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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 18 février 1997 - Vol. 35 N° 15

Audition de dirigeants d'organismes publics du secteur agricole conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics


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Table des matières

Auditions


Intervenants
M. Yvon Vallières, président
Mme Cécile Vermette, présidente suppléante
M. André Chenail
M. Lévis Brien
Mme France Dionne
M. Norman MacMillan
M. Claude Lachance
M. Michel Morin
M. Pierre Paradis
M. Roger Paquin
*M. Bernard Ouimet, CPTAQ
*M. Serge Cardinal, idem
*Mme Rita Bédard, TAPTA
*M. Luc Roy, RAAQ
*M. Jean-Marc Lafrance, idem
*M. Jean-Pierre Mailhot, idem
*M. Guy Breton, Vérificateur général
*M. Michel R. Saint-Pierre, SFA
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation entreprend ses travaux. Le mandat pour cette séance est de procéder à l'audition de dirigeants d'organismes publics conformément à l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Est-ce que, M. le secrétaire, il y a des changements d'annoncés au niveau de la participation des membres?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a pas de remplacement.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, avant de débuter l'audition comme telle des organismes que nous avons convoqués, je me permettrai de situer brièvement le mandat que nous entreprenons aujourd'hui. Alors, c'est en vertu des dispositions de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, adoptée en juin 1993, que cette séance de la commission a été convoquée. Cette loi consacre le principe que chaque haut fonctionnaire est imputable, donc doit rendre des comptes directement devant l'Assemblée nationale, des gestes qu'il pose à titre de gestionnaire public. Par ailleurs, la loi précise que cette imputabilité s'exerce principalement en obligeant les commissions parlementaires à convoquer à chaque année les sous-ministres et les dirigeants d'organismes qui relèvent de leur champ de compétence. Pour notre commission, cela veut dire cinq dirigeants d'organismes et un sous-ministre. Ce mandat s'inscrit, par ailleurs, dans le rôle de contrôleur de l'exécutif, donc de l'administration publique, que chaque député a le mandat d'exercer, en plus de celui de voter des lois et de représenter ses commettants.

Pour la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, c'est donc un deuxième mandat dans le cadre de cette loi, puisque, l'an dernier à pareille date, nous avons entendu tous les dirigeants d'organismes, et, en mars, nous avons entendu le sous-ministre. La commission, suite à ces auditions, a d'ailleurs déposé, en juin 1996, un rapport contenant huit recommandations sur le fonctionnement et l'administration des organismes publics et du ministère.

Pour ce qui est du déroulement des audiences comme tel, chaque président ou présidente d'organisme disposera d'environ, on vous avait dit «20 minutes», mais on préférerait une quinzaine de minutes, pour présenter les activités de son organisme au cours de la dernière année. Par la suite, les membres de la commission pourront questionner les témoins – de 10 à 15 minutes d'échanges entre chacun des députés et les représentants d'organismes – et cela, afin de favoriser la plus grande participation possible de la députation à nos travaux.

En terminant, je voudrais vous rappeler l'horaire de la journée: de 10 heures à 11 h 45, nous entendrons M. Bernard Ouimet, président de la Commission de protection du territoire agricole du Québec; de 11 h 45 à 12 h 30, Mme Rita Bédard, présidente du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole; de 14 heures à 16 heures, M. Luc Roy, président de la Régie des assurances agricoles du Québec; et, de 16 heures à 18 heures, M. Michel Saint-Pierre, président de la Société de financement agricole. Toutes ces personnes seront accompagnées d'un certain nombre de collaborateurs, collaboratrices.

Et, concernant la journée de demain, nous entendrons, à compter de 9 h 30, M. Jean-Yves Lavoie, président de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, et, à 11 heures, M. André Vézina, sous-ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il s'agit là d'un léger changement. Nous avons devancé d'une demi-heure les auditions de la journée de demain, ce qui nous permettra d'être avec M. Vézina, sous-ministre, de 11 heures à 13 heures, donc pendant deux heures.

Dans l'après-midi de demain, à compter de 15 heures, nous entreprendrons notre mandat annuel de surveillance d'organismes. Cette année, la commission a choisi d'entendre la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires. La commission procédera donc à l'examen des orientations, des activités et de la gestion de cet important organisme du domaine agroalimentaire et également des filiales qui lui sont rattachées, soit le Centre d'insémination artificielle du Québec, le Centre d'insémination porcine du Québec et le Centre de distribution de médicaments vétérinaires.

Alors, sur ce, à moins qu'il y ait des demandes de remarques préliminaires de chaque côté, nous procéderions à l'audition du premier témoin sur la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Un petit point technique: simplement indiquer aux membres de la commission et aux participants qu'il n'y a pas d'eau devant vous. C'est dû à un problème technique qui va être résolu, on m'indique, dans les prochaines minutes, n'est-ce pas, M. le député?

M. Chenail: Oui, monsieur.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, ça va être réglé. Alors, sans plus tarder, M. le président, M. Ouimet.


Auditions


Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ)

M. Ouimet (Bernard): Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais d'abord vous présenter les gens qui m'accompagnent: François Duranleau, à ma droite, qui est directeur de l'analyse et de l'évaluation; Serge Cardinal, à ma gauche, que vous connaissez bien aussi, qui est directeur des affaires juridiques et des enquêtes; Mme Louise MacDonald-Charest, qui est secrétaire de la Commission; à l'arrière, Gary Coupland, vice-président, et Carole Jutras, de mon bureau.

Je vais m'en tenir, M. le Président, au temps que vous nous accordez pour présenter l'ensemble de nos données corporatives. Vous avez sans doute remarqué en introduction que notre rapport annuel 1995-1996 que vous avez en main, lorsqu'on l'ouvre, il ne débouche pas sur un organigramme, mais il débouche sur la zone agricole. C'est pour ça qu'on existe. Notre juridiction s'exerce sur 63 000 km². Ça touche près de 1 200 municipalités au Québec, ça concerne 95 MRC et les trois communautés urbaines, et, pour réaliser un mandat de décision et un mandat de surveillance d'application de la loi, nous disposons de 106 personnes.

Avec votre permission, M. le Président, nous avons présenté un document très simple, qu'on pourrait déposer avec votre accord, qui donne les principales données corporatives de la Commission et qui permettra de suivre, parce que ça va être juste une présentation très sommaire, pour vous faciliter l'introduction que je vais faire aujourd'hui.


Document déposé

Le Président (M. Vallières): Volontiers. Alors on va prendre le document puis on va en faire la distribution à chacun des membres de la commission.

Alors, ça va, M. Ouimet. Vous pouvez continuer.

M. Ouimet (Bernard): Très bien. Comme vous avez dans la page de gauche, qui est en couleurs, les principales données qui sont regroupées, notre mandat, les lois qu'on administre, les règlements, l'évolution budgétaire, l'évolution des effectifs, notre mission, nos orientations stratégiques, nos priorités pour l'année, notre organisation et les principales données statistiques qui ressortent du rapport annuel que vous avez eu, alors c'est une synthèse de nos principales données. Pour le reste, je vais les présenter en mettant peut-être l'accent un peu plus particulièrement sur, je dirais, le texte, sur les priorités d'action que nous avions et les principales réalisations pour 1996-1997, en insistant plus particulièrement sur celles qui découlent du travail qu'on a effectué depuis l'adoption et la sanction de la loi, la nouvelle loi, le chapitre 26 des lois de 1996.

Alors, en plus de la réalisation des activités courantes de la Commission au plan de l'examen des demandes d'autorisation, des décisions et de la surveillance de l'application de la loi, la Commission s'était donné un programme assez ambitieux, dans le cadre de son plan d'action annuel, qui s'inscrivait dans la poursuite de son plan stratégique 1994-1997. Nous avons regroupé les principales réalisations autour de six priorités. Je vais mettre plutôt de l'importance avec vous ce matin sur la première parce qu'elle fait le point sur tout ce que nous avons fait depuis l'adoption de la sanction de la loi. Pour le reste, ça va être juste une présentation très sommaire. Et, comme vous conservez le document, il pourrait peut-être vous aider au niveau des questions, si vous en avez à cet égard.

Alors, la première priorité qu'on s'était fixée, c'était de contribuer aux modifications apportées à notre loi constitutive et d'adapter les pratiques administratives et décisionnelles de la Commission pour tenir compte de la nouvelle loi et pour en faciliter l'application. Alors, bien sûr, il y a le rôle-conseil que vous avez connu, puisque, dans le fond, vous avez travaillé énormément à la modification de la loi, vous l'avez adoptée, vous l'avez sanctionnée à l'Assemblée nationale, et on a joué un rôle, je pense, que vous avez reconnu, assez proactif dans ce domaine-là en ce qui nous concerne. Par la suite, nous avons préparé le matériel nécessaire pour faciliter l'implication des instances locales et régionales – on pense aux municipalités, aux MRC, aux communautés urbaines – et pour faciliter la mise en application de la loi dès le premier jour de son entrée en vigueur, lorsque la date sera arrêtée par le gouvernement. À cet égard, on a produit un document synthèse présentant les grands éléments de la réforme, conçu également pour aider les instances municipales à l'appliquer dès le premier jour qu'elle sera en vigueur. Également, ce document synthèse fait état des nouveaux processus d'étude de demandes, et nous l'avons consigné, ici, dans un document qui est prêt pour distribution dès que le gouvernement en jugera la pertinence.

(10 h 20)

Nous avons également revu complètement nos formulaires de demande d'autorisation. Je vous dirais que, de tous les formulaires qui existaient à la Commission depuis le début, les six formulaires qui existaient, nous avons simplifié nos formulaires, dans l'optique des objectifs du gouvernement, pour en faire un seul, lequel incorpore l'esprit et les nouvelles dispositions de la loi et également le rôle accru des municipalités dans le cadre de la nouvelle loi, lorsqu'elle sera en application. Nous avons fait également un document spécial, qui est plus comme un cahier de charges qu'un formulaire, qui s'adresse uniquement aux MRC et aux communautés urbaines pour la présentation des périmètres d'urbanisation. Comme vous le savez maintenant, les périmètres d'urbanisation en zone agricole vont se faire uniquement par exclusion, et seules les MRC et les communautés urbaines seront habilitées, ou les municipalités avec l'accord de leur communauté ou de leur MRC, à proposer des demandes à cet égard. Donc, les documents essentiels à la mise en oeuvre de la loi sont prêts et, dès que le gouvernement arrêtera la date, ils pourront être distribués aux municipalités. Nous aurions aimé pouvoir vous les déposer ce matin, mais, compte tenu qu'ils seraient publics en les déposant et vu que la date d'entrée en vigueur de la loi n'est pas arrêtée, c'est dans cette perspective-là que nous vous mentionnons que le travail est fait, mais nous les déposerons subséquemment.

Également, on a préparé les modifications réglementaires qui vont permettre de soustraire divers cas à l'obligation d'obtenir une autorisation de la Commission ou de réduire le nombre de déclarations devant être produites à la Commission, modifications qui découlent de la nouvelle loi. Également, nous avons travaillé à la préparation de rencontres d'information qui auront lieu dans toutes les régions administratives du Québec, une fois que la loi sera en vigueur, pour permettre, au plan technique, de répondre aux questions d'ordre opérationnel ou d'ordre pratique que posera l'application de la nouvelle loi.

Nous avons également, depuis l'adoption de la loi, sur invitation toujours des parties intéressées, rencontré plusieurs organisations dans le but de faire part des modifications à la loi et également de voir le questionnement qui se posait à cet égard. On a rencontré la corporation des secrétaires-trésoriers des MRC – en pratique, ce sont les gérants des MRC – également les aménagistes régionaux, donc les aménagistes de toutes les MRC du Québec qui vont devoir travailler à l'application de la loi, la Table des préfets de la Montérégie, la rencontre de la Table des préfets de Chaudière-Appalaches, les 23 maires de la MRC des Maskoutains, à leur demande, bien sûr.

On a également mis en place un dispositif qui s'appliquera dès le jour 1 de la nouvelle loi, de l'application de la nouvelle loi, un dispositif assez innovateur de reddition de comptes qui ira encore plus loin que ce que l'on fait dans l'amélioration de nos rapports annuels. Celui-là, il portera sur nos décisions et il permettra à l'Assemblée nationale et à nos interlocuteurs du monde agricole et du monde municipal de prendre en compte les motifs principaux de nos décisions par rapport à notre mission essentielle et à l'objet même de la loi. C'est une reddition de comptes qui ira beaucoup plus loin que la reddition de comptes sur l'efficacité ou l'efficience de la Commission; ça va être sur le résultat de nos décisions. Alors, on a mis en place ce dispositif. Dès le jour 1 de la loi, on va pouvoir le mettre en pratique.

Également, on a apporté – puis on est encore en cours de processus à cet égard – tous les changements qu'il faut à l'interne, parce que c'est immense, ce que ça suppose sur la Commission, au niveau des processus administratifs, des systèmes informatiques, de nos méthodes de travail pour l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Bien sûr que nous avons travaillé très fort pour la formation de notre personnel et des membres à ce nouvel environnement. La conclusion de cette priorité-là, c'est que la Commission est prête à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, dès que le gouvernement le jugera à propos.

Quant à la deuxième priorité, c'était de se positionner à l'égard de la réforme des tribunaux administratifs et d'y contribuer dans le but de modifier ou d'adapter le cadre procédural et institutionnel dans lequel nous oeuvrons, c'est-à-dire vers une déjudiciarisation de notre organisme. Nous avons également poursuivi nos échanges – c'est la priorité 3 – avec nos interlocuteurs du monde agricole et du monde municipal pour en arriver à une compréhension commune des enjeux de la zone agricole et susciter leur engagement. On a travaillé également à poursuivre la réorganisation administrative de la Commission – nous le verrons dans les tableaux que je vais déposer tantôt – qui simplifie encore notre organisation et qui a eu pour effet de réduire le niveau d'encadrement.

Je passe les réalisations qu'on a faites sur chacune de ces priorités-là, puisque vous avez le document en main. J'insiste sur le fait qu'aussi, dans le cadre justement des remarques du Vérificateur général, nous avons fait une politique en ce qui concerne le recours aux plaintes pénales, qui était un point important qui avait été mentionné par le Vérificateur général en particulier. Nous avons continué le processus de révision de traitement de nos demandes d'autorisation. On a mis en place un système d'indicateurs de gestion pour suivre nos délais de traitement, qui était une remarque importante du Vérificateur général, et également nous avons examiné toutes les décisions du Tribunal d'appel, depuis sa création, qui révisaient les décisions de la Commission, pour en tirer tous les enseignements appropriés.

La cinquième priorité, ça s'inscrit toujours dans le cadre de notre plan stratégique 1994-1997. C'était de mettre en place une approche par résultats plutôt qu'une approche par activités, puis d'améliorer de beaucoup notre reddition de comptes. Vous l'avez vu dans le rapport annuel de l'an dernier, vous le revoyez dans le rapport annuel de cette année, nous avons tenu compte très fortement des recommandations du Vérificateur général, et notre rapport maintenant donne beaucoup plus d'informations sur les résultats atteints, sur la mission, les orientations et les résultats. J'en passe pour dire qu'on est en préparation d'une entente avec l'Éditeur officiel du Québec pour rendre accessibles sur CD-ROM toutes les décisions de la Commission depuis 1989.

Également, sur le plan administratif, je mentionnerais juste une chose. En termes d'utilisation de façon optimale de nos ressources à la Commission et de doter la Commission des supports nécessaires particulièrement au plan informatique, ce qui d'ailleurs avait été soulevé par le Vérificateur général, la Commission, en cours d'année, a signé quatre ententes: une avec le MAPAQ pour la réalisation de son plan directeur d'informatique – c'est pour 1 200 000 $ sur trois ans que le MAPAQ nous aide à la mise en oeuvre de notre plan; on a signé une entente avec le ministre du Travail pour avoir quelqu'un qui nous permet de piloter notre opération chez nous parce qu'on n'avait pas les moyens de se doter d'une ressource par nous-mêmes; on a signé une entente avec le ministre des Ressources naturelles pour pouvoir disposer des ingénieurs forestiers, puisque nous n'avons plus d'ingénieurs forestiers à la Commission, dans les cas d'enquêtes en particulier; on a signé une entente, comme, bien sûr, plusieurs organismes, avec notre CMOT, c'est-à-dire le comité d'organisation du travail, sur l'aménagement du temps de travail; et nous sommes actuellement en cours de discussion avec le MAPAQ pour une entente en matière de gestion du personnel.

Je m'arrête là-dessus, plutôt, pour tout simplement vous présenter rapidement, avec un mot seulement, les tableaux qui suivent. Dans le document 2, vous voyez l'organisation administrative de la Commission avec les deux changements qui ont été opérés. Alors, comme vous pouvez voir, à gauche, nous sommes arrivés progressivement, je dirais, à l'organisation de droite qui est de beaucoup simplifiée. La Commission a réduit son niveau d'encadrement de trois cadres et présentement elle dispose de quatre cadres pour l'ensemble de ses activités. Je pense que le tableau parle de lui-même. En ce qui concerne le tableau 3, vous voyez la courbe de ce qui rentre chez nous, la demande, et vous voyez la décision rendue dans le deuxième tableau. Je réfère au document 3. Deux mots seulement: en ce qui concerne la demande, elle se rétablit au niveau de 1992-1993.

Au niveau des décisions rendues depuis 1993-1994, les décisions ont augmenté progressivement pour atteindre un estimé de 4 500 décisions cette année, c'est-à-dire près de 600 décisions de plus par rapport à 1993-1994, et ça s'explique par la remarque qu'on a faite en bas de page: qu'on a toujours plus de décisions que de demandes. Ha, ha, ha! Mais c'est parce que la notion de demande, c'est par dossier ouvert, et parfois nous avons une MRC qui amène quatre ou cinq, six demandes par municipalité. C'est ce qui fait qu'on a toujours plus de décisions que de demandes.

Le document 4 vous donne rapidement l'évolution de notre budget. J'attire votre attention sur le tableau du milieu, où la Commission, depuis 1994-1995, a diminué de 1 000 000 $ ses crédits. Et, en ce qui concerne le tableau 5, vous avez également l'évolution des effectifs à la Commission, qui sont passés de 138 ETC en 1992-1993 à 114 au budget. Dans la pratique, nous avons 110 postes, puisque, dans le programme de départs assistés, il y a quatre personnes qui seront parties, et, dans les faits, nous sommes 106 personnes. Vous avez la ventilation du personnel chez nous.

(10 h 30)

J'en arrive au document 6, qui était une préoccupation très grande du Vérificateur général, et vous voyez que, depuis 1992-1993, la Commission a réduit ses délais de 43 %. En auditions publiques, on est passé de 23 semaines en 1992-1993 à 13 semaines en 1996-1997, donc un gain de 10 semaines, et ça inclut 30 jours, qui est quatre semaines, pour permettre aux parties de réagir quand on envoie le rapport d'analyse. Sur les dossiers qui ne demandent pas d'auditions publiques, nous sommes passés de 18 semaines à 10 semaines, donc un gain de 44 %.

Au total, vous le voyez dans la ventilation au bas, de l'ouverture du dossier, donc, à aller jusqu'à la décision, lorsque c'est en public, c'est 13,4 semaines, y compris toujours le quatre semaines dont la Commission n'a pas le contrôle, et 9,5 semaines sur les dossiers qui ne demandent pas d'auditions publiques. Ça veut dire que le délai de délibéré chez nous, une fois que le citoyen est passé devant un membre, il est rendu à une semaine pour un dossier ex parte, c'est-à-dire sans la présence des parties, et à 2,2 semaines lorsqu'il y a une audition publique, et ça, ça comprend le délai de remise que les gens nous demandent très souvent, ça comprend le fait qu'on siège en région et que souvent, pour attendre d'avoir un nombre assez considérable, donc on est obligé d'attendre une ou deux semaines de plus.

Et vous avez un dernier tableau, qui est le document 7, qui montre qu'en fait, sur trois années, en ce qui concerne les demandes d'autorisation, on peut dire que, malgré un régime d'appels qui est très ouvert, moins de 3 % des décisions de la Commission ont été renversées. Si on le calcule sur la période de 1993-1994 à 1995-1996, la Commission a rendu 12 418 décisions. Il y en a 940, pour l'équivalent de cette période-là, qui sont allées en appel et seulement 358 sur les 12 000, si vous voulez, sur celles qui n'ont pas été attaquées ou celles qui n'ont pas été en révision, qui représentent des décisions infirmées. En pratique, ça veut dire que 2,9 % de nos décisions, sur trois ans, de l'ensemble des décisions qu'on a rendues ont été infirmées.

En conclusion, M. le Président, c'est que, suite au rapport du Vérificateur général, on s'est donné une vision, on s'est donné un plan, on s'est donné une organisation. On a fait face à 1 000 000 $ de compressions, on a diminué nos effectifs de 138 à 106, on a diminué notre niveau d'encadrement de trois cadres. On a réduit nos délais de 43 % et 44 %. On a amélioré nos contacts avec le milieu, et moins de 3 % de nos décisions, sur l'ensemble de trois ans, ont été attaquées dans un régime très ouvert, c'est-à-dire ont été renversées dans un régime de révision très ouvert. Également, nous avons été très proactifs, je dirais, dans tout ce qui s'appelle «les propositions de modifications aux règles du jeu» en vue d'épauler le gouvernement et l'Assemblée nationale dans les modifications apportées pour modifier la dynamique de notre secteur d'activité. Je vous remercie.

Le Président (M. Vallières): Alors, merci, M. Ouimet. Avant de passer la parole à d'autres collègues, peut-être une question rapide à M. le président. Vous avez parlé de documents qui sont actuellement en préparation dans le but d'en arriver à la mise en application de la loi n° 23 qui a été adoptée à l'Assemblée nationale. Est-ce qu'il est de votre intention de faire parvenir aux députés, je dirais, un kit complet des différents documents qui ont été préparés dès que l'aval sera donné par le gouvernement pour la mise en application de cette partie de la loi?

M. Ouimet (Bernard): La réponse, c'est oui, M. le Président, certainement, puis même, comme j'en discutais avec mon ministre, il serait très ouvert à ce que vous puissiez bénéficier aussi dans vos bureaux de comté de séances d'information technique que la Commission pourrait donner des deux côtés de la Chambre.

Le Président (M. Vallières): Ce serait, je pense, une bonne initiative. On sait que souventefois les gens s'informent dans les bureaux de député, et il serait intéressant de voir la mécanique maintenant qui va entourer la mise en application, les changements qui sont introduits dans la loi n° 23.

Là-dessus, vous me permettrez d'indiquer qu'il aurait été, à notre avis – en tout cas, à mon avis – important, parce qu'il y a un climat actuellement assez particulier dans bien des milieux ruraux ou semi-ruraux ou semi-urbains, un climat qui souvent antagonise le milieu agricole et le milieu urbain... Il y a toute une partie de l'application de cette loi qui a été adoptée à l'Assemblée et qui devrait venir améliorer, je pense, l'état des relations dans ces différents milieux.

Ma question, parce que vous avez mis beaucoup d'énergie à préparer les intervenants avec vous pour la mise en application, dont les municipalités, les municipalités régionales de comté, enfin, vos principaux partenaires: Est-ce que, M. le président, vous pouvez m'indiquer s'il y a quelque chose qui techniquement empêcherait la mise en application des dispositions dans la loi n° 23 qui concernent la CPTAQ exclusivement? Est-ce que ce serait faisable? Et est-ce que la façon qu'on vous a donnée de procéder, là, la préparation de documents, tout ça, pourrait être faite à part la mise en application globale de la loi? Il y en a une certaine partie qui fait problème au niveau environnemental, mais toute la partie qui concerne la CPTAQ, est-ce que ça pourrait être appliqué sans problème, compte tenu de l'expérience que vous avez de l'application de la loi actuelle?

M. Ouimet (Bernard): La réponse, je vous dirais, c'est que techniquement, sur un plan technique, ce n'est pas incompatible du tout. La réponse serait: Oui, il y a moyen qu'on entre – sur un plan technique, je dis bien – les dispositions qui concernent la loi, dont la Commission a l'administration, ou ce qui rejoint plus la loi de l'aménagement du territoire avec la Loi sur la protection du territoire agricole, si on fait fi des questions qui sont pendantes sur le droit de produire et la loi sur l'environnement. Donc, pour la partie qui concerne la Loi sur la protection du territoire agricole et la loi sur l'aménagement, il y a beaucoup de dispositions qui pourraient entrer sur un plan technique et qui permettraient de commencer à changer la dynamique.

Maintenant, vous comprenez que l'option qui a été prise de regarder ça dans un ensemble est une option qui ne relève pas de la Commission. Ce n'est pas technique, cette partie-là. Et je crois comprendre, de la lecture des événements, qu'on souhaite arriver avec l'ensemble des dispositions, ce qui serait souhaitable pour toutes les parties, y compris pour la Commission. Mais c'est sûr que, sur un plan technique, il y a suffisamment de modifications qui auraient pour effet de modifier énormément la dynamique, que vous connaissez d'ailleurs, qui sont dans la loi. Je pense, juste comme ça, de mémoire, au fait de créer des comités consultatifs agricoles, par exemple, qui aideraient beaucoup à l'amélioration du climat et de la dynamique au niveau des MRC, au fait que les demandeurs vont devoir prouver qu'il n'y a pas d'espace ailleurs pour s'implanter en zone agricole.

L'obligation qui est faite aux demandeurs, peu importe la qualité des sols en cause, est une disposition importante pour la protection du milieu agricole. Le fait que tous les agrandissements de périmètre urbain, par exemple, ne vont se faire que par exclusion et que seules les MRC et les communautés urbaines ou les municipalités, avec l'appui de leur communauté urbaine ou de la MRC, peuvent faire une demande d'exclusion d'un agrandissement de périmètre urbain, juste ça, c'est comme une révolution en soi. Le fait que, dans les agglomérations urbaines du Québec définies par Statistique Canada, les zones métropolitaines de recensement, les MRC, les municipalités vont devoir tenir compte de l'espace alternatif pour des projets d'envergure, voir au niveau de l'échelle de l'agglomération, ça aussi, c'est des mesures importantes. Je ne les passe pas toutes, mais le fait que, par exemple – juste en terminant là-dessus – une demande qui ne sera pas conforme à la réglementation locale va être jugée irrecevable à la Commission en termes de mesures d'harmonisation, je ne mentionne que ça pour dire qu'il y a, en substance, dans la partie qui concerne plus les affaires de la Commission, les éléments vraiment d'une véritable réforme du régime de protection du territoire agricole.

Je ne veux d'aucune façon amenuiser les autres choses qui ont pris peut-être plus l'actualité ou la manchette, qui ont été plus médiatisées, je dirais, par rapport au droit de produire et qui ont laissé dans l'ombre les changements dont on parle, les changements très profonds à la loi, qui sont vraiment un changement de la dynamique qu'on opérait sur plusieurs années et qui nous emmèneraient vers un régime de protection qui responsabiliserait davantage les collectivités locales, qui permettraient à la Commission de considérer tous les critères de décision dans tous les cas, ce qui n'est pas le cas présentement, particulièrement pour les cas, je dirais, d'intérêt collectif, les cas d'ordre public en région en particulier, et qui nous donneraient plus de leviers dans les zones à forte pression comme la région de Montréal, par exemple, donc une plus grande ouverture vers les projets à caractère collectif pour les régions, d'ordre public, et une meilleure emprise pour contrôler la pression dans la région de Montréal.

Alors, ma réponse, c'est: Oui, ça pourrait techniquement se séparer, mais il y a sûrement des raisons très louables pour faire en sorte que tout le dossier soit attaché avec la loi sur l'environnement par rapport à la réglementation, particulièrement, qui doit en découler.

(10 h 40)

Le Président (M. Vallières): Je vous posais la question, M. le président – en terminant sur le sujet, parce que d'autres collègues veulent vous poser des questions... C'est que la Commission, l'année dernière... Vous vous souviendrez de la préoccupation majeure qui est ressortie, autour de cette table, de l'ensemble des députés, à l'effet qu'on voulait voir la loi du zonage agricole modifiée pour tenir compte davantage de la réalité économique des régions dans ces décisions. Vous nous aviez dit, à ce moment-là: Bien, nous, pour le faire, il faudrait que la loi soit modifiée. La loi l'a été, et aujourd'hui évidemment la Commission ne peut à ce moment-ci tenir davantage compte qu'elle ne le faisait dans le passé, dans ses décisions, de cette réalité régionale. Donc, ça se fait attendre, compte tenu que vous n'avez pas les outils qu'il faut pour procéder. Donc, la réponse que vous me donnez, en tout cas pour moi, elle m'éclaire, dans le sens que, si le dossier devait se prolonger, il n'y a rien qui techniquement empêcherait la CPTAQ, comme suite à une décision du gouvernement, de procéder à l'application de toute la partie de la loi qui relèverait de vos responsabilités. C'est ce que je comprends.

J'ai des demandes d'intervention de part et d'autre. M. le député de Rousseau, suivi du député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Brien: Merci, M. le Président. Lévis Brien, député de Rousseau, dans Lanaudière. Moi, ce matin, d'abord c'est la première occasion que j'ai de parler à des gens de la CPTAQ. Je dois vous dire, M. Ouimet, puisque c'est vous qui portez le chapeau, que je suis très déçu de la CPTAQ, au fil des ans. Mon explication est la suivante. Je me rappelle mes cours de géographie. La vallée du Saint-Laurent a toujours compté parmi les meilleures terres du Québec. Ce n'est pas pour rien qu'il y a un endroit qui s'appelle Terrebonne. Vous avez des villes comme Repentigny, Lachenaie, Saint-Sulpice, Saint-Gérard-Majella, une localité où j'habite, et puis, au fil des ans, malgré la Commission de protection du territoire agricole du Québec, on a vu se développer et se développer les municipalités à vue d'oeil.

Moi, il y a des choses que je ne comprends pas. Quand la terre est bonne, on dézone; quand c'est des caps de roches puis des pits de sable – puis j'ai des exemples – on reste zoné. Je comprends que vous allez dire: Bon, bien, là, il y a un comité d'urbanisme en place, il y a la MRC qui peut avoir un schéma d'aménagement, je comprends qu'on consulte bien du monde, mais la réalité c'est que, sur les bonnes terres du Québec, on continue de bâtir. Puis un exemple: L'Assomption. Je me rappelle des producteurs qui étaient là, à L'Assomption. Maintenant, la terre vaut 1 500 000 $, puis, comme d'habitude, c'est dézoné et puis on construit. Ça fait que là-dessus j'aimerais vous entendre.

Et puis, deuxièmement, bien, une petite question anodine aussi: Est-ce que vos fonctionnaires chez vous vont sur place? Parce qu'il y en a qui se déplacent dans les champs, dans les boisés, dans les régions pour aller voir ce que ça a l'air. Allez-y, M. Ouimet.

Le Président (M. Vallières): M. le président.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, j'ai compris qu'il y avait deux questions du député de Rousseau. Sur la première, ce que je peux vous dire, c'est que je pense qu'il y a un beau message qui a été donné par la décision que la Commission a rendue, qui est une décision qui était courageuse, à mon point de vue, récemment dans L'Assomption, justement, la MRC de L'Assomption que vous avez mentionnée. Vous vous rappelez? La demande, à l'origine, c'était 1 200 hectares qu'on voulait dézoner, il y a quelques années, dans le schéma d'aménagement de L'Assomption. La demande s'est progressivement diminuée suite à des contacts qu'on a eus avec eux, suite aussi à d'autres interventions du gouvernement dans le cadre de la loi 125, de sorte qu'elle est tombée jusqu'à 400 hectares, puis elle a diminué encore. Et, si vous remarquez la dernière décision qui a été rendue dans le cas de L'Assomption, sur les périmètres urbains de L'Assomption, c'est quelques hectares seulement qui ont été dézonés. Je pense que c'était pour un parc agroalimentaire, et le restant, je pense que ça ne faisait pas deux ou trois hectares, au total, à côté de choses qu'on avait autorisées. Ça veut dire que c'était zéro pour le développement résidentiel, zéro pour le développement commercial, zéro pour le développement industriel, sur une demande qui était partie à 1 200 hectares. C'est une décision qui a circulé dans tout Montréal. Dans le Grand Montréal, au sens qu'on entend le Grand Montréal, les 113 municipalités, je pense que tous les préfets avaient copie de la décision qui était en même temps une décision qui était porteuse d'un message.

Bon, c'est sûr qu'il a fallu, au fil des ans, répondre aux demandes, puis ça, je vous dirais, c'est en fonction des critères ou c'est en fonction des motifs qui ont été dits dans les décisions. Vous pouvez très bien en mentionner une, ou deux, ou trois, ou quatre, ou cinq, ou un certain nombre dont on peut partager ou pas l'opinion, mais on doit motiver nos décisions, et c'est par chacune de nos décisions qu'on doit l'indiquer. Mais je pense que les décisions qui ont été rendues dans Bouchette après quatre ou cinq jours d'auditions publiques, sur un site d'enfouissement où c'était non, la décision de L'Assomption qui a eu un effet dans toute la couronne de Montréal, c'est un message et je pense que votre préoccupation nous rejoint beaucoup.

Quant à la deuxième, à savoir si on va sur place, effectivement on va beaucoup sur place. On est une commission de territoire. C'est pour ça que je mentionnais que, dans notre rapport annuel, on met d'abord la zone agricole. Nos analystes sont constamment en contact avec les MRC, les municipalités. Souvent, dans les cas compliqués, ils vont visiter le terrain, et je vous dirais que de plus en plus, quand le cas est un peu difficile à percevoir par les données, il y a toujours une audition qui a lieu. Il y a une visite de terrain par les membres de la Commission.

M. Brien: Est-ce que je peux exprimer un dernier commentaire?

Le Président (M. Vallières): Oui, rapidement.

M. Brien: Merci, M. le Président. Moi, j'en ai aussi... Vous savez, là, on ne refera pas le monde. Je regarde, par exemple, des problèmes qui surgissent présentement dans des municipalités, puis encore à L'Assomption. Il y a un producteur qui vient pour bâtir une porcherie, et puis: Bien non, à L'Assomption, là, tu n'es plus à la campagne, t'es en ville. Et puis ça, c'est majeur, parce que, nous autres, les députés, de part et d'autre, on se retrouve avec des projets de construction, d'agrandissement, bon. Bien sûr, ça concerne l'environnement, ça concerne bien des gens, mais, moi, ce que je veux dire, c'est que le producteur agricole, il a comme un problème. Malgré la Commission de protection du territoire agricole, il n'est pas capable de faire ses activités, ou très difficilement, puis de plus en plus difficilement parce que partout tu vas avoir: Bon, bien, la ville a pris de l'expansion, puis là c'est résidentiel, puis là tu vas épandre de plus en plus loin. Puis, si t'as trois cours d'eau qui traversent ta terre, tu commences à avoir des problèmes à cultiver.

Moi, je veux vous rendre conscient. Je comprends que vous appliquez une loi, je comprends que les lois sont votées par le Parlement, mais je veux vous rendre conscient que, pour jouer son plein rôle, la Commission de protection du territoire agricole doit cesser de donner des autorisations partout où la terre est bonne. Qu'on travaille davantage à concentrer. Ce n'est pas pour rien que Montréal a des problèmes, parce que les banlieues... À Repentigny, voilà 10 ans, il y avait combien de population? Aujourd'hui, ils sont rendus, je pense, à 55 000. Voilà 10 ans, ça devait être environ 20 000. Mais oui, mais c'est des bonnes terres, à Repentigny. Le cultivateur partait avec son tracteur puis il en avait pour une heure et demie à labourer rien que sur un sens. C'étaient des terres extraordinaires. Mais là c'est dézoné, puis c'est des édifices, c'est des résidences, c'est des condos, nommez-les. Mais ce n'est pas protégé.

En tout cas, j'espère que je vous sensibilise. Moi, je viens de la campagne puis, si j'ai fait un choix de vivre en campagne, je ne veux pas vivre en ville. Si je veux vivre en ville, je vais aller vivre en ville. Puis, moi, de temps en temps ça sent le purin, puis de temps en temps il y a des tracteurs qui se promènent à récolter le maïs, puis je l'accepte. Mais ce que je veux vous dire, c'est que, si la Commission de protection du territoire agricole n'est pas plus sévère, bien, on va se retrouver tantôt, au Québec, puis ça a déjà commencé, pas à peu près, avec des problèmes de covoisinage. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Une courte remarque de M. le président.

M. Ouimet (Bernard): Merci, M. le Président. Je prends votre message, comme président de la Commission, très sérieusement. De toute façon, toutes les interventions que vous faites, on les prend comme ça, sérieusement. Mais je le note. Votre volonté, c'est que la Commission soit très rigoureuse dans l'application de la loi, et soyez sûrs que nous allons nous y appliquer.

Si vous remarquez certaines données qui sont dans le rapport annuel qu'on a fourni, que vous avez en main, il n'en demeure pas moins que, pour les développements résidentiels, de toutes les demandes que nous avons eues, par exemple, pour le développement résidentiel, on remarque que 16 % seulement des superficies demandées ont été autorisées par la Commission. On donne plus d'information maintenant qui permet de voir par types de demandes. C'est 18 % pour de deux à cinq résidences. Dans les résidences isolées, c'est 22 % des superficies qui ont été demandées. Et, quand on observe ça, c'est qu'on se rend compte que la Commission est plus ouverte, si on peut parler ainsi, pour les projets d'ordre public ou les projets para-agricoles ou les projets qui ne menacent pas du tout l'agriculture, et, quand c'est pour des développements résidentiels ou des maisons isolées, rattachés ni à l'agriculture ni à la foresterie, le score chute à 80 % de refus dans certains cas.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le président. Peut-être juste une remarque qui ne demandera pas de réponse du président. Il y a peut-être à travailler aussi, au niveau de la Commission, sur la justification de ces refus. Il y a souvent des gens qui viennent nous revoir par la suite puis qui, comme suite aux arguments qui sont fournies par la Commission, semblent vraiment ne pas comprendre les motifs invoqués par la Commission. Je pense qu'il y a un aspect pédagogique, dans les décisions que vous prenez, où il y aurait avantage à s'assurer que les gens comprennent bien les motifs qui sont à la base des décisions qui sont prises. C'était juste une remarque comme suite aux questions du député de Rousseau.

Je m'excuse auprès du député de Beauharnois-Huntingdon, mais je n'avais pas vu ma collègue de Kamouraska-Témiscouata qui m'avait, avant vous, demandé de prendre la parole.

M. Chenail: Vous êtes tout excusé, M. le Président. Allez-y, ma chère.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée.

(10 h 50)

Mme Dionne: Merci, M. le Président.

Une voix: Le député a grand coeur.

Mme Dionne: Oui, il a grand coeur, le député de Beauharnois-Huntingdon. Merci beaucoup. Quelques commentaires avant de poser ma première question. Tout d'abord, dans vos explications, j'ai noté qu'effectivement, de passer de quatre formulaires à un formulaire, vous avez fait un...

M. Ouimet (Bernard): Six.

Mme Dionne: De six formulaires à un formulaire, vous avez sûrement fait un exercice très sérieux pour aider les gens qui ont à compléter lesdits formulaires. Dans ce sens-là, je tiens à vous féliciter de l'avoir fait, et on a bien hâte de voir comment, en pratique, les gens vont... Mais c'est un exercice important de simplification administrative pour le citoyen dans le champ.

