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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le jeudi 28 mai 1992 - Vol. 32 N° 9

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance


Journal des débats

 

(Vingt heures neuf minutes)

Le Président (M. Joly): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je déclare la séance ouverte. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 33, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance. Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Boucher Bacon (Bourget) sera remplacée par M. Richard (Nicolet-Yamaska); Mme Cardinal (Châ-teauguay) par M. Bradet (Charlevoix); M. Houde (Berthier) par M. Tremblay (Rimouski); Mme Loiselle (Saint-Henri) par M. Maciocia (Viger); M. Paradis (Matapédia) par Mme Hovington (Matane); M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue) par Mme Blackburn (Chicoutimi) et M. Williams (Nelligan) par M. Khelfa (Richelieu).

Le Président (M. Joly): Je remarque que nous avons quasiment une équipe nouvelle.

La Secrétaire: À peu près. (20 h 10)

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la secrétaire. Mme la ministre, je vous reconnais pour vos remarques préliminaires.

Remarques préliminaires Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: M. le Président, dans un premier temps, oui, quelques minutes, d'abord pour vous présenter les gens qui m'accompagnent: Mme Nicole Marcotte, qui est présidente de l'Office des services de garde, et Mme Christine Marion, qui est attachée politique à mon cabinet, et pour remercier les gens aussi pour leur collaboration tout au long de cette commission parce que l'été est arrivé, il est tard et on est encore au travail. Merci d'être là. Je suis assurée que, l'Opposition et nous, nous mènerons ces travaux avec célérité. On sait que c'est un projet de loi qui a dû être présenté pour tenir compte d'un jugement de la Cour d'appel, qui rendait la Loi sur les services de garde difficile à appliquer selon nos orientations et nos objectifs. Alors, ce projet vient tout simplement clarifier pour nous permettre de conserver nos orientations et les objectifs que nous avions dans la politique des services de garde. Je voudrais dire, au tout départ, que notre intention est de clarifier la loi, mais n'est pas de changer quelque orientation que ce soit de cette loi-là. Je n'irai pas plus loin.

Je voudrais terminer en avisant la commission, et Mme la critique de l'Opposition est au courant, que nous avons eu une demande; j'ai reçu, le 26 mai dernier, M. le Président, une lettre et une requête des associations de services de garde sans but lucratif, soit l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec, signée par la présidente, Mme Brigitte Guy, Con-certaction interrégionale des garderies du Québec, Mme Claudette Pitre-Robin, et le Regroupement des agences de services de garde en milieu familial du Québec, Mme Jocelyne Tougas, qui demandent à la commission d'être entendues.

Alors, après discussion avec l'Opposition, je suggérerais, M. le Président, que vous acceptiez d'entendre cette Coalition sur les normes que nous avions établies précédemment, soit peut-être 15 minutes d'auditions, avec 15 minutes d'échanges de part et d'autre, pour que les travaux se déroulent mieux par la suite. J'ai dit, dans mon intervention d'hier et de cet après-midi, que nous avions consulté, que nous étions ouverts; alors, je pense que ça favorisera probablement de meilleurs échanges et de meilleures décisions. M. le Président, j'ai terminé.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la ministre. On va terminer les remarques d'ouverture avant d'entendre le groupe. Mais vous avez fait mention qu'il y avait trois groupes. Est-ce que les trois groupes sont regroupés?

Mme Trépanier: Oui. Les trois groupes forment une coalition. Ils ont présenté ce matin leurs représentations en conférence de presse et j'imagine qu'ils veulent nous entretenir sur ce sujet-là.

Le Président (M. Joly): Parfait. Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, porte-parole en matière de condition féminine et de politique de la famille et d'équité salariale. Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. Disons qu'effectivement on est ici parce que le projet de loi a été adopté sur division cet après-midi; on est ici en deuxième lecture, n'est-ce pas? On est ici pour faire l'étude article par article. Disons qu'il y a eu beaucoup de questionnements de la part de l'Opposition. Je n'ai pas l'intention de refaire un discours complet sur tout ce qui a été dit et tout ça. On a eu l'occasion de s'exprimer. Mais il

reste que c'est un nrojet qui, je le conçois très bien et on le comprend de notre côté aussi, est dû à un vide juridique depuis le jugement, la décision du juge Barbeau dans le dossier Choui-nard-Perry. On conçoit très bien qu'il y a un vide et qu'il faut qu'il se passe quelque chose.

Cependant, le projet de loi qu'on a devant nous, qu'on va avoir à étudier à cette commission, ne nous semble pas très précis, très complet et très clair. Il n'est pas évident pour les gens de l'Opposition officielle que ce projet de loi va venir régler à tout jamais la question fondamentale qui se pose régulièrement, et ça, depuis le début, je pense, du dossier des services de garde. Depuis qu'il y a une loi-cadre, et depuis 1979, en fait, il y a eu plusieurs répétitions de demandes, des pressions de faites par les garderies à but lucratif, d'une part. Et c'est de là que découle un peu le problème aussi. Donc, ce projet de loi ne permet pas, à toutes fins pratiques, de clarifier - pour nous, en tout cas - comme je disais tout à l'heure, à tout jamais.

Par rapport à ce qu'il y a dans le projet de loi, on nous réfère à un règlement. La majorité des articles, en fait, nous retournent à un règlement ultérieur, un règlement qu'on n'a pas en main. Donc, c'est très difficile pour nous, au moment où on se parle, de porter un jugement. Je sais qu'on l'a dit, mais je pense qu'il faut le répéter. C'est très difficile, au moment où on se parle, de porter un jugement. On ne sait pas les règles qui vont être établies. On ne sait pas du tout les entières, normes et méthodes, ce qui revient à plusieurs reprises, dans les différents articles du projet de loi. Alors, qu'est-ce que ça veut dire? Qu'est-ce que c'est? On aura beaucoup de questions, c'est sûr.

Il aurait été intéressant qu'on nous produise au moins un projet de règlement, parce que ce règlement, à toutes fins pratiques - et c'est écrit aussi dans le projet de loi; ça aussi, c'est drôlement inquiétant - c'est un règlement qui deviendra en vigueur à partir du moment de sa parution à la Gazette officielle. On n'aura pas droit à un projet de règlement comme on en a généralement à l'occasion d'autres présentations de règlements. Donc, les gens n'auront pas à se pencher ou à donner leur avis après, dans les 45 jours, comme ça se fait normalement. Ce règlement deviendra en vigueur automatiquement lors de sa parution.

Qui, plus est, M. le Président - et ça, au niveau de l'Opposition officielle, ça fait aussi problème - ce règlement, on nous dit qu'à toutes fins pratiques il est en vigueur au moment où on se parle. Il est, d'ailleurs, en vigueur rétroactivement à la date de présentation de la loi. Chez nous, je peux vous dire qu'il y a des gens, il y en a plusieurs qui nous disent que c'est à la limite de la légalité. Moi, je ne suis pas du tout... Je ne suis pas avocate. Comme je le disais, il faut quand même s'informer et se renseigner, li semble que ce n'est pas courant et qu'il y a beaucoup de monde qui se pose la question si c'est faisable, si c'est légal. Habituellement, ça se fait dans les projets où c'est vraiment des questions financières, où il y a eu des annonces du ministre des Finances lors du budget ou des choses comme ça. Mais ce n'est vraiment pas courant dans le genre de dossier qu'on est en train de traiter. Ça ne règle pas le problème. On n'a pas le règlement en main. Donc, je pense que c'est normal qu'on soit inquiets et qu'on se pose beaucoup de questions à ce moment-ci, M. le Président.

Les groupes concernés, je pense, ont le même problème, parce que eux autres non plus ne savent pas, à toutes fins pratiques, qu'est-ce que ce sera, les règles. Je comprends que la ministre dit que, bon, on veut maintenir la qualité, on veut maintenir nos orientations; c'est pour clarifier, pour préciser par règlement, mais nous autres ça ne nous précise pas grand-chose tant et aussi longtemps qu'on n'a pas en main ce règlement-là.

La ministre hier nous disait dans son allocution qu'elle croyait que «les parents ont un rôle de premier plan à jouer dans le maintien et le développement de services de garde de qualité. Le gouvernement a toujours soutenu la participation des parents dans l'organisation, la gestion et la direction des services.» Elle continuait en disant que «le bilan, généralement positif, de cette participation fait que le gouvernement entend bien maintenir son action en ce sens». Disons que je comprends ça et j'espère que c'est ça qui va arriver. Mais, nous autres, on pense aussi que ça aurait été faisable, qu'on aurait pu procéder autrement.

Quand on dit de mettre un moratoire, ça se fait dans d'autres domaines; le gouvernement se sert de cette mesure-là à d'autres niveaux. Moi, en tout cas, j'en ai vu au moins dans deux domaines bien précis, dans le cas des cégeps, d'une part, dans le cas des centres d'hébergement pour les jeunes 12-18. Le moratoire existe toujours du côté des 12-18. Il n'en ouvre pas, le gouvernement, parce qu'il y a un moratoire dans ces centres d'accueil là. Donc, c'est une mesure qui peut se prendre aussi. Et plutôt que de faire un projet de loi comme celui-là qui, en fait, ne règle pas nécessairement la question, parce qu'on n'a pas le règlement, d'une part, et, si on a un règlement après, il y aura toujours probablement des failles où on pourra encore une fois poursuivre le gouvernement ou poursuivre l'Office des services de garde sur un point ou l'autre du règlement...

Il y a toujours des possibilités comme celle-là parce que le jugement a été gagné, finalement, aux dépens de l'article 68.1 qui avait été ajouté. C'est un ajout. C'est une modification de 1989 et, à ce moment-là, on se croyait blindé du côté du gouvernement. On croyait que c'était la bonne mesure et qu'en ajoutant cet article-là à

la Loi sur les services de garde il n'y aurait plus de problème et qu'on serait capable de contrôler. Or, on a vu que ça n'a pas marché et on se retrouve là avec une possibilité de règlement qu'on n'a pas. Il y aura possiblement quelque part une faille; on pourra encore poursuivre, encore gagner et se retrouver au même point, à toutes fins pratiques, d'ici quelques mois, peut-être un an. Dans le cas de 1989, on voit ce que c'a pris comme temps. (20 h 20)

Voyez-vous, disons qu'à ce niveau-là on pense qu'un moratoire, ça aurait été probablement plus efficace. On met un moratoire sur un dossier en particulier. Le gouvernement aurait très bien pu, dans les circonstances, dire qu'il mettait un moratoire sur les garderies à but lucratif suite au jugement. Et ça aurait permis aussi de freiner là, si on veut, le développement de ce côté-là. C'est une mesure qui aurait pu être prise, en tout cas, pour un temps prescrit, restreint peut-être, mais le temps qu'on se fasse vraiment une tête.

Parce que, quand on dit qu'on veut des services de qualité, vous savez, Mme la Présidente, il y a quand même des études qui existent. Il y a des recommandations qui avaient été faites, d'ailleurs, par un comité que présidait justement Mme Marcotte que je vois ici ce soir avec nous. Elle se rappelle sûrement les recommandations de ce comité. Il y a beaucoup d'études qu'on a en main par rapport à la qualité. Il y a même une étude américaine ici qui nous parle de l'importance de la qualité des services de garde et qui nous dit justement que les services de garde ont une meilleure qualité au niveau des garderies où les parents sont les gestionnaires et forment le conseil d'administration; en fait, on parle de garderies à but non lucratif, à ce moment-là. D'ailleurs, cette étude-là a plusieurs sources et c'est assez intéressant de voir d'où viennent les sources. L'une de ces sources est Mme Desgagné qui a participé à monter cette étude-là et Mme Desgagné est un membre de l'Office des services de garde à l'enfance du Québec. Même si c'était une étude américaine, on a demandé conseil à l'office des services de garde et l'office des services de garde faisait partie des sources.

