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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 28 mars 1990 - Vol. 31 N° 6

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Dix heures onze minutes)

Le Président (M. Richard): Mesdames et messieurs, nous débutons nos travaux. Je déclare la séance ouverte, effectivement. Je vous rappelle le mandat de la commission, qui est de tenir une consultation dans le cadre de l'étude du projet de loi 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives. M. le secrétaire, M. Comeau, est-ce que nous avons des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Aucun remplacement, M. le Président.

Le Président (M. Richard): Excellent. Je vais vous faire lecture du déroulement de la journée, de l'horaire. De 10 heures à 11 heures, l'Association des manufacturiers de produits alimentaires du Québec; de 11 heures à midi, Regroupement de l'industrie céréalière et de la production animale; de midi à 13 heures, l'Association des industries forestières du Québec. Il y a une suspension et nous recommençons à 16 heures pour recevoir le Conseil de la coopération du Québec et, à 17 heures jusqu'à 18 heures, la Coopérative fédérée de Québec.

Je vous explique rapidement la mécanique, monsieur: vous avez effectivement vingt minutes pour la présentation de votre mémoire. Par la suite, il y a interrogation de part et d'autre. Alors, sur ce, je vous cède la parole. Vous vous identifiez, le premier intervenant et vous présentez vos collègues.

Association des manufacturiers de produits alimentaires du Québec

M. Latour (André): Bonjour, mon nom est André Latour, je suis directeur général de l'Association des manufacturiers de produits alimentaires du Québec. Le siège social est situé à Saint-Jean-sur-Richelieu. Les collègues qui m'accompagnent sont: à mon extrême gauche, M. Bud Cronshaw, directeur général pour les opérations de conserverie au Québec de Nabisco Brand Itée; cette maison a des usines à Chambly et à Sainte-Thérèse; à ma gauche, M. Jules Tourillon, président-directeur général de David Lord Itée, qui possède des plants de transformation à Saint-Jean-sur-Richelieu et à L'Assomption; à mon extrême droite, M. Karl Delwaide, procureur de l'Association, du bureau... de l'étude Mar-tineau Walker, du bureau de Montréal; et à ma droite, M. Marcel Ostiguy, président-directeur général de la firme les Aliments Carrière inc., qui possède des usines à Saint-Denis-sur-Richelieu, Rougemont, Saint-Césaire et Bedford.

Nous voulons vous remercier de votre invitation, d'abord, et de l'opportunité que vous nous donnez de vous adresser quelques représentations de notre industrie. Comme la loi des marchés agricoles a pris passablement d'ampleur depuis ses débuts, d'une loi qui couvrait initialement à peu près strictement les produits agricoles, maintenant on y trouve des dispositions qui concernent les produits, du champ du producteur à la table des consommateurs, alors vous comprendrez qu'en tant que manufacturiers de produits alimentaires, nous sommes très intéressés par les dispositions de cette loi et par les refontes qui peuvent survenir dans le projet qui est devant nous, aujourd'hui.

Dans un premier temps, j'aimerais peut-être vous situer un peu le profil de notre association. Nous regroupons 160 membres corporatifs, dont 25 membres fabricants. Ces membres fabricants-là ont comme dénominateur commun qu'on peut tous les appeler des conserveries. Et les champs d'activité dans lesquels ils transforment des produits sont les fruits et légumes congelés et surgelés, les légumes en conserve, incluant les marinades, les jus et boissons aux fruits, les autres fruits transformés sous forme de confitures, les viandes en conserve, les soupes, les sauces et les mets préparés, etc. Donc, la majorité de ces transformateurs s'occupent de fruits et légumes et ont des opérations au Québec. En rapport avec la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires, l'AMPAQ représente donc plus particulièrement les secteurs suivants. D'abord, les acheteurs de pommes destinées à la transformation et, également, les acheteurs de légumes destinés à la transformation et dans ces légumes, principalement, qui sont assujettis au plan conjoint, on retrouve les pois verts, les haricots, le maïs sucré, les concombres, les asperges et les tomates. Nos principaux interlocuteurs, au niveau de la production agricole, sont la Fédération des producteurs de fruits et légumes du Québec et la Fédération des producteurs de pommes du Québec, qui sont deux fédérations affiliées à l'UPA.

Quelques statistiques maintenant. Environ 20 % de la production totale des fruits et légumes sont destinés à la transformation. L'industrie de la transformation des fruits et légumes, au Québec, compte à peu près une cinquantaine d'établissements, qui ont à peu près 200 employés réguliers, pour une masse salariale d'environ 40 000 000 $, et quand on arrive aux employés saisonniers, il faut multiplier ce chiffre

par deux, par trois ou par quatre, selon les usines. L'ensemble de l'industrie fait affaire avec à peu près 2000 producteurs agricoles spécialisés, soit dans la production de pommes, soit dans la production de légumes.

Au niveau des légumes transformés seulement, qui nous intéressent plus particulièrement ici, nous faisons affaire avec 800 à 1000 producteurs agricoles qui cultivent à peu près 30 000 acres de légumes de transformation pour une valeur à la ferme d'environ 20 000 000 $, valeur qui, au niveau du marché, au niveau du produit fini, s'élève au montant d'à peu près 150 000 000 $ ou 200 000 000 $. On peut ajouter que les ventes totales de nos membres en provenance du Québec sont d'environ 3 000 000 000 $, si on considère tous les membres de l'Association.

Au niveau des marchés, notre industrie dessert d'abord et surtout le marché québécois, mais également une partie importante de nos expéditions est exportée vers le reste du Canada, vers les États-Unis et vers l'Europe. Certaines de nos entreprises - peut-être que ce sera un peu surprenant pour vous - vont jusqu'à exporter 90 % de la production faite au Québec. Alors, de là découle, évidemment, l'importance, pour nous, de la compétitivité de nos produits.

L'industrie est composée de petites et de moyennes entreprises dont les centres de décision sont situés au Québec. On y compte également quelques multinationales et entreprises nationales qui sont, pour la plupart, implantées au Québec depuis plus d'un demi-siècle. Au niveau des approvisionnements, ils proviennent en majeure partie des régions environnantes des conserveries, c'est-à-dire sur la rive sud de Montréal, dans la plaine du Saint-Laurent entre, à peu près, Valleyfield et Drummondville, dans une espèce de demi-cercle dans le sud de la plaine du Saint-Laurent et, également, sur la rive nord, des régions de Terrebonne, L'Assomption, Joliette et Berthierville.

Maintenant, parmi les buts de nos représentations ici, aujourd'hui, évidemment, ce qui nous amène, c'est la recherche d'une certaine efficacité pour l'industrie. Et quand on parle d'industrie, ici, on inclut, évidemment, les transformateurs, mais également les producteurs agricoles in extenso jusqu'aux consommateurs. Nous voulons également nous assurer par cet exercice que le législateur québécois soit un partenaire réel de l'industrie sur tous les points.

Si nous jetons un petit coup d'oeil sur le passé, au niveau de l'AMPAQ, nous avons toujours reconnu le droit des producteurs agricoles de s'associer. Nous avons un plan conjoint qui existe depuis 1978 et nous négocions avec les producteurs agricoles depuis 1979. Nous nous sommes toujours astreints aux contingences imposées par le plan conjoint. Nous avons investi énormément de temps et d'argent pour bonifier nos relations avec les producteurs agricoles, même si nous sommes bien conscients que l'affectation du temps de notre personnel représente une réduction d'efficacité, en particulier quand on se compare aux États-Unis, et que tous les autres coûts afférents à l'administration du plan conjoint sont absorbés ultimement par les acheteurs, puisqu'ils se reflètent dans le prix des produits.

Si nous jetons un coup d'oeil sur l'avenir, notre environnement, comme on le sait tous, change très rapidement. On parle de libre-échange, de négociations du GATT, de politique agricole nationale. Au plan du libre-échange seulement, les coûts engendrés par notre système de mise en marché risquent d'avoir un impact négatif sur notre compétitivité. Ici, je pense qu'on n'invente rien, ce sont des choses qui ont déjà été dites et j'aimerais peut-être juste citer un court paragraphe qui est extrait du rapport du comité d'examen qui a précédé les travaux d'établissement de la loi. Alors, on y retrouve, en page 10, un paragraphe qui dit ceci: Tant que le système des plans conjoints est fermé, les conséquences de prix plus élevés que ceux observés en pays étrangers pour les produits agricoles restent relativement minimes. Mais si la porte s'ouvre, que ce soit directement par la disparition ou l'amenuisement de barrières à l'importation de ces produits, ou indirectement par l'importation de produits transformés à partir de produits agricoles étrangers, alors le système devient vulnérable.

Je pense qu'on peut, sans craindre de se tromper, vous dire, mesdames et messieurs, qu'actuellement la porte est ouverte. Tous les observateurs s'accordent actuellement pour reconnaître que l'industrie bioalimentaire québécoise devra s'ajuster rapidement dans un environnement commercial plus dynamique et plus compétitif. En parlant de vulnérabilité, le secteur de la transformation des fruits et légumes a déjà été identifié comme l'un des plus vulnérables. C'a été fait à travers le rapport du conseil consultatif sur l'adaptation, qu'on appelle aussi le rapport de Grandpré. On retrouve à peu près les mêmes propos dans une étude de Woods Gordon à l'intention d'Agriculture Canada et, également, on retrouve ça dans d'autres rapports existants.

Alors, examinons donc quelques faits. Aux États-Unis, il n'existe pas de plan conjoint comme tel, donc pas de négociation sur la même base qu'ici. Les regroupements de producteurs aux États-Unis sont donc moins structurés. Si l'on regarde les six produits de notre plan conjoint au Québec, déjà deux d'entre eux sont à l'agonie. On parle ici des tomates rouges et des asperges. Dans le cas de la tomate, on peut préciser qu'il y a 25 ans seulement, au Québec, il y avait toute une panoplie d'usines de transformation, soit industrielles, soit artisanales, et notre autosuffisance en tomates transformées était quand même assez élevée. En 1990, plus aucune entreprise ne transforme la tomate au

Québec. C'est donc dire qu'il y a une évolution qui s'est faite de ce côté-là.

Également, du côté de la flexibilité des producteurs par rapport à celle des acheteurs, si, éventuellement, la situation tournait mal pour les acheteurs, les producteurs auraient toujours la chance d'entreprendre des activités dans un autre secteur. C'est plus facile pour eux que pour nous qui avons des installations très spécialisées et très sophistiquées et qui ne peuvent pratiquement servir à autre chose. Cela nous amène donc à inviter le législateur à une très grande prudence, particulièrement au niveau des pouvoirs consentis au plan conjoint. La loi doit être bâtie de façon à minimiser les coûts pour l'industrie, de façon à favoriser la compétitivité de nos entreprises, et cela, pour le bénéfice ultime de l'ensemble des intervenants, c'est-à-dire nous-mêmes, les transformateurs, les producteurs et, ultimement, les consommateurs. Dans cet esprit, le projet de loi 15 est peut-être un peu trop centré sur nos conditions internes de mise en marché et pas suffisamment sur les nouvelles réalités du commerce international.

Alors, nous avons présenté à la commission un mémoire qui est très succinct et nous aimerions, à ce point-ci, peut-être discuter des trois articles seulement auxquels nous avions attaché notre attention. Ce sont des articles qui, à notre avis, s'ils restent sans changement, risquent de devenir des éléments de non-concurrence pour notre industrie.

Au niveau de l'article 38, historiquement et bien avant l'avènement du plan conjoint, les transformateurs ont complété leurs approvisionnements par la production de leur propre ferme. Quand les transformateurs ont agi de la sorte, c'est soit par un manque de producteurs, soit par un manque de flexibilité chez les producteurs - on sait que nos cultures demandent énormément de rotation - soit à des fins expérimentales ou soit encore à cause de risques inhérents à la culture, les risques étant plus élevés généralement en début ou en fin de saison et les transformateurs se réservaient à ce moment-là la possibilité d'absorber ces risques.

La teneur de l'article 38 du projet de loi 15 nous laisse croire que le législateur pourrait favoriser que le transformateur paie une cotisation syndicale sur sa propre production, une production évidemment qu'il ne se vend pas à lui-même. Le paiement d'une telle contribution pour financer l'organisme, qui représente officiellement les producteurs agricoles, donc ultimement à payer pour des services que le transformateur ne reçoit pas... L'effet de l'article 38 fait en sorte qu'une même entreprise est assujettie en même temps à la fois à titre d'acheteur et à la fois à titre de producteur. Comme les cotisations syndicales font déjà partie intégrante du prix de vente du produit, nous vous soumettons que les entreprises seraient, avec ce système, doublement taxées.

D'abord, les entreprises paient leur association pour les représenter. Les entreprises paieraient le syndicat agricole pour les représenter d'une façon très artificielle et on conçoit également que le prix de la cotisation est déjà inclus dans le prix de revient des légumes. Alors, on convient facilement que ça serait de la double et même de la triple taxation. Si on veut faire un parallèle avec le droit du travail, le droit du travail défend absolument que des entreprises paient ou financent les cotisations syndicales ou financent le syndicat qui représente ses employés. Ce n'est pas permis et on voit très mal comment une loi du ministère de l'Agriculture puisse autoriser une telle chose.

Puisque les cotisations ont un effet direct sur le prix des produits, au Québec les cotisations représentent un montant d'environ 200 000 $ sur des ventes, la valeur à la ferme du produit, d'environ 15 000 000 $ à 20 000 000 $; puisque les marges de profit dans l'industrie sont généralement inférieures à 3 % - et ici quand on parle de 3 %, c'est seulement dans les bonnes années - on conclut que la marge de manoeuvre des entreprises est très étroite. C'est pourquoi il nous semble très approprié et très impératif qu'un amendement soit apporté à l'article 38. On vous suggère d'ajouter après le texte actuel de l'article 38, comme c'est inscrit dans notre mémoire: "Cependant le producteur d'un produit qui à l'état brut est visé par un plan n'est pas tenu de payer la contribution stipulée par le plan ou les règlements sur la partie de sa propre production qu'il transforme lui-même." (10 h 30)

Ceci nous amène à vous parier de l'article 41, qui est le deuxième article sur lequel nous avions arrêté notre attention. Nous avons déjà vu jusqu'à quel point la notion de compétitivité avait une importance cruciale quant aux chances de notre industrie de pouvoir s'adapter efficacement aux nouvelles réalités commerciales, particulièrement dans le cadre du libre-échange canado-américain. Cette notion de compétitivité, je crois que vous l'entendrez, au cours de ces journées, à plusieurs reprises de la part des associations ou des représentants du monde industriel agro-alimentaire. Alors, je pense qu'il n'y a pas de cachette pour personne que le secteur, notre secteur, vit certaines difficultés. Je crois que le député de Berthier et le député d'Iberville en sont, je pense bien, très conscients parce qu'il y a des entreprises dans leur propre comté qui ont été touchées récemment. Alors, c'est pourquoi même si notre association appuie la philosophie sous-jacente de l'article 41, nous souhaitons que le législateur garantisse un système de révision authentique des bienfaits réels de tout plan conjoint dans une démarche qui tienne absolument compte de la compétitivité du secteur industriel. Les plans conjoints doivent être analysés à la lumière de leurs effets sur la

compétitivité de l'industrie, compétitivité qui comporte des avantages réels à la fois pour les producteurs et les consommateurs. Comme le secteur de la transformation des fruits et légumes a été identifié comme l'un des plus vulnérables face au libre-échange, la révision périodique des plans conjoints, Incluant l'aspect compétitivité, constitue pour nous une préoccupation majeure. Cette recommandation, comme les autres que nous vous présentons, cadre bien dans le contexte que la philosophie de base de la future loi soit résolument inscrite dans une orientation de marché. En conséquence, nous suggérons que l'article 41 se lise comme suit: "À la demande de la Régie et au plus tard à tous les cinq ans, chaque office établit devant la Régie ou devant les personnes qu'elle désigne pour lui faire rapport, que le plan, les conventions en vigueur et les règlements qu'il édicté servent les intérêts des producteurs et favorisent une mise en marché efficace, ordonnée et compétitive du produit visé. La Régie invite également les personnes ou les sociétés engagées dans la mise en marché du produit visé ou leur association ou regroupement accrédité à soumettre aussi leurs rapports." Pour nous, la notion de compétitivité qu'on doit retrouver un peu partout à travers la loi - ici, on a relevé l'article 41 - mais partout où il est question dans la loi de mise en marché efficace, ordonnée, nous voyons l'inclusion de la notion de compétitivité en plus. Et finalement, vous voyez que nous avons une modification qui demande que les sociétés engagées, c'est-à-dire les associations ou les regroupements, qu'elles soient également appelées à une consultation par la Régie pour faire la démonstration de cette compétitivité ou non-compétitivité à propos des plans conjoints. Alors, H n'est pas question pour nous de répudier automatiquement les plans conjoints mais cette demande, je pense, manifeste plutôt notre désir de rendre les plans conjoints plus efficaces.

Le dernier article sur lequel nous nous sommes penchés et où nous avons fait les représentations, c'est l'article 79. L'introduction de l'article 79 pourrait régler en principe le problème de sous-financement des associations accréditées. Comme l'article 79 lie cependant le financement des associations accréditées à leur participation à des chambres de coordination et de développement, participation qui est conditionnelle, vous en conviendrez, à la volonté d'autres parties, conditionnelle également à l'état des relations entre les parties ou encore conditionnelle à des situations bien particulières, nous vous suggérons que le texte de l'article 79 soit amendé pour, évidemment, enlever cette condition qui lie le financement à des associations accréditées à leur participation à des chambres de coordination. Alors, le nouveau texte que nous vous suggérons est le suivant: "Les membres d'une association accréditée où une catégorie d'entre eux peuvent, lors d'une as- semblée générale de l'association accréditée convoquée à cette fin, ratifier un règlement pris par l'association afin de déterminer le montant de la contribution pour couvrir les coûts relatifs aux devoirs et obligations résultant de l'accréditation. Ils peuvent de la même manière ratifier un règlement déterminant le montant d'une contribution afin de couvrir les coûts relatifs aux obligations résultant de la participation de leur association à une chambre de coordination et de développement."

Évidemment, nous aurions pu soulever plusieurs autres éléments du nouveau projet de loi 15, en particulier, on aurait pu s'arrêter sur l'équilibre de la représentativité des membres qui composent la Régie des marchés agricoles du Québec. On aurait pu, également, parler des requêtes faites à la Régie pour l'institution ou l'instauration de plans conjoints. On aurait pu parler du vote lors des assemblées générales des producteurs. On aurait pu, également, s'arrêter sur les définitions qui précèdent la loi. Mais c'est à dessein que nous avons voulu limiter notre intervention en priorisant certains points qui nous apparaissent cruciaux.

Nous avons confiance que les membres de la commission parlementaire leur accorderont toute l'attention voulue. J'avais été élu démocratiquement pour vous présenter nos diverses recommandations, maintenant, je pense que nous sommes très anxieux d'engager le dialogue avec vous. Moi-même et mes collègues sommes prêts à répondre à des questions et à échanger si possible. Merci.

Le Président (M. Richard): Merci, M. Latour. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Pagé: M. le Président, vous me permettrez, dans un premier temps, de remercier M. Latour de sa présentation, le féliciter pour son élection très démocratique pour agir comme porte-parole, ce matin, comme directeur général, saluer ses collègues. Je veux profiter de votre visite ici pour vous indiquer, premièrement, qu'on a lu votre mémoire avec beaucoup d'intérêt, beaucoup d'attention. Je dois reconnaître, et profiter de cette opportunité, comme ministre de l'Agriculture, pour saluer et souligner la contribution, éminemment importante, jouée par votre association, dans un premier temps et, évidemment, par les membres de votre association dans le conditionnement et la transformation des produits agricoles québécois.

Vous avez très bien fait, je crois, de donner, de référer au volume d'affaires, au volume transformé au Québec. Vous évoluez dans une industrie, dans un secteur qui, quotidiennement, doit faire face à une compétition qui est très vive, très rigoureuse et qui sera plus forte.

Dans un premier temps, vous nous indiquez - et nous sommes pleinement d'accord avec vous - que ce contexte de mondialisation des

marchés, d'ouverture des marchés aussi, vous place, vous convie à des défis qui sont très grands. D'ailleurs, on avait eu l'occasion d'échanger quand je me suis rendu à votre congrès, l'an passé. L'industrie de la conserverie, au Québec, fait face à un défi très audacieux. D'une part, l'entrée du libre-échange qui crée cet environnement, on aura beaucoup plus de compétition. Vous êtes confrontés, donc, à être plus performants. Vous êtes confrontés à des niveaux de rentabilité qui sont quand même très, très minces, on me parle de marge bien en deçà de 5 %, en moyenne. Donc, vous vous devez d'être vigilants. Vous êtes confrontés, non seulement à cet environnement plus compétitif, accès plus facile à des marchés qui vous étaient traditionnels pour des produits venant d'autres pays. Vous êtes confrontés aussi, dans le domaine de la conserverie, à un autre élément qui est la consommation de produits à l'état frais. Ça aussi, ça commande chez vous discipline, rigueur et excellence continuelles.

Compte tenu qu'on est assez limités dans le temps, je vais aborder immédiatement les questions que vous nous soulevez. Vous référez aux plans conjoints. Évidemment, les plans conjoints, comme je l'ai indiqué hier - je comprends que vous n'étiez pas avec nous hier - je vais vous dire, dans un premier temps, l'objectif de cette loi qui est revisée après quoi, peut-être 20 ans, 25 ans, depuis 1964, l'objectif qui anime le gouvernement en est un très clair, faire en sorte que l'ensemble de l'industrie bioalimentaire québécoise soit régi par une loi actualisée en fonction de l'obligation que nous avons d'être plus performants, plus compétitifs et, surtout, qu'on se donne des moyens révisés pour être capables de répondre aux besoins des consommateurs et des consommatrices. C'est ce pourquoi - je n'ai pas eu de commentaires là-dessus, sur les chambres de coordination - j'aurais aimé vous entendre sur le sujet.

Traditionnellement, le mandat de la Régie des marchés agricoles a été perçu - probablement que votre association l'a perçu comme ça pendant longtemps - à savoir que la Régie est là pour agir comme police, est là pour discipliner, pour appliquer la loi et les règlements adoptés par les producteurs dans le cadre de plans conjoints proposés à la Régie. L'objectif de la loi, c'est, premièrement, de maintenir cette fonction régie, des ententes régies de mise en marché de produits, de règles de mise en marché, mais c'est aussi d'être davantage orienté vers la commercialisation, le développement des marchés, la pénétration de nouveaux marchés, et c'est dans ce sens-là qu'on propose la création de chambres de coordination et de développement. C'est ce qu'on souhaite, nous.

Je comprends que, parfois, il arrive qu'entre l'intention du législateur et le quotidien, l'application d'une loi, il y a certaines variantes, mais l'objectif - là-dessus, on veut être très clair - via ces chambres, c'est de faire en sorte que les gens de l'industrie - vous en êtes un exemple très éloquent - que les producteurs, que leurs représentants, via leur fédération, s'asseoient autour d'une table avec des associations comme la vôtre, qui sont représentatives du milieu de la transformation des fruits et des légumes, aussi, avec les gens de la distribution, et même des consommateurs, pour que ces gens-là travaillent non seulement sur des problèmes ad hoc, mais travaillent aussi sur les façons de faire à moyen et à long terme la part de chacun des intervenants, autant les producteurs - je me réfère, par exemple, à des règles ou à des normes de conformité de produits selon les besoins d'une entreprise de transformation comme la vôtre - que tout le monde ait l'objectif que, globalement, on soit plus fort en fin d'exercice et qu'on se donne les moyens d'intervenir.

Nous croyons que le fait que ces gens-là soient assis autour de la même table, il va se dégager plus facilement des consensus, on a plus de chance qu'il y ait des consensus et on a plus de chance que vous vous compreniez, finalement. J'ai senti dans votre présentation une inquiétude ou, c'est le moins que je puisse dire, un intérêt, et je vous réponds que, pour nous, le meilleur des véhicules pour atteindre les objectifs que vous identifiez ce matin, ce sera très certainement nos chambres de coordination et de développement.

Les plans conjoints, je l'ai expliqué hier, ont joué un rôle essentiel à la stabilité non seulement des revenus, mais aussi de la production agricole au Québec. Les plans conjoints sont contraignants, j'en conviens, je suis d'accord avec vous. Ce serait peut-être plus facile, dans certains secteurs, pour les entreprisés de transformation, de faire affaire avec des producteurs individuels sans se soucier de règles de fonctionnement bien précises, de production, etc., les coûts que ça implique, mais je peux dire sans me tromper, je crois, que l'expérience du Québec en matière de gestion et de mise en marché du produit québécois, inspirée par la formule des plans conjoints, aura été utile et même performante, au bénéfice de l'industrie. Exemple concret: dans certains secteurs, c'est à partir de plans conjoints et de règles prévues dans les plans conjoints qu'on peut garantir les approvisionnements à des entreprises, à un prix donné, sans qu'il n'y ait de surenchère, parce qu'en période... Surtout dans des productions contingentées, où la matière première est limitée, si on n'avait pas comme pendant de ces contingents des plans conjoints qui établissent des règles d'approvisionnement avec les entreprises, ce sont nos entreprises québécoises qui seraient placées dans une très grande situation de vulnérabilité. On l'a déjà vu et ça... Je pense que l'ensemble des intervenants en sont conscients, ce qu'on a vécu dans le poulet, il y a trois ans, à titre d'exemple.

Alors, les plans conjoints ont de grandes qualités. Je comprends que vous mettiez en relief, peut-être, certains défauts de ces fonctionnements, ça, c'est tout à fait normal, tout à fait explicable. Mais ma perception, je crois que le gouvernement, l'Assemblée nationale du Québec qui adoptera cette loi, fait très bien en maintenant ce principe qui est fondamental dans la mise en marché des produits agricoles au Québec. (10 h 45)

Vous m'avez dit: La première demande, c'est de limiter les pouvoirs réglementaires. J'aimerais, donc, vous entendre aussi là-dessus. La première question portait sur les chambres de coordination. La deuxième, vous nous demandez de limiter les pouvoirs réglementaires dans les plans conjoints; j'aimerais que vous y mettiez un peu plus de précision. Vous nous dites, troisièmement, que le projet de loi ne va pas assez loin pour tenir compte des marchés. Ça me surprend un peu parce que c'est... Les éléments particulièrement nouveaux dans le projet de loi réfèrent, entre autres, à une orientation qu'on veut donner à la Régie de tenir compte davantage de l'évolution, des tendances et des besoins des marchés.

Concernant vos représentations très particulières, à l'article 38, où vous soutenez que, comme producteur-transformateur, comme entreprise qui transforme ou conditionne, mais qui produit aussi, vous vous retrouvez un peu dans la situation où vous êtes à la fois membre du syndicat et vous êtes le patron. Vous comprenez que, compte tenu des poursuites qui sont actuellement devant les tribunaux, vous contestez ces dispositions et je suis persuadé que votre procureur, avec vous ce matin, va non seulement écouter, mais noter tous les propos que le ministre pourrait dire sur le sujet. Étant procureur moi-même, étant avocat, non pas procureur, parce que je ne représente pas personne ici, je représente mon monde, étant avocat, je vais être très très bref sur le sujet et vous indiquer qu'on va attendre, purement et simplement, les décisions des tribunaux en semblable matière. Sauf que vous me permettrez un commentaire qui est le suivant: S'il fallait qu'une entreprise de production, qui en même temps transforme, ne participe pas aux règles du jeu des producteurs dans le plan conjoint, c'aurait tout un impact; c'aurait tout un impact, ça. Exemple concret: je pense qu'on aurait beaucoup de difficultés. Je pense que la Fédération des producteurs de poulets aurait beaucoup de difficultés. Si on prend dans la volaille, les entreprises qui transforment, que ce soit des entreprises comme la Coopérative fédérée, que ce soit Tyson, ces entreprises-là détiennent 15 % des quotas et elles doivent remplir toutes les obligations inhérentes aux producteurs pour leurs activités à titre de producteur. Et si, demain matin, 15 % des quotas - ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire près de 9 % du quota global du Canada - ça voudrait donc dire, demain matin, que la Fédération des producteurs de volaille du Québec serait très certainement placée dans une position précaire et délicate, compte tenu de cette stipulation-là.

