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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 12 mars 1992 - Vol. 31 N° 135

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-cinq minutes)

Le Président (M. Gauvin): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la commission de l'aménagement et des équipements ouverte. Je reconnais le quorum. Le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques et la consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, Mme Juneau (Johnson) est remplacée par M. Bélanger (Anjou).

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le secrétaire. Une minute d'attention, s'il vous plaît. L'agenda: aujourd'hui, il était prévu qu'à 9 h 30 on reçoive le groupe sani mobile inc; à 10 h 30, l'union québécoise pour la conservation de la nature; à 11 h 30, la confédération des syndicats nationaux. on suspend nos travaux à midi trente pour reprendre à 15 h 30 avec le barreau du québec; à 16 h 30, l'association de l'industrie de l'aluminium du québec; à 17 h 30, l'association minière du québec.

J'inviterais donc, à ce moment-ci, le groupe Sani Mobile inc. à prendre place eh avant, s'il vous plaît, représenté par M. Clément Boucher, vice-président aux finances, et M. Louis Cos-sette, vice-président à l'environnement. J'in-vfterais le chef de groupe à nous présenter ses collaborateurs ou celui qui me manque comme nom.

Groupe Sani Mobile inc.

M. Boucher (Clément): D'accord, merci. Moi, je veux me présenter: Clément Boucher, vice-président aux finances du groupe Sani Mobile. J'aimerais maintenant vous présenter les autres représentants du groupe Sani Mobile: à ma droite, Louis Cossette, vice-président à l'environnement, et, à mon extrême droite, Paul-André Proulx, directeur du développement et de la technologie du groupe Sani Mobile.

Le Président (M. Gauvin): M. Boucher, il y a 20 minutes qui sont prévues pour votre présentation. Vous pouvez prendre tout votre temps, mais vous n'êtes pas tenu de tout le prendre. Et 11 y a 20 minutes à chacun des groupes parlementaires. donc, je vous invite à nous faire votre présentation.

M. Boucher: Maintenant, pour la présenta- tion, ça va être fait par M. Louis Cossette, de l'environnement.

Le Président (M. Gauvin): M. Cossette.

M. Cossette (Louis): D'accord. Madame, messieurs, le groupe Sani Mobile tient à remercier la commission permanente de l'aménagement et des équipements d'avoir bien voulu accepter d'entendre ses représentations sur le projet de loi 412. Avant de vous faire part des commentaires que nous désirons faire concernant le projet de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec, permettez-nous de vous présenter le groupe Sani Mobile.

Le groupe Sani Mobile oeuvre dans le domaine du nettoyage industriel, de la gestion des substances dangereuses, des interventions d'urgence environnementale et d'inspection et de nettoyage des réseaux d'égout. L'entreprise fut fondée à Lévis en 1965. Pendant les 20 premières années de son existence, elle s'est concentrée dans le domaine municipal, dans la grande région de Québec. Aujourd'hui, de par ses 16 filiales, le groupe Sani Mobile a place d'affaires dans une vingtaine de villes réparties dans toutes les régions administratives du Québec.

Le groupe Sani Mobile est inscrit à la Bourse de Montréal depuis 1988, il emploie plus de 350 personnes et a une flotte de 325 véhicules. Son chiffre d'affaires annuel est d'environ 35 000 000 $. De par la nature de ses activités, le groupe Sani Mobile est en relation constante avec le ministère de l'Environnement. D'une part, presque toutes ses opérations nécessitent une autorisation du MENVIQ et, d'autre part, les activités d'intervention d'urgence environnementale ou de restauration de sites que le groupe fait pour des tiers sont pour la plupart supervisées par le MENVIQ.

Office de protection de l'environnement. De vouloir dissocier la partie du ministère qui élabore les lois, règlements, directives et politiques de la partie qui doit les mettre en application est a priori une bonne chose. Là où on peut s'interroger, c'est sur le moment et les moyens choisis.

Premièrement, question financière. La création d'un office entièrement indépendant du ministère, quoique relevant directement du ministère de l'Environnement, impliquera une augmentation de postes à caractère administratif puisque, dissocié du ministère, l'Office ne pourra bénéficier des services de la Direction de la comptabilité, de la Direction des ressources humaines, et même des services juridiques du ministère. De plus, dans l'année de son instauration, il y aura des coûts inhérents à sa création.

II n'y a qu'à penser à: papeterie, installation de son siège social, identification visuelle, etc. Or, dans une période d'austérité économique où le gouvernement doit réduire ses dépenses, il serait étonnant que de nouveaux crédits soient octroyés au ministère de l'Environnement si l'ensemble de ses responsabilités demeure inchangé. Il risque donc que ce soit des postes directement liés à la mission actuelle du ministère qui soient sacrifiés à la création de l'Office.

La mise en place de l'Office devrait être conditionnelle à l'injection de nouveaux crédits pour son implantation et son administration. Le ministère, amputé de ses responsabilités dévolues à l'Office, ne devrait perdre que les crédits qui étaient consacrés à l'administration et aux opérations des responsabilités dévolues à l'Office.

Autonomie de l'Office. Le projet de loi créant l'Office de protection de l'environnement prévoit que l'Office relèvera directement du ministre de l'Environnement. Toutefois, plusieurs points laissent présager qu'il ne sera pas à l'abri d'ingérences politiques. À l'article 24 du projet de loi, il est stipulé que l'Office sera lié à des directives émises par le ministre portant sur ses objectifs et ses orientations. Aux articles 21 et 41, il est fait mention que, «lorsque l'intérêt public l'exige», le gouvernement peut se substituer au président de l'Office quant au pouvoir d'ordonnance et soustraire de la compétence de l'Office une demande de certificat d'autorisation. Quant à eux, les articles 80 à 84 traitent d'une série d'éléments qui devront relever de l'Office, avec la restriction suivante: «sauf dans le cas où le gouvernement en décide autrement». De plus, l'article 31 précise que l'autorisation de tout projet connexe à un projet soumis à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement sera de la responsabilité du ministre et non de l'Office.

Les mécanismes de révision et d'appel. Dans la forme actuelle du projet de loi, les mécanismes de révision et d'appel ne portent que sur les actes posés par l'Office concernant l'émission de certificats ou de permis. Il n'est prévu aucun forum où pourraient être débattues des questions portant à interprétation.

La législation en matière d'environnement est récente et en évolution constante. Il y a donc peu de jurisprudences sur lesquelles pourront s'appuyer les employés de l'Office lorsque la législation peut laisser place à interprétation. La création d'un forum indépendant auquel pourrait être soumis ce genre de question serait souhaitable. Il permettrait, entre autres, de faire le pont entre l'organisme qui fait les lois et celui qui les applique.

La structure de fonctionnement de l'Office devrait, du moins dans ses grandes lignes, être définie dans sa loi constituante. Ce souhait vise tout particulièrement les moyens que prendra l'Office pour assurer une certaine uniformité dans l'étude des dossiers qui sont de sa juridic- tion.

Dans la mécanique actuelle du ministère, il existe peu d'outils - guides, directives, etc. -qui permettent d'assurer que les lois administrées par le ministère de l'Environnement le soient de façon semblable dans les 12 directions générales de son ministère, et ce, même en tenant compte des particularités régionales.

En conclusion, le groupe Sani Mobile voit d'un bon oeil la création d'un Office de protection de l'environnement, mais émet les réserves suivantes: premièrement, l'Office devrait être créé seulement si le gouvernement garantit qu'aucun crédit dévolu présentement à la mision du ministère de l'Environnement ne sera détourné vers des fonctions administratives; deuxièmement, le projet de loi devrait être modifié afin de garantir son autonomie face à d'éventuelles ingérences politiques; troisièmement, qu'un forum indépendant soit créé. Son mandat serait d'interpréter toute question laissant place à interprétation et de pouvoir recommander au législateur de modifier un texte de loi désuet ou dont l'application est impossible. Toute personne ou entreprise pourrait s'adresser à ce forum. De plus, il pourrait agir comme interface entre le ministère et l'Office dans les questions relevant de ses compétences. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiens à remercier le groupe Sani Mobile de sa présentation. Vous êtes des acteurs sur le terrain de façon quotidienne. L'objectif visé par la démarche est de créer un Office en permettant au ministère de se concentrer sur son travail de législateur, de planificateur et de rendre l'Office plus performant pour des clients comme vous autres et comme le reste de la population.

Vous avez mentionné que vous êtes présents dans l'ensemble des régions du Québec ou à peu près, 16 filiales. Vous faites déjà affaire avec le ministère, au central. Vous faites déjà affaire avec nos bureaux régionaux, dans les régions du Québec. Vous n'avez pas traité de la question de l'uniformité des décisions à travers les différents bureaux régionaux et j'aimerais vous entendre sur ce sujet.

M. Cossette: Effectivement, on n'en a pas parlé. Je pense que, pour nous, c'est le problème numéro un, au niveau de nos activités courantes, à savoir qu'on a 12 régions et 12 façons d'aborder l'environnement différentes. On a peu de directives communes sur comment appliquer la loi. La loi est quand même assez vague et vous avez des directions régionales qui pourraient émettre un certificat d'autorisation. Prenons un exemple: si on prend le cas concret où on a un équipement qu'on retrouve dans plusieurs régions, vous avez une région qui va vous donner un certificat d'autorisation dans les 15 jours, 3

semaines suivantes et une autre région qui va vous refuser l'émission du certificat d'autorisation, et vous avez la gamme complète entre les deux. Donc, il est très difficile actuellement de faire affaire avec les opérations régionales du ministère.

Le seul passage qu'on met, c'est que l'Office ne prévoit pas sa structure de fonctionnement dans sa loi constituante et on n'est pas nécessairement prêts à lui donner le bon Dieu sans confession, pour le moment, comme ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur la question administrative et des coûts, je tiens à vous rassurer. C'est un projet de loi qui a été véhiculé à travers l'appareil gouvernemental et les gens au Conseil du trésor, dont c'est la tâche et la responsabilité, s'assurent qu'en créant un nouvel organisme, si le ministre prétend que c'est à coût nul, les tâches de comptabilité juridique, celles que vous avez mentionnées, sont effectivement à coût nul comme tel. Sur le plan des arrangements, c'est le Conseil du trésor avec l'administration du ministère qui font ces arrangements-là, mais il n'y a pas de taxe additionnelle ou de coût additionnel sur le plan administratif une fois qu'on a franchi l'étape du Conseil du trésor.

M. Cossette: Notre inquiétude n'est pas nécessairement d'un coût additionnel pour nous, comme entreprise ou comme payeurs de taxes. Par contre, ce qu'on ne voudrait pas, c'est que ce soit des postes qui sont dévolus actuellement à une mission environnementale, qui soient coupés pour permettre de créer des postes administratifs qui doivent être dédoublés.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Essentiellement, vous prenez le réseau des bureaux régionaux, qui comptent quelque 600 fonctionnaires à travers les 12 régions au Québec, et vous renforcez vos régions en prenant des gens à la centrale et en les envoyant dans les régions, mais pas des gens qui font déjà de la législation. À titre d'exemple, le contentieux. Les gens qui sont des légistes ne s'en vont pas dans les bureaux régionaux - je ne sais pas s'il y avait des inquiétudes - ils demeurent a Québec. Mais les avocats plaideurs peuvent être dirigés, par exemple, vers les régions.

Sur le plan de la gestion administrative, présentement, nous gérons 1800 personnes-année au ministère. Il y a des équipes administratives. Il est certain que certaines personnes à l'administration vont ère dévolues vers l'Office de façon à devenir des agents de l'administration comme tels de l'Office, mais on ne prend aucune mission qui est accomplie au ministère sur le plan environnemental comme tel pour substantiellement la modifier. Le programme qui va être le plus affecté, qui est au central présentement, est le programme de réduction des rejets indus- triels, qui est en phase de démarrage. Et c'est le temps de l'affecter. Ce n'est pas une fois qu'il sera démarré, une fois que les attestations d'assainissement seront émises qu'on pourra prendre ce programme-là et le régionaliser par la suite. Si on commence rapidement en le régionalisant, si l'entreprise va chercher son certificat dans sa région, avec une autorité d'émission à l'Office, elle va arrêter de se promener entre la région et le central, puis entre le central et la région, etc. C'est ce qu'on recherche.

Deuxièmement, en permettant des pouvoirs de révision des décisions au niveau de l'Office, on vise à créer une uniformité des décisions à travers toutes les régions pour ne pas que vous viviez ce que vous avez mentionné.

Sur le plan de l'autonomie, nous prenons note de vos remarques. Elles sont répétées par d'autres groupes également et elles nous préoccupent. Nous allons probablement proposer des modifications à cet aspect du projet de loi.

Forum indépendant. Moi, j'aimerais vous entendre davantage. Ça semble vous préoccuper.

M. Cossette: Énormément.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Cossette: Dans le sens que votre mécanisme de révision est spécifique à des demandes d'autorisation. Si vous avez des questions d'ordre... Encore là, je vais prendre un exemple concret. On a un dossier qu'on discute avec le ministère depuis environ trois ans sur la question: Est-ce que de l'eau contaminée est un déchet dangereux, oui ou non? On n'a pas de... Ça, c'est dans le mécanisme - je ne vise personne en particulier - c'est la structure qui est ainsi faite. Si vous n'avez pas, dans la structure, un lieu commun où on pourra travailler ensemble pour discuter du problème en question, pour essayer d'avoir des définitions claires... Dans ce cas-là, ce n'est pas une demande de certificat d'autorisation; c'est une demande de clarification: Est-ce que tel type d'activité rentre dans tel cadre ou dans tel autre cadre? C'est surtout ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça, là-dessus, je peux vous répondre. Présentement, ça fait partie de la problématique.

M. Cossette: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La personne en région, parfois, a l'autorité d'émettre le certificat d'autorisation, mais, compte tenu que la question est complexe, réfère au central, au niveau du ministère, à la même personne qui, généralement, participe à la définition de la problématique.

M. Cossette: Toutefois, elle n'est pas tenue de respecter ce que la personne au central a

décidé. Et c'est là des fois que ça accroche.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et voilà! Quotidiennement, parce que la personne ne veut pas prendre la chance en région, puis que la personne au central ne veut pas lui imposer son autorité, là, vous subissez des délais qui font en sorte que la décision ne se prend pas et, dans l'incertitude, il n'y a rien qui avance.

Ce que l'on propose comme mode de fonctionnement avec l'Office, c'est que l'autorité, pour prendre la décision finale, va demeurer, va être consacrée au niveau de la région par la création de l'Office comme telle. Mais nous conservons à Québec, au bureau central, des gens dont l'expertise va être de planifier la réglementation, de mieux la définir. (10 heures)

Présentement, nous sommes en révision sur les déchets dangereux. Nous avons fait adopter par l'Assemblée nationale la loi sur les matières dangereuses et nous sommes à la veille d'une prépublication d'un nouveau règlement sur les matières dangereuses. Ces équipes-là vont demeurer. Mais, présentement, on a de la difficulté à faire en sorte que la région prenne la décision parce qu'elle veut s'appuyer sur Québec et Québec ne veut pas délaisser son autorité ou son pouvoir, si je peux dire, en fonction de la région. Et, si on ne crée pas ce mur par la création d'un organisme qui est l'Office, nous allons perpétuer cette indécision entre la région... Puis, tout le monde a semblé d'accord avec le processus de régionalisation qui a été entrepris il y a un an et demi au ministère. Mais, si on veut que ça fonctionne, la régionalisation, il faut faire en sorte que la personne, elle soit condamnée à prendre la décision en région. Et, si on a un office, elle va être condamnée à décider en région et elle ne pourra pas dire que c'est Québec qui décide à sa place.

M. Cossette: O.K. Mais, il resterait quand même important d'avoir un lieu central à l'Office même. Je ne voudrais pas qu'on recommence à jouer, comme on l'a déjà vu, le central du régional, comme quand on a déjà eu des comités de coordination des opérations régionales, où on aurait, comment pourrais-je dire... Si c'est la région qui prend la décision ultime, on ne peut pas s'assurer... Les gens sont tous des êtres humains, donc, chaque chargé de projet va penser différemment. Si c'est la région qui prend une décision, comment me garantir que la décision est équitable dans les 12 régions?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! C'est que vous avez un droit de révision, là.

M. Cossette: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La façon d'uniformiser...

M. Cossette: Mais ça, ça va si vous avez une demande... C'est toujours en fonction de demandes de certificat d'autorisation. C'est comme si l'Office ne faisait que l'émission de certificats d'autorisation. Il faudrait élargir le mandat à toutes les décisions que l'Office peut rendre, pas juste à celle de l'émission de certificats d'autorisation. Si vous me dites, demain matin, que je n'ai plus le droit de faire telle activité, ce n'est pas une demande de certificat d'autorisation.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va. Si vous me dites demain matin... Donnez-moi un exemple pratique.

M. Cossette: O.K. Je reviens à mon eau, ça va être encore plus simple.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va, c'est aussi bon.

M. Cossette: Demain matin, vous me dites: De l'eau contaminée lors d'un procédé industriel, c'est un déchet dangereux. Ça, c'est dans une région qu'on me dit ça. Le lendemain matin, l'autre région me dit: Non, d'après moi, de l'eau de lavage, ce n'est pas un déchet dangereux. Mais, là, je fais quoi avec ça? J'ai deux régions qui agissent différemment.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais vous me demandez ça dans le cadre d'une...

M. Cossette: Si je marche par le processus légal, tout le processus, on a des délais qui sont quand même longs. On a des entreprises qui, du jour au lendemain, devront cesser leurs opérations, soit dans le traitement de déchets dangereux ou le nettoyage industriel parce qu'on nous dit: Non, là, ça ne marche pas. Il faudrait que vous alliez devant les tribunaux. Allez faire la jurisprudence pour nous autres, pour nous dire si, oui ou non, on a raison.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais, ça, on ne pourra jamais l'empêcher. Parfois, ça sert l'entreprise de faire ça, puis parfois ça sert le ministère, mais, sur le plan de la définition comme telle, je conçois que le règlement qui existe encore sur les déchets dangereux est un règlement qui est vicié. On a eu tout le monde qui...

M. Cossette: Oui, O.K. J'ai peut-être pris un mauvaise exemple en parlant de déchets dangereux. On peut en prendre un autre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est un exemple avec lequel vous êtes confrontés, puis on ne prétendra pas que c'est un bon règlement. Il nous empêche de faire des choses au Québec présentement et c'est pourquoi

l'Assemblée nationale a décidé de ne plus parler dé «déchets dangereux», mais de «matières dangereuses» de façon à permettre à l'entreprise de recycler les affaires qu'on vous interdisait avant; c'était nocif pour l'environnement, notre règlement sur les déchets dangereux comme tels. Mais, à partir du moment où on arrive avec une nouvelle réglementation, il est certain, et ça, on ne pourra pas l'éviter, quelle que soit la formule, que, dans un cas où on va prendre quelqu'un en défaut ou on va penser le prendre en défaut, il va aller devant les tribunaux.

Moi, je pense à pâte et papier. On a perdu un procès dans la Mauricie qu'on pensait avoir bien monté parce qu'une compagnie astucieuse a prétendu que ce n'était pas de la pâte, puis du papier, que c'était du carton qu'elle fabriquait, etc. Les procédés dans les plastiques sont encore plus évolutifs et, dans les autres éléments, on va toujours avoir ce type de problématique là. Le ministre n'a pas l'intention de prétendre que l'Office va éliminer complètement ce genre de problématique là. Les tribunaux vont conserver un rôle. On tente de l'amenuiser; on tente de clarifier les choses pour qu'il y en ait moins qui aillent devant les tribunaux, mais, au total, il va demeurer des problèmes.

M. Cossette: Ça va.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le financement, vous parlez des moyens. Vous m'inquiétez un peu parce que vous êtes des gens généralement bien renseignés. À la première page de votre mémoire, vous stipulez qu'«il serait étonnant que de nouveaux crédits soient octroyés au ministre de l'Environnement si l'ensemble de ses responsabilités demeure inchangé». Moi, je vous soumettrai bien respectueusement que, même si les responsabilités demeuraient inchangées, le ministère de l'Environnement a absolument besoin de nouveaux crédits de façon à s'assurer de l'exécution des mandats actuels. Vous êtes des intervenants importants du côté économique et environnemental, qu'est-ce qui vous inspire une telle déclaration?

M. Cossette: Disons qu'effectivement vous avez probablement besoin de ces budgets-là. Quand je dis que nous sommes étonnés, c'est qu'entre la volonté du ministère de l'Environnement ou de son ministre de bien agir et la volonté générale d'un gouvernement il y a peut-être un écart, sans aller plus loin.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement sur le plan des budgets, il y a deux ans, le ministre des Finances a annoncé, pour les cinq prochaines années, 50 000 000 $ en recherche et développement à l'Environnement.

M. Cossette: Et combien d'argent avez-vous pu octroyer cette année en recherche et déve- loppement?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On commence à peine. Et je suis content que vous le souligniez. Les grandes entreprises sont équipées généralement pour faire affaire avec la portion de notre programme de recherche et développement qui s'adresse aux projets majeurs.

M. Cossette: D'accord.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et qui est arbitré dans le cadre du Fonds de développement technologique. Nous avons manqué de demandes, si vous me demandez mon opinion, au niveau de la PME.

M. Cossette: Par contre, nous avons...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau de la PME québécoise, le programme n'est pas suffisamment connu. Je profite de l'occasion pour vous souligner son existence. Parlez-en. Il n'y a rien que je déteste plus, comme ministre de l'Environnement, que de ne pas dépenser les crédits qui sont mis à notre disposition par les membres de l'Assemblée nationale.

M. Cossette: Je vous réfère à M. Proulx là-dessus.

M. Proulx (Paul-André): Lorsque vous référez au Fonds de développement technologique qui existait avant...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais il y a un nouveau volet environnemental.

M. Proulx: Oui, oui, je sais. Vous parlez du nouveau volet environnemental dont on peut toujours dire qu'il vient d'arriver et puis qu'on peut attendre un petit peu pour en voir les effets. Il est nettement mieux que l'ancien volet; de toute façon, pour n'importe quel expert qui travaillait dans le domaine, l'ancien volet du programme de développement technologique ne s'adressait pas, mais pas du tout, aux PME. Il s'adressait uniquement à la grande entreprise et à ceux qui avaient les moyens assez puissants pour être capables de mettre les sommes d'argent requises. Le nouveau volet s'adresse à des projets plus petits, donc plus accessibles. Peut-être que des entreprises comme Sani Mobile... On commence présentement à y penser, mais ça demeure encore de très gros dossiers a préparer.

Par rapport à la problématique de l'émission des permis et puis de l'Office, ce que je peux vous dire, moi, en tant que directeur de l'environnement, c'est que ce qui nous agace le plus présentement, c'est que, même au niveau du développement technologique, ce qui nous retarde actuellement, c'est l'émission des permis. On a, dans certains cas, des permis qui retardent

depuis plus d'un an. On a, dans certains autres cas, des unités qui ont été développées, des sommes d'argent importantes qui ont été investies, et ces unités-là doivent rester inopérationnelles dans la cour, parce que les permis ne sont pas émis, parce que c'est toujours à l'étude.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais rejoindre peut-être une question qu'on a posée hier à d'autres intervenants. Il y a deux écoles de pensée au ministère de l'Environnement quant à l'approbation des plans et devis ou des normes qu'on a à édicter. Une école de pensée veut que le ministère de l'Environnement fixe par réglementation ses normes de rejet dans l'eau, dans l'air et dans le sol, et laisse le secteur privé, avec ses ingénieurs, libre de concevoir la technologie pour rencontrer les objectifs environnementaux qui sont fixés par le ministère. L'autre école de pensée veut que le ministère approuve le processus au complet par ses ingénieurs, à l'intérieur du ministère. Il y a déjà d'autres groupes qui se sont prononcés. L'industrie forestière, hier soir, si ma mémoire est fidèle. Quelle école de pensée ou quelle approche privilégiez-vous?

M. Proulx: Je vous dirais vis-à-vis de ça que c'est une question qui contient des pièges. Quelle que soit l'école de pensée, pour nous, il y a des pièges évidents. Écoutez, si vous vous fiez sur les normes et puis si les normes que vous adoptez sont basées, par exemple, sur un pays comme les Pays-Bas qui ont adopté les normes internationales parmi les plus sévères au monde et qui - on peut en discuter longtemps - ne sont peut-être pas appropriées dans certains cas au Québec... Quand on parle de normes qui sont en deçà des limites de mesure de nos instruments de laboratoire, on ne peut pas développper de procédés qui vont rencontrer de telles normes. Alors, on va toujours se frapper à la problématique de dire: Écoutez, vous êtes avec des normes qui sont exagérément basses par rapport à ce qu'on est capable techniquement de faire. On se frappe à ce moment-là à un problème, si on prend l'approche «normes».

Si on prend l'approche «processus», le problème, là, finalement, on le vit un peu. Quand on fait affaire avec vos ingénieurs, spécialistes du central du ministère, bon, Ils sont assez spécialisés dans leur domaine pour comprendre le processus dont on parle. Ils ont une vue assez large pour être capables de nous suivre lors du développement technologique. Quand on parle avec les gens des régions, qui ont à traiter une grande quantité de dossiers que j'appellerais standards ou réguliers, qui n'ont pas le temps d'approfondir des processus de technologie, ces gens-là ne nous suivent plus du tout. Ce n'est pas la création d'un office qui va changer ça. La problématique qu'on a à ce moment-là, c'est que ces gens-là, se sentant dépassés, prennent un certain temps, ont une certaine hésitation pour finir par référer le problème au ministère et là les délais commencent parce qu'ils se renvoient la balle, comme vous l'avez dit tout à l'heure.

Vous nous proposez une nouvelle structure. Dans le fond, ce qui nous intéresse avant tout, c'est que les délais soient réduits; c'est la première chose qui nous intéresse. Je pense qu'en tant que clients on veut avoir un service de qualité. Que ce soit un ministère, une division, un office, ce qu'on veut avoir, c'est un service de qualité. Pour nous, la qualité, dans ce cas-ci, ça se pose surtout en termes de délai parce que ça nous coûte très cher. Ce qu'on fait présentement, c'est qu'on a, par exemple, une option pour acquérir une technologie étrangère, mais on a dit: Avant de dépenser des centaines de mille dollars pour l'acquérir, on va commencer par demander des permis, ça va prendre un an, on va sauver un an d'intérêt et, après ça, tu sais... Mais c'est un processus qui, finalement, retarde et, durant ce temps-là, on ne peut pas mettre en opération des technologies qui viendraient régler des problèmes environnementaux.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): sur le plan des délais, qui est une question majeure et importante, est-ce que vous pourriez comparer la qualité de notre service ou son manque de qualité avec d'autres juridictions, en ontario, par exemple, etc? est-ce que vous avez ce type d'information?

M. Proulx: Pas avec l'Ontario, mais je peux le comparer avec d'autres ministères.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Proulx: Parce qu'on fait affaire avec d'autres ministères, que ce soit pour des demandes de subventions ou des demandes... De façon générale, on peut dire qu'à l'Environnement c'est plus long...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Proulx: ...actuellement que les autres ministères, donc les autres systèmes gouvernementaux. Là, je ne parlerai même pas de l'entreprise privée.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous iriez aussi loin... Et je vous le donne à titre d'exemple: dans le processus des évaluations environnementales, lorsque le dossier est confié au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement et que le processus public est déclenché, les délais sont de rigueur et sont indiqués à partir du déclenchement du processus. Dans la réglementation, c'est quatre mois à partir du moment où le ministre passe la commande. Est-ce que vous iriez aussi loin que d'Imposer des délais fixés par loi ou par réglementation pour mieux

satisfaire la clientèle?

M. Proulx: Je crois qu'on peut toujours utiliser une loi ou une réglementation pour mettre des délais, mais...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quelle est la sanction?

M. Proulx: ...rien ne remplacera une action ou un organisme qui dévolue son action sur la qualité du service aux clients. La loi ne remplacera jamais ça. Si vous voulez un exemple, un cas étranger qu'on a vécu, une technologie qu'on regardait, qui venait d'un pays étranger. On leur a demandé à eux autres: Comment avez-vous fait vos démarches pour aller chercher vos permis d'opération dans votre pays? Pour vous donner une idée, en avril, ils ont déposé leur dossier. Au début du mois de mai, un représentant de leur région communiquait avec eux pour fixer une rencontre des spécialistes du central, des spécialistes de la région et de la compagnie, la semaine suivante. La journée qui a suivi la réunion, le spécialiste en question a écrit un procès-verbal résumant la rencontre et donnant à la compagnie les points où elle devait soumettre des analyses. La compagnie a pris trois mois pour faire les analyses. Au mois d'août, elle a resoumis un dossier à l'Environnement avec l'ensemble des analyses qui avaient été demandées suite à la réunion; une semaine après, elle a eu l'octroi de son permis.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quel pays? M. Proulx: Aux États-Unis.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quel État? M. Lazure: Merci, M. le Président. Des voix: Maine.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maine. O.K. Ça va.

M. Lazure: Je veux saluer les représentants de Sani Mobile au nom de l'Opposition et les remercier de venir nous présenter leur point de vue. Vous avez beaucoup insisté ces dernières minutes sur les délais et avec raison. Vous avez même dit: Nous, la notion de service venant de votre ministère, c'est essentiellement associé aux délais, à la rapidité du service. (10 h 15)

Vous avez raison d'être sceptiques. Ce n'est pas vrai que la création d'un office en soi, ça va donner la garantie d'un service accéléré. Ce n'est pas vrai. Ce sont les mêmes équipes qui vont travailler en région. Et ce n'est pas exact non plus de dire, comme le ministre l'a fait depuis deux semaines, qu'avec l'Office les régions pourront avoir toute l'autorité pour décider. Eh bien, il n'en tient qu'à lui de donner l'autorité actuellement aux régions pour décider. Il peut très bien le faire, il y a des ministères qui le font, mais il s'acharne à vouloir utiliser une formule magique: cet Office-là qui va donner l'autorité aux régions.

C'est un peu un écran de fumée parce que cet Office va avoir un conseil d'administration, mais il va avoir aussi des dirigeants. Ce n'est pas vrai que, dans chaque région, ils vont être complètement autonomes et qu'ils ne vont relever de personne. Ils vont relever d'une autorité centrale, de toute évidence. Et, là, je rejoins le début de votre mémoire. Je pense que vous être le premier groupe à mettre l'accent sur le gaspillage de fonds inhérent à la création d'un office. Vous avez raison de souligner ça, les aspects économiques du projet, autrement dit. On a beaucoup parlé des aspects fonctionnels du projet, mais les aspects économiques sont importants. Alors, c'est un gaspillage. Le plus gros client du ministère de l'Environnement, qui s'appelle Hydro-Québec, est venu hier. On voit dans les journaux de ce matin le gros titre: «Scinder le ministère de l'Environnement - créer un office - entraînera délais, coûts et aucun effet positif, croit Hydro-Québec».

Vous dites: On n'est pas contre l'Office, mais on est un peu inquiets quant à la façon de fonctionner. La plupart des gens non seulement sont contre la création de l'Office, mais ont fait ressortir tous les inconvénients d'une telle création. Il y a, ce matin aussi, dans un journal, un editorial titré: «Le fantôme et le pompier», le fantôme étant l'Office, le futur Office, je suppose, et le pompier étant le ministre. Alors, le fantôme et le pompier. Là, je vais rejoindre le mécanisme de révision; vous avez fait des commentaires là-dessus, puis j'aurai une question à vous poser.

Une voix: Martine Corrivault? M. Lazure: Par Marie Caouette. Une voix: On ne la connaît pas.

M. Lazure: Les commentaires qu'elle fait sur le mécanisme de révision des décisions, c'est intéressant. Elle dit: «C'est l'Office lui-même qui nommerait les personnes chargées de réviser les dossiers contestes. Il est difficile de croire qu'on puisse encore songer, en 1992, à mettre sur pied un tribunal administratif aux mains liées de cette façon» à l'avance. Autrement dit, par le mécanisme proposé, à supposer qu'il y ait un office, c'est l'Office lui-même qui va désigner son comité de révision; alors, ça fait plus ou moins sérieux. L'éditorial conclut en disant: «Le brouil-

Ion du ministre ne mérite pas la note de passage.» C'est ce qu'on lui dit depuis deux semaines.

Le ministre a dit: L'Office va donner autorité finale aux régions; deuxièmement, l'Office va assurer que les décisions vont être uniformes. C'est le terme qu'il a employé, «uniformes». Mais ça, l'uniformité aussi, c'est possible de la faire dès maintenant, sans créer un office. C'est pour ça que les gens ne comprennent pas pourquoi il s'acharne à vouloir créer un office. Il n'a qu'à faire son travail, lui et les dirigeants de son ministère, à s'assurer que tous les pouvoirs de décision finale seront donnés à chaque région, mais dans un cadre uniforme. C'est ça que tout le monde nous demande.

Troisièmement, il n'a qu'à s'assurer que des délais raisonnables vont être respectés. On n'a pas besoin d'un office pour ça. C'a été fait dans la loi qui a créé le bureau d'audiences publiques; le BAPE, comme vous le savez, a des délais très clairement identifiés. Alors, le ministre pourrait très bien faire la même chose; il n'a même pas besoin de loi pour ça. Il pourrait très bien, ne serait-ce que par des directives administratives, au moins établir un guide sur le délai minimal et le délai maximal pour l'émission de chaque permis, de chaque autorisation ou de chaque décision. De cette façon-là, on économiserait de l'argent, mais aussi, surtout, on cesserait de miner le moral des fonctionnaires dans son ministère. Vous savez, les fonctionnaires du ministère de l'Environnement ont eu 6 réformes majeures en 12 ans, une tous les 2 ans. Ça prend ça, à peu près, un an ou deux, avant de digérer une réforme. Elle est à peine digérée qu'on arrive avec une autre. Il y a des indigestions de réformes dans ce ministère-là. Le ministre, au lieu d'assumer son leadership politique, de faire de l'animation dans son ministère et dans les régions, s'acharne à vouloir venir en commission parlementaire et présenter des projets de loi pour créer des nouvelles structures.