Donc, vous voyez, M. le Président, on a beaucoup de questions, on s'interroge et on est persuadés, de notre côté, que le projet de loi va permettre, bien sûr, de peut-être essayer de régler des choses rapidement, mais on pense que ce n'est pas la bonne façon de le faire. On pense aussi que le règlement, tant qu'on ne l'a pas, on ne peut pas en juger. En tout cas, à toutes fins pratiques, je suis très contente, de toute façon, que la ministre ait accepté de rencontrer la Coalition, les gens du milieu, les intervenants du milieu. On sait à quel point, de part et d'autre, je pense, de cette table, M. le Président, c'est important de rencontrer les gens du milieu quand on parle de services de garde. Disons que, là-dessus, effectivement, on a eu des ententes. Je voudrais, quand même, permettre à mes collègues, si elles ont des remarques préliminaires à faire, de les faire aussi et donner un petit peu plus de temps au groupe parce que je pense que ça va être très intéressant de pouvoir les rencontrer. Et je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Joly): D'autres parlementaires qui voudraient intervenir au niveau des remarques préliminaires?

Mme Vermette: Oui.

Le Président (M. Joly): Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. M. le Président, je sais qu'habituellement il y a la règle de l'alternance et, comme nous avons une belle galerie d'hommes, j'aurais cru que certains hommes auraient aimé apporter certains commentaires sur le réseau des services de garde. En fait, j'espère que ça sera plus qu'une présence, comme on y est habitués, en ce qui concerne les enfants, de la part des hommes, et qu'ils vont pouvoir aussi apporter leur perception par rapport aux modes de garderie. Nous sommes tous concernés et interpellés lorsqu'on parle d'enfants, évidemment, en tant que parents et aussi parce que nous appartenons à une société constituée d'hommes et de femmes.

M. le Président, en ce qui concerne ce projet de loi, c'est évident que, quant à nous, nous considérons qu'actuellement il est important de nous questionner à savoir dans quelle direction la ministre veut s'orienter en ce qui concerne le développement du réseau des garderies. On sait que l'un des articles principaux de ce projet de loi, qui est l'article 25, fera en sorte que tout se passera par règlement et, comme nous connaissons les règles parlementaires, tout ce qui passe par règlement, évidemment, échappe à l'Assemblée nationale et échappe à des débats qui sont, pour la plupart du temps, très cons-trucfrfs et qui servent justement à bonifier, à certains moments, des projets de loi, et qui empêchent justement des coquilles, au niveau des projets de loi, qui font en sorte que les contribuables sont obligés de référer aux tribunaux pour constamment faire valoir leurs droits ou, en tout cas, leur interprétation en ce qui concerne leurs droits.

Alors, dans ce sens, je trouve tout à fait inhabituel cet article 25, surtout pour un sujet aussi important que le service des garderies au Québec, parce que, évidemment, on met une loi rétroactive et on se donne jusqu'au mois de décembre, en fait, pour se donner ces règle-

merits, en plus. Donc, une forme d'incohérence, à mon avis. À la limite, c'est assez difficile de s'y retrouver, Est-ce qu'on attendra jusqu'à la fin de décembre pour faire des règlements qui seront rétroactifs au mois de mai? Est-ce qu'on a l'intention de déposer les règlements aussi rapidement qu'on a déposé le projet de loi? En fait, on n'a aucune réponse à ces questions.

Évidemment, il y a la Coalition qui est ici présente ce soir. C'est heureux qu'on puisse l'entendre. Puisqu'ils sont sur la ligne de feu, qu'ils sont les premiers concernés en ce qui concerne, en tout cas, le développement du réseau puisque ce sont eux qui donnent les services de garderie aux parents, alors, c'est important de savoir ce qu'ils en pensent de ce projet de loi. Est-ce qu'il y aurait eu des choses qu'ils auraient aimé bonifier ou apporter? Et, puisqu'on est en train de travailler sur un projet de loi, est-ce qu'ils n'auraient pas aussi des points à apporter ou d'autres articles qui favoriseraient aussi le réseau des services de garde et un service de qualité à l'intérieur du réseau? On en parlera sûrement un peu plus tard, mais je sais qu'il y a tout le problème, en fait, des garderies en milieu familial, des ratios. Je pense que c'est des choses qu'il est important qu'on puisse discuter et voir ensemble la possibilité d'introduire des articles qui favoriseraient, en tout cas, les demandes qui sont présentées par la Coalition.

Alors, tout ça, pour moi, c'est des éléments importants qui font aussi appel à autant de bonne volonté de part et d'autre, bien sûr. Mais, dans ce sens-là, je dis à la ministre qu'elle aurait eu avantage à passer par voie législative plutôt que par réglementation. Ça aurait été plus heureux, en tout cas, pour le débat et aussi pour favoriser une loi qui répond vraiment à des besoins. On sait qu'on change assez facilement des règlements; quand un règlement ne fonctionne pas, on en met tout de suite un autre etc., de sorte que les gens se perdent. C'est beaucoup mieux d'avoir une loi bien faite et qui vraiment a été bien pensée, bien articulée, si vous voulez, avec tous les gens qui sont concernés par un projet de loi.

Donc, je le dis à la ministre, c'est tout à fait heureux effectivement qu'elle ait accepté et qu'il y ait eu entente entre les deux côtés de la Chambre pour arriver à écouter la Coalition. J'ai hâte... C'est pour ça que je passe la parole à ma collègue si elle a des remarques préliminaires. Je pense qu'il est important qu'on puisse écouter ensemble et entendre ce qu'ils ont à dire au niveau de la Coalition.

Le Président (M. Joly): Avec votre permission, Mme la députée de Marie-Victorin, je vais reconnaître Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, la ministre nous a dit, dans ses tout premiers mots: Le projet de loi vient clarifier la loi sans la modifier. En relisant les articles, il y a 26 articles dans le projet de loi, il y en a 10 qui sont des articles abrogés, des articles de concordance ou encore des articles suspendus; plus l'article qui prévoit la date d'entrée en vigueur, ça vous laisse, finalement, effectivement peu d'articles qui viennent modifier le fond. Cependant, on ne peut pas parler d'un projet de loi qui ne vient pas modifier la situation actuelle aussi longtemps qu'on ne connaît pas les dispositions réglementaires.

Moi, j'ai la conviction que la ministre veut bien faire; alors, je pars de ça pour essayer d'exprimer ce que je souhaiterais dans ce projet de loi. L'idée d'introduire massivement les recours réglementaires dans le projet de loi, alors que la ministre n'était pas élue, avait été très, très contestée par l'Opposition d'alors qui nous avait juré par tous les dieux... D'ailleurs, ils ont adopté une loi là-dessus, pour limiter les recours réglementaires dans les projets de loi. Parce qu'un projet de loi où la plupart des articles se réfèrent à une réglementation potentielle, finalement, quand vous l'adoptez, vous n'avez qu'une idée extrêmement vague et imprécise de sa portée. Ça finit par être l'équivalent de la lèse-majesté dans le sens que vous amenez les législateurs et les parlementaires à approuver un projet de loi ou encore à s'y opposer, mais sur la base d'informations que nous ne possédons pas. (20 h 30)

C'est ce qui avait expliqué et justifié les tollés de protestation - je vois de vos collègues, qui étaient en Chambre à l'époque - contre le recours aux règlements. On n'a jamais vu autant de règlements et il y a un précédent dans les règlements, que nous n'utilisons que fort peu, c'est-à-dire le règlement entre en vigueur sans qu'il y ait de consultation. Il entre en vigueur dès sa publication, alors qu'en vertu de la publication dans la Gazette officielle il y a une période réglementaire de consultation. Non seulement allons-nous nous prononcer sur un projet de loi dont on ne connaît pas vraiment la portée, mais on ne pourra pas revenir, à l'occasion de l'adoption du règlement, pour corriger ce qui nous semblerait être des interprétations qui vont plus loin que l'esprit de la loi, parce qu'un règlement, c'est connu, ne peut pas aller plus loin que l'esprit de la loi. Mais la loi, telle que libellée, permet à peu près n'importe quoi. Vous allez retrouver de tout là-dedans et personne ne pourrait invoquer que ça va plus loin que la loi, parce que c'est tellement large, vaste que vous pourriez, je vous le dis, mettre n'importe quoi, quasiment le pareil et son

contraire.

Alors, moi, je prends pour acquis que la ministre veut faire un bon travail et je lui fais confiance là-dessus, mais, sur le projet de loi, à moins que, elle, elle ait une idée parfaitement précise, et j'imagine que ses fonctionnaires, à ce moment-là, ont déjà commencé à rédiger le projet de règlement, je me demandais, comme ça, en toute simplicité, si la ministre ne pouvait pas déposer à la commission, à tout le moins pour nous donner une idée, pour que l'on puisse prendre connaissance de ses intentions, une ébauche ou le préprojet de règlement. Je pense que ça pourrait être une première... Ça favoriserait, je pense... Moi, je ne pourrai pas participer aux travaux de toute la commission, mais, généralement, ce genre de décision là de la part des ministres, ça facilite le travail des commissions; ça nous permet, comme parlementaires, de faire un bon travail. Alors, moi, je pense que c'est la demande que je formulerais.

La seconde, elle a trait davantage à l'explosion, dans certaines régions, de ces garderies à but lucratif. Je n'apprendrai rien à la ministre et je n'apprendrai rien à la responsable du dossier, c'est prouvé, c'est connu, les problèmes nous viennent très souvent, malheureusement, des garderies à but lucratif. C'est normal: les garderies à but lucratif, elles sont là pour faire des sous; elles sont là pour faire vivre au moins les quelques personnes qui y travaillent et, généralement, pour générer un peu de revenus. C'est souvent la voie que choisissent des personnes pour constituer un fonds, pour prévoir un peu leurs vieux jours, pour constituer l'équivalent de ce qu'on appellerait un régime de rentes; ils finissent par avoir un immeuble, des équipements et ça acquiert une certaine valeur. Alors, sur cette base-là, il est arrivé - et des enquêtes l'ont démontré - que ces garderies à but lucratif alimentaient moins bien, avaient une moins bonne surveillance, moins d'encadrement. Ce n'est pas surprenant, je pense, compte tenu de l'objectif qui est le leur, de rentabiliser leur activité. Moi, je ne veux pas toutes les mettre, les garderies à but lucratif, dans le même panier, mais je pense que les intentions que la ministre a manifestées d'établir un maximum de places en garderie à but lucratif, il faudrait que ça puisse être clairement établi quelque part.

Alors, moi, j'avais deux requêtes, une première, c'était: Est-ce qu'on peut avoir l'ébauche de ce projet de règlement? La seconde: Est-ce qu'on pourrait convenir - ça rassurerait tout le monde, je pense - de l'idée d'établir, avant de se prononcer, un moratoire sur le développement des garderies à but lucratif, de manière à permettre d'avoir une vision un peu plus d'ensemble et, même si le moratoire n'était que d'un an, d'attendre la publication du règlement et ses conséquences par rapport à la présente loi? J'aurais terminé, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Avec le consentement des membres de cette commission, est-ce qu'on peut permettre à Mme la ministre de tout de suite vous donner une réponse? Oui? Mme la ministre, vous aimeriez prendre quelques minutes, s'il vous plaît.

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: Je voudrais, d'abord, spécifier ou apporter cette clarification que, lors du débat de cette loi-là, j'étais déjà à l'Assemblée nationale, j'étais adjointe parlementaire à l'Habitation. Alors, j'étais là.

Maintenant, vous avez certaines questions auxquelles je veux répondre immédiatement. Je vais répondre à la deuxième, dans un premier temps. Vous dites: Pourquoi, puisque nous ne sommes pas parfaitement prêts à présenter une réglementation, n'imposeriez-vous pas un moratoire pour une année? Moi, je vous dirai que, partout dans la population et l'Opposition, à bon droit, vous êtes les premiers à revendiquer plus de places en services de garde. Nous sommes en retard sur notre développement pour plusieurs raisons, dont le désengagement du gouvernement fédéral, et je le répète parce que c'est important. Cette année, nous avons eu une augmentation de budget, qui porte notre budget à 177 000 000 $ et quelques, et nous avons annoncé un développement de 7500 nouvelles places. En conscience, je ne peux pas dire: Nous mettons un moratoire sur le développement des services de garde parce que nous en avons trop besoin.

