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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 25 mars 1998 - Vol. 35 N° 27

Audition de la Commission de protection du territoire agricole du Québec dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes publics


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Table des matières

Journal des débats


(Quinze heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouvre sa séance. Le mandat de la commission pour notre séance est de procéder à l'audition de la Commission de protection du territoire agricole du Québec dans le cadre d'un mandat de surveillance d'organismes pour discuter principalement de la problématique entourant la mise en vigueur de la loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles, de même que du bilan de la tournée d'information entreprise à ce sujet par la Commission auprès des MRC et sur certaines difficultés rencontrées d'application au cours de son mandat.

Alors, est-ce que, M. le secrétaire, nous avons des remplacements d'annoncés?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon) est remplacé par M. Brodeur (Shefford).

Le Président (M. Vallières): C'est le seul remplacement?

(15 h 20)

Le Secrétaire: Oui.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, la plus cordiale bienvenue à...

M. Paquin: Il y a un autre remplacement.

Le Président (M. Vallières): Un autre remplacement? Bon. Oui. Quel est-il?

Le Secrétaire: Alors, M. Laprise (Roberval) est remplacé par M. Paquin (Saint-Jean).

Le Président (M. Vallières): Excellent. Alors, cordiale bienvenue à tous les membres de même qu'à nos invités.


Exposé du président de la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ)

Et, sans plus tarder, je pourrais passer la parole à M. le président de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation...

M. Ouimet (Bernard): Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): ...M. Ouimet; Commission de protection du territoire agricole, excusez. Oui. Alors, M. Ouimet, M. le président.


M. Bernard Ouimet

M. Ouimet (Bernard): Je vous remercie, M. le Président. Mes premiers mots vont être pour vous remercier de nous permettre de faire le bilan avec vous des premiers mois d'application du nouveau régime, d'autant plus que nous vous sommes redevables, parce que, si on travaille dans un régime qui a été renouvelé, c'est certainement de la part de la collaboration des deux côtés de la Chambre, sur le plan des parlementaires, qui fait qu'on peut travailler avec une loi, maintenant, qui a des perspectives et de l'avenir.

Je voudrais d'abord présenter mes collègues avec moi. Ce sont des gens du comité de gestion de la Commission: François Duranleau, directeur de l'analyse et de l'évaluation; Serge Cardinal, directeur des affaires juridiques et des enquêtes; Carole Jutras, qui est en charge des services administratifs, de la coordination et principalement, je vous dirais, sur toute l'opération de la reddition de comptes, dont vous allez voir des bénéfices aujourd'hui; en arrière, Gary Coupland, vice-président de la Commission, qui fait partie également du comité de gestion, que vous connaissez bien aussi; et Lévis Yockell, qui est professionnel à la Commission, qui a travaillé énormément à la préparation des documents d'aujourd'hui.

Peut-être juste vous situer dans les documents d'ensemble que nous vous déposons aujourd'hui. Vous avez ici un document qui présente l'ensemble de notre présentation; je vais le parcourir très rapidement, sachant qu'on l'a préparé pour vous et que vous pouvez le conserver et le partager avec vos collaborateurs.

Également, vous avez un bilan statistique des rencontres de formation qu'on a faites auprès des MRC, plus détaillé. Et vous avez le premier document de reddition de comptes de la Commission, comme on s'y était engagé l'an passé aussi au niveau du rapport annuel, qui est tout chaud mais qui donne les premières données des premiers mois d'application de la loi. Et, profitant de vous voir aujourd'hui, vous recevez, en même temps que nos interlocuteurs du milieu, notre nouveau mode de fonctionnement dans le cadre de la réforme de la justice administrative qui va commencer la semaine prochaine, jour pour jour, au 1er avril.

Je n'utiliserai pas tout mon temps, M. le Président, qui est de 45 minutes, pour vous permettre de poser plus de questions, pour qu'on ait un bon échange, cet après-midi. Il demeure néanmoins que j'aurais besoin certainement d'un bon 20 minutes – 20, 25 minutes – pour parcourir rapidement le document que vous avez en main.

Alors, il est composé de trois parties essentiellement, c'est-à-dire un rappel sur l'objet, l'esprit, les principales modifications des couleurs du nouveau régime. Deuxièmement, c'est le coeur de notre rencontre, un bilan sommaire de la mise en oeuvre de l'application du nouveau régime. Ça veut dire que là, à ce moment-là, on fera le point sur les documents qu'on avait préparés sur la rencontre avec les MRC et avec d'autres intervenants. Nous ferons le point sur la réglementation qu'on devait préparer. Nous ferons le point également sur le résultat des premières décisions en termes de motivation, comme on s'y était engagé, et peut-être pour terminer avec ce qui s'appellerait, en tout cas de notre point de vue, les enjeux, les deux ou trois principaux enjeux pour les 12, 15 prochains mois. Et finalement, vous avez le document sur la réforme de la justice administrative qui résume très bien notre nouveau mode de fonctionnement.

Alors, si on arrive à la page 1 de 24, c'est-à-dire ce qui caractérise notre régime, on a synthétisé ça dans, je dirais, les deux premières fiches. Le premier, c'est que c'est un ensemble de nouvelles règles du jeu qui traduisent un nouvel esprit, de nouvelles perspectives et qui va nous permettre d'évoluer vers une nouvelle dynamique.

Alors, qu'est-ce qui caractérise, si vous voulez, cet énoncé? C'est le fait que notre approche, à la Commission, est une approche qui est ouverte sur notre environnement externe. Elle prend en compte également tous ceux qui concourent à la protection du territoire agricole, donc les intervenants extérieurs. Évidemment, elle suscite ou elle implique davantage, je dirais, les acteurs du milieu, et c'est certainement un régime qui offre une meilleure harmonisation avec le régime d'aménagement du territoire, en plus de mettre l'accent énormément sur la complémentarité des rôles de chacun dans la protection, et qui devrait nous conduire vers une plus grande cohérence des interventions sur le terrain.

En fait, il s'agit d'un régime qui est basé sur des assises renouvelées par le fait que, premièrement, notre loi n'a plus le même intitulé – on parle maintenant de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles – le fait que l'objet de la loi a été précisé dans la loi et le fait que l'article qui fonde notre compétence ou notre juridiction a été élargi pour nous permettre de tenir compte des particularités des régions.

Alors, si on fait un survol très rapide – parce que je n'entrerai pas dans le détail, compte tenu que vous avez le document – il est bon qu'on se rappelle les principaux changements dans notre secteur d'activité ou dans notre champ de compétence avec le nouveau régime. Et il y en a 12 changements. Je n'irai pas dans le détail, mais juste peut-être se les rappeler ensemble.

Le premier, vous vous rappelez, c'était l'abrogation des dispositions relatives à la constitution des secteurs exclusifs et au régime provisoire qui durait depuis 1989, ce qu'on appelait – vous vous rappelez l'expression – souvent, dans le public, le «vert foncé», donc toute la question des secteurs exclusifs. L'abolition de ce régime-là a été contrebalancée par une série d'autres mesures qui suivent, par exemple l'obligation du demandeur de démontrer l'absence d'espaces appropriés disponibles lorsqu'il s'agit d'un nouvel usage autre qu'agricole, et ça, je dirais, peu importe la qualité, le potentiel du sol en cause.

Donc, il y a une obligation chez le demandeur de toujours essayer de voir s'il ne peut pas s'implanter en zone blanche avant de penser à s'implanter en zone agricole. C'est un changement majeur dans la loi. Ce n'est pas à peu près. C'est vraiment une indication fondamentale.

Le troisième gros changement, c'est l'obligation nouvelle pour tout demandeur de s'assurer que sa demande est conforme au règlement de zonage de la municipalité ou, le cas échéant, aux mesures de contrôle intérimaires. Ça aussi, c'est un changement majeur en termes d'harmonisation avec le régime municipal.

Et, par la suite, il y a eu ce qu'on a appelé sous le vocable «modifications apportées aux critères de décision». Il y a eu une série de changements à nos critères décisionnels, certains qui ouvrent, d'autres qui resserrent. Bon, exemples: l'élargissement de la perspective pour l'examen de sites alternatifs de nature à réduire ou éliminer l'impact d'une demande sur l'agriculture, particulièrement dans les agglomérations urbaines puis les régions métropolitaines de recensement; la considération accrue des conséquences d'une autorisation sur les activités agricoles non seulement actuelles mais futures, leur développement; la considération des conditions socioéconomiques nécessaires à la viabilité des collectivités est devenue un critère obligatoire; puis la possibilité de considérer un avis de non-conformité aux objectifs du schéma d'aménagement d'une MRC ou d'une communauté ou aux objectifs du cadre d'aménagement en ce qui concerne la Commission de développement de la métropole. C'étaient les principaux changements qui ont été apportés à nos critères décisionnels.

Autre gros changement important: la suppression de l'obligation d'obtenir, dans certains cas, une autorisation de la Commission ou de produire une déclaration à la Commission, soit par l'effet de la loi elle-même, soit par l'effet de la réglementation à laquelle nous pourrons revenir par la suite.

Autre changement très important: l'obligation nouvelle pour la Commission de demander l'avis à la MRC et à l'UPA pour toutes les demandes qui sont formulées par une municipalité, une MRC, un organisme public, en fait, les demandes qui ont le plus d'envergure.

Autre changement majeur: seule une MRC ou une municipalité locale qui a l'appui de sa MRC peut formuler une demande d'exclusion de la zone agricole. Ça, c'est une révolution par rapport au passé. Je n'entre pas dans le détail, je m'en vais sur un autre changement majeur, c'est juste pour nous les rappeler, dans l'ensemble. Les demandes d'autorisations ayant pour effet de modifier un périmètre urbain sans qu'il soit contigu à la zone agricole, peuvent être assimilées, dans certains cas, à une demande d'exclusion de la zone agricole. C'est un changement qui est très important.

(15 h 30)

Autre changement, l'introduction d'une alternative au régime du «cas par cas» pour la fonction résidentielle par l'introduction de l'article 59 de la loi. Ce n'est pas une utilisation d'un critère qu'on peut faire demain matin, mais c'est une indication de l'avenir, en termes de perspective, qui peut changer beaucoup de choses. Ça donne une indication très intéressante sur laquelle on pourrait revenir.

Également, il y avait l'instauration, comme vous vous souvenez, d'un nouveau régime d'appel qui faisait que l'appel, tout en demeurant, devient plus axé ou centré sur une erreur de droit ou une erreur de fait déterminante, et ça consacre ainsi le fait que la Commission est généralement reconnue comme étant l'instance où s'apprécie l'impact d'une demande.

Ensuite, l'obligation nouvelle – ce n'est pas secondaire, ça aussi, c'est même majeur – l'obligation nouvelle pour toutes les MRC et communautés d'exercer leurs pouvoirs habilitants en matière d'aménagement et d'urbanisme avec l'objectif de favoriser l'utilisation prioritaire du sol à des fins d'activités agricoles et en tenant compte de l'objet de la loi qui était défini antérieurement, et je l'ai rappelé au début de mon exposé. L'obligation nouvelle pour les MRC de mettre en place un comité consultatif agricole, c'est fondamental en termes d'effets que ça fera à moyen terme dans le changement de la dynamique.

En résumé, toutes ces modifications-là dans la dynamique et dans les règles du jeu ont été traduites dans les documents explicatifs de façon bien concrète en pointant ce que ça voulait dire pour le demandeur, pour les instances municipales, pour l'Union des producteurs agricoles et pour la Commission. Je n'y reviendrai pas aujourd'hui. Ces changements ont été expliqués et résumés dans les documents que nous avons de toute façon en réserve ici et que nous avions envoyés au tout début de l'application de la loi.

Et j'arrive déjà, à la page 10 des notes, à un schéma général qui nous permet de conclure cette première partie-là en pointant que, quand on fait la somme de ces changements-là par rapport au passé, on n'exagère pas en parlant vraiment d'une réforme du régime de protection du territoire agricole. Il s'agit là de changements majeurs; majeurs au sens où, je dirais, on va évoluer progressivement – mais ça, c'est une question de temps et de délais – vers une tout autre dynamique qui était souhaitée au moment des modifications législatives.

Le schéma a l'avantage de présenter comment la loi a été importante, la loi que vous avez votée. Vous voyez, au coeur du schéma, la Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles. Elle a changé trois grandes lois au Québec dans notre domaine ou connexes à notre domaine. Vous voyez à la droite qu'elle a changé profondément notre loi constitutive au point que maintenant on l'appelle la Loi sur la protection du territoire des activités agricoles. Elle a également changé la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, et de façon majeure. Elle a également modifié la Loi sur la qualité de l'environnement. Et elle a amené, de façon concomitante avec l'entrée en vigueur de la loi, des orientations du gouvernement en matière d'aménagement uniquement pour la zone agricole – donc avec un zoom sur la zone agricole – et qui sont d'une grande importance pour la suite des choses sur les schémas d'aménagement qui sont en train de se compléter et qui auront des effets sur les plans et les règlements d'urbanisme des municipalités.

Ce dont on se préoccupe davantage, nous, ici à la Commission de protection du territoire agricole, dans le cadre de notre compétence, vous voyez, c'est peut-être évidemment notre loi à droite, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, et les orientations gouvernementales. En fait, toute cette partie-là a été moins mise en relief, a été plus occultée, si vous voulez, par l'aspect médiatique, depuis les deux dernières années, accordé sur le droit de produire, sur les odeurs, les distances séparatrices, vous savez, en fait, tout ce qui a fait l'objet du débat public. Mais ça a comme caché tous ces aspects-là fondamentaux dans la loi qui, à notre point de vue et sans exagérer, sont probablement le coeur de la loi, parce qu'ils font appel, de un, à un changement d'attitude fondamental face à la zone agricole et, également, le fait que ça interpelle tout le monde, y compris la Commission. On ne s'est pas senti à l'écart de ça, on s'est senti au coeur de ces changements-là, et c'est ce qui a amené la Commission à être proactive dès le début.

Alors, voilà pour la première partie. On vient de se rafraîchir un peu l'esprit sur les principales modifications qui nous concernent; maintenant, on peut voir ce qu'on a fait pour mettre ça en oeuvre. Dans le fond, c'était votre préoccupation principale, c'est le sujet principal d'aujourd'hui.

Évidemment, avant de dire ce qu'on a fait, on rappelle nos orientations. La Commission s'était donné deux orientations, je dirais, essentielles. La première, c'était de contribuer à modifier la dynamique puis les règles du jeu de notre secteur d'activité, dans le sens de responsabiliser davantage les instances municipales puis l'implication du monde agricole dans la protection du territoire des activités agricoles, dans le sens aussi de faciliter la compréhension et la mise en oeuvre du nouveau régime, puis être proactif dans l'établissement de cette dynamique et aussi d'adapter notre organisme aux nouvelles réalités d'aujourd'hui. Et c'est beaucoup, ça, ça a l'air de rien, mais c'est beaucoup. La deuxième orientation, c'est d'appliquer la nouvelle loi de façon judicieuse et rendre des comptes. D'ailleurs, c'est comme une première, aujourd'hui, parce qu'on va devoir rendre des comptes, aujourd'hui même, sur les décisions qu'on a rendues.

Là-dessus, quand je dis de façon judicieuse aussi, c'est qu'on a, vous le savez, récupéré un peu, beaucoup, je vous dirais, on a récupéré complètement la capacité de considérer tous les critères de décision dans tous les cas. Il n'y a plus d'enfarges, comme on voyait avant, donc, on peut exercer notre jugement en fonction de tous les critères de la loi, dans tous les cas, en tenant compte des particularités du milieu. Donc, c'est une grosse responsabilité, en termes décisionnels, et ça oblige à rendre des comptes, puis vous connaissez nos engagements en matière de reddition de comptes.

Alors, les premiers gestes qu'on a posés – vous voyez ça à la page 13 – ça a été de transmettre au public, presque un mois avant l'entrée en vigueur de la loi... Il faut se souvenir qu'on était en plein été, c'était le 20 juin, on changeait complètement les règles du jeu et il fallait que ça marche. Alors on s'est attelé – c'est le cas de le dire – à présenter quelque chose de concret et d'opérationnel qui expliquait les grands éléments de la réforme, qui expliquait notre approche en matière de surveillance de l'application de la loi, qui donnait des guides explicatifs sur comment procéder et qui était le résultat, aussi, de la refonte de tous nos formulaires qu'on avait, pour les simplifier. Et on est parti avec ça et on les a diffusés en des milliers d'exemplaires, je vous dirais, parce que, par la suite, lors des rencontres – vous allez le voir au point 2 – on s'est préoccupé de voir comment c'était accueilli, de voir s'ils les comprenaient, de voir si on pouvait apporter des améliorations. Et c'est ce qui amène le point 2, c'est la réalisation d'une tournée d'information auprès des MRC.

En l'espace de, grosso modo, trois mois, on a rencontré plus de 73 MRC qui se sont prévalues de l'offre qu'on leur avait faite – parce qu'on ne s'imposait pas, nous étions plutôt de service auprès des MRC – et qui représentaient quelque chose comme à peu près toutes les municipalités qui sont représentées qui ont une zone agricole. C'est ça que ça veut dire, quand on parle de 1 166, c'est même plus que celles qui ont une zone agricole, mais c'est parce qu'on a fait une déduction, par ceux qui étaient là, de leur milieu d'origine. Ça a fait 45 sessions d'information qu'on a tenues à l'automne, et ont assisté, à ces rencontres-là, plus de 1 200 personnes, dont 83 % était composé d'officiers municipaux – secrétaires-trésoriers et inspecteurs – et 10 % d'aménagistes, donc des gens qui ont à faire les papiers, préparer les choses.

Qu'est-ce qu'on retire de cette rencontre-là? Nous en avons fait une synthèse à la page 15. La première chose, c'est qu'on a senti un besoin et un intérêt marqué de nos interlocuteurs, qui étaient conscients des responsabilités nouvelles, bien sûr, à mieux connaître les nouvelles dispositions de la loi et qui avaient un souci aussi de bien informer le citoyen. On a aussi pu apprécier – et ça a été souvent mentionné – le caractère concret et pratique du matériel d'information. Je vais vous dire ça dans mes mots. Quand on sortait, les gens disaient: Quand on a vos documents, on n'a pas besoin d'avoir la loi à côté de nous, puis on n'a pas besoin d'avoir des directives à côté, on prend le document puis on est capable de faire des choses avec ça. C'était terre à terre, c'est le cas de le dire, puis, en même temps, ça donnait la perspective.

(15 h 40)

La nécessité aussi, pour la Commission, de maintenir une présence dans le milieu pour assurer une information continue auprès des intervenants, ça a ressorti partout. C'est ce qu'on fait avec nos enquêteurs, nos analystes, puis qu'on va continuer à faire comme ouverture qu'on a à la Commission. Et les dispositions de l'article 32, qui n'était pas à peu près, vous le savez, qui fait que, pour l'émission des permis... un permis municipal pour sécuriser le droit maintenant demande qu'on ait donné le feu vert, d'une certaine façon, à la Commission. C'était très bien accueilli par les officiers municipaux. C'est ce qu'on a senti partout. Peut-être que – je fais une parenthèse – c'était différent au niveau des élus pendant le temps que les officiers étaient très heureux parce que c'est sûr que ça sécurise aussi un officier municipal, le droit est plus clair. Peut-être qu'au début les municipalités imaginaient que c'était peut-être une sorte d'ingérence, mais ça s'est estompé complètement. C'est venu au début de la loi, et on n'en a plus réentendu parler.

