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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 5 mars 1992 - Vol. 31 N° 132

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-six minutes)

Le Président (M. Garon): Mesdames, messieurs, je déclare la séance de la commission ouverte. Rappelons le mandat de la commission qui est de procéder à des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur l'étude du projet de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives.

M. le secrétaire, pourriez-vous nous annoncer, s'il y a lieu, les remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Camden (Lotbinière) est remplacé par Mme Loiselle (Saint-Henri); M. Thérien (Rousseau) par M. Doyon (Louis-Hébert); M. Tremblay (Rimouski) par M. Leclerc O"aschereau).

Le Président (M. Garon): Pourriez-vous nous donner également, M. le secrétaire, lecture de l'horaire de la journée?

Le Secrétaire: Très bien. Immédiatement suivront les déclarations d'ouverture; à 10 heures, nous entendrons l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec; à 11 heures, Laidlaw et, à midi, il y aura une suspension. Les travaux reprendront à 14 heures avec l'Association québécoise des techniques de l'eau; à 15 heures, l'Institut canadien des produits pétroliers et, à 16 heures, ce sera l'ajournement.

Le Président (M. Garon): Nous avions prévu dans les ententes une demi-heure pour les déclarations d'ouverture. Nous commençons un peu avec retard. S'il était possible aux intervenants de raccourcir de part et d'autre leur temps d'intervention pour qu'on puisse commencer le plus possible à 10 heures et ne pas pénaliser l'horaire de la journée. Alors, je demanderais immédiatement au ministre de faire une déclaration d'ouverture.

Déclarations d'ouverture M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, M. le Président. Chers collègues, mesdames et messieurs, en convoquant une commission parlementaire sur le projet de loi 412, intitulé Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives, nous voulons, par cet exercice démocratique, permettre aux différents intervenants intéressés de présenter leurs suggestions et commen- taires qui, nous l'espérons, contribueront à une bonification du texte législatif. Soyez assurés que le gouvernement sera, tout au cours de cette consultation, particulièrement attentif aux propositions qui lui seront soumises et aux échanges d'information qui auront court entre les différents intervenants et les parlementaires à l'occasion de la présentation des mémoires. Du côté ministériel, je tiens, dès le départ, à indiquer que nous demeurons ouvert à toute suggestion s'orientant vers l'objectif prioritaire recherché par ce projet de loi, soit la création d'un nouvel organisme gouvernemental responsable de l'application des lois et règlements en matière d'environnement au Québec.

Avant d'aborder proprement dit le contenu de ce projet de loi, il nous apparaît pertinent de le situer tout au moins brièvement, pour tenir compte de vos propos, M. le Président, dans le contexte de l'évolution du ministère de l'Environnement du Québec. Le ministère de l'Environnement a maintenant un peu plus de 10 ans. Ses missions sont multiples. Tel que défini dans la Loi sur la qualité de l'environnement en 1978, ce ministère a pour fonction d'élaborer et de proposer au gouvernement une politique de protection de l'environnement, de la mettre en oeuvre et d'en coordonner l'exécution. Il a aussi pour fonction de surveiller et de préserver la qualité de l'environnement, de promouvoir son assainissement et de conseiller le gouvernement, ses ministères et organismes en vue de prévenir la détérioration de l'environnement et de protéger les espèces vivantes et les biens.

Lors de notre arrivée au ministère de l'Environnement à la fin de 1989, ce dernier faisait l'objet de critiques fort négatives. La majorité des Québécois et Québécoises, près de 70 %, se déclaraient insatisfaits de l'efficacité du ministère. On se rappellera que, vers cette période, à la suite de l'incendie de l'entrepôt de BPC de Saint-Basile-le-Grand, le commissaire aux incendies, Me Cyrille Delage, déplorait dans son rapport - et je le cite - «la lourdeur administrative et la lenteur d'exécution du ministère».

Par ailleurs, on doit remarquer que, depuis le milieu des années quatre-vingt, la population du Québec se préoccupe davantage de la protection et de la conservation de l'environnement. Les besoins exprimés mettent davantage en lumière les déficiences et les problèmes vécus par le ministère de l'Environnement dans ses relations avec ses diverses clientèles. Afin justement de répondre à ces nouvelles attentes de la population et de mieux la desservir, nous avons apporté, notamment depuis la dernière élection, en 1989, plusieurs améliorations qu'il est ici approprié de souligner.

Ainsi, en 1990, au chapitre de la législation, nous avons apporté des modifications à la Loi sur la qualité de l'environnement - vous vous en souviendrez, le projet de loi 65 - afin de permettre l'application du principe pollueur-payeur. L'Assemblée nationale a également adopté le projet de loi 60 créant la Société québécoise de récupération et de recyclage afin de favoriser la promotion, le développement et l'encouragement à la réduction, au réemploi, à la récupération ainsi qu'au recyclage.

De plus, durant cette même année, au niveau réglementaire, nous avons annoncé l'entrée en vigueur des modifications au règlement sur la qualité de l'atmosphère afin de réduire la teneur en soufre dans l'huile lourde. C'est dans cette même volonté d'améliorer nos services environnementaux que notre bilan législatif et réglementaire de ces derniers mois a été dressé, bilan tout aussi progressif et profitable pour l'ensemble de la population. Ainsi, la législation adoptée au cours de l'an dernier portait notamment sur la prolongation du mandat de la Société québécoise d'assainissement des eaux jusqu'au 31 décembre 1993 afin de permettre l'inscription de quelque 170 nouvelles municipalités ainsi que la construction et l'amélioration d'ouvrages d'assainissement.

De plus, en juin 1991, l'Assemblée nationale du Québec adoptait le projet de loi 143 modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, afin que le gouvernement puisse contrôler davantage les rejets Industriels et apporter des modifications au programme de réduction des rejets industriels. Au terme de la session législative, le projet de loi 405 portant sur les matières dangereuses était également adopté, permettant ainsi au gouvernement d'élargir le champ d'application de la Loi sur la qualité de l'environnement à l'ensemble des matières dangeureuses et de contrôler l'utilisation, l'entreposage, le recyclage et l'élimination de ces matières.

Par ailleurs, au chapitre de la réglementation, le bilan des derniers mois est - vous me permettrez de le souligner - impressionnant, à un point tel que je me limiterai, ici, à une simple enumeration: modifications réglementaires publiées et mises en vigueur, Règlement sur sur les carrières et sablières, Règlement sur les neiges usées, Règlement sur les déchets solides, Règlement sur l'entreposage des pneus hors d'usage; modifications réglementaires prépubliées et en période de consultation, Règlement sur les pâtes et papiers, le premier Règlement sur les déchets biomédicaux et, depuis hier, le Règlement sur les attestations d'assainissement en milieu industriel.

De plus, nous avons apporté, en août 1991, des bonifications majeures à la politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables dans le but d'assurer une protection de tous les lacs et cours d'eau en milieu agricole. Ainsi, dans un autre ordre d'idées, nous avons augmenté les effectifs de la Direction des enquêtes environnementales depuis notre arrivée, ce qui a entraîné un impact considérable sur le nombre de poursuites et de condamnations. Enfin, dans un souci d'un meilleur service à la clientèle, nous avons procédé à une restructuration interne du ministère. Par la suite, nous avons amorcé l'actuel processus de régionalisation des activités dans les secteurs industriel, agricole et municipal afin d'être davantage à proximité des besoins de la population.

Malgré les nombreux efforts qui ont été consacrés et les importantes corrections qui ont été apportées, force est de constater qu'il y a encore place à une nette amélioration, la situation actuelle du ministère demandant une intervention majeure pour remplir, encore plus adéquatement ses multiples missions. En dépit du fait qu'un récent sondage révèle une satisfaction accrue de la population à l'égard du travail effectué par le ministère, 52 % se déclarant maintenant satisfaits par rapport à seulement 30 % il y a deux ans, nous devons faire davantage pour améliorer encore l'efficacité de nos services.

En effet, il apparaît que les fonctions de préparation de législation et de réglementation demeurent toujours difficilement concHiables avec la tâche tout aussi importante d'application et de contrôle efficace des lois et règlements environnementaux. Qui plus est, trop souvent, ce ministère se retrouve dans une situation conflictuelle de juge et partie. À cet égard, mentionnons notamment que le ministère de l'Environnement du Québec se retrouve à la fois législateur par l'élaboration de lois et règlements, exécutant par l'application de cette réglementation, tel lors de l'émission de certificats d'autorisation, inspecteur et enquêteur par le contrôle et la surveillance qu'il exerce sur cette même réglementation, et aussi juge, en tant qu'autorité qui émet des ordonnances, et partie, en tant que défendeur dans les cas de contestation de cette ordonnance devant la Commission municipale du Québec.

En somme, à la lumière de toutes les analyses et consultations réalisées, le constat demeure le même, soit que la structure actuelle du ministère ne lui permet pas de remplir de façon appropriée les mandats diversifiés qui lui sont confiés, et ce, au détriment de l'ensemble des clientèles qui font affaire avec le ministère. Plus que jamais, il nous apparaît évident qu'il faut alléger les mandats actuels du ministère. D'ailleurs, il importe de rappeler que, déjà, des fonctions spécifiques majeures en environnement ont été décentralisées à des organismes distincts. Pensons notamment à la création de la Société québécoise d'assainissement des eaux, en 1980, pour offrir un support aux municipalités afin qu'elles puissent se doter d'équipements d'épuration de bonne qualité et au meilleur coût possible, et la création de la Société québécois de

récupération et de recyclage, en 1990.

Il devient maintenant nécessaire de confier des fonctions spécifiques de contrôle et de surveillance exercées par le ministère à un organisme distinct et régionalisé. C'est dans cet esprit et devant l'obligation d'assurer un meilleur accomplisement des mandats gouvernementaux en matière d'environnement que nous avons présenté une proposition visant la constitution d'un office de protection de l'environnement du Québec.

Le 17 décembre dernier, nous avons déposé à l'Assemblée nationale le projet de loi 412 intitulé Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. À cette occasion, j'ai mentionné que ce projet de loi visait à la fois trois objectifs bien spécifiques: premièrement, rendre le gouvernement plus efficace dans la protection de l'environnement; deuxièmement, rendre le gouvernement plus équitable envers les diverses clientèles à desservir en environnement; troisièmement, permettre une meilleure planification de l'action gouvernementale en ce domaine.

Ainsi, par le dépôt de ce projet de loi, nous voulons essentiellement créer un nouvel organisme gouvernemental dont le principal mandat sera d'assurer l'application des lois et des règlements en matière d'environnement au Québec. Nous croyons que la création de cet organisme distinct et autonome permettra d'accroître l'efficacité, la rigueur et l'uniformité des activités de contrôle et de surveillance, l'Office étant spécialement mandaté pour accomplir ces tâches. Ce nouveau partage des mandats aura pour effet positif de concentrer les activités du ministère de l'Environnement sur ses autres responsabilités tout aussi importantes et essentielles que le contrôle et la surveillance.

Plus en détail, l'Office émettra notamment les certificats d'autorisation, les permis, les attestations, les avis et les ordonnances. Il se verra également confier les mandats d'inspection et d'enquête sur toute question relative a l'application de la réglementation. Il répondra, par ailleurs, aux incidents et aux événements susceptibles de détériorer l'environnement, notamment par le biais d'un service d'urgence environnemental. Dans les cas où l'intérêt public l'exige, il est prévu que certains pouvoirs de l'Office pourront être exercés par le gouvernement.

À ce nouvel organisme reviendra aussi la responsabilité des fonctions découlant de l'application de la Loi sur le régime des eaux, de la Loi sur les pesticides, de la Loi sur les réserves écologiques et de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. De plus, le projet de loi 412, tel que déposé, prévoit la possibilité pour le nouvel office de recevoir des mandats délégués par le ministre de l'Environnement pour l'application des programmes de restauration et de prévention de la détérioration de l'environnement ainsi que tout autre mandat connexe à ces fonctions. Il est aussi prévu que l'Office pourra, dans le cadre de ses fonctions, conclure une entente avec toute personne, municipalité, société, organisme ou même avec d'autres paliers de gouvernement.

Pour sa part, le ministère de l'Environnement pourra davantage concentrer ses énergies sur l'élaboration des lois, des règlements, des orientations et des directives en matière d'environnement. Il pourra également accentuer ses efforts de planification et de préparation des politiques environnementales, se tenir davantage à la fine pointe de la recherche et des nouvelles technologies et multiplier les actions s'orientant vers le développement durable. De plus, le ministère exercera encore davantage les fonctions de représentation, de concertation, d'animation auprès des différentes clientèles, notamment avec les autres ministères provinciaux et les divers niveaux de gouvernement.

Par ailleurs, au niveau des implications administratives, le projet de loi 412, tel que présenté aujourd'hui, prévoit que l'Office sera un organisme budgétaire soumis au même régime administratif qu'un ministère. Le personnel de l'Office sera régi par la Loi sur la fonction publique et proviendra des ressources actuelles du ministère, regroupant au départ plus de la moitié des quelque 1850 postes du ministère ainsi qu'un budget de l'ordre de quelque 60 000 000 $.

Quant aux mécanismes de fonctionnement envisagés pour l'Office, signalons qu'un conseil d'administration de neuf membres sera formé. Il devra être composé du président nommé par le gouvernement, du sous-ministre du ministère, ainsi que de sept autres membres, dont au moins un représentant provenant du secteur environnemental, un du monde municipal, un du milieu des affaires et un des organisations syndicales.

Le projet de loi prévoit en plus la mise en place d'un mécanisme de révision des décisions prises par les représentants de l'Office, offrant ainsi aux citoyens une possibilité de faire valoir leur point de vue sur leurs dossiers par le biais d'un mécanisme d'appel à la Cour du Québec.

Dans un autre ordre d'idées, soulignons que le ministre de l'Environnement demeurera responsable de ces deux organismes, dans le contexte de notre système parlementaire. Il conservera ses pouvoirs et prérogatives sur ces deux entités à qui il fournira ses orientations et lignes directrices. Par ailleurs, le projet de loi 412 prévoit que des liens étroits seront établis entre l'Office et le ministère. Mentionnons également que l'Office de protection de l'environnement du Québec aura à jouer un rôle prépondérant en environnement, outre ses fonctions habituelles. (10 heures)

Ainsi, le ministre de l'Environnement aura l'obligation de consulter l'Office sur tout projet de règlement dont il aurait la responsabilité d'application. L'Office aura de son côté la possibilité de donner son avis au ministre sur

toute question relevant de sa compétence, à la demande de celui-ci ou encore de sa propre initiative. Au cours des prochains mois, nous entendons préciser les types de liens qui pourront être implantés, permettant ainsi aux deux organismes, chacun de leur côté, d'oeuvrer de façon plus performante dans leur champ de compétence respectif, notamment par l'échange d'informations et d'expertises, et ce, sur une base régulière.

De nombreux avantages découleront de la création de l'Office de protection de l'environnement du Québec et de la priorité que le ministère pourra ainsi accorder à ses activités fondamentales de planification, d'orientation et d'organisation. Nous anticipons, d'ores et déjà, que le nouveau partage des responsabilités et les nouveaux mécanismes de fonctionnement qui seront mis en place au sein des deux organismes favoriseront une protection accrue de l'environnement et une amélioration notable des services gouvernementaux en matière environnementale auprès de tous les citoyens et citoyennes. D'un côté, le ministère pourra mieux prévoir, prévenir et intervenir de façon logique et efficace. De l'autre côté, une structure régionalisée, qui aura pour unique mandat de faire respecter nos lois et règlements, pourra s'en acquitter avec une rigueur accrue.

À l'occasion du dépôt de ce projet de loi, j'avais indiqué que cette législation vient concrétiser un engagement important du Parti libéral du Québec. Cet engagement, pris en avril 1991, portait justement sur la création d'un organisme indépendant et autonome du ministère de l'Environnement dont le mandat serait de voir à l'application des lois et règlements environnementaux. Je vous préciserai également que la Commission d'enquête sur les déchets dangereux, la commission Charbonneau, qui a remis son rapport à l'automne 1990, recommandait fortement la mise en place d'un organisme similaire, mais mandaté exclusivement à la gestion des déchets dangereux au Québec.

En conclusion, M. le Président, je terminerai en rappelant que l'objectif du gouvernement, en présentant ces dispositions législatives, vise particulièrement l'amélioration de nos services environnementaux auprès de l'ensemble des diverses clientèles. Comme je vous le mentionnais précédemment, cette commission parlementaire, qui permet cette consultation publique sur ce changement de structures gouvernementales en environnement, nous apparaît fort pertinente et apportera, nous en sommes convaincus, son importante contribution dans le processus parlementaire actuellement en cours. J'invite donc cordialement tous les intervenants à venir nous présenter les ajustements qu'ils jugent appropriés car, au risque de me répéter, nous demeurons ouverts à des modifications qui visent la bonification du projet de loi 412. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jonquière. M. le député de La Prairie, pardon.

Une voix: Y a-t-il eu substitution? M. Lazure: Merci, M. le Président.

M. Dufour: II voulait savoir si on dormait! C'est un truc.

M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, nous voilà encore devant un projet de loi qui a trait à des structures et non pas au fond de la question. Pourquoi créer cet Office? C'est un secret de polichinelle que le ministre pensait avoir trouvé une façon commode de permettre au gouvernement libéral de remplir son engagement de consacrer des sommes importantes à l'environnement. Initialement, le ministre avait espéré que l'Office pourrait assurer son autofinancement par la perception et la gestion des fonds provenant de diverses sources, notamment les amendes, les redevances sur permis, etc. C'eût été alors une façon commode de faire oublier ses échecs auprès du Conseil des ministres, de faire oublier le fait qu'il n'a pas réussi, contrairement à l'engagement solennel de la campagne de 1989, à consacrer 50 000 000 $ dès la première année, alors qu'on sait qu'en réalité il y a eu à peine 25 000 000 $ après deux ans et demi de pouvoir du Parti libéral.

M. le Président, on sait qu'encore une fois le ministre de l'Environnement a subi un échec auprès de ses collègues, autant du Conseil du trésor que du Conseil des ministres, et on lui a dit non à l'autofinancement de l'Office. Cependant, il laisse planer encore auprès des groupes la perspective que, peut-être, il va finir par gagner cette bataille, il laisse planer cette perspective dans le but justement de faire passer son projet de loi. Parce que son projet de loi, les gens n'en veulent pas, M. le Président. Les trois quarts des mémoires que nous avons reçus sont contre ce projet de loi. Je comprends qu'aujourd'hui on a plutôt des groupes qui sont pour, c'est peut-être de bonne guerre, c'est vrai qu'il y a eu deux désistements de dernière minute, mais la plupart des mémoires - et on le verra quand on résumera les audiences de cette commission - la grande majorité des mémoires sont opposés pour la bonne et unique raison que ce que le gens reprochent au ministère de l'Environnement et au ministre de l'Environnement, ce n'est pas d'avoir des mauvaises structures, c'est de manquer de vision, c'est de manquer de planification, c'est de manquer de leadership. C'est ça que les gens lui reprochent.

Je mets le ministre au défi de nous dire qui a réclamé la création d'un deuxième ministère. Parce que c'est de ça qu'il s'agit. Il s'agit, M. le Président - et c'est grave - de démolir un

ministère qui commence à peine à bien fonctionner après, quoi? depuis 1979, une douzaine d'années d'existence, un jeune ministère. Il s'agit de démolir ce ministère-là, de le couper en deux et de créer un deuxième ministère. Ce n'est pas d'un deuxième ministère de l'Environnement, M. le Président, dont on a besoin, c'est d'un ministre de l'Environnement. C'est de ça qu'on a besoin. On n'a pas besoin d'un office de protection de l'environnement, on a besoin d'un ministre qui va protéger l'environnement; c'est de ça qu'on a besoin. Je le mets au défi de me dire qui, dans la société québécoise actuellement, à part les jeunes libéraux du Québec, à part le Parti libéral du Québec, réclame la création d'un office de protection de l'environnement? Personne. Personne ne réclame ça.

Le ministre se sert du rapport Charbonneau en biaisant un peu. Le rapport Charbonneau ne parle pas de la création d'un nouveau ministère, le rapport Charbonneau parle de la création d'une régie des déchets, d'un organisme qui va s'occuper des déchets. Nous sommes d'accord avec ça, nous l'avons déjà réclamé, et c'est dans le programme du Parti québécois aussi. Mais, là, il ne s'agit pas de ça, il ne s'agit pas de créer un organisme qui va avoir une vocation bien précise. Nous aussi, on pense que le fouillis dans la gestion des déchets autant domestiques que dangereux au Québec, c'est le reflet du fouillis de ce gouvernement en matière d'environnement. Ça, ce serait commode, ce serait utile d'avoir une régie des déchets. Mais de venir créer un nouveau ministère... parce que ce dont il s'agit, c'est de créer un office qui va avoir autant de fonctionnaires, sinon plus, que le ministère qui va rester.

Ce que les gens reprochent au ministère de l'Environnement, c'est l'incoordination, l'improvisation, les lenteurs administratives considérables, et ce n'est pas le Parti québécois qui le dit. J'ai devant moi une déclaration de l'Association des manufacturiers et j'espère qu'ils vont venir nous en parler plus longuement. Les manufacturiers québécois accusent le ministre de l'Environnement d'être affligé d'un manque de vision en matière de développement durable, un handicap qu'il pourrait surmonter en partie s'il pouvait les consulter davantage pour mieux équilibrer économie et environnement. Moi, je comprends que ce sont deux secteurs dont j'ai la responsabilité pour mon parti, les personnes handicapées et l'environnement, mais je ne pensais pas que le ministre de l'Environnement tombait aussi dans le groupe des personnes handicapées. Mais, selon M. Le Hir, le ministre de l'Environnement présente un handicap grave, en ce sens qu'il n'a pas de vision globale.

Hier, le ministre a fait un petit coup d'éclat. Il a eu la manchette ce matin dans les nouvelles en rendant public... C'est de bonne guerre, la veille de l'ouverture d'une commission parlementaire, on essaie d'avoir les titres le lendemain matin. C'est de bonne guerre, mais ça faisait quatre ans, quatre ans depuis le projet de loi 99, en 1988, sous le prédécesseur du ministre de l'Environnement, M. Lincoln, que les gens attendaient ce projet de règlement. Mais ne vous faites pas d'illusion. Ce n'est pas adopté encore, ce projet de règlement. C'est une prépublication de 60 jours. Est-ce que le ministre, quand seront finis les 60 jours, va faire adopter par le Conseil des ministres le projet modifié ou pas modifié? On ne le sait pas. On ne le sait pas, M. le Président, parce que le ministre a perdu sa crédibilité.

Quand il parle de créer un nouvel organisme... Il en a créé un, nouvel organisme, qui s'appelle RECYC-QUÉBEC. Il y a fait allusion tantôt pour s'en vanter. Mais, M. le Président, moi, je n'en parlerais même pas si j'étais à sa place. Ça va faire bientôt deux ans que RECYC-QUÉBEC est créé. Le ministre lui a donné deux petits mandats bien modestes il y a un an et demi: la consigne des pneus usés et la consigne des bouteilles. Rien n'a été fait encore. Rien! Il ne s'agit pas de mandats compliqués. La consigne des pneus, l'Ontario l'a déjà depuis plus d'un an; la consigne des bouteilles, il y a plein d'États américains qui l'ont et il y a plein de pays en Europe qui l'ont. Mais le ministre n'arrive pas à réaliser des choses. Le ministre passe son temps à nous présenter des projets de loi, des projets de règlement; il ne livre pas la marchandise, M. le Président. C'est un ministre incapable de réaliser des choses, et c'est ça qui est le problème.

En quoi, je vous le demande, M. le Président, la création d'un nouveau mini-ministère va-t-elle améliorer la coordination entre ceux et celles qui planifient au ministère actuellement? Il y en a qui planifient; le ministre ne les écoute pas la plupart du temps, mais il y en a qui planifient. En quoi la création d'un nouvel organisme, d'un ministère parallèle va-t-elle améliorer la coordination de tout ce beau monde? Il n'y a personne qui va croire ça.

L'inefficacité dans ce ministère, c'est le ministre qui doit en porter la responsabilité et c'est son gouvernement qui doit en porter la responsabilité parce qu'il n'y met pas l'énergie, l'inspiration et l'animation qu'il devrait y mettre lui-même, et son gouvernement n'y met pas l'argent qu'il devrait y mettre. Les problèmes de fonds tiennent beaucoup plus d'un manque de vision globale et d'engagement. Une structure administrative, ce n'est pas ça qui va venir engendrer une volonté politique, et une politique réelle de faire quelque chose pour l'environnement, ça n'a pas besoin de structures nouvelles.

M. le Président, bien sûr que nous allons nous opposer vigoureusement, comme les trois quarts des gens qui ont présenté des mémoires, à la création de cet organisme, création inutile et dangereuse parce qu'elle va encore augmenter l'incoordination, elle va encore augmenter les

retards et, plus grave encore, M. le Président, elle va encore augmenter l'irresponsabilité du ministre. Le ministre va se laver les mains d'un grand pan de ses responsabilités en le confiant à cet organisme. Il va s'en laver les mains. Et on le connaît, nous, le ministre. Il y en a qui ne le connaissent pas beaucoup ici, mais, nous, on le connaît. Nous, on le connaît. Le ministre va se cacher derrière des légalistes.

Une voix: C'est le psychiatre qui parle.

M. Lazure: Oui, c'est le psychiatre qui parle parce que je ne peux pas faire abstraction de mes perceptions. Le ministre de l'Environnement et député de Brome-Missisquoi est un expert en légalisme. Je n'ai pas dit un expert en droit, en légalisme; il se cache derrière des légalistes tout le temps.

Une voix: C'est une mauvaise habitude.

