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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mercredi 25 octobre 2006 - Vol. 39 N° 53

Consultations particulières sur le projet de loi n° 30 - Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d'administration


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare ouverte cette séance de la Commission des affaires sociales.

Nous sommes réunis afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d'administration.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bouchard (Vachon) va être remplacé par Mme Beaudoin (Mirabel).

Le Président (M. Copeman): Merci. Je vous rappelle, chers collègues ainsi que tous ceux qui sont présents dans la salle, que l'utilisation des téléphones cellulaires et d'autres appareils semblables est strictement défendue pendant la durée des séances de la commission. Alors, je prierais tous ceux qui en font l'usage de bien vouloir les mettre hors tension.

Auditions (suite)

Nous allons siéger ce matin, nous allons entendre et échanger avec trois groupes: dans quelques instants, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, suivie, à 10 h 30, par la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, et terminer la matinée avec la Confédération des syndicats nationaux. Et il est prévu que nous ajournons nos travaux à 12 h 30.

Alors, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. M. Fahey, bonjour.

Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)

M. Fahey (Richard): Bonjour.

Le Président (M. Copeman): Nous n'avons pas changé nos règles de fonctionnement, c'est-à-dire: vous avez 20 minutes pour votre présentation, et il y aura par la suite une période d'échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table.

Je présume que c'est M. Prévost qui est à votre droite. Alors, pas besoin vraiment de leprésenter, pour les fins d'enregistrement, transcription, c'est fait. Alors, M. Fahey, la parole est à vous pendant une période maximale de 20 minutes.

M. Fahey (Richard): Merci, M. le Président. Vous excuserez ma voix nasillarde, les changements de saison étant ce qu'ils sont. La FCEI est heureuse d'intervenir sur le projet de loi n° 30, aujourd'hui. Comme vous le savez, on représente 25 000 PME au Québec, 105 000 à la grandeur du Canada, et notre objectif, essentiellement c'est de favoriser l'essor économique de ces moteurs de l'économie québécoise et canadienne pour s'assurer que tout le monde puisse en bénéficier.

D'entrée de jeu, je vous dirais, la FCEI croit souhaitable d'encadrer strictement le fonctionnement des régimes de retraite afin d'assurer qu'ils rencontrent leurs obligations et soient solvables en tout temps. Pourquoi? Parce qu'on ne veut pas se retrouver, à la fin d'un processus d'emploi, et le travailleur qui a investi, l'entreprise qui a investi, et qu'on se retrouve en quelque sorte avec des déficits et des faillites qui font en sorte que les travailleurs n'ont plus cet accès à la rente de retraite. Nous avons sondé nos membres sur la question, en 2003, pour savoir c'est quoi, les particularités d'un régime de retraite. On avait fait ça en collaboration avec la Régie des rentes, et, je vous dirais, les principales préoccupations des PME du Québec en regard avec les régimes de retraite, c'est, bien entendu, une administration qui soit flexible, pas trop fastidieuse, de faire en sorte que les sommes versées dans les régimes soient protégées et insaisissables mais surtout, surtout qu'elles servent exclusivement pour la retraite, de façon à permettre encore une fois aux employés de bénéficier des rentes de retraite qui leurs sont dues au terme de leur emploi.

Encore une fois, cet objectif, le premier objectif d'administration ou d'absence de lourdeur administrative découle du fait, comme on le sait, dans tous les travaux que nous menons sur la question, du fait qu'on le sait, le fardeau réglementaire est beaucoup plus imposant sur une PME que sur une grande entreprise, qui a une batterie d'experts, ou de travailleurs, ou d'employés qui gèrent spécifiquement des régimes de retraite, alors que notre dirigeant de PME est à la fois responsable DRH, gère la production, fait le développement d'affaires, et ainsi de suite.

Donc, l'existence et la pérennité des régimes ont une grande importance pour nos membres, ont aussi une grande importance pour l'économie en général. Et, dans notre mémoire, à la page 3, on cite les propos de David Dodge, qui est le gouverneur de la Banque du Canada, bien entendu, qui dit que les fonds de pension contribuent à une affectation la plus efficiente de l'épargne, là, au niveau des travailleurs. Donc, il faut absolument s'assurer de la santé financière des régimes à prestations déterminées et pallier aux carences réglementaires ou aux carences de financement qui existent dans les régimes.

Le problème ? et c'est un élément de contexte ? c'est qu'on se retrouve souvent, au niveau des carences, surtout dans les régimes à prestations déterminées, dans des situations où on assiste à une asymétrie des obligations. Essentiellement, le promoteur est responsable du financement, il est responsable des déficits, puis il y a des limites au niveau de l'utilisation des excédents. Et, à ce moment-là, nos entreprises ou en tout cas les régimes... ou le fonctionnement de la réglementation actuellement a créé une dynamique par laquelle les investisseurs, les promoteurs investissent ce qui est nécessaire mais guère plus parce que, n'ayant pas accès aux excédents éventuels, ils limitent leurs investissements pour faire en sorte que les contributions soient minimales. Et ça, ce n'est pas nous qui le disons, c'est l'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite dans une publication d'août 2005.

Donc, il faut une réforme, il faut une réforme qui va amener une plus grande symétrie dans la structure même des régimes. Et, à ce niveau-là, bien qu'on salue la démarche ? et on fera des commentaires spécifiques, là, sur certains aspects ? on trouve regrettable qu'elle n'inclue pas les régimes publics du Québec et du Canada. C'est quand même intéressant que le gouvernement, par l'entremise d'un règlement ou d'une loi, exclue ses régimes propres et transfère un fardeau, un fardeau financier, comme on va le voir, au niveau des régimes privés. Et donc on transfère l'incidence économique néfaste sur les entreprises, mais le gouvernement n'est pas prêt à donner l'exemple et de s'astreindre aux mêmes obligations qu'il voudrait transférer aux entreprises. Donc, à ce niveau-là, à notre avis, ça fausse en quelque sorte la démarche, et surtout on pense que ça envoie un mauvais signal dans l'administration des régimes. Si on veut que le secteur privé soit strict, je ne vois pas pourquoi les administrations gouvernementales ne le seraient pas.

Je vais passer la parole à Simon Prévost, qui est notre économiste et directeur des affaires provinciales.

n (9 h 40) n

M. Prévost (Simon): Merci. M. le Président, d'abord, je voudrais commencer par une remarque préliminaire. On déplore que le règlement qui accompagne le projet de loi, dans lequel se trouvent beaucoup de détails quant à l'application, notamment, par exemple, je suppose, le niveau de la provision pour écarts défavorables et d'autres aspects, n'ait pas été publié en même temps que le projet de loi. Disons que ça limite un petit peu notre capacité à faire des commentaires pertinents. Et je dois dire aussi que, moi, j'ai appris des choses, en regardant ce qui a été dit en commission parlementaire auparavant, lors des séances précédentes, j'ai appris des choses sur le fonctionnement du projet de loi, auxquelles je n'avais pas accès en simplement lisant le projet de loi. Donc, éventuellement, disons que ça aiderait grandement les travaux de la commission et aussi notre capacité, nous, à donner l'heure juste si on avait l'ensemble de l'image avant de procéder.

Maintenant, je vais m'attarder à quatre ou cinq aspects particuliers du projet de loi. Bien sûr, le projet de loi en comprend beaucoup plus. On s'est attardés, nous, à ceux qui à notre avis ont une incidence plus directe sur les entreprises et en général sur l'économie du Québec.

D'abord, venons-en à cette question de la provision pour écarts défavorables. On l'avait dit l'année dernière, lors des consultations de la Régie des rentes du Québec, on est tout à fait en désaccord avec cette mesure qui d'une part nous paraît excessive, ça, c'est un premier élément. Deuxièmement, elle va entraîner des coûts économiques significatifs. Et surtout, surtout, la nécessité de cette mesure-là n'a pas été démontrée.

Si on regarde, au cours des dernières années, au cours des 15 dernières années, environ seulement une quarantaine de régimes ont été mis sous tutelle par la RRQ pour toutes sortes de raisons, et pas nécessairement parce que l'entreprise a fait faillite mais aussi parce qu'elle a simplement été vendue ou a terminé ses activités au Québec. Et on ne note pas, nous, quand on regarde l'évolution des données, un lien direct et hors de tout doute entre le degré de solvabilité des régimes et éventuellement la faillite de ces régimes-là.

En clair, oui, la situation est difficile et, oui, effectivement, il y a peut-être un problème de solvabilité ou de capitalisation ? je reviendrai plus tard sur la différence entre les deux mesures ? mais ce qui est clair, c'est qu'il n'y a pas eu quand même, à part quelques cas malheureux bien sûr qu'il faut dénoncer, d'hécatombe du côté des régimes de retraite. Et donc, dans un certain sens, le projet de loi, qui vise à régler ces problèmes-là, en donne beaucoup plus que le client en demande pour régler le problème.

Si on regarde plus spécifiquement les différents arguments qui s'opposent à cette question de la provision pour écarts défavorables, le premier, je dirais, c'est l'argument du coût d'opportunité. On vous a fait référence, en page 7, à une citation du président et chef de la direction de Caterpillar, la compagnie bien connue américaine, mais ça s'applique au Canada, ça s'applique aux grandes entreprises, ça s'applique aux petites entreprises. En clair, si on met des sommes toujours plus considérables dans les fonds de pension, notamment pour constituer une réserve, eh bien cet argent-là ne peut pas servir à faire autre chose. Donc, c'est ça que j'appelle le coût d'opportunité. Si on met l'argent à gauche, si on le met à droite, on ne peut pas le mettre aux deux endroits en même temps. Donc, il y a un problème de ce côté-là.

Et là notre autre problème fondamental, c'est qu'il se pourrait ? c'est peut-être possible ? que l'idée de mettre une provision pour écarts défavorables soit éventuellement une bonne idée. Là, ce qu'on déplore, nous, c'est que l'étude d'impact économique qui aurait dû être rendue disponible ne l'a pas été. Cette étude d'impact économique, dans le fond qui est requise par les directives du Conseil exécutif, eh bien, nous, on ne l'a pas vue. J'ai cru comprendre qu'elle avait été faite, mais le point, c'est qu'on n'y a pas accès. Donc, qu'elle soit faite, c'est une bonne chose; qu'on n'y ait pas accès, c'est une mauvaise chose, et ça ne nous aide pas non plus, encore une fois, à se faire une bonne idée de la mesure. Donc ça, c'est le problème, disons, d'entrée de jeu avec la provision pour écarts défavorables.

On peut aussi parler de coûts financiers, parce que c'est clair qu'à partir du moment où on va mettre de l'argent de côté, eh bien il pourrait s'ensuivre une hausse des coûts financiers des régimes, aussi une perte liée au fait que l'argent qui est là, bien, on ne fait, entre guillemets, rien d'autre avec ? et je reviendrai plus spécifiquement sur cet argument-là un peu plus tard ? et aussi forcément un désintérêt pour le type de régime à prestations déterminées. Et encore une fois on vient plutôt causer des problèmes aux régimes qu'on essaie d'aider, par ce projet de loi. D'emblée, on peut dire que, si l'entreprise est en déficit de solvabilité ou de capitalisation, eh bien c'est parce qu'au départ tout ne baigne pas dans l'huile probablement, il y a peut-être des problèmes financiers au sein de cette entreprise-là. Éventuellement, de mettre de côté des sommes pour créer une provision pour écarts défavorables, bien ça empêche les entreprises d'affecter, en concertation avec leurs employés, ces sommes-là à des initiatives stratégiques beaucoup plus pressantes pour l'entreprise au bénéfice de tous.

C'est peut-être le moment, pour moi, de revenir sur cet argument de dire que oui, mais les sommes qui sont là sont investies, elles ne sont pas dans un bas de laine, elles sont gérées et donc elles peuvent être investies au Québec. Là, il y a une grosse, grosse distinction à faire entre des sommes qui sont disponibles pour une entreprise, pour ses projets d'investissement pour ses travailleurs notamment et pour le développement de l'entreprise, et des sommes qui sont gérées par un fonds de pension, qui sont investies dans des fonds habituellement diversifiés et dont une portion, hein, dans le meilleur des cas, va être investie en actions canadiennes. Et ça, ça veut dire, quand on regarde la composition de la Bourse de Toronto, une portion congrue pour les actions québécoises, donc une portion très petite probablement investie directement au Québec, et sans parler de tout ce qui va être investi ailleurs dans le monde si on a une stratégie prudente et diversifiée de gestion de portefeuille. Bref, il y a un problème de ce côté-là. Encore une fois, c'est le coût d'opportunité. Jusqu'à un certain point, si on met de l'argent là, on ne le met pas ailleurs.

Qu'est-ce que ça signifie en termes de montants? Là, on peut faire des batailles de chiffres, ce n'est pas mon objectif aujourd'hui. Si on me dit par ailleurs que les sommes... et ça, ce n'était effectivement pas du tout clarifié dans le projet de loi, mais si on me dit que les sommes qui vont servir à bâtir cette réserve-là proviennent de l'excédent, ah bien, là, ça change un peu l'analyse qu'on faisait au départ, et franchement j'aurais aimé ça le savoir avant. Ceci dit, ça ne change pas l'analyse sur le fonds, ça change l'analyse sur les détails. Et ce qu'on vous présente, nous, aujourd'hui, ici, c'est une étude empirique qui nous dit que, pour chaque dollar supplémentaire qu'une entreprise va mettre dans un fonds de pension, il y a 0,60 $ à 0,70 $ qui auraient été utilisés autrement pour faire des investissements en capital.

Et, quand on regarde les déficits de solvabilité des entreprises du Québec et qu'on constitue une réserve pour éventualité défavorable, eh bien, nous, notre calcul ? vous verrez le détail dans le détail dans le mémoire ? c'est que c'est de 2,5 à 3 milliards de dollars d'investissement dont on se prive au Québec. Et c'est quand même assez conservateur parce que je ne vous dis pas que chaque dollar qu'on met en supplément dans un fonds de pension, c'est de l'investissement qui est perdu, je vous dis: C'est une portion de ce dollar-là qui est perdue, mais ça fait quand même de 2,5 à 3 milliards d'investissement potentiel perdu. Et là je vous pose la question ? mais la poser, c'est y répondre: Est-ce que le Québec a les moyens de se priver de 2, 3, 4, 5 milliards? On peut faire la bataille de chiffres, chacun a son chiffre, mais, quoi qu'il en soit, on parle ici de milliards de dollars, on ne parle pas de dizaines de millions de dollars. Et on parle d'un problème grave, au Québec, il y a un problème d'investissement, auquel d'ailleurs le gouvernement, M. le Président, est bien au fait puisqu'il est à développer des stratégies justement de développement économique, notamment pour les régions.

Un dernier point sur la provision pour écarts défavorables, c'est le suivant, M. le Président. C'est qu'à partir du moment où on fait ça, et peu importe comment on le fait, eh bien ça va faire en sorte ? et comme je le mentionnais tantôt ? que les régimes à prestations déterminées, qui sont vus par tous les observateurs et analystes comme les meilleurs régimes non seulement pour l'économie, mais aussi pour les travailleurs, puisque les autres régimes qui sont très populaires, ceux à cotisation déterminée, on sait que le risque est 100 % du côté des travailleurs... Alors, si on a à coeur la situation financière des travailleurs ? et je pense que c'est ça qu'on a derrière l'idée quand on propose un projet de loi comme celui-là ? eh bien on ne devrait pas proposer des mesures qui vont faire en sorte que c'est moins intéressant d'aller vers ce type de régime là.

D'autre part, ceux qui sont déjà à 100 %, bien on va leur dire: Tous les surplus que vous allez chercher, d'abord on ne sait à qui ils appartiennent vraiment, mais, même s'il y en a une portion qui vous appartient, vous ne pourrez pas l'utiliser parce qu'il faut que vous vous créiez une réserve. Et donc on tape sur la tête de ceux qui ont géré leurs régimes de manière prudente. Et, quand je dis «ceux», je parle des comités de retraite, là, pas nécessairement l'employeur. Mais ces comités de retraite là, qui ont géré prudemment, qui ont une solvabilité à 100 %, vont devoir encore une fois utiliser les surplus pour créer cette provision.

Petite remarque aussi, j'aimerais savoir, moi, et j'aimerais qu'on m'informe, si c'est possible: Qu'est-ce qui se passe si un régime, année après année, est à 100 % de solvabilité mais ne crée pas d'excédents? Est-ce qu'on va lui demander, autrement qu'avec ses excédents qu'il n'a pas, de s'amener à 107 % ou à 110 % de réserve? Là-dessus, disons que pour l'instant ce n'est pas très clair pour nous.

Très rapidement ? je vais le faire rapidement, même si l'élément est majeur ? l'autre point qu'on veut vous faire valoir, c'est l'évaluation de la santé financière d'un régime de retraite. Évidemment, tout le projet de loi repose sur une évaluation assez négative de la santé financière du régime de retraite. Le projet lui-même repose sur deux mesures particulières qui sont au coeur des différentes... deux mesures de solvabilité, ou de déficit en fait, ou de santé financière qui sont au coeur du projet de loi: une mesure qu'on appelle la mesure de solvabilité et l'autre de capitalisation.

Sans vous donner un cours trop technique, là, et ennuyeux d'ailleurs, la solvabilité, on se dit: Si le régime finit aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe? Est-ce que j'en ai assez pour payer tous mes engagements ou je n'en ai pas assez? C'est à peu près ça, c'est sur une base de terminaison du régime. Et c'est ça qu'on veut éviter. D'abord, c'est le premier niveau de protection. Si on a une entreprise qui fait faillite demain matin, qu'est-ce qui se passe? Est-ce que le régime de retraite est suffisamment garni pour payer les engagements? Ça, c'est l'approche de solvabilité.

n (9 h 50) n

L'approche de capitalisation, c'est sur une base de continuité du régime. Alors là, on regarde au temps présent tous les engagements futurs du régime et les rendements prévus des sommes qui sont mises dans le régime, qu'est-ce que ça donne, tous les actifs donc, d'un côté, et tout le passif, de l'autre, qu'on actualise en date de l'évaluation et on regarde qu'est-ce que ça donne. Pour faire ça, ça prend des hypothèses sur le taux d'inflation, sur le taux de mortalité, sur le taux de rendement boursier et sur les taux d'intérêt. Alors, vous comprendrez que, quand on rentre là-dedans, on vient de multiplier par 10 l'incertitude de cette mesure-là. Et ce qu'on vous fait valoir dans le mémoire, c'est que les actuaires eux-mêmes sont en train de se questionner sérieusement sur la validité de ce type d'analyse là.

Alors, ce qu'on vous dit à ce sujet-là, c'est: Avant de baser un projet de loi sur deux mesures et, par exemple, notamment sur les cotisations pour résorber les déficits, là... Il y a deux mesures: il y en a une pour résorber le déficit de solvabilité, il y en a une pour résorber le déficit de capitalisation. Moi, je vous dis: Dans le meilleur des cas, ces mesures-là sont hasardeuses. On n'a pas une idée précise de la santé financière des régimes quand on analyse ça sur la base de l'approche de capitalisation, donc sur une base de continuité du régime. Cette santé financière là, elle est hautement volatile, et on pourrait voir les taux d'intérêt bouger de 1 %, 1,5 %, et, tout d'un coup, tous les régimes du Québec, bien, sont à peu près en surplus, et, deux ans plus tard, après une baisse de taux d'intérêt, on est tous en déficit. Bref, ce qu'on veut vous mentionner là-dessus, c'est qu'il faut être prudent.

Et il y a une réflexion qui est faite notamment au niveau de l'Association des actuaires mais au niveau aussi des administrateurs de régimes de retraite. Bref, l'industrie du régime de retraite, qu'on soit du côté de ceux qui évaluent la situation que de ceux qui gèrent les régimes de retraite, se pose de sérieuses questions. Il est en train de faire une refonte de ces pratiques actuarielles qui sont reconnues, les bonnes pratiques actuarielles, et qui n'ont pas été changées d'ailleurs depuis 25 ans.

Donc, globalement, le message qu'on veut vous faire passer ici, c'est que, derrière le projet de loi, il y a peut-être lieu aussi de se poser des questions sur quelles sont les pratiques qui sont utilisées pour faire l'évaluation de la santé financière parce que sinon, je veux dire, on est carrément, là... on a les yeux bandés dans une salle où la lumière est fermée et on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va.

Le Président (M. Copeman): M. Prévost, il reste deux minutes à l'exposé.

M. Prévost (Simon): Alors, deux derniers points qu'on veut vous faire. Pour l'amortissement des déficits actuariels, nous, ce qu'on aurait aimé, d'abord, c'est de s'en tenir au déficit de solvabilité, comme je l'ai mentionné, et, d'autre part, faire en sorte que ce soit une approche par paliers et non pas une approche, là, linéaire dans le temps, où on dit: Vous avez cinq ans avec des cotisations, là, pour ramener la situation à l'équilibre. Ceux qui sont en situation beaucoup plus précaire, on leur donne très peu de temps pour se ramener à une situation un peu moins précaire, ceux qui sont en situation moyennement précaire, on leur laisse un peu plus de temps, et ainsi de suite. Vous le verrez à la page 12 du mémoire. Ce que ça signifie, ça, c'est qu'on assure tout de suite une base pour les régimes les plus dangereux, finalement les plus à risque, on les ramène rapidement à un niveau moins risqué.

Et un dernier point, sur le droit de faire assurer sa rente, nous, on croit que c'est un droit qui peut être dangereux pour la santé financière des régimes, qui augmente les coûts financiers du régime et qui diminue l'efficacité de la gestion des sommes de retraite, et donc ça ajoute aussi au problème de l'asymétrie. Dans ce sens-là, c'est à utiliser avec parcimonie. Il faut peut-être se poser la question si ce droit-là est bien balisé dans la loi.

Finalement, l'affectation de l'excédent d'actif, lui, je crois est une question toujours très brûlante. Nous, on y va assez simplement. Pourquoi ne pas affecter les excédents au prorata des sommes qui ont été cotisées par les employés et les employeurs? Et, à ce moment-là, il n'y a pas de négociation ou d'arbitre qui vient décider à la place des gens qui ont cotisé, ça se fait à l'interne entre ceux qui ont participé au régime. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Alors, merci, messieurs. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Merci, M. le Président. M. Fahey, M. Prévost, merci d'être là, ce matin. J'ai écouté attentivement votre exposé, j'ai lu votre mémoire, c'est évident que ça me suscite énormément de questions. Il me semble qu'il y a des aspects de votre présentation qui... Et je n'oserai pas vous dire d'emblée que ça m'apparaît contradictoire, alors je vais essayer de les prendre un par un pour essayer de faire valoir ou mieux comprendre votre position.

