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(Quatorze heures cinq minutes)
Le Président (M. Garon): Je déclare la commission
de l'aménagement et des équipements ouverte. Rappelons d'abord le
mandat de la commission qui est de tenir des audiences publiques dans le cadre
de la consultation générale sur l'étude de la
procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement, et sa portée, notamment en ce qui a trait aux grands
projets industriels et aux projets concernant la disposition des déchets
solides domestiques, et cela, en tenant compte de la procédure
québécoise actuelle, du rapport Lacoste, de la procédure
ontarienne et de la procédure suggérée par le gouvernement
fédéral.
M. le secrétaire, pouvez-vous nous dire s'il y a des
remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Richard
(Nicolet-Yamaska) remplace M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé
(LaFontaine) remplace M. Maciocia (Viger) et M. Poulin (Chauveau) remplace M.
Thérien (Rousseau).
Une voix: Et c'est pour la durée du mandat...
Le Secrétaire: Pour la durée du mandat. Une
voix: ...pas juste une séance.
Le Secrétaire: Pour toute la durée du mandat.
Organisation des travaux
Le Président (M. Garon): L'horaire de la journée.
Aujourd'hui, nous commencerons par des déclarations d'ouverture,
jusqu'à 14 h 30; à 14 h 30, nous entendrons le Comité de
santé environnementale des DSC du Québec; à 15 h 30, le
Centre québécois du droit de l'environnement; à 16 h 30,
la Fondation québécoise en environnement; à 17 h 30,
l'Association des manufacturiers du Québec; à 20 heures, ce soir,
après l'ajournement pour le dîner, le groupe Urbatique; à
20 h 30, Les Amis de la vallée du Saint-Laurent et, à 21 heures,
l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts.
Dans les travaux préparatoires à cette commission, nous
avons convenu qu'il y a deux genres de groupes. Il y a des groupes qui ont une
heure pour être entendus et d'autres groupes qui ont une demi-heure. La
formule habituelle, c'est que les gens vont avoir - ceux qui ont une heure - 20
minutes pour exposer leur mémoire, les députés
ministériels, 20 minutes pour les questions, dans un ensemble ou dans
deux groupes de 10 minutes, par exemple, selon ce qu'ils souhaiteront, et le
parti de l'Opposition également 20 minutes. Alors, quand le groupe qui
vient présenter son mémoire prend plus de temps, le temps est
soustrait aux deux partis pour poser des questions; lorsqu'il en prend moins,
il y a plus de questions qui peuvent être posées, selon un partage
égal entre les deux partis représentés par les
députés. C'est ce que nous avions convenu de faire.
Maintenant, le mandat que nous avons est un mandat considérable.
Je vais prendre une couple de minutes, tout simplement, pour dire que c'est une
consultation générale et des audiences publiques, ce à
quoi la commission s'est longuement préparée puisque des
députés des deux partis politiques sont allés aux
États-Unis et en Ontario. La semaine dernière, par exemple, ils
sont allés à Washington. C'étaient des réunions sur
l'état de la situation dans les différents États
américains, une session particulière d'étude sur les
questions environnementales pour faire le point. Il y a eu une longue
préparation des membres de la commission lors de discussions et de
séances de travail et, également, par des gens qui se sont enquis
de ce qui se passait ailleurs. Les gens qui ont été
engagés par la commission pour faire les travaux ont fait un travail,
depuis maintenant plusieurs mois, de préparation, un document
consultatif pour éplucher les mémoires qui ont été
présentés et pour que le débat qui aura lieu devant cette
commission soit le plus approprié possible.
Moi, ce qui m'a frappé comme président de la commission -
ça fait quand même plusieurs années que j'assiste à
des commissions parlementaires - c'a été la volonté des
députés des deux partis politiques de faire le point sur cette
question des procédures d'évaluation et d'examen des impacts sur
l'environnement. J'ai l'impression que tout le monde est un peu tanné de
voir... Comme le disait l'ancien premier ministre, on n'est plus dans le
domaine des conférences, on est dans le domaine des
circonférences où tout le monde tourne en rond. On voit rapport
sur rapport, étude sur étude et c'est pourquoi les gens ont voulu
faire le point en voyant ce qui se passait avec nos voisins les plus
immédiats, ceux avec lesquels nous sommes en concurrence comme les gens
de l'Ontario, ce qui se passe à Ottawa et ce qui se passe dans les
États américains pour en arriver à déterminer ce
qui devrait se passer au Québec. À la fin, il y aura normalement
un rapport - moi, je le souhaite - unanime de la commission, sans en
présumer, parce que s'il y a
un rapport unanime de la commission, ça veut dire que les
députés des deux partis politiques, normalement, dans leur caucus
respectif, vont faire valoir ces représentations-là. Ça
pourra jouer un rôle important pour faire un consensus à
l'Assemblée nationale. Souvent, à l'Assemblée nationale,
les gens sont d'opinion contraire, ne s'entendent pas, mais c'est comme sur
d'autres points, parfois ils s'entendent. Évidemment, c'est comme pour
les couples heureux, ils ne sont pas dans les journaux. Il y a des couples
malheureux qui font des excès et, souvent, ils font l'objet de
nouvelles. Alors, comme...
Ce que je souhaite, ce n'est pas très politique de le dire pour
ceux qui veulent faire des nouvelles, mais ce que je souhaite, c'est qu'on
puisse s'entendre, vraiment faire un consensus au cours de nos travaux pour...
Je pense que s'il y a une question qui n'est pas d'esprit partisan, qui est...
où on peut vraiment faire avancer les choses, où les gens ont le
goût de faire avancer les choses, c'est bien cette question-là. Et
je pense que les travaux de cette commission peuvent jouer un rôle
considérable dans ce sens-là. Alors, immédiatement, je
vais demander au député de Saguenay, qui est le porte-parole
officiel du parti ministériel dans les questions environnementales, de
prendre la parole et, ensuite, au député de La Prairie.
Remarques préliminaires M. Ghislain
Maltais
M. Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais
tout d'abord vous indiquer que nous sommes deux porte-parole. Nous sommes
coporte-parole, ma collègue de Vachon et moi. Alors, je prendrai la
moitié du temps et je passerai la parole à mon collègue de
La Prairie. Mme Pelchat, de Vachon, pourra prendre l'autre partie du temps qui
m'est alloué.
Dans un premier temps, M. le Président, je voudrais, bien
sûr, remercier les membres de la commission des deux côtés,
des deux partis, des deux grands partis à l'Assemblée nationale,
d'avoir choisi ce mandat qui est une première au Québec. Tout
d'abord, ç'a été une décision unanime des membres
de la commission, des parlementaires. Pourquoi? Parce que la question
environnementale est devenue primordiale pour l'ensemble des
Québécois et des Québécoises. Elle est devenue
primordiale non seulement dans la rue, mais aussi à l'Assemblée
nationale et particulièrement à cette commission. Nous avons
décidé, d'un commun accord, de regarder ce qui se passe avec nos
voisins, autant du côté de l'Ontario que du côté de
New York et d'autres États limitrophes au Québec. Nous avons
voulu garder ensemble, comme parlementaires, un regard bien posé sur nos
concurrents potentiels. Comment, au Québec, on peut faire du
développement durable, coercitif, un développement qui va nous
permettre d'acquérir et de garder une qualité de vie
supérieure dans des délais compétitifs, tout ça en
harmonie avec notre environnement?
Les parlementaires qui sont autour de cette table ne sont pas des
spécialistes en environnement. Nous ne sommes pas des universitaires en
environnement. Nous sommes des élus du peuple. Bien des gens pourront
nous reprocher de ne pas être des spécialistes, et nous
l'acceptons. Cependant, dans une démocratie, la population s'exprime par
ses élus et nous croyons qu'avec ce mandat nous avons la
responsabilité de nous assurer que, particulièrement dans des
circonstances comme celles dans lesquelles on vit au Québec depuis une
quinzaine d'années, nous avons le droit comme parlementaires de nous
poser des questions, nous avons le droit de consulter la population et nous
avons également le droit sublime de faire des recommandations à
l'Assemblée nationale qui est le siège de la démocratie au
Québec.
Nous voulons le faire d'une manière non partisane. Je pense qu'il
faut revenir là-dessus. Tout le travail qui a été fait en
collaboration avec les deux partis politiques l'a été dans
l'intérêt supérieur des Québécois. Le travail
que nous aurons à faire aussi doit tenir compte de certaines
prémisses, du développement économique qui est très
important au Québec, du développement durable, mais aussi dans le
respect de notre héritage qu'on laissera à nos enfants,
c'est-à-dire notre qualité de vie.
Il est évident que tous les mémoires qui apporteront des
suggestions positives seront accueillis favorablement, en rappelant, je pense,
M. le Président - et mon collègue de La Prairie sera sans doute
d'accord avec mol - que cette commission-là ne se veut pas un
procès public des administrations actuelles ou antérieures ou
futures, mais se veut bien la base d'un changement permanent et fondamental
pour l'ensemble de la question environnementale au Québec. (14 h 15)
L'environnement, on peut y faire de... Au gouvernement, à ses
élus, autant aux paliers municipaux que provinciaux, on pourra toujours
faire les reproches que les politiciens ne mettent pas leurs culottes. C'est
très facile à dire, mais lorsque les politiciens ont
décidé de mettre leurs culottes, je pense qu'il est Important que
ceux et celles qui viendront ici ne le fassent pas d'une façon
négative, mais d'une façon positive et constructive. Puisque les
parlementaires ont décidé de faire ce pas, nous demandons donc
aux Intervenants, M. le Président, de faire l'autre pas,
c'est-à-dire de nous apporter des suggestions importantes, des
suggestions qu'on pourra concrétiser par une recommandation unanime et.
finalement, par un projet de loi à l'Assemblée nationale. C'est
là l'objectif fondamental de la commission et des parlementaires qui
sont autour de cette table.
Nous ne voulons faire le procès de personne. Nous ne voulons
accuser personne. Nous voulons faire un pas dans l'avenir et c'est avec ceux et
celles qui ont la question de l'environnement à coeur qu'on le fera.
Voilà, M. le Président. Je cède maintenant la parole
à mon collègue.
Le Président (M. Garon): Mme la députée de
Vachon, puisque vous avez dit que...
Mme Pelchat: En vertu de la règle de l'alternance, M. le
Président, je laisserais le député de La Prairie...
Ça va.
M. Maltais: Ça ne change pas grand-chose. Le
Président (M. Garon): Dix minutes, oui. M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Dans cette
atmosphère d'entente cordiale, je ne veux certainement pas faire de
débat de procédure, mais tout de suite exprimer, au nom de
l'Opposition officielle, toute la satisfaction que nous avons d'amorcer
aujourd'hui l'étude d'une soixantaine de mémoires sur le
thème de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts
sur l'environnement.
Je veux rendre hommage à tous ces groupes et à tous ces
individus qui se sont donné la peine de préparer des
mémoires et qui vont venir devant nous discuter, faire des propositions
pendant trois semaines au moins; je veux aussi rendre hommage à
l'Opposition officielle, pardon, aux députés ministériels
- rendre hommage à l'Opposition, je le fais constamment - parce que
c'est effectivement la première fois, dans l'histoire parlementaire au
Québec, que deux partis tombent d'accord pour se donner un mandat
d'initiative. Il y a eu dans le passé des accords pour étudier
des organismes relevant de telle ou telle commission, mais un mandat
d'initiative aussi vaste que celui que nous abordons aujourd'hui, c'est la
première fois et ça n'a pas été facile. C'est
depuis l'automne 1989, peu de temps après l'élection, que nous
avons commencé, à cette commission, à aborder certains
sujets qui pourraient faire l'objet d'un mandat d'initiative. Vous savez,
ça prend la majorité des deux côtés, la double
majorité. Je vous épargne toutes les discussions
préliminaires qui ont eu lieu, mais nous sommes tombés d'accord
sur le sujet qui nous retient aujourd'hui.
Ce n'est pas par accident, M. le Président, que ce premier mandat
d'initiative dans l'histoire parlementaire du Québec a pour thème
l'environnement. Je crois que ça reflète bien cette espèce
de consensus social, cette espèce d'unanimité sociale qu'on
retrouve aujourd'hui et qu'on ne retrouvait pas il y a 10 ans ou 20 ans.
Aujourd'hui, quels que soient les secteurs de la popula- tion, les gens sont de
plus en plus sensibilisés à l'importance de maintenir un
environnement sain, de réparer des insultes ou des dégâts
environnementaux qui ont pu être créés par accident ou
autrement dans le passé et, surtout, de faire en sorte de
prévenir des accidents. On peut dire que la procédure
d'évaluation, c'est une mesure de prévention. Si on s'est entendu
sur ce thème, c'est justement parce que, des deux côtés de
cette Assemblée nationale, nous pensons que le Québec ne fait pas
assez en matière de prévention dans le moment. Nous pensons qu'en
utilisant plus la procédure d'évaluation et d'examen des impacts
environnementaux, pour tous les grands projets, nous irons dans ie bon sens,
nous irons dans le sens de prévenir, d'empêcher la mise sur pied
d'entreprises qui se développeraient de façon nocive pour
l'environnement. Donc, examen d'impact égale prévention.
Je voudrais aussi, M. le Président, dire un mot du bureau
d'évaluation, le BAPE, le bureau d'audiences publiques pour
l'évaluation des impacts, créé en 1979-1980; ce
Bureau-là a besoin de tout le support des parlementaires actuellement,
des deux côtés de la Chambre, pour reprendre la
crédibilité qu'il a déjà eue. Malheureusement, il a
perdu dans le public, et je dirais même auprès de certains
élus des deux côtés de la Chambre, une part de prestige, de
crédibilité. Je pense que c'est notre devoir de
réhabiliter la réputation du BAPE.
Il y a plusieurs façons de le faire, peut-être par la
nomination du président. On verra que certains mémoires nous
suggèrent de procéder à la nomination d'un
président du BAPE par l'Assemblée nationale, comme nous le
faisons dans le cas du Protecteur du citoyen, des membres de la Commission des
droits de la personne. Plusieurs postes prestigieux dans notre
société québécoise sont désignés par
les deux tiers des députés à l'Assemblée nationale.
Moi, je pense que ce serait une des nombreuses façons auxquelles il
faudra avoir recours pour redonner une plus grande crédibilité
à ce Bureau qui est extrêmement important.
Nous pensons, de ce côté-ci, que plusieurs
améliorations peuvent être apportées. D'abord et avant
tout, mettre en vigueur les recommandations du rapport Lacoste. On peut
comprendre pourquoi les recommandations du rapport Lacoste n'ont pas
été implantées encore, après presque trois ans -
décembre 1988 - mais on ne comprendrait pas pourquoi, après les
travaux de cette commission-ci, elles ne seraient pas implantées. Je
suis content de voir que même la plupart des mémoires des
industriels, notamment l'Association des manufacturiers du Québec,
recommandent que les conclusions du rapport Lacoste soient mises en vigueur,
que les grands projets industriels soient soumis aux évaluations et aux
examens d'impacts environnementaux.
Je pense que nous en sommes rendus à une unanimité sociale
au Québec pour faire en sorte
que tous les projets importants devront dorénavant être
examinés eu égard à leurs conséquences sur
l'environnement.
M. le Président, un dernier mot: les déchets. Ce n'est pas
par accident non plus que nous avons nommément inclus la gestion des
déchets domestiques dans le mandat d'initiative de cette commission. Il
y a de grands projets dans la région de Montréal. Il y en a dans
toutes les régions du Québec. La gestion des déchets
domestiques, c'est devenu une priorité dans notre société.
Il y a certains efforts qui ont été faits pour réduire la
production des déchets domestiques, pour les récupérer,
pour les recycler, mais ça n'est pas suffisant. Au Québec, nous
accusons un retard inquiétant à cet égard. Il va falloir
évidemment que cette prévention dont je parlais tantôt pour
la mise sur pied de grands projets industriels, nous l'utilisions aussi pour la
gestion des déchets.
En terminant, M. le Président, je formule, moi aussi, comme le
faisait mon collègue de Saguenay, le souhait que l'harmonie qui
caractérise notre séance cet après-midi continue tout au
long de ces semaines-là et que nous en arrivions à un rapport
percutant qui aidera la cause de l'environnement au Québec. Merci.
Le Président (M. Garon): Mme la députée de
Vachon.
Mme Christiane Pelchat
Mme Pelchat: Merci, M. le Président. Comme mon
collègue de Saguenay et mon collègue de La Prairie, je suis
évidemment très heureuse de la tenue de cette commission
parlementaire là. Je suis aussi très heureuse que ce mandat ait
été adopté à l'unanimité des membres de la
commission. Je pense que c'est connu de tout le monde et c'est très
clair aussi, l'importance de cette question qui est la procédure
environnementale pour la société québécoise, et la
preuve en est la forte participation des intervenants à notre
commission.
Comme le disait le député de Saguenay, il s'agit d'un
mandat d'initiative de députés, membres de l'Assemblée
nationale, de législateurs si on peut employer une autre expression,
sans nécessairement l'expertise environnementale, légale, etc.,
et professionnelle de gens qui sont tous les jours confrontés avec
l'évaluation environnementale, mais c'est l'expression simple de la
démocratie, c'est-à-dire des gens qui sont là pour
effectuer le travail pour lequel on les a élus, c'est-à-dire
faire des lois et examiner la pertinence et la qualité de ces lois et
des règlements.
Alors, je ne pense pas qu'il soit question, ni de ce
côté-ci ni du côté de l'Opposition, de remettre en
question la philosophie même de la Loi sur la qualité de
l'environnement et du règlement qui l'accompagne. Au contraire, je pense
que cette commission s'en veut une d'examen de quelle façon on pourrait
améliorer la procédure d'évaluation des impacts, de quelle
façon on pourrait la bonifier en fonction des articles qui sont en
application déjà, mais aussi des articles qui ne sont pas en
application; qu'on pense aux articles du règlement, à l'article 2
du règlement qui n'est pas encore en application, qui touche notamment
les grands projets, mais aussi les projets de disposition des
déchets.
Le député de La Prairie en a parlé, il faudra
peut-être orienter la discussion vers la question des déchets
domestiques et des déchets solides un peu plus parce que, à la
lecture des mémoires, on s'aperçoit qu'ils n'en traitent pas
énormément. On traite plutôt de la procédure qui
touche les grands projets, c'est-à-dire les articles qui ne sont pas
encore en vigueur.
Évidemment que le rapport Lacoste est une base de
référence importante, la Loi sur la qualité de
l'environnement et le règlement aussi, mais je pense que ça vaut
la peine d'entendre tous les intervenants, toutes les personnes qui ont
présenté les mémoires et qui l'ont fait de bonne foi. En
fait, Je l'espère. Les députés membres de la commission,
que ce soient les députés libéraux ou les
députés membres du parti de l'Opposition, sont aussi de bonne
foi. Ils sont prêts à entendre les gens et à le faire avec
sincérité. Et je pense que, quant au rapport, on le verra. On
verra les recommandations et on verra l'unanimité ou non autour de ce
rapport-là, mais, comme je l'ai dit, ça se fait de bonne foi et
avec sincérité, on peut rester optimiste et avoir espoir. Merci,
M. le Président, et je nous souhaite à tous d'excellents
travaux.
Le Président (M. Garon): Alors, les déclarations
d'ouverture étant faites et le temps y dévolu étant
terminé, je vais demander au Comité de santé
environnementale des départements de santé communautaire du
Québec de venir nous rejoindre au bout de la table, et demander au
vice-président, M. Robert Rousseau, de nous présenter les gens
qui l'accompagnent. Comme je le disais tout à l'heure, vous avez une
heure à votre disposition, c'est-à-dire que, normalement, le
temps est divisé en 20 minutes, 20 minutes, 20 minutes,
c'est-à-dire un tiers, un tiers, un tiers: 20 minutes pour faire
l'exposé de votre mémoire; ensuite, 20 minutes d'interrogation
par la partie ministérielle et, également, 20 minutes pour le
parti d'Opposition. Alors, M. Rousseau.
Auditions
Comité de santé environnementale des DSC
du Québec
M. Rousseau (Robert): Merci, M. le Président. Mmes, MM.
les députés, au nom du Comité de santé
environnementale, Je tiens à vous remercier de nous avoir donné
l'opportunité de
venir vous présenter les principaux éléments de
notre mémoire ainsi que la possibilité d'en discuter avec vous.
Pour débuter, j'aimerais vous présenter mes collègues qui
m'assisteront dans cette présentation: Mme Lise Cardinal,
médecin-conseil en santé communautaire au département de
l'Enfant-Jésus, et M. Daniel Bolduc, secrétaire du Comité
de santé environnementale.
En guise d'introduction, j'aimerais vous présenter un peu ce
qu'est un département de santé communautaire, très
brièvement, afin de bien situer le contexte de nos propos.
Le Président (M. Garon): Voulez-vous parler plus fort? On
ne vous entend quasiment pas.
M. Rousseau: Comme ça, vous m'entendez bien?
Le Président (M. Garon): Mettre le bouton pour que ce soit
plus fort. Vous avez un bouton.
M. Rousseau: Comme ça, ça va mieux?
Le Président (M. Garon): Oui.
(14 h 30)
M. Rousseau: Juste avant de débuter, j'aimerais vous
présenter un peu le mandat des départements de santé
communautaire afin de bien situer le contexte de notre présentation. Les
DSC, comme on les appelle, sont responsables de connaître et de
surveiller l'état de santé de la population. Ils sont aussi
responsables d'élaborer et de mener des interventions en promotion,
prévention et protection de la santé et, finalement,
d'évaluer l'organisation des services et des Interventions en
santé communautaire. Parallèlement à ces
mandats-là, nous avons quelques fonctions très
spécifiques, notamment en recherche, en enseignement, en santé au
travail et en protection de la santé publique.
Nous avons divisé la présentation de notre mémoire
en deux sections, la première étant sur la pertinence d'une
procédure d'examen et d'évaluation des impacts en regard de la
protection de la santé publique; la deuxième vise plus
particulièrement l'analyse de la procédure d'examen et
d'évaluation des impacts telle qu'elle existe actuellement. En guise
d'Introduction à l'ensemble du document, nous aimerions ramener quelques
concepts au niveau de la santé au sens où nous l'entendons dans
les départements de santé communautaire.
Il y a eu, en 1989, la Charte européenne de l'environnement et de
la santé qui disait: 'Tout organisme public et privé devrait
évaluer et exercer ses activités de manière à
protéger la santé de ta population contre les effets nuisibles
associés à des facteurs environnementaux d'ordre physique,
chimique, biologique, microbiologique et social. Chacun de ces organismes
devrait être rendu responsable de ses activités." Toujours selon
cette charte, la santé des individus devrait absolument prendre le pas
sur les considérations économiques et commerciales. À cet
effet, les pays membres proposent de gérer l'environnement comme une
ressource aux fins de la santé de l'homme et de son bien-être.
Plus récemment, il y a eu la Déclaration de Sundsvall qui
a eu lieu. C'est la Conférence internationale sur les environnements
favorables à la santé qui vient d'avoir lieu en Suède, au
mois de juin 1991, et qui a démontré que les problèmes de
santé, d'environnement et de développement humain ne peuvent
être dissociés. Le développement doit passer par
l'amélioration de la qualité de vie et de la santé en
même temps que par la protection de l'environnement.
À cet égard, les impacts sur la santé de la
population impliquent également qu'on tienne compte des
éléments psychosociaux et socio-économiques reliés
au projet et qui sont susceptibles d'influencer l'état de santé
d'une population. Il nous semble important de préciser que la gestion
économique devrait voir d'abord à l'amélioration des
conditions de vie de la population. La création d'emplois par les
activités économiques nous apparaît un objectif majeur qui
devrait être poursuivi par le gouvernement. L'évaluation
environnementale dont nous parlons devrait tenir compte de cet objectif de
création d'emplois et présenter les bénéfices et
les inconvénients, tout en examinant les alternatives les plus
intéressantes et créatrices d'emplois pour la
société.
Afin de préciser pourquoi la création d'emplois est
importante au niveau de la santé, il y a des données qui sont
dans notre mémoire, et je vais vous donner quelques
éléments, mais pas tous les chiffres qui sont à
l'intérieur. Il y a des études qui ont été faites
par Harvey Brenner, par exemple, de l'université John Hopkins, qui a
démontré que les admissions en psychiatrie augmentaient en
période de chômage élevé et déclinaient lors
de périodes prospères. Il a aussi été
décelé, dans d'autres études, une augmentation du taux de
suicide quelques années après le début de la
période de chômage. Les maladies cardiovasculaires conduiraient
à une mortalité accrue et prématurée deux à
trois ans après cette période de chômage aiguë.
Des études plus sophistiquées du même auteur
permettent d'évaluer la contribution de divers autres facteurs que le
chômage. En augmentant la puissance de son étude, donc en tenant
compte d'un paquet d'autres éléments et d'autres facteurs, il en
est venu exactement à la même conclusion, c'est-à-dire que,
même si le niveau de santé s'améliore avec
l'amélioration du niveau de vie, les variations cycliques de
l'économie créent une charge accrue de maladies et de morts
prématurées pour certains groupes touchés par une
récession. Ces études-là, remises à jour en 1984
suite à la demande du Congrès américain, ont fait en sorte
que les conclusions sont demeurées les mêmes qu'en 1976.
On a des données similaires pour le Québec et
pour le Canada. Statistique Canada confirmait l'association, en 1982, entre le
taux de chômage, les maladies du coeur et les admissions psychiatriques.
Au Québec, Fortin, en 1983, a permis de constater une similitude
marquante entre les pics de chômage et ceux de suicide, pour certaines
régions. En 1984, Demers permettait de vérifier une association
entre les variations du taux de chômage et le taux de suicide. Donc,
c'est confirmé de plus en plus que le chômage créé
par un manque d'emplois génère des problèmes de
santé. Dernièrement, Statistique Canada, en 1990, a noté
pour la première fois officiellement une augmentation des taux de
suicide dans plusieurs régions pauvres du Québec. Donc, on ne
peut pas nier la relation entre chômage, pauvreté et effets sur la
santé.
Dernièrement, l'enquête
Santé-Québec - pour vous donner des chiffres assez probants - a
révélé que les Québécois
défavorisés, âgés de 45 ans à 64 ans,
ressemblent physiquement aux Québécois mieux nantis de 65 ans et
plus. Là, on voit vraiment une distorsion entre l'état de
santé de la population en fonction du niveau de pauvreté qui,
somme toute, est directement relié à l'emploi. Quelques chiffres
démontrent encore, dans l'enquête Santé-Québec, les
coûts associés à cet état de fait. On sait que le
budget global de la santé se chiffre à 11 000 000 000 $ et
peut-être un peu plus.
On note chez la clientèle défavorisée
une consommation plus élevée de médicaments prescrits, une
fréquence d'hospitalisation plus élevée qu'en milieu
favorisé, une surreprésentation des personnes pauvres parmi la
clientèle des centres de services sociaux, un plus grand nombre de
placements d'enfants en familles d'accueil et une sous-utllisation des services
de prévention. C'est pourquoi le ministère de la Santé
propose un objectif à atteindre qui est de diminuer le taux de
pauvreté du Québec de 40 % d'ici à l'an 2000 et ainsi
réduire les coûts économiques et les coûts sociaux
engendrés par la pauvreté, objectif auquel nous adhérons
fortement.
C'est pourquoi, dans un contexte d'élaboration de
politique d'évaluation environnementale, la création effective et
maximale d'emplois à court et à long terme doit devenir un
critère déterminant devant influencer les choix politiques. Ceci
s'avère d'autant plus essentiel lorsqu'on constate l'état de
délabrement de plusieurs régions qui a amené les
populations à se regrouper dans les états généraux
du monde rural, par exemple, ou dans les états généraux de
la Gaspésie, comme on l'a vu récemment.
Finalement, quelques mots sur les impacts physico-chimiques
reliés aux études d'évaluation environnementale. On a
souvent tendance à considérer les études d'impacts et,
lorsqu'on regarde l'aspect santé, de regarder ce que, nous, on appelle
l'approche sanitaire classique, c'est-à- dire la contamination de l'eau,
de l'air, du sol ou des aliments par les produits chimiques et ses effets
possibles sur la santé de la population. Ces
éléments-là existent, ils sont déjà bien
traités actuellement dans les études d'impacts. Il y a beaucoup
d'expertise qui s'est développée à ce niveau-là. Ce
qu'on voudrait voir rajouter, ce sont les éléments des impacts
socio-économiques sur la population qui, eux, sont
générateurs de problèmes de santé, autant que les
impacts physico-chimiques que nous ne dénigrons pas.
Donc, nous espérons avoir présenté
assez clairement que l'évaluation des impacts est plus globale que la
seule perspective de la contamina tion physico-chimique de l'environnement. Les
impacts sur la santé, les impacts psychosociaux et les impacts
socio-économiques sont tous aussi importants. En conséquence, le
Comité de santé environnementale des DSC considère que la
procédure d'examen et d'évaluation des impacts est tout à
fait justifiée dans sa forme actuelle, notamment quant à l'examen
des justifications du projet, et qu'elle doit viser à évaluer de
la façon la plus complète possible tous les impacts d'un
projet.
Maintenant, au niveau de l'analyse de la procédure
d'examen et d'évaluation des Impacts, le Comité de santé
environnementale des DSC considère que le développement
économique et industriel n'est pas Incompatible avec la protec tion de
l'environnement et de la santé. Bien au contraire, nous croyons
plutôt qu'une harmonisation entre le développement et la
protection est possible et souhaitable pour le plus grand
bénéfice de la société, dans la mesure où
une gestion efficace est assurée. Certains principes
généraux de la procédure doivent être
respectés et nous en énumérons quelques-uns tirés
de notre mémoire.
On croit à une procédure qui tienne compte de
l'ensemble des impacts possibles, donc socio-économiques et pas
uniquement physico-chimiques, une procédure qui inclut la gestion du
développement économique et Industriel dans une perspective
à long terme issue des principes du développement durable. Nous
croyons en une croissance qualitative au lieu de quantitative; dans ce sens, le
mot "qualitatif veut dire une augmentation de la qualité de vie, une
augmentation du niveau de vie de la population et pas seulement un
accroissement Industriel non axé sur les besoins d'emploi de la
population. On croit à une procédure qui permette la prise en
compte, pour les prises de décision sur l'acceptation d'un projet, des
bénéfices d'un projet pour la société et de ses
inconvénients en termes d'impacts.
Lès niveaux de risque acceptables et de
bénéfices souhaitables devraient être définis par
les autorités gouvernementales au préalable. C'est-à-dire
que, lorsqu'on fait l'évaluation environnementale, on devrait avoir des
barèmes auxquels se référer. Certains problèmes
qu'on a
vécus avec la procédure d'évaluation telle qu'elle
existe actuellement, nous trouvons que la procédure est
incomplète dans sa couverture des projets. À titre d'exemple,
l'article 2, alinéas g, n, j et p, du règlement
d'évaluation n'est pas encore promulgué, ce qui permet de
soustraire un ensemble de projets industriels à la procédure
d'évaluation des impacts en environnement.
La consultation publique, à notre avis, se déroule trop
tard dans le processus de planification. Les gens devraient être
impliqués dès le début de la directive. Il ne faut pas
oublier que la population détient un savoir sur les milieux où
doivent se passer les projets. Si ces éléments-là
étaient déjà inclus dans la procédure au
début et les gens en étaient conscients au lieu que la population
réagisse après coup en disant: Vous n'en avez pas tenu compte,
ça pourrait déjà orienter la procédure dans le sens
des préoccupations de la population. La procédure
présentement ne s'applique pas aux politiques et programmes
gouvernementaux pourtant à l'origine de la plupart des projets. Nous
reviendrons un petit peu plus tard là-dessus.
Dans les améliorations à apporter à court terme, on
a parlé de participation plus précoce du public, ce qui,
d'après nous, semble faisable, et de promulguer immédiatement
l'article 2 du règlement sur l'évaluation. Ce sont les deux
principaux éléments que nous voulons soumettre à votre
attention.
Au niveau de la justification d'un projet, il faut, en effet, bien
saisir quels bénéfices peuvent être anticipés par la
société puisque ces bénéfices font partie
intégrante du processus décisionnel qui les balance face aux
risques et aux inconvénients. Dans les améliorations à
apporter à moyen terme, nous croyons qu'il devrait y avoir des zones
d'implantation industrielles qui pourraient être définies pour une
durée limitée de 5 à 10 ans, après une
évaluation environnementale et sanitaire du site et consultation de la
population. Donc, on pourrait réévaluer l'ensemble de ces
sites-là au fur et à mesure que les connaissances scientifiques
évolueront et se repositionner sur les choix qui auront
été faits.
Un processus interministériel devrait être mis sur pied
pour définir le plus précisément possible quels sont les
niveaux de risque acceptables dans l'évaluation d'un projet, d'un
programme ou d'une politique. Quand on veut décider si un projet est
acceptable ou non, il faut avoir des guides, il faut avoir des points de
référence. Qu'on ait des niveaux de risque acceptables compte
tenu des connaissances scientifiques actuelles, ça permettrait à
tout le monde de parler à peu près sur le même pied et de
partir au moins avec un point de repère standard.
Nous croyons qu'il faut confier au BAPE toute la gestion des processus
précédents, en plus de lui accorder un mandat de médiation
et d'arbitrage lorsque les parties le demandent.
Nous croyons qu'il faut transformer le BAPE en agence gouvernementale
indépendante qui aurait aussi le mandat de gérer, en la
supportant, la participation du public au suivi et à la surveillance des
projets environnementaux et, finalement, renforcer l'autonomie du BAPE en
faisant nommer son président par l'Assemblée nationale, comme le
disait M. Lazure tantôt.
Enfin, et il s'agit là de la pièce maîtresse de
l'évaluation environnementale pour l'avenir, à notre sens, nous
croyons nécessaire d'instaurer une évaluation systématique
des politiques et programmes gouvernementaux. De nombreuses questions de fond
n'ont jamais fait l'objet de ce type d'évaluation. La politique
énergétique du Québec en est l'exemple le plus pertinent
puisque l'absence d'un débat préalable occasionne aujourd'hui des
tensions importantes au niveau du projet Grande-Baleine.
Au niveau des modalités de participation de la population, la
population doit être favorisée à toutes les étapes
de la procédure. Nous pensons qu'une consultation aux étapes de
dépôt de l'avis du projet et d'émission de la directive
pourrait être menée à bien par le BAPE dans le sens d'un
"scoping" efficace, "scoping" voulant dire un balayage des informations
à traiter. L'audience publique représente évidemment le
processus le plus important de la participation du public.
En guise de conclusion, le processus actuel d'examen et
d'évaluation environnementale, malgré quelques défauts,
représente un acquis majeur pour la société
québécoise, et il faut le protéger. Le Comité de
santé environnementale croit possible d'améliorer le processus
dans le cadre législatif et réglementaire actuel, notamment par
des mesures administratives et par l'utilisation de pouvoirs accrus des
pouvoirs discrétionnaires déjà prévus à la
Loi sur la qualité de l'environnement. Le passage à l'examen
systématique des programmes et politiques représente le prochain
défi de notre société. Le maintien du bien-être et
de la santé des populations ainsi que la préservation de milieux
sains en dépendent étroitement. Merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. Dans un premier temps,
je voudrais, bien sûr, remercier et féliciter M. Rousseau, ainsi
que M. Bolduc et Mme Cardinal, de la qualité de leur mémoire.
Vous avez fait vraiment des recherches et vous faites référence
à beaucoup d'études. Je pense que vous y avez consacré
beaucoup d'heures. Votre mémoire est très bien structuré,
les recommandations bien précises. Vous avez constaté beaucoup de
choses aussi sur ce qui se passait au Québec. Je pense que c'est tout
à votre honneur de présenter un mémoire d'aussi bonne
qualité. (14 h 45)
Vous avez parlé, dans un tout premier temps, dans votre
présentation de cette Charte européenne de l'environnement. En
quoi, par exemple, une Charte européenne de l'environnement pourrait
être applicable au Québec advenant que nos covoisins, nos
voisins... Il faudrait quand même que tout le monde y adhère.
Comment voyez-vous cette charte-là qui mettrait un peu nos voisins sur
un pied d'égalité pour ne pas qu'on soit une
société non compétitive et un territoire non
organisé au niveau environnemental? Par exemple, supposons qu'on compare
le Québec à l'Ontario; si notre réglementation est plus
stricte et plus sévère chez nous, on pourrait être
défavorisé au niveau concurrentiel pour l'implantation des
industries futures, donc défavorisé au niveau des emplois que
vous tenez quand même en priorité, compte tenu de votre expertise
au niveau des maladies et des études que vous avez
complétées. Comment voyez-vous ça un petit peu? Par
exemple, si on prend le modèle de la charte européenne, comment
est-ce que, chez nous, on pourrait, au Québec, agencer ça avec
nos voisins, tout en respectant les prémisses qui vous
Inquiètent?
M. Rousseau: II faut voir la charte comme une déclaration
de principe. Quand on parle de principe, c'est dire que l'homme est au centre
de l'environnement dans lequel nous vivons et les choix qu'on doit faire
présentement doivent être faits en fonction de ça. C'est
évident qu'il y a des choix à faire dans la
société. Il faut penser à long terme. Aussi, il faut se
coller, je pense, sur le concept du développement durable, tel que
développé dans le rapport Brundtland sur notre avenir à
tous, où on dit: On peut bénéficier de l'environnement,
des ressources actuelles, mais il faut aussi penser aux populations à
venir et il faut préserver l'environnement pour qu'eux autres aussi
puissent en bénéficier de la même façon.
Mais il y a aussi d'autres éléments qu'il faut
considérer là-dedans, c'est que des choix qu'on fait
présentement, pour des besoins très ponctuels, en ne regardant
pas l'avenir, peuvent nous coûter une fortune à d'autres niveaux
10, 15 ou 20 ans plus tard. On peut penser, par exemple, à la gestion de
la forêt qui est créatrice d'emplois; oui, effectivement. Par
contre, à l'époque, il n'y avait pas d'évaluation
environnementale. On n'a pas regardé les impacts de la gestion de la
forêt telle qu'elle a été faite par les entreprises et,
aujourd'hui, plane sur nous le spectre de la rupture des stocks. Si jamais cet
élément-là se matérialisait, des emplois qui ont
été très bénéfiques pour le Québec,
qui lui ont permis de créer énormément d'emplois en
région, pourraient s'avérer néfastes parce que l'industrie
pourrait s'effondrer. Et c'est dans ce contexte-là qu'on dit qu'une
charte énonce des grands principes et des grands propos dont il faut
tenir compte dans l'ensemble de nos décisions.
Je crois que ce n'est pas le cas par cas qui est Important, mais c'est
plutôt une philosophie à long terme. On planifie pour maintenant,
on a des problèmes à régler maintenant, mais il y en a
à moyen terme et il y en a à long terme. Si on n'a pas cette
philosophie dans le domaine de l'environnement, on va tous se ramasser avec des
gros problèmes un peu plus tard. C'est un peu ça qu'on veut dire
et ça ne nuit pas au développement économique. Je pense
que les entreprises qui se sont installées ici, si on prend encore
l'exemple des pâtes et papiers, elles ne l'ont pas fait pour 10 ou 20
ans, elles l'ont fait pour très longtemps et qu'on se ramasse avec des
problèmes auxquels on doit faire face maintenant, les premiers
administrateurs n'ont pas aidé les administrateurs d'aujourd'hui. C'est
les administrateurs d'aujourd'hui qui ont les problèmes à
régler, de ceux qui les ont créés avant. Donc,
eux-mêmes se nuisent en agissant de cette façon-là. Je
pense que les entreprises veulent perdurer, et perdurer, c'est tenir compte de
la population, c'est tenir compte de l'aspect santé, c'est tenir compte
du développement économique aussi.
M. Maltais: Mais en partant du contexte où on fait face
à une mondialisation des échanges présentement, dans le
futur, on s'en va vraiment vers ça à tous les niveaux; on parle
de papetiè-res, d'alumineries, en fait, de tout produit fabriqué
à la grandeur des pays. Je vais vous donner un exemple pour vous situer.
On sait que, du côté américain, les Américains, de
plus en plus - vous parliez de papier - vont exiger du papier recyclé.
Si nos compagnies forestières ne s'ajustent pas, peut-être au bout
de quatre ou cinq ans, à qui va-t-on vendre notre papier si on ne
s'ajuste pas? Il faut s'ajuster à eux autres, à un moment
donné. On sait - je pense que mon collègue était avec moi
- que le projet de loi est déposé à l'Assemblée
législative, au Congrès américain et c'est 40 % qu'ils
vont exiger. Ça, c'est un domaine. Mais est-ce que vous autres, dans la
recherche que vous avez faite - je reviens à la Charte de
l'environnement, par exemple - est-ce que tous les pays européens vont
au-delà de la déclaration de principe ou s'ils se consultent pour
ne pas faire la distorsion qu'on craint un peu ici, chez nous, advenant que le
Québec prendrait le leadership et que nos voisins ne suivent pas? Est-ce
que vous avez pu constater ça dans l'étude que vous avez faite ou
en regardant... C'est en 1989, ça fait deux ans. Est-ce qu'il y a eu des
impacts réels sur l'implantation des grandes Industries ou encore le
recyclage de vieilles industries? Est-ce que vous avez pu constater
ça?
