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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 21 novembre 2001 - Vol. 37 N° 21

Consultations particulières sur le projet de loi n° 26 - Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Le mandat de la commission est de poursuivre des consultations particulières sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil. M. le secrétaire, est-ce que la commission a des changements ou des remplacements à annoncer?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Cholette (Hull) est remplacé par Mme Bélanger (Mégantic-Compton) et M. Ouimet (Marquette) est remplacé par Mme Houda-Pepin (La Pinière).

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, nous allons procéder, pendant la prochaine heure, à l'audition du Regroupement de propriétaires d'habitations locatives en Estrie, et, par la suite, nous ajournerons nos débats jusqu'à la fin des affaires courantes, cet après-midi, pour reprendre normalement à la même salle aux environs de 15 heures.

Auditions

Alors, sans plus tarder, je demanderais aux représentants du Regroupement de propriétaires d'habitations locatives en Estrie de bien vouloir s'identifier. Vous disposez de 20 minutes pour présenter votre mémoire et ensuite 40 minutes d'échanges avec la députation autour de la table.

Alors, je pense que c'est d'abord M. Lavoie qui prendra la parole. M. Lavoie.

Regroupement de propriétaires
d'habitations locatives en Estrie (RPHL)

M. Lavoie (Daniel): Merci, M. le Président. Je tiens à souhaiter le bonjour à tous les membres de la commission, à Mme Harel, à Mme Fatima Houda-Pepin et aussi aux autres députés. Il me fait plaisir d'être avec vous ce matin.

D'entrée de jeu, je voudrais présenter mon équipe. Moi, je suis directeur général du RPHL depuis 1989. À ma droite, nous avons le procureur du RPHL depuis 11 ans, de la firme Crochetière et Pétrin, Me Jean Rousseau. À mon extrême droite, nous avons un propriétaire, qui est président du comité contre le projet de loi n° 26, M. Alain Dion, c'est ça; et, à ma gauche, Mme Ève Paré, économiste de l'APCHQ provinciale.

Et, je dois dire, M. le Président, que j'ai ou que nous avons, c'est-à-dire au niveau de l'équipe, derrière nous, une délégation de propriétaires qui s'est levée très tôt ce matin, qui est partie de l'Estrie pour venir vous porter un message qu'on va entendre tout à l'heure. Malheureusement, comme il y a des contraintes logistiques dans cette salle, on a dû refuser, pour respecter les règles du jeu, plusieurs propriétaires qui avaient manifesté l'intention de venir rencontrer la commission pour transmettre son message.

Donc, si vous le permettez, M. le Président et membres de la commission, je vais présenter notre Regroupement dans un premier temps. Le Regroupement des propriétaires d'habitations locatives du RPHL a été fondé en 1981, sous la bannière de l'APCHQ de l'Estrie, par les propriétaires de la région désirant regrouper leurs forces et leurs ressources afin de travailler à la défense et à la promotion des droits et intérêts des propriétaires d'immeubles à revenus. À ce jour, le RPHL regroupe plus de 700 propriétaires, ce qui représente 18 000 logements gérés par ces propriétaires-là, ce qui constitue, dans le grand Sherbrooke métropolitain, 80 % du parc immobilier de l'Estrie. Et je dois dire aussi que, au niveau de notre membership, plus de 50 % de notre membership représente ce qu'on peut qualifier de petits propriétaires, c'est-à-dire moins de six logements.

Depuis plus de 20 ans, le RPHL travaille constamment à élargir la gamme de services offerts à ses membres tant sur le plan régional que provincial et assure de plus en plus une représentativité auprès des différentes instances gouvernementales et auprès des organismes.

Le RPHL est donc constamment à l'écoute des besoins de ses membres afin de leur fournir des services et des représentations à la hauteur de leurs attentes. Le présent mémoire reflète donc la position de l'ensemble des membres du RPHL qui nous ont fait connaître leur position dans le cadre de plusieurs assemblées de consultation, d'appels téléphoniques et d'une pétition, dont on parlera tout à l'heure, signée par plus de 650 propriétaires.

Il nous fait donc plaisir d'avoir été invités à cette commission parlementaire nous permettant d'émettre nos commentaires concernant le projet de loi n° 26. Quoique étant très heureux de pouvoir nous faire entendre par le législateur, nous aurions tout de même apprécié pouvoir être consultés de façon plus formelle et sérieuse au moment de la préparation et de la rédaction de ce projet de loi.

n (10 h 40) n

C'est d'ailleurs par un pur hasard que nous avons appris, quelques jours avant la date prévue de son adoption, l'existence du projet de loi, qui, par ailleurs, devait être adopté sous le bâillon. Nous croyons que cette façon de faire est irrespectueuse envers les propriétaires qui sont des partenaires primordiaux dans le domaine du logement au Québec. Cette façon de faire a grandement choqué les propriétaires qui sont trop souvent ignorés du gouvernement, d'où un sentiment de frustration de plus en plus grand. Ce sentiment est constaté par le contenu des propos des différents propriétaires rencontrés lors de réunions, propos témoignant de leur plus grande exaspération face au gouvernement qui, encore une fois, entendait proposer un projet de loi venant diminuer de façon considérable le peu de droits qu'ils considèrent leur rester, sans initialement leur permettre de faire valoir leur point de vue.

Tous nous ont mentionné, dont plusieurs avec amertume, qu'une telle attitude faisait en sorte de les désintéresser de plus en plus de tout investissement dans le domaine de la location, alors que certains autres nous indiquaient qu'ils envisageaient sérieusement ? et je pèse mes mots ? se débarrasser de leurs immeubles. Cette tendance est d'ailleurs constatée par l'ensemble des associations de propriétaires, dont nous faisons partie au niveau du front commun.

Soulignons à cet effet les remarques de M. Jean-Robert Sansfaçon, dans Le Devoir, version Internet: «Tant qu'il sera plus intéressant de construire des condos que des immeubles locatifs, tant que la Régie limitera au taux d'inflation ? et encore! ? les augmentations de loyer permises, la qualité et le volume du parc locatif iront s'amenuisant.»

Nous tenions à faire cette précision d'entrée de jeu afin de nous faire part de la volonté des propriétaires d'être dorénavant consultés relativement à tout projet de loi pouvant affecter leurs droits. Nous croyons tout comme nos membres que le logement n'est pas seulement l'affaire des locataires et du gouvernement, mais que les propriétaires sont des joueurs essentiels dans la prise de décision de toute législation affectant le logement au Québec.

Document déposé

Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais déposer devant la commission une lettre, ce matin, suite à une allégation de la ministre Harel hier, lorsqu'elle a affirmé que, selon les derniers courriers qu'elle avait reçus de l'APCHQ provinciale, tout allait bien au niveau de la construction. Donc, si vous le permettez, on voudrait déposer cette lettre-là, lettre qui a été adressée le 5 septembre 2001 ? oui, c'est ça ? le 5 septembre 2001 à Mme Louise Harel par le vice-président exécutif de l'APCHQ provincial, M. Omer Beaudoin Rousseau. Et je voudrais juste vous lire les deux premiers paragraphes et on y reviendra pour donner un éclairage complémentaire par rapport à la position de l'APCHQ par rapport à la crise du logement que nous vivons actuellement.

Et je lis les propos de M. Rousseau: «La situation de pénurie de logements locatifs, dans certains marchés, préoccupe l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec (APCHQ). Notre examen de la problématique nous porte à croire que l'environnement fiscal et réglementaire de cette industrie aurait avantage à être révisé.

«Outre la méthode de fixation des loyers, le choix des taux d'imposition, le traitement des méthodes d'amortissement, des gains en capitaux, des coûts initiaux[...], la taxe sur le capital, les redevances de développement et les crédits de taxes (municipales ou TPS-TVQ) peuvent avoir un rôle déterminant sur les décisions d'investissement dans le secteur locatif.» Donc, on va y revenir tout à l'heure avec Mme paré.

Hier, Mme la ministre, vous avez eu certaines difficultés à obtenir des propos directs et convaincants précisant la position des intervenants. Ici, à la conclusion, j'inviterais donc ? on va vous la donner d'entrée de jeu, la position du RPHL ? j'inviterais donc les membres de la commission à prendre notre mémoire à la page 15, et je vais vous en faire une lecture.

Les membres du RPHL sont donc unanimement en désaccord avec la majorité des dispositions contenues dans le projet de loi n° 26. En effet, il appert que le projet de loi aurait été présenté, selon toute vraisemblance, afin de contrer certaines inefficacités de la Régie du logement et de solutionner, du moins en partie, la crise du logement au Québec. C'est sous le couvert d'une attaque contre la discrimination que la ministre Harel propose certaines dispositions alors que, tel que nous l'avons plus amplement démontré ci-avant ? et on va y revenir tout à l'heure ? nous croyons que ledit projet de loi aura un effet tout à fait contraire.

«Cela étant dit ? et je cite encore une fois Le Devoir, M. Sansfaçon ? cela étant dit, il importe d'ajouter que les amendements proposés par la ministre Harel ne touchent qu'à quelques symptômes de la crise du logement, pas aux causes. S'il y a crise, c'est que trop peu de logements ont été construits depuis 6 ans faute de rentabilité dans cette industrie» ? et on va en parler tout à l'heure.

Nous partageons tout à fait cette vision de la crise et pouvons témoigner du fait que, s'il y a crise, et les propriétaires, de façon unanime, le dénoncent, c'est dû au faible taux de rentabilité et à la réglementation sévère qui empêchent les propriétaires d'exercer un contrôle adéquat sur leur investissement. Ils se désintéressent donc de plus en plus et de façon marquée du logement locatif au Québec.

Le tout se traduit par une baisse évidente de la présence du secteur privé dans la construction de nouveaux logements rendant nécessaire l'intervention du gouvernement et la baisse des chantiers de rénovation alors que le parc immobilier vieillit et se détériore de plus en plus. C'est toute la société qui en souffre, tant les propriétaires qui voudraient améliorer la valeur de leur investissement que les locataires qui ont de la difficulté à se trouver un logement et qui voient, par surcroît, la qualité de ceux-ci diminuer.

Avec le taux faible de rentabilité et les contraintes réglementaires imposées par le gouvernement auxquelles les propriétaires doivent envisager s'ajouter l'impossibilité de vérifier la qualité de leurs locataires, l'intérêt d'un tel investissement dans le logement devient tout à fait négatif ? et on en reparlera tantôt.

De plus, nos membres nous demandent d'exiger qu'une commission parlementaire élargie, voire des états généraux sur le logement, soit instituée afin de faire le point et établir une politique cohérente sur le logement au Québec. Nous croyons que le fait de ne vouloir s'attaquer qu'à quelques symptômes n'aura pour effet que d'augmenter la problématique et créer une situation encore pire d'ici quelques années tout en continuant d'accroître le fossé entre les intérêts des propriétaires et ceux des locataires. Nous sommes, pour notre part, convaincus que certaines solutions intéressantes pour toutes les parties pourraient en ressortir.

Donc, je vous disais d'entrée de jeu que les propriétaires de l'Estrie avaient un message à vous livrer, et j'inviterais donc un membre de mon équipe, c'est-à-dire M. Dion, lui-même propriétaire d'immeubles locatifs, à vous présenter effectivement le message des propriétaires à travers les pétitions. M. Dion.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, M. Dion.

M. Dion (Alain): Bonjour, M. le Président. Moi, je suis propriétaire depuis 15 ans et c'est la première fois que je vois dans ma région une telle unanimité contre quelque chose, contre ce projet de loi. J'entends déposer ici les pétitions que nous avons faites. Nous sommes 750 membres en Estrie. Nous avons récolté 650 membres propriétaires qui ont signé contre le projet de loi.

Mais ce qui est encore plus important ? puis, moi, je le vois dans mes logements ? les locataires qui habitent chez moi, ils sont toujours curieux de savoir: J'espère que je vais avoir des bons voisins. Tu ne loueras pas à n'importe qui. Et on voit ça dans à peu près tous nos logements. C'est pourquoi que, nous, on a réussi à faire signer 1 100 locataires qui sont contre le projet de loi. On a réussi a avoir plus de locataires. Et, moi, je les ai rencontrés personnellement, la plupart de mes locataires, et ils n'avaient aucune réticence à signer ça, cette pétition.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, quelqu'un va... peut-être un messager qui peut aller le prendre, le chercher, oui.

M. Lavoie (Daniel): Donc, les pétitions sont là. Vous allez en prendre possession.

Documents déposés

Le Président (M. Vallières): Oui, oui, c'est ça, oui.

M. Lavoie (Daniel): Et on pourrait aussi indiquer ? c'est ça? ? on pourrait indiquer aux membres de la commission qu'à l'annexe 10 de notre mémoire vous trouvez le texte intégral des deux pétitions, c'est-à-dire la pétition des propriétaires et la pétition des locataires.

Si vous permettez, je vais vous en faire une lecture. La pétition contre le projet de loi, celle signée et adressée à Mme Harel par les propriétaires, ça dit ceci:

«Je m'oppose au projet de loi 26, déposé le 15 juin 2001 à l'Assemblée nationale du Québec, qui a pour but de modifier la Loi de la Régie du logement et le Code civil, et d'empêcher ainsi les propriétaires de logements locatifs du Québec, de pouvoir faire une enquête de pré-location et de comportement adéquate sur les candidats- locataires.

«Considérant que cette mesure serait totalement "discriminatoire" pour une catégorie de citoyens voulant tout simplement protéger leurs biens personnels, je vous demande de bien vouloir nous donner un peu d'équité et de justice, et laisser un minimum de protection aux propriétaires de logements, citoyens à parts entières de notre société.

«Je vous demande de mettre fin à ce projet qui aura pour effet de faire disparaître complètement le peu d'équilibre dans les relations "locataire-propriétaire" qui existent déjà dans nos lois actuelles, pour le mieux-être, non seulement des propriétaires, mais de tous les locataires du Québec, en protégeant ainsi notre parc immobilier qui sera tout simplement mis en péril avec l'adoption de la loi 26.

n(10 h 50)n

«Enfin, j'appuie toutes démarches déjà entreprises ou qui seront entreprises par le Regroupement des propriétaires d'habitations locatives de l'APCHQ, région de l'Estrie, pour contrer ces nouvelles mesures que vous voulez mettre en application avec la loi 26. Mme la ministre, nous voulons tout simplement un peu d'équité et de justice, alors que le déséquilibre dans le système de location de logements au Québec sera totalement en faveur des locataires.

«Merci de votre appui.» Et ça a été signé par les propriétaires, vous pourrez vérifier l'authenticité des signatures et des adresses.

Maintenant...

Le Président (M. Vallières): Tout simplement vous indiquer, M. Lavoie, que le document est considéré comme étant déposé, la pétition fait partie de nos documents enregistrés à la commission.

M. Lavoie (Daniel): Merci, M. le Président. Donc, je vais enchaîner. Tout à l'heure aussi, d'entrée de jeu on avait dit qu'on reviendrait sur l'allégation qui a été faite par Mme Harel. Et, pour ce faire, afin de rectifier l'information, donc pour ce qui est de l'APCHQ, il y a une crise de logement au Québec. Et j'inviterais Mme Ève Paré, économiste depuis deux ans à l'APCHQ et qui s'est penchée sur les dossiers de l'habitation, à faire part à la commission de la position de l'APCHQ, de la position officielle.

Le Président (M. Vallières): Mme Paré.

Document déposé

Mme Paré (Ève): Bonjour, M. le Président. Je voudrais déposer un texte ici, qui est en fait mon allocution. On le voit dans les manchettes, le secteur locatif est en crise. Dans les trois plus grands centres urbains du Québec, soit Montréal, Québec, et Hull, on assiste à une pénurie de logements.

Outre la forte demande due à la croissance économique que le Québec a connu ces dernières années, c'est principalement le ralentissement de la construction qui a mené à la situation qu'on connaît actuellement. Présentement, c'est plus de 8 200 logements qu'il faudrait construire dans les trois grands centres afin de rétablir le seuil du taux d'inoccupation à 3 %. Si on projette les données sur quatre ans, c'est-à-dire d'ici fin 2005, c'est plus de 12 500 appartements qu'il faudra construire, dont 11 800 uniquement dans la grande région métropolitaine. Ces données tiennent compte des annonces faites dans le dernier budget, les 6 500 logements dans le cadre de l'entente fédérale-provinciale.

Il y a principalement deux enjeux pour le bon fonctionnement du secteur locatif. Vu le temps dont nous disposons, j'aimerais les commenter brièvement. Le premier enjeu est l'environnement fiscal. Il y a quelques années, détenir un immeuble était une entreprise profitable. Étant donné l'environnement fiscal auquel les propriétaires d'immeuble font face, l'achat d'un immeuble ne constitue plus un placement aussi intéressant pour un investisseur. À ce sujet, j'aimerais attirer votre attention sur un document, ici, que j'aimerais déposer à la commission, qui est un extrait d'une étude commandée par la SCHL auprès de Mario Fortin, professeur à l'Université de Sherbrooke.

Document déposé

Cependant, il existe plusieurs éléments sur lesquels le gouvernement peut intervenir. Vous trouvez en annexe de mon document une liste de mesures fiscales pouvant aider les propriétaires.

Si le gouvernement souhaite encourager la construction d'immeubles locatifs. les leviers les plus efficaces sont les mesures relatives à la possibilité de reporter le profit réalisé lors de la vente, l'augmentation du taux d'amortissement et la possibilité de créer des pertes avec celui-ci, ainsi que les crédits de taxe et subventions.

Plus tôt cet automne, l'APCHQ a lancé au gouvernement, par voie de lettres adressées à Mme Harel, de créer un groupe de travail chargé d'examiner la rentabilité de l'industrie de l'immobilier locatif et de proposer des moyens concrets d'améliorer la situation. Nous croyons toujours que l'exercice serait salutaire. Or, le seul geste que le gouvernement semble vouloir poser au regard de la fiscalité des immeubles locatifs concerne plutôt une hausse de taxe. En effet, en vertu du pacte fiscal, il est question d'introduction de redevances de développement qui pourront se traduire par plusieurs centaines, voire milliers de dollars par logement. Vous comprendrez alors que les observateurs de l'industrie dont nous sommes s'interrogent sur la logique qui amène le gouvernement à travailler sur des programmes de construction de logements abordables d'une main, tout en haussant les taxes de l'autre.

Je parlais de deux enjeux: le deuxième concerne la relation locataire-propriétaire. Pour différentes raisons, le gouvernement encadre les relations propriétaires et locataires. La Régie du logement est chargée d'administrer ce cadre qui se veut aussi équitable que possible en temps de pénurie ou non. Les locataires espèrent trouver dans ce cadre des outils leur permettant d'éviter les abus; les propriétaires, pour leur part, s'attendent à faire reconnaître leur réalité d'affaires.

M. Lavoie (Daniel): Si tu permets, on pourra y revenir.

Mme Paré (Ève): Pas de problème.

M. Lavoie (Daniel): J'aimerais, M. le Président, si vous le permettez, inviter Me Rousseau à apporter des éclairages différents quant à l'article 21.

Le Président (M. Vallières): Alors, je veux tout simplement vous indiquer que le 20 minutes, là, est presque épuisé. Vous pouvez vous permettre d'utiliser un deux minutes additionnel. Pour permettre les échanges avec les parlementaires, il faudrait conclure.

M. Lavoie (Daniel): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Alors, très rapidement, pour ce qui est de l'ensemble des dispositions du projet de loi, on les commente un par un ou à peu près, là, et vous verrez qu'on est essentiellement contre ces dispositions-là dont, entre autres, la question de la conciliation et de l'augmentation de juridiction. Et on est contre, pourquoi? pas à cause du principe, mais parce qu'il faudra que les ressources nécessaires, tant humaines qu'économiques, soient ajoutées pour permettre à la Régie du logement de bien pouvoir faire son travail.

Quant à l'article 21, évidemment, on est en complet accord avec les propos de Me Doray qui a affirmé clairement qu'en vertu de la loi on ne peut plus faire avec le projet de loi d'enquête pré-location. Nous soutenons qu'à tout événement, même si l'interprétation que fait Mme la ministre de cet article est véritablement l'intention du législateur, les tribunaux risquent tout comme l'ont fait Me Doray, moi-même, Me Dufour de l'APQ, la Commission d'accès à l'information et même le Barreau du Québec qui se fera entendre demain... ont interprété... ont eu une interprétation différente.

Or, devant les tribunaux, si le projet de loi n'est pas clair et qu'il y a autant de gens qui en arrivent à cette conclusion-là, il est fort à parier que les tribunaux en arriveront aux mêmes conclusions. Il est donc important de le retirer ou de l'amender. On demande son retrait parce qu'on considère qu'à l'heure actuelle les propriétaires peuvent déjà régler cette problématique-là et faire leurs enquêtes de crédit.

Quant à la question de l'abus, je voudrais tout simplement souligner, et je termine là-dessus, que ce qu'on a entendu en commission parlementaire, c'est que la Commission des droits de la personne a dit qu'il y avait eu 160 plaintes qui avaient majoritairement été réglées hors cour. Donc, le bien-fondé de ces plaintes-là n'a jamais été déterminé pour la majorité.

Quant à la Commission d'accès à l'information, elle traite présentement sans nous confirmer le bien-fondé, elle enquête sur 12 plaintes. Est-ce qu'on fait de la législation cas par cas? Il y a 35 000 propriétaires devant la Régie par année qui veulent être payés, on ne s'occupe pas de ça, mais, par contre, il y a quelques plaintes sous le couvert de la discrimination qui sont portées et dont on ne sait même pas si elles sont fondées, et on veut s'attaquer à ça.

Alors, on considère que le projet de loi ne réglant rien, réglons le problème d'accessibilité aux logements en permettant aux propriétaires de construire, en permettant aux propriétaires de rentabiliser. Il y aura plus de logements et, d'ailleurs, je vous ferai remarquer que l'augmentation des plaintes résulte directement de la pénurie de logements. Réglons ce problème de pénurie là et les problèmes de discrimination allégués diminueront d'autant. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, aux demandes d'interventions. Mme la ministre.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. Lavoie et les personnes qui vous accompagnent, bienvenue à cette commission parlementaire. Vous disiez tantôt regretter que des contraintes logistiques n'aient pas pu vous permettre d'amener encore plus d'appui dans cette salle. Dites-vous que c'étaient les mêmes messages que les locataires nous ont faits, hier après-midi, lorsqu'ils sont venus aussi nombreux également nous dire qu'ils avaient un message à nous transmettre et qu'ils venaient en écho le dire avec beaucoup de gens. Alors, vous voyez qu'au moins si, sur tous les autres points, vous avez des positions irréconciliables, au moins sur celle-là, vous êtes d'accord.

Alors, je vous dirai ceci. D'abord, dans votre mémoire, je veux... parce que c'est répété et ce n'est pas parce qu'une fausseté est répétée qu'elle devient vérité. Et il y a une fausseté dans ce que vous dites, mais une fausseté... Je pense que je vais faire attention peut-être à ce mot-là, parce que «fausseté», ça veut dire qu'on le dit intentionnellement, et je ne pense pas que ce soit nécessairement intentionnel. C'est cette idée que tout ça, ce serait fait en cachette et que c'est ? je vous lis, là ? «par pur hasard que nous avons appris, quelques jours avant la date prévue pour son adoption, l'existence du projet de loi, qui, par ailleurs, devait être adopté sous le bâillon». Et vous continuez comme ça, et c'est repris dans chacun des mémoires des propriétaires.

n(11 heures)n

Alors, je vois très bien que vous vous êtes vous-mêmes convaincus que, parce que le projet de loi était déposé le 15 juin... Vous vous êtes faits des peurs, si vous me permettez cette expression, là. Vous vous êtes monté la tête. Et comme vous vous êtes tous monté la tête, évidemment, les uns après les autres, je retrouve ça dans vos... Il a bien fallu que quelqu'un vous transmette cette fausse information là. D'où vient-elle? Ça, j'apprécierais de le savoir. Est-ce qu'elle vient de l'opposition? D'où vient-elle, cette information? Un projet de loi... j'en ai déposé trois en juin, c'est des projets de loi sur lesquels on veut justement que les gens prennent du temps pour avoir leur opinion. J'ai déposé un projet de loi en juin, sur la Baie James, pour créer une nouvelle municipalité, parce que ça a des incidences sur les Cris, puis je voulais que ça se discute puis que les gens aient le temps de le discuter, en haut du 50e parallèle. Ensuite, j'en ai déposé un sur... l'omnibus, avec beaucoup de choses différentes dedans. Et puis, j'ai déposé celui de la Régie du logement pour avoir le temps justement que les gens se préparent. Jamais, jamais, jamais, il n'avait été question, dans aucun de ces trois projets... Ça va m'arriver encore, comme ça arrive à tous les parlementaires parrains de projets de loi, de les déposer en fin de session, et l'idée justement, c'est de les faire étudier, c'est de les faire... d'avoir le temps de les faire étudier. Il n'a jamais été question...

Mme Houda-Pepin: ...la ministre...

Le Président (M. Vallières): Oui, question de règlement, 30 secondes...

Mme Harel: Je regrette, ce n'est pas une question de règlement, c'est mon intervention. Vous parlerez, vous aurez 20 minutes...

Mme Houda-Pepin: Oui, oui. Monsieur, question de règlement.

Le Président (M. Vallières): Un instant. Est-ce que c'est une question de règlement? C'est quoi, la question de règlement?

Mme Houda-Pepin: La question de règlement, c'est parce que la ministre vient d'imputer un motif à l'opposition. Et je voulais juste à ce stade-ci la corriger en lui disant qu'elle pourrait peut-être trouver des puces ailleurs, mais l'opposition fait son travail correctement...

