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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mardi 12 septembre 2006 - Vol. 39 N° 45

Consultations particulières sur le projet de loi n° 33 - Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, chers collègues! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales. Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de procéder à des consultations particulières et afin de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, Mme Legault (Chambly) va être remplacée par M. Ouimet (Marquette); M. Bouchard (Vachon), par Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve).

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous rappelle, chers collègues, tous ceux qui sont présents dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires et autres appareils semblables est strictement interdit pendant la séance de la commission. Je vous prierais en conséquence de les mettre hors tension.

L'ordre du jour. Nous débutons ce matin les consultations particulières. Nous allons procéder dans quelques instants avec des remarques préliminaires. Ensuite, il y aura la présentation et l'échange avec l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc., et nous allons terminer la matinée avec la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Il y a la suspension habituelle à midi. On reprend à 14 heures, et je ferai la lecture de l'ordre du jour de l'après-midi à ce moment-là.

Remarques préliminaires

Alors, sans plus tarder, je vous rappelle que le temps consacré aux remarques préliminaires est de 30 minutes, c'est-à-dire 15 minutes pour le groupe ministériel et 15 minutes pour l'opposition.

Sans plus tarder, je cède la parole à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux pour vos remarques préliminaires, pour une durée maximale de 15 minutes.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous saluer et votre retour à la présidence. Vous me disiez plus tôt que c'est votre 12e anniversaire d'entrée à l'Assemblée nationale aujourd'hui. Je voudrais vous féliciter au nom de tous les collègues de l'Assemblée, qui certainement feront de même, saluer les collègues du côté ministériel et de l'opposition qui sont avec nous aujourd'hui, particulièrement la députée de Pontiac, qui maintenant agit à titre d'adjointe parlementaire pour la personne que je suis. Alors, je suis très content qu'elle soit avec nous pour les travaux qui vont suivre.

Donc, M. le Président, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler l'affaire Chaoulli-Zeliotis, la Cour suprême du Canada a rendu un jugement invalidant l'article 11 de la Loi sur l'assurance-hospitalisation et l'article 15 de la Loi sur l'assurance maladie. Les juges de cette cour concluaient alors que ces deux articles qui interdisent la vente d'assurance privée pour des soins médicaux et hospitaliers contreviennent à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Cependant, la Cour suprême accordait un sursis d'application du jugement pour une période de 12 mois se terminant le 9 juin 2006, ce qui permettait au gouvernement d'apporter les correctifs. Si rien n'était fait au terme de ce sursis, la vente d'assurance privée pour les soins médicaux et hospitaliers devenait permise sans précision outre que celle-là.

Dans cet esprit, le premier ministre et moi-même avons rendu publique, le 16 février dernier, la réponse du gouvernement à ce jugement sous la forme d'un document de consultation intitulé Garantir l'accès: un défi d'équité, d'efficience et de qualité. Ce document de consultation contenait trois ordres de propositions: d'abord, la poursuite des actions entreprises en matière de prévention et de promotion de la santé, d'amélioration de l'accès aux services de première ligne ? par exemple, les groupes de médecine de famille et les cliniques-réseaux ? d'organisation des services médicaux et hospitaliers de même qu'en matière de qualité des services dispensés; ensuite, une proposition de réponse au jugement de la Cour suprême du Canada, soit concrètement un plan d'amélioration de l'accès aux services de santé et aux services sociaux; et finalement un questionnement sur les enjeux de financement à long terme, et cela, dans un but d'amorcer un large débat dans la foulée du rapport du comité présidé par M. Jacques Ménard.

Il va sans dire que ce document a suscité un vif intérêt au sein de la population du Québec. En effet, près de 140 groupes et individus ont soumis un mémoire à la commission, et 108 d'entre eux ont été entendus. De plus, il convient de noter que plus de 3 500 internautes se sont exprimés sur cette proposition. Je tiens à vous assurer, M. le Président, que le gouvernement a considéré avec sérieux les différentes opinions exprimées et a procédé, le cas échéant, aux analyses d'opportunité requises.

Le projet de loi n° 33, que j'ai eu le privilège de déposer à l'Assemblée nationale, le 15 juin dernier, et qui nous réunit aujourd'hui, propose d'apporter les modifications législatives pour préserver et améliorer notre système public de santé et de services sociaux tout en fournissant une réponse satisfaisante au jugement de la Cour suprême, qui ne nuise pas à l'atteinte du premier objectif. Le projet de loi n° 33 comprend quatre grands volets: d'abord, la... la mise en place, pardon, d'un mécanisme central de gestion de l'accès aux services spécialisés et surspécialisés; deuxièmement, une ouverture limitée à l'assurance privée; troisièmement, la création et l'encadrement des centres médicaux spécialisés; quatrièmement, la mise en place de cliniques médicales associées et leur contribution en soutien au système public de santé.

Je commencerai d'abord par vous présenter les grandes lignes des dispositions législatives relatives à la gestion de l'accès aux services spécialisés. Il est entendu que les moyens déployés misent, d'abord à et avant tout, sur le système public de santé. Les dispositions contenues au projet de loi n° 33 obligeront d'abord tout établissement exploitant un centre hospitalier à mettre en place un mécanisme central de gestion de l'accès aux services spécialisés et surspécialisés, et ce, pour les différents départements cliniques. Ce mécanisme central précisera les règles à suivre pour inscrire un usager sur la liste d'accès aux différents services. Il définira également les modalités de détermination de la date prévisible où le service sera rendu ainsi que les modalités de sa communication à l'usager. À ce propos, M. le Président, je tiens à vous informer qu'un responsable du mécanisme central de gestion de l'accès a déjà été désigné par chaque établissement exploitant un centre hospitalier. Ce responsable doit agir sous l'autorité du directeur des services professionnels de l'établissement.

Par ailleurs, le projet de loi n° 33 prévoit que le directeur général de l'établissement devra dorénavant faire rapport de l'efficacité du fonctionnement du mécanisme d'accès lors de chaque séance du conseil d'administration de l'établissement. Ainsi, le fonctionnement du mécanisme central de gestion de l'accès reposera sur une meilleure gestion des listes d'attente, sur l'information du patient ainsi que sur la responsabilisation des cliniciens et des administrateurs.

Les établissements, de concert avec les agences et le ministère, devront définir les modalités nécessaires pour assurer le cheminement adéquat du patient, de son inscription dans un mécanisme central d'accès à l'obtention de son intervention. Dans un premier temps, l'attention portera d'abord sur les chirurgies. Dès cet automne, des modalités d'accès seront définies pour les chirurgies de la hanche, du genou et de la cataracte afin que les services soient rendus dans les délais reconnus. Ces efforts s'ajouteront à ceux déjà consentis au cours des dernières années, en matière de cardiologie tertiaire et de radio-oncologie, qui ont apporté des résultats notables. Ils s'étendront par la suite aux autres types de chirurgie, par exemple la chirurgie d'un jour, qui regroupe littéralement des centaines de procédures différentes, et à d'autres interventions dont les délais d'attente sont les plus importants.

S'il advenait que les mesures énoncées précédemment ne permettent pas de ramener les temps d'attente à des valeurs cliniquement raisonnables dans l'ensemble du Québec ou dans une de ses régions, le ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait demander par directive la mise en place de mécanismes particuliers d'accès, et cela, après avoir obtenu l'autorisation du gouvernement. Par ailleurs, si un usager ne pouvait obtenir un service visé par un tel mécanisme particulier à l'intérieur du délai jugé raisonnable, le directeur des services professionnels de l'établissement devrait lui proposer sans retard une offre substitutive de service en tenant compte du réseau d'accessibilité aux soins et des corridors de services établis. Le ministre pourra également, le cas échéant, assumer le coût de l'achat du service conformément à ses directives, qu'il s'agisse d'un centre médical spécialisé à financement privé ou d'un dispensateur situé à l'extérieur du Québec.

En réponse au jugement rendu par la Cour suprême du Canada, le gouvernement entend agir avec grande prudence et ne permettre qu'une ouverture très limitée à l'assurance privée soit pour l'arthroplastie-prothèse totale de la hanche et du genou, ainsi que pour l'extraction de la cataracte avec implantation d'une lentille intraoculaire. Cette ouverture limitée à l'assurance privée sera rétroactive au 9 juin 2006, afin d'éviter tout vide juridique en regard du sursis accordé par la Cour suprême du Canada. Cette volonté de limiter au maximum cette ouverture repose, M. le Président, sur un examen attentif de la littérature internationale qui montre qu'une large ouverture provoquerait des conséquences négatives sur la continuité et l'intégration des services et pourrait engendrer un drainage significatif de ressources humaines spécialisées du secteur public vers le secteur à financement privé, ce qui pénaliserait inévitablement les usagers du système public de santé.

Pour cette raison, l'ouverture à l'assurance privée proposée dans le projet de loi n° 33 ne porte que sur des services pour lesquels des modalités d'accès sont mises en place actuellement dans le système public de santé. Toutefois, un éventuel élargissement de la portée de ces mécanismes à d'autres services ne se traduira pas nécessairement par une ouverture élargie à l'assurance privée. En fait, une ouverture additionnelle à l'assurance privée ne pourrait intervenir que par règlement du gouvernement et après étude par la commission parlementaire compétente de l'Assemblée nationale.

Pour limiter davantage les répercussions que pourrait avoir une ouverture à l'assurance privée sur le système public de santé, d'autres dispositions législatives prévoiront le maintien de l'étanchéité du financement public par rapport au financement privé. Ainsi, seuls des centres médicaux spécialisés où ne pratiquent que des médecins non participants au régime public d'assurance maladie pourront dispenser les services couverts par une assurance privée. De plus, M. le Président, le projet de loi vise à ce que les contrats d'assurance privée doivent couvrir la totalité du coût des services requis pour les procédures visées, qu'il s'agisse de services préopératoires, postopératoires, de réadaptation et de soutien à domicile. L'exploitant du centre médical spécialisé sera tenu de voir à ce que le patient reçoive ces services. Et, dans les cas où ces services seraient plutôt dispensés par un établissement public, le gouvernement pourra réclamer de l'exploitant du centre médical spécialisé le coût assumé par le système public pour la dispensation de ces services.

Le ministre pourra prendre des dispositions s'il estime que l'offre de service dans le système public de santé pourrait être affectée par une augmentation du nombre de médecins non participants. Ainsi, il pourra suspendre, pour une durée maximale de deux ans, renouvelable si nécessaire, la possibilité qu'ont les médecins de quitter le régime public d'assurance maladie et de devenir non participants à ce régime.

n (9 h 50) n

Finalement, je tiens à réitérer que notre gouvernement ne considère nullement l'ouverture à l'assurance privée comme étant un moyen de résoudre la problématique de financement des services publics de santé ou comme un moyen pour améliorer l'accès aux services pour l'ensemble de la population. Il s'agit essentiellement d'une disposition qui vise à respecter les libertés individuelles dans l'esprit du jugement de la Cour suprême du Canada.

Le gouvernement entend mieux encadrer le fonctionnement des cliniques où sont dispensés des services médicaux spécialisés qui ne pourraient être offerts dans le cadre régulier d'un cabinet privé de professionnel. Le projet de loi n° 33 propose en conséquence la création d'un régime juridique particulier d'exercice d'activités médicales dans ces centres médicaux spécialisés. En fait, le centre médical spécialisé constituera l'endroit où pourraient se réaliser, hors établissement, des procédures que le ministre pourra déterminer par règlement, en prenant en compte les risques associés à un tel traitement. Le projet de loi propose d'ailleurs une première série de procédures, soit l'arthroplastie-prothèse totale de la hanche et du genou ainsi que l'extraction de la cataracte avec implantation d'une lentille intraoculaire.

Afin de préserver l'étanchéité entre le financement public et le financement privé des services de santé, seuls deux types de centres médicaux spécialisés seront autorisés. On retrouvera ainsi des centres médicaux spécialisés où n'exerceront que des médecins qui ne participent pas au régime public d'assurance maladie et des centres médicaux spécialisés où ne pratiqueront que des médecins participant au régime public. Dans ce dernier cas où pratiquent des médecins participants, les centres pourraient faire l'objet d'une association avec un ou des établissements publics pour des interventions ciblées. L'ensemble des centres médicaux spécialisés seront soumis à un encadrement de la qualité et de la sécurité des services dispensés, qui passera par l'obligation d'être titulaire d'un permis, de recevoir un agrément dans les trois ans suivant l'émission de ce permis et de le conserver en tout temps, par la suite. Ces centres devront également nommer un directeur médical.

Dans le même ordre d'idées, seul un médecin pourra exploiter un tel centre. Et, s'il s'agit d'une société ou d'une personne morale, plus de la moitié des droits de vote rattachés aux actions ou aux parts devront appartenir à des médecins.

Pour améliorer l'accès aux services médicaux spécialisés offerts par le système public de santé et pour permettre de réaliser des gains d'efficience, le projet de loi n° 33 prévoit la possibilité pour les établissements exploitant un centre hospitalier de s'associer à une clinique médicale pour y faire dispenser certains services médicaux spécialisés qui ne requièrent pas la présence d'une infrastructure hospitalière lourde. Cette association permettra ainsi de dégager des ressources dans les centres hospitaliers pour leur permettre de se concentrer davantage sur des procédures plus complexes, et dans cet esprit il est clair que l'arthroplastie-prothèse totale de la hanche et celle du genou continueront de se réaliser en milieu hospitalier uniquement. En pratique, en fonction de la nature des interventions qui seront réalisées, une clinique médicale associée pourrait être un centre médical spécialisé, concept que j'ai déjà abordé, ou un cabinet privé de professionnel, ou un laboratoire médical pour la radiologie diagnostique et les services de biologie médicale. M. le Président, un flou juridique considérable existe actuellement dans ce domaine, et il est temps pour l'Assemblée nationale à notre avis de le clarifier.

Compte tenu, d'une part, du volume potentiel d'actes pouvant être réalisés en clinique médicale associée et, d'autre part, de la volonté gouvernementale de ne pas provoquer un drainage de ressources limitées en centre hospitalier, par exemple, en anesthésiologie, on ne retrouvera vraisemblablement qu'un nombre limité de cliniques médicales associées, celles-ci étant concentrées essentiellement dans les grands centres urbains, en lien avec les établissements qui en prendront l'initiative dans le cadre de leurs plans d'accès. Le mot «initiative» est important. Le ministère n'imposera pas cette solution aux établissements de santé.

L'association entre une clinique et un établissement de santé sera régie par un ensemble de paramètres énoncés dans le projet de loi n° 33. D'abord, le ministre devra approuver une telle association à la suite d'une proposition formulée par une agence après consultation de la table régionale des chefs de département de médecine spécialisée. Ensuite, l'entente encadrant cette association devra contenir un certain nombre d'éléments, tels la nature des services à être dispensés, le nombre minimal et maximal de procédures à réaliser annuellement, le montant unitaire versé par l'agence à la clinique pour chaque service, les mécanismes de surveillance de la qualité des services, etc. Finalement, une telle entente ne pourra excéder cinq ans mais pourra être renouvelée avec l'accord du ministre.

Il importe de souligner et de rappeler, M. le Président, que le patient n'aura aucune somme supplémentaire à débourser par rapport à la situation où il aurait été traité dans un centre hospitalier. Comme je l'ai déjà affirmé, dans le but de préserver l'étanchéité dans le financement des services, seuls les médecins participant au régime public d'assurance maladie pourront exercer dans une telle clinique médicale associée. Ces médecins devront être titulaires d'une nomination leur permettant d'exercer dans un centre hospitalier exploité par un établissement associé à l'entente et ils devront également respecter toutes les obligations rattachées à la jouissance des privilèges qui leur ont été accordés dans l'établissement d'origine. Il convient finalement de noter que les services prévus à l'entente ne pourront être dispensés qu'aux usagers dirigés vers la clinique médicale associée par l'établissement qui a conclu l'entente.

En conclusion, M. le Président, nous tenons à réaffirmer notre intention de préserver un système de santé public et universel où l'accès se fait en fonction des besoins des personnes plutôt que de leur capacité de payer. Nous entendons poursuivre les efforts entrepris au cours des dernières années, en matière de prévention de la maladie, de promotion des saines habitudes de vie, une condition essentielle pour assurer une meilleure qualité de vie à la population québécoise et également essentielle pour réduire la pression à long terme sur la croissance des coûts du système de santé. Nous entendons ainsi continuer nos actions en vue de consolider des services de première ligne, qui demeurent la préoccupation quotidienne la plus importante sur l'accès des citoyens du Québec, et améliorer l'accès aux services de santé et de services sociaux.

À ce chapitre, et je termine là-dessus, M. le Président, le projet de loi n° 33 contient des dispositions qui nous permettront de préserver et de renforcer le système public de santé et de services sociaux, de garantir et de mieux gérer l'accès aux services médicaux spécialisés. De plus, il contient des éléments qui permettront de tirer le meilleur parti d'une relation entre le secteur public et le secteur privé et d'assurer la qualité des services dispensés par les divers partenaires. C'est donc dans cet esprit et avec grand intérêt que nous entendrons les différents groupes qui viendront, au cours des prochains jours, exprimer leurs points de vue sur le projet de loi n° 33 devant cette commission et, le cas échéant, nous suggérer des moyens d'enrichir ce texte législatif. Merci, M. le Président, chers collègues.

Le Président (M. Copeman): Merci, M. le ministre. Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et de nouveau porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Pouvez-vous m'indiquer le temps dont je dispose?

Le Président (M. Copeman): Il y a un total de 15 minutes pour l'opposition. Mme la députée de Lotbinière avait signalé qu'elle souhaitait intervenir aussi. Alors, ça se fait à l'intérieur du 15 minutes.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Très bien. Alors, M. le Président, d'abord je voudrais, moi de même, au nom de mes collègues, souligner ce 12e anniversaire en ce 12 septembre, 12e anniversaire de votre présence à l'Assemblée nationale, et vous dire le plaisir que j'ai à retrouver cette commission parlementaire que vous présidez. C'est une commission parlementaire qui a la réputation fondée, je pense, pour y avoir travaillé pendant quelques mois, qui a cette réputation d'un travail sérieux mais surtout dans un climat de respect des personnes, et je suis convaincue que vous y êtes pour beaucoup, M. le Président. Je voudrais dire à mes collègues de la commission parlementaire le plaisir que j'ai à les retrouver. J'inclus également le ministre dans ce plaisir que j'ai à revenir dans ce dossier. Et il est certain, M. le Président, que cependant, 15 mois après avoir quitté le dossier de la santé, je constate que peu de choses ont vraiment progressé. Il y a du surplace qui s'est fait durant tous les mois qui viennent de s'écouler. Je voudrais également souligner le dévouement, l'ardeur au travail, l'implication de mon collègue le député de Borduas.

Il est certain qu'étant donné l'investissement humain que ça représente d'être porte-parole de l'opposition en matière de santé ? le ministre peut compter sur une équipe très chevronnée et nombreuse au ministère ? moi, je vous indique que je compterai dorénavant sur le dévouement de Sylvain Gobeil, qui est à mes côtés, que je remercie d'accepter cette charge, qui pour n'importe lequel recherchiste apparaît à l'évidence considérable.

Cependant, si j'ai la nette conviction que je retrouve les dossiers dans l'état où je les ai laissés il y a 15 mois, je vois cependant que le ministre n'a pas perdu ses bonnes habitudes de laisser entendre une chose aux médias et aux organismes qui se présentent en commission parlementaire et finalement pour aboutir d'en faire une autre dans les projets de loi qu'il dépose à l'Assemblée. Je mets ça sur le compte de ses difficultés de convaincre le premier ministre et ses collègues du Conseil des ministres, puisque très fréquemment ? je vous en donnerai quelques exemples immédiatement; mais très fréquemment ? les engagements qu'il prend en commission parlementaire, notamment lors des consultations... il ne peut pas donner suite du fait que le Conseil des ministres ne retient pas, à l'évidence même, les propositions qu'il fait. Bien, j'en prends à témoin ses déclarations concernant l'élargissement, par voie législative, de la couverture d'assurance privée pour d'autres chirurgies que celles prévues d'ailleurs dans le document de consultation et que l'on retrouve dans le projet de loi n° 33, c'est-à-dire les genoux, les hanches puis les cataractes.

Alors, le ministre avait en commission parlementaire, le 30 mai, je le cite, déclaré ? lors de la consultation sur cette importante question, il déclarait ceci: «Dans le document de consultation ? disait-il ? on disait que ça se ferait par voie réglementaire...»

«[À la suite] des recommandations qu'on a reçues en commission, on a indiqué à plusieurs reprises qu'on avait modifié notre opinion à ce sujet-là...» Et il ajoutait: «Pour ce qui est de [...] l'assurance privée, ça se [fera] pas voie législative et non par voie réglementaire.» C'était le 30 mai. Le 16 juin, le ministre faisait volte-face sans doute après une réunion du Conseil des ministres où il avait donné suite, parce que ce n'est pas une girouette, le ministre. Je suis certaine que, ce qu'il a dit en commission parlementaire, il l'a proposé au Conseil des ministres. Et, 15 jours plus tard, il faisait volte-face.

n(10 heures)n

En fait, tous les médias l'ont rappelé. Et il énonçait que ce serait par voie réglementaire que cette brèche à l'assurance privée serait déterminée par le gouvernement, son élargissement pourrait être décidé par le gouvernement plutôt que par voie législative, ce qui du moins apparaissait comme une garantie de protection contre l'élargissement de l'assurance privée, qui, rappelons-le, va obliger nos concitoyennes et concitoyens à se procurer ces assurances pour avoir une garantie de délai raisonnable en matière d'intervention dans ces chirurgies.

Mais je ne sais si le... Pourtant, le journaliste du Devoir, Robert Dutrisac, habituellement est considéré comme un membre de la tribune qui fait bien ses devoirs et il rapportait que, même le 16 juin, lorsqu'il énonçait que ce serait par voie réglementaire et non plus par voie législative, qui apporte une protection à cette brèche, à cet élargissement, là, de l'assurance privée, M. Dutrisac rappelait que le ministre, qui venait de faire volte-face en faveur de la réglementation, disait, dans la même conférence de presse, qu'il restait ouvert cependant à revenir sur sa position lors de l'étude du projet de loi, à l'automne, où nous sommes rendus maintenant.

Alors, on le voit, c'est successivement des déclarations qui sont contradictoires. Alors, est-ce à mettre sur le compte de la tergiversation ou à mettre sur le compte des contradictions qui sont le fait de l'incapacité du ministre de convaincre le Conseil des ministres? En fait, on verra.

Un autre exemple éloquent bien évidemment, c'est celui du financement du réseau de la santé. Ça, je dois dire que c'est en quelque sorte, bien évidemment, là, un symbole de ces volte-face et de ces contradictions. Je rappelle que, dans le document même qui a donné lieu, là, à la présentation de 140 mémoires en commission parlementaire, il y a un chapitre qui s'intitule le chapitre VI et qui porte sur les avenues à explorer pour assurer la pérennité du financement du système de santé et des services sociaux. Alors, le ministre avait, à cette occasion-là et à diverses occasions, déclaré, je le cite, là: «Il est clair que la mécanique est infernale, la mécanique financière sur le plan arithmétique nous mène à une impasse. [...]On ne peut pas continuer à se garder la tête dans le sable au sujet du financement de la santé, il faut trouver une solution structurante qui nous amène à maintenir ce réseau...» C'étaient des propos alarmistes, M. le Président. Et ça ne fait pas une éternité, c'était le 27 mars dernier, il n'y a pas six mois de cela. Alors, le ministre ajoutait encore: «...je peux vous dire que, le mur qu'on voyait très lointain, il y a quelques années, on le voit de très près, maintenant.»

Alors, des déclarations comme celles-là, il y en a eu les unes après les autres, M. le Président, pour aboutir en août, il y a quelques semaines à peine, où finalement, une nouvelle fois, le ministre faisait volte-face dans le cadre d'une entrevue au journal Le Soleil. Et, en première page du Soleil, cette entrevue avec l'équipe éditoriale que le ministre donnait l'amenait à dire ceci: «À écouter le ministre de la Santé[...], les fonds disponibles dans les coffres de l'État suffisent à financer le réseau.» Et l'équipe éditoriale ajoutait: En entrevue au Soleil, il répète que la facture collective des soins gonflera de 5 % à 6 % chaque année mais que les Québécois sont capables de s'offrir sans ticket modérateur, sans hausse de cotisation... Et c'est donc, finalement, une volte-face, là, à 180 degrés qui manifestement, encore une fois, s'exprime dans ce dossier. Et là il va falloir que le ministre s'explique parce que, dans son propre document gouvernemental, il faisait état de plusieurs rapports qui ont mis en lumière l'écart grandissant entre la croissance des dépenses du secteur sociosanitaire et la croissance des revenus du gouvernement.

Et il ajoutait: En raison de sa nature structurelle, cette dynamique d'écart, là, menace l'avenir du système, met en cause l'équité entre les générations. Et, sur le même, si vous voulez, sur le même ton, là, suivaient des déclarations à l'effet que les services d'hébergement, de soutien à domicile ne suffisent pas à la demande... ce document gouvernemental et donc faisait état de l'ensemble de ces rapports de comités, groupes de travail: Mazankowski, Kirby, Graydon, le rapport Clair, le rapport Ménard qui portait sur la pérennité du système de santé et de services sociaux.

On sait que ce comité a été mis en place suite aux 16 forums régionaux tenus en 2004 ? le forum national tenu il y a deux ans maintenant, en 2004. Après quoi il y a eu le rapport Ménard il y a un an maintenant. Je pense, M. Ménard a fait le tour de toutes les chambres de commerce qui pouvaient le recevoir au Québec pour faire valoir la nécessité d'une pérennité du système de santé à partir de propositions qui étaient faites dans le document, dans son document. Alors, on voit que, là, il y a encore une contradiction sur laquelle le ministre va nécessairement avoir à s'expliquer. Parce que comment garantir les soins de santé? Comment les garantir sans qu'il y ait de budget accru. On le voit. Par exemple, ces délais pour un médecin de famille sont restés très importants. On sait, M. le Président, qu'il y a actuellement 113 groupes de médecins de famille. C'est au compte-gouttes qu'on les ajoute. Il y a 12 cliniques-réseaux. Ma foi, il n'y en a pas une nouvelle depuis que, moi, j'ai quitté le dossier, il y a 15 mois maintenant.

Alors, moins de délais s'il y a plus de budget, mais il y a moins de budget et, à ce moment-là, il y a plus de délais. Et je veux faire valoir que le rehaussement de la base budgétaire prévu en 2006-2007 a été reporté d'un an. Le 75 millions qui avait été annoncé dans les crédits et dans le budget du ministre de la Santé, eh bien, ça a été reporté de un an. Puis, en plus de ça, faut-il rappeler les déficits autorisés. Ça grève de plus en plus les budgets d'établissement, les intérêts à payer sur les déficits autorisés. Les déficits autorisés, c'est comme payer les services à crédit. Et c'est évident que les budgets d'établissement sont grevés parce que le Conseil du trésor a refusé de payer les intérêts. Et, à même leurs budgets réguliers, les établissements doivent payer finalement les intérêts des déficits autorisés.

Une des grandes interrogations qui m'est venue à la lecture du projet de loi n° 33, c'est: Qu'arrive-t-il du Commissaire à la santé et au bien-être? Il est en place depuis le début d'août. Le ministre, dans son projet de loi, consulte le Collège des médecins, consulte un peu tout le monde, sauf le Commissaire à la santé et au bien-être, et pourtant il est prévu, dans le mandat du Commissaire à la santé, qu'il jette un regard attentif et pénétrant sur la qualité, l'accessibilité, l'assurabilité et le financement des services. Alors, je pense qu'il serait dans l'ordre des choses que la commission parlementaire entende le Commissaire à la santé.

Il est évident également, M. le Président, qu'il y a du ressentiment présentement dans le corps médical. Le sondage qui a été réalisé par la maison Léger sur les intentions des médecins spécialistes en particulier de pratiquer ailleurs qu'au Québec en est peut-être un indice parmi d'autres, là. Mais il est certain, surtout, je pense... les médecins spécialistes, à l'égard du ministre et de son gouvernement, il y a un ressentiment qui n'est pas de nature à favoriser certainement un règlement qui soit harmonieux, là, dans la question des délais.

Mais je reviens finalement à l'essentiel, à savoir pour que ce soit autre chose que la pensée magique, parce qu'un projet de loi, vous savez, ça peut être une coquille vide si ce n'est pas suivi par des moyens concrets, par des mesures pour en permettre l'application. Alors, quelles sont ces mesures, là, pour favoriser les tests diagnostiques, pour favoriser le personnel aux soins intensifs, qui manque présentement? Quelles sont les mesures qui sont prises pour favoriser un médecin de famille? Encore faut-il pouvoir avoir accès à la première ligne pour ensuite se voir dirigé vers des soins spécialisés. C'est un des problèmes, ça, présentement, diagnostiquer les cancers à temps. On reçoit les soins après, mais encore faut-il voir son médecin pour avoir un premier diagnostic.

Alors, il est certain, M. le Président, là, que cette commission parlementaire qui s'ouvre maintenant va amener beaucoup, beaucoup de vigilance de la part de l'opposition officielle, mais en même temps je vous assure de notre désir de collaborer pour le mieux-être de nos concitoyennes et concitoyens. Je vous remercie.

n(10 h 10)n

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, M. le Président. Je voudrais à mon tour saluer vos 12 années d'implication ici, au Parlement, en sachant que vous avez des jeunes enfants et des sacrifices que cela peut imposer. Je salue le père de famille, le député et le président de la commission pour son implication...

Une voix: ...

Mme Roy: ...et le conjoint également.

Donc, on est ici pour discuter du privé, du privé dans la santé. Pour nous, à l'ADQ, cette discussion n'est pas nouvelle. Déjà, en 2001, nous avions des propositions concrètes pour permettre aux médecins désireux ayant atteint leur plafond salarial dans le régime public et désireux de continuer de pratiquer contre une rémunération qui proviendrait des patients désireux d'en payer les frais. Au cours de l'année 2003 de la campagne électorale, nous en avons même fait un enjeu. Souvent, on nous a dit que c'était une hérésie, qu'on a balayé du revers de la main et ridiculisé ces propositions, et elles font maintenant l'objet d'une discussion en commission parlementaire, soit la façon d'intégrer un peu plus de privé dans notre système public.

Ce qui est surprenant par contre, c'est la Cour suprême qui a sonné l'alarme, qui a dû provoquer en disant que chaque citoyen a le droit à la protection de son intégrité physique, qui provoque une réaction du gouvernement. Il me semble que tous et chacun qui sont ici, au tour de la table, savent que chaque citoyen a le droit à la protection de son intégrité physique. Mais nous sommes ici et, j'espère, pas pour donner une réponse à la Cour suprême ou sauver un système, mais trouver des façons d'alléger les souffrances en sachant que les personnes sur les listes d'attente sont toujours aussi nombreuses. Et cette réalité inacceptable doit faire l'objet de tristes constats mais également d'actions, d'actions qui seront utiles pour soulager leurs souffrances.

Nous sommes heureux de participer à ce débat parce que nous croyons que de discuter de l'accès au privé favorise la compréhension des Québécois et favorise également leur adhésion. En mai 2005, un sondage nous indiquait que 65 % des Québécois accepteraient que l'État permette un accès plus rapide à des soins de santé à ceux qui souhaitent payer pour ces soins dans le secteur privé, tout en maintenant le système actuel, le système universel. En juillet 2005, nous apprenions que 68 % des médecins et résidents du Québec accueillaient favorablement le jugement Chaoulli. 30 % des dépenses totales en santé sont également financées par le... soit par les assurances ou par les dépenses personnelles. C'est donc le temps de faire des vrais débats, d'éviter de s'enfoncer dans la défense d'un système et de penser réellement au bien-être des personnes et de la santé des Québécois et des Québécoises.

Nous sommes donc intéressés à participer à ce débat, le faire avancer dans la mesure où la forme de la commission parlementaire le permet. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme la députée. Ayant travaillé avec la députée de Rimouski depuis un certain nombre d'années, je sais que nous partageons beaucoup de choses, et nous partageons également cet anniversaire de 12e année d'élection aujourd'hui même. Nous sommes les seuls autour de la table. Il ne fallait pas oublier personne, alors j'ai fait le tour. Il y en a de plus récents. Il y en a qui ont plus d'ancienneté autour de la table, en termes parlementaires, évidemment. Alors, je tenais à souligner également cet anniversaire pour la députée de Rimouski.

Auditions

Alors, sans plus tarder, nous allons débuter nos consultations avec les représentants de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc. Je vous rappelle, messieurs, que la commission consacrera 60 minutes à l'audition de chaque groupe, c'est-à-dire 20 minutes pour votre présentation. Je vais vous aviser quand il vous restera trois minutes pour mieux vous aider à conclure, et ce sera suivi par un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table.

M. Charest, M. Millette, ce n'est pas votre première expérience, vous êtes rendus pas mal des vétérans de cette commission. Alors, je vous souhaite la bienvenue. Je présume, M. Charest, que vous allez débuter.

M. Charest (Yvon): Oui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): La parole est à vous.

Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)

M. Charest (Yvon): Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission qui ont deux ans d'expérience plus ou moins, merci de nous inviter à cette consultation-là, merci surtout de permettre d'éclairer tous les intervenants sur le rôle actuel que les assureurs privés jouent et permettre aussi de vous aider à répondre à la question du financement à long terme où nous croyons que les assureurs privés peuvent contribuer à solutionner.

Permettez-moi de me présenter: Yvon Charest. Je suis le président du conseil d'administration de l'ACCAP, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes et aussi président et chef de direction de L'Industrielle-Alliance, compagnie d'assurance, et je suis avec M. Yves Millette, qui est le vice-président principal aux Affaires québécoises à l'ACCAP.

L'ACCAP représente les sociétés d'assurance qui souscrivent 98 % des affaires au Québec et au Canada, et, parmi les membres de l'ACCAP, il y a le Regroupement des assureurs à charte du Québec. Aujourd'hui, on va vous parler de trois choses: dans un premier temps, on veut vous rappeler notre position qu'on a prise à l'égard du document Garantir l'accès: un défi d'équité, d'efficience et de qualité; dans un deuxième temps, on veut vous expliquer notre rôle complémentaire qu'on joue actuellement et, nous croyons ? et on va vous l'expliquer ? dans quelle mesure on favorise le financement en vous parlant d'exemples comme l'assurance voyage, en vous parlant d'exemples comme les chambres privées dans les hôpitaux; et, dans un troisième temps, on veut vous aider à réfléchir sur l'approche du financement à long terme. On croit qu'il y a des produits qui aident l'accès aux soins de santé. On va vous parler de l'assurance contre les maladies graves et on va vous parler de l'assurance pour les soins de longue durée.

On veut d'abord vous réitérer qu'on supporte pleinement le système de santé universellement accessible mis en place par le fédéral et par les provinces, où notre rôle est complémentaire. Nous sommes un partenaire du régime public et nous désirons qu'il en soit ainsi. Donc, dans un premier temps, notre position sur le projet de loi n° 33, elle n'est pas nouveau, on vous l'a dite au mois de juin: on vous a dit que, bien qu'il soit timide à l'égard de l'assurance privée, ça présente tout de même une approche qui peut favoriser une meilleure utilisation des ressources en santé, et c'est pourquoi nous saluons ce pas dans la bonne direction. Ce qu'on vous a mentionné, c'est que la proposition retenue par contre ne permettra pas à l'industrie dans son ensemble d'élaborer des produits qui constitueront une valeur ajoutée pour les citoyens qui doivent débourser de leurs poches pour ces chirurgies électives.

Alors, tout en restant dans le cadre de la décision de la Cour suprême dans l'affaire Chaoulli, nous croyons que le gouvernement du Québec aurait dû ou aurait pu ? je comprends que la position actuelle est la suivante ? donc il aurait pu faire trois choses: un, autoriser le recours à l'assurance privée pour d'autres services électifs non visés par la garantie d'accès; deux, permettre à l'assurance privée de couvrir un citoyen qui consulte un médecin désengagé sans exiger que ce médecin pratique en plus dans une clinique complètement privée ? il devrait avoir la possibilité de travailler dans une clinique affiliée lorsque celle-ci a des disponibilités; et, troisièmement, bien on vous a mentionné et on le mentionne encore, l'intérêt de permettre que la couverture s'applique dès la démarche pour la consultation d'un médecin désengagé et non pas uniquement à partir de l'inscription à une liste d'attente ou à l'échéance de la période prévue pour jouir d'une garantie d'accès.

Alors, ces éléments-là ont été mentionnés. Je vais donc, maintenant, passer au deuxième élément qui est le rôle complémentaire. Et ce que je veux vous expliquer, c'est que, dans les années passées puis à cette Chambre, il y a plusieurs décisions qui ont été prises, dans les dernières décennies, d'utiliser l'assurance privée, et on va regarder ensemble aujourd'hui. Puis je ne pense pas que personne refuserait ou changerait de décision, mais il y a en même temps une très grande réticence ? puis on le sent dans les propos de tout le monde ? à aller à une étape plus loin. C'est ce qu'on va essayer de couvrir.

Dans les domaines inoccupés ou partiellement occupés par le secteur public, comme les soins oculaires ou les soins à domicile, l'assurance privée permet aux citoyens de la classe moyenne de faire face au financement à des événements reliés à leur santé auxquels seuls les mieux nantis pourraient autrement faire face. L'assurance privée, c'est un outil de budgétisation qui permet aux assurés d'éviter de débourser une somme importante s'ils sont touchés par un événement non couvert par un régime public. Le plus bel exemple, c'est l'assurance voyage. L'assurance voyage, c'est largement accessible, c'est relativement peu coûteux, et ça permet aux citoyens de voyager tout en étant protégés des conséquences d'une maladie ou d'un accident qui pourrait survenir à l'étranger. Par ailleurs, la présence d'un marché privé permet au régime public de limiter les remboursements des frais médicaux et hospitaliers à l'étranger.

n(10 h 20)n

En dollars, c'est 790 millions qui sont versés en primes pour l'assurance voyage privée sur les 130 milliards que coûtent les soins de santé au Canada. Ça coûte bien peu, mais il s'agit d'une dépense récurrente en moins pour les gouvernements. Pour les citoyens, c'est quelques dollars de prime ? c'est entre 2 $ et 4 $ par jour de voyage ? qui permettent d'éviter une facture de soins qui peut atteindre des dizaines de milliers de dollars. Et ça, il faut se rappeler que, dans le temps passé, en grande partie, au Québec, c'était la RAMQ qui payait pour ça. Aujourd'hui, le gouvernement n'a pas à financer cette dépense.

Donc, si on prend la facture globale, au Canada, de 130 milliards, actuellement c'est financé à environ 70 % par le public puis 30 % par le privé. Alors, le public fait quoi? Bien, il y a 0,60 $ dans 1 $ qui proviennent des régimes d'assurance publics; il y a environ 0,13 $ qui proviennent des programmes publics autres que l'assurance ? ça peut être des dépenses directes du fédéral, ça peut être des programmes privés comme les fondations d'hôpitaux, ça peut être les programmes de recherche; il y a 0,15 $ qui sont payés par le citoyen ? le citoyen paie actuellement, et c'est en fonction de la capacité financière de chacun; et finalement il y a 0,12 $ qui proviennent des régimes complémentaires d'assurance santé qui sont gérés par nous, par le privé.

Donc, actuellement, les régimes complémentaires couvrent les soins dentaires, les médicaments d'ordonnance, les soins paramédicaux, les orthèses, les prothèses, les frais ambulanciers, les chambres privées ou semi-privées à l'hôpital ainsi que les soins d'urgence encourus à l'extérieur du Québec. Sur une base individuelle, les assureurs offrent en plus l'assurance voyage dont nous venons de parler et l'assurance pour les nouveaux résidents et les visiteurs au Canada durant leur période d'attente pour être accessibles au régime public. C'est payé par le privé. Depuis peu, les assureurs ont développé les assurances contre les maladies graves et les assurances pour les soins de longue durée pour compléter leur offre d'assurance complémentaire dans le cadre du vieillissement de la population.

Donc, quand on regarde ça actuellement, ce que le privé fait, est-ce qu'on a diminué la qualité ou l'accès aux soins du système public? On pense que non. Si le gouvernement avait à revoir ses décisions passées, renoncerait-il à autoriser les couvertures actuelles au secteur privé? Je ne crois pas qu'on refuserait de couvrir, ici, au privé, les soins, les chambres semi-privées dans les hôpitaux. Je ne crois pas qu'on renoncerait à nous permettre d'assurer les gens à l'extérieur du pays. Malgré les préjugés défavorables envers le privé, j'ai rencontré très peu de gens qui sont contre l'assurance voyage, très peu de citoyens qui sont contre l'assurance pour les maladies graves ou qui sont contre l'assurance pour les soins de longue durée. Alors, je me pose la question: Pourquoi autant de réticence à ajouter une protection à l'assurance privée? Au contraire, je pense que beaucoup de Canadiens sont prêts à l'utiliser, l'assurance privée.

En fait, les deux tiers des Canadiens sont assurés pour les garanties traditionnelles d'assurance complémentaire privée, et de plus en plus de Canadiens envisagent de souscrire de nouvelles garanties d'assurance contre les maladies graves ou pour les soins de longue durée. Ils font ça parce que ça leur permet d'éviter d'avoir à débourser une somme importante de leurs poches s'ils sont touchés par un événement non couvert par le régime public. Et, étant donné que tout le monde n'est pas affecté de la même façon, dans une période donnée, bien ils acceptent de mettre en commun des risques auxquels ils sont confrontés et de payer une somme prédéterminée pour indemniser ceux qui seront affectés, et ce, pour une fraction de la somme qu'ils auraient à débourser s'ils attendaient d'être touchés.

Alors, si on regarde juste au Québec, par exemple, l'assurance médicaments, c'est disponible sur le privé puis sur le public. Il peut y avoir certains avantages à ce que ce soit couvert par le privé. Par exemple, les couvertures peuvent être plus flexibles en fonction des besoins spécifiques d'un groupe d'employés dans une compagnie; on évite d'avoir deux fournisseurs si l'employeur désire offrir un régime plus généreux que le régime public; l'administration est simplifiée pour les employeurs ayant des employés hors Québec, que l'employeur réside au Québec ou non; la mutualisation fonctionne bien et permet au secteur privé d'offrir des régimes aux petites et moyennes entreprises; et, en plus de ça, bien les assureurs collectifs, eux, ils ont un intérêt à ce que l'utilisation des médicaments soit optimale parce que, dans la majorité des cas, l'assureur couvre également l'assurance salaire. Alors, une des conditions reliées au paiement des prestations d'assurance salaire est que l'assuré invalide poursuive ses traitements.

Donc, ça permet une approche globale. Finalement, le secteur privé développe des programmes de santé et mieux-être grâce aux informations non nominalisées sur les réclamations, sur les médicaments remboursés, sur les clauses d'invalidité. L'employeur est en mesure de mettre en place des programmes favorisant le bien-être de ses employés. Cette tendance s'observe davantage chez les grands employeurs, mais il n'est pas dit que, dans une prochaine étape, ça ne pourra pas profiter également aux PME.