Je comprends que vous avez une opinion globale qui nous dit, au fond: Vous exagérez votre lecture de la situation réelle des régimes de retraite quand la régie nous fait part de la situation en disant que plus de 70 % des régimes sont en situation de déficit de solvabilité. Puis je veux qu'on se comprenne bien, là, le projet de loi porte essentiellement sur les déficits de solvabilité, mais ça va de soi que, pour qu'un régime existe et puisse être capable de vivre, il ne faut pas qu'il soit en déficit de capitalisation. La régie ne nous a pas dit que la situation était préoccupante au niveau de la capitalisation, elle nous a dit qu'elle était préoccupante au niveau de la solvabilité.

Vous nous dites d'autre part que d'évaluer cette solvabilité-là, c'est assez aléatoire, que les taux d'intérêt ou les rendements peuvent varier. C'est bien évident. C'est bien évident, on fait affaire ici à du placement, on fait affaire à de l'investissement, c'est évident que les taux de rendement vont varier, ça m'apparaît élémentaire. Mais en même temps ce n'est pas le seul élément qui doit être pris en compte. Mais vous nous dites: Au fond, tout ça devrait être revu. Vous nous dites même: Les actuaires se questionnent sur la façon d'évaluer cette solvabilité. Je pense qu'il a été clairement dit aussi, au cours de la commission parlementaire, qu'on travaillait en étroite collaboration avec l'Institut canadien des actuaires. Si travailler très, très, très étroitement avec l'Institut canadien des actuaires n'a pas cette valeur de référence pas uniquement au Québec, mais au Canada, ça m'apparaît assez problématique, là, on part sur une base qui est assez fragile.

Donc, vous nous dites: Cette provision pour écarts défavorables, nous, on pense qu'elle n'est pas nécessaire et on pense surtout que ça va précariser la situation des entreprises et ça les prive d'investissements. Moi, je voudrais que vous m'apportiez la solution concrète à ça. C'est comme si on mettait un peu la tête dans le sable puis on disait: Bien, il y a eu quelques cas, là, mais ça, ces quelques cas là, ça touche des retraités qui sont privés de la moitié de leurs revenus ou 30 %, 40 % de leurs revenus. Mais ça, c'est quelques cas malheureux. Comment pouvez-vous nous dire aujourd'hui que ce ne sont que quelques cas malheureux quand il y a 70 % des régimes qui ne sont pas en très bonne situation, quand, à l'année longue, vous nous dites, comme défenseurs du secteur manufacturier, qu'il y a des problèmes importants structuraux? Je veux dire, c'est quoi, votre solution par rapport à l'état de la situation? Et dites-moi, là, comment vous pensez vraiment que la responsabilité n'est pas avant tout dans une gestion rigoureuse de prévoir l'avenir? Parce que, quand on gère un régime de retraite, on est carrément dans de la prévision d'avenir, c'est le fondement même de la structure des régimes de retraite. Quelle est votre solution?

M. Fahey (Richard): M. le Président, si la ministre a entendu ou compris que nous trouvions que la Régie des rentes exagérait, ce n'était pas notre propos. Ce qu'on a dit, c'est qu'il y a des régimes qui sont en déficit de solvabilité, qu'il faut corriger ça, qu'il faut le faire par paliers, en forçant les délinquants à se rattraper plus rapidement puis en donnant à ceux qui sont peut-être mieux solvables, là ? la proposition qu'on fait en page 12, là ? ceux qui sont à 90 % de solvabilité, leur donner une plus longue période pour le faire. Donc, nous ne banalisons pas le fait qu'il y a des régimes qui sont en déficit de solvabilité.

Ce qu'on dit, c'est que, sur les quelque 1 000 régimes, il y en a 40 qui ont été mis en tutelle. Ils n'ont pas tous été mis en tutelle parce qu'ils avaient un déficit de solvabilité, donc il n'y a pas un lien entre les deux. Ça, c'est le premier élément. Donc, ce n'est pas une question d'exagération, c'est simplement les données de la Régie des rentes qui dit: Oui, il y en a qu'on a mis en tutelle, qu'on a dû intervenir. Dans certains cas, c'est désastreux parce que c'étaient vraiment les travailleurs qui perdaient de l'argent. Puis ça, encore une fois, d'entrée de jeu, on vous l'a dit, il faut protéger ces argents-là pour les travailleurs.

Mais, là où on ne vous suit plus, c'est d'aller au-delà du 100 % de solvabilité. Nous, ce qu'on dit, c'est: Écoutez, ces argents-là... On le sait, au Québec, là, on est en déficit d'investissement, ça a des conséquences sur la productivité des entreprises. Donc, justement pour aider ces entreprises manufacturières et autres au Québec, on dit: Parfait, assurons-nous d'avoir 100 % de solvabilité, assurons-nous de tendre vers ça sans nécessairement aller au-delà. Parce que, quand on dit «aller au-delà», ça veut dire qu'on prend de l'argent qu'on aurait pu mettre ailleurs, dans une machine, dans une technologie, dans un ordinateur, qu'on ne pourra pas parce qu'on doit constituer cet excédent pour écarts défavorables. C'est vraiment ça, le sens de notre message.

Et l'autre élément ? peut-être, Simon pourrait compléter là-dessus ? sur la distinction solvabilité puis capitalisation, nous, on est très forts sur la solvabilité. Capitalisation, on dit: Il y a un débat là-dessus, là, et il faudrait peut-être voir comment ce débat-là va atterrir du côté des actuaires avant de se geler dans une loi.

n (10 heures) n

Le Président (M. Copeman): Allez-y, M. Prévost.

M. Prévost (Simon): Oui. Merci, M. le Président. Juste une petite remarque supplémentaire. Effectivement, le gros de la problématique ne se situe pas du côté du déficit de solvabilité, il se situe essentiellement du côté de la capitalisation et comment on la mesure.

D'autre part, Mme la ministre me dit, M. le Président, qu'elle travaille étroitement avec l'Institut des actuaires. Alors, c'est parfait, c'est précisément une chose qu'on voulait entendre. Donc, de ce côté-là, on s'en réjouit.

Et d'autre part on n'a pas dit non plus que la Régie des rentes exagérait. Ce qu'on dit, c'est que, selon les différentes mesures qu'on peut prendre, disons qu'on peut se poser des questions sur l'évolution de la situation de la santé financière des régimes et que donc il faut y aller précautionneusement dans ce sens-là.

Mme Courchesne: Si vous me permettez, je vois une petite contradiction ? très amical. Vous nous dites, M. Prévost, vous nous avez dit tantôt: Si les régimes ont un déficit de solvabilité, ça peut vouloir dire qu'effectivement c'est une entreprise qui éprouve des difficultés. Là, vous nous dites: Si l'entreprise n'est pas solvable, a un déficit de solvabilité, bien pourquoi vous ne réglez pas cette question-là par paliers, en voulant dire: Nous allons demander aux entreprises qui n'ont pas cette solvabilité-là de l'atteindre plus rapidement? Autrement dit, on va dire: On va les contraindre davantage puis... Atteignez cette solvabilité-là plus rapidement. Mais comment voulez-vous qu'ils atteignent cette solvabilité-là plus rapidement si par ailleurs vous nous dites qu'ils sont déjà en difficulté dans leur entreprise? Moi, je vois là une espèce de contradiction, d'une certaine façon.

Et vous ne trouvez pas que la loi, le projet de loi veut justement établir un équilibre, donner un peu d'oxygène, permettre à l'entreprise de remplir ses obligations? Parce que je n'entends pas de votre part qu'un régime de retraite, c'est une obligation pour une entreprise puis, je vais vous dire, presque de la même façon que de réinvestir dans sa productivité. Ce que je veux dire, ça fait partie d'un plan d'affaires, ça fait partie de ton budget, ça fait partie de ce que tu dois prévoir dans une année financière.

Donc, est-ce que la provision ne serait pas justement un excellent moyen pour mettre à l'abri le régime d'une variation dans les taux d'intérêt, d'une variation économique, d'une baisse de rendement? C'est ça, c'est d'être un peu un bon père de famille pour prévoir les coups durs de l'entreprise qui, elle aussi, peut vivre des moments cycliques dans le développement de ses affaires.

M. Prévost (Simon): La contradiction n'est qu'apparente. Et ça va me faire plaisir de prendre quelques secondes pour vous expliquer la subtilité du mécanisme qu'on propose. Et ce que ça me dit, moi, c'est qu'on sera plus clairs la prochaine fois, quand on l'expliquera, si vous y voyez une contradiction. D'abord, c'est clair qu'effectivement, si une entreprise est en déficit de solvabilité, cela pourrait vouloir dire qu'elle a des difficultés financières. Maintenant, tout projet de loi vise, comme vous l'avez mentionné vous-même, un certain équilibre. Et l'équilibre, il se trouve dans notre structure par paliers dans la mesure où...

Dans un premier temps, c'est vrai qu'on est un peu plus durs sur les entreprises qui ont été les plus délinquantes, entre guillemets. Là, vous allez me dire: Oui, mais ce sont peut-être les entreprises qui sont le plus en difficulté. Forcément. Ceci dit, on les ramène rapidement à un palier de 80 % de solvabilité et ensuite, précisément parce que ces entreprises-là sont peut-être plus en difficulté, on relâche la pression et rapidement...

L'équilibre dont je parle ici, c'est que, quand on est dans des situations sous 70 % de solvabilité, il y a peut-être là un plus grand risque, il faut protéger effectivement les travailleurs. Maintenant, on ne va pas demander à ces entreprises-là de se ramener à 100 % d'une manière très rapide qui pourrait nuire à l'évolution de l'entreprise par la suite, on va simplement, comme on dit, sauver les meubles en leur demandant de se ramener à 80 % et ensuite on relâche la pression. Et là on pense qu'il y a un équilibre, il y a un équilibre entre la protection des fonds de retraite des travailleurs et aussi, je dirais, la viabilité financière de l'entreprise.

Et, pour ce qui est de la réserve, pour revenir sur votre commentaire à l'effet que: Est-ce qu'il n'y a pas là une bonne façon de protéger les régimes contre des variations non désirées du rendement?, je vous dirais que, dans le meilleur des mondes, oui, sans doute, mais, si on gère ça, par exemple, comme un budget familial, écoutez, il faut commencer... avant de pouvoir en mettre de côté et épargner ? parce que c'est comme un peu de l'épargne forcée pour les régimes de retraite ? il faut pouvoir payer l'épicerie. Et là le problème actuellement, au Québec, c'est qu'on a à peine de quoi payer l'épicerie. Et peut-être qu'on peut s'occuper effectivement, avant d'en mettre de côté pour des cas incertains de mauvais rendement... avant d'en mettre de côté, on peut peut-être s'assurer de payer l'épicerie, et, dans ce cas-là, ça peut signifier aussi investir dans les entreprises du Québec plutôt que de mettre de l'argent de côté. Donc, on n'a peut-être pas les moyens de la protection et, ceci dit, dans un contexte où on ne voit pas, nous, que, quand on est à 100 % ou à 95 %, on ne voit pas de risque indu pour les fonds des travailleurs. Et la question, c'est vraiment de savoir, une fois qu'on est rendu à 100 %, est-ce qu'on ne peut pas se dire que, ah, il est très raisonnable de croire que les travailleurs et les fonds de retraite de ces travailleurs-là ne sont pas en danger et qu'en mettre davantage, c'est un luxe qu'on ne peut pas se permettre?

Mme Courchesne: Bien, je vais... M. le Président, allez-y, je reviendrai...

Le Président (M. Copeman): Oui. M. le député d'Orford.

M. Reid: Oui. Rapidement, avant de poser ma question, je voudrais juste vous dire qu'effectivement c'est une discussion qui est importante, puisqu'ici c'est toute la question de l'évaluation du risque. Mais c'est comme prendre de l'assurance, il en faut, mais en même temps on en prend-tu trop? Je pense que c'est un petit peu le sens de ce que vous dites. Mais il est clair que le projet de loi doit voir à s'assurer que les travailleurs québécois aient la protection adéquate. Ce que vous nous dites, c'est... Et vous contribuez, je pense, justement à la consultation en ce sens-là, c'est que c'est une gestion du risque puis à quel moment est-ce qu'on en a assez, à quel moment est-ce qu'on en a trop. Et vous contribuez donc à nous éclairer là-dessus, et je vous en remercie.

Moi, j'ai une toute petite question concernant votre recommandation d'y aller selon la répartition, quand on parle des excédents, d'y aller selon la répartition des sommes contribuées. Je me pose juste une question: Est-ce que ça, ça ne devient pas quelque chose... Autant, par exemple, dans une entreprise de la grosseur de l'Université de Sherbrooke, que j'ai gérée, c'est quelque chose de possible parce qu'on a bien du monde pour faire les calculs puis on a bien des ordinateurs pour faire les calculs, est-ce que ça, ce n'est pas quelque chose qui serait difficile à appliquer dans des plus petites organisations?

M. Fahey (Richard): M. le Président, un régime à prestations déterminées, dans une plus petite entreprise, est géré généralement par l'entremise d'un consultant, un expert, un actuaire qui va offrir ses services. Donc, ces gens-là sont capables de faire ces calculs-là. Je ne pense pas que nos dirigeants de PME administrent eux-mêmes leurs régimes. Donc, c'est vraiment à ce niveau-là. Je vous dirais, ça ne représente pas un fardeau supplémentaire pour le dirigeant comme tel.

Ceci étant dit, la méthode de répartition au prorata, c'est simplement de dire: Écoutez, ce n'est pas juste moi qui ai mis 1 $ dedans, mon travailleur a mis 1 $ aussi. Et autant il devrait bénéficier du bon rendement du marché boursier, autant il devrait assumer les mauvais rendements, et la répartition des excédents devrait se faire en conséquence. C'est une notion d'équité ici qu'on propose, qui est relativement simple aussi, pour gérer les excédents.

M. Reid: Merci.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Pontiac, il reste à peu près cinq minutes.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Je vais vous ramener à la page 3 de votre mémoire, on parle de l'asymétrie néfaste des régimes de retraite. Vous dites que vous considérez que des régimes de retraite font l'objet d'une asymétrie néfaste. Vous définissez un peu cette compréhension de l'asymétrie et vous dites qu'elle provient du fait... L'«asymétrie provient du fait que le promoteur d'un régime: est en bout de ligne l'unique responsable du financement du régime; est habituellement le seul responsable de tout déficit éventuel; et n'a la plupart du temps pas accès ou a un accès limité à tout excédent d'actif...»

J'aimerais ça que vous me disiez s'il existe réellement un problème d'asymétrie, considérant les sommes importantes qui ont été prises en congés de cotisation par les employeurs durant des années. J'aimerais ça que vous puissiez m'expliquer ça, à quel point c'est néfaste pour le promoteur d'un régime.

n(10 h 10)n

M. Fahey (Richard): Écoutez, des congés de contribution, là, généralement ça ne se fait pas de façon unilatérale, hein? C'est discuté avec les travailleurs, dans bien des cas. C'est sûr qu'il y en a, des délinquants, là. Puis notre propos, comme Simon l'évoquait précédemment, notre propos, ce n'est pas de protéger les délinquants. Les délinquants doivent être ramenés dans le rang, et ça, c'est le but de l'exercice, aujourd'hui. Ce qu'on veut, c'est que les argents qui sont disponibles dans l'entreprise, que ce soit à cause d'un congé de contribution qui a été convenu avec nos travailleurs ou non, que ces argents-là disponibles, un, assurent la solvabilité. Parce que ça, c'est le premier principe, hein, il faut que tu t'assures que tes régimes de retraite soient solvables parce que, s'ils ne sont pas solvables, tu mets du monde à risque, puis ça, là, tu sais, il faut protéger nos travailleurs là-dessus. Mais, ceci étant dit, une fois qu'on a assuré cette solvabilité-là, qu'on tourne autour de 100 %, bien, après ça, on se demande pourquoi on devrait aller au-delà de cela, étant entendu que ces argents-là seraient forts utiles dans un contexte de transformation de nos entreprises en investissement.

Mme L'Écuyer: Merci.

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Fahey, M. Prévost, merci pour la présentation de votre mémoire. Dans un premier temps, vous commencez la présentation de votre mémoire en disant que vous estimez que le malade sera achevé, non pas guéri. Et vous dites que vous avez fait un sondage en 2003 auprès de vos membres. Ma première question: Vous avez fait ce sondage-là auprès de combien de membres? Et la deuxième question: Combien de vos membres bénéficient d'un régime de retraite à prestations déterminées?

M. Fahey (Richard): Bien, vous avez les données du sondage, là, il y a eu 452 répondants à ce sondage-là. Je vous dirais que la problématique au niveau des régimes à prestations déterminées, c'est généralement des régimes qu'on va retrouver dans la moyenne grande entreprise. O.K.? Le chiffre exact du pourcentage de membres qui ont un régime à prestations déterminées, je ne l'ai pas ici.

Quand on parle d'achever le malade plutôt que le guérir, c'est de dire que, si on crée de plus en plus de contraintes aux régimes à prestations déterminées, il y a fort à parier que ça va être un mécanisme qui va être délaissé par les entreprises. Et, bon, on le sait, on le disait d'entrée de jeu, ces régimes à prestations déterminées ont une valeur économique, ces régimes à prestations déterminées ont une valeur pour les travailleurs, et donc, si les entreprises délaissent ces régimes-là à cause d'un fardeau réglementaire ou de contraintes, que ce soit la provision ou l'assurabilité des... la possibilité de retirer les argents qui sont dans le régime, ça va faire en sorte qu'ils vont devenir moins attrayants, que les entreprises vont moins en créer et qu'on va assister de plus en plus à ce qu'on appelle le «rollover» dans des régimes à cotisation déterminée.

Mme Beaudoin: Vous mentionnez à la page 5: «Dans la même optique, nous ne pouvons qu'être très critiques face à l'intention du gouvernement de soustraire les régimes de retraite des municipalités et des universités aux obligations relatives à la solvabilité tel que stipulé dans un projet de règlement qui vient tout juste d'être déposé.» Alors, ma question est simple: Si vous aviez les détails du règlement, est-ce que vous auriez la même opinion?

M. Fahey (Richard): En fait, ce qu'on parle ici...

Mme Beaudoin: Dans le sens, il a été déposé, là, mais c'est quoi, votre opinion concernant le règlement? Est-ce que vous avez eu le temps de tout analyser ça?

M. Fahey (Richard): En fait, on a regardé le règlement puis, ce qu'on a constaté, ce que le gouvernement venait de faire, c'est de dire: C'est bon pour les entreprises, mais ce n'est pas bon pour ma gang. En gros, là. Et donc on transfère un certain fardeau sur les entreprises privées tout en écartant les régimes des municipalités et des universités, et donc, à ce niveau-là, c'est une question d'équité, là. Ce qui est bon pour Jacques devrait être bon pour Jeanne. Et donc, dans ce contexte-là, on se demande pourquoi il y a cette approche-là.

Puis, si on pousse le raisonnement ? parce qu'on parlait du malade, là, qu'on va achever ? si on pousse le raisonnement et que les entreprises privées, à cause des contraintes qu'il y a là, qui vont se désengager par rapport... ou qui ne créeront plus de régimes à prestations déterminées, on va se retrouver dans une situation où les seuls régimes à prestations déterminées qui vont exister, ça va être dans le secteur public. Avec les contraintes de financement que ça représente pour l'État, avec les contraintes de... la générosité de ces régimes-là comparés avec le secteur privé, moi, je suis inquiet sur l'évolution des choses.

M. Prévost (Simon): Et, si je peux me permettre une remarque supplémentaire là-dessus, quand on parle d'équité, c'est le principe général de la chose. Maintenant, on peut avoir toutes sortes d'arguments pour expliquer pourquoi les régimes des universités et des municipalités ou même les régimes du gouvernement devraient être exclus de ces contraintes plus sévères sur le plan de la santé financière des régimes, il n'en demeure pas moins qu'il y a deux choses qui se produisent ici et qui ne sont bonnes ni l'une ni l'autre. C'est-à-dire qu'à partir du moment où traînent dans les livres les déficits de solvabilité ou de capitalisation des régimes publics et aussi des municipalités et des universités, dont la dette ultimement est garantie par le gouvernement, à ce moment-là on peut se poser sérieusement la question, et c'est, je dirais, férocement d'actualité aujourd'hui: Quelle est finalement l'image des finances publiques qu'on a réellement? Ça, c'est une question.

L'autre question qu'on peut se poser, et M. Fahey l'a mentionné, c'est que, d'autre part, si on veut régler cette situation-là, il va falloir, du côté gouvernemental et des autres institutions ? pardonnez-moi l'expression ? pomper beaucoup d'argent dans les régimes pour amener ça à des niveaux comparables à ce qu'on demande au secteur privé. Alors, dans les deux cas, soit qu'on a une image faussée des finances publiques ou, si on a une vraie image mais une image équitable, on va se retrouver dans une situation de finances publiques difficile. Et ce n'est pas se rendre service que de laisser des déficits de solvabilité traîner du côté des régimes publics.

Mme Beaudoin: Alors, vous savez que plusieurs associations de retraités ont présenté des mémoires, et ils sont unanimes à l'effet qu'ils sont d'accord avec le projet de loi, ils sont d'accord avec l'écart provision, avec le 90 % avant bonification, avec l'achat de rentes, avec le principe d'équité, avec la gouvernance des comités. Qu'est-ce que vous répondez à ces retraités?

M. Fahey (Richard): Si le gouvernement abolissait l'impôt corporatif, 100 % des PME seraient d'accord avec lui. Et donc, à un moment donné, c'est sûr, les mesures qui sont là sont très avantageuses pour les retraités, pour les travailleurs, et ainsi de suite. Ce qu'on dit, nous, c'est qu'un régime de retraite, c'est des deux côtés. Il faut établir un équilibre entre la solvabilité et la protection de la rente de retraite, parce que ça, c'est un principe fondamental que nos membres reconnaissent dans le sondage.

Deuxièmement, il faut avoir, de l'autre côté de la balance, la capacité économique, financière des entreprises pour assumer ces régimes-là. Mon point n'est pas de dire: Enlevons aux retraités au bénéfice des entreprises, ce n'est pas ça, c'est juste de dire qu'il faut établir un équilibre. Et nous croyons que la provision pour écarts défavorables et la mesure, là, au niveau de la capacité de... pour reprendre le mot exact, le droit de faire assurer sa rente, pour nous, ça a des conséquences économiques importantes pour les entreprises, qui viennent fausser à notre avis l'équilibre recherché ou qui devrait être recherché dans le projet de loi.