Ce qui était plus contentieux, même si on reconnaissait que l'application de l'article 79.2 – ça, c'est la question de la réciprocité, les distances, tout ça – ne relève pas de la Commission, tout le monde savait que ça ne relevait pas de nous, en termes d'application, on a senti partout des inquiétudes qui ont été soulevées par rapport à l'application très concrète de la réglementation de nature environnementale. Et ces inquiétudes-là – on a pesé les mots, mais c'est ça que ça voulait dire – elles sont généralisées.

En marge de cette tournée-là avec les MRC, on a rencontré beaucoup d'autres milieux qui étaient préoccupés par rapport à l'application de la loi. Je n'ai pas besoin de les mentionner, vous les voyez à la page 16 de notre document.

J'arrive à la page 17, qui est le point sur la réglementation. Comme vous le savez, le nouveau régime de protection élargit les pouvoirs de réglementation du gouvernement qui peut dorénavant déterminer une série de cas où les conditions peuvent être déterminées. Je n'ai pas besoin d'en faire l'énumération, mais elles sont nommées de façon exclusive.

Les projets de règlement qui couvent tous ces aspects que vous voyez à la page 17 ont fait l'objet d'une prépublication en septembre, ont suscité des commentaires et des propositions et, parmi les personnes qui nous ont formulé des commentaires, on a choisi de rencontrer certaines institutions, dont l'UMRCQ, l'UPA, le Barreau du Québec, la Chambre des notaires. Présentement, on travaille à une version finale des projets de règlement et on devrait franchir les dernières étapes pour l'été. C'est ce qu'on vise actuellement. De la même façon qu'on l'a fait pour le reste, la Commission va se préoccuper d'informer tous ses interlocuteurs et le public et de vulgariser les règlements, de fournir tous les nouveaux formulaires nécessaires et d'informer les officiers municipaux par le biais des enquêteurs. On pourra faire le point davantage lors de la période de questions sur ces aspects-là réglementaires.

Parallèlement à tout ce travail-là, la Commission poursuit la révision de l'ensemble de sa réglementation, les règlements de régie interne, règlements d'application, qui sont des règlements qui sont passés date mais, étant donné que tout bougeait tellement vite, plutôt que de les changer plusieurs fois, nous allons les changer finalement une seule fois, et on arrive à cette étape-là.

Ça m'amène là-dessus à la page 19 en vous disant que tantôt on pourra vous faire part – je n'ai pas l'intention dans mon exposé général d'en parler tout de suite – de ce qui ressort de la première reddition de comptes. Vous avez 13 tableaux assez significatifs qu'on pourra regarder ensemble. Puis la synthèse de tout ça, c'est que – vous allez pouvoir l'observer – c'est intéressant, ce qui ressort, parce qu'on fait part des motifs de nos décisions aussi. Ça démontre une tendance. Il faut être évidemment prudents, parce que c'est le début de l'application de la loi. Comme tout début d'application, il y avait aussi un régime transitoire.

Alors, il y avait aussi toute la validation des données qu'il a fallu faire, qui est un travail monstre. Mais, dans ce qu'on vous produit, c'est une indication très précise de l'évolution de la demande, des taux d'autorisation. On fait un zoom sur un certain nombre de choses, comme les exclusions dans les agglomérations, les usages autres qu'agricoles. Vous allez voir, il y a beaucoup de matière.

Je terminerais par les enjeux qui se dessinent quant à la concrétisation des attentes du nouveau régime de protection du territoire agricole. Les enjeux, ils se résument en deux points. C'est évident qu'après la préoccupation du municipal qui a été très, je dirais – vous le savez – au cours des derniers mois, très accaparé par la façon de gérer la compression du 375 000 000 $... Donc, ça a été majeur avec les discussions avec le gouvernement. Le verglas est arrivé par la suite pour certaines municipalités. Là, je pense que le temps est à la révision des schémas d'aménagement partout à travers le Québec. Et les 10, 12 mois qui s'en viennent vont être très intenses en ce qui concerne la révision des schémas d'aménagement. Et on a tenu à rappeler, en citant – je n'en fais pas la citation ici, mais vous l'avez dans le document – l'orientation du gouvernement pour la zone agricole, l'objectif général qui était recherché, les trois objectifs spécifiques qui reprennent presque intégralement... dont les deux premiers reprennent exactement l'objet de la loi, et les attentes du gouvernement face aux MRC.

Une fois le schéma d'aménagement révisé en conformité des orientations gouvernementales, l'article 59 de la loi ouvre de nouvelles perspectives basées sur une approche d'ensemble par opposition au régime du «cas par cas». Et ça, nous aurons probablement l'occasion d'en reparler davantage lors de notre échange. Ce n'est pas secondaire, ça, et ça peut donner... C'est important que la révision des schémas se fasse dans l'optique des orientations du gouvernement, puis ça devrait nous faciliter la mise en application de l'article 59 dans les deux, trois années qui vont suivre.

Le deuxième message qu'on tiendrait à passer à ce stade-ci de notre observation de l'application du régime, c'est d'accentuer le réflexe de rechercher d'abord en zone non agricole le site pouvant convenir à l'implantation d'un nouvel usage non agricole, pour ainsi contribuer à diminuer la pression dans la zone agricole. Et c'est vrai pour les demandeurs, c'est vrai pour les municipalités, c'est vrai pour la Commission.

En définitive, si je résumais la position de la Commission ou le signal qu'on lance à cette étape-ci, je vous dirais que, dans toute la mesure du possible, ce qu'on cherche, c'est trois choses qui nous apparaîtraient raisonnables: c'est que, dans toute la mesure du possible, il faut conserver au maximum les bonnes terres pour l'agriculture et protéger la zone agricole comme un ensemble, comme un territoire, comme un environnement qui doit demeurer propice à l'exercice et au développement des activités et des entreprises agricoles; c'est aussi amener notre clientèle, dont les entreprises, par exemple, à développer le réflexe de s'établir et de s'implanter en zone non agricole quand c'est réaliste puis quand c'est possible de le faire; et c'est aussi s'assurer que les collectivités disposent d'espaces suffisants en zone non agricole pour assurer leur développement et accueillir les entreprises qui, souvent, n'ont rien à voir avec l'agriculture puis la zone agricole.

Alors, au bout de la ligne, les nouvelles dispositions de la loi nous permettent maintenant de faire ça. Et, comme vous l'aviez souvent souligné lors de l'adoption de la loi, comme il s'agit d'une loi d'équilibre – la Commission, ce n'est pas une place pour des idéologues, autrement dit, partir juste sur un bord de conservation puis partir juste sur un bord de développement, on ne ferait pas notre rôle – ça veut dire que ça appelle le discernement, ça appelle l'esprit d'ouverture face aux particularités des régions et ça appelle beaucoup de rigueur dans son application.

Et vous avez, à la fin, notre nouveau mode de fonctionnement. Parce que la Commission, à partir du 1er avril, ne sera plus un tribunal mais sera un organisme de régulation avec des changements majeurs à son mode de fonctionnement – sur lesquels on pourra revenir plus au niveau de vos questions – changements qu'on a essayé d'amener dans la perspective suivante: garantir au citoyen qu'on va le traiter avec équité, tout le temps, et agir avec une transparence – le mot est choisi – «exemplaire», plus que ce qu'on peut retrouver même dans d'autres organismes, en raison de l'ampleur des responsabilités qu'on a et de l'impact de nos décisions, une grande transparence que vous allez voir au niveau de nos processus, et aussi dans l'optique de travailler de façon, je dirais, plus collégiale, d'utiliser mieux nos ressources, de donner l'indication plus vite au client de l'orientation de la Commission dans un dossier, de travailler plus près du milieu pour réaliser la réforme. C'est tout ce qui nous habitait lorsqu'on a passé la réforme de la justice administrative pour laquelle, aussi, je dirais, la Commission a été aussi proactive qu'elle l'a été pour les modifications à sa propre loi.

Je vous remercie, M. le Président, ça nous donne plus de temps pour la période des questions.


Discussion générale

Le Président (M. Vallières): Alors, de part et d'autre, il y a des demandes d'intervention. Vous me permettrez peut-être, dans un premier temps, de vous remercier de la présentation et plus particulièrement en ce qui a trait au bilan que vous nous dressez et la reddition de comptes, là, écrite, chiffrée. En tout cas, j'ai toujours souhaité, comme parlementaire, qu'on puisse disposer, plus particulièrement à l'intérieur des travaux des commissions, d'outils comme celui que vous nous présentez aujourd'hui sur la reddition de comptes et qui nous permet de procéder à des échanges sur la base de l'atteinte de résultats par rapport à vos objectif que vous vous étiez donnés et dont nous discutons ensemble. On peut revenir, à un moment donné, en commission, comme aujourd'hui et voir dans quelle mesure les objectifs ont pu être atteints.

Demandes d'intervention de la part de mes collègues, à ce moment-ci? S'il n'y en a pas, ça va être rapide. Moi, j'en ai d'autres, si... Oui, M. le député de Saint-Hyacinthe.


Passage d'un rôle de tribunal administratif à celui d'organisme de régulation

M. Dion: Merci, M. le Président. Je n'avais pas l'intention d'intervenir le premier mais, puisque vous m'en donnez l'occasion, je vais en profiter d'abord pour saluer les gens que je connais bien, M. le président, assisté de ses collaborateurs avec qui j'ai eu le plaisir de travailler, et la chance de travailler, dans le passé.

(15 h 50)

C'est sûr que ce que vous nous présentez, aujourd'hui, c'est quelque chose de majeur et, l'occasion nous étant donnée, ici à la commission, de vous rencontrer au début d'une nouvelle ère, vraiment une nouvelle ère, pour la Commission de protection du territoire agricole, je pense qu'il serait très important – parce qu'on aura l'occasion de se revoir probablement à différentes reprises – qu'on puisse vraiment bien saisir les changements majeurs qui sont en train de se produire. Vous terminez en parlant, à la page 22... Vous dites par exemple: «Une fois le schéma d'aménagement révisé en conformité des orientations gouvernementales, l'article 59 de la loi ouvre des perspectives nouvelles basées sur une approche d'ensemble, en opposition au régime du "cas par cas".»

Alors, la procédure antérieure était telle que les gens, quand ils s'adressaient à la Commission, demandaient une autorisation, c'est-à-dire une exception, pour faire quelque chose que normalement la loi ne permettait pas, mais qu'elle permettait dans la mesure où ça ne nuisait pas aux objectifs de la loi; et c'était la Commission, en tant que tribunal, qui tranchait face à cette demande et qui décidait. Alors, c'était le régime du «cas par cas» où chaque cas est un cas d'exception traité comme tel face aux objectifs de la loi, et c'était le cas où la Commission était perçue comme un tribunal, bien qu'il y avait beaucoup de discussions là-dessus: Était-elle un vrai tribunal ou un demi-tribunal ou un tribunal spécial? Mais je crois qu'elle fonctionnait effectivement comme un tribunal, dans les faits. Et l'objectif, je pense, du tribunal à l'origine c'était de détacher du processus politique tout ce qui touchait l'administration de la loi de façon à s'assurer dans la mesure du possible d'une administration impartiale, détachée des partis politiques, détachée des circonstances et, aussi, équitable envers tout le monde.

D'après ce que je vois dans votre présentation – et c'était implicite dans le projet de loi – on passe donc d'un tribunal administratif à un organisme de régulation. J'aimerais ça que vous nous expliquiez de façon plus précise ce que ça signifie dans la façon de travailler et ce que ça signifie, aussi, pour les clients potentiels de la Commission, c'est-à-dire les citoyens qui auront à s'adresser à la Commission. J'aimerais ça avoir plus de détails là-dessus, peut-être en faisant le parallèle entre les deux situations; ça nous aiderait, tout le monde, à mieux comprendre.

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Merci, M. le Président. Peut-être que le plus simple... C'est parce que ça nous amène à la réforme de la justice administrative, pratiquement, je dirais, au document qui était sur la réforme de la justice administrative, parce que c'est là qu'on voit, dans la synthèse, les gros changements qu'on va opérer.

Si vous me permettez, j'aimerais ça, sur une question de ce type-là, permettre à Me Cardinal, qui a connu la Commission depuis le début dans toute son évolution, de compléter ce que je vais dire tantôt.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, Me Cardinal.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Cardinal (Serge): Merci, M. le Président. Dans la pochette qui vous a été distribuée, les documents sont, si vous voulez, vulgarisés ou présentent les effets de la réforme de la justice administrative à la Commission. Ces documents, donc, comme on vous le disait tantôt, sont adressés essentiellement à nos interlocuteurs du monde municipal, aussi aux gens de l'UPA, enfin, aux citoyens de façon générale.

Si vous voulez, je vous amène au processus de traitement d'une demande; c'est peut-être là où il y a les changements les plus importants. Vous vous souvenez du processus, je dirais «actuel», jusqu'au 1er avril, où le dossier – là, je fais une figure de style – est propriété de plusieurs personnes différentes sur une chaîne de montage. Il est propriété d'un analyste qui l'examine, qui envoie son rapport. Il est propriété par la suite – propriété entre guillemets, vous me comprenez – d'un membre de la Commission qui examine l'impact et qui rend une décision. La réforme de la justice administrative, ça vise essentiellement, parmi d'autres objectifs, à muter vers une décision davantage de nature institutionnelle où l'ensemble des ressources sont mises à contribution au bon moment dans le traitement d'une demande d'autorisation.

Alors, par exemple, comment est-ce que ça se traduit? Ça se traduit par le fait que, compte tenu des compétences diverses qu'il y a à la Commission, chaque demande d'autorisation fait l'objet d'un examen par un conseiller juridique dès l'ouverture du dossier pour s'assurer – parce qu'on applique une loi, là, et on parle de droit réel – que la Commission exerce sa compétence de façon correcte, a les renseignements dont elle a besoin. Il faut s'assurer, par exemple – je vous donne une illustration – que la demande est effectivement conforme au règlement de zonage. C'est une des dispositions que vous avez votées. Vous le savez, si la demande n'est pas conforme au règlement local, elle est irrecevable à la Commission. Alors, il faut tout de suite s'inquiéter de cette question-là, dès l'ouverture du dossier, de telle sorte, par exemple, à ne pas faire patienter le citoyen inutilement si, dès le moment de la réception de la demande, on est en mesure de constater qu'on ne peut pas la traiter.

Cet examen d'aspect juridique, je dirais, ayant été fait, très rapidement le dossier est acheminé vers un autre type de professionnel, qui est un analyste de formation, soit géographe, urbaniste, par exemple. Et ce professionnel fait un examen de l'impact de la demande, l'impact, bien sûr, sur la protection du territoire des activités agricoles. Le dossier est soumis par la suite à des membres de la Commission, par opposition au processus dont je viens de vous parler où l'analyste faisait une évaluation du dossier, un rapport qui était envoyé aux parties, qui ne constituait pas la décision mais qui donnait sa propre évaluation des impacts et auquel les gens pouvaient réagir mais sans connaître le point de vue de la Commission. Alors que, par la réforme de la justice administrative, ce que les gens vont connaître très rapidement dans le processus, c'est le point de vue de la Commission. C'est ce qu'on appelle l'orientation préliminaire.

La Commission tout de suite va indiquer que, dans les circonstances qu'elle connaît, avec les renseignements qu'elle a à sa disposition, elle s'oriente littéralement vers une décision, par exemple, favorable ou, par exemple, défavorable, et ça, dans tous les cas. C'est important, c'est la spécificité de notre processus. Quand on parlait de transparence tantôt, vous savez aussi que la réforme de la justice administrative essentiellement – là, je ne veux pas caricaturer – l'obligation nouvelle qui est faite à des organismes, par exemple de régulation, c'est le fait de prévenir avant de rendre une décision défavorable de telle sorte que celui qui demande le permis ou l'autorisation ait l'occasion de bien compléter son dossier et l'occasion de réagir.

Donc, l'obligation formelle qui est faite par la réforme de la justice administrative, c'est de prévenir avant de dire non. Nous, on va beaucoup plus loin que ça, on prévient dans tous les cas. Parce qu'un oui ou un non, ça a un effet important sur le territoire. On pense que, dans notre domaine, il est important d'aller au-delà du droit du demandeur de réagir. Je pense qu'il est important de donner aux citoyens en général, à la municipalité, aux intervenants, à l'UPA, l'occasion de réagir.

(16 heures)

Donc, orientation préliminaire communiquée au citoyen, délai d'un minimum de 30 jours, délai que j'appelle un délai de transparence, qui est en fait le délai que la loi attribue, si vous voulez, aux personnes intéressées pour réagir à l'orientation préliminaire de la Commission et, par la suite, les gens ont l'occasion de faire des représentations écrites, des observations, dit la réforme de la justice administrative, ou de demander une rencontre avec la Commission. Et, encore là, c'est un peu propre à un processus, si quelqu'un demande une rencontre publique, la rencontre, précisément, sera publique. Dans la mesure où ce n'est pas une rencontre bilatérale entre des membres et le demandeur, ce sera une rencontre à l'occasion de laquelle l'ensemble des intervenants intéressés à une demande auront l'occasion de se présenter à la rencontre et de faire valoir leur point de vue. Intervient, par la suite, la décision.

Autre particularité – je vais conclure sur ça, si vous voulez, quant au processus – de la réforme de la justice administrative, la Commission pourra récupérer un pouvoir de réviser ses propres décisions, mais un pouvoir très balisé de révision pour cause. Par exemple, si, à la suite d'une erreur manifeste, un individu n'a pas eu l'occasion de présenter ses observations ou de demander une rencontre, la Commission peut corriger ses erreurs sans avoir à référer la partie ou le demandeur à un appel ou à un processus plus coûteux ou plus long. Alors, c'est une faculté – je le présente comme ça – de corriger une erreur en particulier, une erreur quant au devoir d'agir équitablement. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question?

Le Président (M. Vallières): M. le député de Saint-Hyacinthe.


Portée de l'orientation préliminaire émise par la Commission dans le cadre de l'analyse d'une demande

M. Dion: Oui. Alors, une des choses évidemment qui m'apparaît là-dedans, c'est que l'avis qui était envoyé autrefois, ou l'analyse, plutôt que l'avis, qui comportait généralement une recommandation – pas nécessairement tout le temps mais dans la plupart des cas – était ni plus ni moins que l'équivalent d'un plaidoyer qu'on faisait connaître à la partie adverse, en faveur ou contre, mais qui ne constituait en aucun cas un engagement de la Commission d'aller dans un sens plutôt que dans l'autre. Advenant le cas où, ici, la Commission, donc, se présente, ce que les gens reçoivent, ce n'est pas une analyse mais c'est une orientation. Cette orientation-là, si je ne me trompe pas, c'est l'équivalent d'un engagement de la Commission et, s'il n'y avait pas de réaction, la Commission ne peut pas faire autrement que de confirmer son engagement.