Donc, est-ce que l'assurance privée profite à l'ensemble de la population? Moi, je crois que les assureurs et même le gouvernement ont intérêt à la rendre le plus accessible possible. Donc, l'assurance privée offre ses produits aux citoyens qui veulent une alternative à l'obligation de débourser de leurs poches pour des soins de santé non couverts par le régime public. Et, seulement qu'en 2005, les Canadiens auraient payé 1,9 milliard de dollars de plus de leurs poches si le rôle de l'assurance privée ne s'était pas accru depuis 1998. En effet, en 1998, c'est 16,4 % de la consommation courante des soins de santé que les particuliers payaient de leurs poches, alors qu'en 2005 leur part avait baissé à 15 %. L'assurance privée permet aux citoyens une alternative lorsque le système public ne couvre pas toute la population. Et l'assurance privée, nous disons, ne se développe pas aux dépens du système public, elle complète le système public. Dans la mesure où le projet de loi n° 33 permet l'utilisation accrue de cliniques privées mais qu'il limite l'utilisation de l'assurance privée, il empêche que la classe moyenne ait accès au partage des risques, réservant ainsi aux mieux nantis l'accès à des cliniques privées.

Mon troisième point, c'est d'améliorer le financement à long terme de certaines protections complémentaires. Et le ministre a parlé qu'il voulait qu'il y ait un large débat sur cette question-là, alors ça fait plaisir pour nous de contribuer à ce débat-là.

Pour améliorer l'équité intergénérationnelle du système d'assurance privée, il faut prévoir que les aînés puissent continuer à souscrire à certaines formes d'assurance santé complémentaires après la retraite. Pour ce faire, il faut passer, du moins partiellement, d'un système de financement par répartition, qu'on appelle «pay-as-you-go», que vous connaissez ? pour ceux qui sont familiers avec les régimes de retraite ? à un système de financement mieux capitalisé qui permettra aux citoyens actifs de commencer à prévoir une protection pour les coûts de santé non couverts par les régimes publics après la retraite.

On a l'habitude, et tout le monde connaît ça ? puis le Québec a fait d'énormes progrès dans les années soixante ? de développer et de favoriser des régimes capitalisés avec les régimes de retraite. Ça permet d'avoir une planification financière pour le moment où nous cesserons de travailler. Mais pour les soins de santé non couverts par le régime public bien il n'y a pas actuellement de planification à long terme. Les assureurs privés ont commencé à offrir des assurances maladies graves et des assurances soins de longue durée basées sur le principe de la capitalisation. Et, si les clients en achètent, c'est parce que ça répond à un besoin. Donc, notre population s'intéresse déjà, je crois, à leur propre financement à long terme de leurs dépenses.

L'assurance soins longue durée est une source de prestations venant s'ajouter à celles que procurent déjà les régimes publics en cas de diminution des capacités fonctionnelles ou cognitives. Ces prestations peuvent servir, avant comme après la retraite, à acquitter des frais médicaux, paramédicaux ou de logement ou d'autres frais connexes découlant d'une perte d'autonomie fonctionnelle. Quant à elle, l'assurance des maladies graves prévoit le paiement d'une somme forfaitaire à l'assuré, peu importe son âge, s'il survit pendant une période déterminée, après qu'une maladie prévue au contrat a été diagnostiquée ou qu'un trouble médical est survenu. Il est à noter que l'assuré peut utiliser l'argent comme bon lui semble, sans avoir à fournir des reçus ou s'il choisit de se faire soigner au privé ou à l'extérieur du Québec, voire du Canada, sans que le médecin ait à fournir des explications sur les services de santé prodigués.

À la fin de 2004, 56 000 polices maladies graves et 8 000 polices soins de longue durée étaient en vigueur au Québec. C'est peu. Mais nous souhaitons que le gouvernement définisse, le plus tôt possible, les services qu'il entend offrir dans le système public pour permettre aux citoyens d'élaborer maintenant, en prévision de leur vieillissement, leur propre planification financière en combinant un dosage approprié d'assurance privée et de protection par le régime public.

Nous sommes prêts à discuter plus avant de ces trois points avec le gouvernement.

n(10 h 30)n

Le Président (M. Copeman): Merci, M. Charest. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, afin de débuter notre échange.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Je me suis rendu compte que, dans mes remarques, j'ai oublié de saluer personnellement la critique de l'opposition. Ce n'est pas par impolitesse ou simple distraction. Je m'en excuse et je me permets de saluer son retour parmi nous. Tantôt, j'ai parlé d'un film, Le jour de la marmotte, où on se réveille, où on revit le même jour continuellement; j'ai un peu l'impression de revivre des événements antérieurs aujourd'hui. Puis aussi il y a Yogi Berra qui disait quoi: «It's déjà-vu all over again»? Mais je suis certain que, comme d'habitude, nos échanges seront très constructifs. Et d'ailleurs il y a, dans ses remarques, plusieurs choses que j'aimerais relever, mais je ne le ferai pas aujourd'hui pour laisser le temps de discuter entre nous. On aura d'autres forums, elle et moi, pour échanger sur ces questions-là. Juste dire le brin de nostalgie que j'ai ressenti lorsqu'elle parlait de la profession médicale, en me souvenant avec nostalgie que, quelques mois à peine, ici même, elle me reprochait d'être le véhicule du pouvoir médical. Il faut donc conclure que la perception a changé.

Parlons de la question fondamentale, que vous soulevez, sur l'assurance privée. J'aimerais faire quelques remarques parce que ça m'apparaît important de bien cadrer le débat, notamment lorsque touche au financement. On s'est rendu compte, en commission parlementaire, que la situation est pas mal plus compliquée qu'elle ne le paraît, et, plus on approfondit, c'est comme un oignon dont on enlève les couches une après l'autre pour se rendre compte que les diverses solutions qui sont présentées ne sont pas vraiment porteuses. Je vous donnerais d'abord le premier défi que je lance à tous. Et je ne connais pas un pays au monde qui a un système privé parallèle d'assurance privée ? puis je ne blâme pas les pays d'avoir ça, là; c'est des pays aussi socialement avancés que nous, en Europe de l'Ouest, par exemple, qui ont des systèmes semblables... mais il n'y a aucun de ces pays-là qui a des niveaux de dépenses publiques inférieurs aux nôtres et à un rythme de dépenses publiques inférieur au nôtre. Alors, de dire que l'assurance privée peut éventuellement donner une liberté de choix supplémentaire et une flexibilité plus grande aux citoyens, oui; de dire cependant que ça réduit les coûts de la santé, non.

Et je pense qu'une des failles fondamentales de votre démonstration à mon avis, c'est justement l'exemple que vous utilisez, de l'assurance voyage. L'assurance voyage, ce n'est pas des services assurés, puis ils ne le seront pas. Il n'y a pas de gouvernement qui va introduire le financement public de l'assurance voyage. Vous le prenez en charge parce que ce n'est pas financé publiquement et ce n'est pas dans la panier de services. Moi, je suis bien content d'avoir de l'assurance voyage quand je me déplace à l'international, mais je ne dirais pas que c'est une démonstration de ce que vous avancez. Ce serait une démonstration si le gouvernement se retirait du financement de certaines parties du système de santé et vous le transférait. Ce n'est pas ce qui s'est passé, là. Et essentiellement le panier de services, il est ce qu'il est puis il ne se modifiera pas.

Est-ce que vous pensez ? et je vois que vous dites que c'est un premier pas quand même qu'il faut saluer; est-ce que vous pensez ? que, par exemple, dans le domaine de l'assurance collective, il y a des employeurs de certains types d'entreprises qui seraient intéressés à offrir le type de couverture qui est proposé dans le projet de loi?

M. Charest (Yvon): Je vais répondre à vos deux questions. La première, sur l'assurance voyage, c'était dans le panier de santé, au Québec, il y a 40 ans. C'est ça. Mais, quand la décision s'est prise il y a 40 ans puis que le gouvernement s'est dit: J'ai tant de ressources, je vais les mettre sur ce qui est essentiel, ils ont sorti du champ de la protection hors Canada, et c'est l'assurance privée qui a réglé ça, ce qui fait qu'aujourd'hui il n'y a aucun citoyen québécois qui se plaint que la RAMQ ne paie pas pour l'assurance voyage parce qu'il existe un système. Et le système bénéficie surtout à la population à revenus moyens, qui, elle, via l'assurance, peut absorber plus facilement ces coûts-là. Alors, peut-être que, dans 20 ans, M. le ministre, on va parler de soins à longue durée qui sont offerts par le privé, puis le gouvernement va être content de ne pas être dans ce champ-là. Puis ça va lui permettre de mieux gérer l'essentiel avec les ressources qu'ils ont. C'est tout ce que je dis.

M. Couillard: C'est que ça ne diminue pas les dépenses publiques.

M. Charest (Yvon): Ça a diminué, en 1960 quelque chose, les dépenses publiques et ça a diminué, et c'est pour ça que je dis que les pas passés ont permis à chaque fois au gouvernement d'utiliser l'essentiel de ses ressources sur ce qu'il considérait prioritaire. Et, si le gouvernement prend une décision similaire à celle-là en 2006, ça va avoir le même effet.

Par contre, si le gouvernement dit demain matin: Les chambres semi-privées, on n'aime pas ça que l'assurance privée assure ça, bien, demain matin, il y a 220 millions que les Québécois paient pour des chambres semi-privées qu'ils vont arrêter de payer aux hôpitaux, puis les hôpitaux vont devoir trouver 220 millions. C'est pour ça que je dis: À chaque jour, on doit se questionner: Est-ce qu'il n'y a pas un élément de la prestation globale de soins de santé qui peut être au privé?

Maintenant, sur votre deuxième question, nous avons, malheureusement ou heureusement ? je ne sais pas ce que vous souhaitez, M. le ministre ? la même réponse qu'au mois de juin. Nous ne croyons pas que l'ouverture va être suffisamment grande pour intéresser un médecin à se désengager et à offrir des services et pour intéresser un employeur à ajouter ce bénéfice-là dans des assurances collectives. Nous ne croyons pas. Nous aimons l'ouverture parce que, dans la vie, il n'y a rien de mieux que de développer une structure. On vous l'a dit au mois de juin et on vous la répète. On aime la structure parce que ça permet de discuter réellement. Puis, en fonction des développements futurs, peut-être que, oui, à ce moment-là, ça va permettre, ça va intéresser des employeurs à ajouter ce bénéfice-là dans leurs contrats, mais aujourd'hui on pense que l'ouverture n'est pas assez grande.

M. Couillard: Mais, vous savez, pour nous, clairement, actuellement, dans la situation des effectifs, on ne veut pas poser aucun geste qui facilite ou encourage le désengagement des médecins, là. Ce n'est pas dans cette optique-là qu'on est. Maintenant, est-ce que les choses, au cours des années prochaines, peuvent changer avec l'évolution des effectifs? Je donne toujours l'exemple de pays européens, là, qui ont des différentes façons de faire que nous et qui sont dans des situations d'effectifs totalement différentes de la nôtre. Et ça, je pense qu'il faut toujours garder ça en mémoire.

Donc, évidemment, votre réponse sur la disponibilité des produits me met en mémoire également les remarques que les juges de la Cour suprême eux-mêmes font dans leur jugement, lorsqu'ils indiquent qu'il n'est pas nécessaire d'avoir de prohibition d'assurance privée, parce qu'il n'existe, dans d'autres provinces, pas cette prohibition, puis il n'y a pas plus d'assurance privée un peu pour les mêmes raisons que vous venez de me dire là. Il y a des provinces canadiennes qui n'ont pas, dans le texte de loi, la prohibition à l'assurance privée pour les services assurés par le public, exactement dans la logique que vous introduisez. Ce que nous faisons actuellement, c'est de dire que, si les citoyens veulent éventuellement être propriétaires de cette assurance, c'est uniquement lorsque les services sont donnés par les médecins désengagés. Et c'était leur choix de le faire. Mais ça ne change rien au rythme de croissance des dépenses de l'État sur la santé, ça ne change rien à la question plus large de l'accès. C'est une simple question à mon avis éthique et presque légale, là: Si, aujourd'hui, tous les gouvernements confondus, autour de cette table, au cours des dernières années, n'ont jamais freiné l'ouverture ou le développement de systèmes de cliniques privées par médecins désengagés ? exemple, la Clinique d'orthopédie, à Montréal ? comment peut-on justifier qu'on permet à la personne d'aller contribuer directement pour se faire faire une prothèse... tous gouvernements, ici, confondus, puis qu'on ne laisse pas une personne s'assurer pour ça?

Alors, ce qu'on introduit comme limite ? parce que, si on suit cette logique, on ouvrirait très largement, comme vous l'avez recommandé, à l'assurance privée pour tous les services donnés par les médecins non participants; ce qu'on introduit comme limite ? c'est que nous croyons que, collectivement, c'est acceptable uniquement pour les situations où nous sommes en mesure d'offrir une garantie d'accès, à l'intérieur de délais médicalement raisonnables, à l'ensemble de la population qui, dans la plus grande partie, n'a pas les moyens de toute façon d'obtenir cette assurance aux coûts que ça va représenter.

Est-ce que vous avez, pour nous illustrer, déjà fait une évaluation? Supposons qu'un assureur voulait faire ça. Est-ce que vous avez, dans votre industrie, fait une évaluation du coût éventuel de la prime que ça représenterait de s'assurer pour ces trois chirurgies-là quand on est un travailleur, disons, de 40 ans, là, qu'on est dans un régime collectif?

M. Charest (Yvon): En fait, il y a deux questions dans la vie: il y a la question d'intérêt puis il y a la question de données. Vous avez préciser ce matin, là, que, si un médecin est prêt à offrir le service, il faut qu'il donne l'ensemble du service, incluant le préopératoire, le postopératoire. Puis, j'imagine, avec toutes ces précisions-là, aujourd'hui ce serait plus facile de faire le calcul qu'avant. Mais, étant donné qu'on ne voit pas vraiment pour nous d'intérêt pour des clients d'ajouter cette protection-là dans leur contrat d'assurance, on n'a pas fait les calculs, M. le ministre.

M. Couillard: Parce que j'ai en mémoire un événement récent dans le secteur public, où on a demandé à certains groupes d'employés de la fonction publique s'ils voulaient obtenir un régime de protection dentaire supplémentaire ? je pense que ça représentait 50 $ par mois, de plus ? puis la réponse a été négative. Alors, dans les faits, compte tenu du coût réel ? et une des vertus de ce débat-là, c'est de mettre en valeur les coûts réels de la santé ? compte tenu des coûts réels de ces procédures qu'on doit assurer, du fait que les contrats d'assurance doivent couvrir toute la continuité des soins, y compris la réhabilitation, à mon avis ce seraient des produits quand même relativement coûteux par rapport à ce 50 $ que je viens de vous mentionner.

n(10 h 40)n

M. Charest (Yvon): ...que c'est des produits coûteux, mais, vous savez, c'est le principe même de l'assurance.

Dans toute organisation, on a des gens qui sont invalides, qui ont eu la sclérose en plaques, dont la facture de médicaments est très importante, puis il y en a d'autres qui sont en très bonne santé, et c'est ce qui fait que pour tous les gens les gens paient la prime moyenne. Quand on parle d'opération à la hanche, au genou puis aux cataractes, c'est une fréquence beaucoup plus faible que les soins dentaires, où à peu près tout le monde a des dépendants puis tout le monde a une facture annuelle.

Par contre, je souligne, puis je trouve ça intéressant, votre exemple sur les soins dentaires. C'est qu'au lieu que tous les citoyens fassent pression sur le gouvernement pour être assurés pour tous les soins c'est un mécanisme qui permet à chaque groupe d'employés, dépendant de l'industrie où ils sont, dépendant de leur situation salariale, de décider ce qu'ils sont prêts à se payer puis ce qu'ils ne sont pas prêts à se payer.

M. Couillard: ...au passage également corriger un élément de la déclaration de notre collègue d'Hochelaga-Maisonneuve sur l'assurance privée: nulle part n'est-il inscrit que, pour avoir accès à la garantie d'accès, il faut être titulaire d'une assurance privée. Ça n'a rien à voir. J'ai cru comprendre, dans vos remarques, que vous aviez la perception que, pour être inscrit à la garantie d'accès, il fallait être titulaire d'une assurance privée. Ce n'est absolument pas le cas. Il n'y a aucun caractère obligatoire à la propriété d'une assurance privée. Je pense que c'est très important de le dire.

Parlez-moi donc un peu, parce que c'est un produit dont on entend parler ? puis je profite de votre présence pour me faire éclairer là-dessus ? de la question de l'assurance pour les maladies graves. Est-ce que j'ai bien compris qu'actuellement c'est légal ? et je crois que ça l'est ? et dans la pratique également, de pouvoir avoir une police d'assurance où, en cas de maladie grave, on peut aller chercher des soins, je ne sais pas, moi, à Boston ou ailleurs, sans validation préalable et tout simplement avec le contrat d'assurance?

M. Charest (Yvon): ...alors, je vais vous faire la comparaison avec un contrat d'assurance vie traditionnel, que vous connaissez, et un contrat d'assurance vie où les bénéficiaires ont un montant d'argent au décès de l'individu.

Alors, c'est très facile à comprendre pour tout le monde. L'assurance maladies graves, c'est quoi? C'est que l'assuré reçoit un montant d'argent à partir du moment où un diagnostic de médecin dit que, pour une liste de maladies incluses dans le contrat, que malheureusement il y a le diagnostic puis il est atteint de la maladie. Alors, la liste de maladies peut varier de 15 à 25. Tout est basé sur le diagnostic. À partir du moment qu'il y a le diagnostic, si vous êtes assuré pour 75 000 $, bien vous avez 75 000 $ à votre disposition. Et le 75 000 $, ça peut vous permettre d'avoir un aidant; ça peut vous permettre de rénover, modifier votre maison si vous avez besoin de la modifier parce que vous êtes rendu handicapé; ça peut vous permettre d'aller financer des soins, que ce soit hors Québec ou même hors Canada. Vous avez un montant d'argent à votre disposition, et c'est vous qui décidez de la façon la plus appropriée de dépenser ce montant-là. Et, quand je dis que c'est intéressant, M. le ministre, sur un débat à long terme, vous savez, il y a deux provinces au Canada qui chargent encore ce qu'on appelle une taxe de vente sur des produits d'assurance, et...

M. Couillard: ...dire que le Québec.

M. Charest (Yvon): ...dont le Québec. Mais, quand on regarde une perspective à long terme...

M. Couillard: Excusez, on veut savoir c'est qui, l'autre.

M. Charest (Yvon): L'autre, c'est l'Ontario.

M. Couillard: O.K.

M. Charest (Yvon): Alors, quand on regarde une perspective à long terme pour le financement puis l'exemple de produits que je vous donne, bien ça fait autant d'individus qui prennent en main leur situation financière lors d'une maladie, ce qui fait que ça met relativement moins de pression sur le gouvernement.

J'ai un de mes amis qui attend, là, que sa maison soit rénovée parce qu'il est rendu handicapé, puis il est sur une liste d'attente qui est actuellement de 18 mois, ce qui fait que ce produit-là, il est intéressant dans la planification à long terme. Et ce serait le produit idéal que le gouvernement pourrait dire: Bien, la taxe de vente sur les produits d'assurance, ça m'amène beaucoup d'argent, puis ce serait difficile pour moi de modifier, mais je suis prêt pour ces produits-là qui viennent d'être créés, qui vont aider le financement à long terme, de dire: Je ne chargerai pas de taxe de vente. Ça va permettre d'avoir un prix plus accessible puis ça va permettre d'envoyer le message, dans la bonne direction, à vos concitoyens.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. Charest, M. Millette, bienvenue de la part de l'opposition officielle.

M. Millette, vous nous avez parlé de l'assurance voyage. Vous l'avez présentée dans votre mémoire, mais doit-on comprendre que c'est une assurance complémentaire, que les services de base sont financés pour tous les Québécois, où qu'ils soient dans le monde?, c'est lorsqu'ils coûtent plus cher que les voyageurs prennent une assurance complémentaire?

M. Millette (Yves): Effectivement, ce que vous dites est vrai. C'est pour les soins complémentaires, sauf que, fin des années quatre-vingt, la Régie de l'assurance maladie octroyait quelque chose comme 850 $ par jour, là ? je ne me souviens pas exactement du montant ? pour les soins, pour les frais encourus à l'étranger, alors qu'aujourd'hui c'est de l'ordre de, si je me souviens bien, c'est quelque chose comme 110 $ par jour...

Une voix: ...

M. Millette (Yves): ...maximum.

Donc, la différence, on voit maintenant que les Québécois qui voyagent à l'étranger ont à assumer, soit directement soit à l'intérieur d'une assurance voyage complémentaire, tout ce qui est l'excédent des coûts de 110 $ par jour.

Donc, on voit que le privé, dans ces cas-là, a pris carrément la place du public pour une bonne partie des soins à l'étranger. On connaît la même chose depuis la fin des années 1990 ? je pense que c'est en 1998 ? pour les nouveaux arrivants au Canada, où avant les nouveaux arrivants étaient couverts par la RAMQ dès le premier jour, alors qu'aujourd'hui il y a une période d'attente de trois mois qui est comblée par de l'assurance privée, encore une fois.

Mme Harel: ...de l'assurance voyage, il demeure que c'est une assurance pour couvrir les coûts excédentaires dans les pays où les frais ou peut-être le taux de change finalement font en sorte que les frais de santé excèdent le coût déboursé ici même, au Québec. Est-ce que c'est ce qu'il faut comprendre?

M. Millette (Yves): ...mais, par exemple, comme la majorité des Québécois voyagent aux États-Unis, ça excède de beaucoup ce qui est payé par la RAMQ.

Mme Harel: Mais ça, c'est un choix parce que, s'ils rentent au Québec, ils vont recevoir les soins de santé sans avoir à débourser. Leur choix, c'est de voyager à l'étranger et, à ce moment-là, d'avoir à payer un supplément parce qu'à l'étranger ça coûte plus cher qu'ici, en fait.

Je reviens à une question de fond, je pense, qui est celle d'être traité avec égalité devant la maladie. Je comprends que votre mémoire positionne les orientations de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes comme étant en faveur d'un système public et se positionnant comme complémentaire au système public, mais l'orientation de fond, c'est d'être traité avec égalité devant la maladie. Il y a beaucoup de choses dans le fond qui font que les gens ne sont pas égaux dans une société, là, mais c'est un choix de société de dire: Devant la maladie, on va être traité également et on n'aura pas, si vous voulez, de soins parce qu'on a plus d'argent. On va avoir les mêmes soins, et toute la question, c'est de gérer l'accès à ces soins pour faire en sorte que, devant la maladie, on soit traité avec égalité.

Vous, ce que vous nous dites, par exemple, dans votre mémoire, à la page 4, vous nous dites que le gouvernement devrait procéder autrement ? et je prends le troisième aspect ? vous dites: Devrait permettre que la couverture de soins en fait s'applique dès la démarche pour la consultation d'un médecin désengagé et non pas uniquement à partir de l'inscription à une liste d'attente ou à l'échéance de la période prévue pour jouir d'une garantie d'accès. Ce que vous dites, dans le fond c'est ça que je veux comprendre. Parce que, si le médecin est désengagé, dans le cas des trois chirurgies ciblées, la personne se présente si elle a des assurances immédiatement.

Alors, que voulez-vous dire, là, par le fait de ne pas avoir à s'inscrire, par exemple, à une liste d'attente?

M. Millette (Yves): En réponse à votre question, Mme la députée, je pense qu'il faut être bien conscients que, l'assurance privée étant complémentaire, elle offre de rembourser uniquement lorsque le régime public ne joue pas. Donc, c'est uniquement dans le cas. Et, dans le cas d'un médecin désengagé, la seule chose qui nous empêche d'émettre des produits d'assurance, c'est la législation québécoise qui avait été contestée devant la Cour suprême. Et, nous, ce qu'on dit, c'est que, si le médecin est désengagé, qu'il a le droit de se désengager et que le citoyen qui veut consulter ce médecin-là doit débourser de sa poche. Les assurances sont, à ce moment-là, une façon de permettre à un citoyen de budgétiser et donc de diminuer le coût pour lui de consulter un médecin désengagé. Autrement, ces coûts-là seraient réservés uniquement à des personnes plus riches.

On pense que c'est à l'avantage de la classe moyenne, lorsqu'un médecin est désengagé, qu'il n'y a pas de remboursement par l'État des frais de ce médecin-là. On pense qu'il y aurait avantage à ce que les couvertures d'assurance privée puissent jouer. On n'entre pas, là, dans toute la question de la dualité de paiement des médecins ou ces choses-là, on se limite véritablement à l'assurance complémentaire tel que c'est notre rôle au... c'est-à-dire lorsque les régimes publics ne paient pas, de toute façon.

n(10 h 50)n

Mme Harel: ...de loi n° 33 prévoit de cesser la prohibition d'assurance privée dans le cas de trois chirurgies: genou, cataracte et hanche. Alors, comment s'applique, là, cette recommandation que vous faites dans ces cas-là?

M. Millette (Yves): Ce qu'on considère, c'est que la recommandation actuelle est trop limitée et dans le temps où la garantie d'assurance privée pourrait jouer, c'est-à-dire dès la consultation d'un médecin spécialiste versus après l'établissement du diagnostic, tout aussi par le fait que les trois opérations qui sont couvertes peut être insuffisant. Et on devrait couvrir plus de possibilités parce que, comme on vous le disait tantôt, comme c'est de la budgétisation, plus il y aura un nombre de Québécois prêts à payer une assurance, moins le coût va en être élevé, et donc moins les gens vont avoir à payer. Mais, si les garanties sont très limitées, il y a un nombre moins important de personnes qui vont vouloir y participer, et en conséquence ça va coûter plus cher.

Donc, la raison pour laquelle on demande, lorsqu'il s'agit de coûts non remboursés par l'État, d'être aussi large que possible, c'est de permettre de faire en sorte que les tarifs soient le plus abordables possible pour les gens de la classe moyenne.

Mme Harel: Dans la réponse que vous faites, je comprends que vous interprétez qu'il faudrait, par exemple, à une personne qui détient une assurance privée, disons, pour une hanche, de voir un médecin spécialiste dans le régime public, avant d'avoir accès à une clinique médicale spécialisée.

Une voix: ...

Mme Harel: Non. Alors, pourquoi dites-vous, dans votre mémoire, que vous voulez que la couverture s'applique dès la démarche pour la consultation d'un médecin désengagé? Ça ne s'appliquerait pas en vertu du projet de loi n° 33?

M. Millette (Yves): ...du projet de loi. Pas à notre compréhension, en tout cas.

Mme Harel: D'accord. Bon. Alors, disons que j'aurais intérêt à avoir des explications parce qu'on reste un peu désemparé devant le fait que vous dites que la couverture ne s'applique pas, alors que le projet de loi n° 33, dans le cas de ces trois chirurgies ciblées, prévoit manifestement que ça s'applique. Mais enfin.

Je reviens à ce que vous mentionniez sur la question des maladies graves et puis des programmes d'assurance vieillissement. Je comprends que ce sont plutôt des programmes d'assurance revenu. C'est des programmes d'assurance revenu, et auquel cas, par exemple, si une personne a le VIH, là, elle peut obtenir une assurance revenu qui peut compenser la perte de revenus si elle perd son emploi. Et ce sont des programmes d'assurance revenu, ce ne sont pas nécessairement des programmes d'accès aux soins.

M. Charest (Yvon): Je voudrais faire la précision suivante: c'est qu'historiquement ? tantôt, j'ai parlé d'une assurance vie ? il existe aussi une assurance, depuis très, très longtemps, qu'on appelle l'assurance invalidité, qui est exactement l'assurance revenu: vous êtes invalide, vous avez un revenu à tous les mois. L'assurance contre les maladies graves, c'est différent: un seul versement pour un montant total, un montant important, que le client utilise comme bon lui semble.

Alors, dans une assurance revenu, si quelqu'un est invalide, on lui dit: Tu vas avoir, par exemple, 1 000 $ par mois aussi longtemps que tu es invalide, tandis que, dans une assurance maladies graves, on dit: Tu reçois un chèque, un seul chèque; ce n'est pas 1 000 $ par mois, c'est 75 000 $ et c'est toi qui l'utilises comme bon te semble. Puis je vous donne l'exemple tantôt d'un de mes amis que, s'il avait eu l'assurance maladies graves, il ne serait pas sur la liste d'attente du gouvernement pour la rénovation de maisons de personnes handicapées, parce qu'il aurait utilisé son assurance lui-même, ou il ne serait pas sur une liste d'attente pour avoir des soins à domicile d'un CLSC, parce qu'il aurait utilisé cet argent-là pour avoir une aide à la maison.

J'ai aimé tantôt votre remarque quand vous dites que ce qui est important pour les gens, c'est d'être traités avec égalité devant la maladie. C'est ça, l'assurance: c'est de permettre aux gens à revenus moyens de mettre, de payer un montant raisonnable à tous les mois pour pouvoir, le cas échéant, être traités comme les autres, d'avoir accès à ces services-là, alors qu'une personne qui a des revenus plus importants n'a pas à le budgétiser, dans le sens que, s'il y a un événement majeur qui arrive, la personne va avoir les sous pour les dépenser.

Mme Harel: Mais, monsieur ? excusez-moi, c'est Charest...

Une voix: ...

Mme Harel: ...M. Charest ? ceux qui n'en ont pas, d'argent, eux, ils sont moins égaux que d'autres.

M. Charest (Yvon): Bien, en fait, il faut faire attention. C'est que vous savez toute la force qu'il y a de mettre de côté un montant, si minime soit-il, à tous les mois. Puis les gens qui ont une bonne retraite aujourd'hui, ils ont décidé ou ils ont pris la décision de mettre un 25 $, 30 $, 35 $ par mois, comme régime de retraite complémentaire, en plus de ce qui est permis par le gouvernement. C'est de permettre aux gens de faire l'équilibre entre la pression de consommer maintenant puis regarder nos besoins à court terme versus de planifier pour le long terme.

Alors, moi, ce que je dis, c'est que vous savez très bien qu'une personne qui a des revenus très importants, s'il y a une dépense, si quelqu'un devient invalide puis que la personne a bien des revenus, elle peut rénover sa maison elle-même. Si la personne fait partie de la tranche de revenus moyens, c'est une très grosse dépense. Si la personne s'est assurée contre les maladies graves, bien elle va avoir l'argent disponible. Ça ne règle pas le problème, Mme la députée, des gens qui n'ont pas le revenu, qui n'ont pas les revenus nécessaires pour mettre de côté le 30 $ par mois requis pour s'assurer, c'est bien évident.

Mme Harel: En vous écoutant, M. Charest, j'ai l'impression que toute votre plaidoirie mènerait à la capitalisation d'un régime d'assurance public, disons, qui couvre le plus grand nombre de personnes possible. Vous plaidez pour que ça couvre le plus grand nombre de personnes possible. Vous plaidez que les risques soient très, très partagés. Vous plaidez pour que le financement soit minime, vous venez de le mentionner. Bien, tout ça conduit au rapport Ménard et à la proposition d'un régime d'assurance public contre la perte d'autonomie.

M. Charest (Yvon): En fait, tout ce qu'on fait, nous, c'est: on essaie de répondre à votre préoccupation, à la préoccupation du gouvernement, du financement à long terme des soins de santé au Québec, étant donné le vieillissement de la population. Ce qu'on vous dit, c'est: Quand on compare ce qui se passe pour les régimes de retraite, le Québec a instauré la Régie des rentes dans le milieu des années soixante, a permis des avantages fiscaux pour les gens qui voulaient mettre des sommes excédentaires pour leur retraite. Et dernièrement il y a eu un très bon rapport de la Régie des rentes qui dit: Les Québécois, grâce à la combinaison des deux, ont un revenu de retraite, en proportion de leur salaire juste avant la retraite, drôlement intéressant.

Alors, nous, ce qu'on vous dit, c'est que ce qu'on a réussi à faire pour la retraite, de capitaliser des choses en partie en ayant le coeur public puis en ayant du complémentaire, tout ce qu'on a fait au niveau de la retraite, c'est possible de le faire au niveau de la santé. C'est ça, notre message aujourd'hui. Et c'est pour ça qu'on dit au gouvernement par contre: Dites-nous quel est l'ensemble des services essentiels que vous voulez assurer au niveau de la santé, à long terme, de façon à ce que, nous, le privé, on puisse être en complément et de le dire suffisamment tôt que, si un citoyen veut s'assurer, il sait très bien que, s'il commence à l'âge de 60 ans, la prime va être exorbitante, alors que, s'il commence plus tôt, ça va être drôlement intéressant. Puis c'est dans ce sens-là qu'on dit que, si le panier de services à long terme est précisé, ça va clarifier la situation pour les gens qui vont prendre leur décision eux-mêmes: Est-ce que je rajoute un produit d'assurance de soins de longue durée, par exemple?

Mme Harel: Moi, je me réjouis, M. Charest, là, que vous nous parliez de la bonne santé financière du régime des rentes du Québec. Je m'honore d'avoir été la ministre responsable, en 1997, de sa capitalisation accrue avec une augmentation des primes évidemment, là. Mais il fallait y arriver, là, sinon il y avait danger à l'horizon. Alors, que pensez-vous, là, de la proposition de Jacques Ménard, président du comité sur la pérennité du système de santé et de bien-être mis en place, là, par le gouvernement, proposition en fait qui reprenait celle du rapport de Michel Clair, à savoir la mise en place d'un régime d'assurance contre la perte d'autonomie, d'un régime public?

n(11 heures)n

M. Charest (Yvon): Nous, ce qu'on dit, l'industrie, l'ACCAP, l'industrie de l'assurance de personnes, c'est de dire: Au niveau de la retraite, le gouvernement a un régime public et il a permis au privé d'avoir un régime complémentaire. Ce système-là fonctionne assez bien.

Dans la mesure où le gouvernement est préoccupé sur le financement à long terme des soins de santé, notre position, c'est de dire: Il y a moyen d'avoir des produits, sur base de capitalisation, dans la santé tout comme il y en a dans la retraite. Il y en a deux actuellement que les assureurs ont commencé à développer: les maladies graves puis l'assurance soins de longue durée. Puis on dit: Ces produits-là, ça peut être un complément intéressant à un régime public.

Dans la mesure où vous croyez que c'est utile pour les citoyens puis que vous voulez favoriser le financement à long terme, bien on vous dit: Vous pourriez même envoyer un bon message en disant: Bien, ces deux produits-là, ils n'auront pas de taxe de vente. Puis ça va permettre d'autant aux individus à les intéresser pour assurer le financement à long terme de leurs... de santé complémentaires.

Mme Harel: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Il reste six minutes à ma droite. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Bien, merci, M. le Président. Je vais en profiter pour clarifier un point fondamental pour la suite de nos discussions, qui m'apparaît très important et qui de toute évidence nécessite un éclaircissement: le type d'assurance dont il est question ici d'abord couvre également les soins préopératoires ? c'est indiqué dans le projet de loi, je vous l'indique au passage ? mais ce n'est pas une assurance complémentaire. Une assurance complémentaire, c'est l'assurance voyage, c'est-à-dire que vous offrez un produit pour quelque chose qui n'est pas couvert par l'État.

Si l'État décidait de ne plus financer ? absurde, mais je suppose, là; si l'État décidait de ne plus financer ? la prothèse totale de la hanche et que vous offriez une assurance pour la prothèse totale de la hanche, ça, c'est une assurance complémentaire parce qu'elle est retirée du panier de services publics. Comme elle est dans le panier de services publics, ça devient plutôt une assurance duplicative. Ce n'est pas une assurance complémentaire qui est proposée ici. Deuxièmement, elle n'est pas obligatoire en aucun cas, je veux le répéter, là. Nous, on n'oblige personne, au Québec, à détenir ces assurances-là. On permet leur possession ou leur achat parce que, dans ces procédures-là, il y aura une garantie d'accès pour l'ensemble des citoyens, y compris ceux dont parlait la députée, qui n'ont pas les moyens d'obtenir l'assurance.

Mais ce n'est pas une assurance complémentaire dont il est question ici. Je pense qu'il faut que ce soit très clair pour la suite de nos discussions.

Le Président (M. Copeman): Ça va? Alors, M. Charest, M. Millette, merci beaucoup pour votre contribution à cette commission au nom de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes inc.

J'invite maintenant les représentants de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec à prendre place à la table.

Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 2)

 

(Reprise à 11 h 6)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission poursuit ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentantes de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Mme la présidente Bonamie, bonjour. Comme je l'ai fait pour chaque groupe, je vous avise: vous avez 20 minutes pour votre présentation. Je vais vous indiquer quand il en reste trois. Et ce sera suivi par la suite d'un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table.

Je vous prie de présenter vos collaboratrices et de débuter votre présentation par la suite.

Fédération des infirmières et
infirmiers du Québec (FIIQ)

Mme Bonamie (Lina): Merci. Alors, dans un premier temps, Mme Michèle Boisclair, à ma droite, qui est vice-présidente à la fédération, responsable politique des dossiers sociopolitiques; et, à ma gauche, Mme Lucie Mercier, qui est conseillère justement au secteur du volet sociopolitique à la fédération.

M. le Président, M. le ministre, Mme la députée porte-parole officielle de l'opposition, merci de nous recevoir aujourd'hui, en cette commission, pour venir échanger avec vous notre réflexion, nos préoccupations par rapport au projet de loi n° 33 ou du moins, enfin, la lecture que nous en avons faite. Dans un premier temps, je veux situer que la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec a maintenant, dans ses rangs, non pas juste des infirmières, mais bien des infirmières auxiliaires, des inhalos, des perfusionnistes et des gardes-bébés et que nous travaillons dans à peu près toutes les régions du Québec.

Par le dépôt du projet de loi n° 33, le gouvernement veut répondre à un jugement de la Cour suprême intervenu en juin 2005, décision, je le rappelle, qui était divisée et fondée sur une présence de listes d'attente déraisonnables, listes d'attente antérieures à 2005. Nous sommes toujours d'avis, comme nous l'étions lors de la commission parlementaire sur le livre blanc, que la seule obligation qui est faite à notre gouvernement en est une de trouver la solution aux listes d'attente déraisonnables. Le projet de loi n° 33 vise trois objectifs particulièrement, comme nous le précisait M. le ministre ce matin: instaurer un mécanisme central de gestion de l'accès; créer des centres médicaux spécialisés; autoriser l'assurance duplicative pour certains services. Alors, abordons ensemble les trois thèmes retenus ici, aujourd'hui, pour notre présentation pour tenter de comprendre la portée de ces articles-là.

FIIQ+ tient à rappeler aussi qu'elle a toujours et continuera de favoriser la mise en place de solutions publiques. De notre point de vue, l'instauration d'un mécanisme central de gestion d'accès pour des services spécialisés ou encore surspécialisés dans les établissements publics nous semble tout à fait indiquée, et, par lui-même, seul ce mécanisme-là suffirait à répondre à la commande qui a été faite par la Cour suprême.

Abordons les cliniques médicales ou les centres médicaux spécialisés. Soulignons, dans un premier temps, que le Code des professions a subi quelques modifications depuis les années 2000 et qui permettent maintenant aux professionnels de former des compagnies pour exercer leur profession, et les professionnels de la santé y sont inclus. C'est dans cette conjoncture que nous avons fait la lecture du projet de loi n° 33. Le projet ne nous semble pas écarter la possibilité qu'un centre médical spécialisé puisse être inscrit à la bourse mobilière. Cependant, le projet de loi vient préciser: «Le producteur ou le distributeur d'un bien ou d'un service relié au domaine de la santé et des services sociaux, autre qu'un médecin [...] ne peut détenir, directement ou indirectement, d'actions du capital-actions d'une personne morale exploitant un centre médical spécialisé ou de parts d'une société exploitant un tel centre...» Donc, à la lecture, on comprend qu'il faut être médecin inscrit au Collège des médecins du Québec pour être propriétaire d'un centre médical spécialisé, qu'on soit seul, ou encore former une compagnie de médecins.

n(11 h 10)n

Est-ce que ça veut dire que le propriétaire d'un centre médical spécialisé ? parce que le projet de loi l'oblige aussi à couvrir; s'il est en centre médical spécialisé, il l'oblige à couvrir tout l'épisode de soins: en préopératoire, durant l'intervention chirurgicale et bien sûr le suivi postopératoire... Est-ce que ça veut dire qu'un propriétaire d'un centre médical spécialisé pourra cependant donner en sous-traitance à une entreprise le soutien à domicile post intervention chirurgicale? Et, à ce moment-là, cette entreprise-là devra-t-elle être propriété de médecins, puisque, comme il est stipulé, dans l'article que je viens de vous lire, tout «service relié au domaine de la santé et des services sociaux»?

Est-ce qu'on doit lire de cette façon-là ou est-ce que cette entreprise pourra être carrément une entreprise privée avec aucun propriétaire médecin, parce qu'on sait que, de plus en plus, les entreprises tentent à vouloir ? les entreprises privées ? tentent à vouloir s'implanter de plus en plus dans le soutien à domicile, faute de soutien, de financement publics?

Maintenant, du flou juridique à la confusion. Lors de la conférence de presse que M. le ministre a tenue pour la présentation du présent projet, il indiquait d'un flou juridique, voire même une sorte d'anarchie en termes de structure pour l'existence des cliniques privées avec financement privé. À titre d'exemple, il a évoqué une certaine clinique orthopédique qui pratiquait avec un permis de cabinet privé, là, qui était somme toute illogique, là. Mais c'est comme ça, il y a un flou juridique effectivement qui est exploité là. Mais, en désignant, sous le même vocable de «centre médical spécialisé», tant les cliniques avec médecins participants qu'avec médecins non participants, est-ce que le projet de loi n'emmène pas une certaine confusion aussi? Il est aussi dit que, pour exploiter un tel centre, il devra y avoir un permis délivré par le ministre, mais on ne semble pas, à la première lecture en tout cas, à la lecture du projet de loi... il ne semble pas qu'il va y avoir un permis différent pour les cliniques avec médecins participants que pour les cliniques avec médecins non participants.

Alors, pour le commun des mortels, pour le malade, comment pourra-t-il faire la distinction entre un centre médical spécialisé tenu par des médecins du réseau public avec le centre médical spécialisé où ce n'est pas des médecins participants?

Maintenant, des cliniques médicales ou des centres médicaux. Pour y faire quoi? Lors de la commission sur Garantir l'accès, le ministre, en réponse à une de nos interrogations et comme ce matin aussi, a spécifié que les chirurgies visées par la garantie d'accès ne se feraient pas toutes en centre médical spécialisé bien sûr, puisque les chirurgies ? remplacement total de la hanche ou du genou ? étaient des chirurgies, des interventions à infrastructure trop grande. Mais, contrairement à toute attente, dans notre lecture du projet, on voit que les centres médicaux spécialisés sont autorisés à faire ça. Et non seulement on ne s'arrête pas là, mais on vient dire aussi: Tout autre traitement médical spécialisé déterminé par règlement. Cependant, le projet de loi vient bien spécifier les critères, hein, de prise en compte des risques, bien sûr l'importance du personnel et de l'équipement, le type d'anesthésie et finalement la durée de l'hébergement, qui est habituellement requise pour cette intervention.