Sur les 30 000 acres qui sont en culture, les entreprises en contrôlent 9000 acres, donc c'est près de 33 % du volume de production provenant de T'acrage" québécois qui serait sorti, demain matin, des plans conjoints avec un impact majeur.

Je termine pour laisser le temps à l'Opposition, M. le Président. À l'article 41, vous nous demandez d'ajouter une notion de compétitivité: je trouve ça très intéressant, parce que c'est ce à quoi on se réfère. Vous savez, si on demande une révision automatique puis un échange automatique, tous les cinq ans, sur les plans conjoints, ce n'est pas seulement pour le plaisir de se rencontrer, d'échanger puis de jaser ensemble, c'est pour tenir compte de l'évolution des marchés dans les cinq dernières années, comment le fonctionnement, sans remettre en cause le principe des plans conjoints, mais, comment le fonctionnement dudit plan, accepté ou en vigueur depuis cinq ans... Est-ce qu'il correspond exactement aux attentes, et des producteurs, et des transformateurs, et des distributeurs? Alors, comme trop fort ne casse pas et que trop fort..., comme c'est ça qu'on voulait dire et que vous nous dites qu'on ne le dit pas très clairement, je vais très certainement apporter un amendement, pour être certain que la notion de compétitivité du secteur soit incluse dans ce processus de réflexion qui sera statutaire, à tous les cinq ans.

L'article 79. Vous nous dites: Nous sommes une association, on représente l'ensemble de l'industrie. On demande que chacune des entreprises évoluant dans le secteur doive être membre de notre association. J'ai une demande analogue qui vient du Conseil de l'industrie laitière, qui est confrontée au même problème. Le Conseil de l'industrie laitière, c'est un organisme représentatif des industries privées dans le domaine du lait au Québec. Ils font, ils respectent, ils remplissent bien leur mandat, comme vous le faites, puis je veux vous en témoigner ce matin; cependant, il y a des gens qui se laissent tirer la patte, puis qui sont confortables en sachant qu'ils sont représentés par l'organisme, puis ils ne paient pas leur contribution. Alors, je prévois apporter une modification qui s'appliquera autant à votre association, dis-je, qu'au Conseil de l'industrie laitière, comme quoi une entreprise devra payer sa contribution. Et là, restera à voir si on obligera à être l'âme parce que, nous autres, on veut calquer la même chose, on veut appliquer, dans le secteur des associations représentatives comme la vôtre, les mêmes dispositions qu'on applique aux bénéfices des producteurs agricoles - puis on l'a vu hier - les gens paient leur cotisation mais ne sont pas

membres de l'Union des producteurs agricoles. Alors, la réponse est positive à cet égard-là.

Enfin, l'article 15, la composition de la Régie. J'ai indiqué, hier, que l'objectif était..., parce que, hier, on nous a demandé que les consommateurs soient représentés comme régisseurs. Vous nous demandez aujourd'hui que les gens de la transformation, comme vous autres, soient représentés au sein des régisseurs, etc. J'ai indiqué, hier soir, que l'intention du gouvernement était de revoir la composition de la Régie, la formation de la Régie, en fonction de la personne qui occupe la fonction beaucoup plus que ce qui a pu paraître dans le passé comme étant des représentants de différents secteurs. On sait qu'il y a des gens qui viennent du milieu coopératif, qu'il y a des gens qui viennent du milieu syndical, etc., et là, je ne veux pas - je vais répéter ce que j'ai dit hier - je ne veux pas jeter la panique, là, ça ne constitue pas un préavis de licenciement collectif, cette affaire-là, mais, chose certaine, cette perception de ceux et celles qui sont administrés par cette loi a été pendant longtemps... Ben, la Régie est composée à la fois de membres provenant de... Non, on va tenter de corriger cette situation-là et la notion de représentation, on la voit beaucoup au sein des chambres de coordination et de développement où là, vous serez, l'ensemble des intervenants sera dûment représenté et défendra les intérêts, etc. Merci beaucoup d'être venus nous saluer ce matin, j'apprécie votre mémoire et, encore une fois, merci pour le travail éminemment important que vous faites pour le secteur agricole québécois. Même s) c'est corsé, même si le libre-échange, on doit y faire face, même si les consommateurs sont plus exigeants, même si le marché du frais se développe rapidement, soyez persévérants, continuez à bien faire ça, on a confiance en vous autres. Merci.

Le Président (M. Richard): M. le député d'Arthabaska et porte-parole officiel de l'Opposition, vous avez la parole.

M. Baril: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à ce groupe qui est venu présenter son mémoire. Je n'élaborerai pas longtemps sur votre mémoire puisque vous avez dit, à la fin de votre présentation, que vous aviez hâte de nous entendre vous poser des questions. Donc, je vais vous poser des questions et je vais vous laisser y répondre et non répondre moi-même. On sait que le ministre, puisqu'il a introduit dans la loi ce nouveau mécanisme de chambre de coordination, on le croit, il n'a pas à plaider sur la valeur de ce nouvel organisme. Moi, j'aimerais ça vous entendre sur ce que vous en pensez de cette chambre de coordination? Et telle que définie, telle que présentée dans le projet de loi, sera-t-elle efficace? J'aimerais vous entendre sur ça.

M. Ostiguy (Marcel): Je vais commencer et je vais répondre a la première de vos interrogations sur les chambres de coordination. Je pense que dans le présent et dans le futur, on doit jouer énormément sur les mentalités. Le secteur des légumes et des fruits de transformation a vécu des modifications importantes au niveau de la transformation. Lorsqu'on explique présentement à nos fournisseurs, aux producteurs agricoles, qu'ils doivent modifier leur vision du futur, qu'ils doivent modifier leur type de relation avec les acheteurs, ils ont énormément de difficultés à nous croire. La Loi sur la mise en marché des produits agricoles et le plan conjoint ont aidé à développer, chez les producteurs agricoles, une mentalité qu'ils ont l'impression qu'ils ont énormément de pouvoirs et que cette loi et le plan conjoint ne les obligent pas à changer leur structure de fonctionnement pour s'adapter à la compétition du marché mondial. Je ne pense pas qu'on va pouvoir vivre avec des chambres ou des - moi, j'appelle ça des - tables de confrontation et des tables de coordination ou de concertation. J'ai de la difficulté à voir qu'une journée, je m'assois avec les producteurs agricoles et je suis en confrontation très sévère et très dure et, la semaine suivante, on convoque une chambre de coordination et là, on dit: On va essayer de s'entraider. Il faut essayer d'en arriver à marier ces deux mentalités-là et en arriver à n'avoir qu'une chambre et qu'un mode de fonctionnement et non pas deux modes de fonctionnement qui font qu'une journée, on se confronte énormément et une journée, on dit: On est gentils, on est fins, on va s'entraider.

Je pense que l'industrie de la transformation dans laquelle nous sommes n'a pas 10 ans pour s'adapter au libre-échange. Nous avons, et moi j'en suis convaincu, environ 2 à 3 ans. Si, en 1993-1994, on n'a pas restructuré l'industrie de la transformation et on n'a pas restructuré l'industrie primaire que sont les producteurs agricoles, on va avoir énormément de difficultés à s'ajuster sur les marchés mondiaux. Dans le fond, moi, je serais porté à vous dire: Vous devriez peut-être refaire votre loi et la baser uniquement en fonction de tables de concertation et oublier vos tables de confrontation qui sont une grande partie du projet de loi. Il faut développer la mentalité. J'ai l'impression que le projet de loi ne va pas assez loin pour l'ouverture qu'on doit avoir pour le futur dans des tables de concertation et j'ai l'impression qu'on laisse beaucoup trop de place à la confrontation. Pour le bien de l'industrie agro-alimentaire, si, nous, on ne passe pas à travers, les producteurs n'auront personne à qui vendre leurs produits et c'est excessivement important que les acheteurs passent à travers.

M. Baril: J'aimerais peut-être que vous expliquiez davantage comment, telle que formulée dans la loi, vous pouvez comparer cette chambre

de coordination à une table de confrontation. J'aimerais ça que vous...

M. Ostlguy: Écoutez, lorsqu'on s'en va négocier, je pense que... Moi, depuis deux ou trois ans, je suis allé une fois aux tables de négociation mais, dans les premières années, j'ai fait partie du comité consultatif qui a amené l'implantation du plan conjoint. J'ai, jusqu'en 1986, été, presque toujours à la table centrale aux négociations des producteurs agricoles. Lorsque vous implantez un plan conjoint, dans le passé et encore même aujourd'hui, les producteurs ont toujours eu l'impression que, ouf!, on est corrects. Avec cette structure, on peut se permettre de "fighter" énormément - je m'excuse du terme - la transformation. (11 heures)

Lorsque vous avez un plan conjoint, je pense que dans la mentalité qui existe présentement, on en arrive à des confrontations assez sévères. Je donne un exemple: l'an dernier, avant le début des négociations, on avait rencontré, M. Tourillon et moi, la Fédération des producteurs de légumes de transformation et on leur avait brossé un tableau assez exact et réaliste de la situation de l'industrie et les changements qu'on devait apporter à court terme pour permettre à certaines productions de survivre. Un an après je peux vous dire qu'il n'y a personne qui nous a pris au sérieux et ce que nous avons dit s'est réalisé et ça a entraîné des fermetures d'usines et des pertes de production importantes. Je pense qu'il faut jouer sur les mentalités. C'est probablement la responsabilité de tout le monde dans cette salle de jouer sur les mentalités. C'est aussi la responsabilité du législateur de faire passer la mentalité par ses projets de loi, mais je pense que c'est une responsabilité commune. Présentement, de ce que les producteurs ou les représentants qui administrent les plans conjoints et rencontrent les acheteurs, il y a encore un pourcentage trop élevé de temps qui est alloué à la confrontation pour le peu de temps alloué à l'analyse de la situation et à regarder le futur et voir comment on doit modifier la structure industrielle et notre façon d'avoir des relations entre nous.

M. Baril: Comme ça, vous pensez que le projet de loi, tel que présenté, ne jouera pas sur les mentalités, comme vous le dites, et qu'avec la chambre de coordination, il y aurait place pour amélioration, sans doute. Mais est-ce que ce serait par le biais - je vais oser dire - d'un transfert de pouvoirs d'un organisme à un autre au niveau de la chambre de coordination, si on donnait plus de pouvoirs, ce serait mieux défini ces pouvoirs? Pensez-vous que ça pourrait influencer les mentalités ou si vous n'y croyez pas pantoute?

M. Ostiguy: Moi, monsieur, je crois énor- mément à la coordination, à des objectifs en commun. Je ne pense pas que les producteurs agricoles, dans le secteur dans lequel nous sommes, pourront évoluer si on ne se restructure pas. Si on ne se restructure pas, ils ne pourront pas évoluer. Je pense que la chaîne est très importante et si vous avez un maillon de la chaîne qui ne veut pas fonctionner, il n'y a rien qui va fonctionner. Dans notre secteur, autant la transformation que tous les fournisseurs de services, que ce soient les produits agricoles, une boîte de carton, un emballage, présentement tout le monde est en restructuration. Si on prend le secteur de la transformation, tous nos fournisseurs d'emballages sont en réorganisation et d'une façon très accélérée depuis 12 mois. Je pense que la réorganisation au niveau agricole et le mode de fonctionnement, il va falloir l'accélérer et non pas prendre dix ans; il va falloir ne prendre que deux ou trois ans pour le faire.

M. Baril: Je suis heureux de constater que votre groupe est très préoccupé de l'arrivée du libre-échange, de l'adaptation au libre-échange. À plusieurs reprises, nous avons demandé que les gouvernements, par différentes mesures, participent à ce que l'économie québécoise s'adapte au libre-échange. Il y a une couple d'années, quand l'avant et l'après immédiat de cette entente avec les Américains, on en a entendu beaucoup parier dans les journaux, il y a eu différentes oppositions à ça, et maintenant que cette entente est signée, on s'en va dans le canal et les gens semblent moins ouverts aux préoccupations et aux conséquences. Je ne veux pas dire conséquences uniquement négatives de tout ça, mais il est évident qu'il va falloir que notre économie se vire de bord et vite pour s'adapter à ça.

Croyez-vous que la mécanique des plans conjoints, tels que présentés et définis dans le projet de loi actuel, est adéquate pour que notre production et notre mise en marché s'adaptent au libre-échange dans les années à venir?

M. Ostiguy: C'est une grande question. Évidemment, je pense qu'on n'est pas venus ici initialement pour s'élever contre les plans conjoints. Ça fait déjà un bon nombre d'années qu'on y travaille. Ça fait un bon nombre d'années qu'on essaie de bonifier nos relations puis d'améliorer la situation qui nous a été imposée. Mais, quand même, je pense qu'il faut dire qu'on est un groupe qui l'a acceptée assez docilement.

Il y a d'autres secteurs de l'industrie où c'est peut-être un petit peu moins docile qu'on l'est. Mais au niveau des coûts, c'est simplement au niveau des coûts afférents à l'administration des plans conjoints et les coûts que ça peut amener pour nos productions où, le jour où ça affecte notre compétitivité... Et vous avez vu comment, pour nous, l'exportation, c'est important. Quand on va jouer dans la cour des )

marchés mondiaux, le jour où on n'est pas capables d'être compétitifs, on se fait planter tout simplement.

À date, au Canada, on a réussi à tirer notre épingle du jeu. Nos principaux compétiteurs sont venus des Maritimes, ils sont venus de l'Ontario. On a vécu des hauts, dans les années passées, parce que dans certaines productions, on a marqué des points. Par contre, dans d'autres productions, on a vécu des bas. Je vous ai expliqué le cas de la tomate où c'est complètement disparu du Québec. Mais, malgré ce qui s'est passé, on a réussi à survivre et à se comporter comme une industrie qui vaut la peine d'être supportée.

Alors les plans conjoints, en autant qu'ils ne sont pas là pour nous enfarger constamment puis nous procurer des coûts qui nous empêchent d'être compétitifs, je pense qu'on est capables de vivre avec. Je reviens au niveau des chambres de coordination. Les chambres de coordination, dans le projet de loi, c'est quelque chose de nouveau. Mais vous savez que dans la pratique, c'est quelque chose qui se fait déjà, la concertation puis la coordination.

M. Pagé a fait référence tantôt à la baisse de consommation dans les légumes transformés. Mais, à un moment donné, on s'est assis ensemble avec les producteurs agricoles, avec le gouvernement et on s'est concertés. On a dit: Oui, on devrait adopter une stratégie de publicité de promotion générique. Alors, on a fait exactement ce que je pense qu'une chambre de concertation peut faire, et on l'a fait sans que ça soit structuré dans une loi. Maintenant, quand ce sera structuré puis organisé, la question que je me pose, c'est: Est-ce que ça va amener des coûts tellement exorbitants que ça va nous empêcher d'être compétitifs? Alors, c'est l'interrogation que je me fais. Puis je n'ai peut-être pas tout à fait la réponse. D'autant plus que je remarque également que les chambres de coordination sont des chambres à caractère volontaire. Je pense que les chambres vont naître au fur et à mesure que les besoins vont se présenter, je suppose. C'est un peu mon opinion là-dessus. J'aimerais peut-être que M. Tourillon aborde une autre question des éléments qui ont été soulevés tantôt.

M. Tourillon (Jules): Et qui, peut-être, feront le lien avec ce qu'on mentionnait tantôt en ce qui touche la compétitivité, la concurrence, et le travail qui se fait pour arriver à tirer notre épingle du jeu avec le libre-échange. Dans la question de libre-échange, les journaux en parlent moins, mais peut-être que les compagnies y travaillent beaucoup plus. Mais notre position, même si on nous dit, par exemple, que le marché américain peut s'ouvrir à nous, est extrêmement difficile. Si on prend des éléments du coût de revient, il y a la question des légumes. Les études qu'on a, jusqu'à maintenant, nous indiqueraient qu'on les payerait plus cher que les Américains.

Un autre élément important du coût, ce sont les boites, les boîtes de métal. Un travail se fait, à l'heure présente, pour réduire les coûts des boîtes de métal, mais les différences de coûts entre ce que nous payons et ce que nous serons peut-être appelés à payer cette année et les années suivantes sont considérables.

Une partie du chemin - et une partie importante - va se faire. Il y a aussi les questions de main-d'oeuvre. La main-d'oeuvre au Québec et au Canada est plus élevée qu'aux États-Unis. Et il y a des questions qui dépendent aussi de la politique du fédéral, qui ont trait à la valeur du dollar canadien et aux taux d'intérêt. Si on regarde simplement les taux d'intérêt, une conserverie américaine peut avoir, à l'heure présente, de l'argent à environ 10 %. Nous devons payer pas loin de 15 %. Et la différence est de 5 %, si je fais la différence, disons, entre 10 % et 15 %, mais elle est de 30 % si je prends 5 % sur les 15 %. Tous ces éléments font qu'au point de vue concurrence, même si on nous dit que le marché est ouvert, avant que nous l'atteignions, il va falloir que nous fassions une première chose, c'est que nous nous assurions que nous allons survivre.

Je fais le point avec l'article 38. Je comprends le problème qu'a le ministre. D'autre part, dans l'obligation que nous avons d'être compétitifs, nous avons aussi à voir à ce que toutes les dépenses qui sont reliées à l'achat des légumes soient réduites au minimum. Et sans entrer dans les questions de philosophie, il nous apparaîtrait injuste et inacceptable d'être obligés de payer les frais de négociation de la partie syndicale et de la partie de l'acheteur, enfin, de la partie du plan conjoint et de la partie du producteur, et il nous apparaîtrait qu'au point de vue compétitivité, même si cela ne représentait que 1 % ou 2 %, ce serait suffisant pour créer des embûches qui pourraient mettre en danger notre capacité de survivre, sans compter celle d'exporter vers les États-Unis.

M. Baril: Oui, je partage vos préoccupations au niveau des taux d'intérêt, c'est bien évident, mais on forme un tout. Le producteur lui-même a aussi à supporter, à vivre cette situation économique et financière et pour les plans conjoints - le ministre l'a dit tout à l'heure, je ne veux pas le résumer - les agriculteurs se sont regroupés pour avoir, évidemment, de meilleurs prix et vous assurer à vous aussi une plus grande régularité d'approvisionnements. La formule des plans conjoints, c'est tout ça aussi. Je vais terminer en disant tout simplement que c'est tout ça, le coût du fédéralisme.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Baril: Je vous remercie d'avoir répondu

aux questions pour édaircir davantage, en tout cas, les inquiétudes qu'on avait dans ce projet de loi.

Le Préskient (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. Est-ce qu'il y a un commentaire final, M. le ministre?

M. Ostiguy: moi, j'ai peut-être un commentaire à donner à m. le député d'arthabaska qui posait une question, à savoir s'il pensait que le projet de loi actuel pourrait répondre à la mentalité que je souhaite voir développer. je pense que le projet de loi actuel a le mérite d'apporter une nouvelle vision que l'ancien projet de loi n'avait pas. je pense qu'il y a des ouvertures dans ce projet de loi qui peuvent être intéressantes et l'invitation que le législateur ou que le ministre fait à l'ensemble de l'industrie de coordonner son effort et d'essayer de travailler à un développement, je pense que ça doit être reçu d'une façon très positive par l'ensemble du secteur.

Je pense que le projet de loi actuel a le mérite d'essayer d'influencer, au moins, cette mentalité qui doit être mise de l'avant au cours des prochaines semaines, des prochains mois et des prochaines années, ce qui est excessivement important pour venir à bout de faire survivre l'agro-alimentaire.

Le Président (M. Richard): Merci, monsieur.

Une voix: Merci. (11 h 15)

M. Pagé: Merci beaucoup, messieurs, de votre présentation.

Le Président (M. Richard): Merci. Je demanderais au Regroupement de l'industrie céréalière et de la production animale de prendre place, s'il vous plaît.

Alors mesdames, messieurs, nous vous souhaitons la bienvenue. Je vais peut-être faire seulement une petite modification dans la procédure, qui ne vous touche pas, là, votre présentation, c'est 20 minutes. Si vous permettez M. le ministre, M. le représentant de l'Opposition, on fonctionnera par blocs de 10 minutes, par alternance...

Une voix: Oui, oui.

Le Président (M. Richard): ...sans vous arrêter, évidemment, dans le milieu d'une phrase.

M. Pagé: ...mais à l'avenir on a le ferme propos de ne plus recommencer.

Une voix: On a utilisé longtemps cette formule.

Le Président (M. Richard): Suite, évidemment, à des ententes qu'il y a eu entre les deux bureaux de leaders. Alors messieurs, vous avez la parole.

Regroupement de l'industrie céréalière et de la production animale

M. Boivin (Gilles): Alors bonjour messieurs, madame, M. le ministre.

Le Président (M. Richard): Je m'excuse. Évidemment, vous vous présentez d'abord et vous présentez vos collègues pour les fins de transcription pour des gens qui sont dans une autre boîte, qui ne vous voient pas, malheureusement.

M. Boivin: Je pense qu'en tout premier lieu il serait peut-être bon de spécifier que les sssociations représentées ici sont l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale, l'Association professionnelle des meuniers du Québec, l'Association des négociants en céréales du Québec...

Le Président (M. Richard): Excusez, monsieur, je m'excuse, c'est parce que la problématique, il faut vous identifier, d'abord, parce qu'à l'autre bout, ils écrivent: C'est monsieur Unte) qui dit ça. Autrement, ils sont obligés de revenir et...

M. Pagé: M. le Président, si vous me le permettez, je crois comprendre que notre invité présentait chacune des association pour ensuite présenter qui représente quelle association...

M. Boivin: Exactement.

M. Pagé: ...dans les gens qui l'accompagnent.

M. Boivin: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Richard): Alors si vous voulez inverser la machine, juste nommer le nom en premier, et après ça vous continuez.

M. Boivin: Mon nom est Gilles Boivin, président de l'Association des négociants en céréales du Québec.

Le Président (M. Richard): Magnifique.

M. Boivin: Bon, il serait opportun de présenter les individus présents ici aujourd'hui. M. Réjean Faubert, qui est de Canada Packers, division Shur-Gain, qui représente aussi l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale, M. Christian Breton, de la Maison Nap Breton, directeur de l'APMQ, remplace Mme Laurence Couture, qui, elle, est présidente de l'Association professionnelle des meuniers du Québec, M. André Pilon, directeur général de

l'Association professionnelle des meuniers du Québec, et M. Yvon Gendron, président de l'Association des centres de grains régionaux du Québec. Il y a aussi, excusez-moi, M. Cadorette qui représente la maison Nutribec. Il est juste en arrière de nous.

Le Président (M. Richard): Vous pouvez vous asseoir ici, monsieur sur la chaise, là.

Une voix: Vous pouvez vous asseoir ici, monsieur, près de la console.

Le Président (M. Richard): Allez, allez, vous ne vous en exempterez pas.

M. Pagé: Vous avez l'air d'un joueur de hockey en punition.

Des voix:...

Le Président (M. Richard): Oui, parfait, excellent.

M. Boivin: Alors donc nous voudrions... Une voix:...

Le Président (M. Richard): Continuez, monsieur, vous avez la parole.

M. Boivin: ...dans un premier temps, souligner l'effort de synthèse et de réflexion de la part des membres du comité chargé d'examiner la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et des législations connexes. Nous tenons aussi à les féliciter pour la qualité du rapport qui en a découlé. Quiconque veut connaître l'origine de la nouvelle vision de l'industrie agricole et alimentaire du législateur exprimée dans le projet de loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires se doit de lire attentivement le rapport du comité. Nos associations respectives avaient déjà présenté des mémoires à ce comité. Nous sommes heureux de constater que certaines de nos recommandations et de nos réflexions ont trouvé un écho favorable dans le rapport du comité. Notons au passage que la lecture du rapport du comité nous a conduits à certaines attentes que l'on ne retrouve guère dans le projet de loi actuel. De ce fait, nous apprécions l'opportunité de nous faire entendre aujourd'hui. À titre d'exemple, citons la valeur des quotas. Alors que le rapport du comité recommandait que les fédérations et les offices prennent certaines mesures à cet égard, le projet de loi est plus que discret à ce sujet.

D'un point de vue général, dans un premier temps, précisons que nous supportons entièrement le fait que la Régie des marchés agricoles devienne la Régie des marchés agricoles et alimentaires. Cela démontre clairement que le législateur voit la nécessité de considérer le secteur de la production agricole non comme étant un tout en lui-même, comme secteur, mais plutôt comme en étant un qui fait partie d'un tout, c'est-à-dire de la production à la consommation. À cet égard, nous souscrivons entièrement à la recommandation du comité, à savoir qu'il fallait élargir la portée de la loi pour qu'elle embrasse de façon fonctionnelle tout le secteur agro-alimentaire. Pour ce faire, il apparaissait opportun de promouvoir un mécanisme additionnel à celui des plans conjoints pour impliquer concrètement tous les participants. Ici, par mécanisme additionnel, on fait bien sûr référence aux chambres de coordination.

Dans le contexte actuel, cette nouvelle vision, qui tient compte des bouleversements profonds qui pointent à l'horizon et qui toucheront sûrement non seulement le secteur de la production agricole mais l'ensemble des secteurs de l'agro-alimentaire, constitue dans les faits une ouverture d'esprit tout à fait nouvelle de la part du législateur. Cette invitation à la convergence plutôt qu'à la divergence entre les différents intervenants de la chaîne sera, nous l'espérons, acceptée d'emblée par ces mêmes intervenants.

Au sujet des articles fondamentaux du projet de loi, certains articles nous sont apparus comme essentiels au projet de loi, notamment le chapitre XII touchant à la présence des chambres de coordination et de développement. Nous avons, bien sûr, quelques commentaires à formuler mais nous souscrivons entièrement au principe qui veut que les intervenants se parlent et fassent connaître leurs intérêts. Il est à souhaiter que ces chambres deviennent un véritable lieu de concertation. Et si vous me le permettez, nous y reviendrons un peu plus tard, d'ailleurs, dans l'exposé.

Nous souscrivons au libellé des articles 39, 60, 106 et 203 du projet de loi qui interdit à un office d'utiliser les contributions perçues pour financer la mise en place ou le fonctionnement d'une entreprise commerciale. D'ailleurs, cela correspond exactement à notre position exprimée devant les membres du comité en avril 1988.

Nous voudrions aussi souligner l'importance de l'article 79 qui donne aux associations accréditées un pouvoir de taxation afin de leur permettre de jouer véritablement le rôle que le législateur attend d'elles en vertu de ce projet de loi.

Pouvoir de révision des décisions de la Régie. Dans son mémoire, le comité insistait sur la nécessité de rescinder le pouvoir de révision des décisions de la Régie par le gouvernement. Nous acquiesçons entièrement au principe que dans notre pays, il y a séparation des pouvoirs politique et judiciaire. Maintenir ce pouvoir actuel dans le projet de loi déposé risquerait d'amener quelquefois une révision des décisions pour des considérations électorales plutôt que de les réviser dans une véritable vision des

intérêts de l'ensemble des gouvernés.

