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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 9 mai 1997 - Vol. 35 N° 83

Interpellation : Le réaménagement des centres jeunesse


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, bonjour à chacun des membres, des députés qui assistent à cette interpellation. Le quorum n'est pas nécessaire dans une occasion comme celle-ci, je le répète. Et je répète tout simplement la raison d'être ici ce matin: la commission des affaires sociales se réunit dans le cadre de l'interpellation de Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant, soit le réaménagement des centres jeunesse.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce) sera remplacé par M. Gobé (LaFontaine); Mme Malavoy (Sherbrooke) par M. Lachance (Bellechasse).

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Je vous rappelle simplement quelques petites règles. Mme la députée débutera son premier 10 minutes, M. le ministre 10 minutes, et il y aura alternance entre les députés, à la fois de l'opposition et du groupe ministériel, pour terminer par M. le ministre, 10 minutes, et Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, 10 minutes.

Alors, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, si vous voulez débuter votre intervention.


Organisation des travaux

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Peut-être, avant de débuter, j'aimerais vous demander... Parce que, hier, notre leader adjoint avait vérifié avec le leader du gouvernement – parce que l'interpellation est adressée au ministre de la Santé et des Services sociaux – si le ministre de la Santé serait ici ce matin et on nous avait dit qu'il n'y avait pas d'indication contraire à ce que le ministre ne soit pas présent à cette interpellation.

Alors, j'aimerais savoir, finalement, étant donné que c'est le ministre du Revenu qui est à l'interpellation sur le réaménagement des centres jeunesse, si le ministre de la Santé a des problèmes particuliers de santé ou autres pour ne pas être présent à cette importante interpellation qui touche les enfants en difficulté.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): On sait que le côté ministériel peut déterminer qui est le porte-parole, mais j'imagine que M. le ministre peut certainement répondre à cette question-là.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, on m'a informé – et on va excuser la voix parce qu'il y a un relent de grippe quelque part – effectivement que le ministre avait, antérieurement à la demande d'interpellation qui a été soumise, des engagements auxquels il pouvait difficilement et aisément se soustraire.

Et il apparaît effectivement que le gouvernement, voulant quand même être à la disposition de la commission pour tenir la présente interpellation, se fait représenter par votre humble serviteur. Comme vous le savez, M. le Président, il revient au gouvernement de décider quelle personne, comme membre du gouvernement, peut le représenter à une interpellation.

Je dois vous dire que nous accordons beaucoup d'importance aux travaux de la Chambre. Si mon collègue avait pu se libérer, il aurait certainement pu être ici et, alternativement, si l'opposition officielle avait accepté l'offre du leader de tenir la présente interpellation à un autre moment, mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux aurait pu se rendre disponible à ce moment-là.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie de la réponse. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Oui. Mais je reviens, M. le Président, parce qu'on est en période de session et il est clair... J'ai même le règlement ici qui dit bien: Dans notre système parlementaire, le Parlement a priorité. Un ministère doit donc préparer son horaire en fonction du Parlement. Ce n'est pas son agenda personnel qui prône, M. le Président, mais c'est bien l'agenda du Parlement et des travaux parlementaires.

Une interpellation qui veut questionner le ministre responsable de la Santé et des Services sociaux sur la situation des jeunes en difficulté, sur la situation des jeunes mères adolescentes en difficulté, sur la situation de jeunes enfants abusés sexuellement et physiquement, il me semble qu'il est quand même assez incroyable que, ce matin, on se retrouve avec le ministre, pas parce que j'en ai quoi que ce soit au ministre du Revenu, M. le Président, là, mais je me retrouve dans une situation où on veut discuter, on veut connaître la vérité sur les dossiers qui touchent les centres jeunesse pour enfants et je me retrouve en face du ministre délégué au Revenu.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je crois, à ce moment-ci, que vos commentaires ont été enregistrés. M. le ministre a expliqué ce qui se passe, je pense qu'on est prêt à commencer les travaux. M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Je peux assurer l'opposition officielle de notre entière collaboration comme gouvernement, par mon intermédiaire, en ce qui regarde la présente interpellation et je suggère simplement que nous puissions commencer dès que possible, parce qu'on sait que le temps nous presse puisque nous devrons avoir terminé pour midi.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je ne voudrais pas qu'on fasse un long débat là-dessus.

M. Gobé: Non, non. J'ai juste une question, parce qu'on est vendredi matin, on s'est déplacé – on a tous des activités dans nos comtés aussi – pour venir ici pour parler avec le ministre de la Santé. Pourquoi n'avons-nous pas été avertis hier que le ministre de la Santé ne pourrait pas être là, que ce serait le ministre du Revenu qui le remplacerait? Est-ce qu'on pourrait nous répondre à ça, au moins, par délicatesse?

Mme Loiselle: On a vérifié. On a même vérifié hier.

M. Gobé: Il l'a appris quand, le ministre, qu'il ne pouvait pas venir? On a déplacé les députés, ça coûte cher à l'Assemblée nationale puis on ne peut pas poser les questions qu'on veut au bon ministre. On aimerait avoir la réponse puis on va commencer après.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, tout simplement parce que, encore hier, nous n'avions pas abandonné l'espoir que, peut-être, l'opposition officielle convienne d'un autre moment. Et, d'après ce que je peux comprendre, les négociations se continuaient à ce moment-là. Elles n'ont pas abouti, malheureusement, de façon à permettre que mon collègue puisse être présent. Maintenant, je suis ici...

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Dernière intervention, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Je trouve ça surprenant la réponse parce que c'est dans toutes les...

M. Bertrand (Portneuf): J'ai beaucoup de respect pour l'opposition officielle, quels que soient les représentants de l'opposition officielle...