Alors, ainsi libellé, nous, on en fait la lecture que c'est toute la petite chirurgie ? je dis «petite» sans que ce soit péjoratif ? mais la chirurgie mineure qui est dirigée vers les centres médicaux spécialisés. Il faut se rappeler qu'au Québec, l'an passé, il s'est fait 300 000 chirurgies mineures dans le réseau public. Alors, une telle ouverture s'éloigne, je pense, des engagements du ministre qui, au cours de cette commission, au printemps dernier, nous affirmait que les centres médicaux spécialisés ne seraient utilisés que pour les volumes de chirurgies excédentaires. Alors là, on voit un écart entre ce que le ministre nous a dit et ce qu'on lit dans le projet de loi, parce que le ministre nous disait: On ne souhaite pas que les prothèses de hanche et de genou soient faites dans les cliniques affiliées, et les cliniques seront utilisées pour dégager de la chirurgie mineure, pour faire plus de temps opératoire, pour faire des prothèses dans les hôpitaux.

Alors, est-ce que le ministre a toujours cet objectif? C'est notre question ce matin. Ou est-ce que le gouvernement, par le projet de loi ? et là j'indique «le gouvernement» ? par le projet de loi, n'est pas en train de placer la sous-traitance de la chirurgie mineure dans tous les centres médicaux spécialisés?

Maintenant, le rôle de l'agence régionale, de l'établissement et des médecins. Une agence pourra proposer au ministre, après consultation de la table des chefs de département de médecine spécialisée bien sûr, que tout établissement qui exploite un centre hospitalier et qu'elle détermine puisse s'affilier à un centre médical pour y faire dispenser bien sûr des soins médicaux spécialisés aux usagers de l'établissement.

Là encore, la proposition de l'agence ne semble pas liée au temps d'attente des listes de chirurgie, là. On ne voit pas, dans le projet de loi, qu'il y a l'obligation que ce soit une liste d'attente qui est déraisonnable visée par ça. Alors que le ministre avait promis à plusieurs reprises que les établissements auraient le choix de se prévaloir ou non d'un centre médical spécialisé, on voit, à la lecture du projet, qu'on leur impose le recours non seulement au centre médical spécialisé, mais au cabinet privé et éventuellement au laboratoire si l'agence régionale, après consultation de la table, l'exige.

De plus, le projet de loi oblige l'établissement, le centre hospitalier, à mettre en place un mécanisme de surveillance pour assurer bien sûr la qualité et la sécurité des interventions des services médicaux offerts en clinique. Mais notre interrogation va dans le sens de ? pas qu'il n'est pas nécessaire de mettre un mécanisme de surveillance, loin de là ? mais comment ceci va se faire. D'après nous, la clinique est autonome, est un organisme autonome. C'est une entreprise privée, une compagnie privée qui détient ça. Alors, en vertu des contrats signés, ils sont autonomes. Alors, de quelle autorité morale ou légale le centre hospitalier aura-t-il pour venir imposer son mécanisme de surveillance à une clinique qui est autonome, une compagnie privée? On ne le voit pas dans le projet de loi.

Maintenant, ce tel mécanisme mis en place, parce qu'il va y avoir un mécanisme de mis en place, on en est certaines, mais qui en aura l'obligation financière? Est-ce le réseau public, à l'entière charge du réseau public? Mais ce même mandat de surveillance ne devrait-il pas plutôt relever des différents ordres professionnels? Et qu'en est-il quand on parle de mécanisme de surveillance de la qualité et de la sécurité des gestes posés? Qu'en est-il pour les centres médicaux spécialisés avec médecins non participants où, là, les ordres ne vont même pas? Alors, ils ne pourront pas aller. Présentement, pour les ordres il est très difficile d'aller là. Alors, est-ce que le projet de loi le prévoit? Nous n'en avons pas fait la lecture. Et comment fonctionnera le traitement des plaintes? Présentement, dans le réseau public, il y a tout un mécanisme. Le processus est très clair, comment le cheminement d'une plainte se fait. Lorsque la plainte va être à déposer dans une clinique médicale spécialisée, quel en sera le cheminement, de ce traitement de plainte là?

L'autre questionnement que nous avons, c'est vis-à-vis l'agrément. M. le ministre précisait encore ce matin que les compagnies ou les centres médicaux spécialisés auront trois ans pour aller chercher, obtenir un agrément. Nous étions étonnés parce qu'en Alberta, où il y a présentement ce genre de centres médicaux spécialisés, ils doivent d'abord avoir leur agrément avant d'avoir la possibilité de signer un contrat avec un centre hospitalier. Alors, pourquoi, au Québec, on ferait différemment? On croit qu'il faut rétablir un véritable pouvoir d'intervention des établissements en ce qui concerne les décisions qui sont directement visées dans l'établissement, donc on pense que ce pouvoir devrait être exercé par la voie de son conseil d'administration, qui représente quant à nous une bonne variété des intervenants de tous les horizons.

Alors, les enjeux aussi liés au coût unitaire. Comment s'effectuera le calcul unitaire? Ce matin, le ministre nous disait que le bénéficiaire n'aura jamais d'argent supplémentaire à verser, même s'il va dans un centre médical spécialisé. Oui, mais à quelque part, si le coût unitaire est supérieur dans cette clinique-là, c'est que le fonds public va avoir à verser encore de l'argent en plus. Peut-être pas individuellement mais, collectivement, nous allons payer plus cher des services qui sont faits en centre médical spécialisé plutôt qu'en centre hospitalier. Nous n'avons pas trouvé la réponse dans le projet. Par contre, on vient dire que c'est les agences qui vont être responsables du budget des cliniques. Oui, mais où ils vont prendre le budget? À même le budget du centre hospitalier? Donc, on va sous-traiter son budget vers la clinique médicale spécialisée, donc diminuer son budget pour le centre hospitalier lui-même. Donc, c'est un sous-financement ni plus ni moins, à moins qu'on ne se trompe à la lecture, là. J'attends bien les réponses du ministre. O.K.

n(11 h 20)n

Maintenant, des services de cliniques ou des laboratoires en PPP. Comment va être le mode de financement des cliniques? Vous nous avez assurés en commission qu'une clinique spécialisée affiliée, ça fait partie du système public, c'est financé par l'État, ce avec quoi nous serions d'accord. S'agit-il juste de la construction et de la gestion ou s'agit-il juste des services qui y sont rendus? Donc, le mode de financement, ici, là, on ne le voit pas non plus dans le projet de loi.

En Grande-Bretagne, pays où on expérimente les PPP en santé, depuis 10 ans, qu'en est-il? Alors, dernièrement, la British Medical Association concluait: «Les faits continuent de démontrer que les initiatives privées dans le domaine hospitalier sont excessivement coûteuses et ne répondent pas de manière satisfaisante à nos préoccupations en regard de l'accessibilité.»

Le règlement des différends. En cas de désaccord ? parce qu'il va éventuellement y avoir des désaccords ? dans l'interprétation ou l'application des ententes entre les centres hospitaliers et les cliniques médicales spécialisées, le projet de loi prévoit un règlement des litiges, mais il est muet sur son fonctionnement et sa nature. Les établissements seront-ils tenus de payer un coût dans ce règlement-là, puisque l'entente va se faire entre une agence régionale, un centre hospitalier et un centre de médecine spécialisée? Alors, les trois parties au contrat devront-elles payer le règlement des litiges, encore là, aux frais du réseau public? Nous sommes d'avis que les causes portées en arbitrage commercial devraient être portées à l'attention du public. Dans le même ordre que les fautes commises, professionnelles dans le réseau public doivent être rendues publiques à la population, on considère que les conflits commerciaux devraient être aussi rendus publics et faire l'objet d'une publication au même titre que les arbitrages de griefs.

Un nouveau pouvoir maintenant au ministre: le ministre peut autoriser un établissement public à louer ses installations à un professionnel non participant. S'agit-il d'effectuer les chirurgies à grande infrastructure, comme la prothèse de hanche et le genou, à des clientèles à haut risque qui donc ne peuvent potentiellement pas être opérées dans une clinique médicale? Est-ce donc dire qu'on va mettre les ressources du secteur public à la disposition du service privé?

Pour les ressources humaines c'est un enjeu majeur que les cliniques, les centres médicaux spécialisés. En effet, le réseau public connaît une grande pénurie depuis plusieurs années, chez plusieurs professionnels, alors que c'est le seul bassin de main-d'oeuvre ici, au Québec, pour aller puiser les ressources humaines pour les diriger vers les centre médicaux spécialisés, particulièrement à Montréal, où la pénurie est très grande. Et on sait très bien que les listes déraisonnables sont surtout situées dans la région métropolitaine, donc visées par l'implantation de ces cliniques. En Grande-Bretagne, lorsqu'on a dévié certaines chirurgies vers les centres de médecine spécialisée, ça s'est traduit par une détérioration des conditions de travail du personnel dans le réseau public entraînée par un alourdissement de la clientèle. Dans notre jargon, on parle d'«alourdissement». Donc, on voit la clientèle avec plusieurs pathologies, risques élevés qui est en centre hospitalier. Donc, la lourdeur de la clientèle se fait sentir chez les professionnels.

Le Président (M. Copeman): Mme Bonamie, il vous reste trois minutes.

Mme Bonamie (Lina): Oui. Par ailleurs, le gouvernement anglais a négocié des conditions de transfert des établissements... personnel vers les cliniques spécialisées. Au Québec, on a créé un précédent à l'instauration des GMF et on pense qu'il serait intéressant de regarder cette avenue-là en conséquence pour les centres médicaux spécialisés.

En conclusion, nous réitérons qu'il n'est pas nécessaire de procéder à la mise en place des centres médicaux spécialisés avec médecins non participants pour répondre au jugement de la Cour suprême. Le gouvernement devrait plutôt investir dans les centres ambulatoires introduits, à la fin des années quatre-vingt-dix, par la réforme Rochon et qui présentement n'ont pas le budget suffisant pour vraiment fonctionner en centres ambulatoires qui seraient l'équivalent du centre médical spécialisé qu'on veut introduire par le projet de loi n° 33.

Les membres de la FIIQ, tout comme le ministre, souhaitent une amélioration du réseau de la santé mais en lui en gardant, en lui assurant son caractère public. Et, dans ce contexte, tout élargissement de l'assurance privée duplicative ne devrait être autorisé quant à nous que par loi, par voie législative.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Bonamie. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Bonamie et Mmes Mercier et Boisclair, je crois, avec vous pour votre présence. Et je dois dire que vous avez soulevé des points extrêmement importants, et bien sûr il y en avait tellement qu'on va analyser le contenu de votre mémoire et y apporter des réponses au cours de notre travail subséquent. Mais j'aimerais d'abord vous donner quelques indications sur des points particulièrement cruciaux que vous avez soulevés.

D'abord, je suis entièrement d'accord avec vous, le point du projet de loi qui est le plus porteur d'avenir pour l'accessibilité aux soins médicaux pour tous les Québécois, c'est la gestion des listes d'attente. On en a des démonstrations, là, presque mensuelles ces temps-ci, dans le réseau. À partir du moment où un établissement se dote de ça, on voit presque immédiatement les listes d'attente fondre littéralement, parce que d'abord il y a uniquement les patients qui attendent vraiment la chirurgie qui sont dessus, puis, deuxièmement, ils sont suivis individuellement. Et là je pourrais citer des exemples un après l'autre.

D'ailleurs, vous l'avez bien souligné également, le problème d'accès est fondamentalement, actuellement, un problème pour les soins spécialisés ? pour l'omnipratique, c'est autre chose ? mais un problème des grandes régions urbaines. Si on regarde les régions en général, on voit que les chiffres sont très près de ce qu'on veut atteindre. Vous avez parlé de ressources pour ça. Il faut quand même noter qu'avec le 50 millions qui est déployé cet automne pour les blocs opératoires on aura triplé, depuis 2003, les montants récurrents consacrés à l'accessibilité aux soins dans le réseau public. Alors, je pense que, là, c'est important de le noter.

Quelque chose qui est très, très important, que vous avez abordé, c'est toute cette question de ce que j'ai appelé à l'époque le flou juridique et un peu l'anarchie, que vous semblez voir se succéder par la confusion, généralement. Effectivement, je vais vous concéder que c'est compliqué, et la raison pour laquelle c'est compliqué ? pour faire un pléonasme ? c'est que ce n'est pas simple. Il faut définir les choses puis éviter de créer des effets secondaires qu'on veut absolument ne pas voir. Par exemple, prenons, sans le citer, l'exemple théorique d'une clinique de chirurgie orthopédique à Montréal avec médecins non participants. Qu'est-ce qui se passe actuellement? Dans les faits, ça fonctionne presque comme un hôpital privé. On va être d'accord avec ça. Légalement, ça utilise le statut de cabinet privé; le docteur X fait la chirurgie. Au bout de la période de quelques heures d'observation, on traverse un rideau puis on se retrouve dans une zone qui devient une zone d'hébergement. Ensuite, on est référé dans une clinique privée de... il en existe, à Montréal, plusieurs. Et ensuite, éventuellement, si on a besoin de soutien à domicile, on est pris en charge par une organisation qui fait ça. Je ne sais pas comment ça marche, la tarification. Est-ce que le docteur charge tout ça au patient puis ensuite il paie les gens ou le patient paie pour chaque épisode? Je n'en ai aucune idée.

Mais ce qui est clair, c'est qu'il n'y a pas de définition légale de ce qui se passe là, premièrement, et, deuxièmement, il n'y a aucun encadrement actuellement pour la qualité, la sécurité des soins. Et je pense qu'il n'y a pas un gouvernement au monde ? puis Dieu sait qu'il y a des expériences multiples, dans le monde, de coexistence privée-publique; il n'y a pas un gouvernement au monde ? où le système de santé public, via le ministre de la Santé de l'État, n'a pas un regard sur la qualité et la sécurité des soins, y compris dans la prestation privée des soins médicaux. Alors, je pense qu'il était essentiel de mettre fin à cette obscurité-là. Maintenant, quand on y met fin, la raison pour laquelle on spécifie que, dans les centres médicaux spécialisés, on peut pratiquer les hanches, genoux, cataractes, et surtout les hanches, genoux entre nous, c'est d'une part pour clarifier ce qui se fait actuellement. Parce qu'il se fait de l'hébergement, ne nous le cachons pas là, il se fait de l'hébergement postopératoire actuellement, dans ces cliniques-là, sous le couvert de soi-disant cabinets privés ou autres mécanismes, sans que ce soit encadré correctement par le texte législatif. Si on ne fait pas ça, si on n'introduit pas une limite très précise des types de chirurgies qu'on peut faire dans ces centres-là, à ce moment-là, on ouvre la porte à quoi? À des hôpitaux privés généraux, ce que nous ne voulons pas.

D'ailleurs, vous allez remarquer que le projet de loi modifie l'assurance maladie... l'assurance duplicative dans certaines conditions qu'on a discutées tantôt, mais réintroduit la prohibition sur l'assurance hospitalisation. Vous aurez probablement remarqué ça, j'espère, à la lecture du projet de loi. C'est un point absolument fondamental. C'est que, compte tenu du fait qu'on définit un centre médical spécialisé comme étant un établissement qui peut pratiquer telle, telle, telle chirurgie avec des conditions d'hébergement suite à la consultation du Collège des médecins et d'encadrement, etc., qui sont, celles-ci, définies, il n'y a pas moyen de faire des hôpitaux privés qui font de tout, là. Si on n'avait pas fait ça, si on n'avait fait que lever l'article d'interdiction de l'assurance hospitalisation sans faire cette prohibition... pardon, cette clarification, il n'y a absolument aucun dispositif législatif qui empêche demain matin quelqu'un de construire un hôpital sur le coin de la rue, faire des hernies inguinales, des colistectomies, des choses comme ça. Et là il y a un danger ? je pense qu'on va être d'accord là-dessus; il y a un danger ? majeur non seulement de problème, mais de glissement important.

Alors, je pense que et je réalise que c'est très compliqué. Je suis persuadé que les citoyens qui m'écoutent, là, ils n'ont pas suivi toute l'affaire. Ils n'ont rien compris probablement, puis je les comprends parce que, moi-même, il a fallu qu'on me l'explique au ministère, qu'on en discute plusieurs fois pour qu'on se mette d'accord sur ce concept-là. Mais, je disais: Ça ne marche pas comme vous, là. Il y a quelque chose qui ne marche pas. Comment ça se fait qu'on dit: «Pas les hanches, genoux» mais qu'on met les hanches, genoux finalement dans les centres privés? Mais la raison, c'est fondamentalement celle-là. Et, lorsqu'on revient à la base du problème, qui est le flou juridique actuel du fait qu'on ne veut pas créer d'hôpitaux privés, qu'on doit réintroduire la prohibition d'assurance hospitalisation, tout ce mécanisme-là alors prend tout son sens.

n(11 h 30)n

Maintenant, pour ce qui est du type de permis, je crois que c'est une suggestion qu'on peut regarder avec beaucoup d'intérêt de spécifier dans le permis: Est-ce que c'est une clinique ? pour que le citoyen sache; est-ce que c'est une clinique ? à médecins participants, non participants? Et, si c'est une clinique à médecins participants, est-ce que c'est une clinique qui a des activités? Ce ne sera peut-être pas sur le permis parce que les contrats peuvent changer, mais que le citoyen soit informé: Voici, dans cette clinique-là, on a également des contrats d'affiliation sans frais pour le patient pour tels types de chirurgie. Donc, je prends cette remarque à bon escient.

Et vous avez raison de rappeler que le gouvernement n'impose pas les cliniques affiliées. Le gouvernement n'impose pas les cliniques affiliées. Le ministre ne va pas envoyer une lettre ? ceux qui me suivront et celles qui me suivront ? à tel ou tel hôpital: Vous devez mettre sur pied une clinique affiliée. Et vous avez raison de le souligner ? puis je le fais à plusieurs reprises, moi, quand je me promène au Québec ? qu'il y a des belles expériences actuellement, dans le cadre du réseau public, qui montrent qu'on peut considérablement améliorer l'efficience ? exemple, ici, à Québec, le centre de l'oeil à Saint-Sacrement; exemple, Jean-Talon, à Montréal, pour la concentration des chirurgies orthopédiques ? qui montrent qu'on peut devenir beaucoup plus efficients lorsqu'on fait une précision de la mission d'un établissement.

Maintenant, ce qu'on dit à l'établissement, c'est: Vous avez cette outil-là également que vous pouvez utiliser. Nous, ce qu'on va vous demander, établissements, c'est d'arriver à produire les résultats correspondant à la politique d'accès ou les cibles qu'on fixe en termes d'accessibilité pour les délais d'attente. Alors, si un hôpital est capable, avec les ressources qu'on a triplées actuellement et qui dans l'avenir seront probablement encore ajoutées compte tenu des demandes de soins qui vont se produire, si un centre hospitalier est capable de livrer, entre guillemets, la marchandise de la garantie d'accès ou de l'accès raisonnable pour sa clientèle, qu'il décide d'utiliser les fonds pour justement maximiser sa chirurgie d'un jour, concentrer les activités, pas de problème. Si par contre l'établissement décide de faire l'expérience d'une clinique affiliée, d'en ouvrir une, on ne peut pas se contenter d'en faire un projet pilote parce que vos questions montrent à quel point c'est complexe. Le texte législatif doit encadrer correctement la surveillance de la sécurité, la qualité des soins, la surveillance du déplacement des personnels, le fait que les médecins qui travaillent là doivent remplir leurs obligations à leur hôpital d'attache, s'ils veulent pouvoir pratiquer à cette clinique-là.

Vous voyez qu'il y a plusieurs éléments qu'on ne peut pas laisser au hasard d'un projet qui pourrait émerger à gauche ou à droite. Il y a eu des petits projets localisés. Comme ici, à Québec, il y a eu des contrats entre l'agence et une clinique de radiologie d'IRM pour faire un volume d'IRM. Je crois que le contrat est terminé parce que les nouveaux appareils ont fait en sorte que la clientèle a été prise en charge dans les établissements. Bon.

Alors, voilà l'exemple de ce qu'on peut faire sous le projet pilote. Mais on ne fera pas de projets pilotes de cliniques affiliées compte tenu de la complexité et des risques associés.

Je pense qu'également il faut parler des autres éléments que vous avez soulignés. D'abord, les coûts unitaires. C'est clair qu'il n'y aura pas de contrat qui va se signer avec des coûts unitaires supérieurs à ce qui se fait dans le réseau public. Et tout le défi ? d'ailleurs, Michel Clair l'a très bien indiqué et lors de sa commission et lorsqu'il est venu en cette Chambre, ici; tout le défi ? est d'orienter justement le réseau plus vers cette question de réflexion sur les coûts unitaires et de comparaison, ce que j'appellerais la compétition dans son bon sens, c'est-à-dire être capables de déterminer combien ça nous coûte de faire telle chirurgie. Et, vous allez voir, probablement que vous le savez déjà, Mme Bonamie, c'est très difficile actuellement, dans nos hôpitaux, d'avoir une idée du coût unitaire des chirurgies. Moi, j'en ai fait l'expérience avant, quand j'étais en d'autres fonctions, et c'est tout un exercice. Évidemment, un hôpital a une grande infrastructure; il faut ajouter toutes sortes de coûts au coût unitaire, puis c'est très difficile de faire la comparaison, mais il faut qu'on en vienne au point où on introduit un facteur de comparaison et de performance et d'utilisation correcte des fonds.

Vous avez employé le mot «sous-traitance». C'est-à-dire que, si on fermait complètement un type de chirurgie dans un hôpital pour l'envoyer complètement ailleurs, ce serait de la sous-traitance. Exemple, l'Hôpital Charles-LeMoyne ? je prends ça comme ça, par hasard, décide qu'il va fermer deux salles d'opération puis qu'il va transférer tout le volume de... correspondant à deux salles d'opération à la clinique affiliée, ça, effectivement c'est de la sous-traitance. Si cependant les deux salles d'opération restent ouvertes et qu'on fait de la chirurgie de volume supplémentaire spécifiquement financée pour le contrat en question, parce que ces contrats, pour être autorisés, devront être assortis à des fonds, hein, et des fonds autorisés par tous les mécanismes habituels de contrôle du gouvernement, à ce moment-là, ce n'est pas de la sous-traitance, c'est du volume de chirurgies excédentaires. Et l'hôpital peut décider de faire ce volume de chirurgies excédentaires dans son milieu. Pas d'objection, absolument pas.

D'ailleurs, prenez aujourd'hui l'Internet du site, là, du ministère, vous allez constater que, dans la majorité des régions, on est fort probablement capable, avec les fonds qui s'en viennent cet automne plus la gestion améliorée, de régler le problème sans avoir besoin d'autres solutions. On va probablement se retrouver avec trois, quatre milieux problématiques à très haute densité et complexité, etc., où il va falloir peut-être être plus imaginatifs, puis on verra si ces choses-là se font.

L'allocation de ressources; il n'est pas question de louer des salles pour faire des prothèses de hanche, là. C'est que ça se fait déjà. Vous savez certainement que ça se fait déjà, depuis plusieurs années. Il y a des hôpitaux qui parfois cèdent leurs plateaux techniques, par exemple, pour faire de l'esthétique, des choses comme ça. Ça se fait dans le réseau, mais on ne le sait pas, on ne le sait pas. C'est-à-dire on le sait puis on ne le sait pas. On le sait entre nous, parce qu'on a entendu parler qu'un tel ou un tel hôpital le fait, mais on n'en a pas de vérification et de monitoring corrects.

Je m'excuse de prendre tant de temps. Parce qu'il y avait tellement de points dans votre point que je pense qu'il était important de les clarifier. Alors, si je résume, là, on est bien content. Il y a un autre point que vous avez mentionné, je crois, qui mérite notre attention, c'est lorsque vous avez parlé de la relation temporelle entre l'agrément et la signature du contrat d'association. Je pense que, là, il y a un point qui mérite d'être étudié, là. Vous avez dit qu'il y a des exemples ailleurs au Canada où c'est comme ça que ça se produit. Certainement qu'on va vouloir regarder cette question-là. Certainement.

Alors, ça fait un peu le tour des réactions que j'avais à vos propos, puis je suis certain que vous allez vouloir poursuivre l'échange maintenant. Mais la gestion d'accès, oui, c'est la mesure fondamentale. Moi, j'y crois énormément, à ça, en termes de résultats; les centres médicaux spécialisés: Pourquoi fallait-il clarifier le flou? J'espère en avoir donné... Entre nous, on s'est compris, je pense bien, mais ce n'est pas évident. Et pourquoi on veut éviter la venue, la survenue non contrôlée d'hôpitaux privés et pourquoi on peut réintroduire de cette façon la prohibition d'assurance hospitalisation? Et enfin toutes les questions d'encadrement des cliniques affiliées. En fait, moi, je suis à la recherche, dans cette commission, de beaucoup de suggestions pour bonifier l'encadrement des cliniques affiliées par rapport au modèle qu'on présente actuellement. Il y a peut-être des moyens. Certains nous diront qu'on en fait trop, d'encadrement. Moi, je pense qu'il faut être très prudents avant de reculer sur l'encadrement de ces cliniques-là, mais au moins, si on peut le bonifier, on est prêts, nous, à recevoir toutes les suggestions, dont celles que vous avez mentionnées pour la question de l'agrément.

Mme Bonamie (Lina): ...vous nous précisez qu'elle est réintroduite, la prohibition d'un hôpital privé. Bon. Ça me rassure ce matin, dans un sens, mais, dans un autre sens, je reste encore un peu préoccupée par le petit ajout... bien, pas un ajout, mais la présence, dans le projet de loi, qui dit que «tout autre traitement médical spécialisé déterminé par règlement du ministre». N'est-ce pas là l'ouverture à rajouter, encore là, puis éventuellement faire... je ne dis pas: Aller jusqu'à un hôpital général, mais ouvrir beaucoup plus grand que les trois chirurgies qui sont présentement dans le projet de loi?

Alors, je trouve que ça vient un peu diminuer votre réintroduction de la non-possibilité de faire un hôpital général.

M. Couillard: Bien, je dirais, Mme Bonamie, qu'il faut s'ajuster à la réalité. Je suis persuadé, dans les cliniques telles que la clinique que je mentionnais tantôt, sans la nommer, qu'il se fait d'autres choses que des prothèses de hanche, prothèses de genou. On commence ça parce que ça a un lien très direct avec la garantie d'accès, là, mais on va voir c'est quoi, la situation sur le terrain.

Et là ce qu'il faut noter, c'est que ? et on a eu souvent cette discussion en cours de commission, de consultation avec tous les groupes qui sont venus ? ces cliniques, autant celles de résonance magnétique que celles de chirurgie orthopédique que celles d'autres types, existent depuis de nombreuses années bien antérieures à notre arrivée au gouvernement, et ce n'est que récemment qu'on s'inquiète de leur présence. C'est-à-dire qu'il n'y a personne, il n'y a pas de groupe organisé, y compris du côté du mouvement syndical, y compris du côté du Parti québécois, qui a fait le moindre geste ou représentation pour que ces cliniques soient fermées ou interdites. Donc, on en fait un acquis et une réalité de la société. Ceci étant, on doit donner un encadrement législatif correct.

Je m'excuse; un autre point que j'ai oublié de couvrir: la question des plaintes. Vous dites: Selon quelle rationnelle? Bien là, la rationnelle est la suivante: c'est que, lorsqu'il y a une ressource privée, l'établissement d'une relation formelle et contractuelle entre la ressource privée et le réseau de santé ? exemple, un... exemple, une ressource intermédiaire ou d'autres types de relation de résidence privée ? l'établissement de cette relation ouvre la porte à l'introduction du mécanisme de traitement des plaintes du secteur public dans ce milieu-là. Pas lorsqu'il n'y a pas de relation formelle, cependant. À ce moment-là, ce sont les ordres professionnels qui jouent également un rôle dans les deux cas mais qui demeurent largement des acteurs. Je pense que c'était important de clarifier ça.

Mme Bonamie (Lina): Est-ce que vous pouvez nous préciser ? j'ai trois autres questions suite à notre échange ? pourquoi, dans vos critères retenus pour la possibilité d'élargir les trois chirurgies, il n'y est pas inscrit qu'il doit y avoir une liste excédentaire? Pourquoi ce n'est pas inscrit dans le projet de loi, dans les critères?

M. Couillard: Quelle liste?

Mme Bonamie (Lina): Et je vais juste compléter, si vous me permettez.

M. Couillard: Oui.

Mme Bonamie (Lina): Dans le coût unitaire, bon, vous avez parlé, là, bien sûr que ce ne serait pas supérieur au coût du réseau, mais pourquoi introduire un minimum à ce moment-là? Vous venez garantir à une entreprise privée qu'ils vont avoir une entrée d'argent minimum. En Alberta, M. Couillard, M. le ministre, il n'y a pas de minimum dans les contrats; il y a un maximum, mais il n'y a pas de minimum. Pourquoi, au Québec, on vient introduire un minimum, assurer à une entreprise privée un revenu minimum? Dans le public, il n'y a pas de revenu minimum assuré dans les centres hospitaliers, alors pourquoi, dans la clinique médicale spécialisée, on y mettrait un minimum?

Et je ne vous ai pas entendu non plus ? bien, on avait beaucoup de questions, là, j'en conviens ? mais sur le soutien à domicile. Est-ce que les entreprises qui vont sous-traiter pour assurer le soutien à domicile vont devoir être propriétés de médecins ou pas étant donné qu'elles sont reliées au domaine de la santé et que l'article dit qu'on doit être médecin pour détenir des actions en capital-actions?

n(11 h 40)n

M. Couillard: Bien, nous, on ne parle que des centres médicaux spécialisés, là. Ces entreprises-là existent déjà, là. Ce n'est pas nouveau, là. Ce n'est pas comme si... Ce qui est important ici, c'est toujours rappeler qu'on ne crée rien. Le gouvernement ne crée pas les centres médicaux privés, ils existent déjà. Mais ils ne sont pas encadrés et définis. Le gouvernement ne crée pas la présence d'agences d'infirmières privées et d'agences de soins à domicile, elles existent déjà, depuis des années, et jamais aucun gouvernement, y compris ceux qui sont dans l'opposition actuellement, n'a fait quoi que ce soit pour changer cette réalité.

Alors, il s'agit de prendre acte de cette réalité, et de la codifier, et de la clarifier. Donc, nous, on clarifie la question pour les centres médicaux où il y a des soins médicaux. Les autres choses existent déjà. Il y a déjà, actuellement... le docteur dont je parlais tantôt déjà utilise des ressources privées probablement pour sa prise en charge à domicile puis sa réhabilitation, là. C'est des choses qui existent en toute légalité, actuellement. Ce n'est pas quelque chose de nouveau, là. On n'introduit pas ça.

Mme Bonamie (Lina): En permettant que ça continue, ne vient-on pas ouvrir justement à tout le domaine privé d'aller s'introduire dans le soutien à domicile, soutien à domicile, qui, même dans le réseau public, est déficient ? on se comprend, là, bon, manque de ressources, qu'importent les ressources, que ce soient humaines ou financières? Mais là, en disant que les cliniques médicales spécialisées, avec médecins participants ou non participants, pourront sous-traiter le soutien à domicile pour les interventions qui sont faites là, alors ne vient-on pas ouvrir beaucoup plus large à l'entreprise privée? Et la clinique médicale spécialisée devra-t-elle... Lorsqu'un patient est opéré dans une clinique médicale spécialisée avec médecins non participants, lorsqu'il lui arrive des complications, allez-vous les obliger à avoir des ressources de garde 24 heures sur 24, sept jours par semaine ou est-ce que le patient devra être dirigé vers le centre hospitalier, à la salle d'urgence, où, là, on n'a aucun lien avec le dossier médical aussi?

C'est ces infrastructures-là qu'on n'a pas vues. Bien sûr, il y a des détails qui ne peuvent pas tous être écrits dans le projet de loi. Mais c'est très préoccupant sur la qualité des services à offrir à la population québécoise.

M. Couillard: Là-dessus, je m'excuse parce qu'on termine. Puis ce point est très important pour les complications et les éléments. Actuellement, parce que je reviens toujours à la situation qui existe, là, vous pouvez parler à des médecins de la salle d'urgence de Maisonneuve-Rosemont, par exemple. Ils vont voir arriver monsieur ou madame untel qui a eu la prothèse de hanche à la clinique X, avec du pus qui sort... puis il y a une infection, une ostéomyélite. C'est six semaines à l'hôpital, les antibiotiques, le remplacement de la prothèse. Bon. C'est comme ça actuellement. Maintenant, ça peut arriver dans un autre hôpital public, également. Il y en a, des complications, partout.

Alors, la question éthique et fondamentale est la suivante: Bien sûr, nous ne refuserons pas les soins à quelqu'un qui a eu une complication d'un traitement donné dans une clinique médicale privée de même que les complications inhérentes à ce traitement-là. On ne peut pas faire ça. Par contre, le projet de loi, vous avez vu, donne la possibilité au réseau public de récupérer certains coûts consécutifs à la prestation d'un acte. Par exemple, et c'est déjà un pouvoir qui existe déjà dans la Loi pour l'assurance maladie, par exemple, en cas de faute médicale avérée ou de complications, bien, qu'on puisse éventuellement récupérer les sommes. Mais je pense que c'est quelque chose qu'il est important de faire parce qu'encore une fois la réalité actuelle, c'est ça, et il n'y a personne qui sait vraiment comment prendre ce côté-là. On ne peut pas tout simplement dire: Bien, écoutez, monsieur, madame, vous avez eu votre traitement par un médecin non participant, on ne s'occupe pas de la complication. Non, bien sûr que non. Tout le monde a accès aux soins.

Par la suite, le cas que j'ai décrit va entraîner des dépenses dans le réseau public de probablement centaines de milliers de dollars pour ce cas théorique que j'ai décrit, mais, s'il s'agit d'une complication inhérente ou d'une conséquence inhérente à la chirurgie dans laquelle il n'y a pas eu de faute démontrée ou de problème particulier, je ne vois pas comment, sous quelle logique, on peut aller récupérer des sommes. Cependant, s'il y a eu un problème avéré devant les tribunaux, avec une décision où clairement les dépenses du secteur public sont en relation avec une faute professionnelle ailleurs, bien on devrait aller chez l'assureur en question récupérer également les sommes du réseau public.

Alors, vous voyez, il y a plusieurs points compliqués, mais le temps est limité pour les couvrir tous.

Une voix: ...une question, si vous permettez.

Le Président (M. Copeman): Dans quelques secondes, Mme Boisclair, s'il vous plaît.

Mme Boisclair (Michèle): Écoutez, ce ne sera pas long. Moi, c'est une question et un commentaire. Lina a soulevé tout à l'heure la question des minimums garantis au niveau des cliniques ou des maximums. J'aimerais aussi que vous reveniez là-dessus parce que, quand on regarde ce qui se passe en Angleterre et pour y être allée, ce qu'on a reçu comme information, c'est qu'entre autres, dans un centre de traitement de Portsmouth, on a passé un contrat avec un nombre garanti de chirurgies qui était un nombre de 500, et ce qui en est arrivé, c'est qu'ils en ont fait 60.

L'argent a été donné par le système public, la NHS, et ils n'ont pas de contrôle là-dessus. Alors, c'est pour ça qu'on a une inquiétude à ce que vous disiez qu'on puisse octroyer officiellement un minimum, parce qu'on doit avoir aussi un système de contrôle pour s'assurer que ces chirurgies-là sont faites. Comment aujourd'hui je peux déterminer que, dans cette clinique-là, je passerais un contrat de 75, 200 ou 300 chirurgies excédentaires quand dans les faits, si je l'investis dans mon système de santé public, peut-être que je vais être en mesure de répondre? Alors, vous comprenez quelle est pour nous l'inquiétude qu'on a parce que c'est clairement évoqué, les problèmes qui ont été vécus. Donc, vous vous imaginez le prix unitaire après de la chirurgie quand tu as eu un budget pour 300 et que tu en fais 60. C'était un danger qu'on avait soulevé par rapport à ça.

Et, quant à la sous-traitance ? l'autre question, c'est la sous-traitance ? M. le ministre, c'est vrai que c'est fait par des cliniques privées, je suis d'accord avec vous. Cependant, qui a la responsabilité s'il y a un problème de pratique, quand vous mettez tout l'épisode de soins? C'était aussi notre question.

Le Président (M. Copeman): Nous avons dépassé de quelque temps, à ma droite, mais allez-y.

M. Couillard: ...brièvement, parce que je ne veux pas retirer de temps à l'opposition.

Le Président (M. Copeman): Bien sûr.

M. Couillard: Je dirais que l'Angleterre d'ailleurs est un bon exemple. Je pense qu'il y a beaucoup de Québécois qui seraient heureux d'avoir le niveau d'accès de soins qu'on retrouve en Angleterre, puis il y a beaucoup de points qui seraient à soulever là-dedans.

Maintenant, la question des minima. Vous soulevez le fait qu'il y a des exemples ailleurs où il n'y a pas de minimum. On va les regarder. Instinctivement, ça me paraît bien difficile que des gens soient intéressés à bâtir une clinique sans garantie minimale de revenus, là, c'est un mécanisme fondamental d'économie. Mais on va regarder les exemples. Vous avez dit qu'il existe des exemples en Alberta, en Angleterre. On va regarder toutes ces choses-là. On s'est beaucoup calqué sur la durée des... par exemple, pour ce qui existe ailleurs, un cinq à sept ans, en général. On a choisi cinq ans.

Mais, pour la question des minimums, on va regarder ça certainement. Et la façon de les calculer, c'est assez simple, hein? Le 50 millions qu'on a annoncé, là, on sait grosso modo que ça va nous permettre de faire... des chirurgies de plus. Ce n'est pas compliqué. On connaît les volumes, on connaît les temps opératoires, on connaît la capacité du réseau. Alors, quand on évalue le nombre de chirurgies à faire, par exemple x, en termes d'efforts supplémentaires pour atteindre les délais raisonnables, c'est relativement simple de déterminer ces volumes-là. Par exemple, si vous prenez aujourd'hui le nombre de personnes hors délai pour la chirurgie de la cataracte en soi-même, ça ne veut rien dire. Si vous divisez ce nombre-là par le volume de cataractes fait dans un hôpital, vous voyez le pourcentage d'accroissement de volume qui doit être fait. Est-ce que l'hôpital peut choisir de faire cet accroissement de volume dans ses murs? La réponse est oui. Est-ce que l'agence peut choisir de le concentrer dans un établissement? La réponse est oui. Est-ce que l'établissement peut décider de faire une relation avec une clinique affiliée? Oui, aussi.

Plus de flexibilité, plus d'options, plus de choix, plus de souplesse dans le réseau de la santé, ça va faire bénéficier la plupart des citoyens, je crois. Merci.

Le Président (M. Copeman): Est-ce qu'il faut mettre fin à l'échange à ma droite? La réponse est oui. Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

n(11 h 50)n

Mme Harel: ...M. le Président. Alors, Mme Bonamie, Mme Boisclair, Mme Mercier, comme toujours, vraiment le mémoire de la Fédération des infirmiers et infirmières, cette fois-ci comme les fois précédentes, depuis que j'ai cette responsabilité, pour l'opposition, de la santé, va droit, là, aux questions essentielles, et je vous en remercie. Ce sera une contribution, là, extrêmement importante pour la suite de nos travaux, lors de l'étude article par article du projet de loi.

Dans le résumé que vous faites, là, dès les premières pages de votre mémoire, vous dites deux choses essentielles. Vous dites d'une part que, pour répondre à la décision de la Cour suprême, là, le moyen utilisé par le gouvernement de mettre en place un mécanisme central de gestion de l'accès était suffisant et que cela répondait en fait au jugement de cour à l'effet qu'il fallait mettre fin à l'existence de délais déraisonnables. Ce que vous dites également, c'est qu'en aucun cas le gouvernement ou le ministre ne peut invoquer la décision de la Cour suprême pour justifier des orientations qui en définitive ne sont que des orientations politiques ? je vous cite ?«favorisant la libéralisation du secteur de la santé et des services sociaux et le développement d'un secteur marchand». Partons de là, hein, pour voir quelles sont les conséquences de ça.

Et là je me rends bien compte, surtout avec la limpidité de votre démonstration en particulier aux pages 8 et 9, que ce qu'introduit le projet de loi n° 33, c'est une manière frelatée de faire de l'ambulatoire plutôt que de consacrer les ressources publiques à développer ce que Marc-Yvan Côté appelait les services aux malades sur pied en fait, là, mais qui est vraiment la médecine ambulatoire, là, celle des chirurgies mineures, celle des chirurgies d'un jour en fait et qui est dans la liste d'attente de chirurgies... plus importante présentement. C'est un choix politique et non pas juridique. C'est un choix politique. Le choix aurait pu être: on va consacrer les marges de manoeuvre publiques au développement de l'ambulatoire. Et ce qui est proposé ici, c'est de le consacrer au développement de centres médicaux spécialisés privés, qu'ils soient avec des médecins participants ou non participants. Bon. Ça, c'est la première chose.

Parce que ce qu'il faut distinguer, c'est l'accès finalement à l'assurance privée, qui est très limité pour les centres médicaux spécialisés non participants, mais on crée des centres médicaux spécialisés pour des médecins qui vont exercer dans le privé avec l'argent du public. Et là ce que vous dites, là, c'est que, dans le projet de loi, il n'y a même pas cette dimension qu'il faut qu'au moins ce soit pour faire des chirurgies excédentaires. C'est ça, l'essentiel, là, je trouve, de votre démonstration, là. Ce n'est même pas indiqué qu'il faut que ce soient des chirurgies excédentaires. Puis plus loin vous faites la démonstration aussi que ce n'est même indiqué qu'il faut que ce soient des budgets excédentaires, parce que chirurgies excédentaires supposent budgets excédentaires. Là, dans le fond ce que vous dites, c'est que ça va être des chirurgies de la sous-traitance et qu'en quelque part c'est l'agence, ce n'est même pas l'établissement, c'est l'agence qui peut décider et l'imposer à l'établissement. Et l'établissement va se voir privé d'une partie d'un budget pour ses propres chirurgies aux fins de sous-traiter finalement ailleurs.

Disons, je simplifie, mais c'est ça, votre démonstration, je pense, puis je vous remercie de la limpidité, là, de la démonstration que vous nous faites. La question. Tantôt, le ministre disait, en réponse, je pense, à Mme Boisclair, bon qu'il allait... récupération des coûts, si tant est qu'il y avait des frais encourus, là, par des suites d'intervention bon inadéquates, etc. Oui, mais seulement pour l'assurance privée des non-participants. Parce que je suis retournée au projet de loi, puis il dit que c'est uniquement les centres médicaux spécialisés qui sont composés des non-participants, c'est eux seulement qui vont avoir à rembourser tous ces coûts, là, qui peuvent être, disons, liés, là, à des problèmes conséquemment à une intervention, mais pas les autres. La loi est à cet effet. Alors là, je me dis: Ma foi, le chat est sorti du sac. Excusez-moi, là, c'est, disons, la première conclusion que je peux tirer.

Et à ce sujet je me demande si les établissements eux-mêmes, leurs conseils d'administration, en vertu de la loi qui les régit, peuvent ou pas refuser de divertir une partie de leurs budgets pour des centres médicaux spécialisés privés? Qu'en pensez-vous?