Dans un même souffle, nous soulignons l'importance de nommer à la Régie des personnes reconnues dans leur milieu pour leur compétence, leur intégrité et leur vision. En d'autres termes, non pas pour services rendus ou pour considérations politiques, mais bien pour leur compétence et leur intégrité. Les régisseurs, quitte à en accroître le nombre, devraient représenter équitablement tous les secteurs de la chaîne agro-alimentaire.

Bien que nous souscrivons au fait que le gouvernement ne puisse réviser les décisions de la Régie, il y aurait lieu de prévoir dans la loi la présence d'un ombudsman - cela existe pour les citoyens ainsi qu'à Hydro-Québec - qui pourrait recevoir les plaintes des personnes, entreprises ou institutions visées par la loi. Cet ombudsman aurait un pouvoir d'enquête et, si les plaintes sont fondées, un pouvoir de recommandation au niveau du ministre chargé d'appliquer la loi. On aimerait faire remarquer que tout au long de nos commentaires au sujet des différents articles du projet de loi, l'ombudsman est omniprésent. Donc, j'en parie ici, mais c'est un peu une omniprésence qu'on veut. On veut qu'il soit là pour chapeauter le tout. En passant, l'ombudsman, bien entendu, devrait être neutre.

Mise en marché par un producteur et administration d'un plan conjoint.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boivin: L'article 60 du projet de loi se lit comme suit: "L'administrateur d'un office chargé d'appliquer un plan ne peut être administrateur d'une entreprise de transformation et de commercialisation du produit visé par ce plan sauf si cette entreprise en fait également la production." Il serait nécessaire de faire une distinction entre le producteur qui commercialise son produit et celui qui le commercialise pour le compte d'autrui. Je pense qu'il y a une grosse différence là-dedans. Cet article 60 peut peut être être contourné par le simple fait que quelqu'un peut, du jour au lendemain, devenir producteur en ne produisant que sur une petite parcelle, faire la commercialisation de produits d'autrui et passer outre à l'article 60. Donc, comme on dit, il serait nécessaire de faire une distinction entre le producteur qui commercialise son produit et celui qui commercialise pour le compte d'une autre personne ou d'autrui.

L'examen périodique. L'article 41 se lit comme suit, si vous me le permettez: "À la demande de la Régie et au plus tard à tous les cinq ans, chaque office établit devant la Régie ou devant les personnes qu'elle désigne pour lui faire rapport, que le plan et les règlements qu'il édicté servent les intérêts de l'ensemble des producteurs et favorisent une mise en marché efficace et ordonnée du produit visé." On souscrit entièrement à l'objectif visé par cet article, mais, cependant, il devrait s'appliquer tout autant aux chambres de coordination et de développement, aux associations accréditées qu'aux offices de producteurs. Je crois que, même s'il y a des chambres de coordination de créées, il y aurait lieu d'avoir des révisions périodiques, au minimum, tous les cinq ans.

Commentaire général sur l'article 90. J'aimerais attirer votre attention sur quelques alinéas de cet article, en particulier le troisième, le cinquième et le septième. À l'article 90, on peut lire: "Un office peut, par règlement, contingenter la production et la mise en marché du produit visé par le plan qu'il applique et, à cette fin, les assujettir aux conditions, restrictions et prohibitions qu'H détermine. "Sans restreindre la portée du premier alinéa, un office peut, par règlement - et là, on va dans les différents alinéas, au troisième - déterminer les conditions d'émission, de maintien ou de renouvellement et les modalités de délivrance d'un contingent individuel; - au cinquième alinéa - déterminer les modalités et les conditions de suspension ou de réduction temporaire ou définitive du contingent d'un producteur qui ne se conforme pas au plan, à un règlement, à une convention homologuée ou à une sentence arbitrale ou lorsqu'il produit ou met en marché une quantité du produit visé par le plan supérieure ou inférieure à celle permise par son contingent".

Concernant l'article 90, le commentaire général est le suivant. Premièrement, on n'aimerait pas que ce soit un article à caractère restrictif au niveau technologique ou de la compétitivité. Il y aurait lieu de prévoir qu'un plan conjoint ou un office ne puisse empêcher l'Implantation de nouvelles technologies ou de nouveaux intervenants qui amélioreraient la mise en marché d'un produit, autrement dit, que ce que l'on crée ne soit pas nécessairement mis en vase clos après coup. Donc, le quatrième alinéa, au niveau de la fixation des quotas, devrait se lire comme suit: Établir des équivalences basées sur les superficies cultivées ou les volumes, parce qu'à l'alinéa 4, on essaie d'établir des équivalences basées sur la superficie cultivée, ce qui, peut-être, exclut la notion de productivité. Bien entendu, le cinquième et le septième alinéas devraient être reformulés, car ce pouvoir d'annulation ou de suppression d'une partie du quota ne devrait appartenir qu'à la Régie. Il devrait, bien sûr, aussi tenir en considération le cas de force majeure. (11 h 30)

Disposition d'un quota, à l'article 91: "Seule la personne ou la société qui produit le produit visé par un plan peut être titulaire d'un contingent délivré par un office et l'exploiter.

Toutefois, cette disposition n'empêche pas un nouveau producteur de devenir titulaire d'un contingent."

Le troisième paragraphe, qui nous apparaît

assez important, dit: "Le premier alinéa ne s'applique pas à une institution de crédit". Le commentaire qu'on voudrait formuler, c'est qu'au lieu de simplement donner l'exemple de l'institution de crédit, elle devrait plutôt dire: ...ne s'applique pas à un individu, une entreprise, un prêteur ou à une institution de crédit, parce qu'il n'y a pas seulement les institutions de crédits qui peuvent être dans la peau d'un prêteur.

Ententes avec les autres gouvernements et leurs organismes. À l'article 99, on lit: "Le gouvernement peut, aux conditions qu'il détermine, permettre à un office". Nous, on aimerait voir: "...aux conditions qu'il détermine," permettre à la Régie ou à une chambre de coordination et de développement, s'il en existe une, donc simplement remplacer l'office par la Régie ou ta chambre de coordination.

Comme on l'a dit tout à l'heure - on revient aux chambres de coordination et de développement - nous sommes franchement déçus du libellé des articles touchant les chambres de coordination et de développement. Selon le contenu actuel du projet de loi à ce sujet, le législateur a voulu, tout au plus, institutionnaliser les anciens comités consultatifs, lesquels, nous devons le reconnaître, à l'instar du comité chargé d'examiner la loi, n'ont pas joué le rôle que l'on attendait d'eux. Si l'on tient vraiment à la concertation des partenaires, le législateur devra donner de véritables pouvoirs à ces chambres. À notre avis, la présence de telles chambres est tout aussi révolutionnaire que pouvait l'être la présence des plans conjoints dans la loi de 1957, sur la mise en marché des produits agricoles. Ces chambres constituent, pour nous, les plans conjoints de l'agro-alimentaire. Il faut que ces chambres deviennent un lieu privilégié de discussions afin que chacun des intéressés fasse valoir, non seulement ses intérêts premiers, mais comprenne bien quels pourraient être, à long terme, ses véritables intérêts.

À notre avis, il faut qu'il y ait une chambre pour chacune des productions contingentées actuellement. La Régie et les offices de producteurs ont pour but, entre autres, de permettre aux producteurs de vendre leurs produits à meilleur prix et dans les meilleures conditions. Dans le projet de loi, rien n'est prévu pour permettre aux intermédiaires et aux consommateurs de tirer avantage de ce processus. Pourtant, les acheteurs et les intermédiaires font partie intégrante des négociations avec les offices de producteurs. Les rôles et les devoirs de ces derniers ne sont pas définis. De plus, la présence des consommateurs n'est pas explicitement prévue dans les chambres.

Il y aurait lieu de donner un rôle actif aux chambres en leur faisant entériner les ententes négociées ou imposées par les offices de producteurs. Les chambres seront formées de producteurs agricoles, de fournisseurs d'"intrants" et de services, de transformateurs, de distributeurs et de consommateurs.

L'article 111, qui dit: "Les offices, associations ou autres personnes intéressées à la production ou à la mise en marché d'un produit agricole peuvent s'entendre pour demander à la Régie de former une chambre de coordination et de développement concernant la production ou la mise en marché de ce produit", devrait se lire ainsi: "Les offices, associations ou autres personnes intéressées à la production", à la transformation, à la distribution et à la consommation d'un produit agricole, donc inclure tous les maillons de la chaîne.

À l'article 113, au deuxième paragraphe devrait se lire, on lit: "Les requérants doivent représenter des producteurs et au moins un groupe d'autres personnes". Nous, on suggère plutôt: "Les requérants doivent représenter, au moins deux regroupements intéressés à l'intérieur de la chaîne agro-alimentaire, et non pas d'avoir comme prérequis la demande d'un producteur.

Les garanties de paiement, au chapitre XIV, l'article 144. La garantie de paiement devrait s'appliquer à tous les intervenants de la chaîne agro-alimentaire. À l'article 144 - il y a quand même six alinéas - on parle de garantie de paiement. En ce qui nous concerne, c'est une obligation unilatérale qu'on aimerait voir révisée. Le producteur a une garantie, c'est le seul qui a une garantie. On parle, plus tard, de fonds de compensation, mais, au niveau de la garantie, c'est plutôt ce qu'on appellerait, nous, une obligation unilatérale qu'on aimerait voir révisée.

Responsabilité d'un office, à l'article 149. Si un office peut prendre un règlement pour constituer un fonds pour garantir les paiements des sommes dues aux producteurs, il devrait, en contrepartie, garantir les engagements pris par les producteurs en regard du plan conjoint qu'il administre. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, ça devient, à ce moment-là, une obligation unilatérale qu'on aimerait peut-être voir améliorée. Fonds pour garantir les paiements: c'est la chambre, lorsqu'elle existe, qui devrait constituer et administrer ces fonds.

À l'article 152, dépôt des sommes des fonds perçues, la chose qu'on aimerait peut-être voir amenée ou peut-être additionnée, c'est que les sommes perçues des producteurs par l'office, par l'association accréditée ou par la chambre de coordination et de développement pour constituer un fonds seront déposées auprès de la Caisse de dépôt ou de toute autre institution financière régie par la Loi sur l'assurance-dépôts du Québec. En effet, on ne voit pas pourquoi ça doit être limité à la Caisse de dépôt.

Enquêtes et inspections. À l'article 158 du projet de loi, au niveau des enquêtes, on aimerait voir la Régie elle-même faire et mener les enquêtes et non des individus pouvant potentiellement être en conflit d'intérêts. Aux articles 164 et 165, encore une fois, c'est le rôle de la Régie, exclusivement, et pas de l'office.

En gros, ceci termine nos représentations. Je pense qu'il y a lieu d'avoir des discussions, maintenant. Merci de nous avoir entendus.

Le Président (M. Richard): Merci, monsieur. M. le ministre, pour votre premier bloc de dix minutes au niveau du questionnement, vous avez la parole.

M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je voudrais remercier nos visiteurs, ce matin, soit l'Association canadienne des industries de l'alimentation animale, l'Association professionnelle des meuniers du Québec, l'Association des négociants en céréales du Québec et l'Association des centres de grains régionaux du Québec. Ils nous présentent un mémoire très étoffé, très détaillé, aussi, et très intéressant. Je ne suis pas convaincu qu'on va pouvoir, ce matin, dans le temps qui nous est imparti, voir chacune des modifications que vous demandez. Cependant, je peux vous assurer que le tout est pris en considération, que c'est analysé du côté ministériel, etc.

Je retiens que vous êtes favorables au dépôt d'une loi qui vient modifier les règles du jeu établies par la loi originale. Je crois que vous avez très bien saisi l'intention du gouvernement, et ça se reflète, d'ailleurs, dans vos commentaires, puisque vous indiquez votre satisfaction et que vous supportez le fait que la Régie des marchés agricoles devienne la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. La référence que vous y faites correspond, d'ailleurs, exactement à nos intentions: Qu'on tienne compte, non seulement de la production, mais aussi de l'ensemble de l'activité qui s'amorce, évidemment, par la production, mais qui se réfère aussi au conditionnement, à la transformation, à la mise en marché de ce produit-là avant que le produit final ne soit lui aussi mis en marché après transformation.

La vision que vous manifestez comme suite du contexte actuel - on n'a qu'à penser au GATT, à l'entente de libre-échange, etc. - est rigoureusement exacte, à savoir que, par cette loi, les nombreux intervenants auront les éléments en main. Ils auront des dispositions qui leur seront accessibles en vertu de la loi pour véritablement agir en convergence, comme vous le dites, plutôt que de se limiter à des situations ou à des relations qui, statutairement, s'inscrivent souventefois en divergences.

Vous parlez des articles fondamentaux, vous nous dites que vous êtes sécurisés par le libellé des articles 39, 60, 106 et 203 qui interdisent à l'office d'utiliser les contributions perçues pour financer la mise en place d'entreprises de transformation ou d'entreprises commerciales. C'est l'objectif que nous recherchons, merci de l'appui que vous nous donnez.

L'importance de l'article 79, qui donne, aux associations accréditées, un pouvoir de prélève- ment, afin de leur permettre de jouer véritablement le rôle que le législateur attend d'elles, ça va dans le sens de ce que je disais préalablement, à savoir que, pour le bénéfice d'associations comme la vôtre, j'entends prévoir des dispositions spécifiques qui feront suite à un amendement déposé, allant exactement dans le sens de vos représentations et de vos demandes, à savoir que les entreprises évoluant dans le secteur représentatif de vos associations devront payer leurs contributions aux dites associations représentatives.

Vous nous dites ici - ah ça, j'ai trouvé ça "cute" - et vous insistez pour que le pouvoir de révision des décisions de la Régie par le gouvernement soit aboli. Vous dites qu'il faut qu'il y ait une véritable séparation des pouvoirs politique et judiciaire et qu'il ne faut pas que la politique soit tentée de modifier des décisions de la Régie à la veille des élections ou des choses comme ça. J'apprécie votre témoignage parce que je m'en suis jamais servi. Je ne veux pas apporter de commentaires sur le fait que d'autres, qui m'ont précédé, s'en sont servis, mais j'apprécie votre appréciation. Cependant, vous nous dites qu'il faudrait créer un ombudsman, un genre de commissaire aux plaintes. En soi, ce n'est rien de méchant, ce n'est pas bête. C'est même intéressant de créer, d'envisager la création d'un poste d'une personne neutre, ça va de soi, sans conflit d'intérêts, ça va de soi, qui serait habilitée à donner un avis sur une décision de la Régie. Vous dites: Cet ombudsman devrait faire rapport au ministre. Mais si le ministre n'a pas de pouvoir, le ministre va faire quoi avec son rapport! Changer les commissaires? Mettre le rapport sur la tablette? La question est posée.

M. Pilon (André): Je pense, en fait, M. le ministre, que ce qu'on voulait dire ici, c'est que si, à un moment donné, nous, on se sent lésés dans des décisions qui peuvent avoir été prises par des fédérations, en accord, peut-être, avec la Régie, avant de se rendre au ministre pour pouvoir exposer notre point de vue et, dans notre esprit à nous, peut-être vouloir contester une décision rendue qu'on pourrait peut-être croire biaisée, on ait la possibilité d'exposer ça à une personne neutre, qui aurait à évaluer notre position ou notre point de vue, avant, encore une fois, de se rendre à un niveau plus élevé.

M. Pagé: Dans ce sens-là, O. K.

M. Pilon: C'est dans cette optique-là que...

M. Pagé: Parce que, quand on réfère à un ombudsman ou encore à un commissaire aux plaintes, comme c'est le cas pour Hydro-Québec, comme c'est le cas aussi en matière de protection du territoire agricole - quand il y a des conflits, à compter de maintenant, depuis le mois de septembre, quand il y a des conflits entre une

ville et le monde agricole, au niveau d'un règlement municipal qui risque d'agresser nos agriculteurs en zone verte, on a le commissaire aux plaintes - il faut voir que leurs pouvoirs sont quand même limités. Ici, la situation vécue par des entreprises comme la vôtre, en application de cette loi-là, ça réfère davantage a des éléments de négociation: fixation de prix, conditions de vente, etc. Souventefois, la Régie, de façon tout à fait pertinente, s'est prévalue de son pouvoir en envoyant le tout à l'arbitrage ou en nommant des médiateurs, etc. Jusqu'à date, je pense que l'expérience a bien été; la preuve; on a très peu de demandes sur le bureau du ministre, sauf la demande des coopératives qui s'inspire beaucoup plus d'une approche dogmatique que pragmatique - ça, c'est une autre affaire et on va y revenir la semaine prochaine.

Mais je prends note du fait que vous avez des réserves à ce que le ministre ou le cabinet art, ultimement, un pouvoir de révision. Je prends note, en contrepartie, toutefois, que vous souhaiteriez voir un mécanisme différent qui serait là pour, soit donner un avis, soit faire une recommandation, à la suite de décisions, entre guillemets, insatisfaisantes, à vos yeux, de la Régie. Vous avez ensuite... Il me reste combien de temps, M. le Président? (11 h 45)

Le Président (M. Richard): Deux minutes, M. le ministre.

M. Pagé: Deux minutes. Vous dites, concernant l'article 41: "Nous souscrivons entièrement à l'objectif visé par cet article. Cependant, il devrait s'appliquer tout autant aux chambres de coordination et de développement, aux associations accréditées, qu'aux offices de producteurs." Il faut dire que, pour le moment, tel que le projet de loi est rédigé, les chambres de coordination et de développement n'auront pas de pouvoir réglementaire ou de rôle... L'essentiel, c'est qu'elles soient conviées à un exercice de concertation. Quand vous disiez que les chambres, dans votre esprit, ont autant d'importance que les plans conjoints pouvaient en avoir dans les années cinquante, lorsqu'ils ont été créés, je suis persuadé, moi, que si la dynamique des chambres de coordination est bien conduite, si les gens y souscrivent - je vais vous affirmer quelque chose de peut-être gros ce matin - ça pourrait peut-être aller, à long terme, jusqu'à un remplacement purement et simplement des plans conjoints par les chambres de coordination, par les décisions des chambres de coordination, si c'est là le voeu des parties. Parce que l'objectif - et ça, c'était dans le rapport, d'ailleurs, du comité auquel vous avez participé - est très simple. C'est que plutôt que les gens se tapent dessus tous les ans ou tous les deux ans, lors de la révision des conditions de mise en marché des produits, soit qu'ils vendent ou qu'ils achètent, qu'ils travaillent ensemble à l'année.

Tiens, le plus bel exemple de ça, c'est dans le domaine du lait au Québec. Vous savez, le lait, c'est la première industrie en importance au Québec, en volume d'affaires. Nous sommes la province laitière au Canada. On a l'expertise, la tradition, la coutume, les connaissances, le "know-how". On s'est donné des structures de contrôle de production. On s'est donné des structures de contrôle de la qualité. On a le Centre d'insémination artificielle du Québec, le Programme d'amélioration des troupeaux laitiers. Les activités de la faculté de Médecine vétérinaire ont été spécialement adaptées, entre autres, à la production laitière. Nous sommes les "majors", au Canada. La force laitière canadienne s'appuie sur le quotidien de la production laitière au Québec. O.K.? Ça, c'est ça.

Mais jamais l'industrie laitière n'a été ou n'aura été, probablement, agressée comme elle l'est actuellement, jamais! Premièrement, l'Europe de 1992, avec un bloc homogène d'entreprises qui en font et qui en produisent aussi du lait, de la poudre de lait, du beurre et du fromage, est susceptible de venir nous affecter dans des marchés traditionnels que nous contrôlons. Il n'est pas impossible que des marchés importants, qui sont contrôlés par le Canada ou fournis par le Canada et, notamment, le Québec, soient perdus à la suite de la création d'Europe 1992. Ce n'est pas dans un siècle ça, c'est dans deux ans. Deuxièmement, on a une entente de libre-échange qu'on vient de commencer, qu'on vient d'amorcer. La première démarche, au lendemain du contrat de mariage, de la part des Américains, c'a été de tenter de soulever des points pour faire en sorte que la vie de couple soit de moins en moins vivable. On a vu l'attaque concernant le yogourt et la crème glacée. On est agressés de ce côté-là aussi.

Nous sommes, de plus, agressés à l'intérieur du Canada. La Colombie Britannique, avec 11 %, 10 % de la population canadienne, 3 % des quotas et une population en croissance, dit: Un instant, on en veut, nous autres aussi, du quota. La Fédération des producteurs de lait, le ministre de l'Agriculture du Québec, régulièrement, depuis trois ans, doit négocier avec son vis-à-vis en Colombie britannique pour tenter d'en arriver à des solutions où elle ne sortira pas du plan conjoint parce que, si elle sortait du plan conjoint, tel qu'elle l'avait avisé, ça ferait mal aux producteurs du Québec.

Or, pendant qu'on est agressés de tous bords tous côtés ici, c'est valse la marquise, ce sont des affrontements, des approches dogmatiques de la part de la coopération laitière au Québec qui dit, purement et simplement là, comme dans Garfield, je pense: "I want my cookie", je veux mon lait. Je veux tout mon lait et le lait de mes sociétaires doit être administré, dirigé vers mes usines. Ça, on y reviendra, parce que c'est possible que le ministre, si ça continue comme ça, leur propose même l'adoption d'une loi

spéciale pour leur donner leur lait, mais pas à n'importe quelle condition par exemple. On va aller voter, là. On va faire une campagne puis, là, les membres des coopératives décideront où est-ce qu'ils veulent aller. Ça, c'est s'il n'y a pas d'entente.

Ce que je veux vous dire, c'est qu'une chambre de concertation, si on en avait eu une dans le domaine du lait, il y a quatre ou cinq ans, si on était, aujourd'hui, dans une situation où il y aurait le moindrement la tradition de se parler, plutôt que de s'affronter et se taper dessus une fois par année ou une fois tous les six mois, on ne serait peut-être pas confrontés à ce problème-là aujourd'hui.

C'est ce qui me permet de vous dire que si les chambres de coordination sont bien comprises par les intervenants de l'ensemble des secteurs - et vous le dites, d'ailleurs, très bien que tous les secteurs devraient être couverts - j'ai la conviction, sans prétendre qu'avec cette loi on va changer l'histoire, mais je suis persuadé que, dans quelques années, la preuve aura été faite, si c'est bien utilisé, que non seulement c'est utile, mais que c'est déterminant pour la commercialisation des produits et pour tout ce qu'il y a en amont.

Merci de l'appui que vous donnez. Il y a peut-être des choses que vous souhaiteriez voir en plus dans ces chambres. Avec le temps, ça va venir, mais dites-vous bien qu'au départ c'est un organisme de concertation. Vous aviez une question, monsieur? C'est parce qu'il ne me restait que deux minutes.

M. Boivin: Oui. Juste un petit commentaire, M. le ministre. Vos commentaires sur les chambres de coordination et de concertation rejoignent - et on l'a dit dans notre texte - nos idées, mais, si elles n'ont aucun pouvoir spécifique, justement vous parliez de "know-how" tantôt, peut-être qu'elles risquent drôlement d'être confinées dans un rôle de discussion, puis sans aucun pouvoir. Jusqu'où les pouvoirs iront?

M. Pagé: Mais les gens pourront s'en donner des pouvoirs.

M. Boivin: On ne peut pas le mentionner ici, mais, sans aucun pouvoir absolu, on se pose la question: Est-ce que tout le "know-how" que les gens alentour de la table, dans une chambre de coordination, vont avoir peut être carrément confiné dans cette chambre-là et mourir quand ils vont passer la porte, si la loi n'est pas spécifique?

M. Pagé: Si ça peut vous sécuriser, ces chambres de coordination, si elles le décident, parce que ce sont les acteurs des plans conjoints qui seront assis là et d'autres acteurs aussi, dont la distribution des consommateurs, etc., si c'est là le voeu, s'il y a consensus là-dessus, pourront se donner des pouvoirs additionnels.

Vous êtes plus présents dans l'industrie du porc... Bon! le 7 ou le 8 février, on a conduit une expérience formidable, je dois vous dire que j'ai trouvé ça formidable ce qui s'est passé cette journée où on a pu échanger avec les producteurs de porcs, les transformateurs et les distributeurs, puis là, on a créé un comité de dynamisation et je suis persuadé que ce sera, éventuellement, la chambre de coordination et de développement dans la production du porc au Québec où vous serez.

C'était la première fois que tout ce monde-là s'assoyait avec un ministre, puis je dois vous dire que le pommier a été brassé un peu. On s'est adressé mutuellement des complaintes, etc. On a découvert des choses bien intéressantes: le pompage dans le porc, les petits défauts de chacun et les grandes qualités des uns et des autres, mais, à la fin de la journée, après que chacun ait dit ce qu'il pensait de l'autre, ce qu'il reprochait à l'autre, ce qu'il voulait dénoncer à l'autre, ou, encore, ce que chacun dénonçait au ministre, mais en s'adressant aux autres, ait été mis sur la table, à la fin de la journée, un souhait fut unanime: qu'on reprenne, puis au plus vite.

Le Président (M. Richard): M. le ministre, je dois vous arrêter dans votre intervention et transférer la parole à notre collègue de l'opposition.

M. Pagé: Tu as le même temps, sauf qu'on se le divisera.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Richard): M. le député d'Arthabaska, vous avez la parole.

M. Baril: Une chance que je ne m'enfarge pas dans la procédure, M. le Président, parce qu'on pourrait...

Le Président (M. Richard): Heureusement, M. le député d'Arthabaska.

M. Pagé: ...leader.

M. Baril: Vous avez une avance sur moi en tant que leader. Je vais continuer dans là même foulée que le ministre et que vous également, justement au niveau des pouvoirs de cette chambre de coordination. Le ministre vient de nous dire qu'un coup tout ce beau monde-là réuni autour d'une table, vous n'avez qu'à donner des pouvoirs à la chambre, mais, quand on regarde la formation des groupes qui sont représentés alentour de cette table-là, vous avez les représentants des offices de producteurs qui, déjà, par le biais de leur office, ont des pouvoirs et vous avez des représentants de vos organismes

de transformation, etc. qui, eux, ont déjà des pouvoirs. Alors, comment tout ce monde-là, alentour d'une table, quand il représente un organisme qui en a déjà, peut dire: Je vais enlever des pouvoirs à mon organisme et je vais les partager avec tous vous autres ensemble? De votre bord, vous voulez que cette chambre ait des pouvoirs, mais, pour lui en donner, il faut les prendre quelque part, donc il faut les enlever à quelqu'un. Avez-vous des suggestions à faire? Qui en a trop ou pas assez quelque part? C'est là, le problème, en soi.

M. Pilon: Je pense qu'il n'est pas question, dans notre esprit, d'aucune façon, d'enlever les pouvoirs à qui que ce soit. Mais si on fait un parallèle... parce que, dans la présentation présente, vous avez référé, à un moment donné, au fédéral. On sait que le fédéral, présentement, a des lois et des exigences dans différents secteurs, si on parle, par exemple, au niveau de la santé animale. Mais il n'y a rien qui empêche le provincial d'en ajouter.

