L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des affaires sociales

Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 2 juin 2005 - Vol. 38 N° 138

Consultations particulières sur le projet de loi n° 108 - Loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale et d'autres dispositions législatives


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Onze heures treize minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Nous sommes réunis afin de procéder à des consultations particulières et de tenir les auditions publiques sur le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale et d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, je comprends qu'il n'y a pas de remplacement?

La Secrétaire: C'est exact.

Le Président (M. Copeman): Aucun remplacement. Je vous rappelle que l'utilisation des téléphones cellulaires est interdite dans la salle. Je prierais ceux qui en font l'usage de les mettre hors tension.

Nous allons consacrer, aujourd'hui, chers collègues, 45 minutes pour l'audition de chaque organisme, réparties dans les proportions traditionnelles habituelles, c'est-à-dire 15 minutes pour les groupes, pour leur présentation, 15 minutes pour chaque côté de la table ? durée maximale, je parle toujours.

L'ordre du jour: nous allons débuter avec des remarques préliminaires; par la suite, nous allons entendre et échanger avec le Regroupement pour un régime québécois d'assurance parentale; terminer la matinée avec l'AFEAS. Nous allons reprendre cet après-midi, je vais vous faire lecture de l'ordre du jour à ce moment-là. Il est prévu de poursuivre nos travaux jusqu'autour de 22 heures, ce soir.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, au niveau des remarques préliminaires, Mme la ministre, je vous cède la parole, en vous indiquant que vous avez une période maximale de 15 minutes pour vos remarques.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, d'abord permettez-moi de remercier encore une fois tous les collègues parlementaires qui acceptent d'être avec nous aujourd'hui pour procéder et participer à ces consultations particulières, et je veux particulièrement aussi souhaiter la bienvenue aux représentants et aux représentantes des groupes qui seront devant nous.

En 2000, M. le Président, le projet de loi n° 140 sur l'assurance parentale a fait l'objet, à ce moment-là aussi, d'une consultation générale, et, à la suite de cette consultation, plusieurs amendements ont été apportés au projet de loi qui a été soumis en 2001, et, je rappelle, adopté à l'unanimité.

Pourquoi devons-nous, aujourd'hui, revenir avec un nouveau projet de loi? Bien, c'est évidemment pour établir des modifications techniques en vue d'instaurer le régime d'assurance parentale adapté à la réalité québécoise et qu'on soit en mesure de le rendre en vigueur pleinement le 1er janvier 2006. Un régime qui bien sûr permettra d'aider les parents à concilier leurs responsabilités familiales, les impératifs de leur travail et bien sûr l'épanouissement de leurs familles.

Il nous apparaît donc important que le gouvernement prenne en considération les impacts, entre autres les impacts financiers, qu'amène la décision de passer plus de temps auprès de leur enfant, soit qu'il soit nouveau-né ou récemment adopté. Je vous dirais que c'est particulièrement vrai pour les parents qui disposent d'un faible revenu et ceux qui travaillent à temps partiel ou qui sont travailleurs autonomes, puisque voilà une des belles nouveautés de ce régime d'assurance parentale. En effet, on le sait, le nombre de femmes sur le marché du travail continue d'augmenter. Le travail autonome, le cumul des emplois, le travail à temps partiel sont des réalités auxquelles nous sommes confrontés de plus en plus.

Et d'entrée de jeu je tiens à préciser que les paramètres du régime, par exemple le nombre de semaines de prestations, le taux des prestations et le choix d'une période de prestations plus courte qui ont été inclus dans le projet de loi à la suite des consultations tenues en 2000 ne sont pas affectés par le projet de loi n° 108 que nous étudions en ce moment, mais des améliorations y sont apportées. On pense ici à l'adoption d'un enfant majeur ou l'adoption de l'enfant d'un conjoint qui donnera maintenant droit aux prestations. Ce qu'il faut retenir, c'est que le présent projet de loi reflète notre volonté entière, complète, d'offrir à la population du Québec un régime de prestations parentales de maternité, de paternité et d'adoption plus avantageux, plus souple, adapté à cette réalité des familles d'aujourd'hui.

Je résume brièvement les principales modifications. Elles ont trait à la prise en charge de l'administration du régime par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, par la création d'un fonds fiduciaire appelé Fonds d'assurance parentale, et les modifications sont bien sûr liées à l'évolution du droit depuis la sanction de la loi.

Nous proposons donc que l'administration soit confiée à la ministre plutôt qu'à la Régie des rentes du Québec, tel que la loi de 2001 le prévoyait. La raison, c'est que nous croyons que le ministère offre une expertise qui est reconnue de longue date dans la mise en oeuvre et l'administration de programmes de prestations et surtout dispose des ressources nécessaires pour rencontrer notre engagement de mettre en oeuvre ce régime le 1er janvier 2006. Nous proposons de constituer le Fonds d'assurance parentale parce que toutes les sommes perçues et les dépenses engagées dans le cadre de l'application du régime seront comptabilisées dans ce fonds. Et le projet de loi n° 108 prévoit également de mandater le Conseil de gestion de manière à ce qu'il administre, en qualité de fiduciaire, ce Fonds d'assurance parentale.

n (11 h 20) n

Le régime d'assurance parentale, on l'a dit à plusieurs reprises, est un véritable régime d'assurance financé par les cotisants. Il y a une volonté claire de notre gouvernement de faire en sorte que ce régime soit indépendant et que les sommes soient utilisées aux seules fins du régime. Nous voulons que ce soit les gens qui sont responsables des régimes, qui en déterminent les modalités et qui décident de la manière dont les sommes sont réparties à l'ensemble des partenaires qui cotisent au régime d'assurance parentale. Et je rappelle, M. le Président, que les représentants qui siègent au Conseil de gestion sont les représentants des cotisants, soit les associations patronales, bien sûr les syndicats, des représentants des travailleurs autonomes. Donc, M. le Président, c'est quand même un aspect important de l'institution de ce régime d'assurance parentale.

Par ailleurs, nous devons aussi respecter l'Entente Canada-Québec sur le régime, que nous avons signée fièrement le 1er mars dernier, après tellement d'années d'attente, et donc il faut apporter des ajustements techniques aussi pour se rendre conformes à la signature de cette entente. Ces modifications touchent entre autres l'abolition de certaines restrictions en matière d'adoption d'un enfant majeur ou de l'enfant du conjoint. Ces modifications permettront aussi au Conseil de gestion d'exclure, pour certaines clientèles dont les revenus fluctuent, les semaines où les revenus sont plus faibles afin de ne pas affaiblir la moyenne des revenus assurables, ce qui est avantageux pour les parents.

Des modifications techniques aux dispositions fiscales portant sur les modalités d'établissement de la cotisation au régime québécois d'assurance parentale ou, en d'autres termes, celles qui définissent l'assiette de cotisations au régime sont aussi apportées. D'autres modifications vont donc, comme je le disais tout à l'heure, dans le sens de l'harmonisation de l'ensemble des lois qui sont en vigueur ici, au Québec.

En conclusion et en somme, le Québec arrive à une étape très importante de la concrétisation du régime québécois d'assurance parentale, et, je me permets de le rappeler, M. le Président, qui fait toujours consensus au sein de la société québécoise. Ce consensus politique et social, nous nous devons d'ailleurs de le préserver, car il est garant du projet que nous nous sommes donné comme société, c'est-à-dire un régime d'assurance parentale adapté à la réalité actuelle des familles québécoises et qui constitue la pierre angulaire de la politique familiale au Québec. Tous les obstacles que nous avons surmontés afin d'arriver à cette importante étape peuvent témoigner des progrès que nous avons réalisés. Nous nous sommes engagés à apporter un meilleur soutien aux parents et à poser des gestes concrets en ce sens, et je crois sincèrement que nous atteignons cet objectif en leur offrant des conditions de congé parental qui soient parmi les meilleures, je vais dire, au monde, mais parmi les meilleures très certainement en Amérique du Nord.

Bref, tout est mis en oeuvre pour que le régime entre en vigueur le 1er janvier prochain parce qu'il s'agit d'une priorité de notre gouvernement, et je peux vous assurer que les travaux vont bon train et que nous aurons donc cette mise en oeuvre le 1er janvier prochain.

C'est pourquoi je suis heureuse de présenter le projet de loi. Pour moi, c'est bien sûr une étape significative qui nous apportera sûrement un éclairage complémentaire afin que cette mise en oeuvre se fasse dans le meilleur intérêt de la population québécoise, des familles, des parents et des futurs parents.

Alors, M. le Président, chers collègues, je vous remercie et je nous souhaite tous, à nous tous, aujourd'hui, une excellente journée.

La Présidente (Mme James): Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et de solidarité sociale et de la famille pour les remarques préliminaires.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Merci, Mme la Présidente. Alors, chers collègues et représentants des associations et organisations qui fréquenteront cette commission aujourd'hui, bonjour. Je suis persuadé que nous aurons une journée fort intéressante. Nous sommes engagés dans le dernier droit, avant que les citoyennes, citoyens, parents du Québec puissent éventuellement utiliser et avoir accès à un régime d'assurance parentale fortement amélioré en rapport à celui que nous connaissons maintenant.

Je remercie la ministre de bien avoir voulu accepter notre invitation de tenir des consultations particulières et d'avoir considéré la liste des invités que nous lui avons soumise. Et je veux souligner que nous entendons offrir toute la collaboration possible à l'adoption de ce projet de loi, en considérant évidemment les divers points de vue qui nous seront exprimés.

Je ne veux pas intervenir trop longtemps, Mme la Présidente, parce que... M. le Président, pardon, parce que je pense qu'il est important, à ce moment-ci de nos travaux, de laisser le plus de temps possible à nos invités.

Je veux tout simplement souligner que les préoccupations qui ont été déjà exprimées à travers les médias, que certains groupes viendront répéter ici, les préoccupations aussi qui nous sont parvenues via les courriels et le courrier postal, les préoccupations que nous avons nous-mêmes soulevées lorsque nous avons fait l'adoption de principe du projet de loi, ces préoccupations-là sont importantes, sont nombreuses. J'espère que nous pourrons, au fil de nos consultations et conversations, arriver à améliorer ce projet de loi, qui se présente comme la clé qui va nous permettre éventuellement d'appliquer ce nouveau régime, mais qui a en même temps une incidence assez importante sur un grand nombre d'aspects.

Alors, M. le Président, je vous remercie de votre attention, et j'offre, au nom de mes collègues, la collaboration la plus entière de l'opposition dans l'étude de ce projet de loi et dans cette étape de consultations particulières.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député de Vachon. Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Pour un court commentaire, M. le Président. Au nom de l'Action démocratique, nous sommes contents, heureux, que l'impasse des négociations soit terminée, que nous puissions maintenant nous mettre à l'ouvrage, pour les Québécois et les Québécoises, et avoir un régime d'assurance parentale à la hauteur de leurs aspirations.

Le projet de loi que nous étudions fait état d'un véhicule, d'une fiducie pour gérer ce programme-là. Cependant, bien des inquiétudes sont sur les inconnus autour du projet de loi, ce qui n'est pas dit dans le projet de loi. J'espère que la présente commission va nous permettre d'avancer le travail à ce niveau.

Une des inquiétudes qui nous arrive souvent est: Comment sera financé ce régime? À partir d'une taxe sur la masse salariale, à partir de cotisations aux salariées? Comment dans les faits les travailleurs autonomes vont s'inclure dans tout ce processus-là? J'espère que cette commission va nous permettre d'avancer à ce sujet, et nous assurons la ministre de toute notre collaboration.

Je termine en remerciant les intervenants qui vont nous aider dans ces travaux, en les remerciant de la rapidité avec laquelle ils se sont dits présents et avec le professionnalisme dont ils ont toujours fait preuve. Je suis bien à même de les remercier tous à l'avance. Merci.

Auditions

Le Président (M. Copeman): Alors, merci, Mme la députée. Sans plus tarder, nous pouvons, je crois, débuter la phase consultation proprement dite. Et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes du Regroupement pour un régime québécois d'assurance parentale.

Mesdames, bonjour. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et ce sera suivi par un échange d'une durée maximale de 15 minutes avec les députés des deux côtés de la table. Je ne sais pas si c'est Mme Asselin qui...

Regroupement pour un régime
québécois d'assurance parentale

Mme Asselin (Michèle): Je vais commencer la présentation, au nom du regroupement. Michèle Asselin, de la Fédération des femmes du Québec; et je suis accompagnée de Mme Carole Gingras, de la FTQ; et Mme Ghislaine Paquin, d'Au bas de l'échelle. Toutes trois, nous nous sommes partagé la présentation du mémoire, au nom du Regroupement pour un régime québécois d'assurance parentale, regroupement qui ? vous avez la liste des membres au début de notre mémoire ? qui agit, travaille intensément, depuis les années quatre-vingt-dix, à la mise sur pied d'un régime distinct d'assurance parentale. Plusieurs d'entre vous se rappellent certainement de notre slogan, Enfanter n'est pas chômer!.

n (11 h 30) n

Alors, oui, on en est à une étape cruciale, le régime verra jour enfin le 1er janvier 2006. Nous sommes ici parce que nous avons des commentaires à apporter au projet de loi. On ne prendra pas trop de temps à souligner l'importance de ce régime, qui est une pierre angulaire de toute mesure de conciliation famille-travail et de politique familiale. Cependant, nous voulons transmettre d'entrée de jeu notre inquiétude au fait que les problèmes, qui nous apparaissent mineurs à régler au niveau du financement, soient l'occasion, pour les employeurs ou même pour le gouvernement, de tenter de faire des économies sur le dos des familles québécoises et sur le dos des femmes en particulier parce qu'on sait qu'elles sont les premières concernées par ce régime d'assurance parentale.

Notre mémoire comprend 11 recommandations; vous les retrouvez à la page 16 et 17. Nous avons quatre points à aborder aujourd'hui: le Conseil de gestion, le financement du régime, le transfert des prestataires de la CSST vers le régime québécois d'assurance parentale, et finalement l'harmonisation avec la Loi sur les normes du travail.

Le Conseil de gestion. Depuis plusieurs années, nous avons fait part de l'importance qu'il y ait, au sein du Conseil de gestion, une représentante des femmes, des travailleuses non syndiquées. Vous savez, actuellement le conseil est composé de neuf personnes; il reflète la préoccupation de maintenir une structure paritaire entre les employeurs, les travailleurs et le gouvernement. Le regroupement considère qu'il manque une personne, une femme qui représenterait les travailleuses syndiquées à ce Conseil de gestion.

Vous savez, toutes les analyses du marché du travail témoignent que les travailleuses non syndiquées constituent la majorité des travailleuses au bas de l'échelle. Une membre du conseil qui serait choisie parmi les travailleuses non syndiquées apporterait une analyse de la réalité de ces travailleuses et travailleurs au bas de l'échelle, où par ailleurs ? et on le souligne ? se trouve également la grande majorité des jeunes qui sont directement concernés par ce régime.

Aussi, on voudrait apporter à votre attention que les travailleurs dont les revenus proviennent d'une entreprise sont à la fois des employeurs et des travailleurs. Ces personnes vont devoir payer les deux parts de la cotisation, et, bien qu'elles soient d'éventuelles bénéficiaires comme les travailleuses et les travailleurs, elles ont aussi la même préoccupation que les employeurs de maintenir la rentabilité de leur entreprise et de planifier leur travail. Donc, nous sommes d'avis que leur représentation ne doit pas figurer parmi les trois représentantes et représentants des travailleurs et travailleuses.

Donc, la recommandation 1, c'est que le Conseil de gestion incorpore une membre choisie parmi les travailleuses non syndiquées, après consultation des principaux groupes autonomes de femmes, et je passe là-dessus la parole à ma collègue, Mme Carole Gingras.

Le Président (M. Copeman): Mme Gingras.

Mme Gingras (Carole): Merci. Alors, concernant le financement de ce régime, le Regroupement sur l'assurance parentale est tout à fait favorable à l'instauration d'un fonds d'assurance parentale dans lequel seront comptabilisées les cotisations et les dépenses engagées dans le cadre de cette loi. Ce que l'on comprend de ce projet de loi, c'est que ce fonds d'assurance sera constitué à la fois des cotisations en provenance des employeurs, des travailleurs et des travailleuses.

Malgré les scénarios gouvernementaux qui ont été développés, depuis la fin des années quatre-vingt-dix, concernant le financement du régime, rien n'est toutefois prévu quant à la participation financière du gouvernement. Nous avons constaté, lors du dernier budget du ministre Audet, qu'aucune somme n'avait été prévue pour financer le régime à compter du 1er janvier 2006. Pourtant, à de nombreuses reprises, le précédent ministre de la Famille et de l'Enfance, M. Béchard, nous avait signifié cet engagement. De plus, nous voulons rappeler que le gouvernement a promis, lors de sa dernière campagne électorale, de faire de l'aide aux familles et de la conciliation travail-famille, dont la création du régime d'assurance parentale, les éléments clés de ce programme.

Par ailleurs, il semble que la non-participation du gouvernement à ce fonds serait liée à la notion d'indépendance du fonds, c'est-à-dire qu'aucun gouvernement, actuel et futur, ne pourrait utiliser le surplus du fonds à d'autres fins; nous nous interrogeons à cet effet sur le sens à donner au principe d'indépendance. Bien sûr que nous sommes d'accord avec l'idée de s'assurer que les sommes pour l'assurance parentale soient utilisées exclusivement pour l'assurance parentale, mais nous soutenons que la contribution de l'État à ce régime est fondamentale.

En ce sens, l'article 60 du projet de loi précise à quoi peut servir le surplus, s'il en est un, soit à la diminution ou à l'augmentation des prestations. Mais peut-il servir à d'autres choses? Alors, pour éviter toute ambiguïté, le législateur devrait donc spécifier à quoi doit servir ce surplus.

Par ailleurs, concernant l'Entente Canada-Québec sur le régime, on a vu qu'il y avait une somme, un transfert de 200 millions qui a été prévu pour appuyer la mise en oeuvre du régime. Questions: Le gouvernement du Québec a-t-il reçu ce montant et a-t-il l'intention de transférer cette somme dans le Fonds d'assurance parentale pour la mise en oeuvre du régime? Dans notre esprit, il ne fait aucun doute: cet argent doit servir exclusivement à cette fin.

Maintenant, concernant la contribution gouvernementale, nous croyons qu'elle doit être précisée, au même titre que celle des employeurs et des travailleurs, travailleuses, dans le projet de loi. Cette contribution doit véritablement refléter la volonté du gouvernement de soutenir les hommes et les femmes qui décident d'avoir des enfants au Québec. C'est un message clair qui doit être envoyé à la population du Québec. Cette question concerne l'ensemble de notre société, car il s'agit là d'une mesure sociale faisant partie d'un volet important de la politique familiale.

Recommandation. Donc, nous recommandons que le régime d'assurance québécois... d'assurance parentale du Québec, plutôt, bénéficie d'un financement tripartite: employeurs, travailleurs, travailleuses et gouvernement du Québec.

Concernant les autres sources du financement du régime, nous avons constaté, à la lecture du budget de M. Audet et confirmé par la ministre Courchesne, que les économies faites à même le programme du PRALMA ne seraient pas réinjectées dans les fonds d'assurance parentale. Alors, nous nous interrogeons à cet effet, et nous pensons que ces économies doivent être absolument... servir, elles doivent servir à financer le régime. Donc, la recommandation est à cet effet.

Concernant les taux de cotisation: on constate que le premier règlement en vertu de l'article 6 de la loi qui fixe les taux de cotisation, il ne serait pas, le cas échéant, soumis à l'obligation de publication. Cela aurait pour effet de ne pas permettre aux parties concernées de soumettre leurs commentaires. Donc, nous recommandons que l'article 103 du projet de loi soit retiré.

Par ailleurs, concernant les autonomes, le régime pourra compter donc sur ces nouvelles cotisations. Et, comme il s'agit de quelque chose de nouveau, nous recommandons qu'il y ait une réflexion approfondie autour de la cotisation, particulièrement sur la portion de l'employeur sur la base du revenu et sur la façon d'effectuer la saisie des cotisations. Et à cet effet nous proposons qu'il y ait une ventilation des données, selon qu'il s'agisse de salariés ou d'autonomes, afin que les paramètres du régime reflètent bien la réalité des autonomes, compte tenu des variations du revenu des travailleurs et travailleuses autonomes et pour s'assurer que les modalités du régime soient bien adaptées à leurs besoins. Alors, nous recommandons d'instaurer des mécanismes adaptés à ces travailleurs, travailleuses, pour évaluer les prestations auxquelles ils et elles auront droit en fonction de leurs revenus, sans évidemment les pénaliser.

Par rapport au revenu maximum assurable, nous convenons qu'il y a une confusion dans le projet de loi. On parle à plusieurs endroits de cette question, et, par exemple, il y a l'introduction, il y a l'article 5 de la loi qui prévoit que le maximum assurable est le même que celui prévu à la CSST. Il semble qu'il y ait confusion au niveau de ces articles, où on fait mention de revenus assurables selon qu'il s'agisse du revenu maximum assurable de l'assurance-emploi ou de tout autre maximum. Alors, une chose y est sûre: Nous pensons qu'il y a ambiguïté, et nous recommandons que le maximum assurable soit de 57 500 $, pour 2006, et que ce montant suive le cours du maximum assurable à la CSST et à la SAAQ par la suite.

Concernant le retrait préventif de la travailleuse enceinte: alors, nous voulons vous dire que le projet de loi n° 108 vient confirmer une mesure à laquelle plusieurs s'étaient opposés à l'époque. Et ce que l'on voit, c'est: les articles 88 et 89 du projet de loi amendent de nouveau la Loi sur la santé et la sécurité du travail en stipulant que l'indemnisation venant de la CSST, pour une travailleuse enceinte qui bénéficie du retrait préventif, cesse «à compter de la quatrième semaine avant la date prévue de l'accouchement».

n (11 h 40) n

Alors, cette mesure, on rappellera qu'elle était absente, lors de la commission parlementaire qui a eu lieu en juin 2000, et un amendement est arrivé, entre la commission parlementaire et l'adoption de cette loi, et qui fait en sorte qu'on fait une remise en question d'un régime qui est important pour les femmes du Québec et qui a comme objectif premier ? parce qu'on parle de la Loi sur la santé et sécurité du travail ? l'élimination à la source du danger. Et nous pensons que c'est une mesure importante et une mesure sociale qui a un lien direct avec la santé et la sécurité du travail.

Alors, considérant cet enjeu de taille et ce recul qui est amené par ce projet de loi, nous recommandons le retrait des articles 88 et 89 du projet de loi n° 108 mais aussi l'abrogation des articles 141 et 142 de la Loi sur l'assurance parentale pour rétablir ce droit des travailleuses du Québec.

Mme Asselin (Michèle): Mme Paquin va poursuivre sur la Loi des normes du travail.

Mme Paquin (Ghislaine): Alors, en ce qui concerne l'harmonisation avec la Loi sur les normes du travail, on avait une préoccupation en ce qui concerne les suspensions des prestations en cas d'hospitalisation de l'enfant.

En effet, l'article 83 du projet de loi propose d'appliquer cette suspension-là aux congés de paternité et parental, ce qu'on approuve, ce qu'on trouve intéressant. Par contre, dans le projet de loi, on spécifie que ce doit être fait après entente avec l'employeur. Nous croyons que la personne salariée devrait pouvoir de plein droit choisir cette option comme elle peut choisir de suspendre le paiement de ses prestations de maternité pour cette raison. Il suffirait d'exiger un certificat médical, comme c'est d'ailleurs déjà prévu pour une demande de prolongation de ses congés. Nous recommandons également que cet article s'applique si l'enfant est temporairement retiré de la garde des parents.

Donc, nous recommandons la modification de l'article 83 pour que le droit à la suspension, en cas d'hospitalisation de l'enfant, ne dépende pas d'une entente avec l'employeur. Et nous recommandons également que ce droit s'applique dans le cas où un enfant est temporairement retiré de la garde des parents.

Nous recommandons d'harmoniser la Loi sur l'assurance parentale avec ces changements-là qui sont faits dans la Loi sur les normes du travail, car actuellement on ne peut pas suspendre les prestations de paternité et parentales, selon la Loi sur l'assurance parentale.

En ce qui concerne le décès d'un parent, il y a déjà un article, dans la Loi sur l'assurance parentale, qui stipule que, lorsqu'un des parents décède, le nombre de semaines de congé de maternité ou de paternité non utilisés par le parent décédé s'ajoute au nombre total de semaines de congé parental auquel a droit l'autre parent.

On ne trouve pas la même chose dans la Loi sur les normes du travail. Nous recommandons donc de modifier l'article 83 pour inclure, dans la Loi sur les normes du travail, le décès d'un parent comme raison donnant droit à la prolongation du congé parental, comme c'est déjà prévu dans la Loi sur l'assurance parentale.

En ce qui concerne la promulgation des règlements, l'article 83 propose d'appliquer le fractionnement des congés de maternité parentale et de paternité dans le cas où l'enfant est hospitalisé, dans le cas où la personne est malade ou dans le cas où un proche nécessite sa présence en raison d'une grave maladie.

Un règlement devra prévoir cependant les autres cas, les autres conditions, les délais et la durée du fractionnement, avant que cet article ne puisse s'appliquer. Or, il arrive malheureusement que ces règlements tardent à être promulgués. On attend d'ailleurs, depuis deux ans et demi, un règlement qui permettra de prolonger, dans la Loi sur les normes du travail, jusqu'à 104 semaines la période pendant laquelle le congé parental peut être pris.

Alors, nous demandons que les articles 83 et 84 du projet de loi prévoient que les règlements prévus aux articles 81.14.1 et 81.11 de la Loi sur les normes du travail soient promulgués au moment de la mise en vigueur de la Loi sur l'assurance parentale, soit le 1er janvier 2006, et qu'il y ait harmonisation évidemment de ces règlements-là avec ceux prévus dans la Loi sur l'assurance parentale.

Maintenant, on comprend difficilement la modification qui est apportée à l'article 79 du projet de loi, qui fait un ajout à l'article 79.8 de la Loi sur les normes. C'est un article qui permet aux personnes de se retirer du marché de l'emploi pour prendre soin d'un proche malade.

Le Président (M. Copeman): Mme Paquin, on s'approche des 15 minutes. Si vous voulez poursuivre pendant quelques instants ou si vous préférez aller à une conclusion, c'est à vous de décider, là, mais...

Mme Asselin (Michèle): C'est notre conclusion.

Le Président (M. Copeman): Très bien. Allez-y, Mme Paquin.

Mme Paquin (Ghislaine): Alors, on se demande pourquoi on prend la peine de rajouter parmi les proches le conjoint de son père ou de sa mère. Est-ce que cela veut dire que le gouvernement envisage de demander le rapatriement des cotisations pour les congés de compassion fédéraux? Alors, c'est une question, mais, si c'était le cas, évidemment nous accueillerions très, très positivement l'ajout d'un tel volet, et en même temps on voudrait féliciter les changements qui sont proposés aux articles 81.1, 81.2 de la Loi sur les normes qui permettent, qui facilitent l'application de ces congés-là aux conjoints de même sexe, de même que l'abrogation de l'article 12 de la Loi sur l'assurance parentale facilite leur accès aux prestations parentales. Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, mesdames. Alors, afin de débuter l'échange, je cède la parole à Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, Mme Asselin, Mme Paquin, Mme Gingras, merci d'être devant nous et d'avoir pris la peine de venir exposer un mémoire qui est très, très précis, qui a certainement l'avantage de s'exprimer par sa clarté, comme... Et je ne suis pas étonnée, chaque fois que vous venez devant nous, c'est toujours avec la même conviction et avec la même qualité de travail.

Vous comprendrez que, ce matin, je ne suis pas vraiment devant vous pour répondre à toutes les questions, je suis plutôt devant vous pour essayer d'aller plus loin dans votre réflexion. Vous soulevez beaucoup de questions, certaines de fond, certaines plus techniques, certaines pour lesquelles nous avons déjà les réponses, certaines autres pour lesquelles il y a des nuances à apporter, j'en conviens. Donc, je ne répondrai pas à chacune d'entre elles ce matin.

Mais il y a un élément par contre que je voudrais approfondir avec vous et revenir peut-être un petit peu à l'histoire, et c'est votre recommandation qui concerne le Programme de retrait préventif.

Ma compréhension de la situation, c'est qu'effectivement, en l'an 2000, les partenaires ? quand je dis les partenaires, les intéressés, c'est-à-dire les associations patronales, les syndicats, les représentants des travailleurs ? ont beaucoup discuté sur ce sujet-là. Et ma compréhension, c'est qu'à ce moment-là il y a eu un consensus entre eux, je ne veux pas dire par rapport nécessairement à la Fédération des femmes, mais ma compréhension ? ou au regroupement ? mais il y a eu un consensus pour effectivement que, dans la loi de 2001 et dans les négociations, que ce qu'on y retrouve actuellement soit vraiment le partage ou la façon de faire ou la façon d'aborder la question des retraits préventifs, simultanément ou cumulés, avec le congé d'assurance parentale.

Je crois comprendre que, là, aujourd'hui, vous nous demandez effectivement de garder de façon intacte les retraits préventifs, donc le congé parental s'applique après. Autrement dit, le quatre semaines qui devient congé parental, vous souhaitez qu'il demeure retrait préventif; c'est ça, ma compréhension.

Ma question par contre, c'est: Pour faire ça, vous conviendrez avec moi qu'il faut effectivement essayer de dégager ce consensus-là, parce que... Et d'ailleurs le législateur, en 2001, à mon avis a eu aussi une grande sagesse. Je vous dis ça parce qu'on a beaucoup parlé de sagesse du législateur hier soir, très tard. Mais je constate que, dans une autre loi, le législateur a encore fait preuve de sagesse en créant un conseil de gestion où sont représentés les partenaires, les cotisants, les représentants des cotisants.

Ne croyez-vous pas qu'il serait préférable d'avoir ce consensus-là qui... et on me dit, là, qu'en 2000, ça a été très, très difficile de l'obtenir, ce consensus-là, il a été obtenu après beaucoup, beaucoup de discussions et de négociations. Et ma crainte, c'est que, si on met ça sur la table maintenant, alors que c'est déjà reconnu dans la loi, bien là on n'arrivera pas dans les délais impartis.

Alors, ma question: Qu'est-ce qui est plus important? Est-ce que c'est le régime en vigueur le 1er janvier 2006 ou relancer le débat sur cette question-là?

Le Président (M. Copeman): Mme Gingras.

Mme Gingras (Carole): Merci. Alors, votre question est très pertinente, compte tenu du projet de loi et de la loi. Est-ce qu'on doit prioriser un régime plutôt qu'un autre? Les deux sont importants, je vous répondrais.

n (11 h 50) n

Le regroupement est assez clair dans son mémoire. Ce que l'on vous dit, c'est que l'amendement, qui a été introduit après la commission parlementaire sur la loi n° 140, est amené à la dernière minute, et ce n'était que pour des raisons économiques via pour faire plaisir aux employeurs. C'est ça, il y a une citation, ici, où on dit: «Le montant est égal à l'augmentation des cotisations des employeurs pour le financement du régime.» Alors, ce sont, on le voit bien, des vases communicants.

Alors, le régime du retrait préventif, quand vous dites «a fait consensus», je mettrais un bémol. Moi, j'ai deux lettres ici, devant moi, signées de dirigeants de deux centrales syndicales qui ont acheminé, après l'adoption de la loi, des commentaires disant qu'on ne devait pas toucher à ce régime si cher aux travailleuses. Les deux lettres, une s'adressait à Mme Marois et l'autre à Mme Léger.

Alors, le consensus, c'était d'avoir un régime d'assurance parentale. Ça, c'était évident. Au même moment, ce que l'on entendait, à l'époque, c'est que le gouvernement était pour mettre de l'argent neuf dans le régime. Alors, c'était aussi le contexte.

Et je voudrais juste rappeler, à ce moment-ci, que le régime du retrait préventif, ce n'est pas pour rien qu'il est dans le cadre de la Loi sur la santé et sécurité du travail. La travailleuse qui est enceinte, qui va voir son médecin et qui décrit ses conditions de travail et que le médecin, après vérification, émet un certificat médical en bonne et due forme, en disant: Elle doit se prévaloir du retrait préventif, alors, l'employeur a deux choix: ou bien il la réaffecte à un autre poste ou bien elle se retire de son poste et elle s'en va à la maison. Les travailleuses, je veux dire, elles n'ont pas à porter le fait que les employeurs ne les réaffectent pas ou ne font pas grand-chose pour s'assurer que leurs conditions de travail soient améliorées.

Il faut revenir à l'esprit du programme de la maternité sans danger. Le retrait préventif n'est pas un congé de maternité, c'est un congé parce qu'il n'y a pas eu de réaffectation. C'est dans la loi santé et sécurité, ça n'a rien à voir. On revient à l'esprit, s'il y a une Loi sur la santé et sécurité et qu'on a inclus ce droit en 1981, c'est qu'on voulait permettre à des travailleuses enceintes qu'elles puissent vivre leur grossesse sans risque pour elle et pour l'enfant à naître.

Alors, en coupant dans ce régime-là, je pense qu'on est en train de déresponsabiliser les employeurs, et on pénalise les travailleuses qui n'ont d'autre choix que de se prévaloir du retrait préventif. Alors, à partir de là, vous êtes en train de sabrer dans un programme qui est très cher aux femmes du Québec et qui vivent les conséquences d'un geste qui n'est pas posé dans le milieu de travail. Alors...

Je ne sais pas si on aimerait ça entendre, au Québec, que dorénavant les gens qui sont sur la CSST, sur les accidents de travail ou les maladies professionnelles, que, dorénavant, à cause d'un autre programme, on leur coupe le dernier mois durant une année parce qu'il faut aller financer l'autre programme. Je ne suis pas sûre, moi, que le Québec accepterait ça.

Alors, au regroupement, il y a un consensus. Vous avez le mémoire, vous lisez avec moi les recommandations. Et, en passant, j'en profiterais peut-être pour dire qu'il y a une petite erreur au niveau de la recommandation et dans le texte, là: ce n'est pas l'article 88 et 89 du projet de loi, c'est uniquement l'article 88 que l'on demande le retrait, et c'est l'article 141 de la Loi de l'assurance parentale. Alors, on biffe 89 et 142. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question ou à vos questions.

Mme Courchesne: Bien, M. le Président, oui, en fait ça m'éclaire sur l'histoire, très honnêtement. Ce que je comprends puis je le vis, depuis que je suis ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, ce que je comprends, c'est qu'effectivement, en 2001, on voulait la bonne nouvelle, puis c'est correct, puis c'était une bonne nouvelle, mais qu'effectivement les bonnes nouvelles ont toujours certaines conséquences, et qu'on a dit: Bien, on verra plus tard.

