L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des affaires sociales

Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le vendredi 9 novembre 2007 - Vol. 40 N° 15

Interpellation : La Politique du médicament


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Kelley): Messieurs mesdames, je déclare la séance de la Commission des affaires sociales ouverte. Je vais rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à l'interpellation du ministre de la Santé et des Services sociaux demandée par le député de L'Assomption sur le sujet suivant: La Politique du médicament.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui. Mme Lapointe (Crémazie) est remplacée par Mme Maltais (Taschereau).

Le Président (M. Kelley): Parfait. Très brièvement, je vais rappeler les règles du jeu pour une interpellation. Il y a des rotations avec les remarques préliminaires de 10 minutes pour la personne qui a posé l'interpellation; un droit de réplique de 10 minutes pour le ministre. Après ça, c'est les blocs de cinq minutes dans l'ordre suivant: un député de l'opposition officielle; le ministre et un député du groupe ministériel. Alors, on va faire le plus grand nombre de ces rotations possible. Vers 11 h 35, je vais réserver un cinq minutes pour le député du deuxième groupe de l'opposition. Finalement, il y a les remarques finales de 10 minutes du ministre suivies par les dernières 10 minutes qui vont être pour le député de L'Assomption, tout ça pour terminer, avec votre consentement, à 12 h 4.

Alors, s'il n'y a pas d'objection pour terminer à 12 h 4, sans plus tarder, je vais céder la parole à l'auteur de la motion ou de l'interpellation, M. le député de L'Assomption, pour un droit de parole de 10 minutes. M. le député, la parole est à vous.

Exposé du sujet

M. Éric Laporte

M. Laporte: Merci bien, M. le Président. J'aimerais d'abord commencer par vous saluer, saluer, bien entendu, M. le ministre, et ainsi que tout son personnel, ainsi que les députés. J'aimerais également saluer mes collègues qui sont ici, à mes côtés, pour cette interpellation. Je suis sûr que tout le monde est bien heureux d'être ici, ce vendredi, en avant-midi.

Je sais que le ministre était heureux de savoir qu'on aurait une interpellation concernant la Politique du médicament, donc on en conclut donc que le ministre va être généreux dans ses explications et dans ses commentaires. Donc, la raison pour laquelle on a demandé une interpellation, aujourd'hui, sur la Politique du médicament, ce n'est pas pour remettre en cause la politique en soi, c'est, bien entendu, pour s'assurer de l'application des mesures dont elle contient, c'est pour s'assurer que les mesures donneront des résultats, des résultats concrets, c'est pour s'assurer que tous les efforts seront mis en place pour la saine gestion du régime général d'assurance médicaments, entre autres, et pour la gestion du médicament dans l'ensemble, également. On veut voir aussi s'il n'y aurait pas moyen d'en faire plus, s'il n'y aurait pas de moyen de rajouter des éléments, entre autres, à l'usage optimal du médicament, qui est l'axe le plus important, selon nous.

Donc, c'est dans un souci de saine gestion et de transparence que nous avons demandé cette interpellation. Vous savez, M. le Président, mettre une politique sur papier, c'était souhaitable, c'était très attendu, mais ce n'est pas tout Ce qui est important, c'est l'application de cette politique. On a vu trop souvent, de la part du gouvernement en place, on a vu trop souvent le gouvernement pondre de beaux rapports pour ensuite se déconnecter de la réalité. Donc, aujourd'hui, ce qu'on a l'intention de faire, c'est d'exercer notre mandat de surveillance, d'exercer notre rôle d'opposition officielle. On a eu certaines inquiétudes dernièrement quant à la gestion du ministre, de son régime, entre autres. Juste à penser au cafouillage sur les marges bénéficiaires des grossistes, entre autres, également en pensant au recul qu'il a eu sur ses promesses de 2003 avec l'adoption du projet de loi n° 24. Également, on était inquiets de voir que, dans sa propre politique, certaines des mesures qu'il a mises en place, il est incapable de les respecter, de les mettre en application, dont, entre autres, les ententes de partage de risques avec les fabricants.

On a aussi des inquiétudes quand on regarde les statistiques qui concernent le médicament, l'usage du médicament au Québec. Vous savez, on est rendus à près de 14 % des dépenses du système de santé et des services sociaux. En son ensemble, 14 %, c'est les médicaments qui en sont sont responsables.

Donc, le médicament prend une place de plus en plus importante dans tout ce qui est santé et services sociaux au Québec. C'est donc important pour nous, c'est donc normal pour nous d'y accorder l'importance qu'il mérite, dont la raison pour laquelle nous sommes ici, aujourd'hui. C'est donc normal de surveiller son évolution puis surtout son utilisation. Après tout, le coût total des médicaments au Québec, le coût total pour les personnes assurées par le régime général d'assurance médicaments, c'est rendu près de 3 milliards.

Dans la Politique du médicament, l'axe de l'usage optimal est selon nous, comme je le disais tantôt, l'axe le plus important, puis c'est d'ailleurs ce que pense aussi le Collège des médecins. Je vais vous citer un extrait qu'on peut lire dans le mémoire qui a été déposé par le Collège des médecins: «La notion d'une utilisation optimale des médicaments est apparue tardivement. Mais elle constitue maintenant, selon nous, la seule voie d'avenir. [...]Pour le gouvernement et le gestionnaire, une utilisation optimale pourrait permettre de dégager la marge de manoeuvre budgétaire nécessaire à la viabilité du régime et à l'intégration des nouveaux médicaments, tout en améliorant l'efficience et l'efficacité et en réduisant, notamment, les coûts associés aux effets secondaires des médicaments. [...]L'utilisation optimale est en fait un objectif qui devrait permettre d'atteindre les trois autres...»

Donc, on pense exactement la même chose que le Collège des médecins sur cet aspect-là.

n(10 h 10)n

Beaucoup de monde s'entendent pour dire que nous avons au Québec un régime de remboursement d'assurance médicaments très généreux. Les Québécois consomment beaucoup de médicaments, que ce soit pour les médicaments avec ordonnance ou encore ceux qu'on retrouve en vente libre sur les tablettes de la pharmacie. Au Québec, en 2006, les dépenses totales en médicaments ont atteint 6,2 milliards, 86 % venant des médicaments avec ordonnance et 14 % pour ceux en vente libre. Selon Statistique Canada, les dépenses moyennes en médicaments sur ordonnance ont augmenté de 71 % entre 1992 et 2002. À titre de comparaison, les dépenses globales des ménages pour les soins de santé ont augmenté de 53 % pendant la même période. Les dépenses d'alimentation, d'habillement, de logement ont quant à elles augmenté de seulement 11 %. Québec vient en tête de liste pour le grand nombre d'ordonnances par habitant. Ainsi, en 2003, les médecins du Québec ont rempli 84 millions d'ordonnances pour les 3,2 millions de personnes inscrites au régime public d'assurance médicaments, soit une moyenne de 26 ordonnances par personne. Enfin, le citoyen québécois dépense en moyenne 808 $ par année, en médicaments, ce qui le place en deuxième place au Canada, tout juste derrière le citoyen ontarien. Puis, si on regarde le montant qui est dépensé pour les médicaments prescrits, bien là le Québec est bon premier, loin devant l'Ontario.

Selon l'Agence de santé publique du Canada, les aînés dépensent entre 20 % et 40 % de tous les médicaments de prescription. D'ailleurs, une étude canadienne datant de 2001 montre que les personnes âgées consomment 10,5 médicaments différents par jour, en moyenne. Les médicaments les plus prescrits au Québec sont, dans l'ordre, les analgésiques, antidouleurs, antihypertenseurs, anti... non, pas anti, hypolipémiens ? là, c'est là qu'on peut voir que je ne suis pas médecin de formation ? les antihypothyroïdes et les psychotropes ou les antidépresseurs.

Parlant des antidépresseurs, entre 1999 et 2003, les prescriptions ont augmenté de 80 % au Canada. Ils sont également deux fois plus prescrits aux femmes qu'aux hommes. On parle beaucoup de problèmes de surconsommation chez les jeunes aux prises avec des problèmes de santé mentale. D'ailleurs, le Dre Patricia Gravel, de l'Hôpital Sainte-Justine, rapportait récemment que les pédopsychiatres prescrivent beaucoup trop d'antidépresseurs aux jeunes. Même chose du côté des aînés. Les données de l'enquête sur la santé mentale des Montréalais ont mis en évidence une forte consommation d'antidépresseurs chez les personnes âgées. Le taux, chez les 65 ans et plus, est de 22 %, nettement plus élevé que celui des 18 à 64 ans qui est de 9 %.

Aussi, une étude de l'Université de Montréal a mis en lumière qu'au-delà des caractéristiques des individus, des attitudes et des valeurs largement véhiculées dans notre société, par rapport à la vieillisse, au vieillissement et aux médicaments psychotropes, sont... excusez, au vieillissement et aux médicaments... sont à l'oeuvre pour encourager un recours chronique et à long terme de ces produits. Voilà un point important. Il y a une tendance sociale ici. Pas seulement au Québec, bien sûr c'est en Amérique du Nord au complet. Il y a cette espèce de tendance à aller vers le plus facile: la pilule.

La Politique du médicament regroupe quatre axes différents, dont celui de l'usage optimal dont je mentionnais tantôt, mais il y a également l'accessibilité aux médicaments, l'établissement d'un prix juste et raisonnable puis le maintien d'une industrie biopharmaceutique dynamique au Québec.

Donc, ma question. Je viens de faire un petit peu l'historique de la politique puis aussi, là, j'ai décrit un petit peu les problèmes qu'on reconnaît dans la société. Dernièrement, le médicament a été quand même un sujet chaud dans l'actualité. On a parlé beaucoup du médicament. Donc, je considère qu'aujourd'hui c'est une belle occasion de faire la lumière sur tous les problèmes, de regarder un petit peu les statistiques puis de voir quelles en sont les conséquences. On peut déjà en déterminer plusieurs, mais je pense que c'est important aussi si on pouvait réussir à chiffrer certains problèmes, certains coûts reliés à certains problèmes pour ensuite être en mesure d'avoir une stratégie un petit plus détaillée, un petit plus efficace. Donc, ma question au ministre, c'est: Comment la Politique du médicament et ses quatre axes peut-elle contrer cette tendance sociale, la tendance à utiliser de plus en plus de médicaments... consommation chronique de médicaments? Donc, autrement dit, on va commencer assez large, de façon assez large, pour que le ministre puisse avoir l'occasion de nous expliquer son point de vue puis de nous expliquer un petit peu sa stratégie au-delà de seulement la Politique du médicament. Je vous remercie.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député, pour cette mise en scène de notre sujet. Je suis prêt maintenant à céder la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux, et député de Jean-Talon, et responsable pour la Capitale-Nationale.

Réponse du ministre

M. Philippe Couillard

M. Couillard: J'avais peur que vous oubliiez une partie particulièrement importante de mes responsabilités, M. le Président. Je voudrais, à mon tour, saluer mes collègues de l'opposition, M. le député de L'Assomption, qui est à l'origine de notre présence ce matin, ensemble, M. le député de La Peltrie, qui est avec nous, Mme la députée ? excusez-moi ? de...

Une voix: ...

M. Couillard: ...de Masson, pardon. Ma mémoire m'a brièvement fait défaut.

De notre côté, vous aurez constaté la présence de M. le député de Laurier-Dorion, également ma directrice de cabinet, Mme Rouleau; membres de mon cabinet, M. Lefèvre. Derrière moi, de votre droite vers la gauche, vous remarquerez la présence de Mme Lucie Robitaille, qui est la directrice générale du Conseil du médicament; Mme Hélène Beaulieu, du ministère de la Santé et des Services sociaux; M. Gaudet, de notre ministère, également dans le domaine des médicaments; et, à l'extrême gauche, M. Simard, de la Régie de l'assurance maladie du Québec. Donc, on a avec nous les ressources pour répondre et avoir une discussion intéressante. Puis les thèmes qui ont été abordés par notre collègue en introduction me semblent dignes d'une discussion extrêmement intéressante. On a deux heures pour la faire. J'espère qu'on pourra toucher la plupart d'entre eux.

Bien, je voudrais peut-être faire quelques remarques d'introduction. Le député aura partiellement la réponse à sa question dans mes remarques d'introduction. Je ne lirai pas entièrement, rassurez-vous, les feuilles qui ont été préparées pour moi, mais je garderais certains éléments importants pour qu'on puisse lancer la discussion.

D'abord, c'est qu'effectivement le médicament, de l'avis de tous, fait partie du système de santé. Loin de nous l'époque où on considérait le système de santé de façon isolée par rapport aux médicaments. Le médicament et son accès correspondent à une partie absolument majeure dans le système de santé, surtout dans un système de santé public comme celui du Canada et du Québec, et, s'il est vrai que la question de la consommation des médicaments est importante et doit retenir notre attention, il ne faut pas oublier l'envers de la médaille qui est le fait que les Québécois ont accès aux médicaments et même plus accès aux médicaments dans certains cas que les autres Canadiens. D'ailleurs, au cours des dernières années, l'ensemble des questions qui m'ont été posées sur les médicaments, et je note que le ton est différent ce matin, mais l'ensemble des questions avaient plutôt lien avec le fait qu'un médicament n'était pas disponible: Pourquoi tel médicament n'est pas disponible?, plutôt que des discussions plus larges comme celle que semble vouloir avoir l'opposition ce matin, et j'en suis heureux.

Il faut également rappeler ce qui se produisait avant la mise sur pied du régime général d'assurance médicaments. En passant, ce n'est pas mon régime, c'est le régime qui est là depuis des années, puis je pense qu'il faut s'abstenir de toute propriété envers soit nos postes, soit nos sièges de députés, soit les régimes publics qu'on gère comme élus, pendant quelque temps. Ce régime-là est survenu alors qu'il fallait certainement combler un vide qui était qu'environ 1,5 million de personnes ? il faut quand même nous rappeler cela, là; 1,5 million de personnes ? au Québec n'avaient aucune protection quant à l'impact financier des médicaments. Alors, actuellement, on a 3,2 millions de personnes ? c'est une statistique intéressante, je crois ? qui sont assurées par le régime public, tandis que les régimes privés couvrent 4,4 millions de personnes. Et on peut déjà dire de façon intéressante que, dans le régime public, on ne retrouve pas que des personnes assurées, mais également des personnes qu'on pourrait dire assistées, c'est-à-dire des personnes qui ont des revenus très bas, auxquelles l'État, les contribuables en fait fournissent l'accès aux médicaments.

Il était question, à la naissance du régime d'assurance médicaments, en 1997, de la mise sur pied d'une politique en matière de médicaments, et bien sûr cette politique a été mise en place progressivement, à notre arrivée au gouvernement, avec d'abord un projet de politique qui a fait l'objet d'une longue consultation en commission parlementaire, par la suite un projet de loi n° 130 qui a été adopté à l'Assemblée nationale pour donner les pouvoirs nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de la politique et la publication finalement, le 1er février dernier, de la version finale de la Politique du médicament, qui reprend pour l'essentiel les propositions de 2004 avec certaines modifications. La politique regroupe 29 orientations ministérielles qui visent à favoriser, on l'a dit, l'usage optimal des médicaments, à garantir l'accessibilité aux médicaments et également la fixation juste du prix et le maintien au Québec d'une industrie pharmaceutique dynamique qui est source de prospérité pour notre société.

