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(Neuf heures quarante-cinq minutes)
Le Président (M. Gauvin): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je déclare la séance de la commission de
l'aménagement et des équipements ouverte. Je reconnais le quorum.
Le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques et la
consultation générale dans le cadre de l'étude du projet
de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec
et modifiant diverses dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des
remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, Mme Juneau
(Johnson) est remplacée par M. Bélanger (Anjou).
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le secrétaire.
Une minute d'attention, s'il vous plaît. L'agenda: aujourd'hui, il
était prévu qu'à 9 h 30 on reçoive le groupe sani
mobile inc; à 10 h 30, l'union québécoise pour la
conservation de la nature; à 11 h 30, la confédération des
syndicats nationaux. on suspend nos travaux à midi trente pour reprendre
à 15 h 30 avec le barreau du québec; à 16 h 30,
l'association de l'industrie de l'aluminium du québec; à 17 h 30,
l'association minière du québec.
J'inviterais donc, à ce moment-ci, le groupe Sani Mobile inc.
à prendre place eh avant, s'il vous plaît,
représenté par M. Clément Boucher, vice-président
aux finances, et M. Louis Cos-sette, vice-président à
l'environnement. J'in-vfterais le chef de groupe à nous présenter
ses collaborateurs ou celui qui me manque comme nom.
Groupe Sani Mobile inc.
M. Boucher (Clément): D'accord, merci. Moi, je veux me
présenter: Clément Boucher, vice-président aux finances du
groupe Sani Mobile. J'aimerais maintenant vous présenter les autres
représentants du groupe Sani Mobile: à ma droite, Louis Cossette,
vice-président à l'environnement, et, à mon extrême
droite, Paul-André Proulx, directeur du développement et de la
technologie du groupe Sani Mobile.
Le Président (M. Gauvin): M. Boucher, il y a 20 minutes
qui sont prévues pour votre présentation. Vous pouvez prendre
tout votre temps, mais vous n'êtes pas tenu de tout le prendre. Et 11 y a
20 minutes à chacun des groupes parlementaires. donc, je vous invite
à nous faire votre présentation.
M. Boucher: Maintenant, pour la présenta- tion, ça
va être fait par M. Louis Cossette, de l'environnement.
Le Président (M. Gauvin): M. Cossette.
M. Cossette (Louis): D'accord. Madame, messieurs, le groupe Sani
Mobile tient à remercier la commission permanente de
l'aménagement et des équipements d'avoir bien voulu accepter
d'entendre ses représentations sur le projet de loi 412. Avant de vous
faire part des commentaires que nous désirons faire concernant le projet
de loi 412, Loi sur l'Office de protection de l'environnement du Québec,
permettez-nous de vous présenter le groupe Sani Mobile.
Le groupe Sani Mobile oeuvre dans le domaine du nettoyage industriel, de
la gestion des substances dangereuses, des interventions d'urgence
environnementale et d'inspection et de nettoyage des réseaux
d'égout. L'entreprise fut fondée à Lévis en 1965.
Pendant les 20 premières années de son existence, elle s'est
concentrée dans le domaine municipal, dans la grande région de
Québec. Aujourd'hui, de par ses 16 filiales, le groupe Sani Mobile a
place d'affaires dans une vingtaine de villes réparties dans toutes les
régions administratives du Québec.
Le groupe Sani Mobile est inscrit à la Bourse de Montréal
depuis 1988, il emploie plus de 350 personnes et a une flotte de 325
véhicules. Son chiffre d'affaires annuel est d'environ 35 000 000 $. De
par la nature de ses activités, le groupe Sani Mobile est en relation
constante avec le ministère de l'Environnement. D'une part, presque
toutes ses opérations nécessitent une autorisation du MENVIQ et,
d'autre part, les activités d'intervention d'urgence environnementale ou
de restauration de sites que le groupe fait pour des tiers sont pour la plupart
supervisées par le MENVIQ.
Office de protection de l'environnement. De vouloir dissocier la partie
du ministère qui élabore les lois, règlements, directives
et politiques de la partie qui doit les mettre en application est a priori une
bonne chose. Là où on peut s'interroger, c'est sur le moment et
les moyens choisis.
Premièrement, question financière. La création d'un
office entièrement indépendant du ministère, quoique
relevant directement du ministère de l'Environnement, impliquera une
augmentation de postes à caractère administratif puisque,
dissocié du ministère, l'Office ne pourra
bénéficier des services de la Direction de la
comptabilité, de la Direction des ressources humaines, et même des
services juridiques du ministère. De plus, dans l'année de son
instauration, il y aura des coûts inhérents à sa
création.
II n'y a qu'à penser à: papeterie, installation de son
siège social, identification visuelle, etc. Or, dans une période
d'austérité économique où le gouvernement doit
réduire ses dépenses, il serait étonnant que de nouveaux
crédits soient octroyés au ministère de l'Environnement si
l'ensemble de ses responsabilités demeure inchangé. Il risque
donc que ce soit des postes directement liés à la mission
actuelle du ministère qui soient sacrifiés à la
création de l'Office.
La mise en place de l'Office devrait être conditionnelle à
l'injection de nouveaux crédits pour son implantation et son
administration. Le ministère, amputé de ses
responsabilités dévolues à l'Office, ne devrait perdre que
les crédits qui étaient consacrés à
l'administration et aux opérations des responsabilités
dévolues à l'Office.
Autonomie de l'Office. Le projet de loi créant l'Office de
protection de l'environnement prévoit que l'Office relèvera
directement du ministre de l'Environnement. Toutefois, plusieurs points
laissent présager qu'il ne sera pas à l'abri d'ingérences
politiques. À l'article 24 du projet de loi, il est stipulé que
l'Office sera lié à des directives émises par le ministre
portant sur ses objectifs et ses orientations. Aux articles 21 et 41, il est
fait mention que, «lorsque l'intérêt public l'exige»,
le gouvernement peut se substituer au président de l'Office quant au
pouvoir d'ordonnance et soustraire de la compétence de l'Office une
demande de certificat d'autorisation. Quant à eux, les articles 80
à 84 traitent d'une série d'éléments qui devront
relever de l'Office, avec la restriction suivante: «sauf dans le cas
où le gouvernement en décide autrement». De plus, l'article
31 précise que l'autorisation de tout projet connexe à un projet
soumis à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts
sur l'environnement sera de la responsabilité du ministre et non de
l'Office.
Les mécanismes de révision et d'appel. Dans la forme
actuelle du projet de loi, les mécanismes de révision et d'appel
ne portent que sur les actes posés par l'Office concernant
l'émission de certificats ou de permis. Il n'est prévu aucun
forum où pourraient être débattues des questions portant
à interprétation.
La législation en matière d'environnement est
récente et en évolution constante. Il y a donc peu de
jurisprudences sur lesquelles pourront s'appuyer les employés de
l'Office lorsque la législation peut laisser place à
interprétation. La création d'un forum indépendant auquel
pourrait être soumis ce genre de question serait souhaitable. Il
permettrait, entre autres, de faire le pont entre l'organisme qui fait les lois
et celui qui les applique.
La structure de fonctionnement de l'Office devrait, du moins dans ses
grandes lignes, être définie dans sa loi constituante. Ce souhait
vise tout particulièrement les moyens que prendra l'Office pour assurer
une certaine uniformité dans l'étude des dossiers qui sont de sa
juridic- tion.
Dans la mécanique actuelle du ministère, il existe peu
d'outils - guides, directives, etc. -qui permettent d'assurer que les lois
administrées par le ministère de l'Environnement le soient de
façon semblable dans les 12 directions générales de son
ministère, et ce, même en tenant compte des particularités
régionales.
En conclusion, le groupe Sani Mobile voit d'un bon oeil la
création d'un Office de protection de l'environnement, mais émet
les réserves suivantes: premièrement, l'Office devrait être
créé seulement si le gouvernement garantit qu'aucun crédit
dévolu présentement à la mision du ministère de
l'Environnement ne sera détourné vers des fonctions
administratives; deuxièmement, le projet de loi devrait être
modifié afin de garantir son autonomie face à
d'éventuelles ingérences politiques; troisièmement, qu'un
forum indépendant soit créé. Son mandat serait
d'interpréter toute question laissant place à
interprétation et de pouvoir recommander au législateur de
modifier un texte de loi désuet ou dont l'application est impossible.
Toute personne ou entreprise pourrait s'adresser à ce forum. De plus, il
pourrait agir comme interface entre le ministère et l'Office dans les
questions relevant de ses compétences. Merci.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je tiens à remercier le
groupe Sani Mobile de sa présentation. Vous êtes des acteurs sur
le terrain de façon quotidienne. L'objectif visé par la
démarche est de créer un Office en permettant au ministère
de se concentrer sur son travail de législateur, de planificateur et de
rendre l'Office plus performant pour des clients comme vous autres et comme le
reste de la population.
Vous avez mentionné que vous êtes présents dans
l'ensemble des régions du Québec ou à peu près, 16
filiales. Vous faites déjà affaire avec le ministère, au
central. Vous faites déjà affaire avec nos bureaux
régionaux, dans les régions du Québec. Vous n'avez pas
traité de la question de l'uniformité des décisions
à travers les différents bureaux régionaux et j'aimerais
vous entendre sur ce sujet.
M. Cossette: Effectivement, on n'en a pas parlé. Je pense
que, pour nous, c'est le problème numéro un, au niveau de nos
activités courantes, à savoir qu'on a 12 régions et 12
façons d'aborder l'environnement différentes. On a peu de
directives communes sur comment appliquer la loi. La loi est quand même
assez vague et vous avez des directions régionales qui pourraient
émettre un certificat d'autorisation. Prenons un exemple: si on prend le
cas concret où on a un équipement qu'on retrouve dans plusieurs
régions, vous avez une région qui va vous donner un certificat
d'autorisation dans les 15 jours, 3
semaines suivantes et une autre région qui va vous refuser
l'émission du certificat d'autorisation, et vous avez la gamme
complète entre les deux. Donc, il est très difficile actuellement
de faire affaire avec les opérations régionales du
ministère.
Le seul passage qu'on met, c'est que l'Office ne prévoit pas sa
structure de fonctionnement dans sa loi constituante et on n'est pas
nécessairement prêts à lui donner le bon Dieu sans
confession, pour le moment, comme ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur la question administrative et
des coûts, je tiens à vous rassurer. C'est un projet de loi qui a
été véhiculé à travers l'appareil
gouvernemental et les gens au Conseil du trésor, dont c'est la
tâche et la responsabilité, s'assurent qu'en créant un
nouvel organisme, si le ministre prétend que c'est à coût
nul, les tâches de comptabilité juridique, celles que vous avez
mentionnées, sont effectivement à coût nul comme tel. Sur
le plan des arrangements, c'est le Conseil du trésor avec
l'administration du ministère qui font ces arrangements-là, mais
il n'y a pas de taxe additionnelle ou de coût additionnel sur le plan
administratif une fois qu'on a franchi l'étape du Conseil du
trésor.
M. Cossette: Notre inquiétude n'est pas
nécessairement d'un coût additionnel pour nous, comme entreprise
ou comme payeurs de taxes. Par contre, ce qu'on ne voudrait pas, c'est que ce
soit des postes qui sont dévolus actuellement à une mission
environnementale, qui soient coupés pour permettre de créer des
postes administratifs qui doivent être dédoublés.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Essentiellement, vous prenez le
réseau des bureaux régionaux, qui comptent quelque 600
fonctionnaires à travers les 12 régions au Québec, et vous
renforcez vos régions en prenant des gens à la centrale et en les
envoyant dans les régions, mais pas des gens qui font déjà
de la législation. À titre d'exemple, le contentieux. Les gens
qui sont des légistes ne s'en vont pas dans les bureaux régionaux
- je ne sais pas s'il y avait des inquiétudes - ils demeurent a
Québec. Mais les avocats plaideurs peuvent être dirigés,
par exemple, vers les régions.
Sur le plan de la gestion administrative, présentement, nous
gérons 1800 personnes-année au ministère. Il y a des
équipes administratives. Il est certain que certaines personnes à
l'administration vont ère dévolues vers l'Office de façon
à devenir des agents de l'administration comme tels de l'Office, mais on
ne prend aucune mission qui est accomplie au ministère sur le plan
environnemental comme tel pour substantiellement la modifier. Le programme qui
va être le plus affecté, qui est au central présentement,
est le programme de réduction des rejets indus- triels, qui est en phase
de démarrage. Et c'est le temps de l'affecter. Ce n'est pas une fois
qu'il sera démarré, une fois que les attestations
d'assainissement seront émises qu'on pourra prendre ce
programme-là et le régionaliser par la suite. Si on commence
rapidement en le régionalisant, si l'entreprise va chercher son
certificat dans sa région, avec une autorité d'émission
à l'Office, elle va arrêter de se promener entre la région
et le central, puis entre le central et la région, etc. C'est ce qu'on
recherche.
Deuxièmement, en permettant des pouvoirs de révision des
décisions au niveau de l'Office, on vise à créer une
uniformité des décisions à travers toutes les
régions pour ne pas que vous viviez ce que vous avez
mentionné.
Sur le plan de l'autonomie, nous prenons note de vos remarques. Elles
sont répétées par d'autres groupes également et
elles nous préoccupent. Nous allons probablement proposer des
modifications à cet aspect du projet de loi.
Forum indépendant. Moi, j'aimerais vous entendre davantage.
Ça semble vous préoccuper.
M. Cossette: Énormément.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Cossette: Dans le sens que votre mécanisme de
révision est spécifique à des demandes d'autorisation. Si
vous avez des questions d'ordre... Encore là, je vais prendre un exemple
concret. On a un dossier qu'on discute avec le ministère depuis environ
trois ans sur la question: Est-ce que de l'eau contaminée est un
déchet dangereux, oui ou non? On n'a pas de... Ça, c'est dans le
mécanisme - je ne vise personne en particulier - c'est la structure qui
est ainsi faite. Si vous n'avez pas, dans la structure, un lieu commun
où on pourra travailler ensemble pour discuter du problème en
question, pour essayer d'avoir des définitions claires... Dans ce
cas-là, ce n'est pas une demande de certificat d'autorisation; c'est une
demande de clarification: Est-ce que tel type d'activité rentre dans tel
cadre ou dans tel autre cadre? C'est surtout ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça, là-dessus, je
peux vous répondre. Présentement, ça fait partie de la
problématique.
M. Cossette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La personne en région,
parfois, a l'autorité d'émettre le certificat d'autorisation,
mais, compte tenu que la question est complexe, réfère au
central, au niveau du ministère, à la même personne qui,
généralement, participe à la définition de la
problématique.
M. Cossette: Toutefois, elle n'est pas tenue de respecter ce que
la personne au central a
décidé. Et c'est là des fois que ça
accroche.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et voilà! Quotidiennement,
parce que la personne ne veut pas prendre la chance en région, puis que
la personne au central ne veut pas lui imposer son autorité, là,
vous subissez des délais qui font en sorte que la décision ne se
prend pas et, dans l'incertitude, il n'y a rien qui avance.
Ce que l'on propose comme mode de fonctionnement avec l'Office, c'est
que l'autorité, pour prendre la décision finale, va demeurer, va
être consacrée au niveau de la région par la
création de l'Office comme telle. Mais nous conservons à
Québec, au bureau central, des gens dont l'expertise va être de
planifier la réglementation, de mieux la définir. (10 heures)
Présentement, nous sommes en révision sur les
déchets dangereux. Nous avons fait adopter par l'Assemblée
nationale la loi sur les matières dangereuses et nous sommes à la
veille d'une prépublication d'un nouveau règlement sur les
matières dangereuses. Ces équipes-là vont demeurer. Mais,
présentement, on a de la difficulté à faire en sorte que
la région prenne la décision parce qu'elle veut s'appuyer sur
Québec et Québec ne veut pas délaisser son autorité
ou son pouvoir, si je peux dire, en fonction de la région. Et, si on ne
crée pas ce mur par la création d'un organisme qui est l'Office,
nous allons perpétuer cette indécision entre la région...
Puis, tout le monde a semblé d'accord avec le processus de
régionalisation qui a été entrepris il y a un an et demi
au ministère. Mais, si on veut que ça fonctionne, la
régionalisation, il faut faire en sorte que la personne, elle soit
condamnée à prendre la décision en région. Et, si
on a un office, elle va être condamnée à décider en
région et elle ne pourra pas dire que c'est Québec qui
décide à sa place.
M. Cossette: O.K. Mais, il resterait quand même important
d'avoir un lieu central à l'Office même. Je ne voudrais pas qu'on
recommence à jouer, comme on l'a déjà vu, le central du
régional, comme quand on a déjà eu des comités de
coordination des opérations régionales, où on aurait,
comment pourrais-je dire... Si c'est la région qui prend la
décision ultime, on ne peut pas s'assurer... Les gens sont tous des
êtres humains, donc, chaque chargé de projet va penser
différemment. Si c'est la région qui prend une décision,
comment me garantir que la décision est équitable dans les 12
régions?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah! C'est que vous avez un droit
de révision, là.
M. Cossette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): La façon
d'uniformiser...
M. Cossette: Mais ça, ça va si vous avez une
demande... C'est toujours en fonction de demandes de certificat d'autorisation.
C'est comme si l'Office ne faisait que l'émission de certificats
d'autorisation. Il faudrait élargir le mandat à toutes les
décisions que l'Office peut rendre, pas juste à celle de
l'émission de certificats d'autorisation. Si vous me dites, demain
matin, que je n'ai plus le droit de faire telle activité, ce n'est pas
une demande de certificat d'autorisation.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Ça va. Si vous me
dites demain matin... Donnez-moi un exemple pratique.
M. Cossette: O.K. Je reviens à mon eau, ça va
être encore plus simple.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va, c'est aussi bon.
M. Cossette: Demain matin, vous me dites: De l'eau
contaminée lors d'un procédé industriel, c'est un
déchet dangereux. Ça, c'est dans une région qu'on me dit
ça. Le lendemain matin, l'autre région me dit: Non,
d'après moi, de l'eau de lavage, ce n'est pas un déchet
dangereux. Mais, là, je fais quoi avec ça? J'ai deux
régions qui agissent différemment.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais vous me demandez
ça dans le cadre d'une...
M. Cossette: Si je marche par le processus légal, tout le
processus, on a des délais qui sont quand même longs. On a des
entreprises qui, du jour au lendemain, devront cesser leurs opérations,
soit dans le traitement de déchets dangereux ou le nettoyage industriel
parce qu'on nous dit: Non, là, ça ne marche pas. Il faudrait que
vous alliez devant les tribunaux. Allez faire la jurisprudence pour nous
autres, pour nous dire si, oui ou non, on a raison.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, mais, ça, on ne pourra
jamais l'empêcher. Parfois, ça sert l'entreprise de faire
ça, puis parfois ça sert le ministère, mais, sur le plan
de la définition comme telle, je conçois que le règlement
qui existe encore sur les déchets dangereux est un règlement qui
est vicié. On a eu tout le monde qui...
M. Cossette: Oui, O.K. J'ai peut-être pris un mauvaise
exemple en parlant de déchets dangereux. On peut en prendre un
autre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, c'est un exemple avec lequel
vous êtes confrontés, puis on ne prétendra pas que c'est un
bon règlement. Il nous empêche de faire des choses au
Québec présentement et c'est pourquoi
l'Assemblée nationale a décidé de ne plus parler
dé «déchets dangereux», mais de
«matières dangereuses» de façon à permettre
à l'entreprise de recycler les affaires qu'on vous interdisait avant;
c'était nocif pour l'environnement, notre règlement sur les
déchets dangereux comme tels. Mais, à partir du moment où
on arrive avec une nouvelle réglementation, il est certain, et
ça, on ne pourra pas l'éviter, quelle que soit la formule, que,
dans un cas où on va prendre quelqu'un en défaut ou on va penser
le prendre en défaut, il va aller devant les tribunaux.
Moi, je pense à pâte et papier. On a perdu un procès
dans la Mauricie qu'on pensait avoir bien monté parce qu'une compagnie
astucieuse a prétendu que ce n'était pas de la pâte, puis
du papier, que c'était du carton qu'elle fabriquait, etc. Les
procédés dans les plastiques sont encore plus évolutifs
et, dans les autres éléments, on va toujours avoir ce type de
problématique là. Le ministre n'a pas l'intention de
prétendre que l'Office va éliminer complètement ce genre
de problématique là. Les tribunaux vont conserver un rôle.
On tente de l'amenuiser; on tente de clarifier les choses pour qu'il y en ait
moins qui aillent devant les tribunaux, mais, au total, il va demeurer des
problèmes.
M. Cossette: Ça va.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur le financement, vous parlez
des moyens. Vous m'inquiétez un peu parce que vous êtes des gens
généralement bien renseignés. À la première
page de votre mémoire, vous stipulez qu'«il serait étonnant
que de nouveaux crédits soient octroyés au ministre de
l'Environnement si l'ensemble de ses responsabilités demeure
inchangé». Moi, je vous soumettrai bien respectueusement que,
même si les responsabilités demeuraient inchangées, le
ministère de l'Environnement a absolument besoin de nouveaux
crédits de façon à s'assurer de l'exécution des
mandats actuels. Vous êtes des intervenants importants du
côté économique et environnemental, qu'est-ce qui vous
inspire une telle déclaration?
M. Cossette: Disons qu'effectivement vous avez probablement
besoin de ces budgets-là. Quand je dis que nous sommes
étonnés, c'est qu'entre la volonté du ministère de
l'Environnement ou de son ministre de bien agir et la volonté
générale d'un gouvernement il y a peut-être un
écart, sans aller plus loin.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement sur le plan des
budgets, il y a deux ans, le ministre des Finances a annoncé, pour les
cinq prochaines années, 50 000 000 $ en recherche et
développement à l'Environnement.
M. Cossette: Et combien d'argent avez-vous pu octroyer cette
année en recherche et déve- loppement?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On commence à peine. Et je
suis content que vous le souligniez. Les grandes entreprises sont
équipées généralement pour faire affaire avec la
portion de notre programme de recherche et développement qui s'adresse
aux projets majeurs.
M. Cossette: D'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Et qui est arbitré dans le
cadre du Fonds de développement technologique. Nous avons manqué
de demandes, si vous me demandez mon opinion, au niveau de la PME.
M. Cossette: Par contre, nous avons...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau de la PME
québécoise, le programme n'est pas suffisamment connu. Je profite
de l'occasion pour vous souligner son existence. Parlez-en. Il n'y a rien que
je déteste plus, comme ministre de l'Environnement, que de ne pas
dépenser les crédits qui sont mis à notre disposition par
les membres de l'Assemblée nationale.
M. Cossette: Je vous réfère à M. Proulx
là-dessus.
M. Proulx (Paul-André): Lorsque vous référez
au Fonds de développement technologique qui existait avant...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais il y a un nouveau volet
environnemental.
M. Proulx: Oui, oui, je sais. Vous parlez du nouveau volet
environnemental dont on peut toujours dire qu'il vient d'arriver et puis qu'on
peut attendre un petit peu pour en voir les effets. Il est nettement mieux que
l'ancien volet; de toute façon, pour n'importe quel expert qui
travaillait dans le domaine, l'ancien volet du programme de
développement technologique ne s'adressait pas, mais pas du tout, aux
PME. Il s'adressait uniquement à la grande entreprise et à ceux
qui avaient les moyens assez puissants pour être capables de mettre les
sommes d'argent requises. Le nouveau volet s'adresse à des projets plus
petits, donc plus accessibles. Peut-être que des entreprises comme Sani
Mobile... On commence présentement à y penser, mais ça
demeure encore de très gros dossiers a préparer.
Par rapport à la problématique de l'émission des
permis et puis de l'Office, ce que je peux vous dire, moi, en tant que
directeur de l'environnement, c'est que ce qui nous agace le plus
présentement, c'est que, même au niveau du développement
technologique, ce qui nous retarde actuellement, c'est l'émission des
permis. On a, dans certains cas, des permis qui retardent
depuis plus d'un an. On a, dans certains autres cas, des unités
qui ont été développées, des sommes d'argent
importantes qui ont été investies, et ces unités-là
doivent rester inopérationnelles dans la cour, parce que les permis ne
sont pas émis, parce que c'est toujours à l'étude.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vais rejoindre peut-être
une question qu'on a posée hier à d'autres intervenants. Il y a
deux écoles de pensée au ministère de l'Environnement
quant à l'approbation des plans et devis ou des normes qu'on a à
édicter. Une école de pensée veut que le ministère
de l'Environnement fixe par réglementation ses normes de rejet dans
l'eau, dans l'air et dans le sol, et laisse le secteur privé, avec ses
ingénieurs, libre de concevoir la technologie pour rencontrer les
objectifs environnementaux qui sont fixés par le ministère.
L'autre école de pensée veut que le ministère approuve le
processus au complet par ses ingénieurs, à l'intérieur du
ministère. Il y a déjà d'autres groupes qui se sont
prononcés. L'industrie forestière, hier soir, si ma
mémoire est fidèle. Quelle école de pensée ou
quelle approche privilégiez-vous?
M. Proulx: Je vous dirais vis-à-vis de ça que c'est
une question qui contient des pièges. Quelle que soit l'école de
pensée, pour nous, il y a des pièges évidents.
Écoutez, si vous vous fiez sur les normes et puis si les normes que vous
adoptez sont basées, par exemple, sur un pays comme les Pays-Bas qui ont
adopté les normes internationales parmi les plus sévères
au monde et qui - on peut en discuter longtemps - ne sont peut-être pas
appropriées dans certains cas au Québec... Quand on parle de
normes qui sont en deçà des limites de mesure de nos instruments
de laboratoire, on ne peut pas développper de procédés qui
vont rencontrer de telles normes. Alors, on va toujours se frapper à la
problématique de dire: Écoutez, vous êtes avec des normes
qui sont exagérément basses par rapport à ce qu'on est
capable techniquement de faire. On se frappe à ce moment-là
à un problème, si on prend l'approche «normes».
Si on prend l'approche «processus», le problème,
là, finalement, on le vit un peu. Quand on fait affaire avec vos
ingénieurs, spécialistes du central du ministère, bon, Ils
sont assez spécialisés dans leur domaine pour comprendre le
processus dont on parle. Ils ont une vue assez large pour être capables
de nous suivre lors du développement technologique. Quand on parle avec
les gens des régions, qui ont à traiter une grande
quantité de dossiers que j'appellerais standards ou réguliers,
qui n'ont pas le temps d'approfondir des processus de technologie, ces
gens-là ne nous suivent plus du tout. Ce n'est pas la création
d'un office qui va changer ça. La problématique qu'on a à
ce moment-là, c'est que ces gens-là, se sentant
dépassés, prennent un certain temps, ont une certaine
hésitation pour finir par référer le problème au
ministère et là les délais commencent parce qu'ils se
renvoient la balle, comme vous l'avez dit tout à l'heure.
Vous nous proposez une nouvelle structure. Dans le fond, ce qui nous
intéresse avant tout, c'est que les délais soient réduits;
c'est la première chose qui nous intéresse. Je pense qu'en tant
que clients on veut avoir un service de qualité. Que ce soit un
ministère, une division, un office, ce qu'on veut avoir, c'est un
service de qualité. Pour nous, la qualité, dans ce cas-ci,
ça se pose surtout en termes de délai parce que ça nous
coûte très cher. Ce qu'on fait présentement, c'est qu'on a,
par exemple, une option pour acquérir une technologie
étrangère, mais on a dit: Avant de dépenser des centaines
de mille dollars pour l'acquérir, on va commencer par demander des
permis, ça va prendre un an, on va sauver un an d'intérêt
et, après ça, tu sais... Mais c'est un processus qui, finalement,
retarde et, durant ce temps-là, on ne peut pas mettre en
opération des technologies qui viendraient régler des
problèmes environnementaux.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): sur le plan des délais, qui
est une question majeure et importante, est-ce que vous pourriez comparer la
qualité de notre service ou son manque de qualité avec d'autres
juridictions, en ontario, par exemple, etc? est-ce que vous avez ce type
d'information?
M. Proulx: Pas avec l'Ontario, mais je peux le comparer avec
d'autres ministères.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Proulx: Parce qu'on fait affaire avec d'autres
ministères, que ce soit pour des demandes de subventions ou des
demandes... De façon générale, on peut dire qu'à
l'Environnement c'est plus long...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Proulx: ...actuellement que les autres ministères, donc
les autres systèmes gouvernementaux. Là, je ne parlerai
même pas de l'entreprise privée.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que vous iriez aussi
loin... Et je vous le donne à titre d'exemple: dans le processus des
évaluations environnementales, lorsque le dossier est confié au
Bureau d'audiences publiques sur l'environnement et que le processus public est
déclenché, les délais sont de rigueur et sont
indiqués à partir du déclenchement du processus. Dans la
réglementation, c'est quatre mois à partir du moment où le
ministre passe la commande. Est-ce que vous iriez aussi loin que d'Imposer des
délais fixés par loi ou par réglementation pour mieux
satisfaire la clientèle?
M. Proulx: Je crois qu'on peut toujours utiliser une loi ou une
réglementation pour mettre des délais, mais...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quelle est la sanction?
M. Proulx: ...rien ne remplacera une action ou un organisme qui
dévolue son action sur la qualité du service aux clients. La loi
ne remplacera jamais ça. Si vous voulez un exemple, un cas
étranger qu'on a vécu, une technologie qu'on regardait, qui
venait d'un pays étranger. On leur a demandé à eux autres:
Comment avez-vous fait vos démarches pour aller chercher vos permis
d'opération dans votre pays? Pour vous donner une idée, en avril,
ils ont déposé leur dossier. Au début du mois de mai, un
représentant de leur région communiquait avec eux pour fixer une
rencontre des spécialistes du central, des spécialistes de la
région et de la compagnie, la semaine suivante. La journée qui a
suivi la réunion, le spécialiste en question a écrit un
procès-verbal résumant la rencontre et donnant à la
compagnie les points où elle devait soumettre des analyses. La compagnie
a pris trois mois pour faire les analyses. Au mois d'août, elle a
resoumis un dossier à l'Environnement avec l'ensemble des analyses qui
avaient été demandées suite à la réunion;
une semaine après, elle a eu l'octroi de son permis.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quel pays? M. Proulx: Aux
États-Unis.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quel État? M. Lazure:
Merci, M. le Président. Des voix: Maine.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maine. O.K. Ça va.
M. Lazure: Je veux saluer les représentants de Sani Mobile
au nom de l'Opposition et les remercier de venir nous présenter leur
point de vue. Vous avez beaucoup insisté ces dernières minutes
sur les délais et avec raison. Vous avez même dit: Nous, la notion
de service venant de votre ministère, c'est essentiellement
associé aux délais, à la rapidité du service. (10 h
15)
Vous avez raison d'être sceptiques. Ce n'est pas vrai que la
création d'un office en soi, ça va donner la garantie d'un
service accéléré. Ce n'est pas vrai. Ce sont les
mêmes équipes qui vont travailler en région. Et ce n'est
pas exact non plus de dire, comme le ministre l'a fait depuis deux semaines,
qu'avec l'Office les régions pourront avoir toute l'autorité pour
décider. Eh bien, il n'en tient qu'à lui de donner
l'autorité actuellement aux régions pour décider. Il peut
très bien le faire, il y a des ministères qui le font, mais il
s'acharne à vouloir utiliser une formule magique: cet Office-là
qui va donner l'autorité aux régions.
C'est un peu un écran de fumée parce que cet Office va
avoir un conseil d'administration, mais il va avoir aussi des dirigeants. Ce
n'est pas vrai que, dans chaque région, ils vont être
complètement autonomes et qu'ils ne vont relever de personne. Ils vont
relever d'une autorité centrale, de toute évidence. Et,
là, je rejoins le début de votre mémoire. Je pense que
vous être le premier groupe à mettre l'accent sur le gaspillage de
fonds inhérent à la création d'un office. Vous avez raison
de souligner ça, les aspects économiques du projet, autrement
dit. On a beaucoup parlé des aspects fonctionnels du projet, mais les
aspects économiques sont importants. Alors, c'est un gaspillage. Le plus
gros client du ministère de l'Environnement, qui s'appelle
Hydro-Québec, est venu hier. On voit dans les journaux de ce matin le
gros titre: «Scinder le ministère de l'Environnement -
créer un office - entraînera délais, coûts et aucun
effet positif, croit Hydro-Québec».
Vous dites: On n'est pas contre l'Office, mais on est un peu inquiets
quant à la façon de fonctionner. La plupart des gens non
seulement sont contre la création de l'Office, mais ont fait ressortir
tous les inconvénients d'une telle création. Il y a, ce matin
aussi, dans un journal, un editorial titré: «Le fantôme et
le pompier», le fantôme étant l'Office, le futur Office, je
suppose, et le pompier étant le ministre. Alors, le fantôme et le
pompier. Là, je vais rejoindre le mécanisme de révision;
vous avez fait des commentaires là-dessus, puis j'aurai une question
à vous poser.
Une voix: Martine Corrivault? M. Lazure: Par Marie
Caouette. Une voix: On ne la connaît pas.
M. Lazure: Les commentaires qu'elle fait sur le mécanisme
de révision des décisions, c'est intéressant. Elle dit:
«C'est l'Office lui-même qui nommerait les personnes
chargées de réviser les dossiers contestes. Il est difficile de
croire qu'on puisse encore songer, en 1992, à mettre sur pied un
tribunal administratif aux mains liées de cette façon»
à l'avance. Autrement dit, par le mécanisme proposé,
à supposer qu'il y ait un office, c'est l'Office lui-même qui va
désigner son comité de révision; alors, ça fait
plus ou moins sérieux. L'éditorial conclut en disant: «Le
brouil-
Ion du ministre ne mérite pas la note de passage.» C'est ce
qu'on lui dit depuis deux semaines.
Le ministre a dit: L'Office va donner autorité finale aux
régions; deuxièmement, l'Office va assurer que les
décisions vont être uniformes. C'est le terme qu'il a
employé, «uniformes». Mais ça, l'uniformité
aussi, c'est possible de la faire dès maintenant, sans créer un
office. C'est pour ça que les gens ne comprennent pas pourquoi il
s'acharne à vouloir créer un office. Il n'a qu'à faire son
travail, lui et les dirigeants de son ministère, à s'assurer que
tous les pouvoirs de décision finale seront donnés à
chaque région, mais dans un cadre uniforme. C'est ça que tout le
monde nous demande.
Troisièmement, il n'a qu'à s'assurer que des délais
raisonnables vont être respectés. On n'a pas besoin d'un office
pour ça. C'a été fait dans la loi qui a créé
le bureau d'audiences publiques; le BAPE, comme vous le savez, a des
délais très clairement identifiés. Alors, le ministre
pourrait très bien faire la même chose; il n'a même pas
besoin de loi pour ça. Il pourrait très bien, ne serait-ce que
par des directives administratives, au moins établir un guide sur le
délai minimal et le délai maximal pour l'émission de
chaque permis, de chaque autorisation ou de chaque décision. De cette
façon-là, on économiserait de l'argent, mais aussi,
surtout, on cesserait de miner le moral des fonctionnaires dans son
ministère. Vous savez, les fonctionnaires du ministère de
l'Environnement ont eu 6 réformes majeures en 12 ans, une tous les 2
ans. Ça prend ça, à peu près, un an ou deux, avant
de digérer une réforme. Elle est à peine
digérée qu'on arrive avec une autre. Il y a des indigestions de
réformes dans ce ministère-là. Le ministre, au lieu
d'assumer son leadership politique, de faire de l'animation dans son
ministère et dans les régions, s'acharne à vouloir venir
en commission parlementaire et présenter des projets de loi pour
créer des nouvelles structures.
