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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le vendredi 12 mars 1993 - Vol. 32 N° 35

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation générale sur les thérapies alternatives


Journal des débats

 

(Neuf heures onze minutes)

Le Président (M. Joly): Bonjour. Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur les thérapies alternatives et, à cette fin, d'examiner: la reconnaissance professionnelle de certains thérapeutes alternatifs et les mécanismes de reconnaissance des thérapeutes non éligibles à un statut professionnel au sens de la loi, l'information au public et la contribution du réseau de la santé et des services sociaux pour qu'il favorise la liberté des choix thérapeutiques. Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Non. Alors, je vous rappelle l'ordre du jour de la journée. Aujourd'hui, nous entendrons la Corporation professionnelle des psychologues du Québec, la Société québécoise des psychothérapeutes professionnels, masculins et féminins, l'Alliance des professionnels en pratiques alternatives de santé du Québec et, finalement, le Réseau d'action pour une santé intégrale (RAPSI). Je vois que les gens représentant la Corporation professionnelle des psychologues ont déjà pris place. Alors, il me fait plaisir de vous accueillir. J'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier et aussi identifier les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.

Auditions

Corporation professionnelle des psychologues du Québec (CPPQ)

M. Sabourin (Michel): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, je suis Michel Sabourin, président de la Corporation professionnelle des psychologues du Québec. À ma gauche, je suis accompagné par M. Germain Lavoie, qui est directeur du Service de psychologie du centre hospitalier Louis-Hippolyte-LaFontaine et, à ma droite, Me André Gariépy, qui est mon adjoint et conseiller juridique. Je vous remercie de nous permettre ainsi de vous faire part de nos commentaires et réflexions sur le sujet qui est présentement l'objet de cette commission, les thérapies alternatives.

Avant de passer à une présentation plus détaillée de nos recommandations, ce que nous ferons en conclusion de notre présentation, nous désirons transmettre aux membres de cette commission un certain nombre de constatations qui sont le résultat des analyses et des recherches qu'on a effectuées concernant le sujet des thérapies ou des approches alternatives. Pour ce faire, comme vous avez pu le constater en lisant notre mémoire, nous avons consulté une soixantaine d'ouvrages spécialisés. La première constatation qui découle de nos analyses, c'est qu'il est bien difficile, a priori, de cerner ce que sont véritablement les approches alternatives. Si on se fie à l'avis qui a été émis par le ministère de la Santé et des Services sociaux en préparation à cette commission, eh bien, on pourrait les définir comme étant le champ entier qui constitue en quelque sorte le pendant, l'alternatif aux connaissances professionnelles et aux connaissances scientifiques actuelles.

Par ailleurs, selon les praticiens de ces approches, c'est un petit peu plus que ça. On inclut non seulement des dimensions physiologiques, des dimensions psychologiques et socioculturelles de la santé, mais on parle également de composantes comme l'éveil, l'énergie, la spiritualité. En fait, la spiritualité, c'est la distinction la plus importante qu'une recherche a découverte entre des omnipraticiens et des médecins français qui pratiquent selon des approches plus traditionnelles et des médecins holistiques. La seule différence significative qu'il y avait entre les deux, c'était que, pour les médecins holistiques, l'expérience spirituelle personnelle était importante. À notre avis, il est difficile de concilier l'approche pragmatique et consensuelle qui est celle favorisée par la méthode scientifique avec une position épistémologique qui est celle des approches alternatives, qui relève plutôt de la foi ou d'un système de croyances. Nous nous demandons même s'il faut songer à réintroduire la foi et le religieux dans les pratiques de santé.

Deuxième constatation, c'est que le portrait type des usagers des approches alternatives est typique et il est sans doute instructif à bien des points de vue. Il s'agit, en majorité, de jeunes adultes, entre 20 et 50 ans, majoritairement des femmes, des personnes instruites, de classe moyenne ou supérieure, et dont habituellement la santé physique est jugée comme étant assez bonne — donc, il ne s'agit pas véritablement de gens malades — et pour qui la spiritualité, la croissance personnelle semblent des valeurs importantes. Ce sont des gens qui sont plus critiques face à la médecine scientifique. Pour eux, il y a certaines interventions médicales qui sont acceptées et acceptables comme, par exemple, le traitement par antibiotiques. Par ailleurs, ils sont contre l'usage de tranquillisants. C'est des gens qui sont concernés également par la déshumanisation de certains aspects de la pratique médicale; ils sont concernés par son côté technique et par l'absence, dans bien des cas, d'une véritable relation médecin-patient.

Un troisième point... Et là on essaie de faire un peu le tour des nombreux sondages qui ont été réalisés concernant le sujet. Il y a eu celui de Multi Reso, l'en-

quête de Santé Québec, celle de l'Office des professions. Ce qui ressort d'une analyse de tous ces sondages-là qui sont consacrés à évaluer l'impact des pratiques alternatives, c'est d'abord que le recours aux pratiques qui ne sont pas réglementées — donc, si on exclut la chiropratique et l'acupuncture qui, elles, le sont — c'est quelque chose qui est relativement marginal et c'est quelque chose aussi qui est concentré chez certaines clientèles et en fonction même de certaines problématiques. On remarque, dans ces clientèles-là, un nombre important de «baby boomers» qui sont un peu désabusés du système médical, qui, lorsqu'ils étaient plus jeunes, pensaient que ça irait plus vite, qu'on découvrirait des remèdes au cancer, au sida, mais qui se rendent compte que ça ne progresse pas assez rapidement et qui s'attendent à des résultats rapides. Il y a aussi les populations âgées, des gens aussi souffrant de cancer, de problèmes de dos, d'arthrite, de rhumatismes. Ce sont toutes des problématiques pour lesquelles on retrouve un nombre de personnes qui vont recourir davantage que la moyenne de la population à des pratiques alternatives. C'est ce qui a fait dire à Jallut, en 1992 — c'est un des ouvrages que nous avons consultés — que «l'homme fait appel à la magie devant un danger qu'il ne maîtrise pas». Et c'est ce qui fait aussi que les Américains, présentement, dépensent plus de 1 000 000 000 $ par année pour des médicaments dont l'efficacité thérapeutique n'est pas démontrée.

Il y a aussi, au niveau des pratiques alternatives, une tendance très forte au multirecours, c'est-à-dire qu'on ne consultera pas qu'un seul praticien, on va en consulter plusieurs. Et, qui plus est, ça n'empêchera pas les gens de consulter également le médecin. Donc, on va consulter un nombre important de gens. Donc, ces approches ne représentent certainement pas une forme de prévention et encore moins une source d'économies.

Un quatrième point: le choix d'un praticien alternatif est habituellement fait en fonction de ce qu'on critique le plus chez le médecin, soit son manque de disponibilité, soit le fait que son approche est jugée comme froidement scientifique et qu'il ne s'occupe pas suffisamment du côté des aspects subjectifs des malades. On recherche donc quelqu'un qui est fort, qui est doux, qui est gentil, qui est puissant, qui est attentionné, qui est à l'écoute surtout et qui est sympathique. On le considère davantage comme une personne que comme un professionnel de la santé. Les praticiens alternatifs, du moins certains, ont donc très bien compris cette recherche et ce besoin des patients et, souvent, à défaut d'une véritable formation, ils vont donc offrir à leurs clients une très grande qualité d'accueil, du respect, de l'acceptation, de l'écoute. En fait, leur approche va être beaucoup plus personnalisée. Ceci est sans doute une leçon importante, je pense, que la médecine scientifique aurait avantage à prendre très au sérieux et à développer davantage dans la formation des médecins. Il semblerait, par ailleurs, qu'actuellement des efforts importants se font à ce niveau-là, au niveau surtout de la formation en médecine familiale.

Cinquième point: les praticiens alternatifs de tous ordres sont fort nombreux au Québec. On estime leur nombre à environ 7000. Ils constituent donc un lobby important, même si, dans bien des cas, ils ne s'entendent pas sur divers points de vue. Il arrive souvent que, mutuellement, on s'accuse de charlatanisme. Le problème principal — et ça répond directement à une des questions soulevées par la commission — c'est qu'on trouve que leur formation laisse très souvent à désirer. Il y a même Benedetti, en 1989 — la référence est dans notre mémoire — qui parle d'une véritable «soupe d'alphabet» de diplômes non reconnus, parfois obtenus à la suite de cours par correspondance. bon, ce sont souvent des gens, les praticiens alternatifs, qui ont des métiers ou des professions traditionnels. on a des exemples d'arpenteurs qui ont été recyclés en irrigateurs du côlon; on a des vendeurs qui ont été recyclés en dispensateurs de cours de croissance personnelle. je pense qu'il faut être conscient, ici, du danger très important que représente pour le public le fait d'être très mal informé sur la formation des thérapeutes alternatifs et surtout, comme le mentionne une enquête de l'office des professions en 1991, le fait que 82 % de la population croient que ces gens-là ont étudié dans des établissements reconnus. le titre de docteur, quel que soit son origine, qui est employé souvent allègrement par certains praticiens alternatifs, possède toujours une certaine aura dans la population, et celle-ci a beaucoup de difficultés à distinguer les vrais des faux. (9 h 20)

II y a certains praticiens alternatifs aussi qui sont de véritables experts dans la manipulation de l'information et des curriculum vitae. Il m'est déjà arrivé d'avoir affaire à quelqu'un qui indiquait sur sa carte d'affaires qu'il était un ex-professeur à l'université de X. Bon, j'ai été impressionné. J'ai fait des vérifications, et j'ai découvert que cette personne avait loué une salle dans un centre communautaire de ladite université et avait donné des cours. À ce moment-là, donc, une fois le cours terminé, on devient un ex-professeur à l'université de X.

Il y a aussi une utilisation abondante du mot «ordre». Le mot «ordre» n'est pas réglementé. On a réglementé dans le Code des professions le mot «corporation», surtout affublé du qualificatif «professionnelle». Mais le mot «ordre», qui a été l'appellation que bien des corporations ont conservée encore aujourd'hui, n'est pas réglementé. Donc, on l'utilise abondamment, parce que ça donne une apparence de crédibilité scientifique. Il y a des associations également qui n'ont que quelques membres et qui sont, en fait, des raisons sociales de quelques individus.

Mais je pense à un exemple que j'aimerais donner à la commission, qui va aller dans le sens de la prudence en ce qui concerne toute reconnaissance: c'est ce qui se passait au ministère de l'Éducation il y a une dizaine d'années. Il y a une dizaine d'années, le ministère de l'Éducation du Québec reconnaissait, accréditait les cours de culture personnelle. Ceci a duré pendant un certain nombre d'années et, suite à des pressions de groupes de consommateurs, ça a été complètement abandonné par le ministère parce qu'il y a bien des gens

qui utilisaient cette accréditation-là pour signaler à la population qu'ils faisaient montre d'une grande compétence, encore plus grande parce qu'elle était reconnue officiellement par notre gouvernement. Je pense qu'il faut donc utiliser cet exemple, l'étudier, l'analyser à fond pour voir un peu dans quel sens on peut éventuellement, peut-être, reconnaître certains praticiens. Bon.

Il y a aussi une prolifération incroyable d'approches, de méthodes, de techniques alternatives. On estime qu'il y en a plus de 400 aujourd'hui. Donc, évidemment, il y a une nécessité de mettre de l'ordre dans tout ça et, évidemment, pour la protection du public qui, lui, y perd son latin. Bon. Il y a un certain nombre de ces approches — on estime que c'est environ 20 % — qui touchent plus directement les problèmes de santé mentale. On reviendra sur ces approches-là.

Une sixième constatation, c'est que, dans notre évaluation des pratiques alternatives, on a constaté un excès de syncrétisme. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire qu'il est très fréquent de rencontrer des théories explicatives qui vont joyeusement agglomérer les postulats les plus hétéroclites avec des termes empruntés au vocabulaire scientifique. C'est une joyeuse soupe, une jolie soupe de toutes sortes d'éléments: de la philosophie taoïste avec des concepts qui font appel aux énergies vitales et à toutes sortes de concepts. Et le résultat final est parfois étonnant et a pour objectif, a pour but de donner au tout une apparence scientifique dans une perspective, donc, d'une plus grande crédibilité.

Une septième constatation: presque toutes les pratiques alternatives, ou un très grand nombre d'entre elles, vont référer au concept d'énergie. En fait, l'énergie — que personne n'a identifiée — il faut la faire circuler, il faut la débloquer, il faut la libérer. En fait, c'est comme si l'être humain, c'était un renvoi d'eau ou un bout de tuyau de la grande plomberie cosmique. Bref, la construction d'une thérapie alternative repose en grande partie sur l'amalgame, le bricolage, la superposition des discours, des sources, des arguments d'autorité, des traditions et parfois même des siècles et des cultures. Le danger, c'est que ce syncrétisme peut, à bien des personnes, parfois donner l'impression d'une savante synthèse des savoirs, ce qui est très dangereux parce que ce n'est absolument pas le cas.

Aussi, il y a certaines pratiques qui sont très limitatives ou très réductionnistes. Dans le fond, on utilise souvent la même grille de lecture quel que soit le problème qui est présenté, la même technique, le même discours thérapeutique. On ne fait pas de distinction entre les problèmes et l'approche. C'est la même approche. C'est la seule que l'on connaisse. Quelquefois aussi, il y a une tendance à culpabiliser l'individu, parce qu'on lui dit qu'il est le principal responsable de tous ses malheurs.

Dans La Presse de ce matin, on rapportait ce qu'on nous a dit hier ici, ce qui a été dit par l'ACEF concernant les cours de croissance personnelle. Les explications théoriques qu'on donne sont souvent basées sur des modes de raisonnement qui sont régressifs, primitifs, en fait, caractérisés par la pensée magique. C'est le point de départ. La pensée magique, c'est un mode de raisonnement qui, comme vous le savez, est préscientifïque, et c'est dû au fait que, pour bien des gens, la complexité du monde contemporain est très difficile à appréhender. En fait, c'est beaucoup trop compliqué d'essayer de comprendre ce qui se passe. On essaie de prendre quelque chose, d'avoir des résultats rapides. Donc, on assiste à un retour en force de l'intuition, de la foi et de l'ésotérisme.

Mais le risque premier de cette reconstruction magique dans le domaine plus particulier de la santé, c'est qu'on peut sombrer dans l'absence complète de normes de pratique, dans l'absolue témérité du guérisseur autodidacte, dans le fouillis des théories sans fondement, sans preuves et qui ne possèdent pas, non plus, de cohérence interne. Il y a Bensaid, un auteur qu'on a consulté, en 1988, qui a écrit dans son ouvrage qui s'intitule «Le sommeil de la raison, une mode: les médecines douces»: «Les médecines dites douces jouissent d'une vogue que rien, à l'examen, ne justifie, mais qui, à défaut d'une légitimité scientifique, leur conférerait une "légitimation sociale".»

En fait, il y a quatre type de préjudices — et c'est là notre neuvième constatation — qui peuvent être causés par des pratiques parallèles. Et ça, c'est selon McGinnis, un auteur qui a parlé de ça en 1990. Il y a d'abord le préjudice économique. Bien sûr, il peut y avoir, pour certains, une véritable arnaque; les gens peuvent carrément se faire avoir, individuellement et personnellement. Mais aussi ça peut être un préjudice économique qui va plus loin que ça. En 1983, aux États-Unis, il a été constaté que 4 fois plus d'argent était dépensé pour des pratiques alternatives que pour la recherche sur le cancer.

Il y a aussi, en deuxième lieu, des préjudices directs. Des préjudices directs, ça peut être une question de toxicité à la suite de l'ingurgitation de certaines préparations, de certaines potions magiques, des lésions qui peuvent être causées par, entre autres, des techniques d'irrigation du côlon, des problèmes de métabolisme par l'ingurgitation de multivitamines. Il y a aussi des préjudices indirects. Des préjudices indirects, ça consiste dans l'omission ou le retard des traitements médicaux nécessaires ou requis par une condition particulière ou par le fait qu'on pose des diagnostics, au départ, incorrects. Et, ici, je me permets de dire que les praticiens alternatifs n'ont pas la formation requise pour poser des diagnostics. On pourra y revenir dans la période de questions, si vous le voulez bien.

Ensuite, le dernier préjudice, c'est le préjudice social. Le préjudice social, bien, c'est tout simplement quand on constate que, souvent, il peut y avoir un détournement de fonds publics qui pourraient être, dans bien des cas, consacrés à des besoins beaucoup plus urgents.

Pour nous, les multirecours en pratique alternative sont coûteux et entraînent la dépendance des clients envers leurs guérisseurs parallèles. Une étude importante, je pense, que la commission aurait avantage à

consulter en détail, c'est une étude du gouvernement américain en 1984. En fait, c'est le rapport du sous-comité du Sénat américain sur la santé et les soins à long terme. Ce rapport, qui s'intitulait, en anglais, «Quackery: A 10 $ Billion Scandai», mentionne qu'il y a des sommes colossales qui sont consacrées à des pratiques sans fondement scientifique. En fait, ça excède les 10000 000 000 $ par année, auxquels il faut rajouter, bien sûr, les coûts en souffrance humaine, les coûts en désillusions, etc.

Il y a aussi l'exemple du Bristol Cancer Help Centre. Ceci est intéressant comme exemple et ça va, je pense, dans le sens de ce qu'on a lu ce matin dans le journal comme étant les propos du ministre, hier, sur la nécessité de la recherche scientifique. Le Bristol Cancer Help Centre est un centre alternatif qui croyait en ce qu'il faisait et qui a décidé de soumettre à l'évaluation scientifique son travail. Ce centre-là travaillait surtout avec des gens qui étaient déjà atteints de cancer. L'étude approfondie des techniques utilisées au Bristol Cancer Help Centre, en Angleterre, a démontré que le traitement au Bristol était tout simplement désastreux. En fait, le taux de mortalité était deux fois plus élevé et le taux de métastases trois fois plus élevé que chez les patients qui recevaient un traitement médical hors Bristol.

En conclusion de tout ce qui précède, on pense, premièrement, qu'on ne doit jamais présumer de l'efficacité ou même de l'innocuité d'une pratique parallèle. 11 peut arriver qu'on puisse être trompé et satisfait et content. deuxièmement, l'évaluation scientifique des approches alternatives nous apparaît nécessaire. la méthode scientifique doit être rigoureuse et les résultats doivent être publiés et, même, répliqués. troisièmement, on pense que le gouvernement doit faire preuve de prudence pour toute reconnaissance formelle de thérapies alternatives avant qu'un nombre suffisant de résultats scientifiques probants ne l'autorise à agir dans cette direction. et on pense, enfin, que les praticiens alternatifs doivent avoir le courage et l'honnêteté d'encourager, comme ça s'est fait au bristol, une évaluation scientifique objective de leurs pratiques.

Au plan scientifique, on pense qu'il est important d'évaluer ce qu'on appelle en sciences l'effet placebo. L'effet placebo, comme vous le savez, c'est un moyen privilégié pour discerner si le résultat qu'on obtient, la guérison obtenue est véritablement attribuable au traitement qui a été donné. Dans certains cas, le placebo, ça peut être une petite pilule, une substance inerte qui remplace une substance active. Il n'y a rien dans cette pilule-là, mais on veut voir si l'effet de la pilule comme telle est valide. Ou ça peut être, dans le cas de la psychothérapie, un pseudo-traitement ou quelque chose qu'on fait; ce n'est pas l'absence de traitement, c'est quelque chose pour lequel on essaie de déterminer si ça a un effet thérapeutique. (9 h 30)

Vous n'êtes pas sans savoir que l'effet placebo explique de 30 % à 60 % des effets positifs observés dans différentes formes de thérapie et même produit des effets secondaires négatifs dans 7 % à 36 % des cas. Au plan psychologique, l'effet placebo peut s'expliquer de trois façons. C'est soit l'effet même du praticien, la confiance qu'il inspire, l'autorité qu'il dégage qui peuvent produire les résultats. La nature de l'attribution que le sujet effectue, c'est-à-dire que, si le sujet pense que telle chose va donner un résultat, il arrive dans bien des cas que telle chose donne un résultat. C'est comme ça. Et aussi la suggestibilité; la suggestibilité, c'est le fait que des gens ont des attentes particulières par rapport à des interventions.

Un exemple auquel j'ai participé comme chercheur peut peut-être illustrer cet aspect-là: je participais à une recherche sur l'arthrite rhumatoïde; on avait un certain nombre de patients qui portaient les petits bracelets de cuivre, vous savez, dont on dit qu'ils ont un effet sur la diminution des symptômes de l'arthrite rhumatoïde. Et, de fait, il y a un certain nombre des patients qui ont expérimenté cette diminution d'effets. Mais, en même temps, ces patients-là, on avait mesuré a priori leur degré de suggestibilité et on a constaté — et ce n'était pas, pour nous, surprenant — une corrélation très élevée entre leur niveau de suggestibilité et l'effet ressenti. Donc, il y a un effet très net entre les deux, et qui est loin de l'effet produit par lui-même par le bracelet de cuivre. Ça aurait pu être un bracelet de n'importe quoi; quelle que soit la théorie qu'on lui attribue, ça fonctionnait quand même.

Bon. Écoutez, avant de passer aux recommandations comme telles, puisqu'il ne me reste que peu de temps, je vais simplement mentionner un exemple que vous connaissez sans doute. Présentement, au National Institutes of Health, à Bethesda, Maryland, où est traité notre premier ministre — je pense que c'est un endroit qu'on connaît bien — ils ont créé l'an dernier, en 1992, un office de l'évaluation des pratiques médicales non conventionnelles. Un budget de 2 000 000 $ a été consacré à cet effort, et ils ont l'intention, notamment, d'évaluer l'acupuncture, l'homéopathie, la naturopathie et la massothérapie; et ceci est fait à la demande du Congrès américain. Bon. Nous, on va y revenir dans nos recommandations.

Les recommandations que l'on fait à la commission, il y en a sept. La première, c'est que le gouvernement ne reconnaisse pas légalement le statut et les pratiques des thérapeutes alternatifs, que ce soit, par exemple, par la création d'une corporation professionnelle, par celle d'un registre des thérapeutes alternatifs ou par l'instauration d'un office des thérapies alternatives.

Deuxièmement, que le ministère de la Santé et des Services sociaux contribue à la prévention en matière de santé et à la protection du public en effectuant une campagne d'information publique visant à informer les citoyens des risques potentiels et des coûts économiques et sociaux reliés au recours à des praticiens non professionnels, insuffisamment formés, et à des pratiques sans fondements scientifiques apparents.

Troisièmement, que le ministère de la Santé et des Services sociaux et l'Office des professions étudient la possibilité de réserver le titre générique de «thérapeute»

aux seuls membres de corporations professionnelles de la santé.

Quatrièmement, que le ministère de la Santé et des Services sociaux soutienne financièrement des organismes autonomes d'information publique comme Info-Secte, qui est passé ici hier, et Info-Croissance, et propose la création d'un organisme similaire dans le domaine spécifique des pratiques alternatives, qui pourrait s'appeler Info-Pratiques alternatives.

Cinquièmement, que le mandat de l'Office de la protection du consommateur soit clarifié ou ajusté pour pouvoir répondre spécifiquement aux questions et aux plaintes du public dans le domaine des thérapies alternatives.

Sixièmement, que les corporations professionnelles dans le secteur de la santé, par le mécanisme de la formation continue, et les départements universitaires correspondants au niveau de la formation professionnelle contribuent à assurer une meilleure formation aux principes et aux pratiques de base de la relation d'aide, soit des techniques pour améliorer l'accueil, l'empathie, le respect, l'écoute, de façon à pouvoir mieux répondre aux besoins subjectifs des patients.

Et, enfin — et c'est la recommandation qui est reliée avec l'effort scientifique fait au National Institutes of Health — que le ministère de la Santé et des Services sociaux observe de près l'expérience américaine actuelle au NIH, qu'il en fasse connaître publiquement les résultats et qu'il examine l'opportunité de consacrer également des sommes à des programmes d'évaluation scientifique des approches alternatives les plus populaires au Québec. Pour ne pas nuire aux autres priorités du ministère en matière de recherche et de prévention, on pense que les fonds consacrés à cet effort devraient être limités et qu'ils devraient être complémentés par les associations de thérapeutes alternatifs qui désirent une plus grande reconnaissance publique, de façon à ce qu'ils assument une partie prépondérante du financement de ces recherches.

Voilà, nous sommes disponibles pour répondre à toutes vos questions. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Sabourin. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. C'est un mémoire qui est fouillé, qui fait un vaste tour de la littérature et qui est marqué, à mon point de vue, par un souci d'évaluation scientifique des thérapies alternatives. Je pense que, si j'ai bien saisi la trame de fond, l'évaluation scientifique doit primer, avant même d'avoir une reconnaissance légale des thérapies alternatives, qu'elles soient dans le peloton de tête qu'on reconnaît... Vous en avez mentionné tantôt qui font l'objet d'études plus poussées et plus scientifiques au niveau des États-Unis — homéopathie, ostéopathie, massothéra-pie, et ainsi de suite — dans des instituts qui ont une auréole agrandie au Québec depuis un certain temps, ou ailleurs. Donc, pour vous, l'aspect scientifique est majeur. Et je ne veux pas vous amener dans un piège; je vous dis tout de suite où je veux en venir, parce que l'occasion est rêvée.

Vous avez parlé de La Presse de ce matin, je vous parle du Devoir d'hier. Je pense que ça m'apparaît important, compte tenu du fait que Le Devoir d'hier consacre quand même une bonne page aux, semble-t-il, «nouveaux sorciers». Le titre était assez gros. On connaît ça un peu, nous autres aussi. À l'occasion, on est victimes de gros titres et on sait ce qui en reste. Il en reste toujours quelque chose. Donc, on va profiter de la commission, ce matin, pour aller chercher les éléments qui retiennent notre attention et vous donner l'opportunité de répondre à ces questions-là.

Dans votre témoignage, plus votre témoignage avançait, plus je jetais un oeil sur l'article, du coin de l'oeil, pour voir certains effets, et il me paraît y avoir deux opinions différentes. Et, comme vous êtes, finalement, la Corporation professionnelle, ceux qui avez à protéger le public, et vous le faites par la volonté d'une évaluation scientifique, est-ce que, à votre point de vue, dans votre profession, tout est évaluable sur le plan scientifique?

M. Sabourin: Bon. Écoutez, il existe des ouvrages savants—j'en ai même un avec moi, qui est un super gros ouvrage — qui font le point sur ce qu'on appelle aux États-Unis, en anglais, l'«outcome and process study in psychotherapy». Il y a, depuis au moins une trentaine d'années, un très grand nombre d'études qui ont été réalisées à ce sujet-là. Et, qui plus est — une information que vous ne possédez pas — la Corporation professionnelle des psychologues procède actuellement — parce qu'on pratique ce que l'on prêche — à l'évaluation d'un mode psychothérapeutique un peu percutant, celui des régressions dans les vies antérieures. Il y a un rapport qui va être disponible bientôt à ce sujet-là. On a un groupe d'experts qui a travaillé là-dessus, qui a analysé toute la littérature pertinente, qui a rencontré des gens qui pratiquaient ces approches-là et qui va, donc, soumettre au bureau de la Corporation des recommandations à ce sujet-là.

Étant donné qu'on a connu dans le passé, avec certains de nos membres, un certain nombre de difficultés concernant un certain nombre d'approches, la Corporation a l'intention, donc, dans la mesure de ses capacités, de faire des évaluations, quand ça va être possible, en fonction du fait que, dans notre code de déontologie, l'article 1 mentionne que le psychologue doit utiliser des techniques pour lesquelles il existe des bases scientifiques reconnues. Donc, nous les premiers, c'est quelque chose qui nous préoccupe, et on a l'intention de s'y «adresser». Et, si ça vous intéresse, j'ai une bibliographie complète sur les résultats concernant l'évaluation de la psychothérapie, des modalités plus traditionnelles de psychothérapie: «behaviorale», psychodynamique et autres. Il y a quand même beaucoup de recherches faites à ce sujet-là.