Lorsque notre collègue parle de l'impact financier des médicaments, il a raison, l'impact financier des médicaments, dans notre système de santé, est majeur et il est majeur dans tous les systèmes de santé du monde. La différence, c'est la part qu'en prend l'État, au Québec, par rapport à d'autres États d'Amérique du Nord, par exemple, où le pourcentage des dépenses de médicaments prises en charge par l'État au Québec est plus élevé, ce qui donne plus accès, aux gens à faible revenus au Québec, aux médicaments que ce n'est le cas dans d'autres provinces canadiennes. Mais c'est exact et c'est un point de comparaison, qui fait toujours sourciller les gens, que, si on compare la dépense en médicaments avec la dépense, par exemple, qu'on consacre à payer les professionnels de la santé, notamment les médecins, c'est devenu presque équivalent, c'est-à-dire que la dépense en médicaments combinée du régime général d'assurance médicaments, les dépenses médicaments en établissement, parce que c'est un autre versant des médicaments dont il faut parler également, c'est près du montant total que regroupent les deux masses monétaires des omnipraticiens et des médecins spécialistes.

n(10 h 20)n

Donc, on voit là l'impact financier important des médicaments, et encore une fois il ne faut surtout pas donner l'impression à nos concitoyens qui écoutent ? concitoyennes ? que ce n'est qu'au Québec qu'on a à vivre ce défi de l'augmentation du prix du médicament. La différence, dans d'autres pays, c'est qu'on a les mêmes pressions financières, mais c'est les gens qui, à même leurs finances personnelles, y font face. En d'autres termes, si vous êtes malade, c'est votre problème, trouvez-vous de l'argent pour payer vos médicaments. Il y a même des provinces canadiennes où c'est encore comme ça, tandis qu'au Québec cette pression financière est, je dirais, diffusée, dans l'ensemble de la société, par la présence de régimes publics et privés qui font en sorte que l'ensemble des citoyens participent à cette dépense-là.

Alors, il y a un plan de mise en oeuvre. Il y a quelques actions concrètes ? je pourrais peut-être terminer le temps qui m'est imparti pour la première intervention là-dessus ? l'exemple de quelques actions concrètes qui proviennent de la mise en oeuvre de la politique, d'abord la question de la fin de la politique de non-augmentation des prix, ce qu'on appelle, dans le langage quotidien, le gel des prix, qui existait depuis 1993. On aura l'occasion d'y revenir. Donc, il y a eu un mouvement, depuis le 18 avril 2007, qui était obligatoire. On y reviendra. Dans plus de 85 % des cas, les hausses de prix, en 2007, ont été égales ou inférieures à 2,03 %, donc la vaste majorité des cas. Certains médicaments, on aura l'occasion d'y revenir, ont eu des augmentations plus importantes, mais il s'agissait de médicaments uniques, à faible coût en général, qui étaient menacés de disparaître de nos tablettes et pour lesquels on voulait protéger l'accessibilité pour l'ensemble des citoyens.

On a également alléger la mécanique. Et je pense que les députés sont souvent mis en contact avec des médecins qui se plaignent de la lourdeur du processus de médicaments d'exception. On a introduit la codification pour maintenant 49 % du nombre de médicaments d'exception inscrits à la liste. Alors, au lieu de remplir un long formulaire, ça peut être fait en ligne maintenant, le plus souvent avec un code numérique.

La gratuité des médicaments a été étendue à 325 000 personnes depuis 2003. Je pense qu'on aura l'occasion d'y revenir. On permet également au Conseil du médicament de faire une évaluation prioritaire d'un médicament si son introduction peut engager des économies substantielles pour le régime. Et on a fixé le seuil à 200 000 $ par mois. Il y a déjà deux médicaments qui ont été inscrits au régime, en raison de cette politique-là, de cette mesure-là. Il s'agit de deux versions génériques de médicaments ? il est inutile peut-être de mentionner leurs noms, on pourrait y revenir ? mais qui ont été inscrits prioritairement, en raison du potentiel d'économie qu'ils comportaient.

Il y a également les profils de prescription des médecins, qui devraient être envoyés à partir, je crois, de juin 2008. Il y a la Table de concertation du médicament qui a été mise sur pied pour la question justement de mesures d'usage optimal. Et je suis d'accord avec le député, avec mes collègues que c'est probablement l'axe le plus prometteur en termes d'actions novatrices au cours des prochaines années de la politique. Les autres sont importants également, mais celui-ci l'est particulièrement. Donc, une table de concertation dont la première rencontre s'est tenue le 2 octobre... Il y a également l'encadrement des avantages professionnels liés aux pharmaciens propriétaires ? on pourra peut-être y revenir si on a le temps pendant l'échange ? qui est maintenant fixé à 20 %. Il y a la question de la marge des grossistes sur laquelle on a déjà échangé en commission parlementaire et sur laquelle on pourra revenir aujourd'hui.

Il y a le nouvel encadrement des coûts des médicaments génériques, qui baissent au Québec, en pourcentage du médicament d'innovation. Et, autant dans le médicament d'innovation que dans le médicament générique, il ne faut jamais perdre de vue un aspect fondamental de la situation québécoise, qui est la règle du prix le plus bas. C'est-à-dire que, quels que soient les encadrements des autres provinces canadiennes, les Québécois paient toujours les médicaments moins cher que dans les autres provinces, et ça, c'est très important de se le rappeler. C'est une politique que nous avons conservée, qui était en place depuis quelques années et qui est demeurée intacte.

Le Conseil du médicament devra définir, d'ici septembre 2008, un cadre d'évaluation des médicaments commercialisés dans le traitement des maladies métaboliques héréditaires. On va également régir les activités de recherche dans les centres hospitaliers, surtout ce qu'on appelle les activités de phase IV, qui souvent servent également d'outils de mise en marché de certains médicaments. On veut clarifier la question sur ces questions-là.

La question des médicaments ambulatoires. Des projets pilotes seront amorcés, d'ici la fin de 2008, en matière de révision de la médication à domicile ? ça, c'est particulièrement important pour les personnes âgées ? de même que la transmission de l'intention thérapeutique. Et, comme je l'indiquais plus tôt, les premiers profils de prescription devraient être réalisés d'ici juin 2008.

On a sensibilisé les établissements d'enseignement pour que les professionnels de la santé soient mieux formés à la question de l'usage optimal. On a introduit la question des codes de pratique commerciale. On aura l'occasion d'y revenir. Et on a maintenu, pour l'axe de présence de notre industrie pharmaceutique au Québec, des mesures d'attraction qui d'ailleurs ont un impact, parce que ? on aura l'occasion d'y revenir ? il y a plusieurs dizaines et millions de dollars d'investissement pharmaceutique qui ont été annoncés dans les derniers mois, au Québec, et d'autres à venir au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Ça, ça veut dire des emplois pour les Québécois, des emplois de haut niveau et une prospérité ajoutée.

Et le plus intéressant ? et je viens juste de l'apprendre il y a quelques instants ? c'est que déjà on a des impacts, déjà nous obtenons des impacts concrets de nos actions pour l'usage optimal avec un changement de pratiques déjà perceptible dans au moins deux classes de médicaments. On aura donc l'occasion d'y revenir, M. le Président.

Donc, en conclusion, je pense qu'il y a lieu, comme Québécois, de se réjouir que notre gouvernement ait proposé et adopté une politique du médicament qui actuellement fait l'état de commentaires élogieux non seulement au Canada, mais dans le monde entier, où l'ensemble des États cherchent une coexistence entre l'industrie pharmaceutique, le besoin des patients et les finances publiques, ce que nous avons réalisé avec cette politique. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Merci beaucoup, tout le monde, pour votre discipline.

Alors, on va commencer notre rotation des blocs de cinq minutes en rappelant que c'est le député de l'opposition officielle, le ministre et le député ministériel. Sans plus tarder, je vais céder la parole à M. le ministre... à M. le député de L'Assomption.

Une voix: ...

Argumentation

M. Éric Laporte

M. Laporte: C'est ça, n'anticipons pas. J'aimerais continuer sur l'usage optimal du médicament, puisque, comme j'ai dit tantôt, là, j'y accorde une grande importance.

J'aimerais qu'on se concentre principalement, pour ce bloc, sur la valeur thérapeutique. Les médicaments ont certes une grande valeur thérapeutique. Beaucoup de gens vivent plus vieux et surtout vivent mieux grâce aux médicaments. Ils ont des objectifs de guérison, d'apaisement de la douleur, de ralentissement ou de contrôle d'une maladie, mais les médicaments ont également des effets secondaires. Donc, je pense que c'est important de souligner toute l'importance qu'ont les médicaments. Certaines personnes sont en vie aujourd'hui grâce aux médicaments. Dernièrement, dans l'actualité, on a peut-être un petit peu oublié de signifier toute l'importance du médicament dans la vie de plusieurs personnes, donc je considérais que c'était important de le souligner, mais par contre c'est important également de parler des désavantages et des inconvénients.

Les effets secondaires peuvent à leur tour être mal interprétés comme symptômes d'autre chose ou d'une aggravation de l'état de la personne, ce qui complique la situation et peut conduire à des prescriptions supplémentaires, et à d'autres effets secondaires, et ainsi à une dépendance possible. Ainsi, prescrire un médicament n'est pas neutre. Les effets induits ne sont pas toujours légers et peuvent être graves. On a eu des exemples, là, dernièrement des effets très graves d'une mauvaise médicamentation.

Les médicaments peuvent aussi être mal utilisés. Je vais vous donner quelques statistiques pour nous éclairer un petit peu sur la situation concernant l'usage sous-optimal des médicaments. En 2005, 10 % des adultes canadiens souffrant de problèmes de santé ont déclaré avoir subi des erreurs de prescription ou de posologie de médicaments; 18 % à 50 % des médicaments pris par une personne âgée ne sont pas utilisés de façon appropriée; entre 19 % et 28 % des hospitalisations de patients de plus de 50 ans sont imputables à des problèmes de médicaments. Pour l'ensemble de la population au Québec, on parle de 10 %. Aux États-Unis, c'est énorme également, les chiffres. Donc, on est conscients que ce n'est pas un problème strictement québécois, mais c'est un problème qui mérite toute notre attention, surtout que ça a des effets importants sur le coût du système de santé en général. 60 % de ces hospitalisations sont imputables à des réactions indésirables aux médicaments et 40 %, à la non-conformité aux indications.

Donc, on parle souvent, également, qu'on consomme trop de médicaments, mais il faut faire attention aussi parce que souvent les gens ne vont pas consommer la totalité des médicaments qui leur sont prescrits, puis ça, ça fait en sorte qu'ils vont être mal soignés, puis ils vont devoir avoir d'autres prescriptions souvent plus fortes pour pouvoir combler la différence.

Des études ont estimé que les coûts de l'usage non conforme de médicaments au Québec sont de l'ordre de plusieurs milliards par année, probablement un coût équivalent à celui des maladies coronariennes. La quantité totale de médicaments consommés par les personnes âgées, la non-conformité et la prescription inappropriée des médicaments sont parmi les facteurs qui contribuent à ces coûts. Il y a une certaine forme de danger associée à la consommation de médicaments, et ce message n'est pas tout à fait assez bien véhiculé.

Ce qui m'amène à deux petites phrases que l'on retrouve dans la Politique du médicament, qui sont les suivantes: «En tant que mandataire de la population, le gouvernement doit rechercher dans l'ensemble de ses activités la meilleure utilisation possible des ressources dont il dispose. C'est là un [des principes] de saine gestion administrative universellement [reconnus]. Bien entendu, ce principe s'applique aux médicaments.» Donc, au-delà du médicament, ce principe ne devrait-il pas s'appliquer au traitement de la maladie dans son ensemble? Et je parlais des saines habitudes de vie. On a parlé aussi d'enlever la malbouffe dans les écoles. Donc ça, c'est des moyens effectivement qui peuvent contribuer à améliorer l'usage optimal du médicament. Par contre, est-ce qu'on ne devrait pas aller plus loin?

Je vais vous donner l'exemple, supposons, d'un citoyen, un homme ou une femme, d'une quarantaine ou d'une cinquantaine d'années qui se présente chez son médecin de famille, puis là, dans mon exemple, l'homme ou la femme sont chanceux parce qu'ils ont un médecin de famille. Donc, il arrive avec une bonne dose de surplus de poids, chez son médecin, avec l'objectif de perdre du poids. Son médecin va lui remettre une copie du guide alimentaire, va lui remettre un pamphlet pour expliquer comment faire des redressements assis, des push up, une bonne tape dans le dos mais sans plus. Il n'y a pas un suivi qui est fait, il n'y a pas un suivi assez rigoureux qui est fait présentement pour accompagner ces personnes-là, donc on est conscients qu'il y a un manque de ressources à ce niveau-là, dans notre système de santé. Le citoyen gagnerait sûrement à être mieux renseigné sur sa nutrition, sur la pratique d'activités physiques.

Puis j'ai lu, dans un document qui avait été déposé au symposium de 2004, un document de M. Michael Rachlis... Rachlis, excusez-moi la prononciation; Rachlis ? qui donnait, entre autres, comme piste de solution, la thérapie non médicamenteuse, donc vous utilisez les diététistes, les physiothérapeutes, etc. Donc, ma question: Pourquoi la Politique du médicament n'inclut pas toutes les formes de thérapies non médicamenteuses pour aider à l'usage optimal du médicament?

n(10 h 30)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien, je vais être sympathique avec mon collègue, là. C'est parce que c'est la Politique du médicament. On ne peut pas regrouper toutes les interventions d'un système de santé dans un document qui porte sur les médicaments. À un moment donné, ou bien on parle du médicament ou bien on parle de tout, mais il faut se concentrer sur ça.

Mais la question, cependant je ne veux pas la balayer parce qu'elle est importante puis je veux peut-être la reformuler parce que je ne pense pas que personne s'attendait, lorsqu'on a annoncé une politique du médicament, qu'on annonce une politique de toutes les interventions santé possibles en amont, en aval, etc. Ça, c'est pris en charge par d'autres programmes, puis on pourra en parler certainement. Il est question également de mesurer de cette façon l'impact des médicaments sur le reste du système de santé, et ça, on le fait également avec le Conseil du médicament.

Et je donne toujours le même exemple. Lorsque j'étais ? maintenant, les années passent de plus en plus vite, M. le Président ? en formation comme interne dans les hôpitaux, je me souviens très bien, à chaque semaine, il y avait des gens qui étaient opérés pour des ulcères d'estomac. Chaque semaine. C'était comme une intervention aussi routinière que les pierres au foie ou enlever la vésicule. Il est apparu un médicament à l'époque qui était la cimétidine. Je me souviens, on appelait ça le Tagamet, le nom commercial. Du jour au lendemain, ces interventions ont quasiment disparu des listes opératoires. Les seules personnes qui étaient opérées pour un ulcère d'estomac, c'est celles qui avaient malheureusement une perforation ou un problème associé, une complication d'ulcère d'estomac. Alors, on pourrait isoler le Tagamet ou n'importe quel médicament puis dire que ça coûte très cher, mais, si on fait l'équilibre de ce que ça coûte de façon isolée, dans le médicament, puis de ce que ça coûte généralement pour le système de santé, on pourrait conclure et on pourra conclure certainement que l'introduction de ce médicament-là a eu un effet global d'économie sur le système de santé, et je pense que c'est important toujours de ne jamais perdre ça de vue.

Je suis très content également que notre collègue parle de l'usage optimal de deux façons, parce que, de façon un peu prosaïque, on dit: L'usage optimal, c'est la surutilisation des médicaments. Ça peut être également la sous-utilisation des médicaments, l'usage non optimal. Et je pense que, ça, il faut le rappeler. Exemple: lorsqu'un médecin vous donne une prescription d'antibiotiques pour sept jours ou 10 jours, bien il faut la prendre sept jours ou 10 jours, sinon l'effet recherché ne se produit pas. Même chose pour les médicaments pour l'hypertension ou pour d'autres types. On a vu récemment une étude qui montrait que les personnes recevant des prescriptions pour les médicaments qui baissent le cholestérol souvent abandonnent la prise du médicament au cours des semaines et des mois qui suivent. Donc, c'est important de parler de cela également sous les deux versants: le versant de sur et de sous-utilisation.