M. Williams: C'était moi qui avait la parole, M. le Président?

M. Bertrand (Portneuf): Non, je n'avais pas terminé, non.

M. Williams: J'ai été reconnu par le président.

M. Bertrand (Portneuf): Mais ce que je veux dire, c'est que quels que soient les porte-parole de l'opposition officielle, nous les considérons comme étant des porte-parole représentatifs, tout à fait autorisés à intervenir au nom de leur formation. Tout comme le présent ministre délégué au Revenu représente le gouvernement et s'estime tout à fait en mesure de répondre aux interrogations, aux questions de l'opposition officielle.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Une dernière intervention, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, une dernière intervention, M. le Président, parce que, moi-même, je me suis déplacé ce matin pour questionner le ministre sur un rapport, sorti hier, de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec, qui questionne sévèrement, en quelques lignes, le comportement du ministère de la Santé et des Services sociaux. Et, selon l'information que j'ai reçue, le ministre... Parce que j'ai téléphoné ce matin et j'ai entendu que le ministre avait planifié d'être à Montréal depuis une semaine.

Je ne sais pas si c'est vrai, mais, si c'était vrai, pour un sujet aussi important qu'un rapport de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, pourquoi est-ce que le leader de votre gouvernement n'a pas mentionné ça hier? Je pense que, peut-être, il va plaider encore une excuse, qu'il n'était pas au courant, comme le premier ministre dit avec l'affaire de M. Parizeau, mais là, franchement, j'ai de la misère à le croire.

(10 h 10)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, les commentaires ayant été exprimés de part et d'autre, et des réponses, je pense que nous allons commencer immédiatement l'interpellation. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous avez compris que le temps, je ne l'ai pas compté là.


Exposé du sujet


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Oui, 10-10. Merci, M. le Président. Vous comprendrez que nous sommes très, très déçus de l'attitude du ministre de la Santé et des Services sociaux. Nous avions demandé cette interpellation étant donné l'importance des décisions qui seront prises dans quelques semaines par le conseil d'administration des centres jeunesse de Montréal.

Heureusement, M. le Président, que les intervenants, les éducateurs ont sonné l'alarme il y a un mois. Heureusement que la population a répondu au message des intervenants et des éducateurs, que les amis, que les anciens, que les parents, que les jeunes en difficulté se sont joints aux intervenants et aux éducateurs et ont dit au gouvernement: Mettez le frein, parce que vous êtes en train de fermer des centres d'hébergement, des unités, des installations pour mères en difficulté, des foyers de groupe pour des jeunes enfants abusés sexuellement, des foyers de groupe pour des jeunes enfants qui sont violentés physiquement et psychologiquement. Et ça, M. le Président, au nom des compressions budgétaires, au nom du déficit zéro, au nom du virage-milieu bâclé, précipité et bousculé par le ministre de la Santé et des Services sociaux pour répondre à la commande du premier ministre, pour arriver à l'obsession des compressions budgétaires, l'obsession référendaire, M. le Président, sur le dos des enfants qui souffrent.

Il est presque indécent, M. le Président, ce matin, qu'on se retrouve devant le ministre du Revenu. Ça démontre peut-être un peu l'obsession du gouvernement: ministre du Revenu, argent, revenus, quand, moi, je veux venir ici, avec mes collègues, parler d'enfants qui souffrent. Il est aussi indécent de voir que le ministre de la Santé a fait la même chose que lors de l'interpellation sur la RAMQ. Il s'est faufilé, il n'est pas venu, il a brillé par son absence. Il fait encore la même chose ce matin, le ministre de la Santé. Il brille par son absence, par son manque de courage.

M. le Président, on voulait, nous, ce matin, parler, échanger avec le ministre de la Santé sur l'augmentation des listes d'attente à la Direction de la protection de la jeunesse. J'ai les chiffres qui nous ont été déposés, M. le Président, lors de l'étude des crédits, le nombre de dossiers en attente d'évaluation et de prise en charge à la Direction de la protection de la jeunesse. Avec les compressions aveugles de ce gouvernement sur des dossiers aussi essentiels, importants et troublants que les jeunes en difficulté, on se retrouve qu'il y a une augmentation de plus de 10 % sur les listes d'attente en évaluation pour des jeunes enfants qui sont abusés sexuellement à répétition, qui sont violentés physiquement et psychologiquement. Pire, M. le Président, il y a une augmentation dans la région du premier ministre du Québec. Il s'occupe tellement de sa région, le premier ministre du Québec! Il s'occupe plus du Bloc québécois que de sa région. Dans la région Saguenay–Lac-Saint-Jean, ce n'est pas une augmentation de 10 %, ce n'est pas une augmentation de 50 %, mais c'est une augmentation de 160 % sur les listes d'attente pour des enfants qui sont abusés, pour des enfants qui souffrent, M. le Président.

On voulait aussi parler avec le ministre de la Santé et des Services sociaux de la nouvelle solution de la mixité des clientèles. Ça, c'est encore des solutions qui ont été trouvées suite aux compressions exigées par le ministre de la Santé où on a dit que, peut-être, pour aller chercher des économies, on va mixer la clientèle, ce qui veut dire qu'il va y avoir des jeunes contrevenants qui vont se retrouver sous le même toit que des jeunes qui sont en difficulté dans leur milieu familial, mais qui ne sont pas des contrevenants. On veut aussi mixer la clientèle au niveau des adolescents avec des adolescentes. On parle aussi, dans les solutions, du décloisonnement des services offerts aux enfants de 12 à 18 ans. Actuellement, M. le Président, ces catégories-là sont très, très distinctes: les 12-14 ans sont ensemble et les 14-18 ans sont ensemble. Maintenant, au nom des économies et au nom de l'exigence des compressions de ce gouvernement, on veut mettre ces deux clientèles-là, les fusionner sous le même toit, M. le Président.