Le Président (M. Vallières): Bien.

Mme Houda-Pepin: ...et elle-même l'a reconnu hier.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Bon, je l'apprécie. En fait, tant mieux, M. le Président, ce n'est pas une question de règlement, mais ça ne fait rien...

Le Président (M. Vallières): Oui, la parole est à vous. Ce n'était pas une question de règlement.

Mme Harel: ...c'est une information intéressante. Dans le fond, ce que je comprends de Mme la députée porte-parole de l'opposition à l'habitation, ce n'est pas d'elle que ça vient, cette idée qu'on aurait court-circuité, alors...

Parce que, vous voyez, vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère, hein, vraiment. D'autant plus que, moi, je vous avais écrit le 12... non, ce n'est pas... oui, je vous ai écrit le 12 septembre et je vous dis, le 12 septembre: «J'ai pris connaissance de votre lettre du 18 juin dernier dans laquelle vous me faites part de votre insatisfaction en regard de certaines dispositions du projet de loi n° 26. Je peux vous assurer qu'avant l'adoption de ce projet de loi les parties intéressées seront invitées à faire valoir leurs points de vue en commission parlementaire.» Le 12 septembre. Nous sommes maintenant le... ça fait deux mois et demi, puis vous me répétez la même chose aujourd'hui. Je vais vous dire, là, je ne comprends pas pourquoi... Ce n'est pas parce que vous l'écrivez et que c'est écrit dans chacun des mémoires des propriétaires ou des associations de propriétaires que cela devient véridique.

Moi, je voudrais que les gens qui vous accompagnent sachent que, malheureusement, c'est peut-être un malentendu ou une fabulation, une fabulation pour essayer de mobiliser les propriétaires. Ça, je trouve ça regrettable. Mais il n'a jamais été question, comme vous le mentionnez ici, que... par pur hasard, vous auriez appris quelques jours avant la date prévue pour son adoption l'existence du projet de loi, et là vous dites: Cette façon de faire est irrespectueuse envers les propriétaires. Et là vous faites croire aux propriétaires qu'ils ne sont pas importants pour le gouvernement ou pour moi, qu'ils sont discrédités, qu'ils sont ignorés, qu'ils sont méprisés, qu'ils sont humiliés, et puis, là-dessus, ça s'appelle de la désinformation. Mais je vous le dis, tout le monde le sait ici, tout le monde sait ce processus-là, tout le monde le sait à la Régie, on a déposé le projet de loi pour que vous ayez le temps d'en prendre connaissance, que ce ne soit pas à la dernière minute, que vous ayez tout l'été puis l'automne, puis qu'on ait le temps à la session, comme on fait quand on veut que quelque chose prenne du temps à la réflexion, que ce soit à la session parlementaire suivante que ce soit adopté. Ça, c'est la première chose. Je pense que, sinon, ça cultive l'amertume. Je trouve ça regrettable parce qu'on n'a pas besoin de cultiver l'amertume. Il faut trouver des solutions, des solutions raisonnables.

Et je reviens aux solutions raisonnables. Je l'ai dit, je voudrais presque qu'on ait les adresses des gens qui vous accompagnent, pour que vous ayez copie de ce qu'on dit ici, là, puis qu'on dépose ici, à la commission parlementaire. Je l'ai dit, le gouvernement ne veut pas modifier le droit. Le droit actuel, c'est celui en vigueur depuis 1993 dans la Loi sur la collecte des renseignements personnels dans le secteur privé. Il permet de faire des enquêtes de crédit avec consentement du locataire. Et ce qu'on veut, c'est encadrer le droit. Je l'ai répété sur toutes les manières, mais ça se peut que ça ne vous arrive pas. Moi aussi, je ne suis pas sûre que, si j'étais ici, j'écouterais les travaux à l'Assemblée nationale tout le temps. Mais je le répète devant vous, et c'est ça, notre objectif, on va travailler pour ça, la commission parlementaire, c'est fait pour ça aussi: si c'est mal rédigé de votre point de vue, et c'est possible, il y a des juristes, vous savez comment c'est ici, là... Hier, la Commission des droits est venue dire une chose différente de celle qu'elle nous avait dite le 15 mai, puis la Commission d'accès à l'information est venue nous dire une chose différente qu'elle nous avait dit en juin. Ça évolue, hein. Ce n'est pas une science exacte, on ne peut pas dire deux et deux font quatre. Hé! que j'aimerais ça, j'aimerais donc ça, mais ce n'est pas de la mathématique. Ça a l'air que le juridique, là, il y a des points de vue différents, la preuve, c'est que vous gagnez votre vie avec des différends.

Alors donc, il faut savoir qu'est-ce qu'on veut. Après ça, on demande de le rédiger de la bonne manière. Qu'est-ce qu'on veut? C'est encadrer et non pas interdire. Alors, ça, il faut que ce soit très clair. Ce qui fait que votre pétition, j'en avais pris connaissance, mais je me disais encore une fois, puis je ne vous en fais pas reproche parce que je suis sûre que vous êtes de bonne foi, je l'ai vu juste à votre manière de présenter puis de... M. Dion, vous avez fait signer des gens, puis c'est de bonne foi que vous les avez fait signer, mais vous les avez fait signer comme si nous refusions que le propriétaire puisse faire une enquête de crédit. Nous ne refusons pas, mais nous voulons qu'elle soit conforme à la loi.

Je voudrais poser, tantôt je vous la réserve, M. Rousseau, mais j'ai une autre information à vous donner, Me Rousseau, là, je vais vous poser la question... Vous dites: Le propriétaire peut faire son enquête de crédit présentement. Est-ce que vous concevez qu'il doive la faire avec le consentement du locataire, présentement?

M. Rousseau (Jean): Présentement, ce que la loi sur...

Mme Harel: Attendez. Vous me répondrez, vous avez l'air tout prêt, là, gardez-la, puis je vous pose d'autres questions. La première que je vais poser s'adresse à monsieur... excusez-moi, c'est Me Rousseau, puis je vais poser la question à M. Lavoie.

Bon, M. Lavoie, là, votre présentation, c'était, dans le fond, un cri du coeur pour dire: Il n'y a pas d'argent à faire, il n'y a pas de rentabilité dans l'industrie, il n'y a aucune rentabilité. Hein, c'est ça? Donc, votre cri du coeur, ce matin. Moi, les chiffres que j'ai, ce sont des chiffres qui m'ont été fournis par l'INRS, l'Institut national de la recherche scientifique, qui va terminer une étude qui va être rendue publique avant Noël sur toute cette question-là. Et, dans cette étude, on dit ceci: Les revenus annuels moyens par logement locatif se situent à 4 926 sur le territoire québécois ? ça, c'est par logement locatif ? et les immeubles de 50 logements ou plus pour lesquels le revenu annuel moyen est de plus de 7 900... Donc, le moyen par logement locatif, le revenu qui est fait, en moyenne, c'est presque 5 000, 4 926. Mais, pour les 50 logements ou plus, c'est presque 8 000, 7 900. Ça, c'est le revenu annuel moyen.

Est-ce que... la question que je vais vous poser tantôt, c'est: Est-ce que c'est ça que vous jugez insuffisant? Parce que ça, ce sont les chiffres, là, les plus récents. Alors, si, à l'intérieur de ça, si les propriétaires sont apparentés, c'est-à-dire des parents, des conjoints de fait, bon, etc., à ce moment-là, les revenus... si ce sont des individus, par exemple, ce qu'on appelle les petits petits, là, propriétaires, seuls, là, c'est 4 200 et... quand ils sont propriétaires occupants, 4 208, 4 208 propriétaires occupants; quand ils ne résident pas dans l'immeuble, mais qu'ils sont des individus, 4 900. Et puis, là, ça augmente comme ça. Alors, plus on avance... Les plus importants, ceux qui ont 50 logements, qui sont des compagnies, c'est 7 900, presque 8 000 par logement. Alors, on voit que.. je ne sais pas si, vous, vous trouvez que ce n'est pas assez rentable, mais il y a une rentabilité, c'est des chiffres actuels.

Bon. Vous allez me dire: Oui, mais il y a des dépenses. Alors, les dépenses, on me dit que 65 % des logements locatifs n'ont aucune dépense en rénovation annuellement, ça, c'est à peu près deux tiers qui n'ont aucune dépense en rénovation. Les dépenses d'entretien se situent à 705 annuellement. Puis là on voit des grosses différences, parce que, dès qu'on s'éloigne des centres comme Québec et Montréal, il y a plus de dépenses, les gens ont l'air de plus entretenir, et puis, dès qu'on revient dans des centres comme Québec et Montréal, là on dirait qu'il y a moins de dépenses d'entretien, c'est comme si c'était moins bien entretenu.

n(11 h 10)n

Mais je pense que ça va être bien, bien, bien intéressant, cette étude qui a été commandée par la Société d'habitation du Québec et par la Régie du logement à l'INRS-Culture et Société qui s'occupe d'habitation. Je suis certaine que la députée de La Peltrie ? si j'étais à sa place, je le ferais aussi ? va demander le dépôt.

Une voix: La Pinière.

Mme Harel: La Pinière, La Pinière. La Peltrie, c'est à Québec. La Pinière. Elle va demander le dépôt.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, en vertu de l'article 214, est-ce qu'on peut avoir le document...

Mme Harel: C'est sûr. Mais ce que je lui dirai... je peux peut-être lui donner les tableaux, mais toute l'étude, puisque c'est l'INRS-Urbanisation, va être déposée, me dit-on, avant Noël, mais elle est en cours, si vous voulez... scientifique de ce qu'on appelle la validation.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

Mme Harel: Alors, je peux vous déposer les tableaux cependant, mais...

Mme Houda-Pepin: ...la ministre y réfère, elle pourrait les déposer...

Le Président (M. Vallières): Alors, les tableaux vont être déposés, Mme la ministre?

Mme Harel: C'est ça. Ça va être fait avant Noël.

Mme Houda-Pepin: Non, non, le dépôt des documents.

Documents déposés

Mme Harel: Le dépôt des tableaux. L'autre partie, qui est bien intéressante, ce sont, si vous voulez, les pertes de revenus dues aux logements inoccupés, au logements impayés. Alors, dans les pertes de revenus dues aux logements impayés, dans l'ensemble du Québec... le logement inoccupé, la perte, c'est, en pourcentage, 2,4 %, alors que le loyer impayé, c'est 1,2.

Une voix: Combien déjà?

Mme Harel: 1,2. Pertes consécutives aux logements inoccupés et aux loyers impayés, en pourcentage du revenu annuel, selon la région... je l'ai par région, par taille d'immeuble, par type de propriété et par taille du logement. Alors, pour l'ensemble, la perte sur le revenu pour le logement inoccupé, c'est 2,4, et la perte de revenu pour les loyers impayés, c'est 1,2. Évidemment, ça peut... c'est différent selon la taille des logements.

Je veux juste qu'on se dise une chose, là: regardons ça intelligemment, n'est-ce pas, plutôt que de monter aux barricades, puis, en montant aux barricades, d'amener des gens dans finalement un affrontement qui ne sera pas gagnant pour personne. Demandons-nous, là, correctement qu'est-ce qu'on peut faire de part et d'autre pour que les choses s'améliorent. Ce n'est pas correct. Ce n'est pas correct. Comme on a vu à Montréal, ce n'est pas correct de faire venir des gens. Moi, il y a même un grand animateur de télévision qui m'a raconté que sa femme est propriétaire de logements dans Villeray, et puis elle a mis en location... puis là il est venu des gens, là, énormément, ils étaient en ligne, puis là ils voulaient offrir plus. Ceux qui étaient en ligne, si vous voulez, dans la ligne en arrière, ils disaient: Bien, on va vous en donner plus, on va vous en donner plus. C'est très dangereux. C'est très dangereux qu'il n'y ait pas de règles du jeu. Les règles du jeu vous protègent aussi. C'est très dangereux de dire: On va charger, on va ouvrir une demande, on va faire remplir des formulaires, puis on va faire payer les gens pour qu'on fasse une enquête de crédit. On a vu à Montréal des files sur des trottoirs avec des gens qui avaient leur argent puis qui étaient prêts à payer plus. C'est dangereux. Il faut civiliser ces choses-là. Vous me dites: Dans l'Estrie, ça n'arrivera pas. Tant mieux. D'abord, on a toujours dit: enquête de crédit, on veut l'encadrer, mais ne pas l'empêcher. Mais on veut encadrer les abus aussi, parce qu'il y en a eu. Voilà.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Lavoie et M. Rousseau, il vous reste environ cinq minutes, quatre minutes dans ce bloc pour compléter avec... côté de ma droite. Alors, la parole est à M. Lavoie.

M. Lavoie (Daniel): Oui. Je pense que vous avez beaucoup de questions, Mme la ministre. On apprécie.

Vous avez dit d'entrée de jeu qu'actuellement une commission, c'est là pour permettre les échanges dans le but d'arriver à des solutions constructives. Vous avez aussi fait mention qu'en déposant le projet de loi on a eu des avis juridiques différents. Ça fait partie, je pense, de la démocratie de s'exprimer de façon différente. Comme dirait Jeannette, c'est en se parlant qu'on finit par se comprendre. Nous l'espérons. Je ferais le même parallèle avec les économistes. Il y a plusieurs économistes. Vous citez des économistes qui sont en train de faire une étude. Nous, on a des visions où... les économistes qu'on a consultés ont des visions différentes. Ceci m'amène à vous dire, Mme la ministre, que, dans le cadre de cette commission parlementaire là, on est en train de déborder et ça le confirme très bien qu'on est face à une crise du logement. S'il n'y avait pas de crise du logement à l'heure actuelle, puis on a juste à se référer aux années antérieures, il n'y en avait pas de pancartes dans les rues à Montréal pour demander du logement... O.K.? Je pense que c'est la pénurie de logements qui fait en sorte qu'on voit ces manifestations-là.

Mme Harel: Si vous me permettez tout de suite peut-être de vous rappeler que, dans le budget de Mme Marois, on annonce 13 500. J'étais contente de voir le document de Mme Paré qui demande 12 500 sur quatre ans. Et on s'est engagé, avec le 500 millions dont j'ai la responsabilité, d'en construire 13 500. Ce n'est pas parce que c'est du logement AccèsLogis que c'est moins du logement.

M. Rousseau (Jean): Mais ça fait déjà partie de son étude. Elle, ce qu'elle dit, c'est: En plus de ce que vous allez construire, ça va prendre ça.

Mme Harel: Non, en plus du Logement abordable, c'est 6 500.

Mme Paré (Ève): En plus d'AccèsLogis et de l'entente fédérale-provinciale, parce que, AccèsLogis, ça se construisait déjà depuis quelques années, donc c'est inclus dans le rythme de croissance de la construction annuelle.

Le Président (M. Vallières): Alors, on revient à M. Lavoie.

M. Lavoie (Daniel): Oui. Oui, je vais te passer la parole. Impatiente-toi pas, mon ami Jean.

Mme Harel, bon, je sais que vous avez été choquée par nos propos du tout début. Je me pose la question... C'est vrai que je suis un néophyte, je ne connais pas les règles parlementaires, mais, si le projet de loi avait été adopté sous le bâillon, je me demande comment on aurait pu en discuter librement devant une commission parlementaire, Mme Harel. Je suis un néophyte, là.

Mme Harel: Mais là, M. Lavoie, il n'en a jamais été question.

M. Lavoie (Daniel): Pardon?

Mme Harel: En tout cas, vous me dites «si». Il n'en a pas été question de le faire «si». Pour que ce soit adopté dans un bâillon, il faut que ce soit présenté avant le 15 mai, il faut qu'il ait été déposé. Et c'est très exceptionnel, il faut une loi spéciale autrement. Mais on adopte dans un bâillon des projets de loi qu'on a déposés dans les délais réglementaires, pour lesquels il y a de l'opposition, ça s'appelle... s'il y a un bâillon, en général, c'est parce qu'il y a ce qu'on appelle de l'obstruction. Il n'y a pas eu obstruction, on l'a déposé pour le faire étudier à la session d'après.

M. Lavoie (Daniel): Écoutez, Mme Harel, je vais faire amende honorable; sur le processus parlementaire, je ne m'y connais pas. Mais, par contre, vous êtes revenue avec un autre élément en disant: C'est important, c'est un débat très profond que le projet de loi n° 26 suscite, et vous nous avez donné une semaine pour préparer nos mémoires. Donc, ça devient très difficile... je ne sais pas, on n'a peut-être pas la gymnastique...

Mme Harel: Je vous ai écrit le 12 septembre pour vous dire qu'il y aurait une commission parlementaire. Je vous ai écrit.

M. Lavoie (Daniel): Oui, d'accord, mais ça a pris du temps avant qu'on nous le confirme, qu'il y aurait une commission parlementaire, Mme Harel.

Mme Harel: Bien oui, mais vous le saviez. Moi, je suis la ministre, je vous le dis, il va y en avoir une le 12 septembre, deux mois et demi avant que vous veniez. Parlez-moi pas que c'est à la dernière minute, là. C'est pas sérieux.

Le Président (M. Vallières): S'il vous plaît! Là, je vais vous demander...

M. Lavoie (Daniel): Oui.

Le Président (M. Vallières): ...pour la bonne fin de nos discussions de passer par la présidence et d'obtenir le droit de parole avant de vous exprimer. Alors, pour l'instant, M. Lavoie, vous avez la parole. Et je constate que M. Rousseau, on voulait le faire parler, mais là, si vous continuez, il n'aura pas le temps de parler.

M. Lavoie (Daniel): Je lui cède la parole, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Alors, Mme la ministre, vous devez comprendre la position des propriétaires et des avis qui ont été donnés par les procureurs qui ont dû examiner le projet de loi en prenant pour acquis que ceux qui le rédigeaient connaissaient l'ensemble de la législation applicable conséquemment. Et d'ailleurs, je vous rappellerai ? et on l'a mis en annexe ? la Commission d'accès à l'information vous disait, le 15 mai dernier, que, tel que rédigé, le projet de loi aurait comme conséquence d'empêcher les enquêtes de crédit pour les propriétaires. Alors, vous en étiez informée, on en a pris connaissance, vous avez malgré tout présenté le projet de loi. Me Doray ainsi que... en fait, tous les procureurs qui ont eu à examiner ce projet de loi là, dont moi-même qui ne suis pas un spécialiste de la rédaction législative ni non plus de la Loi sur la protection des renseignements privés, sont tous venus à la même conclusion: ça empêche les enquêtes de crédit. Alors, vous comprendrez que les propriétaires ont monté aux barricades parce que le projet de loi, tel qu'il a été préparé et présenté, faisait en sorte de démontrer une intention qu'on a prise comme étant celle du gouvernement.

n(11 h 20)n

Maintenant, vous m'avez posé une question: Est-ce que le propriétaire doit obtenir le consentement pour procéder à une enquête de crédit? La loi sur l'accès à l'information prévoit... c'est-à-dire, la loi sur la protection des renseignements privés prévoit, à l'article 5 et à l'article 6, qu'effectivement toute information à aller chercher auprès de tiers nécessite l'autorisation du cocontractant. Maintenant, il y a plusieurs décisions qui ont été rendues tant par la Régie du logement et certaines par la Cour du Québec qui sont venues confirmer que le fait pour un locataire de refuser de permettre une telle enquête est un motif suffisant afin d'empêcher la location. Alors, l'état actuel du droit et la loi sur la protection des renseignements privés viennent déjà circonscrire qu'est-ce qu'on peut aller chercher comme renseignements. D'ailleurs, en Estrie, un des commissaires de la Commission est venu nous indiquer que, pour lui, les numéros d'assurance sociale, on ne pouvait pas les prendre. Alors, on s'y est conformé. Mais on a continué à faire nos enquêtes de crédit conformément aux dispositions de la loi.

Le Président (M. Vallières): M. Rousseau, je dois vous arrêter là, c'est bien intéressant, mais il faut gérer le temps aussi. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Lavoie, M. Dion, M. Rousseau et Mme Paré, du Regroupement de propriétaires d'habitations locatives en Estrie, je vous souhaite la plus cordiale des bienvenues ainsi qu'à tous les représentants qui vous accompagnent et les gens qui poursuivent nos travaux. Je souligne aussi la présence avec nous, toute spéciale, de mes deux collègues de l'Estrie, la députée de Saint-François et la députée de Mégantic-Compton, qui s'intéressent beaucoup à ce dossier-là.

Alors, d'entrée de jeu, d'entrée de jeu...

Mme Harel: ...qui est le seul parlementaire homme de notre commission ce soir... aujourd'hui. Nous sommes...

Mme Houda-Pepin: Je voudrais donc revenir au coeur du débat, parce qu'il ne faut vraiment pas s'enfarger dans les fleurs du tapis, et revenir à l'essentiel. D'abord, je voudrais vous féliciter pour votre mémoire, c'est un mémoire qui est très bien fait, largement documenté, bien appuyé par les citations, par les documents aussi que vous nous avez distribués. Je vous remercie aussi pour l'analyse qui a été faite par l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. Parce que la ministre nous sort toujours des chiffres qu'on ne peut pas vérifier. D'ailleurs, elle nous a cité ce matin des données de l'INRS-Urbanisation qu'elle dit elle-même qui sont en cours de validation, donc on ne peut même pas les avoir pour se baser sur quelque chose de concret.

Mais, l'essentiel de ce débat sur le projet de loi n° 26, c'est que c'est un débat qui est partagé. Vous avez les représentants des locataires qui nous disent qu'ils sont satisfaits, grosso modo, avec le projet de loi, et que la disposition de la loi... l'article 21 est nécessaire. Certains nous demandent un resserrement encore plus grand. Et les représentants des propriétaires qui se sont présentés devant nous jusqu'à aujourd'hui nous disent que cette disposition va limiter leur capacité de faire des enquêtes de crédit, donc de vérifier la qualité des locataires, des candidats locataires.

Et aujourd'hui, vous nous avez apporté un élément de plus, qui est du nouveau, je dois dire, c'est que, vous, vous avez fait signer une pétition non seulement à des locateurs, c'est-à-dire les gens que vous représentez, mais également à des locataires, hein, une pétition de 1 100 locataires qui vous appuient finalement dans votre démarche. Et ce que je trouve d'intéressant dans cette proposition, particulièrement à la page 12 de votre mémoire, vous faites donc référence à cette pétition signée par 600 propriétaires, cela va de soi, parce que vous êtes un organisme qui représente les propriétaires, mais de voir que des locataires, 1 100 locataires ont signé une pétition, ça, c'est nouveau.

Et ce qui est intéressant aussi, c'est que ces locataires reconnaissent le droit fondamental du locateur de pouvoir avoir accès à un certain nombre de renseignements afin d'assurer leur jouissance paisible des lieux. Ça, c'est une notion nouvelle que vous venez d'introduire. Et effectivement, là, on n'y a pas pensé, mais c'est une notion qui est importante, parce que les gens qui louent, ils ont besoin de savoir qui est dans leur voisinage. Les gens ont des enfants, ont des familles, et ils ont une qualité de vie aussi, et l'habitation, c'est un impératif au niveau de la qualité de vie.

À cet égard, l'enquête de crédit dont on discute, est-ce qu'elle vous semble nécessaire dans le contexte de ce que vous demandez ou s'il y a des éléments dans l'article 21 en particulier que vous demandez de... dont vous demandez pratiquement le retrait... s'il y a des éléments là-dedans qui peuvent vous accommoder? Jusqu'où, finalement, vous pouvez aller pour satisfaire la jouissance paisible des lieux à vos locataires tout en ayant les éléments nécessaires qui vous permettent finalement d'avoir les informations dont vous avez besoin?

Le Président (M. Vallières): M. Lavoie.

M. Lavoie (Daniel): Je demanderais à Me Rousseau, puisque c'est notre spécialiste.

Le Président (M. Vallières): M. Rousseau.

M. Rousseau (Jean): Alors, vous savez, lorsqu'on fait... En fait, on ne devrait pas parler d'enquête de crédit. Ce que les propriétaires font, c'est des enquêtes prélocation. L'enquête prélocation est à deux niveaux, c'est-à-dire, dans un premier temps, elle sert à déterminer la capacité de payer du locataire, et non seulement la capacité de payer immédiate, mais, comme on l'a dit tout à l'heure... c'est-à-dire précédemment, lors de la présentation d'autres mémoires, elle sert également à permettre d'évaluer sa solvabilité à moyen terme, c'est-à-dire qu'on va voir si le locataire est endetté, s'il risque d'y avoir saisie ou jugement contre lui qui pourrait avoir comme conséquence d'empêcher le locataire de payer son loyer.

Je pense que la Ligue des propriétaires a aussi insisté sur le fait qu'il faut faire attention. Les enquêtes de crédit ne sont pas faites seulement face à des gens... soit des assistés sociaux. Généralement et souvent, quand les locataires se présentent, on ne sait pas s'ils sont sur l'aide sociale, on ne sait pas ce qu'ils font dans la vie. Et les enquêtes de crédit ? plusieurs propriétaires pourraient en témoigner ici ? sont aussi faites pour des gens qui arrivent avec des BMW. Pourquoi? Parce qu'il n'a peut-être pas les moyens de se payer une BMW même s'il fait 35, 40 000 $ par année. Alors, ce n'est pas une question discriminatoire puis dire: On vise une catégorie. Mais on veut s'assurer que la personne... Alors, ça, c'est l'enquête de crédit.