Je reviens au comité de révision, le comité d'appel ou le comité de révision. Vous dites: «II n'est prévu aucun forum où pourraient être débattues des questions portant à interprétation». Vous avez donné quelques exemples au ministre tantôt, suite à vos questions. Mais, moi, personnellement, j'ai un peu de mal à voir un forum indépendant. Ça serait comme un comité consultatif? Est-ce qu'il serait décisionnel, ce forum-là, ou s'il serait consultatif? Pouvez-vous en parler un peu plus?

M. Cossette: Dans notre esprit, on le voit comme les comités consultatifs qui existent déjà, soit le comité consultatif de l'environnement ou celui dans les régions nordiques qui sont déjà prévus dans la loi. Ce sont des organismes qui font des recommandations aux organismes décisionnels. Si on les met décisionnels, on risque peut-être, à ce moment-là, d'avoir plus quelque chose qui ressemble aux CTO, comme on les appelle actuellement, où on a deux sous-ministres qui siègent et qui doivent trancher des décisions. Il faudrait aller vers l'un ou l'autre. La logique voudrait plus que ça soit consultatif, mais avec des gens et de l'Office et du ministère et peut-être des experts externes qui sont invités ad hoc.

M. Lazure: Dans les commentaires que vous faites sur les aspects politiques, ce que vous appelez l'ingérence politique...

M. Cossette: Oui.

M. Lazure: ...vous souhaiteriez que l'Office soit complètement indépendant pour éviter l'ingérence politique.

M. Cossette: Exact.

M. Lazure: Là, j'ai de la misère à vous suivre complètement, par exemple, parce qu'il s'agit de fonds publics. Il s'agit de décisions qui affectent la sécurité, la santé du public et c'est l'administration de fonds publics. Comment peut-on confier ça à un organisme complètement autonome qui ne répondrait pas à l'Assemblée nationale, qui ne répondrait pas au public de ces fonds-là?

M. Cossette: L'Office peut répondre une fois par année au public, a un rapport annuel à présenter. L'Office peut avoir un cadre spécifique qu'il doit respecter. Mais vous dites à l'Office: Peu importe le ministre qui se remplace et peu importe la couleur que le ministre aura, il peut donner des directives, du moment que son Conseil des ministres l'aura entériné, que l'Office devra obligatoirement respecter. Donc, le ministère, ou le ministre, ou le Conseil des ministres peut donner des orientations à l'Office sur comment il devra faire son travail. Ensuite, vous dites: Lorsque l'intérêt public l'exige, on peut passer par-dessus l'Office. C'est quoi, ça, «lorsque l'intérêt public l'exige»?

M. Lazure: Je pense que c'est un peu normal qu'il y ait une poignée, pour ainsi dire.

M. Cossette: Oui.

M. Lazure: on ne peut pas prévoir toutes les situations dans la vie. alors, dans une situation catastrophique, une situation extraordinaire, c'est normal...

M. Cossette: Soit!

M. Lazure: ...que le gouvernement dûment élu par la population ait le pouvoir d'intervenir. À ce moment-là, il répondra de ses actes. Mais

un Office comme vous le proposez, qui répondrait de ses actes simplement par le rapport annuel, ça, ce n'est pas beaucoup, beaucoup de... Je veux dire, ça ne donne pas de sécurité à la population qu'elle pourra le questionner par ses députés ou autrement à l'année longue, pas juste une fois par année.

M. Cossette: Oui. Par contre, vous désirez aussi qu'un ministère de l'Environnement ou qu'un office de protection de l'environnement ait une crédibilité face au public et, actuellement...

M. Lazure: II n'en a pas.

M. Cossette: ...il n'en a pas, et ça, ce n'est pas récent. Il y en a rarement eu. Si vous le laissez trop...

M. Lazure: II est prudent. Oui, c'est bien. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Vous en embrassez large. C'est ça. C'est correct.

M. Cossette: bon. si vous le laissez trop dépendant ou trop près du pouvoir politique, vous ne lui permettrez pas d'obtenir cette crédibilité-là.

M. Lazure: Mais je voulais simplement me dissocier un petit peu de votre position...

M. Cossette: O.K.

M. Lazure: ...qui, à mon avis, confond un peu politique et partisan. je suis d'accord avec vous qu'il faut éliminer, autant que possible, l'ingérence partisane.

M. Cossette: Oui.

M. Lazure: Mais l'exercice normal des responsabilités politiques par les élus, ça, on n'y échappe pas et on ne doit pas y échapper. Et j'ai eu l'occasion de le dire hier: S'il y a un élu choisi par le gouvernement pour être à la tête du ministère de l'Environnement, s'il y a un ministre qui doit tous les jours répondre de ses actes, c'est bien lui et c'est une des raisons nombreuses pour lesquelles on dit: L'Office va venir brouiller les cartes, l'Office va venir jeter un peu de confusion dans l'esprit du public. Est-ce que c'est le ministère qui est responsable de cette situation-là? Est-ce que c'est l'Office? On a beau dire théoriquement: Le ministre répond de l'Office, mais, dans la réalité, il va souvent se cacher, le ministre, derrière des prétextes juridiques, légalistes, pour dire: Ah! Ça, c'est la décision de l'Office, je la respecte.

M. Cossette: Bon. À ce moment-là, est-ce qu'on peut regarder le problème autrement? Si vous regardez le domaine judiciaire, vous avez des tribunaux. Vous avez un ministère de la Justice qui fait des lois, mais les tribunaux sont complètement indépendants du système politique. Bon. Est-ce qu'on ne pourrait pas tendre vers cette approche-là face à l'environnement?

M. Lazure: Oui, mais, là, ça ouvre... M. Cossette: L'Office n'a pas...

M. Lazure: ...une autre piste qui a été exploitée par des personnes qui sont venues hier, en particulier, qui nous disent: Ce projet de loi créant l'Office va rendre encore plus judiciaire l'approche des fonctionnaires du ministre en matière d'environnement, va judiciariser, va créer un climat d'affrontement. On nous a dit ça pas plus tard qu'hier. Et les gens disaient: Faisons donc de la prévention, faisons donc de la concertation plutôt que de renforcer presque exclusivement le bras de l'observation des règlements, des lois et la poursuite.

M. Cossette: Oui.

M. Lazure: ii faut le faire. il faut qu'il y ait une surveillance adéquate des règlements et des lois, mais il ne faut pas que ce soit la principale approche.

M. Cossette: Par contre, je ne crois pas qu'on dise que ça va amplifier, c'est déjà comme ça actuellement. Vous pouvez contester une décision du ministère devant les tribunaux, ce côté juridique existe présentement. Et, de toute façon, vous avez une philosophie de pensée souvent au niveau du ministère qui est de dire: La personne devant vous est coupable et c'est à elle de justifier pourquoi elle fait une demande.

M. Lazure: Je vous pose une question plus générale. Toutes les doléances que vous avez...

M. Cossette: Oui.

M. Lazure: ...sur tous les ministères de-l'Environnement - pas seulement celui-ci, mais les autres avant aussi, comme vous le disiez - notamment les délais, d'après vous, est-ce que ça ne pourrait pas être corrigé dans la structure actuelle du ministère?

M. Cossette: Tout à fait.

M. Lazure: Tout à fait. Bon. Je pense que votre réponse est éloquente. Et, nous, on pense ça aussi. Nous, on pense ça et presque tout le monde pense ça. Bon. Le ministre, quand même - et c'est ça qui est un peu dommage parce que ça met les gens sur des fausses pistes - dit: Autorité en région? Vous allez l'avoir avec

l'Office. Autonomie des régions? Vous allez l'avoir avec l'Office. L'uniformité de décision, dont vous déplorez l'absence actuellement, vous allez l'avoir avec l'Office. Mais tout ça, nous, on dit - et vous aussi vous venez de le dire - que ça pourrait se faire dès maintenant, à l'intérieur même du ministère. Merci, M. le Président, pour le moment.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur ce dernier élément...

M. Cossette: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...nous avons tenté, il y a deux ans, de définir les fonctions à l'intérieur du ministère de façon beaucoup plus précise et plus claire. Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner, l'organigramme du ministère s'était bâti dans les huit ou neuf premières années, à partir de l'évolution des crises. (10 h 30)

M. Cossette: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si on avait une crise de déchets dangereux, on créait une direction des déchets dangereux; si on avait une crise de pneus, on avait pratiquement une direction des pneus. L'organigramme du ministère, c'était à peu près ça, il y a deux ans. On a tenté de le clarifier et de le simplifier. Ça fait partie des restructurations. Il y a quelqu'un qui m'a dit tantôt: Moi, je les ai toutes vécues, les restructurations au ministère de l'Environnement. Clarifier les missions.

M. Cossette: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On s'est dit qu'il y a trois secteurs de pollution importants: l'industriel, l'agricole et le municipal. L'action va se faire en région. Il s'agit de donner un meilleur service, développons nos bureaux régionaux. Depuis deux ans, nous les avons beaucoup développés dans toutes les régions du Québec. Pendant qu'on fait ça, qu'on corrige le passé, qu'on prend soin du présent, il faut penser à maîtriser l'avenir: sous-ministériat au développement durable. On a tenté avec cette approche d'avoir l'approche à l'interne, comme vous dites, la plus efficace possible. Ce n'est pas suffisant. On avait un taux d'insatisfaction de la population qui était de 70 %, il y a deux ans, envers le ministère de l'Environnement. Il est encore de 48 % et c'est encore insatisfaisant pour le ministre de l'Environnement et pour le gouvernement actuel.

La régionalisation, tout le monde a dit: On est d'accord. Elle nous a causé des problèmes, la régionalisation. Elle nous cause des problèmes de délais. Moi, ce que je vous dis, c'est que, la nature humaine étant ce qu'elle est, à moins de condamner la région à prendre la décision par l'implantation d'une structure, nous allons perpétuer l'introduction du dossier à la région, la non-prise de décision par la région même si, par mémo, nous tentons de corriger ça sur le plan de la gestion, la consultation au central même pour des questions qui ne devraient jamais y aller, dont les compétences reposent dans les régions, parce qu'on ne veut pas prendre la responsabilité lorsqu'on n'est pas obligé de la prendre. C'est rare, les gens qui courent après les responsabilités alors qu'ils peuvent se couvrir avant de prendre ladite responsabilité. Si vous avez une recette magique à l'intérieur pour corriger cette réaction humaine qui va être là, que ce soit quelque ministre de l'Environnement que ce soit, moi, j'aimerais la connaître, cette formule-là.

M. Proulx: J'aimerais intervenir sur la question de l'uniformité qui est très importante et qui peut aussi être dommageable pour les opérations d'une entreprise qui se permet des opérations dans une région alors que l'autre région ne le permet pas.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas facile pour la compétition.

M. Proulx: Non, ce n'est pas facile pour la compétition. Effectivement, je suis d'accord avec vous que, les êtres humains étant ce qu'ils sont, ils sont tous différents les uns des autres et, quand on parle d'interprétation et que chacun a son niveau d'interprétation, on entre dans des difficultés. C'est une des portes qui nous tient à coeur. On a beaucoup parlé des délais; il faut aussi beaucoup parler d'uniformité. Mais, encore là, je ne vois pas nécessairement la création de votre Office comme étant une réponse à ça. La création de l'Office, vous savez, c'est une structure. Que les gens en région soient formés d'une façon commune à l'intérieur de séminaires, de colloques ou de rencontres qui leur permettent à tous d'avoir une vue semblable de la même problématique, c'est autre chose qui peut peut-être répondre plus à cette problématique. C'est simplement ce qu'on veut savoir.

Dans le fond, je comprends que vous essayiez des actions pour améliorer les délais et l'uniformité. On est loin d'être certains que la création d'un nouvel office réponde à cette problématique, mais ce qu'on voudrait, c'est que ça s'améliore, et très rapidement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez tellement raison qu'à l'article 18, qui parle des fonctions et pouvoirs de l'Office, à l'aiinéa 6°, nous avons prévu: «en collaboration avec le ministre, conçoit des programmes de formation et d'information dans les domaines de la compétence de l'Office», justement dans le but d'assurer une certaine uniformité.

M. Proulx: Je vois M. Lazure qui s'active. Je pourrais lui demander la même question qui me vient à l'esprit: Est-ce que c'est nécessaire de former un office pour faire des programmes de formation?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Vous pouvez faire des programmes de formation sans créer un office, mais vous ne pouvez pas condamner quelqu'un à prendre une décision dans le système actuel sans former un office.

M. Lazure: Ah, M. le Président! Le Président (M. Garon): Oui.

M. Lazure: Merci. Je ne peux pas laisser passer ça. Ça n'a quand même aucun sens. Je m'excuse, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez le droit de parole.

M. Lazure: À l'intérieur de vos juridictions actuelles à l'intérieur de votre ministère, vous pouvez donner toute l'autorité voulue à vos régions. Vous pouvez donner toute l'uniformité voulue à vos régions. Vous pouvez faire infiniment de choses et c'est ça que les gens vous disent, à commencer par vos fonctionnaires, par vos propres professionnels, par vos propres ingénieurs. C'est eux qui vous disent ça.

Je voulais faire un commentaire sur le Fonds de recherche et de développement technologique en environnement. Le ministre en a parlé tantôt et le groupe en a aussi parlé. Dans le discours sur le budget 1990-1991 - ça fait presque deux ans - le ministre des Finances avait annoncé l'ajout de 50 000 000 $ sur cinq ans, 10 000 000 $ par année. Or, après déjà, quoi, plus d'un an, pour la période des quatre prochaines années, il y a à peine un peu moins de 3 000 000 $ d'engagés. Ça ne va pas très vite. En 1991-1992, 1 200 000 $. Ce sont des chiffres qui viennent du ministère. En 1992-1993, 500 000 $. Ça, c'est en date du 10 décembre 1991. C'est récent, le bilan, c'est il y a deux mois.

Je rejoins aussi vos commentaires. Vous disiez que les fonds de recherche, souvent, étaient donnés à des grosses entreprises et pas beaucoup aux PME. Les gros montants qui ont été donnés ici: 1 099 000 $, ville de Montréal. C'est beaucoup, 1 000 000 $. Université Laval à Québec, deux projets: un de 800 000 $ et l'autre de 400 000 $, soit 1 200 000 $. L'Université Laval et la ville de Montréal, à elles deux, absorbent presque les trois quarts des subventions. Alors, il n'en reste pas beaucoup pour les petites entreprises, les moyennes entreprises, au cas où vous voudriez faire de la recherche et du développement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Une précision là-dessus pour éclairer la commission. Le programme est quand même divisé en deux. Le volet que vous mentionnez de ce programme, ce sont les subventions de 250 000 $ et plus qui sont...

M. Lazure: Non, pardon, M. le Président. J'en ai une de 210 000 $ devant moi, là, les Consultants GPR.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Mais juste pour qu'on se comprenne bien, là, le programme est divisé en deux: les projets de 250 000 $ et plus qui sont gérés dans le cadre du Fonds de développement technologique et les programmes de 250 000 $ et moins qui s'adressent davantage à la PME québécoise, qui sont gérés par le ministère de l'Environnement comme tel. Maintenant, je l'ai dit - tantôt, je le déplorais - les demandes de la part des PME québécoises ne nous arrivent pas en nombre...

M. Cossette: Juste un petit point qui me chicote depuis tantôt quand vous mentionniez là-dessus...

M. Lazure: Non, mais je veux juste corriger, parce que ce n'est pas exact, M. le ministre. Je regrette, mais j'ai le tableau devant moi. Il y en a plusieurs qui sont en bas de 200 000 $.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez le compilé des deux, autrement dit, des deux programmes.

M. Lazure: Oui.

Le Président (M. Garon): Là, il faudrait... Finissez, parce que, autrement...

M. Lazure: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.

M. Cossette: Vous déplorez le fait que la PME ne vous présente pas de demandes. Par contre, je dois vous dire que, nous, on vous en a présenté une, mais, malheureusement, elle a été entérinée après le 10 décembre. Comme vous ne pouvez débloquer aucun budget avant le 31 mars, c'est bien évident que vous ne pouvez pas donner de subvention à la PME.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est-à-dire que, si elle a été entérinée, j'imagine qu'elle a été approuvée.

M. Cossette: Elle a été approuvée avant, mais non signée. Et, comme elle n'a pas été signée avant le 10 décembre, il n'y a pas d'argent disponible avant le 31 mars.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, à partir du 31 mars, l'argent va être disponible. Donc, vous allez être sur la feuille du docteur l'année prochaine.

M. Cossette: On verra. Tout dépendant du Conseil du trésor.

Le Président (M. Garon): Est-ce que le député de La Prairie a terminé?

M. Lazure: Pardon?

Le Président (M. Garon): Est-ce que vous avez terminé?

M. Lazure: Oui, j'ai terminé. Je remercie, au nom de l'Opposition, les gens de Sani Mobile.

Le Président (M. Garon): Je remercie le groupe Sani Mobile inc. d'être venu nous présenter son mémoire.

Nous suspendons les travaux de la commission quelques instants, le temps de permettre au groupe Sani Mobile de se retirer et d'inviter l'Union québécoise pour la conservation de la nature de s'approcher de la table des délibérations.

(Suspension de la séance à 10 h 37)

(Reprise à 10 h 41)

Le Président (M. Garon): J'invite M. Côté, vice-président de l'Union québécoise pour la conservation de la nature, à nous présenter la personne qui l'accompagne, en lui disant qu'il a 20 minutes pour exposer son mémoire, 20 minutes au parti ministériel, 20 minutes à l'Opposition. Si vous en prenez plus, on leur soustraira le temps que vous aurez pris en plus. Si vous en prenez moins, ils pourront le prendre pour vous poser des questions, s'ils le souhaitent. M. Côté.

Union québécoise pour la conservation de la nature (UQCN)

M. Côté (Guy L.): Bien, je vous remercie beaucoup de nous avoir reçus. L'Union québécoise pour la conservation de la nature remercie le président et les membres de la commission de l'aménagement et des équipements de lui permettre d'exprimer ses vues sur le projet de loi 412 visant la création d'un office de la protection de l'environnement et modifiant diverses dispositions législatives. Une bonne partie du corps de notre mémoire sera présentée par Christian Simard, notre directeur général, et je ferai moi-même une partie de la présentation, avec commentaires. Alors, je vous passe M. Simard.

M. Simard (Christian): Merci. On s'excuse du retard dans le dépôt du mémoire auprès des membres de la commission. Les ressources étant limitées, vous ne l'avez reçu qu'hier après-midi, on s'en excuse. Je commencerai la lecture à la page 5 et vous pourrez suivre. Un ou deux paragraphes par page seront mis en relief.

Un ministère promoteur qui n'a pas fait d'étude d'impact. En tant que promoteur de l'OPEQ, le ministère n'a pas respecté les critères et les règles de l'art qu'il impose à tout promoteur ayant un projet risquant d'avoir des impacts sur l'environnement. Ainsi, aucun avis de projet n'a été déposé pour informer le public de l'intention du ministère ou du ministre. À cette absence d'avis n'a succédé aucune étude d'impact ou étude sur les répercussions environnementales de la réforme proposée, pourtant majeure. Aucune période d'information, non plus, ni audiences publiques, si ce n'est la présente commission. Qu'un projet de loi sans analyse ni notes justificatives. Le ministère dispose-t-il d'études incontournables nous assurant qu'il s'agit de la seule solution envisageable, cet Office? Auquel cas l'UQCN et le public en général, nous croyons, doivent en être informés.

La création de l'OPEQ n'est pas une solution, mais c'est plutôt une fuite en avant dans la «structurite». Le ministre nous présente le projet de créer un office de protection de l'environnement comme découlant d'un certain constat de découragement face aux performances de son ministère. Ce constat serait dû à la grande difficulté de cumuler la fonction d'élaboration d'orientations, de lois, de règlements et de directives, et la fonction d'application de ces mêmes lois et règlements dans une perspective de contrôle et de surveillance. S'il est de notoriété publique que le ministère a beaucoup de difficultés à remplir ses mandats multiples, ce n'est pas en le scindant qu'on réglera les problèmes. Il n'y a rien qui assure qu'un office, puisant son personnel dans le ministère actuel et ne disposant d'aucune ressource supplémentaire, fasse meilleure figure que le MENVIQ actuel. D'autres ministères assez complexes, tels que Loisir, Chasse et Pêche, s'acquittent assez bien de leurs mandats multiples. C'est souvent même quand ils créent un genre d'office comme la SEPAQ que ça se complique, la SEPAQ étant la Société des établissements de plein air du Québec, comme vous le savez.

Un conseil d'administration débalancé. Le conseil d'administration prévu dans le projet de loi compterait cinq membres sur neuf issus directement des rangs gouvernementaux, dont le sous-ministre en titre du MENVIQ. C'est incompatible avec la présentation de l'Office comme un instrument indépendant et sourd aux influences politiques.

Maintenant, page 8: Un OPEQ sans kopeks. À l'origine, le projet de création de l'Office lui donnait un statut extrabudgétaire avec pouvoir de tarifer ses services et de gérer directement

les sommes prélevées. L'objectif poursuivi était l'autofinancement de l'Office après cinq ans. L'obtention de ce statut garantissait de l'argent neuf pour la gestion de l'environnement et permettait, à terme, d'espérer une plus grande indépendance d'intervention. Malheureusement, le ministère des Finances a refusé cette façon de faire. Avec les coûts intrinsèques reliés à une réforme et les maigres ressources dont dispose le MENVIQ, il n'est pas possible pour l'UQCN de souscrire à toute réforme, impliquant la création d'un office ou, mieux, la rénovation du ministère, qui ne pourrait recevoir le financement adéquat et qui diminuerait dans les faits les ressources consacrées à la gestion de l'environnement.

Un processus de révision inique. Le pouvoir de révision, tel que défini dans le projet de loi, est inacceptable et constitue un déni de justice naturelle. La révision ne s'adresserait qu'aux demandeurs d'autorisations et ne serait permise que lorsque leur demande serait refusée ou modifiée. En aucun cas l'émission d'un certificat d'autorisation ne pourrait faire l'objet d'une révision de la part de personnes ou de groupes qui en contesteraient la légalité ou la légitimité, même si ces personnes pourraient être directement touchées par l'activité autorisée. L'OPEC ne s'autorisera le droit de se tromper que lorsqu'il n'accordera pas une demande, mais jamais lorsqu'il l'accordera. La balance de la justice risque de s'écrouler avec un pareil débalancement de ses plateaux. L'UQCN ne peut adhérer à une réforme contenant un processus de révision basé sur une pareille iniquité.

Le projet de loi 412. L'UQCN ne s'oppose pas en principe à la création d'un office ou d'une commission qui peut s'avérer dans certaines circonstances un bon outil de gestion environnementale. Cependant, il ne s'agit pas de dire que ça existe aux États-Unis, sous des formes par ailleurs extrêmement différentes de celles proposées, pour pouvoir affirmer que ce sera une panacée pour le Québec. Des informations récentes nous indiquent d'ailleurs qu'une réforme sera présentée sous peu aux États-Unis visant à transformer l'EPA en secrétariat d'État, c'est-à-dire en ministère. On ne va pas tout à fait dans le même sens.

En page 10 maintenant. Le projet de loi 412 n'est pas une solution à l'improductivité du MENVIQ. Prétendant isoler les fonctions d'élaboration de politiques des fonctions de contrôle et de surveillance, le projet présenté fait perdurer la confusion et les possibilités d'ingérence politique dans l'administration de l'Office. L'UQCN réfère, à ce sujet, le lecteur au mémoire du Centre québécois du droit de l'environnement et particulièrement au chapitre sur «l'indépendance apparente». Je pense qu'il est passé hier.

Des lois comme du gruyère. Il n'y a pas que les fonctions de contrôle et de surveillance qui font défaut au MENVIQ, non encore amputé de plus de la moitié de ses fonctionnaires; la conception et la publication des règlements tardent cruellement. Il y a un grand nombre de règlements, depuis longtemps annoncés, qui n'ont toujours pas été produits. Qu'on pense au règlement sur l'eau potable, à celui sur l'air atmosphérique, à ceux relatifs à l'ozone, à la décontamination de l'environnement et au Programme de réduction des rejets industriels qui a fait l'objet de deux lois, mais qui n'est toujours pas en vigueur. La Loi sur la qualité de l'environnement est comme un fromage de gruyère tellement il y a de dispositions législatives en attente d'un règlement ou qui font l'objet d'une suspension d'application dans le cadre du règlement général d'administration. Rappelons notamment, comme c'est un leitmotiv dans les mémoires de l'UQCN depuis malheureusement trop longtemps, les fameux articles 2n, 2g et 2p du Règlement sur l'examen des impacts sur l'environnement qui prévoit l'examen public des grands projets industriels et miniers. Malheureusement, même dans un projet d'OPEC, la question des certificats d'autorisation dépendrait encore directement du gouvernement.

Maintenant, à la page 11: Sur quelle étagère se trouve «Un nouveau cap environnemental»? Je passerais la parole à M. Côté pour la partie sûr le cap environnemental et le plan vert.

M. Côté (Guy L): J'ai pris plaisir à revoir le document qui avait été publié, il y a un peu plus de quatre ans, par un des prédécesseurs de M. Paradis, M. Clifford Lincoln, qui s'appelait «Un nouveau cap environnemental». Quatre ans, ce n'est pas très long dans l'histoire de l'administration québécoise, mais c'est une éternité en ce qui concerne l'environnement, tellement les nouveaux développements en environnement, les nouvelles exigences se bousculent les unes pardessus les autres. C'est un document qui est encore assez neuf. Depuis sa publication - je suis à la page 11 - il n'y a plus eu de réflexions gouvernementales ni de grands engagements politiques en environnement, même s'il y a eu des initiatives prises comme, par exemple, la table ronde. Les deux ministres qui ont succédé à Clifford Lincoln au siège de l'Environnement n'ont pas appuyé de leur poids politique ni, comme on le voit aujourd'hui, fait leur le document de M. Lincoln. Au contraire, on peut dire que le projet de loi 412 est à l'opposé de l'approche intégrée préconisée par ce document.

Le «nouveau cap environnemental» d'il y a quatre ans était un important énoncé de politique qui visait à maintenir la diversité, la productivité, la pérennité des écosystèmes et à diminuer l'exposition des personnes et des espèces aux substances toxiques. S'appuyant sur des principes tels que la clarté, la fermeté, la sélectivité, la transparence, l'approche intégrée, l'engagement des intervenants vis-à-vis de l'environnement et l'action concertée, le document proposait des mécanismes d'action pour tous les champs

d'intervention du ministère. Parmi ces mécanismes, on parlait de «gestion par résultats», de «production de bilans périodiques sur l'état de l'environnement», de «mandats délégués à tous les échelons du ministère». Nulle part il n'est fait mention du problème du cumul des fonctions au sein du ministère, qui semble être devenu insurmontable, selon le ministre actuel.

Dans le document «Un nouveau cap environnemental», il y a toute une section, par exemple, qui discute de la collaboration soutenue avec les autres ministères. Dans cette section, il est indiqué comment le ministère va s'acquitter de ses tâches d'orientation des autres ministères, parce que c'est un ministère qui travaille de façon horizontale. «Ses moyens d'action sont de développer la connaissance écologique du territoire, continuer à offrir aux autres intervenants une approche méthodologique, assurer une vigilance environnementale continue, détecter et documenter - je lis du document de Lincoln - les tendances de dégradation, répertorier les protentiels, les lieux d'intérêt majeur, mesurer l'impact des pratiques courantes, inciter les ministères responsables à revoir leurs politiques et programmes pour les orienter dans le sens de la conservation.» Vous voyez tout de suite, avec ces quelques bribes que j'ai lues, que c'est une approche intégrée et que ceux qui, dans la pratique, voient les projets et ceux qui, dans la pratique, élaborent les politiques sont en rapport étroit les uns avec les autres.

Je continue, à la page 12. Pas trop loin du «cap environnemental» de M. Lincoln et, peut-être, si on peut ainsi s'exprimer, sur la même tablette, doit également se retrouver le «Projet de mise en valeur du Saint-Laurent», élaboré par deux comités largement représentatifs de la population. Ce document de juin 1989 contenait près de 200 recommandations s'étalant sur 10 ans et nécessitant des investissements privés et publics de près de 6 000 000 000 $. Il a été confié, pour réanalyse, à la table ronde sur l'économie et l'environnement, elle-même... Nous avons utilisé l'expression «moribonde», elle est peut-être un peu dure, mais disons que la table ronde n'est pas en santé à l'heure actuelle.

À la page 13, en continuant: Un plan vert pour le Québec, c'est pour quand? Il y a plus d'un an, lorsque le plan vert canadien a été annoncé, prévoyant des mesures évaluées à 3 000 000 000 $, on se serait attendu à une réaction du Québec. Le gouvernement aurait pu choisir d'harmoniser ses programmes et ses interventions à ceux du plan vert ou même de présenter son propre plan vert, là où il aurait pu faire mieux qu'Ottawa ou dans le domaine de ses juridictions. Malheureusement, le gouvernement québécois a choisi de faire le minimum d'ajustements et de ne pas présenter son propre plan environnemental.

Dans la suite de ce mémoire, nous allons vous dire que c'est au niveau des objefctifs que doit se situer l'action gouvernementale, à l'heure actuelle. Lorsque les objectifs auront été définis de façon claire, il y aura peut-être à ce moment-là un débat à y avoir sur les moyens structurels pour les accomplir. Christian.

M. Simard: On insiste également sur le fait que c'est peut-être dans la rénovation à court terme du ministère de l'Environnement que réside la solution aux problèmes administratifs qui semblent insurmontables maintenant. Donc, on continue: Un ministère à rénover. Démontrer que la solution des problèmes du ministère de l'Environnement ne passe pas par la séparation jésuitique entre la forme et le contenu, entre les fonctions de contrôle et de surveillance et les fonctions d'orientations et d'élaboration de politiques ne signifie pas qu'il n'y a pas de problèmes au ministère, loin de là.

Comme observatrice et analyste attentive du ministère de l'Environnement et par les contacts réguliers qu'elle a à tous les niveaux avec les employés de ce ministère dans l'élaboration de ses nombreux dossiers, l'Union québécoise pour la conservation de la nature est en mesure d'affirmer que les fonctionnaires du MENVIQ sont globalement démotivés et ne se sont pas remis de la déclaration du ministre mettant globalement en cause leur compétence. Le ministre ne parle pas directement à ses fonctionnaires ordinaires et très rarement à ses sous-ministres. Il n'y a pas de service de formation continue du personnel au MENVIQ. Le système de gestion par résultats annoncé en grande pompe dans la foulée du «nouveau cap environnemental» a été pratiquement abandonné. Le service juridique se fait souvent rabrouer par les juges sur la façon dont il présente ses dossiers. L'exemple récent dans la cause Noranda démontre bien ce problème. Il n'y a pas de transparence au MENVIQ. Suite à une directive interne, les fonctionnaires sont devenus paranoïaques dans la diffusion des informations les plus simples. L'UQCN est constamment référée à Mme Jacob, la directrice des communications et responsable de l'accès à l'information pour toutes ses demandes à peu près. Il y a toujours absence de système informatique moderne permettant de traiter et d'analyser les données et cette situation perdure plus de 18 mois après le jugement sévère porté à cet égard par la commission Charbonneau, les fameux manifestes de transport. Il existe pourtant un plan de réforme des systèmes d'information du MENVIQ datant de 1987.

À la lecture du dernier rapport du Vérificateur général, on voit bien que le ménage n'a pas été fait au ministère malgré les 6 changements de structure en 12 ans et que ce n'est pas le transfert massif de plus de la moitié des fonctionnaires vers un office qui réglera les problèmes. Ils seront plutôt transmis comme on transmet un virus.

Les recommandations de l'UQCN. Sur la

base des informations et de l'analyse qui précèdent, l'UQCN adresse à la commission, et par-delà au ministre de l'Environnement et au gouvernement québécois, les recommandations suivantes. L'UQCN recommande au ministre de l'Environnement de retirer le projet de loi 412.

L'UQCN recommande que le ministre de l'Environnement confie un mandat d'une durée maximale de six mois à une firme spécialisée qui examinera de fond en comble l'actuel fonctionnement du ministère en vue de faire des recommandations pour améliorer la performance et corriger une situation qu'environnementalistes et promoteurs déplorent à l'unisson.

L'UQCN recommande que le ministre tienne compte des conclusions prochaines de la commission parlementaire chargée d'examiner le processus d'évaluation environnementale au Québec. Ces recommandations devraient faire partie du contexte dans lequel l'avenir du ministère sera examiné. On sait que le projet de loi 412 confirme la situation actuelle quant au non-examen public des grands projets industriels, disant non à l'avance à toute remise en question de cette situation injuste.

L'UQCN recommande la mise en vigueur accélérée des sections pendantes des 13 lois et 30 règlements régissant des activités susceptibles de contaminer l'environnement, incluant les dispositions du fameux article 2 du règlement sur l'évaluation et l'examen des impacts environnementaux prévoyant l'examen public des grands projets industriels, miniers et gaziers, et la transformation en conséquence des 7 règlements administratifs.

L'UQCN recommande que le Québec se dote d'un plan vert d'ici la fin de 1993.

L'UQCN recommande que le gouvernement relance la table ronde québécoise sur l'environnement et l'économie avec une présidence et un secrétariat indépendant de l'appareil gouvernemental. Que le ministère des Finances et le Conseil du trésor soient invités à siéger à cette nouvelle table. Qu'un processus visant la participation du public à la réflexion soit mis en place dans le cadre de cette nouvelle table.

L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec et le ministre de l'Environnement accentuent l'application du principe du pollueur-payeur en généralisant et en intensifiant le système des redevances, droits et tarifs et en favorisant la mise en place de taxes vertes visant à restreindre l'utilisation de nuisances écologiques ou permettant de fixer l'atténuation de leurs impacts environnementaux.

L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec accepte de consacrer les revenus provenant de ces redevances et taxes à la résolution des problèmes environnementaux en les versant au ministère de l'Environnement, comme il a relié les taxes sur la cigarette à l'élimination du déficit olympique.