M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, c'est qu'il y a une préoccupation, chez vous, très impor-

tante d'évaluation scientifique. Vous m'apprenez, et ça ne me surprend pas, l'article 1 de votre code de déontologie, qui est assez clair.

Dans l'article du Devoir d'hier, il y a quand même des affirmations qui sont là, qui sont assez percutantes, merci. Comme on sait que les gens, plus souvent qu'autrement, sont attirés par les titres et gardent l'impression à partir du titre... Comme je vous l'ai dit tantôt, on est confrontés à ça chaque jour, comme hommes politiques, donc... On dit: «Les nouveaux sorciers. La psychothérapie est un art qui fait courir les foules, mais son efficacité n'est pas toujours facile à mesurer.» Évidemment, à l'intérieur de l'article, ce qu'on dit... Vous suivez avec moi, là.

M. Sabourin: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): «Les recherches indiquent que 45 % des effets positifs de la thérapie sont liés au facteur de la rémission spontanée. En d'autres mots, un nombre important de clients en thérapie auraient pu trouver une solution à leurs problèmes en demeurant tout simplement à la maison. Bref, le temps arrange souvent les choses.» (9 h 40)

Et, quand on continue, on cite de vos gens. J'imagine qu'ils sont membres de l'ordre, là.

M. Sabourin: Certains.

M. Côté (Charlesbourg): Oui? Certains? O.K. Alors, c'est pour ça que je vais peut-être en profiter pour faire la distinction, puis, tant qu'à y aller, continuons, là, sur le plan des citations, puis on essaiera de tout ramasser ça ensemble. Plus loin, il est dit: «La question de la durée du traitement agace plusieurs psychologues. Conrad Lecomte insiste sur la responsabilité sociale des psychologues. "Ce n'est pas facile d'aborder cette question avec les collègues peut-être parce qu'il y a des implications économiques".» Ce ne serait pas la seule place, d'ailleurs; il y en a à d'autres aussi. Donc, plus loin, il dit, M. Lecomte, «que les psychologues doivent faire preuve d'humilité. "La technique a un rôle mineur à jouer, dit-il. Le succès d'une thérapie est lié à la qualité de la relation entre le client et son thérapeute".»

Si on prenait cette déclaration pour acquise, il y a donc des aspects qui, sur le plan de la valeur scientifique, seraient difficiles à évaluer. J'en ai l'impression, à tout le moins. Et comment vous conciliez cela avec votre article 1 de votre code de déontologie? Je pense qu'on a besoin de se faire, à ce niveau-là, rassurer et, par le fait même, vous avez une opportunité extraordinaire, ce matin, de le faire.

M. Sabourin: Je peux vous donner un commencement de réponse et demander à mon collègue, Germain Lavoie, de continuer après. Dans ce que vous mentionnez, vous dites que ce n'est pas facile à mesurer. C'est certain que ce n'est pas facile, parce que... On appelle ça une approche multifactorielle. Il y a bien des choses qui varient en même temps, mais ce n'est pas impossible à faire. La preuve: j'ai quand même un certain nombre d'études, et Conrad Lecomte est quand même un des spécialistes à ce sujet-là. Il peut vous en parler de la même façon que moi.

Par ailleurs, c'est sûr qu'il y a des gens pour qui le simple passage du temps va entraîner une rémission spontanée. Bon. C'est un nombre important de personnes. Par ailleurs, il y a des études qui démontrent que ça varie en fonction de la gravité préalable du problème que les personnes ont au départ. Il y a certains problèmes que le passage du temps n'améliorera pas, mais il va les détériorer. Il y a des gens qui ont des problèmes courants de vie quotidienne, et c'est certain qu'ils n'ont pas, à chaque fois et nécessairement, à consulter quelqu'un pour obtenir un effet positif. S'ils le font, bien, évidemment, une partie de l'effet positif qu'ils vont obtenir va être due tout simplement au passage du temps. Il y a beaucoup d'études qui démontrent ça. Mais je pense que c'est important. Vous voyez le genre d'étude, justement: on essaie d'extraire, des interventions qu'on pratique, ce facteur-là. On ne le garde pas sous silence. Je pense que, ça, c'est un élément important. Peut-être que Germain Lavoie peut continuer et vous apporter son point de vue.

M. Lavoie (Germain): M. le ministre, je dirais que, dans notre perspective de souci scientifique, on prend une certaine distance par rapport à l'article du Devoir d'hier qui, lui-même, si vous voulez, est une espèce de résumé très succinct, très parcellaire, certainement, des choses qui ont pu être dites par Conrad Lecomte en particulier et puis par d'autres intervenants.

M. Côté (Charlesbourg): Ça va nous consoler, nous, les politiciens. Comme ça, ce n'est pas seulement à nous que ça va arriver.

M. Lavoie: absolument. effectivement, la question des listes d'attente dont on parlait tantôt, c'est-à-dire les 45 % qui sont rapportés, là, et que vous avez évoqués, ça, c'est une donnée qui remonte aux études d'eysenck — et ça date déjà, quand même, d'une trentaine d'années — qui a été un des premiers à démontrer, effectivement, que, dans des listes d'attente hospitalière, par exemple, il y avait des rémissions spontanées qui survenaient et que, si on faisait une étude d'efficacité de la psychothérapie sans tenir compte de ce facteur du passage du temps, on était dans les patates. alors, c'est une question méthodologique fondamentale et, naturellement, toutes les études contrôlées sur l'efficacité des différentes formes de psychothérapie vont prendre en compte la question du passage du temps, comme elles vont prendre en compte l'effet simple, par exemple, d'avoir un contact avec un thérapeute, etc. donc, ça, c'est une question de contrôle des schemes expérimentaux.

Et ce qu'on dit, au fond, dans notre mémoire, c'est que ce n'est pas nécessaire, si vous voulez, avant

qu'on fasse quoi que ce soit, que la validité scientifique d'une approche soit démontrée de a à z et tous azimuts. Ce qu'on dit, c'est qu'il doit y avoir, si vous voulez, une démarche scientifique dans la formation et dans la pratique professionnelle de qui que ce soit. Parce que, la science, c'est quelque chose qui évolue, naturellement, de façon constante.

Sur la question de la durée des thérapies, évidemment, les opinions sont partagées là-dessus. On peut dire que, effectivement, certaines thérapies se prolongent, sans aucun doute, et on peut dire aussi que d'autres thérapies sont définitivement trop brèves. Alors, le clinicien est toujours confronté à ce dilemme-là de savoir, si vous voulez, qu'est-ce qui est le mieux pour un patient donné à un moment donné. Moi, j'ai fait à la fois des thérapies prolongées, puis j'ai fait des thérapies ultrabrèves, une séance d'une heure ou deux heures avec certains patients et, je veux dire, il faut étudier ça dans chaque cas.

M. Côté (Charlesbourg): Je suis après gérer le temps, tenter de gérer le temps. Qu'est-ce que vous faites, comme corporation, pour vous assurer que vos membres respectent, finalement, votre code de déontologie? J'aimerais vous entendre là-dessus davantage parce que, hier soir, effectivement, on a eu des témoignages et, pendant un bon bout de temps, on a pensé que c'était un psychologue reconnu qui avait orienté des gens vers des cours de croissance personnelle, pour apprendre, ultérieurement, que c'est quelqu'un qui avait usurpé le titre, comme vous l'avez un peu évoqué tantôt. Et, à partir du moment où vous faites votre travail au niveau de vos membres, ce que j'ai compris, c'est que vous nous orientez, au-delà de la valeur scientifique, là, de la base scientifique, vers l'information de la population. Donc, je voudrais vous entendre davantage là-dessus, parce qu'une campagne publicitaire ne règle pas tout; elle rend disponible une information. Bon.

Vous ajoutez, là, une certaine permanence dans de l'information disponible sur le plan téléphonique, par trois propositions précises au niveau d'Info-Secte et des deux autres. Mais, d'abord, dans un premier temps, au niveau de votre corporation, vis-à-vis de vos thérapeutes, qu'est-ce que vous faites pour protéger le public? Et, à la lumière de cette expérience, qu'est-ce qu'on peut faire, en information additionnelle, pour protéger le public contre... Moi, j'avais toujours entendu, à un moment donné, 117; ça a augmenté à 265, et vous nous parlez d'au-delà de 400 thérapies alternatives. C'est le temps que la commission finisse, parce qu'on va finir avec...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): ...1000.

M. Sabourin: Bon. Il y a deux parties dans votre question...

Une voix: Je me demande si ça n'a pas doublé...

M. Côté (Charlesbourg): Oui.

M. Sabourin: Bon. Il y a deux parties dans votre question, M. le ministre. Je vais tenter de répondre dans l'ordre. La première, c'est la question du contrôle qu'on exerce sur nos membres par rapport à une pratique déontologique. Bien, ça, je pense que c'est clair. Il y a eu certaines causes célèbres qui ont fait l'objet des manchettes de journaux l'année dernière et qui touchaient à des problématiques de cette nature. Donc, nous, on est un peu entre l'arbre et l'écorce, là. On a le public à protéger, puis il y a, bien sûr, nos membres qui se plaignent qu'on abuse et qu'on fait parfois un excès de zèle à ce sujet. Ça fait que, malgré tout, on essaie de faire notre possible...

M. Côté (Charlesbourg): Et élu par ses membres.

M. Sabourin: Pardon?

M. Côté (Charlesbourg): Et élu par ses membres.

M. Sabourin: C'est exactement ça, oui. Bon. Malgré tout ça, on essaie, je pense, de faire un bon travail. C'est assez complexe, parce que, pour un certain nombre de thérapies, comme on le mentionnait tantôt, il n'y en a pas, d'évaluation scientifique. C'est pour ça que, nous-mêmes, concernant la régression dans les vies antérieures qui fait l'objet d'une certaine popularité, on a entrepris d'essayer de faire le tour de cette question-là. Il est prévu qu'on va le faire pour d'autres approches qu'on retrouve chez une certaine proportion de nos membres. Bon. Donc, concernant le contrôle, bien, on utilise à plein et à fond, j'oserais dire, les mécanismes disciplinaires. Ça nous coûte très cher; c'est une partie importante de notre budget. On dépense deux fois plus que la moyenne des autres corporations à ce sujet-là, puis ce n'est pas toujours facile. Quand c'est les membres eux-mêmes qui défraient ces coûts-là, il faut comme justifier ça en bout d'année, là.

Deuxièmement, l'information de la population. Je pense que, si on revient à l'article du Devoir que vous mentionniez, dans la petite colonne de droite, dans le bas, on voit, dans le dernier paragraphe, que la Corporation a préparé ce qu'on qualifie d'«excellent guide—ce n'est pas moi qui le dis — à l'intention des personnes qui désirent recourir aux services d'un psychologue». Ça fait que, bon... Donc, on a un certain nombre de publications qui sont disponibles pour le public. Depuis quelques années, on participe de façon régulière à des campagnes, habituellement en interaction avec d'autres professions. Un exemple, ça a été celui sur l'abus des tranquillisants avec l'Ordre des pharmaciens; on a donc fait imprimer une brochure qu'on a rendue disponible.

Egalement, à de nombreuses occasions en cours d'année, on fait des conférences publiques, et on a découvert là quelque chose d'absolument incroyable

comme besoin. Les premières conférences publiques — et c'est des conférences qui font le tour de la province, dans les principales villes, parce qu'on s'est dit qu'il y a des gens, bien sûr, qui habitent hors les grands centres — à chaque fois, c'est à guichet fermé. Ça fait trois ans, c'est la troisième année qu'on fait des conférences pour renseigner la population sur des choses qui ont rapport avec l'éducation des enfants, qui est un sujet très populaire, et on a l'intention de continuer dans ce sens-là, parce que le besoin est là, et on pense que c'est notre devoir de rencontrer ce besoin-là et de tenter d'aider la population à ce niveau-là. (9 h 50)

Nous, on ne dispose pas de budgets illimités. On pense, par ailleurs, qu'avec l'Office des professions et peut-être le ministère de la Santé et des Services sociaux on pourrait travailler en collaboration, éventuellement, pour mettre au point des campagnes. On est, d'ailleurs, consultés régulièrement. Tout récemment, la Régie de la région de Montréal nous consultait dans son dossier sur la prévention en santé mentale. Donc, on était la seule corporation qui était consultée, je pense, parce qu'on a déjà, au niveau du public, cette espèce d'habitude d'être en contact avec lui et de le renseigner.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, je vous en permettrai peut-être une autre petite dernière.

M. Côté (Charlesbourg): Une petite dernière, très rapide. Comme plusieurs intervenants devant la commission, vous souhaitez une clarification des pouvoirs de l'Office de la protection du consommateur. Est-ce que vous croyez que l'Office de la protection du consommateur a suffisamment de ressources? Vous allez me dire non, là, mais, au-delà des ressources sur le plan financier, est-ce que c'est l'endroit où il faut, effectivement, dire: Bon, tout le reste, tous ceux qui, sur une base scientifique, ne réussissent pas — parce que c'est un peu ça, la tendance qui s'est dégagée — à faire la démonstration d'un mieux-être au niveau des individus, bien, ça va devenir comme pour un plombier, un électricien, un vendeur de balayeuses: on envoie ça à l'Office de la protection du consommateur et, finalement, ce qu'on veut, c'est de l'information du public, puis le respect du contrat? C'est un peu ça, là. Est-ce qu'on ne marginalise pas un peu, à ce niveau-là, en envoyant ça à l'Office de la protection du consommateur? Ça me paraît être le fourre-tout, là. On se dit: On envoie ça là; l'Office se débrouillera avec ça, et on aura par la suite, nous autres, une bonne conscience.

M. Sabourin: Je pense que notre recommandation va dans le sens, surtout, de protéger le public contre les préjudices que j'ai qualifiés tantôt d'économiques. Ces préjudices-là, et uniquement ces préjudices-là, on pense qu'il devrait y avoir une instance, au niveau de l'administration publique, qui puisse s'en occuper et en ayant la compétence voulue pour ce faire. Je pense que l'OPC est un organisme qui a une longue tradition et qui possède les outils, les instruments nécessaires pour pouvoir, peut-être, lutter contre ces préjudices et, en fait, donner satisfaction au public qui s'estime lésé. C'est uniquement dans ce sens-là.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Et, évidemment, profiter de ça pour informer le public des délinquants et ainsi de suite, au-delà de l'information plus...

M. Sabourin: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg): Merci.

M. Gariépy (André): Et je pourrais ajouter, M. le ministre, que l'OPC a quand même une très bonne expérience et expertise dans tout ce qui concerne les questions de fausses représentations.

M. Côté (Charlesbourg): Mais pas beaucoup en thérapies alternatives.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Merci.

Le Président (M. Joly): Je vais maintenant reconnaître M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. S'il vous plaît, M. le député.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je veux souhaiter la bienvenue, au nom de l'Opposition, aux gens de la Corporation professionnelle des psychologues. Mémoire très intéressant et, effectivement, marqué nettement au coin de l'approche scientifique et des progrès, au cours des derniers siècles, de la méthode scientifique. C'est important, donc, de pouvoir compter sur des groupes qui nous présentent une façon dont nous pourrions aborder l'évaluation d'un certain nombre d'approches.

J'ai, cependant, M. le Président, envie d'être un peu sévère dans un certain nombre de questions, enfin, toujours pour aller dans la bonne direction de la protection du public et du mieux-être de la population, en me demandant, parfois, si le «scientifisme» n'est pas devenu lui-même une nouvelle religion qui serait capable de tout évaluer, de tout mesurer. On serait à l'aube du «scientifisme», de la méthode scientifique du mesurable et de l'observable. À ce compte-là, des phénomènes de l'esprit, de l'ésotérique, de tout ce secteur-là, quand allez-vous évaluer l'Église catholique? Quand va-t-on évaluer les Témoins de Jéhovah? Quand allons-nous évaluer la pratique religieuse d'un certain nombre, et la foi? Enfin, vous voyez bien, M. le Président, je grossis la question pour aller au bout et voir les limites de l'approche que vous suggérez, qui, à mon avis, n'ayez crainte, doit être utilisée.

Ce qui m'inquiète dans l'approche que vous dites, c'est: soumettons tout à la méthode scientifique, aux résultats observables et mesurables, et on aura des résultats pour indiquer au public ce qui peut présenter des

dangers, ce qui peut présenter des éléments de préjudice grave pour le public. Qui va établir, qui va décider qu'on doit évaluer telle approche, telle technique, telle orientation, telle pratique dite alternative par rapport à quelque chose, ça va de soi, par rapport à ce qui est reconnu actuellement principalement par le mécanisme du Code des professions? Comment on va décider cela? Comment on va définir qui va évaluer quoi et comment? Pourquoi on va faire ça?

M. Sabourin: Écoutez, ma réponse va peut-être vous sembler simpliste, mais on va le faire de la même façon, exactement, que les Américains l'ont fait pour déterminer, au niveau du NIH, qu'on était pour évaluer l'acupuncture, l'homéopathie, la massothérapie et l'autre que j'oublie. Je pense qu'on a suffisamment de gens bien au courant des différentes techniques d'intervention en santé, soit au ministère ou soit présents dans la société, pour ensemble prendre ce genre de décision là.

En ce qui concerne l'aspect du préambule de votre question, qui touchait à l'évaluation de la religion, écoutez, c'est certain qu'on ne veut pas évaluer les systèmes de croyances. On le dit dans notre mémoire, un système de croyances, c'est quelque chose auquel on adhère sans même se poser de questions. Et ça, nous, on respecte ça, sauf qu'on dit que, souvent, au niveau de ce qu'on prétend être des résultats d'intervention, donc qui pourraient être mesurés scientifiquement, de fait, c'est le résultat d'une croyance. Le système de croyances, pour nous, ce n'est pas quelque chose qui est apprehensible par les méthodes de la science. D'ailleurs, il n'y a pas de raison de le faire. D'ailleurs, les religions ne prétendent pas guérir, si ce n'est l'âme. C'est pour ça qu'à ce moment-là, pour nous, ça ne nous apparaît pas être quelque chose devant être fait. Je ne sais pas, peut-être que mon collègue Lavoie aurait des choses...

M. Lavoie: Bien, peut-être que j'aurais envie d'enchaîner un peu sur la question du diagnostic, qu'on n'a pas abordée actuellement, qui se rapporte en partie au mesurable, mais en partie aussi au non-mesurable, à l'intuitif. C'est la partie à la fois scientifique et artistique, disons, des sciences de la santé. Une des questions qui nous préoccupent le plus dans toute cette histoire des thérapies alternatives, c'est d'abord le fait que le mot «thérapeute» lui-même revient partout et que nulle part, ou très rarement, en tout cas, voit-on des systèmes diagnostiques cohérents et documentés dans ces organisations-là, alors que le critère de base, disons, qui va guider la formation d'un psychologue ou d'un médecin ou d'un physiothérapeute, par exemple — prenons les disciplines qui sont à l'intérieur du giron de la santé — c'est d'acquérir, avant toute chose et avant d'intervenir au niveau du traitement, une formation très solide au niveau du diagnostic, premièrement, avant le début du traitement.

Et, ensuite, il faut comprendre que c'est une perspective, la perspective diagnostique, et que, dans notre pratique, c'est quelque chose qu'on exerce tous les jours, avec chaque patient qu'on voit, même au cours d'une thérapie. L'évaluation du progrès de la thérapie se fait en fonction de paramètres diagnostiques qu'on a toujours, en quelque sorte, en arrière de la tête, «in the back of the mind». Et ça, c'est une question qui nous paraît tout à fait capitale. Je veux dire: Si, moi, je veux envoyer mon père, ma mère, mon frère, ma soeur en traitement, je m'attends à ce que la personne qui va la recevoir soit habilitée à fournir à cette personne que je lui envoie en toute confiance une évaluation diagnostique solide et soit en mesure de réévaluer le diagnostic.

Alors, je voudrais dire ça, parce que la perspective scientifique n'est pas seulement ce qui est absolument mesurable, mais comporte aussi, si vous voulez, un corpus de savoir qui est acquis par expérience, d'une façon plutôt empirique que, disons, expérimentale, mais qui fait aussi partie de la science.

M. Sabourin: Juste une courte addition. Ça me fait penser, justement, qu'au niveau du projet de loi 43, en Ontario — je pense que vous l'avez vous-même cité à quelques reprises — la façon de fonctionner est très différente de ce qui existe au Québec. Et, en ce qui concerne la psychologie, c'est intéressant de constater les modalités qu'on a mises en place. Il y a les psychologues qui possèdent un certain nombre d'actes, notamment le diagnostic — ça fait partie des actes partagés avec les médecins et avec d'autres — et on a créé une nouvelle catégorie de ce qu'on appelle, en anglais — je ne sais pas la traduction française — «psychological associates». C'est des gens qui n'ont pas le doctorat en psychologie, qui ont la maîtrise et qui doivent, pour des considérations diagnostiques, travailler sous la supervision de la personne qui est, elle, «psychologist» ou qui a donc le titre complet de pratique. Toute cette notion-là de supervision m'apparaît être quelque chose d'important pour éviter ce que Germain Lavoie appelait les abus possibles des mauvais diagnostics. (10 heures)

M. Trudel: Bien, ça me semble important, à partir de cet exemple-là que vous donnez, en terminant, dans votre réponse, de soulever cela parce que je donne mon opinion là-dessus aussi. Il faut que l'évaluation soit multicritériée. Il faut qu'elle inclue l'ensemble des éléments de la critique et un ensemble de points de vue, parce que vous êtes en plein dans le secteur scientifique de la psychologie. Souvenons-nous, encore récemment, au cours des 30 dernières années, quand les travaux de Skinner ont été mis à jour: Hors du behaviorisme, point de salut chez les psychologues. Tous les autres, tous les freudiens et les autres approches, étaient bannis de l'église de la psychologie scientifique. Hors du behaviorisme, on était des galeux du système, on partageait des croyances. Et, pourtant, vous savez très bien que les behavioristes ont fini par se rattraper en se définissant souvent comme étant du behaviorisme social, hein? Ils ont compris que...

M. Sabourin: Cognitif.

M. Trudel: Ou comment? M. Sabourin: Cognitif.

M. Trudel: Cognitif. Oui, tout à fait. Je dirais, un peu à la blague, pour rattraper l'histoire et rattraper la science aussi, ce qui avait été fait dans d'autres secteurs. Il faut donc, à mon avis... Et je dois vous dire que je supporte entièrement, quant à moi, la nécessité de l'évaluation dite scientifique, mais non pas dans un cadre cartésien strict, très strict. Il faut que tous les points de vue soient inclus, et la source d'évaluation va donc devenir extrêmement importante, et la variation des sources, des lieux d'évaluation va donc devenir extrêmement importante.

Sur le plan concret, je veux bien croire qu'on n'a pas à reconnaître, qu'on n'a pas à légaliser... Je vais prendre vos termes: «Que le gouvernement ne reconnaisse pas légalement le statut et les pratiques des thérapeutes alternatifs.» Mais, à partir de l'affirmation générale qu'on contrôle bien ce qu'on connaît bien, ce n'est pas parce qu'on ne les reconnaîtrait pas légalement, vous l'avez dit un peu tantôt, qu'on va les faire disparaître de la surface nord-américaine, qu'on va faire disparaître, qu'on va nier le phénomène. À mon avis — et je vous demande tout simplement votre opinion — à ce moment-ci, je crois que le risque est plus élevé de laisser circuler ça de façon extrêmement libre sans aucun point de référence pour le consommateur, la consommatrice, pour le citoyen et la citoyenne par rapport au fait de donner un certain encadrement — je choisis mes mots; la commission n'a pas terminé ses travaux — que certains traduiront — et votre référence au ministère de l'Éducation par rapport à un certain nombre d'activités de fonctionnement doit nous faire réfléchir — que certains interpréteront peut-être, c'est-à-dire un cadre qui va être interprété comme une reconnaissance de l'état et de l'existence, donc, en soi du phénomène.

Ce que je vous demande comme question, c'est: À partir du moment où ça existe, où il faut encadrer cela, quels sont les autres moyens qui pourraient être à la disposition d'un État ou du gouvernement pour contrôler le phénomène des thérapies alternatives, contrôler au sens de connaître et être capable de les identifier pour éventuellement renseigner le public? Est-ce que ça vous apparaît une voie qui, quand même, est explorable et souhaitable?

M. Sabourin: Comme je l'ai mentionné tantôt, je pense, d'une façon relativement extensive, on trouve qu'il y a des risques plus grands à reconnaître qu'à ne pas reconnaître parce que, déjà, la population est très mêlée à ce niveau-là et, déjà, comme l'indique le rapport de l'Office des professions, 82 % de la population pensent que des gens qui ont des pratiques alternatives ont des diplômes délivrés par des institutions reconnues, ce qui n'est pas le cas.

Nous, ce qu'on suggère à la place... Vous nous demandez, donc: Si ce n'est pas ça, qu'est-ce que ça peut être d'autre, quelle serait l'alternative, si je peux me permettre l'expression? Puisque, dans bien des cas, le préjudice subi est d'ordre économique, on pense que l'Office de la protection du consommateur, comme je répondais tantôt au ministre, serait une instance qui pourrait s'occuper des plaintes à ce niveau-là. On pense aussi qu'il y aurait un effort important d'information du public à faire, et ça, ça pourrait se faire avec la collaboration ou la coordination à la fois du ministère, de l'Office des professions et des corporations du domaine de la santé, et peut-être d'autres joueurs, aussi, que je n'identifie pas pour l'instant.

Je pense qu'on a un devoir important d'information du public. Ça, on ne le fait pas et on ne le fait pas depuis des années; c'est toujours reporté et, de fait, la population est très mêlée par rapport à tout ce qui concerne le monde professionnel. Je trouve que c'est très dommage qu'on utilise des faux-fuyants ou qu'on utilise des façons, à mon avis, plus simples et qui mettent de côté notre responsabilité, en créant une reconnaissance pour qui le risque est très grand d'être utilisée d'une façon pas directement reliée à ce que cette reconnaissance-là va impliquer.

Dans l'exemple que je donnais sur les cours de culture personnelle, bien — à l'époque, j'avais regardé le dossier — l'accréditation d'un cours de culture personnelle était uniquement associée au fait que les conditions minimales d'hygiène publique étaient respectées dans les établissements qui offraient les cours. Mais pensez-vous que les gens qui s'annonçaient comme étant accrédités par le ministère de l'Éducation, c'est ça qu'ils mentionnaient? Bien, pas du tout. C'était leur compétence qui était accréditée. Ça fait que c'est très dangereux de donner ça aux gens, dans la population, qui n'ont pas la formation voulue pour pouvoir faire la discrimination qui s'impose, de leur envoyer ça, vlan! et en mettant le sceau de l'approbation gouvernementale. Les gens font confiance à leur gouvernement. Peut-être qu'ils ne devraient pas, mais ils font confiance à leur gouvernement, et il faut qu'on tienne compte de ce facteur-là.

M. Trudel: Ce n'est pas un effet placebo, ça, vous voulez dire, là, hein? Non?

M. Sabourin: Ha, ha, ha!

M. Trudel: La confiance au gouvernement, ce n'est pas un effet placebo, non? O.K. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): M. Gariépy, vous voulez rajouter quelque chose?