Mais il y a aussi les enquêtes d'antécédents. Les enquêtes d'antécédents, lorsqu'on fait affaire avec certaines agences, l'agence va nous donner une opinion sur le crédit et va aussi nous indiquer s'il y a eu des jugements de rendus contre ces individus-là et à quel niveau. Est-ce qu'ils ont été condamnés pour avoir vendu de la drogue, pour vandalisme? Est-ce que c'est des personnes qui ont été condamnées pour de la violence, vol? Et ça, les locateurs ont besoin de ces renseignements-là. Vous allez me demander: Est-ce que, dans le projet de loi actuel, ce qu'on propose est suffisant? Je vous dirais que, théoriquement, si effectivement on vient préciser que les renseignement prévus, c'est-à-dire nom, adresse, date de naissance, sont là dans le but de nous permettre de faire ces enquêtes-là, jusqu'à un certain point, avec une réserve que je ferai un petit peu plus tard, oui. Comme M. Aubry l'a dit hier, ça prend des identifiants pour être sûr qu'il n'y a pas interversion de personnes. On doit s'assurer... et juste le nom et l'adresse, souvent, et c'est dommage que les bureaux de crédit n'aient pas pu être présents pour expliquer ce point-là, mais seulement qu'avec l'adresse et le nom... Et, en tant que procureur, lorsque j'arrive pour exécuter des jugements, ou retrouver des gens, ou voir à qui je m'adresse, on n'est pas capable d'obtenir de renseignements supplémentaires. Ça arrête là. On va nous demander soit la date de naissance ou soit le numéro d'assurance sociale.

Alors, la date de naissance, oui, elle est essentielle pour être capable d'aller plus loin et de s'assurer que les gens sur lesquels on a des informations, ce sera les bonnes personnes. Maintenant, ça peut arriver que la date de naissance aussi, à l'occasion ? et ça arrive plus souvent qu'on le pense ? concorde avec une même personne qui a le même nom, et là, à ce moment-là, bien, on a le choix: on fait venir des renseignements sur les deux, et là on pénalise celui qui n'a rien à voir dans le dossier, ou ça nous prend un renseignement supplémentaire, qui est le numéro d'assurance sociale, pour nous assurer qu'on départage. Alors, le numéro d'assurance sociale, c'est pour ça que Me Doray indiquait dans son mémoire qu'il peut être utile dans certaines circonstances.

Mais votre réponse, c'est: les renseignements qu'on se propose de permettre au propriétaire d'aller chercher, oui, ils pourraient nous permettre de faire des enquêtes de crédit. Ce n'est pas là qu'on en a. Là où on en a, c'est que, tel que libellé, c'est clair que c'est les seuls renseignements qu'on pourra obtenir, et on ne pourra faire d'enquête de crédit ou d'enquête prélocation.

n(11 h 30)n

Mme Houda-Pepin: Mais vous avez entendu fort probablement, vous-même et les représentants de votre organisme, hier, la Commission des droits de la personne qui a exprimé des réserves par rapport à ça. La Commission d'accès à l'information, c'est peut-être l'organisme le plus crédible dans le domaine de renseignements personnels. Hier, ils se sont présentés devant nous et, eux, ils reconnaissent d'abord la légitimité des propriétaires d'avoir accès à des renseignements pour faire une enquête de crédit, sauf qu'ils présentent finalement une solution en étapes. La première étape étant le nom et l'adresse de la personne, c'est suffisant pour établir l'identification de la personne; et, par après, toujours par consentement, toujours par consentement avec le locataire ? le candidat locataire, hein, parce qu'il n'est pas encore locataire ? on peut aller chercher des informations comme la date de naissance et ainsi de suite; et, dans un troisième lieu, la Commission d'accès à l'information et ce qu'elle proposait, c'est que ça soit le candidat locataire qui fasse la preuve de sa solvabilité, de sa crédibilité financière, et que vous n'ayez pas à aller jouer dans la vie privée de ces individus-là.

Alors, est-ce que la proposition de la Commission d'accès à l'information vous paraît réaliste? Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait convenir? Et dans la pratique, dans la pratique, est-ce que c'est quelque chose qui peut se faire et qui vous permet d'aller chercher les informations dont vous avez besoin?

M. Rousseau (Jean): Alors, ma réponse à votre question, Mme Houda-Pepin, c'est clairement non. Pourquoi? Quand on est dans un processus de location, les heures sont comptées, et surtout en matière de pénurie de logements, ça prend des renseignements concluants rapidement. Ce que la Commission propose, c'est de dire au locataire: Va te chercher une lettre de ton gérant de banque. Et je suis loin d'être convaincu en pratique qu'il pourra obtenir une responsabilité du gérant de banque qui va s'engager à dire que c'est un excellent payeur puis qu'il n'y a pas de problème. Et, d'autre part, même s'il paie son prêt à la banque, je peux vous donner... on pourrait vous donner une foule d'exemples où les gens sont à temps sur leur hypothèque, mais paient... En fait, ils priorisent le paiement de certaines de leurs dettes. Laquelle? Est-ce que le propriétaire deviendra une priorité? Donc, même si le gérant de banque disait: Oui, c'est un très bon payeur à la banque, ça ne nous permet pas de savoir si dans d'autres cas il paie bien ou il paie mal. Est-ce qu'Hydro-Québec va accepter...

Mme Houda-Pepin: Vous faites allusion à ça, à la page 11, pour Hydro-Québec, justement.

M. Rousseau (Jean): Oui, mais, au-delà de ça, est-ce qu'Hydro-Québec va accepter d'écrire une lettre? Et ça va prendre combien de temps en délais administratifs avant qu'Hydro-Québec écrive une lettre en disant: Oui, monsieur paie ses comptes régulièrement? En pratique ? et en plus de ça, je pense que vous le souleviez indirectement hier ? toutes ces démarches-là seront à la charge du locataire et seront... C'est des démarches qu'ils devront faire eux-mêmes et qui seront longues. Est-ce que le propriétaire va attendre deux semaines si un autre locataire se présente? On peut vous dire qu'une enquête de crédit faite par un propriétaire, une enquête prélocation complète, on le fait en 24 heures. Le lendemain, le locataire sait si oui ou non on peut prendre le logement.

Mme Houda-Pepin: Mais très brièvement, quels sont les renseignements dont vous avez besoin, de votre point de vue, pour identifier le candidat locataire et faire l'enquête de crédit dont vous avez besoin avant de prendre une décision?

M. Rousseau (Jean): Les renseignements nécessaires pour aller chercher ou aller collecter des renseignements auprès de tiers, c'est le nom, l'adresse, la date de naissance, minimalement, et, advenant deux candidats ayant le même nom, même date de naissance, la possibilité de pouvoir recourir au numéro d'assurance sociale. En partant de là, ça nous permet de faire des vérifications adéquates.

Mme Houda-Pepin: Quelles sont les suites que vous donnez à cette collecte de données? Parce que, hier également, des préoccupations ont été exprimées concernant la constitution de banques de données, de trafic de renseignements. Il y a un regroupement qui est venu nous parler justement d'un bureau d'avocats qui trafique les renseignements, qui vend les renseignements. Alors nous, on est, comme législateurs, on est très sensibles à ça puis on est très préoccupés par ça. Qu'est-ce que vous répondez à ce genre de question?

M. Rousseau (Jean): En fait, je vous dirais qu'on légifère par- dessus la légifération. Tout ça est déjà couvert par la loi. La loi empêche déjà de faire ça, il s'agit de l'appliquer, point à la ligne. On n'a pas besoin de faire de la réglementation cas par cas. La loi prévoit qu'on ne peut pas le faire; qu'on donne des dents et qu'on donne comme mandat à la Commission ou à quelqu'un de dire: Voici, on applique la loi. Mais c'est déjà prévu qu'on ne peut pas le faire. Maintenant, s'il y en a qui le font, qu'ils en assument les conséquences et que les poursuites soient prises. Je ne pense pas qu'on doit pénaliser l'ensemble des propriétaires.

Parce que, encore une fois, je reviens sur le fait qu'à mon avis cet article-là est tout à fait inutile. À partir du moment où les deux principales commissions qui reçoivent ces plaintes-là viennent vous dire: Commission des droits de la personne, il y a 160 plaintes au Québec, dont la majorité de toute façon se règlent hors cour, et on n'a pas été en mesure d'évaluer le bien-fondé; et que la Commission d'accès à l'information vient vous dire: On a 300 demandes d'information mais, des demandes d'enquête, il y en a 12. Alors, il y en a pas, il y en a pas vraiment...

Mme Houda-Pepin: Il y a un autre aspect à la chose, c'est que ? on le sait, ça, tout le monde ? que vous soyez propriétaire ou locataire, on s'entend là-dessus: que les relations propriétaire-locataire sont, en règle générale, des relations harmonieuses; que finalement il y a une infime minorité de cas qui sont problématiques, donc le gouvernement, par ce projet de loi et l'article 21 en particulier, il veut appliquer à l'ensemble des locataires et des propriétaires une disposition qui règle une infime minorité de cas problématiques. Alors, aidez-nous à trouver la solution.

On sait que les représentants des locataires ne sont pas sur la même longueur d'onde que vous. Pensez-vous être capables, les représentants des propriétaires dont vous êtes mais aussi la CORPIQ, mais aussi la Ligue des propriétaires de Montréal, mais aussi les autres regroupements qu'on va entendre, de vous asseoir ? on peut vous aider si vous voulez ? avec les représentants des locataires pour trouver un mécanisme, un moyen qui va faire qu'on puisse se rencontrer sur l'article 21. Parce qu'il faut que chacun mette de l'eau dans son vin, sinon on n'en sort pas.

M. Rousseau (Jean): Je voudrais attirer votre attention sur le mémoire de la CORPIQ. Ce qu'on vous dit, ce qu'on vous donne comme pétition de locataires est confirmé par un sondage qui a été fait par la maison Léger Marketing, à la demande de CORPIQ, qui prévoit et qui confirme que 85 % des locataires sont en faveur à ce que le propriétaire collecte des renseignements. Alors, déjà là, quand on vient nous dire que les locataires sont contre, il faudrait... Moi, en tout cas, personnellement ? là, je ne parle pas au nom ce la coalition mais personnellement ? je mets en doute la légitimité de prétendre qu'on représente l'ensemble des propriétaires. Ils représentent un groupe de propriétaires, c'est légitime, ils le font très bien, mais je ne pense pas que ça représente l'ensemble des locataires au Québec. Bon.

D'autre part, c'est ce qu'on vous demande aujourd'hui: Avant d'adopter un petit morceau, un petit projet de loi qui va mettre un tout petit diachylon sur un gros problème, permettez-nous... faites des états généraux où on pourra tous s'asseoir à la même table. On pourra discuter des chiffres que, nous aussi, la ministre Harel nous a donnés ce matin et sur lesquels on n'est pas en mesure de pouvoir répondre. Mais permettez-nous de nous asseoir à une table, de discuter de tout ça et de trouver des solutions...

Mme Houda-Pepin: Moi, avant les états généraux, là... On pourra en discuter en temps et lieu, et je pense que c'est pertinent de réclamer... Il est temps d'avoir une politique d'habitation globale, et qu'on tienne compte des différentes problématiques, mais aidez-nous à régler d'abord ce problème qui est très concret, puis c'est pour ça que vous êtes venus à Québec. Est-ce que vous accepteriez de vous asseoir avec les représentants des locataires pour discuter de la faisabilité, de la possibilité d'améliorer l'article 21 du projet de loi, de façon à le rendre acceptable pour les deux parties? Est-ce que vous accepteriez de faire ça? Parce que je ferai la même demande aux représentants des locataires. Des locataires, c'est ça.

M. Lavoie (Daniel): Bien, là-dessus, Mme Houda-Pepin, c'est sûr, je pense, que c'est un peu un pendant de ce qu'on demande d'une façon un peu plus large. Mais là il y a une problématique, il y a une urgence. Je ne peux pas parler ce matin parce que ça demande consultation aussi auprès des autres associations de la coalition, mais je pense qu'au niveau du Regroupement des propriétaires d'habitations, le RPHL, je pense que toute démarche qui va dans le sens de trouver une solution, bien je ne pense pas qu'on ne puisse s'inscrire en faux par rapport à ça.

Mme Houda-Pepin: Très bien.

M. Lavoie (Daniel): Mais là, comme je vous dis, je ne parle pas au nom des autres associations, mais je crois qu'on peut avoir consultation et vous revenir là-dessus, Mme Houda-Pepin.

Mme Houda-Pepin: J'apprécie beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Alors, il nous reste une minute, Mme la députée.

n(11 h 40)n

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président, vous êtes... Très bien. C'est tellement court. Je voudrais revenir au document qui nous a été déposé par Mme Ève Paré, que je remercie, parce que, pour une fois, on a des éléments d'information très pertinents. Je mets ça en relation avec le document que la ministre nous a déposé ce matin. Je n'ai même pas de références, je n'ai même pas de titre, rien. J'ai un tableau et je ne sais même pas d'où il vient, qui est la personne qui est derrière ça, alors je ne peux pas l'utiliser. Vous savez, en bibliothéconomie, un document sans références est un document qui ne vaut rien. Alors... Mais je le garde quand même.

Pour ce qui est de votre document, je voudrais revenir là-dessus parce que c'est très important. La ministre nous dit, à chaque fois qu'un groupe se présente, qu'il y a 500 millions de dollars qui sont annoncés. Je tiens à relativiser les attentes. D'abord, le 500 millions n'est pas attaché parce que, là-dedans, il y a une partie qui doit venir du fédéral suite aux négociations des logements abordables; deuxièmement, le logement abordable, ce n'est pas le logement à loyer modique, on ne s'adresse pas aux mêmes clientèles. Et vous l'avez d'ailleurs signalé dans vos remarques préliminaires, M. Lavoie, en disant que les investissements vont dans les condos parce que c'est plus lucratif, et les logements à loyer modique, on s'en désintéresse parce que ce n'est pas payant, c'est coûteux finalement, à la fin, les loyers vont en diminuant, et j'ai entendu hier la ministre nous annoncer, suite aux fusions municipales forcées, que les loyers allaient diminuer. Donc, vous avez de grosses mauvaises nouvelles. Déjà qu'au Québec on a les loyers les plus bas comparativement aux autres provinces...

Le Président (M. Vallières): Alors, Mme la députée, il faudrait conclure, il faut conclure, si on veut une réponse.

Mme Houda-Pepin: Je conclus, M. le Président, en remerciant les représentants du regroupement de l'Estrie pour leur mémoire et leur présentation, et je vais continuer le dialogue avec vous, je ne vous lâcherai pas tant qu'on ne trouvera pas une solution.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci de votre présentation. Au revoir.

Alors, la commission va maintenant suspendre ses travaux à après les affaires courantes de cet après-midi, soit aux environs de 15 heures, au retour dans cette salle. Merci. Bon appétit!

(Suspension de la séance à 11 h 42)

 

(Reprise à 15 h 28)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Alors, le mandat de la commission est de tenir des consultations particulières sur le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil.

Alors, compte tenu que nous débutons un peu nos travaux avec quelque 30 minutes de retard, j'ai pris l'initiative de m'entretenir avec M. Houdeib, qui représente le Regroupement des organismes du Montréal ethnique pour le logement, qui m'indique que la présentation du mémoire pourrait être un peu plus courte et les échanges également, ce qui nous permettrait de récupérer un peu de temps, si la commission désire terminer à 18 heures, puisque plusieurs collègues m'ont indiqué qu'ils avaient déjà des choses et qu'ils devaient quitter vers les 18 heures. Donc, récupération d'un peu de temps sur ce premier organisme et peut-être un petit peu, un cinq à huit minutes, sur les deux autres, au total, que nous allons entendre.

Alors, sans plus tarder, je vais laisser la parole à M. Houdeib pour les minutes dont vous aurez...

Mme Houda-Pepin: Hou-dé-ib.

Le Président (M. Vallières): Hou-dé-ib?

Mme Houda-Pepin: Hou-dé-ib.

Le Président (M. Vallières): Houdeib, oui. Pour le temps dont vous avez besoin, et ensuite une période d'échange avec les députés. Alors, la parole est à vous.

Regroupement des organismes du Montréal
ethnique pour le logement (ROMEL)

M. Houdeib (Mazen): Merci, M. le Président. Tout d'abord, j'aimerais vous remercier pour l'opportunité que vous avez donnée à notre Regroupement de s'exprimer devant cette commission.

Document déposé

Il y a deux jours, j'ai remis une note et puis une liste des groupes membres du Regroupement et, en même temps, je désire déposer aujourd'hui le rapport d'activité du Regroupement à la commission. Ça nous sauve du temps et ça donne plus d'informations et de détails sur notre Regroupement et sur nos activités.

n(15 h 30)n

M. le Président, tel qu'on a mentionné dans la note qu'on vous a envoyée, il y a des points qui nous inquiètent un peu dans le projet de loi et nous désirons les soulever. Mais, en même temps, on a mis une note pour exprimer notre appui pour les revendications et la position du FRAPRU et du RCLALQ à l'égard du projet de loi. Alors, pour sauver un peu de temps, je ne retournerai pas nécessairement sur ces points en détail.

Le point le plus important que j'aimerais soulever, c'est ce qu'on vit le jour au jour dans le cadre de nos activités, qui est la question de discrimination dans le logement. Et nous, on a remarqué que dans les lois, il y a beaucoup de clauses qui sont nécessairement claires, qui protègent les droits des gens, mais dans l'application, dans les recours, c'est toujours difficile, ce qui fait que les problèmes persistent sur le terrain.

Et, moi, j'aimerais demander, M. le Président, à la commission de regarder, en fait, trois points essentiels dans le projet de loi: la question des évictions, la question de l'information que le propriétaire peut demander et la question d'augmentation et de diminution de loyer. Sur le premier point, c'est évident que si, dans la loi, il n'y a pas d'équilibre dans les recours de part et d'autre, ça va ouvrir la porte à de l'abus qu'on vit actuellement dans plusieurs incidents qu'on retrouve chaque jour. Le deuxième point, par rapport à l'information, on ne comprend pas pourquoi la date de naissance, par exemple, doit être... doit figurer sur une offre, par exemple, de location ou bien sur n'importe quel document, puisque la loi interdit au propriétaire de demander, par exemple, le numéro d'assurance sociale. Alors, avec la date de naissance, on est capable d'aller chercher les mêmes informations personnelles, mais d'une autre manière, ce qui fait qu'on trouve que, ça aussi, ça peut donner de la marge pour l'abus.

À ce niveau-là, j'aimerais juste préciser que le plus gros problème qu'on vit actuellement, c'est surtout avec les nouveaux arrivants, avec les gens qui viennent d'arriver au Québec et puis qui n'ont pas encore ni d'information, ni de compte de banque, ni de numéro de téléphone, ni rien, ce qui fait que cette demande rend plus difficile pour eux de trouver un logement.

Par rapport à l'augmentation et la diminution de loyer, c'est le même principe qu'on aimerait voir s'appliquer, c'est le principe d'équilibre et d'équité. Ça veut dire, si le propriétaire a le droit d'augmenter le loyer à cause d'augmentation de coûts d'exploitation, on pense que le locataire ne doit pas subir des augmentations de loyer arbitraires, et il faut qu'il soit capable aussi de demander une diminution de loyer au cas où ces coûts-là diminuent en même temps.

Par rapport à la discrimination, je vous ai promis, dans la note que je vous ai envoyée, M. le Président, de mentionner quelques incidents qui arrivent chaque jour; et ça, ça dépend des circonstances. Aujourd'hui, c'est la mode de refuser un appartement pour quelqu'un qui est d'origine arabe, par exemple, ou qui a l'apparence. Il peut être de l'Inde ou du Pakistan ou de n'importe quel pays, mais on a remarqué à plusieurs reprises qu'on refuse de donner le logement comme ça. Et comment on le sait? C'est très simple. Nous, dans le cadre de nos activités, on appelle les propriétaires et puis on discute avec eux du logement à louer, et on leur donne, on leur envoie, par exemple, on leur réfère un locataire potentiel. Et ça, c'est gratuit; c'est un service gratuit qu'on offre aux propriétaires. Et une fois que la personne se présente là-bas, tout d'un coup l'appartement est déjà loué. Alors, on appelle le propriétaire le matin; à midi, l'appartement est déjà loué, du moment où ils voient la face de la personne.

Il y a d'autres situations, là où des propriétaires, au téléphone, carrément nous disent: Ne m'envoyez pas des Noirs, par exemple. Ne m'envoyez pas de ci, de ça, de telle ethnie, etc. Et là je dois mentionner une chose juste à titre de clarification, c'est que ce type de comportement, on le trouve surtout parmi des propriétaires qui sont d'origine autre que québécoise d'ici. On peut analyser et faire des analyses là-dessus, mais sauf que, c'est une réalité. C'est qu'il y a un abus par rapport à l'information qui manque chez ces nouveaux arrivants. Il y a des propriétaires qui convainquent les locataires que c'est normal d'augmenter le loyer chaque mois, par exemple. Et puis il y a des locataires qui tombent là-dedans, surtout... Je parle toujours de nouveaux arrivants qui ne savent pas nécessairement les lois et les règlements.

Alors, nous, on demande que la loi ait, comme je peux peut-être dire, des dents pour pouvoir appliquer les clauses. Lorsqu'un propriétaire n'a pas le droit, par exemple, de demander une information quelconque, que le recours soit un recours immédiat et très clair pour essayer de contrer ce phénomène-là.

Alors, je termine là-dessus, et je vous remercie, M. le Président, pour le temps que vous m'avez accordé.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci, M. Houdeib. Nous allons maintenant immédiatement au questionnement de Mme la ministre.

Mme Harel: Oui. Certainement, M. le Président. Alors, je vous remercie beaucoup, M. Houdeib. Je sais combien ROMEL, l'organisme que vous représentez, Regroupement des organismes du Montréal ethnique pour le logement, a fait du bon travail et a réussi à alerter l'opinion publique. Notamment, il y a certains dossiers... Je pense à ceux des ménages qui habitaient sur Côte-des-Neiges. J'aimerais que vous nous en parliez, dans quel état ils se trouvaient, dans quel état de détérioration se trouvaient les logements que ces familles habitaient.

M. Houdeib (Mazen): On parle en fait de plusieurs bâtiments, certains qui appartiennent aux mêmes propriétaires, d'autres à d'autres propriétaires. C'est très simple. Nous, on travaille dans le cadre du programme AccèsLogis dans le développement des coopératives d'habitation et on fait le tour, d'une façon régulière, des immeubles. On rencontre les gens. Entre autres, il y a eu plusieurs immeubles qu'on a visités à Côte-des-Neiges et à Parc-Extension, là, où les conditions de logement sont totalement inacceptables ni par la loi ni par le standard qu'on respecte ici, chez nous: des plafonds qui sont totalement défoncés, de l'humidité, de l'eau qui coule de tous les robinets à peu près. Et puis, le propriétaire bien sûr, dans ce cas-là, refuse de faire des réparations en disant que, lui, il fait des réparations, mais sauf que c'est les locataires qui maganent les appartements.

Nous, ce qu'on a déduit de tout ça, c'est qu'il y a certains propriétaires malheureusement... Parce que, dans ce type d'industrie, c'est un investissement pour les propriétaires, d'investir dans un immeuble et puis avoir des retombées, des revenus de ça. Alors, il y a certains qui préfèrent laisser aller l'immeuble, garder l'argent qu'ils ramassent des loyers sans faire nécessairement des réparations et, dès que l'immeuble devient totalement délabré ou tombe à terre, ou bien ils le vendent ou bien la banque le ramasse et puis le propriétaire... Ça veut dire qu'il considère qu'il a fait son gain, peut-être.

n(15 h 40)n

Nous, au ROMEL, on essaie toujours au départ... Malheureusement, à cause de manque de ressources, on n'a pas pu continuer pour longtemps dans ça mais on a pris l'habitude de visiter les immeubles, de visiter les propriétaires, de prendre le relevé de chaque appartement qu'on met dans notre banque de logements pour s'assurer que l'appartement répond aux exigences de la Régie et puis... les exigences légales. Et, du moment où on trouve qu'il y a des choses qui ne vont pas, on sensibilise le propriétaire, on lui explique pourquoi il doit réparer telle affaire. Dans tous les cas, c'est dans son intérêt, parce que ça protège son investissement. En même temps, on aide les propriétaires aussi à avoir une idée sur les programmes qui existent. Par exemple, à Montréal ? nous, on fonctionne à Montréal ? les programmes qui existent de la part de la ville pour aider dans les rénovations, etc., afin d'aider aussi les propriétaires à chercher des subventions peut-être pour faire des réparations.

Malheureusement, on a dû arrêter ce type d'activités ? on le fait à l'occasion ? par manque de ressources humaines spécifiquement. Il y avait des propriétaires qui ont réagi positivement là-dessus. Il y en a d'autres que... Peu importe, ils ont peut-être d'autres types de raisonnement par rapport à leur investissement.

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre.

Mme Harel: Oui. J'ai simplement souvenir de la dernière rencontre que nous avions eue, où nous étions, et Mme la députée de La Pinière et vous-même et moi-même, en fait, dans la même salle où se trouvaient le chef de l'opposition et le premier ministre. Alors, c'était une réminiscence qui... Voyez-vous...

Mme Houda-Pepin: ...

Mme Harel: Voilà. Tout à fait. Ce matin, Mme la députée de La Pinière, qui est souvent gentille mais pas toujours, elle m'a fait grief, grief de ne pas avoir donné les sources d'un document de travail qui a été transmis à la Société d'habitation du Québec et à la Régie du logement et qui est un document de travail qui s'intitule Les logements privés au Québec ? La composition du parc de logements ? Les propriétaires bâilleurs et les résidents, qui est une étude réalisée pour la Société d'habitation du Québec, et pour la Société canadienne d'hypothèques et de logement, et pour la Régie du logement, et pour la Régie du bâtiment, qui ont fait alliance, ces quatre organismes, pour obtenir de l'INRS-Urbanisation-Culture et Société vraiment une étude de fond. C'est une enquête nationale québécoise auprès des locataires, propriétaires et propriétaires bâilleurs.