Voilà les recommandations et les analyses de l'UQCN.

M. Côté (Guy L.): Nous sommes à votre disposition pour répondre à des questions ou pour des commentaires supplémentaires.

Le Président (M. Garon): Merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me permettrez, dans un premier temps, de remercier l'UQCN d'avoir pris le temps de nous présenter son point de vue sur la création d'un office de protection de l'environnement. Il n'y a pas de mal à avoir été en retard, on comprend vos contraintes, et ça nous a donné quand même le temps de passer à travers votre mémoire.

Vous étiez présents dans la salle tantôt lorsqu'on a eu l'occasion de donner, sur le plan de la structure administrative du ministère, le fonctionnement. Je n'ai pas l'intention de reprendre avec vous cet élément-là. Mais il n'y a pas eu que du travail au niveau de la structure au cours des deux dernières années. Grâce, dans certains cas, à la collaboration de l'Opposition et au travail de l'ensemble des parlementaires, le menu législatif et réglementaire a été assez bien fourni. (11 heures)

Je vous rappellerai qu'en 1991, sur le plan législatif, deux lois ont été adoptées, une loi qui a été difficile à faire adopter - il y avait beaucoup d'opposition - la loi 65 qui a appliqué, pour la première fois, le principe pollueur-payeur. Il a fallu se battre, comme membres de l'Assemblée nationale, pour faire passer cette loi et l'Opposition était d'accord, je le souligne, à l'époque. L'UQCN nous a donné un bon support à ce moment-là. Nous avons également adopté la loi qui a créé RECYC-QUÉBEC avec des mandats en matière de récupération et de recyclage.

Sur le plan réglementaire, c'a été mince, mais c'était essentiel. Suite à de vives discussions avec le ministère de l'Énergie et des Ressources, nous avons limité le contenu en soufre dans le mazout, de façon à continuer notre lutte contre les pluies acides. Grâce à l'intervention des groupes environnementaux et à la réglementation gouvernementale, les objectifs ont été dépassés. C'est un des rares dossiers environnementaux où on peut prétendre être en avant des objectifs, et l'action de l'Association québécoise de lutte contre les pluies acides n'est pas étrangère à ce bilan.

En 1991, le rythme des projets de loi s'est accéléré. Premièrement, nous avons adopté la loi qui a continué le mandat de la Société québécoise d'assainissement des eaux, de façon à aller dans les petites municipalités. On avait quasiment terminé nos grandes municipalités au Québec, mais il ne fallait pas laisser de côté nos petites municipalités. Grâce également à l'appui des

parlementaires, on a adopté cette loi.

La loi sur les déchets dangereux, c'est une loi qui ne se tenait plus debout, qui était peu applicable. Le rapport Charbonneau l'a critiquée. Nous sommes arrivés avec une nouvelle approche, une nouvelle législation, la loi sur les matières dangereuses. La réglementation n'est pas encore... Je souhaiterais qu'elle soit sur la place publique. Elle est en phase de prépublication chez nous, de dernière analyse. Il s'agit d'une réglementation qui est quand même scientifique. On veut qu'elle soit applicable et on a élargi le concept de «déchets dangereux» à «matières dangereuses», de façon à permettre le recyclage de beaucoup de produits dans la société. Nous avons également adopté une loi sur les rejets Industriels, de façon à obtenir de la part du secteur industriel des éléments que vous réclamez et sur lesquels on reviendra tantôt.

Sur le plan de la réglementation, en 1991 également: règlement sur les carrières et sablières, ça s'imposait et rapidement; règlement sur les neiges usées en concertation avec le monde municipal, l'UMQ, l'UMRCQ, table Québec-municipalités; règlement sur les déchets solides, de façon à permettre au public qui veut devenir propriétaire ou gestionnaire d'un site d'enfouissement de refuser des déchets qui proviendraient de l'extérieur; règlement sur l'entreposage des pneus hors d'usage, à la demande du ministre de l'Environnement et du ministre de la Sécurité publique. Suite à ce qui était arrivé, ça s'imposait que nous agissions rapidement.

Nous avons présentement des règlements qui sont prépubliés et en période de consultation, et vous êtes consultés: règlement sur les pâtes et papiers; règlement sur les déchets biomédicaux qui va être en application bientôt; règlement sur les attestations d'assainissement que nous avons annoncé la semaine dernière et qui rejoint exactement une de vos recommandations, entre autres, du mémoire. A part ces actions, nous avons également modifié la politique de protection des cours d'eau qui ne s'appliquait, avant qu'elle soit modifiée, qu'aux affluents directs du Saint-Laurent. Tout le reste du Québec n'était pas protégé ou le monde municipal n'avait pas la possibilité de les protéger. Ça n'a pas été aussi facile que ça peut paraître de l'extérieur de convaincre l'ensemble des Intervenants gouvernementaux et autres.

Nous avons également remis à jour le plan d'urgence suite aux catastrophes qui étaient arrivées, et ça nous a permis d'Intervenir avec efficacité à Saint-Léonard-d'Aston, dans le cas des pneus à Saint-Amable, etc. Il fallait que ce soit fait au ministère de l'Environnement. Nous avons créé des réserves écologiques. Quand je suis arrivé comme ministre de l'Environnement, la loi existait depuis 1974. Il y avait 21 réserves écologiques de créées dans l'ensemble de la province de Québec. Depuis deux ans, nous en avons créé 11 nouvelles, dont une dans la magnifique circonscription électorale de Brome-Missisquoi. Présentement, II y a sept dossiers très actifs au niveau du Conseil des ministres ou du bureau du ministre pour la création... Nous pensons atteindre nos objectifs de création de 39 dans notre plan triennal. Le cap est bon.

Ce qui est passé inaperçu, le ministère de l'Environnement - ça, ça rejoint vos préoccupations également - siège à l'important comité interministériel sur le développement économique, ce qui fait que, lorsque la SDI ou un organisme gouvernemental investit ou devient partenaire avec une entreprise, il faut qu'il soit en règle avec le ministère de l'Environnement. C'est semaine après semaine que le ministère de l'Environnement accomplit ce nouveau rôle depuis 1989.

Ça peut vous apparaître comme n'étant pas beaucoup. Je vous dis qu'on a pallié l'urgence, corrigé les problèmes d'avant-hier, d'hier. On n'est pas encore parvenus à maîtriser le présent comme il faut. Ça fait que ne nous demandez pas si on est parvenus à maîtriser l'avenir comme il faut. C'est là que nous en sommes, comme ministère de l'Environnement du Québec.

Dans votre mémoire comme tel, je vais corriger une inexactitude, parce que je ne veux pas que ça reste en plan. À la page 15: «Le service juridique se fait souvent rabrouer par les juges sur la façon dont il présente ses dossiers. L'exemple récent dans la cause Noranda démontre bien ce problème.» Je ne peux pas laisser passer ça, on avait donné le mandat au privé dans la cause Noranda. Ce n'étaient pas les fonctionnaires, les juristes du ministère.

M. Simard: J'imagine que c'était encadré par le ministère, que le travail a été un peu encadré par les services juridiques du ministère.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, pas quand le mandat est donné au privé. On donne le mandat au privé... D'ailleurs, c'est passé aux engagements financiers et on a eu des questions de l'Opposition sur l'ampleur de la facture.

M. Simard: Donc, à tout le moins, le choix de la firme, à ce moment-là, est peut-être discutable...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): écoutez...

M. Simard: ...si on lit bien les conclusions du juge.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non non, je ne tenais pas à partir une polémique. Je tenais à ce que...

M. Simard: Oui, mais je...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand les gens méritent d'être blâmés, ils méritent de

l'être; quand ils ne méritent pas de l'être, ils ne méritent pas de l'être. Je ne voulais pas qu'on en ajoute à la situation.

On tombe à vos recommandations. On passe à travers vos recommandations. «L'UQCN recommande que le ministre de l'Environnement confie un mandat d'une durée maximale de six mois à une firme spécialisée qui examinera de fond en comble, etc.» Moi, je vous dirai qu'à l'heure actuelle, pour le moment, je me suis fié à la haute direction du ministère pour l'analyse du diagnostic comme tel. Ce sont les hauts fonctionnaires qui ont fait le diagnostic et qui ont proposé les solutions. Ils connaissent le ministère sur le plan organisationnel mieux que le ministre et mieux que, je pourrais dire, quiconque. On peut les critiquer, on peut affirmer qu'ils ne connaissent pas ça. Vous demandez que ce soit revérifié par quelqu'un de l'extérieur. Ce n'est peut-être pas une idée que je suis prêt à rejeter du revers de la main. Si leur travail est bien fait, il est bien fait.

M. Simard: Si je peux me permettre...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deuxième recommandation... Je vais les passer...

M. Simard: D'accord.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et, après ça, vous reviendrez sur l'ensemble. La deuxième recommandation: «...tienne compte des conclusions [...] de la commission parlementaire chargée d'examiner le processus d'évaluation environnementale au Québec». Oui, nous avons l'intention d'en tenir compte. D'ailleurs, toutes les organisations... Vous avez participé à ces audiences, les députés y ont consacré du temps; moi, j'attends impatiemment le dépôt à l'Assemblée nationale. On m'a quasiment rassuré en me disant que ce serait la semaine prochaine.

Mme Pelchat: On a une réunion de travail, la semaine prochaine.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Réunion de travail la semaine prochaine...

M. Lazure: Pour finaliser.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour finaliser.

L'autre élément: «la mise en vigueur accélérée des sections pendantes des 13 lois et 30 règlements». J'ai eu cette tentation, à un moment donné, de les mettre en vigueur en bloc. C'est que certaines lois datent d'il y a un peu plus de 10 ans, certains règlements aussi. Les mettre en vigueur bêtement créerait autant de problèmes qu'on pourrait en régler. Finalement, il y a un équilibre. Mais, vous avez des sections, entre autres, de la loi sur l'administration qui se doivent d'être mises en vigueur rapidement. Sur les évaluations environnementales, sous réserve du rapport que les parlementaires vont me faire, vous avez le Programme de réduction des rejets industriels. Vous en avez beaucoup qui méritent d'être mis en application. Votre recommandation va dans le bon sens. «L'UQCN recommande que le Québec se dote d'un plan vert d'ici la fin de 1993.» Dans la situation actuelle, moi, je préfère continuer à travailler avec la documentation, l'excellente documentation - «Un nouveau cap environnemental», vous en avez fait mention - que M. Lincoln a laissée. Je pense que ça doit demeurer, pour le moment, l'orientation privilégiée du ministère de l'Environnement du Québec. Ça, ça rejoint peut-être un petit peu la prochaine recommandation, d'ici à ce que la table ronde puisse produire possiblement un plan vert. Je pense que vous seriez les premiers à nous reprocher l'élaboration d'un plan vert sans la table ronde. Il y a une combinaison de table ronde et de plan vert à laquelle je n'arrive pas à échapper comme telle.

Sur votre recommandation: «indépendant de l'appareil gouvernemental», moi, je vous dirai que je n'ai jamais fait d'ingérence politique au niveau de la table ronde comme telle. Votre suggestion que le ministre des Finances et le Conseil du trésor y siègent est une suggestion qui est heureuse. Je pense que, lorsqu'on arrive aux décisions environnementales, l'aspect financier est important. «L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec et le ministre de l'Environnement accentuent l'application du principe du pollueur-payeur en généralisant et en intensifiant le système des redevances, droits et tarifs et en favorisant la mise en place de taxes vertes visant à restreindre l'utilisation de nuisances écologiques...» C'est exactement le sens de la réglementation que nous avons prépubliée la semaine dernière sur les attestations d'assainissement. Je pense que ça va dans ce sens-là. Si vous voulez critiquer ce règlement, il est en consultation présentement et nous sommes ouverts à la critique dudit règlement.

M. Simard: Nous le ferons.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): «Que le gouvernement du Québec accepte de consacrer les revenus provenant de ces redevances et taxes à la résolution des problèmes environnementaux...» Je vous remercie de votre appui dans cette démarche parce que je pense que, dans le contexte économique actuel, les ministères sont un peu gelés sur le plan financier et que le ministère de l'Environnement, qui est le plus jeune et le plus démuni, compte tenu de ses responsabilités, se doit d'être inventif et de passer à travers. Il ne peut pas se limiter à sa croissance actuelle ou à sa taille actuelle pour relever les défis. C'étaient là mes premiers

commentaires. Je vous reviendrai après vos réactions ou après les réactions de M. Lazure.

M. Côté (Guy L): Je suis très heureux d'entendre les commentaires de M. le ministre et, particulièrement, la liste très impressionnante des réalisations qui ont été faites depuis deux ans. Je considère que cette liste appuie beaucoup notre prétention que le domaine de l'environnement est un domaine extrêmement mouvant et en progression constante. Nous avons reçu d'ailleurs de votre ministère, M. Paradis, le document «Regard sur l'environnement en 1991» qui a été préparé pour le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, que vous connaissez bien. Ce document faisait état de quatre principes moteurs des politiques environnementales; le premier, très important, étant la détérioration continuelle de la qualité de l'environnement, c'est ce qui est dit ici.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, c'était vrai, sauf que le ralentissement économique qu'on a connu au Québec cette année...

M. Côté (Guy L): C'est ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...a diminué-La pollution industrielle, quand l'entreprise ferme, elle disparaît.

M. Côté (Guy L): C'est un problème environnemental qui touche tout le pays et l'Amérique du Nord. Le deuxième, c'est les préoccupations soutenues de la collectivité, qui est un phénomène assez récent depuis 1985, mais qui fait, par exemple, que les groupes environnementaux comme le nôtre se présentent ici.

Le troisième, c'est l'importance des questions internationales. Le quatrième, le coût des approches traditionnelles. Il est indiqué «qu'aucun pays n'aura les moyens de défrayer une politique environnementale exclusivement axée sur des mesures correctives.» Vous hochez la tête et avec raison. Votre ministère est un domaine mouvant et le projet qui nous réunit ici, aujourd'hui, est un projet de réforme structurelle.

J'ai, moi-même, participé à une étude à l'Office national du film où j'étais autrefois engagé et où il y avait des problèmes d'organisation. La première idée qu'on a eue, ça a été d'avoir un comité interne. J'y ai participé, d'ailleurs. Comment réorganiser l'Office national du film pour que ça fonctionne bien? Mais, finalement, nous nous sommes rendu compte qu'une étude externe présente des avantages énormes à la condition qu'elle ne soit pas vue comme un instrument politique de désaveu de la situation actuelle, mais beaucoup plus comme un instrument d'amélioration. Les études externes ont ceci qu'elles apportent une façon de voir que ni les hauts fonctionnaires ni les cabinets politiques ne peuvent avoir.

À l'heure actuelle, ayant suivi un peu tous les mémoires qui ont été présentés à la commission parlementaire sur les évaluations d'impact, les groupes écologistes, les promoteurs, HydroQuébec et tous les investisseurs se plaignent du fonctionnement. Ça semble être universel. Ce n'est pas par manque de bonne volonté, mais notre recommandation d'une étude externe demeure. Il me semble que vous devriez l'examiner avec beaucoup d'attention avant de réexaminer le projet de loi 142. Ce projet est un projet administratif et il doit être examiné à la lumière d'une étude sérieuse. On pourrait même l'appeler une évaluation d'impact Christian.

M. Simard: Non, je vais les laisser parler et revenir peut-être sur des points des recommandations, en réponse. Habituellement, je crois que vous fonctionnez ainsi: vous faites vos remarques, M. Lazure les fait et, ensuite... Je ne voudrais court-circuiter personne.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On fonctionne à la bonne... On n'est pas trop rigoureux sur la procédure.

M. Simard: Bon, directement sur les recommandations, naturellement, je ne resterai pas sur le point du mandat externe, mais l'idée d'un plan vert, je pense que c'est important. Quand on dit qu'il y a une table ronde et qu'on ne veut pas séparer ça, disons que je ne suis pas d'accord avec l'analyse du ministre sur la non-ingérence politique dans la table ronde, pour l'avoir vécu intimement et pour avoir vu la présence extrêmement forte de membres du cabinet, notamment, au niveau de la table ronde et de son comité de coordination, l'absence aussi d'un mandat très clair de production d'un plan vert à cette même table, la difficulté d'avoir des réunions fréquentes et intensives de travail avec les membres de la table ronde. Pour l'avoir vécu, là, je vous dis ça. (11 h 15)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez. Sur la fréquence des réunions, je tiens à être clair. Chaque fois que le secrétariat a souhaité réunir la table, je n'avais qu'une condition: c'est que les documents soient sur mon bureau 10 jours avant pour que j'en prenne connaissance. Chaque fois que les documents ont été sur mon bureau 10 jours avant, la table a été convoquée.

M. Simard: Disons que, moi-même, ayant insisté lors d'une réunion, étant à ce moment-là membre de la table, très techniquement, pour avoir une réunion et qu'on la cédule d'avance - étant donné que ces gens-là sont très occupés - j'ai eu besoin d'avoir des appuis, notamment de Me Drouin et tout ça. Ce n'était pas du tout évident, la volonté de... sous prétexte que c'est effectivement des gens durs à réunir, qu'ils sont nombreux, qu'ils ont un agenda et qu'ils ne

peuvent pas passer plusieurs heures. Mais trois réunions de deux heures chacune en une année, dont la première était un peu une réunion de photos de joueurs de hockey, c'est-à-dire une présentation des joueurs à la presse...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous paraissiez bien.

M. Simard: ...eh bien, ça nous est apparu un peu faible. Dans le contexte actuel, même comme membres des comités techniques, c'est sûr qu'on se pose de très grandes questions sur notre participation. On devrait annoncer quelque chose dans ce sens-là bientôt. Donc, donner un mandat à une nouvelle table réoxygénée et répartie sur le sens du monde, avec un mandat de produire un plan vert ou d'aider le gouvernement à la production d'un plan vert, je pense que ce serait sain.

Maintenant, pour les autres, bien sûr que c'est un appui à avoir plus d'argent, et ça, on ne vous l'a jamais caché. C'était pour les réponses sur les recommandations.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de l'Opposition, saluer M. Côté, M. Simard et mettre en relief la contribution remarquable que l'Union québécoise pour la conservation de la nature offre au Québec, au ministère de l'Environnement et à la cause de l'environnement. L'UQCN, M. le Président, c'est l'organisme probablement le plus important, le plus imposant, non seulement par le nombre de ses membres individuels ou par association, mais aussi par la qualité de ses interventions. Je pense que le ministre et les membres de la commission, des deux côtés de la table, doivent accorder une attention toute particulière aux propositions que fait l'UQCN en regard du projet de loi qui est présenté par le ministre.

La prise de position est claire, elle est bien étoffée. Comme la plupart des groupes qui sont venus, je pense que vous faites bien ressortir que, plutôt que de démolir le ministère comme il existe actuellement, il vaudrait mieux faire un effort de rénovation, de rénovation plutôt que de démolition. L'Opposition se dit en accord avec vos recommandations; on n'a pas de dispute avec vos recommandations. Juste un point particulier: le comité de révision. Je constate que vous épousez, que vous partagez les vues du Centre québécois du droit de l'environnement qui est venu nous faire part de sa position. C'est ce que l'Opposition appuie aussi.

Maintenant, la table ronde, on peut s'y arrêter. Mais, avant, juste une autre remarque pour réagir aux propos du ministre. Il dit, en réponse à votre suggestion de faire faire une étude par une firme extérieure: J'ai une bonne étude qui a été faite par mes hauts fonctionnaires. C'est ce qu'il nous dit. Je suis obligé de prendre sa parole. Par contre, je suis obligé de lui dire: De deux choses l'une: ou bien vos hauts fonctionnaires ne sont pas branchés sur les professionnels de votre ministère, notamment les ingénieurs de votre ministère, parce que autant le Syndicat de professionnels du gouvernement s'oppose au projet de loi, autant les ingénieurs de son ministère s'opposent au projet de loi. Alors, est-ce que les hauts fonctionnaires de son ministère ont consulté les professionnels, notamment les ingénieurs, oui ou non? S'ils les ont consultés, ils n'ont sûrement pas tenu compte de leurs opinions, de leurs recommandations puisque ces deux groupes fort importants, les artisans principaux de son ministère, sont opposés à la création de cette nouvelle structure.

Par contre, il vient nous dire que ses hauts fonctionnaires lui recommandent d'aller de l'avant. Je soupçonne que certains de ses hauts fonctionnaires sont d'accord avec le projet de loi, tel qu'il était présenté initialement, à savoir qu'il allait être quasi autonome et qu'il allait s'autofinancer, donc, qu'il était voué à un avenir prometteur quant au développement, avec de l'argent nouveau. Le ministre, d'ailleurs, s'est promené dans son ministère - nous le savons de source sûre - encore récemment, faisant croire aux hauts fonctionnaires que, bon, il ne l'a pas eu, l'autofinancement, mais qu'il va l'avoir plus tard. Il va l'avoir plus tard. Ça, on le sait. Mais, c'est grave, ça. C'est grave parce qu'il laisse encore planer l'illusion. C'est normal que les fonctionnaires qui croient vraiment à la cause de l'environnement se laissent tenter par la perspective qu'il y aura de l'argent nouveau, donc des effectifs nouveaux, donc des actions nouvelles.

Je pense, M. le Président, que le ministre doit retomber sur terre et il ne doit pas vendre des illusions à ses fonctionnaires. Il doit écouter aussi les fonctionnaires beaucoup plus qu'il ne le fait. L'UQCN fait remarquer que le ministre n'est pas proche de ses fonctionnaires. L'UQCN a absolument raison, M. le Président. Cette remarque-là nous est faite très, très souvent que le ministre n'est pas en contact assez étroit avec ses fonctionnaires.

Je reviens à votre mémoire. Vous parlez de la présence du ministère des Finances et du Conseil du trésor à la table ronde. Je pense que c'est fort pertinent comme suggestion. Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus sur des changements qui seraient apportés à la table ronde pour la rendre plus vigoureuse? Moi, personnellement, je n'ai pas d'objection à ce que la table ronde soit l'instrument sur lequel le ministre compte pour élaborer un plan vert, mais encore faut-il que le mandat soit clair. Est-ce qu'il est clair, le mandat? Je vous pose...

M. Simard: En fonction de la production d'un plan vert, non. Très clairement, la réponse est non. C'est conseillé - d'ailleurs, il faudrait relire le mandat et revoir le mandat - un peu de faire des suggestions. On ne parle pas vraiment de recommandations formelles au Conseil des ministres, mais c'est des suggestions qui devraient être élaborées par la table et remises, si je me souviens bien du mandat - il faudrait que je revoie le mandat précis actuel - au premier ministre.

Mais, on n'a senti nulle part... C'est pour ça, d'ailleurs - je pense qu'il ne m'en voudra pas de dire son nom - que la personne qui a dit: «La queue du chien qui mène le chien», c'est Yvon Charbonneau, dans un comité technique. Lorsqu'il travaillait en comité technique, il disait: On n'a pas de mandat de la table elle-même, on ne sait pas vers où aller, on fait des fiches techniques, on s'interroge sur tout, mais on n'a pas de commande précise. C'est le comité technique, à ce moment-là, qui fournit à la table, alors que la table n'a pas eu le temps de faire un minimum de réflexion pour dire: Je veux que les comités techniques travaillent sur un plan vert, je veux que les comités techniques travaillent sur telle, telle chose. Elle n'a pas eu le moyen et on ne peut pas dire que le président a dynamisé la table dans ce sens-là. Le problème est... C'est pour ça qu'un des participants a dit que c'est la queue du chien qui menait le chien.

Bien sûr, ça s'est «cumulé», le problème interne, jusqu'à un certain désaveu du travail des comités techniques ou de la façon dont c'était mené et le départ, comme vous le savez, de M. Harvey Mead. Comment redynamiser cette table-là? Je pense que c'est en lui donnant des ressources suffisantes, en balançant mieux la participation gouvernementale et la participation non gouvernementale. C'est aussi en garantissant...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est gouvernemental.

M. Simard: C'est en balançant mieux la participation gouvernementale et non gouvernementale à l'intérieur des comités techniques et de la table, en termes de proportions.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez, si je suis sur votre temps. J'aurais tendance à être d'accord, au moins pour que les Finances soit membre de la table parce que tout passe, à un moment donné, par le ministère des Finances. Ça, ça va équilibrer plus favorablement en faveur du gouvernement encore. Là, je fais juste mentionner...

M. Simard: Donc, on aura à retravailler cette chose-là. Effectivement, je vous l'avais dit, je l'ai noté que vous étiez en faveur d'un poste. Mais que cette présidence-là et que le secrétariat soient formellement indépendants de l'appa- reil gouvernemental pour pouvoir avoir une liberté de penser et de produire des propositions. Malheureusement, comme il est intégré actuellement à l'appareil gouvernemental, le problème est que les ministères qui sont là défendent leur politique actuelle et, souvent, assurent un certain blocage ou un certain frein en ne voulant pas que les comités techniques ou que la table aillent plus loin que la politique actuelle du ministère, ce qui pourrait peut-être embarrasser le ministre pour lequel travaillent cesdits fonctionnaires. Donc, ils ont cette capacité-là, actuellement, un peu de bloquer une réflexion externe qui, à ce moment-là, dynamiserait le gouvernement en lui fournissant un «think tank», un réservoir de pensées et d'actions bien précises et, à ce moment-là, en produisant un plan vert.

On peut critiquer le plan vert du gouvernement fédéral à bien des égards ou le processus, comment il a été bâti, sauf que ce plan vert continue, même en période de récession, d'être appliqué, ce qui est quand même tout à fait remarquable, et aussi constitue vraiment une approche intégrée en questions d'environnement. Et ça nous apparaît, pour nous, un exemple à suivre et même à dépasser pour le Québec.

M. Côté (Guy L): Puisque notre temps est presque terminé, je pourrais...

M. Lazure: Non non, vous êtes sur mon temps. Allez-y, M. Côté. Il n'y a pas de problème, vous avez la parole

M. Côté (Guy L.): C'est tout simplement pour revenir à ce qui nous réunit ce matin: un projet de loi spécifique plutôt que le fonctionnement général du ministère. Vous avez sans doute remarqué - peut-être pas pour la première fois - l'en-tête, à la première page, de l'Union québécoise, «Penser globalement et agir localement». Il m'est venu à l'idée que ce projet de loi souhaiterait que ce soit fait par deux structures différentes. C'est un peu extensionner la réforme de M. Paradis, mais elle n'est pas dénuée de fondement.

Je crois que le ministre de l'Environnement devrait réfléchir à beaucoup plus long terme sur les effets de scinder en deux une fonction qui, jusqu'à maintenant, était intégrée. Il peut y avoir des effets à court terme en ce qui concerne la rapidité d'exécution de l'émission de certificats, etc. Mais, jusqu'à maintenant, vous nous avez donné très peu d'éléments pour nous convaincre que cette réforme-là est non seulement nécessaire, mais essentielle, c'est-à-dire qu'elle va améliorer.

S'il y a des études, nous souhaiterions qu'elles soient connues S'il n'y a pas suffisamment d'études, nous souhaiterions qu'elles soient faites. Un changement de ce type-là, une fois qu'il est fait, est presque irréversible. Lorsque l'Office sera créé et que son mandat sera donné,

ce n'est pas pour un an ou deux ans. Notre organisme croit que c'est prématuré.

M. Lazure: M. le Président...

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: ...j'ai deux questions à soulever. Tout de suite, la première concernant les études, pour enchaîner avec ce que M. Côté vient de dire. Ma question s'adresse au ministre. D'autres groupes en ont parlé. Mais, là, puisqu'il a fait allusion aux recommandations de ses hauts fonctionnaires, je lui demande formellement de déposer à cette commission, à la prochaine séance, les études de ses hauts fonctionnaires qui lui font la preuve qu'une telle structure est nécessaire pour améliorer la qualité des services. J'espère que le ministre, à la prochaine séance, soit cet après-midi ou la semaine prochaine, pourra nous déposer ces études. On veut être convaincus. On ne l'est certainement pas. On pourra prendre connaissance de ces études.

Ma deuxième question à l'UQCN, c'est... Je reviens à la table ronde. Une des caractéristiques ou un des objectifs, j'imagine, en créant cette table ronde, c'était d'avoir des avis d'un grand nombre de personnes compétentes venant de divers milieux, il existe, par contre, le Conseil de la conservation et de l'environnement, qui est un conseil consultatif fort important, qui émet de très bons avis, très souvent pas suivis par le ministre de l'Environnement, malheureusement, notamment, sur les projets récréotouristiques dont on ne parlera pas aujourd'hui.

Mais, je demande à M. Simard, à M. Côté: Est-ce qu'à la table ronde on vous a expliqué un peu les relations entre votre table ronde et le Conseil de la conservation?

Le Président (M. Garon): M. Simard.

M. Simard: Je suis peut-être un peu... Si vous me permettez, ça ne me tente pas énormément de répondre à votre question en ce sens que, un peu... Il y a eu des liens. Bien sûr, on a étudié, par exemple, un projet - qui est d'ailleurs très, très révélateur de la productivité de la table ronde - soit la déclaration sur la qualité du milieu de vie, qui avait fait l'objet d'un commentaire et d'analyses très sérieuses du Conseil de la conservation et de l'environnement. À l'époque, c'était le Conseil de - j'oublie son premier nom - ce n'était pas encore le Conseil de la conservation et de l'environnement.

M. Lazure: Consultatif de l'environnement. (11 h 30)

M. Simard: Comme quoi ça devient vite vieux. Ces affaires-là, c'est comme les ordinateurs. Donc, on avait avisé là-dessus et on a eu un certain... Mais je discutais récemment avec la présidente par intérim - encore là, il y a des problèmes présidentiels - Mme Françoise Guénet-te, si je ne me trompe pas. Elle me disait qu'au Conseil ils avaient ressenti une certaine frustration du manque de relations étroites avec l'actuelle table ronde.

Maintenant, ce qu'il est important de dire là-dessus, ce n'est pas tellement... Le fonctionnement de la table ronde est un problème en soi qui n'est pas directement lié à la question du problème de fonctionnement du ministère, mais directement lié à: comment donner une volonté politique, une vision environnementale, des objectifs clairs, un agenda environnemental à un gouvernement ou à un ministère qui ne semblent pas en vouloir plus qu'il ne le faut. Pour moi, c'est un certain problème qu'on a ressenti, chez nous, au niveau de la table ronde.

Par exemple, est-ce que le gouvernement du Québec peut nous dire clairement s'il a l'intention ou non d'adopter un plan vert? Partant de là, tout le monde travaille en fonction d'articuler ce plan vert là; ça devient une priorité gouvernementale et tout le monde y travaille. C'est un peu comme l'EPA aux États-Unis - tiens, c'est un exemple pertinent, je pense - qui dit: Vous avez des normes à accomplir au niveau de l'industrie de l'automobile. Pendant deux ans, les automobilistes ou les producteurs d'automobiles disent: C'est impossible, c'est impossible, c'est impossible. Après, ils travaillent comme des fous. C'est un peu le «deadlock» de 1993 pour l'Europe. Donc, c'est ce genre de challenges, de grands défis sociaux en termes d'environnement où tout le monde travaille. Faites-nous un plan vert et, éventuellement, on le regardera. C'est surtout ça qui, à ce moment-là, est ressenti.

Maintenant, ce qui m'inquiète plus particulièrement dans la réponse que le ministre a faite tout à l'heure sur la mise en place accélérée des règlements et des lois, tout en admettant que ce n'est pas facile, tout en admettant que ça prend un financement et tout en admettant qu'il doit y avoir un certain ordre dans ça, il se pose une question de contrôle démocratique extrêmement important. On a, ici, une Assemblée nationale qui, dans certains cas, a adopté des lois à l'unanimité et je suis persuadé que les membres pensent qu'elles sont appliquées. Il y a des grands pans de ces lois-là qui diminuent leur économie interne, qui font en sorte qu'elles ne remplissent pas l'objectif qui était mis dans ces pages liminaires. Je cite seulement de mémoire la loi 99 modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement où on disait que toute personne devant construire dans des milieux humides, zones inondables, prairies, etc. - c'est une inversion du fardeau de la preuve - devait faire la preuve qu'elle ne détruisait pas de milieux et faire la preuve que son aménagement ou que sa construction ne détruisait pas d'habitats. Ça, tout le monde l'a adopté à l'unanimité, mais personne

ou très peu de gens savent que ça a été suspendu par le règlement d'administration et que ce n'est absolument pas appliqué. Donc, c'est un problème de société où on légifère et où on promet des règlements avec la législation qu'on ne livre pas toujours.

Au bout du compte, quand on se promène en Nouvelle-Zélande avec notre législation et nos règlements, ils doivent trouver qu'on est extra-ordinairement merveilleux, dans cette société québécoise qui traite son environnement si merveilleusement. Mais, ils ne savent pas, en Nouvelle-Zélande, que, finalement, il n'y en a pas la moitié qui est appliquée. Ça s'est fait avec le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement qui servait, dans des colloques, d'exemple sur le règlement 2n, 2g et 2p pendant de nombreuses années, tout en ignorant parfaitement que ce règlement n'était jamais appliqué. Mais ça cause un problème énorme, je pense, dans les faits, un problème d'éthique qui devra faire l'objet de... Si on ne les applique pas, qu'on les abroge.

M. Lazure: Merci, M. Simard. Je voudrais demander au ministre, puisqu'il me reste encore quelques minutes, quand il a parlé de l'avis de ses hauts fonctionnaires: Est-ce qu'il a demandé l'avis de son Conseil de la conservation et de l'environnement? Est-ce qu'il a demandé l'avis de la table ronde? Est-ce qu'il a demandé ces deux avis-là...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le Conseil nous fournit régulièrement...

M. Lazure: ...sur le projet de loi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...des avis sur la structure du ministère. J'en ai déjà reçu du Conseil. Sur la table ronde comme telle, il faut comprendre le fonctionnement de la table ronde, qui a été partiellement expliqué par M. Simard. La table ronde est maîtresse de son agenda parce que, si le ministre impose un agenda, il est rapidement accusé d'ingérence politique. Donc, le ministre a été un animateur et a laissé tous les membres de la table ronde définir leurs priorités et s'entendre sur les priorités sur lesquelles - je pense que M. Simard peut en témoigner - ils souhaitaient travailler. Ça n'a pas été une des priorités qui ont été retenues par la table. Je n'en tiens pas rigueur à la table, ce serait de l'ingérence que d'en tenir rigueur.