On voulait aussi questionner le ministre – mon collègue en a fait rapport tantôt – sur le rapport qui a été déposé cette semaine, de la Commission des droits de la personne, qui parle du rôle, questionnable de temps à autre, du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Et on voulait aussi questionner le ministre de la Santé sur la logique de ce gouvernement, qui n'est pas toujours facile à suivre, M. le Président, quand vous pensez que le gouvernement est prêt à fermer les yeux sur la fermeture de Boscoville, qui a une réputation internationale, qui fait depuis plus de 40 ans un travail magnifique auprès des jeunes en difficulté, pour une économie de 700 000 $. Le gouvernement est prêt à fermer les yeux et à fermer Boscoville. D'un autre côté, le même gouvernement, par le biais de son ministre des Finances, se retourne puis dit: Oui, nous, on est prêts à investir 75 000 000 $ dans le béton, nous, comme gouvernement. Il était fier d'annoncer qu'il va investir 75 000 000 $ pour la construction d'une bibliothèque. Dans une situation que l'on vit actuellement de compressions budgétaires, le gouvernement a trouvé 75 000 000 $ pour investir dans le béton quand le gouvernement demande des compressions, cette année, de 4 000 000 $ aux centres jeunesse de Montréal qui peuvent mener à la fermeture de Boscoville, à la fermeture de cinq unités d'installation pour les jeunes mères adolescentes avec leur enfant et pour, aussi, une vingtaine de foyers de groupe pour les jeunes enfants abusés physiquement, sexuellement et psychologiquement.

C'est ça, la logique de ce gouvernement. Puis on voulait se faire expliquer par le ministre de la Santé quelle est cette logique de soit-disant compassion, de solidarité et d'aide envers des enfants qui souffrent. Alors, vous comprendrez, M. le Président, que, devant, finalement, le désintéressement flagrant démontré à la période de questions quand j'ai questionné le ministre à trois reprises, en Chambre, sur la question de la fermeture de Boscoville et des unités d'hébergement pour les jeunes mères en difficulté et pour les enfants, le désintéressement flagrant, l'inaction, l'indifférence du ministre de la Santé dans ce dossier – et, ce matin, on le constate, tout le monde, mes collègues avec moi – le non-respect de nos institutions, le non-respect envers les enfants qui souffrent au Québec, eh bien, il est clair que tout ce qui compte pour ce gouvernement – parce que tout ce qu'on a eu comme idée, c'est de nous envoyer le ministre du Revenu – c'est clair que c'est plus les colonnes de chiffres, comment on peut aller chercher de l'argent.


Motion d'ajournement des travaux

Peut-être qu'on nous a envoyé le ministre du Revenu pour nous expliquer comment on peut récupérer de l'argent sur le dos des enfants qui souffrent, mais, nous, on n'est pas intéressés à entendre le ministre du Revenu nous dire comment il va aller récupérer de l'argent sur le dos des enfants qui souffrent. Alors, M. le Président, vous comprendrez que je demande l'ajournement de ces travaux étant donné le désintéressement de ce gouvernement envers les enfants qui souffrent au Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Je suspends deux minutes, si vous voulez me donner quand même deux minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 19)

(Reprise à 10 h 20)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous voulez parles, je pense. Je peux vous entendre, le temps que je lis un article.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Mais enfin, j'aimerais avoir toute votre attention pour mon intervention. Je dois déjà vous dire que nous sommes disponibles pour poursuivre. Je pense que la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne a fait état d'un certain nombre de sujets, elle a mis sur la table un certain nombre de données qu'il me semble nécessaire, à ce moment-ci, de commenter et de corriger. C'est la raison pour laquelle je souhaite pouvoir, certainement, me prévaloir du premier 10 minutes prévu normalement. Et, quant à la suite des choses, nous souhaiterions également pouvoir poursuivre au niveau des différents sujets qui ont été abordés, de façon à donner l'heure juste à la population.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je suspends pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 21)

(Reprise à 10 h 27)


Décision du président sur la recevabilité

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, nous reprenons nos travaux. Nous avons eu une motion de demande d'ajournement. Je vous lis l'article 165 concerné:

«Ajournement des travaux. Un membre peut proposer que la commission ajourne ses travaux – ce qu'a fait Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Cette motion est mise aux voix sans amendement et elle ne peut être faite qu'une fois au cours d'une séance, sauf par le président ou un ministre membre de la commission. Elle ne peut être débattue, sauf qu'un représentant de chaque groupe parlementaire peut prononcer un discours de 10 minutes chacun.»

Ça, c'est l'article 165. Il faut aller à l'article 303:

«Dispositions particulières. Lorsque a lieu une interpellation – c'est ce que nous faisons ce matin – il n'y a ni motion, ni rapport, ni vote. Le défaut de quorum ne peut être soulevé.»

Donc, quant à l'article 165, la motion d'ajournement n'est pas recevable et, étant donné qu'on est toujours en interpellation, ma décision est que les travaux continuent de la façon prévue.

M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Oui, M. le Président. Moi, je cumule dans cette Chambre plus de sept années de vie parlementaire et c'est la première fois que je vois des députés de l'opposition, ayant sollicité une interpellation, poser un geste tel que celui qui vient d'être posé, se retirer. Devant le sérieux des sujets qui ont été abordés, je vous demande de poursuivre nos travaux. Je pense que le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf est quelqu'un qui a une vaste expérience dans le domaine de la santé et est tout à fait en état, en capacité de pouvoir répondre aux questionnements exprimés par les députés de l'opposition. Alors, j'espère que nos travaux vont se poursuivre et que le ministre va pouvoir répliquer à un certain nombre d'allégations des députés de l'opposition.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Nous poursuivons nos travaux, mais je vous indique tout de suite que je vais respecter scrupuleusement le temps prévu. Alors, M. le ministre, vous avez 10 minutes.


Réponse du ministre


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, je vous remercie. Il me semble important, à ce moment-ci, d'utiliser une partie de mon droit de parole de 10 minutes pour déplorer vivement l'attitude de l'opposition officielle qui, sur une question aussi importante et cruciale que la transformation des centres jeunesse, fait défaut de sa présence et quitte les travaux de la présente commission, prétextant l'absence du ministre, M. Rochon.