Vous avez parlé tantôt de votre échéancier par rapport à la mise en vigueur du projet de loi n° 23. Moi, je voulais vous suggérer une chose. La lettre que vous avez adressée aux MRC et aux communautés urbaines, il aurait été intéressant que tous les députés puissent en avoir une copie, parce que cette information-là, bien, on peut toujours, de son préfet, en avoir une copie, ou de son président de l'UPA régional, mais je pense que, pour que tout le monde ait la même information partout... Que vous puissiez peut-être même encore aujourd'hui envoyer une copie de cette lettre-là à tous les députés de l'Assemblée nationale pour que tout le monde ait la même information, je pense... En tout cas, moi, je ne l'ai pas eue, pour ma part, et ça serait apprécié.

Ce que je voudrais vous demander, M. Ouimet, comme première question, parce que je voudrais que ça soit clair, là... L'année passée, au mois d'avril 1996, il y a une lettre qui a été envoyée dans le dossier de L'Assomption par le secrétaire général associé au Conseil exécutif, Secrétariat à la Métropole, M. Therrien, Jacques-Yves Therrien, qui vous a envoyé une lettre pour vous faire part de ses commentaires quant à la demande de la MRC de L'Assomption de convertir 424 hectares à des fins d'urbanisation. Quand je regarde cette lettre-là, je me dis: Là, il faut se comprendre en la méthode de travail. Est-ce que, d'un... Parce que, là, le ministre Ménard, quand il a parlé à l'Assemblée nationale, il a dit: On peut toujours faire ça. La Commission demande souvent des choses, mais le processus que le citoyen comprend, le processus actuel puis le processus futur avec la loi n° 23... Dans ma tête, il n'y a personne qui doit arriver et dire, par une lettre au président: Nous, nous ne sommes pas d'accord avec une demande d'une MRC. Il y a un processus qui doit être suivi, et tout le monde est régi par ce processus-là, ainsi que les hauts fonctionnaires du gouvernement par rapport à la Commission. Alors, moi, je voudrais qu'on clarifie ça exactement, le processus actuel, tant que la loi n° 23 n'est pas en vigueur, et le processus futur.

Moi, dans ma compréhension, c'est que, si, dans l'avenir, tout le monde passe par la MRC et par des auditions à la CPTA et tout le monde a la même information, ça devrait être logique pour tout le monde. Et, dans le moment, quand on prend connaissance de la lettre du secrétaire général associé à la Métropole, on se dit: Bien, là, lui, il le fait différemment. Est-ce que la loi actuelle lui permet de faire ça différemment? Est-ce que les commissaires ont eu droit à une copie de cette lettre-là, ou le secrétaire général associé a dû suivre le processus normal pour se faire entendre auprès des commissaires? C'est là toute ma question, une question de processus tant pour le citoyen qui doit bien comprendre comment ça fonctionne maintenant que pour tous les intervenants, les partenaires, incluant le gouvernement, et le processus à venir. Alors, j'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus pour que ça soit très clair pour tout le monde.

Le Président (M. Vallières): M. le président.

M. Ouimet (Bernard): Merci. Le processus actuel dans le cas de... Je distingue la région métropolitaine de Montréal surtout, parce que, regardez, c'est un phénomène un peu nouveau, et j'ai demandé moi-même, comme président de la Commission, un avis. Dans ce temps-là, c'était le Secrétariat à la métropole, qui est maintenant devenu le ministère de Montréal. Compte tenu de leurs responsabilités, de leur mandat, de leur vocation, il m'est apparu approprié, en vertu de l'article 13 de notre loi, de leur demander un avis en disant: Nous sommes un tribunal administratif – c'est une lettre d'ailleurs qui est publique, elle est dans le dossier. Comme tribunal administratif, si vous avez des représentations à faire, veuillez nous les faire savoir, parce qu'on siège tels jours, point. Si vous avez des recommandations à faire, faites-les. Donc, nous avons fait, pour la première fois...

C'est parce que habituellement on demande toujours... Dans ces cas-là, vous le savez, on l'envoie aux parties, etc., le rapport, mais là, dans ce cas-là de Montréal, compte tenu de leur mandat, j'ai demandé un avis au Secrétariat de Montréal. Ils ont répondu à la Commission. Leur réponse était dans le dossier, si ça peut répondre à votre question, parce que tout est public. La demande était dans le dossier, la réponse était dans le dossier, et le Secrétariat de Montréal, à l'époque, a jugé bon de faire les commentaires qu'il nous a soumis.

Nous avons fait la même chose récemment avec Boisbriand parce que c'est dans la région métropolitaine de Montréal et parce que c'est un dossier qui était de même... je ne dirais pas de même... oui, de même acabit. Donc, on ne le fait pas pour un petit dossier d'une maison ou deux maisons sur le bord de la route, on le fait soit pour un développement qui a de l'envergure ou un développement qui est susceptible d'intéresser maintenant le ministère de la Métropole. Donc, c'est un processus, vous avez raison, qu'on n'a pas fait à d'autres places au Québec, mais c'est qu'on a dit: Compte tenu des responsabilités qu'ils avaient comme Secrétariat et maintenant qu'ils ont comme ministère à Montréal, dans des cas qui sont de grande envergure, on leur demande un avis, et la Commission en dispose, de cet avis-là, de la même manière qu'on a l'avis de l'UPA, qu'on a l'avis de la MRC, qu'on a l'avis des parties intéressées, et ils ont à statuer. Ils ont pris connaissance – vous l'avez vu par la décision de L'Assomption – de l'avis puis ils ont motivé leur décision, et je pense que, dans ce cas-là, la remarque de votre président tantôt relativement aux motifs de la Commission était assez explicite, pourquoi la Commission disait non sur chacune des demandes.

Il arrive certainement que nous ayons de l'amélioration à faire de ce côté-là, puis nous allons nous appliquer à les motiver pour toujours rendre ça clair pour le citoyen puis dire toujours pourquoi on dit oui et pourquoi on dit non. Non seulement on va le faire, mais on va le rendre public dans une reddition de comptes un peu spéciale, peut-être deux fois par année.

Mais je reviens sur ça. Donc, sur Montréal, effectivement c'est un avis qui a été demandé, compte tenu de leur mandat, c'est une réponse qu'ils nous ont donnée, tout a été émis au dossier. Les commissaires ont pris connaissance de ça. Ils pouvaient faire des représentations additionnelles et venir en auditions publiques. Je crois que c'est ce qu'ils n'ont pas fait. Ils n'ont soumis que des représentations écrites. Et, pour Boisbriand, j'ai demandé un avis semblable et j'attends... Si réponse a été donnée, elle est versée au dossier. Quand ils vont statuer sur la demande, parce que je crois que c'étaient 200 hectares d'agrandissement de périmètre urbain... C'est dans la région métropolitaine de Montréal. Il nous est apparu utile de le faire pour tout le monde quand c'est d'envergure.

Mme Dionne: M. le Président, en complémentaire. On ne peut pas dissocier Montréal du reste du Québec sur des questions d'aménagement, même si c'est plus complexe dans ce coin-là. Mais, à la limite, ça veut dire aussi que le secrétariat aux régions, qui, on nous dit, deviendra un ministère des régions... Le sous-ministre responsable de tout le Québec ou celui responsable d'une région donnée pourrait avoir justement à statuer, comme vous l'avez demandé, si c'est problématique, et vous avez besoin d'un avis. Selon l'article 13, vous avez le droit de le faire, et il pourrait vous répondre, bon, il pourrait apporter ses commentaires, hein, alors ce qui veut dire que...

Prenons le Bas-Saint-Laurent, par exemple, où il y a tout un débat sur l'industrie porcine qui peut être un débat d'aménagement, et tout ça. Alors, vous auriez peut-être, à un moment donné, à demander au sous-ministre adjoint responsable du Bas-Saint-Laurent de vous fournir un avis, puisque, si c'est le cas pour la métropole, et le précédent est créé, vous aviez... En tout cas, si vous avez demandé l'avis et vous en aviez besoin, ça pourrait se faire pour toute région du Québec, à ce niveau-là.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, vous permettez?

Le Président (M. Vallières): Oui, M. le président.

M. Ouimet (Bernard): Nous n'avons pas envisagé pour les...

(11 heures)

Mme Dionne: Mais la loi...

M. Ouimet (Bernard): Nous n'avons pas envisagé... En tout cas, à date, on n'a pas fait de réflexion à savoir si on devait demander au ministre chargé de la Métropole, à son ministère ou à son Secrétariat de nous donner un avis. Ça a été fait pour Montréal, compte tenu des responsabilités très précises puis dans le contexte de la région métropolitaine de Montréal et dans les préoccupations aussi dont le député de Rousseau a fait part tantôt, la pression dans la région de Montréal. Il y a un ministère, il y a un mandat, il y a comme des circonstances qui ont fait ça. Pour le reste, on n'a pas pensé régions.

Mme Dionne: Non, mais, jusqu'à maintenant, M. le président, vous avez quand même ouvert une porte, car vous aviez besoin d'information, en tout cas, et c'est sûr qu'un secrétaire général associé à la Métropole ou un sous-ministre adjoint à la Métropole, donnons-lui le titre qu'il aura... On sait que les régions... Il y aura Montréal et sa région, et il y aura les régions. Alors, le même article pourrait vous permettre de le faire dans des cas où il y a problématique. Alors, à un moment donné, là, c'est clair qu'on peut s'en servir.

M. Ouimet (Bernard): La seule chose – si vous me permettez, M. le Président – que nous avons envisagée au stade des discussions très préliminaires, puisque c'est votre deuxième volet, c'est par rapport à l'avenir. Voilà. C'est plutôt de façon très, très précisée. Les discussions très préliminaires, c'est de voir si, dans les agglomérations urbaines du Québec... Il y en a une trentaine? Bon.

Exemple, Saint-Hyacinthe – parce que tout le monde a cet exemple-là, Saint-Hyacinthe – puis...

Mme Dionne: C'est un bel exemple.

M. Ouimet (Bernard): ...les cinq municipalités, là, Saint-Thomas, Sainte-Rosalie, Saint-Hyacinthe, Le-Confesseur, bon, quand on regarde tout ça, c'est tout ensemble. Vous comprenez? Le Grand Saint-Hyacinthe, c'est un bel exemple, je pense. On a des pourparlers très préliminaires pour voir si ça ne serait pas utile qu'on demande un avis par rapport à l'espace dans la zone blanche, par exemple, à un ministère habilité – vous comprenez? – pour l'espace en zone blanche. On a un avis. Y «a-tu» de l'espace pour 10 ans, 15 ans dans le Grand Saint-Hyacinthe? Y en «a-tu» pour trois ans? Ce qui s'appelle le «management de la zone blanche», ce qui n'est pas notre business pantoute, nous autres – mais ça a de l'effet, par exemple, parce que, s'il y a de l'espace dans la zone blanche, on conserve les bonnes terres – c'est ça, la préoccupation. Puis, s'il y a de l'espace dans la zone blanche pour un développement – on ne parle pas pour une maison, là, on parle pour un développement industriel, commercial – bien, il me semble qu'on devrait regarder ça dans l'agglomération de Saint-Hyacinthe. On ne devrait pas regarder ça rien qu'au Confesseur puis regarder ça... Bon. Alors, dans une perspective comme ça, il y a des pourparlers préliminaires dans le cadre de l'application de la nouvelle loi, parce que les agglomérations, là, ça va prendre du sens uniquement dans la nouvelle loi, contrairement à Montréal, qui est déjà là, qui est un ministère, qui a un territoire, tandis que, pour le reste, c'est relié à la nouvelle loi. Peut-être que, dans les agglomérations, il pourrait être utile que nous soyons éclairés sur le plan de l'espace alternatif dans les zones blanches, mais c'est très, très préliminaire.

Mme Dionne: O.K. Mais je vais aller de façon plus pointue, M. le président. Si on se retrouve, à partir de la loi n° 23, à dire que, dans un milieu donné, le milieu est d'accord, l'UPA est d'accord, la MRC est d'accord et le sous-ministre adjoint de tel ministère n'est pas d'accord...

M. Ouimet (Bernard): Permettez-vous, M. le Président?

Le Président (M. Vallières): Oui, M. le président.

M. Ouimet (Bernard): Nous autres, ce n'est pas tellement qu'ils soient d'accord. Nous autres, ça dépend pourquoi ils sont d'accord et pourquoi ils ne sont pas d'accord, parce qu'il peut arriver que tout le monde soit d'accord...

Mme Dionne: Non, mais tant mieux, là. Il n'y a pas de problème.

M. Ouimet (Bernard): ...puis que nous soyons... Prenons le cas de Sainte-Hélène, chez vous. Bien, c'est un beau cas. Puis là on pouvait exercer toute notre juridiction parce que ce n'était pas sur des sols visés par le régime provisoire, hein? Voilà un développement résidentiel. C'est un beau petit cas, un développement résidentiel qui avait des besoins puis qui était contigu. Tout le monde était d'accord, mais, pour des bons motifs, il se disait: Ça vient juste de donner ce qu'il faut pour 10, 15 ans. Puis ce n'était pas beaucoup en hectares, c'était tout petit. Puis il en restait un petit peu dans la zone blanche, mais tout le monde s'est rendu compte que c'était plus pour l'industriel, ça, puis tout le monde a compris ça. Puis ça a fait l'affaire de tout le monde, mais c'étaient des motifs aussi... Tout le monde, autant l'UPA, qui était d'accord a invoqué des motifs pour protéger l'agriculture aussi, puis la MRC, qui était d'accord, a invoqué des motifs qui étaient pour protéger l'agriculture. Alors, il peut arriver que tout le monde...

Vous savez, dans L'Assomption, je pense qu'il y avait à peu près juste nous autres en désaccord, au total. Il y avait bien plus de monde qui était d'accord, sauf le point de vue, bien sûr, de... On a été peut-être un petit peu plus rigoureux encore que la proposition qui nous avait été donnée de l'UPA, parce qu'on a coupé même des parties que... Même le ministère de l'Agriculture avait donné un avis, puis on a été plus sévères que lui sur le cas de L'Assomption. Ça dépend du motif.

Nous, ce qu'on souhaite c'est que dans l'avenir il y ait vraiment ce brassage-là au niveau local, parce que c'est utile et c'est éclairant, ça, et ça nous permet de rester en haut de la mêlée puis de rendre notre décision motivée, comme nous y invite M. le président, très motivée, pourquoi on dit oui, pourquoi on dit non, parce que, au fond, s'ils sont d'accord puis ça n'a pas de bons sens sur le plan du zonage agricole, sur le plan de la protection, même s'ils sont d'accord, ça va nous faire de la peine peut-être sur le plan personnel, mais ça ne changera pas notre décision, parce que, vous savez, on est assez froids là-dessus. On ne prend pas ça personnel, mais, quand ça a un impact sur l'agriculture, même s'ils sont d'accord, on dit non.

Il arrive même que des fois les producteurs agricoles nous disent qu'ils sont d'accord avec des choses, puis, nous autres, on dit non. Mais ça fait partie... Parce qu'on a deux rôles différents. C'est normal. Puis très souvent ils nous éclairent... Leurs avis nous éclairent tout le temps. Tout le temps ils nous éclairent. C'est pour ça que, dans un contexte comme ça, on se dit: Si on peut aller chercher le plus d'avis, qu'on les brasse, bien, on pourrait arriver à des solutions comme Sainte-Hélène, qui protège l'agriculture puis qui leur permet de planifier un développement pour un 15 ou 20 ans, par exemple.

Mme Dionne: Oui, mais ma question n'était pas nécessairement entre la CPTA et le milieu. Dans la loi n° 23, vous parlez que le milieu doit se prendre en main, doit décider, doit analyser les choses; il faut qu'il y ait collaboration avec les agriculteurs. En tout cas, la loi n° 23, en ce qu'on a étudié tôt au mois de juin, c'était à peu près ça. Mais est-ce que, dans ce cadre-là... L'article 13 est toujours là, lui. Il n'a pas changé. Et ce que je vais vous dire, c'est: Si on dit que c'est le milieu qui va faire des recommandations, puis vous incitez le milieu à se responsabiliser dans ce sens-là et à protéger ses terres, et tout ça, arrive un avis du secrétaire général associé au développement du Bas-Saint-Laurent, je ne sais pas, un avis contraire au milieu; vous allez avoir, à un moment donné, à juger, hein, et le milieu, lui, il est prêt, les outils lui ont été donnés. C'est parce qu'à un moment donné le citoyen va dire: Est-ce que c'est le gouvernement via son... Parce que tout le monde mélange tout, hein, dans ça. Est-ce que le gouvernement, dans le fond, lui, il donne un avis, puis là, tiens, c'est ce qu'il a dit qui va passer?

M. Ouimet (Bernard): Si vous me permettez, M. le Président, c'est que...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): ...nous n'envisageons vraiment pas... Ça n'empêche pas quelqu'un de nous donner un avis. Vous savez, quelqu'un peut nous donner un avis de lui-même, de son propre chef. Il nous donne un avis, on va le considérer, on va le mettre dans le dossier, puis on va le considérer parmi notre preuve. Bon. Mais ce que j'ai laissé voir tantôt, c'est que nous n'avons pas l'intention d'appliquer à Montréal l'équivalent pour toutes les régions sur toutes les demandes. J'ai plutôt ramené ça à une réflexion très préliminaire, très zoomée sur les agglomérations, pour que la Commission soit éclairée pour la partie qu'elle ne manage pas, qui est la zone blanche – vous comprenez? – pour qu'elle ait une idée de l'espace alternatif en zone blanche dans les agglomérations. Mais ce n'est vraiment pas tous azimuts puis «at large».

Mme Dionne: Je vais juste en poser une petite dernière sur le même sujet pour vous faire comprendre où je veux aller. Par exemple, si vous recevez un avis de quelqu'un en titre comme ça, responsable d'un ministère – il a un avis bien précis à donner – est-ce que dans l'avenir, avec la loi n° 23, vous le gardez pour vous ou vous dites: Ça se passe à la MRC maintenant, si vous passez des choses différentes de ce que la MRC a proposé, vous allez aller vous asseoir là avant tout et regarder ça là avant que, nous, on statue, ou vous allez le garder pour quand vous allez statuer?

M. Ouimet (Bernard): Lequel des avis?

Mme Dionne: Prenons l'exemple de la MRC de L'Assomption, O.K.? On se retrouve dans la loi n° 23. Là, il y a décentralisation. Est-ce qu'à ce moment-là la réponse que vous pouvez faire à ce M. Therrien là, dans le cadre de la loi n° 23, ce serait de lui dire, par exemple: Écoutez, vous savez que la MRC de L'Assomption, ça se passe maintenant beaucoup plus dans le milieu, alors, dans ce sens-là, merci de votre avis, mais votre avis, comme il est pertinent – vous avez trois pages – s'il vous plaît, allez donc vous asseoir avec les gens de la MRC de L'Assomption?

(11 h 10)

M. Ouimet (Bernard): Après la loi avec le Grand Montréal, ça va être d'autant plus utile qu'on soit éclairés qu'on a l'obligation de tenir compte, comme vous le savez, puisque la loi, vous avez travaillé tellement dessus, hein... Il est indiqué que la Commission doit toujours considérer, parmi ses critères, notamment le paragraphe 5° qui dit: «La disponibilité d'espaces appropriés de nature à éliminer – éliminer – ou réduire l'impact sur l'agriculture – et là vous avez mis une virgule, puis là vous avez continué en disant – particulièrement dans les agglomérations et dans les zones métropolitaines de recensement.» Tout ce qui suit la virgule, c'est beaucoup, comme responsabilités. C'est comme ça qu'on le prend. Et ça, ça veut dire que, compte tenu des pressions qu'il y a dans Montréal, je vous avoue que c'est très éclairant d'avoir un avis du Grand Montréal.

Remarquez que les discussions en cours sur la création de la commission de développement de Montréal sont à l'effet qu'il nous donnerait un avis presque systématiquement, dans Montréal, sur les demandes publiques.

Mme Dionne: Sur les demandes publiques? O.K.

M. Ouimet (Bernard): Sur les demandes publiques.

Mme Dionne: Je comprends que justement, s'il aura à statuer sur toute demande, comme vous venez de dire, à ce moment-là ce n'est pas juste un avis qui va à la CPTA ou au président de la CPTA, mais, compte tenu que c'est décentralisé beaucoup plus maintenant, la MRC pourra faire le débat avec M. Therrien, par exemple, chacun selon sa compétence et sa juridiction, mais qui aura, à la base...

C'est parce que ce que je ne voudrais qui arrive, c'est qu'à un moment donné tout le monde travaille très fort en bas, là, les MRC, les municipalités, les agriculteurs, les promoteurs... Tout le monde travaille très fort, ce n'est pas facile de s'entendre, mais tout d'un coup arrive comme une lettre du ciel au président de la CPTA, une lettre disant: Bien, écoutez, vous devriez faire les choses différemment, tandis que les gens auront travaillé très fort.

M. Ouimet (Bernard): Oui. Ce qui est assez clair dans le cas de L'Assomption, c'est que ça ne s'est pas fait à l'insu de la MRC, je vous le garantis. C'est-à-dire que, une fois l'avis fourni, du Grand Montréal, la MRC a eu l'occasion de réagir. C'est public, c'est dans notre dossier, et tout le monde peut le consulter. Puis, en plus, il y a eu énormément de discussions. Ça n'a pas été fait comme si ça avait été un avis transmis à nous. Je pense qu'il n'y a rien de plus public que ce qu'a été la réponse de...

Mme Dionne: De M. Therrien?

M. Ouimet (Bernard): ...du Secrétariat, à l'époque, de Montréal. D'ailleurs, elle a été débattue, je pense, à l'Assemblée nationale deux fois.

Mme Dionne: Oui.

M. Ouimet (Bernard): S'il y a un avis qui a été discuté, c'est bien celui-là.

Mme Dionne: Alors, ce qui veut dire que, dans le cadre de la loi n° 23, encore là, vous donnez l'assurance que c'est clair que, à la base, les gens qui feront des commentaires ou des gens en titre qui feront des commentaires, ça ira autant aux instances concernées dans l'avenir, parce que ça a été fait... L'Assomption est le cas type avec l'ancienne loi.

M. Ouimet (Bernard): Ça ferait partie des règles du jeu, du fair play aussi. C'est qu'on n'a pas à bénéficier d'un avis sans le mettre sur la table. La transparence de notre procédure – c'est votre préoccupation – doit être assurée peu importe la solution qu'on trouvera.

Mme Dionne: C'est beau.

Le Président (M. Vallières): Bien. M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Je vous remercie, M. le Président. On parle de L'Acadie pour les porcheries dans un secteur, des ZIP. De quelle façon vous voyez ça au niveau du zonage agricole, ce qui veut dire regrouper les porcheries dans un secteur, un peu comme un parc industriel? À votre niveau, ça vous «cause-tu» des inconvénients ou si la loi n'est pas faite dans ce sens-là, qu'on pourrait faire des choses comme ça?

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Le zonage de production, pour répondre directement à votre question, ce n'est pas notre affaire. Ce n'est pas chez nous, ça. Nous autres, on ne fait pas de ça. Mais je peux quand même mentionner que la création des comités consultatifs agricoles au sein des MRC pourrait être de nature à favoriser un bon climat dans la solution au genre de problème que vous mentionnez.

De mettre des agriculteurs ensemble avec des maires, à une instance qu'est la MRC, l'expérience nous a démontré qu'il sortait des bonnes solutions de ça. Dans la vie bien pratique, bien courante, là, on n'aurait jamais passé à travers la révision de la zone agricole, si on n'avait pas mis les agriculteurs avec les maires. Puis évidemment, nous autres, on a à travailler avec eux, mais à rester en haut de la mêlée devant ça. Mais ça nous éclaire tout le temps puis ça résout bien des problèmes, vous savez.

Il y a des choses qui se règlent en région, et c'est bien plus facile que quand vous mettez ça dans la machine gouvernementale. Ça, l'expérience nous l'a démontré en zonage agricole. C'est tellement vrai. C'est pour ça que le comité consultatif agricole, il pourrait aider dans la perspective d'échanges meilleurs entre les agriculteurs et les maires, qui, dans le fond, ont le même intérêt: ils veulent développer leur milieu puis ils veulent conserver leurs ressources. Et puis la ressource agricole est tellement importante. Alors, les mettre ensemble va favoriser ça. Mais le zonage de production comme tel, ce n'est comme pas dans notre mandat à nous autres, ça.

M. Chenail: Ma deuxième question: Les personnes qui font une demande à la Commission de protection du territoire agricole, ça «s'avère-tu» plus avantageux de le faire elles-mêmes ou de prendre un avocat, d'après vous, ou de prendre un notaire? Parce que, quand les gens viennent nous consulter, ils nous demandent: Comment est-ce que je devrais faire ça? Puis là ils nous disent: À Saint-Hyacinthe, il y a un avocat; lui, il gagne tout le temps, puis...

M. Ouimet (Bernard): Ah, mais il a perdu, entre autres, là-dedans. Ha, ha, ha!

M. Chenail: Ah! Ha, ha, ha! Ça fait que c'est pour vous dire qu'on se pose la question: Quoi répondre aux gens? Nous autres, ce qu'on leur dit, c'est: Prends un notaire et puis vas-y avec la municipalité, un notaire qui va te remplir tes formulaires. Mais est-ce que c'est la bonne réponse qu'il faut donner?

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, c'est évident que je ne pourrais pas vous dicter une réponse. C'est clair. Ce que je peux vous dire comme président de la Commission, c'est que, nous autres, on ne s'enfarge pas dans les fleurs du tapis là-dessus. Ce qui est important, c'est qu'on ait l'information. On n'a pas un décorum ou des procédures qui nous amènent à mettre le monde mal à l'aise devant nous autres. Ce qu'on veut savoir, c'est: C'est quoi qui se passe? C'est quoi alentour du lot? C'est quoi, l'affaire? Qu'est-ce qu'il y a à côté? On veut savoir les vrais faits, ce qui se passe, comment ça marche. Si quelqu'un décide de prendre un avocat, c'est une question personnelle. Ça ne lui nuira pas parce qu'il en prend, mais ça ne l'aidera pas parce qu'il en prend.

M. Chenail: Merci.

Le Président (M. Vallières): Bien. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui. Alors, moi, je vais donner suite un petit peu à la conversation que vous avez eue avec la députée de Kamouraska-Témiscouata. Il s'en vient des changements importants avec la loi n° 23 et il s'en vient d'autres changements très importants aussi avec la réforme du ministre au développement régional, où on veut tout centrer les décisions de plus en plus par territoires de MRC et plus proche du citoyen, de sorte qu'on veut que de plus en plus les décisions soient prises par le milieu, par les instances et les forces vives d'un milieu donné, par territoires des MRC. En tout cas, ça se dessine de cette façon-là.

Alors, moi, je regarde, on parle de plus en plus de guichet unique. On parle de plus en plus de mettre sous un même toit les différents services gouvernementaux, évidemment. En fait, moi, je regarde un petit peu comment vous procédez. Vous avez un rôle de tribunal administratif parce que vous rendez une décision sur un banc par rapport à certaines données, et en même temps vous devez faire une évaluation, dans le fond, de la zone à protéger. En fait, jusqu'à un certain point, je me pose la question à savoir: Ça va être important, votre rôle de tribunal, mais votre rôle, à l'autre instance, du territoire à protéger... Est-ce que le milieu est suffisamment responsable pour être capable d'établir lui-même son propre territoire à protéger en fonction de son plan de développement? Parce que, en fait, au niveau des régions, il y aura des CLD, des centres de développement économique, et ce sera à ces endroits-là qu'on développera les grands axes de développement au niveau d'une région, et c'est eux qui auront à déterminer les orientations qu'ils veulent donner à leur région. Est-ce que vous vous êtes penché par rapport à ça? Et, auquel cas, quelle forme devra prendre, à ce moment-là, la Commission de protection du territoire agricole du Québec? Il y a des changements. Et allez-vous être obligés d'être une structure de la même façon que vous l'êtes à l'heure actuelle, avec le même personnel que vous avez à l'heure actuelle?

M. Ouimet (Bernard): C'est une grande question que vous posez. C'est évident que, dans l'évolution de notre organisme – parce qu'on a évolué, depuis trois ans particulièrement, on a bougé beaucoup, puis il faut continuer de bouger – il faut être ouvert sur notre environnement extérieur, et ce que vous mentionnez, dans le développement régional, c'est une préoccupation constante. Alors, il faudra évoluer au rythme de ces législations-là et de l'approche gouvernementale. Là-dessus, nous sommes parfaitement ouverts.

Notre préoccupation première actuellement, je vous dirais, c'est: Est-ce que le milieu est prêt à ça? Moi, comme président d'un organisme comme le nôtre, j'ai bien hâte que la loi rentre en vigueur parce que j'ai comme l'impression qu'on est au minimum cinq ans en retard, au Québec, dans la responsabilisation des instances locales. On est comme toujours sur le fil d'arrivée. C'est comme si tout le monde rinçait ses moteurs, mais on n'avançait pas. Ça gronde, mais ça n'avance pas. Et, si on faisait un pas comme ça, on changerait la dynamique. Mais c'est comme si, depuis des années, on l'imaginait, le pas, mais on ne partait pas. Et là on se dit: On va faire un pas qui nous mènera où? Ce n'est pas tellement important de voir la cible au bout, mais il va nous faire avancer.

(11 h 20)

Quand demain matin, avec toutes les demandes qui vont rentrer, l'officier municipal va avoir un petit bout à remplir sur la demande – parce qu'on ne pourrait plus traiter sans l'avis de la municipalité – ça a l'air de rien, mais c'est quelque chose qui commencera à transformer la mentalité, ça. Puis, nous autres, on ne travaillera pas dans l'esprit de se dire: On va se garder, vous savez, des choses, puis il ne faut pas... Ce n'est pas pantoute comme ça qu'on regarde ça.

Ce qu'on souhaite, c'est que les instances municipales prennent de plus en plus leurs responsabilités en matière de protection du territoire agricole. Toute notre approche, c'est de faire bouger les règles du jeu. C'est de s'en aller dans une dynamique comme ça, une dynamique qui va arrêter de nous envoyer les demandes une par une, comme on fait depuis 17 ou 18 ans, alors qu'on doit avoir une vue d'ensemble parce qu'on est dans une loi de zonage, une dynamique qui fait que des maires ou des préfets nous disent tous les jours: Qu'est-ce que ça me donne de donner un avis, c'est vous autres qui décidez? puis qu'en plus il peut zoner ça d'une façon, puis on peut décider de l'autoriser même si son zonage le lui défendrait, ce qu'on ne pourrait plus faire dans la nouvelle loi.

Et c'est pour ça que, moi, je vous avoue que, avant d'aller plus loin dans cette réflexion-là, on se dit: Il y a comme quelque chose là qui est ouvert, il y a peut-être des modifications qui ont été votées, qui ont été sanctionnées ça fait sept mois et qui vont nous transporter dans une autre dynamique – ça ne réglera pas tout – mais dans une dynamique de responsabilisation, dans une dynamique où on va confiner notre rôle sur les choses essentielles, comme organisme. On devra certainement se ramener sur l'essentiel, mais après que d'autres auront pris le relais un peu.

Il y en a, au Québec, qui sont très avancés là-dessus. Vous savez, des fois on rencontre des tables de préfets, puis, à l'intérieur de la même table de préfets, il y en a qui sont comme – puis je ne le dis pas péjorativement – un peu à l'état de 1978, qui nous posent beaucoup de questions – pourquoi on ne pourrait pas mettre une maison au bord de la route, 30 000 pi²? – ce qu'on avait comme questions en 1978, puis d'autres, au contraire, qui sont prêts à aller loin. Ils ont fait un schéma qui est pas mal mieux que le premier, la préoccupation des activités agricoles est incorporée dedans, et, eux autres, ils demandent juste de mettre ça en oeuvre puis qu'on commence, puis ça va nous transporter dans un environnement où le relais va être pris. C'est comme une course à relais, ça. Actuellement, c'est comme si on avait juste le bâton. Ha, ha, ha! Mais ça serait bon qu'il y en ait plusieurs qui l'aient, le bâton, puis qu'on puisse juste faire notre bout avec, nous autres.

On va continuer d'évoluer dans cette perspective de préoccupation là, et nous allons... Je pense que la réforme aussi des tribunaux administratifs, qui est prévue avec un «deadline» du 1er septembre, devrait nous donner d'autres instruments avec notre loi pour nous permettre de se décloisonner un peu plus puis d'être un peu plus ouverts sur le milieu, puis en même temps de rendre notre organisme plus efficace et plus adapté aux réalités contemporaines, surtout dans une dynamique de responsabilisation des instances locales. C'est ça qu'on cherche. Mais l'entrée en vigueur de la loi, pour nous autres, est comme un starter qui va nous aider à commencer à changer la dynamique. Comme vous le savez, dans les lois de conservation – ce n'est pas juste la nôtre – c'est toujours des questions de mentalité puis c'est toujours une question de...

Mme Vermette: D'intérêt?

M. Ouimet (Bernard): ...oui, puis il faut toujours insister, en tout cas, pour que... Je dirais qu'il n'y a pas d'avenir pour une loi qui ne responsabilise pas le monde. Je suis convaincu, moi, quand je dis qu'on est cinq ans en arrière, que, quand je dis ça, c'est le minimum. On est au stade où on serait capable, dans quelques années, de faire le lien avec la loi de l'aménagement et la nôtre complètement. Et la loi que vous avez votée, que vous avez adoptée, que vous avez sanctionnée nous permet de se rapprocher, de faire un pas vers un rapprochement qui nous mettra sur d'autres pistes plus prometteuses pour l'avenir.

Mme Vermette: C'est parce que, au niveau de la responsabilisation, moi, je suis tout à fait d'accord, je suis bien votre raisonnement, sauf que, quand on regarde le problème qu'il y a eu avec le porc, à un moment donné il y a eu une confrontation d'intérêts, parce que justement on arrive toujours aux intérêts. Et, au niveau des municipalités, les intérêts municipaux, des fois c'est d'aller chercher le plus facilement les perceptions, en fin de compte, par les taxes, par ce qui rapporte le plus, et ce n'est pas nécessairement toujours évident que c'étaient finalement les fermes artisanales ou les fermes familiales qui pouvaient rapporter le plus au détriment peut-être du développement domiciliaire ou même de centres d'achats, etc. Donc, comment on arrive à régler tout ça, en fin de compte, ces problèmes d'intérêt là, sans faire des conflits qui n'en finissent jamais, tout compte fait? Et puis, à force de ne pas être capable de s'entendre, c'est tout acabit qui...

M. Ouimet (Bernard): Juste peut-être un commentaire.

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet, peut-être en procédant rapidement. Il y a beaucoup de demandes d'intervention d'autres collègues. Parce qu'il nous reste quelque 25 minutes; 20 minutes.

M. Ouimet (Bernard): Oui. C'est juste un commentaire, M. le Président. C'est que c'est l'essentiel de notre job, actuellement. C'est de concilier des intérêts qui sont très divergents. Et, chez nous, quand on dit oui, il y a toujours des gens qui pensent qu'on nuit à la protection du territoire et, quand on dit non, il y a toujours du monde qui pense qu'on nuit au développement. Souvent, c'est ce qui me faisait dire: «Damned if you do, damned if you don't.» Qu'on dise oui ou qu'on dise non, on peut... Mais c'est notre rôle, ça, c'est notre rôle de trouver un équilibre.

C'est une loi qui est pleine d'équilibre: équilibre entre le monde agricole, entre la conservation et la protection, équilibre entre divers intérêts. C'est une loi d'équilibre. Ce n'est pas une loi mathématique dans son application. C'est l'essentiel de notre tâche et de nos préoccupations. C'est comment le faire dans la vie de tous les jours. C'est l'essentiel de notre mandat.

Le Président (M. Vallières): Bon, alors, M. Ouimet, peut-être en continuité avec les questions de Mme la députée de Marie-Victorin, vous nous parlez d'un changement dynamique qui va être introduit avec les nouvelles mesures, entre autres, contenues dans la loi n° 23, avec la présence de comités consultatifs, etc. Il serait intéressant de savoir si, selon vous, cette nouvelle dynamique va avoir des incidences sur votre organisation. Je remarquais qu'entre autres, dans les données que vous nous fournissez, au niveau des demandes, on est à environ 4 000, présentement – c'est ça? – des demandes d'autorisation qui sont reçues.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): Je me souviens qu'au début, dans les premières années de la Commission, on dépassait les 8 000, on est allé vers 6 000, et on semble atteindre un rythme de croisière d'environ 4 000. À partir du moment où il y a un travail de concertation ou de responsabilisation qui se fait au plan local régional, est-ce que ça ne voudrait pas signifier que, dans votre organisation, ça devrait se répercuter par des ajustements au niveau, entre autres, de la grandeur de l'organisme? Par exemple, la question que je vous pose, c'est: Est-ce que le nombre de commissaires va toujours demeurer aussi important qu'il l'est présentement, compte tenu de ces nouvelles mesures? Est-ce que le nombre d'avocats ou de notaires qui travaillent chez vous, le personnel de soutien va demeurer le même? Quel sera l'impact appréhendé? Vous avez dû faire des chiffres là-dessus. Comment vous envisagez la progression de votre organisation avec cette nouvelle dynamique qui sera créée en région?

M. Ouimet (Bernard): C'est une bonne question, M. le Président. On n'a pas tout le décor clair, parce qu'on n'est toujours pas partis dans ce changement de dynamique là, mais c'est sûr que ça va demander des gros ajustements. D'ailleurs, c'est ce qui est le plus intéressant en commission, à ce moment-ci: c'est que tout notre environnement législatif est en mutation. C'est ça qui est intéressant, dans le fond, parce que c'est d'adapter notre institution à ces réalités-là.

Certainement que, sur un horizon... Je ne suis pas capable de vous donner l'horizon précis, parce qu'il faut avoir le point de départ. Mais, sur un horizon donné, là, il me semble que, trois ans après l'application de la loi... Parce que, le lendemain matin qu'elle est passée, les comportements ne sont pas tous changés, là, hein, vous le savez. Mettons trois ans après l'application de la loi. Ce qu'on souhaiterait, c'est qu'on ait moins de demandes. Bien sûr qu'il faudrait avoir moins de demandes. Ça fait drôle de dire ça, comme organisme. Vous allez peut-être dire: Bien, vous baissez votre nombre... Mais c'est ça qu'il faut faire. Il ne faudrait plus qu'il y ait de municipalités, dans cinq ans, qui nous envoient une maison de 30 000 pi² sur le bord de la route. Il n'y a rien de plus près du zonage qu'une maison de 30 000 pi² sur le bord de la route.

On aura peut-être, certainement, j'espère, beaucoup moins de demandes, mais ça sera des demandes un peu plus costaudes: agrandir des périmètres urbains. Ça sera des demandes plus d'envergure et qui demandent de faire les équilibres dont parlait tantôt Mme la députée. Et il faut viser ça, il faut la baisser, notre demande, parce qu'une demande qui ne sera pas conforme au zonage local, elle ne rentrera pas. On ne la traitera pas. Elle n'ira pas en appel dans le régime. Elle ne fera pas tout le circuit de la machine gouvernementale, elle va rester là.

Les mesures qu'on vise avec l'approche globale que vous avez... Une des modifications qu'on visait, qui donnait une indication que tout le résidentiel en zone agricole pourrait venir par demande globale, une fois le schéma adopté, après deux vetos, un veto de la MRC puis un veto de l'UPA, bien, c'est qu'on amène progressivement... On met une pensée là-dedans. Ce n'est pas demain matin que ça va commencer, mais on donne une indication qu'il faut gérer autre chose que des maisons en zone agricole. Et c'est ça qu'on souhaite. C'est pour ça qu'on est impatients de partir, nous autres, parce que, tant qu'on ne part pas, on n'a pas les instruments. Si la loi ne bouge pas, ne se modifie pas et si ça ne bouge pas sur le plan de la réforme de la justice administrative, prenez notre plan stratégique, mettez ça au panier. Ce n'est pas compliqué, c'est qu'on revient à zéro. Nous autres, il faut que ça bouge. Il faut que ça bouge dans la réforme de la justice administrative puis il faut que ça bouge par rapport à notre loi.

