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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 17 mars 1993 - Vol. 32 N° 36

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 43, Loi modifiant la Loi sur le régime des rentes du Québec et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Joly): Alors, bonjour. Il me fait plaisir de vous accueillir à cette commission. Je vous rappelle que la commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 43, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives. Mme la secrétaire, avons-nous des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Marois (Taillon) sera remplacée par M. Lazure (La Prairie).

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, Mme la secrétaire. M. le ministre, nous en sommes à la période où on peut faire des remarques préliminaires. Est-ce que vous avez des remarques préliminaires, M. le ministre?

Remarques préliminaires

M. Bourbeau: Pas vraiment, M. le Président. Vous savez que nous avons déposé un projet de loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec. Nous devons procéder sous peu à l'étude détaillée, article par article, du projet de loi, étant donné que le projet de loi a subi avec succès l'étape de l'adoption de principe. Avant de procéder à l'étude article par article, il a été convenu d'entendre trois groupes, qui sont, je crois, ici ce matin et qui nous feront part de leur point de vue sur ce projet de loi. Alors, pour ne pas retarder indûment ces auditions, moi, je serais disposé, M. le Président, à procéder aussitôt que possible...

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...après avoir fait une motion, tout à l'heure.

Le Président (M. Joly): II y a aussi M. Lazure, qui, en fait, est le porte-parole en matière de main-d'oeuvre et de sécurité du revenu. Alors, M. le député, est-ce que vous auriez des remarques préliminaires?

M. Lazure: Merci, M. le Président. Oui, rapidement, je veux d'abord remercier le ministre pour avoir accepté la proposition que l'Opposition a faite durant le débat sur l'adoption du principe, à savoir de rencontrer quelques groupes en audience particulière qui viendraient nous expliquer leur position vis-à-vis de ce projet de loi. Nous avons voté contre le principe du projet de loi, comme je l'ai expliqué, parce que, tout en contenant des bonifications intéressantes, il y a des choses qui nous paraissent tout à fait inacceptables dans ce projet de loi, et je donne quelques exemples. Il y a la désindexation pour le groupe de 55 à 64 ans chez les conjointes survivantes. D'autre part aussi, quand on regarde les changements de prestation uniforme, il y a plusieurs groupes qui vont être avantagés, mais il y en a autant sinon plus qui sont désavantagés, en particulier le conjoint de moins de 35 ans non invalide avec un enfant à charge, qui reçoit actuellement 306 $ par mois, ne recevrait que 250 $. Deuxième exemple, le conjoint de 35 à 44 ans non invalide et sans enfant qui reçoit 306 $ ne recevrait que 150 $, etc.

Alors, je répète ce que j'ai dit lors du débat sur l'adoption du principe. Nous avons voté contre, mais nous sommes prêts à réviser notre position lors du prochain vote si le ministre se montre réceptif aux recommandations positives, constructives qui seront faites autant par les groupes qui vont venir nous rencontrer aujourd'hui que par l'Opposition. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. le député. M. le ministre, je crois que vous avez une motion.

Motion proposant d'entendre le Conseil

du statut de la femme, la Confédération

des syndicats nationaux et l'Association

québécoise des droits des retraités

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, je voudrais profiter de l'occasion, avant de présenter la motion, pour saluer — je ne l'ai pas fait tout à l'heure, je le fais maintenant — l'arrivée à cette commission du député de La Prairie, qui a été promu au titre de critique en matière de main-d'oeuvre et de sécurité du revenu. Je le félicite pour cette promotion, et je peux lui dire que nous anticipons beaucoup de plaisir à discuter avec lui au cours des semaines et des mois qui viennent.

En ce qui concerne les remarques du député de La Prairie et aussi le point de vue qui a été exprimé par les divers groupes, y compris le Conseil du statut de la femme, je peux dire que nous avons réfléchi, au cours des dernières semaines, des derniers mois, sur les situations qui nous ont été présentées par ces divers groupes là et j'ai l'intention, en commission parlementaire, d'apporter certains changements. Je ne peux pas, évidemment, aujourd'hui, divulguer ces changements-là parce qu'ils n'ont pas encore reçu l'aval du Conseil des ministres, mais possiblement que, si, demain, nous tenons une session pour étudier le projet de loi, nous aurons des modifications à proposer.

Entre-temps, M. le Président, je propose que, en vertu de l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, la commission permanente des affaires sociales procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi 43, Loi modifiant la loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives, le mercredi 17 mars 1993, et à cette fin, qu'elle entende, pour une durée maximale d'une heure chacun, dans un premier temps, le Conseil du statut de la femme; en second lieu, la Confédération des syndicats nationaux; et, finalement, l'Association québécoise des droits des retraités. Voilà, M. le Président, je dépose ma motion en duplicata.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup, M. le ministre. M. le député de La Prairie, s'il vous plaît.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Oui, M. le Président. Nous allons évidemment voter en faveur de cette motion, mais je voudrais tout simplement informer la commission que l'Association québécoise des droits des retraités, qui a envoyé un mémoire, ne peut être présente pour des raisons matérielles, je dirais, hors de leur contrôle. Devant cette situation, je demanderais que la commission accepte d'être saisie du mémoire officiellement et que le mémoire, qui n'est pas très long — il a cinq pages — apparaisse au Journal des débats. (10 h 20)

Essentiellement, la conclusion de l'AQDR est la suivante, en deux points. L'AQDR recommande au gouvernement de bonifier le régime général de rentes du Québec de façon importante plutôt que de procéder à des mini-réformes, comme le ministre le fait actuellement. Deuxièmement, l'AQDR recommande que la prestation uniforme de la rente de conjoint survivant de 55 à 64 ans continue à être indexée, selon l'indice des rentes du Régime de rentes du Québec, de la même façon qu'elle l'est actuellement. Alors, j'imagine, M. le Président, qu'il y aura consentement pour que ce mémoire soit déposé et qu'il soit inscrit au Journal des débats. Merci.

Mémoire déposé

Le Président (M. Joly): Alors, comme il n'y a pas besoin de consentement, M. le député, moi, je... Déjà, le mémoire m'avait été confié. Donc, nous déposons le mémoire de l'AQDR, compte tenu que c'est le voeu de ces gens, de cette association que ce mémoire soit déposé à la commission, afin que les membres puissent nécessairement en prendre connaissance et soient capables de s'orienter, en vertu, disons, du projet de loi comme tel. Alors, la motion comme telle est adoptée avec l'amendement à l'effet que l'Association québécoise des droits des retraités ne sera pas ici comme telle, mais que le mémoire est déposé. Parfait.

Auditions

Alors, nous sommes rendus justement au temps d'écoute. Je demanderais maintenant aux gens qui représentent le Conseil du statut de la femme de bien vouloir s'avancer, s'il vous plaît. Alors, bonjour, mesdames. Il me fait plaisir de vous accueillir. J'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier et aussi nous présenter les gens qui l'accompagnent, s'il vous plaît.

Conseil du statut de la femme (CSF)

Mme Lavigne (Marie): Merci, M. le Président. Je suis Marie Lavigne, présidente du Conseil du statut de la femme; à ma droite, Mme Monique Desrivières, qui est directrice de la recherche au Conseil du statut de la femme; et, à ma gauche, Mme Louise Motard, qui est chercheuse au Conseil.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie beaucoup. Je vous rappelle que vous avez environ une vingtaine de minutes pour nous présenter votre mémoire ou une synthèse du mémoire, et, par après, les parlementaires auront le loisir d'échanger avec vous. Alors, la parole est à vous, Mme Lavigne.

Mme Lavigne: Je vous remercie, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission parlementaire, en premier lieu, je tiens à souligner que ce qui tient lieu de mémoire du Conseil sont des commentaires que le Conseil a produits en septembre dernier sur le projet de loi 43 modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et des commentaires dont, ce matin, des copies additionnelles ont été apportées pour les membres de la commission.

Je ne lirai pas ce commentaire, je vais le reprendre en gros. En septembre dernier, nous avons préparé ce commentaire, et je dois vous avouer que nous ne nous attendions pas à être convoquées devant cette commission huit mois plus tard pour vous faire part de ces remarques. De plus, ayant été avisées de cette convocation il y a moins de 48 heures, vous comprendrez que nous n'avons pas entrepris de nouvelles recherches sur le sujet, ni développé de positions différentes de ce que vous retrouverez dans ce document. Néanmoins, nous vous remercions de l'occasion que vous nous donnez de formuler nos remarques sur ce projet qui, malgré l'aridité très évidente du sujet pour les profanes — et pour moi aussi, je dois l'avouer — et aussi son caractère hautement spécialisé, a ou aura des conséquences très importantes sur des milliers de femmes et d'hommes dans la société québécoise.

Toutes les dispositions de ce projet de loi concernent bien évidemment les femmes à titre d'assurées ou d'ayants droit, mais nous avons limité notre intervention et nos remarques à certaines modifications qui touchent plus spécifiquement les femmes, et on les regroupera sous deux blocs: d'abord, les modifications qui sont relatives à la rente de conjoint survivant, et, en second

lieu, celles qui touchent le partage des rentes au moment de la retraite.

Avant d'aborder ces remarques, je tiens à souligner que le Conseil du statut de la femme s'est réjoui de certaines modifications qui ont été apportées dans le cadre du projet de loi 43. Ainsi, le projet considère l'enfant adoptif commun, au même titre que l'enfant qui est né ou à naître, lorsqu'il s'agit de reconnaître les conjoints de fait après un an; donc, on considère cet enfant-là au même titre. Donc, il s'agit d'une amélioration évidente, et nous nous en réjouissons. En second lieu, le projet élimine toute condition d'admissibilité relative à l'âge du conjoint survivant. Et, en troisième lieu, le projet aussi permet le partage de la rente de retraite entre le bénéficiaire et son conjoint. Et ceci aussi, c'est une nette amélioration. Donc, grosso modo, ces amendements recueillent l'assentiment du Conseil, quoique je doive vous préciser que nous reviendrons plus précisément sur la question du partage de retraite entre le bénéficiaire et le conjoint.

En premier lieu, les remarques que nous tenons à vous communiquer portent sur la définition du conjoint survivant. La définition actuelle du conjoint survivant a déjà été critiquée par le Conseil du statut de la femme parce qu'elle lèse la conjointe légale au profit de la conjointe de fait qui a résidé trois ans avec le cotisant immédiatement avant son décès. Le projet de loi qui est présenté devant l'Assemblée nationale viendrait inverser cette situation en accordant la rente de survivant à l'époux séparé de fait d'un assuré décédé plutôt qu'à son conjoint de fait. C'est donc, maintenant, selon le projet, la conjointe mariée mais séparée de fait qui aurait la priorité sur la conjointe de fait, que cette dernière ait ou non des enfants avec le cotisant décédé et quel que soit le nombre d'années pendant lesquelles elle aurait cohabité avec lui.

Évidemment, si une telle définition, qui est présentée dans le projet de loi, s'harmonise avec celle qui est en vigueur dans les régimes complémentaires de retraite, on doit néanmoins constater qu'elle s'éloigne de la définition de conjoint survivant qui prévaut dans la Loi sur l'assurance automobile ou dans la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles. Cette définition ne s'inscrit pas non plus dans l'esprit de la Loi sur la sécurité du revenu, qui reconnaît les conjoints de fait, de la Loi sur les impôts, qui le fait à partir de cette année. Donc, la proposition qui est dans le projet de loi 43, si elle présente des mérites parce qu'elle protège les droits de la personne mariée et séparée de fait, la question que nous nous posons, c'est: N'amène-t-elle pas le problème inverse pour le conjoint de fait qui se serait qualifié comme conjoint survivant, s'il n'avait existé un conjoint marié et séparé de fait?

Le Conseil du statut de la femme a pris position à ce sujet dans un avis sur les partenaires en union libre. Dans cet avis, il ne nous semblait pas opportun d'attribuer en toutes circonstances la rente de conjoint survivant à l'époux marié et séparé de fait d'un cotisant et de ne jamais reconnaître les conjoints de fait d'un cotisant marié, séparés de fait, peu importe la durée de la vie commune.

C'est donc dans le même esprit que nous recommandons d'établir un équilibre qui tienne compte des années de vie commune. C'est pourquoi nous souhaitons, et c'est notre première recommandation, que l'on reconnaisse le partenaire en union libre comme conjoint survivant, selon les conditions usuelles, c'est-à-dire un an ou trois ans, en donnant cependant la possibilité à l'époux séparé de fait du cotisant décédé de se prévaloir, s'il le souhaite, d'un partage de crédits de rente accumulés durant la vie commune. En adoptant cette proposition plutôt que la disposition qui est prévue au projet de loi, le Régime de rentes irait d'ailleurs dans le sens du Régime de pensions du Canada. (10 h 30)

En second lieu, nous attirons votre attention sur le fait que le Régime de pensions du Canada autorise un partage de gains entre conjoints de fait après un an de séparation, à la demande de l'un d'eux. Dans le but de donner suite aux ententes intervenues entre conjoints de fait, tout en respectant l'esprit du Code civil du Québec, nous recommandons que soit étudiée — il s'agit donc d'une recommandation d'étude — la possibilité que le partage des crédits de rente accumulés au Régime de rentes du Québec durant la vie commune puisse être exécuté à la suite d'une séparation entre conjoints de fait, si les deux conjoints en font la demande.

Le projet de loi, par ailleurs, présente une mesure transitoire pour le conjoint séparé judiciairement du conjoint décédé. Cette disposition se justifie. Toutefois, elle pose certains problèmes que nous signalons dans notre document. Pour éviter ces problèmes, et dans le même esprit que notre première recommandation, nous proposons que le conjoint de fait d'un cotisant marié mais séparé judiciairement avant le 1er juillet 1989 puisse être reconnu comme conjoint survivant, selon les conditions usuelles — un an ou trois ans — mais que, au préalable, on donne la possibilité à l'époux séparé légalement du cotisant décédé de se prévaloir du partage des crédits de rente accumulés durant la vie commune.