M. Lazure: Et, là, en créant un office... Parce qu'il a les pouvoirs. Qu'est-ce que vous voulez, ils l'ont, la majorité; on ne l'a pas. Alors, il est possible, malgré toutes les mises en garde qu'il va entendre pendant les jours qui viennent, qu'il procède quand même à la création de l'Office. Il le regrettera un jour, mais il est possible qu'il le fasse. Mais il y a une possibilité aussi qu'il entende raison et qu'il mette sur la glace ce projet tout à fait inutile, coûteux et dangereux parce que, comme j'allais le dire, il enlève au pouvoir politique dûment élu la responsabilité de répondre à l'Assemblée nationale devant la population des gestes de son ministère. Et je le vois déjà, s'il crée cette structure-là, dire: Ah! Écoutez, moi, je n'y peux rien, c'est l'Office de protection de l'environnement qui a décidé ça. (10 h 15)

Alors, M. le Président, quand on sait à quel point le ministre a démoli jusqu'ici... Le ministre n'a pas été un constructeur; il y a des ministres qui construisent et il y en a d'autres qui démolissent. L'actuel ministre de l'Environnement, c'est un expert en démolition. En arrivant au ministère, il a démoli le moral de ses troupes en reprochant aux fonctionnaires de se traîner les pieds. Littéralement, c'est ce qu'il a dit: Vous vous traînez les pieds, je vais vous brasser, moi, il va y en avoir de l'action! Ensuite, il s'est acharné à démolir certains programmes dans son ministère qui fonctionnaient bien. J'en cite un exemple: le programme des lacs, le programme des lacs qui existait depuis une vingtaine d'années, qui rassemblait une petite équipe d'une douzaine de fonctionnaires et des milliers de bénévoles, qui ont comme souci la protection des rives des lacs, d'un organisme qui s'appelle la Fédération des associations pour la protection de l'environnement des lacs. Demandez aux dirigeants de la FAPEL quelle a été la contribution du ministre de l'Environnement au programme des lacs. Ils vont vous le dire. Il a démoli le programme des lacs. Il a politisé, en plus, le programme des lacs, parce que le ministre a tendance à politiser tout ce qu'il touche. Il a tendance à politiser tout ce qu'il touche. Ce n'est pas pour rien qu'un journaliste disait, il y a quelques mois, que, derrière son sourire angélique, je cite; «M. Paradis est, en fait, un vrai petit démon.»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: «Avec Lise Bacon et Marc-Yvan Côté, il est probablement le seul membre du cabinet qu'on peut réellement qualifier de bête politique.» C'est une bête politique plus qu'un ministre de l'Environnement. Ça, c'est clair. Il politise tout ce qu'il touche. Il a politisé le programme des lacs. Pour la première fois en 20 ans, le programme des lacs qui était administré conjointement par la FAPEL et l'équipe de 12 fonctionnaires, pour la première fois, ces fonctionnaires reçoivent des pressions politiques - politiques! - dans le choix des rives dont ils vont s'occuper, et ça, c'est prouvable.

Le ministre a démoli aussi dans son propre comté, M. le Président. Dans son propre comté! Il n'a pas appuyé les citoyens qui voulaient protéger le mont Pinacle à Frelighsburg. Il a appuyé les développeurs de son comté. Il a appuyé ses organisateurs libéraux. Il a appuyé ceux qui contribuent à la caisse électorale.

M. Doyon: ...des preuves?

M. Lazure: Oui, des preuves de ça, on peut en donner, M. le député de Louis-Hébert. Oui, on peut en donner.

M. Doyon: C'est trop facile de dire ça.

M. Lazure: On peut en donner, des preuves.

Une voix: C'est bien facile de dire ça.

M. Lazure: On n'a qu'à regarder les noms de ceux qui s'occupent du développement du mont Pinacle. On n'a qu'à regarder les noms et on va reconnaître, par exemple, des anciens membres de l'exécutif du Parti libéral de Brome-Missisquoi.

M. Doyon: Ils ont agi légalement. M. Lazure: Légalement, oui. Le Président (M. Garon): Alors...

M. Lazure: Là, j'ai la parole, M. le Président, que je sache.

Le Président (M. Garon): Oui, vous avez la

parole.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur te projet de loi.

M. Lazure: Sur le projet de loi. Le projet de loi est présenté par quelqu'un qui n'a plus de crédibilité. Les groupes environnementaux, il a démoli leur moral aussi. Il leur impose de présenter des projets pour avoir leur subvention. Il les a laissé végéter littéralement au plan du financement, pendant quatre, cinq ans, au même niveau qu'en 1985, au même niveau de subvention.

Le Programme d'assainissement des eaux, le PAEQ, il en a parlé tantôt. Encore une fois, moi, je ferais attention, à sa place, parce qu'il a failli abolir ce programme-là il n'y a pas si longtemps, l'an passé. Pendant des mois de temps, son gouvernement, et surtout son collègue, son cher ami, le président du Conseil du trésor, a laissé planer la possibilité d'abolir le Programme d'assainissement des eaux du Québec.

M. le Président, le ministre nous a présenté des projets de loi à plusieurs reprises. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est le Centre québécois du droit à l'environnement, et je cite là aussi: «Aucun des amendements apportés à la Loi sur la qualité de l'environnement depuis les cinq dernières années n'a été mis en vigueur.» Ça, c'est moins vrai depuis hier. Mais ce n'est pas en vigueur encore, le PRRI qu'il a annoncé hier, c'est juste une prépublication. Donc, ça demeure vrai. Aucun de ces amendements-là n'est en vigueur.

RECYC-QUÉBEC. Je le répète encore une fois, il a eu beau nommer son ex-associé au bureau de son comté, ex-associé de son étude légale, M. Louis Lord, président de RECYC-QUÉBEC, ça ne fonctionne pas. Ça ne fonctionne pas!

Alors, M. le Président, nous, on est convaincus que le ministre va se faire dire de long en large qu'il fait une erreur. On n'est pas convaincus qu'il va les écouter, mais on est convaincus que l'Opposition va voter contre ce projet de loi. Merci.

Le Président (M. Garon): Merci, M. le député de La Prairie. Alors, le temps prévu, selon l'entente intervenue entre les deux partis politiques, pour les remarques préliminaires étant terminé, je vais convier les organismes à prendre place à la table des témoins selon l'ordre convenu. Tout d'abord, l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec. Et je vais rappeler le temps alloué pour la période de présentation et la période d'échanges, puisqu'il a été convenu entre les partis politiques que vous avez 20 minutes pour la présentation de votre mémoire; ensuite, le parti ministériel a 20 minutes et le parti de l'Opposition a également 20 minutes. Si vous prenez plus de temps, le temps que vous prendrez en plus sera soustrait également aux deux partis politiques. Si vous en prenez moins, ils pourront disposer de plus de temps pour poser des questions.

M. Gruenwald, le président, je présume qu'il est ici. Si vous voulez présenter l'équipe qui vous accompagne.

Auditions

Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec inc.

M. Gruenwald (Hans): M. le ministre, M. le Président, membres de la commission, je voudrais vous remercier de nous avoir donné l'occasion de venir commenter le projet de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement. Je crois que le ministre a choisi sa journée pour présenter le projet. Si vous regardez dehors, le ciel est clair, plein de soleil, et je ne me suis même pas coupé à me faire la barbe ce matin. Ça fait que je vous assure qu'il n'y a rien qui peut mal aller à partir de ce moment.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gruenwald: Pour ce faire, je voudrais vous présenter mes collaborateurs à la table: à mon extrême droite, Me John White, de la firme Grondin Poudrier et Bernier; à ma droite immédiate, Jean-Guy Laberge, directeur général de l'Association; à gauche, M. Roch Fortin, du cabinet de communication Cabana-Fortin; moi-même, Hans Gruenwald junior. Je suis président de l'Association, dans mon quatrième terme, ainsi que président des Entreprises Hans Gruenwald inc. qui oeuvrent dans le domaine des déchets solides et liquides dans le secteur Vaudreuil, Robert-Baldwin et l'Ouest de la province de Québec, ainsi que de la firme Service de rebuts Soulanges qui oeuvre principalement dans la maintenance et la vidange des fosses septiques pas mal à la grandeur de la province.

Pour vous présenter le projet ce matin, nous avons confié cette tâche à Jean-Guy Laberge, notre directeur général. Pour ne plus tarder, M. Laberge.

M. Laberge (Jean-Guy): Bonjour tout le monde. M. le Président, l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec est heureuse de porter à l'attention des membres de la commission de l'aménagement et des équipements les résultats de ses recherches et délibérations concernant le projet gouvernemental de création d'un office de protection de l'environnement. Les changements nombreux et complexes intervenus dans la gestion des affaires environnementales depuis la création du ministère québécois de l'Environnement et la nécessité de définir une vision globale en ces matières

pressent l'ensemble de la collectivité du Québec à revoir, à juste titre, les fondements législatifs et les mécanismes administratifs de la politique environnementale.

La conscience aiguë de la population en regard de la protection de l'environnement et des dangers dramatiques de dérapage obligent chacun des intervenants et le gouvernement en premier lieu à prendre conscience de l'état réel de la situation et à favoriser structurellement la protection et la réhabilitation du milieu environnemental. La capacité moderne de nos sociétés à exploiter globalement le réservoir des richesses mondiales et planétaires appelle dorénavant un effort soutenu et coopératif afin de protéger la fragilité de l'équilibre écologique et de garantir, pour nous et les interminables générations à venir, le milieu vital des populations et la satisfaction raisonnable de leurs besoins économiques.

Ces différentes notions, hier théoriques, occupent aujourd'hui le vécu quotidien de tous les individus sans exception. L'avis de danger émis récemment par le ministre fédéral de l'Environnement, concernant la couche d'ozone et nous obligeant dorénavant à une vigilance de tous les instants pour la protection même de notre santé et de celle de nos enfants, a irrémédiablement sonné l'état d'alerte générale. La population, les gouvernements et les influen-ceurs-intervenants de tous les secteurs doivent maintenant rationaliser leur façon de voir et entreprendre l'immense chantier du développement durable.

Dans cette perspective, l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec et sa centaine de membres sont d'avis que la proposition législative de création d'un office de protection de l'environnement arrive à point et qu'elle favorisera une responsabilisation accrue en regard de la protection de l'environnement.

Notre Association, fondée en 1959, qui regroupe les intervenants majeurs dans le domaine de la gestion intégrée des déchets, de la récupération, du recyclage et de la valorisation, est heureuse de s'associer aux délibérations de la commission concernant le projet de loi et réaffirme son engagement à promouvoir la protection du public et à coopérer pleinement avec toutes les instances vouées à l'impérieuse nécessité de la protection environnementale, telles que les MRC, les régies intermunicipales et le BAPE.

L'AESEQ s'est penchée sérieusement sur l'étude du projet de loi gouvernemental et elle est d'avis que l'actuelle structure de gestion environnementale ne correspond plus aux besoins engendrés par la croissance des interventions et la complexité des politiques environnementales. Selon nous, la distinction nette des mandats devant être proposés au ministère et à l'Office devrait permettre au gouvernement d'articuler une vision du développement durable qui soit incarnée dans le contexte du Québec moderne et qui fasse appel à l'expérience tangible du secteur privé. À notre avis, le caractère considérable du défi environnemental est tel qu'il requiert un engagement ferme de toutes les instances et qu'il nous oblige à mettre à contribution l'expertise des intervenants.

À la lecture du projet de loi, l'AESEQ ressent toutefois des incertitudes quant à la volonté du législateur de traduire fermement son intention de distinguer nettement les mandats. À cet égard, le projet de loi devrait être revu de façon à y consigner clairement cet énoncé fondamental de principe.

Dans ce contexte général, l'AESEQ présume de la volonté de l'État d'associer les opérateurs économiques au grand projet d'assainissement environnemental et du développement durable. Cette approche, basée sur la collaboration plutôt que la répression, tout en sanctionnant sévèrement l'inobservation de la loi, devrait permettre de prendre en compte le bilan critique de la situation environnementale actuelle et la vélocité des changements d'attitude dans la population et chez les opérateurs. Le gros bon sens oblige chacun de nous à considérer la réalité et, l'ordre des choses étant ce qu'il est, les objectifs d'assainissement devront tenir compte de la capacité générale réelle à générer du succès. En ce sens, la coopération est essentielle et nous espérons que cette approche aura pour but de donner un essor réel aux efforts de prévention et de réduire comme tel le rôle jusqu'à présent trop répressif du gouvernement et du ministère de l'Environnement, cette attitude étant attribua-ble, par ailleurs, aux retards que connaît le Québec et son gouvernement dans la définition de sa vision d'avenir en matière environnementale.

Nous croyons que le temps est venu de travailler ensemble et notre obligation à tous est de créer un état permanent de protection et de préservation de l'environnement et d'éviter ainsi les illusions et les misères qui sont le lot de ceux qui refusent de regarder sereinement vers l'avenir. Selon nous, la création de l'OPEQ et la responsabilité renouvelée du gouvernement favorisent cet état de nécessaire coopération.

L'AESEQ est d'avis que l'OPEQ sera un instrument qui assurera, à travers le temps et dans les régions administratives du Québec, une meilleure cohérence des décisions. L'OPEQ entraînera, de plus, du moins faut-il l'espérer, une plus grande objectivité au niveau de la gestion des contrôles et de la surveillance. En termes de gestion concrète pour les entrepreneurs, les aspects les plus positifs de la création d'un tel office se retrouveront au double niveau de la clarté des règles du jeu et de l'amélioration des délais de décision.

La création de l'Office de protection de l'environnement permettra au ministère et au

gouvernement de se consacrer à la définition de la vision globale de l'environnement et à l'élaboration des lois et règlements nécessaires à la mise en oeuvre de ladite vision. L'Office aura pour mandat d'appliquer les lois et les règlements et visera sûrement a déconcentrer les services de contrôle et de surveillance, tout en garantissant, à travers le territoire, l'uniformité des règles générales de conduite, ainsi qu'à améliorer la collaboration des intervenants en regard du défi que pose la gestion équitable des mesures environnementales. (10 h 30)

Quoique, à première vue, l'établissement d'un tel office semble d'abord une procédure d'ordre administratif, la compréhension intégrale des fondements du projet montre clairement que c'est la manière en soi de faire les choses en ce domaine qui changera. Le projet d'Office vise l'adaptation au contexte moderne et aux complexités nouvelles de ce secteur. Dans cet ordre d'idées, à moins que l'un et l'autre, le gouvernement et l'Office, n'assurent profondément leur vocation nouvelle, l'exercice que nous faisons aujourd'hui risque de ne porter que sur un simple partage des ressources humaines et n'entraînerait en cela aucune amélioration qualitative des prestations requises pour la gestion de l'environnement. L'analyse que nous faisons du projet prend sa véritable signification dans ce contexte et ne vaut que pour l'engagement du législateur à aller de l'avant dans la modernisation de l'approche globale.

Tout en étant fondamentalement en accord avec la volonté du législateur de créer un office de protection de l'environnement, l'AESEQ note toutefois que le projet de loi, tel que libellé, comporte des lacunes pouvant compromettre le succès de la réforme, et je m'explique.

Le projet propose un office formé de neuf membres nommés par le gouvernement, dont le sous-ministre de l'Environnement. Trois vice-présidents nommés par le gouvernement auront pour mandat d'assister le président sans avoir, selon notre compréhension du projet, un statut de membre. Nous suggérons à la commission de laisser à l'Office la responsabilité de désignation des vice-présidents. Ce changement accroîtrait la responsabilité des membres de l'Office et assurerait une liaison plus forte d'autorité entre l'Office et ses principaux officiers; au cas contraire, l'Office risquerait de n'être qu'un simple conseil d'administration avalisant les orientations déposées par ses cadres supérieurs.

Afin d'éviter certaines difficultés que pose le choix des représentants de secteurs au sein de l'Office, nous recommandons également qu'un profil de compétence soit établi à cet égard et qu'une connaissance approfondie de la pratique environnementale soit requise comme condition de désignation, c'est-à-dire des gens du milieu de notre industrie.

L'obligation d'adoption d'un règlement de régie interne par l'Office devrait aussi contenir l'obligation de circonscrire dans ce document les orientations générales de l'Office en matière de développement de sa culture de travail, laquelle aura une importance capitale pour l'exécution équitable des tâches de l'Office. Nous sommes d'avis que l'adoption d'une telle approche permettrait au personnel de l'Office de mieux saisir les fondements de la mission de celle-ci tout en facilitant la transition idéologique des ressources du ministère vers l'Office, une synergie très grande devant prendre place entre le ministère et l'Office dans l'accomplissement de leurs mandats. C'est aussi par l'adoption d'une telle politique de culture de travail que le personnel de l'Office sera conscientisé et sensibilisé à l'importance de la collaboration devant exister entre l'Office et les opérateurs économiques du secteur privé. L'élaboration d'une culture de travail au sein de l'Office entraînera aussi une plus grande souplesse au niveau de la disponibilité des personnels, lesquels devront garantir un service 24 heures par jour, 7 jours par semaine et 365 jours par année.

L'article 21 du projet et portant sur le pouvoir d'ordonnance permet au gouvernement, lorsque l'intérêt public l'exige, d'exercer le pouvoir d'ordonnance en lieu et place du président. Cet article, tel que libellé, risque d'anéantir la volonté première du législateur à l'effet de distinguer nettement les mandats du ministère et du gouvernement de ceux de l'Office. Cet article doit être reformulé et contenir plus de précisions quant à la notion d'intérêt public, quoique le gouvernement puisse toujours, pour les secteurs d'activité non réglementés, rendre de telles ordonnances. À défaut de préciser son pouvoir d'ordonnance, le gouvernement et le ministre de l'Environnement continueront d'être harcelés par l'opinion, les groupes environnementaux et les entrepreneurs en regard de la plupart des décisions d'ordonnance. Le libellé du texte de loi devrait prévoir une réglementation décrivant les types de projets devant requérir des études approfondies et c'est dans le créneau de ceux-ci que le pouvoir d'ordonnance du gouvernement ou du ministre pourrait prévaloir. À l'exemple de plusieurs législations à l'extérieur du Québec, l'autorité du gouvernement en matière d'ordonnance pourrait contenir une fonction discrétionnaire s'appliquant dans le cas où l'étude des projets contiendrait une mise en garde relative à des effets importants incertains.

Quoique le projet de loi ne traite pas spécifiquement du financement de l'OPEQ, des versions antérieures suggéraient que l'Office soit financé par le moyen des amendes et frais d'autorisation recueillis par celui-ci. À notre avis, cette solution va directement à rencontre de l'esprit de la loi en ce qu'elle confinerait l'Office à une obligation relative d'autofinancement et qu'elle susciterait chez les agents de l'Office une attitude trop orientée vers le

sanctionnement et la collecte de fonds. bien que l'aeseq reconnaisse et appuie le principe de pollueur-payeur, nous considérons que cette notion n'a en soi rien à voir avec la gestion bureaucratique de l'office; nous souhaitons que l'office soit fondamentalement dévoué à l'application des lois et règlements et à la pratique courante de l'action environnementale sur le terrain. si l'on devait ajouter aux fonctions de l'office une obligation d'autofinancement, celle-ci nuirait à son mandat général de facilitateur de saines pratiques environnementales et inhiberait la coopération souhaitée entre l'office et les opérateurs économiques.

En conclusion, M. le ministre et M. le Président, l'Association des entrepreneurs de services en environnement déclare officiellement être en accord avec le projet gouvernemental de création d'un office. L'Association, qui a consulté ses membres et participé à plusieurs sessions d'échanges avec les secteurs des affaires, de l'industrie et de l'environnement en général à ce sujet, est d'avis que la complexité du dossier environnemental requiert une modernisation systématique de l'approche traditionnelle. Notre Association considère qu'à l'instar de nombreux pays et gouvernements, le Québec doit lui aussi reconnaître les changements profonds qui marquent la gestion de l'environnement et se doter à cet égard d'un fonctionnement structurel qui tienne compte de l'ampleur du défi et du nombre considérable d'intervenants.

Dans beaucoup de pays et ici même au Canada et au Québec, les grands ministères se sont dotés, au cours des ans, d'institutions qui départagent le mandat législatif du mandat d'exécution. C'est le cas notamment avec la Régie des marchés agricoles du Québec, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, la Commission des transports du Québec et, aux États-Unis, l'EPA. Les dossiers environnementaux occupent dorénavant une place primordiale dans les affaires publiques; il n'est que normal de voir notre gouvernement proposer une approche qui corresponde à la croissance des services requis et à la nécessité impérieuse d'offrir à chacune des institutions, que ce soit l'Office ou le ministère de l'Environnement, des conditions optimales de fonctionnement.

L'opinion de notre Association va en ce sens et nous appuyons, en conséquence, l'effort actuel en vue de la modernisation de nos institutions environnementales.

Nous réitérons également notre volonté ferme de contribuer aux solutions environnementales et nous offrons pleinement notre coopération afin de doter le Québec d'une vision globale en matière d'environnement et de développement durable.

Nous soulignons à nouveau, en terminant, l'importance capitale de la collaboration des secteurs public et privé en ce domaine et nous sollicitons à l'avance les autorités et le personnel du prochain Office de protection de l'environnement de prendre en compte l'expertise du secteur privé dans notre industrie et de mieux garantir ainsi le caractère fondamentalement réaliste de la politique environnementale.

M. le Président, nous vous remercions de votre bonne attention et nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Vous me permettrez, dans un premier temps, quelques observations. Je remercie votre Association d'avoir pris le temps de nous présenter un mémoire qui est fouillé. Je note également votre appel à la collaboration qui est nécessaire en matière environnementale. Je pense que, si nous voulons obtenir des succès, il faut que tout le monde mette la main à la pâte, y compris le critique de l'Opposition officielle, en formulant des recommandations constructives lorsque le temps le lui permettra.

En ce qui concerne les critiques que vous adressez au projet, je tiens à faire quelques remarques. À la page 6: La composition de l'Office, désignation des vice-présidents, je pense qu'il y aurait une bonification qui pourrait, sans rejoindre complètement votre suggestion, marier le rôle de commis public à celui de partie intégrée à un conseil d'administration. Dans ce sens-là, nous prenons bonne note de votre recommandation.

En ce qui concerne la composition de l'Office, désignation des représentants, nous l'avons laissée la plus ouverte possible pour le moment, tout en identifiant des secteurs d'activité quand même assez larges. Là-dessus, pour le moment, nous avons l'impression que, si nous y allons de façon trop pointue, le conseil d'administration, les pressions vont se faire très importantes pour qu'il devienne très large. C'est par mesure de prudence et suite à l'expérience de la création de certains organismes que j'ai voulu que ce soit laissé, pour le moment, aussi large que ça l'est.

En ce qui concerne le règlement de régie interne, la culture du travail, là, vous avez raison, mais là on s'attaque à ce qu'on appelle, dans la société québécoise, la culture du travail. Vous le faites dans chacune de vos entreprises. Je tiens quand même à souligner que vos exigences, vous placez la barre haute: 24 heures par jour, 7 jours par semaine, 365 jours et vous n'avez pas osé ajouter le quart par année. Je tiens quand même à souligner qu'il y a un service au ministère de l'Environnement, il faut le souligner, qui est offert 24 heures par jour, 7 jours par semaine, le service Urgence environnement. J'ai eu à vérifier son efficacité. Je dois vous dire que ce département possède une culture du travail qui mérite d'être soulignée en

commission parlementaire. Il faudrait que ça devienne contagieux au sein de la création d'un nouvel office. Ce département relevant de la juridiction de l'Office, on ose espérer que la contagion ira en ce sens.

Pouvoir d'ordonnance. Je prends bonne note de votre recommandation. Il y a deux endroits dans la loi où le gouvernement conserve un pouvoir d'intervention. Est-ce que deux, c'est trop? Est-ce qu'un serait suffisant? Vous posez une question qui m'incite à la réflexion.

Le financement de l'Office. Je vous suis dans votre raisonnement lorsque vous parlez d'un office qui serait trop orienté vers la perception de fonds, surtout lorsque vous parlez d'un office qui s'autofinancerait à partir de l'aspect pénal de la réglementation, les amendes, etc. Il y a quelque chose là de pernicieux, je suis d'accord avec vous là-dessus, à ce qu'un organisme gouvernemental se finance en prenant en délit des gens avec qui il doit collaborer s'il veut réussir dans son mandat. Je pense qu'en toute circonstance, personnellement, j'éliminerais cet aspect-là du financement; je ne le considérerais pas.

Hier, nous avons annoncé, comme l'a souligné avec tellement d'amabilité le député de La Prairie, un nouveau programme en matière de réduction de la pollution industrielle. Ce nouveau programme va générer des fonds qui sont d'une certaine importance, d'une importance relative au cours des prochaines années et qui vont retourner au fonds consolidé du gouvernement, alors que le ministère de l'Environnement est un ministère qui est jeune, tout le monde l'a souligné, qui est en croissance et qui a besoin d'une croissance comme telle. Dans le contexte budgétaire actuel gouvernemental, il faut faire preuve de débrouillardise. Sans tomber dans l'aspect pernicieux de récolter des amendes pour financer un organisme gouvernemental, que les droits ou que les activités qui polluent servent à dépolluer, vous ne pensez pas qu'il s'agit là d'une orientation - je vous adresse la question - qui mérite d'être retenue, en vous soulignant que M. Le Hir, qui a été cité tantôt par M. Lazure, le directeur général de l'Association des manufacturiers canadiens, mentionnait, ce matin, que ce n'était peut-être pas une mauvaise approche d'asseoir ça sur un principe de pollueur-payeur? Je vous adresse la question.

M. White (John): M. le ministre, je pense qu'il faut relativiser ça. C'est sûr que le principe de pollueur-payeur doit entrer en ligne de compte pour le financement de ce genre de choses là. Mais l'importance qu'on doit y apporter, cependant, doit être limitée; ça ne devrait pas être la seule source de financement de l'Office et même, à la limite, du ministère. Je pense que ce qui est important, c'est que tout le monde se rende compte que l'environnement, la protection de la qualité de l'environnement, sa préservation, c'est un défi de société. C'est sûr que ceux qui polluent doivent probablement être appelés à payer plus, mais tous doivent être appelés à payer parce que tous, sans nécessairement s'en rendre compte, risquent de polluer. Quand vous jetez des déchets et que vous ne vous occupez pas qu'ils soient bien jetés, excusez-moi, mais vous polluez. Tous, en tant que personne, en tant qu'individu, on peut être amenés à polluer, sans nécessairement le vouloir. Alors, tous, on doit être appelés, je pense, à mettre l'épaule à la roue pour essayer de trouver des solutions financièrement. Alors, oui, le pollueur-payeur doit entrer en ligne de compte; c'est sûr que ceux qui polluent plus devraient payer plus, en principe, mais, malgré tout, toute la société en général doit être appelée à financer, par le fonds consolidé du revenu, si je puis dire, cette démarche qui est essentielle. Alors, c'est dans ce sens-là. (10 h 45)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense qu'il est exclu de penser que le financement du ministère comme tel proviendrait d'une tarification, quel que soit... Je pense que ça demeure parce que tous polluent; comme vous l'indiquez, nous polluons tous dans la société, donc ça vient du fonds consolidé du revenu à partir des impôts et des taxes que nous payons. En ce qui concerne l'Office comme tel, et ça, ce n'est pas prévu au projet de loi actuellement, c'est prévu d'être financé par le fonds consolidé. Je fais juste explorer avec vous, tenter d'obtenir... Parce que vous semblez vous opposer à une participation financière. En limitant à une tarification de certains actes administratifs, quand vous utilisez un service de l'État à partir d'un organisme, on le voit... Je vais utiliser un exemple qui est cher au président de la commission, la commission de protection du zonage agricole. Vous avez une tarification pour faire affaire avec l'Office, vous payez ce que ça coûte finalement. Au niveau d'une autre source de financement, les redevances pollueurs-payeurs, si vous émettez - ce qu'on a annoncé hier - tant de tonnes de contaminants dans les eaux ou dans l'environnement atmosphérique, vous payez, en moyenne pondérée, 2 $ la tonne, etc. Et là où je vous rejoins, c'est qu'il n'est pas question de mettre les amendes là-dedans parce que, là, ça développe un système qui peut devenir pernicieux. Les amendes doivent retourner au fonds consolidé du gouvernement pour ne pas encourager ce type d'approche. Mais est-ce que vous vous objectez à la tarification comme telle et aux redevances comme telles comme sources de financement?