Alors, j'ai obtenu rapport d'analyse qui a été déposé par l'INRS, et c'est vraiment «une étude qui constitue un ajout important ? disent-ils ? à la connaissance du marché du logement», et c'est vrai. À partir d'une enquête téléphonique, il y a eu, entre autres, 10 330 ménages qui ont été interrogés. C'est extraordinaire, hein ? parce que habituellement les échantillonnages sont beaucoup plus faibles: 10 330 ménages interrogés, 6 051 ménages propriétaires occupants, 4 279 ménages locataires. Ensuite, dans la seconde phase, l'enquête a consisté à rejoindre un échantillon représentatif de propriétaires bâilleurs. Pour ce faire, ce sont les coordonnées de propriétaires ou de gérants d'immeuble fournies par les locataires des logements privés qui ont été utilisées et, pour cette seconde phase, c'est 1 147 entrevues qui ont été complétées auprès des propriétaires bâilleurs.

Alors, c'est une analyse qui présente le point de vue des propriétaires bâilleurs, des ménages locataires, des ménages propriétaires occupants, les travaux de rénovation effectués par des propriétaires occupants, et c'est vraiment... Ça va être une étude d'envergure qui va mettre, je pense, qui va mettre fin à beaucoup de prétendus problèmes qui nous sont, si vous voulez, transmis comme des vérités révélées alors que l'enquête va venir, dans le fond, tracer le portrait. Et je sais que Mme la députée de La Pinière meurt d'envie d'avoir copie de cette enquête. Et je vais vous dire, M. le Président, j'ai l'intention de la lui remettre mais non pas de la faire circuler encore parce qu'elle doit être validée sur le plan scientifique par les quatre organismes qui ont demandé et financé, en fait, une telle enquête. Et ce qui est assez extraordinaire, c'est les perceptions des propriétaires bâilleurs quant à l'évolution du marché. Parce qu'on nous a dit: Ce n'est pas rentable. Il n'y a pas de rentabilité. Ça ne vaut pas la peine.

Ce matin, je citais les chiffres. Vous n'y étiez pas, mais, pour les fins certainement de votre intérêt, je citais les chiffres qui donnent un revenu annuel moyen par logement locatif de 4 926 $ annuellement, presque 5 000 $ par logement locatif. C'est une moyenne pour le Québec, mais, pour les propriétaires de 50 logements et plus, la moyenne par logement, c'est 7 900 $, en moyenne. Bon. Alors, il y a de tout là-dedans. Mais c'est évident qu'il faut regarder les choses pour savoir où sont les problèmes. Alors, les problèmes ne sont pas partout parce que, voyez, en ce qui concerne notamment la qualité... toutes les questions relatives à la rentabilité de leur immeuble... Alors, la plupart des propriétaires interrogés estiment que la situation s'est améliorée, 34 % des propriétaires estiment que la situation s'est améliorée; 40 % estiment qu'elle est demeurée stable, ce qui fait qu'au total, c'est 74 %, le trois quarts, qui estiment que la situation est stable ou s'est améliorée, et ainsi de suite.

Alors, on aura vraiment, je pense, certainement tous, tous entre nous, bien, bien, bien, bien de l'intérêt à prendre connaissance de cette étude, notamment celle-ci: «Dans l'ensemble, on juge que la facilité de percevoir le loyer s'est plutôt améliorée. Alors que les propriétaires bailleurs, de près de 60 %, disent que la situation est demeurée stable, 25 % jugent qu'il y a eu amélioration et 14,9 % ? donc presque 15 % ? que la situation est jugée s'être détériorée.» Ça veut donc dire que, dans l'ensemble, on est dans une situation qui n'est pas pire ou en voie, si vous voulez, de décrépitude, mais qui semble, en tout cas, pour les cinq dernières années ? ça portait sur les cinq dernières années ? donc avoir évolué d'une manière positive.

Vous nous avez dit tantôt: Il y a des abus que l'on vit chaque jour. J'aimerais ça vous entendre là-dessus parce que des organismes qui vous ont précédé ou qui vous suivront disent: Il n'y a pas de problème. On ne voit pas pourquoi, à ce stade-ci, il faudrait une législation, il n'y a pas de problème. Évidemment, la Commission des droits et la Commission d'accès à l'information, même si elles partagent des points de vue différents sur ce qui est la solution, sont venues toutes les deux nous dire: Il faut une législation parce qu'il y a des problèmes à résoudre. Alors, quels sont les abus? Ma première question. Mais la deuxième, ça sera aussi: Vous, là, vous êtes un homme raisonnable, un citoyen impliqué, nous le savons. Trouvez-vous que c'est normal qu'on n'ait aucune information quand on veut signer un bail avec un locataire qui va habiter un de ses logements?

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Houdeib.

M. Houdeib (Mazen): Oui. Alors, merci, M. le Président. Sur le premier point, la question de l'abus, moi, j'aimerais préciser que, nous, on est sur le terrain, ce qui fait qu'on vit le jour au jour des situations. C'est sûr et certain que, par rapport peut-être à certains propriétaires, du moment où les locataires ne contestent rien, vous savez, il n'y a pas de problèmes. Pour le même propriétaire, par exemple, dont j'ai fait mention à Côte-des-Neiges, pour lui, il n'y avait pas de problèmes, c'était un complot de la ville, des organismes communautaires, de tout le monde contre lui, alors que, lorsqu'on a visité, il y a des logements à peine où on était capable de rentrer et il y avait des gens qui vivaient dedans. Alors, ça c'est...

Mme Harel: ...capable de rentrer?

M. Houdeib (Mazen): Parce que c'était tellement délabré, c'était tellement... Ça sentait l'humidité, le plafond était à peu près par terre. Dans la salle de bains, les murs étaient noirs de la moisissure, et tout ça, et puis il y avait des gens qui vivaient dedans. Et lorsqu'on parlait avec les gens ? c'est des gens qui viennent de l'extérieur, c'est des immigrants ? premièrement, ils ne savent pas vraiment c'est quoi, les recours; deuxièmement, ils ont peur parce qu'ils ne peuvent pas trouver peut-être d'autre logement. Alors, pour ce propriétaire, il n'y avait pas de problèmes. C'est sûr qu'il y a dans beaucoup de bâtiments... il n'y a pas de problèmes. Il y a beaucoup de propriétaires responsables qui font leur travail et puis qui améliorent leur investissement, mais il y a beaucoup aussi que ce n'est pas le cas.

n(15 h 50)n

Nous, on est sur le terrain. La question des abus, M. le Président... Nous, lorsqu'on travaille dans le programme AccèsLogis, on visite des bâtiments. Sur chaque, peut-être, 20, 30, 40 bâtiments, on est capable de viabiliser un dans le cadre, par exemple, d'AccèsLogis; mais ça veut dire que les autres bâtiments sont dans la même situation que celui qu'on a pu, par exemple, rentrer dans le programme. Il y a beaucoup de bâtiments... À mon avis, la question d'abus, ça prend plusieurs niveaux. Il y a l'abus par rapport aux lois... aux droits et aux devoirs, par exemple, de chacun. Et ça, c'est lorsqu'il y a un locataire qui est dedans. Il y a de l'abus lorsqu'on cherche un logement. On a des cas, qu'on peut vous citer jusqu'à demain matin, sur des familles, par exemple, de quatre, cinq personnes, qui circulent pendant deux mois, trois mois pour trouver un logement, et du moment où le propriétaire aperçoit qu'ils ont des enfants, il refuse de louer. On a plusieurs exemples. Des gens qui ont dû même mentir au propriétaire, dire: On est juste un couple. Et puis il a loué un six et demi pour un couple, et après ils ont amené leurs enfants. Il y a eu bien sûr des problèmes avec ça, etc., après, et puis des chicanes, mais sauf que c'était le cas. Les gens ne sont pas capables d'aller directement et avoir le logement convenable. Et, nous, on croit que le logement, c'est un droit fondamental, ce n'est pas un luxe. Ça veut dire, ce n'est pas un produit qu'on peut s'en dépasser.

Mme Harel: Vous êtes conscient que ce n'est pas un droit qui est reconnu dans aucune des Chartes, ni la Charte canadienne ni la Charte québécoise, vous savez, hein, je crois? C'est donc dire que c'est un droit mais qui est tempéré par le fait que c'est sur le libre marché. En d'autres termes, le propriétaire n'a pas d'obligation de louer. Il a l'obligation de ne pas commettre de la discrimination pour des motifs interdits mais il n'a pas l'obligation de louer. Et, en contrepartie, cependant, s'il loue, le locataire a l'obligation aussi de lui payer son loyer. Il y a, si vous voulez, de part et d'autre des obligations. Il y a un maintien dans les lieux, mais il y a une obligation de payer loyer.

Il y a un organisme, RCLALQ, dont les représentant sont ici d'ailleurs, qui plaide qu'il puisse y avoir des motifs pour lesquels on soit excusé de ne pas payer son loyer, alors qu'on puisse, dans le fond, faire entendre des motifs pour justifier de ne pas payer. À ce moment-là, vous comprenez qu'on serait dans un dilemme où: Pourquoi est-ce que les gens loueraient si s'établissait cette idée qu'on peut être justifié de ne pas payer? Bien évidemment, il y aurait de moins en moins, en moins, en moins, en moins certainement de gens qui voudraient louer en étant dans une situation d'incertitude quant au fait de se faire payer ou pas le loyer.

Souvent, l'enfer est pavé de bonnes intentions. C'est vrai que... On dit souvent: Les bons sentiments ne font pas les bonnes politiques. C'est-à-dire que, appliquer les bons sentiments, les conséquences peuvent être terriblement perverses, c'est-à-dire finalement ne plus vouloir d'aucune façon louer à des gens qui pourraient peut-être éventuellement plaider qu'ils ne peuvent plus payer, qu'ils sont justifiés de ne pas le faire.

Alors, je vous dis tout ça parce que, dans votre mémoire, à la page 3, je crois, entre autres, il y a un aspect pour lequel vous avez raison quand vous dites: «Le locataire n'aurait-il pas droit de demander une baisse de loyer dans le cas d'une diminution de taxes ou de coût de l'énergie?» C'est dans le projet de loi. Oui, c'est une question d'équité, absolument. Si c'est normal pour le propriétaire de demander une augmentation, lorsqu'il y a une augmentation d'énergie, de taxes, etc., il faut que l'inverse soit vrai aussi. Et, dans les cas qui nous intéressent, surtout sur 10 ans, là où on pense qu'on va passer, à Montréal, de 1,99 à 1,42 le 100 $ d'évaluation, bien, on pense qu'il faut qu'il y ait des gens qui puissent profiter aussi de cette réduction qui va se produire sur certains territoires, en tout cas, de la nouvelle ville.

Mais, je vous repose la question... Je sais que vous, vous représentez un Regroupement et chacun reste sur ses positions, ici. Les propriétaires restent sur leurs positions; les locataires restent sur leurs positions; mais vous... Vous-même, par exemple, vous êtes propriétaire. Vous voyez arriver une personne, elle vient d'arriver... Enfin, l'équivalent de celles que vous recevez tous les jours. Elle n'a donc pas aucune façon de démontrer qu'elle a des habitudes de paiement régulières. Alors, qu'est-ce que vous allez... Comment vous allez vous fier? Sur quoi? Juste le nom puis la... Juste son nom, puis ça serait suffisant. Parce que son adresse, même à ça, pourrait ne pas dire grand chose si elle vient d'arriver. Vous accepteriez, vous, de louer à une personne dont vous ne connaissez rien d'autre?

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Houdeib.

M. Houdeib (Mazen): Oui, M. le Président. En fait, je peux...

Mme Harel: Là, il faut que vous me répondiez la vérité.

M. Houdeib (Mazen): Oui. Non, non, je vais répondre directement à ça. Moi, je vous raconte mon expérience personnelle. Moi, je suis arrivé au Québec comme immigrant en 1990. Je n'avais pas d'emploi, ni moi ni mon épouse; j'avais deux enfants. On a fait le tour. C'est sûr que la situation du logement était un peu différente, il y avait... Le taux de vacance était peut-être un peu plus élevé qu'aujourd'hui. Et puis on a choisi un appartement. On a parlé avec la concierge qui était responsable du bâtiment. Elle n'a rien demandé. Elle nous a loué. Elle nous a loué au deuxième étage, et j'avais deux petits enfants qui couraient tout le temps, etc. À la fin du bail ou avant la fin du bail, elle m'a proposé un autre appartement qui est au-dessus du garage, et puis je l'ai accepté. Je n'ai jamais manqué de payer. Elle ne m'a demandé aucune pièce justificative et je n'ai eu aucun problème.

Moi, je vous dis, M. le Président, c'est que, même selon les dernières données statistiques, même les gens qui sont sur l'aide sociale, il y a à peu près 5 % qui ne paient pas leur loyer, alors que le reste, vous pouvez vous imaginer qu'ils paient leur loyer à la place peut-être de manger parfois, mais ils paient leur loyer, ce qui fait que le risque...

Mme Harel: Mais, M. Houdeib, vous avez raison, c'est 5 %, mais c'est 35 000, c'est 35 000 dossiers chaque année à la Régie du logement, 35 000 dossiers de non-paiement de loyer pour lesquels un propriétaire s'adresse à la Régie. On doit penser qu'il y en a un peu plus même, parce qu'il a déguerpi puis le propriétaire sait que ça ne vaut pas la peine de venir à la Régie parce qu'il ne pourra pas le retrouver ou pour toutes sortes de raisons. C'est 5 %. Il y a 1,2 million de baux signés chaque année. Mais ces 35 000 là, si vous étiez un propriétaire d'un de ces 35 000 cas, vous voudriez faire quoi la prochaine fois que vous allez signer un bail? Là, votre concierge, elle, est vraiment sûrement fière parce qu'elle s'est fiée à vous puis elle a eu raison de se fier à vous.

Mais dans les 35 000 cas où ceux qui se sont fiés se sont faits avoir, la fois d'après, qu'est-ce que vous pensez qu'ils doivent faire pour ne pas que ça recommence? Vous savez, je me suis toujours rappelée les phrases de Marcel Léger. Marcel Léger, c'était un député qui a été ministre ici, au Parlement, pendant des années, puis il disait toujours: Quand tu te fais faire quelque chose, la première fois, tu peux toujours dire que c'est la faute de l'autre. Mais, si ça se répète une deuxième fois, il faut que tu dises: C'est ma faute. Et il y a quelque chose de vrai là-dedans. La première fois que vous vous faites avoir, vous pouvez toujours dire que c'est la faute de l'autre; mais, la deuxième fois, vous êtes obligé de dire: Bien, là, c'est ma faute, je n'ai pas pris les moyens qu'il fallait.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, il faudrait procéder rapidement, on a déjà dépassé le 20 minutes.

M. Houdeib (Mazen): Je vais répondre rapidement. Dans les 35 000, M. le Président, qu'on mentionne, il faut aussi remarquer c'est quoi, le nombre des gens qui n'ont pas payé leur loyer parce qu'ils ont un problème avec le propriétaire et qu'ils n'étaient pas au courant de la loi dans la Régie du logement. C'est pas des gens qui ne veulent pas payer leur loyer, c'est des gens qui ont demandé, par exemple, des réparations, des choses au propriétaire. Celui-ci a refusé, alors, ils ont décidé de ne pas payer le loyer. Et là ils sont, bien sûr, dans l'erreur lorsqu'ils font ça.

n(16 heures)n

Mme Harel: Et c'est intéressant ? si vous me permettez juste une dernière seconde ? c'est intéressant, M. Houdeib, parce que justement, suite à toutes les représentations qui ont été faites, on travaille sur cette mécanique qui ferait en sorte que, lorsque le propriétaire envoie l'avis de demande de recouvrement de loyer ou de résiliation pour retard depuis trois semaines, il y ait aussi une information qui permette au locataire de savoir que, s'il s'agit justement de négligence du propriétaire de respecter ses obligations, il peut donc également demander une diminution de loyer ou il peut aussi demander à ce moment-là de ne pas verser le loyer, mais il doit quand même l'acquitter auprès de la Régie en attendant. Alors, toutes ces informations-là vont être données concurremment pour que le portrait complet... On ne peut pas se faire justice soi-même quand même.

M. Houdeib (Mazen): Ça, c'est... M. le Président, ça, c'est...

Le Président (M. Vallières): Très, très rapidement, parce que là on est en train de reperdre le temps qu'on avait gagné. C'est très intéressant, mais on va avoir de la misère à finir à 18 heures.

M. Houdeib (Mazen): Ça, c'est vrai. M. le Président, c'est une question de manque d'information. Et c'est là où le ROMEL, par exemple, essaie de jouer un rôle. Puis la question du recours, c'est très important. Le propriétaire, oui, il a le droit d'avoir le loyer à temps, etc., ça, il n'y a pas de problème avec ça, mais le locataire à notre avis a le droit d'avoir les réparations nécessaires lorsqu'il les demande, dans le même délai. Si ça prend un mois ou deux semaines pour faire une éviction, ça doit prendre deux semaines pour obliger le propriétaire à faire les réparations, par exemple, au lieu que c'est 12 mois actuellement, à peu près.

Le Président (M. Vallières): Très bien, merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Houdeib... (S'exprime en arabe). Je suis très heureuse de vous accueillir, et je connais très bien le ROMEL. Le ROMEL, c'est le Regroupement des organismes du Montréal ethnique pour le logement. J'ai visité votre organisme. Je sais que vous faites un travail remarquable auprès des nouveaux arrivants. Et vous regroupez 44 organismes aussi qui sont avec vous dans votre action.

Vous me permettrez, M. le Président, d'abord de répondre à la ministre, parce qu'elle essaie toujours de faire passer ses messages, notamment concernant la fameuse étude de l'INRS, que je n'ai pas encore lue, et alors elle me prête toujours des intentions. Elle dit que je ne suis pas gentille. Ce n'est pas une question de gentillesse, c'est une question de rigueur. Donc, quand on cite des données, il faut savoir d'où elles viennent, ce qu'elles valent, si on les a vérifiées, les sources, etc. Je tiens les gens de l'INRS dans la plus haute estime, M. le Président. Ce sont des gens très compétents.

Mais il n'en demeure pas moins que la ministre, ce qu'elle nous dit, là... C'est qu'elle prend une étude que personne n'a lue sauf elle puis elle réplique aux gens qui sont venus nous parler en disant que c'est des prétendus problèmes. J'ai de la misère avec ça. J'ai de la misère avec ça, parce qu'une étude, c'est une étude, hein? Ça va traduire... Elle nous parle d'un sondage qui a été fait, ou d'une enquête qui a été faite. Donc, on a été chercher des perceptions. Et là, nous, nous avons devant nous des témoins vivants qui viennent nous parler de ce qu'ils vivent, des problèmes qu'ils expérimentent, que ce soient des propriétaires ou des locataires. Alors, je voudrais inviter la ministre à laisser ce discours de côté puis faire confiance aux gens qui viennent nous voir et qui nous exposent leurs problèmes. Et j'espère que... si ça marche comme ça, on va pouvoir s'entendre pour la suite des choses.

Pour revenir au ROMEL et à la problématique particulière des nouveaux arrivants et aussi des gens qui sont issus des minorités qui sont ici depuis quelques années, qui rencontrent des difficultés particulières, vous nous avez dit que, suite aux événements dernièrement, vous constatez qu'il y a de la discrimination à l'égard des gens d'origine arabe ou qui ressemblent aux gens d'origine arabe et que vous-même, dans le ROMEL, vous avez développé une expérience pour aller visiter des logements, puis la discrimination, pour vous, c'est une réalité. Et vous avez aussi dit que cette discrimination, elle ne vient pas seulement des propriétaires québécois d'origine, mais aussi de propriétaires qui sont de différentes origines. Et ça, pour moi, vous ne m'apprenez pas grand chose, parce que je sais que dans le concret, ça, c'est une réalité aussi.

D'ailleurs, les sondages qui sont faits à travers le Canada, année après année, sur les perceptions des Canadiens à l'égard de l'immigration, il y a des données qui sont compilées en fonction des répondants. Et souvent, par exemple les gens d'origine italienne, d'origine germanique, etc., vont avoir des préjugés à l'égard des gens qui sont des nouveaux arrivants. Ça, ça veut dire que la discrimination n'a pas nécessairement de niche particulière, mais que finalement on n'est pas immunisé contre les préjugés, là. Tout le monde peut être sujet à ça. Mais cela veut dire qu'il faudrait continuer à travailler pour le rapprochement puis mieux faire connaître les gens, et tout ça.

Dans votre mémoire, vous avez dit que vous êtes contre le formulaire de prêt et location par lequel on recueille les données, n'est-ce pas, sur les nouveaux arrivants. Mais, comme, vous, vous traitez avec une clientèle particulière, les nouveaux arrivants, comment ces gens-là vont pouvoir démontrer qu'ils sont des locataires fiables, dans le sens de leur capacité de payer, puisque finalement on n'est pas capable de retracer leur histoire de crédit ici? Comment vous-même... Comme conseiller, qu'est-ce que vous leur dites, à ces gens-là? Comment ils peuvent faire valoir leur, je ne sais pas, moi, leur capacité de payer, ou leur honnêteté, ou leur solvabilité, ou leur relation de confiance, sachant qu'ils partent de rien? Comment vous faites?

Le Président (M. Vallières): M. Houdeib.

M. Houdeib (Mazen): Oui, M. le Président. C'est simple. Lorsque quelqu'un arrive à Dorval, ou à un point d'entrée, comme immigrant, il a son visa d'immigration. Sur le visa d'immigration, l'agent d'immigration à l'aéroport lui demande combien d'argent il a apporté avec lui. Alors, il écrit ça sur le visa, et le visa, c'est la seule, en fait, pièce d'identité que cette personne a, à part son passeport du pays d'origine. Ça veut dire que le propriétaire est capable, dans l'identification, tout de suite, premièrement, de savoir si la personne a de l'argent ou pas. Deuxièmement, ils ont pris l'habitude que, lorsqu'on signe un bail, on paie le premier mois tout de suite, ce qui fait que c'est plus ou moins sécuritaire. Maintenant, si on va dire que cette industrie-là de location d'appartements doit être une industrie à risque zéro, je ne pense pas que ça serait logique. C'est comme toute autre industrie dans le pays, il y a un certain risque à courir.

Maintenant, je dois mentionner une chose rapidement, c'est qu'un propriétaire qui fait... Et je vous donne une exemple vivant, parce qu'on gère des immeubles aussi. Un propriétaire qui gère son immeuble d'une façon qu'il applique une saine gestion, il a par définition pris des réserves sur plusieurs choses: réserves de vacance, mauvaises créances, pour les réparations, l'entretien et pour des réparations majeures parfois, parce qu'il arrive parfois des réparations majeures. Alors, tout ça, c'est inclus déjà dans le loyer. Maintenant, dans le cas d'un immeuble de 20 logements, ou 30, ou peu importe, il y a une mauvaise créance, ou un qui ne paie pas, ou deux, ce n'est pas la faillite pour le propriétaire, c'est-à-dire, il est capable de prendre ce risque. Nous, on ne dit pas que le propriétaire peut louer à n'importe qui, n'importe comment, etc. Il peut, comme j'ai mentionné, il a le droit de ne pas louer son appartement, mais il n'a pas le droit de discriminer contre quelqu'un qui demande la location, sur la base de son origine ou sur la base de son statut familial, famille monoparentale, avec des enfants, sans enfants, etc.

Mme Houda-Pepin: Sur cette question de la discrimination, nous avons entendu hier la Commission des droits de la personne qui nous a dit qu'il y avait quelques centaines de cas de discrimination qui sont traités par la Commission. Selon vous, selon votre expérience, est-ce que ce chiffre-là est réaliste ou si dans le concret, c'est beaucoup plus grand que ça, mais que les gens finalement, d'abord parce qu'ils ne connaissent pas leurs droits, ils ne savent pas que la Commission des droits de la personne existe, ils ne savent pas comment s'en prévaloir, ou parce qu'ils sont nouvellement arrivés, donc ils ne veulent pas partir leur vie sur une chicane avec des propriétaires, etc., et par conséquent ils ne se donnent pas la peine d'entamer des procédures pour discrimination devant la Commission?

M. Houdeib (Mazen): M. le Président, il y a un peu de tout dans ça. C'est, par définition, quelqu'un qui veut louer un appartement, il vient d'arriver, son but principal, c'est de se loger, pas de se chicaner avec les gens. Alors, du moment où il est refusé pour n'importe quel motif, il va essayer de trouver un autre appartement. C'est sa réaction normale et logique. Il ne va pas essayer de...

Maintenant, d'autre part, les cas qui sont devant la Commission des droits de la personne, c'est une partie des cas. C'est les cas où les gens vraiment ont déposé une plainte, mais il y a un certain nombre, qui est le double, le triple peut-être, qui ne dépose pas de plainte, qui ne veut rien savoir. Il dit juste: Cherchez-moi un autre logement.

n(16 h 10)n

Il y a aussi, comme vous avez mentionné, la question de manque d'information, surtout pour les nouveaux arrivants, par rapport aux lois et aux recours. À part d'une affaire qui est très... qu'on a déjà mentionnée, c'est les délais. Les délais, ça veut dire que, du moment où il y a une violation de droits, une discrimination dans ce sens-là, la victime, son recours est très long, très pénible, et puis ce n'est pas l'intérêt des gens. Les gens ne veulent pas faire ça, ils veulent juste louer un appartement. C'est pour cela qu'on a demandé que ce soit équilibré, que...