Par ailleurs, le projet de loi 43 apporte aussi certaines modifications de la prestation uniforme entrant dans le calcul des rentes du conjoint survivant âgé de 64 ans et moins. Et, à cet égard, nous notons trois aspects. D'abord, les modalités proposées pénalisent la majorité des conjoints survivants de 45 ans et moins, s'ils ont des enfants à charge et s'ils ne sont pas invalides. De plus, selon le projet de loi, les enfants de 18 à 25 ans qui sont aux études ne seraient plus considérés comme des enfants à charge. Et, enfin, le projet prévoit une désin-dexation partielle de la prestation aux survivants âgés de 55 à 64 ans. Nous avons des recommandations pour chacun de ces trois aspects.

Compte tenu de la difficile situation des conjointes survivantes de moins de 45 ans qui ont des enfants à charge, nous avons été plutôt étonnées de la diminution de la prestation uniforme et nous avons recommandé — et c'est notre quatrième recommandation — que la prestation uniforme de la rente de conjoint survivant versée au conjoint survivant ayant à charge des enfants

soit maintenue à son niveau actuel.

En second lieu, compte tenu, par ailleurs, que notre société met l'accent sur la formation professionnelle des jeunes et, aussi, compte tenu que des programmes comme celui de la sécurité du revenu ou de l'aide financière aux étudiants présument que les parents sont tenus de soutenir un enfant au-delà de ses 18 ans, tant qu'il n'est pas reconnu indépendant, nous recommandons que l'enfant âgé de 18 à 25 ans, qui fréquente un établissement scolaire au moment du décès du cotisant, soit considéré comme un enfant à charge lors de l'établissement de la prestation.

Enfin, considérant que le groupe des femmes de 55 à 64 ans forme, dans la société québécoise, un des groupes les plus vulnérables, considérant qu'actuellement seulement 27 % des femmes de cette catégorie de population font partie de la population active et qu'elles peuvent difficilement compter sur un revenu d'emploi pour combler la diminution de leur revenu, nous considérons actuellement qu'il est prématuré de vouloir diminuer la rente de conjoint survivant des 55-64 ans et nous considérons que la prestation uniforme doit continuer à être indexée comme elle l'est actuellement. Ces six recommandations avaient trait au bloc de la rente des conjoints survivants.

J'aborde maintenant la question du partage des rentes à la retraite. Le projet de loi 43 propose que la rente de retraite puisse être partagée par le bénéficiaire et son conjoint marié au moment de la retraite. Cette possibilité, comme vous le savez, existe déjà dans le Régime de pensions du Canada depuis 1986, et on considère généralement qu'un tel partage peut être avantageux pour le couple, au plan fiscal. Nous sommes donc très heureuses que le gouvernement propose ce partage, car il s'agit d'une amélioration à la situation actuelle. Cependant, nous aurions souhaité que le gouvernement profite de l'occasion — et c'est là notre septième recommandation — pour permettre le partage non pas de la rente de la retraite, mais bien des crédits de rente accumulés durant les années de vie commune. Une telle approche permettrait que les deux conjoints soient traités de la même façon, quel que soit le conjoint qui est le premier à décéder. Nous avons également recommandé que soit étudiée la possibilité d'un tel partage de crédits de rente à la retraite pour les conjoints de fait, si les deux partenaires en font la demande.

Cette question de partage des crédits de rente à la retraite s'inscrit d'ailleurs dans la logique qui veut que l'on considère que les crédits de rente accumulés au cours de la vie commune sont des avoirs familiaux. Nous pourrons, si les membres de la commission le souhaitent, déposer aux membres un exemple illustrant le résultat différent en cas du décès d'un conjoint ou de l'autre, selon le projet de loi ou selon l'approche d'un crédit de rente, le résultat qu'il y a concrètement sur l'un et l'autre des conjoints.

Enfin, pour conclure, nous souhaitons que les remarques qu'apporte le Conseil du statut de la femme puissent être une contribution positive à la réflexion de la commission parlementaire. Sur ce, nous vous remercions. Il nous fera plaisir de préciser certaines de nos positions. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, Mme Lavigne. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de recevoir les gens qui représentent le Conseil du statut de la femme. Je salue Mme Lavigne, la présidente, et ses adjointes. Je sais qu'on ne vous a pas donné un très grand préavis pour vous présenter ici. On s'en excuse. Par contre, c'est un sujet qui vous tient tellement à coeur que je suis convaincu que vous êtes continuellement bien informées sur ces sujets-là, d'autant plus que le projet de loi avait été déposé il y a maintenant neuf mois, à peu près. De toute façon, je peux vous dire que le ministre, lui aussi, avait déposé le projet de loi au mois de juin et l'avait mis de côté un bon bout de temps. Donc, il a fallu aussi se rafraîchir la mémoire, parce que ces sujets-là sont passablement complexes, et, parfois, il faut avoir en tête tous les éléments pour pouvoir bien comprendre ce qui est recherché.

Alors, il y a la question du versement d'une rente à un conjoint sans égard à l'âge. La mesure que nous proposons, en fait, permet l'équité entre tous les conjoints survivants. On sait que le conjoint survivant sans enfant et âgé de moins de 35 ans, dans la loi actuelle, ne reçoit rien. Avec les propositions que nous faisons, ce conjoint de moins de 35 ans sans enfant recevra une rente, alors que, jusqu'à maintenant, il n'en avait aucune. Donc, ne pensez-vous pas que cette mesure-là, en tous les cas, est une amélioration par rapport à la situation actuelle?

Mme Lavigne: Oui. Oui, M. le Président. Le Président (M. Joly): Mme Lavigne.

Mme Lavigne: Oui, effectivement. Cette mesure, et nous l'avons souligné dans notre mémoire, comme je le disais, il semble que c'est, selon nous, un aspect positif du projet de loi qui fasse en sorte qu'on ne se retrouve plus dans un cas de discrimination selon l'âge, et nous nous réjouissons que le gouvernement ait pris une telle approche.

M. Bourbeau: II y a aussi la question des conjoints âgés de 55 à 65 ans, qui, maintenant, reçoivent une rente réduite lorsque la rente a débuté avant l'âge de 45 ans et qui, dorénavant, recevront une pleine rente. Alors, on estime que ça aussi, c'est une amélioration. Je ne sais pas si vous êtes du même avis, là, mais il suffit pour souligner.

M. le Président, vous remarquerez les aspects de la loi qui améliorent la situation. Je voudrais qu'on en tienne compte. Je compte bien que l'Opposition va faire le travail de tenter de démontrer qu'il y a des aspects de la loi qui ne sont pas améliorés autant qu'on le voudrait, mais, en ce qui concerne ces conjoints-là, de 50 à 65

ans, en tout cas, et dont la rente a débuté avant l'âge de 45 ans, là, c'est quand même une bonne amélioration.

Le Président (M. Joly): Mme Desrivières, aime-riez-vous commenter?

(10 h 40)

Mme Desrivières (Monique): Non, non. Seulement pour dire que, effectivement, c'est une amélioration dans le projet de loi, là, puis on le reconnaît également.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre.

M. Bourbeau: Bon. Alors, qu'est-ce que vous pensez de la hausse de la rente d'orphelin et de la rente d'enfant invalide, qui passe de 29 $ à 50 $, et qui sera majorée annuellement, là, à partir de maintenant, en tenant compte de l'augmentation de l'indice du coût de la vie? Je présume que vous n'avez pas d'objection à ça, non plus?

Mme Lavigne: Si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Joly): Madame.

Mme Lavigne: ...c'est une mesure, bon, qui, en soi, a un aspect intéressant, cette hausse de rente d'orphelin, mais elle nous semble néanmoins limitée dans sa portée, parce qu'elle est contrebalancée par, finalement, la baisse de la prestation uniforme pour une personne qui est non invalide avec enfant à charge. Or, la majorité. .. Ce n'est pas ça, la question?

Une voix: Non, il parlait de la rente d'orphelin.

Mme Lavigne: Oui, la rente d'orphelin. Bien, oui, elle a été augmentée, mais cette hausse... En tout cas.

Le Président (M. Joly): Est-ce que Mme Motard a des commentaires à ajouter?

Mme Motard (Louise): Oui. Bien, avant de parler de la rente d'orphelin, tout à l'heure, vous avez parlé d'une augmentation de rente pour les conjoints de 50 à 64 ans. C'est ça que vous avez dit? Je pense qu'il y a eu un petit malentendu, là. J'ai l'impression que vous vouliez peut-être dire: les conjoints de 35 à 44 ans non invalides et sans enfant à charge, qui ont eu une... Je m'excuse. C'est ça, c'est que, finalement, les conjoints de 55 à 64 ans, ils n'ont pas d'augmentation. Ils vont subir une diminution parce que leur prestation à taux uniforme ne sera plus indexée. Les conjoints de 35 à 44 non invalides et sans enfant à charge recevaient un montant, une prestation à taux uniforme, mais cette prestation-là était diminuée d'un certain montant, là. Les plus jeunes recevaient moins, et plus on s'approchait de 44 ans, plus elles augmentaient. Et là, ce montant-là va être remplacé par une prestation fixe. Mais en réalité, ce que ça va faire, c'est que les plus jeunes vont recevoir plus — un peu — mais les plus vieilles vont recevoir moins. Alors, il y en a qui s'améliorent, dans ce groupe d'âge là, mais il y en a qui ne s'améliorent pas, là.

Le Président (M. Joly): M. le ministre. M. Bourbeau: Oui. M. Legault... (Consultation)

Mme Motard: Ça, c'est pour la prestation de conjoint survivant, là, à taux uniforme, et, après ça, vous avez parlé de la rente d'orphelin. Je pourrais peut-être dire quelque chose après concernant la rente d'orphelin.

Le Président (M. Joly): Avec plaisir, madame.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président (M. Joly): Oui, M. le ministre.

M. Bourbeau: ...j'aimerais dissiper un malentendu. Les gens de 55 ans et plus, là, ce n'est pas exact de dire que la rente n'est pas indexée. La rente va continuer à être indexée, parfaitement indexée.

Mme Motard: Oui, mais c'est la...

M. Bourbeau: J'entendais...

Mme Motard: ...prestation... Excusez.

M. Bourbeau: J'entendais l'Opposition, tantôt, qui disait qu'on n'indexera plus, dorénavant, la rente des conjoints survivants de 55 ans et plus. L'indexation est maintenue. Ce n'est pas exact de dire qu'il n'y aura pas d'indexation, sauf que le plancher à partir duquel on indexe ne sera pas majoré pendant un certain nombre d'années. La base, là, va rester la même, mais la pension individuelle de chaque personne qui va avoir droit à la pension, cette pension-là va être indexée à chaque année. Alors, il ne faut pas dire aux gens: Vous allez avoir une pension gelée à partir d'un certain temps. Ces gens-là, disons qu'ils commencent avec une pension de 600 $ — je vous donne un petit exemple — ils vont avoir l'indexation à chaque année, et ça va être indexé jusqu'à la fin. Donc, il ne faudrait quand même pas annoncer des choses qui ne sont pas exactes, là.

Le Président (M. Joly): Madame Lavigne, s'il vous plaît.

Mme Lavigne: Oui, vous avez tout à fait raison, M. le ministre, et, d'ailleurs, c'est ce pourquoi nous avons, avec précaution, parlé de désindexation partielle. Parce que, effectivement, il y a une portion, qui est la prestation uniforme, qui, elle, va subir une désindexation. Alors... Pardon?

Une voix: Elle ne sera pas indexée.

Mme Lavigne: Cette portion ne sera pas indexée, alors que l'autre portion, qui est un pourcentage, elle, effectivement, va continuer à connaître une certaine augmentation. Donc, il ne s'agit pas d'une désindexation totale, mais d'une désindexation d'une portion, et de la portion uniforme. Dans ce sens-là, donc, il faut comprendre que la réaction est une réaction de surprise, et je dois vous dire que si nous avons eu cette réaction, ce n'est pas que nous ne croyons pas que, à moyen terme ou à plus long terme, il ne faille pas s'en aller vers ce type de mesure, sauf que la position dont nous vous faisons part, c'est qu'il nous semble prématuré, à l'heure actuelle, de s'inscrire dans une démarche qui irait vers cette désindexation partielle, et ceci, essentiellement à partir du taux d'activité des femmes à cette catégorie d'âge.

Il s'agit d'une catégorie d'âge qui porte encore le fardeau historique d'une non-participation au marché du travail et pour laquelle on s'attendait à ce que ces personnes aient une activité au foyer. Donc, il s'agit de gens qui ont une autonomie économique beaucoup plus limitée que les autres catégories de la population féminine en bas de 65 ans. Ainsi, c'est la catégorie où le taux d'activité est le plus bas. Uniquement 27 % des femmes de cette tranche d'âge sont sur le marché du travail, et, parmi ce groupe-là, il y a un groupe extrêmement important qui travaille à temps partiel, c'est-à-dire 28 %. Si on reprend autrement ce groupe d'âge là, on constate que le tiers des femmes dans cette catégorie d'âge n'a strictement aucun revenu; un autre tiers a moins de 2000 $ de revenus par année. Alors, c'est une catégorie extrêmement vulnérable et dont la situation économique se redresse lorsqu'elles arrivent à 65 ans, lorsqu'elles ont une pension de vieillesse, mais c'est la période très, très difficile où l'intégration au marché du travail est extrêmement complexe, surtout pour cette génération qui n'y était pas.

Dans ce sens-là, on se dit qu'on est probablement, cette fois-ci, en avance d'une décennie pour cette modification. Je ne crois pas qu'il faille éliminer cette perspective à moyen terme, mais il me semble que le gouvernement devrait se doter d'instruments d'analyse qui soient en relation avec les taux de participation. Alors, ce que nous vous disons, c'est qu'il nous semble que de rétablir l'équilibre, comme le projet gouvernemental le suggère, nous semble un peu prématuré parce que, alors que l'immense majorité des femmes à d'autres catégories d'âge ont haussé de façon très significative leur autonomie économique, cette partie de la population n'a pas pu le faire encore. C'est essentiellement nos réserves par rapport à l'indexation partielle — je dis bien partielle — que vous avez proposée.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, madame. Je vais maintenant reconnaître M. Legault, président de la Régie des rentes du Québec. M. Legault.