Mme Bonamie (Lina): Dans un tout premier temps, ma première réaction en réponse à M. Couillard, lorsqu'il dit que ça existe présentement, certaines cliniques, effectivement, on le sait, là, ont des permis de cabinet privé. Elles font un petit peu plus que juste de l'orthopédie, on le sait. Mais mon questionnement par rapport à cette réponse-là, c'est: Est-ce qu'on est obligé de légiférer de la délinquance et la rendre légale? Je veux dire, les citoyens du Québec commencent de plus en plus à passer sur les feux rouges. Est-ce que le gouvernement va légiférer qu'on peut passer 30 secondes après que le feu rouge est là? Non. Alors, pourquoi se voit-on obligé de mettre, dans un projet de loi, des choses délinquantes qui se font dans notre réseau public? Il faut cerner ça.

Au contraire, il faut cerner ça. Qu'une clinique médicale spécialisée soit une clinique médicale spécialisée avec médecins participants faisant partie du réseau public à financement public, nous sommes d'accord avec ça. C'est, ni plus ni moins, le centre ambulatoire qui a été pensé il y a quelques années mais pas mis en place encore partout au Québec, probablement à cause du sous-financement puis peut-être à cause de la pénurie du personnel. Mais ces cliniques ambulatoires là, le centre ambulatoire pensés disaient ouvertement que toute chirurgie mineure devait se faire là, tandis que, là, on dit: On va faire trois grosses chirurgies, mais, de temps en temps, le ministre, par règlement, par règlement, là, pourra... ça, pourra l'agrandir. Je pense que c'est jouer sur les mots, ce n'est pas dire tout à fait ce qui va se faire, parce qu'on sait très bien que, de fil en aiguille et de plus en plus, il va se rajouter de la chirurgie mineure, ne serait-ce que pour dégager du temps opératoire. Et c'est indiqué que c'est pour dégager du temps opératoire dans les centres hospitaliers qu'on va dégager vers les centres médicaux spécialisés. Et comment on va les financer? Là, on tente de regarder ce qui se fait, ce qui est annoncé en PPP, la construction du CHUM, où on a bien indiqué que ce n'était que la coquille qui serait au privé, tout le restant serait au public.

Pour les centres médicaux spécialisés, on n'a aucune spécification dans le projet de loi. Est-ce que ce sera juste la coquille? Est-ce qu'on va participer au financement de la coquille par le réseau public? Ça, on ne trouve pas de réponse malheureusement, et ce matin je n'ai pas entendu la réponse non plus par rapport à ça, et ça, ça nous inquiète. C'est quant à nous dévier des fonds publics vers l'entreprise privée. Mais, si c'est là l'objectif, disons-le. Si on veut permettre qu'il y ait deux vitesses, qui est un petit peu... là, présentement dans notre système puis qu'on veut légiférer par rapport ça, qu'on le dise, que c'est ça. Mais par contre on a vu, au cours de l'histoire, des projets de loi arriver, être adoptés à l'Assemblée nationale, bon ? la politique étant ce qu'elle est ? des changements de gouvernement, des interprétations différentes des lois, etc. Là, on entend un ministre de la Santé qui a un objectif d'améliorer le réseau de la santé. Ça, on n'en a aucun doute. Mais, de la volonté du ministre à l'application sur le terrain, il faut baliser ça, et le projet de loi ne balise pas quant à nous assez.

Certains peut-être aujourd'hui diront: C'est des détails, mais nous, comme acteurs, au quotidien, dans le réseau de la santé, on voit que des fois des détails sont très importants.

Mme Harel: ...comprend que vous nous dites également que le pouvoir d'intervention doit rester à l'établissement. Je pense que ça, c'est un, disons, des messages, là, que vous lancez en commission, aujourd'hui.

Dans votre mémoire ? je reviens à la page 9 ? vous dites: Il se fait 300 000 chirurgies d'un jour, n'est-ce pas? Alors, toute la question, c'est de savoir: Est-ce que le projet, c'est d'en faire plus ou de les faire faire ailleurs que dans l'établissement? C'est ça en fait, hein? Et combien de plus, hein, parce que finalement tout n'est pas dans les processus, c'est dans les résultats aussi, là. Qu'est-ce que c'est, le résultat qu'on recherche? C'est tellement confondant, la lecture du projet de loi, parce que vous avez les centres médicaux spécialisés. Là, comme vous l'avez mentionné, le ministre, par simple règlement, peut ajouter tout autre traitement médical spécialisé sans même que ce soit associé, par exemple, à des chirurgies nécessaires parce qu'excédentaires.

Mais il y a aussi, dans le projet de loi, en plus des centres médicaux spécialisés... vous avez les cliniques médicales associées. Tu sais, il faut faire comme un genre de théorie des ensembles, là. Puis, dans les cliniques médicales associées, là c'est les agences qui peuvent décider, avec l'autorisation du ministre, d'en ajouter et donc, à ce moment-là, d'ajouter quoi, exactement? Parce que c'est ça, la question importante. Dans votre mémoire, vous dites: «Sous couvert d'offrir une garantie d'accès pour trois chirurgies, le projet de loi n° 33 [imprime] des modifications majeures au système de santé et de services sociaux du Québec. Le gouvernement [...] n'a jamais reçu un mandat pour opérer de tels changements au nom de la population du Québec. Ces articles du projet doivent être réécrits puisque leur portée va bien au-delà des annonces ministérielles officielles.»

Et finalement ce que l'on comprend ? on verra avec les travaux qui se feront ici, en commission, au fur et à mesure ? c'est que la chirurgie ambulatoire des rapports antérieurs, cette chirurgie ambulatoire, eh bien, est détournée pour se faire de plus en plus vers des cliniques privées, que ce soit avec médecins participants ou non participants. C'est ça qu'il faut comprendre, hein? Bon. Je vous remercie.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme Bonamie, Mme Boisclair, Mme Mercier, merci pour votre participation à cette commission parlementaire au nom de l'ordre... pardon, de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Sur ce, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 14 heures, en vous rappelant, chers collègues, que nous avons un après-midi bien rempli. J'apprécierai si on pouvait commencer à l'heure. Merci.

(Suspension de la séance à 12 heures)

 

(Reprise à 14 h 6)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission poursuit ses travaux. Je vous ferai part, là, de l'ordre du jour de cet après-midi. Nous allons débuter dans quelques instants ? c'est un après-midi assez chargé; nous allons débuter dans quelques instants ? avec l'audition de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec suivie par l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec; l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec; terminer l'après-midi avec l'Association québécoise d'établissements de santé et des services sociaux. Manifestement, étant donné qu'il y en a quatre, groupes, il faut, je pense, tenter de nous autodiscipliner le plus possible pour qu'on puisse terminer autour de l'heure prévue, c'est-à-dire 18 heures.

Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue à Mme la présidente de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Mme Desrosiers, bonjour. Vous connaissez nos façons de faire. Vous avez 20 minutes pour votre présentation. Je vais vous aviser quand il vous reste trois minutes. Par la suite, il y aura un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table.

Je vous prie de présenter la personne qui vous accompagne et par la suite d'enchaîner avec votre présentation.

Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec (OIIQ)

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien. Merci, M. le Président. Alors, je suis accompagnée de Carole Mercier, qui est directrice-conseil aux Affaires externes dans notre organisme qui est l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.

Alors, d'entrée de jeu, je remercie la commission de nous recevoir aujourd'hui, puis ça, pour le projet de loi n° 33, qui est un projet de loi très important pour lequel malgré tout on n'a pas eu de surprise, puisqu'il est tout à fait dans la droite ligne du livre blanc qui avait été présenté l'hiver dernier, pour lequel on a eu l'occasion de se faire entendre dans cette commission. On a bien compris les objectifs du projet de loi et on y adhère, les objectifs qui sont d'améliorer l'accès aux services médicaux spécialisés et surspécialisés notamment par la création de la gestion des temps d'attente, la création des centres médicaux spécialisés, avec la possibilité pour les agences de créer des ententes avec des centres médicaux spécialisés ainsi qu'avec des cliniques médicales associées et la possibilité pour les citoyens d'avoir un contrat d'assurance privée pour une liste spécifique, là, de chirurgies, notamment trois pour le moment.

Donc, on peut dire que nous agréons à l'ensemble du projet de loi. Dans le cadre de cette audition, on va faire des commentaires très ciblés. Je vais y revenir. Ce sera une intervention, je dirais, relativement brève. Mais en introduction je voudrais juste commenter certains points, là, à caractère plus général. C'est certain que l'importance du mécanisme central de la gestion des listes d'attente nous apparaît une introduction vraiment majeure pour améliorer la performance des services publics et c'est très important parce que mieux seront nos services publics, évidemment mieux la santé de la population... ne s'en portera que mieux.

Cela étant dit, pour ce qui est de la question des traitements médicaux spécialisés pour lesquels les citoyens pourront bénéficier d'une assurance privée, on vous avait déjà fait valoir en audition qu'on espérait que la liste... en fait, les amendements à la liste se feraient par voie législative, et vous avez préféré le proposer par voie réglementaire. On pense qu'il est impensable qu'il y ait un élargissement des services qui puissent être couverts par assurance privée sans qu'il y ait un débat public et bien mesurer l'impact de ces choix. Et la détermination de ces traitements, dans le projet de loi actuel que vous nous proposez, devrait en elle-même, puisque c'est déjà enchâssé dans le projet de loi, devrait en soi justifier que les prochains amendements se fassent dans la même logique, donc par amendements législatifs.

n(14 h 10)n

On a omis, dans notre mémoire, d'insister sur un point sur lequel je me permets maintenant de faire quelques commentaires, c'est aussi la désignation des traitements médicaux qui vont pouvoir être faits hors hôpitaux, pour lesquels le ministre se réserve l'autorité dans le cadre d'un règlement et avec simplement consultation du Collège des médecins. Ça nous apparaît que franchement le seul fait de transférer des traitements médicaux de l'hôpital vers des cliniques, autrement dit d'un milieu hospitalier public vers des cliniques médicales à propriété privée, que c'est plus qu'une simple question médicale, que c'est plus qu'une question scientifique ou une question administrative, on pense que c'est un enjeu d'accessibilité qui est plus large que la question médicale et on pense que le projet de loi devrait mentionner que le ministre devrait consulter plus largement que le Collège des médecins, vraiment, parce qu'il peut y avoir des groupes communautaires, il peut y avoir des groupes, dans certains cas, de femmes si on parle des soins mère-enfants, etc.

Donc, vraiment, ça nous apparaît trop réducteur. On parle, à ce moment-là, de l'article 333.1. On enverra une lettre à la secrétaire de la commission parlementaire comme un ajout à notre mémoire.

Enfin, un autre commentaire général: on est très satisfaits du fait que vous avez introduit, dans le projet de loi, des mesures d'encadrement de la qualité et de la sécurité des services médicaux. Là, on a vu toute la liste, que ce soit l'agrément, que ce soit l'obtention d'un permis, la désignation d'un directeur médical, la possibilité pour le Collège des médecins d'émettre des avis sur la qualité et la sécurité des soins. C'est des éléments sur lesquels on avait insisté dans des représentations précédentes. Néanmoins, l'objet même de notre mémoire aujourd'hui, c'est que, vous allez voir, les principaux amendements qu'on réclame, c'est qu'on pense que ce n'est pas encore suffisant, les mesures d'encadrement de la qualité et de la sécurité.

Donc, dans le cadre de cette présentation, je vais aborder la question du rapport annuel des centres médicaux spécialisés, la question de l'encadrement de la qualité et de la sécurité des soins infirmiers dans les centres médicaux spécialisés et le mécanisme de surveillance de ces mêmes cliniques.

Donc, le projet de loi prévoit que, dans le fond, des centres médicaux spécialisés qui vont être de propriété privée vont dans le fond s'ajouter à la desserte de services publics donc, puisqu'ils vont pouvoir contracter l'État, ou les établissements, ou les agences, enfin ils vont pouvoir contracter avec ces mêmes centres la possibilité de faire des chirurgies ou même, dans le cas des cliniques médicales associées, que ce soient des laboratoires, ou tout autre traitement qui pourrait être jugé utile, en complémentarité avec le système public. Donc, pour nous, comme il s'agit d'une desserte privée de services publics, on pense que le ministre doit prendre tous les moyens, comme il semble vouloir le faire d'ailleurs, d'assurer la qualité de ces services-là, mais on a joute la transparence des résultats atteints par ces cliniques-là. Donc, les prestateurs de services médicaux doivent être imputables et rendre accessibles à l'État et aux citoyens des informations sur la nature et la qualité des services professionnels qu'ils vont procurer.

On avait un certain nombre d'inquiétudes sur le drainage de ressources professionnelles entre le secteur... le secteur privé. On n'est pas revenus là-dessus, mais, comme on maintient notre inquiétude sur les possibilités pour ces entreprises privées là de pouvoir choisir pour baisser leur coûtant peut-être du personnel sous-qualifié, alors on veut, on recommande que la loi que vous allez adopter... que les centres médicaux spécialisés doivent transmettre à l'agence et au ministre un rapport annuel de leurs activités relatives aux services médicaux spécialisés qu'ils vont donner, mais y compris des indicateurs relatifs aux autres services dispensés, aux ressources humaines et à la gestion des risques et de la qualité des services. Et on suggère que le contenu du rapport annuel de ces cliniques soit précisé par règlement du ministre. Autrement dit, elles sont privées, mais c'est l'État qui paie. Donc, le citoyen veut avoir toute la lumière sur les activités faites dans ces cliniques, et ça devrait être prévu par le projet de loi.

Le deuxième point que nous abordons dans notre mémoire, c'est l'encadrement de la qualité et de la sécurité des soins infirmiers dans les centres médicaux spécialisés. Alors, nous, on comprend qu'une chirurgie qui se faisait à l'hôpital jusqu'à maintenant, lorsqu'elle va se déporter dans un centre médical spécialisé, la nature même de cette chirurgie, les exigences que ça requiert, autrement dit la nature même du risque qui est associé à cette chirurgie ou ce traitement demeurent les mêmes, donc les standards à respecter sont les mêmes. Et je ne vous apprends rien en vous disant que les soins infirmiers qui, à l'hôpital, sont une composante très importante des services chirurgicaux, que ce soit en pré, per ou postchirurgie, vont restés un enjeu important dans la desserte de ces services-là.

Donc, on mentionne dans notre mémoire, là, on fait état de tout ce que les soins infirmiers veulent dire en pré, per et postchirurgie. Alors donc, allons à l'essentiel en vous disant que le projet de loi prévoit, justement sur cet enjeu, que le ministre pourrait demander des avis au bureau du Collège des médecins sur la qualité et la sécurité des traitements médicaux, sur la compétence professionnelle des médecins dans ces lieux-là, mais le projet de loi est muet quant à la qualité des soins infirmiers. Nous, on a pensé que c'était peut-être une omission parce que le ministre a prévu, dans son projet de loi, que le Collège des médecins voit son pouvoir actuel élargi au fait de pouvoir faire enquête dans ces cliniques-là. Alors, je voulais rappeler à la commission qu'on est quand même surpris que le gouvernement n'ait pas prévu que ce même pouvoir d'enquête là, que nous avons, nous aussi, à l'Ordre des infirmières, soit élargi. Parce que, résumons la chose, là, il y a à peu près, à ma connaissance, seulement le Collège des médecins et l'Ordre des infirmières qui ont un pouvoir d'enquête qu'on appelle à caractère général, qui dépasse l'inspection professionnelle, qui nous permet d'aller dans un établissement public pour vérifier la qualité des soins et des services et pouvoir faire rapport au ministre soit à sa demande ou soit de notre propre initiative.

Alors, il nous apparaît important de maintenir notre capacité à pouvoir faire enquête dans ces milieux, compte tenu de l'importance en fait de l'aspect, je vous dirais, très central et capital de la prestation des soins infirmiers dans ces cliniques-là. Je veux dire que, par rapport à ça, ce n'est pas un pouvoir dont on a abusé dans le passé, on ne l'a utilisé que deux fois: on l'a utilisé pour l'Hôpital Sacré-Coeur et que pour Saint-Charles-Borromée. Et, pour ce qui est de l'Hôpital Sacré-Coeur, je signale, je vous signale, à la commission, que le Collège des médecins était très heureux à l'époque de pouvoir faire l'enquête conjointement avec nous, puisque nous avons fait une enquête de qualité à caractère conjoint. Parce que de toute évidence, à ce moment-là, on parlait des services à l'urgence d'un hôpital, et la complémentarité infirmières-médecins était telle que de faire des rapports séparés, ça n'aurait pas eu de sens. Donc, je pense que ça a fait ses preuves dans le passé comme pouvant donner beaucoup de mérite. Et on insiste sur le fait que l'expertise spécifique de l'ordre sur la qualité et la sécurité des soins peut s'avérer tout aussi pertinente et nécessaire pour les soins dispensés en clinique médicale spécialisée que ce l'est pour un hôpital, et j'aurais même presque le goût de dire a fortiori: dans une clinique médicale spécialisée privée encore plus même peut-être que pour un établissement public.

Donc, c'est un point, je vous dirais, majeur de notre mémoire, et, dans le cadre du mémoire, bien on se donne la peine de mentionner tous les articles pour lesquels, dans le projet de loi, ça requiert des amendements, parce qu'il y a comme trois endroits, là, que ce soit l'article 337.7, 446.1 et un autre. Et, la Loi des infirmières, c'est l'article 11a. Ça demande comme trois amendements de concordance pour rencontrer cette demande-là de l'Ordre des infirmières. En quelque sorte, c'est une demande principale que nous vous adressons aujourd'hui.

Également, un point. C'est que, dans les ententes administratives qu'il y aura entre un établissement et les cliniques ? je ne me souviens plus, là, on vient mêlé ? les cliniques médicales associées ? oui, je pense que c'est les cliniques médicales ou les centres...

Une voix: ...

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...les cliniques médicales... Incidemment, M. le ministre, il a fallu se faire des petits tableaux pour essayer de se comprendre.

Une voix: ...

n(14 h 20)n

Mme Desrosiers (Gyslaine): Ah bon. Bien, je suis contente de vous l'entendre dire parce que ce n'était pas si évident.

Donc, écoutez, dans les ententes administratives, vous mentionnez, dans votre projet de loi, que l'établissement devra ? voyons, je le cherche, là; oui, c'est ça; l'établissement devra ? établir des mécanismes de surveillance permettant à l'établissement et à ses comités, comme par exemple le conseil des médecins et dentistes ? ou à la limite ça pourrait être le conseil des infirmières ? de s'assurer de la qualité et la sécurité des services médicaux donnés dans ces cliniques. Mais on vous recommande qu'à l'article 349.3 il soit nommément indiqué, parce que vous dites juste d'aller voir la qualité des services médicaux, et, nous, on vous suggère d'ajouter des services médicaux certes, «des soins infirmiers et de tout autre service de santé dispensé» dans cette clinique-là.

C'est bien important que ce soit nommément indiqué parce que, si ça ne l'est pas, l'établissement n'investira pas sa direction de soins infirmiers ou son conseil d'infirmières et infirmiers à faire état de certaines recommandations par rapport à certains standards qui seraient requis. Peut-être que, dans votre tête, les services médicaux, ça englobe tout le reste, mais l'expérience nous a montré qu'il vaut mieux être plus précis que moins.

Alors, je dirais en conclusion que notre organisme, on est un organisme de protection du public. On n'a pas voulu, aujourd'hui, recommencer tout le débat privé-public, etc. On s'inscrit dans la philosophie ou les objectifs du gouvernement d'améliorer l'accès aux services, mais, compte tenu de notre mandat de protection du public, nous, ça fait plus de 85 ans que notre organisme existe, et on exerce nos responsabilités jusqu'à maintenant dans le cadre d'un contexte d'établissements d'État, d'établissements publics et on pense que, le transfert de services vers des cliniques à propriété médicale, oui, mais avec peut-être des partenaires internationaux, on ne sait trop. Mais je ne veux pas insister là-dessus. Mais je veux juste dire que le transfert vers des centres qui vont être gérés de façon privée, ça va quand même modifier la dynamique pour, on espère, une amélioration de notre service de santé. Mais c'est très important, ça exige que les pouvoirs de protection du public que notre organisme exerce au mieux, depuis des décennies, nous...

Vraiment, nous espérons avoir l'endossement de la commission pour que, ces pouvoirs-là, nous puissions les exercer dans le futur, dans ces cliniques privées, qui vont, d'une certaine manière, se substituer dans certains cas, lorsque nécessaire, à des services qui étaient jusqu'à maintenant donnés en milieu hospitalier.

Alors, voilà. Nous sommes prêts à répondre aux questions de la commission.

Le Président (M. Copeman): Merci, Mme Desrosiers. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Mme Desrosiers et mesdames pour votre visite. Je voudrais d'abord vous dire que, moi aussi, je me suis fait un petit tableau. Puis ce que j'ai découvert, c'est que faire le tableau de la situation actuelle est encore plus compliqué que faire le tableau du projet de loi parce qu'il y a beaucoup de choses qui sont très floues. D'ailleurs, je vais me permettre de le transmettre aux membres de la commission. On l'avait rendu public à l'époque, ce tableau-là, la situation actuelle par rapport à la situation proposée dans le projet de loi.

Vous avez fait plusieurs importantes recommandations qu'on va bien sûr étudier avec beaucoup d'attention. Puis évidemment rester en contact avec les officiels du ministère, voir comment est-ce que tout ça peut se traduire en texte législatif. Vous avez fait des recommandations très précises sur cette question. Juste aborder quelques points avec vous. Effectivement, dans le projet de loi, actuellement, devant l'Assemblée nationale, on prévoit un élargissement éventuel ? le mot «éventuel» est important ? du panier qu'on peut appeler le panier d'assurance privée pour des services donnés par des médecins non participants par règlement, mais règlement soumis en commission parlementaire. Je voulais quand même l'ajouter parce que ce n'est pas uniquement par règlement, tel que c'est dans le projet de loi actuel, et je comprends que vous souhaitiez un débat plus large. Il y aurait peut-être moyen d'envisager également d'autres solutions. On pourra y revenir pendant la commission, d'ailleurs à la lueur d'autres présentations.

Lorsque vous dites, par exemple: On transfère des activités, non, j'apporte une interprétation différente. Peut-être que, pour les cliniques associées, c'est une partie de la chirurgie excédentaire qui est faite là, mais, pour ce qui est des cliniques non associées, ce n'est pas du transfert, puisque ça existe déjà. Je veux dire, il y a déjà possibilité d'avoir une prothèse de hanche dans un milieu où fonctionnent des médecins non participants. Ce n'est pas quelque chose qui est ajouté au paysage du système de santé. D'ailleurs, à ce sujet-là, dans la clinique ? on mentionne toujours la même clinique parce que c'est l'exemple qui a été le plus médiatisé ? il y a des infirmières qui travaillent certainement dans cette clinique-là.

Alors, quelles sont les activités de surveillance, actuellement, de qualité des actes infirmiers que vous menez dans ce genre de milieu là? Est-ce qu'il y en a?

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...fait, le Code des professions prévoit qu'on peut aller faire de l'inspection professionnelle où qu'exerce une infirmière, et c'est vrai pour le Collège des médecins. Où que soit un médecin, ils peuvent aller l'inspecter. Et c'est pareil pour nous: où que soit l'infirmière, on peut aller l'inspecter, mais, à ce moment-là, on fait une inspection à caractère individuel, et c'est confidentiel. Tu sais, on va dire à la personne: Bien, écoutez... On peut avoir eu une plainte sur cette personne-là comme ça peut être carrément préventif. On se fait un plan. Ça peut être une inspection collective. On va aller voir le groupe d'infirmières et on va faire rapport au conseil des infirmières ou infirmiers ou à ce groupe-là.

Mais c'est que ce dont on parle dans notre mémoire, ce n'est pas de ça dont on parle. Vous avez prévu à juste titre que le Collège des médecins puisse élargir son pouvoir d'enquête, et le pouvoir d'enquête, à ce moment-là, ce n'est plus l'inspection professionnelle, ça s'appelle sur la qualité et la sécurité des services rendus et ça peut mettre en cause, à ce moment-là, l'aménagement physique des lieux qui n'est pas propice à l'exercice. Ça pourrait être les standards de stérilisation. Ça pourrait être d'autres aspects.

Et, comme je vous dis, c'est un mécanisme qui a été très peu utilisé par le Collège des médecins, qui a été très peu utilisé par nous. Il n'y a que nous et eux qui l'avons pour au cas où le ministre aurait besoin d'une opinion sur la qualité, qu'on appelle, des services ? alors, dans le cas des médecins, c'est médicaux; dans notre cas, c'est infirmiers. Mais on parle plus de la qualité des soins en général, et, à ce moment-là, c'est une information qui devient à caractère public. Premièrement, c'est qu'on a le droit d'y aller, poser des questions à d'autres que les infirmières, et ça permet de faire un rapport, je vous dirais, plus global comme on a fait, par exemple, pour Saint-Charles-Borromée mais à partir évidemment de l'angle d'expertise qui est le nôtre. Et je pense qu'historiquement c'était prévu, ça, parce que de façon, je vous dirais, le... Et ça ne met pas en cause la valeur ou la contribution de toute autre profession, mais c'est parce que le Collège des médecins et nous étions très centraux dans la desserte des services hospitaliers et c'est un privilège qui existe déjà dans nos lois.

C'est juste qu'on était surpris que vous ne le prolongiez pas. Parce que, là, on est aujourd'hui, mais, dans cinq ans, dans 10 ans, dans vingt ans d'ici ? je ne connais pas l'avenir... Mais, même si dans le moment, ça... être des services à la marge, ça peut s'accentuer. Mais quand bien même ça resterait à la marge, ça nous apparaît même, je vous dirais, même pour le législateur comme étant une mesure de sécurité de permettre à des organismes tiers de pouvoir faire enquête si besoin était et de faire rapport si besoin était.

M. Couillard: Donc, pour résumer, lorsque vous parlez du pouvoir d'inspection générale que vous partagez avec le Collège des médecins, vous pouvez y aller de votre propre initiative également, c'est-à-dire qu'à...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, oui, oui.

M. Couillard: ...Saint-Charles-Borromée, ce n'est pas le gouvernement qui vous a, je pense, dit, vous y êtes allés de vous-mêmes, là.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Non, mais c'est parce que ce n'est pas... Quand on est allés à Saint-Charles ? je m'excuse d'avoir l'air un peu tatillonne ? au plan législatif, ce n'est pas de l'inspection professionnelle, c'était l'article 11 de la Loi des infirmières qui est équivalent à un autre article que le Collège des médecins a aussi et c'est en sus de l'inspection professionnelle. L'inspection professionnelle, ça, c'est comme de base. On a le droit d'appeler, de rencontrer, d'aller vérifier l'aspect qu'on appelle de la compétence professionnelle. Mais on s'est aperçus, et le législateur l'avait prévu, que la qualité des soins... À un moment donné, la personne est éminemment compétente, mais il est possible qu'un milieu n'ait pas prévu, je ne sais pas, moi, des protocoles de communication particuliers entre les médecins puis les infirmières. Il pourrait y avoir eu... Peut-être que le milieu n'a pas prévu de formation continue; peut-être que le milieu n'a pas prévu un équipement, etc., et ça nous permet, à ce moment-là. Ce pouvoir d'enquête là permet de dépasser la stricte inspection professionnelle.

M. Couillard: Donc, si je reviens à l'exemple de la clinique orthopédique X, là, vous pouvez débarquer demain, aller parler à une infirmière ou au groupe d'infirmières là, mais vous ne pouvez pas aller exercer une activité de surveillance ou d'inspection sur l'organisation générale des soins, les protocoles qui existent entre les professions, les lieux physiques.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Et on ne pourrait pas vous faire rapport. On ne pourrait pas d'aucune manière vous faire rapport.

M. Couillard: Donc, c'est une illustration du vide dans lequel se trouve cette activité actuellement, auquel je réfère souvent, là?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, exactement, exactement.

M. Couillard: Lorsque vous parlez de la nécessité de faire un rapport annuel, vous parlez des cliniques associées. Ce sont les cliniques associées pour lesquelles vous voudriez qu'il y ait un rapport annuel...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, oui, oui.

M. Couillard: ...parce que ce sont celles pour lesquelles il existe une relation formelle avec le système public de santé. Ah, tiens, M. le président, on me remet la tentative de tableau que peut-être les collègues de la commission pourront apprécier, parce que c'est un monde bien compliqué, tout ça. Et je pourrais le transmettre aux collègues de la commission pour servir de référence éventuellement. Puis, dans les explications suivantes, on pourra y référer ou on pourra comparer nos tableaux, Mme Desrosiers, pour voir lequel est le mieux.

n(14 h 30)n

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...ici, là. J'ai mon tableau, moi aussi. Bon, écoutez, pour les fins de notre présentation, c'est à l'effet que, dans le cadre d'ententes, non seulement il y ait l'entente... mais qu'il y ait un rapport annuel quant aux activités faites. Mais, je vais vous dire, la vraie question, c'est qu'on s'était dit probablement que ça va être facile pour l'établissement de dire qu'il a contracté 132 chirurgies de cataractes ou 500 avec tel établissement, et on ne veut pas se faire dire à la fin de l'année: Il y en a eu 500. Vous avez déjà, vous, des mécanismes qui vous permettent, via, je ne sais pas, moi, le fichier Med-Écho, de savoir si, les chirurgies données dans vos centres hospitaliers publics, s'il y a eu des complications, s'il y a eu des incidents, des accidents, des problèmes.

Et on se demandait dans le fond: Ces cliniques-là qui vont être sous entente avec un établissement public, est-ce que non seulement il y a une entente, c'est contractuel, ça? Mais, une fois l'année terminée, est-ce qu'on veut un rapport qui ne soit pas strictement quantitatif mais qui fasse état de certains autres indicateurs qui mettent en cause soit la gestion des risques ou soit les indicateurs de ressources humaines.

Je vais être bien claire, là. Disons qu'on en aurait deux, cliniques, au Québec, une grosse à Montréal, une grosse à Québec. Je ne sais pas, moi, s'il y a un ratio d'infirmières pour des chirurgies équivalentes à Québec, je ne sais pas, moi, cinq par je ne sais pas quoi, puis, à Montréal, c'est 22, peut-être que la population aimerait ça le savoir. Je ne sais pas. On se disait: Il y a un élément de transparence dans le fonctionnement de ces cliniques-là qui devrait être nécessaire.

Puis le point qu'on n'a pas solutionné, c'est comment vous allez saisir les complications. Bien, ça, on ne l'a pas vraiment. C'est parce qu'on ne voulait pas être trop techniques. Mais je vais vous donner l'exemple suivant: si une complication arrive dans une clinique affiliée, une clinique et finalement ils s'en vont en urgence à l'hôpital, comment vous allez relier les complications? Parce que, là, il va s'ouvrir un autre dossier. Est-ce que vous avez cette préoccupation-là de pouvoir, excusez l'expression, là, retracer, le «tracking» de la complication, de l'associer à une clinique? Sans vouloir s'acharner sur leur cas, là, parce que j'imagine que des fois il y a des complications qui ne relèvent pas de la mauvaise pratique, mais vous allez sûrement avoir à coeur de savoir ce qu'il en est.

M. Couillard: Oui, j'en parlais d'ailleurs, ce matin. Dans le cas, par exemple, des complications inhérentes à une chirurgie, comme une infection par exemple, si on se rendait compte, par exemple, qu'il y a des cas répétés ou répétitifs d'infection qui proviennent d'une clinique, il faut le savoir absolument, ne serait-ce que pour des raisons de santé publique. Alors, il y a certainement des mécanismes à saisir. Est-ce qu'il est nécessaire de les mettre dans le projet de loi actuel? On va regarder ça.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, je pense qu'il y a une partie qui va dans les mécanismes peut-être de gestion de l'entente, mais on avait à coeur que ces cliniques-là... Parce que les rapports des établissements publics sont publics. Ce que je veux dire, le rapport annuel de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, on peut y avoir accès, et c'est déjà prévu dans la loi que certains éléments doivent être rendus publics dans un rapport annuel. Et vous n'avez pas prévu l'équivalent pour ces cliniques-là qui vont être associées ou enfin qui vont être sous entente avec un établissement. Et de deux choses l'une: ou c'est inclus dans le rapport de l'établissement public ou ils font leur propre rapport, mais on ne voulait pas que ça échappe.

M. Couillard: ...d'autant plus qu'il y a une relation qui existe avec le CMDP de l'hôpital contractant, donc ça peut être également...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, mais techniquement, d'après nos avocats, comme c'est des entités privées, l'entente, c'est une chose; et la garantie qu'on va donner tel ou tel service... Mais est-ce que vous voulez un rapport annuel ou est-ce que l'entente ? peut-être c'est dans votre liste; l'entente ? dit de produire un rapport annuel? Mais enfin on s'est mis du point de vue du citoyen qui veut savoir ce qu'il en est, des activités, des problèmes et des bons coups, de la performance d'une clinique qui somme toute est financée par l'État au niveau des services médicaux.

M. Couillard: Bien, merci beaucoup pour votre contribution, puis on sera certainement en lien pour la façon de les intégrer dans une amélioration du texte législatif.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Merci.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je voudrais vous saluer, Mme Desrosiers, les personnes qui vous accompagnent. Alors, vous nous dites, dans le mémoire que vous présentez, que vous... Je pense que vous êtes satisfaite, hein, de la demande d'agrément, là, qui est introduite, là, par le projet de loi n° 33.

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...partie des éléments de représentation qu'on a faits à la commission parlementaire sur le livre blanc, qu'il y ait un mécanisme d'agrément, l'obtention du permis, validation. En fait, c'est un encadrement qui nous apparaît nécessaire.

Mme Harel: Dans un des mémoires qui a été présenté ce matin, en commission parlementaire, par la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, ils font état d'une situation incongrue, là, en matière d'agrément, à savoir que, contrairement, par exemple, à la situation qui prévaut en Alberta, où le Calgary Health Region a exigé des opérateurs qu'ils obtiennent l'agrément avant de signer des contrats, finalement, au Québec, le projet de loi serait laxiste, dit ce mémoire, sur la situation, puisque les opérateurs pourraient procéder durant trois ans, avant d'obtenir l'agrément. Et la Fédération, là, des infirmières et infirmiers demandait qu'il y ait des modifications au projet de loi à ce sujet. Quelle est votre opinion là-dessus?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, ça nous a frappés, nous autres aussi, dans le mémoire, à savoir qu'ils ont trois ans pour obtenir l'agrément, et il est possible qu'ils aient signé un contrat de cinq ans avant même d'avoir obtenu l'agrément. Moi, là-dessus je m'étais demandé si c'était juste pour une phase de transition, le temps de partir les cliniques. Mais assurément, nous autres, on n'en a pas fait mention dans notre mémoire, mais définitivement que ce serait préférable que toutes les conditions, les aspects de standardisation ou l'agrément soient requis avant même qu'ils commencent, là.

Mais, je vais vous dire franchement, nous autres, on n'a pas voulu, dans le cadre de notre mémoire, aller trop dans, je vous dirais, les aspects administratifs. On s'est demandé si l'hôpital, l'établissement qui contracterait avec une clinique, lui-même ayant son agrément, peut-être que pour le démarrage, le premier démarrage de la clinique, peut-être que dans le fond va assurer, lui-même s'assurer que... Je ne vois pas un hôpital avoir le goût ? comment on dirait ça? ? de s'associer avec une clinique qui ne respecterait pas les mêmes standards, d'autant plus que les médecins vont être membres du même CMDP. Mais j'abonde dans le même sens que vous, que ce serait peut-être plus prudent que l'agrément soit obtenu avant de commencer.

Mme Harel: Dans la, disons, dans la présentation que vous avez faite du mémoire, il y a comme une présomption à l'effet que l'accès à ces chirurgies-là se fait, si vous voulez, sous la gouverne d'un établissement, alors que, si on quitte le terrain des trois chirurgies ciblées, à savoir les genoux, les hanches, les cataractes, là on va du côté du projet de loi, qui s'intitule Cliniques médicales associées, et, à ce moment-là, ce sont les agences qui proposent au ministre, après consultation de la table régionale, qu'un établissement et non pas l'établissement lui-même qui demande, ou qui propose, ou qui planifie.

En fait, c'est l'agence qui le fait à la place de l'établissement. Et la question qui s'est posée, évidemment c'est la suivante: Quels sont les services médicaux spécialisés que le ministre peut élargir par voie de règlement. Ça, vous l'avez mentionné, là, il y a là une préoccupation, je pense, qui va être généralisée à travers tous les mémoires qui nous seront présentés, puisque le ministre peut, simplement après avoir consulté ? je crois que c'est le gouvernement qu'il consulte ? je pense, là, peut, par règlement, déterminer tout autre service requis, là, services... Ça, c'est pour les cliniques médicales spécialisées. Mais, dans le cas des cliniques médicales associées, c'est l'agence, finalement. Et là ce qu'on s'est posé comme question, c'est: Comment se fait-il que ce n'est pas du tout relié aux chirurgies excédentaires qui doivent être faites, parce que, les critères, vous les reprenez.

Vous les avez les critères, hein? Les critères ne prévoient pas du tout que ce soit une des dimensions qui soit retenue que celle d'en faire plus. Si c'est pour faire à la place, ça change quoi, sauf évidemment la perspective où on laisse de côté tout le virage ambulatoire, qui nécessite des investissements de l'État, et, à la place, pour ces chirurgies d'un jour on ouvre cette perspective de cliniques médicales associées qui vont être assurées d'un volume avec un coût unitaire? Vous avez ça d'ailleurs, dans le projet de loi, là. Et, à ce moment-là, aux articles justement 12 à 349.3... qu'est-ce qu'elle prend comme risques? Elle est assurée d'un montant unitaire versé par l'agence, pas versé par l'établissement. Mais est-ce que c'est déduit de l'établissement, ce qui va être versé à la clinique médicale associée par l'agence? Si c'est pour des chirurgies excédentaires, est-ce qu'il y aura un budget excédentaire? Si c'est pour de la sous-traitance, est-ce que ça va être déduit du budget de l'établissement?

Tout ça, il n'y a rien qui a été clarifié, là, dans le projet de loi, à moins que, vous, vous ayez des réponses qu'on n'a pas encore, là, ici. Mais est-ce que ça ne vous apparaît pas inquiétant de ne pas savoir si ça remplace le virage ambulatoire finalement, ces cliniques médicales associées?

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...non, parce que, je vais vous dire, sincèrement, nous, on l'a pris, je vous dirais, de façon éminemment pragmatique, à savoir que très rapidement on va savoir, après un an, deux ans, trois ans, si l'ajout somme toute de cliniques médicales spécialisées ? vous, votre inquiétude est plus sur les cliniques médicales associées qui vont...

Mme Harel: ...dans le projet de loi?

n(14 h 40)n

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, c'est parce que, nous autres, je vais vous expliquer comment on l'a compris, là. Les cliniques médicales associées, c'est comme un terme générique qui peut couvrir des laboratoires, des cabinets privés professionnels et des centres médicaux spécialisés, ces derniers étant les seuls qui vont pouvoir faire de la chirurgie qui jusqu'à maintenant était sous le couvert de l'assurance hospitalisation, donc qui requiert de dormir là, là. Tu sais, pas nécessairement pour une cataracte, mais ça pourrait aller jusqu'à un jour, deux jours, trois jours, quatre jours. On n'est pas nécessairement dans l'ambulatoire. Moi, je n'ai jamais entendu dire qu'on opère un remplacement de la hanche et qu'on sort en gambadant, dans l'après-midi. Donc, je vous donne à peu près notre compréhension. Mais, cela étant dit, sincèrement...

Mme Harel: ...privé, là.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Pardon?

Mme Harel: Un petit hôpital privé.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, mais là j'avais fait la mention, d'entrée de jeu, à la commission parlementaire du mois de mars. On n'a pas voulu faire le débat privé-public, on a dit: La seule chose qui compte, c'est d'améliorer l'accès aux services pour la population. Il faut qu'en bout de ligne il y ait une valeur ajoutée en termes d'accessibilité, et ça, ça se mesure. Ça, on va pouvoir le mesurer à la fin de l'année. Et il ne faut pas que le citoyen ait à débourser. C'est des services somme toute qui sont couverts par l'État, qu'ils soient faits à l'hôpital ou qu'ils soient faits dans une clinique, pour lesquels il y aura des standards à respecter et pour lesquels nous demandons un peu plus de transparence ou un certain renforcement dans la possibilité de pouvoir enquêter.

Donc, nous, là-dessus, sincèrement, il y a tellement... Et il y a un mécanisme de gestion des listes d'attente qui va permettre de pouvoir déverser, vers un centre médical spécialisé, certaines chirurgies ou nous sommes naïfs. Je ne pense pas. Nous, on pense qu'actuellement la situation qui fait en sorte que les chirurgiens sont extrêmement plafonnés dans leur accès aux plateaux techniques de chirurgie, que, pour toutes les chirurgies qui seraient d'un jour... On n'a pas vu le problème, là, avec le fait qu'un établissement puisse contracter avec une clinique médicale associée pour de la chirurgie d'un jour si la population en bénéficie et le citoyen n'a pas un sou à payer.

Mme Harel: Mais là venez-vous de nous dire que c'est des chirurgies d'un jour? Vous veniez de nous dire précédemment que c'était avec hospitalisation.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Non. Les chirurgies d'un jour, c'est pour les cliniques médicales associées. Moi, j'ai compris que, le centre médical spécialisé, lui, c'est la liste des trois chirurgies et autres qui pourront s'ajouter dans le futur. Si, à la fin de cette commission parlementaire, vous réalisez que, tous les gens qui interviennent, personne n'a compris la même chose, bien peut-être que, là, le législateur aura un problème. Il devra éclaircir la situation. Mais là sincèrement, moi, j'ai compris...

Mme Harel: Je vous propose de lire l'article 12.

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...que tout ce qui était sous le couvert de l'assurance hospitalisation dans le moment pourra faire l'objet d'ententes avec des cliniques médicales spécialisées. C'est ça que j'ai compris. Et il pourrait se rajouter d'autres chirurgies, et qu'en plus ces trois chirurgies-là et d'autres dans le futur pourraient aussi faire l'objet d'assurance privée. C'est ça qu'on a compris.

Mme Harel: Bon. On s'entend au moins sur une chose, il faut qu'il y ait des résultats de plus, parce que tout ça... de combat, si c'est finalement pour simplement faire du déplacement, n'est-ce pas, ça ne vaut pas la peine. Donc, il y a 300 000...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Oui, mais soyons bien honnêtes, Mme Harel.

Mme Harel: ... ? un instant, là; il y a 300 000 ? chirurgies de jour qui sont faites dans les établissements. Il faut qu'il s'en fasse plus pour qu'on ouvre à des centres médicaux spécialisés qui vont, en vertu des services de clinique médicale associée, passer des contrats avec les agences pour pouvoir faire ces chirurgies excédentaires, supplémentaires. Vous-mêmes, vous dites qu'il en faut plus.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Mais, Mme Harel, on a compris la même chose. Vous avez très bien compris...

Le Président (M. Copeman): Mme Desrosiers...

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...que ça va être de...

Le Président (M. Copeman): ...Mme Desrosiers, excusez-moi, pour aider ma compréhension, je pense que ce serait mieux si on parlait une à la fois.