J'ai dit également qu'on privilégiait les services de garde sans but lucratif, mais, vous l'avez, vous aussi, dit, les organismes à but lucratif rendent également de bons services et ce serait extrêmement dommage de retarder le développement des services de garde que nous ne pourrions pas reprendre, parce qu'on pourra peut-être en parler plus longuement à un autre moment, mais on sait qu'il y a un maximum de capacité que l'Office peut prendre et que le milieu peut prendre également. Alors, moi, en conscience, j'étais opposée à un moratoire sur le développement des garderies à but lucratif, oui, parce que je pense qu'on ne peut pas se le permettre comme gouvernement parce que nous manquons beaucoup de places. Ça, c'est une chose.

Deuxième question, vous vous inquiétez de la réglementation qui n'est pas déposée. Vous vous souvenez que le jugement de la Cour supérieure est arrivé antérieurement, mais le jugement de la Cour d'appel qui a suivi, parce qu'il faut savoir qu'il y a eu deux jugements, nous avons eu les motifs de ce jugement le 22 février dernier. Alors, ça a laissé peu de temps, somme toute, pour se retourner et préparer la législation et les règlements. Il fallait d'abord voir ce que nous allions faire, consulter, etc.

Nous sommes coincer avec un échéancier et, si nous ne réglons pas cette situation, nous sommes obligés de retarder le développement des services de garde pour quelques mois, peut-être plus. Alors, c'est la raison pour laquelle nous avons procédé de cette façon-ci.

Pour rassurer tout le monde, j'ai dit, durant toute la consultation et hier dans mon intervention à l'Assemblée nationale et encore aujourd'hui dans ma réplique, que nous nous collerions au plan de développement des années antérieures. Alors, le règlement reflétera très fidèlement la répartition des services de garde comme nous les connaissons présentement. Nous ne sommes pas ici pour changer les orientations que le gouvernement a prises; nous sommes ici pour nous assurer qu'avec le jugement de la Cour d'appel nous puissions agir de façon concordante avec nos orientations. Alors, d'ores et déjà, je peux vous dire que, dans le règlement, il y aura le même pourcentage de développement de places en garderies à but lucratif, sans but lucratif, à quelques virgules près, dépendant des projets qui nous sont proposés. Les critères seront les mêmes. Et je peux vous dire que, dans cet esprit-là, comme nous avons déjà fonctionné depuis 1989 avec des critères qui sont connus maintenant, avec la philosophie de privilégier les organismes sans but lucratif, tout en donnant une place aux organismes à but lucratif, alors, je pense que c'est une certaine assurance parce que vous savez fort bien qu'à plusieurs reprises nous avons eu des lois qui n'étaient pas accompagnées d'un règlement. La réglementation est venue beaucoup plus tard. (20 h 40)

Alors, vous avez quand même eu connaissance, par les années passées, de la façon dont nous avons agi. Je m'engage et je me suis engagée à conserver les mêmes orientations et les mêmes critères dans le plan de développement qui viendra, donc dans le règlement qui sera présenté le plus tôt possible parce que nous ne voulons pas retarder le développement de l'année 1992-1993.

Et, en terminant...

Le Président (M. Joly): Juste un petit instant. Quoique je sois reconnu comme étant très flexible dans l'administration des règles, je vais vous reconnaître, Mme la députée de Chicoutimi, mais j'imagine que, si on veut avancer, on pourra quand même échanger tout au cours de l'étude article par article et même aussi au cours de l'échange avec le groupe. Je peux vous reconnaître si vous y tenez absolument.

Mme Blackburn: Je pense que la ministre n'avait pas tout à fait terminé.

Mme Trépanier: Oui, j'avais terminé.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Oui. Bien. Alors, juste pour une correction à une perception qu'a pu laisser mon intervention tout à l'heure. Lorsque je disais que la ministre n'était pas en Chambre, c'est au moment où l'Opposition libérale dénonçait la nature des règlements, le volume des lois et des règlements, et son leitmotiv, c'était: Légiférer moins et mieux, réglementer moins et mieux. Je vous dis qu'on n'a jamais vu autant de règlements et, des règlements, j'en ai vu passer un, je dirais plusieurs. Il y en ava't une pile que nous ne verrons jamais avant qu'ils soient publiés dans la Gazette officielle et ils vont entrer en vigueur. Là, on avait pire: il y avait des règlements qui entraient en vigueur avant d'être publiés dans la Gazette officielle, avec le projet de loi 186, la loi sur la construction. Alors, ça, c'était comme le comble. Je me dis que, à l'époque, ça aurait fait scandale. L'Opposition aurait été sur tous les toits pour dénoncer l'incurie du gouvernement péquiste d'alors. Je voulais juste remettre ça dans la perspective où je l'avais amené.

La ministre nous dit: Ça nous empêcherait de faire du développement dans les garderies sans but lucratif. Il doit y avoir quand même déjà sur les tables à dessin un certain nombre de projets. Ça ne doit pas être ça qui manque trop, trop. Ensuite, il y a les CLSC qui sont les premiers saisis des besoins, souvent, parce que c'est là que les jeunes parents se retrouvent. Il y a certainement moyen, j'imagine, de faire appel aux CLSC pour favoriser la création de groupes intéressés à s'offrir des services de garde. La ministre, moi, je veux bien lui faire confiance, mais elle nous demande un acte de foi. Puis, comme je connais le gouvernement, il y a quelques personnes, dans ce gouvernement-là, qui ont plus des tendances que j'appellerais social-démocrates. Mais la ministre le sait parce qu'elle siège au Conseil des ministres: il n'y en a pas beaucoup. Je ne leur fais pas confiance, à eux autres. Et c'est pour ça que je trouve ça malheureux. Vous le savez là, je le dis et je sais que la ministre le sait. Je ne l'obligerai pas à le dire, mais elle sait que j'ai raison.

Et c'est pour ça que nous demander un acte de foi comme ça, quand elle va faire l'objet de pressions énormes pour développer tout un réseau privé comme on est en train de le faire pour le développement de l'enseignement primaire et secondaire... Vous connaissez le modèle, on coupe dans le financement dans le public et on augmente le financement du privé. Alors, la tendance est vers ça. Là, ça, permettez-moi de ne pas le partager. Parce que le problème, pour ceux qui pensent que c'est une bonne chose un gros reseau privé, c'est que, lorsque vous laissez l'alternative, les enfants des parents les plus intéressés à l'éducation, dont les parents ont généralement un meilleur niveau de revenus, qui

ont des bons résultats scolaires se retrouvent tous majoritairement - ça va jusqu'à 32 % dans la région de l'Estrie - dans les écoles privées et le public recueille les autres 68 %. Et les parents qui les envoient dans le privé, ils s'occupent des écoles privées. Alors, si on les envoyait tous à l'école publique, comme le fait l'Ontario, comme le font tous les États américains où il n'y a aucune école privée subventionnée, on n'aurait pas les mêmes problèmes.

Mais le danger, c'est qu'on se retrouve dans la même situation tantôt lorsqu'on va avoir affaire à un réseau de garde à but lucratif par trop important comparativement à celui sans but lucratif. Alors, ceux qui pensent que c'est une bonne chose, allez voir ce qui se passe dans nos écoles secondaires publiques.

Le Président (M. Joly): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Alors, compte tenu des voeux exprimés par les deux formations et compte tenu que l'article 244 de notre règlement le permet, Mme la ministre, j'apprécierais si vous pouviez faire une motion à l'effet que nous aimerions entendre la Coalition dont vous faisiez mention tantôt.

Motion proposant d'entendre l'ASGMSQ, la CIRGQ et le RASGMFQ réunis en coalition

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: M. le Président, je fais motion pour que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 33, procède à des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec, la Concertaction interrégionale des garderies du Québec et le Regroupement des agences de services de garde en milieu familial du Québec, qui sont ici en coalition, pour une durée de 45 minutes ainsi réparties, soit 15 minutes pour la présentation de l'organisme et 30 minutes pour des échanges avec les membres de la commission.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, Mme la ministre. Je vais demander maintenant: Est-ce que la motion est adoptée?

Mme Blackburn: Adopté. Auditions

Le Président (M. Joly): Adopté. Les membres représentant cette Coalition, s'il vous plaît, bien vouloir prendre place à la tribune.

Bonsoir, mesdames. Bienvenue à cette commission. J'apprécierais si la porte-parole ou la personne responsable pouvait bien s'identifier et nous présenter la personne qui l'accompagne, s'il vous plaît!

Coalition des trois organismes

représentant les services de garde

sans but lucratif du Québec

Mme Pitre-Robin (Claudette): Certainement. Je suis Claudette Pitre-Robin. Je suis présidente de la Concertaction interrégionale des garderies du Québec. La personne qui m'accompagne est Mme Aliène Côté, qui est vice-présidente de l'association. Ce soir, nous interviendrons au nom de la Coalition. Nos compagnes, présidente et directrice des deux autres organismes, ayant dû s'absenter - Mme Guy, entre autres, devant partir pour la Grande-Bretagne demain matin, ne pouvait pas être présente ce soir - c'est avec finalement un mandat d'elles qu'on doit intervenir ce soir.

Le Président (M. Joly): Vous avez compris les règles du jeu. Alors, je vous reconnais.

Mme Pitre-Robin: Vous nous rectifierez, on n'a pas l'habitude que vous avez.

Le Président (M. Joly): Allez, madame. Sentez-vous bien à l'aise.

Mme Pitre-Robin: Même avec vos thermos.

Le Président (M. Joly): Ça compte sur votre temps là. Vous savez bien que je ne suis pas dur.

Mme Pitre-Robin: Oui. On a des documents qu'on pourrait vous déposer dès maintenant. Vous excuserez s'ils ne sont pas dactylographiés, entre autres, en partie parce que, évidemment, vu l'urgence, nous l'avons fait à main levée, mais on trouvait que c'était plus important que vous puissiez avoir des textes en main. Ça rend la chose plus intéressante.

Alors, je m'en voudrais de commencer sans remercier d'abord Mme la ministre, M. le Président, et les membres de la commission de nous entendre ce soir. Nous reconnaissons que c'est une attention particulière, laquelle nous savons apprécier. Alors, je vous remercie grandement.

Nous allons donc commencer par vous présenter le texte du communiqué que nous avons fait parvenir ce matin, qui expose clairement notre position, je pense. Ensuite, nous pourrons voir les modifications que nous proposons à l'intérieur du projet de règlement et l'argumentation qui s'y adresse.

Alors, la Coalition des trois organismes représentant des services de garde sans but lucratif du Québec demande au gouvernement un engagement ferme pour arrêter le développement des garderies commerciales au Québec. On disait: Cet après-midi, le gouvernement doit voter l'adoption du principe du projet de loi 33, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance. L'objectif de ce projet de loi vise principalement à dissocier l'obtention d'un permis

de service de garde en garderie de l'octroi de subventions à ce service. Les modifications sont rendues nécessaires par les motifs invoqués au jugement de la cause Chouinard-Perry contre l'Office des services de garde à l'enfance, qui a comme conséquence d'invalider le plan de développement de l'OSGE et de permettre le développement non contrôlé des garderies commerciales dites à but lucratif.

Bien que l'intention puisse être louable quant à l'objectif, la Coalition des trois organismes, la Concertaction interrégionale des garderies du Québec, l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec et le Regroupement des agences de services de garde en milieu familial du Québec, considère que la façon de procéder pour limiter le développement des garderies commerciales n'a aucun sens. La loi n'ayant pas été suffisamment explicite jusqu'ici, cela a causé les problèmes que l'on connaît. Les modifications proposées n'amélioreront pas concrètement la situation. La politique doit être claire sur le type de réseau que le gouvernement entend financer à même les deniers publics.

La ministre Violette Trépanier réaffirmait hier, lors de la présentation du projet de loi, l'intention du gouvernement de développer prioritairement des garderies sans but lucratif gérées par un conseil d'administration composé majoritairement de parents. Par contre, le projet de loi confirme le droit à tout promoteur qui répond aux exigences de la loi et des règlements d'obtenir un permis de service de garde en garderie. À l'heure actuelle, nous savons qu'une centaine de projets de garderies commerciales ont fait la demande d'un permis à l'OSGE qui devrait le leur accorder, les rendant ainsi éligibles aux subventions, à l'exonération et à l'aide financière. (20 h 50)

Devant cette situation, la Coalition reconnaît l'urgence d'intervenir et demande au gouvernement de profiter de l'occasion pour inscrire dans la loi, de façon ferme et manifeste, son choix de limiter fortement le développement des garderies commerciales. En ce qui concerne la Coalition, la seule façon de régler définitivement cette ambiguïté est d'abroger l'article 4.5° et toutes ses concordances, ne permettant plus l'ouverture de garderies commerciales au Québec parce que, contrairement à la croyance populaire, ces garderies coûtent cher au Québec. À titre d'exemple, pour l'année 1990-1991, 15 159 000 $ ont été versés en exonération et aide financière pour 261 garderies, comparativement à 28 582 000 $ remboursés à 50 % par le gouvernement fédéral pour 571 garderies sans but lucratif.