M. Legault (Claude): Merci, M. le Président. On me demande, Mme Lavigne, d'attirer votre attention, lorsque vous dites que, dans une décennie, ça vous semblera plus acceptable, que tout en étant d'accord avec la démarche, vous croyez que, dans le temps, il n'est peut-être pas opportun d'appliquer cette mesure. Simplement vous faire remarquer que, justement, la mesure trouvera sa pleine application dans une décennie. Alors que, pour demain, il n'y a rien de changé, dans un an, il y aura un léger changement et ainsi de suite, et ça prendra 10 ans avant qu'on arrive à retrouver l'équité pour tous les âges dans le régime, c'est-à-dire que la prestation uniforme pour les gens de 45 ans et plus sera la même.

En attendant, il faut quand même constater qu'il y a des gens qui, actuellement, reçoivent une rente réduite à cause des spécifications de la loi, et cette rente réduite les suit jusqu'à l'âge de 65 ans, alors que dorénavant ces rentes, bien qu'elles pourront être réduites par le biais du jeu de la prestation à taux uniforme, vont se stabiliser à la hausse quand la personne atteindra 45 ans. Donc, il y a des gens qui vont voir leur rente majorée suite à l'application de cette nouvelle gradation, et pour ce qui est des gens de 55 ans et plus, eh bien, c'est sur 10 ans que la mesure trouvera son application. Voulez-vous que j'enchaîne avec le partage?

M. Bourbeau: Est-ce qu'il y a encore du temps?

Le Président (M. Joly): Je pense que c'est entièrement libre à vous, là. Vous avez une vingtaine de minutes.

M. Bourbeau: II y a un autre point technique. Peut-être qu'on pourrait laisser la parole à M. Legault, étant donné que c'est assez technique. Je crois qu'il a une autre observation à faire qui n'est pas sans intérêt. (10 h 50)

M. Legault: L'autre observation que je me permettrais, M. le Président, c'est sur le partage de la rente de retraite. Ce qui a été recherché, c'est d'abord, dans cet aspect-là, une approche similaire à celle du Régime de pensions du Canada, où il serait possible d'avoir un partage de la rente. Lorsque vous nous suggérez d'étudier la possibilité qu'il y ait plutôt un partage des gains, nous avons fait l'exercice pour se rendre compte que le simple fait de changer le mot «rente» pour le mot «gain» coûterait 45 000 000 $ de plus. Alors, c'est sûrement une mesure intéressante, mais qui a des coûts très élevés par rapport à la qualité de la mesure.

Et également, ce qu'il faudrait savoir, c'est que, lorsque les deux conjoints ont cotisé au régime de rentes d'une façon à peu près égale, sans pour autant prendre le maximum — on a pris à peu près les trois quarts du maximum des gains admissibles — eh bien, il arrive à la fin que, si vous faites un partage des gains, il y aurait une perte d'environ 1500 $ par année pour ces couples-là, dû au fait que, en partageant les gains, vous arrivez à une perte des périodes de retranchement. Alors, l'application des périodes de retranchement, pour la femme qui a élevé des enfants, par exemple, en partageant les

gains, vous faites disparaître cet aspect-là. Vous me direz: II y aurait peut-être moyen de le rétablir, mais là, on serait en train d'écrire un chapitre nouveau, d'une complexité qu'on n'a pas réussi à surmonter, à court terme, pour vous répondre aujourd'hui. Et simplement vous dire que, bien que votre approche ait beaucoup d'intérêt, eh bien, on s'est contenté de mesurer ces intérêts-là, et c'est de l'ordre de 45 000 000$. Vous comprendrez que, là-dessus, la décision reste dans les mains du gouvernement, de voir si cette mesure-là pourrait supporter un coût de 45 000 000 $. Nous, on croit qu'il y aurait beaucoup d'autres domaines où on pourrait apporter des corrections, plutôt que sur celui-là, pour un montant aussi élevé.

Le Président (M. Joly): Merci, M. Legault. Mme Lavigne, aimeriez-vous réagir à ça?

Mme Lavigne: oui. dans un premier temps, j'aimerais réagir à la première partie des propos, où il a été question de l'effet de la désindexation partielle qui se ferait sentir, bon, dans une décennie. je pense que nous en étions très conscientes. et, en parlant de ce report, nous avions en tête le taux de participation de la génération qui est immédiatement avant, c'est-à-dire les 45-54 ans — qui n'est pas non plus à un taux de participation au marché du travail, ou d'autonomie économique équivalent — de façon à ce qu'il agisse beaucoup plus progressivement. parce que les générations qui ont une participation quasi continue sur le marché du travail et qui ont un espoir, dans 10 ans, de se retrouver avec une continuité de participation à l'économie sont les générations qui vont jusqu'à 45 ans, les générations en bas de 45 ans, dont le taux d'activité sur le marché du travail est autour de 75 % de la population, où, donc, 75 % des femmes qui sont sur le marché du travail ont en bas de 45 ans. mais aussitôt qu'on se retrouve dans la catégorie 10 ans plus tard, déjà, il y a un «pattern» qui n'est pas régulier sur le marché du travail, où des interruptions sont fréquentes. c'est ce pourquoi, quand nous parlions de report, nous parlions vraiment dans une optique où, effectivement, dans un horizon qui serait un horizon de 15 ou 18 ans, là, effectivement, on se retrouverait à l'équilibre que vous souhaitez, mais c'était en tenant compte de cet écart, de cette difficulté pour la génération ultérieure.

Alors, il y avait ce point-là. Pour ce qui est de la question du partage des crédits, nous comprenons qu'il y a, effectivement, des coûts supplémentaires. Néanmoins, nous trouvons important de se sensibiliser au fait que la proposition sur le partage de la rente au décès, le problème que ça pose concrètement, c'est que, lorsque l'un des deux conjoints décède, concrètement, il y a la reproduction d'une iniquité, à savoir que ça laisse le veuf cotisant avec 100 % de sa rente, et la veuve non cotisante retombe avec 60 % de la rente.

Vous avez, dans les documents que nous vous avons remis, à la dernière page, un scénario qui montre la différence. Avec le scénario qui est là, selon le projet de loi et selon la proposition, il y a un écart qui, au chapitre de la rente, en tout cas, ne nous semblait pas si grand, mais néanmoins qui provoque des difficultés financières et un écart de revenu entre les deux conjoints. Donc, si l'épouse décède, selon le projet de loi, l'époux retrouve sa rente initiale, c'est-à-dire une rente de 200 $, et il reçoit 60 % de la rente initiale de sa conjointe décédée, soit 60 $, et le total arrive à 260 $. Si c'est l'époux qui décède, et ça, à partir du scénario qui était là, l'épouse, finalement, se retrouve avec un montant de 120 $, alors que, selon notre proposition, au moment où un des deux décède, le montant est le même. Donc, ce n'est pas plus payant pour le couple qu'un des deux meure, et, surtout, ça ne fait pas une déstabilisation qui est déjà énorme, donc ça ne baisse pas outre mesure le revenu. C'était le sens de la proposition que nous vous avons développée.

Le Président (M. Joly): Je vous remercie, Mme Lavigne. Je vais maintenant reconnaître M. le député de La Prairie, s'il vous plaît.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au nom de l'Opposition, de saluer Mme Lavigne et ses collègues, Mme Desrivières et Mme Motard, et de les remercier d'avoir bien voulu venir rencontrer la commission ce matin. Je les remercie aussi parce que leur document m'a aidé à faire mes premiers pas comme porte-parole de l'Opposition dans la discussion de ce projet de loi, la semaine dernière. C'est une étude très étoffée que vous aviez préparée en septembre 1992, et, même si plusieurs mois se sont écoulés, je pense que ça demeure toujours très, très approprié comme document.

M. le Président, le ministre a fait ressortir les points qui sont à l'avantage des prestataires. C'est de bonne guerre. C'est tout aussi de bonne guerre pour l'Opposition de faire ressortir les groupes qui sont désavantagés par cette mini-réforme. Le ministre a l'habitude de présenter des réformes, que ce soit à l'aide sociale ou à la Régie des rentes, en bonifiant quelque peu un petit nombre de personnes et en désavantageant un grand nombre de personnes. C'est un peu le style de mesure qu'il a l'habitude de prendre. J'ai demandé, dans le discours de deuxième lecture, et je répète la demande: Est-ce que le ministre pourra répondre au Conseil du statut ou au président de la Régie des rentes? Je ne le sais pas. Est-ce qu'il y a une étude des impacts financiers de ces changements-là? En d'autres termes, dans l'ensemble des changements que ce projet de loi va apporter, est-ce que le gouvernement va faire des économies? Si oui, de quel ordre? Ou est-ce que le gouvernement va débourser ou la Régie des rentes va débourser des sommes additionnelles?

M. Bourbeau: Est-ce que le député me permettrait une petite observation?

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: C'est seulement que le Régime de

rentes, il est autofinancé. Donc, le gouvernement ne gagne pas ou ne perd pas. C'est autofinancé.

M. Lazure: C'est pour ça que j'ai parlé de la Régie des rentes dans ma dernière remarque.

M. Bourbeau: Non, mais vous avez dit: Est-ce que le gouvernement va faire des économies?

M. Lazure: Au début, j'ai dit «gouvernement», je l'admets, mais j'ai ajouté «Régie des rentes».

M. Bourbeau: Ah bon. (11 heures)

M. Lazure: Autrement dit, ne nous disputons pas sur les mots, mais parlons de l'essentiel. Pour l'essentiel, est-ce que les clientèles vont recevoir plus d'argent, en gros, ou est-ce que les clientèles vont recevoir moins d'argent?

M. Bourbeau: Vous voulez que je réponde à la question tout de suite, là?

M. Lazure: Non, pas tout de suite. Je veux quand même utiliser mon temps. Même si c'est la première fois, je connais un peu les règles de procédure quand même. Ha, ha, ha!

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: J'ai la réponse.

M. Lazure: Vous avez la réponse? Rapidement, alors, allez-y donc.

M. Bourbeau: Toutes les mesures qui sont comprises ici occasionnent en tout des coûts additionnels de 13 000 000 $ pour le Régime de rentes du Québec.

Une voix: Par année.

M. Bourbeau: Par année, bien sûr. Ça, c'est financé par l'ensemble des cotisants.

M. Lazure: Ce serait intéressant, parce qu'on va avoir d'autres séances pour l'étude article par article, d'avoir ce document-là un peu détaillé, comment se répartissent ces 13 000 000 $ de déboursés additionnels annuels.

Mais, si on revient aux prestations uniformes mensuelles, le document du Conseil du statut de la femme, à la page 5, a un tableau, et, que je sache, le ministre ou le président de la Régie n'ont pas disputé l'exactitude de ce tableau-là. Si on regarde bien ce tableau à la page 5, pour tous les groupes, il y a ou bien gel de la prestation uniforme, ou baisse de la prestation uniforme, sauf un groupe, c'est le premier, «non invalide et sans enfant à charge, de moins de 35 ans», qui actuellement n'a rien, qui aurait 150 $. Mais, tous les autres groupes, ou bien c'est stabilisé, ou bien c'est moins. on a parlé de la désindexation du groupe des 55 à 64 ans. m. le président, je me permets, moi aussi, après le conseil du statut de la femme et l'aqdr, de répéter que c'est particulièrement inacceptable, parce que c'est probablement le groupe le plus fragile chez les personnes d'un certain âge, chez les femmes en particulier, de 55 à 64 ans. comme mme lavigne l'expliquait tantôt, elles ne touchent pas encore la pension de vieillesse. le rapport de 1991 démontre que chez toutes les personnes âgées, il y a seulement 40 % des femmes âgées qui touchent une rente de la régie des rentes, alors que chez les hommes, c'est 90 %. il y a encore un déséquilibre frappant, spectaculaire, et ce n'est pas le temps de... même si, comme le président de la régie des rentes l'expliquait tantôt, l'impact majeur se fera ressentir seulement dans 10 ans. pour chaque individu, même s'il ne s'agit que de quelques milliers ou de quelques dizaines de milliers de femmes entre 55 et 64 ans, c'est tout à fait inacceptable, et chaque dollar qui serait enlevé par cette désindexation de la prestation uniforme, c'est un dollar de trop d'enlevé.

Deuxième remarque — question plutôt — au Conseil du statut de la femme. Votre toute première recommandation, à savoir d'équilibrer... L'état actuel des choses avantage la conjointe de fait, et le projet de loi semble vouloir inverser complètement et avantager la conjointe légale, séparée de fait. Moi, je suis tout à fait d'accord, l'Opposition est tout à fait d'accord avec votre recommandation. D'ailleurs, ça irait, dites-vous, dans le sens du Régime de pensions du Canada. Et ça, j'aimerais, tantôt, que le ministre nous le confirme ou le nie. Si ça va dans le sens de la pratique du Régime de pensions du Canada, je ne vois pas pourquoi le ministre viendrait changer ça. Mais la question que je pose, M. le Président, à Mme la présidente ou à une de ses collègues, c'est: De combien de personnes s'agit-il, quand on parle de conjoints légaux qui sont séparés de fait et qui seraient dorénavant «priorisés», si on veut, dans cette nouvelle entente? Est-ce qu'on a une idée du nombre de ces personnes-là?

Le Président (M. Joly): Mme Motard, s'il vous plaît. Mme Lavigne?

Mme Lavigne: Oui. C'est ça, il y a des données annuelles. Ce qu'on sait, c'est qu'au Québec, en 1991, il y a 19 % des gens qui vivent en union de fait. Par ailleurs, le taux de divortialité demeure toujours aussi élevé. Ça, c'est pour l'ensemble de la population. Mais, de façon précise, savoir le nombre de personnes qui se retrouvent dans la situation mentionnée — peut-être que la Régie a des données là-dessus, là — où, lorsqu'un décès survient alors qu'un époux qui est séparé de fait et qui a, au même moment, une conjointe de fait... Bon, il s'agit de périodes, de situations qui ne sont pas régularisées. Cette question-là nous avait été notamment particulièrement soulignée au chapitre de l'incidence qu'elle a dans plusieurs communautés culturelles. Dans plusieurs communautés culturelles, le divorce ou même la sépara-

tion judiciaire est plus ou moins acceptée, et, à cet égard-là, donc, il y a des gens qui ne régularisent jamais leur situation et qui peuvent vivre 20 ans, 30 ans avec un conjoint de fait. Alors, dans le fond, c'est une mesure de souplesse qui permet de reconnaître, finalement, des années de vie commune, et qui permet de s'adapter à des situations et de ne pas vivre une inversion de la situation, parce que l'effet du projet de loi, c'est essentiellement d'inverser.