Mme Harel: Alors, je reviens donc avec la question. Étant donné que ce sont des montants unitaires qui vont être versés par les agences pour couvrir les frais reliés à chaque service médical spécialisé dispensé dans la clinique privée ainsi que les modalités de ce versement ? en fait, ça, c'est dans la loi, l'article 12, et c'est à l'article 349.3, alinéa 1, paragraphe 3° ? c'est donc dire que l'agence et non pas l'établissement va signer avec une clinique médicale associée qui elle-même peut être un centre médical spécialisé ? là, vous voyez un peu l'imbroglio, là ? va signer une entente, puis elle va lui garantir un volume, puis elle va lui garantir un coût unitaire.

Est-ce que selon vous ce coût unitaire et ce volume doivent être déduits d'un budget d'établissement ou en supplément?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Je n'en ai aucune idée, madame. Je n'en ai aucune idée. Parce que, nous, on a compris...

Mme Harel: Ça ne vous dérange pas, que ce soit l'un ou l'autre.

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, écoutez, c'est des budgets globaux. Moi, j'ai compris que l'agence ne signera pas d'entente toute seule avec une clinique. J'ai compris que l'agence peut initier la démarche, mais j'ai compris que l'entente... Et c'est marqué: «L'agence et tout établissement concerné...» Donc, ça va être conjoint. Moi, j'ai pensé que l'agence avait une vision territoriale et, après discussion avec les hôpitaux sur son territoire, pourrait juger la pertinence d'ajouter une clinique médicale associée. C'est ce qu'on a compris.

Une voix: Je regrette, il n'y a pas de...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Mais, pour la question budgétaire, on se l'est posée, la question, mais on a pensé ? écoutez, votre question est tout à fait pertinente ? mais en même temps on a pensé qu'elle ne se réglerait pas dans le cadre du mémoire qui est là... pas du mémoire, mais du projet de loi. Parce que, l'autre aspect, notre compréhension, c'est qu'améliorer l'accessibilité, ça ne veut pas nécessairement dire... Il pourrait se faire plus de chirurgies, mais il pourrait s'en faire peut-être autant mais plus vite. Alors, il n'y a pas nécessairement... nous, le 300 000 chirurgies d'un jour, si les gens attendent 22 mois pour l'avoir, bien peut-être que, s'ils l'ont en trois mois, c'est peut-être mieux. Mais, nous, on a pris une présomption d'amélioration des services, de notre compréhension de la dynamique actuelle.

Mme Harel: Alors, M. le Président, je voudrais simplement rappeler qu'à la lecture de l'article 349.1 il n'y a pas de conjonction. Ce n'est pas «l'agence et l'établissement», c'est l'agence qui propose au ministre, après consultation de la Table régionale des chefs de département de médecine spécialisée, que tout établissement. Alors, ce n'est pas «et». Il n'y a pas de conjonction, premièrement. Je pense que c'est là un aspect important. Si on ajoute le «et», je pense que ça va être indispensable qu'on le fasse, parce qu'un... ne peut pas se voir obliger par l'agence comme c'est le cas actuellement, dans le projet de loi, là, tel qu'on peut le lire.

Par ailleurs, tant mieux, puis il le faut, de la réduction de la durée, mais, si c'est trois mois plutôt que six mois, c'est parce qu'on va en faire plus. Si on diminue la durée, c'est parce qu'on va en faire plus. Comment on pourrait diminuer la durée, puis en conséquence ça veut dire qu'on mettrait à pied des médecins au bout de neuf mois, parce qu'ils auraient, en neuf mois, fait le travail de 12 mois?

Mme Desrosiers (Gyslaine): On ne s'est peut-être pas comprises. Sur le 349.1, c'est marqué: L'agence peut proposer au ministre que tout établissement puisse s'associer avec une clinique, mais le 349.3 dit que l'agence et l'établissement vont signer l'entente eux-mêmes ensemble, après avoir obtenu l'autorisation du ministre. Donc, nous, on avait compris que, le 349.1, c'est que l'agence prenait l'initiative de la desserte territoriale et, après entente avec les chefs de département, pouvait par la suite se mettre en partenariat ou en tout cas établir qu'un établissement va lui-même signer une entente. C'est ce qu'on a compris de la dynamique. Mais, disons qu'en tout cas, a priori, cet aspect-là ne nous causait pas de problème.

Mme Harel: Alors, je vous rappelle que l'article que vous citez, là, 349.3, n'intervient que lorsque l'agence a obtenu du ministre donc la mise en place, là, de clinique médicale associée.

Bon. On revient à la question du montant unitaire versé par l'agence. Est-ce que ce montant unitaire versé par l'agence, il est en, disons, en fonction de services excédentaires justement pour donner suite à cette objectif qui est de réduire les temps d'attente et d'augmenter, par le fait même, le nombre d'interventions ou c'est un budget qui est déduit de celui des établissements?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien là, vous touchez un point crucial qui est la question des enveloppes données à chaque région pour les services. Moi, j'ai compris que le montant que l'agence donnerait, ce n'est pas le montant de la RAMQ, là, c'est vraiment un montant...

Une voix: Excédentaire.

Mme Desrosiers (Gyslaine): ...c'est le montant de la RAMQ ou c'est le montant... Non, ce n'est pas le montant, c'est les coûts afférents à un traitement médical mais qui habituellement ne sont pas la rémunération même du médecin.

Bon. Là, vous me demandez: Est-ce que ça va être soustrait de l'établissement? Est-ce que c'est en sus ou est-ce que le ministère, quand il va faire son budget de la région, va répartir autrement le budget? Je pense que toutes ces réponses sont peut-être possibles et qu'on verra comment le gouvernement, quel qu'il soit, entend gérer la distribution budgétaire.

Mme Harel: Vous êtes certainement consciente que les médecins spécialistes reprochent de ne pas pouvoir exercer plus que quelques heures parfois... quelques jours par semaine. Le ministre l'a dit d'ailleurs lui-même lorsqu'il exerçait à Sherbrooke.

Alors, est-ce qu'ils vont exercer plus dans l'établissement ou ils vont aller exercer dans le centre médical privé?

n(14 h 50)n

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, écoutez, encore là, c'est peut-être un angle d'analyse. Nous, on a compris qu'ils vont exercer plus.

Mme Harel: Ils vont exercer plus en sus de leur exercice...

Mme Desrosiers (Gyslaine): De ce qu'ils font présentement.

Mme Harel: ...dans l'établissement?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Et j'imagine que les plafonds de rémunération de la RAMQ vont être adaptés en conséquence, j'imagine. Mais là je ne suis pas...

Une voix: ...

Mme Desrosiers (Gyslaine): Il n'y en a plus, de plafond? Bon, bien, c'est ça.

Mme Harel: Oui, mais en conséquence faut-il encore qu'il y ait des plateaux techniques, qu'il y ait les soins dont vous parliez, les soins infirmiers et autres. Est-ce qu'en négociant les coûts unitaires dont il est question à l'article que vous citiez tantôt, au paragraphe 3°, est-ce qu'en négociant les coûts unitaires on va aussi négocier les enveloppes immobilières? Est-ce qu'on va négocier finalement l'ensemble d'un budget qui va faire en sorte qu'il va y avoir transfert, vers les centres privés, de ce qu'on aurait pu, je pense... faire dans l'établissement?

Mme Desrosiers (Gyslaine): Bien, nous, dans notre mémoire précédent, on avait souhaité que l'utilisation des infirmières... Étant donné qu'il y a pénurie générale au Québec, on avait souhaité que le transfert ou en tout cas la possibilité d'avoir plus, que ce soit en plus ou plus vite dans une clinique associée... que les infirmières qui collaborent à ces cliniques soient en prêt de services justement pour justement favoriser une certaine rationalisation dans l'utilisation des infirmières et qu'il n'y ait pas une compétition indue entre les instances.

Bon. Est-ce que les mesures prises par le projet qui est sur la table, de concertation par l'agence avec la concertation de tous les chefs des départements, seront suffisantes? Je ne le sais pas. Notre vraie préoccupation, nous, par rapport aux coûts unitaires, c'est... Parce que finalement il n'y a rien qui empêcherait le prêt. Il n'y a rien dans le projet qui est là qui l'empêcherait, le prêt de services. C'est juste que ce n'est pas nommément prévu. Mais je ne vois pas l'établissement, en vertu de 349.3, qui va se tirer dans le pied, qui va se paralyser tout son hôpital en signant une entente de services avec une clinique médicale associée pour quelles fins? Autrement dit, il y aura comme une espèce de négociation qui va faire en sorte que les parties seront gagnantes. C'est ce qu'on a compris.

Là, le coût unitaire, par contre vous touchez à un point. C'est qu'est-ce qui va être pris en compte dans l'établissement du coût unitaire. Est-ce que ce sera trop? Est-ce que ce ne sera pas assez? Parce qu'il demeure que c'est de l'argent que l'État va donner à un entrepreneur privé. C'est des propriétaires. Le prestateur, le propriétaire de la clinique ou les propriétaires de la clinique vont dans le fond se dédommager pour leur investissement. S'ils investissent 20 millions dans une clinique, j'imagine qu'ils espèrent amortir et faire des profits à travers le temps. Donc, c'est inhérent à la complémentarité entre un établissement public et privé, puisque qui dit privé dit éventuellement pour se rembourser sur notre investissement. C'est pour ça qu'on demandait, dans le mémoire, la possibilité, entre autres, de pouvoir faire enquête ou la possibilité qu'il y ait davantage de transparence. Notre crainte, c'est que le coût unitaire, en tout cas pour les premières années, il soit très bas pour rendre ça très attrayant, et éventuellement, comme tout bon marché, toute économie de marché, ultérieurement, ça pourrait devenir pas mal plus cher. Mais ça, c'est ? comment je dirais ça? ? c'est une négociation, c'est une économie de marché.

Qu'est-ce qui empêcherait, après cinq ans, l'agence de signer avec une autre clinique si la première clinique exagère ou je ne sais trop? Mais c'est certain que, pour accepter cette discussion-là, il faut accepter la présomption qu'il peut y avoir partenariat privé-public. Si on ne part pas de cette présomption-là, il n'y a rien qui marche dans l'architecture qui est proposée là.

Le Président (M. Copeman): Nous avons déjà dépassé de quelques secondes le temps imparti. Mme Desrosiers, Mme Mercier, merci pour votre présence à cette commission parlementaire au nom de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.

J'invite immédiatement les représentants de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec à prendre place à la table. Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 14 h 54)

 

(Reprise à 14 h 57)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission poursuit ses travaux, et c'est avec plaisir que nous accueillons les représentants de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec.

M. le président, Dr Bolduc, bonjour.

Une voix: Bonjour.

Le Président (M. Copeman): Je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Vous avez 20 minutes pour votre présentation, et il y a aura un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Je vais vous aviser quand il vous reste trois minutes, pour mieux vous aider à conclure, et je vous prie de présenter les personnes qui vous accompagnent et d'enchaîner avec votre présentation.

Association des conseils des médecins,
dentistes et pharmaciens du Québec (ACMDP)

M. Bolduc (Yves): Oui. Je suis le Dr Yves Bolduc, le président de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec. Je suis accompagné du Dr Martin Arata, qui est le vice-président et qui est également directeur des services professionnels du CSS de L'Amiante, et Mme Françoise Cloutier, qui est directrice générale de l'association. Moi-même, je suis également directeur des Services professionnels au CSS de Lac-Saint-Jean-Est, à Alma.

On est probablement dans les seuls qui, en plus de vous amener de la théorie, vous ont amené de la pratique. Ça fait que, quand on parle de gestion de listes d'attente, je pense que c'est intéressant peut-être, à un moment donné, de voir qu'est-ce que c'est dans un établissement qui fonctionne bien. Et puis je vous ai fait la liste, là, en date du 7 septembre, donc extrêmement récent. Ça fait que, quand les gens disent, là: C'est quasi impossible d'avoir des bonnes listes, c'est vraiment réel, et je suis prêt à montrer les vrais noms, là, n'importe quand.

La façon dont on va présenter le mémoire: je vais partager la tâche avec le Dr Martin Arata. Donc, je vais commencer, puis lui va continuer. Puis par la suite on va peut-être discuter des listes d'attente.

M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, dans le cadre de la commission parlementaire de la Commission des affaires sociales, il nous fait plaisir de présenter nos observations sur le projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. L'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens se rallie à la proposition du projet de loi n° 33 dans la majorité de ses points, la quasi-totalité. Nos observations porteront principalement sur l'accessibilité et la continuité; l'accès et l'imputabilité; les tableaux de bord et les indicateurs de gestion; le rôle du directeur des services professionnels des établissements; le partenariat avec les centres médicaux spécialisés et les centres médicaux affiliés ? les cliniques médicales spécialisées et les cliniques médicales associées; l'importance des mécanismes de coordination et le rôle du directeur médical des cliniques; l'évaluation de la qualité de l'acte et le traitement des plaintes; les autres conditions de succès.

n(15 heures)n

L'accessibilité et la continuité. La qualité des soins et des services implique plusieurs éléments, dont l'accessibilité et la continuité aux soins et services. On sait qu'au Québec les gens ne se plaignent pas de la qualité, ils se plaignent d'avoir accès au système et ils se plaignent qu'une fois dans le système c'est difficile de se retrouver. Donc, en comblant ces deux lacunes, je pense qu'on réussirait à obtenir encore une meilleure qualité de soins.

Le projet de loi n° 33 facilite selon nous l'accessibilité à ces soins et offre des balises structurées permettant aux établissements de santé de se responsabiliser davantage par rapport à l'accès et à la continuité, en mettant en place les mécanismes nécessaires à l'optimisation de leur gestion. Nous aimerions amener une suggestion concernant les mécanismes centraux de gestion de l'accès à des services spécialisés. Selon nous, il y aurait lieu d'instaurer des critères panquébécois ou régionaux. Nous sommes conscients que cet aspect mérite une attention spéciale, car, si les critères sont établis régionalement, n'y a-t-il pas un risque de disparité régionale? Et nous croyons qu'un citoyen, qu'il soit dans le Grand Nord, au Lac-Saint-Jean, ou à Québec, ou Montréal, a le droit aux mêmes soins. Rappelons que l'évaluation de la qualité des soins médicaux, dentaires et pharmaceutiques est un élément primordial et significatif pour les CMDP, puisqu'ils en sont les responsables dans leur établissement.

Nous souscrivons au principe que le patient a droit de recevoir des soins où il le désire. Pour s'assurer d'un mécanisme d'accès étanche qui traduit la réalité des listes d'attente, il faudrait certainement se questionner sur la possibilité pour un patient de s'inscrire auprès d'un autre établissement que celui de son territoire et même de plusieurs établissements. Ce qui est en cause ici, ce n'est pas le choix comme le fait qu'il y a des gens qui sont sur trois, quatre ou cinq listes d'attente, ce qui fait qu'ils paraissent comme trois ou quatre personnes en attente, ce qui fausse les listes d'attente. Au Québec, certains patients se dirigent vers l'établissement de leur choix sans pour autant être reliés à la population du CSS ou du centre hospitalier qu'ils ont choisi. Il nous apparaît important de mettre des balises ou des lignes directrices en place encadrant la liberté permise à la clientèle ou à l'établissement dans ces circonstances, puisqu'un financement devra y être attaché.

On croit que l'argent doit suivre la personne qui reçoit le service. Donc, ce qu'on ne remet pas en question, c'est le choix mais plutôt le financement. Et, après un certain temps, on sait qu'il faut qu'il y ait des ajustements. Exemple, moi, je prenais l'exemple de notre établissement: on a beaucoup une clientèle de Dolbeau qui vient se faire opérer chez nous. Si c'est sur une base régulière et... de prouver que c'est récurrent, on devrait avoir un ajustement de notre base budgétaire en fonction d'une population desservie réellement et non pas théorique... seulement que celui du CSS. Le financement se faisant selon l'approche populationnelle, si l'on veut respecter la liberté de choix du patient, nous devons prévoir des ajustements pour un juste financement.

Le système de santé québécois est le seul où l'on retrouve la gratuité, la mobilité du patient et le libre choix du médecin, ce qui pose de grands défis au niveau de la hiérarchisation des soins et de l'imputabilité. Les tableaux de bord et une saine gestion des données peuvent permettre d'optimiser une bonne gestion de ces éléments. Il doit y avoir un mécanisme de financement qui supporte le fait que le patient soit mobile sur l'ensemble du territoire québécois. Dans les mois récents, plusieurs échanges ont eu lieu au sujet des tableaux de bord et des indicateurs de gestion. L'uniformisation de la saisie des données est un élément essentiel pour supporter la gestion des listes d'attente dans une perspective de faciliter l'accès aux soins et services, et il nous apparaît incontournable de mettre en place une structure de gestion des données qui soit standardisée et informatisée, s'assurant que les établissements pourront saisir les mêmes données, comparer les mêmes données, et pour permettre une facilité de consultation de ces dernières. La définition de critères uniformes pour l'inscription sur les listes d'attente et leur épuration demeurent une condition gagnante afin de mieux gérer l'accessibilité.

Au printemps, on en avait fait mention, puis le projet de loi le prévoit, un des gros problèmes, c'est qu'on n'a pas la juste valeur de la liste d'attente, ce qui veut dire qu'il y a des patients qui sont dans le sarrau du docteur, que, lui, il va attendre avant de les mettre. Donc, ils peuvent attendre des mois, et souvent même il peut les perdre. Et il y a une autre catégorie de patients qui attendent depuis des années, ou qui ont été opérés ailleurs, ou ? on l'a même vu dans des listes... qui sont encore sur les listes. Donc, il faut avoir vraiment une liste qui est à jour.

Le projet de loi prévoit que le ministre peut déterminer par règlement les traitements médicaux spécialisés pouvant être offerts dans les centres médicaux spécialisés. Un tel règlement entrera en vigueur le 180e jour de la date de sa publication. Nous sommes d'avis que tout règlement portant sur les centres médicaux spécialisés ne devrait pas entrer en vigueur plus de 90 jours après la date de publication. On trouve que 180 jours, c'est long, parce que, si vous avez à faire des modifications de système, il faut attendre six mois. Donc, moi, je me dis: Si c'est une bonne décision, est-ce qu'on pourrait l'avoir à l'intérieur de 90 jours, de façon à pouvoir réagir plus rapidement, comme système de santé?

Le rôle du directeur des services professionnels. La nomination d'une personne responsable de la gestion de l'accès à des services spécialisés est une proposition fort intéressante permettant d'identifier un seul acteur dans ce domaine. Cet acteur sera un facilitateur ralliant l'ensemble des personnes en fonction de gestion dans les établissements de santé. Que cette personne responsable soit en lien avec le directeur des services professionnels de l'établissement confirme encore le rôle clé de ce directeur clinique à l'intérieur des établissements de santé. Ce rôle clé est précisé dans un document produit récemment par l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux. Le lien privilégié du directeur des services professionnels avec les chefs de département permet une coordination clinicoadministrative des plus fonctionnelles, adéquates et répondant tant aux besoins de la clientèle que des praticiens à l'intérieur de chacun de nos établissements.

À partir de ce moment-ci, je passerai la parole au Dr Arata.

M. Arata (Martin): Merci, Dr Bolduc. Alors, nous poursuivons avec le partenariat avec les centres médicaux spécialisés et les centres médicaux affiliés.

Plusieurs domaines cliniques ont été identifiés comme pouvant être confiés à des partenaires du réseau. Les trois premières chirurgies identifiées par le ministre, soit celles de la hanche, du genou et de la cataracte, devraient marquer le début d'un mécanisme d'accès de plus en plus élargi pour l'ensemble des services de notre système de santé. Ce mécanisme d'accès favorise de ce fait l'utilisation du système public, sa gestion performante et la démonstration qu'il peut répondre, de plus en plus adéquatement, aux besoins de notre clientèle en documentant, de façon claire, nette et objective, les réels délais reliés à l'ensemble des procédures et des consultations spécialisées. Donc, on comprend très bien que l'on vise la chirurgie hanche, genou et cataracte, mais il nous apparaît significatif et important à moyen terme de l'élargir à l'ensemble des services spécialisés et surspécialisés offerts dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Les centres médicaux spécialisés. Les centres médicaux spécialisés présentent une alternative intéressante pour supporter le système de santé en établissement. Afin de s'assurer de la qualité de l'acte, le projet de loi prévoit le support du Collège des médecins du Québec et l'agrément obligatoire de ces nouvelles structures. Nous souscrivons à cette approche. Lorsque l'on parle de souscription à l'approche pour ce qui est du Collège des médecins et l'agrément, c'est en termes d'évaluation de la qualité de l'acte et en respectant bien évidemment les fonctions de l'ordre professionnel qu'est le collège.

Nous partageons l'approche d'un maintien d'une étanchéité entre les médecins adhérant au système public et ceux se détachant de ce même système. On veut éviter ce qui a déjà été soulevé lors de la dernière commission parlementaire, une transition des ressources vers le système privé. Nous savons que nous sommes présentement en pénurie de ressources, alors, dans le but de garder les deux systèmes étanches et d'éviter un glissement, nous souscrivons à l'approche qui est présentée présentement. La non-perméabilité des médecins adhérant ou non à la Régie de l'assurance maladie du Québec dans la création des cliniques spécialisées évitera les risques de glissement du système public vers le système privé, afin de nous garantir une certaine sécurité quant au nombre d'effectifs disponibles pour les soins et services dans le secteur public, ce que je venais de vous mentionner.

Les cliniques médicales associées. Nous trouvons le concept des cliniques médicales associées très approprié pour compléter l'offre de service provenant du secteur public. Ces cliniques médicales associées permettent au réseau de créer des liens avec un partenaire intégré aux établissements. Le rattachement prévu du médecin pratiquant dans une clinique médicale associée à un CMDP, conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, démontre le lien privilégié de ces cliniques avec le système public. Les obligations se rattachant à la nomination du médecin contribueront certainement à une meilleure continuité de services et à une responsabilisation partagée entre les établissements et les cliniques médicales associées. Ce qui nous apparaît important, c'est, dans la constitution des cliniques médicales associées, le rattachement au CMDP.

Donc, on parle d'obligations rattachées à la jouissance des privilèges, donc on parle d'une continuité entre le réseau des établissements et les cliniques médicales associées, processus aussi de rattachement qui va certainement faciliter l'évaluation de l'acte, puisqu'il a déjà des mécanismes prévus au sein des CMDP ? évaluation au niveau des plaintes, standardisation en termes d'ordonnance, les ordonnances collectives, les protocoles. Donc, il va y avoir une continuité, donc amélioration possible de l'accès, facilitation de la continuité, puisqu'on se retrouve avec un rattachement à un CSSS ou un CH.

L'importance des mécanismes de coordination. Les différents rattachements des établissements de santé soit avec les cliniques médicales spécialisées ou avec les cliniques médicales associées devront permettre l'introduction de mécanismes propres à l'évaluation de la qualité de l'acte au-delà des structures. On pourrait, d'ores et déjà, envisager une évaluation transstructure pour un épisode de soins. Cette approche va dans le sens du meilleur intérêt pour le patient. Donc, idéalement, cibler une évaluation de l'acte à l'intérieur du processus de soins mais pas seulement viser l'acte, donc tout ce qui est en lien encore, comme on vous parlait tout à l'heure, avec la continuité, l'accessibilité et pas seulement le processus de soins isolés.

De la même façon, des mécanismes de traitement des plaintes devront être prévus dans les ententes avec les cliniques spécialisées ou associées. Tel que préconisé par un éminent théoricien des organisations, Henry Mintzberg, des efforts importants, au niveau des mécanismes de coordination, pourront être consentis par les partenaires. Plusieurs opportunités se dessinent. Nous n'irons pas en détail au niveau des théories de Minztberg ici, nous procéderons ultérieurement.

À titre d'exemple, il y aurait peut-être lieu de prévoir une représentation des gens exerçant dans les cabinets affiliés à l'intérieur des CMDP, afin de pouvoir favoriser la continuité des soins de l'établissement de santé avec ces cliniques et de s'assurer d'une uniformisation de la pratique et d'une collaboration étroite entre les partenaires interdépendants.

n(15 h 10)n

Ce qu'on soulève, c'est que, si on a un directeur médical ou il y a des gens qui pratiquent à l'intérieur des cliniques médicales associées, il faudrait peut-être déjà, dans une perspective à court terme, penser, à l'intérieur des exécutifs des CMDP de nos établissements, intégrer ces gens-là dans le but de les mettre au centre du processus de gestion, parce qu'on sait que le CMDP est un peu l'organe de gestion des établissements au niveau médical, en lien avec les chefs de département et le conseil d'administration. Donc, permettre à ces gens-là qui sont dans les cliniques médicales... affiliées, excusez-moi, et associées de se retrouver là et de faciliter le processus encore de continuité et de transfert d'information.

Au niveau régional, des mécanismes de conciliation et de médiation entre les différentes instances doivent se mettre en place selon les priorités établies dans chacune des régions du Québec. Alors, on sait très bien que, si l'offre ne peut pas être offerte par l'établissement, on doit aller dans notre région, et par la suite au niveau de RUIS, et ultérieurement au niveau provincial. Donc, déjà commencer à travailler et planifier cette façon de faire dans chacune de nos régions, être proactifs au lieu d'être en attente des structures à mettre en place.

Les autres conditions de succès. Nous ne pourrions passer sous silence le fait qu'avant d'arriver aux mécanismes d'accès proposés par le ministre d'autres étapes comme l'accès aux médecins de famille, à la consultation des spécialistes, aux plateaux techniques diagnostiques présentent des délais encore significatifs dans certaines régions du Québec. Il serait certainement intéressant de pouvoir alléger le processus d'accès afin de diminuer ces délais, ceci dans le but d'éviter une attente supplémentaire pour des clientèles vulnérables.

On sait très bien que le premier contact avec le système de santé demeure principalement le médecin de famille. Donc, pour enclencher le reste du processus, si on n'a pas ou peu accès à la première ligne ou au médecin de famille, il faut peut-être regarder quel est l'impact sur le reste du système. On sait que le projet de loi ne cible pas cette problématique, mais on vous en fait part, puisqu'on considère que c'est une partie significative dans l'accès aux soins au Québec aussi.

En conclusion ? je vais conclure lentement ? ce projet de loi démontre encore la priorité du ministre quant à l'accès à des soins et services de qualité au Québec avec un système public bien géré. L'apport du privé offre un partenariat intéressant, mais bien baliser ces partenariats démontre, de la part de notre système public, une prudence avisée. Nous insistons sur le soin à mettre pour garantir de très bons mécanismes de coordination ? on vous l'a mentionné tout à l'heure: listes standardisées, comparables, informatisées, en temps réel.

L'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens est soucieuse de préserver la qualité dans tout le processus d'accès et de continuité. Nous réitérons que le souci de la qualité de l'acte des partenaires des différentes instances devra occuper une place de choix et être au premier plan des préoccupations énoncées par notre ministre dans ce projet de loi. De plus, nous souhaitons que le ministre puisse modifier la liste des services médicaux spécialisés accessibles dans les cliniques médicales spécialisées dans les délais de 90 jours, comparativement aux 180 jours qui sont proposés dans le projet de loi.

M. Bolduc (Yves): Vu qu'il nous reste un peu de temps, je pourrais vous parler des trois feuilles, les travaux pratiques, je pense, qu'on doit regarder. C'est dans le fond comment ça s'applique sur le terrain, la gestion des lits. Moi, je vais vous expliquer ma méthode qui fonctionne bien puis que je pratique depuis plusieurs années.

Sur la feuille n° 1 ? on va juste regarder les principes ? c'est d'avoir un système d'information fiable donnant accès facilement aux données. J'ai travaillé avec des établissements. Quand je leur demandais la liste d'attente des patients, ce n'est pas compliqué, il fallait qu'ils fassent ça pratiquement à la main ou que leur système d'informatique ne permettait pas d'avoir les données, alors qu'il existe des logiciels, vous pesez sur le petit bouton et, dans les minutes qui suivent, vous avez toute l'information.

Avoir une liste d'attente épurée: c'est le point majeur. Quand on n'a même pas l'heure juste par rapport à une liste d'attente, comment voulez-vous qu'on ajuste nos ressources?

Avoir un responsable en autorité pour gérer la liste d'attente. Dès qu'un patient est un candidat à une chirurgie, ça demande d'être déposé à l'admission et non pas gardé dans la poche du médecin ou à un autre endroit et ça prend un trio de gestion qui est: le responsable de la liste, celui de l'admission et du bloc opératoire. Ce n'est que ça. Le seul problème dans nos établissements, c'est que ce n'est pas fait, mais ce n'est pas plus compliqué que ça. Ce qu'il faut par la suite, c'est trouver le point d'équilibre entre les besoins de la population desservie et la production. Il faut travailler en «just-in-time» pour éviter les délais, avoir la juste production. C'est qu'il ne faut pas oublier que la sous-production et la surproduction sont aussi néfastes l'une que l'autre.

Donc, c'est vraiment gérer ça comme, je vous dirais ? c'est triste à dire, il ne faut pas comparer des patients à des objets ? mais un peu comme Wal-Mart va gérer son approvisionnement: un patient qui sort, un patient qui rentre sur la liste, il faut être capable de s'ajuster. Et puis il faut avoir les ressources adéquates; un manque ou un surplus de ressources sont dommageables. J'insiste. Un surplus de ressources est dommageable parce qu'on paie trop cher pour le service qu'on a. Un manque, c'est qu'on crée des goulots d'étranglement. Et puis il faut avoir le juste coût et il faut que tout le monde l'applique à ce moment-là.

La deuxième feuille que je vous montre, c'est une feuille que, moi, je fais régulièrement. Ça démontre le temps d'attente de chacun des patients. Si vous regardez, c'est que c'est variable. Même à l'intérieur de la même spécialité, si vous regardez en orthopédie, le I par rapport au J ? ce seraient des noms des médecins ? il y en a un qui a une longue liste d'attente, l'autre, une... liste d'attente. Ce qu'il faut faire à ce moment-là, c'est relocaliser le temps soit pour en donner un peu plus à celui qui attend ou encore, nous autres, ce qu'on fait, c'est qu'on avertit les médecins des temps d'attente de chacun des chirurgiens et après ça on laisse le choix au patient. Mais on dit: Pour tel chirurgien, c'est plus long que pour un autre. Donc, à ce moment-là, il fait un choix ce qu'on appelle éclairé.

La troisième feuille que je vous montre, qui est intéressante, ça démontre les délais d'attente, le nombre de patients qui attendent plus de six mois par chirurgien. Ce qui est intéressant, vous regardez en ophtalmologie ? puis je vous rappelle que ça date, la liste, du 7 septembre, donc très récente ? j'ai 411 patients en attente, ce qui semble un gros chiffre. Quand on dit que le chiffre n'est pas important, mais le délai, mais je n'ai aucun patient qui attend plus de six mois. Ils sont tous opérés à l'intérieur de six mois. Vous avez des endroits, ils ont peut-être seulement que 125 noms sur leur liste, mais vous avez 50 patients qui attendent plus de un an. Donc, c'est comme ça qu'il faut travailler.

Cette feuille-là, je m'en sers, un, pour voir l'intensité, ce que chacun des chirurgiens fait. Ça me permet également de réallouer mon temps opératoire par la suite, selon les besoins. Moi, j'ai un problème, je manque de patients dans certains secteurs, chez nous. On répond tellement bien à la production, c'est que ? on ne peut pas créer de patients, contrairement à ce que des gens pensent, là... ça prend une indication chirurgicale pour le faire. C'est une réalité. Donc, on a offert aussi nos services pour pouvoir opérer des patients d'autres régions pour aider... faire partie de l'entente. Et puis ce qui est intéressant, si vous regardez en orthopédie, c'est que pour la même spécialité vous en avez deux qui ont quelques patients en haut de six mois, puis vous en avez deux qui répondent à l'intérieur de six mois. Donc, c'est intéressant, encore là, quand on avertit les gens des délais. Ça, c'est une feuille que j'envoie à tous les gestionnaires et à tous les médecins du secteur depuis des années, ce qui fait que, quand un omnipraticien réfère un patient, il serait supposé être capable de dire à son patient: Vous devriez vous attendre que ça va prendre huit mois; vous devriez vous attendre que ça va prendre deux mois.

L'autre chose qui est importante comme gestionnaire de listes d'attente, c'est que, si on laisse le chirurgien choisir, le plus important, c'est le patient qui vient le voir. Donc, il le met immédiatement sur sa liste d'opération, tandis que, nous autres, on fait une attention particulière aux patients qui attendent le plus longtemps et on exige que ceux qui attendent le plus longtemps aient une certaine priorité par rapport à ceux que c'est moins long, tout en tenant compte qu'on respecte les priorités du chirurgien. Une urgence, ça va demeurer une urgence. Ça va aussi loin que, si quelqu'un a besoin d'être opéré, mais il dit: Moi, je m'en vais six mois en Europe, chez ma fille, ça peut devenir ce qu'on appelle une urgence sociale. C'est tellement rare qu'on est capables de répondre à ce type de besoin-là. Et puis la personne qui est une vraie urgence, elle, on n'a pas le choix, on le fait rapidement.

Ces petits outils de gestion, ce n'est pas plus compliqué que ça. Là, les gens m'ont dit: Oui, mais ça doit être long. Moi, comme responsable de la liste d'attente, et je gère la liste d'attente chez nous, ça me prend à peu près 20 minutes par semaine. Il faut juste que je cible les bons patients qui devraient être priorisés, et par la suite notre responsable d'admission s'en occupe avec une coordination au niveau du bloc opératoire. Merci beaucoup.

Le Président (M. Copeman): Merci, docteur. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Dr Bolduc, Dr Arata, Mme Cloutier, pour votre visite. Je voudrais souligner le haut degré de participation de l'ACMDP aux activités du système de santé, l'innovation également dans le système de santé. J'ai connu cette organisation avant que je sois en politique, comme étudiant, parce que vous aviez des sessions de formation d'ailleurs de très grande qualité. Et je fais toujours la remarque ? vous me pardonnerez de la faire encore parce que l'auditoire est différent ? que, si je peux avoir contribué à vous donner quelques sujets d'ateliers supplémentaires pour les prochaines années, bien j'en serais heureux.

Il y a également lieu de souligner la performance du Saguenay?Lac-Saint-Jean comme région dans l'accessibilité aux soins. Si on regarde aujourd'hui les chiffres... sont très faibles. Le plan d'accès pour le 50 millions a été un des premiers à avoir été approuvé, celui du Lac-Saint-Jean, au point où ils vont pouvoir servir même d'autres régions comme la Côte-Nord. Et, quant à Alma, bien je pense qu'il y a eu un article dans L'Actualité, il y a quelques temps, sur le système de santé d'Alma, que tous les Québécois voudraient bien avoir. Et je pense qu'il y a un message à donner, c'est que, lorsqu'on parle de l'expérience d'Alma dans les grands centres urbains, on dit: Bien oui, mais c'est un petit hôpital. Je pense qu'il faudrait répondre à ça, là, parce qu'on l'entend de plus en plus.

M. Bolduc (Yves): Ce que je dis toujours: Petite organisation, grosse organisation, c'est la même gestion, O.K.?

Le petit hôpital qui ne fonctionne pas bien va vous dire que l'autre a les ressources pour gérer, puis il n'y a aucun problème. Et le gros établissement va vous dire: Ils sont tellement proches que c'est facile à gérer, alors que ce n'est pas vrai. Si vous prenez les données de tous les établissements du Québec, vous avez des petits établissements qui vont bien et vous avez des petits établissements qui vont mal. Vous avez des gros établissements qui vont bien et vous avez des gros établissements qui vont mal. Ce n'est pas une question de grosseur, c'est une question de gestion. Et puis ça, il faut qu'on se le dise et qu'on enlève ce principe-là. Il faut arrêter d'avoir des excuses et plutôt aller chercher comment faire, chercher une meilleure pratique puis comment faire pour s'améliorer.

M. Couillard: Tout à fait. D'ailleurs, si on est de plus petite taille, on a des ressources plus limitées également. Ça va l'un avec l'autre. Il y a quelques éléments que je voulais discuter.

D'abord, effectivement, je voulais confirmer avec vous qu'on vise l'élargissement de la garantie d'accès, mais on pense plus prudent d'apprendre ensemble le réseau. Vous, vous l'avez déjà appris, on le voit très bien, mais ce n'est pas tous les hôpitaux qui commencent au même stade. Que tout le monde apprenne comment utiliser cet outil-là, cette façon, cette nouvelle culture pour par la suite aller plus loin.

On a choisi de créer dans la loi une obligation pour les établissements de se doter de ce mécanisme-là. On va peut-être entendre ici que ce n'est pas nécessaire, qu'ils vont le faire de toute façon. Qu'est-ce que vous pensez de cette...

n(15 h 20)n

M. Bolduc (Yves): ... s'ils vont le faire de toute façon, pourquoi ils ne l'ont pas fait depuis cinq à six ans? Moi, c'est la réponse que j'ai. Les établissements qui disent: Moi, je n'ai pas... dites-moi quoi faire, puis donnez-moi pas les moyens. Je pense que vous avez les meilleures pratiques, puis c'est une pratique rigoureuse. À partir de ce moment-là, il faut s'obliger, tous les établissements, à au moins avoir les mêmes balises. Et je vous fais remarquer que vous dites, vous donnez des grands principes, mais il y a beaucoup de marge de manoeuvre à l'intérieur de comment faire, O.K.?

Mais, moi, je pense que, si vous aviez laissé trop de liberté, la problématique que vous auriez eue, c'est que chacun aurait développé son système. On serait arrivé, dans quatre, cinq ans, pour se rendre qu'il y en a que ça fonctionne, il y en a qui ne fonctionnent pas, tandis que, là, tout le monde, on doit répondre au mêmes façons de faire. Si par la suite il y a des choses à être changées, je pense qu'il faut avoir une ouverture. Mais la base que vous avez donnée dans le projet de loi, c'est un minimum quant à moi, et puis vous n'allez pas trop loin. C'est d'après moi juste correct.

M. Couillard: Est-ce que vous pensez qu'on devrait être encore plus précis et directifs? On a demandé la personne imputable, on a demandé l'approche individualisée, la fixation d'une date, l'offre de solutions.

M. Bolduc (Yves): Moi, dans mes méthodes à moi, c'est ce que je recommandais, puis, je pense, c'est ce que tous les établissements doivent faire. C'est un minimum à faire. Par contre, est-ce que ça doit être mis dans la loi? Je pense qu'il y a des façons de travailler, mais il faut mettre un minimum dans la loi, par rapport à des obligations. Parce que vous savez comment c'est, si vous ne le mettez pas, il y a beaucoup de gens qui ne le feront pas. Et là on est rendus au stade plus de discuter, on est rendus au stade d'agir sur les listes d'attente.

M. Couillard: Il y a une petite question un peu technique que je voulais discuter avec vous, sur les budgets. Vous avez mentionné au passage le fait que vous desservez maintenant souvent des patients de territoires voisins. Je pense qu'une partie de votre mission d'ailleurs est reconnue comme ça, supralocale, là. Est-ce qu'il n'y a pas non plus quelque chose à faire attention, là? C'est que, si on encourage et qu'on cristallise un peu ce déplacement de clientèles, on n'incite pas Dolbeau, par exemple, à développer ses services de base localement, ce que les citoyens demandent. Où se trouve la limite, là?

M. Bolduc (Yves): Bon. Un, ça dépend de la hiérarchisation des services. Puis je vais vous donner un exemple. Moi, j'ai un centre d'orthopédie chez nous. Dolbeau n'a peut-être pas la population pour avoir un centre d'orthopédie, mais ils ont un centre de chirurgie générale. Moi, je n'ai pas la population pour avoir de la neurochirurgie. Donc, c'est déjà établi au Québec, le type de spécialité, à quel endroit il devrait être installé. Si, de façon circonstancielle, un établissement n'est pas capable d'offrir le service, exemple, chirurgie générale à Dolbeau, on a l'obligation, nous autres, de les aider comme tous les établissements du Québec.

Mais l'objectif, ce n'est certainement pas de les aider à long terme, de façon à ce qu'ils ne se développent pas, c'est de combler temporairement la problématique pour qu'ils deviennent autonomes. Parce qu'étant du Lac-Saint-Jean j'ai toujours prôné qu'on devrait recevoir le service le plus près possible d'où on demeure. Sauf qu'il faut être conscient que, pour une question de qualité, il y a certains services qui demandent un volume minimal puis, à ce moment-là, il faut avoir une desserte soit régionale ou même provinciale. Et il faut respecter ça.

Quand on s'entraide, c'est sur une base temporaire. Mais à tout moment chacun d'entre nous, on peut avoir besoin de cette aide.

M. Couillard: Vous avez parcouru beaucoup le Québec. Vous avez agi à titre de consultant dans plusieurs centres hospitaliers du Québec, vous avez une vision large du territoire, là. Je ne pense pas qu'au Saguenay?Lac-Saint-Jean il y ait des cliniques affiliées, là. Ça me surprendrait.

M. Bolduc (Yves): Moi, je ne penserais pas non plus qu'il va y avoir du volume pour ça, mais j'émets l'hypothèse qu'à un moment donné, s'il y en a une à Québec puis au Lac-Saint-Jean, pour des circonstances particulières on a une difficulté, on devrait être en mesure de pouvoir également utiliser les cliniques affiliées dans d'autres secteurs.

Les cliniques affiliées quant à moi, c'est une alternative, O.K.? Et, dans notre système, la difficulté qu'on a, c'est qu'avant ça, si vous faisiez affaire avec un établissement, puis il n'y a personne d'autre qui pouvait vous aider. Je pense qu'il faut qu'il y ait au moins deux alternatives. Si vous n'êtes pas capable d'offrir le service, il faut être capable que les autres établissements publics viennent nous aider. Si les autres établissements publics ne peuvent pas, on devrait avoir un mécanisme d'accès à une clinique médicale affiliée. L'intérêt également, puis c'est très intéressant, c'est l'émulation. C'est: quand vous savez que votre clientèle pourrait se faire ailleurs, à ce moment-là, vous vous obligez à donner un meilleur service dans votre secteur.

L'intérêt également, c'est que le patient ne paie pas le prix. Le problème qu'on a actuellement, le patient n'a pas de choix. Ça fait qu'il faut lui offrir un choix, des alternatives, et puis ça, ça va se développer au cours des prochaines années. Et puis comme de fait probablement qu'il y a quelques endroits au Québec seulement qu'il va pouvoir y avoir des cliniques médicales affiliées.

M. Couillard: Parce que je remarque que votre politique de gestion de l'accès demande, je dirais, une certaine mobilisation collective du corps médical. Tu sais, il faut que les médecins embarquent dans cette façon de faire. Ce n'est pas quelque chose qui apparaît naturel. J'ai connu quelques corps médicaux, là. Comment vous avez fait pour que ça se produise?

M. Bolduc (Yves): ...expérience: à un moment donné, j'ai agi à titre de... de services professionnels intérimaire dans un gros établissement. C'est probablement le cinquième ou sixième plus gros au Québec, en termes de CSS. Et puis on avait ce problème-là. Le premier problème qu'on avait, c'est que les médecins ne donnaient pas leurs listes d'attente, O.K.? Ça fait que j'ai commencé par leur dire: Écoutez, si on veut avoir une heure juste, apportez-nous toutes leurs listes d'attente. La semaine d'après, je les avais toutes. Après ça, j'ai dit aux médecins: Je vais gérer avec vous autres les listes d'attente et je vais faire des tableaux. Puis là on a fait un tableau. Puis comme de fait on était en 2003 puis on avait des patients qui attendaient depuis 1997.