Je reviens au comité de révision, le comité d'appel
ou le comité de révision. Vous dites: «II n'est
prévu aucun forum où pourraient être débattues des
questions portant à interprétation». Vous avez donné
quelques exemples au ministre tantôt, suite à vos questions. Mais,
moi, personnellement, j'ai un peu de mal à voir un forum
indépendant. Ça serait comme un comité consultatif? Est-ce
qu'il serait décisionnel, ce forum-là, ou s'il serait
consultatif? Pouvez-vous en parler un peu plus?
M. Cossette: Dans notre esprit, on le voit comme les
comités consultatifs qui existent déjà, soit le
comité consultatif de l'environnement ou celui dans les régions
nordiques qui sont déjà prévus dans la loi. Ce sont des
organismes qui font des recommandations aux organismes décisionnels. Si
on les met décisionnels, on risque peut-être, à ce
moment-là, d'avoir plus quelque chose qui ressemble aux CTO, comme on
les appelle actuellement, où on a deux sous-ministres qui siègent
et qui doivent trancher des décisions. Il faudrait aller vers l'un ou
l'autre. La logique voudrait plus que ça soit consultatif, mais avec des
gens et de l'Office et du ministère et peut-être des experts
externes qui sont invités ad hoc.
M. Lazure: Dans les commentaires que vous faites sur les aspects
politiques, ce que vous appelez l'ingérence politique...
M. Cossette: Oui.
M. Lazure: ...vous souhaiteriez que l'Office soit
complètement indépendant pour éviter l'ingérence
politique.
M. Cossette: Exact.
M. Lazure: Là, j'ai de la misère à vous
suivre complètement, par exemple, parce qu'il s'agit de fonds publics.
Il s'agit de décisions qui affectent la sécurité, la
santé du public et c'est l'administration de fonds publics. Comment
peut-on confier ça à un organisme complètement autonome
qui ne répondrait pas à l'Assemblée nationale, qui ne
répondrait pas au public de ces fonds-là?
M. Cossette: L'Office peut répondre une fois par
année au public, a un rapport annuel à présenter. L'Office
peut avoir un cadre spécifique qu'il doit respecter. Mais vous dites
à l'Office: Peu importe le ministre qui se remplace et peu importe la
couleur que le ministre aura, il peut donner des directives, du moment que son
Conseil des ministres l'aura entériné, que l'Office devra
obligatoirement respecter. Donc, le ministère, ou le ministre, ou le
Conseil des ministres peut donner des orientations à l'Office sur
comment il devra faire son travail. Ensuite, vous dites: Lorsque
l'intérêt public l'exige, on peut passer par-dessus l'Office.
C'est quoi, ça, «lorsque l'intérêt public
l'exige»?
M. Lazure: Je pense que c'est un peu normal qu'il y ait une
poignée, pour ainsi dire.
M. Cossette: Oui.
M. Lazure: on ne peut pas prévoir toutes les situations
dans la vie. alors, dans une situation catastrophique, une situation
extraordinaire, c'est normal...
M. Cossette: Soit!
M. Lazure: ...que le gouvernement dûment élu par la
population ait le pouvoir d'intervenir. À ce moment-là, il
répondra de ses actes. Mais
un Office comme vous le proposez, qui répondrait de ses actes
simplement par le rapport annuel, ça, ce n'est pas beaucoup, beaucoup
de... Je veux dire, ça ne donne pas de sécurité à
la population qu'elle pourra le questionner par ses députés ou
autrement à l'année longue, pas juste une fois par
année.
M. Cossette: Oui. Par contre, vous désirez aussi qu'un
ministère de l'Environnement ou qu'un office de protection de
l'environnement ait une crédibilité face au public et,
actuellement...
M. Lazure: II n'en a pas.
M. Cossette: ...il n'en a pas, et ça, ce n'est pas
récent. Il y en a rarement eu. Si vous le laissez trop...
M. Lazure: II est prudent. Oui, c'est bien. Des voix: Ha,
ha, ha!
M. Lazure: Vous en embrassez large. C'est ça. C'est
correct.
M. Cossette: bon. si vous le laissez trop dépendant ou
trop près du pouvoir politique, vous ne lui permettrez pas d'obtenir
cette crédibilité-là.
M. Lazure: Mais je voulais simplement me dissocier un petit peu
de votre position...
M. Cossette: O.K.
M. Lazure: ...qui, à mon avis, confond un peu politique et
partisan. je suis d'accord avec vous qu'il faut éliminer, autant que
possible, l'ingérence partisane.
M. Cossette: Oui.
M. Lazure: Mais l'exercice normal des responsabilités
politiques par les élus, ça, on n'y échappe pas et on ne
doit pas y échapper. Et j'ai eu l'occasion de le dire hier: S'il y a un
élu choisi par le gouvernement pour être à la tête du
ministère de l'Environnement, s'il y a un ministre qui doit tous les
jours répondre de ses actes, c'est bien lui et c'est une des raisons
nombreuses pour lesquelles on dit: L'Office va venir brouiller les cartes,
l'Office va venir jeter un peu de confusion dans l'esprit du public. Est-ce que
c'est le ministère qui est responsable de cette situation-là?
Est-ce que c'est l'Office? On a beau dire théoriquement: Le ministre
répond de l'Office, mais, dans la réalité, il va souvent
se cacher, le ministre, derrière des prétextes juridiques,
légalistes, pour dire: Ah! Ça, c'est la décision de
l'Office, je la respecte.
M. Cossette: Bon. À ce moment-là, est-ce qu'on peut
regarder le problème autrement? Si vous regardez le domaine judiciaire,
vous avez des tribunaux. Vous avez un ministère de la Justice qui fait
des lois, mais les tribunaux sont complètement indépendants du
système politique. Bon. Est-ce qu'on ne pourrait pas tendre vers cette
approche-là face à l'environnement?
M. Lazure: Oui, mais, là, ça ouvre... M.
Cossette: L'Office n'a pas...
M. Lazure: ...une autre piste qui a été
exploitée par des personnes qui sont venues hier, en particulier, qui
nous disent: Ce projet de loi créant l'Office va rendre encore plus
judiciaire l'approche des fonctionnaires du ministre en matière
d'environnement, va judiciariser, va créer un climat d'affrontement. On
nous a dit ça pas plus tard qu'hier. Et les gens disaient: Faisons donc
de la prévention, faisons donc de la concertation plutôt que de
renforcer presque exclusivement le bras de l'observation des règlements,
des lois et la poursuite.
M. Cossette: Oui.
M. Lazure: ii faut le faire. il faut qu'il y ait une surveillance
adéquate des règlements et des lois, mais il ne faut pas que ce
soit la principale approche.
M. Cossette: Par contre, je ne crois pas qu'on dise que ça
va amplifier, c'est déjà comme ça actuellement. Vous
pouvez contester une décision du ministère devant les tribunaux,
ce côté juridique existe présentement. Et, de toute
façon, vous avez une philosophie de pensée souvent au niveau du
ministère qui est de dire: La personne devant vous est coupable et c'est
à elle de justifier pourquoi elle fait une demande.
M. Lazure: Je vous pose une question plus générale.
Toutes les doléances que vous avez...
M. Cossette: Oui.
M. Lazure: ...sur tous les ministères de-l'Environnement -
pas seulement celui-ci, mais les autres avant aussi, comme vous le disiez -
notamment les délais, d'après vous, est-ce que ça ne
pourrait pas être corrigé dans la structure actuelle du
ministère?
M. Cossette: Tout à fait.
M. Lazure: Tout à fait. Bon. Je pense que votre
réponse est éloquente. Et, nous, on pense ça aussi. Nous,
on pense ça et presque tout le monde pense ça. Bon. Le ministre,
quand même - et c'est ça qui est un peu dommage parce que
ça met les gens sur des fausses pistes - dit: Autorité en
région? Vous allez l'avoir avec
l'Office. Autonomie des régions? Vous allez l'avoir avec
l'Office. L'uniformité de décision, dont vous déplorez
l'absence actuellement, vous allez l'avoir avec l'Office. Mais tout ça,
nous, on dit - et vous aussi vous venez de le dire - que ça pourrait se
faire dès maintenant, à l'intérieur même du
ministère. Merci, M. le Président, pour le moment.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sur ce dernier
élément...
M. Cossette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...nous avons tenté, il y a
deux ans, de définir les fonctions à l'intérieur du
ministère de façon beaucoup plus précise et plus claire.
Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner, l'organigramme du ministère
s'était bâti dans les huit ou neuf premières années,
à partir de l'évolution des crises. (10 h 30)
M. Cossette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si on avait une crise de
déchets dangereux, on créait une direction des déchets
dangereux; si on avait une crise de pneus, on avait pratiquement une direction
des pneus. L'organigramme du ministère, c'était à peu
près ça, il y a deux ans. On a tenté de le clarifier et de
le simplifier. Ça fait partie des restructurations. Il y a quelqu'un qui
m'a dit tantôt: Moi, je les ai toutes vécues, les restructurations
au ministère de l'Environnement. Clarifier les missions.
M. Cossette: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On s'est dit qu'il y a trois
secteurs de pollution importants: l'industriel, l'agricole et le municipal.
L'action va se faire en région. Il s'agit de donner un meilleur service,
développons nos bureaux régionaux. Depuis deux ans, nous les
avons beaucoup développés dans toutes les régions du
Québec. Pendant qu'on fait ça, qu'on corrige le passé,
qu'on prend soin du présent, il faut penser à maîtriser
l'avenir: sous-ministériat au développement durable. On a
tenté avec cette approche d'avoir l'approche à l'interne, comme
vous dites, la plus efficace possible. Ce n'est pas suffisant. On avait un taux
d'insatisfaction de la population qui était de 70 %, il y a deux ans,
envers le ministère de l'Environnement. Il est encore de 48 % et c'est
encore insatisfaisant pour le ministre de l'Environnement et pour le
gouvernement actuel.
La régionalisation, tout le monde a dit: On est d'accord. Elle
nous a causé des problèmes, la régionalisation. Elle nous
cause des problèmes de délais. Moi, ce que je vous dis, c'est
que, la nature humaine étant ce qu'elle est, à moins de condamner
la région à prendre la décision par l'implantation d'une
structure, nous allons perpétuer l'introduction du dossier à la
région, la non-prise de décision par la région même
si, par mémo, nous tentons de corriger ça sur le plan de la
gestion, la consultation au central même pour des questions qui ne
devraient jamais y aller, dont les compétences reposent dans les
régions, parce qu'on ne veut pas prendre la responsabilité
lorsqu'on n'est pas obligé de la prendre. C'est rare, les gens qui
courent après les responsabilités alors qu'ils peuvent se couvrir
avant de prendre ladite responsabilité. Si vous avez une recette magique
à l'intérieur pour corriger cette réaction humaine qui va
être là, que ce soit quelque ministre de l'Environnement que ce
soit, moi, j'aimerais la connaître, cette formule-là.
M. Proulx: J'aimerais intervenir sur la question de
l'uniformité qui est très importante et qui peut aussi être
dommageable pour les opérations d'une entreprise qui se permet des
opérations dans une région alors que l'autre région ne le
permet pas.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce n'est pas facile pour la
compétition.
M. Proulx: Non, ce n'est pas facile pour la compétition.
Effectivement, je suis d'accord avec vous que, les êtres humains
étant ce qu'ils sont, ils sont tous différents les uns des autres
et, quand on parle d'interprétation et que chacun a son niveau
d'interprétation, on entre dans des difficultés. C'est une des
portes qui nous tient à coeur. On a beaucoup parlé des
délais; il faut aussi beaucoup parler d'uniformité. Mais, encore
là, je ne vois pas nécessairement la création de votre
Office comme étant une réponse à ça. La
création de l'Office, vous savez, c'est une structure. Que les gens en
région soient formés d'une façon commune à
l'intérieur de séminaires, de colloques ou de rencontres qui leur
permettent à tous d'avoir une vue semblable de la même
problématique, c'est autre chose qui peut peut-être
répondre plus à cette problématique. C'est simplement ce
qu'on veut savoir.
Dans le fond, je comprends que vous essayiez des actions pour
améliorer les délais et l'uniformité. On est loin
d'être certains que la création d'un nouvel office réponde
à cette problématique, mais ce qu'on voudrait, c'est que
ça s'améliore, et très rapidement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez tellement raison
qu'à l'article 18, qui parle des fonctions et pouvoirs de l'Office,
à l'aiinéa 6°, nous avons prévu: «en
collaboration avec le ministre, conçoit des programmes de formation et
d'information dans les domaines de la compétence de l'Office»,
justement dans le but d'assurer une certaine uniformité.
M. Proulx: Je vois M. Lazure qui s'active. Je pourrais lui
demander la même question qui me vient à l'esprit: Est-ce que
c'est nécessaire de former un office pour faire des programmes de
formation?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Vous pouvez faire des
programmes de formation sans créer un office, mais vous ne pouvez pas
condamner quelqu'un à prendre une décision dans le système
actuel sans former un office.
M. Lazure: Ah, M. le Président! Le Président (M.
Garon): Oui.
M. Lazure: Merci. Je ne peux pas laisser passer ça.
Ça n'a quand même aucun sens. Je m'excuse, M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez le droit de parole.
M. Lazure: À l'intérieur de vos juridictions
actuelles à l'intérieur de votre ministère, vous pouvez
donner toute l'autorité voulue à vos régions. Vous pouvez
donner toute l'uniformité voulue à vos régions. Vous
pouvez faire infiniment de choses et c'est ça que les gens vous disent,
à commencer par vos fonctionnaires, par vos propres professionnels, par
vos propres ingénieurs. C'est eux qui vous disent ça.
Je voulais faire un commentaire sur le Fonds de recherche et de
développement technologique en environnement. Le ministre en a
parlé tantôt et le groupe en a aussi parlé. Dans le
discours sur le budget 1990-1991 - ça fait presque deux ans - le
ministre des Finances avait annoncé l'ajout de 50 000 000 $ sur cinq
ans, 10 000 000 $ par année. Or, après déjà, quoi,
plus d'un an, pour la période des quatre prochaines années, il y
a à peine un peu moins de 3 000 000 $ d'engagés. Ça ne va
pas très vite. En 1991-1992, 1 200 000 $. Ce sont des chiffres qui
viennent du ministère. En 1992-1993, 500 000 $. Ça, c'est en date
du 10 décembre 1991. C'est récent, le bilan, c'est il y a deux
mois.
Je rejoins aussi vos commentaires. Vous disiez que les fonds de
recherche, souvent, étaient donnés à des grosses
entreprises et pas beaucoup aux PME. Les gros montants qui ont
été donnés ici: 1 099 000 $, ville de Montréal.
C'est beaucoup, 1 000 000 $. Université Laval à Québec,
deux projets: un de 800 000 $ et l'autre de 400 000 $, soit 1 200 000 $.
L'Université Laval et la ville de Montréal, à elles deux,
absorbent presque les trois quarts des subventions. Alors, il n'en reste pas
beaucoup pour les petites entreprises, les moyennes entreprises, au cas
où vous voudriez faire de la recherche et du développement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Une précision
là-dessus pour éclairer la commission. Le programme est quand
même divisé en deux. Le volet que vous mentionnez de ce programme,
ce sont les subventions de 250 000 $ et plus qui sont...
M. Lazure: Non, pardon, M. le Président. J'en ai une de
210 000 $ devant moi, là, les Consultants GPR.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. Mais juste pour qu'on se
comprenne bien, là, le programme est divisé en deux: les projets
de 250 000 $ et plus qui sont gérés dans le cadre du Fonds de
développement technologique et les programmes de 250 000 $ et moins qui
s'adressent davantage à la PME québécoise, qui sont
gérés par le ministère de l'Environnement comme tel.
Maintenant, je l'ai dit - tantôt, je le déplorais - les demandes
de la part des PME québécoises ne nous arrivent pas en
nombre...
M. Cossette: Juste un petit point qui me chicote depuis
tantôt quand vous mentionniez là-dessus...
M. Lazure: Non, mais je veux juste corriger, parce que ce n'est
pas exact, M. le ministre. Je regrette, mais j'ai le tableau devant moi. Il y
en a plusieurs qui sont en bas de 200 000 $.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous avez le compilé des
deux, autrement dit, des deux programmes.
M. Lazure: Oui.
Le Président (M. Garon): Là, il faudrait...
Finissez, parce que, autrement...
M. Lazure: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.
M. Cossette: Vous déplorez le fait que la PME ne vous
présente pas de demandes. Par contre, je dois vous dire que, nous, on
vous en a présenté une, mais, malheureusement, elle a
été entérinée après le 10 décembre.
Comme vous ne pouvez débloquer aucun budget avant le 31 mars, c'est bien
évident que vous ne pouvez pas donner de subvention à la PME.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est-à-dire que, si elle a
été entérinée, j'imagine qu'elle a
été approuvée.
M. Cossette: Elle a été approuvée avant,
mais non signée. Et, comme elle n'a pas été signée
avant le 10 décembre, il n'y a pas d'argent disponible avant le 31
mars.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais, à partir du 31 mars,
l'argent va être disponible. Donc, vous allez être sur la feuille
du docteur l'année prochaine.
M. Cossette: On verra. Tout dépendant du Conseil du
trésor.
Le Président (M. Garon): Est-ce que le
député de La Prairie a terminé?
M. Lazure: Pardon?
Le Président (M. Garon): Est-ce que vous avez
terminé?
M. Lazure: Oui, j'ai terminé. Je remercie, au nom de
l'Opposition, les gens de Sani Mobile.
Le Président (M. Garon): Je remercie le groupe Sani Mobile
inc. d'être venu nous présenter son mémoire.
Nous suspendons les travaux de la commission quelques instants, le temps
de permettre au groupe Sani Mobile de se retirer et d'inviter l'Union
québécoise pour la conservation de la nature de s'approcher de la
table des délibérations.
(Suspension de la séance à 10 h 37)
(Reprise à 10 h 41)
Le Président (M. Garon): J'invite M. Côté,
vice-président de l'Union québécoise pour la conservation
de la nature, à nous présenter la personne qui l'accompagne, en
lui disant qu'il a 20 minutes pour exposer son mémoire, 20 minutes au
parti ministériel, 20 minutes à l'Opposition. Si vous en prenez
plus, on leur soustraira le temps que vous aurez pris en plus. Si vous en
prenez moins, ils pourront le prendre pour vous poser des questions, s'ils le
souhaitent. M. Côté.
Union québécoise pour la conservation de
la nature (UQCN)
M. Côté (Guy L.): Bien, je vous remercie beaucoup de
nous avoir reçus. L'Union québécoise pour la conservation
de la nature remercie le président et les membres de la commission de
l'aménagement et des équipements de lui permettre d'exprimer ses
vues sur le projet de loi 412 visant la création d'un office de la
protection de l'environnement et modifiant diverses dispositions
législatives. Une bonne partie du corps de notre mémoire sera
présentée par Christian Simard, notre directeur
général, et je ferai moi-même une partie de la
présentation, avec commentaires. Alors, je vous passe M. Simard.
M. Simard (Christian): Merci. On s'excuse du retard dans le
dépôt du mémoire auprès des membres de la
commission. Les ressources étant limitées, vous ne l'avez
reçu qu'hier après-midi, on s'en excuse. Je commencerai la
lecture à la page 5 et vous pourrez suivre. Un ou deux paragraphes par
page seront mis en relief.
Un ministère promoteur qui n'a pas fait d'étude d'impact.
En tant que promoteur de l'OPEQ, le ministère n'a pas respecté
les critères et les règles de l'art qu'il impose à tout
promoteur ayant un projet risquant d'avoir des impacts sur l'environnement.
Ainsi, aucun avis de projet n'a été déposé pour
informer le public de l'intention du ministère ou du ministre. À
cette absence d'avis n'a succédé aucune étude d'impact ou
étude sur les répercussions environnementales de la
réforme proposée, pourtant majeure. Aucune période
d'information, non plus, ni audiences publiques, si ce n'est la présente
commission. Qu'un projet de loi sans analyse ni notes justificatives. Le
ministère dispose-t-il d'études incontournables nous assurant
qu'il s'agit de la seule solution envisageable, cet Office? Auquel cas l'UQCN
et le public en général, nous croyons, doivent en être
informés.
La création de l'OPEQ n'est pas une solution, mais c'est
plutôt une fuite en avant dans la «structurite». Le ministre
nous présente le projet de créer un office de protection de
l'environnement comme découlant d'un certain constat de
découragement face aux performances de son ministère. Ce constat
serait dû à la grande difficulté de cumuler la fonction
d'élaboration d'orientations, de lois, de règlements et de
directives, et la fonction d'application de ces mêmes lois et
règlements dans une perspective de contrôle et de surveillance.
S'il est de notoriété publique que le ministère a beaucoup
de difficultés à remplir ses mandats multiples, ce n'est pas en
le scindant qu'on réglera les problèmes. Il n'y a rien qui assure
qu'un office, puisant son personnel dans le ministère actuel et ne
disposant d'aucune ressource supplémentaire, fasse meilleure figure que
le MENVIQ actuel. D'autres ministères assez complexes, tels que Loisir,
Chasse et Pêche, s'acquittent assez bien de leurs mandats multiples.
C'est souvent même quand ils créent un genre d'office comme la
SEPAQ que ça se complique, la SEPAQ étant la
Société des établissements de plein air du Québec,
comme vous le savez.
Un conseil d'administration débalancé. Le conseil
d'administration prévu dans le projet de loi compterait cinq membres sur
neuf issus directement des rangs gouvernementaux, dont le sous-ministre en
titre du MENVIQ. C'est incompatible avec la présentation de l'Office
comme un instrument indépendant et sourd aux influences politiques.
Maintenant, page 8: Un OPEQ sans kopeks. À l'origine, le projet
de création de l'Office lui donnait un statut extrabudgétaire
avec pouvoir de tarifer ses services et de gérer directement
les sommes prélevées. L'objectif poursuivi était
l'autofinancement de l'Office après cinq ans. L'obtention de ce statut
garantissait de l'argent neuf pour la gestion de l'environnement et permettait,
à terme, d'espérer une plus grande indépendance
d'intervention. Malheureusement, le ministère des Finances a
refusé cette façon de faire. Avec les coûts
intrinsèques reliés à une réforme et les maigres
ressources dont dispose le MENVIQ, il n'est pas possible pour l'UQCN de
souscrire à toute réforme, impliquant la création d'un
office ou, mieux, la rénovation du ministère, qui ne pourrait
recevoir le financement adéquat et qui diminuerait dans les faits les
ressources consacrées à la gestion de l'environnement.
Un processus de révision inique. Le pouvoir de révision,
tel que défini dans le projet de loi, est inacceptable et constitue un
déni de justice naturelle. La révision ne s'adresserait qu'aux
demandeurs d'autorisations et ne serait permise que lorsque leur demande serait
refusée ou modifiée. En aucun cas l'émission d'un
certificat d'autorisation ne pourrait faire l'objet d'une révision de la
part de personnes ou de groupes qui en contesteraient la légalité
ou la légitimité, même si ces personnes pourraient
être directement touchées par l'activité autorisée.
L'OPEC ne s'autorisera le droit de se tromper que lorsqu'il n'accordera pas une
demande, mais jamais lorsqu'il l'accordera. La balance de la justice risque de
s'écrouler avec un pareil débalancement de ses plateaux. L'UQCN
ne peut adhérer à une réforme contenant un processus de
révision basé sur une pareille iniquité.
Le projet de loi 412. L'UQCN ne s'oppose pas en principe à la
création d'un office ou d'une commission qui peut s'avérer dans
certaines circonstances un bon outil de gestion environnementale. Cependant, il
ne s'agit pas de dire que ça existe aux États-Unis, sous des
formes par ailleurs extrêmement différentes de celles
proposées, pour pouvoir affirmer que ce sera une panacée pour le
Québec. Des informations récentes nous indiquent d'ailleurs
qu'une réforme sera présentée sous peu aux
États-Unis visant à transformer l'EPA en secrétariat
d'État, c'est-à-dire en ministère. On ne va pas tout
à fait dans le même sens.
En page 10 maintenant. Le projet de loi 412 n'est pas une solution
à l'improductivité du MENVIQ. Prétendant isoler les
fonctions d'élaboration de politiques des fonctions de contrôle et
de surveillance, le projet présenté fait perdurer la confusion et
les possibilités d'ingérence politique dans l'administration de
l'Office. L'UQCN réfère, à ce sujet, le lecteur au
mémoire du Centre québécois du droit de l'environnement et
particulièrement au chapitre sur «l'indépendance
apparente». Je pense qu'il est passé hier.
Des lois comme du gruyère. Il n'y a pas que les fonctions de
contrôle et de surveillance qui font défaut au MENVIQ, non encore
amputé de plus de la moitié de ses fonctionnaires; la conception
et la publication des règlements tardent cruellement. Il y a un grand
nombre de règlements, depuis longtemps annoncés, qui n'ont
toujours pas été produits. Qu'on pense au règlement sur
l'eau potable, à celui sur l'air atmosphérique, à ceux
relatifs à l'ozone, à la décontamination de
l'environnement et au Programme de réduction des rejets industriels qui
a fait l'objet de deux lois, mais qui n'est toujours pas en vigueur. La Loi sur
la qualité de l'environnement est comme un fromage de gruyère
tellement il y a de dispositions législatives en attente d'un
règlement ou qui font l'objet d'une suspension d'application dans le
cadre du règlement général d'administration. Rappelons
notamment, comme c'est un leitmotiv dans les mémoires de l'UQCN depuis
malheureusement trop longtemps, les fameux articles 2n, 2g et 2p du
Règlement sur l'examen des impacts sur l'environnement qui
prévoit l'examen public des grands projets industriels et miniers.
Malheureusement, même dans un projet d'OPEC, la question des certificats
d'autorisation dépendrait encore directement du gouvernement.
Maintenant, à la page 11: Sur quelle étagère se
trouve «Un nouveau cap environnemental»? Je passerais la parole
à M. Côté pour la partie sûr le cap environnemental
et le plan vert.
M. Côté (Guy L): J'ai pris plaisir à revoir
le document qui avait été publié, il y a un peu plus de
quatre ans, par un des prédécesseurs de M. Paradis, M. Clifford
Lincoln, qui s'appelait «Un nouveau cap environnemental». Quatre
ans, ce n'est pas très long dans l'histoire de l'administration
québécoise, mais c'est une éternité en ce qui
concerne l'environnement, tellement les nouveaux développements en
environnement, les nouvelles exigences se bousculent les unes pardessus les
autres. C'est un document qui est encore assez neuf. Depuis sa publication - je
suis à la page 11 - il n'y a plus eu de réflexions
gouvernementales ni de grands engagements politiques en environnement,
même s'il y a eu des initiatives prises comme, par exemple, la table
ronde. Les deux ministres qui ont succédé à Clifford
Lincoln au siège de l'Environnement n'ont pas appuyé de leur
poids politique ni, comme on le voit aujourd'hui, fait leur le document de M.
Lincoln. Au contraire, on peut dire que le projet de loi 412 est à
l'opposé de l'approche intégrée préconisée
par ce document.
Le «nouveau cap environnemental» d'il y a quatre ans
était un important énoncé de politique qui visait à
maintenir la diversité, la productivité, la
pérennité des écosystèmes et à diminuer
l'exposition des personnes et des espèces aux substances toxiques.
S'appuyant sur des principes tels que la clarté, la fermeté, la
sélectivité, la transparence, l'approche intégrée,
l'engagement des intervenants vis-à-vis de l'environnement et l'action
concertée, le document proposait des mécanismes d'action pour
tous les champs
d'intervention du ministère. Parmi ces mécanismes, on
parlait de «gestion par résultats», de «production de
bilans périodiques sur l'état de l'environnement», de
«mandats délégués à tous les échelons
du ministère». Nulle part il n'est fait mention du problème
du cumul des fonctions au sein du ministère, qui semble être
devenu insurmontable, selon le ministre actuel.
Dans le document «Un nouveau cap environnemental», il y a
toute une section, par exemple, qui discute de la collaboration soutenue avec
les autres ministères. Dans cette section, il est indiqué comment
le ministère va s'acquitter de ses tâches d'orientation des autres
ministères, parce que c'est un ministère qui travaille de
façon horizontale. «Ses moyens d'action sont de développer
la connaissance écologique du territoire, continuer à offrir aux
autres intervenants une approche méthodologique, assurer une vigilance
environnementale continue, détecter et documenter - je lis du document
de Lincoln - les tendances de dégradation, répertorier les
protentiels, les lieux d'intérêt majeur, mesurer l'impact des
pratiques courantes, inciter les ministères responsables à revoir
leurs politiques et programmes pour les orienter dans le sens de la
conservation.» Vous voyez tout de suite, avec ces quelques bribes que
j'ai lues, que c'est une approche intégrée et que ceux qui, dans
la pratique, voient les projets et ceux qui, dans la pratique, élaborent
les politiques sont en rapport étroit les uns avec les autres.
Je continue, à la page 12. Pas trop loin du «cap
environnemental» de M. Lincoln et, peut-être, si on peut ainsi
s'exprimer, sur la même tablette, doit également se retrouver le
«Projet de mise en valeur du Saint-Laurent», élaboré
par deux comités largement représentatifs de la population. Ce
document de juin 1989 contenait près de 200 recommandations
s'étalant sur 10 ans et nécessitant des investissements
privés et publics de près de 6 000 000 000 $. Il a
été confié, pour réanalyse, à la table ronde
sur l'économie et l'environnement, elle-même... Nous avons
utilisé l'expression «moribonde», elle est peut-être
un peu dure, mais disons que la table ronde n'est pas en santé à
l'heure actuelle.
À la page 13, en continuant: Un plan vert pour le Québec,
c'est pour quand? Il y a plus d'un an, lorsque le plan vert canadien a
été annoncé, prévoyant des mesures
évaluées à 3 000 000 000 $, on se serait attendu à
une réaction du Québec. Le gouvernement aurait pu choisir
d'harmoniser ses programmes et ses interventions à ceux du plan vert ou
même de présenter son propre plan vert, là où il
aurait pu faire mieux qu'Ottawa ou dans le domaine de ses juridictions.
Malheureusement, le gouvernement québécois a choisi de faire le
minimum d'ajustements et de ne pas présenter son propre plan
environnemental.
Dans la suite de ce mémoire, nous allons vous dire que c'est au
niveau des objefctifs que doit se situer l'action gouvernementale, à
l'heure actuelle. Lorsque les objectifs auront été définis
de façon claire, il y aura peut-être à ce moment-là
un débat à y avoir sur les moyens structurels pour les accomplir.
Christian.
M. Simard: On insiste également sur le fait que c'est
peut-être dans la rénovation à court terme du
ministère de l'Environnement que réside la solution aux
problèmes administratifs qui semblent insurmontables maintenant. Donc,
on continue: Un ministère à rénover. Démontrer que
la solution des problèmes du ministère de l'Environnement ne
passe pas par la séparation jésuitique entre la forme et le
contenu, entre les fonctions de contrôle et de surveillance et les
fonctions d'orientations et d'élaboration de politiques ne signifie pas
qu'il n'y a pas de problèmes au ministère, loin de là.
Comme observatrice et analyste attentive du ministère de
l'Environnement et par les contacts réguliers qu'elle a à tous
les niveaux avec les employés de ce ministère dans
l'élaboration de ses nombreux dossiers, l'Union québécoise
pour la conservation de la nature est en mesure d'affirmer que les
fonctionnaires du MENVIQ sont globalement démotivés et ne se sont
pas remis de la déclaration du ministre mettant globalement en cause
leur compétence. Le ministre ne parle pas directement à ses
fonctionnaires ordinaires et très rarement à ses sous-ministres.
Il n'y a pas de service de formation continue du personnel au MENVIQ. Le
système de gestion par résultats annoncé en grande pompe
dans la foulée du «nouveau cap environnemental» a
été pratiquement abandonné. Le service juridique se fait
souvent rabrouer par les juges sur la façon dont il présente ses
dossiers. L'exemple récent dans la cause Noranda démontre bien ce
problème. Il n'y a pas de transparence au MENVIQ. Suite à une
directive interne, les fonctionnaires sont devenus paranoïaques dans la
diffusion des informations les plus simples. L'UQCN est constamment
référée à Mme Jacob, la directrice des
communications et responsable de l'accès à l'information pour
toutes ses demandes à peu près. Il y a toujours absence de
système informatique moderne permettant de traiter et d'analyser les
données et cette situation perdure plus de 18 mois après le
jugement sévère porté à cet égard par la
commission Charbonneau, les fameux manifestes de transport. Il existe pourtant
un plan de réforme des systèmes d'information du MENVIQ datant de
1987.
À la lecture du dernier rapport du Vérificateur
général, on voit bien que le ménage n'a pas
été fait au ministère malgré les 6 changements de
structure en 12 ans et que ce n'est pas le transfert massif de plus de la
moitié des fonctionnaires vers un office qui réglera les
problèmes. Ils seront plutôt transmis comme on transmet un
virus.
Les recommandations de l'UQCN. Sur la
base des informations et de l'analyse qui précèdent,
l'UQCN adresse à la commission, et par-delà au ministre de
l'Environnement et au gouvernement québécois, les recommandations
suivantes. L'UQCN recommande au ministre de l'Environnement de retirer le
projet de loi 412.
L'UQCN recommande que le ministre de l'Environnement confie un mandat
d'une durée maximale de six mois à une firme
spécialisée qui examinera de fond en comble l'actuel
fonctionnement du ministère en vue de faire des recommandations pour
améliorer la performance et corriger une situation
qu'environnementalistes et promoteurs déplorent à l'unisson.
L'UQCN recommande que le ministre tienne compte des conclusions
prochaines de la commission parlementaire chargée d'examiner le
processus d'évaluation environnementale au Québec. Ces
recommandations devraient faire partie du contexte dans lequel l'avenir du
ministère sera examiné. On sait que le projet de loi 412 confirme
la situation actuelle quant au non-examen public des grands projets
industriels, disant non à l'avance à toute remise en question de
cette situation injuste.
L'UQCN recommande la mise en vigueur accélérée des
sections pendantes des 13 lois et 30 règlements régissant des
activités susceptibles de contaminer l'environnement, incluant les
dispositions du fameux article 2 du règlement sur l'évaluation et
l'examen des impacts environnementaux prévoyant l'examen public des
grands projets industriels, miniers et gaziers, et la transformation en
conséquence des 7 règlements administratifs.
L'UQCN recommande que le Québec se dote d'un plan vert d'ici la
fin de 1993.
L'UQCN recommande que le gouvernement relance la table ronde
québécoise sur l'environnement et l'économie avec une
présidence et un secrétariat indépendant de l'appareil
gouvernemental. Que le ministère des Finances et le Conseil du
trésor soient invités à siéger à cette
nouvelle table. Qu'un processus visant la participation du public à la
réflexion soit mis en place dans le cadre de cette nouvelle table.
L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec et le ministre de
l'Environnement accentuent l'application du principe du pollueur-payeur en
généralisant et en intensifiant le système des redevances,
droits et tarifs et en favorisant la mise en place de taxes vertes visant
à restreindre l'utilisation de nuisances écologiques ou
permettant de fixer l'atténuation de leurs impacts environnementaux.
L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec accepte de
consacrer les revenus provenant de ces redevances et taxes à la
résolution des problèmes environnementaux en les versant au
ministère de l'Environnement, comme il a relié les taxes sur la
cigarette à l'élimination du déficit olympique.