Lorsqu'on parle des impacts des erreurs de prescription ou des effets indésirables, encore une fois notre collègue a tout à fait raison parce que c'est des statistiques qui sont disponibles publiquement, et il y a des outils qu'on met en place, qui vont pouvoir aider, je dirais, à pallier à ce problème-là, notamment l'informatisation du réseau de la santé. Souvent, j'avais toujours la même image de la personne qui arrive au cabinet de médecin avec pas de médicament avec elle. Donc, elle dit prendre cinq, six, sept, huit produits différents mais ne peut les nommer. Ce qui est amusant, c'est que les gens disent toujours au médecin: Bien, c'est la petite pilule jaune circulaire ou la pilule rouge carrée, en pensant qu'il y a un lexique, dans chaque bureau de médecin, de formes et de couleurs de médicaments qui permet de les identifier, ce qui n'est pas le cas.

Alors, le fait de pouvoir identifier rapidement, sur un écran d'ordinateur, tous les médicaments consommés par une personne en temps réel peut avoir un impact absolument majeur.

Il y a plusieurs éléments de la politique qui touchent l'usage optimal. On va les discuter, je suppose, dans nos échanges, de façon plus détaillée, mais il faut se souvenir de quelque chose cependant, quand on discute ça, c'est qu'avant l'usage optimal repose sur des changements de comportement de la part des citoyens, de façon à ce qu'on ne s'attende pas obligatoirement à avoir une prescription chaque fois qu'on va chez le médecin, et des changements de comportement de la part des prescripteurs, surtout les médecins, également à un moindre degré les pharmaciens. Et les changements de comportement et les changements d'habitudes et les changements de pratiques professionnelles ne se décrètent pas et ne se légifèrent pas. On peut avoir l'ambition de le faire, mais en pratique ça ne peut se faire. Il s'agit de sensibiliser les gens, de les amener à participer avec tous leurs partenaires à des programmes autour de projets concrets comme ceux qu'on va discuter aujourd'hui, qui permettent à tous de se réunir derrière le concept d'usage optimal, mais c'est une illusion de faire croire à la population ? je suis certain que ce n'est pas ce que le député veut faire ? qu'il suffit d'appuyer sur un bouton quelque part à Québec pour que les médecins arrêtent de prescrire tel médicament et prescrivent plutôt tel autre. Ce n'est pas comme ça que ça se produit en pratique, et je pense que les citoyens seraient assez inquiets s'ils pensaient que l'État se mêle de guider le crayon de leur médecin lorsqu'il doit faire ses prescriptions ou ses choix thérapeutiques.

Avec beaucoup de raison, le député de L'Assomption parle de l'importance de la prévention dans toute la prise en charge des personnes, et ça va beaucoup plus loin que les médicaments. Je voudrais quand même le ramener sur un plan, qui à mon avis doit être un plan que l'ADQ écoute de façon sympathique, là. Effectivement, on peut aller chez le médecin se faire donner un programme d'exercices puis une diète puis même parfois rencontrer le diététiste dans un établissement ou de façon privée, mais la responsabilité personnelle, ça existe aussi, là, puis je pense que c'est un concept sur lequel l'ADQ est sensible. Ce n'est pas le gouvernement qui va tout faire, là. À un moment donné, il faut les faire, les exercices, puis il faut les changer, les habitudes alimentaires. Et ça revient à chacun d'entre nous de les faire.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Maintenant, je vais céder la parole au député de Laurier-Dorion. La parole est à vous.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos: Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer M. le ministre, saluer le président ainsi que mes collègues et l'entourage de M. le ministre.

Moi, je dois vous dire, de ma compréhension de la Politique du médicament, je ne vois qu'un geste qui est très, très, très positif pour la population du Québec. Et c'est sûr et certain que, si on était pour regarder, aller en détail à l'intérieur de la politique, on pourrait trouver quelque chose, des détails à critiquer, mais ce qui est important pour moi, c'est: lorsque nous sommes appelés à étudier et évaluer un projet de ce genre là, ce serait de regarder dans l'historique des choses et voir où on se situait avant cette politique-là et qu'est-ce qui s'est passé avant.

Et évidemment j'aimerais peut-être retourner en 1997, avec le régime général d'assurance médicaments qui a été mis en place. On sait qu'avant cette période-là la couverture n'est pas ce qu'elle est aujourd'hui. Et évidemment, avec la Politique du médicament, on vient resserrer, augmenter la couverture, contrôler le prix des médicaments tout en se montrant équitables aux compagnies pharmaceutiques en protégeant l'accès aux médicaments qui auraient peut-être quitté le marché si nous n'avions pas agi, tout en mettant la priorité aussi sur l'usage optimal dont a parlé et fait état mon collègue de L'Assomption et en essayant en même temps de soutenir l'industrie biopharmaceutique au Québec, qui est très importante pour l'économie en termes d'emplois, en termes d'investissement. Je suis député de Laurier-Dorion, donc sur l'île de Montréal, et je peux vous dire que l'industrie pharmaceutique est très importante pour l'économie sur l'île de Montréal, pour les emplois, pour les investissements.

Mais, pour évaluer la crédibilité de cette politique, qui a été d'ailleurs saluée par le milieu, par les intervenants qui ont vécu les situations qui existaient avant la politique et avant le régime général d'assurance médicaments, j'aimerais que le ministre puisse nous expliquer un petit peu plus spécifiquement du processus qui a mené à l'élaboration de cette politique, parce qu'évidemment il fallait qu'il y ait un certain diagnostic de la situation, ce qui existait avant le régime général d'assurance médicaments, ce qui existait un petit peu avant la Politique du médicament, pour pouvoir faire la comparaison, parce que d'après moi, M. le Président, le succès ou le progrès se mesure, à mon humble avis, par la distance parcourue entre ce qui existait avant et ce qui existe en ce moment.

Alors, afin d'évaluer et peut-être démontrer à mes collègues la crédibilité de cette politique et cette démarche, j'aimerais que le ministre nous entretienne un petit peu sur le processus et le travail qui a été fait dans l'élaboration de cette politique-là, les consultations qui ont été menées. On sait qu'il y a eu des consultations, menées, de groupes qui ont été consultés. Alors, je ne veux pas vous parler longuement du Conseil du médicament. Je crois que le ministre aurait des choses à nous dire là-dessus.

Mais c'est le sens de mon intervention. Peut-être pour situer les choses en contexte. Je crois que ça peut aider tout le monde dans leur compréhension. Ça peut aider les citoyens qui nous écoutent chez eux, aujourd'hui, de faire la comparaison: Qu'est-ce qui se passait avant? Qu'est-ce qui se passe depuis le régime général d'assurance médicaments et la politique? Comment la stratégie a été élaborée? Qui on a entendu? Comment on a consulté? Je crois que c'est important pour la compréhension et la mise en contexte de la politique.

n(10 h 40)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Maintenant, je suis prêt à céder la parole au député de L'Assomption.

Une voix: ...

Le Président (M. Kelley): Non. C'est à trois. Alors, vous avez pris bonne note des questions qui ont été posées par le député de Laurier-Dorion et, dans votre prochain droit de parole, vous pouvez répondre aux interrogations du député de Laurier-Dorion, mais le prochain tour est au député de L'Assomption.

M. Éric Laporte

M. Laporte: Merci bien. J'aimerais encore revenir une fois sur l'usage optimal du médicament.

Tout d'abord, avant, j'aimerais juste répondre à un commentaire que le ministre a formulé quant à la thérapie non médicamenteuse qui n'avait pas sa place dans la Politique du médicament. Je dois dire que je ne suis pas tout à fait en accord avec lui parce que, si on regarde l'axe 3, qui est l'axe le plus important, soit l'usage optimal du médicament, je le trouve très faible. Donc, j'imagine puis je suis confiant qu'on aurait pu aller un petit peu plus loin. Puis l'utilisation de la thérapie non médicamenteuse aurait été une belle solution pour donner un petit peu de poids à un axe aussi important. Donc, je voulais juste signifier que j'étais en désaccord avec le ministre sur ce point-là.

J'aimerais revenir à ce qui s'est passé un petit peu dans l'analyse détaillée du projet de loi n° 24. Le ministre nous a dit, à ce moment-là, lorsque je le questionnais sur l'usage optimal du médicament, sur ses objectifs, sur les moyens qu'il prend, qu'il a pris pour réussir à atteindre l'objectif de l'utilisation optimale, le ministre nous a dit n'avoir aucun objectif, que c'était trop compliqué à détailler, cet objectif-là. Je vais le citer juste pour être sûr qu'on se comprenne bien: «C'est très difficile de le faire [...] la question de l'usage optimal des médicaments touche foncièrement les questions de comportement de la part de la population, d'une part, et, d'autre part, des décisions professionnelles de la part des prescripteurs, qui sont les médecins. [...]Mais il était impossible, et ça l'a été pour l'ensemble des États qui ont des régimes d'assurance, d'évaluer de façon précise l'importance de l'économie. Et ça l'est en général pour l'ensemble des mesures touchant les médicaments.»

Vous voyez, le problème que j'ai avec cette affirmation-là, c'est que, si on regarde le rapport du Vérificateur général du Québec 2003-2004, dans le tome II, on peut lire très clairement ? puis je vous lis ce qui a été dit: «Nous avons recommandé au ministre de la Santé et des Services sociaux d'élaborer [...] une politique du médicament ? ce qui a été fait; de définir des objectifs et des indicateurs permettant de juger de la performance du régime général et d'en rendre compte.»

Donc, autrement dit, c'est écrit noir sur blanc. Les recommandations du Vérificateur général, c'est de permettre au régime, permettre à la Politique de médicament de se doter d'indicateurs pour qu'on puisse ensuite évaluer la performance, voir si nos outils qu'on a mis à notre disposition sont performants, si on est dans la bonne direction. Le ministre, ce qu'il est en train de nous dire, c'est que c'est impossible, qu'il n'est pas capable, tandis que le Vérificateur nous dit exactement le contraire. Donc, le ministre est pris à gérer un petit peu sans objectif, donc de façon improvisée. Donc, la question que je vais avoir au ministre, c'est: Pourquoi refuse-t-il de donner des objectifs clairs? Puis est-ce qu'il a mis jusqu'à maintenant des indicateurs sur place pour pouvoir juger de sa performance? Puis, si oui, quels sont ces indicateurs?

Je vous donne un exemple: le taux d'hospitalisation dû à la mauvaise utilisation du médicament. On disait que c'était 10 % au Québec. Est-ce que le ministre tient ces données-là à jour d'année en année, de mois en mois? Puis est-ce qu'il a des objectifs? Est-ce qu'il a l'intention de diminuer ça à 8 %, à 6 %, à 5 % pour pouvoir s'assurer de gérer de façon optimale ses stratégies mises en place dans la politique?

Toujours concernant l'usage optimal du médicament, j'aimerais revenir sur un autre point qui avait été mentionné dans le document fourni au symposium de 2004 par M. Rachlis. Une piste intéressante aussi dont il faisait part, c'était la visite académique. Je vous explique un petit peu c'est quoi, la visite académique. C'est un pharmacien qui se rend au cabinet d'un médecin. Il emploie les mêmes techniques qu'un représentant pharmaceutique, sauf que l'information divulguée n'est pas biaisée. Ce programme permet d'économiser, selon des études qui ont été faites, en 1980, par l'Université Harvard, permet d'économiser 2 $ pour chaque dollar dépensé. Cette politique-là, cette stratégie-là a été étendue en Saskatchewan, en Alberta, en Nouvelle-Écosse.

On sait que la Politique du médicament propose, entre autres, la révision de la médicamentation à domicile, qui est une piste de solution, je crois, qui est vraiment intéressante. Il y a eu beaucoup d'études ailleurs qui ont été faites sur cette stratégie. Ici, je pense, on est à la mise sur pied d'un projet pilote. Je pense, ça a déjà commencé. Le ministre pourrait peut-être nous le confirmer. Mais ce que j'aimerais également savoir, c'est: Pourquoi le ministre n'a pas exploré, n'a pas inclus dans ses outils, dans son coffre à outils, la visite académique? Merci.

Le Président (M. Kelley): Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien. Merci, M. le Président. D'abord, au sujet des remarques de notre collègue de Laurier-Dorion, ce qu'on a constaté au début du travail qui a mené à l'élaboration de la politique, c'est le haut niveau de complexité de l'exercice. Et, je l'ai un peu dit à nos collègues du deuxième parti d'opposition, je me demandais comment il se faisait qu'entre 1997 et 2003 aucune activité concrète n'avait été faite pour mettre sur pied une politique du médicament et je leur avais dit qu'à réflexion je comprenais ça parce que c'était compliqué. Et, nous, on s'est dit qu'on allait le faire et on l'a fait avec tous les partenaires qui tournent autour du médicament, autant les prescripteurs, les professionnels de la santé, l'industrie, le Conseil du médicament, la Régie de l'assurance maladie du Québec, les représentants des citoyens.

Il faut savoir que, comme dans le reste du système de santé, c'est d'immenses blocs conflictuels qui s'affrontent sur un terrain semblable, et de réaliser l'exercice d'équilibre unique qui a été fait, c'est tout à l'honneur du Québec. Et je répète ce que j'ai dit en fin d'intervention, tantôt: Cette Politique du médicament actuellement, elle circule dans le monde entier comme étant un exemple de ce qu'un État peut faire en combinant ? et il y a peu d'États qui l'ont fait, s'il y en a ? les considérations de santé telles que l'accessibilité aux médicaments, la fixation des prix, l'usage optimal et la question économique majeure pour le Québec qui est la croissance, la prospérité, qui nous permet d'alimenter nos politiques publiques.

Maintenant, pour ce qui est de l'usage optimal et ce que mentionne notre collègue, il faut revenir à l'essentiel. Bien sûr, tous les indicateurs existent. La Régie de l'assurance maladie du Québec a un ensemble de statistiques. Je donnerai un exemple d'ailleurs de succès déjà démontré dans la question de l'usage optimal, basé sur les indicateurs qu'on peut obtenir à même les banques de données qui existent et qui sont accessibles. Mais je répète qu'il n'y a aucun pays au monde qui est capable de dire: Bien, voici, si on fait telle action, on va être capable et on vous promet, la population, qu'on va réduire la prescription de ce médicament-là de tant à tant, parce que c'est impossible et ce serait malhonnête de le faire, ce serait très malhonnête de le faire. Ça a déjà été essayé une fois. Le gouvernement précédent avait mis en place des ententes avec deux des compagnies pharmaceutiques dans deux classes de médicaments, pour l'acidité gastrique notamment et pour les anti-inflammatoires, qui devaient, nous dit-on, amener des économies. On avait chiffré 80 à 90 millions de dollars. Alors, je ne dirais pas que c'est zéro quelques années plus tard, mais, disons, un petit peu plus que zéro.

Alors, on n'est pas capable de façon sérieuse ? puis quelqu'un qui ferait ça n'est pas sérieux, là ? on n'est pas capable de dire: Bien, cette mesure-là va entraîner des économies de tant ou une réduction de prescription de tant. Ce qu'on doit faire, c'est également mettre sur pied des mesures consensuelles. C'est pour ça qu'on a une table de concertation qui réunit tous les partenaires. Et là ils s'entendent sur des mesures. Alors, ces partenaires-là se sont entendus sur les mesures qui sont dans la politique, notamment la révision de la médication à domicile. Pour les citoyens qui nous écoutent, il s'agit d'un exercice dans lequel le pharmacien et le médecin font la revue des médicaments pris par une personne âgée, par exemple, et s'assurent de la pertinence et du bon usage de chacun des médicaments. Effectivement, ça mène à des états de santé améliorés pour les personnes et également à des économies. Ça a été démontré dans de nombreuses études.