M. Rousseau: Mol, Je n'ai pas de données précises
sur ces éléments-là, on n'en a pas fait mention dans le
document. Je ne sais pas si mes collègues ont quelque chose à
dire là-dessus.
Votre question est très pertinente. Je crois qu'il ne faut pas
voguer à contre-courant dans le développement industriel.
Même si, ces études-là, on ne les a pas - je n'ai pas de
documentation pertinente très précise par rapport à votre
question - il y a quand même un mouvement qui se fait et qui semble
inéluctable présentement. La préservation de
l'environnement, c'est important. Il y en a qui vont dire. À tout prix
ou à quel prix? Je pense que c'est des questions qu'on peut se poser,
oui, mais l'impact santé sur notre population - c'est
l'élément sur lequel je voudrais revenir - celui-là est
majeur. On se doit, en tant que personnes qui peuvent prendre des
décisions, de faire en sorte que la population soit en santé.
Qu'on regarde le rapport Brundt-land qui commence à faire des petits un
peu partout. Il commence à y avoir des conférences
internationales, c'est-à-dire qu'il y a une prise de position qui se
fait tranquillement. On est au début de cette amorce-là. Je pense
qu'on ne peut pas voir les impacts de façon précise et les
quantifier, mais il y a quand même des mouvements qui se font un peu
partout. De suivre cette philosophie, je ne pense pas qu'on serait
rétrograde, loin de là, et je ne suis pas sûr qu'on serait
si pionnier que ça non plus. Je pense que c'est en train... Et la
population le demande aussi. Ce n'est pas juste notre population, au
Québec, qui le demande. Je pense qu'à peu près partout
dans le monde les gens deviennent de plus en plus conscients et...
M. Maltais: Vous avez touché quand même trois
interrogations qui sont majeures au Québec: l'emploi, la qualité
de vie des travailleurs et, bien sûr, la question d'être
compétitif au Québec. La question de l'emploi, et à juste
titre, je pense, est majeure au Québec. Vous avez démontré
que, lorsque quelqu'un travaille, il y a un risque à l'environnement. Il
y a un risque, si l'environnement n'est pas sain, de tomber malade, et celui
qui ne travaille pas risque de tomber malade et de ne jamais revenir sur le
marché du travail. Vous parlez d'étude psychiatrique. Je suis
sûr que mon collègue de La Prairie reviendra là-dessus,
étant lui-même un éminent psychiatre. Il pourra nous en
dire beaucoup plus long que moi là-dessus. Cependant, vous allez
convenir avec moi que c'est un défi de société où
il est fort difficile d'atteindre un juste équilibre si l'on tient
compte que, si on était tout seuls en Amérique, on ne
rencontrerait pas ce problème-là, on décréterait et
ce serait ça. Mais on doit vivre avec nos voisins. Comment voyez-vous
ça, par exemple, le Québec vis-à-vis de l'Ontario ou de
l'État de New York qui est notre plus grand voisin limitrophe au
territoire québécois? L'attitude du gouvernement du Québec
devrait être quoi? Est-ce qu'on devrait se maintenir au niveau de ces
trois, avoir des exigences ou une réglementation plus forte que ces
trois-là, que ces voisins-là, ou si on devrait rester sur le
même palier? Comment voyez-vous ça?
M. Rousseau: Ce qu'on dit, c'est que, dans un premier temps, il
faudrait établir des critères et des balises pour qu'on puisse
avoir des points de référence lorsqu'on discute
d'évaluation environnementale, et c'est ce qu'on n'a pas
présentement. Si on avait des objectifs de création d'emplois,
d'augmentation du niveau de la qualité de vie ou du niveau de vie de
l'ensemble de la population, s'il y avait une concertation
interministérielle, une coordination interministérielle pour
discuter de l'ensemble de ces problèmes... Il y a le COMPADR qui existe
déjà, mais est-ce que le COMPADR a cette
préoccupation-là? Est-ce que c'est discuté entre... Est-ce
que certains ministères ne font pas des actions pour augmenter la
performance de leur ministère au détriment de la performance d'un
autre ministère? Est-ce que les gens ne fonctionnent pas un peu en vase
clos à l'intérieur même de notre propre système? Je
pense que c'est des questions qu'on peut se poser, à ce
niveau-là, et probablement que vous êtes beaucoup mieux
placé que moi pour avoir des réponses à ce
niveau-là et avoir beaucoup d'exemples à ce niveau-là. Ce
qu'on dit, c'est qu'il faut essayer de faire une concertation de l'ensemble des
ministères avec un objectif commun qui est l'augmentation du niveau de
santé de la population. Ça passe par la création d'emplois
et ça passe par le développement économique aussi et la
préservation de l'environnement. C'est un tout, c'est indissociable.
On a un document ici qu'on peut vous donner aussi sur la
conférence de Sundsvall où on parle d'environnement favorable
à la santé. Il y avait 81 pays membres qui y étaient.
Ça répond un peu aussi à votre question de tantôt.
Il y avait 81 pays membres qui étaient là-bas. Si les gens
commencent à déléguer des représentants
gouvernementaux dans ces conférences-là et qu'ils passent cinq
jours à en parler et qu'ils prévoient d'autres
conférences, c'est que le cheminement se fait. Je pense que le
déblayage doit se faire à l'interne, se fixer des objectifs.
À ce moment-là, les investisseurs vont savoir à quoi
s'attendre, les règles du jeu vont être claires. Ça va
être clair aussi pour la population. Il y a des choix de
société qui vont se faire, et tout ça en fonction
d'objectifs très précis, qu'on mentionne dans notre document.
M. Maltais: M. Rousseau, je vous remercie beaucoup. C'est mon
seul petit 10 minutes que j'avais. Alors, je cède maintenant la parole
à mon collègue.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter les représentants des départements de
santé communautaire. Je pense qu'ils ont raison d'être
fiers de la qualité de leur travail, et ce n'est peut-être pas par
hasard que vous avez été placés en tête de liste. Je
pense que c'est une approche qui est très humaniste et qui nous rappelle
que, bien souvent, quand on parle de souci de l'environnement, au fond, on se
réfère sans trop, trop y penser à la santé,
à la santé mentale et à la santé physique des
individus. Je pense que, depuis quelques années, si la population au
Québec, comme un peu partout, est devenue plus sensible à
l'environnement, c'est en grande partie par souci, par inquiétude
vis-à-vis des menaces à sa propre santé physique ou
mentale. je veux souligner aussi vos recommandations très
précises sur la mise en vigueur des recommandations du rapport lacoste,
évidemment. je veux souligner ce que vous proposez, à savoir la
participation plus précoce du public aux étapes de l'avant-projet
et le support financier aux groupes. vous n'avez pas de recommandation. ma
question pourrait porter là-dessus pour commencer. comment voyez-vous le
support financier aux groupes? sous l'égide d'un comité
quelconque? en ontario, comme arrière-plan, ils ont passé un
projet de loi en 1988, le gouvernement peterson, la loi pour le financement des
intervenants en matière d'environnement. dans cette loi, il est
prévu un comité de sages qui décide du montant que doit
octroyer le promoteur public ou privé aux groupes ou aux individus qui
veulent se présenter pour telle ou telle audience. est-ce que vous avez
fouillé un peu les détails, comment pourrait être
administré un tel fonds ici?
M. Rousseau: Non, on n'a pas fouillé les détails.
Nous nous sommes plutôt... On a parlé, dans le texte, d'une
attribution de 0,1 ou de 1 % du coût du projet devant servir aux groupes
ou organismes voulant faire des représentations, mais on voulait
demeurer au niveau du principe sans tomber dans les modalités. Le
principe, c'était de permettre à des organismes, qui ont plein de
choses à dire et qui n'ont pas toujours accès à une
expertise appropriée pour bien formuler leurs propos, de transmettre
leur information à ceux qui auront à faire l'étude
d'impact environnemental. Je pense que c'est le point qui est très
important.
M. Lazure: Je reviens à la présidence du BAPE.
D'une part, vous dites: "renforcer l'autonomie du BAPE en faisant nommer son
président par l'Assemblée nationale". Bon, on s'entend. D'autre
part, vous dites: "transformer le BAPE en agence gouvernementale
indépendante, qui aurait aussi le mandat de gérer, en la
supportant, la participation du public au suivi et à la surveillance des
projets réalisés." Pourquoi? À votre avis, est-ce que
c'est absolument nécessaire ou ce serait préférable que le
BAPE devienne une agence que vous appelez gouvernementale indépendante?
Il y a une espèce de contradiction dans les termes "gouvernementale
indépendante".
M. Rousseau: Oui. Bien souvent...
M. Lazure: En fait, je vois ce que vous voulez dire.
M. Rousseau: On pourrait dire "subventionné par le
gouvernement, mais ayant une totale..." Un peu comme l'EPA, par exemple.
M. Lazure: Un peu comme?
M. Rousseau: L'EPA, l'Environmental Protection Agency.
M. Lazure: Oui. C'est assez amusant parce qu'il y a plusieurs
groupes maintenant qui demandent que l'EPA devienne plus gouvernemen tal...
M. Rousseau: Oui. C'est...
M. Lazure: ...moins indépendant. C'est le balancier qui se
promène. Mais, à partir du moment où le président,
par exemple, serait nommé un peu comme le Protecteur du citoyen, le
Vérificateur général, les dirigeants de la Commission des
droits de la personne, si le président du BAPE était nommé
par l'Assemblée nationale, est-ce que vous ne pensez pas que, dans un
premier temps, ça pourait suffire pour lui donner une certaine distance
par rapport au gouvernement, par rapport au ministère? (15 heures)
M. Rousseau: Le président, oui. Mais vous avez
parié, dans votre discours, tantôt, de crédibilité.
Je crois que c'est vous qui avez parlé de crédibilité du
BAPE. Je crois qu'elle est à refaire aussi, la crédibilité
du BAPE. Pour nous, de la dissocier appelons-la agence gouvernemen taie
indépendante, entre gulllements - du ratta chôment qu'elle a
actuellement permettrait, dans un premier temps, de lui redonner, en tout cas
à tout le moins, une certaine crédibilité au niveau de la
population et des organismes et donnerait aux gens la perception que cet
organisme n'est pas lié d'aucune sorte et peut tout dire ce qu'il veut
dire, sans mettre en cause présentement la crédibilité des
gens qui font l'ouvrage au BAPE, ce n'est pas ce que je veux dire.
M. Lazure: Mais, toujours sur le BAPE, vous dites à la
page 18: L'organisation interne du BAPE a été
négligée et le gouvernement n'a pas respecté les processus
prévus à quelques reprises. Est-ce que vous avez des exemples a
donner là-dessus?
M. Rousseau: Bien, on peut penser, par exemple, à la
nomination du président où il y a
eu de l'intérim pendant un certain temps... M. Lazure: Ah
bon!
M. Rousseau: ...il y a eu absence de président, plus
personne ne savait qui faisait fonctionner le BAPE, la nomination des
commissaires a été très longue à un moment
donné et on se demandait: Est-ce que le BAPE existe encore, est-ce que
le BAPE fait des fonctions? C'est des discussions qui avaient lieu dans
l'ensemble des milieux que nous côtoyions.
M. Lazure: Votre recommandation, que le directeur de la
santé publique au ministère puisse être autorisé
à demander une évaluation... C'est à la page 19,
ça.
M. Rousseau: Oui.
M. Lazure: Confier au directeur provincial de la santé
publique le pouvoir de demander un examen des impacts, etc. Pouvez-vous
élaborer là-dessus un peu?
M. Rousseau: Oui. On dit, un peu avant, que nous sommes toujours
d'accord avec une liste de projets assujettis aux évaluations
environnementales, sauf qu'une liste dans un règlement, c'est statique,
ça peut perdurer plusieurs années et les connaissances
évoluent, ce qui fait que des éléments qui, à
l'époque où on a fait le règlement, n'étaient pas
prévus dans les projets devant être soumis aux évaluations
environnementales, compte tenu de l'acquisition de connaissances, devraient
peut-être l'être. Ça, c'est le premier
élément.
Le deuxième élément, c'est que le directeur
provincial de la santé publique a un mandat de protection de la
santé publique de la population et qu'à ce niveau-là, s'il
juge qu'un élément est problématique au niveau de la
santé de la population... Et la santé, de la façon dont
nous la définissons, c'est beaucoup plus large que l'apparition de
maladies. C'est un état complet de santé et de bien-être,
autant physique que psychosocial. Le directeur pourrait être en mesure de
demander, on ne dit pas d'exiger mais de demander... Autrement dit, on laisse
une porte ouverte pour quelqu'un qui a un rôle de protection de la
santé publique et dont c'est la principale préoccupation de
pouvoir émettre un avis disant: Je crois que dans ce cas-là,
même si ce n'est pas prévu au règlement, il devrait y avoir
une étude.
M. Lazure: Remarquez que l'article 6.3 de la Loi sur la
qualité de l'environnement permettrait au ministre... Vous savez,
l'article 6.3 donne beaucoup beaucoup de latitude au ministre, hein? "Le Bureau
- parlant du BAPE - a pour fonctions d'enquêter sur toute question
relative à la qualité de l'environnement que lui soumet le
ministre..."
M. Rousseau: C'est le ministre de l'Environnement.
M. Lazure: Oui. Mais on peut prendre ce détour-là
de 6.3 parce que, de ce côté-ci en tout cas, nous, on favoriserait
une amélioration de la procédure sans nécessairement avoir
à changer la législation, changer la réglementation. On
pense que la législation et la réglementation actuelles sont, en
gros, correctes. Ça, c'est un bel exemple. L'article 6.3 de la loi donne
au ministre de l'Environnement carte blanche. Il peut commander une
étude d'impact sur n'importe quoi, y compris si le ministère de
la Santé ou le directeur de la santé dit au ministre de
l'Environnement: Écoutez, il y a lieu de croire qu'il y aurait un
problème de santé grave; voulez-vous, s'il vous plaît,
ordonner au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement de faire le
nécessaire? Il pourrait.
Mais moi, je serais curieux de voir... Jusqu'ici, je n'ai pas
l'impression que les départements de santé communautaire ou,
même, le ministère de la Santé ont été mis
à contribution tellement par le BAPE. Est-ce que je me trompe?
M. Rousseau: C'est-à-dire que depuis à peu
près un an ou deux, lorsqu'il y a des audiences publiques - la
commission Charbonneau, par exemple - l'ensemble des départements de
santé communautaire a été présent à toutes
les assemblées et représentaient le ministère, mais on est
là un peu par après, si on veut. Le dernier exemple dont je me
rappelle, c'est la commission conjointe d'évaluation environnementale de
décontamination du canal Lachine où le ministère a
été demandé... Il a présenté un
mémoire au tout début de l'élaboration de la directive.
Mais il commence à y avoir des rapprochements présentement,
surtout avec l'entente entre le ministère de la Santé et le
ministère de l'Environnement sur certains projets. On commence à
créer de bons liens de communication qui n'existaient pas il y a
plusieurs années, disons. Je crois qu'il y a eu beaucoup
d'améliorations à ce niveau-là, mais on veut laisser une
porte ouverte en disant: Le directeur de la protection de la santé
publique a un mandat qui est différent de celui du ministre de
l'Environnement qui, lui, dort s'assurer de la protection de l'environnement et
de la santé de la population, mais n'a pas le même mandat que le
directeur de la protection de la santé publique. Un peu comme à
l'époque où les départements de santé
communautaire, dans l'ancienne Loi sur la protection de la santé
publique, pouvaient faire arrêter toute situation qu'ils jugeaient
dangereuse pour la population en ayant simplement un mandat d'amener.
M. Lazure: Vous avez raison.
M. Rousseau: Ce pouvoir-là existait autrefois, et il s'est
comme volatilisé. Donc, qui a encore le pouvoir de demander que quelque
chose se fasse et d'être vraiment écouté, si quelqu'un juge
que la protection de la santé publique est en jeu, dans une situation
particulière? On ne dit pas d'exiger, on dit de demander. Il y a une
nuance quand même entre les deux.
M. Lazure: Oui. Mais, d'ores et déjà, par exemple,
votre groupe pourrait Intervenir auprès du ministre de la Santé,
faire valoir que sur telle ou telle situation, il y a lieu que le ministre de
la Santé demande à son collègue de l'Environnement de
recourir à 6.3. Ce serait possible, d'ores et déjà.
M. Rousseau: Ce serait possible, mais ça n'aurait pas le
même poids que si le directeur pouvait le demander, au même titre
que le ministre de l'Environnement pouvait le demander. Mais, moi, je crois que
si les collaborations sont bonnes, et elles commencent à l'être de
plus en plus, il y aura une oreille très attentive à ce
niveau-là. Il ne faut pas se le cacher.
M. Lazure: Je pense que ce que vous nous transmettez comme son de
cloche, c'est fort intéressant et il faudrait s'y arrêter parce
que, effectivement, non seulement les mandats des deux ministres sont-ils bien
différents, le ministre de la Santé et le ministre de
l'Environnement, mais aussi leurs préoccupations sont bien
différentes. La notion, le concept de protection de la santé pour
un ministre de la Santé est pas mal différent dans sa tête
à lui que dans la tête du ministre de l'Environnement. Et
peut-être faudrait-il que le ministre de la Santé ait un
accès ou qu'il ait une partie de la latitude que le ministre de
l'Environnement a pour déclencher une évaluation. Merci.
Le Président (M. Garon): Mme la députée de
Vachon.
Mme Pelchat: Merci, M. le Président. Messieurs, madame,
moi aussi je voudrais vous féliciter de votre mémoire et vous
souhaiter la bienvenue à la commission. J'aimerais revenir sur la
dernière question dont vous venez de terminer la discussion avec le
député de La Prairie, concernant le pouvoir qu'on donnerait au
directeur provincial de la santé publique de demander des audiences
publiques, dans le fond. Est-ce que vous pourriez peut-être
élaborer. Sur quelle base le directeur se baserait-il, dans le fond,
pour demander une telle évaluation? Est-ce qu'il commanderait des
études pour lui-même ou...
M. Rousseau: C'est dans le cadre d'un projet qui est non soumis
à la procédure d'évaluation. Comme on disait tantôt,
on croit qu'il doit toujours y avoir une liste de projets qui devrait
être soumise, et on pense que si jamais cette liste-là doit
être révisée, le ministère de la Santé sera
consulté. On espérerait que la liste soit la plus exhaustive
possible. Par contre, ce qu'il faut penser, c'est que les situations évo
luent, les connaissances évoluent et c'est dans co contexte-là.
Un règlement demeure statique tant qu'on ne l'a pas changé et des
choses qui sont exclues demeureront toujours exclues. On ne sait pas de quoi va
être faite la technologie dans 5 ans ou dans 10 ans, et quels seront les
risques présents.
Et c'est dans ce cadre-là, c'est de laisser une porte ouverte,
une latitude compte tenu de l'évolution des connaissances et compte tenu
de l'évolution de la réglementation qui ne suit pas toujours, qui
suit avec un certain délai quand même, de pouvoir agir assez
promptement en cas de menace, au niveau de la santé publique, de la
population.
Mme Pelchat: Ce que vous me dites, c'est qu'on devrait avoir une
liste de sujets obligatoirement assujettis et...
M. Rousseau: Comme présentement.
Mme Pelchat: ...pour ceux qui ne sont pas soumis, le directeur
provincial pourrait demander... C'est ça.
M. Rousseau: S'il y a lieu, en ayant quand même un dossier
à l'appui, axé sur des risques potentiels. Il faut dire qu'on
travaille énormément présentement sur l'analyse de
risques. Et on essaie d'établir, au niveau provincial, des
critères santé, des critères d'évaluation des
risques d'atteinte à la santé, compte tenu des situations qui
existent présentement. Et de là vont découler des
barèmes auxquels on pourra se référer pour évaluer
si, oui ou non il y a risque d'atteinte à la santé. Ce n'est pas
encore fait. C'est en train de se faire. C'est tout nouveau. Ce sont des
concepts qui se développent un peu partout dans le monde.
Et la journée où on va arriver à ça, on aura
des éléments assez précis pour pouvoir poser un regard
critique sur une situation à risque...
Mme Pelchat: Un diagnostic.
M. Rousseau: Et là, on va avoir cène
alternative-là, cette possibilité-là de pouvoir
questionner une situation problématique ou dangereuse. Et comme on le
dit, on le fait aussi au niveau des politiques. On le propose ici au niveau des
politiques gouvernementales où, présentement, l'ensemble des
politiques n'est pas soumis, assujetti.
Mme Pelchat: Au niveau de ce pouvoir qui est assez Important
quand même, qu'on con-
férerait à un directeur, c'est quand même
intéressant, l'aspect d'une personne autre que le ministre de
l'Environnement qui pourrait éventuellement demander, en cas de risque
à la santé publique... Est-ce que vous ne croyez pas, comme le
disait le collègue de La Prairie - moi, je suis très jalouse du
pouvoir des élus - que ça ne pourrait pas être dans la loi,
en fait, que le ministre de la Santé ne pourrait pas, lui, l'exercer de
quelque façon que ce sort? D'après moi. Est-ce que vous ne seriez
pas d'accord avec ça? Plutôt que le directeur, on donnerait... Si
on changeait la procédure en ce moment, si on avait à
améliorer et si on avait à indiquer que, quand on examine...
M. Rousseau: Absolument pas, parce que, de toute façon, le
ministre, je crois qu'il va le faire sur avis de son directeur de la protection
de la santé publique. Je pense qu'ils vont travailler en étroite
collaboration.
Mme Pelchat: alors, vous n'auriez pas objection à ce que
ce soit le ministre qui ait le pouvoir de demander plutôt qu'un directeur
parce que..
M. Rousseau: Non. Ce qu'on demande, dans le fond...
Mme Pelchat: ...c'est délicat, au niveau du partage des
pouvoirs, au niveau de l'administratif et de l'exécutif.
M. Rousseau: Non. C'est bien le principe qu'on voulait mettre
là-dedans. On l'a mis sur quelqu'un qui, présentement, a le
mandat de protection de la santé publique. La modalité, ça
pourrait être quelqu'un d'autre, en autant que ce principe-là
demeure.
Mme Pelchat: O.K. À la page 18, paragraphe 1, vous parlez
des niveaux de risque acceptables, si je ne me trompe pas. Vous dites: "Ces
décisions doivent être basées sur les connaissances
scientifiques les plus complètes et valides possible et doivent tenir
compte de l'équité entre les différents groupes qui
composent notre société dans le partage des
bénéfices et des inconvénients. Les niveaux de risque
acceptables et de bénéfices souhaitables devraient être
définis par les autorités gouvernementales au préalable,
afin de faciliter le débat." Et vous faites référence
à ce qui existe en Hollande. J'aimerais ça que vous
élaboriez un petit peu là-dessus, notamment sur quelle est votre
intention de définition de ce qu'est un risque acceptable et
peut-être sur ce que vous en connaissez de la Hollande.
M. Rousseau: Si on parle de la notion de "risque acceptable", la
notion, telle que définie présentement, varie d'un individu
à l'autre, dépend de sa formation, dépend de ses valeurs,
de ses croyances, de ses intérêts. Ce qui est acceptable pour moi
ne l'est pas nécessairement pour vous, et l'inverse aussi, et ce,
à tous les niveaux de notre vie quotidienne. C'est un des
problèmes qu'on rencontre lorsqu'on fait des audiences publiques ou
lorsqu'on veut présenter des projets. C'est que chacun y va de ses
propres valeurs. Il n'y a pas de choix de société nulle part.
C'est pour ça que, tantôt, on parlait de choix de
société. Il devrait y avoir des barèmes, des risques
acceptables et des risques inacceptables.
Mme Pelchat: Qui pourrait définir ces risques acceptables?
Le ministère de l'Environnement? Le BAPE? La nouvelle agence qui serait
créée par le BAPE? Les promoteurs? Les organismes
environnementaux? Il y a beaucoup d'intervenants là-dedans.
M. Rousseau: Je pense que c'est un petit peu tout ça. Je
pense qu'il devrait y avoir une discussion très ouverte sur: Qu'est-ce
que la société québécoise est prête à
accepter, en termes de niveau de risque, pour les bénéfices
qu'elle compte retirer de son développement industriel? Cette discussion
n'a jamais eu lieu. Et, on l'a vu, dans l'implantation des... Certaines
entreprises ont essayé d'implanter des éléments de gestion
des déchets dangereux au Québec et se sont heurtés
à la population. Est-ce que ie risque est acceptable pour eux? Est-ce
qu'il l'est pour tout le monde? Il n'y a rien, il n'y a aucun point de
référence. La discussion n'a jamais eu lieu. C'est faisable
de...
Mme Pelchat: Ça revient à votre
préoccupation concernant les programmes et les politiques
gouvernementales. C'est très relié à cela. Donc, si on
soumettait, par exemple, tous les programmes et politiques de
développement du gouvernement à des audiences publiques et
à des études d'évaluation des impacts, on aurait par le
fait même une définition des risques acceptables. Est-ce que je
vous comprends bien, je vous lis bien?
M. Rousseau: En partie. C'est-à-dire qu'on verrait si
l'ensemble de ces politiques et programmes répond aux objectifs qu'on
s'est fixés. Les objectifs, c'est de diminuer fa pauvreté et,
donc, d'augmenter le nombre d'emplois. Ça, ce sont des objectifs qu'on
vise. Et le niveau de risque acceptable, c'est lorsqu'on veut implanter quelque
chose. Le risque nul n'existe jamais, et je pense que tout le monde peut vivre
avec ça. Qu'on fasse n'importe quoi, il y a toujours un risque. Mais
à partir de quel moment disons-nous que ce risque-là, compte tenu
des bénéfices qu'on en retire, la population est prête
à l'accepter ou refuse de le prendre?
Il faut penser aussi que cette notion-là va évoluer parce
que les individus vont évoluer à
travers ça. Ce qui était acceptable il y a 20 ans ne l'est
plus maintenant. Autrefois, on ne s'excusait pas quand on voulait allumer une
cigarette; maintenant, on en est gêné. Il y a eu une
évolution et ce qui était acceptable à l'époque ne
l'est plus maintenant, et c'est comme ça dans tous les domaines. C'est
pour ça qu'on dit que ce n'est pas simple. Par contre, on peut arriver
à des grands schèmes, des grandes balises, des grands principes
auxquels on pourrait se référer lorsqu'on discutera.
Mme Pelchat: Non seulement ce n'est pas simple, mais ça
prendrait une commission parlementaire, un autre mandat d'initiative juste
là-dessus, sur les risques acceptables. Alors, on a encore beaucoup de
pain sur la planche. J'aurais une autre question à vous poser concernant
votre suggestion de création de zones industrielles. Vous avez fait une
relation qui est assez intéressante, d'ailleurs, entre environnement,
pauvreté, chômage, développement - tout ça - maladie
due à la pauvreté et au chômage. Je trouve ça
très intéressant comme relation. (15 h 15)
Vous savez que le taux de chômage en région est assez
élevé pour certaines régions, si on prend, par exemple, la
région de la Gaspésie. Quand on parle de la possibilité de
créer des zones industrielles qui pourraient accepter et accueillir des
projets, j'ai un petit peu peur que les gens, au niveau du développement
régional, nous disent: Oui, oui, un instant; nous autres, on veut tous
les projets possibles et impossibles dans telle région. En tout cas, il
va y avoir une bataille de régions. Le gouvernement ne peut pas
être insensible à cela. Alors, je ne vois pas comment on pourrait
concilier une politique de développement régional en même
temps que d'identifier des zones de développement industriel. Qu'est-ce
qui arriverait si le gouvernement décidait que les zones industrielles
sont établies dans telle région et que la population
décide qu'elle n'en veut pas, de ce type d'entreprise là?
J'aimerais ça vous entendre là-dessus, c'est un concept qui n'est
pas avancé souvent.
M. Rousseau: II y a comme deux niveaux là-dedans.
Même si l'emploi est très faible dans certaines régions et
que les gens veulent des entreprises, je ne suis pas sûr qu'ils sont
prêts à accepter n'importe quel type d'entreprise qui ferait
n'importe quoi chez eux, de un.
L'autre élément, c'est quand on parle de zones
industrielles, on ne parle pas de type d'entreprise, mais plutôt
d'impacts générés par l'activité industrielle. Deux
entreprises identiques peuvent avoir un impact tout à fait
différent: une peut polluer, l'autre ne pas polluer. C'est ça
qu'on veut dire, on parle plutôt de contamination du milieu. Autrement
dit, c'est de déterminer, dans chacune des régions du
Québec... Il y a un parallèle là-dessus. Dans le
mémoire de l'Union des municipalités du Québec, qu'ils ont
déposé à la commission Charbonneau, ils revendiquaient la
détermination de zones d'Implantation de gestion de déchets
dangereux. Ils disaient: Nous, on fait des schémas d'aménagement;
dans nos schémas d'aménagement, on devrait avoir la
responsabilité de déterminer des zones où on peut
implanter des lieux d'élimination de déchets dangereux.
C'est un peu le même concept qu'on dit là-dedans. Il y a
des schémas d'aménagement. Les gens connaissent leur territoire
et ils devraient, en collaboration avec le ministère de l'Environnement
et d'autres ministères, déterminer quelle est la charge d'impacts
environnementaux qu'une zone peut prendre par rapport à du
développement industriel et, compte tenu de ça, on pourrait
déterminer un certain type de contamination maximale qu'il pourrait y
avoir dans ce milieu-là. C'est ce qu'on dit.
Mme Pelchat: O. K.
M- Rousseau: Mais on dit aussi qu'il faut la revoir aux cinq ans
et aux dix ans parce que les nonnes qui nous permettent de prendre des
décisions maintenant vont changer avec les années: certaines vont
s'adoucir, d'autres vont devenir plus sévères. À ce
moment-là, on pourra réévaluer ces parcs-là en
disant: Bien, c'est installé dedans, s'il n'est plein qu'à 60 %
ou 70 %, ce parc industriel là, compte tenu du type d'entreprise et du
type d'impact qu'il a, peut-être que sa charge maximale sera pleine avant
même qu'il soit complètement plein, alors que d'autres pourraient
être un peu plus grands parce que les entreprises ont des impacts plus
légers qu'on ne l'avait cru initialement.
Mme Pelchat: Merci, là-dessus. Est-ce qu'il me reste
encore du temps? Une minute! Une minute pour vous remercier et vous dire qu'on
va certainement prendre en considération vos recommandations. Merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je vais revenir
à l'implication précoce de la population. Nous, on pense que vous
avez tout à fait raison. Il faut que la population intervienne beaucoup
plus tôt dans le processus. Pourriez-vous nous donner des illustrations
à savoir comment cela pourrait se faire? Dans la population, j'inclus
aussi les représentants de la santé publique, les DSC.
M. Rousseau: Je vais prendre l'exemple qui a eu lieu au printemps
dernier, la commission conjointe d'évaluation environnementale
fédérale-provinciale sur la décontamination du canal
Lachine. Pour préparer la directive, pour réaliser l'étude
d'impact, la commission conjointe, où
était un représentant du BAPE, a soumis le projet à
l'ensemble de la population. Les gens étaient libres d'aller
déposer des mémoires et de dire ce qu'ils voulaient voir inclure,
comme évaluation d'impact, les éléments qu'on voulait voir
traiter dans l'étude d'impact pour être capable d'en discuter par
après. Je peux dire que les éléments qui sont sortis
à cet endroit-là, ce n'était pas tellement: On va
décontaminer le canal Lachlne, on va sortir les sédiments.
Quelles sont les différentes méthodes qui vont être plus ou
moins dangereuses pour ma santé et c'est quoi, les risques? Les
éléments qui ont été soulevés et qu'on
voulait voir inclure là-dedans, c'était: Une fois que le canal va
être décontaminé, qu'est-ce que ça va changer dans
ma vie à moi qui vis autour du canal? Est-ce qu'il va y avoir du
développement immobilier? Est-ce qu'il va y avoir un mouvement de
population? Est-ce que les petites entreprises dans lesquelles je travaille
vont fermer? Est-ce qu'on va faire des condos? Quel est le devenir de la
population, une fois ce projet-là réalisé? C'est ce que
les gens ont demandé, que ce soit inclus dans l'étude d'impact.
Ce qu'on peut prédire, c'est que si on ne tient pas compte des impacts
socio-économiques de la décontamination de ce canal-là,
les gens vont revenir exactement avec les mêmes questions dans un an ou
dans deux ans. Lorsqu'on déposera l'étude environnementale il y
aura beaucoup de questions là-dessus. Les gens qui demeuraient dans les
environnements immédiats et le réseau de santé
étaient beaucoup moins intéressés par les méthodes
utilisées que par l'impact du canal, une fols décontaminé,
sur le devenir des populations locales où la population est très
pauvre mais très organisée au niveau social. Donc, son niveau de
pauvreté est moindre que si on la dispersait suite à un
développement Immobilier majeur, peut-être prévu et que
personne ne connaît. C'est un peu ça que je veux dire
là-dedans et c'a été très harmonieux comme
discussion avec les gens de la commission.
M. Lazure: Et cette implication précoce de la population,
est-ce que, d'après vous, c'est de nature à retarder le
processus?
M. Rousseau: Ça n'a pas retardé. Pour moi,
ça va l'accélérer si les gens tiennent compte de ce qui a
été dit là-dedans. Si on répond aux
appréhensions de gens face aux impacts potentiels de ce projet-là
et qu'on puisse, après ça, en discuter, les gens vont parler de
ce dont ils sont préoccupés. Si la commission ne tient pas compte
de ces éléments-là dans sa directive, les gens vont
revenir exactement avec les mêmes questions et vont commencer à
contester l'ensemble du processus parce que la discussion n'aura pas
été ouverte, franche et on n'aura pas répondu à
leurs interrogations.
M. Lazure: On peut continuer dans la même veine. Les
départements de santé communautaire sont relativement
régionalisés. On n'est jamais trop sûr combien il va y en
avoir l'an prochain ou dans deux ans, mais ça, c'est une autre question.
Est-ce que vous envisageriez que cette implication précoce, par exemple,
des agents de la santé, des départements de santé
communautaire, puisse se faire région par région? Et plus large
que ça encore, est-ce que les procédures d'évaluation et
d'examen des impacts ne devraient pas se faire principalement par des
organismes régionaux? Que ce soit le département de santé
communautaire, que ce soit un conseil de développement
économique, que ce soit une chambre de commerce, les agents
régionaux... Tantôt, quelqu'un citait l'exemple du Saguenay
où il y a des alumineries en quantité. Alors on peut imaginer que
les gens dans cette région-là, vos gens en santé
communautaire ont développé une expertise.
M. Rousseau: Ça se fait déjà et il faut dire
que c'est vrai pour les projets régionaux. Les DSC qui ont des
préoccupations et des mandats de région se préoccupent de
ça dans leurs diverses régions où il y a des ressources en
santé environnementale. Et on a aussi un mécanisme de
coordination provinciale qui est le comité et où, lorsqu'un
projet dépasse - si on parie de la stratégie des forêts par
exemple - et touche l'ensemble des DSC périphériques aux grands
centres, à ce moment-là, on met des mécanismes de
coordination provinciale pour faire des mémoires communs qui vont
s'appliquer à l'ensemble d'une stratégie forestière. Et
ces mécanismes-là existent. C'est déjà
amorcé. Lorsque le ministère de l'Environnement reçoit
l'avis de projet, il y a déjà une consultation qui se fait
auprès du ministère de la Santé et, via le comité
provincial, c'est redescendu dans les DSC concernés et il y a des avis
de santé publique qui sont émis sur l'avis de projet. Donc, il y
a tout un mécanisme qui est informel, mais qui est relié aussi
à l'entente des ministères de la Santé et de
l'Environnement qui existe.
M. Lazure: Si on appliquait ces préoccupations
régionales là au BAPE lui-même, est-ce que vous iriez
jusqu'à envisager une série de BAPE régionaux qui
procéderaient aux évaluations en région?
M. Rousseau: Je ne le sais pas. Je n'ai pas
réfléchi à la question. Mais en
réfléchissant un peu à voix haute, je crois que les gens
qui sont à l'intérieur du BAPE peuvent traiter d'un ensemble de
problèmes environnementaux et je crois que l'expertise qui se
développe dans une région face à une problématique,
bien souvent, les connaissances doivent être transférées au
niveau de la connaissance acquise dans un projet ailleurs. Et de dire que les
BAPE doivent être régionaux, je ne le sais pas. Je n'ai jamais
réfléchi à la question. Je ne sais pas si mes
collègues ont une opinion là-dessus.
M. Lazure: II pourrait y en avoir un national et des
régionaux. Moi, je m'inspire un peu, dans ma question, de
précédents. Au Ver-mont, ils font ça. Ils ont
divisé tout le territoire de l'État en neuf régions et
c'est tout petit. Il y a à peine 1 000 000 d'habitants pour l'ensemble
du Vermont, mais ils ont quand même neuf bureaux régionaux
d'évaluation tout en ayant un bureau d'État aussi.
Mais une dernière question. Vous dites à la page 21:
"...confier au BAPE toute la gestion des processus précédents, en
plus de lui accorder un mandat de médiation et d'arbitrage lorsque les
parties le demandent". Médiation, oui, mais quand le même
organisme fait à la fols médiation et arbitrage, est-ce qu'il n'y
a pas un danger d'être en conflit d'intérêts?
M. Rousseau: Si l'organisme est indépendant, comme on le
demandait tantôt, et qu'il...
M. Lazure: Non, mais même s'il est indépendant... Le
même organisme, autrement dit, va consacrer des efforts pour essayer de
rapprocher les deux parties, faire de la médiation, disons. Ce
même organisme-là, ensuite, serait celui qui donnerait la
décision finale, qui arbitrerait.
M. Rousseau: C'est-à-dire que quand on dit "arbitrage",
c'est de prendre une position, une décision face à deux
problématiques où les gens ont un conflit et on veut
régler le conflit. Donc, c'est un peu comme la procédure
d'arbitrage dans les conventions collectives. Quelqu'un fait un arbitrage et
quelqu'un vient aider à solutionner le problème...
M. Lazure: Oui, oui.
M. Rousseau: ...et, en bout de ligne, porte un jugement, compte
tenu d'un paquet d'éléments.
M. Lazure: Oui, mais généralement, ce n'est pas la
même personne qui fait et la médiation et l'arbitrage. Quelqu'un
fait la médiation un bout de temps, si ça ne marche pas, si c'est
un échec, là, il arrive une autre personne qui vient faire
l'arbitrage.
M. Rousseau: Nous, on voyait bien que le BAPE, en étant un
organisme crédible, pouvait assumer ces deux fonctions.
M. Lazure: II me reste une minute environ et, moi aussi, je veux
vous remercier beaucoup non seulement pour votre mémoire, mais aussi
pour la participation des départements de santé communautaire
dans certaines situations très précises, que ce soit à
Saint-Jean, Balmet, ou dans l'est de Montréal et, évidemment,
à Saint Basile aussi et à Saint-Amable. Les DSC sont en train de
développer une expertise fort intéressante. Je veux vous
remercier au nom de l'Opposition.
Le Président (M. Garon): On vous remercie. M. Rousseau:
Merci beaucoup.
Le Président (M. Garon): Maintenant, je voudrais demander
au Centre québécois du droit de l'environnement et à son
président, M. Michel Bélanger, de venir nous rejoindre au bout de
la table et de nous présenter les gens qui l'accompagnent. Comme vous
avez une heure pour la présentation de votre mémoire,
c'est-à-dire 20 minutes pour votre présentation, 20 minutes
également pour chacun des partis, le parti ministériel et celui
de l'Opposition, le temps que vous prenez en plus leur est soustrait et le
temps que vous prendrez en moins leur est dévolu. À vous la
parole, M. Bélanger.
Centre québécois du droit de
l'environnement
M. Bélanger (Michel): Merci bien. En commençant, je
voudrais juste rectifier un peu au niveau des présentations. Je suis
directeur du Centre; le président est Franklin Gertler. Il ne peut pas
être ici présent aujourd'hui parce qu'il est justement
impliqué devant la cour dans une cause d'évaluation
environnementale. J'ai, à ma gauche, Me Lorne Giroux, membre de notre
conseil d'administration, qui va présenter le mémoire aujourd'hui
en ma compagnie et, égale ment, devait être présent
Stéphane Roberge, secrétaire du comité, qui n'a pas pu
venir, revenant d'Ottawa et étant un peu en retard.
Un mot seulement pour présenter le Centre québécois
du droit de l'environnement. C'est un organisme à but non lucratif qui
regroupe principalement des juristes et d'autres spécialistes du domaine
de l'environnement. Nos objectifs sont, d'une part, de favoriser l'accès
aux citoyens à ta justice en matière d'environnement et,
également, de promouvoir son implication dans les processus de
décision. Donc, vous pouvez comprendre qu'une commission parlementaire
qui porte sur l'évaluation environnementale nous intéresse
particulièrement.
Notre approche est multidisciplinaire, comme vous pouvez le voir par les
membres du comité qui ont siégé pour préparer le
présent mémoire Peut-être juste une petite
parenthèse pour ce qui est de la presse. J'avais préparé
un résumé du mémoire pour les gens de la presse et j'ai
appris qu'il ne s'était pas rendu comme prévu. Alors, une copie
devrait être fournie tout à l'heure et j'ai avec moi quelques
copies du mémoire si besoin était.
