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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 17 octobre 2002 - Vol. 37 N° 55

Consultations particulières sur le document de consultation sur le logement social et abordable


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Table des matières

Auditions (suite)

Intervenants

 
M. Yvon Vallières, président
M. Benoît Laprise, président suppléant
Mme Danielle Doyer, vice-présidente
Mme Fatima Houda-Pepin
M. Claude Pinard
Mme Lise Thériault
* M. Pierre Ayotte, APAGM
* M. Richard Gianchetti, idem
* M. Yves Raby, idem
* M. John Johnston, RQOH
* M. Serge Bergeron, idem
* M. Pierre Goyer, idem
* M. Luc Courtemanche, CORPIQ
* Mme Anne Scott, idem
* M. Michel Riverin, idem
* M. Jean-Marie Doyon, FLHLMQ
* Mme Rita Hulsman, idem
* M. Claude Gelderblom, idem
* M. Robert Pilon, idem
* M. Martin Messier, APQ
* M. Gilbert Gour, idem
* M. Gérard Divay, INRS-Urbanisation, Culture et Société
* Mme Francine Dansereau, idem
* Mme Anne-Marie Séguin, idem
* M. Claude Gladu, ville de Longueuil
* M. Jean-Benoît Laberge, idem
* M. François Saillant, FRAPRU
* Mme Sonia Côté, idem
* Mme Nicole Filion, COPHAN
* Mme Sophie Lanctôt, idem
* M. Marcel Blais, idem
* M. Claude Larose, ville de Québec
* M. Louis Méthé, idem
* M. Jean-Luc Duclos, idem
* Mme Louise Lapointe, idem
* Témoins interrogés par les membres de la commission
 

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission de l'aménagement du territoire continue ses travaux sur le mandat d'initiative portant sur le logement social et abordable. Alors, on a encore aujourd'hui une journée très chargée qui devrait se terminer ce soir, si tout va bien, vers les 22 h 15, 22 h 30. Alors, je souhaite la cordiale bienvenue à ceux que nous allons entendre aujourd'hui de même qu'aux membres de la commission.

Alors, M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des changements au niveau... des remplacements?

Le Secrétaire: Non, M. le Président, aucun remplacement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, ça nous amène directement au premier organisme que nous entendrons ce matin, soit l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal. Alors, je prierais les gens de bien vouloir s'identifier et de procéder, dans les 15 prochaines minutes, à nous livrer leur message, et ensuite à des échanges d'environ 30 minutes avec les membres de la commission. La parole est à vous.

Association des propriétaires d'appartements
du Grand Montréal (APAGM)

M. Ayotte (Pierre): M. le Président, Mmes et MM. les députés membres de cette commission, nous tenons à vous remercier de nous laisser prendre place sur votre tribune et de nous donner l'opportunité de nous prononcer encore une fois sur la situation du logement à Montréal.

Permettez-moi d'abord de nous présenter: mon nom est Pierre Ayotte, je suis président par intérim de l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal, soit l'APAGM, et moi-même gestionnaire d'ensembles immobiliers pour familles à revenus modestes depuis plus de 20 ans, et aussi propriétaire; à ma droite, M. Yves Raby, membre du comité de rédaction du mémoire, gestionnaire d'un parc immobilier et copropriétaire; et, à ma gauche, M. Richard Gianchetti, membre du conseil d'administration, développeur, promoteur, constructeur, propriétaire et gestionnaire, il a aussi été président de l'APCHQ.

L'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal existe depuis mars 2001. C'est un organisme sans but lucratif dont la mission est de défendre les droits et les intérêts des propriétaires d'appartements du Grand Montréal. Nous avons maintenant plus de 250 membres qui représentent près de 50 000 logements.

Nous avons eu le privilège cette semaine d'assister à toutes les audiences jusqu'à ce jour, et nous n'avons pas l'intention de vous lire le mémoire que nous avons déposé. Vous aurez l'occasion de le lire en temps et lieu opportuns. Par contre, nous aimerions plutôt revenir sur certaines questions soulevées par d'autres intervenants ou par certains membres de cette commission et des questions qui méritent que l'on s'y attarde un peu plus davantage. Alors, dans une première partie, je vous entretiendrai donc de ces sujets pointilleux et M. Richard Gianchetti parlera des mesures fiscales que nous proposons à la fin.

Donc, tout comme la plupart des autres intervenants qui ont défilé ici jusqu'à aujourd'hui, nous n'avons pas la prétention d'avoir de solution magique au problème, pas plus que nous croyons qu'il existe une solution unique. Tout ce que nous avons entendu ici cette semaine mérite considération. Dans le domaine du logement public et/ou social, il y a certainement de la place pour des maisons de chambre, des centres d'hébergement spécialisés, des HLM, des OBNL, des coops, et nous croyons aussi que l'aide à la personne sous différentes formes peut également occuper une place importante parmi les solutions recherchées. Bref, toutes ces formules ont respectivement leur raison d'être et des champs d'application spécifiques. Nous laisserons donc aux groupes d'intervenants experts du domaine public, social et communautaire le soin de vanter les mérites des uns et/ou de critiquer les autres, car notre secteur d'activité, nos expériences accumulées ainsi que les expertises développées sont autres et relèvent du domaine privé.

Avant de vous faire part de nos constatations et de nos recommandations, nous aimerions replacer tout cela en perspective. Le logement public et communautaire représente environ 8 % du marché résidentiel locatif au Québec. C'est donc dire que le privé occupe plus de 90 % de la place actuellement, et la Société d'habitation du Québec, cette semaine, est venue nous dire que la majorité des locataires québécois sont bien logés. Croire que seul le secteur public et communautaire peut arriver à réduire les tensions dues au faible taux d'inoccupation serait illusoire. Pour se rapprocher d'un équilibre plus sain, il faudra intéresser les investisseurs privés, et nous avons déjà vu que la partie «privé» du programme de Logement abordable mis de l'avant par le gouvernement n'y arrivera pas car il est nettement insuffisant.

Pour arriver à nos pistes de solution, faisons le constat suivant: le logement au Québec est déjà très abordable, puisque parmi les plus bas des grandes villes nord-américaines. On parle d'un loyer moyen pour un deux chambres d'à peu près 1 027 $ à Toronto, dans les 900 $ à Ottawa et à Vancouver et d'autour de 530 $ pour Montréal. Pourquoi les loyers sont-ils si bas au Québec? Eh bien, c'est en grande partie à cause des contrôles de loyer qui ont été appliqués depuis plus de 20 ans. Plus tôt cette semaine, la présidente de la Régie du logement nous a dit qu'à l'origine des contrôles de loyer le législateur poursuivait deux objectifs: le premier, protéger les locataires des hausses abusives qui pourraient avoir comme conséquence de les évincer des lieux et, le deuxième, d'inciter les propriétaires à entretenir et à améliorer leurs immeubles.

À cet égard, Mme Desjardins avait tout à fait raison, puisque le livre blanc de 1977 édifiait ces intentions, et j'aimerais vous citer quelques passages qui sont assez révélateurs: «Un contrôle souple est, par exemple, celui qui a pour objectif de corriger et de compenser les effets de certaines imperfections du marché sans pour autant se substituer à la libre négociation des baux ni nier le rôle de l'entreprise privée comme agent de production et de mise en location des logements. La méthode choisie pour les fixations de loyer assure aux propriétaires des hausses de loyer telles qu'elles n'abaissent pas leur rentabilité. En effet, toute méthode qui diminuerait la rentabilité des immeubles actuels acculerait sûrement tous les propriétaires à la faillite à plus ou moins long terme.» Et, finalement, un dernier passage: «On ne saurait protéger adéquatement le droit au logement sans intervenir en adoptant des mesures de conservation des logements. Plus encore, ces mesures peuvent également viser à maintenir la quantité de logements disponibles.»

n(9 h 40)n

Alors, écoutez, bien que l'étude de l'économiste Thibaudeau ? qui, présentée sous un angle seulement, manquait un peu de rigueur à notre avis ? donnait l'illusion que ces contrôles étaient adéquats, dans la réalité, force nous est de constater qu'il s'agit d'un échec. Et je m'explique. À l'exception des deux dernières années, au Québec, au cours des 12 dernières années, les loyers ont progressé à des taux inférieurs à l'inflation. Le premier objectif, de protéger les locataires contre les hausses abusives, a été rencontré. Mais qui donc a pensé à observer les effets pervers que cela a engendré? Alors, premièrement, ces contrôles ont également protégé les mieux nantis de notre société, qui paient et profitent, pour ne pas dire abusent, des loyers les plus bas en Amérique. Plus de 239 000 ménages consacrent moins de 20 % de leurs revenus au logement, ce qui représente 34,7 % des ménages, comparativement à 28,9 % à Toronto et 27,6 % à Vancouver. Les propriétaires privés supportent donc ce manque à gagner.

De plus le président de la SHQ, M. Gariépy, nous a mentionné mardi qu'il y avait moins de logements sociaux au Québec qu'en Ontario, toutes proportions gardées, ce qui revient à dire que le gouvernement du Québec, au fil des années, a refilé une partie de ses responsabilités en logement social aux propriétaires privés. Les propriétaires privés subventionnent donc, en partie, le logement social et, en partie, les mieux nantis de notre société pour le manque à gagner. Que les propriétaires privés du Québec supportent plus que leur quote-part du logement social, passe encore, même si nous considérons que c'est injuste et inéquitable par rapport à d'autres entreprises, industries ou citoyens, mais que ces mêmes propriétaires subventionnent certains locataires mieux nantis, ça, c'est inacceptable.

Le deuxième objectif poursuivi par les instigateurs des contrôles des loyers, soit inciter les propriétaires à entretenir et améliorer leurs immeubles, n'a pas été rencontré. Bien que la grande majorité des propriétaires québécois soient responsables et aient entretenu tant bien que mal, au fil des ans, leurs immeubles, le parc montréalais vieillit, se détériore et surtout ne se renouvelle pas. Pourquoi? Encore les contrôles des loyers. Le député de Saint-Maurice a demandé, à juste titre, à la présidente de la Régie du logement de nous parler du taux d'ajustement des dépenses majeures qui, selon ce qu'il avait entendu dire, équivalait à un amortissement de 20 ans. Mme Desjardins a bien expliqué que ce taux est basé sur la moyenne des placements garantis de cinq ans, plus 1 % comme incitatif. 1 %. Et ça, c'est dans le document Critères de fixation des loyers publié par la Régie du logement.

Mais comment voulez-vous inciter les investisseurs dans l'entretien et la rénovation des logements avec de telles mesures? Quel investisseur sensé ou homme d'affaires ou femme d'affaires sensé veut, pour 1 % de plus seulement, supporter des risques additionnels et surtout avoir les problèmes de gestion, quand on peut faire un taux de placement garanti puis n'avoir aucun problème ni aucun risque? Le message est clair: Propriétaires, ne rénovez pas vos logements, n'améliorez pas vos immeubles.

Ces indices doivent être revus, et nous sommes heureux d'avoir entendu la présidente de la Régie du logement dire, devant cette commission, qu'elle est ouverte à certaines modifications. Nous pourrions créer une table de travail à cet effet en collaboration avec la Régie du logement et revoir les méthodes de calcul. Nous sommes d'avis qu'il serait irresponsable et insensé d'éliminer toute forme de contrôle de loyer que nous connaissons aujourd'hui. Par contre, nous recommandons une réforme partielle et graduelle à cet égard, ce qui nous permettrait d'évaluer les résultats dans le temps.

Aux pages 20 et 21 de notre mémoire, nous soulignons d'autres sections de la loi sur le logement locatif qui méritent d'être revues: notamment, la liberté contractuelle dont le ministre parlait dans le livre blanc de 1977, c'est-à-dire la possibilité pour les propriétaires de ramener à leur juste valeur marchande les loyers lorsqu'il y a remplacement de locataire; aussi la possibilité pour les propriétaires de demander des dépôts de garantie; revoir les effets pervers des articles de loi sur la cession et la sous-location; et enfin séparer les fonctions de tribunal et d'information de la Régie du logement. Montréal étant surtout constituée de petits propriétaires, ces modifications à la loi sur le logement locatif aurait assurément un impact à moyen et long terme.

Enfin, pour desserrer l'intention du marché actuel, des mesures simples, ponctuelles, rapides et efficaces doivent être prises, soit des mesures fiscales. Les allégements fiscaux sont des solutions à court terme pour démarrer la construction d'un certain nombre d'unités de logement rapidement. Ces mesures pourraient être circonscrites dans le temps géographiquement et/ou par type de projet. Une surveillance étroite des réactions de l'offre et du marché serait de mise pour s'assurer que, lorsque le taux d'inoccupation atteindrait un seuil de 2 %, les mesures seraient retirées pour qu'on ne crée pas un surplus. Les projets alors approuvés et déjà commencés pourraient être complétés et terminés, ce qui nous ramènerait probablement à un taux d'inoccupation oscillant entre les 2 et 3 % recherchés.

Maintenant, M. Richard Gianchetti va vous parler de ces mesures fiscales qui seraient souhaitables pour donner un coup de pouce au marché actuel, ces mesures fiscales que vous pouvez retrouver aux pages 22 à 25 de notre mémoire. M. Gianchetti.

M. Gianchetti (Richard): Merci, M. Ayotte. M. le Président, si vous voulez me suivre, c'est au dernier paragraphe de la page 21. Je vais commencer là. Et, au lieu de vous lire tout le document, je vais vous lire juste les points qui sont pointés. Vous donnez trois minutes? On va essayer de vous sortir ça.

Par ailleurs, l'Association recommande des mesures pour relancer la construction d'immeubles locatifs, mesures qui, d'une part, permettraient aux propriétaires d'offrir des logements à des prix de marché et, d'autre part, favoriseraient l'accès au logement. Ces mesures pourraient être de l'ordre de trois niveaux, c'est-à-dire des incitatifs fiscaux à l'achat d'immeubles locatifs, des programmes de subventions à l'investissement pour réduire le coût de construction et, finalement, certaines mesures pour faciliter l'administration et la gestion. Notons que les mesures proposées par l'Association doivent faire l'objet de discussions, comme nous recommandons cette approche dans le domaine des relations propriétaires-locataires.

Premièrement, une déduction ? bonus ? à l'achat de la construction d'une nouvelle bâtisse construite entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2006 ? là, je vais aller juste où les points, les petits points noirs, ça fait que les applications, on en discutera sur les questions tout à l'heure.

L'acheteur pourrait, dès la première année, opter pour un amortissement de 10 %.

Un montant équivalant à tous les frais professionnels pourrait devenir une perte applicable après amortissement.

Un bonus à l'environnement équivalant à 50 % du coût de l'ouvrage qui serait dépensé en supplément pour les coûts d'aménagement paysager.

Si un investisseur a déjà des immeubles et les vend, le profit ainsi que l'amortissement accumulé ne seront pas taxables jusqu'à concurrence du montant investi dans une nouvelle bâtisse construite entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2006. Autrement dit, on prône un programme de trois ans, qui viendrait se rajouter.

Si l'acheteur a bénéficié de la clause précédente et qu'il revend sa nouvelle bâtisse à l'intérieur d'un délai de 10 ans, il deviendra redevable sur ses gains en capital et son amortissement accumulé total s'il avait profité, à l'achat, des déductions d'impôts. Ça, je vous l'expliquerai après si jamais vous ne comprenez pas.

Si, après avoir conservé son immeuble durant 10 ans, l'acheteur le vend et qu'il appartient à la classe 2003-2006, il pourra apporter ses impôts en gain de capital, excusez, il pourra reporter ses impôts en gain de capital et en accumulation d'amortissement sur les cinq années suivant la disposition dudit immeuble en raison de 20 % par année. Pour ce qu'il aura économisé en impôt à l'achat, il ne sera pas pénalisé.

Les gouvernements fédéral et provincial remettraient à l'entrepreneur 100 % des taxes perçues, TPS et TVQ. Cette mesure aurait pour effet de diminuer le coût de construction d'un logement d'environ 12 020 $.

Les gouvernements fédéral et provincial remettraient, au prorata de ce qu'ils retirent, un montant équivalent à 10 $ de l'heure pour couvrir une partie des salaires versés par les employés de la construction. À titre d'exemple, un logement requiert environ 1 000 heures de main-d'oeuvre. Avec cette subvention, le coût de construction du logement serait réduit d'environ 10 000 $.

La ville pourrait ne pas faire payer à 100 % les services d'aqueduc et d'égout, d'asphalte et d'éclairage au promoteur. Cependant, par règlement, la ville refilerait 50 % des frais à la grandeur de la ville, tandis que l'autre 50 % pourrait être facturé... pourrait être une taxe riveraine, ce qui entraînerait une diminution de coût de construction de la bâtisse d'environ 20 000 $.

Les villes aboliraient la taxe de mutation sur tout immeuble qui aurait le certificat 2003-2006. Cette mesure représenterait une diminution de quelques milliers de dollars sur le prix d'achat pour l'investisseur.

n(9 h 50)n

Le coût de construction d'un logement s'élève aujourd'hui à environ 80 000 $. Avec ces mesures, il serait possible de le réduire à environ 54 500 par unité. Après déduction, cet avantage affecterait considérablement le loyer du logement, soit 400 $ par mois au lieu de 600 ? ça, là-dessus, je suis sûr que je vais avoir une question tout à l'heure.

Pendant les cinq premières années, le gouvernement garantirait un taux d'intérêt de 6 % par année.

La municipalité verserait un crédit de taxe foncière pour une période de quatre ans décroissant.

Éliminer la taxe sur le capital à 100 % pour les immeubles locatifs.

Augmenter à 10 ans la période de restriction au droit à la fixation du loyer et à la modification du bail par la Régie du logement.

Faire en sorte que le gouvernement oblige les autorités en place à faciliter l'accès aux jeunes pour les métiers de la construction.

Considérant la réalité de l'immobilier locatif et l'abordabilité du logement au Québec, il est raisonnable de conclure que les propriétaires d'immeubles locatifs du Grand Montréal apportent une contribution sociale inespérée pour le gouvernement du Québec. Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Merci de votre présentation. Je vais peut-être y aller d'un premier commentaire puis une question en même temps, parce que les mesures que vous venez de nous énumérer, est-ce qu'elles... en se mettant en place, est-ce que ça signifie qu'on conserve également toutes les autres mesures d'aide au logement qui existent présentement au gouvernement du Québec de même qu'au gouvernement fédéral?

M. Gianchetti (Richard): Vous pourriez faire tout ça. Ça, c'est des mesures pour inciter l'entreprise privée de retourner dans la construction. Présentement, là, le gros problème, les investisseurs, il n'y a plus de retour sur leur argent. Avant ça, on pouvait regarder un retour de 10 à 13 % sur notre argent investi. Aujourd'hui, on est «minus», on est moins, il nous en reste moins. On perd quasiment de l'argent sur les nouvelles bâtisses. Donc, vous n'avez pas personne... À 80 000 $, là, du logement, vous êtes obligé de louer 8, 900 $, et là, vous éliminez une grosse partie des locataires. Ça fait qu'on ne parle plus de prix abordable dans ce cas-là. Donc, vous pourriez regarder encore une partie parce que, quand on regarde le logement social, c'est 8 % du nombre de logements qu'on a dans la province de Québec. Ça fait qu'on est encore capable de bâtir, l'entreprise privée, puis on a encore de la place, puis on a de la place pour toutes ces organisations-là.

M. Ayotte le disait tout à l'heure, hein, on a de la place pour toutes, toutes les organisations qu'il peut y avoir pour bâtir du logement. Il y a de la place au Québec pour eux autres, mais l'entreprise privée, depuis au moins 10 ans, c'est elle qui subventionne les locataires sur le prix abordable dans Montréal et... Dans toutes les grandes villes où il manque du logement dans le moment, c'est l'entreprise privée qui subventionne les logements.

Le Président (M. Vallières): Merci. Je vous posais la question parce que, hier, l'UMQ est venue nous dire que, en autant que les municipalités étaient concernées, ils ne pouvaient pas remettre un sou de plus, là, dans l'aide au logement. Je vais immédiatement passer la parole à Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, j'ai plusieurs questions, plusieurs remarques. Bon, je pense que vous avez présenté quelque chose d'intéressant. Vous avez une préoccupation qui est d'avoir une espèce de gamme de logements ou de chambres. Vous avez parlé qu'effectivement il y avait de la place pour tout le monde.

Moi, j'aurais une question qui est... Vous dites, bon, on serait capables de faire plus, dans le fond, si on avait des mesures, et là vous nous en avez envoyées, là, une plus une autre, là. Sauf que tout ça, ça a des coûts, hein, ça a des coûts. On a déjà de l'argent... Et plusieurs sont venus nous dire que ce n'était pas un problème d'argent qu'on avait actuellement, c'est un problème de délai, c'est un problème de capacité de livrer. Hier, le FRAPRU a dit qu'il manquait 26 000, je crois.

Une voix: 23.

Mme Doyer: 23 000, et... 16 000 à Montréal et 23 000 pour l'ensemble du Québec.

Moi, la question que je veux vous poser, c'est: Est-ce que, le privé... Vous dites que vous faites du social, hein? C'est ça que je comprends. Est-ce que le privé pourrait faire du social et à quelles conditions? Parce qu'on a AccèsLogis, on a Logement abordable, et ça, c'est sur 15, 25 ans. C'est quand même un nombre d'années qui est peut-être suffisant justement pour faire en sorte que vous ayez une profitabilité de votre investissement. Est-ce que le privé est capable de livrer plus vite? Vous, trouvez-vous ça? Êtes-vous d'accord avec ça? Vous en êtes, des constructeurs, alors, est-ce que vous êtes capables de livrer plus vite puis à quelles conditions? Est-ce que ces délais-là vous apparaissent normaux?

M. Gianchetti (Richard): Moi, premièrement, pour juste porter une attention à ce que vous avez dit au début de votre prononcé, vous avez dit que l'entreprise privée faisait du social. On ne fait pas du social, par la force des choses, on fait du social.

Mme Doyer: Oui, monsieur, c'est vous qui l'avez dit.

M. Gianchetti (Richard): Oui, mais, c'est ça que je vous dis, par la force des choses, c'est nous qui supportons socialement les logements.

