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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 19 mars 1991 - Vol. 31 N° 64

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Seize heures dix-neuf minutes)

Le Président (M. Joly): À tous et à toutes, il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Je me permets de vous rappeler le mandat. En fait, la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce que nous avons des remplacements?

La Secrétaire: oui, m. le président. mme carrier-perreault, députée des chutes-de-la-chaudière, sera remplacée par mme caron, députée de terrebonne.

Le Président (M. Joly): bonjour, mme caron. ça me fait plaisir. alors, je me permets, d'entrée de jeu, de vous dire que nous avons des remarques préliminaires, j'imagine, m. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Un peu, oui.

Le Président (M. Joly): Je vais vous reconnaître 20 minutes, 20 minutes aux membres de l'Opposition et, aussi, 20 minutes à M. Atkinson du Parti Égalité. Alors, je vous laisse la parole, M. le ministre.

Remarques préliminaires

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, d'entrée de jeu, je vous dis que 20 minutes, ça me paraît très court dans les circonstances.

Le Président (M. Joly): J'imagine qu'on peut sûrement en arriver à se négocier, à l'intérieur de l'enveloppe de temps qu'on a en avant de nous, le temps nécessaire pour vous permettre de dire ce que vous avez à dire.

M. Côté (Charlesbourg): Sur le plan de l'équité, d'un côté comme de l'autre, je pense qu'il faut...

Le Président (M. Joly): Oui, je suis prêt à reconnaître ça, M. le ministre, avec le consentement.

Une voix: Consentement.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre, allez.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Nous entreprenons donc une étape que l'on peut qualifier de déterminante pour la réforme qui a été amorcée, faut-il se le rappeler, il y a maintenant au-delà de cinq ans par la mise sur pied de la commission Rochon. Le projet de loi 120, il faut se le rappeler aussi, ne constitue pas la totalité de la réforme puisque c'est une pièce extrêmement importante parmi un ensemble de quatre mesures que l'on peut qualifier: la réforme, le projet de loi, la politique de santé et bien-être et la mise en oeuvre de cette réforme, donc un document qui est aussi assez important. Mais il constitue, il faut bien l'admettre, la pièce maîtresse, voire un préalable quant à l'application de la réforme que nous avons proposée à la population au cours du mois de décembre. Il assoit légalement les droits des usagers et des mécanismes de recours. Il définit aussi les fonctions et les responsabilités des acteurs dans le système: organismes communautaires, ressources intermédiaires, les établissements et leurs missions respectives, des régies régionales, le ministère lui-même et j'en passe. Il définit, enfin, les règles du jeu essentielles au bon fonctionnement du système: la gestion des services, la gestion des ressources humaines, la gestion des ressources matérielles et, bien sûr, la gestion des ressources financières.

Donc, l'étude article par article que nous nous apprêtons à débuter est une étape importante, extrêmement importante pour l'adoption du projet de loi 120, essentielle, sinon il n'y a pas de troisième lecture, on se comprend bien. C'est un défi pour les parlementaires que nous sommes, peu importe l'identité politique ou l'étiquette politique que nous avons, peu importe si nous sommes de gauche, de droite, du centre, peu importe si nous sommes des gens qui avons travaillé à l'intérieur du réseau ou pas. C'est donc un défi aux parlementaires à cause de l'importance des enjeux et, à voir les réactions au lendemain de la réforme et depuis quelques mois, il y a donc des enjeux extrêmement importants.

Un défi à cause de la complexité du domaine - ce n'est pas un domaine qui est simple, facile; avec au-delà de 950 établissements, on voit toute l'importance des réseaux qui, au fil des années, se sont mêlés, compte tenu de l'appétit de l'un ou de l'autre, à vouloir occuper sans cesse un terrain beaucoup plus grand - et aussi de par le nombre d'articles du projet de loi: tout près de 500, 494 dans sa version que l'on connaît actuellement. Donc, un

travail qui va marquer le Québec pour plusieurs années puisqu'on ne touche pas de manière aussi substantielle au régime de santé et de services sociaux à tous les deux ans, à tous les trois ans. On peut le faire de manière très exceptionnelle, mais pas de manière aussi fondamentale que nous le faisons. Ça va donc exiger une collaboration de l'ensemble des parlementaires qui sont autour de cette table, qui, il y a quelques années, étaient ceux qui avaient la responsabilité de gérer, aujourd'hui qui ont la responsabilité de critiquer. Pour nous qui, à l'époque, avions la responsabilité de critiquer et qui, aujourd'hui, avons la responsabilité de gérer, il y a donc des préalables.

Avant d'aborder les principaux amendements, permettez-moi de rappeler quelques points rapidement, à tout le moins trois points: les étapes franchies - c'est bon de se resituer dans le contexte - le contexte lui-même et, évidemment, un biais d'analyse, ou ce qu'on appellerait de manière plus technocratique un prisme d'analyse, qui ne porte pas insulte du tout à ceux qui me l'ont donné, mais il m'apparaît important de le faire par un biais.

Les étapes franchies. Le projet de loi 120 a été adopté par l'Assemblée nationale le 18 décembre en deuxième lecture. Donc, les principes mêmes du projet de loi ont été adoptés et il avait été déposé à l'Assemblée nationale le 11 décembre dernier, faisant suite, bien sûr, à la présentation de ce qu'était la réforme. Donc, le projet de loi, malgré ses imperfections, ses incompréhensions, voulait lui aussi faire en sorte que la réforme, qui est axée sur le citoyen, le traduise très bien à l'intérieur du projet de loi et c'était très évident.

Cette réforme faisait suite elle-même à un ensemble d'interventions ou de démarches faites au fil des années. J'ai évoqué tantôt la commission Rochon, mise sur pied par notre collègue de Joliette en 1985, pas pour l'artifice d'une idée d'un jour d'un ministre qui avait pensé qu'il y avait quelque chose à faire et qu'il fallait se planter dans ie décor sur le plan politique, mais par un constat qu'il avait fait d'une nécessité approuvée par ses collègues du Conseil des ministres, et qui a travaillé pendant deux ans, qui a consulté 6000 personnes - il faut se le rappeler - et déposé un rapport substantiel.

Par la suite, le document d'orientation de Mme Thérèse Lavoie-Roux "Pour améliorer la santé et le bien-être au Québec". Elle a elle-même rencontré, suite à cela, 2000 personnes à travers le Québec. Une commission parlementaire: au moment où nous sommes ici aujourd'hui, il y a un an nous étions donc en commission parlementaire pour entendre, de janvier à avril 1990, 175 groupes sur 266, une oeuvre colossale que nous avons eu le plaisir de faire ensemble et qui nous permettait de passer un certain nombre de messages et d'en recevoir aussi, et nous en avons reçu abondamment, ce qu'il ne faut pas oublier.

Par la suite, au cours de l'automne, compte tenu de l'importance des décisions que nous avions à prendre, j'ai moi-même décidé de rencontrer, pendant des périodes assez importantes, de trois à quatre heures minimum, des intervenants pour discuter avec eux de la réforme, de leur intervention. Je dois vous dire que c'est pas mal plus que 30 minutes ou une heure en commission parlementaire. On a des sujets très précis, où nous sommes allés au fond des choses - je le pense à tout le moins - avec chacun de ces intervenants, une vingtaine, pour tenter de trouver des solutions optimales aux problèmes de notre système.

Ce n'est pas tout. Malgré tout cela, des observations, des commentaires, des critiques, des félicitations - parce qu'à l'occasion on en a - en janvier, j'ai fait le tour du Québec pour tenter de voir, parmi le réseau, ceux qui avaient un certain nombre de commentaires à passer qui avaient pu décanter ce que nous avions présenté le 7 et aussi adopté comme projet de loi 120. J'ai donc fait le tour de toutes les régions du Québec dans une quinzaine de jours où nous avons rencontré entre 8000 et 10 000 personnes qui ont pu s'exprimer, poser des questions et échanger avec moi.

Il y a une réaction qui fait un large consensus. Les orientations de fond sont partagées par l'ensemble de la population. Deuxièmement, ce que nous avons senti partout, c'est une volonté de collaborer. On ne remet pas en cause le quoi, on ne remet pas en cause la nécessité de, et les gens nous signalent qu'ils ont une volonté de collaborer et d'implanter la réforme le plus rapidement possible. Il y a aussi, bien sûr - je pense qu'il faut pousser l'honnêteté jusque-là - des gens qui, sur des points particuliers qui sont aussi des points de fond, sont plus ou moins d'accord, vu de leur point de vue. Si je prends quelques exemples de l'Opposition, je pense que les remarques ont été plus percutantes lorsqu'on parlait principalement des pièces financières que sont le ticket orienteur, l'impôt-services et d'autres, bien sûr, mais principalement celles-là, alors que les médecins ont manifesté leur désapprobation sur certaines mesures, l'agrément de cabinets privés en particulier, les CMDP et d'autres mesures que nous verrons en cours de route.

J'ai alors, à ce moment-là, été très clair et lancé une invitation à tous ceux et celles qui souhaitaient participer dans le comment collaborer, bonifier, tenter d'influencer ultimement un certain nombre de décisions quant à ce que serait la réforme. Cette invitation-là a donc été bien transmise et elle a été aussi bien reçue, puisque j'ai reçu au niveau du ministère, et la commission en a reçu un certain nombre aussi, quant à moi, 145 mémoires avant le 25 janvier et quelques-uns au-delà du 25 ou du 29 janvier, pour un total de 1500 pages de documents, ce

qui est tout à fait exceptionnel dans les circonstances. Et des mémoires de très bonne qualité où des gens ont effectivement travaillé dans l'esprit de la réforme pour tenter de bonifier, de proposer des choses qui allaient dans le sens que nous souhaitions, et ça, ce sont des amendements qui nous ont été proposés, qui ont donc, à mon point de vue, été très très utiles dans ce qu'on s'apprête à faire au cours des prochaines semaines et des prochains mois. (16 h 30)

Toutes ces étapes m'amènent à dire que, pour moi, la période de consultation sur la réforme et le projet de loi 120 est terminée. La responsabilité appartient maintenant aux parlementaires et c'est leur responsabilité de faire en sorte que nous ayons le plus rapidement possible un projet de loi amendé, bien sûr, puisqu'il le sera, et qui nous permettra de mettre en place la réforme, puisque, déjà, depuis cinq ans, le Québec attend cette réforme et attend ces modifications.

Sur le plan du contexte, il n'est pas nécessaire, je pense, d'insister longuement. Je veux seulement vous dire que le projet de loi 120 a été adopté en deuxième lecture et, selon mes conclusions qui peuvent avoir leur propre biais, et j'en conviens dès à présent, l'impôt-services et le ticket orienteur ont fait l'objet de critiques, tant à l'intérieur de l'Assemblée nationale qu'à l'extérieur de l'Assemblée nationale, compte tenu de ce que chacun comprenait et défendait comme principe. Pour moi, le quoi est maintenant défini; il l'est de manière non équivoque et il a été approuvé par l'Assemblée nationale au mois de décembre.

Deux choses restent à faire: premièrement, des améliorations afin que l'esprit du législateur soit correctement traduit dans les libellés du projet de loi 120 et, deuxièmement, la bonification du comment. D'ailleurs, on a commencé à le faire puisqu'on a reçu 145 mémoires et qu'on les a analysés, par l'entremise de mes officiers supérieurs et des gens du contentieux chez nous qui ont fait un travail de moines pour tenter de colliger et de bien s'imbiber de l'esprit qui nous a été transmis par ces documents. En cela, je dois vous dire que le contenu des 145 mémoires, aujourd'hui, avec le recul, a été essentiel - je ne crains pas de le dire aujourd'hui, malgré le fait que nous ayons déjà un projet de loi 120 - et a été d'un support tout à fait exceptionnel pour voir un certain nombre de lacunes ou d'interprétations possibles de certains articles du projet de loi que nous n'aurions pas vues nous-mêmes par l'analyse que nous en avions faite.

Donc, vous pouvez être assurés de mon entière collaboration, M. le Président, en commission parlementaire à l'étude des projets de loi article par article. J'oserais presque vous dire "ma légendaire ouverture d'esprit" pour recevoir des amendements, puisque, avec le député de

Lévis qui a été mon vis-à-vis pendant de nombreuses années au niveau du ministère des Transports, on a passé à travers des pièces législatives de 700 et 800 articles, et Dieu sait qu'avec le député de Lévis ce n'est pas facile.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Mais on a réussi à passer à travers, toujours en ayant à l'esprit le bien du consommateur. C'est dans cet esprit que je vous dis "ma légendaire ouverture d'esprit", et j'ai bien dit "en commission parlementaire", pour accueillir toutes les suggestions qui pourraient être de nature à bonifier. Et je le dis à l'Opposition aussi: Même si ça vient de l'Opposition, le mérite vous en reviendra et, bien sûr, je suis prêt à jouer ce jeu-là.

Donc, le quoi est défini, notre travail consiste à s'assurer du respect de l'esprit du législateur et de bonifier le comment. Donc, ce qui est pour mes fonctionnaires un prisme et pour moi un biais, donc mon biais d'analyse, mais ça veut dire la même chose, c'est sans doute le point de vue le plus important que je vais aborder avant même d'entamer cette étude article par article. Je souhaite que l'on adopte, en quelque sorte, ce biais d'analyse, c'est une question cruciale, et nous y avons été confrontés par l'analyse des 145 mémoires et ces 145 mémoires n'étaient pas différents des 266 qui ont été déposés et des 175 que nous avons entendus, parce que les propositions venaient, bien sûr, à partir de leur point de vue, tantôt de producteurs, et à partir de leur intérêt à eux, et je pense que c'était leur rôle de le faire. Ce biais, c'est celui du citoyen, point, "period", à la ligne. Point! Pas celui du ministre, pas celui des fonctionnaires, pas celui des directeurs généraux, pas celui des médecins, pas celui des infirmières ou infirmiers. Celui du citoyen, point. Je souhaite que l'on examine le bien-fondé de propositions, mais en fonction d'un intérêt principal, celui des citoyens, non pas uniquement selon le volet consommateur, mais aussi selon celui du décideur et celui du payeur.

Cependant, on vit dans un contexte où il y a des contingences qu'il nous faut respecter: pratique antérieure des professionnels et établissements, ressources limitées. C'est ce que j'ai fait des propositions retenues à l'intérieur des mémoires. Je souhaiterais, bien sûr, que l'Opposition et le gouvernement - puisque je me connais un peu - ne tombent pas dans les pièges traditionnels. Rappelons-nous - et je m'adresse de manière particulière à M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui est le porte-parole de l'Opposition - les paradoxes constatés lors de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi; on en a vu et on en a vu plusieurs et on en a entendu plusieurs. Déréglementez, mais protégez-moi! C'était un des messages et il y en a eu d'autres.

Examinons les revues de presse et comparons les messages des citoyens par rapport à ceux qui défendent leur intérêt. Pour le gouvernement, il n'y a qu'un seul biais pour analyser les demandes, celui du mieux-être des citoyens et des citoyennes du Québec. On l'atteindra à un niveau x; si on l'atteint à 100 %, tant mieux. Tant mieux!

Des amendements, parce qu'il y en aura, bien sûr, M. le Président, c'est ce que j'ai bien compris, des deux côtés... Puisque j'ai eu le plaisir d'être à l'ACAQ ce midi, de rencontrer les syndicats et que je n'ai pas eu le bonheur d'assister à la conférence de presse de mon collègue ni à l'émission "Camille Samson" ce midi - puisque c'était l'Abitibi qui se retrouvait ce midi, de deux à trois - quelques petits rapports fragmentaires m'ont laissé sous-entendre qu'effectivement l'Opposition pourrait avoir quelques papillons. Donc, M. le Président, ce sera la chasse aux papillons, souhaitant trouver à l'intérieur de cette chasse les papillons les plus rares et les plus beaux, mais toujours dans cet esprit du citoyen d'abord. Je vous le dis d'entrée de jeu: Quant à moi, lorsque nous aurons disposé, dans la mesure où nous aurons à en disposer, des motions préliminaires, j'imagine, dans la mesure où il y en a, je rendrai donc disponibles, par leur transmission à votre commission, M. le Président, un certain nombre d'amendements qui sont au nombre de 309 - je vous le dis tout de suite pour vous montrer le travail qui a été fait - 309 papillons que j'entends déposer au projet de loi 120. Ce chiffre va très certainement doubler ou tripler ce que l'Opposition pourrait présenter, mais je vous le dis tout de suite, pour tenter de bien les situer, 60 %, plus ou moins, des papillons sont des papillons d'ordre technique, puisqu'un certain nombre de décisions ont été prises, et, par conséquent, occasionnent des aménagements, mais davantage dans la forme, ou des concordances, même dans certains cas de précisions que nous ont demandées certains intervenants qui n'affectent d'aucune manière la substance du projet de loi.

D'autres amendements plus significatifs sont aussi proposés: je dirais plus ou moins 20 % qui n'affectent pas le quoi, mais qui, effectivement, font appel au comment, ce à quoi nous avions invité nos interlocuteurs à travailler, à réfléchir et à nous proposer un certain nombre de choses, alors qu'un autre 20 % sont de forme, mais aussi peuvent toucher au comment, pour tenter de vous les situer dans l'ordre. Ces amendements font donc suite, pour une bonne part d'entre eux, aux commentaires et recommandations des quatre groupes suivants: communauté anglophone et communautés culturelles, les communautés crie et inuit, le réseau et les médecins.

La communauté anglophone et les communautés culturelles. Tout en souscrivant aux orientations de base de la réforme, la communauté anglophone et les communautés cultu- relles ont émis certaines réserves concernant le respect des droits acquis par leur communauté quant à l'accessibilité à des services de santé et des services sociaux, le maintien de l'identité des établissements sociaux, communautés anglophone et culturelles, leur représentation au sein des conseils d'administration, la nécessité pour les régies de tenir compte de la présence des communautés culturelles et linguistiques dans l'organisation des services et l'allocation des ressources. Le projet de loi 120 prévoit déjà que l'organisation des services doit tenir compte des particularités linguistiques et ethnoculturelles, ce qui est très certainement de nature à plaire à mon collègue, de la population. Des amendements ont donc été suggérés. Afin de préserver cet objectif, des papillons seront proposés afin de préserver l'identité des établissements associés à ces communautés - unification des conseils d'administration non pas uniquement en fonction d'une base territoriale, mais possibilité d'une unification sur la base d'une affiliation linguistique et culturelle et aussi, bien sûr, le CPEJ anglophone. Rappelez-vous que dans la loi nous avions dit: Deux CPEJ pour l'île de Montréal, sans nécessairement spécifier qu'un des CPEJ était anglophone. Nous répondons donc à cette demande de la communauté anglophone. Deuxièmement, d'assurer une présence au conseil d'administration des établissements de la régie via, le cas échéant, la cooptation. Donc, ça signifie que, par ce biais-ci et, évidemment, par une mesure que je vous annoncerai ultérieurement, il y aura, au niveau des régies régionales, cooptation. D'obliger des régies à tenir compte, pour l'organisation des services et l'allocation des ressources, de la présence des communautés culturelles, du programme d'accès aux services pour les anglophones et des établissements désignés comme devant offrir les services en anglais.

Quant aux communautés crie et inuit, les Indiens cris souhaitent la création d'une régie régionale qui aurait pour leur communauté les mêmes pouvoirs que les autres régies qui seront créées a travers le Québec. Les Inuit réclament également une régie régionale pour leur propre communauté. Ils souhaitent également que le projet de loi 120 puisse s'appliquer à eux, mais en l'adaptant pour tenir compte de leurs caractéristiques et de leurs besoins. Une régie régionale était prévue dans la réforme pour chacune des communautés. On pourra le faire dans le cadre du projet de loi 120 car un arrangement doit intervenir entre les parties signataires de la Convention de la Baie James. Finalement, nous nous engageons à amorcer dans les plus brefs délais les négociations qui nous mèneront à cette entente.

Le réseau. Suite aux recommandations et commentaires du réseau, des amendements ont été proposés sur les points suivants: la composition des conseils d'administration; les conseils

d'administration unifiés; les missions des établissements; la marge de manoeuvre des établissements et des régies; l'impôt-services sur les prothèses et les orthèses - on peut toujours se dire qu'il y a des victoires morales pour certains groupes à l'occasion, y compris le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue dans ce cas-ci - et, sixièmement, la vérification externe des établissements.

Premièrement, la composition des conseils d'administration. Le projet de loi 120 permet à trois employés professionnels de siéger au conseil d'administration des établissements. Il ne permet pas aux employés ou professionnels d'être désignés membres d'un conseil d'administration d'un établissement à titre d'usagers ou de représentants du bénéficiaire. De plus, aucun professionnel ou employé ne peut siéger au conseil d'administration de la régie régionale. Avec les modifications proposées, des producteurs du réseau pourront accéder aux conseils d'administration des établissements soit par le canal des sièges cooptés ou à titre d'usagers ou usagères ou représentants de bénéficiaires, mais non pas dans l'établissement où ils travaillent.

Des sièges cooptés au conseil d'administration de la régie régionale, quatre à la régie régionale de Montréal et deux autres, deux aux autres régies, seront également prévus pour maintenir la logique du coopté au niveau de l'établissement et aussi au niveau de la régie régionale. Ces sièges serviront à combler des lacunes de représentation au conseil d'administration: expertises, incluant celles du réseau, parties de territoire, caractéristiques linguistiques et socio-culturelles, domaines d'enseignement et recherche. Mais ces choix cooptés seront faits par la régie et sanctionnés par le ministre.

Au niveau des conseils d'administration unifiés, le projet de loi 120 prévoit utiliser des conseils d'administration des centres de réadaptation pour personnes handicapées au plan physique. Des propositions ont été faites pour tenir davantage compte des réalités différentes des déficients auditifs, des déficients visuels et des déficients locomoteurs.