(10 h 30)

Pourtant, le gouvernement s'est assuré, de différentes façons, de pouvoir être disponible pour une telle interpellation dans les meilleures conditions.

Premièrement, mon collègue, ministre de la Santé et des Services sociaux de même que le leader du gouvernement, à plusieurs reprises, ont offert la possibilité de rendre le ministre disponible à une autre date, par exemple hier, jeudi, et d'autres dates également ont été explorées et auraient été admissibles pour le gouvernement. L'opposition officielle – et ce n'est pas la première fois – a tenu à maintenir l'interpellation ce vendredi matin. Compte tenu de tout le respect que le gouvernement entretient à l'égard des travaux de l'Assemblée nationale et notamment de la présente commission, le gouvernement a tenu, malgré les engagements incontournables qu'avait pris mon collègue, à être présent et m'a mandaté, pour et au nom du gouvernement et du ministre de la Santé et des Services sociaux, pour répondre à toutes les questions que l'opposition officielle pouvait avoir à poser sur cette question, question importante, essentielle, vitale, M. le Président, du réaménagement des centres jeunesse. Je constate l'absence de l'opposition officielle pour la continuation de nos travaux et je la regrette vivement au nom du gouvernement et de mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux.

La députée de Saint-Henri–Sainte-Anne a abordé dans son intervention différents sujets, celui, par exemple, de Boscoville, celui des listes d'attente de même que certains sujets sur lesquels il me fera plaisir de revenir dans d'autres périodes qui nous sont prévues pour justement débattre de cette question.

J'aimerais cependant sensibiliser la population de même que l'ensemble des membres de la Commission au fait qu'on se retrouve non pas devant, actuellement, uniquement le ministre délégué au Revenu pour tenir cette interpellation, mais devant un membre du gouvernement dûment mandaté qui, comme membre du gouvernement, peut aussi faire état d'une très longue feuille de route en ce qui concerne le secteur de la santé et des services sociaux et qui, au-delà de son rôle comme membre du gouvernement, peut effectivement faire état de cette feuille de route et exposer finalement toute la crédibilité que votre humble interlocuteur peut avoir dans ces matières.

C'est au début des années soixante-dix, M. le Président, que j'ai agi justement comme intervenant, comme éducateur dans un centre pour jeunes mésadaptés socioaffectifs. Il s'agissait d'une unité située au Manoir Charles de Foucauld, à Giffard – dans le temps, ça s'appelait Giffard – et c'est à ce moment-là que j'ai eu l'occasion d'avoir mes premiers contacts avec la réalité de ces jeunes qui sont en état de besoin.

On connaissait déjà l'excellent travail qui se faisait partout dans le réseau pour améliorer les services. Boscoville, déjà depuis quelques années, à ma connaissance, pour autant que je me souvienne, faisait état, effectivement, de navire amiral dans le domaine des nouvelles façons d'intervenir auprès de la problématique de ces jeunes. Et c'est donc à ce moment-là que j'ai commencé à m'intéresser à ces questions.

J'ai poursuivi par la suite – je passe par-dessus quelques années – pour me retrouver comme directeur des programmes sociaux et de santé au Conseil du trésor, donc responsable du financement et de la budgétisation de tout le secteur social, de la mission sociale du gouvernement. À ce moment-là, c'était à peu près 40 % du budget total du gouvernement. À la suite de quoi, en 1985, j'ai été nommé membre de la Commission d'enquête sur les services de santé et les services sociaux, présidée par mon collègue ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, qui est devenu depuis ministre de la Santé et des Services sociaux. J'ai agi, donc, comme vice-président de ladite Commission, nommée par le gouvernement de M. Lévesque, reconduite dans son mandat par le gouvernement de M. Bourassa, par la suite, et nous avons produit ce rapport, en 1988, qui est venu finalement orienter l'ensemble des décisions importantes dans le secteur des services de santé et des services sociaux.

Et je me retrouve peu de temps après comme directeur général du Conseil régional de la santé et des services sociaux. J'ai agi comme coordonnateur de la Table des directeurs généraux, au niveau de la Conférence des régies, par la suite, et me voici maintenant membre du gouvernement, tout à fait autorisé au nom du gouvernement à répondre aux questions de l'opposition officielle, pourtant absente, et, M. le Président, je ne pense pas qu'on puisse faire reproche ni au gouvernement, ni au ministre de la Santé et des Services sociaux, ni aux membres du gouvernement, dont je suis, d'être ici présents pour répondre aux questions d'absents.

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais, avant de réagir à certains propos de l'opposition officielle tenus précédemment, bien camper l'essentiel de ce dans quoi nous sommes, en termes de réorganisation des services. Ce n'est pas, M. le Président, le fruit du hasard, mais bien le fruit d'une longue réflexion sur l'organisation et l'impact de l'organisation des services sociaux dans le domaine justement des services à la jeunesse. Alors qu'auparavant la seule mesure de protection disponible était le retrait du milieu familial l'évolution des connaissances, parce qu'on évolue également dans ce sens-là, et l'intensification des services dans le milieu permettent aujourd'hui d'atteindre les mêmes objectifs, mais différemment. Protéger le jeune, oui, mais, plus encore, le faire en lui assurant une intégration harmonieuse à son milieu social.

Alors, on se rappellera que la politique de santé et de bien-être proposait déjà 19 objectifs pour réduire les problèmes de santé et les problèmes sociaux affectant la population, des objectifs et des stratégies d'actions qui reposaient sur trois postulats, trois convictions de base: premièrement, c'est que la santé et le bien-être résultent d'une interaction constante entre l'individu et son milieu; deuxièmement, que le maintien et l'amélioration de la santé et du bien-être reposent sur un partage équilibré des responsabilités entre les individus, les familles, les milieux de vie, les pouvoirs publics et l'ensemble des secteurs d'activité de la vie collective; et, troisièmement, que la santé et le bien-être de la population représentent un investissement pour la société.