M. Lazure: M. le Président, je pense que le ministre fait une petite pirouette. Il ne s'en tirera pas comme ça. Ce n'est pas de l'ingérence politique et personne ne va l'accuser de faire de l'ingérence politique s'il donne des commandes précises à la table ronde, telles que: Formulez-moi, d'ici un an, un plan vert. Ça, c'est une commande précise et tout le monde serait content.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le Conseil fonctionne un peu comme ça. Le ministre passe des commandes précises au Conseil, mais le Conseil conserve quand même sa possibilité d'émettre, proprio motu, des avis sur des sujets d'intérêt. Au niveau du fonctionnement de la table, si le ministre s'était aventuré à passer des commandes, le linge aurait été déchiré sur la place publique.

M. Lazure: Bon, ce n'est pas ce qu'on entend de représentants qui sont à la table ronde, M. le Président, mais peu importe. Là, je demande une question plus précise, je reviens à une des recommandations de l'UQCN. Comment le ministre réagit-il à la recommandation que le gouvernement relance la table ronde sur l'environnement avec une présidence et un secrétariat indépendants de l'appareil gouvernemental? C'est quoi, M. le ministre, votre réaction à ça?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ma réaction à ça, c'est qu'à la fois, dans le même paragraphe, on veut que le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor y siègent - j'imagine, en plus des autres ministres actuels - et, en même temps, on souhaite que ce soit indépendant de l'appareil gouvernemental. C'est, dans le même paragraphe, beaucoup d'éléments à concilier.

M. Simard: Je ne comprends pas. Actuellement, vous dites que la table est maîtresse de son agenda. Donc, vous prétendez qu'elle est indépendante. Il y siège beaucoup de ministres. Disons que, si vous avez des problèmes avec la proposition, vous devez avoir des problèmes avec votre propre fonctionnement de table ronde parce que c'est ce que vous prétendez qu'elle est présentement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. C'est à-dire que ce que l'on a fait, c'est qu'on a composé une table où la participation gouvernementale est importante, les autres participations non moins importantes. Là, vous nous suggérez d'augmenter la participation gouvernementale. On vous dit que ça nous apparaît intéressant, le ministère des Finances, entre autres. Le Conseil du trésor, c'est... Mais, les Finances, là...

M. Simard: C'est une façon de rebalancer, M. le ministre, justement, c'est-à-dire que je crois que c'est là où ça peut s'harmoniser. Vous pouvez ajouter des représentants gouvernementaux. Si la présidence est indépendante et si son secrétariat est indépendant, à ce moment-là, ça clarifie beaucoup les rôles de tout un chacun et ça peut permettre à des gens du ministère des

finances et du conseil du trésor, tout en sachant que la présidence est indépendante et que le groupe peut émettre des propositions au-delà des politiques actuelles du gouvernement, même une plus grande marge de manoeuvre. ça nous apparaît possible.

M. Lazure: M. le Président, je m'excuse. Il me reste seulement une minute; alors, je vais l'utiliser, si vous permettez. Je veux simplement faire remarquer au ministre qu'il peut se placer la tête dans le sable aussi longtemps qu'il le voudra, mais la table ronde ne fonctionne pas. Son sous-ministre adjoint au développement durable, qui était secrétaire de la table ronde sur le développement durable, nous a dit publiquement, il y a quelques mois: Ça ne fonctionne pas. L'UQCN comme d'autres groupements viennent nous dire: Ça ne fonctionne pas. Alors, je pense qu'il faudrait que le ministre ait la modestie de dire: C'est vrai, ça ne fonctionne pas et je vais prendre en bonne considération les propositions qui viennent de l'UQCN et d'autres groupements pour améliorer le fonctionnement.

Je pense qu'une des choses utiles qu'il pourrait faire, ce serait de demander à cette table ronde: Qu'est-ce que vous pensez de mon projet de loi de créer un office? On lui suggère fortement de le faire. Maintenant, les principaux participants à la table ronde nous ont donné leur opinion. On peut présumer que ce serait assez éclatant comme consensus.

M. le Président, au nom de l'Opposition, je remercie les représentants de l'UQCN encore une fois pour leur excellent mémoire et j'espère que le ministre va en tenir compte.

Le Président (M. Garon): Au nom de la commission, je remercie les représentants de l'Union québécoise pour la conservation de la nature. Je suspends les travaux de la commission pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 39)

(Reprise à 11 h 43)

Le Président (M. Garon): La commission de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux en demandant à la Confédération des syndicats nationaux, avec sa vice-présidente, Mme Céline Lamontagne, de s'approcher de la table des délibérations avec les gens qui l'accompagnent. Nous aurons, à toutes fins pratiques, 45 minutes pour l'audition du mémoire. Normalement, il est prévu une heure: 20 minutes pour votre exposé, ensuite, 20 minutes pour les libéraux et 20 minutes pour l'Opposition officielle. Mais, comme on doit terminer nos travaux à 12 h 30 - parce qu'il y a des caucus et, après ça, la période de questions à 14 heures - ça pourrait être 15-15-15, si vous voulez. Mais, ce que vous prendrez en plus, on le soustraira aux deux partis politiques; ce que vous prendrez en moins, ils pourront le prendre pour poser des questions additionnelles, s'ils en ont le désir.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Lamontagne (Céline): Très bien. Alors, merci et excusez-nous de notre retard. Ce n'est vraiment pas très beau sur la 20, il y a eu des accidents assez horribles, semble-t-il.

Je vais vous présenter d'abord les personnes qui m'accompagnent: Serge Quenneville, conseiller syndical à la CSN, et Roger Laroche qui travaille aussi à la CSN. Ces deux personnes ont participé à la recherche entourant notre mémoire sur l'Office de l'environnement. Moi, Céline Lamontagne, je suis vice-présidente de la CSN. Je vais même essayer d'être plus courte que les 20 minutes habituelles, pour laisser plus de temps aux questions.

Je veux juste signifier, d'entrée de jeu, que - peut-être que certains s'en souviennent - la CSN a tenu, en novembre dernier, un colloque sur l'environnement. On a pris conscience - ça a été vraiment une prise de conscience importante pour le mouvement - de la tâche importante à accomplir dans le domaine de l'environnement. Mais, je devrais dire aussi qu'à l'instar d'autres organismes qui nous ont précédés et peut-être d'autres qui nous suivront l'étude du projet de loi qui est sur la table actuellement nous a laissés perplexes, nous a laissés avec plusieurs interrogations qu'on veut partager avec vous. Je pourrais même utiliser une boutade populaire et connue et dire que, dans le fond, nous ne sommes ni pour, ni contre, bien au contraire.

Plus sérieusement, je dirais: Oui, nous sommes d'accord avec le principe d'un office de l'environnement composé de représentants de différents secteurs de la population. Nous sommes d'accord que soient confiées à un office des fonctions de régulation, de promotion, de conception de programmes, etc. Mais, on peut se demander: Est-ce là la priorité actuelle du gouvernement? Est-ce que ça devrait être ça, la priorité actuelle, quand on pense aux tâches qu'il y a à accomplir en environnement?

Tout le monde le dit, et on le répète: C'est une réforme qui est essentiellement un transfert de pouvoirs et de fonctions. On ne voit pas les effets qualitatifs qu'elle peut avoir sur la promotion de l'environnement et sur la protection même de l'environnement. Donc, c'est vraiment une réforme administrative qui nous laisse perplexes, encore une fois, sur les effets qu'elle va avoir sur la qualité même de notre intervention, comme société, sur la protection de l'environnement.

Alors, on va essayer de situer plusieurs points: d'abord, des remarques générales qui

sortent un peu du projet de loi et des remarques plus précises sur le projet de loi qui est sur la table. D'abord, un premier constat sur une réforme environnementale ou une réforme législative en environnement. Nous, on est d'accord pour dire que le développement durable et la protection de l'environnement doivent s'appuyer, comme ça a été dit à la Commission mondiale sur l'environnement, sur une réforme administrative et juridique. Mais on croit qu'il faut bien voir c'est quoi, la situation actuelle au Québec.

De façon générale - peut-être que le ministre va partager notre point de vue - on pense que le ministère de l'Environnement n'a pas les moyens de ses mandats, surtout dans un contexte où la population est de plus en plus exigeante pour avoir de l'information, de la transparence et des interventions touchant la protection de l'environnement. On peut constater que le ministère manque de personnel, n'a pas les moyens financiers suffisants, que la législation est en grande partie désuète, qu'il y a des pratiques - en termes qu'on dirait juridiques ou d'application de la réglementation - qui sont différentes selon que ce soif des entreprises ou des citoyens. Il y a aussi une réforme à la pièce avec un processus de consultation qui n'est pas toujours évident.

Alors, quand on parle de réforme à la pièce, je vais donner des exembles. On a plusieurs projets, ou parties d'ame$dements à des projets de loi sur la table ou nouvelles réglementations. Je pense à la loi 43, à la loi 405, à la loi 65 qui n'a pas été encore, appliquée, aux audiences qu'on a eues sur le B/^PE, où on n'a pas encore le rapport. On a aussi certaines autres réformes réglementaires. Il y a le rapport de la commission Charbonneau qui est appliqué plus ou moins, en tout cas, sûrement pas dans son ensemble. Donc, il y a plusieurs petites réformes, mais, nous, on trouve qu'il serait urgent d'avoir une approche intégrée en environnement qui soit appuyée sur une large consultation, et qu'on ait vraiment une réforme administrative complète et transparente également

Alors, c'est pour ça qu'on propose que le gouvernement inclue son projet de création de l'Office dans une réforme globale du ministère de l'Environnement qui soit accompagnée évidemment d'un énoncé de politique sur la question environnementale et que, sur cette réforme, il y ait une large consultation publique. À notre avis, ça inclut qu'il y ait un énoncé de politique, une réforme juridique et administrative, si l'on veut, mais qui soit basée sur des principes ou des objectifs qu'on veut poursuivre en environnement.

En lien avec cette première proposition, on peut constater également que, si l'Office va créer un nouveau cadre ou une nouvelle structure, on va tous convenir, par ailleurs, qu'il va hériter de la législation actuelle, des lois actuel- les qui sont, sur bien des aspects, désuètes, à notre avis.

Nous, on pense aussi qu'on doit - c'est une deuxième proposition qu'on vous soumet - accélérer le processus de révision des lois et règlements pour s'assurer d'un encadrement juridique acceptable reconnaissant et respectant au maximum le caractère englobant de la protection et de la gestion de l'environnement. Alors, oui, il faut accélérer le processus de révision de la législation et de la réglementation, mais il faut aussi, surtout - peut-être qu'il y aura des étapes à tenir compte, des échéanciers à tenir compte - avoir une vue d'ensemble. Il faut savoir un peu comme société où on s'en va avec toute cette question de l'environnement.

Un autre aspect, ce sont les mécanismes mêmes de l'office de l'environnement. D'abord, sur les nominations, nous, on pense qu'il doit y avoir si l'Office existe - je sais qu'on a annoncé ce matin des modifications majeures au projet de loi. Sur les mécanismes mêmes de la composition de l'Office, d'abord, on pense que, pour les nominations au sein de l'Office, il devrait y avoir une consultation un peu plus large que celle qui est prévue. On suggère aussi la possibilité d'ajouter des observateurs et des observatrices pour avoir un plus grand éventail de représentativité des secteurs de la société québécoise. On constate aussi que les pouvoirs du conseil d'administration ne sont pas du tout définis. On ne parle que des pouvoirs du président ou des personnes qu'il délègue. C'est un aspect.

Deuxième aspect, on constate aussi que le financement n'est pas assuré. Il y a eu beaucoup de débats autour de la question du financement de l'Office et il faut s'assurer que l'Office ait un financement adéquat. Toujours sur le volet du financement, un autre aspect qui nous tient à coeur, c'est: Oui, il faut financer des structures, il faut financer un office ou un ministère qui va faire appliquer la réglementation, mais il faut s'assurer aussi d'indemniser les victimes et d'avoir les moyens de faire la restauration de l'environnement Alors, dans ce sens là. on fait une proposition qui dit que le système de redevances, qui a fait couler beaucoup d'encre ces derniers temps, serve, entre autres, à créer un fonds environnemental, basé sur un système de «sans égard à la faute», dans le but de restaurer l'environnement et d'en indemniser les victimes. Alors, c'est deux choses différentes sur le financement de l'Office. On veut, d'une part, s'assurer que l'Office, s'il existe, ait un financement adéquat pour répondre à ses nombreux mandats et ne pas faire en sorte qu'il y ait un arriéré ou qu'il y ait des problèmes de volume de dossiers. Mais on pense aussi à la question de l'indemnisation des victimes et de la restauration de l'environnement.

Un autre point sur lequel on s'est attardé brièvement, mais qui est majeur, à notre avis, ce

sont tous les aspects juridiques pu judiciaires qui sont dans le projet de loi actuel. Alors, il y a une nouvelle structure qui est proposée. Les grandes étapes de la structure, à savoir une reconsidération administrative, un bureau de révision et un mécanisme d'appel, c'est une procédure qu'on connaît sur d'autres questions. Mais, ce qu'on peut constater, par exemple, c'est que ce n'est pas clair. Ce n'est pas clair. Il n'y a pas de délai, par exemple, pour la reconsidération administrative. Le bureau de révision, on connaît très peu ses pouvoirs. Sa composition reste vague et, ce qui est aussi assez surprenant, c'est que la procédure d'appel est limitative sur certaines questions. Donc, dans certains dossiers, il n'y a pas de procédure d'appel. On constate aussi que le citoyen ou la population en général n'a pas accès à certains recours et au droit d'appel.

Alors, nous, on demande que le gouvernement consacre l'accès de la population au droit de recours et d'appel en environnement. Toujours, sur cette question des procédures ou des recours, ce qui est important comme objectif à viser, ça demeure toujours l'accessibilité du plus grand nombre à des recours, tout en s'assurant de ne pas judiciariser considérablement et que ces recours deviennent difficiles d'accès ou deviennent coûteux, finalement. Alors, il faut prévoir des mécanismes clairs d'accessibilité pour que le droit soit en application. En conclusion, nous, on pense que, oui, la question environnementale est importante, elle doit s'insérer dans le cadre d'un développement durable. Dans ce sens-là - on en parle dans notre mémoire, je ne l'ai pas dit tout à l'heure - on trouve important que le ministère de l'Environnement soit impliqué et qu'il y ait vraiment de la concertation entre les différents ministères pour que la question de l'environnement s'insère dans tous les grands dossiers, particulièrement les dossiers à teneur économique ou industrielle. Alors, il faut que ça traverse vraiment toutes les grandes missions du gouvernement. On pense aussi, donc, que la réforme environnementale, la réforme administrative doit s'insérer dans des objectifs évidents de développement durable. Merci.

Le Président (M. Garon): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Vous me permettrez de remercier, j'étais pour dire mes anciens amis de la CSN au moment où j'étais ministre du Travail; je pense que j'ai conservé avec M. Larose, à travers le temps, un dialogue, pas autant avec les autres membres, je m'en excuse, ce n'est pas toujours facile sur le plan de l'agenda. Je vous remercie de votre mémoire. Comme centrale syndicale, vous avez des choix qui sont parfois difficiles à faire dans le quotidien. Lorsqu'on parle de décisions au sein d'une entreprise, respecter l'environnement peut parfois vouloir dire, lorsque l'entreprise était polluante, des sacrifices énormes.

La CSN, je tiens à le souligner, a été la seule centrale syndicale, dans le cas du dossier de Grande-Baleine, qui a dit oui à Grande-Baleine, mais pas sans études ou évaluations environnementales. Nous avions besoin de cet important support au moment où la CSN nous l'a accordé. Je tiens à transmettre mes remerciements à l'ensemble de la centrale syndicale.

Il y a une inexactitude que je ne peux pas laisser passer dans votre mémoire. On dirait que ça arrive dans tous les mémoires qu'il y en a une grosse. On la retrouve à la page 7 de votre mémoire. Le titre est bon, c'est «manque de personnel», mais le paragraphe qui suit nous indique que le «MENVIQ a fait des coupures importantes dans ses effectifs depuis plusieurs années». Ça, ce n'est pas exact. Nous avons eu, à titre d'exemple, en 1989-1990, des crédits additionnels pour 15 000 000 $ et nous avons créé 200 nouveaux postes avec ces 15 000 000 $. Ce n'est pas allé strictement dans la création de postes, mais il y a 200 nouveaux postes. L'an passé, c'est 10 000 000 $ additionnels au budget et c'est une centaine de postes qui ont été ajoutés, je dirais, particulièrement au niveau des bureaux régionaux du ministère de l'Environnement du Québec. Donc, il y a une augmentation d'effectifs. Mais votre titre demeure vrai, nous n'avons pas suffisamment d'effectifs pour nous acquitter des mandats qui sont les nôtres et qui croissent quotidiennement.

Sur le plan de la structure du ministère, je vais tenter de vous résumer la situation. De 1978 à 1989, le ministère est bâti pour répondre aux crises. S'il y a une crise de déchets dangereux, on crée une direction générale des déchets dangereux; s'il y a une crise de pneus, on crée une direction générale des pneus. On se ramasse avec un organigramme qui est incompréhensible. On tente de restructurer le ministère en 1989 en fonction des trois plus importantes sources de pollution: municipale, industrielle, agricole. On sait que, pour réussir dans l'application, il faut aller dans les régions: on crée une division régionale, sous-ministériat à la division régionale. Corriger les problèmes du passé, c'est bien, mais il faut maîtriser l'avenir: sous-ministériat au développement durable. (12 heures)

On tente de régionaliser le ministère. Les effectifs ont plus que doublé en région au cours des deux dernières années. On a encore des problèmes de fonctionnement et on tente, sur le plan de l'organisation, de créer l'Office. Mais, vous avez raison de le dire, l'Office va continuer à administrer les lois et les règlements avec les qualités et les vicissitudes qu'on leur connaît. Là-dessus, on a tenté de boucher des trous - j'utilise l'expression parce que c'est ça qu'on a fait - de répondre au plus urgent au cours des deux dernières années.

En 1990, la loi 65 - pollueur-payeur - que vous avez mentionnée, vous avez dit qu'elle n'avait jamais été appliquée; je suis obligé de vous soumettre respectueusement qu'on ne l'a peut-être pas suffisamment publicise, mais que cette législation a été utilisée à plusieurs reprises, de mémoire, dans le cas de Laidlaw-Tricil à Mercier, dans le cas de la mine Eldorado en Abitibi, dans le cas des terrains de la Balmet à Saint-Jean-d'Iberville et peut-être - je n'ose pas l'affirmer - dans le cas de certaines industries dans l'est de Montréal, sur la décontamination des terrains. Si on n'avait pas eu cette législation, on n'aurait pu intervenir. On a également créé la société d'État, RECYC-QUÉBEC, en 1990.

Sur le plan des règlements, en 1990: la réglementation sur le contenu en soufre dans le mazout lourd, pour atteindre nos objectifs en fonction de la réduction des pluies acides. Grâce à la collaboration de tout le monde dans la société québécoise, l'un des dossiers où l'on peut dire que les objectifs ont été atteints et dépassés, même s'il faut continuer à y travailler, c'est le dossier des pluies acides comme tel Les objectifs qu'on s'était fixés en 1980, on les a suivis à la lettre comme ministère de l'Environnement du Québec.

En 1991, on a accéléré encore sur le plan législatif: Loi sur la Société québécoise d'assainissement des eaux, de façon à nous permettre d'aller dans toutes les petites municipalités à travers le Québec; loi sur les rejets industriels, de façon à prévoir - on le verra tantôt - la tarification des rejets industriels, dans le sens que la CSN nous le propose; loi sur les matières dangereuses parce qu'avant ça on parlait de «déchets dangereux» et, suite au rapport de la commission Charbonneau, il a fallu également légiférer.

Réglementation. Les règlements mis en vigueur au cours de l'année passée. Carrières et sablières: il a fallu intervenir de façon urgente; neiges usées: avec l'accord des municipalités, des municipalités régionales de comté, l'UMQ, de la table Québec-municipalités; sur les déchets solides, de façon à permettre aux gestionnaires publics de refuser les déchets qui proviennent de l'extérieur de la MRC; règlement sur l'entreposage sécuritaire des pneus: à la demande du ministre de l'Environnement et du ministre de la Sécurité publique, suite à certains événements au Québec.

Les règlements qu'on a prépubliés, qui sont en période de consultation présentement, qui vous touchent, la CSN. Pâtes et papiers, entre autres, et vous avez offert une bonne collaboration à cette réglementation. Les premiers règlements sur les déchets biomédicaux vont entrer en vigueur le 1er avril prochain. La semaine dernière, j'ai annoncé le règlement sur les attestations d'assainissement en milieu industriel; c'est un règlement majeur. On a des progrès de faits en pollution municipale. En pollution industrielle, nous sommes encore à l'état embryonnaire et, dans le domaine agricole, on commence à peine à mentionner le mot au ministère de l'Environnement du Québec.

Pendant ce temps-là, on a ajouté à la protection de nos cours d'eau, une bande de protection sur nos cours d'eau. Avant ça, il y avait simplement les affluents du Saint-Laurent; maintenant, l'ensemble des cours d'eau du Québec est visé. On a créé des réserves écologiques parce qu'il faut laisser aux générations futures quelques coins de territoire intacts pour qu'elles puissent comparer les dégâts qu'on a faits ailleurs. On a créé, au cours des 2 dernières années, 11 réserves écologiques nouvelles; on compte en créer 39 nouvelles au cours des 3 prochaines années. On a amélioré notre plan d'urgence et je pense que, là, vos travailleurs sont particulièrement concernés parce que ce sont les premières victimes, habituellement, dans le cas des interventions d'urgence. Ça arrive en milieu industriel; ce sont eux qui sont sur les lieux. Et, là aussi, il y a eu de l'amélioration.

Et, quelque chose qui est ignoré, le ministre de l'Environnement fait désormais partie non plus simplement du comité interministériel du développement régional et de l'environnement, mais il siège également au comité de développement économique, ce qui fait en sorte que les organismes gouvernementaux comme la SDI ne participent plus financièrement dans des entreprises qui ne sont pas en règle avec le ministère de l'Environnement du Québec.

On a tout fait ça, mais l'insatisfaction de la population envers le gouvernement ou le ministère de l'Environnement est quand même présente. Il y avait 70 % d'insatisfaits il y a 2 ans; il en demeure 48 %, 2 ans après, et c'est encore trop. Il faut faire davantage. On tente de se donner un outil, avec l'Office, qui va nous permettre de mieux «performer».

Vous posez des questions essentielles. Il y a des corrections à apporter, vous avez raison de le souligner. La question des droits d'appel, la question de l'autonomie - vous n'êtes pas le premier groupe - c'est avec raison que vous soulignez ces événements.

Vous insistez sur quelque chose d'important, le financement. Vous savez comment c'est important. Le mode de financement par tarification, le mode de financement par redevances n'est pas inclus dans le projet de loi tel que déposé. Vous en traitez dans votre mémoire. Si vous prenez le temps d'y consacrer quelques pages, ça doit être parce que vous considérez ça assez capital. J'aimerais vous entendre davantage sur le financement d'un office ou du ministère de l'Environnement.

Mme Lamontagne: Premièrement, on pense que c'est à travers les crédits et le fonds de la province que devraient être financées une

structure importante comme le ministère de l'Environnement et une structure comme l'Office de protection de l'environnement. C'est-à-dire que, si l'Office prend force, comme il va avoir un rôle important en termes d'application des règlements et des lois, il ne faudrait pas que ce soit laissé aux aléas d'un financement pas trop sûr. Il faut que ce soit prévu dans les crédits du gouvernement.

La question des redevances nous posait un type de problème. C'est que, ça, ce n'est pas toujours constant comme revenu. Alors, dire, comme ça a été dit, que l'Office serait financé uniquement par les redevances, ça nous inquiétait. Si on inclut dans les redevances la partie punitive, ça pose un autre problème; c'est-à-dire qu'il faut punir beaucoup, plutôt que faire de la prévention, pour obtenir du financement. Alors, on trouvait que c'était une contradiction entre l'objectif qui est toujours de prévenir les catastrophes environnementales ou de réparer de mieux en mieux les systèmes plutôt que de juste punir ceux qui polluent ou ceux qui dérogent à la réglementation.

Alors, c'est pour ça qu'on a abouti avec une telle proposition, tout en tenant compte, on le sait - on en parle à toutes les tables et à toutes les commissions - de la situation financière compliquée actuellement dans la société. A notre avis, les redevances devraient plus servir à un fonds - on n'a pas mis de pourcentage -pour l'indemnisation des victimes et aussi pour réparer, même si on a le principe pollueur-payeur, les écosystèmes, parce qu'il y a de la réparation à faire. Mais on n'a pas fait de règle. C'est une proposition d'ordre très général. Je ne sais pas si vous voulez ajouter...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau des amendes, je pense que je vous suis assez facilement. Il y a quelque chose d'un petit peu pernicieux à dire: On va financer un système en poignant les coupables.

Mme Lamontagne: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est rendus à l'extrême et je pense qu'on aurait avantage à être prudents dans cette avenue. En ce qui concerne la tarification, moi, je n'ai pas d'objection parce que, lorsque quelqu'un utilise un service gouvernemental, qu'il soit tarifé, c'est-à-dire qu'on lui charge ce que ça coûte, ça se fait dans d'autres organismes et je pense que c'est une coutume assez répandue.

Lorsqu'on parle des redevances comme telles, ce que l'on a annoncé, grosso modo, la semaine dernière, et qui devrait normalement être administré par un office de protection de l'environnement dans le cadre du programme de réduction des rejets industriels, ce sont les certificats d'attestation d'assainissement qui font en sorte que l'industrie qui pollue paie une redevance de tant la tonne sur ses émissions dans l'eau, dans l'air ou dans le sol, de façon à inciter cette industrie, plutôt que de payer une redevance, à investir dans de la nouvelle technologie et à se moderniser pour faire en sorte de ne pas polluer. L'objectif, ce n'est pas de collecter l'argent comme tel; l'objectif, c'est de faire en sorte que ça devienne payant pour l'entreprise de se moderniser.

Pâtes et papiers est un bon exemple. Ce règlement va s'appliquer, comme premier secteur d'activité économique, dans le domaine des pâtes et papiers. Donc, ceux qui vont se moderniser vont avoir moins à payer en redevances et vont pouvoir occuper une position plus concurrentielle sur les marchés. Mais je sais que ça affecte, ça, également... On l'a tenté et je pense qu'on n'a pas été décriés par les entrepreneurs. Donc, le niveau de frais que l'on charge à la tonne doit être raisonnable; ils n'ont pas levé le plafond lorsqu'on l'a annoncé. Même M. Le Hir a dit qu'on tenait compte de la conjoncture économique. Mais on voulait mettre un pied dans la porte et aller vers cette approche-là. Ce qui veut dire qu'avec les années, normalement, les montants vont augmenter et, normalement également, le nombre de paramètres sur lesquels on fixe des charges va augmenter étant des paramètres scientifiquement plus connus et plus développés.

Moi, j'aimerais entendre la CSN sur cette approche, parce que c'est majeur. C'est l'approche que l'on a prise. Autant on a pris l'approche en assainissement des eaux dans les financements conjoints avec les municipalités, dans le municipal, autant c'est cette approche qui est présentement retenue dans le milieu industriel, et c'est là que se retrouvent vos emplois.

Mme Lamontagne: Bon. Je vais vous dire qu'on n'a pas encore fait une longue réflexion sur cette question-là, mais je vais vous donner une première impression. Quand vous dites: Plus une industrie va être environnementalement saine, si on veut, moins elle aura à payer de redevances, donc, c'est un incitatif à ce qu'elle se corrige, moi, ça m'inquiète un peu parce que, à mon avis, ce n'est pas évident.

Je peux vous donner un autre parallèle que je n'aime pas faire, mais je vais le faire pareil parce que c'est peut-être un secteur qu'on connaît très, très bien. C'est en santé et sécurité au travail, où on a mis sur pied un mode de tarification, il y a quelques années, qui devait être incitatif au niveau de la prévention. C'était l'objectif et l'objectif était correct, souhaitable, et on le partageait même au niveau syndical. Mais on constate maintenant - et ce n'est peut-être pas indifférent à la situation difficile que vit actuellement la CSST - que, comme on était puni s'il y avait plus d'accidents - j'appelle ça des punitions: on paie plus parce qu'on a plus d'accidents - on a développé toutes sortes de moyens chez les employeurs pour se soutraire à

cette tarification-là.

Donc, on constate qu'on n'insiste pas plus sur la prévention, mais qu'on essaie de déjouer le système par d'autres façons. C'est un peu comme un permis de polluer. Tu paies parce que tu pollues tant. Si ça va vers la prévention, très bien. Mais il y a des fois des effets pervers de systèmes comme ça, et on peut le constater en santé et sécurité. Peut-être que le parallèle n'est pas bon, mais c'est quand même les mêmes industries, habituellement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là où vous avez des problèmes d'accidents de travail, on a généralement des problèmes de pollution importants.

Mme Lamontagne: Oui. Voilà!

M. Laroche (Roger): Si je peux rajouter, M. le ministre...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

M. Laroche: ...il faut faire attention à ne pas tomber dans le modèle de l'US EPA actuellement, qui a une tarification qui découpe sa charge polluante en volumes et fait tout simplement une vente de cette tarification-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On n'est pas rendus là.

M. Laroche: Je ne vous prête pas l'intention de le faire...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

M. Laroche: ...mais il ne faut pas mettre sur pied les mécanismes qui vous permettraient de le faire. Je trouve que c'est contre-productif, pour les mêmes raisons que Mme Lamontagne le soulignait, au niveau des accidents et au niveau environnemental aussi. Actuellement, on est en difficultés économiques, les budgets sont plus serrés, ça va être plus tentant pour l'industrie de peut-être trouver un moyen de ne pas payer cette charge-là, donc peut-être d'investir d'une autre façon et de chercher des subventions. Si l'argent rentre dans les papetières comme il rentrait il y a 15 ans, ça ne sera pas un gros problème de payer la charge polluante, j'ai l'impression. C'est ça, le problème.

Le Président (M. Garon): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux saluer, au nom de l'Opposition, Mme Lamontagne et ses deux collègues, et souligner aussi le travail que fait la CSN depuis quelques années en matière environnementale, notamment un colloque que vous aviez organisé il y a quelques mois et auquel j'ai participé. Vous avez des commentaires tels que: Est-ce que c'est là la priorité actuelle du gouvernement? D'autre part, vous dites: On ne voit pas les effets positifs sur la protection de l'environnement, sur la promotion de l'environnement. Troisièmement, vous dites: Le ministère n'a pas les moyens de ses mandats et cette réforme-ci n'apporte pas d'autres moyens financiers. Il n'y a pas d'ajout de budget ou de personnel. Et, finalement, vous déplorez qu'on procède par des réformes à la pièce.

Je m'arrête à votre première recommandation, votre première proposition, à la page 10. Vous dites: «Que le gouvernement inclue le projet de création de l'OPEQ dans une réforme globale du ministère de l'Environnement (sous forme d'énoncé politique sur la question environnementale) et qu'il soumette cette réforme au processus de consultation publique».

Avant que vous arriviez, le groupe qui est venu nous présenter son mémoire, l'Union québécoise pour la conservation de la nature, s'opposait à la création de l'Office et a posé la question au ministre: Mais sur quoi vous vous basez pour dire que c'est ça, le remède aux maux actuels? Les maux actuels, tout le monde constate qu'il y a des lacunes au fonctionnement du ministère, les délais en particulier. Et le ministre nous a dit: Mes hauts fonctionnaires m'ont proposé ça. Moi, j'ai fait remarquer au ministre que, par ailleurs, le Syndicat de professionnels du gouvernement s'oppose au projet de loi. Ces professionnels, qui travaillent dans son ministère, s'y opposent officiellement et aussi le Syndicat des ingénieurs du gouvernement. Il y a au-delà de 200 ingénieurs dans son ministère. Tout ce monde-là dit: Ce n'est pas nécessaire, c'est même un gaspillage, et c'est mauvais.

Il y a eu tellement de réformes! Il y en a eu 6 en 12 ans, des réformes majeures, dans ce ministère-là. La dernière, c'est lui qui l'a entreprise, le ministre actuel, il y a deux ans. Les gens n'ont même pas le temps de digérer une réforme qu'il arrive une autre réforme. Parce que, ça, ce n'est pas rien. C'est majeur, ce que le ministre propose. C'est de prendre les presque 1800 fonctionnaires à son ministère, de couper ça en deux; la moitié s'en va former l'Office et l'autre moitié reste au ministère. (12 h 15)

Moi, je vous dis, avec votre première proposition, nous sommes d'accord, l'Opposition. Dans ce projet-là, on va plus loin que vous. On dit: II faut que le ministre retire son projet. Mais, au moins, s'il revient avec un projet, il faut que ça fasse partie d'une réforme globale et que cette réforme-là, elle soit soumise à la population, à la consultation. Le groupe de l'UQCN disait, un peu en badinant, au ministre: Vous n'avez pas fait d'étude d'impact de votre projet. Vous êtes le promoteur d'un projet sans avoir fait une étude des impacts que cet Office va avoir sur le paysage actuel de l'environnement

au Québec.

Alors, je veux simplement vous entendre élaborer un peu plus sur le genre de consultation publique sur un énoncé de politique, qui précéderait une telle réforme, parce que ce n'est pas évident que cette réforme-là est nécessaire et utile. Est-ce que vous pouvez élaborer un peu sur votre première proposition?