M. Gariépy: Oui. Bien, je me permettrais peut-être d'intervenir en dehors du cadre de ma position ici, étant donné que je ne suis pas un scientifique, je suis simplement un avocat. Comme ça fait quelques mois que je suis à la Corporation des psychologues, je prétends encore avoir la virginité du citoyen simple et honnête dans sa vie paisible. Je me permettrai peut-être, là, à la surprise de mes collègues à la table, de faire un

petit cri du coeur du simple citoyen.

J'ai vu, dans mon groupe d'amis, des gens qui ont passé à travers toutes sortes de choses un peu capotées, là, dans ce genre-là, et je peux vous dire une chose: Quand le gouvernement, qui est là principalement pour représenter et protéger les citoyens, va donner une caution à quelqu'un, bien, moi, j'ai tendance à faire un peu confiance et à dire: Bien, je m'abandonne à la science et à la connaissance que le gouvernement a reconnues à cette personne-là. N'importe quelle forme de reconnaissance, que le gouvernement, en toute bonne foi, dise: Non, non, c'est limité à ça seulement, ça sera récupéré.

Dans certaines publicités — je vais vous en citer une ici — on dit: Un programme unique enregistré au bureau du droit d'auteur. Mais qu'est-ce que c'est que ça veut dire, être enregistré au bureau du droit d'auteur? Ça ne donne aucune validité scientifique, mais ça donne un certain sérieux. Ce sont des spécialistes de la récupération. Il faut faire excessivement attention. Et, moi, je ne suis pas un scientifique, mais je me dis une chose: II faut dissocier l'approche scientifique du système politico-industriel qui est associé au domaine scientifique. Et, moi, je me dis: L'approche scientifique, c'est une évolution prudente, pas un conservatisme, une évolution prudente. En tant que citoyen, si mon gouvernement a à reconnaître des gens et qu'il dit au citoyen: Va voir cette personne-là, on lui a reconnu une compétence à faire quelque chose qui va te donner un bien-être quelconque, si mon gouvernement veut faire ça, je crois qu'il doit y aller avec de la prudence, parce que, moi, je donne à cette personne-là mon équilibre psychologique et mon intégrité physique; je ne veux pas du tout qu'on passe la charrue sur mon corps ou dans mon esprit et qu'on fasse de moi un résultat d'une boucherie thérapeutique. (10 h 10)

C'est ça, là, finalement. Je ne suis pas un proscientifique, je ne suis pas un proésotérique, mais, moi, ce que je dis à mon gouvernement, en tant que cri du coeur de simple citoyen: Soyez prudent là-dedans parce que, moi, si, de par ma formation universitaire, j'ai minimalement un sens critique, même si ce n'est pas un sens scientifique, je suis bien conscient qu'il y a bien des gens qui n'ont pas ce sens critique là et qui vont se faire avoir royalement par une récupération d'un quelconque titre, qu'il soit même minimal. Alors, faites attention.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Gariépy.

M. Trudel: Oui, c'est un cri, je pense, qu'il faut entendre...

Le Président (M. Joly): En conclusion, M. le député.

M. Trudel: Oui, en conclusion là-dessus, c'est un cri qu'il faut entendre en disant, en vous taquinant un peu: Bien sûr, on peut connaître le droit sans être avo- cat. Vous avez raison. On peut être capable de juger et de se défendre. À preuve, dans le domaine, la Cour des petites créances nous a créé un lieu où les citoyens peuvent être capables de se défendre eux-mêmes à partir des simples principes de la justice naturelle. Vous avez raison qu'il faut être prudents sur l'appropriation de vertus que l'on ne veut pas nécessairement prêter par une certaine reconnaissance en voulant l'encadrer. Mais, par ailleurs, je pense que vous allez convenir qu'il faut mettre en équilibre le fait qu'on contrôle mieux ce qu'on connaît et ce qu'on a identifié que ce qui est laissé à la liberté totale d'exercice ou de pratique dans le milieu. Mais je ne peux pas, en terminant...

Le Président (M. Joly): Très rapidement.

M. Trudel: ...m'empêcher de vous poser une question sur la dynamique générale de la loi 43, M. Sabourin, puisque vous y avez fait allusion. Justement, la dynamique générale de la loi dit: II y a un certain nombre d'actes qui exigent d'être posés par un certain nombre de spécialistes avec des qualifications parce que les préjudices qui peuvent en résulter sont graves. Une autre série d'actes — c'est les 13 actes réservés à un certain nombre de personnes qui doivent avoir les qualifications — peuvent être réalisés par des personnes à qui on réserve le titre. Et tout le restant est laissé au jugement des citoyens, à l'effet général du Code criminel, c'est-à-dire les prescriptions en ce qui concerne l'abus de confiance, l'abus de pouvoir, et des lois inhérentes en matière de contrat de par l'Office de la protection du consommateur. Est-ce que ça vous apparaît une dynamique générale qui est abordable dans le contexte québécois?

M. Sabourin: Je pense que c'est un modèle fort intéressant que je connais assez bien, moi aussi, et je pense que la distinction qu'on fait entre actes réservés et actes exclusifs nous apparaît davantage conforme à la réalité actuelle. En ce qui concerne la non-réglementation de tout ce qui n'est pas nommément réglementé, là, peut-être qu'il y aurait des choses avec lesquelles je ne serais pas. d'accord, mais l'économie générale du modèle m'apparaît fort intéressante et va certainement faire l'objet d'une analyse approfondie au niveau du ministre responsable de l'application des lois professionnelles et de l'Office des professions.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci de cette contribution. Quant à l'appel du citoyen, je pense que c'est un peu le but de la commission, aussi. C'est ce qu'on s'était dit: Si on a de l'audace, voyons jusqu'où il faut être prudent. Et c'est un peu ça qui était notre...

Le Président (M. Joly): Ha, ha, ha! M. Trudel: Merci de votre contribution.

M. Côté (Charlesbourg): Merci.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, au nom de la commission.

Maintenant, j'inviterais les gens représentant la Société québécoise des psychothérapeutes professionnels, masculins et féminins, à bien vouloir s'approcher, s'il vous plaît.

Alors, bonjour, mesdames, bonjour, monsieur. Il me fait plaisir de vous accueillir. Je vous rappelle que vous avez une vingtaine de minutes pour livrer votre mémoire et, par après, les parlementaires échangeront avec vous. Alors, j'apprécierais, M. Gauthier, de bien vouloir peut-être nous introduire les personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Société québécoise des psychothérapeutes professionnels (SQPP)

M. Gauthier (Pierre): Certainement. Merci, M. le Président. M. le Président, M. le ministre, distingués membres de la commission, à ma droite siège Suzanne David, psychologue, psychothérapeute, responsable du comité des admissions dans notre société, et, à ma gauche, Andrée Thauvette-Poupart, travailleuse sociale, psychothérapeute, vice-présidente de la Société. Moi-même, je suis psychoéducateur, sociologue et psychothérapeute. Je suis le président de la Société en question.

Quelques mots sur la Société qui est jeune, qui a été fondée en 1990, qui a été incorporée en 1991. Notre travail, depuis que nous existons — nous avons même planifié notre existence avant — a beaucoup consisté à établir une définition opérationnelle de la psychothérapie qui soit critériée, qui puisse nous guider ensuite dans l'élaboration de critères d'admission de psychothérapeutes en provenance de diverses origines académiques et professionnelles.

Alors, je pense que vous allez entendre peut-être un son de cloche différent, là, de ce qui a été dit au cours de l'heure qui a précédé. Nous voulons tout de suite vous dire que la raison principale de notre présence ici, c'est de défendre le droit de psychothérapeutes professionnellement qualifiés à l'exercice de leur compétence et de défendre le droit du public à leurs services. C'est-à-dire qu'on s'inscrit dans le cadre d'une protection et d'un appel à la protection d'une grande richesse de créativité, de compétence et d'humanisme, je dirais, qui s'est développée, au cours des 50 dernières années au Québec, au profit de milliers de gens et à un coût minime pour l'État.

Alors, on est d'accord qu'il faut être très plein de précautions dans ce domaine, mais on trouve qu'il est essentiel de protéger les acquis, c'est-à-dire l'espèce de floraison de toutes sortes d'approches dont une partie peut sembler farfelue et bizarre, mais où il y a énormément de services potentiels et réels au public du Québec.

Sur l'accréditation des psychothérapeutes professionnels, je cède la parole à ma collègue, Suzanne David.

Mme David (Suzanne): Bon, alors, nous pensons que la pratique de la psychothérapie doit être réglementée et nous pensons aussi que cette réglementation doit non seulement protéger le public, mais également protéger la profession, lui permettre de grandir et de se développer. Or, la question de l'accréditation des psychothérapeutes présente plusieurs difficultés que nous avons tenté de résoudre en élaborant des critères d'admission opérationnels.

Mais, avant de vous en parler, nous voudrions attirer votre attention sur un des principaux motifs qui ne nous permettent pas de retenir la recommandation de l'Office des professions, à savoir que les corporations existantes accréditent les psychothérapeutes. Nous pensons que le problème de l'accréditation des psychothérapeutes est une des conséquences de l'évolution de la connaissance. C'est la vision que nous avons de l'être humain qui a changé. Nous savons maintenant que, pour le comprendre, nous ne pouvons pas l'aborder en pièces détachées, mais que nous devons avoir une vision et une compréhension globales de sa situation.

C'est la question holistique qui est en cause, qui bouscule nos structures, et elles devront changer, progressivement peut-être, mais changer quand même. L'holisme a comme caractéristique de percevoir les liens et non pas les différences. Or, dans le système corporatif, on établit les frontières et les différences. D'ailleurs, l'exposé de M. Sabourin fait état du fait que les frontières sont devenues perméables et qu'on ne peut plus parler de psychothérapie sans parler aussi d'autres pratiques. Le système corporatif actuel ne peut contenir la pratique holistique de la psychothérapie. Il ne peut donc favoriser le développement de la recherche en psychothérapie puisque les praticiens sont cantonnés dans leur secteur défini d'intervention et qu'ils ne peuvent mener à bien, dans la légalité, leurs recherches empiriques.

Les corporations existantes, qui se partagent actuellement la pratique de la psychothérapie, ne peuvent favoriser le développement de la recherche sans dépasser les limites de leur juridiction et entrer en conflit avec d'autres corporations. La cothérapie doit être possible. Actuellement, il est impossible aux membres des corporations existantes de référer des clients à des thérapeutes non membres de corporations sans encourir des mesures disciplinaires sévères. Le client est donc privé d'une ressource pouvant l'aider, et la recherche n'avance pas. Il apparaît donc que la psychothérapie ne peut être réglementée que dans un contexte multidisciplinaire et hors du cadre corporatif tel que défini actuellement. (10 h 20)

À propos des critères d'admission que nous avons élaborés, nous voulions établir des critères d'admission qui ne soient pas uniquement académiques, ce qui est le cas pour la plupart des formations. Actuellement, pour être membre d'une corporation, on a un diplôme et on devient admissible à la corporation. Alors, nous n'avions pas cette perspective-là. Nous considérons que le psychothérapeute doit offrir des qualités et présenter certaines normes, autant au plan de l'être, du faire et du savoir.

Alors, nous avons commencé par élaborer une définition de la psychothérapie, ce qui n'a pas été facile, mais ce qui a été fait, rapport qui a déjà été présenté à l'Office des professions lorsque l'Office des professions faisait son enquête sur la question. Ensuite, nous avons élaboré des critères d'admission qui se basent sur cette définition et, également, dans tout ce travail, on a consulté des documents de nos amis européens comme, par exemple, le syndicat français des psychothérapeutes et d'autres regroupements du type.

Pour élaborer ces critères, d'abord, nous en avons formulé une dizaine et nous les avons soumis à consultation auprès de 83 psychothérapeutes du milieu montréalais qui avaient au moins 15 ans d'expérience. Nous avons procédé à deux reprises à cette consultation. Les gens nous retournaient les formulaires avec leurs commentaires à propos de nos critères, on corrigeait, et on a fait comme ça le va-et-vient deux fois pour aboutir à une série, donc, de 11 critères qui sont actuellement valables et en application. Ces critères sont précis, ils sont opérationnels, ils sont quantifiables, et ils expriment en pourcentage le degré de correspondance qu'il existe entre une candidature et les critères de la Société.

J'aimerais ajouter une remarque à ma présentation qui est un peu une réponse à l'inquiétude de M. Sabou-rin qui, tantôt, mentionnait et déplorait le manque de formation des psychothérapeutes qui ne font pas partie des corporations existantes. Ce que je veux dire à ce sujet-là, c'est que la plupart des psychologues diplômés de l'Université de Montréal ou du Québec faisant partie de la corporation des psychologues ne pourraient pas être membres de la Société québécoise des psychothérapeutes professionnels, pour la simple raison qu'ils ne rencontreraient pas nos critères.

C'est ça que je voulais dire, et je voudrais rappeler également quelque chose à propos des psychologues. Je ne veux pas attaquer ma corporation, mais préciser des choses importantes. Un psychologue n'est pas un psychothérapeute. Un psychologue, c'est une personne qui a des connaissances générales sur l'être humain, mais à l'université on ne donne pas de formation en psychothérapie. La psychothérapie, c'est quelque chose qui se développe en dehors des cadres universitaires. Je pense qu'il y a autant de différence entre un psychologue et un psychothérapeute qu'il y en a entre un biologiste et un médecin. Merci.

Le Président (M. Joly): Madame, merci. M. le ministre, s'il vous plaît. Oh, excusez, madame...

Mme Thauvette-Poupart (Andrée): Oui, d'accord.

Le Président (M. Joly): ...Thauvette.

Mme Thauvette-Poupart: Alors, pour ce qui est de l'information du public, présentement, nous assistons à une offensive de la part des corporations pour assurer le monopole de la psychothérapie, et cela s'accompagne de sévères mises en garde contre le charlatanisme, les fausses représentations et les pratiques douteuses. Nous sommes aussi d'accord que c'est important de protéger le public relativement à ça, et c'est une des raisons de notre existence, comme ma consoeur le mentionnait, en élaborant des critères sévères d'admission dans notre pratique.

Mais cela laisse entendre que toute pratique en dehors des corporations existantes constitue soit de l'incompétence ou de l'escroquerie et, à mon sens, c'est beaucoup de désinformation, à deux titres. Ça veut dire qu'on suppose que tous ceux qui pratiquent la psychothérapie dans les cadres d'une corporation sont automatiquement qualifiés pour le faire, alors qu'il y a peu de corporations professionnelles qui ont des critères spécifiques à la pratique de la psychothérapie. Et on suppose aussi que tous ceux qui pratiquent hors des cadres corporatifs comme tels sont automatiquement disqualifiés, alors qu'il y a des personnes extrêmement compétentes, qui font partie d'associations reconnues ou pas, et qui pratiquent la psychothérapie.

Alors, à notre avis, c'est important que l'information soit distribuée de façon juste pour tous les intervenants en psychothérapie. Il y a d'autres moyens d'informer le public, par exemple, sur des points importants comme: quelles sont les possibilités, quelles sont les limites de la psychothérapie — ce n'est pas la panacée qui va régler tous les problèmes — qu'est-ce qu'on peut faire en psychothérapie, ce qu'on ne peut pas faire, comment choisir son thérapeute, comment choisir la personne qui nous convient, etc.

Alors, je pense qu'il y a des choses à faire à ce niveau-là, et c'est ce que je voulais apporter.

Le Président (M. Joly): Merci, madame.

M. Gauthier: Dernier point, M. le Président, si vous le permettez, le rôle du réseau de la santé et des services sociaux par rapport aux psychothérapies. Premièrement, on trouve que le réseau devrait reconnaître que la psychothérapie valide et fiable existe dans une grande diversité de formes et d'allégeances professionnelles, reconnaître cette diversité-là non pas nécessairement comme un problème, mais comme le signe d'une vitalité et le signe, aussi, d'une réponse extrêmememt diversifiée à des besoins très diversifiés.

Deuxièmement, favoriser le développement des psychothérapies sans vouloir réduire de force, si on peut dire, leur polyvalence. Accepter l'intuition comme un outil de développement de la psychothérapie. Je crois qu'à «scientifiser» à l'excès le développement de la psychothérapie on la paralyse ou on l'étrangle. La psychothérapie, comme la plupart des sciences, d'ailleurs, se développe énormément sur le terrain. Elle ne se développe pas nécessairement selon des approches méthodologiques des grands nombres, ainsi de suite. Elle se développe beaucoup dans le bureau ou dans l'atelier de travail de l'intervenant avec son client ou avec un petit groupe de clients. Peu à peu, la clinique se répand et, peu à peu, les approches qui sont ainsi trouvées ou déterminées se généralisent à un plus grand nombre avec

des adaptations. On appelle ça, dans l'industrie, la recherche et le développement, le «R and D», mais le «R and D» en psychothérapie a un caractère très particulier. Et vouloir à tout prix que toute psychothérapie soit d'abord validée scientifiquement avant d'être exercée, à mon sens, c'est être à contresens du développement vital de la psychothérapie.

Troisièmement, sortir du cadre étroit des corporations existantes pour la référence de clients, pour les contrats de services aussi. Et, quatrièmement, que tout psychothérapeute professionnel reconnu comme tel ait les mêmes droits que ses collègues, qu'il soit ou non membre d'une corporation.

Alors, si vous le permettez, M. le Président, je voudrais lire les quelques recommandations de notre mémoire qui nous semblent particulièrement pertinentes. Ça sera court. Alors, on en a huit, recommandations. Je vais les lire pour la plupart.

D'abord, que le titre de psychothérapeute professionnel soit réservé. Deuxièmement, que l'accès au titre de psychothérapeute et l'exercice de la fonction soient régis par des associations professionnelles telles que la SQPP, mais sans exclusivité. Ces associations auront des critères précis d'admission et un code de déontologie appliqué par un comité de discipline.

Troisièmement, que les associations professionnelles de psychothérapeutes professionnels soient regroupées sous un organisme fédératif des associations professionnelles dans le domaine des thérapies alternatives. Cet organisme sera mandaté par le gouvernement du Québec. Il sera indépendant des corporations professionnelles au sens de la loi. Il s'assurera du plein respect des droits du public. Il supervisera le fonctionnement des associations professionnelles tout en respectant leur autonomie et les secondera dans leur travail d'information du public.

Quatrièmement, que la coalition des organismes alternatifs en santé, regroupant présentement plusieurs associations professionnelles, dont la SQPP, dans le domaine des thérapies alternatives, devienne un organisme fédératif mandaté par le gouvernement du Québec.

Et je vais tout de suite à la sixième et à la septième. Que les frais de psychothérapie soient déductibles de l'impôt sur le revenu des particuliers. Septième: Que les compagnies d'assurances privées soient tenues de reconnaître, lorsque les clauses comportent la mention psychothérapie dans les ententes, les notes d'honoraires des psychothérapeutes membres d'associations professionnelles regroupées sous l'organisme fédératif mandaté par le gouvernement du Québec.

Alors, voilà notre exposé. Nous sommes tout à fait disponibles pour discuter avec les membres de la commission.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. Gauthier. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. D'abord, une première question sur ce que vous êtes. Je pense que vous le dites vous-mêmes, incorporés en juin 1991; c'est relativement jeune. Vous avez combien de membres et d'où proviennent vos membres?

M. Gauthier: On a préparé les chiffres pour vous. (10 h 30)

Mme David: Bon, alors, on existe depuis 1990. On a ouvert les admissions à l'automne 1992. Nous avons actuellement 30 membres, en incluant des dossiers qui sont encore à l'étude parce que le processus d'admission est extrêmement long. On doit faire des évaluations de formation, et c'est long. Nous avons un fichier qui comporte 150 demandes d'informations de personnes qui étaient intéressées à savoir des choses à notre sujet.

M. Côté (Charlesbourg): Ce que je comprends, c'est que, dans chacun des cas, les 11 critères dont vous faites état dans votre mémoire sont appliqués et doivent être respectés pour être accepté dans votre...

Mme David: Nous avons une catégorie de membres en formation. Comme nos critères sont chiffrés, on peut évaluer assez précisément la correspondance entre la candidature et les critères. Si un membre a 50 % des critères, il est membre en formation et, s'il rencontre 75 % des critères, il est titulaire temporaire. Et ils sont tenus de compléter la formation selon les recommandations du comité d'admission dans des délais précis: cinq ans, s'ils sont en formation, trois ans, s'ils sont titulaires.

M. Côté (Charlesbourg): À la lecture de votre mémoire, et je vous entends le présenter ce matin — corrigez-moi si je me trompe — vous semblez un peu en rupture de ban avec la Corporation.

M. Gauthier: Bien, on n'est pas contre la Corporation, mais on est certainement contre le monopole.

M. Côté (Charlesbourg): En tout cas, à tout le moins, la présentation de ce matin fait état de différences assez fondamentales avec la vision de la Corporation, en tout cas, à tout le moins.

M. Gauthier: Oui. À notre grand regret, nous nous nous voyons en divergence, et c'est assez ironique. Il n'y a pas si longtemps, les psychologues se trouvaient, par rapport à la médecine, dans la même situation que nous maintenant par rapport à la corporation des psychologues.

M. Côté (Charlesbourg): Vous élaborerez en cours de route, si vous le souhaitez. Il y a un élément qui me frappe à la lecture du mémoire, et vous l'avez très bien reproduit au niveau de votre présentation: formation. Et, d'ailleurs, ça se reflète très bien dans les critères que vous vous êtes donnés. Je tire une conclusion de votre mémoire et de votre présentation. C'est que vous dites: Au-delà du corporatisme, qui est une

autre question, sur le plan de la formation, ça ne doit pas être exclusif aux universités. Par la suite, à l'intérieur de vos critères, vous mettez un certain nombre d'exigences, du théorique, mais aussi du pratique, si j'ai bien saisi, et quand même passablement d'exigences sur le plan des heures. On voit les 800, 200, ainsi de suite, partagées.

Expliquez-moi, au-delà de ce que j'ai déjà entendu, que la psychologie ne s'enseigne pas à l'université, qu'elle s'apprend — il faut me passer l'expression — sur le tas, ai-je compris, est-ce que c'est ça qui fait que vous dites hors université? Et, dans la mesure où c'est ça, j'aimerais vous entendre parce que, de cette commission, il y a un certain nombre de choses qui ressortent: la nécessité d'une formation clairement démontrable au public pour le protéger. Donc, on a davantage de chances de ne pas être exploité, si on est un citoyen consommateur, si les gens ont une formation qui répond à un certain nombre de critères. Et là, vous nous faites la distinction entre ce qui est théorique et aussi la pratique. Je pense que ça se reflète à l'intérieur de vos critères, mais j'aimerais vous entendre davantage là-dessus. À partir du moment où on dit pas exclusivement à l'université, je remarque que, dans des critères, vous dites possession, au minimum, d'un bac et, par la suite, de la formation dans des domaines de pointe, en particulier, vous concernant.

Mme David: Si vous permettez, M. le ministre, je vais encore répondre. On demande un baccalauréat universitaire dans nos critères, effectivement. C'est une base de culture générale. C'est simplement une disposition à apprendre, à conceptualiser, à réfléchir de façon abstraite. Le baccalauréat peut être en physique, en géographie.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Alors, c'est ce que je comprends; c'est un baccalauréat de niveau universitaire, mais pas dans un domaine particulier...

Mme David: Exactement.

M. Côté (Charlesbourg): ...davantage pour développer des aptitudes...

Mme David: Intellectuelles.

M. Côté (Charlesbourg): ...intellectuelles.

Mme David: Ensuite, quand on parle de formation, il y a deux genres de formation qu'on demande. On demande une formation générale et intégrée, 400 heures, et autre formation, 400 heures. La distinction est importante. Quand on demande formation générale et intégrée, 400 heures, c'est pour éviter que des personnes qui ont glané un peu à droite et à gauche toutes sortes d'informations sans en faire une synthèse et sans en faire une intégration puissent se dire psychothérapeutes. Par le biais de ce critère-là, on espère que des gens auront eu non seulement à étudier une approche, donc, à avoir un contexte théorique, à connaître des principes de base, des principes d'intervention et un certain nombre de techniques, mais qu'ils auront pu approfondir ou fouiller, qu'ils auront été acculés à aller un peu plus loin que des initiations. Les autres 400 heures tiennent compte du fait que nous valorisons la variété et les différents aspects des instruments qui peuvent être utilisés.

Quand on dit que la psychothérapie ne s'enseigne pas à l'université, à l'université on peut étudier des théories et on peut avoir quelques heures de stage supervisées, ce qui est déjà un bon début. Mais, par exemple, il n'y a aucun critère personnel au niveau universitaire pas plus qu'au niveau des corporations. Pour nous, un psychothérapeute, c'est quelqu'un qui doit obligatoirement avoir vécu le processus de la psychothérapie, et ce, sur une durée de 3 ans pour un nombre de 120 heures minimum.

Au niveau de la supervision, au niveau de la mise en pratique, ce qui est difficile, c'est qu'un psychothérapeute qui travaille doit obligatoirement travailler à sa façon, même s'il adhère à un modèle ou s'il a grandi à l'intérieur d'un certain scheme. Le psychothérapeute ne peut pas répéter comme un perroquet des choses. D'ailleurs, il n'a rien à dire en général; il a plus à voir et entendre. Donc, quand on parle de formation, on ne parle pas d'enseignement. Il doit vraiment être accompagné dans l'élaboration d'une synthèse personnelle de ses connaissances, de sa propre expérience à travers le processus thérapeutique, et de la pratique, de comment il se comporte face à un client, comment il réagit. Il a beau avoir lu beaucoup de choses et être très savant, ce qui est important, c'est de savoir ce qu'il en fait dans le rapport à l'autre et comment il peut conjuguer ses connaissances, sa personne et son intervention.

M. Côté (Charlesbourg): En vous écoutant et en vous entendant, j'ai l'impression d'assister à une critique très sévère de notre enseignement au Québec. Est-ce que je me trompe? Parce que je me dis, là: À partir du moment où, sur le plan universitaire, il y a des programmes et qu'on sort de l'université, on doit normalement, à la fin de ses études, être apte à exercer. Là, ce que je comprends, c'est que nos psychologues qui sortent de l'université, selon votre point de vue, ne sont pas nécessairement aptes à exprimer la totalité de leur art et de leur science.

Mme David: C'est ce que je dis, et je pense qu'un grand nombre d'entre eux sont d'accord puisque les gens qui sortent de l'université et qui veulent faire de la psychothérapie, en général, vont aller prendre un superviseur et vont faire de la supervision ou vont faire partie de groupes de supervision ou de groupes de support ou de séminaires d'étude pour continuer ce travail. Je ne dis pas qu'ils ne le font pas.

Le Président (M. Joly): M. Gauthier.

M. Gauthier: Oui, M. le ministre, j'aimerais

vous dire qu'on tend à faire une équation entre formation et carrière universitaire; avoir passé par l'université égale être formé. À mon sens, ce n'est pas tout à fait exact. Ça ne veut pas dire que c'est toujours faux. Il y a de la formation qui se donne à l'université, c'est très évident. J'ai été prof d'université pendant 15 ans. Je peux vous assurer que j'ai vu des professeurs très compétents, des travaux très sérieux se faire, et tout ça. Il n'est pas question de dénigrer en soi l'université.