Alors, c'est de l'ensemble de ces préoccupations-là que cinq objectifs ont été identifiés pour les jeunes: diminuer les cas d'abus sexuel, de violence et de négligence à l'endroit des enfants; atténuer les conséquences de ces problèmes; réduire les troubles de comportement les plus graves chez les enfants et les adolescents et adolescentes; diminuer la prévalence et la gravité de la délinquance; diminuer les cas de violence faite aux femmes en milieu familial et prévenir l'itinérance, particulièrement à Montréal, atténuer ses conséquences et favoriser la réinsertion sociale.

Alors, tout un tas de réflexions ont accompagné l'énoncé de ces priorités-là, par exemple, en matière de prévention, le rapport Bouchard dans Un Québec fou de ses enfants . Par la suite, d'autres rapports et analyses en protection de la jeunesse ont marqué notre réflexion et l'action que nous avons entreprise, notamment le rapport Harvey 2 ou La protection sur mesure: un projet collectif , le rapport Jasmin ou La protection de la jeunesse: plus qu'une loi , en 1991, de mémoire, le rapport Jasmin 2 concernant la Loi sur les jeunes contrevenants. Et tout ceci a abouti finalement au Plan d'action jeunesse qui est donc le résultat d'un exercice d'intégration de l'ensemble de ces contributions, dont les grandes lignes d'action sont: la lutte à la pauvreté, le virage prévention et la concertation multisectorielle. Ce qu'on vise, finalement, c'est un continuum de services intégrés à la jeunesse et des solutions de rechange au placement des jeunes tel que nous l'avons connu jusqu'à présent.

En conclusion, M. le Président, juste pour dresser cette trame d'ensemble, plusieurs autres travaux et recherches ont été effectués dans le secteur de la jeunesse au cours des dernières années. Divers protocoles et certains guides de pratique ainsi que des manuels de référence sur l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse et sur la Loi sur les jeunes contrevenants ont été développés dans ce domaine, et vous comprendrez que l'évolution de l'organisation des services, dans le secteur jeunesse, est loin d'être le fruit du hasard. Tous les travaux et toutes les recherches mentionnés précédemment ont guidé le ministère, et le gouvernement, et les centres de jeunesse dans le développement de nouvelles orientations dans le cadre de la transformation du réseau de la santé. Et c'est dans ce contexte, M. le Président, qu'on doit apprécier les faits dans le cadre de la présente interpellation. Je vous remercie.

(10 h 40)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Bellechasse.


Argumentation


M. Claude Lachance

M. Lachance: Oui, M. le Président, merci. Lorsque j'ai débuté ma carrière dans le domaine de l'enseignement, il y a un quart de siècle maintenant, j'ai moi-même été confronté à cette réalité des jeunes placés en centre d'accueil, et il s'agit d'un centre d'accueil qui avait fort bonne réputation d'ailleurs, sur un site extraordinaire, à Saint-Damien de Bellechasse, ça s'appelait le Pavillon des jeunes. À titre d'enseignant, j'ai eu, pour la commission scolaire Louis-Fréchette, à accueillir dans mes classes – j'étais enseignant en français et en histoire – des élèves qui étaient placés dans le centre d'accueil Pavillon des jeunes. Donc, j'ai pu voir évoluer ces jeunes et constater que, même si le milieu était intéressant, ce n'était quand même pas un endroit idéal pour eux, parce que l'endroit idéal pour eux, des jeunes adolescents de 15 ans, 16 ans, c'était le milieu d'où ils provenaient, c'était leur famille. À quelques reprises, lorsque nous avions des activités où, par exemple, les parents étaient invités, des activités socioculturelles ou sportives ou encore la remise des bulletins, la personne qui faisait lieu de parent était l'éducateur. Parce que, dans chacune des unités, il y avait des éducateurs responsables.

Encore une fois, je ne mets pas du tout, d'aucune façon, en doute la qualité des interventions des éducateurs, mais je pense que les temps changent, il n'y a rien de statique en ce bas monde, et on devait se rendre compte qu'il fallait faire des efforts pour transformer, pour ajuster aux réalités d'aujourd'hui la réalité qui existait à l'époque, il y a 20, 25 ans ou même un peu moins, 15 ans.

En 1996, l'an dernier, dans la région Chaudière-Appalaches, ce qui a été par la suite appelé les centres jeunesse Chaudière-Appalaches, on a réduit le nombre de places en réadaptation interne de toute la région. On a coupé ça de moitié, de 146 à 72. Ça a été un choc, je vous l'avoue, M. le Président, pour les gens qui travaillaient dans ce milieu-là depuis un bon bout de temps, encore une fois, compte tenu de la performance, de la qualité, de la réputation, en particulier, du centre chez nous. Cependant, il faut voir le bon côté des choses et constater que les ressources, les économies réalisées ont permis de financer plusieurs projets et de réallouer des sommes d'argent pour des ressources externes où des interventions peuvent se faire près de la famille ou dans les familles des jeunes qui ont des problèmes. Et je voudrais vous citer quelques exemples de projets qui ont pu être réalisés en Chaudière-Appalaches suite à cette transformation.

Il y a eu le centre spécialisé de réadaptation qui a été accepté. La mise sur pied d'équipes jeunesse-famille, il s'agit d'un modèle d'organisation des services de base au niveau des MRC avec plusieurs partenaires, et une trentaine d'expériences partenariales pour créer des pratiques nouvelles ont été mises sur pied. Les mères en difficulté d'adaptation, il s'agit d'un projet qui permet d'accueillir des mères en difficulté d'adaptation dans la communauté selon trois items: le renforcement des compétences personnelles, le soutien aux habiletés parentales et le support à l'intégration sociale. Le programme de soutien intensif aux familles, des mesures de rechange au placement, intervention dans la famille en situation de crise. Et, finalement, pour terminer, la collaboration à des projets d'organismes communautaires dans le développement de projets et dans leur évaluation.