M. Ouimet (Bernard): Exact.

M. Dion: C'est exact?

M. Cardinal (Serge): Essentiellement, M. le Président, si vous me permettez, ce que ça dit, ce document-là, ça fait, dans un premier temps, le compte rendu de la demande, la synthèse de la demande, pour s'assurer... On communique, par exemple, au demandeur, mais aussi aux autres personnes intéressées dont j'ai parlé tantôt, notre compréhension de la demande. Alors, on lui dit: Votre demande, ça a bien tel effet, c'est pour tel motif que vous voulez la faire. Le document résume aussi, fait la synthèse des principales observations qui sont essentiellement tirées du demandeur lui-même, sur son formulaire de demande, mais ça peut être tiré de la résolution municipale, enfin, de l'ensemble des documents ou des renseignements qui sont à notre disposition.

Et effectivement la troisième partie, si vous me permettez, de ce document-là contient ce que j'appelais tantôt «l'orientation préliminaire». Vous avez raison, c'est un engagement de la Commission. Au fond, ce que ça dit, c'est: Selon notre compréhension de votre demande, avec les renseignements qu'on a à notre disposition, voici l'évaluation qu'on fait, en termes d'impacts, et voici le sens probable de la décision à venir. Cela dit, les gens ont la faculté, comme je vous l'indiquais tantôt, dans un délai donné, de réagir à cette orientation préliminaire soit par des observations écrites ou en demandant de rencontrer des membres de la Commission.

Le Président (M. Vallières): Merci. Oui, sur le même sujet? Oui.

M. Lelièvre: Mais, pour bien comprendre, on voit qu'il y a un préavis de donné s'il y a une modification à l'orientation préliminaire. Mais qu'est-ce qui empêcherait la Commission, proprio motu, de décider, elle, de modifier l'orientation préliminaire et de donner des avis?

M. Cardinal (Serge): Est-ce qu'il y a un empêchement à ce que la Commission modifie son orientation préliminaire, c'est votre question?

M. Lelièvre: Oui, d'elle-même.

M. Cardinal (Serge): Il n'y a pas d'empêchement sur le plan juridique. Ce qui garantit, je pense, que ça va arriver très peu fréquemment, c'est le sérieux avec lequel l'orientation préliminaire va être faite dès le début. Mais, ceci dit, il n'y a pas d'empêchement juridique. Et si ça arrivait que la Commission change d'avis, soit proprio motu, comme vous l'indiquez, ou s'apprêtait à rendre une décision différente à la suite d'observations ou d'une rencontre, c'est encore une fois le souci d'agir équitablement, un souci de fair-play, qui nous fait dire que, si on s'apprête à rendre une décision différente de celle qui est annoncée, on va donner un nouveau préavis, un préavis de 10 jours.

M. Lelièvre: Parce que j'avais compris de l'engagement que mon collègue mentionnait que vous deviez rendre une décision, mais ce n'est pas nécessairement le cas. C'est que la Commission peut rendre une décision et rend une décision s'il n'y a pas autre chose. Mais l'engagement en question fait en sorte que, bon, si la Commission peut changer son orientation... Moi, je veux juste savoir s'il y a un devoir, une obligation de s'en aller dans une direction une fois qu'il n'y a pas de contestation, ou elle peut... Vous entendez parler, vous lisez les journaux comme tout le monde, à un moment donné vous apprenez des choses, et là woop! vous décidez d'arrêter et de fouiller plus loin.

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Je vous dirais que dans la majorité des cas, dans le sens de ce qu'il mentionne, c'est sûr que, dans le fond, quand on examine complètement le dossier, c'est ça que ça veut dire, même si ça va être un document qui va être très administratif, qui va être abrégé, synthèse. Il n'en demeure pas moins que le temps qu'on va mettre c'est de bien comprendre le dossier, très bien comprendre le dossier. Avec l'information qu'on a, en lançant l'orientation préliminaire, c'est vrai que ça engage la Commission, et pas à peu près. C'est un geste sérieux mais il n'en demeure pas moins qu'on donne la chance de réagir.

S'il arrivait qu'un fait majeur nous échappe, ou que, dans nos systèmes, on échappe quelque chose, deux autorisations qu'on a données en face puis nos systèmes informatiques ne nous l'ont pas sorti, ou quelque chose comme ça – vous savez, ça arrive, ça, des choses comme ça – ou des gens nous amènent des faits, des faits vraiment majeurs qui feraient qu'on changerait d'orientation, là, à ce moment-là, on va prévenir, par exemple, qu'on change d'orientation. À la rencontre, on pourra et on va reprévenir les gens.

Mais c'est sûr que, je vous dirais, dans peut-être 98 % des cas, s'il n'y a pas d'interventions qui sont faites, vous savez... On dit à quelqu'un qu'on l'autoriserait à bâtir sa maison à telle place, dans un secteur déstructuré, c'est sûr que ce n'est pas une décision, c'est une orientation, avec tout ce que ça veut dire. Mais la décision va venir après 30 jours, s'il n'y a pas d'observation qui est faite par qui que ce soit, de personnes concernées dans le dossier. Si les personnes concernées dans le dossier n'interviennent pas, vous avez de grandes chances d'avoir la décision dans le sens de ce qu'on envoie. Je pense que c'est ça, le sens de votre question.

Il pourrait arriver – c'est de là la prudence, j'imagine, de Me Cardinal – pour toutes sortes de motifs, qu'on aurait intérêt de dire, je ne sais pas, moi: Peut-être que ce n'est pas notre meilleur, puis qu'on pourrait peut-être se corriger nous-mêmes. On est pas obligé de se flageller si on sent qu'une orientation pourrait être mieux par une information qu'on aurait apprise par la suite. Mais on aura toujours le fair-play, on agira toujours avec fair-play puis on le dira toujours. Mais ça va être marginal.

Dites-vous que, si on l'enligne comme ça et que personne ne fait des représentations, vous avez à 98 %, 99 % de chances d'avoir une décision qui va aller dans ce sens-là. C'est précisément le sens de «s'engager» par rapport à ce que mentionnait tantôt le député de Saint-Hyacinthe. C'est sûr que, par rapport à un rapport d'analyse qui n'engageait pas la Commission, jamais, jamais... tandis que là c'est deux membres qui vont signer; c'est un membre qui va signer, mais ça va être deux membres qui vont prendre l'orientation préliminaire.

M. Lelièvre: Je vous remercie.

M. Dion: Sur la même chose.

Le Président (M. Vallières): Merci. Sur le même sujet, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: Oui, sur le même sujet. En fait, j'aimerais savoir un peu... vous avez pas mal répondu à ma question mais il me reste, enfin, un éclaircissement que je voudrais vous demander. Sans doute, vous l'avez prévu, l'orientation que vous allez donner, bien qu'elle soit abrégée et administrative – première question – elle comportera des motifs de l'orientation, c'est-à-dire la décision qui s'en vient potentiellement. Première question.

Deuxième question, qui est le coeur, la plus importante des deux: Advenant une situation exceptionnelle où la Commission, après avoir donné une orientation, décide dans le sens contraire – elle avait prévu d'autoriser et elle décide de refuser sans préavis de 10 jours – évidemment ce serait une décision attaquable, est-ce que c'est ça que ça veut dire?

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Si vous le permettez, comme il était bien parti tantôt, M. le Président, je le laisserais continuer.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Me Cardinal.

(16 h 10)

M. Cardinal (Serge): Merci, M. le Président. Dans l'hypothèse que vous évoquez, M. le député de Saint-Hyacinthe, si la Commission avait une orientation préliminaire favorable, elle ne peut pas rendre une décision négative sans donner un autre préavis. Alors, la décision est attaquable, pour dire le moins. C'est une obligation formelle de la réforme de la justice administrative.

Quant à votre premier souci – est-ce que l'orientation préliminaire est motivée? – je vous dirais que l'orientation préliminaire va traduire les principaux enjeux, quels sont les principaux motifs, les critères, au fond, en fonction desquels les membres de la Commission en arrivent à l'orientation préliminaire. Mais une fois que j'ai dit ça, il faut cependant prendre garde de confondre avec la décision qui aboutit, en fin de processus, la décision formelle qui, elle, doit être motivée de façon plus systématique.

M. Ouimet (Bernard): Permettez-vous, M. le Président? J'ajouterais une chose à ce que dit mon collègue, exactement dans la même perspective. C'est qu'au bout de la ligne ce n'est pas une prédécision qu'on envoie, dans le sens de motiver un petit peu, puis l'autre, de motiver beaucoup. Exemple – je vous dis ça dans des mots un peu colorés, là – mais par fair-play, comme il mentionnait tantôt, c'est sûr qu'on n'a pas à mentionner tous les motifs mais dire le principal. Il y a de la latitude là-dedans pour prévenir notre interlocuteur, lui dire, bien on s'apprête à vous dire non principalement parce qu'il y a de l'espace dans la zone blanche, puis c'est un beau milieu agricole dynamique. C'est comme assez. Ça pourrait être assez.

C'est un peu par l'expérience. Lorsqu'on reçoit des gens devant nous qui nous posent des questions, des fois on pose la bonne question pour leur permettre de réagir. C'est un peu ça. C'est qu'on va donner l'essentiel du motif ou de l'enjeu comme disait Me Cardinal, mais ça ne sera pas une énumération des 10 critères de la loi, à tout détailler. Ça, ça va venir par la suite dans l'appréciation au niveau de la décision.

Le Président (M. Vallières): Sur le même sujet, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Rapidement. Votre orientation préliminaire, est-ce qu'elle est fondée sur une jurisprudence que vous avez déjà? Ou si cette jurisprudence-là, vous allez vous en servir entre l'orientation et la décision?

M. Ouimet (Bernard): L'orientation préliminaire, c'est le début, si vous permettez, M. le Président, du dossier. C'est comme si on l'enlignait. C'est sûr que c'est le début de la décision, c'est-à-dire qu'on s'enligne. On donne l'orientation préliminaire au client. Mais c'est sûr que ça tient compte de notre jurisprudence et ça tient compte des critères de la loi. Ça tient compte de tout ce qu'on a pour juger après, parce qu'au bout de la ligne, après l'orientation préliminaire, il va falloir la motiver, notre décision. Comme on ne peut pas motiver par d'autre chose que les critères décisionnels, bien, il faut les avoir en tête dès l'orientation préliminaire et toute notre jurisprudence.

Ça se peut qu'on échappe un morceau par exemple; mais ça, il y a du monde qui vont peut-être nous le rappeler, puis ça va nous rendre service, puis on ne prendra personne par surprise, mais on va avoir l'éclairage. Normalement, je vous dirais que j'attache beaucoup d'importance au sérieux de l'orientation préliminaire même si c'est un petit document, comme je vous dis, qui va être 8½ X 11 – pour le distinguer de la décision – et qui va être très business, très administratif, mais ça devrait donner l'heure juste. Évidemment, ça ne sera pas tout le détail auquel s'attend le client quand il va recevoir sa décision avec là évidemment l'appréciation en fonction de tous les critères.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Est-ce que cette orientation-là va être envoyée aussi en même temps au demandeur et, par exemple, à la MRC, à la municipalité?

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Tout le monde va être au courant de l'orientation.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Et si une des parties juge à propos, à un moment donné, de dire: Bien là, il y a un élément qui n'a pas été vu, à ce moment-là ils ont 30 jours pour intervenir.

M. Ouimet (Bernard): Oui. Si vous me permettez, parce que c'est une bonne question, M. le Président. Ça amène à distinguer ce qui fait – Me Cardinal l'a souligné tantôt – qu'on va plus loin que ce que nous demande la réforme de la justice administrative. Disons-le clairement. La réforme, tout ce qu'elle exige, c'est, quand on est pour dire non, de le prévenir. Point à la ligne.

Nous, dans notre domaine, compte tenu qu'on est dans des lois de zonage, compte tenu que dire oui ou dire non, ça a autant d'impact, en tout cas ça a autant d'intérêt selon le côté de la table où on se place, pour la protection ou le développement, on a dit: On va prévenir tout le temps et on va donner toujours 30 jours. D'ailleurs, avoir fait moins, c'est comme si on reculait, parce que nous autres, on était déjà assez avancés dans la transparence avec le rapport d'analyse, on l'envoyait, 30 jours, au monde.

Alors, autrement dit, par rapport aux premières questions – est-ce qu'on va agir? – c'est une transparence très grande. Nous allons continuer de prévenir tout le monde: premièrement, autant pour dire oui que pour dire non; deuxièmement, si on change d'idée, on va faire un petit préavis de 10 jours, mais là on va au moins donner une occasion de réagir; troisièmement, on va le faire à tout le monde alors qu'on n'est pas obligé de le faire à tout le monde. On pourrait juste écouter le demandeur ou celui qui nous écrit, mais on sait très bien dans notre domaine que, entendre l'UPA par exemple seul sans le demandeur, ou entendre le demandeur sans donner l'occasion à l'UPA de venir, sans demander aux mis en cause de venir, on s'est dit: Dans la pratique, dans la vie concrète, ce n'est pas comme ça qu'on va travailler. Donc, on va agir avec transparence.

Mais ce n'est pas peu dire en termes d'implication dans notre organisation. Ces exigences-là de transparence, ça se comptabilise, c'est de l'énergie, ça. Convoquer une personne ou en convoquer cinq, ce n'est pas pareil. Si on a un taux de 60 % d'autorisation, ça veut dire que, si on appliquait bêtement la réforme de la justice administrative et que ça serait juste dans le 40 %, vous savez, qu'on est pour dire non qu'on avise, ça n'a pas le même impact sur notre boîte. Mais, compte tenu de l'importance chez nous d'être transparents, on s'est dit: Il vaut mieux fonctionner comme ça.

Le Président (M. Vallières): Bien. À partir de quand, M. Ouimet, est-ce que vous allez appliquer cette façon de procéder?

M. Ouimet (Bernard): Le 1er avril.


Rôle conseil des députés dans leurs comtés

Le Président (M. Vallières): Le 1er avril. Bien. Vous comprendrez, toutes les questions qui tournent autour de ça, c'est que souvent les clients qui vont vous rencontrer, quand il y a possibilité d'un refus et qu'ils auront avis, il y a de fortes chances que ces gens-là viennent nous voir comme députés. J'aimerais savoir de vous, à partir du moment où ça se produit, où vous situez le rôle du député. On sait qu'auparavant tout le monde se faisait un devoir, parce qu'on ne peut pas intervenir directement auprès d'un tribunal administratif... À partir du moment où le processus est quelque peu modifié, la façon de faire de la Commission se modifie, comment vous situez l'intervention d'un député à l'intérieur de son rôle qu'il a aussi à jouer, le représentant de la population qui vient le voir et qui fait état de problèmes qu'il rencontre avec la Commission de protection du territoire agricole?

M. Ouimet (Bernard): Vous posez une grande question, M. le Président. C'est sûr que... Vous posez la question, et je suis certain que vous avez la réponse. Mais ce que je peux dire là-dessus, c'est que le rôle du député est certainement très important, parce qu'effectivement il se retrouve souvent dans son bureau de comté, puis ça on est très conscients de ça. Je vous dirais que, sur la démarche, ça aide beaucoup, bien conseiller quelqu'un sur la démarche. Sur le résultat, vous le savez, personne ne peut s'engager à ça, mais sur la démarche, oui.

Exemple: quelqu'un qui a reçu un avis, une orientation préliminaire, un compte rendu de dossier comprenant une orientation préliminaire qui est négative, qui aboutit chez vous, bien, vous allez juger, dans votre discussion avec, à lui donner le meilleur conseil, s'il doit nous rencontrer ou s'il doit faire des représentations écrites. Au bout de la ligne, ils peuvent toujours nous envoyer des représentations écrites, puis on va toujours les prendre en considération. Ils peuvent même nous demander une rencontre, puis, s'ils nous demandent une rencontre, on va les rencontrer. Bon. Bien, c'est déjà un bon conseil, parce que la décision n'est pas prise. Si vous voyez que les arguments ne changeraient peut-être pas grand-chose, vous pouvez lui parler avec toute votre liberté d'expression, mais, au bout de la ligne, la démarche, c'est que, s'ils ont quelque chose à dire, il faut qu'ils nous l'écrivent ou il faut qu'ils viennent nous le dire. C'est ça, l'idée.

Le Président (M. Vallières): Bien. Ça ne change pas la relation qu'on a toujours connue entre la députation et l'organisme, c'est-à-dire que l'individu qui vient nous rencontrer... Ma question se situait à... Est-ce que ça donne lieu à des changements par rapport à l'attitude qu'on s'était tous donnée et qu'on continue de se donner de non-intervention auprès de l'organisme?

M. Ouimet (Bernard): Oui. C'est une bonne question que vous posez. Malgré le fait qu'on se déjudiciarise, c'est évident qu'il faut garantir l'équité procédurale et, dans une perspective comme ça, on est un organisme indépendant, on demeure un organisme indépendant. C'était souhaité, d'ailleurs, vous vous rappelez, dans le rapport Facal, et toute la loi est bâtie de même et c'est évident qu'il faut garder cette espèce de réserve face à un organisme comme le nôtre. Vous voyez, même cette préoccupation-là, chez nous, on s'est dit: Une commission, il faut que ça brasse les choses, par rapport à un régime traditionnel où on pouvait quand même...

Vous savez, un commissaire, c'est autonome, c'est le cas de le dire, puis un analyste est autonome sur son rapport, puis, bon, on va pouvoir se parler plus, mais nos règles vont être transparentes et on va garantir qu'un dossier, automatiquement, il va être brassé par deux membres, à l'examen préliminaire, qui auront toujours rencontré l'expert de la région ou l'expert sur la ressource, chez François, dans ses professionnels. Donc, vous êtes garantis que chaque dossier qui arrive chez nous, il est brassé. Mais le contact, après qu'on va l'avoir envoyé, le jour où on...

(16 h 20)

Vous voyez, la préoccupation qu'on a, c'est que, quand il va être parti dans le milieu, l'orientation préliminaire, bien, là, il ne faut pas qu'il appelle le commissaire – le client – qui a signé. Avant, il appelait l'analyste parce que c'est lui qui signait. On a pris ces précautions-là. Les commissaires, ils ne parleront pas au monde là-dessus. Puis, si jamais quelqu'un finit par lui en parler à l'épicerie, bien, il va devoir lui dire: Si vous avez quelque chose à dire, faites-le par écrit ou venez nous rencontrer. Parce que ce ne serait pas «fair» pour son collègue.

Il faut assurer toute la place d'un organisme indépendant. Indépendant, je ne dis pas ça avec un caractère hautain, vous comprenez? Quand je dis indépendant, ça veut dire assurer tout le monde, les parlementaires, assurer le public qu'on traite équitablement les gens, que nos processus sont transparents, qu'on rend des comptes. Mais ça, ça ne nous empêche pas un certain nombre de contacts qu'on peut faire; par exemple, travailler beaucoup plus facilement avec les MRC, avec, des fois, dans le milieu, au niveau d'un projet, en amont du processus... Je ne parle pas des membres, je parle au niveau de nos services professionnels. Vous comprenez?