Mme Lamontagne: D'abord, juste un petit commentaire. Je badinais au début, mais c'est un peu ça, le sentiment qu'on a. Il existe des offices dans d'autres domaines. Pour la langue française, il y a un office; il y en a qui vont bien, il y en a qui vont moins bien. Qu'il y ait une structure en dehors du ministère - mais dépendante du ministère politiquement, évidemment - qui fasse un peu tout l'aspect administratif, les permis, etc., nous, ça ne nous heurte pas comme fonctionnement, si le ministère pouvait plus se consacrer aux grandes politiques, à l'interaction entre les différents ministères. Parce que, ça, c'est un problème. On parle de grappes industrielles avec M. Tremblay. Il faut s'occuper d'environnement et de développement industriel dans les grappes industrielles. Pas plus tard, pas à côté, en même temps. Ça, c'est une grande préoccupation pour nous. Alors, qu'il y ait un ministère qui se consacre aux grandes politiques, qui s'implique et qui soit un ministère senior, je pense, dans le gouvernement, ça nous apparaît important.

C'est pour ça qu'on n'a pas dit non. Ça peut être un moyen de fonctionner si c'est plus efficace. Mais on sait que c'est un contenant et que le contenu reste pareil. Ça, on l'a dit à plusieurs reprises. Sur la première proposition, c'est simple. Tantôt, M. le ministre nous énumérait une série de réformes qui avaient été faites. Il nous énumérait une série de règlements.

Nous, on dit qu'il y a deux aspects. Il y a la législation, la réglementation et la réforme administrative. Qu'on sache où on s'en va un peu; que ce soit dans un cadre, que ce ne soit pas à la pièce et que ce soit dans un tout où on énumère c'est quoi nos priorités au Québec au niveau de l'environnement. Est-ce les déchets toxiques? Est-ce les déchets domestiques? Est-ce les rejets industriels? Est-ce l'eau, etc? Qu'on énumère comme une espèce de plan de travail, si on veut, et qu'on accompagne ça, qu'on dise: Oui, on a ça comme objectif, ça nous prend telle réforme et peut-être, possiblement, qu'il y aura création d'un office. Mais que ce soit dans un cadre.

Il y a aussi un problème; en écoutant l'énumération que M. le ministre nous a faite, je dis: Oui, mais ce n'est pas évident que tout le monde sait ça. Ce n'est pas évident qu'on fait des liens entre les différentes mesures qui se prennent. Et ça, c'est peut-être là un grand problème, à cause que la question de l'environnement est devenue une question... Il y a eu

Saint-Basile, il y a eu les pneus, il y a eu aussi une prise de conscience internationale et mondiale. Il va y avoir la Conférence de Rio, au mois de juin. Alors, la population est de plus en plus exigeante, a de plus en plus d'attentes et il y a aussi beaucoup de groupes.

Donc, nous, on dit qu'on a avantage, comme société, à voir les choses un peu dans leur ensemble et à avoir des objectifs de contenu et pas juste de contenant. Et c'est vrai que ce n'est pas facile. M. le ministre a souligné l'aspect de Grande-Baleine. Ce débat-là à l'intérieur de l'organisation ne s'est pas fait sans heurt et sans confrontation de différents secteurs, parce que ce n'est pas facile. Alors, quand ce n'est pas facile, il faut être le plus transparent possible et avoir un cadre le plus général possible pour qu'on sache où est le chemin qu'on suit.

M. Lazure: Et est-ce que vous verriez la table ronde sur le développement durable, qui a été mise sur pied il y a déjà quelque temps, qui fonctionne plutôt mal... Son secrétaire général, l'ancien sous-ministre au développement durable, a démissionné en claquant la porte, en disant: La table ronde ne fonctionne pas parce que le ministre n'a pas de vision d'ensemble. Je ne vous demande pas de commenter ça, mais est-ce que la table ronde, en soi, pourrait être un instrument pour élaborer un énoncé de politique?

Mme Lamontagne: C'est sûr que la table ronde pourrait servir de lieu prioritaire de départ des consultations pour élaborer cette politique-là, parce qu'à la table ronde il y a des représentants de différents groupes de la société. Je vais faire un autre parallèle dans un autre dossier. Je pense à la formation professionnelle où, avant d'arriver à un projet de loi, un énoncé de politique, il y a eu la conférence permanente qui a permis que les parties s'assoient et, avec le ministre, fassent un certain bout de chemin. Alors, la table ronde pourrait être ce lieu et ce serait un défi très intéressant pour la table ronde d'avoir ce projet-là et de faire ça avec le ministère.

M. Lazure: Est-ce que la CSN en fait partie directement?

Mme Lamontagne: Oui. M. Lazure: Oui?

Mme Lamontagne: Le président de la CSN est membre de la table ronde et on est membres d'à peu près tous les comités techniques. Roger et Serge, ici, sont tous deux sur des comités.

M. Lazure: Est-ce qu'à votre connaissance la table ronde a été consultée sur ce projet de loi?

Mme Lamontagne: À ma connaissance, non, parce que la table ronde, ça fait longtemps qu'elle ne s'est pas réunie.

M. Laroche: Si vous permettez, j'ai la présidence d'un des trois comités, celui de l'aménagement du territoire et du milieu urbain. Effectivement, il y a des difficultés à la table ronde. La table ronde est au neutre depuis un bout de temps. Vous ouvrez la porte, je ne peux pas m'empêcher d'embarquer dedans.

M. Lazure: Pas d'objection.

M. Laroche: II y aurait eu moyen, à travers la table ronde, effectivement, de sortir, à partir du plan d'action, ce qu'on demande, au moins la base: quelle vision environnementale le Québec veut avoir et, à travers cette vision-là, comment le ministère peut répondre à cette vision-là. Et c'est ça qui aurait été le plus important à faire actuellement. C'est malheureux que les travaux aient été arrêtés; c'est malheureux que ça ne reprenne pas aussi vite que ça devrait le faire. J'ai énormément de problèmes avec ça. C'est encore un milieu qui est excessivement riche en expérience, de par la diversité des personnes qui sont là, comme Mme Lamontagne le soulignait. Donc, ça devient très représentatif aussi, au moins pour une première consultation.

M. Lazure: Une autre de vos recommandations, la troisième, où simplement j'aimerais vous voir élaborer un petit peu plus... Je saute parce que, dans l'ensemble, pour nous, c'est encore plus évident que non seulement le projet de loi est prématuré parce qu'il ne s'inscrit pas dans une vision globale, mais on le trouve dangereux. Puis une des raisons... Je reviens là-dessus parce que les artisans principaux de cette réforme-là, c'est le personnel du ministère et ce personnel-là y est opposé. Mais je reviens à votre troisième proposition: «Que le système de redevances serve, entre autres, à créer un fonds environnemental, basé sur un système "no fault", dans le but de restaurer l'environnement». Au fond, vous rejoignez un peu le concept d'un fonds de décontamination. Voulez-vous élaborer un peu sur votre troisième proposition?

M. Laroche: C'est beaucoup plus qu'un fonds de décontamination. Remettre un terrain en état, c'est une première étape; il y a bien d'autres choses. Il y a des nuisances qui ont été créées, des populations qui ont souffert, des écosystèmes qui ont souffert. On dépasse le simple fonds de décontamination. Je pense qu'on avait déjà parlé de ce fonds-là lors des audiences pour le projet de loi 65. On le ramène encore parce que, pour nous, c'est important. La meilleure utilisation des redevances, c'est effectivement la base de ce fonds-là. C'est un fonds qui se nourrit à partir des problèmes qui se créent. Plus les problèmes se créent, plus il y a besoin d'argent pour le fonds, plus vous allez avoir l'argent nécessaire. Dans ce sens-là, la roue n'est pas vicieuse. C'est intéressant d'avoir un financement à partir d'une taxation de problématique, d'une taxation de charge polluante, si on veut. Pas, comme on le disait tout à l'heure, le mettre comme une permission de polluer - c'est toujours là que la ligne est fine - mais l'embarquer tout simplement et dire: Écoutez, il y a tant de dommages qui ont été faits. Les ressources financières vont venir là. C'est à partir de tout ça. La redevance, c'est à peu près la meilleure utilisation qu'on peut en faire.

M. Lazure: Quant à nous, c'est une formule qui nous va tout à fait. Juste une dernière question. C'est vrai que les effectifs en région ont été augmentés, c'est vrai que les bureaux régionaux ont un peu plus d'autonomie. Le ministre justifie souvent son projet d'un office en disant: Bien, avec l'Office, les régions vont être autonomes, puis, deuxièmement, les décisions vont être uniformes à travers le Québec. Nous, on dit: Vous n'avez pas besoin d'un office pour faire ça. Vous pouvez, dans le cadre actuel du ministère, donner encore plus d'autonomie aux régions. Vous pouvez donner un meilleur encadrement quant à l'uniformité des décisions. Je veux vous entendre parler un peu des régions. Est-ce que vos gens ont eu des répercussions d'une plus grande activité régionale?

Mme Lamontagne: J'avoue que je n'ai pas beaucoup de constats ou d'expériences. Je sais qu'il y a beaucoup de gens de nos régions qui sont très, très actifs. Ils font partie des coalitions, des conseils de développement. En tout cas, on ne m'a pas raconté de faits disant qu'il y avait un plus grand bourdonnement dans les régions, mais ça ne veut pas dire, non plus, qu'il n'y a pas un plus grand bourdonnement dans les régions. Ça dépend des dossiers dans lesquels les gens de nos régions travaillent. De ce temps-là, ils sont beaucoup sur les déchets et les incinérateurs, etc. Alors, c'est ça, mais on peut regarder ça.

M. Lazure: Juste une dernière chose. Est-ce que je comprends bien votre position? Vous dites: Bon, on n'a pas d'objections théoriques à la création d'un office, mais, par ailleurs, les améliorations qui devraient être apportées au ministère pourraient être, d'emblée, apportées, notamment, l'énoncé de politique globale, à l'intérieur même des structures actuelles?

Mme Lamontagne: Oui, un énoncé de politique, de toute façon, même s'il y avait un office, ce serait la responsabilité du ministère. C'est évident, c'est politique. Alors, il pourrait y avoir ça. Il pourrait y avoir un énoncé de politique, une réforme et que l'Office fasse

partie du tout. Là, c'est sûr qu'on a l'impression qu'on met un peu la charrue avant les boeufs, qu'on commence par une structure qui va garder un nouveau contenant avec un vieux contenu. Après ça, on va continuer à améliorer les règlements, en tout cas, d'après le programme du ministre. Alors, c'est un peu ça. On ne peut pas, à mon avis, s'objecter au principe. Il n'y a pas de grand principe qui entre en contradiction avec la création d'un office. Dans d'autres domaines, on a déjà demandé... La Société de développement de la main-d'oeuvre, on était d'accord et on souhaitait qu'elle soit créée parce qu'on trouvait ça important comme lieu d'échange avec les partenaires. Alors, c'est pour ça. Mais on a dit: II y a bien d'autres tâches à faire, peut-être, avant de créer un office.

M. Lazure: Merci beaucoup, au nom de l'Opposition.

Le Président (M. Garon): Alors, merci. Après avoir entendu la Confédération des syndicats nationaux, nous allons suspendre les travaux pendant quelques instants, mais nous allons reprendre immédiatement après pour fixer une date pour finaliser nos mémoires sur le BREF et sur la procédure d'environnement. On va suspendre quelques instants pour dire bonjour aux délégués et on va reprendre pour fixer des dates entre nous.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 12 h 29)

Le Président (M. Garon): Je vais ajourner les travaux de la commission de l'aménagement et des équipements sine die, puisqu'il y aura un ordre de la Chambre pour la reprise des travaux cet après-midi. Nous allons immédiatement reprendre en séance de travail entre nous.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

(Reprise à 15 h 44)

Le Président (M. Garon): La commission reprend ses travaux cet après-midi, théoriquement à partir de 15 h 30 jusqu'à 18 h 30, d'abord, avec le Barreau du Québec, Me Suzanne Comtois, avocate. Je vous invite à prendre place, Me Comtois, Me Gagné et Me Sauvé. Comme vous avez une heure à votre disposition, normalement, c'est 20 minutes pour l'exposé de votre mémoire, 20 minutes pour le parti ministériel et 20 minutes pour le parti de l'Opposition. Maintenant, si vous prenez plus de temps... Vous pouvez prendre toute l'heure si vous voulez, mais, à ce moment-là, on soustrait aux deux partis le temps que vous prenez en plus de vos 20 minutes; et, si vous prenez moins de temps, ils pourront utiliser le temps, de part et d'autre, que vous n'aurez pas pris. Alors, à vous la parole, si vous voulez vous présenter comme représentants du Barreau parce que, sur nos papiers, nous n'avons aucun titre de représentation au sein du Barreau.

Barreau du Québec

M. Sauvé (Marc): Alors, Me Marc Sauvé, avocat au service de la législation au Barreau du Québec. Qu'il me soit permis, M. le Président, MM. les membres de la commission, de vous présenter les membres de notre délégation. À ma droite, Me Suzanne Comtois, qui est coordon-natrice de recherche à la Commission de réforme du droit et professeure à la Faculté de droit de l'Université de Sherbrooke; à mon extrême droite, Me Michel Gagné, de la firme McCarthy, Tétrault, de Montréal. Me Gagné est aussi responsable du comité de législation de la section environnement de l'Association du Barreau canadien, division du Québec.

M. le Président, le Barreau du Québec, conscient de l'importance de la question de l'environnement dans notre société, intervient de plus en plus pour faire connaître son point de vue à l'égard des projets de législation et autres initiatives de politique environnementale proposés par les législateurs fédéral et provincial. Nous sommes heureux de vous faire part de nos commentaires au sujet du projet de loi 412, intitulé Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Barreau du Québec a comme principal mandat celui de protéger le public. C'est donc à la lumière de ce mandat général qu'il faut interpréter notre exposé. Comme plusieurs, nous avons été quelque peu surpris du dépôt du projet de loi 412 à l'Assemblée nationale. À notre connaissance, il y a très peu d'intervenants qui sollicitaient la création d'un tel organisme. Quant à nous, l'utilité ou la nécessité de créer l'Office pour veiller à l'application de l'ensemble de la législation en matière d'environnement n'a pas été prouvée, n'a pas été démontrée. Pour expliciter davantage la position du Barreau et l'opposition de principe que le Barreau a à rencontre du projet de loi 412, je cède la parole à Me Suzanne Comtois.

Le Président (M. Garon): Me Comtois.

Mme Comtois (Suzanne): Merci. M. le Président et MM. les membres de cette commission, je vais commencer par faire ressortir les points principaux du mémoire du Barreau. Premièrement, de façon générale, le Barreau a de très sérieuses réserves quant à l'opportunité de créer un office de protection de l'environnement et à l'utilité du projet de loi 412. Si, comme

l'indique le ministre, le but recherché est un accroissement de l'efficacité dans l'administration de la loi, nous craignons que le moyen retenu ne soit inapte à en permettre la réalisation.

Au contraire, le Barreau craint que la scission du ministère de l'Environnement et l'introduction d'un nouveau partage des responsabilités entre le ministère et l'Office proposé ne risquent de générer encore plus d'inefficacité que le régime actuel. Puis, parmi les exemples de l'inefficacité susceptible d'être générée par la scission au sein du ministère, on retrouve dans le mémoire du Barreau, premièrement, que, si on considère déjà avoir un problème au niveau de l'harmonisation et de l'application des lois et des règlements, on voit mal comment la situation pourrait être améliorée lorsque ces fonctions seront confiées, comme le propose le projet de loi, à deux organismes distincts. Il nous paraît que c'est, en grande partie, une question de gros bon sens que de vouloir intégrer la gestion de l'environnement et d'avoir au sein d'une même entité les composantes à la fois d'élaboration des normes et de leur application.

Deuxièmement, on peut aussi évoquer que, si, sous le régime actuel, un des problèmes qu'a eus le ministère à assumer ses responsabilités, c'est le peu de ressources dont il dispose, dans un contexte où l'on ne connaît pas d'argent neuf, on peut douter que la création d'un office qui impliquera inévitablement des dépenses additionnelles réussisse à améliorer la situation au plan de l'efficacité.

Puis, je mentionnerai également qu'en ce qui concerne le mandat de l'Office, qui est défini très largement, et l'exercice de pouvoirs concurrents qu'il implique au niveau des ordonnances, notamment, ce serait une source de chevauchements et de dédoublements entraînant une inefficacité à laquelle on était censé remédier. Donc, le Barreau est contre la création de cet Office parce que, premièrement, on considère qu'on cible peut-être mal. Si ce qu'on veut, c'est augmenter l'efficacité, on ne nous a pas convaincus que la création de l'Office était un moyen de réaliser cet objectif.

En deuxième lieu, nous avons confiance au ministre. Nous souhaitons le maintien du principe de la responsabilité ministérielle et nous sommes contre l'idée de confier à un office autonome le mandat d'appliquer les lois et les règlements en matière de protection de l'environnement, car il faut, selon nous, éviter de déresponsabiliser le ministre. La protection de l'environnement est une préoccupation importante de notre société et nous croyons qu'il est dans l'intérêt public que le ministre demeure responsable de l'application des lois et des règlements, et qu'il réponde de ses actes et des actes de ses subordonnés devant le Parlement et devant l'opinion publique.

Donc, nous considérons, à cet égard, que l'environnement n'est pas un sujet précis et étroit (Jont le ministère peut facilement se des saisir au profit d'un organisme administratif qui n'aurait qu'à appliquer des normes réglementaires très précises. Ce n'est pas le cas; donc, on considère que, pour ces raisons, la structure ministérielle, et le principe de responsabilité ministérielle qui s'y attache, est beaucoup plus appropriée aux choix politiques qui doivent être faits dans ces domaines-là.

Donc, pour ces raisons-là, notre conclusion et nos recommandations principales sont à l'effet de retirer ce projet de loi 412. Par contre, si, en dépit des nombreuses objections qui ont été formulées, le législateur décidait de donner suite à ce projet, la deuxième partie de notre mémoire indique une série de modifications importantes qui devraient y être apportées. Nous soulevons, entre autres, que, premièrement, la présence du sous-ministre au conseil d'administration de l'Office paraît fort incohérente au sein d'un organisme que l'on veut distinct du ministère et, jusqu'à un certain point, constitue un aveu qu'il y a un besoin d'intégration des fonctions normatives et des fonctions d'application des lois et règlements.

Deuxièmement, la nécessité d'un meilleur encadrement procédural du processus de reconsidération des décisions devrait être ajoutée. À tout le moins, lorsqu'on s'attaque à une décision qui était favorable au citoyen, il faudrait alors que celui-ci obtienne un préavis et qu on lui permette de faire des représentations. Également, il y aurait la nécessité d'un meilleur encadrement procédural du processus de révision interne pour s'assurer, notamment, que le décideur initial ne participe pas à la révision de la décision. Il faudrait, encore là, prévoir expressément un droit d'être entendu et d'être représenté par avocat devant l'instance de révision.

Un autre point. En ce qui concerne le transfert de la juridiction d'appel de la Commission municipale du Québec vers la Cour du Québec, le Barreau n'est pas contre parce que, comme on a eu l'occasion de le dire à d'autres reprises, les cours de justice offrent de plus grandes garanties d'indépendance que les tribunaux administratifs et les avocats, de façon générale, sont beaucoup plus familiers avec leur fonctionnement. D'autre part, nous tenons cependant à souligner qu'il nous paraît résulter de ce transfert de juridiction une perte d'expertise parce que, dans les matières environnementales, la Commission municipale du Québec avait acquis une certaine expérience du fait d'avoir exercé, pendant plusieurs années, la juridiction d'appel. Cette expertise-là, on ne la retrouve pas actuellement parmi les membres de la Cour du Québec. Donc, ce sera inévitablement une expérience à bâtir et qui nécessitera une période de rodage qui ne va pas nécessairement dans le sens d'une plus grande productivité à court terme.

Je vais finir ma présentation par quelques questions qui sont soulevées dans le mémoire du Barreau, niais auxquelles le mémoire» rie répond

pas. Ce qu'on voudrait surtout, c'est attirer l'attention sur ces points-là et qu'une étude plus attentive soit faite à leur égard, notamment l'absence d'appel au niveau des ordonnances du gouvernement. On ne prévoit pas, dans le projet de loi, qu'il soit possible d'en appeler des ordonnances du gouvernement. On ne le prévoyait pas non plus dans la Loi sur la qualité de l'environnement lorsque l'appel était à la Commission municipale du Québec. Mais ce qui nous inquiète, c'est que, dans le nouveau projet de loi, on augmente les pouvoirs du gouvernement, notamment par l'effet de l'article 118.2.1 où le gouvernement peut maintenant intervenir même au niveau des certificats d'autorisation. Donc, en ce qui concerne la protection des citoyens, ce serait un recul par rapport au régime actuel lorsque le gouvernement interviendrait plus largement dans l'exercice de ces pouvoirs-là, puisque celui-ci se retrouverait devant une décision qu'on ne pourrait pas porter en appel.

Il y a également un autre point qui semble un recul pour le citoyen dans le projet de loi qui est proposé et qui concerne l'intervention des citoyens devant l'organisme d'appel. On sait que la Loi sur la qualité de l'environnement prévoit que, lorsqu'il y a un appel de logé, des citoyens intéressés peuvent intervenir devant la Commission municipale du Québec. On ne retrouve pas ce droit statutaire à l'intervention des tiers dans le nouveau projet de loi. Ce que ça implique, c'est que ces personnes-là devront inévitablement se qualifier par le biais des dispositions beaucoup plus sévères que l'on retrouve dans le Code de procédure civile ou être à la discrétion de la cour, selon l'évolution récente de la jurisprudence qui reconnaît en certaines matières la discrétion au tribunal judiciaire pour accorder le locus standi à certaines personnes qui n'ont pas un intérêt propre et distinct dans le litige. Donc, du point de vue du citoyen, ça constitue également un recul. Ce sont, essentiellement, les points qu'on pourrait soulever.

Il y a aussi l'article 31.7 qui fatigue un peu les personnes qui se sont interrogées sur la question. On reconnaît au ministre des pouvoirs sur les projets connexes à ceux qui font l'objet d'examen des impacts, sous les articles 31.1 et suivants. Une question qu'on se pose et qui est probablement pertinente, c'est: Pourquoi n'arrive-t-on pas à avoir une approche un peu plus globale des décisions susceptibles d'avoir des incidences environnementales et, lorsqu'on fait des études d'impact, ne pas traiter à la fois du principal et de l'accessoire? Auquel cas, on n'aurait pas ce 31.7 qui reconnaît des pouvoirs connexes au ministre lorsque le gouvernement a pris position sur certains points donnés.

Donc, c'étaient la plupart des recommandations que l'on retrouve dans le mémoire du Barreau.

Le Président (M. Gauvin): Merci, Mme

Comtois. Si ça complète votre présentation, on va permettre à M. le ministre de disposer d'une quinzaine de minutes pour échanger avec vous et la même chose pour les représentants de l'Opposition. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci beaucoup, M. le Président. Vous me permettrez de remercier le Barreau du Québec de sa présentation et de la qualité de son mémoire, de dénoncer immédiatement mon conflit d'intérêts comme membre du Barreau du Québec et d'adresser sans plus tarder quelques remarques aux représentants dudit Barreau.

On ne peut approcher le problème de la création de l'Office sans tracer un bref historique du ministère de l'Environnement. Il se doit d'être bref, le ministère n'a que 10 ans d'existence. Il a été construit à compter de 1978 pour répondre à des crises environnementales. Chaque fois que l'on connaissait, dans la société québécoise, une crise environnementale, une nouvelle direction générale venait agrémenter l'organigramme du ministère. On avait la direction générale des déchets dangereux, la direction générale de l'eau, la direction générale des pneus, pratiquement, à un moment donné.

En 1989, nous avons tenté, dans un souci de maximiser le service à la clientèle et l'efficacité d'action du ministère, de responsabiliser à l'horizontale les gens qui travaillent dans l'appareil. À titre d'exemple, si vous travailliez dans le secteur industriel avant 1989, il y avait à peu près 22 portes d'entrée, ce qui indiquait également que l'industriel avait 22 portes de sortie. Ce que nous avons fait? Nous avons créé cinq sous-ministériats. Nous avons pris les trois plus grands pollueurs ou sources de pollution: municipal, industriel et agricole, et fonctionné à la verticale, en fonction des clientèles. Nous avons ajouté, pour améliorer l'efficacité, un sous-ministériat aux régions, de façon à rapprocher l'action des citoyens comme tels et, de façon à mieux planifier l'avenir, un sous-ministériat au développement durable, de façon à non plus simplement réparer les erreurs du passé, mais à voir à les éviter pour l'avenir.

Sur le plan de la structure, nous avons accentué, au cours des deux dernières années, la régionalisation. Nous avons plus que doublé le personnel dans chacune des régions du Québec. Ça, c'est sur le plan de la structure. Et nous avons amélioré, d'une certaine façon, l'efficacité en responsabilisant, par la structure, les gens qui interviennent, mais pas suffisamment à notre goût et, évidemment, pas suffisamment non plus au goût de l'ensemble de la population du Québec. Le taux d'insatisfaction de la population, il y a deux ans, envers le ministère de l'Environnement, était de 70 %. Il est présentement de 48 % et c'est encore trop important pour l'actuel gouvernement, en tout cas, pour l'actuel ministre.

Sur le plan des actions réglementaires et législatives, nous avons tenté de répondre au plus pressé et nous n'avons pu faire mieux que ça au cours des deux dernières années. En 1990, nous avons adopté deux projets de loi: le premier, le projet de loi 65 - le Barreau a fait sa contribution, à ce moment-là - la loi du pol lueur-payeur sur les sols contaminés, et également la loi qui a créé la Société québécoise de récupération et de recyclage. Il y a eu un seul règlement pendant cette année, le règlement sur le contenu en soufre dans le mazout lourd, de façon à poursuivre notre lutte contre les pluies acides. C'est le seul dossier, je pense, où les objectifs qu'on s'était fixés il y a une décennie ont été atteints et même dépassés grâce à la collaboration de tous les intervenants. (16 heures)

En 1991, notre action réglementaire et législative s'est accentuée: une première loi a ajouté au mandat de la Société québécoise d'assainissement des eaux de façon à compléter le travail qui a été fait dans des municipalités plus importantes pour aller dans des plus petites municipalités au Québec; une deuxième loi pour donner suite, entre autres, au rapport Charbon-neau, loi sur les matières dangereuses. Avant, on ne traitait que des déchets dangereux, tandis que maintenant la juridiction du ministère de l'Environnement s'étend à l'ensemble des matières dangereuses, ce qui nous permet de recycler des éléments qu'on ne pouvait recycler avant; une troisième loi, la loi sur la réduction des rejets industriels. On était avancé en dépollution municipale. On est encore à un stade embryonnaire en matière de dépollution industrielle et on n'est pas encore trop présent en matière de dépollution agricole.

Sur le plan de la réglementation, au cours de l'année 1991, encore là, on a pallié au plus urgent: règlement sur les carrières et sablières, règlement sur les neiges usées, après entente avec les unions municipales; règlement sur les déchets solides, de façon à permettre au gestionnaire d'un site d'enfouissement de refuser des déchets de l'extérieur de sa MRC; règlement sur l'entreposage des pneus hors d'usage, à la demande des ministres de l'Environnement et de la Sécurité publique qui avaient vécu les incidents de Saint-Amable. On a également prépublié des règlements qui sont en période de consultation présentement: règlement sur les pâtes et papiers, qui est l'industrie qui, en termes de volume, est la plus polluante au Québec, et règlement sur les déchets biomédicaux, qui vont entrer en vigueur le 1er avril prochain. On a annoncé, la semaine dernière, la prépublication du règlement sur les attestations d'assainissement en milieu industriel de façon à s'attaquer à ce secteur d'activité.

En plus, nous avons étendu la protection des rives des cours d'eau au Québec, qui était limitée au fleuve Saint-Laurent et à ses prin- cipaux affluents, à l'ensemble des cours d'eau de la province de Québec. Nous avons créé également des réserves écologiques pour que les générations futures aient des endroits ou elles pourront comparer les dommages qu'on a faits comme société. Quand je suis arrivé au ministère de l'Environnement, la loi était en vigueur depuis 1974 et il y en avait 21 de créées. Nous en avons créé 11 au cours des 2 dernières années et il y en a 7, actuellement, au sein de l'appareil exécutif.

Nous avons amélioré le plan d'urgence, parce que les urgences environnementales, il y en a encore à tous les jours. Il y en a moins qui font les médias de façon spectaculaire parce que le plan d'urgence du ministère de l'Environnement a été amélioré. Ça, pas beaucoup de gens le savent au Québec, mais le ministre de l'Environnement, présentement, ne fait pas partie simplement du comité interministériel du développement régional et de l'environnement, mais, depuis la dernière élection, il fait également partie du comité de développement économique. La SDI, entre autres, lorsqu'elle fait une participation financière à une entreprise, ne le fait pas sans que cette entreprise soit en conformité avec la réglementation du ministère de l'Environnement du Québec.

On a fait ça, entre autres - ce n'est pas exhaustif - et on s'est rendu compte qu'on n'était pas encore assez efficace et qu'on n'était pas encore assez performant. On s'est rendu compte que les urgences quotidiennes, les urgences qui nous commandaient de réparer les problèmes d'avant-hier et d'hier et celles qui surviennent aujourd'hui, accaparaient le ministère à 99,8 % du temps et qu'il n'y avait à peu près plus de ressources disponibles au ministère pour faire ce qu'on appelle la politique environnementale, la législation environnementale, la réglementation environnementale. Tout le monde, à partir de la personne qui est dans la région jusqu'au sous-ministre en titre, est pris, de façon quotidienne, dans l'action quotidienne.

La création de l'Office ne vise qu'une chose: faire en sorte que les actes administratifs comme tels soient accomplis par un organisme. On a ça, des offices, dans je ne sais combien de secteurs d'activité économique, qui délivrent des permis et qui font le suivi de la délivrance comme telle du permis. Je ne pense pas que le fait qu'un office accomplisse cette fonction déresponsabilise un ministre. Le ministre continue à être responsable devant l'Assemblée nationale et devant l'ensemble de la population des actes posés par l'office dont il a la responsabilité. C'est d'ailleurs inscrit dans le projet de loi comme tel. On vise à libérer le ministère pour sa planification et à obtenir un maximum d'efficacité administrative sur le terrain.

Je vous ajouterais un troisième élément. Je ne l'ai pas ajouté aux autres groupes, mais vous êtes le Barreau, je vais me confesser. Comme

ministre de l'Environnement, je suis législateur. Je contribue avec les autres membres de l'Assemblée nationale à faire adopter des lois. Je suis également membre de l'Exécutif; donc, je suis responsable de l'application des lois dont j'ai la responsabilité comme ministre de l'Environnement. Je rends également des ordonnances; je suis juge également. Je peux décider, en vertu des pouvoirs contenus dans la Loi sur la qualité de l'environnement, de fermer une usine demain matin après avoir pris connaissance du dossior, présumement après avoir entendu les parties et respecté les règles de justice naturelle. Je vous dirai que je me sens très, très, très mal à l'aise de cumuler ces trois fonctions. Je sais qu'il y en a que ça ne dérange pas dans la société, mais, peut-être quand on a une formation juridique, cumuler sur le même individu des fonctions de législatif, d'exécutif et quasi judiciaires, ça devient un petit peu totalitaire comme approche, et je m'en méfie.

Autre élément - je pense que les événements récents l'indiquent - il n'y a pas un ministre de l'Environnement, quel qu'il soit, de quelque formation politique que ce soit, qui peut répondre de façon quotidienne de l'émission ou de tous les gestes administratifs qui sont posés. Nous émettons chaque jour des certificats dans les bureaux régionaux pour carrières et sablières, pour dépotoirs, pour des industries qui fonctionnent avec des plans et devis compliqués. Demander au ministre de signer chacun de ces certificats, c'est demander l'impossible à quelque individu que ce soit. Je ne dis pas de déresponsabiliser le ministre, parce qu'il en conserve la responsabilité politique devant l'Assemblée nationale et la population, mais il ne peut de façon quotidienne remplir administrativement et correctement cette fonction. C'est le pourquoi du dépôt du projet de loi. Il n'y a pas d'autres raisons majeures. J'en ai peut-être oublié; ça viendra au cours de notre discussion.

Vous nous parlez, et vous êtes le seul à parler de cet élément-là, dans votre mémoire à la page 4, au niveau constitution et organisation - non, vous n'êtes pas le seul, il y a eu un autre groupe qui en a parlé - que vous ne connaissez pas d'autres cas où le sous-ministre est membre d'un organisme. Il y a un ou deux autres groupes... Je pense que c'est Me Bélanger qui se pose cette question-là et, comme il a rédigé ou participé à la rédaction de trois mémoires, on la retrouve. Mon sous-ministre à l'Environnement, à titre d'exemple, est membre du conseil d'administration de la Caisse de dépôt. Ce n'est pas un organisme quasi judiciaire, c'est un organisme important au Québec. On m'a donné la liste d'une dizaine d'organismes où les sous-ministres... Il ne s'agit pas d'organismes de nature administrative comme l'Office, mais beaucoup de conseils consultatifs, entre autres, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, le Conseil des affaires sociales - c'est le sous-ministre en titre qui est là - le Conseil des communautés culturelles et de l'immigration, etc. Il s'agit d'organismes qui sont davantage consultatifs, je vous le concède.

Vous parlez de la nomination du président par l'Assemblée nationale. On a présentement cinq ou six organismes, de mémoire. C'est un sujet qui est toujours cher au député de La Prairie. Vous êtes le premier qui le mentionnez. Au lieu de faire nommer le président de l'Office par lo gouvernement, il devrait être nommé par l'Assemblée nationale du Québec. Vous connaisse/ les organismes où les présidents sont nommés par l'Assemblée nationale. Ce sont des cas d'exception. Si on regarde les autres offices au gouvernement, les autres régies comparables à ce qu'on voudrait créer, c'est nommé par le gouvernement. Est-ce que vous souhaitez que l'ensemble des présidents d'organismes soit nommé par l'Assemblée nationale du Québec?

Le Président (M. Gauvin): Mme Comtois.

