L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'aménagement et des équipements

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'aménagement et des équipements

Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mardi 5 mars 1996 - Vol. 34 N° 48

Consultation générale sur l'avant-projet de loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. Roger Paquin, président suppléant
M. Jean-Claude Gobé
M. Christos Sirros
M. Michel Rivard
Mme Danielle Doyer
M. Léandre Dion
*Mme Vera Danyluk, CUM
*M. Sylvain Gonthier, idem
*M. Gilles Dolbec, MRC du Haut-Richelieu
*M. Serge Lafrance, idem
*Mme Joane Saulnier, idem
*M. Michel Bordeleau, AIMQ
*Mme Odile Goulet, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures sept minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je déclare la séance de la commission de l'aménagement et des équipements ouverte. Le mandat de la commission est une consultation générale et des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui. M. Benoit (Orford) est remplacé par Mme Delisle (Jean-Talon); M. Cherry (Saint-Laurent) est remplacé par M. Gobé (LaFontaine); M. Gauvin (Montmagny-L'Islet) est remplacé par M. Sirros (Laurier-Dorion); M. Perron (Duplessis) est remplacé par M. Lachance (Bellechasse); et M. Pinard (Saint-Maurice) est remplacé par M. Côté (La Peltrie).

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la secrétaire. Nous avons aujourd'hui comme horaire: à 10 heures, les remarques préliminaires qui vont commencer par les remarques du ministre et celles du porte-parole de l'opposition officielle; à 10 h 30, la Communauté urbaine de Montréal; à 11 h 30, la MRC du Haut-Richelieu; et, à midi trente, l'Association des ingénieurs municipaux du Québec.

M. le ministre, vous avez des remarques préliminaires?


Remarques préliminaires


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Oui, évidemment, on a quelques remarques préliminaires à l'égard de ce premier projet de loi, non, ce premier avant-projet de loi que nous abordons au ministère des Affaires municipales depuis la formation du nouveau gouvernement de M. Bouchard.

Avant de passer à ces remarques préliminaires à l'égard du projet de loi, je veux d'abord saluer la représentante et porte-parole de l'opposition en matière d'affaires municipales. On a déjà eu l'occasion d'échanger sur la façon d'être dans le monde municipal, lorsqu'on a la responsabilité au gouvernement de cette fonction, et le partage que nous devons avoir comme vision avec ceux qui sont nos partenaires sur l'ensemble du territoire québécois, c'est-à-dire les 1 401 municipalités. Et ce thème du partenariat avec les municipalités, avec les dirigeants de ces municipalités, avec ceux et celles, les responsables de services, les travailleurs, les gens qui font, finalement, le service dans les municipalités, eh bien, toute cette relation du ministre des Affaires municipales avec ces gens-là doit être vue sous le signe du partenariat.

(10 h 10)

Je souhaite vivement que les travaux que nous serons appelés à conduire au cours des prochaines semaines et des prochains mois soient également placés sous ce signe du partenariat et du développement des collectivités locales avec la représentante et avec l'opposition officielle de l'Assemblée nationale. Nous connaissons bien l'expérience de la députée de Jean-Talon en pareille matière; elle agit et elle intervient en toute connaissance de cause. Alors, je lui offre et j'offre à l'opposition officielle toute ma collaboration pleine et entière, toujours dans l'optique du mieux-être des collectivités locales et du support que nous devons tous apporter au rôle parfois difficile que jouent les élus municipaux, les représentants ou ceux et celles qui interviennent dans le monde municipal pour livrer des services à la population, des services de qualité et au moindre coût possible, compte tenu des circonstances, compte tenu du contexte économique dans lequel nous nous situons aujourd'hui.

J'en profite aussi pour, évidemment, saluer mes collègues de l'Assemblée nationale, qui ont, pour une grande part, une assez large expérience du monde municipal. Les gens qui sont avec nous à la commission de l'aménagement et des équipements et ceux et celles qui sont avec nous aujourd'hui ont une grande expérience du monde municipal. Et je souhaite vivement – et je pense bien que ça devrait être ça, le résultat obtenu à la fin, en particulier, des consultations que nous entreprenons aujourd'hui – une bonification, un enrichissement de l'avant-projet de loi que nous avons soumis pour consultation, parce que l'objectif terminal, l'objectif de résultat, l'objectif recherché est toujours le même: une meilleure façon d'organiser et de livrer nos services publics dans le monde municipal. Alors, l'expérience de mes collègues sur le terrain sera, j'en suis convaincu, d'un précieux secours pour avoir un produit final qui soit d'une très haute qualité et qui soit déterminant également pour une certaine nouvelle direction que nous tentons d'imprimer en matière d'organisation, d'administration, de gestion et de livraison des services publics au niveau municipal.

Alors, comme c'est également le premier projet de loi que nous abordons ici en commission parlementaire depuis le nouveau gouvernement, à travers les remarques préliminaires que je ferai, vous devinerez très certainement un certain nombre d'orientations qui transpirent non seulement à l'égard de ce projet sur l'établissement de sociétés d'économie mixte dans le monde municipal, mais à l'égard aussi d'une perspective quant à l'organisation, à l'administration, à la gestion et à la livraison des services municipaux sur le territoire québécois.

Mme la Présidente, puisque j'ai, dans la revue et l'examen des situations, constaté que le ministère des Affaires municipales est un ministère à législation, j'ai l'impression que nous allons avoir des fréquentations assidues...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: ...et je vous offre aussi toute ma collaboration. Je connais également votre façon de présider les travaux, je connais votre façon d'orchestrer et d'harmoniser souventefois ces travaux pour obtenir de meilleurs résultats. Vous pouvez être sûre que vous pourrez compter également sur ma pleine et entière collaboration dans le respect de l'équité quant au rôle de l'opposition et du gouvernement, puisque vous savez aussi que j'ai occupé suffisamment longtemps la chaise à votre gauche pour savoir comment fonctionne le parlementarisme. Il est basé sur une participation et un échange avec les représentants de l'opposition, qui poursuivent, par ailleurs, le même objectif de toujours avoir un meilleur encadrement, une meilleure législation possible pour supporter nos intervenants et les municipalités, le cas échéant, ici, sur le terrain. Alors, Mme la Présidente, je vous offre cette pleine et entière collaboration et je suis sûr que les résultats que nous pourrons obtenir ici seront intéressants.

Alors, chers collègues, Mme la députée de Jean-Talon et porte-parole officielle de l'opposition en matière d'affaires municipales, mesdames et messieurs qui assistez ce matin au lancement de cette consultation sur l'avant-projet de loi à l'égard des sociétés d'économie mixte, c'est avec un grand intérêt que je procède aujourd'hui à l'ouverture de cette commission parlementaire. Les travaux que nous mènerons ici ensemble sont en quelque sorte précurseurs de l'émergence d'une nouvelle façon de livrer les services municipaux sur le territoire québécois.

Rien ne s'apparente toutefois, à ce titre, à une révolution. Il s'agirait plutôt, en l'occurrence, d'une double adaptation, à savoir, d'une part, à l'égard d'une série de contingences qui obligent maintenant à réviser certains modes de fonctionnement et, d'autre part, à l'égard des perspectives encore insuffisamment exploitées que dessine un nouveau type de partenariat entre les secteurs municipaux et privés. Je suis, de cette manière, déjà convaincu que les discussions que nous aurons sur l'avant-projet de loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal permettront d'offrir éventuellement à nos concitoyens, qui devront toujours être les premiers bénéficiaires, des services de qualité à moindre coût.

On peut déjà juger de l'intérêt que soulève la question par le nombre et la qualité des mémoires qui nous ont été présentés et aussi par la variété des points de vue qui s'y expriment. On trouve de tout dans ces mémoires: des critiques, des mises en garde, des expressions de satisfaction, des propositions d'amendement. Avec cet avant-projet de loi, nous innovons en proposant un volet nouveau dans notre droit municipal. Le sujet n'est certes pas facile; il faudra en préciser les différentes facettes. Il faudra aussi harmoniser des points de vue divergents. Il y avait donc lieu de faire place à un véritable débat public à l'égard de ce nouveau mode d'intervention dans le secteur municipal.

La conjoncture économique actuelle n'est pas d'ailleurs étrangère à l'intérêt que le gouvernement manifeste à l'égard du partenariat que l'on pourrait développer entre les secteurs public et privé. Divers facteurs contemporains limitent de plus en plus et de manière significative la marge de manoeuvre des municipalités. Je réfère ici, entre autres, à des phénomènes tels que la faible croissance économique, les changements structurels des économies, le remboursement des dettes nationales, les rationalisations budgétaires, l'équilibre des finances publiques, la stagnation des revenus des particuliers et également, bien sûr, les conditions de travail dans le secteur municipal et les questions afférentes.

Les municipalités doivent donc s'attendre, dans les prochaines années, à assumer des responsabilités nouvelles et accrues. Il s'agit d'un mouvement qui nous semble irréversible. Elles seront appelées à devoir fournir de nouveaux services pour lesquels elles ne posséderont pas toujours l'expertise requise. Elles devront, ces municipalités, trouver de nouvelles façons de livrer des services municipaux et, concurremment, de réaliser des programmes de renouvellement de leurs infrastructures. À ce titre, elles pourront difficilement compter sur le soutien du gouvernement pour certains aspects de ces questions, puisque nous serons nous-mêmes occupés à solutionner nos propres problèmes financiers. Les municipalités devront compter davantage sur leurs propres sources locales de financement et ne pourront, souvent, s'engager seules pour concrétiser des projets majeurs, sans compter que les citoyens s'attendent à une gestion plus serrée des services publics locaux combinée souvent à une stagnation ou à une diminution des taxes. Dans ce contexte, les municipalités pourront difficilement s'en tenir au mode traditionnel de gestion.

Lorsque étudiées sans préjugé, puis appliquées adéquatement, des façons de faire qui, hier, semblaient inappropriées surprennent aujourd'hui par les résultats qu'elles apportent à des problèmes qui paraissaient jusque-là sans solution. À titre d'exemple, on est arrivé à la conclusion, lors des discussions sur la décentralisation, que l'aide à la petite et moyenne entreprise et à l'entreprise en phase de démarrage est plus efficace lorsque gérée par le palier local. On sait aujourd'hui que l'aide qui provient du milieu et qui est accordée à des jeunes entrepreneurs est plus profitable plusieurs fois, car elle responsabilise davantage ceux-ci vis-à-vis de leur milieu, vis-à-vis de ceux qui leur ont fait confiance. À cet égard, le gouvernement entend explorer divers moyens qui permettraient aux municipalités de s'impliquer au niveau du développement local et de tirer davantage profit des ressources et des capacités administratives et techniques du secteur privé. Les sociétés d'économie mixte constituent un de ces moyens.

(10 h 20)

On peut dire, je pense, en ce qui nous concerne ici, que les mesures que propose l'avant-projet de loi s'inscrivent dans une perspective de prise en charge de plus en plus grande du développement par les autorités locales. Elles s'inscrivent également dans le cadre d'un élargissement des modes de gestion des affaires locales et d'un allégement des normes et contrôles qui régissent les administrations locales. Je sais que cette phrase fera l'objet de beaucoup de questions pendant notre commission parlementaire. Le concept de sociétés d'économie mixte a été développé en France pendant l'entre-deux-guerres pour suppléer à l'inertie de l'entreprise privée en matière de logement. Aujourd'hui, ces sociétés européennes sont présentes dans un certain nombre de pays industrialisés, tels le Japon, l'Allemagne et l'Italie, où elles ont favorisé la réalisation de plusieurs grands projets publics.

L'avant-projet de loi que nous avons déposé ne reproduit évidemment pas tel quel le modèle français. Étant donné le contexte différent, même une adaptation des instruments juridiques et administratifs concernant les SEM, les sociétés d'économie mixte, n'aurait pas été possible. On doit toutefois souligner bien clairement s'être inspirés des grandes lignes de ce modèle français. Au Québec, on a d'ailleurs déjà adopté quatre lois privées permettant la création d'autant de sociétés d'économie mixte à titre de projets-pilotes: à la MRC du Haut-Richelieu et à ville de Laval pour la gestion des déchets, de même qu'à Saint-Romuald, ainsi qu'au village et à la paroisse de Saint-Anselme pour la gestion de leurs parcs industriels respectifs. Je ne crois pas, par ailleurs, que l'on puisse continuer d'accorder ainsi des autorisations à la pièce; d'où la volonté de procéder par une loi-cadre qui permettra, je l'espère, de résoudre les quelques difficultés qui sont apparues dans la réalisation de ces projets-pilotes.

Les sociétés d'économie mixte sont des entreprises dont le financement provient à la fois du secteur municipal et du secteur privé, et qui se spécialisent dans la production et la gestion de biens et de services publics locaux. Pour les municipalités, une telle association leur permettra de profiter de l'expertise développée par leurs partenaires privés. Elles pourront également avoir accès à un éventail plus large de méthodes de gestion. À titre d'exemple, elles seront amenées à acquérir une connaissance plus précise des coûts de production des services et des équipements. Le financement du secteur privé dans les sociétés d'économie mixte devrait permettre aussi aux municipalités de limiter leurs investissements à court terme, donc leur endettement et les frais financiers afférents.

Toutefois, dans une entente, il doit, bien sûr, y avoir deux gagnants, car il ne s'agirait pas là d'une véritable entente si ce n'était pas le cas. Le partenaire privé devra donc y trouver, lui aussi, son compte. Les sociétés d'économie mixte ouvriront des champs d'activité nouveaux aux entreprises québécoises, champs qui ne leur étaient généralement pas encore directement accessibles. À ces entreprises elles assureront une clientèle stable. De plus, le partenaire public est un partenaire solvable et le service public se caractérise à sa base par sa pérennité. Les actionnaires du privé pourront obtenir des institutions financières, probablement, des conditions de financement plus intéressantes, compte tenu de ces facteurs, que celles qui sont habituellement accordées lorsqu'elles sont seules, ces sociétés. Ils seront liés aux municipalités par des contrats à long terme facilitant de meilleures stratégies de développement et de planification des investissements.

Permettez-moi maintenant de résumer le contenu de cet avant-projet de loi ou, du moins, d'en rappeler les grandes lignes. Précisons au départ que l'un des principes qui nous ont guidés dans l'élaboration de cet avant-projet de loi est celui de la prédominance du secteur public à l'intérieur de telles sociétés pour livrer de différentes façons les services publics. Ainsi, les municipalités actionnaires détiendront toujours la majorité des actions de toutes catégories d'une société d'économie mixte. De plus, par la majorité des voix au conseil d'administration, les municipalités auront le contrôle des décisions et des orientations de la SEM. Cette orientation est fondamentale, claire, précise et traduit bien l'intention du législateur.

L'avant-projet de loi propose que le pouvoir de créer des sociétés d'économie mixte s'étende à l'ensemble du monde municipal, c'est-à-dire aux municipalités locales, aux MRC, aux communautés urbaines ou à tout groupement de celles-ci. La décision des instances municipales de s'associer à un partenaire privé pour créer une société d'économie mixte se prendra à la majorité des voix dans les municipalités locales et aux deux tiers des voix dans les communautés urbaines et dans les municipalités régionales de comté. Les municipalités pourront également s'associer à des organismes qui sont mandataires du gouvernement comme le sont, par exemple, Hydro-Québec, ainsi qu'une multitude de sociétés publiques à fonds social. Dans de tels cas, les municipalités n'auraient toutefois pas l'obligation de détenir une majorité d'actions, ni d'être majoritaires au sein du conseil d'administration ou du comité exécutif de la société d'économie mixte. C'est ce que prévoit l'actuel avant-projet de loi.

La municipalité qui créera une société d'économie mixte pourra conclure une convention dans laquelle sera indiqué l'objet du mandat de la société. Toutefois, cet objet sera limité au champ d'activité qui relève de la compétence de la municipalité ou, selon le cas, de celle d'un mandataire du gouvernement, qui peut être aussi fondateur d'une société d'économie mixte, comme nous venons de l'indiquer. L'avant-projet de loi propose jusqu'à maintenant que seule la sécurité publique et la protection contre les incendies en soient exclues. Je pense qu'on va le répéter, Mme la Présidente: L'avant-projet de loi propose jusqu'à maintenant que seules la sécurité publique et la protection contre les incendies en soient exclues. Nous allons, à cet égard-là, sur les objets des sociétés d'économie mixte, explorer à fond cette question pendant la présente commission parlementaire.

Parce que les sociétés d'économie mixte empruntent beaucoup au mode de fonctionnement du secteur privé, il est approprié qu'elles soient régies selon les dispositions de la Loi sur les compagnies, à l'exception de certains aspects qui feront l'objet de dispositions particulières dans cette loi. Les statuts relatifs à une société d'économie mixte devront être approuvés par le ministre, tout comme la convention unanime des actionnaires, certains de leurs règlements portant sur la composition et les pouvoirs du conseil d'administration, ainsi que la convention de gestion liant la société d'économie mixte et les municipalités. Il est évident aussi que nous allons nous questionner beaucoup sur ces aspects de fonctionnement de ces nouvelles sociétés d'économie mixte au Québec.

Le ministre pourra exiger que la décision d'une municipalité d'agir à titre de fondateur d'une société d'économie mixte soit soumise à l'approbation de ses citoyens. Cette discrétion, laissée au ministre dans l'avant-projet de loi, relève du souci de ne pas multiplier indûment les contrôles, tout en permettant, en cas de doute, de vérifier l'appui des citoyens au projet des élus locaux.

L'avant-projet de loi propose aussi que le fondateur municipal détienne en tout temps plus de la moitié du capital-actions dans la société d'économie mixte et qu'au moins un des partenaires privés soit une entreprise à caractère commercial ou industriel détenant un minimum de 20 % du capital-actions dans la société d'économie mixte. Autrement dit, les municipalités devront détenir plus de 50 %, mais moins de 80 % du capital-actions d'une société d'économie mixte. Cette disposition vise à assurer la présence d'un actionnaire principal parmi les actionnaires privés. Elle vise aussi à assurer un apport financier raisonnable de la part du secteur privé. Et, enfin, cette même disposition pourra favoriser le transfert de la technologie de pointe et du savoir-faire développés par l'entreprise privée.

Le conseil d'administration et, le cas échéant, le comité exécutif d'une SEM seront formés majoritairement des représentants des municipalités. La société d'économie mixte sera, sous réserve des dispositions particulières de l'avant-projet de loi, une personne morale de droit privé qui devra se gouverner selon les règles de la première partie de la Loi sur les compagnies.

Pour permettre aux sociétés d'économie mixte d'agir efficacement, il faudra leur accorder certains pouvoirs qu'exercent les municipalités, mais elles ne pourront en aucun cas exproprier des terrains. En effet, nous croyons que, vu la tradition québécoise et cette façon d'être pour les citoyens nord-américains, les gens sont très sensibles à cette question, et on ne saurait accorder à la société des pouvoirs donc d'expropriation. Tout cela devra passer par le fondateur municipal comme responsabilité finale.

Les sociétés d'économie mixte pourront conclure des contrats avec des sous-contractants, mais elles devront s'imposer des règles de saine concurrence. Elles pourront percevoir directement une tarification aux utilisateurs des services et des équipements qu'elles gèrent, le prix demandé ayant été, selon les termes de l'avant-projet de loi, fixé par les municipalités concernées. Ainsi, les municipalités conserveront toujours le contrôle sur le prix des services publics. Elles pourront, par exemple, se prononcer sur la part qui devra être financée par l'impôt foncier général ou autrement en regard de la part qui pourra faire l'objet d'une tarification par la société d'économie mixte. Cette règle aura le mérite de permettre aux municipalités de recourir à la tarification, encore aujourd'hui peu utilisée par le monde municipal.

(10 h 30)

Les sociétés d'économie mixte pourront fournir contre rémunération à toute personne ou entreprise publique ou privée des services reliés à leur domaine d'activité. Les municipalités qui agiront à titre de fondateur municipal pourront garantir des emprunts contractés par une société d'économie mixte, mais ne pourront s'engager, à cet égard, au-delà de la valeur du capital-actions qu'elles détiendront dans cette société d'économie mixte. Les principes d'insaisissabilité, d'imprescriptibilité et d'aliénation rattachés aux biens affectés à l'utilité publique que prévoit le Code civil du Québec à l'égard des personnes morales de droit public s'appliqueront exceptionnellement aux sociétés d'économie mixte.

Certaines règles relatives aux conflits d'intérêts ont été introduites dans l'avant-projet de loi à l'égard des élus municipaux et des administrateurs de la société d'économie mixte. Par ailleurs, les municipalités devront assumer la défense des membres de leur conseil qui seront désignés comme administrateurs d'une SEM. Cette disposition a été introduite à la suggestion de certains représentants des élus municipaux qui s'inquiètent de leur inexpérience dans ce type d'entreprises et des conséquences qu'ils pourraient éventuellement devoir encourir même s'ils agissent en toute bonne foi.

Voilà pour ce qui est des principales dispositions inscrites dans cet avant-projet de loi. Il reste cependant, comme je l'ai indiqué un peu plus tôt, que l'idée de permettre aux instances municipales de s'associer au secteur privé dans le cadre d'une SEM ne constitue, ici, qu'un premier pas au niveau des orientations gouvernementales. Au Québec, les municipalités font présentement usage de trois instruments pour la production et la gestion des services et des équipements publics locaux: les ententes intermunicipales, la régie interne et la sous-traitance. Elles ont peu développé, jusqu'à maintenant, de véritables partenariats avec le secteur privé, comme cela s'est fait ailleurs, en Europe en particulier.

Par exemple, en France, les infrastructures appartiennent généralement aux instances locales qui peuvent déléguer la gestion des services au secteur privé. Plusieurs types de relations contractuelles sont dès lors possibles. Les contrats sont de durée variable et dépendent principalement des montants investis par l'entrepreneur. En Grande-Bretagne, le concept de partenariat en matière de gestion de l'eau est poussé jusqu'à se traduire souvent par une privatisation complète. Les infrastructures appartiennent à l'entreprise privée et sont gérées par elle. L'entreprise perçoit aussi les redevances des usagers. Une réglementation très stricte définie par un organisme public encadre ces entreprises. Par exemple, au moment de fixer et d'accepter la tarification, cet organisme public de contrôle considère l'ordre de grandeur des investissements qui seront requis, notamment en vue de maintenir et même d'améliorer la qualité et le rendement des infrastructures et du service. Aux États-Unis, la pratique de gestion publique locale ressemble à peu près à la nôtre. En matière de partenariat, des expériences de privatisation ont aussi été tentées avec des résultats fort variables.

Il importe de développer de nouvelles formules de partenariat et de nouvelles façons de faire pour les municipalités. Des pouvoirs habilitant ces municipalités à intervenir dans le cadre de ces nouveaux partenariats pourraient être accordés sous réserve, naturellement, de sauvegarder certains principes fondamentaux de la gestion du domaine public, de façon à s'assurer que les choses soient toujours faites au bénéfice des citoyens.

On pourrait, par exemple, autoriser les municipalités à créer des sociétés municipales calquées sur le modèle des régies intermunicipales, c'est-à-dire des unités de production autonomes qui géreraient des services publics sur le mode privé, mais dont les orientations proviendraient des élus. Une telle structure pourrait permettre aux municipalités d'avoir une idée précise des coûts de production des services publics. En effet, l'indépendance de la structure permettrait aux gestionnaires, probablement, de maîtriser l'ensemble du processus de production des services.

On pourrait aussi permettre aux municipalités de s'associer financièrement à un organisme à but non lucratif comme, par exemple, un groupement de travailleurs. La coparticipation, qui s'apparente à ce que l'on désigne souvent comme un joint venture, pourrait s'avérer une avenue intéressante pour les municipalités. Le financement proviendrait à la fois d'un organisme à but non lucratif et du secteur public, et les règles de fonctionnement pourraient se rapprocher de celles que nous énumérons dans cet avant-projet de loi sur la création des sociétés d'économie mixte. On pourrait, par ailleurs, convenir aussi que les régies municipales et les sociétés municipales puissent faire appel à l'épargne du public. Les municipalités demeureraient en tout temps les partenaires majoritaires et le conseil d'administration serait formé exclusivement de personnes élues.

Depuis mon arrivée au ministère, j'ai pu constater l'intérêt que les municipalités portent à la recherche de nouveaux modes de gestion des infrastructures et des équipements. C'est particulièrement le cas dans le domaine de l'eau, les eaux usées, l'eau potable, tout ce qui est relié à la vie locale en relation avec l'eau. Les objectifs poursuivis sont variés: recherche de financement, acquisition d'expertise, diminution des coûts, souplesse de gestion, etc. Cette question est éminemment d'actualité. On parle de privatisation des infrastructures, de partenariat public-privé. On se réfère souvent à des expériences étrangères qui n'ont pas toujours été heureuses. La prudence en pareille matière s'impose, le moins que l'on puisse dire.

L'eau est une richesse, un besoin essentiel pour toute communauté, et il importe de la préserver. Il importe également que notre patrimoine en cette matière, autant sur le plan des immobilisations que sur le plan technique, soit précieusement conservé. Les enjeux financiers et technologiques à cet égard sont considérables. Il peut s'agir de plusieurs milliards de dollars en cause, des investissements qui vont influer sur notre cadre de vie, ainsi que sur les emplois dont certains sont hautement techniques ou technologiques. Toute décision prématurée en matière de gestion de l'eau au Québec pourrait avoir un effet irréversible.