Il ne faudrait pas, autrement dit, dans le changement d'une commission-tribunal à un organisme de régulation, voir que cette retenue nécessaire d'un organisme autonome change. Parce que, à ce moment-là, ça serait plutôt le traitement dans le cadre d'un ministère, d'un demande. Là, vous voyez ça, un ministre qui, pendant 4 000 dossiers par année, devrait gérer politiquement 4 000 dossiers. Ça n'a pas été retenu, ça. Ça a été retenu, un organisme indépendant.

Alors, il faut travailler, je pense, avec la... C'est une très bonne question que vous me posez, mais dans une perspective comme ça... Dans le fond, c'est comme si c'était encore, pour vous autres, là-dessus, un tribunal. J'exprime ça dans des mots un peu colorés, mais c'est un peu comme si c'était un tribunal, entre guillemets.

Parce que le gros changement, il est chez nous. C'est qu'au lieu de toujours marcher... Vous savez, le droit administratif nous imposait d'être cloisonné. Il ne fallait pas parler à notre analyste; c'était comme si c'était un péché mortel. Il ne fallait pas parler à notre avocat sur un dossier; ça pouvait nous être reproché après une audition. Mais pour être efficace, il faut se parler. C'est le minimum qu'on puisse dire.

Ça va nous décloisonner à l'interne mais, par rapport à l'externe, il faut avoir les mêmes garanties qu'on avait avant.


Rencontre d'information avec les députés

Le Président (M. Vallières): Bien. J'ai remarqué que, dans votre bilan statistique des rencontres d'information de l'automne 1997 et de l'hiver 1998, les députés n'ont pas été rencontrés. Est-ce que c'était volontaire? Je sais qu'il y a beaucoup de municipalités, des inspecteurs municipaux, des aménagistes, un grand nombre de secrétaires-trésoriers, plus de 1 000 municipalités; les députés ne sont pas au nombre. Est-ce que c'est volontairement?

Il me semble que nous avions déjà discuté de cette possibilité de pouvoir informer les députés qui sont le plus souvent visés par des décisions dans leur comté à la Commission, qu'ils puissent procéder à des échanges, un peu comme ceux qui se font cet après-midi avec les membres de la commission et vous.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, c'est sûr que, pour la tournée qui était planifiée comme telle, ça n'excluait pas du monde, mais ça visait les gens qui sont... je dirais ceux qui vont fabriquer les choses: l'aménagiste, le secrétaire-trésorier, l'enquêteur de la municipalité. C'était très technique. Il y avait très peu de maires – d'ailleurs, vous l'avez vu – qui ont participé à ces rencontres-là. C'était une rencontre vraiment d'explication des nouveaux formulaires, des guides, de la nouvelle loi, comment travailler. Alors, c'était très opérationnel.

Maintenant, votre question par rapport aux députés. Si la demande nous est faite de rencontrer, par exemple, la députation... Ce qui a été fait en partie avant Noël, à la demande de notre ministre, pour une partie de la députation. Nous avons participé à la rencontre qui avait été organisée avec le cabinet du ministre, à deux séances d'information avec les gens des bureaux de comté souvent qui allaient là. Si vous en manifestez le besoin, je suis certain – il y a quelqu'un du cabinet du ministre avec nous aujourd'hui... Je serais très étonné que mon ministre s'objecte à une chose comme ça, au contraire. Et ça nous fera plaisir de le faire.

Le Président (M. Vallières): À votre connaissance, est-ce que cette offre a été faite aux deux côtés de la Chambre? La demande a été faite par le ministre au nom du groupe parlementaire de la majorité? Je ne sais pas si, de notre côté, ça a été fait. En tout cas, on peut toujours le vérifier.

M. Ouimet (Bernard): Je pense que, dans un premier temps, disons-le franchement, ça avait été plutôt... J'ai cru comprendre que la demande qui nous avait été faite – parce que les rencontres n'étaient pas organisées par nous; nous, on fournissait le contenu de la rencontre – que ça avait été, dans un premier temps, organisé avec, je pense, un côté de la Chambre. Bon. Maintenant, je suis convaincu qu'il n'y a pas d'objections de principe à une chose comme ça. C'est une question opérationnelle.

Le Président (M. Vallières): Le ministre m'avait répondu à une question le 25 avril en m'indiquant qu'il était prêt: On est prêts à fonctionner. Deux, aucun problème. Un briefing de toute la députation et des bureaux de comté pour qu'ils soient sensibilisés à toute la nouvelle procédure. Donc, en tout cas, si ça a été fait de l'autre côté de la Chambre, je me serais attendu à ce que l'offre nous soit faite également, en provenance du ministre lui-même, puisque la réponse qu'il me donnait, c'était que c'était l'ensemble des parlementaires qui seraient invités à cet exercice. Mais, d'un autre côté, on pourra faire la vérification avec le bureau du ministre.

M. Ouimet (Bernard): C'est ça. De notre côté, M. le Président, en tout cas, on réitère notre ouverture à participer à de telles rencontres.


Baisse du nombre de demandes d'autorisation

Le Président (M. Vallières): Dans ce que vous avez intitulé La reddition de comptes , il y a un endroit où vous mentionnez que les données les plus récentes disponibles nous indiquent que le volume des demandes d'autorisation reçues depuis le 20 juin 1997, date d'entrée en vigueur de la nouvelle loi, est en baisse de près de 35 % par rapport à la même période l'année dernière.

L'année dernière, vous nous affirmiez, il me semble, qu'avec un plan soutenu et beaucoup d'efforts la loi n° 23 permettrait à la Commission de baisser le nombre de demandes de 40 % à 50 % sur trois ans, c'est-à-dire au terme de trois ans de travail. Après moins d'un an d'expérience, on parle de 35 %. Est-ce que ça signifierait que vous serez en mesure d'atteindre votre objectif non pas en trois ans mais bien en un an?

M. Ouimet (Bernard): Je ne le penserais pas, M. le Président. Pour être franc avec vous...

Le Président (M. Vallières): Si la tendance se maintenait?

M. Ouimet (Bernard): Oui, mais on est content de voir l'indication. On n'est pas en mesure de dire, pour de multiples facteurs, combinés d'ailleurs – période transitoire, période d'été, travail qui a été fait avec les... Vous le sentez par les statistiques, d'ailleurs, qu'on donne. Il y a eu beaucoup de concertation qui a été faite avec l'UPA sur des dossiers. On le voit par les derniers tableaux, par exemple.

Et, dans un contexte de même – beaucoup de demandes aussi que le milieu a gardées, que les municipalités ont gardées, parce qu'ils ont compris soit que ça n'avait pas de bon sens ou qu'ils ont voulu travailler leurs dossiers mieux – on n'est pas capable de dire que la tendance est sûre, encore. Je pense qu'on ne pourrait pas s'avancer là-dessus, sauf qu'on est content de voir qu'elle s'en va dans la bonne direction.

Aussi, c'est que, nous autres, on l'avait escomptée pour être capable de faire comme il faut notre travail, de continuer d'améliorer notre efficacité et de pouvoir donner un meilleur service. On l'avait escomptée parce que, si la demande ne baissait pas, la Commission n'aurait pas pu soutenir, avec les nouveaux mandats qu'on a, toute la pression. Dans une perspective comme ça, il fallait absolument travailler pour la baisser. L'idée, ce n'est pas de baisser la demande mais de baisser la pression.

Et il y a d'autres gestes qui vont nous amener à le faire, mais qui vont prendre un peu plus de temps. C'est comme maigrir: les premières 20 livres sont des fois plus faciles et les dernières livres sont plus dures. Alors, c'est sûr que ça va être peut-être... Mais je trouve que ça donne déjà quelque chose qui est intéressant puis que le résultat est attribuable aussi certainement en grande partie au milieu. Le sérieux qu'ils ont mis...

Vous voyez ça, regardez, prenez le dernier tableau, par exemple. C'est quand même significatif. À la page 11. Non, je m'excuse, je ne vous ai pas emmenés à la bonne place. C'est plutôt à la page 13. C'est ça? À la page 13, c'est intéressant de voir que sur... Vous voyez, on va prendre le dernier tableau, en bas de la page 13. Pour la période considérée, il y a 122 fois qu'on devait leur demander un avis – MRC-UPA, vous comprenez? – obligatoirement. On a reçu, par exemple – vous le voyez – au niveau des MRC, 68 réponses, c'est-à-dire 56 % qui ont donné des avis là-dessus. Et vous avez, par rapport à l'UPA, 48 réponses qu'ils nous ont données qui équivalent à près de 40 %, 39 %.

Et, en plus, vous vous rappelez, c'était en période d'été. Donc, pour les cultivateurs, ce n'est pas facile, quand la loi arrivait, de donner les avis. Et je crois que la tendance qu'on observe, là, dans les derniers jours, la tendance est à augmenter. Et c'est intéressant parce que ça montre... Voyez-vous, quand ils s'en occupent – c'est ça, moi, que je déduis de ces statistiques-là – quand ils se parlent en amont du processus décisionnel... Regardez le score: l'UPA, les deux tiers des fois, est pour.

(16 h 30)

Vous voyez, ça parle, ça. Puis, évidemment, à leur air, des fois, je blague quand je dis ça, mais je veux dire qu'ils nous indiquent, des fois, par leurs propos, qu'ils sont mitigés. Bon, mais ça, il faut comprendre. On est capable de comprendre ça. On est habitué de travailler avec eux autres, puis ils ont langage très clair, les agriculteurs. Des fois, ils ne nous disent pas qu'ils sont pour, ils ne nous disent pas qu'ils sont contre, mais il faut décoder, puis ils sont très intelligents dans leur façon de procéder. Mais on regarde ça et on dit: C'est quand même, voyez-vous, juste 8,3 % qui étaient contre quand ils ont travaillé les dossiers ensemble.

Mais ça, ça veut dire quoi? Ça veut dire, regardez en haut, ce que ça veut dire. En haut, on a donné ça tous azimuts, sans demander, sans qu'on soit obligé de demander un avis. Puis voyez-vous? Regardez, ils sont 41 % contre. Dans l'autre, ils sont 8 % contre. Ça veut dire que, quand ils se parlent sur les dossiers, quand ils travaillent le dossier, vous avez plus de chance que le site qui arrive ou la demande qui est faite, qu'elle soit plus de moindre impact. Ça témoigne de ça puis ça peut témoigner aussi que, dans l'ensemble des choses, il y a probablement des gros dossiers qui ne sont pas entrés chez nous, parce qu'ils sont encore à l'UPA, qu'ils sont encore en discussion avec la MRC, puis que ça fait quelques mois qu'ils essaient de s'entendre sur le dossier de moindre impact. C'est ce qui nous fait dire qu'on n'est pas encore en mesure de tirer la ligne.

Puis aussi, il faut savoir qu'avec la révision des schémas d'aménagement... évidemment, quand on révise un schéma, on regarde s'il n'y a pas des ajustements à faire. Il faudrait être utopique de penser que ça n'amènera pas certaines demandes. C'est bien sûr. Alors, on n'est pas capable de la camper encore complètement, la tendance, mais on peut dire qu'avec le travail du milieu, de l'UPA, des MRC, qui donnent plus d'avis... Voyez, même en haut, là, 9,2 %, les MRC. Avant, vous vous rappelez, dans nos statistiques qu'on donnait – c'est quoi, Carole? C'est à peu près pareil? Disons qu'elles se maintiennent à peu près à 10 %. Mais c'est intéressant de voir, en tout cas, que la tendance, c'est qu'on s'en va... les MRC, presque six dossiers sur 10, nous donnent un avis, puis à l'UPA, il est à quatre dossiers sur 10, puis la tendance a tendance à s'en venir à la hausse.

Le Président (M. Vallières): Les avis, dans certains cas, sont obligatoires, dans d'autres cas, facultatifs.

M. Ouimet (Bernard): Oui. C'est-à-dire qu'on leur demande un avis. On est obligé de le faire quand c'est un ministère, une municipalité, un organisme public. Dans le reste, ils peuvent nous fournir un avis n'importe quand, parce qu'on a comme habitude de toujours mettre nos couleurs devant eux. Alors, ils peuvent toujours réagir.

C'est quand même intéressant, parce que ça veut dire que le milieu, d'une certaine façon, a commencé à rentrer dans les nouvelles règles et qu'on est dans la bonne direction. Vous vous rappelez, quand on discutait de la loi, on disait: On est toujours sur la ligne de départ. Ça fait cinq ans qu'on en parle, mais on ne décolle pas. Là, les statistiques, elles nous démontrent que les gens, ils ont embarqués dans les règles du jeu, mais qu'on est au début de quelque chose. Il ne faut pas se faire d'illusions, avec l'ampleur des changements que vous avez vu au début, ça serait utopique de penser que demain matin, tout le monde est converti aux nouvelles orientations. Mais on trouve encourageante la réponse des MRC, des municipalités et de l'UPA à ces nouvelles règles du jeu là. Et c'est prometteur, ça.


Répercussions sur les effectifs

Le Président (M. Vallières): Vous aviez déjà réduit considérablement les délais de traitement de dossiers. On assiste maintenant à une réduction du nombre de demandes. Vous augmentez et vous voulez continuer à augmenter votre niveau d'efficacité. Est-ce que, par ailleurs, vous examinez la possibilité que cette réduction de volume de traitement de dossiers pourrait vous amener à réduire éventuellement vos effectifs, à la Commission?

M. Ouimet (Bernard): Bon, c'est une question qu'il faut placer en perspective. Dans le contexte actuel des choses, je pense que ce qu'on récupère, c'était comme essentiel. Je vais vous dire, avec un changement de régime, avec un changement pour la réforme de la justice administrative au 1er avril, avec un changement informatique complet, au 1er avril, on va expérimenter des systèmes qu'on n'a pas connus. La Commission s'en va vers des systèmes intégrés de son traitement de l'information. Et, juste ça, juste l'informatique, là, ce que ça suppose chez notre monde, c'est inouï comme adaptation. C'est comme si on faisait trois réformes en même temps. En pratique, c'est un peu en même temps, parce que juillet, ce n'est pas long, là, puis bon...

Dans un contexte comme ça, c'est sûr qu'avec les années, là... supposons, si on regarde ça sur un horizon, si vous me parlez dans cinq ans, là, ça serait quoi, le profil de la Commission? Ça se peut que la Commission, au lieu d'être à 110, qu'elle soit à 95. Mais ce qu'il va falloir voir avant, c'est l'effet de la réforme de la justice administrative. Il va falloir voir aussi l'effet de nos systèmes informatiques, en termes très concrets, puis il va falloir aussi rééquilibrer nos affaires.

Actuellement, à la Commission, tout le monde, chez nous, est sur une chaîne d'opération. Chez nous, contrairement à bien des organismes ou des ministères, on n'a pas de gens en planification, on n'a pas de gens en vérification, pas de gens qui nous aident à préparer des choses. Ils sont tous sur une chaîne de production. Il va falloir équilibrer nos ressources. La reddition de comptes qu'on fait aujourd'hui, ça n'a pas de bon sens qu'on continue de faire ça comme ça: c'est des heures et des heures et des semaines de monde qui valide puis qui travaille jusqu'à minuit le soir pour arriver avec des données aussi simples que ça. Bon, mais il n'y avait personne en validation de nos données avant, et on n'avait pas des objectifs de reddition de comptes comme on a aujourd'hui. On veut faire ça deux fois par année à nos interlocuteurs puis à la commission de l'agriculture, vous déposer deux fois par année c'est quoi, les résultats de nos décisions puis ces choses-là. Alors, il y a du travail qui va se faire là-dedans.

Alors, quand on regarde tout ça, puis si on veut faire changer le milieu, c'est comme un avion, si on lui coupe les ailes avant qu'il monte, il pique au bout de la piste. Et là il faut aider le milieu à le faire, le virage. Vous savez, toutes les fois que je vais dans une MRC, ils me disent toujours: On «peut-u» avoir ton analyste? Je réponds: Non. Je dis toujours: Vous le voyez sur les listes. L'analyste, il a souvent 10 MRC dont s'occuper, chez nous. Et il ne faut pas oublier qu'on a réduit de 50 % nos enquêteurs, pendant les dernières années, qu'on a réduit quatre ou cinq analystes, dans les dernières années. On a réduit de partout, on a coupé 1 000 000 $ sur la machine en quelques années. Dans cette perspective-là, il est bien trop tôt pour penser ça.

Je crois qu'il faut amener le milieu à faire le virage et mettre toutes nos énergies à être proactifs et positifs vers le changement. Ce n'est pas le temps de couper le support quand on peut faire changer les choses. Par la suite des choses, je ne serai pas capable de vous dire, comme administrateur public, que le nombre devrait être la même chose dans cinq ans. Il va falloir continuer de faire ce qu'on fait, être complètement à l'affût de ce qui bouge dans notre environnement, s'ajuster, regarder les nouvelles réalités puis, si on sent qu'on a du monde de trop, je vous garantis qu'on va être en mesure de l'identifier. Mais ce n'est pas le problème qu'on a, là, c'est plutôt le contraire.

Le Président (M. Vallières): Très bien, merci, M. le président. M. le député de Beauce-Nord.


Statistiques comparatives du taux de demandes

M. Poulin: Oui, M. le Président, un peu dans le même ordre d'idées, je ne sais pas si vous avez des statistiques pour faire un bilan dans les cinq dernières années. On parle d'une diminution de 35 % mais, si on retourne aux années 1972 par exemple, est-ce que le nombre de demandes était plus élevé comparativement à 1995? J'aimerais qu'on parle de ça et j'aimerais qu'on vulgarise un petit peu les tableaux qu'on nous a présentés. On parle de pourcentage de taux d'autorisation, est-ce que les pourcentages d'autorisation ressemblent à ceux des années antérieures? Est-ce que, dans le temps, on est capable de faire des comparatifs? Est-ce qu'on peut nous apporter, on va dire, des informations de manière à ce qu'on se comprenne dans les tableaux? Parce que je regarde, par exemple, à la page 3, je vois des 100 % puis des 92 % puis je me dis: Il me semble que ça ne doit pas être si facile que ça d'être autorisé quand on va présenter une demande. Ça fait que j'aimerais ça, peut-être, qu'on explique un petit peu les documents qu'on nous a remis en commission puis j'aurais quelques petites questions par la suite.

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): M. le Président, c'est une excellente question, puis je pense qu'effectivement lancer juste des statistiques comme ça sans pointer peut-être les affaires un peu majeures qui ressortent, ça serait vraiment incomplet puis, profitant de la rencontre, on pourrait le faire rapidement, sans rentrer dans les détails.

D'abord, votre première question par rapport à la demande. Il faut situer les choses dans le contexte. Je les ai, ici, de 1978-1980, dès le début de la Commission, à aller jusqu'en 1996-1997. La demande, en gros, moi, je vous dirais qu'au tout début c'est sûr qu'on parle de 10 000 dossiers, mais il faut comprendre une chose, aussi. C'est en voyant les dossiers d'Hydro-Québec que je me suis rendu compte de ça, c'est que très souvent on pouvait mettre dans un numéro de dossier, on pouvait avoir 25 numéros de dossiers, c'était comme 25 demandes, alors que nous autres, on va considérer que c'est un dossier, aujourd'hui. Vous savez, il faut faire attention à ces chiffres-là. Puis c'était dans un contexte aussi où toute la rédaction des décisions était faite par un staff professionnel, la Commission était à peu près 180 avec les occasionnels, dans ces bouts-là, plus 110, plus 107 comme aujourd'hui, et c'était rédigé avec peu de commissaires, mais ce n'étaient pas les commissaires qui rédigeaient, c'étaient les professionnels, les avocats qui rédigeaient puis ils rencontraient l'analyste, puis il y avait plus d'analystes, il y avait plus d'avocats, puis ça marchait de même.

