on
préfère plutôt une utilisation de l'automobile, c'est que
les gens ont le choix de l'utiliser ou de ne pas l'utiliser. Ce qu'on avait
évoqué, dans le document du 15 février qu'on vous a fait
parvenir à l'époque, c'est que ça permettait au citoyen un
choix modal, dans la mesure où la taxe sur le carburant qui a
été prélevée, selon nous, et avec raison, le 2 mai
dernier, pouvait servir à financer un service suffisamment attractif
pour l'ensemble de la population et décharger le gouvernement de
coûts importants.
Vous savez peut-être, M. le ministre, qu'en 1989,
l'ex-Régie de l'assurance automobile a fait paraître un document
qui s'intitule "Évaluation des coûts de l'insécurité
routière au Québec". On estime, en dollars constants de 1985,
que, pour cette année, les coûts liés à
l'insécurité routière étaient de 2 000 000 000 $.
Alors, c'est un trou important pour l'économie.
M. Ryan: Je vais dire ça au Club automobile.
M. Parisien: Sauf le respect qu'on porte aux gens du CAA
Québec, il reste que ce sont des sommes assez importantes dont se prive
l'économie québécoise. Voilà, M. le ministre,
pourquoi une taxe sur le carburant vient minimiser un peu l'usage de
l'automobile, avec des effets positifs sur l'économie des coûts
pour le gouvernement, pour l'économie de l'insécurité
routière et des coûts d'utilisation et d'usure du réseau
routier qui sont à la charge du gouvernement du Québec. Bien que
les travaux nécessaires soient importants, comme l'a souligné le
CAA Québec, il reste que c'est l'utilisation de l'automobile et des
camions qui contribue à détériorer le réseau
routier que doit entretenir le gouvernement. Alors, avec cet instrument qui est
la fiscalité du carburant, ça permet davantage au gouvernement de
négocier un peu l'ensemble des comportements modaux au Québec.
(23 h 30)
Alors, pour répondre un peu à votre question, M. le
ministre, la taxe sur l'immatriculation, peu importe que l'automobiliste
l'utilise ou non, il doit la supporter. Alors, comme me disait un
automobiliste: Si je prends le vélo trois mois par année, le
transport en commun quatre mois, je suis davantage pénalisé que
l'automobiliste qui utilise toujours son automobile pour se déplacer.
C'est pourquoi ce droit d'immatriculation ne nous apparaît pas tout
à fait approprié comme mesure dédiée au financement
du transport en commun. On n'écarte pas du tout votre hypothèse
qui est à l'effet d'amener les automobilistes à contribuer. Ils
sont des bénéficiaires indirects du transport en commun, nous le
reconnaissons d'emblée.
M. Ryan: Est-ce qu'il y a d'autres manières dont vous
aimeriez amener l'automobiliste à contribuer peut-être davantage
même au financement du transport en commun, à part l'essence?
À part la taxe sur l'essence et les droits sur l'immatriculation des
véhicules automobiles, avez-vous d'autres suggestions?
M. Parisien: II y a certaines suggestions qu'on avait
évoquées pour suppléer, parce qu'il faut un panier pour
assurer la sécurité financière des sociétés
de transport. Vous avez évoqué dans votre projet de loi la taxe
sur les immobilisations non résidentielles qui inclut les taxes sur le
stationnement. Or, nous croyons que les autorités locales n'ont pas
l'autorité politique pour adopter une telle loi. D'ailleurs, lorsqu'on
l'a fait en Ontario pour financer les projets publics de transport en commun,
vous avez un document ici de novembre 1990 "Ontario increases its support for
public transport in Toronto". Naturellement, ça doit être
financé à même certaines recettes fiscales. Ce qu'a fait le
gouvernement de l'Ontario, c'est d'adopter ici, pour la fin de l'année
1989, "an Act to establish a commercial concentration tax". Queen's Park
croyait détenir l'autorité politique pour pouvoir adopter un tel
projet de loi et c'est pourquoi il devient plus facile de consacrer directement
le fruit de cette taxe au transport en commun sans qu'il y ait une concurrence
ou une espèce de jungle fiscale entre les municipalités. Alors,
ce n'est pas sans fondement que vous avez songé à cette taxe sur
les immobilisations non résidentielles qui inclut les espaces de
stationnement, mais, si ça a été appliqué plus
simplement en Ontario, c'est que c'est la Législature de Queen's Park
qui est intervenue et ce n'est pas les municipalités ontariennes. C'est
pourquoi on est très pessimistes si vous déléguez un peu
cette autorité-là aux municipalités sans qu'on sache ce
qui va advenir. On ne pense pas que ça puisse effectivement se
réaliser.