M. Lazure: M. le Président, je demanderais au ministre de nous faire part de sa réaction à la recommandation no 1 du Conseil du statut de la femme, justement, qui demande de ne pas passer d'un extrême à un autre, à toutes fins pratiques, et qui propose une solution qui est mitoyenne et qui semble se rapprocher de la pratique qui existe au Régime de pensions du Canada.

M. Bourbeau: C'est sûr qu'on peut s'arrimer, comme dit le député de La Prairie, avec bien des choses, mais il y a aussi le Code civil du Québec, là, qui entre en vigueur le 1er janvier prochain. Nous, on a plutôt voulu s'arrimer avec le Code civil. Il y a aussi la loi sur le partage...

Une voix: Du patrimoine.

M. Bourbeau: ...du patrimoine, avec laquelle on a voulu s'arrimer aussi. Alors, on peut s'arrimer avec bien des choses. Nous, on a préféré s'arrimer avec ces instruments-là.

Le député de La Prairie, tout à l'heure, M. le Président, nous disait qu'il avait profité du mémoire du Conseil du statut de la femme pour s'initier au projet de loi, et il mentionnait qu'en page 5 du mémoire on signalait que, dans bien des catégories, il y avait diminution plutôt qu'augmentation. Il faudrait bien réaliser que ces diminutions-là, pour la plupart, se trouvent... Dans le tableau, au no 2, conjoints de 35 à 44 ans, où on dit qu'on passerait, dans 2.1, de 306$ à 150$, et, dans 2.2, de 306 $ à 250 $, etc., ça, là, c'est la prestation maximale que recevrait quelqu'un. Il faut bien penser que c'est très rare, en fait, parce que les gens commencent à 1/120 de ça; c'est-à-dire que, à l'âge de 35 ans, ils avaient 0 $, et là, tout à coup, un mois plus tard, ils ont 1/120, et à chaque mois, ça augmente de 1/120. Comme il y a 10 ans, 12 mois par année, ça fait 120 mois; à chaque mois qui passe, c'est 1/120 de plus. Donc, la moyenne, là, est loin d'être 306 $, et, en fait, très souvent, elle est beaucoup en bas de 150 $, même. Donc, il ne faudrait pas dire, là, que présentement, c'est 306 $ et on tombe à 150 $ ou à 250 $. C'est, en fait, beaucoup moins que ça.

M. Lazure: M. le Président, raison de plus. Si, globalement, les sommes sont peu importantes, pourquoi les diminuer? Parce que là, la vie réelle de tous les jours, ce n'est pas du global, c'est de l'individuel, et, pour chaque individu, il va y avoir une certaine diminution. Ma collègue de...

M. Bourbeau: Non, ce n'est pas exact! Bien non!

Le Président (M. Joly): Je vais reconnaître Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière...

M. Bourbeau: II y a une hausse de 13 000 000 $.

Le Président (M. Joly): ...mais j'aimerais peut-être que M. le ministre...

M. Lazure: Bien, là, on va prendre notre temps? Oui?

Le Président (M. Joly): Oui, s'il vous plaît. Par après, M. le ministre, je vous reconnaîtrai du temps...

M. Bourbeau: Très bien.

Le Président (M. Joly): ...pour donner des explications supplémentaires. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, s'il vous plaît.

Mme Carrier-Perreault: Oui, je vous remercie, M. le Président. Tout à l'heure, les représentantes du Conseil du statut, quand elles ont commencé leur allocution, ont commencé, M. le ministre, en soulignant les bons points, les bons côtés, les aspects positifs de ce projet de loi, mais je pense que si on est ici, ce n'est pas pour entendre les bons points. Si le ministre...

M. Bourbeau: Pourquoi pas? Mais pourquoi pas?

Mme Carrier-Perreault: ...a l'intention de corriger et d'apporter des corrections, j'imagine que c'est sur les points qui achoppent et qui mériteraient une attention particulière. (11 h 10)

Vous avez dit aussi que c'était un sujet qui était aride. C'est vrai, moi aussi, je le reconnais, ce n'est pas un sujet qui m'enflamme particulièrement, là, mais il reste que c'est un sujet qui a beaucoup de conséquences sur les gens. C'est un projet de loi qui va avoir des conséquences importantes, et sur les femmes, aussi. J'aimerais comprendre quelque chose. Le ministre y a fait allusion, il y a quelques instants. Évidemment, ici, on parle des gens séparés légalement par rapport à la notion de conjoints de fait séparés légalement. Quand on parle de gens qui sont divorcés, à ce moment-là, c'est la loi du patrimoine qui s'applique. Par rapport à tout cet aspect-là, le partage des crédits accumulés, tous ces aspects-là, moi, j'aimerais savoir comment ça se répartit dans le cas du patrimoine familial. Parce que le ministre vient de nous dire qu'il veut s'arrimer au Code civil et à la loi du patrimoine, la loi 146. Alors, dans ce cas-là, quand c'est quelqu'un qui est divorcé légalement, où la loi du patrimoine s'applique, quand on parle du partage des gains, des gains accumulés, comment ça se fait? Peut-être que, M. le Président, M. Legault pourrait me répondre, parce que je ne suis pas sûr que, au niveau de 146, le ministre pourrait me donner les détails pointus

que j'aimerais avoir. Est-ce que c'est possible d'avoir une réponse là-dessus?

Le Président (M. Joly): Moi, je n'ai pas d'objection. M. Legault? M. le ministre? M. Legault, s'il vous plaît.

M. Legault: M. le Président, j'ai entendu Mme la députée employer les termes «gens qui sont séparés légalement», mais, tout à l'heure, lorsque le Conseil du statut de la femme a fait sa présentation, on parlait des gens qui étaient séparés. Lorsque les gens sont séparés légalement ou divorcés, la loi sur le partage du patrimoine s'applique. Alors, donc, vous avez raison de dire que c'est la même chose. On peut les identifier dans le même groupe. Alors, donc, ce qui est prévu dans les modifications actuellement à l'étude, c'est de dire: Dans un couple, peut-être qu'il y a une union libre qui a pris place, mais si, à côté, il n'y a pas de séparation légale et il n'y a pas de divorce, c'est comme s'il y avait un mariage qui se continue. Ce que l'on dit, ici, c'est que la simple séparation continue à favoriser le conjoint marié.

Mme Carrier-Perreault: Oui, mais ce que je veux... Excusez, je pense que...

Le Président (M. Joly): Allez, Mme la députée. Allez au fond de votre pensée.

Mme Carrier-Perreault: Ma question était: Comment se fait ce partage de la rente quand les gens sont divorcés, lorsqu'on va selon la loi 146?

M. Legault: Ce n'est pas le partage de la rente qui se fait, c'est le partage des gains. On prend les gains que vous avez d'inscrits. Lorsqu'il y a divorce ou séparation légale, il n'y a pas toujours de rentes qui peuvent être mises en paiement. Alors, on prend le compte du monsieur, on prend le compte de la dame en question, on additionne les deux comptes ensemble et on reverse moitié-moitié dans chacun. Qu'est-ce qu'on reverse? Des gains. Des gains qui vont ouvrir droit à une rente éventuelle: c'est ça qui est partagé. Alors, peut-être que la dame n'avait jamais travaillé à l'extérieur, n'avait jamais eu de gains de travail et le monsieur, oui. Donc, vous prenez ça et vous le séparez en deux. La voilà avec un compte inscrit à la Régie des rentes en son nom propre et qui lui ouvrira un droit à retraite lorsqu'elle atteindra l'âge, lorsqu'elle deviendra invalide, etc.

Mme Carrier-Perreault: Quand le Conseil du statut nous propose ce partage des gains, partage des crédits accumulés, est-ce que c'est ce genre de partage que vous aimeriez qui soit appliqué? Le ministre vient de nous dire qu'il veut s'arrimer au Code civil et à la loi sur le patrimoine familial. Alors, j'aimerais, pour être sûre qu'on se comprenne, savoir si c'est dans ce même sens là que vous voudriez aller avec la Régie des rentes pour les gens séparés.

Mme Lavigne: D'accord. Oui, oui.

Le Président (M. Joly): Mme Lavigne, s'il vous plaît.

Mme Lavigne: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Joly): II vous reste trois minutes. Je tiens juste à vous le dire.

Mme Lavigne: Ce qui se fait, à l'heure actuelle, bon, c'est déjà dans la loi, le partage se fait sans problème. D'accord? Ça, là-dessus, ça va et ça découle de la loi sur le partage du patrimoine familial. Donc, ça, ça va. La modification de définition que l'on demande, c'est pour faire face à un certain nombre de cas d'exception et aussi à une philosophie où on dit que, dans notre société, il y a 20 % des couples qui vivent en union libre, des conjoints qui sont des conjoints de fait, et d'autres qui ont choisi le mariage légal, et où on dit: Nous, dans notre Code civil, on a un mariage légal et ce mariage légal là doit rester, doit avoir une prévalence, parce que c'est une forme d'engagement qui est différente.

Donc, c'est ce pourquoi, dans les faits, on trouve normal qu'il y ait une préséance de la personne qui est mariée, sauf que là, dans les faits, de la façon dont c'est formulé, on se retrouve dans des situations où des gens se sont séparés, mais uniquement de fait; donc, ils ne sont pas allés en cour, ils n'ont pas de jugement, aucun type de jugement — ça peut faire 20 ans qu'ils ne vivent plus ensemble — et on se retrouve face à une nouvelle union de conjoints de fait où il peut y avoir des enfants issus de cette union-là. Des gens peuvent avoir vécu ensemble durant 20 ans, mais on a négligé, par ailleurs, ou on n'a pas voulu faire une séparation légale, et on se retrouve avec des gens qui ont eu une très longue vie commune et qui ne peuvent pas partager des gains.

Alors, la proposition que l'on fait, c'est que l'on reconnaisse ce partenaire-là en union libre, ce concubin qui est là depuis 20 ans, qu'on le reconnaisse comme conjoint survivant en donnant la possibilité à l'époux séparé de fait du cotisant — parce que, même si le mariage n'a pas été défait, il reste toujours là — de se prévaloir du partage de crédits, parce qu'il a toujours son contrat de mariage. Alors, on lui dit: Est-ce que tu peux te prévaloir de ton partage de crédits? Donc, on le fait, mais il est évident qu'on ne peut pas aller plus loin que ça. C'était pour ne pas se retrouver dans une inversion mécanique, ce qui nous semblait un peu une inversion mécanique pour répondre à un problème. Je dois vous dire que c'est un élément extrêmement pointu et qui ne touche pas fondamentalement beaucoup de monde.

Le Président (M. Joly): En conclusion, s'il vous plaît, madame.

Mme Lavigne: Disons que ce qu'on aurait peut-être préféré amener aux membres de la commission,

c'est une réflexion que nous nous faisions sur des possibilités d'ajustement et de modification, notamment concernant les enfants à charge, quand il s'agissait de conjoints, et une recommandation que nous ne retrouvons pas dans notre mémoire... Je ne sais pas, M. le Président, si vous acceptiez que, durant une minute, on puisse vous expliquer une piste qui serait peut-être intéressante à cet égard...

Le Président (M. Joly): Je peux même accepter un dépôt de document, si vous voulez.

Mme Lavigne: Non. On n'avait pas de document là-dessus, mais c'est un type de réflexion qui aurait permis, finalement, de penser que, lorsqu'on avait une rente avec un enfant à charge, il était peut-être possible de penser à des solutions qui soient fluctuantes et que le montant de la rente ne reste pas jusqu'à 65 ans, et peut-être de penser à des rééquilibres budgétaires, à cet égard, qui permettraient, par ailleurs, de combler le manque à gagner dont parlait le président de la Régie des rentes tout à l'heure, qui ferait que la conjointe avec enfant reviendrait, finalement, davantage avec sa prestation uniforme mensuelle. Alors, c'était plus à cet égard-là, mais c'est un côté... On vous écrira une note là-dessus.

Le Président (M. Joly): Oui, ça serait sûrement apprécié. Je vais reconnaître une dernière question à M. le député de La Prairie, s'il vous plaît.

M. Lazure: Merci, M. le Président, pour votre générosité. Je voudrais, en conclusion, attirer l'attention du ministre sur une autre recommandation du Conseil du statut de la femme, la recommandation no 5, à savoir que l'enfant âgé de 18 à 25 ans fréquentant un établissement d'enseignement au moment du décès du cotisant soit considéré comme un enfant à charge aux fins de l'établissement du montant de la prestation uniforme. Moi, je ne comprends pas pourquoi on laisse tomber... Je comprends, encore une fois, que ce ne sont pas de gros montants, globalement, mais ce sont des sommes d'argent qui sont précieuses pour les jeunes qui sont aux études, les 18 à 25 ans. Je comprends que le ministre va peut-être me répondre qu'il existe des programmes de prêts et bourses, mais ça, c'est autre chose; c'est autre chose. On est dans le cadre des rentes aux conjoints survivants et aux orphelins, et nous ne comprenons pas, du côté de l'Opposition, comme le Conseil du statut de la femme d'ailleurs, pourquoi le ministre abolit cette pratique qui existe depuis plusieurs années. Est-ce que le ministre a une explication à cette abolition?

(Consultation)

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît. (11 h 20)

M. Bourbeau: Cette rente-là était payable à l'enfant, alors que le but premier, c'est de faire une rente à la mère. Deuxièmement, effectivement, on a un système de prêts et bourses, et tout le monde y a droit, enfin, ceux qui y ont droit y ont droit, et on ne voyait pas l'utilité de maintenir une situation comme celle-là, étant donné que les prêts et bourses, ça existe pour les besoins des prêts et bourses. Ici, on tente plutôt d'établir des rentes de conjoint survivant. Il semblait y avoir un genre de mélange, là, des objectifs recherchés.