Là, on se retrouve confrontés à la réalité, puis la réalité, c'est qu'on veut un régime le 1er janvier 2006, et je pense et je continue de croire que c'est très important. Mais c'est ça qui arrive: quand on fait des annonces, qu'on fait des mesures, mais qu'on ne veut pas voir la réalité budgétaire, puis vous avez raison, madame, hein, qu'on ne veut pas voir cette réalité financière et cette réalité budgétaire, bien on dit: Ah! on va pelleter ça en avant; un jour, on s'en occupera. Bien, là, c'est sûr que je comprends votre point de vue, je comprends votre point de vue, puis il est important.

Maintenant, je repose ma question... Et sincèrement je ne sous-estime pas votre point de vue. Mais je dis: La même loi qui a dit: Bien on a une bonne nouvelle, puis on croit comprendre qu'il y avait eu consensus, mais, une fois qu'elle est adoptée, là ? puis je ne critique pas ? les syndicats ont dit: Ah! non, ce n'est pas tout à fait comme ça qu'on voit ça.

Aujourd'hui, moi, j'ai le goût de vous dire: Un conseil de gestion est là, les représentants sont tous autour de cette table-là, et c'est là que ça devrait se rediscuter, et le Conseil de gestion devrait faire des recommandations au gouvernement. Parce que là il ne faut pas faire semblant que la loi n'existe pas, il ne faut pas faire semblant, là, qu'on n'est pas dans la mise en oeuvre du régime. Là, on est vraiment dans la réalité. Donc, il y a des mécanismes prévus à la loi, et à mon avis cette question-là devrait être discutée au Conseil de gestion, et il devrait y avoir des recommandations précises de faites, au gouvernement, à travers ce mécanisme prévu par la loi de 2001.

Ma question: Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'on attend des recommandations sur cette question-là? Parce qu'à ma connaissance je ne pense pas que ce soit abordé de façon précise, en ce moment. C'est évoqué mais pas vraiment abordé, mais on verra dans le rapport qu'ils nous soumettront. Alors, est-ce qu'on attend ça ou si on met... Est-ce qu'on est capables... Je vais poser ma question autrement: D'après vous, est-ce qu'on est capables de résoudre cette question-là, d'ici à peine quelques semaines, là, à peine quelques semaines?

Le Président (M. Copeman): Mme Gingras.

Mme Gingras (Carole): Merci beaucoup. Alors, Mme la ministre, votre question, je répondrais: Oui, on est capables de le résoudre, et je pense que ce n'est pas qu'au Conseil de gestion à le regarder. Bien sûr, en tout respect du Conseil de gestion qui a un mandat, il y a une commission parlementaire, aujourd'hui, en tout cas, et je pense que c'est un lieu pour se parler de ce morceau qui est fondamental à l'application du régime, et nous sommes tout à fait en accord avec les gens ici, autour de la table. Le regroupement veut ce... on veut le programme, on veut qu'il s'applique au 1er janvier, il n'y a aucun doute là-dessus.

Mais ce que nous comprenons, c'est ce qui motive la coupure via le programme de la maternité sans danger, c'est le financement. C'est ce que nous comprenons. Le financement, on le voit, c'est: cotisations, travailleurs, travailleuses et employeurs. Nous, ce que nous vous disons: Mais où est le gouvernement, là-dedans?

Le gouvernement a un discours, le gouvernement dit: Oui, on a négocié, on a travaillé; tout ça, on le reconnaît. Il y a une entente, mais en même temps il manque d'argent. En même temps, je vous dirais, le Québec va chercher des fonds du fédéral pour la famille, on a vu quand il y a eu la commission... la consultation plutôt, en 2002, il y a eu un document concernant les services de garde, et on évoquait, dans ce document-là, des chiffres qui excluaient les services de garde et des données où on nous indiquait que le Québec allait chercher des fonds pour ? là-dedans, il y a plusieurs volets ? la promotion de la santé durant la grossesse, au cours de la petite enfance; l'amélioration du soutien aux parents et aux familles; développement de la petite enfance, etc. Et les chiffres qu'on a là: en 2004-2005, 118 millions; 2005-2006, 117 millions; donc, entre 2000 et 2005, 520 millions.

La question que je vous retourne: À partir du moment où on va chercher des argents, comme gouvernement, du fédéral et qui sont destinés à la famille et qu'il y a différents volets qui correspondent tout à fait à l'assurance parentale, mais qu'est-ce qu'on fait de ces argents-là? Pourquoi on ne pourrait pas prendre une partie de ces argents-là et de le mettre dans le régime?

C'est une question de choix. Vous avez un choix à faire, et nous pensons qu'il y a des argents qui pourraient être tout à fait reconnus, qui viennent du fédéral. Et là on ne parle plus de l'Entente Québec-fédéral sur l'assurance parentale, on parle du dossier famille.

n (12 heures) n

Vous avez un discours, on l'a entendu, on le souligne dans le mémoire: Durant la campagne électorale, conciliation travail-famille, soutien aux familles. Bien, je pense qu'on a un test, là, ici, là. Il est temps qu'on pose la question: Est-ce que le gouvernement du Québec est prêt à faire son bout de chemin pour investir dans le régime? On ne peut pas refiler la facture qu'aux cotisants, il y a un rôle que le gouvernement a à jouer. Bien sûr, il y a toute la question de l'administration, et tout ça, là. C'est sûr qu'il y a ça, mais en même temps, la question financière, nous la posons comme regroupement, et on sait très bien que c'est un enjeu majeur.

Une voix: Combien de temps?

Le Président (M. Copeman): Bien, il reste quelques secondes littéralement.

Mme Courchesne: Ça va.

Le Président (M. Copeman): Ça va? M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille.

M. Bouchard (Vachon): Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Asselin, Mme Paquin et Mme Gingras. En ce qui a trait au programme Maternité sans danger, quel était à votre souvenance le rationnel qui a mené à la décision qui a été prise à ce moment-là? Quels étaient les fondements de la décision?

Mme Gingras (Carole): Alors, c'était le financement. À l'époque, il manquait de l'argent, et on essayait d'aller en chercher, et on identifiait à l'époque différentes sources de financement, et l'une d'elles était le retrait préventif.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce qu'il y a eu une réaction aux lettres des présidents des syndicats à l'époque qui ont réagi à la décision en question?

Mme Gingras (Carole): Ce qui avait été à l'époque, c'est: Écoutez, on est dans un processus où on veut absolument s'assurer que la loi soit adoptée et on veut s'assurer, là, qu'on négocie avec le fédéral. Alors, on avait dit, au moment même où on reviendra avec une entente et qu'on sera rendu à l'étape de la mise en application du régime, on pourra s'en reparler. C'est exactement ce qui avait été convenu à l'époque.

M. Bouchard (Vachon): Donc, il y avait une manifestation, là, d'une ouverture à l'égard de cette disposition-là. Dans les faits, là, ce qui arrive dans le fond, pour bien se comprendre, là, pour qu'on puisse tous suivre le plus clairement possible l'implication de cette décision, et dans les recommandations que vous faites, c'est que les femmes qui se retrouvent en situation de devoir utiliser un mode de retrait préventif se trouvent donc à amorcer leur congé de parentalité ou de maternité quatre semaines précocement à ce qu'elles pourraient faire si elles utilisaient d'abord leur congé de prévention et ensuite leur congé de maternité. C'est bien le cas?

Mme Asselin (Michèle): Oui, c'est ça. C'est qu'en fait elles perdent quatre semaines. Et il y a la perte pour les femmes que ça touche individuellement, puis il y a aussi, au niveau politique, un principe qui devient remis en question, parce que pour nous le retrait préventif, ça n'a rien à voir avec le congé de maternité. Et c'est là où il y a une brèche qui est ouverte sur un programme qui est fondamental et qui est lié à la sécurité, dans un milieu de travail, pour la femme enceinte ou celle qui allaite. À l'époque, ça s'est négocié en toute fin de processus. Nous, il y a une ouverture aujourd'hui, il y a une commission parlementaire, il y a une loi qui va bonifier la loi qui va être en vigueur dès le 1er janvier, il nous apparaissait fondamental d'ouvrir cette question-là.

Il y a des questions sur lesquelles nous ne nous faisons aucune illusion, il n'y aura pas de consensus. Il n'y a pas toujours des consensus entre les travailleuses, les travailleurs et les employeurs; les intérêts sont parfois divergents. Il faut, dans ce cas-là, que l'État, que l'État québécois, que le gouvernement impose une vision politique, comme il le fait aussi pour arriver à l'adoption de cette loi et tous les travaux qui nous mènent aujourd'hui. Puis on a confiance que, le 1er janvier, tout va se régler. Pour nous, c'est une question majeure, il faut faire marche arrière et décréter qu'il n'y a pas de vases communicants entre le retrait préventif et le congé de maternité. C'est deux choses totalement différentes, et ça ne devrait pas être des vases communicants au niveau du financement des régimes.

M. Bouchard (Vachon): Très bien. En parlant de financement, est-ce qu'à l'époque vous aviez eu connaissance d'une évaluation d'impact budgétaire d'une décision qui aurait été dans votre sens?

Mme Asselin (Michèle): C'est assez difficile pour nous, comme regroupement, d'avoir des chiffres très précis, ça fluctue beaucoup. On ne peut pas savoir combien, là, chiffrer. À moins que Carole ait des chiffres plus...

Mme Gingras (Carole): C'était très peu. Très peu. À l'époque, je me souviens, quand on nous a fait la présentation des tableaux, je vous dirais que c'était autour de 7 millions, le coût...

M. Bouchard (Vachon): Pour l'ensemble...

Mme Gingras (Carole): Non, non. Le coût pour le retrait préventif. Est-ce que c'est ça, votre question?

M. Bouchard (Vachon): Oui.

Mme Asselin (Michèle): Bien, on n'a pas de chiffres actuellement, là. En 2006...

Mme Gingras (Carole): On ne les a pas. C'est en 2000, ça.

M. Bouchard (Vachon): Bon, très bien. Oui. Merci. Alors, dans votre... Permettez, M. le Président. Dans votre mémoire, en page 8, vous dites: «L'Entente finale Canada-Québec sur le régime québécois d'assurance parentale prévoit le transfert de 200 millions pour appuyer la mise en oeuvre du régime. Le gouvernement du Québec a-t-il reçu ce montant et a-t-il l'intention de le transférer dans le Fonds d'assurance parentale pour la mise en place du régime?» Y a-t-il des indices qui vous feraient croire que ça ne se passerait pas ainsi?

Mme Asselin (Michèle): Bien, quand on nous dit que c'est les cotisants qui doivent assurer le financement du régime, bien on se pose la question: Où ira cet argent qui est issu de l'entente qui a été signée et où va aller l'argent qui est récupéré du PRALMA? C'est les questions qu'on pose parce que, dans notre vision, outre les cotisants, travailleuses, travailleurs et employés, le gouvernement devrait contribuer à ce régime, et, nous, on y voit des pistes pour trouver du financement, notamment ce 200 millions.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, je permettrais à Mme la ministre de s'exprimer là-dessus, puisqu'elle me fait des signes comme quoi...

Le Président (M. Copeman): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Alors, merci, M. le Président. Merci, M. le député de Vachon, de me permettre de répondre. La réponse, c'est: Oui, le 200 millions va être transféré dans le fonds. C'est sûr. C'est officiel. C'est incontournable. Maintenant, ce 200 millions de dollars là actuellement, par entente, là, était versé à partir... En fait, c'est un montant qu'on appelle, nous, calculé 2004-2005. Donc, déjà il y a des versements qui se font. C'est aussi un 200 millions, je vous le dis en toute transparence, qui doit être adopté dans le budget fédéral qui n'est pas encore adopté. Ne soyez pas inquiète. Je vous le dis tout de suite, dans l'entente que nous avons signée, Canada-Québec, ce montant-là est protégé, peu importe... garanti. D'aucune façon, ce montant ne pourrait pas ne pas être versé parce que l'entente que nous avons signée en mars garantit ce 200 millions, et donc ce 200 millions va être au fond le premier montant que nous allons retrouver dans le fonds.

Le Président (M. Copeman): M. le député.

M. Bouchard (Vachon): Puisque nous y sommes et que le gouvernement aura donc créé un précédent d'investir un premier 200 millions dans le fonds, je vais revenir... C'est plus facile quand le gouvernement est une courroie de transmission que lorsqu'il doit investir lui-même de ses propres argents. Et donc j'ouvre la discussion sur cette recommandation que vous faites, à savoir que le gouvernement devrait être un partenaire de la caisse ou du fonds. J'ai déjà exprimé ma sympathie à cet égard-là. Votre argumentation tourne autour du fait qu'il y a un effort que les citoyennes et citoyens du Québec consentent au défi que représente le déficit démographique; que quelque part, s'il y a un déficit démographique et que l'État le reconnaît, le gouvernement pourrait se placer en partenariat avec les parents pour arriver à relever ce défi; que dans le fond l'enfant n'est pas seulement une ressource familiale, mais c'est aussi une ressource sociale, éventuellement une ressource économique extrêmement importante dont la société va bénéficier tout au long de sa vie.

L'argumentation me semble assez forte, là, à la lecture de plusieurs documents qu'on a eu l'occasion de parcourir jusqu'à maintenant, en dehors des mémoires qui sont déposés ici. Est-ce que vous avez une idée ? parce que je pense que le principe on est d'accord, là ? est-ce que vous avez une idée de la proportion de financement que le gouvernement pourrait consentir dans un fonds comme celui-là?

n (12 h 10) n

Mme Asselin (Michèle): Pour pouvoir répondre à votre question, il faudrait avoir des chiffres plus précis des coûts du régime, et on ne dispose pas de toutes les données. Comme regroupement, on n'a pas de pourcentage à proposer ni de montant. Par contre, ce qu'on... Bon. Lors de rencontres précédentes, on a déjà parlé, alors que M. Béchard était responsable, d'un 60 millions. Il faut en fait que les hausses de cotisation pour les travailleuses et les travailleurs soient absorbables, qu'il y ait une contribution juste des employeurs.

Et, quand on parle de la contribution du gouvernement, de l'État, c'est une contribution sociale, hein, parce que les revenus de l'État viennent de l'ensemble des citoyens et des corporations, et donc c'est un engagement important pour les familles québécoises, et c'est un geste qui porte un message aussi sur l'importance qu'on accorde aux mesures de conciliation famille-travail et à des politiques familiales. Pour nous, ce régime, c'est une pierre angulaire, et c'est important que toutes et tous, on y contribue par nos cotisations, mais aussi que l'État y consacre certains revenus qui proviennent de l'ensemble de la société, et qui permet aussi de répartir entre tous et toutes les coûts de ce régime, et, selon les impôts que nous versons à l'État, bien qu'une certaine somme puisse appuyer le régime. C'est aussi dans l'esprit de cette loi qui fait consensus.

Et c'est vraiment... C'est pour ça... On n'a pas de chiffres ni de pourcentage, mais nous, c'est un message clair, le financement. Il y a des montants à y accorder, mais il y a aussi un geste politique important à y accorder.

M. Bouchard (Vachon): Je comprends très bien votre argumentation. Vu du point de vue de la symbolique sociale que cela pourrait représenter, c'est un signal extrêmement fort.

Nous avons en main de fait, et je déposerai le document, donc il deviendra accessible pour l'ensemble des gens, là, un document que nous avons obtenu grâce à une demande d'accès à l'information, sur la répartition des coûts et le financement, là ? je pense que ce n'est pas un grand secret. Mais ce qu'on y retrouve, sur ce document, c'est que la cotisation de base assure 68 % du coût et du financement; la majoration du maximum assurable sur le revenu, à peu près 10 %; la couverture qui... donc les contributions des autonomes, 4 %; et il y a un 7 %, là, qui n'est encore assumé, là, d'un écart entre les coûts et le financement, 183 millions, donc un 17 %. Alors, M. le Président, je pourrai, si vous le permettez, déposer ce document qui pourrait servir d'outil de travail sans doute aux gens lorsqu'ils...

Maintenant, en ce qui a trait aux 60 millions dont il a été fait état avec le précédent ministre de la Famille et de l'Enfance, M. Béchard, est-ce que vous pouvez nous indiquer le moment, ou les circonstances, ou le contexte dans lequel cet engagement ou cette... Est-ce que c'est un engagement ou une prévision, un, ou un souhait ? il y a des nuances à apporter, là ? et dans quel contexte cela a été fait?

Mme Asselin (Michèle): Ah! bien, rappelez-vous, là, il y a plusieurs mois, on était à essayer d'arracher l'entente avec le gouvernement fédéral, et, lors de plusieurs représentations du regroupement auprès du ministre Béchard, alors responsable, il a été question des coûts et du fait qu'on avait déjà des hypothèses des sommes que nous pouvions récupérer du régime de l'assurance-emploi, et on savait qu'il manquerait de l'argent, c'était clair. Et c'est à l'occasion de ces rencontres que le ministre Béchard affirmait que le gouvernement du Québec pourrait combler et contribuer au régime, et on parlait d'un montant d'autour de 60 millions. Mais, encore là, les sommes exactes, au moment de ces discussions-là, ils étaient encore en calcul aussi pour connaître les sommes qui seraient nécessaires.

M. Bouchard (Vachon): Et est-ce que vous avez senti à ce moment-là que la rhétorique autour de la contribution se jouait quant au fait que le programme est un programme d'assurance et non pas un programme social?

Mme Gingras (Carole): Non.

Mme Asselin (Michèle): À ce moment-là, non, les discussions ne faisaient pas de différence. C'était le régime, et on devait trouver tout le financement nécessaire pour appliquer le régime selon la loi. C'est arrivé après l'entente.

M. Bouchard (Vachon): Très bien. Alors, merci beaucoup de votre contribution.

Mme Asselin (Michèle): Dans mon empressement à présenter, j'ai oublié de vous saluer, M. le Président, de saluer Mme la ministre et de saluer mesdames, messieurs. Alors, je tenais à le faire.

Le Président (M. Copeman): Je suis convaincu, Mme Asselin, que vous n'avez pas porté ombrage à qui que ce soit, et on ne vous tient pas rigueur.

Document déposé

Dans un premier temps, j'autorise le dépôt du document Conseil de gestion de l'assurance parentale ? Plan de la présentation, daté du 7 mars 2005.

M. Bouchard (Vachon): On va pouvoir en avoir une photocopie?

Le Président (M. Copeman): Et je vous remercie, mesdames.

Par la suite, évidemment, j'invite les représentantes de l'AFEAS à prendre place à la table pour que la commission puisse poursuivre ses travaux.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre! Alors, la commission poursuit ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de l'AFEAS. Mme la présidente Brault, Mme Cornellier, bonjour. Vous n'êtes pas à votre première expérience devant une commission parlementaire. Ça, tout le monde en est conscient. Je vous rappelle simplement que vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et il y aura par la suite un échange avec les députés d'une durée de 30 minutes partagées équitablement des deux côtés de la table. Nous sommes à l'écoute, Mme Brault.

Association féminine d'éducation
et d'action sociale (AFEAS)

Mme Brault (Diane): Alors, bonjour, M. le Président. Mesdames et messieurs, membres de la commission, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Je tiens à vous remercier au nom de l'AFEAS de nous donner l'occasion de participer aux consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale et d'autres dispositions législatives.

Comme vous connaissez la plupart l'AFEAS, vous savez que c'est une association de défense des droits des femmes, et, depuis près de 40 ans, l'AFEAS agit au sein de la société québécoise, et ce, sur tous les plans. Par sa présence et le réalisme de ses interventions, elle a acquis une crédibilité comme interlocutrice auprès des instances décisionnelles et des organismes du milieu.

L'AFEAS profite de l'occasion qui lui est offerte par les présentes consultations pour souligner l'importance de l'entente Canada-Québec sur l'assurance parentale qui a été conclue le 1er mars dernier. Cette entente constitue le point tournant dans la mise en oeuvre du régime québécois d'assurance parentale, régime qui permettra aux mères et aux pères de mieux profiter des congés, lors de la naissance ou de l'adoption d'un enfant. Bien que le projet de loi n° 108 soit un projet de loi qui clarifie de façon généralement technique la Loi sur l'assurance parentale, il n'en reste pas moins que certains de ses éléments sont fondamentaux pour l'avenir du régime et pour les droits des femmes lors de leurs maternités.

n (12 h 20) n

Dans le présent mémoire, nous aborderons les points suivants: la composition du Conseil de gestion, le Fonds d'assurance parentale, la question de la CSST, l'harmonisation avec la Loi sur les normes du travail, en conclusion, les travaux futurs du Conseil de gestion.

L'AFEAS, à titre de membre du Regroupement pour un régime québécois d'assurance parentale, endosse totalement les recommandations présentées ce matin par les porte-parole du regroupement. Les éléments exposés ici soulignent des points particuliers qui touchent les membres de l'AFEAS ou renforcent les recommandations du regroupement.

La composition du Conseil de gestion. La Loi sur l'assurance parentale institue le Conseil de gestion, personne morale chargée de gérer le régime québécois d'assurance parentale. Elle en définit la composition. En plus du président-directeur général, ses membres proviennent du gouvernement, des employeurs et des travailleurs provenant des syndicats, provenant des travailleuses et travailleurs autonomes. À notre avis, cette répartition des membres contient des lacunes qui doivent être comblées dès à présent puisque c'est maintenant que le Conseil de gestion pose les jalons de base du régime qui sera en vigueur le 1er janvier 2006.

Rappelons que le régime québécois d'assurance parentale soutiendra de façon plus efficace les femmes et les hommes lors de la naissance et de l'adoption d'un enfant. Cependant, il faut le constater, ce sont les femmes qui, en majorité, utiliseront ce régime via les prestations de maternité et parentales. Pourtant, les femmes, qui constituent une partie intéressée au même titre que les employeurs et les travailleurs syndiqués ou autonomes, sont absentes du Conseil de gestion. De plus, les femmes constituent la grande majorité des travailleuses et travailleurs non syndiqués et, à ce titre, ne sont pas représentées au Conseil de gestion. Ne l'oublions pas, les salariés ne sont pas tous syndiqués, principalement les femmes.

Le régime québécois d'assurance parentale, tout en étant un régime d'assurance, est aussi un des outils privilégiés par le gouvernement, le précédent comme l'actuel, pour aider les familles dans la conciliation famille-travail-études.

C'est pourquoi nous recommandons que le Conseil de gestion, en plus des membres présentement déterminés par la Loi sur l'assurance parentale, compte une membre femme, une membre choisie parmi les travailleuses non syndiquées. Ces deux membres seraient choisies après consultation des principaux groupes autonomes de femmes.

Le Fonds d'assurance parentale. Le gouvernement, un partenaire incontournable. Il est à noter que, selon la Loi assurance parentale, article 111, modifié par l'article 58 du projet de loi n° 108, le Conseil de gestion dispose des sommes en provenance de diverses sources, principalement des sommes versées par le ministère du Revenu et provenant des cotisations des employeurs ainsi que des travailleuses et travailleurs, salariés et autonomes. L'article 111 de la Loi assurance parentale prévoit que le Conseil de gestion peut aussi disposer des sommes versées par le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale sur les crédits alloués à cette fin par le Parlement. Cet alinéa permet au gouvernement de participer financièrement au régime comme partenaire, avec les employeurs et les travailleuses et travailleurs.

Pourtant, le message actuel provenant du gouvernement nous laisse croire que le gouvernement ne fera qu'assumer la gestion quotidienne du régime et ne sera pas partenaire dans sa mise en oeuvre sur le plan financier. Pour l'AFEAS, le gouvernement doit annoncer clair et fort son engagement face à ce nouveau régime, et sa participation doit être précisée, au même titre que celle des employeurs et des travailleurs et travailleuses, dans le projet de loi. Cet engagement reflétera la volonté réelle du gouvernement de soutenir les hommes et les femmes qui choisissent d'avoir des enfants ou d'en adopter. L'AFEAS demande un message clair indiquant que le gouvernement agit en soutien aux responsabilités parentales, ce qui va bien au-delà de l'assurance d'un risque. En effet, ce régime est aussi une mesure sociale incluse dans la politique familiale du Québec.

Nous recommandons que le régime québécois d'assurance parentale bénéficie d'un financement tripartite en provenance des employeurs, des travailleuses et travailleurs, salariés et autonomes, et du gouvernement du Québec.

La saisie des prestations. La Loi sur l'assurance parentale statue que les prestations d'assurance parentale sont incessibles et insaisissables. Pourtant, le deuxième alinéa, modifié par l'article 23 du projet de loi n° 108, permet au ministre de déduire les prestations du montant qui lui est remboursable en vertu de l'article 102 de la Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. La modification spécifie que le ministre peut agir avec discrétion pour récupérer les montants dus à la Sécurité du revenu ou assistance-emploi à même les montants de prestations d'assurance parentale. Malgré cette discrétion du ministre, comment la Loi sur l'assurance parentale peut-elle énoncer une chose et son contraire? Les prestations d'assurance parentale permettent aux femmes et aux hommes de prendre soin d'un nouveau-né ou d'un enfant nouvellement adopté, et ce, tout en évitant de trop grands frais liés à la perte de revenus. Comment concilier le fait de pouvoir prélever un montant sur ces prestations, alors qu'elles ne constituent que 70 % du revenu de la personne, avec les engagements du gouvernement d'aider les familles et les exigences de la Loi sur la pauvreté et l'exclusion sociale?

Nous recommandons que le deuxième alinéa de l'article 33 soit retiré complètement de la Loi sur l'assurance parentale.

La question de la CSST. La Loi sur l'assurance parentale, article 141, modifiée par l'article 88 du projet de loi n° 108, confirme l'amendement de la Loi sur la santé de sécurité du travail, en stipulant que l'indemnisation, par la CSST, d'une travailleuse enceinte qui bénéficie d'un retrait préventif au sens de cette loi «cesse à compter de la quatrième semaine avant la date prévue de l'accouchement», tel qu'inscrit dans le certificat médical produit aux fins de l'application du droit au retrait préventif, si elle est admissible aux prestations payables en vertu de la Loi sur l'assurance parentale. La Loi sur l'assurance parentale vient changer cela en décrétant la fin de l'indemnisation par la CSST au début de la quatrième semaine précédant la date prévue de l'accouchement. Cela prive la travailleuse soit de son revenu pendant cette période, soit de sa liberté d'aménager la répartition de son congé de maternité à son gré, avant et après l'accouchement, et cela, au seul bénéfice des employeurs.

L'impossibilité de respecter l'objectif de prévention inscrit dans la LSST impose donc ici une distinction entre les travailleuses. Il s'agit de la perte d'un droit acquis pour les travailleuses enceintes ou qui allaitent, celui de travailler dans un milieu exempt de danger pour elle-même ou son enfant.

Le gouvernement consulte actuellement la société sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes. Dans le cadre de ses conclusions, il a été constaté à maintes reprises que les femmes, tout en ayant une égalité de droit, ne sont pas rendues à l'égalité de fait. Non seulement il reste beaucoup à faire pour atteindre l'égalité complète, mais il faut éviter de revenir sur des acquis réels qui ont été gagnés de chaude lutte.

Nous recommandons le retrait de l'article 88 du projet de loi n° 108 et de l'article 141 de la Loi sur l'assurance parentale.

L'harmonisation avec la Loi sur les normes du travail. La modification prévue à l'article 79 du projet de loi n° 108, modifiant l'article 79.8 de la Loi des normes du travail, nous perturbe. Ce dernier article touche la possibilité pour les personnes de se retirer, sans perte d'emploi, du marché du travail pour donner des soins à un proche. Y sont identifiées les personnes qui pourraient, dans le contexte de la naissance ou de l'adoption, être en besoin de soins, soit son enfant, son conjoint, l'enfant de son conjoint. Mais quelle est l'intention de l'ajout du conjoint de son père ou de sa mère, à l'article 79.8? Le gouvernement envisage-t-il de demander le rapatriement des cotisations pour les prestations fédérales de compassion, comme celles pour les prestations de maternité et parentales? Si c'est le cas, l'AFEAS encourage fortement ce possible développement de la Loi sur l'assurance parentale.

Nous recommandons de clarifier l'intention de la modification à l'article 79.8 de la Loi sur les normes du travail prévue à l'article 79 du projet de loi n° 108.

n (12 h 30) n

En conclusion, les travaux futurs du Conseil de gestion. L'objectif de la présente consultation est de permettre au Conseil de gestion responsable de gérer le Fonds d'assurance parentale, en vertu de la Loi sur l'assurance parentale et d'assurer sa mise en vigueur, tel que prévu, le 1er janvier 2006. À ce moment-là, en 2006, les femmes et les hommes du Québec pourront se prévaloir des prestations de maternité, de paternité et parentales instituées par la loi lors de la naissance ou de l'adoption d'un enfant. Ce régime s'appliquera aux travailleuses et travailleurs, salariés et autonomes, qui ont gagné plus de 2 000 $ durant l'année précédant l'accouchement ou l'adoption.

Cependant, en 2006, il y aura des femmes et quelques hommes qui ne répondront pas aux critères d'admissibilité prévus par la loi mais qui, tout comme les personnes admissibles, auront donné naissance ou adopté un enfant. Rappelons que certains pays européens ayant un objectif d'égalité entre les femmes et les hommes prévoient une mesure d'universalité au sein de leur régime d'assurance parentale. Ces exemples pourraient nous servir de modèle dans nos recherches pour le mieux-être des parents. Par ailleurs, les responsabilités familiales comportent, en plus de celle des parents envers leurs enfants, celle des aidantes et aidants envers leurs proches en perte d'autonomie, malades ou handicapés.

Dans un souci que des mesures et programmes soutiennent les différentes responsabilités familiales, l'AFEAS souhaite que le travail de toutes les personnes qui assument les rôles sociaux de parents et d'aidantes, aidants, soit reconnu, entre autres, au sein de la Loi sur l'assurance parentale. Éventuellement, peut-être, aurons-nous une loi sur l'assurance familiale, incluant les parents et les aidantes, aidants, soit un soutien concret et complet aux familles.

Nous recommandons que le Conseil de gestion soit mandaté dès l'année 2006, à la suite de la mise en oeuvre de la Loi sur l'assurance parentale, pour faire des recherches et des recommandations touchant les personnes présentement exclues du régime, soit les mères et les pères n'ayant pas gagné un minimum de 2 000 $ dans l'année de référence; les aidantes et les aidants, en élaborant un volet de prestations québécoises d'aide aux proches et en rapatriant les cotisations versées à l'assurance-emploi au titre des prestations fédérales de compassion. Merci de votre écoute.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Brault. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Mme Brault, Mme Cornellier, encore une fois la plus cordiale et chaleureuse bienvenue. Vous êtes de fidèles habituées, mais vos commentaires sont toujours appréciés. Vous prenez la peine de réfléchir, de le colliger sur papier et en plus de venir nous le présenter. Merci.

J'aurais une question. Parce que, vous savez, on n'a pas beaucoup de temps, donc je vais aller tout de suite au coeur du sujet, et c'est à votre recommandation 6, lorsque vous suggérez que nous recommandions au Conseil de gestion... en fait, que nous mandations le Conseil de gestion pour faire des recherches et des recommandations touchant les personnes, c'est-à-dire les pères et les mères, qui n'ont pas gagné un revenu minimum de 2 000 $ dans l'année de référence. Or, évidemment, le régime d'assurance parentale, dans sa constitution même, s'adresse aux femmes et aux parents qui sont actifs, donc qui par définition, comme il y a une contribution d'employeur, et une contribution d'employé, et comme c'est un régime d'assurance, il faut donc travailler.

J'aimerais ça connaître votre vue, qu'est-ce que vous avez en tête parce que j'essaie de voir comment on peut étendre ce régime d'assurance là alors que malheureusement les personnes ne travaillent pas. Puis je veux juste départager les choses. Je me doute un peu de ce que vous allez me dire, mais je veux juste me demander: Est-ce que c'est dans ce contexte-là ou dans un autre contexte? Parce que souvent, si elles ne... En tout cas, je veux vous écouter là-dessus.

Mme Brault (Diane): On est très conscientes que l'assurance parentale, c'est pour les travailleuses et les travailleurs qui sont sur le marché du travail, là, puis qui vont payer des cotisations. Mais on est conscientes aussi qu'il y en a qui sont exclues: les travailleuses non syndiquées et aussi toutes les femmes qui sont au foyer qui, elles aussi, vont avoir... ont des enfants et qui peuvent en adopter aussi, et qu'on aimerait éventuellement que ces femmes-là soient aussi incluses, à un moment donné, dans l'assurance parentale, dans un... où on pourrait trouver une façon de faire pour aller chercher des argents. Hélène va compléter.

Mme Cornellier (Hélène): Oui. C'est une question qu'on étudie beaucoup depuis longtemps à l'AFEAS. On peut remonter presque jusqu'en 1966 pour ce type de recommandation là mais plus récemment... Et il existe des régimes européens où on a cette mesure d'universalité pour les personnes qui dans le fond ne se qualifient pas aux critères de base du régime. Et je pense qu'il y a plusieurs choses à regarder. Une chose qu'on constate dans le fond, c'est qu'en 2005 la plupart des femmes et des hommes qui sont en âge d'avoir des enfants ou de les adopter sont sur le marché du travail dans des périodes de leur vie, avant, pendant ou après avoir eu des enfants.

La loi, de par sa composition qui se reflète sur l'assurance parentale, dit: Il faut, dans l'année de référence, qu'il y ait le 52 semaines avant la date d'accouchement ou d'adoption. Si, dans cette période-là, par exemple, on est entre deux enfants, on a décidé de rester à la maison parce que concilier travail-famille, les garderies, même si on a un beau service, il n'y en a pas partout, à un moment donné ça devient un peu trop lourd, la famille décide de garder soi-même l'enfant à la maison, de l'éduquer, aussi parce que ça fait partie de leurs valeurs familiales, cette personne-là, rendu au deuxième, n'a plus le droit parce qu'entre les deux elle n'est pas allée travailler soit son 600 heures, ou ici c'est 26 semaines, puis gagner 2 000 $. Pourtant, elle a travaillé peut-être pendant 10 ans avant, puis elle va retourner travailler éventuellement quand les enfants seront un petit peu plus vieux.