J'invite donc, aujourd'hui, les municipalités à la prudence dans ce domaine et à ne pas précipiter tout geste de privatisation relié à la construction, la gestion, l'exploitation ou encore l'entretien de réseaux d'aqueduc et d'égout, d'équipements d'assainissement des eaux usées ou de filtration de l'eau potable. J'indique également au secteur privé intéressé par ce secteur d'activité de la vie québécoise dans les municipalités, en quelque sorte, de modérer un peu les ardeurs. Cette question est fondamentale, cette question est cruciale pour le Québec non seulement pour la vie des citoyens dans ces collectivités, mais également sur la responsabilité du gouvernement à l'égard de ces questions d'intérêt public et également du développement de notre main-d'oeuvre québécoise à l'intérieur de ces questions.

J'ai d'ailleurs demandé au ministère des Affaires municipales, mon ministère, d'examiner toute cette question de partenariat du secteur public et du secteur privé dans le domaine de l'eau et d'aborder tous les aspects qui s'y rattachent: la propriété, la gestion des équipements, le financement, le contrôle public sur les coûts, la qualité du service, etc. Dans ce dossier, je ne perdrai pas de vue la nécessité vitale pour tous les Québécois d'avoir accès à une eau potable de qualité en quantité et à un coût raisonnable, tout en vivant dans un milieu salubre au niveau du traitement des eaux usées.

Tous ces éléments, toutes ces formules que je viens d'évoquer, y compris la privatisation au niveau de l'eau, il s'agit ici encore de diverses hypothèses de travail. Nous poursuivrons évidemment nos réflexions sur les multiples formules de partenariat qui pourraient intéresser les municipalités; elles le requièrent. Lorsque nous serons prêts, nous entendons procéder à de nombreuses consultations sur ce sujet, autant dans le monde municipal que dans le secteur privé. Si cette démarche s'avérait fructueuse, peut-être pourrions-nous envisager par la suite de présenter d'autres pièces, d'autres projets de loi qui viendraient enrichir l'éventail des outils de gestion et de développement dont disposent les collectivités locales.

Tout cela nous indique donc que nous devons nous adapter et revoir nos façons de faire. On s'entend pour dire que tous les intervenants, quel que soit leur champ d'action, sont appelés à faire leur part en matière de développement économique et de création d'emplois, par exemple, au Québec. On doit donc aussi s'intéresser davantage au développement qui émerge des initiatives des communautés locales et qui, par la concertation et la mobilisation, donne lieu à la création de microentreprises ou de petites et moyennes entreprises adaptées aux contraintes et au potentiel des différents milieux.

(10 h 40)

L'implication des leaders locaux, y compris, bien sûr, au premier titre, les élus municipaux, constitue un élément clé de cette dynamique. C'est pourquoi, en plus de la présente ouverture qu'offre la création des sociétés d'économie mixte au titre du partenariat entre le secteur privé et le secteur public, il faudra continuer à mettre à la disposition des collectivités locales et régionales une gamme plus complète de nouveaux outils d'intervention leur permettant de contribuer ainsi plus adéquatement à l'effort collectif du développement au Québec.

Alors, Mme la Présidente, voilà donc les remarques fondamentales que je voulais signifier d'entrée de jeu: beaucoup de questions, un domaine entièrement nouveau en matière de droit municipal. Oui, bien sûr, nous avons choisi, au cours des derniers mois, et nous allons poursuivre dans cette formule. Il faut oser. Il ne faut pas se priver de retourner toutes les pierres et de regarder toutes les formules possibles, tout en indiquant, en conclusion, Mme la Présidente, que, à l'égard d'un secteur aussi névralgique que celui de l'eau, la prudence, la perspicacité et l'attention doivent être retenues à l'égard de cette situation et la précipitation serait peut-être mauvaise conseillère à l'égard de ce secteur d'activité de nos collectivités locales. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. J'espère que vous ne serez pas toujours indiscipliné comme ça.

M. Trudel: Moi, je comptais sur votre complicité, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est justement. Mais c'était tellement intéressant que je vous ai laissé aller jusqu'au bout. C'était très instructif pour tout le monde.

M. Trudel: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, Mme la députée de Jean-Talon.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Ça m'a fait plaisir, Mme la Présidente, d'entendre notre nouveau ministre et de lui permettre évidemment de dépasser son 15 minutes. Effectivement, ses notes étaient fort intéressantes. Vous me permettrez, d'entrée de jeu, de féliciter le député de Rouyn-Noranda– Témiscamingue que l'on retrouve devant nous aujourd'hui comme ministre des Affaires municipales. J'aimerais, au nom de ma formation politique et en mon nom personnel, lui souhaiter bonne chance et l'assurer, aussi, de notre plus grande collaboration dans les dossiers qui touchent évidemment nos collectivités locales et qui touchent évidemment – quand on regarde – en première ligne, nos citoyens, parce que c'est d'eux qu'on parle. Qu'on parle de quelque législation que ce soit, les citoyens sont au coeur de nos préoccupations. Je l'assure de cette collaboration-là. À chaque fois qu'il y aura une législation ou un projet qui sera présenté par le gouvernement, si ça touche justement la qualité de vie du citoyen, si ça touche son mieux-être et sa capacité de payer, et qu'on cherche toujours davantage de moyens d'alléger son fardeau fiscal, nous serons là évidemment pour appuyer le gouvernement dans ses démarches.

J'aimerais aussi souhaiter la bienvenue, ce matin, aux trois groupes – on aura l'occasion de leur parler sur une base plus individuelle – et les remercier de l'intérêt qu'ils portent justement à cette façon dite innovatrice de conjuguer, finalement, avec la réalité qu'on connaît dans le milieu municipal. Surtout que, pour l'ensemble des municipalités du Québec – M. le ministre faisait référence au fait qu'il y en avait 1 401; ce n'est pas toutes des nouvelles municipalités – donc il y a une panoplie de responsabilités, d'équipements et d'infrastructures qui doivent être réhabilités, restaurés, et les municipalités s'arrachent les cheveux pour savoir évidemment où elles vont trouver les moyens pour s'assurer qu'on dispense justement les meilleurs services aux meilleurs coûts à ces contribuables, que nous sommes d'ailleurs tous et toutes ici autour de cette table.

Alors, ce matin, on est ici, Mme la Présidente, pour évidemment ouvrir la consultation publique sur les sociétés d'économie mixte. Il y a bien des gens qui se demandent, dans un langage très particulier, là, très familier, qu'est-ce que ça mange en hiver, ça, des sociétés d'économie mixte. J'avoue que, pour en avoir parlé avec bien des gens, ça prend une bonne explication, puis une très bonne compréhension. Alors, j'apprécie qu'on ait justement cette consultation sur l'avant-projet de loi sur ces sociétés d'économie mixte qui ne sont pas – je tiens à le préciser ici – une invention du gouvernement actuel. Le ministre y a fait référence. Ce maillage, ce partenariat entre l'entreprise privée et le gouvernement public des collectivités locales existe depuis fort longtemps. Les premières sociétés d'économie mixte ont vu le jour en Europe, plus particulièrement en France, il y a de ça plusieurs décennies. Toute la gamme des responsabilités municipales peuvent faire partie évidemment des responsabilités d'une société d'économie mixte.

Ici, au Québec, c'est le gouvernement du Parti libéral qui a été le premier gouvernement québécois à innover dans ce domaine en 1994 en accordant, par le biais d'un projet de loi privé, à la MRC du Haut-Richelieu le droit de créer, de concert avec une entreprise privée, la première société d'économie mixte, et ce, pour la gestion des déchets. Une deuxième société d'économie mixte, toujours par le biais d'une loi privée, permettait à la ville de Saint-Romuald, ville qui se trouve sur la rive sud, ici à Québec, de créer, elle aussi, sa société d'économie mixte en partenariat avec la société Ultramar et le Syndicat industriel. Deux autres projets, par la suite, de société d'économie mixte ont été accordés par l'Assemblée nationale depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement du Parti québécois, et ce, toujours par le biais de projets de loi privés.

Nous sommes donc, Mme la Présidente, aux premiers balbutiements de ces sociétés d'économie mixte, ici, au Québec. Vous comprendrez donc notre étonnement, au Parti libéral du Québec, mais pas juste au Parti libéral, également chez des intervenants du milieu, de constater la célérité, la rapidité avec laquelle l'ex-ministre des Affaires municipales et député de Joliette, aujourd'hui ministre des Ressources naturelles, M. Guy Chevrette, a déposé son avant-projet de loi sur les sociétés d'économie mixte. Alors qu'une seule de ces sociétés d'économie mixte constituées depuis 1994 est opérationnelle, et ce, depuis mai dernier, il faut s'interroger sur ce qui a motivé ce même ex-ministre à inclure dans son avant-projet de loi des éléments qui n'ont pas encore été validés ou mis à l'épreuve, ou à exclure de ce même avant-projet de loi d'autres éléments qui auraient permis d'éviter des erreurs de parcours vécues à la fois par les fondateurs municipaux ou les partenaires privés dans leur cheminement respectif et collectif vers la création des sociétés d'économie mixte.

Je dois avouer que le concept de société d'économie mixte n'est pas facile de compréhension pour tout le monde. Vous savez, Mme la Présidente, j'ai déjà porté un autre chapeau. Alors, j'ai de la misère, des fois, à me l'enlever de sur la tête. Alors, j'ai essayé, dans le cadre de l'étude de cet avant-projet de loi là et de cette consultation-là, de m'imaginer devant un conseil municipal en train de leur expliquer pourquoi il y aurait maillage entre une entreprise privée et la ville, alors qu'on a toujours perçu l'entreprise privée comme le gros méchant dans les villes, là; elle voulait faire de l'argent alors que la ville ne veut pas faire de l'argent. C'est une parenthèse que j'ouvre, parce que, moi, en tout cas, je veux ramener le débat et j'aimerais qu'on se questionne beaucoup sur la nécessité de la création de ces sociétés d'économie mixte et la capacité qu'auront les élus municipaux à la fois de participer à leur gestion et aussi de convaincre les contribuables que c'est dans leur intérêt de le faire.

Alors, plusieurs citoyens verront arriver le partenaire privé avec une certaine méfiance. Auront-ils raison? Auront-ils tort? Qui choisira ce partenaire? Par quel processus se fera le choix? Le processus sera-t-il transparent? Pourra-t-on éviter le patronage? Quelle garantie les citoyens auront-ils que le fondateur municipal, donc la ville ou la MRC, ou la communauté urbaine, s'associera avec la meilleure entreprise sur le territoire ou dans le milieu? Parce qu'on ne touche pas vraiment à ça dans l'avant-projet de loi. Comment s'assurer que les citoyens seront toujours protégés et qu'ils ne paieront que le prix réel du service qui sera vendu par la nouvelle compagnie qu'est la SEM? Ces mêmes citoyens auront-ils compris qu'une société d'économie mixte est une compagnie privée et que, en vertu des lois régissant les compagnies, la société d'économie mixte devra payer l'impôt s'il y a des profits, engagera des employés, peut faire des profits, peut déclarer faillite?

(10 h 50)

Les citoyens devront comprendre ce qui motive l'entreprise privée à devenir partenaire d'une communauté urbaine, d'une MRC ou d'une municipalité locale et, à l'inverse, ils devront comprendre ce qui a motivé la municipalité ou la communauté urbaine, ou la MRC à devenir partenaire d'une entreprise privée. Les citoyens devront comprendre également les objectifs de cette nouvelle compagnie qui devra allier les intérêts des deux partenaires. M. le ministre faisait référence, tout à l'heure, à ce qu'on doit, dans l'entente, trouver deux gagnants, et je pense que c'est le grand défi qu'on aura à relever, par le biais d'un projet de loi – s'il y a un projet de loi – sur la création des sociétés d'économie mixte.

Pour les municipalités, elles le verront sans doute comme de nouvelles sources de revenus, ces municipalités qui sont aux prises avec un lourd fardeau fiscal et des dépenses qui s'accumulent malgré le fait que les municipalités s'engagent à diminuer ce fardeau-là, à diminuer les dépenses. Mais les comptes de taxes ne diminuent pas pour autant, même si on sabre dans ces dépenses-là ou si on sabre dans les services. Les municipalités devront voir aussi dans l'entreprise privée, dans ce partenaire... Est-ce qu'elles devront le voir comme une chance ou plutôt une opportunité pour l'entreprise privée de faire bénéficier de son expertise et de son apport financier un milieu qu'elle n'aurait peut-être pu envahir autrement?

L'avant-projet de loi tente de conjuguer lois fiscales, lois municipales et toutes autres afin de ne brimer personne. La lecture des mémoires est très révélatrice à de nombreux égards. La plupart des auteurs des mémoires appellent le gouvernement à la plus grande prudence. Rares sont les mémoires qui applaudissent sans réserve l'initiative du ministre d'aller de l'avant avec son avant-projet de loi. Plusieurs se questionnent sur le contrôle non nécessaire octroyé au ministre, sur l'accroissement des instances décisionnelles, sur le renvoi au conseil municipal, au conseil de la MRC ou au conseil d'une communauté urbaine, alors que la SEM, une fois constituée, devient une entité privée, donc indépendante.

Nous ne reprendrons pas, Mme la Présidente, dans nos notes d'ouverture, les nombreux commentaires ou interrogations, ou suggestions émis par les auteurs des mémoires. Ils sont définitivement mieux placés que nous pour les faire valoir lors de leur présentation devant cette commission. Nous désirons toutefois les assurer et assurer les membres de cette commission, ainsi que tous les intervenants qui sont intéressés de près ou de loin par la création des sociétés d'économie mixte que l'opposition officielle entend questionner les auteurs des mémoires afin qu'ils puissent éclairer et enrichir notre réflexion et notre démarche.

Comme plusieurs, nous sommes étonnés que le gouvernement veuille légiférer rapidement, puisque l'expérience québécoise est minimale dans ce domaine. Où est donc l'urgence de légiférer en cette matière? Les députés de l'opposition officielle ne sont pas les seuls à se poser cette question. Pourquoi ne pas laisser d'abord évoluer les quatre projets-pilotes actuellement autorisés? Pourquoi ne pas profiter de leurs expériences pour bonifier l'avant-projet de loi?

Nous avons besoin, Mme la Présidente, d'un nouvel éclairage pour circonscrire l'intérêt du partenaire privé, tout en demeurant très vigilants quant à la protection du contribuable. Tel qu'il est présenté, l'avant-projet de loi prévoit une participation majoritaire du portefeuille d'actions et une représentation majoritaire de la part du fondateur municipal au conseil d'administration.

À une première lecture des mémoires, nous avons relevé certaines suggestions, notamment pour améliorer la flexibilité du fonctionnement et pour assouplir les conditions de partage de la propriété des sociétés d'économie mixte. Nous avons l'intention d'explorer et d'approfondir ces avenues lors de nos discussions. Par le biais de cette consultation, l'opposition libérale veut s'assurer de la protection des droits du contribuable québécois. Au moment où le gouvernement responsabilise les administrateurs publics par le biais de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, nous ne devons pas perdre de vue les intérêts de nos contribuables. À ce titre, certaines recommandations proposent un encadrement quant à la sélection du partenaire privé. Malgré la nature très complexe d'une société d'économie mixte, il nous faut identifier, lors de cette commission parlementaire, les bénéfices que les payeurs de taxes en retireront.

Mme la Présidente, nous sommes tous et toutes conscients de la rareté des ressources financières du gouvernement, des municipalités locales. Nous saluons donc les initiatives que prendront ces collectivités locales pour diminuer le fardeau fiscal de leurs citoyens et de leurs citoyennes, tout en leur assurant des services de qualité et à moindre coût. Il faut cependant être très prudents et ne pas plonger à pieds joints dans des aventures dont on ne connaît pas encore l'issue. Le citoyen – qu'il soit contribuable, il est à la fois payeur de taxes, il est également travailleur aussi dans les communautés locales – doit toujours être au coeur de nos préoccupations, et c'est ce que nous défendrons tout au long de cette commission, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Alors, je demanderais maintenant à la Communauté urbaine de Montréal, représentée par Mme Vera Danyluk et M. Sylvain Gonthier, de bien vouloir s'approcher à la table.

Alors, nous vous souhaitons la bienvenue. Je vous dirais que vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et, après, il y aura des échanges entre le groupe parlementaire et le groupe ministériel de 20 minutes chacun. Alors, même si le temps... Il est 11 heures, là. Vous avez quand même une heure pour votre présentation. Alors, nous vous souhaitons la bienvenue.


Auditions


Communauté urbaine de Montréal (CUM)

M. Danyluk (Vera): Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. le ministre, membres de la commission, tout d'abord, je voudrais vous dire que c'est un plaisir pour nous d'avoir cette opportunité de venir partager nos commentaires sur cet avant-projet de loi sur les SEM. Avant de présenter peut-être formellement ce que nous avons envoyé dans notre mémoire que vous avez reçu sûrement, je voudrais, tout simplement, en entrant dans la matière, parler des possibilités que le ministre a mentionnées tantôt, possibilités, déjà, qui existent dans les lois. Dans la loi constitutive de la Communauté urbaine, il y a des possibilités, déjà, qui permettent aux municipalités et à la Communauté urbaine de confier au secteur privé, à des compagnies à but non lucratif ou à des buts lucratifs, la gestion de certaines activités ou de certaines compétences de la Communauté urbaine.

Comme vous le savez, la Communauté urbaine, à l'heure actuelle, comme toute autre municipalité, peut confier à une compagnie à but lucratif justement de fournir des services ou des avis, ou des matières relatifs à tout domaine relevant de la compétence de la Communauté urbaine. Ça, c'est déjà une possibilité qui permet à la Communauté urbaine de faire autrement, au lieu d'assumer juste dans le secteur public toutes les responsabilités prévues dans la loi. On peut signer, à la Communauté urbaine, des ententes avec toute autorité publique relatives à l'exercice de notre compétence, y compris à l'extérieur de notre territoire.

Il y a aussi la possibilité de signer des ententes avec d'autres compagnies qui peuvent fournir des services, des avis relatifs à toute matière relevant de la compétence de la Communauté urbaine. Il y a aussi une quatrième possibilité, une possibilité de signer une entente avec le gouvernement à titre d'expérience-pilote pour la prise en charge de certaines responsabilités gouvernementales, ce qu'on fait déjà à la Communauté urbaine. Il y a aussi une cinquième possibilité, la délégation de pouvoir non discrétionnaire par le gouvernement pourrait être donnée à la Communauté urbaine; dans certains cas, on a vu dans le passé ce genre de délégation.

(11 heures)

Il y a aussi des ententes intermunicipales avec possibilité de création d'une régie intermunicipale qui est prévue déjà dans la loi de la Communauté urbaine, et est prévue aussi la possibilité des municipalités d'agir de cette façon-là. Il y a aussi, à la Communauté urbaine, la possibilité d'exploiter ou de faire exploiter des commerces dans les parcs, incluant hébergement, restauration, stationnement, ce qu'on fait déjà dans les parcs régionaux de la Communauté urbaine. Il y a une huitième possibilité pour la Communauté urbaine, c'est la possibilité de fonder et d'aider des organismes sans but lucratif, et de leur confier l'organisation et la gestion des activités sur notre territoire, ce qu'on fait déjà.

Conséquemment, ça veut dire que l'avant-projet de loi que nous voyons, qui est déposé ici, est une neuvième possibilité pour la Communauté urbaine et pour les municipalités; une neuvième possibilité, une autre façon de faire les choses, une autre façon d'aller chercher le financement, comme a dit le ministre, une autre façon d'aller chercher l'expertise, comme a dit le ministre. C'est sûr que tout outil qui est donné aux municipalités ou à la Communauté urbaine de Montréal est un outil intéressant qui nous permet de regarder une autre façon de faire des choses, surtout dans la conjoncture où on vit aujourd'hui.

Sauf que, je dois vous dire, j'apprécie la note de prudence que j'entends de la part déjà du ministre et de la part d'un membre de la commission, cette note de prudence dans le sens que nous avons déjà des outils, qui nous sont accordés par loi par le gouvernement, que nous n'avons pas réussi à perfectionner encore. Et, avant d'aller se donner un autre outil où il y a beaucoup d'inconnues, moi, je pense – et je vous émets là un avis ou une opinion très personnelle – qu'on doit voir avec beaucoup d'attention à perfectionner les outils que nous avons avant de nous lancer dans les inconnues d'un autre outil où on n'a pas, surtout sur le territoire ici, au Québec, des preuves vraiment concrètes du succès de ce genre d'outil là.

Dans le document, le mémoire de la Communauté urbaine, c'est sûr que la Communauté urbaine de Montréal a pris connaissance avec beaucoup d'intérêt de l'avant-projet de loi qui est présenté sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal. Dans l'optique où ce projet de loi définit les paramètres d'une nouvelle forme de partenariat entre le secteur privé et le secteur public municipal, la Communauté tient à faire part à cette commission de certains commentaires ayant pour but d'en améliorer la formulation, de souligner certains aspects qu'il nous semble utile de clarifier et particulièrement de s'assurer que les dispositions de ce projet de loi sauront s'harmoniser avec la structure juridique de la Communauté urbaine si elle jugeait éventuellement opportun de se prévaloir des mécanismes de la Loi sur les sociétés d'économie mixte.

Nous présenterons d'abord des commentaires généraux portant sur l'aspect des relations de travail, sur le contrôle du fondateur municipal et sur le droit de regard du ministre des Affaires municipales. Ensuite, nous ferons des commentaires particuliers en regard de certains articles dans l'avant-projet de loi.

Dans nos commentaires généraux, le premier point que nous désirons faire, c'est l'impact sur les relations de travail. L'avant-projet de loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal est muet sur les diverses questions concernant les relations du travail que peut soulever la création d'une société d'économie mixte. Nous devons donc supposer que l'intention du législateur est de maintenir le plein effet de la législation du travail et du cadre contractuel des fondateurs municipaux établi par les conventions collectives.

Sans empêcher la mise sur pied d'une SEM, ce cadre juridique et contractuel soulève à cet égard un certain nombre de difficultés pouvant rendre moins opportune la création de ces nouvelles sociétés. La problématique est différente selon qu'on envisage de confier à la SEM une nouvelle activité ou, au contraire, une activité préalablement exercée par le fondateur municipal. Alors que le premier cas ne présente pas d'embûches particulières, le second soulève des difficultés certaines.

L'article 45 du Code du travail du Québec prévoit que, dans le cas d'aliénation ou de concession partielle ou totale d'entreprise, le nouvel employeur est lié par le ou les certificats d'accréditation de l'ancien employeur et par les conventions collectives en vigueur. De plus, si la SEM exerce une activité auparavant assumée par plusieurs municipalités, il faudrait redéfinir un ou des nouveaux certificats d'accréditation et renégocier une ou des conventions collectives intégrant en un tout cohérent l'ensemble des obligations contractées par les employeurs municipaux, telles les règles d'ancienneté, les plans d'évaluation des employés, etc. Par ailleurs, dans le cas particulier de la Communauté, les dispositions des différentes conventions collectives prévoient une négociation préalable avec le ou les syndicats concernant les modalités selon lesquelles le nouvel employeur s'engage à respecter les dispositions de la convention collective en vigueur.

Enfin, outre les difficultés ci-haut mentionnées, certaines de nos conventions collectives contiennent des clauses limitant considérablement la sous-traitance. Sans se prononcer sur la manière dont le projet de loi sur les sociétés d'économie mixte devrait régler cette épineuse question, nous croyons que certaines pistes de solution devraient y être prévues. À cet égard, nous sommes d'opinion que le Groupe de travail sur les relations du travail dans le secteur municipal, déjà mis sur pied, devrait accélérer ses travaux sur l'application de l'article 45 du Code du travail du Québec dans le secteur municipal. Vous savez qu'il y avait le travail du comité de M. Boivin, qui a travaillé à regarder toute la question d'arbitrage des différends et toute la question, aussi, de l'article 45 du Code du travail. Je pense qu'il est très, très important que ce travail puisse se poursuivre, et rapidement, pour en arriver à des conclusions.

Deuxième point général dont on veut traiter dans nos commentaires, c'est le contrôle du fondateur municipal. L'avant-projet de loi laisse transparaître une volonté du législateur de s'assurer que ce partenariat avec le secteur privé se fasse dans le respect de l'intérêt des citoyens comme payeurs de taxes et comme usagers des services municipaux. Cette volonté est parfaitement louable, et nous la partageons. Toutefois, les mécanismes envisagés nous semblent parfois inutilement lourds ou très limitatifs.

L'avant-projet de loi prévoit que le fondateur municipal doit détenir non seulement la majorité des voix rattachées aux actions de la société, mais aussi plus de la moitié des actions de toutes catégories de cette dernière. Or, l'objectif étant, d'une part, de s'assurer que le contrôle de la SEM reste entre les mains des élus municipaux et, d'autre part, d'intéresser l'entreprise privée à y injecter des capitaux, ce double objectif ne serait-il pas mieux servi si le contrôle du fondateur municipal ne portait que sur le contrôle des voix décisionnelles?

(11 h 10)

Par ailleurs, dès le moment où le fondateur municipal a le contrôle effectif de la SEM, les dispositions y surperposant un contrôle supplémentaire par le conseil municipal ou supramunicipal, le cas échéant, nous apparaissent alourdir inutilement le processus décisionnel de la SEM. Nous ferons à cet égard des commentaires spécifiques aux articles 39 et 40 relatifs à l'octroi des contrats par la SEM, et à l'article 44 exigeant l'autorisation du fondateur municipal en cas d'emprunt par émission d'obligations, et à l'article 21.

Le troisième point général, c'est le droit de regard du ministre des Affaires municipales. Plusieurs articles de l'avant-projet de loi exigent l'approbation du ministre des Affaires municipales pour divers types de décisions reliées à la mise en place et à la gestion de la SEM, par exemple les articles 4, 5, 7, 31, 37 et 49. Les articles 52, 54 et 55 prévoient, par ailleurs, une transmission de documents et d'informations au ministre; l'article 55 contient une obligation particulièrement extensible, la SEM devant fournir au ministre «tout renseignement qu'il requiert sur ses activités».