On ne peut pas diluer, on ne peut pas éliminer des pouvoirs déjà acquis, mais il n'y a rien qui empêcherait la chambre de concertation d'ajouter des pouvoirs additionnels aux organismes déjà en place qui peuvent bénéficier de pouvoirs. C'est dans cette optique-là que, nous, on pense qu'il faut quand même, à partir d'un organisme avec ses pouvoirs, penser et donner des pouvoirs à la chambre qui prenne l'intérêt non seulement d'un organisme mais de tout le chaînon de l'agro-alimentaire.

On ne dit pas que ça va se faire demain matin puis que ça va être facile. Mais on est convaincus que, nous, il faut prendre en considération non seulement, à partir du point A, les intérêts du point A mais il faut se rendre compte quand même qu'en bout de ligne, celui qui nous fait vivre, c'est le consommateur. Et il faut que les intérêts de tous et chacun soient protégés tout au long de cette chaîne-là.

M. Baril: Ce que vous venez de dire là, ça ne va pas à rencontre de l'article 99 que vous voudriez voir modifier un peu? Vous dites: L'article devrait se lire ainsi: Le gouvernement peut, aux conditions qu'il détermine, permettre à la Régie ou à une chambre de coordination et de développement, s'il en existe une...

M. Boivin: Je pense que c'est dans le sens des pouvoirs qu'on aurait aimé voir accorder aux chambres de coordination qu'on a remplacé le mot "office" par les mots "à la Régie ou à la chambre de coordination". Puis je ne suis pas capable de retrouver, vite fait, la place où on a mentionné, au début, que les intérêts communs devront peut-être éventuellement être substitués pour avoir des intérêts... les intérêts des individus ou d'un groupe en particulier devront peut-être éventuellement disparaître pour faire place aux intérêts du groupe de l'agro-alimentaire. Puis on dit d'enlever des pouvoirs à l'un pour les donner à la coordination. Je pense qu'on n'aura pas le choix. Puis si tout le monde veut garder puis si tout le monde s'obstine à protéger sa propre petite cour et puis que, dans le même sens, on parle d'une coordination puis tout le monde semble d'accord avec ça, d'après moi, je ne suis plus. Il y a quelque chose qui ne va pas, à ce moment-là.

On parle de concertation, on parle d'essayer d'unir des idées, d'essayer d'aller de l'avant en groupe. C'est sûr qu'il y a des intérêts d'individus qui devront être... non pas mis de côté mais... pour l'intérêt commun et pour l'intérêt de l'industrie en général.

M. Baril: Ce qui veut dire que l'article 99... À l'article 99, qui se lit actuellement, dans le projet de loi: "Le gouvernement peut, aux conditions qu'il détermine, permettre à un office:...", vous autres, vous voudriez faire sauter le mot "office" puis changer ça par des chambres de coordination ou la Régie.

M. Pilon: C'est ça, oui, définitivement. On remplace le mot "office" par la "Régie" ou la "chambre de coordination".

M. Baril: C'est une grosse demande, ça! M. Pilon: On en est conscients.

M. Baril: À la page 2 de votre mémoire, au deuxième paragraphe, vous dites que vous vous opposiez à ce que les offices de producteurs s'impliquent financièrement dans les agences de vente. Pourriez-vous nous expliquer davantage les raisons, les pourquoi?

M. Pilon: À la page 2? C'est où?

M. Baril: Oui, bien, je dis à la page 2... On dit: "Nous souscrivons au libellé des articles 39, 60, 106 et 203 du projet de loi qui interdit à un office d'utiliser les contributions perçues pour financer la mise en place ou le fonctionnement d'une entreprise commerciale..."

M. Boivin: Oui, je pense que c'est la logique même qui parle. Si, par exemple, toute entreprise commerciale... Prenons l'exemple des céréales ou quoi que ce soit, si des sommes d'argent ou des ressources humaines sont utilisées pour simplement venir en conflit d'intérêts avec d'autres commerces ou en compétition avec les entreprises déjà existantes, nous croyons que ce n'est pas tout à fait de mise d'utiliser ces sommes d'argent ou ces différentes ressources. Je ne sais pas si Christian peut rajouter.

M. Breton (Christian): On a vu, par le passé, qu'il y avait des offices qui se servaient

des fonds fournis par tous les producteurs pour établir des entreprises qui venaient compétition-ner directement d'autres entreprises privées, publiques ou des coopératives dans la mise en marché de certains produits, qui venaient inutilement diminuer les prix reçus par les producteurs, qui venaient créer une compétition, qui n'avaient pas d'affaire à être là. Ça, c'était de l'argent qui venait des producteurs et même, bien souvent, des producteurs qui avaient affaire dans d'autres entreprises.

M. Baril: Pourquoi dites-vous qu'ils ont établi des entreprises qui, en réalité, n'avaient pas d'affaire là?

M. Breton: Parce que ces entreprises venaient faire compétition avec d'autres entreprises pour les marchés, par exemple, de certains produits agricoles. Ce n'est pas dans l'intérêt, moi, je dis, des producteurs d'avoir une entreprise de mise en marché eux autres mêmes, comme il y a déjà eu, par exemple, dans les oeufs, si on se remémore ça, pour venir com-pétitionner un peu toute l'industrie et faire baisser les prix normaux que les producteurs pourraient avoir.

M. Baril: Mais dans un contexte de libre entreprise, la compétition, c'est supposé être bon, c'est supposé être sain, même, qu'on entend parier, des fois.

M. Pilon: À titre d'exemple, les organismes qui sont ici sont des associations qui... Présentement, c'est quand même sur une base volontaire que les gens se joignent à notre mouvement. On n'a pas de loi qui oblige tout meunier, à titre d'exemple, pour ce qui me concerne, à être membre de l'association. C'est par esprit de solidarité et pour la défense de leurs intérêts communs.

Si on regarde au niveau des fédérations, tout producteur, quel qu'il soit, est tenu de payer une cotisation à sa fédération. Alors, ces montants d'argent... C'est là qu'on veut dire qu'on ne voit pas du tout, pour les montants d'argent récoltés, perçus auprès de tous les producteurs agricoles, pour une fédération donnée, qu'on se serve de ces montants d'argent pour mettre sur place ou sur pied un organisme de commercialisation, à titre d'exemple, comme FEDCO, quand ça a existé dans les années 1969, 1970, 1971, avec l'argent des producteurs pour venir compétitionner l'industrie privée. C'est dans ce parallèle qu'on...

M. Breton: En plus, l'argent des producteurs qui avaient des entreprises privées servait, parce qu'ils devaient donner des cotisations à l'association, à se compétitionner eux autres mêmes. L'argent se retournait contre eux autres. Tu étais obligé de donner de l'argent dans des prélevés qui servait à venir te compétitionner. M. Baril: Je ne comprends pas.

M. Pilon: C'est qu'en tant que producteur lui-même, il était tenu de payer à la Fédération des producteurs d'oeufs, en plus de ça, un perçu sur les oeufs produits...

Une voix: Exact.

M. Pilon: ...alors qu'en même temps, lui, il avait son propre commerce. Alors, il donnait de l'argent à FEDCO qui, en retour, avec ces montants d'argent, venait le compétitionner sur ses propres marchés. En fait, peut-être qu'on a de la misère à s'expliquer, mais...

M. Breton: Ça s'explique aussi dans beaucoup de domaines. Ce n'est pas seulement dans ce domaine-là, mais ça se retrouve dans d'autres domaines.

M. Pilon: Non, dans les autres. C'est encore là qu'on dit que les montants d'argent qu'une fédération perçoit auprès de ses membres, que ce ne soient pas des montants d'argent dont elle puisse se servir pour établir une agence de vente et venir compétitionner sur le marché.

M. Baril: Pourquoi, selon vous, un office de producteurs n'utilise-t-il pas juste le pouvoir que le plan conjoint, que la loi lui accorde de mettre en place - je ne dirais pas une agence de vente - de commercialiser son produit? Pourquoi se sent-il obligé de créer une agence de vente, au lieu d'utiliser juste, selon vous?

M. Pilon: On n'a pas d'objection à ça, je veux dire, même si on pense que ce n'est pas leur rôle. Ce qu'on dit, c'est qu'ils ne prennent pas l'argent des producteurs qui paient une contribution, une cotisation, un perçu sur tout ce qu'ils... en fait, même sur le poulet. Un producteur de poulets, et ça peut être même un meunier, en l'occurrence, auquel, les cas qu'on référait tantôt... c'est que lui, si on perçoit de l'argent sur ce qu'il produit et qu'en plus, après ça, on s'en va le compétitionner, si, par hasard, il s'adonne à être dans la production, écoutez, s'ils décident... si une fédération décide de se lancer dans la commercialisation du produit à l'intérieur de sa fédération, bien, qu'elle ne le fasse pas avec le trop-perçu, à moins qu'on permette au producteur de ne pas, s'il le décide, payer à la fédération. À titre d'exemple, si on revient sur les oeufs, ceux qui commerçaient leurs propres oeufs et qui étaient en compétition avec FEDCO, ils étaient tenus de payer, dans ce temps-là, à FEDCO, et ils se faisaient com-pétionner sur leur propre marché. Alors, qu'on dise: Bien, écoute... Si, demain matin, on amendait la loi et qu'on disait, bien: N'est pas tenu,

ne sont pas tous tenus de payer leur cotisation à la fédération ceux qui le jugent à propos.

M. Baril: Pourquoi vous, plus loin, à la page 7, vous dites, là, au niveau des fonds: Les fonds reçus devraient être déposés à la Caisse de dépôt et à d'autres organismes? Pourquoi? Est-ce parce que vous n'avez pas confiance en la Caisse de dépôt que vous suggérez d'autres organismes? Ce serait plus avantageux ou quoi?

M. Pilon: II peut peut-être y avoir des avantages à les placer ailleurs, les taux d'intérêts, peut-être que le côté... l'aspect pratique, il y a peut-être un rendement supérieur, en fait. Ce sont quand même des organismes de l'entreprise privée, qui oeuvrent au Québec, qui rendent service à la classe agricole, en fait, à l'industrie toute entière.

M. Baril: C'est parce que les rendements connus actuellement, à la Caisse de dépôt, depuis 10 ans au moins, ce sont les meilleurs en Amérique du Nord. C'est pour ça que je vous pose la question. Pourquoi on se dit...

M. Pilon: C'est sûr que ce qu'on vient de voir récemment, c'est définitivement... c'est excellent. Mais ce qu'on veut dire, nous, c'est: Pourquoi obliger juste un secteur? Parce que les banques oeuvrent quand même ici. Ce sont des entreprises qui sont là, elles ont une présence et puis elles veulent bien faire partie, elles aussi, de l'agro-alimentaire; non pas seulement au point de vue du risque à prendre mais, à un moment donné, des retours qu'elles peuvent avoir sur leurs investissements.

M. Boivin: Je crois aussi qu'on n'élimine pas du tout la Caisse de dépôt, on la laisse telle quelle. On donne un choix. C'est avec peut-être les choix qu'on devient de meilleurs individus aussi. C'est simplement ça, on n'élimine pas du tout. Si c'était à prendre aujourd'hui comme décision, c'est probablement là, face au rendement, que serait dirigé l'argent, mais c'est simplement un...

M. Baril: oui, je vous remercie de la présentation de votre mémoire. ça participe à clarifier davantage la loi, à clarifier et aussi ça nous permet d'écouter différents intervenants. je vous remercie sincèrement.

Le Président (M. Richard): Merci, M. le député d'Arthabaska. M. le ministre, vous avez un mot final?

M. Pagé: Merci beaucoup, messieurs, de votre présentation. Je suis persuadé que peut-être pas tous mais un certain nombre de commentaires ou de recommandations vont se refléter dans les modifications. Bienvenue.

Le Président (M. Richard): Merci beaucoup, messieurs. Je demanderais à l'Association des industries forestières du Québec de se présenter à l'avant, s'il vous plaît.

Nous allons suspendre quelques instants, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

(Reprise à 12 h 12)

Le Président (M. Richard): la commission reprend ses travaux. je demanderais évidemment au porte-parole de s'identifier et d'identifier aussi les gens qui l'accompagnent.

Association des industries forestières du Québec

M. Lachapelle (Yves): M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs les membres de la commission, mon nom est Yves Lachapelle. Je suis coordonnateur en foresterie pour l'Association des industries forestières du Québec. En ma compagnie, aujourd'hui, il y a: à ma droite, M. Jean-Pierre Landry, vice-président à l'exploitation forestière de la compagnie Daishowa, Les produits forestiers Daishowa Itée, et vice-président de l'Association des industries forestières du Québec; à ma gauche, M. Réjean Bégin, directeur des approvisionnements de F.F. Soucy Itée et président du comité des approvisionnements de l'Association des industries forestières du Québec.

M. le Président, je voudrais remercier la commission d'avoir bien voulu nous recevoir pour qu'on puisse exprimer certains détails de la position qu'on vous a transmise, en janvier dernier. Dans un premier temps, j'aimerais peut-être... comme association d'industries forestières dans une commission sur la mise en marché des produits agricoles, peut-être préciser un peu les raisons de notre intervention dans le dossier.

Dans un premier temps, l'Association des industries forestières du Québec regroupe 28 sociétés impliquées dans la production et dans la transformation de la matière ligneuse. Les membres de l'Association sont impliqués en forêt privée, en forêt publique, dans l'industrie de sciage, dans les pâtes et papiers. Si, aujourd'hui, on vient parler devant la commission de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, c'est que près de 30 % de l'approvisionnement en bois rond des usines de pâtes et papiers proviennent de la forêt privée. Ça représente, pour l'ensemble de l'industrie forestière, quelque 20 % de nos approvisionnements.

Je crois que c'est important, M. le Président, de revenir à l'historique de la reconnaissance du bois de forêt privée comme produit agricole. Vous savez, au Québec, il y a quelque 120 000 producteurs forestiers. On a quelque

2000 usines de transformation de la matière ligneuse et, à l'origine, pour favoriser l'équilibre entre les acheteurs et les vendeurs de matière ligneuse de la forêt privée, on avait trouvé comme solution de reconnaître le bois de forêt privée comme produit agricole et de l'inclure au niveau de l'assujettissement à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles.

Maintenant, je crois que c'est important quand même de souligner qu'à l'origine, on n'a pas fait de distinction entre les types de producteurs de matière ligneuse de forêt privée. Il y a une distinction fondamentale que l'Association veut rappeler aux membres de la commission. C'est celle des producteurs transformateurs, soit les grandes forêts privées industrielles. Si les problèmes de mise en marché pouvaient exister dans le cas des petits producteurs de forêt privée, dans le cas de propriétaires de grandes forêts privées industrielles qui transformaient eux-mêmes les bois produits sur leurs terres, les problèmes de mise en marché n'existaient pas puisqu'ils n'avaient pas à proprement parler de mise en marché. Ils utilisaient leur propre bois.

C'est d'ailleurs pourquoi, dans le mémoire de l'Association, vous remarquerez que nous avons, dans un premier temps, émis certains commentaires généraux sur, justement, l'am-bigurté qui existe, qui prévaut actuellement au niveau de l'assujettissement ou du non-assujettissement des forêts privées industrielles dans les plans de mise en marché des bois de forêt privée. L'Association des industries forestières a toujours avancé que les forêts privées industrielles n'étaient pas assujetties aux plans conjoints de mise en marché des produits agricoles, et nous aimerions que le gouvernement profite de l'occasion d'une révision de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles pour clarifier cette situation. À notre avis, le non-assujettissement des forêts privées industrielles se justifie de plusieurs façons. Je crois que nous l'avons mentionné. Puisque les industries qui possèdent ces grandes forêts privées utilisent elles-mêmes, soit directement ou indirectement, les bois produits sur leurs forêts, il n'y a pas de mise en marché à proprement parler.

Dans un autre ordre d'idée, la Loi sur les forêts, adoptée par le gouvernement du Québec en décembre 1986 et modifiée en décembre 1988, prévoit que pour le grand producteur forestier industriel, pour qu'il soit reconnu comme producteur forestier, il doit préparer des plans généraux d'aménagement et des plans quinquennaux d'aménagement forestier sous le principe du rendement soutenu. C'est un principe qui, dans notre mémoire, est assez détaillé, je crois, au chapitre 2, l'importance de respecter le rendement soutenu au niveau de la forêt privée. On l'a souligné, la forêt privée, c'est 20 % de l'approvisionnement de l'ensemble de l'industrie forestière. Pour nous, la pérennité de cette source d'approvisionnement est très importante.

C'est pour ça, d'ailleurs, que le gouvernement, dans la Loi sur les forêts, a prévu des mécanismes pour permettre de respecter le rendement soutenu dans les grandes forêts privées industrielles.

D'autre part, en ce qui concerne la mise en marché des bois de forêt privée, la Loi sur les forêts, qui régit les forêts publiques du Québec, prévoit que les volumes de bois qui sont attribués à des industriels, les forêts publiques, sont des volumes résiduels en ce sens que les bois de forêt privée, les bois provenant d'autres sources tels les copeaux, les sciures, les planures ou les bois d'importation, sont considérés prioritaires dans l'approvisionnement des usines de transformation. Ainsi, un volume de bois résiduel sur forêt publique est arrêté et révisé tous les cinq ans. En ce sens que les bois de la forêt privée, qu'elle soit de la forêt privée industrielle ou de la petite forêt privée, sont considérés dans l'approvisionnement des usines, dès le départ. Donc, on ne peut pas aller prendre un surplus d'approvisionnement sur forêt publique pour ne pas prendre les bois disponibles en forêt privée. Bien entendu, il y a toujours les aléas des marchés et, compte tenu que la révision est quinquennale, il y a des situations qu'on doit ajuster de façon ad hoc.

Maintenant, je crois que, pour ces raisons, la forêt privée industrielle... il existe déjà suffisamment de raisons pour que le gouvernement profite de la révision de la loi pour clarifier son non-assujettissement au plan de la mise en marché de forêt privée. Comme vous avez pu le noter également dans le mémoire de l'Association des industries forestières, on a émis aussi certains commentaires particuliers sur certains articles du projet de loi. En particulier, je crois que tous les mécanismes de révision, tel qu'on retrouve à l'article 43... 41, excusez-moi... Les mécanismes de révision des plans conjoints... l'AIFQ est très favorable à cette modification, est très favorable à un tel mécanisme, mais elle croit que si, lors de la mise en place d'un nouveau plan conjoint, la consultation est nécessaire, lors de la révision d'un plan conjoint, la consultation est nécessaire aussi.

Sans passer tous les articles sur lesquels on a apporté des commentaires, je crois qu'il y a également, dans le cas de fusion de plans conjoints, les articles 75 et 76, la même consultation des intéressés, lors de fusion de plans conjoints, qui s'avère, pour les membres de l'Association, nécessaire, d'autant plus que l'article 76 prévoit que, lors de fusion de plans conjoints, les caractéristiques de chaque plan conjoint peuvent se retrouver au niveau du nouveau plan conjoint, ce qui est peut-être préoccupant.

Mesdames et messieurs, je crois que ça va compléter, disons, notre partie présentation du mémoire de l'Association. Je crois qu'il faut absolument que le gouvernement saisisse l'oc-

casion de la révision de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles pour clarifier la situation des grandes forêts privées industrielles et que les principes de rendement soutenu, tels que le législateur a prévu les reconnaître dans la Loi sur les forêts, en ce qui concerne les grandes forêts privées industrielles, devrait se refléter également au niveau de la forêt privée et dans la mise en marché des bois qui proviennent de cette forêt.

Le Président (M. Richard): merci, m. lachapelle. m. le ministre, pour les dix prochaines minutes, votre questionnement, s'il vous plaît, auprès de nos invités.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je tiens à remercier M. Lachapelle, M. Landry et M. Bégin de leur présentation de ce matin.

Dans un premier temps, je dois vous indiquer que la tradition a voulu que, pendant plusieurs années, le producteur agricole ait, dans une très grande majorité des cas, dans le passé, une production complémentaire qui était sa forêt privée. Au cours des ans, les circonstances ont voulu que la gestion de plans conjoints permettant d'assumer la direction, la gestion de la forêt privée au Québec se voie placée sous l'empire juridique de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. J'aimerais m'assurer que vous avez bien fait parvenir copie de votre mémoire, en plus de l'acheminer aux membres de la commission et à M. le ministre Middlemiss et à moi, que vous l'avez bien fait parvenir au ministre délégué aux Forêts, M. Albert Côté, qui est responsable du secteur dans lequel vous évoluez. Je dois vous dire que j'apprécierais, au plus haut point si ça n'a pas été fait, que ce soit fait, dans un premier temps; dans un second temps, une fois que ce sera fait, c'est définitif que j'aurai, moi, l'opportunité d'échanger avec lui sur sa perception, parce que la situation a évolué. D'ailleurs, vous dites qu'il y a 120 000 producteurs forestiers au Québec. On a maintenant, quoi, 42 000 producteurs agricoles seulement, et je n'ai pas la conviction que chacun de ces producteurs ou productrices soit aussi producteur forestier.

J'aurais cependant quelques questions à vous poser. À la page 9 de votre mémoire, vous dites: Les membres de l'Association des industries forestières du Québec considèrent que la mise en marché assurée par les offices de producteurs de bois devrait être réalisée de façon à respecter le rendement annuel moyen. Bon, ça, c'est le... c'est ce qu'on appelle le "rendement soutenu". En fait, c'est une volonté de l'industrie, du gouvernement et de l'ensemble des intervenants de l'industrie, dont la Fédération des producteurs de bois du Québec et différents syndicats. On utilise une formule de contingentement, d'une part. D'autre part, les exploitations en forêt publique, à la suite de la rétrocession des concessions forestières, impliquent que d'autres utilisateurs d'autres essences sont habilités à venir chercher leur part qui leur est accordée en ce qui était traditionnellement le gâteau ou le parterre des compagnies forestières au Québec. Pourriez-vous expliquer, pour le bénéfice des membres de la commission et le mien aussi, en quoi ça ne va pas? Parce que ce que je retiens, à la page 9, quand vous dites: "...devrait être réalisée de façon à respecter le rendement annuel (accroissement annuel) effectif des forêts privées..." bon, etc., qu'est-ce qui ne marche pas?

M. Landry (Jean-Pierre): C'est que notre position se veut une continuité de la loi qui régit les terres publiques. Avec la nouvelle loi qui régit les terres publiques, la loi 150, c'est une volonté très ferme de faire respecter la possibilité forestière, qu'on n'hypothèque pas le capital, en d'autres mots, qu'on ne gruge pas le capital. Et on voudrait s'assurer que le gouvernement s'assure d'un même processus pour la forêt privée. Notre crainte, c'est que si, pour des raisons comme on en connaît présentement, par exemple, une mauvaise conjoncture économique, les propriétaires de terrains privés, parce qu'il y a manque d'emploi dans la construction ou dans d'autres domaines d'activité, se tournent vers la forêt privée pour aller chercher ce qui leur manque sur d'autres secteurs d'activité, comme la construction ou l'industrie en général, il peut arriver - c'est un risque - que les propriétaires de terrains privés coupent plus que la possibilité et, à long terme, mettent en danger les approvisionnements de l'industrie, en général. Parce que dans la loi actuelle, sur la loi des forêts, il est dit qu'avant d'aller couper du bois sur les terres publiques, on devra prendre le bois des terrains privés. Et on s'entend sur des périodes de cinq ans. Si les propriétaires de terrains privés coupent plus que la possibilité, le gouvernement présentement est après partager le gâteau des terres publiques, les CAAF. Et si on coupe plus que la possibilité des terrains privés et que le gâteau est séparé dans les terres publiques via les CAAF, dans cinq, dix ou quinze ans, on manquera de bois sur les terres privées et on manquera d'espace ou de bois sur les terres publiques pour faire vivre nos industries. Et c'est dans un esprit de continuité et de long terme qu'on dit que le gouvernement devrait s'assurer de faire respecter la possibilité sur les terrains privés. Je ne sais pas si c'était assez clair, là.

M. Pagé: Oui. J'ai très bien compris. Je vous remercie. Vous référez, entre autres, au bois de forêt privée qui peut être dirigé... parce que lui ne fait pas l'objet d'un contingentement partout. La pulpe a des contingentements dans chacune des régions, si ma mémoire est fidèle.

M. Landry: Bien, contingentement via les

syndicats qui...

M. Pagé: Oui.... qui est habilité à imposer. M. Landry: Qui est habilité à imposer. M. Pagé: O. K.

M. Landry: Mais on sait que présentement, sur 120 000 producteurs forestiers, il y en a à peu près 20 000 qui coupent du bois. Alors, comment établir... Si on prend une possibilité sur 120 000 producteurs et qu'on donne des quotas à 20 000, quelle sorte de processus emploie-ton pour s'assurer que...

M. Pagé: Oui.

M. Landry:... ceux qui en coupent n'en coupent pas trop. Ceux qui ne veulent pas en couper, s'ils en gardent pour aller voir les oiseaux dans leur forêt et ils disent: On ne la coupera jamais. Et qu'on applique ces quotas-là à d'autres...

M. Pagé: Oui.

M. Landry:... ça peut créer des problèmes.

M. Pagé: Je suis d'accord et c'est à ce niveau-là que se situe le problème. Moi, ce que je retiens - vous pourrez me corriger, je n'ai pas le privilège d'être le ministre délégué aux Forêts...

M. Landry: Non, mais vous êtes bien renseigné.

M. Pagé:... je suis l'humble ministre de l'Agriculture.

M. Landry: Vous êtes très bien renseigné, on le voit. (12 h 30)

M. Pagé: Si je comprends bien, ce qui s'en va pour nos entreprises de transformation, entre autres, les compagnies de pâtes et papiers, le bois, il y a un contingentement mis en place par les syndicats de producteurs dans chacune des régions et qui doit être géré, surveillé, contrôlé par les syndicats. Votre inquiétude réfère, je pense, au droit qu'a un propriétaire de boisé privé qui, soit en raison de la conjoncture économique, peu importe pour quel motif, décide d'aller couper son bois sur sa terre et de l'envoyer au sciage.

M. Landry: Que ce soit au sciage ou dans la pulpe, à un moment donné...

M. Pagé: Oui, sauf que ça, ce n'est pas contingenté, il n'y a pas de contrôle qui impose au propriétaire du boisé privé de couper unique- ment tel volume ou tel type d'essence. Moi, entre autres, je vais vous dire que comme député de Portneuf, j'ai tenté de mettre en place un tel mécanisme de contrôle dans ma région pour être certain que le bois puisse servir au maximum aux entreprises de sciage et, par conséquent, avec les copeaux, aux entreprises papetières de la région de Québec et, notamment, de mon comté. Mais ce n'est pas facile. Moi, je sais que ce sont les industries qui n'ont pas voulu. Assez curieusement, l'expérience que j'ai menée, c'était au printemps 1988, si ma mémoire est fidèle, dans la région de Québec, ici, l'ensemble des producteurs étaient d'accord, le syndicat des producteurs de la région de Québec, de ma région, étaient d'accord avec un système de contingentement sur l'ensemble des boisés privés dans la région, à l'effet que ce qui va à la pâte, ce qui va au sciage, etc., et les poteaux de téléphone puis de déroulage, tout était prévu, sauf que ce sont les industries qui n'ont pas voulu. Ce sont les scieries de mon comté qui ont dit "pantoute", de façon très claire. Vous êtes l'association, vous autres, des industries forestières du Québec.