Mais je peux vous dire que, dans les sciences humaines que je connais assez bien, pas seulement le domaine de la psychothérapie, mais les sciences sociales et dites humaines en général, le virage vers l'académisme au cours des 8 ou 10 dernières années a été très, très fort, en partie pour des raisons économiques. On donne des grands cours à des grands groupes parce que faire de la formation individualisée, ça coûte énormément cher. Et j'ai été témoin, moi, de pressions gouvernementales très fortes contre la formation individualisée, par exemple, d'éducateurs pour jeunes délinquants ou pour enfants mésadaptés, parce que des stages bien encadrés, bien supervisés, où on vérifie les acquis de la personne dans son travail, ça coûte aussi cher que la médecine et que, peut-être, on n'a pas les moyens de se payer ça. Mais nous disons que, si on veut exercer la psychothérapie d'une façon compétente et utile au client, il faut être effectivement formé et non pas seulement instruit.

(10 h 40)

M. Côté (Charlesbourg): Je vous suis jusqu'à un certain bout sur le plan universitaire. Évidemment, ça pourrait faire l'objet d'un long débat, un plus grand nombre d'élèves par professeur dans une salle, par mesure d'économie, mais il y aurait peut-être un autre moyen, aussi, c'est d'ajouter un certain nombre de cours aux professeurs universitaires pour la même rémunération, et les groupes seraient moins nombreux aussi. Je pense aussi que ça pourrait nous permettre de régler un certain nombre de problèmes.

M. Gauthier: Oui. Je ne voudrais pas entrer là-dedans...

M. Côté (Charlesbourg): Bien non.

M. Gauthier: ...mais ce que je veux dire, c'est que le médium enseignement sous forme de cours n'est que d'une efficacité très limitée dans la formation d'un intervenant direct. Voilà.

M. Côté (Charlesbourg): Je n'ai enseigné que quelques années, mais ça me rappelle beaucoup de souvenirs. Je ferme la parenthèse. Vous vous êtes donné un code de déontologie. Vous avez senti le besoin de vous en faire un qui, j'imagine, est différent de celui de la Corporation, parce que, s'il était le même, ce serait une reconduction pure et simple.

M. Gauthier: II lui ressemble beaucoup. Il y a des aspects qu'on veut développer, par exemple, au niveau des approches psychocorporelles. En général, c'est considéré avec une très grande méfiance, avec tellement de méfiance qu'il n'y a pas moyen de travailler sérieusement avec des approches psychocorporelles. Alors, il y a une partie de notre code qui va traiter de ça de façon très explicite, là.

M. Côté (Charlesbourg): Dans votre mémoire, vous évoquez l'expérience ontarienne nouvelle, récente et vous l'évoquez, là, comme étant une solution possible à nos problématiques aussi, au niveau du Québec. J'aimerais vous entendre davantage là-dessus parce que, dans la présentation verbale de ce matin, je ne l'ai pas entendu. En quoi la loi ontarienne, telle qu'elle est et encore théorique — parce que, sur le plan de la pratique, là, on verra — réglerait des problèmes de la nature de ceux que vous avez évoqués, au Québec?

M. Gauthier: Bien, au moment où on a écrit notre mémoire, on était surtout au courant des principes qui semblaient guider le législateur ontarien et on voyait que, même en médecine, on réservait certains actes plutôt que de réserver toute intervention, par exemple, de nature médicale à la seule médecine et, dans le domaine de la psychothérapie, ça nous semblait utile que si un... On n'est pas du tout dans le même cas que la médecine, dans le domaine de la psychothérapie, et on voyait que, peut-être, il y a certains actes qui peuvent être réservés de façon plus spécifique et qu'on peut laisser le champ libre à la créativité psychothérapeutique et aux allégeances diverses. De ce point de vue là, je trouve intéressant ce que j'entends ce matin; c'est qu'il semble que la commission veuille, oui, encadrer un peu la psychothérapie, mais pas au point de l'enfermer dans un carcan.

Alors, comment faire ça dans la pratique? Par exemple, on parle d'un registre. Il nous semble que, s'il y avait un registre du gouvernement où sont inscrits les gens qui rencontrent des critères précis comme psychothérapeutes professionnels, quelle que soit leur appartenance corporative ou associative, ça, ça pourrait renseigner le public, et puis, si, évidemment, il y a quelqu'un qui se montre indigne dans sa pratique ou incompétent, bien, il est rayé du registre, et ça aussi, ça devient connu.

M. Côté (Charlesbourg): Et ça offre une certaine protection au public.

M. Gauthier: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Une dernière question, M. le Président...

Le Président (M. Joly): Oui, monsieur, parce qu'on a déjà dépassé l'enveloppe de temps.

M. Côté (Charlesbourg): Depuis le début de la commission, on parle de formation comme étant un des piliers, là, de la reconnaissance de thérapies alternatives, mais on parle beaucoup, aussi, d'évaluation scientifique.

Vous étiez ici, tout à l'heure. On a abordé la question avec la Corporation. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que l'évaluation scientifique a ses limites ou, si je comprends le sens de vos interventions, c'est qu'elle n'est pas la solution à tout?

M. Gauthier: Et loin de là. Je crois que la recherche, surtout dans le domaine de la psychothérapie, s'est beaucoup résumée aux études dites évaluatives, où on essaie d'évaluer l'efficacité des thérapies, et puis, le travail de Lecomte est assez connu, dans le domaine, c'est très difficile d'évaluer l'efficacité des psychothérapies. C'est faisable de faire des études comparatives, mais je crois que ce genre de recherche là est d'une utilité limitée.

Ce qu'il faut, dans le domaine de la psychothérapie, c'est: comment peut-on intervenir? Si on a affaire à quelqu'un qui est dans la schizophrénie ou proche de la schizophrénie, qu'est-ce qu'on peut faire avec cette personne? Si on a affaire à quelqu'un qui a été abusé à de multiples occasions — ce qu'on appellerait, dans notre jargon, un hyperabusé — durant toute son enfance, qui a des séquelles incroyables à l'âge adulte et qui nous arrive à 25, 30 ans, qu'est-ce qu'on peut faire concrètement pour réparer, amorcer un processus de guérison, d'autoguérison, seconder ce processus-là, l'accélérer, si possible? Qu'est-ce qu'on fait avec un jeune délinquant? Ça fait longtemps qu'on...

Moi, j'ai commencé ma carrière en travaillant avec des jeunes délinquants. Ce n'est pas évident de rééduquer un jeune délinquant et de lui faire de la thérapie. Ce n'est pas évident du tout. Et, là-dessus, il y a plein de choses à développer. Quand on dit un jeune délinquant, on prend une catégorie très, très large. Il y en a toutes sortes. Alors, comment faire ces interventions-là? Ça, ça doit faire l'objet d'énormément de recherches, et je dis: II y a beaucoup de recherches qui se font effectivement par les praticiens qui finissent par en parler après 5, 10 ans, quand ils ont vraiment l'impression d'avoir quelque chose à dire. Et, là-dessus, ce n'est pas vrai que les praticiens en général sont des gens qui gonflent leurs prétentions et qui affichent à tout venant qu'ils ont découvert ci, qu'ils ont découvert ça. Il y a peut-être des gens très bons en publicité, mais, en général, les praticiens sérieux et compétents sont bien trop occupés à travailler pour faire beaucoup de publicité.

Alors, ce serait un travail que de faire le tour des praticiens et de dire: Ah! Ici, on a trouvé des choses. Ça, ça serait une autre sorte de recherche. Je pense, moi, que de dire: Ah oui, on va garantir la qualité de la psychothérapie en faisant plein d'études évaluatives, je dirais: À la limite, on passe à côté, on embête ceux qui travaillent bien en les surveillant et en développant beaucoup de méfiance autour d'eux et on n'aide pas à développer le service direct au client qui est, à mon sens, là où l'action doit se faire, où l'argent doit se dépenser, où l'énergie doit s'investir.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. Gauthier. M. le député de Rouyn-Noranda—Témisca- mingue.

M. Trudel: Merci, M. le Président. En vous souhaitant la bienvenue, c'est important d'avoir votre vision des choses dans cet immense secteur de l'esprit, de tout ce qui n'est pas la partie biologique de l'être et pour laquelle nous avons des professionnels patentés, au sens du Code des professions, et un très grand nombre d'autres acteurs, dont vous êtes.

M. Gauthier, vous avez un doctorat en quoi?

M. Gauthier: En sociologie.

M. Trudel: En sociologie. Mais vous êtes aussi psychothérapeute.

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: Vous allez essayer de m'illustrer comment on est docteur en sociologie et qu'on devient psychothérapeute. Qu'est-ce qui fait que ça nous donne les qualités nécessaires, en quelque sorte, pour être capable de prendre en charge un certain nombre de problèmes de l'esprit, dans le domaine du psycho? Évidemment, vous comprenez que ce n'est pas votre exemple personnel, c'est le cas que je veux illustrer.

M. Gauthier: Ah bon! Bien, disons que je peux vous parler de moi-même parce que c'est peut-être l'être que je connais le mieux. Moi, j'ai commencé ma carrière comme psychoéducateur auprès de jeunes délinquants et auprès d'enfants qui avaient de sérieux problèmes de personnalité. Et c'est à travers ça que j'ai décidé d'étudier la sociologie, parce que je voulais connaître le contexte social dans lequel ces problèmes-là s'étaient développés. Donc, j'ai fait un doctorat en sociologie, mais avec une forte orientation vers le psychosocial.

J'ai étudié aux États-Unis. Je suis revenu au pays et j'ai fait une excursion un peu dans le monde socio-économique, mais aussi dans le monde du sous-développement. J'ai fait ma thèse de doctorat au Honduras. J'ai découvert la pauvreté. Ça m'a encore orienté vers le socio-économique aussi et, après un certain temps, cependant, mes anciennes amours sont revenues et je suis retourné à la psychoéducation. (10 h 50)

En psychoéducation, en travaillant avec les étudiants de proche, en travaillant au niveau de la famille, famille monoparentale, famille reconstituée, évolution de la famille québécoise, ainsi de suite, je me suis beaucoup rapproché de la pratique, de l'intervention. J'essayais de former des éducateurs qui savaient intervenir. J'intervenais moi-même en tant que prof chercheur de moyens d'intervention, de sorte que je me suis beaucoup rapproché de l'action directe auprès de la clientèle.

Une chose amenant l'autre, depuis le début des années quatre-vingt, j'ai décidé de me consacrer au travail clinique et à tel point de devenir un clinicien, un intervenant direct, ce que je fais maintenant à plein temps. C'est un profil qui est propre à moi, mais, dans

les gens que je connais autour de moi, il y a plein de gens qui ont accédé à la psychothérapie via d'autres pratiques qui avaient une forte composante interpersonnelle ou une relation d'aide approfondie, si on peut dire, de gens, donc, qui décident d'aller plus loin et qui, finalement, adoptent une formation, se donnent ou s'inscrivent dans une formation en psychothérapie comme telle. Et je crois ça salutaire pour la psychothérapie.

M. Trudel: Vous vous définissez donc plus comme une espèce de pédagogue de l'esprit ou accoucheur de l'esprit que spécialiste de la question de la connaissance des choses de l'être qui sont non matérielles. Parce que vous faites toujours une distinction, à mon avis, souhaitable, là, entre l'application, la psychothérapie, et la connaissance.

M. Gauthier: Ah oui, oui. D'accord. Il y a le psychothérapeute en action, puis il y a des connaissances sur la psychothérapie qu'on peut développer de toutes sortes de façons. Évidemment, on ne peut pas être psychothérapeute sans avoir un bon bagage de connaissances sur la psychothérapie. Ça, c'est évident.

M. Trudel: Je vois le cheminement. Et l'autre étape qui, quant à moi, m'intéresse, c'est: où se situe la frontière pour en arriver à être capables d'identifier les personnes qui vont être capables de faire de la psychothérapie par rapport à celles qui vont tomber dans le culte, qui vont tomber dans les approches gourous, qui vont en arriver à exploiter de façon indue la crédulité? Écoutez, on est en plein... La semaine n'aurait pas pu mieux tomber. On va finir par dire qu'il y a une relation de cause à effet et que c'est ici qu'on a créé Sainte-Anne-de-la-Pérade, là. Mais on est en plein dedans pour l'illustrer. Ou encore comment on évite, avec la définition que vous nous apportez, le musée des horreurs qui nous a été décrit, hier, par l'ACEF-Centre? Parce que vous savez très bien que cela existe.

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: De la psychothérapie à la croissance personnelle, il n'y a qu'un tout petit pas que certains, vous le savez bien, probablement, franchissent aisément. Et on en arrive à l'application d'un certain nombre de techniques «manipulateires» qui sont assez infantiles, entre vous et moi, là. Pourvu qu'on ait une formation un peu universitaire, on découvre ça assez vite, là...

M. Gauthier: Oui.

M. Trudel: ...ces techniques-là. Les politiciens savent même ça. Ça fait que, imaginez! Comment on évite ça, là? Où on fait la distinction pour éviter de tomber dans l'apparition des gourous, de la solution de la pensée magique ou l'exploitation simple de la crédulité?

M. Gauthier: Ma collègue va essayer de répondre à votre question.

Le Président (M. Joly): Mme David, s'il vous plaît.

Mme David: Oui, merci. La question est complexe. La réponse, pour moi, est simple. Je ne pense pas qu'on puisse éviter, d'une façon sûre et certaine, les risques que vous mentionnez. La frontière, nous ne la connaissons pas d'une façon précise. Nos critères d'admission, puisque ce sont eux qui expriment notre position et notre opinion, ce sont des balises qui signifient qu'il y a là un risque minimum. Mais je pense que, cette inquiétude, elle est importante, mais elle devrait peut-être aussi s'appliquer aux autres professionnels qui pratiquent la psychothérapie. Quelle garantie avons-nous qu'un médecin, qu'un travailleur social, qu'une psychologue, qui pratiquent la psychothérapie, ne fassent pas usage des mêmes forces et n'invoquent pas le même dieu que vous mentionniez tantôt, celui de la science?

Je pense que nous sommes dans ce problème-là et que nous avons affaire au facteur humain qui est malléable, qui est suggestible, et il n'y en a pas de garantie. Je pense qu'actuellement il y a énormément de gens qui souffrent d'un abus de pouvoir par rapport à la science, qu'elle soit médicale ou psychologique C'est ce que je peux dire.

M. Gauthier: En somme, ce que dit ma collègue, c'est qu'un diplôme ou une accréditation par une corporation ne garantit pas contre l'abus de pouvoir.

Mme David: Non, ce n'est pas ça. Excuse. M. Gauthier: Non?

Mme David: Non. Ce que je dis, c'est que c'est impossible de l'établir, cette limite. Nous pouvons donner des balises qui protègent, qui minimisent, mais on n'est jamais... Je veux dire, un être humain, c'est un être humain. On ne sait jamais ce qu'il va faire.

M. Trudel: Bien, d'aucuns vous répondraient probablement, mais ils nous le diront, puis ils nous le rappelleront: le comité de discipline de la corporation professionnelle concernée...

Mme David: Oui.

M. Trudel: ...et les règles strictes d'évaluation, enfin. Et là, je ne donne pas la version du public parce que le public, en général, ne croit pas à ça. Je ne porte pas de jugement de valeur. Je ne dis pas que j'endosse l'une et l'autre des visions, mais à la question: Qu'est-ce qui nous garantit? c'est évident que, chez les politiciens, on ne peut pas tous s'assurer que, parce qu'ils sont élus, ils sont tous très compétents et bons, etc.

Mme David: Exact.

M. Trudel: Évidemment, on est en matière de nature humaine, là, et de subjectif.

Le Président (M. Joly): Mme Poupart, vous vouliez rajouter quelque chose?

Mme Thauvette-Poupart: Non, ça va. Le Président (M. Joly): Non, ça va?

M. Trudel: Bon, cependant, en matière de gestion—j'appellerais ça ainsi — du patrimoine public et d'information du public, de qui peut réaliser tel acte, on comprend qu'il y a une certaine responsabilité de l'État en matière de protection du public. Je me demandais, en observant, en vous écoutant, qu'est-ce qui vous différencie, vous autres, d'un psychologue patenté qui, au sens de la loi, peut «pratiquer la consultation et l'entrevue, utiliser et interpréter les tests standardisés des capacités mentales, d'aptitudes et de personnalité pour fins de classification et d'évaluation psychologiques et recourir à des techniques psychologiques pour fins d'orientation, de rééducation et de réadaptation». Qu'est-ce qui vous différencie de ce groupe reconnu dont le champ de travail, le champ d'exclusivité défini au Code des professions est celui, et vous l'avez bien compris, évidemment, des psychologues?

M. Gauthier: Oui. Bien, un, je dois vous dire qu'il y a des psychologues dans notre société, déjà. Il y a plusieurs psychologues dans notre société. Deux, dans l'énumération que vous venez de faire, il y a peut-être un élément, là: tout ce qui touche aux tests, qui est propre aux psychologues et que la plupart des non-psychologues ne seraient pas habilités à faire, puis, encore là, il faudrait voir. Ça dépend des tests en question.

Au niveau du diagnostic, il y a une chicane entre qui a le droit de faire un diagnostic et qui n'a pas le droit. Il n'y a pas de psychothérapeute digne de ce nom qui ne doit pas faire une évaluation de la situation de la personne, de la personnalité de la personne qui est devant lui ou des personnes, s'il s'agit d'un groupe. Et ça, je crois qu'il n'y a pas de distinction entre un psychothérapeute qui est psychologue et un psychothérapeute qui est travailleur social, comme ma collègue, ou psychoéducateur comme moi. Tout le monde doit faire ça.

Alors, il y a un domaine très spécialisé, ce qu'on appelle le «testing» en général...

M. Trudel: O.K.

M. Gauthier: ...qui, lui, serait assez particulier aux psychologues, à mon sens, mais j'aimerais que ma collègue Suzanne dise son avis là-dessus aussi.

Mme David: Non, non. Je suis tout à fait d'accord avec la distinction que tu fais, mais je ne sais pas si votre question s'adresse au niveau de l'intervention ou de l'information.

M. Trudel: Non, écoutez, ma question est assez simple. Dans le fond, c'est de dire: Le champ d'intervention de la psychologie est — je tourne les coins très rond, là — relativement bien défini. Je ne porte pas de jugement, mais c'est bien circonscrit dans le Code des professions. Pourquoi des gens comme vous disent-ils qu'il faudrait un autre corps constitué pour pratiquer dans le même champ d'activités humaines, compte tenu qu'il y en a déjà un champ de reconnu? Quelle est la raison fondamentale qui fait qu'un groupe étant reconnu il devrait y en avoir un autre de reconnu d'une autre façon? Je n'ai pas très bien compris pourquoi nous devrions aller vers la reconnaissance d'un autre groupe. Je voudrais y voir du qualitatif... (11 heures)

Mme David: D'accord.

M. Trudel: ...de différence, là, pour dire: Oui, l'État doit prendre en compte que, qualitativement, ces gens font un autre travail, ou le font différemment, et ça doit être reconnu. Je ne l'ai pas encore tout à fait perçu.

Mme David: Bon. Moi, je suis psychologue, membre de la corporation des psychologues. Ça fait des années que je ne vais plus aux congrès des psychologues, parce que ça ne m'intéresse pas. Les thèmes qui sont abordés, les ateliers qui sont présentés sont les mêmes qui auraient pu être présentés il y a 50 ans. Il y a des choses nouvelles au niveau de la connaissance, qui sont beaucoup plus stimulantes, beaucoup plus vivantes. Donc, le fait de faire partie de la Corporation n'est en rien, pour moi, un stimulant professionnel ou une source de ressourcement. Par ailleurs, je suis limitée dans ma pratique. Même si je me suis beaucoup intéressée aux pratiques psychocorporelles, je ne les pratique pas, parce que je ne veux pas avoir de problèmes avec ma corporation. Alors, je travaille autrement, ce qui ne m'empêche pas d'avoir une vision et une compréhension de la problématique de mes clients, qui est beaucoup plus vaste, beaucoup plus générale. Donc, je pense qu'à l'intérieur du cadre corporatif actuel un psychothérapeute, psychologue ou travailleur social, je ne sais pas, est limité et non stimulé.

M. Trudel: Alors, donc, c'est au niveau de l'encadrement professionnel pratiqué par le corporatisme défini par le Code des professions, et le corporatisme vécu et pratiqué par votre corporation professionnelle. Tantôt, j'avais manqué le pronom, là, mais je comprends maintenant que vous êtes aussi psychologue et que vous êtes, donc, de ce fait, membre de la corporation des psychologues du Québec. Vous en avez à redire contre le corporatisme pratiqué par la corporation des psychologues du Québec, qui, je viens de l'entendre, est un corporatisme trop étroit pour prendre en compte l'évolution des approches et des traitements, et qui — est-ce que c'est ce que vous êtes en train de nous dire, aussi? — est beaucoup trop centré sur la protection des membres et non pas la protection du public.

Mme David: Je dirais que la Corporation protège le public d'après la compréhension qu'elle a de ce que c'est, la psychothérapie, mais je sens également un

danger important. C'est qu'il y a, au point de départ, un ton extrêmement méprisant et dévalorisant quant aux approches alternatives. Je craindrais beaucoup que, si on confie à la Corporation le mandat de les étudier, ce serait simplement une façade pour établir que, effectivement, elles ne servent à rien. Je trouverais ça extrêmement dangereux et dommageable, parce qu'à ce moment-là on aurait sanctionné l'inutilité des pratiques alternatives, et on n'aurait pas avancé.

M. Trudel: II faut que je revienne sur une question que j'ai posée. On a peut-être mélangé, je n'ai pas eu de réponse. Mais, à votre avis, comment on se protège collectivement contre ces abus encore dénoncés par l'ACEF-Centre? Là, on en est en matière de charlatanisme, ça me semble assez évident. Il y a des gens qui ont appris un certain nombre de techniques «manipulatoires» par Michel le magicien et qui s'en vont les pratiquer au su et au vu de tout le monde, puis avec un système difficile pour les consommateurs quant à la dénonciation et à la rectification de ces phénomènes-là. Bon, un coup que l'ACEF-Centre nous a dit ça, à part d'aller vérifier le contrat, s'il a été signé ou pas, de par les dispositions de l'Office de la protection du consommateur, on ne peut pas grand-chose, là. Comment on en arrive, dans notre société heureusement pluraliste et ouverte à — je vais employer le terme, là, entre guillemets — contrôler ces phénomènes-là et à en assurer un certain encadrement?

M. Gauthier: Bien, je crois qu'on a beaucoup travaillé à définir des critères de sélection de gens. Je serais très surpris que les exploiteurs grossiers puissent rencontrer nos 11 critères facilement, par exemple. On ne dit pas qu'on est les seuls à avoir élaboré des bons critères, mais il y a des critères qui permettent de déceler assez rapidement quelqu'un qui a de la formation et de la préparation de quelqu'un qui n'en a pas, et puis quelqu'un qui a vraiment une expérience pratique valable de quelqu'un qui n'en a aucune. Alors, sur ce plan-là, je pense que, pour l'exploitation grossière et l'incompétence grossière, il y a des moyens relativement simples de l'éliminer d'une reconnaissance. Quand on parle d'abus de pouvoir plus subtil — l'abus de pouvoir, par exemple, du professionnel qui abuse de son client, des abuseurs sexuels à travers la pratique professionnelle et tout ça — toutes les corporations ont des problèmes avec leurs membres à ce point de vue là. Que ce soit le droit, la psychologie, la médecine, l'art dentaire, toutes les professions rencontrent ces difficultés-là.

Le Président (M. Joly): Mme Poupart, s'il vous plaît.

Mme Thauvette-Poupart: À ce niveau-là, je pense qu'un des mandats des associations ou des sociétés comme les nôtres, c'est l'information, d'abord. Pour quelqu'un qui est dans un processus thérapeutique, la première chose, c'est que c'est un développement personnel et il a la liberté. Enfin, on ne l'oriente pas d'une façon, mais on respecte son processus et son cheminement à lui.

Ça, c'est important de le dire. Une personne qui se sent engagée ou embarquée dans des croyances, ou peu importe, il y a une lumière rouge qui s'allume. Notre mandat à nous, je pense, comme celui d'autres sociétés ou corporations, c'est d'informer les gens sur ce qu'est une psychothérapie, comment on respecte un processus, de sorte que les gens peuvent discriminer, voir la lumière rouge et poser des questions. Alors, je pense que plus il y aura d'information, plus on va protéger les gens.

M. Trudel: Une toute petite.

Le Président (M. Joly): M. le député...

M. Trudel: II y a combien de personnes, au Québec, qui font des psychothérapies en dehors des membres de la corporation des psychologues du Québec? Il y a combien de ce monde-là, à votre avis? Je sais bien que...

Mme Thauvette-Poupart: De praticiens, vous voulez dire?

M. Trudel: Oui. À combien? Je ne parle pas de votre association.

M. Gauthier: On peut les estimer à quelques milliers.

Mme Thauvette-Poupart: Et, comme le titre n'est pas protégé actuellement... J'ai entendu une anecdote où un professeur disait à ses étudiants, à l'université, et ce n'était pas en sciences humaines ou au cégep: Si vous voulez faire de l'argent cet été, mettez «psychothérapeute» à votre porte et recevez du monde. C'est peut-être un peu ridicule, mais ça peut vous donner, actuellement, la situation relativement aux besoins de protection du public par rapport à ça.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, madame.

M. Trudel: Oui, c'est... Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, au nom des membres de cette commission, d'avoir été parmi nous. C'est bien apprécié. Je demanderais maintenant aux gens représentant l'Alliance des professionnels en pratiques alternatives de santé du Québec de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît. Alors, bonjour. Bienvenue à cette commission. Mme Lévesque, je présume.

Alliance des professionnels en pratiques alternatives de santé du Québec (APPASQ)

Mme Lévesque (Jacinthe): Oui. Alors, M. le ministre...

Le Président (M. Joly): II nous fait plaisir de vous accueillir. Vous aimeriez peut-être introduire les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.

Mme Lévesque: Certainement. Alors, M. le ministre, M. Trudel et les distingués membres de cette commission parlementaire, ça nous fait plaisir d'être parmi vous et de vous exprimer notre point de vue sur la reconnaissance des thérapies alternatives. Avant d'aller plus loin, je me permets de vous présenter l'équipe de collègues qui m'accompagnent aujourd'hui. À ma droite, vous avez M. Jean-Claude Magny, naturopathe. À ma gauche, Mme Marie-Paule Charbonneau, orthothérapeute. J'ai aussi deux collègues à l'arrière — excusez la disposition, c'est juste pour être plus pratique — M. Pierre-Louis Gagnieux, réflexologue, et Mme Claudette Perry, massothérapeute.

Alors, je prends peut-être quelques instants pour vous expliquer qui on est à l'Alliance. D'abord, nous sommes un regroupement qui existe depuis cinq ans et qui a été d'abord peut-être un peu original, peut-être même marginal. Maintenant, on est peut-être un peu normal, parce qu'on a passé par le processus d'intégration de plusieurs thérapies alternatives regroupées dans une même structure. Si on se situe dans le contexte des thérapies alternatives, il y a cinq ans, c'était un peu audacieux de présenter une structure avec, je dirais, une équipe multidisciplinaire au niveau des thérapies alternatives. Mais il faut dire que cette décision est venue du processus de maturation du réseau lui-même, parce qu'on avait réalisé, à l'observation du dossier de l'acupuncture et de la massothérapie, que c'était très difficile de faire valoir nos droits ou, à tout le moins, d'être reconnus en prenant une approche à la pièce. Tantôt, on y reviendra parce que je pense qu'en cinq ans il s'est passé beaucoup de choses, et ça mérite quand même de bien observer. (11 h 10)

Alors, lorsqu'on passe en commission parlementaire en bout de ligne, après avoir entendu toutes les audiences depuis plusieurs jours, c'est bien évident qu'on va s'en tenir aux choses que nous considérons essentielles et qui n'ont pas été dites, pour qu'on puisse avoir la chance d'aller au bout de notre processus de réflexion.

