L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des affaires sociales

Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le mardi 2 novembre 2004 - Vol. 38 N° 74

Consultation générale sur le projet de loi n° 57 - Loi sur l'aide aux personnes et aux familles


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Seize heures cinq minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues. Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle le mandat de la commission. Nous sommes réunis afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le projet de loi n° 57, Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

Je vous rappelle, chers collègues et aux personnes qui assistent à nos travaux, que l'usage des téléphones cellulaires est strictement interdit dans la salle et je vous prierais, tous ceux qui en font l'usage, de bien vouloir les mettre hors tension.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, Mme Richard (Duplessis) va être remplacée par M. Bourdeau (Berthier). Voilà.

Organisation des travaux

Le Président (M. Copeman): Merci. Nous avons le plaisir d'accueillir deux groupes cet après-midi: le premier, le Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec et, le deuxième, autour de 17 heures, le Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec.

Je suis informé, chers collègues, que le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille est retenu à Ottawa. Vous le savez, il participe à une conférence des ministres responsables des services sociaux à Ottawa. Et la première indication qu'on avait, c'est qu'il serait présent évidemment cet après-midi. On a eu une deuxième indication qu'il serait en retard. Puis finalement, très malheureusement, il ne sera pas présent à nos délibérations cet après-midi.

Alors, nous allons procéder avec les travaux de la commission. M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Oui, M. le Président. On comprend fort bien, puis on a donné notre assentiment au fait qu'on pourrait procéder pour entendre les groupes qui ont été invités cet après-midi. Mais, puisque j'ai aperçu le ministre de la Jeunesse au salon bleu, est-ce que la présidence a pensé inviter le ministre de la Jeunesse, puisque nous avons deux groupes qui représentent les intérêts et la perspective des jeunes aujourd'hui?

Le Président (M. Copeman): La réponse est non.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que vous ne pensez pas que c'eût été une bonne idée de...

Le Président (M. Copeman): Ça ne revient pas à la présidence d'inviter des parlementaires, des collègues parlementaires. L'ordre de la Chambre indique qui est membre de la commission. M. le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille est membre pour la durée du mandat. Ça ne revient pas à moi d'inviter qui que ce soit. Les ordres de la Chambre sont connus, et les parlementaires ont le loisir de participer à nos travaux à leur gré.

M. Bouchard (Vachon): Autrement dit ? excusez-moi, M. le Président ? ce que vous indiquez, c'est que le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille aurait pu demander à être remplacé par le ministre de la Jeunesse.

Le Président (M. Copeman): Écoute, le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille a été nommé, pour la durée du mandat, comme membre... Je vais consulter Mme la secrétaire, qui est beaucoup mieux informée sur ces questions que moi.

(Consultation)

Le Président (M. Copeman): Mme la secrétaire m'avise, évidemment en vertu des règles de solidarité ministérielle: Un ministre peut agir au nom d'un autre. Ça se fait, mais, aujourd'hui, il n'est pas prévu que le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et de la Famille soit remplacé par un autre ministre. C'est tout.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président.

Le Président (M. Copeman): M. le député.

M. Bouchard (Vachon): Si les membres du parti ministériel le souhaitent, nous, nous serions prêts à retarder les travaux de quelques minutes, s'ils veulent inviter le ministre responsable de la Jeunesse à venir rencontrer les groupes cet après-midi.

Le Président (M. Copeman): Je ne le crois pas pertinent, M. le député, honnêtement. Je vous ai déjà indiqué que tous les parlementaires sont avisés des travaux de la commission. Nous étions avisés... les membres de la commission ont été avisés, convoqués avant aujourd'hui. L'ordre de la Chambre est très clair. Toute personne qui désire être présente a le choix de le faire. Je ne pense pas qu'il est pertinent de procéder à d'autres invitations, ou quoi que ce soit. L'ordre de la Chambre nous convoquait pour 16 heures, alors tous ceux qui voulaient être présents et dont l'horaire le permettait sont présents. C'est ça que je constate.

M. Bouchard (Vachon): Ça va. M. le Président, je...

Le Président (M. Copeman): Oui.

n (16 h 10) n

M. Bouchard (Vachon): Ce sera ma dernière intervention sans doute, là, mais...

Le Président (M. Copeman): Sans doute.

M. Bouchard (Vachon): Non, mais ça dépend beaucoup de vos réponses. Mais ce que je comprends, c'est que le Conseil des ministres n'a pas jugé bon, étant donné la situation, de déléguer un ministre ici pour écouter les groupes, et aucun ministre n'a cru bon être présent dans les circonstances. Je comprends que le temps de réaction est un peu court, là, mais quand même. Est-ce que je comprends de vos interventions que...

Le Président (M. Copeman): M. le député, ce n'est pas à moi de répondre au nom du Conseil des ministres. Vous allez tirer vos conclusions. Tout ce que je sais: que nous étions avisés que malheureusement le ministre de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille est retenu à Ottawa pour des raisons qu'on connaît. Comme je vous dis, là, ce n'est pas à moi de répondre au nom du Conseil des ministres ou qui que ce soit en ce qui concerne les décisions relatives aux travaux de la commission. Nous avons quorum. Je suggère que nous commencions nos travaux.

M. Bouchard (Vachon): Très bien, M. le Président. Merci.

Auditions (suite)

Le Président (M. Copeman): Merci. Alors, c'est avec plaisir que nous accueillons les représentants du Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec. M. le président Vincent, bonjour. Vous avez une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie par un échange encore une fois d'une période maximale de 20 minutes, chaque côté de la table. Sans plus tarder, je vous prierais de présenter les personnes qui vous accompagnent et de débuter votre présentation.

Comité aviseur-jeunes
d'Emploi-Québec (CAJ)

M. Vincent (François): Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer les députés présents à la commission parlementaire. Puis, je vais présenter la délégation du Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec, en commençant par ma droite: Nicolas Fournier, qui est coordonnateur du Comité aviseur-jeunes; ensuite de ça, Martin Pétrarca, qui est trésorier du comité puis également représentant du Regroupement québécois des organismes en développement en employabilité; puis moi-même, François Vincent, je suis président du conseil exécutif du Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec et également vice-président de la Fédération étudiante universitaire du Québec.

Donc, avant de faire la description du mémoire, je vais vous... C'est ça. Excusez-moi. Je vais recommencer. Avant de rentrer précisément dans l'aspect qui touche la loi n° 57, vous avez remarqué, en lisant le mémoire qu'on vous a présenté, qu'on touchait à la fois du Plan d'action gouvernemental à la lutte à la pauvreté et à l'exclusion puis également de la loi n° 57. Pour nous, il était très important de traiter de ces deux aspects-là puisque le plan de lutte est le fondement même du projet de loi.

En ce sens, bien que je n'en traiterai pas en détail dans ma présentation, il y a un aspect qui ne se retrouve ni dans le projet de loi ni dans le plan d'action, qui selon nous devrait s'y retrouver: il s'agit du rôle d'Emploi-Québec et de la Commission des partenaires du marché du travail. La Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité mentionnait, à l'article 12, puis on en fait mention dans notre mémoire, le rôle d'Emploi-Québec et de la Commission des partenaires du marché du travail dans les définitions et les mises en place des mesures d'aide. Maintenant, cette précision est absente du plan d'action et du projet de loi. Au CAJ, nous croyons que l'article n'est pas contraignant et assure le rôle d'Emploi-Québec et des instances partenariales.

Maintenant, pour ce qui est directement relié à la loi n° 57, j'aborderai en détail deux éléments clés du projet de loi, soit l'Alternative jeunesse et la contribution parentale, parce que selon nous ces deux aspects sont au coeur des besoins des jeunes pour favoriser leur insertion en emploi.

Tout d'abord, concernant l'Alternative jeunesse, nous tenons à saluer l'intention du gouvernement d'offrir aux jeunes prestataires des outils particuliers pour améliorer leur situation. Cela dit, les indications du projet de loi nous laissent avec plus de questions que de réponses, et nous y reviendrons tout au long de la présentation.

Nous comprenons que la volonté du gouvernement est de retourner les jeunes prestataires sur le marché du travail. Précisons ici qu'il ne faut pas faire l'erreur que souvent les gouvernements, dans le passé, ont faite, c'est-à-dire s'empresser à retourner le jeune en difficulté sur le marché du travail sans que les problèmes du jeune soient résolus. Puis bien souvent de nombreux jeunes prestataires du soutien au revenu ont de nombreux problèmes personnels et familiaux qu'il importe de solutionner avant d'indiquer le chemin de l'emploi. Parce que, si ces problèmes ne sont pas réglés, l'insertion du jeune en emploi sera très difficile.

Ici, je peux donner un exemple, puis sans démagogie: un jeune en emploi qui va retourner, qui a encore des problèmes de toxicomanie, bien ça va être très difficile pour lui d'avoir une réussite au niveau de son emploi, il va être porté à décrocher beaucoup plus rapidement. Donc, pour assurer le succès en emploi d'un jeune, il faut prendre en considération ces problèmes-là puis l'encadrer adéquatement pour pouvoir justement, quand il va aller sur le marché du travail, être productif et efficace. Donc, selon l'étude du CAJ, il s'agissait là du principal problème des parcours obligatoires, soit d'insister uniquement sur l'insertion professionnelle et de ne pas régler les problèmes à la source.

Logiquement, si le gouvernement veut que l'Alternative jeunesse fonctionne véritablement, il est essentiel que les mécanismes de continuité de services soient fonctionnels avant l'entrée en vigueur du nouveau programme. Le CAJ craint que les premières générations des prestataires fassent les frais d'un programme qui n'est pas encore au point.

Aussi, selon les membres du CAJ, le succès de l'Alternative jeunesse repose en grande partie sur le volontariat des jeunes. La philosophie du nouveau programme doit être basée sur le double volontariat. Puis là j'explique ce que nous entendons par «double volontariat», c'est-à-dire le choix d'adhérer au programme et le choix au niveau du parcours à effectuer. Le jeune décide par lui-même de participer à l'Alternative jeunesse, il serait contradictoire que le parcours à suivre soit déterminé de manière arbitraire. Des méthodes de coercition rentreraient directement en contradiction avec le barème plancher, et ce serait ni plus ni moins qu'un retour au parcours obligatoire.

En lien avec le volontariat, le projet de loi devrait ouvrir la porte clairement aux clientèles qui n'ont pas actuellement accès aux mesures de soutien du revenu, soit les décrocheurs de 16 à 18 ans et les sans-chèque. Selon le CAJ, il est primordial d'offrir aux jeunes décrocheurs un soutien du revenu et des mesures d'insertion sociale adaptées à leurs besoins particuliers, de manière à éviter qu'ils soient non seulement des décrocheurs scolaires, mais également des décrocheurs sociaux, car, si on y pense, les décrocheurs scolaires ont de hauts potentiels de devenir des sans-chèque. Puis souvent, quand ils sont rendus à ce niveau, ça devient excessivement difficile de les intégrer socialement et par le fait même très difficile pour eux de réintégrer l'emploi.

Notons que l'Alternative jeunesse créera un nouveau profil juridique pour les jeunes y participant, tel qu'il est stipulé à l'article 71. En effet, cet article stipule la mise en place d'une allocation jeunesse. Les membres du CAJ s'inquiètent de la possibilité que ce statut juridique soit une nouvelle manière d'introduire des discriminations envers les jeunes, notamment au niveau des prestations et des recours. Une des leçons que nous avons tirées de Solidarité jeunesse fut que la création des nouveaux statuts juridiques peut introduire des discriminations. Ainsi, dans le nouveau statut juridique, il importe de prévoir que les jeunes aient au moins les mêmes droits que les autres prestataires.

Parlant de discrimination auprès des jeunes, le gouvernement passe à côté d'une belle occasion d'abolir une mesure particulièrement dure envers les jeunes prestataires, soit la contribution parentale. Cette disposition prévoit que les parents des jeunes prestataires doivent contribuer à un certain montant. Bien que certaines dispositions prévoient l'exclusion des jeunes du calcul de la contribution pour certains cas, les études du CAJ nous ont démontré que très peu de jeunes sont au courant des mécanismes et les utilisent.

Aussi, de nombreux jeunes sont en rupture avec leurs parents et ne jouissent d'aucun support, quel qu'il soit. On peut même rajouter ? puis ça, ça a été mentionné dans les groupes de discussion qu'on a tenus ? que même le support moral des parents est une chose rare chez les jeunes prestataires. Puis, en passant, puis là je m'adresse aux députés du parti gouvernemental, même ceux qui sont encore chez leurs parents ne vivent pas dans une situation particulièrement enchantante. L'imposition, pour ces jeunes, d'une réduction de 100 $ est tout à fait aberrante. Plusieurs jeunes, dans les groupes de discussion qu'on a menés, nous ont même affirmé que, dès qu'ils recevaient un chèque, ils devaient payer une forte pension.

n (16 h 20) n

Plusieurs groupes l'ont mentionné, et ils en parleront plus en détail: le projet de loi laisse beaucoup de zones d'ombre qui seront définies par les règlements plus tard. Toutefois, ces impressions sont d'une réelle importance pour définir le sens exact du projet de loi. En ce sens, les membres du Comité aviseur-jeunes ont souligné l'importance de maintenir une voie de dialogue et de consultation sur les règlements qui définiront le projet de loi n° 57. Aussi, il serait de mise que le ministère s'associe avec les organismes communautaires en employabilité spécialisés auprès des jeunes, notamment pour l'élaboration de l'Alternative jeunesse. Finalement, le Comité aviseur-jeunes constate que l'Alternative jeunesse donnera plus de travail à l'ensemble des organismes dévoués aux jeunes. Il est absolument nécessaire que le gouvernement, dans ses prochains budgets, consacre les sommes nécessaires, sans quoi il créerait une situation qui serait contradictoire.

Je vous remercie puis je vous invite à nous adresser des questions. Les deux personnes qui sont venues avec moi sont là précisément pour ça, étant donné que M. Pétrarca oeuvre directement dans le domaine et que M. Fournier a rédigé le mémoire. Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, M. Vincent. Alors, afin de débuter l'échange, Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci beaucoup, M. le Président. M. Fournier, M. Pétrarca et M. Vincent, merci pour la présentation de votre mémoire. Je vous dirais: Excusez le ministre de n'avoir pu être présent, au nom des députés de l'aile parlementaire du gouvernement. C'est quelque chose qui n'était pas prévu, malheureusement il a été retenu. Alors, on s'excuse, mais soyez assurés que nous allons lui faire part de tous vos commentaires et propositions.