Finalement, on peut ajouter, évidemment, tout ce qu'on veut à ça, mais il ne faut pas oublier que, quand on ajoute quelque chose, c'est payé par les cotisants. Alors, on pourrait en ajouter pour 25 000 000 $, 50 000 000 $, 200 000 000 $ et ça va faire en sorte que les cotisations vont augmenter. Là, on a des propositions qui amènent des augmentations de coût de 13 000 000 $, mais on pense que ce qu'on propose là est raisonnable. De toute façon, il y a des modifications additionnelles que j'ai l'intention de proposer demain, en commission parlementaire, qui devraient faire en sorte de pallier à certains problèmes qui ont été évoqués. Je ne peux pas en parler plus longuement maintenant parce que le Conseil des ministres va être saisi de ces propositions-là cet après-midi. M. le Président, on verra demain.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre.

M. Bourbeau: Mais entre-temps j'aimerais remercier Mme Lavigne et les gens qui l'accompagnent pour leur prestation, qui a donné lieu à un débat, à une discussion très intéressante.

Le Président (M. Joly): M. le député.

M. Lazure: Oui. Bon, je suis content de voir que le ministre va nous arriver avec des propositions qui vont bonifier son projet de loi. C'est dommage qu'il ne puisse pas les déposer aujourd'hui pour qu'on puisse les regarder à tête reposée.

Moi aussi, je veux remercier, au nom de l'Opposition, le Conseil du statut de la femme pour sa collaboration et son apport très précieux. Merci.

Le Président (M. Joly): Alors, moi de même. Au nom des membres de cette commission, je tiens à vous remercier, mesdames. Merci beaucoup. Alors, je vais maintenant demander à la Confédération des syndicats nationaux, s'il vous plaît, de bien vouloir s'approcher. S'il vous plaît. Je vous remercie beaucoup. Alors, de façon à ce que les membres de la Confédération des syndicats nationaux puissent prendre place, j'apprécierais la coopération de tout le monde.

Bonjour, madame, bonjour, messieurs. Alors, j'apprécierais si la personne responsable pouvait s'identifier, s'il vous plaît.

Confédération des syndicats nationaux (CSN) Mme Carbonneau (Claudette): Oui. Mon nom

est Claudette Carbonneau. Je suis première vice-présidente de la Confédération des syndicats nationaux, et j'en profiterais pour vous présenter les personnes qui m'accompagnent. Alors, il s'agit, à ma droite, de M. Ghislain Halle, qui est conseiller syndical, coordonna-teur des fédérations du secteur privé à la CSN, et de M. Pierre Bergeron, qui est actuaire-conseil dans ce dossier-là auprès de la CSN.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, vous avez une vingtaine de minutes, madame, pour nous présenter votre mémoire, et, par après, les parlementaires échangeront avec vous. Alors, madame, je vous donne la parole.

Mme Carbonneau: Alors, M. le Président, M. le ministre, M. le critique de l'Opposition, Mmes, MM. les députés, je vous remercie, d'entrée de jeu, de nous recevoir et de nous entendre ici, ce matin. Peut-être très brièvement rappeler la composition de la CSN. C'est, bien sûr, une organisation syndicale québécoise qui regroupe plus de 2000 syndicats répartis sur l'ensemble du territoire et dans tous les secteurs d'activité, lesquels syndicats comptent environ 240 000 membres, travailleuses et travailleurs parmi lesquels on retrouve, d'ailleurs, un petit peu plus de 50 % de femmes.

Avant d'aborder différentes sections de commentaires concernant un certain nombre d'amendements qui sont sous étude, j'aimerais pouvoir formuler un certain nombre de constats et de remarques quant au processus de révision de la présente loi et au contenu du projet de loi qui est sous étude.

Ma première remarque concerne la situation suivante. Je pense que la loi qui régit la Régie des rentes est quand même une loi qui remonte à la Révolution tranquille, loi à laquelle a été apporté, au fil des ans, relativement peu de changements. Or, je vous dirai que, au niveau de la CSN, on a toujours considéré que le régime public de retraite constitue la pierre d'assise du système de sécurité de revenu à la retraite et est, au fond, le meilleur et le seul mécanisme qui puisse avoir la prétention de protéger la majorité de la population à l'âge de la retraite.

Or, on constate, au fond, que l'ajustement ou l'actualisation de cette pièce importante de notre système de sécurité du revenu a été un peu négligée à travers le temps, au détriment, je dirais, d'autres régimes de retraite à caractère plus limité ou à caractère plus privé. Je pense que les régimes publics auraient intérêt à être revus en profondeur et largement bonifiés pour permettre à toutes les travailleuses et à tous les travailleurs de pouvoir bénéficier d'un revenu acceptable au moment de la retraite. Et, très souvent, comme organisation syndicale, nous avons identifié que ce revenu-là devrait, en quelque sorte, se rapprocher du salaire industriel moyen. Alors, on mesure, au fond, l'écart entre la réalité et nos attentes à cet égard-là. Il m'apparaît tout à fait urgent de demander qu'on procède à une modification en profondeur, non pas seulement pour garantir le financement à long terme du régime de retraite, mais aussi pour en bonifier largement les prestations. Je pense que c'est la seule façon comme société québécoise de viser à avoir des politiques complètes de retraite, et il m'apparaît à cet égard-là, à l'égard de cette attente-là qui est la nôtre, que l'exercice auquel vous vous livrez ces jours-ci s'avère un exercice en quelque sorte timide et bien en deçà de nos attentes.

Mon deuxième constat de portée générale est le suivant. Je suis quand même consciente que les amendements qui sont actuellement sous étude, bien qu'ils soient de moindre envergure de ce qu'il serait souhaité par nous, soulèvent quand même des questions importantes au chapitre des droits fondamentaux, de la protection, aussi, des groupes les plus vulnérables de notre société. À cet égard-là, il me serait apparu souhaitable qu'on procède à une véritable consultation publique et qu'à tout le moins, au moment où est sorti le projet de loi, l'ensemble de la population soit davantage en mesure de mesurer les objectifs qui amenaient le gouvernement à proposer un certain nombre d'amendements et qu'on puisse les retrouver énoncés clairement, largement diffusés. De même, j'aurais souhaité que l'impact financier des amendements qui sont sous étude soit connu de l'ensemble de la population et des groupes sociaux qui sont appelés à faire des représentations, de façon à favoriser des choix plus éclairés.

Mon dernier constat, en introduction, c'est que, comme d'autres, je déplore le court laps de temps qui nous a permis de préparer cette présentation-là et je considère que c'est assez problématique, même pour une organisation de la taille de la nôtre, de devoir présenter un point de vue articulé et contribuer à la vie démocratique de la société québécoise quand on se sent serré dans des délais aussi courts.

Alors, c'est en bonne partie pourquoi, au fond, dans notre mémoire, on ne retrouve pas des commentaires sur l'ensemble des dispositions d'amendement qui sont sous étude. On a dû faire des choix et on a choisi, quant à nous, un certain nombre de dispositions qui nous apparaissent avoir plus d'impact sur les besoins des cotisants et de leurs conjoints.

Alors, les premières mesures sur lesquelles on aurait des commentaires à partager avec la commission concernent la définition du conjoint survivant. Il nous apparaît, à nous autres aussi, à l'instar du Conseil du statut de la femme, que l'amendement qui est sous étude constitue une volte-face assez radicale par rapport à la situation qui prévaut avec la loi actuelle. On passe, au fond, du conjoint marié et non légalement séparé comme étant maintenant, avec les amendements reconnus, le conjoint survivant et se substituant, si on veut, au conjoint de fait. Il nous apparaît que ce genre de volte-face ne règle rien quant au fond du problème. Je pense qu'on n'a pas intérêt à ne pas rendre justice à l'ex-conjoint marié et, en quelque sorte, à affaiblir les acquis des femmes au plan du partage des biens et de la législation du mariage. Il y a donc là un intérêt certain à accorder des protections à l'ex-conjoint légalement marié mais qui ne serait pas légalement séparé. (11 h 30)

Par ailleurs, je ne crois pas non plus qu'il y ait beaucoup d'intérêt à affaiblir les maigres acquis des conjoints de fait qui se retrouvent, en bonne partie, en regard du régime des rentes, des conjointes de fait, puisque ça concerne plus directement un grand nombre de femmes. Il nous semble que ce qui est en cause dans cette question-là, ça finit rapidement par être les droits concurrents de deux catégories de femmes, et il m'appa-raît important d'établir clairement les droits des unes et les droits des autres. De notre point de vue, on privilégierait que le conjoint de fait, comme c'est prévu dans la loi actuelle, demeure la personne qui apparaît comme conjoint survivant. Ça nous apparaît plus conforme à la réalité et aux choix récents exprimés à l'intérieur du couple. Par ailleurs, l'ex-conjoint marié ou de fait devrait aussi, pense-t-on, bénéficier du partage des crédits de rente durant la vie commune.

Au chapitre de la rente de conjoint survivant, on est bien conscient que les amendements qui sont sous étude font en sorte que, quel que soit l'âge, on lève un peu la discrimination qui fait en sorte que les conjoints de moins de 35 ans qui n'avaient pas de charge familiale et qui n'étaient pas invalides ne pouvaient pas bénéficier de prestation de rente de survivant. On pense que de lever cette mesure, qui constituait définitivement un obstacle discriminatoire en fonction de l'âge de la personne bénéficiaire, est en soi une bonne chose. Mais là où on se questionne beaucoup, c'est quand on constate les réaménagements que ça amène sur d'autres catégories de conjoints survivants. Ce qu'on constate, c'est que la loi modifie les prestations uniformes et élimine les critères d'admissibilité en fonction de l'âge, mais que ça crée, à toutes fins utiles, une grande catégorie de gagnants qu'on pourrait retrouver chez les personnes qui ont entre 35 et 42 ans, sans personne à charge, et qui ne sont pas invalides. Par ailleurs, il y a comme 3 grandes catégories de personnes perdantes: il s'agit des personnes de 44 ans et moins avec enfant; des personnes de 43 et 44 ans sans enfant; et des personnes de 55 à 64 ans pour lesquelles on voit, du moins d'une façon temporaire, suspendue une partie de leur indexation. ces révisions de barèmes pour d'autres catégories, qui nous apparaissent un peu, à l'intérieur du projet de loi, confondues avec une mesure pour éliminer de la discrimination en fonction des personnes plus jeunes, ça nous apparaît des mesures un petit peu surprenantes. ce qu'on constate, c'est que 90 % des nouveaux bénéficiaires de rente au conjoint survivant sont des femmes. or, les analyses de la régie des rentes du québec démontrent que cette catégorie-là est particulièrement sensible aux pertes de revenus, surtout lorsqu'il s'agit d'une femme qui a des enfants. d'ailleurs, ce sont les femmes âgées entre 35 et 44 ans qui subissent la perte la plus élevée, alors qu'environ 80 % de celles-ci ont des enfants à charge, au début du versement de leur rente. pour une part, aussi, la non-indexation temporaire de la prestation uniforme de 392,52 $ pour un conjoint de 55 à 64 ans aura comme conséquence de ramener son niveau réel éventuel à celui de la prestation accordée à un conjoint survivant de 44 à 54 ans, soit 306,81 $. or, il nous apparaît que ce montant-là est une somme tout à fait en deçà des besoins de cette clientèle particulièrement vulnérable de notre société, et, de ce côté-là, on voudrait attirer l'attention de la commission sur le fait qu'on retrouve, à l'intérieur de cette catégorie d'âge là, un bon nombre de femmes qui, historiquement, ont été tenues en marge du marché du travail et qui, à cet âge-là, ne retrouveront pas nécessairement le moyen d'y retourner facilement, donc de trouver un complément de revenu qui soit satisfaisant.

Bref, sur l'ensemble de cette section-là, on finit par se dire que, bien sûr, on est en faveur de l'élimination des éléments de discrimination en fonction de l'âge, mais il nous semble que ça ne doit pas se faire au détriment de catégories plus vulnérables de la société, d'autant plus que la Régie des rentes du Québec est un régime public de pension et que, de notre point de vue, ça doit obéir à une autre logique que celle qui prévaut dans les régimes privés ou dans les régimes d'assurance et que ça doit davantage prendre en compte des considérations sociales et des considérations de nivellement ou de réponse pour corriger un certain nombre d'inégalités.

On comprend, bien sûr, la nécessité de revoir des critères qui pénalisent un conjoint survivant sur la base de son âge, au moment du décès du cotisant. On est ouvert à cette mesure, on encourage cet exercice-là. Cependant, une révision des critères doit se fonder sur une analyse approfondie des coûts qu'elle engendre et des répercussions qu'elle aura quant au niveau des bénéfices des personnes potentiellement visées. Il faut s'assurer que les personnes les plus vulnérables financièrement dans notre société ne se trouvent pas lésées et plus démunies suite à une telle révision.

Au chapitre de l'invalidité, on est conscient que les amendements qui sont sous étude visent à assouplir les conditions d'attribution de la rente d'invalidité, et on prend bonne note aussi des statistiques à l'effet que ça permettrait à environ 700 personnes de plus par année, soit environ 7 % de plus des gens de cette catégorie, d'avoir accès à cette mesure-là. Toutefois, les nouveaux critères peuvent, pour certaines catégories de personnes ayant 60 ans et plus, s'avérer plus exigeants que ceux qui existaient dans la loi antérieure. Et là, j'aimerais que Pierre Bergeron puisse, à travers un exemple, nous illustrer cette situation-là.

Le Président (M. Joly): M. Bergeron, s'il vous plaît.