Voilà les recommandations et les analyses de l'UQCN.
M. Côté (Guy L.): Nous sommes à votre
disposition pour répondre à des questions ou pour des
commentaires supplémentaires.
Le Président (M. Garon): Merci. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me
permettrez, dans un premier temps, de remercier l'UQCN d'avoir pris le temps de
nous présenter son point de vue sur la création d'un office de
protection de l'environnement. Il n'y a pas de mal à avoir
été en retard, on comprend vos contraintes, et ça nous a
donné quand même le temps de passer à travers votre
mémoire.
Vous étiez présents dans la salle tantôt lorsqu'on a
eu l'occasion de donner, sur le plan de la structure administrative du
ministère, le fonctionnement. Je n'ai pas l'intention de reprendre avec
vous cet élément-là. Mais il n'y a pas eu que du travail
au niveau de la structure au cours des deux dernières années.
Grâce, dans certains cas, à la collaboration de l'Opposition et au
travail de l'ensemble des parlementaires, le menu législatif et
réglementaire a été assez bien fourni. (11 heures)
Je vous rappellerai qu'en 1991, sur le plan législatif, deux lois
ont été adoptées, une loi qui a été
difficile à faire adopter - il y avait beaucoup d'opposition - la loi 65
qui a appliqué, pour la première fois, le principe
pollueur-payeur. Il a fallu se battre, comme membres de l'Assemblée
nationale, pour faire passer cette loi et l'Opposition était d'accord,
je le souligne, à l'époque. L'UQCN nous a donné un bon
support à ce moment-là. Nous avons également adopté
la loi qui a créé RECYC-QUÉBEC avec des mandats en
matière de récupération et de recyclage.
Sur le plan réglementaire, c'a été mince, mais
c'était essentiel. Suite à de vives discussions avec le
ministère de l'Énergie et des Ressources, nous avons
limité le contenu en soufre dans le mazout, de façon à
continuer notre lutte contre les pluies acides. Grâce à
l'intervention des groupes environnementaux et à la
réglementation gouvernementale, les objectifs ont été
dépassés. C'est un des rares dossiers environnementaux où
on peut prétendre être en avant des objectifs, et l'action de
l'Association québécoise de lutte contre les pluies acides n'est
pas étrangère à ce bilan.
En 1991, le rythme des projets de loi s'est
accéléré. Premièrement, nous avons adopté la
loi qui a continué le mandat de la Société
québécoise d'assainissement des eaux, de façon à
aller dans les petites municipalités. On avait quasiment terminé
nos grandes municipalités au Québec, mais il ne fallait pas
laisser de côté nos petites municipalités. Grâce
également à l'appui des
parlementaires, on a adopté cette loi.
La loi sur les déchets dangereux, c'est une loi qui ne se tenait
plus debout, qui était peu applicable. Le rapport Charbonneau l'a
critiquée. Nous sommes arrivés avec une nouvelle approche, une
nouvelle législation, la loi sur les matières dangereuses. La
réglementation n'est pas encore... Je souhaiterais qu'elle soit sur la
place publique. Elle est en phase de prépublication chez nous, de
dernière analyse. Il s'agit d'une réglementation qui est quand
même scientifique. On veut qu'elle soit applicable et on a élargi
le concept de «déchets dangereux» à
«matières dangereuses», de façon à permettre
le recyclage de beaucoup de produits dans la société. Nous avons
également adopté une loi sur les rejets Industriels, de
façon à obtenir de la part du secteur industriel des
éléments que vous réclamez et sur lesquels on reviendra
tantôt.
Sur le plan de la réglementation, en 1991 également:
règlement sur les carrières et sablières, ça
s'imposait et rapidement; règlement sur les neiges usées en
concertation avec le monde municipal, l'UMQ, l'UMRCQ, table
Québec-municipalités; règlement sur les déchets
solides, de façon à permettre au public qui veut devenir
propriétaire ou gestionnaire d'un site d'enfouissement de refuser des
déchets qui proviendraient de l'extérieur; règlement sur
l'entreposage des pneus hors d'usage, à la demande du ministre de
l'Environnement et du ministre de la Sécurité publique. Suite
à ce qui était arrivé, ça s'imposait que nous
agissions rapidement.
Nous avons présentement des règlements qui sont
prépubliés et en période de consultation, et vous
êtes consultés: règlement sur les pâtes et papiers;
règlement sur les déchets biomédicaux qui va être en
application bientôt; règlement sur les attestations
d'assainissement que nous avons annoncé la semaine dernière et
qui rejoint exactement une de vos recommandations, entre autres, du
mémoire. A part ces actions, nous avons également modifié
la politique de protection des cours d'eau qui ne s'appliquait, avant qu'elle
soit modifiée, qu'aux affluents directs du Saint-Laurent. Tout le reste
du Québec n'était pas protégé ou le monde municipal
n'avait pas la possibilité de les protéger. Ça n'a pas
été aussi facile que ça peut paraître de
l'extérieur de convaincre l'ensemble des Intervenants gouvernementaux et
autres.
Nous avons également remis à jour le plan d'urgence suite
aux catastrophes qui étaient arrivées, et ça nous a permis
d'Intervenir avec efficacité à Saint-Léonard-d'Aston, dans
le cas des pneus à Saint-Amable, etc. Il fallait que ce soit fait au
ministère de l'Environnement. Nous avons créé des
réserves écologiques. Quand je suis arrivé comme ministre
de l'Environnement, la loi existait depuis 1974. Il y avait 21 réserves
écologiques de créées dans l'ensemble de la province de
Québec. Depuis deux ans, nous en avons créé 11 nouvelles,
dont une dans la magnifique circonscription électorale de
Brome-Missisquoi. Présentement, II y a sept dossiers très actifs
au niveau du Conseil des ministres ou du bureau du ministre pour la
création... Nous pensons atteindre nos objectifs de création de
39 dans notre plan triennal. Le cap est bon.
Ce qui est passé inaperçu, le ministère de
l'Environnement - ça, ça rejoint vos préoccupations
également - siège à l'important comité
interministériel sur le développement économique, ce qui
fait que, lorsque la SDI ou un organisme gouvernemental investit ou devient
partenaire avec une entreprise, il faut qu'il soit en règle avec le
ministère de l'Environnement. C'est semaine après semaine que le
ministère de l'Environnement accomplit ce nouveau rôle depuis
1989.
Ça peut vous apparaître comme n'étant pas beaucoup.
Je vous dis qu'on a pallié l'urgence, corrigé les
problèmes d'avant-hier, d'hier. On n'est pas encore parvenus à
maîtriser le présent comme il faut. Ça fait que ne nous
demandez pas si on est parvenus à maîtriser l'avenir comme il
faut. C'est là que nous en sommes, comme ministère de
l'Environnement du Québec.
Dans votre mémoire comme tel, je vais corriger une inexactitude,
parce que je ne veux pas que ça reste en plan. À la page 15:
«Le service juridique se fait souvent rabrouer par les juges sur la
façon dont il présente ses dossiers. L'exemple récent dans
la cause Noranda démontre bien ce problème.» Je ne peux pas
laisser passer ça, on avait donné le mandat au privé dans
la cause Noranda. Ce n'étaient pas les fonctionnaires, les juristes du
ministère.
M. Simard: J'imagine que c'était encadré par le
ministère, que le travail a été un peu encadré par
les services juridiques du ministère.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, pas quand le mandat est
donné au privé. On donne le mandat au privé... D'ailleurs,
c'est passé aux engagements financiers et on a eu des questions de
l'Opposition sur l'ampleur de la facture.
M. Simard: Donc, à tout le moins, le choix de la firme,
à ce moment-là, est peut-être discutable...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): écoutez...
M. Simard: ...si on lit bien les conclusions du juge.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non non, je ne tenais pas à
partir une polémique. Je tenais à ce que...
M. Simard: Oui, mais je...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quand les gens méritent
d'être blâmés, ils méritent de
l'être; quand ils ne méritent pas de l'être, ils ne
méritent pas de l'être. Je ne voulais pas qu'on en ajoute à
la situation.
On tombe à vos recommandations. On passe à travers vos
recommandations. «L'UQCN recommande que le ministre de l'Environnement
confie un mandat d'une durée maximale de six mois à une firme
spécialisée qui examinera de fond en comble, etc.» Moi, je
vous dirai qu'à l'heure actuelle, pour le moment, je me suis fié
à la haute direction du ministère pour l'analyse du diagnostic
comme tel. Ce sont les hauts fonctionnaires qui ont fait le diagnostic et qui
ont proposé les solutions. Ils connaissent le ministère sur le
plan organisationnel mieux que le ministre et mieux que, je pourrais dire,
quiconque. On peut les critiquer, on peut affirmer qu'ils ne connaissent pas
ça. Vous demandez que ce soit revérifié par quelqu'un de
l'extérieur. Ce n'est peut-être pas une idée que je suis
prêt à rejeter du revers de la main. Si leur travail est bien
fait, il est bien fait.
M. Simard: Si je peux me permettre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Deuxième recommandation...
Je vais les passer...
M. Simard: D'accord.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et, après ça,
vous reviendrez sur l'ensemble. La deuxième recommandation:
«...tienne compte des conclusions [...] de la commission parlementaire
chargée d'examiner le processus d'évaluation environnementale au
Québec». Oui, nous avons l'intention d'en tenir compte.
D'ailleurs, toutes les organisations... Vous avez participé à ces
audiences, les députés y ont consacré du temps; moi,
j'attends impatiemment le dépôt à l'Assemblée
nationale. On m'a quasiment rassuré en me disant que ce serait la
semaine prochaine.
Mme Pelchat: On a une réunion de travail, la semaine
prochaine.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Réunion de travail la
semaine prochaine...
M. Lazure: Pour finaliser.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour finaliser.
L'autre élément: «la mise en vigueur
accélérée des sections pendantes des 13 lois et 30
règlements». J'ai eu cette tentation, à un moment
donné, de les mettre en vigueur en bloc. C'est que certaines lois datent
d'il y a un peu plus de 10 ans, certains règlements aussi. Les mettre en
vigueur bêtement créerait autant de problèmes qu'on
pourrait en régler. Finalement, il y a un équilibre. Mais, vous
avez des sections, entre autres, de la loi sur l'administration qui se doivent
d'être mises en vigueur rapidement. Sur les évaluations
environnementales, sous réserve du rapport que les parlementaires vont
me faire, vous avez le Programme de réduction des rejets industriels.
Vous en avez beaucoup qui méritent d'être mis en application.
Votre recommandation va dans le bon sens. «L'UQCN recommande que le
Québec se dote d'un plan vert d'ici la fin de 1993.» Dans la
situation actuelle, moi, je préfère continuer à travailler
avec la documentation, l'excellente documentation - «Un nouveau cap
environnemental», vous en avez fait mention - que M. Lincoln a
laissée. Je pense que ça doit demeurer, pour le moment,
l'orientation privilégiée du ministère de l'Environnement
du Québec. Ça, ça rejoint peut-être un petit peu la
prochaine recommandation, d'ici à ce que la table ronde puisse produire
possiblement un plan vert. Je pense que vous seriez les premiers à nous
reprocher l'élaboration d'un plan vert sans la table ronde. Il y a une
combinaison de table ronde et de plan vert à laquelle je n'arrive pas
à échapper comme telle.
Sur votre recommandation: «indépendant de l'appareil
gouvernemental», moi, je vous dirai que je n'ai jamais fait
d'ingérence politique au niveau de la table ronde comme telle. Votre
suggestion que le ministre des Finances et le Conseil du trésor y
siègent est une suggestion qui est heureuse. Je pense que, lorsqu'on
arrive aux décisions environnementales, l'aspect financier est
important. «L'UQCN recommande que le gouvernement du Québec et le
ministre de l'Environnement accentuent l'application du principe du
pollueur-payeur en généralisant et en intensifiant le
système des redevances, droits et tarifs et en favorisant la mise en
place de taxes vertes visant à restreindre l'utilisation de nuisances
écologiques...» C'est exactement le sens de la
réglementation que nous avons prépubliée la semaine
dernière sur les attestations d'assainissement. Je pense que ça
va dans ce sens-là. Si vous voulez critiquer ce règlement, il est
en consultation présentement et nous sommes ouverts à la critique
dudit règlement.
M. Simard: Nous le ferons.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): «Que le gouvernement du
Québec accepte de consacrer les revenus provenant de ces redevances et
taxes à la résolution des problèmes
environnementaux...» Je vous remercie de votre appui dans cette
démarche parce que je pense que, dans le contexte économique
actuel, les ministères sont un peu gelés sur le plan financier et
que le ministère de l'Environnement, qui est le plus jeune et le plus
démuni, compte tenu de ses responsabilités, se doit d'être
inventif et de passer à travers. Il ne peut pas se limiter à sa
croissance actuelle ou à sa taille actuelle pour relever les
défis. C'étaient là mes premiers
commentaires. Je vous reviendrai après vos réactions ou
après les réactions de M. Lazure.
M. Côté (Guy L): Je suis très heureux
d'entendre les commentaires de M. le ministre et, particulièrement, la
liste très impressionnante des réalisations qui ont
été faites depuis deux ans. Je considère que cette liste
appuie beaucoup notre prétention que le domaine de l'environnement est
un domaine extrêmement mouvant et en progression constante. Nous avons
reçu d'ailleurs de votre ministère, M. Paradis, le document
«Regard sur l'environnement en 1991» qui a été
préparé pour le Conseil canadien des ministres de
l'Environnement, que vous connaissez bien. Ce document faisait état de
quatre principes moteurs des politiques environnementales; le premier,
très important, étant la détérioration continuelle
de la qualité de l'environnement, c'est ce qui est dit ici.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, c'était vrai, sauf que
le ralentissement économique qu'on a connu au Québec cette
année...
M. Côté (Guy L): C'est ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...a diminué-La pollution
industrielle, quand l'entreprise ferme, elle disparaît.
M. Côté (Guy L): C'est un problème
environnemental qui touche tout le pays et l'Amérique du Nord. Le
deuxième, c'est les préoccupations soutenues de la
collectivité, qui est un phénomène assez récent
depuis 1985, mais qui fait, par exemple, que les groupes environnementaux comme
le nôtre se présentent ici.
Le troisième, c'est l'importance des questions internationales.
Le quatrième, le coût des approches traditionnelles. Il est
indiqué «qu'aucun pays n'aura les moyens de défrayer une
politique environnementale exclusivement axée sur des mesures
correctives.» Vous hochez la tête et avec raison. Votre
ministère est un domaine mouvant et le projet qui nous réunit
ici, aujourd'hui, est un projet de réforme structurelle.
J'ai, moi-même, participé à une étude
à l'Office national du film où j'étais autrefois
engagé et où il y avait des problèmes d'organisation. La
première idée qu'on a eue, ça a été d'avoir
un comité interne. J'y ai participé, d'ailleurs. Comment
réorganiser l'Office national du film pour que ça fonctionne
bien? Mais, finalement, nous nous sommes rendu compte qu'une étude
externe présente des avantages énormes à la condition
qu'elle ne soit pas vue comme un instrument politique de désaveu de la
situation actuelle, mais beaucoup plus comme un instrument
d'amélioration. Les études externes ont ceci qu'elles apportent
une façon de voir que ni les hauts fonctionnaires ni les cabinets
politiques ne peuvent avoir.
À l'heure actuelle, ayant suivi un peu tous les mémoires
qui ont été présentés à la commission
parlementaire sur les évaluations d'impact, les groupes
écologistes, les promoteurs, HydroQuébec et tous les
investisseurs se plaignent du fonctionnement. Ça semble être
universel. Ce n'est pas par manque de bonne volonté, mais notre
recommandation d'une étude externe demeure. Il me semble que vous
devriez l'examiner avec beaucoup d'attention avant de réexaminer le
projet de loi 142. Ce projet est un projet administratif et il doit être
examiné à la lumière d'une étude sérieuse.
On pourrait même l'appeler une évaluation d'impact Christian.
M. Simard: Non, je vais les laisser parler et revenir
peut-être sur des points des recommandations, en réponse.
Habituellement, je crois que vous fonctionnez ainsi: vous faites vos remarques,
M. Lazure les fait et, ensuite... Je ne voudrais court-circuiter personne.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On fonctionne à la bonne...
On n'est pas trop rigoureux sur la procédure.
M. Simard: Bon, directement sur les recommandations,
naturellement, je ne resterai pas sur le point du mandat externe, mais
l'idée d'un plan vert, je pense que c'est important. Quand on dit qu'il
y a une table ronde et qu'on ne veut pas séparer ça, disons que
je ne suis pas d'accord avec l'analyse du ministre sur la non-ingérence
politique dans la table ronde, pour l'avoir vécu intimement et pour
avoir vu la présence extrêmement forte de membres du cabinet,
notamment, au niveau de la table ronde et de son comité de coordination,
l'absence aussi d'un mandat très clair de production d'un plan vert
à cette même table, la difficulté d'avoir des
réunions fréquentes et intensives de travail avec les membres de
la table ronde. Pour l'avoir vécu, là, je vous dis ça. (11
h 15)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez. Sur la fréquence
des réunions, je tiens à être clair. Chaque fois que le
secrétariat a souhaité réunir la table, je n'avais qu'une
condition: c'est que les documents soient sur mon bureau 10 jours avant pour
que j'en prenne connaissance. Chaque fois que les documents ont
été sur mon bureau 10 jours avant, la table a été
convoquée.
M. Simard: Disons que, moi-même, ayant insisté lors
d'une réunion, étant à ce moment-là membre de la
table, très techniquement, pour avoir une réunion et qu'on la
cédule d'avance - étant donné que ces gens-là sont
très occupés - j'ai eu besoin d'avoir des appuis, notamment de Me
Drouin et tout ça. Ce n'était pas du tout évident, la
volonté de... sous prétexte que c'est effectivement des gens durs
à réunir, qu'ils sont nombreux, qu'ils ont un agenda et qu'ils
ne
peuvent pas passer plusieurs heures. Mais trois réunions de deux
heures chacune en une année, dont la première était un peu
une réunion de photos de joueurs de hockey, c'est-à-dire une
présentation des joueurs à la presse...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous paraissiez bien.
M. Simard: ...eh bien, ça nous est apparu un peu faible.
Dans le contexte actuel, même comme membres des comités
techniques, c'est sûr qu'on se pose de très grandes questions sur
notre participation. On devrait annoncer quelque chose dans ce sens-là
bientôt. Donc, donner un mandat à une nouvelle table
réoxygénée et répartie sur le sens du monde, avec
un mandat de produire un plan vert ou d'aider le gouvernement à la
production d'un plan vert, je pense que ce serait sain.
Maintenant, pour les autres, bien sûr que c'est un appui à
avoir plus d'argent, et ça, on ne vous l'a jamais caché.
C'était pour les réponses sur les recommandations.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ça va.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux, au nom de
l'Opposition, saluer M. Côté, M. Simard et mettre en relief la
contribution remarquable que l'Union québécoise pour la
conservation de la nature offre au Québec, au ministère de
l'Environnement et à la cause de l'environnement. L'UQCN, M. le
Président, c'est l'organisme probablement le plus important, le plus
imposant, non seulement par le nombre de ses membres individuels ou par
association, mais aussi par la qualité de ses interventions. Je pense
que le ministre et les membres de la commission, des deux côtés de
la table, doivent accorder une attention toute particulière aux
propositions que fait l'UQCN en regard du projet de loi qui est
présenté par le ministre.
La prise de position est claire, elle est bien étoffée.
Comme la plupart des groupes qui sont venus, je pense que vous faites bien
ressortir que, plutôt que de démolir le ministère comme il
existe actuellement, il vaudrait mieux faire un effort de rénovation, de
rénovation plutôt que de démolition. L'Opposition se dit en
accord avec vos recommandations; on n'a pas de dispute avec vos
recommandations. Juste un point particulier: le comité de
révision. Je constate que vous épousez, que vous partagez les
vues du Centre québécois du droit de l'environnement qui est venu
nous faire part de sa position. C'est ce que l'Opposition appuie aussi.
Maintenant, la table ronde, on peut s'y arrêter. Mais, avant,
juste une autre remarque pour réagir aux propos du ministre. Il dit, en
réponse à votre suggestion de faire faire une étude par
une firme extérieure: J'ai une bonne étude qui a
été faite par mes hauts fonctionnaires. C'est ce qu'il nous dit.
Je suis obligé de prendre sa parole. Par contre, je suis obligé
de lui dire: De deux choses l'une: ou bien vos hauts fonctionnaires ne sont pas
branchés sur les professionnels de votre ministère, notamment les
ingénieurs de votre ministère, parce que autant le Syndicat de
professionnels du gouvernement s'oppose au projet de loi, autant les
ingénieurs de son ministère s'opposent au projet de loi. Alors,
est-ce que les hauts fonctionnaires de son ministère ont consulté
les professionnels, notamment les ingénieurs, oui ou non? S'ils les ont
consultés, ils n'ont sûrement pas tenu compte de leurs opinions,
de leurs recommandations puisque ces deux groupes fort importants, les artisans
principaux de son ministère, sont opposés à la
création de cette nouvelle structure.
Par contre, il vient nous dire que ses hauts fonctionnaires lui
recommandent d'aller de l'avant. Je soupçonne que certains de ses hauts
fonctionnaires sont d'accord avec le projet de loi, tel qu'il était
présenté initialement, à savoir qu'il allait être
quasi autonome et qu'il allait s'autofinancer, donc, qu'il était
voué à un avenir prometteur quant au développement, avec
de l'argent nouveau. Le ministre, d'ailleurs, s'est promené dans son
ministère - nous le savons de source sûre - encore
récemment, faisant croire aux hauts fonctionnaires que, bon, il ne l'a
pas eu, l'autofinancement, mais qu'il va l'avoir plus tard. Il va l'avoir plus
tard. Ça, on le sait. Mais, c'est grave, ça. C'est grave parce
qu'il laisse encore planer l'illusion. C'est normal que les fonctionnaires qui
croient vraiment à la cause de l'environnement se laissent tenter par la
perspective qu'il y aura de l'argent nouveau, donc des effectifs nouveaux, donc
des actions nouvelles.
Je pense, M. le Président, que le ministre doit retomber sur
terre et il ne doit pas vendre des illusions à ses fonctionnaires. Il
doit écouter aussi les fonctionnaires beaucoup plus qu'il ne le fait.
L'UQCN fait remarquer que le ministre n'est pas proche de ses fonctionnaires.
L'UQCN a absolument raison, M. le Président. Cette remarque-là
nous est faite très, très souvent que le ministre n'est pas en
contact assez étroit avec ses fonctionnaires.
Je reviens à votre mémoire. Vous parlez de la
présence du ministère des Finances et du Conseil du trésor
à la table ronde. Je pense que c'est fort pertinent comme suggestion.
Est-ce que vous pourriez élaborer un peu plus sur des changements qui
seraient apportés à la table ronde pour la rendre plus
vigoureuse? Moi, personnellement, je n'ai pas d'objection à ce que la
table ronde soit l'instrument sur lequel le ministre compte pour
élaborer un plan vert, mais encore faut-il que le mandat soit clair.
Est-ce qu'il est clair, le mandat? Je vous pose...
M. Simard: En fonction de la production d'un plan vert, non.
Très clairement, la réponse est non. C'est conseillé -
d'ailleurs, il faudrait relire le mandat et revoir le mandat - un peu de faire
des suggestions. On ne parle pas vraiment de recommandations formelles au
Conseil des ministres, mais c'est des suggestions qui devraient être
élaborées par la table et remises, si je me souviens bien du
mandat - il faudrait que je revoie le mandat précis actuel - au premier
ministre.
Mais, on n'a senti nulle part... C'est pour ça, d'ailleurs - je
pense qu'il ne m'en voudra pas de dire son nom - que la personne qui a dit:
«La queue du chien qui mène le chien», c'est Yvon
Charbonneau, dans un comité technique. Lorsqu'il travaillait en
comité technique, il disait: On n'a pas de mandat de la table
elle-même, on ne sait pas vers où aller, on fait des fiches
techniques, on s'interroge sur tout, mais on n'a pas de commande
précise. C'est le comité technique, à ce moment-là,
qui fournit à la table, alors que la table n'a pas eu le temps de faire
un minimum de réflexion pour dire: Je veux que les comités
techniques travaillent sur un plan vert, je veux que les comités
techniques travaillent sur telle, telle chose. Elle n'a pas eu le moyen et on
ne peut pas dire que le président a dynamisé la table dans ce
sens-là. Le problème est... C'est pour ça qu'un des
participants a dit que c'est la queue du chien qui menait le chien.
Bien sûr, ça s'est «cumulé», le
problème interne, jusqu'à un certain désaveu du travail
des comités techniques ou de la façon dont c'était
mené et le départ, comme vous le savez, de M. Harvey Mead.
Comment redynamiser cette table-là? Je pense que c'est en lui donnant
des ressources suffisantes, en balançant mieux la participation
gouvernementale et la participation non gouvernementale. C'est aussi en
garantissant...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est gouvernemental.
M. Simard: C'est en balançant mieux la participation
gouvernementale et non gouvernementale à l'intérieur des
comités techniques et de la table, en termes de proportions.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Excusez, si je suis sur votre
temps. J'aurais tendance à être d'accord, au moins pour que les
Finances soit membre de la table parce que tout passe, à un moment
donné, par le ministère des Finances. Ça, ça va
équilibrer plus favorablement en faveur du gouvernement encore.
Là, je fais juste mentionner...
M. Simard: Donc, on aura à retravailler cette
chose-là. Effectivement, je vous l'avais dit, je l'ai noté que
vous étiez en faveur d'un poste. Mais que cette
présidence-là et que le secrétariat soient formellement
indépendants de l'appa- reil gouvernemental pour pouvoir avoir une
liberté de penser et de produire des propositions. Malheureusement,
comme il est intégré actuellement à l'appareil
gouvernemental, le problème est que les ministères qui sont
là défendent leur politique actuelle et, souvent, assurent un
certain blocage ou un certain frein en ne voulant pas que les comités
techniques ou que la table aillent plus loin que la politique actuelle du
ministère, ce qui pourrait peut-être embarrasser le ministre pour
lequel travaillent cesdits fonctionnaires. Donc, ils ont cette
capacité-là, actuellement, un peu de bloquer une réflexion
externe qui, à ce moment-là, dynamiserait le gouvernement en lui
fournissant un «think tank», un réservoir de pensées
et d'actions bien précises et, à ce moment-là, en
produisant un plan vert.
On peut critiquer le plan vert du gouvernement fédéral
à bien des égards ou le processus, comment il a été
bâti, sauf que ce plan vert continue, même en période de
récession, d'être appliqué, ce qui est quand même
tout à fait remarquable, et aussi constitue vraiment une approche
intégrée en questions d'environnement. Et ça nous
apparaît, pour nous, un exemple à suivre et même à
dépasser pour le Québec.
M. Côté (Guy L): Puisque notre temps est presque
terminé, je pourrais...
M. Lazure: Non non, vous êtes sur mon temps. Allez-y, M.
Côté. Il n'y a pas de problème, vous avez la parole
M. Côté (Guy L.): C'est tout simplement pour revenir
à ce qui nous réunit ce matin: un projet de loi spécifique
plutôt que le fonctionnement général du ministère.
Vous avez sans doute remarqué - peut-être pas pour la
première fois - l'en-tête, à la première page, de
l'Union québécoise, «Penser globalement et agir
localement». Il m'est venu à l'idée que ce projet de loi
souhaiterait que ce soit fait par deux structures différentes. C'est un
peu extensionner la réforme de M. Paradis, mais elle n'est pas
dénuée de fondement.
Je crois que le ministre de l'Environnement devrait
réfléchir à beaucoup plus long terme sur les effets de
scinder en deux une fonction qui, jusqu'à maintenant, était
intégrée. Il peut y avoir des effets à court terme en ce
qui concerne la rapidité d'exécution de l'émission de
certificats, etc. Mais, jusqu'à maintenant, vous nous avez donné
très peu d'éléments pour nous convaincre que cette
réforme-là est non seulement nécessaire, mais essentielle,
c'est-à-dire qu'elle va améliorer.
S'il y a des études, nous souhaiterions qu'elles soient connues
S'il n'y a pas suffisamment d'études, nous souhaiterions qu'elles soient
faites. Un changement de ce type-là, une fois qu'il est fait, est
presque irréversible. Lorsque l'Office sera créé et que
son mandat sera donné,
ce n'est pas pour un an ou deux ans. Notre organisme croit que c'est
prématuré.
M. Lazure: M. le Président...
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: ...j'ai deux questions à soulever. Tout de
suite, la première concernant les études, pour enchaîner
avec ce que M. Côté vient de dire. Ma question s'adresse au
ministre. D'autres groupes en ont parlé. Mais, là, puisqu'il a
fait allusion aux recommandations de ses hauts fonctionnaires, je lui demande
formellement de déposer à cette commission, à la prochaine
séance, les études de ses hauts fonctionnaires qui lui font la
preuve qu'une telle structure est nécessaire pour améliorer la
qualité des services. J'espère que le ministre, à la
prochaine séance, soit cet après-midi ou la semaine prochaine,
pourra nous déposer ces études. On veut être convaincus. On
ne l'est certainement pas. On pourra prendre connaissance de ces
études.
Ma deuxième question à l'UQCN, c'est... Je reviens
à la table ronde. Une des caractéristiques ou un des objectifs,
j'imagine, en créant cette table ronde, c'était d'avoir des avis
d'un grand nombre de personnes compétentes venant de divers milieux, il
existe, par contre, le Conseil de la conservation et de l'environnement, qui
est un conseil consultatif fort important, qui émet de très bons
avis, très souvent pas suivis par le ministre de l'Environnement,
malheureusement, notamment, sur les projets récréotouristiques
dont on ne parlera pas aujourd'hui.
Mais, je demande à M. Simard, à M. Côté:
Est-ce qu'à la table ronde on vous a expliqué un peu les
relations entre votre table ronde et le Conseil de la conservation?
Le Président (M. Garon): M. Simard.
M. Simard: Je suis peut-être un peu... Si vous me
permettez, ça ne me tente pas énormément de
répondre à votre question en ce sens que, un peu... Il y a eu des
liens. Bien sûr, on a étudié, par exemple, un projet - qui
est d'ailleurs très, très révélateur de la
productivité de la table ronde - soit la déclaration sur la
qualité du milieu de vie, qui avait fait l'objet d'un commentaire et
d'analyses très sérieuses du Conseil de la conservation et de
l'environnement. À l'époque, c'était le Conseil de -
j'oublie son premier nom - ce n'était pas encore le Conseil de la
conservation et de l'environnement.
M. Lazure: Consultatif de l'environnement. (11 h 30)
M. Simard: Comme quoi ça devient vite vieux. Ces
affaires-là, c'est comme les ordinateurs. Donc, on avait avisé
là-dessus et on a eu un certain... Mais je discutais récemment
avec la présidente par intérim - encore là, il y a des
problèmes présidentiels - Mme Françoise Guénet-te,
si je ne me trompe pas. Elle me disait qu'au Conseil ils avaient ressenti une
certaine frustration du manque de relations étroites avec l'actuelle
table ronde.
Maintenant, ce qu'il est important de dire là-dessus, ce n'est
pas tellement... Le fonctionnement de la table ronde est un problème en
soi qui n'est pas directement lié à la question du
problème de fonctionnement du ministère, mais directement
lié à: comment donner une volonté politique, une vision
environnementale, des objectifs clairs, un agenda environnemental à un
gouvernement ou à un ministère qui ne semblent pas en vouloir
plus qu'il ne le faut. Pour moi, c'est un certain problème qu'on a
ressenti, chez nous, au niveau de la table ronde.
Par exemple, est-ce que le gouvernement du Québec peut nous dire
clairement s'il a l'intention ou non d'adopter un plan vert? Partant de
là, tout le monde travaille en fonction d'articuler ce plan vert
là; ça devient une priorité gouvernementale et tout le
monde y travaille. C'est un peu comme l'EPA aux États-Unis - tiens,
c'est un exemple pertinent, je pense - qui dit: Vous avez des normes à
accomplir au niveau de l'industrie de l'automobile. Pendant deux ans, les
automobilistes ou les producteurs d'automobiles disent: C'est impossible, c'est
impossible, c'est impossible. Après, ils travaillent comme des fous.
C'est un peu le «deadlock» de 1993 pour l'Europe. Donc, c'est ce
genre de challenges, de grands défis sociaux en termes d'environnement
où tout le monde travaille. Faites-nous un plan vert et,
éventuellement, on le regardera. C'est surtout ça qui, à
ce moment-là, est ressenti.
Maintenant, ce qui m'inquiète plus particulièrement dans
la réponse que le ministre a faite tout à l'heure sur la mise en
place accélérée des règlements et des lois, tout en
admettant que ce n'est pas facile, tout en admettant que ça prend un
financement et tout en admettant qu'il doit y avoir un certain ordre dans
ça, il se pose une question de contrôle démocratique
extrêmement important. On a, ici, une Assemblée nationale qui,
dans certains cas, a adopté des lois à l'unanimité et je
suis persuadé que les membres pensent qu'elles sont appliquées.
Il y a des grands pans de ces lois-là qui diminuent leur économie
interne, qui font en sorte qu'elles ne remplissent pas l'objectif qui
était mis dans ces pages liminaires. Je cite seulement de mémoire
la loi 99 modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement où
on disait que toute personne devant construire dans des milieux humides, zones
inondables, prairies, etc. - c'est une inversion du fardeau de la preuve -
devait faire la preuve qu'elle ne détruisait pas de milieux et faire la
preuve que son aménagement ou que sa construction ne détruisait
pas d'habitats. Ça, tout le monde l'a adopté à
l'unanimité, mais personne
ou très peu de gens savent que ça a été
suspendu par le règlement d'administration et que ce n'est absolument
pas appliqué. Donc, c'est un problème de société
où on légifère et où on promet des
règlements avec la législation qu'on ne livre pas toujours.
Au bout du compte, quand on se promène en Nouvelle-Zélande
avec notre législation et nos règlements, ils doivent trouver
qu'on est extra-ordinairement merveilleux, dans cette société
québécoise qui traite son environnement si merveilleusement.
Mais, ils ne savent pas, en Nouvelle-Zélande, que, finalement, il n'y en
a pas la moitié qui est appliquée. Ça s'est fait avec le
Bureau d'audiences publiques sur l'environnement qui servait, dans des
colloques, d'exemple sur le règlement 2n, 2g et 2p pendant de nombreuses
années, tout en ignorant parfaitement que ce règlement
n'était jamais appliqué. Mais ça cause un problème
énorme, je pense, dans les faits, un problème d'éthique
qui devra faire l'objet de... Si on ne les applique pas, qu'on les abroge.
M. Lazure: Merci, M. Simard. Je voudrais demander au ministre,
puisqu'il me reste encore quelques minutes, quand il a parlé de l'avis
de ses hauts fonctionnaires: Est-ce qu'il a demandé l'avis de son
Conseil de la conservation et de l'environnement? Est-ce qu'il a demandé
l'avis de la table ronde? Est-ce qu'il a demandé ces deux
avis-là...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le Conseil nous fournit
régulièrement...