Alors, M. le Président, il y a eu l'acceptation par le ministre de la Santé et des Services sociaux, M. Rochon, d'un projet fort intéressant qui a été accepté par le ministre suite à l'élaboration d'un projet de centre spécialisé en réadaptation des adolescents en difficulté. Ça avait été présenté au ministre, ça, en décembre 1996, et, dans une lettre datée du 24 mars 1997, le ministre annonçait qu'il donnait suite à la demande qui avait été formulée par le directeur des centres jeunesse Chaudière-Appalaches, M. Michaud, qui présentait ce projet de centre spécialisé de réadaptation qui consiste en gros à expérimenter un modèle optimal de réadaptation en tenant compte d'une plus grande implication des parents. Ce projet implique la mise en place de mesures plus intenses de soutien familial et de développement de partenariats sous-régionaux et ça s'inscrit dans le cadre des orientations ministérielles. Avec ça, une somme de 62 000 $ a été accordée.

Alors, voilà, M. le Président, un exemple de ce qu'on peut faire avec des modifications de pratiques.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le député. Je vous rappelle simplement que nous étions sur la période des cinq minutes allouées. Ça a été votre première période. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à ce moment-ci? J'apprécierais que, lorsque quelqu'un va faire sa dernière intervention, M. le ministre en particulier, vous le mentionniez. M. le ministre, si je comprends bien, vous voulez intervenir?


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. En l'absence, malheureusement, du porte-parole de l'opposition officielle sur ce sujet important de l'interpellation, bien sûr qu'il me fait plaisir d'intervenir, notamment en ce qui regarde un des aspects de la seule intervention que j'ai pu entendre sur le fond des choses de la part de la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, le dossier de Boscoville.

M. le Président, Boscoville, on peut en parler sous différents rapports, de ce que ça a été, effectivement, une contribution importante au développement des services en réadaptation. On peut en parler au niveau des installations mêmes de Boscoville actuellement, ou du béton, si vous voulez, ou de ce qu'a représenté Boscoville, c'est-à-dire sa renommée, le symbole que représente Boscoville.

J'aimerais simplement à ce moment-ci vous rappeler la démarche des centres jeunesse de Montréal telle qu'elle apparaît à ce moment-ci. Premièrement, cette décision du conseil d'administration, adoptée à l'unanimité, une résolution par appui qui entérine les objectifs et les principes du virage-milieu, c'est-à-dire de cette nouvelle approche en termes d'intervention auprès des jeunes, et, à cette résolution, un ajout, également adopté à l'unanimité, à l'effet d'associer le personnel à l'élaboration des moyens à retenir pour implanter cette approche-là. Les deux autres résolutions à l'ordre du jour portaient sur les moyens d'implanter le virage, dont la fermeture de Boscoville, effectivement.

Mais je rappelle, M. le Président, qu'il a été aussi unanimement résolu de suspendre la décision du conseil d'administration sur ces questions jusqu'au 27 mai prochain et de tenir des auditions publiques sur ces questions les 12 et 14 mai prochains. On voit là, de la part des membres du conseil d'administration, une attitude tout à fait raisonnable, tout à fait responsable d'entendre ceux et celles voulant s'exprimer sur l'opportunité de la mesure concernée, d'entendre les gens et de pouvoir prendre éventuellement cette décision-là finale avec toutes les informations et les opinions qui auront pu, à ce moment-là, suite aux audiences des 12 et 14 mai, être portées à son attention.

Alors, M. le Président, bien sûr, Boscoville a été, de 1954 jusque dans les années quatre-vingt, finalement – je disais tout à l'heure – la figure de proue ou le vaisseau amiral des expériences des fois révolutionnaires et un peu uniques en ce qui regarde l'intervention auprès de la clientèle en question. On est parti de salles et de dortoirs de 100 ou 200 adolescents, à caractéristique des écoles de réforme du temps, vers des milieux de vie organisés en pavillons et en petites unités de 12 à 15 jeunes. Et ça faisait, je dirais, contraste par rapport à l'approche précédente et certainement une amélioration notable. Les adultes qui les accompagnaient n'étaient plus des préfets de discipline, mais des éducateurs qui recevaient une solide formation professionnelle, qui croyaient à la relation d'aide et surtout aux jeunes. C'était ça, essentiellement, Boscoville.

Alors, il y a eu évolution et développement des services dans l'ensemble du réseau. Et, comme toute institution, il est arrivé des moments où il a fallu et il faut toujours prendre des virages qui s'imposent selon l'évolution des choses, des connaissances, des pratiques. C'est vrai dans le domaine de la santé, c'est vrai aussi dans le domaine social et c'est vrai dans ce cas particulier.

Alors, la situation actuelle. En 1993, la loi a favorisé, donc, la création des centres jeunesse de Montréal qui regroupent sous un même conseil d'administration le Centre de services sociaux du Montréal métro et les centres de réadaptation de l'île de Montréal, dont Boscoville. Et, entre 1995 et 1997, la majorité des établissements ayant une mission centre de réadaptation pour jeunes en difficulté d'adaptation, centre de réadaptation pour mères en difficulté d'adaptation et le Centre de protection de l'enfance et de la jeunesse de Montréal, incluant Boscoville, ont fusionné et ça s'appelle les centres jeunesse de Montréal. Donc, pour répondre à l'ensemble de la clientèle des jeunes en difficulté, le centre jeunesse Montréal est passé d'un réseau d'établissements à un seul, finalement, grand établissement capable d'assurer la mise en place d'un meilleur continuum de services intégrés, capable de répondre à l'ensemble des besoins pour l'ensemble de la clientèle en fonction de ses missions.