Mme Beaudoin: Ce qui vous démarque dans votre mémoire ? et tantôt Mme la ministre le soulignait ? c'est concernant votre opinion, là, des méthodes des actuaires. Vous mentionnez, à la page 11: «Comme on peut le constater, l'approche de capitalisation est sujette à caution, pour dire le moins. Sans une réforme importante des méthodes actuarielles, sur laquelle plusieurs intervenants de l'industrie réfléchissent d'ailleurs...» Moi, j'aimerais vous entendre un peu plus à ce sujet-là. Est-ce que vous contestez toutes ces méthodes? Vous savez qu'ils ont présenté un mémoire, et puis je suis certaine, s'ils vous écoutent, qu'ils aimeraient entendre votre opinion.

n(10 h 20)n

M. Prévost (Simon): Bien, d'abord, là-dessus, je vais vous rassurer tout de suite, nos capacités, je dirais, de recherche actuarielle sont assez limitées, à la FCEI, et ce qui nous empêche de dire des niaiseries dans la mesure où on les fait dire aux autres. En clair, c'est qu'on a repris ? si vous croyez que ce sont des niaiseries ? on a repris ce que l'industrie publie elle-même dans les différents documents de réflexion. On se fait finalement le relais de différents questionnements dans le domaine de l'administration des régimes de retraite et que les actuaires eux-mêmes... On constate que même les actuaires se posent des questions. Ceci dit, les actuaires, quand on parle des pratiques actuarielles reconnues, c'est toujours une question délicate dans la mesure où ils sont juge et partie là-dedans, c'est eux qui les mettent en place, c'est eux qui les appliquent par la suite. Et même le fait que, dans leur document de réflexion ? dont on fait référence dans notre mémoire ? on constate qu'ils se posent des questions, c'est déjà tout à leur honneur.

Ceci étant dit, la question qu'on se pose, nous, c'est plus de dire ? et c'est plus un drapeau qu'on lève ici: Il faut faire attention. Et est-ce qu'on remet en cause l'ensemble des pratiques actuarielles? Non, mais certains le font pour nous, et c'est ce qu'on a voulu vous mentionner aujourd'hui. Ceci dit, on peut être quand même assez heureux de voir que l'évolution du projet de loi, les discussions, la rédaction, j'ose espérer, ne s'est pas faite sans consultation auprès de l'Institut des actuaires. C'est ce que la ministre nous a confirmé tantôt. Donc ça, c'est une bonne nouvelle.

Mais c'est un élément qui, pour nous, semblait assez important parce qu'à partir du moment où on s'est intéressés à la question, on a constaté que... Et c'est peut-être un réflexe qu'on a, nous, mais, avant de savoir quoi dire sur un problème, on veut savoir quel est le problème réellement. Et, quand on s'est mis à gratter pour savoir quel est le problème, on s'est rendu compte que même ceux qui sont chargés de l'analyser, ceux qui sont chargés de faire le diagnostic ne s'entendent pas sur les méthodes qu'il faut prendre pour faire le diagnostic. C'est simplement donc un drapeau qu'on a voulu lever, il faut faire attention.

Mme Beaudoin: Le projet de loi actuel contient plusieurs dispositions concernant la gouvernance des comités. Je m'attendais à ce que vous ayez plus de craintes par rapport à la question de la gouvernance. Est-ce que vous pouvez expliciter votre opinion?

M. Fahey (Richard): Écoutez, notre analyse n'a pas porté là-dessus, on a décidé de concentrer notre intervention, là, sur les cinq points qui nous apparaissaient problématiques au niveau du projet de loi. Je n'ai pas de commentaire spécifique à faire à ce niveau-là.

Mme Beaudoin: À la page 13, vous parlez de l'affectation de l'excédent d'actif. Vous écrivez: «En effet, nous proposons que ces excédents soient distribués selon une méthode de répartition au prorata des sommes totales cotisées au régime [pour] chacune des parties, actualisées au taux de rendement pondéré moyen du régime durant les années en question.» Alors, pour les fins de l'enregistrement, là, est-ce qu'on peut avoir une explication simple de ce que vous proposez?

M. Prévost (Simon): Bon, en clair, ce que ça signifie, c'est que, pour recevoir à une date précise quelles sont les sommes qui ont été cotisées par l'un et par l'autre, il faut voir d'une part les montants qui ont été versés au fil des années, O.K., et ramener tous ces montants-là en dollars d'aujourd'hui alors qu'on veut évaluer comment on va séparer un excédent. La date où on veut le séparer, il faut ramener ça en dollars de la date où on fait l'évaluation. Et, pour ce faire, on utilise un taux d'actualisation, donc pratique courante en finances. Quel taux d'actualisation on devrait utiliser dans ce cas-là? Donc, cette espèce de taux d'intérêt qui va nous ramener tout ça en dollars d'aujourd'hui, eh bien, dans ce cas-là, il nous apparaît évident que c'est le rendement moyen qu'on a eu dans le régime à partir du moment où on a commencé à y mettre des sommes. C'est le taux qui devrait être utilisé pour ramener en dollars d'aujourd'hui et ensuite partager les sommes que chacun a mis au prorata de sa contribution. Mais, soit dit en passant, vous constaterez, quand vous regardez le tableau, que le taux utilisé pour actualiser les sommes des employeurs et des employés évidemment est le même parce que c'est une caisse commune, hein, où chacun a contribué.

Mme Beaudoin: À la page 8, aussi vous parlez de certains travaux empiriques. C'est un petit peu compliqué à comprendre. J'aimerais ça que vous l'expliquiez d'une façon plus simple. Vous parlez d'un rapport selon Rauh, 2006, et vous expliquez exactement, là, que «certains travaux empiriques ont été réalisés pour tenter d'estimer l'impact économique des contributions financières des entreprises aux régimes de pensions à prestations déterminées». Alors, est-ce que vous pouvez expliquer ce qu'ils disent, là, exactement en termes simples? Parce que vous avez plusieurs explications, plusieurs chiffres, mais ce n'est pas simple.

M. Prévost (Simon): Eh bien, je vais essayer de vous faire ça plus simplement. L'idée derrière cette analyse-là, c'est qu'on s'est dit, nous, avant même de savoir, par exemple, comment on va financer cette réserve-là, peu importe, la question, c'est de savoir, comme je le mentionnais lors de la présentation: si on met de l'argent dans une réserve, dans une provision pour écarts défavorables, on ne le met pas ailleurs, et ça, intuitivement on s'est dit que ça va avoir un impact sur l'investissement, ça ne se peut pas. Je veux dire, si, moi, comme entreprise, je dispose de sommes, il est fort possible que je décide de les investir. Maintenant, est-ce que c'est 1 $ pour 1 $? Est-ce que le lien est aussi direct? C'est ce qu'on ne savait pas. Parce qu'on s'est dit d'une part que ça va avoir un impact sur l'investissement... Soit dit en passant, à partir du moment où on a un impact sur l'investissement, je vous soumettrai qu'on a aussi un impact sur l'emploi, et éventuellement un impact sur la consommation, et finalement un impact global sur l'économie, et qui, comme vous vous en doutez, n'est pas positif.

Ceci dit, avant donc de tirer des conclusions, on a regardé la littérature de ce côté-là, et il nous apparaissait intéressant d'utiliser ces chiffres qui nous disent que, pour chaque dollar supplémentaire qu'une entreprise va devoir contribuer à une caisse de retraite, et ça, peu importe, hein, d'ailleurs, si on est à 80 %, ou 90 %, ou à 100 %, ou à 110 % puis on rajoute des dollars, eh bien il y en a de 0,60 $ à 0,70 $ de ce dollar-là qui normalement auraient été investis par l'entreprise. Alors donc, ce dont on vous parle ici, c'est d'un effet qu'on appelle, en économie, l'effet d'éviction, c'est-à-dire ? hein, éviction, ça vient d'évincer ? si vous mettez de l'argent là, vous évincez de l'investissement, il y a un effet d'éviction, et donc ça diminue l'investissement et éventuellement la croissance économique.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée, il reste à peu près cinq minutes, puis le député de Chutes-de-la-Chaudière désire intervenir. On peut y aller? M. le député, allez-y.

M. Picard: Merci, M. le Président. Merci, messieurs. Moi, ce que je retiens de votre présentation, c'est qu'il n'y a pas de problème concernant les régimes de retraite, il y a seulement une quarantaine de cas. Quand je vois votre mécanisme... Puis, moi, je ne partage pas votre avis là-dessus. Je pense que, oui, c'est vrai que ça touche une quarantaine de régimes, mais il faut trouver un mécanisme pour aider ces gens-là. Le mécanisme, la ministre nous le dépose, elle dit: Regarde, c'est ça. Qu'on le bonifie, oui, je suis d'accord avec tous les intervenants.

Moi, j'ai de la difficulté avec votre mécanisme de redressement des déficits par paliers, parce que, quand je vois votre tableau, de 90 % à 99 %, vous avez six ans. Donc, pour moi, le message que je décode, c'est que vous jugez qu'entre 90 % et 99 % tout le monde devrait se tenir là. Parce que, si quelqu'un arrive à 100 %, l'année après il retombe à 98 %, il a encore six ans. Là, j'ai de la difficulté. Peut-être que, par paliers, si la dernière strate, c'était de 100 % à 107 %, peut-être, là, ce serait peut-être plus acceptable, en tout cas aux yeux des parlementaires, selon moi. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus. En tout cas, moi, je tique beaucoup là-dessus parce que j'ai l'impression que les gens vont tomber dans le 100 %, puis ils vont revenir tout de suite à 99 %, puis là il va y avoir un 10 % d'écart. Donc, c'est tout simplement ça, mon interrogation.

M. Prévost (Simon): Écoutez, interrogation fort légitime. Si je regarde l'article 142 du projet de loi, ce que ça nous dit, c'est que «la période d'amortissement d'un déficit actuariel débute à la date de l'évaluation ? blablabla. O.K.? Elle expire à la fin d'un exercice financier [...] au plus tard cinq ans après la date de l'évaluation...» Alors, en clair, quelqu'un qui serait à 70 %, 80 %, 85 %, 97,2 %, lui, il va avoir... ce régime-là va avoir cinq ans pour se ramener à 100 %. Et dans le fond ce n'est pas très différent de notre six ans lorsqu'on se trouve entre 90 % et 100 %. Et même, dans le cas du projet de loi, on pourrait avoir tout avantage à rester dans les environs de 95 %, par exemple.

Ceci étant dit, là où, nous, on ajoute une protection supplémentaire pour les régimes, c'est qu'on dit: Ce n'est pas cinq ans pour tout le monde. Si vous êtes vraiment mal pris, là, il faut vous ramener rapidement à un niveau plus gérable en un an. Et ensuite, si vous êtes moyennement mal pris, vous avez trois ans pour vous ramener à un niveau plus gérable, que, nous, on situe à 90 %.

Ceci dit, je voudrais vraiment mettre l'accent sur la situation suivante. Nous, le nombre de paliers, les niveaux des paliers, comment ça s'inscrit exactement, c'est une proposition qu'on fait, c'est le principe qu'on aimerait voir inscrit dans la loi, tout simplement.

M. Picard: Oui. J'aurais une autre question, M. le Président. Vous n'en traitez pas dans votre mémoire, mais vous avez certainement vu le droit d'arbitrage. Dans le projet de loi, on prévoit qu'une personne peut demander de l'arbitrage. Une centrale syndicale nous a parlé peut-être que ce serait mieux, si ce serait 30 % des gens. Avez-vous un commentaire là-dessus, sur le droit d'arbitrage qui est prévu dans le projet de loi?

M. Fahey (Richard): Je vais me permettre un commentaire ? comment je pourrais dire? ? un commentaire facile, dans le sens qu'une personne, ça crée beaucoup de pression sur le régime, tu sais. Si une personne enclenche un processus d'arbitrage ? et Dieu sait que l'arbitrage, c'est quand même fastidieux ? il y a une problématique. Je pense que, bon, pour ce qui est du niveau où le nombre de personnes devraient être... qui demandent de l'arbitrage, quel niveau ça devrait être, là j'en laisse plus aux experts dans le domaine. Mais juste une personne, je partage votre inquiétude à ce niveau-là.

M. Picard: Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Copeman): Alors, M. Fahey, M. Prévost, merci pour votre participation à cette commission parlementaire pour le compte de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.

J'invite les représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec à prendre place à la table et je suspends les travaux de la commission quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 30)

 

(Reprise à 10 h 33)

La Présidente (Mme L'Écuyer): La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Je veux souhaiter la bienvenue à M. Henri Massé, président. M. Michel Arsenault, M. Pierre Laliberté. Je vous souhaite la bienvenue. Vous avez une période de 20 minutes pour présenter votre mémoire, et après, la période de questions de 15 minutes pour le côté ministériel et 15 minutes pour le côté de l'opposition. Si vous voulez bien commencer, M. Massé, la parole est à vous.

Fédération des travailleurs
et travailleuses du Québec (FTQ)

M. Massé (Henri): À ma droite, c'est Pierre Laliberté, qui est le conseiller politique à la FTQ, puis, à ma gauche, ce n'est pas Michel Arsenault mais Réjean Bellemare, qui est le responsable de la recherche, chez nous, dans les questions de retraite.

La Présidente (Mme L'Écuyer): Bienvenue, M. Bellemare.

M. Massé (Henri): Je voudrais d'abord vous remercier de nous donner l'opportunité de présenter notre point de vue devant cette commission. Il y a plusieurs aspects du projet de loi, à la FTQ, que nous trouvons fort intéressants, au niveau de la gouvernance, par exemple, des affaires, qui étaient bienvenus puis depuis longtemps, au niveau d'une meilleure sécurité financière aussi. Pierre Laliberté y reviendra en détail, tantôt.

On pense que c'est un projet de loi qui pourrait être potable, potable, mais il y a une couple d'éléments que, si vous ne changez pas ou ne corrigez pas, on vous le dit, là, comme on le dit habituellement à la méthode FTQ: Mieux vaut pas de projet de loi du tout que le projet de loi qu'on a devant nous. Et il y a deux éléments qui nous heurtent de front, une couple d'autres qu'on veut changer aussi, mais une couple qui nous heurtent vraiment de front. Puis ça part d'intentions généreuses, là, dans le projet de loi, puis on le dit, mais, si ça a pour effet d'augmenter les coûts du régime de façon appréciable, on va vous demander, à la commission, de regarder sérieusement ce que vous êtes en train de faire.

Le premier élément, c'est la rente garantie aux frais du régime. Si on nous avait offert ça il y a 25 ans, à la FTQ, on aurait sauté dessus. Mais on est toujours dans des contextes donnés, en relations de travail, et, aujourd'hui, là, si on ne tient pas compte du contexte d'aujourd'hui, on a un glissement... ceux qui sont passés avant nous autres, je ne suis pas d'accord sur toute la ligne sur leur présentation, mais il y a un glissement vers les régimes à cotisation déterminée de façon très importante ? je n'ai pas vu le législateur se préoccuper de ça encore, là ? mais très importante.

Aux États-Unis, à l'heure actuelle, c'est près de 80 % des régimes à prestations qui sont en train de glisser vers des régimes à cotisation déterminée. La tendance s'en vient, la même chose, au Canada puis au Québec. On a du retard, là, mais il ne faut pas oublier que notre économie, elle roule, puis on a des multinationales, puis on est pas mal avec les autres, là, on est en train de rouler vers des régimes à cotisation déterminée. Et, juste pour prendre l'exemple de Bell ? ce n'est pas un petit employeur, au Québec, là ? bon, ils sont dedans, là.

Et, nous, on dit que c'est un désastre si on s'en va vers les régimes à cotisation déterminée. D'abord, il n'y a plus l'espèce de mutualisation. Le travailleur ou la travailleuse qui va prendre sa retraite dans les mauvaises années va payer plus la note que celui ou celle qui va prendre sa retraite dans les années de surabondance. Ça fait que, les régimes à prestations, ça se mérite là, là. Ça mutualise des risques, là, sur la longueur des carrières puis l'ensemble des travailleurs puis des travailleurs qu'on représente dans les régimes de retraite. Puis ça, c'est fort important, ça. Il ne faut pas l'oublier, là. Puis on n'en parle pas quand on parle des régimes à cotisation déterminée.

Et l'autre élément: ça coûte cher, les régimes à cotisation déterminée, à administrer à la retraite. Des achats de rentes, ça coûte extrêmement cher. Puis l'argent, au lieu d'aller dans la retraite de l'individu, de l'homme ou de la femme, une bonne partie va dans l'administration. Nous, à la FTQ, on va continuer à privilégier des régimes à prestations déterminées avec les plus faibles coûts d'administration possible puis que l'argent aille dans la retraite. Et c'est vers ça qu'on glisse à l'heure actuelle. Puis on vous dit: Si on prend des mesures, à l'heure actuelle, qui nous amènent encore plus vite vers les régimes à cotisation déterminée, c'est un drame qu'il faut regarder, puis il faut en tenir compte dans les décisions qu'on est en train de prendre. Puis je pense qu'aussi, dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, on devrait continuer à privilégier les régimes à prestations déterminées. C'est le meilleur moyen, ça, de garder sa main-d'oeuvre. Puis il y a des employeurs qui s'en rendent compte puis qui voudraient continuer dans ce sens-là aussi ? peut-être pas tous, là, mais une bonne partie. Ça fait qu'on vous demande de regarder ça comme il faut. Ce qui va augmenter encore une fois de façon trop radicale les coûts des régimes. Ça va nous amener vers ça.

Et, à la FTQ, dans un premier temps, quand on commence à préparer les mémoires en équipe, on travaille là-dessus, on pensait que c'était une bonne mesure. Puis, quand on a réuni l'ensemble de nos syndicats, puis principalement les syndicats du secteur privé, on s'est fait rentrer dedans, puis d'aplomb, sur cette mesure-là, pas au nom du principe que ce ne serait pas le fun, on serait bien contents, là, mais le monde savent les conséquences que ça va avoir, chez eux, sur leurs régimes. Puis les pressions déjà des employeurs, là, qui... ? on essaie de résister le plus possible, là ? que ça va accélérer ça, cette affaire-là.

Deuxième élément qu'on trouve insupportable, c'est l'introduction d'un mode de notion d'arbitrage. Puis ça aussi, c'est généreux au départ. Puis on ne critiquera pas personne qui a demandé ça ou les motifs qui sont là, mais regardons exactement ce que ça va faire. Ça aussi, ça a des effets pervers sur nos régimes de retraite, c'est parce que ça vient chambouler l'économie des relations de travail.

Le régime de retraite, là, ce n'est pas le gouvernement qui nous a donné ça, là. On a un régime public, là, c'est juste le quart des rentes de retraite, puis le reste, là, ce n'est pas le gouvernement qui nous a donné ça, là, ça ne descend pas directement du ciel, là, ça s'est négocié aux tables de négociation. Puis, là où il n'y a pas de syndicat, habituellement, il n'y a pas de régime de retraite. Ça fait que ça prend déjà un rapport collectif puis une négociation de convention collective pour être capable d'aller négocier des régimes de retraite. Puis faites le tour, là, vous allez voir que, dans les milieux non syndiqués, il n'y a pas grands régimes de retraite. Il n'y en a pas, pratiquement pas. Quand il y en a, c'est par accident, parce qu'il y a déjà une entreprise syndiquée à côté qui l'a négocié, puis on l'a étendu. Ça fait que ça vient des rapports collectifs.

n(10 h 40)n

Et là on dit: Vous venez chambouler, avec l'arbitrage, l'économie des relations de travail. Il faut bien comprendre ça, là. Moi, je regarde, dans les 10 dernières années, là, dans nos syndicats, à la FTQ, combien de négociations ont abouti parce qu'en même temps il y avait la retraite. Tu sais, une négociation, là, il y a un bout de retraite, il y a un bout d'autres éléments de sécurité, puis il y a des salaires, puis il y a tout ça, puis finalement tu arrives à un règlement. Et là, si on a un arbitrage qui nous pend au bout du nez, puis que, la retraite, on ne pourra jamais vraiment ? dans une assemblée générale, on arrive pour faire rapport ? régler la question de la retraite parce qu'il y a un arbitrage qui nous pend au bout du nez... C'est très lourd, ce que vous êtes en train de faire dans l'économie des relations de travail, très, très lourd, pas mal plus lourd qu'on pense. On n'est pas dans le droit individuel ici, on est dans le droit collectif. Puis encore une fois je suis fier de ce qu'on a fait, à la FTQ, au niveau des régimes de retraite, on en a négocié pas mal. Ça vient déranger ça.

Puis ensuite, moi, je ne dis pas, là, je ne nie pas, là, qu'il n'y a pas eu quelques exceptions chez nous puis que ce n'est pas arrivé quelques fois que les actifs ont réglé leur affaire puis ils ont oublié les retraités. Je ne nie pas ça. Mais je vous dirais que, dans la très grande majorité des cas, quand on a une négociation puis on a un règlement, il y en a pour les actifs puis il y en a pour les retraités.

Et là je vous rappelle, là, dans le secteur public, bon, il y a des régimes, il y a des clauses d'indexation, puis tout ça, là, mais, dans le secteur privé, ce n'est pas ça qu'on a à l'heure actuelle. Dans le secteur privé, c'est des régimes non indexés. L'indexation se fait à chaque négociation. À chaque négociation, c'est des forfaitaires qu'on ajoute, là, puis habituellement il y en a pour les retraités, puis il y en a pour les actifs, puis habituellement c'est les mêmes montants. Et là, si on sépare ça, si on sépare ça...

Moi, ce qui me fait peur, chez nous, là, on commence à avoir du monde qui nous disent: Bien, on devrait avoir deux comptabilités, une pour les retraités puis une pour les actifs. Puis, la FTQ, on ne veut pas. Ce serait la pire défaite qu'on subirait, nous autres. Mais, si on commence à mettre de la chicane entre les actifs puis les retraités puis que les travailleurs puis les travailleuses qui doivent aller en grève pour changer les conventions collectives puis même améliorer le régime de retraite puis qu'ils ne sont pas capables parce qu'il y a des clauses qui vont venir nous empêcher puis de l'arbitrage possible, bien c'est là qu'on va se ramasser. Et, moi, je ne voudrais pas qu'on se ramasse là, à la FTQ.

Il y a d'autres éléments aussi. C'est arrivé des fois que les retraités ont été discriminés un peu parce qu'on a mis de l'argent dans un programme de préretraite puis de raccordement, puis tout ça. Et là j'en ai vu dans le secteur public, des retraités qui ont chialé contre ça. Bon. On a le droit de chialer. Mais en même temps je veux rappeler qu'il n'y a pas juste les retraités qui sont discriminés, à ce moment-là, aussi. Quand il y a un programme de préretraite, souvent c'est une fenêtre de... tu as cinq, six mois pour prendre la fenêtre puis prendre ta préretraite. Puis pourquoi on le fait? C'est pour éviter qu'il y ait une mise à pied, hein, que les jeunes soient mis à pied, puis on dit: Bon, on va en profiter pour... Mais la fenêtre, là, elle est pour peut-être, des actifs, 3 %, 4 % des actifs. Les autres ne bénéficieront pas de ça non plus. C'est vrai qu'il y a une certaine forme de discrimination. Mais ce n'est pas juste les retraités qui la subissent, les travailleurs actifs la subissent eux autres aussi, parce que ce n'est pas tout le monde qui a le droit à ce programme de préretraite là, ça se passe dans des espaces très serrés, puis des circonstances encore une fois très, très, très courtes, puis souvent pour une question de survie de l'entreprise.