Mme Doyer: Mais répondez à ce que... Je vous dis ce que vous avez dit et je veux que vous nous disiez... Parce que vous n'êtes pas des mécènes, on en convient, je pense. Moi, j'en conviens. Puis, au Québec, c'est vrai que la propriété, ce n'est pas... ce sont souvent des petits propriétaires qui ont 10, 20... Il y en a des gros aussi, mais ce n'est pas tout à fait comme en Ontario ou ailleurs. Alors, comment faire en sorte pour que ça reste intéressant dans ce secteur-là et que... Moi, je pense qu'il faut faire feu de tout bois, là, c'est mon opinion, comme parlementaire, pour répondre à ces besoins-là, aussi immenses, en logement. Puis, en même temps, faire attention, parce que, d'une région à l'autre, ce n'est pas nécessairement... la pénurie n'est pas la même, la réponse aux besoins n'est pas la même. Ça se peut... Et les organismes à but non lucratif, les coops, pour moi, ils ont leur place. Vous avez dit aussi qu'ils avaient leur place.

Comment faire pour répondre à cette gamme de besoins là et que vous, les constructeurs, les propriétaires d'appartements, vous puissiez... Parce que c'est un jeu de dominos, hein? On en convient? Si vous répondez... Puis l'économie va bien actuellement. Il y en a qui quittent le foyer familial, qui sont... Les enfants qui collaient à la maison jusqu'à 25 ans, là, bien, ils vont décoller de la maison, hein? Parce qu'ils ont du travail, puis... Bon. Alors, on veut répondre à tout ça.

Puis, hier aussi, il y a des gens qui sont venus nous dire, les locataires... Puis moi, je ne suis pas d'accord tout à fait avec ça. Je pense qu'il y a moyen d'avoir des programmes intéressants d'accession à la propriété. Puis il reste à discuter sur à partir de quel revenu ça peut être faisable, intéressant et qu'on a la capacité de ne pas se couper la tête pendant 10, 20 ans sur sa consommation. Vous comprenez? La qualité de vie, qu'elle reste là quand même, je dirais, de façon satisfaisante.

Alors, est-ce qu'il y a des façons, des solutions aussi, innovatrices qui ont été faites pour des petites maisons, des choses moins coûteuses? Parce qu'il y a des appartements qui pourraient être transformés, je sais que c'est un peu tabou de parler de ça, mais des blocs appartements quand même assez immenses qui pourraient être transformés puis que les gens puissent devenir propriétaires. Moi, ça m'intéresse, ça, que les gens qui sont longtemps locataires, pour ceux qui le veulent bien, puissent devenir propriétaires. À quelque part, c'est intéressant. Ça peut être des solutions, ça. Est-ce que ça a été fait, pensé, des 40 000, 50 000, 60 000, des propriétés? Je sais que je vous en garroche pas mal, là.

Le Président (M. Vallières): M. Ayotte.

M. Ayotte (Pierre): Oui, M. le Président. D'abord, j'aimerais spécifier que l'argent dont vous parlez, qui est sur la table à l'heure actuelle, c'est en grande majorité de l'argent qui est principalement attribué aux domaines public et communautaire. La part du privé dans ce portefeuille-là, elle est bien petite. Et on a dit à plusieurs reprises qu'elle est non seulement petite, mais bien insuffisante pour intéresser le privé à s'impliquer dans la situation actuelle.

Les mesures que nous proposons, soit de déréglementer partiellement et graduellement certaines parties de la loi sur le logement locatif ainsi que les mesures fiscales, ont pour objectif d'impliquer le privé et d'augmenter la part du privé, dans ce contexte-là. On parle d'un portefeuille qui a à peu près 75 % attribué au domaine public et 25 % au domaine privé, alors que le privé occupe 92 % de la place dans le marché.

Mme Doyer: Moi, je veux que vous... Mettons que ce ne serait pas ça, là. Oubliez ça, là. Mettons que ce ne serait pas ça, ce serait quoi, pour vous, pour que vous soyez capables de suivre et de produire et que ce soit intéressant pour vous?

M. Ayotte (Pierre): Eh bien, écoutez, si...

Mme Doyer: Vous nous avez dit: On va déréglementer le prix du loyer, tout ça. Mais à quelles conditions?

M. Ayotte (Pierre): Moi, je vous assure que, si les autorités mettent en place un certain nombre de mesures que nous avons proposées aujourd'hui, il y a des chantiers qui vont démarrer rapidement. À ce sujet-là, M. Gianchetti pourrait peut-être être plus spécifique sur les délais que ça peut engendrer et ce que ça peut prendre par rapport au domaine public. Et peut-être que M. Raby pourra nous donner un complément de réponse sur certains types de projets qui sont abordables et qui touchent des clientèles spécifiques. Alors, je ne sais pas, est-ce qu'on commence avec M. Raby? Allez-y.

Le Président (M. Vallières): M. Raby.

M. Raby (Yves): Oui. Il y a de la place tout partout à construire, au niveau de la construction. On vit de très belles expériences dans plusieurs banlieues de Montréal. Il est évident que, si on veut que le privé construise, il faut dégrossir le système de départ. Le privé est habitué, quand il a préparé son projet, d'agir rapidement. Ce n'est pas aussi complexe que tout un gros organisme gouvernemental ou fonctionnariste.

n(10 heures)n

Donc, si on a des incitations fiscales à nous aider à démarrer, on va investir. Et, généralement, on construit assez rapidement. Des terrains, ça s'achète, et on n'a pas l'habitude de retarder le temps. On est très ouvert aussi à toutes sortes de bâtiments et toutes sortes de raisons sociales. Je connais bien des gens maintenant qui se spécialisent aussi dans des résidences pour personnes âgées, exemple, Alzheimer. Ils n'ont que des Alzheimer dans leurs résidences de personnes âgées.

On voit maintenant de très petites maisons, Saint-Basile-le-Grand est un des beaux exemples. Eux, ils ont pris conscience que, rendus à un certain âge... Nos jeunes veulent, ils ont des rêves, hein! ils ne s'écrasent pas; le petit pain du Québec, il faut que ça disparaisse, ça. Donc, ils ont des rêves, ils veulent construire et ils achètent de très petites maisons, style cottage, pas très grosses, je peux vous dire que c'est un peu plus qu'un logement de 4 et demi, mais c'est déjà un très bon départ. Donc, investissement moins élevé mais déjà un compte en banque, et c'est souvent le seul compte en banque qui va se préparer pour la retraite. Et après ça, on voit d'autres maisons qui se construisent, un petit peu plus chères et encore et encore, et le réinvestissement fait boule de neige pour une retraite.

Le privé est prêt à ça et très rapidement, parce que ça se fait très rapidement dans le privé, mais à une condition, c'est qu'on ait des incitatifs pour que ce soit rentable. Au niveau de la Régie du logement, nous sommes contre ce qu'on vit, comme l'Alberta, trois, quatre augmentations par année, on n'en veut pas. Il faut que tout soit sain et équilibré. Il ne faut pas déséquilibrer et arriver un jour à ce que notre économie soit malade. Quand on va trop dans le déséquilibre, on finit par y goûter après. À se mettre un trou dans le pied, ça ne nous avancera pas, ça ferait juste mal. Donc, c'est déréglementer légèrement d'année en année pour qu'on puisse... Vous savez, un édifice, c'est beau, on dit: Oui, tu le bâtis, tu investis mais c'est comme la naissance: on commence à avoir des rides en naissant. Donc, on vieillit vite, l'édifice vieillit, il faut donc rénover correctement avec les années. Tout ce qu'on veut, c'est ça. Donnez-nous les moyens pour être en bonne santé parmi cette économie parce qu'on est quand même des partenaires corporatifs importants pour vous, et on ne veut pas être des ennemis des biens des partenaires.

Mme Doyer: Bien, je vous remercie.

M. Ayotte (Pierre): Avec votre permission, M. le Président, un complément de réponse sur les délais de construction.

Mme Doyer: Oui, vite, parce que je sais que les collègues veulent poser des questions, mes autres collègues.

M. Gianchetti (Richard): C'est sûr, comme M. Raby disait, si on est capable d'avoir des réponses, on est capable d'avoir les incitatifs, la construction du logement commencerait et, en dedans d'une année, on serait capable de livrer des logements. Mais voyez-vous? vous avez le programme de 500 millions qui a sorti, on n'a pas encore rien vu, de normes ou de quoi que ce soit, qui a sorti depuis ce temps-là et personne ne bouge. Et si vous regardez les constructeurs, s'il n'y a pas d'autres incitatifs, ils n'embarqueront pas, votre programme ne lèvera jamais.

Ça fait qu'il faut que vous ayez... il faut que vous mettiez de la viande après ça pour que les gens puissent embarquer dedans ? c'est figuratif là ? mais il faut qu'il y ait un incitatif. Puis tant que le gouvernement va s'obstiner à ne pas en mettre d'incitatifs, vous allez avoir une pénurie. Puis préparez-vous parce que le mois de juillet s'en vient là, ça va être dans sept, huit mois, puis s'il n'y a rien qui commence avant l'hiver, il n'y a personne qui va être capable de donner un logement de plus au mois de juillet. Ça fait que la marasme qu'on a eu au mois de juillet dernier, on va l'avoir là encore. Ça fait que...

Quand vous disiez tout à l'heure: Ça coûte de l'argent, les incitatifs, il n'y a pas un sou que le gouvernement sort. La seule affaire qui arrive, c'est qu'il en rentre moins. Mais par contre, ça ne coûte pas un sou au gouvernement si vous l'examinez bien comme il faut. Quand il donne un 10 % d'amortissement, ça ne coûte rien au gouvernement. C'est sûr que l'investisseur, bien, il prend une déduction sur son impôt, il paie un peu moins d'impôt, mais, par contre, il faut que vous pensiez qu'il met des logements sur le chemin puis que ces logements-là, vous créez un surplus, puis quand il y a un surplus puis qu'il y a du logement en masse, c'est là que les prix baissent.

Mme Doyer: Je vous remercie, M. Gianchetti.

Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Ayotte, M. Gianchetti et M. Raby, soyez les bienvenus. Votre mémoire est très conséquent avec tout ce que vous avez soutenu jusqu'à maintenant, n'est-ce pas? Votre association, l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal, représente des gestionnaires d'immeubles, hein, parce que le profil des propriétaires au Québec, selon les dernières données, 88 % sont des petits propriétaires. Et vous, vous travaillez dans les grosses quantités de gestion d'appartements, n'est-ce pas?

M. Ayotte (Pierre): Notre association regroupe autant des petits propriétaires que les grandes gestions, sauf qu'évidemment puisqu'il y a une concentration de grandes gestions au sein de notre association par rapport à d'autres associations, évidemment ça vient fausser un peu la statistique moyenne de nombres d'unités.

Mme Houda-Pepin: C'était juste pour situer, en tout cas, les centres d'intérêts que vous avez parce que vous représentez cet aspect de l'immobilier, c'est-à-dire les gestionnaires d'immeubles, n'est-ce pas? particulièrement dans le Grand Montréal.

M. Ayotte (Pierre): Bien, nous représentons également les petits propriétaires parce que nous faisons nos consultations auprès de tous nos membres, les grands gestionnaires autant que les petits propriétaires.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Vous nous avez présenté, à partir de la page 20 jusque vers la fin, une série de propositions. Du même coup, vous vous dites que vous n'êtes pas très favorables à un soutien à l'accession à la propriété, parce que ça représente des coûts. Est-ce que vous avez calculé les coûts des mesures que vous proposez, que ce soit de nature d'aide directe ou de mesures fiscales?

M. Ayotte (Pierre): Écoutez, nous ne l'avons pas fait parce qu'il y a déjà un organisme, la Communauté métropolitaine de Montréal, qui l'a fait et qui représentait sensiblement, avec peut-être un petit peu moins de détails que ce que nous l'avons fait, mais, par contre, plus de chiffres, plus de détails sur l'aspect financier et pécunier. Eux, ils l'ont déjà fait, l'exercice, et puis on parlait, là, d'une économie nette de 15 millions de coût total engendré de 55 millions et d'économie: alors donc, une économie ou un surplus net de 15 millions pour adopter ces mesures-là. Parce qu'il faut bien comprendre toujours que les mesures fiscales que nous suggérons ne sont qu'un rapport d'impôt... un report d'impôt, c'est-à-dire et non un rapport, un report d'impôt dans le temps et, comme M. Gianchetti l'a si bien mentionné, ça n'enlève pas de sous dans les coffres du gouvernement pour le moment et même qu'à la rigueur on pourrait dire que ça n'enlève rien pour le future. Parce que, si on ne le fait pas, cette activité économique là ne sera pas créée et donc ces revenus-là ne viendront jamais et, à la rigueur, on pourrait même soutenir que philosophiquement, ce sont des revenus futurs additionnels potentiels pour le gouvernement.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Mais, quand vous dites, par exemple, que la ville pourrait ne pas faire payer à 100 % les services d'aqueduc et d'égout, d'asphaltage et d'éclairage aux promoteurs, mais qu'elle doit refiler la facture à 50 % pour la ville-centre et 50 % pour les riverains, la taxe riveraine, il y a quelqu'un qui va payer ce coût-là, là. Et nous avons entendu les représentants et de la Communauté métropolitaine, et de la ville de Laval, et de l'Union des municipalités du Québec qui sont venus nous dire que les municipalités sont étranglées actuellement, qu'elles n'ont pas de marge de manoeuvre, qu'elles ne peuvent pas s'engager dans le logement social, parce qu'on parle ici du logement social, n'est-ce pas? et abordable, et que toute initiative qu'on leur demanderait d'entreprendre dans ce domaine doit s'accompagner par des argents qui viendraient du gouvernement du Québec.

Alors, qu'est-ce que vous répondez à ça? Parce que vous dites que les municipalités doivent s'impliquer financièrement, notamment en renonçant à des taxes en faveur des promoteurs, en refilant la facture aux contribuables, parce que c'est les contribuables qui vont payer et, eux, ils nous disent: On ne peut pas faire ça, parce que la taxe foncière ne nous permet pas d'aller dans le social. La taxe foncière, c'est pour payer justement les égouts, c'est pour réparer les routes, c'est pour donner des services directs, des services de proximité à la population, pas pour faire du logement social.

M. Gianchetti (Richard): Mais il faut que... Supposons on recule un petit peu loin en arrière, reculons d'une dizaine d'années. Avant ça, les villes payaient à 100 % leurs services et les promoteurs n'avaient rien à payer sur les services d'égouts, de rues ou asphalte ou lumière. Et, là, depuis à peu près une dizaine d'années, on a commencé à refiler tranquillement la facture aux promoteurs en chargeant 25 % des coûts puis on s'est ramassé, en fin de compte, on paie le 100 % des coûts, et ça, c'est ce qui donne aux villes une chance d'emprunter un peu plus. Parce que, nous, on leur rapporte une plus-value puis une valeur, parce que, quand on demande des services, ça ne nous intéresse plus de laisser le terrain vide, parce que ça nous coûte deux fois plus cher de taxes. Donc, on bâtit une bâtisse dessus, ça leur rapporte... il y a un investissement parce qu'il y a les taxes, il y a l'évaluation.

Avant ça, on l'avait gratuitement; tout d'un coup, on le paie. Puis, depuis qu'on le paie, toutes ces choses-là additionnées ensemble, ça a fait augmenté le coût de nos maisons, de nos blocs appartements. Vous savez que les logements, qui ont monté, ce n'est pas pour rien que les logements ont monté, c'est parce qu'il est venu tout s'additionner une foule de choses par les années puis, ça, c'est arrivé depuis à peu près 10, 12 ans. Personne ne s'en est aperçu puis tout a augmenté puis, un certain moment, on se ramasse que nos logements nous coûtent 80 000 $. Il y a 10 ans, je bâtissais des logements à 39 000 puis, aujourd'hui, ils me coûtent 80 000.

Mme Houda-Pepin: Oui. Mais les coûts ont augmenté pour tout le monde, y compris pour les locataires. Vous avez dit que vous représentez... le secteur privé représente 90 % du logement au... 88?

M. Ayotte (Pierre): 92.

n(10 h 10)n

Mme Houda-Pepin: 92 %, très bien. Sur ce 92 %, il y a combien de logement social comme tel?

M. Gianchetti (Richard): Il n'y en a pas. On fait du social, mais ce n'est pas des logements sociaux.

Mme Houda-Pepin: Donc, vous n'êtes pas actifs dans le logement social comme tel...

M. Gianchetti (Richard): Non.

Mme Houda-Pepin: ...et vous demandez des mesures fiscales et autres pour vous inciter dans ce domaine. Mais, en même temps, quand on écoute les gens du secteur privé, pas tout le monde mais, en tout cas, à certains discours, on nous dit: on ne va pas dans le social parce que ce n'est pas assez rentable, n'est-ce pas? C'est la barrière première qu'on nous indique.

Puisque vous réclamez des mesures fiscales et puisqu'il y a des gens qui nous disent: l'État ne doit pas subventionner le privé pour construire des logements qui vont être à propriété privée, hein? c'est un argument sur lequel il faut réfléchir. Est-ce que vous seriez ouverts pour examiner la possibilité que les mesures fiscales que vous réclamez soient exclusivement appliquées au logement social?

M. Gianchetti (Richard): Non. Non parce que le but dans le privé quand on investit, c'est de faire de l'argent. O.K., il n'y a personne...

Mme Houda-Pepin: Ça, on le comprend, ça.

M. Gianchetti (Richard): Ça, vous, quand vous déposez de l'argent à votre banque, vous voulez un retour dessus. Si on va dans le social, c'est sûr qu'on va être contrôlé par à peu près 10 organismes du gouvernement qui vont venir se mettre le nez là-dedans puis on ne pourra pas...

Mme Houda-Pepin: Non, non, je ne vous parle pas du contrôle. Moi, ma question est très précise. On cherche des solutions à un problème: la crise du logement social et abordable. Le haut de gamme, on ne s'en occupe pas parce que vous êtes bien placés pour le faire, vous le faites bien, vous faites de l'argent, vous investissez là-dedans, c'est rentable. Le problème que nous avons comme parlementaires, comme pouvoir public, c'est qu'on veut trouver des solutions concrètes à la solution de la crise du logement. Nous avons des budgets qui sont sur la table, hein: au total, 1,8 milliard de dollars pour les prochaines années, si on additionne la contribution de tous les niveaux de gouvernement et des partenaires. Et étonnamment, on n'est pas capable de livrer, on n'est pas capable de répondre à la crise. On a eu le 1er juillet 2001, on a eu le 1er juillet 2002 et on se prépare à une crise pour 2003. Et pourtant le logement abordable est là et l'argent est là et ça ne marche pas.

Pourquoi? Le communautaire nous dit qu'ils sont capables de construire si on assouplit les paramètres des programmes et qu'on accélère les mécanismes. Vous, vous venez nous dire: ça nous prend des mesures fiscales pour nous inciter à aller dans le logement social. Mais si le problème qu'on a à régler ensemble, privé, communautaire et institutionnel, c'est la crise du logement social, vous devez peut-être réfléchir à faire une certaine part, hein, du côté du privé pour apporter votre pierre à l'édifice commun, là.

Le Président (M. Vallières): M. Ayotte.

M. Ayotte (Pierre): M. le Président, j'aimerais que la députée de La Pinière nous définisse ce qu'elle entend par logement social, et là je m'explique parce que ça peut porter à confusion, là. Moi, j'administre des ensembles immobiliers de plus de 1 500 unités de logement où les loyers sont tous inférieurs à la moyenne de la SCHL pour le Québec. Est-ce que ça c'est considéré comme une contribution du privé à de la gestion de logement social? Sans aucun doute que, dans notre livre à nous, ça en est. Et dans l'allocution que j'ai faite au départ, on a clairement montré que le secteur privé subventionnait en partie le logement social à la place du gouvernement et en partie les locataires les mieux nantis qui peuvent profiter de logements très, très bas au Québec. Alors, ça, c'est une première question.

Mme Houda-Pepin: Très rapidement, M. Ayotte, je vous réponds à la question, puisque vous la posez, parce que ce n'est pas ma définition, c'est la définition gouvernementale de ce qu'on entend par logement social. Généralement, un logement social, c'est lorsque l'État intervient pour aider une personne à faibles revenus ? à faibles revenus ? à payer pas plus que 25 % de son revenu au loyer. Donc, l'État intervient par ce 25 % pour aider la personne à se loger correctement puis vivre aussi par ailleurs.

M. Ayotte (Pierre): Mais dans ce cas, ce que M. Gianchetti a expliqué comme mesure fiscale contribuerait à ramener le loyer de base considérablement plus bas que ce que le loyer économique commanderait, et ça, en soi, ça peut devenir du logement social. Ça dépend de combien sera mis dans l'enveloppe au niveau des mesures fiscales et donc de combien on pourra réduire le loyer de base pour le ramener le plus près possible aux objectifs que l'État se fixe.

Mme Houda-Pepin: Je comprends que vous vous donnez une définition beaucoup plus large de ce que c'est que le logement social, mais vous conviendrez avec moi qu'on ne pourra pas contrôler à ce moment-là toute la dynamique du logement social pris dans la définition que vous proposez.

Mais, toujours est-il que je constate, moi, qu'il y a une sorte de fossé entre ce que sont les besoins et ce qu'est la réalité du marché. Et on essaie de trouver des solutions pour dire comment est le privé. Parce que, moi, pour ma part, je crois que le privé a un rôle à jouer et je souhaiterais que le privé puisse prendre un certain leadership dans ce domaine pour dire: On va faire notre part. Il faut trouver les mécanismes. Mais, lorsqu'on revient toujours à demander des mesures fiscales qui sont quand même assez coûteuses... Je n'ai pas eu le temps de calculer tout ce que ça peut coûter mais ça va coûter beaucoup d'argent, ça, aux contribuables québécois pour développer un parc qui, ultimement, va devenir privé. Et la question se pose là puis il y a des groupes qui l'ont posée avant vous puis il y a d'autres qui vont la poser après vous.

Alors, si vous êtes ouverts... Et je pose la question maintenant et je sais que les autres groupes qui vont se présenter devant nous représentant les secteurs privés, pourraient réfléchir ? parce qu'ils sont parmi nous ? sur la possibilité peut-être d'appliquer des mesures fiscales exclusivement au logement social pour régler le problème que nous avons. Parce que, si on l'applique à l'ensemble de la construction, comment on va contrôler que les investissements vont aller justement là où ils devraient aller, là où il y a les besoins? C'est ça, la question. C'est ça, le problème que nous avons et qu'il faut régler.