Je donne la parole tout de suite à Me Giroux pour vous
présenter le contenu du
mémoire.
M. Giroux (Lomé): M. le Président, mesdames et
messieurs, le Centre québécois du droit de l'environnement
remercie la commission parlementaire de lui avoir donné l'occasion de
participer à ce débat qui est important pour la
société québécoise. Nous n'avons pas l'intention de
faire la lecture de notre mémoire devant vous, compte tenu du temps qui
nous est alloué. Cependant, nous aimerions regrouper en un certain
nombre de propositions les principes sous-jacents que le Centre a fait valoir
dans le mémoire qui vous a été soumis aujourd'hui. (15 h
30)
Le premier point que nous aimerions soulever, c'est qu'il existe
actuellement une profonde incompréhension sur ce qu'est
véritablement le processus québécois d'évaluation
et d'examen des impacts sur l'environnement. Nous aimerions rappeler que,
juridiquement, il s'agit essentiellement d'un processus, c'est-à-dire
d'une procédure consultative devant conduire à une prise de
décision sur un programme, une politique ou un projet
spécifique.
Ceci signifie d'abord qu'aux termes de la procédure la
décision finale sur l'opportunité ou non de réaliser le
projet appartient au Conseil des ministres qui peut prendre la décision
qu'il veut parce que son jugement est fondé sur des questions
d'opportunité à la lumière des éléments qui
lui sont fournis.
Juridiquement, étant donné qu'il s'agit d'une
procédure, il apparaît aux yeux du Centre qu'il est essentiel de
préserver l'intégrité de cette procédure. Puisque
la décision finale reste entre les mains du Conseil des ministres et
puisque la procédure a simplement pour but de faciliter cette prise de
décision, juridiquement, le Centre estime qu'il est essentiel de
préserver l'intégrité de cette procédure et de
décourager toutes les tentatives d'en fausser l'exercice par des
techniques comme la segmentation, la division des projets, ou par la prise de
décisions antérieures qui vont avoir pour effet de fausser
l'efficacité de la procédure.
Deuxièmement, au point de vue juridique, il s'agit d'une mesure
par excellence de droit préventif parce que cette
procédure-là, qui est une technique juridique de droit
préventif, nous permet d'évaluer à l'avance les
conséquences environnementales possibles, qu'elles soient
bénéfiques ou défavorables, d'un projet sur
l'environnement. Elle permet, à ce titre, de décider de
l'opportunité de conduire ce projet-là et, ultimement, si la
décision est prise de réaliser le projet, de prévoir (es
méthodes par lesquelles on va minimiser les impacts négatifs du
projet sur l'environnement.
Le mémoire souligne que toute la procédure est à la
fois au bénéfice du promoteur lui-même aussi bien qu'au
bénéfice du gouvernement et de la société en
général. Et la position que le
Centre défend, c'est que le Québec ne peut pas,
collectivement, se priver de ce moyen puissant d'intégrer les
considérations environnementales dans la prise de décisions
publiques ou même, dans certains cas, privées au
Québec.
Un deuxième point que nous aimerions souligner, relativement
à la procédure, c'est que, contrairement à ce qui est
fréquemment véhiculé, ce n'est pas la participation du
public qui a pour effet d'allonger indûment les délais de la
procédure. Le rapport Lacoste démontre de façon
éloquente que la seule partie, en fait, de toute la procédure qui
est limitée juridiquement, c'est la partie de l'audience publique devant
le BAPE parce que cette partie-là est assujettie à un
délai qui est déterminé par le règlement de quatre
mois. Et le constat paradoxal qui est fait par le rapport Lacoste, c'est que si
on augmente la participation publique dans la procédure, si on permet au
public d'être mieux informé, par exemple, de l'avis de projet et
si on associe le public à la période antérieure dans le
processus, celle où on élabore la directive de l'étude
d'impact, le rapport Lacoste démontre de façon éloquente,
en ce qui nous concerne, que d'augmenter et mettre plutôt la
participation publique dans le processus va avoir pour effet d'alléger
les études d'impact, de réduire la durée du processus et,
également, d'en réduire les coûts.
Un autre point que nous aimerions faire valoir, globalement, et ce
point-là est relevé dans le mémoire également,
c'est que plusieurs des difficultés qui sont vécues actuellement
à l'égard du processus d'évaluation et d'examen des
impacts au Québec viennent du fait que l'on demande aux organismes
concernés de faire l'évaluation environnementale de projets
spécifiques, lesquels projets spécifiques s'insèrent dans
le cadre de politiques plus générales qui, elles, ont
échappé à l'évaluation environnementale. Beaucoup
de discussions, à l'heure actuelle, aux yeux du Conseil, viennent du
fait que, certaines politiques générales de développement
- pour donner un exemple concret, la politique en matière
énergétique - n'ayant pas fait l'objet d'une discussion
environnementale publique élaborée, les difficultés se
soulèvent ensuite lorsqu'on demande aux organismes chargés de
faire les évaluations environnementales de discuter de projets concrets
qui s'insèrent dans le cadre de cette politique-là. Et,
forcément, les questions globales qui n'ont pas fait l'objet de
discussion au niveau de la politique sont ramenées dans la discussion
des projets concrets et, souvent, au détriment du promoteur
lui-même. Et refuser d'inclure les politiques de développement
dans le cadre d'une évaluation environnementale, ça ne peut
conduire, aux yeux du Conseil québécois, qu'à faire
ressortir ces discussions-là ultérieurement, lorsque des projets
spécifiques s'insérant dans cette procédure-là vont
être discutés, rallonger le processus, fausser la discussion et,
souvent, c'est le promoteur qui
va en faire les frais.
J'ajouterais deux éléments qui sont couverts par le
mémoire, mais sur lesquels nous aimerions revenir brièvement. La
partie la plus faible du régime juridique québécois, celle
qui est passée sous silence dans la législation et dans la
réglementation, c'est la question du suivi environnemental et, pour le
Centre québécois du droit de l'environnement, la question du
suivi environnemental est importante non seulement parce qu'elle permet de
vérifier si le projet se réalise dans le cadre des autorisations
qui ont été données, mais surtout parce qu'elle devrait
permettre de tirer profit de nos expériences passées et d'en
tirer des enseignements utiles pour la conduite des évaluations
environnementales futures. Et, dans la mesure où il y aura un meilleur
suivi environnemental, nous sommes convaincus que certains des problèmes
actuels qui sont vécus dans la procédure pourraient être
éliminés parce que nous aurions avantage à tirer profit
des expériences du passé. Ceci implique qu'il devrait y avoir des
normes plus sévères quant à la conduite du suivi
environnemental.
En ce qui concerne la médiation, beaucoup de choses ont
été dites au niveau de la médiation dans le processus
d'évaluation environnemental québécois. Il faut comprendre
ici à quel moment la médiation peut se situer. Comme vous le
savez, dans le processus québécois, au moment où le
ministre rend publique l'étude d'impact préparée par le
promoteur, il y a une période de consultations publiques de 45 jours,
pendant laquelle n'importe qui peut demander au ministre de tenir une audience
publique par l'intermédiaire du BAPE. Il y a eu des situations
dans lesquelles la demande d'audience a été faite par une seule
personne, un seul groupe ou un nombre restreint de personnes. Dans ce
contexte-là, dans la mesure où la demande pouvait être
fondée sur des incompréhensions ou dans la mesure où la
demande pouvait s'adresser à certains des aspects particuliers du projet
sans remettre en question l'opportunité de l'ensemble du projet, il y a
eu des tentatives de médiation qui ont été faites,
tentatives qui visaient à tenter de concilier le point de vue du ou des
requérants avec le projet, et ces tentatives-là, dans certains
cas, ont eu pour effet que, puisque le requérant était satisfait,
puisque sa préoccupation était prise en compte, il a
retiré sa demande d'audience publique, de sorte que le processus s'est
continué sans que l'on passe devant le BAPE.
Le Centre québécois du droit de l'environnement signale
ici qu'il ne faut pas oublier que celui qui fait une demande d'audience
publique, même si ce n'est qu'une seule personne, dans la mesure
où cette demande-là n'est pas frivole au sens de la loi, il se
trouve à protéger les intérêts de l'ensemble du
public, c'est-à-dire de tous ceux qui vont ensuite pouvoir
bénéficier du processus d'audience publique devant le BAPE.
Et, dans cette mesure-là, le Centre signale qu'il faut être
prudent parce que la médiation ne doit pas être vue comme un moyen
de réduire la possibilité pour le public de participer au
processus de discussion des impacts et de l'opportunité du projet.
Dans ce sens-là, à l'heure actuelle, sans modifier la
procédure, II serait possible, comme le signale le rapport Lacoste,
d'ailleurs, do prévoir la continuation de certaines expériences
de médiation, mais le Centre manifeste certaines inquiétudes
à l'égard de modifications qui auraient pour effet de substituer
la procédure de médiation à la procédure de
discussion publique. Et le Centre signale qu'à tout prendre, entre les
deux, nous préférons encore la procédure de consultation
publique.
Maintenant, il y a d'autres points spécifiques. Je laisse la
parole à Me Bélanger, s'il y a d'autres points qu'il voudrait
soulever.
M. Bélanger (Michel): Certaines précisions
peut-être, simplement. Nous avons été sollicités,
bien malgré nous, sans effort de publicité, par plusieurs
citoyens et groupes de citoyens qui sont aux prises avec des problèmes
d'ordre juridique en environnement. Dans la limite de nos moyens techniques et
financiers, on a tenté de répondre à ces
besoins-là. Je peux vous dire aujourd'hui de cette expérience
relativement récente des deux dernières années qu'à
peu près 70 % des dossiers qui nous arrivent de partout dans la
province, c'est assez surprenant, les principales questions discutées
sont des questions d'accès à l'information et de participation
des citoyens au processus de décision dans leur région. Et, assez
surprenant également, il y a beaucoup de questions de gestion de
déchets domestiques. Il y a un genre de culte du silence qui
règne un peu partout par peur ou par manque de confiance, mais cette
situation là fait en sorte qu'à l'heure actuelle on n'est pas
beaucoup plus avancé qu'on ne l'était il y a 10 ans, finalement.
On est passé de la conscience environnementale à la mise en
application. Je pense que là, c'est assez évident. Cette
conscience-là s'est faite assez rapidement et je pense qu'on n'est pas
tout à fait prêt et adapté à mettre en applicaton
ces mesures-là.
À ce chapitre-là, on estime, au niveau du Centre
québécois du droit de l'environnement, que la procédure
d'évaluation des impacts sur l'environnement est une procédure
nécessaire, sinon essentielle, ne serait-ce que pour permettre à
nos élus de prendre des choix qui vont s'avérer très
difficiles à accepter socialement On parle de courage politique. On
attend de nos élus du courage politique. Par définition, du
courage politique, c'est d'imposer à la population des décisions
qui sont impopulaires, ce qui est un peu rare dans notre système
actuellement. Mais n'empêche que c'est la réalité que la
problématique environnementale nous présente.
En ce sens, nous estimons que la procédure,
telle qu'elle est, sous réserve peut-être d'ajustements
mineurs au niveau du règlement, devrait être maintenue.
Je m'en tiendrai là pour ce qui est de la présentation et
on complétera avec les questions.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M.
Bélanger, merci, M. Giroux, pour votre mémoire. Bienvenue
à la commission. Vous avez terminé sur une note, M.
Bélanger, de courage politique. Je pense que c'est un message fort
important, mais la politique nous apprend aussi que les lois impopulaires ne
permettent plus aux politiciens courageux d'exercer leurs droits. Ils ne sont
plus là. Il y a une certaine règle de limite quand même
qu'il nous est permis d'exercer, en démocratie, mais tout en gardant
aussi, indépendamment de qui nous sommes, un certain juste milieu.
Moi, j'aimerais juste, en préambule, si vous voulez, dans
peut-être deux minutes - vous savez qu'on est limité dans le temps
- que vous me parliez un petit peu de votre association. Je m'excuse, mais on
n'a pas une connaissance approfondie de votre association. Je pense que c'est
la première fois que vous présentez un mémoire ici en
commission parlementaire à notre commission. Peut-être que dans
d'autres commissions, mais à la nôtre...
Une voix: Ils sont venus déjà.
M. Maltais: Ici, oui? En tout cas, pouvez-vous me donner, en deux
minutes, le résumé de votre association?
M. Bélanger (Michel): En deux minutes, le Centre, comme je
l'ai dit, a été formé il y a deux ans. C'est un
regroupement de juristes qui ont décidé, finalement, d'essayer de
faire valoir l'intérêt public sur les questions de droit de
l'environnement. Donc, on a vraiment deux mandats dont le premier est
d'intervenir sur la lettre de la loi, les politiques, les règlements, de
manière à se donner des moyens plus efficaces et
également, éventuellement, d'assurer un certain support et
service aux citoyens et aux groupes de citoyens qui oeuvrent dans leur
milieu.
M. Maltais: D'accord.
M. Bélanger (Michel): Mais on n'est pas rendu à
cette ultime étape-là. On peut refaire ce qui existe
déjà en Ontario et dans plusieurs autres provinces canadiennes
qui sont déjà équipées d'organismes comme le
nôtre.
M. Maltais: Un genre d'ombudsmans bénévoles.
M. Bélanger (Michel): Ça ressemble à
ça, oui. Surtout la...
Une voix: Non payés.
Des voix: Ha, ha, ha!
(15 h 45)
M. Maltais: Merci beaucoup de ces précisions. Dans votre
mémoire qui est quand même assez - et on s'attendrait, du moins
pour vous autres, à ce qu'il soit assez légaliste parce que vous
êtes des juristes - légaliste, il y a quand même des points
qui sont particulièrement vrais et qui, à notre
compréhension, devraient être sans doute appliqués. Moi,
j'aimerais, par exemple, que vous nous donniez un petit brin d'explications.
Vous dites, à la page 15 de votre mémoire: "À vrai dire,
l'analyse de l'étude d'impact, dans une optique de développement
durable ou viable, est le seul critère d'évaluation, si
imprécis soit-il, à l'égard duquel nous devons aujourd'hui
orienter tout projet de développement."
J'aimerais ça que vous me parliez un petit peu de ça parce
qu'il y a beaucoup de personnes dans le public qui nous donnent beaucoup de
critères d'évaluation, beaucoup de facteurs. Et vous, votre
organisme, vous les résumez quand même en un ou deux facteurs.
J'aimerais ça que vous me fassiez peut-être... les
catégories par importance. C'est quoi qui vous a portés à
vous prononcer sur un jugement aussi court, si on veut, par rapport aux
doléances qu'on reçoit continuellement au niveau de pratiques
d'évaluation?
M. Bélanger (Michel): Je n'ai pas fait... Je n'entends
pas, je n'ai pas la prétention non plus, nous n'avons pas la
prétention d'avoir défini le concept de développement
viable ou durable. Les gens ne s'entendent même pas sur ces deux mots,
alors imaginez-vous ce que c'est. Non, ce qu'on dit ici, essentiellement, c'est
qu'il y a eu certains reproches, ou certains commentaires qui ont
été faits à l'effet que c'était peut-être
outrepasser les pouvoirs de l'organisme que d'ajouter comme critère
d'évaluation le développement durable ou viable dans son
évaluation.
Ce qu'on dit, essentiellement, c'est que parmi les critères du
Bureau d'audiences publiques sur lesquels pourrait porter l'étude
d'impact, en vertu du règlement sur l'évaluation
environnementale, il y a différents éléments dans lesquels
on ne retrouve pas le fameux concept de développement viable. Mais ce
développement viable n'est pas un critère d'évaluation,
mais plutôt une perspective de tous les éléments que le
règlement oblige et impose au niveau de l'étude d'impact, ou
jusqu'où il permet d'aller; c'est finalement une perspective dans
laquelle doivent être évalués les différents
critères que le règlement oblige.
Donc, autrement dit, je n'ai pas la préten-
tion de définir quelle est la portée du
développement viable. D'ailleurs, Me Giroux a mentionné que les
grandes politiques gouvernementales devaient éventuellement tabler sur
de grandes orientations. C'est principalement par l'entremise de ces politiques
générales que va s'orienter justement, suite à des
consultations publiques élargies, le type de développement que
notre société entend privilégier.
M. Maltais: Un petit peu plus loin dans vôtre
mémoire, vous calquez un petit peu sur la loi de l'Ontario, du
gouvernement ontarien, concernant les procédures. On sait que ça
s'applique uniquement aux projets hydroélectriques. Ça ne
s'applique pas aux autres grands projets, à moins que ma mémoire
ne soit fausse et mon collègue me corrigera, mais vous pouvez me
corriger aussi. Écoutez, ce n'est pas clair dans la loi, mais par
expérience, là où ça s'est appliqué, c'est
uniquement au niveau des projets hydroélectriques. On sait comment
ça fonctionne. C'est une espèce de tribunal, "an assessment
board" qu'on appelle, ce genre de tribunal. Est-ce que vous avez analysé
ou est-ce vous avez regardé un peu les résultats de ce genre de
tribunal qu'il y a en Ontario, au niveau du ministère de
l'Énergie et des Ressources et d'Hydro-Ontario?
Nous, on est allé, on a regardé ça, on a vu comment
ça fonctionne, et mon collègue et moi avons été un
petit peu épatés de voir que, finalement, c'était
Hydro-Ontario qui payait les groupes, qui engageait les procureurs aux groupes
pour que les groupes viennent en auditions publiques devant un tribunal quasi
judiciaire. Ce sont des juges, au fond. Mais il y a une chose qui
m'échappe - on n'a pas eu le temps parce qu'on était juste une
journée et demie là-bas - c'est les résultats de
ça. Qu'est-ce que ça donne dans le concret? Est-ce que vous avez
des exemples à nous dire là-dessus?
M. Giroux: Écoutez, il y a actuellement quatre
régimes différents qui existent au Québec, plus le
régime fédéral. J'avoue que, dans mon enseignement, j'ai
commencé par me taper ces cinq-là, et je n'ai pas une
étude exhaustive du régime ontarien. Seulement, il faut concevoir
ceci: Dans le régime ontarien, dans le cas d'un projet spécifique
de développement, à toutes fins pratiques, l'organisme rend une
décision. Et cette décision-là peut être
ultérieurement renversée au niveau politique. C'était
ça à venir jusqu'à tout récemment, à moins
que ça n'ait été modifié.
Ce modèle-là n'a pas été suivi au
Québec, et tous les observateurs du système
québécois sont d'accord pour dire que ce modèle-là
ne doit pas être suivi au Québec, pour plusieurs motifs.
Le premier motif, c'est que nous estimons que c'est plus logique, dans
un système de parlementarisme britannique, que la décision finale
se prenne directement par des gens qui sont responsables devant
l'Assemblée.
Deuxièmement, parce que la décision de l'organisme est
finale jusqu'à ce qu'elle soit renversée, ceci a conduit à
une judlclarisatlon complète du processus devant l'Ontario Joint Board,
ce qui fait que vous avez un système où les gens sont
représentés par des procureurs. Vous avez un système
d'Interrogatoire, de contre-interrogatoire, etc. Ce système-là a
été écarté par tout le monde. Le rapport Lacoste,
mais bien d'autres avant lui, a dit: On n'en veut pas, de ce
système-là. Et, quoi qu'on en dise, quoi qu'il ait
été dit à propos de la crédibilité du BAPE,
il n'en reste pas moins qu'après 10 ans le vrai test de la
crédibilité du BAPE, et II le passe haut la main, c'est que,
pendant 10 ans, ce système-là a bien fonctionné au
Québec et, de façon substantiellement majoritaire, les
recommandations du BAPE ont été entérinées par le
Conseil des ministres. Le système québécois, tous les
observateurs sont d'accord pour le dire, dans notre contexte à nous, II
favorise une participation plus complète, moins artificielle et moins
"antagonistique", si vous voulez, des groupes et des participants.
M. Maltais: Merci beaucoup. Je pense que vous êtes un
excellent plaideur. On voit que vous êtes habitué parce que, vos
réponses, vous y allez. Mais, nous autres, on est limités dans le
temps, alors, on va essayer d'y aller avec le plus de questions possible. Vous
avez regardé également la loi fédérale, vous en
parlez dans votre mémoire à la page 14, quelque chose comme
ça. Si vous aviez à comparer les deux lois, comme juriste, est-ce
que les deux sont sur un pied d'égalité? Est-ce qu'il y a un
"joint venture" à faire ou si le Québec est plus
avant-gardiste?
M. Giroux: C'est difficile à dire. Moi, je ne suis pas
capable de porter un jugement global comme ça, mais je peux vous dire,
II y a des éléments... La loi fédérale est plus
avancée parce qu'elle permet une participation publique au niveau de
l'élaboration de la directive. L'exemple du canal Lachine qui a
été donné tout à l'heure, c'est le meilleur
exemple. Par ailleurs, la loi fédérale a des faiblesses, dans la
mesure où elle laisse au ministère responsable du projet la
première décision quant à la soumission du projet au
processus public. Nous, nous préférons le système
québécois dans lequel il y a un règlement qui dit que, ces
projets-là, vous n'aurez pas le choix, vous allez les assujettir.
Toutefois, nous devons vous dire que, si on lit la jurisprudence
récente qui a été rendue par la Cour
fédérale, si on émascule le régime
québécois au point où la participation publique
disparaît, à toutes fins pratiques, il va y avoir des tendances
Importantes à voir, dans tous les projets de développement, un
aspect fédéral pour que le régime fédérai
puisse s'appliquer. Il y a
des décisions des tribunaux, toutes récentes, qui
encourageraient un processus comme ça. Je ne crois pas que ce soit
à l'avantage du Québec de réduire l'efficacité du
processus québécois parce que ça va avoir tendance
à tenter d'embarquer le régime fédéral.
M. Maltais: Merci beaucoup. C'est tout le temps qu'il me reste,
alors...
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter, moi aussi, les porte-parole du Centre
québécois. Ils m'amènent à me réjouir
d'avoir envoyé ma contribution au Centre pas plus tard qu'il y a une
semaine. J'incite mes collègues de la commission parlementaire à
faire la même chose. C'est un centre qui prépare d'excellents
mémoires, d'excellents travaux. L'exposé des deux porte-parole
est très clair. Moi, j'aime beaucoup certaines de vos positions, par
exemple, lorsque vous détruisez un peu le mythe qui veut que ce soit le
BAPE qui soit responsable des délais ou que ce soit la partie des
audiences publiques qui cause des délais indus aux promoteurs. Je pense
qu'il va falloir revenir là-dessus souvent parce que c'est un peu dans
l'imagerie populaire que c'est parce qu'il y a des audiences publiques, c'est
parce qu'il y a un BAPE que ça prend tant de temps, alors qu'en
réalité ce n'est pas vrai. Vous avez bien démontré
qu'au contraire c'est de nature à raccourcir les délais.
J'aime bien aussi votre exhortation à utiliser la
procédure, toujours dans l'optique d'un droit préventif. Je suis
d'accord avec vous qu'il ne faut pas exagérer ce que j'appelais
tantôt la perte de crédibilité du BAPE; il ne faut pas
l'exagérer. J'aurais peut-être dû parler de certaines
atteintes à la réputation du BAPE, plutôt que de la
crédibilité du BAPE en soi, objectivement. Moi, je conviens avec
vous que le BAPE a fait un bon travail. Ce qu'on peut déplorer, c'est
que son travail ait été limité à des secteurs aussi
restreints. Je comprends qu'il a agi dans peut-être 350 cas, mais il n'a
pas agi dans les grands projets. Mais, là-dessus, on est tous d'accord
maintenant, encore une fois, y compris la partie patronale, pour recommander au
gouvernement que ce sort étendu aux grands projets industriels.
Je voudrais m'arrêter à votre recommandation de ne pas
tenter d'harmoniser la procédure québécoise. C'est assez
lapidaire et, moi, je suis porté à être d'accord avec vous,
mais est-ce que vous pourriez élaborer un petit peu
là-dessus?
M. Giroux: Écoutez, on n'a pas dit qu'il ne fallait pas
harmoniser les procédures. Ce qu'on a dit, c'est que nous ne croyons pas
qu'il faille importer aveuglément les morceaux de la procédure
fédérale. Par ailleurs, nous estimons qu'à l'heure
actuelle - le mémoire en fait mention - il y a une entente entre le
fédéral et le provincial sur le fait que, dans certains cas, il
est possible d'avoir une procédure conjointe. L'exemple du canal Lachine
en est un; il y en a d'autres. Nous croyons que ça, ça doit
être poursuivi afin d'éviter les litiges en particulier et
d'éviter que ce ne soit paralysé par des recours judiciaires.
Maintenant, il faut être bien conscient ici qu'il y a quatre
régimes différents sur le territoire du Québec et que
chacun de ces régimes-là obéit à des règles
différentes. Dans les deux régimes qui s'appliquent dans le Nord
du Québec et à la Baie James, il y a un mélange d'un
régime du Sud et d'un régime fédéral; il y a des
projets qui sont assujettis, il y a des projets qui sont exclus. Il y a, entre
les deux, une zone grise où il peut y avoir une détermination
d'assujettissement.
M. Lazure: Au Centre, est-ce que vous seriez au courant
d'études qui auraient été faites et qui
démontreraient que, dans des sociétés où on utilise
de façon assez rigoureuse la procédure d'évaluation pour
les grands projets, une telle société aurait été
pénalisée au plan de la compétitivité
économique ou de la concurrence économique?
M. Bélanger (Michel): Non. Je n'ai pas eu connaissance
d'étude semblable, mais notre position là-dessus est assez
claire, on estime qu'à l'heure actuelle l'argument économique ou
l'argument de la concurrence ne devrait pas être un facteur qui ferait en
sorte qu'on n'assujettisse pas les grands projets. À certains
égards, si on prend nos voisins de l'Ontario, la réglementation,
à beaucoup d'autres points de vue, est de loin beaucoup plus
sévère. Entre autres, l'Ontario - je ne veux pas
nécessairement qu'on en vienne là - a été la seule
province à condamner à une peine de prison des dirigeants de
compagnie. Donc, si on se basait simplement sur la différence d'une
province à une autre en termes d'exigences environnementales, je pense
que c'est peu élogieux si nos critères qui attirent ces
entreprises-là sont effectivement ces exigences-là.
Un dernier point que je voudrais faire remarquer là-dessus, c'est
que je voudrais qu'on fasse une distinction entre la réglementation
environnementale, c'est-à-dire tous les règlements qui seraient
applicables à un type d'entreprise, et la procédure
d'évaluation environnementale. Le fait de soumettre un projet à
la procédure d'évaluation environnementale n'est pas de dire non
à ces projets-là, mais simplement de leur permettre d'être
discutés publiquement et acceptes socialement. Donc, c'est une grosse
distinction. Si c'est à ce prix-là qu'on doit attirer ces
entreprises-là, nous autres, on estime que ça ne vaut pas la
peine.
M. Giroux: II n'a pas été établi que le
simple fait de l'existence de la procédure québécoise ait
rendu le Québec moins compétitif que d'autres juridictions.
Ça, ça n'a pas été établi. A la limite, si
ça c'était vrai, il faudrait qu'on parle tous anglais parce que
le simple fait que le Québec soit une province francophone, c'est en soi
un élément de non-compétitivité et ce n'est pas une
raison pour dire qu'on va changer ça du jour au lendemain. Ça,
ça n'a pas été établi. Quoi qu'on en dise, il n'y a
personne qui a été capable d'établir ça, à
l'heure actuelle.
M. Lazure: Au contraire, certains croient que même les
entreprises ont avantage à être soumises et que les entreprises
qui sont clairvoyantes désirent être soumises à de telles
procédures.
Enfin, revenons à l'Ontario. Moi, j'ai une nuance à
apporter au commentaire de mon collègue de Saguenay. Je pense, comme
vous, d'ailleurs, que c'est trop judiciarisé. Les procédures en
Ontario sont beaucoup trop judiciarisées. Ce que j'ai trouvé
important et valable, c'est la loi de 1988 qui permet le financement des
intervenants. Elle ne s'applique pas seulement à Hydro-Ontario, mais
à date, c'est le cas par excellence. Mais en principe, elle peut
s'appliquer à d'autres organismes, d'autres promoteurs.
Une question sur votre commentaire. À la page 19, vous
recommandez une plus grande vigilance du ministre qui, lui, dispose de la
discrétion nécessaire pour soumettre certains projets à
une telle évaluation globale. Page 19. Pourriez-vous élaborer
là-dessus un peu, des exemples ou comment pourrait s'exercer mieux cette
vigilance-là? (16 heures)
M. Bélanger (Michel): Ici, on parle principalement des
projets qui ne sont pas soumis aux règlements de façon
obligatoire, bien entendu, et surtout à certaines demandes qui seraient
faites. Je pense, entre autres... Il y a certains accrocs qui ont
été faits dans la loi, c'est-à-dire certains accrocs,
certaines tendances à "sectorialiser" des projets, à diviser des
projets, à faire des bouts de route, à réduire certaines
routes qui, en termes d'impacts environnementaux, sont majeurs.
Nous disons ici que, lorsque la demande est faite de la part de citoyens
ou de groupes de soumettre ces projets-là, les dispositions de l'article
6. 3 pourraient bien s'y prêter lorsque, justement, pour x raisons, le
projet n'est pas soumis de façon obligatoire, mais présente des
répercussions environnementales importantes. On se souviendra qu'au
fédéral un projet dont les répercussions suscitent un
intérêt suffisant de la population est un des
éléments pour lequel la procédure serait
enclenchée.
M. Lazure: Dans un autre ordre d'idées, les impacts
cumulatifs - vous êtes un des rares groupes à avoir traité
de ça et je pense qu'à bon droit vous recommandez que dans la
directive on exige une analyse des impacts cumulatifs - est ce que ça
pourrait aller jusqu'à définir certaines zones d'implantation,
certaines zones géographiques d'implantation d'un type d'entreprise,
d'un type d'usine, d'un type de procédé et qu'à titre
préventif l'évaluation des impacts se ferait à l'avance et
qu'on déciderait: Bon, bien, dans cette zone-là, il pourrait y
avoir une, deux ou trois entreprises de cette nature-là et,
après, ça serait saturé?
M. Bélanger (Michel): Bon, on soulève
effectivement, à la page 20, les difficultés quand on parle
d'effets cumulatifs. Il y a le dernier profet qui s'Installe dans une zone
saturée. Là, effectivement, on parie d'effets cumulatifs, mais il
y a également le premier projet qui s'installe dans une zone qui n'est
pas justement encore développée. Il s'agirait de voir quel est le
rôle du Bureau d'audiences publiques et quelle est l'évaluation
qu'il doit porter sur un projet. Est-ce que c'est justement les perspectives
futures? Est-ce qu'il a la capacité d'évaluer les perspectives
futures alors que le territoire, lui, n'a pas été
aménagé encore? Ou c'est finalement le dernier promoteur qui doit
payer les coûts de la négligence passée?
Donc, l'évaluation environnementale des effets cumulatifs est
nécessaire. Par quels moyens doit-elle être faite?
Inévitablement, si un premier projet s'Installe dans une zone riveraine
qui toucherait des plaines inondables, effectivement, il faut envisager la
possibilité qu'il y ait d'autres projets qui s'y installent ou encore de
façon globale. Et à ce moment-là, à mon avis, toute
la question de l'aménagement du territoire doit venir en ligne de
compte. Il existe deux mécanismes au Québec. Il y a
l'évaluation environnementale, qui évalue chacun des projets, et
il y a également tous les schémas d'aménagement qui,
finalement, déterminent l'usage d'un territoire plus vaste. Mais
ça ne veut pas dire que le Bureau d'audiences publiques ne doit pas
considérer les effets cumulatifs pour un même projet.
M. Lazure: Le suivi. Vous recommandez des programmes de suivi des
projets. Qui est-ce qui serait responsable de ce programme de suivi,
d'après vous? Est-ce que ça serait le BAPE, un autre organisme ou
le ministère?
M. Giroux: Mais écoutez, en ce qui nous concerne, les
recommandations du rapport Lacoste sont suffisantes là-dessus. Le
rapport Lacoste dit, à toutes fins pratiques: II y a la
responsabilité du promoteur et il faut que le ministère exerce
une meilleure surveillance. Et là-dessus, on ne nous a pas
démontré que cette recommandation-là ne gardait pas son
Intérêt aujourd'hui.
M. Bélanger (Michel): Si je pouvais rajouter...
M. Lazure: Oui.
M. Bélanger (Michel): ...juste un élément au
niveau du suivi. On distingue deux choses dans le suivi, c'est-à-dire le
suivi, justement, des projections que l'évaluation environnementale
aurait faites, mais également le suivi lui-même, une fois que
l'autorisation ministérielle a été rendue et là, on
parle beaucoup plus des droits des citoyens à l'application et au
respect des conditions qui ont été imposées à une
entreprise. À ce niveau-là, effectivement, je pense qu'on perd du
terrain sensiblement par rapport aux objectifs que la loi poursuivait dans les
amendements qui ont été ajoutés à la loi en
1978.
M. Lazure: Pourquoi, d'après vous?
M. Bélanger (Michel): On parle... J'ai mentionné
tout à l'heure les dossiers... En matière d'accès à
l'information, effectivement, on se bat devant la Commission d'accès et
devant la Cour du Québec actuellement. Notre organisme intervient
même dans une cause en ce moment devant la Cour du Québec pour
faire valoir le droit des citoyens à l'information qui est reconnu dans
la Loi sur la qualité de l'environnement. Donc, on se bat au niveau de
l'information et au niveau aussi de l'injonction qui est autorisée pour
les citoyens en vertu de l'article 19.3, le pouvoir d'injonction, pour assurer
le droit à la qualité de l'environnement, à défaut
de savoir quelle est la qualité de cet environnement-là et plus
que ça.
Lorsqu'on dit qu'on invite tous les citoyens à participer aux
audiences publiques, ce n'est pas le cas lorsqu'on contrevient, par contre,
à l'autorisation qui est donnée par le ministre, au-delà
de cette audience publique et de la décision ministérielle. C'est
simplement ceux qui fréquentent le lieu autour de l'entreprise qui sont
invités à pouvoir protéger leur environnement et
déposer une injonction. On trouve... Il y aurait peut-être
matière à élargir davantage la portée de ces
dispositions-là.
M. Lazure: Avez-vous une opinion sur la suggestion que le BAPE
devienne un organisme gouvernemental presque Indépendant?
M. Glroux: Écoutez, nous, là-dessus, en ce qui nous
concerne, le statut du BAPE, ce n'est pas la question majeure ici. Le BAPE,
c'est un organisme qu'on connaît dans le système anglais, qui est
un peu un "hearing examiner". C'est un organisme qui entend et qui fait
rapport. Cependant, la composition des commissions et la nomination des
commissaires ad hoc a souvent une importance primordiale et c'est surtout au
niveau du choix des commis- saires et peut-être d'une certaine
consultation, ne serait-ce qu'informelle, que le Centre est
concerné.
En ce qui concerne le statut lui-même du BAPE, pour nous, le BAPE
est un organisme qui entend et qui fait rapport, et ce n'est certainement pas
un organisme décisionnel, et ça ne doit pas le devenir non
plus.
M. Lazure: Et la suggestion que le président du BAPE soit
nommé par l'Assemblée nationale aux deux tiers des voix?
M. Glroux: Écoutez, nous, on n'a pas tellement
d'idée là-dessus parce que le président du BAPE ne
siège pas sur toutes les commissions et ce qui est important, c'est qui
siège sur les commissions. Il est possible cependant que cette
procédure-là assure une autorité morale à
l'égard de la sélection des commissions, mais pour nous, on doit
vous dire, à toutes fins pratiques, à l'heure actuelle, que ce
n'est pas un point majeur.
M. Lazure: Je reviens aux évaluations des politiques
globales. Vous en pariez de façon assez bien marquée dans votre
texte. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples de politiques globales
qui pourraient être assujetties à la procédure
d'évaluation?
M. Glroux: Et si on lit le rapport Lacoste, le rapport Lacoste
dit: "Les politiques de développement comme la politique
énergétique doivent être assujetties à
l'évaluation environnementale." Le rapport Lacoste ne va pas
jusqu'à dire que ces politiques-là doivent passer dans le
processus tel qu'on le connaît actuellement de la loi et du
règlement.
Ce que nous, on dit: Même si ce n'est pas assujetti formellement
avec les délais de quatre mois que l'on connaît actuellement, il
doit y avoir une discussion générale de société sur
certaines grandes politiques de développement parce que l'absence de
cette discussion-là a amené des problèmes dans la gestion
quotidienne du processus d'évaluation des projets spécifiques. La
Baie James, ça en est un exemple.
M. Lazure: À titre de centre de recherche, vous devez
avoir une opinion sur... Sur quoi est basée la réticence d'une
certaine portion des entrepreneurs, des promoteurs, qui... Bon, c'est moins
vrai aujourd'hui, au moment où on se parle, mais c'était vrai
à venir jusqu'à il n'y a pas longtemps. Leur réticence
à soumettre leur projet à la procédure
d'évaluation...
M. Bélanger (Michel): Oui, c'est
l'incompréhension...
M. Giroux: C'est l'incompréhension strictement...
M. Lazure: ...strictement...
M. Giroux: ...des objectifs et de ce qu'est la politique. Pour
nous, c'est simplement ça. Lorsqu'on connaît la politique,
lorsqu'on se rend compte que ça aide... Écoutez, qu'elle soit
prise au Québec, en Ontario ou dans l'État de New York, une
mauvaise décision, ça reste une mauvaise décision. La
difficulté, c'est que la durée de la décision
excède souvent le mandat politique ou excède les besoins à
court terme auxquels on fait face dans une crise économique, par
exemple. Mais il n'en reste pas moins qu'à partir du moment où on
va être capable d'évaluer ces coûts-là et qu'on va
être capable de les "internaliser" dans le calcul, une mauvaise
décision, ça reste toujours une mauvaise décision.
M. Lazure: On nous sert parfois l'argument que les secrets
industriels vont être divulgués ou risquent d'être
divulgués dans des procédures publiques comme celles-là.
Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Giroux: il y a des moyens de protéger ça sans...
À notre avis, cet argument-là n'est certainement pas un argument
majeur pour défaire ce qui existe actuellement.
M. Lazure: Dernière question sur la rapidité ou la
lenteur du processus. Vous le savez mieux que moi, souvent, le processus a
été discrédité parce qu'il était soi-disant
trop long et trop confus dans ses exigences. À quelle étape du
processus, selon vous, pourrait-on raccourcir la procédure, les
délais?
M. Giroux: Écoutez, là-dessus, nous croyons que
certaines des recommandations du rapport Lacoste sont encore actuelles. Comme
il a été dit tout à l'heure, si on favorise la
participation du public au niveau de l'élaboration de la directive,
l'étude d'impact va s'intéresser plus aux vrais problèmes
que les gens vivent et va cesser de faire une description complète de
tout l'environnement québécois. Ça, c'est un point.
Deuxièmement, il y a des questions qui relèvent plus de
l'organisation administrative interne du gouvernement. C'est pour ça
qu'on a été plutôt discrets là-dessus, mais le
rapport Lacoste, à notre avis, couvre bien ces points-là.
M. Lazure: Merci. M. le Président, moi, je n'ai pas
d'autres questions. Je veux remercier mon collègue de
Jonquière.
Le Président (M. Garon): La règle d'alternance, Mme
la députée de Vachon. Je reviendrai au député de
Jonquière.
M. Lazure: Oui.
Mme Pelchat: Merci. Messieurs, tout à l'heure, le
député de La Prairie vous a posé des questions sur
l'harmonisation de la politique, la procédure d'évaluation du
Québec en fonction peut-être de celle du fédéral ou
de celle de l'Ontario. Vous avez dit qu'il n'était pas question de
favoriser l'importation des plus mauvais modèles - on est bien d'accord
avec vous - sauf que ne croyez-vous pas qu'il serait Important, par exemple, au
niveau de la liste des sujets qui devraient être assujettis, de
s'harmoniser avec l'Ontario?
C'est dans ce sens-là qu'on parle de compétitivité
et non pas tout simplement qu'on regarde une procédure
d'évaluation et on dit: Mon Dieu! Au Québec, H y a une
procédure d'évaluation, on est plus compétitifs. Je ne
pense pas que c'est ça et vous l'avez très bien dit, là.
Ça n'a empêché aucun projet de venir s'installer, sauf que
si l'on parle des grands projets Industriels, si ces mêmes projets ne
sont pas soumis à une procédure d'évaluation en Ontario,
est-ce que ça n'affecterait pas la compétitivité?
Le Président (M. Garon):...
Mme Pelchat: Juste un Instant. C'est ça la question que
les gens posent. Moi, Je ne porte pas de...
M. Giroux: Écoutez, prenons le cas des alumineries. La
question se pose: S'il y a plusieurs alumineries au Québec à
l'heure actuelle, plus qu'ailleurs, est-ce vraiment parce qu'il n'y a pas de
procédure d'évaluation des impacts ou si ça ne tient pas
plutôt à d'autres politiques d'incitation à d'autres
niveaux? Pour nous, le grand projet, II y a des questions quant à sa
localisation, quant à son opportunité, quant à ses
impacts, quant à la sécurité, et on n'a pas le droit de se
priver collectivement d'étudier ça tout simplement parce que
ça ne se fait pas ailleurs. On a également des leçons
environnementales à tirer, d'ailleurs. Écoutez...