M. Lazure: ...sur le projet de loi?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...des avis sur la structure du
ministère. J'en ai déjà reçu du Conseil. Sur la
table ronde comme telle, il faut comprendre le fonctionnement de la table
ronde, qui a été partiellement expliqué par M. Simard. La
table ronde est maîtresse de son agenda parce que, si le ministre impose
un agenda, il est rapidement accusé d'ingérence politique. Donc,
le ministre a été un animateur et a laissé tous les
membres de la table ronde définir leurs priorités et s'entendre
sur les priorités sur lesquelles - je pense que M. Simard peut en
témoigner - ils souhaitaient travailler. Ça n'a pas
été une des priorités qui ont été retenues
par la table. Je n'en tiens pas rigueur à la table, ce serait de
l'ingérence que d'en tenir rigueur.
M. Lazure: M. le Président, je pense que le ministre fait
une petite pirouette. Il ne s'en tirera pas comme ça. Ce n'est pas de
l'ingérence politique et personne ne va l'accuser de faire de
l'ingérence politique s'il donne des commandes précises à
la table ronde, telles que: Formulez-moi, d'ici un an, un plan vert. Ça,
c'est une commande précise et tout le monde serait content.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le Conseil fonctionne un peu comme
ça. Le ministre passe des commandes précises au Conseil, mais le
Conseil conserve quand même sa possibilité d'émettre,
proprio motu, des avis sur des sujets d'intérêt. Au niveau du
fonctionnement de la table, si le ministre s'était aventuré
à passer des commandes, le linge aurait été
déchiré sur la place publique.
M. Lazure: Bon, ce n'est pas ce qu'on entend de
représentants qui sont à la table ronde, M. le Président,
mais peu importe. Là, je demande une question plus précise, je
reviens à une des recommandations de l'UQCN. Comment le ministre
réagit-il à la recommandation que le gouvernement relance la
table ronde sur l'environnement avec une présidence et un
secrétariat indépendants de l'appareil gouvernemental? C'est
quoi, M. le ministre, votre réaction à ça?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ma réaction à
ça, c'est qu'à la fois, dans le même paragraphe, on veut
que le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor
y siègent - j'imagine, en plus des autres ministres actuels - et, en
même temps, on souhaite que ce soit indépendant de l'appareil
gouvernemental. C'est, dans le même paragraphe, beaucoup
d'éléments à concilier.
M. Simard: Je ne comprends pas. Actuellement, vous dites que la
table est maîtresse de son agenda. Donc, vous prétendez qu'elle
est indépendante. Il y siège beaucoup de ministres. Disons que,
si vous avez des problèmes avec la proposition, vous devez avoir des
problèmes avec votre propre fonctionnement de table ronde parce que
c'est ce que vous prétendez qu'elle est présentement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. C'est à-dire que ce
que l'on a fait, c'est qu'on a composé une table où la
participation gouvernementale est importante, les autres participations non
moins importantes. Là, vous nous suggérez d'augmenter la
participation gouvernementale. On vous dit que ça nous apparaît
intéressant, le ministère des Finances, entre autres. Le Conseil
du trésor, c'est... Mais, les Finances, là...
M. Simard: C'est une façon de rebalancer, M. le ministre,
justement, c'est-à-dire que je crois que c'est là où
ça peut s'harmoniser. Vous pouvez ajouter des représentants
gouvernementaux. Si la présidence est indépendante et si son
secrétariat est indépendant, à ce moment-là,
ça clarifie beaucoup les rôles de tout un chacun et ça peut
permettre à des gens du ministère des
finances et du conseil du trésor, tout en sachant que la
présidence est indépendante et que le groupe peut émettre
des propositions au-delà des politiques actuelles du gouvernement,
même une plus grande marge de manoeuvre. ça nous apparaît
possible.
M. Lazure: M. le Président, je m'excuse. Il me reste
seulement une minute; alors, je vais l'utiliser, si vous permettez. Je veux
simplement faire remarquer au ministre qu'il peut se placer la tête dans
le sable aussi longtemps qu'il le voudra, mais la table ronde ne fonctionne
pas. Son sous-ministre adjoint au développement durable, qui
était secrétaire de la table ronde sur le développement
durable, nous a dit publiquement, il y a quelques mois: Ça ne fonctionne
pas. L'UQCN comme d'autres groupements viennent nous dire: Ça ne
fonctionne pas. Alors, je pense qu'il faudrait que le ministre ait la modestie
de dire: C'est vrai, ça ne fonctionne pas et je vais prendre en bonne
considération les propositions qui viennent de l'UQCN et d'autres
groupements pour améliorer le fonctionnement.
Je pense qu'une des choses utiles qu'il pourrait faire, ce serait de
demander à cette table ronde: Qu'est-ce que vous pensez de mon projet de
loi de créer un office? On lui suggère fortement de le faire.
Maintenant, les principaux participants à la table ronde nous ont
donné leur opinion. On peut présumer que ce serait assez
éclatant comme consensus.
M. le Président, au nom de l'Opposition, je remercie les
représentants de l'UQCN encore une fois pour leur excellent
mémoire et j'espère que le ministre va en tenir compte.
Le Président (M. Garon): Au nom de la commission, je
remercie les représentants de l'Union québécoise pour la
conservation de la nature. Je suspends les travaux de la commission pour
quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 39)
(Reprise à 11 h 43)
Le Président (M. Garon): La commission de
l'aménagement et des équipements reprend ses travaux en demandant
à la Confédération des syndicats nationaux, avec sa
vice-présidente, Mme Céline Lamontagne, de s'approcher de la
table des délibérations avec les gens qui l'accompagnent. Nous
aurons, à toutes fins pratiques, 45 minutes pour l'audition du
mémoire. Normalement, il est prévu une heure: 20 minutes pour
votre exposé, ensuite, 20 minutes pour les libéraux et 20 minutes
pour l'Opposition officielle. Mais, comme on doit terminer nos travaux à
12 h 30 - parce qu'il y a des caucus et, après ça, la
période de questions à 14 heures - ça pourrait être
15-15-15, si vous voulez. Mais, ce que vous prendrez en plus, on le soustraira
aux deux partis politiques; ce que vous prendrez en moins, ils pourront le
prendre pour poser des questions additionnelles, s'ils en ont le
désir.
Confédération des syndicats nationaux
(CSN)
Mme Lamontagne (Céline): Très bien. Alors, merci et
excusez-nous de notre retard. Ce n'est vraiment pas très beau sur la 20,
il y a eu des accidents assez horribles, semble-t-il.
Je vais vous présenter d'abord les personnes qui m'accompagnent:
Serge Quenneville, conseiller syndical à la CSN, et Roger Laroche qui
travaille aussi à la CSN. Ces deux personnes ont participé
à la recherche entourant notre mémoire sur l'Office de
l'environnement. Moi, Céline Lamontagne, je suis vice-présidente
de la CSN. Je vais même essayer d'être plus courte que les 20
minutes habituelles, pour laisser plus de temps aux questions.
Je veux juste signifier, d'entrée de jeu, que - peut-être
que certains s'en souviennent - la CSN a tenu, en novembre dernier, un colloque
sur l'environnement. On a pris conscience - ça a été
vraiment une prise de conscience importante pour le mouvement - de la
tâche importante à accomplir dans le domaine de l'environnement.
Mais, je devrais dire aussi qu'à l'instar d'autres organismes qui nous
ont précédés et peut-être d'autres qui nous suivront
l'étude du projet de loi qui est sur la table actuellement nous a
laissés perplexes, nous a laissés avec plusieurs interrogations
qu'on veut partager avec vous. Je pourrais même utiliser une boutade
populaire et connue et dire que, dans le fond, nous ne sommes ni pour, ni
contre, bien au contraire.
Plus sérieusement, je dirais: Oui, nous sommes d'accord avec le
principe d'un office de l'environnement composé de représentants
de différents secteurs de la population. Nous sommes d'accord que soient
confiées à un office des fonctions de régulation, de
promotion, de conception de programmes, etc. Mais, on peut se demander: Est-ce
là la priorité actuelle du gouvernement? Est-ce que ça
devrait être ça, la priorité actuelle, quand on pense aux
tâches qu'il y a à accomplir en environnement?
Tout le monde le dit, et on le répète: C'est une
réforme qui est essentiellement un transfert de pouvoirs et de
fonctions. On ne voit pas les effets qualitatifs qu'elle peut avoir sur la
promotion de l'environnement et sur la protection même de
l'environnement. Donc, c'est vraiment une réforme administrative qui
nous laisse perplexes, encore une fois, sur les effets qu'elle va avoir sur la
qualité même de notre intervention, comme société,
sur la protection de l'environnement.
Alors, on va essayer de situer plusieurs points: d'abord, des remarques
générales qui
sortent un peu du projet de loi et des remarques plus précises
sur le projet de loi qui est sur la table. D'abord, un premier constat sur une
réforme environnementale ou une réforme législative en
environnement. Nous, on est d'accord pour dire que le développement
durable et la protection de l'environnement doivent s'appuyer, comme ça
a été dit à la Commission mondiale sur l'environnement,
sur une réforme administrative et juridique. Mais on croit qu'il faut
bien voir c'est quoi, la situation actuelle au Québec.
De façon générale - peut-être que le ministre
va partager notre point de vue - on pense que le ministère de
l'Environnement n'a pas les moyens de ses mandats, surtout dans un contexte
où la population est de plus en plus exigeante pour avoir de
l'information, de la transparence et des interventions touchant la protection
de l'environnement. On peut constater que le ministère manque de
personnel, n'a pas les moyens financiers suffisants, que la législation
est en grande partie désuète, qu'il y a des pratiques - en termes
qu'on dirait juridiques ou d'application de la réglementation - qui sont
différentes selon que ce soif des entreprises ou des citoyens. Il y a
aussi une réforme à la pièce avec un processus de
consultation qui n'est pas toujours évident.
Alors, quand on parle de réforme à la pièce, je
vais donner des exembles. On a plusieurs projets, ou parties d'ame$dements
à des projets de loi sur la table ou nouvelles réglementations.
Je pense à la loi 43, à la loi 405, à la loi 65 qui n'a
pas été encore, appliquée, aux audiences qu'on a eues sur
le B/^PE, où on n'a pas encore le rapport. On a aussi certaines autres
réformes réglementaires. Il y a le rapport de la commission
Charbonneau qui est appliqué plus ou moins, en tout cas, sûrement
pas dans son ensemble. Donc, il y a plusieurs petites réformes, mais,
nous, on trouve qu'il serait urgent d'avoir une approche intégrée
en environnement qui soit appuyée sur une large consultation, et qu'on
ait vraiment une réforme administrative complète et transparente
également
Alors, c'est pour ça qu'on propose que le gouvernement inclue son
projet de création de l'Office dans une réforme globale du
ministère de l'Environnement qui soit accompagnée
évidemment d'un énoncé de politique sur la question
environnementale et que, sur cette réforme, il y ait une large
consultation publique. À notre avis, ça inclut qu'il y ait un
énoncé de politique, une réforme juridique et
administrative, si l'on veut, mais qui soit basée sur des principes ou
des objectifs qu'on veut poursuivre en environnement.
En lien avec cette première proposition, on peut constater
également que, si l'Office va créer un nouveau cadre ou une
nouvelle structure, on va tous convenir, par ailleurs, qu'il va hériter
de la législation actuelle, des lois actuel- les qui sont, sur bien des
aspects, désuètes, à notre avis.
Nous, on pense aussi qu'on doit - c'est une deuxième proposition
qu'on vous soumet - accélérer le processus de révision des
lois et règlements pour s'assurer d'un encadrement juridique acceptable
reconnaissant et respectant au maximum le caractère englobant de la
protection et de la gestion de l'environnement. Alors, oui, il faut
accélérer le processus de révision de la
législation et de la réglementation, mais il faut aussi, surtout
- peut-être qu'il y aura des étapes à tenir compte, des
échéanciers à tenir compte - avoir une vue d'ensemble. Il
faut savoir un peu comme société où on s'en va avec toute
cette question de l'environnement.
Un autre aspect, ce sont les mécanismes mêmes de l'office
de l'environnement. D'abord, sur les nominations, nous, on pense qu'il doit y
avoir si l'Office existe - je sais qu'on a annoncé ce matin des
modifications majeures au projet de loi. Sur les mécanismes mêmes
de la composition de l'Office, d'abord, on pense que, pour les nominations au
sein de l'Office, il devrait y avoir une consultation un peu plus large que
celle qui est prévue. On suggère aussi la possibilité
d'ajouter des observateurs et des observatrices pour avoir un plus grand
éventail de représentativité des secteurs de la
société québécoise. On constate aussi que les
pouvoirs du conseil d'administration ne sont pas du tout définis. On ne
parle que des pouvoirs du président ou des personnes qu'il
délègue. C'est un aspect.
Deuxième aspect, on constate aussi que le financement n'est pas
assuré. Il y a eu beaucoup de débats autour de la question du
financement de l'Office et il faut s'assurer que l'Office ait un financement
adéquat. Toujours sur le volet du financement, un autre aspect qui nous
tient à coeur, c'est: Oui, il faut financer des structures, il faut
financer un office ou un ministère qui va faire appliquer la
réglementation, mais il faut s'assurer aussi d'indemniser les victimes
et d'avoir les moyens de faire la restauration de l'environnement Alors, dans
ce sens là. on fait une proposition qui dit que le système de
redevances, qui a fait couler beaucoup d'encre ces derniers temps, serve, entre
autres, à créer un fonds environnemental, basé sur un
système de «sans égard à la faute», dans le
but de restaurer l'environnement et d'en indemniser les victimes. Alors, c'est
deux choses différentes sur le financement de l'Office. On veut, d'une
part, s'assurer que l'Office, s'il existe, ait un financement adéquat
pour répondre à ses nombreux mandats et ne pas faire en sorte
qu'il y ait un arriéré ou qu'il y ait des problèmes de
volume de dossiers. Mais on pense aussi à la question de l'indemnisation
des victimes et de la restauration de l'environnement.
Un autre point sur lequel on s'est attardé brièvement,
mais qui est majeur, à notre avis, ce
sont tous les aspects juridiques pu judiciaires qui sont dans le projet
de loi actuel. Alors, il y a une nouvelle structure qui est proposée.
Les grandes étapes de la structure, à savoir une
reconsidération administrative, un bureau de révision et un
mécanisme d'appel, c'est une procédure qu'on connaît sur
d'autres questions. Mais, ce qu'on peut constater, par exemple, c'est que ce
n'est pas clair. Ce n'est pas clair. Il n'y a pas de délai, par exemple,
pour la reconsidération administrative. Le bureau de révision, on
connaît très peu ses pouvoirs. Sa composition reste vague et, ce
qui est aussi assez surprenant, c'est que la procédure d'appel est
limitative sur certaines questions. Donc, dans certains dossiers, il n'y a pas
de procédure d'appel. On constate aussi que le citoyen ou la population
en général n'a pas accès à certains recours et au
droit d'appel.
Alors, nous, on demande que le gouvernement consacre l'accès de
la population au droit de recours et d'appel en environnement. Toujours, sur
cette question des procédures ou des recours, ce qui est important comme
objectif à viser, ça demeure toujours l'accessibilité du
plus grand nombre à des recours, tout en s'assurant de ne pas
judiciariser considérablement et que ces recours deviennent difficiles
d'accès ou deviennent coûteux, finalement. Alors, il faut
prévoir des mécanismes clairs d'accessibilité pour que le
droit soit en application. En conclusion, nous, on pense que, oui, la question
environnementale est importante, elle doit s'insérer dans le cadre d'un
développement durable. Dans ce sens-là - on en parle dans notre
mémoire, je ne l'ai pas dit tout à l'heure - on trouve important
que le ministère de l'Environnement soit impliqué et qu'il y ait
vraiment de la concertation entre les différents ministères pour
que la question de l'environnement s'insère dans tous les grands
dossiers, particulièrement les dossiers à teneur
économique ou industrielle. Alors, il faut que ça traverse
vraiment toutes les grandes missions du gouvernement. On pense aussi, donc, que
la réforme environnementale, la réforme administrative doit
s'insérer dans des objectifs évidents de développement
durable. Merci.
Le Président (M. Garon): M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Vous me permettrez de
remercier, j'étais pour dire mes anciens amis de la CSN au moment
où j'étais ministre du Travail; je pense que j'ai conservé
avec M. Larose, à travers le temps, un dialogue, pas autant avec les
autres membres, je m'en excuse, ce n'est pas toujours facile sur le plan de
l'agenda. Je vous remercie de votre mémoire. Comme centrale syndicale,
vous avez des choix qui sont parfois difficiles à faire dans le
quotidien. Lorsqu'on parle de décisions au sein d'une entreprise,
respecter l'environnement peut parfois vouloir dire, lorsque l'entreprise
était polluante, des sacrifices énormes.
La CSN, je tiens à le souligner, a été la seule
centrale syndicale, dans le cas du dossier de Grande-Baleine, qui a dit oui
à Grande-Baleine, mais pas sans études ou évaluations
environnementales. Nous avions besoin de cet important support au moment
où la CSN nous l'a accordé. Je tiens à transmettre mes
remerciements à l'ensemble de la centrale syndicale.
Il y a une inexactitude que je ne peux pas laisser passer dans votre
mémoire. On dirait que ça arrive dans tous les mémoires
qu'il y en a une grosse. On la retrouve à la page 7 de votre
mémoire. Le titre est bon, c'est «manque de personnel», mais
le paragraphe qui suit nous indique que le «MENVIQ a fait des coupures
importantes dans ses effectifs depuis plusieurs années».
Ça, ce n'est pas exact. Nous avons eu, à titre d'exemple, en
1989-1990, des crédits additionnels pour 15 000 000 $ et nous avons
créé 200 nouveaux postes avec ces 15 000 000 $. Ce n'est pas
allé strictement dans la création de postes, mais il y a 200
nouveaux postes. L'an passé, c'est 10 000 000 $ additionnels au budget
et c'est une centaine de postes qui ont été ajoutés, je
dirais, particulièrement au niveau des bureaux régionaux du
ministère de l'Environnement du Québec. Donc, il y a une
augmentation d'effectifs. Mais votre titre demeure vrai, nous n'avons pas
suffisamment d'effectifs pour nous acquitter des mandats qui sont les
nôtres et qui croissent quotidiennement.
Sur le plan de la structure du ministère, je vais tenter de vous
résumer la situation. De 1978 à 1989, le ministère est
bâti pour répondre aux crises. S'il y a une crise de
déchets dangereux, on crée une direction générale
des déchets dangereux; s'il y a une crise de pneus, on crée une
direction générale des pneus. On se ramasse avec un organigramme
qui est incompréhensible. On tente de restructurer le ministère
en 1989 en fonction des trois plus importantes sources de pollution:
municipale, industrielle, agricole. On sait que, pour réussir dans
l'application, il faut aller dans les régions: on crée une
division régionale, sous-ministériat à la division
régionale. Corriger les problèmes du passé, c'est bien,
mais il faut maîtriser l'avenir: sous-ministériat au
développement durable. (12 heures)
On tente de régionaliser le ministère. Les effectifs ont
plus que doublé en région au cours des deux dernières
années. On a encore des problèmes de fonctionnement et on tente,
sur le plan de l'organisation, de créer l'Office. Mais, vous avez raison
de le dire, l'Office va continuer à administrer les lois et les
règlements avec les qualités et les vicissitudes qu'on leur
connaît. Là-dessus, on a tenté de boucher des trous -
j'utilise l'expression parce que c'est ça qu'on a fait - de
répondre au plus urgent au cours des deux dernières
années.
En 1990, la loi 65 - pollueur-payeur - que vous avez mentionnée,
vous avez dit qu'elle n'avait jamais été appliquée; je
suis obligé de vous soumettre respectueusement qu'on ne l'a
peut-être pas suffisamment publicise, mais que cette législation a
été utilisée à plusieurs reprises, de
mémoire, dans le cas de Laidlaw-Tricil à Mercier, dans le cas de
la mine Eldorado en Abitibi, dans le cas des terrains de la Balmet à
Saint-Jean-d'Iberville et peut-être - je n'ose pas l'affirmer - dans le
cas de certaines industries dans l'est de Montréal, sur la
décontamination des terrains. Si on n'avait pas eu cette
législation, on n'aurait pu intervenir. On a également
créé la société d'État, RECYC-QUÉBEC,
en 1990.
Sur le plan des règlements, en 1990: la réglementation sur
le contenu en soufre dans le mazout lourd, pour atteindre nos objectifs en
fonction de la réduction des pluies acides. Grâce à la
collaboration de tout le monde dans la société
québécoise, l'un des dossiers où l'on peut dire que les
objectifs ont été atteints et dépassés, même
s'il faut continuer à y travailler, c'est le dossier des pluies acides
comme tel Les objectifs qu'on s'était fixés en 1980, on les a
suivis à la lettre comme ministère de l'Environnement du
Québec.
En 1991, on a accéléré encore sur le plan
législatif: Loi sur la Société québécoise
d'assainissement des eaux, de façon à nous permettre d'aller dans
toutes les petites municipalités à travers le Québec; loi
sur les rejets industriels, de façon à prévoir - on le
verra tantôt - la tarification des rejets industriels, dans le sens que
la CSN nous le propose; loi sur les matières dangereuses parce qu'avant
ça on parlait de «déchets dangereux» et, suite au
rapport de la commission Charbonneau, il a fallu également
légiférer.
Réglementation. Les règlements mis en vigueur au cours de
l'année passée. Carrières et sablières: il a fallu
intervenir de façon urgente; neiges usées: avec l'accord des
municipalités, des municipalités régionales de
comté, l'UMQ, de la table Québec-municipalités; sur les
déchets solides, de façon à permettre aux gestionnaires
publics de refuser les déchets qui proviennent de l'extérieur de
la MRC; règlement sur l'entreposage sécuritaire des pneus:
à la demande du ministre de l'Environnement et du ministre de la
Sécurité publique, suite à certains
événements au Québec.
Les règlements qu'on a prépubliés, qui sont en
période de consultation présentement, qui vous touchent, la CSN.
Pâtes et papiers, entre autres, et vous avez offert une bonne
collaboration à cette réglementation. Les premiers
règlements sur les déchets biomédicaux vont entrer en
vigueur le 1er avril prochain. La semaine dernière, j'ai annoncé
le règlement sur les attestations d'assainissement en milieu industriel;
c'est un règlement majeur. On a des progrès de faits en pollution
municipale. En pollution industrielle, nous sommes encore à
l'état embryonnaire et, dans le domaine agricole, on commence à
peine à mentionner le mot au ministère de l'Environnement du
Québec.
Pendant ce temps-là, on a ajouté à la protection de
nos cours d'eau, une bande de protection sur nos cours d'eau. Avant ça,
il y avait simplement les affluents du Saint-Laurent; maintenant, l'ensemble
des cours d'eau du Québec est visé. On a créé des
réserves écologiques parce qu'il faut laisser aux
générations futures quelques coins de territoire intacts pour
qu'elles puissent comparer les dégâts qu'on a faits ailleurs. On a
créé, au cours des 2 dernières années, 11
réserves écologiques nouvelles; on compte en créer 39
nouvelles au cours des 3 prochaines années. On a amélioré
notre plan d'urgence et je pense que, là, vos travailleurs sont
particulièrement concernés parce que ce sont les premières
victimes, habituellement, dans le cas des interventions d'urgence. Ça
arrive en milieu industriel; ce sont eux qui sont sur les lieux. Et, là
aussi, il y a eu de l'amélioration.
Et, quelque chose qui est ignoré, le ministre de l'Environnement
fait désormais partie non plus simplement du comité
interministériel du développement régional et de
l'environnement, mais il siège également au comité de
développement économique, ce qui fait en sorte que les organismes
gouvernementaux comme la SDI ne participent plus financièrement dans des
entreprises qui ne sont pas en règle avec le ministère de
l'Environnement du Québec.
On a tout fait ça, mais l'insatisfaction de la population envers
le gouvernement ou le ministère de l'Environnement est quand même
présente. Il y avait 70 % d'insatisfaits il y a 2 ans; il en demeure 48
%, 2 ans après, et c'est encore trop. Il faut faire davantage. On tente
de se donner un outil, avec l'Office, qui va nous permettre de mieux
«performer».
Vous posez des questions essentielles. Il y a des corrections à
apporter, vous avez raison de le souligner. La question des droits d'appel, la
question de l'autonomie - vous n'êtes pas le premier groupe - c'est avec
raison que vous soulignez ces événements.
Vous insistez sur quelque chose d'important, le financement. Vous savez
comment c'est important. Le mode de financement par tarification, le mode de
financement par redevances n'est pas inclus dans le projet de loi tel que
déposé. Vous en traitez dans votre mémoire. Si vous prenez
le temps d'y consacrer quelques pages, ça doit être parce que vous
considérez ça assez capital. J'aimerais vous entendre davantage
sur le financement d'un office ou du ministère de l'Environnement.
Mme Lamontagne: Premièrement, on pense que c'est à
travers les crédits et le fonds de la province que devraient être
financées une
structure importante comme le ministère de l'Environnement et une
structure comme l'Office de protection de l'environnement. C'est-à-dire
que, si l'Office prend force, comme il va avoir un rôle important en
termes d'application des règlements et des lois, il ne faudrait pas que
ce soit laissé aux aléas d'un financement pas trop sûr. Il
faut que ce soit prévu dans les crédits du gouvernement.
La question des redevances nous posait un type de problème. C'est
que, ça, ce n'est pas toujours constant comme revenu. Alors, dire, comme
ça a été dit, que l'Office serait financé
uniquement par les redevances, ça nous inquiétait. Si on inclut
dans les redevances la partie punitive, ça pose un autre
problème; c'est-à-dire qu'il faut punir beaucoup, plutôt
que faire de la prévention, pour obtenir du financement. Alors, on
trouvait que c'était une contradiction entre l'objectif qui est toujours
de prévenir les catastrophes environnementales ou de réparer de
mieux en mieux les systèmes plutôt que de juste punir ceux qui
polluent ou ceux qui dérogent à la réglementation.
Alors, c'est pour ça qu'on a abouti avec une telle proposition,
tout en tenant compte, on le sait - on en parle à toutes les tables et
à toutes les commissions - de la situation financière
compliquée actuellement dans la société. A notre avis, les
redevances devraient plus servir à un fonds - on n'a pas mis de
pourcentage -pour l'indemnisation des victimes et aussi pour réparer,
même si on a le principe pollueur-payeur, les écosystèmes,
parce qu'il y a de la réparation à faire. Mais on n'a pas fait de
règle. C'est une proposition d'ordre très général.
Je ne sais pas si vous voulez ajouter...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Au niveau des amendes, je pense
que je vous suis assez facilement. Il y a quelque chose d'un petit peu
pernicieux à dire: On va financer un système en poignant les
coupables.
Mme Lamontagne: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On est rendus à
l'extrême et je pense qu'on aurait avantage à être prudents
dans cette avenue. En ce qui concerne la tarification, moi, je n'ai pas
d'objection parce que, lorsque quelqu'un utilise un service gouvernemental,
qu'il soit tarifé, c'est-à-dire qu'on lui charge ce que ça
coûte, ça se fait dans d'autres organismes et je pense que c'est
une coutume assez répandue.
Lorsqu'on parle des redevances comme telles, ce que l'on a
annoncé, grosso modo, la semaine dernière, et qui devrait
normalement être administré par un office de protection de
l'environnement dans le cadre du programme de réduction des rejets
industriels, ce sont les certificats d'attestation d'assainissement qui font en
sorte que l'industrie qui pollue paie une redevance de tant la tonne sur ses
émissions dans l'eau, dans l'air ou dans le sol, de façon
à inciter cette industrie, plutôt que de payer une redevance,
à investir dans de la nouvelle technologie et à se moderniser
pour faire en sorte de ne pas polluer. L'objectif, ce n'est pas de collecter
l'argent comme tel; l'objectif, c'est de faire en sorte que ça devienne
payant pour l'entreprise de se moderniser.
Pâtes et papiers est un bon exemple. Ce règlement va
s'appliquer, comme premier secteur d'activité économique, dans le
domaine des pâtes et papiers. Donc, ceux qui vont se moderniser vont
avoir moins à payer en redevances et vont pouvoir occuper une position
plus concurrentielle sur les marchés. Mais je sais que ça
affecte, ça, également... On l'a tenté et je pense qu'on
n'a pas été décriés par les entrepreneurs. Donc, le
niveau de frais que l'on charge à la tonne doit être raisonnable;
ils n'ont pas levé le plafond lorsqu'on l'a annoncé. Même
M. Le Hir a dit qu'on tenait compte de la conjoncture économique. Mais
on voulait mettre un pied dans la porte et aller vers cette approche-là.
Ce qui veut dire qu'avec les années, normalement, les montants vont
augmenter et, normalement également, le nombre de paramètres sur
lesquels on fixe des charges va augmenter étant des paramètres
scientifiquement plus connus et plus développés.
Moi, j'aimerais entendre la CSN sur cette approche, parce que c'est
majeur. C'est l'approche que l'on a prise. Autant on a pris l'approche en
assainissement des eaux dans les financements conjoints avec les
municipalités, dans le municipal, autant c'est cette approche qui est
présentement retenue dans le milieu industriel, et c'est là que
se retrouvent vos emplois.
Mme Lamontagne: Bon. Je vais vous dire qu'on n'a pas encore fait
une longue réflexion sur cette question-là, mais je vais vous
donner une première impression. Quand vous dites: Plus une industrie va
être environnementalement saine, si on veut, moins elle aura à
payer de redevances, donc, c'est un incitatif à ce qu'elle se corrige,
moi, ça m'inquiète un peu parce que, à mon avis, ce n'est
pas évident.
Je peux vous donner un autre parallèle que je n'aime pas faire,
mais je vais le faire pareil parce que c'est peut-être un secteur qu'on
connaît très, très bien. C'est en santé et
sécurité au travail, où on a mis sur pied un mode de
tarification, il y a quelques années, qui devait être incitatif au
niveau de la prévention. C'était l'objectif et l'objectif
était correct, souhaitable, et on le partageait même au niveau
syndical. Mais on constate maintenant - et ce n'est peut-être pas
indifférent à la situation difficile que vit actuellement la CSST
- que, comme on était puni s'il y avait plus d'accidents - j'appelle
ça des punitions: on paie plus parce qu'on a plus d'accidents - on a
développé toutes sortes de moyens chez les employeurs pour se
soutraire à
cette tarification-là.
Donc, on constate qu'on n'insiste pas plus sur la prévention,
mais qu'on essaie de déjouer le système par d'autres
façons. C'est un peu comme un permis de polluer. Tu paies parce que tu
pollues tant. Si ça va vers la prévention, très bien. Mais
il y a des fois des effets pervers de systèmes comme ça, et on
peut le constater en santé et sécurité. Peut-être
que le parallèle n'est pas bon, mais c'est quand même les
mêmes industries, habituellement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là où vous avez des
problèmes d'accidents de travail, on a généralement des
problèmes de pollution importants.
Mme Lamontagne: Oui. Voilà!
M. Laroche (Roger): Si je peux rajouter, M. le ministre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Laroche: ...il faut faire attention à ne pas tomber
dans le modèle de l'US EPA actuellement, qui a une tarification qui
découpe sa charge polluante en volumes et fait tout simplement une vente
de cette tarification-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On n'est pas rendus là.
M. Laroche: Je ne vous prête pas l'intention de le
faire...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
M. Laroche: ...mais il ne faut pas mettre sur pied les
mécanismes qui vous permettraient de le faire. Je trouve que c'est
contre-productif, pour les mêmes raisons que Mme Lamontagne le
soulignait, au niveau des accidents et au niveau environnemental aussi.
Actuellement, on est en difficultés économiques, les budgets sont
plus serrés, ça va être plus tentant pour l'industrie de
peut-être trouver un moyen de ne pas payer cette charge-là, donc
peut-être d'investir d'une autre façon et de chercher des
subventions. Si l'argent rentre dans les papetières comme il rentrait il
y a 15 ans, ça ne sera pas un gros problème de payer la charge
polluante, j'ai l'impression. C'est ça, le problème.
Le Président (M. Garon): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux saluer, au nom
de l'Opposition, Mme Lamontagne et ses deux collègues, et souligner
aussi le travail que fait la CSN depuis quelques années en
matière environnementale, notamment un colloque que vous aviez
organisé il y a quelques mois et auquel j'ai participé. Vous avez
des commentaires tels que: Est-ce que c'est là la priorité
actuelle du gouvernement? D'autre part, vous dites: On ne voit pas les effets
positifs sur la protection de l'environnement, sur la promotion de
l'environnement. Troisièmement, vous dites: Le ministère n'a pas
les moyens de ses mandats et cette réforme-ci n'apporte pas d'autres
moyens financiers. Il n'y a pas d'ajout de budget ou de personnel. Et,
finalement, vous déplorez qu'on procède par des réformes
à la pièce.
Je m'arrête à votre première recommandation, votre
première proposition, à la page 10. Vous dites: «Que le
gouvernement inclue le projet de création de l'OPEQ dans une
réforme globale du ministère de l'Environnement (sous forme
d'énoncé politique sur la question environnementale) et qu'il
soumette cette réforme au processus de consultation publique».
Avant que vous arriviez, le groupe qui est venu nous présenter
son mémoire, l'Union québécoise pour la conservation de la
nature, s'opposait à la création de l'Office et a posé la
question au ministre: Mais sur quoi vous vous basez pour dire que c'est
ça, le remède aux maux actuels? Les maux actuels, tout le monde
constate qu'il y a des lacunes au fonctionnement du ministère, les
délais en particulier. Et le ministre nous a dit: Mes hauts
fonctionnaires m'ont proposé ça. Moi, j'ai fait remarquer au
ministre que, par ailleurs, le Syndicat de professionnels du gouvernement
s'oppose au projet de loi. Ces professionnels, qui travaillent dans son
ministère, s'y opposent officiellement et aussi le Syndicat des
ingénieurs du gouvernement. Il y a au-delà de 200
ingénieurs dans son ministère. Tout ce monde-là dit: Ce
n'est pas nécessaire, c'est même un gaspillage, et c'est
mauvais.
Il y a eu tellement de réformes! Il y en a eu 6 en 12 ans, des
réformes majeures, dans ce ministère-là. La
dernière, c'est lui qui l'a entreprise, le ministre actuel, il y a deux
ans. Les gens n'ont même pas le temps de digérer une
réforme qu'il arrive une autre réforme. Parce que, ça, ce
n'est pas rien. C'est majeur, ce que le ministre propose. C'est de prendre les
presque 1800 fonctionnaires à son ministère, de couper ça
en deux; la moitié s'en va former l'Office et l'autre moitié
reste au ministère. (12 h 15)
Moi, je vous dis, avec votre première proposition, nous sommes
d'accord, l'Opposition. Dans ce projet-là, on va plus loin que vous. On
dit: II faut que le ministre retire son projet. Mais, au moins, s'il revient
avec un projet, il faut que ça fasse partie d'une réforme globale
et que cette réforme-là, elle soit soumise à la
population, à la consultation. Le groupe de l'UQCN disait, un peu en
badinant, au ministre: Vous n'avez pas fait d'étude d'impact de votre
projet. Vous êtes le promoteur d'un projet sans avoir fait une
étude des impacts que cet Office va avoir sur le paysage actuel de
l'environnement
au Québec.
Alors, je veux simplement vous entendre élaborer un peu plus sur
le genre de consultation publique sur un énoncé de politique, qui
précéderait une telle réforme, parce que ce n'est pas
évident que cette réforme-là est nécessaire et
utile. Est-ce que vous pouvez élaborer un peu sur votre première
proposition?