M. Poulin: C'est pour ça que j'ai demandé sur les cinq dernières années parce que je ne voudrais pas partir du début.

(16 h 40)

M. Ouimet (Bernard): O.K., si vous prenez les cinq dernières années, ça s'est tenu alentour de 4 000. Moi, je vous dirais, là... C'est ça, 4 000, voyez-vous? 4 014, 3 818, 3 897, 3 842, 3 999. Cette année, donc, on va être à peu près à 3 000, là. C'est ça que ça va vouloir dire.

M. Poulin: Donc, c'était assez stable au niveau du nombre de demandes qui entraient dans les cinq dernières années.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Poulin: O.K. Avec la réforme, on perçoit une diminution de 35 %.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

M. Poulin: O.K.

M. Ouimet (Bernard): Maintenant, quant aux tableaux, et là vous dites, dans le fond: Comment ça se compare? C'est intéressant, parce que là on peut comparer avec les dernières années.

Si vous me permettez, M. le Président, le tableau 1 démontre le nombre de demandes; le tableau 2, c'est la composition de la demande. Ça va? Puis après, on pourrait aller sur l'autre tableau, qui est le taux d'autorisation selon la demande, puis après on fait des zooms et, sur les zooms, je pourrais répondre à votre question. Par exemple, pour la petite maison sur le bord de la route, c'est quoi, notre score? On va y arriver tantôt.

Si on regarde le tableau 2, qui est la composition de la demande, pour la période considérée, là, il y a 1 517 demandes qui correspondent, dans le fond, à tous les volets. Vous voyez, l'explication, dans le fond, c'est tous les volets dominants d'une demande. Parce que, des fois, ça peut avoir deux volets, ça peut être le lotissement, puis ça peut être l'UNA. Quand on regarde ça, ce qu'on essaie d'expliquer dans le document, c'est surtout deux choses: c'est les exclusions puis les utilisations non agricoles. Ça compose ensemble 70 % de la demande pour la période considérée, et toutes les notes que vous voyez suivre, elles viennent là-dessus, en gros.

Quand vous voyez le pourcentage, 2,8 % pour les exclusions, puis 67 % pour les utilisations non agricoles, vous voyez que 70 % de notre demande est là-dessus. Je ne sais pas si vous me suivez, au tableau 2.

M. Poulin: Vous avez «inclusions»...

M. Ouimet (Bernard): Oui, c'est ça.

M. Poulin: ...de 0,7 %.

M. Ouimet (Bernard): Mais je les passe, ceux-là, parce que, vous savez, c'est tellement secondaire. Je descends à la cinquième ligne, où j'arrive: «Exclusions» et «Utilisations non agricoles». Si on prend les deux ensemble, ça compose 70 % de la demande et, vous allez voir, c'est surtout là-dessus qu'on a mis l'accent pour la suite des choses.

Ce qu'il est intéressant de voir, c'est que ça se maintient à peu près comme avant. Je vous dirais que, dans les quatre, cinq dernières années, le résidentiel, c'est 40 % de notre demande. Il est composé comment, le résidentiel? Il est composé d'agrandissements résidentiels des usages qui sont existants. Vous le voyez pour 14,4 % dans le résidentiel, puis il est composé de nouveaux usages, soit de maisons isolées, soit une résidence attachée à une terre, soit deux résidences ou plus, bon. Quand on met tout ça ensemble, moi, je vous dirais: On est à peu près à une demande qui est semblable à avant, 40 % dans le résidentiel, au niveau de la demande.

Ce qui est intéressant, maintenant, aujourd'hui, c'est qu'on a une statistique qu'on n'avait jamais eue, parce que nos données – Mme Jutras pourra vous en parler de façon plus détaillée; elle travaille à ces données-là depuis des semaines... La résidence isolée, parce que, avant, on ne distinguait pas une résidence sur une terre, rattachée à une terre, versus une résidence établie sur 30 000 pi² au bord de la route. Là, on peut le faire. Quand on parle «résidence isolée», c'est vraiment une maison sur 3 000 m² ou à peu près. Vous voyez, il y en a 211. Ça constitue presque 14 % de notre demande. O.K.? Donc, le plus gros de la demande, dans les usages autres qu'agricoles – les nouveaux usages – c'est des maisons isolées ou c'est des maisons rattachées à une terre pour à peu près 9 %, ou c'est deux résidences et plus pour 2,8 %. Mais en gros, là, le commercial et l'industriel, voyez-vous, c'est à peu près 4 % de notre demande. Vous voyez à peu près comment ça évolue.

Ça, je vous dirais, ça n'a pas beaucoup bougé. C'est à peu près semblable. On l'a dans nos rapports annuels antérieurs. À la page 65 de notre dernier rapport annuel, on fait une comparaison avec des choses qui se comparent, sur trois années: 1994-1995, 1995-1996, 1996-1997, puis je vous dirais, grosso modo, que ça s'en va dans les mêmes tendances.

M. Poulin: O.K.

M. Ouimet (Bernard): Si on prend le tableau 3, au niveau des taux d'autorisation, ce que ça démontre, globalement, si vous prenez les exclusions, comme tantôt, et les utilisations non agricoles, on a un taux d'autorisation de 44,2 % pour les exclusions, et ça représente 20,7 % seulement des superficies qui étaient demandées. Ça, je vous dirais que c'est la tendance qu'on a observée aussi l'an passé. En gros, 20 % des superficies dans le résidentiel et développement résidentiel, on était à peu près à ça l'an passé. Écoutez, c'était peut-être 19 %, de mémoire, quelque 19 %, mais on est à peu près dans ces chiffres-là.

Dans les utilisations non agricoles, quand on regarde ça, voyez-vous, c'est logique, les agrandissements d'usages existants, on score à 90 % d'autorisation. Et là, elles sont détaillées: pour une maison, 92 %; pour un commerce, 74 %; 100 % pour le récréotouristique, quand on agrandit, par exemple, un site déjà récréotouristique; l'institutionnel, 100 %. Et là, si on veut voir comment ça représentait de cas, vous avez ça dans les premiers tableaux. O.K.?

Une voix: ...

M. Ouimet (Bernard): Oui, il y avait très, très peu, aussi, de cas qui amènent... Le 100 %, c'est parce qu'il y avait des fois... Écoutez, il y avait quelques dossiers seulement là-dessus. Mais, en pratique, ça se dessine comme ça. Là où on est le plus sévère, si on veut prendre l'expression «sévère», c'est-à-dire là où la Commission autorise le moins, c'est sur une maison sur 3 000 m². Son score, vous l'avez à la page 7. Il y a eu, au total, 211 demandes au cours de la période. La Commission en a autorisé 65, pour un pourcentage de 30,8 %. Et aussi, elle n'a autorisé, vous le voyez à la fin, que 20 % des superficies qui étaient demandées.

Par contre, ce qui est intéressant avec la reddition de comptes qu'on fait maintenant, c'est que – voyez les motifs – c'est aggloméré. Ça veut dire que, dans le 30 % qu'on a autorisé, il n'y avait pas 1 %... il y a une demande où il y avait des perspectives agricoles. Et vous avez 64 dossiers où ça n'avait pas de perspective agricole, et on a défini ces concepts-là. C'est intéressant, ça. On peut voir que, par exemple, dans 57 des 65 cas que vous voyez en haut à l'extrême droite, il s'agissait d'autorisations motivées par la présence d'un secteur déstructuré. Et on le fait, dans certains tableaux, on le motive un peu. On dit, par exemple, sur les 146 cas qu'on aurait refusés ou qu'il y a eu, dans quelques cas, désistement, c'était pour la disponibilité d'espaces appropriés dans la zone agricole principalement. Ce qui se configure de tous nos tableaux, c'est que, quand on dit non, généralement, c'est parce qu'il y a soit de l'espace dans la zone blanche ou c'est à cause de l'effet sur la zone agricole et sur les activités agricoles.


Critères d'autorisation pour un développement commercial

M. Poulin: O.K. Là, je vais vous arriver avec une situation plus pratique. Je vais prendre l'exemple d'une municipalité qui est dans un milieu agricole – prenons par exemple en Beauce – où il y a un centre urbain, mais qu'il n'y a pas suffisamment d'espace pour bâtir un parc industriel. Si la municipalité est appuyée par sa MRC, son UPA et on identifie, par exemple, une zone où il pourrait y avoir un parc industriel même si à l'extérieur il peut y avoir des parcs industriels, par exemple hors de cette municipalité-là, mais dans la petite municipalité qui veut développer, on va dire, l'emploi chez elle, on demande à la Commission d'examiner une possibilité de prendre de l'expansion. Est-ce qu'à ce moment-là la Commission pourrait refuser, même si tous les intervenants sont d'accord, on va dire, à établir un parc industriel dans ce milieu-là? S'il n'y a pas d'autre espace disponible, même si on est dans un milieu à zone agricole et que tout l'ensemble des intervenants sont d'accord?

Le Président (M. Vallières): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Il pourrait arriver que tous les intervenants soient d'accord puis que la Commission ne soit pas d'accord. On a des cas comme ça. On en a. On pourrait les détailler, j'en ai en liste. Mais, quand il n'y a pas d'espace approprié, vraiment à une grande échelle...

M. Poulin: Est-ce que l'espace approprié pourrait être dans une autre municipalité, c'est un...

M. Ouimet (Bernard): Il peut arriver, oui.

M. Poulin: Dans un cas semblable, oui?

(16 h 50)

M. Ouimet (Bernard): Il peut arriver, oui. Quand il s'agit d'un... Regardez, je vais éliminer là... On ne dirait pas non à quelqu'un pour une maison sur 30 000 pi² parce qu'il y a de l'espace dans l'autre municipalité. Vous savez, ça ne serait pas raisonnable de dire une chose comme ça. Mais, quand il s'agit d'un parc industriel, quand il s'agit d'un développement résidentiel, quand il s'agit d'un développement commercial ou de quelque chose qui est majeur, un développement, l'article de la loi nous oblige – l'article 62.5° – à considérer un espace raisonnable; il y a toujours un jugement à porter, mais un espace raisonnable. Ça pourrait arriver que ça soit dans la MRC contiguë, ça pourrait même être dans la MRC d'à côté, si c'est proche, parce que, des fois, entre deux MRC, ça peut être plus proche qu'à l'intérieur de la même MRC. Oui, ça peut arriver.

Regardez, à Saint-Éphrem, par exemple, chez vous, où ça a été autorisé, c'était le cas, par exemple. C'était un cas où il n'y avait pas d'espace et la Commission l'a autorisé. C'est arrivé dans une petite place dans la région de Montréal où c'est agricole mur à mur, dans les jardins Napierville, où on a dit non, voyez-vous, même si on voulait plus de terrain pour le résidentiel, parce qu'on jugeait qu'il y en avait encore un peu, mais il n'y a pas d'aqueduc et d'égouts, et que c'était agricole mur à mur.

Mais il n'y a pas de mathématiques là-dedans. Je pense que l'idée, c'est, quand ils peuvent aller de façon raisonnable dans des espaces qui sont zonés pour ça, de protéger nos bonnes terres, surtout quand c'est des bonnes terres. Si ce n'est pas des bonnes terres, si on ne perd rien et c'est déstructuré, la recherche d'espaces appropriés ailleurs, vous savez, il faut être raisonnable si on ne perd pas grand-chose en agriculture, si ça n'a pas de perspective agricole. Mais vous voyez, partout dans les données qu'on vous place là, on voit toujours que, quand c'est de la perspective agricole, le taux d'autorisation diminue.

M. Poulin: Même basé sur une création d'emplois? Parce qu'il peut arriver, mettons, que, si ces gens-là ne sont pas capables, je ne sais pas, moi, de créer leur entreprise... Ça peut être des entreprises de transformation. On sait que dans ces milieux-là, quand même, il y a une certaine richesse, il y a des gens, on va dire, qui sont en mesure de se diriger vers d'autres secteurs d'activité. En Beauce, c'est très fréquent; là, je prends l'exemple parce que c'est dans mon comté et il y a certaines problématiques qui se vivent actuellement. On perd peut-être la création de certains emplois si on ne donne pas la chance à un milieu de s'organiser au niveau de son parc industriel. Vous allez me dire, peut-être, qu'ils peuvent aller à 8 km. Mais les gens ne sont pas désireux, bien souvent, d'aller dans la municipalité voisine; ils ont chacun un petit peu leur orgueil. C'est pour ça que je vous dis: Tenant compte que le milieu – ça peut être la MRC, l'UPA, le milieu de la municipalité – ils sont d'accord avec cette perspective-là. Mais, même à ça, il pourrait arriver, on va dire, que la Commission dise: Malheureusement, dans ce secteur-là, étant donné que c'est très d'usage agricole, on ne peut pas permettre une activité semblable et agrandir pour permettre l'utilisation d'espace pour un parc industriel, par exemple. J'ai bien compris, si...

M. Ouimet (Bernard): Ça peut arriver qu'on dise non pour un agrandissement de parc industriel. Remarquez que...

M. Poulin: Une création, même, je disais.

M. Ouimet (Bernard): ...ça nous prend des bons motifs, parce qu'il faut justifier nos affaires. Si c'est non, c'est parce que soyez sûr que c'est sur des terrains où il y a des perspectives agricoles très grandes et qu'on estime que ça pourrait raisonnablement s'implanter ailleurs, ou que le travail n'a pas encore été fait à l'échelle régionale pour essayer d'avoir des sites de moindre impact. Ça, c'est sûr, ça pourrait arriver qu'on dise ça. Mais...

M. Poulin: J'aurais une dernière petite question.

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): Oui, M. le député de Beauce-Nord.


Juridiction sur le zonage de production

M. Poulin: J'aimerais savoir... Actuellement, dans les schémas d'aménagement, il y a des municipalités qui n'acceptent pas certaines productions animales dans leur milieu. Est-ce que, si une demande est adressée à la Commission, la Commission peut, elle, accepter qu'une certaine production soit effectuée, une production animale, dans un milieu où, dans le schéma d'aménagement, on retrouverait, on va dire, une interdiction pour cette...

M. Ouimet (Bernard): C'est que, nous autres, on n'a pas à se prononcer, M. le Président, pour faire de l'agriculture, parce que, nous autres, ce qu'on gère, c'est tout ce qui n'est pas de l'agriculture, d'une certaine façon; c'est-à-dire que l'usage permis dans la zone agricole, d'office, c'est l'agriculture.

M. Poulin: O.K.

M. Ouimet (Bernard): Alors, quelqu'un qui veut établir sa porcherie chez nous, ça ne pose pas de problème. Dès qu'on veut faire autre chose que de l'agriculture, soit exclure un terrain ou soit un usage autre qu'agricole, là, il faut qu'ils viennent nous voir.

M. Poulin: Mais, si je comprends bien, c'est quand même la municipalité qui peut l'interdire, dans un contexte où, mettons, je ne sais pas, moi, dans son schéma, on défend de produire... je ne sais pas, moi, ça peut être du porc, dans un milieu. À ce moment-là, même si vous donnez l'autorisation, la personne qui fait cette demande-là n'a pas le droit – on va dire – de s'implanter et de faire sa production.

M. Ouimet (Bernard): C'est-à-dire qu'elle n'a pas besoin d'autorisation pour faire sa porcherie, pour bâtir sa porcherie.

M. Poulin: Ah! O.K. Il n'a pas besoin d'autorisation.

M. Ouimet (Bernard): Chez nous, actuellement, c'est une déclaration puis, avec nos règlements, il n'y aura même plus de déclaration à faire parce que ça va être un bâtiment agricole. Mais, quant à la municipalité, si vous me permettez, M. le Président, c'est peut-être Me Cardinal qui pourrait préciser ça au niveau du droit. Là, c'est tous les problèmes qu'on voit actuellement un peu partout.

Le Président (M. Vallières): Oui, Me Cardinal, en complément.

M. Cardinal (Serge): Merci, M. le Président. C'est une question complexe, ça. Mais essentiellement, ce à quoi vous faites référence, c'est le zonage de production. Je vous dirais qu'il y a des outils d'introduits par la loi que vous avez votée en 1996, qui est en vigueur – la loi n° 23 – depuis 1997, pour non pas interdire le zonage de production mais je dirais «baliser» le zonage de production. Ces outils-là, je pense aux orientations gouvernementales, dont les MRC doivent prendre compte à l'occasion de la révision de leur schéma, et je pense en particulier à l'outil auquel on a fait allusion plus tôt qui est le forum de discussion, le comité de concertation agricole, le Comité consultatif agricole. Alors, si tout ce monde-là est d'accord au niveau de la MRC, si le gouvernement estime que ça répond aux orientations gouvernementales, le zonage de production va être encore possible mais de façon, comme je vous le disais, balisée. Il va falloir qu'il y ait une discussion au niveau de la MRC sur ces questions-là.

Le Président (M. Vallières): Merci. M. le député de Nicolet-Yamaska, c'est sur le même sujet?

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Sur le même sujet que M. le député...

Le Président (M. Vallières): Et ça va être rapide? Parce que j'avais d'autres demandes d'intervention qui vous précédaient.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ah, ça va être très rapide!

Le Président (M. Vallières): Très bien, allez-y!


Demande de construction d'un bâtiment à vocation récréative

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci. Pour faire suite à la demande de mon collègue de Beauce-Nord, lui, l'exemple qu'il donnait, c'est un parc industriel. Moi, c'est arrivé dans mon comté où on avait demandé la construction d'un local d'âge d'or et, à ce moment-là, la municipalité était d'accord, la MRC aussi. Et je pense que la première décision, ç'a été un refus. Bien sûr, je ne veux pas en faire un cas de comté mais, si vous dites qu'il est possible qu'on puisse fonctionner avec une autre municipalité, ça devient compliqué un peu, parce que l'âge d'or de la municipalité x ne pourrait pas avoir ses activités dans la municipalité voisine à cinq ou 10 ou 15 km. Ça devient complexe et compliqué pour ces personnes-là. Il y aurait une ouverture nouvelle, si je comprends bien, là.

Le Président (M. Vallières): M. le président.

M. Ouimet (Bernard): J'aimerais mieux en parler sur la base du dossier, vous savez, de façon concrète parce que c'est un dossier qui a été jugé et je voudrais voir les motifs avant de donner quelque indication. C'est ça. Mes collègues me font remarquer: Est-ce que c'est une décision qui a été rendue sur le régime sur des sol 3 – 1, 2, 3?

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Bonne question.

M. Ouimet (Bernard): C'est pour ça que je vous dis que c'est bon de voir le dossier. Parce qu'il est arrivé que des gens...

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Mais je ne veux pas en faire un cas particulier, là, vous me comprendrez. Mais...