Mme Pelchat: Je comprends très bien ce que vous dites et
je suis tout à fait d'accord avec vous, mais je veux savoir au niveau de
la compétitivité. C'était ça la question et non pas
au niveau de la pertinence et de l'à-propos d'assujettir ces
projets-là. C'est la raison pour laquelle on a la commission
parlementaire, là. Alors, je veux savoir si ce ne serait pas bon que ce
soit harmonisé avec l'Ontario et, si ce ne l'est pas, est-ce que
ça peut affecter la compétitivité, selon vous? C'est
ça que je veux savoir, selon vous.
M. Giroux. Mais moi, je pense que non pour la simple raison qu'on
n'est pas capable de déterminer, dans la décision quant au choix
d'une province, d'une juridiction ou d'une autre, de dire:
L'élément déterminant, c'est l'existence ou l'absence
d'une procédure d'évaluation des
Impacts.
Mme Pelchat: O.K. Merci. Au niveau de la médiation, vous
parlez de la médiation, à la page 27 de votre mémoire, et
vous expliquez bien que, pour vous, le processus de médiation est
intéressant et utile, mais après l'audience publique. Cette
procédure peut être envisagée seulement après la
tenue de l'audience.
M. Giroux: Sur la directive.
Une voix: Oui, c'est ça.
M. Bélanger (Michel): Sur la directive.
Mme Pelchat: Parce que plusieurs organismes viennent nous voir et
vont venir, ils vont nous dire que, le délai étant trop long,
peut-être que la médiation est un bon moyen de rapetisser les
délais et peut-être éviter la confrontation, etc. Mais je
ne comprends pas, à ce moment-là, votre recommandation... (16 h
15)
M. Giroux: La raison pour laquelle c'est comme ça dans le
mémoire, c'est que le Centre recommande qu'il y ait une participation du
public lorsqu'on élabore la directive que l'on va acheminer au promoteur
qui va préparer son étude d'impact. Pour le Centre, la
médiation, si elle se fait, elle doit se faire après que le
public eut été consulté sur la directive pour que
l'étude d'impact soit pertinente à l'égard des
préoccupations du public. Après ça, peut-être qu'il
pourra y avoir une médiation pour décider si, oui ou non,
les...
Mme Pelchat: II y aura audience comme telle sur le projet.
M. Giroux: Voilai
Mme Pelchat: O.K. Je vois.
M. Giroux: Voilà!
Mme Pelchat: Est-ce que cette médiation-là, selon
vous, devrait être tenue par le Bureau d'audiences publiques, par un
organisme indépendant ou par le ministère de l'Environnement?
M. Bélanger (Michel): Non. Le Bureau d'audiences...
Ça fait partie, c'est... La médiation, contrairement à ce
que j'ai entendu tout à l'heure au niveau de l'arbitrage - ce sont deux
choses très distinctes - la médiation, effectivement, ça
fait partie des fonctions du Bureau d'audiences publiques. C'est une
façon d'arriver... c'est un genre de consultation interne qui ne doit
pas, par contre, comme on a insisté beaucoup, brimer l'audience publique
en soi, mais effectivement, ça pourrait facilement être tenu sous
l'égide...
Mme Pelchat: Ça ne mettrait pas le BAPE dans une position
difficile...
M. Bélanger (Michel): Non.
Mme Pelchat: ...à ce moment-là, si, par exemple, il
y a entente entre les deux intervenants...
M. Bélanger (Michel): Bien non! Au contraire.
Mme Pelchat: ...ou entre les intervenants opposés et les
promoteurs et, à ce moment-là, le BAPE ne tient pas d'audience,
suite au succès d'une médiation, par exemple...
M. Giroux: Regardez, madame...
Mme Pelchat: Vous ne pensez pas que ça nous met dans une
position...
M. Giroux: Dans la situation actuelle, une seule personne peut
demander une audience. La ministre a utilisé le délai que la loi
lui accorde, dans le cas où il n'y avait qu'un tout petit nombre de
demandeurs, pour voir si leur demande d'audience n'était pas
fondée sur un aspect particulier auquel il pouvait être
remédié. Si le requérant, après la
médiation, a accepté de retirer sa demande d'audience, on ne va
plus jamais devant le BAPE. Par ailleurs, ce sur quoi nous en avons, c'est que
nous sommes méfiants parce que nous ne voulons pas que ce
processus-là soit utilisé pour essayer de réduire la
participation publique.
Mme Pelchat: Pour éviter les audiences publiques
justement?
M. Giroux: Voilà!
Mme Pelchat: Alors, c'est dans ce sens-là que je vous pose
la question: Est-ce que le BAPE est le meilleur organisme indiqué pour
faire de la médiation parce que, dans le fond, il est juge et partie en
ce sens que c'est lui qui tient l'audience publique et on lui dit en même
temps: Tu es responsable de tenir l'audience publique, mais pourrais-tu, s'il
te plaît, faire de la médiation pour éviter peut-être
d'avoir une audience publique? C'est dans ce sens-là que je trouve qu'il
y a un petit peu un conflit entre...
M. Giroux: Oui, mais regardez, madame. Vous avez raison dans un
sens, mais le BAPE n'est pas tellement en conflit d'intérêts parce
que ce n'est pas un organisme décisionnel. Ça, c'est le
critère fondamental. Il est là pour entendre et faire rapport.
À notre avis, cette question-là est moins importante dans la
mesure où le BAPE fait rapport après avoir entendu.
Mme Pelchat: Est-ce que la médiation environnementale
devrait être inscrite a la loi...
M. Giroux: Pas actuellement.
Mme Pelchat: ...comme procédure faisant partie
intégrante de la procédure, comme une étape de la
procédure d'évaluation?
M. Bélanger (Michel): Non, parce que, de toute
façon, ça pourrait facilement, dans les cas où ça
s'y prête, s'insérer de façon volontaire, et toutes les
parties ont intérêt à l'accepter dans les cas où
ça s'y prête, comme on le dit.
M. Giroux: Et le rapport Lacoste, madame, nous dit: II faut
encore expérimenter cette question-là; on n'est pas mûrs
pour prendre une décision définitive. Et là-dessus, moi,
je suis d'accord avec ça.
Mme Pelchat: O.K. Vous avez... Votre collègue a
parlé tout à l'heure des projets de gestion des déchets
solides, de la gestion des déchets domestiques. Est-ce que vous croyez,
par exemple, que le choix d'un site d'enfouissement sanitaire devrait
être soumis aux audiences publiques?
M. Giroux: Cette question-là a... Il y a plusieurs
aspects, ici. À l'heure actuelle, il y a des batailles féroces
qui se livrent dans les MRC, devant les tribunaux, sur des questions de
localisation. C'est bien certain qu'on ne pourra pas éviter que ces
batailles-là ne continuent à un niveau ou à un autre. Par
ailleurs, dans la mesure où la localisation d'un site d'enfouissement
sanitaire peut avoir des impacts qui débordent strictement les
intérêts de la région et peut avoir des impacts à
long terme - et l'exemple de ce qui se passe à la carrière Miron
actuellement devrait nous inciter à être prudents - dans ce
sens-là, moi, je serais d'accord avec ça.
Mme Pelchat: Est-ce que... Parce que vous entendez, dans votre
mémoire... À la page 21, vous dites: Nous "soulignons, à
ce chapitre, qu'une certaine procédure de consultation publique entoure
l'adoption des plans d'urbanisme et de règlements en question. Cette
dernière procédure gagnerait toutefois à être
améliorée si nous souhaitons lui voir jouer ce rôle, le cas
échéant."
Est-ce que vous pensez que - et je fais référence à
ce que le député de La Prairie disait tantôt - les
espèces de BAPE régionaux ou, en tout cas, une
décentralisation des pouvoirs du BAPE peut-être vers les MRC,
est-ce que vous verriez ça d'un bon oeil que, par exemple, les
municipalités régionales de comté exercent certains
pouvoirs d'audiences publiques ou d'évaluation pour des projets qui sont
strictement locaux ou régionaux comme, par exemple, le choix d'un site
d'enfouissement sanitaire?
M. Giroux: À l'heure actuelle, ces
débats-là, ils se font déjà devant la MRC et la
MRC...
Mme Pelchat: Oui, mais pas au niveau de l'évaluation de
l'impact environnemental.
M. Giroux: Oui, mais la MRC va vraiment être juge et partie
parce que dans le schéma d'aménagement, c'est elle qui fixe la
localisation. Et là, vraiment, on aurait un cas où on aurait
été juge et partie, à mon humble avis.
Mme Pelchat: Mais est-ce que vous seriez en faveur d'une
espèce de BAPE régional ou, en tout cas, essayons de l'appeler
par... d'un organisme plus régional qui serait chargé de
l'évaluation des projets plus régionaux ou si...
M. Bélanger (Michel): Non. Le BAPE, de toute façon,
peut intervenir dans les réglons. Il n'y a pas de raison de
décentraliser et de faire des petits organismes. Dans des questions bien
précises - et probablement la question des déchets solides s'y
prête - il y aurait peut-être moyen de tenir, mais pour les
circonstances, pour des fins bien précises, justement des genres
d'audiences "sectorialisées", mais essentiellement pour ce
compte-là, mais non pas leur donner te mandat de trancher certaines
questions particulières sur son territoire. Mais, de toute façon,
la procédure qui entoure l'adoption des schémas
d'aménagement le prévoit. Quand on dit améliorer, c'est en
ce sens de tenir compte peut-être de perspectives plus environnementales
dans le développement et, notamment, au niveau de l'implantation de
secteurs Industriels, entre autres, au niveau des effets cumulatifs que les
projets vont faire les uns sur les autres.
Mme Pelchat: Quand on parle d'assujettir les programmes et les
politiques du gouvernement, ce serait peut-être ce genre de projet
là, notamment les sites d'enfouissement sanitaire, les centres de
gestion de déchets et tout ça, qui pourrait être soumis
à une forme de politique globale du gouvernement du Québec quant
à la gestion intégrée des déchets et, par la suite,
bon, chacun des organismes...
M. Giroux: ...de localisation, mais si on lit la jurisprudence
ces derniers temps, l'expérience révèle que les
problèmes de localisation, on n'est pas près d'y
échapper.
Mme Pelchat: Un autre problème qui a été
soulevé très souvent, autant par les promoteurs que par les
municipalités - les maires nous en ont parlé souvent - c'est que,
par exemple, la marina de Chicoutimi ou je ne sais pas trop...
Une voix: La Baie.
Mme Pelchat: ...de La Baie veut s'agrandir et quelqu'un de
Saint-Hubert se manifeste, qui n'est pas du tout dans la même
région, il dit: Ah! moi. j'ai peut-être quelque chose à
dire là-dessus. C'est la seule personne qui se manifeste et, bon, on
tient des audiences publiques à ce niveau-là. On se fait souvent
dire et on va se le faire demander dans les mémoires, pour en avoir lu
plusieurs: Est-ce que la personne ou le groupe qui demande une audience ne
devrait pas démontrer, un, un intérêt juridique et,
deuxièmement, être reliée au projet comme tel ou à
la région?
M. Giroux: En 1978, lorsque ça, ça a
été dans la loi, je me souviens d'avoir participé à
ce débat-là lorsque les articles ont été
insérés dans la loi. Quoi qu'on en dise, je ne pense pas qu'il y
ait des abus criants à ce point que l'on doive changer ce qui a
été fait dans la lof de 1978. La frivolité, à mon
avis, c'est encore un critère qui est valable à
l'expérience.
Si quelqu'un de Saint-Hubert a fait une demande à l'égard
d'un projet ailleurs, c'est peut-être un symptôme qui nous fait
remonter à l'élément que certaines politiques
générales n'ont pas été discutées
collectivement d'abord.
M. Bélanger (Michel): Juste pour compléter. La
question de l'intérêt, justement, n'est pas un problème
majeur qu'on a rencontré. Ça ne mérite pas d'être
réajusté.
Mme Pelchat: Merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Oui. On parle beaucoup des effets cumulatifs puis de
l'impact sur l'environnement. C'est toujours en fonction de projets
particuliers, de projets très précis. Je pose la question
à savoir que les municipalités sont les municipalités
régionales de comté qui décident de déterminer des
zones propices à l'implantation d'industries. À ce que je sache,
il n'y a jamais eu d'étude d'impact là-dessus, il n'y a jamais eu
de personne qui se prononce, si ce n'est dans le plan de zonage, on imagine.
Ça fait aussi qu'on se ramasse avec des effets cumulatifs
répétés et continus: pollution par le bruit, pollution
visuelle, pollution par la poussière; en tout cas, on peut en mettre
partout.
Est-ce que vous recommanderiez qu'il y ait des études plus
complètes avant qu'on puisse décider qu'il y a des parcs
Industriels dans des endroits plutôt que dans d'autres et quelles
seraient les conditions?
M. Giroux: Voici. Ici, il faut être conscient que dans la
loi sur l'aménagement il y a des procédures de consultation et de
discussion publique. En général, les gens ne réalisent pas
tout de suite que l'adoption de tel plan va avoir pour effet que, dans six
mois, un an, deux ans telle activité va s'implanter à
côté. Je ne suis pas certain que le fait que l'on prévoie
une procédure d'impact, à ce moment-là, va engendrer plus
de participation publique. Mais il a été recommandé - et
c'est une des recommandations du rapport Lacoste - qu'il devrait y avoir une
jonction entre la procédure d'évaluation environnementale et le
processus d'aménagement parce que le rapport Lacoste a dit avec justesse
que ce sont des décisions qui, comme vous le dites, ont un impact
considérable.
Moi, je ne suis pas prêt à dire que cette
recommandation-là n'est pas bonne. Il s'agit de savoir comment.
M. Dufour: Oui, c'est ça. Si on décide qu'il y a
une zone industrielle, ça veut dire qu'il y a des accumulations
d'impacts sur l'environnement qui vont se produire. Si on ne fait pas
l'étude avant, comment peut-on déterminer hors de tout doute,
parce que ça suppose des coûts aussi, une zone industrielle.
M. Giroux: Oui.
M. Dufour: Et c'est un engagement qui est important. Il y a des
investissements, il y a des industries qui vont venir s'installer, qui ne
justifient pas nécessairement chacune une étude sur
l'environnement.
M. Giroux: Oui, mais l'inverse de ça, c'est que si on fait
une discussion théorique lorsque la zone est établie et qu'on
invoque ce motif-là pour refuser la discussion concrète
lorsqu'une implantation spécifique va s'annoncer sur le site en
question, je ne suis pas sûr qu'on y a gagné.
Une voix: Ça va? Une voix: Ça va. Le
Président (M. Garon): Terminé?
M. Dufour: J'aurais aimé qu'il soit un peu plus explicite,
à savoir si, en fait, on doit recommander ou pas qu'il y ait une
étude d'impact. Parce que, quelles que soient les décisions,
c'est évident qu'on se ramasse avec des zones industrielles en pleine
municipalité. Par exemple, un moulin agricole en pleine ville, vous
savez ce que ça donne.
M. Giroux: Oui.
M. Dufour: Bon. Vous vous ramassez avec un parc industriel qui,
forcément, n'est pas trop loin du bâti...
M. Giroux: Oui.
M. Dufour: ...donc, il y a des choses qui se
passent dans un parc industriel, à ce que je sache. Il y a du
bruit.
M. Giroux: Oui.
M. Dufour: Une usine de débosselage, ça veut dire
du bruit. Quelqu'un fait brûler quelque chose, H y a de la
poussière. S'il n'y a pas d'étude quelconque qui permette de
s'appuyer quelque part, ça veut dire quoi? Comment une
municipalité peut-elle répondre à ça parce que, un
coup le permis donné, même si le monde a protesté, les
terrains sont achetés et il a le droit de le faire parce qu'il y a des
usages permis? Un coup que ça répond, comment fait-on pour
contrer ça? Parce qu'il y a des impacts et c'est très fort sur
les propriétés, sur les contribuables.
M. Bélanger (Michel): Je reprends un peu ce que Me Giroux
a dit simplement en deux mots. C'est que j'ai l'impression effectivement qu'on
ne peut pas tout prévoir non plus par l'entremise du schéma
d'aménagement et ça présuppose aussi que le type
d'entreprise qui va être là va être nécessairement
néfaste. Je veux dire, le secteur zone industriel, c'est très
général en termes de zonage. Même chose au niveau de
l'agricole.
Donc, les usages qui sont faits ne sont pas nécessairement
nuisibles l'un à l'autre, et je pense que chaque projet devra, comme il
l'a dit, être évalué à la pièce, et je ne
suis pas sûr que les deux régimes... le régime se
prêterait bien à une évaluation environnementale des
impacts d'un schéma d'aménagement, quoique cet aspect-là
doive être considéré davantage.
M. Dufour: Ça va.
Le Président (M. Garon): Alors, je voudrais remercier les
membres - il ne reste plus de temps - du Centre québécois du
droit de l'environnement d'être venus rencontrer les membres de la
commission. Maintenant, je vais demander à la Fondation
québécoise en environnement de venir à la table des
délibérations.
Alors, M. Louis Archambault, président de la Fondation
québécoise en environnement, vous venez nous présenter la
personne qui vous accompagne. Vous avez une heure, c'est-à-dire 20
minutes pour votre exposé, votre mémoire; 20 minutes pour le
parti ministériel; 20 minutes pour l'Opposition. Si vous prenez moins de
temps, le temps que vous n'aurez pas pris sera ajouté aux deux partis.
Si vous en prenez plus, le temps que vous prendrez en plus leur sera soustrait
également. M. Archambault.
Fondation québécoise en
environnement
M. Archambault (Louis): Je vous remercie, M. le Président.
Mmes, MM. les députés, on apprécie vivement de pouvoir
présenter de vive voix notre mémoire devant vous aujourd'hui. Je
suis accompagné par Me Robert Daigneault, de l'étude Lapointe,
Rosensteln, qui a participé de façon très active à
la rédaction du mémoire. (16 h 30)
J'aimerais situer, dans un premier temps, la Fondation
québécoise en environnement, qui est un organisme sans but
lucratif fondé en 1987 et qui compte quelque 225 membres qui sont
essentiellement des personnalités Issues de divers milieux,
scientifique, artistique et du monde des affaires, en plus de 45 000 amis au
Québec.
Quoique la Fondation s'abstienne habituellement de prendre position sur
des sujets spécifiques, elle estime essentiel de prendre position
lorsqu'il s'agit d'élaboration de politiques et de programmes globaux,
en l'occurrence la procédure d'évaluation et d'examen des impacts
sur l'environnement.
Deux critères nous sont apparus comme essentiels pour
l'établissement du cadre de référence de notre
mémoire, soit, en premier lieu, de protéger les acquis de la
procédure et, en second lieu, de prendre en considération les
besoins des citoyens et des promoteurs. La Fondation n'entend pas, en effet,
remettre en question l'essence de la procédure d'évaluation et
d'examen des impacts sur l'environnement. Son souci est davantage de trouver,
à l'intérieur même des balises fixées par la Loi sur
la qualité de l'environnement et sa réglementation, un modus
vivendi qui réponde à la fois aux attentes des citoyens, des
promoteurs et de l'administration, sans bouleverser ce qui, au fond, n'a
peut-être pas été appliqué de façon pleine et
entière.
À l'examen des observations et des conclusions du rapport
Lacoste, la Fondation québécoise en environnement a d'ailleurs
constaté que bien des recommandations de ce rapport pourraient
être mises en application sans aucun changement législatif ou
réglementaire. La Fondation a aussi considéré les autres
modèles de procédure, notamment les modèles ontarien,
canadien et américain.
En ce qui concerne les besoins de la société, soit notre
second critère, la Fondation croit essentiel de tenir compte des
préoccupations des citoyens tout autant que de celles des promoteurs. La
raison est fort simple: la Fondation recherche une procédure
améliorée pour le citoyen d'abord, car il est, en quelque sorte,
le bénéficiaire de celle-ci, mais la Fondation
québécoise en environnement considère que l'environnement
gagnera à ce que la procédure soit acceptée par le plus
grand nombre de promoteurs. On assiste, malheureusement trop souvent, à
des débats stériles où deux partis sont essentiellement
braqués l'un contre l'autre et où l'on n'arrive que difficilement
à faire un consensus.
Quant aux principes de base de la révision de la
procédure, la Fondation souhaite que la
révision de la procédure soit guidée par un certain
nombre de principes, certains étant à l'origine même du
processus et d'autres étant de nouveaux concepts qui doivent être
pris en compte dans le contexte environnemental actuel.
En premier lieu, la participation du public et la transparence. Le
principe de favoriser la participation du public est l'essence même de la
procédure, l'une de ses principales raisons d'être. Elle est
liée à la notion même des impacts environnementaux, qui
vont au-delà des considérations strictes de pollution ou
d'atteinte à l'intégrité du milieu biophysique.
La transparence va de pair avec la participation du public. Elle est
essentielle à l'établissement d'un climat de confiance tout au
long de l'application de la procédure. Elle est l'ingrédient de
base de la médiation environnementale, elle est l'antidote au syndrome
NI MB Y - "pas dans ma cour" - elle est le ferment d'une collaboration
créatrice entre les divers intervenants, et je pense que c'est quelque
chose qui nous manque énormément au Québec.
En second lieu, l'évaluation des impacts et la planification
environnementale. De plus en plus, la procédure doit s'Implanter comme
un outil de planification environnementale. En ce sens, elle devrait pouvoir
idéalement influencer jusqu'à la conception même du projet.
Elle devrait permettre au public d'être mieux renseigné et mis
à contribution plus tôt et permettre d'éviter les
coûts que peut entraîner la remise en question d'un projet souvent
trop avancé.
Cette règle s'applique évidemment en ce qui concerne les
grands programmes. L'assujettissement des grands programmes de l'État
à une procédure d'évaluation de leurs impacts sur
l'environnement devrait être amorcé progressivement. Cela
permettrait de régler dès l'abord les questions qui sont communes
à tous les projets qui seraient réalisés à
l'intérieur de tels programmes. Cela éviterait de placer un
promoteur dans la situation de devoir défendre non pas seulement son
projet, mais le programme dans lequel il s'inscrit.
Il est évident, cependant, que l'assujettissement de programmes
plutôt que de projets est une démarche différente qui
risque d'avoir des caractéristiques méthodologiques très
particulières. De plus, cette évaluation devrait être
effectuée préalablement à l'évaluation des projets
distincts qui s'insèrent à l'intérieur des programmes.
Néanmoins, le Québec a connu jusqu'ici quelques
expériences en la matière. Il ne fait aucun doute que la
procédure est un outil utilisable pour traiter de ces grandes questions,
quitte à y prévoir quelques adaptations. La Fondation a
d'ailleurs déjà souligné la nécessité en
matière énergétique - soit en mai 1990 - de
procéder à une telle évaluation.
En troisième lieu, le développement durable.
Un nouveau concept est maintenant sur toutes les lèvres dans les
milieux environnementaux et les administrations publiques: le
développement durable. C'est un développement conditionnel que
les autres mécanismes d'autorisation ne régissent pas
nécessairement adéquatement, alors que la procédure
d'évaluation et d'examen des impacts, qui considère globalement
l'environnement, est plus à même d'assurer l'atteinte de cet
objectif.
En dernier lieu, nous soulignerons l'équité et
l'efficacité. Une valeur à laquelle il faut tenir absolument,
c'est l'équité. L'un des fondements de notre système
juridique, elle commande que tous et chacun soient traités avec justice
et égalité. Il faut que cette valeur soit présente
à toutes les étapes de la procédure, depuis
l'assujettissement jusqu'à l'autorisation finale, et ce, à la
fois pour le citoyen et le promoteur.
L'efficacité est une valeur inhérente à la
procédure qui n'a peut-être pas toujours été
sauvegardée jusqu'ici. En fait, la plupart des critiques soulignent
effectivement les délais d'application éminemment longs, sans
compter l'inaptitude parfois constatée de la procédure à
cerner adéquatement les vrais enjeux à débattre.
L'efficacité administrative est essentielle; autrement la
procédure se discrédite, on cherche à la contourner,
à l'escamoter. Cette inefficacité administrative porte atteinte
aux possibilités réelles d'intervention des citoyens tout en
rendant la procédure inutilement lourde pour le promoteur.
Voilà donc les grands principes qui devraient être retenus,
de l'avis de la Fondation québécoise en environnement, dans une
analyse critique de la procédure. Ces principes devraient inspirer toute
modification, toute amélioration à la procédure, qu'elle
soit législative ou réglementaire, si c'est le voeu de la
commission, ou qu'elle soit administrative, comme le souhaite plutôt la
Fondation québécoise en environnement.
Sur ce, je vais laisser la parole à Me Daigneault qui va vous
décrire de façon beaucoup plus précise notre cheminement
et nos principales recommandations.
La Présidente (Mme Bélanger): Me Daigneault.
M. Daigneault (Robert): Merci, Mme la Présidente. Mmes et
MM. les députés, ce que je vais faire, en fait, c'est que je vais
attirer votre attention sur des éléments du mémoire qui
sont les plus significatifs. Je pense que la dominante du mémoire, vous
l'aurez constaté, c'est le fait qu'on ne recommande pas de modification
législative ou réglementaire.
Évidemment, on s'adresse à une extension de la
Législature. Ça peut paraître osé de demander au
législateur de ne pas légiférer. La députée
de Vachon avait souligné le projet collectif d'aboutir à un
projet de loi. Il ne s'agit pas de l'écarter; il s'agit peut-être
de l'ap-
profondir, en fait.
Tantôt, entre autres, on a souligné l'importance du
développement durable. C'est un principe qui a été
soulevé par la Fondation dans son mémoire. C'est peut-être,
même s'il est énuméré avec d'autres principes, le
principe qui devrait être le plus important. Le député de
Saguenay a attiré l'attention justement sur l'importance de prendre en
compte le développement durable. C'est un principe qui est
extrêmement important, c'est un principe qui suppose un choix de
société. C'est un principe qui suppose qu'on se donne de
nouvelles façons de faire, de nouvelles façons de planifier, de
nouvelles façons de voir nos activités économiques et
sociales et d'essayer de tenir compte du développement durable dans un
projet de loi qui viendrait modifier la procédure d'étude
d'impact. Ce serait risquer, à mon sens, de rater le bateau, parce qu'il
faudrait toucher à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il
faudrait toucher à la Loi sur les forêts, il faudrait toucher
à la Lof sur les mines. Le développement durable suppose que
toutes ces interventions soient planifiées sur la base des mêmes
fondements.
Alors, le député de Jonquière soulignait justement
le problème du zonage du territoire par rapport à l'implantation
d'un projet particulier. On a souligné tantôt: Est-ce qu'on
devrait assujettir la gestion des déchets à la procédure
d'étude d'impact? Encore là, on tombe directement dans le
problème qui est relié au syndrome NIMBY. Ça suppose une
planification d'ensemble, ça suppose de demander aux citoyens s'ils
veulent continuer aussi à générer des déchets ou
plutôt envisager d'autres façons d'utiliser les ressources qui
soient moins productrices de déchets, donc, l'évaluation aussi
des grands projets, comme on le souligne dans notre mémoire.
Pas de modification législative, donc, mais trouver des moyens de
se servir le mieux possible de la procédure telle qu'elle existe dans la
loi. Alors, la plus belle preuve qu'on puisse se servir de cette
procédure, c'est qu'il y a eu une évolution au cours des
années dans la façon de faire les études d'impact. Au
début, on ne considérait que les impacts strictement
écologiques. On en est venu à considérer les impacts
sociaux, les impacts économiques. On en est venu ensuite à parler
de justification de projets, à parler de risques environnementaux,
toujours avec la même procédure.
Quand on regarde aussi la façon administrative dont on applique
la procédure et celle qu'on retrouve dans la loi, on s'aperçoit
finalement que, déjà, on l'a assouplie - ou des fois
peut-être on l'a compliquée - mais en tout cas, on peut
déjà faire pas mal de choses avec ce qui est là. C'est la
raison principale pour laquelle on ne recommande pas de modifications
législatives.
Alors, les recommandations qui suivent les principes, c'est une
démonstration, si vous voulez, qu'il y a des moyens de tenter de
régler les différents problèmes qu'on associe à
l'application de la procédure. Ça ne veut pas dire que tous ces
moyens-là devraient être appliqués en même temps.
Ça ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas d'autres moyens plus efficaces,
plus appro priés, mais ça montre que, sans toucher à la
loi, on peut déjà faire beaucoup de chemin.
Alors, je pense qu'à ce stade je vais terminer mon exposé
ici et attendre les questions.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Me Daigneault.
M. le député de Saguenay.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup,
messieurs, d'avoir présenté votre mémoire à la
commission. On sait que la Fondation de la faune québécoise, tout
en étant un organisme très jeune, est un des organismes
environnementaux les plus connus au Québec. Il va de soi que la
façon dont vous attirez l'attention au niveau de l'éducation
environnementale est fort louable et je tiens à vous féliciter de
la façon dont vous le faites. Il n'y a rien d'agressif, mais il y a
beaucoup de compréhension et je pense qu'il y a une très bonne
réception de la part de la population. Et des organismes comme le
vôtre, II devrait peut-être y en avoir plusieurs ou encore que le
vôtre s'agrandisse dans tous les coins du Québec. Il fait
très, très bien son rôle d'éducation et ça,
je pense que c'est tout à votre honneur.
Dans un premier temps, vous avez parlé que vous ne voyez pas
nécessairement une modification à la législation. Il va de
soi comme... Je n'apprendrai pas à des avocats comme vous que le
législateur, étant celui qui fait les lois, a tendance à
apporter des correctifs par législation. Mais il faut bien saisir
qu'à l'Intérieur d'une commission parlementaire comme la
nôtre - et je l'expliquais au début - les parlementaires n'ont pas
d'autre choix pour corriger une réglementation que d'aller
vis-à-vis d'un projet de loi et vous savez fort bien que... Vous
êtes des interprètes de la loi et, s'il n'y avait pas de loi,
probablement que vous ne seriez pas là.
Ce qui est Important pour nous, c'est la volonté de faire un
changement. Le seul processus démocratique dans lequel les
parlementaires peuvent effectuer ce changement, c'est par un projet de loi,
là, en modifiant une réglementation qui relève de la loi
de l'environnement. Et ça, je pense que tous les parlementaires ici en
sont bien conscients. Si, à vos yeux, ce n'est pas nécessairement
la meilleure formule, pour nous, c'est la seule. On n'a pas d'autre choix.
À partir de ce moment-là, l'objectif du mandat d'Initiative de la
commission, c'est d'en arriver à un rapport commun déposé
à l'Assemblée nationale dans lequel on recommandera au ministre
de modifier sa loi. Vous voyez tout le processus qu'on doit suivre pour
améliorer ou ajouter une réglementa-
tion ou en ajouter à la réglementation actuelle. Alors,
c'est un processus législatif un peu compliqué, mais pas pour
vous autres parce que vous êtes ceux qui décortiquez ce que nous
faisons ici, finalement. (16 h 45)
Moi, il y a un point sur lequel j'aimerais m'attarder
particulièrement parce que vous avez indiqué dans votre
mémoire que vous avez fait une analyse des procédures
américaine, ontarien-ne, canadienne et, bien sûr, du
Québec, ça va de soi. Comment voyez-vous la nôtre
actuellement, sans amélioration, comparée, par exemple, à
ce que vous avez vu, la législation américaine puis la
procédure américaine, ontarienne et canadienne? Comment
voyez-vous ça et, sur une cote de 0 à 10, quelle est la cote que
vous nous donneriez au Québec présentement, avec la
réglementation avec laquelle le BAPE doit vivre?
La Présidente (Mme Bélanger): M. Archam-bault.
M. Archambault: Oui. Dans un premier temps, en fait... Il y a
donc deux questions. Je répondrai dans un premier temps partiellement au
niveau de la procédure et, après ça, je vais laisser la
parole à Me Daigneault. Au niveau de la procédure, je ne donnerai
pas nécessairement de cote et je vais faire une rectification. Me
Daigneault est avocat; moi, je suis environnemen-taliste, biologiste de
formation. Alors, c'est la réponse du biologiste ou de
l'environnementaliste que vous allez avoir au niveau de la
procédure.
La procédure fédérale a ceci d'intéressant
qu'elle permet aux citoyens de s'insérer dès le départ
d'un projet, alors que notre procédure, finalement, se fait
malheureusement, à mon sens, en vase clos pendant trop longtemps entre
des spécialistes du ministère de l'Environnement, d'une part, et
des spécialistes du promoteur, d'autre part. Alors, malgré tout
le bon vouloir de ces gens-là, il arrive trop souvent qu'on n'ait pas
une acuité assez fine de la problématique environnementale du
milieu récepteur et, à ce moment-là, on se retrouve,
effectivement, comme ça a été souligné par d'autres
intervenants qui sont passés avant nous, avec, en fait, des directives
qui ne répondent pas nécessairement aux besoins des citoyens.
Par ailleurs, les citoyens sont, à ce moment-ci, dans le cadre de
notre procédure, représentés par des groupes
environnementaux qui, malgré toute leur bonne volonté, n'ont pas
non plus nécessairement l'expertise pour comprendre exactement
l'ensemble de tous les enjeux et peuvent définitivement en percevoir
certains. Alors, les groupes environnementaux qui interviennent souvent au
niveau des audiences, ce sont des groupes, souvent des groupes nationaux ou il
y a des groupes qui, spontanément, en fait, se forment et qui n'ont
peut-être pas toujours l'expertise pour répondre à
l'ensemble des besoins, alors que si les citoyens pouvaient essentiellement
aider le BAPE, le Bureau d'audiences publiques, à élaborer des
directives qui répondent vraiment à leurs besoins, je pense
qu'ils deviendraient des interlocuteurs privilégiés, alors que,
souvent, ils sont des observateurs. C'est donc ma réponse à votre
question au niveau de la procédure québécoise.
Par ailleurs, je vais laisser Me Daigneault répondre plus
à fond au niveau de la législation et, également, au
niveau de votre première question quant à l'obligation de
modifier la loi. Je pense que Me Daigneault a quelque chose à dire
là-dessus.
La Présidente (Mme Bélanger): Me Daigneault.
M. Daigneault: Merci beaucoup. Je ne pense pas que je voulais
exclure toute éventualité d'un travail législatif, mais
j'aimerais mentionner que c'est peut-être un projet beaucoup plus
d'envergure et à beaucoup plus long terme qui est en train de s'amorcer
en ce moment. Si on veut effectivement repenser toute la planification de nos
projets, c'est un travail qui peut déborder de beaucoup le strict cadre
de la Loi sur la qualité de l'environnement. En fait, la
procédure d'étude d'impact, c'est peut-être la seule
procédure du genre dans tous les processus d'autorisation qu'on trouve,
que ce soit pour des permis d'ordre commercial ou autre. Elle est très
particulière parce qu'on examine un tas de choses et elle permet
justement d'examiner les aspects sociaux, les aspects économiques.
En ce qui concerne la position du Québec face à d'autres
procédures, j'aurais tendance à rejoindre un peu mon
confrère du Centre québécois du droit de l'environnement
lorsqu'il mentionne qu'il y a du bon et du moins bon dans les
différentes procédures. Il donnait l'exemple du
fédéral où, finalement, pour certaines procédures,
on est un peu à la merci de l'agence fédérale qui va
décider si elle va assujettir le projet à ta procédure ou
pas. S'il n'y a pas matière à évaluation, il n'y en aura
pas. Par contre, le public a droit au chapitre au niveau de
l'élaboration des lignes directrices.
Alors, un exemple, pour ou contre. Si on regarde l'Ontario, vous avez la
procédure contradictoire devant l'organisme qui étudie le projet;
si on veut le voir dans une perspective de développement durable, c'est
contre-indiqué parce que, dans une perspective de développement
durable, il faut plutôt rapprocher les parties. Il faut en faire des
collaborateurs. Il faut que ces gens-là échangent de
l'information. Il ne faut pas qu'ils se retrouvent dans une situation
conflictuelle. Je vais m'abstenir de coter la procédure
québécoise. Je dirais qu'elle est dans la bonne moyenne comme
toutes les procédures, finalement. Elle a du pour et du contre.
M. Maltais: Merci. Je pense que vous êtes un fin avocat
parce que vous n'y allez pas au bout, mais je pense que votre réponse me
satisfait très bien. Mais vous avez dit une chose, au début,
concernant le processus législatif, et je pense que c'est à
l'honneur un peu de tous les parlementaires ici. Si, par le fait que nous
tenons cette commission, si le fait que tous les parlementaires sont unanimes
et que les 58 ou 60 intervenants invités autour de cette table secouent
le pommier québécois pour qu'il en tombe de bons dividendes, on
aura atteint notre objectif comme parlementaires.
L'objectif de la commission parlementaire, là, c'est de secouer
le pommier. Ce n'est pas facile de secouer le pommier environnemental. Nous, on
doit avoir des prémisses qui nous guident tout au long de ça. On
en a parié. D'autres intervenants vont en parier. Ce n'est pas facile de
faire la conjonction, mais l'objectif de la commission, c'est de secouer le
pommier. Je pense que la détermination des membres de la commission ne
laisse pas de doute là-dessus.
Vous pariez un peu, dans vos recommandations, tout à fait
à la page 19, avant vos conclusions, de l'assujettissement des
programmes d'État et que l'évaluation de leur impact devrait
être amorcé progressivement. Ça peut me surprendre au
départ et j'aimerais ça que vous me... Parce que si on n'y va pas
"at large", tout d'un coup, on va être accusés encore de cacher
des choses. Si on y va progressivement... Si on y va tout d'un coup, vous
semblez avoir peur que ça encombre le système et que, finalement,
pas tout le monde puisse intervenir en temps et lieu. Comment vous vous situez?
J'aimerais que vous me spécifiez, peut-être par une couple
d'exemples, votre pensée qui est quand même assez nouvelle. De
tous les mémoires, vous êtes le seul qui présentiez
ça. Je pense que c'est nouveau et fort intéressant.
M. Archambault: Bon, dans un premier temps, ce qu'il faut voir,
c'est qu'il y a énormément de choses à traiter, si on veut
regarder de façon globale, en fait, les grands programmes de
l'État. Ce qui veut dire que, à mon sens, qu'on pourra
difficilement... ou, en fait, la Fondation pense qu'on va pouvoir difficilement
traiter de façon simultanée le grand nombre de programmes
à regarder. Qu'on pense au débat énergétique, si
éventuellement on peut arriver à faire quelque chose dans ce
sens-là, ça va drainer énormément d'énergie,
de temps. Qu'on pense, en fait, à toute la problématique de la
gestion des déchets qui, à l'heure actuelle, a fait les
manchettes, probablement même trop au Québec. On a
énormément de choses à faire et de choses à
traiter. Alors, dans un premier temps, on ne peut pas les traiter
simultanément.
Dans un second temps, pour prendre des exemples plus précis, je
me référerais peut-être au projet de Grande-Baleine en
disant que je crois qu'il serait à l'avantage du gouvernement, en fait,
et de l'ensemble des parlementaires que les projets énergétiques,
par exemple, soient traités de façon globale. Dans la mesure
où on pourrait arriver à un consensus, on pourrait arriver
à des projets de société, comme on l'a déjà
d'ailleurs vu dans le passé.
Qu'on se rapporte à la phase I de la Baie James où,
essentiellement, il y avait vraiment un consensus de la société
québécoise en arrière de ce projet-là pour
comprendre qu'il y avait, en fait, quelque chose qui était compris comme
un besoin collectif. Or, dans le cas de Grande-Baleine, on traite ce projet
tellement à la pièce que, finalement, on a de la
difficulté à mettre les autres enjeux en perspective. Les autres
enjeux sont éminemment importants.
Alors, à l'heure actuelle, le débat est limité
à pour ou contre Grande-Baleine, c'est une chose. Mais au niveau de
notre développement énergétique global, comme
société, quels sont nos choix? Ces questions-là devraient
être posées avant de poser la question du pour ou contre
Grande-Baleine. Est-ce que nous sommes pour le nucléaire? Est-ce qu'on
veut maintenir le moratoire au niveau du nucléaire? Est-ce qu'on veut
regarder la fHlère thermique? Quelle est la part des économies
d'énergie dans toute une réflexion globale?
Je pense qu'en faisant une réflexion globale comme ça on
pourrait arriver à un consensus et à un projet de
société qui, en fait, harmoniserait les efforts de tout le monde.
Donc, c'est essen tiellement ce qu'on veut passer comme message ici. Par
ailleurs, si on prend un projet quel qu'il soft, que ce soit Grande-Baleine ou
un autre, il faut bien se rendre compte qu'il y a des projets qui, à
l'heure actuelle, sont difficilement dépla-çables dans le temps,
et je ne veux pas citer celui de Grande-Baleine en particulier, mais en fait
d'immenses projets; des mégaprojets de cette nature-là souvent
demandent une planification à long terme de plusieurs années, et
on ne peut pas du jour au lendemain faire table rase et dire: Bon, bien,
à partir de maintenant, on regarde de façon globale l'ensemble de
la problématique du développement énergétique en
mettant un moratoire sur toute forme de développement. Alors, il y a des
choses qui peuvent se faire, il y a des choses qui peuvent se faire
peut-être, en fait, avec plus de gradation.