(11 h 30)

Et ce que vous mentionniez, l'univers aussi bouge, continue d'être en mutation. Alors, au niveau du développement régional, on va rester ouverts à ces réalités-là. Je pense que c'est ça qui est l'essentiel de la Commission. L'essentiel de la Commission, ce n'est pas de traiter 2 000 demandes pour une maison sur le bord de la route. Si c'était ça, ça coûterait cher au gouvernement. Ce n'est pas ça, notre rôle. Puis là, nos ressources diminuant... Vous avez vu, c'est parti de 138, puis on est rendus 106, puis on va peut-être... C'est 1 000 000 $ de moins, ça, puis peut-être que l'an prochain, quand on va se revoir, ça sera 1 700 000 $ de moins sur la Commission. Peut-être. Je ne le sais pas. On n'est pas à la défense des crédits, mais peut-être que ça sera ça. Mais il ne faut pas rester avec les mêmes mandats, puis il ne faut pas rester avec la même dynamique puis il ne faut pas rester avec le même «setup», parce que, là, on est faits. On va devenir complètement inefficaces. On ne répondra plus aux plaintes, on ne répondra plus aux demandes.

Moi, ce que je souhaite, M. le Président, c'est que la Commission soit plus mobile, plus petite, qu'elle siège à Saint-Hyacinthe pendant deux jours, puis qu'elle siège dans l'Outaouais pendant deux jours, puis qu'en même temps elle puisse voir les terrains, puis que ce soit pareil dans les Cantons-de-l'Est, une commission plus légère, plus près des préoccupations. Mais il faut partir. Là, on rince les moteurs. Ça gronde, mais, quand on va venir pour partir, on va pomper l'huile.

Le Président (M. Vallières): Bien, ça répond à ma question. Et, à moins que je me trompe, là, quand je vous posais la question à savoir si tout ça va apporter des modifications importantes au plan de votre organisation, au plan des effectifs, la réponse, c'est oui, de ce que je comprends.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Papineau, suivi du député de Rousseau, suivi de la députée de Kamouraska-Témiscouata, suivie de la députée de Marie-Victorin, etc. Mais il reste 15 minutes.

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Ça ne sera pas bien, bien long. Je voudrais juste revenir sur un dossier qu'on avait discuté l'an passé au même moment, Thurso. Vous vous rappelez?

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. MacMillan: C'est juste pour vous informer. Probablement que vous le savez, là, mais, suite à vos... vous avez réétudié le dossier, vous avez engendré ça. Finalement, probablement d'ici deux semaines, ils vont annoncer trois nouvelles industries avec une création de 150 à 200 jobs. Alors, vous vous rappelez, l'année passée je vous avais noté qu'on n'avait pas regardé le côté du développement économique dans la décision de Thurso, mais finalement vous m'aviez répondu que vous aviez coupé un peu dans la décision pour rendre l'utile à l'agréable. Mais c'était juste pour vous dire que vous avez fait un maudit bon coup, parce qu'il va y avoir trois nouvelles industries puis probablement jusqu'à 200 jobs. Ce n'est pas officiel, mais c'est officieux. Alors, c'est juste pour vous mentionner ça.

Juste un petit point, M. le... Dans le point que vous m'avez éveillé, vous parliez de décentralisation, puis vous venez de siéger dans l'Outaouais. On vous avait suggéré ça l'année passée, que sur le comité, si vous vous rappelez, il devrait y avoir des gens de l'Outaouais qui siégeraient avec les commissaires pour vraiment les éclairer, pour connaître les régions. Mais, dans le livre blanc de Chevrette, qui s'en vient bientôt, côté développement économique, exemple Thurso, si vous voulez changer un peu votre mode de vie ou votre – comment je dirais? – dynamique dans chacune des régions du Québec, il n'y a pas juste Montréal, au Québec; il y a l'Outaouais puis la Gaspésie puis il y a beaucoup d'autres régions. Ça serait peut-être bon de regarder dans le livre blanc qui va être déposé aujourd'hui ou demain, qu'on me dit. Peut-être que, côté développement économique, pas strictement agriculture, la CPTAQ pourrait y participer, dans ce livre blanc là, pour le futur, les années 2000. Juste une suggestion.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, me permettez-vous une courte remarque?

Le Président (M. Vallières): Oui.

M. Ouimet (Bernard): Quand je parlais qu'on ne pouvait pas tenir compte du développement économique, c'est parce que c'est dans les données actuelles. C'est que le tiers de nos demandes... Parce que ça n'a l'air de rien, là, mais, tu sais, on se dit: Bon, bien, le régime provisoire... Le régime, ça n'énerve plus personne, ça. Mais la vraie réalité, là, je vais vous dire ça comme un président d'organisme, c'est que, dans le tiers de nos demandes – ça, c'est plus de 1 000 demandes chez nous, c'est presque 1 500 à 1 600 demandes par année – on est pris pour dire à du monde: On ne peut pas tenir compte du développement économique, on n'a pas le droit d'en tenir compte; on ne peut pas tenir compte de la viabilité des collectivités rurales, on n'a pas le droit d'en tenir compte; on ne peut pas tenir compte de l'effet sur la demanderesse même quand c'est un corps public. Il faut prouver que ça soit sans effet en vertu des premiers critères de l'article 62, 1° à 8°. Ce n'est pas beaucoup nuancé, ça, «sans effet». Bon.

Ça veut dire que ça nous amène dans une situation où on dit à du monde qu'on le juge en fonction de critères qui sont là en attendant quelque chose qui n'arrivera jamais – c'est ça que ça veut dire, dans la vraie vie, puis il faut rester crédible, c'est le défi – parce que le régime provisoire a été mis en attendant les secteurs exclusifs. Or, les secteurs exclusifs, ils ne sont pas dans la loi. Ils n'étaient pas plus dans l'avant-projet de loi avant, puis pas plus dans le projet de loi n° 123. Donc, par un projet de loi qui était le 123, par un avant-projet de loi qui a suivi le 123 et par une loi adoptée, sanctionnée, en vigueur, on dit au tiers de nos demandes qu'on les juge en fonction d'un régime qui n'arrivera jamais. On ne dit pas ça de même, mais là je le dis clairement. C'est ça que ça veut dire. C'est pour ça que ça aussi, il faut que ça prenne fin et c'est pour ça qu'à Thurso ils ont subi toute la grande étape. C'était non chez nous, c'était non en appel, c'était non à la Cour du Québec, bon, puis là ils sont revenus, mais c'est des entreprises qui étaient reliées. On a pris les entreprises plus reliées à l'exploitation de la ressource première pour être capable d'en donner un morceau. Mais il faut se le dire franchement: C'est quoi, ça? Ça veut dire qu'il faut quasiment tricoter. Tu sais, il faut le dire comme c'est: Il faut quasiment tricoter.

M. MacMillan: Puis c'est 200 jobs, après.

M. Ouimet (Bernard): Bien, c'est ce qu'on va pouvoir traiter différemment, considérant tous les critères par la suite. Voilà.

M. MacMillan: Juste un petit point.

Le Président (M. Vallières): Oui, M. le député de Papineau.

M. MacMillan: Vous me dites que c'est dépassé. C'est ça que vous me dites. «J'ai-tu» bien compris? Vous avez patiné, vous avez fait le canal Rideau au complet pour me faire comprendre que c'est dépassé, la loi, puis qu'il faut que ça change. Il faut prendre en considération le développement économique dans vos décisions chez vous.

M. Ouimet (Bernard): Bien, c'est ce que j'avais compris de votre recommandation l'an passé puis c'est ce qui est dans la loi, j'imagine, avec son entrée en vigueur éventuelle.

M. MacMillan: Pardon?

M. Ouimet (Bernard): Avec l'entrée en vigueur éventuelle de la loi, on va pouvoir considérer tous les critères de décision. Voilà.

M. MacMillan: Merci.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Rousseau.

M. Brien: Merci, M. le Président. Ma question, M. Ouellet, concerne les commissaires. C'est mentionné, dans votre rapport annuel: Les commissaires sont nommés par le gouvernement ainsi que le secrétaire de la Commission. Moi, j'aimerais savoir comment, à la CPTAQ, vous gérez le travail des commissaires. Je m'explique là-dedans. Un exemple, est-ce qu'on demande à chaque commissaire une divulgation de ses intérêts personnels?

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Brien: Est-ce qu'on s'assure qu'il y a une rotation des dossiers de telle façon que le même commissaire ne traite pas plusieurs fois un dossier, où il y aurait, par exemple, puis c'est souvent le cas – vous savez qu'il y a des millions en jeu là-dedans – danger, vous savez, de prendre une décision influencée, disons?

Une voix: D'aller jouer au golf trop souvent avec les mêmes personnes.

M. Brien: Bien, aussi. Vous savez, moi, je veux m'assurer – puis je suis content que notre Vérificateur général du Québec soit ici – de l'impartialité, de l'objectivité, de l'honnêteté et vraiment que le travail des commissaires soit fait comme à la cour, comme par un juge, en quelque sorte, qui ne doit pas avoir d'intérêts particuliers. Ça fait que je vous écoute là-dessus.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, par rapport à la première question sur la divulgation des intérêts, ça se fait en entrant puis ça se fait à chaque année.

En ce qui concerne la rotation des dossiers, il faut absolument faire la rotation des dossiers. Bien sûr qu'il faut manager ça. Ça fait neuf commissaires. On est neuf à Québec, six à Longueuil. Alors, dépendant de ce qu'on a comme dossier en public, dépendant s'ils ont déjà siégé dans des dossiers semblables, pour éviter que le citoyen se retrouve devant le même qui reviendrait sur une deuxième demande devant le même commissaire, il faut faire ces rotations-là puis aussi s'assurer de la complémentarité des équipes, parce que des membres aussi ont différentes formations, et l'expertise des membres sur les gros dossiers... Donc, c'est presque toujours trois membres. Quand ce n'est pas nécessaire de mettre trois membres, on ne met pas trois membres. Mais votre préoccupation, c'est sérieux. C'est toute la crédibilité de l'organisme, dans le fond, qui est en cause par ça.

M. Brien: M. Ouellet, est-ce que vous avez un code d'éthique écrit ou des directives fermes en ce qui a trait, appelez ça «au comportement des commissaires», que ce soit pendant les séances ou hors séances? Est-ce qu'il y a un code d'éthique là-dedans?

(11 h 40)

M. Ouimet (Bernard): Ce que je peux vous dire, c'est que, à nos rencontres de membres, qui sont régulières, nos assemblées des membres, ce sont des sujets qui reviennent constamment, et nous sommes actuellement en préparation d'un code d'éthique qui va être plus spécifique à notre Commission, mais qui vient d'une réflexion qui a été faite au niveau de l'ensemble des présidents d'organisme. On a fait une réflexion, comme présidents d'organisme, ensemble, les 23 présidents d'organisme, de tribunaux administratifs, qui se réunissent assez régulièrement, on a fait une réflexion sur une base de code d'éthique commun. À partir de cette base, on est en train de le traduire de façon plus particulière chez nous pour avoir un code d'éthique plus élaboré que celui que nous avions il y a quelques années.

M. Brien: M. Ouellet, ma dernière question: En presque 20 ans d'existence...

Des voix: Ouimet.

M. Brien: Ouimet. Excusez. M. Ouimet. En 20 ans d'existence, est-ce que vous avez été témoin d'anomalies au sein de la Commission de protection du territoire agricole? Je parle d'anomalies où il y avait conflit d'intérêts face à un commissaire, face à une commissaire. Est-ce que vous êtes prêt à témoigner de l'honnêteté finalement du déroulement, au fil des ans, des décisions rendues? Est-ce qu'il a été porté à votre connaissance certains cas où un ou une commissaire aurait été influencé de l'extérieur, volontairement ou involontairement?

M. Ouimet (Bernard): Ma réponse, M. le Président...

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Je peux répondre comme président de la Commission depuis 1994.

M. Brien: Je le comprends.

M. Ouimet (Bernard): Je ne voudrais pas remonter en 1978. Non, jamais je n'ai eu ce genre de commentaires là. Il arrive – puis ce n'est pas fréquent – que quelqu'un nous dise qu'il aurait préféré qu'on retarde la décision puis que la décision s'est rendue vite ou que quelqu'un dise: J'ai l'impression de ne pas avoir pris, je ne sais pas, la journée pour expliquer mon affaire. Ça arrive. Dans tous les cas, je regarde ce qui s'est passé pour voir s'il n'y a pas eu un manquement vis-à-vis du commissaire en question. Mais c'est très rare. C'est très rare qu'on ait même des commentaires par rapport à des auditions chez nous qui auraient été bousculées ou... Je ne vous dis pas que ce n'est pas arrivé, mais c'est infime. Mais jamais sur la question du conflit d'intérêts, parce que, s'il y avait eu ça, je vous garantis qu'il y aurait eu enquête. Jamais.

M. Brien: Ça fait que les citoyens du Québec peuvent dormir en paix en ce qui a trait à l'honnêteté et à l'impartialité des commissaires à la CPTAQ.

M. Ouimet (Bernard): Avec l'information dont je dispose, je vous dirais oui, puis le climat aussi, le climat qui existe dans notre Commission, qui est un bon climat.

M. Brien: Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Rapidement, une question sur l'application de la loi et la surveillance. Je vous donne un exemple. Vous donnez une autorisation pour l'opération d'une sablière. Il y a des règles à suivre qui tiennent compte, par exemple, de la terre arable qui doit être remise en état. Tu sais, il y a des choses, là... Et c'est bien inscrit sur l'autorisation que vous donnez. L'opération, par exemple, se fait sur une période donnée. À la fin de la période, si ce n'est pas fait, vous avez des sanctions pénales disant: Bon, ça coûte tant et tant, sauf que ça ne remet pas la terre arable en place, ça.

Alors, moi, ma question, c'est: Comment faites-vous pour vous assurer que justement, là, concrètement les sols sont remis en place comme avant, que le sol arable est remis à sa place, et tout ça? Comment faites-vous ça? Parce que, au niveau pénal, ce n'est pas compliqué, ça, c'est tout l'aspect juridique des choses. Mais l'aspect concret pour que les terres soient remises en condition comme elles étaient avant l'exploitation des carrières ou des sablières, comment vous faites ça?

M. Ouimet (Bernard): Me permettez-vous, M. le Président? Je demanderais peut-être à Serge Cardinal, qui est directeur des affaires juridiques et des enquêtes, qui assure le suivi de nos décisions, de pouvoir répondre.

Le Président (M. Vallières): Oui. M. Cardinal.

M. Cardinal (Serge): Merci, M. le Président. Il y a deux volets, je pense, à votre question. Le premier volet, c'est sur l'opportunité même d'imposer un certain nombre de conditions, et ça, je vous avoue que ce sont des choses qu'on regarde. Dans un contexte où il y a une restriction de ressources évidente – on parlait tantôt d'effectif en décroissant – au niveau du Service des enquêtes en particulier, si je fais un ratio rapide, je vous dirais: Il y a quelque chose comme un enquêteur par 150 municipalités, au Québec. Alors, ça vous donne la toile de fond des choses. Il faut, bien sûr, essayer d'aller à l'essentiel. Alors, dans plusieurs dossiers, on se demande si les conditions qu'on impose ne font pas double emploi avec, par exemple, des conditions de réaménagement ou d'exploitation qui sont prévues dans le règlement sur les carrières-sablières, qui est sous l'autorité du ministère de l'Environnement et de la Faune, pour prendre votre exemple. Alors, on va certainement essayer de rationaliser ça parce qu'on n'a plus les moyens – si on les déjà eus – de faire double emploi avec un autre ministère qui a aussi sa propre vocation et son propre suivi.

Quant au deuxième volet des choses, quant au suivi comme tel des conditions, je vous dirais qu'on doit se concentrer de plus en plus vers les cas où il y a des plaintes du milieu ou des plaintes des citoyens sur des conditions qui ne sont pas respectées.

Mme Dionne: O.K. Bon. Est-ce que, dans ce sens-là... Oui, j'imagine que c'est seulement à partir de plaintes que vous pouvez agir, parce que vous ne pouvez pas être partout sur le territoire. Mais il y a des inspecteurs au niveau de l'Environnement, il y a vos inspecteurs au niveau de la CPTA ou vos vérificateurs, alors, effectivement, dans le cas des sablières-carrières, il pourrait y avoir une seule personne qui est mandatée ou un seul service qui est mandaté pour faire le suivi des plaintes selon les deux lois. Ça serait peut-être la façon la plus efficace. Ce bout-là, je pense que ça peut s'arranger, s'il y a collaboration entre les deux pour être plus efficace.

Mais, au niveau pratique des choses – pas au niveau juridique, là, parce que l'aspect juridique avec des pénalités, puis charger la pénalité, ça, ce bout-là, je pense que, au niveau gouvernemental, on sait comment faire ça puis tous les ministères savent comment le faire, le ministère de la Justice s'assure de ça – au niveau concret, vous êtes la Commission de la protection du territoire agricole, donc des sols. Quels outils vous avez entre les mains pour que justement des carrières ou des sablières qui ont été utilisées soient remises en état, par exemple? Est-ce que vous avez les outils pour vous assurer de ça, qu'après l'exploitation on refait les fossés comme ils doivent être faits, on s'assure que le sol arable est remis en place? C'est cet aspect-là qui est vraiment le coeur de votre travail, en tant qu'organisme. Comment vous faites ça?

Le Président (M. Vallières): M. Cardinal ou M. Ouimet?

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): De façon bien précise, quand la décision contient des conditions, parce qu'il peut arriver qu'on ne mette pas de conditions pour l'exploitation d'une sablière...

Mme Dionne: Vous avez avantage à le faire.

M. Ouimet (Bernard): Mais il pourrait arriver que dans des secteurs on dise: De toute façon, on ne perd rien puis on ne remettra pas ça en agriculture. Ça arrive. Il y a des fois qu'on ne met pas de conditions.

Mme Dionne: Selon la qualité du sol, peut-être, oui. O.K.

M. Ouimet (Bernard): Mais, règle générale, on met des conditions, et les conditions sont suivies par nos analystes. Nos analystes font le suivi des conditions pour nous dire: Bien, à un moment donné... Parce que sinon ça peut rendre des fois la décision caduque. Alors, il y a un suivi qui est fait là-dessus.

Mme Dionne: Oui, mais, concrètement, M. Ouimet, vous retrouvez, puis il y en a au Québec... Vous avez donné des mandats avec des conditions bien précises d'exploitation, et, à la fin du temps donné... Parce que, là, on parle de terres, de sols agricoles, là. Bon. Est-ce que vous avez des exemples? Est-ce que vous avez des problèmes? Ou il n'y en a peut-être pas. En tout cas, moi, je pense à un exemple qui va sûrement être un problème pour la CPTA bientôt, mais... En tout cas. Comment vous êtes capable de vous assurer, parce que c'est un territoire agricole, que c'est remis en condition?

M. Ouimet (Bernard): Oui, vous avez raison.

Mme Dionne: Est-ce que c'est prévu dans la loi ou si ça devrait l'être, peut-être?

M. Ouimet (Bernard): Vous avez raison, ce n'est pas un problème facile qu'est le suivi des conditions dans des cas comme vous mentionnez. C'est pour ça qu'on va l'étudier de façon particulière, d'abord pour s'assurer de poser les bonnes conditions puis qu'elles ne viennent pas en duplication avec l'Environnement. Ça, c'est la première des choses qu'on va regarder.

Mme Dionne: Ça va.

M. Ouimet (Bernard): Puis effectivement on a eu des cas où on s'est rendu compte que ça n'a pas été remis en valeur, et on a pris des mesures, comme il est arrivé dans certains cas qu'on n'a pas pris de mesures de remise en valeur. Mais on s'assure toujours que ça soit transparent. Moi, c'est ça, mon objectif.

Je vais vous donner un exemple. Ça nous arrive régulièrement de regarder des dossiers judiciaires où on peut se rendre compte que, dans un cas donné, par exemple, quelqu'un a fait à quelques reprises... n'a aucun moyen pour remettre ça... Ça coûterait les yeux de la tête à la Commission. On sait qu'on ne sera jamais payé et que le milieu environnant n'est pas nécessairement un milieu complètement agricole; vous savez, il y a toutes sortes de choses alentour. C'est cas par cas qu'il faut porter un jugement, puis, quand on ne les referait pas mettre, dans des cas exceptionnels – c'est toujours exceptionnel – c'est-à-dire qu'on se satisferait de ne pas les remettre en valeur, on s'assure toujours que ça soit transparent auprès de la municipalité, de la MRC ou des gens du monde agricole. En tout cas, c'est ce qu'on travaille de plus en plus.

Mme Dionne: O.K.

Mme Vermette: J'avais envie d'aller à peu près dans le même sens, parce que je me posais comme question...

Le Président (M. Vallières): Oui, rapidement.

Mme Vermette: Si je regarde dans votre livre, beaucoup de demandes touchent, en tout cas, le résidentiel et la villégiature, donc ce qui veut dire que souvent c'est en regard des berges, plus souvent qu'autrement, de la villégiature, en tout cas, si je regarde ça, un lac à la campagne ou... en tout cas, bon, etc., donc ce qui veut dire qu'il y a des problèmes avec... On en a vu à Chicoutimi dernièrement – ha, ha, ha! – où on donne des fois des... Mais est-ce que vous tenez compte de toute cette dimension-là? Est-ce que les décisions du BAPE... Est-ce que vous consultez des gens au niveau du BAPE? Est-ce que tout ça, ça se fait?

(11 h 50)

M. Ouimet (Bernard): Dans les cas précis, M. le Président, des cas de villégiature, c'est surtout, dans le fond, quelqu'un qui veut se construire un chalet près d'un lac.

Mme Vermette: C'est en développement de plus en plus. Moi, je suis à Magog, puis, à Memphrémagog, je peux vous dire qu'il y en a, des grands développements, dans ce coin-là.

M. Ouimet (Bernard): Oui. Mais on les regarde en fonction des critères de notre loi. Bien sûr que notre loi ne dispense pas des autorisations nécessaires auprès de l'Environnement, d'un; deux, auprès de la municipalité ou de la MRC, le cas échéant. Ça ne les dispense pas d'obtenir les autres autorisations, mais on les examine en fonction des critères de notre loi seulement.

Le Président (M. Vallières): Bien. M. le président, sur le même sujet, peut-être rapidement, vous indiquiez qu'au niveau du secteur des mines il y a des dispositions qui existent auprès des exploitants afin qu'il y ait des fonds spéciaux au cours des opérations minières pour la remise en état ou la protection, par exemple, du public par la suite. Ce genre de dispositions là n'existe pas. Mais, dans le cas des gravières ou des sablières qui sont en exploitation, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, à un moment donné, de penser à ce type de mise de fonds en fonction de la remise en état en sol arable éventuellement? Ce n'est pas prévu, actuellement.

M. Ouimet (Bernard): Permettez-vous? J'aimerais ça que Serge Cardinal exprime son opinion.

Le Président (M. Vallières): M. Cardinal.

M. Cardinal (Serge): Oui. M. le Président, ce à quoi vous faites allusion, c'est probablement toute la question, par exemple, des cautionnements qui garantissent les modalités de remise en état. Mais, si vous me permettez de revenir à la réponse que je donnais à votre collègue tantôt, il y a déjà beaucoup de ça qui est géré par le ministère de l'Environnement et de la Faune. Alors, à l'évidence, avec les ressources qu'on a, on ne veut pas faire double emploi. C'est le minimum. C'est plus le ministère de l'Environnement et de la Faune, qui gère le règlement sur les carrières-sablières, qui prévoit ces choses-là.

Le Président (M. Vallières): Merci. Moi, je terminerai avec une courte question qui va bien introduire le groupe qui va suivre, puisque, dans un des documents que vous nous présentez, M. Ouimet, vous indiquez que vous avez procédé à l'examen de toutes les décisions rendues par le Tribunal d'appel depuis sa création, soit en juillet 1989, qui ont infirmé vos décisions, dans le but d'en tirer les enseignements appropriés. Quels sont-ils?

M. Ouimet (Bernard): Je ne pourrais pas vous donner de même, rapidement, en une minute, les enseignements. Ce que je peux vous dire, c'est que ce qui nous a préoccupés, ça a été, dans les 940 et quelques décisions qu'on avait identifiées par thèmes, en faisant un examen très minutieux, d'en tirer les grands enseignements. Je ne suis pas capable de vous donner tout ça aujourd'hui parce qu'on n'a pas mis une priorité de sortir un papier là-dessus à court terme, d'autant plus que, au total, 97 % de ces décisions-là, des 940 et quelques décisions qui avaient infirmé en totalité ou en partie la Commission, c'était pour autoriser des choses auxquelles la Commission avait dit non. À 97 %. Alors, comme on est une commission de protection du territoire agricole, je n'ai pas mis un accent très grand pour qu'on puisse finir le travail à court terme. Mais il y a des fois qu'il y a des bons enseignements qu'on peut retirer, puis on l'a observé dans des cas. On va avoir de la matière ultérieure à cet égard.

Ensuite de ça, c'est que, compte tenu aussi des modifications apportées à la loi, qui balisent l'appel, qui font que les questions et les décisions de la Commission qui vont être portées au tribunal administratif, dans le nouveau régime, devront faire état d'une erreur de droit ou d'une erreur de fait déterminante qui est apportée dans la législation, ça change beaucoup le décor. C'est comme si, de notre point de vue, ça réglait une grosse partie du problème. Mais, comme je vous dis, compte tenu que c'est 97 % – je parle depuis 1989 – des décisions qui nous ont infirmés pour autoriser ce qu'on refusait et compte tenu des commentaires puis d'ailleurs des attentes qu'on a envers la Commission, qui est une commission de protection du territoire agricole, vous comprenez qu'on n'a pas mis un S.O.S. pour sortir tous les enseignements dans le court terme. Mais on regarde, parce que, dans des cas, effectivement...

Puis je vous avoue qu'il y a même plusieurs décisions que, avec le pouvoir de révision de nos propres décisions, qui va revenir avec le droit administratif, parce que c'est dans le projet de loi... On va avoir la capacité de réviser nos propres décisions pour causes à moindres coûts et rapidement. Bien, si on regarde ça, le pouvoir, donc, la capacité de corriger nos propres décisions quand on fait des erreurs, qu'on va ravoir, versus le fait que, dans le projet de loi, l'appel est balisé, dans une perspective comme ça, j'ai l'impression que ça va être très important de voir les enseignements futurs, parce que, en d'autres termes, si on est renversés sur des questions de droit ou des erreurs de fait déterminantes, chacune des décisions qui nous renversera portera un message très important, tandis que, là, le régime étant, comme vous le savez, un régime relativement «wide open», c'est une question d'appréciation de mérite. Quelqu'un peut avoir l'opinion de dire: Nous, on pensait que ça nuit, règle générale, on pense que ça ne nuit pas, ou c'est en partie ou en totalité. Bon, c'est une question d'opinion. Chacun exerce sa juridiction puis interprète les mêmes critères de la loi, mais à sa façon. Les règles du jeu sont comme ça.

Mais, les règles du jeu changeant, le message va être beaucoup plus clair sur la Commission, parce que, je ne sais pas, si on se fait renverser 200 fois dans le nouveau régime parce qu'on aura fait des erreurs de fait déterminantes, bien, c'est un message très important pour la Commission. Nous allons suivre ça avec beaucoup d'intérêt pour corriger nos affaires. Mais, dans un régime de double appréciation, on l'examine pareil, on examine pareil les messages qu'on peut en soutirer. C'est un travail de longue haleine, puisqu'on les a examinées une par une très attentivement et par thèmes. Mais nous sommes en train de finaliser ce travail-là.

Le Président (M. Vallières): Bien. Vous me permettrez une dernière remarque là-dessus, parce que, quand vous parlez que la Commission pourrait réviser elle-même ses décisions et reconnaître, dans certains cas, des erreurs commises, quand on a l'expérience de la vie publique, on se rend vite compte que ce n'est pas facile d'amener du monde à reconnaître qu'il a fait des erreurs, surtout quand ce sont des gens qui sont des fonctionnaires et qui ont une certaine sécurité. Est-ce que ça ne voudrait signifier que ça va être de plus en plus difficile pour un contribuable d'obtenir une révision? Parce que, dans les tribunaux administratifs qu'on connaît, d'obtenir une révision, là, c'est comme chose pas très, très simple puis pas très, très facile parce qu'il y a des gens qui, à ce moment-là, doivent reconnaître qu'ils ont commis des erreurs et qui, à l'intérieur de leur imputabilité, ont à répondre, à un moment donné, de leur niveau d'efficacité, donc ils auront tout avantage, je pense, dans bien des cas, en tout cas, à tenter de justifier les décisions qu'ils ont prises plutôt qu'à agir avec ouverture à l'endroit des gens qui s'adressent à eux.

M. Ouimet (Bernard): On n'enlèvera pas le droit d'appel. Ça va permettre à la Commission de corriger. Parce qu'on a toujours des fausses balles. Si on pouvait les retirer, on les arrangerait et ça irait plus vite.

Regardez, il faut quand même penser que, avant la création du Tribunal d'appel, on était saisis d'un volume relativement imposant malgré une révision pour causes très limitée. Vous avez raison là-dessus. C'est les trois causes standard qu'on met dans la justice administrative puis qui sont très limitatives, vous avez raison. Par rapport à l'appel, c'est très limitatif. Bon. Bien, malgré ça, on rendait de 600 à 800 décisions en révision, et le score net, c'était qu'on se modifiait à 10 %, 12 %, 12,5 %, alors que, avec le régime actuel, qui est vraiment intéressant pour un appelant, là, je veux dire, il est vraiment on ne peut plus ouvert, le nombre de demandes est à peu près 400 par année; mettez-en 500, à la limite. Donc, je pense que les deux régimes vont se compléter.

On aurait la capacité de se réviser quand il faut se réviser, mais c'est assez étroit, vous avez raison. C'est les trois causes qu'on voit dans la révision pour causes. J'ai eu l'occasion d'en faire quelques années avant d'être président de la Commission. Et après ça il y aurait un régime d'appel, ce qui est correct, mais un régime d'appel sur une erreur de droit ou une erreur de fait déterminante, ce qui n'est quand même pas le régime qui est présent. Puis après ça, quand on regarde ce qui est dans la justice administrative, on aurait même – je pense qu'une décision de l'organisme, après, le TAQ, le Tribunal administratif du Québec... – pour les matières de protection du territoire agricole et pour deux autres domaines, la capacité d'aller à la Cour du Québec. Donc, le recours à la Cour du Québec est conservé dans les décisions du TAQ, dans les projets qui sont législatifs, sur place, pour trois matières, dont le zonage agricole.

(12 heures)

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet, il me reste, au nom de mes collègues, à vous remercier de votre présentation, de même que les gens qui vous accompagnaient. Alors, on vous dit: À l'an prochain, peut-être avant. Bonne fin de journée. Merci.

Alors, je prierais maintenant les représentants du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole de bien vouloir s'avancer.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, bienvenue, mesdames. Vous représentez le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole. Alors, j'aimerais bien que vous puissiez vous présenter, s'il vous plaît, et nous donner vos fonctions à l'intérieur de cet organisme.


Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole (TAPTA)

Mme Bédard (Rita): Je vous remercie beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je suis Rita Bédard, présidente du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole. Je suis accompagnée de Me Nicole Jobin, qui est la secrétaire du Tribunal. Je devais être accompagnée, à l'origine, du vice-président du Tribunal, M. Gérard Lavoie, mais il siège actuellement à Montréal. Il a une cause qui a déjà débuté il y a deux semaines, qui s'est prolongée encore cette semaine. Alors, je vous prie de l'excuser.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, madame, je vous donne la parole. Si vous voulez nous donner, en fait, une explication de ce qui se passe chez vous.

Mme Bédard (Rita): Alors, vous avez reçu le rapport annuel 1995-1996. Ce rapport a la même structure de présentation que celui de l'an passé, dont je m'étais servi pour présenter le Tribunal à cette première comparution devant la commission.

Je ne reprendrai pas l'exposé que j'avais fait l'an passé à partir de ce rapport, exposé qui portait sur l'historique et la création du Tribunal, ainsi que la mission et le mandat. On retrouve d'ailleurs les mêmes textes aux pages 11 et 12 du rapport de cette année. Qu'il suffise de rappeler que le Tribunal d'appel est un tribunal administratif qui est chargé d'entendre en appel les décisions ou ordonnances de la Commission de protection du territoire agricole, appels qui sont interjetés devant lui.

Le Tribunal est formé d'une petite équipe mais d'une équipe multidisciplinaire. Aux termes de la loi, les auditions sont toutes publiques. Nous siégeons en formation de trois membres pour entendre chaque dossier porté en appel devant nous.

Si on regarde les activités du Tribunal pour l'année 1995-1996, on peut signaler les éléments suivants, que vous retrouvez au rapport annuel en page 15. On constate que le nombre d'appels a légèrement crû. Il était de 407 l'année précédente, et même de 325 en 1993-1994, donc il y a une légère croissance à 427 appels. Le nombre d'appels qui ont été entendus, cependant, a légèrement diminué, de 363 à 347; et le nombre de décisions rendues a également diminué, de 364 à 314. Ces deux derniers éléments s'expliquant par des changements qui ont été apportés au niveau de la composition du Tribunal.

La loi prévoit que le Tribunal peut être formé d'un maximum de neuf membres. L'an passé, à la demande du ministre, on l'a réduit à sept. D'autre part, cette année-là également, des neuf membres originaux, six membres voyaient leur mandat échu. De ce nombre, deux ont été renouvelés, les quatre autres ne l'ont pas été. Également, il y avait une diminution de deux membres. Finalement, deux nouveaux membres ont été également nommés. Ce qui fait que ça a changé considérablement la composition des membres du Tribunal qui y étaient depuis 1989, depuis l'origine. En plus, un membre a été absent pour une assez bonne période, pour raison de maladie.

Ce qui fait qu'on peut conclure que, malgré une baisse du tiers des membres du Tribunal, c'est quand même énorme. On a malgré tout réussi à maintenir un rythme constant d'auditions et de décisions.

En ce qui concerne la nature des demandes qui sont portées devant nous, tel que vous l'avez en page 18 du rapport annuel, on peut, malgré l'absence de détails au niveau des décisions, en tirer certains constats. Par exemple, en comparaison des demandes présentées l'année antérieure, en 1994-1995, on peut voir que, en 1995-1996, les demandes visant les résidences et les développements résidentiels sont à la baisse. On est passés de 64 % à 57 %, l'an passé. Des demandes de morcellement de fermes tout en conservant des usages agricoles ont également connu une diminution. On avait eu, il y a deux ans, 14 % de ce genre de demandes, on est passés à 10 %.

Par contre, sont à la hausse les demandes visant l'utilisation du territoire pour des chalets et des développements de villégiature. On est passé de 4 % à 8 % de demandes. Les usages commerciaux et industriels ont également crû, on est passé de 6 % à 9 % de nos demandes; les utilisations publiques et les usages récréatifs ont également crû de façon moindre, on est passé de 5 % à 6 %.

Compte tenu de l'absence d'instruments qui étaient au Tribunal, puisque c'est un petit organisme qui n'était pas vraiment équipé sur le plan informatique, il est difficile de vous donner des précisions et des détails concernant les dossiers. Les développements informatiques ont quand même été entrepris au début de l'année financière 1995-1996 et on a quand même encore certaines améliorations à apporter. Mais on pourra, à une prochaine comparution, l'an prochain, vous faire connaître de façon très détaillée la nature des décisions qui sont portées en appel devant nous. Ce qui sera important de faire connaître, c'est ce qui est en appel devant nous consiste en une autorisation ou en un refus, de sorte qu'on pourra peut-être diminuer les appréhensions. Quand on dit que le Tribunal infirme, on a l'impression qu'il infirme seulement des refus puis qu'il accorde des autorisations, alors que ce n'est pas le cas. Donc, on fera mieux connaître de quel genre d'autorisation ou de refus, pour quel usage, quelle était la superficie visée et quelle est la superficie visée par la décision. Pour le moment, malheureusement, à défaut d'avoir le développement requis, on est incapable de vous le fournir. Mais ce sera fait l'an prochain.

Nous sommes également, sur le plan de l'informatique, avec le développement des moyens technologiques, à travailler un dossier avec l'Éditeur officiel, par la voie des Publication du Québec, pour également rendre nos décisions disponibles à tous les intervenants.

Je terminerai rapidement ma présentation en référant à la recommandation qui était contenue au rapport de la commission de l'an passé à la suite des comparutions qui avaient été faites. En ce qui concerne le Tribunal, on indiquait un souhait que je fasse parvenir à ladite commission toute recommandation concernant des modifications législatives qui feraient en sorte qu'on améliorerait le système afin que le citoyen puisse utiliser le recours existant le plus facilement possible. Je n'ai pas fait de suggestion parce que les suites, finalement, à ce qui avait été demandé se retrouvent dans la Loi sur la justice administrative qui a été sanctionnée en décembre dernier.

Dans cette loi-là, on établit des règles propres aux décisions qui relèvent des organismes qu'on appelle à fonction juridictionnelle, par opposition aux organismes à fonction administrative, donc le Tribunal versus la Commission. On indique, au chapitre II de cette loi, que les procédures devant le Tribunal administratif devraient être conduites de manière à permettre un débat loyal, dans le respect du devoir d'agir de façon impartiale et que le tribunal est maître de sa procédure. Cependant, selon l'article 12 de cette même loi, on est très précis: Le Tribunal doit prendre les mesures nécessaires pour délimiter le débat et, s'il y a lieu, favoriser le rapprochement des parties pour donner aux parties l'occasion de prouver tous les faits qu'elles veulent prouver et, si nécessaire – on le précise même dans la loi – d'apporter à chacune des parties, lors de l'audience, un secours équitable et impartial.

Alors, on voit donc là qu'il y a trois devoirs qui vont être imposés aux membres des tribunaux et qu'il faudra respecter. Les trois s'inscrivent dans un souci de faire en sorte que le citoyen puisse, de façon correcte, complète et convenable, faire valoir ses droits. C'est la loi qui l'indique. Des règles de preuve de procédure devront compléter ces articles et un comité de réglementation, dont la création vient d'être récemment annoncée par le ministre de la Justice qui est responsable de la loi, qui est sous la responsabilité de Me Jean-K. Samson, du ministère de la Justice, doit être réuni sous peu pour établir les règles de procédures appropriées. On a rencontré M. Bégin, la semaine dernière, et il nous a justement assurés qu'il comptait sur la collaboration des membres des tribunaux actuels pour faire valoir leur propre procédure en cour, leur expertise et leurs modifications et corrections appropriées. Alors, c'est dans la foulée de ce dossier-là que cette recommandation-là devrait avoir ses suites.

Je peux vous remettre, d'autre part, un très court document qui actualise, si je peux dire, les données concernant le Tribunal pour la présente année et qui, à la dernière page, contient des statistiques sur l'évolution des décisions rendues par le Tribunal pour les trois dernières années.

(12 h 10)

Le Président (M. Vallières): Oui, d'accord, Mme Bédard. Alors, on va le distribuer aux membres de la commission. Ceci termine votre présentation, Mme Bédard?