Le Président (M. Vallières): Alors, voilà, cette réponse va clore la partie de l'intervention.

Une voix: ...à ma question.

Le Président (M. Vallières): Oui, pas vrai, déjà 15 minutes sont dépassées. Mais, donc, une réponse sur une question qui nous apparaît fondamentale des deux côtés de cette table.

M. Raby (Yves): J'aimerais répondre, madame. Quand vous parlez de logement social, vous parlez aussi du fameux projet de Logement abordable, j'imagine. Bon.

On a fait des approches, nous, au niveau de... on avait acheté des terrains, on était prêt à construire et on avait approché... Et le fonctionnaire qui nous a expliqué, nous avait dit: Non, c'est seulement qu'à Montréal, Québec et Chicoutimi. On a dit: Écoutez... nous, on était dans la banlieue de rive sud. «C'est refusé, monsieur, il faut que vous soyez dans l'île de Montréal.» J'ai dit: Écoutez, là, je pense que vous vous trompez peut-être, regardez plutôt le grand Montréal et on est dans un taux d'inoccupation de 0 %. «Impossible, monsieur, Montréal, Québec et Chicoutimi.» On a laissé tomber puis on a vendu les terrains. Bonjour, c'est fini. Et on a vu cette lourdeur. On ne peut pas avancer comme ça.

Ce que M. Gianchetti vous explique en fin de compte, c'est: donnez-nous les allégements fiscaux, là, puis faites-vous en pas, on va avancer, nous autres; on ne l'aura pas, cette lourdeur-là. O.K. On aura à peu près les mêmes incitatifs présentés d'une autre forme mais on va avancer parce qu'on est habitués. Notre taux dollar investi est important pour nous, d'accord? Donc, quand on investi, c'est rapide, ce n'est jamais très long. C'est ça qu'on veut vous dire, madame. On l'a faite, l'approche.

Et le maire... parce que vous savez que c'est la municipalité qu'il fallait qui fasse la demande. Nous, on a quand même été poser des questions aux fonctionnaires, et la municipalité a eu la même réponse et pourtant la municipalité l'a dit: Écoutez, on est dans 0,0 %, on a un problème. «Ah! non, c'est l'île de Montréal.»

Quand c'est rendu lourd comme ça puis que, peut-être, le fonctionnaire n'a jamais fait le secteur, bien, c'est évident qu'on voit qu'il faut que ça s'en vienne vers le privé et qu'on désalourdisse le système. Transférez-nous des allégements fiscaux, on va se mettre en marche parce qu'on n'a pas cette lourdeur là alentour de nous. On a notre nombril à nous. On a nos immeubles. Et c'est là qu'on va se mettre en marche parce que c'est moins complexe pour nous. On a déjà une base pour partir puis on part. Donc, on a vendu nos terrains puis ça a été fini, madame. C'est de valeur.

Mme Houda-Pepin: Mais, je suis très étonnée de ce que vous dites là. Parce que, en fin de compte, le logement abordable s'adresse à toutes les municipalités qui ont un taux d'inoccupation de moins de 3 %, c'est-à-dire celles où sévit la crise du logement. Alors, il n'a jamais été question de limiter ça nécessairement à...

M. Raby (Yves): Toutes les réponses qu'on a eues, et vous voyez, la ville de Saint-Basile a été refusée.

Mme Houda-Pepin: Oui, je sais, mais vous n'êtes pas le seul groupe à nous signaler des problèmes et ça fait partie des choses qu'il faut régler. Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Bien. J'avais une demande du député de Roberval.

M. Laprise: Moi, si je comprends bien ? je voudrais bien vous saisir, ce vous dites ? si, par exemple, le gouvernement disait: O.K. on vous donne les abris fiscaux que vous demandez dans votre document à ce moment-là, vous seriez en mesure de fournir des logements à prix abordable sans pour autant qu'on subventionne la personne qui viendrait s'établir dans vos logements. Ou, encore, on dit: On ne vous donne rien de ça mais, par contre, on permet à la Régie du logement que vous fixiez votre prix pour être en mesure de faire un profit raisonnable. À ce moment-là, nous autres, on subventionne la personne qui va dans votre logement pour ne pas qu'elle paie plus que 25 % de son revenu, par exemple. À ce moment-là, ça pourrait être une formule qui pourrait être acceptable...

n(10 h 20)n

Une voix: Écoutez, moi...

M. Laprise: ...parce qu'il y a un cercle vicieux dans votre affaire, comme vous dites, là. Vous dites: Voyez-vous, nous autres, on veut résoudre le problème du logement des plus démunis, vous nous dites: Les mieux nantis paient 20 % de leur revenu pour leur logement, et les démunis paient 30 % puis 35 % de leur revenu. Alors, il y a une équité qu'il faut retrouver.

M. Ayotte (Pierre): Et là, j'aimerais revenir sur le fait que ? et j'insiste ? les mesures fiscales ne représentent pas des coûts pour l'État, parce que cette activité économique là ne prendrait pas place. La construction de logements dans le secteur privé ne se fera pas à moins que ces mesures fiscales soient adoptées. Donc, ce n'est pas des coûts mais bien un report d'impôts, et vous avez parlé d'abris fiscaux. On ne parle pas d'abris fiscaux, mais bien d'un report d'impôts dans le temps, d'une part.

D'autre part, c'est que, lorsque le privé est mis à contribution dans la création d'unités de logement, on a entendu parler beaucoup devant cette commission de l'effet de percolation. Donc, nous, on est en mesure de faire du logement abordable, pas nécessairement social en fonction de la définition de l'État, mais, en mettant sur le marché un certain nombre d'unités de logement abordable, automatiquement, il va se libérer une certaine quantité de logement social.

Le Président (M. Vallières): Bien. D'autres demandes d'intervention? M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Oui. Moi, M. le Président, j'avais hâte que vous me cédiez la parole, parce que, vous savez, je frémis depuis plusieurs minutes quand je vous entends dire qu'une mesure fiscale, ça n'a absolument pas de coûts pour l'État. C'est phénoménal, ce que vous me dites là, vous! J'ai toujours étudié à l'université, moi, que, lorsqu'on donne à un citoyen une mesure fiscale ou, à une entreprise, une mesure fiscale, on ne peut pas récupérer. Alors, j'aimerais comprendre, à la page 23 de votre mémoire: «Si un investisseur a déjà des immeubles et les vend, le profit ainsi que l'amortissement accumulés ? et Dieu sait, probablement, que, parmi vous, vous devez sûrement avoir des propriétaires qui ont amorti leurs immeubles jusqu'à la corde ? ne seront pas taxables jusqu'à concurrence du montant investi dans une nouvelle acquisition.» Et là, si je continue, on s'aperçoit que le but recherché, c'est de faire en sorte que, si, moi, j'ai 55 ans, j'ai acquis un immeuble il y a de cela 30 ans, que mon amortissement est à zéro, que je n'ai plus d'hypothèque dessus, que j'ai acquis mon immeuble pour une somme de 20 000 $ il y a 30 ans, le même immeuble aujourd'hui en vaut 100 000... Ce que vous me dites, c'est que l'impôt doit oublier l'amortissement que j'ai pris pendant 30 ans et l'impôt doit oublier également la prise de profit qui est taxable.

Et vous me dites que ça n'a aucune espèce de coût pour l'État. Écoutez, vous n'êtes pas sérieux. Vous savez très bien que, lorsqu'on met une mesure fiscale en place, on sait très bien que, dans un certain laps de temps, nous allons récupérer. Vos mesures, Monsieur, à la page 23, m'apparaissent carrément être une façon détournée, une façon détournée de ne point payer l'amortissement et de ne point payer également le gain en capital. Ça m'apparaît très, très clair. Maintenant, si vous voulez me parler des autres mesures, O.K., je dois... Sur celle-là, monsieur, vous êtes...

Une voix: ...

M. Pinard: Est-ce que je peux vous répondre sur celle-là?

Le Président (M. Vallières): Alors, il nous restait deux minutes au total. Donc, la réponse va clore...

M. Gianchetti (Richard): J'aimerais répondre à monsieur. Le but de ça, ce n'est pas d'essayer de sauver de l'impôt ou quoi que ce soit, c'est...

Une voix: ...

M. Gianchetti (Richard): Non. Le but de ça, c'est de donner une chance à des gens d'acheter des nouvelles bâtisses, de construire plus de logements. La personne qui arrive comme vous, là, vous avez acheté une bâtisse à 20 000, vous la revendez 100 000, vous avez 80 000 $, vous l'avez dépréciée, mettons, vous l'avez dépréciée à 100 %, vous avez un package d'à peu près 125 000 $, 150 000 $, que vous payeriez de l'impôt dessus. Si vous prenez de votre argent que vous avez présentement dans vos poches puis vous achetez une nouvelle bâtisse qui vous... qu'on bâtit puis qu'on met du logement sur le chemin et que vous investissez 150 000 $ dessus, votre investissement va annuler les profits et l'amortissement que vous aviez d'accumulés. Mais, par contre, vous l'avez, vous venez de le réinvestir dans une nouvelle bâtisse, ce qui donne une chance de bâtir du logement, d'en bâtir du nouveau sans que...

Parce que, aujourd'hui là, il faut que vous compreniez quelque chose, monsieur, c'est que des investisseurs, il y en a de moins en moins. Les gros investisseurs qu'on avait dans les villes, qui avaient 2, 3 000 logements, vous n'en avez plus de ça. Ces gars-là sont rendus vieux. Il faut que vous preniez du monde qui ont accumulé un actif quelque part puis que vous les incitiez à racheter de nouvelles bâtisses pour faire construire du logement. En faisant construire du nouveau logement, vous allez mettre plus de logements, vous allez réatteindre votre 2 et 3 % de vacances; c'est ça qui est le but.

Vous avez la plus belle preuve qu'il n'y a pas de ce que je vous dis: depuis trois, quatre ans, vous les comptez quasiment, dans les villes puis dans les choses, sur les doigts de votre main, les logements qui se bâtissent. Il ne s'en bâtit pas puis il ne s'en bâtira pas. Oubliez ça là, il ne s'en bâtira pas, du logement. Les investisseurs, on n'est plus intéressé à ça.

Quand vous êtes rendus avec des logements qui coûtent 80 000 $ du logement à bâtir parce que vous avez toutes sortes de lois qui ont été enlevées depuis plusieurs années, les gars ne sont plus intéressés à bâtir. On va placer dans des CPG à 1,7 puis on fait plus d'argent que ça, que ce qu'on fait, puis on n'a pas le problème d'avoir des locataires qui viennent vous chialer puis qui vous amènent à la Régie puis que vous êtes obligé d'aller vous battre à la Régie puis passer pour un innocent à l'autre bout parce que vous êtes le gros méchant qui veut manger un petit locataire. C'est fini, ce temps-là. Les investisseurs ne veulent plus s'embarquer là-dedans. Il faut que ce soit payant. Il faut qu'il reste un peu d'argent. Je ne dis pas de faire des millions, mais qu'il en reste un peu. Et cette chose que j'ai sortie, lisez l'autre, la suivante aussi, si l'autre, la...

M. Pinard: Alors, je l'ai lue, monsieur. J'ai une formation en la matière.

M. Gianchetti (Richard): ...si , la suivante, le gars vend sa bâtisse avant les 10 ans, l'impôt qu'il a sauvé, il va le repayer là. Ça fait que vous n'êtes pas perdant, le gouvernement.

M. Pinard: C'est une excellente façon, par exemple, de mettre à l'abri pour la succession, n'est-ce pas?

M. Ayotte (Pierre): Cinq secondes pour conclure, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Attention. Oui. M. Ayotte, vous allez clôturer. En conclusion. Oui.

M. Ayotte (Pierre): Merci. Écoutez, il faut se souvenir que nous avons mentionné, dans le mémoire et dans notre allocution, que ces mesures fiscales pourraient être circonscrites dans le temps, géographiquement et sur le type de produit. Alors, il ne s'agit pas ici, là, de se protéger de l'impôt ad vitam aeternam.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, ceci met fin à nos échanges très intéressants. Alors, merci d'avoir contribué à nos travaux.

Je demanderais maintenant au Réseau québécois des organismes sans but lucratif d'habitation de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Alors, on vous prierait de vous identifier et de faire votre présentation dans les 15 prochaines minutes. La parole est à vous.

Réseau québécois des organismes
sans but lucratif d'habitation (RQOH)

M. Johnston (John): Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je veux vous remercier pour nous avoir permis de présenter notre mémoire devant vous, prendre le temps aussi de partager avec vous nos préoccupations. Je me présente. Je m'appelle John Johnston. Je travaille à la l'Accueil Bonneau. Je suis aussi président du Réseau québécois des OSBL à l'habitation. À ma gauche, c'est M. Serge Bergeron, président de la Fédération des OSBL d'habitation de Montréal, la FOHM et, à ma droite, M. Pierre Goyer qui est coordonnateur du Réseau québécois des OSBL d'habitation..

On s'excuse tout d'abord pour le retard de notre mémoire, mais vous l'avez maintenant, donc... Je peux comprendre vous n'avez pas eu le temps de le lire.

n(10 h 30)n

Les organismes sans but lucratif constituent un des trois grands parcs de l'ensemble du logement social. Il y a 25 000 unités OSBL au Québec, soit environ le quart de l'ensemble du parc du logement social. Le monde OSBL recouvre une grande diversité de modèles, de clientèles et d'expériences distinctes avec une forte dominance d'organisations dédiées aux personnes vivant avec des difficultés particulières: personnes âgées, personnes seules, dont les itinérants, personnes atteintes d'handicaps physiques ou sociaux. Presque toutes ces personnes qui habitent nos maisons sont pauvres, très pauvres. En plus d'un gîte, elles bénéficient d'une aide financière pour le loyer.

Alors, que faisons-nous exactement? Nous nous occupons de plus que de la brique et du béton. Par exemple, à l'Accueil Bonneau, nous offrons du logement à plus de 120 personnes. Ils sont supportés par un personnel employé, huit personnes, appuyé par un bataillon de bénévoles dans trois maisons pour sans-abri. Que font ces gens à l'Accueil Bonneau? Ils abritent des itinérants; ils offrent du support communautaire, de l'aide à la personne; ils fournissent deux repas par jour; ils font de l'animation. Bref, ils fournissent, en plus d'un toit, un milieu de vie adapté aux groupes les plus marginalisés de Montréal. C'est aussi, par exemple, La Maison d'un nouvel élan, une résidence pour personnes âgées en perte d'autonomie à Jonquière, qui aujourd'hui s'agrandit et qui fournit à ses résidents un milieu de vie, de l'animation, trois repas par jour, une surveillance continue, de l'accompagnement physique; ou encore le foyer Laurentien de M. Bergeron, un travail exemplaire.

Il y a, comme ça, des centaines d'organismes, d'organisations au Québec, une formule originale qui vient en aide aux personnes les plus démunies, en fait, à toutes les personnes marginalisées ou qui pourraient l'être en raison de leur âge, leur condition physique ou de leur condition économique. Nous avons, pour ces clientèles, développé une expertise maintenant reconnue par l'ensemble des acteurs et des observateurs du logement social. Cette expertise s'appelle le support communautaire. Il est innovateur. Il est un partenariat important avec d'autres organisations et les bénévoles. Plusieurs études ont démontré sa validité, son efficacité. On note la démonstration de l'efficacité et de ses approches: une amélioration de la stabilité locative, une réduction de l'utilisation des ressources lourdes du système de santé et du système carcéral, une réduction des méfaits, une augmentation de la qualité de vie, un soulagement de la pauvreté, etc.

On l'a dit, au-delà de la brique et du béton, les OSBL offrent une gamme impressionnante de services aux résidents. Ces services pourtant ont un coût. Nous avons récemment calculé qu'un service de base dans nos maisons équivaut à un coût d'au moins 350 $ par unité par année. Il s'agit ici d'un service minimal d'accueil, de référence et d'évaluation s'adressant à des clientèles en légère perte d'autonomie. Le coût peut facilement atteindre plus de 4 000 $ pour les clientèles plus lourdes. Le financement de ces services, vous l'aurez bien deviné, constitue aujourd'hui notre préoccupation principale. Si on admet que toute réflexion sur le logement social et le logement abordable doit aussi concerner les populations marginalisées ou en voie de l'être et les groupes vivant, à des différents niveaux, des problématiques d'exclusion, toute réflexion sur le sujet devrait amener une intervention sur les moyens d'assurer un support communautaire. C'est une dimension essentielle à la question du logement.

La demande de financement du support communautaire concerne, dans les faits, un ensemble très varié de logements sociaux tant publics que communautaires. Pour mesurer efficacement la demande qui existe dans le réseau communautaire, la mesure la plus précise consiste à répertorier le nombre d'unités d'habitation produit dans le cadre des programmes gouvernementaux. Pour les fins de l'exercice, nous considérons donc essentiellement les logements produits dans le cadre des programmes les plus récents. Cela est d'autant plus pertinent que ces programmes mis en place depuis un peu plus de 10 ans encouragent la formation d'ensemble de logements avec support communautaire.

En fait, il s'agit ici de satisfaire les besoins de financement du support communautaire pour les projets de logements sociaux pour lesquels le gouvernement a souhaité du support communautaire. Cela apparaît d'une logique un peu simpliste, mais cela permet surtout de bien cerner les priorités et de correctement mesurer la demande. Cela permet aussi de donner des conditions égales de financement au sein des programmes pour lesquels certains projets ont reçu une forme de soutien financier alors que d'autres ont été exclus. Les programmes concernés sont le Programme de logement sans but lucratif privé, le PSBLP, et les programmes d'AccèsLogis passés et futurs, jusqu'en 2006. Nous souhaitons donc la mise en branle d'un programme visant à soutenir financièrement le support communautaire offert dans un peu moins de 10 000 unités, incluant les projets à venir au cours des cinq prochaines années.

Voyons d'abord les grands principes qui pourraient guider ce projet de financement du support communautaire. Le projet serait destiné aux organismes sans but lucratif dont la mission principale est d'offrir un toit permanent aux clients desservis. Le financement tiendrait compte des considérations suivantes: admissibilité aux programmes de logement social et communautaire du gouvernement québécois, clientèle desservie, nombre d'unités, etc. Le programme devrait être géré à l'échelle de la municipalité ou du territoire de la régie régionale. Les mécanismes d'application du programme seraient sous la responsabilité des intervenants sociaux des milieux OSBL, Régie de la santé, SHQ, ce qu'on appelle la table des partenaires. La subvention de financement du support communautaire serait accordée sur une base pluriannuelle, entre trois et cinq ans, renouvelable.

Il peut être difficile, à ce moment-ci, de chiffrer exactement le coût d'un tel programme, mais, compte tenu de l'ampleur du parc touché et surtout considérant l'état des besoins ainsi satisfaits, la somme paraîtrait minimale en regard des programmes actuels existants dans le réseau de la santé. Et, quand on sait les économies réalisées par la prise en charge par la communauté des besoins qui autrement seraient la responsabilité du réseau des services sociaux, nous croyons qu'une somme de 10 millions, sur la base annuelle, est une goutte d'eau dans l'océan des besoins sociaux. Pour dire les choses simplement, le programme coûterait 10 millions pour 10 000 unités de logement. C'est peu. On estime qu'avec 10 millions nous pourrions ainsi venir compléter le financement du support communautaire dans près de 10 000 unités. Nous appelons ce programme le 10-10-10, 10 millions pour 10 000 logements pendant minimalement 10 ans. Ce programme constitue une priorité pour nous. Il se trouve à l'intérieur de notre propre développement de l'habitation communautaire. M. Serge Bergeron va maintenant vous expliquer plus en détails ce que nous voyons de l'avenir du secteur de l'habitation.

M. Bergeron (Serge): Alors, mesdames, messieurs de la commission, avant de vous parler de nos plans d'avenir qu'on aimerait proposer, permettez-moi de parler un petit peu du document de réflexion qui a été soumis à la commission. Ce document parle beaucoup, et c'est légitime et essentiel, du logement privé et même... Nous, en fait, du secteur du logement communautaire et public ? je nous mets sous le nous collectif, là, même si on est des OSBL ? même si on est seulement que 8 % ? d'ailleurs, je m'interroge sur ce pourcentage-là, je crois qu'il est plus élevé ? on s'adresse quand même à plus de 500 000 ménages, et je me réfère à des statistiques de 1996, donc plus de 55 % des ménages québécois qui dépensent plus de 30 % de leurs revenus pour se loger. On a besoin d'un secteur privé et d'un secteur public et communautaire en santé, les deux.

Donc, ce document de réflexion qui a été soumis à la commission se situe dans un contexte très effervescent, très mouvementé. Il y a une pénurie de logements à loyer raisonnable, ce qui est l'objectif qu'on tente de régler ensemble avec vous. Depuis quelque temps, il y a eu des gestes qui ont été posés par les instances gouvernementales pour tenter de remédier à cette situation. Il y a eu une mise en chantier de nombreuses unités, de 13 000 unités de logement social et abordable qui a été démarré mais qui bat de l'aile un peu dans son envol, si on veut. Le gouvernement fédéral a décidé enfin de réinjecter des fonds dans le logement social par le biais du programme IPAC et ensuite dans le logement abordable. Sur la scène provinciale, après avoir renouvelé le programme AccèsLogis, on a donné donc, en fait redonner des pouvoirs nouveaux, des responsabilités nouvelles et des obligations nouvelles aux municipalités, notamment par la loi n° 49 qui a été débattue devant vous en novembre dernier et aux instances qui en relèvent dont, entre autres, les offices municipaux d'habitation.

Depuis plusieurs mois, il y a une vaste campagne pour que le gouvernement réinvestisse dans le secteur privé pour faciliter, dit-on, la construction de logements locatifs et abordables. On est très sceptiques à ce sujet du «trickle down» ou de la percolation. Mais, cependant, on est d'accord avec les auteurs du document à l'égard de certains principes généraux: la nécessité de mettre à jour les pratiques dans le domaine du logement social et communautaire, sur le caractère durable, essentiel aux interventions ou aux programmes, sur l'autosuffisance du secteur communautaire et sur le développement d'un fonds d'investissement pour justement donner de cette durabilité et de l'autosuffisance au secteur communautaire.