M. White: Non, M. le ministre. Là-dessus, la réponse, c'est qu'on dit qu'on ne s'objecte pas à ça. Il ne faudrait pas cependant, il faut bien comprendre, que ce soient vraiment les seules sources de financement. On est d'accord avec le principe de pollueur-payeur, on est d'accord qu'il

y ait une certaine tarification, mais il ne faudrait pas que le financement se limite à ça. Comme vous le dites, les amendes pénales, par expérience même personnelle, lorsqu'elles ne sont pas versées au fonds consolidé du revenu, ça a effectivement des effets pernicieux. C'est important de le souligner, je pense.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-être une dernière question. A ïa page 3 de votre mémoire, vous traitez d'un sujet qui est important. Au troisième paragraphe, vous dites: «À la lecture du projet de loi, l'AESEQ ressent toutefois des incertitudes quant à la volonté du législateur de traduire fermement son intention de distinguer nettement les mandats; à cet égard, le projet de loi devait être revu de façon à y consigner clairement cet énoncé fondamental de principe.» Je pense que c'est un énoncé fondamental, ça fait partie de l'objectif gouvernemental en déposant le projet de loi. On me dit - et, là-dessus, je me repose sur mes conseillers légaux - que c'est solide comme départage sur le plan légal, ce qui se trouve là-dedans, à moins que j'aie une critique de mon bon ami, le député de La Prairie, quant à cet aspect. On a préparé des tableaux, à l'interne, qui nous indiquent que l'on distingue clairement. Moi, je suis prêt à les remettre à votre Association; si vous ne trouvez pas ça suffisamment clair, vous pouvez nous revenir en disant... Parce que je suis d'accord avec vous, c'est essentiel que ce soit clairement distingué, que les attributions soient clairement identifiées, de façon à éviter ce que l'on connaît aujourd'hui, un méli-mélange entre le bureau régional et la centrale du ministère, et c'est l'un des objectifs visés par la loi.

M. Fortin (Roch): Dans les faits, le commentaire que l'on a mis dans le mémoire se base sur la lecture factuelle du projet de loi que vous avez déposé. Lorsqu'on fait la lecture du projet de loi, il nous semble que cette volonté de distinction n'est pas aussi nette que chacun semble le laisser entendre. En ce sens-là, on a simplement fait l'observation et on souhaite que ce soit peut-être dans une reformulation de libellé un peu plus claire, particulièrement lorsqu'on se réfère aux interprétations que l'on peut faire des pouvoirs d'ordonnance qui seraient à nouveau délégués au gouvernement ou au ministre et qui permettent de revenir, d'une certaine manière, aux états antérieurs que l'on connaissait et qui ont créé la confusion dont nous sommes tous plus ou moins victimes aujourd'hui et en regard desquels on vise des améliorations qui doivent être adaptées à court terme. Alors, c'est dans un contexte d'observation que l'on tente d'obtenir une clarification de cet ordre-là. À votre suggestion, on souhaiterait obtenir les documents et les tableaux qui ont été confectionnés par vos collègues et votre minis- tère pour qu'on puisse avoir une compréhension plus directe et, éventuellement, le cas échéant, vous soumettre un commentaire de formulation de libellé beaucoup plus précise en regard de notre réflexion.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): D'ailleurs, la façon appropriée, si j'ai ta permission des membres de la commission, je déposerais lesdits tableaux pour que tout le monde possède cette information et puisse réagir.

M. Lazure: II y a consentement, M. le Président.

M. Fortin: Merci.

M. White: Si vous me permettez, là-dessus, M. le ministre, peut-être un exemple - sans faire de légalisme parce que ce n'est pas mon intention - à l'article 18...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. White: ...du projet de loi, plus particulièrement au paragraphe 2°, on dit, entre autres, que «l'Office met en place des mesures visant la protection de l'environnement» et on donne un exempte, «notamment un service d'urgence environnementale». Je n'ai rien, évidemment rien contre le service d'urgence environnementale, sauf que j'en ai peut-être un peu à «met en place des mesures visant la protection de l'environnement». Je pense que vous conviendrez avec moi que c'est très large et que ça peut peut-être créer une certaine confusion à un moment donné ou à un autre. Lorsqu'on pense à mesures, on pense à actions en tant que telles, mais peut-être que quelqu'un qui aura à l'interpréter plus tard verra ça dans un cadre beaucoup plus général et passera de l'application à peut-être la théorie, chose que je pense qu'H faut éviter. C'est dans ce sens-là aussi, c'est un exemple qu'on peut vous donner à partir du projet de loi. Je comprends qu'il faut donner des pouvoirs en termes généraux, mais, je pense qu'on l'a souligné, il va falloir qu'il y ait une synergie entre les deux et il faut quand même définir clairement les rôles à ce niveau-là, en tout cas le plus possible. C'est dans cet esprit-là, M. le ministre.

Le Président (M. Garon): Alors, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Combien de temps?

Le Président (M. Garon): C'est 20 minutes chacun.

M. Lazure: Oui. Je veux, au nom de l'Opposition aussi, remercier les porte-parole de

l'Association des entrepreneurs de services en environnenent du Québec de se présenter devant nous et de nous faire part de leurs observations. Inutile de dire que je ne les partage pas toutes, mais elles sont quand même intéressantes. Celle que je partage, par exemple, c'est à la page 4 de votre mémoire, quand vous dites que vous espérez que cet Office va réduire le rôle trop répressif du ministère, et je cite: «...cette attitude étant attribuabie par ailleurs aux retards que connaît le Québec et son gouvernement dans la définition de sa vision d'avenir en matière environnementale.» La vision d'avenir, vous avez pratiquement utilisé les mêmes termes que j'ai utilisés tantôt dans mes remarques. Je ne vois pas en quoi la création d'un organisme, d'une structure nouvelle va venir ajouter cette vision d'avenir en matière gouvernementale dont vous déplorez l'absence dans ce gouvernement-ci et avec raison.

De la même façon, au paragraphe suivant, vous parlez aussi de la clarté des règles du jeu et de l'amélioration des délais de décision. Encore là, moi, je vous pose la question directement: En quoi, à supposer qu'il n'y aurait pas de nouvel argent avec la création de cet Office-là et à supposer qu'il s'agisse des mêmes personnes, parce que le ministre nous l'a dit tantôt, il va prendre un peu plus de 50 % de ses fonctionnaires, il va les transférer à l'Office et ils vont avoir les mêmes règles, contrairement à ce qu'il avait espéré... Il avait espéré deux choses, le ministre, dans son projet initial. Il avait espéré se constituer une grosse cagnotte là. Ça, c'est fini là. Deuxièmement, il avait espéré que ses employés à l'Office ne seraient pas assujettis aux règles de la fonction publique. Il a perdu là-dessus aussi; oui, oui, il a perdu là-dessus aussi. Tout le monde a vu le mémoire que vous aviez préparé. Mais à supposer... J'ai la parole, M. le Président...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je m'excuse, M. le Président, le député de La Prairie...

Le Président (M. Garon): On revient chacun son tour.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais vous avez une erreur de fait que je...

Le Président (M. Garon): Non, non. On va reprendre chacun son tour. Il vous reste du temps d'ailleurs.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va.

M. Lazure: M. le Président, je pose la question aux représentants de l'Association. À supposer qu'il n'y ait pas d'argent nouveau et qu'il s'agisse des mêmes fonctionnaires, en quoi, tout à coup, par la création d'une structure nouvelle, vous allez avoir beaucoup plus de vision, avec le même ministre aussi à supposer, en quoi vous allez avoir plus de clarté dans les décisions, vous allez avoir moins de délais? En quoi?

M. Fortin: Si vous me permettez, je vais apporter une réponse qui relève des délibérations qu'on a tenues entre nous. D'abord, je ne personnaliserai pas le débat en disant qu'il relève d'un ministre X ou d'un ministre Y. Je pense que nous sommes en face d'une problématique qui concerne l'intérêt de l'ensemble de la population du Québec avec des conséquences sur les parties de territoires qui sont à l'extérieur de la province et qui touchent les grands territoires nord-américains entre autres. Ce à quoi nous faisons face actuellement, c'est à un contexte global qui demande une réflexion très approfondie sur ce qui se passe et sur la vision que l'on devrait adopter. Quand nous parlons de distinguer nettement entre les fonctions d'un ministère ou d'un ministre et les fonctions d'un office qui aurait un mandat très précis, ça va permettre justement de dégager des énergies créatrices du côté ministériel et législatif et du côté des fonctionnaires pour réfléchir à la vision globale qui doit être incarnée, qui doit être articulée.

D'autre part, les fonctionnaires sur le terrain, dorénavant employés d'un office avec une mission très concrète de collaboration et de coopération avec le milieu. Quand on parle du milieu, on parle des entrepreneurs, des gens qui ont une expertise concrète de la gestion environnementale, on parie des gens qui définissent également des objectifs environnementaux en termes de protection de l'environnement, en termes de défense et de protection environnementales. On croit qu'une régionalisation axée dans ce contexte de coopération très étroite et dans une espèce de principe de vases communicants des deux communautés, ministérielle et de l'Office ou de l'espèce de régie, va améliorer la réflexion et nous doter d'une vision. Dans ce sens-là, je pense que les commentaires que formulait le ministre Paradis, au début, en vue d'améliorer l'efficacité et l'équité de mesures en distinguant nettement les mandats, nous croyons fondamentalement que cela peut se faire.

Ceci étant dit cependant, il est sûr que nous sommes face à une réforme structurelle, à une réforme administrative. À moins que la volonté politique de collaboration de la part des deux côtés de la Chambre et de la part de l'ensemble des personnels du ministère n'existe réellement, l'impact pourrait être moindre et, en quel cas, on aura simplement perdu un peu de notre temps et retardé les bénéfices que l'on peut accorder à notre collectivité. Mais, dans la mesure où chacun est prêt à faire sa part et à reconnaître le bilan critique de la situation environnementale, je crois que la complexité des mesures et de la situation nous commande

d'adopter des propositions nouvelles qui vont permettre à chacun d'exercer, au meilleur de ses capacités et de son rendement, les fonctions qui devraient être dévolues par la loi et les règlements.

M. Lazure: Bon. Si je comprends bien, vous dites que, si les fonctionnaires qui vont rester au ministère - un peu moins de 50 % - sont dégagés de toutes les fonctions maintenant dévolues à l'Office, ces fonctionnaires-là au ministère auront plus de temps pour développer une vision. Peut-être que c'est vrai, mais, encore une fois, la vision globale d'un ministère doit venir principalement du ministre titulaire et de son gouvernement. Moi, je ne crois pas qu'il manque de vision chez les fonctionnaires du ministère de l'Environnement, mais je pense que, bien souvent, les fonctionnaires se sentent frustrés et n'ont pas l'occasion de bien réaliser ces visions.

Je reviens aux nouveaux services. Quelqu'un a parlé tantôt de nouveaux services. À quels nouveaux services - toujours compte tenu qu'il n'y aurait pas de nouveaux budgets et que ce seraient les mêmes fonctionnaires - pouvez-vous vous attendre de cet Office-là?

M. Fortirt: Très simplement, je ne veux pas faire encore le débat des personnalités entre un fonctionnaire, un bureaucrate et un travailleur d'agence ou d'office. Mais, même s'il n'y a pas de nouvel argent, il y a une nouvelle mission, il y a un nouveau mandat, il y a une remodernisation de ce que chacun de nous doit accomplir. En ce sens-là, ça compense pour des réductions budgétaires que l'on doit subir ou que l'on devra rencontrer à court terme. Moi, je demeure convaincu - et les collègues de l'Association l'ont énoncé à plusieurs reprises dans nos réunions antérieures - que, si les mandats sont très bien compris, si les objectifs de politiques d'entreprise d'un nouvel office sont très bien compris par les personnels, on aura des résultats beaucoup plus tangibles; la communication entre le terrain et l'orientation gouvernementale ou législative sera de beaucoup clarifiée. Le gouvernement pourra s'attarder à ce qui se passe un peu plus au niveau continental, au niveau des collaborations plus élargies et, à ce moment-là, se doter d'une grande vision. À ce moment-là, chacun des partenaires contribuera à la définition de la vision.

C'est dans ce sens-là que la pratique environnementale est essentiellement un exercice démocratique qui permet à chacun de contribuer à la définition des objectifs. Lorsque le gouvernement assume son autorité, il adopte des règlements et des législations auxquels chacun est tenu et souhaite en général contribuer. C'est dans ce contexte qu'on formule notre accord de principe avec l'orientation définie dans le projet gouvernemental.

M. Lazure: Oui. Vous admettrez avec moi que ce que vous appelez la modernisation, elle pourrait se faire même dans la structure actuelle, non? La modernisation de vision, de pensée, d'action, pourquoi ne pourrait-elle pas se faire dans la structure actuelle?

M. Fortin: Elle pourrait, à notre avis, difficilement se faire dans la structure actuelle puisque l'expérience des 10 dernières années montre qu'elle ne s'est pas faite. Je crois que c'est un argument suffisant pour songer à une nouvelle formule.

M. Lazure: Mais...

M. Fortin: En disant cela, on ne nie pas la qualité d'intervention des agents politiques ou des agents fonctionnaires du ministère qui, chacun, assument leurs responsabilités. C'est la perspective d'intervention qui demande à être modifiée pour avoir un rapprochement avec les intervenants sur le terrain, les intervenants du secteur privé ou les intervenants du secteur de la promotion environnementale comme telle par les groupes, les associations et ceux qui doivent appliquer les règlements, d'une part, et ceux qui doivent définir les politiques et les règlements, d'autre part. En ce sens-là, on croit que la chose est devenue tellement complexe qu'à l'exemple de ce qui se passe dans beaucoup de pays, dans beaucoup de provinces, on peut être appelé à définir les mandats entre un ministère et une régie au niveau de son application, comme on le voit dans beaucoup de pays et dans beaucoup de ministères. (11 heures)

M. Lazure: Mais, de façon brève, c'est quoi, les principales critiques que vos gens ont vis-à-vis du ministère actuellement?

M. Fortin: En général, c'est la question... On ne veut pas formuler ici... D'abord, je tiens à vous le préciser, malgré le fait que vous posiez la question, nous ne sommes pas ici pour faire la critique du ministère, nous sommes ici pour faire des critiques d'observation constructtves sur la proposition de créer un office de protection de l'environnement. Donc, on ne voudrait pas entrer dans le débat parlementaire qui vous revient beaucoup plus qu'à nous en ce qui est de l'autre argumentation. Ceci étant dit, ce qui est observé sur le terrain, en particulier par les entrepreneurs, c'est la difficulté à gérer les délais de sanctionnement ou d'obtention d'autorisation de manière productive, aux fins de gestion économique et de gestion efficace de nos services. En ce sens-là, on croit qu'en ayant un Office on va obtenir des résultats beaucoup plus concrets puisque les fonctionnaires ou les agents de l'Office pourront avoir une compréhension intégrale de ce devoir-là. Et ça, c'est une amélioration très nette et fondamentale pour nous.

M. Lazure: M. le Président, j'admire l'optimisme de monsieur et sa confiance, mais je lui rappelle encore une fois qu'il s'agit des mêmes fonctionnaires qui vont être déménagés, qu'il ne s'agit pas de nouvel argent. Je lui rappelle aussi que, même s'il ne veut pas formuler de critiques, l'Association des manufacturiers en formule. Tout le monde en formule, des critiques, et, essentiellement, c'est deux ou trois catégories de critiques: des retards considérables dans les décisions, l'incohérence des décisions, le manque de coordination entre différents services du ministère, manque de coordination, d'harmonie entre le central et les régions. Ce sont des critiques que vous pouvez mettre sur la table allègrement. Même le ministre va l'accepter, va l'admettre. Ça ne lui fera pas de peine. Mais en quoi, encore une fois, la création de cet Office va accélérer les retards, les délais? En quoi ça va améliorer la coordination?

M. Fortin: Pour faire une synthèse, entre autres, l'Office entraîne la création d'un conseil d'administration pour sa gestion. Le conseil d'administration est formé non pas de fonctionnaires ou de représentants du ministère dans son ensemble, mais est formé de personnes qui origi-nent des différents milieux représentatifs des secteurs économiques, environnementaux, et ainsi de suite. À ce moment-là, ça permet une meilleure adéquation, une meilleure convergence entre les politiques et entre l'application concrète des politiques et des règlements. Ça, c'est un très, très grand changement qui permet, à mon avis, une plus grande démocratisation du processus et qui permet à l'activité gouvernementale de se rapprocher de la pratique réelle. Fondamentalement, la question environnementale, c'est une question qui est essentiellement concrète et qui dépend de la capacité de chacun à gérer la politique environnementale en ce qui le touche collectivement ou individuellement. Si le conseil d'administration représente l'ensemble des secteurs desservant ces besoins-là, bien, il y a déjà une modernisation qui est recevable et qui est souhaitable.

M. Lazure: M. le Président, moi, je vais juste quand même exprimer une espèce de mise en garde que créer une nouvelle structure n'est pas nécessairement synonyme d'une modernisation. Je pense que c'est un peu court comme adéquation: nouvelle structure égale modernisation. Les comparaisons que vous faites vers la fin de votre mémoire, la Commission des transports du Québec et l'Agence de protection de l'environnement aux États-Unis, d'abord, là, c'est un peu un mélange de divers organismes. La Commission des transports du Québec, d'abord, il n'y a même pas 200 employés dans ça. Ça n'a pas le mandat considérable que le nouvel Office aurait. Ce n'est pas du tout comparable. L'Agence de protection de l'environnement aux États-

Unis, il y a de plus en plus de gens qui remettent en question cette agence-là précisément parce qu'ils se rendent compte que les élus se sont dissociés du fonctionnement de l'Agence de protection. Même s'il y a un secrétaire d'État, un ministre qui en répond au Capitole, il reste que c'est une agence qui est devenue trop autonome et les élus n'assument plus leurs responsabilités devant le grand public. Chez nous, au Québec, on a de ces sociétés-là - pour ne pas la nommer, Hydro-Québec - qui fonctionnent pratiquement parfois comme un gouvernement parallèle, mais qui sont... Même s'ils ont un ministre titulaire, ces agences, ces offices, il y a le danger que ça échappe, que leur fonctionnement échappe au leadership politique et à la responsabilité politique.

M. Fortin:... pourrait nous faire dire que tous les dangers nous guettent, peu importe ce que nous faisons. Cependant, nous tentons de rationaliser les problématiques et de trouver des solutions qui peuvent avoir des adaptations très concrètes en vue d'améliorer les problèmes que nous rencontrons. C'est en ce sens-là globalement. On soumet des observations de bonification et des commentaires généraux sur le fondement du projet et de la problématique que vous nous avez soumise.

M. Lazure: Je prends un commentaire, à la page 6. Vous faites une suggestion concernant la composition de l'Office. Est-ce que je vous comprends bien que vous avez l'air de dire qu'il faudrait que ces personnes aient une connaissance approfondie de la pratique environnementale, qu'elles soient pratiquement des professionnels de l'environnement? C'est ça que vous voulez dire?

M. Fortin: Non, on ne va pas jusqu'à ce point-là parce qu'un Office ne doit pas être uniquement fait de représentation professionnelle. On désire que les gens qui seront invités à siéger à l'Office et à assumer ces importantes responsabilités puissent avoir un profil de compétence qui manifeste leur connaissance du milieu technique, du milieu technologique, du milieu des politiques, des règlements ou de la pratique environnementale en général. Je pense qu'à la fin on va arriver avec une mixité qui va nous donner une convergence de compétence qui va être très importante pour la gestion même de l'Office. On ne vise pas qu'à avoir uniquement, strictement des ingénieurs professionnels. Nous voulons surtout des gens qui ont une pratique concrète du terrain à certains égards et d'autres qui ont une compétence complémentaire à d'autres égards pour avoir une commission, une régie ou un office qui soit très représentatif de la compétence du milieu dans le secteur environnemental.

M. Lazure: Juste une dernière question.

Dans la composition de ce conseil d'administration de l'Office, vous avez des représentants du milieu des affaires, du milieu syndical, des groupés environnementaux. Est-ce que vous ne pensez pas - parce qu'il y en a qui pensent ça - qu'il peut y avoir des tensions considérables entre les intérêts de chacun de ces trois groupes de pression, disons, et le mandat général de bien administrer les fonds publics puis une mission publique qui est la protection de l'environnement?

M. Fortin: C'est une très bonne question que vous formulez là. C'est la raison pour laquelle on observait et on recommandait qu'il y ait un profil de compétence d'établi pour les gens qui seraient appelés à siéger, de façon à éviter ces conflits d'intérêts qui seraient raisonnables dans bien d'autres circonstances. Si on choisit les gens en fonction de leur compétence tout en sachant qu'ils représentent des secteurs définis des intervenants, je crois que ça nous permet d'éviter cette crainte.

M. Lazure: Ils défendront leur secteur particulier avec plus de compétence.

M. Fortin: Oui. Pardon?

M. Lazure: Ils défendront leur secteur particulier avec plus de compétence.

M. Fortin: Bien, là, je crois qu'il faut faire confiance en général à l'exercice démocratique de contribution de chacun de nous et de chacun des citoyens aux organismes d'État ou même à leurs propres organisations privées, sinon...

M. Lazure: Mais est-ce que je comprends que vous êtes d'accord avec la structure qui est suggérée quant au conseil d'administration?

M. Fortin: Oui, nous sommes d'accord, sauf qu'on s'interrogeait sur le nombre de sous-ministres ou de représentants du ministère au niveau des trois vice-présidents. Il y avait une certaine - non pas inquiétude - confusion au niveau de la compréhension. On voulait qu'au niveau de la nomination comme telle des membres il y ait des gens avec une compétence très étroite de l'industrie, entre autres, en ce qui touche la représentation de l'industrie, et, pour ce qui touche la représentation des autres secteurs, qu'on ait aussi une connaissance concrète de la pratique environnementale pour assurer d'éviter de faire des débats purement idéologiques et en arriver à travailler concrètement selon les mandats qui devraient être dévolus.

M. Lazure: Une dernière remarque, M. le Président. Tantôt, j'affirmais que, dans son plan initial, le ministre voulait constituer une grosse cagnotte et voulait que les employés de l'Office ne soient pas assujettis à la Loi sur la fonction publique. J'ai devant moi un mémoire du 7 novembre 1991, au Conseil des ministres, de Pierre Paradis, ministre de l'Environnement, et qui dit, à la page 4, tout à fait au dernier paragraphe: Enfin, les employés de l'Office ne seront pas assujettis à la Loi sur la fonction publique, mais l'Office pourra disposer d'une période transitoire d'une année pour lui permettre de recruter ses effectifs à partir de la fonction publique. Je peux continuer: Le statut actuel des fonctionnaires sera...

Une voix:...

M. Lazure: Oui, mais ça ne change rien à l'affirmation. Je peux lire tout le mémoire - il est très intéressant - pour démontrer les échecs du ministre: Le statut actuel des fonctionnaires sera protégé par le maintien de leurs droits et avantages, y compris un droit de retour permanent au sein de la fonction publique. Mais ça. ça n'a rien à voir avec le fait que tout nouvel employé ne serait pas asssujetti à la Loi sur la fonction publique.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est plus complet comme ça.

M. Lazure: Oui, mais vous êtes d'accord.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je suis d'accord que c'est plus complet maintenant que ça ne l'était lorsque vous avez posé la question.

M. Lazure: vous êtes d'accord que votre objectif était que ces gens-là, dorénavant, ne soient pas assujettis à la loi sur la fonction publique.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'objectif tel que présenté, pour que ce soit clair, c'est que les fonctionnaires qui sont actuellement en poste conservent tous leurs privilèges, statut, etc.

M. Lazure: Oui, bien sûr.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II s'agit d'acquis sur le plan des relations du travail. Maintenant, comme dans les autres organismes gouvernementaux qui ont une certaine indépendance, le statut est différent pour les nouveaux employés.

M. Maltais: Voyez-vous, M. le Président, je pense que c'est à moi.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay. Avez-vous fini?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je veux m'excuser auprès de mon collègue.

M. Maltais: Oui, vous avez fini, docteur.

M. Lazure: Oui. Je veux simplement remercier encore une fois...

M. Maltais: Ça fait trois fois que vous dites que vous avez fini, docteur.

M. Lazure: Ce n'est pas à moi de le dire, c'est au président.

M. Maltais: M. le Président, allez-y donc! Le Président (M. Garon): Avez-vous fini? Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): II lui reste deux ou trois minutes. Il ne reste pas grand temps.

M. Lazure: il me restait deux minutes. Je remercie les représentants de l'Association.

M. Maltais: Voilà, docteur!

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Je vous adore, docteur, quand vous dites ça.

Le Président (M. Garon): Ne commencez pas ça!

M. Maltais: D'abord, dans un premier temps, j'aimerais vous féliciter pour votre rapport. Vous l'avez présenté sur du papier recyclé. Il y en a beaucoup qui n'ont pas eu cette gentillesse. On parle d'environnement. Vous l'avez présenté, ici, sur du papier recyclé. Je vous félicite, c'est bien.