M. Bergeron (Pierre): les nouveaux critères, en fait, c'est 2 ans parmi les 3 dernières années de cotisation, ou 5 ans parmi les 10 dernières, ou 50 % de la période cotisable avec un minimum de 2 ans. on pourrait retrouver des gens de 60 ans et plus qui auraient cotisé, par exemple, au cours de 4 des 10 dernières années; mais, 4 des 10 dernières années, ça ne recontre pas le critère de 5 parmi 10, et les 4 années ne sont pas nécessairement 2 des 3 dernières; donc ces 2 critères-là ne sont pas satisfaits. alors, il reste le troisième critère. le troisième critère, c'est 50 % de la période cotisable

avec le minimum de 2 ans. si cette personne-là a une période, par exemple, de 35 ans, à ce moment-là, ça lui prend 50 % de 35 — 17,5 ans — alors que, pour les gens de 60 ans et plus, présentement, il y avait une règle de 5 ans et le tiers de la période cotisable, ou 10 ans. donc, ce n'est pas dans tous les cas, mais dans certains cas, dépendamment des situations particulières, ça pourrait s'avérer plus exigeant.

Mme Carbonneau: Alors, je reprends en soulignant que, bien sûr, on est d'accord avec l'objectif visé, mais on estime tout à fait essentiel d'analyser avec soin les effets des nouvelles conditions sur les personnes visées.

Au chapitre du contrôle de l'invalidité, on évalue que les exigences actuelles sont suffisamment contraignantes relativement à la déclaration et à la preuve qu'il y a lieu de fournir qu'une personne est invalide, et ça nous amène à penser qu'il n'y a pas lieu de contraindre une personne qui doit, à la demande de la Régie, se soumettre à un examen médical, à rencontrer un médecin nécessairement désigné par la Régie elle-même. Je vous dirai que, à l'intérieur de la CSN, le principe du médecin de son choix, c'est un des principes qui nous est très cher.

Au chapitre de la rente de l'orphelin et de l'enfant invalide, on est conscient qu'il y a une majoration des montants. On passerait de 29 $ à 50 $ et on prévoirait une indexation annuelle. Quant à nous, cette mesure vise à corriger partiellement une situation dans laquelle on se trouvait depuis 1974 et qui aurait, à terme, conduit à dévaluer complètement la rente aux enfants, du fait de sa non-indexation et du montant qui, au fil des ans, devenait de plus en plus insignifiant. (11 h 40)

Par ailleurs, on s'est payé un peu l'exercice de faire le calcul suivant. Si la rente à l'enfant avait été indexée depuis 1974, il faut quand même être conscient qu'elle atteindrait aujourd'hui un montant de 100 $ et non de 50 $, tel le montant qui est proposé à l'intérieur des amendements. Bref, à cet égard-là, le montant de 50 $ nous paraît un pas dans la bonne direction, qu'il y aurait peut-être lieu de bonifier davantage, mais on souhaiterait, avant de mettre de l'avant ce genre de recommandation, que ce type d'évaluation puisse être fait dans le cadre d'une révision beaucoup plus globale et beaucoup plus en profondeur de l'ensemble des prestations prévues au Régime de rentes du Québec.

Là, ce que l'on considère une perte tout à fait questionnable, c'est le fait que maintenant on couperait, à toutes fins utiles, la rente aux jeunes entre 18 ans et 25 ans qui seraient encore aux études. On considère que cette mesure-là est tout à fait non justifiée, qu'elle est très éloignée de la nécessaire valorisation du maintien des jeunes aux études, des exigences futures du marché du travail. Bref, on s'oppose à cet amendement-là et on demanderait qu'il soit revu pour maintenir, au fond, cette situation qui faisait en sorte que les jeunes entre 18 ans et 25 ans qui étaient toujours aux études pouvaient continuer à bénéficier de la rente d'enfant orphe- lin.

Le partage des rentes de la retraite. On salue, effectivement, cet amendement qui fait en sorte qu'on puisse dorénavant partager la rente de retraite entre les conjoints mariés et non judiciairement séparés en fonction d'un certain nombre de critères. Et on suggérerait même que cette mesure puisse être élargie aux conjoints de fait, s'ils en font la demande.

Bref, en conclusion, ce qu'on constate, c'est que le Régime de rentes du Québec est financé à parts égales par les cotisations salariales et par les cotisations des employeurs et qu'il a pour principal objectif d'assurer un remplacement du revenu de base lors d'événements tels que la retraite, le décès ou l'invalidité. Bien que les analyses actuarielles démontrent la proportion croissante de la rente de retraite par rapport aux prestations totales, il n'en demeure pas moins que les rentes versées suite au décès ou à l'invalidité d'un cotisant constituent une source importante de revenus pour la personne qui se retrouve dans cette situation.

Alors, on est donc d'avis qu'il n'y a non seulement pas lieu de diminuer les prestations actuellement prévues au Régime, ni encore d'en rendre l'accessibilité plus difficile dans le futur. Au contraire, et je vous ramène à mes remarques d'ordre général du départ, je pense que, comme société québécoise, on aurait tout à fait intérêt à se payer un exercice de révision en profondeur du Régime de rentes du Québec, et qui irait, bien sûr, dans le sens d'accorder une meilleure protection des travailleuses et des travailleurs, au moment de leur retraite, puisque je pense qu'il faut davantage, pour ce faire, miser sur les régimes publics que sur les régimes privés.

J'aurais, si vous le permettez — c'est peut-être un peu inusuel à l'intérieur d'une commission comme ça — une question à vous poser, M. le ministre. J'ai pris connaissance avec attention de vos déclarations au moment de l'adoption du principe du projet de loi et j'aimerais avoir des explications quand vous faites référence aux concordances à établir avec la loi de la CSST. Vous dites quelque part qu'il serait souhaitable qu'une personne qui touche des prestations de la CSST puisse être considérée comme ayant demandé son admissibilité à la rente de retraite dès l'âge de 65 ans. J'aimerais ça vous entendre quant aux changements concrets que votre projet de loi amène là-dessus, et j'aurai peut-être, avec votre permission, un commentaire à formuler suivant votre réponse.

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: Très bien, M. le Président. Je vais revenir sur ce point-là tout à l'heure. En premier lieu, j'aimerais féliciter la CSN pour cette présentation intéressante, qui a été fabriquée, si je comprends bien, en très peu de temps par votre équipe.

Mme Carbonneau: On en a tous les yeux cernés. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Bon. Et j'aimerais féliciter Mme Carbonneau pour la façon tout à fait claire avec laquelle elle s'est exprimée. On aurait dit qu'elle a pris les trois derniers mois à se préparer. Alors, on voit que vous êtes une professionnelle qui êtes capable de vous organiser rapidement. Je vous félicite également pour la couleur de votre habillement aujourd'hui. Je vois que vous êtes à la mode du jour. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Je ne sais pas si c'est pour vous mettre dans les bonnes grâces du ministre que vous avez mis une robe rouge. Je le dis pour le bénéfice du Journal des débats, M. le Président. Les lecteurs ne peuvent pas voir la couleur rouge de la robe de madame.

De façon plus sérieuse, je voudrais simplement vous dire qu'il n'avait pas été prévu originalement, au départ, de tenir des auditions. Le projet de loi a quand même été déposé au mois de juin dernier. Donc, on n'a pas l'impression de prendre les gens par surprise, sauf que cette audition-là n'avait pas été demandée par l'Opposition. C'est que le nouveau critique voulait s'aider à comprendre un peu mieux le projet de loi et s'est dit: En invitant des gens, je vais pouvoir peut-être comprendre un peu mieux. Ça lui permet de comprendre un peu mieux et le ministre aussi, je dois le dire, et les membres de l'Opposition aussi. Alors, tout ça est bien intéressant et très instructif.

J'aimerais simplement signaler que même si, à l'occasion, il peut apparaître que certains groupes peuvent recevoir moins que précédemment — encore que cela va être corrigé par des propositions que j'ai l'intention de faire — il reste quand même que l'exercice se solde par des coûts additionnels de 13 000 000 $ par année pour le Régime. Il ne faudrait donc pas penser que l'exercice qu'on tient appauvrit la clientèle. Il l'enrichit, dans le fond: 13 000 000 $, ce n'est quand même pas peu de chose, et il faudrait faire attention aux tableaux que l'on peut se fabriquer ici et là en réalisant que, dans le système actuel, la rente de 306 $ n'est pas acquise au conjoint survivant entre 35 et 45 ans. Elle n'est pas acquise en totalité. C'est la règle de 1/120 qui s'applique; donc, très souvent, c'est en deçà. Dans la très, très, très large majorité des cas, c'est bien en deçà des 306 $ dont on doit parler.

Maintenant, je vais vous poser une question concernant la rente d'invalidité, dont vous avez parlé tantôt, pour les personnes qui sont âgées de 60 à 65 ans. Cette mesure va permettre de reconnaître plus d'une centaine d'invalides à chaque année, à partir de maintenant. Êtes-vous d'accord que, en proposant cette mesure-là, finalement, le gouvernement reconnaît qu'il faut être moins exigeant pour les travailleurs les plus âgés et que, donc, on pourrait saluer cette mesure-là comme une amélioration intéressante pour les personnes âgées de 60 à 65 ans, et qui élargit leur droit à la rente d'invalidité?

Mme Carbonneau: Effectivement, je salue cette mesure-là comme étant une mesure positive, mis à part la remarque qu'on faisait tantôt sur les critères d'admissibilité. Je reconnais qu'il s'agit là d'un assouplissement, que c'était tout à fait souhaitable et qu'il s'agit, oui, d'un amendement intéressant.

M. Bourbeau: Maintenant, quant à la mesure qui permet aux travailleurs victimes d'un accident de travail de recevoir une rente de retraite plus élevée lorsqu'ils atteignent l'âge de 65 ans, donc qui accorde des avantages importants aux cotisants du Régime de rentes du Québec qui sont victimes d'accidents de travail, vous avez posé des questions tantôt. Je vais demander au président de la Régie, si vous n'avez pas d'objection, de donner un complément de réponse sur cette question-là, qui est quand même un peu technique.

M. Legault: Merci, M. le ministre. Alors, voici, M. le Président. C'est un secteur assez complexe, mais je sais que, par votre intérêt envers les travailleurs et travailleuses blessés au travail, vous avez sûrement une bonne compréhension déjà de ce qui se fait. Actuellement, lorsqu'une personne est invalide, en vertu des lois de la CSST, après 24 mois, on commence à lui reconnaître, d'année en année par la suite, les mêmes droits que si elle avait cotisé au Régime. Il n'y a donc une prise en considération de ce droit-là que pour le 25e mois et les suivants. (11 h 50)

Alors, actuellement, ce qui est prévu dans le projet de loi, c'est de ramener ça et de le prendre en considération, si l'invalidité dure plus de 24 mois, dès le premier mois, en vertu du Régime de rentes du Québec, comme s'il avait cotisé depuis ce premier mois d'invalidité à la CSST. Ceci aura pour effet d'augmenter ses droits à la retraite, donc d'obtenir une rente plus élevée éventuellement, à l'âge de 65 ans, ou de permettre à ses ayants droit ou à sa conjointe survivante d'obtenir une rente plus élevée. Alors, antérieurement, il y avait une pénalité, si vous voulez, durant les 24 mois, que l'on prenait pour considérer que l'invalidité était permanente. Il n'y avait rien qui était pris en considération par et pour le Régime de rentes, alors que, dorénavant, on le fera à compter du premier mois.

Le Président (M. Philibert): Madame.

Mme Carbonneau: Deux choses, M. le Président. D'une part, j'aimerais réagir au commentaire du ministre tantôt. Loin de nous de dire que, bon, il n'y avait pas des sommes plus importantes, vous nous parlez de 13 000 000 $ qui seraient, à travers les modifications qui sont sous étude, redistribués aux bénéficiaires. Mais, par ailleurs, dans notre questionnement de fond, on pense que la Régie des rentes du Québec doit être aussi une mesure qui a une oreille particulièrement attentive pour les groupes les plus vulnérables dans la société. Et au coeur même de notre mémoire, c'est ce type de questionnement là. Bravo si, oui, pour les personnes plus jeunes, on lève un certain nombre d'obstacles qui

s'avèrent discriminatoires en regard de la Charte. On n'a rien contre ça. On est tout à fait en faveur de ça. Mais, par ailleurs, il y a des catégories de bénéficiaires et, malheureusement, elles se retrouvent parmi des femmes avec des enfants à charge, celles qui vivent, au fond, au plan de la sécurité de leur revenu, les pires conséquences du décès d'un conjoint, ou encore chez les femmes âgées. Et on pourrait aussi se parler des hommes âgés, parce qu'on connaît, en cette période de restructuration économique à laquelle on est confronté — c'est la première fois, à l'intérieur de l'ère industrielle — un taux de chômage de plus en plus effarant chez les hommes âgés du secteur industriel. Alors, de ce côté-là, en termes d'équité sociale, on questionne un peu l'équilibre, là. Et loin de nous l'idée de dire: Bon, il n'y a pas une cent de plus qui circule là-dedans. Le débat n'est pas là, mais on voulait ramener ce genre de questionnement là, qui est de nature plus sociale.

Quant à la réponse qui m'a été fournie, peut-être n'ai-je pas formulé suffisamment clairement ma question. Je réfère, précisément, au Journal des débats et je vais tenter de vous lire un extrait de la déclaration du ministre. Il est dit: «Dans le souci d'une meilleure coordination des régimes de sécurité sociale, les bénéficiaires d'une indemnité de remplacement du revenu versée par la CSST seront dorénavant réputés eux aussi avoir fait une demande de rente de retraite à 65 ans.» Or, au fond, ce que je questionne, c'est: Quel type de changements concrets est-ce que ça amène?

Dans le sens suivant, ma compréhension, c'est qu'il y a eu des amendements qui sont intervenus au 1er janvier 1986 et qui font en sorte qu'il n'est plus possible de cumuler à la fois des prestations venant de la CSST et une rente venant de la Régie des rentes. Par ailleurs, il y avait eu une exception pour les personnes pour lesquelles cette rente-là était déjà en cours. C'est un bénéfice qui, à mon sens, va finir par s'éteindre dans le temps. Si on parle de gens qui ont 55 ans, normalement, sur une période de 10 ans, tout ça s'éteint. On est à la septième année. Alors, pourquoi amener ce genre de modification là, qui laisse toujours un petit peu un goût amer de règles rétroactives? Changer les règles du jeu quand le jeu est commencé, c'est toujours un peu malvenu.