Bien, moi, ce que je voudrais vous dire, là: Ne venez pas briser... On a besoin de la solidarité encore entre les travailleurs actifs puis les retraités. Puis on n'est pas parfaits. Puis je suis certain que vous pouvez me trouver une couple d'exemples, on peut vous en trouver, nous autres aussi, 50 exemples, là, où notre monde négocie puis activement pour ceux qui s'en vont à la retraite. Mais faisons attention de ne pas briser ça. Parce que, là, on parle de surplus, là, c'est juste dans le cas de surplus, là, votre disposition. Mais, nous, on ne négocie pas des rentes de retraite puis des indexations de la rente de retraite uniquement dans le cadre de surplus, là. Il n'y en a pas, de surplus, par les temps qui courent. Puis, quand on regarde ce qui se passe dans la réalité économique, là, on va peut-être être un bon bout encore sans avoir de surplus, non plus. Ça fait que, si on vient briser cette espèce de solidarité là parce qu'une fois il y a eu un surplus sur une période donnée puis après ça il n'y en a plus, là, on va faire quoi, là? Il faut continuer à s'en occuper, des retraités, même s'il n'y a pas de surplus.

Quand il y a des déficits aussi dans une caisse de retraite, les retraités ne sont pas directement touchés, les travailleurs actifs ne sont pas nécessairement directement touchés officiellement, parce qu'on dit: C'est l'employeur qui est responsable du déficit. Mais, quand vous arrivez dans votre négociation, s'il y a un 4 %, 5 % qui va au déficit du régime de retraite, ça ne va pas ailleurs, hein? Nous autres, quand on a négocié avec des salariés de la FTQ dernièrement puis qu'il y avait une augmentation de 8 % au niveau du régime de retraite, je peux vous dire que ça a été plus serré sur le reste. Bon. Ça fait que c'est la même chose dans l'économie en général. Ça fait qu'il ne faut pas regarder ça juste à partir du surplus. À un moment donné, il faut regarder ça dans un ensemble de relations de travail.

Puis je finirais là-dessus avant de passer la parole à Pierre pour le reste des détails. Un des problèmes qu'on a dans nos entreprises, à l'heure actuelle, c'est les régimes d'assurance. Puis les assurances principalement où les coûts augmentent le plus, c'est les assurances pour les retraités. Puis il y a des nouvelles normes comptables, là. On est obligés de mettre... les entreprises sont obligées de mettre au bilan les engagements pour les assurances futures de leurs employés. C'est des fortunes. Puis, à la FTQ, nous autres, on se bat puis on dit au monde, là: Ne commencez pas à couper dans les régimes d'assurance des retraités. Puis on va se battre pour être capables d'améliorer le sort de tout le monde. Il n'y en n'a pas, de projet de loi qui protège les retraités au niveau des assurances, là, tu sais? Du jour au lendemain, là, si les actifs décident qu'ils lâchent les retraités, vous allez voir ce que ça va faire. Ça fait que, nous, on vous dit: Bien, à la FTQ, on pense qu'il faut encore continuer à se préoccuper des retraités, mais faisons en sorte de ne pas briser la solidarité qui est nécessaire pour régler ces questions-là.

Ce qu'on verrait, nous autres, on est dans un projet de loi cadre, là, au lieu d'embarquer dans un arbitrage puis qui va venir compliquer les relations de travail, c'est de dire le principe que, quand il y a un surplus puis qu'on améliore le sort des actifs, on doit en même temps améliorer le sort des retraités. Bon. Ça ne mettra pas à l'abri de retourner en cour une autre fois, mais on a une coche de plus pour démontrer que les surplus, ils appartiennent aussi aux retraités. Puis on va être capables de continuer à négocier nos affaires. Mais, je vous le dis, si vous allez avec un arbitrage, ça paraît beau...

Ce n'est pas facile, comme syndicalistes, de venir dire ça parce que souvent on se fait rabrouer par certains retraités qui disent: Bon, vous ne voulez pas nous défendre. Ce n'est pas ça, ce n'est pas ça. On veut être capables de continuer puis on veut être capables de garder la solidarité pour le faire. Et ça, là, une demande d'arbitrage seulement qui empêcherait la conclusion d'une convention collective, vous verrez les conséquences que ça va avoir pour le futur des relations dans une entreprise. Puis après ça, bien, le monde se parle puis, d'une entreprise à l'autre, puis... Ça fait que, moi, je ne voudrais pas revenir en commission parlementaire pour demander des comptes séparés, ce serait une défaite totale pour la FTQ. Ça fait que pensons à ce qu'on est en train de faire.

Le Président (M. Copeman): Avant de céder la parole à M. Laliberté, je veux vous signaler qu'il reste sept minutes pour ce que M. Massé appelle le reste des détails.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laliberté (Pierre): Écoutez, je n'essaierai pas de couvrir tout le reste des détails parce que ça va être impossible, mais je vais quand même souligner quelques éléments. C'est qu'il y a des choses très positives dans le projet de loi. Puis déjà de resserrer la gestion des caisses de retraite puis des régimes de retraite, déjà en soi c'est énorme, ça. Et donc, par exemple, là, d'obliger des évaluations plus régulières, déjà ça, ça va faire en sorte que les congés de cotisation qui ont été pris à tort et à travers pendant plusieurs années, ce ne sera plus possible, ça. O.K.? Je pense qu'il faut que vous gardiez ça en tête.

Les nouvelles règles par rapport à la gouvernance, comme M. Massé disait, nous, en fait, on ne trouve pas grand-chose à redire là-dessus parce que ça fait des années, là, qu'on voit qu'il fallait donner un coup de barre là-dedans. Je pense que les leçons qui ont été apprises de la débâcle, à la fin du... en fait, au début de 2000, là, des années 2000, nous ont montré bien des choses: qu'il faut arrimer le passif avec l'actif, que les politiques de placement, on ne pouvait pas faire ça, tu sais, à gogo, là, mettre tout dans les revenus variables, qu'il fallait vraiment avoir une préoccupation pour justement le passif de ces régimes-là, qu'il fallait aussi responsabiliser les fournisseurs de services, dont les actuaires, qui souvent, en tout cas, à notre avis, ont fait des hypothèses de complaisance avec leurs... enfin, avec les employeurs.

Mais de resserrer, juste de resserrer les mécanismes de gestion, comme vous le faites dans le cadre de ce projet-là, c'est très positif. Donc, nous, en soi, on trouve que juste là, là, on a déjà les outils pour faire le plus gros du chemin. Parce qu'il faut se le dire aussi, le contexte dans lequel on a eu des problèmes, c'est-à-dire l'éclatement de la bulle puis les bas taux d'intérêt, c'est un contexte très particulier, puis rien ne laisse à penser que ça va perdurer indéfiniment, ça. Donc, on va retourner à brève échéance à des situations qui sont plus normales. Et ça, évidemment, avec des outils de gestion qui sont plus serrés, ça va nous permettre, je pense, d'atteindre les objectifs du projet de loi plus généralement. C'est pour ça qu'on trouve qu'au niveau du financement les mesures qui sont suggérées ne sont pas nécessaires. Du moment où on a déjà une loi qui existe, on va avoir des meilleurs outils pour la mettre en application, pour nous, c'est déjà beaucoup.

n(10 h 50)n

Je voudrais peut-être attirer votre attention sur un point en particulier, parce que ça nous a été soulevé beaucoup par justement, là, nos affiliés qui sont dans le secteur privé et qui sont interpellés par ça. C'est-à-dire que, quand on a des prestations uniformes, c'est-à-dire tant de dollars par année de service, par mois, à la retraite, bien, comme M. Massé le disait, on renégocie ça à toutes les conventions collectives. Donc, dans le fond, la seule façon de maintenir la valeur réelle de ces rentes-là, c'est de le refaire, refaire l'exercice à tout bout de champ.

Et, moi, en tout cas, pour avoir négocié des régimes comme ça vers la fin des années quatre-vingt-dix, je peux vous dire que je n'ai pas vu beaucoup, même à l'époque... il y avait souvent beaucoup de régimes qui n'étaient pas solvables, là, en termes de solvabilité, là. Et, en mettant cette règle du 90 %, là, 90 % de solvabilité qu'il faut payer sur-le-champ, en tout cas l'opinion générale est qu'on est en train de mettre une règle un peu arbitraire puis une barrière aussi qui va empêcher la négociation normale, l'amélioration ou même le maintien, le simple maintien de la valeur réelle d'une rente. Et ça, vous conviendrez, là, le passif, quand on a des changements de taux d'intérêt, ne serait-ce que de 1 %, le passif change énormément. Et donc il y a comme une... En tout cas, pour nous, on trouve que c'est franchement astreignant.

Et, moi, je constate que, dans les chiffres qui nous ont été fournis par la Régie des rentes, on parle d'améliorations qui ont été faites dans des contextes où les régimes étaient déficitaires, mais somme toute, là, on parle de très, très peu de cas, hein? Je vous ramène à un tableau, là, qui est dans le document Vers un meilleur financement, page 28, on parle de quelques cas finalement, dans l'ensemble. Les régimes où il y a eu vraiment des améliorations, là, sur 532, on parle de 500 où les régimes étaient au-dessus du 90 %. Donc, on parle d'une minorité de cas.

Et ce que je pense qui était aussi probablement dans le contexte, là, c'est: étant donné que souvent ces décisions-là sont faites avec des évaluations actuarielles qui sont périmées, qu'on voit là, qu'on utilise deux ans après le fait, des fois on ne prend pas les décisions en connaissance de cause. Et c'est pour ça que, comme je le disais plus tôt, d'avoir plus d'information, dans le cas des régimes qui sont en déficit, d'une façon plus régulière, ça va déjà permettre une amélioration très grande de toute cette gestion-là, évidemment. Puis en principe des congés de cotisation ne se prennent pas quand il y a des déficits. Alors ça, on l'a déjà, là.

Le Président (M. Copeman): Alors, merci beaucoup, messieurs. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: M. Massé, M. Laliberté, M. Bellemare, j'apprécie encore ce matin vos commentaires. On a eu l'occasion, au cours de la dernière année, d'échanger à plusieurs reprises sur ce projet de loi. Évidemment, on approche du moment ultime qui est l'adoption du projet de loi, que je souhaite de tout coeur. On a eu l'occasion de débattre sur plusieurs des questions. Je comprends bien vos messages.

Je voudrais qu'on aborde, ce matin, la question de l'arbitrage. Parce que j'entends bien ce que vous me dites, M. Massé, et j'ai une sensibilité à l'égard de ça. Depuis le début que nous travaillons à ce projet de loi, je n'ai jamais voulu d'aucune façon que nous nous immiscions dans le processus de négociation entre l'employeur et le syndicat. Pour moi, c'est quelque chose qui est réglé dans notre société, c'est-à-dire que ça fait partie en fait d'un acquis qui est important au sein de notre société. Et ça, pour moi, je ne veux pas l'entraver inutilement ou de façon démesurée ou qui pourrait effectivement nuire à ce que vous appelez cette solidarité.

Par contre, M. Massé, vous nous dites ? et tous les syndicats nous disent ça, vous n'êtes pas le seul ? que vous êtes les représentants des travailleurs mais que vous êtes aussi les représentants des retraités. Et c'est ça que vous nous répétez, ce matin. Puis je suis convaincue de votre bonne foi puis je suis convaincue qu'aux tables de négociation il y a effectivement des considérations qui sont prises à cet égard-là. Puis vous nous dites: Il ne faudrait pas que le projet de loi rajoute à la chicane ou soit une source de chicane.

Mais, moi, M. Massé, honnêtement, là, ça fait juste trois ans que je suis au coeur de ces problématiques-là, je n'ai pas votre nombre d'années d'expérience dans ce domaine-là, mais, depuis trois ans, moi, j'ai tout lu de ce qui se passe depuis la fin des années quatre-vingt-dix, 2000, moi, je pense que la chicane, elle est là, là. Puis, quand je regarde, ce matin, ce que je reçois, là, sur ma table, bien, tu sais, ça vient du Regroupement des syndicalistes à la retraite, Conseil régional FTQ-Montréal métropolitain, moi, là, je ne dirai pas qu'il y a de la chicane, mais il y a un malaise certain. Puis, si on est réunis, en quelque sorte c'est parce qu'on ne peut pas ni vous, comme représentant syndical, ni moi, comme membre du gouvernement, qui devons représenter cette partie de la population, on ne peut pas non plus se mettre la tête dans le sable puis dire: Il n'y a pas de problème.

Puis, moi, je pense que ce vous voulez nous dire, c'est: Écoutez, il y a eu... Puis vous êtes honnête, vous êtes franc, vous dites: Oui, il y a eu des choses qui auraient pu être mieux faites. Puis là vous dites: Bien, au fond, est-ce qu'on peut travailler sur notre bonne foi?, puis, oui, on a appris du passé, ça fait que là on ne le refera plus ou... Je ne veux pas être simpliste et réductrice, là, c'est parce que je n'ai pas beaucoup de temps, mais vous comprenez aussi qu'on juge, après vraiment un travail en profondeur, avec beaucoup de discussions avec tout le monde, tous les représentants, on juge que le passé doit être garant de l'avenir puis que notre responsabilité, c'est de prévenir. Puis je comprends que des surplus, il n'y en aura peut-être pas demain matin, mais on ne légifère pas pour du court terme, on légifère pour du long terme.

Donc, si je suis sensible à votre argument d'arbitrage, comment... Ce que je crois comprendre, c'est que vous me dites: À ce moment-là, on est prêts à faire un pas de plus pour le partage du surplus, puis, s'il y a vraiment... Parce que toute loi doit prévoir un recours. Ce que vous nous dites, ce matin, c'est que le recours, bien ce sera un recours devant les tribunaux. C'est-u ça que je comprends? Autrement dit, on progresse ensemble, on fait tous un bout de chemin, là. Moi, je dis: Je suis sensible à ça. Puis votre réponse dit: O.K., si on l'enlève, il faut quand même... Moi, le Comité de législation va me dire: Bien, il faut, Mme la ministre, que vous prévoyiez un recours. Quel est ce recours? Puis, vous, la FTQ, vous me dites, M. Massé: Ce sera un recours devant les tribunaux?

M. Massé (Henri): Ça peut être un recours devant le tribunal ou ça peut être plus simple. On a déjà discuté avec votre ministère de mettre... À ce moment-là, la façon la plus simple: formule d'indexation minimale dans les régimes de retraite en cas de surplus. Ah non, non! Bien, c'est ça, c'est ça. Ça, le législateur ne voudra pas toucher à ça parce que d'un coup que la situation... Bon. Ça fait que...

Mais ce qu'on veut vous indiquer: Ne prenons pas des mesures qui vont venir paralyser. Parce que j'ai encore bien plus confiance aux travailleurs syndiqués pour régler les problèmes de retraite puis d'indexation des retraités, même s'il peut y avoir eu quelques accidents de parcours, là, de façon générale, j'ai bien plus confiance aux travailleurs que je représente pour s'occuper du sort des retraités que de bien d'autres dans la société, là. Ça fait que c'est pour ça que je vous dis: N'allez pas démolir ça.

On a des syndicats, par exemple, qui ont déjà négocié. L'Alcan, c'est assez gros, l'Alcan, c'est déjà... les surplus, comment ils sont répartis, puis tout ça. Bon. Mais ce n'est pas tout le monde qui est dans des régimes aussi... Je vous dis, dans le secteur privé, là, l'indexation se fait négociation après négociation.

Puis, bon, on a eu beaucoup de critiques qui venaient, là, puis c'est vrai qu'il y en a, de la critique, mais on a eu beaucoup de critiques qui venaient du... Moi, je dirais, la critique, au niveau des associations de retraités, vient principalement des services publics, principalement des services publics, parce qu'il n'y a pas la même dynamique. Il y a déjà des régimes qui sont indexés, puis la critique vient principalement du fait qu'à un moment donné, bon, il y a eu une partie du surplus qui est allée pour un programme de préretraite. Bon. On peut bien dire que ça n'a peut-être pas été une bonne décision, mais, à ce moment-là, il y a eu autant d'actifs de discrédités que de retraités.

Ça fait que, nous, on dit: Mettons un principe dans la loi que ça va rendre la chose encore plus claire, ou trouvez une mesure simple autour d'une espèce d'indexation minimale mais qui va faire en sorte qu'on va améliorer le sort des retraités. Et le genre de proposition que vous mettez là, là, je vous le dis, là, je vous le dis, là, on connaît le monde chez nous puis on sait comment ça marche aussi, là, c'est l'effet inverse qu'on va avoir, puis c'est ça qu'on ne veut pas, c'est ça qu'on ne veut pas. Autant au niveau des assurances puis des régimes de retraite, on veut continuer à protéger les retraités.

n(11 heures)n

Mme Courchesne: M. le Président, M. Massé, je vous dis que j'ai une sensibilité à l'égard de vos arguments. Maintenant, vous dites: Mettez dans la loi un principe d'indexation minimale. Vous reconnaissez que le projet de loi n° 30 veut par ailleurs ? puis vous êtes d'accord avec ça ? sur la gouvernance, veut responsabiliser le mode de gestion des régimes de retraite. Vous ne pensez pas qu'au lieu de mettre une indexation minimale on est plus avisés d'inscrire dans le projet de loi la capacité pour un régime de déterminer à l'avance, et non pas cas par cas mais sur une longue période, parce que le projet de loi permet ça, l'utilisation des surplus? À ce moment-là, ce sont ceux qui sont directement impliqués par le régime de retraite en fonction de son histoire, de sa situation, de son vécu, de sa réalité plutôt que de, nous, comme législateurs, imposer une indexation minimale qui ne convient pas dans tous les cas. Même, dans certaines situations, vous pourriez trouver une autre voie de solution que celle-là, même pour l'utilisation des surplus. Vous ne pensez pas que c'est plus responsable de simplement dire, bien, que le régime de retraite soit en mesure d'établir à l'avance quelle serait l'utilisation de ses surplus en fonction de sa propre réalité?

M. Bellemare (Réjean): Si vous permettez. Je crois qu'on peut déjà établir à l'avance comment les surplus peuvent être utilisés.

Mme Courchesne: Oui.

M. Bellemare (Réjean): Si on ne le fait pas, c'est qu'une situation établie à l'avance, autre qu'une indexation minimale, lorsqu'on voudra utiliser des surplus pour améliorer des bénéfices pour les participants actifs, peut amener des situations où le meilleur choix pour les retraités serait la survie de l'entreprise dans certains cas et l'utilisation des surplus pour des réductions de personnels actifs, par exemple. Donc, d'avoir une formule établie à l'avance nous amènerait à modifier cette formule-là juste avant une réduction d'actifs, et vous savez que ça causerait problème.

Et ce que M. Massé mentionnait au début, dans sa présentation, c'est la situation vers laquelle on se dirige tranquillement qui nous fait peur, ce n'est pas l'arbitrage en tant que tel. C'est que l'arbitrage nous amène à avoir de la difficulté à négocier, nous dirige tranquillement vers une comptabilité séparée. Et je veux parler du côté retraités, pas du côté actifs, parce que ça, ça règle le problème pour les actifs. Mais, pour les retraités, on se ramasse avec une caisse de retraite gérée avec des hypothèses beaucoup plus conservatrices, qui ne dégagera plus de surplus et qui va amener une perte d'indexation parce que les actifs disant: Ils ont leur caisse, on ne s'en mêle plus. C'est la solidarité qu'on parlait tantôt. C'est vers où on s'en va avec ce processus d'arbitrage là qui nous dérange, ce n'est pas l'arbitrage en tant que tel.

Mme Courchesne: J'ai compris ça. Je répète: J'ai une sensibilité à vos arguments. Sauf que je reviens...

M. Massé (Henri): On veut que vous en ayez plus.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Courchesne: Mais je ne vous le dirai pas ce matin. Ce n'est pas ce matin... Ce n'est pas à moi à dévoiler ça, ce matin, je suis ici pour vous écouter. Cela dit, quand vous... D'ailleurs, si on apporte les corrections, M. Massé, le projet de loi, y va-tu être plus que potable?

M. Massé (Henri): Oui, oui, oui. Bon.

Mme Courchesne: Bon! Bon! Ah, on a déjà fait un gain. On a déjà fait un gain.

M. Massé (Henri): On est des vieux loups des commissions parlementaires, hein? Quand on en met trop, on sait ce que ça fait.

Mme Courchesne: Cela dit, je reviens sur le fait que vous dites... Parce que je reprends votre argument, M. Bellemare. Puis c'est pour ça que, dans le projet de loi, les deux sont permis. On peut décider de l'utilisation des surplus au cas-par-cas ou à l'avance. Mais, de la même façon, à mon humble avis, si on inscrivait l'indexation minimale, ça pourrait avoir le même effet que vous décrivez sur ce qu'on vient... On s'entend là-dessus, là, hein? Bon. Donc, je pense qu'on peut s'entendre, là, sur cet aspect-là. Oui, M. Laliberté?

M. Laliberté (Pierre): N'empêche qu'il y a toujours le recours à l'arbitrage qui est possible, et c'est là où le bât blesse. Puis aussi il y a un effet pervers, dans toute cette dynamique-là, qui n'a pas été mentionné, et c'est celui... Il est fort possible pour un employeur, puis avec... ça ne se passe pas de même d'habitude, là, mais, avec le syndicat, de décider: Bon, bien, il n'y en aura pas, de surplus, dans la caisse, hein? Ça va passer dans les augmentations de salaire, hein? Ça va passer de toutes sortes de façons, mais on ne créera pas une situation où on va avoir un surplus où on va avoir des paquets de contraintes pour le dépenser d'une façon ou d'une autre. Alors, ça aussi, c'est...

Puis ça va dans le sens de ce que Réjean disait. Du moment, là, que vous mettez des choses dans un mode téléguidé qui va créer des problèmes de processus puis probablement des chicanes, c'est sûr qu'à un moment donné... en tout cas, vous créez une situation où on va peut-être se dire: Bien, tu sais, dans le fond on coupe les vivres, là, puis on les réaffecte ailleurs.

Le Président (M. Copeman): Si vous me permettez, collègues, M. Massé, en ce qui concerne l'arbitrage, on sait, dans le projet de loi, que ça peut être enclenché par une seule personne. Est-ce que vous en avez contre l'arbitrage complètement, ou par le mécanisme qui est présentement dans le projet de loi, ou est-ce qu'on peut s'entendre que sur un seuil minimal nécessaire pour enclencher l'arbitrage...

M. Massé (Henri): Il n'y a pas de seuil pour nous autres.

Le Président (M. Copeman): Pardon?

M. Massé (Henri): Il n'y a pas de seuil, pas de seuil. Que ce soit 2 %, que ce soit 10 %, que ce soit 50 %, on va arriver exactement au même effet. Vous allez arriver à une crise dans les milieux de travail puis... Ce n'est pas de même qu'il faut que ça se règle, ces affaires-là, ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai que c'est de même que ça se règle.

Encore une fois, là, les caisses de retraite, ce n'est pas une loi universelle qui a amené ça, tu sais, là. Ça s'est fait par de l'huile de bras puis aux tables de négo. Puis, vous le savez, tout ce qui tourne autour de la retraite, souvent ça veut dire grève en même temps, souvent, souvent, très souvent. Ça fait que ce n'est pas des petits enjeux, c'est des gros enjeux de relations de travail.