Vous savez probablement que l'Institut de développement urbain ne
rejette pas du tout une contribution au financement du transport en commun,
mais ce groupe-là croit également que le gouvernement doit
demeurer un partenaire dans le fonctionnement du transport en commun. Alors,
voilà pour répondre un peu à votre question sur ces autres
sources. Il y a plusieurs solutions dans le financement du transport en commun
et il faut les examiner de façon approfondie.
M. Ryan: C'est malheureux que du point de vue des porte-parole du
monde municipal, on n'ait pas apporté beaucoup d'idées nouvelles
de ce point de vue-là. Vous nous arrivez avec des suggestions que je
trouve intéressantes. Malheureusement, elles nous arrivent
peut-être un petit peu tardivement dans la recherche. C'est des choses
qu'on devra emmagasiner pour des exercices futurs. On a beaucoup de choses. En
Ontario, nous avons examiné plusieurs mesures qu'ils ont prises pour
mieux équilibrer le fardeau fiscal et le plan local. Vous avez
mentionné cette mesure. Il y en a d'autres également qui nous ont
intéressés que nous allons examiner de plus près au cours
des prochains mois. Il y a bien des choses à faire encore dans ce
domaine-ci. Le projet de loi 145 n'est qu'un chapitre évidemment.
Je vous remercie beaucoup, M. Parisien. C'est très
intéressant. Si vous avez de la documentation originale à nous
transmettre sur la participation des gouvernements dans d'autres pays au
financement du transport en commun, accompagnée d'une documentation sur
l'économie générale des finances publiques dans les
mêmes pays, ça pourra nous être très utile aussi.
Nous en avons déjà beaucoup, mais comme vous êtes
spécialisé dans ce domaine-là, vous avez peut-être
des choses à nous communiquer qui pourraient compléter notre
instruction.
M. Parisien: Tout à fait, M. le ministre. On revient
d'ailleurs de Bruxelles grâce à un projet d'étude sous
l'égide de l'Agence Québec-Wallonie-Bruxelles pour la jeunesse et
le cas bruxellois... On devrait produire un rapport au cours de l'année
sur ses observations du cas particulier de Belgique avec laquelle le
Québec entretient des relations privilégiées, par
ailleurs.
M. Ryan: Merci beaucoup.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour (Jonquière): Oui, M. le Président.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que Transport 2000, dans les dernières
années, s'est manifeste à toutes les commissions parlementaires
qu'on a tenues concernant le transport en commun. Je peux prendre juste comme
exemple la région de
Montréal; vous étiez un des membres de cette commission,
M. le Président, et je me souviens que pendant un certain temps, on a
entendu dos représentations intéressantes, dont celles do
Transport 2000 concernant le transport on commun dans la ville de
Montréal, les possibilités de traverse du fleuve pour
améliorer le transport urbain et je pense que, effectivement, cet
organisme est voué à faire avancer la cause du transport en
commun comme tel.