Maintenant, la Table de concertation, elle est également là pour susciter d'autres idées et d'autres actions. Alors, l'exemple de ce que le député appelle la visite académique est également un exemple qui est connu. Si ça fait consensus, elle pourra être mise sur pied, mais il faut commencer avec les mesures qui faisaient consensus. Ce n'est pas facile d'obtenir des consensus dans ce domaine-là parce que chacun est très jaloux de son indépendance et de ses prérogatives, mais on a réussi à le faire.

Je voudrais donner une exemple de cela, de la façon dont on mesure les résultats ? et déjà on mesure le succès de certaines mesures ? avec les indicateurs qui sont disponibles. Je vais prendre un exemple, c'est l'usage des antibiotiques. Le Conseil du médicament et le Collège des médecins ont publié des guides de prescription d'antibiotiques d'abord pour les gens qui sont en dehors des hôpitaux et également, plus tard, dans les hôpitaux, parce que l'usage des antibiotiques dans les hôpitaux a un lien très serré avec le problème des infections nosocomiales, les bactéries résistantes. Mais, si on prend la question des antibiotiques en dehors des hôpitaux, déjà on peut observer un impact de cette mesure-là. Par exemple, le médicament, l'antibiotique qui est recommandé en première ligne pour le traitement d'une infection très commune, là, chez les enfants est passé de 24 % en 2005 à 58 % un an plus tard.

Donc, les médecins ont modifié leur comportement de prescription à l'aide de ce guide-là, et on peut le mesurer, on est capable de le mesurer a posteriori. On peut exprimer le souhait qu'on veut que les médecins changent leurs comportements de prescripteur, mais jamais ces médecins n'accepteraient d'ailleurs ? leurs associations représentatives, en particulier ? qu'on amène une obligation pour les médecins de changer la façon de prescrire. C'est une question de sensibiliser, de ramener les gens autour d'un objectif commun.

Et on a la même donnée d'ailleurs sur les antibiotiques pour la pneumonie, où on a réussi déjà à changer le comportement des gens. Puis la beauté de la chose, M. le Président, c'est que l'antibiotique en question qui est recommandé, non seulement il est au moins aussi efficace, sinon plus efficace que les autres versions qui étaient prescrites auparavant, mais il est beaucoup moins coûteux, parce que c'est là un des rares antibiotiques dont je connais le nom quand je les lis, parce qu'il existait quand j'étais en pratique. Maintenant, il y en a plein de nouveaux dont j'ai perdu la trace déjà depuis quelques années. Voilà, M. le Président.

n(10 h 50)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos: Merci, M. le Président. J'aimerais qu'on discute un petit peu plus sur l'accès aux médicaments, M. le Président. Pourquoi? Parce que selon moi, si vous me demandez personnellement, comme représentant du comté de Laurier-Dorion, je vous dirais que c'est cet aspect-là de la politique qui est probablement le plus important.

Et je trouve important de situer un petit peu nos remarques, mes remarques dans le contexte de ce qui se passait avant 2007. Et, sauf en cas d'erreur et exception, le prix des médicaments qui sont inscrits à la liste des médicaments est demeuré inchangé, nous le savons, entre 1994 et 2007. Pendant ce temps-là, il y avait évidemment eu l'indice des prix à la consommation. Le coût de la vie a progressé. Et ce qu'il est important de comprendre et de répéter, il me semble, c'est que les Québécois paient leurs médicaments moins cher que tous les autres Canadiens. Et je trouve que c'est très, très important, on ne peut pas insister là-dessus assez.

Une autre chose que j'aimerais dire, c'est que la politique a accordé une attention particulière aux clientèles qui sont vulnérables. On sait que, depuis le 1er juillet 2005, la gratuité des médicaments a été élargie aux personnes âgées de 65 ans et plus, assurées par le régime public, et qui recevaient le maximum du supplément du revenu garanti. J'ai beaucoup de personnes dans mon entourage, M. le Président, qui ont cet âge-là et qui bénéficient du supplément de revenu garanti. Je peux vous dire à quel point c'est important, à quel point ça fait une différence, ces sommes-là, dans les vies de ces personnes-là, qui vivent avec souvent des moyens limités. Déjà, on savait qu'il y a une partie des assistés sociaux et des étudiants qui bénéficient de cette gratuité, et la Politique du médicament vient élargir cette gratuité pour un grand nombre de personnes.

Donc, quand on parle de l'impact de la hausse des prix, il ne faut pas perdre de vue que pour plusieurs personnes l'impact de la hausse de prix sera nul. Et, lorsqu'on parle de l'extension de la gratuité des médicaments, on sait qu'à partir du mois juillet environ 250 000 prestataires d'assistance-emploi qui sont sans contraintes sévères à l'emploi seront assurées de cette gratuité, en plus des 30 000 personnes qui ne reçoivent pas le supplément de revenu garanti complet mais 94 % de ce supplément, qui auront également accès à leurs médicaments gratuitement. Et on sait aussi que, la hausse des médicaments, on ne parle pas de hausse de prix sans contrôle. C'est un contrôle qui est très raisonnable, il me semble, quand on parle de hausse de prix d'environ 2 % pour la plupart de ces médicaments pour lesquels on a eu une demande, ce qui représente l'indice des prix à la consommation, c'est-à-dire le taux d'inflation en 2007. Il me semble que c'est très, très, très raisonnable.

Évidemment, il y a eu des médicaments pour lesquels on a fait une demande et pour lesquels il y a eu augmentation supérieure à ce pourcentage, mais, tel que le ministre l'a expliqué plus tôt dans ses remarques, ce sont des médicaments qui sont uniques sur le marché, pour lesquels souvent il n'existe pas d'alternative et pour lesquels on a agi pour éviter qu'ils quittent le marché québécois; et que les Québécois puissent continuer à avoir accès à ces médicaments-là. Alors, j'aimerais que M. le ministre... Évidemment, la parole va passer à mon collègue de L'Assomption, mais c'est là-dessus que, je trouve, le débat devrait se situer principalement, parce que c'est le but de cette politique-là. Et je peux vous dire que, quant à moi, il fallait quand même qu'on agisse, il fallait quand même qu'il y ait une certaine augmentation.

Ce qui est important, c'est que l'État, ce gouvernement a joué son rôle. Et cette augmentation est raisonnable. Elle permet aux gens, aux Québécois, d'avoir accès à leurs médicaments et à protéger l'accès aux médicaments qu'on aurait pu autrement perdre du marché québécois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le député de L'Assomption.

M. Éric Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. J'aimerais maintenant qu'on discute un petit peu de la pénurie de pharmaciens. C'est un problème de plus en plus important dans notre réseau.

Vous savez, la pénurie de médecins et d'infirmières préoccupe, depuis déjà plusieurs années, autant les professionnels de la santé que le Québec dans son ensemble. Mon collègue de La Peltrie pourrait vous en discuter longuement. Le Parti libéral en avait d'ailleurs fait un objectif, autant dans sa campagne de 2003 que celle de 2007, d'incorporer 1 500 nouveaux médecins et 2 000 nouvelles infirmières, objectif qui a d'ailleurs disparu du discours libéral, depuis mai dernier. Mais, à travers cet orage, les pharmaciens font face eux aussi à de gros problèmes de pénurie et de conditions de travail, mais on en entend moins parler.

Récemment, le gouvernement a annoncé une entente avec les médecins spécialistes, puis je crois savoir que les négociations avec les omnipraticiens sont en cours. Cependant, les conditions de travail des infirmières et des pharmaciens du réseau de la santé demeurent difficiles, il ne semble rien y avoir à l'horizon. La Politique du médicament vise justement à accroître le rôle du pharmacien dans le réseau de la santé. Pour ce faire, le climat et les conditions de travail des pharmaciens du réseau se doivent d'être optimaux. Le succès de la Politique du médicament réside dans la rigueur de son application, et le pharmacien sera appelé à y jouer un grand rôle. Mais, en pénurie d'effectif, on peut s'imaginer que ce sera difficile. Suite à l'entente avec les médecins spécialistes, l'Association des pharmaciens d'établissements de santé a levé la main pour souligner que c'est maintenant leur tour. Les inquiétudes sont nombreuses, et je vous les résume.

Pour ce qui est du salaire, résoudre le plus rapidement possible l'écart de rémunération de 25 % à 40 %, qui sépare toujours les pharmaciens d'hôpitaux des pharmaciens salariés oeuvrant dans le secteur privé, au Québec; le recrutement: cet écart est en grande partie responsable des difficultés de recrutement et de rétention des pharmaciens dans les hôpitaux; la pénurie de pharmaciens, actuellement évaluée à 17 % dans les établissements de santé, est l'une des pires, sinon la pire que connaît le réseau; la concurrence: la profession de pharmaciens d'hôpitaux est la seule profession du réseau de la santé à subir une concurrence aussi directe et importante du secteur privé ? pour un pharmacien qui travaille dans un milieu hospitalier, trois pharmaciens oeuvrant en pharmacie privée; l'expertise: un pharmacien qui débute sa carrière en établissement de santé reçoit un salaire d'environ 32 $ de l'heure, comparativement à 40 $ de l'heure, en moyenne, pour un pharmacien qui commence dans le secteur privé ? qui plus est, cette rémunération se reconnaît par l'expertise particulière des pharmaciens d'établissement de santé; les étudiants en pharmacie doivent compléter une maîtrise pour oeuvrer en milieu hospitalier, alors que seul un baccalauréat est requis pour travailler en pharmacie privée.

Les conditions de pratique: les pharmaciens d'établissement de santé sont aussi confrontés à une pratique de plus en plus complexe en raison de l'émergence de thérapies médicamenteuses sophistiquées et du vieillissement de la population. Ils travaillent auprès des patients, au sein d'unités de soins spécialisés ? oncologie, soins intensifs, soins palliatifs et urgence. Comme membres de l'équipe médicale, ils évaluent les traitements médicamenteux en cours, élaborent des plans de soin, suivent les effets. En vertu d'ordonnances collectives et de protocoles en vigueur, ils initient, ajustent et cessent des traitements médicamenteux pour des patients hospitalisés en clinique ambulatoire.

De plus, le rapport du coroner sur les incidents survenus à l'Hôpital Honoré-Mercier, il y a quelque temps, a reconnu que la pénurie de pharmaciens en établissement était un facteur de risque pour la prolifération des infections nosocomiales.

Nous savons que le ministre a récemment créé des comités régionaux sur les services pharmaceutiques. Comment le ministre voit la situation des pharmaciens d'établissement de santé? A-t-il un calendrier pour discuter du problème avec les principaux intervenants et régler la situation? Ce matin, les pharmaciens nous disaient que pour l'instant il n'y a rien qui se passe. Donc, on aimerait avoir le point de vue du ministre. Où est-ce qu'il en est? Merci.

n(11 heures)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Bien, d'abord, notre collègue de Laurier-Dorion a fait état de la fin de la non-augmentation des prix, rappelé aux Québécois que c'était un geste inévitable et incontournable. C'est-à-dire que tout gel en soi est pernicieux, là, surtout s'il se prolonge. Un an ou deux, parfois on peut accepter que ça peut être justifié pour certaines considérations, mais un gel prolongé, dans tous les domaines de l'économie, entraîne toujours des effets pernicieux. L'effet pernicieux le plus important au Québec, c'était le fait que le Québec se trouvait isolé dans cette pratique, par rapport aux États avec lesquels il est en concurrence pour accueillir l'industrie, et que clairement on s'acheminait vers une situation de non-accès aux médicaments, parce que rien ne force les entreprises pharmaceutiques à être présentes sur notre sol ni à y vendre leurs produits. Et également une source de prospérité majeure pour la création de la richesse collective au Québec, dont on a besoin pour financer nos activités publiques, notamment les programmes sociaux.

On aura l'occasion, plus tard dans l'échange, de montrer que déjà des investissements importants ont été annoncés dans le domaine de l'industrie pharmaceutique.

Maintenant, lorsqu'on a annoncé qu'on mettait fin à cette politique, on a également encadré l'augmentation des médicaments au niveau en gros de l'indice des prix à la consommation. Et c'est intéressant que de voir que, dans la première année, alors que justement on s'attendait que ce soit dans cette année que se situe la pression maximale, c'est uniquement 3 % des produits inscrits qui ont bénéficié d'une hausse plus élevée que l'inflation. Et on verra dans des exemples concrets qu'on pourra donner plus tard dans l'échange qu'il s'agit de médicaments de bas coût, uniques, dont le maintien même au nouveau prix représente une économie pour le régime d'assurance médicaments. Ça va être intéressant de noter cela.

Pour ce qui est de l'accessibilité aux médicaments, je pense qu'il faut rappeler aux Québécois qui nous écoutent, pour lesquels c'est important, que c'est au Québec que l'accessibilité des médicaments est la meilleure au Canada. Ainsi, le Québec demeure en tête de liste pour ce qui est de l'accessibilité des inscriptions. Si on prend l'ensemble des demandes d'inscription ? génériques et innovateurs ? c'est 81 % des demandes qui sont accueillies positivement, ce qui est plus élevé qu'ailleurs au Canada. Pour ce qui est des innovateurs, le pourcentage est également plus élevé qu'ailleurs au Canada. Et c'est un choix délibéré du gouvernement et de la société du Québec, d'ailleurs soutenu par l'ensemble des formations politiques, de continuer à avoir une politique d'accueil favorable pour l'industrie pharmaceutique.

Pour ce qui est des pharmaciens d'établissement, le collègue à raison, c'est une pénurie très préoccupante. En premier chef, celle des infirmières. Mais, immédiatement avec celle des infirmières, celle des pharmaciens d'établissement est certainement préoccupante. Il y a eu un geste de réajustement des échelles salariales qui a été fait lors des dernières périodes de négociation, qui a amélioré la situation. On a cependant des bourses d'encouragement au niveau des étudiants pour la maîtrise, par exemple, avec des stages d'orientation, de façon à favoriser ce choix de carrière pour les pharmaciens, qui va bien sûr au-delà du seul cadre financier, mais d'un plan de carrière qui est extrêmement stimulant et valable sur le plan scientifique et personnel.

Outre les conversations sur l'encadrement financier ou la rémunération des pharmaciens en établissement, il y a d'autres façons également dont on peut bonifier l'environnement professionnel des pharmaciens d'établissement, par exemple la robotisation de plus en plus grande. Alors, on investit actuellement, dans tous les départements de pharmacie des grands hôpitaux, pour les doter de systèmes de robotisation, de distribution de médicaments, ce qui libère le temps du pharmacien d'établissement et lui permet de se concentrer sur sa tâche professionnelle. Même chose dans une table actuelle avec l'Association des pharmaciens d'établissements et l'ordre. On étudie la question de la délégation des actes au niveau des technologues ou des techniciens en pharmacie de façon à obtenir le même résultat, c'est-à-dire une pratique pharmacienne, pharmaceutique qui est beaucoup plus intéressante.

Il faut savoir que, sur le seul point de vue financier, ça va être extrêmement difficile pour l'État d'entrer en concurrence directe avec ce qui est offert dans le réseau privé des pharmacies d'officine qui bénéficient de très grands moyens et qui sont capables d'augmenter continuellement les revenus dès que l'État ou le système de santé fait un ajustement. Il faut donc, bien sûr, améliorer ces conditions financières mais également nous assurer de la disponibilité d'un environnement professionnel stimulant et valorisant pour les pharmaciens d'établissement. On y est attachés, on va continuer à travailler sur cette question-là. Moi-même, je suis conscient, personnellement, de l'importance de ces professionnels. J'ai vécu la coexistence avec les pharmaciens d'établissement. Je sais à quel point ces personnes bonifient l'environnement professionnel pour les médecins également et, en bout de ligne, la qualité de services qui est donnée aux patients.