Si je peux me permettre de faire une synthèse de ce qui a été entendu depuis les quatre derniers jours, je pense qu'on peut dire, sans trop se tromper, qu'on a vécu un peu une attitude, je dirais, défensive de la part des corporations existantes que je vais appeler l'industrie de la maladie, parce que ces gens-là travaillent beaucoup avec le curatif, par rapport à toutes les thérapies alternatives qui sont beaucoup plus, je dirais, l'industrie de la santé avec tous les outils préventifs. On a vécu un peu une espèce de... Bon, chacun est venu exprimer, et c'est tout à fait normal, des objectifs en fonction de ses intérêts. Ça, je pense que c'est la tribune parfaite pour le faire.

Ceci m'amène à placer le débat de la science, dont on a beaucoup parlé... Le caractère scientifique de la médecine, je pense que c'est important de le ramener dans le contexte historique, parce que la médecine n'a pas toujours été une médecine scientifique. Si on regarde, au niveau de la sociologie de la santé, c'est très intéressant de comprendre que la médecine a changé de paradigme vers 1910, aux États-Unis. C'est un M. Flexner — un consultant qui a été payé par la société Rockefeller et Carnegie, qui étaient des gens très riches à l'époque — qui a été mandaté pour aller évaluer toutes les écoles de médecine aux États-Unis. On a réalisé très vite que, comme c'étaient eux autres qui finançaient les écoles de médecine, ils ont été obligés d'utiliser les méthodes scientifiques. Sinon, si on n'utilisait pas cette méthode, ce nouveau paradigme, on perdait le financement de notre université. Et ça, ça a créé deux sortes d'écoles de médecine. On a eu toutes les écoles hygiénistes, les écoles beaucoup plus axées sur la médication naturelle, qui ont évolué sans financement du secteur privé et, d'un autre côté, toute la partie, la science, la médecine, telle qu'on la connaît, avec les outils pharmaceutiques. C'est intéressant aussi de dire que Carnegie et Rockefeller étaient les principaux actionnaires des compagnies pharmaceutiques. Donc, on finançait les établissements de santé si ces gens-là appliquaient directement les outils qui étaient mis en promotion.

Alors, tout ceci pour dire que, même aujourd'hui, il n'y a rien de nouveau sous le ciel, c'est-à-dire qu'on tente de changer un paradigme de la santé, mais pour des impératifs économiques. Je pense qu'aujourd'hui, si on est en train de parler de l'évolution des thérapies alternatives, au-delà de la protection du public et de tout ce qu'on a entendu, il ne faut quand même pas se conter d'histoires. Je pense que les thérapies alternatives sont une économie, jusqu'à un certain point, pour l'État, puisque l'État n'y participe pas directement; en bout de ligne les pratiques alternatives, avec une approche préventive, peuvent économiser beaucoup et empêcher les gens d'être malades, sur une longue période.

Ceci étant dit, j'ai glissé dans la pochette que vous avez eue, qu'on vous a remise, deux recommandations de référence qui nous apparaissent très importantes. Évidemment, on est conscients qu'à la tribune ici on ne peut pas exposer la difficulté des médecines naturelles ou des médecines alternatives de se faire évaluer par le modèle de la science. Moi-même, je suis issue du modèle de la science, ce qui me permet d'être capable de le critiquer très ouvertement. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on fasse passer les thérapies alternatives à un processus d'évaluation, mais il ne faudrait pas oublier que les sciences sociales ont des modèles d'évaluation qui pourraient peut-être être plus proches de ce qu'on est et de ce qu'on est capables d'apporter.

On n'a pas d'objection à être évalués — ça, c'est très clair — mais on préférerait de beaucoup une évaluation qui mettrait en parallèle différentes thérapeutiques dans des pathologies spécifiques, pour faire une étude comparative entre le degré, si on veut, d'efficacité d'une thérapie — qui s'appelle peut-être la chiropratique, l'ostéopathie ou l'acupuncture — dans des pathologies comme le mal de dos ou des choses concrètes. Ça, je pense que ce serait très possible. D'un autre côté, il ne faudrait pas, non plus, utiliser le modèle d'évaluation ou les formes d'évaluation comme une mesure pour retarder dans le temps la reconnaissance des médecines alternatives, parce que ce qu'on a vu, c'était...

Bon, on parle beaucoup du caractère scientifique, que j'accepte, et il y a des choses qu'on sera capables d'aller mesurer, mais, d'un autre côté, je pense que ce qu'on demande au gouvernement, c'est de nous donner un encadrement, à cette étape-ci. C'est une structure d'encadrement qu'on veut et on est prêts — c'est ce qu'on propose et on pourra le voir tout à l'heure — à voir dans le temps comment on pourra arriver à une réelle reconnaissance professionnelle en fonction de critères ou en fonction de choses qu'on aura pu évaluer.

Ça m'apparaissait important de situer un petit peu le caractère scientifique. À cet égard, je vous ai mis aussi une référence où, même aux États-Unis, on réalise la difficulté du concept ou du schéma de recherche, lorsqu'on vient à l'appliquer intégralement aux thérapies alternatives. D'une part, parce que les thérapies alternatives n'isolent pas les facteurs — au contraire, on les regroupe — aussi, parce que la personnalité du thérapeute est intimement reliée à la dynamique thérapeutique, et aussi la perception que le patient peut avoir de sa maladie. Lorsqu'on commence à parler de perception ou de personnalité du thérapeute, ça fait beaucoup de facteurs qui sont interreliés et pas nécessairement toujours quantifiables selon le modèle orthodoxe cartésien.

Alors, ceci étant dit, je pense que, par rapport à nos recommandations, à la page 12, ça résume très bien notre position. Pour nous, ça nous apparaît très simple, la réglementation ou l'encadrement qui pourrait être souhaitable. Je pense que le premier principe, pour nous, à respecter, c'est qu'on arrive à établir une seule structure. La raison est simple: c'est que cette structure aura un mandat, le mandat, c'est sûr, d'encadrer les professionnels, de voir aux critères de formation des différentes écoles et aussi de recueillir les plaintes.

Sur le sujet des plaintes — je pense qu'on en a beaucoup parlé depuis quatre jours — il faudrait aussi spécifier que, jusqu'à date, les plaintes, qui ont été dirigées souvent par la Corporation professionnelle des médecins du Québec, entre autres, n'ont pas toujours été des plaintes du public. Ça, pour nous autres, ça nous apparaît criant et même très important, à ce moment-ci. Oui, on est d'accord pour que le gouvernement ou une structure traite des plaintes qui arriveront du public, mais on est bien conscients que, jusqu'à date, il y a beaucoup de plaintes aussi qui ont été forgées. La plainte arrivait souvent d'un agent dénonciateur ou délateur, qui «se falsifiait» en faux patient et qui essayait de nous prendre en défaut, alors que, nous, on était de bonne foi.

Le processus, je dirais, de plaintes, à notre sens — et ça, ça a, je pense, ressorti plusieurs fois — ne devrait pas relever de corporations professionnelles, à cette étape-ci, mais devrait appartenir à la structure d'encadrement, peu importe le nom qu'on lui donne, ce qui fera partie de son mandat. Je pense que l'intégration du public au comité des plaintes nous apparaît essentielle, à ce moment-ci. Je ne sais pas si on ira jusqu'à la proposition de M. Trudel, qui était quand même intéressante, à l'ouverture, où il disait de s'en remettre exclusivement ou, en tout cas, à tout le moins, à un nombre majoritaire de gens du public. Je pense qu'on serait prêts à aller jusque-là, parce que le public est de bonne foi et les gens sont de plus en plus informés. Je pense qu'il ne faut pas penser que le public, il a des...

Bon. C'est sûr qu'il y a des cas d'exception où les gens méritent plus d'information, mais, en général, les gens sont très critiques sur les services qu'ils consomment et de plus en plus. Pour, nous-mêmes, être sur la ligne de front, c'est-à-dire qu'on est un organisme qui accueille, à tous les jours, des appels qui viennent directement du public, je peux vous dire que les gens sont très bien informés. Des fois, je trouve que la discussion a laissé sous-entendre que le public est quand même dupe là-dedans, mais je pense que, à quelques exceptions près, les gens sont quand même avertis, d'autant plus que, quand on va vers les pratiques alternatives, c'est de l'argent que les gens dépensent de leur propre avoir. Donc, ils sont encore beaucoup plus sévères, en ce sens que, quand il y a un échange d'argent et que c'est monnayable, on s'attend à des services et on s'attend à des résultats.

Alors, notre première recommandation, c'est: une seule structure pour encadrer l'ensemble du réseau alternatif, ce qui n'exclut pas — parce que c'est important de bien comprendre la nuance — les membres des corporations professionnelles; ceux qui veulent, ceux qui ont de l'ouverture ou ceux qui ont des affinités avec ces pratiques peuvent les pratiquer quand même. Ça éviterait l'éclatement, si on veut, de voir les thérapies alternatives répertoriées, divisées et un peu morcelées dans chacune des pratiques, des corporations existantes.

À notre sens, ça empêcherait même la saine évolution des pratiques alternatives, alors que, s'il y a une structure qui voit à l'encadrement, ce n'est plus l'appartenance à une corporation professionnelle qui va faire foi de critère, mais bien les critères de base établis qui sont, pour la plupart, les mêmes qu'on a discutés depuis quelques jours: d'abord, la première barrière que, nous, on présente, qui est le tronc commun, et la deuxième barrière qui peut être spécifique à chacune des disciplines, parce qu'on est bien conscients qu'il y a des disciplines qui vont demander une compétence différente d'une autre. Dans le cas de l'acupuncture et de l'homéopathie, il a été clairement démontré que la quantité de formation nécessaire pour arriver à l'exercice et à la pratique est probablement différente de la masso et probablement différente de la réflexologie ou de toute autre pratique. (11 h 20)

Alors, ceci n'enlève pas le caractère, je dirais, bénéfique de la pratique. On ne veut pas, non plus, surcharger les heures de formation juste pour en faire un caractère peut-être bienvenu. Je pense que ça serait à cette structure de reconnaissance de vraiment l'évaluer. Si, pour être un bon réflexologue ou pour être un bon massothérapeute, une quantité de formation x est suffisante, bien, ça pourrait être établi de la façon suivante.

On a beaucoup parlé du modèle de l'Ontario, on a beaucoup parlé de l'évaluation qui se fait aux États-Unis. Je pense qu'à cette étape-ci, après avoir vu tout le

travail... Parce qu'il faut souligner le travail considérable de l'Office des professions, qui a été fait; qu'on soit d'accord ou non avec les recommandations finales, je pense qu'il faut admettre que ce groupe de travail a fait un travail géant. Il a décortiqué le dossier de façon extraordinaire. Il faut dire que ces gens-là étaient de bonne foi. Alors, je pense qu'on n'a pas à envier le modèle d'autres places. Je pense qu'on a plutôt à se faire confiance et on devrait être capables de se trouver, au Québec — on est assez créateurs, on est assez ingénieux — de s'adapter un modèle de pratique des thérapies alternatives en fonction de notre système et de notre évolution ou de notre propre point de rencontre à travers toutes les thérapies alternatives.

C'est bien évident que, encore là, on ne nie pas l'importance d'aller vérifier l'efficacité des thérapies alternatives. Si c'est pour comparer l'efficacité relative des différences techniques, je pense que c'est de bonne foi. Par contre, on ne voudrait pas que les thérapies alternatives aient le fardeau de la preuve de quelque chose qu'on n'exige même pas des méthodes de la médecine. Parce qu'il ne faut pas se leurrer, la médecine n'a pas réussi à prouver encore, de façon scientifique, chacune de ses interventions. On a juste à penser aux pontages, on a juste à penser à l'efficacité de l'aspirine, qui n'est pas encore nécessairement bien cernée. Je ne voudrais pas que les thérapies alternatives soient, quand même, victimes de la procédure de vérification de la preuve, alors qu'on n'exige même pas ça pour plusieurs disciplines médicales, si vous voulez.

Par contre, on est prêts à embarquer, jusqu'à un certain point, dans un processus d'évaluation en autant que le cadre conceptuel de la recherche sera déterminé avec les experts en thérapies alternatives. À ça, on n'a aucune objection; même, on va être heureux de le voir, parce qu'on est convaincus, à cause de l'efficacité des thérapies alternatives, qu'en bout de ligne, quand le gouvernement verra si les thérapies alternatives feront partie, entre guillemets, du panier de services qui seront payés par l'État... Je pense que c'est une analyse qui sera importante et qui sera obligatoire, avant d'intégrer les thérapies alternatives à une structure même si, fondamentalement, ce n'est pas ce qu'on souhaite. Mais on sait que le processus évolutif pourrait amener l'État à regarder une telle hypothèse de travail.

Je pense que, si on veut apporter des éléments nouveaux par rapport à ce qui a été dit... D'abord, je me permets de souligner que, pour nous, une des choses très importantes, à ce moment-ci, que le gouvernement pourrait prendre en considération, c'est le dossier de l'acupuncture. Parce qu'il est faux de prétendre que le dossier de l'acupuncture est réglé. Pour avoir été impliquée dans le dossier depuis plus de 12 ans et y être impliquée jusqu'en haut des oreilles, je peux vous dire que le dossier de l'acupuncture est dans un cul-de-sac duquel on ne se sortira pas. Je pense que ça serait probablement important, à la lumière de cette expérience-là, de voir comment on pourrait ne pas répéter la même erreur, parce que, dans le moment, c'est très problématique, en ce sens qu'il y a des positions arrêtées. Il y a la corporation des médecins qui garde sa tutelle et qui, à notre sens, ne lâchera pas prise sur le dossier de l'acupuncture, quoiqu'il y ait un avant-projet de loi sur la table.

On trouve aussi préjudiciable et même injuste que l'acupuncture ait un traitement de faveur par rapport aux autres disciplines, parce qu'elle n'est pas plus dangereuse et elle n'est pas plus efficace. Elle fait partie de toutes les thérapies alternatives. Nous, on pense que la discipline acupuncture devrait rentrer dans le grand chapeau de toutes les thérapies alternatives. Comme ça, je pense qu'elle serait à sa place. Elle pourrait aussi faire partie de toutes les approches qu'on pourrait soumettre à une évaluation de la structure qu'on voudrait mettre en place.

Projet-pilote, il faut s'entendre. Nous, on entend par projet-pilote une période de cinq ans où on pourrait permettre à tout le monde de régulariser ses critères d'admission et où on pourrait commencer à appliquer les nouveaux critères, parce qu'il va y avoir une étape de transition. Pour nous, c'est ce qu'on signifie par projet-pilote, et pas nécessairement de juste laisser les pratiques alternatives se pratiquer dans des endroits spécifiques et d'aller les vérifier dans leur efficacité propre. Je pense que, ça, ça va être aussi à faire attention, comment on positionne le débat à ce niveau-là.

Il y a tout le dossier que je vous présente bien brièvement, et vous pourrez nous questionner par la suite. Qu'est-ce qu'on fait avec toutes les boutiques d'aliments naturels, qui sont des vendeurs libres, c'est-à-dire qu'il y a une vente, une distribution de produits? Jusqu'à date, on n'a pas beaucoup parlé de la réglementation qui encadrerait les gens qui travaillent dans ces boutiques-là et — je pense qu'il faut dire les choses comme elles sont — ils peuvent être appelés, veux, veux pas, à faire du diagnostic. Parce que, s'il y a une place où il se fait du diagnostic, je pense que c'est à ce niveau-là. C'est une problématique qu'on n'a pas beaucoup discutée pendant la commission parlementaire, et qui nous apparaît importante.

Alors, ceci termine notre présentation et on est prêts à recevoir le questionnement. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, Mme Lévesque. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. J'ai presque été devancé; je dirais même qu'on a répondu à une question que j'avais imaginée avant même le début de votre présentation. Connaissant la présence sur le terrain de l'Alliance depuis quelques années, je pense que vous avez suivi très largement tous les débats de la réforme. On vous a vus un peu partout et dans à peu près toutes les circonstances. Comme ça tire à sa fin, qu'on a eu la Coalition au début et l'Alliance à la fin — puis, c'était volontaire en termes de choix — je m'étais dit: Je vais demander à l'Alliance ce qu'elle tire comme conclusions de cette commission-là. Je pense que vous avez commencé à nous livrer une bonne partie de vos observations.

Ma première question va aborder le scientifique — inévitablement, je pense qu'on n'y échappera pas — ou, vocable plus large, l'évaluation. Vous dites oui à une évaluation sous certaines conditions, si on veut être équitable et juste sur le plan de ces évaluations-là et ne pas tomber dans pas nécessairement les erreurs, mais les mêmes modèles du début du siècle, ai-je bien compris, sur le plan d'une industrie qui s'annonçait très lucrative: pilules, recherches et ainsi de suite. Ma première question est vraiment la suivante: Est-ce que vous ne devez pas admettre, vous aussi, que l'industrie des thérapies alternatives est aussi une industrie florissante et, pour certaines, lucrative?

Mme Lévesque: Tout à fait d'accord avec vous, M. le ministre. Justement, c'est pour ça qu'on vous soulève la problématique des produits naturels où, à notre sens, toute personne qui intervient dans le domaine de la santé au Québec devrait avoir un minimum de connaissances du corps humain et des éléments de base, même si ce n'est que dans la distribution de produits. Un peu comme le secteur immobilier ou tout autre. Ce n'est pas parce qu'on est sur le coin d'une rue, qu'on a pignon sur rue, qu'on a une boutique, et qu'on vend des produits... Je pense que ça mérite aussi d'avoir certaines connaissances de base, et ça, c'est une préoccupation. On pense qu'on devrait passer un peu plus de temps sur ce point-là.

M. Côté (Charlesbourg): O.K. Mais pas... Mme Lévesque: Mais oui, c'est une industrie.

M. Côté (Charlesbourg): D'accord. Profitons-en parce que, ça, c'est un élément des thérapies alternatives. Vous l'illustrez par celui-là, au niveau des boutiques de vente d'aliments naturels. Évidemment, si on extensionne cette notion-là, puis qu'on va très loin, on va se retrouver aussi chez IGA, chez Métro, il y a des bonnes chances, parce qu'il y a des aliments qu'on consomme à tous les jours, qui peuvent avoir aussi des effets sur la santé de l'individu. Cela me paraît aussi évident. Où est la limite dans ça, parce qu'on dit «boutiques de vente d'aliments naturels»?

Mme Lévesque: Aliments...

M. Côté (Charlesbourg): Notre limite, elle est où, dans ce cas-là particulier?

Mme Lévesque: En tout cas, à tout le moins, ça demanderait une réflexion. On pense qu'il y a une piste où aller voir et il y a toute une réflexion à faire dans ce domaine-là. Je comprends qu'ici ce n'est peut-être pas la tribune idéale pour le faire, mais...

M. Côté (Charlesbourg): De toute façon, malgré notre heure...

(11 h 30)

Mme Lévesque: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): ...on ne réussirait pas à trouver des limites, mais je comprends que le point est soulevé. Il a aussi ses limites et, dans ce sens-là, c'est vrai qu'on ne l'a pratiquement pas abordé pendant ces quatre jours-là, ou très peu, sauf, à l'occasion, avec les pharmaciens ou quelqu'un d'autre, sur les effets de la vente de certains herbages qui, supposément, pouvaient être nocifs à la santé.

Donc, on est dans une situation où vous proposez une structure commune, de par votre expérience vécue. Vous avez dit, dans votre présentation: Au lieu d'avoir une intervention morcelée, on a préféré regrouper tout le monde. Au lieu d'avoir un combat à la pièce, parce que c'est un peu ça, comme l'a fait l'acupuncture, comme l'ont fait les chiros et ainsi de suite, on préfère avoir un regroupement, ce que vous avez fait avec l'Alliance, et mener, si on peut s'exprimer ainsi, le même combat quant à la reconnaissance. Profitons-en pour mettre tout le monde sous le même chapeau et tenter de faire reconnaître les thérapies alternatives. Mais elles ne sont pas de même niveau, elles ne sont pas toutes de même niveau.

Mme Lévesque: Ça, on le reconnaît. M. Côté (Charlesbourg): Comment? Mme Lévesque: On le reconnaît bien. M. Côté (Charlesbourg): Bon. Mme Lévesque: Oui.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, on a discuté, en cours de commission, par exemple, d'un certain nombre — et je vous ai vue dans la salle pendant toute cette semaine; donc, il n'y a rien de neuf pour vous — ostéopathie, homéopathie, acupuncture et ainsi de suite. On a dit que ça semblait rallier un certain consensus, que ce n'est pas de même niveau que certaines autres thérapies alternatives. Comment est-ce qu'on fait la distinction entre les deux?

Mme Lévesque: C'est parce que là... Je pense que, pendant la tenue de la commission, on a beaucoup entendu des corporations qui étaient aussi intéressées par des nouveaux créneaux, des nouveaux champs de pratique. Alors, c'est bien sûr que, l'homéopathie, on en a beaucoup parlé. Il faut comprendre que, l'homéopathie, c'est une pratique qui ressemble étrangement à la pratique médicale, c'est-à-dire qu'il y a une prescription, et qui peut amener le médecin à travailler dans le même cadre de travail — ça ne demande pas une organisation différente — d'où l'intérêt de la profession médicale, je pense, à ouvrir ses horizons et à aller vers ces pratiques-là.

Nous, on n'a pas de problème. On sait très bien qu'il y a différents niveaux de compétence nécessaires, mais à l'Alliance on s'est arrêtés aux sept pratiques qu'on a toujours identifiées. Il y en a quelques autres,

mais, par souci de, quand même, bien encadrer celles-là, on s'est limités à sept pratiques, justement parce que ces pratiques-là avaient, à notre sens, un préjudice, ce qui nous a permis d'avoir l'assurance-responsabilité professionnelle pour l'ensemble des sept pratiques. Je dois dire bien humblement qu'on est le premier groupe à avoir obtenu cette couverture de police, après beaucoup de travail et beaucoup d'évaluations. On est prêts à repasser par le même processus d'évaluation, je pense qu'on est prêts à le faire. Les sept pratiques concernées sont: l'acupuncture, l'homéopathie, la massothérapie, l'orthothérapie, l'ostéopathie, la pratique sage-femme. Ces sept pratiques-là ont des risques. Lorsqu'on parle avec des assureurs qui ont une expertise internationale — parce qu'on a fait affaire avec la Lloyd's d'Angleterre — et qui ont affaire à différents groupes de thérapies alternatives dans le monde, parce qu'ils sont les principaux assureurs, bien, on a pu voir où étaient les risques, même si les risques ne sont peut-être pas nécessairement les mêmes que ceux apportés par l'Office des professions.

M. Côté (Charlesbourg): Je vous suivais en même temps que le mémoire qui est déposé, et il y en a une qui est là et que vous n'avez pas mentionnée: la pratique conseiller de santé.

Mme Lévesque: Oui, conseiller de santé, qui est une nouvelle approche pour nous et qui va devenir sous peu... C'est parce que, dans le moment, on est en pourparlers avec ce groupe-là.

M. Côté (Charlesbourg): Je comprends qu'il est encore beaucoup plus global que les autres.

Mme Lévesque: II est beaucoup plus global... M. Côté (Charlesbourg): Bon.

Mme Lévesque: ...et il peut même, à la limite, impliquer aussi les psychothérapies.

M. Côté (Charlesbourg): Mais ce que je comprends, c'est que vous reconnaissez qu'il y en a qui ne sont pas de même niveau que les autres. Dans ce cas-là, vous les regroupez sous un même chapeau, mais il y a d'autres thérapies alternatives.

Mme Lévesque: Je dois vous dire, M. le ministre, qu'il n'y en a pas beaucoup d'autres. Je ne pense pas qu'il y ait 400 pratiques alternatives au Québec. Je pense que, là, on a charrié les chiffres. C'est sûr que, si on prend la massothérapie comme chapeau et que vous décortiquez les 25 techniques différentes de massothérapie, oui, vous allez forcément multiplier le nombre. Mais je pense qu'à l'intérieur de cinq ou six grandes familles, ou champs de pratique, on arrive très, très bien à encadrer l'ensemble des pratiques alternatives qui se pratiquent au Québec. Je ne pense pas qu'on est rendus à 100 pratiques. Je pense que c'est une façon peut-être imagée de montrer la multitude de techniques et de facettes, mais, dans le concret, quand on va voir ce qui se passe sur le terrain et les gens qui vivent de leur pratique, qui travaillent, qui sont les véritables thérapeutes alternatifs, il n'y a pas 100 pratiques. Je pense que c'est illusoire.

M. Côté (Charlesbourg): Mais l'Organisation mondiale de la santé en reconnaît quand même au-delà de 200.

Mme Lévesque: II y en a 104 que l'Organisation mondiale de la santé reconnaît. Mais, ça, c'est partout sur la planète; ça ne veut pas...

M. Côté (Charlesbourg): Oui, oui.

Mme Lévesque: ...dire qu'elles sont toutes pratiquées au Québec.

M. Côté (Charlesbourg): Non, non, je comprends. Je comprends, mais disons-nous, à tout le moins, que, si ça se pratique sur la planète, il y a peut-être des chances qu'éventuellement ça vienne chez nous. Si on veut prévoir l'avenir, à tout le moins, ça me paraît d'une élémentaire prudence qu'on puisse envisager ça aussi.

Mme Lévesque: Bien, on est tout à fait d'accord et on pense même qu'une des missions de cette structure-là, la nouvelle structure qui serait en place, devrait être un comité qui analyse l'arrivée de toute nouvelle discipline. Je pense qu'on ne se veut pas un modèle fermé où on en admet huit ou neuf et là il n'y a plus rien qui rentre. Mais je pense qu'à tout le moins il devrait y avoir un comité spécial qui fait l'analyse de toute nouvelle discipline qui veut se joindre à la grande famille des thérapies alternatives — ne serait-ce que par le corpus académique ou les assises sérieuses de cette pratique-là — et que n'importe qui ne puisse pas, demain matin, inventer une thérapie et se dire porteur d'une nouvelle technique, juste parce que la voie est facile. Je pense que, s'il y a une structure d'encadrement, on devra prévoir ce mécanisme, et ce mécanisme-là pourra aussi faire appel au public et à différents experts et peut-être, là aussi, à l'expertise scientifique qui pourrait apporter sa contribution énormément.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, le moyen de contrôler ce qui est, pas nécessaire, ce qui pourrait être reconnu, c'est par une structure d'encadrement qui, elle, serait autonome des thérapies alternatives. Ce serait de la responsabilité gouvernementale, en termes de structure d'encadrement?

Mme Lévesque: Exactement, oui. Idéalement, sous le ministère des affaires sociales.

M. Côté (Charlesbourg): Et qui, elle, pourrait se donner des critères quant à l'acceptation, aux exigences

quant à la formation de ce qu'on pourrait reconnaître comme thérapies. Vous allez plus loin en disant: Tout le processus de plaintes devrait être traité par cette struc-tufè-là, à ce que j'ai compris...

Mme Lévesque: Définitivement.

M. Côté (Charlesbourg): ...de façon à le sortir des corporations — en termes de traitement de plaintes — qui peuvent à la fois, à l'occasion, être juge et partie. C'est un peu comme ça que vous définissez votre structure d'encadrement.

Mme Lévesque: C'est exactement le modèle qu'on propose.

M. Côté (Charlesbourg): Bon. Je vais plus loin dans la démarche, parce que vous avez vous-même évoqué, si j'ai bien saisi, une certaine crainte à l'égard de ce qui a été évoqué jusqu'à maintenant, ici, comme projet-pilote. Vous semblez craintive, si j'ai bien compris, quant au projet-pilote et votre conception de projet-pilote, je pense, diffère un petit peu de la mienne. Ce que vous avez évoqué tantôt, d'après moi, ce n'est pas un projet-pilote. C'est une période qui permet la reconnaissance, niais qui mène nécessairement...