Je pense que, de ce côté-là, il faut
l'apprécier. Il faut se réjouir d'avoir des gens qui sont
prêts à faire ces choses-là, malgré que,
certainement, on ne soit pas d'accord, le ministre et moi, dans la
dernière partie du mémoire... On pourrait peut-être y
revenir tantôt, mais je voudrais juste vous poser quelques questions sur
la présentation de votre mémoire. À la page 5, vous dites:
Nous jugeons que le gouvernement n'a aucun mandat de sabrer complètement
les ressources financières allouées au fonctionnement du
transport en commun. Nous n'écartons aucunement l'arrivée d'un
quatrième partenaire - et vous mettez entre parenthèses -
automobilistes, entreprises. Nous suggérons une telle
éventualité depuis déjà quelques années.
C'est quoi que vous dites dans ça?
M. Parisien: D'abord, pour la première partie de cet
énoncé, c'est que la population croyait que le gouvernement qui
est installé depuis deux ans devait soutenir l'effort vis à vis
le transport en commun urbain. Alors, dans cette perspective, il est un peu
étonnant qu'on choisisse la voie actuelle, parce que ça ne fait
pas partie d'un mandat pour lequel la population a demandé au
gouvernement de gérer les questions du transport en commun. On croyait
aller dans une voie de relance à l'instar de ce qui so produit dans
d'autres pays européens et mémo aux États-Unis. Et puis,
ça ne s'est pas concrétisé. Et comme la question du
financement du transport en commun n'a pas été traitée
séparément comme une question de transport plutôt qu'une
question de fiscalité, la population ne saisit pas vraiment. On parle
à des gens quotidiennement et ils ne réalisent pas encore
l'ampleur de ce qui est proposé et ils se sentent plus ou moins
informés de cette démarche. Et il est très heureux que
cette... C'est un exercice minimum qu'il y ait, à tout le moins, une
commission parlementaire et il devrait même y avoir davantage une
concertation permanente.
Il y a beaucoup de problèmes à résoudre dans le
secteur des transports. Mais je penso qu'on n'est pas dans... Le forum ici nous
limite à cette question précise. En ce qui concerne
l'arrivée d'un quatrième partenaire, ç'a été
évoqué lors de plusieurs commissions parlementaires ou
consultations depuis le début des années quatre-vingt. Ç'a
commencé à l'époque où Michel Clair était
ministre des Transports. Il y a eu, par la suite, d'autres commissions, en
1987
notamment, il y a des consultations publiques à Montréal
en 1989 à la CUM, à Québec en octobre 1990 à la
Communauté urbaine de Québec.
Il y a comme un sentiment qui va dans le sens de supporter les
transports en commun. Et dans ce sens-là, les automobilistes nous disent
régulièrement, à moins qu'ils nous mentent, qu'ils
seraient prêts à participer au financement du transport en commun
si les ressources auxquelles ils contribuent étaient
véritablement allouées au financement du transport en commun. Or,
ce n'est pas le cas ici. C'est pourquoi on suggère au gouvernement qu'il
n'est pas question d'écarter ce quatrième partenaire qui est
représenté par les automobilistes et les entreprises.
Est-ce que ça répond un peu aux interrogations...
M. Dufour (Jonquière): Oui, ça répond, mais
ça ouvre aussi des perspectives que, nous, on a soulevées. En
fait, quand on vous écoute, est-ce que vous ne trouvez pas que c'est un
peu comme un détournement de fonds auquel on assiste? Parce qu'on dit:
C'est pour le transport en commun, toutes les propositions qu'on fait. Mais,
dans le fond, ce n'est pas vrai. C'est qu'on fait juste changer le mal de
place. On ne fait pas de réallocations de ressources nouvelles. On
essaie de remplacer par d'autres sources de taxation. Le gouvernement ramasse
la caisse. Il part avec. Et c'est un peu ça, la difficulté que
j'ai avec cette réforme-là.