J'aimerais revenir un peu sur... Vous demandiez, afin qu'Alternative jeunesse fonctionne bien, que la clientèle cible soit mieux définie. Qu'est-ce que vous aimeriez voir apparaître à ce niveau-là?

M. Pétrarca (Martin): On semble comprendre, en lisant le projet de loi, que l'Alternative jeunesse va s'adresser principalement aux jeunes qui sont admissibles à l'aide sociale. Mais on fait mention également que, dans des cas exceptionnels, d'autres jeunes qui ne sont pas admissibles à l'aide sociale pourraient bénéficier des services d'Alternative jeunesse. Donc, on souhaite que rapidement soit précisé à qui s'adresse Alternative jeunesse. Et le CAJ, les membres du CAJ sont d'avis que tout programme d'insertion professionnelle pour les jeunes devrait s'adresser à tous les jeunes en difficulté et non pas cibler des statuts particuliers. Donc, on parlait des sans-chèque, les jeunes décrocheurs, les 16-18 ans qui sont sans emploi, qui ne vont pas aux études, donc ces jeunes-là devraient, eux aussi, pouvoir bénéficier des programmes qui seront mis en place dans le cadre d'Alternative jeunesse.

Mme Charlebois: Effectivement, le ministre est très préoccupé par la situation des 16-18, comme vous le mentionnez. On prévoit déjà la possibilité de mettre en place des programmes pour cette clientèle mais aussi pour les jeunes, comme vous le disiez, que vous appelez sans-chèque, là. Il y a une volonté d'étendre le Programme d'alternative jeunesse à ces clientèles-là.

M. Pétrarca (Martin): Dans le projet de loi, on parle «dans les cas exceptionnels». Donc, c'est là-dessus qu'on a accroché un petit peu, qu'est-ce que ça veut dire, «exceptionnels»?

Mme Charlebois: O.K. Vous voudriez voir préciser...

M. Fournier (Nicolas): Mais ça, ça va plus loin. Ce qu'on aimerait... Dans le fond, on aimerait savoir comment est-ce que... clairement, dans le fond... Parce que ce qu'on prévoit ? je ne me souviens plus exactement à quel article ? c'est que le ministre «peut» le faire. Nous, ce qu'on dit, c'est que le ministre doit aller plus loin, il «doit» le faire. Il doit leur offrir quelque chose. Ça ne doit pas être seulement qu'une possibilité, mais bien une obligation d'offrir quelque chose à ces jeunes-là.

Mme Charlebois: Permettez-moi... Vous nous parlez aussi d'Alternative jeunesse, que ça ne doit pas être le seul parcours offert pour les jeunes. Effectivement. Vous savez qu'Alternative jeunesse, c'est un ensemble de mesures. Quelles mesures voudriez-vous voir apparaître, là, dans l'ensemble des mesures, qui vous apparaîtraient possibles et souhaitables?

M. Pétrarca (Martin): Il existe déjà des services. Il y a déjà des services qui sont existants auprès des jeunes. Il y a énormément d'organismes qui sont spécialisés en employabilité auprès des jeunes. Il y a une belle diversité de services qui sont offerts. Donc, il faudrait que l'ensemble des services soient offerts aux jeunes. On parlait de continuité de services, donc de réduire les délais administratifs, de faciliter l'accès aux services qui sont existants aux jeunes, en fonction de leurs besoins. Donc, quand on dit qu'il ne faudrait pas que ce soit le seul parcours offert aux jeunes, c'est-à-dire qu'il faut leur permettre un petit peu de pouvoir bénéficier des services qui vont répondre vraiment à leurs besoins et non pas les lancer dans un processus tout établi d'avance, où est-ce qu'il n'y aurait pas de flexibilité, dépendant des différents besoins des jeunes, leurs situations particulières.

Mme Charlebois: Vous connaissez probablement Solidarité jeunesse, qui est actuel.

M. Pétrarca (Martin): Oui.

Mme Charlebois: Vous savez que c'est un programme qui fonctionne quand même très bien. Alternative jeunesse se veut quelque chose d'encore plus large, je pense. C'est ce qui est souhaité.

Pour continuer dans la continuité des services justement, vous savez aussi qu'il est prévu au projet de loi des ententes entre les ministères, pour justement assurer la continuité. Vous parliez tantôt de jeunes qui ont des problèmes de toxicomanie, etc. C'est déjà prévu au projet de loi qu'il y aurait une continuité et des conversations et des ententes entre les différents ministères pour justement assurer une continuité dans les services, parce que, comme vous le disiez dans votre mémoire... Qu'est-ce que vous souhaiteriez encore là voir développé? En termes de continuité, là, est-ce que vous croyez que les échanges qu'il y aurait entre les ministères pourraient être favorables?

M. Fournier (Nicolas): Dans un premier temps, comme on le dit dans le mémoire, ce que l'on souhaite, c'est que les ententes de continuité de services soient prêtes avant l'implantation du programme, pour ne pas qu'on fixe des ententes pendant que les jeunes sont en attente et qu'en ce sens-là on vient dans le fond travailler à... On travaillerait à l'envers, dans ce cas-là. Ce que l'on souhaite dans les ententes de continuité de services, notamment, c'est que des jeunes qui ont à la fois des problèmes sur le plan personnel et sur le plan professionnel puissent régler l'ensemble de leurs problèmes pour, je pourrais dire, arriver à leurs objectifs de vie. Donc, si le jeune a un problème de toxicomanie, comme M. Vincent y faisait référence plus tôt, donc qu'il puisse, dans le cadre de ses démarches de réinsertion vers l'emploi, régler ses problèmes de toxicomanie puis revenir vers sa démarche vers l'emploi sans qu'il y ait de délai, sans qu'il y ait d'attente, sans qu'il y ait donc de risque que ce jeune-là décroche complètement.

Mme Charlebois: Je pense que c'est dans ce sens-là quand on dit: Il y aura entente entre les divers ministères, c'est dans ce sens-là, c'est d'assurer cette continuité-là justement pour ne pas que... j'allais dire qu'on échappe, là, mais ce n'est pas le véritable mot que je devrais utiliser, pour que le jeune ait une continuité de services justement, pour ne pas qu'il arrive à décrocher complètement, comme vous le disiez.

Vous avez peu parlé de... Parlez-moi donc de prime à la participation. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez vu comme quelque chose d'incitatif? Parce que je sais que vous mentionnez que l'abolition des mesures coercitives, c'est déjà un bon pas, hein? Parlez-moi de votre vision de prime à la participation.

M. Pétrarca (Martin): Bien, évidemment qu'on est en faveur que le gouvernement offre des primes de participation aux jeunes qui désirent faire des programmes, participer à des mesures d'employabilité. Donc, ça existe déjà, je crois comprendre que ça va continuer. Donc, on est tout à fait en accord avec ça.

Je reviendrais à la problématique un petit peu des autres jeunes qui ne sont pas sur l'aide sociale, qui ont les mêmes difficultés et qui, eux, n'ont pas accès présentement, dans la loi actuelle, aux primes de participation, lorsqu'ils participent à des mesures d'employabilité; dans certains cas, oui, dans d'autres cas, non. Donc, on souhaite un réel décloisonnement à ce niveau-là. Un jeune en difficulté, qu'il soit sur l'aide sociale, qu'il soit sur l'assurance-emploi, qu'il soit sans chèque, qu'il soit chez ses parents, 16-18 ans, on pense qu'il devrait avoir les mêmes incitatifs, le même soutien de l'État, peu importe son statut de revenus. Donc, je ne sais pas si ça répond à votre question.

Mme Charlebois: Oui. Vous avez aussi parlé de la contribution parentale.

M. Pétrarca (Martin): Oui.

Mme Charlebois: J'aimerais que vous développiez davantage là-dessus, parce que vous disiez qu'il y a des jeunes qui se voient pénalisés parce qu'ils ne reçoivent pas finalement la contribution parentale comme ils devraient la recevoir. Et avez-vous, comment vous dirais-je, une statistique? C'est-à-dire que, parmi les jeunes, dans l'ensemble des jeunes, est-ce que c'est le cas de la plupart des jeunes ou si...

n (16 h 30) n

M. Pétrarca (Martin): Disons que je n'ai pas la statistique exacte avec moi aujourd'hui. Mais il y a énormément de jeunes, lorsqu'ils font une demande à l'aide sociale, qui voient leurs prestations diminuées à cause du calcul de la contribution parentale. On parle de, je pense, autour de 40 %, mais sous toutes réserves, je pense, c'est ça qu'on a... On a fait un avis là-dessus récemment.

On demande aux jeunes donc qui sont soumis au critère de contribution parentale d'avoir une aide financière de leurs parents, selon les calculs, là, du niveau de revenus de leurs parents. Ce qu'on voit sur le terrain, c'est que les jeunes, qui sont souvent en rupture avec leurs familles, n'ont pas la force d'aller voir leurs parents et de leur exiger qu'ils les soutiennent financièrement, vont se décourager à travers ça et vont tout simplement abandonner l'idée d'avoir une aide de l'État au niveau de l'aide sociale. Donc, à ce niveau-là, nous, on trouve que la contribution parentale devrait être abolie parce qu'elle est discriminatoire pour les jeunes. Donc, c'est vraiment quelque chose qui existe seulement pour les jeunes, et ça appauvrit des jeunes.

Et à quelque part il y a quelque chose de contradictoire parce que la contribution parentale, dans le fond ça vise à diminuer le nombre de jeunes qui vont bénéficier de l'aide sociale, et, de l'autre côté, on s'aperçoit que les jeunes qui ne sont pas sur l'aide sociale ont moins accès au soutien de l'État, au niveau des mesures d'employabilité. Donc, il y a quelque chose de contradictoire là-dedans, et c'est le jeune, en bout de ligne, qui en fait les frais.

Mme Charlebois: Vous ciblez aussi au niveau des organismes communautaires: une stratégie d'accompagnement systématique doit être faite en collaboration avec le milieu communautaire. Est-ce que vous voyez une collaboration avec prime à la participation? Est-ce que vous voyez une collaboration des jeunes vers les organismes communautaires?

M. Fournier (Nicolas): Non. Dans le fond, ce qu'on aimerait voir, et on tire cette recommandation-là d'un de nos derniers avis, qui portait sur les jeunes décrocheurs de 16-18 ans et les jeunes sans chèque, donc c'est que le gouvernement mette en branle une stratégie d'accompagnement pour l'ensemble de ces jeunes-là. Et, quand on dit qu'il la conçoive en collaboration avec les organismes, dans le fond on recommande au gouvernement de ne pas élaborer cette stratégie-là tout seul dans son coin et d'arriver avec quelque chose qui est ficelé en disant: Voilà ce que vous aurez maintenant à appliquer. On aimerait que, lors de l'élaboration d'une telle stratégie, les organismes spécialisés en développement de la main-d'oeuvre pour les jeunes soient impliqués dans l'élaboration.

Mme Charlebois: O.K. Je vais laisser...

Le Président (M. Copeman): Ça va? Oui. Mme la députée de Nelligan, pour une première intervention en commission parlementaire.

Mme James: Merci, M. le Président. M. Vincent, M. Pétrarca et M. Fournier, merci. En tant que jeune députée, je voulais tout d'abord vous remercier pour le travail que vous faites auprès des jeunes.

Dans votre mémoire, à la page 13, vous parlez des agents d'aide, puis j'aimerais vous entendre, étant donné que vous êtes un groupe, un regroupement sur le terrain, par rapport à vos observations ou ce que vous entendez d'une formation que les agents d'aide ont besoin.

M. Fournier (Nicolas): C'est tiré d'un des avis que l'on avait déposés à Emploi-Québec, en janvier 2003, et sur spécifiquement l'obligation de parcours. Si vous voulez, je pourrais vous en faire parvenir une copie. Dans cet avis, ce que l'on démontrait, c'est que les agents d'aide à l'emploi dans les centres locaux d'emploi n'étaient pas formés adéquatement pour recevoir les jeunes. Donc, ils n'avaient pas reçu de formation particulière pour accueillir, pour, je dirais même, avoir une relation intéressante avec le jeune, pour que le jeune se sente sécurisé dans sa relation avec l'agent. Donc, c'est à ce niveau-là, beaucoup, là, qu'il y avait des problèmes de formation.

Mme James: Merci.

Le Président (M. Copeman): Ça va?

Mme James: Oui.

Le Président (M. Copeman): Messieurs, peut-être au sujet du programme Alternative jeunesse et d'autres possibilités de programmes spécifiques, nous avons entendu de la part de plusieurs groupes, depuis le début de nos travaux, des commentaires à l'effet que, dès qu'on commence à énumérer des programmes pour des clientèles cibles, on laisse planer qu'il y a un retour à un temps où les programmes étaient beaucoup plus aléatoires, que les agents avaient beaucoup plus de discrétion. Vous vous dites assez clairement favorables au programme Alternative jeunesse et vous ne semblez pas nécessairement partager cette crainte que, si on commence à cibler des clientèles, on fait un retour en arrière, à des moments où tout le processus d'employabilité ou de réinsertion en emploi était plus aléatoire. Vous êtes à l'aise avec la notion d'Alternative jeunesse. M. Fournier.

M. Fournier (Nicolas): Moi, l'intention, c'est...

Le Président (M. Copeman): Oui.

M. Fournier (Nicolas): On a donné des commentaires sur un programme spécifiquement pour les jeunes parce que le mandat du Comité aviseur-jeunes est de se préoccuper des questions d'employabilité jeunesse. Je ne pense pas que, par ce document-là, on cautionne le fait de développer divers programmes pour chaque clientèle. Nous, on s'est attardés à ce qui était présenté pour les jeunes, et c'est dans cette optique-là qu'on l'a fait.

Par ailleurs, ce que l'on demande aussi, c'est d'aller plus loin dans la consultation, parce que selon nous le projet de loi n° 57 prévoit beaucoup trop d'espaces où il n'y a pas de précision. Je vous dirais un peu à la blague que ce qu'on perçoit, nous, c'est comme si on nous demandait si ça nous intéressait de venir faire un tour de bateau pour 2 500 $, mais on ne nous disait pas si c'était une croisière ou un tour de canot puis on ne nous disait surtout pas c'était quoi, la destination. Donc, en ce sens-là, il y a beaucoup d'imprécisions, qu'il faudra selon nous... il va falloir clarifier de la part du gouvernement.

Le Président (M. Copeman): Monsieur... Oui? J'allais peut-être parler des... Non, allez-y, M. le député, je vous en prie.