L'ensemble des recherches démontre également clairement que les garderies commerciales offrent des services de qualité moindre que les garderies sans but lucratif. Les garderies à but lucratif demandent un effort d'inspection plus grand que les sans but lucratif. Les infractions à la loi et aux règlements sont plus fréquentes dans les BL sur des articles majeurs tels que le ratio.

Dans les garderies à but lucratif, les parents ne peuvent jouer qu'un rôle consultatif et ce rôle ne peut faire d'eux des promoteurs de la qualité, le tout étant selon la bonne volonté du propriétaire. La libre concurrence ne peut être considérée comme gage de qualité d'un service à offrir. Le besoin étant tellement grand par rapport aux services offerts qu'un parent qui s'est trouvé une place se verra dans l'obligation de la garder, souvent pour des raisons pratiques, géographiques ou parce qu'il n'a pas le choix, aucune autre place n'étant disponible ailleurs.

Les garderies à but lucratif ne sont d'aucune utilité dans la recherche de partenaires pour assurer le développement, telles les municipalités et les commissions scolaires. Rappelons que la recherche de partenaires est une orientation clairement énoncée, exprimée dans l'énoncé de politique des services de garde de 1988.

La qualité pour l'enfant est loin d'être assurée au niveau des équipements, des conditions de travail des éducatrices, l'impact direct sur l'enfant, l'alimentation souvent moins variée, moins dispendieuse, plus de profits, taux de roulement du personnel.

Ainsi, la Coalition des trois organismes représentant les services de garde sans but lucratif du Québec demande que le gouvernement provincial reconnaisse la participation des parents comme étant essentielle pour garantir la qualité des services offerts à leurs enfants; que le gouvernement québécois, eu égard au contrôle des parents et à l'incompatibilité de la qualité des services de garde à offrir et à la recherche de profits: a) reconnaisse que seuls les services de garde sans but lucratif peuvent assurer des services de qualité aux enfants et, ce faisant, ne subventionne que les services de garde sans but lucratif; b) mette fin au développement du nombre de places dans les garderies à but lucratif; c) élabore un plan de conversion des garderies à but lucratif en garderies sans but lucratif.

C'est la demande que nous faisons au gouvernement. C'est la position officielle.

Je me permettrais aussi, avant de continuer, de rectifier, au niveau du langage, plusieurs éléments qu'on entend régulièrement. C'est la comparaison entre les garderies commerciales et les écoles privées. Mme Blackburn vient aussi même d'en faire encore la comparaison. Il est fréquent d'entendre que les garderies privées à but lucratif se comparent aux écoles privées afin de faire rejaillir sur elles les préjugés favorables en cours actuellement au Québec quant à la qualité des services dispensés par ces institutions. Il importe donc de rectifier de façon

formelle ces allégations.

Premièrement, contrairement au système scolaire, il n'y a pas au Québec de services de garde publics. Tous les services de garde en garderies ou autres sont privés. Ce qui diffère, c'est qu'ils sont soit à but lucratif, soit sans but lucratif. Les écoles privées au Québec sont presque exclusivement des corporations sans but lucratif, tout comme les garderies sans but lucratif subventionnées que nous représentons. Il est donc tout à fait erroné de mettre en comparaison les garderies privées à but lucratif et les écoles privées, le lien à faire étant davantage du côté des garderies communautaires ou sans but lucratif.

D'ailleurs, bon nombre d'écoles privées ont un conseil d'administration où sont représentés les parents d'élèves, et c'est là le modèle des garderies sans but lucratif subventionnées. Je dirais même qu'actuellement on nous a dit qu'au Québec il n'existe que deux écoles commerciales ou à but lucratif et elles ne reçoivent aucune subvention du gouvernement. Alors, je pense que c'est une rectification importante à faire et c'est sûr que les gens des garderies commerciales n'ont pas avantage à amener ça de l'avant parce que ça leur donne tout un reflet de bien meilleure qualité à cause du préjugé favorable des écoles privées actuellement au Québec. Je pense que c'est important de le mentionner dès à présent. On vous a également... Est-ce que je continue ou si vous voulez intervenir?

Le Président (M. Joly): Allez, Mme Robin.

Mme Pitre-Robin: C'est le «fun» de parler toute seule. Ha, ha, ha!

Alors, on vous a déposé un document écrit à la main où on n'a ressorti, dans le collage fait entre la loi qui existe, le projet et nos commentaires, que les articles où il y avait, finalement, des choses où on apportait des commentaires; donc, vous voyez qu'il est beaucoup moins volumineux, tout n'étant, finalement, pas matière à commentaires. Je pense qu'il y a des choses qui sont des concordances, qui viennent mettre en d'autres mots tout simplement les mêmes données, donc on n'interviendra pas là-dessus.

Par contre, au niveau de la première modification apportée, qui modifiait l'article 2 de la loi, cette modification, dans le troisième paragraphe, dit: «Ces droits s'exercent en tenant compte - c'est ce qui s'ajoute - des règles relatives à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions.» C'est la partie qui est nouvelle. Ce qu'on peut vous dire là-dessus, c'est que cette modification nous inquiète puisqu'elle change un peu le sens de l'ancienne loi puisqu'elle vient limiter un droit non pas pour des principes de bien-être des enfants, mais pour des questions économiques. C'est quelque chose de nouveau qui apparaît maintenant et qui nous apparaît être limitatif. Alors, cet article-là nous inquiète un peu.

Si on prend l'autre page, évidemment, comme vous l'avez entendu dans notre communiqué, nous recommandions, et, pour nous, ça nous apparaît clair, que l'article 4.5° soit abrogé ainsi que toutes ses concordances. Nous allons en rediscuter plus, après. Je ne pense pas que ça change de façon majeure la vision, l'orientation de la loi, comme je le disais à Mme la ministre, puisqu'il faut se rappeler que cet article 5° a été aussi adopté en troisième lecture, lors de l'adoption de la loi, comme ça, un ajout en troisième lecture, en 1979. Ça n'avait donc pas modifié le sens de la loi de l'ajouter; ça ne viendrait certainement pas modifier le sens de la loi de l'enlever. Alors, c'est pour ça que nous recommandons, finalement, d'abroger tout simplement cet article 4.5°.

Au niveau de l'article 8, il n'y avait pas de modification présentée dans le projet. Vous avez reçu, certains d'entre vous, un communiqué du Regroupement des agences de services de garde en milieu familial. C'est vraiment quelque chose qu'il nous paraît important d'apporter comme précision. En vertu du dernier paragraphe - je ne sais pas, vous appelez ça alinéa habituellement, je pense, dans ce cas-là - qui dit qu'une personne peut fournir un service de garde sans être reconnue, l'article de la loi tel qu'il est stipulé dans les définitions, pour un service de garde en milieu familial dorénavant - et c'était la modification apportée en 1989 - venait modifier le nombre d'enfants qu'une responsable du service de garde pouvait finalement garder chez elle. La ministre, d'ailleurs, en faisait mention dans son allocution en disant: «Ce projet de loi modifiait également la définition de services de garde en milieu familial afin de permettre que la personne responsable d'un service en milieu familial, affilié ou non à une agence, puisse garder seule et sans être régie jusqu'à six enfants au lieu de neuf, ce dernier nombre ayant été jugé par des groupes inéquitable et risqué».

Dans le texte antérieur de la loi, on avait les neuf en question et, comme on le voit dans la définition de services de garde, dans ces neuf enfants, en tout cas maintenant, dans ces six enfants, il est important de dire «incluant les siens», de telle sorte que, si quelqu'un a déjà un, deux ou trois enfants, ils ne s'ajoutent pas aux six qu'elle garde. Nous disons que, dans une maison de type familial, avoir un nombre de six enfants, c'est un maximum pour pouvoir assurer des services de qualité. (21 heures)

Ça, c'était reconnu et, dans le cas des agences qui ont des responsables de famille de garde, qui sont régies, qui ont des contrôles, qui sont visitées et supportées, cette règle-là s'applique. Mais, récemment, l'Office des services de garde donne l'interprétation que ça ne s'applique, justement, que pour les services de

garde régis et que, dans le cas des services de garde non régis, le besoin de dire «incluant les siens», alors, les enfants de la personne, de la gardienne, si on veut, n'est pas présent. Ça voudrait donc dire qu'une personne peut garder six enfants et, si elle en a elle-même trois autres, elle en gardera jusqu'à neuf. Là, finalement, elle aura neuf enfants chez elle. Là, finalement, on revient au même nombre qu'on avait avant la modification. Je pense qu'il y aurait lieu d'apporter la modification qui est nécessaire pour vraiment rendre, au niveau de l'interprétation, très clairement le jugement...

Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît, madame.

Mme Pitre-Robin: Pardon?

Le Président (M. Joly): Je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

Mme Pitre-Robin: D'accord.

Le Président (M. Joly): On peut peut-être déborder un peu et empiéter sur le temps des deux formations.

Mme Trépanier: M. le Président, c'est ça. Vous le prendrez sur mon temps. Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Joly): Parfait.

Mme Pitre-Robin: Je pense que ça permettrait, là, de clarifier. C'est important de le faire. Alors, il y a d'autres mesures. Vous avez les textes. Vous pourrez les voir. Entre autres, ça nous apparaissait dangereux de mettre juste des éléments d'approbation. Ce qui nous inquiète davantage, évidemment, c'est toute l'idée de pouvoir laisser maintenant des garderies commerciales ouvrir dès qu'elles sont conformes à la loi et au règlement. Automatiquement, elles ont un permis et peuvent fonctionner. On sait que, depuis le délai, depuis février à maintenant, il y a déjà une centaine de promoteurs qui sont à la porte de l'Office des services de garde et, demain matin, à moins que ces gens-là ne soient pas conformes à la loi et au règlement, l'Office devra leur accorder à la fois le permis et les subventions qui vont avec.

Bien sûr que, dans le projet, on dit que, dans un règlement ultérieur, on viendra limiter le nombre de garderies à but lucratif qui seront financées, mais ça ne nous apparaît pas opérationnel à plus ou moins longue échéance. À l'intérieur des centaines de garderies à but lucratif qui s'implanteraient d'année en année, le gouvernement pourrait toujours dire: Nous ne gardons de celles-là que 7, 8, 10 projets qui seront financés et les autres, jamais. Elles pourraient se mettre en liste d'attente, mais, le nombre de garderies commerciales non financées augmentant fortement, il est évident qu'il y a des pressions énormes et elles décrieront, finalement, toute l'iniquité entre leurs services non financés et les services choisis par le gouvernement pour l'être. Je pense qu'à assez court terme ce ne serait plus supportable et on devrait revoir encore une fois la façon de régir ces services-là, mais, en attendant, se seront ouverts des centaines de services de garde commerciaux où la qualité des services n'est pas du tout assurée ni pour les enfants ni pour les parents qui confient leurs enfants à ces services. Merci.

Le Président (M. Bradet): Merci. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Trépanier: M. le Président, bienvenue aux gens de la Coalition. J'aimerais réagir à quelques propos et peut-être qu'on pourra échanger. Je dois dire que, dans un premier temps - c'est dommage que Mme la députée de Chicoutimi ait quitté - j'étais heureuse de voir que vous aviez spécifié que tout service de garde était un organisme autonome, privé, et c'est très différent. Beaucoup de gens considèrent les services de garde sans but lucratif comme des services de garde, entre guillemets, d'État, et tel n'est pas le cas.

Vous dites, à la page 3 de votre communiqué, que le gouvernement devrait reconnaître «la participation des parents comme étant essentielle pour garantir la qualité des services offerts à leurs enfants». Je pense que nous avons convenu que la participation des parents était capitale, absolument importante et qu'ils étaient les premiers responsables du soin de leurs enfants. C'est la raison pour laquelle nous avons exigé que tout organisme à but lucratif, parce que c'est à ça que vous faites référence, ait un comité de parents consultatif. À tout le moins, il faut absolument que les parents soient présents dans les services de garde.