Et donc il y a une façon de voir que les travailleuses et les travailleurs sont sur le marché du travail de plus en plus. Il y a 30 ans, je ne vous aurais pas dit ça: c'était 30 % des femmes sur le marché du travail; aujourd'hui, c'est peut-être 30 % qui ne le sont pas mais de façon sporadique. Évidemment, là, je ne compte pas les personnes retraitées; de toute façon ils ne sont plus en âge d'avoir des enfants. Donc, il y a des façons de regarder cette chose-là. Nous avions, à l'AFEAS, évalué ça, par exemple, en disant: Salaire minimum, 40 heures-semaine, 70 %, compte tenu que le régime a une valeur de 70 % pour les personnes, ce qui donne, à ce moment-ci, un peu plus que 208 $ ? 208 $, c'était la valeur avant le 1er mai, bon ? par semaine, donc pour le congé maternité, parental, 1 an. C'est à peu près ce qu'on a comme crédit d'impôt de base, une valeur de 9 000 $ à 10 000 $, bon, et pour soutenir une personne qui dans le fond fait un travail social aussi important que l'autre qui est allée, dans l'année précédant son accouchement, travailler sur le marché rémunéré.

Donc, il y a plusieurs volets. Il y a le volet européen, je sais qu'on veut le regarder plus, entre autres, au sein de la politique concilier travail-famille, avec certaines études que le gouvernement est allé faire lui-même l'année passée, dans certains pays européens, pour voir qu'est-ce qui serait faisable. Il y a des mesures de tant par jour, par exemple, dans certains pays, il y a différentes choses possibles, et les personnes ont déjà cotisé au régime. De plus, les personnes comme moi, à mon âge, qui cotisons au régime pour un risque auquel je ne serai plus soumise, puis je pense qu'on est plusieurs ici, donc en janvier prochain je ne devrais pas cotiser à ce volet-là, mais je suis sûre que vous allez me cotiser, hein, puis plusieurs d'entre nous et ces messieurs ici aussi, nous allons faire notre part. Cette part-là est pour l'ensemble des travailleurs et travailleuses, on en convient, et donc nous disons: Élargissons ça à tout l'ensemble des parents.

Donc, moi, je pense qu'il y a des choses à regarder. Et ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est: Ne faisons pas ça cette semaine. On est conscientes que, d'ici le 1er janvier, ce qui est important, c'est le régime lui-même. Mais après il y a différentes questions qui pourront être mises sur la table dont celle-ci plus la question des aidantes, là, tout le rapatriement des prestations.

n (12 h 40) n

Mme Courchesne: Alors, je trouve ça intéressant, Mme Cornellier, Mme Brault, parce qu'effectivement vous savez qu'il est prévu qu'il y ait ce genre de recherche là qui se fasse. Parce que c'est quand même un régime qui va être soumis à une évaluation, c'est-à-dire que les situations vont évoluer, les besoins de notre société vont évoluer, les besoins des familles vont évoluer, alors c'est important effectivement qu'on soit en mesure de se donner des outils qui vont nous permettre d'ajuster à certaines situations. Mais, si je comprends bien un peu votre présentation, c'est que, par exemple, des femmes qui ont déjà travaillé puis qui ont fait les choix que vous avez mentionnés, là, tout à fait louables ? et on sait qu'il y en a plusieurs qui prennent un temps d'arrêt justement pour élever leurs familles ? ce que vous dites, si elles ont déjà ? j'imagine, vous en faites une condition ? si elles ont déjà travaillé, à ce moment-là, on pourrait examiner comment on pourrait les soutenir.

Puis la raison pourquoi je dis «si elles ont déjà travaillé», c'est parce que je veux faire le lien entre ce que vous proposez et, par exemple, l'allocation de la mère au foyer. Parce que j'essaie de voir la différence entre une allocation de la mère au foyer qui est au foyer puis qui n'a jamais travaillé, qui ne travaille pas puis qui a des enfants forcément, elle décide de fonder une famille, elle a des enfants, et voir un peu la notion... Puis c'est là que j'essaie de voir votre notion de congé parental à celle qui a déjà travaillé, fait un temps d'arrêt, peut-être retournera, mais ça, on ne le sait jamais si elle va retourner ou pas, elle pense que, mais... Comprenez-vous? J'essaie de faire le lien entre le type de soutien que vous souhaitez pour ces personnes-là.

Parce que, vous savez, je l'ai dit en remarques préliminaires, le régime d'assurance parentale, c'est un élément de la politique familiale. Et Mme Asselin tout à l'heure nous disait: On veut voir le sérieux du gouvernement dans sa volonté de soutenir une politique familiale. Mais, tu sais, je peux énumérer plein d'éléments qui sont le Soutien aux enfants, qui sont l'Aide aux devoirs, qui sont le soutien au réseau des garderies. En fait, il y a une énumération d'éléments qui va démontrer que le gouvernement, depuis deux ans, a vraiment mis la famille au coeur de ses préoccupations.

Donc, si je rejoins votre proposition, ces mères qui ne sont pas sur le marché du travail, qui sont à la maison, qui ont des enfants, qui reçoivent le Soutien aux enfants, entre autres, ce que vous souhaitez, c'est qu'on puisse aussi ajouter de l'aide, c'est ça que je comprends, par le biais de l'assurance parentale. Mais j'essaie de voir est-ce que c'est parce qu'on veut que les employeurs contribuent à ces femmes-là, que les employés syndiqués contribuent à ces femmes qui choisissent d'arrêter pendant une certaine période de leur vie active? C'est juste ça.

Puis je suis d'accord avec vous, on ne réglera pas ça aujourd'hui, là, ça demande effectivement des recherches, mais je voulais juste m'assurer que je comprenais bien le sens des possibilités que vous nous proposez.

Mme Cornellier (Hélène): Je vais essayer de répondre à votre question qui est quand même simple et pas simple. Bon, l'allocation au foyer, je dois vous dire, je ne sais pas à quoi vous faites référence. Je ne suis pas une spécialiste de toutes les mesures familiales, je travaille principalement sur les revendications de l'AFEAS, donc des fois il y a des programmes que je ne connais pas. Est-ce qu'on ferait d'une condition nécessaire que les femmes aient déjà travaillé avant? On est en train de se questionner là-dessus. C'est une partie de nos projets actuels pour les prochaines années. Alors, vous allez nous voir revenir avec ça, Mme la ministre, sur ces questions-là.

On pense que, dans la plupart des cas, de toute façon les femmes, à partir de 18 ans, étudiantes, comme les hommes, pendant leurs études, travaillent, cotisent ici et là sur toutes sortes de régimes, et donc celui de l'assurance parentale à partir de janvier, comme au RRQ, et tout le reste, l'assurance-emploi. Donc, s'il y a des femmes qui n'ont jamais cotisé au moment d'avoir leurs enfants, ça va être, de nos jours, l'exception. Et ce n'est pas parce qu'on veut dire que c'est mieux que les femmes travaillent, je ne prends pas position, l'AFEAS ne prend pas position dans ce discours-là. C'est surtout l'inclusion des femmes, qu'elles aient le soutien pour les enfants comme toutes les femmes qui ont des enfants, c'est juste normal.

Ce qu'on veut qui soit reconnu par le régime d'assurance parentale, c'est que, quand on a un enfant ou on en adopte, qu'on soit un père ou une mère... On est en train de parler de parents qui mettent des enfants au monde, aident la société à évoluer. C'est un choix personnel, c'est un choix familial, mais c'est aussi un choix social d'avoir des enfants, sinon on ne serait plus là. Et, entre autres, le Forum des générations nous a parlé des problèmes de la démographie, là. Donc, on n'est pas natalistes, mais en même temps on sait que les parents... Puis vous l'avez vu, Mme la ministre, il y a des femmes qui même accouchent au mois d'août puis ont des problèmes parce qu'elles sont allées trop vite dans le régime, elles pensaient qu'elles auraient droit au régime d'assurance parentale en janvier, parce qu'elles se sont dit: Ça va être meilleur, allons-y tout de suite. Bon. Alors, les parents, avec des bons soutiens effectivement, souhaitent souvent d'avoir plusieurs enfants mais veulent avoir les conditions de vie pour mener la grossesse, l'accouchement, et le post-natal, et les années subséquentes de façon décente.

Donc, je pense qu'il faut regarder ça, comment on l'organiserait, et c'est ce qu'ont fait certains pays en Europe. Et encore là il y a des mesures de pays où on prône l'égalité, on met certaines mesures, et d'autres où on prône le retour systématique des femmes à la maison, puis le père retourne travailler, ce qui est le modèle traditionnel ? ce qu'on ne souhaite pas au Québec ? et donc on met une mesure pour que les femmes restent à la maison. Et ça, on ne veut pas ça. On veut que les mesures soient là autant pour les deux parents, puis qu'ils aient un choix réel.

Je pense qu'il y aura à se questionner et il y aura à faire aussi des scénarios sur combien sont de femmes enceintes, combien sont exclues du régime, qu'elles aient gagné entre zéro et 2 000 $ ou qu'elles soient strictement au foyer. On n'a pas ces chiffres-là, et à notre avis on les aura à partir de 2008, parce que le plein régime, ça va être l'année 2007. 2006, on est sur deux régimes. Donc, on a une réflexion à faire, et on souhaiterait que ce soit fait dans le futur. J'espère que je réponds un petit peu à vos questions.

Mme Courchesne: Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci. Je comprends que Mme la députée de Terrebonne souhaite poser une question, et, étant donné qu'elle n'est pas membre de la commission, ça prend le consentement des membres. Est-ce qu'il y a consentement pour que Mme la députée de Terrebonne intervienne? Consentement. À vous, Mme la députée.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, j'avais la même interrogation que la ministre concernant votre recommandation et, avec vos explications, je trouve extrêmement intéressant le cheminement qui a été fait de finalement... une revendication que vous travaillez depuis effectivement très longtemps, toute cette reconnaissance du travail invisible des femmes. Et l'angle que vous l'abordez, je pense qu'il est vraiment intéressant. Ça permet de faire les recherches, ça permet de vraiment connaître la situation puis d'apporter des recommandations. C'est très lié.

Vous avez parlé du Forum des générations, puis c'est exactement ce que je m'étais mis comme note. Dans le fond, quand on dit, comme État qui a un défi démographique... Personnellement, je ne souhaite pas de politique nataliste, pas du tout, mais il faut des moyens, des outils, il faut favoriser des mesures de soutien aux parents qui désirent, qui font le choix d'avoir des enfants, mais il y a aussi un avantage au niveau de la société, et il faut donc le reconnaître. Et là où je diverge un peu avec la ministre, c'est que dans le fond cette partie-là, je pense qu'elle devrait être assumée par la participation du gouvernement. Vu que c'est effectivement une contribution sociale qu'on reconnaît, donc cet élément-là devrait être absorbé non pas par l'employeur ou le travailleur, la travailleuse, elles ne le sont pas, mais par l'État qui, de cette façon-là, reconnaîtrait l'action sociale qui est posée.

Intéressant aussi votre proposition d'examiner la possibilité de rapatrier les cotisations versées à l'assurance-emploi au titre des prestations fédérales de compassion pour faire le lien effectivement avec les aidantes et aidants naturels, puisqu'effectivement, dans les normes du travail, on avait, à ce chapitre-là, apporté des mesures.

Ma question va être à partir de votre première recommandation. Vous êtes membre du Regroupement pour un régime québécois d'assurance parentale, dont vous appuyez effectivement les revendications et celle d'une membre choisie parmi les travailleuses non syndiquées, mais vous ajoutez aussi une membre femme choisie après consultation des principaux groupes autonomes de femmes. Dans votre mémoire, vous présentez votre argumentation, et je veux savoir si j'ai bien saisi, bien compris, à l'effet que finalement ce sont principalement les femmes qui en majorité sont les utilisatrices de ce régime. S'il y a des recherches effectivement à faire pour élargir, ce sont principalement effectivement des femmes aussi qui vont y être intéressées. On pourrait se retrouver sur un conseil de gestion avec trois employeurs hommes, on pourrait se retrouver avec trois syndiqués masculins aussi. Donc, vous voulez vous assurer que cette préoccupation-là, femme, soit là. C'est pour ça que vous faites la demande d'un ajout supplémentaire d'un poste exclusivement femme?

n (12 h 50) n

Mme Cornellier (Hélène): On pourrait le voir comme ça, mais on sait bien que le Conseil de gestion est quand même... Je ne sais pas, je n'ai pas la liste devant moi, s'il y a une parité. Je sais qu'il y a plusieurs femmes, ça, c'est clair. Les instances ont délégué des femmes, en tout cas du côté syndical, à ma connaissance, pas les travailleurs autonomes, mais, il faut bien aussi, les hommes sont là; gouvernement, je ne me rappelle pas, là, je ne peux pas vous dire; le siège femme, c'est plus que ça. C'est sûr qu'ultimement ça pourrait vouloir dire ça, c'est-à-dire que, si tout est d'un côté, donc tous des hommes, on se retrouvait au moins avec une femme. C'est plus large que ça.

C'est que c'est sûr que c'est un régime à base de cotisations. Donc, les représentants autour de la table: gouvernement évidemment, parce que quand même c'est le moteur de la chose, les employeurs et les travailleurs syndiqués et autonomes, parce qu'ils cotisent tous et chacun... On avait oublié, dans la loi, les non-syndiqués. Donc, ils ne se retrouvaient pas dans les syndicats, et ça, je pense que c'est une lacune dans le genre qu'on avait dénoncée au regroupement à l'époque, parce que dans le fond ces travailleurs-là, qui sont quand même une grosse majorité des travailleurs, n'étaient pas représentés, et ce n'est pas les syndicats qui vont les représenter, si on peut dire. C'est sûr que tout le monde travaille pour tout le monde autour de la table, mais quand même.

Plus que ça, c'est qu'on a beau dire qu'on assure un risque. Moi, je trouve ça un petit peu caricatural de parler de la grossesse en termes de risque. On penserait se retrouver dans le milieu médical, ici. Mais, disons, oui, les femmes, on risque de devenir enceintes à un moment donné; les hommes, non. Bon, bien, vous risquez d'être père en tout cas un jour, à votre connaissance ou non. Nous autres, on le sait, c'est clair. Et ce risque-là... Quant à moi, le régime d'assurance parentale, même s'il se définit dans son objet comme une assurance de risque, pour nous, c'est plus que ça. La maternité, c'est le fondement de la société ? ça, je pense qu'on ne changera jamais à moins qu'on fasse toutes des enfants par éprouvette ? et donc c'est cette vision-là des femmes ou des usagères du régime qu'on voudrait amener.

Je sais qu'avec le temps il y a certains comités gouvernementaux... Je pense, entre autres, à la question des sages-femmes où j'ai été impliquée il y a très longtemps. On avait obtenu du gouvernement de mettre en place le comité d'admission, le conseil de consultation, et d'ajouter des représentantes des usagères ? nommément c'était Naissance-renaissance qui jouait ce rôle-là ? donc avec le gouvernement, les sages-femmes et les médecins qui sont les principaux intéressés. Mais dans le fond les principaux intéressés, ce n'est pas eux, ce sont les femmes et les familles. Donc, Naissance-renaissance venait mettre ça. Et c'est la même chose, les principaux intéressés du régime, oui, on pourrait dire que c'est les cotisants, le gouvernement qui gèrent ça, mais ce sont les femmes principalement qui l'utilisent et les parents. Et c'est cette voix-là qu'on voudrait qui soit là. Ce n'est pas juste pour avoir une femme, ce serait une femme qui porte ça, cette préoccupation-là. Et donc c'est dans ce souci-là que dans le fond l'ouverture des comités gouvernementaux se fasse aux usagères et usagers qui utilisent, comme on le voit dans certaines instances, par exemple, du système de santé, des fois plus, des fois moins. C'est dans ce souci-là, clairement.

Mme Caron: Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, solidarité sociale et famille.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Alors, Mme Brault, Mme Cornellier, bonjour, et je vous transmets les salutations amicales de ma collègue de Laurier-Dorion, qui est assise à ma gauche, aussi. Vous avez évoqué la notion de risque, et ça ouvre la porte à une discussion autour d'une enquête qu'a menée la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Peut-être avez-vous vu les résultats ou le feuillet? Alors, ce qu'on dit dans cette enquête, c'est que les deux tiers des dirigeants des petites et moyennes entreprises estiment que la part des employeurs doit être calculée en fonction de l'utilisation que font leurs employés du régime alors que seul un dirigeant sur quatre s'est dit de l'opinion contraire. Alors, ce que ça implique dans le fond, c'est que les entreprises ou les institutions où on retrouverait plus de femmes se verraient imposer un taux de cotisation plus élevé, étant donné que le risque deviendrait plus grand. J'aimerais avoir votre réaction là-dessus.

Mme Cornellier (Hélène): Je pense que j'ai entendu ça hier justement. Dans notre réunion du regroupement assurance parentale, il y a quelqu'un qui a mentionné cette enquête qui est sortie ou ces discussions qui ont été mises sur la table par certains employeurs. On n'en a pas discuté à l'AFEAS, mais je pense que c'est d'un profond ridicule parce que, là, c'est un peu comme toute la notion de congédiement quand une femme peut être enceinte, où on nous demande à l'emploi: Allez-vous être enceinte? Donc, est-ce qu'on va engager encore que des hommes, ou des femmes ménopausées, ou trop jeunes pour avoir des enfants? Mais ça, c'est en bas de 12 ans. Là, je pense qu'on tombe dans un ridicule parfait.

Il y a quand même une fonction de solidarité sociale ici, même si ce n'est pas un programme social nommément, là, comme par exemple les pensions de vieillesse, là, je prendrais ce programme-là, ou l'assurance maladie, ou certaines choses comme ça. Donc, je pense qu'il ne faut pas aller dans le ridicule. Ce sont des arguments que certains pourraient mettre sur la table, on peut penser les employeurs parce qu'il y en a qui cotiseront moins parce qu'eux autres n'ont que des hommes à l'emploi, mais là on va se retrouver... Et maintenant qu'on veut que les hommes partagent ces congés-là, qu'est-ce qui va arriver? Alors, si les hommes sont trop jeunes, eux aussi ne pourront pas utiliser ces congés-là? C'est d'un parfait ridicule.

M. Bouchard (Vachon): Alors, je vous remercie beaucoup, mesdames.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, Mme Brault, Mme Cornellier, merci beaucoup pour votre participation devant cette commission parlementaire, au nom de l'AFEAS.

Et je suspends les travaux de la commission jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 57)

 

(Reprise à 15 h 7)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues! Alors, la commission poursuit ses travaux, et nous poursuivons évidemment les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale et d'autres dispositions législatives.

Cet après-midi, nous allons avoir la présentation et l'échange avec, dans quelques instants, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. C'est suivi par la Fédération des parents adoptants du Québec. Nous allons terminer l'après-midi avec la Centrale des syndicats du Québec. Et il est prévu évidemment qu'on reprenne nos travaux ? il y a une suspension ? qu'on reprenne nos travaux à 20 heures pour terminer la soirée, la journée autour de 22 heures.

Alors, sans plus tarder, ça nous fait plaisir d'accueillir les nombreux représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. M. Roy, bonjour. Vous connaissez nos façons de faire. La seule chose qui change parfois, c'est la durée des auditions. Dans ce cas-ci, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et c'est suivi par un échange avec les parlementaires des deux côtés de la table d'une durée maximale de 30 minutes, pour un total de 45. Je vous prie de présenter les personnes qui vous accompagnent et par la suite d'enchaîner avec votre présentation.

Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)

M. Roy (René): Alors, merci, M. le Président. Oui, immédiatement à ma droite, Mme Hélène Simard, vice-présidente de la FTQ; Mme Louise Mercier, vice-présidente de la FTQ; Mme Carole Gingras, qui est conseillère et spécialiste dans le domaine de la FTQ; et, à ma gauche, M. Claude Maltais, vice-président de la FTQ et président du Conseil régional de Québec de la FTQ.

Alors, oui, on est nombreux, parce que c'est un projet de loi fort important pour nous, c'est une question... on est heureux en même temps qu'il y ait une consultation, c'est une question qu'on a débattue depuis plusieurs années. Nous n'avons pas... Même si c'est un court temps pour faire la présentation, pour se préparer, on a... on ne peut pas appeler un mémoire ce qu'on vous a soumis, mais on a soumis en fait un résumé de nos dernières positions et préoccupations. On connaît bien le dossier, ça fait que... En fait, depuis 1995, la FTQ, à son congrès, avait passé une résolution dans le sens d'avoir un congé parental avec aussi une commission indépendante, et on est bien heureux d'en avoir un, un comité de gestion indépendant là-dedans. En 1998, on avait déjà eu un engagement du gouvernement, et finalement, en 2001, bien, c'est voté à l'unanimité.

n (15 h 10) n

Alors, on n'est pas ici pour remettre en question le congé parental, on n'est pas ici pour remettre en question les prestations qui font en sorte que le congé parental qu'on a devant nous est un des meilleurs en tout cas qu'on connaît, nous, au Canada ou au monde. Puis ça s'inscrit, selon nous autres, dans une approche de politique globale familiale. C'est pour ça que, pour nous, là, Mme la ministre, c'est un régime social, ce n'est pas uniquement un régime d'assurance, mais c'est un régime social, alors on va le traiter comme tel.

Nos questionnements. Actuellement, M. le Président, nos problèmes se situent, à ce moment-ci, au niveau du financement. Tous les gouvernements, les ministres de ces gouvernements-là, en privé ou en public, nous ont toujours assurés que le programme se ferait sans coût pour les travailleurs, sans coût pour les employeurs. On réalise que les coûts qui ont été transférés, c'est-à-dire les montants qui ont été transférés du gouvernement fédéral, ne couvrent pas entièrement les coûts du régime.

Déjà, en 1998, le ministre, l'ancien ministre des Ressources humaines, ressources... Il change de nom souvent, mais en tout cas c'est le ministre responsable, M. Pierre Pettigrew. On a une lettre, on a une lettre de M. Pettigrew à l'effet qu'il reconnaissait le fait que le gouvernement fédéral devait transférer, devait transférer assez d'argent, et il proposait même des montants qui couvraient à l'époque l'ensemble des coûts, l'ensemble des coûts du régime parental. Depuis ce temps-là, qu'est-ce qui est arrivé?

En 2001, on a adopté la loi à l'unanimité, mais il y a quelqu'un qui a fait passer un amendement à la Loi sur la CSST sur la question du régime... le retrait préventif de la femme enceinte et qui allaite. Alors, on va le dire si la FTQ n'a jamais été d'accord avec cette question-là. On veut le répéter aujourd'hui, c'est un cadeau de 26 millions aux employeurs, et, si je comprends bien, le gouvernement, comme employeur, et les municipalités vont sauver autour d'eux autres 15 millions sur ce 26 millions là.

Avec l'entente de 2005, avec Mme Robillard comme ministre, alors on nous transfère, comme je le disais, un montant du régime fédéral qui couvre en fait... on nous transfère en fait le coût du régime fédéral. Alors, là, on n'a plus la même approche du fédéral pantoute. Avant ça, le fédéral nous promettait de transférer de l'argent qui couvrait l'ensemble du régime québécois, tel que voté au Québec, et Mme Robillard, elle, ce qu'elle propose au Québec, c'est en fait les montants qui couvrent le régime fédéral, c'est-à-dire le régime de Jean Chrétien, de 55 semaines. Alors, ce régime-là, il vaut à peu près, selon les montants qu'on a, il vaut 737 millions, alors que le RQAP, si vous voulez, représente... coûte 1 035 millions, 1 035 000 000 $, c'est-à-dire, alors de là le manque à gagner de 298 millions.

La première chose qu'on exige, c'est que le partage de ce surplus-là ? la FTQ est prête à partager les surplus, parce que le régime parental, pour nous autres, est important ? la première base, ça doit être maintenu à du 5-12, 7-12, la division de surplus entre les travailleurs doit être maintenue sur le 5-12, 7-12. Les employeurs par contre vont sauver 80 millions, 80 millions de dollars avec ce nouveau congé parental là, parce que les régimes complémentaires de maternité sont signés, dans les conventions collectives, à 80 %. Il y a plusieurs de ces congés de maternité là qui parlent de 90 %, 95 % du salaire maintenu. Donc, les employeurs vont sauver de 55 % à 70 % ou de 55 % à 75 %, donc ils vont sauver entre 15 % et 20 %, ce qui équivaut à peu près à 80 millions de dollars. On estime que le gouvernement, comme employeur, plus les municipalités vont sauver, dans cette partie-là du congé de maternité, des régimes complémentaires de maternité, plus ou moins 55 millions de dollars.

Alors, il y a des économies, les économies sont toutes sur un bord, les économies sont toutes sur le bord des employeurs et du gouvernement. Nous autres mêmes, les travailleurs, les travailleurs, le plafond admissible, les gains admissibles passent de 39 000 $ à 57 500 $. C'est déjà une augmentation... Pour un travailleur qui gagne 58 000 $, c'est déjà une augmentation de 72 $ par année. Quelqu'un qui gagne 40 000 $ a une augmentation d'environ 35 $ à 40 $ par année.

Alors, on dit: C'est assez, à un moment donné, c'est assez d'envoyer la facture, d'envoyer la facture du côté des employés. Le gouvernement, avec les employeurs, a fait différents scénarios qui font en sorte que la facture de 174 millions... Parce que le gouvernement jusqu'à date nous a dit qu'il ne partagerait aucun... qu'il ne mettrait aucune monnaie, aucun argent dans le régime. Alors, si on prend l'ensemble de la facture qui est de 298 millions puis on fait le 5-12, 7-12, ça laisse les employeurs à 174 millions, mais ça laisse les travailleurs à 124 millions. Mais par contre on vient de voir que les travailleurs, si on maintient la question du régime préventif en plus de ça, vont sauver 106 millions. Alors, le calcul est assez facile à faire que, pour les employeurs, y compris le gouvernement, le coût total va être de 68 millions de dollars, et, pour les travailleurs, on demeure à 124 millions de dollars.

Alors, je le répète: On est prêts à participer aux coûts. Nous, on dit: Première des choses, le retrait préventif, ça n'a pas d'affaire là. Donc, le 26 millions de cadeau aux employeurs, on veut qu'il débarque de là. Alors, si on enlève ensuite de ça les gains qui sont faits par les employeurs dans ce régime complémentaire là, à cause des régimes complémentaires, ça nous donne 298 millions moins 80 millions. Il nous reste, à ce moment-là, 218 millions. À 218 millions, qu'on applique le 5-12, 7-12, puis ça va faire pour les travailleurs 90 millions. Ça veut dire que, sur le transfert du 0,33 $, ça va nous monter notre transfert ? au lieu de le monter à 0,10 $ ? ça va nous monter le transfert pour les travailleurs: de 0,33 $, ça va le monter à 0,39 $ ou 0,40 $ à peu près, 0,07 $ à 0,08 $, et les employeurs, à ce moment-là, vont avoir à peu près le même montant. Ils vont avoir à peu près le même montant, ils vont passer de 0,47 $ aux alentours de 0,54 $ du 100 $ pour la facture du congé parental. Alors, je pense que ça, c'est une manière de diviser d'une façon équitable les coûts du régime en question.

Il y a d'autres points aussi. Le comité de gestion indépendant, on veut que ce soit maintenu. Le congé au 1er janvier, on est surpris aussi de cette question-là, de ce point-là, qu'à partir du 1er janvier il va y avoir deux sortes de congé parental au Québec. On avait insisté beaucoup, dans le passé, que, si une femme accouche le 30 décembre 2005, effectivement, au 1er janvier 2006, elle tombe sur le régime de congé parental du Québec. Et on le demande encore. Voilà, M. le Président. On est prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Copeman): Merci beaucoup, M. Roy. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, mesdames et messieurs de la FTQ, bienvenue. Merci d'être présents devant nous. Comme vous le savez sans doute, M. Roy et moi avons eu à l'occasion des échanges sur ce sujet-là mais des échanges que je dois dire très brefs, au sens où pour moi il est important... Tout en ne refusant pas de partager avec des partenaires les préoccupations, j'ai toujours dit que c'était aussi important que le Conseil de gestion puisse faire son travail, et c'est important. Puis je le redis devant vous, messieurs dames, parce que ce n'est pas simplement facile de dire, comme ministre: Le Conseil de gestion doit faire son travail. C'est parce que ce mécanisme lié au Conseil de gestion, il est prévu dans la loi. Donc, ce n'est pas un conseil de gestion que la ministre ou le gouvernement a décidé de former pour faire des recommandations. Il a un poids quand même plus important, puisqu'il fait partie de la loi et il a été décidé par le législateur. Et il y avait des raisons à ça. Et, sur ce Conseil de gestion, vous l'avez dit, on l'a dit, tous les représentants sont là, concernés: les patrons, les syndicats, les travailleurs autonomes et le gouvernement.

Le gouvernement, il est là, et on aura l'occasion, M. le Président, d'en discuter probablement avec le député de Vachon, sur la place du gouvernement et pourquoi des représentants du gouvernement au Conseil de gestion. Il y a toutes sortes de scénarios possibles à cet égard-là. J'écoutais le député de Vachon qui disait: Bien, si le gouvernement est là, parce qu'il est là, il devrait payer. La grande discussion autour de cette question du financement, c'est aussi ? puis je pense qu'il faut le rappeler, je l'ai dit ce matin, je veux le rappeler encore cet après-midi ? que le gouvernement participe très, très, très activement au financement du régime, puisqu'il est le plus gros employeur. Donc, il est là aussi à titre d'employeur, de patron, et il aura, à titre de patron, à partager cette facture-là. Les cotisations pour le gouvernement, elles vont aussi augmenter. Bien sûr... Et je ne conteste pas du tout, M. Roy, vos chiffres, là. Vos chiffres... Quand vous nous parlez d'économies, effectivement, il y a, pour toutes sortes... à cause de la façon dont le régime est fait et structuré, effectivement il y a des possibilités d'économies pour le gouvernement.

n (15 h 20) n

En fait, une des questions au fond qu'on doit aborder... Puis je pense que c'est là qu'il y a un petit peu de confusion. Puis encore une fois, là, si on va trop loin là-dedans, on va rentrer dans le travail du Conseil de gestion. Mais il peut y avoir, dans les scénarios, une hypothèse qui fait que le gouvernement est là comme employeur. Et, moi, j'attends avec intérêt les recommandations du Conseil de gestion. Parce que ce qu'on entend des gens qui viennent devant nous, c'est qu'on veut qu'on intervienne à la fois comme employeur puis on veut qu'on intervienne à la fois comme gouvernement. C'est ça qu'on nous demande, là, au fond. Mais on oublie toujours de dire que le gouvernement est aussi un employeur extraordinairement important; on est le plus gros. Écoutez, je voudrais juste qu'on n'oublie pas de le mentionner parce qu'il y en a une contribution de notre part aussi, comme n'importe quel autre employeur au Québec.

Maintenant, je vais conclure ma présentation aussi sur le fait... parce que j'ai lu votre mémoire, j'ai écouté ce matin, j'ai écouté, M. le Président, le député de Vachon en entrevue. Le gouvernement du Québec, depuis deux ans, fait beaucoup pour les familles québécoises. Le gouvernement du Québec, depuis deux ans, a investi et continue et continuera ? et continuera ? d'investir beaucoup d'argent pour les familles québécoises. Alors, pour nous, le régime d'assurance parentale est un élément fondamental, la pierre angulaire de notre politique familiale. Mais ce n'est pas le seul élément de la politique familiale dans lequel le gouvernement investit. Alors, il ne faut pas nous écrire ou nous dire que le gouvernement n'a pas de cohérence ou ne fait pas rien d'autre, tu sais, ou ne contribue... Comme si le fait de ne pas ajouter cette part que vous réclamez au régime, c'est comme si, ah!, on n'avait plus de cohérence par rapport à une politique familiale. Je vous rappelle le Soutien aux enfants, je vous rappelle l'Aide aux devoirs, je vous rappelle les garderies, je vous rappelle, je vous rappelle, je vous rappelle. On pourrait faire une longue liste de tout ça.

Mais donc, dans ce sens-là, je tiens à apporter ces précisions-là parce qu'il est évident de toute façon qu'on vous écoute. Moi, je veux juste vous dire que j'entends très, très bien ce que vous nous dites, je l'analyse, et j'en tiens compte, et j'en prends bonne note, et j'exprime le souhait, M. le Président... Je le dis très franchement à M. Roy parce qu'il siège au Conseil de gestion, je souhaite que nous aurons un rapport du Conseil de gestion où il y aura des recommandations qui nous permettront d'avancer ensemble dans ce dossier-là et d'avoir ce régime. De l'avoir le 1er janvier 2006, M. le Président, ne fait aucun doute dans mon esprit. Le régime sera en vigueur le 1er janvier 2006, je n'ai pas de doute là-dessus.

Ce matin, M. Roy, on a abordé la question des retraits préventifs, et je vois que vous le ramenez dans votre mémoire aujourd'hui. Je comprends que la FTQ en fait une demande formelle au même titre que le regroupement en faisait une demande ce matin. Alors, je vais vous reposer la même question que j'ai posée ce matin. Je croyais comprendre qu'il y avait eu, en 2000-2001... je vais dire le mot «consensus», et vous me corrigerez si j'ai tort. Mme Gingras l'a fait ce matin. Bon, je ne veux pas jouer sur le mot «consensus», «entente», mais ma compréhension était à l'effet qu'en 2001 on annonçait la bonne nouvelle; en fait, c'était un peu du type «Achetez maintenant, payez plus tard». Alors, quand on achète, c'est la bonne nouvelle, on est content, bravo, mais, quand il s'agit de dire: Là, maintenant, il faut payer, woups, là, ce n'est plus tout à fait la même situation.

Est-ce que vous ne pensez pas, M. Roy, que cette question-là, si on l'aborde dès maintenant, entre vous, les partenaires au Conseil de gestion, il serait très difficile de... et s'il fallait inscrire ça dans la loi que nous avons devant nous aujourd'hui, bien là on va manquer de temps, on va manquer de temps pour aller dégager ces consensus-là, et là on n'aura pas un régime en vigueur le 1er janvier 2006. Alors, j'aimerais vous entendre sur votre recommandation à cet effet-là.

M. Roy (René): Oui. Merci, Mme la ministre. Oui, on a eu des échanges ensemble. Puis, si on n'est pas capables d'avoir de consensus ? puis on peut prendre le mot «consensus» ou un autre, là ? avec le patronat puis le gouvernement, c'est d'abord la position gouvernementale de mettre zéro. Vous avez été très claire, puis votre sous-ministre aussi. Je l'ai rencontré, puis on a eu des échanges ? ils ont peut-être des fois été courts, mais des fois ils ont été virulents aussi. Les montants qu'on nous a toujours donnés, c'était zéro. Alors, vous savez, quand on est trois parties, là-dedans, puis il y a une partie qui nous dit: On va mettre zéro, là, on n'est pas capables d'en faire, de consensus, à nulle part, on est obligés de revenir sur nos positions primaires.