M. Marsan: Pour compléter. Je ne veux pas vous...

Le Président (M. Copeman): Non, allez-y, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Et à mon tour de vous remercier de nous présenter votre opinion aujourd'hui. Je pense que c'est très intéressant. Une courte question d'information: Vous parlez du statut juridique dans votre mémoire, que les jeunes participants à l'Alternative jeunesse aient des droits et des recours équivalents aux prestataires de l'aide sociale, est-ce que vous avez des droits et des recours très précis, là, que vous souhaitez voir inclus dans la loi et pourriez-vous nous dire lesquels?

M. Pétrarca (Martin): Disons que la crainte qu'on avait à la lecture du projet de loi, c'était que le jeune qui décide de participer à Alternative jeunesse ? parce que c'est volontaire, et ça, on le salue ? se retrouve peut-être dans des situations où il n'aurait pas les mêmes recours que s'il était sur l'aide sociale. Donc, ce qu'on souhaite, c'est qu'il ait absolument les mêmes recours que les prestataires d'aide sociale, qu'il ait le droit d'aller en révision de son dossier, etc. Donc, ce n'étaient pas des recours précis, mais c'était d'avoir les mêmes droits, donc qu'il ne se retrouve pas dans une situation particulière où il pourrait regretter d'avoir accepté de participer à Alternative jeunesse en toute bonne foi.

Et on parlait du niveau de prestation. On souhaite évidemment que le jeune qui souhaite participer à Alternative jeunesse ait au moins des prestations équivalentes à s'il avait choisi d'être sur l'aide sociale.

M. Marsan: Merci.

Mme Charlebois: Juste une précision pour terminer, parce que vous dites que vous voulez les mêmes recours. J'ai entendu le ministre, la semaine passée, justement dire qu'il y aurait les mêmes recours et même que, par rapport à Solidarité jeunesse qui existe actuellement, ils vont en avoir plus, les jeunes, de recours. Ils vont avoir les mêmes recours que le restant de la clientèle. Ça a été précisé la semaine passée.

Le Président (M. Copeman): Peut-être une dernière question sur toute la notion de la contribution parentale. J'ai un souvenir, du temps que j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière d'aide sociale, que cette...

Une voix: Ça fait longtemps.

Le Président (M. Copeman): ... ? oui, ça fait longtemps ? que cette mesure est appliquée de façon assez restreinte, que le nombre de personnes qui sont touchées par cette mesure est relativement limité, que la mesure est un peu complexe à calculer. Et tout ça pour vous dire: Je comprends, vous êtes contre, c'est très clair dans votre mémoire.

n (16 h 40) n

Par contre, il y a un paragraphe à l'article 47 qui dit somme toute que, s'il est difficile... ? je vous le lis, là ?«qu'ils manifestent un refus ? ça, on parle des parents ? de contribuer à subvenir à ses besoins ou qu'ils ont exercé de la violence à son égard», il soit exempté de la contribution parentale. Est-ce que vous trouvez que ce langage donne au moins une certaine flexibilité à l'application de la contribution parentale? Manifestement, en lisant votre mémoire, vous dites: Ça ne va pas assez loin. Mais en tout cas il me semble que... peut-être, ce n'est pas l'idéal, mais il y a une certaine compréhension dans la loi que, quand les parents ne font pas la contribution parentale, on ne veut pas pénaliser outre mesure le jeune. Avez-vous des cas où vous croyez que ça cause préjudice, l'application de cet article-là?

M. Fournier (Nicolas): Je dirais, dans un premier temps, que, dans les avis que le Comité aviseur-jeunes fait, on utilise très peu les... On utilise des statistiques, mais on fait beaucoup de groupes de discussion avec des jeunes qui vivent ces problématiques-là, et ce que nos groupes de discussion nous ont démontré, c'est que les jeunes en question ne connaissent pas les recours. On leur en parle dans les groupes de discussion, et c'est comme si c'était la première fois qu'on leur en parlait. Donc, c'est beau d'en prévoir, mais, quand ils ne sont pas utilisés, c'est tout à fait inefficace. Donc, je pense, c'est pour ça, il faut... Si on veut prémunir ces jeunes-là, il faudrait ne pas leur donner le fardeau de la preuve, mais plutôt prendre l'initiative pour le faire.

Et, comme François le disait plus tôt, ce qu'on a constaté à quelques reprises, c'est qu'il y avait des jeunes qui, lorsqu'ils avaient leurs premiers chèques, devaient verser une pension à leurs parents. Donc, il y a une double... Il y a une contribution parentale inversée, même une contribution de l'enfant envers le parent.

Le Président (M. Copeman): O.K. C'est sûr que cet exemple est difficilement traité par notre système d'aide de dernier recours, dans le sens suivant: ça relève beaucoup plus, je crois, à des relations entre le prestataire et les parents. Moi, comme père de famille, je trouve ça injuste qu'une famille exige une pension de la part... une fois qu'on a reçu le chèque, mais je ne suis pas sûr à quel point l'État peut s'ingérer dans la dynamique des relations familiales.

M. Fournier (Nicolas): Je suis tout à fait d'accord avec vous. Ce qu'on demande au gouvernement dans le fond de reconnaître, c'est que ces jeunes-là vivent dans une situation difficile. Et là où, nous, on a encore une fois un problème de compréhension, c'est lorsque le gouvernement impose une coupure supplémentaire de 100 $ pour des jeunes qui restent à la maison. On reconnaît d'un côté que ces jeunes-là sont dans une situation difficile, mais en même temps on leur impose une coupure supplémentaire.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, de solidarité sociale et de la famille.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci de votre contribution à cette commission. M. le Président, je profite de votre intervention pour soulever le concept ? et j'allais quasiment dire le quiproquo ? qui se manifeste dans les propos tenus par les membres de l'aile parlementaire à propos du concept de solidarité familiale.

Dans le projet de règlement du 21 septembre, M. le Président, le ministre a invoqué la solidarité familiale en disant que, oui, quelque part on allait enlever 100 $ sur le chèque de la personne qui revenait vivre chez ses parents en référant au concept de solidarité familiale, c'est-à-dire que les parents doivent éventuellement aider leurs enfants dans des moments difficiles de leur vie. Enfin, il y a quelque chose là-dedans qui me semble assez paradoxal: on invoque le concept de solidarité familiale, mais on laisse tomber le même concept alors que les situations inverses peuvent se présenter. C'est-à-dire que ce qu'on apprend, c'est que ces jeunes-là font très souvent partie de familles dont le revenu est très faible et qu'ils contribuent, eux, à l'enrichissement de la cagnotte familiale, qui n'est déjà pas très élevée.

Alors, ce que vous évoquez dans le fond, dans votre intervention en commission, et non pas dans votre mémoire parce que je ne pense pas que vous l'attaquiez de front dans votre mémoire, c'est la clause du 21 septembre concernant la coupure de 100 $ au chèque d'aide sociale chez des personnes, et non pas simplement des jeunes, mais des personnes, qui retourneraient dans leurs familles. Est-ce que vous voulez commenter plus avant cette disposition?

M. Pétrarca (Martin): Bien, disons, quand on a pris connaissance de cette nouvelle disposition là, ça nous a un peu surpris. Dans un premier temps, nous, on se réjouissait du fait de la venue d'un barème plancher dans le nouveau projet de loi. On s'était positionnés pour ça dans un avis antécédent. Donc, en voyant cette nouvelle disposition là, bien on dit: Bon, le barème plancher n'est pas si plancher que ça parce que, là, on vient enlever un 100 $ à un jeune qui est sur l'aide sociale, qui a déjà très peu.

Il y avait antérieurement, dans la Loi sur le soutien du revenu, une clause sur le partage de logement, où des jeunes qui partageaient un logement, des jeunes, des assistés sociaux en fait, avaient des coupures sur leurs chèques. Ça, ça a été aboli. Mais là un jeune qui partage le domicile avec ses parents se fait couper son chèque d'aide sociale de 100 $. Alors que, nous, on trouve positif qu'un jeune soit demeuré chez ses parents, c'est comme si le fait de demeurer chez ses parents devait être pénalisé au niveau de l'aide sociale. Donc, c'est clair que, nous, on souhaite que cette disposition-là soit retirée.

M. Bouchard (Vachon): Il y a un avis, enfin il y a une opinion qui a été émise assez clairement par la présidente du Conseil de la famille, lorsqu'elle est venue devant cette commission, à l'effet que le concept de solidarité sociale était utilisé sans doute faussement ou abusivement par le ministre dans ces circonstances, et votre intervention me semble aller dans le même sens. C'est-à-dire que l'idée que des personnes puissent s'associer à l'intérieur d'une même famille pour améliorer leur sort, qui n'est pas très enviable en passant, là, ça vous semble selon vous plus une manifestation de solidarité familiale qu'il faudrait plutôt soutenir que décourager. Et votre intervention me fait aussi penser que... Ce que vous dites, c'est qu'on revient par la porte d'à côté instituer une pénalité pour partage de logement. C'est ce que je comprends de votre intervention?

M. Pétrarca (Martin): Oui. Nous, ce qu'on souhaite, c'est que les jeunes soient aidés, aient une mesure incitative s'ils souhaitent retourner sur le marché du travail, retourner aux études. Donc, tout l'aspect coercitif, on souhaite que ça ne fasse pas partie des mesures qui s'appliquent aux jeunes en particulier ? on est ici pour parler des jeunes. Donc, pour nous, cette disposition-là, c'est coercitif donc, on enlève un 100 $ à un jeune qui est déjà pauvre. Donc, ce n'est pas en appauvrissant les gens, on pense, qu'on va les aider à s'en sortir.

M. Bouchard (Vachon): M. le président, puisque vous abordez la question de la coercition, l'article 49 du présent projet de loi abolit les pénalités. Vous savez qu'avec 149 il va y avoir sans doute un déboursé supplémentaire d'à peu près 8 millions par année, là, 8 ou 9 millions par année. C'est à peu près ce qu'on faisait comme ponction avec les pénalités.

Maintenant, le gouvernement prévoit, dans son plan d'action et dans ses annonces budgétaires, une demi-indexation, une indexation partielle, à la demie, pour les personnes qui sont aptes au travail. Le gouvernement fait une économie d'à peu près 24,3 millions par année avec cette disposition-là. Vous vous exprimez, dans votre mémoire, à l'effet que cette disposition pourrait être ou est discriminatoire envers un sous-groupe des personnes inscrites à l'aide sociale. Est-ce que vous voulez aller plus loin dans cette analyse?

M. Fournier (Nicolas): Bien, nous autres, ce qu'on souhaitait, très rapidement là-dessus, là, c'est que... Pour nous, c'est peu justifié de prévoir une demi-indexation pour certains, une pleine indexation pour d'autres. Donc, tout simplement ce que l'on souhaitait, c'est que l'ensemble des prestataires puissent jouir d'une pleine indexation de leurs prestations.

M. Bouchard (Vachon): Que le ministre ait une chance, là, d'insérer dans son projet de loi un principe de prestation automatique, quelle est selon vous la motivation ministérielle à ne pas le faire?

M. Fournier (Nicolas): ...dans ce cas-là.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que vous avez déjà eu des...

M. Fournier (Nicolas): Je ne veux pas me prononcer au nom du ministre, il faudrait lui demander.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que vous avez déjà eu des discussions ou des échanges avec le cabinet, avec le ministre, là-dessus?

M. Fournier (Nicolas): Pas encore.

M. Bouchard (Vachon): O.K. Est-ce que vous souhaitez en avoir?

M. Fournier (Nicolas): Oui.

M. Bouchard (Vachon): Très bien. Puisque vous êtes comité aviseur auprès d'Emploi-Québec, vous manifestez votre inquiétude, votre préoccupation à l'effet qu'Emploi-Québec et notamment, aussi, la Commission des partenaires sur le marché du travail ne soient pas désormais mentionnées dans le projet de loi comme étant des interlocuteurs corrélatifs ou corrélationnels dans l'aménagement des stratégies d'insertion en emploi. Pouvez-vous mieux nous informer sur vos inquiétudes, vos préoccupations? Qu'est-ce que cela pourrait entraîner éventuellement?

n (16 h 50) n

M. Pétrarca (Martin): Bien, disons que les intervenants, les organismes qui travaillent auprès des jeunes, collaborent avec Emploi-Québec, sont représentés à la Commission des partenaires du marché du travail. Donc, pour nous, c'est d'avoir une voix au chapitre au niveau des orientations en matière de services aux jeunes, notamment en employabilité. Donc, en voyant cet article-là disparaître de la Loi sur le soutien du revenu, c'est une inquiétude. Est-ce que ça veut dire qu'on pourrait prendre des décisions sans consulter la Commission des partenaires du marché du travail ou est-ce que la société civile a voix au chapitre de même que les organismes communautaires en particulier? Donc, c'est notre inquiétude. Et ce qu'on demande, c'est que l'article, je pense que c'est l'article 12, soit rajouté, si on veut, au nouveau du projet de loi.

Le Président (M. Copeman): Ça va? M. le député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Avant de passer à des questions, j'avais simplement un léger commentaire à M. le Président: la déception que mon collègue a amenée un peu de ne pas voir le ministre de la Jeunesse présent. Le projet de loi actuellement, et j'avertis les membres de la commission, le projet de loi actuellement va rentrer en opposition ou... peut-être pas en opposition mais va rentrer en jeu avec la nouvelle Stratégie d'action jeunesse que le gouvernement veut mettre en place.

Actuellement, le ministre de la Jeunesse avait eu comme ouverture, au Forum des générations... il disait qu'il voulait consulter les groupes jeunes pour la rédaction de la Stratégie jeunesse. De ne pas voir aucun représentant, que ce soit son adjoint parlementaire ou le ministre lui-même, c'est un peu décevant, parce que les décisions qui seront prises lors de cette commission, avec ce projet de loi, vont influencer directement sa Stratégie jeunesse. Et c'est là que je me questionne sur le fait: Y aura-t-il une réelle consultation pour cette stratégie-là? En tout cas, je l'espère. Mais j'espère au moins que l'information de ces deux groupes jeunes qu'on aura aujourd'hui sera acheminée au premier ministre... au ministre de la Jeunesse, étant donné qu'il n'a même pas voulu se déplacer ou qu'on n'a pas pensé à l'inviter.