On est aussi convaincu qu'il est nécessaire de préserver les acquis qui sont menacés justement par une certaine tendance néolibérale ? je mets ça dans le contexte général et non politique du terme ? dont la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, un corps législatif et réglementaire sur l'industrie de la construction et la régulation du marché par la Régie du logement. On met ces éléments en doute et, nous, on ne croit pas tellement que ce soit productif, dans le contexte que ça va créer beaucoup plus d'unités, donc finalement les gens à faibles revenus vont pouvoir bénéficier, par déboulement si on veut, de logements abordables, en bout de ligne.

n(10 h 40)n

On est surtout sceptique sur certains aspects du rapport qu'on trouve vraiment essentiels de réviser ou de repenser: entre autres, aux rôles qui sont proposés pour les GRT: le passage de statut de conseiller-promoteur-développeur à celui de propriétaire, ce qui les amènerait à d'importants changements professionnels à l'égard des OSBL ou des coopératives, par exemple; aux jugements de valeur portés sur le parc coopératif, et surtout sur la suggestion de transférer le parc coopératif au milieu, malgré qu'il y a certainement des éléments intéressants là-dedans, mais la mécanique n'est pas proposée et ça mérite réflexion; à l'abandon du Volet I d'AccèsLogis. Et on n'est pas aussi nécessairement confortables avec les commentaires qui sont destinés aux OSBL, qui nous sont destinés, dans ce document-là.

En fait, ce que le document de consultation propose, c'est une restructuration complète, un grand chambardement du logement social et communautaire. Ce qu'on vous propose, nous, c'est de permettre aux acteurs concernés, notamment les GRT, les coops et les OSBL, de réfléchir ensemble à mieux se coordonner, à revoir eux-mêmes leurs pratiques, à s'intégrer localement pour mieux répondre ensemble à la demande en logement de leur milieu. Il y a une maturité, une vision individuelle de plus en plus grande chez chacun de ces partenaires-là et une vision collective naissante de plus en plus claire qui démontrent qu'un partenariat de tous ces acteurs-là ensemble est essentiel pour faire marcher cette révision et cette restructuration.

On a développé depuis quelque temps l'habitude de travailler ensemble. Il y a un fonds québécois de l'habitation communautaire qui a été mis sur pied il y a plusieurs années et, entre autres, il y a un comité de suivi actuellement du Fonds québécois de l'habitation communautaire qui fait ses preuves et qui démontre que, quand le monde communautaire travaille ensemble, en cohérence et en partenariat avec les instances gouvernementales et le pouvoir politique, il y a moyen de faire marcher la machine. Et, entre autres, à Montréal aussi et dans les régions, il commence à s'instaurer de plus en plus un travail de partenariat entre les différents acteurs locaux et régionaux. À Montréal, entre autres, dans certains arrondissements, on a établi des comités d'habitation où tout le monde travaille ensemble: coops, OSBL, GRT, l'Office municipal, certains partenaires locaux, les comités de logement, etc. La solution, je pense qu'elle est locale, elle est dans le milieu et elle est collective.

Donc, il y a une nouvelle culture qui s'amorce, et ce qu'on aimerait et qui n'est peut-être pas nécessairement reflété dans le document de réflexion qui vous a été présenté, c'est qu'il faut favoriser cette chose-là et non pas imposer d'en haut des solutions toutes faites, qui sont peut-être bonnes mais qui veulent peut-être être des réactions isolées à des problèmes particuliers.

En fait, ce qu'on veut justement... Pour être capables d'amener cette nouvelle culture de partenariat, etc., on a besoin d'avoir un plan de développement de l'habitation communautaire. À cet effet, un groupe de travail entamera ses travaux d'ici la fin du mois. Ce groupe de travail doit déployer toutes les ressources nécessaires afin de faire le point sur plusieurs aspects de l'habitation communautaire. Cela comprendra un état de la situation, un diagnostic, des recommandations sur les moyens et les outils nécessaires et les partenariats possibles. Ce plan de développement de l'habitation communautaire...

Le Président (M. Laprise): Il vous resterait environ une minute.

M. Bergeron (Serge): ... ? d'accord, merci ? a été approuvé par la Société d'habitation du Québec et devrait comprendre ces différents chapitres au niveau de la promotion du secteur, la consolidation et l'amélioration du parc de logements et surtout son développement.

En fait, ce qu'on désire, c'est être mieux outillés pour être mieux structurés. Actuellement, le monde OSBL est un peu le parent pauvre pour s'acquitter de sa mission localement dans ses projets. C'est pour ça qu'on a besoin de support communautaire. Mais je dirais qu'on a besoin aussi d'un plan de développement qui va donner un support collectif à ce mouvement-là. On n'a pas de permanents, on n'a pas d'outils, et il faut justement réfléchir à toutes ces questions, travailler ensemble, amorcer une nouvelle culture, faire marcher le développement des nombreuses unités, des nombreux nouveaux programmes. Alors, ce qu'on a besoin, dans le fond, c'est d'avoir de l'appui de votre part, de la part du gouvernement, pour nous aider à créer cette culture-là.

Donc, selon nous, le règlement du problème de la pénurie de logements doit inclure un développement et une consolidation du logement communautaire et public en harmonie avec le développement du logement privé, et on vous demande d'appuyer ce que, nous, on veut faire à l'intérieur de ça en tant que mouvement des organismes OSBL. Le monde OSBL est prêt à travailler avec vous, avec ses interlocuteurs gouvernementaux et avec ses partenaires du monde du logement public et communautaire pour que nous trouvions ensemble des solutions et élaborer un plan, et un plan cohérent, qui donnera des résultats. Merci de votre attention.

Le Président (M. Laprise): Merci beaucoup, Monsieur. Je demanderais à Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, moi, je vais y aller... D'abord, je trouve que vous nous avez présenté un excellent mémoire, puis je vais vous dire aussi mon admiration, parce que je sais que vous faites du travail terrain, vous êtes présents, puis souvent ce sont des clientèles qui autrement seraient probablement abandonnées, j'ose le dire comme ça, ou qui se retrouveraient on ne sait pas trop où. Alors, je vous dis ma grande admiration parce que vous travaillez souvent avec des clientèles lourdes. Alors, moi, je pense que vous avez des clientèles lourdes pour une partie du travail que vous faites et vous avez aussi les organismes à but non lucratif qui ressemblent... Pour moi, ça ressemble aux coops aussi, hein?

Alors, j'aimerais... Vous avez parlé de soutien communautaire, de services, tout ça. Est-ce que vous êtes suffisamment financés? Quels sont les services dont vous auriez besoin? Puis là je pense qu'il y a les services pour les clientèles qui sont les vôtres, qui sont souvent lourdes, comme je le disais, et il y a ce qui est plus le service aux gestionnaires ou la formation à ceux... Je ne sais pas, là, j'aimerais bien comprendre ces choses-là, et je pense que vous êtes rendus au point aussi de voir, comme nous, qu'il y a de la place pour un petit peu tout le monde. Je vois que vous n'êtes pas d'accord avec la proposition de donner davantage de place aux GRT comme producteurs, et tout, mais je pense que peut-être eux autres n'en veulent même pas. Alors, ça fait que ça, là, ce bout-là, je veux bien vous dire que nous avons déposé un document et que ce document-là, nous, nous nous gardons toute la latitude, autour de cette commission, des membres de la commission, pour en juger ultérieurement.

Alors, moi, j'aimerais... Effectivement, pour aller chercher le nombre de logements dont on a besoin, pour répondre à toutes ces clientèles-là, je pense qu'il faut mettre à contribution tout le monde. Et peut-être qu'à Montréal... pas peut-être, à Montréal, dans certaines régions, ce n'est pas tout à fait la même problématique. Chez nous, les HLM, par exemple, les OMH sont très actifs, répondent bien aux problèmes. Alors, moi, j'aimerais ça que vous reveniez là-dessus, puis au niveau des services, des besoins, l'argent.

M. Johnston (John): Je peux répondre, au niveau des services. Bien sûr, on trouve qu'on n'est pas assez financé. Mais je laisserais peut-être Pierre répondre plus spécifiquement au thème des questions au niveau des chiffres.

M. Goyer (Pierre): Essentiellement, on avait l'habitude de dire... Merci de vos commentaires, madame. Effectivement, on s'adresse à une très grande variété, une diversité de clientèles, vous l'avez bien saisi, et souvent même elles recoupent... Vous nous avez comparés tantôt à des coops d'habitation, mais on peut se comparer aussi à des petits offices municipaux.

Mme Doyer: Ça se ressemble, dans le fond.

M. Goyer (Pierre): Et nos clientèles se recoupent puis c'est juste géré différemment. Mais, en plus, on offre des services aux résidents, et il y a une foule de clientèles, des itinérants, comme John le reflète, jusqu'à M. Bergeron, aux personnes âgées en perte d'autonomie. On a fait un tableau, je pense, qui illustre assez bien...

Mme Doyer: Je le trouve intéressant parce que, moi, c'est la première fois que je le vois comme ça, là.

M. Goyer (Pierre): Sur les services, je vous dirais, en deux mots: Depuis 10 ans, on travaille des programmes qu'on appelaient inachevés, c'est-à-dire des programmes brique et béton qui financent la brique et le béton et l'immobilisation et qui demandent du support communautaire dans les maisons, mais le volet financement du support communautaire n'a jamais été assuré. Il devait venir par le réseau de la santé, ce n'est jamais venu, sinon qu'à un moment donné, entre 1997 et 1999, pour les personnes âgées en perte d'autonomie, ça a été comme un élan de générosité du réseau de la santé, mais ça s'est terminé abruptement et c'est devenu notre... Si on cherche l'abordabilité au logement à toutes les clientèles, il y en a, des clientèles, qui ont besoin de support communautaire et il faut aussi que cette question-là soit abordée, permettez-moi l'expression.

L'autre volet que vous suggérez, et merci de l'initiative, on ne l'a pas abordé, les services aux gestionnaires, c'est ce pourquoi le Réseau existe. Je n'ai pas l'habitude de prendre un ton plaintif. Il y a un employé au Réseau. Il y a des demi-employés dans quatre fédérations régionales. Il y a quelqu'un de la Fédération régionale de Québec?Chaudière-Appalaches qui est ici aujourd'hui, il faut le saluer. Mais on est quand même en naissance. Ça fait un an et demi, deux ans qu'on a démarré, et, oui, on commence à livrer des services aux gestionnaires. Dans la région de Montréal, où la Fédération existe depuis déjà une quinzaine d'années, il y a une panoplie de cours aux gestionnaires, aux membres du conseil d'administration, qui sont bénévoles, qui est de très grande qualité, et on cherche à étendre à l'échelle québécoise.

Par ailleurs, puisqu'on a nos amis des offices d'habitation en arrière, il y a aussi des tentatives d'établir des liens de livraison de services communs avec les offices d'habitation. On arrêté ça depuis un an, les discussions, mais on va reprendre ça bientôt. Il y a des échanges qu'on peut faire là-dessus.

n(10 h 50)n

Vous avez donc raison: services aux résidents, c'est notre exigence principale; services aux gestionnaires, on y travaille avec nos maigres moyens, mais je vous dirais que c'est quand même bien parti avec la naissance du Réseau et d'autres fédés un peu partout à l'échelle du Québec.

Le Président (M. Laprise): Merci, monsieur. Madame.

Mme Doyer: Je vous remercie.

M. Bergeron (Serge): Est-ce que vous voudriez que je réagisse? Vous avez dit qu'on était contre le fait que les GRT deviennent propriétaires? En fait...

Mme Doyer: Bien, vous avez...

M. Bergeron (Serge): Oui, on l'a mentionné, mais j'aimerais le mettre dans le contexte...

Mme Doyer: Aux rôles qui sont proposés pour les GRT.

M. Bergeron (Serge): D'accord. Oui, mais on...

Mme Doyer:«Nous sommes sceptiques.» Vous êtes sceptiques. Vous n'êtes pas contre, vous êtes sceptiques. Ha, ha, ha!

M. Bergeron (Serge): Bien, je vais vous expliquer. En fait, là, c'est que ce sont de très bons partenaires avec qui on travaille quotidiennement. Ce qu'on vous a dit, c'est que la réponse est collective. On apprend à travailler au niveau national, au niveau régional et même au niveau local avec nos partenaires. Je vous donnais l'exemple de la table d'habitation dans l'arrondissement Ville-Marie à Montréal, pour ne pas la nommer, où tous ces partenaires-là s'assoient autour de la table pour coordonner leur action. Vers quoi est-ce que ça va mener dans un futur? Une meilleur intégration, une continuité entre les tenures, une possibilité d'avoir une action concertée, c'est ça. Donc, on n'est pas contre que les GRT deviennent propriétaires, mais on n'est pas pour nécessairement. On pense que la formule est à inventer dans la redéfinition des pratiques.

Mme Doyer: O.K. C'est beau. Je vous remercie, messieurs.

Une voix: ...

Mme Doyer: Non, sceptiques.

M. Goyer (Pierre): Voilà.

M. Johnston (John): Eux-mêmes vous l'ont dit, je pense. C'est admiratif.

Le Président (M. Laprise): C'est tout, Mme la députée de Matapédia?

Mme Doyer: Oui.

Le Président (M. Laprise ): Alors, je cède la parole à Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Johnston, M. Goyer et M. Bergeron, du Réseau québécois des OSBL d'habitation, merci pour votre mémoire. Effectivement, vous nous exposez une problématique qui touche des clientèles particulières qui sont parmi les plus démunies, les plus vulnérables, notamment les personnes âgées et les autres catégories de clientèle. Combien coûte la gestion des 25 000 unités OSBL au Québec? Combien ça coûte de gérer ces unités-là?

M. Goyer (Pierre): Personne ne peut répondre à cela. Ce n'est pas, comme les HLM, par exemple, tout à l'intérieur du même programme d'intervention fédéral-provincial. On est dispersés dans 27 programmes fédéraux et provinciaux, du 15 ans jusqu'à AccèsLogis. Il y a 27 programmes qui ont contribué à la naissance de ces 25 000 unités. Et, de toute manière, il y a une partie à l'immobilisation qui a été financée, une autre partie est payée par les locataires et le milieu. Je vous rappelle que, dans AccèsLogis notamment, on a des chiffres sur lesquels on pourrait s'entendre assez rapidement. Mais les locataires contribuent à l'hypothèque, l'organisme et le milieu contribuent aussi à l'immobilisation, par le biais de la contribution au milieu, et le gouvernement contribue pour le solde, c'est-à-dire dans le cadre du programme AccèsLogis. Mais il n'y a pas de chiffre global sur l'ensemble de la gestion des 65 000 unités. C'est peut-être une des choses qu'il faudrait faire dans le cadre des travaux du plan de développement de l'habitation communautaire.

Mme Houda-Pepin: Bien, je comprends la difficulté de colliger des données qui sont un peu éparpillées, mais ça ne justifie pas qu'on ne puisse pas avoir une donnée fiable sur laquelle on peut se baser pour dire combien coûte la gestion des HLM, hein?

M. Goyer (Pierre): Mais cela, on est capable de le chiffrer, je crois. Oui.

Mme Houda-Pepin: Bien, les 25 000 là?

M. Goyer (Pierre): On n'a pas les données, désolé, madame. Cela dit, vous voyez, comme le mouvement est relativement récent, c'est-à-dire l'organisation provinciale est relativement récente, il y a une série d'études comme ça que nous entendons mener dans la prochaine année, y compris le corollaire à votre questionnement, celui de la génération de l'emploi. On est une importante composante de l'économie sociale. Dans une résidence de personnes âgées en perte d'autonomie, pour 30 personnes âgées, vous avez probablement un bassin de cinq à sept employés, c'est ce qu'on a calculé en moyenne. Partiellement, dans les régions d'ailleurs à l'extérieur de Montréal, où on a des résidences pour 30 à 40 personnes âgées, là, il y a un facteur de création d'emplois qui est assez intéressant et sur lequel il faudrait capitaliser, mais on n'a pas les données pour vous convaincre de capitaliser là-dessus.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Alors, j'imagine que c'est une chose sur laquelle vous allez travailler, que la prochaine fois que vous allez venir nous voir...

M. Goyer (Pierre): L'an prochain.

Mme Houda-Pepin: Peut-être même avant, peut-être même avant. Moi, je vais venir vous voir avant. Alors, il faudrait essayer de trouver la donnée.

Ce qui vous distingue essentiellement, effectivement, c'est la notion de services communautaires, parce que vous offrez le gîte évidemment aux personnes qui habitent chez vous mais vous offrez aussi un panier de services. Auriez-vous la gentillesse de nous expliquer qu'est-ce que vous offrez actuellement? C'est quoi, le service de base, ça comprend quoi exactement?

M. Johnston (John): Moi, je dirais que le service de base... Merci beaucoup pour la question. Le service de base, ce qu'on appelle souvent accueil et référence, ça peut être quelqu'un dans la maison qui va accueillir un nouveau locataire, qui va expliquer comment ça se passe dans la maison ou expliquer les règles et peut-être faire un peu d'écoute, dépendant de sa disponibilité, et venir collecter des loyers, venir une fois par semaine pour voir s'il y a des problèmes. Donc, ça, c'est ce qu'on appelle un encadrement très, très, très léger. Ça, c'est ce que pourrait faire cette personne-là.

Mme Houda-Pepin: Que d'aucuns appelleraient l'administration.

M. Johnston (John): C'est ça, c'est quelqu'un qui s'occupe de l'administration presque tout court mais qui a un certain entregent, donc, qui n'aille pas nécessairement jaser avec des personnes. Donc, c'est quand même quelqu'un qui fait la base mais qui a un petit côté social. Et ça peut aller bien sûr à l'autre côté du continuum, qui serait du service 24-7, une personne éveillée 24-7 qui offre des services pas tout à fait de santé, parce que ça, c'est quand même un autre domaine, mais quelque chose des services sociaux, en complément aux services de garde.

Mme Houda-Pepin: Mais ça, c'est des services qui sont facturés à part.

M. Johnston (John): Oui, des services qui coûtent quelque chose. Il faut payer ce monde-là. Donc, actuellement, je peux donner l'exemple de l'Accueil Bonneau, où je travaille, où on est entre les deux, à quelque part. Il y a les trois maisons, on a un staff de huit personnes, et le service qu'on offre est intégré avec les services de l'Accueil Bonneau. Donc, tout l'accueil et référence, il y a quelqu'un qui est présent 35 heures par semaine dans une maison d'à peu près 50 personnes. Voilà. Donc, ces services-là...

Mme Houda-Pepin: Quelle est la moyenne d'âge des résidents dans les...

M. Johnston (John): Mais juste pour dire que ces services coûtent à l'Accueil Bonneau dans les alentours de 120 000 $. Donc, l'Accueil Bonneau contribue à ces services-là. Oui, madame.

Mme Houda-Pepin: Quelle est la moyenne d'âge des résidents dans les...

M. Johnston (John): À l'Accueil...

Mme Houda-Pepin: Non, pas à l'Accueil, dans les OSBL, les secteurs que vous représentez.

M. Bergeron (Serge): C'est peut-être assez difficile à dire, parce que, justement, j'allais vous souligner qu'il y a une très grande diversité évidemment d'OSBL. Alors que le monde coop et le monde HLM est beaucoup plus à profil semblable qu'on peut dire, nous, il y a une très grand panoplie. Parmi les 900 OSBL au Québec, il y a ? c'est 700, pardon ? une très grande diversité. Et, moi, je travaille pour les personnes âgées au foyer Laurentien. C'est un édifice de 200 logements avec beaucoup de services, mais il y a d'autres endroits où c'est 25, 30. La beauté de tout ça, c'est que chaque OSBL reflète les besoins de son milieu et s'y adapte.

Le challenge qu'on va avoir de donner, de financer le support communautaire, c'est de ne pas avoir des règles trop rigides qui vont tenter d'uniformiser. De respecter justement la formule particulière, parce que d'en donner trop ce n'est peut-être pas nécessaire aussi, là. Il ne faut pas arriver à un...

Mme Houda-Pepin: Mais, par exemple, les coopératives hier, ils nous ont dressé le profil de leurs locataires et ils ont dit: Il y a tant de femmes qui habitent, et la catégorie d'âge, etc. Ça nous permet de savoir qui bénéficie finalement de ces logements-là. Alors, idéalement, pour vous, ça fait partie des choses à faire, M. Goyer, hein, n'est-ce pas?

M. Goyer (Pierre): Non, mais il y a une donnée: deux logements sur trois, c'est pour personnes âgées. Une donnée de base, deux... Et je pourrais donc vous dire: Au-delà de 65 ans. Ce que je suggérerais... on ne sera pas capable de vous donner une moyenne mais on va vous dire que deux personnes sur trois qui résident dans les OSBL d'habitation ont plus de 65 ans.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Goyer (Pierre): O.K. Mais, au-delà de ça, nous ne pouvons pas faire un portrait type comme on peut le faire dans un autre parc de logements parce qu'on s'adresse aux jeunes mères monoparentales, aux sans-abri, aux femmes violentées, aux ex-alcooliques et personnes âgées en perte d'autonomie. On va vous donner 17 portraits différents, et c'est ça, la réalité des OSBL. À l'heure actuelle, on sait juste que deux sur trois sont très âgées et pauvres.

Mme Houda-Pepin: Sont des personnes âgées. Quel est le taux de roulement chez vous?

M. Johnston (John): On va répondre encore le même genre de question: On n'a pas de statistiques.

Mme Houda-Pepin: Non, je ne vous parle pas de l'Accueil Bonneau, je ne vous parle pas des services qui sont temporaires, je vous parle des gens qui habitent dans les HLM. C'est quoi, le taux de roulement?

M. Goyer (Pierre): Une très grande stabilité. Je vous donnerai juste un exemple: Il y a une étude approfondie sur le cas des itinérants ou des ex-chambreurs à Montréal qui résident dans du parc OSBL avec support communautaire et il a été démontré ? puis c'est l'étude de la FOHM et du LAREPPS d'il y a trois ans ? que le support communautaire était la meilleure contribution à la stabilité de cette clientèle-là, qui est neuf fois sur 10 dans la rue au mois de février.

n(11 heures)n

Nous, on n'évite pas juste les crises du 1er juillet, excusez-moi l'exemple, mais on est évite aussi les crises du 1er février. On retrouve du monde en dessous des viaducs des fois; chez nous, ils restent dans des ressources d'habitation permanentes.