M. Landry: Les industries forestières, mais principalement les pâtes et papiers.

M. Pagé: Je suis d'accord. Oui, oui. Ça, c'est le premier problème. L'autre élément, c'est que c'est pas mal plus difficile de contrôler un producteur ou un propriétaire de boisé privé qui part, le samedi matin, avec son grand garçon, sa scie mécanique et son 4 par 4 et qui s'en va travailler le bois, que de suivre le lait donné par notre belle vache Holstein ou Ayrshire. Le problème qu'on a et que vous avez probablement aussi, c'est que pour contrôler, s'assurer que les activités prévues dans un plan conjoint et les conditions sont respectées, ça prend le support du syndicat, le support de l'industrie et ça, j'ai cru comprendre que vous l'avez toujours donné, mais ça prendrait aussi des polices.

M. Landry: Je ne veux pas...

M. Pagé: On est rendus avec les polices vertes, puis on va avoir les polices de la forêt puis...

M. Landry: On arrive peut-être à la même conclusion, M. le ministre. On se demande, à un moment donné...

M. Pagé: Mais qu'est-ce qu'on peut faire?

M. Landry:... qu'est-ce que ce problème-là vient faire au ministère de l'Agriculture?

M. Pagé: Vous n'êtes pas satisfaits de nous autres?

M. Landry: Non, ce n'est pas qu'on n'est

pas satisfaits de vous autres.

M. Pagé: Vous n'êtes pas satisfaits de la Régie, plein de bonnes gens qui sont là pour vous aider.

M. Landry: C'est que le problème de la forêt, vous l'avez dit tout à l'heure, vous avez 120 000 producteurs et vous n'avez même pas le tiers de ça comme producteurs cultivateurs. Alors, il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. On a une Loi sur les forêts, on a un ministère des Forêts, ça devrait peut-être être eux qui ont la responsabilité de gérer les forêts, ils devraient les gérer. La loi actuelle essaie de gérer ça, mais elle est un peu, je dirais, amputée de certains membres de pouvoir gérer tout ça, parce que...

M. Pagé: Oui, et l'autre élément, c'est que nous, chez nous, la Régie des marchés agricoles a davantage une tradition de gestion de produits alimentaires que de produits forestiers, ça j'en conviens. Cependant, on a des gens compétents, qualifiés, qui font leur job en vertu de leur mandat, qui font bien leur travail.

M. Landry: On n'en doute pas, mais c'est difficile pour le ministère de l'Énergie et des Ressources, le ministère des Forêts, le secteur des forêts, de gérer la forêt quand une partie de cette forêt est gérée par un autre groupe, un autre ministère qui a sa façon...

M. Pagé: Je comprends très bien ça. J'imagine que mon ami Albert Côté se sent parfois comme étant le père d'une jolie fille mais qui est toujours au pensionnat à Pagé puis sa gang.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pagé: Ceci étant dit, donc, vous profitez de l'opportunité, ce matin, pour nous faire part de ce souhait qu'aurait l'industrie de relever exclusivement ou d'être régie soit par une Régie, une commission, peu importe, qui relèverait du ministre des Forêts.

M. Landry: La forêt devrait relever du ministère des Forêts.

M. Pagé: Je prends note.

M. Landry: Ce n'est pas qu'on ne veut pas faire affaire avec le gouvernement, ce n'est pas ça.

M. Pagé: D'accord. Non, non.

M. Landry: C'est qu'on devrait avoir plus un guichet unique, comme on appelle, que faire affaire avec différents ministères, différentes associations et différents...

M. Pagé: Je note et je suis persuadé que mon collègue, Albert Côté, qui, à défaut d'écouter, aura très certainement l'occasion de lire...

M. Landry:d'ailleurs, on trouve un peu, je dirais, bizarre, ce matin, qu'on parte de 20 % de notre approvisionnement total et qu'il n'y a personne des forêts ici.

M. Pagé: C'était impossible pour M. Côté...

M. Landry: Ce n'est pas que je fais un blâme à M. Côté.

M. Pagé: ...d'être ici avec nous, ce matin.

M. Landry: Non, non, je comprends, mais il y a quelque chose qui... On a l'impression, des fois, qu'on n'est pas...

M. Pagé: Mais sentez-vous à l'aise quand même.

M. Landry: Non.

M. Pagé: Sentez-vous. Ce n'est pas une question, c'est une invitation.

M. Landry: Si on se sent à l'aise dans... M. Pagé: Ici, oui.

M. Landry: Honnêtement, pas tellement, parce qu'on se demande comment des gens peuvent être à la fois jugés sur les oeufs, le lait et un produit forestier qui est complètement d'une autre sphère d'activité et avec d'autres problèmes que le ministère de l'Énergie et des Ressources essaie de gérer avec une nouvelle loi, et essaie de faire tout son possible pour bien la gérer, mais qui est attachée avec une grande partie de ça, et il ne sait pas comment... C'est à côté et on ne sait pas comment le gérer.

M. Pagé: Je note. Oui, M. Lachapelle. Le Président (M. Richard): M. Lachapelle.

M. Lachapelle: II y a quand même certaines particularités à cette production, encore, agricole, au niveau de la loi. Lorsqu'on parle de bois, on parle de production sur des périodes de révolution assez longues. Produire des carottes ou produire du bois, le temps de production est très différent. Lorsque M. Landry parle d'assurer une continuité entre notre approche de la forêt publique et l'approche de la forêt privée, au niveau, notamment, du respect du rendement soutenu, la particularité de la forêt privée vient compliquer un peu l'application de principe aussi fondamental que celui du rendement soutenu. On a parlé du grand nombre de producteurs, du petit

nombre qui mènent en marché, de la méconnaissance des producteurs, également. Dans des calculs de prélèvements admissibles, ce qui est un peu à la base de toute la question des contingentements, on a très peu d'éléments au niveau de qui va mettre en marché du bois ou non.

Cela dit, c'est évident que pour une ressource aussi importante au niveau de notre approvisionnement, nos préoccupations... Votre collègue, M. Albert Côté, est quand même informé et a quand même reçu copie du mémoire que vous avez devant la commission, ce matin.

M. Pagé: O.K.

Le Président (M. Richard): M. le député d'Art habaska.

M. Baril: M. le Président, je vais faire mention, à la page 16, les articles 111 à 123, vous êtes les premiers, en tout cas, parmi ceux dont on a pris connaissance, qui sont passés devant nous, qui faites un parallèle entre la création de la chambre de coordination et la formation de comités consultatifs qui, selon vous, auraient les mêmes objectifs, les mêmes visées. J'aimerais ça vous entendre un peu sur ça.

M. Lachapelle: À ce niveau-là, c'est certain que la loi a déjà des prévisions au niveau des comités consultatifs. Le gouvernement peut mettre sur pied des comités consultatifs. Comme, je crois, dans les présentations précédentes, on l'a souligné également, des mécanismes de concertation, des mécanismes de recherche de solution à des problèmes, il en existe. Il y en a qui se créent de façon ad hoc, il y a déjà des organismes pour que des gens discutent de recherche de solution des problèmes.

Nous, notre préoccupation là-dedans, lorsqu'on parle de chambre de coordination et de développement, c'est encore l'aspect autres structures qu'on voit là-dedans. Il y a des structures qui peuvent être souples, il y a des structures qui peuvent répondre à des besoins ad hoc, qui répondent à ces besoins et disparaissent. Dans le projet de loi, il y a un caractère permanent qui semble être attaché à ces structures-là. Encore une fois, on s'interroge sur le drainage de fonds qui n'iront pas aux producteurs et qui représenteront encore des coûts supplémentaires pour les acheteurs dans ce cas-là. C'est dans ce sens-là qu'on dit: Le gouvernement a des prévisions au niveau de la loi dans le cas de problèmes sérieux de mettre des comités de consultation, de telles structures, et en ce qui concerne des structures permanentes, on a certaines réserves, tout simplement.

M. Baril: Est-ce que je pourrais avoir votre opinion? Hier, les membres de la Fédération des producteurs de bois, je pense, sont venus nous faire part de leur projet d'utiliser, entre autres, la formule des plans conjoints pour mettre en marché le bois du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, entre autres le feuillu, que l'entreprise privée, elle, ne juge pas à-propos d'utiliser ou de mettre en marché... Eux veulent utiliser la formule des plans conjoints pour se donner des structures pour transformer ce bois-là en pâte ou en panneau gaufré, etc. C'est quoi votre position, là-dessus.

M. Lachapelle: Je pense qu'il y a une chose dont il faut être conscient. Dans la forêt privée, l'importance de la ressource feuillu est quand même plus grande qu'en forêt publique. Malheureusement, dans notre structure industrielle de transformation, elle est surtout orientée vers la transformation de bois résineux. C'est ce qui fait qu'il y a des surplus, effectivement, de possibilités forestières en matière ligneuse feuillue qui existent et pour lesquels on n'a pas de débouché. Ce que je comprends de la position de la Fédération des producteurs de bois, c'est que s'il n'y a pas de débouché, on va en créer. Dans ce sens-là, ce n'est pas mauvais que les producteurs se prennent en main pour créer des débouchés qui n'existent pas actuellement pour des productions que personne ne veut.

M. Baril: Remarquez que je vais vous avouer bien honnêtement que je ne connais pas la loi complètement... Je ne connais pas complètement la Loi sur les forêts, mais si on vous écoutait et qu'on transférait toute la production forestière, que ce soit au niveau privé ou autres au niveau de la Loi sur les forêts, qu'est-ce qui arriverait, justement, avec les forêts dont on parle, que les producteurs privés veulent en tirer, en tout cas qui veulent l'utiliser et vous autres, vous n'êtes pas intéressés? Ça ferait quoi s'ils retombaient sous l'autre loi et qu'ils ne pourraient plus utiliser des formules de plan conjoint, la formule de la Loi sur la mise en marché, actuellement?

M. Pagé: Ils vont avoir le même problème de plan conjoint.

M. Landry: Ça ne changera rien. Ca ne changera rien dans le plan conjoint. Il peut y avoir un plan conjoint qui va se rapporter à un autre ministère, tout simplement.

M. Baril: Oui. Mais la Loi sur les forêts le leur "permet-u", actuellement?

M. Pagé: II faudrait la modifier.

M. Baril: Comment?

M. Pagé: II faudrait modifier la loi.

M. Baril: Ah! Bien oui, mais là, c'est ça.

M. Pagé: II faudrait créer... Si vous me le permettez, il faudrait non seulement modifier cette loi-ci, en retranchant très clairement et en spécifiant dans la loi la non-juridiction de la Régie des marchés agricoles sur la mise en marché, de la gestion de la mise en marché des produits forestiers et, parallèlement, il faudrait modifier la loi, une loi sous la juridiction du ministère de l'Énergie et des Ressources et du ministre délégué aux Forêts habilitant le gouvernement à mettre en place une régie, un organisme de contrôle qui transférera automatiquement tous ces plans conjoints. Ça ne créerait pas de vide juridique demain matin, et ce qu'il y avait dans le passé ne tomberait pas pour autant.

M. Baril: Alors, je vous remercie.

M. Landry: Pour répondre plus particulièrement à votre question, c'est un jeu d'offre et de demande. S'ils ont une possibilité d'ouvrir un marché là-dessus, on ne s'oppose pas à ça. On est dans un libre marché, on le prône depuis longtemps. S'ils sont capables de développer un marché pour ces produits-là...

M. Baril: En tout cas, moi, je pense qu'il faut faire attention parce que, dans le passé, on l'a vu et encore aujourd'hui, souvent les grandes papetières ont été chercher le meilleur dans les forêts et ce qui est moins bon, elles le laissent aux producteurs. Donc, il faut faire attention. Et aussi, tout à l'heure, vous avez fait mention - on en a discuté, je pense, suite à une question du ministre - vous avez dit que la formule des plans conjoints a des conséquences sur la surexploitation des forêts privées. Là, sur la surexploitation de nos forêts en général, il y aurait peut-être un bon débat aussi à faire là-dessus.

M. Landry: On est ouvert, monsieur. On est ouvert. Quand vous aurez le temps, on peut s'asseoir pour en discuter. On parle de forêts privées et de forêts publiques. On ne peut pas s'embarquer sur les forêts privées, c'est à eux, mais si vous voulez parler des forêts publiques, on peut en parler. On se sent très à l'aise et je dirais même, comme on dit en bon français, les pattes blanches pour en discuter parce que... Ma façon de gérer les forêts publiques l'a été selon les règles de l'art du temps et on a prôné, en tant qu'industrie, en tant que profession, ça fait longtemps qu'on prône qu'on devrait avoir une nouvelle loi qui impose des choses. On a été, peut-être, l'industrie qui a le plus appuyé la nouvelle Loi sur les forêts. Alors, ce n'est pas parce qu'on a mal fait notre travail ou que les forêts ont été mal aménagées, c'est qu'on avait un surplus de forêts et la loi n'obligeait pas... Socialement, il n'y avait aucune obligation de passer une nouvelle loi. Quand la nouvelle loi est arrivée, on a été les premiers à l'appuyer et ça faisait longtemps qu'on la demandait. Alors, on se sent bien à l'aise là-dessus.

M. Pagé: II faut bien dire une chose, ce n'est pas parce que vous êtes de grosses entreprises que vous êtes des méchants.

M. Landry: Non, non. Et ça, il faudrait commencer à enlever cette approche-là qui passe dans le public. On vous invite...

M. Baril: Non, non, mais...

M. Landry: ...à visiter nos industries et venir voir comment on travaille.

M. Baril: Je comprends, j'ai réalisé moi-même révolution que les grandes compagnies ont faite depuis un certain nombre d'années, mais je vais me référer aux règles de l'art dont vous avez fait mention tout à l'heure. Je vous dis que les règles de l'art, il ne faut pas reculer de 100 ans en arrière de nous autres pour savoir c'était quoi les règles de l'art au niveau de l'ensemble des compagnies. Tu fauchais, et salut, bonsoir. Tu allais chercher ce qu'il y avait de meilleur et le restant restait là.

M. Landry: Non monsieur. On utilisait des essences résineuses, mais on peut faire un paralèlle avec les terrains privés. Vous n'avez qu'à partir de Québec pour monter à Montréal et regardez sur le long de la route 20, ce sont tous des terrains privés. Et regardez quelle valeur ils ont au point de vue forestier, et ce ne sont pas les grosses industries qui ont été les saccager.

M. Baril: Ah ça, les grosses industries, monsieur, elles ont exploité les forêts justement pour que les gens ne se promènent pas le long de la route 20. Ce qui fait que c'est peut-être plus... En tout cas, de toute façon, je vous le dis, ce serait un bon débat.

Une voix: Je pense que ce serait un bon débat.

Le Président (M. Richard): Alors M. Landry.

M. Pagé: ...avant ça, M. le Président, on n'était pas guidé, la coupe n'était pas guidée par le quota du plan conjoint. La coupe égait guidée par les besoins du producteur. Quand il avait besoin d'argent pour revouveler son cheptel, il coupait; quand est arrivé le temps des congélateurs il s'en est coupé pas mal, pour changer le congélateur à Noël. C'était comme ça que ça fonctionnait et là ça fontionne avec un autre cadre.

Le Président (M. Richard): Alors, M. le ministre, avez-vous d'autres questions?

M. Pagé: On va faire rapport au ministre des Forêts et même si vous ne vous sentiez pas à l'aise, merci d'être venus.

M. Landry: Je vous remercie de nous avoir entendus.

Le Président (M. Richard): Alors merci beaucoup messieurs. Sur ce, nous suspendons et nous revenons au travail après les affaires courantes, c'est donc dire vers 16 h 15 environ. Suspension et bon appétit, mesdames et messieurs.

(Suspension de la séance à 12 h 47)

(Reprise à 16 h 35)

La Présidente (Mme Bégin): À l'ordre! Nous allons donc reprendre les travaux de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation soit une consultation dans le cadre de l'étude du projet de loi 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires et modifiant d'autres dispositions législatives. À ce stade-ci, nous allons donc accueillir le Conseil de la coopération du Québec. Je demanderais aux intervenants de bien vouloir s'identifier et de présenter leur mémoire. Ils ont un délai de 20 minutes dans la présentation du mémoire.

Conseil de la coopération du Québec

M. Pelletier (Alphonse-Roger): Merci, Mme la Présidente. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, M. Pagé, messieurs les membres de l'Opposition, mesdames et messieurs, c'est un agréable plaisir d'avoir reçu votre invitation...

La Présidente (Mme Bégin): Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, vous identifier...

M. Pelletier: Excusez-moi.

La Présidente (Mme Bégin): ...pour les galées?

M. Pagé: Mais, Mme la Présidente, il faut bien comprendre que c'est seulement pour le bénéfice du Journal des débats.

La Présidente (Mme Bégin): C'est ça.

M. Pagé: Qui ne connaît pas M. Pelletier, président de la Fédérée?

M. Pelletier: Alphonse-Roger Pelletier. Ici, j'agis à titre de président du Conseil de la coopération du Québec et Mme Juliette Bon-neville est directrice générale du Conseil de la coopération du Québoc Jo m'oxcuso

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Pelletier.

M. Pelletier: Alors, comme vous avez pu le constater, le Conseil de la coopération du Québec a un mémoire qui est très court, qui est assez précis et je pense que le rôle du Conseil de la coopération du Québec, c'est l'entreprise qui représente tout le mouvement coopératif québécois. Alors, je demanderais à notre directrice générale, Mme Bonneville, de vous donner lecture de ce court mémoire.

Mme Bonneville (Juliette): Merci, M. Pelletier. Mme la Présidente, M. le ministre, le Conseil de la coopération du Québec, qui représente près de 3000 entreprises coopératives, regroupant plus de 25 000 dirigeants bénévoles, plus de 40 000 employés, désire faire connaître son point de vue à la commission parlementaire sur le projet de loi 15.

Le Conseil de la coopération du Québec estime que les débats qui entourent ce projet risquent de mettre en cause le caractère spécifique de l'entreprise coopérative et, par conséquent, de faire en sorte que les droits légitimes des membres propriétaires des coopératives agricoles et de la Coopérative des producteurs de sucre d'érable ne soient encore plus difficiles à exercer. Alors, notre propos porte davantage sur l'article 2 du projet de loi.

L'article 2 du projet de loi a besoin d'être modifié. Les agriculteurs propriétaires d'entreprises agricoles ont choisi de se regrouper pour se doter d'entreprises coopératives visant à rassembler leurs produits, à les transformer et à les mettre en marché sous forme de produits alimentaires depuis au-delà de 70 ans. Une bonne proportion de producteurs du Québec ont pris l'initiative de constituer et de développer des entreprises coopératives pour assurer la mise en marché de leurs produits et pour améliorer ainsi leur revenu en leur permettant de bénéficier d'une partie de la richesse créée par leur transformation. Mais qu'est-ce qu'une coopérative? La Loi sur les coopératives la définit ainsi. "Une coopérative est une corporation regroupant des personnes qui ont des besoins économiques et sociaux communs et qui, en vue de les satisfaire, s'associent pour exploiter une entreprise conformément aux règles d'action coopératives.11 Alors, c'est, d'abord, une association de personnes qui se donnent une entreprise Le texte de la Loi sur les coopératives continue en établissant que la première des règles d'action est la suivante: "L'adhésion d'un membre à la coopérative est subordonnée à l'utilisation des services offerts par la coopérative et à la possibilité pour la coopérative de les lui fournir." Alors, il importe que cette loi, la loi 15, spécifie très clairement que les mécanismes de mise en marché qu'elle prévoit ne doivent pas gêner l'nrlion dos ontropfiso:; do transit innalum ut. on

particulier, l'action des coopératives.

L'article 2, tel que proposé, nous apparaît insuffisant à cet égard. Le fait de retrancher en substance le premier paragraphe de l'article 2 actuel équivaut à le vider de la garantie qu'il contenait. En effet, il y a tout lieu de croire que ce nouvel article serait interprété non plus comme une garantie pour une organisation de coopérative de mise en marché, mais simplement comme une priorité en autant que possible accordée au mode coopératif. Il est d'autant plus important de renforcer cet article 2 en lui ajoutant un troisième paragraphe puisque, même en présence de l'article 2 de la loi actuelle, les coopératives, notamment dans le lait, ne peuvent plus opérer en tant que telles.

Alors, nous avons une seule recommandation. Nous recommandons de remplacer l'article 2 proposé dans le projet actuel par le texte de l'article 2 de la loi existante auquel on ajouterait un troisième paragraphe qui s'énoncerait comme suit: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements entre un membre et sa coopérative." Je vous remercie.

La Présidente (Mme Bégin): C'est terminé? Mme Bonneville: Oui.

La Présidente (Mme Bégin): Merci. Je vais demander maintenant au ministre de l'Agriculture s'il a certaines questions à poser. M. le ministre.

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Tout d'abord, je tiens à remercier M. Pelletier et Mme Bonneville de leur présentation aujourd'hui au nom du Conseil de la coopération du Québec qui, comme on le sait, regroupe l'ensemble des institutions coopératives au Québec, autant dans le secteur financier que dans le secteur agricole et agro-alimentaire où la coopération est très importante. Elle a joué et elle continue à jouer un rôle très important dans la mise en marché des produits laitiers. Et même si parfois le ministre de l'Agriculture se retrouve en dualité avec le milieu coopératif québécois, ça n'enlève en rien le respect que j'ai pour ce qui a été fait jusqu'à maintenant au niveau du développement et particulièrement au niveau de la présence en région. Je trouve ça très... Vous remplissez une mission très délicate aujourd'hui, Mme Bonneville, dans le sens que, sans vouloir prêter de motif à quiconque, vous agissez un peu comme éclaireur, éclaireur devant la commission parlementaire au nom de la coopération du Québec avant que les autres viennent, plus particulièrement, déposer leurs demandes, avant que le conseil de la Fédérée vienne et avant mercredi prochain où, là, le Conseil de la coopération laitière arrivera avec des représentants de chacune des grandes coopératives laitières pour tabler sur le pupitre de façon à s'assurer que la production laitière soit bien acheminée aux entreprises de transformation. Je trouve ça très courageux de votre part, très bien, et je vous avise tout de suite que je n'ai pas l'intention d'avoir de débat ou d'échange portant sur la portée de l'article pour chacune des coopératives.

Essentiellement, vous dites: Le texte n'est pas clair. Vous recommandez de remplacer l'article 2. Vous dites: "...le projet actuel par le texte de l'article 2 de Loi existante", devrait être modifié de façon à ajouter "un troisième paragraphe qui s'énoncerait comme suit: Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit à des engagements entre un membre et sa coopérative." J'ai deux questions. Dois-je comprendre, premièrement, que le texte, tel que libellé dans la loi actuelle ou encore tel que libellé dans le projet de loi 15, ne sécurise pas les coopératives en matière d'approvisionnement?

Mme Bonneville: Notre recommandation dit de conserver le texte actuel, c'est-à-dire les deux paragraphes de l'article 2 de la loi actuelle de la mise en marché et d'ajouter ce troisième paragraphe pour renforcer encore plus l'énoncé des deux paragraphes et du principe directeur du deuxième paragraphe de l'article 2. Ce que nous voulons dire, c'est parce que dans la coopération, ce pourquoi les gens se mettent en coopérative, et c'est là notre propos, ce pourquoi nous nous sommes présentés ici, ce n'est pas pour défendre l'activité économique des coopératives, elles sont en mesure de le faire et de bien le faire, mais ce que le Conseil de la coopération du Québec est venu faire aujourd'hui, c'est de démontrer l'importance d'abord de l'entreprise coopérative au Québec, le rôle qu'elle a joué depuis 70 ans dans le secteur agricole et 90 ans et plus dans d'autres secteurs, et de démontrer aussi que l'action coopérative, c'est-à-dire que la façon d'être des entreprises et, dans leur essence même, les coopératives, elles sont basées sur l'usage que le membre peut et doit faire de sa coopérative.

Dans notre langage, on devient membre d'une coopérative parce qu'on peut en faire usage et on peut en faire usage seulement si on en est membre. Alors, c'est toujours le même principe: Si je ne fais pas usage de la coopérative, ça ne me rend pas service. Alors, s'il y a des choses qui viennent entraver ma possibilité d'engagement d'en faire usage que j'ai en devenant membre de la coopérative, parce que sur le plan économique ça me rend service, alors s'il y a des choses qui viennent entraver cette participation-là, ça ne me donne rien d'être membre d'une coopérative et l'entreprise que je me suis donnée avec 200, 500, 1000, 2000 autres coopérateurs, l'entreprise que nous possédons, que nous administrons et pour laquelle nous décidons du partage des excédents à la fin de l'année, propriété qui est très régionale ou locale

et appartenant aux gens du milieu, si je ne peux pas en faire usage et expédier ce que je produis ou les services dont j'ai besoin pour pouvoir aller les chercher, je n'ai pas besoin de coopérative.

M. Pagé: Je ne doute pas du bien-fondé du principe qui s'appuie sur la mise en commun, soit pour des fins commerciales, etc., c'est une forme de coopérative, comme je suis pleinement d'accord avec vous que les coopératives au Québec, dans leur ensemble, ont joué un rôle déterminant dans le développement du Québec. Qu'il nous suffise de se référer au mouvement Desjardins qui est un maillon de fierté pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Je suis pleinement d'accord avec vous, comme je suis d'accord avec le fait que lorsqu'on est membre de la coopérative, je présume qu'on encourage sa coopérative, entre guillemets, mais là on parle non seulement d'appartenance d'un membre à un organisme, mais on se réfère à toute la question des approvision-nemnets: Où le lait du producteur doit-il aller?

Si vous demandez des modifications, c'est parce que vous considérez que le texte antérieur n'était pas suffisamment correct. Dois-je comprendre de votre volonté d'amender que, pour vous, l'article 2, tel que rédigé actuellement, ne garantit pas que le lait des membres coopérants doit aller aux coopératives?

Mme Bonneville: C'est qu'actuellement, même avec la loi qui existe à l'heure actuelle, il y a des problèmes, prenons dans le lait où il y a des problèmes d'usage, c'est-à-dire de pouvoir pour le membre livrer son produit à sa coopérative pour qu'il soit transformé par sa coopérative, son entreprise. Si j'ai un magasin de chaussures, je n'irai pas acheter mes chaussures au magasin d'en face, je vais probablement les prendre chez nous. Alors, c'est un peu la même chose pour l'agriculteur ou le producteur agricole qui est membre de sa coopérative, qui a un engagement ou un contrat de membre, parce que la loi des coopératives agricoles demande aux membres de s'engager par contrat avec sa coopérative à livrer pour un terme de cinq ans son produit à la coopérative pour y être transformé. Alors, son engagement, si je dois le livrer ailleurs, mon entreprise dont je suis propriétaire avec les autres ne me sert plus. Alors, actuellement, c'est qu'il y a des producteurs de lait, par exemple, qui doivent livrer leur lait ailleurs qu'à leur coopérative, même dans la loi actuelle. Alors, le Conseil dit: Les propriétaires, les membres de la coopérative sont brimés dans leur droit d'usage de leur coopérative, parce qu'ils doivent livrer sur demande leur lait ailleurs que chez eux, que dans leur entreprise. Alors, ils se nuisent à eux-mêmes parce qu'ils sont propriétaires de cette entreprise là. C'est dans ce sens-là que, mfimo avec la loi acluollo, çu po.su dos problèmes d'usage de la coopérâtive.

M. Pagé: J'ai seulement deux brèves questions. Je comprends que lorsqu'on est membre d'une coopérative, par exemple, lorsqu'on est membre d'une caisse populaire, vous me direz qu'on n'a pas intérêt comme membre à avoir un compte dans une autre institution financière. Mais on peut l'avoir. Moi, je suis membre de ma caisse populaire à Saint-Basile et j'ai un compte à la Banque Nationale. Ça ne cause de problème à personne...

Mme Bonneville: Non. M. Pagé: ...puis j'ai le droit..