De ce côté-là, je voulais me faire confirmer si j'avais la bonne compréhension, et, en même temps, si j'ai la bonne compréhension, vous avez mon commentaire. Je questionne cette mesure-là. Je considère que ce n'est pas récurrent, ça va s'éteindre dans le temps, et je comprends mal pourquoi on agit maintenant au terme d'une période de 10 ans.

Le Président (M. Philibert): M. le ministre? M. Legault.

M. Legault: M. le Président. Si ça peut vous tranquilliser, madame, dites-vous que la simple chose qu'il y a dans ça, et vous l'avez dit en le lisant, c'est que les gens n'auront pas à formuler de demande de retraite, mais la demande sera donc présumée à l'âge de 65 ans. Alors, c'est tout simplement ça. Ça ne se voulait pas plus malin que ça. C'est donc parce que l'individu qui a passé au travers de la CSST a toujours vu sa demande satisfaite et là, une journée, il ne recevrait rien. On dirait: Ah, mais il fallait que tu demandes ta rente à la Régie des rentes. Il ne peut pas suivre tous ces circuits-là, alors, donc, c'est automatiquement l'autre qui reprend sa charge. Ce n'est que ça.

Mme Carbonneau: Merci.

Le Président (M. Philibert): Merci, M. Legault. M. le ministre.

M. Bourbeau: Un dernier commentaire. Au sujet du médecin traitant, qui constate l'invalidité, qu'on doit consulter, si je comprends bien ce que vous nous avez dit, vous souhaiteriez que ce soit le médecin du travailleur qui soit chargé de constater ou non l'invalidité, qui émettrait un certificat à cet effet-là. Je voudrais vous signaler qu'il n'y a pas de changement dans la loi par rapport à ce qui se fait présentement. Dans le système actuel, c'est le médecin de la Régie dont on utilise les services pour constater l'invalidité, mais ce pouvoir-là existe en vertu d'un règlement. Dorénavant, on le met dans la loi. Donc, la situation va être la même, sauf que ça va être inscrit dans la loi plutôt que d'être inscrit dans un règlement. Bien sûr, à la CSST, ça peut être un peu différent. Nous ne voulons pas privilégier les certificats de complaisance... Le médecin traitant du patient, peut, parfois, être dans une situation difficile. Il s'agit de parler à des médecins qui vont vous dire, comme ils nous le disent, qu'ils sont parfois bien mal placés quand leurs propres patients leur demandent un certificat d'invalidité. Est-ce que l'invalidité est là? Est-ce qu'elle n'est pas là? Ils sont parfois, et souvent même, impliqués dans ce qui pourrait être perçu comme un conflit d'intérêts. On entend maintenir le système actuel, qui fait en sorte qu'on a recours à des spécialistes de la Régie.

Mme Carbonneau: Juste un commentaire là-dessus, M. le ministre. Il y a quand même très certainement, en termes de force, une différence entre ce qui est prévu au niveau du pouvoir réglementaire et le besoin qu'on ressent, comme Assemblée nationale ou comme gouvernement, de lui donner un statut à l'intérieur d'une loi. Et je réémets des craintes à l'effet que ça bureaucratise énormément le processus et que ça a pour effet d'instaurer des mesures restrictives et tatillonnes.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, madame. M. le député de La Prairie, s'il vous plaît.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux remercier Mme Carbonneau et ses collègues, M. Halle et M. Bergeron, d'avoir accepté de venir nous rencontrer ce matin pour nous faire part de leurs réflexions vis-à-vis ce projet de loi. Je vais commencer tout de suite par l'invalidité, puisque c'est une question bien

précise. Je pense que le ministre, tout en étant de bonne foi, est en train de nous induire en erreur, parce que ce qu'il propose, c'est plus contraignant que ce qui existe actuellement, nettement. Le règlement actuel, paragraphe 52, dit ceci: «Toute personne déclarée invalide doit, à la demande de la Régie, se soumettre aux examens médicaux qu'elle indique à la date ou dans le délai qu'elle fixe», tandis que ce qu'il nous propose, l'article 95.2, c'est ceci: «95.2 Toute personne déclarée invalide doit se soumettre à tout examen médical que peut requérir la Régie — jusque là, c'est la même chose — par le médecin que celle-ci désigne — c'est nouveau, ça — et à la date ou dans le délai qu'elle fixe.» C'est nouveau aussi. Alors, c'est beaucoup plus contraignant, M. le Président. Et à cet égard, moi, je voudrais qu'on passe quelques minutes là-dessus. (12 heures)

Je regardais l'évolution du nombre de nouveaux cas acceptés pour une rente d'invalidité depuis quelques années dans le rapport officiel, le Régime de rentes du Québec, statistiques 1991, et ce qui me frappe, M. le Président, et j'aimerais que le ministre en prenne bonne note, c'est que, actuellement, en 1991, il n'y a eu que 8000 nouveaux cas d'invalidité, alors qu'il y a 7 ou 8 ans c'était allé à 12 000. Ça a diminué depuis 7 ou 8 ans. Je pourrais vous en énumérer, là: en 1984, 12 000; en 1985, 10 000; ensuite, 9000, etc. M. le Président, vous êtes député comme moi, comme le député de Laporte aussi. On connaît la sévérité — et le président de la Régie des rentes m'a déjà entendu parler dans ce sens-là — des exigences de la Régie des rentes avant de déclarer invalide une personne. Et moi, ça m'inquiète. Non seulement ça ne s'est pas assoupli, mais si on en juge par le nombre de nouveaux cas par année... Encore une fois, je vous répète qu'il y a 7 ou 8 ans, c'était 12 000 nouveaux cas par année, puis aujourd'hui, c'est 8000. Alors, la première question, justement — vous avez tout à fait raison: C'est quoi, le pourcentage des refus, actuellement? C'est quoi, le pourcentage des refus? J'aimerais ça que le ministre ou le président de la Régie nous donne des chiffres là-dessus, le pourcentage des refus des demandes de rentes d'invalidité, maintenant, depuis quelques années, par rapport à il y a 10 ans. Parce que ce n'est pas normal qu'il y ait une telle diminution. C'est une grosse diminution, ça: 12 000 nouveaux cas il y a 8 ans, puis 8000 nouveaux cas l'an passé. Ça a constamment diminué. Si je me fie à ce qu'on entend dans les bureaux de députés, c'est parce que c'est de plus en plus difficile de les faire accepter. Ce n'est pas parce qu'il y a moins de demandes, à ma connaissance, mais c'est parce que c'est de plus en plus difficile de les faire accepter. Et moi, ce qui nous est présenté par le gouvernement comme un assouplissement dans ce projet de loi là, ça me paraît, au contraire — et là, je partage la crainte de la CSN — une plus grande rigidité.

Le Président (M. Joly): M. le président... M. Lazure: Deuxième...

Le Président (M. Joly): Oh, excusez. Est-ce que vous avez une sous-question ou une deuxième question?

M. Lazure: Oui. Bien, une réaction rapide. Je ne veux pas brûler tout mon temps.

Le Président (M. Joly): M. Legault, s'il vous plaît. Ça serait peut-être plus facile.

M. Legault: Je n'ai pas le document sous la main, mais je pense que M. le député doit sûrement se référer à l'année 1984, lorsqu'il parle de 12 000 cas.

M. Lazure: Oui, oui. C'est ce que j'ai dit: 1984, 12 000...

M. Legault: Mais c'est la...

M. Lazure: ...ensuite, 1985, 11 000, etc.

M. Legault: C'est ça. On voit que ça diminue d'année en année, et c'est plutôt une augmentation qui a été connue durant les années 1984 et suivantes, suite à un assouplissement dans la loi concernant la définition de l'invalidité à 60 ans.

M. Lazure: Oui, oui.

M. Legault: donc, il est arrivé beaucoup plus de demandes, c'est-à-dire des gens qui avaient 61, 62, 63 et 64 ans. et on a connu le même phénomène avec la retraite anticipée. les premières années, on pourrait dire qu'il y a eu énormément de monde qui l'a prise... non, il y a eu plus de demandes, et après, ça s'est stabilisé. et la moyenne reste toujours à peu près la même, c'est-à-dire 60 % d'acceptées, 40 % de refusées.

M. Lazure: Bon. Merci...

M. Legault: Quand on regarde le libellé de la loi, il faut bien comprendre que ce qui est demandé au participant, c'est d'apporter les documents et les rapports médicaux afin que l'on puisse reconnaître son invalidité. Si — et c'est surtout dans ces cas-là — plutôt que de refuser l'invalidité, on va requérir un examen médical supplémentaire auprès d'un spécialiste, lorsqu'il s'agit simplement de se prononcer sur un cas litigieux — «borderline», comme on dit — on va demander un examen médical par un spécialiste pour être capable de voir s'il y a moyen de reconnaître la personne. Alors, c'est la démarche qui est suivie. Actuellement, c'est dans le règlement que ça se produit, et là, ce sera dans la loi. Mais en autant que je suis concerné, on voit la même portée.

M. Lazure: Mais, M. le Président, je maintiens — puis j'ai le texte devant moi — que l'article 95.2, qui est dans le projet de loi, va contraindre plus fortement que maintenant. Parce que vous allez dire dorénavant «par le médecin que celle-ci désigne». La

Régie va désigner le médecin. La Régie ne fait pas ça, dans le moment. La Régie, d'après le règlement, demande des examens additionnels et spécifie quels examens additionnels elle veut, mais elle ne désigne pas le médecin.

M. Legault: Actuellement, dans les faits, la Régie désigne le médecin spécialiste, et c'est la raison pour laquelle il y a lieu de clarifier la situation, parce que c'est la façon dont la Régie a toujours été gouvernée.

M. Lazure: Mais ça ne le dit pas dans le règlement 52, en tout cas.

M. Legault: C'est ce que je vous dis. Il y a une demande de clarification de la situation qui existe depuis 12 ans, en autant que je suis concerné.

M. Lazure: Je ne sais pas si Mme Carbonneau a une réaction à ça. En tout cas, moi, je lis les deux textes et ça ajoute. Là, le président de la Régie nous dit: Ça vient consacrer par un texte ce qui se faisait dans la pratique.

Mme Carbonneau: Moi, je rappelle que déjà on ne conteste pas, effectivement, les pouvoirs de la Régie de formuler des niveaux d'exigence...

M. Lazure: C'est ça.

Mme Carbonneau: ...quant aux modalités de déclaration, quant aux preuves à fournir en matière d'invalidité. Qu'on puisse demander que ce soit examiné par une autre personne, c'est une chose. Le faire en disant: C'est nécessairement devant le spécialiste désigné par la Régie, c'est autre chose.

M. Lazure: C'est très différent, M. le Président. Bon, en tout cas, je ne veux pas m'éterniser sur ce point-là. Je vais passer à un deuxième point.

M. Bourbeau: Par contre—j'ai encore une observation — si la Régie à des raisons de croire que l'invalidité n'est pas là et qu'on arrive avec un certificat d'un médecin qui peut avoir agi par complaisance — le député de La Prairie sait ce dont je parle — la Régie a droit, je pense, de faire contrôler ces certificats-là par un médecin de son choix.

M. Lazure: Oui, on ne conteste pas ce droit-là, et c'est donné par le règlement actuel, mais là, ce qu'on conteste, et la CSN et l'Opposition, c'est que la Régie va se mettre à désigner des médecins elle-même. Bon.

M. Bourbeau: Je ne suis pas surpris que la CSN et l'Opposition soient ensemble. Ce n'est pas la première fois et ce n'est pas la dernière fois, non plus.

M. Lazure: J'espère que ce n'est pas la dernière non plus.

M. Bourbeau: Mais pourquoi la Régie n'aurait pas le droit d'imposer son médecin, si elle n'a pas confiance au certificat qu'on lui propose?

M. Lazure: On en discutera quand on va étudier le projet article par article. Mme Carbonneau...

M. Bourbeau: C'est elle qui paie, enfin.

Le Président (M. Joly): Mme Carbonneau, vous aimeriez réagir?

Mme Carbonneau: C'est parce que c'est toujours un peu délicat, que ces accusations de situation de conflit d'intérêts, de complaisance, mais on peut tous se dire que, dans la vraie vie, ça pourrait jouer des deux côtés. Et de ce côté-là, je veux dire, l'intérêt de la Régie de limiter le nombre de cas à indemniser est tout aussi questionnable que l'intérêt d'une personne à prendre les moyens pour être indemnisée. En ce sens-là, qu'il y ait des contrôles additionnels, qu'on demande à du monde de remplir certaines exigences, de se prêter à un certain nombre d'examens, moi, je pense qu'il faut faire confiance à la compétence professionnelle du corps médical et qu'on ne doit pas aliéner ce droit assez fondamental des personnes de s'adresser aux professionnels de la santé de leur choix.

M. Lazure: M. le Président.

Le Président (M. Joly): M. le député de La Prairie, s'il vous plaît.

M. Lazure: Je voudrais reprendre mon temps de parole.

Le Président (M. Joly): Je suis même prêt à déborder, M. le député. Je pense que vous me connaissez.

M. Bourbeau: Mais je n'ai pas pris tout mon temps, moi.

M. Lazure: Le problème, c'est que le ministre fonctionne, au sujet des rentes d'invalidité, dans le même contexte, dans le même état d'esprit que pour les gens de l'aide sociale. 11 présume que les gens de l'aide sociale vont frauder. Il présume que les médecins vont donner des certificats de complaisance. C'est ça qu'est le problème fondamental, M. le Président. Ma deuxième remarque...

M. Bourbeau: C'est comme ça que la CSST fait un déficit de 1 000 000 000 $ par année aussi.

M. Lazure: Ma deuxième remarque, M. le Président... J'ai respecté le droit de parole du ministre, tantôt. J'aimerais qu'il respecte le mien.

Le Président (M. Joly): Ce que je tiens à souli-

gner, M. le député, c'est que, tantôt, vous avez demandé la parole Le temps du ministre n'était pas écoulé. Il n'y avait que 14 minutes de passées. Je suis prêt, moi, à favoriser un échange libre, à condition que ça se fasse dans les règles.