Le Président (M. Copeman): M. le député d'Orford.

M. Reid: Merci, M. le Président. Il y a un élément que je pense comprendre, je voudrais juste que vous me disiez si je comprends bien, puis il y a un autre élément où j'aimerais avoir des explications peut-être plus concrètes. Ce que je comprends, c'est que finalement l'approvisionnement obligatoire, ça veut dire que, lorsque vient le temps de négocier, il y a une marge de manoeuvre ou toute marge de manoeuvre risque d'aller là et, à ce moment-là, elle ne se négocie plus. Est-ce que c'est un peu ça que je comprends, dans le sens que c'est plus difficile de négocier parce que l'employeur pourrait dire: Regarde, la seule marge de manoeuvre que j'ai, il faut que je la mette parce que je n'ai pas assez de... mon régime n'est pas assez fort, là, et la loi m'oblige à faire ça? Est-ce que c'est un petit peu ça quand vous disiez tantôt que la négociation devient plus difficile?

M. Laliberté (Pierre): Bien, en partie, oui, en partie. Bien là, je ne savais pas si vous faisiez référence à la provision pour écarts défavorables, là, ou de façon plus générale.

M. Reid: ...il a une obligation de combler, là, autrement dit, O.K.?

M. Laliberté (Pierre): Oui, voilà.

M. Reid: C'est un petit peu le sens de ce que j'ai compris. Et ce qui suit dans votre texte, c'est, lorsqu'il y a une obligation de financer immédiatement les améliorations lorsqu'il y a moins de 90 %, vous dites: Ça ne nous permet pas, à nous, de nous assurer qu'il y a la valeur réelle dans la rente. Est-ce que ça ? et ce que je crois comprendre, là ? c'est le fait que vous dites qu'au cours des années il y a eu, par négociation, une assurance qu'au moins la valeur de la rente restait, autrement dit, l'indexation, ou des choses comme ça...

M. Laliberté (Pierre): Mais écoutez...

M. Reid: ...et dans le fond vous dites qu'avec ce nouveau système-là ça ne permettrait pas de faire ces négociations-là, et à la limite vous n'auriez pas à la fin une rente qui aurait été ajustée au cours des années, etc.? Est-ce que c'est le sens de votre intervention?

M. Laliberté (Pierre): Écoutez, ce qui arrive dans un régime privé, là, puis c'est la grande majorité, là, c'est: vous renégociez des dollars par année de service, là, c'est aussi simple que ça, puis vous essayez d'au moins couvrir l'IPC, là, pour la période qui s'est... Puis, écoutez, si vous négociez au moment où vous venez de recevoir un rapport actuariel qui vous dit que vous êtes rendu à 87 %, puis ça, c'est parce qu'il se trouve que les taux à long terme ont baissé il y a six mois à cause de la conjoncture économique, bien là, tout d'un coup, vous êtes dans un contexte où, tout d'un coup, là, vous allez être obligés de demander à l'employeur de payer d'une «shot» l'ensemble des améliorations, qui pourraient être juste le maintien de la valeur réelle de la rente, là, hein, donc pas vraiment une amélioration, là, dans le sens, là, tu sais, frivole du terme, si on peut même utiliser ce terme-là. Alors, c'est pour ça que ce seuil-là devient un peu artificiel.

Puis les décisions en fait, là, c'est ça que j'essayais de dire tout à l'heure, c'est que ces décisions-là ne sont pas faites dans un cadre abstrait, là. Les gens regardent les chiffres, regardent les rapports actuariels puis ils se disent: Est-ce qu'on peut vraiment se le permettre? Et, dans la mesure où l'information va être plus à jour, je peux vous garantir que ça va être fait de façon plus responsable aussi.

M. Massé (Henri): M. Bellemare voudrait ajouter...

M. Bellemare (Réjean): Juste 30 secondes. Je regardais le mémoire, parce que ? une des rares fois ? ce n'est pas moi qui l'ai écrit, mais ce qu'on indique là-dedans, c'est qu'on demande un assouplissement à la règle de 90 %.

Prenons un régime public, du secteur public. Normalement, il y a l'indexation incluse dans le régime, donc les bénéfices sont indexés, et de là se dégage ensuite possiblement un surplus ou un déficit, puis, au-delà de 90 %, on peut continuer les améliorations. Dans des régimes du secteur privé, beaucoup de ces régimes-là n'ont pas d'indexation incluse. Et donc ce qu'on dit, c'est que la règle de 90 %, elle nous paraît trop sévère à ce moment-là, permettons minimalement l'indexation des prestations ? si c'est négocié à la table, là, ce n'est pas automatique qu'on négocie à tous les coups une pleine indexation ? permettons cette indexation-là, même en bas de 90 %, mais pas d'amélioration au-dessus de cette indexation-là.

M. Massé (Henri): C'est le maintien de la valeur réelle.

M. Bellemare (Réjean): Ce que d'autres régimes ont d'écrit dedans, certains n'ont pas eu les capacités de le mettre. C'est tout ce qu'on dit. Ce n'est pas la règle de 90 % qu'on remet en question, c'est son application pour ces groupes-là.

n(11 h 10)n

Le Président (M. Copeman): Il y a M. le député de Saint-Jean qui désire intervenir. Il reste trois minutes en échange.

M. Paquin: Oui, merci, M. le Président. Je vais être rapide. Messieurs, bienvenue, merci de votre présence. Une question très, très courte. On entend souvent, nous, comme députés, de la part des retraités, qu'ils ne sont pas tout à fait heureux avec le rôle qu'ils ont à jouer quand on a à négocier, puis tout ça, au niveau de leur régime de retraite. Comment voyez-vous le rôle des retraités dans tout ça?

M. Massé (Henri): Je vous dirais, chez nous, là, il y a beaucoup, beaucoup de syndicats où les retraités sont encore membres de leur syndicat, peuvent aller à l'assemblée générale; ce n'est pas tous, là, mais bien des places. Et les retraités, il y a beaucoup de retraités, il y beaucoup d'associations aussi de syndicats qui ont des associations de retraités où le monde continue à être actif au niveau de leur syndicat, et, je pense, leurs demandes passent par les assemblées générales, puis tout ça. Mais en même temps la négociation, là, je le disais tantôt, dans le cadre de négociation autour des régimes de retraite, tu sais, souvent il y a grève ou il y a menace de grève. C'est les employés qui sont actifs, c'est les employés qui sont au travail, là, qui sont en train de bûcher pour être capables d'améliorer les régimes de retraite. Autrement, ça ne s'améliore pas, ça, là, là. Et ça, c'est la dynamique des négociations. Ça fait qu'encore une fois je l'admets bien candidement, je ne dis pas que, dans l'ensemble de nos 2 000 syndicats au Québec, ils ont tous fait une job parfaite là-dedans, mais je suis très fier du travail de très grand nombre d'entre eux autres. Il ne faut pas partir d'un accident de parcours. Puis je dirais, là...

Je vais juste donner un exemple. Moi, il y a une affaire qui m'a toujours chicoté puis qui m'a toujours enragé un peu. Les retraités d'Hydro-Québec, par exemple, on fait tout un chiard, il y a une couple d'années, en disant: Nous autres, il y a eu des congés de contribution accordés à l'Hydro, il y a eu des améliorations au régime de retraite, puis les retraités n'ont rien eu. Puis c'est vrai. Mais j'ai été témoin, là, durant cette négociation-là, à deux reprises, le syndicat a offert aux retraités d'Hydro de dire: Nous autres, là... Je pense, les retraités, à ce moment-là, évaluaient le surplus à 57 millions, qui devait revenir aux retraités. Le syndicat, je pense qu'ils disaient, eux autres: C'est 54. Quoi, un écart de 3 millions, ce n'était pas ça qui faisait problème, là. Mais les retraités d'Hydro-Québec, ce qu'ils voulaient, c'est de dire: Donnez-nous le 57 millions ? c'est ça qu'ils disaient à Hydro ? donnez-nous le 57 millions, puis, nous autres, on va gérer le... C'est là que la chicane a poigné.

Le syndicat a dit: Non, nous autres, on va négocier des bénéfices. Puis finalement ça s'est ramassé en cour. Puis ça, ça a fait tout un plat. Puis c'en est un des dossiers, ça, qui a été charrié au bout pour dire: Les syndicats ne s'occupent pas des retraités. Puis, n'importe quel temps, allez voir les syndicats qui sont en place, puis ils étaient prêts à négocier. Ça fait que, tu sais, c'est là, moi, je pense, qu'il ne faut pas se tromper dans nos démarches. Puis effectivement les retraités d'Hydro-Québec, à ce moment-là, auraient dû recevoir plus, mais je pense que, si on avait pris une autre démarche que la démarche juridique puis de se ramasser aux tables de négociation, on ne se serait pas ramassés dans cette situation-là. Le syndicat se fait beurrer, par exemple. Mais il y en a, des affaires comme ça, là. Ça fait que je ne dis pas qu'on est parfaits, mais il y a un peu de démagogie autour de ces questions-là aussi.

Même chose, dans le secteur public, quand on a fait de la préretraite. Peut-être que la décision n'était pas bonne; politiquement, là, je veux dire. Bon. On aurait-u dû retraiter du monde? Mais, moi, quand je regarde, là, est-ce qu'on va se couper de la possibilité, à un moment donné, de prendre le surplus au complet, puis d'essayer d'éviter des mises à pied, puis de retourner des jeunes? Historiquement, les syndicats, on l'a fait, puis il y a de la discrimination là-dedans, autant pour les actifs que les retraités. Mais je pense qu'il faut se garder ça comme moyen collectif. Quand on est dans une entreprise, puis on joue avec la survie de l'entreprise, puis on joue avec la survie des plus jeunes, je pense qu'il faut encore avoir des outils comme ça. Mais, si chacun est sur son bord parce qu'il a été lésé un peu, bien c'est des chicanes à ne plus finir. Je ne sais pas.

Le Président (M. Copeman): Collègues, nous avons terminé à droite. Il y a M. le député de Vimont qui brûle de poser une petite question. Est-ce qu'il y a consentement peut-être pour... Allez-y, M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci. Merci beaucoup. Merci, chers collègues. Très rapidement, juste au niveau de la proposition de permettre aux participants de se prévaloir d'une rente garantie aux frais du régime, est-ce que vous en avez contre le fait que c'est le régime qui paierait ces frais-là ou le fait justement qu'il y ait là une ouverture à ce que les participants puissent prendre...

M. Massé (Henri): Ah non! L'ouverture, on n'a pas de problème. Il y a des régimes, c'est déjà optionnel, ça.

M. Auclair: C'est ça. O.K.

M. Massé (Henri): Puis ce n'est pas contre le principe, encore une fois, là. Je vous le dis, là, si on nous avait offert ça il y a 25 ans, on aurait sauté dessus. Mais, aujourd'hui, on sait les conséquences que ça va entraîner. Puis les régimes à cotisation déterminée, là, personne n'en parle, de ça. Le plus grand dommage qu'on est en train de subir, c'est les régimes à cotisation déterminée, puis personne n'en parle.

Le Président (M. Copeman): Merci. Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière des régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Alors, M. Massé, M. Bellemare, M. Laliberté, merci pour la présentation de votre mémoire. Vous savez, en tant que porte-parole pour l'opposition officielle en matière de régimes de rentes et de retraite, je reçois de nombreux courriels, de nombreuses lettres de la part de retraités, d'associations de retraités qui me disent tout simplement que les surplus leur appartiennent, qu'ils ne veulent pas avoir recours aux tribunaux civils, qu'ils sont d'accord pour l'arbitrage. Alors, qu'est-ce que vous répondez à ces retraités?

M. Laliberté (Pierre): Écoutez, quand il y a un déficit dans la caisse, est-ce qu'on leur envoie une lettre pour les solliciter pour faire des contributions spéciales pour combler le déficit? Ça, je vous conjurerais de leur poser la question à eux aussi quand ils vous contactent là-dessus.

Strictement parlant, la promesse qui est faite, là, dans le cadre d'un régime de retraite, c'est de payer une rente à un moment donné, puis une rente qui est telle qu'elle est spécifiée. S'il y a effectivement des situations qui permettent d'en distribuer puis d'en répartir, ailleurs, bien c'est tant mieux pour tout le monde. Mais ce genre de droit, là, qui...

Puis vous parlez d'équité. Comme on l'a dit, là, de nombreuses fois aujourd'hui, quand il y a des améliorations, là, c'est souvent parce que ça brasse dans les négociations. Il y a des coûts qui sont assumés par les travailleurs actifs. Et, une fois que quelqu'un quitte le milieu de travail, les risques, à part le risque de terminaison en situation de déficit, là, qui est un risque grave, je veux dire, il y a juste... on crée... les risques ne sont plus là, ces gens-là ne seront pas sollicités.

Donc, je pense qu'ici, là, c'est sûr que les régimes de retraite, particulièrement dans le privé, ne sont pas parfaits, loin de là, on travaille à les améliorer à chaque négociation puis on le fait dans la mesure où le contexte économique des entreprises nous le permet, nous permet de pousser puis permet aux entreprises de les améliorer, mais, moi, je pense qu'il faut contextualiser tout ça. Et ça ne veut pas dire que ces gens-là n'auraient pas droit, n'auraient pas... ? comment je pourrais dire? ? ce ne serait pas mieux s'ils avaient droit à plus de... une rente plus élevée, ou tout ça, là. Ce n'est pas ça, la question. La question, c'est le contexte dans lequel tout ça se produit. Et donc, enfin... Voilà ma réponse à la question que je vous donne.

Le Président (M. Copeman): M. Bellemare.

M. Bellemare (Réjean): Je vais profiter de l'occasion pour retaper un petit peu sur le même clou que tantôt. Il faut savoir quelle est l'origine des surplus ? on va parler finances ? sur l'actif des retraités, sur l'actif qui sert à garantir la rente des retraités. L'origine principale de ce surplus-là, c'est la solidarité entre la partie de l'actif des retraités et la partie de l'actif des participants toujours au travail. Je le répète, si on aurait deux caisses séparées, la gestion ne serait pas la même parce qu'on refuserait de mettre à risque les biens des retraités, les garanties qu'on a mises derrière les rentes des retraités, on refuserait de les mettre à risque pour aller chercher un rendement supplémentaire. Si on le fait, c'est parce qu'il y a solidarité avec les travailleurs actifs. Donc, l'origine des surplus vient de la solidarité, et c'est seulement qu'en maintenant cette solidarité-là qu'on va pouvoir continuer à améliorer les bénéfices des participants actifs, des retraités.

Et on a parlé tantôt, là, d'en cas de terminaison. En cas de terminaison, il y a une clause, puis il y a un arbitrage prévu qui permet aux retraités d'avoir leur part des... On ne questionne pas ça, on est dans un autre monde. Le régime se termine, on fait les résultats; il y a assez d'argent pour payer tout le monde; il y en a plus, ça appartient autant à une partie qu'à l'autre. En continuité, c'est une autre chose, on négocie à la table. C'est autre chose.

Mme Beaudoin: M. le Président, écoutez, en tant que juriste, là, je dois vous dire que le recours aux tribunaux n'est pas toujours la solution. Ces gens-là, ces retraités-là me disent: On n'a pas le temps, on n'a pas le goût et on n'a pas l'argent pour avoir recours aux tribunaux. Qu'est-ce que vous leur répondez?

M. Massé (Henri): Réponds. Moi, je suis tanné, là.

M. Laliberté (Pierre): Bien oui. Je sympathise avec toi.

M. Massé (Henri): Moi, je ne le répéterai pas 20 fois.

M. Laliberté (Pierre): Bien, écoutez, je pense que d'une part les retraités ont des recours, dans le sens qu'ils peuvent toujours garder une affiliation puis une participation. Dans le cadre des comités de retraite, il y a des représentants, hein, il y a des façons de faire valoir son point de vue. Et effectivement ce n'est peut-être pas des situations qui sont idéales d'un point de vue individuel. Mais de dire qu'il y a absence de recours, c'est un petit peu exagéré.

n(11 h 20)n

M. Massé (Henri): Je reviens encore, là. Les plaintes sont venues principalement des services publics. Et je pense que la meilleure façon, dans les services publics, là, ce n'est pas de radoter sur le surplus qui a servi à de la préretraite, il y a quatre, cinq ans, c'est de se cracher dans les mains puis de préparer la prochaine ronde de négociations, puis essayer d'éviter les décrets de convention collective, puis d'améliorer notre régime de retraite. Et, moi, je suis convaincu que, dans les demandes, là, les dernières demandes ? parce qu'il n'y en a pas eu, de négociation sur la retraite, on a vu comment ça a fini, là ? dans les dernières demandes, il y avait des demandes pour améliorer le sort des retraités dans les services publics. Puis je pense que, oui, ils méritent une indexation. Oui, leurs revenus, leurs rentes sont trop basses à l'heure actuelle. Mais ça va se régler par la négociation, ça ne se réglera pas par une forme d'arbitrage que, bon, tu sais...

Puis des surplus, là, il y en a eu beaucoup dans le passé, mais, quand on regarde un peu ce qui se passe dans le milieu financier à l'heure actuelle, on ne connaîtra pas... Puis peut-être... Je ne sais pas dans combien d'années, on ne sait jamais, mais on peut être des années, des années avant de reconnaître les situations qu'on a connues dans le passé. Ça fait que, moi, c'est là que je dis: Encore une fois, ne prenons pas des mesures qui vont venir détruire la solidarité, parce que, même en situation de non-surplus, il va falloir améliorer le sort des retraités, autant dans les services publics...

Dans le secteur privé, je n'en parle pas parce qu'à chaque négociation, comme c'est forfaitaire, c'est là que ça se fait. Le secteur public, bien l'indexation est déjà là: moins trois puis, une partie des années, bien c'est un peu moins que moins trois. Mais moins trois, là, avec le vieillissement, l'âge qui recule, moins trois, là, après 30 ans de retraite, ça fait 90, ça. Bon. Ça fait que moins trois, la formule du moins trois, ça n'a plus d'allure. Puis il y avait des demandes, à la dernière négociation, puis on va en avoir, les prochaines. Puis, moi, je pense que c'est là qu'on peut régler cette question-là, autant au gouvernement que dans les sociétés d'État. C'est là qu'on va régler ça.

Mme Beaudoin: M. le Président. Alors, vous mentionnez, à la page 5, au troisième paragraphe, que, la formation pour les membres des comités de retraite, là, qu'il y aurait un problème. Vous parlez du «coût des libérations en temps pour les travailleurs et travailleuses d'une entreprise concernée ainsi que le temps requis de préparation et de participation». Dans les faits, là, quelle est votre suggestion? Est-ce que vous pensez que les entreprises sont d'accord avec votre suggestion? Comment ça va se passer dans les faits? Parce que...

M. Massé (Henri): Je ne sais pas s'ils sont d'accord. Mais, quand on veut avoir de la transparence puis des bonnes règles de gouvernance, bien ça prend de la formation. Puis, si on veut former le monde, il faut leur permettre, sur le temps de travail, de participer à ces rencontres-là. Ce n'est pas nouveau. Dans certains régimes, on a déjà ça, à l'heure actuelle, là, dans certains endroits. Puis on a salué encore une fois ces règles de transparence là puis de bonne gouvernance. Mais il faut y mettre les moyens. Ce n'est pas des millions, ça, là, là. Mais il faut donner les moyens. On a des petits syndicats, des petites caisses de retraite, bon, il faut qu'ils aient droit à une libération syndicale pour être capables d'avoir de la formation.

Mme Beaudoin: Je vais laisser mes collègues poser des questions.

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Messieurs, bonjour. Écoutez, je vais faire d'abord un commentaire. J'ai entendu dire par des retraités qui réclamaient bien évidemment d'être davantage considérés dans les partages de surplus, ou autres, qu'une des méthodes peut-être, et j'ai trouvé ça brillant, alors je me permets de le répéter... que, quand tu es actif, tu es un syndiqué actif, c'est là que tu dois travailler ta façon d'être quand tu seras un retraité, puis qu'avant d'être un retraité, si je ne me trompe pas, tu as dû avoir été un actif. Alors, c'est peut-être là, la méthode. Pendant que tu es actif, tu es un syndiqué actif ? puis je l'ai déjà été moi aussi, là ? donc, à ce moment-là, tu fais tes batailles là puis tu te protèges pour ta retraite.

Alors, c'était mon commentaire. Mais ça me permet de glisser sur l'importance que vous donnez et que je donne également au glissement dangereux vers le régime à cotisation déterminée. Et j'aimerais que vous nous donniez, puis pour ceux qui nous écoutent, parce qu'on nous écoute bien plus qu'on pense, hein, surtout dans ces dossiers-là, là, surtout dans celui-là... Alors, j'aimerais savoir quel est le plus grand danger qui nous attend, comme parlementaires, sur les décisions qu'on va prendre dans quelques semaines peut-être face... si on parle des mesures vers quoi on s'enligne. Parce que le glissement vers le régime à prestations déterminées, pour avoir lu ce que j'ai lu, là, j'y crois, moi aussi, puis la tendance est partie vers ça. Et le risque est grand. Et je ne voudrais pas avoir à vivre dans ce film-là.

Alors, vous nous mettez en garde sur quoi? Puis de quelle façon on pourrait, à l'intérieur de ce projet de loi là, éviter cet écueil-là qui nous attend? On ne l'évitera peut-être pas à 100 %, mais on peut peut-être l'éviter ou le repousser. Parce que je crois davantage personnellement au régime, bien sûr, à prestations déterminées.

M. Bellemare (Réjean): J'avais glissé une note. Puis effectivement le danger, je pense, c'est la complexification des règles. C'est certain que plus l'administration est compliquée, plus ça rend difficile la gestion de ces régimes-là, l'argument patronal par excellence. On parle de coût d'assurance au bout qui va venir grever une partie de l'actif... pas le coût d'assurance, mais le coût d'achat de rentes qui nous chicote un peu.

On a, sur les planches à dessin, qui n'est pas un projet parfait, mais un projet de régime à financement salarial qui nous permettrait de transformer certains régimes à cotisation déterminée vers des régimes à prestations. On attend après depuis trois, quatre ans. Les deux partis d'ailleurs étaient au pouvoir quand on a discuté ça. Je sais que c'est sur le bord d'arriver, mais ça fait quand même trois ans qu'on nous dit que c'est sur le bord d'arriver. Mais il y a des choses à faire. Donc, il faut garder ça assez simple, et éviter effectivement d'en faire un débat politique entre les participants, et maintenir la solidarité.

M. Laliberté (Pierre): Si je peux me permettre d'ajouter. On a fait grand cas, puis à juste titre, des deux cas de faillite, de terminaison de régime avec, bon, des déficits qui ont eu des conséquences évidemment, bon, désastreuses, là, sur les retraités, puis même les actifs, dans le fond, aussi, qui ont perdu, là, une partie de leurs rentes futures.