Mme Bonneville: Puis, ça n'empêche pas le producteur agricole d'avoir un REER quelque part ou d'avoir autre chose. Je veux dire, ça n'empêche pas ça.

M. Pagé: Ça, d'ailleurs, il le manifeste aussi. Puis c'est ça que je crois que vous devriez reconnaître comme Conseil de la coopération. C'est que le même producteur agricole est aussi membre de la Fédération des producteurs de lait du Québec.

Mme Bonneville: Oui.

M. Pagé: Et si on allait à la lettre du libellé que vous proposez, le producteur agricole membre d'une coopérative devrait choisir son appartenance, soit à la coopération ou à la Fédération des producteurs de lait, parce que vous avez très clairement dit, Mme Bonneville, qu'un membre ne peut pas, en raison des ententes qu'il a, qui le lient à sa coopérative, acheminer ailleurs qu'à sa coopérative. Donc, il faudrait faire un choix.

Je ne vous dis pas que ce n'est pas correct, parce que, ça, ce n'est pas exclu que ça arrive à un moment donné dans le temps. Si ce débat-là ne se règle pas, il y a quelqu'un qui va devoir le trancher, le litige. Puis je présume que c'est l'Assemblée nationale du Québec.

Mme Bonneville: Mais, il y a...

M. Pagé: Et si je comprends bien ce que vous dites, selon vos propositions, le producteur devrait choisir. Je suis membre de la Fédération des producteurs de lait. Puis, là, c'est ma fédération qui règle mon transport, puis c'est ma fédération qui négocie mes prix. That's it, that's all", comme on dit. Ou je suis membre de ma coopérative et, là, je suis lié ad vitam aeternam à lui livrer mon lait, point final, à la ligne, "period"!

Mme Bonneville: Ce sont deux organismes à vocation...

M. Pelletier: Deux choses complètement

différentes.

Mme Bonneville: C'est sûr que c'est le même membre qui est membre de son syndicat agricole, de son organisme qui le protège en tant que producteur ou dans son statut de producteur comme syndicaliste qui a des objectifs. Ce regroupement-là a des objectifs et d'avoir une entreprise économique pour la transformation de son produit, l'écoulement, la mise en marché. Et c'est là qu'on dit que cette action devrait être complémentaire. Je veux dire, c'est le même producteur. Alors, il n'a pas à se multiplier. Les producteurs se sont donné les outils économiques qui sont leur propriété, qui sont inaliénables, c'est-à-dire qui ne sont pas vendables. Ils appartiennent aux producteurs qui les détiennent.

Alors, il n'y a personne qui va mettre la clé dans la porte sauf les producteurs. Alors, ça, c'est quand même... Et il n'y a rien qui est contradictoire à ce qu'il ait une entreprise économique dans laquelle il est propriétaire avec les autres et qu'il soit membre de son syndicat qui le protège sur des aspects de sa profession comme producteur. C'est la qu'elle doit être, la complémentarité des objectifs qu'on poursuit comme producteurs.

Alors, c'est cette action complémentaire. Ce n'est pas de l'idéologie quand je dis ça. C'est sûr que le même producteur, il est assis sur la chaise à l'UPA puis il est assis sur la chaise à la coopérative. Et il doit être en mesure de voir où collectivement, parce que la coopérative, c'est une propriété collective... Alors, il doit voir comment collectivement... Ils doivent ensemble mettre en marché leurs produits, développer leur milieu aussi et développer leur propre entreprise et, en même temps, avoir une protection comme producteurs agricoles.

Et les outils qu'ils se donnent, des plans conjoints, etc., doivent être complémentaires et doivent venir aider. Alors, c'est...

M. Pagé: Mon temps étant écoulé, je vous remercie, Mme Bonneville et M. Pelletier. Je dois vous dire, cependant, que, moi, non pas que je le vois, je le vis plus souvent en dualité qu'en complémentarité.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre. Là-dessus, je vais maintenant demander à M. le député d'Arthabaska s'il a quelques questions à poser à la coopérative.

M. Baril: Oui, certainement. Vous savez, de ce côté-ci de la Chambre également, on n'aura pas besoin de discuter longtemps, je pense, pour savoir la nécessité et l'importance que le mouvement coopératif a toujours au Québec et aura encore, évidemment, dans le futur, en s'ajustant aux besoins du marché. Ça, je pense qu'on...

Une voix: C'est écrit dans le ciel.

M. Baril: C'est écrit dans le ciel, c'est évident. Tout le monde s'accorde là-dessus. Le Parti québécois a d'ailleurs confirmé sa position parce qu'en 1982, c'est le gouvernement du Parti québécois qui a réduit en profondeur la Loi sur les coopératives. Ça fait qu'à partir de là, comme on dit...

C'est sûr, actuellement, ce dont on discute, c'est qu'on est pratiquement sur un terrain miné à cause du contexte qu'on vit dans le secteur laitier. Que tu prennes position d'un bord ou de l'autre, ce sont tous les mêmes producteurs laitiers qui sont "pognés" là-dedans, si vous me permettez l'expression. Et si tu parles plus pour l'un que pour l'autre, si tu parles pour les plans conjoints dans l'application, que la Loi sur la mise en marché leur donne, tu vas passer pour quelqu'un qui parie contre les. coopératives. Si tu paries pour les coopératives, si tu dis: On veut mettre le plan conjoint de côté, on va dire: Comment ça? Ils sont contre la Fédération, ils sont contre l'administration des plans conjoints.

Je me mets à la place des pauvres producteurs laitiers qui, eux, assistent à leurs assemblées de coopératives, qui écoutent une version. Ils s'en vont à l'assemblée de la Fédération des producteurs de lait, ils écoutent l'autre version, et ils se disent: Bien, coudon! Qu'est-ce qui arrive là-dedans? Et lui, le producteur, en plus, il a toujours la préoccupation que, le soir et le matin, il faut qu'il revienne faire son train. Il n'a pas juste ça à voir et il n'a pas juste ça à administrer, lui. Il faut qu'il regarde pour voir si sa deuxième du bord est en retard ou, si elle n'est pas en retard, si elle va avoir des troubles de vêlage. Il est tout "pogné" avec ça, lui. Et il est autant rattaché à sa coopérative qu'il peut être attaché à son syndicat.

D'ailleurs, on le voit actuellement, je dirais, cette division ou ce partage d'idées, quel choix il va faire entre les deux. Dans les assemblées, actuellement, il semble, en tout cas, de plus en plus, que les agriculteurs ne veulent pas tasser leur coopérative, absolument pas. Ils veulent rester membres, ils veulent qu'elle soit davantage efficace, mais ils s'aperçoivent aussi que le plan conjoint, ce qu'il leur rapporte... Actuellement, il semblerait que la formule qui est applicable attire plus les producteurs vers l'application intégrale du plan conjoint que celle qui consiste à dire: La coopérative garde tout mon lait et transforme tout mon lait. On sait également que si on appliquait ça intégralement, tu viens de tout débalancer le système du plan conjoint dans le lait. Ça, je n'ai pas de leçon à vous faire là-dessus; vous connaissez ça autant que moi.

Comment vivez-vous ça, vous autres? Comment voyez-vous ça, vous autres, ce partage d'idées? Et quand je dis le partage d'idées, pour

une personne, un producteur, je ne veux pas dire que les agriculteurs se partagent l'un et l'autre. Pour le producteur, comment voyez-vous ça, vous, ce partage qu'il est obligé de faire entre sa coopérative, son syndicat et sa fédération? C'est ça que les producteurs vivent actuellement.

Mme Bonneville: C'est ce que je répondais.

M. Pelletier: Mme la Présidente, M. Baril, comment on voit ça, je pense... Pour moi, ça m'apparaît très simple. Mais avant de répondre à votre question, je voudrais dire à M. Pagé que vous avez raison quand vous soulignez qu'on arrive comme mouvement d'appui à des choses qui n'ont pas été présentées. Je voudrais vous dire que ce n'est pas nous qui avons fait l'horaire aujourd'hui. Ça s'adonne que le CCQ, le Conseil de la coopération du Québec devait se présenter à 16 heures cet après-midi. Il reste que ça nous a amenés à consulter les mémoires des autres parties. Ça s'adonne aussi, malheureusement ou heureusement, Mme la Présidente, que le président du Conseil de la coopération du Québec agit aussi comme président du Conseil de la coopérative fédérée de Québec. Alors, Mme Bonneville a très bien répondu aux questions et c'est là qu'est le problème, à mon sens.

Il y a une loi sur les coopératives qui existe depuis nombre d'années et le principe coopératif qui en découle a été prévu par les législateurs de ce temps-là et on a mis des exigences rattachées à ça, comme vous l'a dit Mme Bonneville. Dans les contrats des sociétaires, il y a une exigence qui doit être signée pour cinq ans. C'est un engagement et ça va de soi. On ne pourrait jamais fonder de coopératives s'il n'y avait pas des engagements quelconques de la part des parties et ces engagements sont fondés sur des principes qui font que le propriétaire doit être l'usager de l'entreprise. Et là, il y a toute une règle: les produits de son entreprise, il s'engage à les fournir à sa coopérative qui, elle, en retour, s'engage à les transformer et à les mettre en marché. (17 heures)

Donc, il y a des contrats de sociétaires et c'est régi par une loi. C'est la législation provinciale qui a encadré ça, et elle l'a très bien fait. Ce qui est arrivé dans les années ultérieures, c'est la formule des plans conjoints, et c'est comme ça que le législateur du temps a prévu: On n'est pas pour démolir les coopératives, tout le monde admet que c'est écrit dans le ciel et c'est bon. On n'est pas pour les démolir. On va tâcher qu'elles continuent d'exister, et on a prévu que le plan conjoint ne devait pas venir en conflit avec la coopérative. Ça aussi, c'était très bien. Mais est-ce qu'on a mis les balises suffisantes? Est-ce qu'on reconnaît encore que les coopératives au Québec, de quelque secteur que ce soit... Mme Bonneville pourrait vous énumérer ce que l'on représente au ccq comme mouvement coopératif. tous les genres de coopératives sont au conseil de la coopération au québec et sont touchés par cet article-là ce qu'on veut faire reconnaître, s'il est vrai que la loi sur les coopératives est bonne, s'il est vrai que ces contrats-là sont valables... et, moi, je le crois parce qu'on ne serait jamais capables d'aller chercher des bailleurs de fonds pour supporter des sociétaires qui décident de bâtir une entreprise si on n'avait pas d'engagement envers notre coopérative d'y faire affaire, c'est fondamental.

Alors, en partant de là, il y a des coopératives qui existent; tout le monde dit que ça a rendu d'immenses services au Québec. Les gouvernements qui se sont succédé - M. Baril l'a dit tantôt - et ceux d'aujourd'hui aussi nous disent que c'est un élément de développement économique au Québec, qui appartient aux Québécois, qui ne se vend pas aux étrangers, qui doit demeurer dans les mains des Québécois, qui est complètement démocratique. On a des assemblées générales, on délègue des administrateurs, des nôtres, pour administrer des entreprises, et on a fait nos preuves, autant dans Desjardins que dans les coopératives de travail, dans les coopératives d'habitation, dans les coopératives funéraires que dans les coopératives agricoles. Alors, tout ce secteur-là, il existe. Et on n'est pas là pour "compétitionner" les compagnies à capital-actions. On est là quand même pour défendre les droits des agriculteurs, entre autres, le droit de bâtir des entreprises à leur mesure et qui leur appartiennent. Et il n'est pas dans l'esprit du CCQ, pas plus que je vais vous le dire tantôt, de démolir ce que les agriculteurs se sont donné comme plan conjoint et comme organisation syndicale. Il est question d'avoir notre part du gâteau et d'être équitable, et, à moins que l'on ne change la Loi sur les coopératives, et qu'elle ne veuille plus rien dire, il faut consolider, il faut préciser ce que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles va comprendre d'une organisation coopérative; on serait peut-être capables de vivre mieux. Tant et aussi longtemps que ce ne sera pas changé à la base, on va continuer à avoir des chicanes, parce que les mêmes législateurs - et ce n'est pas ceux d'aujourd'hui, là, je ne vise pas ceux-là - ont prévu qu'il y aurait deux organismes et un complémentaire, et on n'a pas mis suffisamment de balises. Et là, ça crée les chicanes qu'on connaît.

Mais il ne faudrait pas généraliser non plus, Mme la Présidente, M. le ministre. Il ne faudrait pas généraliser. C'est qu'on arrive à un mauvais moment, à un moment où il y a un problème un peu plus particulier dans le lait, et là, on arrive à généraliser. Dans la plupart des secteurs agricoles, on s'entend assez bien. Mais il y a un problème particulier, je pense qu'il faut l'admettre; on est les premiers à l'admettre. Et c'est pour ça que la loi doit corriger cette lacune. Il

n'y a pas de raison que dans le monde agricole on continue à s'entredéchirer. En 1990, on a besoin de toutes nos forces, M. Baril.

M. Baril: Je pense que tout le monde est bien conscient de ça. Actuellement, avec tout ce qui se présente devant nous, tout ce que nous vivons, qu'il y ait un affrontement entre deux mouvements de mêmes producteurs, ça n'a aucun bon sens.

M. Pelletier: C'est inconcevable.

M. Baril: Inconcevable, ça, c'est... Mais vous nous demandez, vous demandez, en tout cas, au gouvernement non seulement de maintenir l'article 2 comme tel, mais de le renforcer davantage; c'est ce que vous nous demandez.

M. Pelletier: Oui.

M. Baril: Et, moi, ce que je trouve difficile, je vais être franc avec vous, ce que je trouve difficile, moi, c'est de voir que dans une même loi, si mon interprétation est bonne, on aurait deux positions complètement différentes.

M. Pelletier: Non.

M. Baril: Parce que, écoutez, on dit que la formule des plans conjoints ne doit pas nuire au développement des coopératives - là j'interprète, mais en tout cas, c'est ça ce que ça veut dire - et en même temps, dans des articles plus loin, on donne le droit ou le pouvoir à des offices de producteurs de se donner des plans conjoints, et quand on signe des plans conjoints, bien, on sait toutes les conséquences que ça entraîne. Donc, au départ on dit: Vous pouvez nous donner des plans conjoints et c'est l'outil le plus efficace que vous voulez utiliser pour augmenter vos revenus ou mieux en vivre, je ne sais pas quoi. Là, dans la même loi, tu t'empêches de te donner des plans conjoints parce que si, toutefois, ce même plan conjoint nuit au développement des coopératives... Et il faut s'entendre. Moi, je suis certain que si on dit que ça nuit au développement des coopératives, c'est seulement passager. Je pense qu'on n'a pas de grand discours à faire là-dessus. Mais je vais vous écouter là-dessus, sur ces contradictions dans la même loi, à savoir si je l'interprète bien ou si je suis complètement...

M. Pelletier: Qui dit complémentaire dit qu'il y a deux parties. Évidemment, ça cause certains problèmes. Je ferais une comparaison. Dans la constitution canadienne, il y a un gouvernement central et il y a dix provinces. Ça ne semble pas toujours facile de s'entendre. Il y en a qui prétendent qu'ils ont chacun leur rôle à jouer et qu'il y a des rôles complémentaires. Alors, on connaît le débat qui existe actuelle- ment. Quand on arrive à la Fédération canadienne d'agriculture, il y a dix provinces. Là non plus ce n'est pas facile de s'entendre. Mais il faut préciser, quand on dit complémentaire...

M. Pagé: Pas juste à la Fédération de l'agriculture.

M. Pelletier: Non. Quand on dit complémentaire, ça veut dire qu'il faut être en mesure de déterminer qu'est-ce que c'est que la complémentarité. Mais s'il y a un plan conjoint, d'après la loi, quand il n'y a pas de coopératives, il a tous les pouvoirs. Si on prétend qu'un plan conjoint, face aux coopératives, a les mêmes pouvoirs, il faudrait le dire tout de suite. On va mettre une croix sur nos coopératives, mais on va être obligés de former des compagnies. Et on pourra se vendre aux Américains. Ça, c'est le problème qu'on regarde au CCQ.

C'est M. Béland qui devait venir aujourd'hui vous présenter le mémoire du CCQ. M. Béland est vice-président du Conseil de la coopération. Ses engagements ne lui ont pas permis de le faire. Alors, en tant que président, je suis là pour défendre les principes coopératifs. Si, en 1990, ça ne doit plus s'appliquer, qu'on nous le dise. On va changer de formule. Mais en changeant de formule, on perd ce pour quoi on a travaillé avec nos pairs depuis 100 ans. On perd une partie de l'économie du Québec qui s'en ira dans des mains étrangères. Et là, ça appartient aux gens du Québec, autant dans Desjardins, dans la consommation que dans l'habitation. Ça appartient à des gens. Il y a une démocratie qui s'exerce. Mais c'est toujours le rôle de complémentarité d'un plan conjoint. C'est là qu'on achopppe. C'est quoi la complémentarité? Il y a des rôles importants à jouer, indispensables. C'est comme ça qu'on a fait voter à nos coopératives ces plans conjoints. Et elles ont un rôle très important à jouer.

La Présidente (Mme Bégin): M. Pelletier, pourriez-vous conclure? Le temps est...

M. Pelletier: J'ai terminé.

La Présidente (Mme Bégin): Merci. Votre temps de parole étant écoulé, je vais maintenant passer la parole au ministre, M. Pagé.

M. Pagé:...

La Présidente (Mme Bégin): Oui, oui. M. Pagé.

M. Pagé: SI on se réfère au texte, l'historique de l'article 2, c'est d'avoir à l'esprit que la disposition à laquelle nous nous référons ici a déjà été dans le texte de loi.

Mme Bonneville: Elle est dans le texte de loi actuel... non.

M. Pagé: Le troisième alinéa. Mme Bonneville: Le troisième?

M. Pagé: Ce que vous demandez, il était là avant.

M. Pelletier: Oui, il a été enlevé.

M. Pagé: Oui, oui.

M. Pelletier: Après de chaudes luttes.

M. Pagé: Vous nous demandez d'ajouter un troisième alinéa qui dirait - ça, c'est votre demande - "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements entre un membre et sa coopérative."

M. Pelletier: Absolument.

M. Pagé: C'est une disposition de portée générale. Dans le texte original de 1956, cette disposition n'y était pas, mais le projet de loi, lorsqu'il est arrivé au Conseil législatif de l'époque, qui était le Sénat, à l'époque... Cette disposition a été ajoutée suite à des pressions du mouvement coopératif auprès du Sénat. La disposition alors ajoutée comportait un troisième alinéa qui n'apparaît pas dans la loi actuelle ni, bien entendu, dans le projet de loi qu'on dépose, et qui se lisait comme suit: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements d'un producteur vis-à-vis de sa coopérative ni avec les engagements de celle-ci envers une autre coopérative." C'est au moment de la refonte, en 1963, que ce dernier alinéa a été enlevé. S'il a été enlevé, c'est à cause des problèmes pratiques qu'il causait. On ne s'entendait pas, en 1963, sur le sens à donner, sur l'interprétation à donner au troisième alinéa de l'article 2. Le législateur de l'époque a certainement voulu indiquer ses intentions au sujet des relations entre les coopératives et leurs membres dans le cadre d'un plan conjoint. La disposition de cet alinéa est significative: il croyait ainsi avoir réglé le problème. Alors, en 1956, le troisième alinéa n'y est pas, dans le texte original, il est ajouté par le Conseil législatif. Il est inclus dans le projet de loi, qui devient une loi, en 1956. Il y a un vécu avec cette loi, de 1956 à 1963, et, en 1963 parce que très peu de gens concernés, par la voie de leur procureur, etc.... Personne n'est en mesure de donner une interprétation ferme et définitive dudit troisième alinéa. Partant de là, comme on ne se comprend pas, puis qu'on n'interprète pas de la même façon, ça cause problème. Donc, en 1963 on l'enlève. Aujourd'hui, on vit, c'est le moins qu'on puisse dire, des situations analogues de dualité sur l'interprétation, de dualité, par conséquent, sur les représentations ou les revendications, et là, vous nous suggérez de revenir au statu quo ante de 1956. Comment interpréter ça?

M. Pelletier: En 1963 ce ne sont pas les coopératives qui ont demandé de l'enlever. C'était le même problème qu'aujourd'hui, évidem-mentl

M. Pagé: Oui. Je suis d'accord avec vous que le fait de l'avoir enlevé n'a pas réglé plus les problèmes qu'il y a eu entre 1956 et 1963.

M. Pelletier: C'est-à-dire que ça n'a pas été...

M. Pagé: Mais ça ne règle pas notre problème, M. Pelletier.

M. Pelletier: On n'a pas clarifié suffisamment. C'est évident que, quand il y a un rôle de complémentarité, on est appelés a vivre toujours un certain conflit. Et, depuis que le monde est monde, il y a une lutte pour le pouvoir. Alors, quand on dit complémentarité, les deux parties en cause veulent prendre tout le pouvoir, et là, le conflit arrive. Et, on voit ça dans les élections, à un moment donné; on voit ça en Chambre, parfois, aussi.

M. Pagé: Oui, oui, mais nous autres, on n'est pas membres des deux partis, ni M. Baril ni moi.

M. Pelletier: Ha, ha, ha! Nous autres, on n'est pas membres des deux partis non plus.

M. Pagé: Vous êtes membres de la Fédération, vous êtes membres de la coopérative puis...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Pagé: ... souvent ef ois les mêmes membres votent aux deux places...

M. Pelletier: Oui.

M. Pagé: Puis, je ne suis pas toujours convaincu qu'ils votent de la même façon parfois aux deux places.

Une voix: Ils sont membres de l'UPA. Une voix: Oui, c'est...

M. Pelletier: On s'entend pour dire qu'on a besoin des organismes que les agriculteurs se sont donnés.

M. Pagé: Oui.

M. Pelletier: Et, en tant que représentant du Conseil de la coopération du Québec, je veux

vous dire qu'on respecte le point de vue des agriculteurs. Il y a un rôle que le législateur doit jouer, peut-être difficile, mais je ne peux pas croire et comprendre qu'on n'est pas capables d'établir sur du papier des règles du jeu qui vont satisfaire tout le monde. Ceci dit...

M. Pagé: Oui.

M. Pelletier: ...les coopératives agricoles que je représenterai tantôt, veulent ce respect-là des droits des uns et des autres, puis on veut travailler ensemble. Mais on veut que ça soit déterminé pour éviter... Je vous dis que, s'il n'y avait pas de clôture de ligne entre les voisins, il y en aurait, des chicanes, il y en aurait en mosus! Alors, plaçons une clôture quelque part qui va déterminer les rôles de chacun, puis il va être fini, ce tiraillement inutile et coûteux.

C'est vrai que, dans les législations, les projets de loi sont préparés par des avocats, j'imagine.

M. Pagé: Oui.

M. Pelletier: J'ai envie de vous demander si c'est préparé en vue de laisser de la place pour des tiraillements, parce que ça nous amène des avocats, nous autres aussi, là, puis on se tiraille avec nos avocats. Je ne sais pas, j'espère que non, mais on sait bien que les avocats, il faut qu'ils gagnent leur vie. Ha, ha, ha! Je peux taquiner un peu, ha, ha!

M. Pagé: Oui, mais vous comprenez que ce sont les producteurs puis les coopératives qui en engagent.

M. Pelletier: Mais oui! mais oui! Ha, ha, ha! Quand il y en a une partie qui en engage, il faut que l'autre en engage pour se défendre, M. le ministre.

M. Pagé: Je sais. Bon...! Bien!

M. Pelletier: Non, c'est un problème.

M. Pagé: Juste une dernière question, là. Je comprends très bien...

M. Pelletier: C'est pour ça qu'on est ici. (17 h 15)

M. Pagé: ...que ces tiraillages-là, ces dualités, ces affrontements, bon, il faut les éviter, puis l'idéal voudrait... D'ailleurs, je donnais l'exemple, autant au Conseil de l'industrie laitière qu'à la Fédération et au Conseil de la coopération laitière: Si tout le capital humain investi - parce que vous vous réunissez, vous orientez, vous décidez, vous réfléchissez, vous pensez à des moyens d'action - si tout le capital humain investi depuis l'entente de la décision de 1985, si tout ce capital humain avait été investi pour se donner plus de force au Québec, dans l'industrie laitière, pour développer des marchés, pour tenter de travailler plus étroitement à optimaliser nos opérations, ce que le milieu de la coopération - et ce, je le salue avec appréciation, ce que vous venez d'amorcer, la rationalisation des entreprises, etc. - si on avait fait tout ça, on serait rendus un peu plus loin dans cette obligation qu'on a d'être très performants, non seulement à l'échelle du Canada, mais à l'échelle nord-américaine et mondiale. Mais ce n'est pas ça.

Vous me dites: Quand les voisins n'ont pas de ligne de terrain, ils sont sujets à se chicaner. Oui. Est-ce à dire que la ligne à tracer pour donner une force, une certitude à l'application de l'article 2 devrait aller jusqu'au point où le producteur laitier du Québec devrait être, soit membre de la Fédération des producteurs de lait du Québec, soit membre de la Coopérative laitière du Québec, l'une ou l'autre, mais pas les deux. Non?

M. Pelletier: Non. Moi, je pense que ce sont des outils différents et je ne peux pas aller... À l'automne, quand je décide de travailler mon sol pour le printemps, comme agriculteur, je prends ma charrue, je trace des sillons, je laisse travailler la nature et, au printemps, je ne reprends pas de nouveau une charrue, je prends une herse, puis je finis mon travail avec un semoir et j'ai une belle récolte à l'automne. C'est un outil complémentaire. M. le ministre, je m'excuse, je reviens là-dessus. Il y a une loi des coopératives qui a des exigences. On ne peut pas fonder de coopératives si on ne répond pas a ces exigences-là. Après qu'on a fondé une coopérative, qu'on l'a mise en place, il y a une autre loi qui arrive 20 ans après, 30 ans après, puis elle dit que cette loi-là, non... Est-ce qu'il a pu y avoir une autre loi qui dise que la première n'est pas bonne? C'est ça que je me pose comme question.

Il y a une autre loi qui est supérieure à la, première. Alors, nous autres, ce n'est pas ça que la loi dit, la Loi sur les marchés agricoles. Elle dit: Ça doit être complémentaire à l'action de... Prouvons en quoi ça peut être complémentaire et tout le monde va être heureux. Nos agriculteurs, dans le champ, M. le ministre, ont deux chapeaux. Ils ont un chapeau pour la semaine et, quand ils vont à la messe le dimanche, jamais ils ne prennent leur chapeau de semaine, ils prennent leur chapeau du dimanche. Ils savent à quel moment placer le bon.

La Présidente (Mme Bégin): Je vous demanderais de conclure, s'il vous plaît.

M. Pelletier: J'ai terminé.

La Présidente (Mme Bégin): Merci. Ceci clôt le temps de parole du ministre. Je vais maintenant passer la parole à M. le député d'Ar-

thabaska.