On est donc prêts à faire toujours plus, toujours mieux mais dans le contexte de finances publiques qu'il faut gérer de façon serrée bien sûr, mais également par des mesures qui sont économiques, financières mais également touchent l'environnement professionnel, la satisfaction au travail des pharmaciens d'établissement dans un contexte de pénurie, qui effectivement, M. le Président, est très préoccupant et qu'on suit de très près.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos: Merci, M. le Président. Je vous ai parlé tout à l'heure, dans mon intervention précédente, que la partie la plus importante quant à moi a été l'accès aux médicaments qui évidemment comportait un bénéfice direct à la population québécoise. Par contre, on ne peut pas négliger aussi que cette politique a été bien accueillie par le milieu économique.

Et, comme je vous ai mentionné, on sait tous que l'industrie pharmaceutique au Québec est un créateur d'emplois important et une source d'investissement très, très, très importante. J'aimerais citer quelques communiqués de presse pour mes collègues, qui parlent surtout de cette politique-là, et la réaction avec laquelle on l'a accueillie. J'aimerais d'abord citer le communiqué de presse des Manufacturiers et exportateurs du Québec. On sait que les sujets de manufacturiers et de l'exportation sont très d'actualité aujourd'hui. J'aimerais vous lire un petit peu le communiqué du 1er février, de cette association, et je cite: «La Politique du médicament est un excellent exemple d'une politique publique qui réussit à concilier différents objectifs. Au-delà de vouloir améliorer la santé de la population, force est de reconnaître que cette politique contribuera à améliorer également la santé de l'industrie, ce qui est de meilleur augure pour le maintien [de] l'attraction d'investissements.» Ça, c'était, M. le Président, l'association des Manufacturiers et exportateurs du Québec.

Je sais que mes collègues de l'opposition officielle aiment beaucoup citer le Conseil du patronat du Québec, qu'ils connaissent très, très bien. Et, également en même date, date du 1er février, le Conseil du patronat a dit ceci concernant la Politique du médicament: «Le Conseil du patronat félicite le gouvernement du Québec d'avoir su concilier les objectifs de justice sociale et de développement économique dans sa Politique du médicament dévoilée aujourd'hui. [...]Il nous apparaît donc tout à fait acceptable que le gouvernement permette aujourd'hui une majoration des prix des médicaments reflétant l'indice [de] prix à la consommation.»

On venait de parler du fait que, comme je vous ai mentionné dans une remarque, durant très longtemps, plus d'une décennie, les prix des médicaments ont été gelés au Québec. Ce n'est pas pour rien. On dit que 50 % des investissements de l'industrie pharmaceutique canadienne se font au Québec. Bien, je crois que ça, c'est très important. Je ne sais pas si tous les citoyens connaissent ce chiffre-là, mais je trouve, comme Québécois, que c'est très important de savoir que cette industrie-là peut être un partenaire économique très important, et surtout quand on parle d'investissement et de création d'emplois.

Également, M. le Président, si vous me permettez, la Fédération des chambres de commerce du Québec qui a parlé de la politique et nous mentionne que «le gouvernement a très bien relevé le défi de concilier les enjeux et les objectifs de santé, de finances publiques et de développement économique. [...]"À titre de pionnier dans les secteurs de l'économie du savoir, le Québec doit continuer à investir dans la recherche et le développement de nouveaux médicaments, dans la qualité de la formation de nos chercheurs et des autres professionnels de la santé et dans les salaires qui leur sont versés afin d'éviter l'exode des cerveaux."»

Alors, M. le Président, c'est pour vous dire l'importance indirecte qu'a cette politique, je vous dirais, indirecte comparé à... mais très directe pour la population du Québec concernant les emplois et les investissements. Avec cette politique-là, on crée un pôle d'attraction qui permettra à l'industrie pharmaceutique de continuer de développer, de faire de la recherche, garder leurs professionnels et pouvoir continuer à fournir des emplois et des investissements aux Québécois.

Et j'aimerais, à sa prochaine intervention, entendre le ministre là-dessus, sur des investissements récents, l'impact concret de ce qu'on mentionne dans ces communiqués de presse. Il a certainement des données et des chiffres que je n'ai pas. Alors, j'aimerais entendre le ministre à sa prochaine intervention là-dessus. Merci.

n(11 h 10)n

Le Président (M. Kelley): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire: Merci, M. le Président. Je voulais revenir sur les éléments de réponse que le ministre nous a donnés concernant la pénurie de pharmaciens, effectivement un problème qui est extrêmement important, extrêmement préoccupant. Et j'ai relevé dans la réponse du ministre deux choses qui m'interpellent.

D'abord, il parle de bourses pour les étudiants en pharmacie. Ce que mon collègue soulevait comme élément de question, c'est qu'à l'image des infirmières les pharmaciens étaient plus attirés par le secteur privé que par le secteur public. La raison est fort simple, c'est que le secteur privé offre des conditions de pratique dans leur ensemble qui sont pour les pharmaciens plus attrayantes. Donc, un des problèmes de la pénurie, M. le Président, c'est que les conditions de pratique dans le milieu public, comme c'est le cas pour les infirmières, ne sont pas attrayantes. Et là-dessus j'ai entendu le ministre nous dire qu'il y avait des choses qu'on pouvait faire. Alors, ma question, c'est: O.K., mais qu'est-ce qu'on attend pour les faire, parce qu'à tous les niveaux c'est extrêmement hypothéquant et pénalisant dans nos centres hospitaliers, dans nos établissements de santé? Moi, j'ai eu l'occasion d'en visiter plusieurs, le ministre le sait, cet été, et partout c'est un fait qui a été relevé, à savoir qu'on avait de la difficulté à recruter, qu'on avait de la difficulté à garder les pharmaciens, qu'on avait de la difficulté à rendre la pratique intéressante. Et c'est extrêmement hypothéquant.

C'est hypothéquant, M. le Président, parce que le pharmacien en centre hospitalier, entre autres, est confiné à des tâches qui ne sont peut-être pas aussi stimulantes que le pharmacien pourrait le souhaiter. Par exemple, on sait que dans les urgences la présence d'un pharmacien, c'est quelque chose d'essentiel, c'est quelque chose d'extrêmement important pour le bon fonctionnement d'un service d'urgence. Or, de par ses tâches, où il est confiné à la pharmacie de l'hôpital, souvent ce n'est pas possible pour le pharmacien d'être dans les urgences ou sur les unités de soins. On sait qu'il y a certains traitements d'oncologie, entre autres, qui nécessiteraient une présence plus importante des pharmaciens, puis ce n'est pas toujours possible.

Le ministre a parlé de robotisation. C'est effectivement une piste de solution qui est extrêmement intéressante. Par contre, à l'heure actuelle, les centres hospitaliers qui ont eu recours à cette solution-là l'ont fait à même leur budget, c'est-à-dire qu'ils ont coupé dans certains secteurs pour s'offrir ces services-là. Et là il y avait le circuit du médicament qui avait été annoncé par le ministère et qui aurait pu être une piste intéressante. Moi, j'ai visité une quarantaine d'établissements cet été, M. le Président, puis il n'y en a pas un qui était vraiment au fait de la politique, de ses tenants, de ses aboutissants, de ses échéanciers et des montants qui seraient disponibles pour aider les centres hospitaliers qui n'avaient pas la capacité justement de se donner ces marges de manoeuvre là pour informatiser et robotiser la pratique du médicament. Je pense, entre autres, à Trois-Rivières, qui est un exemple, qui a pigé à même ses fonds et qui aurait pu faire école parce que justement on a libéré du temps infirmier aussi, on a libéré du temps pour les pharmaciens. Mais on a libéré du temps pour les infirmières parce qu'il y a moins de manipulation, on diminue le pourcentage d'erreurs humaines en fait à le réduire à quelque chose de pratiquement nul. On sait que ça ne peut pas être nul bien sûr, mais de pratiquement nul.

Donc, on a augmenté la sécurité, on a augmenté l'efficacité. On a diminué les coûts parce que souvent, maintenant, on peut laisser ces tâches-là à des techniciens. Et donc ces manipulations-là qui sont faites par des techniciens le sont évidemment à moindre coût. Donc, il y a bien des centres hospitaliers, moi, qui m'ont dit: Écoutez, donnez-moi la chance, libérez des marges de manoeuvre pour qu'on puisse installer des systèmes comme ça chez nous, et je rentabilise sur une tranche de cinq à 10 ans, je rentabilise l'investissement avec les économies que je peux faire. Or, il y avait une politique du ministère, du circuit du médicament, dont on n'a pas nécessairement beaucoup entendu parler dans les centres hospitaliers, et qui à mon avis aurait intérêt à avoir toute l'attention du ministre et avoir évidemment un calendrier de réalisations beaucoup plus serré que ce que, moi, j'ai eu l'occasion de percevoir.

Et aussi, M. le Président, j'aimerais savoir du ministre son intention quant aux centres hospitaliers qui l'ont fait de leur propre initiative. Alors, d'une part est-ce qu'ils pourront bénéficier des marges de manoeuvre qui se sont libérées dans leur budget? D'autre part, est-ce qu'ils pourront, eux aussi, compter sur une éventuelle politique du circuit de médicaments pour se rembourser parce qu'ils auront fait ça à même leurs frais? Il ne faudrait pas qu'ils soient pénalisés par rapport à d'autres hôpitaux qui ne l'auront pas fait. Et est-ce que le ministre a un calendrier de réalisations beaucoup plus serré que ce qu'on a eu l'occasion de voir jusqu'à date?

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Alors, M. le Président, notre collègue de Laurier-Dorion a d'abord parlé des retombées économiques de la Politique du médicament et de la politique d'innovation et de développement économique du gouvernement. Je dois dire que, dans le domaine de l'industrie pharmaceutique, c'est extrêmement intéressant, ce qui est déjà annoncé. Et il y a des investissements à venir, également. Il y en aura au cours des prochains jours d'ailleurs qui seront annoncés.

Pour l'année 2005, il y avait déjà eu 20 millions de dollars d'Anapharm qui avaient été annoncés; Boehringer, 36 millions en 2006; Sanofi-Aventis, 6 millions en 2006. Mais, en 2007, il y a un alignement d'investissements spectaculaires: AstraZeneca, 10 millions; LAB Recherche, 12 millions; Schering-Plough, 18 millions; Sandoz Canada, 80 millions; GSK Biologiques, 50 millions; GSK Biologiques, encore une fois ici à Sainte-Foy, 199 millions; AstraZeneca a acquis l'usine de biofabrication de DSM biologies; LAB Recherche, 40 millions; Wyeth, 20 millions; Charles River, 36 millions. Juste pour 2007, c'est 553 millions d'investissement.

Ça, c'est des emplois pour les Québécois, c'est des retombées économiques pour nos finances publiques et ça nous aide également à financer nos investissements.

Il y a également du matériel médical. Dans le domaine du matériel médical, Roche Diagnostics a construit un nouveau siège social canadien, 10 millions, en 2007; Becton Dickinson, une usine de fabrication, 40 millions, 100 emplois créés uniquement à cet endroit-là. Il y a des ententes entre les entreprises: 100 millions, Merck, Ambrilia; 10 millions entre Pfizer et Genizon; AstraZeneca et OmegaChem, 8,5; et Draxis, 100 postes avec des millions de dollars.

Et, la plupart du temps, ce qui est intéressant, c'est sans subvention gouvernementale pour la grande majorité des cas, si ce n'est des exceptions de garantie de prêt dans un cas et de subvention dans un cas également. Le reste, c'est uniquement des produits générés par l'industrie. Pourquoi? Parce que les sièges sociaux de ces entreprises-là qui sont situées dans le monde entier observent de façon attentive quel est l'environnement d'accueil des divers pays pour prendre leurs décisions en investissement. Et il est clair et évident maintenant que les orientations gouvernementales adoptées au Québec ont été reçues très positivement par l'industrie pharmaceutique et expliquent l'importance de ces investissements-là, les emplois qui y sont attachés directement et indirectement. Et je répète qu'au cours des prochains jours il y aura un nouvel investissement annoncé, très important, dans la région de Montréal, pour l'industrie pharmaceutique.

Il faut se souvenir que le Québec au Canada obtient environ 42 % à 45 % des activités de recherche des firmes d'innovation, ce qui est considérable, et au moins 18 000 emplois directs. Tous les jours, il y a 18 000 Québécois qui se lèvent pour aller travailler directement dans ce secteur-là, et ça ne compte pas les emplois indirects.

Le député de La Peltrie revient à la question des pénuries de pharmaciens d'établissement. On est d'accord avec l'ensemble de ses énoncés. Je pense que je dois le mettre en garde, puis, je suis certain, lui-même est prudent là-dessus, sur la question d'une tentative de surenchère avec le milieu privé. On peut le faire jusqu'à un certain point, mais il faut être conscients également des limites des finances publiques. D'autant plus qu'on sait que le député ? je crois que c'est le député de Chauveau; je fais toujours l'erreur: député de Taillon, député de Chauveau ? prévoit, d'après ses paroles récentes, priver l'État du Québec de 1 milliard de dollars de revenus. Alors, il faut être très prudents dans toute surenchère qu'on laisserait miroiter à des groupes. On veut bien sûr améliorer leurs conditions de pratique, incluant leur environnement économique, mais il faut le faire de façon rationnelle.

Je suis très heureux de l'entendre parler de la qualité de la pratique comme façon d'attirer et de retenir les professionnels. Les investissements de robotisation sont d'une part présents pour certains cas dans les plans d'investissement annuels de haute technologie. Je ne referai pas l'allusion habituelle aux infrastructures, on pourra peut-être en parler plus tard dans l'échange. Mais ils sont soit annoncés dans les plans d'infrastructures soit considérés par les établissements, et c'est bien qu'ils le fassent, comme des projets d'autofinancement. Le député a raison, on peut, en lançant un projet semblable, probablement dégager, si ce n'est un environnement économique neutre, mais même possiblement des bénéfices financiers pour l'établissement de façon à effectivement permettre aux pharmaciens de se concentrer sur leurs actions professionnelles.

Alors, moi-même, j'ai signé plusieurs lettres d'annonce de ce type d'équipement là au cours des dernières années, derniers mois également. Ça va continuer. Il y a 7,1 milliards d'investissement en infrastructures, faut-il le rappeler ? nous investissons dans les infrastructures au Québec ? qui ont été annoncés pour le réseau de la santé. Parmi ces 7,1 milliards de dollars, il y a de l'argent pour les hautes technologies, l'équipement médical annuellement garanti au cours des cinq prochaines années, et c'est là-dedans bien sûr qu'on ira puiser les enveloppes, entre autres, pour la robotisation des services pharmaceutiques auxquels on donnera une certaine activité prioritaire compte tenu de la situation de pénurie, que notre collègue décrit avec beaucoup de justesse.

Maintenant, la question de la délégation d'actes aux techniciens, j'en ai parlé tantôt, c'est très vrai, mais ça ne peut pas se faire isolément, par le gouvernement. C'est pour ça qu'on a actuellement une table avec l'Association des pharmaciens d'établissements et l'Ordre des pharmaciens pour permettre la délégation aux technologues de plusieurs actes actuellement accomplis par les pharmaciens d'établissement, qui auront un impact sur la qualité de leur pratique et leur désir de rester dans l'environnement hospitalier.