Je suis surpris que le docteur, savant député de La Prairie, n'ait pas dénoncé, finalement, il y a quelques jours - et je reviens au principe du pollueur-payeur - une usine qui a fermé à Trois-Rivières, il y a quelques semaines, parce qu'elle était désuète. On parle de la Wayagamack, vieille, désuète, en lambeaux, polluante à l'extrême. Je me souviens, lorsque le ministre avait annoncé ses directives, ils avaient été les premiers à sortir dans la rue disant que lès directives allaient faire fermer. Si ce ne sont pas les directives qui les avaient fait fermer, ça aurait été la Sûreté du Québec tellement ils étaient polluants. Quand j'ai lu dans les journaux, cette semaine... Et ça m'a surpris de vous, docteur, vous n'avez pas dénoncé votre chef qui veut rouvrir cette usine sans y apporter les modifications nécessaires. Venant de vous, j'ai pensé que vous étiez sorti en vacances. Je vous donne le temps de dénoncer votre chef au cours de la semaine parce que ça n'a aucune espèce de maudit bon sens. On s'entend là-dessus.

Le principe du pollueur-payeur - vous êtes des entreprises - vous le voyez comment, vous autres? Tout à l'heure, le monsieur, au bout, a dit... Je ne me souviens pas de votre nom parce que vous avez oublié de vous nommer pour vous enregistrer. Quand vous parlez, il faut vous nommer pour les fins du Journal des débats et, nous autres, ça nous fait une référence.

M. White: C'est John White, mon nom, M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Ça méfait plaisir, M. White.

M. White: Écoutez, comment on voit le principe du pollueur-payeur? Je pense qu'une personne qui pollue se doit de donner une contribution à la restauration du milieu qu'elle a pu polluer. Cette contribution va s'établir de quelle façon? Évidemment, c'est extrêmement complexe. C'est un débat très complexe, mais c'est un peu le sens que je vous disais tout à l'heure; nous sommes tous un peu des pollueurs.

M. Maltais: Bien oui.

M. White: Tous, nous faisons de la pollution d'une certaine façon ou d'une autre, donc, tous, nous devons être appelés également à payer si l'on suit ce principe-là. Or, il est sûr que ceux qui font plus de pollution que d'autres, les industries importantes... Même certains opérateurs en services en environnement, vous savez, les gens qui font de la gestion de déchets, parfois, peuvent polluer. Alors, ils peuvent être obligés de verser certains montants plus considérables que d'autres pour restaurer le milieu. Alors, c'est dans ce sens-là, je pense, qu'on doit le voir.

M. Maltais: Vous êtes dans le milieu des entreprises. Ce que vous dites là, c'est très bien, mais, le problème, c'est que lorsqu'une entreprise est prise les culottes à terre, il faut le dire, elle n'a plus le même langage que vous tenez là. Là, c'est les avocats, c'est tout le branle-bas. Ce n'est pas de sa faute. Finalement, c'est la faute du ministre si elle a pollué. Il y a un double langage. Le langage qu'on a ici, en commission parlementaire, que le docteur a sur les scènes publiques, c'est merveilleux, mais, quand tu arrives pour passer au «cash», ce n'est pas de même que ça marche dans la vraie vie de tout le monde, à tous les jours. Elles ne veulent pas payer. La Wayagamack, c'est un exemple. Elle aimait mieux fermer les portes. Elle a tellement respecté les gens de Trois-Rivières que, pendant 100 ans, elle les a pollués et, la journée qu'on leur dit: Vous allez arrêter de polluer, elle a fermé et elle a sacré le camp. Il y a juste le chef du Parti québécois qui veut rouvrir cette vieille mosus d'usine là sans la moderniser. Ça n'a pas de bon sens.

Pourquoi ces gens-là, aujourd'hui, ne passent-ils pas au «cash»? M. le ministre de l'Envi-

ronnement, ça fait 75 ans qu'on pollue à Trois-Rivières, voici un beau petit chèque de 500 000 000 $. Vous savez, on a mérité ça. On a tout pollué la région et le fleuve jusqu'à chez nous. Mais ce n'est pas ça qu'ils ont fait. Ils ont sacré le camp en B.C., dans le langage de tous les jours. Expliquez-moi donc ça, ce double langage là, vous, monsieur?

M. Gruenwald: C'est un peu un problème, sauf qu'il ne faut pas perdre de vue une réalité. Quand ces industries, ces entreprises s'implantent dans un secteur donné, elles rencontrent, à la date de leur implantation, les restrictions environnementales et les normes de la pratique environnementale avec lesquelles ces gens-là vivent. 25 ans plus tard, on se réveille et on trouve que, la pratique qui a été sanctionnée par les ministères, par tout le monde, par les professionnels, il y a 25 ans, aujourd'hui ça pollue. C'est très difficile, dans ma façon de penser, de pénaliser une entreprise privée qui, à un moment donné, quand elle a été implantée, a rencontré toutes les restrictions environnementales et tout l'art d'opérer d'une façon convenable. C'était acceptable quand on l'a laissée ouvrir. Je suis d'accord qu'aujourd'hui, avec les nouvelles normes, avec la technologie qu'on connaît, on découvre des nouveaux polluants tous les jours.

M. Maltais: Je suis d'accord avec vous sur ce que vous dites là. Sauf qu'en cours de route il y a des entreprises qui s'acclimatent, qui se modernisent. Les lois, c'est fait pour être changé, c'est fait par des humains. Les lois qui ont été appliquées, disons, en 1975 ou en 1970, mettons en 1976 par le gouvernement du bon docteur, aujourd'hui, en 1992, elles sont désuètes, vieilles, elles n'ont plus d'affaire à être là. Sauf qu'il y a des entreprises qui, en cours de route, se sont acclimatées, elles ont investi, elles ont modifié. Je vais vous en citer une en exemple: la compagnie Québec et Ontario Paper qui a investi, au cours des 15 dernières années, au-delà de 300 000 000 $ pour s'acclimater.

Le première «shot» que le ministre a faite, parce que c'est dans mon comté et que je suis son adjoint, la première amende qu'il a imposée, c'étaient à eux autres, mais les gars n'ont pas dit: Le gouvernement a tort, ils ont payé. Mais ils se sont modernisés; aujourd'hui, ils ne polluent plus ou ils polluent moins. Ils n'ont pas fini. Ça va coûter beaucoup plus d'argent que ça. Mais il y a des entreprises qui l'ont compris et elles ne tiennent pas de double langage. Elles ne viennent pas nous voir par en arrière pour demander au ministre: Demande donc à ton mosus de ministre de changer ses règlements, ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas vrai. Elles se sont modernisées. Il y en a d'autres qui tiennent un double langage. Malheureusement, elles ne sont pas ici aujourd'hui. Elles ne viennent pas quand on les convoque.

On a tenu des audiences pendant 10 semaines, à l'automne, on n'a pas vu une de ces pollueuses-là. C'est tout du monde qui sont bien pleins de bonnes idées, bien pleins de bonnes choses, sauf que, quand arrive le temps de passer au «cash», on ne les trouve plus. Bon. Ça, c'est un point.

Il y a un autre point que vous avez souligné et qui m'intéresse fort bien, à la page 4 de votre mémoire, lorsque vous dites que la future structure sera un instrument qui assurera à travers le temps et dans les réglons une meilleure cohérence des décisions. Je voudrais savoir: En région, comment va-t-il y avoir une meilleure cohérence au niveau des décisions, selon vous autres? Comment voyez-vous ça eh région? On parle toujours de Québec, Montréal, Sherbrooke, Chicoutimi, mais on ne parle jamais des autres petits villages de 25 000, 30 000; vous êtes les premiers à en parler parce que vous avez une certaine expertise là-dedans, j'imagine.

M. Gruenwald: Moi, il m'arrive de travailler avec certains secteurs du ministère où je détecte, à l'intérieur du ministère, un désaccord entre les gens présents. Il me semble qu'avec la création d'un nouvel office ces gens-là, à la place d'être un problème, pourraient devenir une partie de la solution. O.K.? Les gens, en bon langage québécois, chiquent la guenille tout le temps, ils ne sont jamais contents, c'est ci et c'est ça. On va les amener, on va dire: O.K., c'est ton tour au bat, mon homme, viens-t'en ici. À partir d'aujourd'hui, c'est toi, la solution; travaille dans cette direction-là.

M. Maltais: Si l'Office...

Le Président (M. Garon): Alors, le temps étant imparti de chaque côté étant écoulé...

M. Maltais: ...permettait juste ça, m. le président, je pense que le dr lazure devrait voter à tour de bras avec nous autres. au moins, il aura fait un geste extraordinaire.

Le Président (M. Garon): ...je remercie les représentants de l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec de leur présentation. Je suspens les travaux de la commission pendant quelques minutes, avant de recevoir les représentants de Laidlaw.

(Suspension de la séance à 11 h 20)

(Reprise à 11 h 28)

Le Président (M. Garon): La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Je vais demander au représentant de Laidlaw, M. Louis-Paul Nolet, président du

comité, de nous présenter les gens qui l'accompagnent. Comme je le mentionnais tout à l'heure, il y a une heure: 20 minutes pour votre exposé, 20 minutes pour la partie ministérielle, 20 minutes pour le porte-parole de l'Opposition. Ce que vous prendrez en plus leur sera soustrait, ce que vous prendrez en moins pourra leur être ajouté, s'ils veulent le prendre.

Laidlaw

M. Nolet (Louis-Paul): M. le Président, M mes et MM. membres de la commission, bonjour et merci d'avoir accepté que Laidlaw fasse entendre sa réaction au projet de loi 412. Je me présente: Louis-Paul Nolet, président du comité exécutif de Laidlaw Québec inc. Avec moi, à ma droite, M. Pierre Mercure, directeur des affaires réglementaires de Services environnementaux Laidlaw et, à ma gauche, M. Jocelyn Théberge, directeur régional de l'environnement de Service d'enlèvement de rebuts Laidlaw.

Nous sommes heureux de participer à cette commission parlementaire qui témoigne de l'importance que le ministre de l'Environnement accorde au processus démocratique pour trouver les meilleures voies à suivre dans l'exercice de son mandat. Laidlaw, qui a fait de l'environnement son principal champ d'activité, est certainement bien placée pour enrichir de son expérience cette consultation. C'est donc à titre de citoyen corporatif engagé que Laidlaw tient à exposer ses vues sur le projet de loi 412, des vues qui, de prime abord, sont plutôt favorables.

Laidlaw est une société canadienne et un partenaire québécois. Permettez-moi d'abord de dire ce qu'est Laidlaw, une société canadienne établie au Québec et dont le rayonnement est international. Laidlaw est engagée dans quatre grands secteurs d'activité: la gestion des déchets solides et les services de recyclage, la gestion des déchets industriels, la gestion des déchets biomédicaux et le transport de passagers, tout spécialement les écoliers. Créée en 1959, la société Laidlaw a émis ses premières actions en bourse, au Canada, en 1969. Depuis, elle a poursuivi son expansion dans toute l'Amérique du Nord où elle occupe le premier rang dans l'industrie du transport scolaire, le deuxième dans l'industrie de la gestion des déchets industriels et le troisième dans la gestion des déchets solides et les services de recyclage.

Laidlaw est une société innovatrice. Elle est à l'origine du populaire bac pour le recyclage des déchets domestiques. Le bac bleu, qu'elle a implanté en 1981, compte aujourd'hui 35 000 000 d'adeptes. Laidlaw est aussi à l'origine des journées de collecte de déchets domestiques dangereux, les journées DDD, qui sont de plus en plus répandues dans nos municipalités.

Après s'être implantée à travers le Canada et les États-Unis, Laidlaw a fait son entrée sur le marché de l'Europe en 1991.

Au Québec, Laidlaw est le chef de file dans les quatre secteurs de son activité: la gestion des déchets solides et les services de recyclage, la gestion des déchets industriels, la gestion des déchets biomédicaux et le transport des écoliers. Présentement, Laidlaw compte 1400 employés et 20 points de services au Québec. Outre les services de transport d'écoliers qu'elle fournit aux principales commissions scolaires et institutions privées, elle assure toute une gamme de services environnementaux à une clientèle résidentielle, commerciale, industrielle et institutionnelle.

Entre autres installations, Laidlaw exploite, à Gatineau, le seul incinérateur privé de déchets biomédicaux au Québec; à Mercier, le seul incinérateur de déchets industriels au Québec; à Lachute et à Magog, deux sites d'enfouissement, l'un de matériaux secs et l'autre de déchets solides. Laidlaw prévoit que son chiffre d'affaires, au Québec, atteindra 132 000 000 $ au cours du présent exercice financier. La société Canadien Pacifique et la Caisse de dépôt et placement du Québec sont les deux principaux actionnaires de Laidlaw. Le projet de loi 412 est un pas vers l'uniformisation.

Je reviens à l'objet de cette commission parlementaire et aux points sur lesquels Laidlaw croit utile de se prononcer. La création de l'Office de protection de l'environnement du Québec ne peut que nous réjouir si cette mesure resserre notre partenariat dans le domaine environnemental. Nous comprenons que le nouvel organisme aura la responsabilité de l'application des lois et règlements édictés par le ministère, dans un encadrement qui laissera peu de place à la disparité d'interprétations, un point qui, à la lumière de notre expérience, nous semble de toute première importance.

La concertation que souhaitent à la fois le ministre et la majorité des instances qui militent en faveur de l'environnement n'est réalisable que dans la mesure où les entreprises privées sont assujetties à une réglementation uniforme assortie d'exigences et d'échéanciers clairs qui en assurent l'application de façon rigoureuse et cohérente.

Le projet de loi 412 nous paraît être l'expression d'une volonté d'uniformiser la vision et les principes directeurs qui régissent les décisions du ministère tout en décentralisant la responsabilité de leur application par le biais d'une représentation régionale bien orchestrée.

Laidlaw, qui exploite, au Québec, 16 installations de services environnementaux, porte le plus grand respect aux lois et règlements qui s'imposent pour protéger l'environnement et sensibiliser le public à la fragilité de son équilibre. Toutefois, dans l'état actuel des choses, l'application des lois et règlements est souvent compliquée par l'ambiguïté de leur formulation. Nous croyons donc que la création de l'Office fournit au ministère de l'Environnement une

excellente occasion de réviser l'ensemble de la réglementation pour l'uniformiser et, surtout, uniformiser son application. C'est là un préalable que le ministre a sans doute prévu, mais sur lequel nous voulons insister. Selon nous, l'Office ne sera efficace que dans la mesure où il sera doté d'outils et de mécanismes efficaces et où son champ de compétence sera bien délimité. C'est donc dans un esprit de collaboration que Laidlaw tient à s'assurer que certains préalables, qui justifient la création de la nouvelle entité administrative, soient clairement définis.

Quelques mises au point. Tout d'abord, quelques mises au point relativement à la formulation de certains articles du projet de loi 412. À l'article 23, il est mentionné que «tant qu'une décision n'a pas été inscrite en révision ou en appel, l'Office ou une personne exerçant un pouvoir délégué [...] peut [...] reconsidérer cette décision». Puisque l'Office délègue ses pouvoirs décisionnels aux personnes qui le représentent, il nous paraît anormal que l'Office puisse reconsidérer une décision. Nous croyons donc que le mot «Office» devrait être retiré de l'article 23.

Nous voulons également signaler à votre attention que l'article 32, qui modifie l'article 99 de la Loi sur la qualité de l'environnement, n'établit pas clairement la permanence de la composition du comité de révision, un aspect pourtant inhérent à son efficacité. N'y aurait-il pas lieu d'assurer une permanence au comité de révision en établissant une liste restreinte de membres qui seraient appelés au besoin?

La permanence du comité de révision aurait des avantages marqués sur la continuité, l'efficacité et l'équité du processus en ce sens que le groupe profiterait des expériences et des aspects considérés dans les cas précédents, que les décisions prises n'en seraient que plus rapides, plus justes et plus éclairées. Sans imposer à l'Office une charge pécuniaire stable, puisque les membres seraient rétribués en fonction des services rendus, la permanence des membres du comité de révision serait garante de la cohésion des raisonnements et considérations qui président aux décisions et, évidemment, de la complémentarité de l'esprit et de l'application de la loi.

Voilà les suggestions que nous souhaitions faire relativement à la formulation de certains articles du projet de loi 412. Les quelques remarques qui suivent ne visent qu'à faire valoir l'importance de préalables qui sont peut-être dans l'esprit du projet de loi, mais qui ne sont pas précisés dans la lettre.

La révision des règlements. Nous comprenons que la création de l'Office de protection de l'environnement du Québec permettrait d'uniformiser les décisions relatives à l'émission des certificats d'autorisation et des permis, décisions qui sont trop souvent prises sous un angle régional et selon des critères qui peuvent varier d'une région à l'autre.

L'uniformisation, au sein de l'Office, de la perception et de l'interprétation des lois et règlements relatifs à l'environnement nous paraît une condition indissociable du mandat que le projet de loi 412 confère au nouvel organisme. Étant donné que la création de l'Office déleste le ministère de l'Environnement d'un bon nombre de charges quotidiennes pour lui permettre de renforcer son rôle de législateur, on peut sans doute espérer que le processus de révision déjà en cours soit accéléré et qu'il se termine plus rapidement. Muni d'outUs cohérents et appropriés, l'Office pourrait instaurer une procédure d'évaluation des dossiers qui réduirait les délais et clarifierait les exigences. En ce moment, par exemple, en matière de déchets solides, l'entreprise privée qui veut promouvoir des projets en environnement peut difficilement prévoir quels critères seront appliqués à un projet donné ou à quel délai il faudra se résigner pour que le projet soit approuvé.

En outre, les critères d'évaluation actuels portent davantage sur l'aménagement des installations que sur la qualité des résultats obtenus. Il serait donc souhaitable que la révision prévoie et définisse des critères d'évaluation des performances sécuritaires. En plus de renforcer les mesures de protection de l'environnement, ces outils permettraient à l'Office de réduire le temps et les ressources humaines nécessaires au processus d'évaluation. Un effort dans ce sens nous paraît essentiel. Pour que l'Office s'acquitte efficacement des fonctions que lui cède le ministère, nous croyons qu'il est impératif que ses cadres et tous ses représentants s'en remettent aux mêmes outils d'évaluation et que ces outils soient adaptés aux besoins. Compte tenu du fait que les représentants régionaux de l'Office seront les employés des actuelles directions régionales du MENVIQ, Laidlaw croit que cet effort réduirait les cas d'interprétation subjective et d'inégalité d'application d'une région à une autre.

Tarification. Finalement, toujours à la lumière de notre expérience, nous voulons vous faire part d'une suggestion relativement à la tarification des sites d'enfouissement. Laidlaw a toujours été en faveur de normes sécuritaires plus élevées, mais elle souhaite que la tarification suive les exigences des normes et reflète les coûts des services et des infrastructures. Actuellement, selon la Loi sur la qualité de l'environnement, la Commission municipale du Québec a le pouvoir de fixer les tarifs des sites d'enfouissement. Or, si l'émission des certificats et des permis doit être régie par l'Office, ne faudrait-il pas prévoir un mécanisme de fixation des tarifs par l'Office, d'autant plus que les tarifs actuellement décrétés par la Commission municipale sont fixes, ce qui empêche une saine concurrence entre les divers sites? Il faudrait peut-être repenser le principe même de la tarification.

Nous savons tous que les infrastructures nécessaires à la sécurité du public exigent de la part des exploitants des sites d'enfouissement des investissements considérables. La liberté de concurrencer à l'intérieur de prix maxima fixés par la loi de même que l'assurance d'un volume d'affaires qui justifie ces investissements nous semblent aller de pair avec les exigences de normes toujours plus rigoureuses.

Juridictions parallèles. Il me semble qu'il me reste à profiter de cette commission parlementaire, où il est question de la répartition des rôles, pour soulever un dernier point, celui des différentes juridictions.

En ce moment, dans la région de Montréal, où plus du tiers de la population du Québec est concentré, il se prépare deux autres sessions d'audiences publiques: d'une part, la ville de Montréal s'apprête à entreprendre la deuxième tranche des audiences publiques sur la gestion intégrée des déchets et matières recyclables pour les 20 prochaines années; d'autre part, la Régie intermunicipale de gestion des déchets, sur l'île de Montréal, s'apprête à réclamer des pouvoirs additionnels et à présenter son projet d'incinérateur dans l'est de Montréal devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Laidlaw se demande quel sera le rôle de l'Office dans le contexte de ces différentes juridictions? La question me semble ouverte.

En conclusion, Laidlaw est un chef de file au Québec dans les trois secteurs majeurs environnementaux. Au Québec, comme partout ailleurs, Laidlaw a toujours tenté d'aller au-delà des strictes exigences imposées par la loi. C'est dire que son entière collaboration est déjà acquise aux autorités gouvernementales pour que soient mises en vigueur et respectées au Québec toutes mesures qui visent à prévenir la détérioration de l'environnement actuel tout autant que de l'environnement de demain.

Laidlaw voit d'un bon oeil le projet de loi 412 parce que, dans l'ensemble, cette initiative du ministre de l'Environnement peut favoriser le développement durable au Québec si elle s'appuie sur une solide réglementation.

Consciente que le nouvel organisme gouvernemental devient son interlocuteur sur une base quotidienne, Laidlaw ne peut que souhaiter une étroite collaboration dans la mise en oeuvre de lois, règlements, mécanismes visant à assurer la protection de l'environnement.

Tout en assurant son entière collaboration à l'Office qui sera responsable de l'application de la loi, Laidlaw souhaite que son dialogue avec le M ENVI Q se poursuive en ce qui a trait aux importants mandats que se garde le ministère, notamment la recherche et le développement technologique, deux activités importantes dans l'amélioration de la qualité de l'environnement.

Laidlaw souhaite évidemment que ses relations avec le ministère soient non seulement maintenues, mais qu'elles deviennent de plus en plus étroites. En proposant au gouvernement de mettre son expertise à profit, Laidlaw souhaite renforcer son rôle de partenaire du développement durable du Québec.

Mes collègues et moi sommes disposés à répondre à vos questions et à vous fournir des exemples qui pourraient éclairer mes propos. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans un premier temps, vous me permettrez de remercier Laidlaw qui est un intervenant majeur sur le terrain, de façon concrète, de façon quotidienne, dans la gestion des déchets de toutes sortes, en oubliant pour aujourd'hui la question du transport scolaire qui nous préoccupera à l'occasion d'une autre commission parlementaire. (11 h 45)

Dans un premier temps, vous parlez de l'initiative du ministre de l'Environnement de déposer le projet de loi 412. J'aime bien prendre les mérites quand ça me revient, mais j'aime bien les partager également lorsqu'il faut les partager: peut-être que le député de La Prairie pourrait en prendre bonne note. Oui, c'est une initiative du ministre de l'Environnement, mais en collaboration très étroite avec les hauts fonctionnaires du ministère de l'Environnement comme tel. Ce n'est pas quelque chose qui a été concocté par le politique contre l'administratif ou par l'administratif contre le politique. Ces gens-là ont une expérience d'une dizaine d'années au ministère de l'Environnement et ils se sont rendus compte qu'avec les structures actuelles on ne pouvait pas répondre de façon satisfaisante aux exigences des diverses clientèles du ministère, la population en général et, oui, des entreprises du type de Laidlaw. Donc, c'est une idée qui est commune, et de la machine administrative et du ministre de l'Environnement comme tel.

Vous décriez, à raison, la qualité de deux réglementations importantes, celle sur les déchets dangereux et celle sur les déchets domestiques. Je vous donne raison de décrier ces deux réglementations. En ce qui concerne les déchets dangereux, suite à la commission Charbonneau, entre autres, dont nous nous sommes inspirés, nous avons fait adopter par l'Assemblée nationale une nouvelle loi qui va couvrir davantage que les déchets, l'ensemble des matières dangereuses. Nous entendons réglementer le secteur avec une nouvelle approche. Nous souhaitons qu'elle soit supérieure à l'ancienne approche, qu'elle soit plus moderne, plus concrète et plus pratique. De toute façon, elle va tenir compte de l'évolution des technologies récentes.

En ce qui concerne les déchets domestiques, encore là, vous avez raison de le souligner, nous avons apporté une modification mineure - importante quand même pour le monde municipal - qui est entrée en vigueur au début de la dernière

année et qui permet au gestionnaire d'un site d'enfouissement de pouvoir refuser des déchets qui proviennent de l'extérieur de sa MRC, etc. Il s'agit simplement d'une modification qui est mineure, mais la refonte complète du règlement est attendue et souhaitée autant par la population que par l'industrie, et nous corhptons déposer une nouvelle réglementation au cours de la présente année du calendrier en ce qui concerne les déchets domestiques.

Vous m'indiquez - et, là-dessus, j'aurais peut-être besoin de vos lumières pratiques - vos inquiétudes quant à la tarification comme telle des déchets domestiques. Au ministère de l'Environnement, on part de la philosophie suivante: la tarification n'est jamais suffisamment élevée parce que plus le tarif d'enfouissement est élevé, plus vous provoquez de la pression sur les marchés pour recycler, jusqu'à réduire à la source, finalement, l'enfouissement étant la dernière étape, la moins souhaitable. On sait que, présentement, le mécanisme implique la Commission municipale du Québec. Moi, je n'ai pas d'idée arrêtée, mais à la veille de repondre une réglementation sur l'ensemble des déchets domestiques, j'aimerais vous entendre sur votre expérience et sur vos suggestions quant à la tarification.

M. Nolet: Très bien, M. le ministre. Je vais demander à mon collègue, Jocelyn Théberge, de répondre à cette question.

M. Théberge (Jocelyn): M. le Président, dans le contexte actuel, pour la tarification des sites d'enfouissement, la Commission municipale a le pouvoir de fixer des tarifs. Malheureusement, la Commission municipale ne considère pas toujours des normes de protection sécuritaires à l'intérieur des sites d'enfouissement. C'est une commission qui - permettez-moi l'expression -est peut-être parfois biaisée vers le monde municipal. Je vais illustrer ça au moyen d'un exemple. Nous avons actuellement...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous apprendrai que j'ai occupé les fonctions de ministre des Affaires municipales. Ce sont des remarques qui m'apparaissent difficiles.

M. Théberge: Oui. Laissez-moi aller jusqu'à l'exemple. Récemment, dans le cas du site d'enfouissement qu'on a à Magog, par exemple, on est allé devant la Commission municipale et on a demandé de faire reconnaître des coûts pour le captage des biogaz. Les biogaz qui viennent de la décomposition des déchets sont quand même des produits, un effluent toxique. Compte tenu d'une absence de normes dans la réglementation actuelle, la Commission municipale nous a donc refusé des sommes d'argent qui visaient le captage des biogaz. Nous, ce qu'on mentionne dans notre mémoire, c'est que, si la réglementation s'en va vers des pratiques de plus en plus sévères, s'il y a actuellement un mécanisme de révision à l'intérieur du ministère, si cet Office-là applique ces nouvelles normes, on se demande quel rôle la Commission pourra jouer, si elle acceptera les nouvelles règles du jeu telles que soumises par le ministère.