Mme Houda-Pepin: Sur l'article 21, vous dites que vous soutenez la position du FRAPRU. On va les entendre bientôt, mais on connaît... enfin, pour ma part, pour avoir lu leur mémoire, je connais un peu leur positionnement. Et, sur l'article 21, vous dites, bon, que cet article-là ne devrait pas finalement être... on ne devrait pas permettre la cueillette des données, notamment en ce qui a trait à la date de naissance, et tout ça. Et est-ce que, pour vous, un propriétaire qui est raciste ou qui refuse d'avoir chez lui... comme on vous dit: Je ne veux pas avoir de Noirs, je ne veux pas avoir d'Arabes, je ne veux pas avoir de ci, de ça, est-ce que ce propriétaire-là, le fait qu'il puisse ou qu'il ne puisse pas recueillir des informations sur le candidat locataire, ça fait une différence?

Autrement dit, même s'il obtient l'information, même s'il a la date de naissance, même s'il fait une enquête de crédit, même s'il sait que le candidat est solvable, s'il ne veut pas lui louer parce que... pour d'autres raisons, c'est-à-dire motifs ethnie, race, couleur, ça va être tout le temps, c'est-à-dire, cette personne-là va être tout de même privée de logement.

Or, l'argument majeur qui nous a été apporté, c'est que, si on donne la possibilité au propriétaire de recueillir des données en vertu de leur capacité de le faire actuellement, ça risque d'exclure des gens, alors que, vous, vous allez vous retrouver avec des candidats au loyer qui pourraient être exclus, avec ou sans cueillette d'informations.

M. Houdeib (Mazen): Ça, c'est vrai, parce que la discrimination a plusieurs visages, en fait. Il y a des propriétaires peut-être qui veulent discriminer sur cette base, disons, raciale ou autre. Ils n'ont pas besoin même de cueillette d'informations. On a vécu des situations, comme j'ai mentionné, que quelqu'un vient chez nous, on appelle le propriétaire, on organise la visite pour lui. Dès qu'il se présente, parce qu'il est noir, par exemple, ou parce qu'il est ci ou ça, tout d'un coup le propriétaire lui dit: On a loué. Vous savez, dans deux heures, trois heures, il a loué déjà. Alors, ça, c'est bien sûr difficile de faire un suivi là-dessus. Mais là il n'y a pas de cueillette d'informations, c'est automatiquement un refus.

Dans la cueillette d'informations, nous, ce qui nous intrigue un peu, c'est que c'est quoi, la garantie que... si le propriétaire a l'histoire de vie personnelle de quelqu'un, c'est quoi, sa garantie que ce quelqu'un va payer le loyer? Il n'y a pas de garantie. C'est juste des spéculations ou bien des perceptions que, si quelqu'un a un bon crédit, par exemple, etc., ça veut dire qu'il est un bon payeur. Ce n'est pas vrai dans la vie. Ce n'est pas vrai. Il y a des gens qui peuvent parfois perdre leur emploi, qui peuvent avoir des problèmes, et ça sans dire qu'à ce moment-là le propriétaire doit, comment dirais-je, porter ça sur ses épaules, doit subir les conséquences. C'est pas vrai. Nous, ce qu'on demande au gouvernement, c'est d'introduire les moyens qui peuvent pas juste protéger le propriétaire, il y a le droit d'être protégé, on n'est pas contre ça, mais de protéger aussi les gens qui sont vulnérables, qu'aujourd'hui...

Mme Houda-Pepin: La Commission d'accès à l'information, qui s'est présentée devant nous, reconnaît que les nouveaux arrivants, les immigrants, entre autres, ou les étudiants, enfin les nouveaux arrivants sur le marché locatif, ne sont pas exempts de faire la preuve qu'ils sont solvables et sont capables d'assumer la responsabilité de payer le loyer. Qu'est-ce que vous répondez à ça?

M. Houdeib (Mazen): Mais ça, à mon avis, ça rentre toujours dans la même problématique. C'est que la personne qui est un mauvais payeur ou qui ne veut pas payer, par exemple, le loyer, c'est comme l'exemple qu'on a donné, le propriétaire qui ne veut pas louer à quelqu'un sur une base raciale. Alors, peu importe qu'il y ait de l'information valable, valide ou pas, c'est sa position.

Mme Houda-Pepin: Vous-même, au ROMEL, quand vous rencontrez les nouveaux arrivants, là, je sais que vous les accueillez, vous les informez sur le logement, et tout ça, au Québec, qu'est-ce que vous leur demandez comme information? Est-ce que vous référez tout le monde? N'importe qui qui vient chez vous, vous les dirigez vers des propriétaires ou est-ce que vous faites une sorte de sélection, de présélection pour vérifier vous-même c'est quoi, la situation de la personne avant qu'elle s'engage dans un contrat, dans un bail? Et aussi, est-ce que vous essayez de les diriger vers des secteurs où le logement est peut-être plus abordable, il est plus... leurs moyens correspondent justement au quartier dans lequel vous les référez?

M. Houdeib (Mazen): Effectivement. Nous, on ne fait pas... je dirais pas une sélection nécessairement, mais on fait comme une petite conversation avec la personne pour déterminer ses besoins et ses capacités. Et, lorsqu'on réfère quelqu'un à un propriétaire, par exemple pour un quatre et demie, disons, parce que, nous, on a dans nos listes la description de l'appartement et le coût, alors on fait... on réfère quelqu'un qu'on a déterminé qui est capable de payer par rapport à son revenu ou à sa situation pour l'appartement qu'il cherche.

Ce qui fait que, nous, on ne donne pas non plus une garantie au propriétaire là-dessus, personne ne peut donner cette garantie, sauf que, nous, lorsqu'on réfère les gens, on les sensibilise. Parce que les gens, surtout les nouveaux arrivants, ils veulent venir, par exemple, rester près d'un métro, près de je ne sais pas quoi, près du centre-ville, etc.. Alors, on leur explique qu'il y a quand même un système de transport en commun qui est adéquat, etc. On sensibilise les gens. Mais en même temps on regarde leur capacité, leur situation de famille. On ne réfère pas une famille de cinq pour un trois et demie, par exemple, ou un quatre et demie.

Mme Houda-Pepin: Est-ce que, riche de votre expérience, puisque vous traitez avec une clientèle qui est sujette à discrimination, est-ce que vous avez déjà essayé d'organiser des rencontres avec les associations des propriétaires pour travailler avec eux justement sur ces barrières psychologiques qui existent? Comment est-ce que vous pouvez, je ne sais pas, moi, leur faire connaître davantage les gens qui viennent d'ailleurs et leurs habitudes de vie? Parce que finalement il faut connaître son partenaire, un locataire ça devient comme un partenaire. Est-ce que, ce genre de travail, vous y avez déjà réfléchi, vous avez déjà travaillé là-dessus? Et qu'est-ce que ça a donné, si ça a déjà été fait? Et, si ça n'a pas été fait, pourquoi ça n'a pas été fait?

M. Houdeib (Mazen): Auparavant, on l'a fait, mais, encore une fois par manque de ressources, on n'a pas pu maintenir, développer, si vous voulez, un plan d'action avec les propriétaires ou les associations de propriétaires. Mais on était auparavant en contact avec eux. On a découvert rapidement que le problème... Parce que le problème, je dirais, entre guillemets, si vous me le permettez, M. le Président, les mauvais propriétaires, entre guillemets, c'est des mauvais propriétaires, ce n'est pas nécessairement l'association ou tous les propriétaires. Ce qui fait que, lorsqu'on traite avec une association et que, eux, ils ont une perspective, disons, qui est fixée sur l'investissement, etc., c'est correct, on peut arriver à des choses. Mais, sauf que, lorsqu'on est devant un propriétaire que, lui, il ne veut rien savoir, il n'y a pas de recours, ni de l'association apparemment ni rien. Il n'y a pas de recours, parce que, lui, il prend ses propres décisions, parce que c'est... En tout cas, c'est la loi, c'est la démocratie et...

Le Président (M. Vallières): Alors, bien. En terminant, Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président, le temps file vite. Mais cette idée, moi, me semble très intéressante et porteuse d'avenir, parce que, bon, on est là pour vivre ensemble et chacun doit faire sa part. Et je crois que vous avez un rôle à jouer, votre organisme a un rôle à jouer parce que vous avez une expertise. Et je suis persuadée que les associations de propriétaires, ils ont des assemblées publiques avec leurs membres. Ils pourraient trouver dans cette soirée, dans cette rencontre, un moment à vous donner pour que vous puissiez expliquer c'est quoi, la réalité des nouveaux arrivants pour trouver ce point de rencontre. Et je pense que c'est important qu'on puisse bénéficier de votre expertise.

n(16 h 20)n

Deuxième commentaire que je voulais dire, c'est que les nouveaux arrivants, évidemment ils ne passent pas tous par le ROMEL parce qu'ils ne sont pas tous mal pris, parce que les immigrants investisseurs, leur argent achète leur maison avant même qu'ils arrivent, souvent dans des quartiers qui sont assez aisés. Et aussi il y a un phénomène également de mobilité sociale géographique. Lorsque les nouveaux arrivants arrivent, ils s'installent dans des quartiers comme Côte-des-Neiges ou autre, puis, une fois qu'ils ont trouvé du travail, une fois qu'ils ont un revenu stable, etc., là, ils vont aller habiter dans les banlieues et choisir véritablement leur lieu de résidence. C'est le pattern qu'on a connu dans l'ensemble des vagues d'immigration que nous avons eues. Merci beaucoup, M. Houdeib.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Nous vous remercions de votre présentation.

Je demanderais maintenant au groupe suivant, soit l'Association des propriétaires du Québec, de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, la commission continue ses travaux. Je demanderais peut-être à M. le président, je pense que c'est M. Martin Messier, de bien vouloir identifier les gens qui l'accompagnent et présenter son mémoire. Et, si les membres de la commission en convenaient, nous pourrions nous discipliner pour rentrer dans notre questionnement dans les 15 minutes, de part et d'autre de moi. À ma gauche, ça va. Est-ce que, à ma droite, Mme la ministre, ça irait? Mme la ministre?

Mme Harel: Oui, certainement.

Le Président (M. Vallières): Oui. Très bien. Alors, allez-y, M. le président, M. Messier.

Association des propriétaires du Québec (APQ)

M. Messier (Martin): M. le Président, je vous remercie. Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mme la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'habitation, Mmes et MM. les députés, Mme la présidente de la Régie du logement. Je voudrais vous remercier de nous donner l'occasion nous faire entendre aujourd'hui, de vous faire part de nos positions.

Comme Mme la ministre l'a dit à plusieurs reprises, les propriétaires sont inquiets. Nos membres sont préoccupés. D'ailleurs, il s'agit d'une première au Québec, les associations de propriétaires se sont regroupées en front commun.

Document déposé

Et c'est ainsi qu'immédiatement j'aimerais déposer devant les membres de cette assemblée un communiqué qui, émis hier, vient préciser la position de l'Association des propriétaires du Québec, de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, de la Ligue des propriétaires de Montréal, du Regroupement des propriétaires d'habitations locatives de l'Estrie à l'effet de demander le retrait du projet de loi n° 26, tel que libellé, pour faire place à la tenue d'états généraux sur l'habitation qui nous permettront d'entreprendre une réforme globale qui nous permettra d'obtenir un équilibre entre les droits et obligations des propriétaires, qui fasse du système un système qui est intéressant pour chacun, un système où il y a place à investissement et place également aux droits des propriétaires.

C'est avec attention que nous retenons une des interventions, Mme la députée de l'opposition officielle en matière d'habitation, ce matin, qui proposait à un de nos collègues une séance, une rencontre entre propriétaires et locataires. Et c'est ainsi qu'au nom des membres du front commun je tiens à préciser que nous sommes prêts à entreprendre une telle démarche.

J'aimerais maintenant demander, afin de clarifier, de préciser leur position, à M.  Courtemanche, président de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, de venir apporter les précisions suite au communiqué qui a été émis et à leur présence ici hier. M. Courtemanche.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): Simplement afin de réaffirmer, au nom de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, que nous sommes totalement en désaccord avec l'adoption du projet de loi n° 26 tel que stipulé et que le front commun qui a été établi avec toutes les associations de propriétaires au Québec est un front commun unique et vraiment bien cimenté. Nous réaffirmons notre accord et notre appui à toutes les associations qui ont formé le front commun, pour une première fois au Québec. Merci.

M. Messier (Martin): Merci. M. le Président, avec votre permission, je reprendrai la parole pour maintenant vous dire que nous allons tenter de, sans reprendre les points qui vous ont été transmis par nos collègues des autres associations de propriétaires, à... insister sur d'autres aspects. Mais, avant tout, je vais faire quelques précisions.

Alors, d'abord, c'est maintenant qu'avec leur accord je fais miens leurs propos et leur donne mon appui, pour ensuite préciser immédiatement que, lors d'une intervention hier, le RCLALQ a mentionné que, dans le cadre de l'obtention d'une fiche de crédit, le numéro d'assurance sociale était automatiquement divulgué. Alors, j'aimerais, pour des fins de précision, vous citer ici un extrait d'un courriel que j'ai reçu à 12 h 49 aujourd'hui, 21 novembre, de M. Michel Globensky d'Equifax Canada, qui dit ceci: «J'ai relevé dans le Journal des débats des commentaires de Mme Anne Thibault et de M. Denis Cusson relatifs au fait qu'en accédant au dossier de crédit d'un candidat locataire le propriétaire a accès au numéro d'assurance sociale ainsi qu'aux numéros de cartes de crédit de la personne concernée, ce qui est tout à fait faux, et il m'apparaît important que ceci soit précisé lors de vos interventions, si ce n'est déjà fait.

«Leur expérience est basée sur le fait qu'ils ont déjà obtenu d'Equifax une copie de leur propre dossier et il est exact que ces renseignements y paraissent.

«Toutefois, si vous, à titre de membre d'Equifax, ne connaissant pas le numéro d'assurance sociale de votre sujet, nous demandez accès à son dossier de crédit, nous ne vous communiquons ni son numéro d'assurance sociale, ni ses numéros de cartes de crédit, ni l'identité d'une tierce personne si votre sujet a un compte conjoint, ce qui a aussi été allégué par ces intervenants.

«Incidemment, Mme Harel est dans l'erreur lorsqu'elle dit qu'il en coûte 15 $ à un consommateur pour obtenir son dossier de crédit. Il n'y a aucune charge pour ce service» lorsque le consommateur le demande lui-même.

Document déposé

Et je suis un peu novice dans les règles parlementaires, mais j'ai cru comprendre qu'il fallait déposer les documents auxquels on se référait. Alors, j'en ai une copie, mais, avec votre permission, je vais la déposer, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Oui, alors on va m'apporter le document et on pourra le considérer comme déposé...

M. Messier (Martin): Merci.

Le Président (M. Vallières): ...une fois que je l'aurai lu.

M. Messier (Martin): D'abord, Mme la ministre Harel, je tiens à vous remercier de nous entendre aujourd'hui, et nous demeurons convaincus de votre écoute, puisque vous avez démontré dans le passé, notamment dans le cadre de l'adoption, que vous avez présidée, du projet de loi n° 186 qui visait notamment le prélèvement d'une certaine portion des prestations d'aide sociale en cas de non-paiement de loyer... Et c'est donc armé de ces espoirs que je vous demanderais de rassurer les propriétaires.

À plusieurs reprises, Mme la ministre, vous nous avez dit que nos inquiétudes étaient injustifiées, que nous avons en quelque sorte mis le feu aux poudres. Et je dois vous avouer que je partage certaines des craintes exprimées par nos membres, notamment quant au fait... On parlait un peu plus tôt ce matin du bâillon. Peut-être que l'expérience du passé, en nous rappelant d'un mois de décembre 1995 où le bail officiel fut adopté sans plus amples consultations, sous le bâillon, les propriétaires se sont vus inquiets lors du dépôt au mois de juin dernier de votre projet de loi.

n(16 h 30)n

Et j'aimerais, Mme la ministre, souligner à cet égard que certaines des inquiétudes des propriétaires sont certainement dues, à notre point de vue et au point de vue des conseillers juridiques retenus, à une divergence entre les discours tenus et la rédaction du projet de loi n° 26.

Et j'aimerais, si vous le permettez ? encore une fois, je ne sais pas si c'est permis, mais faute d'avis contraire, je me le permettrai... J'ai eu accès aux versions préliminaires des débats d'hier, alors que Mme la ministre Harel répondait à une question, si je ne m'abuse, de M. Cusson, du RCLALQ. Donc, Mme Harel, en traitant de la page 7 du mémoire du RCLALQ ? vous me permettrez de vous citer tout en notant que je ne saurais reproduire toute l'expertise de votre langage: «Tout ce qu'Equifax peut donner comme information, bien, c'est contre ça [...] c'est ces abus-là qu'on vient encadrer en ne permettant plus que ces informations-là soient transmises. En d'autres termes, à partir du moment où il y a une loi qui dit: "Les renseignements nécessaires sont les suivants", si on met la date de naissance, la date de naissance ne permettra plus de donner le numéro d'assurance sociale, ne permettra plus de donner finalement toutes ces autres informations.»

Et, un peu plus loin, M. Cusson dit encore: «Non, mais ça fait partie du dossier de crédit. Quand je fais venir mon dossier de crédit, mon numéro d'assurance sociale apparaît. On a mon solde au compte.» Et Mme Harel de répondre: «Parce que, présentement, ce n'est pas interdit?»

Et c'est une des raisons pour lesquelles les propriétaires sont inquiets, et je saurais gré à la ministre Harel, plus tard, à la fin de mon allocution si cela lui est possible, de préciser que des amendements seront apportés et que la position soit éclaircie afin que ces inquiétudes puissent quitter l'esprit de nos propriétaires qui regagneront, par voie de conséquence, une confiance accrue dans le marché locatif. Je vais déposer le document imprimé ? sur Internet, j'imagine.

Et, sans plus tarder, je vais vous présenter maintenant les membres de mon comité. Je m'excuse, M. le Président, je me suis fait un peu attendre, dans l'empressement, j'imagine, de vous transmettre mes propos.

Alors, M. le Président, à ma droite, M. Benoît Lemieux, propriétaire, membre de l'Association des propriétaires; à ma gauche, à mon extrême gauche, sans besoin de présentation, M. Courtemanche, de la CORPIQ; le suit immédiatement M. Robert Soucy, avocat; à ma gauche immédiate, M. Berthold Lévesque, directeur de l'Association.

J'aimerais transmettre immédiatement la parole à M. Benoît Lemieux. M. Lemieux est un propriétaire, membre de notre Association depuis déjà plusieurs années. Il a une entreprise familiale. Son père a construit lui-même les premiers logements, et maintenant on peut dire qu'il a réussi, puisqu'ils détiennent 1 800 logements dans la région de Montréal et 1 200 aux États-Unis, une entreprise bien de chez nous à laquelle je vais demander d'apporter des commentaires sur le projet de loi n° 26, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Peut-être avant de continuer, M. Messier, vous indiquer que ce que vous m'avez présenté pour dépôt de document, je ne pense pas que ce soit nécessaire, compte tenu que c'est le transcript intégral de nos débats.

M. Messier (Martin): Tout à fait.

Le Président (M. Vallières): On peut tous y référer. Ça va?

M. Messier (Martin): Très bien. Merci.

Le Président (M. Vallières): Alors, on continue avec monsieur...

M. Messier (Martin): ...Lemieux.

Le Président (M. Vallières): M. Lemieux, allez-y.

M. Lemieux (Benoît): Bonjour, M. le Président. Bon, je dois d'abord remercier Me Messier et son groupe de tous les efforts qu'ils font pour essayer d'expliquer le pourquoi que le projet de loi n° 26 ne serait pas favorable au développement des immeubles à location pour le Québec. Moi et ma famille, le Groupe LSR, on est une entreprise qui font de la gestion d'immeubles. Puis, comme tout entrepreneur, on a des responsabilités. Que ce soit du niveau bancaire, du niveau gouvernemental, on doit respecter des engagements à titre d'entreprise. Ça fait que, pour nous, faire de la gestion d'immeubles, c'est essentiel d'avoir les informations nécessaires pour s'assurer de faire les paiements de nos comptes qu'on a. Ça fait que la loi n° 26 consisterait en un grave problème pour nous pour faire le développement de futurs projets.

Au cours des 15 dernières années, en tant qu'entreprise, nous n'avons pas investi dans la construction d'immeubles à logements pour des raisons que la rentabilité pour nos investisseurs n'était pas suffisante. On a préféré plutôt faire des projets de condominiums ou des «townhouses» ou des projets de développement de maisons, parce que c'était ? excusez-moi l'expression, là ? mais c'était un «in and out»: on rentrait en faisant l'investissement, puis, au bout de deux ans, l'investissement était retiré.

Ça fait que, pour ces raisons-là, présentement, les loyers dans la région de Montréal varient entre 500 $ et 600 $, dépendamment des quartiers, et peuvent aller jusqu'à 1 000 $. Mais, lorsqu'on essaie de faire de la nouvelle construction, c'est extrêmement difficile, avec les coûts, puis tout ça, d'être rentable. Ça fait que c'est pour cette raison que, présentement, on s'en va vers un genre de pénurie de logements avec des taux de vacance jamais vus. Il y a eu le rapport de la SCHL, qui est sorti la semaine passée, qui disait qu'il y avait 1,4 % de vacance dans la région de Montréal. Puis, dans toutes les autres régions du Québec, je l'ai vu, j'ai lu le rapport, c'est quand même extrêmement bas.

Puis une des conséquences d'empêcher les propriétaires comme nous de ne pas faire la vérification des locataires, ça va être très néfaste pour le système, parce que, lorsqu'on fait des prêts hypothécaires, une des premières questions que les banques nous demandent, c'est d'avoir les copies des baux. Ils veulent avoir la vérification des baux pour vérifier si on a la capacité de payer nos engagements bancaires.

Un autre problème aussi, des fois, qu'on a quand on parle avec la Régie du logement, on a des fois des problèmes, lorsqu'on fait l'exécution de ces 35 000 personnes là non payeuses, souvent, des fois, les délais sont tellement longs que ça cause des problèmes aux propriétaires, parce que, durant les deux, trois mois que les gens restent là sans payer, ils peuvent créer une certaine bisbille dans les logements, puis ça occasionne qu'il y a d'autres locataires qui sont très solvables et très bons qui nous quittent.

Puis, en terminant, je voulais vous parler que, comme Martin l'a mentionné, Me Messier, on est propriétaires aussi de logements aux États-Unis, on est propriétaires de 1 200 logements, puis on fait la gestion. Puis, depuis les événements du 11 septembre, pour des raisons de sécurité, le FBI nous a exigé de prendre et avoir contrôle de tous nos locataires, pour des raisons de sécurité. Ça a été une demande de l'Association des propriétaires de Houston, qui nous a demandé de faire des enquêtes, puis, si on avait des doutes de certaines personnes, de les rapporter au FBI pour qu'il puisse faire une étude plus complète. Ça fait que je vous remercie beaucoup, M. le Président, c'étaient mes commentaires.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Lemieux.

M. Messier (Martin): Merci, M. Lemieux. Je cède maintenant la parole à Me Robert Soucy. Me Robert Soucy jouit d'une expertise inédite dans le monde du logement locatif à titre d'avocat et il a déjà été régisseur auprès de la Régie du logement. Il est professeur chargé de cours au Barreau de Montréal. Il a enseigné la réforme du Code civil au Barreau de Montréal. Il est spécialiste en droit locatif depuis 21 ans et il représente à ce titre les propriétaires immobiliers. Me Soucy.

Le Président (M. Vallières): Alors, Me Soucy, là, il vous resterait environ deux minutes pour votre présentation.

M. Soucy (Robert): Ha, ha, ha!

Le Président (M. Vallières): On est déjà rendu à 20 minutes, là. Me Soucy.

M. Soucy (Robert): Je vais essayer d'être bref, le plus brièvement possible pour faire quelques remarques d'ordre juridique exclusivement. Tout d'abord, l'article 20 qui veut modifier l'article 1883. On veut changer les mots «avant jugement», les remplacer par les mots «avant que le jugement qui accorde la résiliation du bail ne devienne exécutoire». Cette situation-là vise un locataire qui est en défaut de paiement qui a eu une décision contre lui, et on lui permet de payer avant que la décision lui soit dévoilée. Ça, c'est la situation actuelle. On peut prétendre sans risque de se tromper que ça prend à peu près 65 jours avant que la décision vienne à être rendue par la Régie du logement.

n(16 h 40)n

En modifiant les mots «avant jugement», ça veut dire que, maintenant, le locataire, postérieurement, après que la décision ait été rendue par la Régie du logement, pourra payer la décision ? capital, intérêts et frais ? et annuler la décision rendue par la Régie du logement. Et les mots «avant que la décision [...] ne devienne exécutoire» vont ajouter encore des délais au niveau de l'expulsion d'un locataire fautif parce que, là, on est en présence d'un locataire qui n'a pas satisfait ses obligations. Et on ajoute un délai, s'il n'y a pas d'exécution exécutoire nonobstant l'appel, ça veut dire qu'il peut y avoir un délai encore supplémentaire de 30 jours, donc on peut prévoir 90 jours avant que ce locataire-là soit exclu de son logement.

Et ce qui est difficile à comprendre, c'est que, postérieurement à ce que la décision de la Régie du logement soit notifiée aux parties, ça veut dire que, après avoir eu une audition pleine et entière, il y a une décision qui est rendue et, malgré ça, il peut payer et annuler la décision. C'est la première fois que je vois une disposition semblable, qu'on peut annuler une décision rendue par un tribunal. Avant c'était avant que le jugement soit rendu; maintenant, c'est après. C'est un peu, à mon avis, incongru. C'est tout à fait nouveau dans les annales judiciaires qu'on puisse annuler une décision rendue par un tribunal, qui est la Régie du logement, simplement par le paiement.