M. Maltais: Merci. Je m'arrête ici. Je veux me garder
quelques secondes après. Alors, Mme la Présidente, on reviendra.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je veux
féliciter les représentants de la Fondation
québécoise en environnement pour le travail qu'ils nous
présentent aujourd'hui, plusieurs
suggestions intéressantes. Je voulais, en commençant,
enchaîner sur les grands programmes dont vous venez de parler.
Évidemment, de ce côté-ci de la table, nous avons dit
publiquement à plusieurs reprises que nous étions favorables
à un débat public sur ce grand programme qui consiste à
décider quelle sorte d'avenir énergétique on aura au
Québec. Est-ce qu'il y a d'autres programmes, selon vous, à part
celui-là, qui pourraient être l'objet d'audiences et
d'évaluation par le Bureau d'audiences publiques?
M. Archambault: En fait, j'ai cité tout à l'heure
la problématique des déchets. Je pense que c'est quelque chose
qui est tout à fait d'actualité. On a vécu des
épisodes douloureux et il y aurait probablement intérêt
à se demander de façon globale comment on pense gérer, en
fait, nos déchets au Québec, quelles sont les façons d'en
produire moins, et il y a un certain nombre de questions fort importantes qui
sont à poser, en aval de regarder des projets spécifiques.
Essentiellement, le problème revient toujours à la
même chose: c'est que, lorsqu'il n'y a pas consensus, lorsque les gens ne
comprennent pas de façon globale où on s'en va dans le cadre
d'une politique, à ce moment-là, il y a énormément
de choses qui peuvent se produire, puis ce qu'on peut voir, c'est qu'il y a
énormément d'hypothèses qui peuvent s'échafauder,
d'hypothèses qui ne sont souvent peut-être pas basées
nécessairement sur des faits, et il y a d'autres hypothèses qui
sont élaborées sur ces hypothèses-là. Là, on
s'embarque dans une spirale où, finalement, on ne contrôle plus
rien et les citoyens, parce qu'ils ne comprennent pas de façon globale
où on veut aller dans certains dossiers majeurs, dans certains dossiers
globaux, en fait, ont peut-être raison de se questionner et,
éventuellement, d'allumer des lumières. Alors, c'est dans ce
contexte-là qu'on dit que les citoyens doivent être mis au fait
plus rapidement et qu'on doit regarder de façon plus globale nos projets
de société.
M. Lazure: Mais je dois dire que sur votre autre remarque, au
départ, vous nous avez dit: Nous ne pensons pas qu'il y ait tellement de
lacunes dans la loi ou dans la réglementation. Nous pensons que si on
applique de façon plus expéditive, de façon plus claire
cette loi-là et cette réglementation-là, il y aurait
déjà une grande amélioration. De ce côté-ci,
on est plutôt d'accord avec vous.
Il faut aussi regarder quels sont les gestes administratifs qui
pourraient être portés pour améliorer la procédure.
Par exemple, à la page 9, vous parlez des problèmes
rencontrés dans cette procédure-là et vous dites que
c'était dans la façon de se servir de la procédure
plutôt que la procédure elle-même. Est-ce que vous pourriez
nous donner des exemples? En gros, c'est le ministère de l'Environnement
qui gère la procédure, qui voit au bon déroulement de la
procédure. Est-ce que ça veut dire, dans votre esprit, que c'est
de ce côté-là qu'il faut regarder si ça ne tourne
pas assez rondement? Est-ce que vous pouvez élaborer sur ce
point-là? (17 heures)
M. Daigneault: En fait, il y a bien des endroits où il
faut regarder, certainement du côté des gens qui ont à
administrer la procédure, certainement aussi du côté des
administrés, c'est-à-dire ceux qui ont à s'y soumettre. Je
pense qu'il y a des améliorations à faire sur divers plans, et le
rapport Lacoste, sur ce plan-là, en relate plusieurs.
Si on regarde, par exemple, la soumission hâtive des avis de
projets, ça, ça concerne davantage le promoteur. Si on regarde
les recommandations du rapport Lacoste en ce qui concerne les directives,
ça concerne davantage le ministère. Ça dépend de
quel aspect de la procédure on cherche à améliorer.
M. Lazure: Seriez-vous favorable à ce qu'il y ait des
délais de fixés pour les différentes étapes qui
sont gérées par le ministère, comme il y a un délai
de quatre mois fixé pour la partie publique?
M. Daigneault: Certainement. Ce qui est assez paradoxal, c'est
que dans une procédure qui est là avant tout pour permettre la
participation du public, les seules étapes qui sont fixées dans
le temps sont les étapes où le public est concerné,
c'est-à-dire les 45 jours de la période de consultations
publiques et les 4 mois de la période d'audiences publiques.
M. Lazure: Et, parlant des audiences publiques, vous
préconisez une aide financière aux individus, aux groupes. Est-ce
que vous avez réfléchi un peu de quelle façon ça
pourrait être fait, ça, au Québec? Par quel organisme?
Selon quelle sorte de critères?
M. Archambault: En fait, oui, on est favorables. Ça se
fait d'ailleurs au fédéral. Je vous avoue qu'on n'a pas
nécessairement regardé la mécanique, à savoir
comment ça pourrait se faire. Je reviendrai essentiellement sur un point
qui me semble important. C'est qu'il y a des gens de la base qui ont des choses
à dire et, à partir du moment où on va prendre en
considération ce que les gens qui sont dans le milieu, qui ont à
vivre un éventuel changement causé par un projet, ont à
dire - ces gens-là vont pouvoir s'exprimer et vont pouvoir avoir les
outils nécessaires pour s'exprimer - bien, je pense qu'on va atteindre
notre objectif. Maintenant, comment? Je ne peux pas nécessairement
élaborer là-dessus. On ne l'a pas vraiment regardé. Mais
ce qui est important, c'est que les gens qui sont représentatifs du
milieu puissent être aidés.
M. Lazure: Vous dites, à un moment donné, à
la page 15: "L'étude d'impact est destinée au public. Ce devrait
être un ouvrage vulgarisé, rédigé dans des termes
simples et concis, se concentrant sur les principaux enjeux." Je pense que
c'est fort valable, ce que vous recommandez là, que ce soit un texte
compréhensible par le grand public. Ordinairement, il s'agit de textes
rédigés par des firmes dans un jargon qui est très
difficile à comprendre, qui est très technique. Est-ce que vous
pensez que c'est réalisable d'avoir non pas seulement un
résumé en termes plus vulgarisés, mais d'avoir un rapport
intégral en termes simples? Moi, je pense que c'est possible. Vous
autres, est-ce que vous pensez que c'est possible?
M. Archambault: Moi, j'ai l'impression qu'on peut arriver
à des solutions intéressantes là-dedans. Ce qu'il ne faut
absolument pas faire, c'est de faire en sorte que ces rapports-là soient
des rapports qui soient complètement hermétiques et qui puissent
être étudiés, commentés par un nombre,
malheureusement, trop restreint de personnes. Alors, ça devient un
débat de spécialistes, ça devient un débat entre le
promoteur et ses spécialistes et, souvent, des groupes environnementaux
qui ont une certaine expertise, alors que les citoyens comme tels ne peuvent
malheureusement pas souvent intervenir parce que ça devient hautement
scientifique.
Il y a probablement moyen de faire en sorte que la démarche
globale, sans nécessairement qu'on explique de fond en comble les
équations mathématiques qui sont souvent dans ces
rapports-là, mais qu'on explique de façon globale la
démarche, et limpide cette démarche-là, pour que les
citoyens puissent suivre ce cheminement-là. Et ça, c'est
réalisable.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de Dubuc.
M. Morin: Merci, Mme la Présidente. Dans votre
mémoire, vous vous attardez de façon particulière à
toute la dimension des directives. D'une part, vous soutenez qu'une directive
incomplète peut avoir, évidemment, un effet direct sur une
étude d'impact incomplète et, d'autre part, des directives un peu
trop compliquées, exigeantes ou englobantes vont avoir des effets de
diluer ou de laisser passer inaperçus certains enjeux majeurs. Sans que
ce soit des conclusions, mais vous vous référez au rapport
Lacoste là-dessus, vous soutenez que l'ampleur, pour utiliser votre
expression, des directives devrait être proportionnelle à
l'ampleur du projet ou à l'envergure du projet. J'aimerais que vous
élaboriez un petit peu parce que, lorsque j'ai lu votre mémoire,
je me serais attendu à ce qu'on utilise plus un terme de
complexité, parce que l'étude ou l'importance de l'étude
d'impact au niveau de ces directives n'est pas nécessairement en
fonction de l'envergure du projet en termes de masse physique ou
d'investissement, mais c'est beaucoup plus relié à la
complexité du projet où il faut vraiment fouiller pour faire
ressortir les impacts qui, superficiellement, ne paraissent pas
nécessairement. Or, j'aimerais vous entendre élaborer un petit
peu là-dessus.
M. Archambautt: Dans un premier temps, c'est ce qu'il faut
comprendre. On parle de complexité de projet; alors, on abonde essentiel
lement dans votre sens. Et pour faire en sorte que nos directives vont bien
refléter les besoins de la population, parce que, en bout de ligne,
c'est ce qu'on veut, alors pour faire en sorte que les directives vont bien
refléter les besoins de la population, encore une fois, il faut revenir
à la base et faire en sorte que la population, les groupes
représentatifs du milieu, les citoyens qui vivent dans ce
milieu-là puissent s'exprimer et beaucoup plus vite qu'à l'heure
actuelle. À partir de ça, à la fois pour le promoteur,
pour les groupes environnementaux et pour les élus, il y a une
protection optimale là-dedans, dans cette démarche-là,
parce que, lorsque les gens vont avoir exprimé leurs besoins, leurs
craintes, leurs préoccupations, on va devoir en traiter dans la
directive. Ça, c'est ce qui m'apparait fondamental et je pense que c'est
l'avenue au niveau de votre questionnement là-dessus.
M. Morin: Ça va là-dessus. Maintenant, pour ce qui
est du ministère de l'Environnement qui, lui, a à élaborer
les directives, vous n'ajouteriez rien là-dessus en termes de guide ou
de balises dont le ministère, dont les fonctionnaires devraient
s'inspirer pour aller dans le sens que vous suggérez? C'est
qu'évidemment les directives soient un peu proportionnelles à
l'ampleur du projet ou de sa complexité, parce que, là, vous
faites un commentaire général. Mais j'aurais aimé que vous
alliez un petit peu plus loin dans votre démarche.
M. Archambault: Bon. Ce que je dirais essentiellement, c'est que
le ministère de l'Environnement fait fort bien son travail à
l'heure actuelle compte tenu des moyens dont il dispose. C'est-à-dire
que le ministère, compte tenu du fait qu'il ne peut pas profiter de
l'expertise des citoyens qui ont effectivement dans leurs milieux une expertise
très certaine, essaie, évidemment, de faire des directives pour
prendre en considération l'ensemble des besoins des citoyens et ne pas
laisser de trou. À ce moment-ci, je pense qu'il faut lui rendre hommage
là-dessus. Mais le ministère pourrait, effectivement, être
grandement aidé dans sa démarche et ses professionnels pourraient
être grandement aidés dans la rédaction des directives
s'ils étaient appuyés des citoyens. Est-ce que ça
répond à votre question?
M. Morin: Ça va. Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Mme la
députée de Vachon.
Mme Pelchat: Oui, merci, Mme la Présidente. MM. de la
Fondation, j'aimerais aussi vous remercier de votre présence et de votre
mémoire. J'aimerais juste souligner votre crainte ou votre grande
réticence à une modification à la Loi sur la
qualité de l'environnement, particulièrement concernant la
procédure d'évaluation. Comme l'a souligné mon
collègue Ghislain Maltais, nous sommes députés et notre
fonction principale, c'est de faire des lois, de les modifier, d'examiner si
elles conviennent ou pas à notre réalité. Mais on a bien
dit, par exemple, qu'il n'était pas du tout question de remettre en
question les principes qui sous-tendent la Loi sur la qualité de
l'environnement, notamment sur la procédure, que ce soit au niveau des
audiences publiques, de la participation du public à ce processus, mais
bien d'améliorer, de bonifier la procédure, s'il y a lieu, ou
tout simplement d'appliquer les règlements qui sont adoptés, mais
qui ne sont pas en vigueur. Alors, présumer qu'on va modifier la loi, je
pense que ce n'est pas nécessairement ça, mais peut-être
qu'on le recommandera aussi, et ça ne mettrait pas, d'après mol
en tout cas, en danger, parce que ce n'est pas l'intention des commissaires
ici, la Loi sur la qualité de l'environnement et la procédure.
Dans le fond, ce que je vous demande, c'est de faire confiance aux
législateurs et aux députés que nous sommes. Au contraire,
si on s'est donné ce mandat-là d'une façon unanime, c'est
peut-être parce qu'on y croit, justement, à la procédure
d'évaluation des impacts environnementaux, et je ne pense pas qu'on
veuille aller contre son esprit et sa lettre.
Puisque, dans votre présentation, vous le dites vous-mêmes
qu'une des missions que vous vous êtes donnée au niveau de la
Fondation québécoise, c'est de supporter les groupes
environnementaux, est-ce que, comme plusieurs mémoires nous en font
part, l'utilité de financer les groupes environnementaux, par exemple,
lors des audiences publiques pour qu'ils puissent mieux se préparer et
faire des représentations plus soutenues, mieux
étoffées... Est-ce que vous ne pensez pas qu'on pourrait compter
sur la Fondation québécoise en environnement pour financer les
groupes environnementaux? On nous dit, dans plusieurs mémoires, qu'il
serait peut-être Intéressant de percevoir 1 %, par exemple, au
niveau des promoteurs, ces gens-là qui ont peut-être les coffres
plus garnis. Moi, je me posais la question: Est-ce que la Fondation ne serait
pas aussi un outil de financement intéressant?
M. ArchambauH: Oui, dans le cadre de votre
réflexion...
Mme Pelchat: Ne dites pas non tout de suite.
M. Archambault: ...ce serait peut-être intéressant
de penser à avoir des outils pour permettre à la Fondation de
jouer ce rôle-là. Alors, je pense à la Fondation de la
faune du Québec qui perçoit, je pense, 1 % ou un certain
pourcentage au niveau de tous les permis de chasse et de pêche qui sont
vendus au Québec. Je dois vous dire que la Fondation n'a aucun moyen de
financement statutaire de cette nature-là. La Fondation
québécoise en environnement s'est toujours
débrouillée, en fait, pour aller chercher ses sous,
d'année en année et, par temps de crise économique, fort
difficilement, je vous l'avoue. Alors, c'est évident qu'à l'heure
actuelle, sans un support des autorités supérieures, la Fondation
ne pourrait pas jouer ce rôle-là, soit appuyer
financièrement, de façon massive, les groupes environnementaux
qui auraient à défendre ou à articuler des positions dans
le cadre de projets. Alors, je vous invite ardemment à nous aider.
Mme Pelchat: vous pourriez percevoir votre financement... oui, on
est ici pour ça. vous pourriez percevoir votre financement de quel
organisme?
M. Archambault: Pardon? Mme Pelchat: Des promoteurs?
M. Archambault: Je m'excuse, je n'ai pas saisi.
Mme Pelchat: Percevoir le financement. Par exemple, vous dites:
À l'exemple de l'organisation de la faune qui perçoit 1 % de
chacun des permis. De quelle façon ça pourrait-il se faire pour
la Fondation québécoise? Chaque promoteur vous donnerait
obligatoirement, par la loi, tant d'argent?
M. Archambault: Je vous avoue, à l'heure actuelle, on ne
s'est pas placé en situation et on n'a pas réfléchi, en
fait, pour faire en sorte que les promoteurs impliqués dans des projets
environnementaux puissent nous donner des sous, loin de là. Maintenant,
la façon dont on perçoit nos sommes d'argent à l'heure
actuelle, c'est essentiellement de la part du public, du grand public. On l'a
dit tout à l'heure, il y a 45 000 amis de la Fondation répartis
dans l'ensemble du Québec qui versent une contribution, d'une part.
Secundo, c'est par des dons qui nous sont faits, de corporations par exemple,
souvent essentiellement pour produire des émissions
télévisées ou des messages radiophoniques. Alors, on a eu
des séries télévisées depuis les trois
dernières années. En fait, nos sous viennent de ces
promoteurs-là et du public, pour sensibiliser la population aux enjeux
environnementaux.
Mme Pelchat: Ça va. Vous parlez d'un délai
raisonnable qui devrait être respecté par le ministère de
l'Environnement pour élaborer la directive. D'abord, vous avez
répondu à la question du député de La Prairie
à l'effet que vous seriez prêts à ce qu'il y ait un
délai imposé, et strict et précis. Je dois vous souligner
que, si on avait à suggérer une telle recommandation à
l'Assemblée nationale, ça nécessiterait une modification
à la loi, à la procédure d'évaluation des impacts.
C'est quoi, un délai raisonnable, pour vous? Qu'est-ce que ce
serait?
M. Daigneault: Je pense que, compte tenu de l'expérience
du ministère dans l'application de la procédure, dans le
caractère récurrent de beaucoup de projets - qu'on pense aux
projets de marina, qu'on pense aux projets routiers, ainsi de suite - quand on
regarde, d'ailleurs, les directives et la similitude des paramètres qui
sont exigés dans chacune, je pense qu'un délai de l'ordre de 30
à 60 jours, ce serait amplement, quitte à ce qu'il puisse y avoir
un aménagement dans le cas de situations nouvelles
particulièrement complexes, mais qui devrait être
justifié.
Mme Pelchat: Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je veux revenir
à certaines de vos remarques où vous préconisez qu'on
mette à contribution le public, de façon plus précoce,
dans le processus, ce avec quoi nous sommes bien d'accord. À la page 22,
vous dites: "Que l'on mette à contribution le public pour la
préparation de la directive, particulièrement des gens qui ont
une connaissance intime du milieu récepteur du projet." Comment est-ce
qu'on fait pour dire: Ceux-là sont plus connaissants du milieu
récepteur du projet; ceux-là, non; ceux-là, oui? (17 h
15)
M. Archambault: Je pense que cela se fait de façon
spontanée. On a des exemples. On parlait tout à l'heure de la
procédure fédérale. Il semble que dans le cadre de la
procédure fédérale, lorsque c'est annoncé de
façon adéquate, par exemple, par le biais des journaux de
quartier, par le biais de la télévision communautaire, les gens
qui ont des choses à dire et qui ont des connaissances
intéressantes du milieu viennent spontanément exprimer leurs
préoccupations, leurs besoins. À date, ça a bien
fonctionné, lorsque c'est fait de cette façon-là.
M. Lazure: Une certaine sélection naturelle,
spontanée.
M. Archambault: Oui, parce qu'on ne peut définitivement
pas, en fonction d'une procédure publique, faire une
évaluation...
M. Lazure: II ne serait pas question d'écarter des
gens.
M. Archambault: Je pense que ça ne se fait
carrément pas et ça ne serait pas sain. Il y a un
équilibre qui se fait, en fait, même dans le cadre des
discussions. Lorsqu'il y a plusieurs groupes qui représentent des
intérêts divergents, lorsque la population peut s'exprimer
librement, il y a un équilibre qui se fait dans le cadre de ces
audiences-là.
M. Lazure: Pour revenir à votre préoccupation de ne
pas avoir à légiférer de nouveau, une préoccupation
que je partage, si on regarde l'article 31.2, qui s'appelle la procédure
préalable, ça dit: "Celui qui a l'intention d'entreprendre la
réalisation d'un projet visé à l'article 31.1 - qui
demande un certificat d'autorisation - doit déposer un avis écrit
au ministre décrivant la nature générale du projet. Le
ministre indique alors à l'initiateur du projet la nature, la
portée et l'étendue de l'étude d'impact sur
l'environnement que celui-ci doit préparer." Partageant ce souci de ne
pas modifier la loi, c'est assez large, ça, et je demande en même
temps une consultation gratuite à notre cher maître: Est-ce que,
dans le cadre de 31.2, le ministre ne pourrait pas ajouter dans sa directive
une consultation du public?
M. Daigneault: Je me suis posé la question, dans quelle
mesure effectivement l'élaboration de la directive ne pourrait pas se
faire déjà avec une participation du public. Il se fait
déjà une consultation Interministérielle pour
l'élaboration de la directive, peut-être pourrait-elle être
élargie. Mais comme, finalement, on distribue dans le public une
Information qui origine d'un tiers qui est un promoteur, je pense que celui-ci
devrait aussi collaborer à cette étape-là. Lorsque le
projet se réalise dans un milieu particulier avec un promoteur qui
origine même du milieu, ça peut même donner ouverture
à des collaborations intéressantes.
Je dois dire aussi qu'il y a des aménagements de procédure
interne dans la directive interne du ministère de l'Environnement sur
l'administration de la procédure où ces
éléments-là pourraient être Insérés
sans passer par la voie législative.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Oui, Mme la Présidente. Vous parlez de la
période d'Information et de consultation publique qui se résume
à une période d'information et non à une période de
consultation. Qu'est-ce que vous suggéreriez pour changer ça?
Parce que dans mon expérience, ça me semble, en tout cas, d'une
façon ou de l'autre... Je vais vous laisser élaborer et je
reviendrai, parce que si vous dites de l'information seulement
plutôt que de la consultation...
M. Archambault: Dans un premier temps, je pense qu'il est
important de rappeler que les citoyens devraient être impliqués au
niveau de l'élaboration de la directive. À partir de ça,
il y a énormément de craintes qui se dissipent et il y a
énormément de pressions qui s'en vont, finalement, de part et
d'autre, à la fois pour les citoyens comme pour le promoteur. Là,
je vais laisser continuer Me Oaigneault là-dessus.
M. DaigneauK: En fait, je pense que c'est l'occasion pour le
promoteur non seulement de dire aux gens qu'il y a une brique sur une table
quelque part et elle est disponible, mais de la présenter, de la
justifier, quitte à ce que d'autres intervenants apportent un autre
point de vue, parce qu'il ne faut pas que ce soit unilatéral, et que les
gens puissent poser des questions, et peut-être qu'on découvrirait
que des appréhensions qui, au départ, étaient
présentes se dissipent parce qu'on obtient des réponses, tout
simplement parce qu'il y avait une imprécision ou une
ambiguïté dans le document. C'est peut-être aussi le moment
de faire intervenir la médiation environnementale. Me Giroux a
souligné, à juste titre, que ça ne devrait pas remplacer
l'audience publique, c'est-à-dire qu'on ne devrait pas avoir à
choisir entre la médiation et l'audience. Mais si la médiation
précède l'étape de l'audience, on peut peut-être
éviter l'audience sans pour autant porter atteinte au droit du public
à connaître tous les vrais impacts du projet.
M. Dufour: Oui, mais dans un projet qui est déposé
et qui peut porter à controverse ou qui a besoin d'études
environnementales ou qui a des impacts sur l'environnement, comment un
promoteur pourrait-il agir d'une façon telle que les gens disent: Ah!
oui, mais ça c'est neutre? Moi, je regarde le point de vue dans les
faits. Le promoteur, lui, il a un projet. Il a beau avoir les plus belles
études, il a beau avoir plusieurs explications, les gens, comment ils
regardent ça? Ils disent: Aïe! ça, c'est un vendeur; il ne
vient pas nous consulter, il vient nous organiser; il vient nous vendre son
projet. De quelle façon on pourrait amener... Parce que, dans le fond,
quand le Bureau d'audiences siège, et il doit le faire, il y a des fois
que ça ne serait peut-être pas nécessaire... En tout cas,
j'ai en tête certains projets où ça m'a semblé une
perte de temps. Peut-être que ce n'est pas correct de dire ça,
mais je me dis: On a fait évoluer le monde, mais à quel
coût? Ça aussi, ça a un prix. Quand vous me dites: On doit
les Informer, comment peut-on le faire pour que ça ait au moins une
apparence de neutralité. On parle souvent de la justice, de l'apparence
de justice. La neutralité, l'apparence de neutralité, c'est
quoi?
M. DaigneauH: Puisque, justement, il n'y a rien qui encadre de
façon précise une telle procédure à l'heure qu'il
est, je pense que d'avoir la présence d'autres intervenants qui ne sont
pas nécessairement identifiés comme étant du même
côté que le promoteur serait une façon de contourner cette
difficulté-là. Mais j'aimerais faire un parallèle aussi
avec tout le processus de consultation au niveau des schémas
d'aménagement, par exemple, où, finalement, la
municipalité présente son schéma d'aménagement sans
qu'on mette en doute l'objectivité de la présentation, avec une
nuance cependant: ce sont des élus. Je pense que c'est une nuance qui
est capitale. Mais il reste qu'elle arrive avec son urbaniste, puis on expose
la situation et, là, les gens essaient d'avoir les réponses
à leurs questions.
M. Dufour: Comment pourrait-on placer cette information-là
qui, en fait, devient une véritable consultation? C'est quoi la nuance
que vous apportez par rapport à ça?
M. DaigneauH: C'est quelque chose d'interactif.
M. Dufour: D'interactif.
M. Archambault: Mais je pense que ces procédures-là
vont être beaucoup plus harmonieuses si, effectivement, dès le
départ, on peut cerner, en fait, les questions des citoyens et,
éventuellement, y répondre dans les études qui sont
déposées par les promoteurs. Et, à ce moment-là,
lorsqu'on prend en considération les besoins des citoyens, lorsqu'on
répond à leurs questions, les citoyens sont tout à fait
aptes à juger du bien-fondé des réponses qui sont
données là. Et si, éventuellement, le promoteur n'a pas
répondu de façon adéquate à leurs questions, en
sachant qu'au départ les gens étaient préoccupés
à tel ou tel niveau, je pense qu'il peut s'attirer les foudres des
citoyens et avec raison. Mais il y a énormément de débats
qui ne sont pas des débats à l'heure actuelle et c'est des
débats qui sont provoqués parce que notre procédure n'est
peut-être pas assez raffinée pour permettre de désamorcer
des crises qui n'en seraient pas.
M. Dufour: Vous avez parlé tout à l'heure, vous
avez fart allusion à la question de l'expérience de la
médiation, parce que la médiation, assez souvent, c'est avant que
le Bureau d'audiences siège. Quand on sait le temps énorme que
ça prend entre... Pour la médiation, ça prend autant de
temps que le Bureau d'audiences. Si, après la médiation,
ça achoppe, ça veut dire que le Bureau d'audiences, il faut qu'il
siège. Si on prend tout, si on prend toute l'étape... Je vais
juste faire allusion à un projet sur une route. Au lieu d'aller au
Bureau d'audiences, on dit: On va
faire la médiation. La médiation aurait pris autant de
temps que l'audience, que le BAPE, si le BAPE avait siégé. Si la
médiation ne donne pas de résultats, ça veut dire qu'il
faut que le Bureau siège. On vient de retarder le projet d'un an. Est-ce
que vous avez une solution ou des propositions à faire pour un ou
l'autre?
M. Daigneault: On s'était penchés, dans la
préparation du mémoire, sur la question de la médiation et
on en était venus à la conclusion que ça ne pourrait
peut-être se faire que sur des projets où il y a vraiment des
points bien précis d'identifiés, où il y a
mésentente. En d'autres termes, faire l'audience publique de tout un
projet parce qu'il y a un seul point, à un moment donné, qui
accroche, peut-être que la médiation serait un outil
approprié, quitte à ce que, si ça n'aboutit pas, on se
retrouve en audience. Mais ce que je veux dire, c'est que ça ne pourrait
pas se faire pour des projets d'envergure. Si on regarde l'expérience
américaine en matière de médiation environnementale,
effectivement, les expériences de médiation peuvent devenir
monstrueuses pour des grands projets industriels, par exemple, parce qu'il y a
tellement de facteurs qui entrent en ligne de compte, il y a tellement
d'information qui doit circuler, ça peut parfois être plus long
que notre propre procédure.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le
député de Jonquière. M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente. Il nous reste
malheureusement très peu de temps. Vous avez abordé - et,
malheureusement, vous ne pourrez pas me donner de réponse parce que mon
temps est presque terminé; c'est dommage parce que...
La Présidente (Mme Bélanger): II reste quatre
minutes...
M. Maltais: Quatre minutes? Ah! Je vais pouvoir poser mes
questions. On a parlé de développement durable et vous en avez
parlé d'une façon, en tout cas, moi, qui me plaît beaucoup.
Mais vous savez que le développement durable pose des impératifs
et des choix. Justement, est-ce que, d'après vous, la
société québécoise est prête à faire
un choix pour tailler un développement durable sur mesure? Je pense
aussi, bien sûr, dans les villes et dans les régions.
D'après ce que vous voyez un peu, vous autres, comme organisme
environnemental, est-ce que vous pensez que la société
québécoise est prête à accepter de faire du
développement durable avec des choix bien définis, en respectant
les impératifs que vous y mettez?
M. Archambault: Oui, la société est prête,
définitivement. Je pense qu'il faut dès maintenant s'y pencher de
façon globale. Tout à l'heure, on me demandait de citer des
exemples. On parlait de développement énergétique, on peut
parier également de toute la problématique du
développement durable versus notre infrastructure industrielle: De quoi
veut-on se doter comme projet de société au niveau de notre
développement industriel? Cette réflexion-là doit
être faite aussi et je pense que les citoyens sont non seulement
prêts, mais attendent ça.
M. Maltais: Regardez, je vais vous donner un petit exemple. Au
niveau de la forêt, vous savez qu'il y a un guide d'intervention en
forêt...
M. Archambault: Oui.
M. Maltais: ...qui a été signé conjointement
par le MLCP, le ministère de l'Environnement et le ministère des
Forêts. Dans l'applicabilité, nous rencontrons quand même
des "grelu-grelu" assez forts. Vous savez ce que je veux dire par
"grelu-greiu", c'est-à-dire qu'il y a des chicanes de clocher: C'est mon
lièvre, c'est mon arbre, c'est mon lac. Quand je vous pose la question:
Est-ce que vraiment la société québécoise est
capable de faire abstraction de "mon-petit-je-moi"? Je sais que vous avez une
bonne expérience là-dedans, vous autres. Vous le vivez sur le
terrain, vous le vivez dans vos échos. Est-ce que ça, c'est un
signe avant-coureur, d'après vous, ou si c'est simplement un petit
grondage qu'on peut calmer je ne sais pas comment? Est-ce qu'on est prêt
à faire le saut?
La Présidente (Mme Bélanger): Me Daigneault.
M. Daigneault: Moi, je verrais la réponse à
ça dans la génération montante qui est aux prises avec les
conséquences, justement, de l'absence autrefois de ce concept de
développement durable, avec les problèmes d'ordre
planétaire qu'on connaît, avec la mauvaise répartition des
ressources, si vous voulez. Lorsqu'on regarde ces jeunes-là, je pense
qu'ils vivent... Le monde dans lequel ils arrivent, ce n'est pas du tout celui
auquel nous, on a été habitués et je pense que c'est
peut-être là que l'évolution des mentalités va se
faire.
M. Maltais: Merci. Vous avez totalement raison parce qu'on sait
que les jeunes sont beaucoup plus réceptifs à la question
environnementale que les gens de notre âge. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas
été élevés... Lorsqu'on a eu notre
éducation, ce n'était pas le mot d'ordre à l'école
et, aujourd'hui, ça l'est. Il faut féliciter ceux et celles qui
ont su sensibiliser nos jeunes là-dessus.
En terminant, Mme la Présidente, je vous remercie infiniment.
Dommage. J'espère qu'on aura l'occasion de continuer notre
questionne-
ment, peut-être en dehors de la commission ou dans un autre
endroit. Ça a été fort positif et je vous en remercie.
M. Archambault: Merci infiniment.
La Présidente (Mme Bélanger): Nous vous remercions,
messieurs de la Fondation, M. Archambault et M. Daigneault, de votre
participation à notre commission.
M. Daigneault: Merci.
M. Archambault: Merci beaucoup. (17 h 30)
La Présidente (Mme Bélanger): Je demanderais
à l'Association des manufacturiers du Québec de bien vouloir
prendre place. MM. Richard Le Hir et Éric Meunier.
Association des manufacturiers du
Québec
M. Le Hir (Richard): J'ai également, Mme la
Présidente, le plaisir d'avoir avec nous un ancien président de
l'Association et toujours membre de l'exécutif, M. Robert Murray.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Le Hir.
Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, suivi d'une
discussion entre parlementaires, 20 minutes du côté
ministériel et 20 minutes du côté de l'Opposition.
M. Murray (Robert): J'aimerais préciser que je ne suis pas
ancien, je suis ex.
Des voix: Ha, ha, ha!
La Présidente (Mme Bélanger): C'était bien
de rétablir les faits.
M. Le Hir: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Bélanger): C'est M. Le Hir?
M. Le Hir: C'est ça, et M. Éric Meunier, qui est
l'auteur de notre mémoire. On veut d'abord vous remercier de nous avoir
invités, Mme la Présidente, à participer à votre
commission. Comme vous le savez, la question du développement durable en
est une qui préoccupe énormément les membres de notre
Association. Pour nous, le développement durable, c'est essentiellement
la recherche d'un équilibre entre les impératifs de la protection
de l'environnement et ceux du développement industriel. La recherche de
cet équilibre constitue un exercice parfois périlleux, mais
néanmoins nécessaire et nous croyons avoir
développé certaines propositions qui seraient de nature à
favoriser l'atteinte de ce point d'équilibre.
D'abord, nous souhaitons dire d'emblée que nous sommes favorables
à une meilleure intégration de la consultation publique dans le
processus d'évaluation et d'examen des impacts environnementaux,
à condition que ce processus soit substantiellement
amélioré et qu'il tienne compte des contraintes techniques et
économiques qui sont le lot des entreprises.
Rappelons que le concept de développement durable est basé
sur la reconnaissance que les objectifs du développement
économique et les objectifs de protection de l'environnement ne sont pas
mutuellement exclusifs. Dans ces conditions, le processus d'évaluation
et d'examen public ne doit pas devenir un obstacle à la
réalisation de projets, il doit viser la recherche de solutions et non
seulement l'identification des problèmes.
Or, il est grand temps de revoir le processus que nous utilisons
à l'heure actuelle. Dans bien des cas, l'expérience des
dernières années laisse présager, si rien ne change, que
la mise en place du mécanisme d'évaluation et d'examen public qui
devait, au départ, permettre l'implantation harmonieuse de nouveaux
projets continuera plutôt à favoriser les confrontations, à
multiplier les contentieux et à nous condamner à l'immobilisme.
Il faut changer cette tendance. Le processus doit être orienté
vers la recherche de solutions raisonnables et acceptables aux problèmes
environnementaux potentiels reliés à la réalisation de
projets et vers l'identification des mesures d'atténuation à
mettre en place pour qu'ils se réalisent. Avant que le BAPE n'ait
démontré qu'il est en mesure de faire l'arbitrage des arguments
qui lui sont présentés de manière à favoriser
l'identification de solutions, nous ne pouvons pas véritablement appuyer
l'élargissement de son mandat.
Pour l'Association des manufacturiers, le processus d'évaluation
et d'examen public doit permettre d'accélérer la
réalisation de projets qui s'inscrivent dans une optique de
développement durable. On pense, entre autres, à des projets de
modernisation d'installations qui diminueraient la charge polluante
émise dans l'environnement ou à des projets de construction de
nouvelles installations pour remplacer d'anciennes installations plus
polluantes sur les mêmes sites. De tels projets devraient être
exclus de la procédure d'évaluation et d'examen public ou,
à la limite, être soumis à une procédure
simplifiée. D'ailleurs, il faut se rappeler que des mécanismes
d'autorisation comme les certificats d'autorisation et les attestations
d'assainissement existent déjà, ce qui permet au ministère
de l'Environnement de veiller à ce que les considérations
environnementales soient dûment intégrées même en
l'absence d'examen public.
L'AMQ souhaite que le processus favorise la prise de décision la
plus rapide possible. À cet effet, nous voulons insister sur la
nécessité de reconnaître la dynamique du
développement industriel. Le processus d'évaluation et
d'examen
doit permettre à un promoteur de tirer avantage
d'une conjoncture favorable comme, par exemple, une période durant
laquelle le coût du capital est avantageux ou lorsque le marché
d'une entreprise est en expansion. Les processus décisionnels couramment
utilisés aux fins d'investissement industriel visent toujours à
identifier la meilleure de plusieurs options possibles. C'est donc dire qu'on
fait jouer la concurrence à l'intérieur d'une même
entreprise sur plusieurs projets. Dans ces conditions, le temps entre la
décision de l'ancien projet et sa réalisation est une dimension
critique et l'écoulement d'un temps improductif peut affecter
négativement la viabilité d'un projet. Les projets doivent
pouvoir aller de l'avant lorsque la conjoncture est propice. Après, il
est trop tard.
Dans cette optique, l'AMQ recommande que les projets
mineurs de rénovation, les opérations de routine, les
constructions de petite envergure et d'autres projets de ce type reconnus comme
ne posant aucun risque pour l'environnement ou ayant des effets
négligeables soient exclus de la procédure d'évaluation
publique; également, que les projets à caractère
répétitif dont les mesures d'atténuation sont
identifiées et généralement acceptées soient
classés par groupes. Dans ces cas, une procédure
d'évaluation et d'examen type pourrait être déclarée
comme modèle à suivre et tout projet individuel pouvant
être classé dans ces groupes ne serait soumis à un examen
public que pour prendre en considération des circonstances locales ou
des effets cumulatifs.
Dans les cas où seulement certaines parties d'un
projet sont source de préoccupation publique ou dans les cas où
l'implantation d'un projet se fait à plusieurs endroits, le processus
d'évaluation et d'examen public devrait porter uniquement sur ces
aspects et les audiences être tenues seulement là où il y a
des demandes; aussi, que des zones industrielles disposées à
soutenir l'exploitation industrielle en raison de la "sensl-tivité" du
milieu qu'elles délimitent soient Identifiées au
préalable. Ces zones pourraient être différenciées
en termes de leur capacité à soutenir un niveau d'exploitation
maximal au-delà duquel tout développement ne serait plus
soute-nable. Tout projet pourrait alors s'y implanter dans la mesure où
les effets cumulatifs qu'il pourrait engendrer ne dépassent pas ce
plafond. Tout projet destiné à être implanté dans
ces zones pourrait être soumis, si nécessaire, à une
évaluation et à un examen public simplifié ne portant que
sur les effets cumulatifs et les impacts locaux potentiels.
Dans le cadre des projets majeurs reconnus comme
susceptibles de poser des risques significatifs à l'environnement et
dont l'intérêt ne peut être évalué a priori,
dans une optique de développement durable ou ne pouvant être
couvert par les recommandations mentionnées ci-haut, l'AMQ juge que ces
projets devraient obligatoirement être assujettis à un examen
public. Toutefois, avant d'assujettir ces projets, les étapes suivantes
devraient être privilégiées.
D'abord, la médiation environnementale. Le processus
d'évaluation et d'examen doit encourager le recours à la
médiation environnementale dans les dossiers où il y a demande
d'audiences et où toutes les parties entrevoient une possibilité
de conciliation des divergences. L'établissement, ensuite, de
délais précis et raisonnables pour chaque étape de la
procédure, autant pour les phases publiques que privées. Ces
délais ne devraient pas être modifiables sauf si le promoteur en
fait la demande. Ensuite, l'établissement d'un processus
d'accréditation des intervenants. Le processus d'évaluation ne
doit pas fournir une tribune publique à des groupes qui ne
démontrent pas une capacité à exercer de façon
responsable leur droit d'Intervention. Enfin, l'établissement de
règles du jeu fermes et explicites pour les différents
intervenants.
Les manufacturiers sont également d'avis que le BAPE
ne devrait pas être considéré comme le seul à
pouvoir entreprendre des consultations publiques en environnement. Le
gouvernement doit garder toute sa marge de manoeuvre quant à sa
capacité de choisir les formes de consultations publiques qu'il juge les
plus appropriées, qu'il s'agisse de commissions parlementaires
permanentes comme celle-ci, de commissions d'enquête ou autres.
D'ailleurs, nous croyons que le mandat du BAPE ne devrait pas, pour l'instant,
être systématiquement étendu à l'évaluation
et à l'examen public des politiques et programmes gouvernementaux. Quand
le processus sera amélioré et que le BAPE démontrera qu'il
est en mesure de le gérer efficacement, on devrait y repenser.
Toutefois, l'AMQ suggère, en attendant, que tous les
ministères devraient joindre une évaluation et un examen
d'Impacts environnementaux à toute loi, à tout règlement,
à tout décret et à toute directive qui pourrait avoir des
impacts sur l'environnement. L'AMQ insiste aussi sur le fait que le processus
ne doit pas permettre à l'évaluation et à l'examen de
projets particuliers de devenir un prétexte pour débattre des
grandes stratégies de développement. Si les citoyens veulent des
débats sur les grandes stratégies de développement, qu'on
utilise des mécanismes qui existent déjà, comme les
commissions parlementaires, ou que l'on mette sur pied d'autres formes, sinon
on favorise de faux débats et on s'enlise dans l'immobilisme.
L'AMQ croit également que le processus
d'évaluation et d'examen doit favoriser l'intégration des impacts
environnementaux dans le processus de décision des entreprises et ce,
aussitôt que possible. Ce principe est primordial dans une optique de
développement durable. Nous croyons donc qu'V serait très
important de mettre à la disposition des entreprises des guides
d'évaluation environnementale sectoriels qui seraient
préparés à l'avance par le ministère de
l'Environnement. Ceci permettrait, entre autres, de raccourcir les
délais souvent très longs de la préparation et de la
transmission de la directive gouvernementale. Nous croyons aussi que le
gouvernement devrait développer des programmes pour les entreprises qui
n'ont pas les ressources nécessaires pour entreprendre ces
évaluations.