Mme Lévesque: Un moratoire.

M. Côté (Charlesbourg): ...à la reconnaissance. Donc, c'est davantage un moratoire, qui permet à un certain nombre de thérapeutes, pendant cette période, de se conformer aux exigences que la structure d'encadrement établirait et de se qualifier, finalement, comme thérapeutes et comme pratiques alternatives aussi, à ce que j'ai compris. C'est davantage ça...

Mme Lévesque: Hum, hum!

M. Côté (Charlesbourg): ...que vous souhaitez.

Mme Lévesque: Tout à fait.

M. Côté (Charlesbourg): Donc, ce n'est pas un projet-pilote.

Mme Lévesque: Non.

M. Côté (Charlesbourg): Parce qu'un projet-pilote, on ne peut pas conclure de son utilité avant même d'avoir fait le projet-pilote et d'avoir répondu à un certain nombre d'évaluations.

Mme Lévesque: C'est là que je vous dis que, nous, l'évaluation, on la trouve pertinente dans la mesure où c'est pour faire une étude comparative entre différentes techniques d'intervention par rapport à une pathologie particulière. C'est-à-dire que je ne pense pas que les thérapies alternatives ont le fardeau de démontrer tout ce qui se passe dans le processus, parce que la science, qui est très axée sur le processus, d'après nous, n'arrivera pas à des choses concluantes.

Notre crainte par rapport au projet-pilote, ça serait d'utiliser cette période-là juste pour, un peu, noyer le poisson dans l'eau, et faire qu'au bout de cinq ans on se retrouve avec moins que rien encore et que, finalement, le dossier n'aura pas avancé. Nous, on pense que, cinq ans, c'est long pour être dans le concret et dans le quotidien, et vivre la réalité des thérapies alternatives avec ce que ça implique dans la gestion des thérapeutes, avec l'encadrement et les poursuites qui, soit dit en passant, sont peut-être plus nombreuses que ce que la corpo a laissé sous-entendre. Je pense que, dans notre quotidien, on est prêts à l'action, parce que ça fait plusieurs années qu'on est sur le terrain. On est prêts à des solutions concrètes. On est prêts à contribuer, je pense, à toute solution intelligente, mais on ne voudrait pas, non plus, que la mesure d'évaluation, qui est très poussée par les corporations professionnelles, soit plutôt une mesure pour un peu distraire l'attention et faire en sorte, dans le temps, d'amoindrir le phénomène des thérapies alternatives et que, de toute façon, on porte un préjudice.

M. Côté (Charlesbourg): Mais, entre vous et moi, là, est-ce que le fait d'être très exigeant au niveau de l'évaluation — demeurons au niveau de l'évaluation...

Mme Lévesque: Vous voulez dire des critères d'entrée ou de l'évaluation...

M. Côté (Charlesbourg): L'évaluation. Mme Lévesque: ...scientifique?

M. Côté (Charlesbourg): Parlons du scientifique, disons. Ce qui est social peut aussi être, en termes d'évaluation...

Mme Lévesque: Oui. (11 h 40)

M. Côté (Charlesbourg): ...tel que vous le souhaitiez, une bonne évaluation. Est-ce qu'être très exigeant au niveau de l'évaluation n'offre pas une garantie au public, y compris aux thérapeutes eux-mêmes? Je pense qu'il n'y a pas de quartier à faire au niveau de l'évaluation si nous voulons aller dans cette voie-là. À vous entendre j'ai peut-être l'impression que ça vous fait peur un peu, l'évaluation, sans la repousser, et ce qui vous fait davantage peur, c'est l'évaluation dite scientifique ou du point de vue du corps médical, par exemple, versus l'ostéopathie, l'homéopathie, parce qu'on a entendu depuis le début de la commission que c'était bon, mais en autant que ce soit pratiqué par un médecin.

C'est un peu dans ce sens-là que vous craignez que l'évaluation soit un peu biaisée à sa base même si elle a ces exigences-là. Mais, à la base même, je pense qu'il faut être très, très exigeants au niveau de l'évaluation. Ce sera une garantie pour le public — c'est celui qu'on veut desservir — et aussi une garantie pour les

thérapeutes qui pratiqueront ces thérapies alternatives.

Mme Lévesque: Oui, je pense qu'on n'a pas de problème avec ça en autant, comme vous dites, que ça ne devienne pas quelque chose pour retarder dans le temps la décision de nous encadrer, et en attendant de nous donner une structure viable. En attendant, je pense que tout ce que les thérapeutes veulent, c'est stopper la répression de la Corporation professionnelle des médecins du Québec. C'est ça, dans le fond, notre ultime souhait et c'est le cri du coeur que vous avez entendu des présentations. Même, à la limite, le groupe qui a été, je dirais, le plus grand porte-parole de ce cri du coeur, ça a été les médecins holistiques qui sont venus vous dire: M. le ministre, faites quelque chose. Leur mesure de cinq ans d'études, je pense, était un peu pour venir dire: Eh bien, nous aussi, on veut contribuer à ce processus-là, et on ne veut pas être réprimés.

M. Côté (Charlesbourg): Oui. Demeurons là-dessus, je vais finir là-dessus pour permettre à mon collègue de vous interroger. Un moratoire, ça signifie forcément, dans les domaines que nous pourrions identifier, l'arrêt des procédures contre un certain nombre de thérapeutes alternatifs, mais pas tous les thérapeutes alternatifs. Il faut être assez clairs là-dessus, parce qu'il y a des gens qui portent le nom de thérapeute alternatif, mais qui peuvent être considérés dans la catégorie des charlatans. À ce moment-là, on manquerait à notre devoir élémentaire de protection du public.

Mme Lévesque: Définitivement.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, comment fait-on, dans un moratoire, pour s'assurer que ceux qu'on veut protéger, soit les citoyens, le soient, tout en arrêtant les procédures contre des thérapeutes alternatifs, et qui sont ceux qu'on devrait mettre sous le couvert du moratoire? Ça va nous donner un peu la mesure de ceux qui pourraient être poursuivis légalement.

Mme Lévesque: Moi, je vous dirais, M. le ministre, qu'il n'y a aucune thérapie qui ne devrait pas être sous le couvert du moratoire, c'est-à-dire que vous allez répondre aux plaintes réelles du public. Même si vous décidez d'encadrer l'acupuncture et que quelqu'un fait un geste reprehensible dans l'acupuncture, ce n'est pas parce qu'il y a un moratoire qu'il ne devrait pas être sanctionné.

Alors, ce n'est pas tant la thérapie que le mécanisme même qui va recueillir les plaintes. C'est important que vous gardiez votre rôle de protection du public dans le sens large, et ça, ça serait carrément soustraire de la juridiction de la corporation des médecins tout l'accueil, l'arrivée des plaintes, parce que, là, on n'est plus capable de faire la différence entre une plainte réelle et une plainte forgée par la corpo des médecins.

Alors, si vous mettez dans la structure, peu importe où elle sera, même sous votre juridiction, dans la période de cinq ans, un comité qui verrait à répondre systématiquement à toutes les plaintes du public à l'égard de tout ce qui s'appelle thérapie alternative, je pense que vous vous mettez dans les bonnes conditions pour arriver à vos fins, et sans porter préjudice à aucune des thérapies alternatives. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Côté (Charlesbourg): Oui, en bonne partie. J'en aurais d'autres, mais on me signale que je dois m'arrêter. Mais je suis convaincu que, compte tenu de la complémentarité de l'Opposition et du pouvoir actuellement sur ces dossiers-là, ça va continuer.

Le Président (M. Joly): Je pense que M. Magny avait quelque chose à ajouter. M. Magny, vous auriez aimé dire quelque chose? J'ai senti ça, là.

M. Magny (Jean-Claude): D'accord. C'était concernant la recherche comme telle. Au niveau de la recherche, je pense que, comme disait M. le ministre, il faut effectivement mettre toute la rigueur, au niveau de la science, au service de la population. Le point, par contre, où il faudrait mettre l'emphase, c'est non pas comment ça marche, mais est-ce que c'est dangereux? Si on peut seulement isoler ce point-là — l'effet iatrogène d'une pathologie, par exemple — si vraiment on peut isoler ce côté de danger par rapport à une approche quelle qu'elle soit, je pense que la recherche pourrait d'abord être orientée dans ce sens-là.

Donc, trois points que je verrais au niveau de la recherche. D'abord, préciser une démarche clinique spécifique: est-ce que les pratiques ont une démarche comme telle? Ensuite, la réussite: est-ce que ça marche, oui ou non? Mais pas: comment ça marche? Est-ce que ça marche? Troisièmement: est-ce que c'est dangereux? On parlait, tantôt, des plantes. Il y a certaines plantes, de temps en temps, qu'on retire du marché parce que, utilisées à trop fortes doses, ça peut être dangereux. Ça peut être la camomille, etc. Effectivement, je pense que la recherche devrait, dès à présent, être mise en place par rapport à ces choses-là.

L'autre côté où je suis contre la recherche, c'est le fait que, nous, en pratiques alternatives, on a toujours dit qu'on défend une approche personnalisée, d'une part. Bien, il faudrait faire une recherche sur chaque individu. D'autre part, on défend une forme de transdis-ciplinarité comme telle, un mélange des disciplines. Donc, est-ce que mon approche fonctionne seulement au niveau de la naturopathie ou bien de la naturopathie en accord avec une approche énergétique ou bien une autre approche? Donc, ça va être très difficile de conjuguer une recherche clinique seulement axée sur une thérapeutique. Ces points-là me portent ombrage par rapport à la recherche. Mais les autres volets de la recherche — qui sont beaucoup plus au niveau de l'efficacité, au niveau du danger — me paraissent très raisonnables.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Rouyn-Noran-da—Témiscamingue. M. le député, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. On arrive donc à un certain terme de la commission, et sans préjudice pour le groupe qui va venir après. Je veux noter tout de suite, de la part de l'Alliance, cette ouverture d'esprit que vous manifestez pour défendre, évidemment, les intérêts des membres et d'un certain nombre de pratiques alternatives, mais ce souci que vous avez de vous inscrire dans le courant de la société québécoise et de ne pas demander de passe-droits. Vous ne demandez pas de passe-droits, de laissez-passer en disant: Reconnaissez-nous donc, puis laissez-nous filer comme on l'entend, sans regard de votre part. À cet égard, il faut cependant en arriver — oui, effectivement — à ce que l'État pose des gestes concrets pour en arriver à cela. La commission aurait servi de discussion, mais encore faut-il qu'il y ait des résultats.

Je m'intéresse tout de suite à ce moratoire qui semble se profiler à l'horizon et qui, suivant les différentes interventions qui ont eu lieu ici, signifierait donc un moratoire sur les poursuites pour pratique illégale de la médecine — soyons très concrets — mais, par ailleurs, sans délaisser la responsabilité de la protection du public. Ça va de soi.

Est-ce que vous pensez, donc, que nous pourrions, comme premier geste de reconnaissance et dans le processus de la reconnaissance des thérapies alternatives, dire: Le gouvernement doit récupérer sa responsabilité des poursuites en matière de pratiques relatives à la santé, qui risquent de causer des préjudices graves à la santé publique ou à la santé privée d'un citoyen? En d'autres termes, pourrions-nous imaginer que le système des poursuites puisse être récupéré par le gouvernement, sortir ça de la corporation des médecins du Québec, confier le mandat de surveillance et d'inscrire d'éventuelles poursuites auprès du Procureur général du Québec au commissaire aux plaintes qui a été institué en vertu de la loi 120?

Je répète: Est-ce qu'on pourrait imaginer un système simple qui, pendant un certain nombre d'années, dirait: L'État récupère sa capacité de poursuite pour les actes qui risquent d'être préjudiciables à la santé du public; il confie ce mandat au commissaire aux plaintes, en termes d'analyse et, via le Procureur général du . Québec, il serait chargé de faire en sorte que puissent être instruites des poursuites pour charlatanisme, pour pratique illégale, pour pratique causant des préjudices, sur dossier évidemment. Est-ce que cela pourrait s'articuler de cette façon-là? (11 h 50)

Mme Lévesque: Je pense que ce que vous présentez, c'est très possible. Il y a deux conditions, à mon sens. La première, c'est que, si la volonté politique est très ferme d'agir dans ce sens-là, je pense qu'il n'y aura pas aucun problème. Ma seule inquiétude, c'est: Est-ce que le commissaire aux plaintes a l'expertise, pour être capable de faire la part des choses? À ce moment-là, il faudrait s'adjoindre l'expertise. Supposons qu'il y a une poursuite dans une discipline, ça m'apparaîtrait important que les personnes expertes dans le domaine puissent venir apporter leur contribution, mais toujours en gar- dant le public, aussi. Je pense qu'il ne faut pas délaisser la participation du public dans ce comité des plaintes. Je ne sais pas si le commissaire aux plaintes, dans le moment, a cette portion de gens du public que, nous, on demande, qui était le 50 % que le réseau alternatif serait bien d'accord à instaurer. Alors, tant qu'à instaurer un mécanisme de plaintes, puisqu'il n'existe pas dans le moment, on est aussi bien de le faire d'emblée de la bonne façon et dans une structure où on pense qu'on pourra continuer à fonctionner comme ça, c'est-à-dire avec la partie prenante du public québécois qui, à notre sens, est essentielle dans ce processus-là. Alors, c'est très possible, c'est très plausible, et je ne vous cacherai pas qu'on serait agréablement contents d'une telle démarche.

M. Trudel: Mais, souvent, le mieux est l'ennemi du bien. Si on prend deux ans pour s'assurer que toutes les tendances, que tous les groupes sont représentés dans un éventuel comité de traitement des plaintes sous la responsabilité, théoriquement, du commissaire aux plaintes, on risque fort que les résistances augmentent encore dans les groupes qui sont officiellement reconnus. Ce que je dis — et vous employez le mot «processus» — c'est: Est-ce qu'on peut imaginer que, dans ce processus, l'État récupère sa capacité d'inscrire les poursuites en matière de protection de la santé publique et privée des citoyens; deuxièmement, que l'État amorce un processus d'examen des plaintes faisant appel largement à la participation et à l'intelligence du public et que, troisièmement, tout ça puisse aboutir, dans la capacité du commissaire aux plaintes d'être le porteur d'un dossier éventuel de poursuite contre quelqu'un, auprès du Procureur général, sur dossier documenté, mais de façon, je dirais, désintéressée? En fait, sortons la poursuite contre les voleurs de banque de l'association des banquiers, hein? Est-ce que ça vous apparaît quelque chose qui, en termes d'étapisme, pourrait se vivre?

Mme Lévesque: Ça nous apparaît raisonnable, et non seulement raisonnable, mais je pense qu'on serait très heureux avec une telle démarche. On serait très heureux, on n'a aucun problème avec ça. Je vois le commissaire aux plaintes comme un acteur capable de jouer ce rôle peut-être encore plus que l'Office de la protection du consommateur qui nous apparaît plus être un acteur capable de régler les litiges contractuels par rapport à une entente de services. Comme on l'a proposé dans notre mémoire, à la rigueur, nous, on aurait été prêts à aller jusqu'à établir un contrat de services avec nos clients, si c'est ça qu'il faut pour que le réseau alternatif soit sorti de la... Bon, on pourrait établir un genre de contrat qui réglementerait toute la partie tarification, par exemple, c'est-à-dire qu'avant d'embarquer dans un processus avec un thérapeute le client serait très bien informé que c'est tant la consultation. Il n'y a pas de modalités de paiement d'avance. En tout cas, toute une procédure qui, pour nous, nous apparaîtrait quand même raisonnable et facile.

M. Trudel: En matière de gestion contractuelle... Mme Lévesque: Contractuelle uniquement. M. Trudel: ...du service à être dispensé.

Mme Lévesque: Mais, comme on ne veut pas morceler les différentes parties de cette réglementation-là, on trouve que c'est la structure d'encadrement qui devrait avoir ce mandat-là plutôt que d'éparpiller les mandats dans différentes structures. Mais, en attendant, on est bien d'accord que le comité des plaintes, je pense que ça pourrait être viable.

M. Trudel: Par ailleurs, on ne peut pas éviter de toucher, évidemment, à l'immense secteur de l'évaluation, pas l'évaluation visant à accréditer, mais l'évaluation des thérapies alternatives. Et, quand je dis évaluation, je dois dire que j'adopterais plutôt votre terme, tantôt, en termes d'analyse des thérapies alternatives. Est-ce qu'il vous apparaît imaginable aussi... Parce que ça ne vous fait pas peur? Au contraire.

Mme Lévesque: Non. Ce qui me rend plus craintive, c'est le cadre dans lequel ça va se faire.

M. Trudel: Très bien. C'est ça que...

Mme Lévesque: Est-ce que ça va être un cadre artificiel ou est-ce que ça va être vraiment un cadre de pratique réelle, comme on fait dans le moment, sur le terrain, dans le domaine privé? Dans la mesure où je serai sécurisée quant au cadre conceptuel de la recherche. ..

M. Trudel: Oui, oui.

Mme Lévesque: ...je n'en aurai pas de problème.

M. Trudel: Ce que vous me dites, là, c'est que, si vous confiez au renard le soin de garder le poulailler, vous avez comme des craintes. Bon.

Mme Lévesque: Vous avez très bien compris. Le loup dans la bergerie.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: II y a des façons, dans une société, d'y arriver. Est-ce que vous pensez que nous pourrions demander à FINRS-Santé, à l'Institut national de la recherche scientifique (Santé), qui ne regroupe pas uniquement des professionnels de la médecine... C'est un exemple que je vous donne. Est-ce qu'on ne pourrait pas confier à des équipes multidisciplinaires le mandat spécifique... puis on ne crée rien de nouveau, là...

Une voix: L'Université du Québec!

M. Trudel: Ha, ha, ha! J'en suis sorti. Non, mais l'INRS-Santé existe; il regroupe des scientifiques, c'est pluridisciplinaire. On peut en ajouter aussi, parce qu'il y a, par exemple, des sociologues de la santé à l'INRS-Santé, pour qu'on puisse discuter de protocoles d'évaluation. Est-ce que vous considéreriez que, comme évaluation externe, on pourrait confier à un organisme du type INRS-Santé, à l'Institut national de la recherche scientifique (Santé) des protocoles d'analyse — on verra si c'est «et d'évaluation» — et d'évaluation, pour l'instant, d'un certain nombre de thérapies alternatives, dans le contexte actuel?

Mme Lévesque: Êtes-vous en train de nous proposer des fonds de recherche? C'est dans ce sens-là, avec des sommes...

M. Trudel: Je suis en train, à tout le moins, de proposer qu'il se fasse beaucoup de recherche, sans nécessairement ajouter beaucoup de fonds.

Mme Lévesque: Oui, parce qu'il faut quand même être réaliste. Je pense que, nous, toute notre argumentation, c'est aussi d'arriver à faire des choses, mais sans nécessairement que ça soit un surplus financier. Oui, je pense que c'est réaliste de proposer ça à des équipes de recherche, en autant que l'expertise des thérapies alternatives soit impliquée dans le processus, qu'on ne soit pas là à défendre des paradigmes ou qu'on ne soit pas déjà arrivé avec des réponses ou des positions. Mais, si c'est fait de bonne foi, si c'est fait par des gens détachés, qui n'ont pas nécessairement d'intérêts, ni d'un bord, ni de l'autre, je pense que ça peut très bien se faire, et c'est même souhaitable que ça se fasse.

M. Trudel: Oui, parce que la recherche n'est pas que scientifique, au sens des sciences exactes. La recherche sociale a aussi son paradigme scientifique...

Mme Lévesque: Oui, puis elle a de très bons outils.

M. Trudel: ...et elle est aussi dans un paradigme scientifique qui prend en compte des dimensions autres. Regardez l'exemple qu'on nous donnait, ce matin, à partir d'un autre groupe, la Corporation professionnelle des psychologues, qui disait: On a mesuré, nous, que porter le bracelet, pour un certain nombre d'arthritiques, ça n'a rien à faire avec le matériau que portait la personne; c'est plutôt le degré de suggestibilité qui a joué là-dedans. Mais, écoutez, si le résultat, ça fait du bien...

Mme Lévesque: Exactement. Une voix: Exact.

M. Trudel: C'est le résultat, parce que, quand vous souffrez d'arthrite rhumatoïde, que ça fait mal et que vous êtes incapable d'évoluer normalement dans

votre société, il s'agit, bien évidemment, de ne pas faire dire à un certain nombre de choses ce qu'elles ne produisent pas, mais on ne peut quand même pas...

Mme Lévesque: Éliminer.

M. Trudel: ...enlever l'effet obtenu...

Mme Lévesque: Oui.

M. Trudel: ...par un tel mécanisme. Il n'y a quand même pas de mal à se faire du bien, pour une société, là.

Mme Lévesque: Mais c'est le danger de la science. La science est axée sur le processus, alors que les modèles plus pragmatiques sont axés sur le résultat. Nous, on pense que, par le bon mélange d'un cadre de recherche qui pourrait faire appel à ces deux façons d'évaluer les choses, on pourrait arriver à un heureux compromis, définitivement.

M. Trudel: Je conclus en vous remerciant de votre précieux témoignage. Je comprends que vous offrez une collaboration dans la poursuite du processus. Je comprends aussi que vous ne rejetez pas — au contraire — les paramètres généralement connus de la science, mais j'ose imaginer que vous partagez un autre paramètre avec moi, en tout cas, c'est que la science n'est pas neutre, mais qu'elle peut très bien servir à protéger l'intérêt public et privé, en autant que l'État prenne ses responsabilités en pareille matière. Merci, madame.

Mme Lévesque: Merci, monsieur.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît. (12 heures)

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Je voudrais remercier l'Alliance, et lui dire qu'il existe le Fonds de la recherche en santé du Québec, mais qu'il existe aussi le CQRS qui vient tout juste de déposer au ministère un plan de recherche de trois ans revivifié. Il pourrait être intéressant d'explorer toutes les possibilités que nous offre ce centre-là et on aura l'occasion d'en discuter éventuellement.

M. Trudel: Vous voulez dire que les deux vont demeurer ultimement, et le Conseil et le fonds de recherche?

M. Côté (Charlesbourg): Écoutez, moi, j'ai toujours dit que, éventuellement, je ne suis pas fermé à l'hypothèse qu'on puisse les regrouper sous un même chapeau, en autant que chacun conserve sa spécificité et qu'on ait réussi à rendre le CQRS à un niveau aussi respectable que le FRSQ. À partir de ça, chacun pourrait effectivement générer un certain nombre d'économies à être regroupé. Mais, évidemment, ça, ce n'est pas demain matin et tirez-en les conclusions que vous voulez.

M. Trudel: C'est que ce n'est pas demain matin. Merci beaucoup, M. le ministre.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, au nom des membres de cette commission, je tiens aussi à remercier les membres de l'Alliance. Merci beaucoup. Bon retour.

J'appellerais maintenant les gens représentant le Réseau d'action pour une santé intégrale, s'il vous plaît, connu sous le nom de RAPSI. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette tribune. J'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier et aussi nous présenter les gens qui l'accompagnent. Je vous rappelle que vous avez entre 15 et 20 minutes pour nous faire un sommaire de votre mémoire et, par après, échanger avec les parlementaires. Alors, s'il vous plaît, madame.

Réseau d'action pour une santé intégrale (RAPSI)

Mme Sabourin (Claire): Je vous remercie, M. le Président. Je m'excuse de ma voix enrouée. J'espère que ça ne fera pas trop de problèmes aux membres de la commission. M. le ministre, M. Trudel, je vous présente, à ma droite, Claude Guilbeault et, à ma gauche, Jean-Marie Berlinguette qui est l'actuel président du RAPSI. Je trouve que nous avons, en quelque sorte, une lourde tâche, arrivant les derniers, d'être originaux et de soutenir votre attention. Alors, j'espère que nous y réussirons.

M. Côté (Charlesbourg): Étant à la fois la mère et le père de l'alternatif, je pense que c'est un bon moyen de ramener des enfants au bercail.

Mme Sabourin: Alors, nous allons assumer notre tâche. Dans le mémoire, je voudrais simplement, d'abord, souligner que nous n'avons pas tenté de délimiter ce qui était l'alternatif, ce qui était l'intervention aussi dans le domaine des thérapeutiques alternatives, ni de dire que telle thérapie devrait être reconnue, ni de discerner entre celles qui avaient une portée beaucoup large et les approches qui sont beaucoup plus limitées, sachant qu'il y a, à ce niveau-là, un travail énorme à faire et que ça ne relève pas, en fait, d'une commission parlementaire d'aller plus loin que de dégager de grandes avenues. Par contre, ce qui nous a semblé essentiel, c'est de faire ressortir l'aspect, qu'il y a là un nouvel espace thérapeutique, dans le sens, aussi... Parmi toutes les divergences qu'il peut y avoir parmi les approches, parmi les grilles qui sont utilisées, parmi les facteurs qui sont mis de l'avant pour parler de l'intervention thérapeutique, il y a quand même un certain nombre d'éléments communs qui se retrouvent et qui, nous pensons, ne manifestent pas simplement un phénomène à l'intérieur du monde médical, mais manifestent un phénomène au plan de la société, et j'irai jusqu'à dire au plan d'une transformation dans la pensée même scientifique.

Je reviendrai sur cet aspect-là, car on présente la science souvent comme un bloc monolithique alors que, à mon avis, elle n'en est pas du tout un.

Le grand point qui se profile derrière ce monde alternatif, c'est d'abord de refuser la dissociation entre esprit et matière, et refuser la dissociation de l'humain entre l'âme, le corps, l'intellect, comme s'il n'y avait pas une globalité à l'intérieur de ça qu'il fallait saisir, et aussi de dissocier l'humain de l'univers auquel il appartient. Je pense qu'on est habitués à ces mots-là, mais, derrière ces mots-là, il faut saisir qu'en chacune des approches, en tout cas celles dominantes — pour me garder une porte de sortie face à celles que je ne connais pas, si je me permets — il y a une articulation particulière, il y a des grilles de lecture particulières qui représentent une logique et une cohérence dans la façon de voir, d'articuler les manifestations au plan de la santé et au plan des déséquilibres de santé.

Je pense qu'on passe beaucoup trop sous silence cet aspect et que, si ce langage ou si cette grille de lecture ne correspond pas au monde scientifique actuel, elle ne manque pas pour autant de rigueur. Je pense que c'est pour ça qu'il y a certaines disciplines qui sont déjà reconnues de par le monde. Je n'ai pas été là toute cette semaine pour entendre tous les commentaires et les présentations, mais on s'entend pour reconnaître l'acupuncture, l'homéopathie, l'ostéopathie comme ayant un corpus théorique très rigoureux. Je pense que c'est faire preuve de beaucoup d'ignorance que de vouloir limiter ça à un langage, de vouloir limiter ça à une forme magique d'intervenir avec la personne, sans se rendre compte qu'il y a vraiment une articulation rigoureuse qui permet de comprendre le processus de déséquilibre pathologique chez une personne, que ce soit au niveau d'un simple malaise, d'un déséquilibre qu'on peut appeler au niveau fonctionnel ou même d'un déséquilibre pathologique important.