Où je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, c'est lorsque vous nous dites qu'il y a incompatibilité entre la qualité des services de garde et la recherche de profit. Je pense que nous devons dire que la très, très grande majorité de nos services de garde sont de qualité, et ceux à but lucratif également. Il y a des règles pour nous en assurer. Il y a des contrôles pour nous en assurer également.

Alors, je suis un petit peu en désaccord sur ce point-là. Donc, je ne suis pas d'accord avec votre deuxième demande où vous nous demandez de mettre fin complètement au développement du nombre de places dans les garderies à but lucratif. Je pense que je l'ai dit à plusieurs reprises et je tiens à vous le dire encore ici: Pour nous, il n'était pas question, avec le dépôt de ce projet de loi, de modifier les orientations que nous avions prises comme gouvernement en 1989. Nous sommes le même gouvernement et

nous sommes encore convaincus que nous avons pris de bonnes décisions. Et je veux rester tout à fait fidèle à la politique des services de garde adoptée en 1989.

Donc, vous, vous allez plus loin que ce que nous recommande l'Opposition, soit un moratoire des services de garde. Comme vous n'en reconnaissez pas la qualité, vous demandez qu'on y mette fin totalement. Je ne sais pas si vous voulez vous exprimer sur ce que nous avait proposé l'Opposition quant au moratoire. Moi, j'ai dit cet après-midi - je pense que vous étiez dans les galeries - qu'à mon oeil il n'était pas question de moratoire, parce que ça viendrait changer notre orientation.

Cependant, lorsque vous me parlez des 100 projets en attente, vous allez me dire: Oui, mais là vous allez changer les règles du jeu. Je voudrais vous rassurer ici et vous dire que, d'abord, les 100 ou 90 et quelques projets en attente, rien ne nous dit qu'ils vont respecter toutes les règles. La présidente de l'Office me disait que de très nombreux projets sont présentés, mais ne voient jamais le jour, pour diverses raisons. La réglementation est très sévère et, Dieu merci, elle est sévère parce qu'on travaille avec nos enfants; alors, je pense qu'il faut être très vigilant à cet effet-là, d'une part. Deuxièmement, il y a, dans le projet de loi que nous proposons, un article qui nous dit que, dans les années futures, nous pourrons reconnaître les projets qui avaient été antérieurement acceptés pour du financement.

Alors, ce dont je vous assure ici, c'est que l'objectif du gouvernement, c'est d'assurer le développement des sans but lucratif, parce que nous privilégions les organismes gérés par les parents et nous voudrons nous assurer que cette orientation que nous avions prise en 1989, nous ne la diluions pas et que ne nous ne soyons pas pénalisés dans cette orientation. Alors, je pense qu'un article, dont j'oublie le numéro, viendra garantir ça. Alors, je pense que ça peut être une garantie à cet effet-là. Y aura-t-il des pressions? Je pense que c'est possible. Vous avez raison qu'il puisse y avoir des pressions pour du financement à moyen terme, peut-être. Mais je pense que cet article viendra nous donner une certaine garantie.

Un dernier petit point et je vais vous entendre ensuite. Quand vous nous parlez de l'article 2 - et ça, c'est un point tellement sensible - vous êtes inquiète. Vous nous dites dans vos notes manuscrites: «Cette modification nous inquiète, puisqu'elle vient limiter un droit non pas pour des principes de bien-être des enfants, mais pour des questions économiques». C'est que nous sommes confrontés à des budgets fixes et nous avons modifié cet article, pas parce que nous voulons changer nos principes, mais bien parce que nous avons été questionnés, dans le jugement, sur la clarté de cet article. Et c'est toujours ce que nous avons dit: Nous voulons assurer des services d'excellente qualité. Les enfants et les parents ont droit à ces services, mais dans le cadre de nos possibilités financières. (21 h 10)

Je voudrais vous entendre sur le moratoire possible. Et la dernière question que vous nous posiez à l'article c), vous nous dites d'élaborer «un plan de conversion de garderies à but lucratif en garderies sans but lucratif». Ça serait peut-être l'idéal pour les gens qui, parce qu'il y a des gens qui ont des garderies a but lucratif, aimeraient être transformés. Cependant, dans la situation financière que nous connaissons, avec le développement qui est insuffisant, nous avons un choix à faire: ou nous développons le plus possible ou nous convertissons, et ça ne donne pas de places supplémentaires. J'aimerais entendre la Coalition là-dessus. Est-ce que, vous, vous feriez un choix? D'après ce que vous me dites ici, vous feriez un choix différent du nôtre. Comment pourriez-vous concilier ça, le besoin pour les parents québécois de services et notre limite financière face à la conversion?

Le Président (M. Bradet): Merci. Mme la présidente.

Mme Pitre-Robin: Je reprendrai vos éléments un à un. Par rapport au comité consultatif dans les garderies à but lucratif, Mme la ministre, vous savez sans doute aussi bien que nous qu'un comité consultatif, ça a très peu de pouvoirs et souvent ça n'est consulté que sur ce qu'on veut bien qu'il soit consulté, avec les informations qu'on veut bien lui donner. Nous n'avons qu'à voir pourquoi tant de parents, finalement, ne vont pas dans les comités, n'investissent pas dans les comités, dans nos écoles; c'est parce qu'ils sont consultatifs et on sait que des comités consultatifs, ce n'est pas du pouvoir. C'est consultatif.

Alors, ces parents-là n'ont aucun pouvoir sur, finalement, tout ce qui concerne la vie des enfants dans la garderie. Ce n'est pas eux. La propriétaire ou le propriétaire est là pour dire: C'est mon commerce, je vous consulte, par exemple, parce que nous avons droit à une subvention de 2000 $ pour acheter de l'équipement. Voulez-vous signer la formule parce que ça prend votre signature pour que l'Office nous débloque les 2000 $. Il n'y a pas un parent au monde, qu'il soit sur un comité consultatif ou pas, qui va refuser de signer une formule qui va faire que ses enfants aient pour 2000 $ d'équipement dans leur boîte. Et ça, ça prend.

Mais toute la règle qui suit ça, que cet argent soit vraiment investi sur le matériel, que les parents voient le matériel qui entre, que le matériel reste dans la boite et ne ressorte pas au bout de quelque temps, un comité consultatif ne peut pas suivre ça, ne voit pas ça. Encore moins, il ne voit pas si, pour l'intégration d'un enfant handicapé, suite à une demande, on

reconnaît, par exemple, qu'on devra abaisser le ratio... Comment un parent qui n'a absolument pas de pouvoirs et souvent peu de présence dans la garderie... Souvent, les parents dans les garderies à but lucratif ne peuvent pas se promener comme ils le veulent, ne peuvent pas entrer et sortir, aller questionner.

Évidemment, on entend toute la question de la qualité. On pourrait finalement vous en dire, des histoires d'horreur, et je pense que l'Office en connaît encore plus que nous. Je ne veux pas dire par là que toutes les garderies à but lucratif, finalement, sont des garderies pourries où il n'y a aucune qualité. Mais il y en a un certain nombre et suffisamment important pour se préoccuper des enfants qui sont là. Et il n'y a aucun moyen, dans une garderie à but lucratif, finalement, de s'assurer de la qualité des services. Les parents ne peuvent pas faire cet ouvrage-là et le personnel encore moins. C'est le personnel souvent qui alerte un parent dans n'importe quel type de service autre pour dire: Tu sais, il se passe telle affaire et il me semble que ce n'est pas bien correct pour les enfants.

Dans les garderies à but lucratif, le personnel qui pose des questions sur la dynamique, sur la gestion de la garderie, il est à la porte le lendemain matin. Et ça, on en a, finalement, des commentaires de tas de gens qui y ont travaillé. La majorité des éducatrices qui ont travaillé en garderies à but lucratif se retrouvent dans les garderies sans but lucratif peu de temps après y avoir travaillé et, finalement, les histoires d'horreur, on peut les avoir là aussi.

J'enseigne comme chargée de cours, d'autres de nos collègues enseignent aussi, et là aussi on entend de multiples choses qui se passent, finalement, à l'intérieur même des services par le personnel lui-même. Et plus que ça, je pense, il y a quelques années, j'ai été moi-même membre du conseil d'administration de l'Office, j'ai été membre au tribunal administratif de l'Office, j'ai eu à voir et à juger de la qualité de certaines garderies à but lucratif, et à quel point il était difficile de retirer un permis, même si la qualité était nettement déficiente.

Alors, quels moyens on a quand on voit qu'une qualité est mauvaise, finalement? Combien de permis sont retirés sur la question de la qualité et des moyens? Je pense qu'il n'y a absolument rien qui nous assure ça. Et c'est une grande préoccupation. Bien sûr qu'on voudrait bien vous dire: Dans telle garderie, il se passe telle affaire, telle affaire, telle affaire. Évidemment, nous ne sommes pas là. Nous sommes conscients qu'il s'agit de on-dit, mais des on-dit qui s'accumulent ne peuvent pas faire autre chose qu'inquiéter grandement. En plus, vous connaissez les réseaux de garderies commerciales; il suffirait qu'on sorte deux noms pour avoir un libelle diffamatoire le lendemain matin. Alors, on n'a pas les moyens de se défendre dans un type de procès de même. Donc, c'est évident que nous devons garder, finalement, ces informations-là. Par contre, on sait qu'elles sont là, on sait que les membres de l'Office le savent aussi, on sait que c'est connu. Ça, ça nous inquiète. Même s'il ne devait s'agir que de 25 % du réseau actuel des garderies à but lucratif, c'est présent et c'est dangereux, c'est menaçant.

Ça vient même, Mme la ministre, répondre à votre dernière question, quand vous demandez: Est-ce que, nous, on fait le choix, qu'on développe moins de services de garde parce qu'il y a des parents qui attendent? Moi, je vous dirais tout de suite, avant de répondre à vos autres questions, que, moi aussi, je sjis un parent et que, si, en toute confiance, parce que j'entre dans un service de garde qui a un permis de l'Office, un permis de la municipalité, un permis d'édifice public, tous affichés, je lui confiais mon enfant, pour me rendre compte qu'on massacre mon enfant quelque part, qu'on lui cause du tort, qu'on ne s'assure pas de son plein développement, je vous en voudrais, Mme la ministre, j'en voudrais au gouvernement assez pour se retrouver comme en tribune, peut-être, dans quelques années, comme hier, finalement, les orphelins de Duplessis; ça serait peut-être les enfants maganés de certaines garderies.

Alors, je pense que le critère de qualité, c'est trop important quand on s'adresse à des enfants, de 0 à 6 ans; on n'a pas de risque à prendre, c'est trop important et, pour ça, on n'a pas de garantie. Ce n'est pas une inspection par année des inspecteurs de l'Office, qui nous garantit la qualité, d'autant plus que, là aussi, on a des tas de commentaires qui nous disent: Nous, les inspecteurs, on sait toujours quand ils viennent, les enfants sortent par la porte d'en arrière. Comment? Comment, etc.? On n'a pas vérifié, mais on sait, en tout cas, que c'est inquiétant.

Au sujet de votre question des garderies...

Le Président (M. Bradet): Madame, je voudrais juste vous faire remarquer qu'il reste une minute...

Mme Pitre-Robin: O.K.

Le Président (M. Bradet): ...pour permettre aux deux formations de poser des questions.

Mme Pitre-Robin: Je vais très vite...

Le Président (M. Bradet): On peut continuer? O.K.

Mme Pitre-Robin: Juste une seconde.

Le Président (M. Bradet): On prendra le temps.

Mme Pitre-Robin: Madame disait: II y a seulement 100 projets à l'Office et peut-être que,

là-dessus, il y en a qui vont tomber. Il y en avait 400 et quelques en décembre dernier à l'Office; il y en a déjà un certain nombre qui est éliminé. Placez-vous à la place d'une garderie commerciale; donc, un commerce qui sait qu'entre maintenant et le 14 mai, s'il investit l'argent qu'il faut, il va avoir des subventions, s'il retarde, il ne les aura pas, je vous garantis qu'un grand nombre des 100 services qui sont là vont investir ce qu'il faut parce que c'est ce qui leur permettra d'avoir des subventions. Alors, je serais bien surprise que ce nombre-là tombe si bas.