Ces contrôles nous semblent à contre-courant de la philosophie adoptée au cours des dernières années, allant plutôt dans le sens de l'assouplissement des contrôles et de la diminution de la paperasserie. Si le modèle des SEM obtient du succès, le ministère se verra à nouveau noyé sous le papier et empêtré dans ses contrôles, occasionnant lourdeur administrative et délais qui ne pourront qu'être nuisibles à la bonne gestion de la SEM. À titre d'exemple, l'article 49 prévoit l'obligation pour une communauté urbaine d'obtenir l'autorisation du ministre pour se rendre caution d'une SEM, si l'obligation qui en fait l'objet est de 100 000 $ et plus. Pour la Communauté urbaine de Montréal, un tel montant représente environ 0,01 % de son budget annuel de l'ordre de 1 000 000 000 $.

Les commentaires particuliers sur les articles de l'avant-projet de loi, vous les avez. Je vais essayer de passer rapidement sur ces articles-là. Il y a l'article 2 qui parle de... Selon la définition de «fondateur municipal», une communauté urbaine ne peut se joindre à une municipalité pour agir ensemble comme fondateur municipal, vu les mots «l'ensemble composé de municipalités ou de communautés urbaines». Ça fait que, là, on devrait clarifier le droit pour une communauté urbaine d'agir comme fondateur municipal avec une autre municipalité, qu'il s'agisse d'une municipalité locale ou d'une municipalité régionale de comté.

L'article 9. L'article 53 de la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal prévoit que les décisions du conseil sont prises à la majorité des voix, qui doit comporter à la fois la majorité des voix exprimées par les représentants de la ville de Montréal et celle des voix exprimées par les représentants des autres municipalités, le nombre de voix de chaque membre étant établi en fonction de la population, conformément à l'article 52 de cette même loi. Il faudrait que l'article 9 de l'avant-projet de loi tienne compte de cette règle de la double majorité prévue à la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal quant à l'adoption de la résolution de fondation d'une SEM.

L'article 17. Cet article devrait prévoir qu'un administrateur membre du conseil du fondateur municipal reste en place jusqu'à ce que son successeur entre en fonction, pour éviter qu'il y ait vacance en raison d'une élection municipale.

Sur l'article 20, on doit comprendre que cette rémunération dans le cas d'un élu siégeant au conseil d'administration d'une SEM ne serait pas visée par le maximum prévu par la Loi sur le traitement des élus municipaux. Or, cette rémunération fera partie des dépenses de la société à laquelle la fondateur municipal doit contribuer selon les modalités prévues à la loi. Il y aurait lieu de clarifier si cette fonction d'administrateur ne devrait pas faire partie de sa charge comme élu.

L'article 21. Cette disposition risque d'amener des délais dans l'adoption du budget de la SEM – sauf dans les cas de Québec et de Montréal – dans les cas où la municipalité doit soumettre le règlement fixant ses dépenses à l'égard de la SEM à l'approbation des personnes habiles à voter. En effet, si on fait le lien avec l'article 51 du projet de loi, qui prévoit que la SEM doit transmettre au fondateur municipal son estimation des coûts de la prochaine année financière avant le 1er octobre de chaque année, les délais reliés au mécanisme de consultation de la Loi sur les élections et les référendums risquent d'amener un flottement quant aux décisions budgétaires de la municipalité et de la SEM. Par ailleurs, qu'arrive-t-il dans un cas d'urgence? Lorsqu'il y a une dépense qui n'était pas prévue, comment peut-on régler ce problème rapidement?

Je vais laisser tomber les autres commentaires que nous avons sur les autres articles du projet de loi et je vais tout simplement passer à la conclusion que nous avons présentée dans notre document.

Le nouveau véhicule de partenariat que constituent les SEM ne serait surtout utile que pour de nouvelles activités, à moins que la Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal, ou une autre modalité législative, ne vienne solutionner le problème des relations de travail dans le monde municipal. Sinon, il faut être conscient que ce modèle pourrait n'avoir d'intérêt que pour des domaines de compétence dans lesquels des employés syndiqués du fondateur municipal ne sont pas déjà impliqués.

Nous espérons que ces quelques commentaires seront pris en considération et pourront vous être utiles en vue de l'élaboration d'une loi-cadre sur les sociétés d'économie mixte. Merci beaucoup de votre attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme Vera Danyluk. Alors, M. le ministre.

M. Trudel: Mme la Présidente, alors, je veux d'abord souhaiter la bienvenue à la présidente, Mme Danyluk, de la Communauté urbaine de Montréal, et à M. Gonthier, du secteur des relations de travail. À la lumière de ce que vous nous avez exposé, on comprend pourquoi vous vous faites accompagner de M. Gonthier aujourd'hui, à l'égard des préoccupations majeures qui vous occupent et nous occupent aussi.

Je veux d'abord, bien sûr, vous remercier d'avoir accepté et d'avoir décidé de préparer votre analyse à l'égard de l'avant-projet de loi. C'est significatif, Mme la présidente, que nous ayons convenu de vous demander de témoigner la première à cette commission parlementaire, parce que évidemment nous savons l'importance que prend la Communauté urbaine de Montréal à l'égard du développement sur la façon de gérer peut-être différemment les services publics au niveau municipal, en particulier sur l'île de Montréal, mais aussi ce que ça signifie pour le restant du Québec.

On va s'entendre rapidement pour dire que, lorsque c'est expérimenté de certaine façon sur l'île de Montréal, il y a des bonnes chances que toutes les épreuves que nous ayons à passer vont nous servir pour le restant du Québec. Alors, l'expérience des municipalités et de la Communauté urbaine sur le territoire de l'île – je le souhaite vivement et c'est déjà ce que je vois comme résultat d'analyse de votre part – va nous aider à bien fignoler notre travail à l'égard de ce droit nouveau. J'ai même envie de dire qu'évidemment j'ai bien apprécié vos remarques d'entrée en disant qu'il s'agissait d'une neuvième façon d'intervenir. Vous avez dit: C'est une nouvelle façon d'intervenir. Alors, je pensais que vous alliez dire: Il s'agit vraiment d'une nouvelle façon de gouverner. Je vous ai presque entendue dire ça. Et, effectivement, Mme la présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre!

Mme Danyluk (Vera): Ça, c'est le bon exemple...

M. Trudel: Ha, ha, ha! Mme la présidente, vous nous avez donc cité, à l'égard de cette nouvelle façon d'intervenir dans la livraison des services, un certain nombre de mises en garde. Revenons donc précisément sur les inquiétudes, oui, justifiées à l'égard de ce que signifie l'application de l'article 45 du Code du travail à l'occasion de l'apparition de cette nouvelle formule des sociétés d'économie mixte. Est-ce que vous pensez que nous pourrions en arriver à des aménagements, au niveau des relations de travail, qui puissent nous permettre de développer aussi à l'intérieur des sociétés d'économie mixte de nouvelles formules de partenariat? Je le dis suite aux conversations que nous avons eues récemment, où j'ai eu l'occasion d'apprécier les formules de la Communauté urbaine en matière de partenariat au niveau des relations de travail avec certains corps d'emplois. Est-ce que vous pensez qu'à l'égard de l'article 45 nous pourrions en arriver à des aménagements intéressants pour le monde municipal dans la livraison des services publics à l'intérieur d'une nouvelle formule qui s'appelle les sociétés d'économie mixte?

(11 h 20)

Mme Danyluk (Vera): Pour répondre à votre question, je dois vous dire que je vais dire oui dans le sens où je suis une éternelle optimiste. Et c'est sûr qu'il y a toujours moyen, avec nos syndicats... Et on l'a vu, on a vécu concrètement avec nos gens à la Communauté urbaine, avec nos employés, un travail en partenariat où on a démontré qu'il y a moyen de faire des choses, de faire des progrès importants avec nos employés. Avec l'application de l'article 45 du Code du travail, du côté technique, vraiment comment, à l'intérieur de cet article-là, on pourrait éventuellement développer ensemble, avec nos employés, un partenariat qui nous donnerait les résultats voulus, je dois vous dire que... Comme vous avez dit, c'est pour ça que j'ai le spécialiste en conditions de travail ici, avec moi, et je vais demander à M. Gonthier de vous répondre sur le côté technique.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Gonthier.

M. Gonthier (Sylvain): Oui. Alors, je pense qu'il faut faire la distinction entre les relations qu'on établit avec nos salariés, avec nos syndicats – comme on l'a fait à la Communauté urbaine – et les problèmes techniques que pose l'article 45. Le problème que pose l'article 45, c'est le transfert des accréditations des conventions collectives. Et on a mentionné un certain nombre de problématiques que ça pouvait causer.

L'autre problème que l'article 45 peut poser aussi, c'est lorsqu'elle offre des services aux municipalités. On a des municipalités qui font déjà de la sous-traitance. Prenons le cas de l'enlèvement de la neige où, dans certains cas, on a dit que c'était de la sous-traitance et, dans d'autres cas, on a dit que c'était une concession partielle d'entreprise. Et ça, ça cause des problèmes. Si la SEM, exemple, était une société d'enlèvement de la neige, on se retrouverait dans une situation où des municipalités auraient pu se mettre ensemble – les conventions et les accréditations, avoir été obligées de les mettre ensemble – et, en redonnant le service à la municipalité, elle se retrouve dans une situation où elle doit appliquer la convention collective de la municipalité également. Alors, on se retrouve dans des drôles de dynamiques. Parce que la jurisprudence, qui a évolué avec le temps, n'a pas clarifié cette question-là. Alors, ça, c'est l'aspect technique. Maintenant, à l'intérieur de la SEM, qu'on puisse établir des relations de travail basées sur le partenariat, de toute évidence, on peut le faire et on le fait déjà à la Communauté.

M. Trudel: Très bien. Merci. J'ajoute une remarque, donc, à vos observations. Si la Communauté urbaine de Montréal a réussi cela, soyons bien précis, avec ses cols bleus, pourquoi ça ne serait pas possible, oui, à l'intérieur d'un nouveau défi et d'une nouvelle façon d'organiser la livraison des services publics, à travers, par exemple, des sociétés comme les sociétés d'économie mixte? C'est une remarque qualitative que je veux introduire. Oui, il y a des difficultés; oui, il y a des situations particulières.

Et, à cet égard-là, j'ai l'intention, au cours des prochaines heures, de donner suite à la suggestion de Mme la présidente, il y a quelques minutes, de demander au ministre du Travail de poursuivre la mission de ce qu'on a appelé le comité Boivin à l'égard de l'examen de l'application de l'article 45, en particulier dans le cadre de la création éventuelle de sociétés d'économie mixte, et aussi, d'une façon autre, d'organiser la livraison des services publics municipaux. Tout cela à l'intérieur d'une pensée qui ne veut pas non plus remettre en question, carrément, les unités d'accréditation et la façon dont les relations de travail sont organisées actuellement à l'intérieur du Code du travail. Ce que je veux signifier par là: la notion de partenariat me semble essentielle. Et je conclus, tout simplement, ce chapitre-ci en disant: Si la Communauté urbaine de Montréal a réussi, pourquoi on ne pourrait pas tous réussir au Québec, la ville de Montréal incluse, à l'égard de cette façon de gérer au niveau des relations de travail au Québec et de ce que ça implique dans le monde municipal?

Je veux revenir sur un autre aspect, Mme la Présidente, éminemment important puisque je vous l'ai moi-même signalé dans mes notes d'introduction: toute la question du contrôle ministériel à l'égard de la création et du suivi des activités de la SEM. On est en matière de droit nouveau; Mme la députée de Jean-Talon, la porte-parole de l'opposition, signalait d'ailleurs qu'elle nous trouvait un petit peu pressés et un petit peu vites d'intervenir de cette façon-là à l'intérieur de la livraison des services municipaux. Est-ce que vous ne croyez pas que c'est agir avec sagesse que de fixer un certain nombre de contrôles, puisque nous sommes à l'intérieur d'une formule totalement nouvelle et que nous pourrions procéder par étapes, c'est-à-dire faire en sorte d'harmoniser avec nos partenaires municipaux les interventions en pareille matière, mais marquer ce changement-là de la prudence par un certain nombre de – oui, oui, disons le mot, là, c'est ça – contrôles de la part de l'État, puisqu'on est en matière de droit nouveau? En somme, est-ce que vous êtes prêts à cautionner notre prudence?

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la présidente.

Mme Danyluk (Vera): Écoutez, c'est sûr que, comme vous l'avez mentionné, c'est une formule nouvelle et puis c'est sûr que la Communauté urbaine voit un intérêt dans ce qui est proposé dans l'avant-projet de loi. Et, comme vous le dites, avec les contrôles nécessaires, si on y voit aux contrôles nécessaires, puis avec la prudence que vous avez mentionnée tantôt, c'est sûr, je pense, que c'est quelque chose qui pourrait avancer assez rapidement comme loi. Mais je dois vous dire qu'une chose que j'aurais aimé voir, c'est, de la part du gouvernement même du Québec, la création d'une SEM avec le gouvernement du Québec et avec le secteur privé ensemble, créer une SEM en partenariat avec le privé et permettre à cette société d'économie mixte de fonctionner pendant un an, deux ans, évaluer ce que ça fait, puis, après ça, dire aux municipalités: Là, on vous donne un outil; on a vu qu'il fonctionne et puis on vous le donne pour vous permettre de trouver des nouvelles façons de faire.

Parce que, je vous l'ai dit déjà, dans la province d'Ontario, vous savez que le gouvernement de l'Ontario a, effectivement, démarré un projet en partenariat avec le secteur privé. Il y a toute la nouvelle autoroute 407 qui serait construite par le secteur privé. Il va y avoir du péage sur cette autoroute-là. C'est un projet, effectivement, une sorte de SEM entre le gouvernement de l'Ontario et le secteur privé. Dans un cas comme ça, on peut évaluer le succès d'un tel projet au niveau du gouvernement et puis après ça, après avoir fait l'évaluation de la mise en oeuvre de tout un projet, là, au moins, on dit: On peut évaluer, on a des résultats concrets. Et puis, une fois que c'est «tested», là, on peut dire aux municipalités, puis aux communautés urbaines: Écoutez, on vous donne un outil qui est «full proof». On l'a testé, ça marche, ça fonctionne; on vous le donne.

Moi, je suis prête à dire: Oui, allez-y avec le projet de loi, mais en tenant compte justement des possibilités de contrôle, de la prudence. Surtout dans le domaine que vous avez mentionné dans votre préambule, le domaine de l'eau potable pour les citoyens, je pense que c'est un domaine qui est très délicat. Mais, comme je vous dis, personnellement, j'aurais aimé voir la possibilité pour le gouvernement d'aller faire la preuve d'une SEM avant et, après ça, de dire: Je vous donne un outil, à toutes les municipalités, qui fonctionne et puis qui fonctionne bien.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saint-Jean.

(11 h 30)

M. Paquin: Mme la Présidente, j'ai regardé avec intérêt justement et écouté les propos qu'on vient d'entendre concernant le droit de regard du ministre des Affaires municipales dans les SEM. Je pense, moi, qu'il y a beaucoup d'initiatives qui ont émergé. Pour avoir participé à l'adoption de deux de ces projets de loi privés sur les SEM, je pense que les initiatives, que les projets de gens qui veulent prendre en main leur milieu et se doter d'outils originaux qui leur permettent de le faire, ça sourd d'un peu partout sur le territoire, et je pense qu'on l'a constaté ensemble.

Dans ce sens-là, je pense qu'il est important, dans la mesure où l'on veut favoriser la rationalisation, d'envisager toutes les options possibles et d'oser les mettre au vu et au su de chacun, à l'intérieur d'un avant-projet de loi, par exemple, de façon à ce que ceux qui cherchent des instruments pour accomplir des responsabilités, tout en ayant une approche rationnelle, compte tenu des ressources qui sont disponibles et des acteurs dans le milieu et en particulier dans les régions... Je pense que c'est important de le faire. Et ça ouvre des horizons; je pense que ça nous permet aussi, donc, de faire une exploration. Dans ce cadre-là, l'avant-projet de loi, qui n'est pas le projet de loi, je pense que c'est une occasion de faire un débat de fond. Et, moi, je suis heureux d'entendre les remarques que j'ai entendues et les choses que j'ai pu lire dans les différents mémoires jusqu'ici.

Je voudrais m'attarder à la question du droit de regard du ministre. Je vois dans votre mémoire que vous citez en exemple un certain nombre d'articles où l'approbation du ministre des Affaires municipales vous apparaît une somme d'entraves ou de contrôles peut-être trop nombreux, par exemple, des dispositions pour obtenir une autorisation du ministre pour soutenir une SEM, par exemple, dès que l'obligation, c'est 100 000 $ et plus, vous considérez que c'est très peu parce que c'est 0,01 %, par exemple, du budget de la Communauté urbaine et tout ça. Donc, je reçois ça.

Mais, quand je les regarde, les articles, le 4, le 5, le 7, par exemple, ça dit: Ce genre d'instruments là, l'État est ouvert à ce que le milieu puisse en bénéficier. Ça dit aussi, dans le fond, que toutes ces choses-là doivent être faites dans le meilleur intérêt du citoyen. Donc, comme on est dans du droit nouveau, on se donne une prudence pour les créer. Dans l'article 37, on dit: Si on fait des filiales, il faut que ça suive le même processus. Dans l'article 31, on dit: On se donne des moyens de contrôle. Dans les articles 52, 54 et 55, que vous semblez désapprouver ou, en tout cas, qui vous embarrassent particulièrement, on dit: Pour une période de cinq ans, le temps de la mise en place de l'établissement et de la pérennité de l'organisme, le ministre peut recourir à un certain nombre de choses.

Notamment, il y a beaucoup de choses dans l'article 54, quand on dit: Tout ce qui est requis en vertu de l'article 98 de la Loi sur les compagnies. Je regardais ce que c'était; il y en a toute une série: un bilan dressé, un relevé général, le rapport du vérificateur, plein de renseignements, il y en a toute une liste. Effectivement, c'est beaucoup de documents. Mais, sur une période de cinq ans, pour établir la viabilité et pour être en mesure de répondre que ces choses sont faites dans l'intérêt du public, il me semble que ce n'est pas déraisonnable.

Alors, ma question: Suite à l'ensemble de ces considérations-là, est-ce que vous ne trouvez pas que le modèle de baliser sur cinq ans l'ensemble des interventions, de permettre au ministre d'aller chercher de l'information supplémentaire en vertu de l'article 55 et d'être en mesure de répondre au public que, effectivement, ces choses sont faites dans le meilleur intérêt du citoyen, c'est un modèle nécessaire? À défaut de quoi, qu'est-ce que vous proposez comme alternative?

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la présidente.

Mme Danyluk (Vera): Écoutez, c'est sûr que ça prend des balises pour s'assurer, surtout dans les cinq premières années, que tout est fait d'après les pratiques acceptables du gouvernement et des municipalités. Sauf qu'il semble y avoir une ambiguïté dans ce qu'on fait. On dit qu'on veut créer des SEM pour permettre une façon plus souple pour les municipalités de travailler ensemble avec le secteur privé. On sait que le secteur privé, les gens d'affaires ne veulent pas se faire tracasser avec 100 000 exigences. Même, on sait que, sur le territoire de la CUM, dans la grande région de Montréal, un des gros problèmes avec les investisseurs et avec les compagnies qui nous ont quittés pour aller ailleurs, c'est à cause du fait que, quand ces gens-là venaient demander des changements de zonage ou demander des certificats ou des permis de «whatever», dans certains cas, dans certaines municipalités, ça prenait deux ans pour ces gens-là avant qu'ils puissent les avoir. Ça fait que ces gens-là, éventuellement, ont dit: «Goodbye», les boys, on s'en va ailleurs où c'est moins compliqué. Ça fait que je pense que c'est là...

Je suis d'accord, j'accepte ce que vous dites et je dis: Si, à un moment donné, la loi est adoptée, il faut se donner les balises afin de bien fonctionner, surtout dans les cinq premières années. Sauf qu'on dit: On va assouplir les activités ou le fonctionnement des SEM, même au point de dire qu'on ne demandera pas d'appels d'offres et tout le reste. Mais, de l'autre côté, on dit: Mais le gouvernement devra avoir le droit de regard dans tous les renseignements, tous les documents. Ça fait que c'est juste ça. Ce que j'essaie de vous dire, c'est: Encore une fois, peut-être, essayons de trouver un équilibre dans ce qu'on fait. Parce que ça semble être quelque chose qu'on fait très bien ici, au Québec; à tous les 25 ans, pour une raison ou une autre, on se sent obligés d'inventer une autre structure. Puis, à chaque fois qu'on l'invente, on rend nos vies tellement plus complexes qu'elles étaient auparavant. Et c'est pour ça que j'ai dit, au début de mes commentaires, que souvent on serait mieux d'améliorer ce qu'on fait au lieu de jeter le bébé avec, tu sais...

La Présidente (Mme Bélanger): L'eau du bain.

Mme Danyluk (Vera): ...l'eau du bain. C'est pour ça que je vous dis que vous avez raison. Tu sais, ce n'est pas... Moi, je suis en faveur de ce qui est proposé, sauf que, encore une fois, est-ce qu'on pourrait baliser tout ce qu'on fait et simplifier nos vies? Parce que nos vies sont rendues tellement complexes. Puis on a de gros problèmes à régler, si on pouvait les régler dans la simplicité et dans l'harmonisation de tout ce qu'on fait au lieu de se donner, encore une fois, une autre structure, d'autres complications. Les gens d'affaires, le secteur privé, eux, ils ne veulent pas avoir des structures complexes, ils ne veulent pas siéger à des conseils d'administration où ils n'auront pas le contrôle de leur argent. C'est pour ça que je vous dis: Oui, donnons-nous des balises, mais donnons-nous aussi un équilibre et une simplicité qui nous permettent de fonctionner et d'avancer, parce qu'on ne peut pas continuer à tourner en rond comme on le fait, surtout dans la grande région de Montréal.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, le mot de la fin.

M. Trudel: Mme la présidente, merci beaucoup de ces commentaires. Nous n'avons pas traité de tous les points que vous avez soulevés, mais votre mémoire sera examiné avec très grande attention. Et je retiens votre double perspective à l'égard de ce nouvel instrument: un enthousiasme contrôlé ou bien donc une prudence audacieuse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Alors, nous allons faire en sorte de nous retrouver à travers ces balises. Merci beaucoup, beaucoup de cette présentation et de l'attention que vous accordez à cet avant-projet de loi, et aussi de votre dernière remarque de faire les affaires avec simplicité pour se retrouver aussi au niveau de l'efficacité, tout en préservant toujours évidemment l'intérêt de l'usager au premier titre. Merci beaucoup, Mme la présidente, M. Gonthier. Merci de votre prestation.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre.

Mme Danyluk (Vera): Mme la Présidente, permettez-moi de vous remercier...

La Présidente (Mme Bélanger): Non, ce n'est pas fini.

Mme Danyluk (Vera): Ah! Ce n'est pas fini.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous avez 20 minutes. C'est fini avec le ministre, mais ce n'est pas fini avec le reste.

Mme Danyluk (Vera): Ah! Excusez.

La Présidente (Mme Bélanger): L'opposition est très, très importante dans cette commission, Mme la présidente.

Mme Delisle: Il y a une opposition, Mme la présidente. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, et elle est très importante. Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. J'apprécie également, Mme la présidente, les commentaires sur la simplicité du système, puis s'assurer finalement qu'il n'y a pas de duplication et qu'il n'y a pas de complication aussi dans la façon dont on gère non seulement nos entreprises, mais aussi nos municipalités.

(11 h 40)

Il y a de nombreuses remarques que vous avez passées et qui ont été relevées par le ministre. Je ne reviendrai pas là-dessus. Je retiens, par contre, que vous avez mentionné qu'il y avait évidemment plusieurs avenues qui étaient offertes aux municipalités, aux communautés urbaines et aux MRC pour s'associer avec l'entreprise privée. Cependant, dans la liste que vous avez décrite, il n'y en a pas une seule, sauf celle qui est sur la table et qu'on doit discuter aujourd'hui, qui discute de la formation d'une compagnie. Parce que les municipalités peuvent faire des ententes intermunicipales, peuvent confier à l'entreprise privée la gestion de certains services, mais entre le confier et en être un partenaire intégral, il y a une grande différence, en tout cas, dans mon livre à moi.

Ce qu'on note dans l'ensemble des mémoires qui nous ont été présentés, c'est cette grande prudence évidemment que vous avez soulevée et qui est à noter aussi avant d'aller beaucoup plus loin dans ce processus qui est carrément nouveau et qui fait partie aussi du droit nouveau. Plusieurs en ont parlé tout à l'heure. Je laisserai à mon collègue, dans quelques minutes, le soin de vous parler plutôt des relations de travail, parce que la Communauté urbaine de Montréal est un des rares organismes à avoir abordé très précisément l'angle... Il y en a d'autres qui l'ont fait, mais disons que vous l'avez fait sous un angle un peu particulier, et je pense que c'est intéressant parce que vous vivez à l'intérieur de votre organisme évidemment des réalités que les municipalités ne vivent pas nécessairement. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de problème de relations de travail; il y en a, mais c'est peut-être, à l'occasion, un peu moins compliqué.