Autre chose, c'est l'article 1893.2: «Le locateur ne peut exiger d'un candidat locataire le versement d'une somme d'argent, à quelque titre que ce soit.» Et je voudrais attirer votre attention sur l'article 1904 du Code civil qui permet au propriétaire de demander d'avance le paiement du premier mois du loyer. Tel que rédigé, M. le Président, le texte de loi peut vouloir dire qu'on n'aura plus le droit de demander le premier versement du loyer d'avance parce que l'article 1893 dit: «à quelque titre que ce soit». Il n'y a pas d'exception et ça peut vouloir dire qu'on n'aura plus le droit de demander le loyer, le premier loyer d'avance.

Troisièmement, on parle, à l'article 1947.1, de la réduction des taxes ou des coûts de l'énergie. Je comprends, dans un souci d'équité, que si, un moment donné, un propriétaire a bénéficié d'une hausse des taxes ou des coûts d'énergie, que ces coûts-là sont ventilés directement au locataire, je comprends qu'on puisse vouloir rétablir les faits en disant: O.K., s'il y a une diminution, on va diminuer les loyers en conséquence. Toutefois, on ne précise pas, dans le projet de loi, si le locateur, le propriétaire a déjà bénéficié de l'augmentation de la taxe ou des coûts d'énergie. Et là je m'explique. Il y a beaucoup de propriétaires immobiliers, des personnes âgées ou toutes sortes de personnes qui font des ententes à l'amiable et qui n'augmentent pas leur loyer. On peut voir des gens un moment donné qui n'ont pas demandé d'augmentation de loyer une année où ils auraient eu le droit d'avoir une augmentation de loyer. Et, subséquemment, il y a une baisse de taxes, et les locataires peuvent aller en baisse de taxes, alors que le loyer... on n'a jamais considéré les augmentations de loyer dedans. Ça pourrait nous apparaître comme très injuste pour les propriétaires.

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, M. Soucy, je suis conscient que vous n'avez pas complètement terminé, mais les parlementaires pourront peut-être, dans la foulée de ce que vous venez d'expliquer, vous questionner pour des précisions additionnelles. Alors, la parole est à Mme la ministre maintenant.

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Bienvenue, MM. Messier, Lemieux, Lévesque, Courtemanche, Soucy. Il doit bien y avoir parfois quelques femmes dans les rangs des propriétaires immobiliers.

Alors, je vais vous dire que j'ai un peu de difficultés à vous suivre. Par exemple, prenons le cas, là, de ce que vous venez d'affirmer, à savoir que, dorénavant, vous ne pourriez plus réclamer le loyer du premier mois. Ce qu'on m'indique ici, à la Régie du logement, en fait, les experts, là, de la Régie, c'est qu'on n'a pas, d'aucune façon, touché à cela avec le projet de loi n° 26 et qu'il n'y a rien de différent de ce qui se faisait auparavant qui ne peut plus se faire dorénavant et que c'est finalement la même chose qui se continue. Alors là je vois que, pour vous, là, c'est un bouleversement, et on ne peut pas s'expliquer comment tout à coup il vous apparaît que ce bouleversement arrive alors qu'aucune modification dans la rédaction n'est introduite.

De la même façon, vous demandez à la fois des amendements puis, en même temps, vous demandez de retirer le projet de loi.

De la même façon, vous nous dites maintenant être prêts pour une consultation avec les locataires. Et j'ai ici la lettre que la firme d'avocats Joli-Coeur, Lacasse, Lemieux, Simard, St-Pierre faisait parvenir, le 3 février 1999, à la Régie du logement pour leur demander de mettre fin à ces consultations, à la procédure de consultation menée conjointement par la Régie et la Commission d'accès dans l'intention de préparer un communiqué conjoint qui servirait à informer des locataires et locateurs sur les renseignements qui seraient nécessaires à la conclusion d'un bail.

En d'autres termes, lorsque nous avons pensé procéder sans législation, à ce moment-là, à la fois la Régie du logement et la Commission d'accès à l'information ont joint leurs travaux pour tenir des consultations auprès des locataires et des propriétaires et ont donc annoncé leur intention de tenir de telles consultations, ont écrit aux différents organismes que l'on entend durant la présente commission parlementaire et leur ont dit qu'il était de leur intention de les consulter sur cette question délicate des renseignements permis dans le cadre de la conclusion d'un bail.

Alors, la réponse à cela, c'est une mise en demeure refusant de participer à de telles consultations et, plus encore, une mise en demeure invoquant que de telles consultations ne pouvaient pas avoir lieu. Alors, la prétention, si vous voulez, des parties est la suivante: «Vous ne détenez pas la juridiction pour tenir de telles consultations et [...] toute tentative de formuler les paramètres de la prise de renseignements entre un locateur et un locataire [...] pourrait être contestée comme étant non avenue.»

Alors, est-ce que je dois comprendre que vous avez maintenant changé d'opinion, puisque vous nous demandiez des consultations à l'ouverture de votre présentation? Alors, après avoir mis en demeure la régie d'accès à l'information et la Régie du logement de cesser les consultations dans lesquelles ils s'étaient engagés, dois-je comprendre que vous êtes prêts maintenant à les reprendre?

M. Messier (Martin): Mme la ministre.

Le Président (M. Vallières): M. Messier.

M. Messier (Martin): Merci, M. le Président.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, auparavant, je voudrais demander à la ministre le dépôt du document auquel elle a référé.

Le Président (M. Vallières): Mme la ministre.

Mme Harel: Avec certainement la permission des organismes ici présents. Je pense que c'est la CORPIQ qui avait fait transmettre cette mise en demeure avec copie conforme au ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, à la présidente de la Régie du logement, au président de la Commission d'accès à l'information et à moi-même, ministre des Affaires municipales.

Le Président (M. Vallières): Bon, alors, la CORPIQ est d'accord. Oui, très bien.

Mme Houda-Pepin: Vous me permettrez, M. le Président, juste une nuance à apporter aux propos de la ministre, parce que...

Le Président (M. Vallières): Oui, oui, 30 secondes, 30 secondes, s'il vous plaît.

Mme Houda-Pepin: 30 secondes. Ce que nous avons demandé comme rapprochement...

Le Président (M. Vallières): Non, non, 30 secondes. C'est moi qui vous demande la parole, là.

Mme Houda-Pepin: Ah! Trente secondes. Excusez. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Vallières): Non, mais, c'est parce que je dois d'abord accepter le dépôt du document.

Mme Houda-Pepin: J'ai pensé que vous m'aviez donné 30 secondes. Ha, ha, ha!

Document déposé

Le Président (M. Vallières): Non, non, non. Le document est considéré comme étant déposé. Mais je me permettrai de vous proposer qu'on puisse terminer avec les interventions de Mme la ministre, compte tenu qu'on est serré dans le temps, quitte, tantôt, Mme la députée, à ce qu'on allonge si nécessaire pour des échanges entre la ministre et vous. Autrement, on ne s'en sortira pas dans le temps.

Mme Houda-Pepin: O.K. Mais vous permettez, M. le Président, très rapidement juste de préciser que la demande que nous avons faite de concertation, c'est au sujet de l'article 21 du projet de loi n° 26.

Le Président (M. Vallières): O.K. précision faite. Mme la ministre.

Mme Harel: Ça portait justement là-dessus, parce que, suite à cela et suite à des questions en Chambre de Mme la députée de La Pinière, à la question sur ce que nous allions faire, au printemps dernier, dans le contexte des difficultés et des abus que les médias révélaient sur la quête de logements de familles, particulièrement dans les quartiers montréalais, alors, avec aussi le consentement de la Commission d'accès à l'information qui a clairement indiqué, hier matin, qu'une modification législative s'imposait et avec évidemment la collaboration de la Commission des droits qui a aussi fait valoir qu'une modification législative s'imposait, alors, à défaut de pouvoir mener cette consultation sur la collecte des renseignements personnels que l'on trouve notamment à l'article 21, nous avons conclu à la nécessité d'une modification législative.

n(16 h 50)n

Et je crois qu'elle s'impose encore plus. S'il y avait eu nécessité de m'en convaincre, c'est les travaux de la présente commission qui m'en auraient convaincue, parce que, avec les positions mais irréductiblement opposées des locataires et des propriétaires, c'est une pensée magique de s'imaginer qu'en les assoyant face à face on va réussir à obtenir ce que le législateur doit faire, c'est-à-dire arbitrer au-dessus des parties le bien commun, chacun faisant valoir ses intérêts particuliers. Heureusement que la démocratie consiste aussi, à certains moments, à élire des gens pour qu'ils prennent les décisions en vertu du bien commun, au-dessus des parties et au-dessus des conflits d'intérêts des uns et des autres. Alors...

Et puis j'ai aussi beaucoup de difficultés à vous suivre sur le fait que vous déposez ? et je vous en remercie ? vous déposez un courriel d'Equifax, je crois ? c'est bien ça? ? dans lequel Equifax dit que: Lorsqu'un tiers veut avoir accès à un dossier de crédit, nous ne communiquons ni le numéro d'assurance sociale, ni les numéros de cartes de crédit, ni l'identité d'une tierce personne si cette personne a un compte conjoint, d'une part. Puis, d'autre part, l'un de vous ? je crois que c'est, je pense, M. Lemieux ? qui tantôt avait réclamé ? je ne sais lequel, peut-être un autre, vous me le direz, mais il y en a un de vous, là ? qui a réclamé d'avoir accès au numéro d'assurance sociale. En même temps, M. Messier, vous nous dites: Pas de problème, regardez, Equifax, je vous dépose le courriel d'Equifax, jamais ils ne transmettent le numéro d'assurance sociale, ni les numéros de cartes de crédit, ni l'identité d'une tierce personne qui a un compte conjoint lorsqu'on fait une demande à partir de la date de naissance, et, d'autre part, un des membres de votre délégation nous dit le contraire.

Également, tantôt, j'ai eu de la difficulté à comprendre le «in and out» dont vous parliez. Peut-être juste me préciser, M. Lemieux, le «in and out», c'est à propos des condos? Vous voulez dire qu'en deux ans le «in and out», c'est... Qu'est-ce que ça signifie, là, quand vous aviez parlé...

M. Lemieux (Benoît): Côté investissements, si vous permettez, M. le Président, c'est que, lorsqu'on a des investisseurs puis on dit aux investisseurs: On va investir dans un projet donné, l'attitude présentement des investisseurs, pour les investissements, ils préfèrent, dans le domaine de l'immobilier, ils préfèrent faire un investissement à court terme plutôt qu'à long terme. Lorsqu'on bâtit des logements, c'est un investissement qui est plus à long terme. Ça fait que, présentement, les investisseurs préfèrent des investissements à court terme, ça fait qu'il y a un investissement puis, deux ans plus tard, on a vendu, c'est fini.

Mme Harel: Donc, on est rentré dans son argent. Ce que vous me disiez, c'est: Les condos, ça prend deux ans, puis le logement locatif, c'est plus long. C'est ça que je comprends?

M. Lemieux (Benoît): Exactement. Puis le risque est plus grand.

Mme Harel: Bon. Tantôt, je reviendrai, parce que je ne pense pas que vous y étiez ? ce n'est pas un reproche, là, on a des fois d'autre chose à faire dans la vie, je vous comprends aussi, là ? mais j'ai cité une étude qui va être rendue publique avant Noël qui a été réalisée par l'INRS-Urbanisation, là, qui est une équipe scientifique très, très reconnue. Et puis c'est vraiment majeur, c'est une étude en profondeur. Ça a été financé par la Société d'habitation du Québec, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Régie du logement, la Régie du bâtiment du Québec, et qui démontre que le revenu annuel moyen par logement locatif, c'est 4 926, sur l'ensemble du territoire, mais que, plus les immeubles ont une taille imposante ? c'est-à-dire 50 logements et plus ? le revenu annuel est de plus de 7 900.

Alors, dans le fond, il y a une certaine rentabilité. On ne peut pas dire que c'est lucratif... que n'est pas lucratif, plutôt. Je pense qu'on peut dire que c'est lucratif, mais peut-être que ce n'est pas spéculatif. Et le contexte mondial, c'est qu'on s'est habitué à des investissements très, très spéculatifs, mais très à risque aussi, hein! Tous ceux qui détenaient du Nortel s'en sont rendu compte, qu'il y avait des risques à prendre aussi. Bon. Je voudrais également vous dire combien je suis surprise des chiffres que vous nous avez donnés...

M. Messier (Martin): Me permettez-vous, M. le Président...

Mme Harel: Je pense que... Attendez juste une seconde, je termine là-dessus.

Le Président (M. Vallières): Très bien.

Mme Harel: C'est votre voisin, non, ou peut-être vous-même qui nous avez donné des chiffres qui nous étonnent beaucoup, à la Régie du logement, comme si un locataire qui ne paie pas peut rester deux, trois semaines dans son logement, alors que la loi prévoit qu'il peut y avoir demande de recouvrement et de résiliation après trois semaines, pas trois mois.

Ensuite, vous nous avez laissé entendre que ça prend 65 jours à partir du moment où la demande a été faite. Les délais actuels sont de 46 jours. C'est la moyenne des délais, là, c'est nos dernières statistiques. Alors donc, ce n'est pas deux, trois mois à importuner tous ses voisins, c'est trois semaines au plus, après quoi le non-paiement peut entraîner une demande de recouvrement et de résiliation. Et puis, en plus, c'est 46 jours, la moyenne.

Alors, il nous semble que, d'une certaine façon, dans la situation actuelle, à la fois sur la rentabilité, à la fois sur le fonctionnement, vous vous convainquez les uns les autres que le pire arrive dans votre industrie, celle de la location de logements, alors que, à dire vrai, tous les chiffres, moi, que j'ai sont à l'effet que les propriétaires...

Mais je peux vous comprendre, vous êtes des porte-parole. Vous avez des membres; vos membres ne représentent qu'une infime partie de l'ensemble des propriétaires au Québec. Il y a 1 200 000 logements et, au total, j'imagine que vous représentez peut-être 15 000 membres au maximum. Alors, vous êtes peut-être représentatifs de vos membres, mais, compte tenu des études en profondeur qui ont été faites, je dois vous dire que la majorité des propriétaires trouvent que ça va plutôt bien et que ça va de mieux en mieux.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, si on veut laisser le temps à M. Messier de...

M. Messier (Martin): Je vous remercie, M. le Président. C'était d'ailleurs mon inquiétude et la raison de mon intervention un peu plus tôt. Je vais tenter de répondre à toutes les questions malgré le fait que je n'ai pas l'habileté d'un parlementaire et que l'ordre et la séquence pourraient faire défaut.

D'abord, Mme la ministre, il est exact de dire que j'aurais dû préciser que les amendements ? on vous demande de préciser ? le sont de façon subsidiaire et de réitérer le fait que notre position au projet de loi n° 26 s'inscrit dans le cadre de sa rédaction, de son libellé actuel et que, de façon subsidiaire, si vous décidez néanmoins d'adopter le projet de loi n° 26, nous vous demandons, nous vous demanderons et vous soumettrons d'ailleurs demain des amendements. Et nous vous demandons, s'il est possible de le faire cet après-midi, de confirmer que vous avez l'intention de procéder à des amendements pour éluder cette crainte injustifiée, semble-t-il, des propriétaires.

Deuxièmement, quant aux consultations dont faisait état ce matin la députée de La Pinière, écoutez, sans parler pour la CORPIQ qui avait mandaté le procureur que vous avez cité, ce que je crois me souvenir, c'est que ce n'était pas tant la discussion qui était exclue, mais le forum et la façon de procéder. Et il est vrai de dire qu'aujourd'hui les circonstances sont différentes. L'évolution, comme vous l'avez dit, est une chose qui doit être constatée. Et ce n'est pas la même chose que de demander des consultations dans le cadre d'une convocation, avec respect pour la Régie du logement et la Commission d'accès à l'information, dans le cadre de ces deux commissions-là et de le faire dans le cadre d'une commission parlementaire.

Ceci étant dit, je crois que je reflète l'opinion de tous les propriétaires, et nous croyons être représentatifs, Mme la ministre, des propriétaires québécois, du fait que les propriétaires sont disposés à s'asseoir avec les locataires.

Enfin, j'aimerais préciser, puisque vous faites état du numéro d'assurance sociale, qu'à ma connaissance des membres d'un autre panel ont précisé qu'il était, dans certaines situations telles que l'a précisé Me Doray dans ma section commune de ses recommandations, dans certaines situations, important, afin de distinguer des gens qui portaient les mêmes prénoms et qui curieusement ont la même date de naissance, afin d'identifier ces gens-là dans les circonstances précises, de disposer du numéro d'assurance sociale.

Maintenant, ce qu'Equifax nous dit, Equifax nous dit, et je pourrais vous le dire d'ailleurs de ma propre expérience, si je connais le numéro d'assurance sociale et que je le tape à l'informatique, Equifax me retournera la validation du numéro d'assurance sociale et le numéro d'assurance sociale sur la fiche. Par contre, si je ne le connais pas et que je n'inscris que la date de naissance, Equifax ne me retournera pas le numéro d'assurance sociale, et c'est là la distinction, Mme la ministre.

Quant au délai et au dépôt de loyer, avec la permission du président, je demanderais à Me Robert Soucy d'apporter des précisions à ces deux questions.

Le Président (M. Vallières): Là, on a épuisé le temps. Voilà.

Une voix: ...

Le Président (M. Vallières): Alors, on vous permet de répondre quand même en étant... en l'encadrant le plus rapidement possible.

Mme Harel: Je suis certaine que Mme la députée va permettre à Me Soucy...

n(17 heures)n

Le Président (M. Vallières): Oui. Mme la députée de La Pinière le permet. Très bien.

Mme Houda-Pepin: Moi, M. le Président, je suis ici pour écouter les groupes qu'on a invités. C'est le minimum de respect qu'on leur doit.

Le Président (M. Vallières): Bien, alors on vous écoute.

Mme Houda-Pepin: Ceci étant dit...

Le Président (M. Vallières): Mme la députée, c'est parce que je voudrais que monsieur réponde...

Mme Houda-Pepin: Ah! O.K.

Le Président (M. Vallières): ...continue sa réponse, et je reviens immédiatement à vous par la suite.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Soucy (Robert): O.K. Merci, M. le Président. Écoutez, peut-être que je me suis fais mal comprendre, Mme la ministre. C'est que, lors des délais pour les non-paiements de loyer, les trois premières semaines... On a un délai d'attente avant de faire une demande. Ça prend trois semaines avant de faire une demande. Donc, si on attend trois semaines, on est déjà rendu le 22 du mois, Mme la ministre. Et ensuite, un coup qu'on a fait notre demande, il faut attendre la mise au rôle. Attendre et la mise au rôle, ça prend quatre à cinq semaines avant d'avoir une date d'audience. Donc, si on a trois semaines, et que ça prend quatre à cinq semaines avant d'avoir une mise au rôle, et ensuite on a une audience après quatre et cinq semaines, et ensuite ça prend une semaine, deux semaines avant d'avoir la décision par la poste, nous sommes rendus environ à deux mois, deux mois et demi avant d'avoir la décision.

Ce que j'ai dit, c'est que maintenant, c'est qu'avant que la décision soit exécutoire, on donne un délai de 30 jours de plus. Donc, c'est ça, là, il faut voir le sens des délais.

Le Président (M. Vallières): Bien. Merci, Me Soucy de cette précision. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup. M. le Président, on a entendu parler d'Equifax à quelques reprises. Est-ce que la ministre accepterait qu'on puisse entendre Equifax et M. Globensky? C'était un groupe qu'on avait mentionné sur notre liste d'organismes qu'on aurait aimé entendre. Est-ce qu'elle accepterait qu'on puisse l'entendre?

Mme Harel: M. le Président, je pense que cette question est déjà réglée par une motion adoptée à l'Assemblée nationale et convenue entre nos leaders. Alors donc, les leaders des deux formations politiques respectives ont convenu...

Le Président (M. Vallières): Bon. Très bien...

Mme Harel: ...d'un calendrier qui, comme vous le savez...

Le Président (M. Vallières): ...ça va.

Mme Harel: ...est très occupé...

Le Président (M. Vallières): Bien, merci, merci...

Mme Harel: ...dans les fins de session.

Le Président (M. Vallières): ...la réponse est donnée. Mme la députée de La Pinière, allez-y.

Mme Houda-Pepin: Très bien. M. le Président, je comprends que la ministre, avec son leader, ont supprimé un certain nombre d'organismes dont celui-là. Ça nous aurait éclairés, mais, ceci étant dit, M. le Président, je voudrais quand même revenir sur les commentaires...

Mme Harel: La motion a-t-elle été adoptée à l'unanimité? La motion a été adoptée à l'unanimité. M. le Président, question de règlement. Je n'accepte pas que Mme la députée de La Pinière...

Le Président (M. Vallières): Un instant.

Mme Houda-Pepin: Il n'y a pas de règlement là-dedans, M. le Président.

Mme Harel: Oui, question de règlement. Je n'accepte pas qu'elle ait dit...

Le Président (M. Vallières): Oui. Un instant, s'il vous plaît!

Mme Houda-Pepin: Non, lequel? Quel article? Quel article?

Le Président (M. Vallières): S'il vous plaît!

Mme Harel: Bien, c'est comme ce matin, là, son règlement vaut le mien. Alors, je n'accepte pas qu'elle prétende que le leader et moi aurions ? comment avez-vous dit? ? aurions éliminé...

Mme Houda-Pepin: Bien oui, on a...

Mme Harel: Non, nos leaders ont convenu de part et d'autre. Alors, si nous en avons éliminé, vous en avez éliminé aussi.

Le Président (M. Vallières): Bon, s'il vous plaît! Oui. Alors, pour nous, c'est clair, là, on fonctionne avec ce dont les leaders ont convenu. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Bon, M. le Président, je vais aller très vite là-dessus. Nous avons soumis, parce que nous avons demandé cette consultation, une liste d'organismes qui était plus exhaustive et on a demandé une date pour la consultation. On nous est revenu avec une date qui était amoindrie et une date pour la consultation. On a dit: Ce qui était important pour nous, c'est d'avoir la consultation. Alors, c'est ça. On n'a pas tellement le choix. C'est ça, ce que la ministre appelle négociation.

Ceci étant, je voudrais, M. le Président... Jusqu'à maintenant, j'ai écouté puis j'ai laissé la ministre aller. Mais, à chaque fois qu'il y a un groupe qui se présente et qui dit des choses qu'elle n'aime pas entendre, qu'elle ne veut pas entendre, elle s'applique à discréditer les gens de manière très subtile. Tantôt, elle a parlé de prétendus problèmes, que les gens viennent inventer quasiment des problèmes devant cette commission.

Deuxièmement, là, tantôt, elle vient de parler de la représentation des groupes qui sont devant nous, qui ne sont pas représentatifs de l'ensemble des propriétaires ? on comprend ça, le tissu associatif est organisé comme ça. Le milieu communautaire, la même chose. On n'a pas remis en question, par exemple, le regroupement des locataires qui est venu devant nous, alors qu'il y a un groupe qui est venu tantôt parler aussi au nom des locataires et qui tenait un discours qui est différent.

Si on pousse cette logique loin, on pourrait dire: Le gouvernement gouverne sans majorité, donc la représentativité, elle est discutable à ce point de vue.

Ceci étant dit, M. le Président, moi, je voudrais quand même remercier M. Mercier et le groupe de l'Association des propriétaires du Québec pour être revenus pour nous dire: On est prêt à nous engager finalement dans une démarche de discussion avec les représentants des locataires pour trouver un libellé qui soit relativement acceptable pour les uns, pour les autres. Pourquoi j'ai fait cette proposition? Parce que, moi, je suis convaincue, de la façon dont le débat est amorcé sur ce projet de loi, c'est qu'il y a deux positions qui sont diamétralement campées, opposées, puis on va sortir sur des voies parallèles.

Je vous ai demandé s'il était possible pour vous, et je le demanderai aussi au groupe des représentants des locataires, que l'on puisse s'asseoir et trouver une façon de formuler l'article 21 du projet de loi, autour duquel il y a tout ce débat-là. Vous me revenez, en disant: Oui, vous vous êtes concertés, puis qu'effectivement vous êtes prêts à vous engager dans cette démarche. Je trouve que la ministre doit saisir cette occasion-là, et féliciter les groupes, et les inciter justement au dialogue. Elle aurait... elle devrait... Je l'invite d'ailleurs à faire partie, parce qu'elle a la décision entre ses mains, pour encourager les gens à s'engager dans cette démarche-là, M. le Président. Une main seule n'applaudit pas. Alors, qu'est-ce qu'elle veut? Est-ce qu'elle veut qu'on sorte avec un projet de loi sur lequel il n'y a pas de consensus du tout ou est-ce qu'elle essaie de trouver un moyen pour qu'on puisse représenter l'équité dont elle a parlé elle-même dans le projet de loi qui est devant nous?

Ceci étant dit, M. le Président, M. Lemieux, vous êtes, je pense... vous représentez... vous êtes vous-même propriétaire et une entreprise, vous avez dit, de gestion d'immeubles, et vous avez dit quelque chose qui est nouveau pour moi, vous avez dit que, lorsque vous vous engagez dans des prêts hypothécaires, les banques vous demandent des copies des baux. Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi et en quoi est-ce que cette information est capitale pour vous?

M. Lemieux (Benoît): Certaines banques, lorsqu'on demande des nouveaux prêts, vont nous demander quel genre de... ils veulent vérifier... Lorsqu'on dit à une banque qu'on a 92, ou 94, ou 95 % d'occupation, la banque se donne le droit de vérifier pour voir si on a un baux...