La première question que j'avais pour vous, c'est au niveau de la sous-utilisation des ressources externes en employabilité. J'aimerais ça comprendre selon vous pourquoi il y a cette sous-utilisation-là. Est-ce que ça vient, entre autres, des coupures de 57 millions? La part un peu, là, qu'on vit actuellement avec la privatisation à tous crins. Est-ce que c'est un peu ça qui fait en sorte que les gens ont tendance à garder plus les jeunes chez eux, dans leurs institutions, qu'essayer de les envoyer vers des ressources externes?

M. Pétrarca (Martin): Ce qu'on demande dans le fond, dans notre mémoire, c'est que les ressources externes, l'ensemble des organismes en employabilité qui interviennent auprès des jeunes soient mis à contribution dans l'offre de services aux jeunes, autant dans l'élaboration des programmes également. Parce qu'on ne se le cachera pas, c'est beaucoup les organismes d'employabilité, les ressources externes qui vont être chargés de l'opérationnalisation des programmes, qui devront également renseigner les jeunes, informer les jeunes, accompagner les jeunes. Donc, on souhaite être mis à contribution au niveau de notre expertise terrain autant dans l'élaboration des programmes qu'ensuite de ça dans l'opérationnalisation. Et effectivement vous parliez des coupures, mais il faudra que les ressources financières soient au rendez-vous au niveau d'Emploi-Québec pour qu'on puisse mettre tous ces programmes en place.

M. Bourdeau: Dans votre mémoire, vous parliez, à la page 24, de la Stratégie emploi jeunesse. On sait que le ministre, en septembre 2003, avait pris l'engagement, là, de rapatrier ces sommes-là. Pour vous, en quoi ce rapatriement de sommes là va pouvoir réellement aider la jeunesse, aider les programmes de la jeunesse?

M. Fournier (Nicolas): En fait, le Comité aviseur-jeunes a écrit à cet égard-là plusieurs avis. Ce que, nous, on souhaite par le rapatriement de ces sommes-là, c'est d'avoir une offre de services bonifiée pour les jeunes, donc qui pourrait... Avec ces sommes-là, on pourrait notamment offrir des services aux sans-chèque, et surtout que ça nous permettrait de stopper les dédoublements, parce qu'il y en a, des dédoublements, entre l'offre de services au niveau provincial et au niveau fédéral. Donc, je pense qu'à cet égard-là on a noté à plusieurs reprises notre déception de ne pas voir les initiatives pour le rapatriement des sommes inscrites au plan d'action, d'autant plus qu'il y a eu une motion unanime de l'Assemblée nationale qui a été adoptée, si je me souviens bien, au début 2002, spécifiquement sur le rapatriement des sommes laissées entre les mains du fédéral. Donc, ce que, nous, là... Maintenant que le plan d'action est passé, on aimerait, à tout le moins, qu'il y ait une marque... plutôt que le ministre commence à... entame les négociations à cet égard-là.

M. Bourdeau: Au niveau de l'allocation jeunesse, j'aurais peut-être deux questions pour vous sur la question jeunesse. La première, ce serait: Pour vous, comment pourrait être modulée cette allocation-là? Parce qu'avec Solidarité jeunesse on a actuellement cette prime qui peut être donnée, qui était modulée par les carrefours jeunesse-emploi, par exemple, selon la participation, qui pouvait donner un meilleur résultat au niveau des jeunes qui participaient au programme Solidarité jeunesse. Pour vous, cette allocation jeunesse, comment elle pourrait être... Est-ce qu'elle pourrait être modulée dans le même sens? Qui pourrait s'occuper justement de pouvoir moduler ça d'une façon adéquate pour que le jeune ait les meilleurs services et que le jeune puisse réellement réussir dans ces programmes?

M. Pétrarca (Martin): On ne s'est pas rendus là, je pense ? tu me corrigeras, Nicolas ? dans nos réflexions, à savoir qui qui pourrait s'occuper, là, d'offrir les allocations aux jeunes, et tout ça, là. Ce qu'on dit, c'est que les allocations devraient répondre aux besoins financiers des jeunes et devraient au moins être équivalentes à ce qu'ils recevraient s'ils étaient sur l'aide sociale et avoir les fameuses primes de participation, étant donné que les jeunes d'Alternative jeunesse vont participer à des mesures d'employabilité. Donc, que ce soit au moins l'équivalent de s'ils étaient sur l'aide sociale avec les primes de participation, qu'ils ne se retrouvent pas pénalisés.

M. Bourdeau: Le minimum vital, de préférence ça pourrait être plus.

M. Pétrarca (Martin): De préférence, plus, oui.

M. Bourdeau: C'est bon. Vous avez parlé du... Je veux revenir sur le statut juridique. Vous parliez de discrimination auprès des jeunes. J'aimerais ça avoir peut-être des exemples un peu plus concrets. Qu'est-ce que vous parlez par discrimination des jeunes par rapport à ce statut juridique là? En quoi vous la définissez, cette discrimination-là?

M. Fournier (Nicolas): Bien, c'est un potentiel, hein? Quand on prévoit un statut juridique, c'est que, bon, on peut cibler certaines mesures en disant: Cette mesure x, y s'adressera aux prestataires de x, y, z... ou plutôt aux personnes qui répondent à x, y, z critères. Donc, là où, nous, on exprimait une crainte, c'est à l'effet que, dans l'élaboration de mesures, on oublie ou on omette d'inscrire que les prestataires de l'Alternative jeunesse soient admissibles aux mêmes mesures que les autres prestataires. Toutefois, ce que j'ai compris, et les députés du côté gouvernemental pourront me corriger si je me trompe, c'est que le ministre s'était exprimé en faveur de l'égalité, donc qu'il n'y ait pas de discrimination liée au statut juridique, si j'ai bien compris l'intervention plus tôt. Dans ce cas-là, tant mieux.

M. Bourdeau: O.K. Au niveau de la contribution parentale, qui est un sujet qui revient ici mais qui revient dans d'autres débats, avec les prêts et bourses entre autres, toujours cette contribution parentale qu'on calcule, si je comprends bien votre position, la problématique que vous avez, c'est qu'avec le projet de loi qui ne modifie pas cette contribution parentale là le fardeau de la preuve est donné aux jeunes de dire: Regarde, là, mes parents ne m'aident pas, ou ils me battent, ou etc. Et c'est ça, la grande problématique que vous avez par rapport à ça, parce que la preuve pour faire ça, c'est difficile. Est-ce que vous avez déjà eu des cas un peu plus concrets de ça?

M. Pétrarca (Martin): Très fréquemment. C'est qu'on parle souvent des jeunes, les sans-chèque, je pense que tout le monde s'entend pour dire qu'il existe des jeunes qui sont sans chèque, donc qui sont sans revenus, et souvent la cause de ça, c'est le critère de contribution parentale. Nous, ce qu'on s'aperçoit, c'est que les jeunes sont en difficulté. On leur dit: Mais écoute, tu as des recours, tu as des droits, tu peux obliger tes parents à t'aider, etc. Les jeunes ne le font pas, décident de se débrouiller autrement, n'ont pas la force, donc vont accepter des petits emplois, etc.

M. Bourdeau: M. Vincent, tout à l'heure, vous avez parlé en disant ne pas vouloir faire de préjugé par rapport, bon, à un jeune, par exemple, qui serait toxicomane, bon, difficulté à se trouver un emploi parce qu'à la base il a des problèmes sociaux plus graves. Comment voyez-vous ça avec la mise en place d'Alternative jeunesse? Comment on pourrait faire que, le jeune, lorsqu'il arrive est en difficulté, on puisse...

Une voix: Diagnostiquer.

M. Bourdeau: ...merci, diagnostiquer ? il y a des mots comme ça, des fois ? le jeune et l'envoyer à la bonne place? Qui pourrait faire ça? Et comment on pourrait mettre en place cette structure-là pour ne pas échapper justement le jeune, là?

n (17 heures) n

M. Vincent (François): Je vais envoyer la question à Nicolas.

M. Fournier (Nicolas): Dans plusieurs avis du Comité aviseur-jeunes, on mentionnait qu'il était important que le premier diagnostic se fasse lorsque le jeune en question est encore sur les bancs d'école, avant qu'il devienne un décrocheur scolaire, parce qu'une fois qu'il est devenu un décrocheur scolaire c'est beaucoup plus difficile de le rejoindre et c'est beaucoup plus difficile de lui proposer quelque chose. Alors, il faut commencer selon nous avant que le jeune décroche de l'école, dans le fond, à le diriger vers des endroits qui vont l'aider ou bien à se trouver une formation qui correspond à ses besoins ou à tout le moins signaler rapidement qu'il décroche et pouvoir intervenir rapidement.

M. Bourdeau: O.K. Ça, c'est l'idéal, et je suis d'accord avec vous, l'intervention précoce de dire: Bon, on le cible en partant. Mais il y aura toujours des cas où on va en échapper, hein, on ne s'en rendra pas compte tout de suite, les problèmes vont arriver un peu plus tard, etc. C'est là que j'aimerais vous amener, voir comment, vous, vous voyez... Le jeune qui arriverait avec ces difficultés-là, qui pourrait s'en occuper? Parce que ce n'est pas évident de faire cette...

M. Vincent (François): Je pourrais répondre d'offrir un encadrement nécessaire puis de les envoyer aux bonnes places et non pas juste focusser sur faut retourner en emploi le plus rapidement possible, pour que, quand le jeune arrive sur le marché du travail, comme on l'a dit lors de la présentation, il n'ait pas réglé les problèmes à la source puis qu'il décroche parce que ses problèmes personnels ne sont pas réglés. Donc, c'est justement de travailler aussi en collaboration avec les organismes qui oeuvrent dans ces milieux-là.

M. Pétrarca (Martin): Exactement. Je rajouterais que souvent, dans les mesures actuelles, un jeune ? je vous donne un exemple bien concret ? qui participe à un programme d'employabilité et qui décide d'arrêter son programme pour, exemple, aller dans un programme de thérapie, pour l'instant, c'est vu comme un échec parce qu'il a abandonné son programme d'employabilité, il n'est pas en emploi. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est que, au contraire, ce n'est pas un échec, c'est un succès. Avec les intervenants, il a réussi à identifier son problème, il a réussi à trouver la force de prendre son problème en main et d'aller en thérapie. Et ensuite de ça il va revenir à l'organisme d'employabilité avec un problème en moins et là il va être prêt davantage à intégrer le marché du travail. Donc, il faudrait que les étapes intermédiaires soient reconnues et que le jeune n'ait pas l'impression d'avoir échoué une fois de plus.

M. Bourdeau: Juste en terminant. Selon vous, c'est quoi, les principaux amendements qui devraient être apportés au projet de loi pour correspondre un peu plus à votre vision de ce que devrait être le projet de loi n° 57?

M. Fournier (Nicolas): Comment je pourrais dire? c'est moins des amendements au projet de loi que de voir qu'est-ce qui va être apporté par les règlements. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de matériel qui va se retrouver, d'après notre lecture du projet de loi, qui va se retrouver dans les règlements. Puis, à l'heure actuelle, on n'a aucune indication, ou sinon très peu, de ce qui va se retrouver dans les règlements.

M. Bourdeau: ...peut-être plus se retrouver dans le projet de loi.

M. Fournier (Nicolas): Ça, c'est le gouvernement qui choisira comment fonctionner. Mais, comme je le disais plus tôt, nous, ce qu'on souhaiterait, c'est, à tout le moins, qu'il y ait une formule de consultation pour ce qui va se retrouver dans les règlements pour voir si... Parce que le Comité aviseur-jeunes a en son sein des organismes qui oeuvrent auprès de ces jeunes-là. Donc, est-ce que les règlements vont répondre aux besoins du terrain, aux besoins des jeunes?

M. Bouchard (Vachon): Il y a un projet de règlement, le 21 septembre, M. le Président. Et est-ce que votre groupe a déjà émis un avis sur le projet de règlement du 21 septembre concernant, par exemple, la coupure de 100 $?

M. Fournier (Nicolas): Bien, je vous dirais que l'avis sur le projet de loi a été adopté le 16 septembre, donc quelques jours avant cette coupure supplémentaire là. Je vous dirais qu'on ne s'est pas positionnés, on n'a pas émis d'avis à cet égard-là, mais, si on suit la logique qui est soutenue par le mémoire sur le projet de loi n° 57, on peut dire que c'est une aberration, cette coupure-là.

Le Président (M. Copeman): Messieurs, je tiens à vous préciser, en ce qui concerne le processus d'adoption de règlements, évidemment, ça ne revient pas nécessairement à la Commission des affaires sociales de faire ces genres de consultations là, à moins qu'il y ait un ordre de la Chambre. Mais par contre un règlement de cette nature-là est prépublié dans la Gazette officielle, puis il y a une période de 45 jours où les groupes peuvent réagir. Alors, c'est le processus qui existe actuellement, qui sera mis en vigueur lors de la prépublication d'un éventuel règlement sur la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Alors, c'est le processus que tout gouvernement suit depuis fort longtemps.

M. Vincent, M. Pétrarca, M. Fournier, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom du Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec.

J'invite immédiatement les représentants du Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec à prendre place à la table et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 5)

 

(Reprise à 17 h 9)

Le Président (M. Copeman): Alors, la Commission des affaires sociales reprend ses travaux. C'est avec plaisir que nous accueillons le Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec. Je ne sais pas qui est le porte-parole. Monsieur?

M. Desjardins (Richard): Richard Desjardins.

Le Président (M. Copeman): M. Desjardins, bienvenue. Vous connaissez comment ça fonctionne. Vous avez une période maximale de 20 minutes pour faire votre présentation, qui sera suivie par un échange de plus ou moins 20 minutes chaque côté de la table. Sans plus tarder, je vous invite à présenter les personnes qui vous accompagnent et à débuter votre présentation.

Réseau des carrefours jeunesse-emploi
du Québec (RCJEQ)

M. Desjardins (Richard): Merci, M. le Président. Je tiens d'entrée de jeu à vous présenter les personnes qui m'accompagnent. D'abord, à ma droite, vous trouvez Mme Monique Sauvé. Mme Sauvé est vice-présidente du Réseau des carrefours jeunesse-emploi. Et, pour ce qui est de la personne assise à ma gauche, je vous présente M. Francis Côté, qui est le directeur général du Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec. Enfin, moi-même, Richard Desjardins, j'occupe la fonction de président du Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec et non chanteur.

n (17 h 10) n

M. le Président, je tiens, au nom du Réseau des carrefours jeunesse-emploi, à vous remercier, ainsi que tous les membres de la Commission des affaires sociales, de nous donner l'occasion de vous présenter notre point de vue sur le projet de loi n° 57, la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. D'abord, permettez-moi, M. le Président, de présenter rapidement notre réseau et ensuite les acteurs locaux que sont les carrefours jeunesse-emploi.