Mme Bédard (Rita): J'ai terminé ma présentation.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Peut-être débuter avec une courte question qui en rejoint une qui était posée par le député de Beauharnois-Huntingdon tout à l'heure au président de la Commission. L'an passé, on vous posait également la question, sur les personnes qui se présentaient devant vous qui étaient représentées par des professionnels, soit des avocats ou des notaires, si les personnes qui étaient représentées par ces professionnels-là gagnaient plus souvent leur cause que les autres. Vous disiez: C'est une chose qu'on devra vérifier. Vous n'aviez pas ça en tête à ce moment-là. Est-ce que vous avez fait cette vérification-là? Pouvez-vous nous donner des indications sur le niveau de succès? Je sais qu'il n'y a pas nécessairement corrélation parce que les demandes peuvent être très différentes, peuvent varier d'une à l'autre, mais quel est le pourcentage de succès quand les gens y vont sans aide professionnelle versus ceux qui y vont bien représentés par des avocats ou des notaires?

Mme Bédard (Rita): D'accord. Alors, merci, M. le Président. Je ne peux vous fournir l'information pour le rapport annuel 1995-1996 qui est devant vous, compte tenu, comme je vous le disais, du manque de moyens informatiques, notamment, qui nous permettaient d'analyser les dossiers. Dans le cadre des modifications qu'on m'a demandées en développement informatique, on pourra donner des éléments complets lors d'une prochaine comparution. Mais, justement, en relisant le rapport de la commission et me souvenant de cette question-là, j'ai quand même évalué les trois premiers mois de la présente année. Donc, on a fait une analyse plus manuelle qu'autre chose, mais, enfin, on s'est servi un peu de l'informatique qu'on a, mais on n'est pas capable de vous livrer un tableau officiel. On a donc fait l'évaluation des dossiers rendus en avril, mai, juin 1996. Ça couvre 94 décisions. On constate que, dans 70 de ces dossiers-là qui sont venus au Tribunal, à la Commission, il n'y avait aucun mandataire, ni avocat, ni notaire, personne ne représentait la partie demanderesse. Alors que de ces 94 dossiers-là, toujours, quand ils sont arrivés au Tribunal, il y en a 62 seulement où il n'y avait pas d'avocat mandataire. Donc, finalement, la proportion n'est pas si grande que ça. Il y a un nombre légèrement supérieur de huit, là, mais ce n'est pas si grave que ça.

Si on regarde au niveau des dossiers, on constate, par exemple, que les dossiers où il y avait un mandataire qui assistait ou représentait la partie demanderesse à la Commission – par mandataire, ça peut être un agronome, un ingénieur, un arpenteur-géomètre ou un urbaniste – quand les gens sont venus en appel, là, ils avaient choisi d'être assistés par avocat. On a repéré, toujours dans les trois mois en question, trois dossiers seulement qui rejoignaient cette catégorie-là, et il y a eu deux dossiers qui sont restés les mêmes; la décision de la Commission n'a pas été modifiée en conséquence.

Il y a des dossiers où il y avait un avocat à la Commission et un avocat au Tribunal – il y en avait quatre de ceux-là – dans trois cas sur quatre, la situation est demeurée inchangée. Donc, encore là, on ne peut pas conclure.

Et il y a finalement, peut-être la catégorie la plus intéressante, ceux où il y avait ni avocat ni mandataire devant la Commission, les gens ont choisi de venir au Tribunal avec un avocat. Il y a 16 dossiers. Dix dossiers ont été inchangés. Ça pouvait être une autorisation, un refus, parce que ça peut être une autre partie qui vient en appel, insatisfaite de l'autorisation accordée. Donc, 10 sur 16, ça a été inchangé. Dans les six dossiers où il y a eu une situation changée, en tout ou en partie, on constate que trois de ces dossiers-là consistaient en des autorisations qui avaient été accordées par la Commission, que le Tribunal a infirmées et pour lesquelles le Tribunal a refusé l'autorisation demandée; il y en avait trois autres où c'étaient des refus de la Commission qui se sont transformés en autorisation. Donc, c'est équivalent.

Alors, effectivement, la question est intéressante, parce qu'on se rend compte que ce n'est pas la présence d'avocat ou de notaire qui fait en sorte que les dossiers changent. C'est même révélateur de voir les résultats auxquels on en arrive.

Le Président (M. Vallières): Bien. M. le député de Beauharnois-Huntingdon. Sur le même sujet, je crois?

M. Chenail: Oui. Je pense, après vous avoir entendue, que quand les gens vont en appel chez vous, ils n'ont pas nécessairement besoin d'avocat parce que vous êtes là, comme on pourrait dire, dans le fond, pour essayer de trouver une solution au problème et non pour vous objecter directement au problème.

Mme Bédard (Rita): Oui, on doit même les aider. C'est d'ailleurs prévu. Je vous disais que la Loi sur la justice administrative le prévoit de façon claire, mais nos règlements actuels le prévoient également qu'on se doit d'assister les personnes qui sont devant nous. Les tribunaux également ont eu à se prononcer sur le rôle des membres des tribunaux administratifs, alors que devant les tribunaux de droit commun comme la Cour supérieure, la Cour d'appel, le juge est contraint, si je peux dire, à accepter la preuve qui est devant lui.

Dans les tribunaux administratifs, jusqu'à la Cour suprême, on s'est prononcés et on s'est dit: On n'a pas à se contraindre à tout simplement recevoir la preuve. Certains juges ont même dit: Ces tribunaux-là, ils ont même un pouvoir d'enquête. On se doit, à ce moment-là, de poser les questions nécessaires. On peut, par des documents qui sont mis à notre disposition, quasiment contre-interroger les parties qui viennent devant nous. Il s'agit de ne pas prendre les parties par surprise. On peut poser toutes les questions, recevoir toute la preuve et vraiment enquêter – c'est le terme qui a été utilisé – de façon à ce que justice soit rendue pour les parties qui se présentent devant nous. Alors, c'est très différent des tribunaux de droit commun.

Et, au surplus, vous me permettrez, quand une partie arrive devant nous sans avocat et que l'autre a un avocat, je pense qu'on se doit d'être encore plus vigilants, parce que les avocats de pratique privée ont de la difficulté à oublier qu'ils ne sont pas devant un tribunal de droit commun, ils ont tendance à utiliser beaucoup la procédure et tout ce qui est prévu au Code de procédure civile. On n'y est pas assujettis non plus. Là-dessus, les tribunaux l'ont consacré et confirmé.

Alors, quand un avocat veut essayer d'apporter des objections ou empêcher des témoignages, même au niveau du ouï-dire, les tribunaux administratifs peuvent jusqu'à un certain point accepter du ouï-dire, alors que devant les tribunaux de droit commun, c'est beaucoup plus limité. Alors, il faut donc, à ce moment-là, s'assurer que, malgré toute cette objection légaliste et de procédure, la personne qui est sans avocat va pouvoir expliquer son point de vue, puis faire valoir son point de vue.

M. Chenail: Dans le fond, ce qu'il faut comprendre, c'est que vous êtes là, en fait, pour aider le citoyen qui va devant vous pour essayer de trouver une solution à son problème, plutôt qu'un tribunal qui juge les choses.

Mme Bédard (Rita): Oui, oui. Tout en respectant, naturellement, les critères prévus à la loi. Mais, effectivement, une justice souple et administrative.

M. Chenail: Oui. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci. Je une demande d'intervention de Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, suivie du député de Rousseau.

Mme Dionne: Un petit commentaire, Mme la présidente. Premièrement, vous présentez un document sans le logo du tribunal, et tout ça. Alors, je me suis dit: Est-ce que vous avez quand même votre papier officiel?

Mme Bédard (Rita): Oui, oui. On est petit et modeste, mais on a un papier.

Mme Dionne: C'est ça. D'accord. Même si vous êtes petits. Oui, oui, d'accord. Il me semble qu'il y a une image du Tribunal, effectivement.

On parle de plus en plus de la réforme de la justice administrative. Vous avez parlé des comités dans lesquels vous allez faire partie, tout ça. Et je voyais, dans votre document que vous nous avez présenté, que vous êtes plusieurs, qu'il y a plusieurs commissaires, tout le monde a des échéanciers de date de fin de mandat après l'entrée en vigueur de la Loi sur la justice administrative. Est-ce que, dans ce sens-là, il y a des choses de prévues? Dans la réforme, est-ce que c'est prévu? Parce que je n'ai pas les données avec moi. Est-ce qu'il y a autant de commissaires qui vont être préposés aux dossiers agricoles et ces choses-là? Est-ce que c'est déjà analysé de votre part et de la part du ministère?

(12 h 20)

D'autre part, je sais que même votre mandat se termine le 1er août 1999; il y en a en 2000, 2002. Est-ce qu'on a prévu intégration pour ajuster les deux systèmes, faisant sauver de l'argent, par le fait même, au gouvernement? Est-ce que ces choses-là sont déjà prévues?

Le Président (M. Vallières): Mme Bédard.

Mme Bédard (Rita): Pardon, merci. Le ministère de la Justice avait demandé, en 1996, toutes les données sur tant les ressources humaines, matérielles, informatiques, et il n'a pas, par contre, encore soumis comment il voit le nombre de personnes puis le nombre de membres affectés aux décisions. Ce qui est prévu à date, c'est que dans... Bien, il y a d'abord intégration de la Commission des affaires sociales, du BREF, Bureau de révision de l'évaluation foncière, du Bureau de révision en immigration et du bureau d'examen des plaintes contre le malade mental et le Tribunal, plus d'autres pouvoirs qu'on va chercher dans d'autres lois qui étaient exercés par la Commission municipale, etc. Donc, le ministère est en train d'évaluer effectivement, à partir de tout ça, combien ça peut couvrir de dossiers. Alors, il n'a pas, par division prévue dans la loi, indiqué le nombre de personnes qui y siégeraient. Ce qui est indiqué à date, en ce qui concerne l'agriculture et l'environnement, on prévoit que les auditions se feront par un groupe de deux personnes, donc deux au lieu de trois, comme c'est actuellement, dont un juriste.

Au niveau des membres, les mesures transitoires prévoient qu'il y a transfert des membres pour respecter les mandats au nouveau tribunal et qu'à l'échéance les membres devront se soumettre à la procédure de renouvellement qui est prévue à la loi.

En ce qui concerne des personnes comme Mme Jobin et moi, qui avons ce qu'ils appellent une charge, nous, on est intégrées comme membres, et on verra. Disons que, pour le moment, c'est l'expectative.

Mme Dionne: Parce que, en fait, prenons par exemple, là... Le temps que le système soit rodé, il reste qu'il y a des gens, des citoyens du Québec de partout qui vont vouloir quand même... Vous avez, dans le moment, des délais d'analyse et de prise de décision et, si on fait une réforme des tribunaux administratifs, si on pense au citoyen, le citoyen est certain que ça va améliorer, que ça va être plus rapide encore que c'était, dans tous les domaines, non seulement le vôtre. Sauf que, dans les démarches d'intégration, c'est sûr que vous allez vous assurer que le citoyen qui a affaire à... n'est pas de délais indus, compte tenu de ces changements-là. Alors, ça, j'imagine que c'est analysé entre le ministère et le Tribunal en tant que tel, dans cette vision-là. Il y a le service à la clientèle qui ne doit pas être alourdi en attendant qu'on rode.

Mme Bédard (Rita): Vous me permettez, oui?

Le Président (M. Vallières): Oui, Mme Bédard.

Mme Bédard (Rita): Justement, il y a un autre comité qui vient d'être créé, toujours par M. Bégin, puisqu'il est responsable de la loi, c'est ce qu'on appelle cette fois-là le comité d'implantation. Alors, c'est un autre sous-ministre adjoint à la Justice, Me Gaétan Lemoyne, qui préside le groupe de travail, qui va mettre à jour l'information qu'on a déjà fournie depuis l'an passé et qui doit s'assurer que l'intégration des ressources humaines, matérielles, informatiques et autres va se faire de façon correcte, qui va, j'imagine, évaluer également les besoins précis pour ce nouveau tribunal. La loi indique que ça devrait entrer en vigueur au 1er septembre prochain. Dans un souci, naturellement, de... On crée ça pour que la justice administrative soit mieux rendue pour le citoyen. Alors, l'objectif premier demeure de bien servir le citoyen, de répondre à ses demandes.

Mme Dionne: Est-ce que vous allez être prêts, vous pensez?

M. Bédard (Rita): Alors, le ministre a désigné un membre. Ce comité-là est formé, à date, outre Me Lemoyne, de trois membres: un de la CAS, Commission des affaires sociales; un de chez nous, du Tribunal; et un autre du BREF, puis il va s'y adjoindre des avocats du ministère de la Justice. Donc, c'est le mandat vraiment de prévoir et de s'assurer que tout va être en place.

Mme Dionne: O.K. Merci.

Le Président (M. Vallières): Alors, Mme Bédard, peut-être avant de passer la parole au député de Rousseau, une courte question. Dans la répartition des décisions que vous avez rendues, vous mentionnez que 48 % ont pour objet la construction d'une résidence. Il y en a un autre qui m'intéresse particulièrement: 9 % ont pour objet un usage commercial ou industriel. Est-ce que vous avez le pourcentage dans chaque cas où vous avez rendu une décision positive?

Mme Bédard (Rita): Non, c'est ça que je vous disais, étant donné l'absence d'instruments informatiques, on n'est pas capables de dire s'il s'agissait d'autorisation qu'on a refusée ou de refus qu'on a autorisé. Malheureusement. Le seul pourcentage global que je peux vous donner, qui apparaît dans le deuxième document que je vous ai donné, c'est que, pour l'année 1995-1996, le Tribunal a confirmé 68,7 % des décisions qui ont été portées devant lui et en a infirmé ou infirmé en partie pour la différence. Je ne peux pas, malheureusement, vous indiquer à défaut d'avoir l'instrumentation nécessaire. Je ne peux même pas rien risquer, parce que... Juste quand je vous parlais des six dossiers où il y avait des avocats, pour lesquels j'ai donné un peu plus de détail tout à l'heure, ça varie tellement que c'est dangereux d'y aller sans avoir fait une analyse exhaustive.

Le Président (M. Vallières): C'est parce que, vous comprendrez pour les membres de la commission, si dans les 28 % où il y a eu des décisions qui ont été infirmées et qu'elles soient, par exemple, dans le secteur du développement de villégiature ou dans le secteur commercial ou industriel, ça a une toute autre consonance que si c'était, par exemple, au niveau de la construction d'une résidence. Alors, ça pourrait être intéressant comme données à nous fournir par rapport aux décisions que la Commission prend, la CPTAQ, le niveau d'influence des décisions que vous prenez par secteur. Alors, ça pourrait être très intéressant de voir quels sont les secteurs les plus visés par les retournements de situation, je dirais.

Mme Bédard (Rita): C'est ce que les développements qui ont été commencés permettront de donner l'an prochain.

Le Président (M. Vallières): Très bien, je l'apprécie. M. le député de Rousseau.

M. Brien: Merci, M. le Président. Mme Bédard, j'ai le goût, ce matin ou ce midi, de faire un petit peu mon Jean-Luc Mongrain. Vous savez que, quand je regarde vos chiffres, Ressources financières , pour rendre une décision chez vous, il en coûte 3 407 $ l'unité, puis vous me dites en début de rapport annuel que 54 % concernent des usages résidentiels, maison, chalet. Ça veut dire qu'il y a des causes, chez vous, pour savoir si la personne a le droit de se bâtir un chalet ou non, qui coûtent 3 400 $. Vous savez, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a encore des enfants au Québec qui ne déjeunent pas. Il s'agit de sortir un petit peu dans les rues, que ce soit à Montréal ou ailleurs, pour voir le nombre de commerces fermés, le nombre de gens qui ont des difficultés financières. Est-ce que vous trouvez que c'est justifié?

Deuxièmement, est-ce que vous vous êtes comparés, justement, à d'autres tribunaux administratifs, à savoir pour, je ne sais pas, moi, un coût moyen de vos services?

Mme Bédard (Rita): Par rapport à votre première question: Est-ce que c'est justifié? Je vais vous dire qu'il m'apparaît difficile d'évaluer le droit d'appel qu'on a décidé d'accorder aux individus en matière de protection du territoire agricole. Lorsque le Tribunal a été créé en 1989, on avait constaté que la révision que pouvait faire la Commission ne répondait pas aux demandes des citoyens et que c'était plutôt un mécanisme d'appel qu'il fallait prévoir dans les cas où les individus étaient insatisfaits des décisions de la Commission. Et on a choisi, donc, un mécanisme d'appel. Est-ce que ce mécanisme-là était abusif, exagéré? Je continue à croire que non. On affecte quand même le droit de propriété. Ça peut affecter, à ce moment-là, la propriété d'une personne pour longtemps. Ça peut affecter sa succession. Et on est venu restreindre de façon assez considérable un droit qui était jusque-là absolu au Québec. Quand tu étais propriétaire d'un terrain, il fallait respecter le zonage puis les règlements municipaux, mais autrement tu faisais ce que tu voulais. On est donc venu restreindre de façon assez considérable le territoire du Québec. Est-ce qu'on a prévu, à ce moment-là, peut-être un mécanisme un peu lourd? Je serais prête là-dessus à vous concéder que, au lieu de siéger en formation de trois personnes, on pourrait siéger en formation de deux. C'est ce que la justice administrative va prévoir, et je suis d'accord avec ça. Sauf que la loi créant le Tribunal a instauré une formation de trois personnes. Et ça, c'est encore en vigueur, ce qui fait qu'il faut continuer à siéger en groupe de trois. On ne peut pas aller en deça. On est obligés de par la loi de siéger à trois. La loi nous oblige également à entendre les parties en auditions publiques. Vous savez que la Commission a, je pense, plus de 70 % de ses dossiers qui sont analysés sur dossier seulement. Nous, nous entendons, nous recevons toutes les parties devant nous et nous les entendons, de façon à consacrer justement un droit d'appel.

M. Brien: Mme Bédard, si j'ai bien compris, tantôt, vous avez parlé de 68 % des décisions de la CPTAQ qui sont confirmées par votre tribunal d'appel.

Mme Bédard (Rita): Oui.

M. Brien: C'est exact?

Mme Bédard (Rita): Oui. Mais ça peut être des autorisations ou des refus qui sont confirmés, oui.

M. Brien: D'accord. Puis, là, justement, la dernière partie de mes questions, à savoir si, en comparaison, vous êtes capable de comparer vos coûts à d'autres tribunaux administratifs.

Mme Bédard (Rita): Le seul organisme auquel je peux peut-être me comparer... Il s'agirait de prendre un organisme de même taille qui a à peu près le même nombre de dossiers. Ça m'est difficile de me comparer, par exemple, avec la Commission des affaires sociales qui a 7 000 à 8 000 dossiers. Le seul autre organisme, c'est le Comité de déontologie, je pense que c'est à peu près équivalent.

M. Brien: Et puis...

Mme Bédard (Rita): Maintenant, comme je vous dis, du fait que les auditions, à l'avenir, se feront par deux personnes – parce que la Loi sur la justice administrative va être en vigueur – au lieu de trois, il y aura là une économie réelle.

M. Brien: O.K. Vous en avez peut-être parlé tantôt un peu, mais comment vous voyez la réforme de tribunaux administratifs chez vous?

(12 h 30)

M. Bédard (Rita): Chez nous, ça va avoir un impact parce que, M. Ouimet le disait tout à l'heure, ça a balisé la juridiction du Tribunal. Ce qu'on prévoit dans les modifications apportées à la loi de protection du territoire, c'est que la Commission va avoir un pouvoir de révision de ces décisions et le Tribunal va pouvoir continuer à siéger, mais ne pourra infirmer que lorsqu'il y a des erreurs de faits ou de droit déterminantes.

Je me dois de corriger, peut-être, une affirmation qu'a faite M. Ouimet tout à l'heure. Il semblait dire que la révision allait lui permettre de corriger beaucoup de dossiers. La révision telle qu'on le prévoit dans le projet de loi est la même que celle qu'il y avait déjà eue, à savoir qu'il faut, pour que la révision soit faisable par la Commission, que soit présenté un fait nouveau qui n'avait pas été porté à sa connaissance, ou qu'il y ait un vice de fond ou de procédure majeur, ou encore qu'une personne n'a pas pu faire valoir ses représentations. C'est donc très limité. Ce qui fait que le droit d'appel est maintenu. Ça va donner un débat différent en ce sens que le Tribunal pourra infirmer une décision lorsqu'il y a des erreurs de faits ou de droit déterminantes. Qu'est-ce qu'une erreur de droit ou de faits déterminante? Certains avocats vont nous le démontrer; d'autres vont travailler à nous démontrer le contraire. Je souhaite que ça ne judiciarise pas les procédures devant le Tribunal.

M. Brien: Merci.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Ça complète vos témoignages et ça complète aussi nos travaux pour cette première séquence de la journée. Nous vous remercions, Mme Bédard, de même que les gens qui vous accompagnaient.

Ceci nous amènera à revenir en commission à 14 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau cette fois et non pas à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. Par conséquent, la commission suspend ses travaux à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 14 h 6)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation reprend ses travaux. Nous entendrons cet après-midi, comme premier groupe, la Régie des assurances agricoles du Québec et son président, M. Roy.

Alors, M. Roy, vous disposeriez d'une quinzaine de minutes – on vous avait dit 20 minutes, mais on essaie de gagner un peu de temps pour être en mesure d'avoir davantage d'échanges en direct avec vous – alors une quinzaine de minutes pour nous faire votre présentation et, ensuite, échanger avec les députés. Alors, la parole est à vous.


Régie des assurances agricoles du Québec (RAAQ)

M. Roy (Luc): Merci, M. le Président. Alors, je vais essayer de gagner quelques minutes en lisant un peu plus rapidement le texte.

À titre de président-directeur général de la Régie des assurances agricoles du Québec, poste que j'occupe depuis maintenant le 13 mai, il me fait plaisir de vous présenter le bilan des travaux de la Régie et de rendre compte de l'administration de l'organisme que je dirige.

Je voudrais, avant de débuter mon exposé, vous présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. À la vice-présidence aux opérations régionales, Mme Hélène Alarie, qui est en fonction à la Régie depuis le 13 janvier; à la vice-présidence aux programmes, M. Yvan Rouleau, qui est en fonction depuis le 6 janvier; et, à ma droite, M. Marc Gagnon, qui est secrétaire de la Régie et responsable des services juridiques. Selon les précisions souhaitées, d'autres personnes pourront se joindre et je vous les présenterai à ce moment-là.

Je vous signale que d'importants changements sont survenus à la direction de la Régie au cours de l'année 1996. Tous les postes de direction et le conseil des régisseurs ont dû être renouvelés compte tenu de l'échéance des mandats et des départs à la retraite. Ces départs ont entraîné une réorganisation de la direction et un nouveau partage des responsabilités. Je dépose, pour votre information, un organigramme à jour de la Régie, accompagné des noms des personnes occupant les postes de direction. Je dépose également pour l'information des membres de la commission la liste des régisseuses et des régisseurs et quelques notes biographiques concernant les membres du conseil d'administration. Je profite de l'occasion pour souligner la présence de deux des membres du conseil, Mme Lise Beauchamp et M. René Turcotte.

Comme administrateur public, l'essentiel de mon action consiste à mettre en oeuvre et à appliquer les dispositions de deux lois que les parlementaires ont adoptées dans le domaine des assurances agricoles, soit la Loi sur l'assurance-récolte et la Loi sur l'assurance-stabilisation des revenus agricoles. Je présenterai donc la situation de la Régie par rapport à chacune de ces lois. Je ferai le point sur les fonds d'assurance et je vous entretiendrai quelques minutes de ma philosophie de gestion.

La mission de la Régie est de contribuer à la pérennité des entreprises agricoles du Québec en leur rendant accessibles des protections d'assurance. Celles-ci les protègent contre les baisses de rendement imputables à de mauvaises conditions agroclimatiques ou encore compensent une réduction de revenus causée par des fluctuations à la baisse de la valeur marchande de leur production. À pareille date l'an passé, la Régie comparaissait devant cette même commission et répondait à des questions portant, notamment, sur la tarification, le solde des fonds d'assurance, les méthodes culturales, etc. Les points soulevés ont conduit à des interrogations diverses. Conséquemment, la direction a mis en oeuvre un plan d'action portant sur toutes les questions soulevées par les membres de la commission et le Vérificateur général. Elle a développé des moyens d'action visant à régulariser la situation partout où cela était nécessaire ou à questionner ses méthodes. Je me suis assuré, dès mon entrée en fonction, de leur suivi.

Maintenant, l'assurance-récolte. En 1996, les ministres de l'Agriculture des différentes provinces canadiennes et du gouvernement fédéral ont conclu, après quelques années de consultation et de discussion, que les programmes d'assurance agricole, tels que nous les connaissons depuis leur mise en place, seraient, pour l'essentiel, maintenus. Les ministres ont également convenu que les provinces conservaient la responsabilité de proposer à leur clientèle des programmes mieux adaptés.

(14 h 10)

C'est dans ce contexte, et en tenant compte de vos commentaires et de ceux du Vérificateur général, que nous avons amorcé la réforme de nos règlements en assurance-récolte. Nous avons modifié de façon très substantielle le cadre de référence réglementaire.

Les 16 règlements qui régissaient les programmes d'assurance-récolte ont été refondus. Il n'y a plus maintenant que deux règlements qui régissent l'ensemble des programmes d'assurance-récolte, soit le système individuel et le système collectif. Ces deux règlements offrent les mêmes protections que celles offertes par les 16 règlements antérieurs. Il s'agit là d'une réforme importante qui donne suite aux préoccupations gouvernementales visant à alléger le contenu réglementaire tout en facilitant la compréhension de la clientèle. Les deux règlements ont fait l'objet d'une consultation des clientèles concernées.

Cette refonte réglementaire s'est effectuée en prenant en compte les commentaires adressés par le Vérificateur général, notamment ceux sur la validité des données servant à l'indemnisation en assurance-récolte. En effet, dès juin 1996, j'ai constitué une équipe de recherche et de développement, sous la direction de M. Jean-Marc Lafrance, chargée spécifiquement de revoir les programmes d'assurance.

Le premier projet qui a été mené à terme avec diligence est d'autant plus important qu'il rejoint le plus grand nombre de nos assurés, soit près de 7 000. Il s'agit de la protection foin renouvelé, qui est offerte aux productrices et producteurs en 1997. Nous sommes présentement dans la période d'adhésion. Cette protection d'assurance vise à couvrir les besoins alimentaires des troupeaux, essentiellement des productions laitières et de bovins de boucherie.

Pour l'information des membres de la commission, je dépose copie d'un encart publicitaire sur la protection foin renouvelé, publié le 6 février dernier dans La Terre de chez nous .

L'entrée en vigueur dès 1997 de la protection foin renouvelé va nous permettre, tout en bonifiant largement le programme, d'augmenter de façon significative les contrôles quant au cheptel et à la production grâce, entre autres, au suivi qui sera effectué auprès d'environ 3 500 fermes partenaires réparties sur l'ensemble du territoire québécois. On y réalisera le plan de ferme ainsi que le prélèvement de fourrage pour fins d'analyse de qualité.

Une des particularités du nouveau programme est qu'il offre un éventail de protection à partir duquel chaque assuré choisit les éléments dont il a besoin pour ainsi composer sa propre police d'assurance, faite, pour ainsi dire, sur mesure pour lui-même. Chaque assuré peut donc adapter sa protection en fonction de la situation de son entreprise. La protection comporte 24 combinaisons d'options possibles regroupées au sein de quatre grands blocs.

Quant à la révision des autres programmes actuellement en cours, nous avons privilégié les productions dont les fonds d'assurance comportent des déficits importants, soit les pommes et les pommes de terre. S'ajouteront les cultures maraîchères et fruitières, et ainsi de suite, sur une période de trois ans, pour en arriver à la révision complète de tous nos programmes.

En outre, afin de donner suite aux commentaires plus spécifiques du rapport du Vérificateur général, la Régie a réévalué la validité de certaines de ses données en analysant l'effet de compaction des grains dans les silos et en mettant en place un programme de validation statistique des données d'échantillonnage. Nous nous sommes également intéressés à la question des attributions pour mauvaise gestion en définissant un cadre d'application des normes culturales.

Finalement, en matière de valeur de récupération, nous suivons de près l'évolution des pratiques commerciales, étant entendu que, jusqu'ici, certains marchés sont pratiquement inexistants pour des produits de récupération, par exemple, les petites pommes de terre.

Pour compléter sur l'assurance-récolte, je dépose un document dans lequel on retrouve la liste des programmes d'assurance collectifs et individuels. Vous y trouverez, par programme, le nombre d'assurés, la valeur des biens assurés, ainsi que les indemnités versées pour l'année-récolte la plus récente. Les données sont également ventilées par région.

Quant aux prix unitaires, il constitue un paramètre important de la protection d'assurance. Leur correction peut être effectuée soit par la révision des coûts de production, soit par une mise à jour en fonction des prix du marché. Conformément à l'article 27 de la Loi sur l'assurance-récolte et à l'Entente Canada-Québec sur l'assurance-récolte, la révision des prix unitaires est effectuée à l'intérieur d'un cycle de trois ans, soit un tiers à chaque année.

L'assurance-stabilisation. Examinons maintenant notre bilan en matière d'assurance-stabilisation. On y retrouve neuf régimes d'assurance couvrant 14 productions différentes. Les valeurs assurées sont très élevées et les compensations versées également. Je dépose un document dans lequel on retrouve la liste des régimes d'assurance-stabilisation. Vous y trouverez, par régime, le nombre d'assurés, la valeur des biens, ainsi que les indemnités versées pour l'année-régime la plus récente. Les données sont également ventilées par région.

En 1996, nous avons mis en chantier, pour l'assurance-stabilisation, un projet de refonte réglementaire du même ordre que celui de l'assurance-récolte. Les modifications à venir auront pour effet d'agréger en un seul régime l'ensemble des conditions d'admissibilité et de participation. Par ailleurs, chaque type de production conservera le modèle de coûts de production qui lui est propre.

En matière d'assurance-stabilisation, la principale recommandation du Vérificateur général portait sur la responsabilité et la mise à jour des coûts de production. L'objectif étant que la fréquence de révision des coûts soit telle qu'on obtienne l'assurance que les gains de productivité réalisés au fil des ans soient intégrés aux modèles de façon à éviter de surpayer les productrices et producteurs assurés.

Par rapport à cette recommandation, il a déjà été porté à l'attention de la commission, tant par la Régie que par le ministère, que cette responsabilité d'établir et de maintenir à jour les coûts de production incombe au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. La Régie, pour sa part, apporte au ministère son expertise et ses données.

Pour faciliter les échanges et assurer une meilleure cohésion, le ministère a mis en place un groupe de travail conjoint avec la Régie. Ce groupe de travail a produit des recommandations et des mises à jour des coûts de production de quelques productions. La révision des coûts de production veaux d'embouche et bouvillons et bovins d'abattage sera effectuée au cours des prochains mois. Quant aux coûts de production des porcelets et des porcs à l'engraissement, ils ont été réalisés au début de 1996.

Une seconde recommandation d'importance du Vérificateur général portait sur la validité des unités assurables et concernait en propre la Régie des assurance. Des résultats importants sont dès maintenant observés dans ce domaine, notamment par le recours à des technologies de pointe qui vont nous permettre d'avoir un meilleur contrôle sur la quantification des unités assurables.

Pour les productions animales, la technologie utilisée est celle de l'identification permanente des animaux. La Régie a utilisé cette méthode dans le régime veaux de lait dès l'année 1996, l'a étendue au régime bouvillons pour 1997 et nous planifions son introduction, en 1998, dans le régime veaux d'embouche.

Pour la production végétale, le mesurage assisté par ordinateur est intégré graduellement aux opérations régulières de la Régie depuis 1994. Nous sommes les leaders, au Québec, dans ce domaine. L'avantage de cette technologie est qu'elle nous permet d'être en meilleur contrôle des superficies assurées. Le recours aux photographies aériennes pour effectuer le mesurage géoréférencé des superficies assurées pour les régimes céréales, maïs-grains et soya et pommes de terre va bon train. Il va de soi que nous appliquerons cette technologie aux 3 500 fermes partenaires pour le programme foin en assurance-récolte. On évalue actuellement à 50 % le travail réalisé, et nous prévoyons le terminer pour 1999.

Par ailleurs, simultanément à l'utilisation de ces deux technologies, nous avons structuré davantage les mesures de contrôle et de validation des données obtenues par déclaration des assurés. Les contrôles sont notamment exercés auprès des clientes et clients qui s'assurent pour la première fois, auprès de tous ceux et celles dont la déclaration introduit un écart important par rapport aux superficies assurées antérieurement et auprès des assurés dits à risque.

Finalement, afin de nous assister dans nos mesures de contrôle, je porte à votre attention le fait que les régimes d'assurance-stabilisation ont fait l'objet de modifications importantes au chapitre des sanctions pour déclaration inexacte. En effet, dans le cas d'écart entre la déclaration et la réalité observée, le producteur est désormais cotisé à partir des unités inscrites à sa déclaration et compensé uniquement sur les unités réellement produites.

(14 h 20)

De plus, votre commission nous recommandait, dans son rapport de juin 1996, de calculer les primes d'assurance de façon telle que, sur une période de cinq ans, tous les régimes d'assurance agricole puissent atteindre l'équilibre budgétaire. Nous sommes parfaitement à l'aise avec une telle recommandation, d'autant plus qu'elle se situe en continuité avec la méthodologie de tarification introduite pour l'année d'assurance 1995-1996 qui prévoit que tout déficit actuariel doit être amorti sur une période de cinq ans.

J'accorde, pour ma part, la plus grande importance au redressement des fonds d'assurance. Je vous informe que j'ai bien reçu le message que vous nous avez envoyé en 1996. Soyez assurés que nous allons continuer d'appliquer rigoureusement la méthodologie de tarification en vigueur. L'application de cette méthodologie, conjuguée à la révision des modèles de coûts de production et à la conjoncture actuellement favorable des prix du marché, nous permet de constater des résultats intéressants.

Ce qui caractérise, en effet, l'année 1996 en assurance-stabilisation, c'est le niveau favorable des prix et leur fermeté, bien que cela ne se reflétera dans les états financiers de la Régie avant plusieurs mois – j'en expliquerai les raisons un peu plus loin. L'année 1996 marque un important redressement du fonds général d'assurance.

À pareille date l'an passé, sur la base des états financiers du 31 mars 1995, on parlait d'un déficit d'environ 300 000 000 $. Les états financiers, au 31 mars 1996, font état d'un déficit de 230 000 000 $. Sur cette même base, les états financiers à venir au 31 mars 1997 feront état d'un déficit d'environ 190 000 000 $.

Bien que ces chiffres soient tout à fait conformes, ils nous présentent un état de situation décalé dans le temps de 12 à 20 mois. La raison de cette distorsion provient des choix des dates des années-régime qui ne correspondent pas aux dates de l'année financière. Je dépose un document illustrant cette situation que je pourrai, tout à l'heure, commenter.

Ainsi donc, tenant compte de l'échéance des années-régime survenant à des périodes différentes dans l'année, des règles prévalant dans la production des états financiers et leur disponibilité pour l'information des parlementaires, le déphasage atteint même 20 mois. La situation réelle du fonds général d'assurance au 31 décembre 1996 apparaîtra aux états financiers du 31 mars 1998. Il ne sera disponible qu'en mi-année 1998.

En me référant à un autre indicateur tout à fait fiable et vérifiable, qui donne le portrait en temps réel, soit le mouvement de trésorerie, au 31 décembre 1996, le fonds général d'assurance en assurance-stabilisation et en assurance-récolte, mais surtout en stabilisation, est maintenant en situation de surplus. Je dépose un autre document illustrant le constat. Ainsi, pour la première fois depuis les 10 dernières années, le fonds est devenu positif.

Pour remédier à cette distorsion, j'ai demandé aux services comptables de la Régie de préparer une proposition de présentation de notre situation financière en temps réel. Cette proposition sera soumise au conseil d'administration au cours des prochains mois et respectera toutes les règles de l'art en la matière. Nous comptons, M. le Président, faire appel à l'expertise du Vérificateur général pour nous assister dans l'orientation de nos travaux et pour la validation de ceux-ci.

Puisqu'il s'agit de ma première présence parmi vous, je voudrais vous dire un mot sur ma philosophie de gestion et sur les questions qui me préoccupent le plus.

D'abord, en ce qui concerne la révision de nos programmes d'assurance, ils doivent être conçus de façon à atteindre les objectifs visés par l'État, à savoir supporter des productrices et des producteurs agricoles dans leurs activités économiques. Nos programmes doivent être mieux adaptés à la réalité de chaque entreprise et faire preuve de flexibilité dans l'offre de service.

Le secteur agricole est un secteur complexe. Les productions ont beaucoup évolué, les entreprises aussi. L'activité agricole se pratique sur un grand territoire. Les programmes d'assurance ne peuvent donc, comme on l'a fait par le passé, constituer une proposition unique. Il faut donc, comme je l'ai indiqué, qu'il soit flexible, multiple et laisser à chacun et chacune des productrices et producteurs agricoles le choix de composer la protection dont il a besoin, en tenant compte des particularités qui lui sont propres.

Ma seconde préoccupation est la rigueur de l'administration. La Régie est une institution publique. Il paraît un peu curieux, surtout ici à l'Assemblée nationale, de rappeler cette caractéristique, mais cela n'est pas superflu. Je le rappelle à chaque occasion. La Régie est une institution publique qui doit être gérée selon les règles prévalant dans le secteur public. Son action s'inscrit à l'intérieur de l'économie générale de l'ensemble des lois, règlements et procédures régissant l'administration publique. C'est une réalité dont tous les intervenants du secteur doivent prendre acte.

Le cadre de référence de la relation entre l'assuré et la Régie est le contrat. L'objectif n'est pas de donner plus ou moins à notre assuré, mais de lui garantir un traitement respectant les termes du contrat intervenu entre la Régie.

Quant aux valeurs de gestion auxquelles j'adhère, il me semble que dans toute organisation deux éléments constituent l'essentiel de sa richesse, soit ses clients et son personnel. Ensuite, je pense que la meilleure façon d'évaluer la performance d'une organisation, c'est à partir des résultats. C'est toujours sur la base et sur la foi des résultats attendus et obtenus que j'exerce mon jugement.

La Régie des assurances agricoles du Québec est une institution relativement jeune. Le moral des troupes, si on me passe l'expression, est, je dirais, très bon. Les employés de la Régie sont dynamiques, ils sont engagés et ils font leur travail avec dévouement. Nous sommes tous des employés de l'État et je peux vous dire que nous sommes fiers de l'être. Je pense qu'il n'est pas inutile de le rappeler par les temps qui courent.

Enfin, M. le Président, je vais sauter une couple de pages, parce que je pense que le temps passe un peu rapidement.

Un dernier mot, dernier commentaire sur un des éléments dont traitait la commission et le Vérificateur général, l'an passé: les unités assurées par rapport à l'autorisation qu'on les producteurs de produire un certain nombre d'unités.

Alors, il ne fait pas de doute pour moi que, lorsque la Régie assure et indemnise un assuré sur la base des unités assurées, elle devrait s'en tenir à indemniser que des unités que les exploitants agricoles ont droit de produire en vertu de l'économie générale de nos lois. Le problème est de savoir qui a le droit de produire quoi. Pour ce qui est du qui, cela nous est bien connu, mais le quoi, c'est plus difficile. Je peux vous assurer que la Régie respecte et respectera les décisions rendues par les autres organismes gouvernementaux en autant qu'ils puissent nous informer et nous transmettre des décisions reposant sur des bases juridiques solides.