M. Bergeron (Serge): Et c'est la même chose pour la clientèle âgée qu'on permet de rester beaucoup plus longtemps à domicile plutôt que d'être en centre d'accueil. Donc, un facteur de stabilité et de prolongation à moindre coût pour l'État d'ailleurs.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Et votre principale réclamation finalement devant cette commission, c'est le financement des services communautaires ? principalement, là, parce qu'on commence d'abord par la survie des organismes ? et vous avez calculé que ça coûterait 10 millions de dollars, je crois, et vous voulez augmenter les services, vous allez passer de 7 000 unités à 10 000, je crois, c'est bien ça. Ça nous laisse avec les 25 000. Par rapport à 10 000, il y a une différence quand même de 15 000. Qu'est-ce qui arrive avec ces 15 000 là?

M. Goyer (Pierre): L'écart entre les deux, c'est qu'on dit: On ne pourrait pas financer tout le monde en même temps, là. Le support communautaire est à la fois offert dans certaines unités du parc HLM comme il est offert ou il devrait l'être dans le parc d'OSBL sous juridiction fédérale à l'heure actuelle, le 15-1 et 56-1, sur lequel il y a des discussions de transfert. Ce qu'on dit, c'est que, dans le cadre des HLM, il y a des méthodes qui sont en train d'être élaborées. J'imagine que les gens des offices vous en reparleront ou les gens de la SHQ pourraient en reparler. Dans le cas du parc fédéral, ça reste à négocier parce qu'ils ne sont pas nés avec, ces OSBL là, la vocation d'offrir du support communautaire, mais ça s'en vient parce que la population a 75 ans en montant. Il va falloir leur offrir, mais on verra ça dans le cadre du transfert.

Les 10 000 unités dont on parle ici, ce sont celles qui sont nées dans le cadre de programmes provinciaux comme AccèsLogis, en cours ou à venir, et aussi le PSBLP, c'est-à-dire le volet personnes âgées en perte d'autonomie. Et ça, ça fait 10 000 unités pour lesquelles le support communautaire était exigé mais qui n'ont pas eu de financement. On est modestes, là.

Mme Houda-Pepin: Oui, d'accord. Est-ce que, une fois qu'on fait tout le calcul de tous les services offerts, on peut estimer que les 25 000 unités sont couvertes par les services communautaires, peu importe qui les finance, fédéral, provincial, etc.? Est-ce qu'ils sont couverts ou est-ce qu'il reste une proportion significative qui n'est pas couverte par les services communautaires?

M. Goyer (Pierre): Il restera, à l'intérieur du parc fédéral, une proportion intéressante pour laquelle le support communautaire devra être développé. À l'heure actuelle, ce n'est pas là parce que la demande n'est pas là. Elle est latente, je vous dirais, mais il ne faudrait pas oublier... Je vous rappelle qu'il y a des discussions encore entre le fédéral et le provincial sur le transfert et ils négocient sur la somme qui devrait être transférée pour l'entretien des immeubles. J'ajoute, un peu à la blague: Il faudrait peut-être aussi penser à la population qui est dedans, qui vieillit et on aura besoin du support communautaire pour eux autres. Il n'y a pas juste la rénovation des bâtiments: il y a le maintien dans les lieux des personnes qu'il va falloir qu'il fasse l'objet de discussions avec le fédéral.

Mme Houda-Pepin: Étant donné que le temps court très vite, et les échanges sont fort intéressants, je voudrais avoir une réponse rapide sur la question de l'harmonisation des services au gouvernement. Parce que, très souvent, l'habitation est considérée comme un secteur à part, mais, lorsqu'on le regarde de près, à partir des besoins, on réalise qu'il y a beaucoup de choses qui sont interreliées, que la santé entre en ligne de compte: les services communautaires, les services alimentaires, les services de sécurité et ainsi de suite. Et je sais que, vous, vous êtes bien placés pour avoir une réflexion là-dessus. Mais le gouvernement, lui, ne vous suit pas parce que le gouvernement, lui, continue à fonctionner en silo: l'habitation, c'est un ministère; la santé, c'est un autre ministère. Ce monde-là ne se parle pas. Est-ce que vous avez réussi à dégager ou à sensibiliser le gouvernement assez pour qu'on développe une vision intégrée de l'habitat?

M. Johnston (John): Moi, je dirais qu'on commence, on amorce, la ville de Montréal. Ça, c'est la beauté, un peu, de la gestion locale parce que, une fois qu'on laisse la grande ville de Québec où les ministères sont tous séparés puis là on arrive localement, bien, là, il faut absolument qu'on travaille ensemble parce que le CRS est là, la Régie est là, donc... Et même, il y a un projet d'habitation où les personnes ont des besoins. Donc, c'est là où on fait la séparation, là où on fait...

Mme Houda-Pepin: Mais au gouvernement du Québec... Parce que, finalement, tantôt, là, même la ville, elle va s'adresser à Québec pour avoir les sous. Est-ce que vous avez dégagé... Est-ce que vous sentez qu'il y a une ouverture?

M. Goyer (Pierre): Il y a de l'espoir. Il y a de l'espoir, et on saura s'en reparler dans à peu près un mois, mais, effectivement, à l'exemple de Montréal, la ville et la SHQ et la Régie qui ont signé un protocole cet été, de collaboration, on devrait ? on devrait et on le souhaite ? assister à une signature de protocole d'entente entre les deux ministres délégués à l'Habitation et à la Santé d'ici la fin du mois d'octobre ? c'est ce que nous souhaitons ? alors, avant la fin de vos travaux. Nous saurons conclure sur cet aspect-là, et c'est pour nous super important. On parle de complémentarité, d'interdisciplinarité, mais il faut que les deux ministères se parlent, plus encore: ils ont laissé entendre qu'ils signeraient un papier commun. On confie beaucoup d'espoir là-dessus.

Mme Houda-Pepin: O.K. Très rapidement. Vous avez parlé de plans de développement de l'habitation communautaire, et je ne vous ai pas entendu parler de la politique d'habitation qui couvre tous les partenaires. Est-ce que c'est parce que vous n'êtes pas d'accord avec une politique, vous ne la voyez pas nécessaire, ou est-ce que vous estimez que, oui, la politique est un préalable pour aller plus loin, notamment pour faire des plans de développement sectoriel avec les différents intervenants, éventuellement?

M. Bergeron (Serge): Bien, je pense que ce qu'on vous soumet, c'est: permettez-nous de réfléchir, dans un plan développement du monde communautaire, nous-mêmes, entre nos partenaires, et là, on pourra alimenter le gouvernement et le Parlement, l'Assemblée nationale, pour peut-être déboucher sur une politique révisée. La dernière remonte à M. Trudel il y a quelques années; ça mériterait peut-être d'être réfléchi. Il y avait une réflexion de décentraliser vers les municipalités. Je pense que, là, quand on parle de support communautaire, de différents autres concepts, il y a peut-être d'autres partenaires qui doivent être intégrés là-dedans. Là où on est rendus, nous autres, c'est qu'on est en train de se créer cette nouvelle culture là entre nous. Et vous faites allusion aussi à la nouvelle culture, même avec les autres ministères. Alors, vous imaginez qu'il y a tout un genre de brasse-camarades amical à établir, un dialogue. Et peut-être ? c'est à espérer ? que ça pourra débloquer sur une politique d'ensemble, enfin, une vision globale du développement du logement social communautaire et public.

Le Président (M. Laprise): Je remercie Mme la députée de La Pinière. Oui?

M. Goyer (Pierre): ...permettez de dire que c'est une politique d'habitation communautaire qu'on veut d'abord et ça pourra s'intégrer à l'intérieur d'une politique d'habitation, de manière générale, mais on laissera aux parlementaires le soin de la faire.

Mme Houda-Pepin: Je vous comprends, M. Goyer. Je vous comprends.

Le Président (M. Laprise): Je remercie la députée de La Pinière, et je cède la parole au député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Alors, bonjour. Dans votre rapport, à la page 8, vous mentionnez que vous avez plus de 25 000 unités de logement OSBL au Québec, et vous mentionnez à la page 9 que, dans le cadre de programmes provinciaux, dans les 10 dernières années, vous avez mis sur pied 8 000 unités avec support communautaire dont plus de 3 000 répondent aux besoins des clientèles vivant des problématiques tout à fait particulières, par exemple les sans-abri, les familles monoparentales, les handicapés physiques ou mentaux. Et, au bas de la page 9 de votre rapport, il y a la proportion des clientèles du volet 3, et dans ce volet-là je remarque que vous avez listé là, de la santé mentale aux autistes, pour un total de 882. Est-ce que ? ma question est fort simple ? ...

Une voix: ...3 000...

M. Pinard: En partie, oui. Et, en sous-question ? je vais vous la poser tout de suite, comme ça vous ferez une réponse globale ? est-ce que, actuellement, il y a un manque pour les clientèles tout à fait particulières, comme l'Alzheimer, l'alcoolisme ? on sait que c'est quand même un fléau important sur le territoire du Québec ? les femmes victimes de violence, les handicapés, les ex-détenus, les mères adolescentes et autres? Est-ce que vous êtes en manque actuellement et est-ce que, ça, ça fera l'objet également de discussions avec les ministres Bertrand et Côté d'ici la fin du mois d'octobre?

M. Goyer (Pierre): Absolument. Et il y a deux sources du manque, je vous dirais, et on est deux à demander, dans les clientèles particulières. D'abord, le 880, c'est les chiffres dans le cadre d'AccèsLogis des derniers temps. Et donc, il y a un paquet d'autres initiatives qui ont été faites, particulièrement à Montréal, qui ont été faites dans le cadre d'autres programmes, et ils ne sont pas pris en compte ici, mais on voulait juste donner un inventaire de ce qu'on a fait dans le cadre d'AccèsLogis, donc, dans les cinq dernières années. Et il y a deux sources de demandes quand on s'adresse aux clientèles particulières: il y a le réseau de la santé qui a son propre bagage de demandes et qui aimerait bien ça loger du monde qui ne sont plus en institution ou qui ne pourront plus l'être et il y a, je vous dirais, la société civile, le milieu communautaire, les intervenants en santé mentale, en toxicomanie ou autres qui proviennent d'OSBL; ils veulent répondre à un autre bloc de demandes. Effectivement, l'entente entre les deux ministères devrait servir à arrimer les deux plans d'intervention. C'est difficile de le chiffrer, mais je vous rappellerais une dernière image qu'on a eue: dans AccèsLogis, on faisait 90 unités par année, dans la programmation, pour les clientèles particulières, à l'échelle du Québec. Et c'est ce qui est prévu aussi pour les cinq prochaines années. On a ajouté à ça des programmes particuliers d'intervention pour femmes ou autres, mais c'étaient des enveloppes qui étaient bonnes pour un an. Donc, vous comprendrez que, à 90 par année, les 25 dernières années, on ne livrait pas la marchandise sur l'ensemble du territoire. L'itinérance est présente dans beaucoup de centres urbains notamment, puis des femmes violentées, malheureusement, ce n'est pas juste une question de centres urbains non plus; il y en a partout, et toutes les autres problématiques sociales, par ailleurs.

n(11 h 10)n

À Montréal récemment, sur la question des sans-abri, le maire Tremblay et Mme Harel, à l'époque, suite à la crise du viaduc de février, se sont engagés à implanter 500 unités juste pour les sans-abri, les itinérants ou en voie de l'être. Déjà, juste cette demande-là qui commence à être chiffrée, là, on est au-delà de la capacité du gouvernement de financer parce qu'on en avait 90 par année. On est en train de faire le ménage là-dessus, le monde commence à identifier ça, et il y a probablement... Mais là, il va falloir s'entendre avec une série d'intervenants, que ce soit le réseau de la santé, le monde OSBL ? il y a des intervenants sur le terrain aussi, là: les sociétés de l'Alzheimer, les associations de femmes et autres ? pour faire un package de la demande. Il n'y a pas assez d'argent dans la pizza pour se la partager de manière plus efficace.

Le Président (M. Laprise): Vous terminez, monsieur? M. le député de Saint-Maurice, terminé? J'inviterais la députée de Matapédia... Je peux poser la mienne, en attendant?

Mme Doyer: Posez-la.

Le Président (M. Laprise): Alors, moi, j'ai une petite question à poser: À la page 20 de votre mémoire, vous parlez d'allocation universelle pour remplacer le volet I d'AccèsLogis. Est-ce que ça comprendrait l'ensemble des aides aux personnes? Est-ce que ce serait basé également sur le pourcentage du revenu, soit 25 ou 30 % du revenu, mais que toute personne qui est obligée de payer son loyer plus cher, cette aide-là serait universelle? Qu'est-ce que vous entendez par ça?

M. Goyer (Pierre): Vous m'excuserez, mais, non, on ne dit pas ça. Ce qu'on dit, c'est qu'on est sceptiques sur ce qui est contenu dans le document qui dit, en question: Devrions-nous abandonner le volet I d'AccèsLogis? On dit: Non. Parce que ce qu'on semble voir dans le document, ce n'est pas clair, mais on abandonnerait le volet I pour une mesure comme l'allocation au logement d'une manière un peu plus universelle. On ne se prononce pas là-dessus. On ne se prononce pas là-dessus, mais, par ailleurs, on dit: N'abandonnez pas le volet I d'AccèsLogis, là. Ce n'est pas vrai que le logement social, c'est juste pour les plus maganés, là, handicapés, avec des handicaps sociaux ou physiques ou mentaux ou autres. Ce n'est pas vrai. Il y a aussi... Le volet I a sa place, notamment le secteur coop fait sa niche beaucoup dans le volet I, et il faut conserver cette tenure-là. Mais on ne se prononce pas sur l'allocation-logement.

Et dans le titre du mémoire, je vous réponds: C'est fort pertinent, le titre du mémoire est clair. Toute politique d'habitation ou tout plan d'action gouvernemental en habitation, c'est un équilibre entre les moyens; il y en a pour tout le monde parce qu'il y a des besoins très diversifiés. Il peut y avoir de l'allocation-logement, il peut y avoir de l'aide dans la pierre, il peut y avoir de l'aide dans le cadre des volets II et III, et il y a trois modes de tenure principaux dans le logement social, c'est ça qu'il faut garder. Il faut garder un équilibre entre les acteurs et les moyens. Présentement, ce n'est pas le cas.

Le Président (M. Laprise): Vous voyez: l'argument de consultation n'était, justement, pas clair, volontairement; on voulait provoquer, justement, de l'interpellation, des réactions.

M. Goyer (Pierre): On cherche les auteurs.

Le Président (M. Laprise): Alors, d'autres questions?

Mme Doyer: Oui, moi, j'aurais deux petites choses: vous vous prononcez, vous dites que vous êtes d'accord avec les auteurs du document à l'égard de certains principes généraux dont le développement d'un fonds d'investissement. Puis, moi, je pense à ce qu'on a été capables de faire avec le Fonds de lutte à la pauvreté, puis ça a été partout, dans toutes les régions. J'aimerais que vous me précisiez comment vous verriez ça, là, de façon très réaliste, un fonds d'investissement dans le logement social?

Puis la deuxième chose, c'est que vous... je n'ai pas bien compris, vous dites: «Nous sommes convaincus qu'il est nécessaire de préserver les acquis menacés par une forte tendance néolibérale ? ça, j'ai une bonne petite idée de ce que ça peut être ? dont la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, un corps législatif et réglementaire sur l'industrie de la construction et la régulation du marché par la Régie du logement.» Ça, je ne comprends pas.

M. Goyer (Pierre): On est d'accord avec les auteurs. Non, la phrase est mal écrite, j'en conviens.

Mme Doyer: Oui, c'est ça, je n'ai pas compris.

M. Goyer (Pierre): Mais, essentiellement, depuis l'Institut de développement économique que vous allez entendre ou que vous allez recevoir ou que vous avez reçu...

Mme Doyer: On les a entendus, on les a entendus, on a eu ce... on a été privilégiés de les entendre.

M. Goyer (Pierre): ...jusqu'à certains discours récents où on dit qu'il faut abolir tout, là. Nous, on dit: Non, on ne pense pas qu'il faut... que la vague néolibérale doive mener à l'abolition de...

Mme Doyer: Elle n'est pas arrivée à moi, en tout cas.

M. Goyer (Pierre): Et donc... Et là-dessus on est d'accord avec les rédacteurs du document qui disent qu'il faut préserver les acquis comme la Régie du logement, et c'est nommément les trois qu'ils mentionnent: les règles sur l'industrie de la construction, la Régie du logement et la LAU. Il faut préserver ça. C'est ce que la phrase aurait dû dire dans les faits.

Mme Doyer: D'accord. Et sur le fonds d'investissement, comment vous verriez ça, de façon réaliste, là?

M. Bergeron (Serge): En fait, le fonds d'investissement, si on regarde la réalité, une des difficultés pourquoi on a de la difficulté à livrer le programme, là, de 15 000 logements, et à Montréal surtout le programme de 5 000 logements, c'est que les OSBL, entre autres, là, pour ne parler que d'eux, ont de la difficulté à acheter les terrains, à faire toutes les démarches. Quand ça prend six mois, un an, deux ans avant d'accoucher d'un projet, on n'a pas les fonds d'investissement nécessaires pour bloquer un terrain.

Entre autres, nous, au Foyer Laurentien, on fait partie aussi d'une nouvelle corporation qu'on a mise sur pied, les Habitations communautaires Ville-Marie. La SHDM à Montréal veut vendre de ses immeubles, elle doit disposer de 25 % de son parc immobilier dans les trois prochaines années, elle a décidé ça. La plupart de ces projets sont gérés par des OSBL, et eux devront s'en porter acquéreurs. Elle a publié, la SHDM, le 21 septembre dernier, un appel d'offres dans lequel ? même, elle en avait publié un il y a un an ? dans lequel elle demandait un dépôt de 10 %. C'est un projet de 5,5 millions. En connaissez-vous beaucoup des organismes sans but lucratif qui ont 550 000 $ qui dorment dans leur compte de banque? Moi, je n'en connais pas.

Alors donc, il faut trouver une façon d'à la fois permettre aux OSBL de développer leur expertise. On en parle beaucoup dans le rapport de développer le pouvoir économique existant de ces acteurs-là, mais on n'a pas les outils financiers pour le faire. Donc, c'est essentiel d'avoir un fonds de développement qui va permettre de faire ça et d'accélérer, en bout de ligne, la livraison de logements qui est la réponse à la pénurie de logements qu'on a actuellement. Alors, ça se tient tout ensemble, ça.

Mme Doyer: Je vous remercie.

Le Président (M. Laprise): Alors, c'est terminé. On remercie beaucoup, MM. Goyer, Johnston et Bergeron.

Et nous invitons la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, M. Luc Courtemanche, président; Mme Anne Scott, vice-présidente, et M. Michel Riverin, directeur général.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Alors, j'inviterais les représentants de la CORPIQ à bien vouloir s'identifier et à procéder à la présentation de votre mémoire dans les 15 prochaines minutes. La parole est à vous.

Corporation des propriétaires
immobiliers du Québec inc. (CORPIQ)

M. Courtemanche (Luc): Bonjour. Mon nom est Luc Courtemanche, président du conseil d'administration de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec. À ma droite, vous avez Mme Anne Scott, propriétaire gestionnaire dans la grande région de Montréal, ainsi que administrateur au sein de la Corporation à titre bénévole, je tiens à le spécifier. Et, à ma gauche, M. Michel Riverin qui est le directeur général de notre Corporation.

Nous sommes honorés de participer à cette consultation et nous tenons d'emblée à vous informer que tous les mémoires déposés devant votre commission par les membres des associations de propriétaires membres du front commun soutiennent une position commune et font foi de solidarité. En effet, après une lecture approfondie de chacun des chapitres du document de consultation, les membres du front commun cheminent vers une même direction que chacun développera à l'intérieur de son mémoire respectif. Et je tiens à déposer officiellement cette déclaration commune, s'il vous plaît, au même titre que mon prédécesseur de la Ligue des propriétaires, hier soir.

Notre démarche s'inscrit dans un souci du mieux-être des propriétaires investisseurs et des clientèles qu'ils desservent. Peut-être, avant d'aller plus loin... J'ai oublié de vous faire part, pour peut-être les besoins de la cause, que notre Corporation est un organisme sans but lucratif qui est présente dans toutes les régions du Québec et qui compte au-delà de 6 000 propriétaires, dont 90 % de nos membres sont des petits propriétaires de six logements et moins. Simplement une petite spécification. Rappelons-nous, dans le même ordre d'idées, que la très grande majorité ? soit 88 % ? des propriétaires d'immeubles à logements au Québec sont de petits investisseurs qui répondent en grande partie adéquatement aux besoins des ménages locataires, autant en matière d'abordabilité que sur le plan de la disponibilité. Depuis 24 ans, le logement locatif a été soumis à un régime de contrôle des prix des loyers avec une méthode de fixation plus compressive qu'incitative à l'investissement, qui a fait en sorte que le Québec se retrouve aujourd'hui avec un parc de logements en voie de détérioration et un désintéressement marqué des investisseurs à créer de nouvelles unités, d'où la situation actuelle.

n(11 h 20)n

Notre intervention d'aujourd'hui vise à assurer la santé du secteur locatif privé, répondre aux besoins spécifiques de certaines clientèles locataires et assurer la conservation et le développement du patrimoine immobilier québécois.

Dans la deuxième partie de notre mémoire, vous allez retrouver une synthèse de l'état de la situation. Donc, c'est notre compréhension du document que vous nous avez soumis.

Je vous amènerais tout de suite à la page 8 de notre mémoire. Selon nous, les véritables causes de la crise ? et j'aimerais ouvrir une parenthèse en mentionnant «rareté de logements» ? il y a deux véritables causes. Il y a premièrement le facteur démographique. Vous savez, vous êtes vraiment conscients que, au-delà des quelques années que nous avons passées, il y a eu un déplacement de la population vers les grands centres urbains. Et je vous mentionnerai un peu plus tard, dans le volet économique de notre mémoire, pour quelles raisons il y a eu un tel déplacement, mais j'aimerais attirer votre attention sur le fait suivant: rappelons-nous que le logement est à la fois un bien de consommation pour les ménages locataires, un canal d'investissement pour les investisseurs et les ménages propriétaires et un levier de contrôle de l'économie pour les gouvernements. Si l'activité résidentielle, à l'instar de l'immobilier en général, est essentiellement de nature cyclique, elle est toutefois soumise, plus encore que le secteur non résidentiel, à une série de normes, de contrôles et de mesures étatiques qui engendrent à l'occasion des déséquilibres marqués entre l'offre et la demande dans certains segments du marché et comportent des coûts économiques et sociaux non négligeables.