D'abord, le Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec est un organisme sans but lucratif qui regroupe 107 carrefours jeunesse-emploi présents sur l'ensemble du territoire québécois. La création du réseau découle d'une volonté d'échange et de collaboration entre les carrefours. Notre mission est donc de les regrouper, de les représenter, mais aussi de promouvoir et de défendre collectivement une approche communautaire adaptée aux besoins des jeunes adultes. Enfin, nous cherchons à favoriser l'intégration sociale et économique des jeunes adultes québécois.

Pour leur part, les carrefours jeunesse-emploi sont des organismes qui cherchent à répondre à la volonté et à l'engagement des partenaires privés, communautaires et institutionnels, de faire en sorte que les jeunes adultes finissent par trouver leur place au coeur des collectivités. Les carrefours sont des lieux d'accueil, d'aide et de valorisation pour les jeunes. Leur mandat spécifique est de travailler à l'amélioration des conditions de vie en général des jeunes adultes de 16-35 ans en les accompagnant dans leurs démarches d'insertion sociale, professionnelle et bien sûr économique.

Enfin, pour résumer, nous donnons la chance aux jeunes de réaliser différents projets de vie. Ces projets peuvent être l'emploi, le retour aux études, le démarrage d'une petite entreprise, etc.

M. le Président, en comprenant ce que font les carrefours jeunesse-emploi, il vous sera facile de comprendre pourquoi nous porterons principalement notre propos sur le chapitre III du projet de loi, soit celui qui traite du programme Alternative jeunesse. Nous avons fait ce choix parce que nous croyons que les membres de cette commission ont eu le loisir d'entendre et de lire bon nombre de propos portant sur les autres chapitres du projet de loi, à cette étape-ci des audiences. En somme, nous pensons qu'il est important d'éviter de reprendre les commentaires éclairés des organismes qui nous ont précédés.

Pour commencer, sachez que nous saluons la volonté du législateur de soutenir davantage les jeunes adultes qui requièrent une aide financière de l'État en mettant en place des activités leur permettant d'acquérir ou de recouvrer leur autonomie personnelle, sociale et professionnelle. Nous sommes bien placés pour savoir à quel point il est efficace de miser sur des mesures et programmes ciblés et adaptés aux besoins particuliers des jeunes, mais encore plus du jeune adulte.

Nos cinq années passées à travailler avec les jeunes de Solidarité jeunesse nous poussent à affirmer aux membres de cette commission l'incontournable nécessité de soutenir adéquatement et de développer des initiatives où les jeunes adultes sont au centre de la prise de décisions et où l'on mise sur une intervention personnalisée globale, fondée sur un accompagnement et un suivi soutenus. Cette incontournable nécessité de mieux soutenir les jeunes dans leur insertion socioprofessionnelle est aussi commandée par le contexte social et économique, mais surtout démographique des prochaines décennies. Les participants au Forum des générations d'octobre dernier, dont nous étions, ont d'ailleurs convenu de cette question. Nous croyons aussi que les citoyens du Québec sont, pour l'ensemble, d'avis que le Québec moderne n'a plus les moyens financiers et moraux de n'offrir qu'un chèque d'aide sociale pour unique solution à un jeune en difficulté.

Ce sont ces motifs qui nous poussent à voir d'un bon oeil la création, dans le projet de loi, du programme Alternative jeunesse. Toutefois, attention, il ne faudrait pas prendre ces dernières paroles comme un appui inconditionnel de notre part à ce programme. Non, car pour nous Alternative jeunesse doit remplir un certain nombre de conditions gagnantes, pour ne pas dire de conditions sine qua non.

Notre participation au déploiement de Solidarité jeunesse sur le territoire et les récents accrochages avec le ministère de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille dans le changement d'application du projet pilote Solidarité jeunesse au programme Solidarité jeunesse ? nous, on appelle ça le Solidarité jeunesse du 31 mars 2004 et celui du 1er avril 2004, il y a une différence entre les deux ? nous poussent à demeurer prudents au sujet de notre adhésion à ce nouveau programme. Il n'en demeure pas moins que nous souhaitons qu'Alternative jeunesse connaisse un aussi grand succès que le projet pilote Solidarité jeunesse, ça veut dire le projet d'avant avril 2004.

Pour ce faire, l'expérience acquise auprès des milliers de jeunes qui ont fréquenté les carrefours jeunesse-emploi nous démontre que, au-delà de l'enchâssement d'un tel programme dans un texte législatif, il faut à tout prix considérer certains facteurs clés dans son application.

Sur ce, je laisse la parole à Mme Monique Sauvé, si vous y consentez, bien sûr, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Avec grand plaisir. Allez-y, madame.

Mme Sauvé (Monique): Merci, M. le Président. Alors, ces facteurs clés, quels sont-ils? D'abord, la question du volontariat est un incontournable. En ce qui concerne le projet de loi n° 57, nous considérons qu'il est nécessaire que le texte législatif en fasse mention. Nous sommes partisans d'une formule de double volontariat. Je m'explique.

La participation ou non à Alternative jeunesse doit être laissée au choix des individus. Par la suite, lorsque la personne a fait le choix du programme Alternative jeunesse, il devrait aussi avoir le choix de la mesure qu'il aura à entreprendre au sein de ce programme.

Ensuite, sur le plan des droits et obligations, nous nous questionnons sur l'allocation jeunesse introduite à l'article 71 du projet de loi. Nous estimons qu'il est nécessaire qu'un jeune adulte participant à une démarche d'intégration bénéficie, lui, ainsi que son ménage, de revenus suffisants. Tel que libellé actuellement, l'article 71 ne précise pas quel serait le montant minimal octroyé en allocation. Nous savons que la loi n'est pas le lieu où l'on introduit les montants; toutefois, la loi peut garantir la composition du montant. C'est dans cette optique que nous demandons que soit inscrite dans la loi la constitution de la prestation ou allocation accordée pour la participation au programme Alternative jeunesse. Selon nous, celle-ci devrait être composée de la prestation de base consentie dans le Programme d'aide sociale et d'une majoration qui comprendrait, entre autres, un montant calculé en fonction des besoins et de la situation de l'adulte et de sa famille, ensuite d'un montant inhérent à ses obligations personnelles et familiales et bien sûr un montant lié à sa participation au programme.

En ce qui concerne les frais supplémentaires liés, par exemple, au transport, au matériel ou aux médicaments, ils devraient au moins être équivalents à ce qu'auraient droit les autres participants à des mesures d'Emploi-Québec et non inférieurs ou plus difficiles à obtenir comme c'est hélas encore le cas dans Solidarité jeunesse. Pour nous, il est préoccupant que le législateur ne pose pas les bases minimales devant servir au calcul des allocations. En ce sens, nous croyons qu'il serait plus responsable d'être clair à cet effet.

Le projet de loi est également muet quant aux avantages et aux droits qui seraient accordés aux participants à Alternative jeunesse. Qu'advient-il pour ces personnes de la couverture des frais pour soins médicaux, de la vue et dentaires? Mais surtout ces personnes ont-elles droit à des recours prévus à l'article 96 concernant la demande de révision? Leur allocation sera-t-elle saisissable? Leurs conjoints auront-ils les mêmes droits qu'eux dans l'accès aux différentes mesures ou encore aux différents avantages? Voilà des exemples qui nous poussent à dire qu'un gros travail reste à faire sur ce plan.

Enfin, ne serait-il pas possible d'oser davantage avec ce projet de loi? Ne serait-il pas pertinent de combler le vide entre la Loi sur l'instruction publique qui oblige la fréquentation scolaire jusqu'à l'âge de 16 ans et celle de l'aide sociale qui stipule un droit d'entrée à 18 ans? Nombre de jeunes décrocheurs pourraient être avantagés de bénéficier des mesures de réinsertion développées au coeur d'Alternative jeunesse. Cela permettrait d'intervenir plus tôt dans la vie du jeune, ce qui est connu comme un des gages de succès d'une intervention.

Un autre facteur de succès de tout programme d'insertion socioprofessionnelle réside dans la qualité du partenariat entre le public et le communautaire souvent appelés à soutenir les personnes dans leurs démarches vers l'insertion. Ce partenariat doit être empreint de souplesse et de respect du mode d'intervention ainsi que de l'autonomie de gestion des organismes.

Le programme Alternative jeunesse proposé dans le projet de loi n'échappe pas à cette nécessité. En effet, que ce soit en matière de développement individuel, économique, social, local ou dans toute autre sphère de notre société, l'époque du mur-à-mur est définitivement révolue. Il en va de même sur le plan de l'intégration socioéconomique.

n (17 h 20) n

Les carrefours jeunesse-emploi s'appuient sur un mode d'intervention personnalisé qui se veut centré sur les besoins des jeunes adultes. Cette intervention est aussi orientée vers une approche globale, une approche que l'on appelle écologique, qui tient compte du jeune adulte dans son environnement, de l'ensemble de ses conditions de vie et de ses besoins. Évidemment, l'action des carrefours est complémentaire à celle des organismes du territoire et a pour objectif de soutenir les jeunes adultes dans leur quête d'autonomie personnelle, sociale, professionnelle et économique.

Concrètement, cette approche globale se traduit par des résultats probants et tangibles pour l'ensemble des participants. En effet, elle permet de tenir compte de jeunes qui sont plus éloignés que d'autres du marché du travail. Par exemple, quelques-uns ont des besoins primaires à combler tels que le logement, la nourriture, etc. Dans un tel cas, les besoins d'intégration professionnelle et sociale deviennent secondaires. Il faut d'abord et avant tout soutenir ces jeunes sur ce plan avant de les amener plus loin dans leur cheminement. D'autres n'ont besoin que d'un peu d'accompagnement pour se remettre en selle et intégrer le marché du travail. D'autres encore devront recouvrer la santé avant de pouvoir progresser. Une intervention souple et personnalisée qui mise sur l'accompagnement permet de s'adapter à la situation particulière de chaque jeune et de le conduire à des résultats tangibles. Ce ne sont là que quelques exemples destinés à illustrer l'importance de permettre clairement l'adaptation des interventions aux besoins de chaque individu, et nous affirmons que le programme Alternative jeunesse doit miser, dans son application, sur ce mode d'intervention.

En outre, un tel mode d'intervention nécessite certaines adaptations au chapitre des indicateurs de résultat. Comme nous venons de le voir, chaque pas franchi dans le cheminement vers l'intégration sociale, économique et professionnelle mérite d'être considéré. Il est donc de mise, dans l'évaluation d'un tel programme, d'adopter des indicateurs de résultat, tant quantitatifs que qualitatifs, qui rendent justice au cheminement accompli par les jeunes, y compris les plus démunis ou les plus éloignés du marché du travail. Par exemple, il peut s'agir d'un retour à la santé, d'un retour aux études, d'un retour temporaire à l'assurance-emploi ou autres.

Les taux de placement des différentes initiatives peuvent paraître extrêmement alléchants à court terme, mais, dans la vie de tous les jours, dans l'intervention auprès des jeunes, c'est l'ensemble des actions qui se doivent d'être prises en compte lors de l'évaluation des résultats finaux.

Nous croyons également qu'Alternative jeunesse doit prendre exemple sur des programmes et des mesures qui ont fait leurs preuves. En ce sens, Solidarité jeunesse doit être l'une des voies principales d'Alternative jeunesse. Bien que des aspects importants de Solidarité jeunesse doivent être revus et corrigés, nous sommes tout de même d'avis que son essence et ses fondements doivent continuer de guider les actions du gouvernement en matière d'intervention auprès des jeunes, notamment des jeunes les plus démunis.

Je conclurai cette section de notre propos, avant de laisser la parole à M. Côté, en vous disant que la toute dernière condition de réussite d'Alternative jeunesse réside sans aucun doute dans un investissement suffisant de moyens financiers et humains ainsi que dans la qualité de la mobilisation des différents acteurs impliqués dans le déploiement de ce programme. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. Côté.

M. Côté (Francis): Merci, M. le Président. Mme Sauvé terminait son intervention sur la nécessité de mobiliser adéquatement l'ensemble des ministères et partenaires impliqués au quotidien dans la mise en place des conditions de réussite des jeunes adultes et nous ne saurions trop insister sur cette question. C'est d'ailleurs avec intérêt que nous constatons que la continuité et l'intégration des services semblent explicitement prises en considération à l'article 68 du projet de loi.

C'est d'abord et avant tout parce qu'ils ont des besoins que les jeunes se tournent vers les nombreux services publics et communautaires, tout comme les autres citoyens québécois. Ne connaissant pas tous les services ni toutes les portes d'entrée pertinentes, ils frappent trop souvent à la mauvaise porte ou baissent tout simplement les bras devant la méconnaissance des services, les longs délais d'accès, la complexité des services, l'absence de transition entre eux, leur manque de complémentarité et enfin le manque de cohérence dans l'accès général des services publics et communautaires.

De plus, ces problèmes sont souvent associés à ce que nous pourrions qualifier de discontinuité dans l'accès à de nombreux services offerts aux jeunes adultes. Une plus grande cohérence dans les services, ainsi qu'un meilleur arrimage entre les programmes, représente d'ailleurs l'un des principaux arguments amenés par les différents partenaires au Sommet du Québec et de la jeunesse de 2000. Nous croyons également nécessaire de vous rappeler qu'avant de faire cheminer un jeune adulte dans une pléiade de services publics comme communautaires il est nécessaire d'obtenir son consentement explicite.

Même si l'article 68 démontre le souci de tenir compte de ces considérations essentielles au succès d'un programme comme Alternative jeunesse, il nous apparaît toutefois opportun de lui apporter quelques précisions. D'abord, il importe certes de favoriser la continuité de services et d'éviter toute rupture dans le cheminement des individus. Pour ce faire, le gouvernement se doit par contre de garantir la disponibilité des ressources dans les autres ministères, organismes et institutions concernés.

Par ailleurs, nous sommes d'avis qu'un des gages de succès d'une approche intégrée est d'établir un partenariat avec l'ensemble des acteurs au sein d'une collectivité, qu'ils soient publics, privés, communautaires ou institutionnels.

En fait, dans l'application de tout programme, nous croyons que le partenariat permet de travailler à l'insertion des jeunes adultes dans une optique d'action sociale qui renouvelle les rapports de la communauté avec ses jeunes citoyens en vue d'améliorer leurs conditions générales de vie.