Mais les gens qui sont à cotisation déterminée, là, puis qui ont des REER, puis qui voulaient prendre leur retraite en 2001, là, est-ce qu'eux autres n'ont pas vu la valeur de leurs actifs diminuer? Puis est-ce qu'ils n'ont pas vu la valeur de leurs actifs diminuer grandement? Est-ce qu'ils n'ont pas vu, avec les bas taux d'intérêt, la possibilité d'acheter une rente diminuer également?

Puis je vous ferai remarquer qu'à ma connaissance, là, les deux cas dont je vous ai parlé, là, c'est les deux seuls cas, O.K.? Alors, dans un univers presque de 1 000 régimes de retraite, c'est quand même pas si pire que ça, hein? Alors que, pour tous ceux et celles qui avaient des REER ou des RCD, les impacts ont été inévitables. Alors, la mutualisation du risque, là, elle a servi très bien les retraités dans la période qu'on vient de passer, O.K.? Puis je pense que le législateur doit garder ça en tête, en passant.

On a parlé de règlement. Je voudrais souligner, sur la question du règlement qui a été aussi proposé pour l'exception pour les régimes municipaux et universitaires, nous, on croit qu'on devrait aussi ajouter les sociétés d'État là-dedans. L'exception est faite... a été faite, dans le fond, parce qu'on se dit: Ces régimes-là ne sont pas soumis, dans le fond, à la concurrence de marché, et les risques de terminaison sont presque...

Une voix: Nuls.

M. Laliberté (Pierre): Nuls, voilà. Dans le cas des sociétés d'État, on peut convenir que c'est des monopoles réglementés qui ne vont presque certainement pas aussi faire faillite, en tout cas à brève échéance. Donc, pour nous, ce serait quelque chose qui irait de soi également.

Mme Champagne: Dernier petit point, si vous permettez. Moi, ce que je vais retenir, là, d'une partie toute petite: si on balise trop, on exagère trop, on pousse trop sur le bouchon, à quelque part l'employeur, les entreprises, on les amènera doucement à décider d'aller vers des régimes à cotisation déterminée, si on n'est pas prudents dans les balises qu'on va mettre dans le projet de loi. C'est ça que je comprends, là?

M. Massé (Henri): Il y aura une pression très forte, madame, très, très forte, là. Je vous le disais, aux États-Unis, c'est 80 % des régimes qui ont basculé. Ici, là, c'est très, très fort, et c'est clair que, si on pousse trop loin, la pression va être encore plus forte. Puis on se le fait dire. Ça fait que, tu sais, à moins que vous ayez une disposition pour dire que les employeurs n'ont plus le droit de changer de régime, de s'en aller avec des cotisations...

Non, mais c'est avec ça qu'on joue. C'est avec ça qu'on joue. J'aimerais bien dire autrement, moi. La rente assurée, là, aux frais du régime, là, je vous le dis, il y a 25 ans on se serait battus comme des malades pour... Puis c'est le fun pour les retraités aussi, là. Mais aujourd'hui on le sait quel effet que ça a. Puis notre monde, surtout dans le secteur privé, où les régimes sont pas mal moins généreux, là... Le secteur privé, là, les régimes, tu sais, c'est à peu près la moitié des services publics, là. Et là ils viennent nous dire: Bien aïe, wop, wop!, au moins, là, attention, parce qu'il s'en va le régime, là, tu sais. Ça fait que c'est ça qu'on a.

Mme Champagne: Merci.

Le Président (M. Copeman): Ça va? M. le député de L'Assomption, oui.

n (11 h 30) n

M. St-André: Moi, M. le Président, j'ai le goût de m'aventurer sur une question plutôt glissante, ce matin. Je lis le journal La Presse, ce matin, il y a un article qui s'intitule Le mythe de la retraite dorée déboulonné ? Des retraités réclament le droit à un niveau de vie décent. Il y a des chercheurs, entre autres, qui ont présenté leurs conclusions à une activité qui s'est tenue hier, je pense, dans la région de Québec. On peut prendre connaissance de certains chiffres, entre autres ? je les cite: «En 2001, 80 % des Québécois âgés de 65 ans et plus gagnaient moins de 25 000 $ par an; 44 % gagnaient moins de 15 000 $ par année. Si bien que plus du tiers d'entre eux revisitent le marché du travail, au moins à temps partiel.»

Donc, on parle de personnes qui, pour joindre les deux bouts, arrivent à leur retraite, pas une retraite décente, mais, pour des revenus de retraite suffisants, donc ils sont obligés de retourner au moins à temps partiel pour boucler leur budget. Je comprends qu'il y en a qui pensent, au Québec, qu'on ne travaille peut-être pas assez, mais, quand on est obligé de travailler pour manger, arrivé à la retraite, moi, je pense qu'on a un sérieux problème, en tout cas.

On rajoute en plus que, selon la prédiction des deux chercheurs en question, «dans 15 ans, ce sera 56 %» des Québécois âgés de 65 ans et plus qui gagneraient 15 000 $ ou moins par année. Ça, j'appelle ça un appauvrissement. C'est en soi des statistiques inquiétantes. Puis d'ailleurs ce n'est pas la première fois qu'on lit des études qui font état de la situation des retraites au Québec.

On explique également qu'il y a trois grandes raisons, là, qui expliquent cette détérioration des retraites au Québec: «...les régimes de retraite publics sont insuffisants ? vous l'avez évoqué d'ailleurs, tantôt ? pour maintenir le niveau de vie de la classe moyenne; les régimes à l'emploi sont en général insuffisants et couvrent seulement une fraction de la main-d'oeuvre; [et] l'épargne personnelle substantielle est le lot bien sûr d'une minorité plus fortunée.»

J'aimerais savoir, selon vous, si le projet de loi qui est à l'étude aujourd'hui va permettre au moins de corriger en partie cette situation-là. Puis sinon qu'est-ce qu'il faudrait faire pour assurer une retraite décente aux personnes retraitées?

Le Président (M. Copeman): En 2 min 30 s, M. Massé.

M. Massé (Henri): Le projet de loi ne viendra pas changer grand-chose là-dedans, là, tu sais. 40 % des Québécois et des Québécoises qui sont couverts par un régime. Dans les statistiques que vous venez de soulever, bon nombre n'ont pas de régime complémentaire, là, ils ont juste le régime public. Bon. La FTQ, traditionnellement, nous autres, on a toujours demandé que le régime public augmente, s'améliore. Bon.

Mais l'autre élément, si on veut rester à notre portée, là, qui peut être intéressant aussi, on a demandé, par exemple, dans les dernières années... puis ça, il y a une unanimité, là, monde syndical, patronal, sur une espèce de retraite progressive où quelqu'un peut continuer à travailler puis continuer à cotiser à un régime de retraite aussi pour être capable de bonifier encore son régime. Là, on est poignés avec le ministère des Finances. Ça fait cinq ans qu'on en parle, ça fait cinq ans qu'on n'a pas de réponse. Je pense que c'est plus difficile au fédéral qu'au niveau du gouvernement du Québec. Bon. Ça fait qu'il y a tout ça.

Et c'est facile de dire que, comme M. Bouchard, il va falloir travailler plus, là, mais, moi, je vous dirais que c'est inégal. Chez nous, il y a des milieux de travail où effectivement le monde peuvent travailler plus longtemps, mais il y a d'autres milieux de travail, que ce soit dans la couture ou ailleurs, quand ils arrivent à 60 ans, puis qu'ils ont travaillé à la pièce, puis que c'est des rythmes infernaux, puis que c'est des maladies de travail consécutives à cause des gestes répétitifs, puis des milieux chauds, puis des milieux humides, puis des milieux froids, à 60 ans, là, il y en a que c'est le temps qu'ils partent parce qu'ils en ont assez.

Ça fait que, tu sais, on ne pourra pas trouver de mesure universelle, mais je pense qu'une des mesures, c'est encore... Il y a des mesures publiques aussi qui doivent se prendre pour continuer à améliorer notre régime public. Quand on dit qu'il y a 60 % du monde qui ont juste ce régime-là, ça fait partie de vos statistiques.

Le Président (M. Copeman): M. Massé, M. Laliberté, M. Bellemare, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire au nom de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

J'invite immédiatement les représentants de la Confédération des syndicats nationaux à prendre place à la table.

Je suspends les travaux de la commission quelques petits instants.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

 

(Reprise à 11 h 35)

Le Président (M. Copeman): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. C'est avec plaisir que nous accueillons les représentants de la Confédération des syndicats nationaux. M. le vice-président Roy, bonjour.

Confédération des syndicats nationaux (CSN)

M. Roy (Louis): Bonjour, M. Copeman.

Le Président (M. Copeman): Comme d'habitude ? vous êtes un habitué, vous aussi ? vous avez 20 minutes pour votre présentation. Je vais vous aviser quand il vous reste deux minutes pour mieux vous aider à conclure, simplement. Il y aura par la suite un échange d'une durée maximale de 20 minutes avec les parlementaires de chaque côté de la table. Je vous prie de présenter vos collaborateurs et par la suite d'enchaîner avec votre présentation.

M. Roy (Louis): Merci, M. le Président. J'ai, à ma droite, donc à votre gauche, Mme Nathalie Joncas, qui est actuaire à la Confédération des syndicats nationaux; et, à ma gauche, donc à votre droite, M. Marcel Pepin, qui est adjoint à l'exécutif de la CSN.

Alors, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, nous savons tous ce qui a frappé le régime de retraite à prestations déterminées dans les dernières années, hein? La chute des marchés pendant quelques années, la baisse des taux d'intérêt et enfin l'atteinte d'une plus grande maturité par les régimes, dont bien peu avaient prévu qu'elle s'accélérerait dans un contexte si difficile, cette combinaison de facteurs a frappé fort et ses effets sont prolongés et sont toujours présents. Alors qu'il y a quelques années l'attention était placée sur l'amélioration des régimes et les mécanismes de partage des surplus, aujourd'hui les efforts doivent être recentrés vers la survie et la sécurité des régimes à prestations déterminées.

Permettez-moi au passage de souligner que la situation n'est pas plus rose, moins en fait, dans les régimes à cotisation déterminée ou encore pour les gens qui ne dépendent que de leur épargne individuelle pour la retraite. Ces régimes vivent les mêmes problèmes à plein, et les individus sont seuls pour y faire face, ils n'ont pas de moyen pour corriger la situation et personne ne parle d'eux.

Nous croyons que les régimes à prestations déterminées demeurent de loin, dans le système privé de retraite, le meilleur outil pour assurer une protection du revenu à la retraite. C'est la seule formule, autre que la bonification des régimes publics, qui permette un partage de risque entre les salariés et les entreprises. Les autres formules rejettent tous les risques sur les salariés.

Les régimes à prestations déterminées présentent des particularités, une certaine complexité et ils sont dans un contexte qui exige que nous revoyions les règles de financement. Cet exercice doit évidemment assurer la sécurité à long terme des prestations, il doit cependant aussi assurer la survie des régimes à prestations déterminées et leur développement. C'est dans cette perspective que nous avons développé notre analyse. Nous croyons que plusieurs mesures, dans le projet de loi, vont dans cette direction mais d'autres, non. Il y a présentement un équilibre fragile qui ne doit pas être rompu, et, adopté tel que présenté, le projet de loi met en danger cet équilibre, et il n'y aura éventuellement que les grands régimes qui survivront.

Alors, d'abord, sur l'essentiel, nous sommes d'accord avec la mise en place de la provision pour écarts défavorables et avec les nouvelles règles de financement des améliorations futures des régimes. Alors, la provision pour écarts défavorables, tout exigeante qu'elle puisse être, obligerait tous les régimes à une plus grande prudence avant de pouvoir prétendre être en surplus, avant qu'un régime considère avoir la marge de manoeuvre suffisante pour apporter des améliorations. Cette provision, plusieurs la croient inutile, mais combien de régimes ont bien estimé les probabilités de supporter les conditions des dernières années et s'y sont préparés? Bien peu ont cru à l'accumulation de pareilles conditions adverses. Les conséquences sont lourdes à porter, aujourd'hui, en termes de cotisation, de rentes futures plus faibles ou, pire encore, de rentes qui ont été coupées.

Les règles de financement proposées ? je pense, entre autres, là, au seuil de 90 % de solvabilité en deçà duquel les améliorations au régime devraient être payées comptant ainsi qu'aux règles plus exigeantes entre 90 % et le point où la provision pour écarts défavorables serait constituée ? donc les règles de financement qui sont proposées sont lourdes à porter pour plusieurs régimes, c'est vrai, mais elles empêcheraient de vendre du rêve. Elles élimineraient toutes les pratiques où les parties à la négociation collective conviendraient de bénéfices qui seraient dans les faits financés bien plus tard dans le temps. Elles diminueraient les risques de se retrouver avec des drames comme ceux des Aciers Atlas ou encore elles diminueraient l'ampleur de ces drames. C'est pourquoi, après en avoir débattu depuis plus d'un an avec les responsables de nos différents secteurs professionnels d'activité, nous supportons une telle approche.

n(11 h 40)n

Deuxièmement, la maturité croissante des régimes est un des défis relativement nouveaux auxquels ils font face. Les régimes ont maintenant de grands nombres de retraités, et le passif attaché à ces retraités est par conséquent très important. La valeur de la rente du retraité qui a 35 ans de service est souvent considérable. Il faut additionner la valeur des crédits de rentes de plusieurs salariés actifs plus jeunes pour égaler le passif dû à un retraité. Il y a donc une croissance fort importante, dans beaucoup de régimes, du passif associé aux retraités. Cela fait porter un risque considérable sur les salariés actifs et les employeurs. En effet, lorsque les choses vont mal, comme ce fut le cas dans les dernières années, tout le régime, y incluant la partie retraités, se retrouve en déficit, et il n'y a que les salariés actifs et les employeurs pour y faire face. C'est la règle générale. Et nous savons bien que, lorsque survient une faillite en même temps, bien les retraités écopent alors plus lourdement. Cela constitue l'exception, et on reviendra là-dessus.

Ce poids plus grand, porté par les actifs et les employeurs, a un impact considérable dans la négociation et la vie des régimes. Un de nos syndicats a un régime où le passif des retraités représente 90 % du passif total. Pour faire face au problème, les actifs et l'employeur ont dû augmenter leurs cotisations et diminuer significativement la rente future promise par le régime. Payer plus pour recevoir moins, voilà la situation de ces gens-là. Pour un autre exemple, les régimes de la construction... avant sa transformation récente, a dû essentiellement transférer 500 millions de dollars du compte des actifs au compte des retraités pour renflouer la caisse retraités.

Nous regardons donc d'un oeil positif les dispositions qui auraient pour effet de diminuer le poids du passif retraités dans les caisses, d'autant plus si cela peut avoir pour effet aussi de diminuer les risques portés par les retraités. Dans cette perspective, des modalités qui permettraient l'achat de rentes chez les assureurs peuvent permettre d'aller dans ces deux directions à la fois. Il faut cependant des conditions qui ne mettent pas plus en difficulté encore les parties, qui assurent, elles, le financement au quotidien du régime. Les conditions d'achat des rentes proposées dans le projet de loi ne sont pas acceptables, selon nous, que ce soit l'achat du fait de la seule volonté des futurs retraités, les paiements supplémentaires considérables que les employeurs auraient à assumer et même le peu de latitude du comité de retraite pour procéder aux achats de rentes. On devrait plutôt envisager une formule où le comité de retraite puisse procéder à l'achat de rentes lorsque la provision pour écarts défavorables serait constituée, limitant ainsi beaucoup l'impact financier d'une telle mesure.

Troisièmement, les propositions d'arbitrage sur l'utilisation de surplus en cours de vie du régime sont extrêmement problématiques. Elles réouvriraient toutes grandes des portes que les tribunaux ont déjà fermées. Cette formule sera très exigeante en temps et en argent. Elle sera conflictuelle au possible. Elle ne tient pas bien compte des risques réels portés par les différentes parties intéressées dans un régime ni des clauses des régimes déjà convenues entre les parties. Elle n'ajoutera aucune sécurité aux prestations de qui que ce soit, elle ne changerait strictement rien pour la protection par exemple des retraités d'Atlas, des mines Jeffrey ou de Davie. Bref, cette formule, selon nous, doit être retirée du projet.

En conclusion, les mesures proposées sur la constitution des provisions pour écarts défavorables et sur le financement des régimes sont les vraies mesures qui contribuent singulièrement à sécuriser les prestations de tous les participants dans l'avenir. La mise en oeuvre de ces mesures est particulièrement exigeante pour les participants actifs et les employeurs. Si en plus on contraint tout le monde sur toute amélioration future des régimes, nous nous dirigeons vers un mur.

Dans la réglementation, vous vous préparez à soulager les régimes du secteur public et municipal du point de vue de leurs obligations quant à la solvabilité. Comment les régimes du secteur privé pourraient-ils faire face à toutes les obligations prévues dans le projet de loi? Il y a des éléments sur lesquels nous pouvons avancer maintenant, mais il faut que la bouchée soit digestible, et il reste du temps avant la mise en vigueur du projet de loi. Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas conclure maintenant sur la question des surplus futurs, qui incidemment prendront du temps à venir, avec les dispositions proposées sur les provisions pour écarts défavorables.

Alors, je n'ai pas abordé ici la question de la gouvernance des caisses de retraite, nous l'avons fait dans le mémoire et nous préférions avoir un peu plus de temps pour échanger avec la commission. Alors, M. le Président, vous n'aurez pas besoin de me dire qu'il faut que je conclue, considérez que c'est fait.

Le Président (M. Copeman): Et on admire la capacité de synthèse, M. Roy. Merci. Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.

Mme Courchesne: Mme Joncas, monsieur... ah, écoute, M. Roy et M. Pepin. D'abord, je veux vous féliciter, parce que j'ai lu votre mémoire avec beaucoup, beaucoup d'intérêt. Vous le documentez d'exemples concrets, vous le documentez vraiment de façon détaillée dans votre analyse d'impact sur les conséquences à la fois positives et moins positives sur chacune des mesures. Je peux vous dire qu'il est très intéressant à lire, il est fouillé et il fait certainement le tour de la question.

Comme la FTQ, nous avons eu l'occasion, vous et moi, d'échanger à quelques reprises, au cours de la dernière année, sur l'ensemble des mesures, puis vous avez vu qu'on a quand même progressé beaucoup depuis le début, souvent à votre suggestion. Je pense, par exemple, aux discussions assez fortes qu'on a eues avec Mme Joncas, avec M. Pepin. Et là vous avez compris qu'on arrive en fait un petit peu en bout de piste, l'objectif étant très certainement, pour moi et pour le gouvernement, de pouvoir adopter ce projet de loi là le plus rapidement possible. En tout cas, c'est un voeu, parce que j'y crois puis je crois que c'est dans l'intérêt de tous de le faire.

Je veux aborder, ce matin, quelque chose qu'on n'a pas abordé beaucoup depuis le début de la commission parlementaire puis qui me surprend, parce que je suis sûre peut-être que ça m'a échappé dans nos discussions. Mais vous dites que vous êtes d'accord avec la provision pour écarts défavorables, mais vous ne suggérez pas qu'elle soit liée à une politique de placement. Est-ce que je comprends que vous voulez qu'on fixe cet écart-là de façon fixe? Si oui, pourquoi? Puis pourquoi vous seriez en désaccord avec le fait de le lier à une politique de placement, qui est en fait notre capacité à gérer un risque?

M. Roy (Louis): Marcel.

Le Président (M. Copeman): M. Pepin.

M. Pepin (Marcel): Bien, écoutez, c'est une question qu'on a abordée effectivement. On pense que ça ajoute un élément de complexité à l'intérieur des régimes. Ce n'est pas la question principale de l'ensemble de la question, mais d'avoir une provision qui, selon la réglementation, variera de x % ? je ne connais pas les pourcentages ? de 5 % à 10 % par exemple, selon la politique de placement des régimes, fait en sorte qu'à mesure où on pourrait évoluer sur notre politique de placement, ça vient changer la provision qu'on a pu constituer ou qu'on est en train de constituer, et là, tiens, ça ne fait plus l'affaire, et donc on ne sait pas à moyen terme, on est toujours obligés d'ajuster les deux, l'un par rapport à l'autre.

Nous, on s'est dit: Enlevons un élément de complexité, sachons où on s'en va en termes de provision pour écarts défavorables. On doit atteindre 7 %, alors vivons avec 7 % dans le futur et on saura à quoi s'en tenir. Si on prend plus de risques à l'intérieur du régime, on composera avec cette réserve-là, mais qu'on n'ait pas à la modifier progressivement à travers le temps selon la politique de placement. C'est simplement la réflexion qu'on a faite.

Mme Courchesne: Vous voyez un élément de simplicité, moi, j'y voyais un élément de flexibilité. Mais je comprends.

L'autre élément qui m'a surprise aussi, c'est le fait que vous n'étiez pas favorables aux lettres de crédit. Ça, ça m'a vraiment étonnée parce que ça a été une des mesures, quand on l'a annoncée dans le projet de loi... en fait, on a nous-mêmes adopté, dans le projet de loi, des mesures temporaires, ça a été plutôt bien reçu. Là, je crois comprendre que vous avez une certaine inquiétude. Vous pensez que l'institution financière pourrait intervenir, même vous allez assez loin, là, dans le processus de négociation, ou pourrait intervenir, ou influencer, ou, plus qu'influencer, déterminer des balises à l'employeur. Moi, je ne vois pas comment juridiquement ça pourrait aller aussi loin que ça. Mais je voudrais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Paquin): M. Roy.

M. Roy (Louis): L'éminence grise... Je vais demander à Mme Joncas, Nathalie, de répondre.

Mme Joncas (Nathalie): Les régimes de retraite, il y a plusieurs intervenants qu'on ne voit pas et puis qui ne sont pas discutés ici. On a toutes les normes comptables qui apparaissent, qui font des dommages quand même assez importants parce qu'ils mettent des règles additionnelles sur comment doit se comporter le financement. Là, on a toutes les normes de solvabilité, on a les normes de capitalisation, on a les normes comptables. Là, on ajouterait encore le fait que, là, la banque... il y aurait des institutions financières qui mettraient des lettres de crédit. Et, on le sait, quand la situation financière d'une entreprise devient difficile, s'il y a beaucoup de lettres de crédit dans le régime de retraite, c'est certain que les grands créanciers vont, d'une façon ou d'une autre, intervenir dans le régime de retraite. C'est faire intervenir un quatrième intervenant dans le régime de retraite. Donc, c'est pour ça qu'on trouvait que, si la compagnie est capable d'avoir des lettres de crédit, qu'elle ait des lettres de crédit pour d'autres choses, là, mais pas dans le régime de retraite. Si sa capacité d'avoir des lettres de crédit est correcte, bien qu'elle ait ses lettres de crédit pour faire d'autres choses mais qu'elle mette le vrai argent dans le régime de retraite.

n(11 h 50)n

Le Président (M. Paquin): Mme la ministre.