Je pourrais arrêter finalement, sinon qu'au niveau de l'article 2, quand vous nous dites de restreindre notre inquiétude, ça nous apparaît un peu particulier que, dans une loi, s'inscrive un principe, finalement, de restreindre les dépenses gouvernementales plutôt que le principe même de la Loi sur les services de garde à l'enfance et non pas un principe de restreindre l'investissement du gouvernement dans une certaine mesure. C'est un petit peu particulier, à notre sens.

Le Président (M. Bradet): Alors, merci, madame. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, lors d'une réplique, la ministre - on parlait de la possibilité d'appliquer un moratoire aux garderies à but non lucratif - pour nous répondre là-dessus, nous disait: Vous savez, on a un problème, on a déjà du retard au niveau du nombre de places allouées et accordées. Alors, on ne peut pas bloquer le développement, non plus; il faut absolument qu'on soit capables d'en arriver à donner un nombre de places. Évidemment, on parlait, nous, seulement de faire un moratoire sur les buts lucratifs. Vous nous dites, comme ça, qu'il y a une centaine de projets qui sont rentrés.

La ministre nous disait, aussi, tout à l'heure, que la décision écrite, avec les motifs, c'est rentré au mois de février, donc c'est très rapide, et il faut prendre une décision rapidement. Il reste que la décision, on la connaît depuis novembre. On n'a peut-être pas les motifs, mais on avait quand même déjà les premiers motifs du premier jugement jusqu'à un certain point. On sait que la Cour d'appel a rejeté l'appel, le 27 novembre. Donc, le gouvernement et l'Office des services de garde savent, depuis que l'appel a été rejeté, à toutes fins pratiques, avec ou sans les motifs, que ça ne passe pas. Alors, on sait qu'on a un problème. Le gouvernement et l'Office des services de garde savent, à toutes fins pratiques, qu'il y a un problème avec ce trou-là, si on veut, depuis le mois de novembre.

Comment est-ce possible qu'on ait présentement une centaine de projets de garderies commerciales qui ont fait la demande d'un permis et qu'on doit le leur accorder? Cette centaine de projets là, d'une part, ils sont arrivés à partir de quand? Ils sont arrivés après la décision de la Cour d'appel. Ça, j'aimerais bien le savoir parce que, si on les a laissé s'accumuler, ça veut dire qu'il aurait fallu peut-être agir plus rapidement pour ne pas laisser accumuler une centaine de projets. (21 h 20)

Ça, c'est une question, je m'excuse, mais que j'adresse du côté de la ministre, parce que la j'ai vraiment un problème de compréhension, parce que laisser accumuler 100 projets BL, quand on sait qu'on devra les accorder s'ils se conforment au permis, je trouve ça énorme, d'une part. D'autre part, je suis consciente, quand la ministre parle du fait qu'il est important que le développement se fasse le plus rapidement possible, qu'on a des manques à gagner au niveau des services de garde, puis, bon, on nous dit qu'on a 100 projets au niveau des garderies commerciales. Est-ce qu'il y en a, des projets au niveau des garderies sans but lucratif? Est-ce que c'est possible? Comment on fait pour en susciter davantage? J'aimerais vous entendre de votre côté là-dessus.

Le Président (M. Bradet): Alors, le premier volet de la question. Madame, vous allez répondre au deuxième volet?

Mme Pitre-Robin: Oui.

Mme Trépanier: Vous avez priorité, madame, c'est vous, notre invitée.

Le Président (M. Bradet): Allez-y, Mme Robin.

Mme Pitre-Robin: Alors, je pense que des projets de garderies sans but lucratif, il y en a, les demandes sont présentes. Évidemment, il y a des groupes moins constitués qu'il y avait avant le plan de développement. Avant le plan de développement de l'Office, les gens s'organisaient en groupe, préparaient des projets et s'inscrivaient à l'Office en disant: Nous avons l'intention et là ils se mettaient comme sur la liste d'attente, avant que leur tour arrive. Maintenant, depuis le plan de développement de l'Office des services de garde, l'Office a fait connaître... Et je pense qu'on était tout à fait d'accord sur, finalement un développement beaucoup plus organisé, pour s'assurer que les régions aient des services de garde qui se développent aussi et non pas tous dans les mêmes secteurs. Ça, ça a eu pour conséquence, évidemment, que les gens savent que, tant que l'Office ne dit pas: Cette région-là, d'après nos critères, est prioritaire et il ne s'en ouvrira pas dans d'autres villes à côté pendant trois ou quatre ans, bien, évidemment, il n'y a pas de groupe qui se met en place comme ça.

Par contre, quand on sait qu'il y a, finalement, besoin de services et qu'il y aurait possibilité d'avoir un permis de service de garde en garderie sans but lucratif, il est très rare qu'on ne constitue pas rapidement un groupe de parents pour mettre en place ce service. On pourrait aussi, évidemment, supporter davantage ces parents-là pour accélérer le développement, mais je pense que c'est possible, il n'y a pas de problème. Quand la ministre, dans le fond, dit: Un moratoire sur les BL, ça reporterait le développement, nous pourrions très bien transférer, au cours de ce moratoire, les 28 % de places en BL en places sans but lucratif et le coût ne serait pas beaucoup plus élevé. Il faut vous rappeler que les garderies commerciales coûtent très cher parce qu'à l'intérieur du programme du RAPC leur coût en aide financière n'est pas remboursé, le gouvernement fédéral ne paie pas la part des 50 % comme il le fait dans les garderies sans but lucratif. Les garderies, actuellement, à but lucratif au Québec ou commerciales ont à l'intérieur de leurs garderies un nombre beaucoup plus important, toutes proportions gardées, d'enfants exonérés et qui reçoivent de l'aide financière. Donc, ils coûtent très cher et ce ne serait pas une économie vraiment d'échelle à court terme de dire, là: On ne transfère pas ces places, ça coûterait trop cher. Je pense qu'on pourrait développer le même nombre de places en garderies sans but lucratif.

Le Président (M. Bradet): Merci, Mme Pitre-Robin. Mme la ministre, oui.

Mme Trépanier: Pour répondre à votre réponse, à ce moment-là, ça viendrait changer le plan de développement avec lequel vous êtes d'accord, nous dites-vous. Par le pourcentage de celles à but lucratif subventionnées, il y aurait là un écart avec les orientations que nous avions. Bon, alors, je sais que c'était possible, mais nous avons fait le choix de nous coller au plan de développement. Pour répondre aux questions de Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière et ça va répondre aussi à une question de Mme Pitre-Robin, vous nous dites: Pourquoi vous n'êtes pas intervenue avant? Vous connaissiez la cause depuis un bon moment. Vous auriez pu intervenir avant le mois de février. Tant que nous n'avions pas les motifs du jugement et tant que nous n'avions pas le jugement de la Cour d'appel, on ne savait pas si ce jugement toucherait seulement le cas particulier qui était devant la Cour. On ne savait pas si ça toucherait l'ensemble des services. On l'a su lors du jugement de la Cour d'appel. On ne pouvait pas agir avant. Il fallait avoir toutes les données. C'est dans les motifs du jugement de la Cour d'appel, le 22 février, qu'on a su, par exemple, qu'il fallait modifier l'article 2 quant au droit pour les enfants d'un service de qualité.

Vous nous dites, madame: Vous avez ajouté quelque chose dans l'article 2. On ne l'a pas ajouté. Dans notre esprit, dans l'esprit du législateur, lorsque nous disions que nous offririons des services compte tenu de l'organisation et des ressources des organismes et des personnes qui fournissent ces services, il était question également de ressources financières. Le juge ne l'a pas interprété comme ça; alors, c'est la raison pour laquelle ça nous prenait les motifs du jugement pour venir le clarifier dans la loi.

Concernant, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, les 100 projets, ils sont déposés à l'Office depuis septembre ou octobre, depuis plus tôt que février; un certain nombre ont été déposés depuis février. Alors, ça, c'est une chose. Deuxième chose, nous n'avons pas le pouvoir de refuser des projets. Nous n'avons même pas le pouvoir de refuser un permis, le jugement vient de nous le dire, à un promoteur qui se conformera au règlement. Alors, on doit accepter tous les projets qui nous sont proposés. Ça, c'est très clair. Mais, de la coupe aux lèvres, il y a une grande marge parce qu'il faudra qu'ils se conforment. Un service à but lucratif qui, aussi, a comme principe et un de ses objectifs d'être rentable n'ouvrira pas s'il n'est pas assuré de cet objectrf-là également. Alors, nous ne pensons pas qu'il y ait une prolifération épouvantable de services. Mais, honnêtement, on ne peut présumer de rien au moment où on se parle.

Le Président (M. Bradet): Merci. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Disons que c'est un peu dans ce sens-là. C'est vrai que la ministre n'a pas le pouvoir d'empêcher de donner le permis suite au jugement, mais il reste que la ministre, quand même, a le pouvoir de décréter un moratoire.

Mme Trépanier: Oui.

Mme Carrier-Perreault: Pour revenir à Mme Pitre, j'aimerais avoir une autre donnée. Depuis 1989, selon vos chiffres - vous travaillez dans le milieu, vous êtes dans le domaine - quel est le rythme, si on veut, selon vos données, de développement des services de garde, au prorata but lucratif, but non lucratif? Est-ce que vous avez une idée de la proportion? Il en ouvre combien à but lucratif par rapport à celles à but non lucratif? J'aimerais avoir des données là-dessus.

Le Président (M. Bradet): Mme Pitre-Robin.

Mme Pitre-Robin: Voilà. Depuis 1989, à l'intérieur du plan de développement de l'Office des services de garde, il y a, finalement... C'est un des éléments, Mme la ministre, vous le reconnaîtrez, qui, de toute façon, a débalancé, même si vous collez, demain matin, le plan de

développement au règlement, le principe du 28 %. au québec, lors de l'adoption de la politique, il y avait 28 % de services de garde à but lucratif qui existaient et on a dit: on va garder ce même pourcentage-là de garderies à but lucratif au québec. donc, la règle qu'on appelle du 28-72, du 28 %, était collée à une réalité. il existe 28 %, nous allons continuer de laisser développer des garderies à but lucratif dans l'ordre de 28 % de l'ensemble du réseau. où il y avait des iniquités, c'est que ces 28 % de l'ensemble, chaque année, pouvaient très bien s'installer dans les mêmes régions. ce n'était pas réparti également. donc, il y a des régions qui n'avaient pas de développement d'une garderie commerciale, alors que, dans d'autres régions, il y en avait trois, quatre ou cinq. donc, ça pouvait être très important.

Ce qui est important dans ça, c'est qu'à partir du moment où les garderies à but lucratif ou commercial peuvent ouvrir, peu importe - et on verra, il y en aura 100 de plus; on va passer de 245 à 345 dans quelques mois - la règle du 28 %, ça ne tient plus. L'objectif même du 28 %, qui disait: Nous allons conserver un principe de 28 % de services de garde à but lucratif pour 72 % de services de garde sans but lucratif à travers la province, ça ne tient déjà plus, ça ne peut pas tenir, parce qu'il y aura 28 % de places créées, mais il y a toutes celles qu'on ne finance pas qui vont ouvrir. Donc, déjà, il y a atteinte importante à tout le principe même de, finalement, ce qui était le plan de développement de l'Office. On n'en tient plus compte du tout. Ça pourrait vouloir dire que, dans un an ou deux, les garderies à but lucratif se retrouvent dans l'ordre 50 % ou 60 % du réseau. Là, ce n'est plus du tout en lien avec les volontés et les intentions du gouvernement, lors de l'adoption de la politique, ni lors des modifications à la loi en 1989, ni, je pense, maintenant, mais c'est un fait. On n'aura pas le choix, ça va être ça. Je mettrais ma main au feu... (21 h 30)

Quand vous dites: On ne peut présumer de rien, en effet, je vous dirais que le Dr Lazure nous avait dit, en 1979: Ne vous inquiétez pas, les petites filles, on leur donne le droit, mais il n'en ouvrira pas parce qu'on ne les financera pas. On a vu ce que ça a donné, il s'en est ouvert en masse. En 1979, on a dit: On va limiter le développement; ce n'est pas grave, on va les limiter. On voit ce que ça a donné. Au contraire, on ne peut même plus les limiter pantoute, elles ouvrent «at large». Alors, ce n'est pas ce qu'on va amener ici dans une réglementation qui va nous garantir, parce que c'est encore plus faible que tout le reste finalement, qu'il ne s'en développera pas davantage.