C'est dans cet ordre d'idées que nous tenons à ajouter une recommandation à celles déjà formulées dans notre mémoire. Nous croyons qu'il est essentiel, afin d'incarner la volonté exprimée au coeur de l'article 68, que le ministre responsable de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles mette en place un comité aviseur chargé de lui faire des recommandations sur la manière d'appliquer le programme Alternative jeunesse mais aussi sur la forme que devra prendre l'offre de services jeunesse de son ministère tout entier.

En terminant, nous souhaitons vous rappeler que nous voyons d'un bon oeil le programme Alternative jeunesse, mais nous croyons que d'importantes modifications s'imposent afin que ce programme réponde aux besoins des jeunes.

Je vous laisse sur une citation de Fernand Dumont, qui va, je l'espère, enrichir votre réflexion: «La prise en charge des problèmes, en particulier celui de l'exclusion, met d'abord en cause la qualité de [la] vie collective, sa capacité [à] former des citoyens, la teneur pédagogique de sa culture.»

Voici donc ce qui met fin à notre présentation. Il va de soi qu'avec le temps alloué nous avons fait un survol de notre mémoire en tentant de cerner l'essentiel. Nous souhaitons avoir contribué à vos réflexions et mettons à votre disposition une copie écrite de notre allocution. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. Côté. Alors, afin de débuter l'échange, Mme la députée de Soulanges.

Mme Charlebois: Merci, M. le Président. Mme Sauvé, M. Desjardins, M. Côté, merci pour votre présentation. Je crois que vous m'avez entendue tantôt, nous nous excusons de l'absence du ministre, qui a été retenu à Ottawa aujourd'hui, à la toute dernière minute. Soyez assurés que vos propos vont être transmis au ministre. Si toutefois nous pouvons davantage effectuer de communications, ce sera pour nous un plaisir. Mais je tenais à excuser parce que c'est vraiment à la toute dernière minute qu'on a pu savoir qu'il ne pouvait pas être présent.

Alors, votre mémoire a été fort enrichissant, parce que parler de jeunes, ça me concerne beaucoup. J'ai deux jeunes, moi-même, une fille de 19 ans et un garçon de 22 ans, et je comprends ce que les jeunes peuvent vivre aujourd'hui. Mais aussi, dans tout le monde accéléré où ils vivent, nos jeunes, parfois c'est important d'avoir des bonnes ressources, comme vous le mentionnez. Favoriser l'intégration sociale des jeunes, il faut avoir des bons moyens. Vous avez parlé favorablement d'Alternative jeunesse, quoique vous espérez, je pense, que Solidarité jeunesse ait contribué à la réflexion ou en tout cas soit une base de réflexion. Et effectivement Solidarité jeunesse est un programme qui fonctionne bien, quoique, comme vous le disiez, tout programme ou toute chose, il y a toujours lieu à amélioration. Mais effectivement ça a été une des pierres d'assise dans la réflexion, je crois, d'Alternative jeunesse.

Vous savez qu'Alternative jeunesse, c'est un ensemble de mesures qui vont être inscrites, et je me demandais si on ne pouvait pas profiter de votre passage pour nous dire ce que vous souhaiteriez voir comme mesures inscrites dans Alternative jeunesse.

n(17 h 30)n

M. Desjardins (Richard): Bien, dans les mesures, on en a discuté un peu, c'est qu'on espère que ça laissera place à des initiatives et non pas... et on en a parlé tantôt, rapidement, Solidarité jeunesse, vous savez, était un projet pilote qui, pendant deux ans, a mis les assises du programme Solidarité jeunesse. Et la journée que c'est devenu programme, c'est là qu'il y a eu des grands changements parce que, lorsqu'on parle de programme, on parle de normes plus rigides et en tout cas d'alourdissement et, même s'il y a des gens... Et le ministre lui-même nous a dit que ce n'était pas la volonté... Mais on sait que, lorsqu'on rentre dans l'appareil administratif, bien souvent chacun veut mettre sa virgule, et ça fait qu'on complique les choses. Et on espère que ça laissera place...

Vous savez, on est 107 carrefours jeunesse-emploi. Il y a à peu près, minimum, 107 initiatives locales qui des fois pourraient être exportées dans d'autres régions du Québec, et peut-être ce serait intéressant d'aller voir qu'est-ce qui se fait déjà et peut-être de l'emmener à un niveau plus national, au niveau plus à la grandeur du territoire du Québec. Donc, si on a cette souplesse-là de pouvoir aller voir... Et on n'a pas de programme, exemple, comme Solidarité jeunesse à vous offrir, si c'était ça, votre question.

Mme Charlebois: Bien, peut-être pas de programme comme... Allez-y.

M. Côté (Francis): Bien, je vous dirais que, compte tenu de certaines données que le ministère possède mais aussi celui de l'Éducation, s'il y avait des mesures à développer, notamment en collaboration avec les carrefours jeunesse-emploi, ce sera certainement des mesures favorisant le raccrochage scolaire. C'est encore une réalité criante, au Québec, malgré des taux de diplomation intéressants, je vous dirais, sur le long terme. Mais quand même il y a encore 20 %, si ma mémoire est bonne, de jeunes qui ont 35 ans, aujourd'hui, qui n'ont aucun diplôme. Évidemment, c'est un bassin de main-d'oeuvre intéressant, c'est des jeunes en parfaite santé. Donc, favoriser le raccrochage scolaire serait certainement une des orientations qui devraient être retenues dans l'Alternative jeunesse. Et on devrait développer des services à cet effet puis, je vous dirais, profiter aussi de l'expérience et de l'expertise qui a été développée dans les carrefours jeunesse-emploi à ce niveau.

Mme Charlebois: Est-ce que je dois comprendre que vous êtes d'accord avec l'approche que propose le projet de loi n° 56? Parce qu'on parle de plus de souplesse avec Alternative jeunesse. C'est quelque chose de différent que d'être à l'aide sociale dans des normes encadrées, là. Est-ce que je dois comprendre que vous êtes favorables à Alternative jeunesse avec des mesures plus souples?

Mme Sauvé (Monique): Oui, pour répondre à votre question, je pense que non seulement on est en faveur, mais ça correspond déjà à l'intervention qu'ont les carrefours jeunesse-emploi. Quand M. Desjardins parlait tantôt qu'il y a peut-être 107 initiatives, c'est dire longuement que chaque carrefour jeunesse-emploi a adapté non seulement son intervention à chaque jeune, mais aussi à chaque réalité de son milieu.

Alors donc, dans ce sens-là, la souplesse, oui, c'est absolument une nécessité, et je pense que, dans le succès de l'intervention des carrefours jeunesse-emploi, c'est vraiment une démonstration probante de la façon de fonctionner, l'approche souple, l'approche personnalisée. Et j'ajouterais aussi qu'Alternative jeunesse doit tenir compte ? on le mentionnait dans la présentation, on le mentionne dans le mémoire ? autant des jeunes qui sont loin du marché du travail, qui sont près du marché du travail. Il y a là encore là une souplesse d'accompagnement qui est à considérer. Parce qu'un jeune qui n'a pas d'embûche ou de réalité personnelle difficile, bien c'est un petit coup de pouce qui peut être nécessaire en termes d'accompagnement adapté à ses besoins. Un autre qui a des problèmes de santé, un autre qui a des problématiques familiales ou autre, c'est un autre type d'accompagnement. Alors, c'est ça aussi, la signification de la souplesse d'intervention, je pense.

Mme Charlebois: Vous savez qu'on a plusieurs groupes qui sont déjà venus. Il y en a plusieurs qui ont semblé craintifs, là, quant à la possibilité pour le ministre de conclure des ententes avec des organismes. On a même été jusqu'à parler de privatisation de l'aide sociale. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Côté (Francis): En ce qui nous concerne, l'initiative Solidarité jeunesse, le projet pilote, je pense qu'il a donné de francs succès pour certains jeunes. Et on misait justement sur ce type d'approche, c'est-à-dire que l'organisme carrefour jeunesse-emploi recevait des jeunes qui faisaient une entrée à la sécurité du revenu, parce qu'on considérait que le carrefour jeunesse-emploi possédait l'expertise pour donner plus d'encadrement, plus de temps, développer des plans d'action court ou moyen terme peut-être plus proches des besoins du jeune. Donc, à ce niveau-là, pour nous, c'est garant de succès.

Est-ce qu'on doit s'opposer à ça? Est-ce que c'est une privatisation de l'aide sociale? Nous ne croyons pas. L'objectif, c'est de faire en sorte que ces personnes quittent le plus rapidement possible l'aide sociale mais quittent l'aide sociale pour toujours. Donc, il faut les outiller. Et est-ce que le régime ou le système public est toujours le mieux placé ? public, je parle gouvernemental ? dans sa formule actuelle, pour faire ça? Bien, évidemment, pas toujours. Évidemment, pas toujours.

Et il y a des ressources qui ne sont pas nécessairement à la disposition des centres locaux d'emploi, qui ne lui permettent pas d'avoir un aussi long suivi auprès des personnes, un aussi grand encadrement. Et, si on pense ? je vais employer un anglicisme, mais ? au «case load» des agents de la Sécurité du revenu, ce serait difficile de faire ce que nous faisons avec les jeunes prestataires. Donc, chacun doit un peu avoir sa place dans tout ça, là, tant le public que le communautaire. Nous, on ne parle pas de PPP mais de PPC, un partenariat public-communautaire efficace.

Mme Charlebois: Je vais la retenir, celle-là. Dites-moi, vous avez mentionné aussi dans... Puis ça, mon intervention se veut en ce sens de rectifier certains commentaires. Vous avez fait mention que vous vouliez que les gens chez Alternative jeunesse, les jeunes, aient les mêmes droits finalement quant à la révision. Et le ministre l'a dit clairement la semaine passée, je veux juste me faire le porte-parole en son nom: Oui, les gens vont avoir les mêmes droits quant aux réclamations, effectivement.

Aussi vous nous parlez du projet de loi qui doit avoir un caractère, comment dire, volontaire vers le programme pour les jeunes. Ça aussi, c'est stipulé dans le projet de loi, puis c'est important que ce caractère-là y reste, et c'est sur une base de volontariat qu'Alternative jeunesse va fonctionner. Vous savez qu'on a aboli les mesures coercitives, tout ça.

Où je veux en venir, c'est que vous parlez qu'il faudrait renforcer l'article 67 et en même temps laisser de la souplesse. Comprenez-vous? Ce que je veux dire, c'est que, quand on parle de renforcer l'article 67, de laisser moins de discrétion au ministre, la discrétion au ministre, elle est là parce qu'on veut justement pouvoir avoir plus de souplesse dans la création de programmes, et tout ça. J'aimerais vous entendre là-dessus. En fait, c'est pour pouvoir varier les offres en fonction des besoins des participants, là.

Mme Sauvé (Monique): Je peux peut-être répondre. Je pense que c'est une... En fait, c'est une préoccupation qu'on a que finalement, dans l'orientation des jeunes vers les différentes mesures, les différents services, les différentes activités qui seront offerts par Alternative jeunesse... Je comprends bien votre nuance et votre explication, mais en même temps il faut vraiment qu'il y ait une place prépondérante et une reconnaissance de l'expertise d'évaluation des besoins qui soit mise à contribution et qui vienne des expertises jeunesse déjà en place dans le milieu. Alors, c'est cette préoccupation-là, c'est cette contribution-là qui doit être là dans l'affectation ou le cheminement des jeunes vers les mesures. Je ne sais pas si... Mais je comprends bien votre...

Mme Charlebois: C'est parce que j'essaie de voir comment on peut concilier un renforcissement de l'article 67, tout en laissant une marge de manoeuvre qui va permettre au ministre de pouvoir créer plusieurs programmes qui vont être selon la clientèle, les besoins de la clientèle, finalement. Comment on peut faire les deux à la fois, là?

n(17 h 40)n

M. Côté (Francis): En fait, nous, on demande à ce que soit plus encadré... C'est l'article 71, en ce qui nous concerne, où on veut un encadrement plus précis de la prestation et renforcir... Dans le fond, ce qu'on a demandé... On est d'accord, là, qu'il faut laisser de la souplesse au ministère pour bâtir des programmes, des mesures, etc., là, ça, là-dessus, je pense que Solidarité jeunesse encore une fois est le témoin de cette souplesse, là. Là-dessus, on s'entend très bien. Nous, où on demande un peu plus d'encadrement, c'est sur la question de la prestation, de l'allocation jeunesse. Pour nous, c'est important qu'on soit capable de distinguer ce qui va là-dedans et non pas de laisser ça à la simple discrétion du ministre et, par extension, compte tenu que le ministre n'est pas Dieu, hein, il n'est pas présent sur l'ensemble du territoire, par extension à ses fonctionnaires. Donc, on veut limiter le plus possible l'arbitraire.

Et donc aussi ce qu'on demandait, c'est de donner... c'est l'article 68 sur les actions concertées où, là, nous ce qu'on demande, c'est véritablement que ces actions concertées s'incarnent dans un comité aviseur ? appelons-le comité aviseur parce que je pense que le terme est connu ? mais que l'article 68 s'incarne dans un lieu où on pourra concerter justement ces programmes mesures. Je pense qu'il est là, l'équilibre. C'est que, oui, donnons l'autonomie au ministère pour développer, mais laissons aussi les partenaires qui ont de l'expérience auprès des jeunes intervenir sur les programmes mesures développés par le ministère pour les commenter, les bonifier, puis à la limite, des fois c'est plate, mais les rejeter aussi, là.