M. Nolet: Peut-être que je pourrais ajouter, M. le ministre. Évidemment, quand on suit les règlements et les critères que votre ministère nous demande pour les sites d'enfouissement, il faut investir des millions de dollars pour protéger le sol avec les membranes, les cellules, tout ça. Vous comprendrez que ces coûts-là, on doit les récupérer dans les années à venir, sur les coûts et sur la tarification.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous nous avez adressé une remarque quant à la complexité d'intervention dans la grande région de Montréal, là où on retrouve une quantité importante de déchets domestiques, entre autres. La Régie intermunicipale des déchets a procédé à un regroupement important de plusieurs municipalités. Comme vous le savez, sur le territoire de l'île de Montréal, deux municipalités ne font pas partie de cette Régie. Il s'agit de la ville de Montréal et de la ville de Montréal-Nord.

Présentement, au ministère de l'Environnement, on favorise un regroupement de l'ensemble des municipalités. Ça nous apparaîtrait plus simple sur le plan de la gestion intégrée comme telle, mais, par respect pour l'autonomie municipale, nous souhaitons que ça se fasse par des ententes librement négociées entre la Régie et les municipalités impliquées. Mais, de façon pratique, si l'Office avait à exercer une juridiction, l'Office conserverait ses juridictions ou les juridictions du ministère quant à l'émission de certificats pour un site d'enfouissement, de certificats d'autorisation ou d'exploitation pour un incinérateur, etc.

Le bureau d'audiences publiques en matière environnementale... si vous construisez un incinérateur, vous devez passer par le BAPE comme tel. Au niveau de ce que Montréal fait présentement, il s'agit simplement de l'énoncé d'une politique qu'ils soumettent à leur propre bureau d'évaluation environnementale, ce qui crée - vous avez raison de le souligner - présentement beaucoup de confusion chez les gens qui ne suivent pas au jour le jour l'évolution de ce dossier. Je sais que le ministre des Affaires municipales, aujourd'hui, a une rencontre avec les gens de la Régie, entre autres, pour voir de quelle façon on pourrait simplifier cette approche dans ce milieu qui est important et qui a accompli, il faut le souligner, des progrès importants au cours des dernières années. La collecte sélective, à partir des municipalités de l'ouest de l'île de Montréal, etc., a accompli des progrès majeurs au cours des dernières années.

Une question sur un aspect que vous avez volontairement ou involontairement négligé dans votre mémoire: le financement de l'Office de protection, le financement du ministère. Vous avez eu l'occasion, je crois, d'entendre les questions qui ont été adressées au groupe qui vous a précédé. Ça va dans le même sens. Vous ne parlez pas, dans votre mémoire, du financement. Est-ce que ce qui est proposé présentement, un financement totalement gouvernemental, vous apparaît approprié? Est-ce que vous seriez d'accord avec un financement partagé, c'est-à-dire tarification pour les permis, redevances pour les tonnes de pollution émises dans l'atmosphère, dans l'eau ou dans le sol? Mais j'exclus tout le temps la question des amendes qui doivent continuer à retourner au fonds consolidé de façon à conserver une neutralité.

M. Nolet: En effet, on ne s'est pas prononcé sur le sujet parce qu'on s'en est tenu au bill 412, et ça ne touche pas la question du financement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je serai très bref. Je vous indique que nous prenons bonne note de vos remarques quant à l'article 23 du projet de loi qui stipule que «tant qu'une décision n'a pas été inscrite en révision ou en appel, l'Office ou une personne...» Retirer le mot «Office», ça nous apparaît une suggestion qui vise à bonifier l'actuel projet de loi. Ça va pour le moment. Dr. Lazure?

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux saluer les gens de Laidlaw et les remercier de se présenter devant cette commission pour nous faire part de leurs commentaires. J'ai juste une question. Dans l'historique que vous avez fait de votre entreprise, vous avez parlé de l'incinérateur - une question qui est un peu hors du projet de loi, mais je reviendrai tout de suite après au projet de loi - de déchets biomédicaux. La question que je vous pose: En pourcentage, qu'est-ce que vous traitez venant du Québec et venant hors du Québec, y compris les États-Unis? Est-ce que c'est... À peu près?

M. Nolet: Très bonne question. Je vous dirais, en provenance des États-Unis, 20 %.

M. Lazure: Puis de l'Ontario et hors Québec?

M. Nolet: C'est à peu près 60 % de l'Ontario.

M. Lazure: 60 % plus 20 %, 80%. Comment se fait-il que seulement 20 % de ce que vous traitez à Gatineau vient du Québec?

M. Nolet: C'est parce que, actuellement, les hôpitaux ont des incinérateurs et la grande quantité... L'hôpital Notre-Dame, à Montréal, reçoit beaucoup de déchets, le Montreal General...

M. Lazure: Oui, oui, l'hôpital Notre-Dame, mais il n'y en a pas beaucoup d'hôpitaux qui ont des incinérateurs...

M. Nolet: Oui, il y en a pas mal.

M. Lazure: ...qui fonctionnent et qui sont approuvés par le ministère.

M. Nolet: Prenez même une ville comme Rouyn-Noranda, on me dit qu'ils utilisent leur incinérateur.

M. Lazure: En tout cas, bref, 80 % de ce que vous traitez vient de l'extérieur du Québec?

M. Nolet: C'est ça.

M. Mercure (Pierre): Excusez, M. Lazure, on peut peut-être mentionner quelque chose. C'est que l'incinérateur de Gatineau est situé près de la frontière ontarienne. Donc, c'est normal qu'on reçoive quand même une quantité de déchets de l'Ontario.

M. Lazure: Je ne veux pas aller sur le fond, je veux avoir des chiffres précis. Merci. Sur le projet de loi... Mais, avant, M. le Président, je me permets de... Le ministre, tantôt, vous a dit: J'accepte vos félicitations, mais je veux associer mes fonctionnaires aux félicitations. Il laissait entendre ainsi que les fonctionnaires étaient d'accord avec son projet de loi. Je veux vous faire remarquer, M. le Président, qu'il y a le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec - qui est quand même un syndicat important - qui, dans son mémoire - n° 14 - recommande: premièrement, le retrait du projet de loi 412; deuxièmement, la mise en oeuvre d'une réforme administrative du MENVIQ créant un sous-ministériat chargé de l'application des lois et des règlements et, troisièmement, que tous revenus issus des redevances, permis, certificats et amendes soient réservés a la protection de l'environnement. Bref, le ministre a omis de dire que le Syndicat des professionnels - il y en a beaucoup de professionnels dans son ministère - était opposé au projet de loi. Il a omis de dire aussi que...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je n'ai jamais prétendu qu'il y avait unanimité.

M. Lazure: J'ai la parole, M. le Président. Il a omis de dire que l'Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec y était aussi opposée. Il y en a beaucoup d'in-

génieurs dans son ministère. Je cite le mémoire des ingénieurs: «II semble que la création de l'Office veuille davantage répondre à des préoccupations politiques immédiates plutôt que de satisfaire à de réels besoins environnementaux. L'OPEQ, l'Office, n'apporte rien de nouveau. Il risque de faciliter l'ingérence politique et de se discréditer lui-même. Il va, en outre, contre le processus d'unification et de régionalisation entrepris par le ministère, actuellement, et c'est finalement un autre projet de restructuration qui contribuerait à créer confusion et démotivation.» C'est important, ça. C'est des gens qui travaillent avec le ministre, les ingénieurs et les professionnels.

Moi, je prétends, M. le Président, que les gens de l'extérieur, y compris Laidlaw, qui viennent se prononcer en faveur du projet de loi, ont le droit de savoir ces choses-là. Je reviens à ma première question aux représentants de Laidlaw. Compte tenu qu'il n'y aurait pas d'argent nouveau, compte tenu qu'il n'y aurait pas de ressources humaines additionnelles, qu'est-ce que vous voyez de si avantageux dans cette création d'un office?

M. Nolet: Regardez, M. Lazure, je vais permettre à mes deux collègues, à gauche et à droite, qui travaillent sur une base quotidienne avec le ministère, d'exprimer leur opinion. C'est important de voir l'autre côté de la médaille et de voir les gens qui travaillent quotidiennement avec ces gens-là.

M. Mercure: On peut peut-être mentionner tout de suite que, nous, le point qui nous semble important dans la création de l'Office de protection de l'environnement, c'est qu'à l'heure actuelle, dans les faits, selon nous, il existe déjà cette duplicité entre les régions et le ministère de l'Environnement. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a quelques années le ministère de l'Environnement a effectué une décentralisation de ses opérations et, par conséquent, maintenant, ce sont les régions qui sont responsables au jour le jour d'appliquer la réglementation. Le problème qu'on voit, nous, dans la structure actuelle, c'est que les décisions des régions ne sont pas appelâmes. Autrement dit, vous avez une décision d'un fonctionnaire en région et vous êtes, entre guillemets, le client. Vous n'avez aucune façon de manifester au gouvernement que vous n'êtes pas d'accord avec la décision, sinon par des coups de téléphone ou autres.

Nous, ce qu'on pense, c'est que l'Office permettra un appel des décisions des régions et un meilleur équilibre entre le mandat actuel qu'elles ont et celui que le gouvernement a, que le ministère de l'Environnement a. Ça nous semble fondamental ça. Il existe donc cette duplicité-là dans les faits et on pense que ça va simplement faire en soi que ce qui existe déjà soit bonifié.

M. Théberge: Oui, un commentaire. Au niveau, par exemple, de l'émission des certificats d'autorisation. Actuellement, ce sont les régions qui reçoivent les projets et qui ont la responsabilité d'émettre les certificats d'autorisation. Or, dans les faits, un dossier qui est présenté a une direction régionale va évidemment être analysé aussi par un autre groupe qui se situe quelque part dans une direction à l'administration centrale à Québec. Comme mentionnait Pierre, ça amène une duplicité. On assiste souvent, nous, a des batailles d'experts à l'intérieur du ministère, à savoir que des gens des régions et des gens de l'administration centrale s'opposent ou, encore, nous donnent, je dirais, des avis qui sont parfois dissonants, ce qui est un peu embarrassant et ce qui, de toute façon, amène inévitablement des délais importants dans la réponse qu'on peut avoir à nos demandes.

M. Lazure: M. le Président. M. Nolet: Excusez, M. Lazure.

M. Lazure: Oui. (12 heures)

M. Nolet: Je veux juste ajouter qu'au niveau financier c'est aussi un problème. Quand nous soumettons des projets comme des agrandissements de sites d'enfouissement, où on doit investir des millions de dollars pour satisfaire les exigence gouvernementales, vous vous imaginez que des délais de six, huit mois et d'un an augmentent considérablement ces frais-là.

M. Lazure: D'accord. Je prends note des remarques de vos collègues qui disent: Actuelle ment, il y a un dédoublement. Il y a des choses qui nous sont dites en région et qui ne sont pas nécessairement celles qui sont dites à l'administration centrale, à Québec. C'est ça que vous voulez dire? Bon! C'est un problème réel, mais en quoi la création de l'Office va changer ça? Il ne faut pas s'imaginer que l'Office va avoir du personnel seulement dans les régions et que ce personnel-là va être autonome. L'Office va avoir du personnel à Québec, j'imagine, sûrement. Il va y avoir des patrons à Québec. Comment une nouvelle structure, qui s'appelle Office, va vous donner la garantie qu'il n'y aura plus de dédoublement?

M. Mercure: Enfin, vous avez dit, tantôt, qu'il y a effectivement un dédoublement entre l'administration centrale et les régions. Il existe aussi des différences majeures entre les décisions, bien souvent, ou les interprétations que les régions vont donner aux règlements en matière d'environnement. Par exemple, dans le domaine des déchets dangereux, si vous demandez un conseil à une région pour une activité quelconque, on va vous dire que ça prend tel type de permis. Si vous demandez la même chose

dans une autre région, on va vous dire: Non, non, ça ne prend pas de permis. Dans une troisième région, on va vous dire que ça prend une étude d'impact. L'Office va permettre d'uniformiser, en quelque sorte, l'interprétation que les régions vont avoir de la réglementation.

M. Lazure: Convenez-vous que ça pourrait être fait, même dans la structure actuelle, l'uniformisation?

M. Mercure: Sans doute, mais ce n'est pas fait. Alors, nous, ce qu'on dit, c'est que l'Office va...

M. Lazure: Mais, justement là!

M. Mercure: ...sans doute permettre d'arriver à cet objectif-là.

M. Lazure: Justement, M. le Président, c'est ça le danger de tomber dans le panneau. Parce que ça n'est pas fait à cause d'un manque de volonté politique, on va mettre sur place une nouvelle structure et on pense que ça va se faire. Je pense que c'est se créer beaucoup, beaucoup d'illusions.

J'en viens à une autre question, M. le Président, sur la nomination des membres du conseil d'administration. Vous n'en parlez pas de façon détaillée, mais est-ce que vous êtes d'accord avec la façon de créer le conseil d'administration?

M. Nolet: Je voulais, M. Lazure, continuer sur la réponse de mon collègue au sujet de la plus grande efficacité et uniformité que l'on voit dans l'Office. Moi, je pense qu'un élément important, c'est justement le conseil d'administration qui, lui, va chapeauter toutes ces activités-là et qui va être formé de gens en provenance de différents milieux, de gens en provenance de l'extérieur du ministère, soit des hommes d'affaires, des gens du monde syndical. Moi, je pense que le fait de donner un mandat clair et précis, qu'il y ait un conseil d'administration autonome, formé en partie par des hommes d'affaires, va assurer un plus grand dynamisme et une plus grande autonomie de décision que si c'est mêlé, comme on le voit actuellement, à l'intérieur du ministère. Moi, je fonde beaucoup d'espoir sur ce conseil d'administration là.

M. Lazure: Le projet ne donne pas exactement la procédure de nomination, sauf de dire que c'est le gouvernement qui va les nommer. Ça, c'est une formule qui est souvent utilisée.

Une voix:...

M. Lazure: Oui, oui, on donne l'origine, mais les mécanismes de la nomination, est-ce que vous, vous avez des idées là-dessus, vous avez des suggestions?

M. Nolet: Écoutez, je suivrais les mécanismes qui sont en vigueur présentement; s'ils fonctionnent bien dans d'autres secteurs, je présume qu'ils vont aussi bien fonctionner pour l'Office.

M. Lazure: Revenons... Vous avez soulevé le problème de Montréal, l'espèce de confusion sur Itle de Montréal. Le ministre vous a répondu: Oui, mon collègue des Affaires municipales s'en occupe. Il est tard, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire. C'est vrai que, depuis déjà deux ou trois ans, on sait que la Régie intermunicipale a de gros projets, que la ville de Montréal n'était pas incluse dans ces projets-là. Moi, je pense qu'en plus des bons offices du ministre des Affaires municipales on souhaiterait, nous, dans l'Opposition en tout cas, que le ministre de l'Environnement s'en occupe plus activement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai rencontré...

M. Lazure: Oui, il rencontre, il rencontre. Mais on ne sent pas, là comme ailleurs, qu'il y a une volonté politique et un plan, une directive, une direction. Tout le monde le dit, actuellement, à Montréal, depuis quelques mois, que c'est tellement gros, tellement absurde, la situation. Vous avez deux séries d'audiences et vous avez cet immense projet d'incinérateur, au-delà de 200 000 000 $, qui n'implique pas la ville de Montréal. La rumeur circule que ça va l'impliquer éventuellement, d'autres disent: Non, non, non, l'incinérateur n'est pas assez gros pour prendre tous les déchets de la ville de Montréal. C'est un bel exemple où c'est une coordination et une animation politique que ça prend pour faciliter l'harmonie et la coordination entre les différentes villes de 111e de Montréal. Vous avez raison de soulever ça.

Maintenant, la tarification, l'enfouissement sanitaire. Vous notez que c'est l'Office qui en aurait la charge, la supervision. Vous, est-ce que vous avez des suggestions plus précises à faire quant au genre de tarification qu'il devrait y avoir pour les lieux d'enfouissement? Vous avez fait une critique de la commission municipale, mais qu'est-ce que vous souhaitez à la place?

M. Nolet: Je vais laisser Jocelyn Théberge répondre à cette question-là, mais je vous dirais qu'il est très important pour l'entreprise privée de récupérer ses coûts d'investissement dans les sites d'enfouissement. Actuellement, il y a très peu de sites d'enfouissement au Québec, comme vous le savez, qui ont des infrastructures pour protéger l'environnement. Si, disons, nous devons investir des montants - et nous sommes tout à fait d'accord... D'ailleurs, la plupart des sites

d'enfouissement dont nous avons la gérance à travers l'Amérique du Nord ont toutes ces précautions-là, ces cellules, ces membranes-là. Alors, je dis tout simplement qu'il faut s'ajuster en fonction des investissements. Si c'est un autre organisme qui décide de la tarification, qui ne connaît pas les coûts d'investissement ou la protection qu'on a dû faire, à ce moment-là, ça cause un problème. Jocelyn... Un exemple pratique.

M. Théberge: C'est clair que la tarification, à un site d'enfouissement, doit refléter les moyens qui sont mis en place pour la protection de l'environnement. C'est aussi clair que les sommes importantes qu'on doit mettre en place nécessitent, pour une entreprise comme la nôtre, de rattraper ses investissements. Ce qui nous apparaît un peu anormal, c'est... Encore là, je vais parler de dissonance qui peut exister dans la fixation de tarifs par la Commission municipale, dépendamment de certaines conditions. Ce qui se passe, c'est qu'il y a des sites, actuellement, qui peuvent arriver à une tarification imposée qui ne permet pas tout simplement la protection de l'environnement. Dans ce sens-là, nous considérons que l'Office, étant lui-même le maître d'oeuvre de nouvelles normes de protection, serait en mesure de mieux évaluer un dossier de présentation de tarification.

M. Lazure: Dernière question. Sur les sites d'enfouissement, soit nouveaux ou agrandissements de sites existants, qu'est-ce que vous pensez de l'hypothèse que chaque autorisation pour l'agrandissement d'un site ou chaque autorisation pour la création d'un nouveau site soit précédée d'audiences publiques, autrement dit que ça soit assujetti à la procédure dévaluation des impacts environnementaux?

M. Théberge: Nous sommes actuellement dans une procédure d'autorisation pour une site d'enfouissement. Je dois mentionner ici que, dans les façons actuelles d'appliquer la procédure au ministère de l'Environnement et dans le cas d'une compagnie, je dirais, de la taille de Laidlaw, nous sommes déjà soumis à une procédure très sévère d'évaluation, à savoir que nous devons produire des études détaillées quant aux propriétés des terrains, quant aux moyens techniques de protection de l'environnement qu'on veut mettre en place. Somme toute, nous ne sommes pas défavorables à ce que le développement de sites soit assujetti à la procédure d'évaluation environnementale parce qu'on considère, de toute façon, que nous sommes à peu près à ce niveau-là.

M. Lazure: Y compris les audiences publiques.

M. Théberge: Ça pourrait aller jusqu'aux audiences publiques, oui. ,,,

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier les représentants de Laidlaw.

Le Président (M. Garon): Merci, M le député de La Prairie. Merci, M. le ministre. Je voudrais remercier les représentants de l'entreprise Laidlaw qui sont venus faire la représentation de leur mémoire. Je suspends les travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

(Reprise à 14 h 30)

Le Président (M. Garon): La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Là-dessus, je demande à l'Association québécoise des techniques de l'eau de s'approcher de la table des délibérations. M. Lalonde, président, si vous voulez nous présenter la personne qui vous accompagne. Il y a une heure qui est prévue pour vous entendre, c'est-à-dire que, selon les ententes convenues entre les partis, vous aurez 20 minutes pour présenter votre mémoire, le parti ministériel aura 20 minutes pour vous poser des questions ou faire des commentaires, de même que le parti de l'Opposition officielle. Maintenant, si vous prenez plus de temps que vos 20 minutes, ce sera soustrait de part et d'autre, dans la même proportion, du temps qui est dévolu aux deux partis; mais, si vous en prenez moins, s'ils veulent prendre ie temps que vous n'aurez pas pris pour poser davantage de questions, ils vont pouvoir le faire. Alors, à vous la parole, M. Lalonde.

Association québécoise des techniques de l'eau

M. Lalonde (Michel): M. le ministre, MM. les commissaires, mesdames et messieurs, premièrement, je me présente, Michel Lalonde, président de l'Association québécoise des techniques de l'eau; à ma gauche, M. Éric Bouchard, qui est le directeur général de notre Association.

En premier lieu, j'aimerais vous remercier de nous permettre de présenter ici notre position face à l'Office de protection de l'environnement. Dans la présentation, on va essayer de respecter les 20 minutes. D'une part, je présenterai l'Association, M. Bouchard enchaînera avec notre vision de la gestion de l'eau et je terminerai avec les commentaires face à l'Office ainsi que nos recommandations.

L'Association québécoise des techniques de l'eau, c'est une association à but non lucratif qui a été fondée en 1962. Nous fêtons donc notre 30e anniversaire cette année. L'Association regroupe environ 1500 membres qui se retrouvent principalement dans les groupes de consultants

les fournisseurs ou manufacturiers d'équipements de traitement d'eau potable et d'eaux usées, les exploitants d'usines, les services publics tels que les municipalités ainsi que les différents ministères provinciaux et fédéraux, les groupes d'industries ainsi que d'étudiants. C'est fondamentalement des gens qui sont spécialistes dans le domaine de l'eau. Leurs intérêts sont la gestion, l'utilisation et la protection de la ressource eau. Notre but est de poursuivre notre mission qui est de contribuer à assurer, au Québec, l'excellence dans le domaine de la gestion de l'eau par la prévention, la détection des problèmes, l'application efficace des procédés techniques et scientifiques ainsi que le transfert d'informations technologiques.

De plus, l'AQTE sensibilise le public à la conservation et à l'utilisation rationnelle de l'eau. Au cours des 30 dernières années, l'AQTE s'est associée à de nombreuses réalisations et s'est prononcée sur des dossiers aussi importants que la création du ministère de l'Environnement, de la Société québécoise d'assainissement des eaux, la directive 006 concernant la formation des exploitants d'usines, le Programme d'assainissement des eaux du Québec, ainsi que le projet sur les fabriques de pâtes et papiers et plusieurs autres. Pour rendre aux Québécois et Québécoises l'usage de leurs cours d'eau à des coûts raisonnables - je dis bien à des coûts raisonnables - pour les gouvernements et les contribuables, l'AQTE, depuis plusieurs années, propose une approche globale dans la gestion de l'eau et de l'environnement orientée vers le développement durable.

M. Bouchard (Éric): Donc, comme le disait M. Lalonde, l'Association québécoise des techniques de l'eau a toujours prôné une approche de gestion globale de l'environnement de la ressource eau. Tout le monde sait très bien qu'avec la détérioration de la qualité de l'environnement actuellement, avec les problèmes de compétitivité des entreprises dus, entre autres, à la mondialisation des marchés, il faut de plus en plus prendre conscience de la réalité environnement versus l'économie. Ce sont les grands problèmes des années quatre-vingt-dix. Il faut donc adapter nos solutions aux années quatre-vingt-dix. C'est pourquoi nous croyons qu'il faut faire preuve d'énormément de créativité et d'imagination pour apporter des solutions adaptées aux problèmes des années quatre-vingt-dix. Il faut cesser d'utiliser les modes de fonctionnement actuels ou de simples mesures coercitives pour essayer de réparer une partie d'un problème. Et tout ça, ça commence, pour nous, par la concertation de tous les intervenants.

Il faut essayer d'établir un mode de gestion qui tienne compte de tous les utilisateurs et, pour nous, ce mode de gestion globale qui tiendrait compte de tous les utilisateurs et qui tiendrait compte de tout le cycle d'une ressour- ce - on fait référence ici à la ressource eau - pourrait très bien s'apparenter au modèle de gestion d'eau d'agences de bassins. Les grands principes de ce mode de gestion sont assez simples. D'une part, on applique un principe de redevances, c'est-à-dire le pollueur-payeur; on installe également une tarification de l'eau, alors l'utilisateur-payeur, de sorte qu'on s'assure de sommes qui puissent nous permettre un financement permanent dans la «priorisation» des actions. Ainsi, ça se traduit concrètement par des mesures qui peuvent être soit préventives, soit correctives, ou tout simplement de nouvelles tendances. Mais c'est bien important de se rendre compte qu'on prend de l'argent pour l'environnement et qu'on s'en sert pour l'environnement; et ce sont les intervenants qui «priorisent» les actions qu'il faut faire face à ça. Cela dit, je laisse la parole à mon collègue, M. Lalonde.

M. Lalonde: Donc, maintenant, nos commentaires au niveau de l'Office. Pour l'Association, le rôle que s'est donné l'Office de protection de l'environnement du Québec, qui est d'appliquer les lois et règlements tout en s'assurant d'un certain financement, n'est qu'une des facettes ou une des fonctions d'un mode de gestion intégrée. Je pense qu'on constate ainsi une vision partielle de l'approche globale qu'on présentait.

Également, le projet de loi nous est arrivé un peu par surprise, autant pour les gens de l'intérieur que de l'extérieur du ministère de l'Environnement. Donc, c'est un projet qui est arrivé à brûle-pourpoint, sans aucune consultation et sans aucune concertation. Et, dans ce sens-là, ça va à rencontre du concept de développement durable où on se doit d'avoir une concertation de tous les intervenants, de tous les milieux.

D'autre part, les problèmes de coordination qui existent actuellement à l'intérieur ainsi qu'à l'extérieur du ministère de l'Environnement nous laissent sceptiques par rapport à l'Office de protection de l'environnement du Québec. En effet, comment peut-on croire qu'en scindant le ministère de l'Environnement en deux ces problèmes de coordination seront réglés? Au contraire, ça va plutôt alourdir tout le processus et probablement compliquer les relations entre les divers intervenants.

Quant au financement, on constate qu'il y a un processus de redevances qui sera, en fait, utilisé pour les frais d'opération ou d'administration de l'Office, mais que, par contre, les excédents seront versés au fonds consolidé. Évidemment, nous, au niveau de l'Association, on est totalement contre ce principe-là étant donné que c'est contre les grands principes incitatifs face à un développement durable et à une gestion globale de l'eau.