Donc, sur l'ensemble des constats, je rejoins mon collègue autant sur la nécessité de pousser la robotisation que sur celle de favoriser la délégation d'actes et un environnement professionnel plus riche pour les pharmaciens d'établissement.

n(11 h 20)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Sur le nom «Taillon», la même confusion existe. «La députée de Laporte», qu'on peut parler, mais, «le député Laporte», on ne peut pas mentionner ça. Alors, sur ça, je vais céder la parole au député de Laurier-Dorion.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos: Merci, M. le Président. Alors, nous avons discuté un petit peu, tout à l'heure, concernant l'usage des médicaments, et j'aimerais aussi abordé un petit peu ce sujet-là de mon côté, mais plus du point de vue de la population, de la population directement touchée par la politique.

À ma lecture de la politique, il y avait différentes mesures qui étaient prévues afin de justement améliorer l'usage des médicaments et pouvoir, comme c'est un des objectifs importants poursuivis par la politique, pouvoir fournir de l'aide directe à la population qui est prise des fois dans des situations où ? on a déjà eu une histoire comme ça, M. le Président ? tard la nuit, un enfant se réveille ou notre conjointe ou conjoint se réveille, ne se sent pas bien. On a un médicament, il est légèrement expiré en termes de date, et on a besoin d'un conseil. J'avais lu, à l'intérieur de la politique, qu'il y avait des mécanismes, différents mécanismes afin d'aider les citoyens dans des situations de ce genre-là. D'abord, j'avais lu concernant le développement de la révision de la médication à domicile qui était une approche qui était centrée sur le patient, notamment pour la clientèle vulnérable qui n'est pas en mesure de se déplacer aussi facilement que d'autres clientèles. Alors, j'ai trouvé ça intéressant dans le temps que nous parlons de soins à domicile de plus en plus, de mobilité réduite de certains de nos citoyens.

Il y avait également, dans la Politique du médicament, une question de donner accès à de l'information et des conseils pour les citoyens par l'intermédiaire de différents services qui ont été mis sur pied et qui existent dans notre système. Je parle, entre autres, d'Info-Médicaments, qui est un service de deuxième ligne, qui est accessible en tout temps, via Info-Santé. Et j'avais déjà, M. le Président, entendu parler d'une campagne d'information qui allait également viser le grand public, qui met l'emphase sur la responsabilité de chacun quant à l'usage des médicaments, parce qu'on sait que le patient, le citoyen a un rôle à jouer là-dedans aussi, mais évidemment, par manque d'information, des fois il y a des erreurs qui peuvent se produire.

Alors, cette campagne d'information. Je voulais savoir où on est rendu avec cette campagne d'information. Le ministre pourrait nous entretenir dans le temps qu'il lui restera, lors de sa prochaine intervention. Parce que, M. le Président, on peut parler d'usage des médicaments; tant que l'information ne se rend pas aux citoyens, tant que les citoyens n'ont pas accès à des renseignements qui leur permettront de prendre des décisions éclairées ? et, comme je vous dis, des fois ça peut arriver la nuit, ça peut arriver la fin de semaine ? on ne peut pas viser l'usage optimal sans pouvoir compter sur ces mécanismes-là.

Alors, j'aimerais que le ministre puisse nous entretenir là-dessus dans sa prochaine intervention. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. Je suis prêt maintenant à céder la parole au député de L'Assomption. M. le député.

M. Éric Laporte

M. Laporte: Merci bien, M. le Président. Donc, c'est le dernier bloc de questions pour le ministre, donc je vais essayer d'en profiter pour poser plusieurs question en même temps, d'un seul coup.

J'aimerais premièrement revenir sur les marges bénéficiaires des grossistes. Vous savez, M. le Président, l'interpellation d'aujourd'hui a fait en sorte qu'on a sûrement sauvé au régime plusieurs centaines de milliers de dollars. Parce que, la semaine passée, on parlait avec le ministre, pendant l'étude détaillée du projet de loi n° 24, de la façon qu'il rectifierait son erreur, donc de ramener à 6 % la marge bénéficiaire des grossistes. À ce moment-là, il nous a dit qu'il allait régler la situation prochainement. En voyant venir l'interpellation, le ministre a publié dernièrement, dans la Gazette officielle, là, son projet de règlement, donc on peut donc en conclure que l'interpellation d'aujourd'hui a porté fruit déjà. Le cafouillage qu'il y a eu dans toute la situation des marges bénéficiaires faisait en sorte que ça coûtait 82 000 $ par jour au régime général d'assurance médicaments. Le ministre a dit pendant l'étude du projet de loi n° 24 qu'il attendrait de voir, lorsque la situation serait réglée, combien ça va avoir coûté, tout ça, tout le jeu, là, de virevent, là, de passer de 7 % à 6 %, de 7 % à 6 %, combien ça coûterait au régime.

Donc, on s'attend à ce qu'aujourd'hui, étant donné qu'il a publié, dans la Gazette officielle, son projet de règlement, qu'il puisse nous dire combien effectivement ça a coûté. Selon mes estimations, c'est 7,2 millions, le coût de l'erreur. Je rappelle au ministre que, si jamais il n'est pas d'accord avec mon chiffre de 7,2 millions, il se doit de me donner le chiffre, son chiffre à lui, son calcul à lui, sinon on doit s'en tenir à mon chiffre, à mon estimation à moi.

Je rappelle un petit peu la situation pour faire un retour sur ce qui s'est passé. Jusqu'au 1er octobre dernier, les grossistes en médicaments pouvaient établir leurs marges bénéficiaires à l'intérieur d'une fourchette de 0 % à 9 %. C'est ce qu'ils ont fait à la suite de l'entrée en vigueur de ce règlement en 1993. Ainsi, pour des raisons qu'ils ont choisies, certains grossistes ont fixé leur marge à 7,15 %; d'autres, à 6,5 %; et d'autres, autour de 5 %. Dans le document de consultation de la Politique du médicament qu'il a rendu public en décembre 2004, le ministre a proposé de réduire le plafond de 9 % à 6 %, puis finalement le ministre est revenu sur ses intentions après consultation puis l'a fixée à 7 %. Toutefois, le ministre a fait la sourde oreille aux représentations de plusieurs intervenants qui l'invitaient à déterminer des critères précis pour établir les marges, par exemple, en fonction d'un modèle d'affaires ou du type de service rendu par les grossistes, à l'instar du régime fiscal qui établit des distinctions selon la nature de l'entreprise. La seule proposition du ministre à effet, ça a été l'établissement de la marge en fonction des territoires desservis, qui n'a pas fait l'objet d'une étude plus approfondie de la part des fonctionnaires du ministère, qui a été rapidement mise de côté.

Comme on pouvait s'y attendre, tous les grossistes ont donc profité de l'occasion pour augmenter leur marge bénéficiaire à 7 %, ce qui représentait un déboursé total supplémentaire, pour le régime, de 30 millions. Comme je le disais précédemment, le ministre est finalement revenu sur sa décision pour rétablir la marge à 6 %. Donc, le temps qui s'est écoulé a coûté environ 7,2 millions au régime.

Donc, le ministre a improvisé, a établi une mesure mur à mur qui cause certains préjudices à certaines entreprises. Ce que j'aimerais savoir, c'est si le ministre a l'intention de mettre sur pied une mesure qui va être permanente, parce que qu'on sait que dans la politique on dit qu'on va revoir la marge bénéficiaire des grossistes dans deux ans. Donc, est-ce qu'on a seulement fait pelleter le problème par avant? Est-ce qu'on va avoir à régler encore la question deux ans? Pourquoi le ministre n'essaie pas, aujourd'hui, de mettre sur pied une mesure qui soit durable à long terme? Je pense que c'est ça, l'esprit de la politique. Ce n'est pas d'éteindre des feux, mais c'est plutôt d'avoir une vision à long terme.

J'en profite également pour poser une question concernant la liste IMS. On sait que le Conseil du médicament a l'intention de rendre disponible le profil de prescription aux médecins qui le désirent, en juin 2008. Le profil de prescription individuel est déjà disponible par la compagnie IMS, mais en plus c'est gratuit. Donc, ce que je me demande, c'est: Pourquoi le ministre met sur pied, par le biais du Conseil du médicament, met sur pied un système qui va faire en sorte que le médecin va avoir son profil disponible, étant donné que c'est déjà disponible présentement et puis c'est gratuit? Donc, combien ça va coûter de mettre cette mesure-là en place?

Puis je sais qu'il y a présentement des négociations avec IMS pour peut-être collaborer, là, sur la mise sur pied du profil de prescription, donc j'aimerais savoir où est-ce que le ministre en est à ce sujet-là. Je vous remercie.

n(11 h 30)n

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien, il y a beaucoup de sujets pour cinq minutes, M. le Président, alors on va essayer de les condenser. Pour notre collègue de Laurier-Dorion, effectivement on a lancé une campagne de sensibilisation pour la population, tournant autour de l'usage optimal du médicament, sur trois ans. Je pense que la campagne a été bien menée, et il faut maintenant envisager une quatrième année et rappeler que la responsabilité personnelle du citoyen a une importance dans la question de l'usage optimal.

Il y a un autre axe ou un autre versant de cette opération de communication directe avec la population qui est Info-Santé. On va, au cours du début 2008, actualiser le numéro 811 pour l'ensemble des régions du Québec, ce qui va être beaucoup plus efficace et donner un meilleur service à la population, un taux de réponses plus élevé avec Info-Santé. Et on devrait, autour de 2009 ? c'est ce qui est prévu ? ajouter un versant Info-Médicaments à Info-Santé, dans lequel, lorsque le citoyen, dans l'exemple que donnait le collègue, a une question concernant les médicaments, il pourra être mis en contact avec un pharmacien ou un expert qui sera capable de lui donner les renseignements concernant l'usage des médicaments.

Quant à la remarque du député de L'Assomption, je dirais qu'il est assez téméraire de relier le règlement de la marge bénéficiaire au fait qu'il ait demandé une interpellation. «Téméraire» est un euphémisme, M. le Président. D'autre part, l'utilisation du mot «virevent», on le voit, dans les caricatures et éditoriaux depuis quelques semaines, que l'application de cet adjectif ne se situe pas du côté du parti ministériel. Loin de là. Mais on n'y reviendra pas, cependant.

Je voudrais parler, dans le temps qui reste, de deux sujets très importants, d'abord la marge bénéficiaire des grossistes et la question des profils de prescription. Il faut rappeler l'histoire. Si on n'avait pas agi, tout le monde montait à 9 %, avec des coûts encore plus importants pour le réseau de la santé et notamment le régime d'assurance médicaments. Il faut rappeler que c'est par négociation avec les grossistes qu'on est arrivés à cette entente sur 7 %, où, disait-on, du côté des grossistes, on disait: Bien, écoutez, le jeu du libre marché va s'appliquer, et la concurrence va faire en sorte qu'on étale les augmentations ou les fixations de marge de profit de 5 % à 7 %, ce qui devrait avoir un effet financier nul pour L'État. Alors, il est clair que ce qu'ont démontré les entreprises grossistes, c'est qu'elles ne se soumettent pas aux règles du marché ou, à l'inverse, que les règles du marché ne s'appliquent pas dans leur domaine, puisque l'ensemble des grossistes se sont dépêchés de demander des augmentations à 7 %, qu'il faut accepter parce que l'alternative, c'est de le laisser monter à 9 %, tout le monde, en attendant l'adoption finale du règlement.

Donc, devant cet état de fait, il est décidé de façon finale, pour au moins deux ans, parce qu'on va effectivement revoir ça dans deux ans, de mettre tout le monde à 6 %.

Et, lorsqu'on parle d'autres modèles possibles, il faut quand même rappeler certaines choses à notre collègue, c'est que le modèle de zone géographique dont il parle, le principal biais ou le principal problème qu'il causerait, c'est que des citoyens des régions de la Côte-Nord, par exemple, en pratique paieraient plus cher un médicament que les citoyens de Québec ou les citoyens de Montréal. Alors, il n'y a certainement aucune formation politique qui veut faire ça.

L'industrie ou le groupe des grossistes nous a laissé entrevoir d'autres modèles possibles sans jamais nous les présenter de façon précise, et, lorsqu'ils étaient présentés et analysés, ils avaient tous comme résultats d'augmenter les déboursés de l'État de façon considérable, alors que l'augmentation ou la fixation des marges bénéficiaires à 6 % se fait à coût nul pour l'État, et il y a lieu de s'en réjouir.

Quant à l'impact de la période dans laquelle on est passé de 9 % à 7 %, puis de 7 % à 6 %, il faudra attendre l'étude des crédits pour en avoir une étude détaillée ou une évaluation détaillée. Dans le cadre d'un régime dont le coût net est de 2,1 milliards, il s'agit d'un coût relativement faible qui est cependant là mais qui découle effectivement d'un consensus qui s'était fait avec l'industrie, des marges, et dans lequel il y avait des considérations importantes notamment pour la région de Québec ? je vois le député de La Peltrie ? où il y a des grossistes, dans la région de Québec, qui ont des sites, des entrepôts, avec des emplois et qui laissaient entrevoir que, si on ne montait pas les marges plus haut que 7 %, les emplois seraient menacés et que les firmes pourraient avoir à fermer leurs portes. De leur côté, il y a d'autres firmes grossistes qui disaient qu'elles étaient capables de fonctionner à 5 %, et même eux se sont dépêchés de monter à 7 % lorsqu'on a déposé le premier projet de règlement, ce qui est assez consternant de ma part quant à la responsabilité sociale et au comportement collectif d'une partie de l'économie.

Alors, ayant démontré donc la non-application des lois du marché dans leur secteur, le gouvernement doit jouer un rôle de réglementation et d'équilibre. C'est la raison pour laquelle les marges des grossistes seront fixées à 6 %. Et ce sera comme ça pour deux ans, et bien sûr deux ans au bout desquels on reverra l'impact de ces mesures-là. Et on sera toujours prêts, dans deux ans, à accueillir la suggestion d'autres modèles, ce qui ne s'est jamais matérialisé jusqu'à maintenant. Je rappelle que chaque suggestion du groupe des grossistes se faisait de façon individuelle, sans consensus dans leur groupe, et avait comme résultat invariable d'augmenter les dépenses des contribuables dans ce domaine-là. Alors, je pense que c'est une approche qui était justifiée, qui est une approche directe et équilibrée.

Pour ce qui est des profils de médicament ? très brièvement, il me reste juste 2 secondes ? les médecins préfèrent de beaucoup avoir l'État leur envoyer un profil de prescription qu'une entreprise privée dont ils ne connaissent pas l'évolution et l'utilisation par la suite de ces profils-là.

Le Président (M. Kelley): Merci, M. le ministre. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Gerry Sklavounos

M. Sklavounos: ...M. le Président. On a parlé d'accès à quelques reprises et on entend certains mythes des fois circuler concernant l'augmentation des tarifs pour la participation au régime public d'assurance médicaments. On sait qu'il y a certains collègues qui peuvent même contribuer à entretenir ces mythes-là concernant la contribution qui est exigée, l'augmentation de la contribution. Et j'aimerais que le ministre, en général... On a parlé, tout à l'heure, de la gratuité de médicaments et que le fait de cette gratuité a été étendu à plusieurs groupes de personnes, des personnes qui bénéficient du supplément de revenu garanti à 100 %, à 94 %, des prestataires d'aide sociale, également ceux qui sont sans contraintes sévères, et je trouve ça très important. Mais j'aimerais que le ministre aussi, lorsqu'il aura l'occasion peut-être de conclure, nous parle un petit peu de ce que ça représente pour les autres groupes de personnes en termes de contributions annuelles, pour que les citoyens qui nous écoutent chez eux soient capables de mettre les choses dans le contexte.

On pourrait entendre que, oui, on donne la gratuité d'une main, mais on enlève de l'autre main. Par contre, je vous dirais que la réalité est tout autre. Nous avons réussi, ce gouvernement a réussi, M. le Président, à contrôler et à obtenir des augmentations, mais seulement des augmentations très, très raisonnables de la part des citoyens dans tous les groupes qui sont visés.