Quant au moment précis où le public devrait intervenir
dans le processus d'évaluation et d'examen, nous croyons que, tant et
aussi longtemps que le public n'interviendra pas plus tôt dans le
processus, nous nous retrouverons devant des situations de confrontations. Nous
sommes d'avis que le public devrait être consulté
immédiatement après que la directive gouvernementale devant
guider la réalisation de l'étude d'impact sera
complétée et transmise au promoteur. Cette approche aurait comme
avantage de permettre au public de prendre connaissance des
éléments constituant une évaluation environnementale dans
les règles de l'art et il pourrait alors, à partir de ces
informations, identifier les points qui le concernent le plus et en ajouter de
nouveaux, si nécessaire. Le promoteur pourrait alors se pencher plus en
détail sur ces points particuliers dans la préparation de son
étude d'impact.
En conclusion, l'AMQ souhaite insister sur le fait que toute information
dont la divulgation est de nature à affecter la
compétitivité d'une entreprise doit demeurer confidentielle.
Même si elle est transmise au gouvernement, au ministère de
l'Environnement, cette information transmise à titre confidentiel
devrait pouvoir demeurer confidentielle, faute de quoi c'est la
compétitivité, la capacité de concurrence même des
entreprises qui en souffrirait et c'est le Québec qui en sortirait
perdant.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Le Hir. Mme
la députée de Vachon.
Mme Pelchat: Merci, Mme la Présidente. M. Le Hir, M.
Murray, l'ex.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Pelchat: J'ai oublié votre nom, monsieur-Une voix:
M. Meunier.
Mme Pelchat: M. Meunier. J'aimerais vous féliciter pour
votre mémoire, vous souhaiter la bienvenue et souligner le ton
modéré de votre mémoire et je pense que ça
réjouit tout le monde de cette commission.
Il y a plusieurs choses qui sont évoquées dans votre
mémoire et j'aimerais peut-être commencer par vous demander
carrément, parce que vous parlez souvent du rôle du BAPE, que le
BAPE.. En fait, vous ne semblez pas satisfaits du rôle du BAPE, en tout
cas, de la façon dont le BAPE s'acquitte de ses fonctions. Je n'irai pas
par quatre chemins, je vais vous poser la question: Qu'est-ce que vous avez le
plus à reprocher ou au BAPE ou à la procédure comme telle
d'évaluation des impacts environnementaux?
M. Le Hir: Nos reproches s'adressent plus particulièrement
à la procédure utilisée. Il s'agit d'une procédure
qui ressemble énormément à une procédure judiciaire
qui se déroule dans un contexte de confrontation, d'opposition et dont
la caractéristique est de faire ressortir beaucoup plus facilement les
problèmes que les solutions aux problèmes. Dans ce
sens-là, nous ne croyons pas que ce type de procédure soit
approprié à la recherche d'un point d'équilibre comme doit
en constituer le développement durable. Nous croyons qu'il serait
relativement facile de modifier l'orientation et le fonctionnement du BAPE pour
faire en sorte que cet organisme soit bien davantage axé sur la
recherche de solutions que sur l'identification de problèmes.
Mme Pelchat: Mais qu'est-ce qui fait, d'après vous, qu'il
y a confrontation et querelle entre les promoteurs et le public ou les gens qui
s'opposent à un projet?
M. Le Hir: Écoutez...
Mme Pelchat: Je vais vous dire qu'il y a certaines personnes qui
ont identifié ou qui proposent que cette source de conflit et de
confrontation vient essentiellement du manque de transparence des promoteurs
qui, souvent, ne donnent pas ou ne veulent pas rendre publiques, justement,
toutes les études et c'est ce qui est vraiment, pour certaines
personnes, la source de confrontation. Est-ce que ce n'est pas un peu
ça?
M. Meunier (Éric): Très rapidement pour
compléter les commentaires de M. Le Hir. Il faut toujours se rappeler
que le mandat du BAPE en tant que tel était relativement bien astreint
dans le cadre de la loi. On parie particulièrement, par exemple, du
passage suivant de la loi, c'est l'article 31.9 de la loi qui dit: "Le
gouvernement peut adopter des règlements pour déterminer les
paramètres d'une étude d'impact sur l'environnement en ce qui
concerne notamment l'impact d'un projet sur la nature, le milieu biophysique,
le milieu sous-marin, les communautés humaines, l'équilibre des
écosystèmes, les sites..." Or, ce qui arrive, c'est que, bien
évidemment, tant et aussi longtemps que le mandat du BAPE est celui
d'examiner des questions qui sont directement pertinentes à celles de
l'environnement en tant que tel, c'est quand même un mandat qui est
relativement, je dirais, clair et avec lequel les promoteurs peuvent vivre.
Sauf que, quand on est rendus dans une dynamique où on dit
carrément, par exemple, au BAPE: On va mettre en question,
par exemple, le développement d'un secteur économique
particulier, on va débattre devant le BAPE, à savoir si on a fait
un bon choix économique ou non. En tant que tel, il est très
clair qu'un promoteur qui est prêt à prendre un risque important
au niveau de ses investissements, qui est prêt à dégager
des sommes d'argent importantes en tant que telles et se voit dire, dans le
fond, devant un organisme qui, à la base, était supposé
regarder les impacts environnementaux: Écoute, on va questionner
carrément ton risque, on va carrément questionner si, en tant que
tel, tu fais bien de prendre le risque et si ça vaut la peine, par
exemple, au niveau monétaire... Or, il faut quand même se rendre
compte qu'au niveau des promoteurs, si on n'a pas toute la question
d'entrepreneurship, si on n'est pas prêts à prendre ce
risque-là et si on soumet l'évaluation de ce risque-là
à une partie qui est supposée examiner la question
environnementale, il est clair que ça peut soulever certaines frictions.
(17 h 45)
L'autre point également, comme on le dit dans notre
mémoire, c'est que le public intervient trop tard. Carrément,
c'est qu'à un moment donné il y a évidemment un
cheminement de projet, il y a des décisions qui sont prises en cours de
route et, en bout de ligne, on demande au public de dire: Donnez-nous votre
aval. Alors, il est bien clair qu'il y a certains facteurs qui n'ont pas
été pris en considération dans des études et qui
sont de nature à causer des confrontations. Alors, je veux dire, ces
deux facteurs-là expliquent un petit peu pourquoi, des fois, le ton
monte.
Mme Pelchat: mais vous seriez en faveur que le public intervienne
dès le début, c'est-à-dire dès l'émission de
la directive. c'est ce que j'ai compris.
M. Le Hir: Effectivement, oui.
Mme Pelchat: Est-ce que ce serait la seule étape où
vous souhaitez que le public intervienne ou si vous souhaitez que le public
intervienne aussi, par exemple, dans l'élaboration et dans
l'étude du projet comme tel?
M. Le Hir: L'élaboration du projet comme tel, il faut
quand même laisser au promoteur l'initiative de développer son
propre projet. On ne peut pas demander à des tiers...
Mme Pelchat: Bon. Oui. Vous dites que vous voulez que le public
intervienne dans la directive.
M. Le Hir: Oui.
Mme Pelchat: Est-ce que c'est le seul moment où vous
voulez que le public intervienne?
M. Meunier: Oui, mais il demeure toujours l'étude d'impact
en tant que telle, les audiences publiques, c'est-à-dire que...
La Présidente (Mme Bélanger): Je m'excuse. Pour le
bénéfice du Journal des débats, vous
répondez chacun votre tour et, étant donné que c'est
enregistré, ce n'est pas télévisé, c'est
enregistré seulement, j'aimerais que vous me donniez le temps de vous
identifier avant. Alors, M. Meunier.
M. Meunier: En tant que tel, non seulement on dit que le public
devrait intervenir plus tôt, mais, dans le fond, on dit: Plus souvent Non
seulement on dit que le public devrait intervenir dans le cadre de
l'étude d'impact en tant que telle, quand l'étude devient
publique, mais avant même cette étape-là,
c'est-à-dire celle de dire: Écoutez, on va peut-être avoir
un droit de regard ou, à toutes fins utiles, un droit de commentaire
quand la directive va être émise, pour les raisons qu'on vous a
expliquées dans le sommaire de notre mémoire.
La Présidente (Mme Bélanger): Mme la
députée de Vachon.
Mme Pelchat: Merci. Vous dites aussi qu'il serait peut-être
utile d'exclure certains projets d'une façon systématique, vous
parlez de projets qui s'inscrivent a priori dans une optique de
développement durable et que, donc, ces projets là devraient
systématiquement être exclus, et vous parlez aussi de
projets-pilotes, que ces projets-là devraient être des
projets-pilotes qui devraient être exclus. Est-ce que vous ne croyez pas
qu'il y aurait un danger de voir apparaître tout d'un coup, un peu
partout dans toutes les régions du Québec - je m'excuse, j'ai
beaucoup de difficultés - une multitude de projets pilotes? Moi, je vois
déjà dans toutes les régions deux, trois projets-pilotes.
Donc, c'est un projet pilote, il peut être exclu de la
procédure.
M. Meunier: Est-ce que vous parlez des... La Présidente (Mme
Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Excusez-moi. Est-ce que vous parlez d'exclure des
études d'impact les questions de recherche et de développement?
Est-ce que c'est ça la chose à laquelle vous faites
référence?
Mme Pelchat: Non, non, non.
M. Meunier: Si vous parlez des groupes génériques
en tant que tels, c'est carrément une autre question.
C'est-à-dire qu'en fonction d'une certaine courbe d'expérience
qui a été acquise au ministère, parce qu'ils ont quand
même évalué un certain nombre de projets et ils le font
encore,
il est très clair qu'on pourrait grouper certains projets dans
des grandes classes. Il y a des projets qui sont similaires dans leur nature,
qui sont similaires dans leurs impacts également et qui, d'ailleurs,
peuvent même apporter... Je veux dire, je suis certain, il y a
déjà des solutions d'atténuation qui sont
Identifiées. Dans ce cadre-là, ce qu'on dit en tant que tel, ce
n'est pas nécessairement de leur tirer systématiquement la
procédure, mais c'est au moins, à tout le moins de les soumettre
à une procédure qui est simplifiée.
Alors, dans ce sens-là, dans la mesure où c'est un projet
à caractère répétitif dont les impacts sont connus,
dont les mesures d'atténuation sont connues, on dit en tant que tel:
Bon, on les groupe dans des grandes classes, on fait une directive ou un guide
d'évaluation qui couvre ces classes-là et, évidemment,
selon les règles de l'art et, encore là - juste pour faire une
parenthèse, très rapidement - ce n'est pas obligé que ce
guide-là soit figé dans le béton, c'est-à-dire
qu'en fonction de la courbe d'expérience qu'on va acquérir dans
les années futures, il sera même possible de le modifier aussi, je
veux dire, à tous les deux ans, à tous les trois ans, ce sera
à déterminer.
Or, dans ce cadre-là en tant que tel, je ne comprends pas tout
à fait votre question pour débuter, mais ça ne pose pas de
problème. Il n'y aurait pas de projet-pilote partout.
Mme Pelchat: Écoutez, je vais vous citer. On dit, à
la page 5, au paragraphe 2 de votre mémoire: "Certains projets
s'inscrivent, a priori, dans une optique de développement durable. On
peut penser, par exemple, à des projets de modernisation d'installations
qui diminueraient la charge polluante émise dans l'environnement,
à des projets de construction de nouvelles installations pour remplacer
d'anciennes installations plus polluantes sur les mêmes sites, à
des projets de recherche et de développement ayant pour but de trouver
des solutions - en tout cas, il y a plusieurs projets - aux problèmes
environnementaux. A notre avis, de tels projets devraient être exclus -
je lis bien, j'ai une bonne version - de la procédure...
M. Meunier: Oui, tout à fait.
Mme Pelchat: ...d'évaluation et d'examen d'impact ou
encore, à la limite, être soumis à un processus
simplifié." C'est ce que je vous demande.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: C'est parce qu'on ne saisit pas tout à fait la
notion de projet-pilote à laquelle vous faites référence.
Impossible de répondre à votre question si on ne comprend pas
d'abord Ça-
Mme Pelchat: C'est parce que, dans votre mémoire, vous
parlez de projets qui auraient déjà été
évalués ou qui rencontrent déjà des critères
de développement durable - c'est ce que vous dites - et que ces
projets-là devraient être exclus de la procédure. C'est
à vous, peut-être, de m'expliquer...
M. Le Hir: Mais on parie là de procédés qui
sont déjà bien connus.
Mme Pelchat: Comme par exemple...
M. Le Hir: Écoutez, il y en a toutes sortes de
procédés industriels. Par exemple, lorsqu'on construit,
aujourd'hui, une nouvelle aluminerie et que cette nouvelle aluminerie va
remplacer une aluminerie existante, on sait déjà que la
technologie utilisée dans le cadre de cette alumine-rie-là va
être beaucoup moins polluante pour l'environnement que ne l'était
l'ancienne technologie.
M. Meunier: II y a certaines choses assez
répétitives, par exemple, comme la construction d'un
pipeline.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Excusez-moi. Je veux dire, les impacts sont
relativement bien connus et on a une expérience, une courbe
d'expérience qui est relativement grande, également. On sait que
l'impact sur l'environnement, ça va dépendre un petit peu du
diamètre du pipeline et ça va dépendre également de
la longueur. En tant que tel, ce qu'on dit, c'est que ça pourrait
créer des classes. À ce moment-là, on regarde, on dit:
O.K., ça va être sur telle longueur, de telle grosseur, de tel
diamètre. Alors, ce qu'il est important de vérifier, ce sont ces
variantes-là, et c'est ce qu'on dit. Alors, à ce
moment-là, ça pourrait certainement jouir d'un processus
simplifié.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, Mme la Présidente. Je salue M. Le Hir,
M. Murray, M. Meunier. Je les remercie pour leur présence ici et pour
leur mémoire. Quand on parle, comme vous l'avez fait en des termes
très positifs, du mariage souhaitable entre l'économie et
l'environnement, on est partenaires, on s'entend très bien. Quand vous
déplorez les délais qui sont trop longs, on s'entend très
bien aussi. Quand vous déplorez que les procédures ne sont
souvent pas assez claires, on s'entend aussi. Mais lorsque vous dites:
"Contrairement aux recommandations du rapport Lacoste, nous ne sommes pas
d'avis que le public devrait être consulté à l'étape
de la préparation de la directive gouvernementale devant guider la
réalisation de l'étude d'impact", là on s'entend
moins. Nous, et d'autres aujourd'hui - d'ailleurs, vous l'avez entendu,
probablement, si vous étiez ici - plusieurs mémoires
préconisent que le public soit impliqué le plus tôt
possible, et ça, vous l'avez dit vous autres mêmes. Mais pourquoi
pas à l'étape de la préparation? Vous dites: Parce que
c'est technique. Un instant! On peut vulgariser la technique. Tantôt,
justement, on discutait de ça, de l'importance de vulgariser des
directives. C'est un cercle vicieux, autrement. Si vous dites: II ne faut pas
mettre le public là-dedans parce que c'est trop technique, bien
ça va rester technique. Et là, restant technique, on va dire: On
ne peut pas mettre le public, c'est technique. Alors, c'est une espèce
de cercle vicieux. C'est une tautologie, qu'on appelle.
Mme la Présidente, moi, je voudrais demander aux
représentants, d'abord, pourquoi vraiment... Ce n'est pas parce que
c'est technique que vous vous opposez à la participation du public. Vous
dites aussi: Parce que ça va allonger les délais. Mais un
instant! On nous a démontré aujourd'hui, et on le sait depuis une
secousse, que la seule partie où les délais sont
contrôlés, c'est la partie publique, justement; vous le savez;
tandis que les autres parties de la procédure qui
précèdent l'implication du public n'ont pas de délai fixe,
et c'est dans ces sections-là qu'on accuse des retards. Alors, dire: On
ne mettra pas le public dans le coup parce que ça risque d'être
trop technique pour lui et, deuxièmement, ça va allonger les
délais, ça me paraît un peu fragile.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Très rapidement. À votre intervention,
on pourrait répondre de plusieurs façons. La première,
c'est qu'effectivement nous croyons qu'il y a une question de délai. La
première des choses, c'est qu'en ce moment le public n'est pas
consulté au niveau de la directive. Alors, quand vous parlez de la
procédure d'audiences publiques qui est, effectivement, bien
réglée, en termes de temps, au niveau de la loi, ça couvre
seulement l'étude d'impact en tant que telle; ce sont les audiences sur
l'étude d'impact. Or, l'étape de la formulation de la directive,
de la transmission de la directive se ferait avant. Alors, à savoir:
Est-ce qu'on s'entend à ce que ce soit toujours inscrit dans les quatre
mois ou pas, c'est une question qu'il faut se poser.
Également, je vais vous le dire bien franchement, ce qui arrive,
et ça demeure vrai, c'est qu'il doit y avoir un effort de vulgarisation
qui se fasse au niveau de la directive. Mais pourquoi, à ce
moment-là, est-ce que l'effort doit se faire, je dirais, avant que la
directive soit faite? Si on a quelque chose à vulgariser, il faut
l'avoir en main. Alors, s'il y a une étape qui est importante, c'est
d'avoir la directive technique, de s'entendre, c'est-à-dire et au niveau
du promo- teur et au niveau du gouvernement mais c'est surtout la
responsabilité du gouvernement, de l'avoir en main et, après
ça, suite à ça, une fois qu'on l'a, de la vulgariser et,
comme on dit dans notre mémoire, de demander les commentaires du public,
sans ça vous demandez au public: Écoutez, faites-moi une
directive environnementale, qu'est-ce qui vous préoccupe? En tant que
tel, on croit, nous en tout cas, que ce serait préférable de
commencer avec une bonne base de connaissance qui soit établie dans les
règles de l'art et qui soit ouverte aux commentaires du public.
D'ailleurs, à ce moment-là, on pourrait faire l'effort de
vulgarisation et le public pourrait en prendre connaissance, la commenter; le
promoteur la prendra en considération dans son étude d'impact.
C'est ce qu'on dit.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Mme la Présidente, là où,
justement, il a été démontré que, lorsque le public
intervient, ça raccourcit les délais au lieu de les allonger,
c'est que précisément, si vous mettez votre public dans la
rédaction de la directive, vous allez connaître dès le
départ les préoccupations du public, au lieu de connaître
simplement le devis technique que le ministère vous demande à
vous, entreprise. Il serait utile que vous sachiez dès le départ
ce qui inquiète la population autour de l'entreprise qui va
s'établir là. C'est dans ce sens-là qu'on dit souvent, les
gens qui ont fait l'expérience de cette implica tion précoce du
public, que ça sauve du temps au lieu d'en consommer plus.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Dans le fond, c'est assez intéressant parce
qu'on dit à peu près la même chose, c'est juste une
question de savoir à quel moment ça devrait se passer. Vous, vous
dites qu'on devrait consulter le public au moment même de la
rédaction de la directive en tant que telle. On sait que, des fois,
déjà la rédaction de la directive est quand même
assez longue et on sait effectivement que, par exemple, certains
critères d'analyse changent en cours de route, etc. Alors, nous, en tant
que tels, en fonction de l'expérience passée, on est de nature,
en tout cas on croit un petit peu que ça pourrait augmenter les
délais. Mais, dans le fond, on dit exactement la même chose. On
dit: Ce qui est important, c'est que le public soit consulté avant
même qu'on lui présente un fait établi. A ce
moment-là, qu'on le consulte lors de la directive, on trouve qu'il y
aurait des délais qui seraient associés à ça, ou
qu'on le fasse tout de suite après et qu'on demande aux citoyens: Vous
avez ici une directive qui a été faite dans les règles de
l'art; y a-t-il des choses que vous ne comprenez pas là-dedans? on va
vous les expliquer,
on les explique. Après ça, on demande: Est-ce qu'il y a
des choses qui ne sont pas couvertes là-dedans et que vous aimeriez voir
dans une étude d'impact? et c'est complété. On fait
l'étude d'impact - normalement, si le promoteur fait son ouvrage, en
prenant en considération les commentaires qui lui ont été
apportés - et on fait les audiences publiques là-dessus. À
ce niveau-là, je crois que la consultation serait efficace et ça
désamorcerait beaucoup de situations de confrontation.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Je vois que le mariage, que le couple n'est pas aussi
rapproché qu'on ne le croirait de prime abord. Il y a une
incompréhension. Vous dites: Ils nous diront ce qui ne va pas dans le
devis. Mais je pense qu'une entreprise ne doit pas simplement attendre les
réactions de la population à son projet, elle doit aussi attendre
et entendre la population, ce qu'elle a à dire, même avant de
prendre connaissance du devis technique. Si elle l'écoute, cette
population-là, c'est à ce moment-là qu'on sauve bien du
temps et bien des débats idéologiques.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: Écoutez, sur cette question-là, on a
déjà des exemples et, dans le cas de Soligaz, de tels efforts ont
été faits avec les résultats qu'on connaît:
Ça n'a rien donné du tout. Alors, permettez-nous d'être un
petit peu sceptiques. Il y a quand même une chose aussi qu'il faut
prendre en considération, ce ne sont pas toutes les entreprises qui ont
les mêmes possibilités. Ce ne sont pas toutes les entreprises qui
ont les moyens d'investir plusieurs centaines de millions ou dizaines de
millions dans la préparation de dossiers et traîner ces
dossiers-là pendant plusieurs années sans en voir une issue. Il y
a des investissements, à un moment donné, qu'il faut mettre en
proportion. Il nous semble y avoir une disproportion entre les exigences de
préparation qu'on demande aux entreprises et parfois les
résultats qu'il est possible d'en attendre.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Pour élargir un peu le débat, à
la page 3... Là, vous venez d'évoquer Soligaz. Mais à la
page 3, vous semblez faire une charge assez sévère
vis-à-vis du processus d'évaluation. Vous dites: "Pourtant, dans
bien des cas, l'expérience des dernières années laisse
présager, si rien ne change, que la mise en place du mécanisme
d'évaluation et d'examen public, qui devrait au départ permettre
l'implantation harmonieuse de nouveaux projets, continuera plutôt
à favoriser les confrontations, à multiplier les contentieux et
à nous condamner à l'immobilisme." Ce sont des termes assez durs,
assez forts, ça. Mais à part Soligaz, pouvez-vous m'en
énumérer un certain nombre de projets?
M. Meunier: Écoutez, je ne veux pas...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Excusez-moi encore une fois. (18 heures)
M. Lazure: Parce que c'est vous qui avez... M. Le Hir, vous avez
parlé de Soligaz. Mais si vous avez parlé de Soligaz, moi, je
serais bien curieux de voir s'il y en a d'autres exemples comme ça.
M. Meunier: Écoutez, par exemple, on va prendre une autre
chose qui s'inscrit, d'ailleurs...
M. Lazure: Ce n'est pas M. Le Hir. Identifiez-vous donc.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Excusez-moi. Il y a d'autres cas, évidemment,
qui sont intéressants à noter, particulièrement parce
qu'ils s'inscrivent un petit peu dans le cadre du développement durable.
Dans le cas précis, il faut bien dire, c'est consultation publique
versus - excusez l'anglicisme - mais contre, par exemple, un projet qui passe
nécessairement devant le BAPE. Il y a quand même eu audiences
publiques.
On va se rappeler qu'à un moment donné il n'y a pas si
longtemps de ça, il y a une compagnie qu'il n'est pas nécessaire
de nommer qui avait le projet de se servir de pneus usés pour faire de
la revalorisation énergétique. Or, on a procédé
à une intense consultation publique et ce qui est arrivé,
à un moment donné, c'est qu'évidemment on a eu d'autres
interventions de l'extérieur qui ont fait, de toute façon, que le
projet n'a pas vu le jour. Or, il est clair que dans ce cas-là il y a eu
une certaine volonté d'avoir une consultation publique. À savoir
s'il y aurait eu moyen de la faire plus efficacement, bien ça, la
question ne se pose pas tout de suite ou elle aurait dû se poser
alors.
Mais ce qui est arrivé, dans le fond, c'est quoi? C'est qu'on a
essayé d'entamer un processus de consultations publiques pour qu'il y
ait l'implantation de ce projet-là en particulier, qui n'a jamais vu le
jour, et quelques mois après on voyait Saint-Amable. Or, moi, je vous
pose la question: Quand on a des projets de ce type-là qui
développent des polémiques importantes - évidemment, il y
a des questions d'implantation, il y a des questions régionales -
ça va prendre combien de Saint-Amable avant qu'on implante une solution?
D'ailleurs, il faudrait poser certaines questions, à savoir: Un
Saint-
Amable, ça représente quoi comme impacts sur
l'environnement, contrairement, par exemple, à la revalorisation
énergétique qui est faite sous procédé
contrôlé? Il y en a d'autres aussi. Par exemple, on
pourrait...
M. Lazure: Si vous permettez, je veux juste réagir
à celui-là parce que ce n'est justement pas un bon exemple.
Là, vous venez de parler de Ciment Saint-Laurent dans la région
de Joliette, mais concernant Ciment Saint-Laurent dans la région de
Joliette, tout le branle-bas auquel on a assisté, c'était une
mobilisation de citoyens. Ça n'avait rien à voir avec la
procédure d'évaluation des impacts environnementaux. Rien,
monsieur, absolument rien. Alors, votre exemple est très mal choisi.
M. Meunier: Non, mais j'ai bien fait... M. Lazure:
Maintenant...
M. Meunier: Excusez-moi, encore une fois, j'ai bien fait...
M. Lazure: Permettez...
M. Meunier: J'ai bien fait la précision de dire que
ça ne s'inscrivait pas dans le mandat du BAPE...
M. Lazure: Bien oui, alors moi, je vous demandais...
M. Meunier:... mais que c'était une forme d'audience
publique.
M. Lazure: si vous permettez que je finisse mon intervention, je
demandais à vous, a m. le hir ou à m. murray, à part
soligaz, de nous citer d'autres exemples, dans ces dernières
années, où la procédure d'évaluation a mené
à l'immobilisme. c'est le mot que vous employez, ça.
M. Meunier: Oui, bien sûr...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier:... et on l'emploie à dessein parce qu'il nous
semble que dans le cas de Soligaz, qui est certainement le cas qui va servir de
cas type pour tous les autres cas de projets industriels qui sont
présentement sur le point de faire l'objet d'études,
l'expérience est loin d'être concluante.
M. Lazure: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure:... juste une question là-dessus. est-ce que, m.
le hir, vous admettez que le promoteur, dans le cas de soligaz, a eu une
certaine partie du blâme dans les retards? est-ce que vous admettez
ça?
M. Le Hir: Écoutez, non, je ne suis pas prêt
à admettre ça.
M. Lazure: Non, O. K.
M. Le Hir: Et la raison c'est que, consécutivement
à l'étude qui a été faite par le BAPE, il y a eu
des expertises de faites par une commission qui a été
spécialement constituée et elle est arrivée, cette
commission, à des conclusions tout à fait contraires à
celles du BAPE.
M. Lazure: Mme la Présidente, moi, je voudrais revenir aux
grands projets industriels. Si je comprends bien l'Association, elle
désire que les grands projets industriels soient obligatoirement
assujettis à un examen public. Elle y met trois conditions. Deux me
paraissent, quant à moi, tout à fait correctes, à savoir
que dans les dossiers où il y a demande d'audiences et où toutes
les parties entrevoient une possibilité de conciliation la
médiation devrait être encouragée. Bon. La deuxième,
des délais précis et raisonnables pour chaque étape de la
procédure, particulièrement pour l'étape de la directive
de l'étude d'impact. Parfait. Mais la troisième, Mme la
Présidente, elle mérite qu'on s'y arrête un peu et qu'on
pose des questions. Elle dit: "Seuls les intervenants ayant
démontré leur intérêt véritable et une
argumentation pertinente pourraient participer aux audiences publiques. " Qui
va choisir ces intervenants-là?
M. Le Hir: Écoutez...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir:... il existe... Excusez-moi. Mme la Présidente,
c'est une règle difficile pour nous, qui ne sommes pas familiers,
à maîtriser. Il existe déjà d'autres types
d'organismes qui remplissent un rôle similaire au BAPE et qui ont
établi ce genre de règles. Il en existe, par exemple, dans le
cadre du CRTC. Il y a la possibilité d'intervention pour des groupes. On
leur donne même un financement dans certains cas; on appelle ça
l'intervener funding". Il y a bien des groupes environnementaux qui seraient
tout à fait favorables à l'établissement d'une telle
procédure. C'est une procédure à laquelle, nous, pour
notre part, nous serions ouverts dans la mesure où elle permettrait
à tous et à chacun d'exercer leur droit de parole de la
façon la plus responsable possible.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Oui. Vous admettrez avec moi qu'il y a un danger quand
même qu'on veuille éliminer ou mettre de côté
certains intervenants qui pourraient ne pas paraître avoir assez
d'intérêt ou une argumentation assez pertinente. Je pense qu'on
est sur un terrain fragile et ça pourrait frôler la censure,
à un moment donné.
M. Le Hir: Non...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: ...M. le député, je ne crois pas. En
fait, pour nous, le problème se pose de la façon suivante. Il y a
dans certains cas - je dis bien dans certains cas - des gens qui ne sont
élus par personne, qui n'assument aucune responsabilité et qui
n'ont de comptes à rendre à personne et qui, par des
déclarations démagogiques, égarent le public en jouant sur
son ignorance et sa sensibilité. Ils exercent ainsi une pression
émotive indue sur les gouvernements responsables et contrarient le
fonctionnement normal des institutions démocratiques. En face de
situations comme celle-là, nous, comme en fait nous tous et vous tous,
avons des responsabilités pour faire en sorte que les débats ne
dérapent pas dans une démagogie facile et ultimement dans un
osbcurantisme.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Mme la Présidente, je rappellerai à M.
Le Hir qu'il y a beaucoup d'animateurs de radio qui font justement ça.
Je ne pense pas, M. Le Hir, que vous ayez dénoncé ces
animateurs-là sur la place publique.
M. Le Hir: Ils ne jouent pas le même rôle, M. le
député.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Lazure: Ils jouent un rôle très important, les
animateurs de radio, très très important.
M. Le Hir: Ils ne font pas partie des institutions. J'aimerais
simplement terminer sur cette question par une citation de Platon: "Lorsque les
pères s'habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils
ne tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent
devant leurs élèves et préfèrent les flatter,
lorsque, finalement, les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne
reconnaissent plus au-dessus d'eux l'autorité de rien ni de personne,
alors c'est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le
début de la tyrannie."
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Moi, Mme la Présidente, je n'ai pas de citation
de Platon...
La Présidente (Mme Bélanger): Commentaire pour
Platon.
M. Lazure: ...mais si je voulais être malin, j'aurais une
citation de M. Le Hir qui partait des écolo-fascistes il y a quelque
temps. Je voudrais tout simplement implorer M. Le Hir et ses compagnons de
faire attention aux termes qu'ils utilisent quand ils parient des gens qui
s'occupent d'environnement et d'écologie parce que si les gens dans
l'entreprise peuvent, de façon un peu méprisante, parier des
écolo-fascistes, les gens de l'environnement peuvent parler des
écono-fascistes aussi, parce que ça va jouer dans les deux sens
et là, justement, on arrive à des confrontations que vous voulez
éviter.
M. Le Hir: Là-dessus, M. le député...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: ...soyons bien clairs. La première chose, c'est
que dans cette dénonciation-là nous n'avons pas voulu viser des
groupes ou des individus, nous avons visé des comportements. Nous avons
bien pris la peine de ne nommer personne et nous avons bien pris la peine
également de dire qu'il s'agissait de comportements marginaux.
La deuxième chose, c'est que le fait qu'ils soient marginaux
n'enlève rien à l'influence qu'ils sont en mesure d'avoir. En ce
qui concerne les entreprises, il faut bien voir la liberté avec laquelle
certains de ces groupes, organismes, personnes - appelons-les comme on voudra
-dénoncent, eux, avec une vigueur parfois assez crue, en accusant les
entreprises de comportement criminel sans même qu'une preuve n'ait
été faite. Dans ces conditions, je ne pense pas qu'on ait, sur ce
point, de leçons à recevoir de personne.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: J'ai une question d'un autre... Vous avez fait
allusion au financement tantôt; est-ce que vous avez des suggestions
à faire au gouvernement? À supposer que cette commission-ci soit
favorable à une recommandation permettant le financement de groupes ou
d'individus, est-ce que vous avez discuté entre vous de quelle
façon ce financement-là pourrait être assuré?
M. Le Hir: Non, nous ne sommes pas entrés dans le
détail là-dessus. La seule chose que nous avons voulu faire,
c'est faire référence à des situations où ça
existe et proposer ça comme piste de solution. Quant à la
façon de le faire, il
y a beaucoup de consultations à mener et il faut bien être
conscients - parce que je vous vois venir gros comme un autobus - qu'en ce qui
concerne les entreprises...
M. Lazure: On est rendus en autobus, maintenant.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: ...n'a pas pris l'autobus.
M. Le Hir: En ce qui concerne les entreprises, il y a des limites
à leur imposer des charges continuellement. Et, encore aujourd'hui, nous
avions l'occasion, en conférence de presse, de situer nos
préoccupations en matière de compétitivité devant
certains résultats que nous avons pu rendre publics. La situation est
suffisamment dramatique à l'heure actuelle sans qu'il soit
nécessaire d'y ajouter.
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: J'ai bien compris que vous n'avez pas d'offres
à faire aujourd'hui au gouvernement à cet égard. Mais vous
êtes au courant que l'Ontario, sous un gouvernement libéral et non
pas néo-démocrate, a passé la loi qui s'appelle
"Financement des intervenants en environnement". Vous êtes bien au
courant de ça. Une dernière question. Tantôt, vous
apportiez des précisions. Je vous ai entendu parler du système
qui était trop judiciarisé ici: confrontations, et tout
ça. Mais j'ai eu l'occasion, avec le député de Saguenay,
d'assister à des audiences en Ontario et je vous prie de nous croire que
c'est beaucoup plus judiciarisé, beaucoup plus. Et notre système
ici, d'évaluation, n'est pas judiciarisé. Au contraire, par
rapport à la plupart des autres, il est réputé pour ne
l'être presque pas. Alors, encore une fois, je pense qu'il y a des
images, des perceptions du système et particulièrement du Bureau
d'audiences publiques qu'il faudrait réviser.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier. M. Le
Hir: Non, je vais prendre la réponse. La Présidente (Mme
Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: Là-dessus, le fait que, par exemple, ce soit
plus judiciarisé ailleurs ne règle pas nécessairement les
problèmes. Et il faut voir également quel est l'impact que cela a
sur les délais. Encore une fois, je vous prie de vous souvenir de
l'importance de la dynamique du développement. L'entreprise, lorsqu'elle
cherche à lancer une initiative, profite d'un créneau
d'opportunité dans le temps. Ce créneau-là, il est
restreint et il faut que l'entreprise ait l'occasion d'en profiter, faute de
quoi le projet tombe à l'eau, n'a plus sa raison d'être.
Alors, encore une fois, toute procédure qui vise à
favoriser l'émergence des problèmes plutôt que la recherche
des solutions n'est pas une façon de faire et, à notre avis,
n'est pas de nature à faciliter la recherche de l'équilibre qui
doit exister entre les Impératifs de la protection de l'environnement et
ceux du développement industriel.
La Présidente (Mme Bélanger): O.K. M. le
député de Saguenay, pour respecter l'alternance.
M. Maltais: Merci, Mme la Présidente, M. Le Hir et ses
deux associés, bienvenue à cène commission. Je voudrais ne
pas passer sous silence l'apport économique que vous représentez
comme Association des manufacturiers. Vous êtes le coeur moteur, un peu,
du Québec, et vous êtes indispensables à l'économie
québécoise aussi, ça va de soi. Comment se situe le
Québec? Vous qui recevez dans vos membres des investisseurs de tous les
pays, de toutes les régions limitrophes au Québec, comment se
situe le Québec au niveau de la compétition dans l'implantation
de grandes entreprises par rapport, mettons, à la Communauté
européenne, par rapport, un petit peu, aux États limitrophes
américains qui touchent au Québec et l'Ontario? Comment vous
pouvez me situer ça?
M. Le Hir: Je ne pense pas qu'on puisse examiner la
problématique de l'implantation industrielle sous le seul angle de
l'environnement. C'est plus large que ça. Lorsqu'on parle de
compétitivité on parle nécessairement de l'ensemble des
facteurs qui contribuent à définir la position concurrentielle
d'une entreprise. Et lorsqu'on parie, disons, d'une province, pour parler de la
nôtre, il s'agit essentiellement de voir quelle est notre capacité
de créer de la richesse.
Or, sur ce plan-là, je dois vous dire que nous sommes
plutôt mal en point. Il faut faire très attention, avant de nous
créer des embûches additionnelles ou des étapes
additionnelles dans des processus de développement, de s'assurer que
cela n'aura pas pour effet d'être la goutte d'eau qui fera
déborder le vase ou, comme on le dit en anglais, "the straw that will
break the camel's back".
À l'heure actuelle, il faut bien réaliser qu'on ne
constitue pas une terre particulièrement attrayante pour les
investissements, et je parle autant du Québec que du reste du Canada.
À l'heure actuelle, l'écart de compétitivité avec
les pays industrialisés, qui s'est creusé depuis 10 ans, est de
l'ordre de 15 %. Et il faut faire très attention, lorsqu'on se donne de
nouvelles politiques, de faire en sorte que ces politiques n'auront pas pour
effet, encore une fois, de miner notre capacité concurrentielle. C'est
bien
beau de vouloir se définir un environnement qui respecte les
meilleurs critères, mais si les pays avec lesquels on est en concurrence
ne le font pas. on est en train de se tirer dans le pied sur le plan
économique. (18 h 15)
La Présidente (Mme Bélanger): M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Mais, entre vous et moi, M. Le Hir, advenant le cas
que personne ne nous écoute à cette heure-là, qu'est-ce
qu'ils se disent, les futurs investisseurs, lorsqu'ils parlent de la loi
environnementale au Québec lorsque vous les rencontrez dans un petit
breakfast à New York? Les grandes entreprises de la Nouvelle-Angleterre,
on sait qu'elles sont toutes rendues à un point de saturation; il faut
qu'elles se rebâtissent dans bien des États américains et
elles lorgnent avant de... Bon, en tout cas, elles ont beaucoup de
réglementation chez elles; on se parle entre vous et elfes. Comment
voient-elles le Québec au niveau, toujours, environnemental? Je ne parle
pas d'énergie, de ports de mer, ainsi de suite. Je parle au niveau des
exigences gouvernementales.
M. Le Hir: Je pense que c'est...
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: Mon collègue, M. Murray, a une bien plus grande
expérience de cette réalité-là parce que
lui-même a eu à prendre des décisions d'implantation
où la question environnementale a constitué un facteur. Alors, je
vais le laisser répondre.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Murray.
M. Murray: J'aimerais répondre à cette question
d'une façon un peu tangentielle. Je pense que le Québec est un
bon endroit pour nous, les manufacturiers, pour investir nos fonds. Le but
principal d'un manufacturier au Québec et au Canada, et peut-être
à travers l'Amérique du Nord en ce moment, son objectif majeur,
c'est vraiment la survie. Nous sommes dans un climat économique assez
difficile et nous espérons que les mois, les années à
venir vont nous conduire dans un climat plus favorable.
Mais, pour survivre, je suis convaincu qu'un manufacturier, par les
temps qui courent, doit être vu et doit être perçu aussi
comme un citoyen corporatif responsable; un citoyen corporatif irresponsable ne
survivrait pas par les temps qui courent. Puis, pour être citoyen
corporatif responsable, mesdames et messieurs, je vous soumets qu'il est
absolument essentiel que ce manufacturier-là ne soit pas un pollueur.
Ça, c'est primordial. Il ne pourra pas vendre ses produits, il ne pourra
pas, éventuellement, attirer la main-d'oeuvre et la gestion qu'il lui
faut.
Mais, tout ceci dit, celui qui est déjà établi
n'est pas toujours "non polluting", mais il faut qu'il le devienne. Il doit le
devenir dans un cycle qui est un peu relié aux facteurs
économiques. Je pense que nous, les manufacturiers, nous souhaitons
vraiment être partenaires avec vous, du gouvernement, pour trouver
ensemble les moyens de devenir non pollueurs - parce qu'il y en a qui le sont -
dans un cycle qui nous permettra de survivre durant cette période
difficile.
Et, tout en disant tout cela, moi, je suis convaincu que le
Québec n'est pas à l'arrière-garde ni plus strict que les
autres pays que je connais. Je pense qu'ici, au Québec, ce que nous
avons depuis quelques années, nous, les manufacturiers, nous avons... "I
did not mean to make a speech." Je ne sais pas ce qui me fait dire tout
ça dans un seul point mais nous, ce que nous avons réussi, je
pense, ici au Québec, depuis une décennie, c'est d'entreprendre
un dialogue effectif entre vous, les décideurs du gouvernement, et nous,
les manufacturiers. Pour répondre à votre question, je pense que
vraiment le Québec est un bon endroit où investir maintenant et
il le sera dans l'avenir.