Moi, j'aimerais revenir sur le contrôle du fondateur municipal. De prime abord, ça ne semble pas compliqué. Cependant, on dit qu'on va donner au fondateur municipal la majorité décisionnelle au niveau des actions votantes. Dans votre mémoire, à la page 3 – et j'aimerais vous citer parce que j'aurais une question là-dessus; c'est le troisième paragraphe du point 2 – vous dites: «Or, l'objectif étant, d'une part, de s'assurer que le contrôle de la SEM reste entre les mains des élus municipaux et, d'autre part, d'intéresser l'entreprise privée à y injecter des capitaux, ce double objectif ne serait-il pas mieux servi si le contrôle du fondateur municipal ne portait que sur le contrôle des voix décisionnelles?» J'aimerais savoir ce que vous voulez dire et en quoi les intérêts de la Communauté urbaine de Montréal et, par ricochet, des villes aussi seraient mieux servis.

Mme Danyluk (Vera): Écoutez, le commentaire est fait, tout simplement, dans le sens: pourquoi on s'impose, nous, un contrôle sur les investissements, sur l'argent que le secteur privé pourrait injecter dans une SEM? Parce que, de la façon dont la loi est écrite, ça nous donne l'impression que, si le secteur privé voulait venir faire partie d'une SEM, il est limité dans sa possibilité d'injecter des fonds à cause du fait qu'on insiste pour que ce soit toujours le fondateur municipal qui ait la majorité des investissements. Je me dis qu'une fois que la municipalité, le fondateur municipal ou la communauté urbaine a le contrôle des voix décisionnelles au sein d'un conseil d'administration pourquoi on imposerait un double contrôle?

Parce qu'à part de ce qui est présenté dans l'avant-projet de loi je dois vous dire que, moi, je vois la possibilité d'avoir une SEM où le secteur privé serait majoritaire, et ça pourrait fonctionner très bien dans l'intérêt d'une municipalité ou d'une communauté urbaine. Dans le secteur privé, s'il y a une entreprise qui a une expertise extraordinaire qui pourrait venir servir à la municipalité ou à une communauté urbaine, dans certains cas – peut-être des cas très rares – il pourrait y avoir une SEM où l'entreprise privée serait majoritaire, aurait le contrôle et pourrait rendre un meilleur «deal» à la municipalité qu'à l'intérieur d'une société.

Mme Delisle: Sauf que, Mme la présidente, je pense que l'objectif premier... Lorsque le premier projet de loi privé a été adopté et, par la suite, les trois autres, une des garanties que le citoyen, que la municipalité avait, c'était justement, lors de la création de cette compagnie privée – parce que je pense que c'est le coeur de la discussion qu'on doit avoir et de la réflexion qu'on aura pendant quelques jours – que ça devienne compagnie privée et que les municipalités doivent garder le contrôle au niveau des décisions. Et je vous dirais, pour avoir lu l'ensemble des mémoires, que ça va un peu à l'encontre de ce que vous venez de dire.

C'est fort intéressant que vous veniez dire ça, parce que, finalement, vous êtes la Communauté urbaine de Montréal; il existe deux autres communautés urbaines. Et vous me permettrez un petit commentaire personnel: Vous êtes des gens, finalement, qui gèrent une grosse boîte; je suis déjà passée par là. Mais la municipalité, finalement, elle est vraiment davantage collée au sol et la SEM, elle, pour revenir à ce que je voulais dire, doit en tout temps s'assurer que le contribuable est protégé. La SEM n'a pas été créée pour faire faire des profits à une compagnie privée ou à une entreprise privée. La SEM permet – d'après ce qu'on peut comprendre, tout le monde – à une municipalité de s'associer avec l'entreprise privée pour faire baisser les coûts, développer une expertise dans les domaines, finalement, où la municipalité ou la MRC, ou la communauté urbaine, à ce niveau-là, ne pourrait pas se permettre de le faire.

Alors, moi, ce que je veux vous demander, à partir de la réponse que vous venez de me donner... Plusieurs mémoires font état du fait qu'à la limite l'entreprise privée pourrait détenir 100 % des actions, mais ne jamais détenir plus de 49 % des actions votantes. Et ça, je pense que c'est le nerf de la guerre, actuellement, dans notre discussion. D'après vous, est-ce qu'on pourrait élargir la SEM? D'après ce que je peux comprendre, là, l'entreprise privée pourrait prendre le contrôle de la SEM, c'est ce que vous venez de dire.

Mme Danyluk (Vera): Je vous dis que, s'il y a une garantie pour la municipalité ou la communauté urbaine d'avoir la majorité des voix décisionnelles, c'est sûr que, dans ce cas-là, si le secteur privé veut investir plus que le 49 %, nous, on ne voyait pas le problème.

Mme Delisle: O.K.

Mme Danyluk (Vera): Mais avec la garantie justement que, pour les voix décisionnelles, la majorité appartiendrait à la municipalité. Ça, c'est sûr que, dans le contexte de l'avant-projet de loi qui est devant nous, c'est important d'avoir ce contrôle-là pour les municipalités. Mais, comme je vous le dis, comme hypothèse, il y a une possibilité d'avoir une entreprise privée qui aurait le contrôle d'une société mixte, qui pourrait donner un meilleur «deal» aux municipalités. C'est sûr que ce n'est pas ça que je vous propose aujourd'hui, mais je sais pertinemment qu'il y a une façon d'aller chercher de meilleurs services pour les municipalités, puis ça coûterait moins cher.

Mme Delisle: Une toute dernière, Mme la Présidente, sur la question de la rémunération. C'est toujours un sujet très délicat, mais je pense qu'il faut l'aborder. Vous avez choisi de l'aborder dans votre mémoire, à la page 6. Vous dites, concernant la rémunération: «Il y aurait lieu de clarifier si cette fonction d'administrateur ne devrait pas faire partie de sa charge comme élu.» Est-ce qu'on pourrait savoir ce que vous pensez vraiment, parce que le débat est ouvert, là? Est-ce que ça ne devrait pas faire partie de la charge d'un élu ou bien est-ce qu'un élu qui va y siéger devrait être rémunéré au même titre qu'un administrateur d'une entreprise privée?

Mme Danyluk (Vera): Je dois vous dire que, sur ce point-là, il y a deux possibilités de traiter la question, sauf que, nous, on l'a abordée dans le sens que, dans la loi, il y a un maximum qu'un élu peut avoir comme rémunération chaque année. Et même, dans la Gazette officielle du Québec , on voit à chaque année, pour la Communauté urbaine et tout ça, ces montants-là. On se dit: Si on veut avoir vraiment une SEM, qui est une société comme une entreprise privée qui a une existence en elle-même, l'élu ne devrait pas être limité par le maximum et pourrait aller chercher de l'argent en plus au niveau de la SEM, si on veut donner une existence à la SEM qui ressemble justement aux entreprises.

(11 h 50)

Mme Delisle: On voit déjà, Mme la présidente, la difficulté de concilier des dispositions qu'on retrouve dans diverses lois et qui font en sorte de bien conjuguer cet arrimage-là lors de la création d'une SEM.

Je vais céder la parole, si vous permettez, Mme la Présidente, à mon collègue, le député de LaFontaine.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, madame. Mme Danyluk, il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission. Vous faites ressortir, et c'est à juste titre – et on verra par la suite, lors des audiences qui vont suivre, que la CSN, l'UMQ, la Chambre de commerce le font ressortir aussi – le point particulier de l'application des conventions collectives et des relations de travail que pourrait générer ou créer cette nouvelle manière de faire, qui serait la création d'une SEM. Alors, il est vrai qu'on aurait, comme vous le dites si bien, à transférer les conventions collectives, à faire en sorte que les employés s'entendent avec cette nouvelle entité. Et, lorsqu'on voit la manière dont ça se déroule actuellement à Montréal ou dans d'autres municipalités – on voyait Sainte-Foy, la semaine dernière – on peut d'ores et déjà se poser un certain nombre de questions quant à la facilité avec laquelle ça pourrait se faire. Je pense qu'on aurait là certainement une source supplémentaire de conflits qui pourraient être générés dans un certain nombre de municipalités, du moins sous la forme actuelle de l'avant-projet de loi.

Il y a quelque chose aussi que vous ne mentionnez pas, mais j'aimerais ça que vous parliez là-dessus, advenant que nous allions plus de l'avant et que des SEM se créent dans des secteurs névralgiques pour l'intérêt du public. Alors, on sait qu'ils ne seront pas dans la protection des incendies ou la police, mais, par contre – le ministre l'évoquait lui-même – on sait que, sous-jacent à cela, dans certaines municipalités, il y a des velléités d'aller vers l'eau, par exemple; ça peut être aussi vers le ramassage des déchets; ça peut être les bibliothèques. On voit qu'à Montréal le maire Bourque essaie de faire faire du communautaire. Qui nous dit qu'un jour un maire ou une mairesse, de bonne foi, n'essaiera pas de faire une SEM pour gérer son service culturel ou de bibliothèque?

Qu'est-ce qui arrive, advenant que ce serait une SEM, donc une compagnie privée gérée par les relations de travail en vigueur dans le privé et non plus dans le public, en cas de conflit de travail et de détermination des services essentiels? Parce que, là, ce n'est plus du tout pareil que lorsqu'on est soumis au Code du travail, selon l'article 45. C'est le Code du travail qui régit la fonction publique municipale, entre autres. Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus. Comment vous voyez ça, vous, une SEM, là, un conflit de travail? Et d'autant plus qu'on parle de sous-traitant; la SEM peut sous-traiter. Ça peut être le sous-traitant qui devient en grève, lui, là. Il y a la loi antiscab, ça interdit aux employés d'aller travailler. Est-ce qu'il y a assez de cadres pour faire marcher le système d'aqueduc? Ce n'est pas forcément évident. Est-ce qu'on ne va pas devoir aller abolir, à ce moment-là, ou retravailler non seulement l'article 45, mais aussi la loi antiscab? Je ne sais pas. J'ouvre ça large. Je ne l'ai vu dans aucun mémoire actuellement. Vous êtes la première à qui je pose la question; je la poserai certainement aux autres qui viendront. J'aimerais ça avoir votre vision là-dessus.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la présidente.

Mme Danyluk (Vera): Mais c'est sûr que, dans les commentaires qu'on a faits sur les conditions de travail, c'est dans cette veine-là qu'on a soulevé, au tout début de nos commentaires, l'importance d'essayer de régler ou de permettre au groupe qui a travaillé, justement le groupe de travail sur les relations de travail, de permettre à ces gens-là d'essayer de revoir l'article 45, de revoir un peu tous les détails concernés dans les SEM, parce que c'est sûr que le secteur privé, son objectif, c'est de faire de l'argent et de faire des profits. Du côté du secteur public, c'est sûr qu'il y a tout le service à la population. Il y a des services essentiels dont vous avez parlé, et justement on n'a pas ces réponses-là. C'est pour ça que, nous, dans nos commentaires généraux, c'est la première chose dont on a parlé.

Parce que, dans le projet de loi ou l'avant-projet de loi, c'est sûr qu'on n'a pas tous ces détails-là. Et ça nous semble primordial qu'il faut trouver des solutions, il faut connaître les possibilités. Qu'est-ce qu'il arrive si c'est justement une SEM qui donne un service et que, à un moment donné, il y a des problèmes de relations de travail? Qu'est-ce qu'il arrive au citoyen à la base du système? Je n'ai pas la réponse. Je vous l'ai dit tantôt, c'est pour ça que j'ai peur de la complexité et que j'ai peur de structures qui sont complexes, à cause de tous ces détails-là qui sont des inconnues pour nous. Et je ne sais pas s'il y a d'autres commentaires que, peut-être, M. Gonthier pourrait ajouter, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Gonthier.

M. Gonthier (Sylvain): Quant aux dispositions sur l'application des services essentiels, je pense qu'il m'apparaît clair, là, à première vue, que quelqu'un qui aurait à gérer l'eau, une SEM qui gérerait l'eau devrait être soumise aux dispositions des services essentiels. On ne peut pas dire que l'eau n'est pas essentielle parce qu'elle est gérée par une SEM. Dans le cas des bibliothèques, je vous dirai que c'est peut-être une autre question qu'on aurait à se poser par ailleurs. Alors, je pense qu'il faudra adapter les dispositions du Code du travail en vertu de cette nouvelle réalité-là. Mais ça n'empêche pas que ces dispositions-là pourraient trouver application.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député...

M. Gobé: Oui, Mme la Présidente. Alors...

La Présidente (Mme Bélanger): Bien, là, c'est parce qu'il ne reste pas grand temps, puis M. le député de Laurier-Dorion voudrait avoir une question.

M. Sirros: Alors, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): Après M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Non, non. C'est correct.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'écoutais attentivement le ministre tantôt et j'étais heureux de constater qu'il vantait la nécessité de faire plus avec moins, exposait les vertus de l'association avec le privé et j'étais presque en train de le féliciter pour son virage vers le libéralisme. J'étais certain que ses antécédents sociaux-démocrates allaient oser trouver une façon de concilier tout ça.

M. Trudel: Ce n'est pas irréconciliable, ça, M. le député.

M. Sirros: J'écoutais aussi tant le ministre que la présidente de la CUM et le porte-parole de l'opposition qui parlaient aussi de la nécessité de faire beaucoup attention, d'avoir beaucoup de prudence, une approche très prudente. C'est assez inusité qu'on présente des projets de loi avec lesquels on procède avec autant de timidité; je dirais que ça vous fait presque peur d'aller de l'avant.

Je vous ai entendu aussi parler des différents moyens dont disposent déjà les municipalités au niveau de faire faire différents services. Vous avez parlé, je pense, de neuf différents moyens qui existent, que ça soit les services directs, en sous-traitance, etc. Ici, nous en avons un autre qui nous est offert comme possibilité. Je n'ai pas décelé un genre de réclamation insistante de votre part pour avoir accès à ce projet de loi, à cette possibilité d'avoir des SEM.

Ma question était la suivante: Pourquoi on ne pourrait pas – et vous avez très bien, aussi, fait ressortir la non-nécessité de réinventer les choses et de créer des structures à tous les x nombre d'années – tout simplement, procéder cas par cas, un peu comme on l'a fait jusqu'à maintenant? Il y a quatre situations qui nous ont été présentées; on les a traitées individuellement, il y a eu des projets de loi privés qui ont permis la création de SEM. Qu'est-ce qui empêcherait pour l'instant, jusqu'à ce qu'on soit tous un peu plus sécures avec cette façon de procéder, de procéder de cette manière-là? Est-ce que vous voyez une nécessité pour un projet de loi cadre, mur à mur, qui établit des règles pour tout le monde plutôt qu'une approche qui pourrait être une approche cas par cas pour l'instant?

La Présidente (Mme Bélanger): Une minute pour la réponse, Mme la présidente

M. Sirros: Mais ça va être tellement instructif et intéressant qu'elle va pouvoir dépasser un peu, comme le ministre, sûrement.

Mme Danyluk (Vera): Pour être simple, toute simple et aussi courte dans ma réponse, tout simplement, si vous me posez la question: Est-ce qu'il y a une urgence d'adopter une telle loi immédiatement? je vous dis honnêtement non. Il y a sûrement déjà les huit autres outils que nous avons dans les municipalités et dans les communautés urbaines pour aller faire des choses en partenariat. Les huit outils que nous avons sont très peu utilisés et toujours à cause d'une chose: on revient toujours à l'article 45 du Code du travail.

M. Sirros: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): D'autres petites questions, M. le député de LaFontaine?

M. Gobé: Oui, c'était si...

La Présidente (Mme Bélanger): Courtes questions.

M. Gobé: ...Mme la présidente, à ce moment-là, serait prête à faire des recommandations, si le projet de loi devait continuer son cours, pour que soit automatiquement incluse une clause de services essentiels sur l'opération des SEM, particulièrement dans les domaines assez pointus ou assez importants du service au public, comme l'eau et d'autres – je prenais les bibliothèques comme exemple, M. Gonthier – organismes. Est-ce que vous seriez prêts à faire cette recommandation-là?

Mme Danyluk (Vera): Oui. On parlait de balises tantôt; s'il y avait des balises pour protéger les citoyens dans des cas comme ça, c'est sûr que, là, ça rend l'avant-projet de loi beaucoup plus acceptable.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, Mme Danyluk et M. Gonthier, nous vous remercions de votre présence à cette commission. Nous allons suspendre quelques instants pour faire le changement de groupe.

Mme Danyluk (Vera): Mme la Présidente, merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 12 h 3)

La Présidente (Mme Bélanger): S'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Le mandat de la commission est toujours consultation générale et auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal. Nous recevons maintenant la MRC du Haut-Richelieu, représentée par M. Gilles Dolbec, maire de la ville de Saint-Luc et président de Compo-Haut-Richelieu inc. Je demanderais à M. Dolbec de bien vouloir présenter les personnes qui l'accompagnent.


MRC du Haut-Richelieu

M. Dolbec (Gilles): Bonjour, Mme la Présidente. Dans un premier temps, c'est moi, Gilles Dolbec. Alors, je vais présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. Il s'agit de M. Charlemagne Vaillancourt, à ma droite, c'est-à-dire à votre gauche, qui est le maire de Saint-Alexandre et administrateur de Compo-Haut-Richelieu; j'ai, à mon extrême gauche, le maire d'Henryvillle, c'est-à-dire M. Serge Lafrance, qui est également administrateur de Compo-Haut-Richelieu; et nous avons, à ma gauche, Mme Joane Saulnier, secrétaire-trésorière de la municipalité régionale de comté du Haut-Richelieu.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Alors, comme vous le savez, vous avez 20 minutes pour présenter vos remarques qui seront suivies d'une discussion entre les ministériels et l'opposition pendant 40 minutes. M. Dolbec, c'est vous qui êtes le porte-parole?

M. Dolbec (Gilles): Oui, Mme la Présidente. Premièrement, laissez-moi vous saluer, également M. le ministre, le député du comté de Saint-Jean, c'est-à-dire mon député, monsieur... M. Roger Paquin – inquiète-toi pas, je l'avais, Roger – ainsi que Mmes et MM. les membres de la commission. Alors, j'aimerais, dans un premier temps, vous remercier pour nous recevoir à la commission parlementaire cet avant-midi, c'est-à-dire plutôt vers l'après-midi maintenant.

J'aimerais, dans un premier temps, positionner la MRC du Haut-Richelieu. Vous savez, comme il y a certains d'entre vous qui l'ont dit tantôt, que la première SEM à être créée au Québec fut la MRC du Haut-Richelieu. Or, disons que les gens de la MRC du Haut-Richelieu travaillent au dossier de cette SEM là depuis trois ans maintenant et ça s'est concrétisé par le début des activités de la MRC, c'est-à-dire de Compo-Haut-Richelieu, au mois de janvier 1996. La MRC a été à même de conclure à la nécessité de ce nouvel outil de travail qui est indispensable pour rejoindre les objectifs de toute municipalité, c'est-à-dire la rationalisation des coûts.

Elle constitue également un projet-pilote dans la province de Québec. Malheureusement, même si on est un projet-pilote dans la province de Québec, c'est rare les fois où l'on fait appel à nos services. Je tenais, tout simplement, à le souligner. Je pense que ça aurait été peut-être préférable, à un moment donné, de nous appeler pour certaines questions. Malheureusement, on ne l'a pas fait. Une SEM, c'est un outil essentiel pour relever les nouveaux défis du monde municipal, mais pas tout à fait comme on l'a écrit dans l'avant-projet de loi.

J'aimerais passer aux remarques générales sur l'avant-projet de loi. Le conseil de la MRC du Haut-Richelieu est d'avis que l'orientation de cet avant-projet de loi ne rencontre pas les objectifs de souplesse et d'allégement de contrôle recherchés, espérés et préconisés pour l'administration et la gestion municipales futures. L'on y retrouve beaucoup trop de similarités avec les opérations actuelles du monde municipal. Le gouvernement semble avoir oublié que, par cette nouvelle façon de faire, il voulait permettre aux municipalités, MRC et communautés urbaines de créer une entité privée et, à cet effet, il doit scrupuleusement dissiper toute association avec le monde public. Trop souvent a-t-on vu grimper les factures lorsqu'il s'agit de municipalités qui demandent des biens ou services. Il ne s'agit pas de camoufler le secteur public, mais bien de le traiter à titre d'actionnaire usuel qui participe à une compagnie privée.

À la lecture de certains articles, nous sommes enclins à conclure que le gouvernement fait marche arrière avec les compétences accordées, entre autres, aux municipalités régionales de comté depuis le 1er janvier 1988. Obliger la MRC à faire confirmer certaines de ses décisions par chaque municipalité nous retourne 10 ans en arrière. Déjà, la gestion du droit de retrait est lourde et suffit, par ailleurs, pour permettre aux municipalités de se retirer d'un service offert; alors, pourquoi exiger de toutes celles qui veulent aller de l'avant une confirmation qui, par leur participation, se confirme automatiquement? L'adage «Qui ne dit mot consent» devrait trouver ici toute son application.

Le gouvernement, ayant déjà amorcé un mouvement de décentralisation, devra le faire de façon complète et totale, c'est-à-dire que les responsabilités transférées et ce nouvel outil de gestion qu'est la société d'économie mixte doivent l'être d'une façon absolue, sans laisser l'impression d'une constante tutelle du ministre des Affaires municipales. Bien qu'il s'agisse de deniers publics investis dans une compagnie privée, le gouvernement doit traiter la SEM à titre d'entité totalement privée et se tourner vers l'actionnaire du secteur public pour le régir directement et non via la nouvelle compagnie. L'on manque complètement le bateau lorsqu'on envisage de régir les SEM comme une régie intermunicipale. Le concept des SEM est différent et les objectifs aussi. N'oublions pas qu'enfin le secteur public pourra faire ses preuves sans être préalablement affublé du boulet qu'il traîne toujours à titre de public et qui plus souvent qu'autrement lui coûte cher et le limite dans ses gestes, pouvoirs de négociation et champs de compétence.

Il faut cibler la constitution de SEM comme un outil souple pour le monde municipal et faire attention pour ne pas régir à outrance cette nouvelle conception et formule d'association pour en faire une compagnie privée normale et usuelle. Le ministre des Affaires municipales doit figurer les SEM comme une compagnie ordinaire sans plus, car plus on imposera des mesures d'opération exceptionnelles à cette compagnie, plus l'on s'éloignera de l'objectif de diversification et de souplesse tant attendu. Il aurait, par ailleurs, été opportun de définir certains champs de compétence régionaux ou municipaux exclusifs pour la constitution de SEM et, ainsi, de circonscrire et limiter les pouvoirs de retrait à ces seuls champs d'activité.

(12 h 10)

Je voudrais vous parler maintenant d'une vision globale de l'avant-projet. Après examen, il faut tendre, comme on le disait tantôt, à assouplir l'avant-projet de loi. On peut vous faire référence à certains articles à l'intérieur de l'avant-projet de loi qui font en sorte que le ministre s'impose assez souvent à l'intérieur des SEM: l'article 7, entre autres, quand on parle de liquidation; vous avez l'article 8, vous avez l'article 12, l'article 21, l'article 20, l'article 49, etc. On a beaucoup d'articles qui font en sorte que le ministère des Affaires municipales s'implique énormément.

Le projet de loi, il est trop rigide présentement: trop d'autorisations à demander, aucune marge de manoeuvre. Nous référons même – et ça va loin – en tant que gouvernement, à la dénomination sociale de la nouvelle compagnie. Il y a trop de contraintes et de références à l'actuel système municipal: approbation du ministre, approbation du fondateur municipal, avis aux municipalités, pourcentage du budget, etc. Il faut gérer l'actionnaire et non la nouvelle compagnie qui, elle, est privée et doit le rester. Je fais référence ici à tous les articles qui demandent l'approbation du fondateur municipal. N'oublions jamais que nous sommes majoritaires, c'est-à-dire le fondateur municipal.

Élément essentiel à préconiser et à retenir: la majorité du secteur public détenue au sein du conseil d'administration de la société d'économie mixte. C'est pourquoi il ne faut pas référer au fondateur municipal, c'est-à-dire que le fondateur municipal détient la majorité au sein du conseil d'administration, c'est-à-dire du C.A. Il faudrait éviter également – on en a parlé tantôt lors d'autres discussions – d'assujettir la majorité du conseil d'administration au capital-actions. L'augmentation du capital-actions a été fournie par la partie privée. Il s'agit ici de la garantie d'exécution et, également, il y a l'allégement du fardeau fiscal des municipalités, de même que le concours au risque de cette nouvelle entité. On parle ici: Si on veut que les compagnies privées joignent le rang des compagnies publiques également pour en faire une SEM, elles doivent investir à l'intérieur de cette compagnie-là afin que le secteur municipal puisse rationaliser le plus possible ses dépenses. Après tout, le secteur privé, c'est lui, l'expert. Il doit investir et il doit se servir de sa technologie pour faire profiter la SEM de ses recommandations.

Nous avons également préconisé que la continuité, au moins un an après la démission ou la non-élection d'un élu, devrait être prise en considération pour siéger au sein du conseil d'administration d'une SEM, parce que vous savez que les élus municipaux, autant que les élus provinciaux, sont sujets à des élections et, par le fait même, sont sujets à partir. À ce moment-là, pour qu'une continuité se fasse, on suggère qu'il y ait peut-être une continuité à l'intérieur. Un élu, même s'il ne se représente pas, pourrait peut-être siéger à la SEM – parce qu'il ne faut jamais oublier qu'une SEM, c'est une entité privée, c'est-à-dire que c'est une compagnie – pour au moins préparer la relève d'autres élus qui pourraient le remplacer éventuellement.

Considérer également la partie privée comme un vrai investisseur et non un prêteur. Il faut éviter de traiter inéquitablement les intervenants du domaine privé par rapport aux mandataires du gouvernement. Ici, on fait allusion à l'article 13: un mandataire du gouvernement pourrait faire partie d'une SEM, mais n'aurait pas les mêmes qualificatifs ou ne pourrait pas investir dans cette SEM là. Alors, si on parle d'une SEM, si on parle d'une compagnie privée, que ce soit un mandataire du gouvernement, on veut qu'il soit sur le même pied d'égalité que tout autre mandataire qui pourrait investir dans une SEM.