Quant à la mission des établissements, des recommandations ont été faites pour mieux encadrer la mission des établissements. Suite aux demandes du réseau, des précisions seront apportées à la mission des catégories des établissements, mais sans mettre en cause le partage déjà fait entre établissements de première ligne et établissements agissant sur référence ou principalement sur référence. (16 h 45)

La marge de manoeuvre des établissements et des régions. J'ai entendu, bien sûr, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue dire: L'oxygène tant promis ne se rend pas. Il avait un peu raison et on l'a constaté nous aussi, évidemment. Ce que je comprends maintenant, c'est que ce sera différent. Donc, des artisans du réseau de la i santé et des services sociaux ont indiqué que le projet de loi 120 ne donnait pas une marge de manoeuvre suffisante aux établissements et aux régions. Certains articles du projet de loi ont été revus pour accorder plus de flexibilité et de liberté de gestion aux établissements, soit par rapport à la régie régionale, soit par rapport au ministre ou au ministère.

J'ai la même préoccupation que celle de donner de l'oxygène et un espace aux établissements et aux régies. Il faut admettre, cependant, que le gouvernement a fait deux choix qui conditionnent notre marge de manoeuvre, soit qu'il n'y ait pas de suffrage universel et que c'était non à un autre palier de taxation. Nous sommes allés, donc, le plus loin possible en confiant des pouvoirs aux régies sur l'aménagement des services sur leur territoire, sur l'allocation des ressources, en renforçant les mesures d'imputabilité aussi. Il ne faut pas oublier qu'on gère un réseau de santé et de services sociaux, donc un système complexe avec une structure à trois paliers: ministère, régies, établissements, où il faut qu'un minimum de règles du jeu soient définies afin que le réseau fonctionne, justement, en système. Tant et aussi longtemps que le Québec financera le réseau de la santé et des services sociaux, le ministre sera donc l'ultime personne imputable et on s'apprête, au cours des prochaines semaines, bien sûr, à faire l'exercice annuel des crédits où c'est au ministre qu'on pose des questions et c'est lui qui, devant l'Assemblée nationale, est imputable.

L'impôt-services sur les orthèses et prothèses. La réforme de la santé et des services sociaux prévoyait un impôt-services sur les programmes complémentaires qui respectait la capacité de payer des usagers. Compte tenu que la clientèle des personnes handicapées est très vulnérable et que l'impôt-services sur les orthèses et prothèses contredisait la politique À part... égale du gouvernement du Québec, l'impôt-services sur les orthèses et prothèses ne sera pas appliqué. Mais nous n'avons pas le choix, pour faire face aux besoins de la population et pour pallier au retrait graduel du fédéral. C'est de nature à vous plaire, bien sûr, vous qui avez tant souhaité et même fait du porte à porte, usé des souliers pour être un représentant du Québec au NPD fédéral. Donc, vous aurez compris que ce que je regrette tout simplement, c'est de ne pas vous avoir aidé sur le plan politique pour qu'effectivement vous soyez avec le NPD un défenseur des intérêts du Québec, mais à Ottawa.

Des voix: Ha, ha, ha! M. Gautrin:...

M. Côté (Charlesbourg): Oui. Évidemment, ce que je comprends, c'est que mon collègue, M. Gautrin, qui, lui aussi, a été un porte-étendard du NPD en...

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça fait longtemps.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, ça fait quelques années.

Les médecins. Les médecins ont soulevé un certain nombre de problèmes reliés au projet de loi 120. Je le dis publiquement en espérant, bien sûr, être entendu puisque mes propos sur les médecins ne sont que les aspects négatifs qui, à l'occasion, sont entendus. Des propositions ont été faites et des mesures intéressantes nous ont été soumises par le corps médical, que ce soit la Corporation professionnelle des médecins, que ce soit la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, les résidents ou les étudiants en médecine. Donc, c'est enregistré; tout ça pourra être retenu contre moi ultérieurement. Mais une chose est certaine, c'est que je le dis parce que je le pense et, avant de les aborder, je voudrais souligner un certain nombre de faits.

Je tiens, quant à moi, mordicus à faire en sorte que les Québécoises et les Québécois des régions reçoivent des services médicaux car ils paient les mêmes impôts, encore une fois, que ceux de Montréal, de Québec ou d'ailleurs. Le projet de loi ne remet pas en question les libertés fondamentales des médecins, contrairement à ce qui a été véhiculé. Il nous semble établir un juste équilibre entre les libertés individuelles et les responsabilités collectives. L'évaluation de l'acte médical continuera à être faite par les pairs.

Les amendements touchant les médecins sont nombreux et ils concernent les sujets suivants: les CMDP, des ententes médecins-établissement, l'agrément des médecins, l'"opting out", les mécanismes de recours, la négociation, le lien entre la signature du relevé d'honoraires et la rémunération des médecins, les plans d'effectifs médicaux.

Les conseils des médecins, dentistes et pharmaciens. Des représentations ont été faites sur les établissements devant obligatoirement constituer de tels conseils, sur leur composition et leur rattachement. Un CMDP devra être créé dans tout établissement comptant au moins cinq médecins et non pas uniquement dans les centres hospitaliers, comme le prévoyait le projet de loi. Bien sûr, vous pourriez reprendre le même libellé pour les Cil, donc pour les conseils des infirmiers et infirmières, avec la même norme de cinq infirmiers ou infirmières. À la composition de l'exécutif du CMDP et de celui du Cil, il y aura plus d'échanges réciproques des présidents aux exécutifs. Par contre, un comité multidisciplinaire d'évaluation sera institué dans les établissements pour évaluer la qualité des soins et des services rendus par ces établissements. Cela permettra de tenir compte de la préoccupation d'autres professionnels qui ne sont pas nécessairement médecins ou infirmiers Quant au rattachement du

CMDP et des autres structures, ils continuent et continueront à relever du directeur général, mais l'obligation à ce dernier sera faite de transmettre au conseil d'administration les recommandations que lui formulera le CMDP ou le Cil.

Les ententes médecins-établissement. Des médecins ont demandé le retrait de la signature de l'entente entre un médecin et un établissement. Cette entente devait spécifier tant les privilèges que les obligations d'un médecin dans sa pratique en établissement. Cette demande se fondait sur deux raisons spécifiques. Premièrement, la signature de cette entente formaliserait la relation entre un médecin et un établissement et risquerait de s'établir davantage entre les avocats représentant les deux parties plutôt qu'entre les deux parties elles-mêmes. Deuxièmement, l'attribution d'obligations spécifiques à un médecin risquerait d'avoir un effet pervers très important; cela pourrait être perçu comme des obligations maximales plutôt que minimales, comme le voulait l'esprit du projet de loi. La signature de l'entente entre le médecin et l'établissement, qui devait préciser tant les privilèges que les obligations d'un médecin dans sa pratique en établissement, est donc retirée. Elle sera remplacée par des précisions au processus actuel d'attribution de privilèges d'un médecin et plus particulièrement quant aux obligations qu'il doit respecter sous peine de perte de privilèges.

L'agrément des médecins. Là aussi, plusieurs, des médecins ont formulé des recommandations sur quatre points précis concernant l'agrément: premièrement, différencier les conditions d'un premier agrément de celles d'un renouvellement de l'agrément; deuxièmement, limiter dans le temps l'obligation d'être agréé pour pouvoir bénéficier des honoraires à 100 %; troisièmement, prévoir un mécanisme d'agrément qui impliquerait des médecins et, quatrièmement, prévoir un mécanisme de recours pour les médecins qui feront face à un refus ou à un non-renouvellement de l'agrément. Nous avons donc et nous apporterons donc des amendements au projet de loi.

Dans le renouvellement de l'agrément, uniquement le respect des engagements pris et le maintien de pratique sont suffisants. Le respect des pians d'effectifs médicaux et l'acceptation de nouvelles obligations seront requis pour un premier agrément. Pour les médecins de 10 ans et plus de pratique, une seule condition sera requise: le maintien de la pertinence de leur pratique eu égard aux besoins de la population. De plus, les médecins pourront s'affranchir plus rapidement de l'agrément en fonction de l'éloi-gnement de la région de pratique ou de l'intensité des services fournis. Une commission médicale composée uniquement de médecins sera instituée pour aviser la Régie sur l'agrément des médecins. Elle aura trois mandats: évaluer la pertinence des pratiques des médecins qui font

une demande d'agrément, donner un avis sur l'agrément pouvant être accordé, analyser les profils de pratique des médecins de la région en vue de donner un avis sur les modes de rémunération et d'organisation de la pratique de ceux-ci. Un droit et un mécanisme de recours concernant l'agrément seront prévus spécifiquement pour les médecins.

L'"opting out". Les médecins ont fait valoir que certains médecins pourraient avoir des raisons personnelles ou professionnelles de ne pas être agréés ou de pratiquer en établissement en deçà des plans d'effectifs médicaux. Des médecins peuvent se soustraire à l'agrément pour leur pratique en cabinet privé moyennant une rémunération à la baisse ou à des conditions de rémunération fixées par le ministre. Un amendement est apporté pour soustraire des plans d'effectifs médicaux les médecins déjà inscrits dans un programme de formation pour leur pratique en établissement moyennant une rémunération fixée par le ministre.

Quant aux mécanismes de recours, trois problèmes sont relevés par rapport aux recours dont disposent actuellement les médecins. Premièrement, il y a des sujets, tel l'agrément, pour lesquels aucun mécanisme de recours spécifique n'est prévu. Deuxièmement, il existe plusieurs mécanismes de recours ayant juridiction sur les mêmes objets, telles les mesures disciplinaires prises à l'endroit des médecins. Et, troisièmement, les délais d'audition de ces recours sont souvent très prolongés et ce, principalement à la Commission des affaires sociales. Afin de simplifier et d'accélérer les recours éventuels des médecins, un amendement sera apporté visant à créer un mécanisme spécifique d'arbitrage auquel pourraient recourir des médecins dans toute matière qui fait l'objet de la Loi sur les services de santé et les services sociaux et ce, en remplacement de la Commission des affaires sociales.

La négociation. Les fédérations médicales - je ne sais pas si ça a changé pour les spécialistes, on verra avec le nouveau président - demandent de revenir au libellé de la loi actuelle en ce qui a trait au pouvoir du ministre de déterminer les groupes de professionnels avec lesquels il peut conclure une entente. La loi actuelle parle d'organismes représentatifs de toutes catégories de professionnels, tandis que le projet de loi 120 parle de groupements ou regroupements représentant des professionnels. Les médecins perçoivent dans ce changement de libellé une volonté du ministre de morceler des fédérations médicales. Un amendement sera apporté pour préciser que le ministre peut reconnaître uniquement des groupements ou regroupements provinciaux. Les médecins contestent également la préséance qu'un règlement pris en vertu de la loi 120 puisse avoir sur une entente. Un amendement sera également apporté pour que seul un règlement concernant les gammes de services assurés puisse avoir préséance sur une entente.

J'achève, M. le Président. Je sais que j'abuse de votre patience, mais c'est pour vous donner un meilleur éclairage des intentions ministérielles, souhaitant qu'elles deviennent les intentions de cette commission.

Le lien entre la signature du relevé d'honoraires et la rémunération des médecins. Tel que formulé, le projet de loi 120 faisait en sorte que la signature de l'usager est requise pour que les médecins puissent être rémunérés par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Les médecins ont fait valoir que, dans certaines circonstances, il pouvait être difficile d'obtenir la signature des usagers, par exemple, en santé mentale. De plus, un usager pourrait refuser de signer le relevé d'honoraires parce que le médecin n'aurait pas consenti, pour des raisons d'ordre professionnel, à lui procurer le service ou le médicament qu'il requérait. La signature par le client du relevé d'honoraires est maintenue même si certaines exceptions sont permises. Le médecin sera tenu d'en remettre un exemplaire au client, de telle sorte que la sensibilisation aux coûts soit préservée, mais on fera en sorte de dissocier la signature de la rémunération.

Quant aux plans d'effectifs médicaux, l'une des principales craintes des médecins concernant l'application des plans d'effectifs médicaux est l'impossibilité de revenir en région centrale après avoir pratiqué en région éloignée. Un amendement est apporté afin de réserver une partie des postes à être octroyés aux régions universitaires spécifiquement pour les médecins ayant déjà pratiqué en région non universitaires.

Vous le constatez donc, M. le Président, beaucoup d'amendements ont été apportés en regard des médecins. Ils sont de nature à bonifier le fonctionnement du régime. J'espère que cela démontrera la bonne foi qui nous guide quant à la réforme.

Tels sont, pour l'essentiel, les changements proposés au projet de loi 120. C'est mon sentiment qu'ils bonifient le projet de loi actuel. Ils permettront, je l'espère, de réaliser un consensus encore plus large autour de la réforme.

En guise de conclusion, l'exercice que l'on entreprend est très important. C'est une dernière étape relative aux décisions à prendre car, je l'ai dit au début et je le répète en terminant, le temps des consultations est terminé, le quoi ayant été bien défini. Un seul biais d'analyse: l'intérêt du citoyen. Les propositions faites d'amendements que nous pourrons voir au fur et à mesure des prochaines semaines et, j'imagine, des prochains mois visent à bonifier le comment dans le respect des principes et orientations et objectifs de la réforme et du projet de loi 120. Est-ce que, pour autant, ça veut dire, M. le Président, que nous ne pourrons pas à nouveau bonifier le projet de loi 120? Je pense que oui. Dans l'exercice que nous débutons, je dis tout de

suite à l'Opposition et à mes collègues que je ne serai pas un ministre buté, en pensant que je suis le seul à avoir raison. Cependant, la preuve leur incombera de faire la démonstration que c'est véritablement une bonification dans l'esprit même de ce qu'est la réforme, soit en prenant le biais du citoyen, et que c'est ça qui devra, bien sûr, servir et bien servir le citoyen.

Merci de votre patience, M. le Président, et on vous certifie déjà à ce moment-ci notre support et notre compréhension vis-à-vis du rôle que vous allez jouer, compte tenu de ce que nous avons à faire comme travail, et on vous assure de notre grande ouverture d'esprit.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Ça me confirme ce que je savais déjà. Je pense qu'on ne doutait jamais de votre ouverture d'esprit. Alors, je vais reconnaître maintenant le porte-parole de l'Opposition officielle en matière de réforme de la santé et des services sociaux, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Vous avez une quarantaine de minutes, M. le député. (17 heures)

M. Trudel: Et vous alliez ajouter "avec une ouverture d'esprit aussi grande", j'en suis sûr, M. le Président, je suis assuré de cela.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Je savais que vous-même, vous renchéririez.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Nous sommes d'accord, bien sûr, avec le ministre sur l'importance de l'étape que nous allons Iranchir au cours des prochains jours, des prochaines semaines, des prochains mois, dans l'étude de cet important projet de réforme qui nous a été soumis au mois de décembre dernier et, pour notre part, du côté de l'Opposition officielle, nous entreprenons aujourd'hui l'étape la plus importante d'un long cheminement initié par l'ancien gouvernement avec la mise sur pied de la commission Rochon en 1985.

L'étude en commission parlementaire du projet de loi 120 portant sur la réforme de notre réseau de santé et de services sociaux sera longue. Non pas que nous ayons l'intention, M. le ministre, d'entreprendre une opposition systématique ou, dans le langage parlementaire, un "filibuster", mais parce que nous sommes conscients et convaincus, comme le sont, je l'espère, les députés ministériels, que la commission des affaires sociales représente le dernier filet, le dernier rempart avant que ne prenne vie une réforme qui affectera tout notre système de santé et de services sociaux pour des dizaines d'années à venir On no refait pas cet exercice là tous les deux ans, tous les cinq ans. C'est un exercice fondamental. L'action législative que nous amorçons aujourd'hui aura un impact direct et concret sur la santé et le bien-être de nos concitoyennes et de nos concitoyens et ce, à court, moyen et long ternie.

Dans notre esprit, chacun des 494 articles du projet de loi 120 mérite d'être scruté à la loupe afin de bien en mesurer l'implication. Réformer pour le plaisir de réformer étant une motivation insuffisante, nous nous attendons à ce que le ministre motive, pour sa part, adéquatement le pourquoi des nouvelles mesures et, à travers son prisme, en quoi le citoyen y gagne lui-même pour ne pas que cela se transforme en biais pour le citoyen concerné et que l'on cherche ensemble, à travers ce prisme, comment nous allons solutionner les problèmes de ce citoyen concernant ces services de santé et ces services sociaux.

De plus, comme il y a beaucoup de silences dans ce projet de loi - nous pourrions dire des "non-dit" - concernant, par exemple, l'organisation du réseau des services de santé et des services sociaux dans la grande région de Montréal ou encore celle des départements de santé communautaire, ainsi que le service ambulancier et préhospitalier au Québec, malgré les précisions que vient de nous apporter dans son discours d'ouverture le ministre à l'égard de certaines dimensions dans la région de Montréal, nous pensons que nous sommes en mesure d'exiger rigueur, franchise, ouverture de la part du ministre pour en arriver, comme il l'a dit et comme il dit d'habitude, à ce que nous servions les citoyens, de quelque région qu'ils soient au Québec, de la bonne façon. En contrepartie, nous pouvons dire au ministre qu'il va de soi que nous légiférerons avec ouverture d'esprit.

Ceci étant dit, j'aimerais aussi, de notre côté, aborder quelques points précis du projet de loi 120, enfin la version que nous avons entre les mains depuis le mois de décembre dernier, et, malheureusement, pas les 145 mémoires qu'a reçus le ministre. Nous devons jeter notre éclairage à partir des documents qui sont publics et qui ont été déposés à l'Assemblée nationale et pas au-delà.

D'abord, lorsque le ministre a lancé son projet de réforme en décembre dernier, les réactions furent généralement positives - nous savons lire, nous aussi, de notre côté. J'exclus ici, bien entendu, la position du corps médical en particulier, qui a eu une opposition assez virulente à différentes mesures contenues dans le projet de réforme. Toutefois, le ministre en conviendra, au fur et à mesure que le temps s'est écoulé, différents groupes constatèrent un net décalage entre le livre blanc et le projet de loi 120; les critiques et les demandes d'amendements se firent de plus en plus pressantes. La démonstration de cette affirmation, nous la tenons maintenant du ministre lui môme qui dit: 150() payes, 145 mémoires qui lui ont été soumis

Donc, après le moment où on a publié cette réforme et jusqu'au moment où on aborde aujourd'hui l'étude article par article, les différents groupes ont vu qu'il y avait un certain décalage et le ministre nous annonce même aujourd'hui qu'au-delà de 300 amendements seront soumis de sa part au projet de loi qui est à l'étude devant nous.

La première question qu'il faudra se poser, évidemment, avec le dépôt de ces 309 amendements, c'est: Est-ce que l'un ou l'autre de ces amendements modifie les principes que nous avons fait adopter par l'Assemblée nationale au mois de décembre dernier? Les étapes au niveau législatif sont bien campées dans notre règlement et, lorsque nous demandons à l'Assemblée nationale une approbation de principe, nous lui demandons d'approuver un ensemble de principes dont nous étudions le détail, l'écriture, la publication plus précise en commission parlementaire; c'est l'étape que nous abordons aujourd'hui. Le ministre comprendra très facilement que nous devrons d'abord nous poser une question: Est-ce que les modifications, les papillons, pour employer le langage ou le jargon qu'il a lui-même utilisé, sont de nature à changer fondamentalement les principes que nous avons soumis, que le ministre a soumis à l'Assemblée nationale? Et ça aussi, nous disons au ministre: Nous le ferons avec ouverture d'esprit en vue d'en arriver à une bonification du projet de réforme qui nous a été présenté.

Dans notre esprit, ainsi que dans celui de plusieurs groupes qui ont fait des demandes formelles dans ce sens, nous pensons que des auditions particulières ne peuvent être remplacées par des négociations à huis clos et des rencontres avec certains groupes particuliers. D'ailleurs, nous récusons les arguments que le ministre a fait valoir dans une lettre qu'il a fait parvenir à tous les intervenants au mois de janvier dernier - il l'a signalé dans sa présentation - à tous les intervenants et destinée, nous pensons, à les décourager de demander des consultations particulières. Pourquoi? Le ministre expédie, le 15 janvier, une lettre à tous les intervenants du réseau de la santé et des services sociaux et il leur donne 10 jours pour réagir à son projet de loi. Nier que le ministre ait le droit de faire des consultations, quand même! Quand même, le ministre a le droit de demander des avis. Ce que nous pensons, c'est que le ministre s'attaque à la réforme d'un système complexe dans lequel les enjeux sont énormes pour la société québécoise, ce qui, uniquement en termes de système, coûte à l'État Québécois le tiers de son budget. Est-ce que tout cela ne mériterait pas, pour quelques jours, d'avoir des audiences particulières afin que soient débattus publiquement, ou lancés publiquement à tout le moins, les enjeux du projet de réforme qui nous est présenté par le ministre?

D'abord, les consultations publiques tenues au printemps 1990, faut-il le rappeler, portaient sur un avant-projet de loi substantiellement différent de celui qui est sur la table aujourd'hui. Les exemples de principes ou de dispositions sur lesquels les groupes ne pouvaient se prononcer lors de la consultation parce que absents du projet de loi présenté par Mme Lavoie-Roux sont multiples. Les gens ont été, oui, consultés, ont pu se présenter dans une commission parlementaire qui, comme le ministre l'a rappelé, a été l'une des plus longues de l'histoire de ce Parlement. Mais se prononçaient-ils sur le bon objet? Devaient-ils se prononcer ou nous donner des avis sur ce que le ministre nous a présenté en décembre? Ce que nous disons, c'est qu'on n'a pas invité les gens et les gens ne se sont évidemment pas présentés à nous pour nous faire des observations, des remarques, des suggestions sur le bon projet de loi et c'est pourquoi nous pensons qu'il faille, de façon limitée, demander au gouvernement du Québec, au ministre de la Santé et des Services sociaux de revenir sur cette attitude carrée de ne tenir aucune audition publique particulière, dans le langage parlementaire, au niveau du projet de loi 120.