Mais on ne doit pas s'arrêter là, M. le Président, on doit continuer à essayer d'adapter la dispensation des services en fonction, je veux dire, des méthodes d'aujourd'hui qui ont beaucoup plus de chance d'avoir de l'impact sur la clientèle en question par, notamment, ce virage-milieu. Et c'est vers là qu'on se dirige globalement et c'est ce qui nous amène aujourd'hui à réfléchir sur, finalement, Boscoville, sa mission et son avenir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions de cinq minutes? Il n'y pas d'autres interventions de...

M. Bertrand (Portneuf): ...une autre intervention de cinq minutes.

(10 h 50)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Vous voudriez faire une autre intervention? Vous pouvez le faire, M. le ministre.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Bon, en constatant l'absence de l'opposition officielle, M. le Président, vous me permettrez néanmoins d'intervenir sur un autre aspect de l'intervention de Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, tout à l'heure, en ce qui regarde la clientèle des mères en difficulté d'adaptation.

De quoi s'agissait-il, M. le Président? Les centres jeunesse de Montréal offrent des services de réadaptation à des femmes, des jeunes filles en difficulté d'adaptation grave, pendant la période périnatale ou de petite enfance, dans le but de les amener à faire des apprentissages qui leur permettront d'assumer leur propre développement et de remplir adéquatement leur rôle parental. Alors, pour rencontrer cette mission, on dispose, à Rosalie-Jetté, de services externes de 63 places. C'est la mise en situation. Six en appartements supervisés; 21 en unités de vie individualisées et 36 en foyers de groupe où mères, nouveaux-nés et jeunes filles enceintes pouvaient être hébergées.

Alors, qu'est-ce que ça devient et pourquoi cette ressource-là? L'intervention, qui vise le bien-être, la responsabilité et l'autonomie de la jeune fille et la sécurité de son enfant, doit être intensive, continue, personnalisée et se situer le plus près possible de la communauté afin d'éviter la marginalisation et d'être pleinement efficace, comme intervention.

Alors, toujours dans le contexte de cette approche-milieu, de cette approche, je dirais, de vie, là, que les centres jeunesse de Montréal se proposent maintenant d'identifier, les services aux mères en difficulté grave d'adaptation devront, eux aussi, être plus disponibles à partir du milieu de vie, M. le Président, et être plus centrés sur l'intégration dans la communauté en favorisant, notamment, l'intervention d'urgence et de crise et, avec le milieu, l'intervention éducative et sociale individualisée, offerte de façon intensive, l'évaluation et le développement des compétences parentales par des ateliers de stimulation mère-enfant, le développement d'un réseau d'hébergement plus souple, hébergement de répit pour enfant, familles d'accueil pour mères, enfants et adolescentes enceintes, foyers et appartements supervisés pour jeunes mères, de façon à développer davantage l'autonomie, et un partenariat avec les ressources intermédiaires et communautaires du réseau de la santé mentale pour les mères majeures.

Alors, cette approche, M. le Président, entraînera donc une modification importante, vous le comprenez bien, de la configuration actuelle des services. J'aimerais que l'opposition officielle soit là pour que je puisse lui expliquer et faire en sorte qu'on comprenne, de l'autre côté de la Chambre, de quoi il est question véritablement, bon. Donc, une modification importante de la configuration actuelle des services, passant d'une approche de type conventionnelle à une approche beaucoup plus novatrice, répondant, je dirais, aux règles de l'art en termes d'intervention dans une société avancée et civilisée, donc une approche plus novatrice dans la communauté avec possibilités d'hébergement plus souples, beaucoup plus souples que dans les formules que nous avions jusqu'à présent.

Alors, il ne s'agit pas, ici, de réduire les services et les ressources cliniques – il s'agit de bien comprendre – qui y sont affectés, mais bien de les redéployer différemment dans des formes d'intervention davantage adaptées. Alors, cependant, pour permettre à nos clientèles et à nos intervenants de s'adapter à cette évolution, on doit effectivement transformer en deux phases et on va conserver, minimalement encore pendant un an, deux foyers de groupe, c'est-à-dire 18 places, et les appartements supervisés déjà existants.

Voilà, M. le Président, je tenais, sur cette question précise qui a été introduite dans l'intervention de la porte-parole de l'opposition officielle, à donner l'heure juste sur ce qu'on fait. Il faut comprendre, là, qu'on continue à agir. Ce n'est pas parce qu'on modifie des services qu'on abandonne le support à ces mères-là ou à ces futures mères là. Au contraire, on utilise différemment les services à notre disposition dans des formes d'intervention qui sont bien davantage adaptées à la façon d'agir aujourd'hui, et je rappelle, M. le Président, qu'il s'agit d'une question qui fera aussi l'objet d'audiences publiques. J'espère, à ce moment-là, que l'opposition officielle se tiendra informée du contenu et sera présente pour, d'une certaine façon, en apprendre sur ce domaine. Je vous remercie.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions de cinq minutes? Il n'y a pas d'autre intervention... Il y a une autre intervention de cinq minutes. Alors, M. le ministre.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Alors, M. le Président, j'aimerais quand même... La question des listes d'attente a été abordée par ma collègue, et j'aimerais élaborer un peu là-dessus. Premièrement, au cours des trois dernières années, le nombre de signalements reçus, retenus, et le nombre de prises en charge effectuées n'enregistrent pas de mouvement important. J'irais même ajouter ceci, M. le Président: de façon générale, il s'agit d'une situation qui est stable depuis maintenant plusieurs années. Selon les informations qui sont à ma disposition, ça date déjà de sept à huit ans où on a à peu près le même niveau d'attente. Alors, si l'affluence des demandes enregistre une très légère baisse dans les centres jeunesse, le volume de situations en protection reste le même comme celui des situations qui, après évaluation, transitent par une prise en charge du réseau de protection. Le taux de judiciarisation enregistre, toutefois, une très légère baisse.