L'établissement s'est responsabilisé, et on a épuré la liste d'attente en accord avec les médecins. Et par la suite ce que j'ai expliqué aux médecins: Je vous apprécie beaucoup pour vos qualités de chirurgiens, mais il faut travailler ensemble pour la gestion. Et c'est ce qu'on a fait, et ils ont très bien collaboré. Un chirurgien, ce que ça veut, c'est du temps opératoire, et ça veut opérer ses patients. Les lits, c'est accessoire. On n'a pas besoin de lits. Si on fait beaucoup de chirurgie ambulatoire, on en a moins besoin. Mais ce qu'ils veulent, eux autres, c'est mieux travailler avec l'établissement.

Moi, personnellement, quand c'est bien expliqué puis qu'on travaille pour leur intérêt, je pense qu'il n'y a pas de difficulté.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. C'est extrêmement intéressant, l'expérience que vous nous décrivez, Dr Bolduc. Je voudrais vous saluer au nom de l'opposition officielle, Dr Arata et Mme Cloutier.

La question qui m'est venue, Dr Bolduc, à la lumière surtout de l'échange, là, que vous avez eu avec le ministre, c'est la suivante. Dans le projet de loi, on y retrouve, à l'article 349.5, là, ceci ? je lis: «Les services médicaux spécialisés qui sont prévus dans une entente...» Donc, ça suppose que ce sont des services médicaux spécialisés dans le cadre des cliniques médicales associées, n'est-ce pas, pour suivre la logique du projet de loi, puisque, pour qu'il y ait une entente, il faut que l'agence ait soumis ce projet au ministre et qu'il ait approuvé, etc.

Donc, je reprends: «Les services médicaux spécialisés qui sont prévus dans une entente ne peuvent être dispensés qu'aux seuls usagers qui sont dirigés vers la clinique médicale associée par l'établissement partie à l'entente.» Ça signifie donc que seul l'établissement partie à l'entente. Disons qu'il y aurait, à Québec, pour reprendre l'exemple que vous donniez, il y aurait donc ce genre de clinique médicale associée qui serait partie à une entente avec un établissement de Québec ? disons, le CHUQ avec l'agence régionale ? et les seuls que peut recevoir la clinique médicale associée, ce sont ceux que l'établissement partie à l'entente lui envoie. Est-ce que ça convient à cette logique que vous décriviez?

M. Bolduc (Yves): Oui, parce qu'à ma connaissance une clinique médicale associée pourrait faire des ententes avec plusieurs établissements. Et puis un exemple: si, moi, à mon établissement, je ne suis pas en difficulté, à ce moment-là, je n'aurais théoriquement pas besoin d'une entente. Mais, si je perds deux orthopédistes, puis, au lieu d'en avoir quatre, j'en ai deux, puis je me retrouverais avec une liste d'attente qui serait trop longue puis qu'il n'y a personne, au Québec, qui pourrait m'offrir de l'aide au niveau des établissements publics, à ce moment-là, ce serait intéressant que je puisse aller chercher une entente avec une clinique médicale associée, de façon à ce que je puisse offrir le service à ma clientèle.

Moi, je pense que, si on ne met pas un certain contrôle et puis on ne balise pas les choses, ça va devenir anarchique. Et ce qu'on veut à la fin, c'est que notre clientèle se fasse opérer à l'intérieur des délais recommandés ou reçoive d'autres types de services à l'intérieur des délais recommandés. Moi, je pense également qu'il faut se laisser du temps, et puis, peut-être que dans trois, quatre ans, on va ouvrir plus, on va trouver d'autres mécanismes. Mais au début les gens sont tellement craintifs par rapport à toute cette nouvelle approche qu'on est mieux d'être plus prudents, puis je pense que c'est une prudence qui est raisonnable.

Mme Harel: J'ai souvenir, il y a déjà plusieurs mois de cela, là, au moment où j'avais la responsabilité au départ, là, du dossier de la santé, d'une lettre qui m'avait été envoyée. Je pense que c'était un chirurgien orthopédique d'Amos qui était d'ailleurs responsable des services professionnels de son établissement et qui protestait du fait que l'hôpital Jewish, à Montréal, avait écrit à différents établissements pour leur dire qu'il y avait eu des budgets supplémentaires de l'agence régionale de Montréal pour faire de la hanche, là, et puis qu'ils avaient comme épuisé la liste d'attente, et puis qu'ils étaient disposés à en faire pour des patients des régions, disons, plus éloignées.

Alors, je ne sais pas comment vous voyez ce...

M. Bolduc (Yves): ...on parlait de systèmes. À un moment donné, il faut faire attention. Moi, je suis pour une certaine compétitivité, mais il ne faudrait pas que les gens de Montréal ou de Québec téléphonent aux gens d'Alma et disent: Venez vous faire opérer chez nous parce qu'on a du budget. Moi, je vous dirais plutôt: S'ils répondent suffisamment à la demande, on devrait prendre une partie de l'argent qu'on leur a donné peut-être en trop et le réallouer dans un autre établissement, de façon à ce qu'on opère les gens le plus près possible. Savez-vous pourquoi on n'opère pas les gens chez eux? C'est parce que souvent il n'y a pas de chirurgien pour les opérer, hein? Il y a des régions, dont la Côte-Nord, quand vous n'avez pas un orthopédiste pour une population de 52 000, c'est sûr qu'ils ne peuvent pas être opérés.

L'objectif, ce n'est pas de prendre cette clientèle-là puis de l'amener à Alma. On peut le faire temporairement pour accommoder la population, mais l'objectif c'est d'avoir des orthopédistes qui vont opérer à cet endroit-là, que je ne veux pas nommer, mais à cet endroit-là.

Puis on a toujours défendu... En région, notre crainte, d'ailleurs ça a toujours été ça ? Mme Charest défend la même chose du côté de Rimouski ? c'est qu'on augmente beaucoup les ressources en central et puis qu'on prenne notre population, qu'on l'amène ici. C'est des coûts supplémentaires et ce n'est pas des bons services à la population. Une endocholécystectomie faite à Alma ou une endocholécystectomie faite à Chicoutimi, à Montréal ou à Québec, c'est la même qualité, hein? Nos taux de complication ne sont pas plus... qu'ailleurs. Et puis je pense qu'il faut encourager à avoir les gens pour qu'ils se fassent opérer le plus près possible de chez eux. Mais, quand on n'est pas capable d'offrir le service, il faut qu'on développe des alternatives, ce que prévoit le projet de loi.

n(15 h 30)n

Mme Harel: ...dans la présentation de votre mémoire, vous faites bien la démonstration de la quadrature du cercle aussi, par exemple, hein, quand vous dites, dans votre mémoire, qu'on retrouve à la fois la mobilité du patient et le libre choix du médecin par le patient, ce qui fait, si on reprend votre exemple, là: quelqu'un qui a besoin d'une intervention orthopédique sur la Côte-Nord peut s'en venir ici, à Québec, chez un parent, sa fille ou sa mère, là, et puis s'inscrire à un établissement de Québec pour l'obtenir dans un centre médical associé où va pratiquer un médecin, un chirurgien en fait spécialiste. Et donc ça ne réglera jamais le problème de la Côte-Nord, finalement. C'est complexe, tout ça.

M. Bolduc (Yves): Oui puis non. Pratico-pratique, là, chez moi, 95 % de ma population en orthopédie se fait opérer à Alma, O.K.? Ils ne vont pas se faire opérer ailleurs, même s'il y a de la disponibilité ailleurs. Vous avez toujours un 5 % à 10 % des gens qui vont se faire opérer ailleurs parce que sa fille est à tel endroit puis, elle, elle préférerait se faire opérer à cet endroit-là, parce qu'elle va être en convalescence chez sa fille ou qu'ils connaissent un secteur. Ou ça arrive également qu'il y a des gens... Vous êtes à Alma, vous avez un accident à Montréal, vous allez être opéré à Montréal.

Donc, ce 5 % à 10 % là, il va toujours être présent, puis on se promène d'un côté puis de l'autre. Puis il ne faut pas l'empêcher, il faut juste voir que c'est mineur par rapport à tout le dossier. 90 % des gens vont aller recevoir des soins près de chez eux. Où on a un problème, c'est lorsqu'ils n'ont pas le choix. Et, à ce moment-là, il faut leur offrir des alternatives.

Mme Harel: Il est prévu, dans le projet de loi, dans l'ensemble, si vous voulez, de l'économie générale du projet de loi, que les centres médicaux associés qui regroupent ? comment on les appelle? ? là, les cliniques médicales spécialisées, là.

Une voix: ...

Mme Harel: Non. Les centres médicaux associés, c'est le grand ensemble puis le sous-ensemble, c'est les centres...

Le Président (M. Copeman): ...médicaux spécialisés.

Mme Harel:«Centres». C'est vrai. Le mot «clinique» et le mot «centre» en fait, vous voyez?

Une voix: On va se démêler.

Mme Harel: Parce que très souvent le ministre et vous-même avez utilisé «affilié», et finalement ce n'est pas dans le projet de loi. Mais enfin on s'entend, on se comprend. L'idée, c'est: Comment on fait pour donner un service, plus de services en moins de temps, hein, finalement à plus de gens, puisqu'on veut réduire les listes d'attente, hein?

M. Bolduc (Yves): J'ai toujours été impressionné que, quand il y a une émulation dans un système, le système sort toujours gagnant, O.K.? Personnellement, je pense qu'à partir du moment qu'il y a des alternatives les directeurs généraux d'établissement vont avoir avantage à mieux organiser pour que les gens restent localement. Si on a des listes d'attente qui sont plus fiables, on va être capables d'ajuster les ressources pour que le patient reste le plus près de chez lui. Le problème qu'on avait actuellement, c'est une question de confiance dans le système, c'est-à-dire, quand vous ne savez même pas la liste d'attente, de quoi ça a l'air, comment voulez-vous réinjecter de l'argent? Ce que vous disiez tantôt est intéressant aussi: S'il y a des centres qui n'ont plus de liste d'attente, est-ce qu'il doivent continuer à avoir autant de salles ouvertes? Je pense qu'il y a des ajustements à faire.

Et il ne faut pas oublier également qu'il y a des endroits qui ont développé parce que les gens d'ailleurs... opérer chez eux. À partir du moment qu'on les fait... au bon endroit, il y a peut-être un ajustement de ressources qui va devoir être fait, mais ça, ça va tout se faire sur plusieurs années. L'alternative qu'on va avoir, c'est que, si vous ne faites pas bien le travail chez vous, on va offrir à votre clientèle d'aller ailleurs. Et, moi, je peux vous dire que des médecins, comme tout autre type de professionnels, répondent bien à ça. Puis ce que j'ai déjà dit à mes chirurgiens: Si on ne s'organise pas, on va se faire organiser. Mais c'est ce qu'on dit encore, actuellement.

Mme Harel: Mais en fait c'est que, vous, vous n'avez pas dans votre univers, à Alma, à envisager d'avoir à composer avec, attendez, une clinique médicale associée ? je l'ai cette fois ? vous n'avez pas à composer, dans votre univers, avec une clinique médicale associée. Mais la clinique médicale associée, elle, elle va avoir un contrat de cinq ans avec un coût unitaire puis un volume. Il va bien falloir que l'établissement lui en envoie puis n'en fasse pas lui-même.

M. Bolduc (Yves): Il peut y avoir des ajustements, puis probablement que, dans les ententes, on va prévoir que, la clinique médicale, on va lui offrir de faire tant de cataractes par année ou de faire tant de prothèses par année. Puis ça va être un ajustement qui va se faire sur plusieurs années.

Puis ce que vous dites, à Alma, c'est... Je vais vous donner un exemple que j'ai actuellement. Par contre, j'ai un problème de pénurie en radiologie et puis, pour avoir une mammographie, chez nous, ça prend 13 à 14 mois en dépistage, ce qui est très long, et on ne l'accepte pas non plus. Savez-vous qu'est-ce que j'ai fait? On a contacté le ministère. Il offre un service qui s'appelle CLARA, où il y a une... qui va venir chez nous puis va nous faire des mammographies. Puis, moi, ce que j'expliquais, avec les ressources que j'ai, je ne serai jamais capable de répondre aux besoins. Ça fait que la solution à ça, ce n'est pas de dire: Je ne suis pas capable, je ne suis pas capable, je ne suis pas capable, c'est: C'est quoi, les autres solutions que je peux faire? C'est d'essayer d'avoir quelqu'un qui vient donner le service chez moi, et puis on regarderait, si on ne pouvait pas les avoir, de référer notre clientèle ailleurs. L'objectif, c'est que le client reçoive le soin. Et puis il faut comprendre que, quel que soit l'endroit, il y a des secteurs que vous pouvez être très performant parce que vous avez les ressources, il y a d'autres secteurs où vous allez avoir besoin d'aide.

C'est un mécanisme d'entraide qu'on se crée dans le réseau. Il ne faut pas avoir peur de les utiliser parce que, quand vous avez des goulots d'étranglement, ça prend beaucoup d'énergie pour passer à travers. Quand je parle de goulots d'étranglement, c'est quand vous avez une trop grosse liste d'attente. Vous ne serez pas capable de passer à travers. L'exemple que je donnais: j'ai fait des travaux pour un établissement où l'orthopédiste avait 200 prothèses en attente. Ça fait que, si je le faisais opérer à chaque jour de l'année, ouvrable, ça prenait plus de un an avant qu'on passe à travers.

C'est deux façons de faire: c'est soit qu'on se réorganise pour que d'autres chirurgiens puissent opérer cette clientèle-là, et on offre le choix aux clients ou les gens vont continuer d'attendre très longtemps, ce qui n'est pas ni bon ni pour le chirurgien ni pour la clientèle.

Mme Harel: La radiologie, là, l'exemple que vous donniez, vous pensez que, d'une manière permanente, là, jamais vous ne pourrez avoir un service permanent compte tenu du peu de volume.

M. Bolduc (Yves): ...parce que présentement on est en recrutement de médecin étranger puis on espère qu'il va entrer dans un an. Mais, quand le troisième va rentrer ? parce qu'à l'époque on était trois, nos temps d'attente, dans ce type d'examen là, étaient de deux semaines... Mais, encore là, comme je vous dis, quand vous travaillez en région, c'est des petites équipes. Vous perdez quelqu'un; avant de recruter une autre personne, ça peut prendre des années. Donc, il faut avoir des alternatives pour continuer à offrir les services à la population.

Mme Harel: ...exemple, là, le même, pour cette question qui est préoccupante quand on sait le nombre de cancers du sein, là, qui augmente constamment. Mais vous allez avoir un radiologue, un médecin étranger dans un an, mais, si vous avez signé une entente pour cinq ans en garantissant un coût unitaire avec un volume, vous ne le ferez pas venir parce que vous allez être obligés de continuer à donner du volume à cette clinique privée avec laquelle vous avez fait une entente.

M. Bolduc (Yves): Non. Je pense que ce qu'on va faire à ce moment-là, c'est que, si on lui donne du volume ? puis, comme je vous disais, on pense que ça va s'appliquer seulement pour les grands centres ? à ce moment-là, il devra y avoir un ajustement avec les établissements. Mais ce ne sera pas une petite population de 50 000, ça peut être une population de 5 à 600 000 qui va travailler avec ces cliniques-là. Et avec le temps, également, on va s'ajuster et, qui sait, peut-être que dans quelques années on va attribuer un volume minimal pour des cliniques médicales associées, et puis les hôpitaux vont continuer à opérer des chirurgies plus lourdes. Il ne faut pas oublier: 60 % de notre volume opératoire, c'est de la chirurgie ambulatoire qui pourrait se faire en externe.

Donc, c'est des ajustements de système qu'on va faire au cours des années, mais je crois que de développer des alternatives, c'est une solution pour régler l'accessibilité.

Mme Harel: En fait, la grande question, c'est: Est-ce que finalement la réforme Rochon, là, qui était celle du virage ambulatoire, va se faire à l'extérieur des établissements avec un système qui va déraper vers ça, tranquillement?

M. Bolduc (Yves): Moi, je ne parlerais pas de dérapage, je parlerais de collaboration. Et puis vous savez que ça existe déjà, parce que, quand vous allez voir un médecin en clinique privée, actuellement ? comme, moi, j'ai une clinique privée, j'ai un GMF, c'est un système comme ça qu'on propose de faire ? c'est que le médecin... payé par l'assurance maladie, mais c'est son secrétariat. Là, on travaille avec les... de GMF, mais c'est son secrétariat qui se paie. C'est le même principe qu'on peut avoir au niveau des blocs opératoires, et ça existe également en radiologie. Et je fais la différence entre un système public et un système privé dans lequel le patient paie. Ce qui est important, c'est que le payeur soit public et puis qu'on assure la qualité au niveau des soins et puis qu'on développe de l'accessibilité.

Mme Harel: Mais, si le payeur est public, c'est en fait l'État, la collectivité, en fait c'est nous tous, là. Qu'est-ce qu'on paie? Est-ce qu'on paie aussi le profit? Est-ce qu'on paie aussi l'investissement immobilier? Qu'est-ce qu'on paie de plus qu'on paie dans un établissement public?

n(15 h 40)n

M. Bolduc (Yves): Un établissement public a des normes qui sont peut-être différentes du privé. Et, encore là, moi, je vous dis, il y a une certaine collaboration qu'il faut avoir entre les deux, et je ne pense pas qu'un système peut être 100 % public sans ces collaborations-là. Puis même j'étais en Europe, cet été. J'étais en Suède, en Finlande, en Norvège. Quand vous parlez avec les gens du système de santé, c'est des systèmes de santé qui sont extrêmement élevés en termes de standards, et justement ils ont tous développé des alternatives différentes quant aux paiements, mais à la fin ? puis il y en a même là-dedans que le patient paie une partie...

Même en Russie, vous savez, les gens paient pour avoir des soins. Je ne pense pas que c'est ça qu'il faut rechercher, mais ça nous prend un équilibre dans notre système où est-ce qu'on... des alternatives. Et je pense que ça amène un petit peu de compétitivité, ce qui n'est pas mauvais. Puis, plutôt que d'utiliser le mot «compétitivité», j'utiliserais le mot «émulation» entre les différents partenaires et les collaborateurs.

Mme Harel: ...il n'y a aucun de nous qui aimerait vivre sous le système de santé russe, là. Mais, les pays nordiques que vous avez cités, les médecins spécialistes sont salariés. Ils sont très, très bien salariés, mais ils sont salariés.

M. Bolduc (Yves): Ça, encore là, c'est un mode.

Mme Harel: Au Danemark, ils sont salariés.

M. Bolduc (Yves): Mais, moi, j'ai toujours dit: Les médecins, ce n'est pas le mode de rémunération qui est important, c'est quel niveau de rémunération qui vous est important. Toute la question du dilemme salaire versus acte, moi, j'ai connu les deux, et, dans les deux, on peut faire de la bonne médecine. Mais, il faut se le dire, quand quelqu'un est à salaire, des fois il y a moins de productivité sur certaines choses puis, dans d'autres cas, il y en a plus. Mais, encore là, je ne pense pas que c'est là qu'on doit porter un jugement, c'est surtout: il faut vivre avec notre système et s'entendre comment est-ce qu'on produit, aller chercher une meilleure qualité avec les ressources qu'on a. À la fin, il faut être conscients également que c'est un système qui doit être viable avec une pérennité dans le temps. Donc, il faut avoir un modèle économique qui est le plus intéressant possible.

Le Président (M. Copeman): ...Dr Bolduc, Dr Arata, Mme Cloutier, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire au nom de l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec. Et j'invite immédiatement les représentants de l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec à prendre place à la table.

Je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 42)

 

(Reprise à 15 h 48)

Le Président (M. Reid): Alors, nous allons reprendre nos travaux. Je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue à l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec et je voudrais souligner, avant de passer la parole au Dr Arbour, que vous avez une vingtaine de minutes pour faire votre présentation. Et, après ces 20 minutes là, nous aurons une période d'échange qui va durer une quarantaine de minutes avec 20 minutes de chaque côté de la Chambre.

Je vous demanderais, en commençant, Dr Arbour, de présenter la personne qui vous accompagne. Alors, je vous passe la parole.

Association des médecins
ophtalmologistes du Québec (AMOQ)

M. Arbour (Jean Daniel): Oui, merci. Alors, il s'agit du Dr Patricia Laughrea, qui est cornéologue à Québec, ici même, et qui est aussi vice-présidente de l'association.

Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, je remercie la Commission des affaires sociales de l'invitation faite à l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec de s'exprimer sur le projet de loi n° 33 présenté par le ministre Philippe Couillard et qui modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Comme vous le savez, les ophtalmologistes sont, d'abord et avant tout, des médecins. Ils sont les seuls médecins qui sont spécialisés dans le diagnostic et le traitement médical et chirurgical de toutes les maladies et de toutes les anomalies de l'oeil et de ses annexes. L'Association des médecins ophtalmologistes ou AMOQ est une des 34 associations regroupées au sein de la Fédération des médecins spécialistes, la FMSQ, et représente environ 268 membres directement visés par les changements législatifs contenus dans le projet de loi n° 33. Aujourd'hui, l'intervention de l'AMOQ fait suite à la commission parlementaire tenue en avril dernier et ayant pour sujet le document de consultation Garantir l'accès: un défi d'équité, d'efficience et de qualité présenté par le premier ministre et le ministre de la Santé et des Services sociaux le 16 février dernier. Lors de cette commission, l'AMOQ avait relevé plusieurs points qui n'étaient pas précisés dans le texte présenté par le ministre et qui touchent deux sujets en particulier, soit les listes d'attente et les cliniques spécialisées affiliées qui ont changé de nom par la suite.

Mais, avant d'aborder nos commentaires et pour le bénéfice des membres de cette commission, il est important pour nous de définir le contexte qui nous conduit ici. Le projet de loi n° 33 vise, à ce qu'on nous dit, l'amélioration de l'accès aux services médicaux spécialisés et surspécialisés au Québec. L'AMOQ est très heureuse de l'entendre, car on semble nous annoncer ici un important changement de direction de la part du ministère, si on regarde les 15 dernières années.

n(15 h 50)n

En effet, depuis le début des années quatre-vingt-dix, les ophtalmologistes et leurs patients québécois ont plutôt assisté, impuissants, à une graduelle et profonde diminution de l'accès aux soins médicaux. Ainsi, alors que tous les indices démographiques pointaient vers un vieillissement de la population québécoise, avec une augmentation prévue de la demande de soins médicaux de plus en plus pointue, le gouvernement du Québec a pourtant décidé unilatéralement de fermer des milliers de lits de soins de courte durée, de fermer des salles d'urgence, de fermer des salles d'opération, de mettre à la retraite 4 900 infirmières de façon prématurée et au sommet de leurs compétences, ce qui évidemment a nui ou a empêché au fonctionnement des salles d'opération et d'unités de soins. Et en plus le gouvernement a favorisé le départ prématuré à la retraite de 1 000 médecins spécialistes comprenant évidemment des médecins ophtalmologistes.

De plus, le gouvernement a diminué, de façon très importante, les entrées à l'université en médecine et par conséquent aux programmes d'études spécialisées en ophtalmologie. Comme il faut au minimum 10 ans d'études universitaires pour former un ophtalmologiste, vous comprendrez que la pénurie actuelle est là pour encore un bon moment, d'autant plus que le Québec rémunère ses médecins spécialistes avec le plus bas salaire, de très loin, de toute l'Amérique du Nord et que les conditions de pratique y sont les plus encadrées et coercitives de tout le monde industrialisé. On peut donc affirmer que le gouvernement est le premier responsable de la situation difficile de l'accès aux soins de santé, que la population subit aujourd'hui. On peut aussi être assurés que les médecins ophtalmologistes font tout en leur pouvoir pour pallier aux insuffisances d'un système qui périclite en facilitant l'accès au système de santé par leurs bureaux privés, financés à même leur rémunération. Ainsi, année après année, les bureaux privés doivent accomplir de plus en plus de tâches qui auparavant étaient révolues aux centres hospitaliers, où l'on retrouve pourtant un personnel clérical encore très imposant.

Les médecins ophtalmologistes ont aussi très bien démontré qu'il suffit d'arrêter de fermer les portes des salles d'opération pour faire diminuer drastiquement et efficacement les listes d'attente. Les chirurgies de cataracte en sont le meilleur exemple. Au cours des trois dernières années, le gouvernement actuel a octroyé des sommes supplémentaires visant à faire diminuer les listes d'attente en chirurgie de cataracte et avec succès, puisqu'on a vu fondre rapidement les temps d'attente moyens pour une chirurgie de cataracte qui sont passés de plus de un an à moins de trois mois en moyenne, dans les grands centres urbains. Et nous saluons l'effort du gouvernement en ce sens. On doit aussi mentionner que partout l'efficacité s'est améliorée, et partout le coût moyen par épisode de soins a diminué, ce qui est très positif.

Ceci étant dit, le projet de loi n° 33 vise à augmenter donc l'accès aux soins médicaux premièrement en instaurant, dans un centre hospitalier, un mécanisme central de gestion de l'accès aux services de santé avec liste d'attente centralisée. Cette mesure en elle-même ne fait que créer une structure bureaucratique sans pour autant augmenter l'accès aux soins, à moins d'être accompagnée d'une augmentation de l'offre de soins, qui est ici la grande absente. Il y a aussi un risque de dérapage comme il s'en est produit un il y a moins de deux semaines, ici même, à Québec, alors qu'un groupe de fonctionnaires de l'accueil d'un centre hospitalier a décidé de manipuler les priorités opératoires de médecins ophtalmologistes en se basant, dit-on, sur le projet de loi n° 33 et au gré des listes d'attente des médecins. Cette façon de faire est évidemment inacceptable. Seuls les médecins connaissent vraiment la condition de leurs patients, et les priorités opératoires devraient être distribuées par les médecins entre eux. L'AMOQ est d'avis que le mécanisme de gestion de l'accès doit faciliter l'accès sans l'intervention des fonctionnaires dans les activités réservées depuis toujours aux médecins, et le projet de loi n° 33 devrait le refléter.

De plus, il faudra éviter de réduire les listes d'attente à des feuilles comptables où les patients deviendraient des numéros que l'on pourrait déplacer d'un médecin ou d'un établissement à l'autre. Et, à la lumière des interventions qui ont été faites ici, aujourd'hui, je pense que le point est d'autant plus important. Si on commence à déplacer les gens comme des numéros, on va briser la relation médecin-patient, ce qui est complètement contraire à l'esprit médical. Par conséquent, avant d'adopter le projet de loi n° 33, il serait pour le moins indiqué de mieux définir les mécanismes par lesquels le ministre rendrait accessible un service médical donné, puisque le texte du projet de loi ne le précise pas.

La deuxième partie du projet de loi n° 33, qui interpelle directement les ophtalmologistes, concerne les centres médicaux spécialisés ou CMS où devraient oeuvrer des médecins participant au système public, en ce qui nous concerne. L'AMOQ est d'avis que les centres médicaux spécialisés peuvent représenter une partie de la solution au manque d'accès aux soins médicaux ophtalmologiques. Cependant, le projet de loi n° 33 n'est pas très rassurant quant au financement et à la flexibilité de l'encadrement de ces centres.

Lors de la précédente commission parlementaire, l'AMOQ avait insisté sur plusieurs points précis, notamment que tous les médecins pratiquant au sein des CMS soient obligatoirement membres actifs d'un conseil de médecins, dentistes et pharmaciens d'un établissement qui offre la garde en ophtalmologie pour recevoir les patients présentant des pathologies complexes ou des complications hors des heures ouvrables habituelles, et ce, pour éviter évidemment un délaissement de la pratique plus lourde en milieu hospitalier au profit des cliniques médicales associées. Le projet de loi n° 33 va dans ce sens et nous satisfait.

Deuxièmement, l'AMOQ proposait que les propriétaires de ces cliniques soient majoritairement des médecins. Le projet de règlement propose plutôt que le conseil d'administration d'une telle entité soit composé majoritairement de médecins et que les droits de vote rattachés aux actions d'un CMS devraient être détenus par des médecins membres du Collège des médecins. Nous sommes très confortables avec cette position, puisqu'il serait inutilement réducteur de limiter le financement de ces centres à de seuls médecins. De plus, le conflit d'intérêts potentiel entre les CMS et des sociétés qui fabriquent, ou qui vendent, ou qui offrent des produits et services en période pré, per ou postopératoire à des patients qui reçoivent des services dans les CMS est complètement éliminé par l'interdiction de participation financière de ces dernières aux CMS, ce qui est très correct. Là où nous sommes moins d'accord, c'est lorsque l'on interdit l'accès aux installations des non-participants aux participants et inversement, parce que, sur le plan de la rentabilité, une plus grande flexibilité présenterait des avantages certains. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que le projet de loi n° 33 est extrêmement rigide sur ce point, avec amendes sévères à l'appui.

Troisièmement, les CMS étant liés par contrat aux établissements concernés, l'AMOQ était d'avis qu'ils devraient être impliqués dès le début de l'épisode de soins et non après un délai de six mois, comme le suggérait au départ le document présenté par le ministre. Le projet de loi actuel va aussi en ce sens, et c'est très satisfaisant.

Quatrièmement ? c'est un point très important ? les CMS, je le répète, risquent de déstabiliser gravement les équipes de soins en place au sein des établissements parce que tous les intervenants d'une équipe de soins ne désireront pas ou n'auront pas nécessairement intérêt à aller dans le CMS. Il y aura invariablement un déplacement inéquitable des ressources vers le CMS, lorsqu'un contrat sera signé, au détriment des soins offerts aux patients en établissement, et le danger apparaît encore plus grand en centre d'enseignement universitaire. Sur ce sujet, le projet de loi n° 33 stipule, et je cite, qu'«une agence peut proposer au ministre [...] que tout établissement [exploitant] un centre hospitalier [...] puisse s'associer à une clinique médicale [associée] pour y [déplacer des] soins médicaux spécialisés», et ceci peut se faire après simple consultation de la Table régionale des chefs de département. L'AMOQ craint fortement que les fonctionnaires ne mettent en péril l'accès aux soins en n'ayant pas à obtenir l'aval des médecins concernés par cette décision de recourir à un centre médical spécialisé. Nous réitérons notre suggestion d'obliger l'agence à obtenir l'assentiment de la majorité des membres du service ou du département d'ophtalmologie du centre hospitalier ciblé avant de négocier un partenariat avec un CMS.

Nous sommes d'avis que l'accès aux soins pourra être amélioré en impliquant les ophtalmologistes plutôt qu'en les éloignant du processus décisionnel. La démotivation qui en résulterait annulerait certainement les effets positifs escomptés par l'agence.

Cinquièmement, le développement des CMS ne devra pas nuire aux missions d'enseignement des établissements, et ces derniers devront garder des masses critiques tant au niveau clinique qu'au niveau chirurgical pour assurer leur mission auprès d'une masse d'étudiants qui va en croissant grâce aux réouvertures en médecine. Le projet de loi n° 33 n'offre pas de garantie en ce sens, cependant.

Maintenant, concernant les règles d'encadrement et de développement des CMS édictées par le projet de loi n° 33, c'est à se demander si le gouvernement veut vraiment voir des CMS. En effet, on apprend qu'en plus de devoir obtenir un permis, nommer un directeur médical, obtenir un agrément des services, ouvrir ses portes exclusivement à des participants, en ce qui nous concerne, le projet de loi n° 33 donne au ministre un pouvoir d'inspection dans un lieu qui ne lui appartient pas. De plus, le contrat liant le centre hospitalier au CMS a une durée plutôt courte de cinq ans, et pendant ce temps le ministre peut révoquer le permis du CMS en diverses circonstances. Ces conditions rendent peu attrayantes pour l'instant l'implication des médecins dans les CMS, et en ce sens l'AMOQ suggère que le contrat soit d'une durée minimale de 10 ans avec des garanties de moyens de médiation et d'arbitrage en cas de différends entre les fonctionnaires et les médecins du CMS. Le projet de loi n° 33 a même l'odieux de menacer les médecins du CMS d'amendes allant jusqu'à 6 000 $ s'ils enfreignent les règles énumérées. Les fonctionnaires qui ont écrit ce projet de loi semblent oublier que les politiques qu'ils ont eux-mêmes mises de l'avant depuis 15 ans ont directement mené aux problèmes d'accès aux soins médicaux spécialisés que connaît la population québécoise.

À quand les amendes pour des gestionnaires qui ferment les salles d'opération, les lits d'hôpitaux, des cliniques de soins à tous les jours, quelque part au Québec? L'AMOQ recommande fortement que les mesures incitatives restent et non les mesures coercitives telles que sont les amendes.

n(16 heures)n

Finalement, le projet de loi n° 33 stipule que les sommes d'argent facturées aux patients d'un CMS doivent se limiter aux sommes normalement exigées par un centre hospitalier à l'usager, ce qui est à l'encontre, malheureusement, de la réalité de la majorité des bureaux en exercice aujourd'hui. Tous sont au courant que des frais accessoires sont facturés aux patients dans les bureaux et que, sans ces frais accessoires, aucun bureau ne pourrait subsister aujourd'hui, dans la province. Jamais le système actuel ne pourrait absorber l'énorme quantité de travail effectuée tous les jours, dans les bureaux privés des ophtalmologistes et des autres médecins spécialistes. De plus, le projet de loi limite l'accès au CMS aux seuls patients référés par l'établissement avec lequel le CMS est associé. Ceci limite inutilement et considérablement la marge de manoeuvre de ces derniers. Cette limitation devrait être retirée du projet.

En conclusion, il faut bien réaliser que les politiques de rationnement de la main-d'oeuvre et de ressources entreprises par le gouvernement depuis les années quatre-vingt-dix ont certainement contribué largement aux listes d'attente que nous connaissons aujourd'hui et que la pénurie de médecins et d'infirmières ne sera pas réglée dans un proche avenir, surtout avec la récente adoption de la loi n° 37, qui concerne les médecins spécialistes, et ce, malgré les récents ajustements au niveau des entrées en médecine. Le gouvernement est responsable de l'accès aux soins médicaux spécialisés, et le projet de loi n° 33 semble indiquer une volonté de l'améliorer.

L'AMOQ est d'avis que les centres médicaux spécialisés pourront permettre aux ophtalmologistes d'augmenter l'accès aux soins seulement si le gouvernement leur donne la latitude et le financement nécessaires et non en les paralysant avec des mesures coercitives inutiles. Merci beaucoup.

Le Président (M. Reid): Oui. Vous êtes bien en avance. Ça va donner le temps d'avoir des échanges un petit peu plus en détail, peut-être. Alors, je vais passer la parole d'abord au ministre pour le côté gouvernemental. M. le ministre.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, Dr Arbour, Dre Laughrea, de votre visite aujourd'hui. On en profite pour souligner effectivement les bons résultats que les chirurgiens ophtalmologistes ont réussi à obtenir dans la chirurgie de la cataracte. Il s'agit probablement d'une des plus importantes réductions au Canada, actuellement, de listes d'attente pour la chirurgie de la cataracte. Mais vous avez bien expliqué, l'été dernier ou le printemps dernier, qu'il y a d'autres problèmes ophtalmologiques qui ont besoin également de notre attention, et c'est pour ça qu'on est là, aujourd'hui, pour discuter de cette chose-là.

Je vais discuter des deux éléments que vous avez abordés plus particulièrement, d'abord la gestion de la liste d'attente et, deuxièmement, les cliniques associées. Vous avez émis plusieurs craintes ou recommandations. Pour ce qui est de la liste d'attente et de sa gestion centralisée, je crois personnellement que, s'il est vrai que les médecins soient les seuls ? et il faut qu'ils soient les seuls ? à prioriser les patients, qui va être opéré avant un tel, c'est un jugement médical dans lequel jamais l'État ne devrait s'ingérer. Il faut cependant qu'il y ait des mesures qui aident peut-être les médecins. Dans la gestion du phénomène d'attente ou du fonctionnement d'un bloc opératoire, ils ne sont pas naturellement compétents. On peut être excellent clinicien mais pas nécessairement très bon pour gérer ces questions-là. Et le Dr Bolduc tantôt parlait du phénomène des listes d'attente dans les... Ayant été chef de département, je connais bien le phénomène, et il y a plusieurs choses en dessous de ça.

Lorsqu'on dit que les patients se déplacent, je comprends très bien votre crainte, puis on ne veut pas en venir là. Ce qu'on veut faire cependant, et c'est très différent, c'est qu'on doit offrir une solution. Je pense qu'il n'est pas question, nulle part dans le projet de loi, de dire: M. Untel, vous attendez sur la liste de M. le Dr Arbour, ça fait trop longtemps, on vous prend puis on vous envoie dans un autre hôpital. Jamais. Cependant, l'hôpital a la responsabilité, après avoir d'abord parlé au médecin. Parce que souvent, avec toutes les activités quotidiennes, si on se fait juste dire: Bien, tel patient arrive maintenant à la date limite, est-ce qu'on peut accélérer sa chirurgie?, souvent ça va se régler comme ça, vous le savez bien, quotidiennement. Mais, si c'est difficile de le faire, on doit lui offrir une autre solution. C'est un peu ce qu'on entendait tantôt avec le Dr Bolduc, et non pas, de façon coercitive ou obligatoire, déplacer un patient. Je pense qu'on l'a fait avec la radio-oncologie avec succès, et c'est dans cette optique-là qu'on le voit et non pas, je vous rassure, là, pour...

Vous me donnerez les détails sur cet épisode de changement de priorités opératoires. Ce n'est pas du tout l'optique dans laquelle on est. On a entendu tantôt que, lorsque l'administration hospitalière et le corps médical se conjuguent ensemble, ils réussissent à adapter très bien les patients en attente aux disponibilités qu'il y a. Et ça se fait à l'interne, par consensus, et c'est comme ça qu'on veut que ça se fasse. Et je pense qu'il est essentiel qu'on adopte ce mécanisme de gestion centralisée et de validation, surtout, des listes d'attente. Je ne dirais pas qu'en ophtalmo le problème de validation est majeur, là, parce que c'est des types de situations dans lesquelles vous êtes habitués à fonctionner depuis longtemps, mais il y a d'autres spécialités où il y a beaucoup, beaucoup de travail à faire dans la validation des listes d'attente.

Pour ce qui est des centres associés ou des cliniques médicales associées, effectivement on a tenu compte de plusieurs de vos remarques dans le projet de loi. Quelques remarques. D'abord, vous parlez des frais accessoires. C'est certain qu'on veut que, lorsque la clinique fait sa proposition, elle va inclure ce que normalement elle demande comme frais accessoires aux patients dans la négociation pour le tarif unitaire de la chirurgie en question. Ça tombe sous le sens. Et donc ce qu'on veut, c'est que le patient n'ait pas à débourser d'autre chose qu'en milieu hospitalier.

Là, vous pourrez peut-être corriger mon impression. Si actuellement on est opéré pour une cataracte dans un hôpital, on peut avoir à débourser, depuis plusieurs années, un montant supplémentaire pour obtenir une lentille d'un modèle différent.

Une voix: Tout à fait.

M. Couillard: Donc, ça peut être la même chose à la... mais pas plus que ça, la même chose que c'est actuellement dans le milieu hospitalier. Je ne sais pas, sur le plan des frais accessoires, comment vous réagissez à ça, là.

M. Arbour (Jean Daniel): Bien, c'est ça, c'est que vous êtes au courant qu'actuellement la majorité des bureaux d'ophtalmologistes chargent des frais de gouttes au patient. Le patient qui entre paie un certain montant pour les gouttes. Bon. Ça, c'est déjà une source de revenus qui n'existe pas à l'hôpital, évidemment. D'autres frais qui sont chargés et qui sont tout à fait légaux; vous vous rappelez que les biométries, c'est-à-dire la mesure de la longueur axiale de l'oeil, qui est utilisée pour choisir la lentille intraoculaire qu'on va implanter lors d'une chirurgie de cataracte, a été désassurée en milieu extrahospitalier. Alors donc, c'est une source de revenus qui est très importante dans les bureaux actuels mais qui ne peut être chargée à l'hôpital. Et, si les bureaux perdent ce montant-là, ça fait une grosse différence, surtout que la chirurgie... elle représente quand même une bonne partie du revenu d'un ophtalmologiste.

Alors, c'est des montants qui doivent être pris en considération. Si vous me dites que le montant doit être négocié avec l'agence, c'est donc un coût supplémentaire pour l'agence à ce moment-là qu'elle n'a pas à payer actuellement, lorsque le patient passe par le bureau au lieu de l'hôpital. Et, pour certains endroits dans le Québec, comme à Notre-Dame, où je travaille, je vous dirais que la très grande majorité de ces mesures-là sont faites en bureau privé et permettent de... l'hôpital, mais il y a des frais quand même qui s'accompagnent.

M. Couillard: Je pense que ces frais-là doivent être «built-in», si je peux m'exprimer ainsi, dans la négociation du tarif unitaire entre l'établissement puis la clinique. Et, même à ça, il faut qu'on en arrive ? et je pense qu'on peut en arriver, il y a des expériences qui le démontrent ailleurs qu'au Québec ? à des tarifs unitaires inférieurs à ce que ça coûte en milieu hospitalier pour faire certaines chirurgies à... infrastructure.

L'autre fois, vous nous aviez donné d'autres exemples que la cataracte pour le type d'activités spécialisées que vous pourriez faire dans ces cliniques-là. Vous aviez beaucoup parlé du glaucome, particulièrement. Pourriez-vous nous donner quelques exemples de situations cliniques qui, vous trouvez, pourraient facilement être déplacées du milieu hospitalier vers la clinique médicale associée?

M. Arbour (Jean Daniel): Je vous dirais que la majorité des activités cliniques ophtalmologiques et chirurgicales peuvent être transportées dans un CMS, actuellement, parce que le pourcentage que représentent les chirurgies beaucoup plus lourdes est quand même assez faible. Ce n'est pas 50 %, là, c'est moins, peut-être de 5 % à 10 %. Même pas. La grosse majorité des chirurgies se font très facilement dans un CMS. Les autres vont requérir de l'équipement beaucoup plus spécialisé et une infrastructure plus grosse et devraient rester à l'hôpital.

Il y a le glaucome. Il y a la rétine qui peut être faite dans un CMS. Même la chirurgie de rétine, que ce soit un «buckle» ou une... ça se fait sous anesthésie locale, sans présence d'un anesthésiste immédiat. L'anesthésiste peut être dans une salle à l'extérieur. Donc, s'il y a une anesthésie, on a parlé des CMS qui pourraient avoir, par exemple, un anesthésiste pour plusieurs salles d'opération. Les chirurgies étant plus légères, ça pourrait très bien se faire là. Donc, la majorité d'activités ophtalmologiques peuvent se faire là. L'imagerie peut se faire là. On va développer beaucoup l'imagerie au Québec ? on en a déjà parlé ? pour augmenter l'accès aux soins ophtalmologiques, et il y a vraiment des sommes à débloquer là-dedans, pour faire débloquer l'imagerie, pour favoriser l'accès des gens aux soins médicaux. Les rétinopathies diabétiques. Le laser peut être fait en clinique médicale spécialisée. Il se fait souvent en clinique médicale spécialisée, même si la majorité des traitements au laser se font à l'hôpital.