Mme Comtois: Non, je ne crois pas que le souhait du Barreau était d'étendre le processus de nomination à tous les présidents d'organismes, mais je pense qu'on insistait particulièrement parce qu'on distingue le droit de l'environnement, ou la gestion de l'environnement, des autres domaines pour lesquels on a pu, par ailleurs, créer des offices, conseils ou tribunaux. On distingue encore là le processus de nomination du président de ces organismes-là de celui qui devrait s'appliquer, s'il est créé, à l'Office de protection de l'environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À partir du moment où un ministère possède une fonction législative et réglementaire et qu'il est doté d'un bras d'action... Je pourrais prendre, à titre d'exemple, le cas des permis d'alcool où il y a des normes pour les délivrer ou le cas, dans un domaine où j'ai pratiqué, du droit agricole. À un moment donné, il y a une Régie des marchés agricoles avec des normes ou la Commission de protection du territoire agricole. Ça sert de bras d'action ou de gestion. Ces présidents-là rendent des décisions qui sont quand même importantes. Lorsqu'on parle de l'aménagement du territoire au Québec, il y a des relations environnementales. Ces présidents-là ne sont pas nommés comme tels par l'Assemblée nationale. Est-ce que ce serait souhaitable qu'ils le soient?

Mme Comtois: Je ne crois pas que le mémoire du Barreau aille jusque-là. Peut-être qu'il faudrait poser la question, puis, après ça, voir les membres du Barreau délibérer sur cette question-là. Mais, en ce qui concerne la proposition qui est formulée ici, elle vise essentiellement à traiter de façon isolée et distincte le cas de la gestion de l'environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À la page 5, au premier paragraphe en haut, vous mentionnez «que la formation du comité soit assujettie à certaines règles telle l'exclusion des membres qui ont pris la décision initiale» en révision. Je pense que ça va de soi. C'est un principe de saine application de la loi, et nous le retenons. Vous parlez du recours en appel à la Cour du Québec. Moi, j'aimerais vous entendre davantage parce que le Centre québécois du droit de l'environnement nous dit: Non, pas la Cour du Québec, parce que c'est un peu trop judiciarisé comme tel. Vous, vous nous dites: Mais ça donne une meilleure garantie d'impartialité ou d'indépendance.

Mme Comtois: En fait, ce que je pourrais ajouter, c'est qu'il n'y a pas vraiment de posi tions fermes qui ont été prises sur cotte question du transfert à une instance juridiciaire de la juridiction d'appel. Ce que le mémoire tend plutôt à faire, c'est faire ressortir le fait qu'il y a à la fois des avantages et des inconvénients. Je ne crois pas que vous retrouviez dans le mémoire tel qu'il vous a été soumis une position ferme pour ou contre le transfert de juridiction.

On vous dit, d'une part, pourquoi le Barreau ne peut pas, en tant qu'organisme regroupant les avocats, être contre. On croit beaucoup aux garanties d'indépendance des tribunaux judiciaires et on croit beaucoup aussi aux garanties de protection que la procédure qui est suivie devant les instances judiciaires permet aux citoyens, mais, d'autre part, on est conscient qu'il s'agit d'un domaine spécialisé pour lequel peut-être un banc multidisciplinaire serait assez utile. Ce genre de choses là, on ne risque pas de le retrouver si la juridiction est exercée devant la Cour du Québec.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai suivi votre argumentation sur la question de la spécialisation ou d'une certaine expertise que pourrait posséder la Commission municipale J'en ai été le ministre responsable lorsque j'étais aux Affaires municipales. Quelle est votre première réaction à la création, au niveau de la Cour du Québec, d'une Chambre en environnement?

Mme Comtois: Ce serait une façon d'acquérir une certaine expertise en nommant des gens avec une juridiction très limitée. Ce serait une façon de procéder.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme la Chambre de l'expropriation.

Mme Comtois: Comme la Chambre de l'expropriation. Même le Tribunal des professions est formé de juges de la Cour du Québec. C'est pour ça qu'il est un peu une entité distincte, parce qu'on l'appelle tribunal administratif, mais tous les membres ont le statut de juge. C'est ça.

Il y a quelques organismes comme ça qui sont un peu à la frontière entre...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je retiens vos trois éléments qui n'étaient pas intégrés au mémoire comme tel, entres autres, la question des ordonnances du gouvernement non appelables. On va s'y pencher. Je n'ai pas de réponse à vous donner, mais la question a plus que son mérite.

Mme Comtois: C'est surtout dans la mesure où le pouvoir du gouvernement est élargi. On comprend qu'il n'y a pas de recul par rapport aux ordonnances qui suivent le processus d'évaluation et d'examen des impacts, mais, si le gouvernement exerce le pouvoir de 118.2.1, a ce moment-là, ça devient une zone qui. avant, était protégoo par l'exercice d'un recours en appel, puis qui ru; l'est plus

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même chose. J'ai déjà annoncé des modifications quant aux interventions des citoyens au niveau de l'appel et je vais revérifier l'article 31.7. C'est un nouvel élément que vous nous apportez et je vous remercie d'avoir attiré notre attention. M. le député.

Le Président (M. Gauvin): M le député de La Prairie.

Mme Comtois: Est-ce que je peux vous poser une question?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

Mme Comtois: Est-ce à dire que vous ne renoncez pas au projet de loi?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si j'étais convaincu que la structure actuelle du ministère de l'Environnement du Québec nous permettrait d'atteindre un niveau d'efficacité qui nous permettrait de mieux assumer nos mandats J'ai comme l'impression qu'on a fait beaucoup dans la structure actuelle au cours des deux dernières années: le processus de responsabilisation linéaire, toute la question de la régionalisation. On s'est rendu compte que cette régionalisation-là, qui reçoit le support d'à peu près tous les intervenants, soit dit en passant - on n'a pas eu besoin de la passer en commission parlementaire parce qu'on on aurait sans doute eu des objections - ne pourra donner les résultats escomptés tant et aussi longtemps qu'on ne condamnera pas - et je m'excuse d'utiliser l'expression - la région à prendre la décision. (16 h 15)

En matière environnementale, la personne en région reçoit une demande. Elle a l'autorité d'émettre le certificat présentement, mais elle ne le fait pas parce que, humainement parlant, elle a l'opportunité d'aller vérifier au central, de

se couvrir, si je peux utiliser l'expression. Et le central ne déteste pas tirer le dossier vers le haut, parce que c'est son pouvoir qu'on a tenté de déléguer vers le bas. Tant qu'on ne créera pas de façon très hermétique, par une structure juridique comme telle, une sorte de vase hermétique qui va condamner la région à prendre sa décision, le central ne renoncera pas à ses pouvoirs, qu'il a exercés depuis une dizaine d'années, et la région va se couvrir lorsqu'elle exercera ses pouvoirs dans le moindre certificat d'autorisation.

Le Président (M. Gauvin): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition, je veux saluer la représentante et les représentants du Barreau, les féliciter pour la qualité de leur mémoire. Le Barreau, depuis quelques années, est de plus en plus présent lorsqu'il s'agit de projets de loi ou de discussions touchant l'environnement, la qualité de l'environnement et je pense qu'il doit être félicité. Je n'ai pas pris de chance aujourd'hui. Je me suis fait accompagner d'un membre du Barreau, le député d'Anjou, mon collègue d'Anjou, pour assurer que l'Opposition va accorder vraiment toute l'importance qu'il faut à votre mémoire.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'on peut officiellement souhaiter la bienvenue au député dans cette commission parlementaire?

M. Lazure: Bien sûr. C'est la première commission parlementaire du député d'Anjou aujourd'hui. La première de sa longue carrière.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On la souhaite quand même pas aussi longue.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Alors, M. le Président, j'ai bien aimé la question directe de Mme Comtois tantôt. Le ministre, effectivement, a l'air à s'entêter, bien que pratiquement tous les mémoires, tous les groupes soient venus lui dire: De grâce, mettez ça sur la glace. Il essaie de justifier son projet de loi, la création de son Office, en disant: Je veux donner une autonomie complète aux régions. Nous lui avons répondu et les groupes lui ont répondu: C'est possible de faire ça à l'intérieur du ministère actuel. C'est possible. Vous avez raison d'exprimer votre surprise vis-à-vis de ce projet de loi.

Vous posez d'excellentes questions dans votre mémoire. Vous posez la question: C'est qui, les groupes qui ont réclamé ça? Nous aussi, on a posé cette question-là dès le début. Il y en a un seul groupe, à notre connaissance, et ce sont. les jeunes libéraux. Ils sont bien intentionnés. Je pense qu'ils s'inspirent un peu du modèle américain de l'Agence de protection de l'environnement. Mais vous démontrez dans ça, comme d'autres groupes, que, au contraire, la tendance actuellement au Canada et aux États-Unis est de remettre aux élus et aux ministères l'entière responsabilité. On dirait que vous m'avez entendu. Vous avez utilisé pratiquement les mêmes termes que moi, hier. C'est tellement important, l'environnement, sociologiquement parlant, en 1992, au Québec, que, pour chaque geste qui touche l'environnement venant d'un gouvernement, il faut que la population identifie un ministre qui va répondre de ces gestes-là. Alors, nous, l'Opposition, on concourt à 100 % avec la teneur de votre mémoire.

Vous faites des commentaires sur les dangers de dédoublement qui vont survenir avec la création, à toutes fins pratiques, de deux ministères. C'est la moitié du ministère qui s'en va constituer l'Office pour faire appliquer des lois, donner des permis, etc., et l'autre moitié qui reste au plan central. Quand le ministre dit: Enfin, avec mon Office, les gens en région n'auront plus à se référer au central, ce n'est pas exact. Ce n'est pas exact. Il va y avoir des autorités dans l'Office. Il n'y aura pas juste un conseil d'administration. Il va y avoir un P.-D.G. Je ne sais pas comment il va s'appeler, mais il va y avoir des grands patrons de l'Office qui ne seront pas en région, qui vont être centrale-ment localisés quelque part. C'est un peu une grande illusion de dire: On va donner carte blanche aux régions et elles n'auront plus à se référer au central.

Je pense que les critiques que vous faites aussi sont bonnes. Le projet de loi 412, vous dites, «permettra au ministre de l'Environnement de s'éloigner de quantité de dossiers chauds et de les refiler à un office dont le président n'est pas responsable devant l'Assemblée nationale.» Vous démontrez bien aussi, comme je l'ai dit tantôt, que ce soit dans l'Illinois ou au Manitoba, que la tendance est à l'inverse de ce que le ministre a l'intention de faire.

Une première question que je voulais vous poser concernant, justement, la nomination du président de l'Office si, par malheur, le ministre va jusqu'au bout et fait adopter cette loi-là: Est-ce que vous proposez nettement, comme, nous, on a l'intention de le faire probablement dans une autre instance, c'est-à-dire la présidence du BAPE, du Bureau d'audiences publiques, que le président de cet Office soit nommé par l'Assemblée?

Mme Comtois: Oui. M. Lazure: Oui.

Mme Comtois: En tout cas, ne devrait-il pas être nommé par une majorité de députés de l'Assemblée nationale? J'imagine que, de la façon

dont c'est formulé, si on s'en tient à ça, c'est un peu moins exigeant que la nomination du Protecteur du citoyen qui exige les deux tiers.

M. Lazure: Oui.

Mme Comtois: J'imagine que ça serait de la nature d'un vote pris à l'Assemblée nationale.

M. Lazure: Bon. On a les mêmes préoccupations. En admettant l'hypothèse catastrophique que l'Office soit créé, le mécanisme de révision, les membres du comité de révision ne devraient pas être nommés par l'Office. Ça va de soi, ça. On partage votre opinion à cet égard. Je reviendrai tantôt. Je vais laisser mon collègue d'Anjou peut-être faire quelques commentaires ou poser quelques questions.

Le Président (M. Gauvin): M. le député d'Anjou.

M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie. Ça va être un bref commentaire. Bon, comme vous en avez fait part tout à l'heure, je suis tout récent à l'Assemblée nationale et encore plus récent sur cette commission. Donc, c'est tout récemment que j'ai pris connaissance de ce projet de loi et que j'ai lu avec attention votre mémoire.

Alors, j'ai lu attentivement ce projet de loi et la première question que je me suis posée, c'est: Qui a demandé un tel projet de loi? J'ai peine à comprendre, avec tous les problèmes en environnement qu'on a, avec toutes les situations urgentes qu'il y a, pourquoi le ministère et les employés du ministère prendraient toute cette peine pour travailler sur un projet de loi si ça ne répond pas à une demande précise, à un manque flagrant, à un problème qu'on veut régler, et qu'il y ait un groupe de pression, avec des problèmes vraiment concrets, qui a demandé une intervention du gouvernement.

Je ne vois rien dans ce projet-là qui permet d'espérer qu'il va y avoir une amélioration soit de la gestion ou de l'application des règlements, de la réglementation en place. Au contraire, ce que je vois, c'est le dédoublement un peu... On sait que sur la scène nationale on se bat contre le dédoublement des juridictions ou des compétences. Là, on est en train de faire un dédoublement au sein du ministère par une loi alors qu'on sait que, quand on parle de dédoublement, automatiquement on parle de perte d'énergie, de perte d'argent. Alors que, justement, votre ministère, le ministère de l'Environnement, se bat pour avoir des crédits supplémentaires pour des manques d'argent, ça va être encore plus d'argent qui va être consacré à une administration plutôt qu'à donner des subventions ou des choses pour régler vraiment des problèmes.

Aussi, ce que je trouve dangereux dans le principe qui est édicté par ce projet de loi là, c'est l'échappatoire. C'est justement un peu le principe qu'on retrouve souvent aux États-Unis et je pense qu'on ne devrait pas emprunter à nos collègues américains. C'est le fait de créer des commissions qui sont indépendantes - on pourrait les appeler paragouvernementales - et après, quand il y a des décisions impopulaires qu'on veut faire passer, on les fait passer par ces commissions-là. Après ça, on dit: Écoutez, ce n'est pas notre faute. C'est la commission qui a une certaine indépendance vis-à-vis de nous qui a pris cette décision-là, blâmez-la. Alors, nous, on se déresponsabilise. Je trouve que c'est un principe qui est très dangereux. Et l'EPA, évidemment, qui est l'agence américaine, l'a prouvé dans le passé. Surtout, M. Reagan s'en est servi à satiété pour faire passer certaines choses. Je ne pense pas qu'on doive implanter ce système-là ici.

Comme je vous dis, moi, je suis étonné de voir ça. On dirait un genre de gymnastique intellectuelle ou un exercice intellectuel fait par un groupe d'avocats pour passer son temps et pour accoucher de quelque chose qui ne va absolument servir à rien. Je pense que c'est une très belle gymnastique, mais, maigre tout, dans cette gymnastique-là, je pense qu'il y a des graves lacunes au niveau des processus de révision, des pouvoirs de l'inspecteur. Je pense qu'il manque de sparadrap, qu'il manque de quelque chose pour essayer de colmater les brèches dans ce projet de loi là. Alors, c'est les commentaires que j'ai à faire.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le député d'Anjou. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci. Pour revenir à l'essentiel de votre position, l'étonnement que vous avez, on sait qu'il y a eu en 12 ans, depuis que le ministère est créé, 6 réformes majeures. Six. La dernière a été instaurée par le ministre actuel il y a deux ans, quand il a été nommé à l'Environnement. Il a procédé, et c'était son privilège, à une grande réforme de structures. Il y a eu des bons résultats à cette réforme, notamment, quant à l'augmentation des effectifs en région, et une plus grande autonomie de décisions dans les bureaux régionaux. On a concouru à ça et, nous, on dit, comme la plupart des groupes qui sont venus l'ont dit: Continuez dans cette voie-là. Clarifiez un peu plus les cadres à l'intérieur desquels les décisions régionales doivent être prises pour qu'il y ait quand même assez d'uniformité d'une région à une autre. Il y a des gens qui se sont plaints que des décisions peuvent être assez hétéroclites d'une région à une autre.

Alors, nous, on dit: Les fonctionnaires sont en train de digérer à peine la réforme qu'il a mise sur pied et on va leur en imposer une autre catastrophique, majeure, celle-là. Non seulement les gens ne réclament pas cet Office, mais les professionnels du ministère de l'Environnement

et notamment les 220 ingénieurs de l'Environnement disent: Non, ne faites pas ça. Ils l'ont dit au ministre clairement et par écrit, très, très clairement: Ne faites pas ça.

Or, moi, je suis content de voir que votre mémoire est catégorique. J'espère que le ministre, qui est avocat, aura un minimum d'égards et sera ébranlé par votre argumentation - nous, on n'arrive pas à l'ébranler, en tout cas, en surface - et va épargner au personnel, les 1800 personnes qui travaillent dans ce ministère - et la plupart sont de très bons employés, font du bon travail, que ce soit centralement ou en région - une autre transition pénible qui durera des mois et des mois. Vous savez, les gens le savent déjà que c'est en marche, que le ministre veut faire ça. Alors, il y a beaucoup d'inquiétudes, il y a beaucoup de tensions et ça mine le moral des troupes.

Moi, je veux juste faire un dernier commentaire sur vos suggestions. Peut-être que vous voudrez élaborer. L'intervention des tiers. À supposer que l'Office soit créé, encore une fois dans cette hypothèse pessimiste, si je comprends bien, vous voulez que la révision et l'appel soient plus ouverts que le projet de loi le prévoit.

Mme Comtois: En fait, l'endroit dans le mémoire où ce point-là apparaît, c'est dans les questionnements. Le Barreau n'a pas pris de position ferme là-dessus, mais on fait remarquer, par ailleurs, qu'il y a un recul en ce qui concerne la protection des citoyens, puisque, alors qu'il pouvait intervenir en vertu d'un droit statutaire devant la Commission municipale du Québec, on ne retrouve plus cette disposition-là, ce qui fera en sorte que ce sera beaucoup plus difficile pour eux de se qualifier aux fins d'être entendus devant la Cour du Québec.

M. Lazure: Une autre question... C'est une contribution assez originale que vous faites. Je ne pense pas que d'autres en aient parlé. À la page 6, sur les pouvoirs d'inspection, vous dites: «Nous croyons que les inspecteurs devraient être soumis à la prestation d'un serment et à certaines normes de formation et de conduite». Pouvez-vous élaborer un petit peu là-dessus? Le serment, notamment, c'est un serment à l'effet de quoi? Surtout pas à la reine, j'espère, sauf pour le comté de Brome-Missisquoi peut-être.

Une voix: Vous avez été bien reçu...

M. Lazure: J'ai été très bien reçu dans Brome-Missisquoi. C'est de bon augure pour la prochaine élection, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous invite personnellement à venir, M. le député.

M. Lazure: J'irai.

Mme Comtois: En fait, je pense que je n'élaborerai pas nécessairement sur la notion du serment, la modalité que la garantie qu'on souhaite obtenir prendra. L'idée, c'est de s'organiser pour éviter les conflits d'intérêts. Le risque qui se présente, c'est que des personnes qui deviennent inspecteurs de l'Office soient des personnes qui ont travaillé pour le concurrent de celui qui veut maintenant avoir un certificat d'autorisation. Ce serait juste de voir à ce qu'il y ait un mécanisme qui empêche les préjugés parmi ceux qui sont responsables de faire des inspections, sur la base des rapports desquels dépendra l'issue de la demande qui est faite par un promoteur. La forme que ça pourrait prendre, je pense que ça peut être raffine.

M. Lazure: Je pense que c'est une excellente suggestion qui peut être considérée et peut-être même mise en application dans le cadre actuel du ministère. Ça n'a pas besoin d'être dans le cadre d'un office. Au nom de l'Opposition, merci beaucoup.

Le Président (M. Gauvin): Est-ce que M. le ministre...? Oui, quelques commentaires.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aurais peut-être aimé, dans le but de mener ou de poursuivre le dialogue avec le Barreau, mentionner au Barreau qu'au cours des 10 dernières années le Québec a progressé dans le domaine de son assainissement des eaux, avec la collaboration du monde municipal. Je pense que le programme qui a été mis sur pied en 1978, qui a commencé à recevoir des résultats importants à partir de 1985 - une pure coïncidence, je ne veux pas faire de politique; s'il n'avait pas été commencé en 1978, on n'aurait pas pu avoir les éléments en 1985 - est un programme qui va bien et, sur le plan de la dépollution municipale, nous accomplissons des progrès qui sont importants.

Nous sommes sur le point de nous attaquer pour la première fois à la pollution industrielle. Nous avons interpellé l'Assemblée nationale à deux reprises. Mon prédécesseur, M. Lincoln, en 1989, a été le premier à déposer le projet de loi 99, si ma mémoire est fidèle, projet de loi sur la réduction des rejets industriels. Il a prépublié une réglementation dans la Gazette officielle du Québec. Nous avons reçu plus de 70 mémoires. Nous avons dû ajuster la législation parce que les mémoires nous recommandaient des choses. Même les modifications au règlement, ce n'était pas suffisant. Il fallait changer la loi porteuse. Nous avons changé la loi porteuse. Nous avons publié encore une fois et nous pensons que cette fois-ci est la bonne.

Un des rôles les plus importants de l'Office va être de mettre en application, dans chacune

des régions du Québec, ce programme de réduction des rejets industriels et l'application des certificats d'attestation d'assainissement. Il est certain que, sur le plan de la main-d'oeuvre... Je regarde les deux prochains groupes qui vont comparaître, l'Association de l'industrie de l'aluminium du Québec et l'Association minière du Québec. Les ressources qu'on va envoyer en région au niveau des mines, on va placer ça dans les régions où il y a des mines, notre expertise. Au niveau des alumineries, bien, on va placer ces gens-là qu'on a présentement au central au niveau des régions où on retrouve des alumineries. Mais si on ne prend pas ce virage de la régionalisation immédiatement, si on ne la consacre pas, cette régionalisation-là, nos experts vont demeurer à Québec et les autres vont être en région. Ce que j'expliquais au tout début, c'est que ce dossier va entrer par la région, va monter à Québec, revenir en région et l'encensoir va continuer.

On reçoit deux plaintes de l'industrie à cet effet: les délais que ça prend, qui sont absolument insupportables pour l'entreprise et, également, le fait que les décisions ne soient pas nécessairement uniformes. Les gens des pétrolières sont venus nous dire que, si vous avez une entreprise dans une région, parfois ça prend un certificat d'autorisation et, dans une autre région, pour la même activité, ils vous disent que ça n'en prend pas. Donc, il y a une question d'uniformité et d'efficacité. Dans le système actuel, moi, je n'ai pas encore vu comment on pouvait régler cette problématique-là. Si le Barreau veut poursuivre sa réflexion, moi, je poursuis la mienne de mon côté sur des éléments de justice que vous nous avez soulignés à raison. Ça va. Merci.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le ministre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui, peut-être juste une dernière chose que je voudrais tirer au clair. Le ministre a fait valoir tantôt qu'une de ses raisons pour créer un office, c'est qu'il se sent mal à l'aise. Il a même utilisé le terme «totalitaire». Il se sent mal à l'aise ayant à répondre à la population, à l'Assemblée nationale, de ses faits et gestes dans différents domaines: légiférer, surveiller, contrôler, etc. Mais il y a plein de ministres qui font ça actuellement. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche le fait actuellement. Il y a d'autres ministères qu'on pourrait nommer.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quelle ordonnance rend-Il?

M. Lazure: Si le ministre n'est pas à l'aise, eh bien, c'est son problème, ça. Il ne faut pas chambarder toute la structure d'un ministère parce qu'il a des états d'âme et qu'il se pense trop totalitaire en exerçant les fonctions qu'il exerce. Mais sérieusement, M. le Président, je pense que les groupes qui sont venus à date, y compris le Barreau, passent le message clairement au ministre: De grâce ne posez pas un geste aussi lourd de conséquences sans pouvoir mettre sur la table les raisons objectives qui vous amènent à poser ce geste-là. Moi, je répète la demande au ministre qu'à une prochaine séance de cette commission le ministre dépose les études qui le justifient de procéder à ce changement de structures. Merci.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le député de La Prairie.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'on pourrait avoir la réponse du Barreau? Moi, j'ai entendu la question, mais on ne leur a pas donné l'opportunité de répondre sur l'exercice, dans un ministère, des fonctions législatives, executives et quasi judiciaires. À ma connaissance - j'ai occupé plusieurs postes de ministre et j'essaie de faire le tour - il n'y en a pas d'autres.

Le Président (M. Gauvin): La question, c'est qu'on vous demande de citer des exemples.

Mme Comtois: Est-ce qu'il y a d'autres ministères? Je n'ai pas réfléchi à cette question-là. Je ne pourrais pas vous en donner maintenant. Est-ce que je pourrais ajouter un seul point?

Le Président (M. Gauvin): Oui, allez.

Mme Comtois: Si vous donnez suite au projet, il y a une chose que j'ai oubliée parmi les changements qui devraient être apportés. Au niveau du recours en appel devant la Cour du Québec, on a restreint les cas d'ouverture à l'appel alors que l'appel devant la Commission municipale du Québec, en vertu de l'article 96 de la LQE, prévoit que la Commission municipale peut intervenir «si les motifs de fait ou de droit invoqués au soutien d'une telle ordonnance sont erronés», alors qu'à l'article 103.2 du projet de loi, pour que la Commission puisse intervenir sur des motifs de fait ou de droit, il faut que ceux-ci soient manifestement erronés. C'est qu'on a monté un peu la barre. On a exclu des cas pour lesquels on pourra obtenir correction devant la Cour du Québec par rapport à ce qu'on pouvait obtenir devant la Commission municipale.

Le Président (M. Gauvin): Merci, Mme Comtois, M. Gagné et M. Sauvé, de nous avoir présenté votre mémoire. On va suspendre. Avant de suspendre, je vais inviter l'Association de l'industrie de l'aluminium du Québec à prendre place. Nous allons suspendre une minute ou deux.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 38)

Le Président (M. Gauvin): comme je le mentionnais, nous recevons l'association de l'industrie de l'aluminium du québec, représentée ici par m. christian van houtte, président-directeur général. je vous inviterais à nous présenter vos collègues, m. van houtte, s'il vous plaît.

Association de l'industrie de l'aluminium du Québec (AIAQ)

M. Van Houtte (Christian L): M. le Président, M. le ministre, M. le représentant de l'Opposition, permettez-moi de vous présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. À ma droite, M. Jean-Marie Sala, directeur de l'environnement à la Société d'électrolyse et de chimie Alcan; à ma gauche, Carol Jomphe, surintendant environnement à l'Aluminerie Alouette à Sept-îles, et M. Sylvain Bergeron, ingénieur en environnement à la Société canadienne de métaux Reynolds de Baie-Comeau.

Le Président (M. Gauvin): Merci. Vous avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Ensuite, chacun des groupes parlementaires ici aura 20 minutes pour échanger avec vous.

M. Van Houtte: Merci, M. le Président. L'Association que je représente et qui est devant vous aujourd'hui est toute jeune. Nous avons eu l'occasion de venir devant cette commission au mois de septembre dernier pour discuter de la procédure d'évaluation des impacts. Mais un des buts fondamentaux qui ont mené à la création de l'Association, c'est la défense des intérêts communs des membres. L'environnement figure en toute première place dans les objectifs de l'Association. Voilà pourquoi nous sommes devant vous aujourd'hui. Nous voulons, de la même façon que nous l'avons fait en septembre dernier, vous faire part de nos commentaires de façon très constructive, très positive sur le projet de loi 412.

L'Association de l'industrie de l'aluminium représente cinq grands producteurs d'aluminium québécois et canadiens. Vous les connaissez tous bien:^ l'Aluminerie Alouette, en construction à Sept-îles; l'Aluminerie de Bécancour; l'Aluminerie Lauralco, en construction à Deschambault; la Société d'électrolyse et de chimie Alcan et la Société canadienne de métaux Reynolds Itée.

Les investissements réalisés - je pense que vous les connaissez également - par l'industrie de l'aluminium au Québec au cours des 10 dernières années se chiffrent à près de 8 000 000 000 $. Chaque nouvelle installation rencontre les plus hautes normes fixées par le ministère de l'Environnement et utilise la meilleure technologie disponible. Pour nous, bien avant que la protection de l'environnement devienne un choix de société, l'industrie de l'aluminium améliorait déjà sur une base volontaire un bon nombre de ses installations. Au cours des 10 ou 12 dernières années, de vieilles installations ont été modernisées. Des équipements nouveaux ont été mis en place, des centres de traitement des gaz et des fumées ont été installés et des séries Soderberg ont même été remplacées par de nouvelles séries beaucoup plus performantes.

Les compagnies qui sont membres de l'Association, bien sûr, n'en sont pas non plus à leurs premières expériences en ce qui concerne leur participation active dans l'élaboration des lois et des règlements, que ce soit au Québec, au Canada ou ailleurs dans le monde. À maintes reprises, ces compagnies ont participé à l'étude de différents projets de loi et de règlements, que ce soit dans le cadre de groupes de travail, de rencontres informelles ou de commissions parlementaires comme c'est le cas aujourd'hui. À chaque occasion, M. le Président, nous avons voulu que notre participation soit toujours constructive. Donc, notre engagement relatif à la protection de l'environnement est total et il est fonction d'un principe de développement durable et de l'harmonisation des questions environnementales et économiques qui font partie d'un tout qui est, pour nous, indissociable.

Nous avons, M. le Président, dans notre mémoire, soulevé un certain nombre de points et nous faisons quatre recommandations principales. La première, c'est que nous croyons que la création de l'Office viendra accroître le nombre d'organismes avec lesquels l'industrie doit interagir en imposant une structure plus complexe et moins efficace, freinant ainsi la réalisation d'investissements, même ceux visant la protection de l'environnement. À notre avis, il faudrait viser à simplifier le fonctionnement du MENVIQ plutôt qu'à le compliquer par la création d'un office parallèle qui, de plus, ne pourra que générer des coûts supplémentaires et qui ne fera rien comme tel pour améliorer l'environnement.

Deuxième volet, c'est que nous croyons que la création de l'Office risque d'entraîner le Québec dans une judiciarisation excessive de l'environnement sans nécessairement garantir une meilleure protection de l'environnement. Je crois que plusieurs mémoires ont soulevé ce point au cours des derniers jours. Notre expérience est dans le même sens. Donc, nous croyons que nous devrions plutôt revoir les lois et les règlements actuels, les rendre plus faciles d'application, plus flexibles, c'est-à-dire plus réalistes, plus conformes aux réalités quotidiennes, et les rendre plus efficaces, et simplifier l'appareil administratif gouvernemental, ce qui entraînerait une réduction de coûts.

Troisième point que nous soulevons, c'est que la séparation du groupe responsable de la conception des règlements et du groupe respon-

sable de l'application, à notre avis, compromettra l'applicabilité de la Loi sur la qualité de l'environnement. Nous croyons qu'il est possible de conserver à l'intérieur du MENVIQ les personnes responsables de concevoir les lois et les règlements et les personnes responsables de les appliquer afin de favoriser une synergie et une cohérence plus grande.

Quatrième point, nous croyons que la création de l'Office réduira de façon drastique le rôle du gouvernement dans la gestion de l'environnement. Ce point-là a aussi été soulevé, je crois, par d'autres organismes. Nous croyons que l'environnement est un sujet trop important pour que le gouvernement et le ministre en confient l'application à un organisme indépendant. Nous recommandons donc que les responsabilités dévolues à l'OPEQ dans le projet de loi 412 demeurent la responsabilité du ministre.

Vous avez, M. le ministre, fait état, tout à l'heure, de l'âge du ministère. Vous avez dit que le ministère a maintenant 10 ans, 12 ans. C'est relativement jeune. Nous croyons, en conclusion, que, plutôt que d'adopter un projet de loi qui créerait un office de protection, il serait peut-être temps de faire un temps d'arrêt, de faire une pause qui permettrait au gouvernement, aux groupes, aux intervenants, de consolider les lois et les règlements qui ont, au cours des 10 ou 12 dernières années, fait l'objet soit d'adoption par le gouvernement, soit d'études et qui, par la suite, on été retirés.

Je pense, M. le Président, que, dans le contexte actuel, il est temps de procéder à une consolidation. Il est temps de voir exactement où nous allons et de quelle façon nous voulons y aller. Je lisais hier le mémoire présenté par l'Association des manufacturiers du Québec qui disait que c'était un peu comme monter à bord d'un autobus «no where». J'ai l'impression et nous avons l'impression que l'Office, comme tel, ne pourra pas faire mieux que le ministère de l'Environnement actuel. Un des principes, à notre avis, qui contribuent à l'inefficacité dont parlait le ministre tout à l'heure, c'est peut-être justement les structures comme telles à l'intérieur du MENVIQ. Plutôt que d'en créer de nouvelles, ne serait-il pas plus avantageux, plus économique et plus rentable de procéder à une restructuration à l'intérieur du MENVIQ?

Donc, M. le Président, nous croyons que le gouvernement devrait surseoir à l'adoption de ce projet de loi et procéder à une consolidation de toutes les lois et de tous les règlements qui ont été adoptés, présentés, soumis, etc., au cours des dernières années pour que, finalement, on sache exactement dans quel cadre le gouvernement veut se diriger. Après, et après seulement, nous croyons que là, en consultation avec les parties, nous pourrons décider quels mécanismes, quels moyens nous prendrons pour faire appliquer les lois et les règlements ainsi consolidés. Voilà, M. le Président, l'essentiel de nos commentaires.

Le Président (M. Gauvin): merci, m. van houtte. nous allons inviter m. le ministre à échanger avec vous pour une quinzaine de minutes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je remercie l'Association de l'industrie de l'aluminium du Québec. On sait que c'est un secteur d'activité économique sur lequel le Québec a beaucoup misé et mise encore et dont le Québec attend des retombées économiques encore plus importantes lorsqu'on pourra encore transformer un petit peu plus chez nous l'aluminium que nous fabriquons. Je n'ai pas l'intention de reprendre, parce que je pense que vous étiez dans la salle tantôt lorsque je l'ai expliqué, le bref historique du ministère, sa structure, la législation et la réglementation en vigueur au cours des dernières années. Mais je vais reprendre une partie de l'argumentation parce que, si ma prémisse n'est pas bonne, j'aurai des problèmes d'aboutissement ou d'atterrissage.