Certains principes n'étaient donc pas contenus dans le projet de Mme Lavoie-Roux lorsque nous avons fait la consultation aux premiers mois de 1990. Mentionnons, à titre d'exemple, le ticket modérateur ou, devrions-nous dire, orienteur, dans la mesure où le ministre a envoyé aussi son dictionnaire à Mme Lavoie-Roux. L'impôt-services n'était pas un principe qui était inclus dans l'avant-projet de loi de Mme Lavoie-Roux. La régionalisation des enveloppes de la RAMQ, la Régie de l'assurance-maladie du Québec, n'était pas incluse dans ce projet de loi. Les modifications au régime de négociation avec les fédérations médicales, malgré et avec les amendements que le ministre nous promet, n'étaient pas à l'agenda du projet de Mme Lavoie-Roux à l'époque de la consultation. La disparition des centres de services sociaux, l'autorité des directeurs généraux sur les conseils des médecins, dentistes et pharmaciens, le conseil des infirmiers et infirmières, les nouvelles formules pour les conseils d'administration, l'exigence de qualifications pour tous les directeurs d'établissement, de façon universelle, avant d'être, entre guillemets, repêchés par un établissement, n'étaient pas des principes inclus dans le projet de loi de Mme Lavoie-Roux et, en conséquence, évidemment, les groupes n'ont pas pu se prononcer là-dessus, n'ont pas pu nous faire des observations et le débat public, quant au tiers du budget du Québec consacré à des services qui concernent l'ensemble de la population du Québec, doit être fait de façon limitée, nous en convenons avec le ministre, et que les enjeux soient lancés publiquement et puissent faire l'objet d'un débat.

Mais plus grave, et c'est l'un des aspects

les plus condamnables du refus de tenir des audiences publiques, les discussions clés, à notre avis, se tiennent et continueront forcément de se tenir derrière des portes closes. La commission Rochon avait pourtant dénoncé un réseau pris en otage par les différents groupes qui oeuvrent en son sein; on comprend mal pourquoi le ministre se laisse entraîner dans cette dynamique en refusant d'étaler au grand jour les tractations ayant cours dans les différentes officines du pouvoir.

Les enjeux sont de taille et impliquent les intérêts de l'usager. Qui contrôlera la pratique professionnelle des médecins? Les conseils d'administration ou les directeurs généraux d'établissement? Le ministre l'a abordé; il apportera quelques amendements à cet égard. Qui sera en charge des familles d'accueil, finalement? Les départements de santé communautaire resteront-ils campés dans les hôpitaux? Comment réglera-t-on le problème de la répartition des effectifs médicaux sur l'ensemble du territoire québécois? En comptant sur la participation de nos professionnels de la santé de ce secteur? Combien de centres de protection de l'enfance et de la jeunesse y aura-t-il sur le territoire de Montréal? Deux, trois, plus? Seront-ils divisés sur une base linguistique et qu'arrivera-t-il à ce moment, par exemple, du CSS juifs à la famille? Les hôpitaux pourront-ils continuer à offrir des services de clinique externe? Feront-ils de la prévention et de la réadaptation comme ils l'exigent? Est-il pertinent de faire siéger le président du conseil des infirmiers et infirmières au conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, et vice versa? Doit-on abolir les départements de médecine générale dans les hôpitaux? Comment sera financé le développement des services de première ligne dans les CLSC?

Voilà autant de questions et de sujets pour lesquels un débat avec les principaux intervenants aurait jeté un éclairage profitable sur nos travaux. Il est encore temps de convoquer des audiences particulières et je souhaite sincèrement que le ministre accède à notre demande. Trois petites journées! Trois petites journées ne compromettront en rien le calendrier d'entrée en vigueur du projet de réforme du ministre.

Quelques mots, bien sûr, au niveau de l'absence d'une politique de santé et de bien-être. Lors des consultations publiques, largement rappelées par le ministre, du printemps 1990, nous avons mis en relief l'incongruité d'étudier un projet de loi réformant les structures du réseau avant même d'élaborer une politique de santé et de bien-être. À partir d'aujourd'hui, nous fabriquerons ensemble un outil sans en connaître son utilisation. J'ajouterai que de nombreux groupes partagent cette analyse. Les remarques faites à l'époque demeurent non seulement pertinentes, mais s'appliquent avec d'autant plus d'acuité que nous sommes à quelques jours seulement du dépôt de la politique de santé et de bien-être telle que promise pour le 1er avril par le ministre de la Santé et des Services sociaux. Pourquoi ne pas attendre quelques jours supplémentaires? Les beaux jours d'avril se présenteront bientôt! Où est l'urgence nationale? Pour nous, un calendrier de travail intelligent pourrait s'élaborer ainsi: convocation pour trois jours d'audiences particulières la semaine prochaine, suspension pour l'étude des crédits, ce qui nous permettra de connaître les implications financières de la réforme, dépôt de la politique de santé et de bien-être et début de l'étude en commission parlementaire, à moins, bien sûr, que le ministre ne soit pas prêt à livrer sa politique de santé et de bien-être dès maintenant ou pour le début d'avril. (17 h 15)

Dans la même veine, j'ajouterai immédiatement que le projet de loi devra prévoir que les objectifs de la politique de santé et de bien-être soient déposés, débattus et ajustés devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale à tous les deux ans. On exige bien qu'Hydro-Québec vienne défendre annuellement son plan de développement et d'investissement devant une commission parlementaire. Si le rôle fondamental que l'on destine à la politique de santé et de bien-être se veut sérieux, pourquoi ne pas en faire autant, et un large débat au sein des élus à l'Assemblée nationale? D'ailleurs, de telles séances de la commission seraient extrêmement utiles et intéressantes. L'impact des nouvelles technologies, par exemple, sur les coûts du système, les nouvelles techniques de reproduction, l'impact de la qualité de l'environnement, des conditions de logement et de la pauvreté sur la santé, la sécurité routière et les coûts du système, la lutte au tabac, aux MTS, à la drogue, à la violence conjugale, sans oublier, bien sûr, un regard sur l'atteinte des objectifs fixés par le ministère sont autant de sujets qui ne manqueraient pas de nourrir une commission parlementaire sur la politique de santé et de bien-être au Québec.

De tels débats auraient inévitablement comme effet secondaire de sensibiliser les ministres sectoriels dont les missions et actions ont un impact direct sur les coûts du réseau de la santé et des services sociaux. Deux jours de commission parlementaire à tous les deux ans favoriseraient l'émergence d'une approche beaucoup plus globale des problèmes de santé et des problèmes sociaux au Québec.

J'aimerais maintenant formuler un certain nombre de commentaires non exhaustifs, bien sûr, compte tenu du temps qui nous est alloué, sur des aspects plus précis du projet de loi et pour lesquels, si le ministre veut obtenir notre adhésion en troisième lecture, il devra démontrer, bien sûr, les justifications nécessaires et une volonté d'amender son projet de loi actuel.

Le ticket orienteur ou modérateur et l'impôt à rebours. Le ministre connaît notre position sur

ces deux mesures qui entraînent l'effritement des principes d'universalité et de gratuité. Ce qui est moins connu du public, c'est la belle unanimité qui se dégage à rencontre de ces mesures. Des fédérations syndicales à la coalition des aînés, en passant par les centrales syndicales et les associations de consommateurs, on dénonce ces mesures dont la manifestation la plus odieuse est certes l'impôt-services pour un certain nombre de services complémentaires de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, tout en constatant que le ministre a fait un premier bon pas en retirant l'intention d'imposer l'impôt-services sur toutes les orthèses et prothèses dont le coût est assumé par la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Nous l'invitons fermement à progresser plus rapidement et à retirer le mécanisme régressif que constitue l'impôt-services.

Quant au ticket modérateur, le ticket orienteur - je me mêle toujours entre le dictionnaire Côté et le dictionnaire Lavoie-Roux - les arguments contenus dans les différents mémoires que nous avons reçus sont plus que convaincants. Il s'agit d'une mesure discriminatoire, difficile d'application et inutile compte tenu que les CLSC, par exemple, ont connu à eux seuls un accroissement de leur clientèle uniquement par la publicité entourant le lancement du projet de réforme du ministre. L'article 410, alinéa 14 doit être retiré de ce projet de loi.

La régionalisation des services. Eu égard à la régionalisation des services, le discours contenu dans le livre blanc promettait. Le ministre se souviendra que nous l'avions appuyé dans cette démarche, au niveau de la régionalisation. Nous souhaitons pouvoir continuer à le faire, mais une condition s'impose: nous voulons une véritable régionalisation et non une simple déconcentration. Nous souhaitons l'émergence d'un véritable décideur régional et non une duplication coûteuse du ministère de la Santé et des Services sociaux. De multiples dispositions devront être modifiées afin de limiter au minimum les interventions ministérielles au niveau régional. En contrepartie, puisque le ministre a choisi - il l'a dit - de ne pas aller vers le suffrage universel et la reconnaissance d'un certain pouvoir de taxation, les mécanismes d'imputabilité des futures régies régionales, à notre avis, exigent d'être peaufinés davantage. Le minimum sera de retrouver dans le projet de loi des dispositions articulant les comparutions obligatoires des régies régionales devant la commission des affaires sociales. La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale devrait statutairement entendre au minimum quatre régies régionales par année, effectuant ainsi une rotation permettant de couvrir l'ensemble du territoire a tous les quatre ans. Par ailleurs, la commission parlementaire disposerait du pouvoir de convoquer, lorsque la situation l'exige, n'importe quelle régie à la fin de son exercice budgétaire.

Au niveau de la formation des assemblées régionales et des conseils d'administration, des modifications s'avéreront nécessaires afin d'éviter toute opération de noyautage. Le risque est bien réel et des groupes organisés élaborent déjà des stratégies dans ce sens. Si la dialectique du citoyen-décideur a un sens, le ministre aussi devrait y voir et nous pourrons lui montrer aussi d'autres documents ou mémoires qui nous ont été soumis sur des opérations de noyautage qui sont déjà en cours au niveau de certains conseils d'administration.

Dans la mesure où l'on réussit à échafauder une mécanique d'imputabilité adéquate et des assemblées régionales et des conseils d'administration représentatifs de la population, il sera d'autant plus aisé d'accorder une véritable marge de manoeuvre à ces régies régionales.

En ce qui concerne l'organisation des établissements sur le territoire de la régie, celle-ci apparaît habilitée à prendre des décisions dans un cadre législatif qui lui permet véritablement d'agir ainsi. Les pouvoirs du ministre devraient se limiter à la reconnaissance des missions universitaires ainsi qu'à la gestion des permis des établissements, encore qu'il s'agisse ici d'un pouvoir important puisque c'est à partir des permis que l'on détermine le nombre de lits dans un établissement. La réglementation prévue à l'article 347 devra donc permettre une certaine autonomie aux régies régionales.

Au chapitre de l'organisation des services, le rôle des régies dans l'élaboration des priorités de santé et de bien-être, à l'article 260, doit être renforcé - c'est ce que nous avons compris des papillons que le ministre entend déposer à cet égard - pour éviter qu'elles ne deviennent de simples exécutantes de politiques élaborées en vase clos à Québec. Elles doivent pouvoir collaborer et participer à l'élaboration des politiques nationales. De plus, des plans d'organisation de services, d'abord soumis à l'assemblée régionale plutôt qu'au ministre, impliqueraient davantage le milieu, nous le pensons.

Autre exemple, l'ingérence appréhendée du ministère dans l'élaboration des systèmes d'admission aux établissements ne nous apparaît guère compatible avec l'esprit d'une véritable régionalisation, tel que mentionné aux articles 417 et 274.

Les dispositions à caractère financier pourraient connaître certains assouplissements. La véritable régionalisation des moyens d'intervention se concrétisera au moment où sera affectée aux régions du Québec l'enveloppe budgétaire du ministère. Quelles seront les règles qui présideront à cette répartition de l'enveloppe? Le législateur doit manifester une certaine confiance à l'égard des régies qu'il entend créer, sinon le jeu n'en vaut point la chandelle.

L'article 342 qui autorise le ministre à prendre toute mesure pour accroître l'efficacité

et l'efficience des établissements est inacceptable parce que arbitraire et susceptible d'interférer continuellement dans les décisions au niveau régional. Par ailleurs, il s'avérera nécessaire que la régie, pour sa part, dispose de moyens pour assurer le respect de ses propres décisions. Le ministre s'est octroyé un tel pouvoir à l'article 375, par le mécanisme de la rétention des subventions. Pourquoi pas un pouvoir analogue dans les régies?

Bref, des modifications importantes s'imposent pour que les régionalistes puissent crier victoire. En tout état de cause, il aurait été essentiel de discuter de ces choses avec les principaux intéressés, les CRSSS et les représentants des fonctionnaires qui seront transférés, bien sûr, s'H en est et s'il y en a de transférés.

Les missions des établissements. Lorsque l'on aborde les discussions entourant les missions des établissements, nous nous retrouvons au coeur des divergences entre les différents intervenants du réseau. C'est essentiellement à ce niveau que des consultations particulières auraient apporté un éclairage aux membres de la commission. Prenons un exemple concret à partir dune situation où, M. le ministre, nous le disons franchement, honnêtement et ouvertement, l'Opposition officielle hésite encore à trancher: Les centres de jour doivent-ils relever des CLSC ou des centres d'accueil? Chacune des deux parties invoque des arguments intéressants. Pour les CLSC, les centres de jour constituent le prolongement de leur mission de maintien à domicile. En stimulant les personnes âgées, ils favorisent leur autonomie. Placer les centres de jour dans les centres d'accueil rapproche trop, selon les CLSC, les personnes âgées de l'hébergement qui, lui, s'avère un moyen plus coûteux par ailleurs. Au contraire, pour les centres d'accueil, la présence de centres de jour permet, justement, aux personnes âgées d'apprivoiser le centre d'hébergement. Cela provoque également un va-et-vient qui crée de la vie dans les centres d'hébergement et évite que ceux-ci ne deviennent de simples mouroirs isolés et sans contact avec le monde réel. De plus, les centres de jour en centres d'accueil permettent au personnel de se ressourcer quelque peu en favorisant le contact avec des personnes possédant un plus haut degré d'autonomie. Finalement, les centres d'accueil, de leur côté, font valoir qu'ils ont déjà l'équipement et les infrastructures nécessaires pour maintenir les centres de jour.

On pourrait donner d'autres exemples. Les médecins pratiquant en centre hospitalier feront-ils de la prévention? Est-ce un empiétement sur la mission des CLSC? Les CLSC, eux, ne devraient-ils pas se voir octroyer le rôle de promotion, justement pour marquer une différence avec les établissements hospitaliers?

Toujours au chapitre des missions, l'on ignore comment s'effectuera le partage des responsabilités, je le disais tantôt, sur l'île de Montréal. Est-ce sur une base linguistique, ethnique ou territoriale? Dans notre esprit, il ne s'agit pas d'une question de détail.

Je pourrais continuer longtemps sur le sujet. Il est donc superflu de dire que nous porterons une attention toute méticuleuse aux articles 53 et suivants pour éviter que le ministre n'achète une paix illusoire en laissant délibérément des articles flous.

Les mécanismes de protection des usagers. Nous aurons plusieurs commentaires à formuler sur les mécanismes de protection des usagers. Compte tenu de la commission parlementaire sur l'extension du mandat du Protecteur du citoyen, nous exigerons la création d'un recours externe dans le traitement des plaintes. Toutefois, nous espérons aussi la même attitude du ministre à l'égard des dispositions du projet de loi qui, à notre avis, ne garantissent aucunement un minimum d'indépendance aux individus chargés de traiter des plaintes au sein des établissements et des régies régionales. Il faudra prévoir que ceux-ci relèvent directement du conseil d'administration et qu'ils puissent pleinement exercer leurs fonctions sans remise en question constante de leur poste. Le mémoire ou la copie du mémoire de la CSN qui a été expédié au ministre offre à cet égard des pistes extrêmement intéressantes. Les articles 28 et suivants retiendront donc l'attention des membres de la commission et nous aurons, de notre côté, à proposer aussi un certain nombre de papillons à cet égard, compte tenu des travaux et des conclusions qui devraient nous parvenir d'ici peu de la commission des institutions à cet égard.

La répartition des effectifs médicaux. On ne peut entamer ce projet de loi sans parler de la profession médicale, d'abord parce que ce sont les médecins qui seront, de toute évidence, les plus affectés par la réforme. Sans revenir sur toutes les dispositions, énumérons bien celles qui leur déplaisent souverainement: premièrement, la procédure d'agrément des médecins par la régie régionale; l'intégration des cabinets privés dans l'élaboration des plans d'effectifs médicaux; la tutelle des CMDP sous l'autorité des directeurs généraux d'établissement ainsi que la présence du président ou de la présidente du Cil sur le CMDP; l'absence des médecins des instances décisionnelles des régies régionales - avec des papillons pour les modifications qui seront apportées, a annoncé le ministre - alors que celles-ci disposent de responsabilités importantes, ces régies, en matière d'organisation médicale, de nomination et de révocation des médecins; la régionalisation des enveloppes de la Régie de l'assurance-maladie du Québec - les médecins se sont exprimés là-dessus, largement, aussi - les mesures concernant la répartition des effectifs incluses dans la loi plutôt que dans le cadre d'entente négociée; la modification à la proeô dure de négociation des ententes qui ne seront

plus obligatoirement négociées avec les fédérations existantes - nous étudierons avec attention la proposition d'amendement qui sera déposée par le ministre à cet égard. (17 h 30)

Un autre élément qui a fait l'objet de bien des discussions et de beaucoup de remarques de la part de la profession médicale, c'est l'évacuation, dans le projet de loi, du directeur des services professionnels dans l'établissement hospitalier et aussi l'absence de précision quant au rôle des chefs de départements cliniques; le refus d'impliquer les médecins au niveau de l'élaboration des différents plans ou des divers plans d'organisation et d'effectifs et, finalement, l'absence de droit de recours pour les médecins insatisfaits d'une décision de la Régie les touchant - je sais, le ministre y a touché dans les amendements qu'il entend proposer.

Inutile d'insister sur le ridicule du refus d'entendre les médecins en commission parlementaire, d'autant plus qu'ils ont présenté un plan de rechange qui, dans leur esprit, assurerait une répartition interrégionale et intrarégionale des effectifs médicaux. Il nous semble qu'à partir de leur position certains compromis auraient pu se dégager dans le cadre d'une discussion franche et publique.

Pour notre part, nous endossons certaines de leurs demandes, notamment la création des commissions médicales régionales et une participation réelle aux instances décisionnelles, et leurs craintes qu'un jeune médecin ne puisse revenir dans un grand centre - le ministre y a touché. Bien sûr, nous regarderons ces modifications avec attention. Toutefois, nous réitérons les principes suivants, à l'intérieur desquels devraient s'aménager de tels amendements.

Il est de la responsabilité première des élus de s'assurer que tous les citoyens et les citoyennes aient accès à des services médicaux de base. Le ministre a raison, nous y souscrivons. Les citoyens et citoyennes du Québec paient tous les mêmes impôts, ils ont droit à des services de base partout au Québec.

Si les moyens incitatifs sont à privilégier, on ne peut exclure les moyens coercitifs compte tenu de l'expérience passée. Il convient de donner de la souplesse, de se donner de la souplesse, mais en s'assurant que les services de base sont disponibles.

La régionalisation des enveloppes de la RAMQ est une composante importante du programme de notre parti. Nous tenons à ce que ce soit inclus de façon claire et précise dans le projet de loi 120.

Il faut établir également des mécanismes pour s'assurer qu'un jeune médecin ne soit pas confiné toute sa vie, compte tenu de la mécanique proposée, dans une région donnée.

Nous pensons qu'un autre élément-cadre devrait présider à nos discussions eu égard à la répartition des effectifs médicaux et qu'il est possible d'avoir des règles différentes pour les catégories distinctes de médecins, qu'on soit omnipraticien, qu'on soit pratiquant dans une spécialité de base ou, comme on dit dans le langage, dans une surspécialité.

Nous pensons qu'il faille accroître la participation des médecins aux mécanismes décisionnels et que c'est un objectif parfaitement atteignable.

La qualité de pratique et la détermination du type de pratique devraient continuer d'être déterminées par des pairs.

La répartition des effectifs médicaux au Québec ne peut, par ailleurs - je pense que nous sommes d'accord avec le ministre là-dessus -être soumise aux aléas d'une négociation collective.

En ce qui concerne l'assujettissement du CMDP à l'autorité du directeur général de l'établissement, le ministre aura à nous convaincre. On pourrait songer à une position de compromis en créant un recours devant le conseil d'administration en cas de désaccord grave entre le CMDP et le directeur général.

En tout état de cause, peu importent les solutions que privilégiera le législateur, chose certaine, le discours agressif à l'endroit des médecins doit cesser. Nous ne devons pas faire cette réforme de la santé et des services sociaux contre les médecins. On ne peut nier la maladie dans un texte de loi. Une fois le projet de loi adopté, les usagers continueront de requérir des soins et il importe de préserver la motivation du corps médical. On ne saurait construire un système sans leur apport et un minimum d'appui. Inutile, M. le ministre, de répéter l'expérience de Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Une voix: On s'en reparlera.