Ce que disent ces grilles, c'est: On ne peut plus regarder l'individu en pièces détachées. C'est un terme qui a été utilisé ce matin, et je pense qu'il faut absolument y revenir, à ce niveau-là. C'est probablement le talon d'Achille de la science à pouvoir regarder les approches alternatives; c'est que, jusqu'à présent, ces approches ont toujours été développées pour regarder l'individu en pièces détachées. Alors, dans quelle mesure les protocoles qu'elle a mis au point actuellement peuvent-ils aborder les disciplines autres dans le monde alternatif avec des protocoles pour des individus en pièces détachées, quand nos grilles de lecture, quand les grilles de lecture généralement admises, ne fonctionnent plus pour des individus en pièces détachées?

Alors, c'est sûr qu'à ce niveau-là, moi, je pense qu'on ne peut pas aborder le détail de ces grilles au niveau de la commission parlementaire, mais il faut absolument qu'il y ait des gens à l'esprit ouvert, qui veuillent entendre un discours différent. C'est souvent là le problème qu'il peut y avoir lorsqu'il y a des évaluations scientifiques qui sont faites dans les approches alternatives, c'est qu'il n'y a pas nécessairement des gens qui veulent accepter de se faire dépayser, c'est-à- dire d'avoir un langage qui est différent de celui auquel ils ont été conditionnés durant autant d'années d'apprentissage universitaire et autant d'années, aussi, de recherches universitaires.

Je voudrais revenir sur un aspect qui, à mon avis, est aussi essentiel et central au monde alternatif: c'est la façon de voir la santé et la maladie non plus comme — la maladie, principalement — quelque chose qui nous tombe dessus, quelque chose qu'on est obligés d'assumer sans trop savoir comment ça se fait qu'on y est arrivés, mais bien comme un processus normal de déséquilibre, et ceci pouvant se reproduire tout au long d'un cheminement de vie. Alors, la maladie n'est plus quelque chose qui nous tombe dessus et auquel on doit réagir après coup, mais le moment, plutôt, d'une réflexion, d'un arrêt, d'une prise de conscience qui va pouvoir permettre ultimement une prise en main de la personne par elle-même, donc une responsabilisation. Pour nous, le terme de la responsabilisation, c'est un terme essentiel, c'est une étape essentielle pour arriver à une société où on va avoir vraiment une culture de la santé. Mais la responsabilisation de la personne ne peut pas venir de l'extérieur. Elle ne peut pas être imposée de l'extérieur. Il faut d'abord que la personne puisse prendre conscience de son chemin de vie et qu'elle se rende compte pourquoi elle est arrivée, à un moment donné, à avoir un problème de santé.

Alors, souvent, la responsabilisation a été présentée comme une culpabilisation; ce matin, il y a quelqu'un qui faisait référence à ça. Je pense que ce n'est pas du tout l'optique qui est développée dans le monde alternatif. Mais ce que nous disons, c'est que la responsabilisation doit se construire sur des choses. La personne ne peut pas nécessairement devenir responsable du jour au lendemain sans avoir des outils, sans avoir de l'aide appropriée pour se prendre en main. C'est lorsque devient important, à mon avis, le moment thérapeutique, et j'appuie sur ce mot: le moment thérapeutique, parce qu'on ne devrait pas concevoir la relation à un système de santé comme étant un contrat à vie auquel... un abonnement où il faille retourner régulièrement. C'est l'occasion d'entrer en contact avec quelqu'un qui va nous permettre de faire le point sur la situation, mais aussi avec quelqu'un qui va avoir en sa possession une grille de lecture qui va nous permettre d'induire un processus, et un processus de reconstruction de la santé, si je peux utiliser ce terme-là. (12 h 10)

La grille que possèdent les thérapeutes alternatifs n'est pas la même que la grille que possède le corps médical. La grille que possèdent les psychothérapeutes n'est pas la même que possèdent les psychologues. À ce niveau-là, je pense qu'il va vraiment falloir qu'il y ait des lieux d'interface, que ce soit dans le système de la santé, que ce soit au ministère, que ce soit ailleurs — et, nous, on privilégie la formation de l'Office des professions — pour qu'il y ait des échanges qui existent non pas sous le mode de débats comme on en connaît, comme on en a vu encore dernièrement, mais où les gens qui vont se présenter là vont le faire dans l'idée

d'avoir une ouverture sur les nouvelles approches qui sont présentées avec le but de comprendre quel apport on peut avoir.

Jusqu'à présent, les actions qui ont été posées par les différents groupes en place n'ont jamais été ou à peu près jamais... Je me permettrai de ne pas connaître les cas où il y a eu des ouvertures heureuses, mais elles ont été très peu nombreuses, les occasions où les professionnels de la santé ont décidé de s'asseoir avec des thérapeutes alternatifs dans le but de saisir quel apport positif pouvait avoir le monde alternatif afin de solutionner des problèmes de santé. Ça se fait. C'est tellement marginal qu'on les ignore, en réalité. Nous, on pense qu'il y a là une solution d'avenir. Mais, pour que cette solution puisse exister, il faut absolument qu'il y ait une volonté déterminée, au plan de notre société, de donner lieu, de donner la place à ces approches alternatives qui, de toute façon, existent au plan de la société. C'est un mouvement social qui s'est manifesté jusqu'à présent, c'est un mouvement de pensée, c'est un mouvement thérapeutique. À notre avis, il est là à demeure et, même si on décide de ne pas le reconnaître, comme certains le voulaient bien, il ne disparaîtra pas.

Il découle de cette approche au niveau de la prise des responsabilités des individus un point essentiel — et je pense que le ministre l'a apporté dans sa déclaration, à l'ouverture de la commission parlementaire — la question du choix thérapeutique. Pour nous, le choix thérapeutique, c'est le point central de ce que les thérapies alternatives ont apporté au Québec, et je dirais que c'est un point tout à fait révolutionnaire, si on décide de l'admettre. Car, dans le système de santé tel qu'il existe actuellement, dans la définition même de ce que sont les professionnels, le choix thérapeutique n'a pas sa place. Dans la définition, le professionnel, c'est celui qui sait, c'est celui à qui on s'en remet, c'est celui qui a été cautionné un jour, de telle sorte que je puisse entièrement m'y fier. Nous, on dit que ce n'est pas une démarche thérapeutique.

Dans ce sens-là, amener la question du choix thérapeutique sur la table, c'est remettre en cause fondamentalement une façon de faire dans notre système de santé et c'est dire: Nous, on pense que, quand on va voir un intervenant dans le monde de la santé, on ne met pas le pied sur un tapis roulant où, par la suite, on n'a plus rien à dire si ce n'est que de suivre les tests et suivre les prescriptions médicamenteuses qu'on nous prescrit. C'est de dire: J'ai le choix thérapeutique. Dire: J'ai le choix thérapeutique, c'est: J'ai aussi le choix de dire non à un thérapeute lorsque je vais le voir, que ce soit un médecin ou que ce soit un thérapeute alternatif. Et ceci est absolument nouveau dans le système de santé, de pouvoir aller voir un intervenant de la santé et dire: Je vous ai entendu, je comprends l'analyse que vous faites de mon cas, mais je refuse le traitement que vous me donnez, je considère que j'ai d'autres choix à faire. La gestion de ce choix thérapeutique est effectivement quelque chose qui sera très difficile parce qu'elle forcera les thérapeutes en place et les professionnels en place à revoir leur rôle face au client. Alors, c'est toute la question de la prise en charge que, nous, maintenant, on refuse et que le monde alternatif a amenée, nous pensons, à l'intérieur même de la profession médicale et qui, maintenant, fait son chemin.

Mais, ceci dit, si on dit que les gens ont le choix, ont la possibilité de faire un choix thérapeutique, il faut aussi qu'ils aient la capacité de le faire. Et la capacité a comme condition objective première la reconnaissance légale. Je pense que reconnaître le fait que des thérapies existent, que des gens sont déjà en train d'utiliser ces thérapies-là, ce n'est pas dire, de la part du gouvernement: On les cautionne et on pense qu'elles sont toutes bonnes. Elles sont là, elles sont à demeure, le public les reconnaît, mais le public reconnaît aussi qu'il y a un travail à faire afin de mieux s'y retrouver. Il faut donc qu'il y ait de l'information, il faut donc que cette information-là, aussi, ne soit pas une information qui soit biaisée à la base.

À ce sujet-là, je pense qu'on peut parler autant d'information biaisée dans le monde alternatif que dans le monde professionnel; d'où, ce qu'il faut, c'est essayer de trouver un lieu où l'information pourra être véhiculée, mais une information qui ne sera ni la coloration totale de l'un, ni la coloration totale de l'autre. Donc, trouver un lieu qui ait pour but de rassembler l'information qui existe jusqu'à présent et essayer de voir comment elle peut être communiquée au public. Parce que la communication d'une information, au niveau des thérapies alternatives, n'est pas en soi quelque chose de facile. Il y a à concevoir comment elle peut être transmise au public et comment elle peut être utile au public. Alors, il s'agit de savoir ce que sont ces thérapies, où on peut aller chercher des thérapeutes et, aussi, à quel coût on peut aller les chercher, ces thérapeutes-là.

Mais la possibilité de faire cette démarche-là — et on voudrait le rappeler au ministre — de la part d'une personne n'est pas en soi facile, car, lorsqu'on est obligé de faire cette démarche-là, c'est généralement parce que, déjà, se manifeste un problème de santé, déjà, on est en situation de fragilité et, déjà, plusieurs individus peuvent donc être facilement influencés par des gens qui ont beaucoup moins de scrupules. C'est toujours une situation vulnérable où la personne a à recourir à un intervenant pour l'aider au plan de sa santé. D'où on pense qu'il faut, effectivement, qu'il y ait un lieu qui facilite ce choix thérapeutique qui nous semble être central et que ce lieu pourrait fort bien être un office.

D'ailleurs, c'est un peu une surprise de voir à quel point on veut donner l'attribution, le contrôle ou l'encadrement à toutes sortes d'organismes, mais on a donc de la difficulté à entrevoir la possibilité qu'il pourrait y avoir un office qui représenterait les thérapeutes alternatifs. Alors, du point de vue même du public, on pense que cet office serait l'institution essentielle. Pour ce, je vais donner trois autres raisons qui me semblent être essentielles pour que le ministre ne mette pas de côté la possibilité de créer un office des thérapies alternatives, que ce soit sous la forme telle qu'elle a été présentée par la Coalition ou que ce soit sous une autre

forme, il s'agit d'une question de modalités.

Je reprendrai le premier point. Au moment où la personne recherche un thérapeute, que ce soit un médecin ou que ce soit dans le monde alternatif, c'est généralement un moment où la personne est en situation de fragilité. Elle a perdu l'impression de santé ou elle a perdu la dynamique de sa santé et, à ce moment-là, elle n'est pas nécessairement sécurisée par le fait que le thérapeute qu'elle ira voir pourra être poursuivi si, éventuellement, il y a eu des problèmes. Il ne nous semble pas qu'un système de santé puisse reposer, comme seule garantie pour ses thérapeutes, sur la base qu'il y a des poursuites possibles par la suite, que ce soit à une instance ou à une autre. Ceci nous apparaît plutôt comme des solutions ultimes, des solutions lorsque les premières balises qui ont été mises à l'intérieur d'un système de santé n'auront pas été respectées.

L'autre élément qui nous semble aussi important, c'est que, souvent, on a mentionné que ça pouvait être laissé aux forces du marché. Il ne nous semble pas que les forces du marché, dans le cadre de notre société, soient vraiment l'instance où puisse se gérer la relation à un thérapeute. Quelqu'un, qui pourrait très bien se retrouver au niveau du système, connaître très bien les lois du système de marché, savoir utiliser la publicité, savoir utiliser les trucs, pourrait très bien persister au niveau du système de santé, même si les traitements qu'il prodigue aux gens ne sont pas aptes. Combien faudra-t-il qu'il y ait de personnes qui se fassent prendre à l'intérieur d'un système pour que le système de marché finisse par cautionner cette personne-là de telle sorte qu'elle soit éliminée? Il ne nous semble donc pas que le système de marché en soi puisse être la solution.

Il y a finalement un autre point qui nous semble essentiel, c'est que les approches alternatives — et, nous, nous le croyons, que les approches alternatives vont prendre de plus en plus d'importance au niveau du système de santé — aient la possibilité de se développer. Elles n'en sont qu'au début. Au plan de la formation, au plan de la recherche, tout est à venir encore. Alors, si on veut vraiment que ces approches puissent se développer, avoir accès aux fonds de recherche, tels que vous les mentionniez précédemment... Et on sait que les fonds de recherche sont généralement donnés à des institutions bien encadrées qui existent dans le monde universitaire et que, si on ne fait pas partie de ce réseau-là, il est très difficile d'avoir accès aux fonds de recherche. Vous parliez de deux fonds avec lesquels je suis entrée en contact pour avoir plus d'information à ce sujet-là. (12 h 20)

Si le monde alternatif n'a pas de lieu commun où il puisse y avoir une conjonction entre ces différentes forces-là, je vois difficilement que chacun des groupes, éclatés chacun de leur côté, puisse faire face actuellement à tous les groupes qui existent, qui sont déjà en place, qui, en quelque sorte, ont une position de force simplement du fait qu'ils sont déjà dans le système depuis fort longtemps. Alors, ne leur reconnaissant pas un lieu de jonction, un lieu d'interface, ce serait, d'une certaine façon, les cautionner, nous le croyons, à plus ou moins long terme, à une récupération parce qu'ils ne pourront pas être développés au plan de la formation suffisamment. Ils ne pourront pas se développer au plan de la recherche et ne pourront pas avoir accès à tout le réseau du financement.

Alors, nous, on pense qu'il y a sûrement d'autres raisons pour justifier qu'il y ait un office qui soit créé pour encadrer les thérapies, dont celle de recevoir les plaintes. Pourquoi ce ne serait pas l'office des thérapies alternatives qui recevrait les plaintes plutôt que l'Office de la protection du consommateur, plutôt que l'autre structure que vous mentionniez? Il semble qu'on cherche absolument une autre issue que celle-là. Alors, moi, je vous donne la question: Pourquoi pas l'office des thérapies alternatives lui-même? Alors, je vous laisse avec ces remarques, et nous sommes ouverts à vos questions.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, Mme Sabourin. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Sans avoir assisté à la commission, je pense que vous faites en même temps une bonne synthèse d'un ensemble de choses qui se sont passées au cours de la semaine et qui sont la réalité avec laquelle on a été confrontés cette semaine par la commission et, avant cette semaine, par le terrain, en souhaitant que ça puisse nous inspirer pour demain. Je veux davantage penser à demain, pas en termes de 24 heures, mais...

Mettez-vous dans la situation où vous avez franchi l'ensemble du processus démocratique et que le premier ministre du Québec vous dit: Demain matin, vous allez assumer la responsabilité du ministère de la Santé et des Services sociaux. Vous allez donc avoir comme premier mandat celui de régler le problème des thérapies alternatives au Québec. Et vous prenez ma relève, ce qui n'est pas impossible. Quels sont les gestes que vous pourriez poser dès demain, pas en termes de 24 heures, on se comprend bien, là? Quel est le premier geste à poser? Quel est le deuxième? Quel est le troisième? Je ne vais pas plus loin que ça parce qu'on n'aura peut-être pas le temps de les poser. Allez-y. Pour que ce soit suffisamment significatif, compte tenu de votre connaissance... Vous avez une connaissance très, très vaste de tout ce domaine, de tout ce champ-là. Ce n'est pas par hasard tantôt que j'ai dit que vous étiez, comme regroupement, à la fois la mère et le père de bien des choses. En ce sens-là, quels seraient les premiers gestes que vous pourriez poser: un, deux et trois? C'est assez exceptionnel d'être nommé ministre aussi rapidement et de voir...

M. Trudel: Est-ce qu'il faut qu'ils fassent tout ça avant le mois de juin?

M. Côté (Charlesbourg): Comment?

M. Trudel: Est-ce qu'il faut qu'ils fassent tout ça avant le mois de juin?

M. Côté (Charlesbourg): Pas nécessairement, mais ça peut donner des orientations et finalement susciter, peut-être, suffisamment d'intérêt pour le mois de juin ou soit plus tard.

Mme Sabourin: II faut dire que ça faisait fort longtemps que nous attendions cette commission parlementaire. Nous l'aurions espérée avant. Peut-être que déjà on aurait pu se mettre au travail. Je pense que la première chose qu'il faut accepter de regarder... Bon, je pense qu'il faut créer un comité. C'est évident qu'il va se pencher sur ce qui existe actuellement, non pas dans l'idée de cautionner scientifiquement des choses. Je pense que ce n'est pas la première étape à franchir. Et ça, on pourra y revenir, sur la question scientifique, mais je trouve qu'on en a parlé abondamment jusqu'à présent.

Je pense qu'il faut faire le tour de la question: Comme état de fait, qu'est-ce qui existe? Je dirais que peut-être la première chose qui permette, dans un premier temps, non pas de cautionner les gens qui sont en place en disant: On vous donne la bénédiction, vous pourrez continuer, dans x temps vous aurez droit à..., c'est d'abord, probablement en créant quelque chose de semblable à l'Office, mais peut-être pas de formel, de définitif, d'amener les thérapeutes à s'inscrire. Ceci dit, si on veut que les thérapeutes s'identifient et s'inscrivent, il ne faut pas qu'ils craignent que, x mois plus tard, voilà, la banque est là pour que les corporations en place viennent faire les poursuites. Ça, c'est évident que, si c'est dans cet esprit-là, il n'y a personne qui va coopérer. Mais je pense que, pour le gouvernement, dans un premier temps, ce serait identifié.

Ça ne sert à rien de dire: Us ne sont pas bons, on ne va pas les reconnaître, on va continuer à les laisser dans l'illégalité. On ne règle pas la question. Si on regarde l'enquête que le gouvernement a commandée pour annoncer la commission parlementaire, les gens disaient: Ils sont là, on y va, mais on a peur des charlatans. Bon, bien, si on a peur, peut-être qu'il faut commencer à regarder qui est sur le terrain. Et une façon de le faire, c'est d'amener les gens à s'inscrire, pas en disant: On va vous taper sur les doigts, pas en disant: On va décider que votre formation est bonne ou pas bonne, ou: On va vous donner votre certificat, mais en faisant l'éventail des ressources qu'on a.

Je m'excuse, là, j'ai un problème de sécheresse...

M. Trudel: L'homéopathie pourrait vous aider. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Sabourin: Je m'en suis servie, parce qu'il n'est pas certain que j'aurais été ici aujourd'hui.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Trudel: Deux morceaux de rameau.

Mme Sabourin: Alors, je pense que cette chose-là doit se faire au niveau des thérapeutes, qu'ils s'appellent comme ils s'appellent, mais doit se faire aussi au niveau des thérapies. Avoir une idée des thérapies qui existent parce que, à mon avis, il y a là aussi un problème. Et c'est ça que je disais au départ, sous le terme «thérapies» ou «interventions thérapeutiques», on met toutes sortes de choses qui, en réalité, ne sont peut-être pas alternatives. Il faut définir le champ. Elles ne sont peut-être pas des interventions thérapeutiques. Ça aussi, il faut le savoir. Et, à ce moment-là, peut-être que ça relève de complètement autre chose d'aller régir les abus qui se passent au niveau des crises de croissance de certains groupes et qui ne relèvent pas des interventions thérapeutiques. À mon avis, beaucoup de problèmes ont été créés dans le monde alternatif et certains les ont créés de toutes pièces pour discréditer ce qui se faisait aussi de sérieux en y mettant tout ce qu'on pouvait y mettre, du plus farfelu au plus sérieux.

Je pense qu'il faut arrêter de se faire — je m'excuse, je n'ai pas le terme — tirailler d'un côté et de l'autre par tous ceux qui ont des bénéfices à discréditer les thérapies alternatives. Et je pense qu'à ce niveau-là, sans vouloir les condamner, le monde des corporations qui a été formé au niveau universitaire... Et on sait très bien que, quand on passe par un conditionnement universitaire, on ne fait pas que passer par une formation, mais qu'on passe par un conditionnement et que vouloir changer cette façon de penser n'est pas facile. Et, à mon avis, derrière tout le discours du charlatanisme qui nous est présenté, le point central, c'est de refuser de reconnaître que, dans le monde alternatif, il y a l'émergence d'un paradigme différent, un paradigme qu'il faut laisser s'exprimer, apprendre à connaître avant de vouloir le mettre en morceaux, l'analyser et le briser.

Ceci dit, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas entreprendre de cerner avec des outils plus rigoureux ce qui se passe à ce niveau-là. Pour reprendre ce que M. Trudel disait, peut-être que l'INRS-Santé serait apte à ce niveau-là, mais encore faudrait-il que ce soient des scientifiques aussi qui aient eu contact avec le monde alternatif et qui sachent ce que c'est que le monde alternatif, autrement que par une formation de fin de semaine. À ce niveau-là, oui, ce serait intéressant, mais avec des gens sérieux. On pense que, dans le monde scientifique, des médecins, des physiologistes, des biologistes, et on peut en nommer bien d'autres, il y en a plein qui se sont intéressés au monde alternatif et il y en a plein qui sont ouverts à mettre de l'énergie de sorte à montrer qu'il y a du sérieux, à montrer où sont les limites et à montrer où le monde alternatif ou les thérapies alternatives ne peuvent plus intervenir au plan de certains troubles de santé. Ça, je pense que ce serait le début et je n'ai pas trouvé votre troisième étape. Ça viendra peut-être. (12 h 30)

M. Côté (Charlesbourg): Est-ce qu'on a porté à votre connaissance la proposition de l'Association de médecine holistique du Québec qui a été déposée à cette commission mercredi, si je ne m'abuse, à l'effet de proposer un moratoire? Bon. Quand on parle de mora-

toire, évidemment, c'est sur les poursuites qu'intente la Corporation professionnelle des médecins contre un certain nombre de thérapeutes. Je pense que ça doit avoir ses limites, ça aussi. Il y a des gens qui vont pratiquer l'homéopathie, qui ont les compétences pour le faire et qui sont, aujourd'hui, poursuivis. Ça, c'est une chose, mais il y a des gens qui peuvent la pratiquer sans avoir des compétences. Ça, c'est une autre chose. Je pense qu'il faut distinguer.

Alors, un moratoire, on s'entend bien, limité à ceux qui ont des compétences d'exercer une spécialité dite alternative et, parallèlement, prendre une année pour faire le tour de la question et, par la suite, faire en sorte qu'on puisse, à l'intérieur de projets-pilotes, faire une évaluation d'un certain nombre de thérapies alternatives, qui nous mènerait, éventuellement, possiblement, à un consensus plus facile et qui amènerait des amendements à la législation. Ça, c'est une démarche de l'aile, disons, la plus progressiste du corps médical, qui est en contact avec des médecines alternatives et qui les reconnaît et, même, les pratique. Je ne sais pas si on a porté à votre connaissance le détail de cette proposition qui semble avoir un certain sens. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Guilbeault (Claude): Moi, je pourrais y aller.

Le Président (M. Joly): M. Guilbeault, s'il vous, plaît.

M. Guilbeault: Oui. L'idée en soi n'est quand même pas mauvaise. Cependant, il faut être précis, il faut être clair. Ce n'est pas parce qu'on est médecin, puis qu'on pratique l'homéopathie que l'on peut tout faire. Il y a des gens qui sont homéopathes, qui ne sont pas médecins, qui travaillent très, très bien aussi. Donc, oui, on l'a dit dans d'autres groupes, il est important que le moratoire soit là, que l'on s'entende qu'il y a des gens qui ont mal agi, qui ont été, vraiment, comme à rencontre de leur code d'éthique ou qui ont blessé une personne et que des poursuites soient présentes. Mais, pour quelqu'un qui pratique et qui n'est pas en accord avec la Loi médicale, moi, je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'on mette ça de côté. On sait même qu'il y a des gens qui sont massothérapeutes et qui, selon la Loi médicale, n'auraient en principe, selon tous les jugements, même pas le droit de donner un massage à une personne qui ressent de la fatigue. C'est allé, quand même, jusque-là.

Maintenant, que pendant un an on fasse des projets-pilotes, comme vous en parliez avec l'autre groupe, je pense qu'on peut être ouverts à ça, mais en autant que les thérapeutes alternatifs soient partie prenante, qu'ils n'aient pas l'impression qu'on est en train, soit de les manipuler ou de les juger. Je pense qu'on a tous le goût qu'on évalue ce qu'on fait, mais en autant qu'on va respecter nos propres grilles de travail, que ça ne paralyse pas tout le dossier pendant un an. Il y a tout ça, aussi, qu'il faut regarder. Il y a des gens qui pratiquent depuis 10 ans, depuis 5 ans. On ne parle pas de gens qui commencent, là. Il y a des gens qui sont dans le métier depuis 5 ans, 10 ans et on marche sur les freins depuis presque 5 ans, puis 10 ans. Alors, il ne faudrait pas, non plus, qu'on rajoute une autre année où on va freiner, sous prétexte qu'on est en projet-pilote. Qu'on ait des projets-pilotes avec tous les paramètres, qu'il y ait de l'étude qui soit faite, que des gens soient présents, je pense que les gens ont le goût de participer à ça s'ils se sentent secures. Alors, ça, je pense que ça ne cause pas grand problèmes.

M. Côté (Charlesbourg): ma seule inquiétude à cette proposition, c'est: comment fait-on pour s'assurer que nous ayons une protection la plus totale possible du public? évidemment, vous l'avez dit vous-mêmes tantôt, lorsqu'on reprend l'étude, le sondage que le ministère a mené, 65 % des gens ont quand même peur des charlatans. ce n'est pas négligeable, non plus, là. et, lorsqu'on voit des mémoires comme celui de l'acef, hier soir, ou d'info-secte qui viennent, finalement, donner des exemples très concrets à partir d'analyses de terrain qu'ils ont faites, il y a aussi ces possibilités qui sont présentes dans l'esprit des gens et dont on doit se préoccuper à partir du moment où on devra avoir un certain recul pour décider ce qu'on peut enclencher comme moyens.

La proposition de l'Association de médecine holistique m'apparaissait intéressante dans ce sens-là parce qu'elle marque un pas en avant et, présentée par elle, je ne suis pas sûr qu'il y a un piège — autant se le dire — mais il y a cette volonté de faire progresser les choses, comme je l'ai dit depuis le début, d'être audacieux, mais aussi prudents. Parce que, finalement, on poursuit tous le même but: protéger le public contre les charlatans. Alors, c'est un petit peu ça et, juste pour préciser, dans leur esprit à eux, le projet-pilote n'est pas d'un an. C'est un an pour la mise en place, finalement, d'une structure qui mènerait vers des projets-pilotes et qui ferait l'évaluation souhaitée, mais avec un partenariat bien clair, bien senti, bien assumé par l'ensemble des intervenants.

Mme Sabourin: Je voudrais dire quelque chose là-dessus. J'ai l'impression qu'apporter une telle proposition, c'est en quelque part aussi nier le travail qui a été fait depuis des années par les organisations en place. Il y en a, des organisations, comme vous l'avez vu — en tout cas, j'ai pu le voir ce matin, au niveau des psychothérapeutes que je connais — qui sont venues ici et qui ont fait un travail, justement, pour essayer de déterminer des normes, pour augmenter les critères de formation, qui font un suivi pour savoir si, effectivement, leurs membres pratiquent en conformité avec le code de déontologie. Moi, je n'entends rien de ça, ici. C'est comme si le travail qui a été fait à ce niveau-là et qui, à mon avis, a beaucoup de valeur, on va laisser ça tomber, on va mettre ça de côté et, tout à coup, on ne va se retrouver qu'à l'intérieur de projets-pilotes.