Nos positions, à la FTQ, au départ, là, sur le retrait préventif, c'est un amendement qui a été fait. On a fait nos présentations, à ce moment-là, puis on n'était pas d'accord. Maintenant, elle est passée pareil, elle est passée pareil, la question du retrait préventif. Et il fait partie évidemment de l'ensemble des coûts, là, il coûte 25 millions aux employeurs, mais il y a beaucoup de femmes qui ne sont pas heureuses trop, trop de voir qu'elles perdent quatre semaines de retrait préventif en les envoyant sur le congé parental, malgré les gains qu'elles font ensuite pour le congé parental.

Alors, nous, on vous donne notre position là-dedans. Si vous faites un pas... Vous nous parlez que vous êtes le plus gros employeur. On vient de vous le dire, vous le savez très bien... On a échangé ensemble, vous le savez: de toute manière, c'est autour de 50 millions. Je ne sais pas quel chiffre que vous avez, mais en tout cas les argents, les économies faites par le gouvernement peuvent varier, selon le point de vue, entre 45 et 70 millions de dollars. Alors, vous nous dites ? vous avez entendu ? vous nous dites que, comme employeur, vous avez fait une contribution. Bien, on vous en propose une aussi. Vous savez, il y en a une, contribution. Si vous commencez par enlever les économies que vous faites avec les employeurs, puis ensuite on applique le 5-12, 7-12, alors on fait notre bout de chemin dans toute cette question-là.

Puis il y a tout le domaine de la petite enfance, que vous recevez 520 millions du fédéral dans le développement de la petite enfance, 520 millions dans les derniers cinq ans, puis on cherche encore où est-ce qu'il va exactement. Je ne parle pas des garderies, là, je vous parle du développement de la petite enfance. Vous recevez des montants du fédéral.

Et l'autre affaire: dernièrement, tout le monde passait à Ottawa puis ramassait des millions de dollars. Je pense que ça aurait été bon d'y aller aussi, la semaine passée ou voilà deux, trois semaines, pour aller chercher quelques millions pour le congé parental; ça nous aurait évité le problème qu'on a aujourd'hui là-dessus.

Mais en tout cas notre position, là-dedans... il y a une participation. Si vous voulez qu'on avance... Le comité de gestion... M. Latulippe est ici, aujourd'hui. De notre côté, actuellement, il n'y a pas d'entente au comité de gestion. Il n'y a pas de consensus; on est incapables de faire une recommandation au comité de gestion, il n'y en a pas. Puis, je pense, c'est pour ça que vous faites une commission parlementaire là-dedans. J'ai l'impression que c'est pour ça.

Alors, on est poignés dans un «merry-go-round», là, actuellement, où est-ce qu'on n'est pas capables de dégager de consensus parce qu'on n'est pas capables... il y a une partie qui n'est jamais d'accord pour faire un bout de chemin là-dedans.

Mme Courchesne: M. le Président... M. Roy, en toute sincérité, là, en toute franchise et honnêteté, on peut se dire, là, que, dans l'entente qu'on a signée le 1er mars dernier, là, on est vraiment allé chercher la juste part du Québec. Ce que vous me dites, c'est que vous auriez voulu qu'on demande au reste du Canada de payer pour la bonification que, nous, on veut se donner ici, au Québec. C'est un peu ça que vous dites, là.

M. Roy (René): Oui, oui, tout à fait. C'est ça qu'on avait... C'est ça qu'on...

Mme Courchesne: Bien, honnêtement, M. Roy, quand même, pensons-y 30 secondes, là.

M. Roy (René): Bien, ce n'est pas moi qui vais pleurer pour faire payer le fédéral, là.

n (15 h 30) n

Mme Courchesne: Bien... Non, mais n'allez pas dire... Ne nous dites pas par ailleurs que le problème, c'est là qu'il se situe. Il ne se situe pas là. On est allés chercher la juste part des Québécois et des Québécoises au gouvernement fédéral, et ça, je pense que la démonstration est très claire à cet égard-là.

Un jour... Quand on dit, M. Roy, qu'on veut, et la loi va le refléter, un régime d'assurance qui soit indépendant et autonome, et quand on dit que, notre volonté... S'il est indépendant et autonome, bien ça voudra donc dire, s'il y a des surplus, par exemple ? et ça arrive, dans des fonds de retraite... dans des fonds d'assurance, qu'il y a des surplus ? que le gouvernement n'ira pas piger ces surplus-là.

Si le gouvernement se contente... si la participation du gouvernement se résume à son rôle d'employeur, est-ce que vous ne pensez pas que le fait d'assurer que, comme dans tout régime d'assurance, ce sont les cotisants qui financent le régime, ça va éviter que le gouvernement ? quel qu'il soit, là, que ce soit celui qui est devant vous ou un autre, là ? que le gouvernement, quel qu'il soit, aille piger dans ces surplus-là? Est-ce que vous ne croyez pas, pour une fois qu'on veut donner cette autonomie et cette indépendance à ceux et celles qui cotisent, que ce n'est pas un pas dans la bonne direction et que ce n'est pas quelque chose que vous auriez réclamé de toute façon haut et fort?

M. Roy (René): On l'a déjà réclamé. On l'a déjà réclamé, puis là-dessus... Je l'ai dit en commençant, on est d'accord avec l'autonomie du Conseil de gestion. Mais le gouvernement ? puis je vous l'ai déjà dit dans des rencontres ? le gouvernement est toujours quand même en chapeau. Que ce soit la CSST ou que ce soient d'autres organismes, ils sont toujours rattachés au gouvernement. Des fois, il y a des gouvernements qui prennent le bilan financier de la CSST puis ils le mettent dans leurs bilans financiers. Il y a une place que... C'est un régime social, ce n'est pas uniquement un régime d'assurance pour nous autres, là, à ce moment-ci. C'est un régime social là-dedans, il fait partie, vous l'avez dit vous-même, d'une vaste politique familiale. Vous l'avez dit. Je suis d'accord avec vous, vous ne faites pas juste le congé parental, là, le gouvernement du Québec, vous en faites d'autres.

Alors, pour nous autres, c'est un régime social, puis le gouvernement doit, dans une certaine façon, sûrement participer et il va le faire de toute façon parce que... Moi, vous me parlez de surplus du régime de congé parental, j'ai de la misère. Je ne suis quand même pas tellement jeune puis je n'ai pas vu beaucoup de régimes gouvernementaux qui ont fait des surplus, là.

Mme Courchesne: L'assurance-emploi au fédéral... pas d'un régime parental, mais l'assurance... Convenez avec moi qu'à l'assurance-emploi, au Canada, il y a eu des surplus, puis est-ce que c'est ça qu'on veut?

M. Roy (René): On est rendu à 47 milliards.

Mme Courchesne: Et c'est ça qu'on ne veut pas reconduire au Québec, et on ne veut pas répéter cet exemple-là au Québec, et on veut se prémunir contre ça, et, je le répète, peu importent les gouvernements qui seront ici. Il me semble que c'est un principe de gestion qui est fort responsable et louable.

M. Roy (René): C'est un principe de gestion fort responsable et louable, mais, même si on obtenait une caisse autonome de l'assurance-emploi au fédéral, il y aurait toujours un lien avec le gouvernement, c'est bien évident, vous savez bien ça. La même affaire va se produire ici avec le congé parental, vous allez garder un lien là-dedans.

Maintenant, dans nos discussions, on vous dit: Participer au démarrage. S'il y a un surplus, à un moment donné, le gouvernement se retirera. Le gouvernement provincial se retirera, je n'ai pas de problème là-dedans. C'est qu'actuellement vous refilez la facture carrément. Il y a des employeurs qui ont des économies d'un bord ? puis vous en êtes un, gros employeur ? puis, nous, on est des travailleurs puis on a simplement la facture sur notre bord, 124 millions, point final.

Mme Courchesne: Je terminerai, M. Roy, en vous disant que le démarrage, on le fait. Il y a 200 millions qui va au démarrage, la première année, dans le fonds de régime parental, et ça aussi, c'est une contribution gouvernementale.

M. Roy (René): C'est un 200 millions qui vient du fédéral, Mme la ministre, mais c'est de l'argent qui vient des gouvernements, puis c'est de l'argent qui vient de nous autres, finalement. Ça fait que...

Le Président (M. Copeman): Alors, M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, solidarité sociale et famille.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président. Alors, bonjour à tous nos invités. Il y a le député de Gouin qui nous accompagne, la députée de Terrebonne, la députée de Laurier-Dorion, alors nous vous saluons tous. Merci de votre présentation et de la clarté de vos propos.

Tout simplement un retour sur le 200 millions en question, là. C'est un 200 millions qui est non récurrent, et ce dont on parle dans le fond, c'est une contribution récurrente de la part du gouvernement du Québec à la caisse d'assurance parentale. Et ça m'apparaît une drôle de façon de qualifier la contribution du gouvernement que de dire: Bien, voilà, on met 200 millions dans la caisse. C'est fait. Bonjour et merci. Le 200 millions est géré essentiellement par la fiduciaire, à la caisse d'assurance parentale, qui le reçoit des mains du gouvernement du Québec, qui l'avait reçu des mains du gouvernement fédéral. Alors, il y a eu un rôle de courroie de transmission de la part du gouvernement du Québec qui le remet à la caisse.

D'autre part, je ne sais pas si on ne pourrait pas continuer sur cette lancée de discuter du statut du fonds. Ce qu'on lit dans la loi qui modifie la Loi sur l'assurance parentale, donc celle qui nous concerne maintenant, en 52, on dit: L'article 91 de cette loi est modifié par l'insertion [...] du [paragraphe] suivant... Le fonds est chargé d'administrer en qualité de fiduciaire, c'est-à-dire que le Conseil de gestion est chargé d'administrer, en qualité de fiduciaire, le Fonds d'assurance parentale. Et, dans la loi, on dit que le Conseil de gestion gère le régime d'assurance parentale et il n'engage que lui-même lorsqu'il agit en son nom.

Autrement dit, il me semble qu'il y a là, dans l'esprit du législateur et dans la loi, des garanties d'indépendance. Est-ce que je fais fausse route ou est-ce qu'on n'a pas là une manifestation juridique assez nette du fait que, même si le gouvernement contribue en termes de partenaire dans le fonds, le fonds garde toute son indépendance étant donné qu'il est aux mains d'un fiduciaire qui est indépendant du gouvernement? Est-ce que je comprends bien ou... Comment vous voyez ça?

M. Roy (René): C'est comme ça qu'on voit ça. Mais il reste que c'est une création du gouvernement. Et puis ce qu'on dit aussi, dans le financement, un financement récurrent... Quand vous parlez d'un financement récurrent, on a même dit au gouvernement: Si le financement en question, s'il s'avère qu'il y a des surplus, bien, le côté gouvernemental, la contribution au gouvernement, on est même prêts à dire: C'est celle-là qu'on regardera en premier à diminuer avant de diminuer les cotisations des travailleurs puis des employeurs. Voyez-vous?

Alors, on ouvre même la porte au gouvernement en disant au départ: Embarquez avec nous autres. Parce que la facture qu'on reçoit du fédéral est de 298 millions. Je n'ai pas répondu tout à l'heure parce que... Mais, les lettres qu'on a reçues puis les engagements qu'on a reçus, c'était un engagement qui était beaucoup plus que le régime fédéral, c'était un engagement de payer le régime provincial du Québec. Ça, ce n'est pas Mme la ministre, aujourd'hui, qui avait pris ces engagements-là, c'étaient d'autres ministres qui avaient pris cet engagement-là. Alors, je tiens à le rappeler.

Mais la caisse, pour nous autres, oui, elle devient indépendante, mais elle est fiduciaire. Mais il reste toujours que le gouvernement va sûrement avoir ? les Anglais disent: «arm's length» ? va sûrement avoir un bras de contrôle là-dessus parce que, si ça vire à toutes sortes de choses, s'il y a trop de déficits ou trop de surplus, trop de choses à faire, c'est le gouvernement politiquement qui va se faire accuser et qui va être capable... Il peut, par voie de législation, changer ça puis modifier ça, mais, de la manière que la loi est faite, vous avez raison.

M. Bouchard (Vachon): Par ailleurs, je fais remarquer en passant, là, sans vouloir ouvrir un débat, mais c'est un débat qu'on pourra compléter lorsque nous serons à étudier la loi article par article... Mais on ne peut en même temps prétendre que le gouvernement contribue d'un montant de 200 millions et s'en montrer réjoui et en même temps dire qu'il ne peut pas contribuer à d'autres montants récurrents parce qu'il briserait le lien, il fragiliserait l'indépendance du fonds et du Conseil de gestion à ce moment-là. Alors, ou bien on agit d'un côté et on confirme que cela n'entrave pas ou ne nuit pas à, ou bien on s'abstient complètement parce qu'on pense que ça va nuire à, mais on ne peut pas dire les deux choses en même temps.

Ceci dit, je vous ai déjà parlé en aparté, tout à l'heure, d'une enquête qui a été menée par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, d'un échantillon de ses membres, aux deux tiers, qui disent que finalement les cotisations devraient être ajustées au risque institutionnel, c'est-à-dire que, lorsque les institutions présentent plus de risques à la fois du point de vue du volume, de la taille, et sans doute aussi du nombre de femmes, il faudrait voir, mais que les cotisations devraient être ajustées en fonction de ce risque-là. Et j'aimerais vous entendre là-dessus. Je vous en ai déjà parlé tout à l'heure.

M. Roy (René): Bien, la première chose là-dessus, je les connais, leurs manières de faire leurs référendums... pas référendums, excusez-moi, de faire leurs...

Une voix: ...

n (15 h 40) n

M. Roy (René): ...sondages ? merci ? manières de faire leurs sondages, puis ce n'est pas scientifique du tout. Et puis je pourrais vous publier des sondages de la FTQ avec la question faite d'avance pour avoir la réponse qu'on veut avoir ensuite. Alors, selon moi, ce n'est pas très sérieux comme sondage de la part de la fédération indépendante.

L'autre, le principal facteur là-dedans, ce serait extrêmement discriminatoire pour les femmes, parce que, si les employeurs commencent à payer selon le risque de maternité pour l'embauche de travailleuses et de travailleurs, mon Dieu Seigneur, où est-ce qu'on s'en va? Ça veut dire qu'à l'embauche il va y avoir discrimination contre les femmes. Alors, c'est de rétablir un système de discrimination systématique, et ce n'est déjà pas facile, même à l'embauche. Je pense que des fois... On n'a pas d'enquête là-dessus, mais j'ai l'impression qu'il y en a, qu'il s'en fait un peu à l'embauche. Sans faire d'enquête de la FTQ, on n'en fera pas là-dessus, mais... Alors, moi... On va être absolument opposés à ça. Je ne pense pas qu'il n'y ait personne de sérieux au Québec qui peut penser faire une chose semblable.

M. Bouchard (Vachon): Dans votre mémoire, vous insistez, comme on l'a fait ce matin avec l'AFEAS, là, sur l'impact que pourrait avoir la diminution de la durée du retrait préventif en acceptant de changer les quatre dernières semaines et de les transformer en congé parental. Je comprends que la position que vous défendez ici est une position qui est en tous points semblable à celle de l'AFEAS.

M. Roy (René): Bien, oui. On l'a déjà défendue pour la CSST puis toutes les fois... La santé et sécurité au travail, pour nous, la FTQ, c'est d'une importance capitale. Nos travailleuses qui se prévalent des retraits préventifs, ce n'est pas pour des farces, c'est parce qu'elles sont prises dans des milieux de travail où est-ce que, là-dedans, leur vie est en danger... pas leur vie à elles, mais la vie de l'être à naître est en danger. Et, si on a bâti cette loi-là, c'est pour protéger ces gens-là. Alors, là, je comprends qu'à un moment donné, dans les échanges, les employeurs voyaient le coût augmenter, puis qu'on a fait un cadeau sur le retrait préventif, mais ça n'a jamais été un cadeau que, nous autres, on a voulu faire, ce n'est pas nous qui avons voulu faire ce cadeau-là, et notre position n'a jamais changé là-dessus. Mais ça fait partie de l'ensemble des discussions sur les millions de dollars qu'il faut payer pour ce congé-là.

M. Bouchard (Vachon): M. Roy, je ne veux pas vous mettre dans l'embarras, mais je ne pense pas que vous soyez embarrassé facilement.

M. Roy (René): Qu'est-ce que vous avez dit?

M. Bouchard (Vachon): Mais vous avez mentionné, tout à l'heure, que les travaux au Conseil de gestion étaient difficiles, les négociations extrêmement difficiles étant donné qu'aucun ne semblait vouloir modifier sa position, notamment en ce qui concerne la répartition des cotisations et du poids à porter sur le surplus envisagé, là. J'aimerais vous entendre plus longuement là-dessus.

Est-ce que ça dépend d'après vous de la... tout simplement d'une question de dynamique et du rôle d'un absent, par exemple d'un absent comme le gouvernement comme partenaire, en tant que contribuant à cette caisse? S'agit-il d'un problème de structure du Conseil de gestion? Est-ce que la composition du Conseil de gestion fait problème? Est-ce que le rôle, les fonctions, la mission du Conseil de gestion vous apparaissent interpellés dans la remarque que vous avez faite tout à l'heure? J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus.

M. Roy (René): Non, le contrôle... la question de la structure du Conseil de gestion n'est pas problématique, n'est pas problématique actuellement. La problématique... On a fait plusieurs rencontres patronales, syndicales, gouvernementales ? je ne pense pas qu'on se soit assis tous les trois en même temps à la même place, là, mais ? j'en ai fait avec différents groupes. On est capables d'établir des consensus assez... sur certains points, on est capables d'établir des consensus sur le 5-12, 7-12, en tout cas il me semble que, du côté patronal, ils l'ont accepté. Parce qu'ils avaient fait des scénarios, à un moment donné, où est-ce qu'ils divisaient ça 50-50, ils avaient changé le 7-12 pour un 50-50. Il me semble qu'ils ont reculé là-dedans. Ils vont être en commission parlementaire à soir, vous pourriez leur poser la question, mais il me semble que, là, on avait ce consensus-là sur la question. Puis l'autre consensus qu'on avait, c'est que le gouvernement provincial doit participer.

Alors, on ne peut plus avancer parce qu'au départ le gouvernement nous dit: Zéro. Alors, sur quel montant on peut s'entendre? Évidemment que les employeurs tirent sur leur couverte, sur la couverte, de leur bord. Nous, on a 124 millions là-dedans, puis on dit à tous les scénarios que tout le monde nous propose: Nous autres, on reste toujours à 124. Ce n'est pas compliqué, nous autres, on reste à 124 millions. Les travailleurs et travailleuses, vous payez, puis les autres... Alors, on ne peut pas avoir de consensus avec les employeurs parce qu'eux autres ils font un scénario avec le gouvernement pour baisser leur partie, ils ne nous incluent pas là-dedans. Alors, on ne sait pas quel bout... C'est pour ça qu'on n'a pas de consensus actuellement au comité de gestion, mais ce n'est pas sur la question... Les gens, autour de la table, s'entendent que c'est les gros partenaires ? patronal, syndical, gouvernemental ? qui sont incapables d'arriver à partager ensemble le magot... pas le magot, mais la facture.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que, M. le Président... Mme la Présidente ? excusez-moi ? est-ce qu'on doit craindre que cette difficulté que vous avez de vous entendre puisse mettre en péril la mise en oeuvre du programme pour le 1er janvier 2006?

M. Roy (René): Bien, ça dépend du gouvernement. Si le gouvernement décide de passer un rouleau compresseur, puis de passer une loi, puis de nous faire payer, on n'aura pas bien, bien le choix, mais il n'aura pas notre accord sur un partage inéquitable. Ce sera à lui de défendre sa division, la manière qu'il a réparti la facture. Nous, on va être sûrement sur le comité de gestion pareil, puis on veut que le congé parental, qui est fort important pour les femmes au Québec, commence le 1er janvier 2006, et puis on va mettre tous les efforts possibles pour faire en sorte que ça commence au 1er janvier.

M. Bouchard (Vachon): Une autre petite question, si vous permettez. Que pensez-vous de cette suggestion qui nous a été faite, ce matin, d'ajouter une représentante des femmes travailleuses non syndiquées au Conseil de gestion?

Mme Gingras (Carole): Alors, la FTQ soutient la demande qui a été faite d'avoir un ajout au Conseil de gestion pour avoir un siège pour les travailleuses non syndiquées afin de leur permettre d'avoir une voix au chapitre pour les raisons qu'on peut imaginer. Entre autres, la réalité des travailleuses non syndiquées souvent est différente: des revenus plus bas, elles connaissent moins souvent les droits, les politiques sociales, et tout ça. Alors, on pense que ça pourrait être intéressant de les avoir à la table du Conseil de gestion.

M. Bouchard (Vachon): On parle de quelle population exactement, de combien de femmes s'agit-il, quelle est la taille de la population dont on parle?

Mme Gingras (Carole): Du côté des travailleuses non syndiquées?

M. Bouchard (Vachon): Non syndiquées, oui.

Mme Gingras (Carole): Non syndiquées. Actuellement, les travailleuses syndiquées au Québec, c'est plus bas que le nombre de travailleurs syndiqués. Et je pense que je ne me tromperais pas en vous disant qu'on n'est pas loin du 30 %, et là il faut voir dans quel secteur. Si vous allez dans certains secteurs, comme l'alimentation et le commerce, c'est très bas, on est autour peut-être de 13 %, 14 % de travailleuses syndiquées. Si vous allez évidemment dans la fonction publique, le taux de syndicalisation est plus élevé, mais il y a des secteurs... si vous allez dans le secteur manufacturier, le taux de syndicalisation des femmes est beaucoup plus bas.

Alors, c'est inégal d'un secteur à l'autre, mais c'est clair que les femmes sont moins syndiquées que les hommes au Québec, donc il y a un travail à faire de ce côté-là. Et le fait qu'elles s'amènent à la table des discussions, au Conseil de gestion, ça peut être probablement fort enrichissant pour voir qu'est-ce qu'on peut faire avec elles et de plus pour leur permettre de s'y retrouver là-dedans et puis qu'elles puissent donner... Qu'on leur offre un droit de parole.

M. Bouchard (Vachon): Alors, merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme James): Merci. Alors, Mme Gingras, Mme Mercier, Mme Simard, M. Roy et Mme Maltais... M. Maltais, désolée, je vous remercie pour votre présentation de la part de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

n (15 h 50) n

Et je demanderais maintenant à la Fédération des parents adoptants du Québec à prendre place pour leur présentation de mémoire, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme James): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je reconnais les représentants de la Fédération des parents adoptants du Québec. Je comprends, Mme Gagnon ? bonjour ? que vous êtes la porte-parole du groupe aujourd'hui.

Mme Gagnon (Claire-Marie): Bonjour, Mme James. Oui, c'est exact.

La Présidente (Mme James): Alors, vous êtes une habituée en commission parlementaire. Alors, vous pourrez...

Mme Gagnon (Claire-Marie): J'ai l'habitude, oui. C'est bien.

La Présidente (Mme James): Alors, je vous rappelle que vous aurez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Cette période sera suivie d'un échange avec les parlementaires de 15 minutes de chaque côté, du côté ministériel et ensuite de l'opposition officielle. Je vous demanderais, avant de commencer votre présentation, de bien présenter les gens qui vous accompagnent.

Fédération des parents
adoptants du Québec (FPAQ)

Mme Gagnon (Claire-Marie): Avec grand plaisir. Alors, je vous présente... Moi-même, donc vous m'avez présentée, Claire-Marie Gagnon, présidente de la Fédération des parents adoptants du Québec. Vous avez, à gauche, M. Pierre Dorchies, qui est secrétaire-trésorier de la fédération; Mme Sonia Lodovichetti, qui est administratrice; à ma droite, vous avez Mme Johanne Lemieux, qui est conseillère experte, et Mme Karine Martel, qui est administratrice à la FPAQ aussi.

Alors, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, mesdames et messieurs, au nom de la Fédération des parents adoptants du Québec, j'aimerais remercier la Commission des affaires sociales de nous permettre de nous exprimer sur le projet de loi n° 108. Nous l'avons appris avant-hier, mardi après-midi, que nous venions aujourd'hui. Alors, le texte est... ça a été fait la nuit passée, ça a été copié. Alors, ça nous fait plaisir, ça nous faisait très plaisir de participer à cette Commission des affaires sociales.

La Fédération des parents adoptants du Québec est une association de parents qui a été fondée en décembre 1986. Elle a pour objectifs de défendre les intérêts des enfants et ceux des parents en adoption internationale et de promouvoir l'adoption internationale et de créer un centre d'information en pré et en postadoption. Nous comptons des membres à travers tout le Québec, même en Abitibi, M. Bernard, et nous sommes très sensibilisés à toutes les questions touchant les droits et l'équité pour les enfants adoptés. En l'an 2000, lors de la présentation du projet de loi n° 140, la Fédération des parents adoptants était très préoccupée alors par l'application de la Convention de La Haye en adoption internationale. Donc, toutes nos ressources, qui sont essentiellement bénévoles, étaient mobilisées par ce dossier. Ainsi, les subtilités de ce projet de loi n° 140 nous avaient échappé.

La grande médiatisation de la loi n° 108 a éveillé chez nos membres de vives réactions concernant la différence de traitement entre la parentalité biologique et celle par adoption. Depuis ce temps, nous avons sensibilisé l'ensemble des députés et en particulier nous avons eu des contacts avec les députés M. Vincent Auclair, M. Camil Bouchard, M. Maurice Clermont, et surtout avec la ministre Mme Michelle Courchesne. Nous avons informé le grand public à travers les médias écrits, Le Journal de Montréal et des hebdos locaux, et à travers les médias audiovisuels, CTV, TVA et CBC Radio. À l'heure actuelle, nous avons accumulé plus de 3 000 signatures dans une pétition réclamant l'égalité de traitement entre les enfants biologiques et les enfants adoptés.

Le fondement de notre argumentation. Depuis l'an 2000, il y eut des progrès considérables sur les connaissances concernant la création du lien d'attachement. Nous sommes accompagnés de Mme Johanne Lemieux, pionnière au Québec concernant la problématique de l'attachement chez les enfants adoptés et qui pourra élaborer sur ce sujet, à votre demande, lors de la période de questions.

De nombreuses études témoignent de l'importance pour le parent adoptant de demeurer auprès de son enfant durant une période d'au moins 12 mois pour favoriser le lien d'attachement, le solidifier et pour sécuriser davantage l'enfant. Selon la psychologue Diane Quévillon, qui travaille auprès d'enfants adoptés: «Il faut penser à ce que la mère reste à la maison avec l'enfant idéalement pendant un an et pas de garderie!»

La mère biologique bénéficie d'un congé de maternité pour se remettre physiquement de son accouchement mais également pour apprivoiser son nouveau rôle de mère et s'attacher à son enfant. De son côté, l'enfant adopté est un enfant abandonné, souvent négligé physiquement et émotivement dans son milieu substitut. Il devrait bénéficier du même droit d'accès à sa mère pour se remettre de ses blessures, pour s'attacher à ses nouveaux parents et pour apprivoiser sa nouvelle vie de famille, réalité qu'il n'a souvent jamais connue.

Comme l'a dit M. le député Copeman, qui malheureusement a quitté, lors des travaux parlementaires du 14 décembre 2000: «Il me semble, M. le Président, que le temps d'adaptation est pareil dans les deux cas. Un enfant qui est adopté, il faut que la famille s'adapte à peu près de la même façon, parce qu'on peut adopter un nouveau-né, on peut adopter une fillette ou un garçon d'un an...» Mme la députée Léger ajoutait: «Effectivement, pour un enfant, qu'il vienne d'une grossesse, que la mère ait accouché ou que l'enfant ait été adopté, l'adaptation est pareille à ce niveau-là.»

Dans les articles de la loi n° 140 qui ne sont pas modifiés par le projet de loi n° 108, les prestations d'adoption n'incluent pas le temps accordé aux prestations de maternité. À la question à savoir pourquoi les mères adoptives n'auraient pas droit aux prestations de maternité, il nous a été donné comme raison le fait qu'elles n'accouchent pas. On accorde donc entre 15 à 18 semaines de prestations à la mère pour accoucher. Nous pensons plutôt que ces semaines ont été accordées afin que la mère et l'enfant créent un lien d'attachement solide durant les premiers mois. En ce qui concerne l'adoption, l'importance du temps accordé pour créer ce lien est aussi grande, sinon plus, si on considère que cet enfant est déjà fragilisé et qu'il porte en lui la blessure de l'abandon.

Nous constatons donc une différence flagrante de traitement entre les parents adoptants et les parents biologiques. Nous demandons donc au législateur de tenir compte d'un principe qui est la base de toutes nos mesures de protection de l'enfance, soit l'intérêt supérieur de l'enfant. Nous affirmons que l'intérêt supérieur de l'enfant sera malheureusement oublié si les dispositions de la loi sont maintenues. Tout enfant adopté a le droit d'être accueilli en tenant compte de ses besoins spécifiques, besoins à la fois semblables et différents de ceux d'un nourrisson. À ce titre, il a droit, comme les autres enfants, à 55 semaines de présence de l'un ou de l'autre de ses parents.

Mme Lodovichetti (Sonia): L'impact de la proposition. Le 17 mai 2001, lors de la troisième lecture de la loi n° 140, M. le député Copeman a énoncé que ce programme coûterait 666 millions de dollars pour environ 73 000 naissances et adoptions annuellement au Québec. Selon ces chiffres, cela représente, en fonds gouvernementaux, un montant d'environ 9 000 $ par enfant. Comme la loi n° 140 n'offre aux parents adoptants qu'environ les deux tiers du temps alloué aux parents biologiques, l'État québécois économise environ 3 000 $ par enfant adopté, pour un total annuel de 4 millions de dollars ? ici, je cite les chiffres de 1999 ? soit environ 0,6 % de la valeur du programme, et le pourcentage ne change pas, même si les chiffres ont changé.

Nous pensons que le fait de porter les prestations d'adoption au même niveau que celles promises aux parents biologiques représente une dépense budgétaire minime. Le législateur devrait prendre en considération que ces sommes représentent un investissement parce qu'elles vont permettre de consolider et de renforcer les liens d'attachement de l'enfant adopté. L'État québécois, par cet investissement minime, va récupérer largement ces sommes en diminuant les risques de décrochage scolaire, de problèmes de comportement et de mésadaptation sociale.

Mme Martel (Karine): De façon plus concrète, sur un budget de 10 $, ça correspond à 0,06 $ pour les enfants adoptés.

Mme Lodovichetti (Sonia): Notre proposition d'amendement. Comme il nous semble difficile à ce stade de modifier les concepts et terminologies de prestations de maternité, de paternité, parentales et d'adoption, nous proposons de relever les paramètres des prestations d'adoption au niveau de ceux reconnus aux parents biologiques. Ainsi:

Attendu que le nouveau régime québécois d'assurance parentale, qui entrera en vigueur en janvier 2006, prévoit des prestations différentes pour les parents biologiques et les parents adoptifs;

n(16 heures)n

Attendu que le temps accordé à la mère biologique, dans le cadre des prestations de maternité, sert également à créer un lien d'attachement solide avec son enfant, au cours des premiers mois de sa vie, et que ce lien est aussi important et primordial pour une mère adoptive envers un enfant qui a connu un ou plusieurs abandons;

Attendu que tous les professionnels de la santé, dans le domaine de l'adoption, témoignent de l'importance, pour les parents adoptifs, de demeurer auprès de leur enfant durant une période d'au moins 12 mois afin de favoriser ce lien d'attachement, de le solidifier et de sécuriser davantage l'enfant;

Attendu qu'au sens de la loi les parents adoptifs ont les mêmes responsabilités et devoirs envers leur enfant que les parents biologiques;

Nous proposons de modifier le projet de loi n° 108 comme suit:

De modifier l'article 7 en y ajoutant, à la fin de cet article, «et par le remplacement du chiffre 37 de la seconde ligne du premier alinéa par le chiffre 55 et le chiffre 28 de la troisième ligne du premier alinéa par le chiffre 43»;

D'ajouter, entre l'article 10 et l'article 11, un nouvel article comme suit:

«L'article 18 de cette loi est modifié par le changement du chiffre 12 de la troisième ligne du second alinéa par le chiffre 30 et le chiffre 28 de la sixième ligne du quatrième alinéa par le chiffre 43.»

En d'autres mots, plus simple de donner 55 semaines pour tous les parents, qu'ils soient biologiques ou adoptifs.

En conclusion, nous pensons que notre proposition d'amendement permettra au législateur de modifier un aspect de la loi n° 140 qui est préjudiciable à l'intérêt supérieur de l'enfant adopté; de permettre une reconnaissance pleine et entière du statut de parent; de démontrer un soutien plus marqué à l'adoption comme partie de la solution requise dans le contexte du défi démographique; d'apporter un soutien dans les périodes d'adoption, notamment durant les dernières semaines de fébrilité et de stress; de renforcer l'établissement d'un lien d'attachement enfant-parent souvent plus complexe dans le contexte d'une adoption; de faciliter l'engagement paternel et maternel et son soutien dans son rôle d'accompagnement parental.

Puisse le législateur accéder pleinement à nos demandes pour Un Québec fou de ses enfants!.

La Présidente (Mme James): Alors, merci. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec les parlementaires. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Courchesne: Merci, Mme la Présidente. Mesdames messieurs, je veux vous dire bienvenue d'abord et très chaleureuse bienvenue parce que j'apprécie que vous ayez pris la peine de vous présenter devant nous.

Effectivement, vous l'avez souligné, il y a eu plusieurs communications entre nous, et je veux d'emblée vous dire ? et je l'ai dit ? que j'avais une grande sensibilité par rapport à la situation que vous exposez aujourd'hui.

Il y a des préoccupations, il y a des arguments dont j'ai pris connaissance, que vous avez fait valoir. Vous avez un très bon mémoire qui résume la situation, mais vous touchez aussi une question qui est non seulement pertinente, mais qui fait partie, je dirais, des nouvelles réalités d'aujourd'hui et qui fait partie des nouvelles familles d'aujourd'hui et qui fait partie d'un nouveau portrait aussi, je dirais, démographique, hein? Et donc ça mérite très certainement notre attention, notre intérêt, ça mérite qu'on s'y attarde.

Par contre, par contre, il y a, à ce projet de loi et à ce régime québécois d'assurance parentale, une histoire, une histoire qui a commencé en l'an 2000, qui a fait un pas de plus, en l'an 2001, avec l'adoption de la loi initiale. Et je comprends que le gouvernement de l'époque a eu à écouter aussi un peu. Parce que ce que je me rappelle et ce que je crois comprendre, c'est qu'à cette époque-là, de façon peut-être moins présente qu'aujourd'hui... Le phénomène, même en cinq ans, a pris de l'ampleur. Ça, on va convenir de ça. Mais, déjà, à l'époque, cette situation-là existait. Puis, moi, j'ai, dans mon entourage, bien des personnes que je connais qui ont adopté, même avant 2000, bien avant 2000. Donc, ce n'est pas... mais...