Alors, je pense que c'est ça, notre cri du coeur, c'est ça, finalement, la menace actuellement. Et je vous dirais, vraiment là, à tout le moins: Si vous ne voulez pas, en tant que gouvernement, limiter le développement absolument des garderies à but lucratif, si vous les laissez continuer à se développer, c'est quelque chose que nous pouvons comprendre même si nous ne sommes pas d'accord, mais, je veux dire, au moins, ne les financez pas. Les règles seront claires. Il y aura des garderies sans but lucratif, reconnues, privilégiées comme développement par le gouvernement, subventionnées et des garderies à but lucratif, comme les écoles à but lucratif, non subventionnées. C'est le choix qu'a fait aussi le gouvernement de l'Ontario actuellement dans ses politiques qu'il vient d'adopter. Je pense que, ça, ça ne va pas à rencontre du tout des orientations qui étaient là, puisque les garderies à but lucratif vont continuer à se développer, vous ne les empêchez pas, et ça permettrait au moins de statuer clairement, de faire le choix. Je pense que, ce choix-là, il doit se faire dans la loi et pas dans un règlement. C'est sur ça que je conclurais, Mme la ministre, M. le Président.

Le Président (M. Bradet): Alors, madame, c'est le temps qui était alloué. Il est 21 h 30. Je voudrais, au nom des membres de cette, commission, au nom de la ministre, vous remercier du témoignage et de l'éclairage que vous nous donnez. Alors, merci beaucoup, Mme Pitre-Robin et Mme Côté. Et, tel que c'était convenu, nous allons passer à l'étude détaillée du projet de loi.

Mme Pitre-Robin: Merci bien de nous avoir entendues.

Étude détaillée

Le Président (M. Bradet): Merci beaucoup. J'appelle donc l'article 1. Mme la ministre, est-ce que vous voulez...

Mme Trépanier: Oui.

Le Président (M. Bradet): ...que j'en fasse la lecture?

Mme Trépanier: La lecture de l'article? Le Président (M. Bradet): Oui.

Mme Carrier-Perreault: Est-ce que je peux vous demander une suspension de deux minutes à peu près?

Le Président (M. Bradet): Oui. Parfait. Mme Carrier-Perreault: D'accord.

Le Président (M. Bradet): Alors, la commission suspend ses travaux pour deux minutes.

Mme Carrier-Perreault: Merci. (Suspension de la séance à 21 h 33)

(Reprise à 21 h 39)

Le Président (M. Bradet): La commission reprend donc ses travaux.

Nous en étions à l'article 1. Mme la ministre, vous avez la parole.

Services de garde au niveau primaire

Mme Trépanier: M. le Président, l'article 1: L'article 2 de la Loi sur les services de garde à l'enfance (L.R.Q., chapitre S-4.1) est remplacé par le suivant: «Un enfant a droit de recevoir, jusqu'à la fin du niveau primaire, des services de garde de qualité, avec continuité et de façon personnalisée. "Le titulaire de l'autorité parentale a le droit de choisir le service de garde qui lui convient le mieux. "Ces droits s'exercent en tenant compte de l'organisation et des ressources des organismes et des personnes qui fournissent ces services, des règles relatives à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions ainsi que du droit d'un titulaire de permis d'une commission scolaire ou d'une personne responsable d'un service de garde en milieu familial d'accepter ou de refuser de recevoir un enfant.» (21 h 40)

M. le Président, cet article vient préciser que le droit de l'enfant de recevoir, jusqu'à la fin du niveau primaire, des services de garde de qualité, avec continuité et de façon personnalisée, et le droit du parent de choisir le service de garde qui lui convient le mieux s'exercent en tenant compte de l'organisation et des ressources des organismes et des personnes qui fournissent ces services, des règles relatives à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions, du droit d'un titulaire de permis, d'une commission scolaire ou d'une personne responsable d'un service de garde en milieu familial d'accepter ou de refuser de recevoir un enfant.

Le Président (M. Bradet): Est-ce qu'il y a des questions? Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Oui. Merci, M. le Président. Comme on peut s'en rendre compte, le bout qui est ajouté et qui fait un petit peu différent... En fait l'article est réaménagé, mais il y a seulement la partie des règles relatives à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions qui est rajoutée, qui n'était pas dans l'article qui était là avant.

On a entendu, d'ailleurs, ce que les gens sont venus nous dire comme représentations. Effectivement, ça fait référence aux règles et à la réglementation qui vont suivre et qu'on va retrouver un peu plus loin, j'imagine, un peu partout dans le projet de loi. C'est à ça que vous faites référence. C'est dans quel but que vous ajoutez ça, clairement?

Le Président (M. Bradet): Oui, Mme la ministre.

Mme Trépanier: Oui. Alors, c'est technique, la réponse. Je vais... M. le Président, je me reprends. Je ne voudrais pas oublier de présenter les gens qui m'accompagnent, parce que les intervenants ont changé à la pause. Alors, Mme Nicole Marcotte, qui est toujours présidente de l'Office et qui est toujours à ma gauche, et Mme Camille Faucher, qui est avocate à l'Office des services de garde.

M. le Président, comme je disais tout à l'heure, lors de la présence du groupe que nous avons rencontré, nous avons dû clarifier cet aspect de la loi pour bien faire connaître l'intention du législateur. Il n'était pas question de changer l'intention du législateur, mais le jugement de la Cour d'appel nous a amenés à être obligés de clarifier parce qu'il n'avait pas compris le sens de cet article-là comme le législateur l'avait préalablement donné lors de l'adoption de la loi.

Si vous voulez avoir plus de détails, je demanderais à Mme Faucher de continuer.

Mme Faucher (Camille): Bien, il y avait toute l'interprétation du mot «ressources» qui avait été faite par le juge de la Cour supérieure; les ressources n'étaient pas vues comme une ressource financière. Puis, aussi, ce qu'il faut voir avec l'article 2, c'est que c'est un article de principe; c'est une déclaration de principe qui doit, finalement, refléter les restrictions ou autres normes qui se retrouvent par ailleurs dans la loi. Alors, c'est important, avec les droits qui sont reconnus là, que la déclaration de principe contienne l'esprit des restrictions qui se trouvent ailleurs dans la loi. Et c'est pour ça qu'on retrouve ça, pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté à l'effet que ces droits-là sont toujours sujets à des règles d'exonération financière ou de subventions.

Le Président (M. Bradet): Merci, Mme Faucher.

Mme Carrier-Perreault: Dans l'article 2 tel que libellé, quand vous parlez «des règles relatives à l'exonération, à l'aide financière et aux subventions», vous parlez du projet de règlement qu'on aura plus tard, qu'on n'a pas encore dans les mains aujourd'hui.

Mme Faucher: À la fois des règles qui sont contenues à la loi et du règlement sur l'exonération financière, qui est en prépublication, et du règlement sur les subventions qui sera fait aussi.

Mme Vermette: Effectivement, je peux comprendre, en fait, que vous apportiez plus de précisions, surtout suite à ce jugement-là. Je pense que c'est important à ce niveau-là, mais c'est à savoir, au niveau des règlements justement, là, la portée des règlements et est-ce que ça va favoriser aussi les organismes à but lucratif ou pas.

Le Président (M. Bradet): Mme la ministre.

Mme Trépanier: Je peux vous dire dès maintenant que j'ai toujours dit et je continue à dire que la réglementation va refléter la situation actuelle. Donc, notre gouvernement a, dans sa politique des services de garde, privilégié les organismes sans but lucratif, tout en continuant un développement des services de garde à but lucratif, que nous fixions dans la politique des services de garde à 28 %. Dans le fond, nous avons un peu continué la politique qui prévalait antérieurement parce que, on le disait tout à l'heure, en 1979, lors de l'adoption de la Loi sur les services de garde, le Parti québécois avait reconnu le développement des services de garde à but lucratif; il avait été inclus dans la loi.

Alors, nous avons toujours été convaincus de ce principe directeur, que nous devions privilégier des services de garde gérés par les parents, tout en conservant une possibilité de développement de services de garde à but lucratif. Alors, il n'est absolument pas de notre intention de modifier cette orientation-là. Cependant, nous avons dû clarifier ça pour satisfaire au jugement parce qu'on ne voulait pas être contestés à nouveau. Mais nos intentions demeurent les mêmes: on ne veut pas changer nos orientations.

Le Président (M. Bradet): Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Je comprends très bien, en fait, les préoccupations de la ministre quand elle dit qu'elle ne veut pas changer ses préoccupations et qu'elles demeurent toujours les mêmes par rapport aux BL, sauf que, moi, en tout cas, je ne connais pas la teneur des règlements. Je vous sais de bonne foi et je dois vous croire, de toute façon, mais je ne les ai pas vus. Alors, si je m'en tiens ici à cet article, ça devient, en fin de compte, très généreux pour les personnes qui pourraient aller devant les tribunaux et essayer de dire: Écoutez, il y a de l'exonération pour les parents; donc, je suis dans un organisme à but lucratif privé, ça répond aux normes, ça donne un service de qualité, etc., je ne vois pas pourquoi, moi, en tant que parent, je serais brimé quelque part. Et là, vous pourriez avoir des pressions quelque part pour changer votre règlement et là, finalement, on arriverait à fournir l'exonération aux parents. Et là, on n'est plus près de votre plan de développement, on n'est plus près de rien de ça, mais, par exemple, parce que ça va être écrit dans la loi et que ça va être très clair à ce moment-là, c'est ça qui va devenir applicable à ce niveau-là.

Le Président (M. Bradet): Mme la ministre.

Mme Trépanier: Actuellement, nous fonctionnions avec un plan de développement qui était élaboré selon des critères précis, suite à une planification régionale, qui était élaboré par l'Office des services de garde et qui était soumis au Conseil des ministres du gouvernement. Dorénavant, ce que le jugement est venu nous dire, c'est que nous ne pouvions plus lier l'émission de permis et les subventions et l'exonération financière. Nous, dans notre orientation, dans notre article 1, on disait: Les enfants ont droit à des services de qualité dans les limites de notre budget. Alors, ce qu'on vient faire dans notre projet de loi, on vient, si vous voulez, confirmer les décisions du juge et dissocier l'émission de permis et l'octroi de subventions et d'exonérations financières. Alors, l'émission de permis, c'est dans la loi et nous venons donner au gouvernement le pouvoir de réglementer. Au gouvernement le pouvoir de réglementer. Alors, la garantie additionnelle que la population a quant à nos intentions, c'est que, d'abord, un, il y a un engagement de notre part, du gouvernement, de présenter un règlement qui soit fidèle à nos orientations.

Et là, je voudrais faire une parenthèse et je suis heureuse de voir que madame que nous avons rencontrée tout à l'heure vient d'entrer à l'instant et va pouvoir entendre ma réponse également. Mme la députée de Chicoutimi, je crois, me disait tout à l'heure: Je n'ai pas confiance. J'ai confiance en certaines personnes de votre gouvernement, mais je n'ai pas confiance à tout le monde. Je vous dirai, sans dévoiler des secrets d'alcôve du Conseil des ministres, que tout le monde au Conseil des ministres était unanime et scrutait le projet de loi pour s'assurer qu'on soit fidèle à la politique des services de garde. Ça, je peux vous le dire. Alors, donc, la politique que nous avons adoptée en 1989, le gouvernement en général y croit, le gouvernement dans son ensemble y croit. Ça, c'est une garantie. (21 h 50)

La garantie additionnelle que nous aurons, c'est que maintenant le plan de développement, dans le fond, sera à l'intérieur d'une réglementation. Un règlement du gouvernement, c'est plus strict et avec des meilleures balises qu'un plan de développement soumis, qu'un décret, si vous voulez, au Conseil des ministres. Alors, ça, c'est une garantie additionnelle.