M. Couillard: Et là le problème que vous avez mentionné ? vous travaillez vous-même à l'Hôpital Notre-Dame, donc au CHUM, qui est un milieu d'enseignement ? c'est que vous avez soulevé le problème ? d'ailleurs, on en discutait récemment, dans un colloque, ailleurs ? cette question spécifique des... universitaires dans le cadre de ce déploiement éventuel de certaines activités en clinique associée. Et une des solutions possibles, c'est de conserver un bassin d'activités dans le centre... qui correspond aux besoins d'enseignement. Une autre solution possible, c'est de déplacer un peu de l'activité d'enseignement dans la clinique spécialisée.

Est-ce que ça vous paraît impossible, par exemple, d'opérer avec un résident senior à la clinique spécialisée?

M. Arbour (Jean Daniel): Pas du tout. On en a discuté avec plusieurs membres de l'association, et effectivement une partie de l'enseignement pourrait être effectuée dans ces centres-là, sauf qu'il faut toujours garder en tête qu'enseignement ne rime pas tellement avec efficience. Alors donc, la rentabilité du CMS pourrait être affectée par ça, alors il faut toujours qu'il y ait un juste équilibre. C'est pour ça que j'insistais tout à l'heure, quand je disais que l'agence doit éviter de passer par-dessus le groupe de médecins pour signer un contrat entre un centre hospitalier et un CMS, parce que les gens le voient, le problème. L'agence n'est pas nécessairement au courant des tâches d'enseignement qui se font de façon précise, dans le centre.

n(16 h 10)n

M. Couillard: Lorsqu'on a fait le mécanisme proposé dans le projet de loi pour l'initiation d'un projet, c'est un peu une discussion assez prolongée qu'on a eue: Comment est-ce qu'un projet est initié? Par quelle façon on le fait cheminer justement pour éliminer ? vous en avez parlé vous-même ? les conflits d'intérêts potentiels ou des choses qui pourraient survenir? Lorsqu'on a le mécanisme de l'agence qui, avec l'établissement et sa table de chefs de département régionale, on a l'impression qu'on a un mécanisme qui est un peu à distance et qui maintient une certaine indépendance et une appréciation juste des volumes de chirurgies à faire. Mais il ne s'agit pas du tout, loin de là, pour nous, d'écarter. Je ne pense pas.

Est-ce que ça vous semble concevable qu'un hôpital puis une agence élaborent un projet en cachette de leurs services d'ophtalmologie?

Une voix: Tout à fait.

M. Couillard: Ça me paraît inconcevable, là.

M. Arbour (Jean Daniel): Ça vous paraît inconcevable, mais la réalité de tous les jours fait en sorte qu'une agence peut très bien décider de signer quelque chose avec un autre groupe, au mieux offrant. Moi, ça ne me semble pas du tout... Je peux vous dire que j'ai entendu beaucoup de projets qui sont en l'air... pas en l'air, mais dans l'air, depuis des années, et ça se ferait facilement. Alors, pour moi c'est important. De toute façon, je ne vois pas le désavantage à le coucher par écrit et à le mettre dans le règlement, à obliger une agence qui veut faire un contrat entre une institution et un CMS, à l'obliger à avoir l'assentiment des médecins. Et c'est le gros bon sens. Je ne pense pas que les médecins vont s'opposer à quelque chose comme ça.

M. Couillard: Je trouve aussi que c'est le gros bon sens, mais, à la lumière de votre présentation, on va y réfléchir. Mais le but n'était pas d'écarter un service médical de la validation d'un projet. Je voulais encore une fois vous l'assurer.

La question de la propriété également a fait l'objet de beaucoup de réflexions. Vous n'êtes pas sans savoir... Vous avez probablement suivi quelques présentations lors de la commission. On a eu des présentateurs, dont Michel Clair, qui est lui-même un peu le père du concept de cliniques affiliées, maintenant centres médicaux associés. Lui s'opposait même totalement à la participation des médecins dans la propriété et l'administration de la clinique. Je ne sais pas si vous avez suivi sa présentation. Il disait: Bien, on ne peut pas mélanger des concepts de pratique clinique puis des concepts d'affaires.

Et donc les médecins selon lui devraient être exclus. Vous avez vu que ce n'est pas le chemin qu'on a pris. Mais quel est votre commentaire là-dessus, là?

M. Arbour (Jean Daniel): Ah, mais j'abonde totalement dans le sens qu'on vous avait proposé, parce que je me souviens très bien qu'on a eu cette discussion-là en avril. Il est certain que le patient trouve plus son compte en ayant, en avant de lui, ou quelqu'un qui parle pour lui qui est un médecin par rapport à un administrateur ou quelqu'un qui dirige une compagnie. J'en suis convaincu. Le Collège des médecins, le code de déontologie obligent le médecin à faire passer les intérêts de son patient avant et non le profit. C'est une très bonne décision, je pense, que le gouvernement a eue de faire en sorte que la majorité des votes rattachés aux actions soit détenue par des médecins, même si la participation financière n'est pas nécessairement la même, ne suit pas nécessairement.

M. Couillard: Sans parler de l'impact au niveau des accords de commerce internationaux. On aura l'occasion d'y revenir dans d'autres discussions.

Évidemment, vous le savez, la chirurgie de la cataracte est parmi les trois chirurgies ciblées pour la garantie d'accès dans son premier déploiement, et on veut par la suite l'étendre à d'autres procédures. Si vous aviez à identifier une ou deux procédures dans lesquelles actuellement, en ophtalmologie, il y a un problème significatif d'accès, vous nous suggéreriez d'aller dans quelle direction pour étendre?

M. Arbour (Jean Daniel): Le numéro un actuellement, c'est la greffe de cornée, et la Dre Laughrea pourrait vous en parler. Le temps d'attente au Québec est le plus élevé, je crois, de tous les pays industrialisés. C'est près de trois ans à certains endroits. Alors, la greffe de cornée est très souffrante actuellement, ici, au Québec. Actuellement, de façon très ponctuelle, c'est le strabisme, aussi, adulte.

Une voix: Est-ce que la greffe de cornée, ce n'est pas lié à un problème d'approvisionnement en greffons, à ce que je sache, essentiellement?

Mme Laughrea (Patricia): En fait. En particulier, oui. Il y a vraiment une pénurie de donneurs, alors que, toutes les possibilités, on les aurait au Québec. Vous savez qu'il y a des lois qui sont différentes dans les autres provinces canadiennes, aussi desquelles on aurait peut-être avantage, là, à s'inspirer.

Certaines provinces sont arrivées à régler les problèmes de pénurie de greffons par une nouvelle législation. Alors, je dirais que, oui, le facteur principal est vraiment la pénurie de greffons. Il y a, deuxièmement, aussi l'organisation au sein des hôpitaux qui complique les choses aussi. On parle de disponibilité de temps opératoire, disponibilité aussi à l'occasion, là, de temps, là, anesthésique. Il faut rappeler aussi que les équipes aussi de gens qui sont habilités à s'occuper de problèmes particuliers comme les greffes de cornée sont quand même assez petites aussi et assez fragiles. Ça rejoint un petit peu aussi ce qu'on a dit tout à l'heure, au point de vue enseignement. Ça reste que ce sont des équipes où il n'y a pas tant de personnes que ça pour lesquelles c'est possible de s'occuper, bon, soit de l'enseignement, soit de la greffe de cornée ou divers domaines un peu précis comme ça.

Alors, je pense qu'il ne faut pas les oublier ou les noyer à travers l'écoute d'autres problèmes.

M. Couillard: Ça va.

Le Président (M. Reid): Merci. Alors, je vais passer la parole maintenant à la députée d'Hochelaga-Maisonneuve qui est la porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et services sociaux.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais saluer les porte-parole de l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec, Dr Arbour, Dre Laughrea.

Dr Arbour, vous pratiquez, vous exercez à Notre-Dame et en clinique privée et vous dites qu'une bonne partie de la chirurgie de la cataracte actuellement, là, les interventions se font en clinique privée. Est-ce que c'est ce qu'il faut comprendre?

M. Arbour (Jean Daniel): Non. Ce que je disais, c'est qu'une très grande partie... Ce n'est pas juste la cataracte, l'ophtalmologie, hein? Il y a 90 000 autres raisons pour voir un ophtalmologiste, et la majorité des patients qui sont vus dans certains centres sont vus en bureau privé. Les cataractes sont quand même opérées dans les centres hospitaliers, actuellement, sauf chez les non-participants, et c'est ça qu'on veut changer avec ce projet de loi. On voudrait que les participants au système public puissent aussi opérer des cataractes dans des centres conventionnés, entre guillemets.

Alors donc, au niveau chirurgical, non, ce n'est pas ce que je disais. Ce que je disais, c'est vraiment par rapport à l'examen du patient, au diagnostic, les traitements de laser, des choses comme ça, mais pas pour la chirurgie de cataracte actuellement.

Mme Harel: Dites-moi, est-ce que je me trompe d'avoir compris que selon vous il y aura peu d'ophtalmologistes qui décideront de se désengager puis de travailler dans des CMS non participants composés de médecins non participants?

M. Arbour (Jean Daniel): D'accord. Moi, je...

Mme Harel: Vous sembliez présumer que tous choisiraient de rester participants.

M. Arbour (Jean Daniel): En fait, je ne me suis pas vraiment lancé là-dessus. Je pense que la majorité des médecins ophtalmologistes actuellement ne songe pas à se désengager. Et de toute façon, grâce à la loi n° 37, ce serait très difficile de le faire, comme vous le savez, sous peine de représailles assez importantes.

Mais, non, le but actuellement, c'est que le système public continue de fonctionner beaucoup mieux, c'est-à-dire s'améliore, augmenter l'accès mais tout en restant public. L'avantage des CMS, c'est que ça reste public dans le sens que c'est le gouvernement qui paie pour les épisodes de soins, mais les fonds proviennent de l'extérieur. Et on s'attend en contrepartie à ce que la gestion soit extérieure et non pas que les problèmes qu'on connaît à l'hôpital se transposent au bureau. Ça va très bien dans les bureaux privés. Pourquoi? Parce que c'est tout petit, c'est géré comme une petite entreprise et c'est l'inverse qu'on retrouve dans les gros hôpitaux, qui sont énormes qui ont à faire face à tant de demandes continuellement avec des complexités très différentes. C'est beaucoup plus facile de gérer une petite place, contrairement à ce que le monsieur des CMDP disait tout à l'heure. Je n'adhère absolument pas à son assertation.

Mais, ceci dit, je pense que, dans ces centres-là, les CMS, les patients auraient plus facilement accès à des soins défrayés par le système public mais gérés par des fonds privés, entre guillemets.

Mme Harel: C'est-à-dire que les fonds sont publics.

M. Arbour (Jean Daniel): Non. Bien, c'est-à-dire les revenus sont publics...

Mme Harel: Les fonds sont publics.

M. Arbour (Jean Daniel): ...mais les investissements sont privés.

Mme Harel: Bon. Parlons-en. Vous parliez tantôt de la nécessité de débloquer des fonds publics pour de l'imagerie. Vous parliez aussi du laser et, dans la mesure où ces interventions se font dans les cliniques privées, qu'on va appeler cliniques de médecine spécialisée, ces fonds publics vont donc servir à débloquer des fonds essentiels, comme le laser ou l'imagerie, pour le privé. C'est ce qu'il faut comprendre de ce que vous nous disiez.

M. Arbour (Jean Daniel): Non. Pas vraiment. Moi, je pense qu'il y a de la confusion entre privé et non privé, et c'est très confondant, effectivement. Il y a du privé qui est conventionné puis du privé non conventionné. Il y a du participant et du non-participant.

Mme Harel: Mais ça reste du privé.

M. Arbour (Jean Daniel): Bien, oui. Mais, écoutez, les bureaux privés qu'on a actuellement, où je vois...

Mme Harel: La propriété de la clinique médicale spécialisée, elle est privée?

M. Arbour (Jean Daniel): Tout à fait.

Mme Harel: Donc, propriété privée de la clinique médicale spécialisée, mais finalement financement public de l'usager.

M. Arbour (Jean Daniel): Tout à fait.

Mme Harel: Bon. C'est un peu comme... Bon. Je ne donnerai pas d'exemple. Mais, ceci dit, donc c'est la propriété privée de la clinique médicale spécialisée pour laquelle le financement public de l'usager va permettre. Parce que vous disiez vous-même...

M. Arbour (Jean Daniel): De traiter les gens.

Mme Harel: ...tantôt d'équiper. Il va falloir de l'équipement.

M. Arbour (Jean Daniel): Non. L'équipement va être payé par des fonds privés. Ce ne sera pas des fonds publics qui vont payer ça, et c'est ça, la nouveauté.

Mme Harel: Vous voulez dire que ça va être par altruisme.

n(16 h 20)n

M. Arbour (Jean Daniel): Non, non. Actuellement, par exemple, dans mon bureau privé, au 15e étage, là, sur la rue Président-Kennedy, c'est moi qui paie, à même ma rémunération, les employés, le papier, l'ordinateur, le téléphone, tout ça. Ce ne sont pas les fonds publics. Pourtant, les gens qui viennent chez moi n'ont pas à débourser, autres les frais accessoires de gouttes, mais ils n'ont pas à débourser pour les visites, ils n'ont pas à débourser pour rien.

Mme Harel: Faites-vous ça à perte?

M. Arbour (Jean Daniel): Pardon?

Mme Harel: Est-ce que vous faites cela à perte?

M. Arbour (Jean Daniel): Non, on ne fait pas ça à perte, mais on ne fait pas ça pour gagner de l'argent non plus. C'est à peu près à but non lucratif, toutes ces choses-là.

Mme Harel: Vous le dites sérieusement?

M. Arbour (Jean Daniel): Oui, tout à fait.

Mme Harel: Vous voulez dire que...

M. Arbour (Jean Daniel): On est une société de partage de dépenses, mais je parle de mon cas à moi. Évidemment, il y a d'autres...

Mme Harel: Mais vos revenus. Ces heures-là que vous dispensez, il y a des revenus qui vous sont versés par le régime public.

M. Arbour (Jean Daniel): La RAMQ. Oui, tout à fait.

Mme Harel: C'est ça. Bon.

M. Arbour (Jean Daniel): Je traite des patients. C'est normal que je sois rémunéré pour ça.

Mme Harel: Voilà. Mais là vous avez bien vu que, dans le projet de loi, il va y avoir des ententes par lesquelles il y aura des coûts unitaires.

M. Arbour (Jean Daniel): Pardon? Des coûts unitaires. Oui, tout à fait.

Mme Harel: C'est ça, des coûts unitaires, là. Il y a un montant unitaire qui va être versé par l'agence pour couvrir les frais reliés à chaque service médical. Qu'est-ce que vous entendez par «les frais»?

M. Arbour (Jean Daniel): Mais ce n'est pas moi qui ai fait la loi, là. Je demanderais plus au ministre, là, qu'est-ce qu'il entend par ces frais-là.

Mme Harel: Mais vous, qui êtes ophtalmologiste?

M. Arbour (Jean Daniel): Mais, moi, personnellement, c'est les frais... Par exemple, on essaie de déterminer le coût unitaire d'une chirurgie de cataracte. Ça n'a pas été fait partout, en passant, hein, mais il faut déterminer combien ça coûte avec le loyer, avec les employés, avec les équipements, avec tout l'équipement qu'on doit... etc. Il faut arriver avec un prix, et «that's it». C'est comme ça que ça se fait.

Mme Harel: Et ce prix, va-t-il comprendre des équipements? Vous le mentionniez, le mot «équipement». Va-t-il comprendre, par exemple, le laser, l'imagerie, etc.?

M. Arbour (Jean Daniel): Bien, il faudra qu'il y ait un prix qui puisse comprendre pour la dépréciation de ces équipements-là. C'est bien évident. On ne fera pas ça... Il n'y a personne qui va aller faire... Je ne pense pas que les médecins soient sollicités pour faire des dons d'équipement actuellement.

Mme Harel: Alors, je reviens à ma question de départ: Ces amortissements, là, dont vous parlez, d'équipement, telle l'imagerie, tel le laser, ça va donc amener des fonds publics qui vont être débloqués dans le cadre de ces montants versés par les agences à des CMS pour tel équipement, qui ne seront pas débloqués pour un tel équipement dans les établissements publics.

M. Arbour (Jean Daniel): Tout à fait. C'est le but, d'ailleurs.

Mme Harel: D'accord.

M. Arbour (Jean Daniel): Non, le but, c'est de déplacer un traitement d'un centre hospitalier à un endroit où on pense qu'il va être plus efficace et moins coûteux.

Mme Harel: Et donc pas de faire de l'excédentaire.

M. Arbour (Jean Daniel): Non, pas du tout.

Mme Harel: Pour vous, le but, ce n'est pas de faire plus, mais c'est de faire ailleurs.

M. Arbour (Jean Daniel): C'est de faire mieux...

Mme Harel: Ailleurs.

M. Arbour (Jean Daniel): ...et plus facilement avec plus de flexibilité. Tout à fait, tout à fait.

Mme Harel: Bon. Alors, dans ce sens-là, quand vous dites «mieux», vous voulez dire moins cher? Vous voulez dire aussi cher? Vous voulez dire plus d'interventions? Qu'est-ce que vous entendez par «faire mieux»?

M. Arbour (Jean Daniel): Avec moins d'irritants que l'on retrouve dans les hôpitaux. La notion d'argent là-dedans pour nous, je vous dirais, est beaucoup moins importante. Ce qu'on veut, c'est de pouvoir traiter nos patients dans un endroit qui est agréable, dans un endroit qui fonctionne bien et où on a de l'aide pour bien pratiquer la médecine. Actuellement, le système public n'offre pas ça. On fait des cliniques à toutes les semaines. Il manque de personnel, il manque de ressources, il manque toujours de quelque chose, et ça fait des années que ça dure. On aimerait pratiquer, voir nos patients dans des conditions qui sont agréables pour bien les traiter dans des conditions qui sont agréables pour eux aussi. Il faudrait voir ça. Venez faire un tour dans les hôpitaux, vous allez voir à quel point c'est moins agréable que dans un bureau.

Mme Harel: Est-ce que, quand vous parlez de personnel, il y aura donc embauche de personnel qui pour vous sera mieux rémunéré que dans un établissement? Comment allez-vous pouvoir les recruter? Vous allez donc...

M. Arbour (Jean Daniel): Par des conditions agréables.

Mme Harel: ...dégarnir l'établissement si vous en recrutez. Vous allez dégarnir d'un côté. Vous parlez de pénurie depuis le début. Donc, vous allez en prendre dans l'établissement.

M. Arbour (Jean Daniel): S'il y a moins de soins qui sont faits dans l'établissement, j'espère que les gens vont se déplacer là où il y a de l'ouvrage. Si on garde le même nombre de personnels dans un centre qui fait deux fois moins de chirurgies, qui voit deux fois moins de patients, il y a un gaspillage quelque part. On est aussi bien de prendre ces employés-là puis les avoir dans un autre milieu. Je pense que ça va suivre. C'est vraiment un déplacement.

Mme Harel: Mais va-t-il falloir quand même de l'équipement, tels l'imagerie, le laser, dans l'établissement qui fait de l'enseignement?

M. Arbour (Jean Daniel): Tout à fait.

Mme Harel: Donc, on va se dédoubler.

M. Arbour (Jean Daniel): Il va y avoir un équilibre en fait, pas un dédoublement. Je ne pense pas que l'agence régionale va dire, par exemple, à Notre-Dame: Vous faites actuellement 4 500 chirurgies de cataractes; pour l'enseignement, vous avez besoin d'un tel nombre, vous allez faire 4 000 au... puis 4 000 à... Ça ne peut pas se générer comme ça. Il va y avoir un partage, finalement.

Mme Harel: Croyez-vous que, dans les CMS, les médecins ophtalmologistes vont demander un remboursement pour le temps dévolu à l'enseignement, si tant est qu'il y avait déplacement de l'enseignement?

M. Arbour (Jean Daniel): Il ne le font pas actuellement. Je ne pense pas que ça va être envisagé par la suite, là, à moins que ça débloque dans ce sens-là.

Mme Harel: Ils seront dans une entreprise privée, hein, qui assume, comme vous le disiez tantôt, tous les coûts que vous mentionniez, là, et qui va devoir certainement non seulement amortir, mais avoir quelques profits pour intéresser l'investisseur.

M. Arbour (Jean Daniel): Pas nécessairement. Pour ce qui est de l'enseignement, juste pour répondre à votre question, on le fait d'emblée, l'enseignement, depuis des années, presque gratuitement, dans les hôpitaux, hein? On est payés avec quelques dollars par année pour des centaines et des centaines d'heures passées avec les étudiants. On n'est déjà pas payés pour ça.

Mme Harel: Alors, on peut prendre pour acquis que le président de l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec considère que le déplacement de l'enseignement pourrait se faire dans les cliniques ? on dit: Cliniques médicales spécialisées ? sans qu'il y ait pour autant rémunération. C'est ce qu'on doit comprendre?

M. Arbour (Jean Daniel): Non, non, on aimerait avoir de la rémunération pour ça, c'est évident. Ça fait des années que c'est demandé, mais on n'en a pas actuellement. On ne s'attend pas à ce qu'il y en ait plus demain matin.

Mme Harel: Mais vous le voyez, l'enseignement, déplacé dans les CMS?

M. Arbour (Jean Daniel): Une partie de l'enseignement qui est plus léger pourrait certainement se faire là-bas. C'est sûr que l'enseignement plus lourd, dans les pathologies plus complexes ou les complications, devra rester en centre hospitalier. La majorité de l'enseignement devra rester en centre hospitalier. Ça, j'y crois fermement. Je ne pense pas que l'enseignement peut être déplacé à 95 % dans ces CMS là. Pas du tout. Ce n'est pas ce que je dis du tout.

Mme Harel: À quel pourcentage?

M. Arbour (Jean Daniel): Je n'en ai aucune idée. On n'a pas évalué encore.

Mme Harel: Maître... excusez-moi, Dre Laughrea, vous parliez tantôt d'un manque de disponibilité de temps opératoire notamment pour la cornée. Voulez-vous un peu expliciter sur cette question?

Mme Laughrea (Patricia): C'est que, par exemple, si on a des chirurgies qu'on doit faire sous anesthésie générale... Pour certaines greffes de cornée, c'est vrai qu'une bonne partie de nos greffes de cornée peuvent être faites sans anesthésiste. D'autres patients ou si c'est pour des cas plus lourds, des chirurgies qui vont être combinées à extraction de cataracte, fixation de lentilles, des problèmes comme ça, à ce moment-là, on aura besoin d'un anesthésiste. Alors, on n'a pas toujours un anesthésiste disponible au moment où on a le greffon, sauf en dehors en fait, là, des heures, le soir et la fin de semaine. Ce sont des chirurgies qui doivent être faites en semi-urgence parce que le temps de conservation du greffon avant la greffe est limité.

Alors, si on a du temps opératoire, lorsqu'on a besoin d'un anesthésiste, avec anesthésiste disponible au cours de la semaine, ce sont des chirurgies, à ce moment-là, qui peuvent être faites avec un personnel régulier sur semaine. Alors, c'est une question sur laquelle on travaille.

Mme Harel: Qu'est-ce que vous recommandez?

Mme Laughrea (Patricia): À ce moment-là, d'abord de pouvoir avoir du temps opératoire disponible pour les gens qui font des chirurgies spéciales, par exemple comme les greffes de cornée; d'avoir une certaine flexibilité aussi dans le temps. C'est sûr que, pour des organisateurs, on aimerait beaucoup pouvoir nous dire: Bon, vous avez du temps opératoire à chaque semaine et vous devez faire vos cas compliqués et vos cas simples ou alors vous faites les cas simples telle et telle journée et, une ou deux journées par mois, vous faites vos cas compliqués. Malheureusement, les greffons cornéens, on ne sait pas quand est-ce qu'ils arrivent. Une semaine, je peux faire six, sept, huit greffes de cornée puis je peux passer deux semaines avec aucune greffe de cornée parce qu'on n'a pas de donneur.

Alors, c'est cette flexibilité-là. Pour un sens, on sait que, la greffe de cornée, il ne s'en fait que dans trois villes au Québec, à Montréal, à Sherbrooke et à Québec. Il ne s'en fait que dans quelques hôpitaux. L'équipe de médecins qui en fait est quand même assez petite. Alors, on aimerait beaucoup si on pouvait s'occuper des greffes de cornée comme on peut s'occuper, par exemple, des chirurgies électives. Et, malheureusement, ce n'est pas le cas jusqu'à ce qu'on puisse avoir peut-être des greffons synthétiques ou des greffons congelés. Mais ce n'est pas le cas actuellement. Donc, on a besoin à la fois d'un support et d'un support avec une certaine flexibilité.

Mme Harel: Je vous remercie.

Le Président (M. Reid): D'autres questions? Alors, je voudrais remercier les représentants de l'Association des médecins ophtalmologistes du Québec, le Dr Arbour et la Dre Laughrea.

Nous allons suspendre les travaux de la commission pendant quelques instants, le temps de permettre aux représentants de l'Association québécoise des établissements de santé et services sociaux de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 30)

 

(Reprise à 16 h 32)

Le Président (M. Reid): À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais maintenant souhaiter la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux et, avant de passer la parole à son président, M. Potter, je voudrais vous souligner qu'on a une vingtaine de minutes pour faire une présentation, et par la suite nous disposerons d'une quarantaine de minutes, si nécessaire, pour échanger avec les membres de la commission.

Alors, je vous demanderais, M. Potter... vous passer la parole, de présenter les gens qui vous accompagnent.

Association québécoise d'établissements
de santé et de services sociaux (AQESSS)

M. Potter (Alex G.): M. le Président, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, Mme la porte-parole de l'opposition officielle, chers membres de la Commission des affaires sociales, tout d'abord laissez-moi vous présenter les autres personnes qui représentent avec moi, aujourd'hui, l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux. D'abord, M. Serge Vermette, le premier vice-président de l'association et président du Centre hospitalier affilié universitaire de Québec; Mme Diane Drouin, deuxième vice-présidente de l'association et présidente du CSSS Drummond; M. Yves Benoit, directeur général de l'Hôpital Charles-LeMoyne; et Mme Lise Denis, directrice générale de l'AQESSS.

Je vous remercie de permettre à notre association de présenter sa position sur le projet de loi n° 33, qui se veut la réponse du gouvernement du Québec au jugement Chaoulli-Zeliotis de la Cour suprême sur les questions d'assurance privée ainsi que l'accès aux soins spécialisés et surspécialisés. Le débat sur l'accès aux services de santé a occupé un espace important sur la place publique, au cours des 18 derniers mois, surtout dans la foulée de l'arrêt de la Cour suprême, mais aussi par la réponse que le gouvernement du Québec a donné à ce jugement le printemps dernier, avec la publication de son document de consultation Garantir l'accès: un défi d'équité, d'efficience et de qualité. Plusieurs organisations, dont la nôtre, ont contribué au débat lancé par le gouvernement le printemps dernier en participant à la Commission des affaires sociales. Une nouvelle étape a été franchie en juin avec la présentation du projet de loi n° 33. Nous y retrouvons en bonne partie la réponse législative que le gouvernement du Québec donne à son document de consultation, une réponse balancée, modérée, responsable. Le gouvernement aurait très bien pu se contenter de donner une réponse à la seule question de l'assurance privée au coeur du jugement de la Cour suprême, mais nous croyons qu'il a fait preuve de sagesse en engageant un débat beaucoup plus large, celui de l'accès au réseau sociosanitaire dans son ensemble.

Conséquemment, l'association se prononce en faveur des grandes orientations retenues dans le projet de loi. L'association se montre favorable au retrait de la garantie d'accès telle que définie dans le document de consultation, c'est-à-dire en tant que norme réglementaire, et de la remplacer par un mécanisme d'accès aux services spécialisés et surspécialisés.

Par contre, l'AQESSS questionne certains passages du projet de loi, le jugeant beaucoup trop prescriptif. L'objectif d'améliorer l'accès n'implique pas de légaliser les délais ni les processus. Dans ce contexte, l'association et ses membres croient que la mise en place d'un mécanisme d'accès devrait tendre vers une obligation de résultat pour les établissements plutôt qu'une obligation de moyens.

Maintenant, je cède la parole à la directrice générale de l'AQESSS, Mme Lise Denis, qui présentera les propositions de notre association dans le but de bonifier le projet de loi.

Mme Denis (Lise): Merci, M. le Président... Mme la porte-parole de l'opposition officielle, mesdames messieurs, bonjour.

L'Association et ses membres considèrent que l'accès raisonnable aux services de santé constitue un droit fondamental pour les citoyens et les citoyennes. Pour la population l'accès à une chirurgie, à un service spécialisé est un des aspects les plus significatifs du bon fonctionnement du système de santé. L'assurance d'être traité à l'intérieur d'un délai raisonnable est nécessaire pour s'assurer que la population québécoise conserve toute sa confiance dans ses institutions de santé et de services sociaux. Nous croyons qu'en plus d'être traités dans un délai raisonnable les citoyens doivent connaître les délais d'attente dans chacun des établissements ainsi que les délais considérés comme raisonnables. En ce sens, l'association et ses membres s'inscrivent donc résolument en faveur des objectifs du projet de loi, c'est-à-dire l'amélioration de l'accès aux services spécialisés et surspécialisés.

De plus, nous accueillons favorablement, comme on vient de l'indiquer, le retrait de la garantie d'accès en tant que norme réglementaire, telle qu'elle se retrouvait dans le document de février 2006. La publication et la large diffusion de consensus scientifiques sur les délais raisonnables pour différents types d'interventions nous semblent une approche préférable.

D'abord, la gestion de l'accès et le rôle essentiel des établissements. Bien que l'association et ses membres partagent les grandes orientations du projet de loi, dont celle de la mise en place d'un mécanisme de gestion de l'accès, nous tenons à exprimer notre désaccord quant au fait que le projet de loi soit prescriptif sur les moyens à prendre pour mettre en place ce mécanisme de gestion. Nous croyons qu'il est essentiel que les établissements soient directement responsables de la mise en place du mécanisme et puissent faire les choix d'organisation appropriés. À titre d'exemple, le projet de loi prévoit la nomination d'un responsable du mécanisme central de gestion de l'accès aux services. Compte tenu du rôle prépondérant qu'aura à jouer ce responsable, nous croyons qu'il appartient aux établissements de déterminer la place qu'il prendra en fonction de la réalité propre à chacun des établissements. La loi place le responsable du mécanisme sous l'autorité du DSP. Or, dans certains établissements, le responsable du mécanisme pourrait, par exemple, relever d'un directeur général adjoint ou encore d'une directrice de soins infirmiers.

Enfin, le projet de loi prévoit l'obligation pour le directeur général de faire rapport au conseil d'administration de la gestion de l'accès à chaque séance régulière. Le directeur général possède déjà l'obligation de faire rapport de la bonne marche des activités de l'établissement, et les conseils ont une responsabilité, ils sont imputables quant aux services rendus à la population. À notre avis, il n'est pas nécessaire d'ajouter cette obligation spécifique. C'est pourquoi nous recommandons que le projet de loi détermine une obligation de résultat plutôt qu'une prescription de moyens. Mais que voulons-nous dire par une obligation de résultat? Pour l'association cela signifie deux choses: cela signifie l'obligation d'abord de mettre en place un mécanisme de gestion d'accès transparent, crédible et bien sûr d'en répondre, mais cela signifie aussi l'obligation de réaliser les interventions ciblées dans les délais raisonnables, lorsque les conditions sont réunies, que les délais sont connus et que le ministre donne des directives claires en ce sens.

Quelques conditions de réussite. En plus de la flexibilité au plan organisationnel, il y a certaines autres conditions qui nous apparaissent essentielles. Le projet de loi prévoit que le mécanisme s'applique aux services spécialisés et surspécialisés. L'association comprend que cela inclut les tests diagnostiques spécialisés, les interventions, les traitements, les évaluations par un spécialiste, la psychothérapie, voire même les services de physiothérapie. Nous sommes en accord avec cet objectif, mais nous sommes d'avis que l'application complète à tous les services spécialisés et surspécialisés ne pourrait pas se faire de façon immédiate. C'est pourquoi nous recommandons que l'implantation du mécanisme de gestion de l'accès s'applique, dans un premier temps, à un nombre limité d'interventions, incluant, par exemple, des interventions touchant les clientèles pédiatriques.

n(16 h 40)n

Les interventions ciblées seront établies par le ministère après consultation des agences et des établissements et feront l'objet de directives ou d'orientations ministérielles. Les délais raisonnables, eux, devraient être définis par consensus d'experts médicaux et être largement diffusés. En plus de cibler des interventions, nous croyons que l'implantation doit aussi se faire de façon graduelle, et en ce sens il est important de favoriser la mise en place de projets pilotes pour supporter la mise en place de l'ensemble de la structure.

Une autre condition de réussite, c'est de favoriser la participation des médecins. En effet, il faut s'assurer de la participation des médecins spécialistes. Leur mobilisation repose en bonne partie sur le fait que le mécanisme représente de la valeur ajoutée à leur travail. De plus, compte tenu des responsabilités qui sont confiées aux chefs de département ou de service et compte tenu du fait qu'il s'agit d'un dossier, nous le savons tous, qui est sur la table, depuis longtemps, l'association recommande que le gouvernement règle, dans les meilleurs délais, la question de la rémunération des médecins spécialistes pour les tâches médicoadministratives, lesquelles sont essentielles pour le bon fonctionnement du mécanisme.

Enfin, pour réussir, il faut continuer d'améliorer l'offre de service et investir les ressources nécessaires. L'association et ses membres estiment qu'il faut poursuivre les efforts, les investissements ciblés dans certains secteurs. Cependant, l'accent mis dans ces secteurs ne doit pas nuire à l'atteinte des autres priorités des établissements, telles que les services généraux, les soins en santé mentale. Advenant un tel scénario, la réduction de l'attente des uns s'effectuerait aux dépens des autres. Aussi, l'association recommande que les investissements ciblés se poursuivent de manière à assurer l'amélioration de l'offre de service et par conséquent de l'accessibilité.

Enfin, pour que le projet de loi soit une réussite, le ministère doit investir aussi dans les ressources financières, humaines et informationnelles nécessaires à l'implantation du mécanisme d'accès dans les établissements. Le réseau n'en est pas à sa première expérience en matière de systèmes d'information sur l'accès. Une quinzaine d'établissements spécialisés ont mis près de quatre ans à implanter avec le ministère le système de gestion de l'accès aux soins pour la cardiologie tertiaire et la radio-oncologie. La préoccupation, que nous partageons avec le gouvernement du Québec, d'améliorer la gestion de l'accès et de rendre transparentes et accessibles les informations fait aussi l'objet de travaux chez nos voisins. Le gouvernement ontarien a mis sur pied l'an dernier le «Wait Time Information Strategy» dont le mandat est de doter la province d'un système d'information et de gestion des listes d'attente pour un nombre d'interventions ciblées. Le gouvernement ontarien a choisi d'implanter son mécanisme de gestion de l'accès graduellement, en commençant par quelques centres hospitaliers. Nous croyons que le Québec devrait s'inspirer de cette approche graduelle et progressive.

Conséquemment, nous recommandons qu'un mécanisme de concertation soit mis en place entre le ministère, les agences et les établissements pour définir les paramètres d'un système de gestion de l'accès fonctionnel, cohérent, intégré et compatible. On recommande aussi que la mise en place du mécanisme de gestion soit soutenue adéquatement par les ressources humaines, matérielles et financières nécessaires.

En complétant cette partie, on ne peut passer sous silence le fait que le ministère, les agences et les établissements consacrent de nombreux efforts actuellement pour rehausser l'offre en chirurgie. Les statistiques démontrent effectivement des améliorations sur les délais d'attente, mais nous estimons que, pour donner un meilleur accès à moyen terme à l'ensemble des services, on ne peut pas faire l'économie d'une démarche progressive. Aussi, les sommes annoncées en juin pour augmenter l'offre en chirurgie constituent une bonne nouvelle. L'association et ses membres estiment cependant que l'argent ne réglera pas tous les problèmes dans l'immédiat. Le personnel oeuvrant dans nos établissements est déjà très sollicité. La pénurie de main-d'oeuvre nous frappe de plein fouet. Il arrive que, dans certains établissements, les blocs opératoires ne fonctionnent pas à plein régime, à cause d'un manque de personnel spécialisé. On pense au personnel infirmier ou encore aux anesthésistes. Former une infirmière en salle d'opération nécessite parfois jusqu'à deux ans, et il faut tenir compte de cette réalité avec laquelle les établissements doivent composer quotidiennement.

Maintenant, au tour des centres médicaux spécialisés. L'association croit que les dispositions retenues par le législateur concernant les centres médicaux spécialisés portent à confusion autant chez les citoyens que dans le réseau. Les propositions que nous formulons visent à éliminer cette confusion. Tout d'abord, nous sommes d'avis que le concept de centre médical spécialisé ne doit s'appliquer qu'aux centres médicaux privés et payants où pratiquent des médecins non participants. Cela permettra de maintenir l'étanchéité entre les deux pratiques. Nous croyons aussi qu'il est important de mettre en place un encadrement offrant une garantie supplémentaire de qualité et de sécurité pour les citoyens.

De plus, l'AQESS est aussi d'avis que le gouvernement doit encadrer toutes les chirurgies qui sont pratiquées dans les centres médicaux spécialisés, y compris les chirurgies non couvertes par le régime public, comme par exemple la chirurgie esthétique. Pour le moment, le projet de loi limite les conditions de permis aux trois seules interventions prévues par le projet de loi. Nous recommandons donc que le concept de centre médical spécialisé soit réservé exclusivement aux médecins non participants de manière à bien identifier sa vocation privée et payante et que les permis des centres médicaux spécialisés incluent toutes les interventions qui peuvent y être réalisées.

En ce qui concerne les cliniques médicales associées, nous pensons qu'il faut agir mais sans légiférer. L'association se prononce en faveur de la possibilité pour les établissements de conclure des ententes avec des cliniques médicales associées. Il s'agit d'une offre alternative de service intéressante pour les établissements dont les infrastructures ne permettent pas toujours d'offrir certains services spécialisés dans un délai raisonnable. Mais l'association est en désaccord avec la définition et l'encadrement dès maintenant, dans la loi, du concept de clinique médicale associée. Des ententes, d'ailleurs déjà en vigueur, entre notamment des organismes gouvernementaux, des établissements et certaines cliniques médicales font en sorte que le concept existe déjà, sans intervention du législateur.

Plutôt que d'inscrire ce concept dans la loi, le gouvernement pourrait, dans un premier temps, émettre une directive ministérielle sur l'encadrement d'ententes tripartites ? agence, établissement, clinique ? et permettre que l'expérience démontre les meilleures manières de faire. Il nous apparaît préférable de fonctionner de la même manière qu'ont été créés à ce jour les 113 groupes de médecins de famille ou les 12 cliniques-réseaux à Montréal, soit par l'implantation et l'évaluation de projets pilotes. L'association et ses membres recommandent donc que le développement de cliniques médicales associées se fasse dans le cadre de projets pilotes et qu'en conséquence le concept soit retiré du projet de loi.

Finalement, sur la question de l'ouverture à l'assurance privée, l'association constate avec satisfaction qu'elle demeure contrôlée par un mécanisme réglementaire de modification à la liste des traitements médicaux, qui permet une étude publique et transparente par les instances démocratiques de l'Assemblée nationale. Cependant, l'association propose au législateur de ne pas limiter l'ouverture à l'assurance privée au remplacement de prothèses totales de la hanche et du genou, alors que d'autres interventions moins effractives, comme l'implantation d'une prothèse partielle, permettraient d'atteindre les mêmes objectifs cliniques mais ne seraient pas remboursées. Pour cette raison, l'association recommande que l'ouverture à l'assurance privée soit maintenue aux seules interventions ciblées en incluant cependant les interventions moins effractives qui poursuivent le même objectif clinique.

En conclusion, l'association appuie les grands objectifs du projet de loi n° 33, soit de procurer un meilleur accès aux services spécialisés et surspécialisés à l'ensemble des citoyens, mais nous estimons néanmoins que des ajustements doivent être apportés pour rendre plus efficiente, à terme, la mise en place d'un mécanisme de gestion de l'accès à l'échelle du Québec. Le projet de loi traite de l'accès aux services spécialisés, mais je voudrais rappeler ici, en terminant, les deux autres chapitres du document de consultation Garantir l'accès: un défi d'équité, d'efficience et de qualité. Rappelons que ce document traitait aussi de l'accès aux services de première ligne et de la pérennité du système de santé et de services sociaux. En avril dernier, notre association avait indiqué que l'accès aux services passait par l'accès aux services de base. La population de chaque territoire devra compter sur les médecins de famille, les infirmières et les autres professionnels nécessaires pour fournir des services de santé et des services sociaux courants, adéquats de même que des services de promotion et de prévention. L'accès à un médecin omnipraticien constitue d'ailleurs une étape obligatoire avant d'obtenir un rendez-vous avec un médecin spécialiste.

Pour ce qui est de la pérennité du système, nous tenons à réitérer nos propos d'avril dernier. Pour faire face à la croissance des coûts et aux nouveaux besoins, pour relever les défis du vieillissement de la population, le réseau devra pouvoir compter sur de nouvelles sources de revenus. Nous croyons que la réflexion mérite toujours d'être poursuivie sur cette question, car nous estimons que les paramètres de l'équation n'ont pas changé. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Reid): Merci, M. Potter. Merci, Mme Denis. Je vais passer la parole maintenant pour une période d'échange au ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Couillard: Merci, M. le Président. Merci, M. Potter, Mme Denis et M. Benoit, Mme Drouin et M. Vermette, pour votre visite aujourd'hui. Je voudrais d'abord faire quelques remarques, essentiellement des félicitations, pour votre association, d'abord pour son existence même. L'essence de l'association unifiée des établissements de santé par rapport aux associations, disons, parallèles qui existaient auparavant est un progrès majeur. Également, je voudrais féliciter l'ensemble des gestionnaires du réseau et des administrateurs pour avoir introduit des changements sans précédent en termes d'organisation et de culture. Dans un système qui fonctionne 24 heures par jour, sept jours par semaine, avec presque 230 000 employés et 18 000 médecins, je pense que c'est un témoignage de votre capacité d'adaptation et de changement.

On est d'accord avec vous également que l'accès... Si on demandait aux Québécois ? on l'a dit plusieurs fois, puis je le répète souvent; si on demandait aux Québécois ? aujourd'hui qui nous écoutent quelle est leur principal problème d'accès, ils ne parleraient pas de la prothèse de hanche, ni de genou, ni d'opération de cataracte, ils me parleraient du médecin de famille. Alors, c'est pour ça qu'il y a une kyrielle d'autres actions. Le but du projet de loi n'est pas de parler de ces actions-là, mais il y a une kyrielle d'autres actions en cours, comme vous le savez, pour améliorer le nombre de médecins et la façon dont ils pratiquent et la façon dont ils sont répartis sur le territoire.

n(16 h 50)n

Je voudrais que, dans le projet de loi... Et je suis content de voir qu'il requiert votre adhésion quant à ses objectifs et ses grands axes. Il y a des éléments, pour moi, qui m'apparaissent susceptibles d'être améliorés mais probablement pas susceptibles d'être retirés. Et je vais vous expliquer ? puis on aura un échange ? pourquoi j'ai cette attitude-là.