Mme Lamontagne: D'abord, juste un petit commentaire. Je badinais
au début, mais c'est un peu ça, le sentiment qu'on a. Il existe
des offices dans d'autres domaines. Pour la langue française, il y a un
office; il y en a qui vont bien, il y en a qui vont moins bien. Qu'il y ait une
structure en dehors du ministère - mais dépendante du
ministère politiquement, évidemment - qui fasse un peu tout
l'aspect administratif, les permis, etc., nous, ça ne nous heurte pas
comme fonctionnement, si le ministère pouvait plus se consacrer aux
grandes politiques, à l'interaction entre les différents
ministères. Parce que, ça, c'est un problème. On parle de
grappes industrielles avec M. Tremblay. Il faut s'occuper d'environnement et de
développement industriel dans les grappes industrielles. Pas plus tard,
pas à côté, en même temps. Ça, c'est une
grande préoccupation pour nous. Alors, qu'il y ait un ministère
qui se consacre aux grandes politiques, qui s'implique et qui soit un
ministère senior, je pense, dans le gouvernement, ça nous
apparaît important.
C'est pour ça qu'on n'a pas dit non. Ça peut être un
moyen de fonctionner si c'est plus efficace. Mais on sait que c'est un
contenant et que le contenu reste pareil. Ça, on l'a dit à
plusieurs reprises. Sur la première proposition, c'est simple.
Tantôt, M. le ministre nous énumérait une série de
réformes qui avaient été faites. Il nous
énumérait une série de règlements.
Nous, on dit qu'il y a deux aspects. Il y a la législation, la
réglementation et la réforme administrative. Qu'on sache
où on s'en va un peu; que ce soit dans un cadre, que ce ne soit pas
à la pièce et que ce soit dans un tout où on
énumère c'est quoi nos priorités au Québec au
niveau de l'environnement. Est-ce les déchets toxiques? Est-ce les
déchets domestiques? Est-ce les rejets industriels? Est-ce l'eau, etc?
Qu'on énumère comme une espèce de plan de travail, si on
veut, et qu'on accompagne ça, qu'on dise: Oui, on a ça comme
objectif, ça nous prend telle réforme et peut-être,
possiblement, qu'il y aura création d'un office. Mais que ce soit dans
un cadre.
Il y a aussi un problème; en écoutant
l'énumération que M. le ministre nous a faite, je dis: Oui, mais
ce n'est pas évident que tout le monde sait ça. Ce n'est pas
évident qu'on fait des liens entre les différentes mesures qui se
prennent. Et ça, c'est peut-être là un grand
problème, à cause que la question de l'environnement est devenue
une question... Il y a eu
Saint-Basile, il y a eu les pneus, il y a eu aussi une prise de
conscience internationale et mondiale. Il va y avoir la Conférence de
Rio, au mois de juin. Alors, la population est de plus en plus exigeante, a de
plus en plus d'attentes et il y a aussi beaucoup de groupes.
Donc, nous, on dit qu'on a avantage, comme société,
à voir les choses un peu dans leur ensemble et à avoir des
objectifs de contenu et pas juste de contenant. Et c'est vrai que ce n'est pas
facile. M. le ministre a souligné l'aspect de Grande-Baleine. Ce
débat-là à l'intérieur de l'organisation ne s'est
pas fait sans heurt et sans confrontation de différents secteurs, parce
que ce n'est pas facile. Alors, quand ce n'est pas facile, il faut être
le plus transparent possible et avoir un cadre le plus général
possible pour qu'on sache où est le chemin qu'on suit.
M. Lazure: Et est-ce que vous verriez la table ronde sur le
développement durable, qui a été mise sur pied il y a
déjà quelque temps, qui fonctionne plutôt mal... Son
secrétaire général, l'ancien sous-ministre au
développement durable, a démissionné en claquant la porte,
en disant: La table ronde ne fonctionne pas parce que le ministre n'a pas de
vision d'ensemble. Je ne vous demande pas de commenter ça, mais est-ce
que la table ronde, en soi, pourrait être un instrument pour
élaborer un énoncé de politique?
Mme Lamontagne: C'est sûr que la table ronde pourrait
servir de lieu prioritaire de départ des consultations pour
élaborer cette politique-là, parce qu'à la table ronde il
y a des représentants de différents groupes de la
société. Je vais faire un autre parallèle dans un autre
dossier. Je pense à la formation professionnelle où, avant
d'arriver à un projet de loi, un énoncé de politique, il y
a eu la conférence permanente qui a permis que les parties s'assoient
et, avec le ministre, fassent un certain bout de chemin. Alors, la table ronde
pourrait être ce lieu et ce serait un défi très
intéressant pour la table ronde d'avoir ce projet-là et de faire
ça avec le ministère.
M. Lazure: Est-ce que la CSN en fait partie directement?
Mme Lamontagne: Oui. M. Lazure: Oui?
Mme Lamontagne: Le président de la CSN est membre de la
table ronde et on est membres d'à peu près tous les
comités techniques. Roger et Serge, ici, sont tous deux sur des
comités.
M. Lazure: Est-ce qu'à votre connaissance la table ronde a
été consultée sur ce projet de loi?
Mme Lamontagne: À ma connaissance, non, parce que la table
ronde, ça fait longtemps qu'elle ne s'est pas réunie.
M. Laroche: Si vous permettez, j'ai la présidence d'un des
trois comités, celui de l'aménagement du territoire et du milieu
urbain. Effectivement, il y a des difficultés à la table ronde.
La table ronde est au neutre depuis un bout de temps. Vous ouvrez la porte, je
ne peux pas m'empêcher d'embarquer dedans.
M. Lazure: Pas d'objection.
M. Laroche: II y aurait eu moyen, à travers la table
ronde, effectivement, de sortir, à partir du plan d'action, ce qu'on
demande, au moins la base: quelle vision environnementale le Québec veut
avoir et, à travers cette vision-là, comment le ministère
peut répondre à cette vision-là. Et c'est ça qui
aurait été le plus important à faire actuellement. C'est
malheureux que les travaux aient été arrêtés; c'est
malheureux que ça ne reprenne pas aussi vite que ça devrait le
faire. J'ai énormément de problèmes avec ça. C'est
encore un milieu qui est excessivement riche en expérience, de par la
diversité des personnes qui sont là, comme Mme Lamontagne le
soulignait. Donc, ça devient très représentatif aussi, au
moins pour une première consultation.
M. Lazure: Une autre de vos recommandations, la troisième,
où simplement j'aimerais vous voir élaborer un petit peu plus...
Je saute parce que, dans l'ensemble, pour nous, c'est encore plus
évident que non seulement le projet de loi est prématuré
parce qu'il ne s'inscrit pas dans une vision globale, mais on le trouve
dangereux. Puis une des raisons... Je reviens là-dessus parce que les
artisans principaux de cette réforme-là, c'est le personnel du
ministère et ce personnel-là y est opposé. Mais je reviens
à votre troisième proposition: «Que le système de
redevances serve, entre autres, à créer un fonds environnemental,
basé sur un système "no fault", dans le but de restaurer
l'environnement». Au fond, vous rejoignez un peu le concept d'un fonds de
décontamination. Voulez-vous élaborer un peu sur votre
troisième proposition?
M. Laroche: C'est beaucoup plus qu'un fonds de
décontamination. Remettre un terrain en état, c'est une
première étape; il y a bien d'autres choses. Il y a des nuisances
qui ont été créées, des populations qui ont
souffert, des écosystèmes qui ont souffert. On dépasse le
simple fonds de décontamination. Je pense qu'on avait déjà
parlé de ce fonds-là lors des audiences pour le projet de loi 65.
On le ramène encore parce que, pour nous, c'est important. La meilleure
utilisation des redevances, c'est effectivement la base de ce fonds-là.
C'est un fonds qui se nourrit à partir des problèmes qui se
créent. Plus les problèmes se créent, plus il y a besoin
d'argent pour le fonds, plus vous allez avoir l'argent nécessaire. Dans
ce sens-là, la roue n'est pas vicieuse. C'est intéressant d'avoir
un financement à partir d'une taxation de problématique, d'une
taxation de charge polluante, si on veut. Pas, comme on le disait tout à
l'heure, le mettre comme une permission de polluer - c'est toujours là
que la ligne est fine - mais l'embarquer tout simplement et dire:
Écoutez, il y a tant de dommages qui ont été faits. Les
ressources financières vont venir là. C'est à partir de
tout ça. La redevance, c'est à peu près la meilleure
utilisation qu'on peut en faire.
M. Lazure: Quant à nous, c'est une formule qui nous va
tout à fait. Juste une dernière question. C'est vrai que les
effectifs en région ont été augmentés, c'est vrai
que les bureaux régionaux ont un peu plus d'autonomie. Le ministre
justifie souvent son projet d'un office en disant: Bien, avec l'Office, les
régions vont être autonomes, puis, deuxièmement, les
décisions vont être uniformes à travers le Québec.
Nous, on dit: Vous n'avez pas besoin d'un office pour faire ça. Vous
pouvez, dans le cadre actuel du ministère, donner encore plus
d'autonomie aux régions. Vous pouvez donner un meilleur encadrement
quant à l'uniformité des décisions. Je veux vous entendre
parler un peu des régions. Est-ce que vos gens ont eu des
répercussions d'une plus grande activité régionale?
Mme Lamontagne: J'avoue que je n'ai pas beaucoup de constats ou
d'expériences. Je sais qu'il y a beaucoup de gens de nos régions
qui sont très, très actifs. Ils font partie des coalitions, des
conseils de développement. En tout cas, on ne m'a pas raconté de
faits disant qu'il y avait un plus grand bourdonnement dans les régions,
mais ça ne veut pas dire, non plus, qu'il n'y a pas un plus grand
bourdonnement dans les régions. Ça dépend des dossiers
dans lesquels les gens de nos régions travaillent. De ce
temps-là, ils sont beaucoup sur les déchets et les
incinérateurs, etc. Alors, c'est ça, mais on peut regarder
ça.
M. Lazure: Juste une dernière chose. Est-ce que je
comprends bien votre position? Vous dites: Bon, on n'a pas d'objections
théoriques à la création d'un office, mais, par ailleurs,
les améliorations qui devraient être apportées au
ministère pourraient être, d'emblée, apportées,
notamment, l'énoncé de politique globale, à
l'intérieur même des structures actuelles?
Mme Lamontagne: Oui, un énoncé de politique, de
toute façon, même s'il y avait un office, ce serait la
responsabilité du ministère. C'est évident, c'est
politique. Alors, il pourrait y avoir ça. Il pourrait y avoir un
énoncé de politique, une réforme et que l'Office fasse
partie du tout. Là, c'est sûr qu'on a l'impression qu'on
met un peu la charrue avant les boeufs, qu'on commence par une structure qui va
garder un nouveau contenant avec un vieux contenu. Après ça, on
va continuer à améliorer les règlements, en tout cas,
d'après le programme du ministre. Alors, c'est un peu ça. On ne
peut pas, à mon avis, s'objecter au principe. Il n'y a pas de grand
principe qui entre en contradiction avec la création d'un office. Dans
d'autres domaines, on a déjà demandé... La
Société de développement de la main-d'oeuvre, on
était d'accord et on souhaitait qu'elle soit créée parce
qu'on trouvait ça important comme lieu d'échange avec les
partenaires. Alors, c'est pour ça. Mais on a dit: II y a bien d'autres
tâches à faire, peut-être, avant de créer un
office.
M. Lazure: Merci beaucoup, au nom de l'Opposition.
Le Président (M. Garon): Alors, merci. Après avoir
entendu la Confédération des syndicats nationaux, nous allons
suspendre les travaux pendant quelques instants, mais nous allons reprendre
immédiatement après pour fixer une date pour finaliser nos
mémoires sur le BREF et sur la procédure d'environnement. On va
suspendre quelques instants pour dire bonjour aux délégués
et on va reprendre pour fixer des dates entre nous.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise à 12 h 29)
Le Président (M. Garon): Je vais ajourner les travaux de
la commission de l'aménagement et des équipements sine die,
puisqu'il y aura un ordre de la Chambre pour la reprise des travaux cet
après-midi. Nous allons immédiatement reprendre en séance
de travail entre nous.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 15 h 44)
Le Président (M. Garon): La commission reprend ses travaux
cet après-midi, théoriquement à partir de 15 h 30
jusqu'à 18 h 30, d'abord, avec le Barreau du Québec, Me Suzanne
Comtois, avocate. Je vous invite à prendre place, Me Comtois, Me
Gagné et Me Sauvé. Comme vous avez une heure à votre
disposition, normalement, c'est 20 minutes pour l'exposé de votre
mémoire, 20 minutes pour le parti ministériel et 20 minutes pour
le parti de l'Opposition. Maintenant, si vous prenez plus de temps... Vous
pouvez prendre toute l'heure si vous voulez, mais, à ce
moment-là, on soustrait aux deux partis le temps que vous prenez en plus
de vos 20 minutes; et, si vous prenez moins de temps, ils pourront utiliser le
temps, de part et d'autre, que vous n'aurez pas pris. Alors, à vous la
parole, si vous voulez vous présenter comme représentants du
Barreau parce que, sur nos papiers, nous n'avons aucun titre de
représentation au sein du Barreau.
Barreau du Québec
M. Sauvé (Marc): Alors, Me Marc Sauvé, avocat au
service de la législation au Barreau du Québec. Qu'il me soit
permis, M. le Président, MM. les membres de la commission, de vous
présenter les membres de notre délégation. À ma
droite, Me Suzanne Comtois, qui est coordon-natrice de recherche à la
Commission de réforme du droit et professeure à la Faculté
de droit de l'Université de Sherbrooke; à mon extrême
droite, Me Michel Gagné, de la firme McCarthy, Tétrault, de
Montréal. Me Gagné est aussi responsable du comité de
législation de la section environnement de l'Association du Barreau
canadien, division du Québec.
M. le Président, le Barreau du Québec, conscient de
l'importance de la question de l'environnement dans notre
société, intervient de plus en plus pour faire connaître
son point de vue à l'égard des projets de législation et
autres initiatives de politique environnementale proposés par les
législateurs fédéral et provincial. Nous sommes heureux de
vous faire part de nos commentaires au sujet du projet de loi 412,
intitulé Loi sur l'Office de protection de l'environnement du
Québec et modifiant diverses dispositions législatives.
Le Barreau du Québec a comme principal mandat celui de
protéger le public. C'est donc à la lumière de ce mandat
général qu'il faut interpréter notre exposé. Comme
plusieurs, nous avons été quelque peu surpris du
dépôt du projet de loi 412 à l'Assemblée nationale.
À notre connaissance, il y a très peu d'intervenants qui
sollicitaient la création d'un tel organisme. Quant à nous,
l'utilité ou la nécessité de créer l'Office pour
veiller à l'application de l'ensemble de la législation en
matière d'environnement n'a pas été prouvée, n'a
pas été démontrée. Pour expliciter davantage la
position du Barreau et l'opposition de principe que le Barreau a à
rencontre du projet de loi 412, je cède la parole à Me Suzanne
Comtois.
Le Président (M. Garon): Me Comtois.
Mme Comtois (Suzanne): Merci. M. le Président et MM. les
membres de cette commission, je vais commencer par faire ressortir les points
principaux du mémoire du Barreau. Premièrement, de façon
générale, le Barreau a de très sérieuses
réserves quant à l'opportunité de créer un office
de protection de l'environnement et à l'utilité du projet de loi
412. Si, comme
l'indique le ministre, le but recherché est un accroissement de
l'efficacité dans l'administration de la loi, nous craignons que le
moyen retenu ne soit inapte à en permettre la réalisation.
Au contraire, le Barreau craint que la scission du ministère de
l'Environnement et l'introduction d'un nouveau partage des
responsabilités entre le ministère et l'Office proposé ne
risquent de générer encore plus d'inefficacité que le
régime actuel. Puis, parmi les exemples de l'inefficacité
susceptible d'être générée par la scission au sein
du ministère, on retrouve dans le mémoire du Barreau,
premièrement, que, si on considère déjà avoir un
problème au niveau de l'harmonisation et de l'application des lois et
des règlements, on voit mal comment la situation pourrait être
améliorée lorsque ces fonctions seront confiées, comme le
propose le projet de loi, à deux organismes distincts. Il nous
paraît que c'est, en grande partie, une question de gros bon sens que de
vouloir intégrer la gestion de l'environnement et d'avoir au sein d'une
même entité les composantes à la fois d'élaboration
des normes et de leur application.
Deuxièmement, on peut aussi évoquer que, si, sous le
régime actuel, un des problèmes qu'a eus le ministère
à assumer ses responsabilités, c'est le peu de ressources dont il
dispose, dans un contexte où l'on ne connaît pas d'argent neuf, on
peut douter que la création d'un office qui impliquera
inévitablement des dépenses additionnelles réussisse
à améliorer la situation au plan de l'efficacité.
Puis, je mentionnerai également qu'en ce qui concerne le mandat
de l'Office, qui est défini très largement, et l'exercice de
pouvoirs concurrents qu'il implique au niveau des ordonnances, notamment, ce
serait une source de chevauchements et de dédoublements entraînant
une inefficacité à laquelle on était censé
remédier. Donc, le Barreau est contre la création de cet Office
parce que, premièrement, on considère qu'on cible peut-être
mal. Si ce qu'on veut, c'est augmenter l'efficacité, on ne nous a pas
convaincus que la création de l'Office était un moyen de
réaliser cet objectif.
En deuxième lieu, nous avons confiance au ministre. Nous
souhaitons le maintien du principe de la responsabilité
ministérielle et nous sommes contre l'idée de confier à un
office autonome le mandat d'appliquer les lois et les règlements en
matière de protection de l'environnement, car il faut, selon nous,
éviter de déresponsabiliser le ministre. La protection de
l'environnement est une préoccupation importante de notre
société et nous croyons qu'il est dans l'intérêt
public que le ministre demeure responsable de l'application des lois et des
règlements, et qu'il réponde de ses actes et des actes de ses
subordonnés devant le Parlement et devant l'opinion publique.
Donc, nous considérons, à cet égard, que
l'environnement n'est pas un sujet précis et étroit (Jont le
ministère peut facilement se des saisir au profit d'un organisme
administratif qui n'aurait qu'à appliquer des normes
réglementaires très précises. Ce n'est pas le cas; donc,
on considère que, pour ces raisons, la structure ministérielle,
et le principe de responsabilité ministérielle qui s'y attache,
est beaucoup plus appropriée aux choix politiques qui doivent être
faits dans ces domaines-là.
Donc, pour ces raisons-là, notre conclusion et nos
recommandations principales sont à l'effet de retirer ce projet de loi
412. Par contre, si, en dépit des nombreuses objections qui ont
été formulées, le législateur décidait de
donner suite à ce projet, la deuxième partie de notre
mémoire indique une série de modifications importantes qui
devraient y être apportées. Nous soulevons, entre autres, que,
premièrement, la présence du sous-ministre au conseil
d'administration de l'Office paraît fort incohérente au sein d'un
organisme que l'on veut distinct du ministère et, jusqu'à un
certain point, constitue un aveu qu'il y a un besoin d'intégration des
fonctions normatives et des fonctions d'application des lois et
règlements.
Deuxièmement, la nécessité d'un meilleur
encadrement procédural du processus de reconsidération des
décisions devrait être ajoutée. À tout le moins,
lorsqu'on s'attaque à une décision qui était favorable au
citoyen, il faudrait alors que celui-ci obtienne un préavis et qu on lui
permette de faire des représentations. Également, il y aurait la
nécessité d'un meilleur encadrement procédural du
processus de révision interne pour s'assurer, notamment, que le
décideur initial ne participe pas à la révision de la
décision. Il faudrait, encore là, prévoir
expressément un droit d'être entendu et d'être
représenté par avocat devant l'instance de révision.
Un autre point. En ce qui concerne le transfert de la juridiction
d'appel de la Commission municipale du Québec vers la Cour du
Québec, le Barreau n'est pas contre parce que, comme on a eu l'occasion
de le dire à d'autres reprises, les cours de justice offrent de plus
grandes garanties d'indépendance que les tribunaux administratifs et les
avocats, de façon générale, sont beaucoup plus familiers
avec leur fonctionnement. D'autre part, nous tenons cependant à
souligner qu'il nous paraît résulter de ce transfert de
juridiction une perte d'expertise parce que, dans les matières
environnementales, la Commission municipale du Québec avait acquis une
certaine expérience du fait d'avoir exercé, pendant plusieurs
années, la juridiction d'appel. Cette expertise-là, on ne la
retrouve pas actuellement parmi les membres de la Cour du Québec. Donc,
ce sera inévitablement une expérience à bâtir et qui
nécessitera une période de rodage qui ne va pas
nécessairement dans le sens d'une plus grande productivité
à court terme.
Je vais finir ma présentation par quelques questions qui sont
soulevées dans le mémoire du Barreau, niais auxquelles le
mémoire» rie répond
pas. Ce qu'on voudrait surtout, c'est attirer l'attention sur ces
points-là et qu'une étude plus attentive soit faite à leur
égard, notamment l'absence d'appel au niveau des ordonnances du
gouvernement. On ne prévoit pas, dans le projet de loi, qu'il soit
possible d'en appeler des ordonnances du gouvernement. On ne le
prévoyait pas non plus dans la Loi sur la qualité de
l'environnement lorsque l'appel était à la Commission municipale
du Québec. Mais ce qui nous inquiète, c'est que, dans le nouveau
projet de loi, on augmente les pouvoirs du gouvernement, notamment par l'effet
de l'article 118.2.1 où le gouvernement peut maintenant intervenir
même au niveau des certificats d'autorisation. Donc, en ce qui concerne
la protection des citoyens, ce serait un recul par rapport au régime
actuel lorsque le gouvernement interviendrait plus largement dans l'exercice de
ces pouvoirs-là, puisque celui-ci se retrouverait devant une
décision qu'on ne pourrait pas porter en appel.
Il y a également un autre point qui semble un recul pour le
citoyen dans le projet de loi qui est proposé et qui concerne
l'intervention des citoyens devant l'organisme d'appel. On sait que la Loi sur
la qualité de l'environnement prévoit que, lorsqu'il y a un appel
de logé, des citoyens intéressés peuvent intervenir devant
la Commission municipale du Québec. On ne retrouve pas ce droit
statutaire à l'intervention des tiers dans le nouveau projet de loi. Ce
que ça implique, c'est que ces personnes-là devront
inévitablement se qualifier par le biais des dispositions beaucoup plus
sévères que l'on retrouve dans le Code de procédure civile
ou être à la discrétion de la cour, selon
l'évolution récente de la jurisprudence qui reconnaît en
certaines matières la discrétion au tribunal judiciaire pour
accorder le locus standi à certaines personnes qui n'ont pas un
intérêt propre et distinct dans le litige. Donc, du point de vue
du citoyen, ça constitue également un recul. Ce sont,
essentiellement, les points qu'on pourrait soulever.
Il y a aussi l'article 31.7 qui fatigue un peu les personnes qui se sont
interrogées sur la question. On reconnaît au ministre des pouvoirs
sur les projets connexes à ceux qui font l'objet d'examen des impacts,
sous les articles 31.1 et suivants. Une question qu'on se pose et qui est
probablement pertinente, c'est: Pourquoi n'arrive-t-on pas à avoir une
approche un peu plus globale des décisions susceptibles d'avoir des
incidences environnementales et, lorsqu'on fait des études d'impact, ne
pas traiter à la fois du principal et de l'accessoire? Auquel cas, on
n'aurait pas ce 31.7 qui reconnaît des pouvoirs connexes au ministre
lorsque le gouvernement a pris position sur certains points donnés.
Donc, c'étaient la plupart des recommandations que l'on retrouve
dans le mémoire du Barreau.
Le Président (M. Gauvin): Merci, Mme
Comtois. Si ça complète votre présentation, on va
permettre à M. le ministre de disposer d'une quinzaine de minutes pour
échanger avec vous et la même chose pour les représentants
de l'Opposition. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci beaucoup, M. le
Président. Vous me permettrez de remercier le Barreau du Québec
de sa présentation et de la qualité de son mémoire, de
dénoncer immédiatement mon conflit d'intérêts comme
membre du Barreau du Québec et d'adresser sans plus tarder quelques
remarques aux représentants dudit Barreau.
On ne peut approcher le problème de la création de
l'Office sans tracer un bref historique du ministère de l'Environnement.
Il se doit d'être bref, le ministère n'a que 10 ans d'existence.
Il a été construit à compter de 1978 pour répondre
à des crises environnementales. Chaque fois que l'on connaissait, dans
la société québécoise, une crise environnementale,
une nouvelle direction générale venait agrémenter
l'organigramme du ministère. On avait la direction
générale des déchets dangereux, la direction
générale de l'eau, la direction générale des pneus,
pratiquement, à un moment donné.
En 1989, nous avons tenté, dans un souci de maximiser le service
à la clientèle et l'efficacité d'action du
ministère, de responsabiliser à l'horizontale les gens qui
travaillent dans l'appareil. À titre d'exemple, si vous travailliez dans
le secteur industriel avant 1989, il y avait à peu près 22 portes
d'entrée, ce qui indiquait également que l'industriel avait 22
portes de sortie. Ce que nous avons fait? Nous avons créé cinq
sous-ministériats. Nous avons pris les trois plus grands pollueurs ou
sources de pollution: municipal, industriel et agricole, et fonctionné
à la verticale, en fonction des clientèles. Nous avons
ajouté, pour améliorer l'efficacité, un
sous-ministériat aux régions, de façon à rapprocher
l'action des citoyens comme tels et, de façon à mieux planifier
l'avenir, un sous-ministériat au développement durable, de
façon à non plus simplement réparer les erreurs du
passé, mais à voir à les éviter pour l'avenir.
Sur le plan de la structure, nous avons accentué, au cours des
deux dernières années, la régionalisation. Nous avons plus
que doublé le personnel dans chacune des régions du
Québec. Ça, c'est sur le plan de la structure. Et nous avons
amélioré, d'une certaine façon, l'efficacité en
responsabilisant, par la structure, les gens qui interviennent, mais pas
suffisamment à notre goût et, évidemment, pas suffisamment
non plus au goût de l'ensemble de la population du Québec. Le taux
d'insatisfaction de la population, il y a deux ans, envers le ministère
de l'Environnement, était de 70 %. Il est présentement de 48 % et
c'est encore trop important pour l'actuel gouvernement, en tout cas, pour
l'actuel ministre.
Sur le plan des actions réglementaires et législatives,
nous avons tenté de répondre au plus pressé et nous
n'avons pu faire mieux que ça au cours des deux dernières
années. En 1990, nous avons adopté deux projets de loi: le
premier, le projet de loi 65 - le Barreau a fait sa contribution, à ce
moment-là - la loi du pol lueur-payeur sur les sols contaminés,
et également la loi qui a créé la Société
québécoise de récupération et de recyclage. Il y a
eu un seul règlement pendant cette année, le règlement sur
le contenu en soufre dans le mazout lourd, de façon à poursuivre
notre lutte contre les pluies acides. C'est le seul dossier, je pense,
où les objectifs qu'on s'était fixés il y a une
décennie ont été atteints et même
dépassés grâce à la collaboration de tous les
intervenants. (16 heures)
En 1991, notre action réglementaire et législative s'est
accentuée: une première loi a ajouté au mandat de la
Société québécoise d'assainissement des eaux de
façon à compléter le travail qui a été fait
dans des municipalités plus importantes pour aller dans des plus petites
municipalités au Québec; une deuxième loi pour donner
suite, entre autres, au rapport Charbon-neau, loi sur les matières
dangereuses. Avant, on ne traitait que des déchets dangereux, tandis que
maintenant la juridiction du ministère de l'Environnement s'étend
à l'ensemble des matières dangereuses, ce qui nous permet de
recycler des éléments qu'on ne pouvait recycler avant; une
troisième loi, la loi sur la réduction des rejets industriels. On
était avancé en dépollution municipale. On est encore
à un stade embryonnaire en matière de dépollution
industrielle et on n'est pas encore trop présent en matière de
dépollution agricole.
Sur le plan de la réglementation, au cours de l'année
1991, encore là, on a pallié au plus urgent: règlement sur
les carrières et sablières, règlement sur les neiges
usées, après entente avec les unions municipales;
règlement sur les déchets solides, de façon à
permettre au gestionnaire d'un site d'enfouissement de refuser des
déchets de l'extérieur de sa MRC; règlement sur
l'entreposage des pneus hors d'usage, à la demande des ministres de
l'Environnement et de la Sécurité publique qui avaient
vécu les incidents de Saint-Amable. On a également
prépublié des règlements qui sont en période de
consultation présentement: règlement sur les pâtes et
papiers, qui est l'industrie qui, en termes de volume, est la plus polluante au
Québec, et règlement sur les déchets biomédicaux,
qui vont entrer en vigueur le 1er avril prochain. On a annoncé, la
semaine dernière, la prépublication du règlement sur les
attestations d'assainissement en milieu industriel de façon à
s'attaquer à ce secteur d'activité.
En plus, nous avons étendu la protection des rives des cours
d'eau au Québec, qui était limitée au fleuve Saint-Laurent
et à ses prin- cipaux affluents, à l'ensemble des cours d'eau de
la province de Québec. Nous avons créé également
des réserves écologiques pour que les générations
futures aient des endroits ou elles pourront comparer les dommages qu'on a
faits comme société. Quand je suis arrivé au
ministère de l'Environnement, la loi était en vigueur depuis 1974
et il y en avait 21 de créées. Nous en avons créé
11 au cours des 2 dernières années et il y en a 7, actuellement,
au sein de l'appareil exécutif.
Nous avons amélioré le plan d'urgence, parce que les
urgences environnementales, il y en a encore à tous les jours. Il y en a
moins qui font les médias de façon spectaculaire parce que le
plan d'urgence du ministère de l'Environnement a été
amélioré. Ça, pas beaucoup de gens le savent au
Québec, mais le ministre de l'Environnement, présentement, ne
fait pas partie simplement du comité interministériel du
développement régional et de l'environnement, mais, depuis la
dernière élection, il fait également partie du
comité de développement économique. La SDI, entre autres,
lorsqu'elle fait une participation financière à une entreprise,
ne le fait pas sans que cette entreprise soit en conformité avec la
réglementation du ministère de l'Environnement du
Québec.
On a fait ça, entre autres - ce n'est pas exhaustif - et on s'est
rendu compte qu'on n'était pas encore assez efficace et qu'on
n'était pas encore assez performant. On s'est rendu compte que les
urgences quotidiennes, les urgences qui nous commandaient de réparer les
problèmes d'avant-hier et d'hier et celles qui surviennent aujourd'hui,
accaparaient le ministère à 99,8 % du temps et qu'il n'y avait
à peu près plus de ressources disponibles au ministère
pour faire ce qu'on appelle la politique environnementale, la
législation environnementale, la réglementation environnementale.
Tout le monde, à partir de la personne qui est dans la région
jusqu'au sous-ministre en titre, est pris, de façon quotidienne, dans
l'action quotidienne.
La création de l'Office ne vise qu'une chose: faire en sorte que
les actes administratifs comme tels soient accomplis par un organisme. On a
ça, des offices, dans je ne sais combien de secteurs d'activité
économique, qui délivrent des permis et qui font le suivi de la
délivrance comme telle du permis. Je ne pense pas que le fait qu'un
office accomplisse cette fonction déresponsabilise un ministre. Le
ministre continue à être responsable devant l'Assemblée
nationale et devant l'ensemble de la population des actes posés par
l'office dont il a la responsabilité. C'est d'ailleurs inscrit dans le
projet de loi comme tel. On vise à libérer le ministère
pour sa planification et à obtenir un maximum d'efficacité
administrative sur le terrain.
Je vous ajouterais un troisième élément. Je ne l'ai
pas ajouté aux autres groupes, mais vous êtes le Barreau, je vais
me confesser. Comme
ministre de l'Environnement, je suis législateur. Je contribue
avec les autres membres de l'Assemblée nationale à faire adopter
des lois. Je suis également membre de l'Exécutif; donc, je suis
responsable de l'application des lois dont j'ai la responsabilité comme
ministre de l'Environnement. Je rends également des ordonnances; je suis
juge également. Je peux décider, en vertu des pouvoirs contenus
dans la Loi sur la qualité de l'environnement, de fermer une usine
demain matin après avoir pris connaissance du dossior,
présumement après avoir entendu les parties et respecté
les règles de justice naturelle. Je vous dirai que je me sens
très, très, très mal à l'aise de cumuler ces trois
fonctions. Je sais qu'il y en a que ça ne dérange pas dans la
société, mais, peut-être quand on a une formation
juridique, cumuler sur le même individu des fonctions de
législatif, d'exécutif et quasi judiciaires, ça devient un
petit peu totalitaire comme approche, et je m'en méfie.
Autre élément - je pense que les événements
récents l'indiquent - il n'y a pas un ministre de l'Environnement, quel
qu'il soit, de quelque formation politique que ce soit, qui peut
répondre de façon quotidienne de l'émission ou de tous les
gestes administratifs qui sont posés. Nous émettons chaque jour
des certificats dans les bureaux régionaux pour carrières et
sablières, pour dépotoirs, pour des industries qui fonctionnent
avec des plans et devis compliqués. Demander au ministre de signer
chacun de ces certificats, c'est demander l'impossible à quelque
individu que ce soit. Je ne dis pas de déresponsabiliser le ministre,
parce qu'il en conserve la responsabilité politique devant
l'Assemblée nationale et la population, mais il ne peut de façon
quotidienne remplir administrativement et correctement cette fonction. C'est le
pourquoi du dépôt du projet de loi. Il n'y a pas d'autres raisons
majeures. J'en ai peut-être oublié; ça viendra au cours de
notre discussion.
Vous nous parlez, et vous êtes le seul à parler de cet
élément-là, dans votre mémoire à la page 4,
au niveau constitution et organisation - non, vous n'êtes pas le seul, il
y a eu un autre groupe qui en a parlé - que vous ne connaissez pas
d'autres cas où le sous-ministre est membre d'un organisme. Il y a un ou
deux autres groupes... Je pense que c'est Me Bélanger qui se pose cette
question-là et, comme il a rédigé ou participé
à la rédaction de trois mémoires, on la retrouve. Mon
sous-ministre à l'Environnement, à titre d'exemple, est membre du
conseil d'administration de la Caisse de dépôt. Ce n'est pas un
organisme quasi judiciaire, c'est un organisme important au Québec. On
m'a donné la liste d'une dizaine d'organismes où les
sous-ministres... Il ne s'agit pas d'organismes de nature administrative comme
l'Office, mais beaucoup de conseils consultatifs, entre autres, le Conseil
consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, le Conseil des affaires sociales
- c'est le sous-ministre en titre qui est là - le Conseil des
communautés culturelles et de l'immigration, etc. Il s'agit d'organismes
qui sont davantage consultatifs, je vous le concède.
Vous parlez de la nomination du président par l'Assemblée
nationale. On a présentement cinq ou six organismes, de mémoire.
C'est un sujet qui est toujours cher au député de La Prairie.
Vous êtes le premier qui le mentionnez. Au lieu de faire nommer le
président de l'Office par lo gouvernement, il devrait être
nommé par l'Assemblée nationale du Québec. Vous connaisse/
les organismes où les présidents sont nommés par
l'Assemblée nationale. Ce sont des cas d'exception. Si on regarde les
autres offices au gouvernement, les autres régies comparables à
ce qu'on voudrait créer, c'est nommé par le gouvernement. Est-ce
que vous souhaitez que l'ensemble des présidents d'organismes soit
nommé par l'Assemblée nationale du Québec?
Le Président (M. Gauvin): Mme Comtois.