Alors, le but de mon propos, c'est de dire: Ce que je trouve un peu dommage, c'est qu'en 2001, lorsqu'on a adopté la... le précédent gouvernement a initié la loi initiale, comment se fait-il que cette question-là n'ait pas été abordée sous l'angle que vous faites valoir aujourd'hui? Il y avait des études en 2000, en 2001, il y avait des expériences, il y avait... Je vous le dis, là, parce que je suis très, très proche de médecins célèbres qui ont travaillé sur cette question-là, puis, bon, etc.

Donc, là, la difficulté que nous avons aujourd'hui, c'est qu'il y a une entente, il y a une loi qui existe et qui a déjà défini les grands paramètres du congé parental. La difficulté que ça pose: Oui, mais on est le gouvernement aujourd'hui, on pourrait tout de suite proposer un amendement, dire: Ça y est, c'est réglé, puis les problèmes... Sauf qu'il y a quand même des facteurs dont on doit tenir compte, c'est que la loi prévoit aussi qu'il y ait des partenaires qui doivent s'entendre sur la façon dont on va établir toutes les modalités de prestations. Donc, si on arrivait, aujourd'hui, avec notre amendement, on l'imposerait, et on l'imposerait dans un contexte où ? vous étiez présents tout à l'heure ? nous sommes en train d'essayer de définir comment nous allons le mettre en vigueur, ce régime, le 1er janvier.

Tout ça pour vous dire que j'ai comme le sentiment qu'il est minuit moins cinq, mais en fait il est peut-être minuit et cinq, si toujours on veut avoir notre entrée en vigueur du régime le 1er janvier 2006, parce que, sincèrement, ce consensus-là, on ne l'obtiendra pas en une semaine ou en deux semaines ou en tout cas avant d'adopter la loi. Je serais très inconfortable d'apporter l'amendement sous l'angle de l'imposition, alors que ça n'a pas été véritablement discuté par ces partenaires-là.

L'engagement que je prends, par contre... et je ne vous dis pas que c'est une décision finale, là, ça, je ne suis pas en train de vous dire ça, cet après-midi. Mais ce que je dis... parce que je pense encore que votre position mérite analyse, mais je crois aussi qu'on doit demander un avis formel au Conseil de gestion sur cette question-là, je pense que ça mérite très certainement d'être regardé et de voir comment on peut... Bon.

Maintenant, je vous le dis tout de suite, je pense qu'il y a effectivement, si on regarde le régime qu'on vient d'adopter, qu'on vient de signer, il y a des gains importants pour les parents adoptants. Je pense que, ça, on ne peut pas le nier. Si on compare au régime fédéral, il y a des gains aussi qui sont là, qui sont importants.

Et donc pourquoi le gouvernement, en 2001, n'a-t-il pas ouvert cette porte-là? Moi, c'est un peu ça, ma question. Pourquoi ils ne l'ont pas ouvert, cet... Et, vous, à ce moment-là, est-ce que vous avez fait valoir les mêmes arguments auprès du gouvernement?

La Présidente (Mme James): Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Claire-Marie): Est-ce que je peux répondre?

La Présidente (Mme James): Mme Gagnon, allez-y, oui.

Mme Gagnon (Claire-Marie): Merci. Mme la ministre, ce que vous dites, vous dites reconnaître qu'il y a eu une erreur.

Mme Courchesne: Non, non.

Mme Gagnon (Claire-Marie): Non? Et...

Mme Courchesne: Non, non, je pose la question. Je n'ai pas reconnu... Mme la Présidente, permettez-moi...

Mme Gagnon (Claire-Marie): O.K.

Mme Courchesne: Moi, je ne suis pas là pour juger s'il y a eu erreur ou pas erreur. Ce que je dis, c'est: Ça n'a pas été fait en 2001. Pourquoi ça n'a pas été fait en 2001? Est-ce que vous, en 2001, ou votre association aviez fait les représentations requises en 2001?

n(16 h 10)n

Mme Gagnon (Claire-Marie): Non. Comme je l'ai mentionné au début de mon texte, nous n'avons pas fait les représentations parce que nous sommes des bénévoles entièrement, et tout le temps que nous passons et même ici, c'est tout à nos frais, et on est obligés d'avertir nos employeurs, entre parenthèses, et nous n'étions pas sur le dossier, et ça n'avait pas été aussi publicisé, et d'ailleurs la loi n'a pas été adoptée.

Mais depuis elle a été adoptée par... excusez-moi, elle a été adoptée mais pas mise en application, et on se rend compte que, même à cette époque-là, M. Copeman, qui était toujours au Parti libéral, avait dit, et j'ai cité ses phrases, et je citais aussi les gens du Parti québécois qui eux aussi disaient... Mme Léger disait aussi qu'ils considéraient effectivement qu'on avait les mêmes droits parentaux.

Et, si on poursuit dans cette démarche, on va entériner une erreur que tout le monde reconnaît en ce moment. Tout le monde va reconnaître qu'on fait une erreur en ne donnant pas les mêmes congés parentaux aux parents adoptifs et aux parents biologiques. Je ne crois pas que ça prendrait énormément de temps à obtenir un consensus des deux côtés de la Chambre, si c'est ce que vous disiez, que ça prendrait du temps; je ne crois pas que ça prendrait du temps, donc, pour obtenir un consensus.

Mme Courchesne: Non. Mme la Présidente...

La Présidente (Mme James): Allez-y, Mme la ministre.

Mme Courchesne: Mme la Présidente, je ne veux pas en débiter, là. Je vais reprendre, d'accord? C'est parce que c'est très important, là, qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur mes propos.

Je répète aujourd'hui: Je ne dis pas qu'il y a erreur ou pas erreur. Il y a des points de vue sur la question, très sincèrement. Parce que le régime est ainsi constitué qu'il y a des prestations de maternité, des prestations parentales et des prestations de paternité... et des prestations d'adoption, vous avez raison, mais... donc le régime est ainsi fait. Ce qui est en cause, c'est la portion prestations de maternité auxquelles les parents, et les mères principalement, mais les parents adoptants n'ont pas droit. Ils n'ont pas droit à la prestation de maternité; c'est ça, la question.

Et je ne suis pas sur le fond du principe, là; il y a des arguments fort valables dans votre position. Mais le régime a été constitué de cette façon-là, initialement, en 2001. Le régime fédéral était constitué de cette façon-là aussi. C'est ça que je veux signaler. Alors, moi, je ne veux pas, là, dire que la ministre dit qu'il y a une erreur, je ne veux pas embarquer là-dedans, aujourd'hui. Je suis là pour vous écouter. Je dis que vous avez des propos valables.

La question que je pose, par contre, c'est: Comment se fait-il, alors qu'on avait ces situations-là, même si on est dans un phénomène nouveau ? en 2001, ça existait ? comment se fait-il qu'en 2001 le gouvernement précédent n'a pas légiféré pour tenir compte de la situation des parents adoptants? C'est ça, le fond de la question, pour moi, aujourd'hui. Parce qu'effectivement je dis aujourd'hui: Il n'y a rien d'impossible, mais il est minuit moins cinq, c'est dans ce sens-là, pour être capables d'avoir notre régime en vigueur le 1er janvier 2006. Il est très rare qu'on va arriver à cette étape-ci, dans un processus de projet de loi, où ça implique plusieurs partenaires. Veux veux pas, ça implique plusieurs partenaires, parce que, bon, le montant que ça représente actuellement, c'est autour de 7 millions de dollars. Alors, c'est sûr qu'il y a quand même ce montant-là qui est en cause. Alors, c'est pour ça que je vous dis: On a moins de temps pour aller dégager un consensus autour de cette question-là. C'est vraiment ça, le sens de mes propos.

La Présidente (Mme James): Avant de vous laisser répondre, je ne pouvais pas passer sous silence la présence... je voulais souligner la présence des étudiants de l'école Gaétan-Boucher qui se sont joints à nous. Bienvenue à la Commission des affaires sociales. Comme le disait le député de Vachon, sans doute que ces étudiants vont pouvoir bénéficier de ces congés parentaux. Mme Gagnon, oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Gagnon (Claire-Marie): Pierre va continuer.

La Présidente (Mme James): Alors, monsieur.

M. Dorchies (Pierre): Oui. Je comprends la complexité de la loi, et, comme je dis, comme nous avons dit, en l'an 2000, la fédération et ses bénévoles étaient occupés avec les textes législatifs de la Convention de La Haye et toute l'adaptation de la législation québécoise dans la Convention de La Haye. Cette loi-là, qui semblait une loi, pour la plupart du commun des mortels, une loi extrêmement complexe et extrêmement subtile, on l'a passée dans la mite, on ne l'a pas vue. Ceci dit, quatre ans plus tard, quand on s'aperçoit, là, avec la loi n° 108, qu'on est en train d'amender cette loi, on se dit: Pourquoi on ne profite pas de la loi n° 108 pour l'amender?

Or, je peux comprendre qu'il y a des partenaires, je peux comprendre qu'il y a des contraintes budgétaires. Par exemple au Luxembourg, on a associé maternité, d'un côté biologique, à accueil, du côté adoption, c'est-à-dire qu'on donne des prestations de maternité ou des prestations d'accueil. Est-ce qu'il faut changer toute la terminologie et la loi? En une soirée et une nuit, on n'a pas eu le temps de vous proposer tous les amendements possibles; vous comprenez ça.

Ceci dit, il y a une question budgétaire. Je ne peux pas retourner dans l'histoire, à savoir pourquoi on a choisi 32 semaines de congés parentaux. Pourquoi 32 semaines? On comprend que le 37 semaines, pour les parents adoptants, c'est 32 plus cinq du congé du père; ça ressemble à peu près à ça. Maintenant, pourquoi 32? Pourquoi pas 31? Pourquoi pas 30? Personne ne le sait. Maintenant, je vous dis: Au niveau simplement budgétaire, l'ensemble des parents vont avoir droit à 55 semaines de congés parentaux conjoints...

La Présidente (Mme James): M. Dorchies, c'est pour vous aviser: vous n'avez que deux minutes.

M. Dorchies (Pierre): ... ? oui ? 55 semaines, ça veut dire que, si on coupe une semaine de congés parentaux puis on ramène ça à 54 semaines, comme il y a à peu près 70 000 naissances au Québec, vous allez sauver 70 000 années parentales. Il y a 1 000 adoptions, au Québec, environ. Alors, vous allez pouvoir rajouter facilement les 18 ou 17 semaines qui est parmi le 17 000 semaines de congés parentaux, 17 000 années de congés parentaux, alors vous allez économiser plus de 70 000 de l'autre côté.

Je veux dire, je pense qu'on peut béatement être un peu mathématicien et puis de dire: On peut avoir le bon sens. Je ne pense pas que ça cause un préjudice aux parents biologiques de se faire couper de 55 à 54 semaines; par contre, bien, on règle un peu le problème et on conçoit que c'est tellement complexe que... C'est vrai, les parents adoptants ne sont pas nécessairement toujours à l'affût puis ils n'écoutent pas nécessairement tout ce qui se discute dans les commissions des affaires sociales.

La Présidente (Mme James): Alors, merci, M. Dorchies. Je cède maintenant la parole au porte-parole officiel. M. le député de Vachon, la parole est à vous.

M. Bouchard (Vachon): Oui. Je salue les enfants de Gaétan-Boucher. Merci de votre visite. Alors, j'ai un peu de familiarité avec ceux-là parce que c'est des enfants de mon comté, alors... Et, avant les visites, on les rencontre dans leurs classes et on explique ce qui va se passer. Ils sont bien chouettes.

Alors, ceci étant dit, au sujet de votre analyse et au sujet de vos demandes, j'entends, du côté de la ministre, là, qu'elle reçoit vos demandes avec sympathie, qu'elle va les relayer au Conseil de gestion. Je pense que le Conseil de gestion, en relisant nos discussions, vont bien voir que quelque part la ministre n'est pas antipathique à vos demandes, qu'elle a des regrets de ce que tous les parlementaires, à l'unanimité, jadis, aient voté la loi comme elle l'a été. Il y avait un gouvernement différent, à l'époque, il y avait un Parlement, et les parlementaires se sont tous associés derrière cette disposition.

Les temps changent, les temps évoluent, les sensibilités ne sont pas les mêmes, les opportunités et les occasions non plus. Et ce que vous nous dites dans le fond, c'est qu'on éliminerait les prestations d'adoption pour les remplacer par des prestations de maternité et d'accueil d'un enfant, et on serait en affaires.

Une voix: ...

M. Bouchard (Vachon): Bon. Est-ce que... Il y a, je pense, un certain nombre de questions qui vont être posées à l'effet de combien ça coûte, quelle va être la charge, comment elle va être répartie. Mais, au point de départ, je pense qu'on doit reconnaître deux choses: un, les liens d'attachement dont vous parlez, de l'enfant envers les parents, sont sinon aussi difficiles, peut-être plus difficiles à établir que dans d'autres circonstances; deux, qu'ils sont constamment à reconstruire parce qu'il y a un élément d'insécurité, une empreinte d'insécurité dans le parcours de ces enfants, très souvent, et en même temps chez les parents, un stress supplémentaire, vu les difficultés qu'ils ont rencontrées, tout au cours de leur préparation, très souvent, mais aussi les difficultés qu'ils rencontrent à l'adaptation de l'enfant à son nouvel environnement. J'ai des copains qui ont fait des adoptions, et je peux voir ça de très près. En même temps, quelle grande joie.

n(16 h 20)n

Et il y a beaucoup de... Lorsque j'ai présenté ? puis mes collègues sont ici pour en témoigner ? le dossier au caucus, je n'ai eu que des réactions extrêmement positives et de soutien et d'appui à vos demandes. Je ne suis pas sûr... Je n'y étais pas, il y a quatre ans. Je ne suis pas certain que la chose ait été présentée de la même façon. Je ne suis pas... Bon, alors on me dit que les discussions n'ont pas été très longues, et, une des raisons pour lesquelles elles n'ont pas été très longues, c'est que vous étiez occupés à d'autre chose. Et d'ailleurs on vous en est bien reconnaissants parce que nous avons discuté des aménagements à la Loi de l'adoption l'an dernier, et la contribution que vous avez faite à ce dossier-là est extrêmement importante pour guider les décisions des parlementaires dans ce dossier-là, je m'en souviens très bien. Alors, comme dit l'autre: On vous en doit une.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard (Vachon): Mais, ceci étant dit, je n'ai pas beaucoup de questions à vous poser, sauf que je peux vous assurer que mon groupe parlementaire a été avisé, a été informé, a analysé vos demandes et s'y associe. Je sens une sympathie de l'autre côté, du côté ministériel. Je suis persuadé que nous allons tenter de trouver le moyen ensemble d'arriver à répondre à des attentes qui nous apparaissent, de ce côté-ci, en tous les cas, raisonnables et j'ajouterais, en mon nom personnel, nécessaires.

Donc, voilà, je ne sais pas si mes collègues ont quelque chose à rajouter, mais vous avez l'essentiel de nos réactions. Peut-être avez-vous vous-mêmes des réactions.

La Présidente (Mme James): Mme la députée de Lotbinière.

Mme Roy: Je vais prendre, moi, la parole, au nom de l'Action démocratique. Je représente le deuxième parti de l'opposition. J'ai été aussi bien... j'ai bien compris vos problèmes. Je les partage également, et je suis d'accord avec votre position également. Donc, je pense que maintenant on est législateurs, il nous reste à prendre le leadership pour corriger la situation.

La Présidente (Mme James): ...Mme Gagnon.

Mme Gagnon (Claire-Marie): ...aussi, Mme la députée.

La Présidente (Mme James): C'est terminé? Alors, merci beaucoup, Mme Martel, Mme Lemieux, Mme Gagnon, Mme Lodovichetti et M. Dorchies, pour votre présentation de la part de la Fédération des parents adoptants du Québec.

Et je demanderais maintenant aux représentants de la Centrale des syndicats du Québec à prendre place, pour la présentation de leur mémoire. Merci.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme James): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Centrale des syndicats du Québec. Je demanderais bien sûr à la porte-parole de s'identifier ainsi qu'aux gens qui l'accompagnent.

Je vous rappelle bien sûr que vous aurez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Je vous reconnais, alors je sais que vous êtes des habitués au processus. Alors, vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire. Ensuite, nous allons passer à la période d'échange avec les parlementaires: 15 minutes du côté ministériel, ensuite 15 minutes du côté de l'opposition officielle. La parole est à vous.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Mme Chabot (Louise): Merci, Mme la Présidente. Louise Chabot, vice-présidente de la Centrale des syndicats du Québec. Les personnes qui m'accompagnent: Chantal Locat, responsable de la condition des femmes à la CSQ, et Mario Labbé, qui est conseiller syndical au dossier de la sécurité sociale.

Bien, d'entrée de jeu, nous tenons à vous remercier pour cette invitation, même si le délai a été très court. Je comprends qu'il l'a été pour tout le monde. Ça nous faisait extrêmement plaisir de se présenter dans le cadre de ce projet de loi. Puis je tiens à saluer aussi l'action gouvernementale dans ce dossier, mais l'action de tous les parlementaires. Je pense qu'aujourd'hui c'est avec beaucoup de fierté qu'on peut venir saluer le projet de loi qui est devant nous. Je pense que la Loi sur l'assurance parentale marque un pas de plus dans l'avancement de la société, dans la reconnaissance qu'on a pour les familles, dans notre reconnaissance collective à l'endroit des parents. Donc, je pense que c'est un plus.

La CSQ milite depuis plusieurs années pour l'avancement des droits parentaux. On le rappelait dans notre mémoire, que vous venez d'ailleurs de recevoir, on s'en excuse. Il n'est pas très long, par exemple, il est tout chaud. On rappelle toutes les luttes qu'on a menées, depuis les années soixante-dix, et, depuis, on milite toujours pour l'avancement des droits parentaux et des responsabilités familiales. On a été d'ailleurs de la commission parlementaire en 2000, on soutient toujours les orientations qui avaient été présentées à ce moment.

Nous sommes aussi membres du Regroupement pour l'assurance parentale, un mouvement qui s'est mis en place dans les années quatre-vingt-dix. D'ailleurs, notre mémoire s'en inspire beaucoup. On endosse les orientations du RAP, mais on va y ajouter des préoccupations. Je pense que vous devez voir les quelques recommandations qu'on vous fait comme étant des modifications qui veulent bonifier le régime. Et le titre le dit, je pense qu'un régime qui doit être à responsabilité partagée... éviter aussi les reculs sur des acquis qu'on a déjà obtenus. Donc, essentiellement, nos modifications vont porter sur les modifications qui sont apportées par ce projet de loi sur la Loi santé et sécurité du travail, sur la Loi des normes; aussi le mécanisme de représentation au comité de gestion; et bien sûr le financement de ce régime-là où on fera une recommandation importante, qu'on pense que le financement doit être d'une responsabilité partagée, considérant que c'est pour nous une responsabilité collective, de l'ensemble, de s'assurer d'un régime d'assurance parentale qui est à la hauteur des aspirations des femmes et de notre société.

Je laisse tout de suite la parole à Chantal, qui va vous présenter ? et Mario, je pense, dans les questions ? l'essentiel de nos recommandations. Merci.

Mme Locat (Chantal): Bonjour. Je voulais dire que ce qu'on a mis dans le mémoire, c'est particulièrement nos préoccupations en ce qui touche les droits, les droits de représentation; les grands enjeux aussi, au niveau de l'engagement, d'un projet social qui doit être pris en compte aussi par le gouvernement, selon nous.

Je vais parler ici de la Loi sur la santé et sécurité au travail. On est vraiment partie prenante du mémoire du RAP et on prend nôtre tout ce que le RAP a inclus là-dedans. Parce que, pour nous, c'est important de le rappeler que le projet de loi n° 108 vient de plus confirmer que les mesures auxquelles plusieurs s'étaient opposés, déjà, à l'époque, dont la CSQ, au moment de l'adoption de la Loi de l'assurance parentale...

Les articles 88, 89 du projet de loi amendent de nouveau la Loi sur la santé et sécurité au travail, en stipulant: L'indemnisation par la CSST d'une travailleuse enceinte qui bénéficie d'un retrait préventif au sens de cette loi cesse à compter de la quatrième semaine avant la date prévue de l'accouchement telle qu'inscrite dans le certificat médical. Pour nous, c'est comme un recul et un reni des droits déjà des travailleuses qu'elles avaient.

n(16 h 30)n

Cette mesure était absente lors du projet en 2000; elle a été ajoutée par la suite. On dit: L'argumentation au soutien de la mesure à ce moment est faite de nature purement économique et au seul bénéfice des employeurs. Ici, on donne aussi ce que la ministre, à l'époque, avait dit, c'est que l'indemnisation de la travailleuse enceinte qui bénéficie d'un retrait préventif par le régime d'assurance parentale plutôt que par la CSST, à partir de la quatrième semaine précédant la date prévue pour l'accouchement, lorsqu'elle est éligible, entraîne pour les employeurs des économies de cotisations à la CSST d'environ 14 millions de dollars. Par ailleurs, ce montant est égal à l'augmentation des cotisations des employeurs pour le financement des régimes d'assurance parentale. Alors, ce sont, on le voit, des vases communicants. C'est la ministre à l'époque... ça avait été... lors des débats de la Commission des affaires sociales, le 27 février 2001.

Nous voulons rappeler aussi au gouvernement que l'objet premier de la Loi sur la santé et sécurité est l'élimination du danger à la source même. Le retrait préventif des travailleuses enceintes et qui allaitent est une mesure sociale importante qui a été gagnée suite à de longues luttes. Dans l'instauration de cette mesure, soit en 1981, une travailleuse peut être indemnisée, en vertu d'un retrait préventif, jusqu'à la date de son accouchement, si ses conditions de travail sont dangereuses. La Loi sur l'assurance parentale vient changer cela en décrétant la fin de l'indemnisation par la CSST au début de la quatrième semaine précédant l'accouchement. Cela prive la travailleuse soit de son revenu pendant cette période, soit de sa liberté d'aménager la répartition de son congé de maternité à son gré, avant ou après l'accouchement, et cela au seul bénéfice des employeurs.

L'impossibilité de respecter l'objectif de prévention inscrit dans la Loi sur la santé et la sécurité au travail impose donc ici une distinction entre travailleuses, distinction à laquelle la CSQ ne peut souscrire. Aussi, on pourrait rajouter que cet ajout-là, cet amendement-là priverait la mère d'être plus longtemps avec son enfant, puisque déjà les semaines seraient calculées avant. Donc, c'est pourquoi nous recommandons non seulement le retrait de l'article 88 et 89 du projet de loi n° 108, mais aussi l'abrogation des articles 141 et 142 de la Loi sur l'assurance parentale.

Je nommerais uniquement les propositions qu'on a ici, les recommandations. Je sais qu'elles ont été aussi apportées par le Regroupement de l'assurance parentale: que le droit à la suspension en cas d'hospitalisation de l'enfant ne dépende pas d'une entente avec l'employeur et que ce droit s'applique également dans le cas où un enfant est temporairement retiré de la garde des parents; et l'autre recommandation, c'est qu'on ajoute le décès d'un parent comme raison donnant droit aussi à une prolongation de congé parental, et je sais que, ce matin, ça a dû vous être expliqué.

Pour ce qui est de la cotisation, pour nous autres, c'est très important que ce ne soit pas par règlement. Particulièrement la première fois, on aimerait que ce soit public et qu'il y ait plus de représentations pour traiter du taux de cotisation. Puis ce que j'ai compris aussi à la lecture, si c'est toujours là, c'est que c'est dans cinq ans qu'on devra faire une évaluation du régime d'assurance parentale, des fonds et de tout ce que ça implique. Je pense qu'il serait important peut-être de ne pas attendre cinq ans. Nous recommandons donc le retrait de l'article 103 du projet de loi n° 108.

Pour nous, la composition du Conseil de gestion, c'est aussi un enjeu majeur. La CSQ croit qu'il faut instaurer un mécanisme pour représenter les groupes de travailleuses et travailleurs non syndiqués. Nous savons que les femmes non syndiquées sont souvent les femmes qui se retrouvent au plus bas de l'échelle salariale, que les travailleurs non syndiqués ont quand même un écart considérable salarial. Donc, on pense que ce serait important, compte tenu de leur expertise, qu'elles soient représentées au Conseil de gestion.

C'est pour cette raison qu'on a la proposition 4 qui dit que le Conseil de gestion incorpore une membre choisie parmi les travailleuses non syndiquées, après consultation des principales associations autonomes de femmes.

Nous savons toutes et tous que, dans la conjoncture actuelle d'une mondialisation néolibérale, d'une précarité qui va en s'accroissant, de la pauvreté qui est toujours présente, particulièrement chez les femmes, que leur situation ne va pas en s'améliorant, bien au contraire. Il faut donc que la voix de ces femmes soit représentée au Conseil de gestion.

Le coeur, pour nous aussi, de ce régime d'assurance parentale est l'engagement de l'État. La CSQ est favorable à l'instauration d'un fonds d'assurance parentale, à titre de patrimoine fiduciaire d'utilité sociale, dans lequel seront comptabilisées les cotisations et les dépenses engagées dans le cadre de la Loi de l'assurance parentale. Nous soutenons encore une fois les préoccupations du Regroupement pour une assurance parentale, puisqu'il est important de rappeler que le gouvernement doit s'engager dans ce régime qui est beaucoup plus qu'une assurance, mais bien un projet social.

Ce qu'on comprend de la loi, c'est que les travailleurs et les travailleuses ainsi que les employeurs vont cotiser, mais on ne voit pas ici l'engagement de l'État. Nous constatons aussi qu'avec le dépôt du budget rien n'a été mis non plus en faveur de la mise sur pied de ce régime-là alors qu'on avait déjà eu des promesses en ce sens-là, en disant qu'il y aurait un investissement, qu'il y aurait des économies qui iraient dans le régime. Le gouvernement doit injecter les sommes d'argent neuf pour la mise en place du nouveau régime québécois d'assurance parentale. Sa contribution au régime est fondamentale.

L'entente finale Canada-Québec du régime d'assurance parentale nous parle d'un transfert de 200 millions. On n'a pas trop entendu parler, à savoir si le Québec l'avait reçu. Alors, ça ferait partie des questions: Est-ce que le gouvernement québécois a reçu cet argent et est-ce qu'il compte aussi l'investir dans le régime, directement dans le régime d'assurance parentale?

La contribution du gouvernement doit être précise, au même titre que celle des employeurs et des travailleurs et des travailleuses dans le projet de loi. Cette contribution doit refléter la volonté du gouvernement de soutenir les hommes et les femmes qui choisissent d'avoir des enfants. C'est un message clair qui doit être envoyé à la population, on doit sentir dans ce message qu'il s'agit d'une question liée au soutien des responsabilités parentales.

Cette question concerne l'ensemble de la société québécoise. C'est un projet social faisant partie d'un volet important de la politique familiale. Comme les travailleurs et les employeurs, le gouvernement doit s'investir et prévoir dans son budget de l'argent neuf pour ce projet de société faisant partie d'une politique familiale qu'il dit être une de ses priorités.

La recommandation 4... Ah! excusez-moi, je n'ai pas... moi, j'ai un vieux document, ici. Un vieux document, il s'agit de ce matin... il est vieux de ce matin, parce que ça a été assez rapide, n'est-ce pas?

La recommandation 6. La CSQ recommande que le régime québécois d'assurance parentale bénéficie d'un financement tripartite: employeurs, travailleuses et travailleurs et gouvernement du Québec.

À la lecture du budget aussi, on voit qu'il y a des économies ici réalisées par le PRALMA. Nous recommandons donc que les économies gouvernementales réalisées, notamment au niveau du PRALMA, fassent partie des sources de financement du régime.

En conclusion, la Centrale des syndicats du Québec est heureuse de voir que les familles du Québec pourront bénéficier d'un régime d'assurance parentale plus généreux. En tant que société moderne soucieuse d'apporter aux familles le support dont elles ont besoin, nous croyons fermement qu'un pas en avant se réalise. Par contre, force est de constater qu'il y a encore place à l'amélioration, en vue d'une application plus respectueuse des droits. Nous croyons que les recommandations mises de l'avant ne pourront que la favoriser.

Il nous semble nécessaire de ne pas amender la Loi sur la santé et la sécurité du travail tel que dit tantôt; le faire serait de renier des droits acquis suite à de longues luttes. Le retrait préventif est une mesure de prévention, il ne faudrait quand même pas réaliser des économies sur le dos des femmes qui n'ont pas le choix de se retirer d'un travail qui comporte des risques pour elles.

Les travailleuses et travailleurs cotiseront à l'assurance parentale. Il faut en tenir compte et exiger que la détermination du taux de cotisation ne se fasse pas par règlement, mais de façon publique.

Quand le gouvernement nous affirme qu'il fait de la famille une priorité, nous sommes très heureux, parce qu'il sera sensible à la réalité des familles, au déclin démographique qui nous guette. Faut-il rappeler aussi que la création de la caisse d'assurance parentale vise un objectif sociétal qui est tout aussi bien démographique, social qu'économique? Ce n'est donc pas aux seuls travailleurs et employeurs d'y contribuer.

On se souvient que le projet de loi n° 140 a fait consensus, à l'assemblée générale. C'est donc dire que l'État doit s'engager et y mettre le prix. Je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Locat. Alors, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Mme Chabot, Mme Locat, M. Labbé, bienvenue. Merci d'être là. On a placoté, mais on a placoté de choses intéressantes qui étaient tout à fait en lien avec votre mémoire qui est fort bien fait, très explicite, succinct, qui recoupe par ailleurs des points qu'on a discutés abondamment aujourd'hui. C'est pour ça que je vais vous interroger sur des aspects qu'on n'a pas encore abordés.

n(16 h 40)n

Alors, pas que les autres éléments de votre mémoire ne soient pas fondamentaux et importants, mais vous comprenez que, si vous avez assisté un petit peu à nos débats, là, il y a bon nombre des aspects qui ont déjà été couverts. Mais vous faites des recommandations quant au droit à la suspension en cas d'hospitalisation de l'enfant. Donc, vous dites: On ne veut pas que ça dépende d'une entente avec l'employeur, ça devrait être un droit. Et je crois comprendre que c'est ça que vous voulez dire. L'objet de ma question, c'est: J'imagine que, si vous l'abordez comme vous le faites, c'est que vous auriez crainte que l'employeur n'accepte pas. C'est ça?

Mme Locat (Chantal): Exactement.

Mme Courchesne: Bon. Je comprends ça très bien. Moi, je veux dire, on est peut-être prêts à regarder des formulations, à cet égard-là. Mais est-ce que vous ne convenez pas avec moi par ailleurs que, dans la gestion, dans le pratico-pratique aussi, il se peut que l'employeur ? surtout si l'enfant, bon, est hospitalisé on ne sait pour exactement combien de temps, ça peut être court terme, moyen terme, un peu plus long terme, des fois il y a des facteurs qu'on ne peut pas prévoir ? donc l'employeur pourrait, lui, procéder à une embauche, pourrait devoir... Alors, est-ce qu'on ne pourrait pas trouver une façon de quand même préserver une obligation de s'entendre pas au sens qu'on n'a pas droit au congé, bien au contraire ? puis là on verra, on est prêts à examiner la question ? mais quand même de s'assurer que... surtout quand on veut faciliter des conciliations travail-famille, il me semble que nous aurions intérêt à encourager cette bonne entente plutôt qu'encore imposer une entente comme telle ou de non-entente qui laisse quand même l'employeur un peu en plan en ne sachant pas à quoi s'en tenir est-ce que ce sont des jours, des semaines, des mois?

Et, vous savez, ça arrive, hein, parfois ça arrive que le dialogue n'est pas aussi limpide qu'on le souhaiterait. Donc, est-ce qu'on ne devrait pas peut-être trouver une façon de palier à ces difficultés-là tout en respectant le droit au congé en cas d'hospitalisation? Parce qu'on reconnaît d'emblée le bienfait de la demande.

Mme Locat (Chantal): Bon, il pourrait peut-être y avoir une formulation qui soit différente, qui permettrait un consensus des deux parts. C'est sûr que, bon, il y a des cas où ça peut être plus difficile, mais en même temps le droit de choisir et de pouvoir s'entendre aussi... et je pense que c'est la formulation, là, qui est seulement à retravailler, ce n'est pas le fond comme tel, là. Mais la formulation, que ce soit nécessairement par entente, bien il peut arriver aussi où il n'y a pas d'entente à ce moment-là, que l'employeur ne veut pas ou bien qu'il n'a pas la souplesse ou bien qu'il n'a pas l'ouverture, en tout cas... Mais ici c'est vraiment, bon, une formulation qui serait peut-être à rechercher pour améliorer la situation.

Mme Courchesne: Je vous dirais la même chose pour votre recommandation en ce qui concerne le décès d'un parent. Nous allons faire certaines vérifications avec les Normes du travail aussi, question d'harmonisation. Je pense que, dans les deux cas, il y a des aspects intéressants à regarder de cet aspect-là.

Il y a un point que je n'ai pas non plus abordé ce matin, avec les intervenants, les groupes avant vous. Effectivement, nous avons des demandes pour élargir le Conseil de gestion à une représentante des travailleuses non syndiquées. Actuellement, le Conseil de gestion a une représentation que je qualifierais, là, entre guillemets, de paritaire ou en tout cas... mais il y a un certain équilibre au Conseil de gestion. Je pense que c'est sage de faire un certain équilibre dans la représentativité, sinon on n'arrivera jamais à s'entendre.

Si je vous disais, par exemple, que, s'il y a une ouverture d'ajouter un membre de travailleuses non syndiquées, est-ce que vous accepteriez d'ajouter un membre patronal pour maintenir cet équilibre-là ? parce qu'on croit comprendre, entre autres, que les travailleurs autonomes sont davantage du côté syndical que du côté patronal?

Mme Locat (Chantal): Bien, pour ma part, c'est parce que, là, déjà, dans le Conseil de gestion, ce qu'on sait, c'est qu'il y a un représentant des travailleurs autonomes qui dirige des entreprises, qui se trouve employeur, à la fois employeur et... Un travailleur autonome peut en soi se retrouver employeur et salarié. Donc, je pense que, si le travailleur autonome qui est représenté là a une entreprise, il devient employeur, et il aura tout avantage, lui, je veux dire, à aller chercher, peut-être au niveau des cotisations, quelque chose de moindre ou quelque chose comme ça.