Mme Houda-Pepin: Un bail.

M. Lemieux (Benoît): ...si on a un bail de chacun de ces locataires-là, pour s'assurer que c'est vrai qu'on a un taux d'occupation, là, tel que mentionné.

Mme Houda-Pepin: O.K., d'accord. Mais...

M. Lemieux (Benoît): C'est cette vérification-là qu'elle nous demande. À ce que je sache, on leur donne la possibilité. Je ne peux pas affirmer ou déconfirmer que la banque vérifie...

Mme Houda-Pepin: L'information.

M. Lemieux (Benoît): ...l'information, mais elle vérifie que, mettons, l'appartement 104, le nom de, mettons, M. Tremblay, ou Smith, ou peu importe...

Mme Houda-Pepin: O.K. Vous avez dit aussi que vous avez des logements, vous gérez des logements, vous possédez des logements aux États-Unis?

M. Lemieux (Benoît): Oui.

Mme Houda-Pepin: Vous gérez ou vous possédez? Ou les deux?

M. Lemieux (Benoît): Les deux.

Mme Houda-Pepin: Les deux. Alors, connaissant le contexte et l'environnement réglementaire, fiscal et législatif aux États-Unis, vous naviguez entre deux mondes législatifs, celui du Québec et celui des États-Unis. Pourriez-vous nous dire quelles sont, selon vous, les barrières ou les difficultés supplémentaires que vous rencontrez au début? Vous êtes le même propriétaire, vous gérez vos biens ici, vos biens immobiliers, vous en gérez aux États-Unis, est-ce que votre vie de gestionnaire et de propriétaire est plus facile aux États-Unis qu'ici, et en quoi est-ce qu'il y a une différence pour vous?

M. Lemieux (Benoît): Elle est extrêmement plus facile aux États-Unis.

Mme Houda-Pepin: Pourquoi?

M. Lemieux (Benoît): La principale raison, c'est que le droit... Aux États-Unis, quelqu'un qui n'est pas responsable de son loyer ou qui ne paye pas son loyer, c'est quelque chose qui est beaucoup plus grave, ça affecte le crédit de la personne. C'est beaucoup plus grave.

À Montréal, on peut parler qu'on a 2, 3 %, sur notre ensemble immobilier, là, on a jusqu'à 3, 4 % d'un montant que c'est impossible pour nous autres de recouvrir parce que les gens quittent, partent, s'en vont, en tout cas pour toutes sortes de raisons. Aux États-Unis, on parle d'un montant qui est moins que 0,5 %.

n(17 h 10)n

Dans l'État du Texas, lorsque quelqu'un ne paie pas son loyer le quatrième du mois, il y a des frais de 25 $ qui sont imposés au locataire pour payer le loyer. Ça fait qu'on a beaucoup moins d'arrérages. Puis, lorsqu'on arrive aux... à Houston, je pense, c'est le 18 du mois qu'on peut aller à la cour, et la cour nous donne un jugement dans les 10 prochains jours. Lorsque le loyer n'est pas payé puis le logement est très solvable et très bien, la cour ordonne la personne de quitter le logement. Ça fait que dans un délai de 40 jours toutes les transactions sont finies, au lieu de...

Mme Houda-Pepin: D'accord. La Commission d'accès à l'information, là, qu'on a entendue hier et qui ont présenté leur document CONTACT, je pense que vous êtes familier avec ça, vous avez pris connaissance de ce document-là, la Commission d'accès à l'information reconnaît aux propriétaires la légitimité de collecter des informations pour fins d'enquête financière, hein, mais ils y vont par étapes. Ils disent: En principe, le nom, le prénom et l'adresse complète devraient suffire à prime abord. Et, si cette information-là n'est pas suffisante, le propriétaire peut, par consentement, toujours par consentement, aller recueillir, par exemple, l'adresse du propriétaire antérieur. Et dans un autre niveau ils demandent au locataire, au candidat locataire, au postulant, de faire lui-même la preuve de sa capacité financière en amenant «une attestation du respect des obligations par son institution financière; une attestation du respect de ses obligations par un propriétaire précédent; tout autre document attestant du respect de ses obligations par un organisme ou une entreprise de biens ou de services qui requiert des paiements échelonnés dans le temps; et des extraits pertinents de son dossier de crédit».

Donc, il peut aller lui-même chercher son dossier de crédit puis faire la preuve qu'il est solvable. Est-ce que cette démarche qui est proposée par la Commission d'accès à l'information, c'est quelque chose qui peut vous satisfaire, vous, dans votre groupe? Ou, je peux...

M. Lemieux (Benoît): Ça dépend toujours de la personne qui fait le... si la compagnie est solvable, puis elle nous démontre que son rapport est véridique, puis qu'il serait favorable pour nous, les propriétaires d'immeubles, j'en vois aucune, objection.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Lemieux (Benoît): C'est un service qu'on aurait la possibilité d'utiliser présentement. C'est un service... Ça marche comme ça aussi à Houston, il y a une possibilité là-dessus qu'on paie un montant x, puis je pense que Me Messier offre ce service-là présentement.

Mme Houda-Pepin: O.K.

M. Messier (Martin): Avec votre permission, M. le Président, j'aimerais compléter la réponse. Je voudrais, Mme la députée de La Pinière, vous faire part ici, puisque à plusieurs reprises vous avez demandé aux associations, aux regroupements de propriétaires, qu'elles étaient les informations qu'ils jugeaient essentielles dans le cadre de la collecte de loyers... et j'attirerais votre attention à ce sujet à la position qui... en fait, aux recommandations de Me Doray, qui se trouvent tant dans notre mémoire que dans le mémoire des trois autres associations qui nous accompagnaient. Et je pense que vous retrouverez là les informations qui sont jugées être nécessaires par le propriétaire. Merci beaucoup.

Mme Houda-Pepin: Mais tout le problème est là, là. Parce que ce que, vous, vous demandez, c'est trop par rapport à ce que les locataires ou les associations de locataires estiment être nécessaire finalement, parce que...

M. Messier (Martin): Voyez-vous, on est conscient des préoccupations des locataires. Par contre, quand on se rattache au nombre de plaintes, il y a un problème qui mérite d'être traité. Mais est-ce qu'on a ici le bon véhicule? Est-ce que cette loi-là, avec son ardeur, ne fera pas plus de dégâts en voulant protéger un locataire auquel elle finira par nuire en décourageant les investissements immobiliers? Je suis convaincu qu'il y a de la place pour aménager ces dispositions-là, comme d'autres, de façon raisonnable pour rétablir un équilibre entre les droits et obligations de chacun.

Et, ceci étant dit, il y a peu de plaintes de formulées tant devant la Commission des droits de la personne que devant la Commission d'accès à l'information. M. Lemieux l'a dit, les associations offrent ce service, cette possibilité-là, pour les enquêtes de crédit. Et, sur les milliers d'enquêtes que nous faisons mensuellement, nous n'avons que quelques exceptions qui sont réglées ? hein, des gens qui ont de la difficulté de donner leur numéro d'assurance sociale ? elles sont réglées parce que à ce moment-là on offre aux locataires de ne donner cette information-là qu'au préposé de renseignements, une information qui ne sera pas retransmise au propriétaire, et ça règle tous les dossiers.

Mme Houda-Pepin: Mais vous...

Le Président (M. Vallières): Alors, ça termine notre bloc de temps qui est imparti.

Mme Houda-Pepin: Le bloc... Ah! c'est dommage, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Oui, très intéressant. Alors, il faut quand même terminer.

Mme Houda-Pepin: Alors, je suis désolée, mais on continuera le débat.

Le Président (M. Vallières): Oui. Très bien. Alors, je veux vous remercier de votre présentation. Et je demanderais maintenant au Front d'action populaire en réaménagement urbain de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, la commission continue ses travaux. Je demanderais maintenant au représentant du Front d'action populaire en réaménagement urbain de s'identifier et de présenter leur mémoire dans les 20 prochaines minutes.

Front d'action populaire
en réaménagement urbain (FRAPRU)

M. Saillant (François): Oui, bonjour. Mon nom est François Saillant. Je suis coordonnateur du FRAPRU. À ma gauche, il y a Caroline Tremblay, qui est organisatrice au FRAPRU, qui a travaillé sur le mémoire qui va vous être présenté aujourd'hui, et, à ma droite, Karina Montambault, qui est active dans un groupe local dans le quartier Saint-Henri, Petite-Bourgogne, un peu tout le sud-ouest sauf Pointe Saint-Charles, et qui s'occupe particulièrement du service aux locataires, donc connaît bien les difficultés rencontrées par les locataires.

Peut-être juste vous dire au départ que notre mémoire est basé sur une prémisse. La base de notre mémoire, c'est que le logement, avant d'être un investissement, avant d'être une entreprise ou un conglomérat d'entreprises, le logement, c'est d'abord et avant tout un besoin essentiel, et c'est aussi un droit. Droit qui est reconnu, peut-être pas dans la Charte québécoise des droits, mais dans des textes internationaux qui ont été endossés par le Québec, notamment la Déclaration universelle des droits de l'homme, à l'article 25, qui reconnaît implicitement le droit au logement, et le Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, auquel le Québec a adhéré, je pense, il y a 25 ans cette année.

Peut-être avant de commencer comme tel à parler du projet de loi n° 26, je pense que c'est important de revenir sur la situation qui est vécue par les locataires. Je ne veux pas vous assommer avec des données qui ont été dites par d'autres organismes, mais je pense que c'est important, entre autres, de se rappeler de la détérioration de la situation, comment la situation s'est aggravée depuis 20 ans.

En 1981, il y avait tout près de 14 %, pas tout à fait 14 %, des locataires, des ménages locataires, qui payaient plus que la moitié de leurs revenus pour se loger. Lors du dernier recensement, recensement de 1996, ce pourcentage-là était rendu à 22,5 % à l'échelle du Québec, donc on est passé de 14 % des locataires en 1981 à, 15 ans plus tard, à 22,5 % des locataires.

Les seuils de besoins impérieux qui sont reconnus par le gouvernement québécois, qui sont utilisés par le gouvernement québécois, démontrent que de 1991 à 1996 le nombre de ménages qui vivent des besoins impérieux, particulièrement des locataires, a augmenté de 38 %. Donc, c'est une situation qui s'est aggravée et qui s'est aggravée dans un contexte ? quand on parle de 1991 à 1996 ? dans un contexte où les hausses de loyer n'étaient pas nécessairement faramineuses. C'est une période de hausses relatives des loyers, contrairement à ce qu'on avait connu dans les années quatre-vingt. Et pourtant on a connu une détérioration de la situation extrêmement grave.

n(17 h 20)n

Il y a une étude qui est parue récemment, qui a été rédigée par un professeur de l'Université de Toronto, David Hulchanski, qui démontre comment les locataires se sont appauvris. Il a fait une comparaison de revenus sur les locataires montréalais, leurs revenus en 1984, et maintenant leurs revenus de 1999, en termes de dollars constants. Et ce qu'il a remarqué là-dedans, c'est que le revenu des locataires, durant cette période de 15 ans là, avait baissé de 16 % et que les avoirs des locataires avaient baissé de 51 %.

Donc, on a assisté à un appauvrissement des locataires, et les locataires sont dans un état de grande vulnérabilité, vulnérabilité qui s'est accrue dans les toutes, toutes dernières années par la pénurie de logements locatifs qui a frappé les grands centres urbains comme Montréal, Québec, Hull, mais aussi d'autres centres dont on parle un peu moins, je pense, par exemple, à des villes comme Granby, des villes comme Sainte-Thérèse, Saint-Jérôme, où il y a aussi pénurie de logements locatifs, Laval, Longueuil.

Le taux de logements inoccupés dans le dernier rapport de logements locatifs, on parlait d'un taux qui, à l'échelle du Québec, était de 2,2 %, à Montréal, était de 1,5, dans la région métropolitaine, 1,4 à Hull. Et ce que tout le monde prévoyait ? on va savoir ça, lundi, parce que lundi le rapport sur les logements locatifs de la Société canadienne d'hypothèques et de logement va sortir ? on prévoyait que les taux, cette année, seraient de l'ordre plus de 1 % à Québec et Montréal et à 0,8 % dans la région de l'Outaouais.

Et ça, ça a des conséquences. C'est des chiffres, mais des chiffres, ça a des conséquences sur les individus. On sait, entre autres, qu'une période de rareté de logements, ça a pour effet d'inciter les propriétaires à profiter d'un marché plus favorable pour augmenter les loyers. On va voir encore là dans le rapport de la SCHL comment ça a joué durant la dernière année. Ça permet aussi d'être plus sélectif au moment de la location d'un logement, et, quand je dis plus sélectif parfois ça va jusqu'à plus discriminatoire, et souvent ça va jusqu'à plus discriminatoire.

Les données qu'on a beaucoup citées, je pense, à la commission, ici, de la Commission des droits de la personne, le nombre de plaintes à la Commission des droits de la personne, on parle d'un nombre de plaintes au 1er novembre qui était de 161. On dit: Bien, ce n'est pas beaucoup, 161. D'abord, il faut voir la tendance. Il y a eu une augmentation importante par rapport à l'année passée du nombre de plaintes à la Commission des droits de la personne pour discrimination sur le logement, il y a une augmentation importante, augmentation d'environ 50 % du nombre de plaintes. Et pour nous autres, c'est clair, et je pense que la Commission elle-même a du dire la même chose: le nombre de personnes qui portent plainte à la Commission des droits de la personne par rapport au nombre de personnes qui sont victimes de la discrimination, c'est uniquement un très, très, très pâle reflet. C'est la pointe de l'iceberg. Il y a du monde qui veulent... Quand tu te fais refuser un logement pour un motif que tu juges discriminatoire, ton premier souci, c'est de te trouver un logement. Ce n'est pas de partir une vendetta contre la personne qui t'a refusé ton logement. Et c'est pour ça qu'il n'y a pas plus de plaintes. Ça ne veut pas dire que, parce qu'il y a 161 plaintes de discrimination, il y a juste 161 cas de discrimination. Je pense que c'est beaucoup plus important que ça comme phénomène.

Sur ce, sur le projet de loi n° 26 comme tel, il est clair qu'on salue certaines améliorations qui sont apportées. Je pense, par exemple, au fait que, la responsabilité de s'occuper de l'offre et de location de logements, de voir à ça, on ait donné cette responsabilité à la Régie du logement. Pour nous autres, c'est un acquis qui est mince, qu'il va falloir renforcer, mais c'est quand même un acquis qui vient combler un vide juridique. Le fait qu'on ait diminué la période avant le 1er juillet, avant la date d'expiration des baux, à laquelle tu peux demander des modifications au bail, de six à cinq mois, c'est aussi un acquis. Le fait qu'on puisse demander une diminution du loyer dans les cas où il y a diminution de taxes ou diminution des coûts de l'énergie, c'est aussi un acquis. C'est des points qu'on veut saluer.

Par contre, c'est clair qu'on veut demander des amendements sérieux au projet de loi sur toute la question de l'offre de logements d'abord et sur la question aussi des délais qu'on veut rétrécir pour l'éviction de locataires qui seraient jugés coupables de non-paiement de loyer. Et là-dessus je vais passer la parole d'abord à Caroline Tremblay sur la question du non-paiement de loyer.

Mme Tremblay (Caroline): Bonjour, comme François Saillant vient de le dire, je vais m'attarder au non-paiement de loyer, à la question du non-paiement de loyer, et aussi à l'introduction dans le projet de loi n° 26 des dispositions qui pourraient faire en sorte qu'on va évincer de façon plus rapide les mauvais payeurs, entre guillemets.

Évidemment, nous, on est totalement en désaccord avec l'introduction de cette disposition-là. Puis on aimerait rappeler que le rapport annuel ? je crois qu'on en a parlé au cours de ces deux derniers jours ? rapporte qu'il y a plus de 67 000 causes qui ont été entendues pour l'année 2000-2001 à la Régie du logement. Sur ces 67 000 causes, il y en a 36 709 qui sont pour recouvrement, résiliation de bail. Évidemment, ce chiffre, c'est la moitié des causes, donc c'est beaucoup. Puis on aimerait ça comparer avec ce qui en était de la situation en 1984, où il y avait seulement 14 820 causes qui étaient pour recouvrement, résiliation de bail. Donc, ce qu'on peut constater, entre 1984 et l'an 2000, c'est qu'il y a vraiment eu une augmentation de plus du double de non-paiement de loyer, et on fait le lien avec le fait que les revenus des gens, entre 1984 et 2001, ont diminué de 16 %. Donc, il y a un lien de cause à effet à faire assez rapidement entre l'augmentation de la pauvreté et le non-paiement de loyer.

En plus, on aimerait peut-être dire aussi que, s'il y a 36 709 demandes de recouvrement de loyer qui ont été faites cette année, ce n'est pas énorme si on considère qu'il y a plus de 273 000 ménages locataires qui déboursent plus de 50 % de leurs revenus au loyer. Donc, ça veut dire qu'il y a énormément de gens qui font énormément d'efforts pour être capables de payer leur loyer.

Ensuite, si le nombre de causes pour non-paiement de loyer sont élevées à la Régie du logement, on peut constater que le taux de mauvaise créance dans les HLM est assez bas. Il est de l'ordre de 0,5 %, puis ça, c'est les données de la Société d'habitation du Québec. Donc, on peut constater que, quand les gens ont les revenus, quand ils sont capables de payer leur loyer, bien, ils le paient. Donc, il ne faut pas penser que, s'ils ne paient pas leur loyer, c'est parce qu'ils veulent frauder ou parce que... pour cause de malversation. C'est vraiment parce que... dans la plupart des cas, c'est parce qu'ils sont incapables de le payer.

Donc, malheureusement, le projet de loi n° 26 veut évincer de façon plus rapide encore les locataires qui n'auront pas payé leur loyer. Ce qu'on peut constater aussi, c'est que les délais pour recouvrement, résiliation de bail, actuellement ils sont de 46 jours, donc ils sont déjà assez bas. Puis les délais pour les autres plaintes qui sont déposées à la Régie du logement sont de 153 jours. Donc, pour ce qui est de la résiliation de bail, pour l'obtenir de la part d'un propriétaire, ça prend seulement 46 jours, mais, quand il est question pour un locataire, par exemple, de faire des réparations dans son logement, ça prend entre neuf et 12 mois. Donc, on considère qu'il y a déjà un déséquilibre qui est assez flagrant entre les causes qui sont... entre le délai d'attente pour les locataires et le délai d'attente pour les propriétaires.

On ne comprend pas pourquoi, par le biais de cette disposition-là, pour évincer plus rapidement les locataires, pourquoi on veut accentuer encore une fois le déséquilibre entre les locataires et les propriétaires. On ne comprend pas pourquoi le ménage... En fait, on voit qu'on veut introduire une disposition pour donner aux locataires 10 jours pour contester la plainte après réception... mais enfin, après réception d'une plainte, on lui donnerait un délai de 10 jours, et aussi le fait que le greffier pourrait délibérer sans même avoir entendu la cause.

Bon. Premièrement, un délai de 10 jours, on considère que c'est totalement insuffisant. Pourquoi? Parce que ce n'est pas tout le monde qui est capable de comprendre la langue. Il y a des gens qui sont analphabètes, il y a des nouveaux arrivants, pour qui 10 jours, c'est totalement insuffisant. Aussi, ça ne donne pas le temps aux gens d'aller requérir des services auprès de l'aide juridique. Ça, aller à l'aide juridique, normalement ça prend environ deux semaines. On considère de plus que faire entendre son point de vue, c'est un principe de justice fondamental, puis qu'on ne peut pas déroger à ça, puis je pense qu'il faut continuer à faire en sorte que les locataires puissent faire entendre leur point de vue. Ça va venir fragiliser davantage encore la situation des locataires, qui, on l'a vu, est assez difficile étant donné qu'ils s'appauvrissent puis étant donné le manque de logements locatifs à l'heure actuelle.

On recommande donc d'enlever la disposition sur l'éviction plus rapide des mauvais payeurs et le fait aussi de permettre de délibérer sans avoir entendu le point de vue du locataire. On a des solutions à ça. On aimerait ça que le projet de loi puisse introduire des modalités raisonnables de paiement, qu'il y ait des ententes qui puissent être faites entre un propriétaire et un locataire. Ça éviterait que des gens se retrouvent à la rue. On considère qu'il y a assez de personnes comme ça qui se sont retrouvées à la rue le 1er juillet dernier ou des personnes qui n'ont pas de logement à l'heure actuelle. Donc, pourquoi, avec cette disposition-là, on mettrait encore davantage de gens sans logis?

n(17 h 30)n

Donc, on considère que c'est inacceptable et on considère que, bon, au-delà de ça, du fait qu'il faut enlever cette disposition-là, on pense que, si on veut que les locataires soient en mesure de payer leur loyer, bien il faut augmenter leurs revenus. Donc, pour augmenter leurs revenus, il faut augmenter les prestations d'aide sociale, il faut enlever la coupure pour partage de logement, il faut augmenter les prestations de l'allocation-logement, il faut aussi construire des logements sociaux pour toutes les personnes, pour tous les gens à faibles revenus qui en font la demande. Donc, c'était ma partie.

Le Président (M. Vallières): Oui. Merci, Mme Tremblay.

M. Saillant (François): Maintenant, je vais passer la parole à Karina Montambault sur la question du fameux article 21 tant discuté.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Mme Montambault.

Mme Montambault (Karina): Bonjour. En premier lieu, je voudrais vous dire que, moi, je travaille beaucoup sur le terrain. C'est que je rencontre souvent des locataires. Je les vois dans la vie de tous les jours. On salue l'initiative de la ministre puis du gouvernement actuel de vouloir interdire la cueillette de certains renseignements personnels. Il y a une volonté politique que la Régie du logement puisse intervenir dans le processus d'offre de location, et ça, c'est salutaire, c'est une bonne chose, mais on a certaines réserves, par contre.

La réserve qu'on a, c'est de permettre la cueillette de la date de naissance. C'est parfait que, dans le cas de cueillette de renseignements tel le numéro d'assurance sociale, on puisse permettre l'octroi de dommages et intérêts punitifs, mais, en permettant au propriétaire d'avoir la date de naissance, on lui permet indirectement de faire ce qu'on lui interdit directement, parce que la date de naissance va permettre quand même de faire des enquêtes de crédit pour les locataires. Donc, il y a une ouverture à ça, et, nous, on considère que ce n'est pas nécessaire de faire des enquêtes de crédit pour détecter si on a un bon ou un mauvais locataire.

Ce qu'il est nécessaire d'avoir, c'est le nom, l'ancienne adresse ? actuelle ? puis peut-être le nom de l'ancien propriétaire pour qu'il y ait quand même... c'est sûr, c'est légitime d'avoir certaines informations. Donc, on vous demande de retirer la date de naissance parce qu'on considère que, à toutes fins pratiques, ça va permettre indirectement ce qu'on interdit directement.

On parle aussi également de discrimination, puis, moi, je la vois sur le terrain, la discrimination. Les premières victimes de discrimination, c'est les assistés sociaux et les immigrants. Dès que ces gens-là mentionnent leur condition sociale, ipso facto, on ne veut pas leur trouver de logement, puis c'est les premiers qui sont victimes de la crise du logement. Si le nombre de plaintes à la Commission des droits de la personne a augmenté, ça ne traduit pas réellement la réalité parce que, ultimement, ces locataires-là n'auront pas de logement. Ça ne résoudra pas à court terme leur problème.

Donc, on veut que le gouvernement prenne la responsabilité puis les moyens de faire du testing puis de vérifier sur le terrain les pratiques discriminatoires des propriétaires. Il y a un travail à faire à ce niveau-là. Il ne faut pas que le gouvernement soit passif; il doit être actif. Et puis on pense que l'utilisation d'enquêteurs pour faire du testing, ça pourrait être une mesure qui est nécessaire, en plus de l'encadrement du processus juridique. Donc, c'est pas mal tout ce que j'avais à vous mentionner, et je vous remercie.

M. Saillant (François): J'aimerais peut-être juste pour terminer...

Le Président (M. Vallières): Oui, M. Saillant.

M. Saillant (François): ...vous dire que, bon, les propriétaires ont formé un front commun. Peut-être juste dire que les groupes de locataires et les groupes de défense des droits en matière de logement ont aussi formé un front commun il y a déjà quelque temps. Et une demande qui a été portée par l'ensemble de ces organismes-là, c'est le fait que le Québec se dote enfin ? ça fait 25 ans à peu près que je suis dans le domaine, ça fait 25 ans que j'entends parler de ça et ce n'est jamais arrivé ? qu'on se dote enfin d'une politique globale intégrée d'habitation.

Aujourd'hui, on a une occasion de débattre, mais on débat d'un petit bout. Ce serait le temps d'avoir un débat beaucoup plus global sur l'ensemble du phénomène et d'être capable d'apporter des modifications importantes à toute la loi de la Régie du logement, et aussi d'avoir des investissements plus importants dans le domaine du logement social. On a vu des pas lors du dernier budget; on les a salués. Mais ça demeure des pas, ça demeure insuffisant par rapport à l'ensemble des besoins. Et il y a besoin que tout le monde, que l'ensemble des ministères aussi soit mis à contribution, et c'est pour ça que ça prend une politique globale en habitation.

Finalement, un dernier point. On sait que ce n'est pas l'objet de la commission comme telle, mais il nous semble qu'il y a une situation d'urgence, qui est toute la conversion de logements locatifs en copropriétés. Avec la loi 170, on a donné le pouvoir à chacun des arrondissements à Montréal de décider de déroger à l'interdiction de convertir qui existe sur l'ensemble de l'île de Montréal. Il nous semble que, dans la situation actuelle du parc de logements locatifs, de redonner à 27 agglomérations un tel pouvoir, ça nous semble quelque chose d'extrêmement dangereux, et je pense qu'il y aurait nécessité d'agir rapidement là-dessus.