La Régie, au nom des principes de la cohérence de l'action gouvernementale, appliquera sa décision. Dans un dossier de ce genre, nous sommes en situation de support. C'est pourquoi déjà, depuis plusieurs mois, nous participons à des échanges avec le ministère de l'Environnement et de la Faune pour obtenir, dans la production de porcs en engraissement entre autres, les informations relatives au volume de production autorisé.

La Régie a participé au Sommet sur l'industrie porcine, nous savons qu'un inventaire rigoureux des établissements de production d'élevage de porcs est présentement en cours. La Régie collabore pleinement à la réalisation de cet inventaire, en rendant disponible, dans le respect de la loi sur l'accès à l'information, les données dont elle dispose et apporte ainsi son expertise. Il en est de même dans les autres productions, de même que dans les dossiers d'orientation de production agricole du Québec. Je pense ici à tous les domaines de l'agroenvironnement, de l'agriculture durable, de l'aide financière, de la viabilité et de la durabilité des entreprises, des pratiques agricoles, etc. La Régie, dans ces dossiers, est en situation de support. Et je peux rassurer la commission que notre contribution active est assurée aux organismes en situation d'initiative.

En résumé, nous avons pris acte des recommandations du Vérificateur général et de cette commission. Ils ont influencé nos décisions et nos actions au cours de la dernière année. Nous espérons que l'exercice d'aujourd'hui vous permettra d'apprécier les progrès réalisés, que nous entendons bien poursuivre dans les mois à venir. Vos commentaires nous serons utiles pour mieux positionner la Régie dans sa tâche de bien servir la clientèle. Je vous remercie, mesdames et messieurs, de votre attention.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie, M. Roy. Ceci nous amènera à des échanges avec les membres de la commission.

Je vais peut-être juste me faire confirmer une précision que vous auriez donnée, là, concernant le solde déficitaire prévisible au 31 mars 1997 du fonds d'assurance-stabilisation, on parle bien de 190 000 000 $?

(14 h 30)

M. Roy (Luc): Oui. Les prévisions du fonds au 31 mars 1997, oui, sont que le déficit sera de l'ordre d'environ 190 000 000 $.

Le Président (M. Vallières): Donc, on passe de 230 000 000 $, un peu au-dessus du 230 000 000 $, à 190 000 000 $.

M. Roy (Luc): C'est exact.

Le Président (M. Vallières): Et c'est une série de facteurs qui sont à la base de cette réduction, j'imagine, non pas un seul?

M. Roy (Luc): Oui. L'année 1996, comme je l'ai indiqué, est une année fort intéressante pour nous autres. Les prix sont faits et sont à un niveau supérieur aux prix couverts par l'assurance-stabilisation. Pour une des premières années, je pense, dans à peu près... en tout cas dans la plupart des grandes productions, porcs, porcelets et céréales, la Régie ne verse pas d'indemnité cette année. Ce qui fait qu'on a des entrées d'argent, mais on n'a pas de sortie.

On a à verser des indemnités importantes dans la production du boeuf, mais l'un et l'autre font que le fonds d'assurance s'améliore.

Le Président (M. Vallières): Bien. Des demandes d'interventions? Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Oui. Merci, M. le Président. Ma première question, c'est peut-être, vous l'avez abordée dans votre présentation, M. Roy, la comparaison des années d'assurance, là. Il semblerait que ça cause problème, mais vous n'avez pas expliqué votre tableau.

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Est-ce que vous pourriez le faire? Peut-être que ça pourrait nous amener à...

M. Roy (Luc): Je vais y revenir.

Mme Dionne: Oui.

M. Roy (Luc): On va prendre le tableau. J'ai voulu illustrer par ce tableau-là la différence qu'il y avait entre l'année financière. Alors, si vous prenez le premier trait en haut, vous avez l'année financière 1995-1996, qui se termine le 31 mars. Alors, quelles sont les données que l'on retrouve dans le rapport financier au 31 mars 1996? Alors, on retrouve les données de l'assurance-récolte pour l'ensemble de l'année, du 1er avril au 31 mars 1996. Là, ça va bien. Mais quand on entre dans les régimes d'assurance-stabilisation, dans le veau d'embouche, bouvillon et bovin, veau lourd et agneau, l'année d'assurance va du 1er janvier au 31 décembre. Donc, par rapport à l'année financière, vous avez un écart de trois mois.

Mme Dionne: Alors, il vous manque de l'information sur trois mois ou vous en avez trop de trois mois, là.

M. Roy (Luc): Voilà. Si vous continuez, là où c'est plus...

Mme Dionne: Problématique.

M. Roy (Luc): ... inquiétant et plus déphasant, puis que ça donne un portrait qui est décalé, notamment dans le porc à l'engraissement et porcelet, alors, c'est au 30 juin; presque un an. Alors, vous avez chacune des productions: pommes de terre, juillet; juillet; mois d'août; septembre; 14 août. De sorte que quand on regarde les résultats de l'année financière au 31 mars d'une année, on est décalé d'à peu près 20 mois. Donc, quand je vous parle aujourd'hui puis que je vous cite les chiffres du rapport financier du 31 mars, puis que je parle de la production du porc, par exemple, je vous parle de la situation qui a été vécue entre juillet 1994 et juin 1995. Alors, on commence à avoir un écart. On n'est plus en temps réel du tout.

Mme Dionne: O.K.

M. Roy (Luc): Alors, si je veux vous parler aujourd'hui en temps réel, alors je prends un autre indicateur que celui des états financiers, puis je vais voir les mouvements de trésorerie, comment ça se passe au jour le jour dans la trésorerie, bien, j'ai une situation qui est tout à fait différente. Alors, au lieu de vous parler d'un déficit anticipé de 190 000 000 $ au 31 mars, je peux vous dire qu'au 31 décembre 1996 nos fonds d'assurance, ils sont positifs. Ils ne sont pas en déficit de 190 000 000 $; ils sont positifs de 88 000 000 $. Tout ça, ça s'explique par ce déphasage ou le décalage des années-régime versus l'année financière, de sorte qu'on n'a pas un portrait réel. Alors, j'ai...

Le Président (M. Vallières): Excusez-moi, juste avant qu'on continue, j'avais une remarque du député de Rousseau qui m'indiquait que ce serait intéressant d'avoir le texte de ce que vous nous avez présenté tantôt. Le secrétariat pourrait le reproduire et le distribuer aux membres de la commission, avec votre permission.

M. Roy (Luc): Le texte de mon exposé?

Le Président (M. Vallières): Oui, tantôt, c'est ça.

M. Roy (Luc): Oui. Alors, on va vous remettre ça.

Le Président (M. Vallières): D'accord, merci. Vous pouvez continuer.

Mme Dionne: Oui, merci, M. le Président. Dans le même ordre d'idées, est-ce que vous avez l'intention de revoir ça? Et quels sont les impacts? Parce qu'il y a les producteurs, là, qui doivent... j'imagine que ça peut changer des choses au niveau de leur cotisation, tout ça, là. Comment vous avez l'intention de changer ça pour avoir des données égales, si on veut, à la fin de l'année financière?

M. Roy (Luc): Je ne peux pas vous dire techniquement comment on va procéder parce qu'on commence à aborder la question. Quand on commence à jouer dans les chiffres, les états financiers, il faut être très prudents, pour bien respecter les règles de l'art. Alors, on commence notre travail là-dessus. Je ne peux pas vous donner d'indication, mais notre objectif, c'est de pouvoir, d'ici les prochains mois, présenter des états financiers qui sont en temps réel et qui donnent une image de la situation au moment où on se parle. Il ne semble pas que techniquement on ait des problèmes, des embûches majeures là-dedans. On me dit que c'est faisable. Et ça va être fait, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, on va demander au Vérificateur général de nous assister là-dedans, parce qu'on va jouer beaucoup dans les chiffres, et de nous valider là-dedans. Je pense qu'on peut compter sur votre collaboration, M. Breton?

Mme Dionne: Dans le même ordre d'idées, M. le Président, on sait qu'au niveau des assurances on se prépare à 1999. Et ça amène un tas de nouvelles études tant par le ministère que par la Régie. Est-ce que, justement, le fait de tout mettre ça à jour, ça va vous permettre d'avoir un tableau beaucoup plus global des assurances au Québec? Parce qu'on parle d'y aller par revenu global d'entreprise plutôt que par secteur. Alors, là-dessus, où vous en êtes rendus?

M. Roy (Luc): Alors, ça va exactement dans le sens de ce que vous venez de nous dire. On porte une grande attention à l'état de nos fonds d'assurance. Parce que, bien sûr, si on arrive à un nouveau système qui s'applique en 1999, bien, il faudrait... Si on se retrouve avec un déficit de 200 000 000 $ ou 300 000 000 $, quand on va arriver pour établir un nouveau régime, on va avoir des problèmes en quelque part, tout le monde. Alors, on essaie de prévoir, d'anticiper cette réalité-là et de voir à prendre des mesures maintenant pour corriger toutes les situations que l'on peut corriger, pour que, quand on va arriver en 1999, on soit dans une situation où on ne sera pas tout le monde coincé avec des déficits importants qu'on va avoir de la difficulté à résorber. Effectivement, on planifie notre travail dans ce sens-là.

Mme Dionne: Quel est votre travail spécifique au niveau de 1999? Parce qu'on est déjà en 1997, ce n'est pas loin. Alors, le gouvernement devra annoncer ses couleurs, effectivement, avant 1999 pour son application. Quel est votre travail et où vous en êtes rendus là-dessus?

M. Roy (Luc): Ce dossier-là sur la sécurité du revenu ou le nouveau concept qui a été invoqué de revenu global, c'est un dossier qui est à l'initiative du ministère de l'Agriculture; c'est principalement le ministère qui pilote tous ces dossiers. Le ministre a annoncé la mise en place d'un comité de travail et...

Mme Dionne: Vous êtes là-dessus?

M. Roy (Luc): Pardon?

Mme Dionne: Vous êtes là-dessus, à la Régie?

M. Roy (Luc): C'est M. Rouleau qui représente la Régie sur ce dossier-là. M. Rouleau est assisté dans son travail par M. Lafrance et un économiste qui travaille chez nous. Alors, on contribue aux travaux, on fournit toutes les données dont on dispose et on fait des analyses. Enfin, on participe très activement à ce dossier, bien qu'il soit sous la responsabilité du ministère.

Mme Dionne: Ça va pour moi.

M. Roy (Luc): Est-ce que je pourrais ajouter, madame, juste un mot? À votre première question, on vous a également distribué un histogramme qui montre l'évolution du fonds de trésorerie pour chacune des années. Alors, c'est important et intéressant de voir que c'est la première fois depuis huit ans que le fonds de trésorerie est maintenant positif. Vous avez les chiffres, à la fin, dans le tableau.

Le Président (M. Vallières): Pour l'ensemble des régimes, M. Roy, pour l'ensemble des régimes.

M. Roy (Luc): Pour l'ensemble des régimes. Alors, quand on regarde le fonds de trésorerie, au 31 décembre 1996, il est positif de 82 000 000 $. Alors, il se compose d'un surplus de 43 000 000 $ en assurance-récolte et à peu près 40 000 000 $ en assurance-stabilisation.

Mme Dionne: Et quels sont les secteurs dans lesquels on est vraiment... Pour que vous soyez rendus au 31 décembre, ça veut dire qu'il y a le maïs, entre autres. Quels sont les gros facteurs qui ont contribué?

M. Roy (Luc): Je vais vous donner les chiffres dans un instant. Je sais de mémoire qu'il y a le maïs ou les céréales, avec 60 000 000 $ et quelques. Dans toutes les productions bovines, ça ne va pas très bien d'abord. Veau, bouvillon, veau de grain, veau de lait, porcelet et porc, vous connaissez la situation, ça se replace pas mal bien. Alors, maïs-grain, on devrait être en surplus d'environ 60 000 000 $; le blé et l'orge...

(Consultation)

M. Roy (Luc): Alors, le maïs-grain, pour l'année-récolte 1997-1998, on devrait être en surplus de 65 000 000 $, en chiffre rond. C'est le plus important, évidemment. Le porcelet, si les prévisions se maintiennent, je pourrais dire si la tendance se maintient jusqu'au mois de juin, à la fin de juin, on devrait être en surplus de 15 000 000 $.

Mme Dionne: Ah oui!

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Ça va faire plaisir à notre ami...

M. Roy (Luc): Évidemment, on est sur des prévisions de prix de marché, puis la marge entre l'écart actuel du prix du marché et le prix stabilisé n'est pas très grande. Alors, ça varie. Puis des fois on fraude. Mais on pense que ça va se maintenir.

Mme Dionne: Est-ce que ça veut dire également, si je comprends bien, au niveau du fonds, c'est qu'il était en déficit, on a rattrapé, on a payé le déficit passé et on est rendus dans un surplus?

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: On a tout fait ça?

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Donc, en agriculture, ça va quand même pas si mal.

M. Roy (Luc): Excusez-moi, madame, j'étais...

Mme Dionne: Donc, ça va bien en agriculture, de façon générale.

M. Roy (Luc): Actuellement, l'année 1996, pour la partie qui me concerne, les prix dans les productions qui sont stabilisés, ça a été pour nous une bonne année. C'est pour ça que j'ai déposé le mouvement de trésorerie pour l'indiquer, parce que, là, on est en temps réel, on voit les vraies affaires, au vrai moment. Puis on a de très bonnes nouvelles, c'est que nos fonds d'assurance sont maintenant en surplus.

Mme Dionne: D'accord, merci. Ça va, M. le Président, pour le moment.

Le Président (M. Vallières): C'est bien, M. Roy. Alors, je demande l'intervention du député de Rousseau, suivi du député de Beauharnois-Huntingdon.

(14 h 40)

M. Brien: Merci, M. le Président. M. Roy, moi, je viens de la région de Lanaudière et, si je me rappelle bien, en juillet 1995, on a eu une grêle importante; il y a environ un an et demi. Et, vous savez, il y a beaucoup de producteurs qui n'étaient pas assurés, de producteurs maraîchers. Je m'expliquais mal un petit peu comment il se faisait qu'autant de producteurs n'étaient pas assurés contre la grêle. Apparemment, vous avez une assurance qui couvre ce type d'avarie qui est toujours relié, vous savez, aux températures très chaudes. Est-ce que c'est parce que les... Souvent, on se fait dire par les producteurs: Bien, ça n'en vaut pas la peine. La prime est tellement élevée par rapport à ce qu'ils peuvent retirer lorsqu'il y a une grêle que les gens ne s'assurent pas. C'est bien sûr que le matin... Puis, moi, j'ai vu des champs ravagés. On parle des oignons, par exemple, ou tout ce qui était feuillu, les dommages sont majeurs. Même les navets, il y en avait qui étaient attaqués. Sauf que les gens me disaient: Le produit ne correspond pas à ce dont on a besoin. Êtes-vous capable d'élaborer un petit peu là-dessus, s'il vous plaît?

M. Roy (Luc): Oui, certainement, ça me fait plaisir. Je l'ai indiqué un peu tout à l'heure dans mon exposé. C'est un fait qu'on entend dire ça; des producteurs nous l'ont dit. Je pense que, dans cette situation-là, on retrouve trois éléments. D'abord, je pense que c'est vrai, il faut le reconnaître, les programmes d'assurance que nous avons, qui ont été conçus il y a déjà un certain nombre d'années, ils n'ont pas été suffisamment réajustés ou adaptés aux réalités; ils n'ont pas suffisamment évolué. Nos programmes sont restés dans une situation trop statique, à mon avis. Les producteurs nous font souvent le reproche ou le commentaire que les programmes ne répondent pas à leurs besoins. Et c'est un constat que l'on accepte. On a entrepris, comme je l'ai indiqué, une révision de nos programmes. Le premier programme qu'on a révisé cette année, c'est celui du foin, qu'on appelle foin amélioré, on vous a distribué un encart. Dans les années précédentes, on avait, dans le foin, une protection d'assurance, quelle que soit la région, quelle que soit l'entreprise, le producteur qui voulait s'assurer prenait l'assurance ou ne la prenait pas. Il n'avait pas d'autres choix. Or, cette année, dans cette production-là, on offre un programme avec beaucoup plus de flexibilité, 24 combinaisons possibles de programmes. C'est une protection pratiquement sur mesure.

Ce qu'on veut faire dans les autres productions, c'est la même chose, notamment dans les cultures maraîchères. On a un travail d'analyse qui est fait, on a ramassé presque toutes nos données. On a fait, l'an passé, des groupes témoins auprès des producteurs de culture maraîchère dans les régions de la rive sud et de la rive nord du fleuve. On a les résultats de ça; on a un premier rapport qui nous est déposé. Notre objectif, c'est de proposer aux producteurs dans les cultures maraîchères quelque chose qui pourrait – espérons-le, nos travaux ne sont pas terminés – ressembler un peu à la protection du foin, c'est-à-dire qu'il y aurait des programmes multiples qui seraient mieux adaptés aux réalités des entreprises et aux besoins de chacune des entreprises. Alors, ça, c'est le premier volet. Nous sommes à travailler là-dessus.

Le deuxième, bon, il y a un commentaire sur la prime. Alors, c'est possible que, oui, dans certaines circonstances, les producteurs disent que c'est trop cher. Il y a une question d'évaluation personnelle. Enfin, il y a toujours des producteurs qui préfèrent prendre leurs propres risques aussi. Il y en a qui préfèrent...

M. Brien: Qui se disent, si je comprends bien: S'il n'y a pas de grêle pendant 10 ans, j'y regagne.

M. Roy (Luc): Je suis gagnant. Malheureusement...

M. Brien: Sauf que le matin où il y a de la grêle, ils viennent me voir.

M. Roy (Luc): Il y a quelque chose qui est passé dans la mentalité puis dans les coutumes par rapport aux assurances agricoles que, moi, je déplore beaucoup. Beaucoup de producteurs considèrent l'assurance quasiment comme un rendement. Exactement comme vous venez de le dire. Ils calculent leurs risques en disant: La prime, sur 10 ans, me coûte tant, je n'ai pas eu de grêle, donc je suis gagnant de tant. Alors que le raisonnement... Les assurances, ce n'est pas un placement, ce sont des assurances: tu t'assures contre un risque. C'est bien sûr que si tu faisais le même raisonnement avec ton assurance-incendie sur ta maison ou ta grange, tu pourrais avoir le même résultat, parce que, des fois, tu paies pendant 25, 40, 50 ans puis tu ne passes jamais au feu. Donc, c'est une dépense inutile. Malheureusement, il y a trop de ce point de vue là qui est un peu répandu.

M. Brien: Est-ce qu'il y a eu une bonne consultation – parce qu'ils doivent être regroupés en association – avec les producteurs maraîchers du Québec? Je veux dire, vous travaillez conjointement avec eux pour voir leurs besoins?

M. Roy (Luc): Oui, on les a rencontrés régulièrement.

M. Brien: Vous savez, M. Roy, puis j'insiste, moi, je n'aimerais pas me faire dire à nouveau que l'assurance-récolte en cas de grêle n'est pas adéquate. Si, dans deux ans, il y a une grêle majeure dans une région du Québec, moi, je veux m'assurer, aujourd'hui, puis je profite de l'opportunité pour vous demander qu'il y ait... Vous me dites que ça va être semblable à la protection accordée pour le foin. J'ose espérer que ça va être très concret et que ça va répondre vraiment aux besoins du producteur maraîcher du Québec.

M. Roy (Luc): C'est notre objectif. Je peux vous dire que c'est dans cet objectif-là qu'on travaille. Et nos travaux, on les fait en très étroite consultation avec les représentants des associations. La Fédération des cultures commerciales, par exemple, les gens de l'Union des producteurs agricoles, tant sur le plan régional qu'au niveau de la confédération de l'UPA. On est en étroite collaboration avec eux, on les rencontre régulièrement.

M. Brien: Vous me dites que, cette année, c'était le foin. On parle de quand, à peu près, pour une protection grêle plus efficace?

M. Roy (Luc): Nous avons actuellement un programme qui couvre la grêle de façon spécifique. Il faudrait que je vérifie des chiffres pour savoir quel est le pourcentage des producteurs qui sont assurés.

(Consultation)

M. Roy (Luc): Au niveau de la grêle, il y a à peu près 60 % des producteurs, qu'on me dit, qui sont couverts par le programme grêle. C'est l'élément qui est le plus couvert, la grêle, dans les cultures maraîchères.

Dans nos priorités de travail, on a fait le foin. Cette année, on a priorisé deux productions qui sont dans de gros déficits en assurance-récolte: les pommes, dans les pommiers, puis les pommes de terre; et l'autre production qui suit, c'est les cultures maraîchères. Maintenant, c'est ces trois dossiers qui s'en vont de front, en même temps. Alors, nous sommes actuellement à travailler dans le dossier des cultures maraîchères.

M. Brien: M. Roy – puis je termine là-dessus – êtes-vous capable de me préciser, de me dire: Bon, bien, écoutez – je ne sais pas, moi – à l'été 1999, oui, notre programme d'assurance-récolte en ce qui a trait aux dommages causés par la grêle va être adapté aux productions maraîchères?

M. Roy (Luc): Alors, la proposition devrait être prête, on me dit, pour le printemps 1998.

M. Brien: O.K.

M. Roy (Luc): Donc, on a l'été. Le temps de faire compléter les travaux, les consultations, processus réglementaires, l'adoption, publication des décrets, et tout ça, ça devrait être en vigueur pour la saison de protection 1998.

Quand je disais, tout à l'heure – je reviens un peu là-dessus – que ça peut être semblable à la protection foin, ce que je veux dire, ce qui m'apparaît fondamental là-dedans, c'est la flexibilité du programme. Les programmes doivent permettre de la flexibilité pour s'adapter le plus près possible de la réalité de chacune des exploitations. Des exploitations, ce sont les propriétaires des fermes qui sont responsables de la gestion de leur entreprise. Moi, je pense que l'État peut leur offrir des services, certainement, l'État a choisi de le faire, mais l'État ne doit pas se substituer à leur décision.

Dans le foin, avant, il n'y avait qu'un programme: ils prenaient celui-là ou ils ne prenaient rien. Maintenant, là, ce qu'ils ont, ils choisissent eux-mêmes leur protection. C'est cette règle-là que je veux appliquer dans toutes les productions, notamment dans les cultures maraîchères. C'est ce principe-là que je veux respecter: avoir des programmes qui soient flexibles, adaptés. Le producteur ou la productrice choisira elle-même le type de protection qu'elle veut assumer. S'il y en a qui pense que la grêle, c'est pour eux un grand risque, bien, ils choisiront la grêle, puis ils choisiront le niveau de protection pour la grêle. S'ils veulent avoir un niveau de protection élevé, ce sera eux qui feront leur propre choix. Ce sont ces principes-là que je veux respecter.

(14 h 50)

M. Brien: C'est intéressant. Il me vient à l'idée, aussi, de vous poser cette question: Tout ce qui est acériculture, production de sirop d'érable – vous savez, on a eu des verglas importants – ça, ce n'est couvert, en aucun cas, par l'assurance-récolte, est-ce que c'est pensable d'entrevoir une couverture? Je pense à la tubulure qui est endommagée énormément, tous les érables, soit que les têtes sont brisées ou qu'il y ait des dégâts majeurs. Est-ce que l'assurance-récolte s'est penchée là-dessus? Parce que, moi, entre autres, dans ma région, il y a des producteurs qui ont des manques à gagner qui vont jusqu'à 50 000 $ cette année, aisément.

M. Roy (Luc): Actuellement, on n'a pas de projet dans ce sens-là. On ne s'est pas penché sur la question. On n'a pas reçu de demande spécifique de le faire. Je peux vous dire que si on recevait une demande, techniquement, il n'y a pas d'empêchement à ce qu'on fasse une étude comme celle-là. Ça serait possible. Sauf que ça ne nous a jamais été demandé. Si ça nous était demandé, bien, j'imagine qu'on ferait le travail.

M. Brien: Bien, ce n'est pas impossible. Merci, M. Roy.

M. Roy (Luc): Il faudrait nous fournir des ressources aussi pour le faire.

Le Président (M. Vallières): M. Roy, peut-être avant de passer la parole au député de Beauharnois-Huntingdon, je reviendrais à votre tableau que vous nous avez fourni sur l'historique au 31 mars de chaque exercice financier et de la trésorerie.

M. Roy (Luc): Oui.

Le Président (M. Vallières): L'an passé, on posait des questions et on a toujours parlé en termes de déficit, au niveau de la stabilisation plus particulièrement, qu'on voyait arriver dans plusieurs régimes. Je me souviens, l'an passé, c'était au moins un ou deux régimes. C'était tout déficitaire, dont celui du porc à l'engraissement qui, à lui seul, c'était 157 000 000 $ de solde déficitaire. Et là, aujourd'hui, on nous parle d'un cash-flow; on parle d'une trésorerie à 82 000 000 $. C'est du net, ça, là. Vous avez ça en poche au 31 décembre 1996. Ça me paraît être, de prime abord, une grosse, grosse bouchée. Mais, évidemment, vous tenez compte, à ce moment-là, de l'assurance-récolte, qui, elle, me semble être devenue la vache à lait, littéralement, parce que, elle, c'est plus positif année après année. Donc, vous semblez considérer, de toute façon, les deux pour en arriver à une trésorerie positive.

Je me souviens que, l'an passé, quand la commission a fait la recommandation de, sur cinq ans, s'assurer que les programmes fassent leurs frais, on y allait avec stabilisation. C'était la stabilisation surtout qu'on visait. Ici, c'est comme si on venait atténuer l'impact comme tel du déficit qu'on constatait dans l'assurance-stabilisation par production. Cette nouvelle façon de nous le donner, moi, grosso modo, ce que ça me dit, c'est que, l'an passé, on parlait de 230 000 000 $ où on était littéralement en déficit, et là, tout d'un coup, on vient nous dire: On a dans le cash 82 000 000 $ au 31 décembre, ce n'est pas si grave que ça l'affaire. C'est drôle, l'année passée, on disait: Mautadit! Il faut faire de quoi très rapidement, ça n'a pas de bon sens! Et là, tout d'un coup, on nous dit: Bien, coudon, ça peut-être plein de bon sens parce qu'on a un solde qui est positif en trésorerie, 82 000 000 $. Ça me paraît important qu'on comprenne bien la mécanique qui vous amène à ce chiffre-là. En tout cas, moi, c'est la première fois qu'on me le soumet de cette façon-là.

M. Roy (Luc): Oui, je comprends, M. le Président, que ça paraît un gros saut, et c'est effectivement un gros saut. D'abord, un premier commentaire. Je ne voudrais pas qu'on comprenne par ça que la situation est hors de danger, qu'on est en pleine sécurité et qu'on n'a plus de problème. Il faut bien comprendre que nous sommes dans les assurances. On assure un prix de coûts de production, par exemple dans le porc, on assure une unité produite. Si le prix du marché baisse, bien, quand on entre et qu'on commence à payer – le prix du marché on ne le contrôle pas – si ça tourne de bord, ça peut aller vite. Et ça, il faut être bien prudent là-dessus. L'année 1996 a été une année où ça a très bien été. C'est une des premières années, à ce qu'on m'a dit, où on n'a pas à intervenir ni dans le maïs, ni dans les céréales, ni dans le porc. C'est la première année, paraît-il. Alors, quand on perçoit des cotisations de 24 $ par unité de porc produite, qu'on a 5 200 000 $ ou 5 300 000 $ et que ça dure 12 mois, bien, ça va assez vite, les entrées de fonds, ça tourne assez vite, mais, quand on paie, ça va vite sur l'autre bord aussi. Donc, 1996, ça a été rapidement.

Mais ce qu'il faut bien aussi, autre élément, regarder attentivement, si vous prenez l'histogramme, ici, si on va voir le tableau qui est à la fin, l'an passé, quand on était à la commission parlementaire de mars 1996, si vous tenez compte du décalage, le président parlait, à l'époque, des chiffres qui se produisaient en l'année 1994. Et, moi, je vous parle des chiffres... Je fais un gros saut. Je reprends tout: le 15, 20 mois de déphasage, je prends ça, plus une bonne année dans les prix, puis je vous dis: Au 31 décembre, la trésorerie, elle est positive. Alors, je comprends que ça fait un grand saut. Je ne pouvais pas avoir une trésorerie positive puis vous dire qu'il y a 190 000 000 $ de déficit dans les fonds d'assurance. On n'était pas en temps réel, là. Alors, en se remettant en temps réel, on a l'effet de deux choses: se replacer en temps réel et l'effet d'une bonne année. Ce qui fait qu'on se retrouve à la trésorerie en surplus de 82 000 000 $ dont la moitié provient de l'assurance-récolte, 43 000 000 $, et l'autre moitié, à peu près 40 000 000 $, vient de l'assurance-stabilisation.

Le Président (M. Vallières): Bien, M. Roy. On aura certainement l'occasion d'examiner un peu ces données-là qui nous sont fournies aujourd'hui et pouvoir y revenir. J'ai, à ce moment-ci, d'autres demandes d'intervention, dont le député de Beauharnois-Huntingdon, mais, Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, sur le même sujet.

Mme Dionne: C'est juste un petit commentaire, M. le Président. On va se revoir, de toute façon, à l'étude des crédits dans à peu près un mois, là. Est-ce qu'il y a moyen... Un plus un fait deux, là, puis quand je regarde votre année 1995-1996 par rapport au 31, je me dis qu'il y a quelque chose que je ne comprends pas, parce que vous êtes... Moins 68 000 000 $, moins 230 000 000 $ plus l'assurance-récolte de 31 000 000 $, et là, il faut partir avec les mêmes chiffres pour arriver à... Alors, il y a peut-être des revenus qu'on ne connaît pas, c'est peut-être ça.

Est-ce qu'on pourrait avoir, pour l'étude des crédits en tout cas, ce qui fait votre différence? Parce que si vous arrivez avec 82 000 000 $ dans le plus, vous savez... Est-ce qu'on pourrait avoir ce tableau-là entre vos derniers chiffres de 1995-1996, tels qu'ils sont, et votre 82 000 000 $ au 31 décembre? Est-ce que c'est possible de nous amener là, là?

M. Roy (Luc): Oui, oui.

Mme Dionne: Parce qu'il y a un bout qui est difficile à comprendre parce que, nous, on ne connaît pas les revenus, tant en «stab» qu'en assurance-récolte.

M. Roy (Luc): Je vous comprends. Je répète un peu l'explication, mais on aura ce document-là. Puis peut-être même que dans quelques minutes, on pourra vous le fournir. Je pense qu'on l'aurait. Mais je reprends un petit peu l'explication. Si vous prenez le tableau que vous avez à la base de l'histogramme...

Mme Dionne: Regardez, M. Roy, je vous arrête juste pour vous... Quand on aura le tableau, on reviendra avec l'explication parce que, sinon, je risque de poser des questions dont les réponses vont être dans le tableau. Alors, je vais vous sauver du temps.

M. Roy (Luc): Parfait.

Mme Dionne: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Oui. Moi, je voudrais vous poser des questions sur la grêle dont mon collègue parlait tout à l'heure. Parce que, dans ma région, c'est là qu'il y a le plus grand nombre de jardiniers-maraîchers. Et ma ferme, chez nous, en est une des plus grosses. Malheureusement, elle est assurée chez vous pour la grêle. Malheureusement. On a eu de la grêle cet été, et je peux vous dire pourquoi les gens n'en veulent pas de votre assurance. Ce n'est pas le prix que ça coûte, c'est les complications après que tu es grêlé. Parce que, en plus d'être grêlé, les complications commencent toujours là, avec vous autres. Ça devient tellement compliqué et ça prend tellement de papiers quand tu veux commencer à te défendre avec vous autres.

Chez nous, on a été grêlé. Ça n'a pas été compliqué, ils ont mesuré puis ils ont dit: Bon, bien, c'est correct, c'est réglé. C'est quand on a reçu le paiement qu'on a compris comment ça marchait. Parce que, là, ils ont coupé à peu près 60 % du montant qu'ils étaient supposés t'envoyer parce qu'ils avaient replanté à la même place. Là, on dit: Si ça ne fait pas, bien, il faut que tu ailles en appel. Puis quand tu t'en vas en appel, ça devient compliqué, ils ne tiennent pas compte que si tu plantes des oignons sur une ferme, il y a un temps pour planter des oignons. Passé le 10 mai, tu ne plantes plus d'oignons. Donc, si tu es grêlé, tu es assuré pour tes oignons. Normalement, ils devraient te payer, puis, après ça, avec ta ferme, tu aurais le droit de faire ce que tu veux pour essayer de te reprendre à faire d'autres revenus. Chez vous, ce n'est pas ça qu'on fait, on te pénalise parce qu'on dit: Ah! Tu as replanté. On te pénalise à 60 %, 70 % du montant que tu étais supposé recevoir.

(15 heures)

Donc, la personne qui a un investissement de 500 000 $, 600 000 $ pour cultiver des oignons à tous les ans – parce que c'est ce que ça coûte – n'a plus les revenus pour payer ses investissements. Elle, elle comptait sur son assurance qu'elle avait prise de vous autres.

Le gars, il dit: Il n'aurait pas fallu que tu replantes. Donc, il aurait fallu que tu te croises les bras tout l'été puis attendre.

Puis la meilleure dans tout ça, parce que, en fouillant un petit peu ça, vu que je suis député, j'ai constaté qu'il y avait de mes voisins, de mes amis, à qui la même chose était arrivée, mais, eux autres, ils n'avaient pas été pénalisés. C'est pas mal le fun, hein?. Ça devient tellement compliqué. Puis, chez nous, il n'y a pas à dire, on est une des plus grosses fermes au Québec, de la paperasse on aime ça en faire, on en fait de la paperasse. Le dossier n'est pas encore fini, parce que, là, la balance de la récolte qui n'était pas trop maganée, qu'on a gardée, ils sont venus prendre des échantillons pour savoir combien il y aurait de récoltes. Ça fait que, là, on a dit: La fin de l'année arrive, il faut savoir comment on va retirer d'eux autres. Aujourd'hui, avec les banques puis les rapports d'impôts, il faut tu saches tes comptes à recevoir et tes comptes à payer. On a essayé de trouver ça, de savoir ça, mais là, il nous ont demandé: Combien vous en avez vendu, vous autres? Parce que l'échantillon qu'ils étaient venus prendre, ils ne savaient plus, là, ça fait qu'ils voulaient avoir les factures de ventes qu'on était pour faire nous autres. Ça fait que ça devient tellement compliqué.

C'est un peu la même chose dans la stabilisation pour les pommes de terre, en passant, là. Ça amène les deux sujets. Les fermes, aujourd'hui, pour avoir des marges de crédit, pour faire un rapport d'impôts, ça leur prend ce qu'elles paient puis ce qu'elles reçoivent aussi. Avec des gens comme vous autres, on ne peut jamais savoir ça. On en entend parler 18 mois après. Ça me fait penser à votre petit programme ici. On en entend parler 18 mois après, là, ce que tu vas retirer de tes patates de 1995. Ce qui amène à dire qu'il n'y a pas de collaboration. Vous ne tenez pas compte de la situation de l'agriculteur. C'est malheureux. Il y a des gens de la stabilisation dans les pommes de terre qui sont venus chez nous cet automne, je les ai reçus, mais je ne leur ai pas dit que j'étais député. Je leur ai amené des petites idées qu'ils pourraient prendre pour expliquer aux agriculteurs puis comment ça fonctionne une ferme. Une ferme, c'est comme ailleurs aujourd'hui, il faut que tu fasses un rapport d'impôts, il faut que tu aies une marge de crédit. Tout ça ne se fait pas avec vous autres. On arrive pour faire un rapport d'impôts, le 1er décembre, tu ne le sais pas comment tu vas retirer de stabilisation ou si tu vas en payer. Tu ne le sais pas comment tu vas retirer d'assurance-récolte pour tes oignons ou comment tu vas en payer. Ce qui fait qu'il n'y a plus personne... Les gens ne veulent pas s'assurer chez vous pour ça. C'est pour ça. Parce que l'assurance en tant que telle, si c'était bien fait, le coût ce n'est pas important. Les gens sont tannés de ça. Parce que quand tu arrives à ton gérant de banque, tu lui dis: Je vais payer 30 000 $ de stabilisation cette année, il voudrait savoir si ça va te rapporter quelque chose. Il voudrait savoir, quand arrive la fin de l'année, dire: Coudon, tu as payé ça, c'est quoi que ça a rapporté, ça? Tu as une dépense, ça te prend un revenu, ou comment tu vas justifier ça. Avec vous autres, on le sait toujours 18 mois après. Puis, ça, c'est important, je pense, que vous en teniez compte, parce que c'est pour ça que les agriculteurs n'osent pas s'assurer, ils ne comprennent pas votre système, ils ne comprennent pas votre façon de faire les choses.

Moi, j'ai des preuves en main, que je peux vous montrer, qu'il y a des gens qui ont été payés pour leurs oignons, la même grêle que chez nous, qui n'ont pas été coupés sur leur facture. Chez nous on a été coupé. Je peux vous montrer les chiffres, vous allez voir qu'ils sont gros, les chiffres. Donc, il n'y a pas de logique.

La même chose pour vos gens qui vont sur les fermes mesurer. Ils s'en vont dans les champs partout, ils n'arrêtent même pas voir le propriétaire, ils s'en vont, ils sont chez eux. Ils fonctionnent comme si la ferme leur appartenait. L'agriculteur, il passe deuxième tout le temps.

Ça se fait chez nous, c'est pour ça que j'en parle. Si ça se fait chez nous – puis c'est une grosse ferme, on cultive 1 500 acres de légumes – ça se fait partout. Je pense que ces choses-là, comme il dit, il faudrait que ce soit corrigé. C'est urgent. Ça devrait être corrigé ça fait longtemps. Ça fait longtemps que ça devrait être corrigé, être capable de donner des réponses à l'agriculteur. Ce qui n'a jamais été fait chez vous. Nous autres, chez nous, on s'était assurés voilà une dizaine d'années, on a tout lâché ça à un moment donné. On a dit: On ne s'assurera plus, trop compliqué, trop de troubles, trop de paperasses. Finalement, on est revenu cette année à dire: On va s'assurer pour les oignons. Malheureusement, on a été grêlé. On a été grêlé plus que les oignons. Mais, encore une fois, on pense sérieusement à ne plus jamais s'assurer chez vous. Avec les preuves qu'on a dans le dossier, puis comme député à l'Assemblée nationale, comme personne qui siège sur l'agriculture, je vous dis que ça fait pitié, votre organisation. Ça, je peux vous dire ça en passant.

M. Lachance: Vous ne charriez pas un petit peu, M. le député?

M. Chenail: Non. Je pourrai vous donner les preuves si vous voulez les voir. C'est tout ce que j'avais à dire.

Le Président (M. Vallières): Alors, j'invite les membres de la commission qui ont des questions à poser de demander la parole au président. Alors, il y a une réaction de M. Roy qui est attendue, évidemment, comme suite à l'intervention du député de Beauharnois-Huntingdon. L'autre demande d'intervention, la suivante, c'est le député de Bellechasse. M. Roy, allez-y.

M. Roy (Luc): Alors, je retiens, trois éléments principaux de votre intervention, M. le député. D'abord, la question de l'application du programme sur la grêle. Je laisserai M. Lafrance, dans un instant, répondre comment techniquement fonctionne le problème de la grêle.