M. Ouimet (Bernard): C'est ça. Exactement. Mais il est arrivé des cas, M. le Président, où on avait dit non en vertu du régime provisoire, O.K., qui sont revenus chez nous. Il y a des fois où on a maintenu la même décision, mais il y a des fois où on a pris une autre décision. Il y avait des cas assez pathétiques, même, des fois, des cas d'agrandissement de périmètres à des places où ça... Vraiment, là, c'était le secteur exclusif qui nous permettait... On ne pouvait pas porter un jugement là-dessus. Alors, il est arrivé des cas où ils sont revenus chez nous puis ç'a été autorisé, puis il y a eu des cas où ils sont venus chez nous et ils ont eu la même réponse. Je sais que Mme Jutras a ces données-là, en termes de pourcentage d'ensemble, mais je vous dirais qu'il y a certains cas qui sont venus où on a jugé la chose différemment dans le cadre des nouvelles dispositions. La majorité, c'est que ça n'avait pas changé, mais il y a eu des cas où ça a changé.

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Ça va, merci.


Délai pour soumettre à nouveau une demande

Le Président (M. Vallières): Dans les cas qui sont l'objet d'un refus pour des motifs que la Commission justifie, les gens ont combien de temps? Supposons que quelqu'un voudrait reformuler une demande presque similaire, il ne fait pas d'appel, ne conteste pas la décision, cette personne-là pourrait reformuler une demande dans quel délai?

M. Ouimet (Bernard): Voulez-vous dire qu'il avait fait sa demande dans l'ancien régime?

Le Président (M. Vallières): Non, le nouveau régime. Une décision rendue en janvier.

M. Ouimet (Bernard): O.K. On a dit non à quelqu'un dans le nouveau régime, puis là vous dites que ça serait exactement la même affaire.

Le Président (M. Vallières): Ou supposons que la personne y retourne avec une superficie de la moitié de ce qu'il a demandé, il aurait combien de temps pour reformuler une demande qui serait à peu près la même?

M. Ouimet (Bernard): Il n'y a pas de délai.

(17 heures)

Le Président (M. Vallières): Il n'y a pas de délai?

M. Ouimet (Bernard): Non, il n'y a pas de délai.

Le Président (M. Vallières): O.K.

M. Ouimet (Bernard): Si c'était exactement la même affaire, bien, c'est sûr que...

Le Président (M. Vallières): Elle devrait être refusée à nouveau.

M. Ouimet (Bernard): ...il pourrait s'attendre à recevoir quelque chose qui ressemble à peu près à la première. Mais là c'est peut-être une tout autre demande.

Le Président (M. Vallières): Oui. Mais là je vais sûrement revenir sur le sujet. Parce que, quand les parlementaires ont discuté avec vous en commission déjà, il y a à peu près un an et demi ou deux ans, pour donner la possibilité à la Commission de prendre en compte, en considération, des critères de développement économique en région et la viabilité d'une collectivité – c'est l'une des parties de la section 8 dans les résultats que vous nous donnez – c'est sûr qu'il va être intéressant de comparer – si on peut avoir en main un certain nombre de vos décisions – vos décisions avec l'esprit que, en tout cas, nous, on entendait vis-à-vis la conduite qu'on voulait se donner de tenir compte de l'avis des collectivités locales et de leur développement économique. C'est sûr que ça nous prendrait plusieurs décisions pour pouvoir juger un peu de l'évaluation qu'on fait si on atteint l'objectif qu'on se donnait comme législateurs. Mais il m'apparaît que, dans des catégories de sol 1, 2, 3 ou 4, la Commission semble être très ferme vis-à-vis toute éventualité de développement économique, même pour des expansions – que ce soit parc industriel ou ça peut être carrément aussi une industrie qui a besoin d'expansion – que vous les référiez soit au parc industriel le plus rapproché, même si ce n'est pas dans leur municipalité, ou encore à une zone blanche dans une autre municipalité voisine pour donner l'expansion à leur business.

Quand on se reporte à la culture à laquelle on assiste dans les milieux ruraux, ce n'est pas évident, les décisions comme ça. Parce que les gens, souvent, vont priver la municipalité, et la leur et la voisine, d'investissements dans un contexte comme celui-là. Moi, j'ai des exemples chez nous, en tout cas au moins un, une décision que vous avez prise. Conséquemment, il faudrait voir à l'usage – je ne sais pas le nombre de décisions que vous allez prendre – dans quelle mesure possiblement des gens se privent d'investissements par rapport à des décisions comme ça et s'il y a une solution. Parce qu'il y a des municipalités, entre autres, puis c'est un phénomène assez spécial, où la zone blanche n'existe pas dans la municipalité du canton ou dans la municipalité de paroisse, mais la zone blanche existe dans le village. Dans plusieurs cas, il n'y a pas eu de fusion ou il n'y en aura pas pour encore plusieurs années. Donc, ça donne lieu à des décisions qui, possiblement, débouchent sur des emplois nouveaux qu'on n'a pas.

Alors, on peut peut-être vous entendre rapidement là-dessus, parce que, moi, un jour ou l'autre, je vais vous revenir avec probablement plusieurs décisions que vous auriez prises afin de pouvoir se faire une opinion sur l'atteinte de l'objectif que nous avions, en tout cas, comme législateurs.

M. Ouimet: Oui. Très bien. En ce qui concerne le critère de développement économique, vous avez, à la page 12, certaines données qui ont été mises dans nos tableaux. Mais, avant de l'aborder comme tel, directement, je peux vous dire que toutes les fois, et si on ne l'a pas fait dans un cas ou deux, c'est parce qu'on est dans l'erreur – je vous le dis, mais on n'en a pas trouvé – toutes les fois que c'est invoqué par une MRC, un corps public, une municipalité, c'est toujours pris en considération. Ça, je dois dire ça. Vous savez, avant on ne pouvait pas, sur des sols de classe 2, même l'invoquer. Parce qu'on ne pouvait pas tenir compte de ce critère-là sur les classes 2 et 3. Maintenant, toutes les fois que c'est invoqué, toutes les fois qu'on a une preuve par une instance publique – MRC, municipalité – nous le considérons.

Cela dit, pour le considérer, il faut le regarder à l'intérieur de nos 10 critères. Et il y a des fois que ça fait pencher la balance d'un bord, puis, des fois, ça fait pencher la balance de l'autre bord. Vous savez, dans le cas, par exemple, de Rouville, vous avez vu que la Commission a considéré l'effet de la demande sur le développement économique, en a disposé, mais elle est arrivée à un refus. Elle est arrivée à un refus et en a disposé. Dans des cas comme, prenez... on a des exemples, Saint-Siméon, dans Bonaventure. Saint-Siméon, dans le vieux régime, l'ancien régime, on ne pouvait rien faire. On a réglé avec la nouvelle loi. Albanelle, dans le vieux régime, on ne pouvait rien faire – au Saguenay– Lac-Saint-Jean – on a réglé dans le nouveau régime. À Saint-Édouard, on n'a pas réglé, on a dit non. Alors, si je vous dis ça, c'est parce qu'on – j'en ai une bonne liste – va probablement, dans nos prochaines redditions, comme celle qui serait un peu plus élaborée dans notre rapport annuel, accorder de l'importance à ça parce que c'est majeur pour les gens. C'est très important de voir la motivation.

Et je pense que, quand c'est invoqué, ces critères-là, il y a une attitude de la Commission qui est vraiment de le prendre en considération, oui, mais il y a des fois où le résultat de ça, même en prenant en considération le développement économique, on arrive au résultat qu'il faut dire non pareil. Parce que ça n'emporte pas les autres critères qui sont de nature à protéger la zone agricole. Bon.

Et c'est ce qui fait que, dans ce qu'on voit venir déjà avec les quelques cas qu'on a, on voit que la Commission n'est pas idéologique. La Commission est pratique. Dans des cas, elle dit oui, des fois, même si ça fait balancer des choses, dans des cas, elle dit non. Ce qui va être important, et vous l'avez vous-même mentionné dans d'autres commissions parlementaires – ça, c'est un message important pour nous – c'est de toujours motiver nos décisions. C'est ça qui est important au bout de la ligne. C'est que, si on dit non, quand c'est invoqué, il faut que les gens comprennent. Si on dit oui, à cause de ça, il faut que tout le monde comprenne aussi.

Au bout de la ligne, c'est ça, pour nous autres, rendre des comptes. Puis on nous jugera à la pratique, si on exagère d'un côté ou si on exagère de l'autre. Mais il y a quand même – je terminerais là-dessus – une pensée persistante, dans certains milieux ou avec les sommets régionaux puis l'agrotourisme, puis tout ça, qui fait que – c'est pas juste nous autres – dès que c'est protéger l'environnement, c'est contre le développement économique; dès que c'est protéger notre paysage rural qui rapporte, qui va rapporter dans l'agrotourisme un jour, c'est contre le développement économique; dès que c'est protéger les territoires agricoles, c'est contre le développement économique.

Autrement dit, je pense qu'il y a une mentalité, il y a une réflexion à faire dans les milieux là-dessus, ne pas toujours tout mettre sur le dos de la protection du territoire agricole parce que, au bout de la ligne, des fois, on échange quatre trente sous pour une piastre. Et il y a des fois aussi où ce n'est même pas quatre trente sous pour une piastre, c'est l'économie de la région qui y perd. Et il y a une réflexion à faire là-dessus.

Prenez l'exemple, dans un domaine qui n'est pas le nôtre, les rues principales, regardez le travail qui s'est fait dans les rues principales. Et ils ont fait quoi? Ils ont conservé le patrimoine, puis souvent ça donne de la valeur économique au milieu.

En tout cas, cette réflexion-là, je pense qu'elle va être présente dans les schémas puis dans les discussions dans le milieu. Nous, on essaie d'avoir une position qui est toujours justifiée en fonction des critères de la loi, de l'esprit de la loi, puis d'essayer d'être raisonnable, puis de l'expliquer. Mais c'est évident qu'on va faire des gens, toujours, certaines personnes, insatisfaites là-dessus. On ne peut pas toujours dire oui pour ce critère-là. La preuve, c'est qu'il faut le considérer. Mais il y a des fois où on ne balance pas la décision pour ça.


Portée des avis donnés à Hydro-Québec

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie, M. Ouimet. Avant de passer la parole au député de Gaspé, puis au député de Beauce-Nord, j'aimerais peut-être vous poser une question, parce que, tantôt, j'aurai à quitter avant la fin des travaux et je tenais absolument à vous adresser cette question concernant deux avis, parce que vous donnez, à la page 13 de votre reddition de comptes, des avis formulés sur des demandes présentées par une MRC, une municipalité, un ministère, un organisme public ou un organisme fournissant les services d'utilité publique.

Vous avez fait référence, tantôt, à Hydro-Québec. On sait que récemment vous avez été sollicités, comme la loi le demande, par le gouvernement du Québec. En vertu de l'article 66, je pense, de la loi, le gouvernement peut, après avoir pris avis de la Commission de protection du territoire agricole du Québec, autoriser aux conditions qu'il détermine l'utilisation à des fins autres que l'agriculture d'un lot d'une zone agricole pour les fins d'un ministère ou organisme public.

(17 h 10)

Alors, vous avez, à ce jour, rendu quelques avis au gouvernement du Québec, comme suite à cette demande qui vous a été faite, entre autres un avis du 13 janvier 1998 et un autre du 20 janvier 1998, portant sur des corridors de transport d'énergie et sur certaines installations qui seront à être faites, au nom de l'urgence d'intervention. J'aurai quelques questions là-dessus, puisque, en tout cas, dans le premier avis que vous émettez, vous nous indiquez que c'est bon pour 12 mois, donc que c'est une autorisation qui a une durée temporaire à l'intérieur de la zone agricole du territoire des municipalités affectées par ces travaux.

Ma question était à l'effet de savoir, si par exemple les travaux n'avaient pas débuté sur l'ensemble des corridors qui auraient été préautorisés, est-ce que ça voudrait signifier qu'Hydro-Québec, une fois ce délai écoulé, devra nécessairement obtenir de nouvelles autorisations? Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a actuellement, face aux tracés qui sont proposés par Hydro-Québec, des levées de boucliers. Dans ma propre région, je parlais, encore aujourd'hui, avec le préfet de la MRC du Val-Saint-François, Me Marc-André Martel – je peux en parler parce que c'est vraiment d'un ressort très public, c'est dans les journaux de ce matin – on nous indiquait que, suite à la levée de boucliers qu'il y a eue de la part des maires qui réclament un moratoire, Hydro-Québec a présenté quelques tracés alternatifs qui ne font pas encore l'objet de consensus, et les autorisations qui sont données sont données sur de très vastes superficies. Il serait intéressant de savoir l'avis que vous avez donné: quelle est la superficie totale que ça touche par rapport à ce que vous a demandé le gouvernement du Québec?

Mais les gens, je dois vous indiquer, sont un peu surpris de voir que, même s'il y a un certain niveau d'urgence, d'abord, pour certaines lignes qui sont urgentes, il y en a d'autres, semble-t-il, qui sont moins urgentes mais dont Hydro-Québec se sert quand même à l'intérieur du décret qui a été donné par le gouvernement du Québec. Et je dois vous indiquer que, autant au niveau de l'environnement que de la CPTAQ, face aux principes et aux valeurs puis à ce que vous prêchez, ça fait un peu contraste par rapport à ce qu'on a connu dans le passé, puis il y a une difficulté de compréhension de la population par rapport à cette autorisation globale qui a été donnée et à des avis, finalement, que, semble-t-il, vous avez donnés en ne connaissant vraiment pas de façon précise les emplacements proposés par Hydro-Québec sur plusieurs... on parle de quelques centaines de kilomètres. Alors, c'est des décisions qui affectent une très large... c'est beaucoup en termes de superficie. C'est pour ça que ça m'intéressait de savoir quelle est la superficie qui a été visée par la demande et comment vous allez vous assurer qu'on tienne compte au moins, de façon minimale, des impacts sur le territoire agricole. Parce que ce qui est véhiculé présentement, en région, c'est qu'Hydro-Québec peut passer à peu près n'importe où présentement avec l'avis que vous avez émis. M. le président.

M. Ouimet (Bernard): Je vais commencer par votre conclusion, M. le Président, parce que, au bout de la ligne, c'est que vous vous interrogez quant à l'avenir, je pense que c'est ça qui est le principal. Et je vous dirais que, là-dessus, on est fier de voir que la recommandation qu'on avait faite à Hydro-Québec, dans le deuxième avis que vous avez mentionné, celui du 20 janvier, a été retenue, c'est-à-dire que, quand on va être au niveau du tracé – là, on était au niveau d'un grand corridor – Hydro-Québec va revenir devant chez nous. Déjà, les contacts sont établis avec nos professionnels, l'échange d'information se fait, et Hydro sait que, pour les lignes qui s'en viennent, ils doivent redemander un avis à la Commission, c'est-à-dire que le gouvernement va nous demander un avis. Et ça, c'est clair, ça a été accepté dans le décret.

Nous, c'est un avis, mais le décret a été fait en s'assurant que l'avis de la Commission serait donné et, là-dessus, on va le donner sur des tracés précis. Au moment où on avait donné, le 20, notre accord, on était dans des corridors très très larges. On savait d'expérience qu'il y a moyen d'arriver aux tracés de moindre impact à l'intérieur de corridors très très larges. On n'était pas au niveau des superficies, on n'était pas capable de les déterminer, Hydro n'était pas capable de nous les donner.

C'était vraiment qu'on savait qu'on pouvait aller comme ça ou comme ça, qu'on pouvait avoir quelques kilomètres à droite, quelques kilomètres à gauche, puis on savait, d'expérience, qu'à l'intérieur d'un grand corridor... Parce qu'il ne faut pas oublier que la Commission a une expérience dans les corridors énergétiques, on a rendu 78 décisions sur des corridors énergétiques depuis 1990, et quelque chose comme 230 dossiers, des décisions qu'on a rendues depuis le début de la Commission.

On est assez familier avec ces affaires-là et on se disait, sur la base de l'expérience, le corridor étant suffisamment large... on pouvait comprendre, dans les circonstances, que l'important, c'était qu'ils viennent nous voir lorsqu'il y aurait quelque chose de précis avec des superficies, avec des enlignements, savoir où les pylônes vont être et le tracé définitif. Et c'est ça qu'on voulait. On a gagné ça quand même. On a gagné ça, parce que le gouvernement a retenu dans son décret de venir nous voir sur ces tracés définitifs. Ça, c'est l'essentiel par rapport à l'avenir. Ça peut sécuriser les gens, c'est qu'on va devoir donner un avis et le donner en fonction des critères de la loi, comme dans n'importe quel dossier. Ça, c'est clair. Le décret est fait comme ça.

Le Président (M. Vallières): Si, par exemple, il n'y avait pas eu cette levée de boucliers... Je prends toujours l'exemple de l'Estrie, là où il y a des problèmes présentement, et Hydro-Québec a présenté des tracés alternatifs qui ne font toujours pas l'affaire. Mettons que ça n'a pas eu lieu, vous vous seriez prononcés, la Commission, sur le premier tracé qui a été présenté par Hydro-Québec, le corridor, et il y aurait eu un tracé un peu plus définitif, vous vous seriez prononcés là-dessus sans autre alternative. Est-ce que ça pourrait vouloir dire que la Commission, sur des territoires aussi vastes, compte tenu des enjeux, aurait pu demander à Hydro-Québec de refaire ses devoirs et de retarder l'échéancier parce qu'on prévoit des travaux de construction dès le mois d'août? Le 1er août, la construction débute.

Compte tenu de l'ampleur des demandes, j'aimerais ça que vous me reveniez sur la superficie totale qui est concernée par les décrets. Est-ce que vous pensez être en mesure, de façon à respecter les échéanciers, de pouvoir donner des avis et de rendre des décisions? Et est-ce que ce seront des décisions et des avis dont doit tenir compte le gouvernement? Ou ce sont simplement des avis qu'il peut ou pas...

M. Ouimet (Bernard): Non.

Le Président (M. Vallières): C'est à sa volonté?

M. Ouimet (Bernard): Très bien. Un, par le décret, c'est un avis qu'il va nous demander, l'accord plutôt, mais la loi permet de faire ça, lorsque c'est un ministère ou un organisme public. En l'occurrence, Hydro-Québec est un organisme public au sens de notre loi.

Dans une perspective comme ça, c'est une bonne idée aussi, l'idée de l'avis, parce que l'avis nous permet de donner pleinement, de consacrer tout notre temps à l'analyse du dossier. De toute façon, on sait que c'est un projet qui va devoir être autorisé par le gouvernement. Dans les circonstances où c'est un projet qui a une urgence, qui a de l'importance et que, de toute façon, le gouvernement va devoir décider, bien sûr que la position de donner un avis, pour nous, plutôt qu'une demande d'autorisation, je crois que c'est aussi avantageux pour la Commission de donner un avis plutôt que s'ils procédaient par demande d'autorisation. Un avis ne nous empêche pas de consulter du monde avant de le donner; un avis ne nous empêche pas d'aller voir le terrain; un avis ne nous empêche pas de les faire comparaître devant la Commission pour qu'on ait toute l'information. On a toute la latitude de le faire.