M. Baril: Merci, Mme la Présidente. Il y a eu un moment d'arrêt, mais je vais continuer dans la même veine où j'étais parti tout à l'heure. Comment pouvez-vous expliquer que les coopératives agricoles, entre autres, sentent le besoin tellement important d'avoir cette protection, qui est l'article 2 dans la Loi sur la mise en marché? Si on compare à un grand mouvement coopératif, au Québec, que sont les caisses populaires, qui n'ont pas de loi semblable dans les... Comment on dit ça? Ils n'ont pas de disposition semblable dans leur loi et s'il y a un mouvement coopératif qui s'est développé, au Québec, ce sont bien les caisses populaires, comprenez-vous, et c'est heureux ainsi. Ils n'ont pas eu besoin de dispositions particulières pour se développer, hein? Leur président, M. Béland, dit qu'il faut être compétitifs, H faut relever des défis, le libre-échange s'en vient. On est dedans, c'est vrai, II ne s'en vient pas, on est dedans. Il y en a, je crois bien, qui ne s'en aperçoivent pas, mais on est dans le libre-échange et il faut faire face à tout ça. vous parlez de la loi des coopératives qui est là depuis 1956, tout ça. vous avez fait une farce tout à l'heure, je vais vous en faire une, moi aussi; ce n'est pas méchant, je ne veux pas être méchant. vous avez parlé de l'agriculteur, quand il veut labourer l'automne, il prend sa charrue et il laboure et le printemps, quand il veut travailler ça, il prend une autre sorte d'outil. l'agriculteur aussi, il s'est développé parce que, aujourd'hui, il y a des méthodes structurées et il n'a même plus besoin de labourer l'automne. ça prend une autre machinerie et il brasse moins la terre et c'est aussi efficace. mais on n'en est plus à la même méthode qu'il y a 25 ou 30 ans. pourquoi, dans la loi... ne trouvez-vous pas, ma question est là, ne trouvez-vous pas que certaines coopératives n'ont même plus... je dirais que cet article n'a même pas pu les empêcher de se développer en étant assurées d'un approvisionnement constant et d'une formule qui dit: nous autres, on est bien comme ça et même si on se cassait la tête pour trouver de nouveaux produits, etc., ça nous donne quoi de plus? dans l'immédiat, je parle. donc, ne pensez-vous pas que cet article, ce fameux article dans la loi n'a même pas empêché certaines coopératives de se développer? je ne veux pas généraliser.

M. Pelletier: Écoutez, c'est une question qui s'adresserait plutôt à l'autre partie.

M. Baril: Ah! Je peux la retenir.

M. Pelletier: Je ne voudrais pas élaborer trop longuement là-dessus, parce que je pense que ça s'adresserait plutôt à l'autre partie.

Mme Bonneville: J'aimerais répondre à vos interrogations. Vous faisiez la comparaison avec le mouvement Desjardins. Si M. Béland avait été ici et... Si vous avez lu quelques articles de journaux, je vous assure que M. Béland - c'est-à-dire tout le mouvement, parce que c'est tout le mouvement, ce n'est pas juste M. Béland, parce que ça a l'avantage d'être un groupe, de nous représenter comme membres - s'est battu pour défendre la formule. Il s'est fait dire souvent: Pourquoi ne faites-vous pas des affaires comme tout le monde? Ou, pourquoi ne faites-vous pas des affaires comme du monde, quand vous parlez de vos parts permanentes, quand vous parlez d'avoir des prospectus pour chacune des caisses populaires pour émettre vos bons? Je donne cet exemple pour vous dire que la formule coopérative, elle est mal connue et elle n'est pas connue non plus. Et on voudrait qu'elle sort comme les autres entreprises. Mais on voudrait avoir tous les avantages, sauf les exigences que ça peut demander. Alors quand on essaye de donner des plans conjoints, quand on essaye d'avoir des choses complémentaires, on trouve toujours ça difficile, parce que la formule coopérative, on la trouve encombrante. Il y a des règles d'action qui font qu'il y a la propriété; le pouvoir est entre les mains des gens, le partage des excédents. Il y a des formes et ça doit être respecté si on veut que ce soient des coopératives. A ce moment-là, quand on crée d'autres outils - ça ne veut pas dire qu'on n'a pas à actualiser l'action des coopératives; ça ne veut pas dire qu'on n'a pas à rendre, pour 1990 ou pour l'an 2000 la formule coopérative, pour qu'elle réponde mieux à nos besoins d'aujourd'hui en regard des marchés, en regard de la finance... Parce que c'est une réponse économique, la coopération. Il reste qu'on connaît trop peu la coopération et on voudrait faire en sorte qu'on la... Je ne dirai pas le mot qui me vient naturellement, mais je vais dire: On veut essayer d'en faire une entreprise comme les autres, alors qu'elle n'est pas une entreprise comme les autres.

M. Baril: Mais je connais...

Mme Bonneville: On fait des affaires, mais on fait des affaires autrement dans une coopérative.

M. Baril: Je connais, madame, des producteurs laitiers - puisque ce sont eux qui sont le plus mis en cause - je connais des producteurs laitiers, je ne dirais pas vieux en âge, mais vieux en implication dans le mouvement coopératif - dans notre langage, on dit souvent des gens vendus aux coopératives - et actuellement ces mêmes personnes - je me répète - elles ne renient pas leur coopérative, mais elles trouvent plus avantageuse la formule du plan conjoint dans le contexte qu'on vit présentement que, je vais oser dire la formule coopérative, mais mon terme n'est peut-être pas exact. Mais dans la

situation qu'on vit, il y a un choix à faire. Il y a des vieux producteurs, des vieux coopérateurs qui sont pour la formule et dans les assemblées... Je vois M. Pelletier qui fait de grands signes de tête. Dans les assemblées, pourquoi pensez-vous que ces mêmes coopérateurs-là, ces producteurs, disent aux dirigeants de la coopérative: C'est assez. On est tannés de payer des centaines de milliers de dollars à des avocats? Assoyez-vous et négociez. Comment expliquez-vous ça? Est-ce que c'est parce que, après 25 ans de coopéra-tisme, ils ne connaissent pas le mouvement coopératif?

Mme Bonneville: Pas nécessairement. Mais quand on fait de la coopération, on fait un choix à long terme, on ne fait pas un choix pour l'immédiat. On fait des choix pour bâtir des entreprises qui sont à plus long terme. On fait des choix qui ne nous rapportent pas tout de suite, dans notre poche, demain matin, mais qui font qu'on se donne des outils économiques pour transiger. On bâtit des entreprises économiques au Québec pour développer notre société économiquement.

Vous allez me dire que c'est de l'idéologie, mais ça n'en est pas. Quand on opte pour la formule coopérative, on fait le choix de ne pas être un entrepreneur tout seul qui met dans sa poche, demain matin, les profits de son argent, mais on investit avec les autres, on fait le choix de développer un projet collectif, une entreprise économique qui se perpétue, qui continue même après qu'on soit parti: Desjardins n'est plus là, mais il a bâti pour l'avenir. Alors, l'entreprise coopérative, c'est ça aussi et c'est ce principe-là qu'on a à défendre aujourd'hui. L'activité économique des coopératives, ils vont la défendre, mais l'entreprise coopérative, c'est quand on fait ce choix-là. On fait un choix à long terme, on fait un choix d'investissements, mais d'investissements économiques et sociaux, et ça, il faut le reconnaître. On fait des affaires, oui, en coopération, mais on fait des affaires autrement. La caisse populaire n'appartient pas à Claude Béland...

M. Baril: Écoutez, madame...

Mme Bonneville: ...puis il n'a pas plus de votes que moi à la caisse populaire. Alors, quand on fait un choix dans la coopération... L'agriculteur ou le producteur qui dit: Ce serait plus avantageux pour moi d'avoir possiblement ma compagnie. C'est vrai qu'il serait plus riche, possiblement.

M. Baril: Écoutez, madame, je comprends...

Mme Bonneville: C'est ce choix-là qu'on fait.

M. Baril: Je vais finir.

La Présidente (Mme Bégin): Je vous demanderais de...

M. Baril: Je vais finir. Je veux juste dire, en conclusion, que le débat, je ne sais pas, est mal engagé ou s'oriente mal. On ne nie pas tout ce que vous dites. Je l'ai dit, au début, tout à l'heure. J'oserais dire: Qu'il se lève, celui ici qui est contre les coopératives.

Mme Bonneville: Ah oui!

M. Baril: Ah! voyez-vous! Je l'ai dit tout à l'heure, au début, qu'on ne nie pas ça, mais c'est pour ça que je vous dis qu'il s'agit de trouver une formule pour faire en sorte que tous et chacun, dans ce système-là, puisse trouver son compte. Je l'ai dit au début: II ne faut pas penser qu'on est contre les coopératives, si on défend les plans conjoints et que, si on défend les coopératives, on est contre les plans conjoints et vice versa.

Je vous remercie de votre mémoire et on va sans doute avoir l'occasion de se reparler puisque, entre autres, M. Pelletier a deux chapeaux dans le mouvement coopératif. Il faut s'en parler. En tout cas, j'ai apprécié l'échange. On pourrait en jaser encore longtemps.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Baril. Ceci met fin au temps qui était imparti au Conseil de la coopération du Québec. Je remercie également M. Pelletier et Mme Bonneville de s'être déplacés pour venir se faire entendre en commission.

Là-dessus, je demanderais au prochain... M. le ministre?

M. Pagé: Non, je disais merci à ces bonnes gens, madame, monsieur.

M. Pelletier: Merci beaucoup de nous avoir écoutés. Je me suis aperçu qu'il y avait beaucoup de questions. Ça veut dire qu'il y a beaucoup d'intérêt pour la coopération. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Pelletier. J'inviterais maintenant la Coopérative fédérée de Québec à prendre place, s'il vous plaît! (17 h 30)

À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous allons donc, maintenant, accueillir la Coopérative fédérée de Québec. Je demanderais au porte-parole de cette coopérative de bien vouloir s'identifier ainsi que ceux qui l'accompagnent, en vous rappelant que vous avez vingt minutes pour votre intervention.

Coopérative fédérée de Québec

M. Pelletier: Merci, M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de l'Opposition,

mesdames, messieurs. En commençant par ma droite, ici - je suis toujours le même, Roger Pelletier, président de la Coopérative fédérée présentement - Mario Dumais, qui est le secrétaire général de la Coopérative fédérée; M. Jean-Marc Bergeron, qui en est le directeur général et, à ma gauche, Me Alain Garneau qui est le directeur du contentieux à la Coopérative fédérée, et M. Paul Massicotte, qui est le premier vice-président à la Coopérative fédérée.

Alors, sans plus de commentaires, comme le temps est limité, je vais passer tout de suite... Est-ce que toutes les personnes ici présentes ont en main le mémoire de la Coopérative fédérée? Oui, tout le monde a le mémoire. Alors, à la page 1. La Coopérative fédérée de Québec s'est toujours intéressée à la mise en marché des produits agricoles. Sa mission l'exige, puisqu'elle fut mise sur pied pour approvisionner les exploitations agricoles via un réseau de coopératives d'approvisionnement et pour transformer et mettre en marché les produits agricoles ou alimentaires provenant de ces mêmes exploitations ou des coopératives agricoles. Les agricul-teurs-coopérateurs, via leur coopérative locale et régionale, sont les propriétaires de la Coopéraive fédérée de Québec. A ce titre également, la Coopérative fédérée de Québec s'intéresse à la mise en marché de leurs produits et aux formules législatives et réglementaires qui encadrent cette mise en marché.

C'est pourquoi, dès les années cinquante, au moment où le gouvernement de l'époque créait une commission d'enquête, la commission Héon, la coopération agricole est intervenue pour faire valoir son point de vue. De même, elle l'a fait au moment des diverses révisions de la loi, plus particulièrement en 1988, auprès du comité présidé par Me Gilles Prégent, ici présent, qui était chargé d'examiner la loi.

Le mouvement coopératif agricole compte 29 570 sociétaires. La Coopérative fédérée de Québec est la fédération des coopératives agricoles. 103 coopératives et 2225 producteurs en sont sociétaires. Ces 2225 producteurs, ce sont des gens qui sont des membres directs de la Coopérative fédérée par des sections de la Coopérative fédérée.

En tant que fédération, la Coopérative fédérée de Québec représente les intérêts collectifs du mouvement coopératif agricole et anime la vie associative parmi les représentants de ses propriétaires-usagers.

La Coopérative fédérée de Québec est aussi une entreprise industrielle et commerciale. Elle fournit aux agriculteurs, par le biais de ses coopératives sociétaires, les biens et services nécessaires à l'opération des entreprises agricoles, y compris des produits pétroliers. Également, elle transforme et met en marché les produits agricoles, tels que le porc, la volaille, les produits laitiers et les fruits et légumes.

Elle emploie 3800 personnes et son chiffre d'affaires s'élève à 1 400 000 000 $.

La mise en marché des produits agricoles. Dans une économie de marché, la commercialisation est une des fonctions propres à l'entreprise. C'est à travers elle qu'une entreprise reçoit les signaux du marché. Ces signaux lui indiquent la réaction de ceux à qui les produits ou les services commercialisés par l'entreprise sont destinés. L'entreprise à l'écoute de ces signaux pourra alors ajuster ses opérations pour mieux satisfaire ses clients en modifiant les quantités produites, la qualité de ce qui est produit ou encore en abandonnant un type de production pour en développer un autre. C'est ce qui permet d'ajuster la production aux besoins changeants de la demande. Il importe, par conséquent, que les signaux du marché soient transmis le plus directement et avec le moins d'interférence possible aux entreprises. Par conséquent, la situation normale est que la mise en marché incombe aux entreprises.

Par contre, l'agriculture recèle des caractéristiques particulières qui ont amené les pouvoirs publics à juger légitime et opportun de contrevenir à la façon normale de faire les choses en matière de mise en marché. Voici, en bref, ce que sont ces particularités de l'agriculture.

L'agriculture, lorsqu'elle passe d'une production de subsistance à une production marchande, se structure, du moins en Amérique du Nord, sur la base d'entreprises à haute intensité de capital, qui génèrent une faible rentabilité courante en regard de la valeur totale des exploitations. De plus, la rémunération du travail qu'elle peut supporter est inférieure à celle qui se pratique dans les autres secteurs de l'économie.

Les marchés des denrées agricoles sont des marchés très particuliers. L'offre et la demande sont très inélastiques à court terme, ce qui provoque de grandes variations de prix, à la suite de faibles variations des quantités mises en marché. De plus, la nature biologique des produits fait que les entreprises contrôlent moins bien qu'en industrie, où l'on travaille, en général, avec des matières inertes, les quantités disponibles pour la mise en marché. L'influence climatique sur les productions végétales vient ajouter à l'instabilité de l'offre.

De plus, l'offre à moyen et à long terme n'a pas tendance à s'ajuster à la baisse à la suite d'une diminution de prix. En fait, le capital investi en agriculture ne se déplace pas vers un autre secteur à la suite d'une baisse de rentabilité, pas plus que le travail n'aura tendance à le faire. À la suite d'une baisse des prix, les agriculteurs ont souvent la réaction de produire plus pour pouvoir maintenir leur revenu monétaire brut.

Signalons, enfin, que sur les marchés des denrées agricoles, l'offre provient d'une multi-

tude d'unités, alors que la demande est souvent concentrée quand ce n'est complètement monopolisée sur les marchés locaux.

Pour établir un meilleur équilibre des forces entre les agriculteurs et les acheteurs de leurs produits et donner aux agriculteurs des moyens de bonifier et de stabiliser leurs revenus, on a mis en place un cadre législatif et réglementaire qui permet d'adopter, en matière de commercialisation des denrées agricoles, des façons de faire qui s'écartent considérablement des règles qui prévalent habituellement dans une économie de marché.

D'abord, la commercialisation n'est plus effectuée par l'entreprise agricole et elle est confiée à une organisation collective, soit le plan conjoint. Ensuite, elle est coercitive. Finalement, elle permet, en certaines circonstances, un groupement obligatoire de l'offre et même un contrôle, par le plan conjoint, des quantités produites par chaque entreprise. On conviendra qu'il s'agit là de règles inhabituelles. Elles délèguent à une organisation collective, le plan conjoint, et à un organisme qui s'apparente à un tribunal administratif, la Régie des marchés agricoles, des pouvoirs qui en font des organismes qui ont un impact majeur sur l'ensemble de l'activité économique de l'industrie agroalimentaire.

La coopération agricole accepte l'idée maîtresse de cette loi qui permet aux agriculteurs d'organiser collectivement la mise en marché de leurs produits, dans la mesure où une majorité suffisante d'entre eux en exprime la volonté.

Par contre, étant donné le caractère exceptionnel de cette façon d'effectuer la commercialisation et l'étendue des pouvoirs qu'il faut déléguer aux plans conjoints et à la Régie des marchés agricoles dans ce contexte, il importe au plus haut point de circonscrire précisément le champ d'application de ces pouvoirs, d'établir des règles qui favorisent une cohabition harmonieuse entre les plans conjoints et les entreprises intervenant dans la transformation et la mise en marché des produits agroalimentaires et de prévoir des recours en vue de permettre aux parties intéressées d'obtenir la révision de décisions importantes.

Champ d'application des mécanismes collectifs de mise en marché des produits agricoles. La vision qui a présidé à la mise en place de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et l'analyse qui sous-tend cette vision prennent en compte des réalités qui relèvent de la commercialisation qui intervient entre l'agriculteur et le premier acquéreur d'un produit agricole écoulé à l'état brut. Par contre, les différentes lois de mise en marché des produits agricoles ont toujours été ambiguës à cet égard. Le projet de loi 15 non seulement ne clarifie pas cette question du champ d'application de la loi, mais il l'obscurcit.

Dans le projet de loi, sont disparues les définitions de producteur et d'acheteur. Par contre, la définition de l'expression "mise en marché" est maintenue dans son libellé antérieur, que voici: "mise en marché: la vente, la classification, la transformation, l'achat, l'entreposage, le parcage et l'expédition pour fin de vente, l'offre de vente et le transport d'un produit agricole, ainsi que la publicité de financement des opérations ayant trait à l'écoulement de ce produit".

On constate que la transformation des produits agricoles est englobée dans la mise en marché au sens de cette loi, de même que le financement des opérations ayant trait à l'écoulement de ce produit. Par conséquent, toutes ces activités qui se déroulent au sein de la filière agro-alimentaire pourraient être englobées dans la définition de "mise en marché" que l'on vient de lire.

De plus, on retrouve, dans le projet de loi à l'étude, cette autre définition: "produit agricole: tout produit de l'agriculture, de l'horticulture, de l'aquiculture, de l'aviculture, de l'élevage ou de la forêt, à l'état brut ou transformé partiellement ou entièrement par le producteur ou pour lui, les breuvages ou autres produits alimentaires en provenant."

On identifie ici qu'un nouveau produit agricole inclut les produits de l'agriculture à l'état brut, mais également tous les produits alimentaires et les breuvages en provenant. D'ailleurs, la confusion que l'on retrouve dans ces définitions est aggravée par le titre même du projet de loi qui inclut, contrairement à celui de la loi qu'il remplace, "la mise en marché des produits agricoles et alimentaires". Il faudrait, selon nous, circonscrire le champ d'application de cette loi et l'action des plans conjoints à la commercialisation qui intervient entre l'agriculteur et le premier acheteur de son produit, quand celui-ci est encore à l'état brut. S'il fallait donner des pouvoirs additionnels au plan conjoint, par exemple, prélever des sommes pour promouvoir, par la publicité, la consommation d'un produit, comme le beurre, issu d'un produit brut, ces pouvoirs additionnels devraient être explicitement énumérés et se limiter aux cas énumérés.

Mme la Présidente, si vous me permettez, je demanderais à M. Dumais de continuer.

M. Dumais (Mario): Relations entre les plans conjoints et les autres entreprises intervenant dans la mise en marché. Nous endossons les dispositions de l'article 106 du projet de loi 15 qui interdisent à un officier d'utiliser les contributions perçues des producteurs pour financer la mise en place ou le fonctionnement d'une entreprise commerciale ou de détenir du capital-actions ou toute autre forme de capital dans une telle entreprise. Voici pourquoi. Ce qu'apporte de nouveau la formule des plans conjoints face aux

autres systèmes de mise en marché existants, c'est la possibilité d'implanter un système coercitif de regroupement de l'offre. Un plan conjoint dispose d'un pouvoir très considérable de réglementation de la mise en marché des produits agricoles et de perception de prélèvement auprès des producteurs.

Avec les agences de ventes volontaires, les offices de production assumeraient un rôle qui n'est pas le leur. Ils concurrenceraient, à l'aide de fonds prélevés sur un mode obligatoire, d'autres organismes de mise en marché véritablement volontaires. Ce faisant, ils discréditeraient, par conséquent, leur capacité d'agir en tant qu'organisme qui impose des règlements au secteur. D'ailleurs, on pourrait tout aussi bien contester, à partir des mêmes observations, la légitimité, pour un syndicat agricole disposant du pouvoir de prélever des cotisations obligatoires, de s'impliquer dans des organismes volontaires de mise en marché et de transformation des produits agricoles.

Mais il y a un domaine qui relève d'un rapport entre les plans conjoints des entreprises du secteur agro-alimentaire qui nous importe encore plus à la Coopérative fédérée, c'est la question des rapports entre les offices de commercialisation et les coopératives. Les agriculteurs-coopérateurs, propriétaires d'entreprises agricoles, ont choisi de se regrouper pour se doter d'entreprises industrielles et commerciales visant à rassembler leurs produits, à les transformer et à les mettre en marché sous forme de produits alimentaires depuis au-delà de 70 ans. Des producteurs ont pris l'initiative de constituer des coopératives pour assurer la mise en marché des produits et pour améliorer leurs revenus en leur permettant de s'approprier une partie de la richesse créée par leur transformation. Or, qu'est-ce qu'une coopérative? La Loi sur les coopératives la définit ainsi: "Une coopérative est une corporation regroupant des personnes qui ont des besoins économiques et sociaux communs et qui, en vue de les satisfaire, s'associent pour exploiter une entreprise conformément aux règles d'action coopératives." Le texte de la Loi sur les coopératives continue en établissant que la première des règles d'action est la suivante: "1° l'adhésion d'un membre à la coopérative est subordonnée à l'utilisation des services offerts par la coopérative et à la possibilité pour la coopérative de les lui fournir*. (17 h 45)

II importe que cette loi spécifie très clairement que les mécanismes de mise en marché qu'elle prévoit ne doivent pas gêner l'action des entreprises de transformation et, en particulier, l'action des coopératives. L'article 2, tel que proposé, nous apparaît insuffisant à cet égard. Le fait de retrancher en substance le premier paragraphe de l'article 2 actuel équivaut à le vider de la garantie qu'il contenait. En effet, il y a tout lieu de croire que ce nouvel article serait interprété non plus comme une garantie pour une organisation de coopératives de mise en marché, mais simplement comme une priorité, en autant que possible, accordée au mode coopératif. Il est d'autant plus important de renforcer cet article 2 en lui ajoutant un troisième paragraphe, que, même en présence de l'article 2 de la loi actuelle, les coopératives, notamment dans le lait, ne peuvent plus opérer en tant que telles. Aussi, nous proposons de remplacer l'article 2 proposé par le texte de l'article 2 de la loi existante, auquel on ajouterait le troisième paragraphe suivant: Rien, dans l'application de la présente loi, ne doit venir en conflit avec les engagements entre un membre et sa coopérative.

Révision des décisions de la Régie, droit de révision du gouvernement. La Régie des marchés agricoles dispose d'immenses pouvoirs, tant administratifs que judiciaires, si on tient compte que sa juridiction englobe, en plus de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et alimentaires, la Loi sur le produits laitiers et leurs succédanés, la Loi sur le grain et la Loi sur les producteurs agricoles. L'incidence économique et institutionnelle de ces décisions est énorme et a des conséquences structurantes sur l'importante industrie agro-alimentaire du Québec. Par conséquent, il importe de maintenir la disposition de l'article 13a de la loi actuelle qui stipule que le gouvernement peut réviser les décisions de la Régie. Mentionnons que ce recours n'a pas été utilisé abusivement dans le passé et qu'il constitue un mécanisme ultime de sauvegarde des intérêts légitimes des parties touchées par les décisions de la Régie.

Droit d'appel à la Cour du Québec et pouvoir de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure. De plus, il est important que les parties intéressées par les décisions de la Régie puissent avoir accès aux tribunaux afin de vérifier, si nécessaire, la légalité de ces décisions. En conséquence, nous recommandons que le projet de loi soit modifié de manière que soit instauré un droit d'appel devant la Cour du Québec. Également, il faut abolir toute clause privative dont celle contenue à l'article 18. Ces droits d'appel et de révision sont d'autant plus importants que, comme le veut le projet de loi, la Régie sera amenée à interpréter, appliquer et exécuter ses propres décisions. D'une part, elle fait la loi en décidant de tout règlement d'un plan conjoint - article 96 - et de toute convention ou autre condition de mise en marché - article 81 et suivants - et, d'autre part, elle applique la loi en réglant tout litige qui survient dans le cadre de l'application d'un plan conjoint - article 124.

Le pouvoir de la Régie d'ordonner ou d'interdire des actes jugés susceptibles d'entraver un plan conjoint. Pour les mêmes motifs que vous venons d'énoncer, nous demandons que l'article 140 du projet de loi, visant à donner le

pouvoir à la Régie d'ordonner à une personne d'accomplir ou de ne pas pas accomplir un acte déterminé, jugé susceptible d'entraver l'application d'un plan conjoint, d'une convention ou d'un règlement, soit amendé de manière que, premièrement, ce pouvoir d'ordonnance ne vise exclusivement que les seuls actes dérogatoires à un règlement ou à une convention et non tout acte jugé susceptible d'entraver leur application ou celle d'un plan conjoint et, deuxièmement, que ce pouvoir soit inopérant, si la légalité de la disposition réglementaire ou conventionnelle que la Régie vise à faire respecter est contestée, et ce, jusqu'à ce jugement final. En effet, la version actuelle de l'article 140 a une portée beaucoup plus large, susceptible d'interprétation abusive et il nous apparaît essentiel que la Régie ne puisse obliger à agir ou interdire un acte, si la disposition légale sur laquelle elle s'appuie est contestée. Compte tenu de l'effet souvent structurant...

La Présidente (Mme Bégin): M. Oumont. Je m'excuse, M. Dumont...

M. Dumais: Dumais.

La Présidente (Mme Bégin): Je m'excuse M. Dumais, je vous demanderais de conclure, compte tenu qu'il ne reste que deux minutes à votre temps d'intervention.

M. Dumais: Dans deux minutes, j'aurai presque terminé, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bégin): Donc, il y a consentement, vous pouvez poursuivre, M. Dumais.

M. Dumais: Parfait. Donc, les droits des personnes visées par l'ordonnance, si la disposition contestée était effectivement jugée nulle.

Autres dispositions du projet de loi; les quotas, suspension et annulation de quotas, article 90,5°, 7°, 10° et 127. La comparaison des paragraphes 5, 7 et 10 de l'article 90 et de l'article 127 crée un doute quant à l'exclusivité du pouvoir de la Régie en matière d'annulation, de suspension et de réattribution des quotas d'un producteur fautif, pouvoir exclusif clairement reconnu à la Régie par la loi actuelle. En conséquence et compte tenu de l'importance et de la valeur de ces droits pour les agriculteurs, il nous semble essentiel que soit révisé le libellé de ces articles de manière qu'ils réaffirment, sans ambiguïté possible, l'exclusivité de ce pouvoir à la Régie.

Pouvoir d'un plan conjoint de fixer le contingent minimum et maximum dont un producteur peut, lui-même ou en association avec d'autres personnes, être titulaire. Il n'est pas de notre intention de s'objecter à ce qu'un plan conjoint ait le pouvoir de fixer le contingent minimum et maximum dont un producteur peut, lui-même ou en association avec d'autres personnes, être titulaire. Cependant, nous recommandons que la loi définisse clairement le mot "association" de manière à éviter toute interprétation abusive d'un tel pouvoir. En l'absence d'une telle précision, il est à craindre qu'on ne définisse arbitrairement des associations sans égard à un contrôle effectif des contingents et de leur propriété. Nous croyons que le terme "association" doit faire référence uniquement à une notion de copropriété de quotas ou à une notion de contrôle effectif, par exemple, la compagnie mère par rapport à sa filiale.