Mme Comtois: Non, je ne crois pas que le souhait du Barreau
était d'étendre le processus de nomination à tous les
présidents d'organismes, mais je pense qu'on insistait
particulièrement parce qu'on distingue le droit de l'environnement, ou
la gestion de l'environnement, des autres domaines pour lesquels on a pu, par
ailleurs, créer des offices, conseils ou tribunaux. On distingue encore
là le processus de nomination du président de ces
organismes-là de celui qui devrait s'appliquer, s'il est
créé, à l'Office de protection de l'environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À partir du moment
où un ministère possède une fonction législative et
réglementaire et qu'il est doté d'un bras d'action... Je pourrais
prendre, à titre d'exemple, le cas des permis d'alcool où il y a
des normes pour les délivrer ou le cas, dans un domaine où j'ai
pratiqué, du droit agricole. À un moment donné, il y a une
Régie des marchés agricoles avec des normes ou la Commission de
protection du territoire agricole. Ça sert de bras d'action ou de
gestion. Ces présidents-là rendent des décisions qui sont
quand même importantes. Lorsqu'on parle de l'aménagement du
territoire au Québec, il y a des relations environnementales. Ces
présidents-là ne sont pas nommés comme tels par
l'Assemblée nationale. Est-ce que ce serait souhaitable qu'ils le
soient?
Mme Comtois: Je ne crois pas que le mémoire du Barreau
aille jusque-là. Peut-être qu'il faudrait poser la question, puis,
après ça, voir les membres du Barreau délibérer sur
cette question-là. Mais, en ce qui concerne la proposition qui est
formulée ici, elle vise essentiellement à traiter de façon
isolée et distincte le cas de la gestion de l'environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): À la page 5, au premier
paragraphe en haut, vous mentionnez «que la formation du comité
soit assujettie à certaines règles telle l'exclusion des membres
qui ont pris la décision initiale» en révision. Je pense
que ça va de soi. C'est un principe de saine application de la loi, et
nous le retenons. Vous parlez du recours en appel à la Cour du
Québec. Moi, j'aimerais vous entendre davantage parce que le Centre
québécois du droit de l'environnement nous dit: Non, pas la Cour
du Québec, parce que c'est un peu trop judiciarisé comme tel.
Vous, vous nous dites: Mais ça donne une meilleure garantie
d'impartialité ou d'indépendance.
Mme Comtois: En fait, ce que je pourrais ajouter, c'est qu'il n'y
a pas vraiment de posi tions fermes qui ont été prises sur cotte
question du transfert à une instance juridiciaire de la juridiction
d'appel. Ce que le mémoire tend plutôt à faire, c'est faire
ressortir le fait qu'il y a à la fois des avantages et des
inconvénients. Je ne crois pas que vous retrouviez dans le
mémoire tel qu'il vous a été soumis une position ferme
pour ou contre le transfert de juridiction.
On vous dit, d'une part, pourquoi le Barreau ne peut pas, en tant
qu'organisme regroupant les avocats, être contre. On croit beaucoup aux
garanties d'indépendance des tribunaux judiciaires et on croit beaucoup
aussi aux garanties de protection que la procédure qui est suivie devant
les instances judiciaires permet aux citoyens, mais, d'autre part, on est
conscient qu'il s'agit d'un domaine spécialisé pour lequel
peut-être un banc multidisciplinaire serait assez utile. Ce genre de
choses là, on ne risque pas de le retrouver si la juridiction est
exercée devant la Cour du Québec.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai suivi votre argumentation sur
la question de la spécialisation ou d'une certaine expertise que
pourrait posséder la Commission municipale J'en ai été le
ministre responsable lorsque j'étais aux Affaires municipales. Quelle
est votre première réaction à la création, au
niveau de la Cour du Québec, d'une Chambre en environnement?
Mme Comtois: Ce serait une façon d'acquérir une
certaine expertise en nommant des gens avec une juridiction très
limitée. Ce serait une façon de procéder.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Comme la Chambre de
l'expropriation.
Mme Comtois: Comme la Chambre de l'expropriation. Même le
Tribunal des professions est formé de juges de la Cour du Québec.
C'est pour ça qu'il est un peu une entité distincte, parce qu'on
l'appelle tribunal administratif, mais tous les membres ont le statut de juge.
C'est ça.
Il y a quelques organismes comme ça qui sont un peu à la
frontière entre...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je retiens vos trois
éléments qui n'étaient pas intégrés au
mémoire comme tel, entres autres, la question des ordonnances du
gouvernement non appelables. On va s'y pencher. Je n'ai pas de réponse
à vous donner, mais la question a plus que son mérite.
Mme Comtois: C'est surtout dans la mesure où le pouvoir du
gouvernement est élargi. On comprend qu'il n'y a pas de recul par
rapport aux ordonnances qui suivent le processus d'évaluation et
d'examen des impacts, mais, si le gouvernement exerce le pouvoir de 118.2.1, a
ce moment-là, ça devient une zone qui. avant, était
protégoo par l'exercice d'un recours en appel, puis qui ru; l'est
plus
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Même chose. J'ai
déjà annoncé des modifications quant aux interventions des
citoyens au niveau de l'appel et je vais revérifier l'article 31.7.
C'est un nouvel élément que vous nous apportez et je vous
remercie d'avoir attiré notre attention. M. le député.
Le Président (M. Gauvin): M le député de La
Prairie.
Mme Comtois: Est-ce que je peux vous poser une question?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
Mme Comtois: Est-ce à dire que vous ne renoncez pas au
projet de loi?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si j'étais convaincu que la
structure actuelle du ministère de l'Environnement du Québec nous
permettrait d'atteindre un niveau d'efficacité qui nous permettrait de
mieux assumer nos mandats J'ai comme l'impression qu'on a fait beaucoup dans la
structure actuelle au cours des deux dernières années: le
processus de responsabilisation linéaire, toute la question de la
régionalisation. On s'est rendu compte que cette
régionalisation-là, qui reçoit le support d'à peu
près tous les intervenants, soit dit en passant - on n'a pas eu besoin
de la passer en commission parlementaire parce qu'on on aurait sans doute eu
des objections - ne pourra donner les résultats escomptés tant et
aussi longtemps qu'on ne condamnera pas - et je m'excuse d'utiliser
l'expression - la région à prendre la décision. (16 h
15)
En matière environnementale, la personne en région
reçoit une demande. Elle a l'autorité d'émettre le
certificat présentement, mais elle ne le fait pas parce que, humainement
parlant, elle a l'opportunité d'aller vérifier au central, de
se couvrir, si je peux utiliser l'expression. Et le central ne
déteste pas tirer le dossier vers le haut, parce que c'est son pouvoir
qu'on a tenté de déléguer vers le bas. Tant qu'on ne
créera pas de façon très hermétique, par une
structure juridique comme telle, une sorte de vase hermétique qui va
condamner la région à prendre sa décision, le central ne
renoncera pas à ses pouvoirs, qu'il a exercés depuis une dizaine
d'années, et la région va se couvrir lorsqu'elle exercera ses
pouvoirs dans le moindre certificat d'autorisation.
Le Président (M. Gauvin): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Au nom de l'Opposition,
je veux saluer la représentante et les représentants du Barreau,
les féliciter pour la qualité de leur mémoire. Le Barreau,
depuis quelques années, est de plus en plus présent lorsqu'il
s'agit de projets de loi ou de discussions touchant l'environnement, la
qualité de l'environnement et je pense qu'il doit être
félicité. Je n'ai pas pris de chance aujourd'hui. Je me suis fait
accompagner d'un membre du Barreau, le député d'Anjou, mon
collègue d'Anjou, pour assurer que l'Opposition va accorder vraiment
toute l'importance qu'il faut à votre mémoire.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'on peut officiellement
souhaiter la bienvenue au député dans cette commission
parlementaire?
M. Lazure: Bien sûr. C'est la première commission
parlementaire du député d'Anjou aujourd'hui. La première
de sa longue carrière.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On la souhaite quand même
pas aussi longue.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Lazure: Alors, M. le Président, j'ai bien aimé
la question directe de Mme Comtois tantôt. Le ministre, effectivement, a
l'air à s'entêter, bien que pratiquement tous les mémoires,
tous les groupes soient venus lui dire: De grâce, mettez ça sur la
glace. Il essaie de justifier son projet de loi, la création de son
Office, en disant: Je veux donner une autonomie complète aux
régions. Nous lui avons répondu et les groupes lui ont
répondu: C'est possible de faire ça à l'intérieur
du ministère actuel. C'est possible. Vous avez raison d'exprimer votre
surprise vis-à-vis de ce projet de loi.
Vous posez d'excellentes questions dans votre mémoire. Vous posez
la question: C'est qui, les groupes qui ont réclamé ça?
Nous aussi, on a posé cette question-là dès le
début. Il y en a un seul groupe, à notre connaissance, et ce
sont. les jeunes libéraux. Ils sont bien intentionnés. Je pense
qu'ils s'inspirent un peu du modèle américain de l'Agence de
protection de l'environnement. Mais vous démontrez dans ça, comme
d'autres groupes, que, au contraire, la tendance actuellement au Canada et aux
États-Unis est de remettre aux élus et aux ministères
l'entière responsabilité. On dirait que vous m'avez entendu. Vous
avez utilisé pratiquement les mêmes termes que moi, hier. C'est
tellement important, l'environnement, sociologiquement parlant, en 1992, au
Québec, que, pour chaque geste qui touche l'environnement venant d'un
gouvernement, il faut que la population identifie un ministre qui va
répondre de ces gestes-là. Alors, nous, l'Opposition, on concourt
à 100 % avec la teneur de votre mémoire.
Vous faites des commentaires sur les dangers de dédoublement qui
vont survenir avec la création, à toutes fins pratiques, de deux
ministères. C'est la moitié du ministère qui s'en va
constituer l'Office pour faire appliquer des lois, donner des permis, etc., et
l'autre moitié qui reste au plan central. Quand le ministre dit: Enfin,
avec mon Office, les gens en région n'auront plus à se
référer au central, ce n'est pas exact. Ce n'est pas exact. Il va
y avoir des autorités dans l'Office. Il n'y aura pas juste un conseil
d'administration. Il va y avoir un P.-D.G. Je ne sais pas comment il va
s'appeler, mais il va y avoir des grands patrons de l'Office qui ne seront pas
en région, qui vont être centrale-ment localisés quelque
part. C'est un peu une grande illusion de dire: On va donner carte blanche aux
régions et elles n'auront plus à se référer au
central.
Je pense que les critiques que vous faites aussi sont bonnes. Le projet
de loi 412, vous dites, «permettra au ministre de l'Environnement de
s'éloigner de quantité de dossiers chauds et de les refiler
à un office dont le président n'est pas responsable devant
l'Assemblée nationale.» Vous démontrez bien aussi, comme je
l'ai dit tantôt, que ce soit dans l'Illinois ou au Manitoba, que la
tendance est à l'inverse de ce que le ministre a l'intention de
faire.
Une première question que je voulais vous poser concernant,
justement, la nomination du président de l'Office si, par malheur, le
ministre va jusqu'au bout et fait adopter cette loi-là: Est-ce que vous
proposez nettement, comme, nous, on a l'intention de le faire probablement dans
une autre instance, c'est-à-dire la présidence du BAPE, du Bureau
d'audiences publiques, que le président de cet Office soit nommé
par l'Assemblée?
Mme Comtois: Oui. M. Lazure: Oui.
Mme Comtois: En tout cas, ne devrait-il pas être
nommé par une majorité de députés de
l'Assemblée nationale? J'imagine que, de la façon
dont c'est formulé, si on s'en tient à ça, c'est un
peu moins exigeant que la nomination du Protecteur du citoyen qui exige les
deux tiers.
M. Lazure: Oui.
Mme Comtois: J'imagine que ça serait de la nature d'un
vote pris à l'Assemblée nationale.
M. Lazure: Bon. On a les mêmes préoccupations. En
admettant l'hypothèse catastrophique que l'Office soit
créé, le mécanisme de révision, les membres du
comité de révision ne devraient pas être nommés par
l'Office. Ça va de soi, ça. On partage votre opinion à cet
égard. Je reviendrai tantôt. Je vais laisser mon collègue
d'Anjou peut-être faire quelques commentaires ou poser quelques
questions.
Le Président (M. Gauvin): M. le député
d'Anjou.
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie. Ça va
être un bref commentaire. Bon, comme vous en avez fait part tout à
l'heure, je suis tout récent à l'Assemblée nationale et
encore plus récent sur cette commission. Donc, c'est tout
récemment que j'ai pris connaissance de ce projet de loi et que j'ai lu
avec attention votre mémoire.
Alors, j'ai lu attentivement ce projet de loi et la première
question que je me suis posée, c'est: Qui a demandé un tel projet
de loi? J'ai peine à comprendre, avec tous les problèmes en
environnement qu'on a, avec toutes les situations urgentes qu'il y a, pourquoi
le ministère et les employés du ministère prendraient
toute cette peine pour travailler sur un projet de loi si ça ne
répond pas à une demande précise, à un manque
flagrant, à un problème qu'on veut régler, et qu'il y ait
un groupe de pression, avec des problèmes vraiment concrets, qui a
demandé une intervention du gouvernement.
Je ne vois rien dans ce projet-là qui permet d'espérer
qu'il va y avoir une amélioration soit de la gestion ou de l'application
des règlements, de la réglementation en place. Au contraire, ce
que je vois, c'est le dédoublement un peu... On sait que sur la
scène nationale on se bat contre le dédoublement des juridictions
ou des compétences. Là, on est en train de faire un
dédoublement au sein du ministère par une loi alors qu'on sait
que, quand on parle de dédoublement, automatiquement on parle de perte
d'énergie, de perte d'argent. Alors que, justement, votre
ministère, le ministère de l'Environnement, se bat pour avoir des
crédits supplémentaires pour des manques d'argent, ça va
être encore plus d'argent qui va être consacré à une
administration plutôt qu'à donner des subventions ou des choses
pour régler vraiment des problèmes.
Aussi, ce que je trouve dangereux dans le principe qui est
édicté par ce projet de loi là, c'est
l'échappatoire. C'est justement un peu le principe qu'on retrouve
souvent aux États-Unis et je pense qu'on ne devrait pas emprunter
à nos collègues américains. C'est le fait de créer
des commissions qui sont indépendantes - on pourrait les appeler
paragouvernementales - et après, quand il y a des décisions
impopulaires qu'on veut faire passer, on les fait passer par ces
commissions-là. Après ça, on dit: Écoutez, ce n'est
pas notre faute. C'est la commission qui a une certaine indépendance
vis-à-vis de nous qui a pris cette décision-là,
blâmez-la. Alors, nous, on se déresponsabilise. Je trouve que
c'est un principe qui est très dangereux. Et l'EPA, évidemment,
qui est l'agence américaine, l'a prouvé dans le passé.
Surtout, M. Reagan s'en est servi à satiété pour faire
passer certaines choses. Je ne pense pas qu'on doive implanter ce
système-là ici.
Comme je vous dis, moi, je suis étonné de voir ça.
On dirait un genre de gymnastique intellectuelle ou un exercice intellectuel
fait par un groupe d'avocats pour passer son temps et pour accoucher de quelque
chose qui ne va absolument servir à rien. Je pense que c'est une
très belle gymnastique, mais, maigre tout, dans cette
gymnastique-là, je pense qu'il y a des graves lacunes au niveau des
processus de révision, des pouvoirs de l'inspecteur. Je pense qu'il
manque de sparadrap, qu'il manque de quelque chose pour essayer de colmater les
brèches dans ce projet de loi là. Alors, c'est les commentaires
que j'ai à faire.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le
député d'Anjou. M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci. Pour revenir à l'essentiel de votre
position, l'étonnement que vous avez, on sait qu'il y a eu en 12 ans,
depuis que le ministère est créé, 6 réformes
majeures. Six. La dernière a été instaurée par le
ministre actuel il y a deux ans, quand il a été nommé
à l'Environnement. Il a procédé, et c'était son
privilège, à une grande réforme de structures. Il y a eu
des bons résultats à cette réforme, notamment, quant
à l'augmentation des effectifs en région, et une plus grande
autonomie de décisions dans les bureaux régionaux. On a concouru
à ça et, nous, on dit, comme la plupart des groupes qui sont
venus l'ont dit: Continuez dans cette voie-là. Clarifiez un peu plus les
cadres à l'intérieur desquels les décisions
régionales doivent être prises pour qu'il y ait quand même
assez d'uniformité d'une région à une autre. Il y a des
gens qui se sont plaints que des décisions peuvent être assez
hétéroclites d'une région à une autre.
Alors, nous, on dit: Les fonctionnaires sont en train de digérer
à peine la réforme qu'il a mise sur pied et on va leur en imposer
une autre catastrophique, majeure, celle-là. Non seulement les gens ne
réclament pas cet Office, mais les professionnels du ministère de
l'Environnement
et notamment les 220 ingénieurs de l'Environnement disent: Non,
ne faites pas ça. Ils l'ont dit au ministre clairement et par
écrit, très, très clairement: Ne faites pas ça.
Or, moi, je suis content de voir que votre mémoire est
catégorique. J'espère que le ministre, qui est avocat, aura un
minimum d'égards et sera ébranlé par votre argumentation -
nous, on n'arrive pas à l'ébranler, en tout cas, en surface - et
va épargner au personnel, les 1800 personnes qui travaillent dans ce
ministère - et la plupart sont de très bons employés, font
du bon travail, que ce soit centralement ou en région - une autre
transition pénible qui durera des mois et des mois. Vous savez, les gens
le savent déjà que c'est en marche, que le ministre veut faire
ça. Alors, il y a beaucoup d'inquiétudes, il y a beaucoup de
tensions et ça mine le moral des troupes.
Moi, je veux juste faire un dernier commentaire sur vos suggestions.
Peut-être que vous voudrez élaborer. L'intervention des tiers.
À supposer que l'Office soit créé, encore une fois dans
cette hypothèse pessimiste, si je comprends bien, vous voulez que la
révision et l'appel soient plus ouverts que le projet de loi le
prévoit.
Mme Comtois: En fait, l'endroit dans le mémoire où
ce point-là apparaît, c'est dans les questionnements. Le Barreau
n'a pas pris de position ferme là-dessus, mais on fait remarquer, par
ailleurs, qu'il y a un recul en ce qui concerne la protection des citoyens,
puisque, alors qu'il pouvait intervenir en vertu d'un droit statutaire devant
la Commission municipale du Québec, on ne retrouve plus cette
disposition-là, ce qui fera en sorte que ce sera beaucoup plus difficile
pour eux de se qualifier aux fins d'être entendus devant la Cour du
Québec.
M. Lazure: Une autre question... C'est une contribution assez
originale que vous faites. Je ne pense pas que d'autres en aient parlé.
À la page 6, sur les pouvoirs d'inspection, vous dites: «Nous
croyons que les inspecteurs devraient être soumis à la prestation
d'un serment et à certaines normes de formation et de conduite».
Pouvez-vous élaborer un petit peu là-dessus? Le serment,
notamment, c'est un serment à l'effet de quoi? Surtout pas à la
reine, j'espère, sauf pour le comté de Brome-Missisquoi
peut-être.
Une voix: Vous avez été bien reçu...
M. Lazure: J'ai été très bien reçu
dans Brome-Missisquoi. C'est de bon augure pour la prochaine élection,
mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous invite personnellement
à venir, M. le député.
M. Lazure: J'irai.
Mme Comtois: En fait, je pense que je n'élaborerai pas
nécessairement sur la notion du serment, la modalité que la
garantie qu'on souhaite obtenir prendra. L'idée, c'est de s'organiser
pour éviter les conflits d'intérêts. Le risque qui se
présente, c'est que des personnes qui deviennent inspecteurs de l'Office
soient des personnes qui ont travaillé pour le concurrent de celui qui
veut maintenant avoir un certificat d'autorisation. Ce serait juste de voir
à ce qu'il y ait un mécanisme qui empêche les
préjugés parmi ceux qui sont responsables de faire des
inspections, sur la base des rapports desquels dépendra l'issue de la
demande qui est faite par un promoteur. La forme que ça pourrait
prendre, je pense que ça peut être raffine.
M. Lazure: Je pense que c'est une excellente suggestion qui peut
être considérée et peut-être même mise en
application dans le cadre actuel du ministère. Ça n'a pas besoin
d'être dans le cadre d'un office. Au nom de l'Opposition, merci
beaucoup.
Le Président (M. Gauvin): Est-ce que M. le ministre...?
Oui, quelques commentaires.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'aurais peut-être
aimé, dans le but de mener ou de poursuivre le dialogue avec le Barreau,
mentionner au Barreau qu'au cours des 10 dernières années le
Québec a progressé dans le domaine de son assainissement des
eaux, avec la collaboration du monde municipal. Je pense que le programme qui a
été mis sur pied en 1978, qui a commencé à recevoir
des résultats importants à partir de 1985 - une pure
coïncidence, je ne veux pas faire de politique; s'il n'avait pas
été commencé en 1978, on n'aurait pas pu avoir les
éléments en 1985 - est un programme qui va bien et, sur le plan
de la dépollution municipale, nous accomplissons des progrès qui
sont importants.
Nous sommes sur le point de nous attaquer pour la première fois
à la pollution industrielle. Nous avons interpellé
l'Assemblée nationale à deux reprises. Mon
prédécesseur, M. Lincoln, en 1989, a été le premier
à déposer le projet de loi 99, si ma mémoire est
fidèle, projet de loi sur la réduction des rejets industriels. Il
a prépublié une réglementation dans la Gazette
officielle du Québec. Nous avons reçu plus de 70
mémoires. Nous avons dû ajuster la législation parce que
les mémoires nous recommandaient des choses. Même les
modifications au règlement, ce n'était pas suffisant. Il fallait
changer la loi porteuse. Nous avons changé la loi porteuse. Nous avons
publié encore une fois et nous pensons que cette fois-ci est la
bonne.
Un des rôles les plus importants de l'Office va être de
mettre en application, dans chacune
des régions du Québec, ce programme de réduction
des rejets industriels et l'application des certificats d'attestation
d'assainissement. Il est certain que, sur le plan de la main-d'oeuvre... Je
regarde les deux prochains groupes qui vont comparaître, l'Association de
l'industrie de l'aluminium du Québec et l'Association minière du
Québec. Les ressources qu'on va envoyer en région au niveau des
mines, on va placer ça dans les régions où il y a des
mines, notre expertise. Au niveau des alumineries, bien, on va placer ces
gens-là qu'on a présentement au central au niveau des
régions où on retrouve des alumineries. Mais si on ne prend pas
ce virage de la régionalisation immédiatement, si on ne la
consacre pas, cette régionalisation-là, nos experts vont demeurer
à Québec et les autres vont être en région. Ce que
j'expliquais au tout début, c'est que ce dossier va entrer par la
région, va monter à Québec, revenir en région et
l'encensoir va continuer.
On reçoit deux plaintes de l'industrie à cet effet: les
délais que ça prend, qui sont absolument insupportables pour
l'entreprise et, également, le fait que les décisions ne soient
pas nécessairement uniformes. Les gens des pétrolières
sont venus nous dire que, si vous avez une entreprise dans une région,
parfois ça prend un certificat d'autorisation et, dans une autre
région, pour la même activité, ils vous disent que
ça n'en prend pas. Donc, il y a une question d'uniformité et
d'efficacité. Dans le système actuel, moi, je n'ai pas encore vu
comment on pouvait régler cette problématique-là. Si le
Barreau veut poursuivre sa réflexion, moi, je poursuis la mienne de mon
côté sur des éléments de justice que vous nous avez
soulignés à raison. Ça va. Merci.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le ministre. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Oui, peut-être juste une dernière chose
que je voudrais tirer au clair. Le ministre a fait valoir tantôt qu'une
de ses raisons pour créer un office, c'est qu'il se sent mal à
l'aise. Il a même utilisé le terme «totalitaire». Il
se sent mal à l'aise ayant à répondre à la
population, à l'Assemblée nationale, de ses faits et gestes dans
différents domaines: légiférer, surveiller,
contrôler, etc. Mais il y a plein de ministres qui font ça
actuellement. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche le fait
actuellement. Il y a d'autres ministères qu'on pourrait nommer.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quelle ordonnance rend-Il?
M. Lazure: Si le ministre n'est pas à l'aise, eh bien,
c'est son problème, ça. Il ne faut pas chambarder toute la
structure d'un ministère parce qu'il a des états d'âme et
qu'il se pense trop totalitaire en exerçant les fonctions qu'il exerce.
Mais sérieusement, M. le Président, je pense que les groupes qui
sont venus à date, y compris le Barreau, passent le message clairement
au ministre: De grâce ne posez pas un geste aussi lourd de
conséquences sans pouvoir mettre sur la table les raisons objectives qui
vous amènent à poser ce geste-là. Moi, je
répète la demande au ministre qu'à une prochaine
séance de cette commission le ministre dépose les études
qui le justifient de procéder à ce changement de structures.
Merci.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le
député de La Prairie.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce qu'on pourrait avoir la
réponse du Barreau? Moi, j'ai entendu la question, mais on ne leur a pas
donné l'opportunité de répondre sur l'exercice, dans un
ministère, des fonctions législatives, executives et quasi
judiciaires. À ma connaissance - j'ai occupé plusieurs postes de
ministre et j'essaie de faire le tour - il n'y en a pas d'autres.
Le Président (M. Gauvin): La question, c'est qu'on vous
demande de citer des exemples.
Mme Comtois: Est-ce qu'il y a d'autres ministères? Je n'ai
pas réfléchi à cette question-là. Je ne pourrais
pas vous en donner maintenant. Est-ce que je pourrais ajouter un seul
point?
Le Président (M. Gauvin): Oui, allez.
Mme Comtois: Si vous donnez suite au projet, il y a une chose que
j'ai oubliée parmi les changements qui devraient être
apportés. Au niveau du recours en appel devant la Cour du Québec,
on a restreint les cas d'ouverture à l'appel alors que l'appel devant la
Commission municipale du Québec, en vertu de l'article 96 de la LQE,
prévoit que la Commission municipale peut intervenir «si les
motifs de fait ou de droit invoqués au soutien d'une telle ordonnance
sont erronés», alors qu'à l'article 103.2 du projet de loi,
pour que la Commission puisse intervenir sur des motifs de fait ou de droit, il
faut que ceux-ci soient manifestement erronés. C'est qu'on a
monté un peu la barre. On a exclu des cas pour lesquels on pourra
obtenir correction devant la Cour du Québec par rapport à ce
qu'on pouvait obtenir devant la Commission municipale.
Le Président (M. Gauvin): Merci, Mme Comtois, M.
Gagné et M. Sauvé, de nous avoir présenté votre
mémoire. On va suspendre. Avant de suspendre, je vais inviter
l'Association de l'industrie de l'aluminium du Québec à prendre
place. Nous allons suspendre une minute ou deux.
(Suspension de la séance à 16 h 35)
(Reprise à 16 h 38)
Le Président (M. Gauvin): comme je le mentionnais, nous
recevons l'association de l'industrie de l'aluminium du québec,
représentée ici par m. christian van houtte,
président-directeur général. je vous inviterais à
nous présenter vos collègues, m. van houtte, s'il vous
plaît.
Association de l'industrie de l'aluminium du
Québec (AIAQ)
M. Van Houtte (Christian L): M. le Président, M. le
ministre, M. le représentant de l'Opposition, permettez-moi de vous
présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. À ma droite,
M. Jean-Marie Sala, directeur de l'environnement à la
Société d'électrolyse et de chimie Alcan; à ma
gauche, Carol Jomphe, surintendant environnement à l'Aluminerie Alouette
à Sept-îles, et M. Sylvain Bergeron, ingénieur en
environnement à la Société canadienne de métaux
Reynolds de Baie-Comeau.
Le Président (M. Gauvin): Merci. Vous avez 20 minutes pour
nous présenter votre mémoire. Ensuite, chacun des groupes
parlementaires ici aura 20 minutes pour échanger avec vous.
M. Van Houtte: Merci, M. le Président. L'Association que
je représente et qui est devant vous aujourd'hui est toute jeune. Nous
avons eu l'occasion de venir devant cette commission au mois de septembre
dernier pour discuter de la procédure d'évaluation des impacts.
Mais un des buts fondamentaux qui ont mené à la création
de l'Association, c'est la défense des intérêts communs des
membres. L'environnement figure en toute première place dans les
objectifs de l'Association. Voilà pourquoi nous sommes devant vous
aujourd'hui. Nous voulons, de la même façon que nous l'avons fait
en septembre dernier, vous faire part de nos commentaires de façon
très constructive, très positive sur le projet de loi 412.
L'Association de l'industrie de l'aluminium représente cinq
grands producteurs d'aluminium québécois et canadiens. Vous les
connaissez tous bien:^ l'Aluminerie Alouette, en construction à
Sept-îles; l'Aluminerie de Bécancour; l'Aluminerie Lauralco, en
construction à Deschambault; la Société
d'électrolyse et de chimie Alcan et la Société canadienne
de métaux Reynolds Itée.
Les investissements réalisés - je pense que vous les
connaissez également - par l'industrie de l'aluminium au Québec
au cours des 10 dernières années se chiffrent à
près de 8 000 000 000 $. Chaque nouvelle installation rencontre les plus
hautes normes fixées par le ministère de l'Environnement et
utilise la meilleure technologie disponible. Pour nous, bien avant que la
protection de l'environnement devienne un choix de société,
l'industrie de l'aluminium améliorait déjà sur une base
volontaire un bon nombre de ses installations. Au cours des 10 ou 12
dernières années, de vieilles installations ont été
modernisées. Des équipements nouveaux ont été mis
en place, des centres de traitement des gaz et des fumées ont
été installés et des séries Soderberg ont
même été remplacées par de nouvelles séries
beaucoup plus performantes.
Les compagnies qui sont membres de l'Association, bien sûr, n'en
sont pas non plus à leurs premières expériences en ce qui
concerne leur participation active dans l'élaboration des lois et des
règlements, que ce soit au Québec, au Canada ou ailleurs dans le
monde. À maintes reprises, ces compagnies ont participé à
l'étude de différents projets de loi et de règlements, que
ce soit dans le cadre de groupes de travail, de rencontres informelles ou de
commissions parlementaires comme c'est le cas aujourd'hui. À chaque
occasion, M. le Président, nous avons voulu que notre participation soit
toujours constructive. Donc, notre engagement relatif à la protection de
l'environnement est total et il est fonction d'un principe de
développement durable et de l'harmonisation des questions
environnementales et économiques qui font partie d'un tout qui est, pour
nous, indissociable.
Nous avons, M. le Président, dans notre mémoire,
soulevé un certain nombre de points et nous faisons quatre
recommandations principales. La première, c'est que nous croyons que la
création de l'Office viendra accroître le nombre d'organismes avec
lesquels l'industrie doit interagir en imposant une structure plus complexe et
moins efficace, freinant ainsi la réalisation d'investissements,
même ceux visant la protection de l'environnement. À notre avis,
il faudrait viser à simplifier le fonctionnement du MENVIQ plutôt
qu'à le compliquer par la création d'un office parallèle
qui, de plus, ne pourra que générer des coûts
supplémentaires et qui ne fera rien comme tel pour améliorer
l'environnement.
Deuxième volet, c'est que nous croyons que la création de
l'Office risque d'entraîner le Québec dans une judiciarisation
excessive de l'environnement sans nécessairement garantir une meilleure
protection de l'environnement. Je crois que plusieurs mémoires ont
soulevé ce point au cours des derniers jours. Notre expérience
est dans le même sens. Donc, nous croyons que nous devrions plutôt
revoir les lois et les règlements actuels, les rendre plus faciles
d'application, plus flexibles, c'est-à-dire plus réalistes, plus
conformes aux réalités quotidiennes, et les rendre plus
efficaces, et simplifier l'appareil administratif gouvernemental, ce qui
entraînerait une réduction de coûts.
Troisième point que nous soulevons, c'est que la
séparation du groupe responsable de la conception des règlements
et du groupe respon-
sable de l'application, à notre avis, compromettra
l'applicabilité de la Loi sur la qualité de l'environnement. Nous
croyons qu'il est possible de conserver à l'intérieur du MENVIQ
les personnes responsables de concevoir les lois et les règlements et
les personnes responsables de les appliquer afin de favoriser une synergie et
une cohérence plus grande.
Quatrième point, nous croyons que la création de l'Office
réduira de façon drastique le rôle du gouvernement dans la
gestion de l'environnement. Ce point-là a aussi été
soulevé, je crois, par d'autres organismes. Nous croyons que
l'environnement est un sujet trop important pour que le gouvernement et le
ministre en confient l'application à un organisme indépendant.
Nous recommandons donc que les responsabilités dévolues à
l'OPEQ dans le projet de loi 412 demeurent la responsabilité du
ministre.
Vous avez, M. le ministre, fait état, tout à l'heure, de
l'âge du ministère. Vous avez dit que le ministère a
maintenant 10 ans, 12 ans. C'est relativement jeune. Nous croyons, en
conclusion, que, plutôt que d'adopter un projet de loi qui
créerait un office de protection, il serait peut-être temps de
faire un temps d'arrêt, de faire une pause qui permettrait au
gouvernement, aux groupes, aux intervenants, de consolider les lois et les
règlements qui ont, au cours des 10 ou 12 dernières
années, fait l'objet soit d'adoption par le gouvernement, soit
d'études et qui, par la suite, on été retirés.
Je pense, M. le Président, que, dans le contexte actuel, il est
temps de procéder à une consolidation. Il est temps de voir
exactement où nous allons et de quelle façon nous voulons y
aller. Je lisais hier le mémoire présenté par
l'Association des manufacturiers du Québec qui disait que c'était
un peu comme monter à bord d'un autobus «no where». J'ai
l'impression et nous avons l'impression que l'Office, comme tel, ne pourra pas
faire mieux que le ministère de l'Environnement actuel. Un des
principes, à notre avis, qui contribuent à l'inefficacité
dont parlait le ministre tout à l'heure, c'est peut-être justement
les structures comme telles à l'intérieur du MENVIQ. Plutôt
que d'en créer de nouvelles, ne serait-il pas plus avantageux, plus
économique et plus rentable de procéder à une
restructuration à l'intérieur du MENVIQ?
Donc, M. le Président, nous croyons que le gouvernement devrait
surseoir à l'adoption de ce projet de loi et procéder à
une consolidation de toutes les lois et de tous les règlements qui ont
été adoptés, présentés, soumis, etc., au
cours des dernières années pour que, finalement, on sache
exactement dans quel cadre le gouvernement veut se diriger. Après, et
après seulement, nous croyons que là, en consultation avec les
parties, nous pourrons décider quels mécanismes, quels moyens
nous prendrons pour faire appliquer les lois et les règlements ainsi
consolidés. Voilà, M. le Président, l'essentiel de nos
commentaires.
Le Président (M. Gauvin): merci, m. van houtte. nous
allons inviter m. le ministre à échanger avec vous pour une
quinzaine de minutes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je remercie l'Association de
l'industrie de l'aluminium du Québec. On sait que c'est un secteur
d'activité économique sur lequel le Québec a beaucoup
misé et mise encore et dont le Québec attend des retombées
économiques encore plus importantes lorsqu'on pourra encore transformer
un petit peu plus chez nous l'aluminium que nous fabriquons. Je n'ai pas
l'intention de reprendre, parce que je pense que vous étiez dans la
salle tantôt lorsque je l'ai expliqué, le bref historique du
ministère, sa structure, la législation et la
réglementation en vigueur au cours des dernières années.
Mais je vais reprendre une partie de l'argumentation parce que, si ma
prémisse n'est pas bonne, j'aurai des problèmes d'aboutissement
ou d'atterrissage.