Mais c'est pour ça que, je tiens à vous le signaler, on ne peut pas mettre des superficies sur quelque chose qui est des corridors. C'est quand ils vont nous proposer les tracés définitifs sur lesquels on va se prononcer qu'on va pouvoir mettre des superficies et des numéros de lots et des parties de lots, donc, d'une façon extrêmement précise. Et là, compte tenu de l'envergure – et c'est un peu, comme vous dites: Dans le temps qu'on a pour faire ces choses-là – mais c'est pour ça qu'on établit des liens professionnels avec nos services professionnels pour déjà avoir des connexions pour voir venir le dossier, pour qu'on puisse avoir plus de temps à l'analyser, plutôt que de voir entrer ça un jour, et c'est tout fait. Hydro offre une très bonne collaboration là-dessus, au plan professionnel, de nous tenir au courant de leurs évolutions sur le dossier, parce qu'on sait qu'il va falloir que ça bouge; les échéanciers sont serrés et les travaux sont d'envergure.

Alors, là-dessus, c'est bien parti. Donc, on va pouvoir se prononcer, on va se prononcer sur des choses précises, et les contacts, les échanges professionnels qu'on a avec Hydro-Québec vont nous permettre, dans le délai, de faire quelque chose de très correct de la part de la Commission. Un avis ne nous amène pas dans des délais, à attendre 30 jours, par exemple, comme avec une demande d'autorisation pour laisser au client le soin de réagir. Un avis, on peut mettre tout notre temps sur notre avis, mais on n'est pas obligé à un délai de rigueur. Vous comprenez? Alors, dans 15 jours ou dans trois semaines, on fait pas mal d'ouvrage, surtout si on a été sensibilisés à l'évolution technique, professionnelle du dossier. Et un avis, c'est fait par trois membres.

Le Président (M. Vallières): Oui.

(17 h 20)

M. Ouimet (Bernard): Donc, c'est aussi brassé chez nous, c'est...


Urgence d'autoriser de nouveaux tracés de lignes de distribution pour Hydro-Québec

Le Président (M. Vallières): C'est une dimension qui n'est pas négligeable, compte tenu que la population, sur le territoire visé, s'attend à ce que des spécialistes dans le domaine puissent donner leur opinion sur ce que propose Hydro-Québec.

Par exemple, j'entends des gens comme le président de RAPPEL, un écologiste, René Pelletier, de la région de Sherbrooke, qui nous dit, je le cite: «Notre région est perdante sur toute la ligne car elle n'a aucun choix, aucun mot à dire sur un projet qui n'est pas urgent. Pourquoi ne pas utiliser la ligne électrique de Sherbrooke et Magog pour se rendre au poste de Saint-Cézaire? Elle existe déjà. Elle représenterait une économie, tant sur le plan financier qu'environnemental, pour Hydro-Québec.» C'est toute des questions comme ça qui se posent présentement, alors qu'on semble bousculer les étapes. Et c'est la même chose au niveau environnemental et au niveau de la protection du territoire également.

On me racontait récemment qu'Hydro-Québec propose des tracés qui carrément passent dans des érablières, coupent des érablières, passent dans des granges, dans des granges-étables. Les gens se questionnent, à ce moment-là, par rapport à cette latitude extrême qui semble être laissée à Hydro-Québec.

Et la question qu'on se posait également, et peut-être pourriez-vous m'informer là-dessus: Est-ce que vous avez eu l'occasion de vérifier, par rapport à l'ensemble des corridors sur lesquels on vous a demandé un avis, quel était le niveau d'urgence? Est-ce que ce sont des lignes qui sont là à titre de sécurité au cas où on aurait des pannes? Est-ce qu'il y a des nouvelles lignes, de nouvelles installations d'Hydro-Québec qui, elles, sont peut-être moins urgentes et qui pourraient se traiter à l'intérieur des processus réguliers qu'on connaît?

M. Ouimet (Bernard): Oui, très bien. Vous voyez, le premier avis qu'on a donné et que vous avez mentionné, le 13 janvier, il ne fait pas de doute que c'était l'extrême urgence. Il ne faut pas se le cacher. Vous vous rappelez le contexte.

Regardez notre avis. On parle toujours, toujours, dans nos attendus, «compte tenu». Voyez-vous, les travaux de reconstruction, on ne parle que des travaux de reconstruction, on le dit dans le deuxième attendu, dans le troisième, dans le quatrième, on parlait de reconstruction.

Mais, de façon très concrète, quand arrive une catastrophe comme celle-là, qui est capable de nous dire, le pylône qu'ils mettent en attendant, s'il va être là pour trois ans ou s'il va être là juste pour un mois? Même Hydro ne pouvait pas faire ça, dans les circonstances. Alors, comment vouliez-vous qu'on l'imagine, ça?

Alors, c'est pour ça que le premier avis, il a été fait, dans le fond, dans des circonstances particulières pour leur dire: Écoutez, procédez! Quand c'est une emprise, il y a des droits acquis, mais en dehors des emprises, on n'est pas capable de distinguer la reconstruction de ce qui sera permanent. Vous reviendrez nous revoir après, si ça a un caractère de permanence. Mais qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse de plus, dans des circonstances aussi exceptionnelles où l'urgence était manifeste? Vraiment manifeste!

Quant au deuxième, il y a des jours qui se sont passés, entre ça, il y a du travail qui s'est fait partout. Nous, on n'avait pas à décider de l'urgence ou pas, sur une chose comme ça. On n'avait pas à statuer sur l'opportunité d'aller sur une ligne ou d'aller sur une autre. C'est que le deuxième avis, il portait plus sur les boucles, boucler le système pour le rendre plus sécuritaire. Puis, à la limite, chez nous, à la Commission de protection du territoire agricole – c'est peut-être différent sur d'autres forums – mais quand bien même ça aurait été pour se rendre aux États-Unis, on n'a pas à se demander si l'électricité qui sort, c'est de l'électricité qui rentre, nous autres, à la Commission de protection du territoire agricole.

Nous autres, l'opportunité du projet ou de faire la ligne, non, ce n'est pas nous autres. En tout cas, on ne joue pas cette carte-là, puis je pense que ce serait excéder notre juridiction et notre compétence de faire ça. Ce qu'on dit, par exemple, c'est, quand on a un corridor et qu'on arrive au niveau d'un tracé, on est capable de préciser les choses, il faut en évaluer l'impact pour s'assurer que c'est un tracé de moindre impact en tenant compte des caractéristiques du projet puis des critères de la loi. Notre avis, il va tenir compte des caractéristiques du projet puis il va tenir compte des critères de la loi.

Alors, c'est pour ça que, de notre côté, au bout de la ligne, c'était plus pour garantir comme tel qu'on va être dans le processus. À mon sens c'est un très bon point parce que, quand on regarde les mécanismes, là-dessus, M. le Président, je pense que c'est important, quand on regarde la difficulté que ça a amené du côté environnemental. Il y a des gens qui ont des mandats importants. Mais, dans les études d'impact, les processus sont différents, sont plus longs. Il y a une mécanique dans la Loi sur la protection du territoire agricole qui nous permet d'agir plus vite. La loi est bien faite là-dessus. La loi est excellente là-dessus.

Quand il faut agir avec urgence puis qu'il y a quelque chose que, de toute façon, on sait que c'est le gouvernement qui va décider en bout de ligne, pourquoi ne pas nous demander un avis? C'est ce qu'il a fait. C'est ce qu'il a fait, il nous a demandé un avis. C'est conforme à la loi.

Alors, on s'est prononcés, nous autres, dans le contexte où on ne jugeait pas de l'opportunité du projet, dans le contexte où on n'avait pas à qualifier l'urgence parce que, dans un cas, elle était manifeste. Et même dans le deuxième, elle était quand même importante, compte tenu des échéanciers des travaux. Ce qu'on avait à voir, c'était de s'assurer qu'ils reviendraient devant nous avec des choses concrètes pour qu'on puisse se prononcer sur un tracé concret, pour être en mesure d'en évaluer l'impact.


Obligation de demander une autorisation en vertu des décrets concernant Hydro-Québec

Le Président (M. Vallières): Votre décision du 20 nous dit... On parle de précédents qui permettent à la Commission de constater qu'il apparaît possible d'identifier éventuellement des tracés précis qui minimisent les impacts négatifs qui ne manqueront pas de surgir à quelques endroits sur les axes de tracés proposés. À cet égard, la Commission se montre disposée à fournir son avis, si le gouvernement le juge à propos, dans le cadre de son mandat d'assurer la protection du territoire agricole, etc.

Est-ce que, tantôt, j'ai bien compris que vous me disiez que le gouvernement, en vertu des décrets, serait dans l'obligation de demander votre autorisation quand les tracés précis seront connus?

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): Le décret le précise?

M. Ouimet (Bernard): Oui, je pense que l'obligation... Il l'a mis dans le décret. En tout cas, c'est clair, clair dans le décret qu'il va nous demander notre avis. Ça, soyez sûr de ça. C'est dans le décret.

Le Président (M. Vallières): Bon. Mais je veux juste connaître la portée de la décision que vous avez prise, parce que c'est une décision du 20 janvier. On dit: «En conséquence, la Commission émet un avis favorable pour la réalisation des projets soumis par Hydro-Québec dans les axes ci-haut décrits.»

M. Ouimet (Bernard): Oui.

Le Président (M. Vallières): Alors, j'essaie de connaître la portée de... C'est une décision qui a lieu sur les... je ne sais pas combien de kilomètres. C'est plusieurs centaines de kilomètres.

M. Ouimet (Bernard): Remarquez que c'est un avis. Ce n'est pas une décision. Et c'est le décret du gouvernement qui fait foi de décision gouvernementale. Mais vous voyez, justement, la Commission n'a pas à autoriser l'usage autre qu'agricole pour les fins de corridors énergétiques sur des lots ou parties de lots dans des municipalités. On n'était pas à ce niveau-là.

On était au niveau des grands axes, puis on s'est dit: On le sait d'expérience, on sait très bien qu'il va y avoir des territoires où c'est sensible à l'agriculture. C'est évident. En connaissant le territoire, on le voit très bien. Mais on le dit: À l'intérieur des axes qui nous sont proposés, il y a moyen de trouver des tracés de moindre impact. Sans impact total, je ne crois pas, mais de moindre impact.

Et ils se sont engagés, dans le décret, à nous demander notre avis. Et c'est là que j'enclenchais tantôt en disant que déjà il y a des échanges techniques pour qu'on soit en liaison avec eux autres constamment, pour les données, pour qu'on soit en mesure de réagir dans un délai raisonnable.

Le Président (M. Vallières): Alors, s'il n'y avait pas cette levée de boucliers en Estrie, présentement, face aux corridors proposés par Hydro-Québec, est-ce que je dois présumer que, dans les avis que vous donneriez ou que vous auriez donnés par rapport au corridor original, vous auriez proposé à Hydro-Québec de modifier ses tracés?

M. Ouimet (Bernard): On ne pouvait pas proposer ça, parce qu'on n'avait pas de tracés. On a rencontré Hydro-Québec, mais ils ne nous ont pas proposé des tracés, ils n'étaient pas rendus à l'étape des tracés.

Le Président (M. Vallières): Vous aviez des corridors.

M. Ouimet (Bernard): On avait des grands corridors. Donc, on n'a pas donné notre avis sur le tracé. On a donné notre avis sur le corridor pour qu'ils viennent nous voir au niveau du tracé.

Le Président (M. Vallières): Est-ce qu'Hydro-Québec négocie actuellement avec les municipalités, enfin les gens qui demandent un moratoire dans les régions concernées? C'est effectivement ces tracés-là qui, par la suite, vont vous être soumis.

M. Ouimet (Bernard): C'est ça.

Le Président (M. Vallières): Assurément un dossier à suivre, M. le président, compte tenu de son ampleur. Je reviens avec ma question: Il serait intéressant de savoir quelle est la superficie visée par Hydro-Québec à l'intérieur des demandes? Évidemment, on le saura quand les tracés plus précis seront connus.

M. Ouimet (Bernard): Voilà.

Le Président (M. Vallières): Mais je sais que ça va transiter par chez vous, il serait intéressant de savoir la superficie qui est concernée par les demandes qui vous sont faites.

(17 h 30)

M. le député de Gaspé, qui sera suivi du député de Beauce-Nord.


Enlèvement de sol arable

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Dans votre reddition de comptes, à la page 2, on parle d'enlèvement de sol arable ou gazon. Puis j'ai regardé, dans les autres pages qui suivaient, pour retrouver des données là-dessus et j'en ai vues à la page 3: il y avait 80 % des demandes qui avaient été accordées. Maintenant, on n'a pas de détails, en tout cas je n'en ai pas vus, peut-être que ça m'a échappé, concernant les superficies pour lesquelles ça a été demandé, les raisons, etc., comme on le retrouve ailleurs. Est-ce que vous avez des données là-dessus?

M. Ouimet (Bernard): Est-ce que vous me permettez, M. le Président?

Le Président (M. Vallières): Oui, allez-y, M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Effectivement, ce n'est pas dans les données qu'on vous a remises, parce qu'on a mis l'accent plus sur l'exclusion et l'utilisation non agricole, à cette étape-ci de nos données. Maintenant, si vous n'avez pas d'objection, je demanderais à Carole Jutras, qui a les données plus détaillées, de vous fournir l'information.

Le Président (M. Vallières): Mme Jutras.

Mme Jutras (Carole): Oui, si on regarde, pour la période considérée, on a 20 demandes qui portaient effectivement sur des demandes de permis d'enlèvement de sol arable ou de gazon. Seize de ces demandes-là ont été autorisées par la Commission. Pour ce qui est des superficies en cause, on parle d'une superficie totale visée de 103 hectares au point de départ, superficie totale autorisée de 69 hectares, donc faites la proportion. Généralement, ces autorisations-là sont toujours des autorisations qui sont conditionnelles et qu'on ne juge pas négatives pour une utilisation ultérieure à des fins agricoles. D'ailleurs, vous allez avoir beaucoup plus d'information si vous consultez notre rapport annuel, où on détaille beaucoup plus sur les motifs qui appuient les autorisations dans ce type de dossiers là.


Pouvoir d'enquête de la Commission

M. Lelièvre: J'ai une autre question à vous poser. La loi prévoit des pouvoirs quand même assez importants à la Commission, des pouvoirs d'enquête, et, dans le rapport ou dans les données que nous avons, il n'en est pas fait mention. Particulièrement, si on regarde les pouvoirs d'enquête que vous avez, la Commission peut enquêter sur toute matière qu'elle juge... J'avais sorti l'article et je l'ai mis de côté... C'est de savoir si la Commission a d'elle-même entrepris des enquêtes et, si oui, combien et dans quels cas, quels genres de... Parce que, à la fin, la Commission peut également imposer des amendes, des peines importantes, donc j'aimerais savoir ce que vous avez sur cet élément-là.

M. Ouimet (Bernard): Permettez-vous, M. le Président?

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Oui.

M. Ouimet (Bernard): Me permettez-vous, avec votre autorisation, avant de passer la parole à mon collègue... Je pense que ce qu'on visait, au niveau de la première reddition de comptes, c'était surtout parce qu'on s'était engagé à rendre compte des motifs de nos décisions, et c'est la première fois qu'on fait comme ça, où on sort ça en dehors de notre rapport annuel, c'est-à-dire de façon plus sommaire. On n'a pas fait un tour d'horizon complet des activités de la Commission. Mais, dans nos rapports annuels, si vous regardez depuis trois ans – et c'est un changement à 360 degrés, c'est le cas de le dire – on a viré complètement dans notre reddition de comptes et on donne beaucoup d'information sur le suivi de la loi: les enquêtes, les résultats de nos enquêtes, les jugements qui vont devant les tribunaux supérieurs, le résultat de ces jugements-là, le nombre de ces jugements-là. On résume même les principaux. On donne aussi, je dirais, par rapport au suivi de la loi, un tableau relativement complet au niveau de notre rapport annuel. Là, c'est comme si c'était, entre guillemets, quelque chose qui est un peu spécial. C'est qu'on s'était engagé à vous faire un premier feed-back, mais on n'est pas allé au niveau du suivi de la loi. On est allé sur certaines variables qui nous apparaissaient significatives sur le plan décisionnel, sans que ça soit exhaustif comme dans notre rapport annuel.

Maintenant, il n'en demeure pas moins que Serge Cardinal pourrait, avec votre permission, peut-être ajouter des choses là-dessus.

Le Président (M. Vallières): Oui, Me Cardinal.

M. Cardinal (Serge): M. le Président, ce que j'ai devant moi, ce sont les données préliminaires qui ont été faites dans le contexte de la préparation du rapport annuel, comme vient de le dire le président, et non pas de notre entretien d'aujourd'hui. Alors, ce ne sont pas des données réconciliées, mais ça vous donne quand même un ordre de grandeur. D'une part, le volet surveillance de l'application de la loi, si vous voulez, s'applique essentiellement à la vérification des déclarations. Vous savez que les déclarations, ce sont des situations dans lesquelles une personne prétend à un droit que la loi lui reconnaît et prétend donc, par exemple, pouvoir installer une maison en zone agricole sans avoir à requérir l'autorisation de la Commission. Alors, dans cas-là, il y a une déclaration à produire. En termes de volume, on parle d'à peu près – je vous dis ça, je n'ai pas les chiffres devant moi – 4 000 par année et chacune de ces déclarations-là fait l'objet d'une vérification ou d'une enquête. Même chose pour les plaintes qui sont logées à la Commission.

Mais, si j'arrive plus spécifiquement au volet plus contentieux ou plus judiciaire, les données que j'ai devant moi, qui sont détaillées dans le rapport annuel, nous indiquent qu'à ce moment-ci – l'année n'est pas complètement terminée, il reste une semaine – il y a 53 jugements qui ont été rendus par les cours de justice relativement à des affaires généralement dont la Commission les avait saisies. Par exemple, en Cour supérieure, pour assurer la surveillance de la loi et la sanction de la loi, il y a 36 jugements qui ont rendus par la Cour supérieure dans lesquels la Commission était requérante. De ces 36 dossiers judiciaires, il y a 22 jugements qui ont été favorables, c'est-à-dire où la Cour a, à la demande de la Commission, ordonné, par exemple, la cessation d'une contravention ou ordonné la remise en état des lieux. Alors, donc, 22 jugements favorables et un défavorable où la Cour a rejeté la requête de la Commission. Et je vous signale que, quant à ce rejet, il a été porté en appel. Alors, si vous voulez, la décision ou le jugement n'est pas définitif à cet égard-là.

Toujours à titre d'illustration – puis je termine là-dessus, mes données ne sont pas suffisamment complètes pour élaborer davantage – la Commission a dû faire une étape de plus dans le processus de sanction et, parfois, requérir de la Cour des jugements en outrage au tribunal. Donc, des sanctions, une condamnation à une amende, et même, rigoureusement, à l'occasion, des peines d'emprisonnement. Là, je parle de gens qui, vraiment, sont des récalcitrants, qui décident manifestement de ne pas respecter ni la loi ni les ordonnances de la Commission ni les jugements des tribunaux. Les données que j'ai devant moi, c'est que la Commission a dû procéder par requête pour outrage au tribunal dans quatre cas l'année dernière. Et, dans deux de ces cas-là, la Cour a donné droit, c'est-à-dire a accueilli les requêtes pour outrage et a condamné à des amendes ou à de l'emprisonnement. Et, dans deux autres cas, les requêtes ont été rejetés et un des deux rejets est en appel, aussi. Ça vous donne un aperçu des statistiques.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): M. le député de Gaspé.