Il faut régir également le droit de retrait pour les MRC de façon adéquate. Il faut élargir les compétences, éviter de gaspiller de l'énergie pour rien. Ici, on fait toujours allusion qu'une municipalité, même après de longs débats et après avoir pratiquement mis la SEM sur pied, peut se retirer et ainsi nuire énormément à la bonne marche de cette compagnie qui se fiait quand même sur l'ensemble des municipalités pour avoir les volumes ou les besoins nécessaires pour aller de l'avant.

Il faut limiter les interventions du ministère des Affaires municipales aux rapports financiers et aux prévisions budgétaires des entités municipales en ce qui a trait à son pouvoir de supervision. Il y a un autre point, ici, que nous prenons en considération, les articles 21 et 22 qui demandent qu'on aille soit au public ou au ministère pour des investissements d'au-delà de 1 % du budget d'une municipalité. Si cette contrainte avait fait partie du projet de loi de la SEM du Haut-Richelieu, je peux vous dire qu'on ne serait pas ici devant vous aujourd'hui pour vous parler qu'on a un fait accompli et concret dans le Haut-Richelieu, parce que c'est quand même très bas comme pourcentage.

Il faut également régir les règles du droit du travail. Vous avez parlé, tantôt, passablement du droit du travail, c'est-à-dire de l'article 45, malgré que, nous, nous sommes un peu mal placés pour parler de ça, parce que nous régissons présentement une société qui fait de la gestion intégrée des déchets, alors que ça n'existait pas sur le territoire, il n'y avait pas d'employés. Ça fait que ce n'est quand même pas dans notre... Ça ne nous accroche pas présentement, cet article-là; ça pourrait accrocher, éventuellement, comme vous en parliez tantôt avec la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, certains fonctionnaires ou certains employés, par exemple, qui pourraient avoir certains problèmes.

Je voudrais, peut-être, avant d'aller à la conclusion, vous dire qu'on se demande pourquoi tant de restrictions au niveau gouvernemental. Il faut penser que les élus des municipalités qui vont siéger à la SEM, que ce soit dans n'importe quel domaine du privé, doivent répondre à leur population, c'est-à-dire que je pense que les élus dans le domaine municipal ont la responsabilité de donner le meilleur service possible à leur population.

Si justement on voulait aller vers une autre façon de gouverner, il serait peut-être temps de s'y pencher, sur la nouvelle façon de gouverner, c'est-à-dire faire confiance, peut-être, aux élus des municipalités autant que les gens font confiance aux élus gouvernementaux pour administrer leurs biens. Je pense que nous sommes, en plus, les mieux placés, dans le domaine municipal, pour prendre nos responsabilités. Nous sommes, peut-être, les élus les plus près de la population. Je pense qu'à partir de là nous sommes jugés par nos pairs et, un peu comme vous, dans le fond, tous les élus gouvernementaux, je pense que nous sommes responsabilisés à ce moment-là.

En signe de conclusion, je voudrais vous faire quelques mises en garde vis-à-vis la perception d'une SEM pour le gouvernement. Il faut plus tendre à régir le fondateur municipal que de restreindre la SEM proprement dite. Si certains documents doivent être transmis, que ce soit une obligation du fondateur municipal et non de la SEM. Si des limites de garanties, dépenses ou autres doivent être décrétées, qu'elles le soient sans nuire au cours normal de la SEM à titre de compagnie privée. On semble méconnaître ce que c'est, une SEM. C'est pour ça qu'on insiste beaucoup sur une compagnie privée. Je pense que, quand on fait partie d'une compagnie privée, on n'a pas d'obstacles comme on nous en présente présentement à rencontrer sur notre chemin.

Il aurait été adéquat de prévoir des modalités fiscales libérant le fondateur municipal de payer des impôts, de prévoir des dispositions plus claires quant aux assurances, à la responsabilité, au mode de rémunération du gestionnaire, aux obligations minimales d'investissement du partenaire privé, de clarifier la rémunération des élus et de diminuer la surveillance de la SEM par le ministre des Affaires municipales. Permettez-nous de suggérer qu'à titre avant-gardiste cette loi devrait être intégrée au code des municipalités du Québec de façon distincte ou à l'intérieur d'un chapitre de la Loi sur l'organisation territoriale municipale. Par ailleurs, il aurait été plus prudent d'examiner le vécu du cas-pilote du Haut-Richelieu, comme je l'ai mentionné tantôt, avant la rédaction de cet avant-projet de loi cadre.

En espérant que ces quelques propos sauront aider à cheminer vers plusieurs SEM viables et rentables, puisqu'il s'agit là d'une solution menant sans équivoque à des résultats concrets et positifs pour le monde municipal, je tiens à vous remercier de votre attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Dolbec. M. le ministre.

(12 h 20)

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. Je veux souhaiter la bienvenue aux gens de la MRC du Haut-Richelieu et à vous en particulier, M. Dolbec, qui êtes le maire de la ville de Saint-Luc et aussi le président de ce qu'on pourrait appeler, oui, cette première SEM qui a été créée par autorisation du gouvernement du Québec par un projet de loi privé, il y a quelques mois. Je veux souhaiter la bienvenue également à M. Vaillancourt, M. Lafrance et Mme Saulnier qui est la secrétaire-trésorière de la municipalité et qui a un rôle important, aussi, à jouer à l'intérieur de l'évolution de cette première SEM au Québec. Bon.

Alors, M. le maire, je vous remercie des indications que vous nous donnez parce que, effectivement, vous êtes donc les premiers témoins du monde municipal à l'égard de cette nouvelle formule d'intervention. Il y a un certain nombre de choses, je vais vous le dire, qui étonnent assez clairement dans votre présentation, puisque vous affirmez qu'il ne faudrait retrouver, en gros, dans l'économie générale des sociétés d'économie mixte que les lois qui président à l'évolution du secteur privé. Le projet de loi présenté par le gouvernement pour encadrer la formation de ces nouvelles entités, ça comporte deux éléments. Si nous voulions aller vers la simple privatisation de services publics, nous n'aurions pas introduit un tel projet de loi. C'est un nouveau type d'entreprise qui pourrait être créé au Québec. Oui, il est vrai que le projet de loi prévoit des dispositions, en général, pour protéger l'intérêt public. Ce n'est pas une loi encadrant des entreprises privées oeuvrant seules dans le secteur municipal. C'est un avant-projet de loi qui vise à la création de nouvelles sociétés d'économie mixte. Alors, il ne faut pas qu'il y ait maldonne, là, sur l'objet de ce que nous sommes en train d'examiner.

Je comprends, par ailleurs, que votre expérience pratique sur le terrain nous amène à baliser ça de la meilleure façon possible pour avoir un résultat d'efficacité au niveau de ce que nous recherchons comme produit, c'est-à-dire des services publics livrés d'une façon différente, avec une efficacité et des coûts, souhaitons-le, qui soient moindres, parce qu'on ne prévoira pas de nouveaux instruments au niveau des entités locales au Québec si on ne cherche pas un résultat différent pour les citoyens, puis les usagers. Si c'est du pareil au même, on va fermer nos valises, on va tous rentrer chez nous et on va continuer à faire «more of the same». Non, il s'agit de changer.

À cet égard-là, je vous rappelle que vous dites, d'entrée de jeu, que vous déplorez en quelque sorte qu'on n'ait pas fait appel à votre expérience. Voilà l'objet de la consultation sur cet avant-projet de loi. Si nous avions voulu procéder de façon unilatérale, sans consultation, sans prendre note de ceux et celles qui ont l'expérience ou qui vivent des expériences similaires, bien, on aurait présenté un projet de loi. Alors, c'est un avant-projet de loi. Donc, tout est permissible, en particulier à l'égard de ceux qui ont vécu de telles expériences comme vous en vivez au niveau de la MRC du Haut-Richelieu.

Ceci étant dit, M. le maire et président de cette première SEM au Québec, qu'est-ce que vous voulez dire quand vous demandez, là, à l'État, au gouvernement d'être beaucoup moins présent au niveau de l'évolution des sociétés et que vous lui demandez, à cet État, par ailleurs, de définir certains champs de compétence régionaux ou municipaux exclusifs pour la constitution des SEM? C'est quoi, ces champs de compétence régionaux que vous voudriez voir réserver aux SEM, tout en souhaitant, je vous le rappelle, là, en demandant à l'État de ne pas intervenir dans les objets ou dans le contrôle de la SEM?

M. Dolbec (Gilles): M. le ministre, je pense que vous avez deux volets à votre question. Pour les champs de compétence, on parle, là, entre autres, dans ce qu'on a fait, nous, peut-être, là, de la gestion des déchets intégrée, par exemple; c'est un champ de compétence de niveau municipal, il y en a d'autres également. Et le volet que vous regardez quand vous... Moi, quand je parle de contraintes gouvernementales... On n'a pas besoin de contraintes gouvernementales, présentement, pour former une SEM, parce que, dans notre livre à nous autres, une SEM, c'est une compagnie privée dont la majorité des décideurs sont des élus municipaux. À partir de ce moment-là, ces mêmes élus municipaux là doivent, via leur budget et via déjà beaucoup de contraintes municipales, faire en sorte que vous approuviez automatiquement, mais en les regardant, j'imagine, à votre ministère, les budgets des municipalités et les budgets qui seront dévolus à la bonne marche de cette même SEM là qui serait créée, peu importe, dans un domaine donné.

À partir de ce moment-là, il faut quand même responsabiliser les élus municipaux d'une certaine façon. Il ne faut pas penser que les élus municipaux dans les municipalités ont été élus pour le plaisir d'être élus. Je pense qu'ils ont été élus pour le plaisir aujourd'hui d'administrer les biens publics de leur municipalité et, par le fait même, de leur région. On a créé les municipalités régionales de comté; on est en train de créer – et je pense que la présidente de la Communauté urbaine en parlait tantôt – des contraintes. On crée beaucoup de choses, mais on ne facilite jamais les choses. Alors, pourquoi toujours se créer des contraintes à l'intérieur des créations qu'on met sur pied pendant que vous avez la possibilité, dans votre propre milieu, de gérer ça d'une façon très efficace via les élus qui seront majoritaires? Parce que c'est de ça qu'on parle, là: on parle des élus majoritaires dans un domaine donné.

À partir de ce moment-là, c'est sûr qu'il doit y avoir des surveillances de budgets dans le domaine municipal par le ministre des Affaires municipales. Ça, on n'a rien contre ça. Et, qui plus est, c'est que, dans le moment, dans notre région du Haut-Richelieu, on est en train de faire la preuve qu'une SEM, c'est rentable et potable pour le milieu. Vous allez probablement bénéficier d'autres mémoires durant les semaines qui vont venir, et je pense qu'il y a des gens qui vont être en mesure de vous le prouver. Mais, nous, présentement, dans le Haut-Richelieu, notre SEM nous fait déjà économiser de l'argent pour nos citoyens. Alors, je pense que c'est déjà une preuve.

C'est évident qu'il faudrait peut-être aller plus loin dans le cheminement de ces sociétés d'économie mixte là pour voir s'il y aurait possibilité – bien, s'il y a possibilité, nous autres, on est en train de le prouver – dans d'autres SEM créées de sauver également des coûts un peu partout dans les municipalités soit régionales de comté ou dans les municipalités locales ou rurales, peu importe, du territoire du Québec. Mais, nous, présentement – ça, on peut vous le dire chiffres à l'appui – on a sauvé des coûts du fait qu'on est en train de s'organiser avec une société d'économie mixte de notre milieu.

M. Trudel: Dans votre mémoire, là, toujours dans le même secteur d'activité, là, ou le même champ de commentaires, je devrais dire, il y a quelque chose qui m'étonne: que des élus municipaux nous disent ici que le secteur public, dans une SEM, c'est un boulet à traîner. Je dois dire que je suis un peu étonné de ça, que des élus du secteur municipal viennent nous dire qu'à l'intérieur d'une SEM... «N'oublions pas qu'enfin le secteur public pourra faire ses preuves sans être préalablement affublé du boulet qu'il traîne toujours à titre de public et qui plus souvent qu'autrement lui coûte cher et le limite dans ses gestes, pouvoirs de négociation et champs de compétence.» Est-ce que je comprends bien en disant que la présence du secteur public avec ses règles d'imputabilité, c'est une raison quasi suffisante pour empêcher le bon fonctionnement d'une société d'économie mixte?

M. Dolbec (Gilles): Quasiment. Je peux vous dire quasiment. Écoutez, dans nos municipalités, M. le ministre... Moi, je peux vous dire que je suis un élu depuis 1978 et je vais parler à titre personnel. Dans une municipalité, quelle qu'elle soit, on est au service de la population et on prend nos responsabilités en tant qu'élus parce qu'on est élus au même titre que n'importe qui. Et je n'ai jamais compris, moi – j'ai toujours compris, mais je veux dire...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Vous aimeriez mieux comprendre autrement.

(12 h 30)

M. Dolbec (Gilles): ...on va s'expliquer, là – pourquoi on devait toujours faire un règlement d'emprunt, puis demander au ministère des Affaires municipales de l'approuver. C'est nous autres qui sommes élus chez nous; qu'on prenne nos responsabilités et qu'on fasse les choses qu'on doit faire chez nous. À ce moment-là, plus on va avoir de contraintes au niveau de... Puis, là, on parle de SEM, puis, là, il faut comprendre qu'on s'enlève complètement du domaine municipal; on parle de compagnies privées. Et, quand on parle de compagnies privées, ne nous mettez pas les contraintes que vous mettez aux municipalités, de grâce! Laissez-nous voguer allégrement en tant que compagnies privées. Regardez c'est quoi, une compagnie privée, et laissez-les aller. Ne nous mettez pas des contraintes où, toutes les fois qu'on va bouger, il faut qu'on vous pose la question: Est-ce que vous êtes d'accord? Est-ce qu'on peut faire ci? Est-ce qu'on peut faire ça? Et, qui plus est, jusqu'à un certain moment donné, il faut aller en référendum dans notre municipalité pour le demander à notre population. Si ce n'est pas une contrainte, c'est quoi?

Une voix: Un boulet?

M. Dolbec (Gilles): Si ce n'est pas une contrainte, je vais dire comme mon partenaire, ici: C'est un boulet. Mais c'est ça, la problématique. Qu'on allège au moins ces fardeaux-là afin d'éviter de toujours aller voir une tierce personne pour les responsabilités que, de toute façon, on prend pareil, là. On les prend pareil, ces responsabilités, puis on est en mesure de les prendre, nos responsabilités.

M. Trudel: Là, je comprends, monsieur...

M. Dolbec (Gilles): Je peux permettre à mes gens de... Je m'excuse, M. le ministre.

M. Trudel: Bien sûr.

M. Dolbec (Gilles): Il y a de nos gens qui peuvent répondre aussi. C'est parce que je ne suis pas tout seul; on est des élus, on est tous égaux, nous autres, ici. Je pense que nos gens peuvent aussi se mêler de ça.

M. Lafrance (Serge): Mme la Présidente, M. le ministre...

La Présidente (Mme Bélanger): C'est M. Lafrance?

M. Lafrance (Serge): Oui. Merci. Je pense que, quand on parle d'un boulet, l'expression est peut-être colorée un peu, mais il faut comprendre que, quand on parle d'un nouvel outil, d'une nouvelle structure pour travailler dans le domaine municipal, il fallait y voir des avantages et des avantages directs. Nous sommes conscients que, dans le domaine municipal, le pouvoir de négociation contractuel ne nous était pas permis.

Dans le nouvel outil que vous préconisez dans l'avant-projet de loi que vous déposez aujourd'hui pour discussion, vous donnez ce nouvel outil au monde municipal. C'est ça qui est très intéressant et c'est pour ça que la MRC du Haut-Richelieu est allée de l'avant dans un tel projet. Et c'est l'outil recherché dans le domaine municipal présentement. Ce pouvoir contractuel que nous n'avions pas, maintenant, avec cet outil-là, complété avec l'expérience et l'expertise du domaine privé, va donner le levier nécessaire au monde municipal pour passer au travers des nouveaux défis. On est très conscients de l'ère de la décentralisation et nous sommes assurés qu'avec la possibilité que l'économie mixte peut nous donner nous allons trouver des solutions à nos problèmes. C'était en complément à M. Dolbec.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Trudel: C'est un bon complément, cette bonne réponse du président et maire, du président de Compo-Haut-Richelieu et du maire de la ville de Saint-Luc, puisque la volonté de l'État, c'est de fournir un nouvel instrument – ce n'est pas d'ajouter des enfarges – pour obtenir de meilleurs résultats. Avec l'expérience que vous avez maintenant dans la gestion intégrée des déchets, avec cette SEM, Compo-Haut-Richelieu, est-ce que, vous, de votre côté, vous estimez que votre partenaire privé est éminemment satisfait de la façon dont ça fonctionne? C'est quoi, votre perception, à vous autres du secteur public, à l'égard de votre concubin?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dolbec.

M. Dolbec (Gilles): Dans un premier temps, j'ai beaucoup de difficultés à répondre pour quelqu'un d'autre.

M. Trudel: Mais je veux avoir votre perception, à vous.

M. Dolbec (Gilles): Pour le secteur privé, en toute honnêteté – parce que je suis originaire du secteur privé, moi; j'étais dans le transport autrefois – je peux vous dire en toute objectivité que ce n'est pas facile de faire affaire avec le secteur public et privé, parce que c'est vrai que c'est long, ça prend du temps. Puis vous connaissez le secteur privé. Moi, j'étais dans le secteur privé, je vous l'ai dit tantôt. Quand j'avais besoin de m'acheter quelque chose autrefois, je faisais un téléphone et je disais: On achète ça. O.K.? Dans le secteur public, ce n'est plus pareil. Là, tu dis à tes fonctionnaires: On a besoin d'un camion pour la neige cet hiver. Ah! Ça, c'est trois mois. Mais, là, l'hiver va être fini. Ah bien! On l'aura plus tard. Tu sais, je veux dire... C'est ça, le secteur public, et c'est des contraintes d'un bout à l'autre tout le temps, tout le temps.

Pour répondre à votre question, M. le ministre, ça n'a pas été nécessairement facile, je pense, pour le privé, de se joindre à nous, mais on est passés à travers. Et c'est ça, la beauté, je pense, de la SEM du Haut-Richelieu: c'est qu'on en est venu à faire quelque chose de concret dont les deux partenaires bénéficient. En tout cas, nous, présentement, on en bénéficie. Le secteur privé, moi, je peux vous dire qu'éventuellement il va en bénéficier. Et j'irais plus loin dans mon explication, juste un peu pour répondre à la question que Mme la députée de l'opposition posait tantôt. Une SEM, je m'excuse, là, mais c'est une compagnie pour faire de l'argent. Oui, une SEM, c'est une compagnie pour faire de l'argent, et je vais vous expliquer pourquoi. Nous, dans le domaine municipal, l'argent qu'on va faire, on va en faire bénéficier nos contribuables. Le privé, lui, va faire des profits. Alors, on est gagnants, tous les deux.

Et je l'expliquais, à un certain moment donné, à des gens qui nous disaient: Oui, mais comment vous allez faire pour faire ça? Dans le domaine de la gestion intégrée des déchets, c'est sûr qu'on a baissé les coûts à la porte, au moment où on se parle, d'à peu près toutes les municipalités du Haut-Richelieu, sauf quelques-unes. Alors, nous, on se dit: Si un jour – parce que, là, on s'en va dans un projet plus grandiose que seulement la cueillette – on fait de l'argent avec ça, à notre contribuable, si on n'a pas à investir pour de nouveaux équipements dans notre SEM, on pourrait prendre cet argent-là de nos profits ou de nos bénéfices et dire: Bien, écoute, au lieu de te coûter 80 $ la porte ou 90 $ – c'est un chiffre lancé en l'air, là, que je lance – bien, dorénavant, ça te coûtera 85 $ ou 80 $.

Alors, c'est évident que, pour nous du secteur public, c'est le contribuable qui va en bénéficier parce que, nous, on ne peut pas en bénéficier personnellement. Mais le privé, lui, il va le faire, ce même argent-là; alors, lui aussi va en bénéficier. Alors, on va y trouver, tous les deux, notre profit et c'est nos communautés qui vont en profiter. C'est, tout simplement, ça que je voulais vous expliquer en tant qu'une compagnie qui est là pour faire des profits.

M. Trudel: Très bien. Je reviendrai si j'ai quelques minutes.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Alors, bonjour. Bienvenue à bord. Moi, j'écoutais vos propos. Je partage incomplètement votre point de vue sur la question de la compagnie privée, en ce sens qu'il y a différents modèles d'entreprises autonomes au Québec: il y a des coops, il y a des compagnies, il y a des OSBL, etc., et chacune, selon ses règles, fonctionne. Ici, ce qu'on cherche à faire, c'est à créer un cadre dans lequel on pourra mixer des entités appartenant à l'un ou l'autre des mondes – le monde municipal, par exemple, et une compagnie privée – dans le but d'offrir un service particulier à des populations. Là où je vous rejoins, c'est sur le fait que ce n'est pas un organisme sans but lucratif. La compagnie privée doit y trouver ses profits sur le plan technologique, sur le plan des profits pécuniaires et tout ça, et évidemment l'entité municipale, en termes de retombées positives pour la gestion de ses finances et, donc, le bénéfice du contribuable.

Mais ma question globale, à ce moment-ci, puis j'en aurai plusieurs autres... Et, tantôt, mes collègues me glissaient à l'oreille: On aurait dû les entendre plus longtemps, ils ont beaucoup d'expertise. Mais je résumerais ça de la manière suivante. Le Haut-Richelieu a senti le besoin de cet outil, la SEM, pour faire un travail. Si ça avait été, au lieu d'une loi privée qui habille exactement le concept, la loi-cadre actuelle, le projet de loi cadre actuel, est-ce que vous auriez songé à utiliser cette voie-là? Et, si oui, est-ce qu'aujourd'hui Compo-Haut-Richelieu serait là? Et le corollaire à ça, c'est, advenant que votre réponse, c'est non, bien, là, que faut-il absolument, quelles sont les conditions minimales qu'il faudrait rencontrer?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dolbec.

M. Paquin: C'est une question longue, là.

M. Dolbec (Gilles): Oui. Je pense que, oui, il aurait fallu trouver et il va falloir trouver, au fur et à mesure que les mois et les années vont passer, des solutions aux problématiques qui existent présentement dans le domaine public, dans le monde public. Et vous êtes les mieux placés, en plus, pour la voir, la problématique de rationalisation des dépenses. Vous vous faites transférer et vous transférez à tout bout de champ des responsabilités nouvelles aux municipalités. Je pense que, pour que le monde municipal soit en mesure de les recevoir, il faut trouver des moyens efficaces pour faire en sorte de gérer d'une façon rationnelle nos dépenses et nos activités sur les territoires. C'est évident que, les sociétés d'économie mixte, ça a été apporté dans un contexte semblable. Or, si ça n'avait pas été une société d'économie mixte, on l'aurait appelée comment? Je ne le sais pas, là. Sauf que, oui, je pense que c'est important et dans beaucoup de domaines.

(12 h 40)

On parlait tantôt – et je pense que j'ai écouté M. le ministre, au début de l'allocution – d'assainissement des eaux, on parlait du traitement des eaux dans les municipalités. Je pense qu'un jour ça va en venir à ça. Mme Danyluk, tantôt, nous parlait des routes provinciales ou municipales, peu importe, faites par l'entreprise privée. On va en venir à ça. Si on n'est plus capables d'aller chercher des argents de nos citoyens... C'est-à-dire qu'on est capables d'aller en chercher encore; de toute façon, ça va toujours être eux autres qui vont payer, mais il va falloir regarder la façon dont ils vont le payer à moindre coût possible. Et, si on n'est plus capables, dans le domaine municipal ou dans le domaine provincial, de faire faire des travaux à moindre coût, il va falloir penser à d'autres solutions, et c'en est une, autre solution. Il peut y en avoir, peut-être, des centaines d'autres que je n'ai pas, mais, par contre, on a celle-là, et je pense que, nous, on est en train de prouver qu'elle est potable, puis qu'elle est bonne.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Dolbec. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci...

M. Lafrance (Serge): Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Lafrance, vous voulez compléter? Parce que le temps ministériel est terminé.

M. Lafrance (Serge): ...juste pour compléter...

La Présidente (Mme Bélanger): Complétez.

M. Lafrance (Serge): ...s'il vous plaît, l'intervention pour répondre à M. Paquin. La rédaction du mémoire qu'on a proposé à la commission, ici, reflète exactement ce qu'on disait comme position. L'outil qui est présenté en avant-projet n'aurait pas pu se réaliser et se concrétiser au Haut-Richelieu, tel qu'il est déposé. Mais, suite aux recommandations émises dans le mémoire, oui, ça aurait été un outil valable et intéressant. Il ne faut pas oublier qu'il y a eu des sommes énormes d'investies pour créer la première loi, le bill privé. Et vous en êtes conscients, M. le ministre, ainsi que M. Paquin, qu'il y a eu énormément de travail et beaucoup d'argent investis là-dedans. Puis on peut vous dire que c'est parce qu'on y croyait, à cet outil; on est fiers de l'avoir, cet outil, et on veut continuer à travailler avec cet outil. C'est en complément de réponse.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Je me joins aux commentaires des collègues. Moi aussi, j'aurais apprécié avoir, peut-être, un petit peu plus de temps étant donné que vous êtes les pionniers dans ce domaine-là, MM. les maires et Mme Saulnier. Je vous souhaite la bienvenue, puis je suis fort heureuse de vous avoir là. Je voudrais d'abord vous dire combien votre mémoire nous a inspirés. J'aimerais aussi, peut-être, juste clarifier une petite perception. Peut-être que j'ai mal compris la remarque de M. le maire Dolbec. Je n'ai absolument rien contre le fait que l'entreprise privée fasse de l'argent. Je dois vous dire que, pour moi, c'est une condition absolument absolue.