Comme ministre de l'Environnement, je l'ai dit, j'ai l'impression qu'en
matière d'assainissement des eaux, qu'en matière de pollution
urbaine comme telle le ministère de l'Environnement du Québec,
lorsqu'il a créé la Société
québécoise d'assainissement des eaux, a créé un
véhicule pour régler le problème, comme on dit, a pris la
bonne décision et qu'on a accompli, au cours des 10 dernières
années, des progrès importants dans l'assainissement de nos eaux.
Soit dit en passant, ce programme sert indirectement le monde industriel
surtout situé dans les régions plus urbanisées. Si vous
avez une entreprise ou une usine, vous pouvez bénéficier
indirectement du programme d'assainissement des eaux. J'ai également
indiqué que, sur le plan industriel, nous étions à
l'état embryonnaire et, quant à la pollution agricole, on
commence à s'habituer au vocabulaire, au ministère de
l'Environnement. Nous ne sommes pas encore rendus sur le terrain.
Quand je regarde le secteur des alumineries comme tel et que je prends
le projet au tout début, je me rends compte que, oui, le
ministère est associé sur le plan de la délivrance d'un
certificat d'autorisation pour la construction. Bien que, sur le plan des
évaluations environnementales, le bureau d'audiences publiques ait
juridiction pour une marina de 101 bateaux, le BAPE n'a pas juridiction sur
l'établissement d'une aluminerie, au Québec. Ça, ça
me préoccupe beaucoup et ça me fait dire qu'on n'est pas rendu
encore loin dans le domaine industriel.
Deuxième élément. Lorsque je regarde notre
réglementation, je peux comprendre l'Association des manufacturiers qui
nous dit: Arrêtez tout ça, ne bougez plus. On va regarder
ça. Mon prédécesseur, M. Lincoln, en 1988 ou 1989, a fait
adopter un projet de loi sur la réduction des rejets industriels. Il a
prépublié un règlement. Soixante-quinze mémoires
ont été présentés. Nous
avons dû retourner à la législation. Nous venons de
prépublier un autre règlement sur les attestations
d'assainissement et je ne voudrais pas avoir la perception qu'on nous dit:
Arrêtez, on va encore une fois tout regarder ça. Parce que,
lorsque mon successeur arrivera, il dira: On a accompli des progrès dans
le monde municipal, on n'a pas encore bougé dans le monde industriel et
on ne sait pas encore ce que le monde agricole, ça veut dire au
ministère de l'Environnement.
Ça, c'est un fardeau que j'ai à porter devant
l'Assemblée nationale du Québec et devant la population du
Québec. J'ai l'intention de le porter en faisant des progrès,
avec votre collaboration, mais je n'ai pas l'intention d'arrêter
ça là. Il faut qu'on soit clair. Ce qui a été
prépublié, à moins qu'on ait commis des erreurs majeures
dans notre réglementation sur les certificats d'attestation
d'assainissement, il s'agit d'une approche américaine, d'une approche
qu'on retrouve dans d'autres juridictions canadiennes et d'une approche qui
donne des résultats en diminution de pollution, parce que l'entreprise
investit davantage dans la modernisation de ses entreprises.
Soit dit en passant, le secteur de l'alumine-rie est un secteur qui a
investi beaucoup dans la modernisation de ses entreprises au cours des
dernières années et je vous en rends le témoignage devant
cette commission parlementaire. Vous avez accéléré vos
programmes, ce qui vous a permis de passer à travers la crise actuelle
sans avoir des fermetures importantes, et le ministère de
l'Environnement reconnaît ça. Maintenant, nous en sommes au niveau
où tout notre programme en fonction des industries va entrer en
application. Nous voulons en assurer une application régionale. Nous
avons besoin d'une application régionale qui soit proche du client de
façon à éviter les délais, comme vous l'avez
mentionné, et de façon à vous donner un meilleur service
parce qu'ils connaissent le milieu ambiant, finalement.
La problématique que j'ai, elle est bien simple, comme ministre
de l'environment. Je l'ai fait, le ménage à l'interne dans les
structures verticales, sauf que j'ai une joute de ping-pong depuis ce
temps-là entre mon bureau régional et le central pour des raisons
humaines dont je ne pourrai me défaire. Il est normal que le central
veuille conserver ses pouvoirs - elle ne veut pas les aliéner en
fonction des régions - et il est normal que le fonctionnaire en
région veuille sécuriser sa décision en la faisant
endosser par le central. Et, tant et aussi longtemps qu'on ne créera pas
quelque chose d'hermétique entre les deux, on n'aura pas de solution
à notre problème. C'est notre problème. Quand je dis
«notre problème», ce n'est pas le problème de
l'actuel ministre de l'Environnement, c'est un problème de
fonctionnement au ministère de l'Environnement. Si on tente de le faire,
c'est pour le bénéfice de l'environnement, oui, mais aussi pour
le bénéfice de nos clients importants comme, entre autres,
l'industrie de l'aluminium au Québec.
Le Président (M. Gauvin): Est-ce que vous avez des
réponses?
M. Van Houtte: M. le Président, je demanderais
peut-être à M. Sala, qui représente la
Société d'électrolyse et de chimie Alcan et qui est un
grand spécialiste, de faire des commentaires sur ce que vous venez de
dire.
Le Président (M. Gauvin): M. Sala.
M. Sala (Jean-Marie): Merci beaucoup. Je voudrais d'abord
mentionner que des progrès importants ont aussi été
réalisés par notre industrie, qu'il s'agisse de l'assainissement
de l'air, qu'il s'agisse de l'amélioration de nos rejets liquides. Ces
progrès, je pense, M. le ministre, vous pourriez aussi les souligner
parce qu'ils sont à l'avantage de la collaboration et de
l'identification de problèmes que nous avons pu faire avec plusieurs de
vos fonctionnaires et qui ont permis de faire des progrès remarquables
dans le cadre de la législation actuelle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Sala... M. Sala:
Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...si vous me permettez de vous
interrompre, je l'avais souligné. Vous êtes un des secteurs
industriels au Québec qui a investi le plus massivement dans la
modernisation avec des effets bénéfiques pour
l'environnement.
M. Sala: Je ne voudrais pas inonder la commission avec des
chiffres, mais ils sont à la disposition de tous et chacun et du public
également. J'aimerais seulement mentionner certains chiffres bien
spécifiques relatifs à nos vieilles usines. Qu'on garde en
mémoire, par exemple, que les émissions d'hydrocarbures
aromatiques polycycliques, qui ne sont par réglementées
actuellement, ont été réduites, entre 1983 et 1991,
à Jonquière, de six fois. Il y en a aujourd'hui six fois moins
qu'il y en avait. Je pourrais vous donner des chiffres du même ordre de
grandeur. Les huiles et graisses rejetées, par exemple, dans nos rejets
liquides, qui subsistent encore sont aujourd'hui 13 fois plus faibles qu'elles
ne l'étaient en 1980. Je pourrais continuer sur les différents
paramètres. Si vous êtes intéressés, ça nous
ferait plaisir de vous faire parvenir ces informations-là.
L'autre chose que j'aimerais mentionner est un point qui me paraît
important. Il a été fait référence à
quelques reprises à la réglementation américaine. Je crois
qu'il y a une date importante qu'il faut garder en mémoire, c'est
avril
1987. Pourquoi avril 1987? Parce que c'est la date de publication du
rapport Brundtland, «Notre avenir à tous», qui a
répandu dans la société, et je pense que les industries
n'y échappent pas, cette notion de développement durable à
laquelle nous avons déjà eu plusieurs fois l'occasion
d'adhérer.
Je crois que ce virage-là est un virage philosophique important
et que, quand on parie de nouvelles lois, de nouveaux règlements, de
nouvelles polices, etc., il ne faut pas oublier que cette philosophie a
changé. Ce n'est plus la philosophie qu'il y avait dans les
années soixante-dix. La notion de développement durable a
été adoptée par toutes les entreprises. À titre
d'exemple, je rappellerais le livre qui a été publié en
novembre 1989 au Saguenay-Lac-Saint-Jean, «Pour que demain soit»,
donc deux ans après la publication du rapport Brundtland, et qui a
été publié par la table sectorielle environnement du
Conseil régional de concertation et de développement avec la
collaboration, entre autres, du Conseil régional de l'environnement.
D'ailleurs, M. le ministre, vous lui aviez remis, il y a deux ans, le prix du
mérite environnemental provincial.
Nous croyons que c'est dans cet esprit de concertation à la base
dans les régions où nous opérons que pourront se faire les
améliorations que nous voulons, que vous voulez, que tous veulent en
termes d'amélioration de la qualité de l'environnement et non pas
par une complication, une complexité accrue des lois, des
règlements, des intervenants. J'arrêterai là. J'aurais
encore d'autre choses à dire, mais peut-être que nous pourrons en
discuter plus tard.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous allez dans le même sens
pour la régionalisation. Si on souhaite donner la responsabilité
accrue à la région, c'est parce qu'on pense qu'il y a une
sensibilité régionale d'un bureau régional que ne peut
posséder le bureau-chef à Québec. On ne peut avoir ces
sensibilités-là. Vous avez raison de le souligner, la table de
concertation Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'était la plus avancée
à l'époque au Québec, mais ce n'était pas le cas
dans toutes les régions du Québec. D'ailleurs, elle a reçu
le prix du mérite environnemental provincial parce qu'ils étaient
les meilleurs au niveau de la province.
Une question très pratique. Vous êtes des gens qui
investissez, qui construisez des alumine-ries au Québec. Il y a deux
écoles de pensée présentement au ministère. Il y en
a une qui me recommande comme ministre de l'Environnement de fonctionner en
fonction de résultats, c'est-à-dire on vous impose le respect de
normes d'émissions dans l'eau, dans l'air et dans le sol et on vous
laisse libres ou maîtres du design ou de la planification de votre usine.
Il y a une autre école de pensée qui me recommande non seulement
d'avoir des résultats à atteindre, mais également
d'intervenir et d'approuver chacun des éléments de la conception
comme telle de votre usine et des procédés.
Le Président (M. Gauvin): M. Sala. (17 heures)
M. Sala: Oui. Nous pouvons faire un peu un retour à ce
moment-là sur le mémoire que nous avions soumis à la
commission de l'aménagement et des équipements relatif au
fonctionnement du BAPE. Nous recommandions à l'époque que le
public soit consulté dans une toute première étape, au
moment de l'émission, sur le document, la directive environnementale
émise par le ministère, tout de suite au début du projet.
C'était notre recommandation, de façon à impliquer le
public dans l'évaluation des projets le plus tôt possible. Et
revenir ensuite, dans une deuxième étape éventuellement,
pour une vérification, pour que le public puisse vérifier de
quelle façon nous avions répondu au projet. J'en viens à
votre question.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous feriez un bon politicien.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Sala: Non, non. C'était juste pour remettre... Parce
que ce dossier a déjà été discuté. Quant
à savoir si les fonctionnaires du ministère devraient regarder
l'ensemble ou le détail des dossiers, je ne crois pas qu'ils doivent le
faire. Je pense que les dossiers sont effectivement disponibles, mais je ne
crois pas qu'ils devraient passer un temps exagéré sur le
détail de la construction, sur l'approbation des plans et devis. En
fait, il s'agirait d'appliquer simplement le règlement sur
l'administration de la loi, qui prévoit les documents qui doivent
être soumis au ministère, et de se limiter à ça sans
passer à travers un détail d'acceptation ou d'évaluation
des plans et devis.
Je crois qu'il se passe beaucoup de temps à ce niveau-là
et que le ministère pourrait gagner du temps et être beaucoup plus
efficace sans risquer de mettre en péril l'environnement par la
construction des projets. Est-ce que ça répond?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, cette partie répond.
Merci.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala. Je reconnais M.
le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, au nom de
l'Opposition, il me fait plaisir de saluer les représentants de
l'Association de l'industrie de l'aluminium qui viennent fréquemment
à cette commission-ci nous apporter leur contribution quant à la
façon d'améliorer notre environnement
au Québec. Je vous félicite pour votre mémoire.
C'est sur un ton sobre, mais d'une grande sagesse et d'une grande
clarté. On n'a qu'à lire, à la page 5, les quatre points,
et ça résume très bien. Les formules sont très
bonnes. Vous dites: «Nous croyons que la création de l'Office
[...] risque: «1° d'imposer une structure plus complexe et donc moins
efficace; «2° de judiciariser l'environnement sans en garantir une
meilleure protection; «3° de limiter l'interaction essentielle entre
les concepteurs de règlements, ceux par qui ils sont appliqués et
ceux à qui ils sont appliqués;» et, enfin: «4° de
réduire de façon drastique le pouvoir du gouvernement dans
l'application de la loi en remettant notre environnement entre les mains
d'intervenants aux intérêts divergents et
limités».
Je vais revenir sur le quatrième point pour poser une question
tantôt. Mais je veux juste ajouter un ou deux commentaires pour vous dire
que vous êtes en très bonne compagnie. Vous êtes en
très bonne compagnie, non seulement avec l'Opposition, ça va de
soi, mais aussi, peut-être, avec certains députés
libéraux silencieux qu'on entendra peut-être, à un moment
donné, un peu plus tard sur ce projet de loi. Vous êtes en
compagnie d'Hydro-Québec, qui est le plus gros client du
ministère de l'Environnement, de l'Association des manufacturiers du
Québec, du Conseil du patronat, des groupes environnementaux, du Barreau
qui vient de passer avant vous. Enfin, la très, très grande
majorité des groupes tient à peu près le même
langage que vous. Chacun le fait à sa façon, mais chacun met le
ministre en garde. Et j'aime bien votre finale, quand vous dites: De
grâce, M. le ministre, faisons une pause pour permettre au gouvernement
de mieux harmoniser ses lois, ses règlements, de mieux harmoniser le
cadre à l'intérieur duquel fonctionnent les directions
régionales. C'est un appel qui est très sage: faire une pause. On
n'a rien à perdre à faire une pause; au contraire, tout à
gagner.
Un dernier commentaire, je reviens à ma question. Le ministre -
je ne peux pas m'em-pêcher de le relever - vous dit: Ça me
préoccupe que les alumineries ne soient pas assujetties à la
procédure d'évaluation et d'étude des impacts
environnementaux. Mais il n'en tient qu'à lui et à son
gouvernement. Depuis 1985, on vous demande de mettre en vigueur ces
articles-là. Évidemment, là, pendant plusieurs mois, il a
eu l'occasion de dire: Bien, j'attends le rapport de la commission. Mais il
sait fort bien que la commission va lui demander ça d'ici quelques
semaines; il le sait fort bien. Il nous a laissé entendre, cependant,
qu'il n'était pas pour réagir de façon très,
très favorable quand il est venu à la clôture de la
commission. Oui. Enfin, je reviens à votre mémoire, au
quatrième commentaire que vous faites: «réduire de
façon drastique le pouvoir du gouvernement dans l'application de la loi
en remettant notre environnement entre les mains d'intervenants aux
intérêts divergents et limités.» Pouvez-vous
élaborer un petit peu là-dessus?
M. Van Houtte: Je pense, M. le Président, qu'il s'agit
simplement de voir dans le projet de loi la façon dont sera
composé le conseil d'administration de cet Office. On parle d'un conseil
d'administration de neuf membres, composé du président-directeur
général et du sous-ministre, et il reste sept postes à
combler avec des représentants du monde des affaires, du monde syndical,
municipal et des groupes environnementaux. Pour nous, il semble, en tout cas,
que l'environnement soit un sujet trop important pour que les décisions
importantes relatives à l'administration des lois et des
règlements soient prises à la majorité des voix sur un
conseil d'administration où, de par leur nature même, les gens ont
peut-être des intérêts complètement divergents.
Les groupes environnementaux diront, bien sûr, que le gouvernement
ne va jamais assez vite. Les groupes municipaux essaieront sans doute, parce
que ce sont eux-mêmes des élus, de tempérer ou d'aller
suivant les dossiers. Les représentants syndicaux, à qui ces
personnes-là seront-elles imputables? Les représentants du milieu
des affaires, eux, voudront toujours faire une étude de coûts. En
fait, les intérêts me semblent tellement divergents que,
finalement, ça peut causer beaucoup plus de problèmes que
d'autres choses, selon nous, un conseil d'administration formé comme
ça.
M. Lazure: Merci. Je pense que c'est tout à fait
pertinent, ce que vous dites là, et un document que j'ai entre les
mains, qui est une série de notes du Secrétariat à
l'aménagement, au développement régional et à
l'environnement, un comité qui a étudié le projet de loi
du ministre, fait des commentaires à peu près semblables aux
vôtres sur cette question précise.
Il y a aussi, à la page 9 de votre texte, une remarque qui est
assez originale, qui n'est pas apparue dans d'autres mémoires. Vous
dites: «L'ajout de deux nouveaux intervenants, l'OPEQ central et l'OPEQ
régional, viendra alourdir et ralentir le fonctionnement d'un
système déjà complexe en multipliant les recours
judiciaires plutôt qu'en favorisant la solution concrète de
problèmes.» Avant de vous demander d'élaborer un peu
là-dessus, je ferai remarquer au ministre que c'est ça, le vrai
langage. La vraie vérité, c'est ça. Parce que le ministre,
depuis le début, dit: Je crée l'OPEQ pour que, en région,
les décisions se prennent. Un peu comme si l'OPEQ ne devait être
constitué que de personnel en région. Vous avez raison de parler
d'un OPEQ central. Il va y en avoir un OPEQ central si le projet de loi est
adopté. Mais la judiciarisation
accrue, de quelle façon vous la voyez venir?
M. Sala: La façon dont nous voyons arriver cette
judiciarisation tient au fait que la loi et les règlements, au
Québec, ont évolué de façon assez
considérable. M. le ministre a parlé tout à l'heure du
projet de loi 99 qui date déjà du 15 novembre 1988, dans la
première version, et qui aboutit actuellement. L'harmonisation de la loi
et des règlements laisse à désirer. Quand on parle, par
exemple, du règlement sur les déchets dangereux, le
ministère a très rapidement réalisé, en 1985, qu'il
y avait des changements à faire. Ce sont des changements importants.
L'objectif est louable. C'est très difficile, nous en sommes
extrêmement conscients, mais si on remettait actuellement cet état
de situation entre les mains d'un office qui serait indépendant du
ministère, nous pensons que c'est davantage l'outil, finalement, qui
serait difficile à appliquer par quelqu'un qui est indépendant du
ministère. Il est déjà très difficile à
appliquer quand il faut l'appliquer à l'intérieur du
ministère par les fonctionnaires du ministère. Il y a toute une
question d'interprétation de certains articles, etc. Si on remettait
tout cela dans les mains d'un office, il nous semble que,
inévitablement, on arriverait à une judiciarisation. Et cette
judiciarisation fait peut-être le bonheur des avocats, mais nous ne
pensons pas que ce soit bénéfique pour la qualité de
l'environnement dans lequel nous vivons.
M. Lazure: merci. je pense que vous rejoignez plusieurs autres
mémoires qui ont mis en garde le ministre sur cette judiciarisation qui
nous guetterait tous.
M. Jomphe (Carol): M. le Président, peut-être juste
un autre exemple que je voudrais amener. Aluminerie Alouette est une nouvelle
entreprise et on n'est pas encore entré en production. Actuellement, il
y a un projet de règlement aussi qui s'en vient au niveau des effluents
des industries. Je veux juste vous rappeler que, sans qu'il y ait
présence de règlement, Aluminerie Alouette et même les
autres alumineries au Québec ont fait des grands pas dans les
dernières années au niveau de leur traitement des eaux.
La plupart des entreprises ont élaboré des programmes
d'assainissement et, maintenant, font la recirculation des eaux et font le
traitement d'une purge qui peut être rejetée à
l'environnement. Dans le cas d'Aluminerie Alouette, sans qu'il y ait eu
présence de règlements et de judiciarisation, nous avons
élaboré un projet où on fait la recirculation
complète des eaux industrielles de telle façon qu'il n'y ait
aucun rejet dans l'eau.
À ce moment-là, on peut se poser la question: Est-ce qu'il
y a vraiment nécessité d'avoir une réglementation ou
est-ce qu'on ne doit pas plutôt aller, comme on en parlait tout à
l'heure, vers la concertation et vers les intérêts communs des
entreprises, du gouvernement et de la population? Il y a moyen, je pense, de
faire ça sans qu'il y ait toujours une réglementation au
bout.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Jomphe. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Oui, merci, M. le Président. À la page
11 de votre mémoire, vous dites: «II est important que les
avant-projets puissent être discutés lors de leur phase de
préparation, avant leur dépôt officiel - ce qui n'a pas
été le cas pour le projet 412; il n'y a pas eu de consultation -
cette préconsultation permet aux parties intéressées et au
MENVIQ de faire connaître leurs positions dans un contexte construct
[...] L'adoption rapide de la loi 405 en décembre dernier était
à rencontre du principe de consultation, et cela nous paraît
complètement inacceptable.»
Vous avez raison et je vous rappelle que l'Opposition avait
demandé au ministre de l'Environnement de prendre le temps de consulter
quelques groupes, sur invitation. Même, on était d'accord pour se
limiter à un certain nombre de groupes, mais il a refusé. Il a
plaidé l'urgence alors qu'en réalité il n'y avait pas
urgence parce que les règlements, qu'il devait déposer,
d'ailleurs, en même temps que le projet de loi, en décembre, ne
sont même pas encore déposés.
Je pense que vous prenez un bel exemple, à la page 11. Vous avez
tout à fait raison de souligner que, souvent, le ministre procède
trop rapidement et il aurait avantage à prolonger les consultations,
autant avec ses fonctionnaires qu'avec les groupes qui sont à
l'extérieur, que ce soit les industriels ou les groupes
environnementaux.
M. le Président, moi, je veux, en terminant, remercier encore une
fois les représentants de l'industrie de l'aluminium pour la
contribution importante qu'ils font aux travaux de la commission.
Le Président (M. Gauvin): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: M. le Président, brièvement,
étant donné qu'on ne vous a pas tous les jours, les
spécialistes de l'environnement de chacune des multinationales dans
l'aluminerie. Vous avez parlé tout à l'heure, M. Sala, des
réductions fort importantes des émanations de HAP. Je sais que M.
Larouche a entendu parler beaucoup de ceux de Baie-Comeau. À
Baie-Comeau, on a un avantage. On sait où ils sont, dans la baie des
Anglais. Je sais que Reynolds a diminué beaucoup aussi les
émanations de HAP. Ils ont fait vraiment un travail extraordinaire et on
sait maintenant qu'il y a moins d'émanations, peut-être dans la
même
proportion que vous avez dit concernant Alcan. Donc, à Baie
Comeau, on sait où sont les HAP qui ont été produits avant
la diminution. Chez vous, M. Sala, est-ce que vous savez où est-ce
qu'ils sont?
M. Sala: Absolument. M. Maltais: Oui?
M. Sala: Absolument. Nous avons, depuis la fin des années
soixante-dix, contribué d'abord à l'identification des HAP. Notre
centre de recherche d'Arvida a d'ailleurs fait des publications sur les
méthodes analytiques des HAP et, immédiatement lorsque ces
méthodes ont été disponibles, nous les avons
utilisées pour identifier dans toutes nos usines où se trouvaient
les sources d'émissions. Et nous avons d'ailleurs partagé avec le
ministère de l'Environnement, dans les années 1984-1985, les
études que nous faisions pour identifier le mieux possible où se
trouvaient les HAP. Donc, ceci pour identifier les sources, les
émissions, où elles se produisaient.
Dans un autre esprit, nous avons également suivi de très
près tout ce qui se faisait au sujet de la qualité des eaux de la
rivière Saguenay et de la qualité des sédiments. Il y a eu
d'abord une première étude des sédiments qui a
été faite dans les années 1985-1986, qui a
été publiée et qui montrait où se trouvaient les
HAP qui avaient pu être laissés dans la rivière.
Mais je voudrais, à ce moment-ci, bien préciser que le
problème, entre guillemets, des HAP est celui des vieilles salles de
cuves Soder-berg en utilisation, en service au Québec, celles qu'on
appelle Soderberg à goujons horizontaux par différence avec ce
qui existe à Baie-Comeau où les goujons sont verticaux; ces HAP
là créent un problème à l'atmosphère et non
pas un problème dans l'eau.
Néanmoins, nous avons participé avec les chercheurs qui
faisaient cette recherche dans les sédiments du Saguenay et nous avons,
d'une certaine façon, facilité aussi les travaux du Bedford
Institute of Oceanography de Darmouth. Nous avons très bien relié
d'où venaient les HAP et également comment les rejets de HAP dans
le liquide avaient fortement diminué depuis 1976. Les
corrélations sont tout à fait disponibles; elles ont fait l'objet
de publications scientifiques, aussi bien quant à la méthode de
datation des carottes de sédiments qui étaient
prélevées que des analyses. On a très bien relié
l'évolution de la contamination des sédiments du Saguenay aux
rejets liquides de l'usine d'île Maligne qui, jusqu'en 1976, rejetait
malheureusement ses effluents liquides de lavage des gaz d'élec-trolyse
dans le Saguenay. En 1976, cela a été arrêté et les
liqueurs, depuis, sont envoyées à Jonquière où nous
faisons de la récupération de cryolithe qui est une des
matières premières que nous utilisons dans la production
électrolytique de l'aluminium.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. Sala. C'est tout le
temps qu'on avait à notre disposition. Je remercie M. Sala, M. Bergeron,
M. Jomphe et M. Van Houtte de leur présentation.
Avant d'accueillir l'Association minière du Québec, nous
allons suspendre une minute ou deux. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 17)
(Reprise à 17 h 20)
Le Président (M. Gauvin): alors, on invite l'association
minière du québec à prendre place, en la personne de m.
raynald vézina, vice-président aux opérations,
cambior.
Une voix: C'est M. Drouin.
Le Président (M. Gauvin): Excusez-moi! Nous recevons M.
Claude Drouin, directeur général, M. Roberge, adjoint à la
direction, et M. Thomassin. M. Drouin, vous avez 20 minutes pour faire votre
présentation. Vous n'êtes pas tenu de prendre tout ce
temps-là, mais les 20 minutes vous sont allouées.
Association minière du Québec
M. Drouin (Claude): je vais me contenter, m. le président,
de vous présenter mes partenaires qui sont au bout de la table: m. yves
thomassin, qui est le conseiller en environnement; immédiatement
à ma gauche, me jean roberge, qui est mon adjoint et celui qui vous fera
la présentation.
Le Président (M. Gauvin): M. Roberge.
M. Roberge (Jean): Oui, bonjour, M. le Président. Bonjour,
M. le ministre et MM. les députés du gouvernement et de
l'Opposition. On vous remercie beaucoup de nous avoir invités à
présenter notre mémoire ici, à la commission
parlementaire, principalement sur ce projet de loi qui est important puisqu'il
constitue un virage important à nos yeux de la gestion environnementale
de la part du gouvernement.
L'Association minière, comme vous le savez, regroupe une
quarantaine d'entreprises minières dans le domaine du fer, du cuivre, du
zinc et de l'or, qui se situent parmi les premiers producteurs au monde. De par
ses activités, l'Association minière est bien placée pour
voir ce qui se passe en matière d'environnement, tant au niveau
régional que central, puisque nous avons affaire aux deux paliers
d'administration de la Loi sur la qualité de l'environnement de par nos
membres.
Le Président (M. Gauvin): Je m'excuse, M.
Roberge.
M. Roberge: Oui.
Le Président (M. Gauvin): Nous avons un petit...
M. Roberge: La cloche.
Le Président (M. Gauvin): ...dérangement de
parlementaires. Nous allons suspendre nos travaux pour quelques minutes, car
les membres de l'Assemblée nationale doivent se présenter pour un
vote.
Donc, la commission reprend ses travaux. Excusez-nous, M. Roberge, je
vous invite à continuer votre présentation.
M. Roberge: O.K. M'entendez-vous bien? Des voix: Oui.
M. Roberge: Ça va bien? Parce qu'on me dit souvent que je
n'ai pas une voix tellement forte.
La question de scinder le ministère en deux, on en avait
déjà parlé précédemment dans l'examen du
projet de loi 99. Je vais vous expliquer pourquoi. Le ministre voulait avoir,
ajouté dans la Loi sur la qualité de l'environnement - et
ça s'y trouve - le pouvoir d'ajouter des normes dans les certificats
d'autorisation afin d'éviter tout accident. À ce
moment-là, on avait souligné dans notre mémoire qu'il
pourrait être difficile et même dangereux pour le ministre d'avoir
à émettre des certificats d'autorisation contenant des normes
pour éviter des accidents, alors que le propre des accidents, c'est
d'être accidentels; et le ministre pourrait être pris à
partie si un accident, effectivement, arrivait ou si une norme ou un mode de
détection survenait quelques années plus tard. On l'avait mis en
garde et on avait suggéré, peut-être, qu'il faudrait penser
à scinder des activités. Mais, dans notre pensée, la
scission ne devrait pas se faire à cette place-là. Elle devrait
se faire plutôt pour l'activité de surveillance, qui pourrait
aller seule, mais la question de conception - lois, règlements,
émission de permis, d'ordonnances, etc. - devrait être entre les
mains de la même autorité, de façon à ce que ce soit
cohérent avec les politiques, lois et règlements
envisagés, et émettre les permis en conséquence de
ça. Et la surveillance pourrait aller plus loin.
À ce moment-ci, nous croyons que c'est vraiment trop tôt
pour opérer un tel divorce. D'abord, on pense que la culture
environnementale au Québec n'est pas assez bien assise pour qu'un volet
Important du ministère s'en sépare. Comme question de fait,
l'harmonisation des activités et des approches du central et des
diverses régions que l'on veut scinder n'est pas à 100 %
réalisée. Nous pensons que cette étape devrait être
franchie avant de séparer ces groupes. Avant de scinder un organisme en
pensant mieux s'occuper de l'environnement, il serait essentiel, à notre
sens, de chercher à mieux faire dans le cadre actuel plutôt que de
risquer un accroissement des difficultés.
Il ne faut pas, à ce moment-ci, créer un autre organisme
nécessitant un personnel supplémentaire, non plus, d'une certaine
façon privé de l'expertise du central. Il y aurait un risque
d'incohérence nuisible pour l'environnement et nuisible pour la
clientèle visée par les diverses lois et les règlements.
En effet, l'expertise et les connaissances acquises de part et d'autre au
ministère de l'Environnement deviendraient difficilement accessibles
pour les deux entités. Nous pensons qu'à ce moment-ci il est plus
important de renforcer l'expertise actuelle et ces connaissances.
Le central et le régional coupés l'un de l'autre,
mutuellement, d'une source d'information, cela rendrait aussi difficile
l'application des lois et des règlements. Les deux sont des
collaborateurs précieux l'un envers l'autre et la division
envisagée devrait être plutôt basée sur des
critères d'efficacité. La preuve n'a pas été faite,
à notre sens, qu'un tel geste amènerait l'efficacité
souhaitée. Peut-être que, dans un certain nombre d'années,
la situation sera assez mûre pour l'effectuer, mais pas à ce
moment-ci.
Quant à nous, notre expérience avec le ministère de
l'Environnement, au central et au régional, nous laisse clairement voir
qu'il y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer
à autre chose. Par exemple, il y a des divergences de vues entre ce que
le régional préconise et ce que le central envisage. D'autre
part, même entre les régions, des différences sont
notées quant au traitement des dossiers. De plus, on constate un manque
important de connaissances du milieu minier, mais aussi des autres milieux -
les milieux industriels - autant dans les régions qu'au central, quoique
nous sommes portés à croire que le central fait preuve de
beaucoup plus d'éloi-gnement de la réalité.
Sur le traitement des dossiers, beaucoup de temps est passé sur
des aspects techniques de forme plutôt que de fond. Beaucoup de
délais aussi sont constatés et subis. Quant à
l'émission des autorisations et des permis, il est clair qu'une partie
des délais est due à des divergences de vues à l'interne
entre les divers groupes ayant à gérer le même dossier. On
préconisait, par exemple, que le central soit impliqué dès
le départ d'une demande d'autorisation et qu'il vienne sur les lieux
davantage dans les régions plutôt que d'attendre que le dossier
lui parvienne, et parfois d'une manière parcellaire. Il devrait y avoir
une symbiose plus grande entre le central et le régional. Devant cet
ensemble de constatations, nous considérons que le central ne devrait
pas, à ce moment-ci, se couper du régional, et vice versa.
D'autres exemples. On a pensé à vous
mentionner, en Ontario ou en France, le fonctionnement. Les
régions ont plus de pouvoirs qu'actuellement, ici, au Québec.
Mais, dans une certaine mesure, en Ontario, on envisage de rapatrier au central
certains pouvoirs parce qu'il y a une grande autonomie des régions et
ça nuit à la cohérence de l'application des lois. En
France également, ils ont des problèmes de cet ordre-là.
Il ne faut pas oublier non plus le contexte constitutionnel dans lequel on vit.
Actuellement, on n'est plus certain de qui fait quoi et jusque dans quelle
mesure les provinces ou le fédéral ont une juridiction
entière, partielle ou commune sur l'environnement.
Quand on parle de la loi sur la protection de l'environnement comme
telle, la compétence provinciale est peut-être plus importante ou
plus évidente, mais quand on parle de la compétence
environnementale dérivant, par exemple, de la Loi sur les
pêcheries, la juridiction n'est pas claire. Créer à ce
moment-ci un troisième acteur ne ferait que compliquer la situation pour
les entreprises et les gens qui constituent la clientèle visée,
et pour l'environnement, probablement.
Les changements importants et rapides qu'on a connus. Quand on lit
l'article premier de l'Office, c'est difficile de ne pas se remémorer le
passé et de ne pas se demander où on s'en va et si on a
examiné suffisamment le passé pour en arriver aujourd'hui
à la solution qui est envisagée. Je pense qu'il faudrait marquer
peut-être un temps d'arrêt dans les modifications et les
changements. L'année dernière, un groupe de travail au
ministère a transcrit comment devraient fonctionner les relations
central et régional. Je pense qu'on devrait tenter cette
expérience avant de passer à une autre approche, telle
qu'envisagée par le projet de loi.
Les articles du projet de loi. Sur le conseil d'administration, par
exemple, la représentation au sein du conseil d'administration nous
inquiète parce qu'on envisage des représentants du milieu des
affaires, environnemental, municipal et syndical. On ne pense pas que ces
groupes mis ensemble vont constituer le regroupement idéal pour la
gestion de l'environnement. Dans le domaine des affaires, par exemple, vous
avez le secteur primaire, mais vous avez les secteurs secondaire et tertiaire
qui, chacun, se divisent en différents groupes bien spécifiques.
Et l'un des groupes du milieu des affaires ne pourra pas nécessairement
représenter le milieu des affaires comme tel.
Dans les autres domaines également, je pense qu'il va y avoir un
regroupement artificiel difficile. Le monde municipal, par exemple, serait
représenté par qui? Par des personnes qui sont de
municipalités régionales, locales, de régions
éloignées, de municipalités à plus haute
densité, qui auront une problématique tout à fait
différente et une approche différente? On se demande aussi
comment un tel regroupement consti- tuerait un interlocuteur valable. On pense
aux syndicats. La moitié des travailleurs sont syndiqués;
ça ne veut pas dire que ça représente les travailleurs.