Comme ministre de l'Environnement, je l'ai dit, j'ai l'impression qu'en matière d'assainissement des eaux, qu'en matière de pollution urbaine comme telle le ministère de l'Environnement du Québec, lorsqu'il a créé la Société québécoise d'assainissement des eaux, a créé un véhicule pour régler le problème, comme on dit, a pris la bonne décision et qu'on a accompli, au cours des 10 dernières années, des progrès importants dans l'assainissement de nos eaux. Soit dit en passant, ce programme sert indirectement le monde industriel surtout situé dans les régions plus urbanisées. Si vous avez une entreprise ou une usine, vous pouvez bénéficier indirectement du programme d'assainissement des eaux. J'ai également indiqué que, sur le plan industriel, nous étions à l'état embryonnaire et, quant à la pollution agricole, on commence à s'habituer au vocabulaire, au ministère de l'Environnement. Nous ne sommes pas encore rendus sur le terrain.

Quand je regarde le secteur des alumineries comme tel et que je prends le projet au tout début, je me rends compte que, oui, le ministère est associé sur le plan de la délivrance d'un certificat d'autorisation pour la construction. Bien que, sur le plan des évaluations environnementales, le bureau d'audiences publiques ait juridiction pour une marina de 101 bateaux, le BAPE n'a pas juridiction sur l'établissement d'une aluminerie, au Québec. Ça, ça me préoccupe beaucoup et ça me fait dire qu'on n'est pas rendu encore loin dans le domaine industriel.

Deuxième élément. Lorsque je regarde notre réglementation, je peux comprendre l'Association des manufacturiers qui nous dit: Arrêtez tout ça, ne bougez plus. On va regarder ça. Mon prédécesseur, M. Lincoln, en 1988 ou 1989, a fait adopter un projet de loi sur la réduction des rejets industriels. Il a prépublié un règlement. Soixante-quinze mémoires ont été présentés. Nous

avons dû retourner à la législation. Nous venons de prépublier un autre règlement sur les attestations d'assainissement et je ne voudrais pas avoir la perception qu'on nous dit: Arrêtez, on va encore une fois tout regarder ça. Parce que, lorsque mon successeur arrivera, il dira: On a accompli des progrès dans le monde municipal, on n'a pas encore bougé dans le monde industriel et on ne sait pas encore ce que le monde agricole, ça veut dire au ministère de l'Environnement.

Ça, c'est un fardeau que j'ai à porter devant l'Assemblée nationale du Québec et devant la population du Québec. J'ai l'intention de le porter en faisant des progrès, avec votre collaboration, mais je n'ai pas l'intention d'arrêter ça là. Il faut qu'on soit clair. Ce qui a été prépublié, à moins qu'on ait commis des erreurs majeures dans notre réglementation sur les certificats d'attestation d'assainissement, il s'agit d'une approche américaine, d'une approche qu'on retrouve dans d'autres juridictions canadiennes et d'une approche qui donne des résultats en diminution de pollution, parce que l'entreprise investit davantage dans la modernisation de ses entreprises.

Soit dit en passant, le secteur de l'alumine-rie est un secteur qui a investi beaucoup dans la modernisation de ses entreprises au cours des dernières années et je vous en rends le témoignage devant cette commission parlementaire. Vous avez accéléré vos programmes, ce qui vous a permis de passer à travers la crise actuelle sans avoir des fermetures importantes, et le ministère de l'Environnement reconnaît ça. Maintenant, nous en sommes au niveau où tout notre programme en fonction des industries va entrer en application. Nous voulons en assurer une application régionale. Nous avons besoin d'une application régionale qui soit proche du client de façon à éviter les délais, comme vous l'avez mentionné, et de façon à vous donner un meilleur service parce qu'ils connaissent le milieu ambiant, finalement.

La problématique que j'ai, elle est bien simple, comme ministre de l'environment. Je l'ai fait, le ménage à l'interne dans les structures verticales, sauf que j'ai une joute de ping-pong depuis ce temps-là entre mon bureau régional et le central pour des raisons humaines dont je ne pourrai me défaire. Il est normal que le central veuille conserver ses pouvoirs - elle ne veut pas les aliéner en fonction des régions - et il est normal que le fonctionnaire en région veuille sécuriser sa décision en la faisant endosser par le central. Et, tant et aussi longtemps qu'on ne créera pas quelque chose d'hermétique entre les deux, on n'aura pas de solution à notre problème. C'est notre problème. Quand je dis «notre problème», ce n'est pas le problème de l'actuel ministre de l'Environnement, c'est un problème de fonctionnement au ministère de l'Environnement. Si on tente de le faire, c'est pour le bénéfice de l'environnement, oui, mais aussi pour le bénéfice de nos clients importants comme, entre autres, l'industrie de l'aluminium au Québec.

Le Président (M. Gauvin): Est-ce que vous avez des réponses?

M. Van Houtte: M. le Président, je demanderais peut-être à M. Sala, qui représente la Société d'électrolyse et de chimie Alcan et qui est un grand spécialiste, de faire des commentaires sur ce que vous venez de dire.

Le Président (M. Gauvin): M. Sala.

M. Sala (Jean-Marie): Merci beaucoup. Je voudrais d'abord mentionner que des progrès importants ont aussi été réalisés par notre industrie, qu'il s'agisse de l'assainissement de l'air, qu'il s'agisse de l'amélioration de nos rejets liquides. Ces progrès, je pense, M. le ministre, vous pourriez aussi les souligner parce qu'ils sont à l'avantage de la collaboration et de l'identification de problèmes que nous avons pu faire avec plusieurs de vos fonctionnaires et qui ont permis de faire des progrès remarquables dans le cadre de la législation actuelle.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Sala... M. Sala: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...si vous me permettez de vous interrompre, je l'avais souligné. Vous êtes un des secteurs industriels au Québec qui a investi le plus massivement dans la modernisation avec des effets bénéfiques pour l'environnement.

M. Sala: Je ne voudrais pas inonder la commission avec des chiffres, mais ils sont à la disposition de tous et chacun et du public également. J'aimerais seulement mentionner certains chiffres bien spécifiques relatifs à nos vieilles usines. Qu'on garde en mémoire, par exemple, que les émissions d'hydrocarbures aromatiques polycycliques, qui ne sont par réglementées actuellement, ont été réduites, entre 1983 et 1991, à Jonquière, de six fois. Il y en a aujourd'hui six fois moins qu'il y en avait. Je pourrais vous donner des chiffres du même ordre de grandeur. Les huiles et graisses rejetées, par exemple, dans nos rejets liquides, qui subsistent encore sont aujourd'hui 13 fois plus faibles qu'elles ne l'étaient en 1980. Je pourrais continuer sur les différents paramètres. Si vous êtes intéressés, ça nous ferait plaisir de vous faire parvenir ces informations-là.

L'autre chose que j'aimerais mentionner est un point qui me paraît important. Il a été fait référence à quelques reprises à la réglementation américaine. Je crois qu'il y a une date importante qu'il faut garder en mémoire, c'est avril

1987. Pourquoi avril 1987? Parce que c'est la date de publication du rapport Brundtland, «Notre avenir à tous», qui a répandu dans la société, et je pense que les industries n'y échappent pas, cette notion de développement durable à laquelle nous avons déjà eu plusieurs fois l'occasion d'adhérer.

Je crois que ce virage-là est un virage philosophique important et que, quand on parie de nouvelles lois, de nouveaux règlements, de nouvelles polices, etc., il ne faut pas oublier que cette philosophie a changé. Ce n'est plus la philosophie qu'il y avait dans les années soixante-dix. La notion de développement durable a été adoptée par toutes les entreprises. À titre d'exemple, je rappellerais le livre qui a été publié en novembre 1989 au Saguenay-Lac-Saint-Jean, «Pour que demain soit», donc deux ans après la publication du rapport Brundtland, et qui a été publié par la table sectorielle environnement du Conseil régional de concertation et de développement avec la collaboration, entre autres, du Conseil régional de l'environnement. D'ailleurs, M. le ministre, vous lui aviez remis, il y a deux ans, le prix du mérite environnemental provincial.

Nous croyons que c'est dans cet esprit de concertation à la base dans les régions où nous opérons que pourront se faire les améliorations que nous voulons, que vous voulez, que tous veulent en termes d'amélioration de la qualité de l'environnement et non pas par une complication, une complexité accrue des lois, des règlements, des intervenants. J'arrêterai là. J'aurais encore d'autre choses à dire, mais peut-être que nous pourrons en discuter plus tard.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous allez dans le même sens pour la régionalisation. Si on souhaite donner la responsabilité accrue à la région, c'est parce qu'on pense qu'il y a une sensibilité régionale d'un bureau régional que ne peut posséder le bureau-chef à Québec. On ne peut avoir ces sensibilités-là. Vous avez raison de le souligner, la table de concertation Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'était la plus avancée à l'époque au Québec, mais ce n'était pas le cas dans toutes les régions du Québec. D'ailleurs, elle a reçu le prix du mérite environnemental provincial parce qu'ils étaient les meilleurs au niveau de la province.

Une question très pratique. Vous êtes des gens qui investissez, qui construisez des alumine-ries au Québec. Il y a deux écoles de pensée présentement au ministère. Il y en a une qui me recommande comme ministre de l'Environnement de fonctionner en fonction de résultats, c'est-à-dire on vous impose le respect de normes d'émissions dans l'eau, dans l'air et dans le sol et on vous laisse libres ou maîtres du design ou de la planification de votre usine. Il y a une autre école de pensée qui me recommande non seulement d'avoir des résultats à atteindre, mais également d'intervenir et d'approuver chacun des éléments de la conception comme telle de votre usine et des procédés.

Le Président (M. Gauvin): M. Sala. (17 heures)

M. Sala: Oui. Nous pouvons faire un peu un retour à ce moment-là sur le mémoire que nous avions soumis à la commission de l'aménagement et des équipements relatif au fonctionnement du BAPE. Nous recommandions à l'époque que le public soit consulté dans une toute première étape, au moment de l'émission, sur le document, la directive environnementale émise par le ministère, tout de suite au début du projet. C'était notre recommandation, de façon à impliquer le public dans l'évaluation des projets le plus tôt possible. Et revenir ensuite, dans une deuxième étape éventuellement, pour une vérification, pour que le public puisse vérifier de quelle façon nous avions répondu au projet. J'en viens à votre question.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous feriez un bon politicien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sala: Non, non. C'était juste pour remettre... Parce que ce dossier a déjà été discuté. Quant à savoir si les fonctionnaires du ministère devraient regarder l'ensemble ou le détail des dossiers, je ne crois pas qu'ils doivent le faire. Je pense que les dossiers sont effectivement disponibles, mais je ne crois pas qu'ils devraient passer un temps exagéré sur le détail de la construction, sur l'approbation des plans et devis. En fait, il s'agirait d'appliquer simplement le règlement sur l'administration de la loi, qui prévoit les documents qui doivent être soumis au ministère, et de se limiter à ça sans passer à travers un détail d'acceptation ou d'évaluation des plans et devis.

Je crois qu'il se passe beaucoup de temps à ce niveau-là et que le ministère pourrait gagner du temps et être beaucoup plus efficace sans risquer de mettre en péril l'environnement par la construction des projets. Est-ce que ça répond?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, cette partie répond. Merci.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala. Je reconnais M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, au nom de l'Opposition, il me fait plaisir de saluer les représentants de l'Association de l'industrie de l'aluminium qui viennent fréquemment à cette commission-ci nous apporter leur contribution quant à la façon d'améliorer notre environnement

au Québec. Je vous félicite pour votre mémoire. C'est sur un ton sobre, mais d'une grande sagesse et d'une grande clarté. On n'a qu'à lire, à la page 5, les quatre points, et ça résume très bien. Les formules sont très bonnes. Vous dites: «Nous croyons que la création de l'Office [...] risque: «1° d'imposer une structure plus complexe et donc moins efficace; «2° de judiciariser l'environnement sans en garantir une meilleure protection; «3° de limiter l'interaction essentielle entre les concepteurs de règlements, ceux par qui ils sont appliqués et ceux à qui ils sont appliqués;» et, enfin: «4° de réduire de façon drastique le pouvoir du gouvernement dans l'application de la loi en remettant notre environnement entre les mains d'intervenants aux intérêts divergents et limités».

Je vais revenir sur le quatrième point pour poser une question tantôt. Mais je veux juste ajouter un ou deux commentaires pour vous dire que vous êtes en très bonne compagnie. Vous êtes en très bonne compagnie, non seulement avec l'Opposition, ça va de soi, mais aussi, peut-être, avec certains députés libéraux silencieux qu'on entendra peut-être, à un moment donné, un peu plus tard sur ce projet de loi. Vous êtes en compagnie d'Hydro-Québec, qui est le plus gros client du ministère de l'Environnement, de l'Association des manufacturiers du Québec, du Conseil du patronat, des groupes environnementaux, du Barreau qui vient de passer avant vous. Enfin, la très, très grande majorité des groupes tient à peu près le même langage que vous. Chacun le fait à sa façon, mais chacun met le ministre en garde. Et j'aime bien votre finale, quand vous dites: De grâce, M. le ministre, faisons une pause pour permettre au gouvernement de mieux harmoniser ses lois, ses règlements, de mieux harmoniser le cadre à l'intérieur duquel fonctionnent les directions régionales. C'est un appel qui est très sage: faire une pause. On n'a rien à perdre à faire une pause; au contraire, tout à gagner.

Un dernier commentaire, je reviens à ma question. Le ministre - je ne peux pas m'em-pêcher de le relever - vous dit: Ça me préoccupe que les alumineries ne soient pas assujetties à la procédure d'évaluation et d'étude des impacts environnementaux. Mais il n'en tient qu'à lui et à son gouvernement. Depuis 1985, on vous demande de mettre en vigueur ces articles-là. Évidemment, là, pendant plusieurs mois, il a eu l'occasion de dire: Bien, j'attends le rapport de la commission. Mais il sait fort bien que la commission va lui demander ça d'ici quelques semaines; il le sait fort bien. Il nous a laissé entendre, cependant, qu'il n'était pas pour réagir de façon très, très favorable quand il est venu à la clôture de la commission. Oui. Enfin, je reviens à votre mémoire, au quatrième commentaire que vous faites: «réduire de façon drastique le pouvoir du gouvernement dans l'application de la loi en remettant notre environnement entre les mains d'intervenants aux intérêts divergents et limités.» Pouvez-vous élaborer un petit peu là-dessus?

M. Van Houtte: Je pense, M. le Président, qu'il s'agit simplement de voir dans le projet de loi la façon dont sera composé le conseil d'administration de cet Office. On parle d'un conseil d'administration de neuf membres, composé du président-directeur général et du sous-ministre, et il reste sept postes à combler avec des représentants du monde des affaires, du monde syndical, municipal et des groupes environnementaux. Pour nous, il semble, en tout cas, que l'environnement soit un sujet trop important pour que les décisions importantes relatives à l'administration des lois et des règlements soient prises à la majorité des voix sur un conseil d'administration où, de par leur nature même, les gens ont peut-être des intérêts complètement divergents.

Les groupes environnementaux diront, bien sûr, que le gouvernement ne va jamais assez vite. Les groupes municipaux essaieront sans doute, parce que ce sont eux-mêmes des élus, de tempérer ou d'aller suivant les dossiers. Les représentants syndicaux, à qui ces personnes-là seront-elles imputables? Les représentants du milieu des affaires, eux, voudront toujours faire une étude de coûts. En fait, les intérêts me semblent tellement divergents que, finalement, ça peut causer beaucoup plus de problèmes que d'autres choses, selon nous, un conseil d'administration formé comme ça.

M. Lazure: Merci. Je pense que c'est tout à fait pertinent, ce que vous dites là, et un document que j'ai entre les mains, qui est une série de notes du Secrétariat à l'aménagement, au développement régional et à l'environnement, un comité qui a étudié le projet de loi du ministre, fait des commentaires à peu près semblables aux vôtres sur cette question précise.

Il y a aussi, à la page 9 de votre texte, une remarque qui est assez originale, qui n'est pas apparue dans d'autres mémoires. Vous dites: «L'ajout de deux nouveaux intervenants, l'OPEQ central et l'OPEQ régional, viendra alourdir et ralentir le fonctionnement d'un système déjà complexe en multipliant les recours judiciaires plutôt qu'en favorisant la solution concrète de problèmes.» Avant de vous demander d'élaborer un peu là-dessus, je ferai remarquer au ministre que c'est ça, le vrai langage. La vraie vérité, c'est ça. Parce que le ministre, depuis le début, dit: Je crée l'OPEQ pour que, en région, les décisions se prennent. Un peu comme si l'OPEQ ne devait être constitué que de personnel en région. Vous avez raison de parler d'un OPEQ central. Il va y en avoir un OPEQ central si le projet de loi est adopté. Mais la judiciarisation

accrue, de quelle façon vous la voyez venir?

M. Sala: La façon dont nous voyons arriver cette judiciarisation tient au fait que la loi et les règlements, au Québec, ont évolué de façon assez considérable. M. le ministre a parlé tout à l'heure du projet de loi 99 qui date déjà du 15 novembre 1988, dans la première version, et qui aboutit actuellement. L'harmonisation de la loi et des règlements laisse à désirer. Quand on parle, par exemple, du règlement sur les déchets dangereux, le ministère a très rapidement réalisé, en 1985, qu'il y avait des changements à faire. Ce sont des changements importants. L'objectif est louable. C'est très difficile, nous en sommes extrêmement conscients, mais si on remettait actuellement cet état de situation entre les mains d'un office qui serait indépendant du ministère, nous pensons que c'est davantage l'outil, finalement, qui serait difficile à appliquer par quelqu'un qui est indépendant du ministère. Il est déjà très difficile à appliquer quand il faut l'appliquer à l'intérieur du ministère par les fonctionnaires du ministère. Il y a toute une question d'interprétation de certains articles, etc. Si on remettait tout cela dans les mains d'un office, il nous semble que, inévitablement, on arriverait à une judiciarisation. Et cette judiciarisation fait peut-être le bonheur des avocats, mais nous ne pensons pas que ce soit bénéfique pour la qualité de l'environnement dans lequel nous vivons.

M. Lazure: merci. je pense que vous rejoignez plusieurs autres mémoires qui ont mis en garde le ministre sur cette judiciarisation qui nous guetterait tous.

M. Jomphe (Carol): M. le Président, peut-être juste un autre exemple que je voudrais amener. Aluminerie Alouette est une nouvelle entreprise et on n'est pas encore entré en production. Actuellement, il y a un projet de règlement aussi qui s'en vient au niveau des effluents des industries. Je veux juste vous rappeler que, sans qu'il y ait présence de règlement, Aluminerie Alouette et même les autres alumineries au Québec ont fait des grands pas dans les dernières années au niveau de leur traitement des eaux.

La plupart des entreprises ont élaboré des programmes d'assainissement et, maintenant, font la recirculation des eaux et font le traitement d'une purge qui peut être rejetée à l'environnement. Dans le cas d'Aluminerie Alouette, sans qu'il y ait eu présence de règlements et de judiciarisation, nous avons élaboré un projet où on fait la recirculation complète des eaux industrielles de telle façon qu'il n'y ait aucun rejet dans l'eau.

À ce moment-là, on peut se poser la question: Est-ce qu'il y a vraiment nécessité d'avoir une réglementation ou est-ce qu'on ne doit pas plutôt aller, comme on en parlait tout à l'heure, vers la concertation et vers les intérêts communs des entreprises, du gouvernement et de la population? Il y a moyen, je pense, de faire ça sans qu'il y ait toujours une réglementation au bout.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Jomphe. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui, merci, M. le Président. À la page 11 de votre mémoire, vous dites: «II est important que les avant-projets puissent être discutés lors de leur phase de préparation, avant leur dépôt officiel - ce qui n'a pas été le cas pour le projet 412; il n'y a pas eu de consultation - cette préconsultation permet aux parties intéressées et au MENVIQ de faire connaître leurs positions dans un contexte construct [...] L'adoption rapide de la loi 405 en décembre dernier était à rencontre du principe de consultation, et cela nous paraît complètement inacceptable.»

Vous avez raison et je vous rappelle que l'Opposition avait demandé au ministre de l'Environnement de prendre le temps de consulter quelques groupes, sur invitation. Même, on était d'accord pour se limiter à un certain nombre de groupes, mais il a refusé. Il a plaidé l'urgence alors qu'en réalité il n'y avait pas urgence parce que les règlements, qu'il devait déposer, d'ailleurs, en même temps que le projet de loi, en décembre, ne sont même pas encore déposés.

Je pense que vous prenez un bel exemple, à la page 11. Vous avez tout à fait raison de souligner que, souvent, le ministre procède trop rapidement et il aurait avantage à prolonger les consultations, autant avec ses fonctionnaires qu'avec les groupes qui sont à l'extérieur, que ce soit les industriels ou les groupes environnementaux.

M. le Président, moi, je veux, en terminant, remercier encore une fois les représentants de l'industrie de l'aluminium pour la contribution importante qu'ils font aux travaux de la commission.

Le Président (M. Gauvin): M. le député de Saguenay.

M. Maltais: M. le Président, brièvement, étant donné qu'on ne vous a pas tous les jours, les spécialistes de l'environnement de chacune des multinationales dans l'aluminerie. Vous avez parlé tout à l'heure, M. Sala, des réductions fort importantes des émanations de HAP. Je sais que M. Larouche a entendu parler beaucoup de ceux de Baie-Comeau. À Baie-Comeau, on a un avantage. On sait où ils sont, dans la baie des Anglais. Je sais que Reynolds a diminué beaucoup aussi les émanations de HAP. Ils ont fait vraiment un travail extraordinaire et on sait maintenant qu'il y a moins d'émanations, peut-être dans la même

proportion que vous avez dit concernant Alcan. Donc, à Baie Comeau, on sait où sont les HAP qui ont été produits avant la diminution. Chez vous, M. Sala, est-ce que vous savez où est-ce qu'ils sont?

M. Sala: Absolument. M. Maltais: Oui?

M. Sala: Absolument. Nous avons, depuis la fin des années soixante-dix, contribué d'abord à l'identification des HAP. Notre centre de recherche d'Arvida a d'ailleurs fait des publications sur les méthodes analytiques des HAP et, immédiatement lorsque ces méthodes ont été disponibles, nous les avons utilisées pour identifier dans toutes nos usines où se trouvaient les sources d'émissions. Et nous avons d'ailleurs partagé avec le ministère de l'Environnement, dans les années 1984-1985, les études que nous faisions pour identifier le mieux possible où se trouvaient les HAP. Donc, ceci pour identifier les sources, les émissions, où elles se produisaient.

Dans un autre esprit, nous avons également suivi de très près tout ce qui se faisait au sujet de la qualité des eaux de la rivière Saguenay et de la qualité des sédiments. Il y a eu d'abord une première étude des sédiments qui a été faite dans les années 1985-1986, qui a été publiée et qui montrait où se trouvaient les HAP qui avaient pu être laissés dans la rivière.

Mais je voudrais, à ce moment-ci, bien préciser que le problème, entre guillemets, des HAP est celui des vieilles salles de cuves Soder-berg en utilisation, en service au Québec, celles qu'on appelle Soderberg à goujons horizontaux par différence avec ce qui existe à Baie-Comeau où les goujons sont verticaux; ces HAP là créent un problème à l'atmosphère et non pas un problème dans l'eau.

Néanmoins, nous avons participé avec les chercheurs qui faisaient cette recherche dans les sédiments du Saguenay et nous avons, d'une certaine façon, facilité aussi les travaux du Bedford Institute of Oceanography de Darmouth. Nous avons très bien relié d'où venaient les HAP et également comment les rejets de HAP dans le liquide avaient fortement diminué depuis 1976. Les corrélations sont tout à fait disponibles; elles ont fait l'objet de publications scientifiques, aussi bien quant à la méthode de datation des carottes de sédiments qui étaient prélevées que des analyses. On a très bien relié l'évolution de la contamination des sédiments du Saguenay aux rejets liquides de l'usine d'île Maligne qui, jusqu'en 1976, rejetait malheureusement ses effluents liquides de lavage des gaz d'élec-trolyse dans le Saguenay. En 1976, cela a été arrêté et les liqueurs, depuis, sont envoyées à Jonquière où nous faisons de la récupération de cryolithe qui est une des matières premières que nous utilisons dans la production électrolytique de l'aluminium.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala. C'est tout le temps qu'on avait à notre disposition. Je remercie M. Sala, M. Bergeron, M. Jomphe et M. Van Houtte de leur présentation.

Avant d'accueillir l'Association minière du Québec, nous allons suspendre une minute ou deux. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise à 17 h 20)

Le Président (M. Gauvin): alors, on invite l'association minière du québec à prendre place, en la personne de m. raynald vézina, vice-président aux opérations, cambior.

Une voix: C'est M. Drouin.

Le Président (M. Gauvin): Excusez-moi! Nous recevons M. Claude Drouin, directeur général, M. Roberge, adjoint à la direction, et M. Thomassin. M. Drouin, vous avez 20 minutes pour faire votre présentation. Vous n'êtes pas tenu de prendre tout ce temps-là, mais les 20 minutes vous sont allouées.

Association minière du Québec

M. Drouin (Claude): je vais me contenter, m. le président, de vous présenter mes partenaires qui sont au bout de la table: m. yves thomassin, qui est le conseiller en environnement; immédiatement à ma gauche, me jean roberge, qui est mon adjoint et celui qui vous fera la présentation.

Le Président (M. Gauvin): M. Roberge.

M. Roberge (Jean): Oui, bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre et MM. les députés du gouvernement et de l'Opposition. On vous remercie beaucoup de nous avoir invités à présenter notre mémoire ici, à la commission parlementaire, principalement sur ce projet de loi qui est important puisqu'il constitue un virage important à nos yeux de la gestion environnementale de la part du gouvernement.

L'Association minière, comme vous le savez, regroupe une quarantaine d'entreprises minières dans le domaine du fer, du cuivre, du zinc et de l'or, qui se situent parmi les premiers producteurs au monde. De par ses activités, l'Association minière est bien placée pour voir ce qui se passe en matière d'environnement, tant au niveau régional que central, puisque nous avons affaire aux deux paliers d'administration de la Loi sur la qualité de l'environnement de par nos membres.

Le Président (M. Gauvin): Je m'excuse, M.

Roberge.

M. Roberge: Oui.

Le Président (M. Gauvin): Nous avons un petit...

M. Roberge: La cloche.

Le Président (M. Gauvin): ...dérangement de parlementaires. Nous allons suspendre nos travaux pour quelques minutes, car les membres de l'Assemblée nationale doivent se présenter pour un vote.

Donc, la commission reprend ses travaux. Excusez-nous, M. Roberge, je vous invite à continuer votre présentation.

M. Roberge: O.K. M'entendez-vous bien? Des voix: Oui.

M. Roberge: Ça va bien? Parce qu'on me dit souvent que je n'ai pas une voix tellement forte.

La question de scinder le ministère en deux, on en avait déjà parlé précédemment dans l'examen du projet de loi 99. Je vais vous expliquer pourquoi. Le ministre voulait avoir, ajouté dans la Loi sur la qualité de l'environnement - et ça s'y trouve - le pouvoir d'ajouter des normes dans les certificats d'autorisation afin d'éviter tout accident. À ce moment-là, on avait souligné dans notre mémoire qu'il pourrait être difficile et même dangereux pour le ministre d'avoir à émettre des certificats d'autorisation contenant des normes pour éviter des accidents, alors que le propre des accidents, c'est d'être accidentels; et le ministre pourrait être pris à partie si un accident, effectivement, arrivait ou si une norme ou un mode de détection survenait quelques années plus tard. On l'avait mis en garde et on avait suggéré, peut-être, qu'il faudrait penser à scinder des activités. Mais, dans notre pensée, la scission ne devrait pas se faire à cette place-là. Elle devrait se faire plutôt pour l'activité de surveillance, qui pourrait aller seule, mais la question de conception - lois, règlements, émission de permis, d'ordonnances, etc. - devrait être entre les mains de la même autorité, de façon à ce que ce soit cohérent avec les politiques, lois et règlements envisagés, et émettre les permis en conséquence de ça. Et la surveillance pourrait aller plus loin.

À ce moment-ci, nous croyons que c'est vraiment trop tôt pour opérer un tel divorce. D'abord, on pense que la culture environnementale au Québec n'est pas assez bien assise pour qu'un volet Important du ministère s'en sépare. Comme question de fait, l'harmonisation des activités et des approches du central et des diverses régions que l'on veut scinder n'est pas à 100 % réalisée. Nous pensons que cette étape devrait être franchie avant de séparer ces groupes. Avant de scinder un organisme en pensant mieux s'occuper de l'environnement, il serait essentiel, à notre sens, de chercher à mieux faire dans le cadre actuel plutôt que de risquer un accroissement des difficultés.

Il ne faut pas, à ce moment-ci, créer un autre organisme nécessitant un personnel supplémentaire, non plus, d'une certaine façon privé de l'expertise du central. Il y aurait un risque d'incohérence nuisible pour l'environnement et nuisible pour la clientèle visée par les diverses lois et les règlements. En effet, l'expertise et les connaissances acquises de part et d'autre au ministère de l'Environnement deviendraient difficilement accessibles pour les deux entités. Nous pensons qu'à ce moment-ci il est plus important de renforcer l'expertise actuelle et ces connaissances.

Le central et le régional coupés l'un de l'autre, mutuellement, d'une source d'information, cela rendrait aussi difficile l'application des lois et des règlements. Les deux sont des collaborateurs précieux l'un envers l'autre et la division envisagée devrait être plutôt basée sur des critères d'efficacité. La preuve n'a pas été faite, à notre sens, qu'un tel geste amènerait l'efficacité souhaitée. Peut-être que, dans un certain nombre d'années, la situation sera assez mûre pour l'effectuer, mais pas à ce moment-ci.

Quant à nous, notre expérience avec le ministère de l'Environnement, au central et au régional, nous laisse clairement voir qu'il y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer à autre chose. Par exemple, il y a des divergences de vues entre ce que le régional préconise et ce que le central envisage. D'autre part, même entre les régions, des différences sont notées quant au traitement des dossiers. De plus, on constate un manque important de connaissances du milieu minier, mais aussi des autres milieux - les milieux industriels - autant dans les régions qu'au central, quoique nous sommes portés à croire que le central fait preuve de beaucoup plus d'éloi-gnement de la réalité.

Sur le traitement des dossiers, beaucoup de temps est passé sur des aspects techniques de forme plutôt que de fond. Beaucoup de délais aussi sont constatés et subis. Quant à l'émission des autorisations et des permis, il est clair qu'une partie des délais est due à des divergences de vues à l'interne entre les divers groupes ayant à gérer le même dossier. On préconisait, par exemple, que le central soit impliqué dès le départ d'une demande d'autorisation et qu'il vienne sur les lieux davantage dans les régions plutôt que d'attendre que le dossier lui parvienne, et parfois d'une manière parcellaire. Il devrait y avoir une symbiose plus grande entre le central et le régional. Devant cet ensemble de constatations, nous considérons que le central ne devrait pas, à ce moment-ci, se couper du régional, et vice versa.

D'autres exemples. On a pensé à vous

mentionner, en Ontario ou en France, le fonctionnement. Les régions ont plus de pouvoirs qu'actuellement, ici, au Québec. Mais, dans une certaine mesure, en Ontario, on envisage de rapatrier au central certains pouvoirs parce qu'il y a une grande autonomie des régions et ça nuit à la cohérence de l'application des lois. En France également, ils ont des problèmes de cet ordre-là. Il ne faut pas oublier non plus le contexte constitutionnel dans lequel on vit. Actuellement, on n'est plus certain de qui fait quoi et jusque dans quelle mesure les provinces ou le fédéral ont une juridiction entière, partielle ou commune sur l'environnement.

Quand on parle de la loi sur la protection de l'environnement comme telle, la compétence provinciale est peut-être plus importante ou plus évidente, mais quand on parle de la compétence environnementale dérivant, par exemple, de la Loi sur les pêcheries, la juridiction n'est pas claire. Créer à ce moment-ci un troisième acteur ne ferait que compliquer la situation pour les entreprises et les gens qui constituent la clientèle visée, et pour l'environnement, probablement.

Les changements importants et rapides qu'on a connus. Quand on lit l'article premier de l'Office, c'est difficile de ne pas se remémorer le passé et de ne pas se demander où on s'en va et si on a examiné suffisamment le passé pour en arriver aujourd'hui à la solution qui est envisagée. Je pense qu'il faudrait marquer peut-être un temps d'arrêt dans les modifications et les changements. L'année dernière, un groupe de travail au ministère a transcrit comment devraient fonctionner les relations central et régional. Je pense qu'on devrait tenter cette expérience avant de passer à une autre approche, telle qu'envisagée par le projet de loi.

Les articles du projet de loi. Sur le conseil d'administration, par exemple, la représentation au sein du conseil d'administration nous inquiète parce qu'on envisage des représentants du milieu des affaires, environnemental, municipal et syndical. On ne pense pas que ces groupes mis ensemble vont constituer le regroupement idéal pour la gestion de l'environnement. Dans le domaine des affaires, par exemple, vous avez le secteur primaire, mais vous avez les secteurs secondaire et tertiaire qui, chacun, se divisent en différents groupes bien spécifiques. Et l'un des groupes du milieu des affaires ne pourra pas nécessairement représenter le milieu des affaires comme tel.