En plus, l'AQTE a toujours reproché au gouvernement son manque de vision et de

volonté politique en matière d'environnement. Je pense que le gouvernement a toujours eu la fâcheuse habitude de s'attaquer aux problèmes à la pièce et, dans ce sens-là, on semble oublier que l'application du concept de développement durable nécessite la participation de tous les ministères. Comment un seul organisme, qui relève d'un seul ministère, peut-il prétendre régler tous les problèmes environnementaux? Il ne faut pas que la sensibilisation et les actions partent du bas vers le haut, mais plutôt du haut vers le bas. C'est, selon nous, une façon trop facHe de se décharger de ses responsabilités en tant que gouvernement. Nous croyons donc que l'appui des intervenants et leur adhésion à une nouvelle façon de gérer l'environnement constituent les seules garanties de réussite.

Compte tenu de ce qui a été mentionné précédemment et fidèle à la vocation première de préserver l'environnement et l'eau dans un cadre de développement durable, l'Association québécoise des techniques de l'eau propose donc:

Que le gouvernement du Québec adhère d'abord au principe élémentaire de la gestion intégrée de la ressource eau et environnement;

Que le ministère de l'Environnement assume son leadership et propose une nouvelle politique de gestion intégrée en invitant les divers intervenants à la concertation;

Que le projet de loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec soit rejeté dans son ensemble;

Qu'un mode de gestion globale de l'environnement soit instauré et que celui-ci soit basé sur le modèle des agences de bassins;

Que son expérience - c'est-à-dire celle de l'Association - soit retenue en rapport avec la ressource eau et environnement. Cette dernière est prête à contribuer activement à ce virage. Ainsi, tous les intervenants travailleront à la réalisation d'actions concrètes.

Merci de votre attention.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je remercie l'AQTE de son mémoire. Je ne peux pas vous accuser de ne pas être consistants. Vous revenez sans cesse à la charge avec la question de la gestion de l'eau par bassins. C'est une valeur ou une idée que vous mettez de l'avant avec persistance, une valeur qui n'a pas été rejetée par le ministère de l'Environnement du Québec et qui n'a pas été adoptée non plus, pour être franc.

Le modèle auquel on se compare souvent, lorsqu'on parle des agences de bassins, c'est ce qui se passe en France. On peut plus facilement se comprendre et on peut observer. Grosso modo, les informations dont je dispose m'indiquent que, sur le plan des agences de bassins comme telles, en France, on parle d'une moyenne de 6 000 000 d'habitants par agence de bassins. On sait que la population du Québec n'a pas encore atteint les 7 000 000. C'est presque l'ensemble. Qu'est-ce que vous considérez comme minimum vital au niveau d'un bassin de population pour que ça soit viable comme organisation?

M. Lalonde: Évidemment, quand on aborde la question des agences de bassins, tout le monde nous dit tout le temps: Ah oui, vous faites référence à la France. Or, en France, ils sont 53 000 000 d'habitants et puis il y a six agences de bassins. Ici, on a des centaines de cours d'eau et on est 6 000 000 d'habitants. Nous, ce qu'on a tout le temps proposé, c'est qu'on dit: Au Québec, nous sommes prêts et nous nous devons d'appliquer les grands principes des agences de bassins. On a entrepris des démarches. Nous sommes persévérants, comme vous l'avez dit, M. le ministre, et nous comptons l'être encore longtemps.

Mais il faut adapter ce modèle-là à la réalité québécoise. Et ça, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire réunir tous les intervenants autour d'une table et dire: Mesdames, messieurs, nous devons appliquer les grands principes des agences de bassins. Mais, dans la mécanique, dans le fonctionnement, comment ça va aller, tout ça? Il faut le demander aux gens et c'est comme ça qu'on réussira à l'appliquer, ce qui sera pour nous un exemple concret de développement durable. Parce qu'on ne veut pas prétendre posséder la vérité. On dit: Allons-y avec les grands principes. Réunissons les gens et définissons ensemble leur application.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le plan du principe, je ne pense pas que ça pose de difficultés de compréhension, en autant que le ministre est concerné. Sur le plan du fonctionnement comme tel - sans tomber dans le nombre d'habitants, etc., il faut l'éviter pour le moment - on a déjà au Québec, sur le plan de chacune des régions, des modes de fonctionnement. L'unité la plus petite, on part de la municipalité; on va jusqu'à la municipalité régionale de comté, qui est devenue une structure sous-régionale, et on va jusqu'aux régions comme telles, les différentes régions administratives du gouvernement du Québec. Comment peut-on concilier le bassin comme tel - qui est une approche environnementale, soit dit en passant, que je suis loin de décrier - avec cette organisation administrative des autres aspects, dont certains autres aspects environnementaux de la vie des régions et des sous-régions?

M. Lalonde: En fait, comme M. Bouchard le disait tantôt, effectivement, ici, au Québec, on est seulement 6 000 000 et ça correspond sensiblement à un bassin, un peu comme c'est constitué, actuellement, dans les autres pays, non pas seulement en France mais également aux États-Unis et en Ontario. Ça voudrait dire, d'une

part, que, si on part à la base, des municipalités, premièrement, il y aurait un système de tarification qui serait mis en place. Je pense que, là-dessus, on s'entend. Les consommateurs doivent payer pour l'eau qu'ils utilisent; c'est le grand principe pollueur-payeur ou utilisateur-consommateur. Les municipalités percevraient ces redevances-là qui seraient en partie réinvesties dans le secteur ou la région concernée, parce que les besoins de chaque région, de chaque secteur sont différents, d'une part, et les excédents seraient retournés, entre autres, à l'agence elle-même de bassins qui s'assurerait du suivi administratif.

Évidemment, le ministère de l'Environnement devra, lui, continuer son travail au niveau de la loi et des règlements, ce qu'il fait actuellement. L'agence de bassins pourrait être... Là, on parle de l'Office de protection de l'environnement. C'est que l'Office de protection de l'environnement ne fait, comme je le disais tantôt, qu'une simple facette de la gestion globale de l'environnement, d'autant plus qu'il n'y a eu aucune consultation ou concertation auprès des autres intervenants, que ce soit du milieu agricole, du milieu des associations ou du milieu des autres intervenants, ce qui fait que l'agence, comme telle, pourrait être... Il existe déjà actuellement des organismes. Vous avez d'autres sociétés d'État qui existent déjà. Le fait d'ajouter un office de protection, c'est ajouter une autre institution à travers laquelle il y aurait une répartition des charges, sans compter qu'avec la décentralisation des pouvoirs que le gouvernement est en train de faire vers les municipalités il y a certains pouvoirs que l'Office de protection devrait déléguer, dans cette optique de décentralisation, vers les municipalités. Comment cela va-t-il se faire? Ça va encore compliquer toute la procédure.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ministère n'est pas en processus de dévolution de ses responsabilités vers le monde municipal. Présentement, nous n'en sommes pas là. Mais je m'en voudrais de ne pas profiter de votre expérience de terrain pour vous demander, si vous aviez à suggérer au gouvernement la dévolution de responsabilités du provincial vers le municipal, de nous citer quelques exemples qui vous apparaissent les plus prioritaires. (14 h 45)

M. Lalonde: Des exemples de... je m'excuse?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De pouvoirs qui devraient passer du provincial au monde municipal?

M. Bouchard: Vous disiez que nous étions persistants et je le serai encore, M. Paradis. Je vous dirai qu'on n'est pas venus ici pour donner la recette miracle, et, comme je le disais tantôt, on ne prétend pas la posséder. Pour revenir à ce que je vous disais des intervenants municipaux, réunissons-les, les intervenants municipaux, les gens de l'UMQ, les gens de l'UMRCQ. Nous avons un modèle intéressant à proposer, qu'ils connaissent bien et que vous connaissez bien également - je suis heureux d'entendre que vous êtes loin de le décrier - et, avec ces gens-là, je pense qu'il y a moyen de s'entendre, entre nous, pour voir comment on peut la gérer, cette précieuse ressource qu'est l'eau.

Je ne vous dirai pas aujourd'hui que la gestion de l'eau, ça va aller aux municipalités et que telle autre action, ça va aller à la MRC, etc. On n'en est pas là dans le processus. Je pense qu'on doit commencer par la base, par le début, et c'est en établissant les grands principes de l'agence de bassins et en réunissant les intervenants qu'on pourra ensemble le définir.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez mentionné dans votre mémoire, et M. le président l'a mentionné verbalement, les problèmes de coordination - c'est le terme utilisé dans le mémoire; je ne me souviens pas du terme...

M. Bouchard: C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...que vous avez utilisé verbalement - entre le ministère de l'Environnement et la SQAE ou bien le BAPE, comme tel. Ça fait deux ans que je suis titulaire du ministère. J'en ai peut-être perçu, j'en ai peut-être vu, mais j'aimerais que vous me racontiez vos expériences personnelles. À partir de quels éléments vous pouvez parler de ces tiraillements?

M. Bouchard: On n'entrera pas dans la cuisine, mais la première idée qui nous est venue à l'esprit, surtout quand on faisait référence au BAPE, c'était évidemment le dossier de Soligaz dans lequel il ne semblait pas y avoir unanimité entre les deux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne pense pas qu'il y ait eu tant de difficultés entre le BAPE et le ministère de l'Environnement. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas eu...

M. Bouchard: O.K.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...entre le BAPE et le gouvernement, mais je n'en ai pas senti entre le ministère de l'Environnement... L'exemple est frappant.

M. Bouchard: Bien, pour nous qui recevons l'information de tous les jours dans les quotidiens, à ce qu'on pouvait voir et ce qu'on pouvait lire - je sais très bien qu'on peut critiquer ou pas l'information qu'on reçoit - il

semble qu'il n'y avait pas unanimité, en tout cas, entre la décision du BAPE sur ce sujet et celle du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que, dans la gestion quotidienne - et c'est pourquoi je vous adressais la question - je n'ai pas, en deux ans d'expérience - il faudrait peut-être consulter mes prédécesseurs - connu d'accrochages majeurs entre le Bureau d'audiences publiques et le ministère de l'Environnement. Peut-être que mes prédécesseurs en ont connu et qu'ils pourraient m'éclairer là-dessus. Vous ne semblez pas en avofr d'autres. Vous étiez sous l'impression que Soligaz en était un. C'est ça que je retiens?

L'autre élément, entre la Société québécoise d'assainissement des eaux et le ministère comme tel...

M. Lalonde: Pardon? Vous avez parlé au niveau de la SQAE?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le même type de problème.

M. Lalonde: En fait, on veut toujours le regarder d'une façon générale. On ne veut pas, évidemment, être pointus ou entrer dans des détails, mais je pense qu'on a pu constater et qu'on constate encore actuellement la lenteur de l'avancement du programme d'assainissement qui est, entre autres, reliée à tout le côté administratif. Évidemment, l'argent est un point important, on le conçoit bien. Par contre, il n'en demeure pas moins qu'il y a quand même une certaine lourdeur administrative et un problème de coordination qui est en place, qui est là, entre le ministère de l'Environnement et la Société. Je ne vous donnerai pas d'exemples particuliers, mais on conçoit, à l'intérieur des gens, qu'il y a des petits accrochages au niveau de la gestion entre la Société et l'Environnement. Et ça, ça retarde les dossiers.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je dirai que l'expérience me porte à vous donner raison, M. le président. Ce n'est pas régulier, mais, dans certains cas, il y a de ces accrochages-là.

M. Lalonde: Et, dans ce sens-là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est parce que je n'avais pas vu la même chose au niveau du BAPE, c'est tout. C'était le sens de...

M. Lalonde: ...ce qu'on veut dire, c'est qu'avec le fait de scinder le ministère de l'Environnement et d'amener une autre institution - je me permets de nommer l'Office de protection de l'environnement - ça ne va que compliquer tout le côté administratif. Là, on va se ramasser avec le ministère de l'Environnement qui va faire une partie des normes et règlements, l'Office qui va en appliquer une autre partie - et ce n'est pas encore tout à fait clair - et la Société qui est à travers tout ça. Déjà, il y a des problèmes de coordination, et c'est ce qu'on soulignait. La venue de l'Office de protection de l'environnement ne va que compliquer les choses en termes de gestion administrative. C'était ça, notre présentation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a eu l'opportunité d'entendre, ce matin, des gens qui pratiquaient l'environnement sur une base quotidienne et ils semblaient plaider un peu dans le sens contraire de ce que vous dites. Ils disaient, au contraire: La clarification des rôles du ministère, qui va être chargé de l'énoncé des politiques, des directives, de la législation, de la réglementation comme telle, va lui permettre de se consacrer à sa mission de législateur, de réglementateur, de penseur du futur en matière environnementale. Et le fait de clarifier cette responsabilité à l'Office va faire en sorte qu'au niveau de ceux qui vont être en région ils vont savoir que ce sont eux qui sont responsables, non pas de rédiger la loi ou de rédiger le règlement, mais de l'action quotidienne dans l'émission du permis, le suivi, le contrôle, etc. et que ça risque d'apporter, cette clarification, plus d'efficacité. Comment répondez-vous à ces gens-là?

M. Lalonde: En fait, on est loin d'être convaincus de cette approche-là, d'une part, parce que, au niveau du ministère de l'Environnement, il y a des choses... Premièrement, ils réussissent difficilement à assurer un suivi adéquat. Je pense qu'on y a déjà fait allusion dans nos différents communiqués de presse ou conférences de presse. Vous avez mentionné tantôt des problèmes d'argent; on est bien conscients qu'il y en a, des problèmes d'argent, sauf qu'il faut s'assurer d'un minimum de suivi pour assurer la pérennité de tous ces investissements-là qu'on fait, d'une part. Et, d'autre part, on sait également que la décentralisation... Évidemment, on sait que l'expertise est au ministère de l'Environnement actuellement. Le fait de décentraliser cette expertise - je vous parlais tantôt d'aller en région - et de s'amener vers un office de protection de l'environnement qui, lui, va rapatrier certains pouvoirs du ministère, qui va assurer - je pense que vous le disiez dans votre document - avec plus de rigueur le suivi des lois et règlements, dans ce sens-là, nous, on considère que ce n'est pas évident, la répartition des charges qui va se faire entre le ministère de l'Environnement... Parce que c'est ces gens-là, qui sont déjà là, qui vont être déplacés dune place à l'autre. C'est loin d'être évident.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur la répartition des responsabilités, j'ai communiqué

aux membres de la commission ce matin, avec l'autorisation de la commission, le partage comme tel. Je vais faire la même chose avec votre Association, si vous le permettez, vous remettre la définition du partage et vous demander de nous revenir, de façon verbale ou écrite, comme vous le souhaiterez, pour nous dire si ça vous apparaît, sur le plan du partage, intéressant ou non intéressant.

Sur le plan de vos relations avec le ministère et la SQAE, je vous dirai que vous êtes dans une situation un peu particulière. Le ministère de l'Environnement n'investit pas beaucoup, contrairement à ce qu'on pourrait penser, sur le plan monétaire. À part le Programme d'assainissement des eaux, on a un programme PAAGF en matière agricole. Pour le reste, nous administrons de la législation et de la réglementation; nous l'appliquons dans le quotidien. Donc, votre relation est particulière - je tiens à le souligner - avec le ministère de l'Environnement parce que la Société québécoise, elle, est dotée de budgets importants; pas assez importants, mais importants quand même. Cette relation-là ne serait pas affectée par la création de l'Office. La SQAE demeure comme telle; le ministère, au niveau de son rôle central, demeure comme tel; lorsque nous parlons - vous allez le voir à la lecture du document - de pouvoirs à l'Office de protection de l'environnement, nous parlons de tout l'aspect du suivi réglementaire, à partir de l'émission du certificat d'autorisation jusqu'aux enquêtes et inspections, etc.

Le problème, je vous le soumets bien respectueusement, c'est que le ministre, quel qu'il soit, présentement, a à la fois le chapeau de législateur, d'exécutif, de quasi-juge parce qu'il rend des ordonnances, etc. Ça devient - je ne dirais pas dans le cas du Programme d'assainissement des eaux parce qu'on n'a pas trop de problèmes à ce niveau-là - une situation qui est intenable. On le voit, ces jours-ci, dans la gestion des déchets domestiques, la gestion des déchets dangereux, l'émission des permis, des certificats d'attestation d'assainissement pour les industries, etc. Demander au ministre d'être à la fois législateur, exécutant de toutes ces lois et de rendre des décisions quasi judiciaires sur chacune de ces lois, ça m'apparaît un fardeau, en tout cas, qu'ont voulu partager d'autres sociétés comparables à la Société québécoise. Ça va là-dessus.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, au nom de l'Opposition, je veux féliciter les représentants de l'Association. Le mémoire n'est pas long, mais il est excellent; il est très bon. Quand on voit, à la page 2, que vous affirmez que le Programme d'assainissement des eaux du Québec «est sans contredit la plus grande réalisation environnementale du québec, jointe à des retombées économiques profitables pour bien des entreprises», nous, on concourt à ça et on accepte...

M. Dufour: C'est excellent.

M. Lazure: ...volontiers cette affirmation.

M. Dufour: Ça vient du public.

M. Lazure: M. le Président, il y a une chose fondamentale. Écoutez, soyons clairs. L'Association dit textuellement: «Que le projet de loi sur l'OPEQ soit rejeté dans son ensemble.» Donc, l'Association et l'Opposition, nous nous rejoignons, à ce moment-là, et on est en compagnie de nombreux organismes. Encore une fois, la plupart des organismes sont de cet avis-là. Mais ce qui est inquiétant - vous l'avez soulevé un petit peu - c'est que ce projet de loi, l'idée même du projet de loi n'a pas été soumise à la table de concertation. Le ministre prétend faire des consultations à tout bout de champ. C'est ce qu'il nous dit. Il rencontre les gens, il mange avec les gens, mais pas de concertation formelle. Son sous-ministre, M. Mead, a démissionné il n'y a pas si longtemps en claquant la porte, en disant: Ce n'est pas sérieux le développement durable, le ministre n'y croit pas.

Ne jouons pas le jeu de l'autruche, là. Regardons les faits en face. Le ministre n'a jamais commenté le départ de son sous-ministre au développement durable. C'est grave, ça. Le ministre était allé chercher l'une des personnes les plus prestigieuses dans les mouvements écologistes, M. Harvey Mead, bien connu; il lui avait donné un poste prestigieux, sous-ministre adjoint responsable du développement durable. Au bout de, quoi, un an et demi, à peu près, M. Mead dit: J'ai modestement, silencieusement et patiemment tenté de faire valoir cette idée du développement durable à l'intérieur du ministère et, de toute évidence, la direction du ministère n'est pas intéressée. Et il s'en va. Et il dit, à toutes fins pratiques, dans des entrevues que je pourrais citer - le ministre le sait: Le ministre ne prend pas au sérieux la table de concertation sur le développement durable. Le fait que le ministre n'ait pas soumis ce projet-là, l'idée de son projet à cette table-là, ça démontre, encore une fois, qu'il ne prend pas ça au sérieux.

Et la deuxième remarque que vous faites, qui est tout à fait pertinente, vous dites: Le ministère arrive difficilement à coordonner l'après-loi ou l'après-réglementation. Le ministre présente souvent des projets de loi, des avant-projets de règlement, mais ou bien ça ne devient pas opérant ou bien c'est mal coordonné avec ce qui existe déjà dans le ministère.

M. le Président, je pense que, quand le ministre répond comme il l'a fait, encore une fois, à la suggestion que l'Association a faite à

plusieurs reprises, que la gestion de l'eau soit faite selon le modèle de gestion de bassins... Et ce n'est pas seulement en France que ça existe, ça existe dans plusieurs pays d'Europe. Ce n'est pas seulement dans les gros pays de 60 000 000 d'habitants que ça existe. Le ministre répond: On n'est pas pour, mais on n'est pas contre, à l'image de son chef. Ni pour ni contre, bien au contraire. Mais de dire: On est seulement 6 750 000, ce n'est pas une raison, ça. Comme l'Association a bien répondu: Faisons une adaptation de ce système-là à une petite société de 6 750 000. Ça se fait, ça, mais c'est le genre de leadership que n'exerce pas le ministre. Je suis obligé de le lui dire en face.

Moi, je crois que c'est de ça que le ministère a besoin, de leadership, que ce soit la concertation avec les agents du milieu qui ne se fait pas, que ce soit de l'innovation. Et mettre sur la table la possibilité d'organiser, au Québec, la gestion par bassins, ça serait novateur. Les gens les plus experts dans le domaine, l'Association, vous le demandent depuis un bout de temps; il y en a d'autres qui le demandent aussi. Pourquoi ne pas le faire? Ce n'est pas en créant un office, une nouvelle structure qu'on va innover nécessairement. Le rôle d'un ministre, ce n'est pas seulement de faire des lois et des règlements, c'est d'innover aussi et d'offrir du leadership.

Moi, j'avais une question ou deux à poser à l'Association. Quand vous dites: «Que le gouvernement du Québec adhère d'abord au principe élémentaire de la gestion intégrée de la ressource eau et environnement», à part la gestion par bassins dont on vient de parler, est-ce qu'il y a d'autres aspects de la gestion de l'eau par rapport à l'environnement que vous pouvez proposer?

M. Lalonde: Vous voulez dire par rapport à l'environnement?

M. Lazure: Oui. (15 heures)

M. Lalonde: Évidemment, l'Association québécoise des techniques de l'eau - le nom le dit clairement - on s'est toujours attardés de façon particulière au niveau de l'eau, mais je pense qu'on doit regarder plus loin et regarder au niveau de l'environnement également. Lorsqu'on parle du principe du pollueur-payeur et qu'on parle du principe de tarification, ça peut s'appliquer à tous les niveaux, c'est-à-dire qu'à partir du moment où on utilise un service, on doit payer pour le service en question. Que ce soit pour de l'eau, que ce soit pour des déchets ou que ce soit pour autre chose, à partir du moment où on paie pour les services qui nous sont rendus, je pense qu'il y a un grand principe, c'est que les gens se responsabilisent, d'une part, et ça devient équitable pour tous les consommateurs; que ce soient des industries, des agriculteurs, des résidents, ça devient équitable. Donc, le grand principe de tarification - je pense que c'est la base de départ - s'applique à tous les consommateurs, d'une part.

Évidemment, de ça vont résulter des sommes d'argent et ces sommes d'argent... On en paie déjà des taxes actuellement, on paie également des impôts qui s'en vont, dans bien des cas, au fonds consolidé ou qui effacent des dettes d'autres ministères. On n'entrera pas dans les détails. Mais, à partir du moment où on établit un principe de tarification avec financement des redevances et qu'on réinvestit ces sommes d'argent dans les secteurs concernés ou pour répondre aux besoins ou objectifs, enfin aux priorités que les secteurs se sont donnés, ça va être d'autant plus incitatif auprès des différents pollueurs qui vont au moins constater que c'est bénéfique pour leur secteur et bénéfique pour tous les résidents avoisinants.

M. Lazure: Le ministre, il y a quelques mois, a...

M. Bouchard: J'aimerais compléter en ajoutant quelques mots. Comme M. Lalonde le disait, effectivement, de par notre nom, nous sommes spécialisés dans le domaine de l'eau. On a établi un modèle, on a fait part d'un modèle dont on fait la promotion depuis longtemps sur une gestion globale de la ressource eau. Il est évident qu'étant donné que c'est notre spécialité on croit que le modèle est bon. Mais on lance une invitation également à ceux qui se spécialisent dans les autres domaines à se joindre à cette concertation qu'on veut dégager dans tout ça pour adapter le modèle à l'environnement en général.

M. Lazure: Le ministre a lancé, il y a quelques mois, l'idée d'un double système d'approvisionnement en eau. Il y a eu diverses réactions à ça: l'eau pour boire et l'eau pour arroser son char. Qu'est-ce que l'Association pense de ça?

M. Lalonde: On a eu à se prononcer, au moment où c'est arrivé. Évidemment, l'Association québécoise des techniques de l'eau est totalement en désaccord avec cette approche. Je ne dis pas que ça ne peut pas être utilisé dans des cas particuliers - on entend bien des cas vraiment particuliers ~ mais, dans le contexte actuel qu'on connaît, dans les municipalités qui existent, je ne pense pas qu'on va réinventer la roue ou qu'on va inventer une nouvelle municipalité, aller recreuser dans une rue - et, là, on parle de coûts importants - pour construire un nouveau réseau, des nouvelles entrées d'eau, de la nouvelle plomberie. C'est un petit peu exagéré comme concept, comme tel, sans compter comment on va faire pour contrôler les enfants qui vont ouvrir tel robinet qui est de l'eau qu'on

boit et tel robinet qui est de l'eau pour arroser les autos. Enfin, je pense que c'est tout à fait impensable comme système.

On est mieux de revenir à une approche plus globale où l'on parle de systèmes d'aqueduc qui existent déjà, d'usines de filtration qui existent déjà: premièrement, établir une nouvelle réglementation sur l'eau potable qu'on demande depuis déjà quelques années; deuxièmement, être en mesure d'apporter les ajouts, les corrections ou ce qu'il faut pour améliorer le système, parce que, si l'on met une réglementation en place qui va être, évidemment, plus sévère que celle qui est là actuellement, on va devoir apporter des corrections auprès des usines de filtration ou des systèmes en place. Mais tout ça devra se faire toujours devant le même concept, un concept de tarification, de redevances, et, là, on va être en mesure d'apporter des corrections. C'est bien évident que l'on sait que le gouvernement n'a pas d'argent et qu'il n'en aura pas. Même si on essayait d'aller en chercher plus, on ne serait pas en mesure d'aller en chercher plus. Il faut donc déjà penser et s'orienter vers l'implantation d'un système intégré de gestion de l'eau plutôt que de régler un problème de façon ponctuelle avec une solution qui est peut-être un petit peu farfelue, vous m'excuserez, M. le ministre.

M. Lazure: Une autre question. Vous avez parlé d'épuration des eaux. Dans les petites municipalités, les petits bassins de population, on sait qu'actuellement il est très coûteux de mettre sur pied un système d'épuration des eaux. On parle de coût de système, par exemple, de 4 000 000 $ pour une population de 300 personnes. On entend toutes sortes de chiffres comme ça. Ça revient très cher de la personne, évidemment. Mais, vous autres, est-ce que vous avez une vue d'ensemble, est-ce que vous jugez que c'est un problème grave actuellement, au Québec, le fait qu'apparemment on n'ait pas trouvé des façons modestes et pas trop coûteuses de fournir un système d'assainissement des eaux aux populations de petites municipalités?