M. Trudel: Le facteur déterminant de la conduite à bon port - et je terminerai là-dessus - de la réforme de la santé et des services sociaux, c'est, bien entendu, l'argent. Il ne sert à rien de décréter que les CLSC seront les établissements de première ligne s'ils n'ont pas les moyens de remplir ce rôle. Seront-ils équipés en laboratoire, en équipement technologique nécessaire? Si oui, quelles seront les sommes mises à leur disposition? Combien d'argent deviendra disponible à la suite de la réallocation budgétaire? Combien d'argent neuf? Combien coûtera le réaménagement des CRSSS en régies? Autant de questions pour lesquelles le ministre devra nous fournir, bien sûr, des réponses et des garanties formelles. Une dernière question, peut-être et sûrement la plus importante au chapitre du financement. Quand, compte tenu du désengagement du gouvernement fédéral, le ministre traversera-t-il également les divisions de la Chambre pour militer clairement en faveur de s'occuper de nos propres affaires, de ce côté-ci, en matière de santé et de services sociaux

comme ailleurs, comme II pense et comme II dit souvent qu'on est capables de s'en occuper?

En conclusion, M. le ministre, je terminerai en disant que nous légiférerons avec sérieux, souplesse, mais fermeté sur des aspects qui nous tiennent à coeur, tout en souhaitant que le ministre fasse preuve également, comme H l'a dit lui-même, de son habituelle ouverture à des modifications. Nous passerons de longues soirées ensemble, j'espère qu'elles seront agréables et surtout fructueuses pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Merci, M. le Président. C'étaient les quelques remarques préliminaires que j'avais.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. S'il vous plaît, M. le député.

M. Gordon Atkinson

M. Atkinson: Merci. M. le Président, membres de la commission, M. le ministre, avant de commencer, je tiens à vous souligner que mon allocution sera entièrement en français. Ce n'est pas ma langue maternelle; j'ai un problème avec la langue française. Je vous transmets donc une copie de cette allocution afin qu'il soit plus facile pour vous de suivre. Merci.

J'aimerais d'abord féliciter le ministre et son ministère pour cette tâche ambitieuse. Le ministère de la Santé et des Services sociaux, en plus d'avoir le plus gros budget du gouvernement, est le ministère qui affecte de façon directe la vie de chaque Québécois et Québécoise. Ceci étant dit, je dois maintenant faire des commentaires moins élogieux.

En lisant le projet de loi 120, je suis très déçu de voir que les articles qui m'avaient marqué particulièrement dans le document d'orientation n'étaient pas dans ce projet de loi déposé à l'Assemblée nationale. Quoique je puisse comprendre la difficulté à traduire la vision d'ensemble de ce projet de loi en jargon de juriste, je crois néanmoins que, dans plusieurs cas, ce projet va à rencontre des intentions du ministre. Pendant les séances de cette commission, j'apporterai des commentaires précis sur certains articles de ce projet de loi. À ce moment, cependant, je parlerai de mes inquiétudes en ce qui regarde ce projet.

Dans le document d'orientation, j'étais heureux de voir que le ministre parlait de reconnaître les besoins des communautés anglophone, allophone et autochtone. Il nous a même assurés que ces communautés seraient impliquées dans ce processus, mais, à mon chagrin, le projet de loi ne reflète pas ces idées.

Un aspect des plus dangereux de ce projet de loi est la régionalisation par laquelle des établissements seront limités à desservir un territoire géographique déterminé. Le projet de loi doit tenir compte que plusieurs institutions servent de coeur pour certaines communautés culturelles. À ce titre, elles font affaire avec une population qui dépasse la délimitation d'un territoire. Des anglophones des Cantons de l'Est qui vont à l'Hôpital général de Montréal ou des Italiens de l'extérieur de Montréal qui vont se faire soigner à l'hôpital Santa Cabrini sont des phénomènes courants. Je dois souligner que cet aspect du projet affectera non seulement les communautés culturelles, mais quiconque a un attachement à un établissement qui se trouve à l'extérieur de sa région. Cette inquiétude est très importante parmi les aînés qui ont peur de ne plus pouvoir jouir des services des établissements et/ou des médecins en qui ils ont confiance Quand nous parions de territoire desservi par un établissement, nous devrions penser à la population qui utilise cet établissement, et non seulement aux gens vivant à proximité. Ce concept doit être mis en pratique par le conseil d'administration et la direction des services fournis.

Pour plusieurs communautés culturelles, l'importance de maintenir l'accès à des institu tions familières vient de la peur de ne pouvoir avoir des services dans une langue qu'elles comprennent. Si le ministre veut un système moins centralisateur, il doit faire face à ce problème. Pour cette raison, je propose qu'un article qui obligera les institutions à refléter les caractéristiques linguistiques et culturelles de leur territoire soit rajouté à la loi. Je dois souligner que ceci ne devrait pas être vu comme un cadeau ou une concession aux communautés anglophone ou allophone, mais comme la reconnaissance des droits aux citoyens de recevoir des soins de santé et des services sociaux auxquels ils ont droit ainsi qu'un pas vers l'acceptation de la réforme.

Pendant que je parle de décentralisation, je voudrais souligner le rôle des organismes communautaires et des CLSC. Je suis totalement en accord avec l'intention du ministre d'intégrer les organismes communautaires dans le réseau des services sociaux. Toutefois, le projet de loi n'est pas à la hauteur des attentes engendrées par le document d'orientation. La loi ne reconnaît pas l'énorme contribution des organismes communautaires, ni les inquiétudes concernant leur mandat ainsi que leur autonomie à l'intérieur du système de santé et de services sociaux. Il ne faut pas oublier que les organismes communautaires découlent d'un besoin dans la communiante que l'on ne trouvait pas ailleurs. La loi telle que formulée exclut les organismes communautaires de donner des soins de santé et des services sociaux. Ceci doit être clarifié. Nous devons développer une collaboration entre les institutions et les organismes communautaires.

Le problème des salles d'urgence bondées est très urgent dans notre système actuel. Je dois cependant m'opposer à la proposition du ministre pour résoudre ce problème. Je crois que

les problèmes peuvent être corrigés en injectant de l'argent dans les centres de soins prolongés, en assurant que les soins donnés par les CLSC soient rendus publics et en trouvant une solution aux problèmes internes des hôpitaux.

Je me réjouis des inquiétudes du ministre en ce qui a trait aux services de santé en région éloignée. Je crois que la vraie façon de résoudre ce problème serait en offrant des compensations à ceux et celles qui accepteront de travailler dans ces régions lointaines. Les médecins partiront de la province, du pays, si nous imposons des conditions trop difficiles pour eux et nous, les Québécois, seront les grands perdants. Je crois que le programme de jumelage, tel que le ministre l'a souligné, avec un nouveau programme de compensations, régularisera les divergences entre les régions. Une suggestion que j'aimerais voir dans les programmes de compensations serait que les prêts universitaires reçus puissent être réduits de 5 % pour chaque année passée en région éloignée. La réduction pourrait prendre effet après une période de trois ou quatre ans. Les médecins seront non seulement encouragés à s'établir en région éloignée, mais ils seront également encouragés à y demeurer. Sur ce point, j'aimerais apporter un amendement au projet de loi autorisant le ministre de faire un paiement anticipé de pas plus de 35 000 $ pour un médecin. Le remboursement de ce prêt se ferait de la même façon, c'est-à-dire 5 % de réduction de prêt pour chaque année passée en région éloignée. (17 h 45)

En plus, je crois que nous devons faire des démarches pour reconnaître l'importance des professionnels de la santé, des infirmières, des travailleurs sociaux, des physiothérapeutes et de tous les autres qui ont des rôles essentiels dans notre système de santé.

Une autre proposition que l'on retrouve dans le projet de loi est l'idée d'une période d'accréditation de trois ans avant d'ouvrir un bureau privé. On ne peut s'attendre à ce qu'un médecin ouvre un bureau s'il y a une possibilité qu'il soit obligé de le fermer trois ans plus tard. Qu'arrivera-t-il aux patients de ce même médecin s'il est contraint de s'installer ailleurs? Les malades sont les grands perdants.

Je comprends les problèmes entourant la garantie du nombre adéquat de médecins. Ce dont on a besoin, cependant, c'est d'une meilleure communication entre le gouvernement et les facultés de médecine pour s'assurer que les inscriptions correspondent aux besoins de la province. Depuis quelques années, les facultés de médecine ont reçu des directives contradictoires. Par exemple, je me reporte au département de médecine familiale dans les universités du Québec. En 1987, après qu'on leur eut dit d'augmenter leur niveau d'admissions, les hôpitaux ont investi dans leurs infrastructures et leurs ressources humaines. Maintenant, en 1991, ils se font dire de diminuer leurs admissions. Nous devons avoir un projet bien planifié pour s'assurer que ce genre d'erreur ne se répète pas.

L'universalité des soins est le dernier sujet que j'aimerais discuter. Le projet de loi présente plusieurs mesures qui violeraient ce concept. Parmi celles-ci, l'article 410, paragraphe 12, où des honoraires de 5 $ pourraient être exigés de toute personne ayant abusé des cliniques d'urgence. Mais l'article n'indique pas le montant des honoraires qu'on pourrait demander. On pourrait facilement demander 20 $ ou 50 $. Pour cette raison, je m'y oppose. Si le ministre ignorait ma demande pour que cet article soit aboli, je demanderais au minimum qu'une augmentation du ticket orienteur soit ratifiée par l'Assemblée nationale, M. le ministre.

Je comprends les inquiétudes du ministre sur la hausse des coûts des soins de santé. Je ne crois pas que les compressions budgétaires du ministre soient nécessaires. L'impôt-services, qui prendra en considération les soins de santé tels que les médicaments pour les personnes âgées, les soins dentaires pour les enfants et les appareils d'orthèse et de prothèse qui sont en ce moment fournis gratuitement, comme revenu taxable, pénalisera les plus vulnérables de notre société et présentera d'autres complications bureaucratiques.

En investissant dans la prévention et les soins à domicile qui sont véritables, nous en bénéficierons dans l'avenir. Notre gouvernement a comme mandat de fournir aux Québécois les services de santé à un coût rentable, mais d'une manière compatissante. Nous ne voulons pas nous retrouver avec la même situation que le programme de vaccination contre la grippe où le ministère n'a pu fournir le nombre de vaccins demandé.

Nous devons développer une approche multidimensionnelle si nous voulons un système qui prévient la maladie. Le ministère de la Santé et des Services sociaux doit mettre sur pied des programmes coordonnés avec les autres ministères. Comme exemple, si nous voulons encourager les soins à domicile en gardant les personnes âgées à leur domicile, nous devons nous assurer qu'elles aient une façon fiable de se rendre à leurs rendez-vous chez le médecin; sinon, elles demeureront à l'hôpital plus longtemps que nécessaire. Pour régler ce problème, le ministère doit coordonner cela avec le ministère des Transports. Le ministère du Revenu pourrait concevoir une déduction d'impôt pour ceux qui prennent soin de leur famille. Le ministère de la Sécurité du revenu doit s'impliquer pour assurer que les patients psychiatriques reçoivent de l'aide pour faire face au système bureaucratique complexe. Si les patients psychiatriques ne peuvent s'occuper de la bureaucratie, ils se retrouveront à l'hôpital. Le ministère des Communautés culturelles devrait être également consulté sur la façon de s'assurer que les

immigrants soient bien informés sur les soins de santé et les services sociaux disponibles, ainsi que les besoins des différentes communautés ethniques. Le ministère responsable de l'habitation devrait offrir des subventions afin de permettre aux personnes âgées et aux personnes handicapées de faire des modifications à leur résidence pour qu'elles puissent être plus autonomes.

C'est le mandat du gouvernement de fournir des soirs de santé pour tous les Québécois de la façon la plus rentable, tout de môme sympathique. Le développement d'une approche multi-dimensionnelle au problème de prévention non seulement donne un meilleur service à l'individu, mais apporte un contrôle à la montée des prix.

En ce qui a trait au financement, j'aimerais souligner que l'article 192, qui touche les cadeaux et les héritages des institutions, pourrait limiter les contributions du secteur privé. Je crois que nous ne devrions pas limiter les contributions qui n'entraînent pas de dépenses. Si le secteur privé veut contribuer pour l'entretien de nos institutions, laissons-le faire.

Une autre menace au concept d'universalité n'est pas mentionnée dans ce projet de loi. Si le ministre est sérieux quand il dit que le citoyen est le centre de cette réforme, il doit s'occuper de ta transférabilité de la carte d'assurance-maladie. Parce que le gouvernement a rejeté l'accord sur la facturation réciproque que les autres provinces ont signé, les citoyens du Québec sont obligés de payer s'ils ont besoin de soins médicaux dans une autre province. Les Québécois qui sont à l'extérieur du Québec temporairement sont pénalisés parce qu'ils doivent prendre une assurance privée, payer des montants supplémentaires ou attendre anxieusement de voir s'ils ont les moyens d'avoir des soins médicaux s'ils sont malades. La signature de l'accord sur la facturation réciproque coûterait 1 $ additionnel à chaque Québécois, un montant très minime pour avoir la paix pendant des vacances ou en voyage d'affaires.

Pendant que j'en suis à la carte d'assurance-maladie, je suis en faveur de la carte à puce avec le dossier médical complet du patient. Nous devons, cependant, nous assurer que le droit à l'intimité de chaque individu soit respecté. Les médecins et les hôpitaux doivent avoir accès au dossier médical. Cela pourrait être une question de vie ou de mort. Je suis également pour que cette carte soit munie d'une photographie pour empêcher l'usage illégal des cartes par ceux qui n'ont pas droit aux services de santé.

Finalement, M. le Président, si nous désirons créer un système vraiment centré sur le citoyen, nous devons simplifier la bureaucratie des plaintes pour ne pas avoir des attentes interminables. Le ministre a proposé plusieurs mécanismes. Dans chaque établissement, un administrateur serait désigné pour prendre ces plaintes. L'action prise à la suite de ces plaintes serait présentée à l'assemblée générale de l'établissement. Les décisions peuvent être interjetées à la commission régionale qui, à son tour, doit faire rapport au ministre. Le ministre a également proposé d'augmenter le rôle du conseil professionnel pour le traitement des plaintes.

Même si ces mesures semblent imposantes, je ne crois pas qu'elles aideront le citoyen en cas d'urgence. Une personne avec un sérieux problème ne peut attendre que sa plainte soit acheminée à travers une bureaucratie complexe. Pour cette raison, je propose un ombudsman de la santé qui aurait le pouvoir d'agir rapidement. Cet ombudsman serait indépendant du sysème de santé, mais au courant de son fonctionnement. Cet ombudsman est essentiel si nous voulons fournir la sécurité et la confiance que les citoyens du Québec ont le droit d'attendre de leur système de santé et de services sociaux.

Dans les semaines à venir, j'examinerai avec plus de soin ce projet de loi. J'aimerais que l'on se souvienne de la façon dont nous affecterons la vie des citoyens par les décisions que nous prendrons à cette commission. Laissons de côté les prises de bec reliées aux luttes du pouvoir et à la rivalité entre les groupes et pensons aux besoins de tous les Québécois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Maintenant, est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui aimeraient intervenir? M. le député de Nelligan, je vous reconnais.

M. Williams: Merci, M. le Président

Le Président (M. Joly): Vous avez une vingtaine de minutes.

M. Williams: Je vais respecter les règles et essayer de finir proche de 18 heures, parce que nous avons autre chose à 18 heures aussi.

Le Président (M. Joly): Nous avons jusqu'à 18 h 30.

M. Williams: 18 h 30?

Le Président (M. Joly): Oui.

Une voix: Mais ce n'est pas une raison pour t'étendre.

Le Président (M. Joly): Je vous dis ça pour vous encourager.

M. Russell Williams

M. Williams: Bon. Excellent! Merci beaucoup de me donner la chance de faire quelques petits commentaires au lancement de l'étude article par

article de la loi 120. Je pense que ce type de loi touche la vie quotidienne de tous les Québécois et Québécoises et on parie maintenant de valeurs fondamentales. C'est pourquoi je suis très encouragé par la bonne volonté que j'ai entendue, du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue et aussi du député de Notre-Dame-de-Grâce, sur la façon dont nous allons approcher cette question. Nous sommes tous ici pour améliorer notre système de santé et services sociaux. Je pense que nous avons un des meilleurs systèmes de santé et de services sociaux au Canada, et mondialement, mais nous pourrons continuer de l'améliorer. (18 heures)

Nous pourrons aussi, avec le ministre, discuter de la question des amendements et nous en avons plusieurs. Nous allons discuter de ça pendant les semaines qui vont suivre et j'espère que nous pourrons garder cet esprit d'ouverture et si, c'est une bonne logique de continuer à améliorer le projet de loi 120, nous pourrons faire ça.

Ce soir, juste suite aux commentaires que j'ai entendus de l'autre côté du pupitre ici, il y a plusieurs sujets que je voudrais toucher, mais je pense que je vais juste en garder un pour ce soir parce que nous allons avoir plusieurs autres semaines pour en discuter. C'est la question de l'accessibilité au système de santé et de services sociaux pour les minorités, incluant la communauté d'expression anglaise et aussi les communautés culturelles, parce que je pense que notre gouvernement québécois est le chef de file dans ce dossier en comparaison avec tous les autres gouvernements provinciaux. Si on fait la comparaison, je pense que nous avons vraiment commencé les bonnes démarches dans une direction très très positive.

Je voudrais juste vous placer dans le contexte quand on parle de la question des droits aux services de santé et services sociaux pour la communauté d'expression anglaise. Vous vous souvenez de la loi 142 que notre gouvernement libéral a passée au premier mandat. Ça a été un long débat avec l'Opposition dans ce temps-là, et je parie de l'Opposition du Parti québécois et non pas de l'autre parti de l'Opposition. Il y a certainement une différence de vision complètement, pas sur la question des services, je pense, mais sur la question des institutions. Nous avons passé une loi basée sur deux grands principes: l'un, c'est de protéger les établissements et l'autre, c'est de protéger la question de l'accès aux services en anglais pour la communauté d'expression anglaise. Ça a été passé et, maintenant, c'est en vigueur.

Le projet de loi 120, maintenant, prend la même philosophie que j'ai vue dans la loi 142: mettre le client, le citoyen, comme cible de toutes les planifications. Pour le sous-groupe dont on parie maintenant, la communauté d'expression anglaise, ça va prendre cette philoso- phie, avoir le citoyen comme cible de toutes les décisions que nous voulons prendre. C'est pourquoi la loi 120 protège les deux grands principes que nous avons protégés avec la loi 142. Je voudrais les répéter. Ça va être une garantie des services en anglais partout dans la province de Québec, pas juste où les normes sont suffisantes, et c'est aussi une protection pour les établissements de la communauté d'expression anglaise qui sont publics, mais qui ont des liens historiques avec la communauté d'expression anglaise. C'était dans la loi 142 et ça va être dans la loi 120. Mais le ministre a, aujourd'hui, soulevé quelques points comme bonification de ces deux principes.

Et maintenant, je parie de quatre grands thèmes. Le premier, c'est la question des services. Nous voulons, avec chaque niveau de planification, garantir l'accessibilité aux services en anglais. Deuxièmement, nous voulons éliminer tous les doutes, à savoir que nous voulons protéger les établissements. Avec ça, le ministre a parié de la question de l'unification des conseils d'administration. On parie de la possibilité de faire l'unification sur une base linguistique et pas nécessairement territoriale. Avec ça, c'est plus loin que ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce a mentionné. Nous avons, encore une fois, répété notre protection des établissements qui ont un statut en vertu de l'article 113f de la Charte de la langue française. Ça a été répété et nous pourrons continuer cette protection, toujours dans les paramètres de la réforme qui respecte le client comme cible.

L'autre question qui est très importante pour tous les Québécois, comme le ministre l'a mentionné, sur le concept en général, nous sommes tous des payeurs de taxes et notre système de santé et de services sociaux est disponible pour tous les Québécois. C'est pourquoi nous avons besoin de trouver les moyens d'assurer pour la communauté d'expression anglaise une représentation au niveau décisionnel incluant les équipes, les professionnels, incluant aussi le niveau bénévole, comme les conseils d'administration des établissements, et aussi les régies régionales qui vont avoir une grande responsabilité de planification dans les affaires sociales. Et, quatrièmement, nous vouions donner les paramètres clairs à toutes les personnes dans le réseau pour que, quand on fait la planification, quand on divise l'argent et les ressources, on tienne compte des caractéristiques linguistiques et des autres caractéristiques aussi, caractéristiques linguistiques et ethnoculturelles de chaque région. Avec ça, nous avons tricoté ces philosophies dans la loi et avec ça, les garanties sont très très fortes; c'est basé sur le principe de fond que les citoyens sont la cible de toutes les démarches.

Sur la question de l'accessibilité, maintenant, je pense que nous avons complètement passé l'ancien débat... Est-ce que c'est un débat

politique, ce débat linguistique dans les affaires sociales? La question de la langue, ce n'est pas un débat politique dans cette question, c'est un débat de services; c'est clair, c'est noir sur blanc dans cette loi. Je voudrais aussi aller encore plus loin sur cette question de l'accessibilité des services parce que, avec ces quatre thèmes, je pense que nous avons vraiment donné les outils à la communauté d'expression anglaise pour avoir une bonne protection de ses services, une bonne protection de ses établissements et, plus que ça, être utile, être participant dans le réseau. Parce que nous ne voulons pas créer de ghetto pour la communauté d'expression anglaise, nous ne voulons pas créer un réseau parallèle; nous voulons un bon système qui donne l'assurance aux services, mais dans les paramètres de notre réseau. Nous voulons faire la même philosophie pour les communautés culturelles parce que, de plus en plus, les communautés culturelles veulent prendre une place plus importante dans la société québécoise et, dans la même philosophie, nous voulons donner un programme d'accès aux services pour les communautés culturelles.

Vous avez vu un changement de jargon du ministre quand il a parlé. Nous avons parlé de tenir compte des caractéristiques ethnoculturelles et vraiment, je pense, encore une fois, on parie de clarification. Parce que nous voulons être très précis que nous voulons avoir, dans le système, tous les moyens nécessaires de rendre notre système plus accessible pour toutes les minorités.

Une voix:...