Nous avons, aux assurances agricoles, plusieurs programmes. Nous intervenons dans des régions et dans des réalités, d'une production à l'autre, qui sont très différentes l'une de l'autre. Il est possible, puis je ne veux pas aller dans les cas particuliers, peut-être, que vous ayez vécu une mauvaise expérience dans un dossier, chez vous, dans une production donnée, dans un cas qui est spécifique. C'est possible. Il y a toujours... Il faudra voir sur le plan particulier. Mais, sur le plan général, si vous me permettez, de façon générale, votre commentaire me semble un peu sévère à l'égard des employés de la Régie. Selon les indicateurs que j'ai chez nous, quand je regarde les enquêtes faites au niveau de la satisfaction de la clientèle, les commentaires que nous recevons des organismes de producteurs, ce que l'on voit dans les groupes témoins, de façon générale, le taux de satisfaction des clients, des producteurs à l'égard de la Régie est généralement assez satisfaisant. Je ne peux pas dire que ça s'applique dans tous les cas, tout le temps, c'est des situations qui sont très différentes d'une à l'autre. Mais, de façon générale, les indicateurs qu'on a nous révèlent des taux de satisfaction généralement assez élevés.

Quant à l'intervention des représentants de la Régie sur les fermes, les directives de la Régie à l'égard de ses employés sont d'être toujours d'une très grande politesse, de toujours demander l'intervention, de se présenter et de respecter les règles de l'art en la matière, quand on va sur une ferme, sur une entreprise. Et ça, je suis un peu surpris de ce commentaire-là, parce que c'est la première fois que c'est porté à ma connaissance. J'en prends bonne note et je vais, avec la directrice des opérations régionales, la vice-présidente, Mme Alarie, et avec son personnel, qui est responsable des bureaux régionaux, prendre des mesures nécessaires pour m'assurer que des situations comme celle-là ne se présentent pas. Ce n'est pas dans nos politiques et ce n'est pas comme ça qu'on a l'intention d'agir. En tout cas, sauf exception, ce n'est pas de cette façon-là que nos employés se comportent. Mais, s'il y a des cas précis qui sont portés à notre connaissance, on interviendra là-dessus.

Quant à l'application du programme de la grêle, je demanderais à M. Lafrance de nous donner les explications.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, M. Lafrance.

M. Lafrance (Jean-Marc): Oui. Alors, peut-être pour positionner adéquatement les choses, disons que dans le secteur des cultures maraîchères, actuellement, la Régie assure autour de 20 %, soit des superficies ou des producteurs qui produisent. À l'opposé de ça, on a des programmes d'assurance-récolte où on couvre au-delà de 70 % des producteurs ou des surfaces, notamment dans le cas du tabac, des légumes de transformation. Alors, dans le cas des maraîchers, ce qu'on a fait, d'abord, un, c'est de comprendre pourquoi on ne couvre que 20 % des surfaces ou des producteurs. La réponse principale, elle vient, finalement, de l'analyse du secteur de production maraîchère qu'on a opérée, dont on a terminé les résultats à la fin de février dernier. Enfin, ça révèle un secteur qui est excessivement différencié au niveau de la taille des entreprises, différencié géographiquement dans la répartition des entreprises et différencié aussi sur la part du revenu maraîcher qu'occupe... c'est-à-dire la part du revenu agricole, la part qui est attribuable au secteur maraîcher. Alors, tout ça présente des variations très, très, très grandes à l'échelle du Québec.

Alors, ce qu'on a positionné là-dedans aussi, c'est que, au niveau de l'assurance-récolte, les producteurs bénéficient d'une protection qu'on appelle tous risques, actuellement. Donc, l'ensemble des risques naturels protégés à l'article 24 de la Loi sur l'assurance-récolte peuvent faire l'objet d'un contrat d'assurance. On a instauré, depuis quelques années, une protection qu'on appelle de risque spécifique contre la grêle. Alors, cette protection-là, actuellement, en termes d'adhésion, c'est celle-là où on a une très bonne adhésion de la part des producteurs. Même je vous dirais que, l'année dernière, on a pratiquement doublé le nombre d'assurés sur la protection spécifique contre la grêle. Alors donc, ça répond à un besoin qui est un petit peu plus ponctuel ou plus particulier.

(15 h 10)

Alors, ce qu'on constate aussi, au niveau de la demande de couverture d'assurance de la part des producteurs maraîchers, c'est qu'elle origine de deux niveaux. Alors, il y a des producteurs agricoles qui nous demandent, à l'heure actuelle, d'avoir des protections pour risques spécifique, alors d'accentuer encore plus la protection contre la grêle et, vraisemblablement, aussi d'ajouter des protections contre le gel. Alors, la plupart des producteurs, maintenant, nous manifestent qu'ils ont moins d'intérêt pour une couverture tous risques. Alors, ça, c'est des éléments, dans le diagnostic des cultures maraîchères, qu'on a réalisés récemment.

Parallèlement à ça, il y a des entreprises dont le degré de spécialisation est très grand. Alors, c'est des entreprises où on cultive, par exemple, une, deux ou trois espèces sur des superficies très grandes. Alors, ces producteurs-là nous manifestent, à l'heure actuelle, des besoins différenciés. Certains, surtout les jeunes entreprises qui viennent de commencer leur production maraîchère, nous demandent des couvertures tous risques; la plupart des autres producteurs, ce qu'ils nous demandent, c'est un moindre intérêt pour l'assurance-récolte, pour autant qu'ils auraient, par contre, une protection de type catastrophe, alors une protection qui couvrirait un risque sur 10 ans, donc 60 %, finalement, du potentiel de production.

Dans le cas des autres producteurs agricoles, des maraîchers de grandes entreprises, ce qu'ils nous demandent... ils ont plus d'intérêt pour le nouveau programme qui a été élaboré par le fédéral, qui est le Programme d'autogestion du risque, ce qu'on appelle le PAR. Ce programme-là, c'est l'équivalent d'un CSRN, un compte de stabilisation du revenu net, dont le rendement est doublé. Alors, ça, actuellement, ça fait l'objet de discussion avec le ministère de l'Agriculture et le gouvernement fédéral pour voir si on ne pourrait pas développer ce type d'approche là pour certains producteurs maraîchers.

Alors, la réalité que j'essaie de vous traduire, c'est qu'il y a beaucoup de besoins très hétérogènes dans cette production-là qui correspondent à des demandes d'intervention, en termes de sécurité du revenu, très différenciées. Donc, la recherche d'outils financiers de type sécurité du revenu au niveau du PAR ou du CSRN; pour un certain autre groupe, c'est une protection de risques spécifiques, contre la grêle ou le gel hâtif; pour d'autres, une protection de type tous risques. Alors, c'est ça qu'actuellement on a identifié dans le diagnostic, ce à quoi on travaille actuellement et dont l'horizon est le printemps 1998 – c'est ce que M. Roy a mentionné – le développement d'une nouvelle approche qui va essayer de répondre à tous ces besoins-là. Alors, c'est un moyen casse-tête.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Lafrance. Rapidement, M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: Donc, vous êtes conscients de ce que je vous ai dit par rapport à l'assurance pour la grêle, vous abordez dans le même sens. Parce que l'assurance pour la grêle, je pense que le premier 20 %, vous ne le payez pas.

Une voix: Exact.

M. Chenail: Exact. Quand tu es grêlé, il n'y a plus rien, mais on dit: Le premier 20 %, on ne le paie pas. Ça fait qu'on revient, dans le fond, que le programme... Pourquoi il y a rien que 20 % qui s'assurent? C'est parce que le programme n'est pas bon. Si on prend le cas dont on parlait tout à l'heure, 20 % de coupés – parce que, dans le programme normal, c'est 20 % – après ça, on dit au gars: On te coupe un autre 50 % ou 60 % parce que tu as replanté. Finalement, le gars s'est assuré pour avoir 20 %, 25 % du montant auquel il s'attendait. Quand tu assures tes revenus, parce qu'une assurance, c'est comme assurer un revenu, si tu as ton produit, tu vas avoir ton revenu; si tu n'as pas ton produit puis que tu as pris une assurance, tu vas avoir ton revenu quand même. C'est là qu'il faut que l'assurance soit faite en conséquence d'avoir le revenu, si tu l'as assuré. C'est dans ce sens-là qu'il faudrait que le programme soit fait.

M. Roy (Luc): J'ajouterais, si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Roy, allez-y.

M. Roy (Luc): ...un point là-dessus. Ce qui est bien important – je l'ai souligné dans mon exposé tout à l'heure et vous avez fait référence à ça – je pense que, pour plusieurs raisons, s'est développé, à l'égard des assurances agricoles, un certain nombre de critiques dans le milieu, des fois fondées, des fois plus ou moins fondées. En tout cas, il y a eu beaucoup de discussions. Pour bien établir cette situation de la relation entre l'assuré et la Régie, il faut revenir et être bien conscients que la base de cette relation – et ça répondra peut-être à la question de M. le député – c'est le contrat d'assurance qui intervient entre la Régie et l'assuré. Souvent, quand le contrat intervient, les attentes du producteur sont plus élevées que ce qui est prévu au contrat, notamment. C'est vrai que quand on arrive dans la partie de la récupération – parce que, des fois, ce n'est pas une perte totale, ce n'est pas 100 % – ça fait l'objet de débats. La perte, est-ce qu'elle est de 80 %? Est-ce qu'elle est de 70 %? Est-ce qu'on peut récupérer 25 %? C'est, des fois, techniquement complexe aussi à évaluer, et, souvent, on ne réfère pas suffisamment, je pense, au contenu du contrat. C'est pour ça que j'ai indiqué tout à l'heure – et je le rappelle à chaque fois, dans toutes mes interventions – que la relation entre l'assuré et la Régie, c'est le contrat. Il faut revenir au contenu du contrat et voir ce qu'il y a dedans, le contrat. Quand il est question de récupération, souvent les producteurs aimeraient mieux qu'on n'en parle pas. Mais c'est prévu au contrat et il faut la faire, cette récupération-là.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Oui, M. le Président. Je reviens à des informations, tantôt, qui ont été données concernant les 82 000 000 $ au 31 décembre 1996. Ma question est très terre à terre: Est-ce que ça signifie que, au 31 décembre 1996, il y avait 82 000 000 $ quelque part dans un dépôt à la caisse populaire ou dans une banque? Ou bien si ce sont des chiffres qu'on pense que ça va être ça qu'il y avait au 31 décembre, quitte à être vérifiés plus tard?

M. Roy (Luc): La réponse est oui. Si on regarde les années antérieures, les 31 décembre des autres années antérieures – et c'est des données que l'on retrouve aux états financiers – la Régie avait toujours des emprunts qui étaient en cours, des billets qui étaient signés qu'on devait honorer. On avait des dettes. Or, cette année, au 31 décembre 1996, on n'a pas de dette, on n'a pas d'emprunt puis on a de l'argent dans le compte de banque.

M. Lachance: Est-ce qu'on peut savoir...

M. Roy (Luc): Si vous me permettez, il reste quand même qu'il y a certaines années-régime... il y a encore des choses qui vont être à payer, si vous ramenez la comparaison en année-régime. Mais, au 31 décembre, dans la caisse, la réponse, c'est: Oui, c'est ça qu'il y a.

M. Lachance: Est-ce qu'on peut savoir avec quelle institution financière la Régie fait affaire? Est-ce que c'est avec plusieurs ou avec une? Les chèques qui, par exemple, partent puis qui s'en vont vers les producteurs qui sont assurés sont tirés sur des comptes de quelle institution financière?

M. Roy (Luc): La Banque Nationale. La Régie fait affaire avec la Banque Nationale depuis plusieurs années, mais le contrat qui est actuellement en cours est en marche depuis un an. Et ça fait suite à un appel d'offres. Le Mouvement Desjardins, Banque Nationale, Banque Royale ont soumissionné. La meilleure proposition est venue de la Banque Nationale.

M. Lachance: C'est agréable à nos oreilles d'entendre ça par rapport à l'apocalypse de l'année passée, là, appréhendée. C'est une musique agréable de voir des plus, des surplus. Je pense que pour le Vérificateur général, c'est intéressant aussi, et surtout pour les contribuables payeurs de taxes. Peut-être que ça va être un modèle à imiter pour d'autres organisations.

Si la tendance se maintient, est-ce que vous avez l'intention, à la Régie, d'essayer de constituer un fonds confortable qui pourrait prévenir pour les périodes... On sait bien que, à un moment donné, ce ne sera pas de même à tous les ans, malheureusement, parce que les aléas de la température et de la conjoncture économique font que, bon, s'il y a une assurance, c'est parce que c'est nécessaire. Est-ce que vous avez l'intention de – là, c'est un peu de la prévision – constituer un fonds confortable et à la fois de diminuer les cotisations pour les producteurs, dépendamment du résultat? Moi, ça me préoccupe un petit peu parce que, si ça va bien, ce qui risque d'arriver, c'est que les producteurs décident, dans le domaine du porc par exemple, de ne plus s'assurer, et là, vous allez avoir une autre sorte de problème. Et nous aussi, comme députés, on risque d'avoir une autre sorte de problème, parce que, quand les gens ne sont pas assurés et qu'il arrive une catastrophe, bien, là, ils ne savent plus quel bord prendre, ils viennent nous voir puis ils disent: Bon, bien, je vais faire faillite, y «a-tu» moyen de nous aider? Alors que l'assurance, bien, au moins, quand tu es couvert, les dégâts risquent d'être pas mal moins gros.

(15 h 20)

M. Roy (Luc): Oui. Merci pour la question. La réponse à la première partie, est-ce que c'est l'intention de la Régie de constituer un fonds, est oui. La tarification des primes d'assurance, c'est fait à partir d'une politique bien précise; il y a des objectifs. Je vais vous les énumérer ici, mais les critères sont bien arrêtés. Parmi ces critères-là, il y a l'accumulation d'une réserve. On considère qu'on devrait avoir en réserve l'équivalent de... pas la plus mauvaise année, mais, disons, d'une année représentative d'une année de désastre. Supposons dans le foin, par exemple, cette année, on a versé en indemnités, en chiffres ronds, à peu près 14 000 000 $; il y avait 21 000 000 $ d'accumulé dans le fonds. On part donc avec un surplus de 7 000 000 $. L'objectif, dans cette production-là, on devrait avoir un fonds d'assurance qui corresponde à peu près à ça, 20 000 000 $, 25 000 000 $ ou 30 000 000 $ d'accumulés dans le fonds. Alors, la tarification dans chacune des productions, quand on parle d'une tarification sur cinq ans, on parle de résorber des déficits, mais on parle aussi d'une accumulation, d'une réserve pour faire face aux mauvaises années. C'est ça, le principe de l'assurance. Quand ça va bien, tu engranges; quand ça va mal, bien, tu paies. Puis, quand ça revient, bien, tu refais. C'est le va-et-vient, c'est ça, le principe d'une assurance. Alors, oui, on pense à constituer une réserve.

Deuxième point que vous souligniez, le danger que certains producteurs ne s'assurent plus quand ça va bien, oui, mais, en assurance-stabilitation, le contrat entre la Régie et les assurés est d'une durée de cinq ans. J'ai parlé tout à l'heure du contrat, de l'importance de respecter le contrat. Tout repose là-dessus. Et la Régie entend – et ça va venir dans les modifications réglementaires de cette année – resserrer ses critères pour assurer le respect du contrat.

Maintenant, je profite de l'occasion de votre question pour le souligner, et on le souligne dans nos réunions aussi, quand les producteurs disent: Ça va bien, je ne m'assurerai plus... On a eu l'exemple, cette année, dans le maïs entre autres, où, à la fin de l'été, les gens ont fait des prévisions que dans l'année 1996 l'assurance-stabilisation n'interviendrait pas. Certains ont dit: Je ne paierai pas ma cotisation. On a un certain nombre de dossiers qui sont en suspens, sur lesquels on devra se prononcer. Sauf que les prévisions de la fin de l'été ou du début de l'automne, dans le maïs, elles ne se sont pas tout à fait réalisées et les prix ne sont pas aussi bons qu'ils étaient. Et là, on est en situation où l'assurance va probablement avoir à intervenir.

Alors, les producteurs qui ont fait ce calcul, de dire: Je ne m'assure pas parce que ça va être bon, bien, il sont un peu mal pris aujourd'hui. Je comprends. Et là, il y a un travail de notre part, de la part de la Régie, à faire de l'information, une meilleure sensibilisation des producteurs, puis à redévelopper ce réflexe que les assurances agricoles, ce sont des assurances. On s'assure contre un risque. Ce n'est pas un placement, mais c'est une assurance que l'on prend pour se couvrir d'un risque qui est toujours possible. Et les prévisions, en agriculture, avec le climat, si on avait des prévisions sûres dans le climat, tout le monde serait riche. Et dans les marchés, c'est la même chose, ça change très rapidement.

Le Président (M. Vallières): M. Roy, vous nous avez parlé de la création d'un fonds et il y avait aussi une autre question sur les tarifs, les primes, puisque ça annonce bien. Est-ce que ça signifie que vous allez être en mesure aussi de réévaluer à la baisse, lors des prochaines années, les primes?

M. Roy (Luc): Oui. Alors, quand les fonds d'assurance s'améliorent, qu'on est en période de constitution, qu'il n'y a pas de déficits à rembourser, qu'il n'y a pas d'intérêt à payer, toute la politique de tarification s'ajuste et on assiste à une diminution des primes. Oui, par exemple, dans le porc, on devrait, cette année – je l'ai dit à un journaliste de La Terre de chez nous – si la tendance se maintient, d'ici le mois de juin, avoir une diminution substantielle de la prime d'assurance.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Oui, une dernière question. Merci pour les informations. Vous nous avez fourni plusieurs tableaux extrêmement intéressants. Il y en a un ici, entre autres, sur les statistiques en ce qui concerne les unités assurées pour l'année de production 1995. À ce jour, est-ce que vous auriez entre les mains les statistiques concernant les porcelets et le porc à l'engrais? Parce que, ce qu'on voit ici, probablement il y a une augmentation. En tout cas, si on en juge par les demandes de permis, de certificats d'autorisation au ministre de l'Environnement, il doit y avoir un écart entre ce qu'il y avait en 1995 et ce qu'il y a maintenant.

M. Roy (Luc): Oui, l'écart est très grand entre le déficit du fonds d'assurance dans les porcs et porcelets et la situation d'aujourd'hui...

M. Lachance: Mais je parle d'unités assurées.

M. Roy (Luc): De la prime d'assurance?

M. Lachance: Non, non, d'unités assurées, de têtes assurées.

M. Roy (Luc): Ah! Le nombre. Excusez-moi. Oui, on pourrait vous donner ça dans un instant.

(Consultation)

M. Roy (Luc): Je n'ai pas à portée de la main, M. le député, l'évolution de la production par année. Je pourrais vous faire parvenir ça au cours des prochains jours, avec un tableau porcs et porcelets, évolution de la production chaque année. Mais, les chiffres que j'ai vus dans le courant de l'automne et dont je me souviens de mémoire, c'est que la production porcine, au cours des sept, huit dernières années, a crû d'à peu près, en moyenne, 100 000 têtes par année. Actuellement, on doit se situer à 5 300 000 autour. Je pense que les dernières années, ça dépasse un peu les 100 000.

M. Lachance: Dans votre tableau, après la première page, Statistiques sur l'assurance-stabilisation, année de production 1995, porcelets, unité assurée, 310 499; porcs à l'engrais 5 152 005.

M. Roy (Luc): Oui.

M. Lachance: Alors, c'est à partir de ça ma question. Mais je comprends que vous ne pouvez pas nécessairement me fournir ces informations aujourd'hui, sur le champ. Si c'est possible de les avoir, ça serait intéressant pour les membres de la commission. Merci.

M. Roy (Luc): Oui, ça sera transmis d'ici une journée ou deux.

Le Président (M. Vallières): D'accord, merci. M. Roy, peut-être une rapide, parce que je veux être bien sûr. Je vous ai parlé tantôt de projeter au 31 mars 1997, sur la même base que l'année dernière avec laquelle on travaillait, on travaillait sur un déficit de 230 000 000 $, je ne me trompe pas en disant que, au 31 mars 1997, sur la même base, on parle de 190 000 000 $?

M. Roy (Luc): Oui, c'est exact.

Le Président (M. Vallières): O.K. Nonobstant l'explication que vous avez donnée tantôt, là, de ce qui est en banque.

M. Roy (Luc): Si vous restez sur la base des années financières, sur la même base qu'on voit au rapport annuel de la Régie au 31 mars de chaque année, alors, l'an passé, 1996, c'était 230 000 000 $, et nos prévisions au 31 mars 1997, ça sera autour de 190 000 000 $.

Le Président (M. Vallières): Bien. Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Oui, M. le Président. Moi, j'ai de la misère à comprendre ça, M. Roy. Vous dites: C'est 190 000 000 $ en déficit au 31 mars 1997, c'est ça qui est prévu.

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Pourquoi votre fonds peut être en surplus quand vous êtes dans le trou. Là, il y a un bout que... C'est quand même... C'est pour ça. Pourquoi on pourrait avoir une trésorerie positive quand...

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: 190 000 000 $, c'est quand même...

M. Roy (Luc): Vous avez tout à fait raison, madame.

Mme Dionne: Non, mais c'est ce bout-là que j'ai de la misère à saisir.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Roy, c'est ça, vous allez reprendre votre explication.

M. Roy (Luc): Moi aussi, j'ai posé plusieurs question, madame. Le problème vient qu'on utilise des indicateurs différents. L'année financière, c'est une chose. Le principal problème vient des... En assurance-stabilisation, les années-régime qui couvrent une production, par exemple dans la production du porc, c'est du 1er juillet au 30 juin. Donc, dans la production du porc, on va comptabiliser toutes les interventions, les cotisations, les contributions, les indemnités pour la période du 1er juillet au 30 juin de l'année suivante.

À quel moment on retrouve ces données-là dans les états financiers? Alors, à cause des délais, bien, la donnée réelle du porc, vous la retrouvez dans les états financiers 20 mois plus tard. Or, ce que, moi, j'essaie de faire, ce que j'ai fait aujourd'hui en utilisant la trésorerie, le 20 mois, je l'ai tout pris et je l'ai comprimé...

Mme Dionne: Plus une partie d'estimée.

M. Roy (Luc): Non. Quand je suis sur le compte de la trésorerie, je ne suis pas sur des estimés, je suis sur des faits réels vérifiables et qui existent.

Le Président (M. Vallières): Au 31 décembre.

M. Roy (Luc): Au 31 décembre. Alors, quand on prend 190 000 000 $, on va se relocaliser dans le temps, c'est le 31 mars 1997, donc dans un mois.

Mme Dionne: Trois mois plus tard que vos prévisions de trésorerie.

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: O.K.

M. Roy (Luc): Mais les chiffres du 31 mars 1997 aux états financiers, vous allez dans chacune des années-régime d'assurance-stabilisation, c'est les données d'il y a 12, 14, 18 et 20 mois passés. Donc, au 31 mars 1997 – vous voyez, le régime part – ça va être les données du 30 juin 1995. On va être rendu en 1997, là.

Le Président (M. Vallières): Vingt mois.

M. Roy (Luc): Donc, on travaille avec trois indicateurs différents: les états financiers, les années-régime et la trésorerie.

Mme Dionne: Sauf que, en tout cas, je peux peut-être ne pas être forte en comptabilité, M. Roy, mais il y a une chose quand même, c'est que les états financiers, à un moment donné, que ce soit le 31 mars d'une année ou d'une autre, doivent donner la photo à telle date, une photo juste. Si votre trésorerie, c'est une chose et vos états financiers, c'est une autre chose, il y a un pont qui fait que la...

M. Roy (Luc): Alors, voilà le problème, madame.

Mme Dionne: C'est ça que vous allez nous produire dans l'autre tableau?

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Bon. O.K.

(15 h 30)

M. Roy (Luc): Alors, quand je dis – et c'est ce que j'ai dit et c'est ce que je voulais faire ressortir par les tableaux que j'ai déposés... Quand nous prenons les états financiers de la Régie au 31 mars de chaque année, qui sont produits selon les règles de l'art, nous n'avons pas un portrait de situation en temps réel.

Mme Dionne: Oui, c'est ça.

M. Roy (Luc): Ce n'est pas en temps réel, les chiffres qu'on a là. Comme il y a plusieurs régimes et de gros montants, quand vous calculez tout ça puis que vous déphasez ça dans le temps, bien, ça fait de gros montants, effectivement. J'ai donné les explications tout à l'heure pour vous indiquer combien ça peut aller vite: 5 000 000 de parts à 24 $ la tête, laissez-moi ça pendant 12 mois, ça fait de l'argent qui rentre en caisse. Alors, ce qui arrive, c'est que depuis le printemps 1996, à 24 $ par tête, ça rentre dans la caisse puis ça ne sort pas, là, parce qu'on n'intervient pas actuellement.

Mme Dionne: Si on prend, par exemple... Est-ce qu'on peut?

Le Président (M. Vallières): Oui, allez-y!

Mme Dionne: Merci, M. le Président. Prenons, par exemple, le veau d'embouche, vous avez un petit dossier là-dessus avec la Fédération des producteurs de bovins?

M. Roy (Luc): Oui.

Mme Dionne: Pour l'année 1995, les prix ne sont pas fixés ou, s'ils le sont, ça ne fait pas longtemps, là, parce qu'il y avait quand même un débat: la Fédération n'acceptait pas votre évaluation. Et ça, ça ne fait pas si longtemps que ça. Et vous étiez en train de travailler sur l'année 1996. Moi, en tout cas, je voulais juste savoir... Premièrement, il y avait ça, le constat, que le prix de 1995 n'est pas fixé. Donc, forcément, les remboursements à partir de 1995, s'il y a eu des paiements de faits, c'est du partiel parce que ce n'est pas fixé, donc ce n'est pas complet. Alors, pour le veau d'embouche, vous êtes comme déphasés, c'est le cas de le dire. De un.

Deuxièmement, il y avait un autre débat qui se faisait à l'intérieur, à l'effet que l'évaluation qui était faite, que ce soit 1995 ou 1996, était faite à partir des veaux qui étaient vendus aux parcs d'engraissement seulement et pas nécessairement à partir de tous les veaux d'embouche. Ce qui voulait dire que, par exemple, des producteurs – puis ils ont quand même de la difficulté dans le bovin de boucherie – qui ne vendaient pas aux parcs d'engraissement – les propriétaires de parcs d'engraissement ont quand même un beau choix, ils sont comme les premiers à passer dessus – la vente se faisait à un prix moindre que dans les parcs d'engraissement. Le débat se fait – je pense que vous avez dû en être servis, là – à savoir si vous ne pourriez pas changer un peu la mécanique pour vous assurer, à tout le moins, que les producteurs qui vendent à d'autres que les parcs d'engraissement puissent avoir... qu'on tienne compte du prix réel de vente et non seulement de celui d'un veau qui est vendu... le beau veau qui est vendu aux parcs d'engraissement. Est-ce que, ça, ce dossier-là, ça chemine bien?

M. Roy (Luc): Oui. Ça me fait plaisir de vous dire que c'est même réglé maintenant depuis quelques semaines.

Mme Dionne: Oui. Bon. Dites-moi comment.

M. Roy (Luc): Pardon?

Mme Dionne: Dites-moi comment.

M. Roy (Luc): Je vais devoir demander à M. Mailhot, qui s'en occupe, comment il l'a réglé. Mais je peux vous dire que ce débat-là, avec la Fédération, il est en cours depuis, je pense, quelques années. Puis, cet automne, on a fait des enquêtes, des vérifications, et c'est réglé à leur satisfaction, parce que les enquêtes qu'on a faites ont confirmé que le point de vue qu'ils soutenaient, ils avaient raison. Alors, on leur a donné raison puis on a modifié nos règlements en conséquence. Et le paiement de l'année 1995, il est fait final. C'est tout réglé maintenant.

Mme Dionne: Ça ne fait pas longtemps, là, c'est janvier, février, là.

M. Roy (Luc): Ah oui! C'est...

Mme Dionne: Parce que, en date du 12 décembre, ce n'était pas réglé.

M. Roy (Luc): Alors, M. Mailhot va nous donner des détails là-dessus.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Oui. En fait, le règlement d'assurance-stabilisation, le régime d'assurance-stabilisation pour les producteurs de veaux d'embouche prévoit une source de prix. Par contre, il prévoit que la source de prix qui est utilisée pour verser les indemnités aux producteurs de veaux d'embouche, c'est la moyenne des prix des veaux payée par les producteurs qui engraissent les bouvillons.

Mme Dionne: Donc, les parcs d'engraissement.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Les parcs d'engraissement. C'est ça qu'on a au règlement. Par contre, il y a des strates de poids où il n'y a pas de vente d'animaux.

Mme Dionne: Aux parcs d'engraissement.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Donc, on a reconstitué des prix. C'est pour cette raison-là qu'on a procédé à une enquête qui visait à déterminer, lorsqu'il y avait des ventes, comment les parcs d'engraissement pouvaient payer ces animaux-là ou comment, sur un marché équivalent, ces animaux-là pouvaient se vendre. C'est les discussions qu'on a eues avec la Fédération au cours de l'automne dernier, discussions qui nous ont amenés à déterminer une façon d'évaluer ces sources de prix là lorsqu'il nous manque des sources d'animaux, lorsqu'il nous manque des animaux, pour en venir à constituer notre prix moyen qui va servir à établir les niveaux de compensation pour l'année.

Pour l'année 1996, au cours de l'été 1996, on a procédé à une enquête auprès des producteurs de veaux d'embouche qui étaient assurés au programme et qui vendaient des animaux à différentes sources. C'est ce qui nous a permis d'établir des ratios de prix selon les différentes strates de poids et selon les sexes des animaux; ratios qui vont nous servir à comparer les résultats qu'on obtient pour la récolte ou la production de veau de l'année 1996, comparer ça entre eux, selon les poids des animaux, selon les sexes des animaux, et en venir à établir une source de prix qui permettra de fixer le niveau de compensation de l'année 1996.

Mme Dionne: L'année 1995, d'après ce que vous me dites, vous êtes allés chercher d'autres sources que ce qui est vendu aux parcs d'engraissement.

M. Mailhot (Jean-Pierre): On a fait une enquête.

Mme Dionne: Est-ce que ça a changé les prix?

M. Mailhot (Jean-Pierre): Lorsqu'on a fait l'enquête, à l'été 1996, on est arrivé à la conclusion que pour une strate de poids donnée, par exemple de 400 à 500 lb, des femelles, lorsqu'il n'y a avait pas d'animaux achetés par les parcs d'engraissement...

Mme Dionne: Non, ça va en Ontario.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Par contre, il y en avait de vendus sur d'autres marchés.

Mme Dionne: Sur des encans?

M. Mailhot (Jean-Pierre): Donc, on a pu établir un prix moyen, prix moyen qu'on a comparé avec d'autres catégories de poids, les sexes, les mâles et les femelles, et ça nous a permis d'établir des écarts. Donc, ça nous permet d'avoir des ratios, des équivalences de prix, selon les différentes strates de poids et pour les deux sexes.

Par contre, pour l'année 1995, le paiement final de compensation avait été effectué. La décision avait été prise par la Régie au printemps 1996. Le versement final de la compensation de l'année 1995 a été payé au printemps 1996.

Mme Dionne: Même si, au niveau de la Fédération, les gens n'étaient pas d'accord. Il n'y avait pas moyen de réviser ça?

M. Mailhot (Jean-Pierre) Il y avait des discussions avec la Fédération, mais, ce qu'il faut voir aussi, c'est qu'il s'agit d'une source de prix qui est réglementée en fonction des données dont on disposait à ce moment-là. C'est le niveau de prix qu'on a pu établir de par nos enquêtes et de par les données qu'on pouvait établir avec les producteurs.

Mme Dionne: Mais si vous étiez... Prenons, par exemple, que le prix a été évalué au printemps 1996 pour l'année 1995.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Oui.

Mme Dionne: Même au mois de décembre 1996, les gens vous demandaient de revoir ça et de reconsidérer ce dossier-là, et il devait y avoir d'autres discussions. Donc, ça n'a pas changé, vous ne révisez pas votre dossier?

M. Mailhot (Jean-Pierre): Pour l'année 1995, il n'y a eu aucun changement; il n'y a aucune révision de sources de prix et de prix pour permettre d'établir la compensation.

Mme Dionne: Bon, alors, ce qui veut dire, M. Roy, qu'au niveau de l'année 1995, en tout cas, à partir de décembre 1996, quand les gens ont dit qu'ils avaient demandé une révision, qu'ils n'étaient pas satisfaits, vous maintenez la décision du printemps 1996 sur ce dossier?

M. Roy (Luc): Oui, mais là...

Mme Dionne: Pour 1996, vous pouvez peut-être changer des choses, mais pour 1995, vous la maintenez.

M. Roy (Luc): Oui. Parce qu'on parle de deux choses. L'année 1995, elle est réglée, il y avait un règlement puis on n'est pas capable d'aller à l'encontre du règlement. Pour 1996, on a fait des enquêtes pour vérifier les arguments qui étaient portés à notre connaissance, on a constaté qu'ils étaient bons, on a modifié nos règlements et ils vont s'appliquer pour l'année 1996. La modification, reconnaissance qui a été faite, elle donnait raison au point de vue de la Fédération

M. Mailhot (Jean-Pierre): En partie.

Mme Dionne: Pour 1996.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Pour 1996.

Mme Dionne: Donc, ce qui veut dire que, pour 1995, on n'y touche plus, la décision est maintenue. C'est seulement pour 1996, à partir des nouvelles données, que vous allez considérer tout ce qui n'est pas vendu aux parcs d'engraissement.

M. Roy (Luc): Oui. Parce qu'il faut toujours bien considérer que, quand on constate des choses par des enquêtes, il faut ensuite les traduire, nous autres, dans des règlements, que les règlements soient adoptés, qu'ils soient en vigueur pour qu'on puisse agir. Alors, il y a toujours un certain temps, un peu de décalage.

Mme Dionne: Oui, mais l'enquête que vous avez faite en 1996, c'était compte tenu des données de 1995, hein?

M. Roy (Luc): Oui, mais là, c'est une limite.

Mme Dionne: Ce n'est pas pour rien que vous la faisiez, de toute façon, c'est parce qu'il y avait quelques ambiguïtés. On avait des débats, hein? Alors, c'est pour ça que l'étude a été faite de façon plus exhaustive.

M. Roy (Luc): Oui, mais, d'habitude, quand on fait des études ou une enquête comme celle-là, c'est parce qu'il y a un débat. Ha, ha, ha!

Mme Dionne: Exactement.

M. Roy (Luc): Il y en avait un, effectivement.

Mme Dionne: Alors, comme ça, M. Roy, vous allez comprendre pourquoi les gens pensaient fort bien que cette étude-là permettrait de régler le problème de 1995, puisque c'était suite à la problématique soulevée pour 1995.

M. Roy (Luc): Je comprends.

Mme Dionne: Puis vous n'y touchez pas.

M. Roy (Luc): Pardon.

Mme Dionne: Vous n'y toucherez pas?

(15 h 40)

M. Roy (Luc): Bien, remarquez, si la réglementation me permet d'y toucher ou me permettrait d'y toucher, je le ferais. Maintenant, il faudrait que je vois le règlement, tel qu'il est écrit, ce qu'on me dit. Le règlement est publié, puis on n'a pas le choix de l'adopter. À l'intérieur du règlement, je ne pense pas que je puisse revenir sur l'année précédente.

Le Président (M. Vallières): Bien, merci, M. Roy.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Il y aurait peut-être un point additionnel.

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Mailhot.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Lorsqu'on procède à une enquête de prix, l'objectif est d'obtenir quelque chose, toujours à l'intérieur du règlement, qui soit représentatif du marché, d'avoir quelque chose qui soit représentatif de ce que la ferme modèle obtient. Donc, on peut avoir toutes sortes de discussions avec des représentants de producteurs pour des sources de prix, mais l'objectif qui est visé, c'est d'avoir quelque chose qui soit représentatif à l'intérieur et respectant la réglementation applicable dans le cadre de ce programme-là. C'est pour cette raison-là que, graduellement, il arrive qu'on doive procéder à des enquêtes et à des recherches d'informations additionnelles pour voir comment le marché progresse, comment certains groupes d'animaux peuvent être vendus dans d'autres créneaux qui existaient auparavant.

Donc, le marché du veau d'embouche a évolué considérablement au cours des dernières années. Il était rendu nécessaire, pour nous, de faire une enquête pour voir comment ça progressait de ce côté-là et comment les producteurs de bouvillons et bovins d'abattage s'approvisionnaient d'animaux sur les différents marchés.

Mme Dionne: Parce que, en fait, il y a seulement 40 % des veaux d'embouche qui sont achetés par les parcs d'engraissement. Donc, sur le 60 % qui s'en va en Ontario, les femelles qui ne sont pas intéressantes pour les parcs d'engraissement, parce qu'ils ont le choix de choisir les plus beaux, les plus costauds.

C'est sûr que la Fédération des producteurs de bovins devait être en demande là-dessus depuis un bout de temps, parce que plus le secteur du bovin de boucherie veut prendre sa place puis produit, plus vous aller en retrouver qui vont être en dehors des parcs d'engraissement parce qu'il y a en juste 40 %.

M. Mailhot (Jean-Pierre): Il y a des marchés qui sont plus difficiles à cerner, entre autres le marché du veau d'embouche où il peut y avoir une grande variabilité dans les poids des animaux, dans la qualité des animaux, dans les prix qui sont offerts selon les régions. C'est pour ça que, au cours des dernières années, on a eu souventefois des échanges avec la Fédération des producteurs de bovins sur les sources de prix, sur l'information dont on pouvait disposer en provenance des parcs d'engraissement. Parce que ce n'est pas une mauvaise source d'information...

Mme Dionne: Non, non.

M. Mailhot (Jean-Pierre): ...c'est le marché principal, au Québec, les parcs d'engraissement.

Mme Dionne: C'est le choix; ils ont le choix. Alors, ils prennent les animaux qui peuvent leur aider le plus, je veux dire, qui peuvent produire le plus. Ils ont le choix.

Le Président (M. Vallières): Bien, merci. M. le député de Nicolet-Yamaska, suivi du député de Brome-Missisquoi.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): M. Roy, je ne suis pas un expert en comptabilité, mais je vous reviens avec le tableau, qui m'apparaît un peu – comme je vous le dis, je ne suis pas un expert – comme une comptabilité de caisse, là. Autrement dit, y «a-tu»... Est-ce que c'est dans vos prévisions qu'un jour vous allez faire une comptabilité où l'année financière de tout, par exemple l'assurance-récolte pommes de terre, soya, etc., arrive dans un même temps, ou à peu près compte tenu des saisons, mais que la période de 20 mois serait raccourcie, par exemple, sur une période de quatre, cinq mois, ou trois mois, ou huit mois? Est-ce que c'est dans vos prévisions?

M. Roy (Luc): Oui, la décision est prise. D'ailleurs, j'en profite pour vous présenter Mme Sylvie Grondin, qui est responsable des services financiers chez nous, c'est elle qui a préparé le tableau. Je lui ai demandé, et le travail commence ces jours-ci, de voir comment on peut organiser notre système pour pouvoir présenter des états financiers en temps réel ou selon les délais qu'on est habitué. Ce n'est pas normal qu'un état financier parle d'une situation passée il y a 20 mois. Il y a un délai qui n'est pas raisonnable.

Alors, on va travailler à corriger cet élément-là, cette année. Je pense que d'ici quelques mois ça devrait être fait, de sorte qu'on va vous revenir... Puis on ne travaillera pas avec trois indicateurs différents, on en aurait un, puis un avec lequel on est habitué de travailler non seulement nous à la Régie, mais que tout le monde est habitué de travailler avec un état financier, qu'on sait ce que ça veut dire.