Dans cette optique, le rôle que joue la structure de l'évolution démographique dans la crise du logement actuelle est déterminant. À la page 11 de notre mémoire, une étude prospective réalisée par la SHQ sur la base de données de l'Institut de la statistique du Québec, de Statistique Canada et de la SCHL permet de mieux saisir l'impact à long terme de la démographie sur la demande domiciliaire. Je vous invite à consulter le tableau 3.2 à la page 12 de notre document, qui démontre très bien que, depuis 1991, et cela, jusqu'en 2041, la création annuelle moyenne de nouveaux ménages est en continuelle diminution. On peut donc prévoir une diminution sensible de la pression exercée sur le secteur locatif dès le tournant de la décennie, soit 2011-2016, alors que les enfants des derniers baby- boomers auront entre 20 et 25 ans.

Bref, si la démographie et ses facteurs connexes ne sont pas les seuls déterminants de la demande de logements et, partant, de la construction neuve au Québec, ils en déterminent la tendance lourde pour les années et les décennies à venir. Sur la base de ce qui précède et sous réserve des nombreuses nuances qu'il convient d'apporter à nos conclusions, la baisse progressive de la demande domiciliaire, tant pour la location que pour la propriété, s'impose comme une réalité inexorable que seuls la croissance économique et l'enrichissement des ménages viendront moduler. Il est essentiel d'en tenir compte notamment dans l'élaboration des politiques et programmes visant la production de logements locatifs abordables afin d'éviter à plus long terme un retour à des niveaux d'inoccupation financièrement insoutenables, et ce, de façon permanente.

Concernant les facteurs économiques de l'actuelle rareté de logements, si les taux d'inoccupation sont plus bas dans les trois principales RMR, donc régions métropolitaines de recensement du Québec, soit Montréal, Québec et Gatineau, c'est en grande partie que la croissance économique des dernières années y a été beaucoup plus forte que dans les autres régions du Québec. À cet égard, depuis 1995 jusqu'en 2001, l'emploi a augmenté de 12,1 % dans les trois principales RMR, alors que les autres régions n'ont connu une augmentation que de 7,5 %. Pendant cette même période, peu de logements standards ont été construits parce que le prix de location d'une unité neuve dépasse parfois du simple au double le loyer marchand comparable dans l'existant. Le fossé à combler est si considérable que les promoteurs ne voient aucun intérêt à mettre sur le marché des unités de logement neuves qui risquent de ne pas trouver preneur. Enfin, le système de contrôle des loyers qui, dans son application depuis 23 ans, nivelle le prix des loyers par le bas plutôt que de favoriser l'amélioration de la qualité du parc de logements.

Notre seconde partie de notre mémoire fait état de la synthèse des avenues de solution. Je vous invite à passer tout de suite à la troisième partie de notre mémoire qui sont nos commentaires critiques sur les avenues, justement, de solution.

Concernant les politiques d'habitation et spécifiquement l'aide à la personne, selon une étude publiée en 1996, l'aide à la personne permet d'aider quatre fois plus de ménages que ne le ferait l'aide à la pierre, donc la production de logements de type HLM. De plus, les avantages des programmes d'aide à la personne l'emportent largement sur les inconvénients et, moyennant certains ajustements, on pourrait en améliorer encore l'efficience.

Concernant l'aide à la pierre, toute aide de quelque nature que ce soit ne devrait pas être appliquée à l'ensemble du Québec mais plutôt spécifiquement aux régions qui affichent un taux d'inoccupation inférieur au taux d'équilibre, offrant ainsi à l'ensemble des locataires québécois une disponibilité de logements suffisante.

Concernant la mise à jour des pratiques, l'auteur laisse entendre qu'une remise en question des acquis réglementaires, Régie du logement, Code du bâtiment, CCQ, etc., constituerait un retour en arrière qui risquerait de s'accompagner d'une baisse de qualité des logements québécois. Ce jugement est péremptoire et n'est soutenu par aucune analyse des avantages et des coûts reliés aux réglementations existantes. Bien au contraire, on est en lieu de se demander comment une réglementation restrictive de contrôle du coût des loyers peut déboucher sur une amélioration de la qualité des logements.

Dans son état actuel, la réglementation qui régit le secteur locatif privé demeure un frein au renouvellement et à l'entretien du parc de logements. Quant à la réglementation qui régit l'industrie de la rénovation résidentielle, elle affecte directement le renouvellement du parc de logements. Plus de flexibilité réglementaire plutôt qu'une déréglementation pourrait grandement aider à résoudre le problème de l'entretien et du renouvellement du parc de logements au Québec.

Concernant les mesures d'aide au logement social et abordable, vous ayant déjà fait part de nos commentaires dans le volet Politiques d'habitation, nous aimerions attirer votre attention sur le volet des partenariats publics-privés où certaines mesures d'assistance au privé devraient être mises de l'avant pour assurer un soutien adéquat aux propriétaires privés, toujours, qui hébergent déjà une clientèle présentant des problèmes d'adaptation. À ce sujet, Mme Scott vous entretiendra de cette problématique que vivent les propriétaires, lors de la période de questions.

Concernant l'accession à la copropriété à logements multiples, tel que mentionné par plusieurs intervenants depuis le début de vos travaux, nous devons prendre conscience que l'implication massive de l'État dans le soutien aux locataires pour l'accession à la propriété serait un trou sans fond qui entraînerait une augmentation du fardeau fiscal des Québécois et qu'il faut donc établir des priorités et faire des choix.

En conclusion, la rareté actuelle des logements dans les trois principales régions métropolitaines de recensement, soit Montréal, Québec et Gatineau, est le résultat d'une série de facteurs dont la solution ne saurait être une mesure unique. Inonder le marché par une construction ponctuelle et massive d'unités de logement, il y a là une barrière que l'expérience des années soixante-dix et quatre-vingt nous invite à ne pas franchir.

n(11 h 30)n

L'amélioration de la qualité du parc de logements du Québec passe nécessairement par un allégement des réglementations ? Régie du logement, Code du bâtiment, CCQ ? auxquelles il est présentement soumis. En regard du logement social, l'État ne doit intervenir directement dans la construction que pour répondre aux besoins spécifiques de certaines clientèles, tout en favorisant l'aide à la personne, une formule simple et efficace. Merci.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie. Merci beaucoup, M. le président. Concernant votre demande de dépôt de document sur les déclarations communes, nous allons le faire circuler auprès des membres de la commission, mais le document a déjà été déposé, hier, par M. Aubry, de l'Agence des propriétaires de Montréal. Très bien.

M. Courtemanche (Luc): Oui, j'en suis très conscient, oui. C'est simplement pour réitérer notre solidarité.

Le Président (M. Vallières): Alors, il sera circulé auprès des membres de la commission. Alors, le premier membre de l'Assemblée à vous adresser la parole sera Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. Bonjour, messieurs. Bonjour, madame. Alors, moi, je vais y aller assez rondement. Bon. Vous savez que, à la Régie du logement, ce sont surtout des propriétaires, dans 80 % des cas, qui y sont, pour 35 000 cas de non-paiement de loyer généralement. Moi, je voudrais vous entendre par rapport au non-paiement puis, en même temps, mettre ça en lien ou en parallèle ? parce que je veux bien comprendre la problématique ? en lien avec les organismes à but non lucratif. Des fois, c'est de la clientèle qui se retrouverait ou qui devrait se retrouver dans des organismes à but non lucratif, avec des problématiques, d'accord? on en convient, qui... Je voudrais que vous me démêliez par rapport à ça, par rapport au non-paiement de loyer. C'est qui les... Ce sont qui les gens qui ne paient pas leur loyer? D'accord?

Et, moi, toute la question de la discrimination... Parce que, dans les HLM là, hein, dans les HLM, le tiers, ce sont des personnes seules et souvent avec des problématiques, je dirais, diverses ou multiples. Et la moitié de ces familles qui se retrouvent en HLM, à Montréal ? ça, je parle de Montréal ? la moitié des familles, ce sont des immigrants et, la plupart du temps, avec peu de revenus.

Et vous nous dites, dans votre document, à la page 25: «Le marché locatif privé répond bien à la demande des ménages québécois dont la plupart trouvent à s'y loger convenablement à un coût nettement inférieur à ce qui prévaut dans le reste du pays, d'où la nécessité de ne produire des logements sociaux que pour répondre aux besoins des clientèles particulières présentant des problèmes d'adaptation ? là vous mettez entre parenthèses ? désinstitutionnalisés, immigrants, réfugiés, familles monoparentales, personnes âgées en perte d'autonomie, etc.»

Alors, moi, j'aimerais que vous m'expliquiez un peu par rapport à ça là. Puis, tantôt, on nous disait qu'il y avait peut-être... Vous faisiez un peu... Vous aviez une vocation quasi sociale. Alors, je voudrais...

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, M. Courtemanche. Mais, avant que vous preniez la parole, on demanderait aux gens qui ont des cellulaires de les désactiver ou encore de sortir avec leur cellulaire.

Mme Doyer: Puis, juste avant que M. le Président vous laisse la parole, moi, dans le fond, je recherche des solutions gagnant-gagnant. Parce que je sais que ce n'est pas intéressant pour vous, les propriétaires, d'avoir des logements... Écoutez, j'ai déjà été propriétaire d'une maison que je louais. Ce n'est jamais intéressant de ne pas recevoir le paiement de son loyer. Puis, quand on investit, on a aussi le droit... on est dans un marché privé. Comme je l'ai dit ailleurs, on ne fait pas du mécénat. Mais, par contre, moi, j'ai aussi à protéger les droits des gens pour faire en sorte qu'on n'ait pas de discrimination. Puis, quand je vois que, dans les HLM, c'est des gens, des immigrants pauvres, souvent, qui se retrouvent là, bien, ça doit être parce qui se passe quelque chose sur le marché privé aussi.

M. Courtemanche (Luc): Pour répondre à votre première question concernant le non-paiement des loyers, sur les 35 000 demandes annuelles enregistrées à la Régie du logement, écoutez, on n'a pas de chiffres à l'effet: combien c'est des locataires qui ont des subventions, combien n'en ont pas. Mais tout ce que je peux vous dire à ce sujet-là, c'est que, oui, il y a 35 000 demandes de non-paiement; ça, c'est 35 000 propriétaires qui acceptent d'aller déposer une demande. Il y en a possiblement autant qui ne font pas de demandes, parce qu'ils sont persuadés au départ qu'ils ne recouvreront jamais les sommes qui sont perdues.

La première obligation d'un locataire dans le bail, c'est le paiement du loyer. Ça, je pense que c'est tout à fait logique. Toute entreprise au Québec qui loue, qui vend des biens, des services, la première obligation, c'est le paiement du loyer. Donc, de là à mentionner que, oui, c'est important pour les propriétaires de s'assurer qu'ils vont recevoir leur paiement, parce que, eux, de leur côté, ils ont des obligations, aussi, financières. Et, si le propriétaire ne paie pas en arrière, mais, ce n'est pas long que l'immeuble lui est enlevé. Je ne sais pas si ça répond à votre question concernant le paiement du loyer.

Concernant votre deuxième point d'interrogation sur le logement social versus les immigrants, tout ça, écoutez, on est très conscients qu'il y a des besoins de logements et, je tiens à le respécifier, pour des besoins spécifiques. Lorsque vous avez ? et c'est un attaché politique qui nous a mentionné ça ? une famille qui arrive au Québec et qu'ils ont six enfants, il n'existe pas de logement physique au Québec pour répondre à un besoin tel quel. Donc, il faut que le gouvernement prenne sa responsabilité, et, en tant que citoyen on contribue à ça afin de produire des logements qui sont adaptés à ces grandes familles là, qui sont adaptés, comme le groupe avant nous qui l'a bien spécifié, aux personnes âgées en perte d'autonomie, etc. Il y a des besoins, au Québec, de logements spécifiques pour des besoins spécifiques et, avec de l'aide aussi, spécifique.

Et de là, je passerai la parole à Mme Scott qui vous expliquerait un petit peu la problématique qu'un propriétaire peut vivre lorsqu'il loue un logement à des gens qui ont besoin vraiment d'aide, là, pointue, là. Je vais laisser la parole à Mme Scott.

Mme Scott (Anne): Écoutez, il y a une partie de notre clientèle qui est problématique qui, dans le fond, ne devrait pas se retrouver dans le logement conventionnel, parce qu'ils ne sont pas aptes à tenir logement et puis les propriétaires se retrouvent sans aucun support communautaire. Les familles sont souvent éclatées ou il n'y a pas de famille. On n'a pas d'aide des CLSC. On n'a pas d'aide non plus des policiers et on se retrouve avec des problèmes de comportements qui sont souvent, au moins, sinon plus importants que les problèmes de non-paiement par rapport à cette clientèle-là puis on se retrouve vraiment démuni.

Ces gens-là éventuellement vont se retrouver sans logement parce que les autres locataires, les voisins, ont des inconvénients de côtoyer un locataire qui a des problèmes psychiatriques ou de d'autres natures. Alors, on a aussi... Nous, comme propriétaires, on doit assurer la jouissance paisible des lieux à tous les locataires d'un édifice. On doit leur assurer aussi une certaine sécurité. Vous comprendrez que, avec la désinstitutionnalisation, entre autres, il y a des gens qui étaient, avant, en institution puis que, maintenant, avec une médication, sont, entre guillemets, aptes à tenir logement. Mais il faut que le dosage et que la prise des médicaments soit faite et, si ces gens-là sont laissés pour compte par manque d'argent, peu importe les raisons, eh bien, on se retrouve avec un problème dont toute la société hérite, et les locataires voisins aussi. Alors, c'est une clientèle, je pense, qu'il faut traiter vraiment à part. En fait, c'est un débat, je pense, qu'on oublie de parler. C'est une clientèle, puis ce n'est pas un gros nombre, mais ces gens-là ont vraiment besoin d'un encadrement ou des ressources spécifiques pour eux.

Le Président (M. Vallières): Merci beaucoup. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. Courtemanche, Mme Scott, M. Riverin, bienvenue à la commission. C'est toujours intéressant de vous entendre, votre point de vue est toujours constant. Et on a eu l'occasion d'échanger avec vous, avec la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, à quelques reprises, depuis que... en tout cas, moi, je suis au dossier et vous m'avez vue agir et chercher un peu les points d'équilibre. Parce que, dans le dossier du logement social et abordable, le problème essentiel que nous avons, c'est que nous avons des partenaires qui sont au diapason et il est difficile de dégager des consensus sur des solutions communes.

Alors, quand même, on n'abdique pas, on essaie de chercher les solutions avec vous, avec les représentants des locataires, avec tous les partenaires. Et ce matin, j'ai posé une question à un groupe qui vous a précédés et je vous ai annoncé ma question d'avance pour que vous puissiez y réfléchir. Quand on demande des mesures fiscales pour soutenir l'intervention du secteur privé dans le logement locatif, on se fait répondre légitimement que l'État n'a pas d'affaire à soutenir le privé qui ultimement va être propriétaire du bien qu'on a, dans lequel la collectivité a investi. Et comme nous avons devant nous un problème qui est celui de la crise du logement social et abordable. Puis je n'irai pas dans la sémantique pour savoir si c'est une rareté ou une pénurie. Disons qu'on parle de la même chose et qu'on a un problème qu'on veut régler avec la bonne volonté de tous.

n(11 h 40)n

La question que j'ai posée ce matin: Est-ce que vous seriez d'accord, si on proposait des mesures fiscales, que l'on puisse les appliquer exclusivement à des projets qui sont destinés aux locataires à faible revenu pour régler le problème dont on parle aujourd'hui, sachant que l'entreprise privée, dans le domaine de l'habitation, peut investir de toute façon dans les autres gammes de logements et de propriétés? Est-ce que vous êtes en mesure de nous donner un signe encourageant pour aller dans cette direction avec vous?

M. Courtemanche (Luc): Écoutez, il faut être bien conscients, Mme Pépin, que, au Québec, il y a trois types de logements: il y a le logement social, le logement abordable et le logement disons conventionnel privé à coût autre. Le problème majeur, selon nous, de la situation qu'on vit présentement, ce n'est pas un problème de rareté, de pénurie, de crise de logement, c'est un problème de pauvreté. Ça, je pense que, socialement, en tant que citoyen, c'est un problème de pauvreté; les gens n'ont pratiquement plus les moyens ou ont des moyens très limités pour subvenir à leurs besoins.

Pour ce qui est des mesures fiscales, je vous dirais que, oui, je serais d'accord avec vous à l'effet que ces mesures-là s'appliquent exclusivement ? et là, je vais bien m'exprimer ? pour la construction de logement social, mais, vous savez, le logement social, encore là, ne devient pas la propriété du privé, il reste la propriété de l'État. On s'entend là-dessus? Et le logement abordable, lui, devient la propriété du privé ? ça, j'en conviens. Donc, il pourrait y avoir des mesures fiscales strictement réservées à ces deux types de construction.

Mais il y a une chose qu'il ne faut pas oublier, la rénovation du parc de logements actuel. Donc, ça, c'est un problème aussi qui est très criant. Il y a 5 000 logements d'inoccupés à Montréal actuellement et il n'y a personne qui peut nous contredire sur cet effet-là. La grande majorité de ces logements-là ne sont pas habités parce qu'ils ne sont pas habitables, parce qu'il n'y a pas eu d'incitatif, les propriétaires n'ont pas eu les moyens de les rénover. Donc, oui pour des mesures fiscales mais bien pointues.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Courtemanche (Luc): Et je répète que le logement social n'appartient pas au privé. Il est de propriété de l'État. Peut-être que mon directeur général veut rajouter.

M. Riverin (Michel): J'ajouterais une précision, Mme Pépin, c'est que, si on va dans un type de programme comme celui-là, il ne faut pas que ce soit, encore une fois, un type de programme qui est mur à mur pour le Québec, c'est-à-dire à partir de Gaspé aller jusque dans l'Outaouais. Vous le savez, les taux d'équilibre sont variables d'une région à l'autre; il y en a trois RMR qui ont des taux d'équilibre inférieurs à la normale à l'heure actuelle. Donc, si d'aventure votre commission va dans cette direction-là, elle doit également prévoir que ces programmes-là ne s'appliqueront pas dans des régions comme la Côte-Nord, comme la Gaspésie, comme la Beauce, comme la Mauricie, le Saguenay. Il faut faire attention. Ne venez pas créer un déséquilibre.

Pour les régions que je viens de nommer, il y a une autre façon de le faire, et vous le disiez ce matin, je vous écoutais et vous disiez: On a 1,8 milliard. Mais savez-vous qu'à raison de 60 millions par année pendant 30 ans, vous pourriez aider un maudit paquet de ménages?

Mme Houda-Pepin: Bien, écoutez, M. Riverin, je ne veux pas commenter sur chacun des points que vous soulevez parce que ça soulève des débats, mais disons qu'on cherche les solutions et que, aujourd'hui, on va tenter de ne pas s'enfarger dans les fleurs du tapis. Disons que le privé est à 92 % dans le logement, mais qu'il n'est pas très actif dans le logement qu'on appelle bas de gamme, c'est-à-dire logement social ou le logement «chose»; on ne peut pas nécessairement même s'entendre sur la terminologie, mais on parle généralement du logement social.

Moi, quand je vous dis: Essayons de faire un chemin pour régler la solution, pour trouver une solution commune, je ne suis pas sûre que cette solution-là va avoir nécessairement l'approbation de tous les groupes, mais le consensus, ce n'est pas l'unanimité non plus. L'essentiel, c'est de trouver le moyen de faire un pas en avant vers la solution de la crise du logement.

Vous avez dit, M. Courtemanche, que le problème en est un de pauvreté. C'est un des facteurs. Il n'est pas le seul, mais c'est un des facteurs. Mais peu importent les causes de la crise, le fait est qu'elle est là, le fait est qu'on cherche aujourd'hui, dans cette commission, des solutions pour nous aider à la solutionner, bon.

Et puis vous soulevez à juste titre les réalités différentes. Je suis d'accord avec vous. Vous-même, M. Courtemanche, vous êtes du Saguenay et chez vous, le problème, ce n'est pas la rareté de logements, c'est l'aide à la personne. Alors, dans ce cas-là, ce qu'il faut, c'est qu'il faut occuper les logements qui sont disponibles justement par une aide à la personne. Mais à Montréal, dans des quartiers, on frise le zéro pour cent de taux d'inoccupation. Quand même qu'on donnerait de l'aide à la personne, elle ne pourra pas se trouver de place pour se loger; donc, il faut construire. Je vous suis sur cette ligne-là, il faut tenir compte des besoins. Il ne faut pas aggraver la crise, il faut la soulager. Donc, tenir compte des réalités, oui, qu'elles soient régionales ou en termes de besoin et de clientèle, on est tout à fait d'accord.

Revenons maintenant au programme Logement abordable, le Programme de logement abordable, qui a été lancé en novembre 2001, enfin l'entente est signée depuis, et on nous dit, les groupes qui se sont présentés devant nous nous disent: On n'est pas intéressés à aller là-dedans. Ça, c'est un problème, un problème majeur. Nous sommes face à une crise, on a de l'argent puis il n'y a personne qui veut le prendre. Alors, la raison, c'est que les paramètres ? vous nous dites que c'est les paramètres que le gouvernement a mis de l'avant ? ne nous permettent pas un niveau de rentabilité ou d'efficacité pour pouvoir livrer les unités de logement souhaitées. C'est bien ça?

Qu'est-ce que vous souhaitez qu'on modifie, aujourd'hui, dans ce programme-là, qui fasse en sorte qu'on puisse livrer les unités de logements?

Le Président (M. Vallières): M. Courtemanche.

M. Courtemanche (Luc): Ce qu'il ne faut pas oublier, Mme Pepin, c'est que, nous, de la CORPIQ, nous représentons des propriétaires immobiliers et non des constructeurs d'habitation. Ça, je pense, il y a une très grande différence et une très grande nuance à apporter de ce côté-là.

Le constructeur, lui, il va, s'il le désire, construire un immeuble et va le vendre tout de suite au propriétaire qui, lui, va devoir le gérer pendant 15, 20, 25 ans. Et si le propriétaire effectivement n'a pas les ressources nécessaires, l'immeuble ne dégage pas de revenus nécessaires pour gérer l'immeuble, il n'en voudra pas de l'immeuble. De là à ce que les constructeurs ne construisent pas, parce que le propriétaire, lui, ne pourra pas gérer l'immeuble.