M. Williams: Et c'est la première fois, dans un texte législatif, que cette distinction est faite. Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Je n'ai pas oublié ça. Et ce sont vraiment deux philosophtes. Quand tu vois tous les textes et que tu mets toutes les cartes sur la table, il y a tous les moyens de garantir les services pour les minorités et aussi de rendre le système plus accessible chaque année. Parce que la vision, la figure québécoise change quotidiennement; notre vision comme société change. Nous avons donné les outils pour avoir une bonne participation dans le réseau. Avec ça, quand on parle d'avoir des plans d'accessibilité, on parle pour les communautés culturelles aussi et, quand on parle de tenir compte des caractéristiques linguistiques, on parle de tenir compte des caractéristiques ethnoculturelles aussi. Quand on parle de tenir compte des caractéristiques linguistiques pour les allocations de ressources, on parle de tenir compte des caractéristiques ethnoculturelles. Avec ça, c'est très très clair et j'ai voulu souligner cette affaire.

L'autre chose que je voudrais juste men- tionner - une des premières fois, je pense, que vous avez vu ça dans les lois québécoises - c'est clair que nous allons avoir des établissements publics qui ont un mandat régional pour la communauté d'expression anglaise. On parle des établissements résidentiels, mais on parle - et le ministre a souligné ce point dans ses remarques - de CPEJ qui va avoir un mandat régional pour la communauté d'expression anglaise. Les établissements, avant, ont toujours joué un rôle: Est-ce qu'ils sont sous-régionaux ou est-ce qu'ils sont anglophones? Est-ce qu'ils ont le mandat d'avoir des contrats d'autres régions? Dans la loi, je pense que vous trouverez toutes les réponses. On donne à la communauté les moyens de répondre à ses besoins sur les quatre thèmes: institutions, services, représentation et planification des services. Nous aurons, au cours des prochaines semaines, la chance de discuter de ça.

J'ai juste voulu mentionner que je suis fier d'être associé à cette loi et aussi à la réforme qui touche en particulier les questions pour toutes les minorités québécoises. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député de Nelligan. Est-ce que d'autres parlementaires aimeraient intervenir pour faire des remarques préliminaires? Madame, je vous reconnais, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que tous les parlementaires autour de cette table sont bien convaincus que c'est l'étape déterminante, parce que c'est l'étape qui nous permet de passer des principes théoriques du livre blanc à l'application, et on sait à quel point, souvent, il y a une différence entre les beaux principes et l'application comme telle. Ce qui importe pour les citoyens et les citoyennes du Québec, c'est l'application. Vous savez, cette réforme a suscité énormément d'attentes Lorsque les attentes sont immenses, la déception peut être encore plus grande, lorsqu'on arrive à étudier un document. Les attentes sont d'autant plus grandes qu'elles touchent un secteur vital, c'est-à-dire la santé des Québécois et des Québécoises. Il n'y a rien de plus important que ce sujet-là.

J'avoue que j'ai apprécié l'intervention du député de Notre-Dame-de-Grâce qui a souligné l'importance de la cohérence entre les différents ministères. Sur tous les projets de loi, nous devrions nous y attarder davantage.

Lorsque le ministre a fait sa tournée dans le réseau, un peu partout à travers les régions, l'étude du projet de loi 120 a permis une réflexion, mais une réflexion très sérieuse de tous les intervenants de tous les milieux. J'ai eu l'occasion de participer à quelques journées de travail, des journées de travail extrêmement

importantes où les intervenants et les intervenantes souhaitaient comprendre, analyser le projet de loi 120 et vraiment établir les liens concrets qu'ils auront à vivre dans ce réseau. il y avait, bien sûr, à la fin de cette analyse, des inquiétudes. la question qui revenait le plus souvent, c'était de savoir si nous aurions les moyens de nous payer cette réforme, si le ministre réussirait à convaincre son gouvernement de l'importance de mettre l'argent nécessaire pour arriver à instaurer la réforme.

L'inquiétude dans notre milieu se situait aussi au niveau des CLSC puisque, dans certaines régions, surtout la couronne de Montréal, les établissements sont peu nombreux. Nous devons donc nous limiter parfois aux services du CLSC. Ce que nous avons remarqué au cours des derniers mois, c'est que le citoyen, qui est important dans cette réforme, ce qui compte pour lui, c'est le service direct. Ce qu'il a retenu de la réforme, c'est deux éléments. On a fait une petite vérification, une opération consultation chez les citoyens un petit peu partout dans la région, et ils ont retenu deux éléments de la réforme: le ticket orienteur et ils ont retenu que la porte d'entrée, c'était le CLSC. Mais ils ont compris que la porte d'entrée, c'était le CLSC immédiatement. Ce qui fait que, dans nos régions, nous nous sommes retrouvés avec un surplus de demandes au niveau des CLSC et les CLSC n'étaient pas prêts à recevoir ces demandes des citoyens. L'inquiétude majeure des travailleurs et des travailleuses dans les CLSC, c'est de ternir l'image des CLSC avant même que la réforme soit mise en application. Le danger est là. Si on souhaite que la porte d'entrée soit vraiment le CLSC, il faut que les CLSC aient rapidement les moyens de répondre à cette demande, parce qu'on va complètement passer à côté de l'objectif premier. Parce que si les citoyens se rendent dans les CLSC et s'aperçoivent qu'ils n'ont pas les services qu'ils veulent, ils ne voudront plus repasser par cette porte d'entrée là, et ce qu'on souhaite peut, finalement, conduire complètement à la mort des CLSC plutôt qu'à cette vigueur de nos CLSC.

Le bien du citoyen, je pense que tout le monde le recherche et on le souhaite. Le citoyen est habituellement considéré surtout comme un consommateur, un citoyen-consommateur, un citoyen-payeur. Il n'a pas souvent l'impression d'être le citoyen-décideur, sauf peut-être une fois par trois ans, quatre ans, et, dans cette réforme, le citoyen a encore la conscience de ne pas être vraiment décideur, de ne pas prendre partie dans cette réforme. Il se fie surtout aux instances, au milieu, et aux organismes communautaires. (18 h 15)

Les organismes communautaires sont extrêmement déçus du projet de loi 120. Ils ne retrouvent pas une reconnaissance réelle de leur rôle et on sait à quel point ils sont importants partout en région, surtout dans les régions où il n'y a pas de services actuellement. Ces organismes communautaires, depuis quelques années, ont permis de faire de la prévention et de répondre aux besoins, alors que l'État lui-même ne répondait plus à ces besoins-là. Ce sont les organismes communautaires qui ont décidé de répondre aux besoins essentiels des citoyens, de s'organiser, d'offrir des services à peu de coûts, alors que l'État, lui, n'agissait, finalement, que comme État-pompier pour répondre à ce qu'il y avait de plus important. Donc, il faudrait s'assurer que, parmi les amendements que le ministre va nous déposer, on va tenir compte du rôle des organismes communautaires et s'assurer aussi qu'on va travailler beaucoup au niveau de la prévention. Parce que c'est évident que la prévention, à long terme, nous allons y regagner du côté économique.

Vous comprendrez qu'à titre de porte-parole en matière de protection du consommateur, j'ai attaché une attention particulière au service des plaintes et j'ai vérifié au niveau des milieux. Si on regarde les différents mémoires qui ont été déposés, il y a des inquiétudes de ce côté-là, concernant le service des plaintes. C'est vrai que, lorsqu'on parle de plaintes du côté de la santé, il faut que ce soit quelque chose de rapide et efficace. Il ne faut pas qu'on se perde dans la bureaucratie, il ne faut pas, non plus, que les citoyens soient obligés de faire une plainte écrite, parce qu'il ne faut jamais oublier qu'on a quand même 25 % de la population qui est analphabète au Québec. Malgré que nous avons célébré l'Année internationale de l'alphabétisation et qu'il y a eu certains efforts de faits, il y a beaucoup de travail à faire de ce côté-là. Et cette population qui, automatiquement, se retrouve souvent... Les personnes qui ont besoin de services de santé, parce qu'il y a un lien entre la pauvreté, les analphabètes et la santé, effectivement, on s'aperçoit dans les statistiques que ces gens-là recourent plus souvent aux services de santé. Donc, si le processus des plaintes est compliqué, on les élimine automatiquement du système.

Le fait que le ministre nous parle de déposer quelque 309 amendements sur 494 articles nous démontre, bien sûr, une grande ouverture du ministre, mais c'est également la preuve que le projet de loi se devait d'être retravaillé et qu'on devait y apporter des corrections. C'est évident que, du côté de l'Opposition, nous allons nous attacher, nous aussi, à regarder attentivement chaque article pour voir s'il n'y aurait pas lieu d'apporter d'autres améliorations et de s'assurer, nous aussi, que le bien du citoyen est respecté. Parce que cette notion de bien du citoyen, elle peut avoir deux notions: lorsqu'on est le gouvernement en place, il y a toujours le côté financier qui compte, et le bien du citoyen peut parfois différer tenant compte des moyens financiers. Donc, nous nous assurerons, bien sûr,

d'étudier les articles très attentivement et je pense que le travail devrait se faire dans la plus grande collaboration, parce que l'important, c'est vraiment le citoyen. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Alors, c'étaient les remarques préliminaires. M. le ministre, est-ce que, avec le consentement des...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, juste une petite remarque que je sens à tout le moins l'obligation de faire ici, quitte à ce que, si mon collègue souhaite réagir, il réagisse, compte tenu du fait aussi qu'à 18 h 30...

Le Président (M. Joly): Nous suspendrons.

M. Côté (Charlesbourg): ...on suspendrait les travaux pour reprendre à 20 heures. Je ne veux pas reprendre tout ce que j'ai entendu parce qu'on n'en sortirait pas et on s'est dit que ce n'est pas ça qu'on ferait. Il y a peut-être un seul élément que je n'ai pas dit dans mon intervention et que je veux dire à ce moment-ci, et ce n'est pas stratégique, c'est tout simplement parce que je n'ai pas pensé de l'inclure dedans, mais ça m'apparaît important de le dire à ce moment-ci.

Je suis l'un des rares ici qui ait vécu les deux côtés de la Chambre, qui ait vécu l'Opposition et qui ait vécu le pouvoir. J'ai vécu le pouvoir comme député de 1973 à 1976; j'ai vécu l'Opposition comme recherchiste. J'ai recommencé au sous-sol du parlement après ma brillante victoire de 1976. J'ai fait tous les étages, j'ai fait de la recherche, j'ai été assis en arrière pour conseiller des parlementaires. Je suis revenu en 1983 dans l'Opposition et je suis au pouvoir depuis 1985. Donc, je connais très bien les rôles des uns et des autres, et j'ai même joué ce rôle-là, j'ai été souffleur dans ce rôle-là aussi. Une chose qu'il m'apparaît extrêmement important de dire à ce moment-ci, et chacun dans nos rôles d'Opposition et de pouvoir, c'est de ne pas mêler, non plus, en cours de route le pouvoir et l'Opposition. Le pouvoir, c'est celui qui a été élu pour gouverner, pour décider et pour gérer et ça, c'est mon rôle à moi à ce moment-ci que je vais exercer au meilleur de ma connaissance, bien sûr, et, évidemment, à ce que j'ai compris, l'Opposition a un rôle, pas d'opposition systématique, de toute façon je pense qu'on est assez grands pour tous savoir ça. Une chose est certaine, c'est qu'à partir du moment où il y a des propositions d'amendements qui vont engager le fond et le gouvernement, je vais me camper dans mon rôle de pouvoir pour dire: Oui, c'est acceptable, ou: Non, ça ne l'est pas. Et, évidemment, à partir de ça - ça me paraît extrêmement important de le dire à ce moment-ci pour ne pas que... - j'aurai mon biais du pouvoir, avec tout ce que ça comporte, parce que c'est lui qui va fouiller dans les poches des citoyens pour être capable de financer ce qu'on veut faire. Donc, tenter d'avoir un équilibre à ce niveau-là qui me paraît extrêmement important. En terminant sur Louis-H.

Une voix:...

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, en terminant sur Louis-H., parce que, évidemment, des exemples comme ça, on pourrait en donner au fur et à mesure de nos discussions. Louis-Hippolyte-LaFontaine est un exemple idéal de discussions, si on veut le faire, des droits des bénéficiaires, du citoyen d'abord, par rapport à des producteurs de services. Et l'histoire même de Louis-Hippolyte-LaFontaine sous votre gouvernement, comme sous le nôtre, est un dossier qui n'a jamais été réglé malgré la volonté de Camille Laurin, une génération avant vous dans le PQ, ça, y compris politique, qui a tenté de régler le problème, mais qui ne l'a pas réglé. Alors, c'est pour ça que si on veut illustrer ça d'exemples, y compris Louis-H.-LaFontaine, avec toute la structure d'organisation, le CMDP, le pouvoir du chef de département psychiatrique, à partir du bénéficiaire, à 40 ou 60 cordés dans des locaux en arrière, alors qu'on investit des sommes fabuleuses sur le plan administratif pour les bureaux administratifs - ça n'a pas été sur la place publique... Mais si on veut en discuter, on va en discuter "ail the way" et on va s'apercevoir que, par le biais du bénéficiaire, il y a peut-être bien des choses qu'on peut apprendre en cours de route qui peuvent être très instructives pour l'ensemble de la collectivité. Le juge s'est prononcé, on verra ce que nous ferons comme gouvernement parce que, sur le plan légal, il y a des étapes dont on peut se servir et, très très prochainement, nous ferons connaître ce que nous envisageons faire, mais je ne serai pas indifférent à ce qui s'est passé à Louis-H., soyez-en sûrs.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le minis tre. M. le député, aimeriez-vous intervenir? Je vous reconnais le droit parce que c'est de bon aloi. On s'est entendu sur la formule, sur la façon. Alors, on ne sera pas encadré, là.

M. Trudel: II eut été surprenant que le ministre ne réagisse pas à cette partie-là. C'est parfaitement son droit, je pense que c'est dans l'esprit, et je lui ferai remarquer d'entrée de jeu que, dans les deux premières phrases de mon discours d'ouverture, je dis que nous ne ferons pas systématiquement d'opposition, ni de "filibus-ter". Ce qui ne veut pas dire que nous n'allons pas insister de notre côté et vous, si vous dites que vous avez franchi tous les échelons, et je vous le reconnais, vous comprenez également le pourquoi et ce n'est pas uniquement en termes parlementaires que nous devons le faire, parce

qu'il y a des gens intéressés là-dessus. je n'ose pas, non plus, repartir la bataille sur louis-h. -lafontaine en vous citant la page 80, la page 32 et la page 35 de la médecine ligotée des médecins de louis-hippolyte-lafontaine. nous repartirions un débat et je ne pense pas que ce soit ici...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, surtout que ce que j'ai compris, c'est que la médecine ligotée a été battue la semaine dernière.

M. Trudel: M. le ministre, il nous reste cinq minutes avant l'ajournement. J'aurais également...

Le Président (M. Joly): Avant la suspension.

M. Trudel: Non. J'aurais également, si le ministre le permet, je pense qu'il accepterait... Il y a peut-être quelques informations supplémentaires, non seulement pour l'Opposition, que vous devriez donner...

M. Côté (Charlesbourg): C'est oui. M. Trudel: C'est oui.

M. Côté (Charlesbourg): C'est oui, comme j'ai toujours fait dans toutes les commissions.

M. Trudel: Quel est votre échéancier, M. le ministre?

M. Côté (Charlesbourg): L'échéancier? M. Trudel: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Moi, je ne suis pas pressé. Je ne suis pas pressé. L'échéancier, c'est qu'on va commencer à étudier article par article et on va prendre le temps qu'il faut pour répondre aux questions que vous avez, et si ça finit à la fin mai, ça finira à la fin mai; si ça finit à la fin juin, ça finira à la fin juin.

M. Trudel: Est-ce que vous pourriez donner de l'éclairage, parce qu'il y a eu beaucoup d'informations et, franchement, il n'y a pas eu moyen de vérifier - je pourrais citer beaucoup de sources - d'un autre projet de loi d'application de cette réforme qui apparaîtrait? Je pense que c'est assez essentiel, la question, parce qu'il y a toute une série soit d'objections, d'éclairage, de questions supplémentaires que nous aurons à poser, suivant l'intention du ministre, la façon législative de faire entrer sa réforme. Mais là, c'est important au niveau de l'éclairage qu'on doit posséder et, également, pour les groupes qui discutent de ces questions-là au niveau du public.

M. Côté (Charlesbourg): L'intention législative, quand j'ai dit... Je vous le dis tout de suite, je trouverais abusif qu'à la fin juin, donc à l'ajournement de la session, on n'ait pas adopté le projet de loi. Donc, j'ai peut-être été un peu ambitieux, je l'avoue candidement; ce n'est pas nécessairement un défaut que de vouloir procéder et régler des choses. Trop souvent, l'appareil gouvernemental est accusé d'être trop lent. Je souhaitais débuter l'étude article par article à la fin janvier, mais je pense qu'on se serait littéralement cassé la gueule. Ça a été beaucoup plus sage de procéder de la manière dont on l'a fait. Et le plus bel exemple du respect des intervenants, c'est qu'on a un nombre de papillons assez important que nous aurions eu pour une partie de toute manière et, je l'ai dit, inspirés par des mémoires sur le fait de nous alerter sur tel danger ou tel sens, telle interprétation qu'on pourrait tirer de tel article. Donc, par conséquent, l'application de la réforme débutera dès que le projet de loi sera adopté, pour moi, fin juin. Si c'est avant, tant mieux. Si c'est plus tard, on devra se reparler avant l'ajournement, selon les règles parlementaires pratiquées au règlement, sans que ce soit une menace, ce n'est pas ça qui est mon objectif.

M. Trudel: C'est le coup classique. M. Côté (Charlesbourg): Comment? M. Trudel: C'est le coup classique, là.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. Bien, le coup classique...

M. Trudel: Cette fois.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, mais le coup classique, à partir du mois de... Quand on commence au mois de mars et qu'on se retrouve à la fin juin... Bon, évidemment, on peut toujours dire qu'un "filibuster", on n'en fait pas et on n'en fera pas, mais évidemment, que de le dire, il faut voir dans la pratique ce que ça donne. Vous l'avez dit, je prends votre parole; même si vous êtes, à l'occasion, un peu démagogue, vous êtes quand même un gentleman en dehors.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): À partir de ce moment-là, je prends votre parole. Alors, une chose est certaine, c'est qu'il y a donc, par conséquent, à partir du mois de mai, tout un enclenchement d'une série de nominations ou d'élections dans les conseils d'administration, qui devaient s'enclencher, et je pense qu'on l'aurait fait de manière pas conforme à l'esprit de la réforme et à ce qu'on s'apprête à adopter. Par conséquent, oui, effectivement, il y a un projet de loi qui va être déposé très prochainement puisque, demain, le Conseil des ministres sera saisi de la teneur du projet de loi, et j'en ai d'ailleurs informé le leader de l'Opposition il y a

déjà deux semaines de cela, qui viserait à faire en sorte qu'on annule ce qui est prévu à la loi actuelle en termes d'élection des conseils d'administration pour prolonger le mandat de ceux qui sont là jusqu'à ce qu'en janvier, on puisse faire l'élection des nouveaux conseils d'administration. C'est l'élément qui est dans le décor au moment où on se parle et c'est le seul.

M. Trudel: Très bien.

Le Président (M. Joly): M. le député, rapidement, s'il vous plaît!

M. Trudel: Bien, enfin, je vais poser la question, M. le ministre, et vous déciderez si vous répondez ou pas en revenant à la séance. Et la politique de santé et de bien-être?

M. Côté (Charlesbourg): La politique de santé et de bien-être, je l'ai toujours dit, c'est une suite logique qui va avec le projet de loi 120. Et, à l'époque, quand j'avais dit: En avril, on rendra publique la politique de santé et de bien-être, j'ai toujours la même idée. Je dis: La mise en oeuvre, la politique de santé et de bien-être, la loi 120 et la réforme elle-même sont quatre pièces extrêmement importantes qui doivent aller de pair la journée où on commencera à mettre en application la réforme. Si on en arrive à l'adoption du projet de loi 120 au mois de mai ou au mois de juin, la politique de santé et de bien-être va cheminer de la même manière, de telle sorte que la politique de santé et de bien-être devienne un document extrêmement important de l'application de la réforme et un guide très important pour la réforme. Je vous dirais très simplement que lorsqu'on parle de politique de santé et de bien-être, comme vous l'avez dit dans votre intervention, que c'était une nécessité, une obligation pour savoir ce qu'est le projet de loi 120, je ne partage pas votre point de vue. Parce que si on décide demain matin, dans ia politique de santé et de bien-être, qu'on va réduire de 20 % les maladies cardiovasculaires, dites-moi: Est-ce que la régionalisation, les conseils d'administration des CLSC ou des CPEJ vont être influencés par la politique de santé et de bien-être? Je ne pense pas. Donc, en le prenant de cette manière-là, c'est clair que c'est une pièce très très importante, une pièce très importante, mais qui est faite par des fonctionnaires que j'ai chez nous et 'ris ne sont pas multiples malgré le fait que vous ayez, dans votre discours, évoqué la possibilité d'en transférer quelques-uns au niveau régional. Ils ne sont pas très nombreux et ils ont fait un travail colossal pour la réforme, un travail tout aussi colossal sur le plan du contentieux au niveau de la loi 120 et de l'analyse systématique des 145 mémoires. Le temps a été consacré à ça et on accuse donc un petit retard au niveau de la politique de santé et de bien-être, mais qui n'est pas majeur et on va se retrouver avant la fin juin et, je l'espère, le plus vite possible - si ça peut être en mai, ce sera en mai - avec la politique de santé et de bien-être qui sera publique.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Nous allons maintenant suspendre nos travaux et reprendre à 20 heures dans ce même salon, cette même salle.