Mme Courchesne: Oui, mais vous convenez avec moi, Mme Joncas, qu'il y a un plafond dans le projet de loi, là: tu ne peux pas mettre plus que 15 % en lettres de crédit. Donc, encore là, est-ce que ce n'est pas dans la mesure où, on s'entend, on veut tous protéger nos régimes à prestations déterminées, mais par contre on a convenu qu'il fallait aussi resserrer certaines règles de financement, et c'est cet équilibre qu'on recherche? Donc, dans ce sens-là, encore une fois, est-ce que ça ne donne pas une certaine souplesse et que ça ne répond pas aux préoccupations de dire: Bien, si une entreprise, pour qui c'est plus difficile à très court terme... est-ce que ça ne permet pas, effectivement, à la fois, de protéger sa capacité de garder son régime? Est-ce que ça ne lui donne pas la souplesse? Est-ce que ça ne permet pas de peut-être réinvestir? En tout cas, tu sais, ça donne une espèce de flexibilité encore là et ça laisse une marge de manoeuvre dans la prise de décision de l'entreprise. Est-ce qu'il n'y a pas là une façon de préserver ces régimes-là en donnant un outil additionnel plus flexible et plus souple?

Mme Joncas (Nathalie): Écoutez, sur les lettres de crédit, on vous a donné notre opinion comme quoi ce n'est vraiment pas l'outil qu'on privilégie, O.K., mais, pour moi, ce n'est pas ça, ce n'est pas cet élément-là du projet de loi qui va faire en sorte que ça va changer la dynamique des régimes de retraite à prestations déterminées. Quand même, dans ce projet-là, c'est quelque chose d'accessoire, selon moi, là, ce n'est vraiment pas une majeure là-dedans.

Mme Courchesne: On est d'accord là-dessus.

Mme Joncas (Nathalie): Donc, on vous a donné notre opinion, mais ce que je vous dis, là, ce n'est vraiment pas ce qui va faire la différence.

Mme Courchesne: Non, mais on est d'accord là-dessus. La seule chose, je veux juste vous dire mon étonnement parce que vous êtes à peu près les seuls qui avez apporté ce point de vue là, c'est pour ça que je voulais l'aborder. Oui.

M. Roy (Louis): Si vous permettez, Mme la ministre, juste rapidement, c'est vous dire... On est assez jaloux, j'oserais dire, du fait que les régimes de retraite font partie du processus de négociation. Et les intervenants qui sont cachés, dans ces histoires-là, sont toujours les intervenants qui parfois font dérailler le train au moment où on pense qu'il va rentrer en gare.

Et la question d'avoir des banques qui ont un intérêt à voir en fait comment le régime se développe pour assurer leur propre crédit, bien ça nous apparaît un peu dangereux. Mais c'est plus dans ce sens-là qu'on voudrait éviter que ces gens-là viennent, par en arrière parce qu'ils ne seront pas assis aux tables évidemment, mais viennent faire des pressions sur l'employeur puisque l'employeur est pris avec eux d'une certaine manière.

Mme Courchesne: O.K. Je vais vous faire un aveu, vous dire que, si on a introduit dans le projet de loi cette possibilité de rachat de rentes, c'est beaucoup, beaucoup à la suite des discussions qu'on avait eues avec vous. Je comprends qu'il y a une différence majeure dans le projet de loi. Par contre, à la lecture de votre mémoire, c'est que, nous, on dit, dans le projet de loi, qu'un retraité pourrait en faire la demande, mais le comité de retraite aurait une période de trois ans pour racheter.

Ce que vous nous dites, vous, c'est que vous pourriez être d'accord avec ce rachat de rentes, mais vous souhaitez que ce soit le comité de retraite qui décide, ce qui peut se faire actuellement, dans la loi actuelle. Dans notre cas, évidemment le retraité qui faisait une telle demande brisait son lien avec le régime. Et ce que je crois comprendre, c'est que vous souhaiteriez aussi... Puis, si je me rappelle, Mme Joncas, vous aviez insisté beaucoup sur les régimes qui étaient à maturité puis qu'il y avait une pression importante actuellement. Donc, ce que vous dites à la différence de nous, c'est que vous voudriez que ce même lien soit brisé mais à la demande du comité de retraite. Est-ce que c'est ça que je comprends? Est-ce que ma compréhension est la bonne?

Mme Joncas (Nathalie): Oui, deux choses, la première chose... Oui, nous, on demandait que le comité de retraite puisse utiliser l'achat de rentes dans une formule d'immunisation pour réduire son risque puis être capable en même temps d'assurer les retraités. De la façon que c'est apporté dans le projet de loi... Comme on en avait parlé, nous, il n'y avait pas de coût additionnel parce que ça se faisait... si le comité de retraite voyait qu'il y avait suffisamment d'argent, donc procédait, pour sécuriser les rentes, faisait une utilisation prioritaire du surplus et y allait de façon plus discrétionnaire. Comme c'est amené, automatiquement on va être obligés de prévoir que tout le monde va le demander, donc les coûts, on va devoir les capitaliser, et après ça le comité va procéder. Donc, c'est vraiment toute une autre dynamique, là.

Mme Courchesne: Je comprends. On s'entend.

Le Président (M. Copeman): M. Pepin, oui, allez-y.

M. Pepin (Marcel): ...un élément supplémentaire sur cette question-là. C'est une question assez intéressante. Effectivement, on a eu l'occasion d'en discuter pendant un certain temps, au moins une demi-heure, une heure, je ne sais trop, là. Sur cette question-là spécifiquement, là, disons qu'on a discuté une heure. Mais c'est une question assez complexe, en même temps: Qui peut effectivement commander l'achat d'une rente à l'extérieur? À quel moment ça peut se faire? Est-ce qu'il y a une coupure du régime? À quel moment il y a une coupure du régime? Qui supporte les coûts associés à ça? Ce n'est pas une question qui peut se traiter si rapidement, pense-t-on. Et c'est une des questions sur lesquelles on pense qu'il serait intéressant d'avancer, autant pour la sécurité des retraités que pour l'équilibre futur des régimes. Mais prenons un peu de temps pour approfondir chacun de ces aspects-là. D'ici 2010, il nous semble qu'il y a un peu de temps. Mettez une date limite quelque part, mettez un comité de travail sur pied, je ne sais trop, avec tout le monde, et essayons de définir les critères qui permettraient aux régimes de vivre avec ce genre de disposition là. Je pense que c'est une... Il y a trop d'aspects dans ça pour le régler rapidement.

Mme Courchesne: D'accord.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Vimont.

M. Auclair: Merci beaucoup. Messieurs dames, bonjour. La ministre a déjà couvert énormément la question au niveau de l'achat des rentes, parce qu'il y a quand même une préoccupation. Parce que, moi, en 2005, j'étais présent lorsque vous avez présenté votre mémoire au niveau justement de la possibilité d'acquisition de rentes. Et ce que je trouve très intéressant, c'est... même dans le mémoire actuel, votre commentaire est très clair comme quoi vous considérez que quand même l'achat de rentes auprès d'assurances, ça augmente la sécurité des retraités, et c'est quand même quelque chose qui est très important. Vous le constatez, vous l'émettez.

La seule chose que, moi, là-dedans, pour juste compléter la question de la ministre... Est-ce que vous considérez qu'il pourrait y avoir un impact et il diminuerait peut-être aussi, cet impact-là, du fait que beaucoup de retraités pourraient se retirer? Parce que vous partez avec cette prémisse-là, selon moi, qui est la bonne façon de faire. Si c'étaient les retraités qui payaient le coût, à cet égard-là, quelle serait votre position? Est-ce que vous êtes plus favorables? Parce que je sais qu'il va y avoir un impact, il va y avoir un impact dispendieux même, vous le soulevez, de l'acquisition de ces rentes-là. De votre côté, est-ce que vous prévoyez que ce serait préférable si c'étaient les retraités qui payaient cette facture-là?

M. Pepin (Marcel): Écoutez, une rente de 30 000 $ ou 40 000 $, là, Nathalie est certainement la personne la plus qualifiée pour nous dire combien ça vaut, là, mais, disons, une rente de retraite, ça vaut souvent 400 000 $, ou 300 000 $, ou 500 000 $. Et, si le régime est solvable à 80 % et qu'il nous manque 1/5 de cette valeur-là, on parle de sommes appréciables, on parle de 75 000 $, de 80 000 $. Puis en plus il y a les marges de l'assureur qu'il va falloir assumer, hein, dans cette opération-là. Donc, on parle de sommes considérables.

C'est d'ailleurs ce qui nous fait dire: Bon, l'employeur, s'il doit payer ça dans les mois qui suivent la demande puis qu'il y en a 30 qui partent dans l'année, à un moment donné, ça va paraître dans l'équation, cette histoire-là. Alors, on pense qu'il faut trouver une formule qui nous permette d'avancer dans cette direction-là mais qu'on n'a pas encore trouvé la formule. Si c'est le retraité qui devrait le payer, sa rente vient de diminuer de 20 %, 25 %. Ça ne tient pas la route non plus, c'est impossible de gérer ça comme ça. Alors, il faut trouver une autre formule que celle-là.

Nous, on pensait qu'effectivement, si on se dit en accord avec une provision pour écarts défavorables, tiens, les régimes seraient rendus éventuellement à 107 % de solvabilité, bon, bien, il y a des marges à l'intérieur du régime, est-ce qu'au moment où on a atteint cette marge-là, là, on ne peut pas examiner de façon plus importante l'achat des rentes auprès des assureurs? On a justement une marge supplémentaire qui nous permet... D'abord, on a 100 % de la solvabilité puis en plus on a une marge supplémentaire pour faire face aux coûts supplémentaires qui vont être exigés par l'assureur, de toute façon. Alors, il faut examiner le moment et les mécanismes qui nous permettraient d'aller dans cette direction-là, mais ça ne peut pas être ce que vous nous... La question que vous posez, là, ça ne peut pas être ce chemin-là.

M. Auclair: C'est pour ça que je vous pose la question. Non, parce que, quand on parle avec les retraités, pour eux, lorsqu'on leur parle de l'achat, le coût relatif à l'achat de la rente, c'est beaucoup plus le frais que ça pourrait entraîner pour le coût de négociation avec l'assureur, etc. Dans la perception des retraités, en tout cas ceux qui sont venus me voir à mon bureau, eux autres, quand on leur parlait de ça, c'était le coût relatif, combien ça me coûte, moi, pour dire: Bon, O.K., je vais payer un assureur, il y a une prime x à payer. Ce n'était pas le manque à gagner, parce que, pour eux, et là je les comprends très bien, cette rente-là, elle est là, elle est censée être là, elle est censée être accessible, parce que, dans toute la vision, c'est que c'est des fonds qui sont disponibles, qui sont là pour rassurer.

Donc, cette réalité-là que vous venez de soulever, pour les retraités, en tout cas ceux qui m'ont questionné, ça n'a jamais été une question qui leur a soulevée à l'esprit parce que, pour eux, cet argent-là, il est disponible, il devrait être là. Même si on sait que ça peut être déficitaire, ils ne le voient pas comme ça, eux autres. Eux autres, ils voyaient vraiment le coût, dire: Bon, O.K., ça coûterait combien, 1 000 $, 2 000 $ pour négocier puis acheter auprès... le coût de transfert, dans le fond? C'est un peu comme ça qu'ils le voient, eux autres. Ils ne le voient pas par rapport à ce que vous soulevez, là, comme point, que ça pourrait coûter le manque à gagner. Ça, à ce niveau-là, eux autres, puis je les comprends, ils seraient en total désaccord parce que ça n'a pas d'allure par rapport à leurs attentes.

n(12 heures)n

Et c'est là qu'est le déséquilibre dans l'explication qui est très claire à être expliquée à leurs retraités. Parce que les retraités, eux autres, vous l'avez dit, une prestation déterminée, ils savent que, quand ils prennent leur retraite, il y a un montant x qui leur revient par année et c'est à quoi ils doivent s'attendre. De là tout l'autre débat après ça des surplus, là, qui rentre en jeu. Mais à la base, si on veut, ils veulent se consolider parce qu'ils ne veulent pas vivre des fermetures, ils ne veulent pas perdre... des fois des mauvaises gestions, ils se disent: Nous autres, on va prendre notre retraite, on va prendre notre fonds, puis on va le gérer, puis on va l'autogérer, puis ça va finir là. C'est de là un petit peu qu'est le point, là.

M. Pepin (Marcel): Si une rente est payée régulièrement, à partir du moment où quelqu'un s'en va à la retraite et qu'on lui doit 30 000 $ par année, bien le régime devra assumer à chaque année ce 30 000 $ là. Et, s'il était en déficit au moment où la personne est partie, on est en continu à travers le temps, il y a une possibilité pour le régime, soit pour les actifs et l'employeur, de cotiser plus ou de se refaire par d'autres éléments. Donc, il y a du temps pour lisser les choses et faire en sorte que le problème s'amenuise.

Si on achète les rentes, l'argent sort. Là, il sort 300 000 $, il sort 400 000 $. Et, si on n'a pas un mécanisme pour couvrir le 20 % manquant ? dans mon exemple de tantôt ? supposons un groupe de 100 personnes, il y en a 20 qui partent à la retraite et il manque le 20 % en question, alors, si on était à 80 % de solvabilité avant que ces gens-là partent et qu'on les paie à 100 %, bien les autres, ils vont se retrouver, eux autres, à 65 % de solvabilité ou à je ne sais pas quel pourcentage. Alors, ça ne marche pas, ça ne marche pas.

M. Auclair: ...d'accord avec vous, du tout, du tout, ce que vous dites là. Sauf que le problème, il est quand même sur l'explication claire qu'on doit donner aussi à nos salariés, parce que c'est pour eux autres, là, les régimes complémentaires de retraite, c'est pour eux, là, dans le fond c'est leur assurance. Donc, si on leur présente des réalités comme ça, il faut très bien leur expliquer et que ce soit très clair pour eux autres, là, que, cette réalité-là, ce n'est pas juste dire: Bon, c'est un montant, on transfère. Il y a des montants, de là la solvabilité devient très importante. Et ces facteurs-là doivent être expliqués, parce que les gens qui viennent nous voir, malheureusement ils ne l'ont pas, cette conception-là, encore moins cette réalité-là. Donc, c'est...

M. Roy (Louis): Si vous permettez, je veux quand même dire que, oui, c'est vrai que le régime de retraite est pour les retraités, mais il est aussi pour les jeunes qui rentrent au travail, hein? Le régime n'est pas que pour les passifs...

M. Auclair: On le bâtit, on se comprend, on le bâtit.

M. Roy (Louis): ...il est pour les actifs aussi. C'est ça.

Le Président (M. Copeman): M. le député de Saint-Jean. Il reste trois minutes.

M. Paquin: Oui. Oui, merci, M. le Président. Mesdames, messieurs, merci de votre présence et bienvenue à l'Assemblée nationale. Un peu dans le même sens que mon collègue de Vimont, vous semblez en désaccord avec les mesures qui permettraient aux retraités d'avoir droit au chapitre quand il y a un surplus dans la caisse. Quelle mesure proposez-vous pour compenser ça? Parce que souvent, lorsqu'il y a un surplus dans la caisse, les retraités y ont participé grandement. Ça fait que qu'avez-vous à proposer pour améliorer le sort des retraités dans ce sens-là?

M. Roy (Louis): Bien, premièrement, il faut bien comprendre que la question des surplus, on ne peut pas la traiter purement de façon mathématique, là. C'est une question de réalité: Y a-t-il ou pas un surplus? Et les régimes à prestations déterminées ? ça nous amènera peut-être sur une autre question, là ? les régimes à prestations déterminées, ils sont construits sur le principe que ce sont les actifs qui paient, on garantit une rente à ceux qui s'en vont, et c'est pendant que les gens sont actifs qu'on négocie quelle va être la rente qu'ils vont recevoir, hein? C'est ça. Le principe, c'est celui-là.

Alors, à partir du moment où il y a des surplus... Dans le passé ? et on le dit, d'ailleurs, dans notre texte ? il y a des gens qui ont utilisé des surplus pour des choses qui probablement n'auraient pas dû être utilisées, parce qu'ils considéraient, à ce moment-là ? c'est facile à dire après, hein, être gérant d'estrade ? ils considéraient, à ce moment-là, que les surplus c'était comme un mode permanent et qu'il y aurait des surplus ad vitam aeternam. Sauf que ce n'est pas ça qui s'est passé. Et, quand ça a frappé, mettons, la réduction de rendement, par exemple, bien, on s'est rendu compte que, des surplus, il n'y en avait pas, il n'y en avait plus. Et c'est à partir de ce moment-là que les retraités ont commencé à se dire: Oh, un instant!

Quand il y avait des surplus, je vais vous dire, les négociations se faisaient en fonction de bonifications. Il y a des gens qui ont pris des congés de retraite, il y a eu aussi des bonifications. Les bonifications se sont appliquées aux gens qui étaient là au moment où il y avait des surplus, les gens qui sont partis. Alors, ça m'amène, ça, au point que vous avez sur la question de l'équité, dans le texte, qui nous amène sur les poursuites et les recours, etc. Mais, un régime à prestations déterminées, c'est très difficile. Le régime, il est équitable collectivement, mais individuellement ce n'est pas tout le monde qui a la même rente parce que, dépendamment de quand vous êtes actif ou de quand vous êtes passif, vous bénéficiez de bonifications qui étaient là ou qui ne sont pas là. Alors, on ne peut pas calculer l'équité pour un retraité, il faut calculer l'équité pour les groupes, pour l'ensemble du groupe: Est-ce que collectivement les gens en ont eu pour leur argent? Mettons que je résume, là, rapidement.

Alors, la question des surplus, premièrement, nous, là, quand les retraités se plaignent comme ça, là, moi, je vais vous dire sincèrement, je suis très heureux de ça, parce que, si les retraités revendiquent aujourd'hui, c'est parce que c'est probablement des gens qui ont milité dans les milieux syndicaux, et qui ont voulu faire valoir leurs droits toute leur vie, puis qui aujourd'hui considèrent qu'ils ont un point de vue, qu'ils veulent le faire valoir, et ça, là, il n'y a jamais personne qui va se plaindre de ça à la CSN. En même temps, nous, on représente à la fois les jeunes qui rentrent au travail dans un établissement, dans une usine, à la fois les gens qui sont à la retraite puis, à la fois aussi, tous les autres qui sont entre les deux. Et, nous, on cherche l'équilibre dans tout ça.

Vous savez que, si nos jeunes prenaient plus le temps d'écrire... Là, j'entendais tantôt les questions posées à nos camarades de la FTQ. Si c'étaient nos jeunes qui vous écrivaient comme députés, peut-être que vous auriez des lettres tout à fait à l'inverse de celles des retraités, hein? Ils diraient: Moi, je suis tanné de payer pour des personnes qui sont parties, etc., là, hein? On entendrait ça aussi. Alors, il faut trouver l'équilibre de ça. Et ces jeunes-là qui sont derrière moi, là, eux aussi, ils ont été actifs, ils ont fait des revendications, ils ont négocié des régimes de retraite, et c'est quand ils étaient actifs qu'ils ont bonifié les régimes de retraite, et heureusement qu'ils étaient là. Alors, c'est une question d'équilibre et d'équité intergénérationnelle entre les actifs, les retraités, les jeunes qui rentrent. Alors, tout ça doit trouver un espace d'équilibre, et, nous, c'est ce qu'on cherche à la CSN.

Le Président (M. Copeman): L'équilibre me dirige maintenant à ma gauche.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Copeman): Alors, Mme la députée de Mirabel et porte-parole de l'opposition officielle en matière des régimes de rentes et de retraite.

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. M. Roy, M. Pepin, Mme Joncas, merci pour la présentation de votre mémoire. Je trouve ça très intéressant de vous entendre parler d'équité. D'ailleurs, vous avez un chapitre qui explique très bien tout ça. Vous parlez des jeunes. On va en parler, des jeunes. Est-ce que, vous, vous avez fait un genre de sondage concernant leur opinion? Parce que vous dites: Si on consultait ces jeunes-là, probablement qu'ils diraient qu'ils n'ont pas à payer pour les gens plus âgés. Qu'est-ce que vous avez fait pour arriver à cette conclusion-là que finalement les surplus n'appartiennent pas aux retraités?

M. Roy (Louis): Mme Joncas.

Mme Joncas (Nathalie): Les jeunes, je vous dirais, là, dernièrement, la majorité des régimes de retraite que j'ai vus, on se dirige vers justement des fermetures de régimes de retraite. On a vu Quebecor World, on en a vu plusieurs comme ça. Ce qui arrive, c'est que les régimes à prestations déterminées sont rendus... sont très gros, sont complexes, tout le monde vous l'a dit, ils sont en danger. Donc, ce que les compagnies font, elles ferment le régime, disent: Tous ceux qui sont là sont garantis, les jeunes qui vont rentrer rentrent à cotisation déterminée. Ça va être le cas.

Tantôt, lors de l'autre groupe, vous avez cité des statistiques qui disaient que les retraités sont de plus en plus pauvres. Vous allez avoir encore une génération qui va être encore plus pauvre parce qu'ils n'auront pas accès aux mêmes types de régimes que les présentes générations.

Donc, pour moi, les jeunes, ce que je trouverais important, c'est aussi de travailler non seulement à préserver ce qu'on a, mais aussi s'assurer que les prochaines générations vont avoir accès aux mêmes types de régimes et qu'on soit capables de mettre en place des... d'avoir une souplesse dans la loi qui permette aux parties de s'entendre, puis de mettre des régimes où les employeurs, les employés vont trouver le milieu pour être capables de... justement que les autres générations soient capables d'avoir les mêmes régimes. Moi, ça me préoccupe beaucoup plus que le fait de dire: On va partager les surplus. Oui, on va partager les surplus, oui, il va y avoir de l'équité, mais, les prochaines générations, là, il ne faut pas les oublier, celles-là non plus.

Mme Beaudoin: M. le Président, tantôt vous avez entendu évidemment, là, le mémoire de la FTQ, puis, eux, ils craignent qu'on vienne à séparer les caisses des actifs. J'aimerais vous entendre sur ça. Est-ce que vous partagez les mêmes craintes pour le partage?

Mme Joncas (Nathalie): C'est certain que, si jamais il y avait un projet de loi qui disait que les surplus, bon, ça va être jugé sur la base de l'équité, avec l'argent des retraités, bien on essaierait de le mettre un petit peu plus sécuritaire, tu sais, parce qu'on essaierait soit de faire de l'appariement d'actifs, soit d'acheter des rentes parce qu'on ne voudrait pas se ramasser avec des déficits. De toute façon, qu'il y ait le projet de loi ou pas, les régimes de retraite ont déjà commencé à assurer un petit peu plus leurs passifs, c'est-à-dire faire de l'appariement d'actifs puis rendre ça un petit peu plus sécuritaire. Mais, si jamais on disait: Il va y avoir un partage équitable, et tout, ça se pourrait qu'il y ait des caisses séparées puis qu'on dise: Bon, bien, on va prendre la caisse des retraités, on va l'apparier ou on va acheter des rentes puis on va garder ça, il n'y aura pas de surplus puis il n'y aura pas de déficit, puis ça, ça va être comme ça, puis après ça les actifs vont être opérés sur une base de coûts un petit peu plus libérale pour justement être capables d'avoir des bénéfices qui soient assez intéressants.