Mme Charlebois: Je vais laisser la parole à mes collègues, M. le Président. Mais j'aimerais profiter de l'occasion pour vous dire que j'ai visité le Carrefour jeunesse-emploi solidarité dans mon coin, dans Vaudreuil-Soulanges, et j'ai été plus qu'emballée de l'intervention de ces gens-là, et je tenais à vous le dire parce que, si vous les rencontrez, vous leur mentionnerez. Allez-y, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Bernard: Merci, M. le Président. Mme Sauvé, M. Desjardins, M. Côté, bonjour. Je suis content que vous soyez ici aujourd'hui. Vous représentez le Réseau des carrefours jeunesse-emploi, puis, moi, j'en ai deux très dynamiques à Rouyn-Noranda puis au Témiscamingue. Vous connaissez certainement M. Turpin, entre autres, et tout son groupe. Ce sont des organismes que j'admire beaucoup. Ce sont des jeunes très impliqués. Puis une chose que j'ai toujours remarquée dans les deux, celui du Témiscamingue et celui de Rouyn-Noranda: le personnel est en forte majorité féminin. Je ne sais pas si c'est partout au Québec, cette tendance-là, puis c'est quelque chose qui, je pense, reflète une tendance peut-être éducationnelle aussi du côté des femmes, qui sont plus impliquées dans la société. Elles sont très dynamiques puis fortement impliquées. Maintenant, moi, j'ai deux bureaux de comté et mon bureau de comté à Ville-Marie, au Témiscamingue, mon attaché qui est là, il a été le directeur par intérim du Carrefour jeunesse là-bas. Puis maintenant j'ai une autre de mes attachés, à mon bureau, qui a aussi été dans le Carrefour jeunesse de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

Mais j'ai tout le temps suivi l'activité des jeunes dans mon comté pour différentes raisons. Ça fait maintenant 18 ans, moi, que je suis à Rouyn-Noranda. Quand je suis arrivé là-bas, j'ai eu un groupe d'amis que les jeunes à l'époque, quand je les ai connus, avaient 10 ans. Maintenant, ils sont tous rendus dans la vingtaine, puis j'ai regardé l'évolution de ces gens-là. Mais j'ai les filles aussi chez moi, avec ma conjointe. Puis les problèmes qu'on voit actuellement puis le travail fait par les carrefours jeunesse... On parlait tantôt, le groupe d'adultes, comment saisir ou discerner, quand un jeune est au secondaire, quand est-ce qu'il va devenir décrocheur ou ne le deviendra pas. Je regarde les jeunes que, moi, j'ai connus à l'âge de 10 ans, qui étaient dans des familles bien normales, dans un bon environnement, puis je regarde celui à l'époque qui est vraiment drôle, celui que je pensais qu'il allait être le premier à décrocher, en fin de compte c'est le seul qui a le diplôme universitaire de la gang. Puis, quand on retourne à l'époque quand il avait 15 ans, c'était le nonchalant puis qu'on ne voyait pas... Puis maintenant c'est lui qui s'en va faire une maîtrise. Alors, je me dis, c'est très difficile pour les parents puis même pour, je pense, les enseignants de déterminer, quand on va être jeune, lequel qui va décrocher ultérieurement ou pas. Puis donc, quand on parlait tantôt... les gars, je me dis, c'est difficile.

L'autre volet, je pense qu'on demande souvent beaucoup à la société puis au gouvernement, dans le sens de... quand on veut mettre en place des programmes. Puis, moi, je regarde à Rouyn-Noranda, entre autres, puis le Carrefour jeunesse qui sont là, ils sont très dynamiques, puis, lui, c'est un carrefour jeunesse... À Rouyn-Noranda, il y a un noyau urbain avec une périphérie rurale. Au Témiscamingue, c'est entièrement un secteur rural, puis, au Témiscamingue, entre autres au printemps, on a annoncé un programme travail-études qui a été mis en place. Puis, à toutes les fois qu'on veut mettre en place un programme, que les gens veulent implanter un programme, ça prend un minimum de jeunes puis ça prend un minimum d'entreprises. Et ça a été très difficile de mettre en place le programme parce qu'en milieu rural, entre autres, puis on le voit, il y a beaucoup de décrochage chez les hommes.

Et c'est très difficile, mettre en place des programmes, parce qu'on parlait tantôt d'éloignement du marché du travail, mais il y a un éloignement qui est intellectuel ou formationnel, par la formation, mais l'autre est un éloignement géographique du marché du travail. Les jeunes qui sont en milieu rural n'ont pas de moyen de déplacement, et différentes raisons qui font que c'est difficile, pour eux, de retourner faire de la formation de manière ultérieure, aller acquérir leur diplôme. Mais l'autre, par exemple dans un programme travail-études, la mobilité des jeunes n'est pas là, puis, je pense, souvent on demande beaucoup à la société pour dire: Oui, on veut réintégrer des jeunes sur le marché du travail, leur donner de la formation via un programme travail-études, mais c'est difficile, pour différentes contraintes, puis il faudrait une panoplie de programmes ou de mesures tellement variés pour vouloir atteindre nos objectifs de réinsertion... Je pense que des fois on s'en demande trop. C'est facile en milieu urbain pour différentes raisons, puis entre autres proximité, l'environnement, puis, en milieu rural, c'est plus difficile. La souplesse, on en a besoin, c'est définitif, particulièrement dans les régions, pour vouloir mettre en place des programmes qui vont répondre à la grande variété de gens.

Et tout ce préambule-là... Entre autres, j'aimerais voir, vous autres... On a eu un programme travail-études. Je pense que c'est une mesure qui pourrait éventuellement s'intégrer dans un programme comme Alternative jeunesse. Actuellement, selon vous, est-ce que ce type de programme là répond un peu aux objectifs d'Alternative jeunesse? Et tantôt on demandait des mesures similaires, mais est-ce qu'il y aurait d'autres mesures qui, selon vous... aller chercher ces jeunes-là, les intégrer dans le programme? Mais également je voudrais avoir votre point de vue sur les sans-chèque, parce que tout ce qu'on peut faire actuellement... Les sans-chèque, on n'en parle à peu près pas, puis j'aimerais avoir votre point de vue. Qu'est-ce qui devrait être selon vous des mesures ou des idées pour dire qu'est-ce qu'on peut faire avec les sans-chèque? Parce que je me fais interpeller souvent par rapport à ces jeunes-là.

Le Président (M. Copeman): Il faudrait, messieurs dames, que la réponse soit un peu plus courte que le préambule...

M. Bernard: Désolé, désolé.

Le Président (M. Copeman): ...parce qu'il nous reste malheureusement très peu de temps. Mais allez-y.

M. Desjardins (Richard): Je vais essayer. Rapidement, c'est sûr et certain... Vous parlez de programmes puis de programmes. Moi, j'aimerais ça qu'on se donne une définition des programmes, hein: bien souvent des choses qui viennent d'en haut puis qui descendent. Les projets, pour moi, c'est des choses qui sont initiées à la base puis qui remontent. Si on laissait la chance, dans Alternative jeunesse, justement de donner la chance à des initiatives locales comme celle-là, moi, je pense qu'on a plus... C'en est un, facteur de succès, pour nous.

Et, quand vous parlez des sans-chèque, nous, on le décrit... Autant, les 16-18 ans qui sont tout le temps à part, il n'y a jamais rien pour eux, il y a aussi les sans-chèque, et les sans-chèque, c'est souvent des jeunes qui, soit parce qu'ils habitent chez leurs parents, à cause de la contribution parentale, ne sont pas des assistés sociaux, ils ne sont pas des gens à chèque, ils sont tout le temps mis à côté, et ce serait intéressant de pouvoir les inclure. Je sais que le groupe avant nous l'a demandé. Nous, ça fait longtemps qu'on le demande, de dire: Regardez, ces gens-là se retrouvent dans la craque du système. On peut-u aplanir la chose puis justement les prendre? Je vais vous dire, les carrefours jeunesse-emploi, on a travaillé avec le peu de moyens... Parce que bien souvent on nous demande aussi de rendre certains comptes, et on a peu de moyens pour toucher cette clientèle-là et surtout d'outils. Je parlerais plus des outils. On n'a pas d'outil, on n'a pas de mesure ou de... On essaie de monter des projets et de faire financer ces projets-là. Bien, ce n'est jamais finançable, parce que ce n'est pas un assisté social, ou un chômeur, ou un... C'est la difficulté.

Mme Sauvé (Monique): Je me permettrais...

M. Côté (Francis): Je voudrais conclure avec...

Le Président (M. Copeman): Pas à trois.

M. Côté (Francis): Non, hein?

Le Président (M. Copeman): À deux, oui, mais...

n(17 h 50)n

M. Côté (Francis): Trois parlent en même temps. Je voudrais conclure en disant qu'un des facteurs de succès, et ça, c'est partout en région lorsqu'on veut véritablement bâtir des mesures, des programmes et des projets qui doivent être le coeur de l'Alternative jeunesse, l'une des conditions importantes, là, c'est véritablement la mobilisation d'Emploi-Québec dans l'Alternative jeunesse, et ça, c'est «fondamental». Peu importent les initiatives qu'on voudrait mettre en place, si Emploi-Québec n'est pas un partenaire de la première heure, de la première heure, je peux vous dire que ça devient extrêmement complexe de développer quoi que ce soit. Nous l'avons vécu, nous, dans Solidarité jeunesse au départ, où Emploi-Québec ne se sentait pas tout à fait impliqué ou correctement impliqué, et ça a pris du temps avant que, je dirais, on travaille ensemble. Aujourd'hui, ça va beaucoup mieux. Emploi-Québec est un vrai partenaire. Mais je vous dirais que, lorsqu'Emploi-Québec n'est pas mobilisé à l'entour d'une question de l'Alternative jeunesse, à l'entour de mesures qu'ils doivent offrir aux jeunes, là, mon Dieu, c'est une pente presque infranchissable.

Mme Sauvé (Monique): Est-ce que je pourrais me permettre...

Le Président (M. Copeman): Très brièvement, Mme Sauvé.

Mme Sauvé (Monique): ...deux phrases simplement pour conclure sur la préoccupation que vous aviez des sans-chèque? Au-delà de la difficulté, que mentionnait M. Desjardins, d'aller chercher du soutien ou des initiatives pour aider cette clientèle-là, les carrefours jeunesse-emploi, de par leur mission, accueillent des jeunes de tout statut, sans discrimination, et sont dès le départ un lieu d'accueil, un milieu de vie, service retour aux études, soutien à l'emploi pour la clientèle sans chèque, parce qu'on les reçoit beaucoup dans nos carrefours. Alors, je voulais simplement préciser ça.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Mme Sauvé, M. Desjardins, M. Côté, bonjour. Votre recommandation 2.2 sur le volontariat, simplement une petite observation. À chaque fois que cet item est soulevé devant cette commission, nous sommes devant une affirmation ministérielle à savoir que, non, ça va être volontaire. Nous avons entendu des groupes s'inquiéter avant vous là-dessus. Nous allons suivre le dossier de très près, et notamment je pense que j'ai vu une ouverture, du côté du ministre, quelque part pour bien indiquer que l'article 49 sur les pénalités ne s'appliquera pas seulement au Programme aide sociale où l'article est niché, mais qu'on pourrait le voir dans les dispositions communes, donc qu'il puisse couvrir à la fois les chapitres III et IV. Par ailleurs, je vous indique en passant aussi que l'article 96 pose des problèmes, là-dessus, puis on va revenir dans l'étude article par article.

Ma question, ma seule question, avant de passer la parole à mes jeunes collègues, porte sur votre proposition 3.1 (10) à l'effet «qu'il soit clairement inscrit dans la loi que la prestation ou l'allocation accordée pour la participation au programme Alternative jeunesse est constituée de la prestation de base consentie dans le Programme d'aide sociale, majorée» d'autres trucs, là. Est-ce que ça veut dire que vous êtes d'accord avec la prestation de base consentie dans le Programme d'aide sociale, c'est-à-dire la demi-indexation annuelle?

M. Côté (Francis): Je vous dirais que c'est une question piège, là-dessus, hein? Je vais vous dire, on n'a pas réfléchi... On l'a pensé en fonction de ce qu'il existait actuellement dans Solidarité jeunesse, dans les pratiques qu'on avait, et on n'a pas été jusqu'à réfléchir est-ce qu'on est d'accord ou non avec la formule consentie actuellement dans le projet de loi. Donc, je ne peux pas vous répondre. On n'a pas de prise de position collective là-dessus.

M. Bouchard (Vachon): ...M. le Président, je pense qu'on est en mesure ou en droit d'inviter le groupe à se manifester ultérieurement. Si jamais vous vous forgez une opinion sur la question, on serait très heureux d'entendre... ou de vous lire à ce sujet-là. Merci.

Le Président (M. Copeman): Dans quel ordre? M. le député de Joliette.

M. Valois: Merci, M. le Président, de reconnaître une certaine forme d'ancienneté.

Une voix: En âge et en...

M. Valois: En âge, bien sûr. Non. Non, je pense que, le soir...

Le Président (M. Copeman): Ce n'est surtout pas alphabétique, hein?

M. Valois: Bien... Mais, le soir des élections, j'ai su bien avant le député de Berthier que j'allais être député. On parle de quelques minutes ici, là, alors...

Tout ça pour dire: Je vous souhaite d'abord la bienvenue, Mme Sauvé. M. Côté aussi, bienvenue, en comprenant qu'on s'est déjà croisés dans le cadre d'un temps où vous étiez vous-mêmes au Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec. Vous avez, jusqu'à un certain point, une longue expertise en matière d'emploi, et je suis heureux de vous retrouver aux carrefours jeunesse-emploi. Et je termine évidemment en saluant la présence de M. Desjardins qui, au-delà du fait d'être président du conseil d'administration du réseau, est aussi le directeur général du Carrefour jeunesse-emploi de d'Autray-Joliette. Alors, bienvenue.

Et je profite du fait que vous êtes là, M. Desjardins, pour dire devant tout le monde, là, ici, que, lundi dernier, à la Chambre de commerce, un prix a été décerné à une nouvelle entreprise qui a été mise sur pied à Joliette, qui va créer 100 nouveaux emplois, et les premiers remerciements de ce nouvel entrepreneur ont été à vous parce que vous êtes le premier responsable de cette nouvelle entreprise qui s'installe dans le coin de Joliette. Et ça faisait du bien de voir qu'à la Chambre de commerce les premiers remerciements allaient au Carrefour jeunesse-emploi et à son dynamisme. Et notamment c'est un carrefour qui, au-delà du fait que je suis moi-même député de Joliette, là, reçoit souvent la visite de plein de gens, et je crois que ça va être encore le cas dans les prochaines semaines même, où des gens vont aller visiter qu'est-ce qui se passe à Joliette, qu'est-ce qui se passe dans ce carrefour-là, ce dynamisme-là, et c'est tout à votre honneur, M. Desjardins.

J'interviens, moi, ici aussi, en lien... Et c'est pour ça que je faisais le lien tantôt avec M. Côté, et le fait que vous ayez passé au Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec. C'est que le Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec, nous attendions, nous, de notre côté, que ce comité-là... les gens qui le représentaient étaient pour nous parler d'Alternative jeunesse ou du programme peut-être le plus en lien, qui est celui de Solidarité jeunesse à l'intérieur d'Alternative jeunesse, en nous disant: Voici le modèle à suivre, voici ce qu'il faut appliquer partout, voici ce qui va bien, tout ça. Et pourtant le Comité aviseur-jeunes d'Emploi-Québec est arrivé avec une série de lumières rouges par rapport à, oui, il y a quelque chose qui est bien de ce côté-là, sauf qu'il y a encore trop d'incertitudes par rapport à ce projet de loi là, à comment ça s'en va, trop de questions sans réponse.