D'autre part, à noter que, pour ce qu'on appelle les code 1 – pour n'être pas trop technique, là, pour qu'on nous comprenne, dans le jargon, là, ça, ça veut dire les urgences, les situations, par exemple, où la vie de l'enfant est en danger, les situations d'abus physiques et sexuels, les situations concernant les 0-6 ans – il y a priorisation immédiate. C'est ce qu'on appelle le code 1. Alors, ces cas-là sont traités sans délai, au niveau de l'évaluation. O.K.? Donc, on peut parler de listes d'attente, mais il s'agit, dans ces cas-là, de code 1, au fond, d'un traitement immédiat au niveau de l'évaluation.

De même, toutes les ordonnances judiciaires sont respectées et une situation en attente à la prise en charge peut impliquer un suivi, une intervention minimale et la dispensation de certains services pendant la période d'attente. Ce n'est pas parce qu'il y a une période d'attente qu'on n'agit pas. On est en mesure effectivement d'agir. Et vous trouverez, M. le Président, dans les chiffres que je vais vous citer, le portrait des listes d'attente, là, telles qu'on les connaît actuellement. Nombre de signalements reçus, 1994, 1995, 1996, à peu près 50 000: 51 227, 51 099, 49 418. Nombre de signalements reçus, c'est aux alentours de 25 000, pendant ces années-là. Et les nouvelles prises en charge, aux alentours de 8 000.

C'est quoi, la conclusion de ça, M. le Président? La conclusion c'est qu'on voit bien, de la façon qu'on a d'intervenir jusqu'à présent, au cours, grosso modo, des 10 dernières années, mettons huit ans, on constate à peu près le même volume de listes d'attente, le même volume de signalements. C'est donc dire que les méthodes traditionnelles d'intervention n'ont, d'une certaine façon, qu'une portée limitée. Elles ont une portée, mais ce n'est pas en continuant la façon d'intervenir sur ces problèmes-là, la façon de rendre les services actuellement qu'on va finalement régler le problème. C'est par des approches alternatives, c'est par des approches modulées, bien sûr, en s'appuyant sur l'expérience qu'on a jusqu'à présent, mais, également, en faisant évoluer le réseau de services vers de nouvelles façons d'intervenir, notamment, en amont des problèmes, M. le Président. Ce qui nous guide comme façon d'intervenir, c'est la même façon qui existe dans d'autres secteurs d'activité, par exemple, en santé. On peut bien continuer à ramasser les gens sur des brancards, les accidentés de la route, indéfiniment, si on ne corrige pas la courbe quelque part, on aura toujours des gens à ramasser puis à soigner par la suite. Donc, si on intervient en amont du problème, on a plus de chance effectivement que les, entre guillemets, listes d'attente soient moins fortes, qu'on arrive à faire en sorte qu'elles soient moins fortes un jour. Alors, c'est un peu la même chose là-dedans.

Le virage-milieu vise à faire en sorte qu'on dispense davantage des services plus proches du milieu naturel de vie des gens, qu'on puisse intervenir en même temps sur l'environnement du jeune, sur sa famille. Ceci va permettre, croyons-nous, d'avoir un signalement plus tôt des cas qui risquent de poser problème et donc une intervention à la fois plus légère et probablement beaucoup plus efficace, plutôt qu'attendre tout le temps d'être devant des situations qui, finalement, ont tellement empirées qu'elles sont difficiles à régler une fois qu'on les prend en charge. Voilà, M. le Président, ce que j'avais à dire essentiellement sur cette question.

(11 heures)

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions de cinq minutes?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je constate que, encore une fois, l'opposition officielle a adopté la politique de la chaise vide. Je ne suis pas sûr que c'est la meilleure façon de défendre ses points de vue et surtout de défendre les intérêts des différentes clientèles et des personnes qui sont visées par nos centres jeunesse. Mais, enfin, j'aimerais quand même, puisque le règlement me le permet, M. le Président, faire une dernière intervention équivalant aux 10 minutes normalement que j'aurais pour terminer.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Alors, je vous invite à faire, justement, votre période de 10 minutes maximum, de conclusion.


Conclusions


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Alors, je serai très bref, M. le Président. Je pense que le gouvernement, dans le cadre de ses interventions au niveau des problématiques jeunesse et notamment en ce qui regarde les centres jeunesse, a une façon d'agir tout à fait responsable.

Nous devons, avec les ressources financières qui nous sont consenties, faire en sorte d'avoir davantage d'impact sur les problématiques dans le domaine de la jeunesse. Et, pour ce faire, nous devons envisager, effectivement, un certain nombre de modulations dans la façon de rendre les services, et c'est ce qu'on essaie de faire, et ce qu'on va réussir à faire grâce aux orientations qui sont, finalement, l'objet d'une très longue réflexion, je dirais de l'ordre d'au moins 10 ans, là.

La commission Rochon a commencé ses travaux en 1985, grosso modo. Elle les a terminé en 1988. Ça a été repris par deux ministres de la Santé et des Services sociaux successifs, à la fin des années quatre-vingt, début des années quatre-vingt-dix. La loi 120, je crois, a été adoptée, qui était très en ligne avec ces orientations-là.

Tout l'effort de réflexion qui s'est rajouté, par exemple, avec le rapport Bouchard, le rapport Harvey, je crois, 1 et 2 est venu ajouter à la pertinence de ce qui avait été donné comme orientation, autant au niveau de la politique santé et bien-être qu'à d'autres occasions. Et ce que nous sommes en train de faire, compte tenu des ressources à notre disposition, c'est de réussir ce virage-milieu, et nous allons le réussir, M. le Président.

Je ne peux que déplorer actuellement que l'opposition officielle se soit désintéressée, ce matin, de cette question par son absence. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bertrand, Charlevoix): Je vous remercie beaucoup. Ceci termine cette interpellation. La commission ayant rempli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 2)


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