Maintenant, il va rester une particularité, qui peut peut-être nous poser un problème. Il y a des années de production, je prends, par exemple, la pomme de terre, la période de végétation et de récolte, bien, c'était l'été et l'automne 1996. Maintenant, nous sommes en hiver 1997 et nous sommes dans la période d'écoulement, de mise en marché de ce produit-là.

Alors, quand il faut travailler avec les prix du marché, il faut bien attendre que le marché se soit manifesté puis qu'il ait été vécu. Alors, il faut faire des enquêtes jusqu'à l'été. Et l'année-récolte dans la pomme de terre, c'est du mois d'août au mois d'août. Alors, il faudra voir comment on va pouvoir s'ajuster pour tenir compte des particularités de chacune des productions et des marchés.

Nonobstant ça, notre objectif, c'est de produire des états financiers et des données compréhensibles en temps réel, et facilement compréhensibles.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Moi, ce que je voudrais peut-être vérifier aussi, avec M. Breton, le Vérificateur général – je ne sais pas si je peux adresser une question au Vérificateur général, je pense que oui: Est-ce que vous étiez au courant de cette comptabilité-là, M. le Vérificateur général?

M. Breton (Guy): Non. Je l'ai effectivement appris aujourd'hui quand ça nous a été présenté. Bien sûr qu'on va rencontrer Mme Grondin prochainement, pour qu'elle nous explique comment elle se propose de procéder et voir ce que ça donne. Mais, pour nous, c'est nouveau.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Est-ce que vous pouvez me dire aussi si dans d'autres organismes on pourrait retrouver la même chose?

M. Breton (Guy): De mémoire, non. Cette comptabilité... Dans une compagnie d'assurance-vie, dans de l'assurance générale, il y a des statistiques d'expérience qui permettent de dire que sur une cotisation reçue la probabilité qu'on soit obligés de payer des remboursements est de tant, donc la probabilité qu'on fasse un profit puisse être présumée puis inscrite aux résultats financiers.

Dans le contexte de l'agriculture, je ne sais pas si cette même probabilité est aussi sécuritaire, si on peut présumer des profits qu'on va faire et, en conséquence, les passer immédiatement aux états financiers, ou s'il ne faut pas attendre d'avoir vécu et la période de récolte et la période du marché avant de savoir si effectivement il y aura profits ou pas sur les cotisations reçues. Donc, ne pas présumer qu'on a un profit ou qu'il reste des liquidités tant que chaque dossier n'est pas fermé. Mais il faudra voir.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Bien. Merci.

Le Président (M. Vallières): Alors, merci, M. Breton. C'est sûr que ça serait intéressant pour les membres de la commission d'avoir le fruit de vos délibérations afin qu'on puisse continuer l'exercice qu'on fait aujourd'hui et peut-être être en mesure, quand on reverra la Régie, de discuter avec des données que tout le monde aura bien saisies. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, merci, M. le Président. Peut-être une question – et là, je m'excuse, je suis arrivé en retard, peut-être qu'elle a été partiellement abordée. Une remarque qu'on a souvent de la part des producteurs agricoles, c'est qu'ils comprennent le régime de stabilisation comme étant un régime qui va faire en sorte que le revenu soit stabilisé à condition qu'il soit efficace, etc. La plainte qu'on a entendue le plus au cours de la dernière année, c'est qu'à partir du moment où le producteur agricole s'engage pour une période de cinq ans, à l'intérieur de cette période de cinq ans, le gouvernement peut jouer avec les deux bouts, avec la prime puis avec ce qui lui est versé. Il se retrouve dans un sentiment disant: L'insécurité que j'avais sur les marchés, maintenant, je la retrouve à cause de l'existence du Conseil du trésor ou au niveau gouvernemental, parce que ma prime, comme mon versement, est affectée par des décisions à court terme, qui sont prises ad hoc.

De quelle façon on peut en arriver à un système qui stabilise vraiment le revenu de l'agriculteur pour sa période de cinq ans en disant: Vos primes vont être à peu près ça, on a suffisamment d'expérience là-dedans et on va verser à partir de tel niveau. Est-ce que les règles du jeu vont continuer à être changées annuellement ou est-ce que les règles du jeu vont être connues pour la période du contrat pour le producteur agricole?

Le Président (M. Vallières): M. Roy.

M. Roy (Luc): Oui. Vous parlez toujours en assurance-stabilisation?

M. Paradis: Oui.

M. Roy (Luc): En assurance-stabilisation, l'objectif de la politique tarifaire, on en a parlé un peu tout à l'heure, c'est d'équilibrer nos fonds d'assurance sur une période de cinq ans. Et quand on établit le tarif, le montant de la cotisation, ça se fait en tenant compte de la politique de tarification. Ça veut dire que, s'il y a un déficit, il faut le rembourser; s'il y a des frais d'intérêt, il faut les payer; s'il y a un fonds accumulé, il va s'accumuler.

C'est sûr que ça varie. Je regarde dans le porc, par exemple, ça a varié beaucoup; le fonds d'assurance varie énormément aussi. Bien sûr, si on était capables d'arriver à une tarification plus stable, je pense que c'est un objectif qu'on devrait poursuivre. Maintenant, je ne suis pas capable aujourd'hui... je ne crois pas qu'on puisse aujourd'hui vous dire que, oui, on pourrait avoir une prime qui sera bien stable.

(15 h 50)

M. Paradis: Mais vous avez quand même plus d'expérience de marché, de vécu, si peux utiliser l'expression, qui doit vous permettre de baliser les choses davantage. Vous avez connu les hauts et les bas, si je peux utiliser l'expression

M. Roy (Luc): Ha, ha, ha! Oui, c'est le cas de le dire. On a connu des hauts et on a connu des bas. On a surtout connu, au cours des années antérieures, des bas. En 1996, on connaît des hauts. Puis je peux vous dire que ça fait du bien au compte de trésorerie de connaître des hauts.

M. Paradis: Oui, mais, vous, placez-vous à la place du producteur agricole qui, lui, s'embarque pour cinq ans – c'est supposé de le rassurer, ce système-là – il se dit: Au bout de la ligne, ça «varie-tu» autant que le marché, ce système-là?

M. Roy (Luc): Oui, il faut dire que la prime d'assurance en assurance-stabilisation, à moins qu'on me donne des indications contraires, bien sûr qu'il y a une variation, mais les écarts ne sont pas de 25 $, 30 $ du porc. C'est de quelques dollars à l'unité. La dernière année, la cotisation est restée au même niveau.

Est-ce qu'on pourra avoir plus de stabilité? Ça, il faudra que je pose la question puis qu'on la regarde très attentivement à l'intérieur du cadre de la politique de tarification. Je ne m'avancerai pas dans des prévisions, parce que, je le répète, on est sur des marchés – le commerce des denrées alimentaires que vous connaissez – à l'échelle internationale. C'est un marché qui est très complexe et il n'y a personne qui a réussi encore à faire des prévisions. Si quelqu'un avait réussi, il serait bien riche aujourd'hui. Alors, on travaille avec des probabilités. Mais les prévisions sont difficiles.

M. Paradis: Mais, malgré ça, je comprends qu'il y a un effort ou une volonté exprimée d'aller vers une plus grande stabilisation, du point de vue du producteur agricole, quant à sa prime et quant aux déboursés.

M. Roy (Luc): Oui.

M. Paradis: Deuxième élément. Ça a traîné dans l'actualité, si je peux utiliser l'expression, à un moment donné. La source était sans doute le ministre de l'Environnement qui, à un moment donné, aurait eu des pourparlers ou qu'il s'entreprendrait des pourparlers avec l'ASRA dans le but de faire en sorte que les paiements de stabilisation soient orientés vers le virage du développement d'une agriculture durable, pour aider les cultivateurs à prendre le virage vert. Est-ce qu'il y a eu des discussions à date? Et, s'il n'y en a pas eu, est-ce que ça fait partie de la planification?

M. Roy (Luc): Il y a actuellement des discussions qui se poursuivent avec le ministère de l'Environnement, j'en ai fait état dans ma présentation, au nom des principes de la cohérence de l'intervention gouvernementale. Si la Régie des assurances agricoles assure des unités produites, il me semble évident qu'elle ne peut pas assurer des unités produites mais non autorisées en vertu d'autres lois. Parce qu'il y a un principe, au niveau de la cohérence, si un producteur est autorisé par son certificat du ministère de l'Environnement à produire supposément 5 000 unités de porc par année et que, nous, on intervient puis qu'on assure, bien, ça serait incohérent, si le producteur en produit 6 000, 7 000, que, nous autres, on paie puis on assure les 6 000 ou 7 000.

M. Paradis: Je comprends ce bout-là, même les banques font ça, là. Mais est-ce que l'argent que vous versez pourrait être dédié dans ce virage-là?

M. Roy (Luc): Ça, c'est une question qui ne relève pas de ma compétence cependant.

M. Paradis: Non, non, mais est-ce que vous avez eu des discussions là-dessus?

M. Roy (Luc): Actuellement, nous avons des discussions avec le ministère de l'Environnement pour s'échanger des informations. Pour nous, nous avons besoin de savoir qui a droit de produire quoi. Nous autres, on connaît qui, on les connaît, mais le quoi, ce que le producteur a le droit de produire, nous avons besoin des informations.

Est-ce qu'en appliquant une gestion plus rigoureuse puis en se collant comme il faut sur les bonnes informations il y a des unités qui ne sont plus assurées et que ça dégage des profits? Bien, là, c'est dans l'enveloppe fermée du ministère de l'Agriculture, et c'est le ministre de l'Agriculture qui aura à décider à quelles sources il affecte ces revenus-là ou ces économies-là.

M. Paradis: Non, non, moi, je parle du producteur qui a son certificat d'autorisation, tout est correct, il respecte la loi sur l'environnement, etc., mais que le ministère de l'Environnement arrive avec des exigences additionnelles, fait des pourparlers avec l'ASRA, en disant: Bon bien, lorsque vous faites vos paiements, il y en aura un tiers ou 25 % qui sera dédié à un virage vert. Est-ce que vous avez ce genre de discussion là avec l'Environnement?

M. Roy (Luc): On n'est pas rendus là.

M. Paradis: Vous n'êtes pas rendus là?

M. Roy (Luc): Non.

M. Paradis: O.K. Troisième point. On se rappelle, il y a trois, quatre ans, peut-être cinq ans même, que plusieurs producteurs de veaux avaient eu des problèmes énormes avec le BVD, les troupeaux contaminés, etc., même des producteurs laitiers comme tels avaient vu leur troupeau décimé. À l'époque, il avait été question d'une assurance contre ce genre de sinistre. Même, je me souviens qu'un de vos prédécesseurs avait mentionné qu'il y avait des travaux qui étaient faits là-dessus. Est-ce que ce dossier-là a progressé?

M. Roy (Luc): Oui, il a progressé beaucoup dans le courant de l'automne. On pense que, d'ici le printemps 1997, dans quelques mois, le ministre de l'Agriculture pourra peut-être annoncer une décision là-dedans. Nos travaux ont beaucoup avancé dans le courant de l'automne. Et si les ressources sont nécessaires, ce sera la décision du gouvernement, ce sera possible d'envisager que cette assurance, assurance-santé animale, qu'on appelle en langage interne avec l'acronyme ASSUMA, soit en vigueur pour le 1er janvier 1998, c'est-à-dire la prochaine année.

M. Paradis: Ne donnez pas ça au ministère de la Santé. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Roy (Luc): Je n'ai pas de relation fonctionnelle avec le ministère de la Santé. J'ai l'obligation d'être cohérent avec toutes les politiques gouvernementales cependant.

Le Président (M. Vallières): Merci. Oui, M. le député de Bellechasse. Peut-être juste une courte, M. Roy, avant de continuer. L'an passé, nous avions questionné votre prédécesseur sur les unités autonomes de gestion, il nous disait travailler à ça. Est-ce que vous êtes en mesure de nous indiquer aujourd'hui où est-ce que vous en êtes rendu à ce niveau à la Régie?

M. Roy (Luc): Oui. Alors, le dossier de l'unité autonome de service n'a pas beaucoup avancé cette année. En fait, il n'a, à toutes fins pratiques, pas avancé à cause des changements à la direction de la Régie, d'une part. D'autre part, on a priorisé nos interventions au niveau des programmes de gestion financière. On a aussi quand même avancé dans notre travail de planification stratégique, nos indicateurs de gestion et la gestion par résultat. Ce sont tous des travaux que nous devons faire de façon préalable à la transformation de la Régie en une nouvelle unité autonome de service. Alors, ces travaux-là se font. De façon particulière, sur le dossier unité autonome de service, non, on n'a pas avancé, mais ça fait partie des priorités des prochains mois.

Le Président (M. Vallières): Alors, l'an prochain à la même date, quand on va vous questionner, ça va être intéressant de vous entendre là-dessus.

M. Roy (Luc): Oui, j'espère.

Le Président (M. Vallières): Ça devrait avoir évolué.

M. Roy (Luc): J'espère que je pourrai vous dire oui.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Bellechasse, on pourrait peut-être terminer avec vous, puisque le temps s'écoule rapidement.

M. Lachance: Ça va être très bref, M. le Président. J'ai remarqué que dans les statistiques qui nous ont été fournies par la Régie, les régions qui sont utilisées ne concordent pas nécessairement avec les régions administratives. Afin d'avoir une concordance complète, est-ce qu'on peut s'attendre à ce que, dorénavant, vos statistiques... Par exemple, chez nous, c'est Chaudière-Appalaches, alors que ce que vous nous avez fourni comme information est dans Bellechasse, il y en a une partie du côté de la Beauce t il y en a une partie du côté de Québec.

M. Roy (Luc): Alors, je prends note de la question. Je comprends que vous êtes habitué de travailler avec des statistiques par région administrative. Un autre élément de concordance.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, merci beaucoup, M. Roy, et les gens qui l'accompagnaient également.

À ce moment-ci, je proposerais peut-être une suspension de cinq minutes, ce qui permettrait également aux gens de la Société de financement agricole de s'approcher. La commission reprendrait ses travaux dans cinq minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 59 )

(Reprise à 16 h 12)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Alors, nous en sommes rendus à entendre la Société de financement agricole. Nous procéderons jusqu'à 18 heures. J'inviterais M. Saint-Pierre, qui est le président, à nous faire sa présentation et nous pourrons, par la suite, procéder à une période d'échanges avec les députés membres de la commission. Alors, M. Saint-Pierre, la parole est à vous.


Société de financement agricole (SFA)

M. Saint-Pierre (Michel R.): Merci, M. le Président. Distingués membres de la commission, c'est un grand plaisir, pour une deuxième année, de venir vous rencontrer dans le cadre de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics. Permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, et pas nécessairement des inconnus, d'ailleurs: à ma gauche, M. Louis Bernard, nouveau vice-président de la Société, que vous avez connu, il y a une époque pas trop lointaine, où il était sous-ministre adjoint à l'Agriculture; à ma droite, Norman Johnston, directeur de la recherche et de la planification; Mme Hélène Boliviens, agroéconomiste de la même direction; et, à ma gauche, Mme Manon Boucher, agente d'information.

L'an dernier, au cours de notre rencontre, j'avais mis beaucoup d'emphase sur la réforme des programmes de financement agricole qui était entrée en vigueur quelques mois plus tôt, soit en juin 1995. Ma présentation avait alors permis de brosser, on peut dire, un portrait global et entrer dans quelques détails de cette réforme-là qui, entre autres, comprenait un élargissement assez important, assez majeur de notre cadre d'intervention, que l'on pense à l'agriculture à temps partiel, à l'agrotourisme, à la transformation à la ferme et à toutes sortes d'activités connexes qui, jusque-là, étaient interdites à la Société au niveau de son champ d'intervention.

La rencontre de cette année m'offre l'occasion de vous livrer les premiers résultats, c'est-à-dire ceux de presque une année complète de cette réforme-là, l'année qui se termine dans six semaines. Les résultats, donc, après 10 mois complétés, ne laissent aucun doute sur le fait que les nouvelles activités, notamment, ont suscité beaucoup d'intérêt dans le milieu. Globalement, c'est au-delà de 500 000 000 $. C'est une première fois dans l'histoire de l'organisme qu'on va dépasser les 500 000 000 $, quelque chose comme 530 000 000 $ ou 540 000 000 $, selon les prévisions actuelles, soit une hausse de 20 % sur le total de l'exercice passé. Ce montant inclut 848 prêts à des entreprises à temps partagé, ce qui n'est pas banal, pour un total de 73 000 000 $ à ce jour, et 81 prêts à des entreprises de biens et services, pour un montant de 8 000 000 $, soit un peu plus de 80 000 000 $ à ce jour dans des secteurs qui sont nouveaux pour nous et qui contribuent fortement, à ce que, nous, on peut évaluer, à dynamiser les régions du Québec, régions qui, pour la plupart, ont l'agriculture comme activité de base.

Globalement, c'est néanmoins tout le secteur agricole qui connaît une croissance des investissements cette année. En fait, les investissements nouveaux dans le secteur sont évalués par nous, à ce stade-ci, à à peu près 600 000 000 $. Plusieurs facteurs se conjuguent pour créer cette situation: des marchés relativement bons, dans le porc, les céréales notamment, qui ont permis d'augmenter le niveau de confiance et d'amorcer un cycle de développement assez spectaculaire; les taux d'intérêt qui sont très bas. C'est connu, les taux actuels sont ce qu'il y a eu de plus bas au cours des 30 dernières années. On parle, pour un emprunteur à la Société aujourd'hui, d'un taux pour un prêt fermé cinq ans de 7 % et un taux, avec un terme d'un an, de 5,20 %. Troisième facteur, l'ouverture de nos programmes qui a créé, ce que je mentionnais tout à l'heure, une nouvelle dynamique dans le secteur. Et, enfin, une présence plus accrue, et qu'on souhaite encore davantage accrue au cours des prochaines années, dans le milieu pour stimuler des développements dans le milieu agricole et dans les régions en particulier. Quand on parle de régions, on parle de régions qui ont peut-être une problématique de développement davantage que les régions-centres du Québec.

L'autre événement qui mérite d'être mentionné à ce moment-ci, c'est le fait que l'organisme fête ses 60 ans cette année. En fait, la création de la Société de financement agricole, jadis l'Office du crédit agricole, date du 12 novembre 1936. Donc, ça fait un peu plus de 60 ans pour ce qui est de la création au plan juridique, au plan de la loi, et ça va faire bientôt 60 ans que les premières activités, c'est-à-dire les premiers prêts de la Société ont été consentis.

On vous a fait parvenir un document qui a été produit, qui a été tiré à une quarantaine de mille exemplaires dans La Terre de chez nous , et qui relate un peu, enfin, les événements et également donne un peu le contexte des années trente qui ont vu la création de l'organisme. Cet événement-là nous offre également l'occasion, tout en analysant le passé, de voir un peu comment l'avenir, l'avenir à moyen terme à tout le moins, se présente avec les lunettes qu'on peut avoir aujourd'hui. On ne peut pas beaucoup aller au-delà de trois, quatre ou cinq ans dans nos prévisions d'avenir, mais, quand même, les projections actuelles nous permettent tout de même de voir où s'en va l'agriculture et quels seront ses besoins en matière de financement agricole.

Alors, c'est l'exercice, globalement, auquel on s'est livrés, nous, en préparation de cette rencontre-là. On a préparé quelques images et, si vous le permettez, ça nous permettrait, je pense, de mieux se situer, là, un peu dans le temps, quelques références au passé, et, comme je le disais, voir également comment on peut extrapoler pour l'avenir.

Alors, si on regarde l'évolution des 60 dernières années à la Société, les principales étapes, bien sûr, il y a la création en 1936 qui découle directement de la crise économique des années trente. C'est-à-dire que le gouvernement a souhaité mettre en place un organisme pour relancer l'activité agricole qui était extrêmement ralentie et qui vivait des heures extrêmement difficiles dû à l'absence de capital pour se développer ou même pour changer de propriétaire, parce que la problématique de transfert existe depuis toujours. Donc, c'est le contexte dans lequel est né l'organisme et on peut dire que c'est à petits pas, à pas feutrés, que les années et les décennies se sont écoulées. Jusqu'en 1960, la valeur des prêts est encore relativement modeste, on parle de l'ordre de 15 000 $ lorsqu'on se situait dans les années soixante, alors que le prêt initial, initialement lors de la création, c'était 6 000 $ comme prêt maximum. Alors, l'inflation n'avait pas beaucoup joué.

Au cours des années soixante, il y a eu une vague de mécanisation où on peut dire que le tracteur a remplacé le cheval. Au cours des années soixante-dix, ça a été une vague beaucoup plus de spécialisation de l'agriculture accompagnée d'une très grande augmentation des productions et également dans un contexte d'inflation. C'est là qu'on a vu les valeurs agricoles augmenter sensiblement. C'est probablement à cette époque-là que la ferme moyenne a franchi le seuil du 100 000 $ comme valeur moyenne.

(16 h 20)

En 1980, début 1980, flambée des taux d'intérêt, récession qui a amené un premier choc économique après presque 50 ans et, pour une première fois, on a connu le phénomène de faillite en agriculture. Il faut quand même se situer, les faillites en agriculture à l'époque, même si importantes au plan des familles concernées, elles ont été relativement peu nombreuses si on les compare à ce qu'ont vécu, par exemple, les agriculteurs américains au cours de la même période ou encore à ce qu'ont connu les propriétaires de PME, mais, malgré tout, ce n'est pas quelque chose qui devait être pris à la légère. Il y a eu un nombre relativement important de faillites qui ont amené une certaine prise de conscience d'une nouvelle réalité qui est celle des difficultés cycliques et des conjonctures difficiles, choses qu'on n'avait beaucoup connues au cours des cinq décennies précédentes.

Finalement, en 1990, on peut dire que le développement du concept de l'économie régionale a commencé à prendre place et on a également, nous, pris conscience de l'importance de soutenir une nouvelle forme d'économie, celle surtout des petites entreprises. On parle de l'agriculture à temps partiel, on peut parler également de l'agrotourisme et de toute une série d'activités qui, jusque-là, étaient considérées comme secondaires et délaissées par rapport à l'agriculture à temps plein qui, elle seule, était admissible aux programmes de la Société de financement agricole.

Voilà pour un bref rappel des cinq ou six dernières décennies. Voilà ce que ça donne un peu, on passe vite, de 1930 à 1995: la valeur des fermes en 1930 était de 6 000 $; comme je le mentionnais, 30 ans plus tard, elle n'avait pas beaucoup monté en haut de 20 000 $; et, tout d'un coup, entre 1970 et 1980, en fait, inflation extrêmement grande, flambée des prix de tout et des taux d'intérêt également et la valeur des fermes a monté pour atteindre le niveau actuel qui est de l'ordre de 575 000 $.

Qu'est-ce que ça donne comme encours de prêts? Bien, il y a également un tableau assez spectaculaire qui montre bien, dans le fond, le phénomène qui s'est produit dans les années soixante-dix, le phénomène d'inflation, et une croissance qui actuellement est relativement soutenue. Aujourd'hui, depuis enfin quelques semaines, on a dépassé le niveau du 2 500 000 000 $ comme encours des prêts.

Autre phénomène intéressant lié à différents facteurs, c'est la part relative du budget consacré au financement agricole. Même si ça baisse, on ne se sent pas nécessairement délaissé dans tout ça. Il y a certains facteurs qui expliquent le phénomène. D'une part, les taux d'intérêt jouent beaucoup, étant donné qu'une partie encore importante des prêts est consentie avec des protections contre hausse de taux d'intérêt ou encore des subventions d'intérêts, tout simplement. Alors donc, le niveau des taux joue beaucoup. Il y a également eu des phénomènes comme la réforme du programme qui a fait que la tendance, toutes choses étant égales, est que le montant des besoins en subventions sera réduit à l'avenir; peu importe si les taux évoluent, la tendance est à la baisse. Il y a également eu une réforme importante au plan de l'administration et, vu une réduction importante, on a des données plus précises là-dessus, du nombre d'employés à la Société, qui joue dans ce sens-là, de sorte qu'aujourd'hui la part du budget total consacré au financement est de l'ordre de 10 %.

Ce budget se répartit en trois grandes catégories, par ordre d'importance: les subventions, qui est le budget de transfert, ce qui représente environ 65 %; le fonctionnement représente 23 %; et l'assurance-prêts, qui est le budget consacré à la création d'un fonds visant à payer les pertes de prêts, représente actuellement 12 % du montant total du budget.

Au plan du fonctionnement, on a mis en parallèle ou en comparable un certain nombre de données venant d'autres organisations qui évoluent plus ou moins, là – les comparables valent toujours ce qu'ils valent – tout de même dans un domaine comparable. Prenons le cas... Les trois premiers, peut-être, sont un peu plus proches. La Société de financement, voilà, nous, notre pourcentage des dépenses de fonctionnement sur 100 $ d'encours de prêts est passé, au cours de la dernière année, de 0,87 $ à 0,79 $. La Société de développement industriel, qui a un mandat semblable au niveau des autres secteurs de l'économie, est restée stable à 0,96 $ par 100 $. La Société du crédit agricole, qui est peut-être la comparable la plus valable parce que, pour l'essentiel, c'est un mandat qui rejoint le nôtre, elle a un coût de fonctionnement sensiblement plus élevé, de l'ordre de 1,54 $ à l'heure actuelle. Il ne semble pas qu'ils ont mis en place un programme de réduction. Les autres sont plus ou moins comparables, étant donné qu'on doit parler soit de réseaux, comme c'est le cas pour les banques à charte, ou encore d'autres problématiques qu'on connaît un peu moins, comme celle de la Banque de développement du Canada. Mais, néanmoins, je pense que les trois premières nous permettent de nous situer, c'est un peu le «bench mark» au niveau de nos dépenses de fonctionnement.

Évidemment, le principal poste de fonctionnement, comme c'est le cas fréquemment dans l'administration publique, ce sont les effectifs, ce sont les salaires. Le tableau que vous voyez nous donne le portrait de l'évolution des effectifs au cours des, je ne sais pas, sept, huit dernières années, une baisse importante. On a frappé, à un moment donné, le seuil de 400 équivalents temps complet, ce qu'on appelle les ETC, pour aujourd'hui nous situer à 320 au début de l'exercice, et, après la mise en place du programme de retraite anticipée, le chiffre d'aujourd'hui est de 309 personnes.

Tout ça a pu être rendu possible parce qu'on a allégé passablement nos façons de faire. On a délégué nos pouvoirs décisionnels vers les régions et vers différents autres niveaux d'autorisation. Ça nous a donné comme résultat peut-être le plus visible l'évolution des délais de traitement qui est passé d'un peu plus de 100 jours au début de l'opération à environ 12 à 14 jours à l'heure actuelle, malgré – ce qu'on va voir, je pense, à la suite – une augmentation extrêmement importante du volume de prêts consentis, de demandes, en fait, au cours de la même période.

On a voulu également comparer au chapitre des pertes pour mauvaises créances, ce sont ici les provisions pour mauvaises créances qui ont été mises là, comment on peut se situer par rapport à d'autres organisations, encore là plus ou moins comparables, certainement comparable avec la Société du crédit agricole, où les prévisions pour mauvaises créances sont de l'ordre de 0,21 % en ce qui nous concerne et de 0,31 % dans le cas de la Société du crédit agricole Canada. Et les autres sont en hausse sensiblement par rapport à nous.

Comment expliquer ça? Bien, ça peut s'expliquer par le fait que, évidemment, on dispose d'une expertise considérable dans un secteur où il est possible de voir venir un peu plus les coups que quand on évolue dans un secteur extrêmement large, dans le financement universel; également, par une approche extrêmement prudente de gestion des dossiers en difficulté qui nous amène, dans le fond, à essayer le plus possible de régler les dossiers avant qu'une perte se réalise. Donc, on fait preuve de beaucoup de patience dans la gestion des dossiers en difficulté et ça donne des résultats, même si parfois ça prend un peu de temps.

(16 h 30)

La répartition de l'encours de la Société au Québec n'a pas été en diminuant. Il y a eu même une augmentation de l'ordre de 2 % au cours de la dernière année. Elle est de 56 % par rapport à 31 % pour tous les autres prêteurs, et ça inclut les fournisseurs de machinerie, les institutions financières. Le court terme est davantage consacré dans «autres prêteurs» et le long terme est davantage concentré chez nous. Pour ce qui est de la Société du crédit agricole du Canada, elle a un encours relativement stable de 13 %.

On arrive à la fin, je pense, de nos... On tire vers la fin des présentations. L'évolution des activités de prêt. Encore là, on voit la croissance très marquée au cours des dernières années. L'année 1992-1993 est intéressante parce qu'elle s'explique par le contexte du GATT. On se souvient, à l'époque, de toute l'insécurité qui tournait autour de la signature du GATT. Les anglais appelaient cette période-là le «wait and see». C'est tout à fait ce qu'on peut voir ici, les gens étaient en attente de nouvelles. La signature qui s'est faite, donc, en 1993-1994 a signifié pour beaucoup de gens: Bon, on respire enfin et on repart le cycle. Cette confiance-là s'est maintenue au cours des dernières années.

Dans les nouveaux domaines dont je parlais tout à l'heure, les entreprises à temps partagé ou à temps partiel, je voudrais peut-être signaler le fait que, des fois, on utilise l'expression «gentlemen farming», mais ce n'est pas tout à fait ça, là, ce n'est pas des gentlemans-farmers dans le sens de gens de la ville qui vont passer le week-end à la campagne; c'est beaucoup plus des gens qui pratiquent l'agriculture sur une plus petite échelle et qui également ont d'autres revenus. C'est particulièrement important dans certaines régions où, bon, les fermes sont plus petites et les revenus d'appoint sont importants pour boucler la boucle au niveau du budget familial.

Donc, le niveau d'activité. Là, on a neuf mois. Je vous mentionnais tout à l'heure des statistiques de 10 mois. Les chiffres sont quand même importants après neuf mois: c'étaient 778 prêts pour 65 000 000 $. Dans l'entreprise biens et services, ce qu'on entend là-dedans, ça peut être aussi bien des regroupements pour achat de machinerie, ça peut être des entrepôts conjoints de fruits et légumes, ça peut être, à la rigueur, un abattoir, ça peut être une fromagerie, mais généralement des petits établissements qui servent ou qui desservent un nombre réduit d'agriculteurs. Il n'y a pas de nombre maximum, mais, en général, ça se situe autour peut-être d'une douzaine lorsqu'on parle, par exemple, de CUMA. Ça a été le cas dans le dossier de la Fromagerie L'ancêtre, par exemple, ils étaient une dizaine de producteurs. Donc, ce genre d'entreprises là qui, si elles évoluent vers une croissance importante, évidemment, seront probablement financées ultimement par d'autres organisations et, qui sait, peut-être la Caisse de dépôt. Mais, lorsque, nous, on reçoit ces demandes-là, ce sont vraiment des très petites entreprises qui démarrent.

Un des baromètres pour nous de l'activité agricole, c'est le type de prêt qu'on consent. On se souvient, il y a quelques années, on s'était inquiétés de l'endettement parce qu'on faisait beaucoup de refinancement en agriculture. C'était un baromètre d'une santé relativement précaire où les gens tentaient plutôt de solidifier leur base financière. Les indices qu'on a là par le tableau d'utilisation des sommes prêtées vont dans le sens tout à fait contraire. Actuellement, il y a beaucoup d'investissements à caractère, on peut dire, dynamique, achat de ferme pour consolider, pour grossir, pour être plus efficace, construction de bâtiments. On pense notamment au secteur porcin où il y a un remplacement important des installations et une modernisation également parce que l'infrastructure de production porcine a 20 ou 25 ans en moyenne et qu'il est temps de renouveler ce parc d'équipement là. Donc, c'est là qu'on retrouve 30 % au niveau de la construction, 2 % au niveau des animaux, la machinerie également 10 %. Alors, ce sont les principales catégories qu'on peut appeler dynamiques. À côté de ça, il y a évidemment l'échange de quotas laitiers qui, lui, ne crée pas une activité nouvelle, ça passe des mains de l'un à l'autre. Et il y a d'autres types de financement, consolidation de prêts garantis, donc c'est consolidation de prêts qui sont déjà chez nous, ou encore consolidation d'autres dettes, ce qui est assez fréquent.

Et je voudrais terminer sur les principaux enjeux de la Société. Pour nous, les enjeux portent, d'une part, sur les accès au financement, et c'est le but premier de l'organisation. L'argent est disponible, mais à quel prix et est-ce que l'argent est disponible vraiment partout? Notre fonction à nous, en tout temps, peu importent les cycles économiques, dans des conjonctures pas toujours bonnes, dans des régions souvent défavorisées et dans des productions souvent naissantes et en voie d'établissement, c'est de rendre disponible le financement. Ça, je pense, c'est l'objectif premier de l'organisme depuis sa création. Des fois, on dit: Être là contre vents et marées, ça veut dire ne pas retirer le parapluie lorsqu'il fait mauvais, ce qu'on a souvent reproché à quelques banquiers.

Deuxième: d'assurer une sécurité financière. On respecte cet objectif-là, même si on a modifié sensiblement le niveau d'intervention au niveau des taux, en assurant un parapluie contre les hausses de taux d'intérêt. Lors de la dernière réforme, on a jugé qu'un taux d'intérêt de 8 % de base, c'était raisonnable. C'est seulement au-delà de 8 % que l'intervention débute. Comme on a pu le voir au cours des dernières années, bien il n'y a pas eu de hausse, il n'y a pas eu de taux au-delà de 8 %, donc il n'y a pas eu d'intervention pour ce qui est des prêts consentis depuis deux ans.

Le développement régional qui est devenu pour nous un peu un dada, une priorité. La dernière réforme nous a permis d'entrer là-dedans. On a encore nos armes à faire, mais néanmoins le niveau d'activité qu'on a pu constater dans les segments d'agriculture à temps partiel et de nouvelles activités comme, par exemple, l'agrotourisme nous permettent tout de même de voir qu'on débute, mais de plain-pied dans ce secteur.

Et, enfin, le transfert graduel. C'est pour nous un objectif que d'amener l'agriculture à passer d'une génération à l'autre sans s'endetter comme elle l'a fait au cours des dernières générations. Il y a un phénomène un peu particulier au Québec, c'est qu'on croit qu'il faut, à chaque génération, endetter le patrimoine pour le passer à l'autre. C'est une chose qui est particulière au Québec, qui est culturelle et qui nous a amenés à tenter de passer, de véhiculer d'autres messages, de proposer d'autres formules, d'être, d'ailleurs, un intervenant entre deux membres de la même famille, entre deux générations pour garantir un prêt direct plutôt que de passer par une institution financière et augmenter le niveau de risque ou encore de proposer des formules comme l'élargissement de l'entreprise avec intégration d'une deuxième génération, de sorte que, avec le temps, il y aurait toujours plus ou moins une permanence de deux générations sur une entreprise. C'est une chose qui se voit couramment à l'extérieur, mais que, au Québec, on n'a pas vue beaucoup. Il faut donc tenter de changer ces mentalités-là, parce que la résultante du mode de transfert traditionnel au Québec, c'est de l'endettement et ça contribue largement au niveau d'endettement qu'on connaît ici. Alors, c'est un autre des objectifs que nous poursuivons et qui est pour nous une priorité.

Alors, voilà, c'est à peu près le tableau, là, des objectifs, des projets qu'on a sur la planche pour les prochaines années. Merci.

Le Président (M. Vallières): Alors, merci, M. Saint-Pierre. Avant de passer la parole à mes collègues, j'ai peut-être une question de précision très rapide. L'année dernière, vous nous aviez indiqué que 75 % des prêts avaient été approuvés dans les bureaux régionaux. Est-ce que cette tendance s'est maintenue au cours de la dernière année?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Le montant des prêts a été révisé, mais pas à la baisse, c'est-à-dire le montant d'autorisation par région, de sorte qu'on se situe encore à à peu près ce niveau-là, avec quelques variances, entre 75 % et 80 %. Certains régions où le montant des prêts est un peu plus petit vont peut-être atteindre le 80 % comme niveau moyen d'autorisation.

Le Président (M. Vallières): Les délais de traitement étaient de l'ordre de 15 jours en région. Est-ce que cette moyenne a été conservée?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Elle se situe entre 12 et 15 jours à l'heure actuelle, malgré des périodes relativement importantes qu'on a connues. Il y a eu des mois où la demande était extrêmement importante, puis, malgré tout, on a réussi à maintenir ça à l'intérieur d'à peu près ce niveau, ce seuil de 15 jours qu'on s'était fixé.

Le Président (M. Vallières): Est-ce que, M. Saint-Pierre, vous avez des données pour qu'on ait quelques précisions sur le pourcentage de fermes où on retrouve des sociétés présentement soit époux-épouse, ou père-fille, ou père-fils? Est-ce qu'on a un pourcentage dans la dernière année, là, supposons, ce qui a été autorisé?

(16 h 40)

M. Saint-Pierre (Michel R.): Je crois qu'on peut vous donner une réponse immédiatement. En attendant, je dois dire que le programme de subvention d'aide à l'établissement, qui s'était élargi en 1986, a permis à beaucoup de femmes d'adhérer. Donc, de plus en plus, on retrouve une société époux-épouse comme modèle de base. C'est un modèle qui tend à évoluer vers une corporation, parce que justement, comme je le mentionnais tout à l'heure, lorsqu'une deuxième génération se pointe, il devient beaucoup plus facile de procéder à une intégration dans une structure à capital-actions. C'est rendu à un certain niveau que la chose nous apparaît souhaitable.

Bon. Nous avons la réponse, mais essentiellement au niveau des subventions à l'établissement consenties. C'est une réponse que je dirais partielle à votre question; on peut tenter de trouver une réponse pour l'ensemble des prêts consentis. Au cours de la dernière année, les individus, donc personnes, propriétaires uniques, ont représenté 15,5 % de nos subventions à l'établissement; les sociétés, donc une société souvent époux-épouse, ou deux, ou trois membres d'une même famille, 35,9 %; les corporations, 32,9 %; et autres, ce serait peut-être indivis, 15,7 %.

Alors, on l'a pour l'ensemble des prêts, malheureusement pas en pourcentages. Si je regarde les plus gros chiffres en termes de nombre, sur 6 314 prêts consentis l'an dernier, 2 211 l'ont été à des sociétés; 1 796 l'ont été à des corporations; 1 576 l'ont été à des agriculteurs, des individus; et d'autres catégories mineures, agriculteurs, entrepreneurs conjoints ou emprunteurs conjoints et coopératives également, il y en a quelques-uns qui ont été consentis. Le gros, on peut dire... Les trois structures, les trois formes d'organisation les plus importantes sont, dans l'ordre: sociétés, corporations et individus.

Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata.

Mme Dionne: Oui, merci, M. le Président. Une petite question rapide et, ensuite, une sur le fond. Vous aviez un mandat du ministre de faire une étude sur l'impact financier des modifications à l'assurance-stabilisation dans l'industrie porcine. Il y avait un échéancier de prévu pour la remise au ministre, le 1er février. Est-ce que ça a été fait? C'est complété et c'est au ministre maintenant?

M. Saint-Pierre (Michel R.): On n'est pas à l'intérieur de notre échéancier, on le dépasse légèrement. On devrait terminer le travail, quoiqu'on est en train de rassembler les données, certainement d'ici à la fin de février.

Mme Dionne: O.K.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Il y a 350 entreprises qui ont été...