Il y avait une certaine protection qui existait sur l'île de Montréal. Il y avait, à l'heure actuelle, un moratoire qui s'appliquait sur l'île de Montréal, compte tenu du taux de logements inoccupés. Là, maintenant, ça va être le free-for-all à partir de maintenant. N'importe quel arrondissement peut décider de déroger, et ça peut causer des gros problèmes dans le contexte de rareté de logements locatifs qu'on connaît où va parler d'un taux qui, peut-être, lundi prochain, va... on va nous dire, à la SCHL, qu'il est rendu à 1 %. Je vous remercie.

Le Président (M. Vallières): Oui, merci. On va passer maintenant aux échanges. Et, si les parlementaires en conviennent, on pourrait procéder à 15 minutes à ma droite, 15 minutes à ma gauche. Puis j'ai le député de Roberval. Ça fait plusieurs reprises qu'on l'inscrit, puis il n'a pas eu la parole encore. Il a quitté pour quelques secondes, mais il va revenir. Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, bienvenue, M. Saillant. Vous êtes un familier des travaux de commissions parlementaires et vous êtes accompagné par... Je pense que c'est Mme Tremblay et Mme Bourque, hein? C'est bien ça?

M. Saillant (François): Montambault.

Mme Montambault (Karina): Montambault.

Mme Harel: Montambault. Alors, vous êtes Karina Montambault. Bon. Écoutez, la députée de La Pinière m'a fait grief tantôt d'être trop rigoureuse à l'égard des associations de propriétaires et pas assez à l'égard des associations de locataires.

Mme Houda-Pepin: Pas rigoureuse.

Mme Harel: Alors, je ne sais pas si...

Mme Houda-Pepin: ...

Mme Harel: ...les questions que je vous poserai seront mises au compte de l'une ou l'autre des deux colonnes, mais la première que je veux vous poser est la suivante: Est-ce que vous pensez qu'on devrait retirer le projet de loi? Vous savez sans doute que les points de vue ont évolué au niveau des associations de propriétaires. Le premier groupe entendu nous a dit non, puis, après, le deuxième a dit oui puis, finalement, peut-être, et puis, finalement, le troisième a dit ? il vous a précédés, là, il était là juste avant que vous vous présentiez... alors, demande le retrait. Ça, c'est la première question.

La deuxième, c'est... Finalement, en vous écoutant, là, celle qui me vient à l'esprit, c'est celle qui concerne les locataires, parce que vous nous dites: Ils ont le droit de demander des renseignements. Vous avez dit ça, Mme Montambault. Et, dans un sens, vous questionnez, vous êtes en désaccord avec les renseignements, dont la date de naissance, que le projet de loi permet de demander. C'est ce que je comprends. En même temps, vous dites: Ils ont le droit d'en demander, puis, de l'autre côté, vous dites: Oui, mais le nom, l'adresse précédente et le nom du locateur. Bon.

Quand vous êtes venus ici à l'Assemblée nationale tantôt, ils vous ont demandé votre date de naissance. Ici, à l'Assemblée nationale, pour la sécurité, je crois, dès que vous passez à l'accueil, automatiquement, on vous demande une preuve pour confirmer votre date de naissance. En tout cas, c'est une information qui m'est venue, là, de Mme la députée de Rimouski. Et je me suis dit: Si on le demande à l'Assemblée nationale pour identifier, évidemment, parce que c'est la façon qui permet d'identifier, comment ça pourrait être justifié de ne pas le faire dans le contexte de la signature d'un bail? D'autant plus que toute la question, c'est de savoir: Est-ce qu'avec la date de naissance tout vient? Tantôt, on nous a présenté un courriel d'Equifax qui dit: Non, non, non, c'est un tiers; il n'y a pas de numéro d'assurance sociale; il n'y a pas non plus de numéro de carte de crédit. Il y a seulement l'enquête de crédit, j'imagine, sur la personne à partir de son numéro. Bon. Ça, c'était ma deuxième question. Je ne sais pas si elle va satisfaire Mme la députée de La Peltrie, mais...

Mme Houda-Pepin: Je serais satisfaite...

Mme Harel: La Pinière.

Mme Houda-Pepin: ...si vous me nommez par mon comté.

Mme Harel: La Pinière. La Peltrie, ça a été Mme Marois il y a quelques années. Je m'en excuse.

Mme Houda-Pepin: On fait des confusions, Mme la ministre.

Mme Harel: Je m'en excuse, je m'en excuse.

Mme Houda-Pepin: Ha, ha, ha!

n(17 h 40)n

Mme Harel: Bon. Et puis une autre question aussi: Vous savez qu'on a préparé un projet de livre blanc. À l'occasion du 20e anniversaire de la Régie du logement, l'an dernier, la présidente, qui est à mes côtés, Me Desjardins, et tout le personnel ont travaillé presque un an à la préparation de ce livre blanc, qui a comme objectif d'adapter la législation à l'évolution de la société: ça n'a l'air de rien, là, mais des résidences avec services pour personnes âgées, bien, ça n'existait pas vraiment il y a 30 ans; la colocation, vraiment une colocation qui est cyclique, ça, j'en conviens, dépendamment de la croissance économique, mais qui est un... les conjoints de fait, la réalité des conjoints de fait; la réalité des ménages monoparentaux ? toute la question de violence conjugale, je ne dis pas qu'elle n'existait pas il y a 20 ans, mais elle est examinée; elle est tout à fait autrement reconnue et combattue; et puis toute la question de l'accès à l'information et de la protection de la vie privée.

En fait, à partir de la publication du livre blanc... Un livre blanc, vous le savez, ça donne lieu à une très, très vaste consultation, ça donne lieu à beaucoup de discussions, d'échanges, bon, etc. Alors, est-ce que, par exemple, on serait mieux de retirer le projet de loi puis de publier le livre blanc puis d'attendre à ce moment-là que cette consultation ait lieu?

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Saillant.

M. Saillant (François): Oui. Bien, sur la question d'abord, est-ce qu'on demande le retrait du projet de loi? C'est non. On me demande des amendements au projet de loi sur des points précis qu'on a identifiés. On a noté qu'il y avait certaines améliorations dans le projet de loi auxquelles on tient, mais c'est sûr qu'on a des amendements majeurs qu'on aimerait obtenir et que, si... Je pense particulièrement à la question du recouvrement de loyer, la question aussi de la date de naissance qui nous fatigue.

Sur cette date de naissance-là, justement... Bon, le fait qu'on l'a demandé ici, d'abord, il faut dire que ça n'a pas toujours été la pratique à l'Assemblée nationale. Comme vous dites, je suis un vieil habitué, c'est arrivé après l'affaire Lortie qu'on a commencé à avoir ce type de... Donc, je ne voudrais pas revenir sur la lettre à George W. Bush et au lien avec le terrorisme, mais avec... d'agresseurs potentiels et de matière de sécurité. Il me semble qu'on ne parle pas du tout de ça, là. On parle d'un domaine qui est tout à fait différent.

Et, par ailleurs, quand on demande la date de naissance ici, ce n'est pas pour vérifier un dossier à Equifax, là. En tout cas, la réponse serait un peu plus longue même si Equifax est rapide. Je ne suis pas inquiet là-dessus. Ils sont quand même plus longs que le temps que ça prend pour entrer à l'Assemblée nationale. On ne parle pas du même type de renseignements.

Et, pour nous autres, le problème, c'est juste qu'il me semble qu'il y a une certaine logique à respecter. Si, d'un côté, on dit: On interdit le numéro d'assurance sociale, mais que tu donnes un moyen qui permet d'arriver exactement au même résultat, on ne comprend pas la logique. Et c'est là, il me semble, que le gouvernement doit faire son lit. S'il dit: Je restreins au strict minimum les renseignements personnels et, à ce moment-là le strict minimum, ça veut dire le nom, l'adresse de la personne et le nom, l'adresse, le numéro de téléphone du locateur actuel, à ce moment-là, c'est suffisant. S'il dit: Faut aller plus loin que ça, bien, à ce moment-là, il ouvre grand parce que, avec la date de naissance, il permet la même chose qu'il interdit par ailleurs.

Sur le livre blanc, c'est clair qu'on souhaite avoir un débat et, on le disait à la fin: Pour nous autres, il y a lieu d'avoir un débat. Après 20 ans avec la loi actuelle, il y a lieu d'avoir un débat d'ensemble sur est-ce que le contrôle des loyers qu'on a au Québec à l'heure actuelle est suffisant. Est-ce qu'il sert bien les locataires et les locateurs aussi? Est-ce que la Régie du logement, dont, au départ, la constitutionnalité, je le rappelle, avait été contestée par les associations de propriétaires et maintenant est utilisée à 90 % par les propriétaires...

Mme Harel: 53 % des dossiers qui sont, disons, qui sont déposés à la Régie le sont par des locateurs, des propriétaires. 53 %. C'est parce que c'est cyclique, hein, et je pense que c'est le chiffre... C'est plus que ça?

Une voix: 53 % en non-paiement.

Mme Harel: O.K. C'est combien au total.

Une voix: C'est pas loin de 80.

Mme Harel: Alors, pas loin de 80, vous avez raison, M. Saillant. 80 % de tous les dossiers déposés devant la Régie le sont par des propriétaires.

M. Saillant (François): C'est ça. Comme la moitié des causes sont des causes pour résiliation de bail, recouvrement de loyer, jusqu'à un certain point, la Régie du logement est un peu devenue à l'heure actuelle, par la force des choses, un peu une agence de recouvrement de loyer.

Donc, oui, on souhaite ce débat d'ensemble là, mais on souhaite même plus large que ça, là. Comme je le disais, l'ensemble des groupes de défense des droits en matière d'habitation souhaite qu'on ait un débat sur une politique d'habitation, une politique globale intégrée de l'habitation.

Le Président (M. Vallières): Bien. Est-ce qu'on peut aller au député de Roberval? Mme la ministre, vous avez terminé? Oui?

Mme Harel: Certainement. Oui, oui, j'ai terminé. Bien, on pourrait laisser Mme la députée de La Pinière...

M. Laprise: J'ai l'impression que... Vous savez, des fois... Il y a un proverbe qui dit: Le bonheur des uns fait le malheur des autres. Mais on a l'impression, à écouter les mémoires, qu'il y a des malheurs des deux côtés. Les propriétaires ne sont pas heureux de cette formule-là, les locataires non plus, parce qu'on dit: Bien, dans la rareté du logement, normalement... Vous venez nous dire aujourd'hui que la rareté du logement fait des locataires des gens les plus vulnérables parce que les gens deviennent vulnérables face à se trouver un logement. C'est difficile de se trouver un logement. Il n'y en a pas beaucoup. Les logements augmentent et pas nécessairement... La qualité n'augmente pas toujours avec parce qu'il y a une rareté de construction dans les nouveaux logements.

Alors, dans cette optique-là, vous autres, les locataires, est-ce que vous seriez d'accord à ce qu'il y ait un fonds qui soit mis en place pour justement protéger le locataire, mais aussi protéger le locataire et permettre du développement dans la location, dans les logements?

À ce moment-là, il y aurait un fonds qui pourrait être... Un peu comme... Moi, je suis en agriculture et on a une assurance récolte et on se la paie. Et je crois qu'il y aurait peut-être un montant qui serait émis par logement à chaque mois, 1 $ par logement. Par exemple, 1 million de logements, c'est 1 million par mois qui pourrait être récupéré dans un fonds et qui viendrait garantir à la fois... sécuriser à la fois le propriétaire, mais aussi protéger le locataire face à son logement.

Ça pourrait être peut-être des prêts même de ça sans intérêt advenant le cas qu'un locataire aurait un recul de paiement de loyer. Il pourrait avoir un prêt sans intérêt qui lui permettrait de se rattraper et de protéger les gens qui sont plus vulnérables. Est-ce que vous auriez objection à ça?

M. Saillant (François): Je ne suis pas sûr que je comprends tout à fait l'idée que vous avancez. Mais, d'abord, sur la question de la vulnérabilité des locataires, moi, je pense qu'on n'est pas les seuls à le dire, on est dans un contexte à l'heure actuelle où les locataires sont plus vulnérables que jamais. On dit que c'est un marché favorable aux propriétaires quand le taux de logements inoccupés est inférieur à 3 %. On est loin de ça à l'heure actuelle, on est très en bas du 1 %.

Mais il y a une autre raison pour laquelle les locataires sont vulnérables aussi, c'est la pauvreté des locataires, la pauvreté grandissante des locataires. En ce qui a trait à un fonds, nous autres, il nous semble que, s'il y a un endroit où on doit investir, c'est dans le logement qui est sans but lucratif qui n'est pas bâti sur la même logique que le logement privé.

Il existe des logements privés; il va continuer à en exister. 90 % des logements, plus que 90 % des logements locatifs sont des logements privés. Il y a place pour d'autre chose que du logement privé et il me semble que, s'il y a des efforts à concerter, c'est vers le secteur non lucratif qui, lui, ne se soucie pas à un moment donné de savoir s'il s'adresse à des personnes à faibles revenus puis ces gens-là sont-u solvables ou non. Par mission, des organismes sans but lucratif, des coopératives d'habitation, des habitations à loyer modique s'adressent aux gens qui sont les plus mal pris.

M. Laprise: Les coopératives d'habitation actuellement, c'est en développement dans des secteurs donnés.

M. Saillant (François): Il y a un certain développement à l'heure actuelle du secteur sans but lucratif. Comme je le disais tout à l'heure, on a salué les annonces qui ont été faites dans le budget. On note que le Québec, qui... Allé jusqu'à récemment, il y avaient deux provinces canadiennes qui faisaient encore du logement social: il y avait la Colombie-Britannique et le Québec. Maintenant, le Québec est la seule. Et, qu'elle fasse plus que ce qu'elle faisait jusqu'à maintenant, on l'a salué, tout en ajoutant ? et on l'ajoute et on va continuer à l'ajouter ? que ce n'est pas suffisant, compte tenu de l'ampleur des besoins, qu'il va falloir aller plus loin que ça. Mais, s'il y a un secteur à consolider, il me semble que c'est ce secteur-là du logement sans but lucratif sous forme de coopératives, sous forme de HLM, sous forme d'OSBL.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Saillant, Mme Montambault et Mme Tremblay, merci pour la présentation. C'est un mémoire fort intéressant.

Comme vous le savez, M. Saillant, pour vous avoir déjà rencontré, je vous avais dit que, au-delà du diagnostic, ce qui me préoccupait, c'était la recherche de solutions. Et je vous avais dit aussi que la recherche de solutions ne peut pas se faire seulement avec les représentants des locataires, mais ça prenait l'autre partie, qui sont les propriétaires, considérant qu'ils sont des partenaires majeurs.

J'ai écouté, pendant les deux journées, les points de vue et je réalise qu'il y a un certain nombre de consensus. Même si les propriétaires et les locataires ne se parlent pas directement, lorsqu'on écoute le discours, vous vous entendez sur une chose: un, il y a une crise de logement qui se traduit par une pénurie beaucoup plus aggravée dans les grands centres urbains. Vous vous entendez sur le fait que les logements sont délabrés. Donc, il y a un problème au niveau de la qualité de logement pour les locataires.

Vous vous entendez pour dire que les relations entre propriétaires et locataires dans l'ensemble sont bonnes, mais qu'il y a un segment qui est problématique. Et même, par rapport aux assistés sociaux, on nous a dit que la plupart des assistés sociaux payaient leur logement sans problème et que, finalement, il y a une infime minorité qui se ramasse avec des difficultés.

Vous vous entendez pour dire que l'argent, l'investissement dans l'immobilier s'en va dans les condos parce que c'est plus lucratif et qu'on abandonne le locatif, surtout le locatif à prix modique parce que ce n'est pas payant. Vous, vous dites... De toute façon, vous avez une autre argumentation.

Vous vous entendez pour dire que le taux de vacance est dramatiquement bas et que cela génère une crise, aggrave la crise, ce qui fait que, finalement, ça déboule sur les problèmes, ça aggrave les problèmes.

Vous vous entendez sur la nécessité d'avoir une politique globale, et je me réjouis de vous entendre dire ça parce que je l'ai réclamé de la ministre, le 26 octobre dernier, lors de l'interpellation. Les représentants des propriétaires nous disent qu'ils veulent avoir des états généraux.

n(17 h 50)n

Donc, il y a des points de rencontre malgré tout, et c'est ce que c'est ce que j'essaie de rechercher. Mais, d'un autre côté, évidemment, il y a des divergences, et ça aussi, je les ai bien notées, parce que, de votre point de vue, les propriétaires font partie des problèmes et, moi, j'essaie de voir si on ne peut pas les voir aussi comme faisant partie des solutions qu'on peut trouver à ce problème, et je considère qu'ils sont également des partenaires importants.

J'ai demandé aux représentants des propriétaires s'ils acceptaient de s'engager avec les représentants des associations de locataires, avec vous, le FRAPRU, qui est un groupe parapluie, parce que vous avez une grande expertise ? vous regroupez beaucoup d'associations à travers le Québec ? pour trouver une façon de libeller l'article 21 qui soit acceptable pour les uns et pour les autres.

Je ne suis pas une idéaliste en disant cela. Je sais très bien que ce n'est pas facile. Je sais très bien que les positions sont diamétralement opposée, parce que les uns disent qu'il faut retirer quasiment le projet de loi à cause de cet article principalement et, vous, de votre côté, vous dites: Il faut maintenir le projet de loi, lui apporter quelques modifications.

Est-ce que vous accepteriez, M. Saillant, de vous engager dans une discussion ? ça ne vous engage pas nécessairement à un résultat immédiat ? pour qu'on trouve un libellé qui puisse être acceptable, avant de dire qu'il n'y a pas moyen pour vous de vous entendre? Parce que, voyez-vous, si on n'arrive pas à ce juste milieu, à cet équilibre finalement, ce qui va arriver, c'est que la ministre, elle, elle va être forte de votre division pour dire: Je tranche le dossier de telle façon.

Et, comme vous êtes finalement les opérateurs ? particulièrement les propriétaires, c'est eux qui vont mettre ça en application, et, vous, vous allez être les gens qui allez voir venir les problèmes, et il faudrait les gérer, ces problèmes-là ? est-ce qu'on ne peut pas agir en amont et trouver une solution à ça? Est-ce que vous accepteriez de vous engager dans une discussion avec les représentants des propriétaires? On définira la formule. J'essaierai de convaincre Mme la ministre aussi de se joindre à ce concert pour qu'on trouve une façon de régler ce problème.

Le Président (M. Vallières): M. Saillant.

M. Saillant (François): Juste vous dire que je suis personnellement extrêmement sceptique par rapport à ce genre de formule là. On a, il y a quelques années, l'ensemble des groupes de locataires et l'ensemble des groupes de propriétaires, siégé à un comité de travail du ministère de la Sécurité du revenu ? à l'époque, ça s'appelait comme ça ? sur la question du non-paiement des loyers. Et, au bout de quatre rencontres, les groupes de locataires on a dit: On en a assez; on ne veut pas débattre du fond du problème. Tout ce qu'on amenait qui permettait de débattre du fond du problème, qu'est-ce qui explique que les gens ne paient pas leur loyer, systématiquement, on nous disait: Oui, oui, oui, mais là on veut savoir, là, comment qu'on va être payé. Ça a été ça, les discussions. Et, moi, j'ai malheureusement peur que ce soit exactement la même chose.

Et, à l'heure actuelle, s'embarquer dans ce type de démarches là, moi, je pense que c'est condamné à l'échec. En tout cas, je n'ai pas été là les deux jours, mais on m'a fait rapport de ce qui s'était dit durant les deux jours et il semble qu'il y a là deux positions dans lesquelles il va être extrêmement difficile de trouver un équilibre.

Je pense qu'il y a une question de choix qui va devoir être fait: est-ce qu'on protège particulièrement les locataires dans une période de grande vulnérabilité comme c'est le cas à l'heure actuelle ou si on garde des privilèges présentement accordés au propriétaire? Et, pour moi, c'est une question de choix politique et je pense que c'est le choix du gouvernement de faire ce choix-là. Mais je ne pense pas qu'il y a possibilité de trouver un équilibre entre deux positions qui me semblent plutôt inconciliables et irréconciliables.

Mme Houda-Pepin: Je suis parfaitement consciente, M. Saillant, et vous avez raison de dire que, par le passé, vous n'avez pas réussi à vous entendre et que finalement votre scepticisme est justifié. Mais, dans le cas présent, peut-être qu'avant d'affirmer de façon catégorique qu'il n'y a pas moyen de s'entendre, peut-être que, si on faisait l'effort d'une rencontre ou deux, ne serait-ce que pour voir la température de l'eau, ne serait-ce que pour voir jusqu'où est-ce qu'on peut aller.... Et, si on aboutit aux résultats que vous nous dites à l'effet qu'il n'y aura pas possibilité de s'entendre, on aura au moins fait l'exercice, on aura au moins essayé. Et, si, par hasard, dans la discussion, on parvient à un quelconque juste milieu, bien, vous aurez contribué à ça.

Parce que vous dites: C'est une question de choix, oui, la politique, c'est une question de choix, hein? C'est pour ça qu'on est en politique, c'est pour faire des choix et vivre avec les conséquences de nos choix aussi. Mais on peut également travailler à rapprocher les parties quand c'est possible. Je ne vous dis pas qu'on va se casser la gueule par goût, là, on le fait parce qu'on croit qu'il y a des gens de bonne volonté qui voudraient bien nous aider à résoudre ce problème-là. Et je pense que vous faites partie des gens qui ont de la bonne volonté.

Moi, je vous invite réellement, là, avant de dire catégoriquement: Il n'y a rien à faire, qu'on puisse s'asseoir à tout le moins avec quelques représentants, les représentants des locateurs, et faire l'effort. Et, si, suite à une première rencontre, on constate que les positions sont tellement campées de part et d'autre qu'il n'y a rien à changer, bon, bien, vous aurez gagné, mais, moi, j'aurai au moins tenté de faire cet effort-là avec vous. Et je suis persuadée que, si la ministre sent qu'il y a une volonté de rapprochement, elle va se joindre à nous. Elle finira... Je tenterai de la convaincre, je tenterai de la convaincre. Alors, M. Saillant, vous avez le dernier mot, là.

M. Saillant (François): Je ne vois franchement pas intérêt à ça. Il me semble que, depuis deux jours, on entend des points de vue qui me semblent totalement irréconciliables, et je vois difficilement comment on va pouvoir, autour d'une même table, arriver à quelque chose de commun. D'un côté, nous autres, on dit: Limitons au strict minimum; de l'autre côté, on dit: Ouvrons les vannes toutes grandes.

Mme Houda-Pepin: Oui, mais, justement...

M. Saillant (François): Et, à partir de là, comment tu fais pour concilier ça? C'est quoi, l'équilibre entre restreindre puis ouvrir tout grand?

Mme Houda-Pepin: Bien, écoutez, M. Saillant, vous avez raison. C'est pour ça que je fais cette proposition. Vous avez parfaitement raison, on est conscient qu'on est sur des voies parallèles. Et ce n'est pas la première fois qu'en commission parlementaire on s'est retrouvé dans des situations comme ça. Il se trouve qu'en commission parlementaire on est encadré par la réglementation, là; on a un temps de parole, on a tant de personnes qui se présentent. Mais, si, informellement, on peut en discuter dans un forum peut-être plus libre, peut-être qu'on pourrait trouver une solution. C'est cet effort-là que je vous demande de faire.

M. Saillant (François): Nous autres, l'effort qu'on fait, c'est de demander à la commission parlementaire, et particulièrement au gouvernement, qui a le pouvoir en bout de ligne, d'apporter les amendements nécessaires à une meilleure protection des locataires.

Mme Houda-Pepin: D'accord. M. le Président, très rapidement, un groupe, ce matin, qu'on a entendu a fait signer une pétition ? un groupe qui représente des propriétaires ? a fait signer une pétition par 1 100 locataires qui invoque le droit au locateur de cueillir, de recueillir des informations personnelles sur les candidats locataires au nom de la jouissance civile de leur lieu. Qu'est-ce que vous répondez à ça quand des locataires eux-mêmes disent au propriétaire: Nous, on veut vivre paisiblement dans notre environnement, et c'est tout à fait légitime pour vous de recueillir des informations pour savoir qui est-ce que vous allez nous amener dans notre voisinage immédiat?

M. Saillant (François): Est-ce qu'on a ce type d'information là dans une enquête de crédit?

Mme Houda-Pepin: Pardon?

M. Saillant (François): Est-ce qu'on a ce type d'information là dans une enquête de crédit?

Mme Houda-Pepin: Probablement, mais...

M. Saillant (François): Si la personne écoute la musique tard le soir, c'est dans l'enquête de crédit, ça?

Mme Houda-Pepin: Non, ça, c'est un autre...

M. Saillant (François): Non, mais c'est parce que, d'un côté, on veut avoir des renseignements qui permettent d'aller fouiller dans les renseignements personnels des gens, et on se base pour ça sur des relations de voisinage, des relations qui ont trait au bruit et à ce type de phénomène là. Ça n'a pas rapport.

Mme Houda-Pepin: D'accord. C'est tout.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, je vous remercie. Ceci met fin à nos travaux pour aujourd'hui. Demain, nous avons rendez-vous en cette même salle, à 9 h 30, sur le même sujet. Alors, nous ajournons donc nos travaux à demain, 9 h 30, en cette salle. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 59)



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