Le Président (M. Bradet): Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Mme la ministre, ça peut être une garantie, mais, écoutez, on sait bien qu'un jour on peut changer de titulaire au niveau du ministère responsable de la Condition féminine et des services de garde. Une philosophie de gouvernement, ça se change aussi. En fait, ça dépend des impératifs économiques d'un gouvernement. Effectivement, tout ça fait en sorte qu'à un moment donné on peut très bien arriver à changer le règlement, puisque le règlement ne pourra jamais aller plus loin que la loi, de toute façon, le règlement va être beaucoup plus limitatif que la loi. Donc, finalement, bon, qu'on change le règlement ou qu'on fasse sauter un règlement, c'est beaucoup plus facile, en tout cas. Vous n'êtes pas obligés de revenir à l'Assemblée nationale pour faire ça. Vous le faites par décret. Mais, par contre, dans un article de loi, dans une loi, c'est beaucoup moins facile, à ce moment-là, parce que ça veut dire qu'il faut que ce soit par le consentement de l'ensemble de l'Assemblée nationale. Et, ça, c'est différent.

En fait, ça me fait penser à la portée générale de ce projet de loi. Pourquoi ne pas être clair quand on a l'occasion de dire tout de suite: Bon, alors, nos intentions, c'est de maintenir 28 % du réseau et puis de s'en aller avec 28-72? Pourquoi ne pas dire tout de suite: Bien, écoutez, nos intentions sont très claires, le réseau doit se limiter à ça, et pour tout ce qui a été fait avant ce projet de loi, bon, bien, on va favoriser la conversion, d'une part, et, dorénavant, enfin ce qui sera développé comme réseau, c'est un réseau qui sera vraiment un réseau de services de garde à but non lucratif?

Et, d'ailleurs, Mme la ministre, pour avoir déjà parlé avec des gens qui étaient propriétaires de garderies à but lucratif, je me souviens très bien que la plupart étaient prêtes à cette conversion-là en autant qu'on leur donne les outils, les moyens nécessaires et le temps aussi de le faire. Et, simplement, je me dis: C'est une volonté de gouvernement, c'est un choix de gouvernement.

On a invoqué les motifs, bon, d'argent, évidemment, que ça coûterait trop cher si on arrivait à faire ça. Mais, à mon avis, je pense qu'il y a toujours un incitatif, un intérêt à le faire. Et d'autant plus que, aussi au niveau des BL, je me suis laissé souvent dire par des gens qui étaient propriétaires ou des gens qui voulaient devenir propriétaires: Écoutez, notre droit de gérance, on y tient. Et, quand on est obligé d'être un OSBL, c'est-à-dire qu'on est obligé de composer avec des parents, puis, vous savez, la continuité... En tout cas, on mettait en cause des fois la continuité parce que les parents pouvaient changer etc., disant que c'était beaucoup plus facile de gérer quand c'était un BL.

Ça aussi, ça m'inquiète un peu, parce que là je parle toujours de la portée générale, en fin de compte, du projet de loi et puis des philosophies qui s'affrontent à l'heure actuelle. Et, ça aussi, ça me fait peur jusqu'à un certain point, en me disant: Bon, bien, on continue de le maintenir, ce réseau-là. Est-ce qu'on ne suscite pas dans le fond l'espoir chez les BL de voir à ce que, finalement, à force de faire des pressions sur un gouvernement beaucoup plus favorable à la privatisation que d'autres gouvernements, il s'en aille dans ce sens-là? Et puis, quand on connaît aussi, bon, qu'on est porté à dire qu'on favorise le droit de gérance davantage que la participation, bon, en fart, ça m'inquiète aussi, tout ça.

Non pas que ce soit, bon, votre position à vous qui m'inquiète, non, pas du tout, parce que je sais que, bon, là-dessus, vous défendez très bien vos dossiers, que vous avez aussi à coeur, en fait, ce que vous défendez et puis que vous êtes aussi très présente au niveau des préoccupations qui s'y passent. Mais, il y en a d'autres aussi qui ont d'autres intérêts quelquefois. Et, comme on est actuellement dans un contexte aussi où il y a des échanges fédéraux-provinciaux, je me dis: Est-ce que c'est notre intérêt, en tant que gouvernement du Québec, de faire en sorte qu'on minimise la facture du côté du fédéral? Pourquoi ne pas aller chercher notre argent le plus possible? Pourquoi ne pas se donner une structure et un moyen d'aller chercher le plus possible d'argent du fédéral pour nous permettre justement de développer un bon réseau chez nous, puis qui va être vraiment conforme à nos aspirations?

Le Président (M. Bradet): Mme la ministre.

Mme Trépanier: M. le Président, il y a deux volets là. Je voudrais répondre, d'abord, au premier volet de la première question, lorsqu'on parle de l'article 1. C'était pour clarifier ce droit de l'enfant aux services de garde, mais un droit relatif parce qu'il faut tenir compte également de nos ressources financières. C'est la seule raison pour laquelle nous avons dû le clarifier. C'est ça qu'on disait dans l'article. Comme ça n'a pas été interprété comme ça, on s'est dit: II y a un problème à quelque part, on va le clarifier. Alors, nous, nous croyions que c'était clair dans notre esprit, mais apparemment ce n'était pas clair dans l'esprit de tous. Alors, c'est la raison pour laquelle nous devons le clarifier.

Quant à votre deuxième volet où vous nous parlez de l'inquiétude que vous avez quant aux services de garde qui ne sont pas gérés par des parents et que vous nous dites: Pourquoi, dans le fond, ne limitez-vous pas et ne convertissez-vous pas les services à but lucratif en services à but non lucratif? j'ai le goût de vous poser la question: Pourquoi vous ne l'avez pas fait, vous autres, en 1979? C'est vous autres qui avez établi... Là, vous allez me dire que vous n'étiez pas là et moi non plus, mais on doit respecter la philosophie. Ma directrice de cabinet me dit toujours qu'on doit vivre avec notre histoire, et on ne refera pas l'histoire non plus. Il devait y

avoir des arguments qui ont fait que vous avez introduit la possibilité de développement de celles à but lucratif et, à ce moment, le RAPC existait et vous saviez fort bien qu'un organisme à but lucratif obtiendrait moins d'exonération financière que l'organisme sans but lucratif. Moi, je vous dirai que je vis avec ce principe-là. C'était dans notre philosophie et nous avons décidé de maintenir l'orientation que nous avons, dans le fond, confirmée en 1989. Je ne sais pas si vous voulez répondre à ça. Je ne veux pas partir un débat, mais ça me surprend.

Mme Vermette: Mme la ministre, on est deux à vouloir répondre, mais ma collègue, je pense, aurait une bonne réponse à vous donner.

Le Président (M. Bradet): S'il vous plaît, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Puisque la ministre fait référence à 1979, écoutez, moi, je n'étais pas là, c'est vrai, la ministre non plus, mais il reste que, de toute façon, on vit avec notre histoire effectivement. J'ai pris mes renseignements aussi là-dessus. Quand on n'est pas là, on est mieux d'aller voir ce qui s'est passé. On me dit qu'en 1979 il y avait un réseau important de garderies à but lucratif sur le territoire - et j'ai vu des chiffres, 470 - et que le réseau de garderies sans but lucratif, à ce moment-là, n'était pas existant. Ce système-là a été mis un peu, à toutes fins pratiques, de l'avant avec l'entente-cadre, le système avec les subventions, etc. Voyez-vous, moi, c'est ce qu'on me dit. On me dit aussi qu'en 1979 - et ça, j'ai vérifié, par exemple, un peu plus loin - le Parti québécois, qui était au pouvoir à ce moment-là, accordait uniquement une subvention au niveau de l'exonération financière, avait permis cet écart-là, cette ouverture-là parce que le système des garderies existant... Vous parliez du nombre de places, que c'était important de combler les besoins des gens. À ce moment-là, qu'est-ce que vous voulez, semble-t-il que c'étaient des BL qui comblaient les besoins parce que les autres n'étaient pas assez nombreuses. Il n'y en avait pas, à toutes fins pratiques.

Ce qu'on me dit aussi, c'est qu'au niveau de l'exonération financière on avait accordé, suite au tollé de protestation, aux pressions, suite aussi à la démonstration que le besoin était comblé par ces gens-là à l'époque... D'ailleurs, je suis persuadée que vous ouvrez une porte importante à des pressions, moi aussi. Je pense que ma collègue vous l'a dit tout à l'heure. Je suis persuadée que vous allez avoir à en subir énormément. Mais il reste qu'on me dit qu'à cette époque-là la seule porte qui avait été ouverte, en fait, c'était par le biais de l'exonération financière pour les parents. C'est vrai que le RAPC existait, puisqu'on parle de 1972, mais il reste que cette porte-là avait été ouverte parce que c'était une subvention qui s'adressait à des parents payeurs de taxes, qui avaient besoin de services. Ce n'était pas une subvention directe, c'était une subvention indirecte.

Il reste que c'est sûr qu'on ne refera pas l'histoire. Il y a eu une porte, effectivement, à ce moment-là, mais il y avait des raisons, semble-t-il, différentes de celles qu'on vit aujourd'hui, en 1992. Parce que maintenant, aujourd'hui, on sait que le réseau est quand même... Vous parlez de 28-72. Les chiffres que j'ai eus de votre cabinet me donnent 245 garderies à but lucratif pour 588 à but non lucratif. Or, aujourd'hui, si on regarde ça, il y a une bonne partie quand même du besoin qui est comblée par des garderies sans but lucratif. (22 heures)

Moi aussi, ça m'inquiète, le développement. Je trouve ça important. On a un manque à gagner important. J'entendais Mme Pitre qui nous a expliqué, tout à l'heure, que, oui, c'est possible, le réseau des garderies sans but lucratif pourrait arriver à présenter suffisamment de projets avec un peu d'incitation au niveau du milieu et éventuellement, oui, il pourrait combler les besoins. Alors, ceci étant dit, je ne sais pas, en tout cas, il reste que...

Le Président (M. Bradet): Ceci étant dit, il nous reste une minute. Je voudrais vous le faire remarquer.

Mme Carrier-Perreault: Regardons ça! Ça va vite, hein! Cette chose-là, finalement, c'est nouveau. C'est une règle... En fait, ce petit bout de phrase est intégré là parce qu'on fait référence à un règlement qui va venir plus tard, qu'on va retrouver à peu près partout. Ça va toujours être le même règlement dont on va parler, si je comprends bien, M. le Président, parce que c'est le règlement qu'on attend, qu'on n'a pas et qu'on n'aura pas tout au long de l'étude article par article de ce projet de loi, à toutes fins pratiques. Là, on se comprend. Alors, pour ces raisons-là, moi, je dois vous dire que je demanderais la suspension de cet article-là. On va pouvoir y revenir. Tant et aussi longtemps qu'on aura des questionnements concernant le règlement, je préférerais demander la suspension de l'article.

Le Président (M. Bradet): Mme la ministre.

Mme Trépanier: II nous reste très peu de temps. Juste quelques précisions. D'abord, un, le 28-72, c'est un engagement que nous avions pris, non écrit, là, mais que nous respectons dans les faits. Le 28-72 réfère à un nombre de places et non à un nombre de services, parce que vous savez que les services n'ont pas tous le même nombre de places, d'une part. Je vous ai ramenée en 1979 et on n'est pas responsables de

notre histoire, ni l'une ni l'autre, mais je vous dirai que, lorsque les sans but lucratif sont arrivés, comme vous avez fait la loi, vous auriez pu convertir quand même les services à but lucratif en services sans but lucratif. Vous nous demandez de le faire aujourd'hui. Vous auriez pu le faire dans le temps. Et je termine en disant que ce qui était vrai en 1979, qu'il manquait de places et que les organismes à but lucratif rendaient un service, c'est encore vrai aujourd'hui. On manque encore de places. Alors, c'est dans ce sens-là que je n'ai pas voulu limiter le développement des services de garde pour le moment. Alors, M. le Président, je pense que nous reprendrons la semaine prochaine, après une fin de semaine de repos.

Le Président (M. Bradet): c'est ça. alors, il est 22 heures. donc, les travaux de la commission sont ajournés sine die. je vous remercie beaucoup.

(Fin de la séance à 22 h 3)

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