Donc, moi, je pense qu'en allant chercher une femme qui représente les travailleuses non syndiquées et qui... Pour moi, je mettrais les trois sièges, les travailleurs... ce serait les deux travailleurs... les deux représentant les syndicats plus les travailleuses non syndiquées. Et, pour moi, le travailleur autonome, comme il représente les deux, qu'il a les deux statuts, j'ai de la difficulté à le mettre uniquement du côté des travailleurs. Je le mettrais peut-être à un siège particulier, mais je n'ajouterais pas, à ce moment-là, un poste au niveau des employeurs parce que, déjà, il se retrouve souvent employeur aussi, tandis que les travailleuses autonomes, exemple, qui sont plus au... Dans le fond, le fait d'aller chercher aussi des travailleuses non syndiquées, des femmes qui représentent des travailleuses non syndiquées, aussi c'est pour représenter des femmes qui sont souvent dans les bas revenus. Et, par les chefs d'entreprises qui sont travailleurs autonomes, ce ne sont pas nécessairement des bas revenus et ne représentent pas nécessairement ces salariées-là qui ne sont pas représentées du tout dans ce Conseil de gestion là.

Moi, je crois que, déjà, avec un qui représente les travailleurs autonomes, qui dans le fond représente les deux et qui a un statut très particulier, que l'ajout d'un siège femmes non syndiquées n'a pas besoin d'avoir un autre ajout, pour moi, pour les employeurs.

Mme Courchesne: Merci.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Gouin.

M. Girard: Alors, bonjour. Merci pour votre présentation, votre présence en commission parlementaire. J'avais une question. Il y a un groupe qui est venu nous rencontrer précédemment, la Fédération des parents adoptants du Québec, et qui a indiqué qu'il souhaitait qu'il y ait une modification à la loi afin de porter le niveau des prestations, là, d'adoption au même niveau que celles des parents biologiques. Et je voulais savoir, comme vous siégez au Conseil de gestion, est-ce que la CSQ est ouverte à cette proposition?

Mme Locat (Chantal): On ne siège pas au Conseil de gestion...

M. Girard: O.K. Excusez-moi.

Mme Locat (Chantal): ...mais, je veux dire, je pense que ce serait des choses à discuter. C'est difficile pour moi de répondre comme ça, mais, je veux dire, on est ouverts à ce que les femmes aient... que ce soit d'une façon la plus équitable possible. Là, il faut vérifier, à ce moment-là, si on considère qu'accoucher... si on minimise le fait qu'accoucher peut être aussi... en soi peut demander un certain repos aussi, mais je pense que c'est légitime aussi, pour les femmes qui adoptent, d'avoir les mêmes congés que les autres. En tout cas, ça, c'est personnel, je vous dirais, pour tout de suite, là. Est-ce que tu voudrais...

Mme Chabot (Louise): Bien, je regarde juste... parce qu'effectivement on ne s'est pas attardés à cela. Moi, je pense qu'il y a une équité de traitement. Qu'on adopte ou qu'on soit en prestation de maternité, ça nous semble un objectif qui peut être... qui serait souhaitable. Et d'ailleurs, si je le regarde plus dans le secteur public, les batailles qu'on a faites pour les congés de maternité gagnés dans les années soixante-dix, il y a le congé de maternité puis il y a aussi le congé pour adoption où les prestations sont les mêmes; ce qui diffère, c'est le nombre de semaines. Au niveau de la prestation donc... mais des bonifications qui visent effectivement à reconnaître particulièrement les congés pour adoption, en tout cas on pourrait être ouverts à regarder ces questions-là, bien que je vous dis qu'on a entendu la représentation précédente, mais on s'était moins attardés à cet aspect-là en se présentant devant vous.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que c'est la première fois que vous entendiez cette demande de la part des parents adoptants?

Mme Locat (Chantal): Bien, pour ma part, d'avoir les mêmes semaines, c'était la première fois, là, puis je veux dire, bon, je pense que c'est légitime aussi, là. Mais, comme toute nouvelle demande aussi demande réflexion, bien je pense que, oui, moi, c'est la première fois que j'entendais cette demande-là, personnellement, là.

M. Bouchard (Vachon): Donc, je conclus que cette thématique-là n'avait jamais été abordée au Conseil de gestion jusqu'à maintenant.

Mme Chabot (Louise): Nous ne sommes pas au Conseil de gestion.

Mme Locat (Chantal): Est-ce que vous voulez dire le regroupement ou le Conseil de gestion?

M. Bouchard (Vachon): Le Conseil de gestion. Vous n'y êtes pas?

Mme Locat (Chantal): Nous ne sommes pas au Conseil... Ce n'est pas nous qui sommes au Conseil de gestion pour... Vous voulez dire pour les travailleurs syndicaux?

M. Bouchard (Vachon): Oui.

Mme Locat (Chantal): Ce n'est pas nous, c'est des membres de la FTQ... un membre de la FTQ et un membre de la CSN.

M. Bouchard (Vachon): Ah! Je m'excuse. J'ai fait erreur, là-dessus. Je pense que mon collègue de Gouin a une question concernant les congés de paternité aussi.

n(16 h 50)n

M. Girard: Oui, c'est ça. Sur les congés de paternité, dans la loi, c'est cinq semaines qui sont non transférables. Est-ce que vous jugez que ce sera beaucoup utilisé, puis est-ce que vous jugez que, cinq semaines, c'est suffisant ou que le Québec devrait s'inspirer d'autres pays européens qui proposent des congés où il y a un nombre de semaines plus important?

Mme Locat (Chantal): Vous voulez dire pour les hommes?

Mme Chabot (Louise): Oui, des congés...

Mme Locat (Chantal): Pour les pères?

M. Girard: Oui, pour les hommes, oui.

Mme Locat (Chantal): Oui, oui. En tout cas, déjà, cinq semaines, je pense que c'est un minimum. Moi, je suis très contente, je pense que le Québec a fait un grand pas, puis on verra dans le futur, peut-être que ça ira plus loin, dépendamment de qui aussi prendra en charge les enfants. Parce que, bon, bien, ces avancées sociales là vont aussi faire avancer et les femmes et les hommes vers des avenues nouvelles. Donc, il faudra... Je pense qu'il faut se réadapter à mesure que le monde évolue, là. Mais, moi, je trouve que c'est une avancée qu'il faut saluer, le fait qu'il y ait cinq semaines pour les hommes. Nous sommes très contents.

Mme Chabot (Louise): Puis il y a la mesure de l'avancement du régime, on pourra regarder des mesures, mais on voit... quand on regarde d'où on part et où nous sommes, je pense qu'il y a déjà... c'est des mesures de conciliation famille-travail, je pense que, pour les hommes, c'était revendiqué aussi.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, quelle analyse faites-vous de la position gouvernementale, exprimée jusqu'à maintenant, qu'une contribution gouvernementale mettrait en péril l'indépendance de gestion du fonds? Est-ce que vous avez déjà eu des discussions là-dessus? Est-ce que ça vous paraît un problème important? Comment vous réagissez à cela?

Mme Chabot (Louise): En tout cas, on n'a pas regardé cette analyse-là sous l'angle d'ingérence ou d'indépendance. Pour nous, le régime... quand on demande, on revendique... Là, on voit qu'on met en place une caisse, une mesure sociale ? parce qu'on la qualifie comme ça. On trouve que c'est une mesure où il y a une responsabilité collective, que c'est une mesure sociale où on... En implantant une caisse qui va faire reposer seulement sur les cotisants qui sont employeurs et travailleurs, ce régime-là, pour nous, je ne pense pas que ce soit de l'insubordination ou qu'on va venir entraver une gestion de dire que l'État ? je vais le dire dans mes mots ? met une mise de fonds et contribue... on n'a pas qualifié la hauteur, mais contribue financièrement, dans ses politiques plus globales, d'une politique de la famille, d'une politique de conciliation famille-travail, donc, je ne pense pas qu'il y ait de... qu'il faut voir... Si les règles sont bien claires, il y a une contribution de l'État puis tout le monde contribue. Donc, on ne s'oppose pas non plus au fait qu'il y ait une caisse où les travailleurs puis les employeurs contribuent, mais on pense que ça ne peut pas... on ne peut pas juste une fois mettre un montant puis après faire reposer le régime... Il me semble qu'il y a une responsabilité étatique qu'on se dégage, puis je pense que le régime serait mieux assuré, il y a une responsabilité publique plus grande aussi, avec une contribution de l'État. Mario.

M. Labbé (Mario): Je pense aussi que... Je trouve que c'est un drôle d'argument de dire que le fait que le gouvernement investisse dans la caisse ferait en sorte qu'il y ait plus de risques qu'il pige dedans. Si on se fie à l'expérience fédérale en matière d'assurance-emploi, je ne suis pas sûr qu'on peut en arriver à cette conclusion-là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Labbé (Mario): ...puisque le gouvernement fédéral pige davantage que jamais dans la caisse depuis qu'il n'y contribue plus. Alors, je ne pense pas que ce soit un excellent argument.

Mme Locat (Chantal): J'aimerais...

M. Bouchard (Vachon): Mais la caisse n'est pas autonome là-bas.

M. Labbé (Mario): Non.

Mme Locat (Chantal): Puis j'aimerais ajouter aussi que ce n'est pas un régime d'assurance ordinaire, c'est vraiment un régime et un projet de société, un régime qui est là pour aider à la famille, conciliation travail-famille. Donc, il faut que le gouvernement lance un message clair, qu'il mette de l'argent neuf, qu'il soit prévu dedans qu'il investisse dedans mais pas pour le transférer ailleurs, mais pour le conserver là. Moi, je pense qu'il y a moyen d'être indépendant, dans le sens de ne pas aller chercher l'argent après mais d'investir quand même là, comme volonté politique. Il faut absolument que le gouvernement investisse de l'argent là-dedans.

M. Bouchard (Vachon): Est-ce que vous êtes d'accord avec la FTQ qui dit au gouvernement: Écoutez, les économies que vous faites comme employeur, étant donné la nature du nouveau programme, réinjectez-les dans la caisse, pour un certain nombre d'années en tous les cas, et, au bout d'un certain temps, on évaluera si jamais il y avait des surplus dans la caisse, on pourrait en rediscuter? Est-ce que vous voyez que ce genre de proposition a plus de chance d'être acceptée parmi vos membres qu'une proposition d'engagement définitif gouvernemental?

Mme Locat (Chantal): Moi, je pense que ça prend les deux: l'engagement et les économies qui sont réinvesties. Bon, je pense que l'important, c'est que ça revienne aux travailleurs. Donc, s'il y a des économies qui sont faites là, qu'elles soient réintroduites auprès des travailleurs soit par une baisse de cotisation ou par une prime ou par l'amélioration d'un régime d'assurance. Je pense que, socialement, on pourrait être ouverts à ça aussi. Mais l'important, c'est que ces économies-là reviennent à l'ensemble des travailleurs, des travailleuses.

Mme Chabot (Louise): Ou aux employeurs. Si on a une caisse qui a des économies puis qu'on réussit à faire qu'au fil du temps on... parce qu'on veut bien que l'utilisation de ces sommes d'argent soit pour le bénéfice du régime, donc il n'y a pas d'objection. Mais à notre avis ça ne vient pas substituer à l'idée que, dans le cadre d'un programme social, que c'est comme ça qu'on le voit puis tel qu'il est devant nous, que l'État doit investir aussi.

M. Bouchard (Vachon): C'est comme ça que vous le voyez. C'est comme ça que la Cour d'appel aussi l'a vu alors que le cas lui était présenté. C'est pour ça d'ailleurs que la Cour d'appel a donné un oui retentissant aux quatre questions qui lui étaient posées, c'est-à-dire qu'il y avait un cas d'ingérence et un cas d'empiétement très net du gouvernement fédéral en la matière. C'est désormais devant la Cour suprême, puis on espère que la Cour suprême reconnaîtra les mêmes dimensions, les mêmes caractéristiques. Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Chabot, Mme Locat, M. Labbé, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire au nom de la Centrale des syndicats du Québec.

Et, sur ça, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 20 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 57)

 

(Reprise à 20 h 4)

Le Président (M. Bachand): Donc, à l'ordre, messieurs... monsieur. «À l'ordre», c'est un terme qui veut simplement inviter les convives et les gens qui participent à la commission...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand): ...à la commission d'être à l'écoute sur le plan intellectuel, sur le plan émotif.

Donc, nous allons procéder aux travaux. Je vous rappelle donc que la Commission des affaires sociales est réunie afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale et d'autres dispositions législatives.

Donc, je vous rappelle rapidement, on est 20 heures, Conseil du patronat du Québec, M. Gilles Taillon, président. Bonsoir, M. Taillon. Je vous rappelle rapidement les règles. Il y a 20 minutes ? c'est 15 minutes ou 20, Mme la secrétaire? ? 15 minutes pour la présentation de votre mémoire et il y a 20 minutes, de part et d'autre, de questions, et on va favoriser l'échange... C'est bien 20 minutes? 15 minutes aussi, de part et d'autre. Donc, bienvenue à notre commission, M. Taillon, et je vous prie de procéder à la présentation de votre mémoire.

Conseil du patronat du Québec (CPQ)

M. Taillon (Gilles): Merci beaucoup, M. le Président. Merci à la commission de recevoir le Conseil du patronat du Québec et de lui permettre d'exprimer son point de vue sur le projet de loi n° 108, modifiant la Loi sur l'assurance parentale. D'entrée de jeu, vous avez un mémoire qui a été déposé ce soir, je vais tenter de le résumer. Je ne le lirai pas, je vais tenter de donner les grands pans de nos observations et de nos réactions.

D'abord, le projet de loi n° 108, par son article 4 qui modifie l'article 6 du projet original, campe de façon claire la responsabilité des cotisants du régime via le Conseil de gestion, la responsabilité de fixer les taux de cotisation. C'est, à notre point de vue, un meilleur principe d'assurance, et nous souscrivons à cet amendement-là, nous sommes même heureux de le voir apparaître. Mais, avant de fixer les taux, il y a une question préalable qu'il faut régler, et c'est l'évaluation du quantum nécessaire au financement de ce régime, un régime d'assurance parentale québécois qui est fort intéressant mais aussi coûteux.

On sait que les bénéfices contenus à la loi vont entraîner des coûts de 40 % supérieurs au régime fédéral actuel, soit environ 298 millions de dollars additionnels selon les prévisions. S'il fallait maintenir le mode de répartition qui a cours avec le régime fédéral, un mode de répartition qui est 7/12 employeur, 5/12 travailleur, il en coûterait 180 millions de plus aux entreprises du Québec. C'est un montant qui est substantiel, qui est énorme dans un contexte de concurrencer les entreprises des autres provinces et des autres pays qui nous concurrencent et c'est un montant énorme aussi devant la nécessité actuellement de stimuler les investissements.

Pour bien situer la valeur de 180 millions de dollars pour les entreprises en charge sociale additionnelle, rappelons que le ministre des Finances du Québec, dans son dernier budget, a annoncé une réduction des impôts des entreprises, à terme, donc en 2006-2007, de l'ordre de 159 millions de dollars, pour justement attirer des investisseurs. Alors, si d'un autre côté on augmentait les charges sociales d'un montant supérieur, vous comprendrez que, pour les entreprises du Québec, c'est là une bien mauvaise nouvelle. Nous avons fait des consultations autour du projet de loi original, et évidemment, pour les entreprises, c'est une pilule extrêmement difficile à avaler, une telle augmentation au niveau des cotisations.

Nous vous faisons, ce soir, à l'occasion du projet de loi n° 108, quatre suggestions ayant pour but de réduire d'une part... ou d'affronter le problème de financement que je signale et de rendre le régime plus viable. Premier aménagement, et vous retrouvez ça en page 3 du petit mémoire, premier aménagement, au niveau du financement du régime. Nous pensons, à l'instar de nos collègues des syndicats, que, pour atténuer la pression sur les coûts, le gouvernement doit participer au financement du régime. L'ancien gouvernement s'était engagé, au moment des discussions originales, à contribuer; nous souhaitons que le gouvernement présent aille dans le même sens. Pour nous du monde patronal, et c'est une proposition qui a fait l'objet, dans les associations représentant les entreprises, l'objet d'un consensus, nous pensons que, compte tenu de la situation financière difficile du gouvernement, la part que le gouvernement devrait réinjecter dans l'assurance parentale devrait correspondre à ce qu'il économise par rapport à ses régimes complémentaires actuels: donc, d'une part, un 57 millions de dollars qu'il économise avec la mise en place d'un régime qui va lui coûter moins cher, et, d'autre part, nous pensons qu'à la CSST, au niveau du retrait préventif, le gouvernement actuellement, qui utilise davantage le régime que les employeurs privés, serait capable de financer à hauteur de 36 millions de plus le régime d'assurance parentale, faisant en sorte d'éviter les interfinancements.

n(20 h 10)n

Bref, dans notre esprit, la part du financement gouvernemental devrait être supérieure à 90 millions. Nous souhaitons... Et là-dessus je vous disais tantôt, quant à la nécessité du gouvernement de participer, je pense qu'il y a consensus chez les cotisants au régime, tant du côté patronal que syndical; quant aux modalités, évidemment il n'y a pas consensus, le Conseil de gestion travaille à essayer de trouver les modalités les plus appropriées. Nous souhaitons, nous, du côté patronal, que les modalités de financement soient des modalités carrément d'assurance et donc, à ce moment-là, qu'on ait un taux spécial pour le gouvernement employeur, un taux pour les employeurs privés, et bien sûr un taux pour les travailleurs, et un quatrième taux pour les autonomes.

Donc, si vous avez besoin d'explications supplémentaires, on pourra expliquer comment le 93 pourrait s'investir dans un contexte comme celui-là, mais ce serait une façon de permettre dans le fond au régime d'avoir aussi une durabilité, éviter les soubresauts liés à des subventions une année, moins de subventions l'autre année. Avec des taux distinctifs, on atteindrait un objectif de durabilité. Donc, premier aménagement souhaité, c'est une participation du gouvernement au financement du régime.

Deuxième aménagement souhaité, c'est une comptabilité séparée pour les travailleurs autonomes. Nous croyons que, du côté des travailleurs autonomes, on ne dispose d'aucune expérience pour déterminer l'évolution et l'allure qu'aura le régime. On ne pense pas qu'il appartienne ni aux employeurs ni aux travailleurs de financer cette portion du régime. Donc, on aimerait une comptabilité séparée, voire une évolution différente pour les travailleurs autonomes.

Troisième aménagement que nous souhaitons ? c'est davantage un souhait que nous exprimons ? nous souhaitons que le régime tel qu'il est, qui est déjà très avantageux, le régime d'assurance parentale tel qu'il est, qui coûte déjà 40 % de plus, qui offre des bénéfices bien supérieurs à ce qu'on connaissait, ne fasse pas... n'accueille pas de nouveaux bénéfices, qu'il n'y ait pas d'amendement, que les prestations restent les mêmes que ce qu'on connaît actuellement, à la fois dans le projet original et dans le projet amendé. Donc, on insiste pour que les parlementaires résistent aux pressions qui pourraient venir de certains groupes pour modifier les bénéfices du régime. Laissons vivre ce régime-là, on va voir quel rythme de croisière il va prendre. L'expérience pourrait nous amener à réaliser que les prévisions sont inférieures à la réalité, hein? Le fait qu'on a un congé plus long, ça va peut-être faire en sorte qu'il y ait un engouement pour ce régime-là. Donc, résistons aux pressions pour accroître les prestations ou les bénéfices du régime déposé actuellement.

Quatrième aménagement souhaité, et je vais terminer avec cela, c'est que nous souhaitons, en fonction des pouvoirs qui sont dévolus désormais... ou par le projet, au Conseil de gestion, nous souhaitons que la composition du conseil soit modifiée. Nous pensons que, dans le conseil actuel, qui compte 10 représentants, le gouvernement est surreprésenté. Il y a quatre représentants sur 10 qui viennent de la partie gouvernementale. Notre proposition serait à l'effet de vous suggérer un conseil qui compterait neuf membres: un président bien sûr nommé par le gouvernement; quatre représentants d'employeurs, dont un sur quatre représentant l'employeur gouvernement; trois représentant des travailleurs, ce qui permettrait de faire droit à des demandes pour inclure des représentantes de travailleuses, surtout non syndiquées à ce qu'on a compris, donc trois représentant des travailleurs; et un représentant des autonomes. Donc, un conseil plus léger, plus représentatif et respectueux de la proportion des coûts qui seront assumés par les participants et les cotisants au régime. Donc, quatre sur neuf aux employeurs, y incluant un représentant gouvernemental, un président neutre, trois travailleurs et un autonome.

Voilà dans l'ensemble les constatations que nous faisons à l'égard des modifications et du régime d'assurance parentale, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. Taillon. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. Alors, M. Taillon, merci beaucoup surtout d'être présent avec nous à une heure tardive. C'est d'autant plus apprécié, mais vous savez qu'on a dû rapidement réagir à l'horaire. Alors, votre présence est d'autant plus appréciée.

J'apprécie, M. Taillon, les précisions, la clarté, l'esprit de synthèse, vous êtes droit au but. Alors, vous me permettrez de vous poser des questions de la même façon, droit au but. J'ai bien pris note, là, des quatre recommandations que vous nous faites. Vous suggérez qu'il y ait un taux différencié pour le gouvernement. J'aimerais que vous élaboriez davantage, là, vous avez été très brièvement. J'aimerais savoir pourquoi, mais j'aimerais savoir aussi de quel ordre, c'est-à-dire peut-être nous donner davantage de précisions. Autrement dit, si un tel taux différencié était introduit, il faudrait, j'imagine, en avoir les critères, les paramètres et... L'autre question que je vais vous poser très franchement: Est-ce que le Conseil de gestion a accepté d'analyser ce genre de proposition-là? Est-ce qu'il y a des scénarios qui ont été élaborés avec ce genre de possibilité?

M. Taillon (Gilles): Bon, au départ, sur le principe, nous disons, nous pensons qu'il est préférable d'avoir un taux particulier pour le gouvernement employeur, donc d'avoir un comportement gouvernement employeur dans un régime d'assurance, que d'avoir une subvention ou un ajout venant du gouvernement. Ça, c'est le premier principe, O.K., qu'on... La façon d'établir le taux, bien c'est en injectant, dans le régime, la part des économies que le gouvernement fait avec ses régimes complémentaires, donc le 57 millions, et la part de l'interfinancement, le 36 millions, qui provient du retrait préventif.

L'interfinancement, ça veut dire ceci. Dans le retrait préventif actuellement, le gouvernement paie, à cause du mode de financement à la CSST pour le retrait préventif, environ 25 % du coût et utilise 45 % des ressources financières dévolues à ce programme-là. Donc, c'est davantage le gouvernement, avec son secteur parapublic, qui prend des congés de maternité en retrait préventif que les employeurs privés. On établit, nous, sur un régime de 175 millions, qu'il y a 36 millions d'écart. Donc, si vous injectez le 57 plus le 36, ça fait 93 millions, vous mettez ça dans le régime et, une fois cela mis, il y a un partage, entre les employeurs et les travailleurs, de cette somme additionnelle mise par le gouvernement.

À votre question précise, il est un peu difficile de parler d'un montage financier sans avoir les chiffres sur la table, mais nous avons déposé ces scénarios-là au Comité de gestion de l'assurance parentale, nous en avons discuté avec nos collègues représentant les travailleurs ? je vous ai dit tantôt «s'il y a accord sur le fait que le gouvernement participe» ? là-dessus il n'y a pas encore d'accord, mais on discute.

Mme Courchesne: Non, ça, je sais ça.

M. Taillon (Gilles): O.K.

Mme Courchesne: Mais, M. Taillon, là, si j'écoute votre raisonnement, là, ça voudrait dire que les employés du secteur public cotiseraient davantage que les employés du secteur privé. C'est ça que ça veut dire.

M. Taillon (Gilles): Non, ce n'est pas ça que ça veut dire. Les travailleurs, eux autres, il n'y a pas de distinction, c'est strictement l'employeur gouvernement et l'employeur privé.

Mme Courchesne: Voilà, vous avez raison. Je comprends.

M. Taillon (Gilles): Il n'y aura pas de cotisation supplémentaire.

n(20 h 20)n

Mme Courchesne: Non, mais... Je comprends ce que vous voulez dire, mais en même temps... Je vais poser ma question autrement. Ce que je veux dire, c'est que dans un sens le secteur public, lui, il va quand même mettre beaucoup plus, d'une certaine façon, tout confondu, que le privé. Je comprends que, vous, vous... En fait, vous, ce que vous dites, c'est qu'on prend les économies, on prend le retrait préventif et puis on remet ça dans la grande cagnotte, puis, une fois qu'on a mis ça dans la grande cagnotte, là on va rétablir des taux différenciés.

M. Taillon (Gilles): En fait...

Mme Courchesne: Attendez. Juste pour terminer, si vous me permettez. Parce qu'on a déjà un taux différencié si on va sur le 5-12, 7-12 ? pour moi, c'est une forme de taux différencié ? ça fait que, là, on aurait un troisième taux différencié. C'est ça que vous nous dites?

M. Taillon (Gilles): C'est ça qu'on propose parce qu'en fait...

Mme Courchesne: Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est un peu compliqué?

M. Taillon (Gilles): Non, ce n'est pas compliqué parce qu'en fait...

Mme Courchesne: Et équitable, vous trouvez que c'est équitable?

M. Taillon (Gilles): Non, c'est équitable.

Mme Courchesne: Expliquez-moi l'équité de ça.

M. Taillon (Gilles): L'équité, parce que la proportion que le gouvernement va payer, c'est la proportion de l'utilisation qu'il fait des régimes, autant CSST qu'assurance parentale. C'est un principe d'assurance: on paie en fonction de l'utilisation. Sinon, compte tenu des bénéfices que vous avez donnés actuellement, vous feriez, dans la mise en place du nouveau régime, comme gouvernement, des économies globales, alors que les deux autres contributeurs, les employeurs privés et les travailleurs, auraient des augmentations substantielles de l'ordre de 40 %. Donc, c'est un moyen de rétablir l'équilibre.

Mme Courchesne: M. Taillon, on s'entend que la très grande entreprise a aussi des économies.

M. Taillon (Gilles): Définitivement. La problématique qu'on a...

Mme Courchesne: On fait quoi avec les économies de l'entreprise?

M. Taillon (Gilles): Dans les entreprises... Au niveau du gouvernement, c'est un employeur unique, O.K.? Entendons-nous. Donc, c'est assez facile de répartir, alors que, dans l'entreprise, il y a à peu près 23 millions d'économies des régimes complémentaires, surtout dans la moyenne et grande entreprise, mais c'est très inégal. C'est-à-dire que, si on applique l'économie à l'ensemble des entreprises de ces régimes complémentaires là, on va faire payer par les petites des régimes complémentaires qui étaient offerts par les grandes. Donc, ça devient extrêmement difficile dans le privé.

Ce qu'on sait par contre, c'est que, comme les régimes complémentaires dans le privé étaient surtout le lot de grandes entreprises, que c'était mis là comme un avantage compétitif pour attirer la clientèle... pour attirer la main-d'oeuvre, on est à peu près assuré que, même si l'entreprise bénéficie d'une réduction liée à ce 23 millions là, elle va le réinvestir dans d'autres bénéfices pour garder son avantage compétitif, notamment dans le pharmaceutique, et ainsi de suite. C'est un plus.

Donc, il est très difficile d'aller récupérer cette économie-là du côté des employeurs privés, compte tenu que ce sont des employeurs qui ne sont pas... il n'y a pas d'homogénéité. Chaque entreprise a... C'est la problématique.

Mme Courchesne: M. le Président, je ne veux pas... On n'est pas là pour essayer de dénouer cette question-là ce soir...

M. Taillon (Gilles): ...les modalités de financement.

Mme Courchesne: ...mais il n'en demeure pas moins que vous nous dites: Parce que c'est difficile d'attribuer les économies au bon endroit dans le privé mais que c'est tellement plus facile dans le public parce qu'il y a un employeur unique, bien que le public, tu sais, lui, il remette ses économies entièrement. Mais, au privé, bien là... Non, mais j'ai compris, mais vous comprenez que ce que vous nous avancez ce soir fait partie des difficultés, fait partie des difficultés dans la discussion parce que...

M. Taillon (Gilles): ...les économies du 23 millions au privé, là, il va y avoir une augmentation importante des cotisations.

Mme Courchesne: Alors, pour le gouvernement, employeur unique, plus gros employeur du Québec, il va aussi y avoir des augmentations de cotisations. Alors...

M. Taillon (Gilles): Qu'on veut proportionnelles à ce que les autres paient.

Mme Courchesne: Pardon?

M. Taillon (Gilles): Qu'on veut proportionnelles à ce que les autres paient par rapport à l'utilisation des régimes.

Mme Courchesne: Je ne veux pas rentrer... On ne réglera pas ça ce soir, mais vous comprenez, M. le Président, que je sens qu'il y a des zones qui méritent énormément d'être réfléchies et analysées en profondeur. Parce que je comprends, là, qu'au fond tout le monde, tout le monde veut un peu de son côté avoir droit au chapitre, puis c'est normal, puis c'est correct, mais en quelque part il va falloir qu'on établisse des critères qui soient un peu les mêmes pour tout le monde. Puis la logique, il va falloir qu'elle soit aussi rationnelle, logique rationnelle, j'insiste, aussi pour tout le monde parce que, sinon, c'est là que ça devient plus difficile.

Juste avant que mon temps termine, si vous me permettez, j'aimerais ça parler du retrait préventif avec vous parce qu'on en a parlé beaucoup aujourd'hui, du retrait préventif, et je sais que vous avez ce sujet-là comme préoccupation. Et ce que je comprends, c'est qu'en 2001, lorsque la loi initiale a été adoptée, qu'il y ait eu des discussions, des ententes ou qu'il y ait eu consensus ou pas, il y a quand même eu des enjeux sur la table, à cette époque-là, sur le retrait préventif. Et il y a une décision qui a été prise, à ce moment-là, de dire qu'il y a quatre semaines du congé parental qui ni plus ni moins remplaçaient les quatre semaines près de l'accouchement du retrait préventif, et à tel point que ça a été mis dans le projet de loi. Ça a été mis dans le projet de loi. Là, on se retrouve en 2005... Puis, à ce moment-là, on a packagé ça ? excusez-moi l'expression ? pour annoncer la bonne nouvelle et puis là, quatre ans plus tard, on dit: Ah! bien, là, non, ce n'est plus ça, là.

Alors, moi, je veux savoir de vous: Est-ce que c'est vraiment à l'intérieur du dossier de l'assurance parentale qu'il faut régler cette question-là sur le retrait préventif? Et pourquoi on se retrouve quatre ans plus tard avec des demandes à cet égard-là alors que ça a quand même fait l'objet de pas mal de discussions en 2001, là?

M. Taillon (Gilles): Bon. Dès le départ, je vous dirais, en premier commentaire à votre remarque sur l'équité: Si le gouvernement ne participe pas au régime d'assurance parentale, à mon avis il y aura inéquité. Le gouvernement sera gagnant, alors que les autres ne le seront pas. Ça, c'est ma première remarque.

Quant au retrait préventif, dans mon esprit, dès le début des discussions en 2000, chaque fois qu'on a discuté la question avec l'ancien gouvernement, quand on s'est présenté en commission parlementaire, il était toujours question d'éviter une forme de double emploi puis d'avoir des semaines qui étaient réduites en termes de coût pour les employeurs, au niveau du retrait préventif. Ça, ça a toujours été clair.

Maintenant, qu'est-ce qui a fait que, depuis quatre ans, ça évolue? Moi, je comprends les gens qui ne paient pas le régime de retrait préventif de dire: C'est un beau bénéfice, puis il faudrait le garder, puis avoir l'autre. Nous, on dit ? c'était notre troisième remarque: Il faut faire attention. On met un régime très avantageux d'assurance parentale en place, et il faut éviter de rendre notre système économique non compétitif, donc d'avoir des coûts pour les employeurs qui sont énormes.

J'aimerais attirer votre attention sur le fait que le régime de retrait préventif à la Commission de la santé et sécurité, c'est un régime qui est entièrement payé par les employeurs et qui coûte 175 millions de dollars actuellement, en hausse de 10 % par année, alors que le régime de base en santé et sécurité augmente de 2 % par année. Donc, c'est un régime qui est très généreux; les employeurs du Québec ne sont pas gênés d'offrir ce bénéfice-là. Maintenant, si on a deux régimes, évitons de faire double emploi et créditons une partie du retrait préventif aux coûts dans le fond ou au soulagement des coûts du régime d'assurance parentale. C'est la logique et c'est un débat qui est là depuis le début puis qui a toujours été accepté à la fois par le gouvernement antérieur et, je comprends, par le gouvernement actuel puisqu'il l'a mis dans le projet de loi.

Mme Courchesne: J'aurai une dernière question, parce que le temps file. Vous avez fait une proposition, dans votre mémoire, sur la représentativité au Conseil de gestion et vous dites: Bien, qu'on représente en fonction des coûts que chaque groupe a à défrayer. C'est une position. Maintenant, vous savez qu'on a eu beaucoup de demandes ? toute la journée aujourd'hui, ça a été le cas ? pour ajouter une représentante de travailleurs, travailleuses non syndiqués. Et je crois comprendre que vous pourriez avoir des réticences à cet égard-là ou en tout cas je comprends que ça va à l'encontre un peu de ce que vous recommandez dans votre mémoire, ou pas. Je voudrais connaître votre avis là-dessus. Et votre proposition, est-ce qu'elle ne brise pas un peu un équilibre? Je comprends que, vous, vous basez votre équilibre sur les coûts, mais est-ce qu'encore là c'est véritablement la bonne façon de le faire, uniquement par rapport aux coûts, parce qu'il y a d'autres enjeux qui sont discutés autour de la table du Conseil de gestion, ou est-ce qu'on ne devrait pas avoir une parité entre les représentants?

M. Taillon (Gilles): Ce qu'on vous propose, nous, dans le fond ferait une place à un troisième représentant des travailleurs. On vous dit quatre employeurs, trois travailleurs et un autonome, plus le président qui est le représentant gouvernemental. Il y a une place donc pour un autre travailleur.

Mme Courchesne: ...sur votre quatre par contre.

M. Taillon (Gilles): Notre quatre qui inclut un quatrième patron, qui est un représentant gouvernemental. Actuellement, il y en a trois, patrons, mais il y en a quatre du gouvernement. Ça fait que, si vous me dites que le gouvernement est dans les employeurs, bien on est sept actuellement.

Mme Courchesne: Ah! oui, mais...

M. Taillon (Gilles): Bien oui, c'est ça.

Mme Courchesne: Si vous nous dites que le gouvernement...