Si on avait dit: Cette réforme-là est dans le but de
vraiment améliorer le transport en commun et de le changer. Mais, dans
le fond, on dit: On a besoin de tant d'argent. On va en chercher là et
on le remplace avec d'autres ressources. Mais ce qu'on fait - et je pense que
c'est là le problème - c'est qu'on met en danger ou on remet en
question tout le transport en commun comme tel.
M. Parisien: C'est d'ailleurs ce qui nous a sidérés
avec la taxe sur le carburant. Alors, on croyait que le problème
était réglé. Le 2 mai, on applaudissait cette mesure. J'ai
pu rencontrer le ministre des Finances et nous lui avons rappelé que
c'était une bonne mesure et qu'on attendait qu'il dédie une
partie de ça au transport en commun. C'était à un
congrès de l'Association des économistes du Québec. Et
quelle ne fut pas notre stupeur d'apprendre, lors du dépôt du
projet de loi le 14 mai, qu'il y avait 0,00 $ du fruit de cette taxe du 2 mai
que le gouvernement hésitait à appliquer au début de
l'année. Il parlait d'une quelconque compétitivité
fiscale. Or, en Europe, bien qu'on aille vers une intégration
poussée, on a obtenu des informations de là-bas, du
Secrétariat d'État belge en Europe, que la taxe sur les
carburants n'a aucun effet sur la compétitivité des entreprises
entre les différents pays européens. Alors, le gouvernement a vu
une voie qui était intéressante à explorer de ce
côté-là. Or, il a décidé de prendre l'argent
et de mettre ça un peu dans la poche. Alors, cette mesure-là ne
correspond pas au désir de la population, à notre avis. C'est
quasiment un hold-up que d'avoir pris des idées qu'on avait
évoquées pour trouver une solution à ce problème et
qu'on se retrouve encore avec ce problème-là au mois de juin.
M. Dufour (Jonquière): Quand on dit que... Tu m'as fait
perdre l'idée, toi. Attendez un peu. Je vous ai dit tout à
l'heure et je vous ai rappelé que vous avez participé à
plusieurs exercices - vous parlez de deux ans, mais on peut dire depuis six ans
- avec le gouvernement actuel. Vous avez au moins participé à
quelques exercices concernant, par exemple, le réseau de transport
intégré dans la ville de Montréal, des projets pour les
réseaux routiers et les métros, etc. Ces exercices que vous avez
suivis dans le passé, est-ce que vous pensez que dans l'état
actuel des choses, avec ce qu'on a sur la table, ça a des chances de se
réaliser à quelque part? On parlait de prolongement ici, d'une
voie spéciale sur le... On a parlé même d'une voie sur la
jetée, etc.
M. Parisien: On voudrait être ici pour discuter, M. le
député...
M. Dufour (Jonquière): Croyez-vous qu'on a
privilégié le transport en commun et qu'on va le mettre?
M. Parisien: ...de toute autre question que ce dont on discute.
On pense que c'est un peu frustrant pour une association comme la nôtre
de défendre le statu quo. On voudrait discuter d'avenir et de projet,
mais là, on tente de sauver les meubles. C'est un peu malheureux de se
retrouver dans cette situation. On tente de trouver des solutions et on
espère bien que le gouvernement entendra notre message. C'est pourquoi
on tente le tout pour le tout en venant ce soir convaincre les élus de
l'Assemblée nationale des responsabilités qui leur incombent.
Certainement que le projet de loi qui est présenté est tout
à fait prématuré et on soumet respectueusement au ministre
que les membres de l'Assemblée nationale ne devraient pas appuyer le
projet de loi dans la forme où il est présenté, à
moins de modifications spectaculaires.
M. Dufour (Jonquière): J'ai écouté
religieusement le ministre des Affaires municipales qui nous parlait de son
engagement par rapport à la réforme. Il nous a dit qu'il a fait
partie d'un comité de consultation et d'orientation. Il a
étudié toutes sortes d'avenues et ce n'est pas juste l'effet de
sa cogitation, de ses décisions, mais c'est lui qui décide de la
mettre en marche, cette réforme-là.