(Suspension de la séance à 18 h 32)

(Reprise à 20 h 38)

Le Président (M. Joly): Nous allons reprendre nos travaux. Nous avions terminé, je crois, les remarques préliminaires. Nous en sommes rendus aux motions préliminaires, s'il y en a Est-ce qu'il y a des motions préliminaires? Donc, pas de motions préliminaires.

M. Trudel: M. le Président...

Le Président (M. Joly): Oui, M le député.

Motion proposant d'entendre la Corporation professionnelle des médecins du Québec

M. Trudel: Je l'avais, je pense, en esprit, annoncé un peu, avant que nous abordions l'article 1 du projet de loi qui est à l'examen devant nous aujourd'hui, le projet de loi 120. En vertu de l'article 244 de notre règlement, j'aimerais proposer, en vertu de cet article de nos règles de procédure, que la commission parlementaire des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, des consultations particulières quant à tous les article dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende la Corporation professionnelle des médecins du Québec. Alors, M. le Président, je ferai donc, en vertu de 244, cette proposition d'audiences particulières de la Corporation professionnelle des médecins du Québec.

Le Président (M. Joly): votre motion semble recevable, m. le député. m. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président...

Le Président (M. Joly): Excusez-moi, je pense que vous avez le droit de débattre votre motion, M. le député.

M. Trudel: C'est bien. À moins que le ministre ne l'accepte, on n'aura pas besoin.

M. Côté (Charlesbourg): Ne vous faites pas d'illusions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Alors, M. le Président, nous devons, bien sûr, prendre en compte les remarques préliminaires du ministre lui-même qui nous a indiqué qu'il avait reçu, depuis le dépôt du projet de loi à l'Assemblée nationale, 145 mémoires de personnes, de groupes, d'associations qui désiraient dire au ministre qu'est-ce qu'ils pensaient de ce projet de loi et, surtout, de l'écriture des différents articles de ce projet de loi sur lequel nous nous étions prononcés à l'Assemblée nationale, au niveau du principe, à la fin de décembre dernier. Le ministre avait, je l'ai mentionné tantôt, même pris soin, compte tenu de l'ampleur de la réforme à laquelle nous nous attaquions, d'écrire aux différents groupes, aux différentes associations une lettre spécifique mentionnant qu'il aimerait bien recevoir, dans un délai de 10 jours, des remarques des différentes associations, des suggestions, des modifications possibles, des propositions d'amendement au projet de loi.

Quand nous demandons, M. le Président, dans une motion préliminaire, ici, d'entendre la Corporation professionnelle des médecins, c'est que, rapidement, et le ministre lui-même, dans son discours terminant la deuxième lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale, avait déposé devant le président de l'Assemblée nationale les coupures de presse sur la réaction à sa réforme. Bon. La question de la répartition, en particulier, des effectifs médicaux a toujours été un sujet extrêmement brûlant au niveau de l'organisation des services à la population du Québec. Il y a différentes mesures qui sont apparues au cours des dernières années et le ministre nous arrive, dans l'esprit d'atteindre un objectif qui est souhaitable, en disant: Nous allons, finalement, adopter un mécanisme qui va faire en sorte que la main-d'oeuvre médicale, si je peux m'exprimer ainsi, va oeuvrer là où sont les populations sur l'ensemble du territoire, et la base du mécanisme qu'il propose, c'est le contrat d'agrément au niveau de la régie régionale et un certain nombre de mécanismes afférents.

Réaction immédiate, non seulement de la Corporation professionnelle des médecins, mais aussi, je pense que le ministre pourrait en convenir facilement, de l'ensemble des groupements professionnels de médecins au Québec et en y ajoutant la Fédération des médecins résidents et des étudiants dans les Facultés de médecine. On peut adopter, c'est bien sûr, deux attitudes carrées là-dessus, en disant: Oui, vous allez aller pratiquer et vous allez aller intervenir sur le territoire là où sont les populations et je me donne le pouvoir exclusif. À l'autre bout du continuum, eh bien, on a expérimenté au Québec différentes formules tournées surtout autour des mesures incitatives et on doit bien dire, je pense, honnêtement, que dans le cas de certaines catégories de professionnels de la médecine, parlons des omnipraticiens, eh bien, le résultat, sans avoir atteint 100 % de l'objectif poursuivi, a quand même permis une répartition de la main-d'oeuvre au niveau des omnipraticiens et, le moins que l'on puisse dire, c'est que cette situation-là est très différente de ce qu'on a vécu pendant un bon nombre d'années au Québec. Là, on dit: On va prendre une seule méthode, même avec les modifications que le ministre a annoncées dans ses remarques préliminaires, dans son discours d'ouverture. Ça va être soumis à une mécanique d'agrément au niveau des régies régionales.

Ce que la Corporation professionnelle des médecins nous répond, ce que des groupes professionnels nous répondent là-dessus, c'est: Nous, on aimerait bien que tout cela fasse l'objet d'un débat public. Vous savez, lorsqu'on a un immense système comme celui des services de santé et des services sociaux au Québec - mais prenons la partie santé - et qu'on y retrouve un nombre aussi considérable de spécialistes qui sont les chevilles ouvrières de ce système, nous, nous pensons, M. le ministre, que ce ne serait pas superflu de confronter nos points de vue sur la façon dont nous allons faire en sorte, au Québec, que les professionnels interviennent là où sont les populations et que nous soyons capables d'écouter - et le rôle des élus, à l'Assemblée nationale, c'est aussi celui-là - les gens sur le terrain, regroupés, par ailleurs, dans des corporations professionnelles ou d'autres types de regroupements professionnels et qu'on soit capable de les entendre et de dire: Voyez-vous, du point de vue de l'exercice de votre profession, la méthode que nous prévoyons utiliser, que le gouvernement veut utiliser, est-ce que vous pouvez nous dire si, professionnellement, c'est viable, c'est acceptable dans votre vie professionnelle ou si vous êtes capables de nous amener des arguments qui nous diraient: Voyez-vous, ce que vous voulez nous imposer là, ça aura tel effet pervers ou tel autre type d'effet pervers et, là-dessus, vous allez peut-être passer à côté du propre objectif que vous voulez atteindre.

Est-ce qu'après 20 ans, au minimum, de vie dans un réseau qui s'appelle le réseau de la santé et des services sociaux, après avoir apporté certaines modifications au niveau de la façon dont nous répartissons nos effectifs médicaux, au Québec, nous pourrions prendre une heure ou une heure et demie, dans une commission de l'Assemblée nationale du Québec, et dire: La méthode que nous avons prévue, c'est celle-là par rapport aux objectifs, et dites-nous publiquement - parce que ce n'est pas uniquement l'affaire d'une relation entre un groupement de l'Assemblée nationale et un groupement de professionnels, c'est pour des services à la population - ce que vous trouvez inacceptable là-dedans, compte tenu

des objectifs et des moyens qu'on veut mettre en oeuvre pour y arriver, compte tenu de ce que vous êtes, comme profession, compte tenu du service que vous rendez à la population et compte tenu de ce que vous êtes capables de faire aussi, comme professionnels responsables dans votre secteur d'activité. Ils sont capables de nous dire ça. Et qu'on ait une discussion ouverte là-dessus, c'est le principe général des auditions publiques où nous pouvons questionner.

Lorsque la Corporation professionnelle des médecins, en particulier, est venue nous rencontrer dans le cadre des consultations que nous avons tenues à l'hiver 1990, est-ce que la Corporation professionnelle des médecins pouvait nous dire, nous affirmer, nous poser un certain nombre de constats par rapport à la méthode que le ministre allait mettre de l'avant, eu égard au problème ou à la situation de la répartition des effectifs médicaux? La réponse est non, elle ne pouvait pas nous donner, nous dire, nous faire de commentaire, nous exposer, à partir de la pratique quotidienne des professionnels de la santé au Québec, ce que ça pourrait avoir comme effet, puisque ce n'était pas dans la proposition ou dans l'avant-projet de loi, dit l'avant-projet de loi Lavoie-Roux. Alors, on ne peut pas leur reprocher aujourd'hui de nous dire: Bien, écoutez, on est en désaccord avec un certain nombre de choses, et nous aurions peut-être des éléments à suggérer.

Par ailleurs, le ministre pourrait très bien répliquer, et dire: J'ai fourni d'amples occasions à la Corporation professionnelle des médecins et autres professionnels de ce secteur d'activité dans notre réseau de santé et de services sociaux, j'ai fourni beaucoup d'occasions où ces gens-là ont pu s'exprimer. Mais là, il y a une différence qu'il faut saisir. Ce n'est pas parce que le ministre invite des groupes professionnels concernés à lui donner leur version de son projet que ça évite et que ça doive tenir lieu d'un débat public qui doit absolument avoir lieu, qui doit prendre place lorsqu'on travaille sur des éléments aussi importants que les professionnels qui sont au service de la population. Et ça, ce n'est pas l'objet d'un débat privé, ce n'est pas l'objet d'un débat entre une personne responsable, oui, devant l'Assemblée nationale, et un groupe de personnes responsables devant leur corporation et devant le public également - parce qu'il faut se rappeler qu'elles sont regroupées en corporation et qu'elles sont là également et on est organisé pour être capable de leur dire si elles ne font pas leur travail - de voir à la protection du public quant aux actes qui sont réalisés par les professionnels qui sont regroupés au sein de cette corporation-là. Non, ce n'est pas un débat privé et le risque que l'on court toujours lorsqu'on procède à de telles consultations, c'est de dire: Bon, là-dessus, moi, j'ai un objectif, je veux y parvenir et là, inévitablement, on en arrive à certains compromis, ou à certains arrangements, entre guillemets, qui font en sorte qu'on va y arriver mais le public, les Québécois et les Québécoises, ils sont tenus en dehors du débat.

Est-ce que les gens qui oeuvrent dans ce secteur sont uniquement des professionnels de la médecine? Non, ce ne sont pas uniquement des professionnels de la médecine. Ce sont également des citoyens et des citoyennes du Québec qui oeuvrent dans leur secteur d'activité, qui oeuvrent auprès des gens qui, inévitablement, ont des problèmes avec leur santé et qui peuvent nous donner aussi leur vision des choses quant au fonctionnement, quant à l'organisation du système. Je ne pense pas qu'on puisse affirmer, dans quelque forum que ce soit, que nos médecins, au Québec, s'en sont toujours tenus uniquement, uniquement, comme on veut bien le leur reprocher dans certains milieux, à leurs intérêts professionnels stricts et à leurs conditions de travail. Je pense que c'est faux d'affirmer cela. On peut dire et on peut compter sur notre main-d'oeuvre médicale pour débattre le sens qu'on veut donner à notre système de santé et à nos services sociaux. on a commencé tout ce débat-là par une commission d'enquête, la commission rochon, en 1984. oui, nous l'avons continuellement étalé sur la place publique, ce débat-là, et nous pensons que nous devons le poursuivre au moment précis - et on ne se lancera pas uniquement dans une litanie de reproches - où un ministre responsable propose différentes mesures pour répondre aux différentes interrogations, aux différentes consultations, aux différentes rencontres qu'il y a eu depuis 1984. alors, au moment où on arrive au but, où on propose des mesures très précises pour atteindre les objectifs, nous, on pense, m. le président, que ce n'est pas abusif de dire: nous aimerions entendre, au minimum, la corporation professionnelle des médecins du québec pour qu'elle nous dise: nous autres, sur le terrain, avec l'expérience que nous avons auprès des québécois et des québécoises, nous pensons que nous devrions aller dans telle direction, nous pensons que nous devons aller dans telle autre direction en ce qui regarde la place des médecins dans notre système.

Et le sens qu'a pris le débat depuis un bon nombre de mois, ç'a été, et peu importe - je le fais comme parenthèse - si c'est la réalité des mots qui ont été dits ou de la perception qu'on en a eue dans le public, mais la perception générale, c'est: On va faire une réforme et on va les casser, les médecins. On va faire une réforme et on va les placer. Je ne pense pas qu'on puisse, dans un aussi gros système, avec ces piliers de base que constituent les médecins comme force agissant dans notre réseau, qu'on doive laisser planer cette perception des choses. Nous ferions fausse route, comme législateurs, si on en mettait - et moi, je pense qu'on a laissé

percer cette impression-là au cours des dernières semaines - un peu trop sur le dos des médecins, comme si c'étaient des groupes qui étaient fermés complètement au dialogue. Nous avons vu, et le ministre l'a vu également, dans les messages qu'il a lancés, ça a été de dire: Nous, on veut atteindre tel objectif, servir les citoyens et les citoyennes là où ils sont sur le territoire du Québec. Si vous pensez que vous avez une meilleure approche que celle que je propose, eh bien, venez me la porter, portez-la à mon bureau.

Nous, ce que nous disons, nous avons reçu également un bon nombre de ces professionnels dans nos bureaux, au niveau de l'Opposition, et ça a été la même réaction. Messieurs, mesdames, si vous pensez que vous pouvez nous suggérer, compte tenu de votre expérience, de votre expertise, de vos capacités, de votre expérience sur le terrain, des solutions qui nous font éviter le maximum d'effets pervers dans ce que nous voulons atteindre comme objectifs, suggérez-nous des systèmes. Eh bien, des professionnels de la médecine ou des gens qui se préparent à être des professionnels de la médecine sont venus également nous porter des éléments de solution, des éléments de solution, d'ailleurs, que le ministre a retenus en partie.

Mais il serait intéressant de réexaminer maintenant dans toute cette dynamique qu'est-ce que ça va signifier pour la force médicale du Québec, comment on va gérer les cas frontières, comment ça va jouer, cela, effectivement sur la main-d'oeuvre médicale, l'annonce dans la réforme - parce que je ne suis pas sûr que ce soit dans le projet de loi - de la régionalisation de l'enveloppe de la RAMQ. Quels effets ça va avoir sur la main-d'oeuvre médicale au Québec?

Tout simplement, ce que nous voulons, par la motion que nous présentons en vertu de l'article 244 de notre règlement, M. le Président, c'est de dire: Les professionnels de notre système ont le droit de parole, ont le droit au débat public, ont le droit d'exprimer ce qu'ils pensent de la proposition ministérielle et ça n'enlève absolument aucune prérogative, absolument aucun pouvoir, ça n'enlève aucune possibilité pour le ministre en termes de décision en vertu de la majorité ministérielle qu'ils détiennent à l'Assemblée nationale pour former le gouvernement, ça n'enlève absolument rien. C'est tout simplement une ouverture d'esprit pour dire: Est-ce que nous allons entreprendre et mettre sur pied une réforme complète de notre système de santé et des services sociaux, sachant que les acteurs, qu'une grande partie des acteurs principaux de ce système-là sont en désaccord, tel qu'ils nous l'expriment par leur corporation professionnelle? Eh bien, je pense que la question est assez lourde de conséquences.

Prendre trois jours au niveau d'auditions particulières, compte tenu de la période de temps où nous sommes rendus, on aura l'occasion, donc, d'entendre publiquement les enjeux ou l'avis de cette corporation professionnelle sur les enjeux de la réforme, en particulier, encore une fois, au niveau des différents écueils que peut représenter l'approche du ministre en matière de répartition des effectifs médicaux. Nous partageons, à cet égard, le même objectif que le ministre, nous l'avons dit à plusieurs occasions. Quelqu'un qui représente ici le comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue est particulièrement sensibilisé à cette question de la répartition des effectifs médicaux. Sauf que, quand je regarde, de prime abord, la méthode par laquelle on veut passer pour affecter nos professionnels... Vous savez, M. le ministre, je fais à beaucoup de groupes une comparaison, je dis que c'est a peu près comme piquer la crise du recteur dans une université, à peu près à tous les trois mois ou les quatre mois. Vous savez, quand vous êtes recteur d'un établissement universitaire et que vous avez des budgets à gérer, un bon matin, vous entrez à votre bureau et vous dites: Bon, là, ça va faire, ce matin. On va décider que, dans cet établissement, c'est le recteur qui va être boss et ça va être lui qui va décider. Et il va faire en sorte que tout le monde va passer par la même machine administrative et les mêmes normes. Et si je décide, dans une classe, qu'il va y avoir une norme de 45 étudiants par classe pour dispenser un cours, ça va être vrai pour tout le monde. Quand vous vous assoyez, et ça, pour peu qu'on ait vécu dans un système où les disciplines intellectuelles se côtoient régulièrement, on s'aperçoit, après une demi-heure de réflexion, que la première réaction à la base, de vouloir tout régimenter, de vouloir tout décider d'en haut, de vouloir tout imposer au nom d'une norme nationale, d'une norme qui s'applique mur à mur dans l'institution, ça ne marche pas.

Ça ne marche pas parce que les philosophes vont venir vous expliquer des raisons disciplinaires qui font en sorte que la seule et unique méthode d'intervention en enseignement, de pratique du développement de la connaissance, de la conservation des connaissances, ça ne peut pas se passer de la même façon que ça se passe en sciences appliquées, en sciences pures ou du côté de la formation des travailleurs sociaux. Et l'on comprend vite que la dynamique même d'un système qui fait appel à des spécialistes doit respecter aussi un certain nombre de valeurs, un certain nombre de dimensions qui appartiennent à la discipline propre et qu'on ne peut pas faire en sorte que les normes vont s'appliquer mur à mur à toutes les disciplines, à tous les professionnels, à toutes les catégories de professionnels d'un établissement de nature universitaire. Je pense qu'on peut faire le parallèle avec une institution, un établissement qui est chargé, ou un groupe de professionnels chargés de dispenser des services pour des citoyens dans une région comme le Québec.

Dans ce sens-là, ce que nous disons au

ministre, c'est: II serait intéressant de voir les représentants de la corporation responsable non seulement de la discipline professionnelle, mais de l'évolution de la profession au niveau du corps médical au Québec, venir nous dire: Voyez-vous, M. le ministre, nos spécialistes, nos spécialistes qui ont leurs difficultés, comme tout le monde, à s'entendre à l'interne - et on ne commencera pas à jouer profondément là-dessus, en disant: Voyez, il y a un groupe qui pense comme ci et il y a un groupe qui pense comme cela. C'est normal. Dans un groupe, au moins, il y a une discipline qui se déroule, il y a une façon d'être dans ce regroupement-là. Et qu'il y ait des divergences de vues, c'est éminemment souhaitable. Au niveau de la Corporation des médecins, on est capable de nous dire: Voyez-vous, nos spécialistes, à l'intérieur de notre corporation, ils pensent que la façon dont on répartira les effectifs médicaux au Québec, en vertu de la méthode que vous proposez, il y a des dangers. On est capable de vous dire, au niveau des omnipraticiens qui oeuvrent partout sur le territoire au Québec, qu'il y a tel ou tel danger. On peut vous dire aussi, au niveau des résidents, les étudiants résidents qui sont actuellement en processus de spécialisation ou en fin de processus de formation, il y a comme une espèce de contrat que nous voulons passer au niveau social. Et il serait d'autant plus important que nous les écoutions, ces gens-là, que c'est la relève au niveau de l'intervention dans les différentes corporations et, surtout, auprès des différentes catégories de la population au Québec. (21 heures)

Moi, je pense que c'est tout à fait normal qu'on prenne une période de temps limitée, d'autant plus que là, il ne faut pas jouer au chat et à la souris. On ne serait pas en train de demander ici à la Corporation professionnelle des médecins du Québec de nous dire: Voulez-vous vous garrocher cette nuit et aller nous préparer un mémoire, aller réfléchir sur les intentions du projet de loi? Non, ces mémoires, et en particulier de la Corporation et pour d'autres groupes de professionnels de la médecine au Québec, ils ont été rédigés. Ils ont été présentés, dans certains cas, à la présidence de la commission des affaires sociales, dans certains cas au ministre de la Santé et des Services sociaux, dans certains cas aux représentants de l'Opposition, dans d'autres cas à l'un ou l'autre ou à l'ensemble de ces représentants. Ce que nous disons, c'est: Pourquoi ne pas ouvrir le débat sur un projet de réforme essentiel et dans lequel projet de réforme nos médecins, notre main-d'oeuvre spécialisée au niveau du médical, est concernée directement? Si nous avons été capables de recevoir ici, au niveau du ministre et au niveau de l'Opposition, que la création d'une commission médicale au niveau des régies régionales, c'était un lieu qu'il fallait non seulement créer, mais reconnaître comme essentiel au niveau de l'articulation de la participation de nos professionnels à notre système de santé et des services sociaux...

Bien sûr, on pourrait ajouter toutes sortes de commentaires qu'on a entendus au cours des derniers mois, en disant: Écoutez, est-ce que ces gens-là, à la limite, sont véritablement capables de prendre les intérêts du citoyen plutôt que leur intérêt corporatif, que les intérêts de leur profession? Bien voilà, voilà un lieu, ici, en commission parlementaire de l'Assemblée nationale, un beau lieu pour débattre ces questions et s'exprimer franchement sur ces dimensions, parce qu'on n'a pas le droit dans notre société. Et quelle que soit la source de ces commentaires ou de ces perceptions que l'on véhicule dans le public, c'est extrêmement dangereux qu'on laisse planer un certain nombre de doutes, un certain nombre d'impressions sur le comportement de nos professionnels. Je pense qu'il n'y a personne qui peut nier que ces perceptions-là, elles ont été largement véhiculées au cours des dernières semaines. On n'a qu'à lire les papiers des différents éditorialistes du Québec pour nous dire que la perception ou le discours même du ministre a fait en sorte que c'a créé, à tout le moins, une impression au niveau des professionnels de la médecine au Québec.

Alors moi, je pense qu'au niveau des objectifs que nous poursuivons, au niveau de ce que ces gens-là pourraient nous apporter, au niveau de l'expérience qu'ils ont sur le terrain et également qu'on puisse leur permettre et qu'ils puissent nous permettre, comme responsables au niveau ministériel, en ce qui concerne le ministre, et au niveau de l'Opposition, qu'on puisse faire ressortir aussi d'autres effets que nous n'avons pas obtenus par d'autres méthodes de répartition des effectifs médicaux et qu'on puisse en discuter.