L'organisation d'un conseil d'administration devrait être
articulée, comme le ministère, d'une façon assez
symétrique pour qu'ils se comprennent. Par exemple, le ministère
est articulé: urbain, agricole, industriel, développement durable
et conservation, s'occupant de l'eau, de l'air et du sol. Avoir un conseil
d'administration qui fait référence à des groupes
d'activité, il me semble que c'est différent; l'approche ne sera
pas pareille et il y aura une difficulté d'entendement entre ces deux
groupes. (17 h 30)
À l'article 10, on mentionne la nécessité de
régler la question des conflits d'intérêts. C'est une
très bonne mesure qui devrait même s'appliquer aux
ministères qui ont un rôle important à jouer dans la
société. Le conflit d'intérêts devrait être
articulé, expliqué de façon à ce que ce ne soit pas
simplement le fait de détenir des actions ou un intérêt
financier dans une entreprise qui constitue un conflit d'intérêts.
Il y a peut-être d'autres situations. Quand on parie d'entreprises, on
pense à celles qui sont la clientèle visée par les
règlements, mais on pense aussi à des entreprises de consultants
en matière d'environnement. Je pense que les conflits
d'intérêts devraient être couverts d'une manière
assez articulée là-dedans. Mais, d'une manière
générale, c'est une bonne mesure à passer.
Quand on regarde les pouvoirs de l'Office prévus aux articles 18
et 19, on voit qu'il interviendra en environnement en mettant en place des
mesures de protection et un service d'urgence. À la demande du ministre,
il pourra appliquer des programmes de restauration, de prévention,
recevra des plaintes, concevra des programmes de formation et d'information et
fournira des données statistiques, tout en exécutant des mandats
connexes, et pourra donner des avis au ministre.
Ce que nous ne savons pas, par contre, c'est ce qu'il va faire dans ces
divers domaines. Est-ce que l'Office pourra faire des enquêtes sur ces
plaintes? Pourra-t-il exercer des activités pour mettre en branle les
mesures qu'il aura mises en place? Dans le domaine de la conception des
programmes de formation et d'information, est-ce que l'Office fera aussi de la
formation ou est-ce qu'il donnera des mandats de formation sans avoir
lui-même le mandat de faire la formation? Aussi, sur cette même
question des pouvoirs et des fonctions, on s'inquiète du fait
qu'à l'article 24 on prévoit que le ministre pourra indiquer
à l'Office quels sont les objectifs ou les orientations précises.
Cet élément, quant à nous, constitue une source de
conflits qu'il faudrait éviter.
À notre avis aussi, les activités de l'Office vont doubler
celles du ministère et, quant aux mandats connexes, il serait important
de les
définir. C'est une notion très large qui peut mener
à ce que l'accessoire dépasse l'essentiel. C'est une zone grise
à éviter, la question des mandats connexes dont on parle dans ces
articles 18 et 19.
À l'article 22, on parle de mandats ou d'ententes que l'Office
pourra faire avec une personne ou une municipalité pour exercer ses
fonctions. Comme nous l'avons mentionné, les fonctions de l'Office
étant peu claires, on se demande sur quoi l'Office pourra s'entendre.
Est-ce qu'il s'agit uniquement de collaborer en vue d'effectuer des
échanges de données, de renseignements? Est-ce qu'il s'agit de
concevoir des programmes de formation et d'information? Est-ce qu'il s'agit du
fait de recevoir des plaintes ou encore de voir à l'application de
programmes de restauration? Ceci devrait être éclairci, quant
à nous, en précisant les ententes dont il s'agit et le mode de
financement prévu pour que les personnes, municipalités,
sociétés ou organismes réalisent le mandat ou
l'entente.
À l'article 32, on vise à modifier les demandes d'appel en
révision. Au sujet de l'article 96, il serait important d'ajouter qu'une
décision de l'Office devrait être motivée en plus
d'être écrite et transmise. Pour la question de la
révision, il faudrait prévoir, à notre avis, la
possibilité de demander une révision dans les cas de refus ou de
modifications de certificat, permis, autorisation et approbation faites
à l'initiative de l'Office à la demande d'un
intéressé, et non pas viser uniquement les cas d'attestation
d'assainissement. L'article 99, pour sa part, prévoit qu'une demande de
révision est faite à trois personnes désignées par
l'Office. On croit qu'il serait important de préciser quels sont les
pouvoirs de ces trois personnes et les qualités qu'elles doivent avoir
pour exercer ces fonctions. À l'article 100, la possibilité est
prévue que le comité de révision de l'Office rende une
décision provisoire dans l'intérêt de la protection de
l'environnement. Nous sommes tout à fait contre ce genre de disposition
qui fait fi des droits des parties et qui est d'une discrétion absolue
entre les mains de trois personnes dont on ne connaît ni les
qualités, ni les pouvoirs, comme si la légalité aux yeux
de quelqu'un pouvait être mise de côté par simple opinion
divergente. C'est inquiétant, cette disposition-là. Cette
façon de prévoir des pouvoirs est inadmissible, quant à
nous, et une entreprise pourrait être obligée de fermer ses portes
sans s'être fait entendre en appel.
Enfin, en mentionnant tous les changements envisagés dans le
projet de loi 412, lorsqu'on remplace évidemment le mot
«fonctionnaire» par le mot «personne» et en ayant en
tête la délégation ou les ententes que l'Office pourra
conclure avec tout organisme, municipalité, société ou
organisme, il est à craindre que tout un chacun puisse devenir un
délégué ou un représentant de l'Office, comme, par
exemple, des municipalités, des sociétés pour la
protection de l'environnement ou tout autre organisme qui aurait l'intention de
jouer un rôle de police verte. Il serait très important
d'éclaircir ce à quoi on veut en venir, puisque ça ne nous
semble pas clair. On prévoit que l'Office pourra donner par entente des
mandats, mais on se demande quel genre de mandats on envisage. Est-ce que c'est
l'ensemble ou partiel? Ce n'est pas très clair et, aussi,
inquiétant.
Comme remarque générale, nous pensons que la
création de l'Office ne devrait pas être envisagée à
ce moment-ci et que le gouvernement devrait plutôt s'occuper de s'assurer
que ce qui existe actuellement fonctionne bien et mieux avant de passer
à une autre étape que nous trouvons vraiment trop
prématurée et qui risque d'enliser la gestion environnementale et
de mêler tout le monde.
Le Président
(M. Gauvin): merci, m. rober- ge.
j'inviterais m. le ministre à échanger avec vous pour une
période d'une quinzaine de minutes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Dans un premier temps, vous me
permettrez de remercier l'Association minière du Québec, qui est
devenue une habituée devant cette commission parlementaire. Il y a des
visages que l'on reconnaît, les porte-parole; je veux également
les remercier pour le temps qu'ils ont consacré à la
rédaction du mémoire.
Vous terminez votre exposé en nous parlant d'améliorer ce
qui fonctionne déjà bien, pour que ça fonctionne mieux.
Moi, j'aimerais ça vous croire. Si l'ensemble de la population du
Québec et les clients du ministère étaient satisfaits que
ça fonctionne bien, moi, je ne serais pas assis ici présentement
en train de discuter avec vous. C'est parce que je pars d'une autre
prémisse que la vôtre que je pense que ça ne fonctionne pas
bien. En tout cas, pas assez bien. On dispose, au gouvernement, de moyens de
vérifier si le peuple est satisfait. En matière environnementale,
on l'a fait. Il y a deux ans, il y a 70 % de la population qui était
insatisfaite de la performance du ministère de l'Environnement. Je
comprends que ça fasse l'affaire de l'Opposition, puis je comprends sa
position également: c'est parfait, tant que c'est comme ça.
Depuis deux ans, on a changé quelques façons de
fonctionner. Au dernier sondage d'opinion publique, en décembre, 48 %
étaient encore insatisfaits. C'est encore trop pour un gouvernement qui
vise à servir de façon efficace ses clientèles. Je
comprends que vous avez un secteur d'activité qui est un peu pointu. Il
est large, il est important, mais l'environnement, ça touche l'ensemble.
Ça touche l'individu à partir de ses achats, finalement, du
berceau à la tombe, dans toutes ses activités humaines. Au cours
des dernières années, ce qu'on a réussi à faire
avec
la structure actuelle en tentant d'en tirer le maximum, on a
réussi à pallier aux urgences d'avant avant-hier, d'avant-hier,
puis d'hier, puis, une journée de temps en temps, on se rend à
l'urgence de la journée. Ce qui ne nous laisse pas beaucoup de temps
pour ce que vous appelez - le défi auquel vous nous conviez, et vous
avez raison de nous y convier - le développement durable, parce que tout
l'appareil gouvernemental, à partir de ses bureaux régionaux
jusqu'au bureau du sous-ministre - pour ne pas mentionner celui du ministre -
est pris de façon quotidienne dans ce qu'on appelle les urgences.
Ce qu'on tente de faire, c'est faire un peu mieux. Moi, je regarde le
bilan législatif et réglementaire des deux dernières
années, puis je dis: On a bougé, mais on est encore en retard.
Les deux dernières années, je ne vous rappellerai pas de mauvais
souvenirs sur le plan législatif, mais la loi 65, pollueur-payeur; en
1990, la loi qui a créé RECYC. Sur le plan réglementaire,
pas beaucoup de choses. On a modifié le contenu en soufre du mazout
lourd de façon à respecter nos échéances dans la
diminution des pluies acides. Et on l'a fait. En 1991, on a
accéléré le tempo un peu sur le plan législatif. On
a permis à la Société québécoise
d'assainissement des eaux d'aller dans les plus petites municipalités au
cours des trois prochaines années. En ce qui concerne les déchets
dangereux, pour donner suite au rapport Charbonneau, on a passé une loi
sur les matières dangereuses, de façon à pouvoir recycler
davantage d'éléments. Et, dernièrement, on passé
une loi sur la réduction des rejets industriels.
Sur le plan réglementaire, on a accéléré le
tempo pour - encore hier et avant-hier - faire un règlement sur les
carrières et les sablières. C'est important de fonctionner par
résultats et non plus d'approuver tout le design du
dépous-siéreur. Le règlement sur les neiges usées;
il a fallu négocier avec les unions municipales. Le règlement sur
les déchets solides pour permettre aux gens d'une région, aux
gestionnaires d'un site d'enfouissement de refuser des déchets de
l'extérieur de leur MRC. Encore une urgence. Le règlement sur
l'entreposage des pneus hors d'usage. Ce n'est pas une question
environnementale épouvantable, mais quand le feu prend, par exemple,
ça devient une question environnementale urgente.
Dernièrement, on a prépublié des règlements
qui sont en période de consultation, des règlements sur les
pâtes et papiers. En volume, c'est le principal pollueur, comme
industrie, au Québec. Le premier règlement sur les déchets
biomédicaux. Je sais que ça ne vous touche pas directement, les
mines, mais... Ça vous touche?
M. Roberge: On a une question d'une mine sur ça,
justement!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): o.k. bon, bien, le 1er avril,
ça entre en vigueur, puis on est en retard dans cette
réglementation, si bien que l'incinérateur decom, à
gatineau, incinérait 80 % des déchets biomédicaux qui
venaient de l'extérieur du québec.
Une voix: Incinère.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): incinère actuellement.
Puis, une des raisons, c'est qu'il n'y avait pas de règlement au
Québec. À partir du moment où vous ne réglementez
pas votre secteur, c'est certain que vous n'approvisionnez pas l'usine qui les
détruit. Et, la semaine dernière, nous avons annoncé le
règlement sur les attestations d'assainissement en milieu
industriel.
Puis, malgré ça, on a encore l'impression d'être sur
le problème d'avant-hier et on se dit: Comment on peut se
dégager, au niveau du ministère, avec les ressources qu'on a,
pour ne pas que ça coûte plus cher - on connaît
l'état de l'économie - faire en sorte de se dégager pour
avoir le temps de faire une meilleure réglementation, une meilleure
planification, puis s'orienter vers le développement durable? En
confiant à un organisme des tâches pas compliquées, mais
qui méritent d'être bien faites, des tâches
d'émission de certificats. La loi, la norme est là. Tu
émets le certificat. Tu fais le suivi du certificat, tu le fais en
région, puis tu t'assures que c'est appliqué. Ce n'est pas
compliqué comme approche, ça vise à maximiser
l'efficacité.
Vous le dites dans votre mémoire, puis vous le dites bien. Page
2. «Notre expérience avec l'environnement nous laisse clairement
voir qu'il y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer
à autre chose. On dénote des divergences entre ce que le
régional préconise et ce que le central envisage.» Je n'ai
pas le goût de nier ça, c'est un petit peu la perception que j'ai,
comme ministre de l'Environnement. «D'autre part, même entre les
régions, des différences sont notées quant au traitement
des dossiers.» Il y a même des clients qui sont venus nous dire
que, si vous êtes dans une région, ils exigent un certificat
d'autorisation, puis, si vous êtes dans l'autre, c'est correct, ils n'en
ont pas besoin. Pourtant, c'est le même ministère. «De plus,
on constate un manque important de connaissances du milieu minier, autant dans
les régions qu'au central, quoique nous sommes portés à
croire que le central fait preuve de beaucoup plus d'éloignement de la
réalité.» Puis c'est normal que le central soit plus
éloigné d'une région minière.
Ce qu'on veut faire avec l'Office, c'est tenter - je ne dis pas qu'on a
la recette magique - d'améliorer notre efficacité, de condamner
la région à prendre sa décision; parce que,
présentement, le central n'aime pas beaucoup ça quand c'est la
région qui prend la décision, parce que ça lui
enlève du pouvoir. Puis, à la région, ils se disent: On
est peut-être aussi bien de ne
pas la prendre tout seuls, cette décision-là. On est aussi
bien de se faire couvrir par le central. En pratique, la régionalisation
qu'on a entreprise, elle va connaître du succès si on a un mur
étanche et que les gens sont condamnés à prendre leurs
responsabilités. Ils pourront s'y référer pour de
l'expertise, s'ils le veulent, mais la décision ne leur sera pas
imposée par le central. C'est à eux que reviendra cette
responsabilité.
Dans le domaine minier, c'est sûr que les régions qui sont
fortes dans le minier, on va leur envoyer des gens qui sont actuellement au
central pour qu'ils s'adaptent à la région, qu'ils connaissent le
milieu, le secteur, et qu'ils soient en relation avec l'industrie. Nous autres,
on ne vise pas à pénaliser l'industrie qui veut collaborer. On
vise à évoluer positivement vers le développement durable
avec cette industrie-là. Mais, actuellement, avec la structure qu'on a
et les moyens qu'on a, nous sommes rendus au bout de l'efficacité qu'on
peut en tirer, puis les résultats ne sont pas satisfaisants pour la
population, puis ça a bien l'air qu'il n'y a pas moyen d'aller chercher
beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de personnel et de fric au cours des
prochaines années.
J'ai fait mon plaidoyer. J'ai une question précise à vous
adresser sur le financement. Vous mentionnez, à la page 1 du
résumé de votre mémoire: «Du côté du
financement d'un nouvel organisme, nous croyons que les finances de
l'État ne sont pas dans une situation pour l'envisager à ce
moment-ci et il ne devrait pas être envisagé de le faire payer par
la clientèle qui doit déjà assumer un coût important
en la matière. L'environnement, c'est une cause pour toute la
société et non pour un seul groupe.» Nous venons de
prépublier, la semaine dernière, notre règlement sur les
attestations d'assainissement, qui prévoit un financement - Office ou
pas Office - où on va tarifier nos actes administratifs et où on
va charger tant pour la charge polluante qui a été émise
dans le sol ou dans l'atmosphère. On a l'impression qu'on va à
rencontre de ce que vous nous exposez. Vous n'êtes pas d'accord avec
cette approche industrielle? Parce qu'on n'en avait pas d'autre, approche
industrielle, soit dit en passant. C'est celle qu'on a retenue; c'est celle qui
est appliquée dans plusieurs États américains, celle qui
est appliquée, entre autres, dans d'autres provinces canadiennes, comme
la Colombie-Britannique, de mémoire. Moi, j'aimerais vous entendre sur
ce mode de financement.
M. Drouin: Je vais commencer par quelques commentaires
généraux, M. le ministre, avant de passer la parole à
celui qui est rendu beaucoup plus expert que moi dans le domaine, comme c'est
là. J'aimerais peut-être relever votre première parole,
quand vous avez dit qu'on vous disait que ça fonctionnait bien. Je crois
qu'il faudrait lire comme il faut; il y a une virgule avant ce mot-là
dans la phrase, ici. On dit que «le gouvernement devrait plutôt
s'occuper de s'assurer que, ce qui existe actuellement, fonctionne bien et
mieux avant de passer à une autre étape». Nous sommes
d'accord avec votre proposition que ça ne fonctionne pas à
merveille. (17 h 45)
Mais, tout de même - l'essentiel de notre mémoire - dans la
première partie, avant de revenir à la question du PRRI, on vous
dit de nous donner le temps, à l'industrie, de faire quelque chose avant
de tout retourner. Par exemple, j'ai la copie de la loi refondue jusqu'au 20
juin 1991; quand on regarde à l'article 2, en bas de la page, le nombre
de fois où la loi a été renouvelée depuis 10 ans,
c'est 5 fois par ligne, et il y a 5 lignes. Alors, comment croyez-vous que le
client a le temps de s'adapter et de faire quelque chose?
J'aimerais vous donner un exemple qui témoigne que, lorsqu'on a
le temps de faire quelque chose, on réussit à faire quelque
chose. La meilleure preuve que je pourrais vous donner, c'est la question de la
directive 019 qu'on a dans les mines, qui régit les normes de
comportement dans le domaine minier. Quand vous avez commencé à
parler de cette directive-là - je crois que le Parti
québécois était au pouvoir - c'était en 1977. Elle
a été publiée pour la première fois en 1979 et,
quand on regarde ce qui a été fait avec cette
directive-là, quand on regarde nos coûts et qu'on regarde... Vous
avez donné un deuxième «input» à cette
directive-là vers 1986 ou 1987. Bien, l'impact que ça a eu dans
le domaine minier, c'est qu'on a eu le temps de s'adapter. Quand vous regardez
nos normes de comportement d'après le bilan environnemental qu'on a
publié l'année passée, je crois que vous êtes en
mesure de voir que la directive du ministre a eu le temps de travailler et a eu
le temps de faire quelque chose.
Quand on regarde, maintenant, tout ce qui arrive, la multiplication des
processus... La police verte, on n'a pas eu le temps de la connaître et
on n'a pas envie de la connaître non plus, mais, de toute façon,
elle ne fait que passer et ça a tout l'air qu'elle va trépasser
instantanément. C'est important d'avoir le temps de réagir
à un projet. Vous parlez du PRRI. On n'a pas encore réussi, je
pense, à avoir 100 % de conformité dans les normes
environnementales. Il y a des manques technologiques, là-dedans. Ce
n'est pas de la mauvaise volonté. Il y a de la technologie qui manque
et, quand la technologie ne manque pas, bien, c'est de l'argent qui manque pour
réussir à passer au travers. Quand on revient, par exemple, de la
dernière conférence des ministres des Mines qui a eu lieu
à Halifax, au mois de septembre, quand on nous dit, à un moment
donné, que, dans l'industrie canadienne, les fonds d'exploration sortent
du pays, une des raisons qu'on donne - pas la seule - c'est les
tracasseries au point de vue des exigences environnementales,
l'imprécision dans le domaine des exigences environnementales. Pas la
qualité, mais, des fois, le manque de rationnel pour supporter les
exigences que l'on a là-dedans. C'est des problèmes
fatigants.
Vous parlez du PRRI. Ça me trouble parce que ça veut dire
que... J'ai mis la main sur ce projet-là hier, l'avant-projet. Je n'ai
pas eu le temps de dormir comme il faut dessus, mais on s'aperçoit
qu'une compagnie peut respecter totalement toutes les normes et, malgré
tout, avoir une tarification énorme pour vivre avec ça. En
d'autres mots, vous dites que c'est une façon de préconiser le
rejet zéro. On ne va payer rien quand ça va être un rejet
zéro, mais on ne tient même pas compte des normes de
qualité qui existent, par exemple, dans l'eau avec laquelle on
s'approvisionne pour faire nos procédés. En d'autres mots, on va
être pénalisés pour ce que la nature a mis dans l'eau dont
on se sert. Il y a des rejets là-dedans. Il n'y a pas de norme de
soustraction dans ce domaine-la. C'est fatigant. Moi, en tant que directeur
général, je n'ai plus le temps de suivre tout ça. Je suis
obligé d'avoir deux acolytes pour suivre tout ça et, finalement,
je suis dépassé. C'est pour ça qu'à partir de ce
moment-là je suis à la veille de me regarder les cheveux et de
dire que peut-être je devrais laisser complètement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. Drouin, je vous suis, mais,
dans le domaine minier, la réglementation n'est pas tellement
accablante, pour le moment. Vous avez parlé, avec raison, d'une
directive.
M. Drouin: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est avec ça qu'on
travaille.
M. Drouin: Oui.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On ne peut pas dire qu'au
Québec on a accablé le secteur minier sur le plan
environnemental.
M. Drouin: Mais je peux vous répondre là-dessus
que, justement, on a essayé de se conformer quand même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ah oui!
M. Drouin: On a fait le travail quand même.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne veux pas entendre parler,
là, que les capitaux...
M. Drouin: Ce n'est pas nécessaire d'être
accablé pour réussir à bien travailler.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...ont fui le
Québec à cause de la réglementation dans le domaine
minier.
M. Drouin: Non, non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): On a une directive.
M. Drouin: Je vous demande, M. le ministre, de bien
préciser. C'était un des éléments.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K. M. Drouin: Pas le seul.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais y a-t-il des gens qui ont
moins que nous...
M. Drouin: Dans les normes?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui n'ont même pas de
directives en environnement sur la planète?
M. Drouin: On a des normes plus exigeantes au Québec, oui,
qu'au fédéral. Dans les mines, on a plus de normes au
Québec qu'au fédéral, dans le cas du pH, par exemple.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): O.K.
Le Président (M. Gauvin): Je vous remercie, M. Drouin.
C'était le temps qui était alloué à la formation
ministérielle. M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, au nom de
l'Opposition, je salue M. Drouin et ses collègues et les félicite
pour le sérieux et le caractère très approfondi,
très poussé de leur présentation. Inutile de dire que nous
partageons, à l'Opposition, presque à 100 % les
inquiétudes que vous manifestez vis-à-vis de la création
de l'Office.
Je relève quelques commentaires que vous faites. Par exemple,
à la page 3, vous dites: «Le divorce prévu constituerait
aussi, quant à nous, un obstacle supplémentaire pour le bon
fonctionnement de l'application des lois actuelles. Il ne faut pas, à ce
moment-ci, scinder les opérations du ministère puisque les
difficultés s'accroîtront. Le central et le régional
seraient coupés mutuellement d'une source d'information et de
collaborateurs fort précieux à ce moment-ci». Et vous
continuez comme ça. Un peu plus loin, vous dites: «Quant à
nous, notre expérience avec l'environnement nous laisse [...] voir qu'il
y a plusieurs difficultés à aplanir avant de passer à
autre chose». Et, notamment, les divergences entre le régional et
le central.
En conclusion, finalement, vous dites: «Nous croyons qu'il devrait
y avoir une plus grande coordination [...] Le central et le régional
de-
vraient venir ensemble sur les lieux afin d'avoir une même
connaissance et compréhension des choses, mais ceci en évitant de
retarder l'examen du dossier.» Ça, c'est très pertinent. Je
pense que, probablement, ça ne se fait pas assez. Sous n'importe quel
gouvernement, on n'encourage pas assez des visites, des présences en
première ligne des gens qui sont au central vis-à-vis des
régions, en région. Moi, j'ai toujours été un grand
promoteur de la décentralisation et de la régionalisation. C'est
pour ça que, nous, de l'Opposition, on dit, comme la grande
majorité des groupes qui viennent ici depuis quelque temps, au ministre:
Continuez d'accentuer la régionalisation, mais vous pouvez le faire
à l'intérieur de la structure actuelle. Ce n'est pas
nécessaire de créer une nouvelle structure. Ce n'est pas
nécessaire d'ajouter des coûts et de la confusion, aussi.
Moi, j'aime bien votre commentaire, à la page 6. Vous dites qu'il
ne faut pas oublier que, dans le contexte constitutionnel actuel, il y a
déjà beaucoup d'incertitude. Vous êtes le premier groupe
à le relever. C'est un aspect additionnel et il faut en tenir compte.
C'est vrai que le ministère de l'Environnement fédéral va
prendre de plus en plus de place au Québec. C'est cousu de fil blanc, on
le voit de toutes sortes dé façons. M. Charest essaie de se
créer un espace important dans le Québec, que ce soit sur la
question de l'ozone... On va avoir des scores de l'ozone chaque semaine,
dorénavant. Donc, on va pouvoir apprécier les largesses du
gouvernement fédéral à chaque semaine. Toutes les
manières sont bonnes pour créer une impression auprès des
Québécois que le fédéral devient indispensable, y
compris en environnement, alors que le fédéral, en environnement,
au Québec, il a fait très peu à venir jusqu'à
récemment. Et là, tout à coup, il veut se donner une
grande visibilité.
Vous avez raison. Laissons l'aspect politique. Nous, on en est
conscients, en tout cas, et j'espère que tout le monde en est conscient,
de l'aspect propagande. Mais, pour le commun des mortels moins politisé,
vous avez raison de soumettre que la création d'un office va ajouter
encore de la confusion. Est-ce que c'est l'Office qui est responsable de telle
situation dans mon patelin ou si c'est le ministère de Québec ou
le ministère d'Ottawa? Je pense que c'est une contribution originale que
vous faites sur ce point particulier.
Vous dites, à la page 7, que vous avez appris «qu'un groupe
de travail oeuvre à organiser les relations entre le central et le
régional.» Au moment où un groupe s'affaire à
ça, vous avez raison de dire: Oups! Tout d'un coup que le ministre nous
arrive avec un projet de loi pour créer une nouvelle structure? Mais je
m'arrête ici pour demander au ministre de bien vouloir - je l'ai
demandé une couple de fois, mais je le répète encore, je
répète ma demande puisque vous m'en donnez l'occasion -
déposer devant cette commission le document, l'étude, le travail
auquel nos gens de l'Association minière font allusion. Il existe ou il
n'existe pas? Je pose la question au ministre, M. le Président.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a un document sur le
fonctionnement entre les régions et le central qui prévoit de
façon théorique comment c'est supposé fonctionner.
M. Lazure: Mais je soumets au ministre, M. le Président,
que ça serait intéressant pour les membres de la commission de
l'aménagement et des équipements de pouvoir prendre connaissance
de ce document-là.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce qui m'intéressait
davantage, c'était l'expérience pratique que vivait la
clientèle, parce que le document, comme je l'ai indiqué, donne la
théorie. Les clients vivent la pratique.
M. Lazure: Mais l'expérience pratique de la
clientèle, vous l'avez entendue; groupe après groupe, ils vous
disent: N'allez pas dans cette direction-là, vous faites une erreur. Le
message est très clair venant du groupe des mines, comme du groupe de
l'aluminium, du groupe des pâtes et papiers ou du groupe forestier. Tous
les groupes, pratiquement, disent au ministre: N'allez pas dans cette
direction-là. Vous dites clairement qu'«il n'y aurait pas à
s'inquiéter de renoncer à créer l'Office. Il s'agirait
plutôt d'agir de façon à avancer avec ce qui existe
plutôt que de créer une plus grande scission et de
générer une duplicité sclérosante.» C'est
bien dit.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Vous êtes
médecin?
M. Lazure: Mais le ministre revient tout le temps sur la
thèse qu'en créant l'Office il va donner des pouvoirs de
décision finale aux régions. C'est sa grande thèse. Puis,
il fait valoir que, là, il y a de la confusion, sinon des contradictions
d'une région à une autre, d'une part, mais aussi entre les
régions et le central. Et là il dit: Ça va être
clair; avec l'Office, les régions vont avoir la décision finale.
Mais, M. le Président, je soumets encore une fois - et je ne sais pas
pourquoi le ministre ne comprend pas ça; tout le monde a l'air de le
comprendre - que le ministre peut, lui, avec ses hauts fonctionnaires,
décider que, dorénavant, les régions vont avoir le mot
final dans tel ou tel secteur d'activité. Il peut très bien le
faire. C'est ça qu'on appelle du leadership politique, M. le ministre,
de prendre ses responsabilités et de trancher. Ce n'est pas la
création d'une nouvelle structure qui va venir prendre les
décisions à votre place. J'espère que ce n'est pas un des
buts que vous recherchez en créant une nouvelle structure. Mais il n'en
tient qu'à vous de décider si, oui ou non, vous voulez
que la région ait le mot final dans telle ou telle situation.
Sur l'ensemble du mémoire - c'est pour ça que je n'ai pas
tellement de questions à vous poser - nous sommes d'accord. L'Opposition
est d'accord avec votre mémoire.
M. Roberge: II y a des gens qui n'y sont pas; je peux
compléter.
M. Lazure: Pardon? Oui, allez-y.
M. Roberge: Quand on dit que le central et le régional ont
besoin de générer une cristallisation de l'environnement ou du
concept, il y a des cas concrets; par exemple, il y a des règlements
conçus au central, mais qui ne tiennent pas compte de la
réalité. On peut peut-être passer même tout de suite
à... Les pneus, par exemple; un membre a fait faire une
évaluation pour savoir combien ça va lui coûter. Ça
va lui coûter 250 000 $ pour faire l'enclos demandé. Pour les BPC,
il a fait deux sites; c'est des conteneurs marins sur des blocs de
béton; chacun a coûté 1 000 000 $. Dans son cas, huit pneus
seulement vont rencontrer la norme; c'est des gros pneus. Alors, on voit bien
que le central, qui a conçu les normes, n'a pas pensé à
ça.
Dans le domaine des attestations d'assainissement, par exemple, au
ministère, on ne s'est pas inquiété de savoir si les
laboratoires sont en nombre suffisant au Québec pour répondre
à toutes les analyses demandées, et quel est le coût de ces
analyses-là. Ensuite, est-ce que les équipements sont existants
pour faire les analyses? Mes membres me disent qu'il y a des analyses qui sont
demandées pour lesquelles il n'y a aucun laboratoire
équipé pour réaliser ça au Canada. Ensuite, les
attestations d'assainissement, on a l'impression que ce ne sera pas très
cher, sauf que, pour demander l'attestation d'assainissement, il va falloir
faire une carac-térisation. Il va falloir faire une foule d'analyses et
d'études, et une analyse de caractérisation coûte entre 140
000 $ et 200 000 $ pour chaque entreprise. C'est cette vision-là, ce
manque d'information sur place dont le central manque. Et il ne se rend pas
compte qu'il y a des choses qui seront inabordables à cause
d'éléments. L'attestation d'assainissement, tous les
rapports...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Si vous me le permettez, ce n'est
pas simplement le central, à ce moment-là, si je prends pour
acquis que ce que vous me dites est exact. Dans le cas des règlements
d'attestation d'assainissement, au ministère, on a pris chacun des
secteurs d'activité économique, avec le nombre assez
précis d'usines ou d'opérations, on a fait les coûts; on a
tenu compte, on pense, chez nous, de l'ensemble des coûts, mais on est
toujours prudents. On les envoie au comité interministériel du
développement économique et au comité
interministériel du dé- veloppement régional, et là
les autres ministères sectoriels comme chez vous, Énergie et
Ressources, confrontent nos chiffres et, à partir du moment où
tout le monde a confronté les chiffres, là, on les accepte ou on
les rejette.
M. Roberge: On serait intéressés à les voir,
les chiffres, parce que je ne crois pas qu'ils correspondent à la
réalité. On pense qu'améliorer l'efficacité de la
gestion environnementale, ce serait d'abord... Prenez les analyses d'effluents
qu'on envoie depuis nombre d'années. Et, en passant, je vous souligne
qu'on a demandé à nos membres, qu'ils soient légalement
obligés de le faire ou pas légalement obligés de le faire,
faites-le donc, tout le monde. Ils sont tous embarqués. Alors, ils ont
fait ça, mais aucune analyse de ces analyses n'a été
faite. Aucune étude pour décrire la problématique
environnementale du secteur minier n'a été faite à partir
de ça.
Nous, à l'Association, on l'a fait, par exemple, et, avec le
bilan, ça nous a permis... C'est un document qui explique sommairement
ce qu'il en est. Mais on pense que le ministère devrait peut-être
examiner, avec les données qu'il a, les problématiques typiques,
voir qu'est-ce qu'il y a à améliorer et l'améliorer. En
deux ans, les budgets environnementaux dans les mines sont passés de 11
000 000 $ à 55 000 000 $. La conformité environnementale, ou ce
que j'appelle plutôt la qualité des effluents par rapport aux
normes, s'est améliorée de sorte que seulement 5 % des
échantillons, qui sont par milliers les échantillons,
dépassent la norme et l'amplitude a diminué de beaucoup. On sait
exactement ce qu'est la problématique, on sait les sujets de recherche
qu'il faut approfondir, on sait les difficultés qu'il nous reste
à aplanir, mais, au moins, on va avancer et on aimerait embarquer le
ministère dans ça.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Me Roberge, regardez la
disproportion des moyens. Vous nous dites: Le secteur minier a mis 55 000 000
$.
M. Roberge: En 1990. C'est 65 000 000 $ maintenant.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Moi, au ministère de
l'Environnement, je gère l'argent qui m'est voté par
l'Assemblée nationale. C'était un maximum, cette
année-là, de peut-être 130 000 000 $, 135 000 000 $, pour
l'ensemble des secteurs. Ça fait que, oui, on a besoin de vous autres.
Vous pouvez faire davantage. 55 000 000 $ pour un secteur pointu alors que pour
l'ensemble on n'a pas 150 000 000 $.
M. Roberge: Ça démontre que le ministère a
un effet de levier important.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Gauvin): M. le député de La
Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Juste quelques
commentaires. Je veux réagir à ce que-Moi, j'apprends qu'on vous
demande beaucoup d'analyses. Même si ce n'est pas légalement
exigé, vos gens s'y sont plies. Mais il n'y a rien de plus frustrant, M.
le Président, pour des entreprises, que de faire des choses aussi
futiles que d'envoyer des analyses en sachant qu'elles ne seront même pas
prises en considération, qu'elles ne seront pas étudiées.
C'est un peu comme les manifestes.
M. Roberge: Elles ne sont pas comprises, non plus.
M. Lazure: C'est ça. En plus! Mais ça rappelle les
manifestes. La commission Charbonneau a rendu publique cette situation honteuse
où des caisses complètes de manifestes sur le transport de
matières dangereuses étaient accumulées au
ministère et personne ne les étudiait. Le ministre a
trouvé une solution astucieuse. Il a dit: Dorénavant, il n'y en
aura plus d'exigé, de manifestes. Il a réglé le
problème comme ça, mais je pense que ça crée un
climat, justement, où les gens sont frustrés vis-à-vis des
demandes du ministère. Finalement, c'est une belle illustration de votre
propos central. Votre propos central, avec lequel l'Opposition concourt
à 100 %, c'est de dire au ministre: Écoutez, il y a un tas de
choses que vous pouvez faire avec votre instrument actuel, avec votre contenant
actuel, à l'intérieur de ce contenant-là. De grâce,
faites-les donc plutôt que de faire perdre le temps de vos 1100 ou 2000
fonctionnaires à préparer un office qui, nous, on
l'espère, en tout cas, ne verra pas le jour. Merci.
Le Président (M. Gauvin): Merci, M. le
député de La Prairie. Je remercie l'Association minière du
Québec pour sa présentation. La commission de
l'aménagement et des équipements va ajourner ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 18 h 4)