M. Maltais: Merci beaucoup, M. Murray.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le
député de Dubuc, il reste trois minutes.
M. Morin: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
revenir à la charge sur un point que mon collègue a
abordé, soit votre processus d'accréditation pour les
intervenants. Évidemment, je comprends vos préoccupations envers
les intervenants qui n'auraient pas la capacité de présenter un
mémoire, de faire une intervention éprouvée - si je peux
utiliser l'expression - ou envers des intervenants dont l'intérêt
direct ne serait pas démontré, ou qui auraient des
intérêts autres, enfin... Mais c'est votre suggestion. Je
comprends vos préoccupations, sauf que c'est la recommandation que vous
faites d'établir un processus d'accréditation... Parce que des
audiences publiques, je pense, prennent leur crédibilité dans le
fait qu'elles sont ouvertes, sans aucune limite.
Ceci dit, je vous pose la question à savoir si vous ne pouvez pas
atteindre le même but par, peut-être, l'introduction d'une mesure
dans le processus? Je n'ai pas beaucoup d'expérience, mais j'ai vu
à quelques reprises des audiences où la première partie,
on le sait, sert au promoteur pour exposer son projet et la deuxième
partie des audiences sert aux intervenants pour venir, évidemment,
présenter leurs préoccupations. Dans beaucoup de cas, les
commissaires permettent aux promoteurs seulement, à la fin de la
journée - je ne sais pas si c'est une coutume ou une procédure
régulière - de venir rectifier les soi-disant faussetés.
Est-ce qu'à ce moment-là on n'atteindrait pas le même but
que celui que vous
recherchez, sans établir un processus d'accréditation qui,
enfin, paraît très douteux? On pourrait arriver aux mêmes
fins, mais en permettant aux promoteurs de réagir et de rétablir
les faits immédiatement après l'intervention pour éviter,
peut-être, les cas où il se dirait des choses dont le promoteur
pourrait être... Enfin, c'est ma question.
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir, 45
secondes pour répondre à la question.
M. Le Hir: Pour répondre en deux temps, moi, je vais vous
donner une courte réponse de principe et M. Meunier va vous
répondre dans l'application. Dans une histoire de la Grèce
antique, qui est le berceau de la démocratie, l'historien Robert Cohen
dit ceci: "À trop vouloir respecter l'absolue liberté de parole
et d'action de chaque citoyen, elle entravait celle des serviteurs de
l'État, justifiait leur prudence excessive et ne leur permettait
guère que de pratiquer une politique a la petite semaine." On parle bien
de la Grèce antique. On ne suggère pas que les choses sont comme
ça maintenant.
Que le peuple gouverne en démocratie, c'est naturel en somme. Il
est moins naturel qu'il s'insinue sans y être préparé dans
tous les rouages du gouvernement au risque d'en fausser le fonctionnement.
Voilà pour le principe. Je vais laisser M. Meunier vous
répondre.
La Présidente (Mme Bélanger): En 30 secondes, s'il
vous plaît, M. Meunier.
M. Meunier: Pour revenir exactement à vos commentaires,
pour avoir fait des consultations, évidemment, dans l'élaboration
de ce mémoire-là en tant que tel, à savoir si cela serait
suffisant pour remplacer un processus d'accréditation, il faudrait
certainement en discuter davantage. Mais avoir un droit de réplique,
c'est-à-dire que le promoteur ait un droit de réplique aux
arguments présentés, effectivement, c'est une
préoccupation qui nous a été présentée
souvent par les promoteurs. On ne l'a pas vraiment inclus dans notre
mémoire, mais je peux vous dire, par exemple, que dans la mesure
où il y aurait droit de réplique, ce ne serait certainement pas
vu d'un mauvais oeil.
La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Meunier.
Mme la députée de Vachon.
Mme Pelchat: Oui, merci, Mme la Présidente. J'aimerais
revenir, M. Le Hir, si vous le permettez, à la question de Soligaz. Je
ne sais pas si j'ai bien entendu tout à l'heure le commentaire que vous
avez fait en disant que ce qui a été fait pour Soligaz, notamment
au niveau de la directive... Est-ce que vous avez confondu, en ce sens que la
directive de Soligaz, vous savez qu'elle n'a pas été soumise
à la consultation publique? C'est ça? Il a confondu?
La Présidente (Mme Bélanger): M. Meunier.
M. Meunier: Excusez-moi encore une fois Rectification. Avant que
le projet de Soligaz soit implanté, le promoteur en tant que tel, c'est
à dire les promoteurs, je devrais dire, en tant que tels, ont
eux-mêmes décidé d'engager une tierce partie pour
procéder à une consultation publique. Ils l'ont fait et il
semblerait, d'ailleurs, qu'au niveau de la réception de la population il
y avait certains objectifs d'atteints au niveau de la démarche qui
s'était dressée. Or, quand ils sont arrivés en audiences
publiques, véritablement, il semblerait qu'il y ait eu d'autres
intervenants, disons, qui ont quand même faussé le débat,
dans le sens... Je parle évidemment de la population locale qui avait
déjà été consultée. Et c'est tout ce que je
disais.
Mme Pelchat: O.K. Parce que c'est bien clair, je pense qu'il faut
bien qu'on s'entende sur le fait que la directive du ministère de l'En
vironnement n'a pas été soumise aux audiences publiques...
M. Meunier: ...référence à la directive, je
faisais...
Mme Pelchat: ...pour le bénéfice de nos
débats et du Journal des débats.
M. Meunier: ...tout à fait compris.
Mme Pelchat: Moi, j'aimerais revenir sur la position
concurrentielle du Québec et la pos sibilité que les
investisseurs viennent s'établir ici en grand nombre. Je pense que c'est
essentiel. C'est un objectif que nous supportons. D'ailleurs, le ministre
Gérald Tremblay, cette semaine, l'a très bien expliqué en
parlant de l'urgence d'agir dans notre économie, sans oublier que le
ministre de l'Industrie et du Commerce, Gérald Tremblay, et le premier
ministre ont exigé que la Société de développement
industriel, lorsqu'elle prête de l'argent à des promoteurs,
respecte et vérifie si ces gens-là sont conformes aux directives
et aux exigences du ministère de l'Environnement. Est-ce que, oui ou
non, M. Le Hir, la procédure d'évaluation du Québec, telle
qu'on la connaît en ce moment, empêche et décourage les
investisseurs de venir s'établir au Québec?
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: Si l'on prend simplement le dernier cas en date qui
est celui de Soligaz, il n'y a pas de doute qu'une procédure comme
celle-là est de nature à décourager même le plus
entreprenant des investisseurs.
Mme Pelchat: Et, dites-moi ce que vous
suggérez pour l'allégement, à part le délai?
Parce que, tantôt, vous avez parlé du délai; c'est unanime,
le rapport Lacoste en fait état aussi, de l'urgence de modifier la
procédure pour qu'elle soit un peu plus courte. Mais à part le
délai, qu'est-ce que vous suggérez pour l'alléger...
M. Le Hir: On a proposé un certain nombre de choses...
Mme Pelchat: ...et faire en sorte aussi que le principe du
développement durable, comme vous le dites, soit respecté, M. Le
Hir?
La Présidente (Mme Bélanger): M. Le Hir.
M. Le Hir: ...qui sont toutes dans notre mémoire, dont on
a fait état, entre autres, en particulier, s'assurer qu'on ne
développe pas un processus sur un modèle "confrontationnel" et
que le processus mette d'abord et avant tout l'accent sur la recherche des
solutions plutôt que sur l'identification des problèmes. Autrement
dit, il ne devrait pas être possible pour un projet de sortir du bureau
du BAPE sans qu'on ait identifié toutes les solutions, dans la mesure
où il en existe, bien entendu.
Mme Pelchat: Merci.
La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous vous
remercions, MM. Le Hir, Meunier et Murray.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 28)
(Reprise à 20 h 10)
Le Président (M. Garon): Je déclare la commission
de l'aménagement et des équipements ouverte. Nous appelons le
groupe Urbatique, représenté par M. Jean-Paul Gravel, Mme Linda
Landry et M. Bernard Letarte. Alors, vous avez une demi-heure,
c'est-à-dire 10 minutes pour exposer votre mémoire, 10 minutes de
questions pour le parti ministériel et 10 minutes pour le parti de
l'Opposition officielle.
Alors, à vous la parole, M. Gravel.
Groupe Urbatique
M. Gravel (Jean-Paul): Merci. M. le Président, Mme la
vice-présidente, Mmes et MM. les commissaires, bonsoir et merci de nous
fournir l'occasion de contribuer à l'évolution de la
procédure environnementale au Québec. Avant de vous exposer nos
vues sur l'opportunité d'assujettir les projets industriels à une
telle procédure, j'aimerais vous présenter les collègues
qui m'accompagnent: Mme Linda Landry, qui est titulaire d'un doctorat en
géographie de l'Université Laval, est spécialisée
en environnement et en aménagement du territoire; M. Bernard Letarte,
à ma droite, est agronome et spécialiste en
environnement-transport. Pour ma part, je suis économiste-urbaniste avec
plus de 15 ans d'expérience en études environnementales et je
dirige, à titre de président-fondateur, le groupe Urbatique.
Le groupe-conseil Urbatique que nous représentons oeuvre depuis
plus de 20 ans dans le domaine des études d'aménagement,
d'urbanisme, d'économie et d'environnement. Durant cette période,
la firme a réalisé pour le compte d'Hydro-Québec, du
ministère des Transports et de plus de 150 municipalités du
Québec des études de planification et d'impact environnemental de
projets majeurs. Nous avons donc pu voir la procédure à l'oeuvre
et en constater les possibilités et aussi certaines des limites.
Le mémoire soumis par Urbatique à la commission comprend
essentiellement les éléments suivants: La procédure
actuelle est une bonne procédure et devrait être maintenue comme
telle; elle n'a pas besoin d'être changée sur le fond, ce que
risquerait de faire l'introduction du "scoping" recommandé par le
rapport Lacoste. Les projets industriels de grande envergure avec une incidence
majeure sur l'environnement devraient être soumis à la
procédure actuelle. Il en résulterait des projets de plus grande
qualité environnementale et un climat social amélioré.
L'assujettissement des projets industriels à la procédure
actuelle soulève cependant une difficulté de taille. Il devient
alors nécessaire, comme nous le démontrerons, que les
gouvernements provincial et régionaux identifient clairement leur
politique de développement industriel.
L'expérience montre que les promoteurs assujettis
s'améliorent progressivement grâce à l'expérience
acquise lors des audiences publiques et que la qualité environnementale
des projets qu'ils élaborent s'accroît progressivement.
L'expérience nous enseigne aussi que, lors des débats en
consultations publiques, il y a polarisation des forces en présence.
Cependant, comme les débats se déroulent dans un contexte formel
où les règles du jeu sont connues des différentes parties
impliquées, il en résulte une amélioration du climat
social.
Du côté des projets industriels, l'absence d'un cadre
formel permettant l'implication de la population donne lieu à des
débats médiatiques encore plus polarisés et plus explosifs
que ce n'est le cas lorsqu'un tel cadre existe. Les mouvements populaires
soulevés par les projets d'implantation des entreprises Lauralco,
Glaver-bec et Labco dans la région de Québec en sont
d'éloquents témoignages.
Dans ce contexte, qu'on ne peut que qualifier d'anarchique, le fait que
des groupes particuliers puissent accaparer les tribunes publiques sans que la
contre-argumentation ne
soit présentée ni même disponible soulève un
problème social de fond. De plus, ces projets récents ont mis en
évidence le fait que les procédures de consultation publique
réalisées dans le cadre de l'élaboration des
schémas d'aménagement et des autres documents de planification du
territoire servant à l'identification des parcs industriels n'ont pas
permis de résoudre les conflits potentiels liés à
l'implantation d'une industrie lourde spécifique.
C'est dans cette optique que l'assujettissement, en offrant une
possibilité d'intervention du public dans un cadre structuré,
permettra une participation plus constructive du public et l'atteinte des
objectifs poursuivis par cette participation. Ces objectifs, que visent-ils?
Essentiellement, ils visent à fournir les données et les analyses
requises pour permettre l'arbitrage quant aux choix de société
impliqués, quant au choix de l'intervention optimale et quant à
l'identification des mesures d'intégration, dont les mesures
compensatoires.
Grâce à l'assujettissement, l'examen portera sur des sujets
connus, avec des encadrements précis quant aux réponses à
fournir et quant à la possibilité de contre-interrogation. Dans
le contexte sociopolitique actuel, il ne faut donc pas considérer la
procédure comme un mécanisme supplémentaire de
contrôle mais, bien au contraire, comme un mécanisme de
révision encadrant et balisant un processus actuellement
compliqué et source de conflits majeurs.
Malgré ces avantages, deux difficultés subsistent quant
aux modalités selon lesquelles devrait se dérouler l'examen
public. La première difficulté vient de ce que les projets
industriels majeurs sont souvent financés en partie par des fonds
publics. La deuxième difficulté est liée au
caractère habituellement non répétitif de ces projets.
Le financement public d'un projet privé implique que le promoteur
privé soumis à la procédure risque d'avoir à
justifier et à défendre publiquement une politique de
développement industriel élaborée par le gouvernement.
Nous posons qu'une politique de développement industriel provinciale ou
régionale gagnerait à être débattue
antérieurement aux discussions qui entourent l'implantation d'un projet
particulier. Ce débat se situe au-delà des responsabilités
d'une entreprise donnée. Il serait souhaitable que les gouvernements
concernés en prennent directement la responsabilité.
Une deuxième difficulté soulevée par
l'assujettissement des projets industriels à la procédure
environnementale tient au fait que ces projets sont pilotés par des
promoteurs qui n'élaborent que peu de projets et, très souvent,
n'en élaborent qu'un seul. Or, l'effet structurant qui est l'un des
objectifs majeurs de la procédure est en partie lié à son
caractère répétitif qui permet aux promoteurs de
s'améliorer avec le temps.
On peut donc craindre que les promoteurs industriels qui ne pilotent
généralement qu'un seul projet ne bénéficient pas
de l'expérience acquise dans d'autres projets et, en particulier, de
l'importance d'associer la population. Ils ne pourront donc accéder
à un niveau de qualité élevé dans leurs
études environnementales. Leurs tentatives seront alors
confrontées à des difficultés certaines qui limitent la
probabilité de réussite.
Devant cette problématique particulière, deux attitudes
sont possibles: la première consiste à introduire une
participation statutaire et réglementaire de la population dès le
début du processus par l'introduction d'une étape de type
"scoping", sous l'égide du BAPE, tel que suggéré par le
rapport Lacoste. Une telle éventualité modifiera en substance le
rôle des Intervenants, en particulier celui du BAPE, du ministère
de l'Environnement et, éventuellement, celui du gouvernement.
D'une procédure de contrôle environnemental impliquant la
participation de la population, on s'orientera vers une procédure de
gestion de la participation de la population à l'élaboration d'un
projet à forte incidence environnementale. C'est une orientation qui
nous apparaît non souhaitable à cause de la lourdeur des
mécanismes impliqués.
Comme alternative à cette vole, il y a celle du maintien de la
procédure selon ses caractéristiques actuelles. Cette
procédure permet à un promoteur de tenir compte, dans son projet,
des attentes de la population. Les principaux promoteurs publics ont
utilisé une telle approche pour parer aux lacunes de la procédure
actuelle. Nous croyons qu'une telle approche est beaucoup plus efficace parce
qu'elle permet un contact direct entre le promoteur et la population.
Nous ne croyons donc pas qu'il faille imposer l'implication continue de
la population dans la préparation d'un projet. Le promoteur doit
lui-même comprendre et assumer l'utilité d'une démarche de
consultation, en établir les objectifs et les modalités et,
éventuellement, supporter les conséquences de ses
décisions. Merci de votre attention.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. M. Gravel, Mme et MM.
les associés, permettez-moi de vous saluer, de vous remercier
d'être présents ici ce soir, de reconnaître aussi dans votre
firme des experts de la consultation. On sait que vous êtes
habitués aux tâches des programmes d'urbanisme municipaux, et tout
le processus de consultation qui s'y rattache fait de vous des gens qui ont
certainement passé par le plus de consultations au niveau des
municipalités, au niveau des MRC et, bien sûr, à d'autres
niveaux industriels aussi.
Donc, vous êtes une firme d'experts reconnue dans la consultation
entre le citoyen et un palier de gouvernement qu'on pourra appeler municipal et
régional. Dans une partie de votre mémoire, et vous êtes le
premier à souligner ça, au fond, vous trouvez que le
débat, lorsqu'il prend de l'ampleur médiatique, ne voit jamais la
contrepartie. Vous citez les exemples de Laural-co, Glaverbec, et ainsi de
suite. Pouvez-vous nous expliquer ça un petit peu, aller un petit peu
plus loin que ce que vous avez dit dans votre mémoire?
M. Gravel: Oui. Eh bien, voici. Dans le cas de ces
projets-là, c'est qu'ils n'étaient pas soumis à une
procédure formelle. Alors, les gens, les groupes environnementaux qui
étaient préoccupés d'avoir de l'information ont simplement
lancé des cris d'alarme et ils étaient les seuls à
discuter. Je pense, entre autres, je crois que c'est dans le cas de Glaverbec,
par exemple, où il y a eu tout un ensemble d'énoncés de la
part de Greenpeace et, quand les gens ont voulu répondre, Greenpeace
n'était pas là et ils ont dû s'adresser à Greenpeace
à travers les journaux.
Les journalistes courent après des intervenants et vont poser des
questions aux différents maires de la communauté urbaine pour
avoir des informations. Alors, c'est un débat qui
dégénère parce qu'il n'y a pas de cadre, il n'y a pas de
plate-forme, il n'y a pas d'endroit où les groupes environnementaux
pourraient s'adresser pour avoir de l'information, où ils pourraient
soulever des interrogations, et vice-versa.
Le promoteur privé, en l'occurrence, c'était... Je pense
au cas de Glaverbec en particulier; lui ne savait pas diable à quel
saint se vouer parce qu'il disait: Écoutez, moi, je suis un promoteur
privé. Pourquoi est-ce que j'engagerais un débat et à quel
titre j'engagerais un débat, avec qui et en vertu de quels principes et
de quels objectifs?
Il se retourne vers les gens qui, somme toute, l'ont incité
à venir s'installer dans la région de Québec. Ces
gens-là disent: On n'a pas de mandat particulier. Il est dans un parc
industriel, bon, alors, tout ce qu'ils peuvent dire c'est que ça a
été accepté par la population dans le cadre d'un processus
de planification. Mais, soudainement, la population se pose des questions, elle
aussi, et elle dit: Tiens, on a déjà accepté. On ne savait
pas qu'on avait accepté une semblable activité. Alors, tout cela
se met à flotter et, actuellement, c'est ce que nous déplorons.
C'est que dans ce genre de situation il n'y a pas de responsabilité. On
dit simplement: Que les gens se battent entre eux et
s'entredé-chirent.
M. Maltais: M. Gravel, vous semblez dire dans votre
mémoire que, finalement, au niveau, par exemple, du zonage industriel ou
du zonage tout court, il y a eu beaucoup de consultations.
Par exemple, lorsque, dans un plan de zonage, vous créez un parc
industriel dans une municipalité ou dans une ville, finalement, tout le
processus de consultation et d'objection a déjà été
rendu public. Lorsque, dans ce même parc d'une municipalité ou
d'une ville, un industriel vient s'établir, s'il n'est pas soumis aux
grandes études d'impacts, vous semblez dire que la consultation a
déjà été faite, si j'ai bien compris. Pouvez-vous
me donner un petit peu...
M. Gravel: Ça, c'est l'aspect un petit peu ambigu et,
justement, c'est ce qu'on a souligné aussi ce soir en le rappelant dans
le mémoire. C'est que, suivant les règles du jeu de la loi 125,
il n'y a pas de doute. Il y a toute une procédure de consultation
publique qui accompagne l'adoption d'un schéma d'aménagement,
dans lequel schéma d'aménagement on va établir les
endroits qui sont propices pour des fins industrielles. Dans le cadre de cette
procédure de consultation publique, la population pourrait s'opposer ou
demander des modifications.
Mais ce que l'expérience nous montre, c'est que ça, c'est
noyé, cette démarche, en ce qui a trait en particulier aux parcs
industriels, que ce soit au niveau du schéma d'aménagement ou au
niveau du plan d'urbanisme local. C'est noyé dans tellement d'autres
préoccupations que, finalement, il n'y a pas de discussion sur les
enjeux propres du parc industriel. Il y a d'autres problèmes aussi,
parce que c'est tellement lourd, un schéma régional
d'aménagement, ça contient tellement d'éléments que
toute l'implication industrielle passe à travers un ensemble d'autres
préoccupations et ce n'est pas mis sur la place publique.
Il y a aussi le fait que les citoyens en général sont
préoccupés quand ils ont un projet précis. Alors, la
probabilité interprétée à partir d'une
réglementation que, possiblement, éventuellement, il pourrait y
avoir un projet susceptible de les affecter, bien ça, ils ne le voient
pas. Alors, concrètement, ce qu'on réalise, c'est que les projets
industriels, même s'ils répondent à toutes les exigences
des schémas régionaux, des parcs et des plans d'urbanisme locaux,
ils doivent encore être soumis à la discussion et à des
justifications.
M. Maltais: À la page 7 de votre mémoire - si vous
le permettez, M. le Président - vous amenez quelque chose de nouveau, au
fond. Vous semblez, dans le milieu de la page... "La première consiste
à introduire une participation statutaire et réglementaire de la
population dès le début du processus par l'introduction d'une
étape de type "scoping" sous l'égide du BAPE, tel que
suggéré dans le rapport Lacoste." En fait, si je vous saisis bien
- vous pourrez me corriger - il s'agit d'établir les règles du
jeu avant de partir, quelle est la participation, quel est le statut
consultatif que la population aura, et de l'établir par
réglementa-
tion avant le départ des audiences, si je vous comprends bien,
là.
M. Gravel: Ça... Veux-tu élaborer?
M. Letarte (Bernard): En fait, ce que nous soulignons là,
c'est une des recommandations du rapport Lacoste qui, comme vous le savez,
avait manifestement comme mandat de rester à l'intérieur de la
réglementation. Il a quand même cru bon de déborder sur
deux aspects. Il a dit: Peut-être qu'il devrait y avoir - et
c'était une de ses recommandations importantes, donc - il serait
important que, dans un premier temps de la procédure,
antérieurement, somme toute, à l'établissement de la
directive, on ait un contact avec la population pour que celle-ci
détermine la nature des enjeux et aussi explique ce qu'elle attend de
l'étude d'impact. C'est la procédure, c'est ce qu'on entend par
"scoping" et c'est ce que nous avons compris de la recommandation du rapport
Lacoste: Rendre cette étape-là, ni plus ni moins, obligatoire,
réglementaire et applicable à chacun des projets qui sont soumis
à la réglementation. Voilà le fait, disons, qui est
établi là.
M. Maltais: Dans votre mémoire, vous ne parlez pas,
même un peu, de ce que serait l'incidence du projet de loi
fédéral comparé, par exemple, à la
définition du rapport Lacoste concernant la réglementation du
BAPE. Est-ce que vous avez touché ou regardé quelles pourraient
être les conséquences du projet de loi fédéral sur
la réglementation actuelle ou, tout au moins, la recommandation que
Lacoste fait dans son rapport?
M. Gravel: On l'a regardé ou on ne l'a pas regardé?
Bien, on ne l'a pas regardé. Alors, c'est ce que...
M. Letarte: En fait, notre orientation et notre expérience
sont liées au déroulement de la procédure
québécoise. Évidemment, on pourrait se prononcer sur ce
qu'on pourrait penser ou comprendre de la réglementation
fédérale ou de la loi fédérale. Maintenant, on ne
s'est pas vraiment orientés dans ce sens-là. On livre ce soir,
donc, le produit de l'expérience que nous avons par rapport, vraiment,
à la procédure québécoise et à ce que nous
en comprenons.
M. Maltais: D'accord. Vous ne semblez pas reprocher grand-chose,
finalement, à la réglementation du BAPE, hormis... Votre
expérience vécue, pour vous, ça a bien fonctionné
dans la réglementation actuelle?
M. Letarte: Ce que vous posez, c'est par rapport aux promoteurs
avec lesquels nous avons été impliqués, et manifestement
c'est deux promoteurs importants, soit le ministère des Transports et
Hydro-Québec. De projet en projet, on a constaté effectivement,
quant à nous, que l'approche concernant l'environnement, l'approche
aussi devant la participation du public se sont améliorées de
façon constante. C'est le produit de l'apprentissage de la
procédure, dans le fond, sur ces promoteurs.
Ils ont des caractères spéciaux, ces promo teurs. Comme on
l'a dit, ce sont des promoteurs publics qui ont plusieurs projets qu'ils
élaborent de façon constante, et ils ont effectivement la chance
de pouvoir apprendre du processus qui est mis en place par la procédure.
Et, dans ce sens-là, nous considérons effectivement que la
procédure a atteint ses objectifs. Alors, c'est forts do cette
expérience que nous considérons effectivement qu'on peut
l'appliquer aux projets industriels. (20 h 30)
M. Gravel: J'ajouterais même que cette
expérience-là, d'apprentissage, n'est pas terminée. Entre
autres, en rapport avec tout ce qui a trait à la participation des
populations, il reste encore énormément de travail à faire
de la part des promoteurs. Et les gens cherchent tous - enfin, je dis tous,
c'est ceux avec lesquels on tra vaille, que ça soit le ministère
des Transports ou Hydro-Québec, ou même dans le cas des
municipalités... Tous les responsables cherchent des moyens de mieux
saisir ce que veut la population, de mieux connaître les désirs de
la population de façon à en tenir compte. Parce que, somme toute,
les promoteurs, c'est comme n'importe qui, ils veulent que leurs projets
fonctionnent, ils veulent que ça marche. Alors si, pour que leurs
projets marchent bien, Ils doivent répondre aux attentes de la
population, bien, ils vont faire les efforts requis pour connaître les
attentes de la population. Le problème, d'une certain façon... Un
des gros problèmes, en ce qui a trait à l'aspect participation
des populations, c'est la difficulté de savoir vraiment ce que les gens
veulent et, deuxièmement, de tenir compte des consensus, de trouver des
façons d'additionner, si on veut, ou de tenir compte de ce que M. X, Y
ou Z veut. Il y en a un qui dit: Moi, je préfère des beaux
paysages, et l'autre dit: Moi, je préfère la chasse et la
pêche, et l'autre préfère l'agriculture. Alors, comment
pondérer tout ça? C'est là qu'est le...
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Je vous remercie, M. le Président. Je veux
féliciter le groupe Urbatique. Je pense qu'on doit les écouter
bien attentivement parce qu'il n'y a pas beaucoup de groupes au Québec
qui ont une expérience de 20 ans comme consultants dans le domaine qui
nous préoccupe aujourd'hui.
Ma première remarque, c'est en rapport avec votre observation que
la procédure actuelle est valable, qu'elle fournit un cadre civili-
se - c'est l'expression que vous utilisez - aux différents
Intervenants. Vous n'avez pas de critique fondamentale à l'égard
de cette procédure-là. Si je comprends bien, vous ne proposez pas
de changements radicaux à cette procédure.
La deuxième observation que vous faites, qui m'intéresse
beaucoup, c'est quand vous dites: Grâce à cette dernière
caractéristique sur la procédure, Hydro-Québec et les
Transports ont amélioré leurs projets au cours des années.
Ça mérite d'être polycopié, cette
observation-là, et d'être transmis à beaucoup de monde
parce qu'il y a bien des gens qui ont peur de la procédure. C'est
tellement vrai que, cet après-midi, quand un certain groupe nous faisait
un peu le procès de la procédure actuelle, l'accusant
d'être trop longue et d'amener à des confrontations inutiles,
à la paralysie, l'immobilisme - c'est l'expression qu'on utilisait -
quand on a demandé des exemples à ces gens-là, ils nous
ont cité l'exemple de Ciment Saint-Laurent qui n'avait rien à
voir avec la procédure, qui avait été justement en dehors
des cadres de la procédure, vous le savez très bien.
Alors, il y a une grande confusion. Et, moi, je retiens que des gens qui
ont la vraie expérience comme vous l'avez... Vous êtes d'avis que
la procédure est valable, qu'elle offre ce cadre civilisé et que
les gens apprennent à mieux s'en servir. Vous donnez les deux exemples:
Transports et Hydro-Québec.
Deuxièmement... Là, je voudrais que vous élaboriez
un peu, c'est intéressant. Je ne pense pas l'avoir vu ailleurs dans
d'autres mémoires. Vous dites: Pour éviter qu'une entreprise
particulière n'ait à défendre une politique de
développement industriel en lieu et place du gouvernement, celui-ci
pourrait le faire, en tenant compte des implications environnementales, lors de
l'élaboration de sa politique et en procédant à des
consultations publiques. Au fond, vous dites: Ce n'est pas à un
entrepreneur ou à un promoteur privé, lorsqu'il est, comme c'est
le cas souvent, lourdement financé par des fonds publics, de venir
défendre cette politique industrielle. Moi, je m'arrête à
cette remarque que vous faites que je trouve très pertinente et je vous
demande de nous en parler un petit peu plus. Qui ferait cette consultation
publique pour demander au gouvernement de défendre lui-même sa
politique industrielle, au lieu de la faire défendre par un promoteur
privé?
M. Gravel: En fait, vous me demandez comment ça devrait
être fait. D'abord, il faudrait que ce soit connu clairement, c'est la
première exigence. Je peux repartir des expériences
régionales que nous avons parce que l'expérience de bureau, nous,
c'est plus près des gouvernements locaux. On travaille avec les
municipalités et les municipalités sont regroupées en MRC.
Les MRC font face à la même problématique qu'un
gouvernement, quel qu'il soit, elles doivent se préoccuper de
bien-être et de développement économique. Elles doivent
adopter des politiques en rapport avec ça, qui se traduisent en rapport
avec ces objectifs, qui se traduisent en aménagement de territoire.
Alors, nous, on soulève... Évidemment, ça se fait
de soulever les enjeux et les objectifs du développement dans un
territoire donné et amener les gens à décider. Je pourrais
citer des cas où ça se pose de façon très
concrète. On dit: Voici, ici on a un espace - je pense, entre autres,
à une municipalité dans le comté de Charlevoix. Ils ont un
magnifique espace à développer qui est résiduel; c'est
tout ce qui leur reste. Ils disent: On peut s'en servir pour du logement
à loyer modique, on peut s'en servir pour des résidences
secondaires, pour des auberges - il y a un choix - ou on peut s'en servir pour
des résidents. Alors, il y a un choix à faire, il y a une
décision à prendre qui est fonction de leurs objectifs.
À un autre niveau, ça devient plus difficile. Pensons, par
exemple, au cas récent des alumine-ries au Québec. On ne peut pas
demander à une aluminerie en particulier qu'on a invité à
venir ou incité à venir au Québec de justifier toute la
politique québécoise en ce qui a trait à l'utilisation
alternative des ressources hydroélectriques. Ça, ce serait un cas
où il faudrait qu'il y ait un débat public qui ne peut pas se
faire avec un promoteur, que ce soit Lauralco ou n'importe qui.
M. Lazure: Moi, je suis bien d'accord avec votre suggestion que
c'est le gouvernement qui devrait, sur la place publique, expliquer sa
politique industrielle. Mais je reviens à ma question: Est-ce que vous
avez des suggestions à nous faire? De quelle façon? Ça
peut être fait dans une commission parlementaire, mais ce n'est pas ce
qu'on appelle un grand débat public, une commission parlementaire.
Est-ce que vous voyez des façons de le faire?
M. Gravel: Tout de suite, là, je vous avoue que je ne me
suis pas posé ce problème-là.
M. Lazure: Bon!
M. Letarte: On peut prendre peut-être des exemples en
cours, les consultations qui sont faites au niveau de l'aménagement des
forêts et qui ont été quand même initiées
à ce moment-là par le ministère des terres et
forêts... de l'Énergie et des Ressources quant à
l'utilisation de toute la ressource forêt. Effectivement, comme vous le
dites, si vous soulevez la commission parlementaire, ça peut être
une étape. C'est un processus qui peut impliquer un certain nombre
d'étapes, dont la commission parlementaire, dont aussi le
ministère de l'Industrie et du Commerce. Alors, c'est à ces
ministres et à ces organisations à prendre ni plus ni moins le
micro et à élaborer, comme dit M. Gravel, d'abord une
politique, c'est un premier élément. On a, à titre
d'exemple, la politique du cap environnemental du ministère de
l'Environnement, qui a quand même fait l'objet d'un processus
d'élaboration et d'une consultation. On pourrait avoir la même
chose sur les industries.
M. Gravel: Le plus loin que j'irais là-dedans... Ça
ne m'apparaît pas piégé, mais il y a une difficulté
de dire: Est-ce qu'il y a une recette? Moi, je dirais que toute cette
question-là se situe dans une perspective, j'oserais dire, culturelle ou
de savoir-vivre social. Il faudrait que les journalistes soient assez avertis
et capables - je dis "journalistes" au sens large - de se prononcer de
façon intelligente sur des politiques de développement
industriel. Il faudrait que les gens dans les universités, qui ont les
compétences voulues, soient à l'affût et se prononcent. Il
faudrait qu'il y ait des responsables dans la société qui
prennent position. Il faudrait que l'ensemble de la société soit
préoccupé de développement économique et qu'il y
ait une discussion qui s'engage qui soit équilibrée entre les
perspectives de bien-être et les perspectives de développement
économique. Actuellement, au Québec, c'est en train de se faire,
mais je dirais que la difficulté vient du fait - et ça on le voit
dans les schémas d'aménagement et c'est clair et net à 99,
9999 % - que toutes les préoccupations sont des préoccupations de
bien-être. Ce n'est pas parce que les gens sont contre les aspects
économiques ou le développement économique, mais on n'a
pas une culture économique au Québec. Elle est en train de se
faire.
M. Lazure: Votre collègue a fait allusion au débat
qui se tient actuellement concernant la politique des forêts. Est-ce que
vous imaginez le Bureau d'audiences publiques faisant un débat semblable
sur une politique industrielle?
M. Letarte: Je dois dire, personnellement, que ça fait
partie, effectivement, des moyens qui sont tout à fait acceptables.
M. Lazure: Dernière question. Comme bien d'autres vous
proposez que le public soit associé le plus rapidement possible dans le
processus. À quelle étape suggérez-vous que le public soit
impliqué?
M. Gravel: Nous, notre façon de voir là-dedans,
c'est de dire que le promoteur soit responsable, lui, d'impliquer le public,
plutôt que d'en faire une responsabilité gouvernementale. Alors,
par exemple, dans le cas d'Hydro-Québec, les gens savent
qu'Hydro-Québec sait très bien qu'elle aura à - je dis
"convaincre" la population - présenter à la population ses
positions et à tenir compte des besoins, des volontés et des
désirs de la population.
Alors, le promoteur, lui, se prépare. C'est tout à fait
semblable à une entreprise qui dit: Je veux mettre un produit sur le
marché. Bien, on fait une étude de marché. Alors, dans une
certaine mesure - je mets ça entre guillemets - la participation de la
population dans ces projets-là peut être assimilée - je le
dis encore entre guillemets - à une procédure de l'étude
de marché où on va chercher ce que tes gens veulent, dans quelle
mesure ils le veulent, et quels sont les éléments importants pour
eux, par exemple, en environnement.
Si je pense à des lignes de transport d'énergie
électrique, on dit: II y a des aspects visuels, il y a des aspects
biophysiques, II y a des aspects agricoles. Alors, c'est quoi l'importance
relative de tout ça? C'est quoi les priorités dans une
région donnée? Comment ça va affecter les gens? Qu'est-ce
que les gens sont susceptibles de privilégier? Le promoteur du projet,
lui, a la responsabilité d'en tenir compte dans son projet et de se
donner les moyens pour aller saisir auprès de la population quelles sont
les attentes de la population.
M. Lazure: Merci.
Le Président (M. Garon): Alors, je remercie les gens du
groupe Urbatique d'être venus devant la commission et j'invite maintenant
Les Amis de la vallée du Saint-Laurent à prendre place en leur
disant qu'ils ont une demi-heure. J'invite M. André Stainier,
président, à nous présenter son groupe. Il a 10 minutes
pour exposer son mémoire. Il y aura 10 minutes pour le parti
ministériel et 10 minutes pour le parti de l'Opposition Alors, M.
Stainier.
Les Amis de la vallée du Saint-Laurent
M. Stainier (André): Merci, M. le Président. Merci
de nous donner l'occasion de présenter quelques considérations
à cette importante commission sur l'évaluation des impacts sur
l'environnement. Je vous présente tout d'abord les personnes qui
m'accompagnent: à ma droite ici, M. Gaston Cadrin, qui est membre des
Amis de la vallée du Saint-Laurent et président du groupe Giram,
Groupe d'Intervention et de recherche en aménagement du milieu; à
ma gauche, Mme Nicole Guilbeault, de notre conseil d'administration; M. Jacques
Noël, également membre du conseil d'administration des Amis de la
vallée du Saint-Laurent; derrière lui, M. Réal
Laliberté, également membre du conseil d'administration des Amis
de la vallée du Saint-Laurent, moi-même étant
président de ce groupe. (20 h 45)
Les Amis de la vallée du Saint-Laurent est un organisme
incorporé, sans but lucratif, voué à la protection et
à la promotion des sites, des paysages et du patrimoine historique
bâti des rives du Saint-Laurent, particulièrement dans les
régions administratives de
Québec et de Chaudière-Appalaches.
Les Amis de la vallée du Saint-Laurent considèrent que par
leur beauté, leur harmonie et le contact privilégié qu'ils
offrent avec la nature et avec l'histoire, les sites, les paysages et le
patrimoine historique bâti de la vallée du Saint-Laurent sont des
facteurs Importants de richesse culturelle, de qualité et de
développement économique aux plans résidentiel,
touristique, récréatif.
Notre organisme a été fondé en 1986 sous le nom de
Contestension Portneuf-Lotbinière. Il s'est occupé à
l'époque de protéger les comtés de Portneuf et de
Lotbinière, et particulièrement la vallée du Saint-Laurent
dans ces régions contre les dommages environnementaux causés par
le projet de ligne électrique à haute tension
Radisson-Nicolet-Des Cantons d'Hydro-Québec.
Nous présentons tout d'abord quelques grands principes
généraux qui rassortent plus particulièrement pour nous de
l'expérience que nous avons. Vous remarquerez que ces grands principes
recoupent plusieurs de ceux mis en évidence par le comité Lacoste
dans son rapport. En fait, je le dis tout de suite, notre grande conclusion,
celle qui fait la synthèse de tout ce que nous avons à dire
à ce moment de la vie du Québec, est qu'il faut, sans plus
tarder, mettre en application les recommandations du rapport Lacoste.
Ces recommandations forment, à notre avis, un ensemble,
particulièrement topique, complet, bien structuré, pragmatique et
réaliste, apte à apporter les améliorations, à
introduire les progrès dont le Québec a actuellement besoin et
qu'il est en mesure d'adopter en matière d'évaluation
environnementale.
Détaillons maintenant les principes généraux que
nous voulons plus particulièrement mettre en évidence. Selon
nous, l'examen et l'évaluation des impacts sur l'environnement doivent
tout d'abord porter sur l'ensemble des impacts, soit les impacts sur
l'environnement naturel, l'environnement économique, l'environnement
social et cela, tant au niveau national qu'aux niveaux régional et
local, il s'agit, en fait, de pouvoir mettre en balance l'ensemble des
avantages et des inconvénients de ce qu'on évalue pour
l'environnement naturel, économique et social du pays, des
régions et des localités touchées.
Deuxième principe. L'évaluation et l'examen doivent se
faire à un stade de la planification qui permet de planifier en fonction
du meilleur effet environnemental d'ensemble. Et pour cela, la
considération de l'effet environnemental doit commencer dès les
premiers stades de la planification et doit influencer celle-ci. En d'autres
mots, on doit examiner et évaluer les impacts sur l'environnement pour
mieux planifier et non pas pour mieux opérationnaliser quelque chose qui
est déjà planifié. Cela signifie aussi que l'examen et
l'évaluation des impacts sur l'environnement doivent porter sur les
politiques et les program- mes de développement et pas seulement sur les
projets particuliers qui mettent ces politiques et ces programmes en
oeuvre.
Troisième principe. L'examen et l'évaluation doivent se
faire en tenant compte du cumul des effets sur l'environnement de l'ensemble
dans lequel ce qu'on évalue s'insère historiquement ou
géographiquement.
Ils doivent aussi pouvoir conduire au rejet du projet ou du programme
évalué, ou à sa transformation substantielle, et pas
seulement à des modifications non substantielles ou à
l'acceptation pure et simple. Ils doivent aussi, d'ailleurs, offrir des
alternatives. On constate souvent que le promoteur ne présente qu'une
option, celle par hasard, qui correspond le mieux à ses
intérêts, alors qu'il y a d'autres options possibles qui
pourraient être plus avantageuses pour l'environnement.
L'examen et l'évaluation des impacts doivent aussi se faire avec
les populations concernées par l'environnement naturel,
économique ou social touché. Il faut reconnaître ces
populations comme représentant et défendant les
intérêts liés à cet environnement,
intérêts reconnus comme devant être pris en compte.