Mais pour revenir, vous savez, on contribue au logement social dans le privé dans le sens où il y a de nombreux logements qui sont disponibles pour le supplément au loyer. Vous souleviez le point tantôt que, oui, au Saguenay, on a 5 % de vacance. Des logements vides, il y en a, O.K. Des suppléments au loyer, il y en a partout, j'en ai dans mon parc immobilier. Mais souvenez-vous que le président de la SHQ a dit ici, lui-même, en personne, mardi matin, qu'il avait offert des unités de HLM qui étaient vacantes dans la périphérie de Montréal et que les gens, ils n'en voulaient pas ? les locataires, là ? je ne parle pas des propriétaires, je parle des locataires. Il y a un petit problème aussi de ce côté-là. Il faut faire prendre conscience aux locataires que, si dans un secteur particulier il n'y a plus de disponibilité, trois rues plus loin, il y a 10 logements de vacants. Comme propriétaires fonciers que nous sommes pour la plupart, si on veut acheter une maison dans un quartier où il n'y en a plus, bien, on va aller plus loin. Donc, il faut faire prendre conscience de ça.

Et le logement abordable, bien, écoutez, nous, on représente des propriétaires. On vous l'a dit à maintes reprises que le système de fixation des loyers aujourd'hui est inadéquat selon nous et, principalement pour nous, pour la rénovation du parc de logements actuel. Ça, je pense que c'est une problématique majeure.

Et vous savez, au Québec, on nous lance souvent les chiffres qu'il y a peut-être 30 000 personnes qui sont sur des listes d'attente des offices municipaux d'habitation. Mais posez la question à ces 30 000 personnes là demain matin: Qu'est-ce qu'ils recherchent en appliquant sur ces listes-là? C'est quoi qu'ils veulent? Ils ne veulent pas un logement, ils en ont un. Ce qu'ils veulent, c'est consacrer le moins d'argent possible au paiement du loyer. Ce qu'ils veulent, c'est des suppléments de loyer. Le gouvernement pourrait, demain matin, aider ces 30 000 personnes là en leur fournissant à chacun un supplément au loyer puis tout le monde serait heureux, mais il reste qu'il y aurait un besoin de certains logements pour des clientèles spécifiques, on est très conscient de ça. Le problème est très, très difficile...

Mme Houda-Pepin: Est-ce que vous êtes en train de contester les taux d'inoccupation? Est-ce que vous êtes en train de nous dire...

M. Courtemanche (Luc): Non, non, je ne conteste pas aucunement les taux d'inoccupation.

Mme Houda-Pepin: Bon, d'accord. Non, mais, je voulais juste vous comprendre.

M. Courtemanche (Luc): Non, non.

Mme Houda-Pepin: Donc la rareté est là et même si les gens ont...

M. Courtemanche (Luc): Écoutez, la rareté est là pour des besoins spécifiques.

Mme Houda-Pepin: D'accord.

M. Courtemanche (Luc): Mais il faudrait que, dans la mentalité des locataires, de ce qu'ils comprennent, même pour un locataire qui a les moyens de payer un logement de luxe, s'il n'y en a pas dans un secteur, bien, il va aller dans un autre secteur.

n(11 h 50)n

Mme Houda-Pepin: Oui. Rapidement, M. Courtemanche, pour la rénovation, justement, parce que vous nous alertez, dans votre mémoire, que la réglementation est un frein et à l'investissement et à la rénovation. Le gouvernement investit chaque année autour de 40 millions de dollars pour l'entretien des 62 000 unités de HLM. Quelle est la proportion de l'investissement du secteur privé dans la rénovation?

M. Courtemanche (Luc): La proportion, si ma mémoire est...

Mme Houda-Pepin: Ou le montant? En tout cas, un chiffre qui nous donnerait une idée, là?

M. Courtemanche (Luc): C'est environ 6 milliards, si ma mémoire est bonne. On investit, en moyenne, 500 $ par unité de logement, en moyenne.

Mme Houda-Pepin: Par année?

M. Courtemanche (Luc): Par année. C'est minime, là, parce qu'on fait le minimum, là. C'est le minimum viable pour que le logement soit habitable.

Mme Houda-Pepin: Et quelle est votre évaluation de la qualité du parc locatif?

M. Courtemanche (Luc): Écoutez, la qualité du parc locatif? En grande partie, il est en mauvais état. Ça, il faut l'avouer, là. Vous n'avez simplement qu'à vous promener dans certains quartiers. Au-delà du fait que les municipalités ont des programmes de revitalisation des centres-villes, etc., ce qu'il ne faut pas oublier dans ces programmes-là, c'est que, oui, le propriétaire a accès à ce programme mais sous condition. Le propriétaire qui voudrait simplement, lui, remplacer la toiture et les fenêtres, la municipalité va dire: Non, si tu as accès au programme, tu va refaire la plomberie, l'électricité, l'égout. Au bout du compte, le propriétaire n'a pas les moyens, même en payant juste 30 % de la facture.

Mme Houda-Pepin: Dernière question parce que le temps coule: En ce qui a trait à la Régie du logement ? évidemment, ce n'est pas votre plus grand ami, mais vous ne voulez tout de même pas jeter le bébé avec l'eau de bain ? vous dites: Il faut revoir le mandat de cette régie. Et vous vous en plaignez beaucoup pour ce qu'elle fait actuellement. Hier, il y a la Ligue des propriétaires, qui est un de vos collaborateurs et membre, je crois, dans le même regroupement, qui a proposé la révision des critères de fixation de loyers qui sont utilisés par la Régie. Et, ce matin, nous avons eu l'Association des propriétaires d'appartements du Grand Montréal qui a proposé la création d'une table de travail pour revoir les règles de calcul. Êtes-vous favorable à cette instance? Est-ce que vous pensez que, s'il y avait une table dans laquelle les partenaires se retrouvent, ça pourrait éventuellement faire avancer les choses?

M. Courtemanche (Luc): Effectivement. Écoutez, on a été agréablement surpris de l'ouverture que la présidente, Mme Desjardins, de la Régie du logement, a fait mardi. Et soyez sans crainte, elle va être sollicitée dans les jours qui viennent afin de s'asseoir, afin de pouvoir peaufiner avec elle des méthodes qui vont aller rejoindre ses préoccupations et les nôtres.

Le Président (M. Vallières): Alors, avec le consentement, parce que là on dépasse, et on a des problèmes d'agenda.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, c'est un commentaire, ce n'est pas une question: Quand on parle de la discrimination et des immigrants pauvres, je voudrais apporter une nuance: la discrimination, elle affecte les familles nombreuses, qu'elles soient immigrantes ou québécoises et, également, elle affecte différentes clientèles dont les nouveaux arrivants. Mais les immigrants, ils ne sont pas tous pauvres, et beaucoup d'entre eux sont membres, probablement, de vos corporations de propriétaires. Je tenais à préciser ça.

Le Président (M. Vallières): Bien. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. On voit très bien que le document que nous avons présenté a provoqué des interpellations, mais on sent aussi que les mémoires qui nous sont présentés s'interpellent les uns les autres. On sent qu'il y a des différences d'opinions et je trouve ça très, très, très positif, d'ailleurs.

Et moi, ce qui me préoccupe, c'est votre mur-à-mur que vous avez parlé tout à l'heure. C'est bien évident que les problèmes de Montréal ne sont pas les problèmes du Saguenay ? vous le savez comme moi ? mais, par contre, il faudrait peut-être que, dans ces régions-là, il y ait quand même une équité qu'il faut conserver. Parce que c'est sûr, si on crée du logement dans les grands centres, soit Gatineau, Chicoutimi ou ailleurs, à Montréal ou Québec, et qu'on crée des conditions qui sont plus favorables, alors, non seulement, nous autres, on va être pénalisés sur le plan économique mais on va être pénalisés également sur le plan de la population. Ça va attirer la population à l'extérieur, qu'on le veuille ou non. Il faut absolument créer des conditions ici, dans les régions: une certaine qualité de logement, un prix abordable également, et garder une qualité de service pour les personnes qui veulent rester dans la région, qu'ils ne soient pas nécessairement attirés parce que... On disait hier, à Gatineau, d'ailleurs, qu'il y avait un surplus de population dû à leur développement économique, qui se fait sentir. Et si peut-être que, dans les régions, on sent qu'il y a moins de problèmes sur la quantité de logements, ça veut dire également qu'il y a un problème aussi sur le développement économique dans les régions.

M. Courtemanche (Luc): La solution, M. Laprise, est très simple, tellement simple, là...

M. Laprise: Tant mieux.

M. Courtemanche (Luc): ...que ça en est aberrant: c'est le supplément au loyer. Ce n'est pas compliqué. Dans les régions, dans votre belle région du Lac-Saint-Jean, ce n'est pas compliqué, ils n'ont pas besoin de logements, ils ont besoin du supplément au loyer. C'est juste ça que les gens veulent. Ils veulent un supplément au loyer, ils veulent diminuer le coût qui est consacré au paiement du loyer. On ne sera pas pénalisés dans la région du Saguenay versus Montréal parce qu'ils vont construire certains sites. Souvenez-vous, il y a quelques mois, j'ai félicité, moi-même, personnellement, au nom de la Corporation, le ministre Côté qui a annoncé une construction dans un petit village à Larouche, au Saguenay, d'une résidence de 10 logements pour personnes retraitées. Je l'ai félicité personnellement parce que c'était logique, c'est une décision logique et réfléchie. Mais d'aller construire 50 logements à Chicoutimi quand le taux de vacance est de 5 %, c'est illogique.

Le Président (M. Vallières): Bien. J'ai d'autres demandes d'intervention? Non, ça va aller? Alors, nous vous remercions de votre présentation qui ajoute à ce qu'on a déjà entendu et qui va alimenter notre réflexion. Alors, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.

Je demande maintenant aux gens représentant la Fédération des locataires de HLM du Québec de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je demanderais donc aux gens représentant la Fédération des locataires de HLM du Québec de bien vouloir s'identifier et de procéder à la présentation de votre mémoire dans les 15 prochaines minutes. À vous la parole.

Fédération des locataires d'habitations à loyer
modique du Québec (FLHLMQ)

M. Doyon (Jean-Marie): Bonjour, M. le Président. Bonjour, messieurs, mesdames. Pour commencer, je voudrais juste... Vous avez remarqué, on avait présenté des personnes pour présenter le mémoire, mais les personnes ont changé un peu, ça fait que je vais vous les présenter de toute façon. Je voudrais juste vous dire en passant que, le mémoire, on se le répartit en trois. Il y a trois personnes qui vont donner un aperçu du résumé du mémoire.

À ma droite, vous avez Mme Rita Hulsman de Montréal, suivie de M. Claude Gelderblom de Rivière-du-Loup, qui est vice-président à la Fédération. Moi, je suis Jean-Marie Doyon, je suis président de la Fédération des locataires de HLM. À mes côtés, on a M. Robert Pilon qui est coordonnateur à la Fédération. Je crois, en passant, qu'il va se faire un plaisir de répondre aux questions.

La Fédération des locataires d'habitations à loyer modique est heureuse de participer aux travaux de cette commission. À l'approche des prochaines élections au Québec, c'est une bonne chose que les différents partis réfléchissent aux principaux problèmes vécus par les citoyens et citoyennes, aux enjeux globaux au niveau de l'habitat. Dans la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, le logement joue un rôle structurant extrêmement important. On aura beau parler de lutte au décrochage ou de réinsertion par l'emploi, sans un toit pour se loger, tout cela ne demeurera que des mots.

Notre Fédération, qui représente les 65 000 ménages habitant dans les logements à prix modique répartis dans 553 offices d'habitation du Québec, se présente devant vous pour vous exprimer le point de vue de ceux et celles qui ont la chance d'habiter dans les logements sociaux publics. Nous voulons vous expliquer pourquoi il faut être fiers de ce patrimoine collectif qui a le grand mérite d'avoir amélioré nos vies. Les HLM ont des défauts, c'est bien sûr, mais nous sommes les mieux placés pour vous en parler. Mais ils ont beaucoup évolué au cours des dernières années, surtout avec l'adoption de la loi n° 49 en avril dernier. Au même titre que les hôpitaux et les écoles publiques, ils constituent un maillon important de notre filet de protection sociale. Avec la pénurie actuelle de logements, il est essentiel que la Société d'habitation du Québec puisse, comme le précise les objets de cette constitution, mettre à la disposition des citoyens du Québec des logements à loyer modique. Le principal problème avec les HLM, c'est qu'il ne s'en fait plus depuis 1994. Ce n'est donc pas le fruit du hasard si 25 000 ménages sont présentement sur des listes d'attente dans l'espoir d'accès à un HLM.

n(12 heures)n

Il est faux de prétendre que l'industrie du marché locatif peut répondre aux besoins des gens pauvres. Nous ne sommes pas des experts, c'est vrai, mais nous avons la prétention de savoir de quoi nous parlons pour l'avoir vécu nous-mêmes. Payer le loyer ou nourrir les enfants, se faire refuser un logement à cause des enfants ou par manque d'argent, se voir expulsés de son logement pour des retards de paiement sont d'autant de difficultés que nous ne connaissons que trop bien.

Dans le domaine de l'habitation, comme à la santé et l'éducation, il est devenu à la mode de rechercher des solutions innovatrices du côté de l'entreprise privée. Pourtant, le marché privé possède déjà 90 % du secteur locatif, ce qui ne l'a pas empêché de produire la crise du logement que nous connaissons aujourd'hui. Le Québec commence à ressembler à plusieurs provinces canadiennes et États américains où des familles complètes se retrouvent sans logis, incapables de payer le prix du marché. Le document de consultation nous apprend que plusieurs pays réinvestissent massivement dans le logement afin de solliciter la crise à laquelle ils font face. C'est aussi ce que doit faire le gouvernement du Québec avec la participation financière obligatoire du gouvernement fédéral. Il ne faudrait surtout pas l'oublier même s'il ne tient aucune commission pour réfléchir à la crise du logement que nous vivons. Lorsqu'on manque d'écoles et d'hôpitaux, on ne se place pas passivement comme société à la remorque du privé dans l'entente que celui-ci y trouve son compte. Si le marché privé locatif s'avère incapable de fournir un nombre suffisant de logements à bas loyer, il revient à l'État d'intervenir pour voir à combler un besoin aussi essentiel. C'est pourquoi nous appuyons la demande du FRAPRU qui convie la société québécoise à relever le défi collectif de mettre en branle un grand chantier de logement social afin de réaliser chaque année 8 000 nouveaux logements sociaux dont la moitié en HLM.

Ainsi, nous ferons d'une pierre trois coups: lutte contre la pénurie de logements locatifs, lutte contre les logements trop chers pour 300 000 ménages québécois et lutte contre la discrimination. Cette demande est très réaliste puisque c'est exactement le nombre de logements sociaux que les gouvernements du Québec et d'Ottawa réalisaient conjointement au début des années quatre-vingt. La crise actuelle justifie amplement un retour à de tels investissements évalués à environ 400 millions par année. Si Ottawa n'avait pas unilatéralement cessé toute participation à la construction des logements sociaux en 1994, nous aurions aujourd'hui 50 000 logements sociaux de plus et nous n'aurions pas besoin de tenir une commission parlementaire pour chercher des solutions à la pénurie de logements.

Mme Hulsman (Rita): Il faut cesser de considérer le logement social comme une simple dépense. Il représente plutôt un investissement qui apporte un bien durable aux collectivités. Dans une perspective de développement durable, il permet de revitaliser des quartiers sans en chasser la population résidente à faibles revenus. De plus, il est faux de prétendre que le logement HLM coûte beaucoup plus cher que les formules d'aide au secteur privé. Le document de consultation de la commission se trompe lorsqu'il affirme que le programme HLM coûte 355 $ par mois par logement, comparativement à 260 $ pour le supplément au loyer privé. Un 20 logements pour familles des habitations Roland Vigneault, construites en 1981, à Trois-Rivières, ne coûte plus en 2002 que 136 $ par mois. Le chiffre de 355 $ constitue une moyenne, mais au fur et à mesure que les coûts de financement, les hypothèque diminuent, le déficit d'exploitation diminue également.

Dans le cas de l'allocation-logement ou du supplément au loyer privé, les coûts de ces programmes ne peuvent qu'augmenter d'année en année en fonction des hausses de loyer dans le secteur privé locatif, et ils n'apportent aucun actif. Ainsi, une étude de la SHQ indiquait que, lorsque la période couverte par l'entente avec le SCHL sera terminée, les immeubles construits dans le cadre du programme HLM, seront la propriété de la SHQ, bien qu'elle n'ait défrayé qu'une partie, c'est-à-dire 31 % des coûts. Les 65 000 logements à prix modique que la SHQ a mis à la disposition des citoyens et citoyennes du Québec constituent un patrimoine collectif de l'ordre de 2 milliards qui permet de loger convenablement plus de 100 000 personnes. Selon un sondage récent de la FLHLMQ réalisé auprès de 2 000 locataires, 89 % des ménages habitant un HLM sont heureux d'y demeurer.

Le parc de logement social ne représente qu'environ 10 % du parc de logements locatifs au Québec; c'est bien peu par rapport à plusieurs pays d'Europe qui ont 30 ou même 40 % de logements sociaux. La SHQ a adopté en 2001 une politique des loyers favorisant les petits travailleurs et nous promet, pour 2003, un règlement sur l'attribution favorisant la mixité sociale.

Après des années de lutte et de mobilisation, les ménages habitant les logements à prix modique du Québec ont obtenu une grande victoire qui leur permet maintenant de s'impliquer dans la gestion de leur immeuble. La loi n° 49 rend désormais obligatoire la mise en place d'un comité consultatif de résidents dans chacun de ses 553 offices d'habitation du Québec ainsi que la reconnaissance des associations de locataires à l'intérieur des HLM. Dans les derniers mois, la FLHLMQ a travaillé avec les OMH de Montréal, Gatineau, Longueuil, Trois-Rivières, Saint-Jean et Québec à implanter des comités consultatifs. Dans tous les cas, les locataires ont participé nombreux. Il a même fallu limiter le nombre de volontaires qui voulaient s'impliquer au comité consultatif.

Le document de consultation de la commission comprend un élément très intéressant concernant les nouvelles pratiques sociales HLM, particulièrement le programme Hope VI aux États-Unis. Les objectifs de ce programme rejoignent exactement nos propres demandes afin que les HLM puissent agir comme des tremplins de promotion sociale pour nos membres à faibles revenus. Ces objectifs sont: réduire la concentration de pauvreté en y encourageant une certaine mixité sociale et en incitant notamment les familles ouvrières à s'y installer; fournir des services de soutien à la population résidente comme des programmes d'éducation, des services à la petite enfance et des services pour aider les individus à s'intégrer et à garder leur emploi; intégrer les résidents dans la gestion globale de leur milieu de vie.

C'est pourquoi nous sommes heureux de constater que, dans sa stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, le gouvernement du Québec cible la population des HLM comme un lieu d'intervention privilégié. Nous réclamons une action concertée de plusieurs ministères afin de supporter le travail des associations de résidentes et résidents afin de briser le cercle vicieux de la misère. Pourquoi ne pas créer un programme de services communautaires pris en charge par les résidentes et résidents et créant des emplois pour eux? De telles expériences ont eu des résultats extrêmement positifs, notamment en France et aux États-Unis.

Concrètement, nous souhaiterions faciliter la mise en place de services tels que les haltes-répit, les clubs de devoirs, les petits déjeuners, les camps de jeunes, les coopératives de travail jeunesse, les corvées d'entretien, en impliquant les associations dans la définition des besoins, des services et en favorisant leur réinsertion à travers l'organisation de ces activités.

Le Président (M. Vallières): ..reste trois, quatre minutes.

n(12 h 10)n

M. Gelderblom (Claude): Comme nous l'affirmions lors de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 170, nous partageons l'analyse à l'effet que certains enjeux, notamment le logement social, dépassent largement les territoires des municipalités et devraient être pris en charge à l'échelle de la MRC ou de l'agglomération. À l'exemple de l'Ontario où 65 commissions régionales administrent 85 000 logements HLM, nous pourrions réduire de 543 à 75 le nombre des offices d'habitation au Québec en confiant dorénavant la gestion des HLM aux 31 nouvelles agglomérations urbaines et aux 44 MRC sans noyau urbain. Au-delà des économies que nous pourrions faire, le regroupement des offices d'habitation permet de moderniser et de professionnaliser le réseau des HLM afin que celui-ci puisse développer une vision globale sur les problèmes de logement et augmenter sa capacité d'intervenir au profit des populations en difficulté. Dans de nombreuses régions au Québec, les municipalités sont présentement incapables, faute de ressources, d'assumer leurs responsabilités en habitation. Ces offices auraient alors les ressources nécessaires pour agir tant comme gestionnaires responsables que comme développeurs.

C'est dans cette perspective que nous nous opposons à la proposition contenue dans le document de consultation de la commission à l'effet de transférer la gestion des 400 petits offices à des OBNL. Le développement de consultation de la commission propose d'instaurer un nouveau fonds de développement du logement social, ce qui, en soi, est une excellente idée, mais de le réserver en exclusivité aux OBNL en habitation. Nous croyons qu'à l'exemple du Fonds de solidarité de la FTQ le Fonds québécois en habitation pourrait bénéficier d'une forme d'incitatif fiscal pour inciter les épargnants à investir dans la construction de nouveaux logements sociaux. La formule du brevet A en France existe depuis près de 100 ans. C'est une bonne idée de se donner des leviers de développement social qui sont moins dépendants, à long terme, des humeurs budgétaires des gouvernements qui se succèdent à Québec et à Ottawa.

Il serait, par contre, scandaleux de refuser de venir en aide aux 25 000 ménages demandeurs de HLM. Le logement public est une part importante de notre réseau de logement social. Il répond de mieux en mieux aux besoins des 65 000 ménages qui y résident. Il s'agit, de plus, du seul réseau qui accorde une accessibilité sans aucune restriction de ses logements.

Pour répondre aux différents besoins exprimés par la population à faibles revenus et pour simplifier l'accès au logement social, il est essentiel que les différents fournisseurs de logements subventionnés par l'État se coordonnent efficacement dans chacune des régions. Les gens devraient pouvoir s'inscrire, en allant à un seul endroit, sur une liste centrale leur donnant accès aux différentes formes de logement subventionné. Cette liste d'attente centrale pourrait être administrée conjointement par les différents réseaux: HLM, coops et OBNL, et tenir compte de la spécificité de chacun d'eux. Un tel système existe présentement en Ontario et simplifie beaucoup la recherche de logement des personnes en difficulté.