M. Lazure: Très bien.

Le Président (M. Joly): Je suis même prêt à déborder. Je pense que les gens reconnaissent que, normalement, je donne une latitude qui favorise tout le monde.

M. Lazure: bon. je veux revenir à la csn, m. le président. au début de ses remarques, mme carbon-neau a fait valoir qu'il est urgent, non seulement d'assurer un meilleur financement pour notre régime à la régie des rentes du québec, mais aussi de le bonifier. l'opposition concourt dans cette orientation. le gouvernement actuel n'a pas l'air d'aller dans cette direction-là. le ministre a plutôt parlé d'un projet de régime de rentes simplifié, pour les petites et moyennes entreprises. bon. il y a une certaine valeur à ça, évidemment. c'est plafonné depuis longtemps, dans le secteur des régimes complémentaires de rentes. c'est resté autour de 40 %. il y a à peine 40 % des travailleurs et travailleuses qui ont un régime complémentaire de rentes actuellement. et là, le gouvernement va essayer, de peine et de misère, de stimuler les pme à avoir un nouveau régime de rentes. (12 h 10)

Pourquoi ne pas prendre la voie la plus simple, la voie qui est celle du régime de rentes public du Québec? c'est bien évident que les rentes actuelles ne sont pas suffisantes, autant pour ce qui concerne le plafond du revenu admissible que du pourcentage. ça, c'est bien évident. et les pays où on a le moins de chômage sont les pays, justement, qui ont les meilleurs régimes de rentes publics. je pense aux pays scandinaves, notamment. ça fait sourire le ministre, mais c'est vrai, ça. et ce n'est pas vrai qu'en améliorant le régime de rentes public on va faire peur aux entreprises. c'est le discours qu'on entend de l'autre côté de la table. je pense qu'il est grand temps que le régime de rentes public, qui est le bas de laine des québécois et des québécoises, qu'on s'attaque à celui-là et qu'on le bonifie. les pme, selon les chiffres du ministre, dans les entreprises de moins de 20 employés, c'est 15 % seulement des travailleurs qui ont accès à un régime de rentes complémentaire. alors, les mesures incitatives, que ce soit pour les grandes entreprises, les petites ou les moyennes, ça n'a pas marché. depuis 10, 15 ans, c'est resté à 40 %. les 13 000 000 $ dont parle le ministre, m. le président, j'aimerais ça, comme mme carbonneau le disait tantôt, qu'on ait, dès notre prochaine rencontre, un état détaillé de la situation, où ça s'en va, quels sont les groupes qui vont bénéficier de ce déboursé additionnel de 13 000 000 $ venant de la caisse.

Je voudrais aussi, en terminant mes remarques, quitte à revenir sur les rentes d'invalidité tantôt... On a compris que, pour les 60 à 65 ans, concernant la rente d'invalidité — je vais m'en tenir à ce point-là pour terminer — il y a un assouplissement, qui est le bienvenu. Je comprends qu'il y a une plus grande sévérité par le biais du médecin désigné par la Régie des rentes. Mais on a parlé d'autres assouplissements, et j'aimerais ça que le ministre nous détaille un peu plus les assouplissements qui vont maintenant accompagner l'acceptation des invalidités. J'ai de la misère à voir où sont ces assouplissements-là, hormis la catégorie des 60 à 65 ans.

M. Bourbeau: M. le Président, j'étais un peu distrait. On va demander au président de la Régie des rentes de répondre à la question. Ça va éviter de reposer la question.

Le Président (M. Joly): Absolument. M. le président, M. Legault, s'il vous plaît.

M. Legault: M. le Président, je crois que la question pourrait trouver sa réponse dans les règles d'admissibilité à l'invalidité. C'est que, actuellement, la règle de 5 des 10 dernières années pour ouvrir droit à une rente d'invalidité est d'une sévérité telle que beaucoup de gens sont rejetés dès la première analyse du dossier, avant même de se rendre au dossier médical.

Tout à l'heure, la CSN pointait que, dans certains cas, il pouvait arriver que les nouvelles règles soient pénalisantes pour l'individu. Je veux bien reconnaître qu'il peut y avoir 1, 2 ou 10 individus qui pourraient se retrouver pénalisés, mais, malheureusement, c'est souvent le cas lorsqu'on essaie d'ouvrir davantage mais dans des limites de coûts respectées. C'est que ça nous permettra de reconnaître 700 personnes de plus sur une base annuelle, qui ne peuvent l'être actuellement, c'est-à-dire que par la règle de 5 des 10 dernières années viendra s'ajouter une règle qui parlera de 2 des 3 dernières années, donc ce qui favorise la reconnaissance de l'invalidité pour une personne qui arrive sur le marché du travail ou qui revient sur le marché du travail après une longue période d'absence, ce qui est souvent le cas des femmes qui ont élevé des enfants. Également, si quelqu'un a cotisé la moitié de la période cotisable, eh bien, ça ouvre le droit à une rente d'invalidité.

Alors, là encore, ce sont des règles qui vont venir assouplir et qui reconnaissent que le but recherché est de pouvoir reconnaître le plus grand nombre de personnes invalides, leur reconnaître droit à une rente. C'est pour ça que ça me surprend beaucoup de voir que la différence qu'il y aura entre le règlement et la loi, lorsque je dis que le médecin est désigné par la Régie, c'est dans le but, la plupart du temps, de ne pas se priver d'une expertise additionnelle pour pouvoir reconnaître l'individu plutôt que dans le but de bloquer des individus. Tout l'ensemble de l'amélioration de la rente d'invalidité passe d'abord par l'admissibilité avant tout, parce que, peu importe ce qu'on dirait sur le plan médical, si les gens ne peuvent pas passer au travers du premier critère, qui est l'admissibilité, rien ne sert de corriger les

détails. C'est donc par ce biais-là qu'on est capable, dans des coûts contrôlés, d'améliorer l'ouverture à la rente d'invalidité.

Le Président (M. Joly): M. le député, s'il vous plaît.

M. Lazure: Sur ce point précis, M. le Président, ce serait bien la première fois, à ma connaissance, que des médecins désignés par un organisme public deviennent plus généreux, entre guillemets, vis-à-vis des demandes d'invalidité que les médecins hors de ces organismes publics. Autrement dit, je n'ai jamais vu, moi, un médecin désigné par la CSST pour réviser un examen médical, un médecin désigné par la SAAQ, la Société de l'assurance automobile, ou tout autre organisme du genre, je n'ai jamais vu ces médecins-là dire: Vous vous êtes trompés, il avait droit à l'invalidité. Je ne pense pas que d'introduire des médecins de la Régie va rendre plus nombreuses les rentes d'invalidité. Je ne pense pas, en soi. Au contraire, l'histoire nous montre que ces médecins-là deviennent un peu l'équivalent de médecins de compagnie, comme on les connaissait autrefois. C'étaient des médecins qui, presque systématiquement, prenaient la contrepartie du médecin de famille, presque systématiquement. Donc, j'exprime une grosse crainte.

J'ai une dernière question pour Mme Carbonneau. Mme Carbonneau, je ne sais pas si vous avez pris connaissance d'un document de la Régie des rentes concernant le nouveau type de régime de retraite, le régime de retraite simplifié auquel j'ai fait allusion. Est-ce que vous pourriez réagir de façon préliminaire à ça?

Mme Carbonneau: Je vais demander à Ghislain de le faire, mais, effectivement, il y a une rencontre prévue, je pense, au début de la semaine prochaine, avec des gens de la Régie des rentes, et on a préparé un mémoire spécifiquement sur cette question-là.

M. Lazure: Ah bon.

Mme Carbonneau: Mais, on peut vous donner les grandes lignes. Vous allez retrouver là-dedans, évidemment, nos préoccupations pour la bonification des régimes publics. Alors, je laisse Ghislain donner le reste.

Le Président (M. Joly): M. Halle, s'il vous plaît.

M. Halle (Ghislain): Alors, rapidement, on pense que, effectivement, il y a lieu de se pencher plus spécifiquement sur un véhicule un peu plus souple pour les petites entreprises. Des fois, c'est l'entreprise qui est précaire, des fois ce sont les emplois qui sont précaires. Ça, dans ce sens-là, ça nous intéresse. Malheureusement, ce qu'on craint actuellement, avec l'avancée que le ministre a faite, c'est la disparition, la transformation des régimes complémentaires de retraite actuels en régimes simplifiés afin de se sauver des comités de retraite, qui sont, effectivement, une originalité dans leur conception au Québec, mais qui ont aussi amené, pour la première fois, les gens à avoir plus d'information sur un véhicule de retraite qui était fortement remis en question. On n'a qu'à regarder, par exemple, évidemment, toute la question de ce qui s'est produit avec les excédents d'actif.

Alors, sans entrer dans le détail, c'est la crainte qu'on a actuellement avec ce projet-là. En plus, on se dit qu'il y a probablement possibilité d'arriver avec un régime plus souple tout en maintenant certains comités qui seraient beaucoup allégés en termes de pouvoirs et ainsi de suite. Dans le projet actuel, il nous semble que c'est les institutions financières qui vont sortir les grandes gagnantes de ce projet-là.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup. Alors, juste peut-être en conclusion, là, les remerciements d'usage, si vous voulez.

M. Bourbeau: Moi, j'aurais une observation à faire...

Le Président (M. Joly): M. le ministre, s'il vous plaît. (12 h 20)

M. Bourbeau: ...étant donné qu'il me reste encore quelques minutes, M. le Président. Je trouve un peu étonnant qu'on soupçonne le ministre qui a institué les comités de retraite, souvent — on va se le dire entre nous — pas nécessairement avec l'enthousiasme délirant des employeurs... Ça ne faisait pas tellement leur affaire quand on a modifié la loi, parce que, jusqu'à ce moment-là, les employeurs géraient les fonds de retraite seuls, sans être dérangés trop, trop, trop. Alors, c'est le ministre qui a imposé des comités de retraite dans la réforme de la loi. Je suis surpris qu'on me soupçonne maintenant de vouloir me sauver de ces comités de retraite là. Si j'ai eu le courage de les mettre sur pied, je ne suis tout de même pas pour les mettre maintenant sur une tablette. Alors, je pense que, à ce sujet-là, ma crédibilité est sans tache. J'ai réformé la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes dans le sens de donner aux travailleurs des droits accrus, une meilleure protection, une protection 100 fois meilleure, quand on considère que, jusqu'à ce moment-là, il fallait avoir travaillé 10 années pour un employeur et avoir atteint l'âge de 45 ans pour avoir droit à la retraite, et que, dorénavant, on a mis ça à 2 ans. Alors, je pense qu'on a amélioré d'une façon spectaculaire la loi.

Bon. M. le Président, tout ce que je peux dire, c'est que le régime de rentes simplifié qu'on envisage, c'est une amélioration encore, je crois, dans le sens que ça va permettre à des travailleurs de PME d'avoir accès à une rente complémentaire, ce qu'ils n'ont pas présentement. Est-ce qu'on va refaire, avec ce régime-là, le coup des comités de retraite? Il n'y a rien de définitif encore, on est en consultation. Alors, c'est pour ça qu'on vous consulte. Il est possible qu'il y ait une forme de comité ou, disons, de participation des travailleurs

aux décisions. Tout ça est présentement en train d'être regardé. Donc, je ne dis pas que ça ne peut pas se produire.

Mais, pour terminer sur ce sujet-là, je pense que l'État a raison d'avoir un régime de base — le Régime de rentes du Québec est le régime de base de tous les Québécois — mais qu'il ne faut pas compter uniquement sur l'État pour prévoir l'aide à la retraite, que les travailleurs, individuellement, ont une responsabilité, eux aussi, de préparer leur retraite. C'est la responsabilité de chacun d'y voir. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il est important de s'assurer que les travailleurs et les employeurs aussi fassent un effort pour compléter le régime public par des régimes privés, de compagnies privées, que ce soient les régimes à prestations déterminées comme dans les grosses compagnies ou des régimes simplifiés pour les petites compagnies, les PME. Donc, je pense que la sécurité du revenu, c'est un ensemble de moyens et que les uns n'excluent pas les autres.

Le Président (M. Joly): Merci beaucoup, M. le ministre. En conclusion, très rapidement, M. le député, s'il vous plaît.

M. Lazure: Oui, M. le Président, deux choses. Premièrement, je demanderais au ministre d'avoir l'obligeance de nous transmettre copie des mémoires qu'il a reçus ou qu'il va recevoir concernant son projet de régime de rentes simplifié, si c'est possible. Parce que la CSN vient de me dire qu'elle a envoyé un mémoire... Ou qu'elle va envoyer un mémoire? Dans un souci de transparence, là.

M. Bourbeau: M. le Président, il n'y a pas de mémoire comme tel. On fait des consultations. Parfois, c'est verbal, parfois, c'est une lettre d'un groupe. Enfin, il y a peut-être des mémoires ou des... C'est plutôt des documents, des lettres qui sont écrites.

Le Président (M. Joly): Merci.

M. Lazure: Je voudrais remercier Mme Carbon-neau et ses deux collègues pour leur présence ici, aujourd'hui.

Le Président (M. Joly): Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais remercier Mme Carbonneau, M. Halle et M. Bergeron pour leur prestation. Tout ça est bien intéressant et va nous permettre de faire avancer le dossier, sûrement.

Mme Carbonneau: Moi, je voudrais juste vous dire, M. le ministre, que c'était loin de notre intention que de vous faire un procès d'intention. Prenez-le positivement. On vous offre une belle occasion, au fond, de poser un geste courageux pour contraindre l'appétit vorace des employeurs de mettre un terme aux comités de retraite. Prenez-le comme ça.

Le Président (M. Joly): Merci. Alors, pour l'information des membres de cette commission, j'ai accordé 22 minutes pour la présentation du mémoire, 17 minutes à M. le ministre et 23 minutes à l'Opposition, pour un total de 62 minutes. Alors, je pense que c'est important à souligner. Alors, au nom des membres de cette commission, je remercie aussi la CSN. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 25)

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