Mme Beaudoin: Puis l'asymétrie, qu'est-ce que vous en pensez?

Une voix: ...

Mme Beaudoin: L'asymétrie.

M. Pepin (Marcel): Laquelle?

Des voix: Ha, ha, ha!

n(12 h 10)n

Mme Beaudoin: C'est à vous de me répondre dans ce sens-là.

Une voix: Veux-tu commencer, Nathalie?

Mme Joncas (Nathalie): Écoutez, l'asymétrie, ce à quoi vous référez, c'est les employeurs qui disent: Écoutez, nous, on paie les déficits puis les employés ont les surplus. Écoutez, moi, je n'ai jamais vu un régime de retraite, là, où, les surplus, c'était écrit que ça appartenait aux employés, que ça n'avait pas été négocié, là. Les employeurs, c'est rare que, dans leur régime de retraite, de façon... mettent sur pied...

Une voix: Automatique.

Mme Joncas (Nathalie): ...c'est ça, de façon automatique, mettent sur pied puis disent: Le régime de retraite, bien tous les surplus appartiennent aux participants. Souvent, là, dans les régimes, on a des clauses qui disent: On partage les surplus, on partage les déficits. Donc, on s'est tous mis des règles de partage. C'est sûr, quand ça va mal, ils disent: Bien là, on paie les déficits, puis on aimerait ça avoir les surplus. Mais, si le contrat est fait différemment, ce n'est pas... c'est le contrat qui s'applique.

Et, je vous dirais, quand les employeurs sont venus nous voir, aux tables de négo, et nous ont dit: Écoutez, on paie les déficits, bien on s'est assis puis on a dit: Bon, bien, comment on va faire ça? Si le déficit est trop gros, on va regarder nos régimes de retraite. Donc, l'asymétrie, on l'a traitée régime par régime, en disant: Voici comment, dans le futur, on va régler les problèmes; s'il y a des surplus, voici comment on va les traiter; puis voici les déficits.

C'est sûr qu'une fois que c'est établi des fois on aimerait ça qu'il y ait une loi qui vienne nous dire: Bon, bien, les surplus, à cette heure, ils nous appartiennent, là. Mais des fois il faut respecter aussi tous les contrats qui ont été négociés au fil du temps.

M. Roy (Louis): ...Marcel?

M. Pepin (Marcel): Peut-être un élément supplémentaire. C'est que les régimes ne sont pas construits de façon à ce qu'une année sur deux tu tombes en surplus ou en déficit, et que les choses sont égales, et donc, si ça va mal, permets-moi de prendre les surplus puis, quand ça... plutôt, quand ça va bien, laisse-moi prendre les surplus, puis, quand ça ira mal, je paierai les déficits. Les régimes sont construits avec les ensembles d'hypothèses des actuaires. Et ils nous le disent, dans les régimes, ils disent: Écoute, avec cet ensemble d'hypothèses là, à mon avis, deux années sur trois, trois années sur quatre, tu vas être en surplus puis, une année sur quatre, tu as un risque d'être en déficit. Ce n'est pas symétrique, ça, cette façon-là de faire les choses.

Alors, quand l'employeur dit: Écoute, à chaque fois qu'il y a un déficit, c'est moi qui dois l'assumer, ça fait que laisse-moi prendre les surplus, bien, dans bien des cas, ça veut dire: Trois fois sur quatre, je vais prendre des surplus puis, une fois sur quatre, je paierai des déficits. Le tout se retrouve à la table de négociation, et effectivement il y a des résolutions qui sont apportées à ça au cas pas cas, là. Ce n'est pas problématique.

Mme Beaudoin: M. le Président, alors, moi, j'aimerais savoir qu'est-ce qui vous différencie, là, de la FTQ, de leur position. Ce que j'ai compris, là, c'est que vous êtes d'accord avec l'écart provision, vous n'êtes pas d'accord avec l'achat de rentes ni avec le principe d'équité. Par contre, je pense que vous n'avez pas la même position par rapport aux 90 % avant bonification. J'aimerais savoir exactement, là, quelle est votre position par rapport à la FTQ.

M. Roy (Louis): Bien, écoutez, premièrement, si vous voulez qu'on fasse les différences entre la CSN et la FTQ, j'espère que vous avez toute la journée à nous consacrer parce que...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Beaudoin: D'accord. Je parle par rapport au projet de loi.

Le Président (M. Copeman): La réponse est non, M. Roy.

M. Roy (Louis): Ah! d'accord. J'aime beaucoup votre façon de présider, M. Copeman. Deuxièmement, malheureusement, nous n'avons pas assisté à la présentation de nos camarades de la FTQ de façon complète. Mais, nous, c'est clair que la question de la solvabilité nous intéresse. Nous sommes intéressés à faire en sorte que les retraités, on garantisse ce qu'on leur a promis, mais en même temps qu'on leur promette des affaires réalistes aussi. Et ça, c'est extrêmement important.

Et la question de la solvabilité nous apparaît être une ligne intéressante. Hormis le fait, là, de la question d'un pourcentage flottant, nous, on pense que, si c'est 107 % qu'il faut atteindre, bien ce sera 107 % dans tous les cas. Et ça permettra à la fois pour les gens qui gèrent les régimes de savoir où ils en sont, est-ce qu'ils sont suffisamment solvables ou pas, et ça permettra aux retraités d'avoir une certaine assurance. Si on combine ça avec les achats de rentes, bien ça permettrait aux gens de véritablement partir à la retraite en se disant: Bien, voilà, voici ce que je vais recevoir, voici ce que j'ai accumulé dans mon régime de retraite, et je vais le recevoir tout le reste de ma vie, et ne pas avoir de surprise.

Alors, dans ce cadre-là, nous, je ne sais pas si nous sommes différents de d'autres sur cette question-là, mais la question de la solvabilité, mettons, du 107 %, pour l'appeler comme ça, nous, on est d'accord avec ça, malgré les risques que ça a et avec les nuances qu'on a mises dans notre texte, là. Marcel?

M. Pepin (Marcel): Un complément, peut-être. Tantôt, j'ai entendu des exemples où on parlait de 87 % de solvabilité, ou des choses comme ça, donc quelque chose qui était assez proche du 90 %. Ce n'est pas tellement ça qui est le problème. Évidemment, si on est autour d'une règle comme celle-là, passe encore. Mais, si on est dans un régime où on est à 74 % de solvabilité et là que les parties sont en négociation et décident d'améliorer un aspect ou un autre, que ce soient les rentes des retraités actuelles ou les rentes futures des actifs, et là que tout à coup la solvabilité descend à 66 % dans le régime, on pense que ça devient un problème de gérer les régimes comme ça.

Quand on parlait, dans l'introduction, de vendre du rêve, bien là on vient de faire une belle promesse, mais il n'y a pas d'argent dans le régime du tout pour faire face à ça. Et, si on se retrouve dans une situation d'entreprise qui ferme après, bien les promesses ne seront pas là pour y faire face. Alors, on pense qu'une plus grande rigueur dans l'approche de ces questions-là est une chose qui est la bienvenue. On le voit, le drame que ça fait dans certains cas, c'est vraiment dramatique. Mais, si on promet des choses pour lesquelles on ne met pas l'argent dans la caisse... On pense qu'il faut accélérer un peu les choses là-dedans et que ça, c'est une façon d'assurer la sécurité du plus grand nombre dans les régimes de retraite.

Mme Beaudoin: M. le Président? Alors, dans votre chapitre sur la gouvernance des comités de retraite, à la fin de la présentation de votre mémoire vous faites référence à l'énoncé de politique du gouvernement, Moderniser la gouvernance des sociétés d'État, et vous dites que ça contient plusieurs mesures qui pourraient renforcer la gouvernance des conseils d'administration. J'aimerais vous entendre à ce sujet-là parce que vous parlez en particulier, là, de nommer des membres indépendants compétents. De quoi s'agit-il?

M. Pepin (Marcel): Bien, écoutez, on s'est questionnés en regardant à la fois le projet de loi qui vient nous dire: Tiens, maintenant, il y aura un certain nombre de règles pour encadrer le travail des comités de retraite qui devront, avec tous leurs fournisseurs de services... tous les fournisseurs de services devront s'assurer, tout le monde, que les risques financiers qui sont pris par le régime sont bien évalués et qu'on prévienne le comité de retraite de ça, qu'il prenne toutes les mesures nécessaires pour faire face à ces risques-là qui pourraient se présenter. Bon, c'est une façon d'aborder les choses, mais, nous, on pense que ça va faire en sorte que les comités de retraite vont se faire prévenir par tout le monde qu'il y a toutes sortes de risques, qu'ils vont être obligés de faire faire toutes sortes d'études. C'est une façon de gouverner les choses.

Mais en même temps on a effectivement un projet de politique sur la gouvernance des sociétés d'État qui tombe pas mal dans la ligne internationale actuellement sur la gouvernance des entreprises de façon générale, où on vient dire: Assurons-nous de la meilleure compétence possible sur les conseils d'administration, assurons-nous d'une certaine diversité à l'intérieur des conseils d'administration. Donc, on pense qu'il y a des choses qui pourraient nous inspirer là-dedans pour s'assurer d'avoir, dans les comités de retraite, un maximum de compétences pour faire face aux exigences que représente l'administration d'un régime de retraite.

Alors, on n'a pas ciblé de façon précise, dans le mémoire: Prenez telle ou telle mesure, mais on pense qu'on pourrait s'inspirer de mesure comme celle-là et dire aux comités de retraite: Vous avez la responsabilité d'administrer ça au mieux, en bon père de famille ou je ne sais trop, alors assurons-nous que, dans ces comités-là, on ait un maximum de compétences pour faire face à ça. Donc, on pense que pourquoi ce serait différent, ça, des règles qu'on impose dans la gouvernance de d'autres niveaux.

Mme Beaudoin: Je vais laisser ma consoeur...

Le Président (M. Copeman): Mme la députée de Champlain.

Mme Champagne: Oui. D'abord, madame, messieurs, bonjour. Concernant l'équité, on le sait que, dans les divers mémoires qu'on a reçus, c'est un sujet qui est très, très sensible et un sujet sur lequel chacun a peut-être sa définition de l'équité.

Vous mentionnez dans votre mémoire... une partie de votre mémoire du moins, importante, sur l'équité dit à peu près ceci, que l'équité ne se mesure pas entre le groupe de travailleurs actifs et celui des retraités ? je partage ça, là ? mais bien entre les différentes générations de travailleurs. C'est plus large que ça. Il faut regarder plus large que juste une bataille entre les retraités qui disent: Je veux les surplus, puis les syndiqués qui disent: Non, non, non, c'est pendant qu'on est actifs qu'on doit les avoir.

Ça fait longtemps que j'ai dépassé cette ligne-là, parce que ça fait longtemps qu'on reçoit des groupes qui nous parlent de part et d'autre, puis notre tête se fait, là, en tout cas se fait davantage. Mais on a une loi à travailler, on va avoir à se positionner là-dessus, puis on va essayer d'être justes ou le plus juste possible envers tout le monde.

Et vous dites également que, quand il y a des surplus énormes, la question ne se pose peut-être pas. Il y a des groupes, des organismes, peut-être comme le vôtre, ou des entreprises plus particulièrement qui font un partage très équitable, puis on s'entend sur le terrain. Et vous tenez énormément à ce que ça demeure dans un moyen de négociation, qu'on n'en fasse pas une règle à tout crin, là, que la négociation se joue comme il se doit. Puis la ministre disait tout à l'heure qu'elle respecte ça entièrement, que ça doit se jouer à ce niveau-là.

Alors, moi, quand je vois ce débat-là qui se fait, quasiment un débat de générations, si vous étiez assis à notre place, ce qui pourrait être le cas, vous verriez ça comment, dans la loi, là, la partie importante pour en arriver à cette justice-là tout en ne prenant pas nécessairement tous les surplus avec un partage égal? Je le comprends, parce que, pendant que tu es actif, tu ramasses des surplus, mais parfois tu te ramasses avec des déficits, là. Puis, les caisses de retraite à surplus, il y en a de moins en moins. On s'entend?

Alors, pour éviter de glisser carrément vers le régime de prestations qu'on craint, celui qui va être à cotisation et qui peut être dangereux pour les travailleurs parce qu'il n'y aura plus de garanties là, mais pas pantoute, là, ce serait quoi, la méthode, le moyen, la ligne, dans le projet de loi, qui ferait cet équilibre-là auquel on tend tous, là, autant les retraités, que les syndiqués, que les parlementaires?

M. Roy (Louis): Marcel?

n(12 h 20)n

M. Pepin (Marcel): Écoutez, il y a différentes formules qui ont été énoncées par différents groupes. Tantôt, on a entendu l'idée: Tiens, plutôt que de reprendre la formule du projet de loi, assurons-nous qu'à l'avenir, lorsqu'il y aura disposition de surplus, on ait une indexation automatique partielle, à tout le moins, par exemple, des retraités. On pourrait penser à d'autres formules qui disent, par exemple: S'il y a une disposition de surplus, il y en a une proportion x qui correspond en partie au passif des retraités qui devrait être utilisée pour les retraités. Il y a différentes formules qui pourraient être imaginées en plus de celle qui est là.

Nous, on pense que c'est une question qui mérite examen aussi. On pense que c'est une question qu'on doit traiter. Encore une fois, notre position, c'est qu'on doit creuser encore cette question-là pour essayer de trouver un équilibre là-dedans d'ici 2010. Le projet de loi entrera en vigueur en 2010, ça nous donne un petit peu de temps pour encore creuser ces questions-là pour trouver une solution à travers ces différentes hypothèses là.

Quand on dit qu'il y a des problèmes entre les générations, c'est y compris entre les générations de retraités. Si on parle d'arbitrage sur la disposition des surplus, disons que, dans le secteur public, bon ? qui n'est pas soumis au projet de loi, là, mais supposons qu'il est soumis à une règle semblable ? disons qu'il y a une disposition de surplus aujourd'hui. Il se peut très bien qu'un retraité qui est parti en 1998, je pense, avec les programmes de préretraite, dise: Ah, tiens, moi, je suis passé à la caisse déjà, j'ai bénéficié de ces surplus-là, c'est correct que je ne rebénéficie pas de ceux qui passent maintenant. Mais celui de 1996 va peut-être lever le bras puis dire: Ah, tiens, moi, je ne suis pas passé à la caisse en 1998, et donc, moi, je veux un arbitrage, je veux savoir si les choses sont équitables. Là, donc, entre chaque catégorie, on va peut-être arriver à un arbitrage à la fin qui va nous dire: Les retraités de 1994 à 1996, eux, n'ont pas bénéficié de ceci et cela, donc il faudrait quelque chose, les retraités de 1982 à 1989, autre chose.

Écoutez, c'est un exercice, c'est un exercice extraordinaire, ça. Moi, j'ai déjà eu l'occasion de faire ça dans un régime de retraite, examiner toutes les sources et les dépenses de surplus sur une vingtaine d'années, et on ne l'a pas fait dans un contexte conflictuel, là, on avait un actuaire, on n'en avait pas trois, un pour l'employeur, un pour les salariés, un pour les retraités, on n'avait pas trois avocats non plus dans le dossier, là. Et, si on s'en va dans une formule d'arbitrage, c'est ça qu'on va faire et sur chaque disposition de surplus, à mon avis. Et ça, ça pose un fardeau qui est beaucoup trop grand sur les régimes. Et on pense que déjà la pression est telle sur les régimes que les employeurs, dès qu'ils vont arriver à un niveau de solvabilité à peu près neutre, là, dans les caisses de retraite, ils vont se dire: O.K., là, on sort de là, on arrête ça là.

Alors, la question va être réglée. La question va être réglée, on ne débattra plus de surplus. Tout le monde, on va se diriger très largement vers des régimes à cotisation déterminée, puis c'est les salariés qui vont écoper de toutes les difficultés qui vont se présenter, ils vont en écoper directement, soit des baisses de rendement, soit des taux d'intérêt faibles, puis ils n'auront pas de possibilité de se rattraper. On pense que, dans ces régimes-là, il y a quand même moyen de mutualiser les risques puis d'avancer par la négociation, et c'est ce qu'on doit faire. Et, sur cette question-là, la formule qui est là, on ne la considère pas réaliste. Il faut continuer à creuser puis essayer d'en trouver une qui réponde à ces problématiques.

Mme Champagne: Une autre petite question. Alors, si ce que vous proposez ensemble ici, ça a bien du bon sens, là, on va négocier, on va parler à nos travailleurs, à nos retraités, on va leur expliquer le danger de glisser vers l'autre régime, que, je pense, pas grand monde veut avoir, là, parce que le risque est grand pour le travailleur, puis, le jour où l'employeur va décider ? à moins d'une loi qui l'empêcherait de le faire, puis j'en doute ? qu'il ne peut plus se détacher de ce régime-là, s'il est dedans, afin d'éviter le danger, bien, puisque la négociation... Parce que, si la négociation avait fonctionné, là, on n'aurait pas eu des mémoires de groupes de retraités qui sont venus nous dire: Regarde, ça n'a pas marché par négociation, vous autres, le législateur, légiférez. C'est ça qu'on vient nous dire, là, et c'est là la demande.

Je sais qu'on a jusqu'en 2010, mais, entre les deux, vous autres, comme groupes syndicaux, vous vous préparez à faire quoi avec vos travailleurs, vos retraités? Vous allez leur parler bien évidemment, c'est des gens qui ont cotisé longtemps. Aujourd'hui, ils ont droit à leur cotisation, puis ils sont toujours inquiets de ne pas avoir un partage équitable. Alors, vous allez faire quoi, vous autres, comme organisme, pour les convaincre de, puis nous amener, nous autres, peut-être à prendre les meilleures décisions?

M. Roy (Louis): D'abord, Mme Joncas.

Mme Joncas (Nathalie): Moi, je comprends, là, il y a de l'argent, des fois il y a des surplus dans la caisse, puis je comprends que le monde voit ces surplus-là, puis c'est légitime que tout le monde dise: Il y a une partie qui me revient, ou je devrais avoir ça. J'ai de la misère à comprendre que les retraités disent: Écoutez, moi, je n'ai pas eu ma part. C'est quoi, la part? Pourquoi? Beaucoup de retraités sont partis avec des bonnes rentes, ils sont partis... ils ont des rentes indexées en partie. Et on voit, là...

Mme Champagne: ...les rentes garanties.

Mme Joncas (Nathalie): ...on va mesurer, là... Je vous dirais, là, j'ai pris des régimes de retraite où, les retraités, les rentes étaient indexées, partiellement, là, pas complètement, là, mais quand même il y avait des meilleurs rentes au départ que les rentes qu'on promet à ceux qui sont encore au travail. O.K.? Donc, ils ont des indexations puis des rentes. J'ai de la misère à penser que systématiquement, parce qu'il y a des surplus, on peut prétendre qu'ils n'ont pas eu leur part.

Le régime de retraite, là, c'est une série de règlements, il faut qu'il soit équitable dans son application, et chacun... Puis, je vous dirais, là, s'il y a 100 participants actifs, 100 retraités, il va y avoir 200 personnes qui vont avoir des choses différentes. Ce qui est important, c'est que les règles soient équitables pour tous. Une fois qu'on arrive, le surplus... Puis la règle, c'est... Comment on décide de l'attribution de ce surplus-là? C'est prévu souvent dans les régimes de retraite. C'est soit par entente ou des fois c'est l'employeur qui décide. Mais, une fois qu'on a fait ça, pour moi, là, si on met une mesure sur le partage des surplus pour dire: Voici, telle façon, c'est comme ça que ça va se placer, on touche à l'essence même du régime à prestations déterminées, et là automatiquement on le transforme en cotisation déterminée pour dire: Chacun va avoir une part qui est égale au montant accumulé avec intérêt. C'est comme si on tournait un peu en rond, là.

Donc, l'équité, s'il y a une équité parfaite du montant, cotisation avec intérêt, c'est cotisation déterminée. Si on veut préserver le sens du «prestations déterminées», c'est-à-dire avoir une souplesse pour répondre à des besoins ponctuels, essayer d'améliorer quand c'est le temps pour répondre justement à des besoins, puis travailler pour avoir la plus grosse rente de retraite au départ et non pas celle qui augmente le plus vite mais celle qui est le plus haut, bien il faut qu'on laisse cette souplesse-là. Si on ne l'a plus, on tue l'instrument, là, on tue le régime à prestations déterminées.

Mme Champagne: Parfait. Merci.

M. Roy (Louis): Et les résultats, les résultats des négociations qu'il y a eu dans le passé, c'est ça qui crée le régime de retraite. Et, moi, j'en ai vu, des discussions sur la pleine indexation, mais c'est les actifs qui disaient: Wo! un instant, c'est trop cher. Et, tu sais, on a des demandes salariales, on a des demandes sur du normatif, on a des demandes sur la retraite. Ce sont ces mêmes gens là qui ont fait ces débats-là, dans le passé, sur la pleine indexation de leur régime de retraite, là. Il ne faut pas se leurrer là-dessus, là. Ce n'est pas moi qui ai fait les débats sur les régimes de retraite, il y a 10 ans, dans telle entreprise, là, c'est les gens qui étaient là, dans cette entreprise-là. Et, à toutes les fois, les gens nous demandent, quand on est en négociation: Combien ça coûterait, faire la pleine indexation? Et on leur fait les calculs. Mais il nous disent: Wo, wo, wo! on ne montera pas les cotisations à ce niveau-là, là.

Alors, oui, le résultat du régime actuel des gens qui sont à la retraite... Peut-être qu'il y en a, des régimes, qui ne sont pas bons. J'entendais tantôt des... Vous savez, un régime, là, quelqu'un qui reçoit 15 000 $ par année de régime de retraite, vous aurez beau l'indexer, il va être dans la misère pareil, là. C'est bien mieux de travailler à avoir un excellent régime de retraite; c'est ça, l'important. Et, nous, on pense que les meilleurs régimes de retraite sont ceux à prestations déterminées. Mais ça, il faut les maintenir, et, pour les maintenir, bien il faut éviter de faire en sorte de mettre trop de pression sur ces régimes-là. Et c'est ce qu'on dit par rapport à ce projet de loi là. Et là je vois M. Copeman qui fatigue sur sa chaise...

Le Président (M. Copeman): Nous allons nous laisser là-dessus. Exact. Alors, M. Roy, Mme Joncas, M. Pepin, merci pour votre contribution à cette commission parlementaire au nom de la Confédération des syndicats nationaux.

Malgré le fait qu'il est prévu que nous siégions la semaine prochaine, c'est-à-dire mardi matin, nous allons écouter attentivement les avis touchant les travaux de la commission.

J'ajourne les travaux de la commission sine die. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 28)


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