Également, M. le Président, si vous me permettez, on entend souvent ? et, je vous dis, c'est des choses qui reviennent souvent ? parler des compagnies qui font des médicaments génériques au Québec, et, malgré le fait qu'on reconnaît aussi qu'il y en a, de ces compagnies qui sont installées au Québec, qui contribuent de leur façon à l'économie, il y a une perception des fois chez les citoyens que ce sont les compagnies qui font de la recherche et qui créent des médicaments novateurs pour les gens qui sont peut-être désavantagés des fois par les politiques, et alors que la vie est beaucoup plus facile pour les compagnies qui font des génériques et qui produisent des médicaments qui sont en quelque sorte des copies de médicaments où il y a un investissement apporté par des entreprises, de la recherche, du travail faits, et par la suite on profite de ce travail-là afin de mettre sur le marché des produits génériques.

J'aimerais également si le ministre pouvait revenir dans ses remarques finales concernant le type de contrôles qui existent dans la politique et qui seront mis en vigueur bientôt, de ce je comprends, pour le bénéfice des gens, des citoyens qui nous écoutent, concernant le contrôle qu'eux, les compagnies génériques, auront à inclure dans leurs politiques, afin de pouvoir, à ce niveau-là, également contrôler la part du prix des médicaments qui est assumée par l'État et par les citoyens, parce que c'est une partie assez importante quand même du marché. Et, à ce niveau-là, j'aimerais entendre le ministre là-dessus. Et, s'il pourrait nous donner une idée également de la période sur laquelle on prévoit avoir ces contrôles en place, ça pourrait éclairer la population et les citoyens qui nous écoutent chez eux. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Il nous reste maintenant le cinq minutes réservé pour le deuxième groupe de l'opposition. Alors, je suis prêt à céder ? manifestement, ils ne sont pas décidés d'utiliser ce temps; alors, je suis prêt à céder ? la parole à M. le député de La Peltrie pour un cinq minutes. Après ça, il y a les deux blocs de 10 minutes pour les remarques finales. M. le député de La Peltrie.

M. Éric Caire

M. Caire: Oui. Merci, M. le Président. Je voulais revenir sur la réponse que le ministre a faite tout à l'heure, quand on a parlé de la robotisation et du circuit du médicament.

D'abord, à ma grande consternation, je constate que le ministère a annoncé un circuit du médicament et qu'il n'avait pas nécessairement les fonds pour le faire, parce que le ministre nous dit: C'est le 7 milliards de dépenses d'infrastructures qui va servir à le financer. Or, la politique du circuit du médicament a été annoncée déjà il y a un certain temps. Donc, on a annoncé une politique pour laquelle on n'avait pas de fonds. C'est ce que j'en conclus, de la réponse du ministre. Puis, dans ses remarques finales, il pourra corriger si d'aventure ma conclusion n'est pas exacte, et je suis sûr qu'il ne s'en privera pas.

D'autre part, M. le Président, je conçois mal que le ministre peut considérer un investissement technologique comme une dépense d'infrastructures. À mon avis, il y a une différence entre faire un toit, monter un mur puis investir dans une technologie qui nous permet d'économiser des coûts. Or, il n'y a personne qui va économiser des coûts, dans le réseau de la santé, avec de la brique puis du bardeau d'asphalte. Par contre, la robotisation ? bien, je veux dire, j'espère qu'on va prendre l'image pour ce qu'elle est, là; par contre, la robotisation ? et le ministre a acquiescé à mon affirmation, nous fait économiser des coûts, de même que la délégation d'actes. Donc, c'est un investissement.

n(11 h 40)n

Et ce que je disais, c'est que, cet investissement-là, à très court terme, les centres hospitaliers qui s'en prévalent sont capables de le rembourser. Or, de deux choses l'une: ou on leur permet de le faire et on leur permet d'amortir ça sur une courte période ou on le finance évidemment puis, à ce moment-là, bon, bien on récoltera les économies. Mais, d'une façon ou d'une autre, il y a pour le gouvernement une économie à terme. Donc, il n'y a pas lieu, M. le Président, d'endetter les Québécois, de mettre ça sur la dette de la province, qui sera remboursée entre maintenant et jamais, et donc d'hypothéquer la santé et la capacité financière des Québécois dans son ensemble pour un projet d'investissement qui pourrait, à très court terme, être rentable.

Donc, cette logique-là, M. le Président, je ne peux pas être en accord d'aucune espèce de façon, là, parce qu'on était bien d'accord qu'on dégageait des marges de manoeuvre.

D'autre part, M. le Président, il y a des centres hospitaliers qui ont fait ce choix-là. Et, dans la politique du circuit du médicament, en aucun temps il n'est spécifié que, d'une part, ils seront remboursés si on étend la Politique du médicament à l'ensemble des centres hospitaliers ou, d'autre part ? et le ministre est resté muet là-dessus ? qu'ils conserveront l'ensemble des marges de manoeuvre dégagées dans leur budget de fonctionnement donc qui ne se feront pas couper d'autant, parce que la robotisation va permettre, par exemple, de payer moins en salaires, bon, etc., de payer moins sur différents aspects. On réduit les erreurs, donc le volume de médicaments qu'on jette diminue, le volume de médicaments qu'on récupère augmente.

Donc, vous voyez, M. le Président, qu'il y a un ensemble de coûts, il y a un ensemble de gains qu'on fait pour un centre hospitalier. Et il y a des centres hospitaliers qui ont fait ce calcul-là, qui ont fait les investissements en conséquence et qui, aujourd'hui, se demandent: Si on robotise l'ensemble du réseau, serons-nous dédommagés pour, nous, avoir été précurseurs ou serons-nous pénalisés? Alors, là-dessus la Politique du médicament est extrêmement muette, et c'est un peu inquiétant.

Autre questionnement. Bon. Le ministre nous dit: Il y a une limite à la surenchère avec le privé. C'est le gros bon sens, c'est le gros bon sens. Bien sûr qu'on ne veut pas se lancer dans une surenchère éternelle avec le privé, mais il n'en demeure pas moins, M. le Président, que c'est un point de comparaison, que c'est une situation, qu'elle nous plaise ou non, c'est une situation dans laquelle on se trouve. Il y aura toujours un comparatif entre le public et le privé, et je pense que ce n'est pas une mauvaise chose non plus, que le public peut s'en sortir. Bien sûr, quand on récupère des montants d'Ottawa, du déséquilibre fiscal ? déséquilibre fiscal, on s'entend, qui dit: L'argent est à Ottawa, les services sont à Québec ? quand on récupère ces montants-là, encore faut-il s'en servir pour donner des services et non pas pour cautionner des promesses de campagne électorale qui étaient un peu évasives, quant à moi qui étaient un peu injustifiées.

Alors, on a de la marge de manoeuvre. Il y a une possibilité pour le gouvernement sans se lancer dans une surenchère qui n'en finit plus puis qui va amener les finances publiques dans une impasse. Ce n'est absolument pas ce qu'on souhaite, mais il y a quand même possibilité de bonifier l'ensemble des conditions de pratique ? le ministre y a fait mention ? dans les défis qui seront pour les employés du secteur public, dans les tâches qui pourront être exécutées mais aussi dans les conditions salariales. C'est un élément parmi d'autres, et là-dessus la réponse du ministre a été un peu décevante.

Le Président (M. Kelley): Merci, M. le député. On est maintenant dans les deux blocs de 10 minutes qu'il nous reste pour les remarques finales. Je vais maintenant céder la parole au ministre de la Santé et Services sociaux. La parole est à vous pour un maximum de 10 minutes.

Remarques finales

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Sur la question des génériques effectivement ? et l'actualité en a fait mention récemment quant à la fixation équitable et correcte du prix des génériques ? rappelons toujours cette règle du prix le plus bas, qui fait que le Québec offre les prix les plus bas à ses citoyens par rapport à ce qui se fait dans l'ensemble du Canada.

Ceci étant dit, la politique s'exprime là-dessus de façon très claire, avec une proposition dont les économies devraient apparaître en février prochain, d'ailleurs une source d'économie assez importante, une proposition de baisser le prix du générique à 60 % pour le premier lorsqu'il n'en existe qu'un et à 54 % lorsqu'il en existe d'autres. Il faut savoir que cette intention vise également à reconnaître la contribution qu'a également l'industrie générique dans l'économie du Québec. On parle beaucoup, et avec raison, d'une industrie d'innovation comme source d'activité de haut niveau, recherche, etc. Il y a également des activités de recherche, il y a également des milliers d'emplois dans l'industrie générique. Il faut donc prendre garde de ne pas adopter des politiques qui pourraient également nuire à cette source d'activité économique au Québec.

Maintenant, compte tenu de l'application de la règle du prix le plus bas, il est certain que, si d'autres provinces canadiennes, notamment l'Ontario, qui a une politique qui, d'après ce qu'on a vu, envisage des réductions encore plus importantes de prix du médicament générique par rapport au médicament innovateur, il est certain qu'une telle politique, si elle est adoptée en Ontario, aura un effet automatique au Québec, en raison de la règle du prix le plus bas. Donc, les citoyens québécois, les contribuables sont protégés à ce niveau-là. Il y a là des économies importantes de l'ordre de 5 millions de dollars par mois, et c'est des sources d'économie appréciable qu'on va pouvoir dégager au cours des prochaines années et qui vont bien sûr se poursuivre à mesure que nouveaux médicaments génériques s'ajouteront à la liste lors de l'expiration des brevets et de l'expiration de la période de protection supplémentaire en termes de remboursement, qui fait en sorte que l'industrie a choisi de s'installer au Québec.

Le député de La Peltrie parle encore une fois des robots. Tout est possible. Il y a des nombreux outils possibles. Ça reste un appareil qui peut être acquis par... capitalisables ou qui peut être acquis par projets autofinancés. Il n'est pas question de priver des établissements de quelque revenu ou quelque bénéfice que ce soit. Nous, on ne réduit pas, on ne coupe pas les budgets. Je pense que le député le reconnaîtra, là. Il n'y a pas un établissement de santé au Québec qui n'a pas vu constamment ses budgets augmenter. Non, non, il n'y a pas de précédent, là, quant à l'augmentation de budget, par rapport à ce qui a été fait entre 2003 et maintenant, par rapport à ce qui existait auparavant. On a, nous, le désir, et on l'a prouvé continuellement depuis 2003, d'investir continuellement dans notre système de santé. Il n'y a aucun établissement de santé, aucun établissement de santé qui a eu des coupures depuis 2003. Tout le monde a eu des augmentations de budget, et des augmentations très importantes. Et on finance également les médicaments dans les établissements, au moyen de qu'on appelle l'indexation spécifique. Puis, lorsqu'on ajoute l'Avastin récemment pour le cancer colorectal à la liste des médicaments en établissement, c'est des dizaines de millions de dollars qu'on va financer pour les établissements.

Alors, de la même façon, le député est probablement au courant, il y a quelques années, il y avait eu un programme autofinancé pour l'économie d'énergie, les établissements de santé. C'est un très bel exemple. C'est un très bel exemple. On peut faire la même chose avec les appareils de stérilisation. Actuellement, on regarde ça au ministère également. On peut faire la même chose avec les robots pharmaceutiques. Il ne faut pas oublier que les robots pharmaceutiques, c'est souvent des grosses machines qui nécessitent des changements à l'environnement physique et également des budgets d'immobilisations. Je sais qu'il ne voulait pas dire ça de façon générale puis je ne relèverai pas ça de façon négative, mais ce n'est pas vrai que les dépenses d'immobilisations ne permettent jamais de faire des économies. C'est souvent au contraire le cas parce que, les locaux étant plus efficaces et accueillant des installations plus performantes sur le plan économique, elles permettent de faire les économies de santé.

Juste brièvement, la question de déséquilibre fiscal. Je rappelle que, lors de la dernière année, on sait que notre gouvernement a été, au cours des dernières années, très efficace dans la récolte de bénéfices provenant du gouvernement fédéral. Il y a quand même les deux tiers du 2,1 milliards de transferts fédéraux supplémentaires qui ont été investis en services, éducation, santé; un tiers en baisses d'impôt qui commencent d'ailleurs en janvier. Je ne pense pas que l'ADQ va recommander que ces baisses d'impôt soient annulées, d'autant plus que les citoyens en verront un effet concret sur leurs chèques de paie, à partir de janvier prochain. Il y a également, dans la même perspective, dans le même environnement canadien, de nombreuses provinces canadiennes qui ont annoncé des baisses d'impôt, incluant les provinces qui reçoivent de la péréquation.

Alors, il y a lieu de faire un équilibre, de contribuer bien sûr à nos services publics mais également de faire bénéficier les citoyens québécois, particulièrement ceux de la classe moyenne, de ces baisses d'impôt importantes. Puis je regrette personnellement que l'ADQ ait voté contre le budget qu'on avait présenté, qui contenait ces baisses d'impôt importantes, qui seront très visibles pour la population du Québec à partir de janvier prochain.

Pour revenir au sujet du débat que nous avons eu aujourd'hui, qui d'ailleurs a été intéressant, je voudrais remercier mes collègues sur la façon dont il a été mené parce qu'on a, je pense, touché des points importants et on les a discutés de façon correcte. Rappelons que la Politique du médicament au Québec est une innovation dont tout le Québec peut être fier. Encore une fois, je le répète, parce qu'il faut se le dire entre Québécois lorsqu'on fait des choses qui suscitent l'attention du monde entier. C'est le cas de la Politique du médicament avec un axe d'abord d'accessibilité qui protège les Québécois et qui maintient le niveau d'accessibilité très élevé qu'on a au niveau des médicaments, qui améliore l'accessibilité des médicaments des personnes les plus démunies de notre société. 325 000 personnes ont ainsi retrouvé la gratuité des médicaments. Ce n'est pas rien. C'est des personnes qui ont des revenus entre 7 000 $ et 13 000 $ par année, qui sont très démunies, dont les budgets personnels sont extrêmement fragiles, et de les protéger contre l'impact financier des médicaments est un acte qui traduit notre préoccupation pour la justice sociale tout en assurant le développement économique du Québec.

La fixation équitable des prix a été touchée dans notre discussion. Je suis content qu'on ait touché cet élément de fin de la politique de non-augmentation, une fin balancée, équilibrée, encadrée, qui a été saluée par l'ensemble des intervenants d'ailleurs du milieu économique au Québec et qui fait en sorte, on l'a vu, que, dans la vaste majorité des cas, 97 % des médicaments inscrits, les hausses ont été au niveau de l'inflation. Et, pour les autres ? malheureusement, on n'a pas eu le temps de regarder ça ? mais les cas des médicaments qui ont été touchés par des hausses de prix supérieures à l'inflation... sont, par exemple, des augmentations de 0,20 $ à 0,22 $ le comprimé, alors que le médicament d'alterne est de 0,25 $ le comprimé, ce qui entraîne bien sûr des économies importantes pour le contribuable et le régime général d'assurance médicaments.

n(11 h 50)n

Même désir de fixer de façon équitable les prix dans la question des génériques, même désir de fixer également, de façon équitable, les prix dans l'encadrement des ristournes ou des avantages professionnels consentis aux pharmaciens propriétaires. Même désir également, même si l'événement entourant les grossistes à mon avis est décevant quant au comportement collectif de ce groupe d'entreprises là, même souci d'équité et d'équilibre dans la fixation de la marge bénéficiaire des grossistes.