Enfin, ils doivent se faire en prenant en considération chaque
région et chaque localité ou unité territoriale de
façon distincte et particulière quant à ceux de ses
intérêts liés à son environnement.
Bref, au plan général, la perspective doit en être
une de planification du développement intégrant la
considération des effets de ce qu'on évalue sur l'environnement
comme faisant partie du développement à planifier. La perspective
doit aussi en être une de concertation dans ta planification,
concertation entre les porteurs des intérêts servis directement
par le projet ou le programme qu'on évalue et les porteurs des
intérêts de l'environnement touché.
Ceci nous paraît particulièrement important et
synthétisant bien ce qu'il y a à dire en ce domaine: Tout projet
ou programme doit s'insérer dans une perspective de développement
global, perspective qui doit être portée par l'ensemble des
intérêts concernés. On a trop tendance à
séparer, non seulement à distinguer, mais vraiment à
séparer et à isoler le problème environnemental comme ne
faisant pas partie du problème du développement ou de la
planification et encore moins, pense-t-on, que la population a quelque chose
à dire à un plan de concertation, et non pas simplement de se
faire entendre par mode d'une consultation faite après que les
décisions ont déjà été prises.
Ces opinions sur les principes généraux à retenir
plus particulièrement nous amènent à appuyer plus
spécialement les recommandations 1 à 9 et 33, pour être
précis, du rapport Lacoste et, en fait, plus largement, l'ensemble des
recommandations rassemblées sous les titres: Rendre plus
générale la pratique d'évaluation
environnementale, Introduire les préoccupations environnementales
dès les premiers stades de la planification d'un projet - je reprends
donc, là, les titres mêmes de la synthèse du rapport
Lacoste - Mieux informer le public au tout début des projets et
augmenter les occasions qu'il a d'intervenir, et, enfin, Assujettir les projets
conformément à la finalité de la procédure.
De ces principes généraux, nous tirons quelques
conséquences. Nous sommes d'avis que tous les projets pouvant avoir un
impact significatif sur l'environnement devraient être soumis à la
procédure prévue par la loi, et particulièrement tous les
types de projets énumérés à l'article 2 du
règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts sur
l'environnement. Cette recommandation nous paraît majeure. Elle est
d'ailleurs reprise au rapport Lacoste. La soustraction actuelle des projets
industriels et autres les plus importants annule presque l'effet visé
par la réglementation. C'est comme s'il y avait deux environnements et
que le public ne pouvait s'occuper que du moins important de ces deux
environnements.
Deuxième conséquence pratique. Le ministre ou le
gouvernement ne devrait pas pouvoir restreindre le mandat d'enquête et
d'audience donné au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement en
matière d'impact d'un projet sur l'environnement. Et là aussi
nous reprenons une recommandation du rapport. Par exemple, en 1986, le ministre
avait interdit au BAPE d'examiner la question des corridors de traversée
du Saint-Laurent par la ligne Radisson-Nicolet-Des Cantons et lui avait enjoint
de se limiter au mode de traversée dans le corridor déjà
décidé. Nous avions d'ailleurs contesté cette
décision du ministre. En fait, elle remontait déjà pas mal
loin car un an et demi auparavant le gouvernement, par décret, avait
décidé de l'aspect le plus important au point de vue
environnemental de ce projet, le corridor de parcours de la ligne
Radisson-Nicolet-Des Cantons. On en avait décidé, par
décret, après une étude à huis clos entre hauts
fonctionnaires de cinq ministères.
Autre conséquence. La population devrait être
informée de l'avis de projet et associée à
l'élaboration de la directive indiquant les impacts et les
possibilités d'impact à étudier, compte tenu des
particularités du projet, ce qui est aussi recommandé par le
rapport Lacoste. Sans cela, en fait, on piège la population. Ainsi, lors
de Radisson-Nicolet-Des Cantons, la première annonce, la première
annonce qui a été faite du projet à la population
s'accompagnait de la mention explicite que tout est déjà
décidé. Nous voulons avoir votre avis sur des aspects mineurs du
projet seulement.
Autre conséquence encore. Les groupes émanant de la
population, tels les organismes à but non lucratif, devraient voir des
ressources financières, techniques et humaines mises à leur
disposition pour la préparation de leur participa- tion au processus
d'examen et d'évaluation des impacts sur l'environnement. C'est aussi
une recommandation du rapport Lacoste.
Nous pouvons dire que l'on pourrait s'Inspirer de la formule convenue
entre Hydro-Québec et Contestension Portneuf-Lotbinlère. Cette
formule avait été: le dépôt par Hydro-Québec
d'une somme en fiducie dont les intérêts permettent de financer
les activités de surveillance et de protection de l'environnement
touché par le projet, somme qui pourrait également être
versée à l'organisme en cas de non-respect par HydroQuébec
de ses engagements environnementaux, pour financer des poursuites et autres
actions. Une adaptation de cette formule pourrait être: le
dépôt par le promoteur d'un capital en fiducie jusqu'à la
totale exécution de ses obligations environnementales, versement des
Intérêts pro duits entre-temps dans un fonds destiné
à rembourser au gouvernement les sommes ou une partie des sommes que
celui-ci aura allouées aux groupes participant au processus, la retenue
du capital en cas de non-exécution des obligations environnementales
dans le but de financer, précisément, des poursuites ou autres
actions que la population voudrait entreprendre pour la défense de ses
intérêts environnementaux non respectés tel qu'entendu.
Pour terminer, je voudrais signaler deux particularités en raison
de leur importance en matière environnementale et en raison de
l'intérêt que nous portons à ses objets. C'est tout d'abord
la nécessité d'intégrer, dans l'évaluation et
l'examen des impacts sur l'environnement, la considération des effets et
du cumul des effets sur les paysages, les sites et le patrimoine bâti
considérés en tant que facteurs de richesse culturelle, de
qualité de vie et de développement économique aux plans
résidentiel, touristique et récréatif.
D'autre part, c'est l'opportunité, nous semble-t-il, d'accorder
à la vallée du Saint-Laurent, c'est-à-dire le fleuve et
son enveloppe visuelle, un statut de territoire environnemental particulier
dans lequel il serait d'avance entendu que les projets doivent respecter
certaines normes spécifiques qui seraient en accord avec les valeurs
environnementales uniques et capitales, d'ordre naturel, historique et
esthétique de ce territoire. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Garon): Comme vous avez pris quinze
minutes pour votre présentation, il reste sept minutes et demie pour
chaque parti. M. le député de Lotbinlère. (21 heures)
M. Camden: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais
peut-être d'abord remercier M. Stainier, à titre de
président des Amis de la vallée du Saint-Laurent, de la
présentation de son mémoire. Je suis, évidemment, à
même de témoigner de l'à-propos de certains
éléments
dont il nous a fait part ce soir et plus particulièrement des
situations auxquelles il a été confronté,
particulièrement à l'égard de la ligne
Radisson-Nicolet-Des Cantons. Mais peut-être d'une façon plus
précise j'aimerais que vous me précisiez, pour fins de
compréhension, M. Stainier, à l'égard de la
considération des paysages, sites et patrimoines bâtis... C'est
une de vos principales recommandations de voir à intégrer des
mesures qui permettraient d'évaluer les impacts réels sur ces
sites et paysages et, également, le patrimoine. Est-ce que l'ensemble de
ces projets qui peuvent avoir un impact significatif sur l'environnement...
Vous dites que ça devrait être soumis à la
procédure. Qu'est-ce que vous entendez par un impact significatif sur
l'environnement? Qu'est-ce que votre organisme définit ou Identifie
comme étant un Impact significatif sur l'environnement?
M. Stainier: Bien, ce serait un impact dont on peut
évaluer, sur des bases objectives, qu'il va influencer soit la
qualité de vie de la région dans le domaine, par exemple, de
l'environnement visuel, soit le potentiel récréo-touristique dans
le cas, par exemple, du patrimoine bâti ou des sites qui sont attracteurs
de villégiateurs ou de touristes. Le significatif est à la mesure
des effets que cela risque d'avoir, compte tenu d'une analyse objectivement
fondée sur la vie et le développement de la région
où l'on se situe. Je pense que le significatif n'est pas, ici, une
notion subjective ou... C'est vraiment en relation avec les effets de type
social ou économique et non pas simplement au niveau de la
sensibilité que l'on peut vraiment objectiver les choses et se rendre
compte que ces valeurs de type plus suggestif ont des impacts sociaux et
économiques. Je ne sais pas si M. Cadrin voudrait compléter,
justement.
M. Cadrin (Gaston): Peut-être qu'on peut donner un exemple.
Dans le cas de Lauralco, par exemple, à Deschambault, quel va être
l'impact? C'est sûr qu'on n'a pas analysé tellement l'impact
direct de l'entreprise, là. On sait que ça n'a pas
été soumis à l'évaluation environnementale. Mais si
on prend sur le plan, par exemple, de la question que vous posez concernant les
paysages de la vallée du Saint-Laurent, ça va être quoi
l'impact sur le patrimoine de Deschambault, qui est un superbe village, qui a
des beaux points de vue sur le fleuve, avec l'urbanisation que va
entraîner l'entreprise? Ça a parfois des effets indirects d'avoir
une implantation comme celle-là dans un milieu qui est très
rural, qui a une belle Intégrité au niveau du paysage et ce sont,
je pense, des éléments qu'il faut considérer.
Actuellement, si vous allez, par exemple, au ministère de
l'Environnement, ils sont très peu équipés, finalement,
dans les directives, pour spécifier ce qu'il faut protéger sur le
plan des paysages, sur le plan de l'environnement visuel aussi. Donc, il y
aurait sûrement lieu de procéder à un cadre d'analyse
beaucoup plus précis et c'est dans ce sens-là qu'il est
proposé qu'il va falloir dans l'avenir... Je pense que Les Amis de la
vallée du Saint-Laurent vont arriver avec une proposition très
bientôt faisant en sorte que le fleuve soit considéré comme
un patrimoine national et qu'il y ait, justement, des mécanismes ou une
meilleure coordination entre les ministères.
Je vais vous donner un autre exemple. Dans le cas, par exemple, de la
ligne Radisson-Nicolet-Des Cantons, on a demandé aux Affaires
culturelles: Qu'est-ce qu'il y a de patrimoine dans le secteur de
Lotbinière ou dans le secteur de Grondines? Bon, ils ont regardé
leurs maisons classées et ils ont dit: "Ah! la ligne aérienne va
passer assez loin. Il n'y a pas de problème, vous pouvez passer." Est-ce
que c'est ça, une protection du paysage, une protection de
l'environnement bâti au Québec, dans un paysage qui est
distinctrf? On dit qu'on est distinctif sur le plan culturel, mais on l'est
aussi sur le plan de l'habitat et si on ne fait rien pour protéger cet
habitat-là lorsqu'il arrive des projets industriels majeurs, très
perturbants pour cet environnement-là, paysager et visuel, il ne restera
plus grand-chose sur le plan touristique, pour les générations
à venir, à montrer en bordure du Saint-Laurent.
M. Camden: Merci. Je reviendrai. On me dit qu'il me reste
quoi?
Une voix: Deux minutes.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Lotbinière.
M. Camden: Deux minutes? Je vais les garder peut-être pour
la fin.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux rendre hommage
aux Amis de la vallée du Saint-Laurent. Dans un sens, on est un peu des
frères ou des cousins puisque je suis député du
comté de La Prairie, avec trois municipalités qui longent le
Saint-Laurent.
Juste pour continuer là-dessus, est-ce que vous connaissez des
fleuves ou des rivières qui ont ce statut environnemental particulier
dont vous parliez tantôt? Moi, je trouve ça intéressant
comme idée. Est-ce que le Nil ou le Rhin ont des statuts
environnementaux particuliers?
M. Stainier: M. Cadrin va peut-être pouvoir répondre
plus précisément que moi, mais ce qui me frappe c'est que de plus
en plus... Ce qu'on sait c'est qu'en France, par exemple, des fleuves sont
administrés par des comités de bassins. On
parle plus de bassins là que seulement du fleuve, et c'est des
comités issus de la population qui gèrent l'ensemble de ce qui va
se passer dans le bassin hydrographique d'un fleuve.
Ce que je sais aussi c'est que les associations, les colloques, les
congrès sur les fleuves se multiplient. Il y en a un à
Orléans le mois prochain, il y en a un autre à Lyon - pour ne
parler que de la France - en décembre. Manifestement, c'est une
préoccupation que l'on a. Ici au Québec, il faut quand môme
remarquer que le gouvernement du Québec a estimé devoir
créer le parc du Saguenay. Je ne parle pas du parc marin qui est plus
récent et qui est différent, mais il y a ce parc
administré par le MLCP, le ministère du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche, qui protège, assure une certaine protection sur
l'ensemble de la vallée du Saguenay. M. Cadrin peut-être...
M. Cadrin: Bien, je ne connais pas de fleuves qui sont
classés comme tels. Cependant, comme a dit M. Stainier, en France, il y
a des comités de bassins, mais il y a aussi des contrats de
rivières. Il y a une concertation dans l'aménagement des bassins
fluviaux. Aussi, je dois ajouter que dans le plan vert français qui est
sorti l'an passé, il y a à peu près un an, le paysage
apparaît vraiment comme un élément qui est
intégré à l'environnement, alors qu'au Québec,
cherchez le paysage, hein? Nulle part... Il n'y a personne qui se
préoccupe du paysage, que ce soit les Affaires culturelles ou que ce
soit le ministère de l'Environnement, il n'y a personne qui a la mission
spécifique de protéger notre paysage qui est unique en
Amérique du Nord, ne serait-ce que... On pourra vous donner bien des
éléments qui en font un paysage unique. Vous les connaissez
probablement aussi pour la plupart, ces éléments-là.
M. Lazure: En tout cas je suis très sympathique à
cette idée parce que c'est un fait, le Saint-Laurent a occupé une
telle place dans notre histoire, a joué un rôle si grand. Et, en
plus de sa beauté naturelle, il évoque tellement de choses pour
nous que c'est un peu dommage de laisser aller tout l'aspect paysage. Vous avez
raison. En tout cas, dans la région de Montréal, cherchez les
paysages du Saint-Laurent qui ont été épargnés. Il
n'y en a pas beaucoup. Dans la région de Québec, vous êtes
plus privilégiés.
Une question concernant l'approbation des projets. Vous dites que
l'examen d'évaluation des impacts sur l'environnement doit pouvoir
conduire au rejet du projet ou du programme évalué, ou à
sa transformation substantielle. Mais ça peut se faire actuellement.
Est-ce que vous en doutez ou quoi? Ça peut se faire.
M. Stainier: Oui, oui. Je n'en doute pas dans cette enceinte-ci,
parce que nous sommes au niveau de la procédure. La procédure le
permet. Mais dans la pratique, dans la réalité, l'exemple
évidemment le plus énorme pour nous, c'est Radisson-NIcolet-Des
Cantons, qui était peut-être un projet particulier, mais il reste
qu'il n'était absolument pas question non seulement d'annuler le projet
Radlsson-NIcolet-Des Cantons, mais même de modifier son corridor pour
l'essentiel. Je pense sincèrement que bien d'autres projets soumis ainsi
à l'évaluation environnementale le sont dans l'esprit, et avec
les pressions qu'il faut pour que l'esprit passe, qu'il ne s'agit pas de
vouloir le contester sur le fond, mais seulement de l'aménager sur les
modalités. Il faut certainement améliorer les choses de ce point
de vue.
Je pense que... Une autre recommandation que nous faisons touche au
même objet, c'est de saisir la population dès le début d'un
projet, dès le stade, ici, de l'avis de projet, pour être dans la
procédure actuelle, de même que prévoir de
l'évaluation environnementale dès le stade de planification ou de
conception soit du projet, soit des programmes. À ce moment-là,
il y aura réellement une possibilité d'option zéro.
Actuellement, dans la pratique, je ne pense pas que la plupart du temps ce soit
réellement ou politiquement possible.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Dubuc.
M. Morin: Oui, merci M. le Président. Considérant
que... De par le contenu de votre mémoire, vous vous préoccupez
beaucoup, disons, du niveau environnement paysager ou visuel.
Considérant que vous avez touché aussi le projet du parc marin,
seriez-vous en mesure de nous dire comment vous voyez l'harmonisation du parc
marin, pour la partie située sur le fleuve Saint-Laurent, et les rives
du fleuve Saint-Laurent? On sait que quand on parle de protection de
l'environnement naturel paysager... Je ne sais pas, ce n'était pas dans
votre mémoire, mais, comme vous y avez fait référence,
j'aimerais avoir peut-être un peu votre vision des choses sur les
possibilités d'harmoniser le développement du parc marin -
évidemment, secteur marin, bien sûr - avec la partie terrestre du
fleuve qui, elle, n'est pas parc.
M. Stainier: M. Cadrin, qui a plus travaillé l'ensemble de
la vallée que nous, dans son métier de géographe et
d'expert, pourrait peut-être vous répondre.
M. Cadrin: Disons que je n'ai pas analysé
spécifiquement ce cas-là. Je sais qu'il y a eu des audiences
publiques concernant le parc marin. Nous autres, on n'a pas proposé de
mémoire en particulier. Mais ce à quoi vous faites allusion, si
je comprends bien, c'est, finalement, comment on peut intégrer, dans ce
secteur-là, l'aspect biophysique, la faune, les mammifères
marins
avec aussi le paysage côtier, les villages et la population qui
vit dans cet environnement-là.
Je dois vous dire tout de suite que, de prime abord, le paysage auquel
vous faites allusion, ce n'est sûrement pas le plus massacré au
Québec. Alors, déjà c'est un bon point; c'est
peut-être plus possible de voir à cette
intégration-là. D'ailleurs, la région de Charlevoix est
reconnue par l'UNESCO, au niveau de territoire de la biosphère. Alors,
déjà, je pense qu'il y a des balises. Le fait d'avoir reconnu ce
territoire-là, je pense que c'est parce qu'il y avait un potentiel, il y
avait des éléments intéressants. Je pense que le parc
marin devrait consolider ou tenir compte de tous ces
éléments-là, avoir une vue globale, une vue
intégrée. Ce qu'on reproche souvent lorsque arrivent des projets,
c'est qu'il n'y a pas de vue globale. On n'insère pas les projets dans
un contexte d'ensemble où tous les éléments biophysiques
humains sont considérés. On appelle ça
l'écosystème global. C'est pour ça que... Ce n'est pas
toujours évident qu'on le fait actuellement dans les projets
industriels.
Le Président (M. Garon): Alors, M. le député
de Lotbinière, vous avez trois minutes.
M. Camden: Trois minutes. Merci, M. le Président. Un point
qui a attiré mon attention dans votre mémoire est celui, plus
particulièrement, des groupes qui auraient à défendre des
positions à l'égard de projets bien particuliers. Est-ce que vous
pourriez peut-être m'indiquer d'une façon plus claire, à
l'égard de cette aide financière, quels seraient les groupes qui
pourraient... comment on les rendrait éligibles, par le fait même,
à ce financement et d'où proviendrait également ce
financement, si on exclut, par exemple, les cas d'Hydro-Québec ou,
enfin, du gouvernement du Québec?
M. Stainier: Le financement proviendrait des promoteurs qui
auraient à faire un dépôt proportionnel à l'ampleur
du projet - un dépôt et non pas un don - qui a deux raisons
d'être. Première raison d'être: c'est un devoir social, je
dirais, que de favoriser la participation de la population au processus
démocratiquement décidé ici au Québec, que la
population participe à ces choses-là, à
l'évaluation environnementale; d'autre part, c'est aussi - ce qui
n'existe pas - une forme quelconque, enfin, une forme de garantie
vis-à-vis du respect des obligations environnementales.
Je pense que ce n'est un secret pour personne que les recommandations,
non pas les recommandations du BAPE, mais les décisions prises
après les audiences publiques par le ministère de l'Environnement
- il faudra respecter ceci, ceci, ceci - ne sont pas l'objet d'une très
grande vérification. Les promoteurs doivent savoir qu'ils seront tenus
de respecter ce que le gouvernement décidera qui doit être fait en
matière environnementale. Une des bonnes façons d'y faire
attention, c'est d'avoir cette perspective d'argent qui risque d'être
perdu. (21 h 15)
Donc, nous, on parle d'argent venant des promoteurs au pourcentage du
projet et nous en donnons deux raisons d'être. A qui serait-il
attribué, comme je le disais, comme nous l'avons écrit? Cet
argent serait versé dans un fonds alimenté, par ailleurs, aussi
par le gouvernement éventuellement et, en tout cas, géré
indépendamment des promoteurs. Il serait attribué à tout
groupe qui se qualifierait pour intervenir de façon justifiée
dans un processus de consultation. Alors, la loi étant très large
au Québec, tout citoyen participant à l'intérêt
public... Ces critères ne devraient évidemment pas être
trop étroits. Mais à partir du moment où un groupe se
qualifie, de la même façon qu'il se qualifie pour des subventions
ou pour des reconnaissances ou pour être invité à une
commission parlementaire, etc., je ne pense pas que ça devrait poser un
bien gros problème que celui de la qualification des groupes.
Le Président (M. Garon): Alors, je remercie Les Amis de la
vallée du Saint-Laurent d'être venus rencontrer les membres de la
commission. Comme le temps dévolu à votre mémoire est
écoulé, je vais demander à l'Association
québécoise pour l'évaluation d'impacts de venir prendre
votre place à la table afin de présenter leur mémoire avec
M. Luc Ouimet comme président fondateur, qui pourra nous
présenter les gens qui l'accompagnent. Là, il s'agit d'un temps
alloué d'une heure, c'est-à-dire 20 minutes au maximum pour votre
présentation, 20 minutes pour le parti ministériel, 20 minutes
pour l'Opposition.
Je dirai aux membres que vous y gagnez à être brefs un peu
dans vos réponses parce que si vous êtes trop longs, comme on est
obligé de céduler un temps limité, à ce
moment-là, les gens ne peuvent pas vous poser autant de questions comme
ils aimeraient le faire. Si vous voulez répondre plus longuement...
Ça fait qu'il y a moins de sujets que les gens de la commission
aimeraient toucher qui sont touchés quand les réponses sont plus
longues.
Association québécoise pour
l'évaluation d'impacts
M. Ouimet (Luc): Je vous remercie, M. le Président.
Mesdames et messieurs, comme il était prévu, il devait y avoir
d'autres membres à la table pour m'accompagner. Je vous présente
M. Yvan Biron, même si c'est marqué M. Yvan Boivin, qui
était avant de la firme Lavery O'Brien, mais qui est rendu maintenant
Lavery...
M. Biron (Yvan): De Billy. C'est depuis cette semaine que nous
sommes fusionnés avec Gagnon-De Billy de Québec.
M. Ouimet: II y avait M. Lamoureux de Dimension Environnement qui
venait du Lac-Saint-Jean et M. Laroche de la CSN qui venait de l'Outaouais. Je
constate qu'ils ne sont pas avec nous ce soir. Par contre, dans la salle, nous
avons plusieurs membres de l'Association, aussi bien de l'Université
Laval, du ministère des Forêts, du Groupe Dryade, du groupe
Urbatique, du ministère de l'Environnement, quelques autres qui sont
intéressés à devenir membre, et du ministère des
Transports.
Donc, cela illustre que l'Association québécoise de
l'évaluation d'impacts veut regrouper toutes les personnes
intéressées par l'utilisation de l'évaluation d'impacts,
en particulier, à l'intérieur des processus de planification et
de prise de décision et, d'une façon générale, non
seulement à l'intérieur des procédures
réglementées, mais à l'intérieur, également,
d'une action non réglementée... qu'ils soient à
l'intérieur de la planification d'action de ministères ou
d'entreprises privées.
Comme nos objectifs sont également de procéder à
l'amélioration des méthodes d'évaluation d'impacts et
à leur utilisation, l'essentiel de notre mémoire porte
là-dessus. Évidemment, l'évaluation d'impacts - je viens
de le mentionner - c'est plus que simplement la procédure
d'évaluation d'impacts. La procédure d'examen d'évaluation
d'impacts a des exigences particulières, mais c'est une méthode
de planification qui va être de plus en plus utilisée
particulièrement dans les sociétés modernes et pour peu
que l'on est conscient des effets du passé sur les modèles de
développement et que l'on veut maintenant essayer de prévenir les
effets sur les ressources, sur le milieu ou sur les personnes des effets du
développement.
Mais la procédure d'évaluation d'impacts
québécoise, comme n'importe quelle procédure... On peut
procéder à des améliorations, mais il y a un certain
nombre de conditions pour que ça puisse porter ses fruits. Avec la
même législation, la même réglementation, on pourrait
avoir des approches ou des pratiques administratives qui sont... qui favorisent
plus ou moins l'atteinte des objectifs poursuivis par la procédure. Dans
ce contexte-là - et je vais y aller en résumé - il y
aurait certainement des efforts à faire étant donné le
poids particulier, par exemple, que tient le Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement dans ces débats publics et du poids important qu'on fait
porter aux commissaires. Il y aurait sûrement lieu, étant
donné les exigences qu'on a à leur endroit, de voir s'il n'y
aurait pas avantage à ce qu'ils soient nommés par
l'Assemblée nationale et, un peu selon les procédures
américaines, qu'ils répondent à des questions publiques
par des commissions, soit de l'Assemblée nationale ou par autre
mécanisme.
Comme il ne s'agit pas d'une application mécanique, mais d'une
procédure à l'intérieur d'un processus de planification,
pour que les gens prennent ça au sérieux, pour que les
ministères prennent ça au sérieux, II serait important,
quel que soit le gouvernement qui a la responsabilité d'appliquer les
procédures, qu'il laisse entendre des messages clairs à
l'ensemble des appareils gouvernementaux pour faire des efforts sérieux,
non pas de contourner la procédure ou de s'adapter à la
procédure pour ne pas en vivre l'esprit, mais évidemment et sans
hésitation, l'intégrer dans les pratiques courantes.
De la même manière, un certain nombre d'outils... Quand on
applique de nouvelles procédures - même si celle du Québec
semble être vieille puisqu'elle a maintenant 10 ans - ça reste
quand même des institutions récentes, des pratiques
récentes et il y a encore des façons de faire peu en rapport avec
la procédure. Il y a donc avantage a développer à
l'intention des gestionnaires, d'abord gouvernementaux et ensuite à ceux
qui sont soumis à la procédure, des outils qui peuvent favoriser
l'application de la procédure. C'est fait dans d'autres milieux, dans
d'autres pays, à d'autres paliers de gouvernement et ça pourrait
être fait avec avantage également au Québec.
Il serait peut-être utile qu'il y ait des documents de
vulgarisation à l'intention du grand public. Si on regarde ce qui s'est
passé lors des discours publics, entre autres, à l'occasion du
dossier Soligaz, on est étonné que le sens et la portée de
la procédure d'évaluation d'Impacts ne soient pas
nécessairement partagés de façon claire et unanime par
l'ensemble des acteurs et l'ensemble des groupes d'Intérêt de
notre société.
Quant aux améliorations qu'il serait possible d'apporter à
l'actuelle procédure, si tant est qu'on identifie qu'il serait
souhaitable d'en apporter, je pense qu'on ne sera pas la première
association à rappeler que la commission Lacoste a fait un certain
nombre de travaux, a rencontré un certain nombre de personnes, un
certain nombre d'acteurs, a fait un certain nombre de recommandations. On n'a
pas eu, à date, officiellement, d'analyses du gouvernement, de ce qu'il
entendait donner comme suite à ces recommandations et on pense qu'il y a
là une matière très riche d'améliorations sans
même procéder à des modifications réglementaires ou
législatives.
Par contre, il y a... En particulier on pourrait insister sur, à
la fois, les deux bouts de tout l'élément de la procédure
qui mériteraient sûrement, dès Immédiatement, qu'on
s'attaque sérieusement à leur amélioration. C'est, au tout
début, au moment de la directive, ce qu'on appelle en très bon
français du "scoping", c'est-à-dire la focalisation des enjeux
pour permettre aux gens de déterminer ce qui est pertinent et ce qui
devrait être étudié et, à l'autre
extrémité de la procédure, c'est celui du suivi, du
contrôle des conditions que le Conseil des ministres impose
habituellement pour l'implantation d'un projet ou l'adoption d'une technologie.
Ce n'est
pas toujours assuré que les conditions imposées par le
gouvernement sont appliquées, ce qui contribue parfois à un
manque de crédibilité de la part du public envers les projets qui
sont présentés et envers les fiabilités universelles des
technologies proposées. C'est particulièrement le cas dans des
domaines reliés, par exemple, aux déchets dangereux.
Quant aux améliorations plus pointues de la procédure, il
nous apparaît que, lorsqu'on veut procéder à des
changements réglementaires ou législatifs, il serait imprudent de
se livrer à des modifications sans avoir une étude très
approfondie de l'effet de telles modifications sur l'ensemble de
l'économie d'une procédure. Dans ce sens-là, il serait
avantageux d'avoir des hypothèses et d'avoir aussi des analyses
d'impacts de telles modifications sur l'ensemble des procédures, sur
l'ensemble des objectifs atteints.
En conclusion de cette brève présentation, notre
association est convaincue que le processus d'évaluation d'impacts est
un processus exigeant, très exigeant par rapport à ceux qui
élaborent des projets et pour les décideurs politiques qui
doivent émettre, au nom du bien commun, des certificats d'autorisation.
C'est en même temps une approche dont on ne saurait se passer pour un
État moderne et qui fait en sorte que, si on voulait l'affaiblir ou si
on voulait passer un peu à côté, on risquerait de
décider, par le fait même, de ne pas être compétitifs
avec les autres sociétés qui vont faire un certain nombre
d'efforts pour adapter des technologies ou adapter des planifications de
projets respectueuses du milieu dans lequel ils oeuvrent. Je vous remercie.
Le Président (M. Garon): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci. M. le Président. À la page 7 de
votre mémoire, premier paragraphe: "Nous estimons qu'il ne serait pas
souhaitable que la commission veuille statuer sur l'ensemble des questions
soulevées, sans avoir réalisé les interventions ou
études appropriées, et sans grille d'analyse, sans avoir
précisé dans le cadre de la prise de décision." Qu'est-ce
que vous voulez dire par cela?
M. Ouimet: C'est intéressant. Il s'agit ici d'un mandat
d'initiative d'une commission d'étudier cette question. Quel est le
projet de réforme? Quelles sont les hypothèses de réforme?
Pourquoi étudier le projet? À quel niveau? Jusqu'où aller?
Le document de la commission pose énormément de questions qui
peuvent aller dans tous les sens. Il ne se dégage pas une orientation
privilégiée, une hypothèse claire d'une réforme, de
sorte que des gens peuvent venir dire des opinions sur toutes sortes de sujets.
A la fois, ça peut porter sur des questions d'orientation comme
ça peut porter sur des questions techniques ou des questions pointues.
Dans ce contexte-là, il est assez difficile de savoir quelle sorte
d'analyse faire, quelle sorte de recommandation et, de la même
manière, on n'a pas nécessairement d'assurance de quelle
façon le gouvernement entend donner suite à la nature des
recommandations qui pourraient être faites. Il y a une espèce
d'incertitude, en tout cas, pour les gens qui se présentent ici quant
à l'objet.
M. Maltais: D'accord. Dans le deuxième paragraphe, vous
nous dites: "Quelles sont les analyses que des professionnels, pour le compte
du gouvernement, ont faites des recommandations du rapport Lacoste - et
ça, on vous suit - du C-13 du gouvernement fédéral - qui
n'est pas adopté encore, mais qui est en voie - et des
législations comme les procédures étrangères,
américaines..." En quoi, par exemple, la législation du Bureau de
l'environnement du Delaware est-elle différente et
désavantage-t-elle celle du Québec, selon vos études?
M. Ouimet: Non, je ne veux pas procéder, à moins
qu'on n'ait un mandat, à une analyse comparative des différentes
procédures. Je vous dis que la commission semble ouvrir et dire: II
faudrait regarder parce qu'il y a des avantages et des désavantages
à telle ou telle procédure. Il y a des procédures
canadiennes, il y a des procédures américaines. Si on voulait
procéder à des améliorations - c'est le volet technique -
en changeant des parties de règlement ou en changeant des parties de la
législation, il vaudrait la peine, à ce moment-là, de
faire des comparaisons pour essayer de trouver les meilleures
améliorations qu'on puisse trouver.
M. Maltais: Merci.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux saluer le
travail des gens de l'Association québécoise pour
l'évaluation d'impacts. Je voulais leur poser quelques questions en ce
qui a trait aux fameux délais. Vous avez plusieurs commentaires sur les
délais. Vous avez raison de souligner que souvent la perception publique
- et peut-être plus chez les promoteurs - est à l'effet que la
procédure telle qu'elle existe maintenant est injuste, leur impose des
délais considérables.
Est-ce que vous pourriez, avec toute l'expérience que vous avez,
nous identifier les phases ou les étapes où les délais
sont les plus fréquents, d'une part? Et, d'autre part, pourriez-vous
nous faire des suggestions pour améliorer cette situation-là?
M. Ouimet: Elles peuvent être nombreuses. J'insiste
toujours que, pour aborder des questions
comme celle-là, il serait plus souhaitable d'être
systématique. Il y a eu des études entreprises pour le compte de
la commission Lacoste. Il y en a déjà eu aussi au sein du
ministère, pour regarder - et, là, souvent on parle de moyenne de
durée de la procédure... Il faudrait toujours encore là le
situer même dans la durée moyenne de la planification d'un projet
au sein d'un gouvernement. Des étapes peuvent être trop longues
à certaines étapes, et ce n'est pas toujours du côté
de l'application de la bureaucratie.
C'est-à-dire que, par exemple, si on faisait un examen attentif
de tous les cas, c'est sûr qu'il y a des fois que les directives ont pris
du temps à être émises. C'est vrai aussi que dans certains
cas, même après une demande d'audience publique, le ministre a
été long à statuer sur la pertinence d'une audience
publique. C'est vrai aussi que parfois la décision que le gouvernement a
prise suite à une audience publique a été longue à
prendre. C'est vrai aussi, cependant, que dans certains cas, ou bien un
promoteur a hésité ou il a été long avant de donner
suite à l'autorisation qu'il avait. Dans certains cas, même, le
promoteur parfois était long à déposer son avis de projet,
même si ses études ont été faites sur plusieurs
années. Parfois, également, le promoteur, après des
directives d'une étude d'impact qui aurait pu se faire en six mois, pour
toutes sortes de raisons peut avoir pris deux ans ou trois ans pour la
réaliser.
Une des avenues possibles pour l'amélioration au niveau des
délais, pour répondre à votre question, ça serait
à différentes étapes peut-être d'exprimer des temps
limites au réalisation d'une étape. On pourrait fixer des temps
limites pour l'émission des directives. On pourrait fixer des temps
limites au ministre pour statuer sur une audience publique. On pourrait
également peut-être, dans certains cas, donner un temps limite
pour la production d'une étude d'impact après quoi le projet
pourrait être considéré comme caduc. Mais ce sont des
hypothèses qu'il faudrait analyser de façon
systématique.
M. Biron: Si je peux ajouter un élément de
réponse à votre question. Sans encore là vous donner des
paramètres stricts ou définis sur les limites qui seraient
à favoriser, puisqu'on ne s'est pas penché strictement
là-dessus, la question des délais demeure essentielle dans ce
sens que je pense que tous les intervenants en 1991 sont sensibles au fait que
certains projets vont nécessiter une évaluation et un examen.
Ça, ce n'est même plus remis en question. Je pense qu'aujourd'hui
c'est accepté. Ce que les gens ont de la difficulté à
vivre, c'est l'incertitude qui entoure ça. Ce n'est pas
l'évaluation à l'examen lui-même que les gens ne veulent
pas vivre, c'est l'incertitude qui l'entoure. Alors, il faut trouver des moyens
de rassurer les gens.
Très certainement ça ne leur fera pas
nécessairement plaisir. Tout ce qu'on va mettre en place ne leur fera
pas plaisir. Il y a des choses qu'ils vont aimer, il y a des choses qu'ils vont
moins aimer. Ce qu'ils vont au moins être capables de faire, c'est de
connaître l'étendue de leurs droits et de leurs obligations. Dans
ce sens-là, la question des délais est essentielle. Ça
donne aux gens au moins la notion et la con naissance de ce dans quoi ils
s'embarquent, combien de temps ça va durer et où ils vont. Je
pense qu'à l'heure actuelle, c'est ce qui fait craindre aux gens, le
mécanisme d'évaluation, l'examen des impacts. Ce n'est pas le
mécanisme lui-même, c'est les incertitudes, c'est la
méconnaissance du mécanisme, c'est finalement le vague quant aux
obligations et aux droits que les gens détiennent dans cette aventure.
Ils ont l'impression qu'ils savent quand ils commencent, mais ils ne savent pas
où ils vont arriver et quand ils vont arriver.
M. Lazure: Juste une dernière question. Dans la liste des
projets assujettis, à la page 10, vous en parlez, mais ce n'est pas
clair, clair. C'est une mise au point que je voudrais entendre de votre part.
Vous dites: "SI l'on veut rouvrir la liste des projets, il serait souhaitable
que ce ne soit pas que des fonctionnaires, mais l'ensemble des groupes
d'intérêt à l'intérieur et à
l'extérieur du gouvernement qui participent", etc C'est justement un des
objectifs de cette commission. C'est d'entendre des suggestions des gens qui ne
sont pas des fonctionnaires, quoique vous trouve rez aussi des fonctionnaires
dans votre groupe, apparemment. Alors, c'est un peu...
M. Ouimet: Pas exclusivement.
M. Lazure: Non. Mais vous dites aussi: "À cette liste de
projets soumis obligatoirement, il pourrait être possible de soumettre,
de façon discrétionnaire, d'autres projets". Pour être bien
clair, êtes-vous d'accord que tous les grands projets devraient
être assujettis?
M. Ouimet: Oui. Le sens de la proposition n'est pas de
restreindre. Ce qu'on rappelait, c'est qu'au début, quand ce projet
s'est fait, cela a été aussi une discussion interne entre des
gens à l'intérieur du gouvernement, sur des bases de
critères biophysiques. On s'est dit que si on rouvre la liste
maintenant, si on introduit d'autres critères et s'il n'y a pas que des
échanges à l'intérieur du gouvernement mais avec
l'extérieur, on va probablement arriver avec une liste
différente. Dans notre esprit, ce n'est pas une liste amoindrie parce
que c'est évident que si on introduit d'autres critères on va
sûrement trouver important d'assujettir d'autres projets.
Lorsqu'on fixe une limite... On reconnaît la
nécessité et les avantages de la procédure
québécoise d'avoir une liste de projets
réglementés, mais, effectivement, il y a d'autres
projets qui, parfois, ne sont pas réglementés et
qu'à l'exercice ou à l'examen ou pour toutes sortes de types de
problèmes qu'ils posent on trouverait souhaitable de les soumettre. On
se dit qu'il pourrait y avoir la possibilité d'en ajouter, même
s'ils ne sont pas dans un projet réglementé, mais cela suppose
une discrétion, un choix de soumettre ce projet à la
procédure.
M. Lazure: M. le Président, en terminant, juste une
remarque pour finir. Je suis surpris - j'ai déjà eu l'occasion de
vous le dire - de constater que vous ne faites pas de recommandations, de
suggestions. Un groupe qui a quand même ramassé beaucoup
d'expertise en ayant des gens qui viennent de tous les milieux, qui ne fait
aucune recommandation, cela me laisse un peu perplexe et sur mon
appétit. Merci.
M. Ouimet: Puisque vous faites allusion au fait qu'on s'est
déjà parlé, je vais vous refaire à peu près
les mêmes éléments de réponse. La première
réponse, c'est: comme il s'agit d'une première activité
où on va le rendre formel, d'une première activité de
cette association qui se veut plus un rassemblement, un lieu d'échange,
on ne voulait pas prendre de position qui risquait à ce moment-là
- parce que ces gens-là jouent des rôles institutionnels
différents, et vous en avez ici en arrière - de heurter, et on
n'avait pas eu l'occasion de consulter tout le monde. Mais ce qui est
très important aussi, c'est de penser qu'il nous était difficile
de faire des recommandations alors qu'on était convaincus qu'on ne
voyait pas clairement les hypothèses de modifications ou les besoins de
modifications... dans quelle perspective on allait.
Cela dit, s'il y a une chose, puisque c'était votre
dernière question, M. le député... J'en profite
également pour dire que ia participation du public fait également
partie de l'évaluation d'impacts et l'actuelle commission fait
également partie des mécanismes de participation du public. Je ne
sais pas si cela a répondu à votre question.
Le Président (M. Garon): Messieurs et mesdames de la
commission, je remercie l'Association québécoise pour
l'évaluation d'impacts d'être venue nous rencontrer. Cela
étant dit, j'ajourne les travaux de la commission à demain matin,
9 h 30, en avisant les membres de la commission que les travaux vont aller
jusqu'à 11 h 30 parce qu'il y a un groupe qui devait venir et qui,
à la dernière minute, n'a pas pu venir. Nous ajournerons les
travaux à 11 h 30 et ils reprendront à 14 heures ensuite. Je vous
le dis pour la planification de vos travaux personnels.
(Fin de la séance à 21 h 39)