Dans les autres domaines également, je pense qu'il va y avoir un regroupement artificiel difficile. Le monde municipal, par exemple, serait représenté par qui? Par des personnes qui sont de municipalités régionales, locales, de régions éloignées, de municipalités à plus haute densité, qui auront une problématique tout à fait différente et une approche différente? On se demande aussi comment un tel regroupement consti- tuerait un interlocuteur valable. On pense aux syndicats. La moitié des travailleurs sont syndiqués; ça ne veut pas dire que ça représente les travailleurs. L'organisation d'un conseil d'administration devrait être articulée, comme le ministère, d'une façon assez symétrique pour qu'ils se comprennent. Par exemple, le ministère est articulé: urbain, agricole, industriel, développement durable et conservation, s'occupant de l'eau, de l'air et du sol. Avoir un conseil d'administration qui fait référence à des groupes d'activité, il me semble que c'est différent; l'approche ne sera pas pareille et il y aura une difficulté d'entendement entre ces deux groupes. (17 h 30)

À l'article 10, on mentionne la nécessité de régler la question des conflits d'intérêts. C'est une très bonne mesure qui devrait même s'appliquer aux ministères qui ont un rôle important à jouer dans la société. Le conflit d'intérêts devrait être articulé, expliqué de façon à ce que ce ne soit pas simplement le fait de détenir des actions ou un intérêt financier dans une entreprise qui constitue un conflit d'intérêts. Il y a peut-être d'autres situations. Quand on parie d'entreprises, on pense à celles qui sont la clientèle visée par les règlements, mais on pense aussi à des entreprises de consultants en matière d'environnement. Je pense que les conflits d'intérêts devraient être couverts d'une manière assez articulée là-dedans. Mais, d'une manière générale, c'est une bonne mesure à passer.

Quand on regarde les pouvoirs de l'Office prévus aux articles 18 et 19, on voit qu'il interviendra en environnement en mettant en place des mesures de protection et un service d'urgence. À la demande du ministre, il pourra appliquer des programmes de restauration, de prévention, recevra des plaintes, concevra des programmes de formation et d'information et fournira des données statistiques, tout en exécutant des mandats connexes, et pourra donner des avis au ministre.

Ce que nous ne savons pas, par contre, c'est ce qu'il va faire dans ces divers domaines. Est-ce que l'Office pourra faire des enquêtes sur ces plaintes? Pourra-t-il exercer des activités pour mettre en branle les mesures qu'il aura mises en place? Dans le domaine de la conception des programmes de formation et d'information, est-ce que l'Office fera aussi de la formation ou est-ce qu'il donnera des mandats de formation sans avoir lui-même le mandat de faire la formation? Aussi, sur cette même question des pouvoirs et des fonctions, on s'inquiète du fait qu'à l'article 24 on prévoit que le ministre pourra indiquer à l'Office quels sont les objectifs ou les orientations précises. Cet élément, quant à nous, constitue une source de conflits qu'il faudrait éviter.

À notre avis aussi, les activités de l'Office vont doubler celles du ministère et, quant aux mandats connexes, il serait important de les

définir. C'est une notion très large qui peut mener à ce que l'accessoire dépasse l'essentiel. C'est une zone grise à éviter, la question des mandats connexes dont on parle dans ces articles 18 et 19.

À l'article 22, on parle de mandats ou d'ententes que l'Office pourra faire avec une personne ou une municipalité pour exercer ses fonctions. Comme nous l'avons mentionné, les fonctions de l'Office étant peu claires, on se demande sur quoi l'Office pourra s'entendre. Est-ce qu'il s'agit uniquement de collaborer en vue d'effectuer des échanges de données, de renseignements? Est-ce qu'il s'agit de concevoir des programmes de formation et d'information? Est-ce qu'il s'agit du fait de recevoir des plaintes ou encore de voir à l'application de programmes de restauration? Ceci devrait être éclairci, quant à nous, en précisant les ententes dont il s'agit et le mode de financement prévu pour que les personnes, municipalités, sociétés ou organismes réalisent le mandat ou l'entente.

À l'article 32, on vise à modifier les demandes d'appel en révision. Au sujet de l'article 96, il serait important d'ajouter qu'une décision de l'Office devrait être motivée en plus d'être écrite et transmise. Pour la question de la révision, il faudrait prévoir, à notre avis, la possibilité de demander une révision dans les cas de refus ou de modifications de certificat, permis, autorisation et approbation faites à l'initiative de l'Office à la demande d'un intéressé, et non pas viser uniquement les cas d'attestation d'assainissement. L'article 99, pour sa part, prévoit qu'une demande de révision est faite à trois personnes désignées par l'Office. On croit qu'il serait important de préciser quels sont les pouvoirs de ces trois personnes et les qualités qu'elles doivent avoir pour exercer ces fonctions. À l'article 100, la possibilité est prévue que le comité de révision de l'Office rende une décision provisoire dans l'intérêt de la protection de l'environnement. Nous sommes tout à fait contre ce genre de disposition qui fait fi des droits des parties et qui est d'une discrétion absolue entre les mains de trois personnes dont on ne connaît ni les qualités, ni les pouvoirs, comme si la légalité aux yeux de quelqu'un pouvait être mise de côté par simple opinion divergente. C'est inquiétant, cette disposition-là. Cette façon de prévoir des pouvoirs est inadmissible, quant à nous, et une entreprise pourrait être obligée de fermer ses portes sans s'être fait entendre en appel.

Enfin, en mentionnant tous les changements envisagés dans le projet de loi 412, lorsqu'on remplace évidemment le mot «fonctionnaire» par le mot «personne» et en ayant en tête la délégation ou les ententes que l'Office pourra conclure avec tout organisme, municipalité, société ou organisme, il est à craindre que tout un chacun puisse devenir un délégué ou un représentant de l'Office, comme, par exemple, des municipalités, des sociétés pour la protection de l'environnement ou tout autre organisme qui aurait l'intention de jouer un rôle de police verte. Il serait très important d'éclaircir ce à quoi on veut en venir, puisque ça ne nous semble pas clair. On prévoit que l'Office pourra donner par entente des mandats, mais on se demande quel genre de mandats on envisage. Est-ce que c'est l'ensemble ou partiel? Ce n'est pas très clair et, aussi, inquiétant.

Comme remarque générale, nous pensons que la création de l'Office ne devrait pas être envisagée à ce moment-ci et que le gouvernement devrait plutôt s'occuper de s'assurer que ce qui existe actuellement fonctionne bien et mieux avant de passer à une autre étape que nous trouvons vraiment trop prématurée et qui risque d'enliser la gestion environnementale et de mêler tout le monde.

Le Président (M. Gauvin): merci, m. rober- ge. j'inviterais m. le ministre à échanger avec vous pour une période d'une quinzaine de minutes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans un premier temps, vous me permettrez de remercier l'Association minière du Québec, qui est devenue une habituée devant cette commission parlementaire. Il y a des visages que l'on reconnaît, les porte-parole; je veux également les remercier pour le temps qu'ils ont consacré à la rédaction du mémoire.

Vous terminez votre exposé en nous parlant d'améliorer ce qui fonctionne déjà bien, pour que ça fonctionne mieux. Moi, j'aimerais ça vous croire. Si l'ensemble de la population du Québec et les clients du ministère étaient satisfaits que ça fonctionne bien, moi, je ne serais pas assis ici présentement en train de discuter avec vous. C'est parce que je pars d'une autre prémisse que la vôtre que je pense que ça ne fonctionne pas bien. En tout cas, pas assez bien. On dispose, au gouvernement, de moyens de vérifier si le peuple est satisfait. En matière environnementale, on l'a fait. Il y a deux ans, il y a 70 % de la population qui était insatisfaite de la performance du ministère de l'Environnement. Je comprends que ça fasse l'affaire de l'Opposition, puis je comprends sa position également: c'est parfait, tant que c'est comme ça.

Depuis deux ans, on a changé quelques façons de fonctionner. Au dernier sondage d'opinion publique, en décembre, 48 % étaient encore insatisfaits. C'est encore trop pour un gouvernement qui vise à servir de façon efficace ses clientèles. Je comprends que vous avez un secteur d'activité qui est un peu pointu. Il est large, il est important, mais l'environnement, ça touche l'ensemble. Ça touche l'individu à partir de ses achats, finalement, du berceau à la tombe, dans toutes ses activités humaines. Au cours des dernières années, ce qu'on a réussi à faire avec

la structure actuelle en tentant d'en tirer le maximum, on a réussi à pallier aux urgences d'avant avant-hier, d'avant-hier, puis d'hier, puis, une journée de temps en temps, on se rend à l'urgence de la journée. Ce qui ne nous laisse pas beaucoup de temps pour ce que vous appelez - le défi auquel vous nous conviez, et vous avez raison de nous y convier - le développement durable, parce que tout l'appareil gouvernemental, à partir de ses bureaux régionaux jusqu'au bureau du sous-ministre - pour ne pas mentionner celui du ministre - est pris de façon quotidienne dans ce qu'on appelle les urgences.

Ce qu'on tente de faire, c'est faire un peu mieux. Moi, je regarde le bilan législatif et réglementaire des deux dernières années, puis je dis: On a bougé, mais on est encore en retard. Les deux dernières années, je ne vous rappellerai pas de mauvais souvenirs sur le plan législatif, mais la loi 65, pollueur-payeur; en 1990, la loi qui a créé RECYC. Sur le plan réglementaire, pas beaucoup de choses. On a modifié le contenu en soufre du mazout lourd de façon à respecter nos échéances dans la diminution des pluies acides. Et on l'a fait. En 1991, on a accéléré le tempo un peu sur le plan législatif. On a permis à la Société québécoise d'assainissement des eaux d'aller dans les plus petites municipalités au cours des trois prochaines années. En ce qui concerne les déchets dangereux, pour donner suite au rapport Charbonneau, on a passé une loi sur les matières dangereuses, de façon à pouvoir recycler davantage d'éléments. Et, dernièrement, on passé une loi sur la réduction des rejets industriels.

Sur le plan réglementaire, on a accéléré le tempo pour - encore hier et avant-hier - faire un règlement sur les carrières et les sablières. C'est important de fonctionner par résultats et non plus d'approuver tout le design du dépous-siéreur. Le règlement sur les neiges usées; il a fallu négocier avec les unions municipales. Le règlement sur les déchets solides pour permettre aux gens d'une région, aux gestionnaires d'un site d'enfouissement de refuser des déchets de l'extérieur de leur MRC. Encore une urgence. Le règlement sur l'entreposage des pneus hors d'usage. Ce n'est pas une question environnementale épouvantable, mais quand le feu prend, par exemple, ça devient une question environnementale urgente.

Dernièrement, on a prépublié des règlements qui sont en période de consultation, des règlements sur les pâtes et papiers. En volume, c'est le principal pollueur, comme industrie, au Québec. Le premier règlement sur les déchets biomédicaux. Je sais que ça ne vous touche pas directement, les mines, mais... Ça vous touche?

M. Roberge: On a une question d'une mine sur ça, justement!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): o.k. bon, bien, le 1er avril, ça entre en vigueur, puis on est en retard dans cette réglementation, si bien que l'incinérateur decom, à gatineau, incinérait 80 % des déchets biomédicaux qui venaient de l'extérieur du québec.

Une voix: Incinère.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): incinère actuellement. Puis, une des raisons, c'est qu'il n'y avait pas de règlement au Québec. À partir du moment où vous ne réglementez pas votre secteur, c'est certain que vous n'approvisionnez pas l'usine qui les détruit. Et, la semaine dernière, nous avons annoncé le règlement sur les attestations d'assainissement en milieu industriel.

Puis, malgré ça, on a encore l'impression d'être sur le problème d'avant-hier et on se dit: Comment on peut se dégager, au niveau du ministère, avec les ressources qu'on a, pour ne pas que ça coûte plus cher - on connaît l'état de l'économie - faire en sorte de se dégager pour avoir le temps de faire une meilleure réglementation, une meilleure planification, puis s'orienter vers le développement durable? En confiant à un organisme des tâches pas compliquées, mais qui méritent d'être bien faites, des tâches d'émission de certificats. La loi, la norme est là. Tu émets le certificat. Tu fais le suivi du certificat, tu le fais en région, puis tu t'assures que c'est appliqué. Ce n'est pas compliqué comme approche, ça vise à maximiser l'efficacité.

Vous le dites dans votre mémoire, puis vous le dites bien. Page 2. «Notre expérience avec l'environnement nous laisse clairement voir qu'il y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer à autre chose. On dénote des divergences entre ce que le régional préconise et ce que le central envisage.» Je n'ai pas le goût de nier ça, c'est un petit peu la perception que j'ai, comme ministre de l'Environnement. «D'autre part, même entre les régions, des différences sont notées quant au traitement des dossiers.» Il y a même des clients qui sont venus nous dire que, si vous êtes dans une région, ils exigent un certificat d'autorisation, puis, si vous êtes dans l'autre, c'est correct, ils n'en ont pas besoin. Pourtant, c'est le même ministère. «De plus, on constate un manque important de connaissances du milieu minier, autant dans les régions qu'au central, quoique nous sommes portés à croire que le central fait preuve de beaucoup plus d'éloignement de la réalité.» Puis c'est normal que le central soit plus éloigné d'une région minière.

Ce qu'on veut faire avec l'Office, c'est tenter - je ne dis pas qu'on a la recette magique - d'améliorer notre efficacité, de condamner la région à prendre sa décision; parce que, présentement, le central n'aime pas beaucoup ça quand c'est la région qui prend la décision, parce que ça lui enlève du pouvoir. Puis, à la région, ils se disent: On est peut-être aussi bien de ne

pas la prendre tout seuls, cette décision-là. On est aussi bien de se faire couvrir par le central. En pratique, la régionalisation qu'on a entreprise, elle va connaître du succès si on a un mur étanche et que les gens sont condamnés à prendre leurs responsabilités. Ils pourront s'y référer pour de l'expertise, s'ils le veulent, mais la décision ne leur sera pas imposée par le central. C'est à eux que reviendra cette responsabilité.

Dans le domaine minier, c'est sûr que les régions qui sont fortes dans le minier, on va leur envoyer des gens qui sont actuellement au central pour qu'ils s'adaptent à la région, qu'ils connaissent le milieu, le secteur, et qu'ils soient en relation avec l'industrie. Nous autres, on ne vise pas à pénaliser l'industrie qui veut collaborer. On vise à évoluer positivement vers le développement durable avec cette industrie-là. Mais, actuellement, avec la structure qu'on a et les moyens qu'on a, nous sommes rendus au bout de l'efficacité qu'on peut en tirer, puis les résultats ne sont pas satisfaisants pour la population, puis ça a bien l'air qu'il n'y a pas moyen d'aller chercher beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de personnel et de fric au cours des prochaines années.

J'ai fait mon plaidoyer. J'ai une question précise à vous adresser sur le financement. Vous mentionnez, à la page 1 du résumé de votre mémoire: «Du côté du financement d'un nouvel organisme, nous croyons que les finances de l'État ne sont pas dans une situation pour l'envisager à ce moment-ci et il ne devrait pas être envisagé de le faire payer par la clientèle qui doit déjà assumer un coût important en la matière. L'environnement, c'est une cause pour toute la société et non pour un seul groupe.» Nous venons de prépublier, la semaine dernière, notre règlement sur les attestations d'assainissement, qui prévoit un financement - Office ou pas Office - où on va tarifier nos actes administratifs et où on va charger tant pour la charge polluante qui a été émise dans le sol ou dans l'atmosphère. On a l'impression qu'on va à rencontre de ce que vous nous exposez. Vous n'êtes pas d'accord avec cette approche industrielle? Parce qu'on n'en avait pas d'autre, approche industrielle, soit dit en passant. C'est celle qu'on a retenue; c'est celle qui est appliquée dans plusieurs États américains, celle qui est appliquée, entre autres, dans d'autres provinces canadiennes, comme la Colombie-Britannique, de mémoire. Moi, j'aimerais vous entendre sur ce mode de financement.

M. Drouin: Je vais commencer par quelques commentaires généraux, M. le ministre, avant de passer la parole à celui qui est rendu beaucoup plus expert que moi dans le domaine, comme c'est là. J'aimerais peut-être relever votre première parole, quand vous avez dit qu'on vous disait que ça fonctionnait bien. Je crois qu'il faudrait lire comme il faut; il y a une virgule avant ce mot-là dans la phrase, ici. On dit que «le gouvernement devrait plutôt s'occuper de s'assurer que, ce qui existe actuellement, fonctionne bien et mieux avant de passer à une autre étape». Nous sommes d'accord avec votre proposition que ça ne fonctionne pas à merveille. (17 h 45)

Mais, tout de même - l'essentiel de notre mémoire - dans la première partie, avant de revenir à la question du PRRI, on vous dit de nous donner le temps, à l'industrie, de faire quelque chose avant de tout retourner. Par exemple, j'ai la copie de la loi refondue jusqu'au 20 juin 1991; quand on regarde à l'article 2, en bas de la page, le nombre de fois où la loi a été renouvelée depuis 10 ans, c'est 5 fois par ligne, et il y a 5 lignes. Alors, comment croyez-vous que le client a le temps de s'adapter et de faire quelque chose?

J'aimerais vous donner un exemple qui témoigne que, lorsqu'on a le temps de faire quelque chose, on réussit à faire quelque chose. La meilleure preuve que je pourrais vous donner, c'est la question de la directive 019 qu'on a dans les mines, qui régit les normes de comportement dans le domaine minier. Quand vous avez commencé à parler de cette directive-là - je crois que le Parti québécois était au pouvoir - c'était en 1977. Elle a été publiée pour la première fois en 1979 et, quand on regarde ce qui a été fait avec cette directive-là, quand on regarde nos coûts et qu'on regarde... Vous avez donné un deuxième «input» à cette directive-là vers 1986 ou 1987. Bien, l'impact que ça a eu dans le domaine minier, c'est qu'on a eu le temps de s'adapter. Quand vous regardez nos normes de comportement d'après le bilan environnemental qu'on a publié l'année passée, je crois que vous êtes en mesure de voir que la directive du ministre a eu le temps de travailler et a eu le temps de faire quelque chose.

Quand on regarde, maintenant, tout ce qui arrive, la multiplication des processus... La police verte, on n'a pas eu le temps de la connaître et on n'a pas envie de la connaître non plus, mais, de toute façon, elle ne fait que passer et ça a tout l'air qu'elle va trépasser instantanément. C'est important d'avoir le temps de réagir à un projet. Vous parlez du PRRI. On n'a pas encore réussi, je pense, à avoir 100 % de conformité dans les normes environnementales. Il y a des manques technologiques, là-dedans. Ce n'est pas de la mauvaise volonté. Il y a de la technologie qui manque et, quand la technologie ne manque pas, bien, c'est de l'argent qui manque pour réussir à passer au travers. Quand on revient, par exemple, de la dernière conférence des ministres des Mines qui a eu lieu à Halifax, au mois de septembre, quand on nous dit, à un moment donné, que, dans l'industrie canadienne, les fonds d'exploration sortent du pays, une des raisons qu'on donne - pas la seule - c'est les

tracasseries au point de vue des exigences environnementales, l'imprécision dans le domaine des exigences environnementales. Pas la qualité, mais, des fois, le manque de rationnel pour supporter les exigences que l'on a là-dedans. C'est des problèmes fatigants.

Vous parlez du PRRI. Ça me trouble parce que ça veut dire que... J'ai mis la main sur ce projet-là hier, l'avant-projet. Je n'ai pas eu le temps de dormir comme il faut dessus, mais on s'aperçoit qu'une compagnie peut respecter totalement toutes les normes et, malgré tout, avoir une tarification énorme pour vivre avec ça. En d'autres mots, vous dites que c'est une façon de préconiser le rejet zéro. On ne va payer rien quand ça va être un rejet zéro, mais on ne tient même pas compte des normes de qualité qui existent, par exemple, dans l'eau avec laquelle on s'approvisionne pour faire nos procédés. En d'autres mots, on va être pénalisés pour ce que la nature a mis dans l'eau dont on se sert. Il y a des rejets là-dedans. Il n'y a pas de norme de soustraction dans ce domaine-la. C'est fatigant. Moi, en tant que directeur général, je n'ai plus le temps de suivre tout ça. Je suis obligé d'avoir deux acolytes pour suivre tout ça et, finalement, je suis dépassé. C'est pour ça qu'à partir de ce moment-là je suis à la veille de me regarder les cheveux et de dire que peut-être je devrais laisser complètement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Drouin, je vous suis, mais, dans le domaine minier, la réglementation n'est pas tellement accablante, pour le moment. Vous avez parlé, avec raison, d'une directive.

M. Drouin: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est avec ça qu'on travaille.

M. Drouin: Oui.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne peut pas dire qu'au Québec on a accablé le secteur minier sur le plan environnemental.

M. Drouin: Mais je peux vous répondre là-dessus que, justement, on a essayé de se conformer quand même.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah oui!

M. Drouin: On a fait le travail quand même.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas entendre parler, là, que les capitaux...

M. Drouin: Ce n'est pas nécessaire d'être accablé pour réussir à bien travailler.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...ont fui le

Québec à cause de la réglementation dans le domaine minier.

M. Drouin: Non, non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a une directive.

M. Drouin: Je vous demande, M. le ministre, de bien préciser. C'était un des éléments.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. M. Drouin: Pas le seul.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais y a-t-il des gens qui ont moins que nous...

M. Drouin: Dans les normes?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui n'ont même pas de directives en environnement sur la planète?

M. Drouin: On a des normes plus exigeantes au Québec, oui, qu'au fédéral. Dans les mines, on a plus de normes au Québec qu'au fédéral, dans le cas du pH, par exemple.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.

Le Président (M. Gauvin): Je vous remercie, M. Drouin. C'était le temps qui était alloué à la formation ministérielle. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, au nom de l'Opposition, je salue M. Drouin et ses collègues et les félicite pour le sérieux et le caractère très approfondi, très poussé de leur présentation. Inutile de dire que nous partageons, à l'Opposition, presque à 100 % les inquiétudes que vous manifestez vis-à-vis de la création de l'Office.

Je relève quelques commentaires que vous faites. Par exemple, à la page 3, vous dites: «Le divorce prévu constituerait aussi, quant à nous, un obstacle supplémentaire pour le bon fonctionnement de l'application des lois actuelles. Il ne faut pas, à ce moment-ci, scinder les opérations du ministère puisque les difficultés s'accroîtront. Le central et le régional seraient coupés mutuellement d'une source d'information et de collaborateurs fort précieux à ce moment-ci». Et vous continuez comme ça. Un peu plus loin, vous dites: «Quant à nous, notre expérience avec l'environnement nous laisse [...] voir qu'il y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer à autre chose». Et, notamment, les divergences entre le régional et le central.

En conclusion, finalement, vous dites: «Nous croyons qu'il devrait y avoir une plus grande coordination [...] Le central et le régional de-

vraient venir ensemble sur les lieux afin d'avoir une même connaissance et compréhension des choses, mais ceci en évitant de retarder l'examen du dossier.» Ça, c'est très pertinent. Je pense que, probablement, ça ne se fait pas assez. Sous n'importe quel gouvernement, on n'encourage pas assez des visites, des présences en première ligne des gens qui sont au central vis-à-vis des régions, en région. Moi, j'ai toujours été un grand promoteur de la décentralisation et de la régionalisation. C'est pour ça que, nous, de l'Opposition, on dit, comme la grande majorité des groupes qui viennent ici depuis quelque temps, au ministre: Continuez d'accentuer la régionalisation, mais vous pouvez le faire à l'intérieur de la structure actuelle. Ce n'est pas nécessaire de créer une nouvelle structure. Ce n'est pas nécessaire d'ajouter des coûts et de la confusion, aussi.

Moi, j'aime bien votre commentaire, à la page 6. Vous dites qu'il ne faut pas oublier que, dans le contexte constitutionnel actuel, il y a déjà beaucoup d'incertitude. Vous êtes le premier groupe à le relever. C'est un aspect additionnel et il faut en tenir compte. C'est vrai que le ministère de l'Environnement fédéral va prendre de plus en plus de place au Québec. C'est cousu de fil blanc, on le voit de toutes sortes dé façons. M. Charest essaie de se créer un espace important dans le Québec, que ce soit sur la question de l'ozone... On va avoir des scores de l'ozone chaque semaine, dorénavant. Donc, on va pouvoir apprécier les largesses du gouvernement fédéral à chaque semaine. Toutes les manières sont bonnes pour créer une impression auprès des Québécois que le fédéral devient indispensable, y compris en environnement, alors que le fédéral, en environnement, au Québec, il a fait très peu à venir jusqu'à récemment. Et là, tout à coup, il veut se donner une grande visibilité.

Vous avez raison. Laissons l'aspect politique. Nous, on en est conscients, en tout cas, et j'espère que tout le monde en est conscient, de l'aspect propagande. Mais, pour le commun des mortels moins politisé, vous avez raison de soumettre que la création d'un office va ajouter encore de la confusion. Est-ce que c'est l'Office qui est responsable de telle situation dans mon patelin ou si c'est le ministère de Québec ou le ministère d'Ottawa? Je pense que c'est une contribution originale que vous faites sur ce point particulier.

Vous dites, à la page 7, que vous avez appris «qu'un groupe de travail oeuvre à organiser les relations entre le central et le régional.» Au moment où un groupe s'affaire à ça, vous avez raison de dire: Oups! Tout d'un coup que le ministre nous arrive avec un projet de loi pour créer une nouvelle structure? Mais je m'arrête ici pour demander au ministre de bien vouloir - je l'ai demandé une couple de fois, mais je le répète encore, je répète ma demande puisque vous m'en donnez l'occasion - déposer devant cette commission le document, l'étude, le travail auquel nos gens de l'Association minière font allusion. Il existe ou il n'existe pas? Je pose la question au ministre, M. le Président.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a un document sur le fonctionnement entre les régions et le central qui prévoit de façon théorique comment c'est supposé fonctionner.

M. Lazure: Mais je soumets au ministre, M. le Président, que ça serait intéressant pour les membres de la commission de l'aménagement et des équipements de pouvoir prendre connaissance de ce document-là.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qui m'intéressait davantage, c'était l'expérience pratique que vivait la clientèle, parce que le document, comme je l'ai indiqué, donne la théorie. Les clients vivent la pratique.

M. Lazure: Mais l'expérience pratique de la clientèle, vous l'avez entendue; groupe après groupe, ils vous disent: N'allez pas dans cette direction-là, vous faites une erreur. Le message est très clair venant du groupe des mines, comme du groupe de l'aluminium, du groupe des pâtes et papiers ou du groupe forestier. Tous les groupes, pratiquement, disent au ministre: N'allez pas dans cette direction-là. Vous dites clairement qu'«il n'y aurait pas à s'inquiéter de renoncer à créer l'Office. Il s'agirait plutôt d'agir de façon à avancer avec ce qui existe plutôt que de créer une plus grande scission et de générer une duplicité sclérosante.» C'est bien dit.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes médecin?

M. Lazure: Mais le ministre revient tout le temps sur la thèse qu'en créant l'Office il va donner des pouvoirs de décision finale aux régions. C'est sa grande thèse. Puis, il fait valoir que, là, il y a de la confusion, sinon des contradictions d'une région à une autre, d'une part, mais aussi entre les régions et le central. Et là il dit: Ça va être clair; avec l'Office, les régions vont avoir la décision finale. Mais, M. le Président, je soumets encore une fois - et je ne sais pas pourquoi le ministre ne comprend pas ça; tout le monde a l'air de le comprendre - que le ministre peut, lui, avec ses hauts fonctionnaires, décider que, dorénavant, les régions vont avoir le mot final dans tel ou tel secteur d'activité. Il peut très bien le faire. C'est ça qu'on appelle du leadership politique, M. le ministre, de prendre ses responsabilités et de trancher. Ce n'est pas la création d'une nouvelle structure qui va venir prendre les décisions à votre place. J'espère que ce n'est pas un des buts que vous recherchez en créant une nouvelle structure. Mais il n'en tient qu'à vous de décider si, oui ou non, vous voulez

que la région ait le mot final dans telle ou telle situation.

Sur l'ensemble du mémoire - c'est pour ça que je n'ai pas tellement de questions à vous poser - nous sommes d'accord. L'Opposition est d'accord avec votre mémoire.

M. Roberge: II y a des gens qui n'y sont pas; je peux compléter.

M. Lazure: Pardon? Oui, allez-y.

M. Roberge: Quand on dit que le central et le régional ont besoin de générer une cristallisation de l'environnement ou du concept, il y a des cas concrets; par exemple, il y a des règlements conçus au central, mais qui ne tiennent pas compte de la réalité. On peut peut-être passer même tout de suite à... Les pneus, par exemple; un membre a fait faire une évaluation pour savoir combien ça va lui coûter. Ça va lui coûter 250 000 $ pour faire l'enclos demandé. Pour les BPC, il a fait deux sites; c'est des conteneurs marins sur des blocs de béton; chacun a coûté 1 000 000 $. Dans son cas, huit pneus seulement vont rencontrer la norme; c'est des gros pneus. Alors, on voit bien que le central, qui a conçu les normes, n'a pas pensé à ça.

Dans le domaine des attestations d'assainissement, par exemple, au ministère, on ne s'est pas inquiété de savoir si les laboratoires sont en nombre suffisant au Québec pour répondre à toutes les analyses demandées, et quel est le coût de ces analyses-là. Ensuite, est-ce que les équipements sont existants pour faire les analyses? Mes membres me disent qu'il y a des analyses qui sont demandées pour lesquelles il n'y a aucun laboratoire équipé pour réaliser ça au Canada. Ensuite, les attestations d'assainissement, on a l'impression que ce ne sera pas très cher, sauf que, pour demander l'attestation d'assainissement, il va falloir faire une carac-térisation. Il va falloir faire une foule d'analyses et d'études, et une analyse de caractérisation coûte entre 140 000 $ et 200 000 $ pour chaque entreprise. C'est cette vision-là, ce manque d'information sur place dont le central manque. Et il ne se rend pas compte qu'il y a des choses qui seront inabordables à cause d'éléments. L'attestation d'assainissement, tous les rapports...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous me le permettez, ce n'est pas simplement le central, à ce moment-là, si je prends pour acquis que ce que vous me dites est exact. Dans le cas des règlements d'attestation d'assainissement, au ministère, on a pris chacun des secteurs d'activité économique, avec le nombre assez précis d'usines ou d'opérations, on a fait les coûts; on a tenu compte, on pense, chez nous, de l'ensemble des coûts, mais on est toujours prudents. On les envoie au comité interministériel du développement économique et au comité interministériel du dé- veloppement régional, et là les autres ministères sectoriels comme chez vous, Énergie et Ressources, confrontent nos chiffres et, à partir du moment où tout le monde a confronté les chiffres, là, on les accepte ou on les rejette.

M. Roberge: On serait intéressés à les voir, les chiffres, parce que je ne crois pas qu'ils correspondent à la réalité. On pense qu'améliorer l'efficacité de la gestion environnementale, ce serait d'abord... Prenez les analyses d'effluents qu'on envoie depuis nombre d'années. Et, en passant, je vous souligne qu'on a demandé à nos membres, qu'ils soient légalement obligés de le faire ou pas légalement obligés de le faire, faites-le donc, tout le monde. Ils sont tous embarqués. Alors, ils ont fait ça, mais aucune analyse de ces analyses n'a été faite. Aucune étude pour décrire la problématique environnementale du secteur minier n'a été faite à partir de ça.

Nous, à l'Association, on l'a fait, par exemple, et, avec le bilan, ça nous a permis... C'est un document qui explique sommairement ce qu'il en est. Mais on pense que le ministère devrait peut-être examiner, avec les données qu'il a, les problématiques typiques, voir qu'est-ce qu'il y a à améliorer et l'améliorer. En deux ans, les budgets environnementaux dans les mines sont passés de 11 000 000 $ à 55 000 000 $. La conformité environnementale, ou ce que j'appelle plutôt la qualité des effluents par rapport aux normes, s'est améliorée de sorte que seulement 5 % des échantillons, qui sont par milliers les échantillons, dépassent la norme et l'amplitude a diminué de beaucoup. On sait exactement ce qu'est la problématique, on sait les sujets de recherche qu'il faut approfondir, on sait les difficultés qu'il nous reste à aplanir, mais, au moins, on va avancer et on aimerait embarquer le ministère dans ça.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Me Roberge, regardez la disproportion des moyens. Vous nous dites: Le secteur minier a mis 55 000 000 $.

M. Roberge: En 1990. C'est 65 000 000 $ maintenant.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, au ministère de l'Environnement, je gère l'argent qui m'est voté par l'Assemblée nationale. C'était un maximum, cette année-là, de peut-être 130 000 000 $, 135 000 000 $, pour l'ensemble des secteurs. Ça fait que, oui, on a besoin de vous autres. Vous pouvez faire davantage. 55 000 000 $ pour un secteur pointu alors que pour l'ensemble on n'a pas 150 000 000 $.

M. Roberge: Ça démontre que le ministère a un effet de levier important.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gauvin): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Juste quelques commentaires. Je veux réagir à ce que-Moi, j'apprends qu'on vous demande beaucoup d'analyses. Même si ce n'est pas légalement exigé, vos gens s'y sont plies. Mais il n'y a rien de plus frustrant, M. le Président, pour des entreprises, que de faire des choses aussi futiles que d'envoyer des analyses en sachant qu'elles ne seront même pas prises en considération, qu'elles ne seront pas étudiées. C'est un peu comme les manifestes.

M. Roberge: Elles ne sont pas comprises, non plus.

M. Lazure: C'est ça. En plus! Mais ça rappelle les manifestes. La commission Charbonneau a rendu publique cette situation honteuse où des caisses complètes de manifestes sur le transport de matières dangereuses étaient accumulées au ministère et personne ne les étudiait. Le ministre a trouvé une solution astucieuse. Il a dit: Dorénavant, il n'y en aura plus d'exigé, de manifestes. Il a réglé le problème comme ça, mais je pense que ça crée un climat, justement, où les gens sont frustrés vis-à-vis des demandes du ministère. Finalement, c'est une belle illustration de votre propos central. Votre propos central, avec lequel l'Opposition concourt à 100 %, c'est de dire au ministre: Écoutez, il y a un tas de choses que vous pouvez faire avec votre instrument actuel, avec votre contenant actuel, à l'intérieur de ce contenant-là. De grâce, faites-les donc plutôt que de faire perdre le temps de vos 1100 ou 2000 fonctionnaires à préparer un office qui, nous, on l'espère, en tout cas, ne verra pas le jour. Merci.

Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le député de La Prairie. Je remercie l'Association minière du Québec pour sa présentation. La commission de l'aménagement et des équipements va ajourner ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 4)

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