M. Parisien: M. le député, j'ai rencontré ma
députée, qui est également ministre
déléguée aux Finances. Elle ne réalisait pas les
conséquences de la proposition gouvernementale du 14
décembre.
M. Dufour (Jonquière): Mais elle l'approuve.
M. Parisien: Alors, on pense qu'il n'y a pas eu vraiment un
débat suffisant autour de cette proposition.
M. Dufour (Jonquière): Mais quand on entend tout ce que
vous nous dites et vos réactions par rapport au projet de loi, est-ce
que vous maintenez toujours la dernière ligne, la dernière phrase
de votre mémoire ou s'il n'y a pas certaines restrictions?
M. Parisien: À quelle phrase faites-vous
référence, M. le député?
M. Dufour (Jonquière): M. Claude Ryan, un homme
responsable et pondéré par tradition, doit convaincre ses
conseillers de refaire leurs devoirs. Est-ce que vous pensez que cette
réforme-là est juste le fait des fonctionnaires? Parce que de la
façon que vous l'écrivez, ça pourrait être le fait
des fonctionnaires, mais je pense que ça dépasse un peu ça
parce qu'il y a une volonté politique, il y a une volonté
gouvernementale. On aura beau enrober ça, mais, moi, je pense, en tout
cas... Je vous écoute. Je lis votre mémoire, je vous
écoute, et il me semble que ça ne correspond pas. Je ne dis pas
que vous ne devez pas continuer à le considérer, je vous dis que
dans cette question-là, je ne suis par sûr qu'il respecte ce que
vous pensez.
M. Parisien: Mais vous savez, on n'évoque pas cette partie
du mémoire, la fin du mémoire, sur l'actuelle démarche
qu'il tente de poursuivre dans l'adoption du projet de loi, mais sur l'ensemble
de sa carrière, à la fois comme journaliste et comme homme
politique.
Mme Marois: Ah bon! D'accord. Ça nous rassure.
M. Parisien: On fait une analyse.
M. Dufour (Jonquière): C'est une précision que
j'aime vous voir apporter. Je veux vous remercier, je trouve que c'est un
apport intéressant à cette commission. Et je pense qu'on a besoin
des gens comme vous qui paraissent plus civiques et qui, des fois, nous
rappellent qu'il y a des éléments qui peuvent être
oubliés, qu'on doit penser toujours aux usagers et au bien commun. Je
vous remercie.
M. Parisien: Et on fait un travail énorme pour tenter
d'apporter des éléments nouveaux.
M. Dufour (Jonquière): Je suis convaincu do ça.
Le Président (M. Garon): Mme la députée do
Taillon.
Mme Marois: Non, ça va, merci, je n'ai pas de question, M.
le Président.
Le Président (M. Garon): Mle député
de Pointe-aux-Trembles.
M. Dufour (Jonquière): II veut nous fairo parler
absolument.
Le Président (M. Garon): Ça va? M.le
député de Labelle.
M. Léonard: Ça va.
M. Dufour (Jonquière): Bien voyons!
Le Président (M. Garon): Alors, M. le ministre, pour le
mot de la fin.
M. Ryan: Alors, M. Parisien, vous saluerez bien M. Chartrand pour
nous tous...
M. Parisien: Je ne manquerai pas de lui transmettre le
message.
M. Ryan:... et je souhaite bon succès. à Transport
2000. Merci.
M. Parisien: Merci.
Le Président (M. Garon): Merci, M. Parisien, et bon voyage
de retour.
M. Parisien: merci, m. le président, do votre attention,
en dépit de l'heure tardive, et de votre collaboration entière,
mm. et mmes les membres.
Le Président (M. Garon): Nous ajournons les travaux
à demain 10 heures précises.
(Fin de la séance à 23 h 47)