M. Taillon (Gilles): Moi, je trouve que ma proposition est un peu plus équitable que la vôtre, mais ça, c'est une question de discussion.

Mme Courchesne: Bien, c'est parce que je ne vous ai pas mis la mienne sur la table, c'est pour ça. Moi, je pose les questions, je ne vous ai pas encore mis la mienne sur la table.

n(20 h 30)n

M. Taillon (Gilles): La vôtre est celle qui existe actuellement.

Mme Courchesne: Je posais simplement une question. Merci.

M. Taillon (Gilles): S'il y en a une meilleure... C'est beau.

Le Président (M. Copeman): M. Taillon, j'ai été inspiré, cet après-midi, par une présentation d'un groupe à aller revoir les travaux de 2000-2001. Alors, je suis allé revoir l'échange entre vous et moi, au mois de novembre 2000, concernant le projet de loi n° 140 qui établit le régime québécois d'assurance parentale. D'ailleurs, encore une fois avec un peu de chagrin, je constate, autour de la table que, comme membre de la commission, je suis le seul député qui était élu à ce moment-là. Aujourd'hui, on a également Mme la députée Terrebonne qui était députée à ce moment-là, qui a voté sur le projet de loi. On est les deux seuls qui occupaient des fonctions de député à ce moment-là.

Alors, je suis allé revoir notre échange, je l'ai relu, et il est vrai qu'en novembre 2000 vous avez, au nom du Conseil du patronat, exprimé des craintes concernant le financement du régime, la proportion de financement. Et vous avez dit, à ce moment-là, que... vous avez exprimé, au nom du Conseil du patronat, le désir de revoir le financement, et en faisant référence, entre autres, au 7/12-5/12, quote-part employeur-employés, et même la participation du régime.

Manifestement, lors de l'adoption en 2001, vous n'avez pas réussi à convaincre le Parlement du Québec de changer ces paramètres. Vous êtes cohérent avec cette position; cinq ans plus tard, vous dites toujours: Est-ce qu'on ne peut pas revoir le 7/12-5/12? Il est vrai que la loi, telle qu'adoptée, prévoyait que le Conseil de gestion fixait les quotes-parts, mais tous les scénarios étaient bâtis sur 7/12-5/12. Je pense que vous êtes d'accord avec moi. Il n'y a jamais eu de doute quand on a adopté la loi. Je ne vous dis pas que ce serait la décision définitive du Conseil de gestion, mais tous les scénarios de financement étaient 7/12-5/12. Là, vous plaidez toujours pour la possibilité de reformuler ce financement. Ce serait quoi dans votre proposition? Comment est-ce qu'on devrait refinancer le système?

M. Taillon (Gilles): Bon. Le refinancement du système finalement donnerait une participation des employeurs privés qui serait autour de 6,5 sur 12, une part un peu plus grande de l'employeur gouvernemental puis une part un peu moins grande, un peu moins que le 5/12 pour les travailleurs. C'est un peu ça que ça a comme effet, de mettre un taux employeur. Maintenant, la proportion 7/12-5/12, on la contestait, au Conseil du patronat, même au fédéral parce que c'est une proportion qui a peut-être sa logique dans un régime d'assurance chômage, assurance-emploi, qui en a peut-être moins dans un régime d'assurance parentale. Donc, la logique, on l'avait là aussi.

Ce qu'on dit actuellement... On ne fait un débat 7/12-5/12, on fait un débat... 180 millions de dollars de plus pour les entreprises, ça nous apparaît être une très mauvaise décision, puis le Québec se tire dans le pied. On dit: Peut-on l'aménager différemment? Le gouvernement, lui, fait des économies plus grandes que le secteur privé. Peut-il le réinjecter au bénéfice à la fois des employeurs et des travailleurs? C'est ça, notre proposition, O.K.?

Le Président (M. Copeman): En sachant fort bien que, quand vous parlez d'injection de la part du gouvernement, on parle des impôts des contribuables.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Copeman): Le gouvernement du Québec n'imprime pas son argent dans le sous-sol du parlement du Québec. Évidemment, on le prend des impôts et des tarifs, des...

M. Taillon (Gilles): Mais on ne dit pas d'augmenter les impôts, on dit: Ce que vous allez économiser, remettez-le dans ce régime-là plutôt que le remettre ailleurs. Ou à moins que vous nous disiez que allez baisser les impôts par ailleurs de 57 millions. Là, on va peut-être avoir un autre débat.

Le Président (M. Copeman): À un moment ultérieur. Deuxième point, si vous me permettez, la question de l'augmentation de la charge fiscale sur les entreprises. À plusieurs reprises, dans votre mémoire, vous me donnez l'impression que vous êtes un peu surpris par l'augmentation des coûts. Je vous cite: «On sait qu'il coûtera définitivement plus cher que le régime fédéral; on parle d'une augmentation de 298 millions de dollars, soit 40 % de plus que le coût de l'actuel régime fédéral.» Un peu plus loin, vous dites également... Vous reprochez essentiellement en disant que le gouvernement aurait dû expliquer un peu mieux à la population que les coûts de ce régime étaient pour augmenter d'une telle proportion. Vous dites: Le gouvernement aurait dû dire explicitement à la population qu'il coûterait au moins 40 % de plus que le régime fédéral.

Minimalement, il n'y a pas tout à fait la moitié de cette augmentation de 298 millions qui était tout à fait prévisible. Et il me semble également très prévisible, pour le Conseil du patronat... Je vous réfère à l'effet de l'augmentation du maximum de revenus assurables. La loi adoptée en 2001 prévoit, à l'article 5, prévoyait que le maximum de revenus assurables correspond à celui de la CSST. Alors, sur l'augmentation qu'on voit, de 298 millions, il y a 115 millions quant à moi qui étaient tout à fait prévisibles parce que le maximum de revenus assurables, calqué sur celui de la CSST, augmentait. D'ailleurs, si je comprends bien, vous êtes membre du conseil de la CSST. Alors, vous avez pu, il me semble... on aurait pu prédire assez relativement facilement l'augmentation de cet ordre-là, de 115 millions, à cause simplement et purement de l'augmentation dans le maximum de revenus assurables. On ne parle pas d'une augmentation de taux de cotisation, là, on parle des choses qui sont assez prévisibles, il me semble.

M. Taillon (Gilles): Il est évident qu'on savait que les bénéfices qui étaient accordés dans ce régime-là, à la fois au niveau du maximum assurable, puis au niveau de la durée, puis du délai de carence qui est prévu, on savait que ça coûterait plus cher. Il n'y a pas de doute là-dessus. Quant au quantum, bien il dépend à la fois d'une analyse des bénéfices; il y a une partie qu'on ne pouvait pas mesurer, nous, que le conseil a mesuré avec le temps, là, depuis quelque temps; et il y a aussi les résultats de la négociation avec le fédéral, on ne savait pas ce que ça donnait. Rappelez-vous, vous me rappelez 2001, on disait au gouvernement: Attention! Il y avait à l'époque un écart de 90 millions. On disait: Il faut s'assurer qu'on est capable, dans notre position, nous, au CPQ, de faire en sorte de réduire cet écart-là.

Donc, ce sont des éléments qui ne nous permettaient pas, avant d'arriver avec le projet précis, la négociation finie, de déterminer combien ça allait coûter. On aurait pu vous faire une recommandation de dire: Réduisons les bénéfices maintenant qu'on connaît les coûts. Ce n'est pas ce qu'on vous fait comme recommandation.

Le Président (M. Copeman): Je comprends, mais le 115 millions dont je vous parle de façon très précise...

M. Taillon (Gilles): Lui, il était prévisible.

Le Président (M. Copeman): Lui était prévisible, vous êtes d'accord avec moi?

M. Taillon (Gilles): Oui.

Le Président (M. Copeman): Bien, c'était prévisible parce que le maximum des revenus... oui, le maximum des revenus assurables...

Une voix: ...

Le Président (M. Copeman): Bien sûr. Alors, ça amène plus de revenus, ça amène plus de cotisations, c'est sûr. Alors, c'est ce point-là qui était prévisible selon la loi, calqué sur le maximum de revenus assurables du CSST. Merci.

M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, solidarité sociale et famille.

M. Bouchard (Vachon): Bonsoir, M. Taillon.

M. Taillon (Gilles): Bonsoir.

M. Bouchard (Vachon): Je vais aborder une des propositions que mes collègues n'ont pas abordée, à savoir la proposition d'une comptabilité séparée pour les travailleurs autonomes. J'aimerais vous entendre. Je ne pense que vous ayez commenté, hein? Est-ce que vous pourriez être plus précis là-dessus? Qu'est-ce que vous envisagez vraiment? Une période de mise à l'essai? Racontez-nous.

M. Taillon (Gilles): C'est un peu l'objectif visé. Dans le fond, côté des travailleurs, on sait un peu quelle est la performance attendue de ce régime-là. On peut prévoir dans le fond à cause... on a un vécu. Du côté des travailleurs autonomes, beaucoup plus difficile parce qu'il n'y a pas de précédent, et en plus ceux qui vont contribuer au paiement des primes, c'est les travailleurs autonomes eux-mêmes, comme travailleurs. Mais la part de l'employeur du travailleur autonome va être établie comment, et tout ça? Donc, le temps de voir aller la pratique et la façon de financer le régime, on se dit, il serait intéressant d'avoir un fonds séparé... peut-être pas un fonds séparé, mais une comptabilité séparée.

M. Bouchard (Vachon): C'est cette notion-là que je n'ai pas tout à fait pigée. Une comptabilité séparée ou un fonds séparé, c'est très différent, là. Ce dont vous parlez, c'est d'un suivi séparé...

M. Taillon (Gilles): Oui.

M. Bouchard (Vachon): ...mais avec les mêmes paramètres, les mêmes conditions et les mêmes taux.

n(20 h 40)n

M. Taillon (Gilles): Non, parce que ça ne peut pas être les mêmes taux puis les mêmes conditions, ce n'est pas les mêmes contributeurs. Il n'y a pas d'employeur chez le travailleur autonome.

M. Bouchard (Vachon): Pardon?

M. Taillon (Gilles): Il n'y a pas d'employeur chez le travailleur autonome.

M. Bouchard (Vachon): Non, non, je comprends...

M. Taillon (Gilles): Donc, il ne pourra pas avoir... Il faut donc avoir, là aussi, une comptabilité séparée qui inclut des taux séparés, un cheminement séparé. Actuellement, le Conseil de gestion prévoit un coût autour de 50 millions de dollars dans ce dossier-là. Est-ce que c'est vrai? On va voir. Il faut expérimenter. Regardons ce que ça va donner, puis, si ensuite on s'aperçoit qu'on a un historique sur deux, trois, quatre ans qui va bien, que les primes sont raisonnables et sont, je dirais, gérables par les gens, ça pourra être intégré. Mais, dans un premier temps, allons-y avec une comptabilité séparée. On pense que c'est une façon de mieux circonscrire cette partie-là de la loi.

M. Bouchard (Vachon): Mais j'aimerais vraiment être au clair là-dessus. Dans votre tête, une comptabilité séparée, est-ce que ça signifie un microfonds séparé?

M. Taillon (Gilles): Je vous dirais... Théoriquement, je serais un partisan d'un fonds, parce que, là, ce serait très, très étanche. Maintenant, allons-y, sans avoir, là, la mécanique d'un fonds, avec une comptabilité séparée dans un premier temps, on verra ce que ça donne par la suite.

M. Bouchard (Vachon): Très bien. Sur la question d'un taux qui serait différent pour des employeurs dont l'utilisation de l'assurance serait plus importante, donc, en termes d'assurance, le risque plus élevé, vous envisagez ça strictement d'un point de vue de l'assurabilité et du risque. Et il y a des gens qui sont venus nous dire, cet après-midi, suite notamment à l'enquête de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, que dans le fond ce que ça voulait dire, c'est qu'on taxait d'une certaine façon davantage les entreprises où il y avait plus de femmes. Et est-ce que vous ne trouvez pas qu'une approche comme celle-là est, d'une part, discriminatoire et, d'autre part, implique quelque part que les entreprises ont tout avantage à écarter la main-d'oeuvre féminine?

M. Taillon (Gilles): Je pense que l'objectif n'est pas cela. L'objectif est de dire: On...

M. Bouchard (Vachon): Non, mais le résultat, le résultat.

M. Taillon (Gilles): Nous, on dit, là: On prend en compte la situation du coût du régime, de son utilisation en fonction de deux types d'employeurs: les employeurs privés, employeur gouvernemental. On ne dit pas qu'il faut taxer davantage le gouvernement, on dit: Récupérons ce que le gouvernement paie déjà en plus...

M. Bouchard (Vachon): Là, j'ai bien compris.

M. Taillon (Gilles): C'est ça.

M. Bouchard (Vachon): Bien. Mais cependant, dans votre formulation, la façon dont vous formulez les choses, il y a des taux qui sont supérieurs là où les risques sont plus grands, autrement dit là où il y a une utilisation plus grande du fonds.

M. Taillon (Gilles): Là où il y a une utilisation plus grande, parce que ce n'est pas un risque, là, mais là où il y a une utilisation plus grande, effectivement.

M. Bouchard (Vachon): Bon, oui. Mais à la limite c'est là où il y a un risque plus grand. L'assurance fonctionne sur le risque, et le risque se calcule à l'utilisation.

M. Taillon (Gilles): Là où il y a une utilisation plus grande...

M. Bouchard (Vachon): Oui, bon.

M. Taillon (Gilles): ...constatée.

M. Bouchard (Vachon): Mais, résultat, résultat de tout cela, les entreprises où la main-d'oeuvre féminine est plus abondante vont être pénalisées, le secteur du vêtement par exemple.

M. Taillon (Gilles): Non, non. On y va strictement avec deux distinctions, là. On ne fait pas une distinction chez les employeurs privés. On parle du gouvernement, employeur gouvernemental, versus les employeurs privés, qui sont homogènes, les employeurs privés, M. Bouchard, là. On ne fait pas de distinction. Chez les employeurs privés, ça va être un taux qui tient compte puis qui va évoluer en fonction de l'expérience. On fait une distinction strictement au niveau gouvernemental.

M. Bouchard (Vachon): O.K. Donc, vous ne vous associez pas du tout avec cette hypothèse, cette proposition de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

M. Taillon (Gilles): J'avoue que je ne connais pas la position de la Fédération de l'entreprise indépendante, là. Je vous dis: Nous, la position qu'on a développée et qui faisait consensus même chez les représentants de la Fédération de l'entreprise indépendante, c'est celle que je vous explique.

M. Bouchard (Vachon): Merci. Très bien.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Laurier-Dorion.

Mme Lefebvre: Merci. Bonsoir. On a discuté plus tôt aujourd'hui de la situation des parents adoptants. J'aurais aimé vous entendre un peu sur cette question.

M. Taillon (Gilles): Ce qu'on vous dit, un de nos commentaires est: Attention à ne pas ajouter des bénéfices au régime actuel, compte tenu de ce qu'on constate comme régime: très avantageux mais coûteux. Donc, je réponds un peu à votre question. Maintenant, je ne connais pas la position des parents adoptants, mais je vous dis: Toute demande d'amélioration du régime, dans un régime qui est déjà extrêmement coûteux et qui est performant, là, qui va être le meilleur au Canada, il faut donc être prudent. On vous dit: Être prudent. Maintenant, je ne connais pas la proposition, je ne peux pas la commenter.

Mme Lefebvre: Mais je vais quand même la mentionner. Dans le fond, ce qu'ils demandent, c'est la même équité, donc bénéficier des mêmes paramètres que les autres parents. Donc, à cet égard-là, si vous mentionnez qu'on ne doit pas ajouter de nouvelles dispositions ou de nouveaux...

M. Taillon (Gilles): Il est évident que, nous, de notre point de vue, on ferme la porte à cette demande-là.

Mme Lefebvre: Donc, il y aurait deux niveaux de parents.

M. Taillon (Gilles): Il y en a actuellement.

Le Président (M. Copeman): Ça va?

M. Bouchard (Vachon): Ça ne va pas, mais...

Le Président (M. Copeman): O.K. La commission va? M. Taillon, merci beaucoup d'avoir participé à cette commission parlementaire, au nom du Conseil du patronat, et j'invite...

Une voix: ...

Le Président (M. Copeman): J'invite immédiatement le prochain groupe, qui est la Centrale... la Confédération, pardon, la Confédération des syndicats nationaux, à prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Pour un bref moment, Mme Joncas, je vous ai perdue en dessous, en dessous du pupitre. Alors, je suis content de voir que vous êtes là, et c'est avec plaisir que nous vous accueillons, Mme la présidente de la Confédération des syndicats nationaux, Mme Carbonneau, Mme Joncas. Bonsoir.

La seule chose qui change, dans ce type de commission parlementaire, c'est la durée des audiences. Ce soir... toute la journée, on a consacré 45 minutes, 15 minutes pour votre présentation; c'est suivi par un échange d'une durée maximale de 15 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. En vous souhaitant encore une fois la bienvenue, Mme Carbonneau, nous vous écoutons.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

Mme Carbonneau (Claudette): Alors, bien, merci. J'irai droit au but. D'abord, merci à la commission de nous entendre à l'occasion de cette consultation, et je vous dirais d'entrée de jeu que la CSN appuie le projet de loi qui met sur pied un régime d'assurance parentale qui somme toute demeure enviable, dans le contexte nord-américain. Je rappelle que le contexte démographique, social et économique dans lequel le Québec évoluera au cours des prochaines décennies appelle des mesures particulières de conciliation famille-travail, et ce programme en est un bon exemple. Le régime d'assurance parentale deviendra une des pierres angulaires d'une politique familiale permettant de répondre aux besoins des travailleuses et des travailleurs de demain désireux de fonder une famille. Le programme ne pourra atteindre ses objectifs qu'avec une implantation dès le 1er janvier 2006, et ce, avec les pleins bénéfices, tel que promis aux Québécoises et aux Québécois depuis plusieurs années.

Ce qui préoccupe la CSN dans le projet de loi, ce sont moins tant les mesures qu'on y retrouve mais bien davantage celles qui n'apparaissent pas à l'intérieur de ce projet de loi. Plus spécifiquement, je dirais, le silence en ce qui concerne le financement du régime nous inquiète. Le projet de loi modifiant la Loi sur l'assurance parentale ne spécifie aucunement le partage des coûts entre les différents cotisants. Il remet plutôt au Conseil de gestion la responsabilité de fixer les taux de cotisation, et, par le fait même, d'établir le partage des coûts du régime.

n(20 h 50)n

En effet, l'article 4 du projet de loi prévoit que le Conseil de gestion fixe, par règlement, les taux de cotisation des employés et des employeurs ainsi que des travailleurs autonomes. Au Québec, peu ou pas de lois sociales remettent la responsabilité aux conseils d'administration de fixer le partage des coûts entre les employés, les employeurs et le gouvernement. Nous croyons qu'il existe une différence majeure entre la responsabilité de fixer le partage des coûts d'un régime et celle d'assumer le suivi des coûts d'un tel régime. La première incombe, à notre point de vue, au gouvernement, la seconde doit être confiée au Conseil de gestion. La loi encadrant la Régie des rentes du Québec de même que la Loi sur l'assurance-emploi fixent le partage des coûts entre les parties. Les entités responsables de la gestion de ces régimes doivent réviser ces taux pour s'assurer qu'il y a suffisamment d'argent pour payer les prestations promises. Il n'y a pas de discrétion pour faire varier le partage des coûts. Et, si les partenaires qui siègent au conseil d'administration de la RRQ devaient revoir annuellement le partage des coûts entre les employés et les employeurs, nous croyons que le financement de ces régimes serait bien souvent dans l'impasse. Nous croyons qu'il est du devoir du gouvernement de fixer, dans la loi, le partage des coûts du régime, et par la suite le Conseil de gestion sera en mesure d'en faire le suivi et de recommander à la ministre toute hausse ou baisse des taux suivant l'expérience du régime.

Le financement du régime d'assurance parentale se fera en partie grâce au transfert des points de cotisation du régime d'assurance-emploi. Le régime québécois étant plus généreux, tant au niveau des salaires assurables que du point de vue des bénéfices, il est nécessaire de trouver une source additionnelle de financement. Présentement, au régime d'assurance-emploi, les employés financent 5/12 du coût du régime et les employeurs, 7/12. Nous croyons que ce partage des coûts entre les employés et les employeurs doit être maintenu.

Pour être en mesure de déterminer les modalités de financement du nouveau régime, il faut bien comprendre les éléments affectant les coûts du régime et nécessitant des augmentations de coûts. Il est possible de les regrouper en trois catégories: les coûts des prestations provenant du régime de base comparables aux prestations payées par l'actuel régime d'assurance-emploi, l'augmentation due à la majoration du salaire assurable et finalement la bonification des prestations.

La cotisation demandée par le nouveau régime pour financer les bénéfices de base comparables à ceux actuellement payés doit correspondre au rabais des cotisations qui sera appliqué au régime d'assurance-emploi pour les travailleurs, les travailleuses ainsi que pour les employeurs du Québec. De même, l'augmentation des coûts résultant de l'application d'un salaire maximum assurable plus élevé doit être partagée entre travailleurs et employeurs dans les mêmes proportions que le régime fédéral actuel.

Faisons ici l'hypothèse que les nouveaux bénéfices soient les mêmes que ceux actuellement garantis par le régime fédéral et que la seule modification provienne de la hausse du salaire assurable. Eh bien, si les participants devaient payer plus que les 5/12 des coûts du nouveau régime, on assisterait à une subvention de la part des bas salariés en faveur des hauts salariés, et ça, ça nous apparaît tout à fait inacceptable. En effet, une augmentation de la part financée par les participants se traduirait par une hausse du taux de cotisation, et, pour une travailleuse gagnant un salaire de moins de 30 000 $ par année, cette hausse du taux se traduirait par une cotisation plus élevée pour un bénéfice équivalant à celui actuellement payé, son salaire assurable demeurant inférieur au maximum actuel de 39 000 $. Les employés cotisant sur un salaire plus élevé verront leur protection augmentée, car les nouvelles prestations couvriront une plus grande part de leurs revenus.

Pour les employeurs, cette hausse de cotisation se traduira, dans plusieurs cas, par des économies dans leurs programmes complémentaires bonifiant les prestations de l'assurance parentale ? et ça, à la période de questions, je vous fournirai très clairement l'opinion sur les différences à établir ou surtout à ne pas établir entre les employeurs publics et privés. En effet, les hauts salariés se retrouvent souvent dans la grande entreprise, et c'est cette dernière qui offre le plus souvent des programmes complémentaires et qui fera donc plus d'économies à la suite de la mise en place du programme d'assurance parentale. Il est vrai que l'adéquation n'est pas parfaite entre ceux qui subiront la hausse de cotisation et ceux qui vont en bénéficier, et ce, tant pour les employés que pour les employeurs, mais c'est là tout le principe de l'assurance.

Finalement, l'augmentation réelle des coûts vient du fait que le régime québécois offrira des bénéfices plus généreux que ceux actuellement payés par le régime d'assurance-emploi. Et personne ne remet en cause la nécessité d'un tel programme, tous vont en bénéficier. Les changements démographiques que subira le Québec au cours des prochaines années auront probablement des impacts sur les finances publiques ainsi que sur les coûts de plusieurs programmes sociaux. Comme il est mentionné dans la brochure du gouvernement Réaliser le Québec de demain, un des deux grands défis que le gouvernement a entrepris de relever, c'est d'accroître la population active, et nous croyons que le gouvernement a un rôle à jouer dans ce domaine et qu'il doit financer une part importante des coûts résultant du nouveau programme d'assurance parentale. Cette part doit être significative et récurrente pour permettre au programme d'avoir un financement adéquat au cours des prochaines années.

Alors, la CSN demande donc que le gouvernement verse annuellement à la caisse d'assurance-emploi un montant significatif pour financer ce programme, et le solde des coûts devrait être réparti entre les employés et les employeurs sur la même base de financement que le régime d'assurance-emploi, soit 5/12 pour les uns, 7/12 pour les autres.

Pour ce qui est des travailleurs autonomes, bien le régime va permettre à ces travailleurs de cotiser et d'avoir enfin accès à un régime d'assurance parentale. Cette ouverture en faveur des travailleurs autonomes répond à des besoins longtemps exprimés par cette catégorie de travailleurs. Au Québec, très peu de lois donnent aux travailleurs à contrat, aux pigistes, aux autres travailleurs atypiques des bénéfices comparables à ceux offerts aux salariés traditionnels, et nous croyons qu'il est important que ce programme atteigne ces objectifs et puisse répondre aux besoins de ces travailleurs. Cette première expérience doit donc être faite correctement et servir de modèle aux autres programmes sociaux. Il faut donc se donner les moyens pour suivre l'expérience de ce groupe de travailleurs, pour être en mesure d'intervenir rapidement et d'assurer le succès de cette première expérience. En ce sens, nous croyons aussi qu'une comptabilité distincte doit être établie pour cette catégorie de travailleuses et de travailleurs, et de plus les risques associés à la couverture des travailleurs autonomes ne peuvent être assumés par les autres travailleurs.

La CSN demande donc que, pour les premières années du régime, le gouvernement assume les risques de déficit associé à cette catégorie de travailleuses et de travailleurs, et les taux de cotisation des travailleurs autonomes doivent être en lien avec le taux de cotisation des travailleurs salariés et celui des employeurs. Cependant, contrairement à la demande de fixer, dans le temps, le partage des coûts entre employeurs et travailleurs, nous croyons qu'il pourrait être nécessaire de revoir, après quelques années d'expérience, les cotisations versées par les travailleurs autonomes.

Un fonds d'assurance, là, parentale comme patrimoine fiduciaire d'utilité sociale, bien on salue cette initiative de la ministre et nous croyons qu'une telle appellation devrait empêcher toute tentation gouvernementale de détourner ces fonds au profit d'autres fins. Et là nous citons, à l'intérieur de notre mémoire, un certain nombre d'articles du projet de loi qui témoignent de cette réalité-là. Alors, la lecture de ces articles nous amène à penser que le Conseil de gestion doit tout mettre en oeuvre pour bien gérer les fonds de l'assurance parentale et s'assurer d'un fonctionnement efficace du programme.

Or, la structure d'administration, de fonctionnement et de gouvernance de ce nouvel organisme n'est pas comparable à ce qui existe actuellement, que ce soit à la Régie des rentes ou encore à la Commission de santé et de sécurité du travail. On ne met pas en place une structure complète d'administration. En effet, l'article 43 du projet de loi précise ce qui suit: «L'administration du régime d'assurance parentale est confiée au ministre.» Nous continuons de penser qu'il aurait été préférable que la Régie des rentes administre ce régime, car ce que nous trouvons plus difficile à concilier, ce sont les responsabilités fiduciaires qui sont confiées au Conseil de gestion et les pouvoirs absolus donnés au ministre en regard de l'administration du régime.

Alors, nous interprétons que toutes les décisions d'administration, que ce soit concernant les coûts, les façons de faire ou les décisions politiques, relèveront du ministre et non du Conseil de gestion. L'on n'a qu'à penser à l'annonce faite, le 20 mai dernier, par la ministre en ce qui concerne l'implantation d'un centre de service à la clientèle du régime dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Or, cette décision est une décision politique et n'a pas donné lieu à des échanges au sein du Conseil de gestion.

Pour ce qui est d'une représentante additionnelle au Conseil de gestion, on appuie les demandes qui ont été formulées, notamment par le regroupement pour l'assurance parentale, dont nous faisons partie. En effet, je pense qu'il est important d'ouvrir un poste de plus pour permettre une représentation des travailleuses non-syndiquées et de le faire après une consultation des groupes autonomes de femmes réellement représentatifs.

n(21 heures)n

En conclusion, on a beaucoup placé nos réflexions de ce soir dans le cadre d'une consultation de toute dernière minute. Et pour nous ce qui est majeur, ce qui est important, c'est vraiment que les décisions qui doivent être arrêtées le soient rapidement, que le programme puisse rentrer en vigueur vraiment le 1er janvier prochain et qu'on cesse d'assister à ce jeu un petit peu déplorable où certaines parties interpellées par la mise en place de ce régime tentent encore de se défiler de leurs responsabilités. Je rappelle que, s'il y a un régime d'assurance parentale qui a été voulu unanimement par l'Assemblée nationale du Québec, c'était pour le bénéfice des parents, c'était pour le bénéfice des enfants et certainement pas pour permettre à aucune des parties de se délester de leur niveau de responsabilité. Alors, je m'arrête là.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Carbonneau. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Carbonneau, Mme Joncas, bienvenue. À vous deux aussi, je dis merci d'être présentes avec nous à une heure aussi tardive. C'est très apprécié.

Et, Mme Carbonneau, malgré votre débit ultrarapide de lecture, je pense que, votre position, elle est claire et limpide à l'égard de bien des sujets. Et, si vous me permettez, je voudrais effectivement revenir sur le fait que vous ajoutez, en tout cas, pour moi, un élément peut-être, je ne dirai pas, nouveau, mais qu'on a moins discuté, qui est celui où vous souhaitez que l'on fixe, dans la loi, immédiatement, le partage des coûts du régime.

En même temps, vous saluez l'initiative de créer cette fiducie et de consacrer, permettez-moi l'expression, cette caisse autonome. Et donc, et vous le savez, cette caisse autonome, qui, elle, va devoir faire en sorte... cette caisse autonome, bien il faut qu'elle soit gérée par, à mon humble avis ? je veux vous entendre là-dessus ? par les partenaires qui cotisent, par les cotisants, et c'est pour ça que le législateur a prévu le Conseil de gestion.

Donc, est-ce qu'il n'y a pas là une contradiction ou comment... C'est un peu difficile pour moi de dire d'une part à des partenaires: Bien, écoutez, vous avez une caisse autonome. On vous demande de prendre certaines responsabilités parce que c'est l'argent de vos membres, donc vous avez droit au chapitre dans les principales décisions, mais, pour ce qui est de déterminer les coûts, ah bien! ça, c'est le gouvernement qui doit le faire.

Cela dit, je vous rappelle que le Conseil de gestion, c'est des pouvoirs de recommandations, puis qu'actuellement c'est par décret que le gouvernement va aussi les établir. Mais, vous, vous voulez aller plus loin parce que vous voulez fixer ça dans la loi. Alors, expliquez-moi, là...

Mme Carbonneau (Claudette): Madame, ce n'est pas sans avoir vécu un certain bout d'expérience avec le Conseil de gestion qu'on arrive avec force avec cette recommandation-là. Très honnêtement, c'est d'abord l'Assemblée nationale qui a voté à l'unanimité, hein, à deux reprises, sur ce projet de loi là, et elle l'a fait au nom du bien commun, au nom de l'intérêt général. Elle l'a fait pour les parents du Québec, elle l'a fait pour un certain nombre d'enjeux. Bon.

Qu'on dise: Il s'agit d'une caisse complètement autonome, qu'on ne vive pas les psychodrames qu'on vit avec la caisse d'assurance-emploi au fédéral, je salue cela. Cependant, je pense qu'un gouvernement, comme une Assemblée nationale, reste un régulateur irremplaçable dans une société, et je regrette, mais, à laisser aller les choses telles que je les vois ou je peux les observer au sein du Comité de gestion, je me demande comment ça va se trancher. Écoutez, là, ça va-tu être: Aujourd'hui, c'est ma tournée, servez-vous; demain, ce sera la vôtre? Ça n'a pas de bon sens.

Il y a des enjeux de bien commun, et pour moi, c'est l'entrée en vigueur du programme pour le 1er janvier prochain. Ça fait 10 ans que les Québécoises attendent ça. Alors, il faut quelque part que ces choses-là soient tranchées. Et, de ce côté-là, je vous dirais que ce n'est pas différent d'autres législations où il y a des caisses tout à fait autonomes, tout à fait étanches. La Régie des rentes par exemple, c'est le Parlement, c'est l'Assemblée nationale qui a toujours établi le partage des taux de cotisation. Alors, on n'est pas, on n'est pas en terrain neuf, là.

Mme Courchesne: Comme le temps est relativement court, je veux revenir sur presque le sujet du jour qui est celui du retrait préventif. Je vous ai lu, au tout début, là, au moment... ou quelques jours après la signature de l'entente. Vous avez dit ? et je partage ce point de vue, je vous rassure tout de suite, Mme Carbonneau, le régime sera bel et bien en vigueur le 1er janvier 2006 ? mais vous avez dit: Ce n'est pas le moment de requestionner les paramètres du régime, c'est le moment, comme vous dites si bien, de mettre en oeuvre ce qui est attendu depuis si longtemps. J'aimerais vous entendre, autour de ce débat-là, j'aimerais connaître véritablement votre position autour du débat qu'on a senti aujourd'hui sur le retrait préventif.

Mme Carbonneau (Claudette): Bien, alors, écoutez, on va se rappeler que les dispositions actuelles du projet de loi concernant le retrait préventif, ce n'est pas une demande des groupes de femmes, ce n'est pas une demande syndicale. C'est une demande qui avait entraîné des commentaires plutôt négatifs de notre part au moment de l'adoption du projet de loi. Bon.

Et il y a aussi de prévu un mécanisme de révision des dispositions de la loi. Moi, je vous dis: Je considère qu'il y a eu là une erreur importante, de la part de l'Assemblée nationale, une confusion de genres. Le retrait préventif est là pour des raisons de prévention, ce n'est pas une modalité pour ajouter à un congé. Alors, on ne prend que l'aspect congé, alors que toute la Loi de la santé et sécurité, au contraire, on doit travailler à assainir le milieu, garder les gens au travail, et ce n'est qu'en cas d'impossibilité ou de non-volonté de le faire qu'on devra consentir à un congé.

Alors, il y a là une erreur importante. Et, de ce côté-là, la CSN partage la critique qui vous a été présentée, notamment par le RAP. Vous êtes à même d'observer que, ce soir, comme CSN, comme confédération, nous ne revenons pas avec une revendication précise vous disant: Il faut, avant de tout mettre en place et quitte à paralyser le processus, régler cette situation-là. Or, en ce sens-là, la CSN se sent toujours à l'aise de dire: Oui, cet élément-là, c'est une erreur. Sur le fond des choses, nous partageons exactement la même position que les autres groupes, mais en même temps, s'il y a un ordre de priorité à établir, c'est vraiment de s'assurer du démarrage du programme après 10 ans d'attente.

Et, à voir, juste écouter les audiences qui m'ont précédée, il y a toutes sortes de remises en question qui peuvent être faites. Et, de ce côté-là, bien, moi, je suis prête à ce qu'on appelle tout le monde à la plus grande discipline pour les intérêts supérieurs des parents québécois.