Il y a plusieurs éléments, là, et on n'aura sans doute pas le temps d'en faire le tour. Il y a tout le volet politique. Tout à l'heure, le ministre disait: Si on avait voulu privatiser les services, on ne serait pas ici pour s'en parler aujourd'hui. Je pense que c'est à peu près ce que M. le ministre a dit. Vous nous dites dans votre mémoire, à la page 9: «Si l'on parle de privatisation autant le faire» tout de suite «intégralement». C'est à la suite de l'article 12 et de vos commentaires là-dessus.

Je pense que la difficulté, ici, c'est le mariage entre deux cultures ou le maillage entre deux cultures qui sont complètement différentes. On ne peut pas reprocher au gouvernement de vouloir s'assurer que les lois municipales soient respectées, que le partenaire municipal ou le fondateur municipal, qui, lui, est là parce qu'il représente l'ensemble des contribuables, puisse y trouver son profit, entre guillemets, qui n'est pas nécessairement un profit financier, mais des services de qualité qu'il n'est peut-être plus capable de rendre parce que, finalement, les ressources financières sont difficiles à aller chercher. Et évidemment l'autre partenaire, qui est le partenaire privé, lui, a aussi son intérêt, qu'il soit financier, qu'il soit aussi de développer son expertise et d'en faire profiter son milieu. Bon. Donc, pour moi, c'est une condition sine qua non. Je pense que les objectifs, on les comprend très bien. Mais de marier ces deux cultures là, puis de les vendre, c'est deux choses.

Il faut comprendre aussi la difficulté que la plupart des gens ont à assimiler ce qu'est une SEM, parce que j'entends dans vos propos que c'est une compagnie privée. C'est ça, et ce n'est pas d'autre chose que ça. Et je me suis fait expliquer, dans la perspective d'autres gens, là, qui se sont prêtés de bonne grâce à me l'expliquer, comment ça fonctionnait. Il faut le voir comme une compagnie privée. Donc, s'il faut le voir comme une compagnie privée, il y a évidemment tous les commentaires que vous faites en ce qui regarde le volet politique, et c'est à ça que je viens.

En ce qui regarde le droit de retrait, toute la question d'assurer une continuité lorsqu'un membre du fondateur municipal ne peut plus siéger, soit parce qu'il décide de ne pas se représenter aux élections municipales ou parce qu'il se fait battre... Bon. Or, j'aimerais parler du droit de retrait, si vous permettez, parce que je pense que c'est un dossier qui est largement débattu à l'intérieur des MRC actuellement. On retrouve cette préoccupation-là dans le mémoire de l'UMRCQ, vous en faites mention dans le vôtre. Est-ce que vous pourriez élaborer sur la difficulté que vous occasionne justement ou qu'occasionnera, dans des schèmes futurs, toute la question du droit de retrait pour les membres?

M. Dolbec (Gilles): J'aimerais, si vous permettez, Mme la Présidente, demander à Mme Saulnier, qui vit la MRC et qui vit tous les problèmes de droit de retrait, parce que c'est elle qui a à composer avec tout ça à la MRC, de voir le côté légal, puis ainsi de suite. J'aimerais ça qu'elle vous explique la problématique qu'on vit présentement, bien, présentement... qu'on vivrait avec ça aussi également, là.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme Saulnier.

Mme Saulnier (Joane): Madame. Alors, en deux temps, l'avant-projet de loi prévoit qu'il existe un droit de retrait pour se retirer de la société d'économie mixte. Alors, nous, à la MRC du Haut-Richelieu, nous avons piloté ce dossier-là via l'acquisition de compétences en vertu de 178.0.1. Et, effectivement, pour cette compétence-là, il existe, pour les municipalités de la MRC, un droit de retrait. Alors, l'avant-projet de loi nous obligerait à un deuxième droit de retrait, c'est-à-dire, d'une part, pour la SEM et, d'autre part, pour l'acquisition de compétences. L'aberration: imaginez-vous la MRC du Haut-Richelieu exercer sa compétence au niveau du service municipal d'élimination des déchets en vertu de deux modes, une SEM, puis l'autre, parce qu'il y en a certains qui se sont retirés. C'est un aspect du dossier pour lequel ça a été difficile à faire passer, là, cette proposition de droit de retrait.

L'autre chose, je vais élaborer un petit peu sur le droit de retrait en général pour l'acquisition de compétences des MRC. Il faut le vivre au sein d'une MRC, ça, dans le sens où, administrativement parlant, en tout temps, une municipalité peut se retirer d'un service municipal. Alors, qu'est-ce qu'on fait au niveau technique et pratico-pratique? On inscrit à quelle date la municipalité s'est retirée. Alors, deux mois plus tard, on change de bord et on revient. Tant mieux pour la MRC, parce qu'on accroît notre volume, on accroît notre force de négociation, notre pouvoir, etc. Mais vous imaginez-vous que, pendant cette période de deux mois là, on a investi, mettez, peut-être 200 000 $ pour l'implantation d'un centre multifonctionnel.

Alors, nous avons établi, au sein de la MRC, des règles administratives qui régissent les droits de retrait et les droits de retour. Et ces municipalités-là qui veulent réintégrer sont assujetties aux droits de retour et aux pénalités aussi, parce qu'il ne faut pas se leurrer, le conseil de la MRC doit quasi prévoir toutes les éventualités possibles sur 20 ans pour éviter la déstabilisation, si vous voulez, de l'exercice de cette compétence-là au niveau du service municipal.

Alors, c'est juste deux petits exemples qui vous montrent à quel point, dans le temps, c'est difficile à gérer. Et je vous fais grâce de quand on arrive à l'élaboration des prévisions budgétaires. Au moment où on les élabore, on a des quotes-parts qui sont établies. Entre-temps, deux semaines passent et, avant l'adoption au mois de novembre, on a un retrait; ça chambarde tout le processus de répartition des quotes-parts et on se retrouve, peut-être au mois de février, avec deux autres qui sont parties. Alors, il n'y a pas de suivi administratif, financier et toute la gérance des dépenses, c'est catastrophique, je dois vous le dire, en tant que...

Et je vais me permettre, parce que j'en ai l'opportunité – merci, M. Dolbec – de peut-être souligner qu'il faut faire le pas pour définir des champs exclusifs. Je ne veux pas dire par là enlever des compétences aux municipalités. Bien au contraire, il faut que les municipalités, entre autres celles du Haut-Richelieu, comprennent qu'il y a des domaines où il faut y aller de façon régionale. Et ce domaine-là, comme les déchets, a fait la preuve sur notre territoire qu'il faut gérer ça de façon...

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous voulez conclure. C'est parce qu'il y a d'autres questions.

Mme Delisle: Moi, je...

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Mme la Présidente – j'apprécie énormément votre point de vue, Mme la secrétaire-trésorière – j'aurais aimé entendre de la part des élus... Parce que c'est quand même une problématique, là, avec laquelle vous devez vivre, dont on entend souvent parler. Je sais qu'on n'est pas ici pour faire le débat sur le droit de retrait qui existe évidemment à l'intérieur de la gestion des MRC, mais qui vous cause problème. Est-ce que vous auriez souhaité – j'entendrais peut-être un oui ou un non d'un des trois maires ou des trois – régler toute cette question du droit de retrait avant qu'on s'embarque, justement, dans une loi-cadre sur...

(12 h 50)

M. Dolbec (Gilles): Définitivement.

Mme Delisle: ...la composition des SEM? C'est un oui ou c'est un non?

M. Dolbec (Gilles): Oui, oui.

Une voix: Oui, oui.

Mme Delisle: C'est un oui?

M. Dolbec (Gilles): Définitivement oui.

Mme Delisle: Bon, bien, parfait. J'aurais aimé aussi parler de la prolongation. Comment vous voyez, à l'intérieur du conseil d'administration de la SEM, la prolongation du mandat d'un élu? Parce qu'on parle d'une composition majoritaire d'élus pour le conseil d'administration. Vous voyez ça comment, M. Dolbec? L'élu qui quitte par choix ou l'élu qui quitte parce qu'il n'a pas le choix, parce qu'on a choisi quelqu'un d'autre à sa place, le voyez-vous prolonger son mandat d'un an, six mois? Parce que vous vivez sur le terrain; vous n'avez peut-être pas vécu plus que six mois, actuellement, là, sept mois, sauf qu'en anticipant ce qui pourrait vous arriver dans votre gestion quotidienne...

M. Dolbec (Gilles): Présentement...

Mme Delisle: ...qu'est-ce que vous pourriez recommander aux commissaires autour de la table?

M. Dolbec (Gilles): Moi, je pourrais recommander aux commissaires de prendre en considération le fait que, si le secteur public veut garder sa majorité au sein du conseil d'administration, il est évident que l'élu qui doit quitter ses fonctions, peu importe la raison, devrait, en principe au moins, être approché pour demeurer au moins six mois, le temps que le nouvel élu qui serait élu sur le conseil d'administration prenne la relève, pour comprendre le dossier à fond. Parce qu'il est évident aussi que, dans ce conseil d'administration là, il y a des décisions importantes à prendre, et on ne peut pas se permettre de dire: Bien, écoute, il y a trois privés, il y a trois publics, parce que, le quatrième, il ne comprend pas. Alors, le quatrième ne comprenant pas, est-ce que... On pourrait toujours avoir un quatrième qui va dire: Bien, si les trois autres disent oui, moi, je dis oui, là. Mais si on a un quatrième qui dit: Écoutez, moi, je vais attendre de comprendre avant de prendre des décisions, ça pourrait paralyser jusqu'à un certain point le processus de bonne marche de l'entreprise comme telle. Alors, c'est pour ça qu'on pourrait peut-être extensionner ou aussi, si on ne veut pas extensionner... Parce qu'on parle toujours de l'élu municipal. Nous, on avait peut-être aussi soit l'élu ou son représentant.

Maintenant, le gouvernement nous demandait, à l'époque, que ce soit des élus qui siègent au conseil d'administration. À partir du moment où c'est des élus, puis où c'est la MRC qui a fait le «move» pour une SEM, bien, c'est des maires, ça. Ça va de soi, là. Il n'y a pas de représentants, non plus. Alors, c'est évident qu'il pourrait peut-être y avoir un représentant du monde municipal sans que ce soit un élu aussi, et ça, je ne suis pas sûr que le ministère était chaud à ça, là. Mais c'est pour une continuité, dans le fond, administrative.

Mme Delisle: M. le maire Dolbec, j'aimerais vous entendre parler de l'opportunité ou non de permettre à des sociétés mandataires du gouvernement de participer ou d'être partenaires de la SEM. Il y a des intervenants qui vont vous suivre dans les jours qui viennent et qui ne sont pas d'accord avec le fait que les sociétés mandataires du gouvernement puissent être des partenaires. Évidemment, ils prétendent que ça peut être de la concurrence déloyale. Est-ce que, pour vous, tout le monde est sur le même pied? Est-ce que vous voyez ça d'un bon oeil ou d'un mauvais oeil? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Dolbec (Gilles): Bien, personnellement, là, je vais parler pour moi personnellement parce que, avec l'expérience que j'ai aussi... Je vais peut-être parler de l'assainissement des eaux, parce qu'on est en train de finaliser, dans notre région, une usine d'épuration des eaux et on a eu beaucoup d'approches pour une SEM justement. Et c'est évident que, si un mandataire du gouvernement arrive à l'intérieur de ça, nous, on veut qu'il soit traité de la même façon dont on traite le partenaire privé. Je verrais mal... En tout cas, c'est peut-être favoriser le mandataire du gouvernement de faire autrement, là. Le mandataire du gouvernement, peu importe l'expertise qu'il a, parce qu'il n'y a pas juste lui qui a l'expertise; il y en a d'autres expertises, et on demande à d'autres expertises du milieu...

Et je parle d'assainissement des eaux, là, qu'on se comprenne bien. Ça prend des ingénieurs, ça prend des gens qui ont déjà travaillé dans ce domaine-là. C'est sûr que les gens du gouvernement, les mandataires du gouvernement peuvent avoir beaucoup d'expertise, mais il y en a d'autres qui ont la même expertise. Alors, pourquoi les autres qui ont la même expertise vont être obligés, eux autres, en entrant dans une SEM, d'investir des sommes et les mandataires du gouvernement, d'après ce qu'on peut comprendre de leurs interventions, pourraient tout simplement dire: Nous autres, on a l'expertise, on vous conseille, puis on ne met pas d'argent? C'est juste ce point-là; je veux que ce soit...

Mme Delisle: Sur le même pied.

M. Dolbec (Gilles): En tout cas, personnellement, je veux que ce soit... C'est une question d'équité.

Mme Delisle: Parfait. Concernant le choix du partenaire – ce serait ma dernière question, Mme la Présidente – vous avez fréquenté un seul partenaire ou vous en avez fréquenté plusieurs? Bon. Vous en avez choisi un, là, mais est-ce que vous auriez souhaité voir dans l'avant-projet de loi des critères pour permettre justement, là... Il y a des critères de qualité ou de compétence. Je ne dis pas que votre partenaire n'en est pas un, au contraire, là, mais est-ce que ça vous agacerait de voir que les municipalités seraient tenues de faire un petit peu le tour de ce qu'il y a dans le milieu ou bien si vous préférez, comme élus – surtout si vous avez un projet et que ces gens-là souhaitent s'arrimer à ce projet-là – choisir votre partenaire? J'aimerais vous entendre parler du choix du partenaire.

M. Dolbec (Gilles): Bien, écoutez, choisir le partenaire... C'est évident que la municipalité va se former une SEM en considérant le fait que le partenaire veut se joindre à une SEM. Parce qu'il y a beaucoup de partenaires, dans le moment, qui sont très intéressés à s'en venir dans une SEM en tant que gestionnaires. Ce n'est pas une SEM, ça, et on ne comprend pas les SEM. C'est ce qu'on disait tantôt, qu'on ne comprend pas les SEM. C'est évident qu'on ne les comprend pas au Québec. Et le partenaire qui, lui, dit: Moi, j'ai l'expertise nécessaire; j'aimerais ça travailler pour vous autres en tant que SEM, là, je lui dis: Combien tu es prêt à mettre d'argent? Bien, il dit: Écoutez, on n'en met pas, d'argent, nous autres, là; on va vous donner notre expertise, on va vous permettre de ne plus aller en soumissions – ce qui est déjà bien, entre autres, en passant, là – on peut aller en soumissions ou on peut négocier, ce qu'on n'est pas capable de faire dans le monde municipal. C'est déjà un acquis.

Sauf que c'est sûr qu'on préfère choisir notre partenaire en fonction des qualités qu'il a et des compétences qu'il a à l'intérieur d'un domaine donné. De toute façon, si on ne choisit pas notre partenaire, on s'en va en soumissions – on peut toujours le faire – et, après, on va le choisir pareil, d'une façon ou d'une autre. Parce que ce n'est pas évident que tout le monde va dire: Bien, écoute, moi, une SEM, ça m'intéresse. Moi, je ne veux pas investir. Moi, j'ai les qualifications pour faire ça. Alors, au moment où on se parle, là, c'est plus délicat qu'on pense.

Mme Delisle: Exactement.

M. Dolbec (Gilles): Au moment où on se parle, c'est plus délicat qu'on pense, parce qu'il faudrait que les gens la comprennent, la SEM. Au moment où les gens vont comprendre la SEM, puis que tu vas dire... Parce j'ai déjà posé la question à quelqu'un, moi. J'ai dit: Es-tu prêt à investir 2 000 000 $? Je ne vous dirai pas qu'est-ce qu'il m'a dit, mais, tu sais, je veux dire, c'est ça, une SEM. Es-tu prêt à investir dans notre compagnie, là?

Mme Delisle: Si je comprends bien, M. le maire, là – juste un petit commentaire avant de terminer – c'est la municipalité qui doit être l'initiatrice...

M. Dolbec (Gilles): Oui. Bien oui.

Mme Delisle: ...de la SEM, dans votre esprit à vous.

M. Dolbec (Gilles): Dans...

Mme Delisle: Non, mais ce que je veux dire par là, c'est que ce n'est pas la porte grande ouverte pour l'entreprise privée de venir s'asseoir dans toutes les municipalités, puis de dire: Bon, bien, maintenant, moi, j'ai de l'expertise à vous vendre; je veux être un partenaire. Dans votre esprit à vous, l'initiative vient de la municipalité.

M. Dolbec (Gilles): Oui, puis selon nos besoins, entre autres.

Mme Delisle: Parfait.

M. Dolbec (Gilles): Selon nos besoins, parce qu'on n'a pas besoin d'une SEM dans tous les domaines.

Mme Delisle: On a beaucoup d'explications à donner, là.

M. Dolbec (Gilles): Ce n'est pas facile, ce n'est pas sorcier non plus, mais tu n'as pas besoin de ça dans tous les domaines municipaux. Je pourrais peut-être...

Mme Delisle: Bien, ça va.

M. Dolbec (Gilles): Dans le domaine municipal, je vais vous donner un exemple. Pour une municipalité quelconque, son réseau d'égout et d'aqueduc, c'est sûr qu'on pourrait aller vers une entreprise privée pour le donner, mais ça serait long à apprendre tout le processus, parce que nos employés le connaissent d'un bout à l'autre, le réseau. Et, s'il y avait des fuites d'eau, s'il y avait des blocages quelconques, avec l'entreprise privée, dans un premier temps, dans les premières années, on donnerait un très mauvais service à notre population par le manque de connaissance du réseau. Sauf que ça s'apprend, là, mais on est quand même aux premiers balbutiements. Comme vous le disiez tantôt, il y a bien des choses qu'on va apprendre, mais c'est évident que la municipalité doit choisir avec qui elle devrait faire affaire.

La Présidente (Mme Bélanger): Il reste trois minutes. M. le député de LaFontaine.

Mme Delisle: Je les cède au député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Vous avez mentionné, puis Mme Danyluk aussi que l'entreprise privée qui était dans une SEM, c'était pour faire de l'argent. Je présume que la municipalité veut en faire aussi. Et là je m'interroge, moi, sur la notion de service public, parce que, là, on parle de services donnés au public; on ne parle pas de production ou de vendre des produits pour faire de l'activité industrielle. Alors, est-ce qu'il est, d'après moi, sain que nos administrations municipales ou gouvernementales puissent aborder des sujets de service au public avec la notion de faire de l'argent? Est-ce qu'on ne devrait pas plutôt tendre à les aborder, au niveau d'une administration municipale ou provinciale – on parlait du transport tout à l'heure – avec plutôt la notion d'économiser et de donner le meilleur service possible, le plus accessible possible, au meilleur coût? J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Dolbec (Gilles): Oui. Je peux vous répondre...

M. Gobé: Et qu'est-ce qui vous empêche de le faire?

M. Dolbec (Gilles): C'est assez facile de vous répondre.

M. Gobé: Qu'est-ce qui vous empêche de le faire?

(13 heures)

M. Dolbec (Gilles): Les contraintes gouvernementales. Permettez aux municipalités, demain matin, de négocier des coûts avec des entrepreneurs, on va aller négocier des coûts de transport, on va aller négocier des coûts de déchets, on va aller négocier des coûts. On va aller en soumissions publiques, mais on va pouvoir négocier par après. Alors, c'est toutes les contraintes que nous avons dans l'entreprise publique. C'est que nous sommes obligés d'aller au plus bas soumissionnaire qui, bien des fois, est le seul à soumissionner. Alors, à partir de là, vous ne faites pas d'économies. Bien, vous pourriez faire des économies, mais vous ne pouvez pas aller plus loin que ça. Et c'est sûr qu'on est toujours liés aux lois gouvernementales également. On parle du Code du travail; on est liés à ça aussi. Même une entreprise privée est liée à ça. On ne fait pas de miracles dans une SEM.

M. Gobé: Donc, si je comprends bien, on n'est pas obligé de passer par une SEM pour faire une meilleure administration et défendre les meilleurs avantages des citoyens. On pourrait simplement faire en sorte d'alléger les processus, actuellement, dans les appels d'offres ou dans l'administration gouvernementale. Est-ce que ça touche aussi, ça, les relations avec les employés, les conventions collectives, le Code du travail, tout ce à quoi les administrations sont assujetties actuellement?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Lafrance, vous voulez répondre à ça?

M. Lafrance (Serge): Complément de réponse à M. Dolbec tantôt, parce qu'on parlait de pourquoi on va vers une société privée, puis pourquoi il va y avoir des profits. Il faut comprendre que les dépenses récurrentes, dans le domaine municipal, qui n'amènent jamais de profit non plus sont une lourdeur. Dans un deuxième temps, quand il va y avoir profit, il va y avoir participation des deux milieux, des deux mondes, et il faut qu'on ait aussi, dans l'outil qu'on met de l'avant, un allégement de l'endettement du monde municipal. C'est un des attraits dans l'outil qui deviennent aussi essentiels à conserver dans l'orientation. Ce n'est pas juste l'allégement des fardeaux de l'administration, mais la participation au niveau d'investissement par rapport aux parties privées est aussi très intéressante.

M. Gobé: Juste avant...

La Présidente (Mme Bélanger): C'est fini, M. le député.

M. Gobé: Bien, j'avais une question que j'avais posée à M. Lafrance; j'aurais aimé ça qu'il me réponde.

La Présidente (Mme Bélanger): Une petite question.

M. Gobé: Non, j'avais posé la question. Il n'a malheureusement pas eu le temps de me répondre.

M. Lafrance (Serge): Écoutez, je peux quand même vous répondre. C'est que c'est évident que, même si on s'en va dans une SEM, on ne changera pas les lois et les codes de travail. On va toujours être soumis aux lois, peu importent les lois qui existeront. Sauf qu'il faut quand même se dire que, dans une société d'économie mixte, si on s'en va avec une entreprise qui a l'expertise dans le domaine où on s'en va, c'est évident qu'on va sauver des coûts également, parce qu'il faut prendre en considération l'expertise des gens, il faut prendre en considération leurs connaissances et tout ce qu'ils peuvent nous apporter comme tel, tandis que, dans le domaine municipal...

Je ne dis pas que le domaine municipal n'est pas compétent, loin de là, sauf qu'on a des restrictions, nous, à rencontrer. On a beaucoup de restrictions. Dans le domaine privé, on a beaucoup moins de restrictions et on peut étendre aussi nos champs de compétence – bien, je parle du privé avec le public – ailleurs, c'est-à-dire que, si, nous, dans le Haut-Richelieu, exemple, on est dans le domaine, présentement, de la cueillette des déchets... Jusqu'à présent, les municipalités ne s'occupaient pas de la commercialisation des déchets. Or, c'est qui qui fait l'argent avec? C'est le domaine privé, présentement.

Or, pourquoi, nous, on ne pourrait pas faire de l'argent avec eux autres? Je ne parle pas de faire de l'argent d'une façon ignoble, parce que, si c'est ça, ils vont rester avec le domaine privé, sauf qu'on a le droit, nous autres aussi, de compétitionner avec le domaine privé en tant qu'entité municipale privée, qui est une SEM, pour faire bénéficier nos citoyens de cette manne-là que le privé paie déjà à d'autres entreprises privées. C'est ça, une SEM. C'est d'aller voir les marchés sans pénaliser notre population pour autant. Là, on ne pénalisera jamais notre population; on va toujours faire bénéficier notre population des connaissances et de ce qu'on peut lui apporter, et des meilleurs profits possible.

M. Gobé: En terminant, pour ce faire, il faudrait donc que vos employés de la SEM ou que la SEM ne soient pas assujettis aux mêmes contraintes, en termes de conditions de travail, de convention collective, que la municipalité; sinon, le coût va être sensiblement le même, hein?

M. Dolbec (Gilles): Bien, écoutez, en ...

M. Gobé: Si vous voulez compétitionner le privé, le privé, lui, n'est pas forcément assujetti.

M. Dolbec (Gilles): Oui, mais, en principe, le privé administre mieux que le public, le personnel. En tout cas, c'est plus strict, c'est moins ouvert, peut-être, là, tu sais. C'est évident que tu vas toujours avoir des contraintes, mais, dans le privé, ça coûte toujours moins cher parce que tu administres d'une façon plus rationnelle aussi.

M. Gobé: Merci. Mais, malheureusement, je dois dire que ce n'est pas assez long. Vous avez des gens d'expérience; ça aurait été intéressant qu'on continue.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de LaFontaine. M. le député...

M. Trudel: Mme la Présidente, juste une petite remarque, si vous me permettez. Effectivement, donc, on est ici avec la MRC qui a la première et quasiment la seule expérience au niveau des SEM au Québec en termes d'éclairage. Je veux tout de suite préciser que je ne rejette pas que nous puissions regarder avec l'opposition – qu'on puisse non pas allonger parce qu'on est dans un calendrier particulier aujourd'hui – la possibilité que vous puissiez revenir, si telle était votre volonté et que nous puissions, s'il y avait de l'intérêt... J'ai beaucoup d'intérêt, pour ma part et de notre côté, à l'expérience que vous avez vécue. Ne serait-ce que pour aujourd'hui, Mme la Présidente, je sais, par exemple, que mon collègue de Limoilou en a une toute petite, comme on dit communément, à la fin, et je vous dis: Je suis prêt à examiner avec l'opposition le fait qu'on puisse se retrouver dans une autre période de temps pour examiner davantage votre...