Dispositions pénales de la loi

M. Lelièvre: Oui. Dans quel genre de cas on retrouve des personnes qui sont très récalcitrantes à appliquer les dispositions de la loi? Est-ce que vous avez des cas à l'esprit? Est-ce que vous pourriez nous dire... Parce qu'on voit, dans la loi, qu'il y a quand même des pénalités importantes, particulièrement aux articles 90, 90.1. Donc, j'imagine que ça doit aller chercher des amendes considérables à partir de la récidive puis dépendamment de ce qu'on fait.

Par ailleurs, s'il y a une contravention en vertu de l'article 26, pour une première infraction, c'est 5 000 $ d'amende. Ça, c'est l'enlèvement du sol arable.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Me Cardinal.

M. Cardinal (Serge): Merci, M. le Président. Ce à quoi vous faites référence, c'est le volet sanctions pénales de la loi. Essentiellement, on peut chercher à faire cesser une infraction par la voie que j'appellerai la voie civile. Les jugements auxquels j'ai fait allusion tantôt, c'était essentiellement ça.

M. Lelièvre: Des recours extraordinaires.

M. Cardinal (Serge): C'était de s'adresser à la Cour par une disposition qui est prévue dans la loi – c'est l'article 85 – qui prévoit que la Commission ou, quant à ça, la municipalité ou toute autre personne intéressée peut demander à un juge d'ordonner la cessation d'une infraction à la Loi de protection du territoire agricole. Et là je ne suis pas sur les amendes. La conclusion, dans ce type de dossier, par exemple, c'est de dire: Enlève la maison, cesse l'enlèvement de sol arable. Ce n'est pas la condamnation à une amende.

Les montants auxquels vous faites référence, à l'article 90.1, sont d'une disposition nouvelle introduite justement par la loi n° 23 et avaient notamment pour objectif d'avoir un effet dissuasif plus important dans des domaines où le sol était bouleversé, où souvent le tort était irréparable. C'est ça, l'enlèvement de sol arable, c'est l'exploitation d'une gravière, c'est la coupe à blanc dans une érablière. Et je vous dirais, sans pouvoir supporter ça, à ce moment-ci, par des statistiques – ce n'était pas le sens de notre propos d'aujourd'hui – que ç'a eu l'effet dissuasif recherché, ç'a eu un effet important, cette hausse du montant possible des amendes.

(17 h 40)

Mais ce à quoi je m'attardais tantôt en termes de statistiques, c'était davantage le volet civil. Et je vous dirais qu'au-delà des amendes c'est celui qui fait le plus mal, parce que c'est celui qui a pour conséquence, par exemple, de dire à quelqu'un qui a exploité une sablière: Tu arrêtes et tu remets en état. Ce qui coûte généralement beaucoup plus cher que le 5 000 $ ou 10 000 $ d'amende.

Et les cas vraiment récalcitrants – pour compléter votre question sur ça – je ne suis pas capable de départager par la nature de l'infraction. J'ai à l'esprit... je ne souhaiterais pas les citer ici, mais j'ai à l'esprit des situations. C'est le cas d'une résidence qui doit être démolie par ordre de la Cour et où les délais s'allongent. Ceci dit, le cas que j'ai à l'esprit, ça va se régler. La maison va effectivement être déménagée.

Mais il y a aussi des cas où c'est de l'enlèvement de sol arable ou c'est des cas d'entreposage de matériaux. Il y a même encore là un cas que j'ai à l'esprit, où la municipalité elle-même a procédé à plusieurs reprises – je pense que c'est sept ou huit reprises – par des requêtes en outrage au tribunal, obtenant des condamnations systématiquement, sept ou huit fois, mais à chaque fois que l'individu paie l'amende ou sort de prison, il recommence. On est allés récemment, nous, en outrage au tribunal, la Commission, pour supporter la municipalité, je dirais, d'une part; d'autre part, pour bien sûr assurer de notre côté aussi le respect de la loi; et on a obtenu une peine d'emprisonnement plus longue dans l'espoir, naïf peut-être, mais dans l'espoir que la municipalité dispose de ce temps-là pour faire une partie du ménage sur la propriété, une partie de la remise en état.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): M. le député de Beauce-Nord.


Évaluation du travail de la Commission

M. Poulin: Oui, M. le Président. Votre organisme, au Québec, c'est le seul, en fait, qui est responsable de la protection du territoire et des activités agricoles. Peut-être une question particulière, là: Comment peut-on voir, dans les tableaux que vous présentez sur les taux d'autorisations, que le travail est fait correctement? Comment peut-on concilier l'immense mandat avec les résultats que vous présentez? On parle d'équilibre institutionnel. Est-ce qu'on peut le retrouver à partir des documents qui nous sont remis? Comment peut-on évaluer tout ça?

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): M. Ouimet.

M. Ouimet (Bernard): Remarquez qu'à partir juste des chiffres c'est déjà très bien parce que ça donne une indication de l'ensemble. Moi, le sentiment que j'ai en regardant – parce que j'étais curieux aussi de voir qu'est-ce qui sortirait de cette première reddition de comptes là – je trouve qu'il ressort un portrait équilibré de la Commission.

Je vais vous donner un exemple. Si, au lendemain de la nouvelle loi, on se mettait à autoriser des maisons sur 30 000 pi² dans la zone agricole à 80 %, là, je vous dirais: On est complètement parti, il y a quelque chose. En tout cas, je ne comprendrais pas mon institution puis je me dirais: Il y a quelque chose que je n'ai pas fait pour que ça arrive de même.

D'un autre côté, si on n'en voyait pas une, imaginez bien, on pourrait dire: Ils sont partis sur un bord puis ils sont tous dans le même bord de la chaloupe. C'est le cas de le dire. Puis il peut arriver qu'une maison, vous savez, de plus dans le lot 88 à Carignan... C'est un développement résidentiel puis il en reste quelques-unes. Qu'est-ce que ça change quand on en a autorisé? Vous savez, il y en a 70, supposons; mettez-en deux de plus.

Alors, on tombait dans l'idéologie. Mais il me semble que le résultat est dans la tendance qu'on observe depuis les trois dernières années. Qu'on serve ça avec un peu plus de... je dirais dans l'esprit de la loi. Vous savez, on s'est rappelé les grandes, grandes modifications. Dans les grandes modifications – je cite ça comme ça, par exemple – on disait: C'est important, l'espace alternatif. Puis le législateur a donné à la Commission une arme pour, avant d'autoriser un développement, s'assurer qu'il n'y a pas d'espace dans la zone blanche. Bien, on retrouve dans nos motifs, la plupart du temps, ce critère-là utilisé par le commissaire pour dire qu'il refuse la demande parce qu'il y a de l'espace dans la zone blanche.

L'économie générale de la loi a été faite aussi pour protéger les activités agricoles actuelles et futures. On retrouve dans nos refus la pondération de ces critères-là pour dire qu'on a beaucoup de décisions, dans nos refus, qui vont dans le sens de refuser parce que ça aurait un impact sur les activités agricoles, compte tenu de l'homogénéité du milieu et d'autres facteurs. Il y a des décisions, même, qui le disent carrément. Et c'est arrivé, mon Dieu, je me demande si ce n'est pas chez vous, dans la Beauce, mais il me semble en tout cas qu'il y a eu des gens qui nous ont demandé une exclusion, mais c'était dans le fond pour barrer un petit peu une porcherie qui voulait se construire. Donc, c'était un camping avec droits acquis, et ils voulaient l'exclure pour que les distances changent pour éloigner la porcherie qui s'en venait. Quand on regarde la décision de la Commission, la décision dit: Non, on n'embarque pas là-dedans nous autres. On ne fera pas ça, là.

Alors, autrement dit au net par rapport aux grands changements de la loi, moi, en tout cas, je suis satisfait de ces premières données qui sont quand même le fruit... Dans une petite boîte comme chez nous, vous savez, c'est un peu la fin du monde, préparer tout ça, mais au bout de la ligne, c'est concret, c'est précis, ça donne l'idée que la Commission est une commission pragmatique, n'est pas une commission idéologique, est une commission qui comprend l'esprit de la loi, qui comprend le nouvel esprit de la loi, qui tient compte des réalités économiques. Notre loi nous permet de faire ça, de tenir compte des réalités agricoles et économiques puis des réalités des régions. C'est beaucoup de responsabilités pour un organisme comme le nôtre, mais c'est ce qu'on souhaitait. On ne voulait plus être en mesure de dire à du monde: On vous dit non parce que la loi l'empêche, comme ça a été souvent avec le secteur exclusif. On veut être capable de le dire pour des vrais motifs parce qu'on est capable d'en disposer.

Je trouve qu'au bout de la ligne, en tout cas dans cette première sortie de données, il y a toujours un risque à s'exposer à une reddition de comptes. Vous savez, on ne fait pas de la reddition de comptes pour flatter notre image, on rend des comptes parce qu'on dit: On a mandat, et ils nous jugeront là-dessus. Mais on est toujours un peu inquiet comme président quand on sort ces données-là parce qu'on se dit: Ça s'en «va-tu» dans la bonne ligne? «C'est-u» pas dans la bonne ligne? Moi, je suis content de la première reddition de comptes. Je trouve qu'au bout de la ligne, dans les facteurs les plus, je dirais, significatifs, les exclusions dans la zone agricole, les utilisations non agricoles, ça a de l'impact. On a mis l'accent sur ces variables-là, mais je suis content du résultat.

Si on était arrivé à des exclusions de la zone agricole avec un pourcentage de 1 % d'autorisations, je me dirais: C'est vrai qu'on est sévère, entre guillemets, parce qu'on n'a pas à être sévère ou pas sévère, on a juste à appliquer la loi, dans le fond. Mais je me poserais des questions. Je me dirais: On «tient-u» compte des réalités? Vous comprenez? Il y a quelque chose qui ne marcherait pas. Par contre, si on arrivait dans les exclusions avec un taux de 90 %, là je me dirais: Notre marché a-t-il pris du lousse, entre guillemets? Y «a-tu» quelque chose qui ne marche pas? Y «a-tu» des choses qu'on ne comprend pas? Alors, je trouve qu'on est bien embarqué dans le nouveau régime. Je trouve que ça travaille bien comme ça puis qu'on est dans la bonne direction puis on va rester toujours ouvert. On n'est jamais insensible à ce que le milieu, nos interlocuteurs, les parlementaires nous soulignent. Il n'y a jamais une pensée ou une parole qui passe inaperçue. On retourne chez nous, on examine ça. Ça a été notre marque de réussite, ça, d'être ouvert à ce qu'on nous disait pour s'améliorer, et il faut garder ça.

C'est incroyable les changements auxquels la Commission fait face actuellement. C'est comme si on faisait 10 années dans une. On en est pratiquement à la troisième phase d'une réorganisation administrative, après cinq ans, alors qu'on a été 15 ans sans bouger. On a diminué la Commission de 1 000 000 $. On a réduit nos délais de plus de 40 %. On a été proactif dans les modifications de notre loi. On l'a été dans la réforme de la justice administrative. Moi, en tout cas, je suis content de représenter une commission qui a autant de compétence et de, je dirais, d'engagement pour que les choses marchent. Mais on est conscient que c'est frêle. On n'est pas gros. On est partout sur le territoire, mais on n'est pas gros et on veut que ça réussisse, la loi que vous avez ensemble modifiée, qui est une loi qui devrait nous donner des perspectives pour 10 ans en avance.

Quand on dit qu'on est dans la bonne direction, je ne voudrais pas laisser l'impression qu'on vient d'atteindre le bout. Mais au moins on est bien parti. Puis, si on avance toujours de même, on s'en va dans la bonne direction. Tandis qu'avant on n'avait pas de direction. On était handicapé par toutes sortes d'affaires qui nous handicapaient dans l'application de la loi. Là, il n'y a plus d'enfarges législatives et il y a une évolution à faire dans le milieu. Et il faut être capable de comprendre le milieu. Quand ça fait 20 ans qu'on ne leur donne pas de responsabilités en matière de protection du territoire agricole, il ne faut pas leur taper sur la tête à la première erreur. Il faut comprendre le problème qu'ils ont. Il faut se situer à leur place, puis plutôt essayer de travailler pour qu'ils comprennent. C'est un peu notre approche, de les responsabiliser, mais de ne pas les laisser tomber dans l'évolution des choses, puis de faire en sorte que la pensée évolue vers plus de protection du territoire agricole, progressivement.

(17 h 50)

On sait qu'on va être meilleur dans trois ans et qu'on va en obtenir plus. Mais au moins il fallait que ça parte. Il fallait que ça parte correct. Il fallait qu'on s'en aille dans cette direction-là, puis peut-être que dans cinq ans, vous savez, on ne parlera plus de ça, de maisons au bord de la route. C'est ce que je souhaite. Parce que s'il y a de quoi qui est près du zonage local, c'est bien une maison sur le bord de la route. Mais, quand je dis ça, vous comprenez très bien ce que ça veut dire, combien de discussions dans le milieu, dans les MRC, dans les municipalités, avec l'UPA, discuter des impacts, regarder les conséquences sur l'environnement de mettre une maison de plus, d'en mettre dans tel rang, de ne pas en mettre autant dans tel rang. Autrement dit, toute la concertation que ça prend.

On sait que c'est de l'ouvrage, mais on sait que c'est comme ça qu'il faut faire les choses. On sait que c'est la formule gagnante. Au bout de la ligne, on veut juste faire la job d'une commission, pas faire la job qu'on sait que les autres peuvent faire, un peu comme dans une course à relais. C'est pour ça qu'on parlait de complémentarité des rôles. Qu'il y ait plus de concertation dans le monde du processus décisionnel, qu'on soit l'arbitre des grands enjeux, puis on n'est pas obligé de gagner notre vie, vous savez, à autoriser des maisons à 30 000 pi² sur le bord de la route, une Commission qui est à Québec, puis à Longueuil, quand ça nous vient du Saguenay–Lac-Saint-Jean, que ça nous vient de la Gaspésie, de Val-d'Espoir, de Percé. Ces demandes-là, est-ce que ça a besoin de se rendre à Québec? Mais pour faire ça, il faut mettre toutes nos énergies à amener le milieu à le faire.

C'était ça, ma réponse, tantôt, au Président. C'était de dire: Au moment où on peut amener le milieu à le faire, c'est là qu'il faut mettre nos énergies. Souvent, dans la machine gouvernementale, on oublie ça. On dirait: C'est un succès, on passe à d'autre chose. Là, on oublie ce qui a fait le succès. Ce qui est important, c'est de soutenir les intervenants pour que la pensée change face à la zone agricole, et ce, dans une loi qui est une loi d'équilibre, qui peut tenir compte des impacts économiques, des impacts agricoles, puis des réalités des régions du Québec. C'est une loi bien bâtie.

On peut la critiquer sur des aspects du droit de produire ou des questions qui sont reliées aux distances, qui sont reliées aux odeurs, mais ce n'est pas ça, le coeur de la loi, puis dans cinq ans, on sera plus avancé. On aura peut-être moins de problèmes de distances séparatrices. On aura peut-être moins de problèmes d'odeurs. Bien des fois, vous savez ce que c'est. C'est comme une porcherie: il y a des gros rapports avant qu'elle arrive, puis quand elle arrive, il n'y en a plus. Il y a des fois où on a comme peur de l'affaire qu'on ne connaît pas.

Alors, il y a toute une évolution, une mentalité, puis nous autres, on se positionne comme un organisme qui se veut actif là-dedans. Je pense qu'on ne subit rien. Les changements qui sont là, je vous dirais qu'on s'en sent aussi imputables que les parlementaires. Vous avez changé la loi. Vous êtes responsables de l'avoir changée. On se sentirait aussi irresponsables si ça tombait.

C'est comme si on se disait: Ils nous ont donné des bons outils, il faut que ça marche. C'est un peu ce qui anime mon équipe de direction – c'est le cas de le dire, ce n'est pas une grosse équipe, on s'est réduit de 50 %, nos cadres, en quelques années; c'est même un peu exagéré, le niveau qu'on a atteint, au moment où on se parle – et je dirais aussi toutes nos équipes de travail. C'est beaucoup de changements pour un petit organisme, mais qui veut se positionner là-dedans. On n'est pas à la remorque des choses, puis on ne subit pas les choses. On veut que ça marche. Puis, surtout, on se corrigera et on s'améliorera. Soyez sûrs de ça.

Il n'y aura pas, jamais, d'intransigeance dans la Commission. Il faut jouer notre rôle, c'est sûr, puis notre rôle, ce n'est pas toujours de plaire à du monde. Nos décisions ne plaisent pas toujours. On ne fait pas pour qu'elles déplaisent, mais elles ne plairont pas à tout le monde. Mais on sera toujours à l'écoute face à ce que ça donne dans le milieu. On va essayer de développer des systèmes qui vont nous informer. C'est ça, la relation avec nos analystes. François a travaillé énormément, de son côté, avec nos analystes, pour qu'en ayant moins de rapports à faire, vous savez, comme si on pouvait...

Avant, on faisait un rapport sur chaque demande. Mais si on fait moins de rapports, c'est pour mieux être en contact avec nos interlocuteurs pour savoir ce qui se passe, puis comment un projet a pris racine dans le milieu. C'est important que les commissaires sachent ça. On ne peut pas agir, dans un milieu comme le nôtre, disconnecté des réalités sur le terrain, des réalités de chaque région, de comment un projet naît, puis ce que ça donne si on dit oui puis si on dit non, et ça, nos analystes vont jouer un rôle capital pour informer les commissaires. C'est un peu le sens de notre réforme, aussi: les dégager un peu de certaines affaires – parce qu'on ne peut pas penser en avoir plus – pour qu'ils mettent plus de temps avec le milieu, plus de temps à informer les membres, pour qu'on progresse.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Ça répond à votre question, M. le député de Beauce-Nord?

M. Poulin: Oui.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Je vous remercie. Autre intervention? Ça va?

M. Lelièvre: Un commentaire.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Un commentaire? En terminant?

M. Lelièvre: En terminant.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Il nous reste cinq minutes.

M. Lelièvre: M. le président, madame et messieurs qui vous accompagnent, moi, c'est avec beaucoup de satisfaction que je reçois les informations à cette séance d'aujourd'hui et je constate l'approche positive que vous avez dans la façon éventuellement de traiter les dossiers et de traiter les demandes, dans la nouvelle façon de faire les choses, c'est-à-dire de mettre un appareil administratif au service des citoyens. Et, avec les avis, dans la procédure qu'on prévoit, le citoyen sera prévenu de vos orientations, de vos intentions dans le cadre d'une décision, et je suis persuadé que ça va permettre de régler beaucoup de litiges préalables au lieu de se ramasser devant les tribunaux et de ne plus finir à... procédure par-dessus procédure. Je pense que c'est une approche et, en tout cas, en ce qui me concerne, je reçois cette approche avec beaucoup de satisfaction.

Le Président (M. Morin, Nicolet-Yamaska): Merci. Ça va? Je veux en profiter pour vous remercier infiniment, membres de la Commission de protection du territoire agricole du Québec et des activités agricoles. Merci de votre présentation, merci aux membres de la commission.

Nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 57)


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