Et là, j'aimerais ça savoir si ça va avoir l'allure de ce qu'on connaît ou de ce qu'on a pu entendre pour

d'autres choses. Alors, je veux savoir: C'est quoi, la finalité de ça? Montrer que c'est efficace? Montrer qu'on peut travailler ensemble? Il y a des lieux où il y a déjà des médecins et des gens alternatifs qui travaillent ensemble, étudient ensemble, coopèrent. Alors, je voudrais savoir, moi: Que nous apporterait d'avoir de tels projets-pilotes plutôt que, dans un premier temps, d'essayer d'entrer en contact avec les organisations sérieuses qui existent, qui ont défini des normes, qui ont des membres qui se sont soumis à des exigences et d'essayer de voir si, pour un certain nombre de disciplines, on ne peut pas déjà identifier des réseaux organisés? C'est comme si on ne voulait pas tabler sur tout le travail qui a été fait dans le monde alternatif jusqu'à présent, et ça, je trouverais ça fort dommage de la part du gouvernement de vouloir reprendre à zéro le travail qui a été fait.

M. Côté (Charlesbourg): Juste pour vous rassurer, si je le peux, d'abord, je connais très bien le projet-pilote sages-femmes. Je le connais très, très bien, avec les écueils. On l'a, d'ailleurs, évoqué avec la Corporation professionnelle des médecins, hier. Mais, juste pour vous rassurer, ce que j'ai pu constater de la part des médecins holistiques du Québec, c'est, bien sûr, de ne pas repousser du revers de la main tout ce qui s'est fait. Ils sont même partie prenante, pour certains, de ce qui s'est fait comme expériences sur le terrain et qu'on verse ça au dossier immédiatement et qu'on continue. Donc, j'ai l'impression que ça irait un peu dans le sens que vous souhaitez. Il s'agira de le définir. C'était à ça que servait la première année de leur proposition. On aura l'occasion d'y revenir. Merci.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le ministre. M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue au dernier groupe qui chapeaute, en quelque sorte, la semaine que nous avons vécue ici. Je dois vous dire, pour ma part, d'entrée de jeu, que je fais miennes, en quelque sorte, votre affirmation ou, enfin, un certain nombre d'affirmations que nous avons entendues tout le long de la semaine, que de nier un phénomène le ferait disparaître, de ne pas reconnaître les thérapies alternatives, ça va avoir comme pensée magique, comme effet magique, de les faire disparaître.

D'ailleurs, peut-être vous souvenez-vous d'une grande leçon qui nous a été donnée dans l'histoire. Vous savez, le grand philosophe allemand, Nietzsche, était un athée et un nihiliste. Tous les matins, il entrait en classe et inscrivait au tableau: «Dieu est mort. Signé: Nietzsche.» Un bon matin, Nietzsche ne s'est pas présenté à ses cours. Il y a un étudiant qui s'est levé et qui a inscrit au tableau: «Nietzsche est mort. Signé: Dieu.»

Des voix: Ha, ha, ha!

(12 h 40)

M. Trudel: Ce n'est pas parce qu'on nie un phénomène qu'on va le faire disparaître. Et qu'on veuille nier la différence — je vous le dis d'entrée de jeu — entre matière et esprit, ça ne nous avancera pas beaucoup dans le débat. Je pense qu'il faut répéter que nous sommes en présence d'un phénomène et d'approches qui, d'évidence, répondent à des besoins dans le public et à une nécessaire diversification au plan de la prise en charge. Ça, c'est le deuxième angle que je veux souligner dans votre présentation. Vous dites: Ça s'assimile aussi beaucoup à un processus de prise en charge de la santé. Ah! On a un système, il faut bien aussi la traiter, la maladie; personne ne va nier, je pense, dans le monde du réel, cette réalité-là. Mais, si on s'occupait, oui, effectivement, un peu plus de la prise en charge de la santé et d'instrumenter la population davantage — je ne dis pas complètement parce que, bon, on est mortels, hein; hé! il y a comme une réalité, là — on arriverait à des choses qui sont beaucoup plus concrètes.

L'autre dimension, vous dites: Hum! on a peu entendu ici, de la part des professionnels patentés, l'évocation de la possibilité d'aller chez les thérapies alternatives pour trouver d'autres sources, pour obtenir de meilleurs résultats. Et là, j'arrive à la question de l'analyse et de l'évaluation des thérapies alternatives. Ce que vous dites, finalement — et vous allez me le dire, si vous êtes d'accord ou pas d'accord avec cette perspective-là — c'est: On n'a pas peur de ça, l'évaluation, ça doit faire partie... Je dis bien analyse et évaluation parce que, l'évaluation, c'est le jugement, ça, c'est le résultat, là, et c'est porteur pour l'avenir quand on a porté un jugement. Mais l'analyse, elle, laisse la liberté de choisir. Bon.

Est-ce que vous diriez: II y a un certain nombre de lieux et d'organismes qui pourraient effectuer de l'analyse et de l'évaluation des thérapies alternatives; nous voulons en être, cependant, au niveau de la définition des paramètres d'évaluation, mais nous voulons surtout qu'il y ait des fonds réservés — parce que ça prend du fric quelque part, ça prend des moyens — à cette fin de l'évaluation des thérapies alternatives? Je ne parle pas des thérapeutes, on va y revenir tantôt, mais des thérapies alternatives. Est-ce que c'est cette direction-là? Et donnez-nous un peu plus de précisions sur comment vous pensez que ça devrait s'articuler au niveau des thérapies.

Mme Sabourin: C'était un des points de recommandation dans notre mémoire, en tout cas, qui, pour nous, est central. Mais je voudrais faire une nuance tout de suite. On parle de l'évaluation ou de vérification de l'efficacité de nos thérapies alternatives, en tout cas, comme si c'était quelque chose qu'il fallait faire à un moment donné et que ce serait fini, et qu'après ça on pourrait reconnaître.;. J'essaie de... En tout cas, c'est assez particulier, cette façon de voir, dans le sens où, pour nous, les approches alternatives ont émergé depuis longtemps, plus ou moins longtemps, et il y en a qui continuent à se développer. Pour que ces approches-là finissent par exprimer leur plein potentiel, il faut effectivement qu'il y ait des lieux qui deviennent des lieux réguliers où la recherche se continue, où la compréhen-

sion des processus qui sont utilisés ou mis en branle par les outils qu'on a au plan alternatif soit étudiée, soit évaluée. Mais, ceci, il ne me semble pas que ça doit se produire à un moment donné, qu'il y ait un contrat qui soit donné et que, là, on puisse l'établir une fois pour toutes. Le monde médical lui-même, dans sa recherche, ne fonctionne pas comme ça; c'est un processus continu, c'est un continuum.

Donc, c'est beaucoup plus un esprit qu'il faut développer, où on admet de faire de la recherche dans une nouvelle perspective, avec des nouvelles grilles, dans l'optique, aussi, de développer les nouveaux protocoles; et ça, ça a été dit à plusieurs reprises et je pense que ça devient un langage qui est plus hermétique. Mais, si on se sert des protocoles qui ont été développés dans le monde médical et qu'on veut rapidement faire l'évaluation au niveau des thérapies alternatives, je pense qu'on va arriver à des résultats comme il y en a qui aiment nous en apporter: Non, ça ne marche pas parce que ça ne répond pas à ça. Là, il y a d'autres scientifiques qui vont réagir en disant: Oui, mais on ne peut pas faire ça. Est-ce qu'on va déboucher encore sur des querelles de scientifiques comme il s'en est produit en homéopathie avec les recherches de Benveniste, à un moment donné, qui nous ont donné quoi au plan de la pratique clinique?

Alors, je voudrais quand même faire cette distinction-là: II nous semble, en tout cas, pour que les différentes approches alternatives puissent se développer, oui, qu'il va falloir qu'elles aient pignon sur rue, il va falloir qu'il y ait des formations sérieuses, que les thérapeutes aussi acquièrent des méthodes de recherche à l'intérieur de leur propre travail, comme il se fait dans le monde médical, comme il se fait dans les différentes corporations au niveau des formations, qu'il y ait des lieux où la recherche se fasse de façon continue.

Le moment critique, c'est comme pour initier ça. Qui va faire ça? Est-ce que c'est les spécialistes en place qui, eux autres, ont des vieux protocoles? Est-ce qu'on va leur demander d'arriver à prouver ça dans six mois, dans un an? Il me semble que c'est une question tout à fait irréaliste, de procéder de cette façon-là, de faire l'évaluation, à l'intérieur d'une période limitée, des approches alternatives. Moi, ce que je pense, en tout cas, qui serait une étape, puis c'est peut-être là que le terme «évaluation» est plus pertinent, c'est que des gens se penchent sérieusement sur les grilles de lecture pour se rendre compte — ce que j'entends par «grille», c'est un corpus théorique rigoureusement articulé — qu'il y a des grilles de lecture. Si je prends la grille de lecture en acupuncture, qui, traditionnellement, était une grille de lecture qui était très symbolique, mais qui a une logique stricte, qui fonctionne avec une pensée souvent analogique, mais qui a fait son chemin, aujourd'hui, on commence de plus en plus à faire des liens avec la médecine plus scientifique.

Mais, si on veut absolument prendre ce corpus-là, puis en faire une preuve scientifique, à mon avis, on veut faire rapidement ce qui va être le processus, peut-être, des prochains 1000 ans, pour essayer de traduire en langage scientifique d'une science qui évolue elle-même, un corpus théorique qui n'est pas au niveau de cette dissociation matière esprit, qui n'est pas au niveau d'un langage biochimique, qui n'est pas au niveau du langage qu'on retrouve très généralement dans le milieu scientifique. Alors, moi, il me semble qu'il y a une illusion à penser qu'on va pouvoir donner à une équipe de scientifiques le souci de prouver et d'évaluer telle approche. C'est beaucoup plus avec la rigueur qui est derrière ça et, effectivement, avec l'expertise clinique afin de voir les résultats que ça donne, qu'on va pouvoir arriver à approcher l'efficacité de ces thérapies. Mais en faire une preuve scientifique, moi, je pense que c'est une illusion.

M. Trudel: Mais vous convenez donc de la nécessité de l'analyse.

Mme Sabourin: D'une démarche de recherche, oui, oui.

M. Trudel: Et que ça apparaît non seulement nécessaire, mais urgent, compte tenu de l'ampleur du phénomène et, par ailleurs, du peu d'intéressement des cercles officiels. Parce que, vous avez raison, si vous voulez soumettre un projet de recherche au CQRS, au FCAR, etc., si vous n'avez pas de Ph.D., si vous n'êtes pas patenté, vous n'en aurez pas, de subvention de recherche.

Mme Sabourin: Si vous ne faites pas partie d'un centre de recherche.

M. Trudel: À la limite, vous allez aussi faire comme les universités, vous allez vous engager du monde pour être sur les comités de sélection des projets. Parce que, là, il ne faut pas se causer d'illusions. J'ai été recteur d'université, mais j'avais le malheur d'être recteur d'une petite université et je ne pouvais pas me payer des lobbyistes pour investir les comités disciplinaires, puis, des subventions de recherche, je n'en avais pas. Bon.

Mme Sabourin: C'est encore pire pour le monde alternatif.

M. Trudel: J'imagine. Alors, je l'ai été un peu, dans ce réseau alternatif là, et c'est pourquoi, tantôt, je parlais, entre autres, comme exemple, de la possibilité de l'INRS; il vaut mieux les prendre jeunes, ils sont moins momifiés, dans le domaine de la recherche.

Maintenant, parlons un peu de la reconnaissance des thérapeutes, de cette idée du registre. Parce que, évidemment, quand on réussit à définir à qui on a affaire ou qui fait quelque chose, bien, si on s'investit d'une mission d'information auprès du public ou de la responsabilité de l'information, il faut savoir de quoi on parle. Il y a toujours ce phénomène inquiétant et je ne sais pas si on est en quadrature du cercle parce que, dès le moment où on a un registre, on a quelqu'un pour

dire: Je suis bon parce que je suis au registre. En d'autres termes, comment pourrait-on en arriver à avoir l'information, à la colliger, et que le simple fait de colliger l'information ne devienne pas une accréditation, une reconnaissance?

Je ne veux pas être méchant, mais on a vu passer pas mal de docteurs, ici, et de toutes les sortes. Vous avez vu, même moi, j'en ai taquiné quelques-uns en disant: Moi, j'ai un doctorat, un Ph.D. Un docteur, dans la hiérarchie de la diplomation, c'est un troisième cycle. Pourtant, il y a bien du monde qui porte le titre de docteur, puis qui n'est pas du troisième cycle. Mais, ça, c'est de la sociolinguistique, c'est Chomsky. Comment en arriver à ce qu'on puisse avoir l'information et que tout ça ne devienne pas un instrument de promotion? Avez-vous réfléchi à ça?

Mme Sabourin: Ah oui. D'ailleurs, vous avez rencontré la Coalition et ça a été une des questions. Le RAPSI a contribué à mettre sur pied la Coalition, un des premiers groupes que vous avez rencontrés. Et ça a été une question largement débattue au niveau de la Coalition: comment faire à ce niveau-là pour qu'il n'y ait pas une récupération? C'est un véritable problème parce que ce qu'on risque d'avoir, c'est que des individus vont vouloir s'inscrire pour avoir la reconnaissance. Mais je pense qu'avec ça c'est l'information aussi qui doit être véhiculée et il y a peut-être un changement. Ce qu'apporte le monde alternatif, c'est un questionnement qu'on n'a pas fait par le passé sur nos propres professionnels. Par le passé, quand on allait voir un professionnel, il s'agissait qu'il ait passé son diplôme, qu'il soit dans sa corporation, pour qu'on pense qu'il était bon. Par le passé, on allait voir le médecin du coin et on ne s'informait pas à 10 personnes pour savoir: Mais quel médecin je pourrais aller voir? Alors qu'aujourd'hui il est courant de dire: Là, il faudrait peut-être que j'aille voir un médecin, mais lequel je vais aller voir? On ne prend plus pour acquis que quelqu'un qui fait partie d'une corporation est nécessairement un bon intervenant au plan de la santé. Alors, je pense que, ce questionnement-là, il se fait dans le monde médical, et ça vient peut-être de notre questionnement, ça vient peut-être des désaccords ou des mauvaises expériences qu'on a eues avec les professionnels bien patentés. (12 h 50)

Le problème se pose pour nous parce qu'on n'est pas encore dans des structures. Alors, on a le fardeau quasiment de la preuve pour des groupes qui, eux autres, n'ont plus rien à prouver parce qu'ils ont la légalité avec eux. Je pense qu'il faudrait aussi prendre ça en considération un peu. C'est comme si on était obligés de tout prouver, d'amener des solutions à des questionnements de société qui ont émergé.

Il nous semble, en tout cas, que, de toute façon, la solution, c'est d'avoir un registre et que la solution, aussi, pour éviter que des gens profitent de ce registre-là pour se valoriser eux-mêmes, c'est l'information. Donc, un office qui a un registre doit aussi assumer une part d'information, de telle sorte que le public sache ce que ça veut dire. Si on a juste un registre qui ne cautionne pas les formations, c'est-à-dire qui ne vérifie pas les formations, ça veut dire que, cette personne-là, on reconnaît qu'elle existe, on reconnaît qu'elle prétend faire ça, que sa thérapie se définit de cette façon-là, mais on ne vous dit pas qu'elle le fait bien. À la limite, je pense qu'il n'y a pas grand corporations, de toute façon, qui peuvent aller loin.

Sauf que ce qui peut être fait aussi, c'est aller plus loin en disant: Cette personne-là, on peut lui donner un autre statut. C'est ce que la Coalition appelle «certifier», je pense, où, cette fois-là, on dit plus, on dit: Cette personne-là existe, elle a cette formation-là, on a vérifié qu'elle a cette formation-là, elle a passé des examens, elle a passé un certain nombre d'exigences, suivant les différents groupes. Les psychothérapeutes peuvent définir des exigences plus précises, en conformité avec leur champ de pratique; les massothérapeutes peuvent faire la même chose. Et on vous dit, en plus: Cette personne-là s'engage à respecter un code de déontologie. Pour nous, il nous semble — et ça, ça n'a pas l'air de revenir trop souvent dans les questions, comme si ce n'était pas important — que le code de déontologie est quand même une barrière psychologique, une barrière réelle contre certains abus, et une possibilité aussi de recours pour les individus.

Alors, si on met ces différentes délimitations, si, de plus, il y a de l'information qui est donnée, moi, je pense que le public est intelligent, je pense que le public est capable de faire la nuance et, de la même façon qu'il est en train de devenir critique face aux professionnels, il développe sa critique aussi face au monde alternatif. Je serais surprise qu'on puisse avoir une structure qui nous garantisse qu'on n'ait aucun problème. Elle deviendrait d'une rigidité telle que ce n'est pas ça qu'on veut, non plus. Donc, ce qu'il faut, ce sont des balises qui nous permettent d'éviter les écarts trop grands ou les risques d'abus.

Je tiens à repréciser — mais, auparavant, vous m'excuserez — aussi qu'un des problèmes, il me semble, c'est que, le monde alternatif, on en fait un fourre-tout, on met de tout là-dedans. Et, si on éliminait un certain nombre de groupes d'interventions qui, à mon avis, ne sont pas des interventions thérapeutiques en alternatif, peut-être que déjà on arriverait à régler le problème qui semble être un problème d'encadrement dans le monde alternatif. Moi, je pense, en tout cas, qu'il y a quelque chose ici à clarifier dans les limites du monde alternatif.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup.

M. Trudel: En conclusion, donc, ce que vous nous dites, c'est surtout de ne pas chercher la solution parfaite et définitive. Le pire serait de dire: C'est tellement vaste, la gamme est tellement étendue que ça nous donne quasiment l'autorisation de ne rien faire et on va se réfugier derrière la barrière ou la sécurité des corporations professionnelles. Et vous nous dites, dans le fond: Osez reconnaître, en vous y intéressant, les théra-

pies alternatives, n'ayez pas peur de mettre sur pied un certain nombre de mécanismes légers qui ne créent pas de l'exclusivité, mais, essentiellement, les thérapies alternatives sont des éléments essentiels, sont des éléments importants dans la société québécoise et ce sont des instruments de promotion de la santé. C'est ce que j'ai entendu tantôt. Ce sont des instruments importants de promotion de la santé. Et, quand on dépense 13 000 000 000 $ là-dedans, refuser de regarder ça en face, ce serait comme nier une réalité importante au plan de l'escalade des coûts dans un État, en particulier ici, au Québec, et on se priverait probablement de ressources importantes, sans qu'elles soient très dispendieuses, ai-je compris au cours de la semaine. C'est ça?

Mme Sabourin: J'ajouterais seulement une chose.

Le Président (M. Joly): Très brièvement, madame, s'il vous plaît.

Mme Sabourin: Très, très court. Je pense que c'est vrai que ce qu'on entend principalement, c'est la crise économique, des coupures, ça coûte trop cher, on ne peut pas investir dans ça. Je pense que la question qui est posée aujourd'hui, ce n'est pas une question à court terme. Il ne faudrait pas qu'une situation particulièrement problématique au plan économique, à court terme, fasse qu'on prenne des moyens qui, à moyen terme, ne rendront pas service, ne permettront pas aux thérapies alternatives de prendre leur véritable place et, donc, de rendre service à la population québécoise en général.

Je pense que, le discours économique, il ne faut pas, non plus, qu'il vienne devant tous les autres aspects qui sont en cause lorsqu'on parle des approches alternatives, qui sont des moyens de développer la santé et de réduire les frais de santé ou les frais de maladie.

M. Trudel: Moi, j'ai la même conclusion avec ce que vous venez de dire. C'est: Allez en paix, croissez et multipliez-vous.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre, merci. Alors, compte tenu... Oui, merci aux gens du Réseau d'action pour une santé intégrale d'avoir été parmi nous. Alors, bon retour.

Mémoires déposés

Maintenant, pour les rendre publics et pour les faire valoir comme s'ils avaient été entendus et présentés devant la commission, je dépose les mémoires qui ont été reçus dans le cadre de la présente consultation, mais qui n'ont pas été entendus par la commission. Je dépose la liste nécessairement de ces organismes-là et des gens qui nous ont soumis des mémoires, ainsi que les mémoires mêmes. J'ai cru comprendre, M. le ministre, aussi qu'en vertu de l'article 176 vous aviez une demande à faire.

Remarques finales M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Vous lisez dans mes pensées, M. le Président. Habituellement, à la fin d'une commission, à la fois l'Opposition et le parti gouvernemental veulent bien tirer un certain nombre de constats qu'ils font de cette commission-là. Je pense que, si on faisait ça maintenant, on risquerait de ne pas rendre justice à la commission et à la cause. On a, malheureusement, trop souvent vu — et j'y ai participé, à la fois dans l'Opposition et au pouvoir — chacun des partis politiques plaçant à l'occasion son intérêt de parti à bien paraître tantôt s'opposer ou supporter timidement. Je pense qu'on est dans une situation aujourd'hui où cette commission parlementaire là a été marquée au coin d'une ouverture très évidente de l'ensemble des parlementaires siégeant, peu importe leur identité politique. Nous sommes rendus à un point où cette situation-là doit être portée, je pense, à la connaissance du Parlement, et ça devra se faire éventuellement.

Convocation d'une séance de travail selon l'article 176 du règlement

Pour y arriver et pour mettre de notre côté le plus de chances possible d'une réussite, donc d'une bonne lecture de la situation et, par conséquent, ayant une bonne lecture de la situation, dégager les vraies solutions, que ce soit au niveau de la connaissance, que ce soit au niveau de l'évaluation, que ce soit au niveau de la protection du public, que ce soit au niveau de la formation^ M. le Président, j'ai presque envie de souhaiter effectivement me servir de l'article 176 pour convoquer une séance de travail, avant même que le rapport soit remis à l'Assemblée nationale, où nous pourrions, les deux formations politiques officielles — et, si le Parti Égalité veut en être, je n'ai aucun problème — élaborer ce que pourrait être, au cours des prochains mois, un cheminement de travail, laissant le soin, la liberté à l'Opposition, comme formation politique, comme à mon parti aussi, de porter un jugement sur l'oeuvre finale de cette commission. (13 heures)

Quant à moi, dans la mesure où ça m'irait, je pourrais toujours effectivement me faire le défenseur, si besoin est, de ce que nous pourrions convenir ensemble dans le processus gouvernemental au niveau des différents comités ministériels et, par le fait même, déboucher beaucoup plus facilement sur un consensus et que ça devienne une volonté du Parlement et non pas uniquement d'une formation politique, en tout ou en partie. Mais je souhaite que, en tout, on s'entende; ça nous permettrait de faire un cheminement plus rapide. Avoir le consensus au niveau des formations politiques siégeant à l'Assemblée nationale me paraît être le meilleur moyen de tenter de dégager un consensus dans la population quant à la voie à suivre.

C'est dans ce sens-là que je souhaiterais ardemment recevoir la collaboration de tous les parlementaires pour une séance de travail qui nous permettrait de cheminer. Une, deux ou trois, dépendamment de notre besoin; je pense que ça peut s'évaluer sans connaître précisément chacune des règles qui nous régissent. M. le Président, je suis pleinement convaincu que vous nous en informerez et que vous nous donnerez les limites dans lesquelles on peut oeuvrer avec le règlement, et je souhaite le faire le plus rapidement possible.

Le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue nous parlait d'échéance au mois de juin. Je ne sais pas trop à quoi il faisait allusion, mais une chose est certaine, c'est qu'il y a très certainement moyen de faire passablement de travail quant à ce que nous devrions dégager comme voies à soumettre au gouvernement. Plus vite on le fera, plus ça me donnera de temps, sur le plan personnel, pour être capable de le faire progresser dans l'appareil gouvernemental.

Le Président (M. Joly): Alors, je prends acte de votre demande qui sera consignée au procès-verbal de cette présente séance. La secrétaire de la commission va en assurer le suivi et nous reviendrons... On convoquera sur ça les parlementaires. J'imagine, M. le député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, que vous avez des choses à nous dire?

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Bien, quelques remarques, M. le Président, en terminant, sans effectivement, de ce côté-ci, tirer des conclusions sur la présente période que nous venons de vivre et les audiences que nous venons de tenir. Effectivement, je souscris au fait que nous puissions utiliser une des dispositions de notre règlement pour faire en sorte que nous mettions ensemble une certaine somme d'énergie et d'idées pour faire progresser ce dossier des thérapies alternatives. Si nous pouvons — nous l'avons fait d'entrée de jeu à cette commission — apporter des éléments qui puissent faire en sorte que, au Québec, on va non seulement être une société distincte, mais qu'on va faire distinctement des choses parce qu'on va aller plus loin et qu'on va y aller autrement pour faire ces choses-là — et ça me semble être le cas en rapport avec la question des thérapies alternatives — je pense que tous les moyens doivent être pris pour qu'on en arrive à terme à franchir des étapes, réservant, évidemment, le droit au critique de l'Opposition et à l'Opposition de jouer leur rôle d'Opposition comme au côté ministériel de présenter ses propositions et au leader de l'Assemblée nationale, au leader du gouvernement et au leader de l'Opposition de faire les ententes sur le plan mécanique.

Nous sommes ici dans un processus. Il me plaît de penser qu'à la fin d'une certaine période qui pourrait être juin — je n'avais rien d'autre à l'esprit que la fin d'une certaine période ou la fin d'un paradigme, comme il a été évoqué ici — nous puissions accoucher de quelque chose véritablement en santé pour permettre de vivre de très nombreuses années avec d'autres partenaires dans le domaine de la santé des Québécois et des Québécoises.

Ce qui nous préoccupe, ce qui me préoccupe, c'est la santé plus que la maladie, constatant que, lorsqu'on est malade, par ailleurs, on a aussi de bonnes ressources, au Québec, pour s'en occuper. Mais la question de la santé des Québécois et des Québécoises doit être placée au centre. Vous vous souvenez, M. le ministre, de celui que nous avons mis sur ce tabouret, avec trois dimensions, à une certaine époque; j'aimerais bien qu'on s'y intéresse de toutes les façons. Non seulement notre collaboration va vous être acquise, mais, surtout, notre critique va vous être acquise. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, c'est peut-être juste un petit élément, mais je voudrais qu'il soit du domaine public. C'est pour vous dire que je souhaiterais que la commission puisse avoir la liberté, par exemple, d'inviter à nouveau, à huis clos, l'Office de la protection du consommateur pour savoir ses limites et, peut-être aussi, l'Office des professions pour explorer dans ces voies d'avenir. Ça me paraît peut-être une bonne initiative parlementaire quant à renforcer le rôle du député aussi et sa capacité de dégager des solutions. Je pense qu'à ce niveau-là ça pourrait être très intéressant.

En terminant, je veux dire au député de Rouyn-Noranda—Témiscamingue que l'objectif de juin est un très bon objectif puisqu'il n'est relié à aucune autre chose que celle qu'il évoquait. Mais, en souhaitant un accouchement pour le mois de juin, il faudrait s'assurer que ce ne soit pas un prématuré et qu'on tombe dans les bébés de petit poids, qui nécessiteraient, finalement, d'autres sortes d'interventions qui donneraient certains mérites à une autre science que celle qu'on recherche.

M. Trudel: Je ne peux pas m'empêcher de conclure — je m'excuse.

M. Côté (Charlesbourg): Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Vous êtes très sage, M. le ministre.

M. Trudel: ...M. le Président — en disant que, par ailleurs, en étant toujours très sage, vous avez absolument raison: l'alternative vous surveillera.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Joly): Alors, merci à tous les...

M. Côté (Charlesbourg): Et je ferai tout pour qu'elle demeure l'alternative.

Le Président (M. Joly): ...parlementaires, à tous ceux qui ont participé à cette commission. Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 13 h 8)

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