La Présidente (Mme Bélanger): Expertise.

M. Trudel: ...expérience à l'égard des SEM, toujours pour nous enrichir, bien sûr.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Limoilou, une toute petite dernière.

M. Rivard: Merci, Mme la Présidente. Vraiment une petite dernière. Les élus municipaux qui sont sur le conseil d'administration de la SEM sont-ils rémunérés?

M. Dolbec (Gilles): Dans le moment, on est rémunérés, nous autres, avec la MRC du Haut-Richelieu parce qu'on représente la MRC du Haut-Richelieu à la SEM. Mais on est rémunérés, présentement.

M. Rivard: Mais vous êtes rémunérés par la MRC et non pas par la SEM.

M. Dolbec (Gilles): Non, non. On est rémunérés par la MRC, mais on le facture à la SEM, présentement.

M. Rivard: Sur une base de jetons de présence ou...

M. Dolbec (Gilles): Sur une base de jetons de présence.

M. Rivard: Il y a combien de réunions environ par année? Puis quel est le montant du jeton de présence?

M. Dolbec (Gilles): Combien de réunions par année? Je peux vous dire que, présentement, on a eu passablement de réunions parce qu'on débute une SEM, mais, en principe, il ne devrait pas y avoir plus que quatre ou six réunions par année. Normalement, là, un coup que la SEM... Bien, je pense.

M. Rivard: O.K. Et le montant du jeton de présence, c'est en fonction des heures passées ou si c'est un montant fixe?

M. Dolbec (Gilles): Bien, nous, c'est un montant fixe; c'est de 150 $.

M. Rivard: Par réunion?

M. Dolbec (Gilles): Et c'est des réunions qui, habituellement, durent de 10 heures à 17 heures. Tu sais, des bonnes réunions.

M. Rivard: Merci beaucoup.

M. Dolbec (Gilles): Ça me fait plaisir.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Limoilou. Alors...

M. Trudel: Une minute pour remercier.

La Présidente (Mme Bélanger): Vous voulez remercier, M. le ministre?

M. Trudel: Oui.

La Présidente (Mme Bélanger): Allez-y.

M. Trudel: Alors, MM. les maires et Mme la secrétaire-trésorière, je veux vous remercier des informations que vous nous avez communiquées ce matin à la lumière de votre expérience. Je le répète, il y a aussi tous les textes évidemment de votre mémoire. Ce n'est pas parce qu'on ne se questionne pas ici publiquement qu'on n'a pas pris note de ça. Je vais regarder avec la représentante de l'opposition, la porte-parole de l'opposition, la possibilité qu'on puisse se revoir si c'est possible, mais je note évidemment des interventions intéressantes.

Je note, en particulier, deux éléments, M. le maire. C'est que ça amène de l'eau au moulin sur la possibilité que le gouvernement soit moins paternel à l'égard des emprunts municipaux, parce que, à d'autres tables plus larges au Québec, on n'a pas entendu tout à fait ce même langage. Et Mme la députée de Jean-Talon se souviendra également que, dans une vie antérieure, le ministre des Affaires municipales, comme député, avait souhaité, lui aussi, donner plus de marge de manoeuvre aux conseils municipaux en matière de sélection de contrats pour les municipalités dans leur milieu. Là-dessus, vous savez très bien que nous avons déjà soumis ces deux questions à nos unions municipales, et je souhaiterais vivement que l'on puisse reprendre la discussion à la lumière de ce que vous avez dit à l'égard de ces deux questions. Merci de votre apport aujourd'hui.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors...

M. Dolbec (Gilles): Mme la Présidente, si vous permettez, je veux remercier les gens du comité de nous avoir écoutés, et nous sommes disponibles pour vous rencontrer à nouveau si vous avez besoin de plus d'éclaircissements dans ce qui peut vous aider, avec la petite connaissance que nous avons du dossier. Alors, merci beaucoup encore une fois.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, on vous remercie, M. Dolbec, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, et nous vous souhaitons un bon retour.

M. Dolbec (Gilles): Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): La commission suspend ses travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 13 h 8)

(Reprise à 13 h 17)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à tout le monde de prendre place. S'il vous plaît! Mme la députée de Jean-Talon...

La commission reprend ses travaux. Le mandat de la commission, c'est toujours une consultation générale et des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal. Alors, je demanderais à l'Association des ingénieurs municipaux du Québec, représentée par M. Michel Bilodeau...

Une voix: Bordeleau.

La Présidente (Mme Bélanger): ...Bordeleau, je m'excuse...

M. Bordeleau (Michel): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): ...et Mme Odile Goulet... Comme les autres invités, vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire et, après, ce sera suivi par un questionnement de 40 minutes. Alors, M. Bordeleau.


Association des ingénieurs municipaux du Québec (AIMQ)

M. Bordeleau (Michel): Je vous remercie. M. le ministre, Mme la députée de Jean-Talon, membres de la commission, Mme la Présidente, on a pris connaissance de l'avant-projet de loi, et l'AIMQ tient à remercier les membres de la commission pour la tribune qui lui est offerte présentement pour débattre également de sa vision concernant le projet de sociétés d'économie mixte.

Pour vous situer, l'Association des ingénieurs municipaux du Québec, l'AIMQ, a été fondée en 1963. Elle regroupe quelque 215 membres répartis dans 121 organisations municipales allant des grandes villes comme Montréal à des communautés urbaines, à des MRC et également à des villes de régions éloignées comme les villes de Rouyn-Noranda, de Gaspé. On couvre, bref, pratiquement la grandeur du Québec. Nos membres occupent des postes variés allant de la direction générale jusqu'à l'ingénieur de projet. Pour être membre en règle de l'AIMQ, il faut d'abord être ingénieur et oeuvrer au sein d'une ville ou d'une MRC.

Notre mission consiste à promouvoir le statut de professionnel de la gestion. Quant à la mission de l'Ordre des ingénieurs du Québec, elle consiste à protéger le public. Donc, on voit très bien, au niveau des sociétés d'économie mixte, que nos membres ont un droit de regard qu'on dirait important face à ce nouvel avant-projet de loi. Par la nature même de leurs fonctions, les ingénieurs municipaux sont des gestionnaires de premier plan, actuellement, dans le domaine des contrats octroyés par les municipalités. Dans une multitude de domaines techniques, les ingénieurs municipaux entretiennent plusieurs contacts avec les fournisseurs de biens et services, y compris les ingénieurs-conseils. En tant que gestionnaires de services importants pour les villes, en termes de coûts, tels que les travaux publics, les services techniques – et, tantôt, M. le ministre en a fait l'élaboration, l'eau potable, l'eau usée, l'urbanisme, etc. – nous cernons également très bien les problématiques financières auxquelles nos organisations municipales sont confrontées eu égard à la construction et à l'entretien de ces mêmes infrastructures.

(13 h 20)

L'AIMQ reconnaît que le fragile équilibre des pouvoirs entre le niveau provincial et le municipal est en train de se transformer de façon importante. Nous considérons qu'effectivement les divers niveaux de gouvernement se doivent de créer des partenariats avec l'entreprise privée. La réhabilitation d'infrastructures et la gestion des réseaux de services seront sans doute incluses dans les champs de compétence des sociétés d'économie mixte, ce qui aura pour effet de modifier substantiellement la façon de gérer de nos membres.

À titre de commentaires généraux, l'AIMQ appuie un projet de loi cadre comparativement à plusieurs projets de loi d'intérêt privé qui auraient créé de la répétition et de l'engorgement au ministère des Affaires municipales dans l'approbation de ces nouveaux partenariats. Nous croyons également que le gestionnaire qu'est l'ingénieur municipal peut et doit être partie prenante de ces partenariats. Il doit être l'élément d'appui sur lequel peut compter l'élu pour le guider dans la conduite de ces nouvelles ententes.

Tout le monde reconnaît la pertinence d'une optimalisation des ressources, mais il faut dire que les élus ont le devoir de s'assurer que leurs choix sont éclairés. Le faire-faire ou l'association avec le secteur privé ne les exempte pas de veiller à la planification des travaux et au contrôle de la qualité des services achetés. Et c'est ici que l'ingénieur municipal devient un allié majeur du gestionnaire éclairé, car, en fin du compte, nous, les ingénieurs municipaux, sommes au service exclusif de la municipalité qui nous emploie. On a un sentiment profond d'appartenance, et la notion de profit brut, en termes d'argent, est importante au niveau des comptes de taxes, mais comme tels ce n'est pas uniquement sur cet aspect-là que nous travaillons. Nous avons intérêt à obtenir des ouvrages durables dans le temps et des choix éclairés en optimisant une saine gestion des biens publics. De plus, comme la plupart de nos membres, soit 80 % d'entre nous, proviennent du secteur privé, nous sommes à même de mettre en application les styles de gestion similaires à l'entreprise privée. À cet effet, nous croyons que la loi doit permettre que des fonctionnaires puissent agir à titre de représentants du fondateur municipal de la SEM au même titre qu'un membre du conseil.

Tantôt, on entendait M. le maire, concernant la SEM du Haut-Richelieu, mentionner qu'un élu qui quitte la SEM devrait prolonger dans le temps peut-être un mandat subséquent. Nous, on croit que, si on avait un conseil d'administration pour une SEM à vocation technique, comme nos statistiques démontrent que nous sommes à l'emploi de nos villes depuis 11 ans – c'est des statistiques qui ont été effectuées l'année dernière – on pourrait assumer cette continuité-là. C'est-à-dire que l'avant-projet de loi ne semble pas prévoir des dispositions à l'effet que des personnes autres que des élus municipaux peuvent siéger sur les conseils d'administration. On verrait d'un très bon oeil une société d'économie mixte formée de trois membres de la firme privée, trois élus municipaux et un ingénieur à vocation technique pour représenter les intérêts de la municipalité. L'article 15 de ce projet de loi ne semble pas permettre cela présentement.

Dans le cas d'une SEM à caractère technique, il faut rappeler que la Loi sur les ingénieurs prévoit que l'exercice par un ingénieur de l'un ou l'autre de plusieurs actes énumérés à l'article 3 de ladite loi est du ressort exclusif de ce professionnel. Pour toutes ces raisons, il nous apparaît essentiel que l'ingénieur municipal puisse agir comme membre du conseil d'administration d'une SEM à vocation technique et, ce faisant, il devrait jouir des mêmes protections que celles des élus. On pourrait même élargir cette réflexion au niveau des bibliothèques. On mentionnait l'exemple, tantôt, advenant la création d'une SEM pour des bibliothèques; ça pourrait être le représentant de la ville, qui connaît bien la problématique des bibliothèques, qui pourrait siéger sur le conseil d'administration.

Concernant les commentaires plus spécifiques sur ce projet, nous croyons que la constitution de sociétés d'économie mixte en vertu de la partie IA de la Loi sur les compagnies, telle que stipulée à l'article 1, est le véhicule juridique le mieux adapté pour cette forme de partenariat. Nous croyons que le choix du bon partenaire devient une opération cruciale. Seuls les articles 10, 13 et 33 traitent présentement de ce choix. Le choix du partenaire ne peut être fait au hasard, mais bien sur des critères solides et objectifs de compétence dans les domaines spécifiques où la municipalité entend orienter sa délégation. Ces critères doivent mettre les élus à l'abri de l'arbitraire d'un choix à base d'influence politique. Les citoyens, surtout s'ils sont taxés par les SEM, comme le prévoit l'avant-projet de loi, veulent s'assurer de l'équité et de la transparence de ce choix.

Les villes ont donc avantage à mettre en concurrence les divers partenaires potentiels et ainsi à profiter des meilleures offres de partenariat. Ainsi, si le jeu est clair, si les règles sont équitables, les partenaires intéressants et valables seront attirés et présenteront une offre dans le meilleur intérêt des contribuables. Nous proposons donc que la sélection du partenaire se fasse obligatoirement à travers un processus simple qui puisse mettre en valeur les qualités et les compétences.

Nous avons élaboré trois différentes étapes de ce processus. D'abord, une première étape, qui consiste dans les critères. La ville établit les critères de qualité et de compétence requises pour qu'une entreprise devienne partenaire. Au niveau de la préqualification, qui constituerait la seconde étape, les entreprises doivent démontrer au travers d'une offre de qualification leur potentiel. Concernant la dernière étape, l'offre de service, les quelques meilleures entreprises qui répondent aux qualifications requises feront une offre formelle de partenariat à la ville, et cette dernière choisira la plus avantageuse. Cette procédure courte, en trois étapes, permet donc d'éviter l'arbitraire dans le choix et met les élus à l'abri d'influences.

Nous croyons également que les entreprises privées exigeront des conditions plus favorables à leur égard avant de participer aux SEM, et ça, c'est particulièrement dans le cas où on a des membres en régions éloignées. De plus, on pense, comme M. le ministre l'a mentionné tantôt, qu'on devrait créer des formules gagnantes, gagnantes. Si on crée uniquement des formules où la partie municipale est très bien structurée, puis qu'on demande des concessions à l'entreprise privée, on s'embarquerait dans des espèces de négociations qui mettraient peut-être en péril les étapes de base qu'on veut respecter. Donc, c'est dans cet aspect-là qu'on tenait à mentionner cet élément.

Nous croyons également que les montants de caution prévus à l'article 49 sont nettement insuffisants. Loin de nous de mettre un chiffre sur ces cautionnements-là, mais on parle de cautionnements de 50 000 $. Nous, quand on effectue des travaux d'infrastructures, on a des cautionnements qui représentent 50 % main-d'oeuvre, 50 % matériaux; donc, pour des contrats qu'on donne de 1 000 000 $, on a, règle générale, des cautionnements qui nous garantissent cet aspect-là. Dans le projet de loi, on parlait de 50 000 $; il faut voir dans quel sens les SEM vont être créées. On croit qu'il faudrait trouver peut-être une façon de mieux définir les cautionnements plutôt que l'arbitraire d'un simple chiffre.

Nous croyons également que les contrôles qu'exercera le MAM alourdiront la gestion des SEM qui avaient justement pour but de désengorger la gestion municipale. Il y a donc contradiction entre l'application de la loi et son but. Je pense qu'on en a quand même assez bien débattu, lors des présentations précédentes, pour éviter d'élaborer plus longuement sur ce sujet.

Finalement, en guise de conclusion, l'Association des ingénieurs municipaux du Québec est favorable, de façon générale, à toute mesure qui permettrait d'offrir des services à meilleur coût aux citoyens, en plus d'assurer l'intégrité et la transparence dans l'utilisation des fonds publics. Le partenariat avec l'entreprise privée apparaît prometteur si cette union permet de réduire les coûts des services et permet de faciliter les procédures de gestion de ces mêmes services. La société d'économie mixte constitue une avenue intéressante de partenariat public-privé, mais ne doit pas être perçue comme la solution unique. La privatisation de services et l'octroi de contrats clé en main à long terme ne sont que quelques autres exemples à envisager.

Peu importe le partenariat envisagé, il nous apparaît impératif que toute loi ou tout règlement puisse permettre aux ingénieurs municipaux de jouer un rôle clé dans la gestion des services publics. Notre formation, notre engagement professionnel vis-à-vis de la Loi sur les ingénieurs et le respect de notre code de déontologie font de nous des partenaires de premier ordre. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Bordeleau. M. le ministre.

M. Trudel: Merci, Mme la Présidente. M. Bordeleau et Mme Goulet, bienvenue à cette commission parlementaire. D'entrée de jeu, je vous remercie d'avoir pris soin de nous soumettre vos propositions, vos observations, vos commentaires à l'égard de cet avant-projet de loi.

Je vais commencer par vos presque derniers mots pour débuter mon intervention. Oui, M. le président, je note votre intérêt professionnel au premier titre avant votre intérêt particulier à l'égard du projet de loi que nous avons devant nous. Vous nous faites des suggestions, des propositions, des avertissements; vous nous donnez un certain nombre de balises qu'il faudrait respecter. Je le note, parce qu'on a souvent, dans ce milieu ou dans d'autres milieux, noté des comportements de certaines corporations professionnelles: vous placez les intérêts de la profession et ce que vous avez comme compétences au-dessus des intérêts qu'on pourrait identifier comme des intérêts corporatistes. Nous apprécions cette vision des choses.

(13 h 30)

Et vous placez l'intérêt public au premier titre de vos préoccupations, ce qui nous préoccupe aussi ici évidemment au premier titre puisque l'avant-projet de loi qui est sur la table maintenant, ça vise évidemment à livrer de façon autre les services, mais toujours avec le souci de la protection des intérêts du public, des usagers, des contribuables. Les citoyens sont contribuables lorsqu'on discute d'eux ici, dans ce projet de loi, et je note ce souci bien important pour vous.

Par ailleurs, la première suggestion que vous nous faites, c'est de dire: À l'égard de la composition du conseil d'administration de la SEM, élargissez donc le type de personnes qui pourraient représenter le milieu municipal et, nous, comme spécialistes des services au niveau de la municipalité, on souhaiterait en être. J'aimerais ça vous entendre un petit peu plus à ce sujet-là, puisque vous imaginez assez facilement que les élus municipaux... On en a entendu tantôt, là, des gens de Compo-Haut-Richelieu, de la MRC du Haut-Richelieu. Est-ce que vous n'êtes pas en train de nous dire que ça diminuerait, là, de façon notable l'imputabilité des élus municipaux s'ils n'étaient pas directement à la table, au conseil d'administration de la société d'économie mixte? Ou encore on pourrait dire: Comment vous allez réconcilier ces deux dimensions de l'imputabilité des élus municipaux, en vertu du mandat qu'ils ont reçu du public, lorsqu'ils siègent au conseil d'administration versus le fait que ce soit, par exemple, un ingénieur qui puisse représenter la partie municipale au conseil d'administration de la SEM?

M. Bordeleau (Michel): O.K.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bordeleau.

M. Bordeleau (Michel): Merci. Ce qu'il faut voir là-dedans, c'est que les sociétés d'économie mixte sont une nouvelle façon de faire les choses. Et, nous, nous préconisons que les ententes devront être de longue durée. Tantôt, je vous mentionnais qu'on avait des expériences de travail de 11 années en moyenne au niveau des villes, et on pense qu'on peut assurer la continuité.

Pour répondre à votre question, comme il s'agit d'une nouvelle façon de faire, il faut également peut-être élargir, aussi, la nouvelle notion d'imputabilité concernant les municipalités. Moi, j'oeuvre au sein d'une municipalité de 40 000 habitants et je dois vous dire que la relation élus-citoyens... C'est peut-être un petit peu moins le cas dans des villes de plus grande envergure comme Montréal, mais, au niveau des municipalités de moins grande importance, la relation entre élus et fonctionnaires est quand même beaucoup plus près. Nous formons présentement ce genre de partenariat là. Il s'agirait, quant à nous, de plus l'officialiser.

Je vous disais aussi que nos membres occupent déjà des postes clés, que ce soit des directeurs généraux, des directeurs généraux adjoints. On participe déjà de façon très tangible à la prise des décisions. On conseille nos élus et on voit dans la création des sociétés d'économie mixte peut-être une façon, un petit peu, d'officialiser cette chose-là. C'est bien évident que, au niveau de l'imputabilité, je verrais également notre rôle comme étant un rôle, quand on parle de SEM à vocation technique, d'aviseur technique pour nos élus.

Tantôt, vous avez mentionné différents éléments qui pourraient être faits au niveau de l'eau potable, de l'eau usée. Les firmes qui vont s'adjoindre à nos élus... Il ne faut pas oublier que nos élus sont des gens qui sont plus généralistes. Nous, on est pointu dans le domaine et on parle beaucoup de réseaux d'aqueduc, d'usines de filtration et d'épuration; on pense qu'on pourrait être une personne qui pourrait être un très bon conseiller sur cet élément-là. Donc, c'est un petit peu notre point de vue là-dedans.

M. Trudel: En tout cas, vous soulevez...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Trudel: Pardon? Oui. Très bien. Vous soulevez là une question qui est, quant à moi, extrêmement pertinente à l'égard de ce que nous allons adopter comme formulation définitive au moment où nous irons plus de l'avant avec le projet de loi cette fois-ci, tout en indiquant déjà ici qu'il me semble minimal cependant qu'on puisse laisser, je dirais, à la municipalité, au fondateur municipal le soin de décider si ce sera un élu ou un représentant d'une autre catégorie. Vous, ce que vous dites, c'est: Nous offrons notre expertise professionnelle...

M. Bordeleau (Michel): Exact.

M. Trudel: ...la continuité de notre expertise...

M. Bordeleau (Michel): C'est ça. Exact.

M. Trudel: ...au service du rendement de cette société d'économie mixte.

M. le président, M. Bordeleau, vous avez entendu ce matin les remarques que j'ai faites à l'égard d'un secteur bien sensible actuellement dans le domaine de l'élargissement, si vous permettez ce mot-là, quant à l'entrée du secteur privé dans le champ municipal. Vous avez vu le message de prudence, d'être «précieux» au niveau des mouvements qu'on aura à réaliser et que certaines municipalités prévoient peut-être réaliser au cours des prochaines semaines. Moi, je vais carrément vous demander votre opinion à l'égard de ce point de vue, là, de la prudence quant à certains secteurs vitaux pour les collectivités locales, mais je vais lier ça à votre remarque qui nous dit que, par ailleurs, vous nous trouvez bien pointus au niveau des contrôles ministériels, du moins dans la première période de création des sociétés d'économie mixte.

Je ne veux pas vous mettre en boîte, là, M. le président; on n'est pas ici pour ça. Je veux que vous nous disiez... Parce que c'est vrai que vous êtes des professionnels fortement impliqués dans la vie municipale, puis votre avis est extrêmement important. Mais, deuxièmement, là, si vous nous dites que vous partagez cette prudence-là – comme dirait l'autre, là: Wo! les moteurs – sur la vitesse de privatisation et surtout sur les règles qui doivent présider à l'entrée du privé dans le secteur des services municipaux, comment vous réconciliez ça avec votre indication du surcontrôle que vous y voyez, dans les SEM?

M. Bordeleau (Michel): Tout d'abord, je dois vous dire qu'on partage définitivement votre prudence dans ce dossier-là. Vous mentionnez également qu'on émettait le commentaire à l'effet qu'on ne voudrait pas avoir beaucoup de contrôles. Ce n'est pas nécessairement le cas. C'est que de créer une SEM, d'une part, c'est quelque chose et de l'exploiter, dans un deuxième temps, c'est un autre élément. Il nous apparaissait qu'on avait beaucoup de critères concernant l'exploitation. Mais je ramènerais peut-être votre question au choix du partenaire. Comme je vous dis, oui, ça nécessite une certaine prudence, mais en aucun cas, au niveau de l'avant-projet de loi, ne nous apparaissait un endroit où on définissait des critères de choix du partenaire. Pour nous, la prudence passe définitivement par la sélection du partenaire, dans un premier temps, et, dans un deuxième temps, lorsque...

Il faut s'entendre, là. On ne croit pas que la proposition qu'on fait fera en sorte d'alourdir le processus, parce qu'il ne faut pas se le cacher, nous ne croyons pas que les SEM vont se mettre demain matin à pulluler à toutes sortes de sauces. Il va y en avoir, des projets. On pense qu'on doit prendre bien notre temps pour que nos municipalités sélectionnent les bons partenaires et, lorsqu'on les exploitera, bien, c'est peut-être au niveau des mécanismes de contrôle qu'on devra mettre un peu plus la pédale douce, comme on l'expliquait dans notre mémoire. Mais, pour répondre à votre question, nous partageons votre prudence, et cette prudence-là passe par des critères de sélection, de choix du bon partenaire.

M. Trudel: Est-ce que...

Le Président (M. Paquin): M. le ministre.

M. Trudel: Pardon? Merci. Est-ce que j'étire trop, donc, en disant que vos commentaires à l'égard du contrôle ministériel, disons que ça peut être acceptable pour une certaine période de temps à l'égard des SEM?

M. Bordeleau (Michel): Je pense que oui. Je pense que oui. Il faut voir de notre côté qu'on préconise des SEM de longue période. Ça s'est déjà vécu dans le monde municipal où la privatisation de services a fait en sorte que les différentes firmes qui se sont succédé avaient des contrats de courte durée et, donc, n'avaient pas nécessairement l'intérêt de protéger les ouvrages à long terme. Donc, je pense que c'est important qu'il y ait des contrôles, oui, mais quand même il ne faudrait pas que ces contrôles-là fassent en sorte de créer un entonnoir d'engorgement, puis alourdissent le système. On veut devenir plus performants, on veut participer à ces réformes et c'est à ce niveau-là qu'on veut travailler.

M. Trudel: J'y reviendrai, M. le Président, mais je pense que mes collègues avaient des questions.

Le Président (M. Paquin): D'accord. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, moi, tantôt, j'ai comme sursauté intérieurement, mais c'est parce que je sais que, vous, vous avez souligné que vous n'avez qu'un seul intérêt: de préserver le bien public, d'être loyal, finalement, à la municipalité ou à la MRC qui engage l'ingénieur. Et, tantôt, quand vous avez parlé de représenter votre municipalité ou votre MRC, je me suis demandé comment ça pourrait s'articuler parce que, même si on va vers une entreprise ou une société où le privé est très important, c'est quand même les élus qui restent imputables, c'est quand même des deniers publics qui vont être mis et c'est aussi toute la question de la tarification.