Ce que nous allons prendre comme décision, ça affecte le professionnel de la médecine sur le terrain puis ça affecte ultimement, évidemment, le citoyen au centre du système dont le ministre a décrit, il y a quelques heures, l'importance, en termes de signe central sur lequel nous allions placer cette réforme du système de santé et des services sociaux. Eh bien, si on veut véritablement prendre l'intérêt du citoyen, la part du citoyen d'abord, moi, je pense qu'on doit aussi prendre la part des professionnels qui, quotidiennement, dans nos institutions, dans nos établissements, prennent également la part de ce citoyen.

J'en veux encore pour expérience, tout à fait avant d'entrer en commission parlementaire, ce problème des effectifs médicaux, dans ma propre famille où je dois, demain matin, faire venir ma propre fille ici, à Québec. Et j'ai pu constater, en communiquant avec un orthopédiste de Saint-Sacrement, cet après-midi, pour un problème vécu dans une région comme Rouyn-

Noranda-Témiscamingue, que je pouvais, oui, ici, de ce professionnel, avoir un rendez-vous cette semaine, en termes de spécialisation, pour regarder, pour poser un diagnostic sur ce qu'il y aurait à faire pour la grande fille de 17 ans qui est à la maison. Ce que je constatais à travers cela, c'est que nos professionnels de la santé sont en général très disponibles. Il y a des problèmes de répartition, il y a des façons de faire les choses qui font en sorte qu'ils comprennent, à la base, que nous avons un profond respect pour le travail qu'ils font dans notre société, qu'ils ont une part importante à réaliser pour atteindre les objectifs que nous nous sommes donnés en société au Québec et comme ils sont des témoins continuels, comme ils sont des personnes aussi citoyens au centre d'un système, ces personnes, elles sont capables de nous dire: Bien, voyez-vous, comme législateurs, vous vous occupez de votre responsabilité, vous tentez de mettre sur pied le meilleur système qui fasse en sorte qu'on réponde aussi aux besoins des citoyens où qu'ils soient au Québec. Nous, on peut vous dire, comme professionnels, si vous voulez qu'on continue à évoluer, si vous voulez qu'on continue à donner des services de qualité, eh bien, nous pensons qu'il doit y avoir un certain nombre de paramètres à l'intérieur desquels ça doit s'opérer, cette répartition, et puis, peut-être, à la fin de la ligne, on n'en arrivera pas ultimement, au même moyen, en termes de répartition...

Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à conclure, M. le député, s'il vous plaît.

M. Trudel: ...peut-être qu'on n'en arrivera pas avec les mêmes moyens au niveau de la répartition de la main-d'oeuvre médicale, mais certainement qu'on nous déclarera: On est heureux que vous portiez ce débat-là sur la place publique, que vous nous laissiez la chance de nous exprimer et de vous faire part de nos craintes et, aussi, des suggestions positives que nous pourrions vous faire à titre de législateurs.

En conséquence, M. le Président, voilà pourquoi j'ai présenté cette motion qui nous amènerait à entendre ce regroupement québécois de professionnels, qui s'appelle la Corporation professionnelle des médecins, ce qui ferait en sorte que nous pourrions, à l'intérieur d'une limite de temps raisonnable, dans une pratique habituelle et reconnue, au niveau des gouvernements, entendre, dans une période de temps restreinte, encore une fois, ce groupe témoin au Québec.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre, 30 minutes ou moins.

M. Marc-Yvan Côté M. Côté (Charlesbourg): Ça va être moins,

M. le Président. Évidemment, je ne me ferai pas mon propre "filibuster".

M. le Président, il y a un certain nombre de choses que je vais relever à ce moment-ci. Je ne prends pas l'engagement de le faire à chaque motion que déposera le député, parce qu'on pourrait perdre du temps. Je me réserve quand même le droit de relever un certain nombre de choses qui pourraient, à l'occasion, écorcher mes oreilles ou ma logique à moi. Je commencerai par certains éléments qu'a souvelés le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, et ce n'est pas la première fois qu'il le fait, qui relèvent, a mon point de vue, d'arguments démagogiques. Il l'a dit dans l'introduction, il l'a répété tantôt, j'aurais dit: On va casser, on va placer les médecins. Je le mets au défi de me trouver l'endroit où j'ai dit ça, quand j'ai dit ça, parce que c'est des genres de propos que je n'ai jamais tenus. Et, évidemment, s'il veut faire une évaluation où c'a brassé le plus avec les médecins, je lui rappellerai qu'il fasse un retour en arrière, un certain soir de commission parlementaire où on entendait des mémoires, où les résidents sont venus en commission parlementaire et succédaient à la Fédération des médecins spécialistes. Il ira voir au texte. Et il ira voir dans le ton aussi, voir si le ministre a été celui qui a mené la charge ou si la charge n'est pas venue davantage de d'autres et, en particulier, d'un de ses collègues. Pour lui rafraîchir la mémoire... Et ce n'était pas une petite charge non plus, à ce moment-là. C'en était une bonne!

Donc, à partir de ce moment-là, je pense qu'il faut quand même faire attention. J'ai répété à plusieurs reprises, qu'il est faux de prétendre, ou que quelqu'un veuille prêter dans la bouche d'un autre qu'un médecin qui aura fait six ans, pour un omni, qui aura fait dix ans d'études, pour un spécialiste, qu'on puisse lui substituer n'importe qui, n'importe quand, n'importe comment pour remplir le rôle qu'il a à remplir. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas possible. Ça, ça a été dit à maintes reprises. Évidemment, ça occupe moins de place que l'accrochage que j'aurais pu avoir avec Augustin Roy, que l'accrochage qu'on aurait pu avoir avec quelqu'un d'autre et, de toute façon, qui fait l'affaire d'Augustin et qui fait l'affaire du ministre aussi, ou qui fait l'affaire de quelqu'un d'autre. Parce qu'on doit toujours se rappeler que les fédérations sont aussi, à ce moment-ci, des syndicats et qu'elles ont des intérêts à défendre et que la Corporation, elle aussi, a certains principes et certains intérêts à défendre. Et je pense que ce n'est pas mauvais que de dire ce genre de choses là. Ça ne s'attaque pas aux personnes. Je ne pense pas que ce soit mesquin non plus. C'est la nature des choses, comme moi, j'ai aussi des positions à défendre.

Donc, à partir de ça, je pense qu'il faudra peut-être être un petit peu prudent à ce niveau-là. Et, à moins que l'intention - et j'ose espérer

que ce n'est pas celle-là - ne soit qu'on veuille effectivement mettre de l'hutte sur le feu pour atteindre des buts Inavoués et inavouables, ça, c'est une autre chose.

Quant à votre situation personnelle - parce que j'ai trouvé que vous aviez accès à des orthopédistes qui vous répondaient assez vite - si c'est tout de suite dans la même semaine, c'est bien différent de bien d'autre monde qui attend sur la liste d'attente. Donc, tant mieux! Si le besoin est là, le besoin est là. C'est le jugement du médecin qui, à ce moment-là, s'applique. Ce n'est pas mol qui vais le contester, c'est à lui de le juger. Et c'est exactement ce que la réforme veut faire. Le jugement du médecin est le jugement du médecin et il n'y a personne qui tente, à ce moment-ci, dans la réforme, d'inféoder la profession médicale. Et ça, c'est très très très clair. Donc, à partir de ce moment-ci, y est clair, M. le Président, que des exercices d'auditions publiques, on en a fait. J'oublie Rochon, j'oublie Mme Lavoie-Roux, on en a entendu ou, à tout le moins, déposé 266, il y a un an. On en a entendu 175. M. le Président, on a reçu 145 mémoires, ce qui fait le modeste total, sur le môme sujet, de 411. Ça, c'est à part les rencontres que j'ai tenues moi-même, personnellement en personne, dans des séances de travail, pour aller chercher la quintessence de la nuance de telle ou telle proposition qui devait tenter de rejoindre... On a fait des choix. Les choix sont faits et on a tenté d'aller encore plus loin.

Si j'ai bien saisi, tantôt, les propos de M. Roy, U a dit: C'est des marches que vous avez montées dans la bonne direction. Il en reste encore, mais c'est des marches dans la bonne direction. Donc, il faut croire qu'on n'est pas aussi bouchés que ça, que, de temps en temps, on se lave pour être capables d'entendre ceux qui viennent nous voir et qui nous passent des messages. Quant à moi, 411, c'est assez. Si on n'est pas éclairé, à 411, on ne réussira jamais à faire passer l'électricité dans la lumière qui est brûlée. Alors, ça me paraît évident et on ne pourra pas faire d'une 2 watts une 100 watts. Ça, c'est impossible! À moins qu'il n'y ait des interventions chirurgicales tout à fait spéciales et très rapides, je ne pense pas qu'on puisse faire ça. (21 h 15)

Donc, à partir de ce moment-ci, quant à moi, je me suis suffisamment informé pour procéder à ce pourquoi nous sommes conviés. On n'est pas conviés à nouveau à s'introduire dans une commission parlementaire pour entendre des témoins, pour entendre des gens qui vont venir nous exprimer leur opinion. Après la deuxième lecture, donc le principe voté en Chambre, on est conviés à un exercice d'adoption article par article, et ça me paraît très clair.

D'autre part, je dois vous dire que je ne suis pas surpris de la proposition de mon col- lègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Je ne serais pas surpris non plus que Mme la députée de Terrebonne intervienne pour supporter en force son collègue dans le même sens. Je ne suis pas surpris. Au mois de décembre dernier, après application de la réforme, pendant qu'on discutait en Chambre du principe de deuxième lecture, j'ai reçu des téléphones au cabinet, de groupes qui disaient: Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Il y a quelqu'un à l'Opposition qui nous a appelés et a dit: Demandez une commission parlementaire, demandez à être entendus. Je ne suis pas surpris qu'aujourd'hui on veuille y arriver. Quand on sollicite, évidemment, il y a de l'intérêt. Je vous donnerai les noms si ça vous intéresse. Alors, j'aurai la simplicité de le faire à l'extérieur, mais je pourrai vous donner des noms si jamais ça vous intéresse, autrement que par le micro. Mais il y a une chose qui est claire, c'est qu'il y a eu une sollicitation. C'est votre rôle. Donc, je vous dis que je ne suis pas surpris, aujourd'hui, que... Vous reconnaissez en être l'auteur?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): Je ne suis pas surpris, à ce moment-ci, que ça puisse se faire. Évidemment, je ne dénonce pas la situation, je dis: Vous l'avez fait, vous l'avez fait. Il n'y a rien là, sauf que ça ne me surprend pas qu'aujourd'hui vous arriviez avec une motion et que vous preniez vos 30 minutes pour tenter de nous expliquer bien des affaires au niveau des effectifs médicaux. Écoutez, avec 500 articles et 300 amendements à part les vôtres, vous allez avoir de l'espace un peu pour exprimer votre opinion. On a l'impression qu'on va se demander, à la fin, si on ne radote pas. Donc, je ne suis pas surpris de ça. Et qu'on m'arrive avec une proposition, d'entrée de jeu, en disant... La Corporation professionnelle des médecins, ça ne me surprend pas non plus, parce que la Corporation professionnelle des médecins ne s'est pas contentée, à partir du mois de janvier, d'un mémoire, mais de deux. Un premier, propre, et un deuxième en commun; donc, deux mémoires. Ils n'ont pas manqué leur coup. Deux mémoires qui m'ont été présentés et dont vous avez certainement obtenu copie.

Donc, j'ai de la misère à comprendre où est-ce que veut en venir le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Il arrive avec une proposition, parce que j'ai entendu à quelques reprises, et il l'a échappé encore tantôt: trois jours. J'ai entendu ça dans son discours de présentation cet après-midi. Et là, il arrive avec une motion. Il dit: Pourrait-on entendre la Corporation professionnelle des médecins? Je ne comprends pas. On va les entendre pendant trois jours? Je suis sûr que M. Roy serait capable de nous entretenir pendant trois jours...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): ...des bonheurs et des malheurs, M. le Président, de la profession médicale et de ce qui va et qui ne va pas dans les services de santé et les services sociaux, de manière très éloquente, avec beaucoup de sagesse aussi sur le plan des propositions. Mais je ne comprends pas.

Et je terminerai en vous disant, M. le Président, que si le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue me dit à ce moment-ci: Oui, la Corporation professionnelle des médecins, c'est le seul organisme qu'on est prêt à faire entendre en commission, c'est réglé, on commence demain matin, on passera l'avant-midi avec eux autres s'il faut et après ça on entamera l'étude article par article. Donc, c'est entre ses mains que ça repose. S'il veut qu'on entende la Corporation professionnelle, on va l'entendre et on passera après ça aux articles, un par un.

Une voix: L'avant-midi.

M. Côté (Charlesbourg): Pas trois jours parce que... Pas trois jours.

Le Président (M. Joly): Un supplice, il faut que ça se termine.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, je vous ai exprimé mon point de vue. Dans la mesure où ça ne va pas et que ça ne va pas dans ce sens-là, M. le Président, je me contenterai, les prochaines fois, de vous dire: Faites parler ceux que vous avez à faire parler et, après ça, qu'on appelle le vote. Et les remarques de ce moment-ci seront les mêmes pour les autres, me réservant le soin de corriger certaines affirmations qui pourraient être faites au passage.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui voudraient se prévaloir de leur droit de parole? Mme la députée, vous avez 10 minutes.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense qu'il a été clairement dit, autant par le ministre que par mon collègue de l'Opposition, que nous étions à une étape déterminante, donc à la dernière étape où nous pouvions entendre des groupes. Et ça m'étonnerait beaucoup que le ministre ait compris que nous voulions entendre un seul groupe durant trois jours. Ça m'étonnerait vraiment qu'il ait compris ça. Ce qu'on dit, du côté de l'Opposition, c'est que c'est la dernière chance pour entendre des groupes. Ce qu'on dit aussi, c'est qu'il y a peu de groupes qui ont fait des demandes formelles, peu de groupes. Donc, ce qu'on dit: Pourquoi on n'entendrait pas les groupes qui ont fait des demandes formelles? Le ministre nous a dit que l'Opposition a sollicité des demandes d'audiences.

C'est fort possible, mais je peux confirmer au ministre que ce n'est pas l'Opposition qui a préparé les demandes formelles d'audiences. Donc, si les groupes ont jugé bon de les faire, ces demandes-là, peut-être avec de la sollicitation avant, mais ils ont jugé bon de les faire quand même, ces demandes-là, donc, ce serait peut-être intéressant de les entendre.

Il y a deux raisons qui peuvent jouer pour ne pas les entendre. Le ministre peut nous dire: On manque de temps. On est pressés par le temps et il faut l'adopter rapidement, faire l'étude rapidement. Pour un projet de cette envergure-là auquel il nous a annoncé qu'il y aurait 309 amendements en plus des 494 articles qu'on a déjà, je ne pense pas que nous soyons à deux jours ou trois jours près. Donc, ce n'est pas une question vraiment de temps.

L'autre argument du ministre, c'est de nous dire qu'il y a déjà eu des consultations, et à plusieurs reprises. Oui, il y a eu des consultations, sauf qu'il y a toujours eu des consultations sur des documents différents. Le projet de loi 120, tel qu'il a été déposé en décembre, on n'a pas eu d'audiences par la suite. H y a eu 145 mémoires qui ont été déposés et je me demande même si, du côté des députés du gouvernement, des députés ministériels, ils ont eu la chance, tous ces députés, de lire les 145 mémoires qui ont été déposés...

Une voix:...

Mme Caron: ...et s'ils ont pu voir les changements qu'on pouvait apporter.

Vous savez, lorsque, dans un projet de loi, on nous annonce qu'il y a 309 amendements sur un projet de 494 articles, ça peut changer, il peut y avoir des changements vraiment significatifs au niveau global de ce projet de loi là. C'est plus de 62 % du projet qui est touché.

Nous avons ici un rôle de législateur, bien sûr. Un gouvernement peut passer des lois, peut présenter des réformes, mais concrètement, sur le terrain, ce qu'on souhaite, d'abord et avant tout, des deux côtés de la Chambre, c'est évidemment la réussite de la réforme. Et la réussite de la réforme, elle va dépendre non seulement des législateurs, mais bien des gens qui vont la vivre, cette réforme-là. Et là, je fais appel à mon expérience antérieure de professeur. Au moment où on nous soumettait des changements pédagogiques, régulièrement, on nous proposait des réformes, des réformes sur lesquelles on était plus ou moins consultés, parfois. Mais dans l'application les résultats n'ont pas été très significatifs et nous nous retrouvons aujourd'hui avec un système d'éducation qui a de sérieuses faiblesses, tout comme notre système de santé. Et si on veut vraiment que la réforme soit une réussite, il faut que tous les agents concernés soient bien consultés, et c'est le dernier moment où on peut le faire.

Du côté de la santé, on a des problèmes du côté des effectifs, mais on a des problèmes du côté de la qualité, aussi. Et cette qualité-là, on ne l'atteindra pas si nos professionnels n'en sont pas convaincus.

La Corporation professionnelle des médecins du Québec a déposé deux mémoires et le ministre en a fait mention. Il y a donc plusieurs points de litige. Et, personnellement, il y aurait certains points sur lesquels j'aurais aimé interroger la Corporation professionnelle des médecins du Québec, particulièrement sur la notion de médecin traitant, qui nous permet d'assurer une continuité des soins. Je trouve que c'est un élément intéressant qui a été présenté par la Corporation professionnelle des médecins du Québec et sur lequel on aurait pu élaborer un peu et poser des questions pour arriver à un système de santé un petit peu plus humain. Parce que c'est parmi les plus grands reproches du citoyen-consommateur que nous avons actuellement au niveau de la santé, qui nous dit que, finalement, il n'y en a plus de médecin traitant, et que tout se passe à l'urgence, on ne voit jamais les mêmes professionnels, et on a difficilement un diagnostic sûr.

J'aurais aussi aimé les entendre, bien sûr, sur le système de traitement de plaintes puisque je l'ai abordé cet après-midi en commission. C'est un sujet extrêmement préoccupant parce que c'est le sujet qui nous permet de donner satisfaction aux citoyens-consommateurs. Et là-dessus, c'est évident qu'on ne partage pas nécessairement les arguments qui sont avancés par la Corporation professionnelle des médecins du Québec, que nos arguments se rapprochent davantage de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec, bien sûr, mais j'aurais vraiment aimé les entendre et poser des questions et essayer de voir leurs réactions par rapport aux commentaires de la FNACQ, la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec.

L'autre point important, parce qu'ils en ont soulevé vraiment plusieurs, c'est évidemment le fonctionnement du ticket modérateur. Puisque la Corporation professionnelle des médecins du Québec va être directement touchée et qu'elle va être sûrement appelée à rendre un jugement à savoir si le citoyen consommateur s'est présenté au bon endroit ou s'il a à payer ou non un ticket modérateur, puisque c'est ce qu'on va décider, alors le médecin va être directement concerné et c'est évident qu'il aurait été intéressant de les entendre. Ce qu'on a demandé, donc, c'est deux à trois jours d'audiences pour entendre les groupes qui ont fait les demandes formelles et les groupes prioritaires. C'est tout. On ne demande pas au ministre de reprendre le processus complet de consultation et puisque le ministre, lui, a l'avantage, bien sûr, d'avoir déjà en main les 309 amendements, c'est évident qu'au niveau des questions qu'il aurait à poser à ces groupes-là, ça pourrait être très intéressant et ça nous permettrait peut-être d'avoir plus rapidement consensus au niveau de cène réforme et d'assurer sa réussite.

Vous savez, tantôt, le ministre nous parlait de démagogie. Il s'agit plutôt de s'assurer qu'au moment où nous sommes à la dernière étape tout le monde qui a demandé à nouveau à être entendu soit entendu. Et ces gens-là savent très bien qu'ils ont déjà été entendus. Ils savent très bien qu'ils ont déposé un mémoire et ils ont quand même fait une demande formelle d'audiences. Alors pourquoi ne pas répondre à cette demande qui est bien simple et qui nous prendrait très peu de temps, qui prendrait sûrement moins de temps que de passer à travers une série de motions qui seront plus ou moins intéressan tes pour le ministre alors qu'il pourrait entendre directement les groupes s'exprimer et poser des questions très clairement sur les différents sujets de litige? On sait que, du côté de la Corporation professionnelle des médecins, il y a énormément de points de divergence, c'est peut-être la corporation où il y en a le plus, à part, bien sûr, la Fédération des médecins résidents du Québec aussi. C'est les deux groupes où on a eu le plus de revendications. Donc, ce ne serait pas quelque chose de très long, de très laborieux et ça nous permettrait peut-être de partir sur un meilleur pied et d'obtenir des résultats très rapidement.

Le ministre nous a fait part, cet après-midi, au tout début, de sa grande ouverture par rapport à des amendements. Alors, peut-être pourrait-il nous démontrer aussi, du côté des audiences, qu'on pourrait peut-être entendre les deux groupes qui ont fait des demandes formelles. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires, d'autres... Non? Alors est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Non.

M. Côté (Charlesbourg): M le Président, j'avais fait une proposition au député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. La Corporation professionnelle des médecins, moi, je peux les entendre demain matin. On passe à autre chose après, c'est tout. Alors, si le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue me dit oui, on va voter pour; s'il me dit non, on va voter contre.

Le Président (M. Joly): M. le député, est-ce que l'entente vous semble valable?

M. Trudel: M. le Président, je vous demanderais une suspension de deux minutes, s'il vous plaît, maximum.

Le Président (M. Joly): Nous allons suspen

dre les travaux pour deux minutes. (Suspension de la séance à 21 h 30)

(Reprise à 21 h 32)

Le Président (M. Joly): Nous reprenons nos travaux. M. le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, la parole est à vous.