M. Lalonde: Peut-être, de façon générale, vous savez qu'actuellement la partie du programme d'assainissement urbain - parce qu'à date il n'y a à peu près que l'assainissement urbain qui a été fait - ça s'est fait surtout au niveau des grosses municipalités, communautés urbaines ou grosses villes. Évidemment, ce qu'il reste à faire, c'est effectivement les petites municipalités et il n'y a effectivement pas beaucoup de payeurs de taxes pour ce qu'il y a à faire comme infrastructures.

Par contre, les technologies existent pour implanter des systèmes simples; on parle de technologies alternatives - ça, c'est à la mode - de technologies adaptées au contexte. On a des secteurs où on peut mettre des systèmes avec des tourbières, des secteurs avec des plantes. Il y a toutes sortes de systèmes qui existent, mais il faut prendre le temps, comme on le disait tantôt, d'avoir de l'imagination et de la créativité et ne pas s'en tenir qu'à des solutions qui existent déjà, qui ne coûtent pas cher d'exploitation et qui ne coûtent pas cher d'investissement, dans certains cas. Il faut vraiment aller vers des solutions innovatrices qui répondent vraiment aux besoins de la municipalité et au nombre de payeurs de taxes en conséquence.

M. Lazure: M. le Président, juste une remarque en remerciant les représentants de l'Association. De ce côté-ci de la table, la gestion par bassins, nous y croyons aussi puis notre position est claire: nous sommes favorables à ce genre de gestion des systèmes d'eau par bassins, comme ça se fait ailleurs, et il y aurait moyen d'imaginer une adaptation pour le Québec.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Très brièvement, sur la question de la qualité de l'eau, parce que c'est votre spécialité. On sait actuellement que les normes du ministère de l'Environnement pour l'eau dont on s'abreuve sont basées sur les critères de Santé et Bien-être social Canada 1978. On sait que ce rapport a été mis à jour. Maintenant que les normes sont connues pour 1989, certaines autres juridictions les ont mises en place, et c'est ce à quoi je faisais référence lorsque je parlais d'un double système. Est-ce que vous seriez, comme Association, contre le fait qu'on maintienne les normes de 1978 pour l'ensemble des utilisations et qu'on exige, pour l'eau dont on s'abreuve, les normes de 1989?

M. Lalonde: Je pense qu'on ne peut pas avoir deux systèmes de normes; on ne devrait avoir qu'un système de normes, si je comprends bien votre présentation, parce que, premièrement, c'est plus facile à gérer, c'est plus facile à suivre. C'est bien évident que, si la réglementation est plus sévère, c'est sûr qu'il va devoir y avoir des investissements. Mais, si vous regardez le bilan de l'eau qui a été fait en 1989 par le ministère de l'Environnement, le bilan démontrait que, de façon générale, l'ensemble des municipalités avaient de l'eau de qualité acceptable et, dans certains cas, de très bonne qualité.

Il y a encore des municipalités, et vous le savez fort bien, qui acceptent de faire bouillir leur eau 10 à 15 fois par année. C'est bien évident que, si les normes étaient plus sévères dans ce sens-là, les municipalités devraient se prendre en main et apporter des corrections pour répondre à la nouvelle réglementation. C'est qu'il y a une tolérance; les gens tolèrent, donc il y a beaucoup de sensibilisation à faire auprès du public. Mais le gouvernement, c'est son devoir

de prendre ça en main et d'être capable de dire: Bien, voici, il faut protéger notre public et il faut être en mesure d'établir une réglementation qui permettra aux municipalités d'y répondre, d'apporter les correctifs qu'il faut puis d'obtenir de l'eau de qualité.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai été informé, j'ai reçu des chiffres du ministère de la Santé et des Services sociaux qui m'ont alarmé sur le nombre de cas de gastro-entérites - je ne voudrais pas citer de chiffres de mémoire, mais c'était inquiétant - qui étaient dues à un manque de qualité de l'eau au Québec avec la réglementation et son application actuelle. C'était supérieur à 1 000 000 de cas par année si ma mémoire est fidèle.

M. Lalonde: C'est bien évident qu'il y a beaucoup de gens qui ne le disent pas. Ils ont des problèmes de gastro-entérite pour une journée ou deux. Il n'y a pas de problème. Ça ne coûte pas cher de taxe d'eau. Mais, si les gens en veulent, de l'eau de qualité, ils ont juste à payer un peu plus puis ils vont en avoir, de l'eau. Lorsqu'on désire s'acheter une voiture de meilleure qualité, on paie pour. C'est un grand principe: on paie pour ce qu'on désire.

Le Président (M. Garon): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Oui, M. le Président. Je suis heureux que vous soyez ici. Il y a longtemps qu'on entend parler, comme vous le dites, de votre Association. Ça fait 30 ans que vous existez. Je regarde, dans la présentation de votre mémoire, les membres. Vous me dites qu'il y a des consultants. Quelle sorte de consultants?

M. Lalonde: II y a des biologistes-conseils, il y a des ingénieurs-conseils, il y a des écologistes-conseils, toutes sortes de professionnels impliqués dans le domaine de l'eau, en consultation.

M. Maltais: O.K. Les fournisseurs, c'est des fournisseurs de matériaux de...

M. Lalonde: Des manufacturiers, entre autres, d'équipements...

M. Maltais: Des vendeurs de pompes ou quelque chose comme ça.

M. Lalonde: Des vendeurs de pompes d'eau potable, d'eaux usées.

M. Maltais: Des exploitants d'usines?

M. Lalonde: Ça, en fait, c'est des opérateurs, si on veut. C'est des gens qui travaillent pour les municipalités, qui opèrent l'usine de filtration ou les usines d'épuration.

M. Maltais: O.K. Vous dites, à la page 2 de votre mémoire, que toutes ces initiatives que le ministre veut mettre de l'avant, l'objectif, selon lui, c'est d'améliorer la qualité, mais que «les actions isolées du M ENVI Q ne nous permettent pas de répondre positivement à cette question» Qu'est-ce que vous entendez par «actions isolées»?

M. Lalonde: L'exemple auquel on faisait allusion tantôt, au niveau d'une solution d'aller vers deux conduites en parallèle, c'est des propositions qu'on appelle, nous, isolées. Pour nous, ce n'est pas des solutions globales. C'est des solutions ponctuelles qui ne répondent nécessairement pas toujours à un problème qui est plutôt global. Ça, c'en est un cas qu'on peut citer et c'est dans cette optique qu'on inscrivait ça dans notre représentation.

M. Maltais: O.K. Vous avez soulevé un petit peu plus loin dans votre mémoire le principe du pollueur-payeur. Qu'est-ce que vous en pensez, vous autres?

M. Lalonde: Le principe du pollueur-payeur? M. Maltais: Oui.

M. Lalonde: Je reviens un peu au principe que je présentais tantôt, un principe de tarification.

M. Maltais: Non, mais spécifiquement celui-là, pollueur-payeur.

M. Lalonde: Mais c'est le même principe. C'est le principe que celui qui consomme de l'eau la rejette. Lorsqu'on consomme de l'eau, l'eau s'en va dans l'égout et retourne à la rivière. Donc, le consommateur-utilisateur, c'est le pollueur qui paie pour ce qu'il consomme.

M. Maltais: Mais, voici, il y a une rhétorique qui est contre un peu là-dedans. C'est que tout le monde est pour le principe du pollueur-payeur, vos membres, qui sont des consultants, des avocats. Il y a des ingénieurs. Il y a toutes sortes de beau monde là-dedans. C'est qu'une fois qu'on établit le principe du pollueur-payeur il n'y a encore personne qui veut passer au «cash», et, là, vos consultants, vos avocats qui défendent des industries, les utilisateurs d'eau... Il n'y a encore personne. Ce que vous énoncez, en fait, tout le monde l'énonce. Le principe du pollueur-payeur, tout le monde est d'accord avec ça, mais il n'y a jamais personne qui veut payer. Et, parmi vos membres, c'est eux qui défendent les pollueurs pour ne pas les faire payer. Il faudrait, à quelque part, à un moment donné, avoir le même langage au Québec. Des avocats

vont venir. Ils vont être d'accord pour le principe du pollueur-payeur. Je n'ai jamais vu défendre les grandes compagnies pollueuses de l'eau par l'association des concierges de mon coin. C'est des avocats qui les défendent. Il faudrait peut-être avoir le même langage, à quelque part.

M. Lalonde: Mais monsieur... Vous m'excuserez...

M. Maltais: Maltais, Saguenay, BPC.

M. Lalonde: Écoutez, à partir du moment...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lalonde: Merci de l'information.

M. Maltais: À propos, docteur, vous voulez faire une déclaration là-dessus? Oui, on continue.

M. Lalonde: À partir du moment où il y a une concertation où tous les gens sont impliqués... Je vais vous donner un exemple. Prenez le cas du lac Magog.

M. Maltais: Oui.

M. Lalonde: Tous les résidents autour du lac Magog se sont pris en main et on dit: Bien, voici, à partir de maintenant, il n'y en aura plus de bateaux sur le lac et on va faire attention. Mais ils se sont pris en main. Ils ont pris des mesures. Ils ont même eu des consultations auprès du ministère de l'Environnement qui a accordé des programmes de subventions dans le cadre du Programme d'assainissement des eaux pour apporter des travaux correctifs autour de leur lac. Donc, les gens ont été subventionnés et ont payé pour apporter des corrections pour être en mesure de retrouver l'usage de leur cours d'eau qui, en l'occurrence, était le lac Magog, de pouvoir en profiter. Mais, là, les gens ont été concertés, se sont pris en main et ont pris action. Bon. Là, vous dites: Des avocats défendent les industries. C'est bien évident que, d'une part, ça prend une réglementation. Bon. Là, on commence à parler de projet de loi au niveau des rejets liquides. On a été consultés dans ce sens-là d'un projet. Il est bien évident qu'à partir du moment où il y aura une réglementation qui sera mise en place au niveau des industries et qu'elles devront s'y conformer, bien, ça va raffermir un peu la façon dont les gens vont polluer.

Par contre, si on regarde globalement, à partir du moment où les gens consomment... C'est sûr que les grosses industries paient des taxes dans les différentes municipalités où elles sont. C'est sûr que le montant de taxes qu'elles paient n'est certainement pas important par rapport à ce que ça pourrait leur coûter s'il y avait une tarification vraiment imposée en fonction de ce qu'elles consomment en termes d'eau potable et de ce qu'elles rejettent. Les gens concernés autour du même bassin de drainage ou de la même rivière, quand ils vont dire: Écoutez, elles polluent dans notre propre rivière et, nous autres, on ne peut pas utiliser ou recouvrer l'usage de ce cours d'eau, bien, il va falloir qu'ils se prennent en main. Tout le monde autour du secteur concerné va se prendre en main, autant les agriculteurs, des gens des différents ministères, des ingénieurs-conseils, des avocats, comme vous l'avez si bien dit tantôt, et ils vont dire: Bien, voici, si cette industrie-là ne bouge pas, on va prendre action, on va faire quelque chose.

M. Maltais: Moi, je viens du comté de Saguenay, c'est la Côte-Nord, et je suis député là depuis quand même une décennie, comme quelqu'un me le faisait remarquer. Moi, j'ai fait une chose avec les ZEC à saumon. J'ai cinq belles rivières à saumon: la Sainte-Marguerite, des Escoumins, Laval, Godbout et Baie-Trinité. On a commencé, dans les années 1983, 1984, à interdire les moteurs hors-bord dans les rivières à saumon. Bon. Là, les gens qui sont membres de ces ZEC, ce n'est pas tous des gens de la Côte-Nord. Mais la lutte qu'on a dû avoir parce que les avocats, qui sont membres de votre Association, ont engagé des biologistes, qui sont membres de votre Association, qui nous ont démontré en cour qu'un moteur hors-bord et une canne d'huile dans le fond d'une rivière à saumon, ce n'était pas si pire que ça! Il faudrait arrêter d'avoir ce double langage là. On en est venu à bout parce qu'on les a mis dehors de la ZEC, vos consultants, vos avocats et vos biologistes. Là, on n'a plus personne avec des moteurs hors-bord dans nos rivières à saumon. Mais il ne faudrait pas... (15 h 15)

Moi, ce qui me choque, ce qui me met en maudit, savez vous, c'est bien simple, c'est que des gens s'en viennent ici en commission parlementaire et énoncent des grands principes de Démosthène, tout est beau, mais, dans la pratique courante, ils n'ont pas fermé la porte ici qu'ils laissent leur canne de bière sur le perron du parlement. Mais il faudrait arrêter d'avoir ce double langage. Je vous le dis parce qu'on a mené une lutte devant les tribunaux pour faire interdire les moteurs hors-bord. C'étaient les avocats qui défendaient ces membres récalcitrants, c'étaient les biologistes, qui font partie de votre Association, sans doute, qui ont dit que ce n'était pas si polluant que ça, une canne d'huile sur une frayère à saumon.

Moi, maudit, ce qui me tanne là-dedans, c'est qu'il y a deux langages au Québec. Il faudrait en avoir rien qu'un. Ce que vous venez nous dire, j'adhère à ça à 100 %. Mais, quand vous allez passer la porte, n'oubliez pas de le garder encore, votre grand principe. C'est ça qui

met le monde en maudit, le monde ordinaire, pas les grands psychologues ou psychiatres comme le docteur. Mais, moi, ça me met en maudit.

M. Lalonde: Je veux juste apporter une précision...

M. Maltais: Je suis un gars de la rue, moi.

M. Lalonde: je comprends ça. mais, nous, on ne boit pas de bière, à l'association québécoise des techniques de l'eau, on boit de l'eau, pour votre information.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Maltais: Ah, vous n'êtes pas tous Lacordaire, attention! Ça là, on m'a déjà fait le coup ici! Vous n'êtes pas le premier à nous dire ça.

M. Bouchard: Mais, M. Maltais... M. Maltais: Oui, je vous écoute.

M. Lalonde: Pour votre information, c'est un monsieur du Lac-Saint-Jean aussi.

M. Maltais: Parlez à vos membres, ce sont les pires. J'ai eu de la misère avec eux autres dans la rivière Sainte-Marguerite. Ils étaient subventionnés par l'Alcan.

M. Bouchard: M. Maltais. M. Maltais: C'est les pires.

M. Bouchard: On tient seulement un langage. D'ailleurs, si vous avez écouté votre collègue, M. Paradis, tantôt, il nous trouvait persévérants et persistants avec notre principe d'agences de bassins. Et je pense que, de par les positions qu'on a émises, on a toujours été cohérents avec ce message. Et avant qu'on franchisse le seuil de la porte et après qu'on l'aura franchi, on compte toujours être cohérents et toujours véhiculer le même message qui est d'assurer, au Québec, l'excellence dans le traitement de la resssource eau.

M. Maltais: Le message est très beau puis il est très bien, M. le Président. Il est excellent votre message, je n'ai rien contre votre message. Mais ce sont vos «mautadits» membres qui changent d'idée en cours de route. C'est bien beau, ça fait chic de payer une cotisation à l'Association québécoise des techniques de l'eau puis de se mettre une petite pancarte dans son char. Mais, quand c'est toi qui vient défendre les pollueurs en cour, tu as changé d'idée, parce que le fric, ça fait changer bien du monde d'idée. Ce que je vous demande comme message, M. le président, quand vous aurez repassé la porte, parlez donc à vos membres, de temps en temps, ça va leur faire du bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Juste une petite question, parce que je vois bien que vous nous dites que le ministre n'a pas d'autre choix que de passer à la consultation. Moi, j'ai l'impression, pour faire partie de cette commission parlementaire de l'aménagement et de l'équipement, qu'on est toujours en consultation avec les environnemen-talistes. On passe notre temps... les pesticides. On vient de se donner un mandat. Malgré tout ça, vous venez nous dire, puis c'est écrit: On devrait consulter plus et le ministre devrait se mettre en consultation. Qu'est-ce qui ne marche pas? Est-ce que ça veut dire qu'on consulte pour consulter ou si c'est juste une parade qu'on fait tout le temps? Ou vous voulez nous dire par vos mots, sans le dire, que le ministre ne fait pas sa job et que le ministère n'est pas à l'écoute, qu'il s'amuse? C'est quoi là?

J'aimerais que vous me disiez ça, parce que j'ai comme l'impression que, pour l'environnement, on a mis du temps, un moyen temps. Mais si ça se traduit en rien, rien plus rien, ça égale rien.

M. Lalonde: D'accord. Mais il y a une chose, par exemple.

M. Dufour: Oui.

M. Lalonde: On revient encore à dire ce qu'on disait tantôt à M. Paradis, et il l'a même corroboré, c'est que ce n'est pas la première année qu'on parle de ça, les agences de bassins puis la gestion globale de l'eau. C'est bien évident qu'il va falloir faire un premier pas. Là, c'est sûr qu'on présente l'Office de protection de l'environnement qui est arrivé durant les vacances de Noël. Vous comprendrez que c'est un peu surprenant que ça arrive durant les vacances de Noël, d'une part. D'autre part, lorsqu'on parle de consultation, à partir du moment où on sait que ça existe, la gestion globale de l'eau, puis qu'on est en mesure de faire quelque chose, on commence par s'asseoir puis on commence à parler de ça. Puis on va en trouver une, solution, ça existe puis ça fonctionne ailleurs.

On arrive et on présente l'Office de protection de l'environnement qui n'est qu'une seule petite facette de la gestion globale de l'eau. C'est là qu'on dit qu'il aurait dû y avoir consultation avant. On en serait arrivé à dire: Voici, il faut s'orienter vers une gestion intégrée de l'eau et de l'environnement. C'est ça qu'on

dit. Mais il faut se consulter avant. On est là comme intervenants, comme Association, on en parle depuis longtemps. On travaille déjà avec des représentants du ministère de l'Environnement et il y aura probablement un colloque dès cet automne avec l'UMRCQ et l'UMQ, et les gens du ministère de l'Environnement seront impliqués justement pour élaborer des grandes lignes, pour entamer une orientation vers la gestion intégrée. Et, là, on nous arrive avec l'Office de protection de l'environnement. C'est pour ça qu'on dit qu'il n'y a pas eu de consultation. Parce qu'il y a des systèmes qui existent et on nous arrive avec ça. C'est simplement pour ça qu'on recommande de le rejeter.

M. Dufour: Est-ce que je vous comprends bien quand vous me dites: II y a beaucoup de consultations sectorielles, mais on n'a pas de consultation globale? En fait, on est épivardé tous azimuts. On n'a pas de gouvernail. C'est un peu ça. Je décode ça dans vos paroles. Je peux bien me tromper.

M. Lalonde: Mais ça prend une volonté politique.

M. Dufour: O.K. Une voix: C'est ça.

M. Lalonde: C'est simple, ça prend une volonté politique.

M. Dufour: Je vous remercie.

Le Président (M. Garon): Alors, je remercie les représentants de l'Association québécoise des techniques de l'eau de la présentation de leur mémoire. J'invite maintenant l'Institut canadien des produits pétroliers à s'approcher de la table. Je suspends les travaux de la commission pour une couple de minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 21)

(Reprise à 15 h 22)

Le Président (M. Garon): La commission reprend ses travaux. J'inviterais M. André Dumais, président de l'Institut canadien des produits pétroliers, à présenter les gens qui l'accompagnent, en vous rappelant qu'une heure est prévue pour entendre votre groupe. Vous prenez normalement 20 minutes pour faire votre exposé. Ensuite, le parti ministériel peut poser des questions pendant 20 minutes et le parti de l'Opposition, pendant 20 minutes. Ce que vous prendrez en plus leur sera soustrait et ils pourront se partager également le temps que vous ne prendrez pas sur les 20 minutes qui vous sont accordées. M. Dumais.

Institut canadien des produits pétroliers

M. Dumais (André): Merci, M. le Président. Mme et MM. de la commission de l'aménagement et des équipements, M. le ministre, bonjour. Je débute en vous remerciant, au nom des membres de l'Institut canadien des produits pétroliers, pour l'opportunité que vous nous offrez de venir discuter avec vous du projet de loi 412 recommandant la création de l'Office de protection de l'environnement du Québec. Avant de débuter la présentation de notre mémoire, laquelle sera limitée aux 20 minutes que vous nous avez accordées, permettez-moi de vous présenter brièvement les membres de notre délégation ainsi que l'organisme que nous représentons devant vous, l'Institut canadien des produits pétroliers ou l'ICPP, comme on s'appelle entre nous autres.

Je me présente d'abord. Je suis André Dumais, président du comité de direction de la division du Québec de l'ICPP et, dans la vie de tous les jours, qui est plus ou moins rose des fois, je suis vice-président marketing Québec et Maritimes pour Shell Canada. Je suis accompagné de cinq collègues à qui je demanderais de s'identifier d'un signe de la main au moment où je vais les présenter: tout d'abord, Richard Dupuis, vice-président du comité de direction du Québec de l'ICPP et directeur général Québec pour Pétroles Esso Canada; ensuite, Cari Lussier, président du comité des affaires environnementales de l'ICPP et directeur environnement, prévention et hygiène industrielle chez Petro-Canada; René Miglierina, vice-président de la division du Québec de l'ICPP; Gilles Morel, membre du comité des affaires environnementales et directeur général Affaires publiques et gouvernementales, Compagnie pétrolière Impériale Itée; Gilles Beauregard, également membre du comité des affaires environnementales de l'ICPP et directeur environnement et sécurité chez Shell Canada.

L'Institut canadien des produits pétroliers ou l'ICPP est un organisme à but non lucratif représentant la majorité des compagnies canadiennes qui assurent le raffinage et la commercialisation des produits pétroliers. L'ICPP a vu le jour le 1er janvier 1991 et est le résultat, en fait, de la fusion de quatre associations pétrolières régionales dont, entre autres, l'Association pétrolière du Québec, communément référée comme l'APQ historiquement, qui avait été fondée en 1958.

Ici, au Québec, nos principaux membres sont Esso, Petro-Canada, Shell, Ultramar, Sunoco, Sergaz et la division du pétrole de la Coopérative fédérée du Québec.

La mission principale de l'ICPP est de représenter de manière proactive l'industrie pétrolière dans les domaines de l'environnement de la santé et de la sécurité, ainsi que divers autres touchant l'industrie pétrolière et la sa-

ciété québécoise. À titre d'exemple, voici divers secteurs auxquels l'ICPP s'intéresse présentement: la définition de lignes directrices en matière d'environnement, la qualité du sol dans les sites d'exploitation, la qualité de l'air et la réduction des émissions, la qualité de l'eau et réduction des contaminants, la gestion des huiles à moteur usées, la prévention des déversements pétroliers, la formation et les interventions en cas de déversements pétroliers.

Sur ce, je cède la parole à mon collègue Richard Dupuis qui effectuera la présentation de notre mémoire. Par la suite, nous serons à votre disposition pour en discuter ou répondre à vos questions. Richard.

M. Dupuis (Richard): Merci, André. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, l'Institut canadien des produits pétroliers, l'ICPP, désire exprimer son accord de principe, malgré certaines questions soulevées un peu plus loin dans notre présentation, à la création de l'Office de protection de l'environnement du Québec. Nous croyons que ce partage des compétences et responsabilités entre le ministère et l'Office devrait résulter en une meilleure gestion de l'environnement au Québec.

L'ICPP, en 1990, avait appuyé avec vigueur la recommandation 43 de la Commission d'enquête sur les déchets dangereux, qui se lisait comme suit: «Que le rôle du MENVIQ et ses fonctions de réglementation, de planification et d'animation du milieu soient confirmés et renforcés, de sorte qu'il puisse consacrer ses ressources actuelles et futures à ces tâches essentielles.» La promulgation du projet de loi 412 permettrait de suivre cette recommandation en chargeant principalement l'Office de l'application des lois et règlements et en laissant au ministère l'élaboration de la législation et des stratégies environnementales. Selon nous, voici les aspects positifs prédominants de ce projet de loi.

Premièrement, la participation au conseil d'administration de l'Office de représentants des divers secteurs de la société, notamment du domaine des affaires, favorisera une approche encore plus concertée. L'industrie pétrolière accueille avec satisfaction cette opportunité de contribuer à l'identification des orientations et des priorités.

L'article 3 du projet de loi 412 traitant de la composition du conseil d'administration de l'Office de protection de l'environnement du Québec dit, dans son deuxième paragraphe: «Au moins un membre provenant de chacun des domaines suivants est nommé après consultation des groupes les plus représentatifs des domaines des affaires, environnemental, municipal et syndical.» S'inspirant des mots «au moins», l'ICPP recommande fortement la présence de trois membres du domaine des affaires au conseil d'administration, représentant respectivement les secteurs des ressources, des industries manufactu rières et des services. Nous croyons que cette représentation du domaine des affaires constituera un apport important à l'élaboration de la stratégie du développement durable. Nous recommandons que les candidats choisis pour représenter les divers domaines mentionnés soient des gestionnaires qui ont déjà fait leurs preuves et qui ont une connaissance approfondie du domaine environnemental.

Deuxièmement, la réforme de la procédure d'appel des décisions et ordonnances constitue une amélioration longtemps attendue.

Troisièmement, l'identification de la conception de programmes de formation et d'information parmi les priorités d'intervention de l'Office reçoit notre accord entier, et nous recommandons fortement que cette responsabilité soit accentuée. Nous croyons que ces programmes de formation et d'information devraient être dirigés autant vers l'interne que l'externe. Les programmes internes devront avoir comme objectif d'amener une uniformité d'application des lois et réglementations et ainsi atteindre une plus grande objectivité. Ces mêmes programmes internes contribueront au développement d'une expertise spécifique en rapport avec le milieu industriel.

L'ICPP avait, en 1990 - un an - accordé un support non équivoque au chapitre sur les mesures administratives dans un rapport préliminaire de la Commission d'enquête sur les déchets dangereux intitulé «Les déchets dangereux au Québec, les orientations en bref». Il était suggéré que le ministère préconise des mesures administratives visant une application plus efficace, plus cohérente et plus transparente des lois et règlements. L'ICPP croit que l'Office de protection de l'environnement du Québec est l'outil tout désigné pour atteindre ces objectifs auxquels nous souscrivons complètement. (15 h 30)

Quatrièmement, la séparation des fonctions de législateur de celles de contrôle et surveillance devrait mener à une plus grande équité ainsi qu'à une uniformité d'application. Il est bien entendu que nous nous demandons, comme d'autres groupes de notre société, si les mêmes fins pourraient être atteintes par une réforme administrative du ministère. Question difficile à résoudre de notre de point de vue et selon notre perspective de l'extérieur.