Et pourquoi je fais le lien? C'est que j'ai senti dans la présentation, notamment celle de M. Desjardins, bien les mêmes lumières rouges, jusqu'à un certain point, du sens où est-ce que, oui, Alternative jeunesse, il y a quelque chose de potentiellement intéressant, Solidarité jeunesse est un programme qui vaut la peine qu'on s'y penche, maintenant vous avez basé vos lumières rouges essentiellement... Moi, j'ai vu deux grands facteurs. J'aimerais que vous y reveniez pour vraiment nous les expliquer très bien. Vous parliez d'expérience par rapport à 31 mars, 1er avril, lorsque c'est passé du projet au programme. Et l'autre, aussi, lumière rouge était en lien à cette idée de, un, l'expérience, et, deux, vraiment du lien que vous aviez fait avec cette idée de la souplesse et de l'approche personnalisée. Alors, en ce sens-là, j'aimerais vraiment plus vous entendre par rapport à qu'est-ce qu'il s'est passé qui fait en sorte que pour vous il y a eu une expérience qui semble vous déplaire un peu dans le fait qu'on est passé, là, du projet au programme. Et, de l'autre côté, parlez-nous aussi plus longuement peut-être de toutes ces idées en lien avec la souplesse et l'approche personnalisée qui semblent être pour vous des facteurs bien importants de réussite.

M. Desjardins (Richard): Je vais y aller, puis Francis pourra compléter.

Le Président (M. Copeman): M. Desjardins, juste avant, je prends pour acquis qu'il y aura consentement des membres de la commission pour dépasser 18 heures de quelques minutes. Consentement? Allez-y, M. Desjardins.

M. Desjardins (Richard): Merci. Quand j'ai parlé de Solidarité jeunesse... Il faut dire que Solidarité jeunesse, jusqu'au 31 mars 2004, était un projet pilote, O.K., sur une base de deux ans ? un peu plus de deux ans ? et, au 1er avril, devenait un programme. Et, nous, je dois vous dire, on ne s'attendait pas à un tel changement dans l'application. C'est que, lorsqu'il est devenu programme, bien sûr il y a eu un paquet de règles qui ont été mises de l'avant. Je ne peux vous donner rien qu'un exemple. Avant, un jeune arrivait échu et arrivait pour faire une demande d'aide sociale, on offrait au jeune: Regarde, tu peux avoir l'aide sociale, mais il y a aussi Solidarité jeunesse qui peut être intéressant. Donc, le jeune ? je pense, c'était à 80 % ou à 75 % des jeunes ? choisissait Solidarité jeunesse sur une base volontaire, venait voir qu'est-ce que c'était et avançait là-dedans. Et il n'y avait pas de pénalité et il y avait beaucoup de souplesse parce que nous gérions, les carrefours jeunesse-emploi, le chèque, l'allocation. Ça, c'était un des gros morceaux.

n(18 heures)n

À partir du 1er avril, là, on est rentrés dans un système où le chèque était fait à Québec et le chèque était envoyé par la poste. Je ne peux vous donner rien qu'un exemple que j'ai vécu cet été, et on nous avait garanti: 48 heures, le chèque va être arrivé, vous allez pouvoir le remettre en main propre au jeune. Parce que c'était encore le carrefour qui le remettait. Le 13 juillet passé, je revenais de vacances et de pêche, et j'ai vu qu'il y avait... Et M. Valois peut voir la grandeur du terrain qu'on a au carrefour. Il y avait une tente qui était montée sur le terrain du carrefour, et j'ai posé la question: Pourquoi qu'il y a une tente là? Et on m'a dit, on m'a expliqué que les jeunes... Ils étaient 17 jeunes à attendre leurs chèques. Ça veut dire que ces jeunes-là, s'ils avaient choisi d'être sur l'aide sociale, le 1er juillet, il y aurait eu un chèque dans leurs comptes de banque puis ils auraient pu payer leurs loyers. On était le 13 du mois et, pour toutes sortes de raisons... On appelait au ministère puis: Ils ont été émis, ils ont été envoyés, mais là Postes Canada les a perdus en quelque part. Le 13, ils ne l'avaient pas reçu. Ça, ça fait partie des irritants. Et chez nous les jeunes se parlent. Ils se disent: Aïe! ne va pas là, tu t'en vas dans quelque chose où tu vas être dans le trouble.

Ça fait que ça, c'en est un des exemples où, nous, on dit: Il était facilitant avant, et il n'y a pas eu... Et la raison... Si on avait dit: Bien, les carrefours perdent de l'argent ou il y a des... Ce n'était pas ça. Tous les livres... Et ils nous ont dit... Puis on a été vérifiés, le Vérificateur a mis le nez là-dedans, et tout était correct. Pourquoi on a changé ça? Ça, ce n'est rien qu'un des aspects, mais il y en a encore plusieurs autres.

Lorsque c'est devenu programme, on a voulu fonctionner d'une autre façon. Et ça, c'est notre crainte. Lorsque ça devient programme, il y a plein de normes, fonctionnaires ou autres, qui font en sorte qu'on alourdit la chose et ? excusez l'expression, là, j'essaie d'en trouver une qui se dit, mais ? on écoeure les jeunes tout simplement.

M. Côté (Francis): Peut-être, pour donner un autre exemple concret, Richard a parlé tantôt qu'auparavant nous gérions la prestation de base de la personne et une allocation de participation supplémentaire qui était donnée. Pourquoi est-ce que c'étaient les carrefours jeunesse-emploi qui géraient l'allocation de base et une allocation de participation? L'objectif du projet pilote, c'était de faire en sorte que le jeune ne... En fait, c'était de faire en sorte qu'on imite le marché du travail, c'est-à-dire plutôt que de recevoir un chèque d'aide sociale puis d'avoir une étiquette ? permettez-moi l'expression ? de BS, ce jeune-là avait au contraire un chèque au logo du Carrefour jeunesse-emploi qui lui était émis chaque deux semaines, comme un chèque de paie. Et évidemment on ne faisait pas de ponction sur ce chèque-là. Donc, l'allocation, la prestation, on s'en servait comme outil d'intervention.

Donc, il était là, il faisait son 20 heures-semaine dans Solidarité jeunesse, le carrefour lui remettait son chèque de paie. Ensuite, si la participation de ce jeune était une participation de qualité ? quand on dit de qualité, c'est que le jeune était présent, le jeune était dynamique, bon, etc. ? on lui remettait en plus un autre chèque, une allocation de participation qui équivalait à 30 $ par semaine.

Aujourd'hui, là, tout ça, c'est fini. Ces outils d'intervention là, c'est tout dans un versement unifié, envoyé par le gouvernement du Québec par la poste. Et ça arrive quelquefois en retard. Ça cause ce que Richard a dit.

Donc, quand un jeune avait une participation qui n'était pas nécessairement une participation de qualité, par exemple il pouvait arriver intoxiqué, sur les 20 heures, un deux heures, un trois heures, on lui disait: Moi, je ne pense pas que ta participation a été de qualité. On appliquait une sanction directe sur son allocation de participation ? et non de base, c'est important de le comprendre ? et elle était, la sanction, immédiate. On disait: Bon, cette semaine, on va moduler ton chèque. Au lieu de recevoir 30 $, tu vas recevoir 20 $. Si tu t'amendes la semaine prochaine, on va te ramener complètement ton montant. Comprenez-vous? On jouait, là, avec l'allocation pour essayer de continuer de bonifier la participation de la personne, le pousser à investir davantage dans son propre plan d'action à lui. Et c'est ce type d'outils qui nous ont été retirés avec le passage du projet pilote au programme, et ça, pour nous, si on est en train de développer un programme comme l'Alternative jeunesse, qui se veut mur à mur parce qu'il y a beaucoup de jeunes, puis il faut gérer les chèques d'une façon x, puis pas moyen de gérer autrement, bien pour nous ça devient beaucoup moins intéressant dans nos pratiques, nos pratiques d'intervention auprès des personnes.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Berthier.

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. À mon tour, je vous souhaite la bienvenue, aussi vous féliciter, comme Jonathan a fait, mon collègue de Joliette plutôt a fait, féliciter notre directeur général de notre carrefour. Il faut comprendre que le Carrefour d'Autray-Joliette est un peu différent des autres, comme chacun a un peu ses spécificités. Nous, chez nous, on a la chance que notre carrefour... Là, tu parlais de Démarrage d'entreprises, justement de gérer ces argents-là pour Démarrage d'entreprises, et je pense que, tant à Joliette que dans d'Autray, avec les différents points de services qu'il y a, vous faites un travail qui est extraordinaire. Beaucoup de jeunes... Juste mon voisin est un de vos anciens prestataires de services qui a parti une entreprise d'ébénisterie.

Une des questions que j'avais au début concernait Alternative jeunesse. Est-ce qu'à la base vous avez été consultés? Étant donné que vous êtes l'organisme qui a le plus d'expérience et d'expertise dans le domaine, est-ce que vous avez été consultés par le ministre pour la modulation d'Alternative jeunesse?

M. Côté (Francis): Vous voulez dire si on a été consultés, là, pour sa mise en place ou sa mise en forme dans un projet de loi? Non, pas implicitement, là, comme ça. On nous a demandé est-ce qu'on verrait d'un bon oeil la création d'un programme un peu comme Solidarité jeunesse, tout ça, puis là-dessus, oui, c'est arrivé. Mais de façon précise, sur l'ensemble, là, de ce qu'on peut retrouver dans le projet de loi, pas de manière aussi détaillée. Mais ce n'est pas au ministre... En fait, le ministre a une équipe. Il est capable, là, de travailler et puis d'attendre les commissions parlementaires pour se faire orienter, j'imagine.

M. Bourdeau: Ça dépend comment qu'on voit le travail. Page 10, vous parlez que vous êtes favorables à Alternative jeunesse, mais vous êtes très inquiets de la discrétion laissée au ministre. Dans le projet de loi, on parle que «le ministre peut offrir aux personnes qui y sont admissibles et conformément au titre», blablabla. Est-ce que vous pensez que cet article, avec le «peut», est un peu trop souple, justement? Est-ce que c'est là, la problématique de cet article 67?

M. Côté (Francis): Nous, c'est au niveau véritablement de la prestation où on veut véritablement que ce soit clarifié. Puis au niveau des droits des personnes. Donc, le «peut», lorsqu'il est relié à ce type d'avantages, pour nous, laisse un peu trop de souplesse.

M. Bourdeau: Au niveau du financement, parce que c'est aussi une certaine souplesse qu'a le ministre, souhaitez-vous des garanties, au niveau justement des moyens financiers qui vont être mis à votre disposition, avec de tels... pas mis à votre disposition, mais plutôt mis à la disposition d'Alternative jeunesse?

M. Côté (Francis): Bien, c'est évident que, dans un projet de loi, on ne peut garantir un investissement financier pour la réalisation d'un programme, ça, on en est conscient. Mais je pense que de poser la question, c'est y répondre. C'est sûr, je ne vous dirai pas non qu'on aimerait ça avoir des garanties de financement pour la réalisation du programme. Pour nous, c'est clair, oui.

M. Bourdeau: O.K. Au niveau de la durée des programmes, encore une fois, est-ce que vous pensez que cette durée des programmes là devrait être spécifiée ou plutôt laissée encore une fois à la discrétion du ministre?

M. Côté (Francis): Quand vous parlez de la durée des programmes, est-ce que vous parlez au niveau de la durée de la participation de la personne à l'Alternative? C'est ça dont vous voulez parlez, de la durée de participation de la personne à l'Alternative jeunesse?

M. Bourdeau: Dans le projet de loi, si on comprend bien, c'est que tout est laissé à la discrétion du ministre. Selon vous, est-ce qu'il ne devrait pas plutôt y avoir une spécification justement de ces durées de ces programmes?

M. Côté (Francis): Bien, voilà ce qui nous pose aussi problème dans Solidarité jeunesse. C'est justement d'en arriver à se donner des minimums puis des contraintes au niveau du temps. Je vous rappelle qu'on fait affaire avec une clientèle qui a d'énormes besoins et qui revendique un encadrement et surtout un accompagnement à moyen, long terme, bien souvent. Et, de faire en sorte que l'on se limite dans la durée de participation de ces personnes, je pense que ce ne serait pas une solution éclairée.

M. Bourdeau: O.K. Vous parlez aussi, dans votre mémoire, du vide juridique qui existe pour les jeunes entre 16 et 18 ans pour l'admissibilité à l'aide sociale. Pensez-vous que ce serait une bonne idée et souhaitable que l'âge, justement 16 ans, soit inscrit dans ce projet de loi là pour justement garantir cette admissibilité?

M. Côté (Francis): Encore une fois, tel qu'il est libellé, l'article permet en fait d'aller non seulement au niveau de l'âge, hein... Par exemple, il dit: Si une personne ne correspond pas aux critères d'admissibilité de l'aide sociale, elle pourrait quand même faire Alternative. Je ne limiterais pas le critère d'accessibilité uniquement en raison de l'âge, mais je demande au ministre d'être relativement souple dans son application et de faire en sorte que des jeunes décrocheurs de 16 ans, chez qui on a identifié des risques de chômage prolongé, puissent systématiquement avoir accès à Alternative jeunesse.

n(18 h 10)n

Évidemment, notre objectif, ce n'est pas de faire en sorte que tous les jeunes décrochent à 16 ans pour aller sur l'aide sociale recevoir une prestation. On a les moyens techniques aujourd'hui, les moyens au niveau des capacités de nos intervenants, tant psychologues, psychoéducateurs et autres, on est capable de détecter assez bien, je pense, quels sont les jeunes qui sont à risque de chômage prolongé et de les orienter. Mais qu'ils soient admis à un programme tel que l'Alternative, je pense que c'est là la voie de solution mais que ce ne soit pas juste une exception parmi tant d'autres, qu'il y ait quand même une voie de passage relativement facile, ça aussi, c'est de la continuité de services.

M. Bourdeau: Terminé?

Le Président (M. Copeman): Oui, malheureusement. Alors, M. Desjardins, M. Côté, Mme Sauvé, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom du Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec. Et j'ajourne les travaux de la commission sine die en sachant qu'il est prévu qu'on siège demain après-midi. Alors, on écoute attentivement les heures de la Chambre, demain. Merci.

(Fin de la séance à 18 h 11)


Document(s) associé(s) à la séance