Mme Courchesne: Est-ce que, Mme Carbonneau, étant donné... Parce que, moi, je dis que, ce régime, il a une histoire, et, ses lois, là, celle de 2001 puis celle d'aujourd'hui, elles ont une histoire aussi. Est-ce que vous auriez cette même position à l'égard des parents adoptants?

Mme Carbonneau (Claudette): À l'égard des... Oui.

Mme Courchesne: Aujourd'hui, là. Parce que, moi, j'ai dit que j'avais une sensibilité, à la rigueur. Mais, maintenant, est-ce que c'est maintenant ou est-ce que c'est un peu plus tard? Parce que je suis comme vous. Moi, ce que je veux, c'est un régime le 1er janvier 2006.

Donc, est-ce que...

Mme Carbonneau (Claudette): Oui.

Mme Courchesne: Puis la question que je pose, c'est: Pourquoi on n'a pas tenu compte des parents adoptants en 2001? Je veux dire, c'était une réalité en 2001 aussi. Donc, ma question, c'est: Quelle serait votre position à l'égard des parents adoptants, ce soir, pour une mise en vigueur du régime le 1er janvier 2006?

Mme Carbonneau (Claudette): Écoutez, honnêtement, si cette consultation, au moment où elle se fait, à quelques mois du démarrage, devait ouvrir sur une série d'amendements, il faudrait faire un exercice de réflexion. Il faudrait faire un exercice de priorisation aussi des éléments.

Je dois dire qu'à l'égard de certains volets de la demande des parents adoptants... Remarquez qu'il y a des choses, là, qui sont prévues au projet de loi, là. L'affaire de l'adoption de l'enfant majeur, là, moi, la seule raison raisonnable que j'en trouve, c'est une concordance avec le régime fédéral.

Mme Courchesne: Oui. Oui. C'est ça.

Mme Carbonneau (Claudette): Vous dire que c'est la priorité sociale du siècle...

Mme Courchesne: C'est ça. C'est ça que c'est.

Mme Carbonneau (Claudette): ...je suis un peu difficile à convaincre à cet égard-là, hein? Et, si on me demandait d'établir un ordre de priorité, je peux vous dire qu'il ressemblerait à bien d'autres choses que ça.

La demande des parents adoptants, honnêtement, là, je voudrais, comme CSN, qu'on l'étudie, qu'on l'étudie davantage. J'imagine que ça doit être la même chose pour les différents groupes. Il y a toujours eu, dans la logique autour des congés de maternité et des congés parentaux, un temps réservé, si on veut, à retrouver ses forces physiquement pour la femme qui accouche, bon. Là, on nous propose une autre logique, mais je considère qu'il est un peu minuit moins cinq pour faire ce genre de débat là maintenant.

Mme Courchesne: Vous avez aussi, comme beaucoup d'intervenants aujourd'hui, dit qu'il serait souhaitable d'avoir une participation du gouvernement. Dans un certain sens, vous avez peut-être moins défini le type de contribution. Ce que je veux dire par là, c'est... j'aimerais vous entendre.

n(21 h 10)n

Plusieurs ont parlé des économies, plusieurs... Bon, le président du Conseil du patronat a parlé d'un taux préférentiel. J'aimerais vous entendre, parce que... Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, vous, un taux différencié, pas préférentiel mais plutôt différencié? Comment situez-vous... Parce qu'à minuit moins cinq il faut chiffrer, il faut chiffrer la part de chacun. Donc, est-ce que vous pourriez nous dire comment vous voyez cette implication du gouvernement?

Mme Carbonneau (Claudette): Essentiellement, je pense qu'il y a une responsabilité importante pour le gouvernement de souscrire de façon substantielle à cette caisse-là et de le faire, pas au nom d'économies réalisées comme étant employeur, mais de le faire comme un gouvernement responsable par rapport aux besoins de l'immense majorité des citoyennes et des citoyens du Québec. Or, ça, c'est la première chose.

Donc, ce qu'on imagine de notre côté, c'est davantage un montant, je dirais, substantiel, mais un montant fixe, prédéterminé, qui est fixé à la caisse, qui est versé à la caisse sous forme forfaitaire, si on veut, et en quelque sorte après quoi le partage prévu entre les employeurs et les employés, tel qu'on le connaît dans le régime fédéral, continue d'être celui qui a cours.

Moi, je vais vous dire, sur la perspective de deux taux de cotisation, un pour les employeurs privés et un pour le gouvernement du Québec, j'y vois deux difficultés majeures, la première étant celle qui a été soulevée tantôt, à la période de questions. Il y a là vraiment... on entre dans des taux différenciés en fonction du taux d'utilisation, et là on pénalise clairement les employeurs qui embauchent de façon intensive de la main-d'oeuvre féminine, ce qui, d'un point de vue de discrimination, est totalement intolérable.

Deuxième réalité. Est-ce qu'on peut se dire que... Je trouve qu'il y a du monde qui ont beaucoup d'imagination, surtout beaucoup de sans-gêne avec la rémunération des autres. Il s'agit en quelque sorte de la rémunération des travailleuses et des travailleurs du secteur privé. C'est un bénéfice qui a toujours été compté en négociation, hein, qui a permis parfois qu'ils se retrouvent avec des taux de salaire inférieurs, et là, pour une catégorie de monde, pour 15 % de la main-d'oeuvre, là il faudrait qu'on joue dans les salaires par-dessus la tête des parties négociantes, autant gouvernement employeur, autant syndicat les représentant, puis là que ça devienne la contribution du gouvernement? C'est inadmissible, de placer les choses de cette façon-là.

Troisième considération, et là je ne vise pas que le gouvernement du Québec: baser les choses sur des économies, hein, puis le faire de... Qu'il y ait des économies, c'est réel, c'est vrai pour le gouvernement du Québec, on pourra s'en reparler aux tables de négociation, au lieu directement approprié; c'est vrai pour aussi un certain nombre d'employeurs du secteur privé. Mais en même temps ça signifie peut-être que ces employeurs-là ont, depuis un certain nombre d'années, fait un peu plus que les régimes publics.

Or, est-ce que l'image qu'on veut laisser, au Québec, c'est: vous faites des économies parce que vous avez donné plus, peut-être y avez-vous été poussés dans le cadre de négociations, bien aujourd'hui vous devez contribuer plus parce que vous avez tenté de corriger ou d'amoindrir le problème depuis cinq ans, depuis 10 ans, depuis 20 ans. Je trouve que c'est une logique qui est très questionnable.

Mme Courchesne: Merci.

Mme Carbonneau (Claudette): Vous demandiez, Mme la ministre, aussi de vous donner une indication un peu chiffrée de ce que...

Mme Courchesne: Ah oui! Bien, pas chiffrée, je crois que vous m'avez répondu. Je voulais avoir...

Mme Carbonneau (Claudette): Bien, je vais vous donner, je vais vous donner quand même un ordre de grandeur.

Mme Courchesne: ...le principe. Oui, je voulais avoir le fond du principe, là.

Mme Carbonneau (Claudette): Je vais vous donner un ordre de grandeur. Écoutez, il y a grosso modo 300 millions, hein, de bonification qui sont prévus au régime. Or, moi, je pense qu'une contribution raisonnable du gouvernement du Québec ? pour des enjeux sociétaux, hein, je le répète bien ? devrait au fond permettre de recevoir le tiers de cette somme-là puis ensuite la répartition 5/12, 7/12 qu'on connaît entre les employeurs et les employés, là.

Le Président (M. Copeman): Merci. M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, solidarité sociale et famille.

M. Bouchard (Vachon): Alors, bonsoir. Je vous souhaite la bienvenue, au nom des membres de l'opposition officielle: le député de Gouin, la députée de Terrebonne, la députée de Laurier-Dorion.

J'ai envie de continuer la conversation avec vous concernant... Enfin, je vais aborder deux sujets. Le premier, c'est sur les parents adoptants. Je n'ai pas encore saisi tout à fait où vous vous situez. Vous dites: On passe d'une logique du repos, par rapport à l'effort de la grossesse, à une logique différente. Je me demande si c'est ça qui quelque part pose les interrogations et si ça introduit des doutes quant à l'à-propos et la pertinence des demandes ou si vous avez aussi des interrogations sur l'impact financier ou budgétaire?

Mme Carbonneau (Claudette): Non. Bien, écoutez, moi, je pense que, dans un premier temps, la journée où on se retrouvera en commission parlementaire pour réouvrir le régime d'assurance parentale, il faudra se poser la question: Où sont les besoins les plus urgents, quelles sont les demandes prioritaires? Et, honnêtement, là, à la CSN, puis, j'imagine, dans beaucoup de groupes, on n'a pas fait cet effort-là en fonction de cette commission parlementaire ci.

Alors, je soulevais un certain nombre de questions, je suis incapable, à ce moment-ci, d'y apporter une réponse ferme en disant: La vieille logique qui a prévalu à distinguer un congé de maternité avec un effet physique sur les mères, une période de récupération, ça doit être la logique qui doit prévaloir pour les 10, les 20, les 50 prochaines années. Vraiment, c'est une question qu'il faudrait pouvoir se poser, et, une fois qu'on aura répondu à cette question-là, quelles priorités donne-t-on à cette revendication-là, si on doit la retenir par rapport à d'autres revendications.

Alors, je considère surtout ? et c'est l'essentiel de ma réponse ? que je ne nous sens pas conviés à ce genre de commission parlementaire là, et c'est toujours intéressant bien sûr de dire: Ah! enfin, on va réouvrir, on va pouvoir repenser l'ensemble des bénéfices. Mais je maintiens encore qu'il y a un temps dans la vie pour faire ça. Et, à voir le débat polarisé... Pour être très franche, là, à voir le débat polarisé qu'on connaît, les organisations syndicales avec les associations d'employeurs, je pense qu'il y a une certaine sagesse populaire qui devrait nous amener à garder le fixe sur ce que je crois encore être l'intérêt général de la population du Québec, c'est-à-dire une mise en place au 1er janvier prochain, plutôt que de se relancer, à ce moment-ci, dans tout un psychodrame où les uns sont pour, les uns sont contre tel ou tel bénéfice.

M. Bouchard (Vachon): Je vais vous poser la question très candidement, là: En quoi l'ouverture de la discussion sur le financement tripartite ou bipartite est-il différent, en termes de considérations, à minuit moins cinq, que celui du congé parental?

Mme Carbonneau (Claudette): Sans entente, c'est très simple. Sans entente sur le financement, on aura beau entendre toutes les déclarations de la ministre, du gouvernement, il n'y a pas de démarrage du programme. Ce n'est pas compliqué, c'est la condition sine qua non pour qu'il y ait un programme de congé parental, au Québec, le 1er janvier prochain.

Alors, on peut bien ne pas en discuter, on peut bien faire semblant qu'on va tenter d'arbitrer ça dans un conseil de gestion dont d'ailleurs une des recommandations de notre mémoire, c'est aussi qu'on révise la composition, hein? Bon, il y a peut-être des questions d'équilibre là-dedans, mais comment cette question-là va être tranchée? Je le disais presque en dérision, tantôt, mais vraiment le temps file et ça devient extrêmement sérieux.

Il faut, pour justement prélever les cotisations adéquates, il faut un certain nombre de délais. L'été s'en vient, c'est septembre normalement qui est prévu pour ce genre de délai là, et c'est la clé. Il n'y a pas d'application possible du régime d'assurance parentale s'il n'y a pas de décision de prise sur la façon dont les coûts sont répartis.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, en termes de séquence, de séquence logique dans le dénouement de ce problème, quelle est la première étape qu'il faut franchir, d'après vous? Parce que vous parlez d'une polarisation, hein? Vous parlez d'une polarisation des intérêts entre les syndicats et les patrons, au sein du conseil. Comment dénouer cette polarisation? Quel est l'élément qui changerait la dynamique autour des discussions?

n(21 h 20)n

Mme Carbonneau (Claudette): Bien, écoutez, on tente de se parler, il y a eu toutes sortes de tentatives d'échange. On poursuivra certainement ces discussions-là, mais je pense qu'avant l'ajournement l'Assemblée nationale doit aussi envisager, comme Assemblée nationale, comme régulateur sur des éléments importants du comportement en société, de trancher cette question-là. Autrement, elle ferait peu de cas des intérêts d'une majorité de parents qui ne peuvent pas faire les frais d'une querelle, je dirais, privée.

M. Bouchard (Vachon): Mais, si je comprends...

Mme Carbonneau (Claudette): Autrement, là, tu sais, on ne va quand même pas tirer ça à 0,10 $ qui...

M. Bouchard (Vachon): Non. Mais, si je comprends bien le rôle du Conseil de gestion, le Conseil de gestion émet ses avis au gouvernement?

Mme Carbonneau (Claudette): Oui.

M. Bouchard (Vachon): Et, le Conseil de gestion, s'il arrivait à un cul-de-sac sur la question du financement, émettrait un avis d'échec, quant à un avis à donner dans le fond, et remettrait par conséquent la décision au gouvernement. Donc, quand vous dites que ça revient à l'Assemblée nationale, moi, je peux vous retourner la balle et dire: Bien, déposez votre rapport, en constatant l'échec, et le gouvernement décidera. Non?

Mme Carbonneau (Claudette): Ça, je vais vous dire, là, sur la mécanique, oui, ça pourrait être une façon de le régler. Mais il faudrait encore être en mesure de s'expliquer pourquoi, dans d'autres lois, sans que personne s'en scandalise, les gouvernements et l'Assemblée nationale a su trancher sur la façon de partager les coûts entre différents groupes dans la société.

Alors, Nathalie, peut-être, en...

Mme Joncas (Nathalie): Ce que je pourrais vous dire, c'est que, le Conseil de gestion, il est à même de déterminer les sommes qu'il faut qui rentrent dans ce fonds-là, est capable de faire le suivi qu'est-ce que ça coûte. Mais, de demander aux intervenants, les trois intervenants qui sont là, de trancher le partage, est-ce que, moi, je paie 5/12, toi, tu en paies 6/12, tu en paies 1/12, c'est la première chose que vous demandez; la première chose qu'il faut trancher, c'est le partage. Si on savait tout de suite le partage, le Conseil de gestion pourrait faire le reste de son ouvrage, mais, de demander aux intervenants c'est à qui, la tournée, de payer, c'est à qui le tour de payer, on va tourner en rond longtemps, là. Si ce n'est pas moi, c'est toi, là.

Donc, c'est fixer le partage, fixer la part du gouvernement, et là le Conseil de gestion va pouvoir faire... Parce que tous les chiffres sont sur la table, toutes... la majorité des études ont été faites. On a tous les chiffres, mais qui va les payer? C'est ça, la question.

Donc, fixez le coût, fixez le partage, et le Conseil de gestion va faire le suivi de ces taux-là, va faire un suivi, va être capable de s'assurer que tout ne dérape pas. Mais c'est vraiment... la question clé, c'est le partage.

Mme Carbonneau (Claudette): Un dernier argument. Un dernier argument que je vous invite à peser, c'est que, là, on se retrouve avec un programme qui est celui de l'assurance parentale, qui est au fond un tout petit programme, et on a cette fâcheuse habitude d'avoir des programmes terriblement éclatés. Comment juger de l'équité entre les différentes parties, dans un contexte de dispersion de cet ordre-là? Et à mon sens, c'est une raison de plus pour une intervention à caractère politique.

J'entendais, tantôt, le président du Conseil du patronat dire: Pourquoi est-ce que ce serait pas, hein, les plus grands utilisateurs, etc.? Aurait-il, soutiendrait-il la même logique s'il s'agissait d'assurance-emploi, s'il s'agissait du volet chômage où il disait: Là aussi, on veut... Hein? Le comportement du secteur public, il pourrait dire: Bien, nous, on est beaucoup moins à l'origine de mises à pied, etc.

Ça n'a pas de bon sens de gérer à la petite semaine, de gérer petit paquet par petit paquet, et je regrette, mais le Conseil de gestion... et le Conseil de gestion de l'assurance parentale... Seuls les acteurs politiques, à mon sens, dans l'état actuel de la loi, sont capables de trancher avec une vision plus ample et plus large que nécessite le contexte.

M. Bouchard (Vachon): Dans le fond, votre position, là, si j'essaie de la résumer, c'est celle-ci, c'est qu'il y a déjà des paramètres connus et acceptés. Il manque un paramètre, c'est celui de la division des charges, d'une certaine façon. Et vous dites: Que le gouvernement nous dise quelle sera cette division et on l'administrera. C'est ça, hein?

Mme Carbonneau (Claudette): Oui, mais plus que ça. Nous plaidons aussi en faveur d'une contribution gouvernementale, là, dans les formes où je l'ai expliquée tantôt, là.

M. Bouchard (Vachon): Compris. Mais ce qui s'est passé...

Mme Carbonneau (Claudette): Mais, par delà ça, oui, nous demandons à l'Assemblée nationale de trancher comment doit être répartie, entre les travailleurs et les employeurs, cette question-là.

M. Bouchard (Vachon): Et il y a un autre groupe, cet après-midi, dont je ne me rappelle pas l'identité exacte, là, mais qui nous disait que cette question de la répartition pourrait être résolue plus facilement si on connaissait justement la portion ou la contribution gouvernementale à titre de partenaire de la caisse. Est-ce que...

Mme Carbonneau (Claudette): Ça aussi, j'espère que ça va être connu et que ça va être connu très rapidement, là. C'est quelque chose d'extrêmement important. Et, si j'évoque souvent le fait qu'il est minuit moins cinq, il est minuit moins cinq pour l'ensemble des parties, le gouvernement y compris, là. Ça, pour moi, c'est on ne peut plus clair.

M. Bouchard (Vachon): Une dernière question, M. le Président? En ce qui concerne les travailleurs autonomes, dans votre mémoire vous semblez vous aligner à peu près de la même façon que le Conseil du patronat, moins techniquement, là, mais vous semblez dire: Bon, voilà une population avec laquelle on n'a pas beaucoup d'expérience, il faudrait voir...

Mme Carbonneau (Claudette): Oui. Sur les travailleurs autonomes, là, ce qu'on veut le plus comme CSN, c'est que ça réussisse. On trouve qu'il y a là quelque chose de novateur, il y a là quelque chose de porteur. Ce n'est pas présent dans nos autres lois sociales. Alors, on n'a pas le droit de prendre des risques inutiles.

On ne vous parle pas d'une caisse séparée, on vous parle de regarder comment ça se profile. Je vais vous dire, plus cette question-là est creusée, plus on a encore énormément de sympathie pour plusieurs couches de travailleurs, travailleuses autonomes, là; les pigistes, il y a du monde qui vivent des situations extrêmement difficiles là-dedans.

Il y a quand même des cas plus complexes, O.K.? Des cas de personnes qui tantôt sont entrepreneurs et tantôt sont travailleurs autonomes et qui peuvent se placer en position de faire déraper les coûts d'une caisse, O.K., de façon complètement indue et bien loin des bonnes intentions qui ont guidé cette modification tout à fait progressiste à l'intérieur de la loi. Et voilà pourquoi nous demandons qu'il y ait une observation très précise qui soit faite, de façon à en garantir la pérennité, qu'on voit les comportements, qu'on apprivoise cette nouvelle réalité là, et surtout qu'on ait un comportement équitable.

Et ultimement nous disons que, pour le début, pour la mise en place du régime en toute équité, on ne peut pas demander non plus aux travailleurs plus standard d'assumer les coûts qui pourraient découler d'une utilisation dont personne ne peut mesurer exactement le profil à l'heure où on se parle. Et on pense que, cette expérimentation-là, elle vaut la peine dans la société québécoise; elle mérite d'être suivie avec des données ventilées, différenciées. Alors, c'est ça qui nous anime derrière cette recommandation-là.

M. Bouchard (Vachon): Oui. Oui. Alors, ça m'éclaire, parce que ce que vous dites dans le fond, c'est qu'il n'est pas question de refuser de partager le risque, mais il est question de faire un suivi extrêmement serré des comportements et des résultats d'application des paramètres.

Mme Carbonneau (Claudette): Oui.

M. Bouchard (Vachon): Merci.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Carbonneau, Mme Joncas, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire au nom de la Confédération des syndicats nationaux.

Et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 28)

 

(Reprise à 21 h 30)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

Remarques finales

Alors, nous sommes rendus au stade des remarques finales. Je vous rappelle que l'ordre de la Chambre indiquait qu'il y a 15 minutes à la disposition de l'opposition, 15 minutes à la disposition du groupe parlementaire formant le gouvernement. Alors, M. le député de Vachon et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi, solidarité sociale et famille, pour vos remarques finales.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Oui. Je serai bref, M. le Président. J'ai d'abord l'intention de remercier l'ensemble des participants à cette journée, je pense que ça aura été une journée extrêmement intéressante pour tout le monde. Le rythme des présentations... Simplement du point de vue du format, c'est intéressant d'utiliser un format 45 minutes comme celui-là. On a comme une allure d'efficacité un peu plus grande, avec un esprit de concision. C'est assez intéressant.

Du point de vue du contenu, je me réjouis beaucoup que l'on ait proposé d'entendre ces groupes de divers horizons. Et le premier constat qu'on fait, c'est que le Conseil de gestion est coincé, et c'est un coinçage assez majeur, autour de la question de la répartition. Ça a été très clair, je pense, on a vu se construire cette réalité-là, devant nous durant la journée, et je pense qu'il y a une responsabilité des parlementaires de se pencher là-dessus, parce que, si nous visons toutes et tous la date du 1er janvier 2006, ça m'est apparu et à mes collègues aussi comme un défi très important, pour les parlementaires, à relever. Donc, je pense qu'on a un premier devoir, là, de se pencher là-dessus, et j'espère que les parlementaires, de ce côté-ci de la commission, seront appelés à réfléchir avec le gouvernement là-dessus. Bien sûr qu'on n'est pas au niveau de la décision finale, mais il me semble que quelque part il y a un devoir parlementaire très fort, là, qui nous interpelle.

Le deuxième constat, c'est qu'il y a quand même une... parmi les groupes qui se sont exprimés, là, tous les groupes sans exception, sauf la Fédération des parents adoptants qui n'ont pas émis d'avis là-dessus, se sont prononcés en faveur d'un investissement gouvernemental pour différentes raisons qui relèvent parfois du coût et du fardeau des cotisations, mais surtout... moi, j'ai entendu surtout pour des raisons de leadership social, de symbolique sociale, de signal très fort, donné par le gouvernement, en matière de solution qu'on doit apporter au défi démographique et en matière de soutien parental. Alors, voilà un deuxième constat.

Il y a quand même un bon nombre de groupes, quatre, qui ont demandé une révision du conseil d'administration. La plupart du temps, ça concernait un ajout des représentantes ? ou d'une représentante à tout le moins ? des travailleuses non syndiquées, et la question du retrait préventif a aussi été évoquée de façon assez percutante. Il y a quand même quatre groupes qui se sont prononcés très clairement là-dessus et qui souhaitent certainement une révision des dispositions de la loi à ce sujet.

J'ai bien senti aussi ? dernière remarque ? que tout le monde s'associait à ce souhait très vif que le régime soit installé le 1er janvier 2006, ce qui, je pense, nous offre une plateforme de conciliation, de négociation assez intéressante, étant donné qu'il y a un ralliement, à tout le moins, autour d'un objectif commun qui n'est peut-être pas partagé avec autant d'intensité par l'un ou par l'autre, mais qui habite, je pense, la majeure partie des partenaires.

Alors, voilà, M. le Président, je pense qu'on voit très bien... Je pense avoir... j'ai parlé des parents adoptants. Est-ce que... Je n'ai pas parlé des parents adoptants?

Une voix: Non.

M. Bouchard (Vachon): Enfin, les parents... Moi, je pensais en avoir parlé.

Une voix: Non. Non.

Une voix: On verra...

M. Bouchard (Vachon): Non?

Des voix: Non.

Une voix: ...très bien.

Une voix: Non, tu ne l'as pas dit.

Le Président (M. Copeman): Les esprits sont partagés là-dessus, M. le député.

Des voix: Oui, oui, oui.

M. Bouchard (Vachon): Non, c'est parce que je n'ai pas le score dans la colonne, mais on a entendu, hein, je pense, suffisamment d'intervenants autour de cette question-là: il y a une hésitation qu'on a constatée, chez deux ou trois groupes, une sympathie, chez tout le monde, mais une hésitation, chez deux ou trois groupes, puis un appel très ferme, chez deux ou trois autres groupes, à revoir notre position là-dessus.

Notre position, de ce côté-ci, c'est que nous avons, je pense, évolué très rapidement durant les dernières années. Nous avons constaté les besoins de ces parents. Leurs revendications sont maintenant extrêmement claires, alors qu'elles l'étaient beaucoup moins à l'époque, étant donné, nous ont-ils expliqué, qu'ils étaient absents de la scène pour une autre bonne raison, la Convention de La Haye. Alors, je pense que c'est aussi un constat que l'on doit faire. Alors, voilà, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le député. Alors, Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Michelle Courchesne

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. À mon tour de remercier tous les collègues parlementaires d'avoir consacré cette journée à un dossier extrêmement important pour l'avenir du Québec et des familles québécoises, il en va de soi. Et ça, je pense que c'est un constat qui fait en sorte que nous déployons tous les efforts et toute l'énergie requise pour faire en sorte que ce régime d'assurance parentale puisse aussi démarrer sur le bon pied. Je pense que c'est important que ça puisse se faire de cette façon-là.

J'ai eu l'occasion de dire, à plusieurs reprises mais notamment aujourd'hui, que ce régime était la pierre angulaire d'une politique sociale, d'une politique familiale, pardon, et le député de Vachon vient juste de faire référence à la nécessité d'exercer un leadership social à cet égard-là.

M. le Président, vous me permettrez de lui rappeler qu'il faut quand même admettre, admettre très sincèrement et d'emblée et j'espère qu'il saura le faire, que, depuis deux ans, le gouvernement a investi des sommes fort importantes dans justement le soutien aux familles québécoises, que ce soit par le biais du Soutien aux enfants, par le biais de l'Aide aux devoirs, que ce soit par bien sûr cette signature d'entente qui, je vous l'assure, fera en sorte qu'il y aura un régime en vigueur le 1er janvier 2006. Tout ça, ce sont quand même des investissements, des choix que le gouvernement a faits, sans hésitation, M. le Président. Ce sont des sommes très importantes, et ce sont des sommes qui seront appelées aussi à augmenter au cours des prochaines années.

Et c'est évident que, lorsque le député de Vachon, M. le Président, nous dit: Bien, il faudra qu'on s'attaque à ces solutions démographiques, je pense qu'il y a bien d'autres actions que nous avons prises, depuis deux ans, pour démontrer que ce défi démographique était non seulement une préoccupation, mais que nous faisions le nécessaire pour adapter les décisions du gouvernement à ces nouvelles réalités et que nous étions dans un mode de solution à cet égard-là.

n(21 h 40)n

Donc, il y a des choix que nous devons faire en toute responsabilité, et nous les faisons. Mais ces choix-là bien sûr peuvent rallier un certain nombre de personnes, qui font que, quand on choisit, bien ce qui est intéressant avec les commissions parlementaires, c'est de pouvoir justement échanger sur le fond des choses et être capables d'expliquer, de part et d'autre, que, si, dans un dossier comme tel, on fait un type de choix, c'est aussi qu'il ne faut pas oublier qu'il y en a plein d'autres pour lesquels les investissements importants non seulement ont été effectués et qu'il y en a d'autres qui sont requis.

Et, M. le Président, si je reviens sur le régime d'assurance parentale, on a beaucoup parlé du Conseil de gestion, aujourd'hui, et, dans ce sens-là, bien, en 2001, la législation a prévu ce Conseil de gestion là, et, moi, je suis une de celles qui, dès mon arrivée, a salué cette initiative-là. Je pense que c'est une initiative importante, j'ai eu l'occasion de le dire, parce qu'on regroupe autour d'une même table les représentants de ceux et celles qui contribuent, et il me semble que c'est là non seulement un geste de confiance, mais c'est un geste, oui, bien sûr, de responsabilisation, mais qui permet, autour d'un enjeu de société aussi fondamental, qui permet à ces représentants de pouvoir en arriver à des décisions partagées.

Donc, oui, il y a obligation de s'entendre, d'une certaine façon. Oui, c'est nouveau. Oui, en ce moment, il y a ce défi qui se présente devant nous, mais, moi, M. le Président, je suis une femme toujours optimiste et qui croit que... et surtout ici, au Québec, moi, je fais confiance à cet exercice de concertation, je fais confiance à cette capacité qu'ont ces intervenants de trouver les bonnes solutions dans l'intérêt de ces travailleurs et travailleuses et de ces familles qui en bénéficieront.

Je veux rappeler, M. le Président, aussi qu'il... et là on peut avoir une divergence de vue, mais je veux rappeler encore une fois que, dans ce régime, le gouvernement contribue. J'ai bien entendu ce qui m'a été dit aujourd'hui et je ne prends pas ça à la légère, mais pas du tout. J'ai une écoute très attentive, par rapport à tous les scénarios qui auraient pu nous être évoqués aujourd'hui et par rapport à l'importance d'une contribution gouvernementale, et je suis certaine que mes collègues qui sont avec moi ont eu cette même écoute attentive. Mais, mais: il faut bien comprendre qu'à titre de plus gros employeur du Québec nous aurons à contribuer sur les augmentations. Nous contribuons aussi, et le député de Vachon... et je ne veux pas tourner le fer dans la plaie, il l'a évoqué, il ne l'évoquera plus, je ne pense pas, mais il l'a évoqué, que le 200 millions de dollars, pour la première année, est aussi une injection d'argent gouvernemental, parce que très honnêtement, très honnêtement, cette somme d'argent, bien on fait le choix de l'investir dans le fonds, dans la caisse autonome. On fait ce choix-là, et c'est correct, et il faut que ce soit comme ça, et je suis d'accord avec ça, mais c'est quand même 200 millions de dollars de l'argent des contribuables, et ça, il faut se le dire, et ça sert au démarrage, et, M. le Président, vous me permettrez de rappeler au député de Vachon que, lorsque son gouvernement a tenté, je dis bien tenté, des négociations avec le gouvernement fédéral, qui ont été très courtes, bien il n'a pas pensé, le gouvernement précédent, à négocier un montant pour justement cette année de transition et un montant de démarrage pour qu'il puisse partir du bon pied, ce régime-là. Et c'est quand même 200 millions de dollars que nous avons réussi à obtenir dans le cadre de cette entente.

Alors, je me permets de rappeler ces éléments-là, M. le Président, parce que, oui, l'argent, à minuit moins cinq, c'est important, et je peux assurer les membres de cette commission et ceux et celles qui sont venus devant nous que nous allons poursuivre les discussions. Nous allons poursuivre très certainement les analyses à l'égard de tout ce qui nous a été transmis aujourd'hui comme souhaits et comme recommandations.

En terminant, M. le Président, ou presque en terminant, je veux juste rappeler que, oui, aujourd'hui, on a beaucoup parlé de retrait préventif. On a parlé aussi de cette situation des parents adoptifs, et que, moi, je partage un peu l'avis de la présidente de la CSN qu'il est un peu minuit moins cinq et que des décisions comme celle-là méritent très certainement des réflexions et des analyses plus approfondies, et que ce que nous souhaitons, d'abord et avant tout, c'est la mise en oeuvre d'un régime le 1er janvier 2006, et que, dans ces deux situations-là, bien, de pouvoir faire ces réflexions et ces analyses approfondies, bien, là, ne permettrait pas d'adopter la loi avant la fin de la session. Donc...

Mais ça ne veut pas dire pour autant, M. le Président, que, si on a à franchir ces étapes-là, que, ces sujets-là aussi, on les met de côté, on n'en parle plus, ce n'est pas important, au contraire. Moi, je peux assurer mes collègues que, dans les deux cas, il y a un engagement de ma part de dire: Bien, il faut qu'on puisse poursuivre des travaux qui nous permettront d'y voir beaucoup plus clair et aussi de prendre les décisions, encore une fois pas de les imposer, mais de le faire en partage de réflexions avec l'ensemble des partenaires. C'est, je pense, une question de respect. Et, quand on veut travailler à l'avenir et à bâtir l'avenir du Québec, bien je pense qu'on doit le faire avec ses partenaires qui sont importants et qui représentent en fait un si grand nombre de la population, et ce sont nos travailleurs et nos travailleuses et nos patrons, il ne faut pas les oublier, les entreprises qui les emploient. Et, comme ce sujet-là est important pour maintenir notre taux d'activité, bien, M. le Président, je pense que nous allons continuer ce que nous avons amorcé, c'est-à-dire le faire en collaboration avec tous ceux et celles que la question concerne.

M. le Président, nous aurons l'occasion de revenir sur ces sujets importants, lors du débat article par article, et je vous remercie beaucoup et je remercie toute l'équipe qui nous accompagne pour la journée que vous nous avez consacrée. Merci.

M. Bouchard (Vachon): J'invoque le règlement 212.

Le Président (M. Copeman): Alors, l'article 212 du règlement dit ceci: «Propos mal compris ou déformés. Tout député estimant que ses propos ont été mal compris ou déformés peut donner [des] très brèves...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): ... ? non, mais je lis, si je mets emphase, mais ça dit; de très brèves ? explications sur le discours qu'il a prononcé.

«Il doit donner des explications immédiatement après l'intervention qui les suscite. Elles ? ça veut dire les explications, j'imagine ? ne doivent apporter aucun élément nouveau à la discussion, ni susciter de débat.»

Alors, en vertu de l'article 212, M. le député, allez-y.

M. Bouchard (Vachon): M. le Président, la ministre a fait référence à l'intervention que j'ai faite, ce matin, à l'effet que le gouvernement créait un précédent, alors que la ministre répondait à une question et disait qu'elle dirigeait le 200 millions qui venait du fédéral dans le Fonds de l'assurance parentale. Je l'ai dit parce que je voulais mettre en évidence une contradiction, une incohérence ? et ça, ce n'était pas un fait nouveau parce que je l'ai dit ultérieurement, dans mes autres interventions ? de la part de la ministre qui dit que, pour le gouvernement, investir un montant dans le fonds menace l'indépendance de fonctionnement du fonds et du Conseil de gestion. Voilà tout, M. le Président.

Mémoires déposés

Le Président (M. Copeman): Merci. Une dernière chose à faire pour les rendre publics et pour valoir comme s'ils avaient été présentés devant la commission, je dépose le mémoire des organismes suivants: la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante et l'Association des manufacturiers et exportateurs du Québec.

Et, sur ce, chers collègues, j'ajourne les travaux de la commission sine die.

M. Bouchard (Vachon): Merci, M. le Président.

(Fin de la séance à 21 h 49)


Document(s) associé(s) à la séance