D'abord, pour ce qui est de la prescription du mécanisme de gestion de l'accès, vous remarquerez, et je pense que c'est le cas, ça a été mentionné, que le mécanisme prescrit est très large. Alors, on n'est pas très précis et volontairement on ne l'a pas été. Ce qu'on demande finalement, c'est quoi? C'est trois éléments. La nomination d'une personne imputable en lien avec les cliniciens, c'est pour ça qu'il y a un rapport avec le DSP et c'est certain qu'il va entrer en lien également, qu'il va être en lien avec les administrateurs de l'établissement. Mais il faut que les cliniciens soient partie intégrante de ce système-là. Et cette personne, je crois, est nommée dans la très grande majorité, sinon tous les établissements de santé déjà, au moment où on se parle, là. Le... vous avez déjà commencé ça, là. Première chose.

Deuxième chose: une approche individualisée du patient. Moi, je trouve que, comme on l'a fait pour le cancer, avec les infirmières pivots, puis en santé mentale, le jour où quelqu'un qui est inscrit sur la santé mentale recevra un... sur une liste d'attente, pardon, recevra un téléphone de son établissement juste pour lui dire qu'ils sont au courant que la personne existe, déjà c'est un gros, gros progrès, et il faut qu'on ait ça.

Et, troisièmement, c'est l'offre d'alternatives. Au moment où on arrive à la période de délai qu'on aura jugée raisonnable, bien il faut qu'il y ait des alternatives offertes, et la première alternative, c'est d'opérer le patient ou la patiente dans votre établissement. Puis je suis certain que c'est comme ça que vous allez résoudre les problèmes dans la vaste majorité des cas, mais il faut qu'on ait également, dans notre sac, d'autres possibilités de solutions jamais obligatoires pour la personne mais qu'on puisse au moins lui fournir cette idée-là.

Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est quand même assez large? Vous avez, à la lumière de ces grands éléments là, beaucoup de latitude pour la façon dont vous allez procéder sur place, dans chacun de vos établissements, compte tenu de leur taille respective, compte tenu de vos équipes.

Mme Denis (Lise): ...simplement sur la question, par exemple, du responsable de l'accès qui se rapporte au DSP, il y a des établissements, à l'heure actuelle, où, au niveau d'un responsable de l'accès, il ne dépend pas du DSP; il dépend d'un directeur général adjoint ou va dépendre d'une DSI, et c'est là que la réalité peut être différente d'un établissement à l'autre.

Je pense, le sens de notre propos, c'est de dire: Oui, un mécanisme de gestion de l'accès, vous demandez d'en faire un, demandez-nous d'y répondre, donnez-nous un certain nombre de critères, mais, quand on vient décrire, c'est là, je dirais, qu'on a une inquiétude. Quand on vient dire comment est-ce qu'on va le placer, à toutes fins utiles, dans le plan d'organisation, là on dit: Bon, bien là, peut-être que ça va trop loin parce que c'est de l'ordre du moyen, et ce moyen-là n'est peut-être pas celui qui est adapté à chacune des situations. Si on mettait ça dans quelque chose qui est plus un cadre de référence, déjà on serait plus capable d'adapter selon des réalités différentes. Mais, quand c'est dans la loi, là c'est sûr que ça devient incontournable, puis ça ne répond peut-être pas toujours à ce que l'établissement a déjà, est déjà en train de mettre en place, effectivement.

M. Couillard: Bien, je dirais que par définition tout établissement qui offre des services médicaux spécialisés et... aura un directeur des services professionnels, en pratique, là.

Mme Denis (Lise): Oui, mais maintenant, selon les plans d'organisation, la façon d'organiser les services varie d'un établissement à l'autre. Et il y a des endroits où, par exemple, on est organisé par programmes. Le DSP a bien sûr son rôle, mais la personne responsable de l'accès est en lien avec le DSP. Mais la direction pour ce service-là ou ce responsable-là ne sera pas nécessairement... le directeur hiérarchique ne sera pas nécessairement le DSP. Dans le fond, ce qu'on voulait protéger, c'est la capacité d'adapter.

M. Couillard: O.K. Mais, je pense, il est essentiel, pour que ça marche, ça, que les médecins adhèrent à ça, parce qu'on leur enlève un petit peu le contrôle sur la liste d'attente et puis la gestion de l'accès. Il faut qu'ils aient confiance que les gens vont aborder le problème dans un angle clinique. Et d'avoir un clinicien, un médecin, le DSP, qui en général est un médecin, directement imputable et finalement imputable, pour moi, c'est un gage de succès. Mais on verra, à la lueur des événements, s'il y a lieu de modifier ça ou de l'ajuster. Je pense que ce genre de projet là par définition est un projet en évolution permanente et en ajustement.

Vous avez parlé de la nécessité, puis là-dessus on est d'accord, de déployer progressivement la garantie d'accès. Là-dedans, on l'a dit plusieurs fois, les pays qui ont tenté, d'un seul coup, de le faire pour toutes les procédures ont lamentablement échoué dans tous les exemples. Il y en a même un ? je pense que c'est le Danemark ? qui a essayé quatre fois avant d'arriver à un projet valable. On prend hanche, genou, cataracte parce que ce sont les procédures ciblées dans l'accord d'Ottawa, parce que ce sont les procédures associées aux changements démographiques beaucoup, parce que, vous le savez, il y a une grosse demande de soins dans ces trois éléments-là. Mais on s'en sert également comme école pour nous, pour le réseau, d'apprendre à utiliser la garantie d'accès, la gestion des listes pour ensuite l'étendre à d'autres procédures. Et je dirais que, pour ce qui est des autres procédures, je pense qu'il y a un piège où il faut peut-être éviter de tomber. C'est que, je vais vous dire franchement, si on attend d'avoir des consensus scientifiques pour les 600 ou 700 différentes chirurgies qu'on fait dans nos établissements, il n'y en aura jamais. Alors, ce qu'on a fait, c'est qu'on a essayé de dégager celles pour lesquelles ça existait. Ça a été très long, très difficile, puis on se rend compte qu'il n'y a pas beaucoup de littérature scientifique sur la question.

Par opposition, le gouvernement britannique, par exemple, a adopté une position qui a été d'emblée celle de dire que c'est... toutes les chirurgies, c'est six mois. Je pense qu'on va arriver à quelque chose comme ça. Instinctivement, pour le citoyen, là, ou la citoyenne, pour autre chose qu'une chose urgente ou une situation qui menace la vie bien sûr, une chirurgie élective, un examen électif, six mois paraît être une période raisonnable qu'on est prêt probablement à accepter. Au-delà de six mois, ça devient plus difficile à accepter. Je pense qu'on doit viser ça. Mais on est d'accord avec vous sur l'introduction graduelle de cette garantie d'accès. Je pense que c'est très important.

Je voudrais peut-être bifurquer un peu avec M. Benoit. Vous êtes à l'Hôpital Charles-LeMoyne. Racontez-nous donc un peu parce que c'est un des endroits où ça a bien fonctionné, la réduction des listes d'attente. À Charles-LeMoyne, vous avez des très beaux résultats. Est-ce que vous avez fait certains des éléments de la gestion de liste ou vous avez procédé d'autre façon? Peut-être que vous pourriez nous éclairer de cette façon-là.

M. Benoit (Yves): Je vous dirais qu'essentiellement ce qui s'est fait, c'est qu'on a travaillé avec les chefs de département. C'est simple, là, comme réponse, mais ça s'est fait effectivement en fonction de relations d'affaires avec les différents chefs de département. Ce qui a été aussi bien sûr un incitatif intéressant, c'est qu'il y a eu des ajouts de ressources associés à ça, il ne faut pas le négliger. Vous le savez, il y a eu un 20 millions d'abord. Là, on parle d'un autre 40 millions qui est en train de...

Une voix: ...

M. Benoit (Yves): 50 millions. Oui, c'est parce que je ne regarde pas la... médicale. Alors, 50 millions qui viennent s'ajouter à ça. C'est sûr que c'est des incitatifs, là, qui aident beaucoup à mobiliser des médecins, des gestionnaires, des gens, dire: Regarde, on a une possibilité d'aller chercher des éléments additionnels. Alors, c'est clair qu'il y a des choses comme ça qui se sont faites. Ce qui s'est fait aussi par des échanges plus internes, je dirais, là, parce que c'est vraiment au niveau interne que ça s'est fait, c'est plus sur la consolidation par rapport à certaines spécialités par rapport à d'autres, donc des ajustements sur du temps opératoire donné à un par rapport à l'autre.

Il faut toutefois faire attention. Il y a une fragilité à ça. La fragilité, on l'a vécue chez nous, puis j'imagine que ça peut se vivre ailleurs. Ça peut créer aussi un déséquilibre par rapport à d'autres secteurs pour lesquels on se doit de donner aussi du temps opératoire, sinon on risque de voir des gens partir puis manquer à notre liste de garde puis là ne plus être capables de répondre à des choses. Alors, il y a un équilibre clinique fragile qu'il faut garder en lien, en contact, d'où l'importance du rôle du... ce que j'appelle chez nous le DSP. Mais effectivement, d'une façon hiérarchique, des fois le DSP est maintenant rendu... dans certaines organisations. Donc, il y a peut-être des ajustements qu'on devra regarder à partir de là.

M. Couillard: Très intéressant comme précision. Il y a un élément que vous avez mentionné dans votre présentation, sur lequel je vais revenir mais alors là très amicalement, là. Ce n'est pas une critique du tout. Je dirais que, la question de la prescription de présentation par le D.G., au conseil d'administration, des résultats sur l'accès, si je n'avais pas passé tant d'années de ma vie dans les établissements de santé, je ne l'aurais peut-être pas mise. Et ce n'est pas une critique que je fais. C'est normal, les administrateurs ont plein de comptes à rendre, plein de choses à faire, plein de rapports à faire, puis Dieu sait qu'on en demande, des rapports, des statistiques, et c'est tout à fait compréhensible. Mais c'est une façon pour nous de mettre au premier plan la question de l'accès. Parce que, disons-le, réfléchissons, là, c'est quoi, la mission fondamentale d'un établissement de santé et de services sociaux? C'est donner accès à des services de qualité et sécuritaires dans des délais raisonnables. Vous vous souvenez, j'avais dit ça dans une rencontre qu'on avait eue.

Alors, il faut que cette question d'accès devienne véritablement une obsession. Je vais vous dire, pour moi c'est un peu une obsession, puis je suis certain que pour vous également, dans chaque établissement, ça l'est. Mais il faut que ça soit traduit envers les membres du conseil d'administration par la communication régulière des résultats. D'après moi, c'est un gage de succès et non pas, je dirais, un manque de confiance ou un acte de manque de confiance envers le conseil d'administration ou le directeur général.

Mme Denis (Lise): Les membres de conseil, M. le Président, se sentent investis d'un rôle important par rapport aux services à la population. Ils s'en sentent imputables et ne croient pas nécessaire de rajouter le fait que dans une loi on demande à ce que leur D.G. leur fasse rapport tous les mois. Il y a eu une habitude qui se prend. Je pense que le réseau aussi est en pleine évolution. Les membres de conseil ont à rendre compte des services qu'ils rendent à la population, puis, en ce sens-là, je dirais, ces conseils-là, pour qu'ils sentent qu'ils ont un rôle important à jouer, ne souhaitent pas nécessairement qu'on leur dise, par la loi, qu'ils doivent recevoir un rapport tous les mois. Je ne sais pas s'il y a des membres de conseil ici qui...

n(17 heures)n

Mme Drouin (Diane): Je suis tout à fait d'accord, c'est sûr, parce que, quand vous avez mis en place les CSSS, un élément qui ressortait souvent, c'était la responsabilité populationnelle. Alors, je pense que les membres de conseil ont déjà assimilé ça depuis deux ans, et ça fait partie de ça. Je pense que c'est une de leurs responsabilités bon d'avoir des tableaux de bord réguliers de la part du directeur général. Bon. C'est sûr qu'avec cette nouvelle loi, instinctivement, les gens vont demander que ça fasse partie du tableau de bord, comme d'autres éléments qui nous apparaissent importants. Là, on est en pleine fonction pour les projets cliniques, toutes ces choses-là, alors c'est un tout, c'est global. Mais que ce soit directement inscrit dans une loi, qu'automatiquement, à chaque réunion de conseil, le D.G. fasse rapport au conseil d'administration, ça, on se sent trop pris par la main.

Une voix: Pourtant, c'est une main généreuse et tendre.

Le Président (M. Copeman): ...

M. Benoit (Yves): J'ajouterais peut-être juste un élément. Je vous rejoins beaucoup quand vous dites la préoccupation, parce qu'on a connu des années effectivement où on parlait juste de chiffres dans les conseils d'administration, puis ça se limitait à ça, là. C'était juste les budgets. Mais je dirais qu'effectivement, depuis la réforme, il y a des rapports réguliers qui se font sur la progression des ententes cliniques, puis je rappellerais tout le volet des ententes de gestion maintenant qui nous sont amenées puis qu'on doit discuter avec notre conseil régulièrement.

Alors, moi, tout ce que je dis, c'est: Évitons d'être redondants, mais assurons-nous, là, que ? parce qu'il y a tout le volet des ententes de... sur lesquelles on peut avoir des fois jusqu'à 30 indicateurs; assurons-nous, là, que ? ces éléments-là se parlent. Est-ce qu'il faut le passer par une loi? Bon. En tout cas, personnellement, je ne pense pas, là, mais ça, j'aime autant laisser votre job puis je vais faire la mienne.

M. Couillard: On pourrait peut-être ajuster la fréquence. On pourra voir. C'est de cette façon-là.

Mme Denis (Lise): Est-ce que je peux revenir sur un élément que, M. le ministre, vous avez soulevé?

Une voix: ...

Mme Denis (Lise): Sur la compréhension du mécanisme d'accès. Je suis contente d'entendre effectivement le gouvernement. Puis le ministre a toujours annoncé que vous cibleriez les interventions pour lesquelles on inscrirait des délais puis pour lesquelles on ajusterait l'offre de service. Mais, quand on lit la loi ? puis c'était ça, l'inquiétude, c'était un petit peu ce que notre mémoire traduit aussi; quand on lit la loi ? puis l'article qui parle du mécanisme d'accès, ils touchent tous les services spécialisés et surspécialisés. Et donc, même si on implante graduellement des notions d'ajustement de l'offre, de délai, le mécanisme, lui, qui va se mettre en place devrait théoriquement toucher aussi tous les services spécialisés et surspécialisés, d'où notre préoccupation de dire: Si on veut toucher tout dans le mécanisme, au point de départ, ça, c'est difficile.

M. Couillard: ...le message est bien envoyé, et publiquement et dans le réseau, que, dans un premier temps, le ministère, le gouvernement va demander des résultats assez rapides sur les trois chirurgies qui sont identifiées, l'apprentissage de la méthode, qui par la suite peut être élargie à beaucoup d'autres situations, au rythme bien sûr que chaque établissement veut faire, puis on fixera les objectifs ensemble qu'on peut atteindre.

C'est d'ailleurs pour ça que le 50 millions dont on parlait tantôt, qui, en passant, n'inclut pas les honoraires médicaux...

Une voix: ...

M. Couillard: ...ils sont en plus, visent à faire autre chose que des hanches, essentiellement autre chose que des hanches, genoux, cataractes. Il y a eu un 20 millions annoncé cette année, et on veut faire encore plus de hanches, genoux, cataractes mais également beaucoup d'autres choses, notamment la chirurgie d'un jour, si vous regardez vos statistiques, là. Et d'ailleurs vous êtes en train de faire votre plan d'accès certainement sur cette question-là.

Pour ce qui est de la description légale des centres médicaux spécialisés, je comprends que vous voulez qu'on décrive juste légalement le monde des médecins non participants. C'est un peu ce que vous demandez. Mais j'explique depuis ce matin qu'il y a tout un flou qui existe actuellement, puis le flou existe également du côté des médecins participants. Par exemple, de la même façon qu'on ne définit pas légalement ce qui se passe dans la clinique d'orthopédie machin, à la clinique de polychirurgie de Montréal, par exemple, où c'est des médecins participants qui chargent des frais accessoires, il n'y a pas non plus d'encadrement légal véritable. C'est considéré comme un cabinet médical, alors qu'il se fait des chirurgies, là. Je ne dirais pas de la chirurgie majeure, là, mais quand même de la chirurgie significative, disons, si je peux utiliser ce terme-là.

Alors, il faut également que ? là, il y a un directeur médical ? à mon avis, il faut qu'il y ait un agrément, il faut qu'il y ait un encadrement, de sorte que je crois qu'il serait imprudent, de notre part, de limiter l'encadrement légal uniquement au monde des médecins non participants. Vous ne trouvez pas?

Mme Denis (Lise): C'est parce que, dans le projet de loi, tel que rédigé, ça nous a semblé confus, là. Peut-être qu'on a...

M. Couillard: Ce n'est pas simple.

Mme Denis (Lise): Mais c'est parce que les cliniques médicales spécialisées, elles peuvent vivre de deux façons, dans le projet de loi: elles peuvent vivre avec des médecins non participants, privés, payants puis elles peuvent vivre avec des médecins participants associés avec une clinique médicale associée.

M. Couillard: Je vais le rephraser. Les centres médicaux spécialisés peuvent être de deux types, à l'exclusion de l'un de l'autre en raison du principe d'étanchéité entre le monde des médecins participants et non participants. Les centres médicaux spécialisés peuplés, excusez-moi l'expression, de médecins non participants, voilà un monde. L'autre monde, c'est un ensemble qui comprend des médecins participants. Parmi ces cliniques, certaines auront des contrats d'affiliation avec des établissements de santé. Elles deviennent alors des centres médicaux et des cliniques médicales associés, et d'autres, non. Exemple, la clinique de polychirurgie de Montréal, qui existe actuellement avec des médecins participants qui chargent des frais accessoires aux patients mais qui n'a pas de contrat d'affiliation avec un centre hospitalier.

Alors, il y a un grand ensemble de centres médicaux spécialisés qu'on divise en deux: participants, non participants, et, dans le monde des participants, bien il y a deux autres catégories. J'aurais aimé ça que ce soit plus simple que ça, mais il y a quelqu'un qui a dit: Quand le problème est compliqué, en général la solution est un peu compliquée également.

Mme Denis (Lise): ...trouvait que le concept de centre, de clinique médicale... excusez, de centre médical spécialisé devrait être restreint ou orienté vers les médecins qui ne sont pas participants, où c'est privé et payant, et on avait l'impression qu'aux yeux de la population ce serait plus compréhensible aussi. Ce concept-là, il s'applique pour cette réalité-là, O.K., et ce que, nous, on a plus touché puis évidemment la façon dont on a lu le projet de loi, c'est la capacité pour un établissement de faire une entente avec une clinique médicale dite associée, O.K., avec laquelle l'établissement peut établir une entente avec l'agence. Et là on dit: Oui, ça, c'est un concept intéressant, il faut aller de l'avant. Ce n'est pas nécessaire partout. Ce sera selon les besoins, évidemment. Ça se fera de, je dirais...

Mais on dit: Faisons ça comme on a fait un peu pour les GMF et pour les cliniques médicales réseaux où il y a eu, de la part du ministère, je dirais, un certain nombre de normes d'établies, une espèce de cadre de données, de règles du jeu mais qui ont pu évoluer dans le temps, compte tenu du fait que le contexte, le cadre n'étaient pas figés. C'est comme ça qu'on l'a abordé et moins sous l'angle effectivement de d'autres types de cliniques qui font des interventions assez... et qui ne seraient, si je comprends bien, là, dans ce concept-là, pas couvertes si la clinique médicale associée était retirée.

M. Couillard: Mais, pour cette question-là, la clinique médicale associée, c'est-à-dire la clinique privée comprenant des médecins participants ayant une relation conventionnée avec un établissement de santé, là on reste toujours dans la même logique, c'est pas mal plus compliqué qu'un GMF. C'est parce qu'il y a bien des choses là-dedans. Il y a bien des choses à vérifier puis bien des pièges à éviter, notamment pour la question du personnel, notamment pour la question des obligations des médecins, la question de la propriété. De se limiter à un cadre de référence pour ça, ça m'apparaît difficile. Puis plus largement, moi, dans la gestion, je ne suis pas un grand partisan des projets pilotes, je suis plutôt de l'école ? il y a une école là-dedans, hein, de projets pilotes ou pas; de l'école ? qui dit: On met en place quelque chose, on le surveille, on le monitore, on l'ajuste continuellement, dans le cours de sa vie. Et je pense qu'en général ça donne de meilleurs résultats. Parce que souvent, quand on fait des projets pilotes avec la meilleure intention, souvent ça peut être la meilleure façon de tuer un projet également. C'est-à-dire que, oui, on a un projet pilote, puis on le laisse dormir pendant quelques années, puis on décidera plus tard ce qu'on fait, tandis que, là, il n'y a pas d'obligation de les créer, ces cliniques, autour de la table, ici. Peut-être en Montérégie urbaine.

Puis encore, si vous êtes capables d'arriver au résultat sans ça, vous n'avez pas besoin de la faire, la clinique affiliée, ou d'avoir un contrat avec la clinique affiliée. Mais, dans la plupart des régions, d'après moi il n'y a aucun besoin de mettre ça sur pied. On parlait avec quelqu'un du Lac-Saint-Jean avant vous. Là-bas, là, je ne vois pas l'intérêt.

Mme Denis (Lise): Effectivement, quand vous dites: Il n'y en aura pas nécessairement besoin, il n'y en aura pas nécessairement beaucoup, mais la constatation qu'on fait, c'est qu'il y en a, des projets qui existent, là. On appelle ça des projets pilotes, là. Mais il y a des projets qui existent. Il y a des cliniques qui ont déjà des ententes avec des centres hospitaliers.

La loi de la santé et des services sociaux prévoit aussi la capacité pour les établissements d'établir des ententes. Et peut-être que, pour faire évoluer, justement garder cette souplesse dans l'évolution peut-être pour un an, deux ans, c'est là qu'on disait: Peut-être qu'il vaut mieux y aller ? trouvons un autre mot que «projet pilote»... Mais, à partir des besoins que les gens ont dans les établissements, au niveau des régions, les quelques places où ça pourra se développer, bien ça permettra peut-être après, effectivement, de légiférer, au besoin.

M. Couillard: Mais je pense que, madame, ça part du besoin qu'on identifie dans une région. C'est ça, la première affaire. Évidemment, nous, on donne des normes en termes d'accessibilité, des objectifs, puis c'est à vous, dans vos établissements, de voir comment est-ce que vous êtes capables d'arriver à ces résultats-là. Est-ce que vous avez besoin ou pas de faire une clinique associée? L'outil sera là, et vous le déciderez. Peut-être que certains le choisiront, d'autres, non. L'important pour nous, c'est le résultat final pour le citoyen qui attend ces soins.

Le Président (M. Copeman): Merci. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve et porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé.

n(17 h 10)n

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je voudrais, au nom de l'opposition officielle, vous saluer, M. Potter, Mme Denis, Mme Drouin, M. Vermette, M. Benoit, et en fait souscrire aux propos du ministre et nous réjouir également de l'intégration réussie, je crois, hein, n'est-ce pas, des associations qui étaient représentées par deux organisations auparavant.

Vous disiez, je pense, à juste titre, dans la présentation de votre mémoire, que l'accès aux services passe d'abord par un accès aux services de base. Je pense que c'est là une maxime qu'il faut se répéter parce que la population en fait, au moment du dépôt du document Garantir l'accès, a eu l'impression que c'était l'accès aux services de base également, et finalement, là, on se rend compte que c'est beaucoup plus restreint. Disons que c'est mon éditorial, là, de la journée.

Je voudrais avec vous voir un peu comment ça pourrait. Le ministre tantôt a fait état que, si le centre médical spécialisé ne couvrait pas les médecins participants, à ce moment-là, il y aurait comme un vide parce que ce n'est pas finalement, si vous voulez, tous les médecins participants en clinique qui vont avoir une entente avec un établissement pour être une clinique médicale associée. Il y a comme un... Je ne sais pas. Vous, vous le voyez comment? Parce que la question qui m'est venue au moment où le ministre a fait la présentation, c'est la suivante: Est-ce que des médecins participants peuvent s'organiser en clinique, ne pas requérir le statut ni de centre médical spécialisé ni de clinique médicale associée?

Une voix: ...

Mme Harel: J'aimerais ça. Je ne sais pas si vous voulez que le ministre... Moi, je lui donne le temps pour répondre.

Le Président (M. Copeman): ...consentement tout partout, alors allez-y.

M. Couillard: ...non et oui. C'est-à-dire qu'à partir du moment où la loi serait éventuellement adoptée pour avoir des centres où ce type de chirurgies du moins sont pratiquées, ce type de chirurgies qui sont prescrites là sont pratiquées il faut avoir un permis de centre médical spécialisé. Si on ne fait pas ces chirurgies-là, et peu probable qu'on les fasse partout, à ce moment-là, on peut continuer à s'appeler un cabinet. Mais, quant à voir si on veut avoir une relation conventionnée ou pas avec l'établissement, ça, c'est autre chose. C'est autre chose. Ça, c'est selon les besoins locaux.

Donc, dans tous les cas, oui, un centre médical spécialisé. Certains cas d'entre eux ne... Le meilleur exemple que je peux donner, c'est la clinique de polychirurgie de Montréal, là. C'est dommage de la nommer, là, parce que je n'en connais pas beaucoup d'autres, mais c'est les médecins participants qui travaillent là. Ils n'ont pas de relation. Peut-être voudront-ils en établir une ou pas. Je ne sais pas.

Mme Harel: Je retiens les recommandations que vous faites, là, dans votre mémoire à l'effet de graduellement voir à l'implantation du mécanisme de services spécialisés et surspécialisés couverts, là. Je ne sais pas si vous voulez élaborer là-dessus, mais je pense que c'est un aspect important de votre recommandation.

Mme Denis (Lise): Oui. Peut-être qu'un élément effectivement qui nous paraissait important, c'est qu'il faut réussir effectivement à avoir une gestion personnalisée de l'accès. Je pense que la préoccupation du ministre là-dessus est largement partagée dans le réseau. Donc, une relation privilégiée avec la personne qui attend pour qu'on soit capables de l'accompagner, de lui dire à quel moment elle sera opérée, où elle aura son traitement. Et pour ça cependant, pour être capables de faire ça à la grandeur des établissements, au niveau des différentes spécialités, autant des tests que des services, il nous semble que ça prend une bonne information et une bonne information au point de départ, et donc une capacité pour les établissements, que tous les services, je dirais, toutes les banques de données se parlent, qu'on soit capables d'introduire un système qui soit performant, qui fasse en sorte aussi qu'on sache si une personne qui est inscrite pour une chirurgie dans un établissement, est-ce qu'elle est aussi inscrite dans un autre établissement?

Donc, qu'on soit capables de combiner les données au plan régional aussi puis au plan provincial. Et il faut que ce genre de système là puisse se développer, et ça, on dit: Ça prend un peu de temps, là, ça, pour être capables de faire ça.

Aujourd'hui, bien sûr, on va de l'avant avec des chirurgies ciblées, des listes d'attente qui vont se ramener à des niveaux raisonnables sur un certain nombre de cibles, mais, pour que l'ensemble de l'activité hospitalière notamment soit couverte, il faut qu'il y ait à la base une bonne information et pour ça il faut qu'il y ait un système d'information qui se développe. Et, là aussi, la participation des médecins est essentielle, et c'est là qu'on donne l'exemple, entre autres, de la cardiologie tertiaire de même que la radio-oncologie où ça a pris quelques années.

Mme Harel: D'autant qu'une intervention chirurgicale peut conduire à d'autres, hein? Mon conjoint rentre, moi, au mois de décembre, à l'hôpital pour un anévrisme... puis en sort après deux embolies pulmonaires. Alors, une intervention peut aussi conduire à d'autres interventions du fait des conséquences, bon, etc. Ça, ce n'est pas... Dans votre mémoire, vous dites qu'il faut l'octroi de ressources nécessaires au maintien de l'offre de service et à la mise en place du mécanisme de gestion. Vous en faites une des recommandations. J'aimerais savoir. C'est la recommandation neuf, plus précisément.

Vous dites: Il faut que ce soit soutenu par des ressources humaines, matérielles et financières. Est-ce qu'actuellement les établissements que vous représentez sont suffisamment équipés pour donner suite à l'implantation de ce qu'on trouve dans le projet de loi n° 33?

Mme Denis (Lise): Je pense que les établissements font l'effort, à l'heure actuelle, de s'ajuster avec les argents qui sont annoncés pour améliorer l'offre de service. Ça, je pense que c'est incontournable, O.K.? Ce qui est à faire et qui, là, prend du temps, c'est de réussir à mettre un système d'information. Et là il faut voir, il faut partir un petit peu de ce que chaque établissement a déjà comme système, et ça, c'est variable.

La gestion de l'accès dans les établissements, dans les systèmes, il y a des places où ça se fait par services, il y a des places où ça se fait de façon centralisée, il y a des places où ça se fait complètement déconcentré. Des fois, il ont des systèmes d'information... On a même réalisé qu'il y a des endroits qui sont encore à la mitaine, hein? Excusez. Ils font ça manuellement. Et donc on dit: Pour avoir une gestion, un mécanisme qui soit vraiment performant, qui couvre l'ensemble, il va falloir qu'on accepte qu'il y a un système d'information à monter. On peut commencer à travailler, mais il faut monter ça pour qu'on puisse couvrir l'ensemble des interventions. Et là ça dépend du niveau d'informatisation des différents systèmes des uns et des autres. Bien sûr, il y a des projets porteurs qui s'en viennent, qui vont aider, tout ce qui a été annoncé avec Infoway notamment, mais il va falloir s'attarder à monter ce système-là. Et ça, chaque fois qu'on monte un système comme ça, ça oblige. Ça oblige parce qu'il faut s'entendre sur les mêmes définitions: Quand est-ce qu'on met le patient sur cette liste-là? Comment est-ce qu'on qualifie telle chirurgie? Est-ce qu'il faut aller? Jusqu'où on va dans le diagnostic? Est-ce qu'il faut mettre le délai dans le système?

Ça, il faut réunir les équipes, à la fois les équipes médicales, les équipes de professionnels, pour être capables de se donner un cadre. Ça oblige, ça oblige à des changements de culture aussi. Et on dit là-dessus: Là, on a un bout de chemin à faire ensemble pour y arriver. Je ne sais pas si Yves...

M. Potter (Alex G.): Mais aussi il y a toute une foule d'obstacles qui ne sont pas reliés à un système d'information: il y a des disponibilités des lits des hôpitaux, il y a la pénurie de personnel dans certaines places comme les... etc. Il faut, dans un établissement donné, il faut réunir tous ces problèmes-là puis les résoudre. C'est comme ça. Ce n'est pas facile tout le temps.

Mme Harel: Dans votre mémoire, j'ai cru comprendre, là, surtout à la page 2, que vous insistiez sur le fait que l'appel à des ressources extrahospitalières, comme vous dites, là ? j'imagine que ça, c'est finalement les cliniques médicales associées ? ça doit se faire, ça doit reposer sur la situation particulière de chaque établissement, notamment sur la disponibilité des ressources. Mais je comprends qu'à ce moment-là... Est-ce que vous insistez pour que dans la loi, une fois qu'elle sera étudiée et adoptée, ce ne soit pas que l'agence, là, qui propose au ministre après avoir consulté, là, les chefs de département mais que ce soit tripartite et que l'établissement soit pris en considération lorsqu'il y aura proposition?

Une voix: M. Benoit.

M. Benoit (Yves): Je peux peut-être me permettre un commentaire par rapport à ça. Les CSS sont appelés à jouer un rôle important dans la dispensation des soins mais aussi sur tout le volet de l'approche populationnelle, la responsabilité populationnelle. Je pense qu'à ce niveau-là, là, ça devient important de voir avec eux comment on peut effectivement se servir de cet élément-là comme étant en même temps un levier.

Ce qu'on a fait avec la réforme puis ce qu'il y a d'intéressant, c'est que d'abord il y a eu les fusions, là, des établissements comme tels, là, puis qu'on a passé au travers ces éléments-là, mais en même temps, là, ce qu'on doit faire, c'est développer davantage des relations avec les cliniques privées, avec les pharmacies, ainsi de suite, là, parce que ça fait tout partie du réseau, cet élément-là. Alors, s'il y a des projets tels celui-là, qui peut servir de levier au CSS qui a cette responsabilité-là, il faut permettre au CSS de les utiliser comme levier. C'est à ce niveau-là.

Alors, ce n'est pas le CSS qui doit déclencher, mais c'est sûrement que le CSS a un bon portrait de ses besoins pour la région, est même capable de dire quelles cliniques puis comment est-ce qu'ils peuvent le travailler, là.

Mme Harel: ...prenante, n'est-ce pas...

M. Benoit (Yves): C'est ce que je pense.

Mme Harel: ...partie prenante, là.

n(17 h 20)n

M. Benoit (Yves): Mais je vous rappellerais que ? excusez; je vous rappellerais que ? les ententes de gestion le font déjà comme ça, là, on le fait déjà, CSS, agences. Puis, écoutez, les PTH-PTG, ils sont déjà dans les ententes de gestion, là, ça fait qu'on n'est pas dans quelque chose de nouveau là-dessus, là. Ça fonctionne, là, ça fonctionne bien, là.

Moi, tout ce que j'espère, c'est que, les étapes suivantes qu'on est en train de faire avec une possibilité de signature d'ententes avec des cliniques qui pourraient peut-être avoir des statuts peut-être avec une évolution plus grande, bien, qu'on n'exclue pas les CSS qui sont dans le... beaucoup de ces éléments-là, là. Puis je pense qu'à date ça se fait. J'espère que ça va se poursuivre, c'est tout.

Mme Harel: Alors, je pense, ça, c'est un aspect important, là, certainement, en tout cas, que nous retiendrons lors de l'étude article par article du projet de loi.

Je voudrais également vous demander de préciser un élément que vous avez été les seuls à apporter puis, je pense, qui est important, la distinction entre hébergement et hospitalisation. Et je crois que, là, vous nous mettez en garde, là, à l'égard de ce qu'on retrouve, dans le projet de loi, comme étant les facteurs dont le ministre doit tenir compte avant d'autoriser un centre médical spécialisé à procéder, là. C'est bien cela? Il doit tenir compte de différents facteurs, notamment la durée de l'hébergement. Et ce que vous nous dites, c'est que le mot «hébergement», ça signifie se loger provisoirement, alors que l'hospitalisation, c'est autre chose, là. Puis j'aimerais ça que vous nous précisiez ça.

Mme Denis (Lise): O.K. Dans le fond, ce qu'on dit, c'est que le centre médical spécialisé à l'intérieur duquel se feront des interventions du type hanche et genou, ce sont des interventions qui sont majeures pour la personne et qui nécessitent une hospitalisation, qui sont suivies d'une hospitalisation. Les gens ne sortent pas de là après 24 heures, là. Donc, il y a quelques jours d'hospitalisation. Ça nécessite des services à notre sens qui sont au-delà du simple hébergement qu'on pourrait comprendre comme logement et couvert. Ça nécessite un suivi postopératoire, ça nécessite des soins, et c'est dans ce sens-là qu'on dit que l'«hospitalisation» est un terme qui nous apparaît plus approprié que celui d'«héberger», tout simplement.

Mme Harel: Donc, il faudrait modifier, bien, en fait, amender de manière à ce qu'on remplace «hébergement» par «hospitalisation». C'est ce que vous recommandez?

M. Benoit (Yves): Personnellement, je ne suis pas sûr que je parlerais d'hospitalisation dans des cliniques spécialisées, là. Je vous dirais que, les conditions nécessaires à une bonne hospitalisation, on les retrouve dans les établissements de santé, on ne les retrouve pas dans des cliniques comme ça. Ma préoccupation est beaucoup plus à l'effet que, par exemple, si ? je veux prendre juste de l'exemple de chez nous; évidemment si ? par exemple, je n'ai pas de salle... puis j'ai des lits disponibles, que j'ai une entente avec une clinique qui va me l'opérer puis qui me le ramène, je n'ai pas de problème parce que j'ai des lits qui peuvent le recevoir. Ma crainte est plus à l'inverse. Si je veux, moi, m'entendre avec une clinique pour faire des interventions, bien c'est pour prendre l'épisode au complet. Alors, il faut voir si elle est capable de prendre l'épisode au complet.

Puis je ne suis pas prêt, moi, là, à dire que les cliniques, là, dans le privé, avec tout le respect que je peux avoir pour ça, elles sont en mesure de voir des patients. Écoutez, dans un hôpital, après une chirurgie de la hanche, vous allez garder un patient quatre, six, huit jours dans un suivi, avant qu'il soit pris en charge par un centre de réadaptation au retour à domicile. Alors, ils ne sont pas dans un hôpital pour rien, là, hein?

Mme Harel: ...est-ce qu'on va faire ces chirurgies ailleurs qu'à l'hôpital, qui nécessitent une hospitalisation?

M. Benoit (Yves): Bien, moi, encore une fois je reviens à ce que je disais tantôt, ça dépend beaucoup, un, de l'établissement, c'est quoi, les disponibilités qu'on peut avoir dans l'établissement X, Y, Z: Est-ce qu'il y a une disponibilité là qui fait qu'on peut s'entendre avec un tiers pour faire une partie de l'épisode? On le reprend ou ça? Est-ce qu'il y a des éléments sur lesquels il peut être complémenté à un service? Sinon, moi, au lieu d'envoyer un patient dans une clinique qui n'a pas tout le service, je vais bien sûr favoriser un autre centre hospitalier qui va me l'offrir. Il y a une question de qualité puis de sécurité, là, qu'il faut avoir, là.

Mme Denis (Lise): En complémentaire, je dirais cependant ? puis c'est là que l'expression, c'est pour ceux qui vont... à supposer qu'il y ait, par exemple, des gens qui ont une assurance privée puis qu'il y ait un centre médical spécialisé privé... de médecins non participants, eux, ils sont tenus d'assurer le service au complet, O.K.? Et je comprends qu'il peut y avoir des problèmes, là, à baptiser les choses autrement, O.K., mais ce qu'on veut qui soit bien clair, c'est que, dans ces centres médicaux spécialisés, qui sont plus qu'une clinique puis qu'on ne veut pas non plus appeler un hôpital, hein, il n'en demeure pas moins que, la lourdeur de ce à quoi ils ont à répondre, ils doivent être équipés pour le faire. Je pense que c'est ça. En tout cas, le sens de notre propos, c'est celui-là.

On n'a pas fait de recommandation plus loin en se disant: Il y a des.... Je vous dirais, il y a des tenants et aboutissants qui sont au-delà de ce qu'on peut dire là-dedans, mais il faut reconnaître que c'est: dans ces centres médicaux spécialisés privés, les gens qui auraient des assurances ou qui décident de payer, bien il faut que l'organisation de ce centre-là permette que ce soit l'équivalent de l'hôpital, si on peut exprimer les choses comme ça.

Mme Harel: ...chose certaine en tout cas, il y a une lumière rouge qui est allumée, puis on va avoir l'occasion certainement d'explorer tout cet aspect-là, cette dimension-là puis d'en débattre.

Il reste quatre minutes seulement, et je voulais attirer votre attention pour en connaître votre interprétation, de l'article du projet de loi, qui prévoit qu'un établissement public ou privé conventionné pourrait louer ses installations à un professionnel participant au sens de la Loi sur l'assurance maladie, dans le fond sans avoir besoin de l'autorisation préalable du ministre.

Parce que ce que l'article dit, c'est qu'un établissement ne peut, sans avoir obtenu l'autorisation préalable du ministre, louer ses installations à un professionnel non participant. C'est donc dire qu'il pourrait, sans avoir l'autorisation préalable du ministre, les louer à un professionnel participant.

Une voix: ...

Mme Harel: Il ne peut pas pour un non-participant, mais la loi ne parle jamais pour ne rien dire, n'est-ce pas? Alors, s'il ne peut pas pour un non-participant, c'est parce qu'il peut pour un participant. Alors, comment vous interprétez le fait qu'un établissement public ou privé conventionné pourrait louer des installations et procéder, là, dans le cadre de la présente loi?

Mme Denis (Lise): Je dirais simplement, là, que ça prend l'autorisation du ministre pour le louer à un non-participant. Mais ce que ça suppose, c'est que c'est donc possible de le louer.

Mme Harel: ...louer, oui.

Mme Denis (Lise): Bien, si la loi dit ça, c'est parce que c'est possible de louer.

Mme Harel: Et ça veut dire que ce n'est pas nécessaire d'avoir l'autorisation du ministre et que ça pourrait être loué à un participant.

Mais, dans le cadre de l'organisation des cliniques médicales spécialisées avec des médecins participants qui pourraient dans le fond être à la fois participants à l'hôpital puis en plus louer les installations de l'hôpital où ils sont participants, là, pour pouvoir faire des interventions, bon on verra.

Mme Denis (Lise): On n'a pas... exprimé de réserve particulière là-dessus. Je pense qu'on n'a pas considéré...

Mme Harel: Vous êtes favorable à ce qu'il y ait location d'installations?

Mme Denis (Lise): On aura sûrement à pousser un peu plus loin notre réflexion là-dessus, merci.

Mme Harel: D'accord. Alors, je vous laisse là-dessus. Puis la dernière chose, parce que ça m'a alertée, c'est la question pédiatrique. Votre mémoire, il insiste sur le fait que les listes d'attente en matière de services pédiatriques, je pense, sont assez importantes, les délais qui sont constatés, dites-vous. Et vous dites: «Il est essentiel que les établissements à vocation pédiatrique participent au développement du mécanisme de gestion.» Est-ce qu'il pourrait en être autrement?

Mme Denis (Lise): Dans le fond, on a voulu attirer l'attention sur les clientèles pédiatriques. On comprendra tous d'abord que le temps, quand on parle de six mois, ça n'a pas le même impact pour un adulte que ça a pour un enfant, un bébé. Et donc, quand on parle de cibler certaines interventions, on se dit: Soucions-nous aussi de la clientèle pédiatrique. Ce n'est sûrement pas les hanches, genoux, cataractes, on se comprend bien. Et en plus le temps répond à une autre notion. Et le sentiment qu'on a, pour avoir parlé aux établissements à mission pédiatrique, c'est qu'ils se sentent parfois un peu ? comment je dirais? ? isolés malgré leur problème énorme de liste d'attente, et on dit: Portons-leur une attention particulière. Assurons-nous qu'on ne les oublie pas tout en mettant en place nos choses. Comme je vous dis, pour les enfants c'est une autre notion. C'est vrai. Vous l'avez fait en protection de la jeunesse, quand vous avez changé la loi, parce que vous avez tenu compte du temps. Bien, je dis: Pour les interventions chirurgicales, il faut faire la même chose.

Le Président (M. Copeman): Avant de saluer nos invités ? peut-être on peut rester assis ? quelques items de régie interne pour la commission. Mme Denis, Mr. Potter, M. Benoit, Mme Drouin, M. Vermette, merci beaucoup pour votre participation à cette commission au nom de l'Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux.

Je vous rappelle, chers collègues, que nous reprenons nos travaux en ce qui concerne le mandat actuel demain, à 14 heures, mais j'ajourne les travaux de la commission jusqu'à demain matin, 9 h 30, afin d'effectuer un autre mandat. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 29)


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