Accréditation. L'expression "regroupement coopératif utilisée à l'article 77 pouvant être confuse, nous croyons qu'il est nécessaire de préciser qu'une coopérative et une fédération de coopératives sont des organismes aptes à être accrédités.

Nouveaux permis. Nous souscrivons d'emblée à l'article 194 du projet de loi qui stipule qu'avant de délivrer un permis pour exploiter une usine de transformation dans le lait, on doit tenir compte non seulement de l'intérêt public, mais également de l'opportunité économique pour le secteur. Une telle disposition devrait, selon nous, s'appliquer à tous les secteurs de l'industrie alimentaire, plus particulièrement là où l'approvisionnement des usines est contingenté. En conséquence, nous recommandons notamment que la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments soit modifiée en ce sens.

Finalement, les effets rétroactifs de la loi. Les dispositions déclaratoires des articles 204 et 205 pourraient être interprétés comme ayant un effet rétroactif, notamment en ce qui a trait aux litiges actuellement devant les tribunaux et la Régie. La loi actuelle et le projet de loi sous étude ayant des différences significatives, il est important, et ce, au nom des principes élémentaires de justice, que ces articles 204 et 205 soient revus de manière qu'il soit clairement stipulé que ces litiges présentement en cours seront décidés et réglés selon la loi actuelle.

Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bégin): Merci beaucoup, M. Dumais. Je vais maintenant reconnaître M. le ministre de l'Agriculture.

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais remercier MM. Pelletier et Dumais, les représentants de la Coopérative fédérée qui nous présentent aujourd'hui leur mémoire, un mémoire qui est bien étoffé. On en a pris connaissance, on l'a analysé. Il y a plusieurs points très spécifiques auxquels vous vous référez. Vous demandez soit des modifications, des éclaircissements ou d'être sécurisés.

En ce qui concerne le caractère rétroactif que vous voyez par les dispositions des articles 204 et 205, qui pourraient être interprétés comme

ayant un effet rétroactif, vous dites que ça pourrait intervenir dans les litiges actuellement devant les tribunaux ou encore à la Régie. Il faudrait que ce soit nommément et clairement exprimé dans l'article pour que ça puisse s'appliquer à de tels litiges, parce que les problèmes comme ceux auxquels vous vous référez sont régis, en vertu des règles du droit, par les dispositions applicables au moment où le litige a été porté à la connaissance soit du tribunal ou de la Régie.

Nous prenons bonne note de vos commentaires pour les différents points spécifiques, compte tenu du peu de temps que nous avons. Il est déjà 17 h 55. Vous demandez le maintien du recours au Conseil des ministres. Vous dites qu'il n'a pas été utilisé abusivement, je n'en doute pas, mais vous me demandez d'y recourir. Le droit d'appel à la Cour du Québec et le pouvoir de contrôle, c'est maintenu: il n'est pas question de toucher à ça, en vertu de l'article 33 du Code de procédure civile, entre autres. Ça ne devrait pas causer trop de problèmes.

Vous vous référez à l'essence du problème qui est vécu, entre autres, par les coopératives, aujourd'hui, et d'ailleurs l'organisme précédent en témoignait de façon très éloquente. Je vais poser quelques questions, très brièvement. Si on regarde le lait... Le fait d'échanger sur le lait, de faire porter mes premières questions sur le lait, n'enlève en rien l'appréciation que le ministre et le gouvernement a à l'égard de l'ensemble des activités de la Coopérative fédérée. Vous êtes un "major", un groupe majeur dans l'industrie bioalimentaire, au Canada, et on est bien fiers de votre performance, tout comme nous sommes bien fiers aussi de la diversité des services que vous pouvez offrir aux membres des coopératives au Québec, et on vous encourage à continuer dans ce sens-là. Nous sommes fiers aussi - et je pense que la Fédérée a été créée pour ça, en termes de structure - du leadership que la Coopérative fédérée assume auprès des coopératives membres de la Fédérée, au Québec. C'est ça votre responsabilité et je vous encourage à continuer à l'assumer pleinement, entièrement et totalement.

Si on se réfère à la question du lait et qu'on regarde les années 1988-1989, dans le "pool" 1, les sociétaires ont produit 254 000 000 de litres de lait. La réception des coopératives dans les usines est de 455 000 000 de litres. On sait que le volume de la garantie de l'approvisionnement est illimitée dans le "pool" 1. Donc, il y a une différence de 201 000 000 de litres de plus. Vous recevez, dans le "pool" 1, 201 000 000 de litres de plus que vos membres produisent. Si on se réfère maintenant au "pool" 2, vos sociétaires produisent 1 501 000 000 de litres et les coopératives reçoivent 1 374 000 000 de litres. Donc, il y a une différence de 127 000 000 de litres. Au total, si on fait le décompte... Si, demain matin, le principe d'acheminer le lait des membres vers les coopératives était accepté, vous seriez perdants de 74 000 000 de litres. Alors, comment concilier la requête à l'effet que le lait des sociétaires soit acheminé aux coopératives avec un état de fait qui, à la lecture des chiffres qui sont publics, qui sont acceptés par chacun des intervenants, démontre qu'avec les mécanismes actuels, prévus dans les ententes conclues et appliquées en vertu de la loi, les coopératives sont gagnantes?

Une voix: M. Bergeron. (18 heures)

M. Bergeron (Jean-Marc): Mme la Présidente, M. le ministre, cette demande des coopératives s'est faite dans le cadre des ententes intervenues dans le passé, dans le cadre de l'entente Trudeau, qui spécifiait que, du côté du lait nature, c'était la Fédération qui s'occupait des approvisionnements des entreprises. Alors, quand les coopératives ont dit qu'elles voulaient le lait de leurs sociétaires, ça faisait référence uniquement au lait de transformation puisque ça avait déjà été concédé que la Fédération des producteurs de lait faisait la direction du lait de consommation, ou du lait nature, comme on l'appelait à l'époque.

Je pense qu'il faudrait quand même souligner à la commission que, dans les conventions ou les sentences arbitrales intervenues entre la coopération et le syndicalisme, il y a déjà des dispositions par lesquelles la Fédération des producteurs de lait reconnaît que le lait des sociétaires va à la coopérative. C'est l'usage ultérieur qui en est fait qui a été discuté, qui fait la discussion dans le secteur laitier. Pour ce qui est de la convention comme telle, c'est déjà prévu que le lait des sociétaires est livré à la coopérative. Il y a plusieurs articles qui confirment cette réalité dans les conventions ou les sentences arbitrales intervenues. Comme je vous disais, c'est l'usage ultérieur de ce lait, une fois qu'il est arrivé à la coopérative, qui fait litige

M. Pagé: Je suis d'accord que la situation... Une fois qu'il est entré à la coopérative, en vertu des autres dispositions s'appliquant dans le "pool" 2, suite à des ententes et à des décisions qui sont survenues, il y a des volumes qui sont transités. Cependant, quand vous vous référez à l'entente Trudeau, c'est une entente qui est intervenue entre le Conseil de la coopération et la Fédération des producteurs de lait, il y a un certain nombre d'années, où le Conseil de l'industrie laitière n'était pas présent, à ce moment-là, parce que ça s'est inscrit dans un autre contexte.

L'approche du gouvernement, dans un dossier litigieux comme celui-là, doit s'appuyer sur l'intérêt supérieur de l'industrie, avant même l'intérêt de chacun des membres. Ce qui me porte à soutenir qu'on ne peut pas... Quand le

ministre est confronté à un problème ou reçoit une demande très dogmatique, qui s'explique par l'appartenance du membre à sa coopérative, ça, j'en conviens, qui s'appuie là-dessus, sur un principe, comme vous l'exposez et comme Mme Bonneville et M. Pelletier l'ont exposé précédemment... Mais on ne peut pas prendre uniquement le bout qui fait notre affaire.

Les sociétaires, les coopératives laitières du Québec produisent 1 755 000 000 de litres de lait en 1988, 1989. Donc, l'application exacte, exacte, de la requête qui est formulée, ça vous donnerait 1 755 000 000 de litres de lait et non pas les montants que vous recevez actuellement qui sont de 74 000 000 de litres de plus.

M. Bergeron (Jean-Marc): Si vous permettez. Évidemment, vous vous référez, M. le ministre, à des négociations, des demandes qui ont eu lieu, en réalité, dans un autre forum. Dans ce forum-ci, nous, nous disons que rien ne doit intervenir entre un sociétaire et sa coopérative. On le dit bien à l'aise parce que c'est déjà reconnu par la Fédération des producteurs de lait que rien ne doit intervenir entre les deux. Quand je vous ai dit, tout à l'heure, qu'il y a des clauses de la convention qui disent que la Fédération n'intervient pas entre le sociétaire et la coopérative, il y en a onze clauses qui disent ça.

Quant aux demandes précises des coopératives, dans l'autre forum ou dans l'autre débat, comme disait M. Pelletier, tout à l'heure, c'est qu'il s'agit finalement de partager tes rôles et de faire en sorte que les gens puissent trouver chacun leur intérêt respectif, sur le plan économique et sur le plan des pouvoirs et juridictions de chacun. L'article 2, en étant précisé, on souhaite que ça permette de clarifier ces choses-là. Et on souhaite aussi que l'autre débat, qui va déterminer les volumes ou la façon de traiter des volumes précis, trouve sa solution dans le cadre de pourparlers entre les personnes ou les organismes impliqués.

M. Pagé: alors, vous allez très certainement convenir avec moi que cette situation de fait où les coopératives laitières du québec reçoivent en 1988-1989, et nous aurons les chiffres de l'année laitière 1989-1990 après le mois d'août prochain... si on regarde les tendances du premier trimestre de l'année 1989-1990, elles vont exactement dans le même sens, parce que la disposition comme quoi on peut se référer à un volume additionnel de 15 %, dans certaines classes, a été utilisée, dans le premier trimestre de la politique laitière de la dernière année laitière, autant, sinon plus, à l'avantage des coopératives qu'à celui des industries privées au québec. partant de là, vous convenez avec moi, m. bergeron, que cette situation de fait où les coopératives reçoivent plus que ce que produisent leurs sociétaires, s'appuie sur des ententes intervenues, sur des décisions, des ententes suite à des négociations entre la Fédération, le conseil de l'industrie, soit des décisions arbitrales, ou des décisions de la Régie.

M. Bergeron (Jean-Marc): je n'ai pas les chiffres et je ne contesterai pas vos chiffres quant au volume réellement reçu. j'imagine qu'ils sont vérifiés et à date.

M. Pagé: Oui, oui.

M. Bergeron (Jean-Marc): Effectivement, c'est le fait qu'on reçoive du lait en classe 1 - lait nature - c'est le résultat de l'entente Trudeau et d'ententes intervenues. On reçoit à ce moment-là le lait de non-sociétaires. Dans l'autre domaine, dans le domaine de la transformation du lait... Le fart qu'on reçoive le lait de nos sociétaires et avec l'accord de la Fédération, on le reçoit, c'est-à-dire le lait quitte la ferme du coopérateur et il s'en va à la coopérative, transporté par la coopérative. Ça aussi, c'est reconnu dans des ententes. Ça l'était clairement reconnu. Maintenant, les litiges et les discussions qui ont lieu actuellement, c'est sur l'utilisation ultérieure, une fois qu'il est arrivé à la coopérative. Va-t-il être usiné à la coopérative ou cédé à un tiers contre rémunération? La rémunération est-elle adéquate? Est-ce que les coûts de transport... Il y a tout un paquet de problèmes techniques qui sont en discussion mais, dans le cadre du forum ici, on dit que rien ne doit intervenir entre le coopérateur et sa coopérative. Je pense que la convention le reconnaît et ça n'a jamais été le problème. La convention le reconnaît déjà.

M. Pagé: Parfait! Si ça n'a jamais été ça, parfait! Si ça n'a jamais été ça, M. Bergeron, vous confirmez que la garantie pour le sociétaire de voir son lait traité ou conditionné par sa coopérative s'appuie sur des ententes et non pas sur l'interprétation à donner à l'article 2.

M. Bergeron (Jean-Marc): II est certain, si je me rappelle bien ce qui s'est passé dans les négociations, l'article 2 a certainement aidé à ce que les négociations donnent les résultats qu'on a.

M. Pagé: Mais la référence juridique qui a permis, depuis l'entente Trudeau, à laquelle se sont ajoutées les ententes, les décisions depuis 1985, la référence juridique, pour en arriver à une situtation de fait et de droit, où le lait des sociétaires va aux coopératives et les coopératives sont gagnantes en volume, parce que vous en recevez plus que vous n'en produisez, ça s'est fait à partir de l'entente entre la Fédération et la coopération.

M. Bergeron (Jean-Marc): L'effet net de tout ça, c'est définitivement à la suite d'ententes

et ces ententes-là ont été négociées conformément à la loi, c'est-à-dire l'article 2, dans le cadre général de la loi, bien sûr.

M. Pagé: O.K.

M. Bergeron (Jean-Marc): La loi donnait un cadre général au déroulement de ces négociations-là et c'est dans ce sens-là que ça aidait.

M. Pagé: O.K. Donc, la garantie, le lien sociétaire, coopératif dans le conditionnement du lait ne dépend pas de l'article 2, mais plutôt des ententes.

M. Bergeron (Jean-Marc): Comme je vous dis, le fait qu'il soit reçu, traité entre la coopérative et le sociétaire, effectivement, actuellement, c'est régi par les ententes.

M. Pagé: Merci, M. Bergeron.

M. Bergeron (Jean-Marc): son utilisation ultérieure est aussi régie par les ententes, mais ce sont les points qui sont en discussion actuellement.

M. Pagé: Merci, M. Bergeron.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Bergeron.

M. Pelletier: Si vous me permettez peut-être une petite remarque...

La Présidente (Mme Bégin): Sur votre temps de parole. M. Pelletier, oui.

M. Pelletier: Je pense que l'article 2, justement, a permis de s'appuyer sur quelque chose pour négocier ces ententes. S'il n'avait pas été là, on ne serait peut-être pas là aujourd'hui. C'est pour ça qu'on va le maintenir et le renforcer, si nécessaire. C'est l'article 2 qui a permis de négocier ces ententes, parce qu'on en revenait à l'article 2.

M. Pagé: Je dois dire que l'article 2, tel que libellé, tout au moins... Pour moi, l'assise juridique, ce sont les négociations des ententes et vous nous disiez dans le mémoire précédent que c'était une vision presque apocalyptique, si l'article 2 disparaissait ou s'il n'était pas amendé. Or, force est de constater, chacun autour de cette table, suite à l'échange qu'on vient d'avoir, que ce n'est pas l'article 2, ce sont les négociations entre les parties.

M. Pelletier: Je constate, Mme la Présidente, M. le ministre...

M. Pagé: Puis vous êtes gagnants.

M. Pelletier: Vous l'avez dit vous-même, on a des difficultés à s'entendre. Alors, on veut renforcer l'article 2 pour préciser davantage des choses et pour éliminer une bonne partie de ces difficultés. C'est dommage que ça arrive, ce fameux problème de lait, à un moment où il y a une commission parlementaire et où on est dans le plus chaud, vous le savez M. le ministre, de la discussion, mais peut-être au moment où on est le plus près de s'entendre aussi.

M. Pagé: Ah oui!

M. Pelletier: Malheureusement, ça arrive à un moment où ça fait dévier l'objet de notre mémoire, à la Coopérative fédérée, qui est beaucoup plus d'ordre général. Le problème du lait sera traité, selon ce que je comprends, mercredi prochain, le 3.

M. Pagé: Oui. D'ici à une semaine.

M. Pelletier: On devait être là comme Coopérative fédérée.

M. Pagé: II coule du lait dans les pipe-lines pendant une semaine.

M. Pelletier: Je parle de la commission parlementaire: L'honorable cour d'aujourd'hui va entendre les parties concernant le lait.

M. Pagé: La semaine prochaine.

M. Pelletier: L'objet du mémoire de la Coopérative fédérée, ce n'était pas de parler particulièrement de lait, mais...

M. Pagé: On comprend.

M. Pelletier: ...on prévoyait qu'on pourrait en parler, parce que c'est trop chaud. Laissons refroidir un peu le lait. Quand il est trop chaud, ça fait bobo.

M. Pagé: Hum!

M. Pelletier: Je pense qu'ici l'objet de notre mémoire, c'est de parler du général.

M. Pagé: Vous allez le faire chauffer pour le pasteuriser.

M. Pelletier: L'objet du mémoire de la Coopérative fédérée, c'est de parler de la coopération en général, mais c'était le seul objectif pour lequel on est ici aujourd'hui. Si ça n'avait été que du président de la Coopérative fédérée, ça aurait eu lieu la semaine prochaine, le 3, mais à cause de mon absence la semaine prochaine j'ai demandé que ce soit reporté à aujourd'hui et je vous remercie d'avoir accepté que ce soit reporté à aujourd'hui.

M. Pagé: Ça me fait plaisir.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Pelletier.

M. Pagé: Merci, M. Pelletier.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant reconnaître M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: Oui, Mme la Présidente. Je ne ferai pas de préambule, je vais vous poser une question bien directe: Comment pouvez-vous concilier une disposition telle que libellée dans l'article 2, comment pouvez-vous concilier ça avec les changements profonds qui s'opèrent actuellement dans le contexte de mondialisation et dans la situation du libre-échange qui est là depuis un an? Comment pouvez-vous voir que ça va aider davantage? Comment ça vous prépare-t-il? Est-ce que ça vous aide? Quelle force pouvez-vous y voir?

M. Pelletier: M. Dumais peut peut-être expliquer. (18 h 15)

M. Dumais: Oui. Notre perception, c'est qu'il y a mondialisation des économies, oui. Par contre, il n'y a pas libre-échange dans le domaine du lait. Il y a une entente entre les États-Unis et le Canada, l'Accord de libre-échange. Et cet accord-là n'a pas ouvert les frontières du côté du lait. Il y a un article 11 au GATT qui permet de contrôler l'entrée du lait aux frontières. L'article 11 est encore là. Si on ne s'entend pas pour le libeller différemment, il va demeurer ce qu'il est là. Donc, il continue d'y avoir un contrôle aux frontières, d'une part. Mais, d'autre part, en quoi est-ce que l'article 2 de la Loi sur les coopératives empêcherait notre économie agricole d'être moins compétitive si, un jour, nos frontières ne sont plus ouvertes? Ce n'est pas facile à imaginer que vous conceviez que l'article 2 soit un obstacle à la compétitivité de notre économie agricole, parce qu'on a traité tantôt des questions du lait. Le problème, si c'est d'affecter le lait en fonction des besoins du marché, ça se fait. Il y a des règles qui se négocient, qui s'établissent, etc.

Alors, est-ce qu'il ne faudrait plus d'article 2, parce qu'il y a le libre-échange et il y a les négociations du GATT? Bien, le rapport entre l'article 2 et ces situations-là est loin d'être évident à nos yeux. Où, encore, est-ce que l'existence de coopérative, ça nuirait à notre compétitivité dans un contexte où les échanges sont plus libéralisés?

Selon nous, au contraire. Le mouvement coopératif constitue l'embryon de pôles économiques importants au Québec. Enlever les embryons de la coopération agricole dans le secteur agroalimentaire, enlever cette force puissante qui est le mouvement Desjardins dans le milieu financier, on ne sera pas plus compétitifs, advenant des frontières plus ouvertes, qu'on ne l'est présentement.

Donc, selon nous, c'est loin d'être un obstacle. Au contraire...

M. Baril: Vous avez...

M. Dumais: ...l'article 2 de la Loi sur la mise en marché à ce qu'on tire notre épingle du jeu, advenant qu'il y art une plus grande libéralisation qu'il n'y en a à l'heure actuelle, parce que, là, il n'y a pas de libre-échange dans le lait, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Dumais. M. Baril.

M. Baril: Vous avez signalé que vous avez appliqué actuellement des conventions ou des ententes qui dirigent le lait selon les utlisations. C'est justement. C'est tout là qu'est le litige, là. C'est ça qui est fondamental là-dedans. Justement, c'est ce que les coopératives, ce pouvoir des plans conjoints de diriger le lait selon l'utilisation.

À la page 6 de votre mémoire... Plus le temps passe... On va aller plus rapidement. À la page 6 de votre mémoire, vous mentionnez: "II importe que cette loi spécifie très clairement que les mécanismes de mise en marché qu'elle prévoit ne doivent pas gêner l'action des entreprises de transformation, et en particulier l'action des coopératives."

Est-ce que vous voulez dire que l'article 2 devrait être libellé différemment et inclure ce qu'on a ici? La présente loi ne doit pas être interprétée comme un moyen de concurrencer toute entreprise de mise en marché des produits agricoles.

M. Dumais: On dit, M. le député, très précisément dans notre mémoire à propos de l'article 2 ce qu'on suggère. On suggère le maintien des deux paragraphes qu'il y à dans la loi actuelle plus l'ajout d'un autre paragraphe qu'on vous a lu et qui est disponible dans le mémoire. Vous le retrouvez à la page...

M. Baril: À la page 6, M. Dumais.

M. Dumais: C'est ça. Alors, essentiellement, les deux derniers paragraphes de la page 6 disent ce qu'on recommande sur l'article 2. Aussi, nous proposons de remplacer l'article 2 proposé par le texte de l'article 2 de la loi existante, auquel on ajouterait le troisième paragraphe suivant: "Rien dans l'application de la présente loi ne doit venir en conflit avec les engagements entre un membre et sa coopérative."

La Présidente (Mme Bégin): ...M. Dumais.

M. Baril: Une dernière, rapidement.

La Présidente (Mme Bégin): Oui, M. Baril.

M. Baril: Juste au quatrième paragraphe, qu'est-ce que vous vouliez dire par ce paragraphe-là?

M. Dumais: Quelle page?

M. Baril: À la page 6, toujours la page 6: "II importe que cette loi spécifie..." Qu'est-ce que vous vouliez dire par là?

M. Dumais: 6...

M. Baril: À la page 6. "Il importe que cette loi spécifie très clairement que les mécanismes de mise en marché qu'elle prévoit ne doivent pas gêner l'action des entreprises de transformation, et en particulier l'action des coopératives."

M. Bergeron (Jean-Marc): Ce qu'on veut dire par là, c'est que...

La Présidente (Mme Bégin): M. Bergeron.

M. Bergeron (Jean-Marc): ...la Loi sur la mise en marché ne doit pas gêner, sans leur consentement, je veux dire, par un pouvoir qui serait imposé de l'extérieur, les conventions ou les différentes mesures qui existent dans l'industrie laitière lorsqu'elles ont été consenties, négociées et acceptées par les parties. C'est la même chose du côté des entreprises privées, dans le fond. Lorsque c'est accepté, négocié, entendu et convenu, on peut mutuellement s'entendre sur des choses et, même si on est gênés par certaines dispositions, on peut vivre avec parce qu'on les a négociées ou consenties en retour d'autres avantages, en tout cas. D'une façon, on a trouvé un modus vivendi.

Ce qu'on dit, c'est que par cette loi il ne faut pas que la loi permette de gêner l'action de ces gens-là, des coopératives ou de tout autre intervenant, dans le fond, par une simple décision unilatérale et que ces gens-là n'aient pas un mot à dire. Je voudrais revenir, tout à l'heure, sur ce que vous avez mentionné et ça se dit très souvent, ça, que les coopératives contestent le pouvoir de diriger le lait, etc.

Depuis l'entente Trudeau de 1970 et quelque chose, 1979, on n'a jamais contesté le droit de la Fédération de diriger le lait, notamment dans le lait nature. On ne l'a pas contesté non plus dans le lait de transformation. Le seul problème, c'est que de la manière qu'il est fait actuellement, ça crée des problèmes, des stress économiques. Ça crée des difficultés financières importantes aux coopératives, aujourd'hui.

Je ne sache pas, moi, que dans les mémoires du Conseil de la coopération on conteste le pouvoir de le faire. Ce qu'on conteste, c'est la manière dont c'est fait actuellement et la manière dont les sentences ont dit que ça se ferait. C'est ça le problème.

M. Baril: Je vous remercie d'être venus nous présenter ce mémoire. J'aurais sans doute d'autres questions à vous poser pour approfondir ça davantage, mais l'heure est avancée et il y a des personnes qui doivent, je pense, aller à d'autres activités. De mon côté, je vous remercie beaucoup d'être venus nous présenter ce mémoire.

La présidente (Mme Bégin): M. le ministre.

M. Pagé: Je voudrais remercier nécessairement la Coopérative fédérée de sa présentation. On n'a pas eu le temps de toucher à chacun des points spécifiques que vous avez portés à notre attention, mais je vous assure qu'on va prendre en compte vos représentations. Merci d'être venus et continuez le leadership que vous assumez auprès du mouvement coopératif agricole au Québec. D'ailleurs, autant le ministre de l'Agriculture est satisfait de voir les coopératives . laitières du Québec s'inscrire dans une démarche de fusion, d'intégration, de rationalisation d'activités, autant je compte sur la Coopérative fédérée du Québec pour s'assurer que le tout se fasse aussi, inspire non seulement par une volonté d'optimaliser et de rentabiliser, mais qu'on tienne compte aussi de l'impact au niveau des emplois, du maintien des emplois au niveau des régions.

M. le président Pelletier, bon voyage la semaine prochaine. Vous serez en compagnie de mon homologue, M. Mazankowski, dans les pays du bloc de l'Est. Bon voyage! Ramenez-nous des contrats.

La Présidente (Mme Bégin): M. Pelletier.

M. Pelletier: Une toute petite intervention. C'est pour reprendre ce que disait M. Baril. Lors de ma première présentation, vous avez souligné que Desjardins s'était développé même s'il y a des sociétaires qui allaient faire affaire avec les banques. Ce qu'on n'a pas dit, c'est que dans le domaine financier il n'y a pas de plan conjoint.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Pelletier. Ceci clôt le temps qui vous était imparti pour la présentation de votre mémoire. Je tiens à vous remercier de vous être déplacés pour venir nous rencontrer. Je vais maintenant ajourner les travaux de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.

M. Pelletier: Si vous le permettiez, Mme la Présidente, j'aurais un document que j'aimerais distribuer. C'est l'histoire de la coopération agricole au Québec. Alors, je pense que ça pourrait aider à comprendre. Je pense bien que

tout le monde comprend, mais il reste qu'il y a beaucoup de choses. L'histoire de la Coopérative fédérée, en particulier, depuis 1922, cet embryon, qui aujourd'hui, est devenu la Coopérative fédérée et les objectifs poursuivis par la Coopérative fédérée.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. Bergeron. Vous n'avez qu'à remettre ce document au secrétaire de la commission. Il verra à le faire parvenir à chacun de ses membres. Oui, M. le ministre.

M. Pagé: Oui, pour taquiner un peu nos bons amis de la Fédérée, je vous rappellerai que les gens de la Coopérative de sirop d'érable sont venus nous voir cette semaine et ils nous ont laissé du sirop d'érable. Mes collègues s'attendaient que vous nous ameniez un peu de moz-zarella parce que vous vous êtes lancés là-dedans depuis quelques années.

M. Pelletier: C'est de la dinde qu'on aurait dû vous apporter.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bégin): Donc, ceci clôt la discussion. Nous allons donc ajourner nos travaux au mardi 3 avril, à la salle Papineau, et ce, à compter de 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 26)

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