M. Trudel: M. le Président, je voudrais d'abord relever une information sur laquelle le ministre a donné, lui, sa version des choses, et qui n'est pas fausse, mais sur laquelle il faut apporter une précision.

Le Président (M. Joly): je m'excuse, mais on est hors d'ordre, parce que, dans le fond, je vous ai donné vos 30 minutes et j'ai donné 30 minutes au ministre. à moins qu'il n'y ait consentement des membres de cette commission...

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai toujours dit que je ferais montre de souplesse et, si certains de mes propos ont pu faire en sorte que ça nécessite une réplique de la part de mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, je suis prêt à l'entendre, toujours dans le but de faire avancer nos travaux.

Le Président (M. Joly): Vous avez des excuses, M. le député?

M. Trudel: Pas tout à fait.

Le Président (M. Joly): Ah bon!

M. Trudel: Pas tout à fait. Le ministre a dit, en donnant la liste des organismes qui, effectivement, à la présidence de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, ont manifesté le désir d'être entendus, qui ont envoyé des mémoires... Vous disiez tantôt que seulement deux organismes ont demandé d'être entendus. Oui, vous avez dit ça.

M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas moi qui ai dit ça, c'est votre collègue.

M. Trudel: Non, vous avez dit ça, auparavant.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non. M. Trudel: Vous avez la liste ici.

M. Côté (Charlesbourg): Allez chercher les galées, vous ne retrouverez jamais ça. C'est de votre côté, c'est vous autres qui l'avez dit. C'est Mme la députée de Terrebonne...

M. Trudel: Ce que je veux bien préciser...

Mme Caron: On a répété ce que vous avez dit.

M. Trudel: Ce qu'il faut bien préciser, M. le ministre, et ce n'est pas en termes de reproches que je fais cela, vous avez choisi de dire aux groupes intéressés au Québec par le projet de réforme que vous avez présenté, vous leur avez expédié une lettre leur disant: Vous pouvez m'envoyer à moi, et évidemment que je ne vous nierai pas ce droit-là et cette façon de faire les choses, vous pouvez m'envoyer vos réflexions sur le projet que j'ai déposé. L'interprétation qui en suit immédiatement, c'est de dire: Écoutez, des audiences publiques, il n'y en aura pas. Ça ne sert à rien de présenter des demandes à la commission des affaires sociales, une demande d'auditions publiques, on ne sera pas entendus. Il ne faut pas se surprendre aujourd'hui qu'on ait ce nombre de personnes ou de groupes qui ont manifesté leur intention de formellement déposer des mémoires à la commission des affaires sociales. L'autre preuve de cela, vous l'avez dit vous-même, M. le ministre, vous avez reçu 145 mémoires d'organismes ou de personnes. Donc, l'intérêt pour des groupes ou des personnes était bien là. Est-ce qu'on a fait quelques erreurs? Est-ce qu'on a mal visé la façon de faire les choses? On peut faire nos gérants d'estrade par après et dire: Écoutez, ces gens-là, si on leur avait dit formellement: Si vous nous le demandez, on va étudier ça en commission, c'est pas mal sûr qu'on aurait eu autant de demandes que vous avez reçu de mémoires. Ça, c'est le passé.

Vous dites maintenant: Si le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue me fait la proposition d'entendre la Corporation des médecins, tout de suite demain matin, je suis prêt à l'entendre demain matin et on va discuter avec eux et on va passer, avec les arguments qu'ils nous présenteront, à l'étude de notre projet de loi. M. le ministre, je pourrais bien être tenté de vous dire: Ah! là, je vais jouer aussi au fin finaud en disant, de mon côté: Oui, j'accepte votre proposition, mais je vais vous dire honnêtement, M. le ministre, je vais être clair, vous savez avec quoi je vais revenir après l'entente.

M. Côté (Charlesbourg): Vote, M. le Président.

M. Trudel: Dans ce sens-là...

M. Côté (Charlesbourg): Vote. Vote. Vote.

M. Trudel: Je peux juste terminer ma phrase...

Le Président (M. Joly): Je m'excuse, vous étiez déjà hors d'ordre. J'ai toléré, avec l'approbation des membres de cette commission...

M. Trudel: Très bien, j'accepte.

Le Président (M. Joly): Partant de là, je pense qu'on a tranché. Alors, ça laisse supposer... Je me dois de vous demander si la motion, telle que libellée, présentée par le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue est acceptée.

M. Côté (Charlesbourg): Non.

Le Président (M. Joly): Refusée. Si vous êtes d'accord à ce que ce ne soit pas un vote nominal, on peut quand môme aller...

Une voix: Vote nominal.

Le Président (M. Joly): Vote nominal, parfait.

M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Contre.

Le Président (M. Joly): Mme la députée de Bourget

Mme Boucher Bacon: Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Contre.

Le Président (M. Joly): Mme la député de Saint-Henri.

Mme Loiselle: Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Matapédia

M. Paradis (Matapédia): Contre.

Le Président (M. Joly): Le député de Fabre, contre.

Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Pour.

Le Président (M. Joly): M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Trudel: Pour.

Le Président (M. Joly): La motion est

Alors, j'appellerais l'article...

Motion proposant d'entendre la Confédération des syndicats nationaux

M. Trudel: M. le Président, avant de procéder à l'article 1, j'aurais une autre motion à présenter en vertu de l'article 244. Compte tenu des dispositions de notre règlement, il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission permanente des affaires sociales tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, des consultations particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle entende les représentants de la CSN. le président (m. joly): la motion est recevable. vous avez, tel que vous connaissez les règlements, m. le député, un droit de parole de 30 minutes.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Alors, M. le Président, nous avons présenté un certain nombre d'arguments dans une première motion qui vient d'être rejetée et c'est le moyen parlementaire - puis il faut s'expliquer un peu là-dessus - c'est le seul moyen que nous avons à notre disposition pour faire en sorte qu'un groupe qui a fait une demande formelle d'audiences ou d'auditions devant cette commission, la CSN, puisse être entendu et puisse faire valoir son point de vue dans ce débat. Bon! Le règlement, à l'article 244, ce qu'il nous indique c'est qu'on peut présenter un certain nombre de motions. Si nous choisissons actuellement, compte tenu de ce que nous avons dit en remarques préliminaires de l'étude de ce projet de loi, article par article, que nous ne ferions pas un "filibuster" ou que nous ferions de l'obstruction systématique continuellement et sur une très longue période, ce que nous voulons signifier au ministre, en dehors de résolutions à la pièce que le règlement nous oblige à présenter ici, c'est qu'il nous semble y avoir un besoin fondamental pour que différentes catégories d'intervenants, au sein du réseau de la santé et des services sociaux, nous semble-t-il... Ce serait normal qu'on puisse les entendre dans une commission parlementaire publique, pour nous donner, nous dire, de leur point de vue, quels sont les enjeux qui sont présents au niveau du projet de loi présenté par le ministre à l'Assemblée nationale et sur lequel l'Assemblée, de façon majoritaire, s'est prononcée au niveau des principes. Maintenant que nous avons eu le temps, tous et chacun des organismes intéressés et surtout des travailleurs et travailleuses, des professionnels, des gens qui vivent quotidiennement dans ce système, d'approfondir ce que pourrait signifier ce projet de loi 120 lorsqu'il deviendra loi, bien nous, il nous semble que c'est tout à fait normal qu'on ne prolonge pas indûment le débat sur les tenants et les aboutissants de ce projet de réforme mais que des regroupements nationaux puissent venir nous dire: Écoutez, nous, au sein de notre organisme, on a bien analysé ce projet de loi, on a bien regardé les implications et, voyez-vous, comme tantôt, pour la Corporation professionnelle des médecins

et les groupes qui font partie de cette Corporation, eh bien, on peut vous donner des effets prévisibles, on peut vous dire certains effets prévisibles et, peut-être, certains effets pervers au niveau du système, si nous l'adoptons. Il y a d'autres dimensions aussi là-dedans qui concernent particulièrement les travailleurs et les travailleuses qui sont regroupés au sein d'unités syndicales et qui oeuvrent quotidiennement dans ce réseau de la santé et des services sociaux.

Évidemment, M. le ministre, j'aurais pu vous présenter une motion en vertu de l'article 244 où je vous demanderais trois jours d'audiences où nous pourrions entendre les représentants de grands organismes nationaux qui, principalement, représentent des acteurs du système et qui vivent quotidiennement la réalité, comme citoyens aussi, de notre système de santé et des services sociaux et qui pourraient nous dire que la voie dans laquelle nous nous sommes engagés au niveau de la présentation de ce projet de loi, eh bien, il faut arrondir les coins, bonifier certaines dimensions, resserrer certaines autres dimensions pour qu'on puisse être sûrs que pour les 20 ou 25 prochaines années, eh bien, on aura les effets désirés et on atteindra les objectifs recherchés, compte tenu de ce qui est proposé comme structures.

Évidemment que j'aurais pu vous présenter une motion où j'inviterais les représentants de la FTQ à venir nous donner leur vision des choses, la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec aurait pu venir nous parier de différentes dimensions en ce qui concerne son travail professionnel, en ce qui concerne son intervention dans le système, tout comme j'aurais pu, et je devrais, et ce serait tout à fait normal de la part de l'Opposition, dire: M. le ministre, nous voulons faire des CLSC la porte d'entrée du système. Les gens de la Fédération des CLSC, dans un processus extrêmement démocratique, dans une consultation très élargie au sein des organismes ou des établissements qui sont regroupés au sein de la Fédération des CLSC, ont pu se prononcer et nous dire: Bien, nous autres, notre monde sur le terrain qui vit quotidiennement et qui a analysé et qui a regardé attentivement vos intentions au niveau du projet de loi 120, eh bien, nous, nous pouvons dire que, dans telle ou telle dimension, il faudra être très prudent.

Quand vous voulez faire des CLSC la porte principale d'entrée, M. le ministre, il faut que nous vous disions qu'il faudra y ajuster les ressources. Ces niveaux-là vont véritablement être capables de jouer ce rôle-là, parce que, actuellement, dans certains coins, nous sommes même incapables de jouer le rôle qui nous est actuellement dévolu et ça devient une condition sine qua non et je le donne tout simplement à titre d'exemple.

Nous souhaiterions que les élus de l'Assemblée nationale puissent les entendre. J'aurais pu, évidemment aussi, vous dire dans une seule et même résolution, bien, il existe actuellement une conférence des CRSSS au Québec. Quand même, ce n'est pas les derniers venus. C'est des gens qui, régionalement, dans le découpage actuel, vivent les problèmes, vivent les situations parfois difficiles au niveau de la répartition des ressources, qui ont à arbitrer un certain nombre de conflits, qui ont à arbitrer un certain nombre de dimensions quant à la responsabilité ou à l'affectation de certaines ressources au niveau d'un certain nombre d'établissements, soit au niveau régional, sous-régional ou même au niveau local. Et ces gens-là ont une expertise qui serait appréciable pour la commission des affaires sociales, pour les différents députés qui sont regroupés, ici, au sein de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.

On procède, dans ce projet de loi, à un réaménagement - je pense qu'on peut le dire -majeur du fonctionnement ou des responsabilités attribuées aux CSS, aux Centres des services sociaux à travers le Québec. Ce que nous demandons, M. le ministre, ce n'est pas de procéder ici à l'audition des 9, 10, 11, 12, 13 CSS à travers le Québec. Ces gens-là sont regroupés dans une association nationale et sont capables de nous donner les principales dimensions de comment ils envisagent leur nouvelle mission à l'intérieur des centres de protection de l'enfance et de la jeunesse et de nous donner une appréciation parce que ce sont des personnes qui vivent continuellement dans ce réseau. Et que nous affections maintenant des ressources qui, jusqu'à maintenant, ont été affectées au réseau des CSS directement dans les établissements, peut-être ont-elles un certain nombre de mises en garde, ces personnes-là, à nous donner. Peut-être ont-elles un certain nombre de dimensions sur lesquelles il nous faudrait nous pencher très sérieusement pour dire: Oh! attention! L'intention est bonne. Il faut cependant mettre les filets de sécurité nécessaires de façon à ce qu'il n'y ait pas déviation et qu'on n'ait pas d'effets pervers au niveau du système. (21 h 45)

J'aurais pu vous dire exactement la même chose sur le fond, au niveau des centres d'accueil au Québec: population vieillissante, rôle accru des centres d'accueil transformés au niveau de leur administration, des responsabilités qu'ils auront, éventuellement, ces centres-là, dans le réseau de la santé et des services sociaux au Québec. Bien, je pense que les différents établissements représentés au sein de l'ACAQ, les différentes catégories d'établissements auraient très bien pu venir ici et nous dire: Bien, voilà, après étude approfondie de ce que nous a présenté le ministre et de l'incidence sur nos activités et sur la réponse aux besoins des citoyens et citoyennes qui sont chez nous, à qui nous sommes appelés à donner des services et de la façon dont nous pensons que nous devons

donner réponse à ces besoins-là, eh bien, on pense qu'il y a peut-être un certain nombre de dangers.

Il y a peut-être du renforcement, au niveau de certaines dimensions, dans le système, qu'il faudrait introduire dans le projet de loi parce que. encore une fois, vos intentions ne seront pas accomplies, les effets recherchés ne seront pas atteints parce que nous n'avons pas suffisamment pris de précautions au niveau de la modification législative. Bien sûr, également, au niveau du communautaire, j'aurais pu vous faire exactement la même argumentation et dire: Bon, 9 existe, au Québec, des coalitions d'organismes communautaires et, a partir du moment où le ministre a choisi d'indiquer une voie de reconnaissance, de financement et de support des organismes communautaires dans le réseau de la santé et des services sociaux, est-ce qu'il s'agit, en termes de virage, du bon virage que nous sommes en train de prendre?

Alors, je pourrais continuer comme cela, sauf une chose, M. le ministre, c'est le message que nous voulons passer, le message que nous voudrions qui soit entendu au niveau de la motion que nous présentons, c'est qu'il y a un certain nombre de groupes, un certain nombre de regroupements, au Québec, qui sont capables, qui sont déjà préparés, qui ont fait l'analyse, qui, généralement, vous l'ont fait parvenir, à vous, comme ministre responsable de la révision des choses, mais qui n'ont pas eu l'occasion de déposer cela sur la place publique, à l'intérieur d'un mécanisme qui s'appelle une commission de l'Assemblée nationale, et il nous apparaît éminemment souhaitable que dans le débat actuel, à travers les mécanismes usuels que l'on connaît dans notre société, qui s'appellent les médias d'information, certains lieux où on peut mettre sur la place publique ces enjeux-là, à l'occasion d'une commission parlementaire, eh bien, l'offre que nous avons faite dès l'ouverture de la commission, c'est de dire: Nous ne recommencerons pas l'exercice et le nombre de jours pendant lesquels nous avons réalisé cet exercice-là tout au cours de la session d'hiver 1990 de l'Assemblée nationale, mais nous pensons qu'il pourrait y avoir un certain nombre de discussions et d'échanges de points de vue avec l'Opposition sur des auditions publiques et particulières dans notre langage. Et nous pensons qu'en trois jours nous sommes capables d'entendre les principaux groupes représentatifs des intervenants du réseau, et également des gens qui sont des citoyens et citoyennes du Québec qui peuvent vous faire voir les enjeux de ce projet de réforme.

Bon, le raisonnement que l'on peut poursuivre quasi éternellement, c'est de dire: Bon, écoutez, nous avons un choix. Si l'Opposition présente ses motions pendant quatre jours, eh bien, on est aussi bien d'accéder à leur demande. Nous ne souhaitons vraiment pas, M. le ministre, effectuer un tel travail de représentations sur une période aussi longue. Nous pensons que, dans le calendrier qui est maintenant le nôtre et qui semble être le vôtre au niveau de l'objectif à atteindre, tout cela attaché si possible au mois de juin, nous avons le temps, en ces trois jours, d'entendre des groupes représentatifs.

Accepter votre offre d'il y a quelques minutes d'entendre uniquement la Corporation professionnelle des médecins du Québec, nous aurions fait un pas en avant parce que nous aurions pu permettre le débat public sur la question des responsabilités, des affectations et de ce que nous demandons à nos professionnels de la médecine au Québec. Mais faire cela eut été injuste et insuffisant, surtout pour d'autres groupes qui ont des rôles aussi importants dans notre réseau de la santé et des services sociaux.

Et, à l'inverse, nous ne pensons nettement pas qu'il faille aller à des auditions ouvertes, publiques, où nous redemanderions à tous les groupes du Québec de venir nous présenter leur point de vue. Non, nous pensons qu'effectivement tout n'a pas été complètement fermé, que les gens ont eu l'occasion de s'exprimer à travers certains canaux. Cependant, y y a des objets qui ne doivent pas être des objets de possibles négociations entre ce groupe représentatif de leur intérêt et le ministre responsable. Pourquoi? Ce n'est pas la partie ministre responsable sur laquelle je veux forcer ici. C'est qu'on est en matière de services publics, de dépenses publiques et tout cela doit se faire dans un débat public, restreint, oui, lancer des grandes questions, oui. Donner la vision des choses au niveau de ces groupes-là, eh bien, ça nous semble essentiel que nous puissions les entendre devant cette commission.

La CSN - puisque dans la motion que je présente, je voudrais que l'on entende les gens de la CSN - ces gens-là auraient pu nous dire... Ils ont comme de l'expérience au niveau des négociations collectives, c'est leur objet propre de représenter les travailleurs et les travailleuses et de négocier les conventions, les conditions collectives de travail. Alors, la décentralisation des négociations collectives, est-ce que ça pose un problème? Est-ce que, comme partie représentant les acteurs du système, la vision que le ministre nous donne dans son projet de loi, c'est vivabie, c'est acceptable? Ça nous donne quoi, dans un projet de loi, d'adopter une perspective qui nous semble souhaitable a nous autres, mais où tous les joueurs n'accepteraient pas ces règles du jeu peut-être parce que impossibles, compte tenu de l'histoire que nous avons? S'il y a des gens qui peuvent nous donner des informations là-dessus, nous donner leur vision juste des choses, je pense bien que c'est les gens de la CSN comme d'autres groupes syndicaux que nous pourrions rencontrer.

Les mesures de valorisation et de motiva-

tion qui sont prévues, qui sont annoncées dans la réforme au niveau de certaines catégories de personnel, est-ce qu'elles ne sont pas vouées à l'échec tant qu'on n'aura pas réglé la question du résultat de l'application de la loi 160? Je pense qu'il faudrait entendre les principaux concernés, leurs représentants. Peut-être que les représentants de la CSN auraient plus de succès que nous, M. le ministre, pour tenter de vous convaincre une dernière fois de revenir sur les accrocs à l'universalité, à la gratuité par un système de l'impôt à rebours ou de l'impôt-services ou de l'imposition d'un ticket modérateur. Ça aussi, c'est des citoyens responsables qui vivent au sein de ces associations. Les gens de la CSN auraient très bien pu également nous présenter leur point de vue sur la nécessité d'introduire un code d'éthique pour les travailleurs et travailleuses, une disposition sur laquelle les gens représentés au sein de la CSN semblent très peu portés parce que peu porteuse de fruits ou de résultats en matière de motivation au niveau de ceux et celles qui interviennent dans ce système. Il y en aurait toute une série d'éléments sur lesquels la CSN pourrait venir nous éclairer.

Alors, je présente cette motion: Que nous puissions entendre les représentants de la CSN pour les quelques motifs que je viens d'expliciter. Nous pensons que des auditions particulières limitées dans le temps seraient de nature non abusive et nous permettraient d'avoir un maximum d'éclairage au niveau de l'ensemble du projet de loi que nous avons à discuter article par article ici et nous souhaitons que le ministre puisse peut-être bonifier son offre à chaque occasion et que, lorsqu'on sera rendus à six ou sept groupes représentatifs, eh bien, nous pourrons relever le gant et dire: Oui, M. le ministre, nous acceptons votre offre et nous ne voulons pas déborder, nous ne voulons pas abuser du temps que nous pourrions utiliser à bien débattre, dans notre société québécoise, les enjeux que nous avons choisis il y a au-delà de 20 ans et qui, pour un certain nombre, sont remis en question par le projet de loi 120 et le projet de réforme.

Alors voilà ce que j'avais à dire, M. le Président, au niveau de cette motion visant à entendre les gens, représentants de la CSN au sujet du projet de loi 120 qui est actuellement en analyse devant cette commission.

Le Président (M. Joly): Est-ce que vous avez terminé, M. le député?

M. Trudel: Oui.

Le Président (M. Joly): Oui? M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Vote. Vote.

Le Président (M. Joly): Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui veulent intervenir sur la motion? Alors je vais... Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Non. M. Trudel: Nominal.

Le Président (M. Joly): Nominal. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Contre.

Le Président (M. Joly): Mme la députée de Bourget.

Mme Boucher Bacon: Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Contre.

Le Président (M. Joly): Le député de Fabre, contre.

Mme la députée de Saint-Henri.

Mme Loiselle: Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Matapédia.

M. Paradis (Matapédia): Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Contre.

Le Président (M. Joly): M. le député de Rouyn-Noranda - Témiscamingue.

M. Trudel: Pour.

Le Président (M. Joly): Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Pour. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): La motion est rejetée. Je vais donc appeler l'article...

M. Trudel: M. le Président, avant de passer à l'étude de l'article 1, vous vous doutiez, je pense, que j'allais présenter une motion.

Le Président (M. Joly): Toujours en vertu de l'article 244...

M. Trudel: Toujours en vertu de l'article 244.

Le Président (M. Joly): Bien, parfait, je vous reconnais.

M. Trudel: À moins, M. le Président, que je ne vous présente, compte tenu de l'heure, une motion d'ajournement de nos travaux à demain matin, tel que prévu, à 9 h 30.

Le Président (M. Joly): Alors, tel que souhaité, nous ajournons nos travaux à demain, 9 h 30, à la môme salle.

(Fin de la séance à 21 h 59)

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