Et, le dernier axe de la politique, il faut le rappeler, parce que beaucoup ont critiqué le gouvernement à l'époque ? et je ne crois pas par contre que ça a été le cas de l'ADQ, je ne me souviens pas qu'on ait mentionné cet élément-là ? mais on a critiqué le gouvernement d'inclure un volet économique à une politique du médicament, alors qu'il nous semble évident qu'il faut le faire. Il faut absolument faire le lien entre la prospérité économique, le financement des régimes collectifs, notamment les régimes sociaux et du médicament, et c'est parce qu'on a une politique d'accueil délibéré à l'endroit de l'industrie pharmaceutique d'innovation au Québec. Quelles sont les façons concrètes par lesquelles nous avons cette politique d'accueil délibéré? Il y a le maintien de la protection des brevets de cinq ans supplémentaires en fait indirectement en prolongeant la période de remboursement des innovateurs. Il y a tout le soutien fiscal des activités de recherche et développement, le soutien fiscal, l'encadrement fiscal des entreprises. Il y a la non-utilisation de l'outil du prix de référence.

Tout ça fait en sorte que, lorsqu'on regarde le Québec, particulièrement le Québec, de Zurich ou d'autres pays où les sièges sociaux de ces grandes compagnies se situent et où les décisions se prennent pour les investissements, le Québec devient et demeure une terre d'accueil très favorable.

Et il faut rappeler qu'au-delà de ces discussions et de ces décisions économiques de ces grandes entreprises globales il y a pour les citoyens du Québec des emplois, là. Il y a des gens, je répète, il y a 18 000 personnes, tous les jours, qui se lèvent pour gagner leur vie très bien, en passant, dans des emplois de valeur ajoutée dans l'industrie pharmaceutique. On veut non seulement que ça persiste, mais que ça augmente au cours des prochaines années. On est très encouragés par le demi-milliard de dollars déjà investi, en 2007, par l'industrie pharmaceutique au Québec. Il y en a encore d'autres à venir d'ici 2008, et ça va se poursuivre au cours des prochaines années, ce qui montre qu'on est un gouvernement qui fait l'équilibre entre la croissance économique et la justice sociale.

Ce n'est pas pour rien donc qu'on obtient une performance économique au Québec, actuellement, malgré ses défis, entre autres la hausse du dollar, la situation de la forêt, mais une situation économique qui est sans précédent, avec un taux de chômage très bas, avec un taux d'emploi très élevé, avec également une activité économique importante, en même temps qu'on a diminué le nombre de personnes sur l'aide sociale, qu'on a redonné la gratuité des médicaments à 325 000 personnes démunies qui l'avaient auparavant perdue, qu'on a rehaussé les seuils d'aide juridique.

Donc, une belle démonstration de ce qui est la tradition de notre formation politique, c'est-à-dire un équilibre entre la jeunesse, la génération de la prospérité et de la richesse collective, et la justice sociale, la préoccupation, et la solidarité qu'on a pour les plus démunis d'entre nous et qui caractérise le Québec. On est très fiers de cette caractéristique, d'ailleurs. Mais, pour le faire, il faut placer au premier plan la création de la richesse et de la prospérité, parce que, comme le disait si bien notre chef à l'époque, M. Bourassa, et ce que nous répétons aujourd'hui, c'est que, pour répartir la richesse et la prospérité, il faut s'assurer de la créer d'abord par des décisions qui sont des décisions qui peuvent sembler, parce qu'elles le sont, difficiles mais qui sont nécessaires et qui doivent toujours s'accomplir sur la base de prémisses. Notre priorité, la priorité du gouvernement, c'est le développement économique, une population en santé et, en grand nombre, active dans l'économie et bien sûr une croyance fondamentale, et on l'a réaffirmé et on le réaffirmera, dans le fédéralisme canadien comme solution d'avenir pour le Québec.

Alors, on a eu l'occasion avec cette Politique du médicament. En fait, pour moi c'est un des beaux exemples de ce que signifient ces valeurs profondes de notre formation politique.

Je voudrais, en terminant, parce qu'il ne reste que quelques secondes, vous remercier, M. le Président, de même que le personnel de l'Assemblée nationale qui est avec nous, mon collègue le député de Laurier-Dorion et également mes collègues de l'opposition pour la qualité de leurs propos aujourd'hui, en espérant qu'on aura l'occasion de se revoir dans d'autres débats, ce qui est une certitude d'ailleurs, au cours des prochaines semaines.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le ministre. Maintenant, à l'auteur de l'interpellation, M. le député de L'Assomption.

M. Éric Laporte

M. Laporte: Merci bien, M. le Président. Je crois que cette interpellation était l'occasion idéale pour nous de signifier l'importance qu'on accorde aux médicaments. D'ailleurs, ma première question en Chambre, lors de mon premier mandat, c'était par rapport aux médicaments. Donc, notre intérêt n'est pas nouveau, puis on va continuer de suivre ça avec beaucoup d'intérêt. Vous savez, les défis sont encore énormes. On entendait le ministre qui énumérait certains défis. On en a soulevé, nous aussi, là. De notre côté, on a beaucoup de préoccupations encore. Le ministre a été généreux dans ses commentaires, mais il y a encore des questions auxquelles on n'a pas eu les réponses qu'on aurait aimées. Mais, comme le disait le ministre, on va avoir l'occasion d'en rediscuter, j'en suis certain.

Certains chiffres que j'aimerais juste resouligner parce qu'on n'a pas eu l'occasion d'en parler. J'y ai touché, là, seulement brièvement. Au Québec, on dépense 699 $ par habitant, en médicaments prescrits, comparativement à 648 $ pour la moyenne canadienne. L'exercice qui est intéressant à faire, c'est de mettre ça au prorata de la population, puis on arrive à un montant de 90 millions, le montant total que ça coûte de plus au Québec que dans le reste du Canada. Si on se compare, supposons, en Ontario, toujours si on se compare aux médicaments prescrits, c'est 184 millions de plus qu'on paie que l'Ontario, qui est la deuxième province la plus dépensière au Canada. Ce qui est marquant, c'est lorsqu'on se compare à d'autres provinces comme le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta, qui eux ont des mesures plus agressives, mais c'est tout près de 1 milliard de différence si on met ça au prorata de la population. Donc, je crois qu'on a encore beaucoup d'énergie à mettre, beaucoup de moyens à mettre sur place pour pouvoir aller chercher plus d'économies, d'où l'importance qu'on a accordé, aujourd'hui, à l'utilisation optimale du médicament. Ça, je tiens à le noter, c'est malgré le fait... Le ministre tantôt parlait qu'on avait la politique du prix le plus bas au Canada. Donc, malgré cette politique, mais on paie quand même énormément cher pour nos médicaments.

Donc, ce qu'on peut conclure de cette interpellation, bien c'est que, comme le disait le ministre, comme tout le monde le dit, comme tous les gens qui ont déposé des mémoires l'ont dit, c'est que l'usage optimal du médicament, c'est l'affaire de tous. C'est l'affaire du citoyen, du médecin, du pharmacien, du fabricant, bien sûr du gouvernement également.

Le gouvernement, c'est lui qui va être le leader dans tout ce qui est mis en place des mesures qui touchent l'usage optimal. C'est lui qui va guider en somme, là, tous les intervenants de ce milieu-là. Donc, j'ai des craintes des fois, lorsque j'entends le discours du ministre, qui semble vouloir un petit peu se déresponsabiliser. C'est sûr que le citoyen a vraiment une importance majeure à jouer, là, dans sa consommation de médicaments, mais le rôle du ministre est également très important. On doit fournir aux citoyens tous les outils nécessaires pour qu'il puisse accomplir ses objectifs de consommation de médicaments, d'où mon intérêt pour la médicamentation non... pas la médicamentation, mais l'usage de thérapies non médicamenteuses. Donc, nos craintes, c'est que le gouvernement soit celui qui ralentisse tous les efforts des autres joueurs, c'est celui qui va se traîner les pieds dans l'application de mesures, dans la recherche de nouvelles applications. Comme je le disais tantôt, c'est lui qui va être le leader de tout le processus, c'est lui qui va donner le rythme auquel on va appliquer certaines solutions, puis présentement son rythme est quand même encore très lent.

On a juste à penser, par exemple, à l'encadrement de la distribution des échantillons dans les établissements de santé. Dans son calendrier des échéanciers de ces mesures qu'il s'est fixées, on peut voir que son objectif, c'est d'encadrer la distribution d'échantillons seulement en décembre 2009, donc c'est très loin. Puis pourtant ça, c'est quelque chose que tout le monde a réclamé. Tous les groupes qui ont déposé des mémoires en ont discuté. Certains parlaient de l'abolition complète des échantillons, d'autres parlaient plutôt... ou la majorité parlait d'encadrer. Le ministre est d'accord avec ça également parce que dans sa politique il a décidé d'encadrer la distribution des échantillons. Mais pourquoi le faire seulement en décembre 2009? Pourquoi être si lent? Bien, ça, c'est des questions qu'on va avoir l'occasion de requestionner le ministre là-dessus parce qu'on veut, nous, que tout se passe le plus rapidement possible, on veut atteindre l'utilisation optimale du médicament le plus rapidement possible.

Donc, c'est long, c'est très long. Puis il y a d'autres mesures également comme l'entente de partage, le principe de risque avec les fabricants. On n'a toujours aucune mesure qui a été mise sur pied, aucune entente qui a été conclue avec les fabricants de médicaments innovateurs. Donc, c'est une autre mesure qui nous laisse un petit peu songeurs, qui nous crée certaines inquiétudes. Si le ministre met sur pied des mesures qu'il n'est même pas capable de respecter dans sa propre politique, bien je pense je pense qu'on a raison de vouloir surveiller de très près sa gestion.

Donc, on considère que la détermination du ministre est faible par rapport à l'usage optimal du médicament, comme je le disais, entre autres, pour l'usage de la thérapie non médicamenteuse. C'est pour ça. Je sais que le ministre considère que ça ne fait pas partie de la Politique du médicament, mais pourtant ça a une priorité, c'est essentiel si on veut diminuer l'usage du médicament. Donc, comme je l'ai mentionné tantôt au ministre, je ne suis pas tout à fait d'accord avec lui sur ce point de vue là puis j'espère qu'il aura l'occasion de nous expliquer un petit peu plus tard c'est quoi, toutes ses intentions concernant l'utilisation de thérapies non médicamenteuses.

J'aimerais donner, entre autres, l'exemple des centres jeunesse. Dans les centres jeunesse, on le sait, il y a un taux d'utilisation des médicaments excessivement élevé, ce qui est quand même inquiétant. Puis il y a des études qui ont été faites, il y a des projets qui ont été mis sur pied qu'on peut conclure que, lorsque les enfants sont mieux encadrés, on peut réduire l'utilisation, là, de certains médicaments donc, d'où l'importance, là, comme je dis, de bien encadrer le patient, les jeunes, les personnes âgées. Comme, les personnes âgées, supposons, si on pouvait leur mettre à leur disposition un diététiste qui puisse bien les encadrer, bien encadrer leur menu, c'est évident qu'on va pouvoir réduire la consommation de médicaments.

n(12 heures)n

Donc, présentement, les ressources ne sont pas disponibles dans le secteur, système de santé. Par contre, je crois qu'il y a des moyens qui pourraient être mis en place pour que ces ressources-là soient disponibles.

Un autre point d'interrogation, le ministre en a parlé brièvement, la Table de concertation. On sait qu'il y avait déjà une table de concertation qui existait auparavant. Par contre, ce qui a été dénoncé de la part de plusieurs groupes, dont les médecins, c'est que le Conseil du médicament n'écoutait pas les recommandations de la Table de concertation. Donc là, on met beaucoup d'emphase sur les résultats que pourrait créer, que pourrait produire une table de concertation qui inclut tous les participants du milieu. Toutes les personnes qui pourraient avoir des idées pour avoir des moyens de réduire la consommation ou d'utiliser les médicaments de façon optimale sont réunis sur cette table-là. Donc, une de nos craintes, c'est de voir le Conseil du médicament encore une fois éviter de répondre au questionnement de la Table de concertation ou éviter d'utiliser les recommandations qui seront faites par cette table.

Donc, c'est ça. Je veux revenir un petit peu, là, sur les objectifs que le Vérificateur général recommandait de mettre sur place en même temps que la Politique du médicament. Ce qu'on peu en conclure, c'est que le ministre a rappelé, a confirmé encore une fois ce qu'il avait déjà dit, c'est qu'il considère que c'est trop difficile à mettre sur pied, de tels indicateurs, de tels objectifs. Pour moi, ma vision des choses, c'est que, lorsqu'un gestionnaire refuse de se fixer des objectifs clairs, c'est parce que le gestionnaire n'a pas confiance en sa gestion, n'a pas confiance dans les outils qu'il a mis en place. Donc, il n'ose pas se mettre d'objectif. Donc, c'est une façon un petit peu, là, de se cacher, là, d'être sûr de ne pas décevoir personne, d'être sûr de ne pas décevoir les gens qui comptent sur l'usage optimal du médicament.

Je vais reciter un passage, là, du rapport du Vérificateur général. En qualifiant la stratégie 2001-2004, ce qu'il disait, c'est: «D'une part, ces objectifs portent sur des moyens à prendre plutôt que les résultats attendus. D'autre part, le plan stratégique ne reprend aucun des objectifs de la loi ni ne fixe de cible ou d'indicateur pour les atteindre.» Donc ça, c'étaient les commentaires du Vérificateur général sur la stratégie 2001-2004. Alors, on peut exactement prendre les mêmes propos puis les appliquer à la Politique du médicament qui a été mise en place dernièrement. Donc, c'est décevant de voir que les propos du Vérificateur général n'ont pas trouvé écho dans la nouvelle Politique du médicament.

Je vais revenir sur la marge bénéficiaire. Le ministre n'a toujours pas voulu nous donner le montant, le coût de son erreur, du cafouillage. Il nous a demandé d'attendre, là, un petit peu plus tard, à la reddition de comptes, à l'analyse des crédits. Ce qui est frappant par contre, ce qui est même désolant, c'est de voir que le ministre a banalisé le chiffre que j'avançais, de 7,2 millions. Parce que, vous savez, 7,2 millions, le ministre a dit: C'est sur un ensemble, un budget d'environ 4 milliards, donc, 7,2 millions, il ne faut pas s'en faire avec ça. Par contre, j'aimerais rappeler au ministre que 7,2 millions, ça représente 460 chirurgies cardiaques, des chirurgies qu'on ne peut pas faire parce qu'on justifie le fait que les salles d'opération ne peuvent pas être utilisées, faute de budget. Donc, 7,2 millions, c'est 460 chirurgies cardiaques, M. le Président. Donc, je trouve ça un petit peu inquiétant de voir le ministre banaliser un chiffre aussi important.

Donc, faute de temps, je vais m'arrêter là. Je vais prendre le temps de remercier, bien, le ministre, même si on n'est pas d'accord sur certains points, même si on aimerait avoir plus d'éclaircissement sur certains points. Mais il a quand même été généreux dans ses commentaires, puis ça a été des bonnes discussions qu'on a eues aujourd'hui. Je remercie aussi le député, puis mes collègues également puis je vous remercie, vous, ainsi que tout le personnel pour cet avant-midi. Je vous remercie bien.

Le Président (M. Kelley): Merci beaucoup, M. le député. À mon tour, je veux dire merci beaucoup à la table, merci beaucoup aux recherchistes, aux représentants du ministère et des organismes qui sont parmi nous, aujourd'hui. Et finalement merci beaucoup à la discipline de tout le monde. On a respecté le temps, qui nous a permis de faire un échange intéressant sur cette politique et ces questions.

Sur ça, j'ajourne nos travaux, nous avons accompli notre mandat. J'ajourne nos travaux au vendredi le 16 novembre, à 10 heures, pour une autre interpellation. Merci beaucoup et bonne fin de semaine tout le monde.

(Fin de la séance à 12 h 4)


Document(s) associé(s) à la séance