Mme Dionne: Visées.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...oui, qui ont été investiguées, on peut dire, là. C'est vraiment une étude très poussée de chacune des entreprises, parce qu'il faut voir sur chacune quelle est sa sensibilité réelle à des variations, parce que, bon, la sensibilité, on ne peut pas juste prendre un chiffre de résultat et extrapoler. Donc, c'est quand même un travail de fond qui s'est fait sur 351 entreprises sur un total de 1 500 à peu près.

Mme Dionne: Donc, il y en a à peu près le tiers qui sont évaluées.

M. Saint-Pierre (Michel R.): À peu près. Non, un peu moins que le tiers, 40 %, à peu près, là. C'est-à-dire, non, 30 %.

Mme Dionne: 30 %.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Oui, 30 %.

Mme Dionne: O.K. Donc, ça serait complété à la fin février, vous dites?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Pour la fin février, le résultat devrait être livré au ministre...

Mme Dionne: O.K., parfait.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...d'ici deux semaines, certain.

Mme Dionne: Ça va être fait. D'accord, merci. Quand on regarde le volet... Dans votre dernier tableau, vous avez parlé de développement régional. Si on regarde la demande alimentaire à travers le monde, les projections qui sont faites, si on regarde les jeunes diplômés en agriculture, le taux de placement est très élevé, si on regarde le nombre de terres abandonnées qu'il y a un peu partout, il y a de la place pour de l'agriculture qui est peut-être plus, à ce moment-ci, à risque, mais il y a du potentiel d'avenir. D'ailleurs, l'année 1996, je pense, en agriculture, a été très bonne, meilleure que d'autres secteurs d'activité.

Moi, ma question, M. le Président, c'est à l'effet: Est-ce que la Société regarde pour travailler dans des secteurs de première transformation soit sur la ferme ou... Par exemple, dans le domaine de l'acériculture, dans ma région, dans le moment, il y a énormément de développement, mais le baril de 45 gallons part de la région, s'en va, exporté comme ça et des fois on manque de financement, on manque de regroupement, on manque d'expertise. Il y a un tas de choses qui pourraient être faites. Est-ce que la Société, dans son mandat de développement régional, est en train de regarder des différents volets comme ceux-là, qui sont peut-être plus à risque que les secteurs dans lesquels la Société est présentement, mais qui pourraient permettre un développement de l'agriculture dans son ensemble? Prenons les terres abandonnées, les terres en friche, il y a certaines cultures différentes qui pourraient être faites, mais ce n'est pas les banques, ce n'est pas les caisses populaires qui vont se lancer là-dedans, qui vont appuyer des prêts si la Société n'y va pas en premier. C'est bien clair. Est-ce que vous regardez ce volet-là, ce développement-là dans le contexte du développement régional et avec toutes les possibilités qu'on retrouve au niveau des projections internationales?

M. Saint-Pierre (Michel R.): D'une part, on regarde, oui, et on essaie surtout de suggérer aux gens de regarder. Notre rôle, à l'heure actuelle, c'est surtout de faire la promotion d'une certaine ouverture, de raconter un peu des histoires à succès là-dedans. C'est surtout de cette façon-là. Il est très difficile pour nous, et d'ailleurs dangereux même, de suggérer une action précise et pointue à quelqu'un. Par exemple...

Mme Dionne: Mais est-ce que les règles, la loi et les règlements que vous avez présentement vous permettraient justement d'élargir et jusqu'où?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Tout à fait. On a fait, d'ailleurs, au cours de la dernière année complète, 35 interventions au niveau de la première transformation, pour un montant de 2 369 000 $. C'est des activités de toutes sortes, mais beaucoup de choses comme la mise en conserve de produits. Il y en a qui sont peut-être un peu plus... Je pourrais citer, parce que ça a été rendu public lors de conférences de presse, Les Jardins d'Émilie. C'est peut-être rendu un peu plus gros, mais c'était petit. Ils se développent vite, c'est peut-être leur caractéristique. Alors, c'est une transformation, tout de même, qui est partie comme ça d'un rêve, d'une idée qu'il fallait soutenir et on est derrière ce projet-là. D'autres projets moins publics qui sont du même type, soit des mises en conserve... Dans l'acériculture, ça va même quasiment jusqu'au restaurant, donc aux services de restauration à la cabane à sucre.

Mme Dionne: Dans les érablières.

M. Saint-Pierre (Michel R.): C'est ça. Ça peut être ça. La Fromagerie L'Ancêtre est un exemple également. Encore là, c'est un exemple peut-être d'une entreprise un peu plus grosse que celle auxquelles vous faites allusion, mais, quand même, on ne parle pas de gigantisme, là.

Mme Dionne: Si on parle, par exemple, dans le Bas-Saint-Laurent, de l'acériculture, il y a x nombre de gallons. Au lieu de les exporter directement ou de les passer par la Fédération des producteurs de sirop d'érable, avec tout le cheminement, si les gens décidaient de partir une entreprise pour faire de l'embouteillage en petits contenants, pour vendre directement, il y aurait une valeur ajoutée déjà avant que ça sorte de la région. Est-ce que c'est des créneaux dans lesquels la Société irait?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Tout à fait. C'est un créneau évidemment sujet à un plan d'affaires qui démontre une viabilité.

Mme Dionne: Oui, oui, tout à fait. On s'entend.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Mais c'est le genre de dossier également qui souvent nécessite qu'on soit là longtemps pour justement contribuer à rendre le dossier faisable, faire en sorte que les paramètres rendent le dossier viable en termes de perspectives. Donc, c'est des dossiers souvent qui se mènent sur une plus longue période qu'une simple transaction d'achat d'une ferme ou de construction d'une bâtisse. Mais on est là et un des objectifs est de faire connaître davantage cette ouverture parce qu'elle contribue, à notre avis, grandement à développer les régions.

On constate qu'en agriculture il y a, dans le fond, deux grandes tendances: il y a la grande ferme qui va aller vers les grands marchés, c'est l'entreprise qui produit sur un marché non différencié et qui produit du lait, qui produit des céréales; et il y a l'autre extrémité, mais tout aussi viable, il y a la petite entreprise qui se dirige vers le créneau, vers le marché souvent régional ou encore très pointu. Alors, ce sont les deux grandes tendances qu'on observe et pour lesquelles, nous, on doit être en mesure d'aider aussi bien un développement plus grand qu'une petite entreprise.

(16 h 50)

Mme Dionne: M. le Président, je pense que M. Saint-Pierre a dû voir sûrement que, dans La Terre de chez nous, on parle de la Société de financement. Le titre, c'est: La Société de financement serait trop frileuse . Il semblerait effectivement que, quand la Société de financement ne va pas dans un dossier, les banques n'y vont pas. Parce que vous êtes en agriculture, selon beaucoup d'experts, de caisses populaires et de gens, bon, bien, quand vous garantissez, vous prenez tout. Alors, vous êtes peut-être les experts et vous ramassez, là... Alors, si vous n'y allez pas, il n'y a pas grand monde qui va y aller. Alors, on vous qualifie de Société frileuse, particulièrement en Abitibi-Témiscamingue.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Oui, j'allais vous dire: En Abitibi, il faut dire qu'il fait plus froid qu'ici.

Mme Dionne: Des fois, il fait plus froid à Québec qu'en Abitibi. C'est plus humide ici.

M. Saint-Pierre (Michel R.): En fait, la déclaration de M. Mongrain qui est président de l'UPA visait effectivement quelques cas, qui, à son avis, n'ont pas eu la réponse qu'ils attendaient. Également, il y a le fait que, jusqu'à l'an dernier, on n'avait pas une direction régionale établie sur place, on n'avait pas un pouvoir décisionnel. On vivait une réalité qui était celle de délais de traitement plus longs. Tout ça faisait en sorte que le niveau de satisfaction était, d'une façon même mesurable, moins élevé qu'ailleurs. Alors, le résultat de tout ça, évidemment, c'est que le président de l'UPA régional nous fait part d'une certaine façon de son mécontentement.

Les résultats depuis l'instauration d'une direction régionale autonome avec pleins pouvoirs – puis ça date de moins d'un an – ont été qu'on a doublé le montant des prêts au cours de la même période correspondante entre l'année dernière et cette année et qu'on a passé nos délais de traitement de 26 jours à 13 jours dans cette même région. On n'a pas fini, je pense, malgré tout, le travail. On manque d'effectifs là-bas, c'est une des choses, région extrêmement grande, difficile à couvrir, ce qui fait en sorte que ça crée un contexte plus susceptible de mécontenter des gens. Mais on y travaille. On est à la recherche d'une personne, probablement un déplacement d'une personne qui est déjà chez nous, pour aller là-bas et particulièrement desservir la région d'Amos–Val-d'Or qui semble moins bien desservie que les deux autres, qui sont le Témiscamingue d'un côté et la région de La Sarre. On connaît assez bien la problématique de cette région-là.

Mme Dionne: Alors, comme ça, dans l'Abitibi-Témiscamingue, à l'avenir, la Société va être le chef de file?

M. Saint-Pierre (Michel R.): On prend des engagements. Ils organisent pour ce printemps, dans quelques semaines, la date n'est pas encore fixée, une sorte de rencontre régionale sur le thème du financement agricole. L'idée au départ, c'était de nous brasser un peu, il ne faut pas se le cacher. On est prêts à se faire brasser...

Mme Dionne: Vous répondez, O.K.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...mais également à donner notre version des faits, là.

Mme Dionne: Mais vous êtes fort conscients de l'impact de la Société dans le domaine agricole partout à travers le Québec. Effectivement, vous avez une lourde responsabilité parce que, si vous n'y allez pas, vous dégagez des tendances de toute façon. Dans des secteurs qui seraient plus à risque, on va moins retrouver les institutions financières dites normales sur le terrain si vous n'êtes pas là; ils vont être très frileux, eux autres aussi, là. C'est une responsabilité. Bon, bien, peut-être qu'avec l'implication et l'envergure que vous avez prise au fil des années ça a fait que vous avez aussi cette responsabilité-là en développement régional que vous n'aviez pas auparavant parce que, bon, les institutions financières ne se basaient pas autant sur votre expertise pour appuyer l'agriculture.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Nous sommes conscients de ce phénomène-là et du rôle qu'on peut jouer dans des domaines comme, par exemple, le maintien d'un bassin laitier régional. C'est une chose que... À l'époque, on ne soupçonnait pas beaucoup l'importance de ce phénomène-là. Or, aujourd'hui on participe à toute une série d'activités pour garder le dans la région. Et on voyait récemment que, suite à une intervention collective dans laquelle on est partie prenante, l'an dernier, au Lac-Saint-Jean, bien ils ont augmenté leur part du quota laitier provincial qui semblait être en baisse sur une base annuelle. Alors, ce genre de chose là, on est tout à fait conscients de l'importance. Lorsque l'occasion se présente, écoutez, on se pointe et on participe à des activités pour faire la promotion de nos services, mais également de l'impact qu'on peut créer, qu'on peut jouer là-dedans.

Mme Dionne: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, j'avais une demande d'intervention du député de Saint-Jean.

M. Paquin: Oui. On est à combien de mois de l'événement de Beauce-Grain, de la faillite? Ça fait combien de mois, maintenant?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Beauce-Grain, c'était au printemps? Est-ce que ça fait un an?

M. Paquin: O.K. Alors, ce que je me demandais, c'est que, bon, à cette époque-là, je sais que la Société de financement agricole avait montré ouverture, et souplesse, et compréhension, et tout ça, là, dans le refinancement de plusieurs agriculteurs qui étaient pris dans la tourmente d'un événement dans lequel ils étaient victimes et lesquels s'étaient enquis d'abord s'ils pouvaient faire confiance à une institution, et tout ça. Mais, sans revenir sur l'événement lui-même, ce que je voudrais savoir, c'est: Bon, bien, plusieurs mois après, est-ce que, à votre connaissance, il y a des faillites? C'est quoi, le portrait des gens dans ce secteur-là, brièvement?

M. Saint-Pierre (Michel R.): On a fait une étude et les dernières données qu'on a: sur 70 entreprises touchées, 63 ont été étudiées et contactées, donc ont donné suite à un appel de notre part pour faire l'état de situation; sept d'entre elles n'ont pas répondu à notre appel. Donc, on a quand même un portrait relativement complet: 63 sur 70. Là-dessus, 49 étaient et sont encore en bonne situation financière, d'autant plus que le marché des céréales a été très bon dans les 12 mois qui ont suivi. Alors, 70 % ou 49 d'entre elles sont en bonne situation financière et aucune intervention n'était nécessaire. Sur 14 qui étaient en difficulté ou considérées comme telles, il y a eu 10 interventions de notre part; il y a eu deux interventions additionnelles – donc, on est rendu à 12 – qui ont été faites par d'autres prêteurs; et deux entreprises qui font actuellement l'objet d'un suivi périodique, quasi mensuel, de notre part et qui exigeront peut-être, le cas échéant, une intervention d'urgence, là. Il en reste deux, finalement.

En réponse à votre question plus précise, il n'y a pas eu de faillite, à ce jour. La perte moyenne par entreprise était de 28 000 $, mais il y a eu des écarts importants entre la moyenne de 28 000 $... Certains ont perdu des sommes aussi importantes que 250 000 $. Par ailleurs, ce n'était pas celles qui étaient en plus grande difficulté financière.

M. Paquin: Pardon?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Ce n'était pas celles qui étaient en plus grande difficulté financière. Celle qui a perdu le plus, de mémoire, c'était autour de 250 000 $...

M. Paquin: Oui, c'est ça.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...et elle n'était pas en difficulté financière.

M. Paquin: Oui. Les sept qui n'ont pas répondu, est-ce qu'ils sont toujours en affaires, à votre connaissance?

M. Saint-Pierre (Michel R.): On n'a pas de données...

M. Paquin: Vous n'avez pas de données sur les sept.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Il y a eu un contact qui a été fait et ils n'ont pas souhaité, tout simplement, qu'on aille plus loin dans l'étude de leur dossier.

M. Paquin: Alors, je vous remercie pour le tableau. Je voudrais aller sur un autre sujet complètement. Tantôt, vous avez énoncé quatre enjeux dans votre présentation. Notamment, vous avez parlé du développement régional. Vous avez peut-être insisté plus sur les trois autres que sur celui-là. Sur l'enjeu du développement régional et dans le contexte actuel particulier, comment vous situez votre action? C'est quoi, votre stratégie d'ensemble? C'est quoi, vos intentions?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Bien, au départ, on a regardé un peu la toile de fond de ce qu'étaient les besoins régionaux. Quand on parle de développement régional, évidemment toutes les régions sont des régions, mais, dans le concept de développement régional, on pense davantage à celles qui sont un peu moins pourvues en termes d'avantages agroéconomiques, de qualité de terres, éloignées des marchés, et ainsi de suite. Donc, on a voulu prendre d'abord conscience de ce qu'était la réalité, ce qui nous a menés à élargir, de fait, notre programme l'an dernier pour englober des activités qui, jusqu'à présent, étaient exclues, et je mentionnais l'agriculture à temps partiel, ce qui est très important dans ces régions-là.

On parlait tout à l'heure de l'Abitibi. Une production importante en Abitibi et qui se fait sur une base temps partiel, c'est la production bovine. Or, dans l'ancien programme, il ne nous était pas possible de soutenir ce genre de développement là. Et la deuxième plus importante production dans le domaine de l'agriculture à temps partiel jusqu'à présent ou depuis un, ça a été justement la production bovine. La plus importante, c'était l'acériculture. Beaucoup de cette production acéricole se fait dans le Bas-Saint-Laurent–Gaspésie. Donc, ce sont des actions concrètes qui nous aident à soutenir le développement régional.

(17 heures)

D'autres initiatives qu'on a prises, ça a été d'être présents dans le milieu, de faire part de notre disponibilité, bon, avec les moyens qu'on a, là. On n'a pas de très grands moyens en termes financiers pour faire de la publicité, mais, malgré tout, on a tenté d'être les plus présents possible dans le milieu pour suggérer aux gens des démarches dans ce sens-là. Les résultats, tout de même, à ce jour, si on parle, au cours de la dernière année, de 800 prêts à peu près, 778 prêts en agriculture à temps partagé en neuf mois, c'est tout de même éloquent. Le chiffre qu'on va atteindre au total dans les nouvelles productions, qui inclut la transformation, qui inclut l'agrotourisme, va frôler les 100 000 000 $, ce qui était le niveau total des activités de la Société dans tout le secteur agricole il y a à peine une douzaine ou une quinzaine d'années. Donc, on est tout de même dans des chiffres importants.

M. Paquin: Est-ce qu'il y a des cas là-dedans, dans ces nombreux dossiers là – je ne sais pas, moi – de transformation à la ferme, par exemple, qui ont une ampleur industrielle ou si c'est plutôt des activités accessoires? Autrement dit, quand vous allez dans des domaines voisins de l'agriculture ou compatibles avec l'agriculture sur des établissements agricoles, dans le cas, par exemple, de la transformation à la ferme ou de la mise en marché, et tout ça, est-ce qu'il y a des installations qu'on pourrait qualifier d'industrielles?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Oui. Je vous donne des exemples sans nommer les entreprises: une entreprise de transformation et mise en marché de laine de mohair; une entreprise de fabrication et distribution de jus de pomme frais; une fromagerie, en fait, ce n'est certainement pas la seule parce qu'il y a celle qui a été plus connue et, je l'ai mentionné, qui est de notoriété publique, c'est Fromagerie L'ancêtre; il y a un centre de transformation acéricole dans le Témiscouata; une autre fromagerie de chèvre. Alors, ce sont des exemples d'entreprises, de petites entreprises.

M. Paquin: En agrotourisme, par exemple, hébergement à la ferme ou des choses comme ça, est-ce que vous avez des choses aussi?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Il y a aussi eu, dans la liste des entreprises de biens et services qu'on appelle, un nombre important d'entreprises qui sont d'hébergement à la ferme, de tables champêtres également, de plus en plus. C'est souvent combiné avec d'autres choses.

M. Paquin: Je m'intéresse à ce domaine-là parce que, bon, évidemment, là vous situez ça, et à juste titre, dans une perspective de développement régional, donc en faisant en sorte de diversifier les possibilités pour les gens qui tiennent feu et lieu dans ces régions-là et de diversifier leurs activités pour tirer de plus grands bénéfices. Par contre, ce qu'on observe dans certains coins de la Montérégie notamment, pour parler de cette région que je connais mieux que les autres, c'est que, après ça, une fois que les gens sont installés dans leurs activités, ça créé une pression sur l'agriculture comme telle. Par exemple, une fois que vous avez un comptoir attrayant, ou un lieu à connotation agrotouristique, ou des choses comme ça, bien ça créé des pressions pour empêcher certains élevages ou certaines activités agricoles qu'on pourrait appeler de première ligne, hein, ou plus fondamentales chez les producteurs à temps plein, ou des choses comme ça.

En conséquence, est-ce que, au moment d'accorder vos supports, vous prenez ces éléments-là, des critères comme ceux-là en considération pour accepter ou refuser un prêt en termes de structuration, puisque c'est dans votre axe de développement régional, ou est-ce que vous consentez ces prêts-là et que vous indiquez des conditions à l'effet que ça ne peut pas nuire à telle et telle autre production voisine, ou des choses comme ça? Autrement dit, puisque vous êtes devenu un intervenant dans ce domaine du développement régional en aidant – je pense qu'on peut être favorable très bien à ça – est-ce qu'en même temps vous avez des précautions de ne pas déstructurer les acquis soit, en accordant les prêts, au niveau des critères ou, en les ayant accordés, en termes de conditions complémentaires?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Je pense bien que dans plusieurs cas, la préoccupation, par exemple, de concurrencer un autre n'est pas nécessairement... Je veux dire, il y a des cas tellement pointus et tellement uniques que, bon, il n'est, de toute évidence, pas question beaucoup d'une concurrence ou de déstabiliser un marché ou une économie précise, sauf que, dans la plupart des entreprises de transformation qui sont devenues moyennement importantes, on demande un avis sectoriel au ministère de l'Agriculture.

M. Paquin: De?

M. Saint-Pierre (Michel R.): On demande un avis sectoriel au MAPAQ qui, lui, a une vision beaucoup plus large de ce qu'est un secteur précis de transformation et qui nous livre, sans obligation de notre part, tout de même le portrait d'une économie. Prenons un exemple. Si des producteurs viennent nous voir pour mettre en place, ériger un abattoir, on va définitivement demander un avis sectoriel parce qu'il s'agit d'un secteur pour lequel... D'abord, nous, on n'a pas une très grande expertise au niveau de la transformation et il y a toute une série d'autres joueurs qu'il est important de connaître.

M. Paquin: Donc, vous avez ce souci. Il arrivera donc, par exemple, dans un projet à caractère plus industriel en milieu rural, que vous preniez la précaution d'aller au ministère de l'Agriculture demander un avis sectoriel. Est-ce que c'est vrai aussi pour l'agrotourisme?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Je ne pense pas que, jusqu'à présent, il y ait eu des demandes d'avis sectoriels pour des activités d'agrotourisme. On parle quand même de financement de montants relativement modestes et pour lequel... Bon, je ne le sais pas, jusqu'à présent, en tout cas...

M. Paquin: Bien, c'est parce que je peux vous donner des exemples à peine hypothétiques. Vous avez, par exemple, des vignobles qui sont installés à un endroit et où on veut faire des tables champêtres. Ça entre en collision avec les perspectives d'élevage dans le milieu avoisinant ou avec des cultures qui sont déjà implantées ou des élevages qui sont déjà dans le milieu. Alors, c'est pour ça que je pose la question. Dans le cas de l'industriel, vous m'avez répondu. Je pose la question dans l'autre domaine. Quand ça va du côté secondaire, en agriculture comme dans l'agrotourisme, est-ce que vous avez le même souci, la même précaution?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Bien, on va le regarder sur une base de risque, bon, quels sont les enjeux liés à cette entreprise-là, et on va essayer de trouver le plus possible quels sont les facteurs qui peuvent jouer sur l'avenir de ce projet-là, qui peuvent influencer sa viabilité. Donc, il peut y avoir des facteurs environnementaux qui vont être soulignés et ça fait partie du processus d'analyse, bien sûr.

M. Paquin: Ma préoccupation va un petit peu dans l'autre sens ou dans le corollaire, c'est-à-dire que le fait d'avoir une implantation et un développement dans une zone agricole sur un projet à caractère secondaire, si on veut, il ne faudrait pas que ça vienne déstructurer le caractère primaire du milieu. C'est dans cet esprit-là que je posais la question, et non pas sur la viabilité d'entreprise pour laquelle vous prêtez, mais sur l'effet déstructurant de son positionnement, surtout si elle réussit. C'est là-dessus, là, qu'est ma préoccupation ici.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Il faut dire que, en ce qui nous concerne, la limite maximum des interventions, qui est de 1 000 000 $, est vite atteinte lorsqu'on parle de transformation alimentaire. Que ce soit dans le domaine des viandes ou de la transformation de fruits et légumes, ça reste un montant relativement petit par rapport aux besoins et aux normes de salubrité dans ce secteur-là. Donc, assez rapidement, les projets prennent une envergure et atteignent des besoins financiers qui dépassent notre cadre d'intervention à nous. Dans le cadre des projets qui sont de notre ressort, à l'intérieur d'un montant maximum de 1 000 000 $, les impacts sont généralement plus limités sur l'économie régionale.

M. Paquin: Mais ils peuvent avoir un effet déstructurant. En tout cas, moi, je vous invite peut-être à faire une petite réflexion là-dessus, en tout cas, à faire attention en faisant un développement – je pense que c'est souhaitable et je partage les axes de développement que vous avez, je partage votre souci, en particulier pour le cas des industries – de ne pas faire en sorte d'appuyer un développement dans un milieu qui aurait comme effet de déstructurer ce milieu-là sur ce qu'il a de fondamental en termes d'agriculture. C'est simplement là-dessus, là, que je faisais porter mon intervention.

La Présidente (Mme Vermette): Oui, alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Je voudrais juste vous poser une question par rapport... Bon, peut-être pour conclure. Vous parliez, en fait – je ne sais pas si c'est au moment des auditions l'année dernière, moi, je n'étais pas tout à fait présente là, mais je l'ai lu – au niveau de la formation, des gens qui demandent des prêts chez vous. Il y a beaucoup de gens qui ont plus ou moins de formation et vous mentionniez que, dans sept cas sur 10, il y a des possibilités, dans le fond, que la viabilité de l'entreprise ne soit pas nécessairement très intéressante s'ils n'ont pas la formation. Est-ce que vous vous êtes penchés sur cet aspect-là? Êtes-vous allés plus large là-dedans? Maintenant, est-ce que vous demandez que les gens soient mieux formés? Faites-vous de la formation? Ça fait partie de vos tâches?

(17 h 10)

M. Saint-Pierre (Michel R.): D'une part, la formation, pour nous, il y a un volet incitatif qui est une subvention à l'établissement avec un volet formation, avec une exigence de formation. Donc, le montant qui est de 10 000 $ ou de 20 000 $ par jeune qui s'établit est déjà une incitation assez importante, d'une part, vers la formation. Pour être plus précis, la subvention de 10 000 $ est offerte à tout jeune qui finit avec un Diplôme d'études professionnelles en agriculture, c'est un niveau secondaire avec une formation spécialisée, et la subvention de 20 000 $ est offerte à des jeunes qui ont un niveau D.E.C. en agriculture. Donc, cette subvention-là vise justement à créer un mouvement vers la formation. D'une part, il y a ça.

D'autre part, dans l'analyse globale d'un prêt qu'on fait, qu'on consent, il y a des considérations qui ne sont pas nécessairement la formation comme telle, mais il y a la capacité de gérer une entreprise. Bien souvent, c'est lié à la formation. On l'a également démontré en faisant des études et en se référant à des études universitaires sur la fréquence des faillites ou des échecs en agriculture par rapport au niveau de formation, il y a une corrélation très évidente entre échec et non-formation en agriculture.

Donc, tout ça nous amène, et pas seuls, de concert avec le ministère de l'Agriculture, à faire la promotion de la formation avec un incitatif que je mentionnais qui est relativement important. Il n'y a pas grand monde dans d'autres secteurs qui bénéficient d'une subvention de 20 000 $ pour se former avant de s'en aller en agriculture. Également, ça a eu comme impact une augmentation extrêmement importante au niveau des inscriptions dans les établissements qui dispensent ces formations-là, c'est-à-dire les quelques cégeps, cinq cégeps pour ce qui est du D.E.C., plus les deux ITA. Alors, il y a eu une augmentation extrêmement importante du nombre d'inscriptions. Donc, il y a quand même un mouvement vers ça.

Le discours de formation a également été repris par l'ensemble du milieu, ce qui n'était pas évident au départ. Au départ, la formation, on la regardait bien souvent avec un sourire en disant: Bien, j'ai réussi, mais je ne suis pas allé à l'école, ou on se référait à la génération un peu plus vieille qui n'était pas allée à l'école puis qui avait réalisé de beaux développements. Mais aujourd'hui je pense que le consensus dans le milieu, que ce soit au niveau des structures de représentation comme l'UPA, c'est de supporter ça, de supporter le développement. Donc, il y a eu vraiment une amélioration extrêmement importante au cours des cinq ou six dernières années parce que le critère de formation existe depuis le début de 1990.

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce que les taux de faillite ont diminué depuis ce temps-là? Est-ce que vous voyez une diminution des taux de faillite au cours des cinq dernières années, à partir du moment où vous avez commencé à aujourd'hui?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Je pense qu'il est un peu tôt. D'autre part, le niveau de faillites est toujours très bas depuis quelques années. Le taux de faillite, le taux, aussi bien, d'arrérages que de pertes pour mauvaises créances est extrêmement bas depuis le début des années quatre-vingt-dix. La conjoncture a été relativement favorable. Donc, il est difficile, dans un tel contexte, de faire une relation entre formation et faillite. C'est peut-être dans des contextes plus difficiles qu'on peut le mesurer.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie bien. M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. Chenail: M. le président, vous avez parlé tout à l'heure de maximum de 1 000 000 $ pour les fermes. Chez nous, dans notre région, un acre de terre noire, vous savez que ça se vend 5 000 $. Donc, le gars qui achète 200 acres de terre, son maximum est atteint. Les fermes de 200 acres de terre noire, vous savez qu'elles ne sont pas rares dans ma région; chez nous, on en a 3 000. C'est une exception, peut-être, là. Mais, après ça, si on met les bâtisses, la machinerie, puis ainsi de suite, finalement, c'est que de plus en plus d'agriculteurs de ma région sont obligés d'aller se financer ailleurs. Puis vous savez que dans les banques, quelqu'un disait tout à l'heure: Ce n'est pas évident. Dans les caisses populaires non plus. Donc, on arrive avec un gros problème. Ce problème-là va aller en s'accentuant, à moins que vous fassiez des changements. La même chose aussi au niveau des marges de crédit, ce qui a été une bonne initiative, mais le montant qui est quand même de 500 000 $, pour plusieurs agriculteurs, ça peut suffire, mais, dans notre milieu, avec l'exportation qu'on fait aux États-Unis, puis tout ça, bien on n'arrive pas facilement à se financer chez vous par rapport à ça.

Je me demandais de quelle façon vous prévoyez l'avenir dans ce domaine-là. Parce que, quand on regarde ce qui se passe dans ma région, les gens du coin ont acheté des terres cet automne 5 000 $ l'acre. Les gens grossissent. Ça fait que, plus ils grossissent, plus ils vont s'en aller de chez vous parce qu'il n'y a personne qui va les prendre. Le voisin achète le voisin. Finalement, avec les marchés qu'on a aux États-Unis pour exporter dans les légumes, bien les gens grossissent. Si le financement ne grossit pas avec, bien les gens se revirent de bord et ils sont obligés d'aller au gouvernement fédéral pour régler leur problème. Les gens, bien souvent, aimeraient mieux rester au provincial. Je ne sais pas de quelle façon vous pourriez envisager de régler le problème à court terme, mais c'est vraiment un gros problème, pour ma région surtout.

M. Saint-Pierre (Michel R.): La façon n'est pas compliquée, c'est de proposer, comme ça a été le cas dans l'histoire, des augmentations. Là, peut-être, justement, on est à une époque où les étapes se franchissent plus vite qu'elle ne se sont franchies dans le passé. Je crois que c'est une question que l'on peut simplement, nous, retenir et suggérer, parce que, effectivement, peut-être que le pourcentage des entreprises agricoles qui excèdent en besoin notre montant maximum va aller en augmentant. Alors, je crois que le milieu est certainement peut-être un peu plus sensibilisé aujourd'hui à cette réalité-là qu'il ne l'était il y a cinq ans. Une suggestion dans ce sens-là peut certainement amener à faire hausser et même à faire sauter le maximum de prêt. Mais, pour l'instant...

M. Chenail: Mais vous ne pensez pas que vous pourriez vous baser, mettons, je ne sais pas, moi, d'après l'acrage, d'après la valeur des terres? Parce que, vous-même, vous disiez tout à l'heure, je pense, que la valeur des terres a remonté, et tout ça. Donc, ça aussi, ça devrait suivre automatiquement. Dans le fond, il ne devrait pas y avoir de plafond, parce que, là, les personnes qui grossissent, qui achètent le voisin, elles sont obligées d'aller se financer ailleurs. Dans le fond, elles créent des jobs, elles créent de l'emploi, elles créent de l'économie, et puis les gens s'en vont au fédéral parce qu'ils n'ont pas les crédits qu'il faut au provincial. Vous ne pensez pas qu'on devrait, dans un avenir rapproché, changer ces barèmes-là et y aller avec des barèmes selon les besoins des gens, dans le fond? C'est aussi simple que ça, d'après moi.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Écoutez, en ce qui me concerne, je suis assez convaincu de cette nécessité-là et puis je suis prêt à porter le message. Effectivement, ça peut être en faisant évoluer à la hausse le maximum ou ça peut être en intégrant un autre critère, comme vous le suggérez, qui pourrait être un ratio. Oui, je suis porteur de votre message.

M. Chenail: Si la commission vous faisait une recommandation dans ce sens-là, ça vous aiderait?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Ah! Bien sûr.

La Présidente (Mme Vermette): M. le député, je retiens, en fait, votre recommandation. Vous en faites une recommandation à la commission?

M. Chenail: Oui.

La Présidente (Mme Vermette): Donc, nous allons la retenir en termes de recommandation et on verra pour la suite des choses.

M. Saint-Pierre (Michel R.): J'aimerais ajouter...

Une voix: À l'unanimité.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...que les producteurs avaient signifié, eux, à l'époque, lorsqu'on parle de la réflexion qui a été amorcée au début de 1990, leur volonté de voir un plafond. Je vous le signale à titre d'information, l'UPA avait fait une représentation dans ce sens-là.

La Présidente (Mme Vermette): Je vous remercie. Est-ce que vous avez d'autres questions, M. le député?

M. Chenail: Non, ça va aller.

La Présidente (Mme Vermette): Alors, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, très rapidement, Mme la Présidente. M. Saint-Pierre, vous avez mentionné tantôt, là, qu'en 1992-1993 l'évolution au niveau des activités de prêt étaient du «wait and see» comme tel. Ça a repris avec beaucoup de dynamisme au cours des dernières années. Si on regarde les transactions de quotas cette année par rapport à l'an passé, cette année, ça constitue 11 % de vos activités comparativement à 6,6 % l'an passé. Donc, ça a repris dans ce domaine-là aussi. Est-ce que la Société prête ou à quel pourcentage la Société prête-t-elle sur un quota? Et vos calculs sont faits sur une base de combien d'années, là?

M. Saint-Pierre (Michel R.): D'une part, ce n'est pas sur un pourcentage d'une transaction comme telle, c'est beaucoup plus sur la capacité financière d'une entreprise, parce que, pour tout besoin, ça peut être 100 % du besoin si la structure financière permet que ce soit ainsi.

M. Paradis: Ah! Bien, vous avez en garantie le fonds de terre, et tout ça, là. Non, mais sur le quota à l'état pur, là?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Mais ce n'est même pas une question de garantie de fonds de terre, c'est beaucoup plus la structure financière en termes de ratio dette-équité global. Alors, le nouvel achat peut être financé à 100 % si le reste des actifs ne l'est pas beaucoup. Mais je continue quand même ma réponse au niveau, par exemple, des critères. Le critère premier, c'est beaucoup plus une capacité de faire face à un paiement, un repaiement, un «payback» sur une période de cinq ans. C'est le critère qu'on a mis de l'avant au cours des dernières années. O.K., il s'est passé cinq ans depuis et le système marche encore...

(17 h 20)

M. Paradis: Votre période, c'est cinq ans.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...mais l'avenir, je ne le connais pas dans ce domaine-là. Je pense que la prudence voulait qu'on donne ce signal-là au milieu, qu'on invite des gens qui sont en mesure d'avoir une rentabilité marginale sur un tel achat qui permette de faire un remboursement sur cinq ans à venir nous voir. Ce signal-là, en même temps, c'est aux autres de dire: Écoutez, si l'achat d'un quota n'est pas rentable pour vous, bien il vaudrait peut-être mieux s'orienter différemment.

M. Paradis: O.K. Pour prendre un exemple d'une production qui est quand même, sans être très importante, assez importante, la production des oeufs. On me dit que les quotas ont une valeur approximative de 50 $ par poule. Un jeune qui veut se partir, ça lui prend un poulailler, pas gros, là, 10 000 pondeuses, une petite entreprise.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Au moins.

M. Paradis: Est-ce que la Société va embarquer? Il se part, lui; ce n'est pas un achat de quota pour rajouter au 10 000 ou 20 000 qu'il a déjà, il commence. Vous financez jusqu'à quel pourcentage?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Non. Je pense qu'il n'y a aucune étude qui pourrait nous démontrer la rentabilité d'un achat global à partir du prix des quotas à l'heure actuelle. Le phénomène des quotas, c'est un drôle de phénomène où le prix, comme celui de n'importe quelle valeur boursière, est établi à la marge. Donc, c'est une transaction marginale qui fait que ce prix-là existe. Dans le domaine de la volaille particulièrement, mais c'est un peu vrai également dans le domaine du lait, si on devait financer la totalité d'une ferme laitière ou avicole en incluant un quota, il n'y a personne qui pourrait arriver.

Donc, évidemment, ça nous amène à repenser toute la situation ou la problématique, comme on dit des fois, du transfert d'entreprise, de l'établissement sur la ferme et à regarder des avenues alternatives. Mais c'est certain que tout le monde va être frustré si on tente de faire une transaction en bloc pour établir quelqu'un sur une ferme, encore plus avicole parce que, comme vous le dites, la valeur du quota en aviculture est devenue absolument faramineuse par rapport à la valeur des installations. Alors, je pense que le non-tangible vaut trois fois ce que le tangible vaut dans une ferme avicole.

M. Paradis: Dans un autre domaine, on sait que la Société de développement industriel a signé avec le ministère de l'Environnement, il y a quelques années, un protocole d'entente à l'effet qu'elle ne déboursait pas dans un dossier si l'entreprise n'était pas en règle avec le ministère de l'Environnement. Est-ce que vous avez le même style d'entente ou de politique à la Société?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Oui. Ce n'est pas une entente avec le ministère, c'est une politique.

M. Paradis: Bien, à la SDI, c'est une entente interministérielle.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Nous, c'est une condition. Évidemment, le ministère de l'Environnement le sait. Bon, il procède, dans la mesure du possible, en sachant ça et avec diligence lorsqu'il est possible. Mais ce n'est pas une condition qui est liée dans une entente, c'est une condition qui, pour nous, fait partie de nos politiques administratives. On exige que tous les permis soient détenus par l'entreprise qui opère. Dans le cas, par exemple, d'une entreprise porcine, on exige également que la rentabilité soit démontrée sur les volumes autorisés et non pas sur des volumes additionnels. Alors, si quelqu'un a un volume autorisé de 3 000 porcs et qu'il nous disait qu'il arrive bien avec 4 000, on va refaire les calculs avec 3 000. Et sa rentabilité...

M. Paradis: Si vos calculs arrivent, même s'il est en infraction avec l'Environnement, vous payez pareil?

M. Saint-Pierre (Michel R.): Écoutez, on peut toujours le signaler. D'une part, du côté stabilisation, il va y avoir un problème aussi là, parce que le nombre, jusqu'à présent, n'était pas lié, mais il l'est maintenant ou il va l'être – je ne le sais trop, là, s'il va l'être. Donc, il y a un problème là certainement. D'autre part, on ne peut pas commencer non plus à suivre quelqu'un, là, on ne peut pas commencer à le suivre au niveau de ses pratiques. Notre intervention dans une entreprise agricole...

M. Paradis: Non, non, au moment du déboursé, là, au moment de l'approbation.

M. Saint-Pierre (Michel R.): ...se fait aux trois ans ou quatre ans. Pour nous, l'entreprise doit être en règle, mais on n'a pas d'inspecteur pour aller vérifier et compter, là. Tout, au niveau documentation, doit être bien appuyé pour qu'on puisse donner suite à une demande.

La Présidente (Mme Vermette): Est-ce que vous avez d'autres questions? Est-ce qu'il y a d'autres questions? Alors, sur ce, M. Saint-Pierre, M. le président, on vous remercie d'avoir bien voulu répondre à nos questions et de nous éclairer aussi par rapport à la Société de financement agricole. Alors, je vous remercie bien.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Merci.

La Présidente (Mme Vermette): J'ajournerais nos travaux à demain matin, 9 h 30.

M. Saint-Pierre (Michel R.): Merci et bonne soirée.

(Fin de la séance à 17 h 25)


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