Nous nous en remettons donc à la recommandation du ministre, conscients des objectifs qu'il désire atteindre. Cependant, notre souci principal réside dans le processus décisionnel du ministère, sérieusement lourd et lent dans l'état présent. L'Office amènera-t-il une plus grande efficacité de gestion et les délais administratifs seront-ils plus raisonnables? Nous n'en sommes pas convaincus, du moins durant la période de transition. L'ICPP croit que voilà le plus grand défi qui se posera à l'Office et nous en faisons une condition de notre support éventuel à ses activités.

Nous désirons également profiter de cette occasion qui nous est offerte pour soulever l'urgence de tendre vers une complète uniformité d'application des lois et règlements. Les directions régionales du ministère n'ont pas vraiment réussi dans ce domaine et notre acte de foi dans la capacité de l'Office d'y arriver se manifeste en enjoignant le ministre d'en faire une priorité majeure du nouvel organisme.

L'ICPP recommande également que la création de l'Office soit l'occasion d'examiner le dédoublement découlant des responsabilités de la Communauté urbaine de Montréal dans l'administration des lois environnementales concernant l'air et l'eau sur son territoire.

Nous désirons ici exprimer un support plus spécifique à l'article 24 qui dit, dans son premier paragraphe: «Le ministre peut donner des directives portant sur les objectifs et l'orientation de l'Office dans l'exercice des fonctions qui lui sont conférées.» Nous croyons que le principe de la responsabilité ministérielle a inspiré cet article et nous ne croyons pas qu'une plus grande indépendance doive être accordée à l'Office, d'autant plus que toute directive devrait être déposée devant l'Assemblée nationale dans les délais prescrits.

L'article 1.9 de la Loi sur la qualité de l'environnement définit le mot «personne»: un individu, une société, une coopérative ou une corporation autre qu'une municipalité. Nous nous demandons si cette définition de «personne morale» inclut également les institutions publiques et parapubliques, ainsi que les ministères. Nous croyons fermement que tous les organismes et toutes les institutions, quels qu'ils soient, devraient être astreints aux mêmes règles que les autres secteurs touchés par cette loi et nous recommandons fermement qu'il en soit ainsi en ce qui a trait au projet de loi 412.

M. le Président, l'Institut canadien des produits pétroliers remercie la commission de l'aménagement et des équipements de l'Assemblée nationale du Québec de l'avoir entendu. Notre désir de participation ne se limite pas à ce document ou mémoire. Nous offrons notre support entier pour collaborer à la création de l'Office. Nous serons aussi disponibles pour offrir notre point de vue tout au long de la mise en place et de l'application de la loi advenant qu'elle soit sanctionnée par l'Assemblée.

En terminant, nous félicitons le ministre pour ce projet de loi et nous lui rappelons notre point de vue quant aux objectifs majeurs de l'Office: gestion efficace, réduction des délais administratifs, uniformité d'application, objectivité et accent sur la formation et l'information. Merci. Je pense, comme André le disait, qu'on serait maintenant prêts à recevoir vos questions.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous me permettrez, dans un premier temps, M. le Président, de remercier l'Institut et ses porte-parole et de souligner, avant d'entreprendre les questions ou les remarques, que, lors de l'adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi 65, loi sur le pollueur-payeur, surtout en ce qui concerne la contamination des sols, vous avez été une des seules industries à appuyer ouvertement le ministère de l'Environnement. Je pense que cet appui vous honore. Par la suite - nous continuons à suivre attentivement vos actions -vous avez accéléré, malgré la crise économique difficile que vous traversez, le changement de vos réservoirs pour les remplacer par des réservoirs à double paroi. Ce geste mérite également d'être souligné, de même que la mise sur pied d'un institut pour agir en cas d'urgence lors de déversements dans le fleuve Saint-Laurent. Je pense que ces trois gestes traduisent très bien que l'industrie pétrolière est consciente qu'il s'agit d'une industrie polluante, mais qu'elle est prête à prendre des moyens pour atténuer la pollution et réparer les dommages lorsque des dommages sont subis par notre environnement. Comme ministre de l'Environnement du Québec, je pense que vous êtes un des secteurs industriels les plus avancés dans la philosophie du développement durable appliqué dans le quotidien et à partir duquel vous devez payer à même l'argent de vos compagnies.

Cela étant dit, deux remarques particulières. Dans le résumé de vos recommandations, vous nous suggérez de viser l'élimination du débouble-ment des responsabilités avec la Communauté urbaine de Montréal. À quoi faites-vous spécifiquement allusion? Quels sont les problèmes particuliers auxquels votre industrie fait face et comment pourrions-nous y remédier?

M. Dupuis: Je pense qu'en en parlant sur une base de principe plutôt que sur une base peut-être d'exemples particuliers, quand on regarde un certain nombre de projets et qu'on voit les processus à travers lesquels on a dû passer pour obtenir soit des certificats d'autorisation, des opinions ou du support, on est obligés, à l'heure actuelle, de dédoubler beaucoup d'efforts pour tenter d'informer les gens sur les différents projets qu'on veut véhiculer. Ce qu'on dit par cette élimination du dédoublement des responsabilités, c'est qu'en principe, sur une base d'efficacité, on tente de développer, comme on tenterait de le faire peut-être dans nos entreprises, un minimum d'interventions ou un minimum d'intervenants quand on touche un domaine particulier, dans ce cas-ci l'environnement. Alors, c'est plus sur une question de principe comme celui-là où on veut tenter d'éliminer d'être obligés de rencontrer plusieurs intervenants quand on pourrait peut-être aller à un endroit et réussir à obtenir satisfaction à travers un processus. Alors c'est un peu dans ce sens-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Les communautés urbaines - et je pourrais faire référence au cas de Québec - nous demandent de plus en plus, comme ministère de l'Environnement, de déléguer des responsabilités ou des juridictions, à condition de déléguer les crédits afférents, soit dit en passant. Contrôle de l'atmosphère. Si la Communauté urbaine de Montréal obtient le contrôle de l'atmosphère, la Communauté urbaine de Québec veut la même chose, etc. Est-ce que vous voyez d'un mauvais oeil ou d'un bon oeil ces demandes des communutés urbaines?

M. Dupuis: Dans la même ligne de pensée, ce qu'on voit, c'est que ces dédoublements ou ces multiplications de groupes de gestion ou d'intervenants, pour une entreprise, elle doit tous les rencontrer ou leur faire face. Ce n'est sûrement pas la direction la plus efficace. Peut-être que, pour des raisons municipales, il y a d'autres raisons qui... Au point de vue de notre entreprise ou de nos entreprises, on préfère.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous nous mentionnez également, dans vos recommandations, ce qui suit: «Astreindre les organismes publics et parapublics aux mêmes règles que les autres secteurs touchés par la loi.» Est-ce qu'à votre connaissance il y a des organismes publics ou parapublics qui ne seraient pas astreints au droit général en matière environnementale?

M. Dupuis: II y a eu cette impression-là qui est restée sur la table. Est-ce que quelqu'un a des observations additionnelles?

M. Miglierina (René): Je dirais que peut-être, même si on ne peut pas vous donner d'exemples présentement, dans la loi 412, ce n'est pas identifié comme tel.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pourrais, à ce moment-là, compte tenu - et peut-être quitte à une vérification ultérieure avec les juristes du ministère - vous indiquer que l'article 126 de la Loi sur la qualité de l'environnement indique que la loi s'applique à l'ensemble des organismes publics et parapublics. Il n'y a pas, à ma connaissance - et c'est pour ça que je vous le demandais - d'exclusion et l'économie générale de la loi va faire en sorte que l'Office va avoir juridiction sur l'ensemble des organismes publics et parapublics. Je tiens à vous rassurer...

M. Dupuis: Ça répond à la question.

M. Dumais: Si je peux commenter. Dans le contexte de l'application, dans ce contexte-là, il y a peut-être aussi l'aspect que, même si elles sont sujettes aux mêmes lois, lors de la mise en application de ladite loi, ce que j'appellerais les mêmes règles ou délais s'appliquent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, parfois, on fait comme les pétrolières, on donne un meilleur service à nos plus gros clients. Pour nous, Hydro-Québec est un très gros client, au ministère de l'Environnement, avec un gros volume, donc nous tentons de lui donner un service exemplaire, tout en disant que nous souhaitons donner le même service à l'ensemble des petites et moyennes entreprises québécoises.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de l'Opposition, féliciter les représentants de l'Institut canadien des produits pétro liers et les remercier pour leur présentation. Dans le fond, vous faites un acte de foi, comme vous le dites vous-même, à un moment donné: «II est bien entendu que nous nous demandons, comme d'autres groupes de notre société, si les mêmes fins pourraient être atteintes par une réforme administrative du ministère. Question difficile à résoudre de notre point de vue et selon notre perspective. Nous nous en remettons donc à la recommandation du ministre». Acte de foi envers le ministre. On n'est pas tous portés à avoir autant foi au ministre et ce n'est pas tout à fait mon rôle non plus de faire des actes de foi...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Si je peux me permettre de commenter sur ce point-là, c'est bien évident qu'il existe un grand nombre de problèmes dans le système présent. C'est bien évident que, dans un système modifié par cette proposition de loi, il va continuer à y avoir des problèmes à résoudre. Mais ce que je pense qu'on voit à travers cette proposition-là, c'est une amorce de possibilité pour réviser la façon dont les choses se font aujourd'hui, et, à travers cette révision, ça permet des ouvertures, ça permet des discussions, ça permet d'arriver peut-être à d'autres solutions et puis d'amorcer ces solutions à ces problèmes qu'on dit qu'il existe aujourd'hui. Nous...

M. Lazure: Même s'il n'y a pas de personnel nouveau additionnel, même s'il n'y a pas de budget additionnel?

M. Dupuis: Ce que je dis, c'est qu'il faut commencer quelque part. On ne peut pas dire que tous les problèmes sont résolus par ça. Je pense que c'est notre position. Ce n'est pas une solution à tous les problèmes, c'est une amorce de solutions et c'est bien évident que si ça prend plus d'argent, ça prend plus d'argent et si ça prend d'autre personnel, ça prend d'autre personnel.

M. Dumais: Excusez-moi. Si je peux ajouter un contexte dans l'acte de foi, qui n'est peut-être pas autant un acte de foi, sans vouloir offusquer, avec les personnes présentes, mais peut-être beaucoup plus un acte de foi dans le concept. L'acte de foi est, en fait, vis-à-vis d'une clarification des rôles qui devrait amener une clarification des responsabilités et des actes. Si la même personne est juge, juré et bourreau, automatiquement - bourreau, je ne voulais pas prendre le mot «exécuteur»...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dumais: Mais c'est un peu dans ce contexte-là, l'acte de foi. Si les rôles et les objectifs sont clarifiés, automatiquement les mises en place devraient être meilleures. C'est un peu le point. René, voulais-tu ajouter quelque chose?

M. Miglierina: Non.

M. Lazure: Un point particulier. Vous soulevez l'incohérence, le fait que ça ne soit pas uniforme, que les décisions de région en région ne sont pas uniformes. Pouvez-vous nous donner des exemples de ce que vous avez vécu à cet égard?

M. Dupuis: Je pense qu'on a des gens ici qui vivent plus que moi au jour le jour les contradictions qui se font. Je ne sais pas, Cari, si tu voudrais parler un peu à ce sujet-là?

M. Lussier (Cari): Oui. Peut-être un exemple typique, c'est lorsqu'on enlève certains réservoirs qui ont eu des fuites avec le temps et qu'on discute avec la régionale concernée. À ce moment-là, la loi exclut les sols contaminés aux hydrocarbures comme un déchet dangereux, ne les traite pas comme un déchet dangereux. Certaines régionales sont encore à l'école que c'est un déchet dangereux et interprètent le règlement en conséquence. Ça fait que ça pose beaucoup de problèmes en manifestes de transport, certificats d'autorisation pour enlever ces réservoirs. En fin de compte, présentement, certains de nos représentants font l'éducation de certains inspecteurs pour les instruire sur le fait de ce qu'est un sol contaminé aux hydrocarbures, que ce n'est pas sorcier et que, si on le traite d'une façon admise par les différentes pratiques que l'on a, à ce moment-là, on peut résoudre le problème rapidement et efficacement.

M. Lazure: Et vous pensez vraiment que la création d'une structure nouvelle, l'Office, va régler ce genre de problèmes là?

M. Lussier: Comme mes collègues le disaient tout à l'heure, si on donne les priorités valables, entre autres l'information, sur laquelle on insiste dans notre mémoire, et l'éducation, chose certaine, l'efficacité des inspecteurs et des différents intervenants du ministère de l'Environnement va augmenter et, d'autant plus, le client va être satisfait. Quand je dis «client», c'est le citoyen, l'industrie et les commerces.

M. Lazure: Mais vous êtes conscients sans doute que la grande majorité des groupes qui vont venir - on commence aujourd'hui - sont contre. Vous en avez entendu seulement un aujourd'hui, mais la grande majorité des 30 mémoires qu'on a eus...

M. Dupuis: On peut... M. Lazure: Pardon?

M. Dupuis: J'allais dire qu'on peut simplement, nous, présenter les vues et la perspective de notre industrie.

M. Lazure: C'est ça.

M. Dupuis: À ce moment-ci, on concentre là-dessus.

M. Lazure: Oui. Les délais puis le manque d'uniformité dans les décisions, pour vous, est-ce que c'est un gros problème, actuellement? Moyen? Petit? Très gros? (15 h 45)

M. Lussier: C'est un problème important pour nos opérations de tous les jours parce que toutes nos compagnies sont en train de faire des remplacements de réservoirs, on a tous des programmes. Certains sont déjà complétés, d'autres se continuent d'une façon très active et ça retarde beaucoup les opérations et ça exige beaucoup plus de frais, en fin de compte, pour faire le même travail.

M. Morel (Gilles): Est-ce que je peux ajouter un commentaire là-dessus? Je crois que l'Institut canadien des produits pétroliers est arrivé à un point où on est vraiment à l'étape... On a passé la question philosophique; on a fait ce virage environnemental il y a déjà plusieurs années et on est en pleine période d'activité sur le chantier. On fait des changements de réservoirs, on fait de la restauration de sols et on se bute assez fréquemment aux délais administratifs au niveau de l'administration, au niveau de l'obtention des certificats. On fait face aussi aux différentes interprétations dépendamment des régions et c'est peut-être pour ça que, pour nous, on met plus d'emphase sur ces points. Ça fait d'ailleurs partie de nos recommandations. À ce moment-là, on fait confiance au ministre pour faire adopter cette loi-là. On est d'accord avec les principes, mais on veut vraiment qu'au niveau administratif il y ait des aménagements qui facilitent la tâche et qui nous permettent de con-

tinuer le travail amorcé déjà depuis quelques années.

M. Lazure: Quant à la responsabilité ministérielle, vous êtes sans doute au courant que plusieurs groupes craignent que la création de l'Office amène une baisse dans la responsabilité ministérielle, une déresponsabilisation du ministre de l'Environnement vis-à-vis des actions de l'Office. Ça inquiète plusieurs groupes, ça. Qu'est-ce que vous eh pensez, vous autres?

M. Dupuis: Si ma mémoire est fidèle, la structure qui est proposée conserve quand même au ministre la responsabilité des actions de l'Office. Donc, dans ce sens-là, je pense qu'on ne peut pas éviter la responsabilité et, à notre avis, c'est la place où les responsabilités doivent se ramasser, en fin de compte, puis on est satisfait de ça.

M. Lazure: Oui, mais la crainte que les gens expriment est fondée en partie sur le fait que l'Office va avoir, dans certaines situations, un statut quasiment judiciaire. On sait que le ministre est porté un peu, un peu beaucoup, à avoir une attitude légaliste et à dire: Si l'Office a pris cette décision-là, c'est la responsabilité de l'Office, puis: L'Office est en train de réviser sa décision et, moi, je ne peux pas commenter ça; c'est l'Office qui est un corps quasi autonome. C'est ça qu'il va dire, le ministre, comme on le connaît, nous autres.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est mon psychiatre personnel.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Mon patient préféré.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Permettez-moi de ne pas me mêler entre les deux propos.

M. Lazure: On fait une thérapie de groupe.

Une voix: Je ne sais pas qui va étudier l'autre.

M. Dupuis: Je dirais quand même...

Le Président (M. Garon): Moi, je suis le directeur d'hôpital.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dumais: Heureusement qu'on est juste en visite journalière.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dupuis: Je vais me reconcentrer. La situation est la suivante, d'après nous. Il y a l'aspect réglementation puis il y a l'aspect administration de la réglementation. On peut intervenir à plusieurs étapes. On peut intervenir à l'étape de la réglementation et, à travers ça, avoir une certaine consultation, faire valoir nos points et, à ce moment-là, obtenir des changements ou obtenir des satisfactions dans ce sens-là. Et vous tombez de l'autre côté qui est l'application de la législation, si je peux appeler ça... La responsabilité de s'assurer que les lois sont observées dans le domaine de l'environnement ne nous Inquiète pas si les choses sont faites et les règlements sont là, et on a eu la chance de vivre à travers l'élaboration des règlements. On devrait être capables de les observer, les règlements. Donc, on ne s'inquiète pas de l'aspect législatif.

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement pour revenir à un aspect plus mercantile ou financier, il n'y a pas d'allusion, dans votre mémoire, à la question du financement comme tel de l'organisme qui est l'Office. Il y a différents scénarios ou idéologies qui peuvent être complémentaires ou s'affronter. On a eu l'occasion de discuter avec d'autres groupes, ce matin, de la possibilité d'autofinancer le fonctionnement de l'Office à partir d'une tarification pour les gestes administratifs, comme beaucoup d'organismes gouvernementaux le font, de redevances appliquées sur le principe du pollueur-payeur, un peu dans le sens de la réglementation du Programme de réduction des rejets industriels dont on a annoncé la prépublication du règlement hier, la question des attestations d'assainissement. Soit dit en passant, moi, j'exclus le financement par les amendes. Je pense que ce côté-là doit être complètement exclu. Ça doit demeurer au fonds consolidé pour ne pas que le système devienne pernicieux en soi, tente de s'autofinancer comme ça. Mais êtes-vous plus favorable à un financement par le Trésor public, à partir du fonds consolidé, ou par une tarification, ou des redevances, ou un système mixte en ce qui concerne l'Office, en tenant compte que le ministère, lui, continue à être financé par le fonds consolidé?

M. Dupuis: à moins que je ne me trompe, je pense que le projet de loi comme tel n'avait pas... la raison pour laquelle on ne l'a pas commenté dans notre mémoire, c'est que le mémoire ou le projet de loi n'avait pas de référence à ce sujet-là. donc, on n'a pas commenté.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est-à-dire

qu'il mentionne que, tel que déposé, c'est financé par le fonds consolidé.

M. Dupuis: C'est ça. Donc, à ce moment-là, on n'a aucune observation à faire sur ce mode de financement dans le sens que c'est acceptable que le financement vienne de là. Mais, si on veut reculer et parler un peu plus de principe, le principe qui est souvent véhiculé de pollueur-payeur, en principe, c'est quelque chose qu'on accepte et, des fois, je pense qu'on a l'impression... On dit qu'on paie déjà beaucoup dans ce domaine-là et on se pose des questions à savoir si on ne paie pas déjà beaucoup notre part à travers toutes les modalités de taxes qui viennent à tous les niveaux. En particulier, quand on regarde le niveau de taxation dans notre industrie et le niveau de profitabilité de notre industrie, je ne veux pas vous faire pleurer, mais disons que ce n'est pas quelque chose qui est rose depuis les 10 dernières années et que ce n'est pas quelque chose qui va en s'améliorant rapidement ces jours-ci. Le principe, on l'accepte et on le supporte. L'application, les modalités, les formules, tout ça, on est souvent un peu inquiets de la façon dont les formules sont arrivées. Ce qu'on dit, c'est que pour arriver à ces formules-là, ça prend une consultation.

Ça prend, disons, des discussions pour venir à comprendre quel est l'impact sur notre industrie. Est-ce que ces impacts-là vont affecter notre profitabilité? Parce que ces impacts-là vont faire que notre industrie va avoir de la difficulté à compétitionner sur les marchés nationaux, sur les marchés internationaux. Donc, je pense que ce n'est pas une réponse qui est oui ou non, mais c'est une réponse qui demande beaucoup de consultations, tout en acceptant le principe qui est énoncé.

Le Président (M. Garon): M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. Je pense que j'ai bien lu votre mémoire. J'ai écouté aussi la réponse que vous avez faite à mon collègue de La Prairie concernant votre philosophie et votre approche. Il me semble vous avoir déjà entendu parler à l'effet que votre philosophie, ce n'était pas l'affrontement mais que c'était, effectivement, d'essayer de vivre avec ce qui existait. Ça me semble un peu ça. Vous essayez d'en prendre le meilleur et vous en tirez le plus possible. C'est sûrement à cause de vos relations d'affaires et de la façon de fonctionner aussi que vous avez pour vos industries. Peut-être que c'est très sage de le faire de cette façon-là. Ce n'est pas un reproche, au contraire. C'est vous dire que vous avez au moins de la suite dans les idées. C'est au moins ça.

Tout à l'heure, je suis resté surpris quand M. le ministre vous a posé la question sur la CUM, la Communauté urbaine de Montréal, qui applique des règlements sur l'environnement. Vous semblez dire: Ça, ça nous cause des problèmes. Et ça, ça me surprend quelque peu, parce que la Communauté urbaine de Montréal, comme celle de Québec, accepte des responsabilités déléguées du gouvernement du Québec. Et je pense que c'est heureux que ça se fasse comme ça. Par exemple, dans l'inspection des aliments, la ville de Montréal exerce le plein pouvoir ou la Communauté urbaine exerce le plein pouvoir. Elle est dédommagée par le gouvernement du Québec et je pense que personne ne s'en plaint, parce qu'elle est directement concernée et directement impliquée. Pourquoi, dans votre fonctionnement à vous autres, ce serait différent?

Parce qu'on parle un peu de décentralisation; de déconcentration, pas de décentralisation. C'est de la déconcentration, ça, un peu. Puis, pour le public, vous qui êtes aussi soucieux de l'environnement, si la ville est contente puis vous autres aussi, ça va mieux pour les citoyens. Je vous demande votre position.

M. Dupuis: On ne le regarde pas dans ce sens-là. Je pense qu'on le regarde dans le sens de l'efficacité pour nous. On ne nie pas que les gens des municipalités, de la Communauté urbaine de Montréal tentent de trouver des solutions qui sont adéquates pour eux. Ça, c'est définitivement ce qu'ils tentent de faire. Mais, par contre, pour des sociétés qui doivent faire face à plusieurs municipalités, plusieurs villes, la Communauté urbaine de Montréal dans ce cas-ci, pour nous, être obligés d'aller expliquer le même projet au niveau provincial, au niveau municipal, au niveau de la Communauté urbaine de Montréal et puis tenter d'obtenir les autorisations de tous ces gens-là à plusieurs reprises, ça devient beaucoup plus difficile, beaucoup moins rentable et puis, en fin de compte, on arrive probablement aux mêmes résultats.

Donc, ce qu'on dit, c'est que, s'il y avait seulement un groupe, une fonction qui s'occupe des mêmes besoins... On ne nie pas les besoins. On dit que, s'il n'y avait qu'une façon de faire face à ces besoins-là, ça nous simplifierait la vie, comme entreprise.

M. Dufour: J'accepte votre point de vue à l'exception que, pour moi, vous ramez au contraire du courant, parce que plus ça va aller, plus les municipalités vont vouloir exercer leur rôle, leur véritable rôle. Puis c'est dans toutes les facettes de la vie des citoyens. Et, même si le ministre dit que ça prend de l'argent, on sait ce que ça fait d'une façon ou d'une autre; les municipalités finissent par tout ramasser, parce qu'on transfère les factures quand ça ne fait pas.

Moi, je pense - et je vous le dis carrément - que les municipalités vont exiger de plus en plus de pouvoirs puis qu'elles vont vouloir les exercer effectivement. Si elles sont responsables des chemins et si elles sont respon-

sables d'à peu près tout ce qui se passe, c'est clair que, même pour ça, elles ont à répondre vis-à-vis de leurs citoyens. Je vais vous donner l'exemple de Chicoutimi, quand le port de mer a été contaminé. Il y a eu longtemps des réservoirs de pétrole - vous êtes au courant de ça - et, quand ils ont décontaminé les sols, ça a fait une moyenne belle guerre. Ce n'est pas vous autres qui avez été poignes avec ça et ce n'est pas le gouvernement fédéral qui a été poigne avec ça, même si c'est le gouvernement fédéral qui a tout payé, je crois, pour être bien honnête. La municipalité a été poignée avec les problèmes. Ça fait que de plus en plus, comme les municipalités... Non, non, le fédéral a payé. C'était le port de mer. Ça appartient au fédéral; ça n'appartient pas au Québec, pas encore, mais ça va venir Ce que je dis par rapport à ça...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Peut-on s'assurer qu'ils sont décontaminés avant de les prendre?

M. Dufour: ...c'est que les municipalités vont vouloir de plus en plus s'impliquer parce qu'elles ne voudront plus prendre juste le problème. Et je pourrais vous en souligner des problèmes ailleurs que là-dedans.

M. Dupuis: C'est qu'on oppose deux principes.

M. Dufour: Oui.

M. Dupuis: On oppose un principe, évidemment, que les gens veulent avoir les responsabilités et gérer leurs besoins, mais, nous, on oppose l'autre principe, qui est celui de l'efficacité. Est-ce que la société peut se permettre de multiplier et multiplier toutes sortes de formes de processus et faire en sorte qu'on se ramasse avec 122 municipalités dans la région de Montréal quand il y en a cinq à Toronto? C'est ce genre de situation que, nous, on vise en disant: Simplifions, réduisons et coûts moindres.

M. Dufour: Vous n'avez pas lu les journaux dernièrement? Il a été annoncé qu'il va y avoir une grande étude qui va être mise sur pied, à Montréal, pour diminuer le nombre de municipalités.

M. Dupuis: J'ai bien compris.

M. Dufour: Ça fait que, là, vous allez être aux oiseaux. Vous allez payer probablement moins de taxes.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Garon): Alors, je remercie les représentants de l'Institut canadien des produits pétroliers de la présentation de leur mémoire à la commission. Nous devons reprendre nos travaux, pour entendre d'autres mémoires sur le projet de loi, le 10, mais, comme il y aura session avant, nous allons ajourner les travaux de la commission sine die.

(Fin de la séance à 15 h 58)

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