(13 h 40)

Alors, moi, à un moment donné, dans nos bureaux, si je regarde aussi tout ce qui s'est fait avec la Société québécoise d'assainissement des eaux... L'ex-ministre Chevrette a dit: Bon, bien, là, c'est fini, le bar ouvert. Mais, nous, les élus, on a souvent dans nos bureaux des municipalités qui sont accompagnées de leurs ingénieurs. On s'en vient ici, au ministère, et on a, encore une fois, des rencontres avec des ingénieurs. La MRC de La Matapédia, par exemple, elle a son ingénieur et, quand ils vont au ministère de l'Environnement, bien, là, il y a d'autres ingénieurs. Alors, moi, c'est plus votre place. Comment vous voyez ça, idéalement, par rapport – comment je dirais ça – à préserver tout ce qui est, là, éthique professionnelle des ingénieurs du municipal et le bien public? Parce que c'est ça que vous me dites que vous avez comme objectif premier. Puis, dans ce fonctionnement nouveau qu'est une société mixte, comment est-ce que vous verriez ça idéalement pour protéger l'ordre public, bien sûr, mais en même temps atteindre les objectifs que messieurs et madame du Haut-Richelieu veulent, c'est-à-dire rendre le service au meilleur prix possible? Alors, comment naviguez-vous à travers tout ça?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bordeleau.

M. Bordeleau (Michel): Je vous remercie. Ça me fait plaisir que vous parliez de votre ingénieur, parce que M. Robichaud a siégé, jusqu'à l'an passé, sur le conseil d'administration de l'AIMQ.

Nous, dans un premier temps, avant de parler d'articuler, ce qu'on préconise, c'est de rééquilibrer, si on veut, les connaissances au niveau du C.A. Et loin de moi de dire que nos élus n'ont pas la connaissance qu'on a, ce n'est pas ça que je veux mentionner. C'est juste pour dire: On fait une nouvelle façon de faire, et je crois que cette nouvelle façon de faire là doit également considérer une nouvelle façon de faire de l'imputabilité au niveau d'un ingénieur municipal. Chez nous, dans la ville pour laquelle j'oeuvre, c'est une notion qui est devenue importante, l'imputabilité. Elle ne l'est pas seulement au niveau des élus; elle le devient également pour les chefs de service, comme dans mon propre service. Donc, au niveau des dépenses, nos élus tendent à nous faire devenir imputables de nos budgets.

Et, à cet élément-là, moi, je dois vous dire que je n'aurais pas de difficulté à composer avec une nouvelle forme qui élargirait la notion d'imputabilité également au fonctionnement des ingénieurs. Je sais très bien où vous voulez en venir au niveau des pressions qu'on pourrait subir, mais, comme je vous dis, à la base, ça serait de rétablir le partage de connaissances qui pourrait exister autour d'une table à vocation technique, dans le cas présent les ingénieurs. Est-ce que je réponds à votre question?

Mme Doyer: Oui...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de Saint-Hyacinthe.

Mme Doyer: Il y avait juste... Mais tout ce que vous... Ça ne peut pas se faire, disons, dans l'informel ou dans le... Parce que les gens, là, ils vont devoir avoir un comité technique plus restreint, j'imagine, dans un projet qu'ils ont en commun. Par exemple, que ce soit la gestion des déchets ou quoi que ce soit, ils se font alimenter par leurs ingénieurs ou leurs professionnels. Alors, en tout cas, je sais que vous ouvrez sur quelque chose de nouveau. Je trouve ça intéressant, puis, en même temps, je trouve ça à faire attention.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la députée de Matapédia. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Merci, Mme la Présidente. C'est sur le même sujet. Je trouve ça très intéressant, ce que vous apportez, et, en même temps, je trouve ça très difficile à concevoir d'un point de vue théorique, en tout cas. C'est que, si on essaie d'analyser froidement ce que ça implique, la participation d'un ingénieur employé d'une municipalité sur un conseil d'administration de SEM, on voit qu'il y aura autour de la table, plus ou moins, dans le schéma que vous avez dit, trois personnes de la municipalité, trois personnes de l'investisseur privé et un ingénieur dans le milieu. Alors, je me dis, l'ingénieur, lui...

L'élu, son intérêt, j'imagine que c'est le bien commun de la communauté plus l'interprétation qu'on en fait qui va lui permettre de se faire réélire. L'intérêt de l'investisseur, bien, c'est son profit évidemment sur son investissement. L'intérêt de l'employé, c'est quoi? Conserver son emploi, puis garder son statut professionnel. J'imagine son statut professionnel, parce qu'il est un professionnel, hein? Alors, donc, il faut qu'il protège son statut professionnel.

Alors, dans le cas de conflit où est-ce que c'est qu'on a à trancher, vous en avez trois d'un côté... Mettons que la municipalité a telle position, les investisseurs telle autre position, puis vous avez l'ingénieur, entre les deux, qui doit trancher, qui est l'employé de la municipalité. Ou il se range du côté de l'autorité municipale, puis, alors, à ce moment-là, aussi bien avoir un élu; ou il se range du côté de l'investisseur, puis, alors, il y a des problèmes. Parce que, là, il ne s'agit pas d'être un médiateur. En fait, il ne s'agit pas d'être autour de la table pour transmettre des connaissances, parce qu'un conseil d'administration peut inviter qui il veut pour avoir des connaissances. Il s'agit de trancher, et c'est dans les moments difficiles qu'on voit s'il y a lieu d'avoir telle ou telle composition ou tel ou tel rapport de force. Alors, c'est le genre de problème que ça me pose.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bordeleau.

M. Bordeleau (Michel): Merci. Je saisis très bien vos préoccupations, mais, nous, on n'admet pas ce point-là dans l'optique de dire: Il y aura trois-trois, et l'ingénieur va toujours trancher. Nous, ce qu'on voulait mentionner, c'était que, de la façon dont actuellement les documents étaient faits, il n'y avait pas de sous-comité ou de comité de gestion, avant le conseil d'administration, qui permettrait à la municipalité d'avoir référence à ses professionnels. Et, nous, c'était dans cet élément-là. Je dois vous mentionner que, nous, les ingénieurs municipaux, on est assujettis aux règles, au respect de notre code de déontologie, comme bien des professionnels le sont. Donc, avant tout, nous sommes des ingénieurs; dans un second temps, nous sommes des ingénieurs municipaux. Mais il ne faudrait quand même pas percevoir qu'on va toujours être dans un conflit trois-trois et que l'ingénieur va décider.

Nous, ce qu'on voulait mentionner, c'était que quelque part on puisse avoir une tribune pour protéger les intérêts du public, que ça soit de façon informelle ou autre. Ça pourrait être un élément, mais actuellement, à la lueur des documents dont on prenait connaissance, M. le ministre, tantôt, a parlé d'un aspect facultatif: de laisser à la municipalité le soin de l'inclure ou non. On trouvait ça, déjà, un pas en avant par rapport aux documents soumis. Donc, on ne veut pas nécessairement s'imposer concernant la formation des conseils d'administration; on veut seulement dire que non seulement on veut protéger notre statut, mais on veut également protéger les biens publics.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Trudel: Une toute petite complémentaire sur cette question. Est-ce que, pour vous, c'est bien clair que vous siégeriez là éventuellement comme mandataire du fondateur municipal ou comme membre expert de votre profession dans le secteur municipal? Le type de représentation que vous assureriez au conseil d'administration, ça serait dans quel sens?

M. Bordeleau (Michel): Définitivement comme mandataire de la municipalité.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée... Une autre petite question? Il vous reste peut-être une minute.

M. Trudel: Une minute?

Mme Delisle: C'est votre journée, M. le ministre.

M. Trudel: Ah! Merci, Mme la représentante de l'opposition.

Mme Delisle: La seule. Ha, ha, ha!

M. Trudel: Prenez la première, elle dit, les deux autres qui vont venir vont être terribles.

Mme Delisle: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Vous nous dites dans votre mémoire également que vous trouvez les «provisions» de l'avant-projet de loi insuffisantes à l'égard de la possibilité que le fondateur municipal, au niveau du cautionnement, soit limité à un certain niveau, en fait à la partie qu'il a dans la SEM, c'est-à-dire, s'il est à 51 %, pas au-delà de 51 %. Enfin, on limite, on fait un plafond à l'égard du cautionnement municipal. Vous souhaitez qu'on élargisse ça. Vous ne trouvez pas ça un peu dangereux?

M. Bordeleau (Michel): Pour répondre à votre question, ce n'était pas dans l'aspect de la limitation. Nous, ce qu'on soulignait, c'est que la dimension cautionnement fait partie de notre quotidien lorsqu'on gère des contrats de services, des biens. On a des cautionnements qui sont beaucoup plus, si on veut, en termes de pourcentage par rapport à un chiffre qui est imposé. Vous n'êtes pas sans savoir que, si on a en tête de créer une petite SEM, un cautionnement de 50 000 $ pourrait très bien faire l'affaire. Sauf que le fait de mettre un chiffre en valeur, si on veut, absolue peut être dangereux dans une application où la SEM pourrait avoir une plus grande envergure. C'est cet aspect-là. Nous, ce qu'on voulait mentionner, c'est que la définition qu'on fait des cautionnements devrait prendre en considération que les projets pourront être d'envergure très importante et qu'il faudrait, à ce moment-là, que les cautionnements soient, si on veut, en fonction de ces valeurs-là.

M. Trudel: Je veux juste souligner que la limite du cautionnement, je dirais, c'est sous réserve de l'autorisation du ministre. Lorsqu'on dépassera tel niveau de l'implication municipale, on pourra le faire...

M. Bordeleau (Michel): O.K.

M. Trudel: ...mais avec l'autorisation du ministre. C'est la même mécanique...

M. Bordeleau (Michel): La même mécanique. O.K.

M. Trudel: ...la même dynamique qu'à l'égard des emprunts.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. J'aimerais revenir à la représentation. Si on part du principe, là, tel qu'on en a parlé ce matin avec le Haut-Richelieu – j'ai cru comprendre que M. Dolbec était clair là-dessus – que l'initiative vient du fondateur municipal... Bon. Alors, je pense que, en toute transparence, là, c'est ce qui a été dit. En tout cas, c'est comme ça qu'il le voit, puis je pense que c'est comme ça que les gens ont voulu qu'on le comprenne également, même si ça devient une entreprise privée. Le fondateur municipal ne se lève pas un bon matin pour dire: Bon, je crée une SEM, on va se trouver des partenaires, puis partir trouver les partenaires sans évidemment associer, j'imagine, le trésorier municipal, le secrétaire-trésorier là où c'est un secrétaire-trésorier, les ingénieurs ou, enfin, les officiers qui travaillent pour la municipalité et qui sont les partenaires immédiats d'un conseil municipal.

(13 h 50)

Je suis capable de reconnaître, moi, que, si on n'avait pas ces partenaires-là, si on n'avait pas les officiers municipaux, là, dans tout ce que ça comporte, les élus municipaux qui ne sont pas là à temps complet, puis qui n'ont pas nécessairement toute l'expertise auraient des petits problèmes. Je reconnais l'importance de votre corporation, mais l'importance aussi d'avoir autour d'une table des gens de votre expertise. Mais qu'est-ce qui empêche la COMAQ ou d'autres organismes de venir nous dire qu'eux aussi pourraient faire bénéficier de leur expertise, au sein d'un conseil d'administration de la SEM, tous les membres du conseil d'administration? Est-ce que vous voulez l'exclusivité ou si vous souhaitez qu'on en choisisse un parmi tant d'autres? Comment ça marcherait?

M. Bordeleau (Michel): Aucunement, Mme la députée de Jean-Talon. Si vous prenez note, à la page 3, on mentionne qu'«il en va de même pour toute autre profession dans tout autre type de SEM». On le mentionne clairement. D'abord, j'aimerais quand même apporter une petite parenthèse. Vous parlez de corporation. Aujourd'hui, nous représentons l'AIMQ, l'Association des ingénieurs municipaux du Québec. Nous regroupons 215 membres, contrairement à l'Ordre des ingénieurs du Québec, qui est notre corporation professionnelle, dans laquelle nous sommes quelque deux membres parmi les 40 000. Donc, la distinction est quand même importante. Comme je vous dis, notre code de déontologie nous vient de l'Ordre des ingénieurs, mais nos fonctions au niveau de l'AIMQ, c'est un réseau qui existe au sein des villes.

Il faut également mentionner que, pour M. Dolbec, lors de la création de sa SEM, les élus ont peut-être été les initiateurs d'un projet, mais je crois que, dans un contexte de partenariat privé-public, il y aura des situations où le public aura une idée, parce qu'il dispose de bâtiments ou dispose d'autres choses, alors que l'élu n'est pas au courant. Donc, il est fort possible que l'entreprise privée rencontre les élus et dise: Je pourrais faire une bibliothèque à l'aide d'un bâtiment que présentement je ne réussis pas à rentabiliser. Je fournirais, comme mise de fonds, le bâtiment et je vois très bien la ville fournir d'autres équipements. Donc, bien que la SEM du Haut-Richelieu ait été initiée, je crois, par l'entremise de la municipalité, il y aura lieu de considérer que le milieu privé – on parle vraiment de partenariat privé-public – sera également initiateur de certains projets. Donc, pour nous, ça nous apparaît également une façon de voir les choses.

Mme Delisle: Je ne voulais pas vous mettre sur la défensive, M. Bordeleau, au contraire; je voulais juste vous faire dire, en fait, votre réflexion sur ce qui pourrait être inclus ou pas inclus dans l'article de loi qui se limite uniquement, là, à mentionner que le fondateur municipal aurait la majorité, qu'il serait composé d'élus municipaux. Ce serait intéressant de voir comment on pourrait le libeller, finalement, pour inclure... Est-ce qu'on ajoute à la majorité ou est-ce que vous en faites partie? Je sais que, tout à l'heure, la question vous est venue de la part du ministre et vous avez répondu: On serait mandataire évidemment du fondateur. Ça, ça va bien. Mais vous souhaiteriez que ce soit inclus dans l'avant-projet de loi, ou éventuellement dans un projet de loi, que ça peut être un élu ou un officier, ou, enfin, peu importe. C'est ce que vous souhaitez, là?

M. Bordeleau (Michel): Oui, définitivement.

Mme Delisle: O.K. Je voudrais...

La Présidente (Mme Bélanger): Un instant, Mme la députée de Jean-Talon, Mme Goulet voulait ajouter.

Mme Goulet (Odile): Oui, ce que je voulais juste ajouter, c'est que, moi, je représente la ville de Sherbrooke et, chez nous, il y en a une initiative qui a été proposée; ça vient des firmes de génie-conseil qui se sont regroupées et qui nous ont proposé un projet de société d'économie mixte. Donc, l'initiative ne vient pas nécessairement toujours de la municipalité. En tout cas, dans notre cas, ça ne venait pas de la municipalité et, de prime abord, c'est vers les élus qu'ils vont aller pour expliquer leur projet. Donc, c'est pour ça qu'on pense que ça peut être intéressant d'avoir un autre point de vue, à un moment donné, qui vient de l'intérieur, puisque c'est nous qui vivons, comme tels, avec les réseaux ou avec le système de collecte des déchets, puis tout ça. Alors, on peut présenter un autre point de vue.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Une dernière avant que je cède la parole à mon collègue. Concernant le choix du partenaire – j'ai, tout à l'heure, abordé la question avec les représentants de la MRC du Haut-Richelieu – vous insistez beaucoup sur le fait qu'on s'occupe beaucoup de l'exploitation dans l'avant-projet de loi, mais qu'on ne s'occupe pas, finalement, du choix, au niveau de sa création, du partenaire. Est-ce que votre intervention à ce sujet-là – parce que, quand même, ça regroupe quasiment une page, là, dans votre mémoire – vient du fait que vous souhaiteriez vraiment qu'il y ait un choix entre quatre, cinq firmes, supposons, là? Est-ce que ça fait partie d'expériences que vous avez vécues ou de mauvais choix d'entreprises avec qui votre organisme aurait travaillé? Ça ne se veut pas une question-piège; ça se veut vraiment une question pour éclairer le débat, là.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bordeleau.

M. Bordeleau (Michel): Ce n'est pas nécessairement suite à une réserve d'une mauvaise expérience. C'est que, nous, ce qu'on constate, c'est que le ministre des Affaires municipales parlait ce matin de prudence. Je pense que, les gens ici, on s'entend qu'il ne faut pas se lancer tête perdue dans les sociétés d'économie mixte. Donc, pour nous, ça nous apparaît un tamis, un endroit où on peut exercer cette certaine prudence-là, et le tout doit s'effectuer dans une certaine transparence. Donc, à cet effet-là, c'était plus dans cette optique-là que résultant des mauvaises expériences passées qu'on voulait amener un petit peu cette nouvelle dimension qui n'avait pas été, quant à nous, explorée. C'est vraiment pour rejoindre le terme de prudence.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Bordeleau. Dans vos conclusions, vous dites: «L'Association des ingénieurs municipaux du Québec est favorable de façon générale à toute mesure qui permettra d'offrir des services à meilleur coût aux citoyens en plus d'assurer l'intégrité et la transparence dans l'utilisation des fonds publics.» Avez-vous fait des études, votre association, qui démontrent qu'en effet le fait de privatiser, ou d'autres formes de délégation de certaines responsabilités de services publics au privé, amène des économies, une plus grande transparence et un meilleur service?

Parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, vous n'êtes pas sans savoir, peut-être, que certaines villes européennes et américaines aussi d'ailleurs... Mais prenons l'Europe parce que, tout à l'heure, M. le ministre a parlé de l'exemple français; alors, on peut, nous aussi, y référer. Dans les municipalités qui y ont eu recours et qui ont recours maintenant au secteur privé pour desservir la population avec un certain nombre de choses, dont l'eau en particulier – vous y faites allusion dans votre mémoire – on se rend compte que les tarifs de ces services ont augmenté de 100 %, 200 % dans certains cas, et cela sans aucune incidence fiscale à la baisse sur le compte de taxes du citoyen. Alors, est-ce que, vous, de votre côté, vous avez des études qui peuvent nous démontrer qu'au contraire – parce que vous l'appuyez, là – ça va faire des économies?

M. Bordeleau (Michel): O.K. Pour répondre à votre question, je dirais qu'elle est à deux volets: le volet économique, d'une part, et le volet transparence, dans un autre côté. On n'a pas nécessairement effectué des économies, comme au niveau de l'eau potable. Nous avons déposé un mémoire qui se veut plus généraliste que parler de l'eau potable, qui est très d'actualité suite à la décision de la ville de Montréal d'avoir certaines orientations. Ce qu'il est important de mentionner au niveau des économies, c'est que bien souvent on est assujettis, avec nos appels d'offres publics, à demander des cautionnements. Puis on sait pertinemment – nos fournisseurs nous le disent – que, si on était passés par négociation directe, on aurait obtenu des meilleurs coûts. Je pense que c'est plus dans cet aspect-là qu'il faut voir qu'on a des processus administratifs qui sont lourds et qui nous empêchent, comme l'a dit le maire Dolbec, d'utiliser une négociation de pair à pair, si on veut.

Concernant l'autre volet, de transparence, c'est que toute cette transition-là doit évidemment s'effectuer dans une certaine transparence et c'était à cet effet-là qu'on avait introduit la notion de transparence.

M. Gobé: Est-ce que, un peu comme le faisaient valoir les gens qui vous ont précédés, de la Communauté urbaine de Montréal, vous ne penseriez pas qu'il serait peut-être, dans un premier temps, plus utile de recourir aux SEM pour de nouveaux organismes de gestion? À titre d'exemple: les autoroutes. On sait qu'au Québec on a besoin d'un certain nombre d'autoroutes: l'autoroute 13 pour aller à Mirabel, la 50, là, qui vient de l'Outaouais, la 30, la 20. Est-ce qu'on ne serait pas mieux, à ce moment-là, de commencer par répondre, avec les SEM, à des nouveaux services, à des nouveaux besoins, un peu comme ça se fait – on va prendre encore l'exemple du ministre – en France avec l'Office des autoroutes, avant d'aller tout de suite, là, faire sauter des pans entiers de services publics qui sont donnés actuellement par le municipal ou par la province? Ceci pour faire nos dents, là, pour faire nos expériences et voir où ça nous mène. Parce que vous savez comme moi que, si on commence à prendre des pans entiers, là, de services municipaux et que ça ne fonctionne pas comme on pense et comme beaucoup de choses que nous avons pensées depuis 20, 25 ans, qui n'ont pas toujours fonctionné selon nos souhaits, on risque de se retrouver avec des problèmes pour les citoyens, les payeurs de taxes, et aussi une confusion, là, très importante.

(14 heures)

La Présidente (Mme Bélanger): M. Bordeleau.

M. Bordeleau (Michel): Je mentionnerais, pour répondre à votre question, qu'au niveau des autoroutes, bien qu'on regroupe des municipalités, les projets routiers de grande envergure comme les autoroutes, à part l'île de Montréal, vont nous toucher de peu, parce qu'une autoroute crée un lien d'une ville à une ville. Donc, au niveau des réseaux routiers, ce ne seront pas nécessairement des problématiques auxquelles les ingénieurs des villes vont devoir répondre.

Par contre, il faut faire bien attention quand on parle de partenariat privé-public. La notion qu'on introduit ici de partenariat est élargie. On pense définitivement qu'il ne s'agit pas de rayer un pan de nos employés municipaux ou quoi que ce soit. Ce qu'on dit juste, c'est qu'actuellement on a des très bons employés. M. le maire Dolbec mentionnait tantôt qu'on a une connaissance, que nos employés de travaux publics ont une connaissance de nos réseaux, que nos techniciens dans les villes ont une connaissance de nos infrastructures. C'est bien évident qu'on ne peut pas prendre cette partie-là qu'on connaît, puis carrément la mettre de côté. Ce qu'on préconise, c'est de garder cette connaissance-là et de créer un nouveau partenariat pour créer une meilleure dynamique de fonctionnement. C'est vraiment à cet effet-là. Loin de nous de régler l'ensemble. Je ne sais pas si je réponds à votre question. Ça ne semble pas être le cas...

M. Gobé: C'est parce qu'elle m'amène une autre question. Je ne le prends pas forcément pour vous, mais vous êtes ingénieur municipal, vous êtes au sein même de l'appareil municipal, donc peut-être plus sensible à ça. Dans ce nouveau partenariat, on fait quoi avec les employés municipaux? Est-ce qu'on les transfère tous? Prenons un service, je ne sais pas, moi, des eaux, un service existant. On les transfère tous dans la SEM? À quelles conditions? Est-ce qu'on maintient les conventions collectives? Est-ce qu'on maintient les mêmes obligations de services essentiels?

M. Bordeleau (Michel): On a répondu ce matin concernant les services essentiels. C'est définitif qu'une SEM va devoir, si elle était à vocation au niveau de l'eau potable, maintenir des services essentiels. Il faut bien être clair: on veut améliorer, rendre les systèmes de gestion plus souples, mais on ne veut pas aller de l'autre côté, puis mettre, entre guillemets, en péril la sécurité...

M. Gobé: ...collectives?

M. Bordeleau (Michel): Pardon?

M. Gobé: Les conventions collectives?

M. Bordeleau (Michel): Oui.

M. Gobé: Vous les gardez dans la SEM, les mêmes que dans le service existant?

M. Bordeleau (Michel): Ce n'est pas nécessairement un élément du mémoire qu'on a poussé.

M. Gobé: Non, mais je vous pose la question parce que c'est la réflexion globale, hein!

M. Bordeleau (Michel): Globale.

M. Gobé: On ne peut pas seulement mettre dans un mémoire ce qui fait notre affaire, là, quand on passe devant... J'aimerais avoir votre opinion en langage peut-être... À moins que vous ne soyez pas prêt à me répondre. Vous pouvez me le dire, puis je vais comprendre.

M. Bordeleau (Michel): Je vous répondrais qu'il y a un exemple, la ville de Hamilton-Wentworth. Une firme privée a pris en possession les ouvrages d'assainissement, les ouvrages d'eau potable, a intégré les employés municipaux, qui étaient anciennement au niveau de la ville, dans le nouveau partenariat en maintenant les conditions. Et les résultats – je crois que ça fait un an et demi que ça fonctionne – sont très probants. C'est bien évident que toute la notion de l'article 45 doit être débattue. Je pense que, ce matin, on l'a abordée. La venue des sociétés d'économie mixte met peut-être juste une emphase sur le fait qu'il faudrait se pencher très à fond sur cet aspect-là de l'article 45 du travail pour faire en sorte qu'on soit capables de voir de quelle façon chacune des villes pourra composer avec ça. Parce que, actuellement, chaque ville qui négocie ses conventions collectives négocie surtout des choses de sous-traitance en vertu de cet article-là. On veut créer des mécanismes qui vont faire de nous des sociétés plus performantes. Donc, on pense que ce débat-là doit être élevé à un niveau, je vous dirais, supérieur de ville en ville, que chaque ville doit prendre de l'énergie pour le travailler, mais vraiment, à l'échelle provinciale, ce débat-là doit être traité. C'est ce qu'on croit.

M. Gobé: Une dernière question. Est-ce que, selon vous, avant de créer une SEM, on devrait obligatoirement s'entendre avec les employés qui vont être touchés directement par la création de cette SEM?

M. Bordeleau (Michel): Je crois...

M. Gobé: Avant.

M. Bordeleau (Michel): Je crois que cette réflexion-là doit être un élément qui doit être considéré lors de la création de la SEM en question. Définitivement.

M. Gobé: Je vous remercie, M. Bordeleau.

La Présidente (Mme Bélanger): D'autres questions? Alors, nous vous...

M. Trudel: M. Bordeleau, madame...

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre?

M. Trudel: ...merci beaucoup. Très précieux, les commentaires que vous nous transmettez aujourd'hui. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous vous remercions de votre présence, et la commission ajourne ses travaux à demain, 15 heures.

(Fin de la séance à 14 h 5)


Document(s) associé(s) à la séance