De plus, il est nécessaire d'établir une interconnexion entre les différentes composantes du réseau du logement social au Québec. Une personne devrait pouvoir passer d'un OBNL à un HLM, d'un HLM à une coop et d'une coop à un HLM en fonction de l'évolution de ses besoins, de sa situation personnelle. Les coopératives et les OBNL et les HLM doivent être les différents maillons d'une même chaîne qui doit se compléter, les HLM ayant une vocation généraliste et les OBNL, une fonction plus spécialisée. Merci.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Merci. Merci d'être pas mal dans le temps également. Ça va nous permettre d'avoir une quinzaine de minutes d'échange de part et d'autre avec les groupes parlementaires. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui, merci, M. le Président. Alors, moi, je suis sûre que vous avez regardé, comme moi, avec attention, à la page 49 du document qu'on a envoyé en consultation, la question de l'évolution de la structure démographique, puis comment est-ce que c'est différent à Montréal ou ailleurs par rapport à des régions telles que la mienne, le Bas-Saint-Laurent, des comtés comme le mien, Matapédia. Alors, on dit: «Pour l'ensemble des régions, une grande partie de ce qui sera construit d'ici 2021 deviendra excédentaire par la suite.»

Alors, on a cette préoccupation, vous comme moi, de faire des choses, de court, de moyen et de long terme, qui ont de l'allure, puis parce qu'on travaille souvent avec l'argent des gens, du peuple, à quelque niveau qu'il se situe. Et on a, dans des villages, par exemple... Souvent, les HLM, ils vont se bâtir soit neufs, parce qu'il n'y a rien dans le village ou la ville qui répond aux besoins, ou soit en recyclant des bâtisses qui retrouvent une nouvelle vocation.

Alors, moi, dans le document qu'on vous a présenté, on parle d'une planification puis de l'importance aussi d'avoir quelque chose par rapport à une MRC, un schéma d'aménagement, de regarder ça avec une vision globale. Et je suis sûre que vous avez cette préoccupation-là. On parle du rôle des administrations municipales, locales et régionales. Puis je me demande, le CRCD, par rapport à la question du logement social, comme on lui a donné un rôle au niveau des garderies, par exemple, de regarder ça globalement... Puis, moi, comme députée, j'ai toujours une préoccupation pour que, les garderies, dans un village, il n'y en a pas, en milieu familial, il faut y aller. Puis c'est la même chose que dans le logement social ? d'accord? ? pour un ensemble.

Alors, moi, dans votre mémoire, il y a des choses qui je trouve intéressantes, peut-être parce que j'ai la même vision des choses. Mais l'idée que vous avez de regrouper les offices d'habitation pour renforcer leur rôle à travers le Québec et par ce fait même d'aller chercher, peut-être avec les MRC ? c'est les municipalités qui sont aussi vos partenaires ? d'aller chercher une meilleure planification terrain puis de ne pas faire en sorte que dans un village on fasse quelque chose qui devient un éléphant blanc ou que les gens ne sont pas intéressés d'aller là. Alors, moi, il y a ça que je veux vous dire, que je suis d'accord avec votre vision des choses puis de professionnaliser aussi toute cette question du logement social puis de la dispensation des divers services.

À la page 12, je voudrais vous faire préciser des choses. Vous dites que dans le document de consultation, on propose d'instaurer un nouveau fonds de développement du logement social. Vous dites: «ce qui est en soi une excellente idée, mais de le réserver en exclusivité aux OBNL en habitation». Dois-je comprendre que vous ne voulez pas des coops là-dedans? Ce n'est pas ça que je dois comprendre, hein? Et vous parlez aussi... vous dites: «Nous croyons qu'à l'exemple du Fonds de solidarité de la FTQ, le Fonds québécois en habitation devrait bénéficier d'une forme d'incitatif fiscal pour inciter les épargnants à investir dans la construction de nouveaux logements sociaux.» J'aimerais que vous élaboriez? Comment vous imagineriez ça, un fonds d'investissement pour le logement social au Québec?

Le Président (M. Vallières): Alors, c'est M. Doyon qui répond?

Mme Doyer: Puis le ghetto? Juste... les ghettos. Parce que souvent on entend: Les ghettos... les HLM, c'est des ghettos. C'est-u si vrai que ça?

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Pilon.

M. Pilon (Robert): Vous posez plus qu'une question là. Ha, ha, ha!

Mme Doyer: Trois.

M. Pilon (Robert): Bien, peut-être d'abord sur le fonds. Nous, on ne pense pas que l'argent va venir... que le gouvernement peut se retirer du financement de nouveaux logements et que le Fonds québécois en habitation communautaire doit trouver tout l'argent ailleurs, mais on pense que ça peut se compléter. Donc, oui, le gouvernement doit continuer à investir et même à réinvestir au niveau du logement, puisqu'il y a une pénurie, mais, en même temps, on devrait pouvoir donner au Fonds certains leviers. S'il y a des incitatifs fiscaux, si le gouvernement veut donner des incitatifs fiscaux à quelqu'un, on dit: Donnez-les au Fonds québécois en habitation parce que c'est un fonds qui est sans but lucratif et vous pouvez être sûrs que les incitatifs fiscaux vont bien servir à donner du logement aux plus bas coûts possible.

Quels genres d'incitatifs fiscaux pourraient être développés? On n'est pas des spécialistes, mais effectivement on sait que, en France, depuis 100 ans, les enfants qui vont à l'école peuvent s'ouvrir un compte de banque et, en grandissant, bien, ces fonds-là se multiplient, ça fait 100 ans que ça existe. L'incitatif, c'est quoi? C'est que, je pense que tu as la moitié... quand tu fais des revenus d'intérêts avec ça, bien, la moitié de tes revenus d'intérêts ne sont pas imposables. La condition, par contre, c'est un peu comme les REER ici ou le Fonds de solidarité, c'est que c'est investi dans la réalisation de logements sociaux sans but lucratif, un peu comme le Fonds de la solidarité de la FTQ permet de créer... tu investis, tu sauves de l'argent, tu sais que ça va créer des emplois, du moins tu l'espères. Bien, ce fonds-là, ce serait un fonds destiné à la réalisation de logements sociaux.

Mais on n'ira pas beaucoup plus loin là-dessus parce qu'on n'est pas des experts, mais ce qui est sûr, c'est qu'il y a un manque à ce niveau-là et que le Fonds mériterait d'avoir d'autres véhicules que juste l'argent du gouvernement. Parce que, vous le savez, il y a des bonnes et des moins bonnes années.

Sur les ghettos, il y a eu une évolution au Québec. Les premiers HLM bâtis dans les années soixante-dix, ils n'étaient pas bien, bien beaux. Si on pense à Québec, par exemple, la première idée qu'on a des HLM dans la ville de Québec, c'est les gros blocs le long de l'autoroute, et on ne voit qu'eux d'ailleurs parce qu'ils sont gros puis ils sont visibles, alors que la moitié des HLM, on ne les voit pas: c'est des petits logements de deux étages, trois étages dans un quartier comme Limoilou, Saint-Sauveur. Eux, on ne les voit pas, on ne sait pas que c'est des HLM. Donc, l'idée qu'on a des HLM, c'est que c'est des gros blocs inhumains...

Mme Doyer: Il y en a 10 centres de 50 à 60 au Québec, en passant.

M. Pilon (Robert): Oui. Alors qu'il y a eu une évolution positive des HLM au niveau de la construction.

L'autre chose, c'est au niveau des ghettos comme tels. Il y a eu des erreurs de faites, surtout dans les années quatre-vingt. Il y a des politiques de loyer et d'attribution des logements ? d'ailleurs, le Vérificateur général du Québec lui-même le notait ? qui ont eu pour effet de chasser les petits travailleurs au salaire minimum des HLM. Et là, on a parqué dans les HLM seulement les bénéficiaires de la sécurité du revenu ou les pensionnés. Ça, ça a été une erreur. C'est en train d'être corrigé, c'est-à-dire qu'on a changé la politique des loyers pour favoriser les familles monoparentales qui travaillent au salaire minimum à demeurer en HLM.

Et la SHQ nous a promis pour 2003 qu'on changerait le règlement sur la façon d'attribuer les HLM pour que les ménages travailleurs à très faibles revenus puissent également y avoir un meilleur accès. Donc, ça aussi, ça va être positif pour tout le monde parce que la mixité sociale, ça va bénéficier pas juste aux ménages travailleurs, ça va bénéficier aussi aux personnes assistées sociales. Ça va être bien qu'il y ait du monde qui se lève le matin pour aller travailler, c'est un modèle positif pour ceux qui n'ont pas cette chance-là. Donc, la mixité sociale, nous, on y croit puis on la revendique.

n(12 h 20)n

Sur votre première question de la planification, nous, ce qu'on constate, c'est que beaucoup de municipalités au Québec n'ont pas les moyens de faire une planification urbaine ou régionale, c'est fait à la bonne franquette. Ils n'ont pas les ressources nécessaires dans les petites municipalités ? je pense à Cap-Chat, à Sainte-Anne-des-Monts. Ils n'ont pas ces possibilités-là alors que, si on regroupait les 15 ou 20 petits offices municipaux de ces régions-là, où les gens travaillent à temps partiel, une journée par semaine, et qu'on créait un organisme en charge, justement de la planification des besoins...

Mais, aussi, ce qui est nouveau ? c'est la dernière partie de notre mémoire ? c'est que nous, on aimerait qu'il y ait non seulement une planification, mais une gestion coordonnée des listes d'attente et des logements disponibles dans les HLM, dans les coops et dans les OSBL. C'est sûr que ça, ça va un peu froisser l'autonomie de tout le monde. Tu sais, chacun aime bien faire ce qu'il veut dans les offices, dans les coops, dans les OSBL, mais nous, on pense que ce n'est pas profitable pour le pauvre monde, il faut avoir une gestion planifiée de ça. Quand il y a des logements qui se libèrent, il faut qu'un organisme central dans la région le sache et puisse en faire bénéficier l'ensemble de la population. C'est un petit peu l'anarchie actuellement. Ce n'est pas la fin du monde, mais on pourrait avoir une gestion beaucoup plus profitable pour les gens si c'était mieux planifié et organisé.

Mme Doyer: Merci. Vous avez bien...

Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, madame et messieurs de la Fédération des locataires de HLM du Québec, soyez les bienvenus. Votre mémoire est assez étoffé, vous avez abordé plusieurs aspects de la consultation à laquelle on vous a conviés, et je reconnais la consistance et la persistance des demandes que vous soulevez à chaque fois que vous vous présentez devant nous.

Vous faites référence, à la page 8 de votre mémoire, à l'adoption du projet de loi n° 49 et la mise en place de comités consultatifs de résidents, une disposition avec laquelle on était entièrement d'accord. Le projet de loi a été adopté, ça fait déjà plus de six mois. Est-ce qu'il y a des comités de résidents qui ont été mis en place un peu partout en plus de ceux qui existaient déjà, et dans quelles régions?

Le volontaire, M. Pilon.

Le Président (M. Vallières): M. Pilon.

M. Pilon (Robert): Oui. Il faut dire que les membres de mon conseil d'administration sont très représentatifs et savent ce qui se passe chacun dans leur région, mais, quand vous posez une question sur l'ensemble de la province, c'est moi qui ai la chance de me promener.

Mme Houda-Pepin: Oui. Allez-y.

M. Pilon (Robert): On constate que c'est une chose de passer une loi, mais, de changer les mentalités, c'est beaucoup plus long que simplement passer une loi. On a applaudi beaucoup la loi, mais six mois pour changer les mentalités qui existent depuis 30 ans, c'est peu. Dans les grandes villes: Trois-Rivières, Sherbrooke, Saguenay, Gatineau, les comités consultatifs se sont mis sur pied, et il y a une bonne collaboration des offices qui apprennent d'ailleurs, eux également, à gérer différemment les HLM. Vous savez, avant, c'était très paternaliste; tu avais des administrateurs payés qui s'en occupaient, puis le pauvre monde dedans n'avait pas un mot à dire, et là, ces gens-là apprennent à travailler en partenariat avec les résidents. C'est nouveau pour eux. Ça fait qu'il faut être un peu patient de part et d'autre, mais il y a une bonne volonté.

Par contre, on a l'impression que, dans les régions plus éloignées des grands centres... Vous savez, il y a 400 petits offices où le directeur travaille une journée-semaine. Eux ne savent pas toujours que la loi a été adoptée par le Parlement en avril dernier. Par contre, et l'Association des offices et l'Association des directeurs et la Fédération des locataires, on travaille ensemble à éduquer tous ces gens-là, et la SHQ nous a promis que ceux qui ne seraient pas éducables dans un temps raisonnable se feraient parler dans le casque par des fonctionnaires de la SHQ dans quelques mois.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Houda-Pepin: D'accord, très bien. Alors, vous avez répondu à ma question. Maintenant, vous avez, à la page 9 de votre mémoire, suggéré la création d'un programme de services communautaires qui serait pris en charge par les résidentes et les résidents et qui créerait des emplois pour eux. Nous avons entendu le Réseau des OSBL en habitation, qui nous a parlé des services qui sont déjà offerts. Vous, vous suggérez un programme qui serait plus large et qui serait administré et mis en place par les résidents. Pourquoi? Parce que vous êtes insatisfaits de ce qui se fait actuellement ou parce que... Qu'est-ce qui manque de ce qui se fait actuellement?

M. Pilon (Robert): Je vais vous donner deux exemples, si vous me le permettez. Le premier... Hier, on était à la commission des affaires sociales qui étudie le projet de loi n° 112 et on donnait justement deux exemples. Le premier, c'est il y avait un monsieur, qu'on n'a pas amené avec nous aujourd'hui, M. Giroux qui vient de Saint-Jean-sur-le-Richelieu. M. Giroux, c'est une personne âgée dans un immeuble de 88 logements personnes âgées.... La plupart des gens qui sont là sont rentrés sur leurs deux pattes en HLM, mais ça fait 15 ans de ça, 20 ans de ça, ils sont en légère perte d'autonomie. Les gens restent chez eux, ne sortent plus, ils sont en jaquette, en robe de chambre puis ils mangent des beurrées, donc... L'association des résidents a construit une cafétéria. Donc, sept, huit personnes âgées de leurs mains, sans un sou de subvention de personne, ont construit une cafétéria au sous-sol et là, maintenant, ils servent des repas à coût modique non seulement aux 80 résidents mais à l'ensemble des personnes âgées du secteur. Ils ont fait ça sans un sou de subvention, ils ont créé un emploi, celui de la cuisinière, et ils essaient tant bien que mal de la payer par les repas.

Ce qui leur manquerait, c'est peu de chose, c'est des petites subventions parce que ça s'autofinance quasiment. Mais ces gens-là sont allés cogner à toutes sortes de portes, mais, comme ce n'est pas des spécialistes de la... c'est des bénévoles, des résidents personnes âgées bénévoles, ce n'est pas des spécialistes de la demande de subvention, ils n'ont pas réussi à faire financer ce projet-là qui est un excellent exemple dans les projets de maintien à domicile, qui sauve énormément d'argent parce que ces personnes-là, s'ils n'étaient plus dans leur HLM, ils seraient où? Ils seraient dans le réseau de la santé puis ça coûterait un bras au gouvernement. Donc, on voudrait ? premier exemple donc ? un programme de subvention accessible à ce type d'action là en HLM, action bénévole communautaire.

L'autre exemple c'est, les HLM c'est 65 000 logements, c'est beaucoup d'entretien puis de conciergerie, ça...

Mme Houda-Pepin: ...M. Pilon, je vais vous demander des réponses courtes parce que j'ai d'autres questions puis peut-être ma collègue aurait aussi des questions. L'idée de donner des mesures fiscales pour inciter le privé à s'impliquer dans le développement de nouvelles unités de logement social et abordable, vous n'êtes pas tout à fait favorables à ça. Ce matin, on a discuté avec les représentants des propriétaires qui nous ont dit qu'ils étaient ouverts à considérer la possibilité que, si ces mesures fiscales se mettaient en place, elles seraient réservées exclusivement au logement social et abordable. Est-ce que cette ouverture du secteur privé vous invite à reconsidérer votre affirmation?

M. Pilon (Robert): L'expérience qu'on a des 20 dernières années, c'est que les programmes gouvernementaux, tant à Québec qu'à Ottawa, qui ont soit subventionné directement ou indirectement la rénovation ou la construction de logements ? là on pourrait en citer plusieurs ? il y a eu Loginove, il y a les IRLM, bon ? il y en a plein. Nous, le constat qu'on fait, c'est que, oui, on a subventionné l'entreprise privée, mais jamais les gouvernements ont pu assurer un contrôle efficace sur le coût des loyers après rénovation ou après construction, parce qu'il y a quelque chose de naturel. Si moi, je peux louer mon logement à Montréal 700 $ puis qu'il y a une queue de 15 personnes qui sont prêtes à le payer, 700 $, ce n'est pas vrai...

Mme Houda-Pepin: Je vais vous arrêter. Dans le logement abordable, un des paramètres qui est précisé dans l'entente, c'est justement le coût du loyer. Donc, ça, c'est prévu, là, le contrôle est là...

M. Pilon (Robert): Bien sûr et c'est pour ça que l'entreprise privée n'est pas intéressée à appliquer...

Mme Houda-Pepin: Mais s'il y avait contrôle, est-ce que vous seriez d'accord avec l'idée que le gouvernement incite par des mesures fiscales le privé à s'engager dans le logement social et abordable? Parce que, malgré la bonne volonté du communautaire, malgré la bonne volonté du coopératif, malgré la bonne volonté des gouvernements, on n'arrive pas à livrer suffisamment d'unités de logement pour juguler la crise. Alors, le privé, il faut qu'il y aille parce qu'ils vont nous aider à construire et répondre, là où il y a des besoins pour la construction de nouvelles unités, à régler le problème.

M. Pilon (Robert): Madame, on a la réponse à votre question: quand on regarde le Programme de logement abordable, il y a les subventions qui sont disponibles. Ce qu'on dit au marché privé c'est: vous pouvez les prendre, mais il va avoir un contrôle sur le loyer. Le constat qu'on fait, c'est que le privé n'applique pas dans ces programmes-là parce qu'ils veulent les subventions mais ils ne veulent pas le contrôle du loyer qui va avec. Donc, on peut développer ces programmes-là, si vous voulez, ils existent déjà et ils ne sont pas utilisés par le privé. C'est pour ça qu'on dit: Prenons ces argents-là et faisons en sorte que l'État puisse, via le communautaire, réaliser 8 000 nouveaux logements sociaux par année.

n(12 h 30)n

Mme Houda-Pepin: O.K. Il reste combien pour ma collègue? O.K., très bien. J'ai le temps pour une petite question. La crise du 1er juillet, là, il y en a qui considèrent... notamment, on a un organisme qui nous a déposé un mémoire et, malheureusement, il ne s'est pas présenté devant nous comme tel, c'est le Regroupement des propriétaires d'habitations locatives de l'Estrie. Eux, ils suggèrent, par exemple, de casser les automatismes du 1er juillet. Est-ce que vous considérez que, si les baux n'étaient pas limités à une date fixe, ça pourrait régler la crise du logement d'une certaine manière? À quel niveau, je ne le sais pas, je vous pose la question.

M. Pilon (Robert): Je ne suis pas un expert. Ce que je sais, c'est que, si on avait... si les gouvernements... Je crois que c'est les libéraux, à l'époque, d'ailleurs qui avaient établi ça, le 1er juillet. Ça avait beaucoup rapport avec les écoles et les familles: on ne voulait pas déplacer les jeunes de leurs écoles n'importe quand dans l'année. Et je pense que tout le monde avait applaudi à ça à l'époque. Bon, c'est sûr que maintenant il y a beaucoup de ménages qui n'ont plus d'enfants.

Ceci dit, que ce soit le 1er juillet ou qu'il y ait 12 périodes dans l'année où on peut se chercher des logements, il y a une réalité qui demeure, c'est que, dans les grands centres urbains, il n'y en a pas, de logements, sauf ceux qui sont vides parce qu'ils ne sont pas habitables. Alors, je ne suis pas sûr que ce serait une solution miraculeuse. Peut-être que ça aurait un certain effet, mais mettons que je ne suis pas sûr.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. Pilon.

Le Président (M. Vallières): Merci beaucoup. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci, M. le Président. Je pense que vous avez un mémoire qui reflète bien la réalité des HLM. Et je suis très heureux de constater que le coût qui revient au gouvernement s'en va vers la baisse, vers le rabais, parce qu'il y a des HLM qui ont été construits à 17, 18 % d'intérêt dans ces années-là. Et, moi, j'avais 100 logements chez nous et ça coûtait environ 400 000 $ par année de déficit au niveau de ces logements-là, ça veut dire à peu près 350 $ par mois de déficit. Maintenant, dans le contexte actuel d'intérêt à 5 et 6 %, ça veut dire que, à ce moment-là, les coûts reviendraient beaucoup moindres, ça baisserait plus vite, en tout cas, concernant ça, là. Est-ce que, vous autres, dans votre recommandation, vous recommanderez que le gouvernement rouvre à nouveau vers la construction de HLM?

M. Pilon (Robert): Tout à fait. Ce qu'on souhaite, c'est qu'il y en ait 4 000 qui se réalisent. Vous savez, à la fin de la période de Pierre Elliott Trudeau, il se construisait 5 000 logements... et de M. Bourbeau, André Bourbeau, qui était le ministre responsable de l'habitation, il se construisait 5 000 logements HLM au Québec chaque année. Ça, c'est au tout début des années quatre-vingt-dix. On aimerait revenir à 4 000 logements HLM par année, justement à cause de la pénurie.

Sur les coûts financiers, il y a eu des erreurs de faites dans le passé. Vous savez, les premiers HLM coûtaient cher parce qu'on prenait des hypothèques sur 35 ans. Il n'y a pas un propriétaire, il n'y a pas un individu au Québec qui prendrait une hypothèque sur 35 ans, on paie quatre fois, cinq fois l'actif. Donc, je pense que, ça, on peut tirer des leçons de ça pour que les logements HLM coûtent moins cher, entre autres, soit de... on a pris des hypothèques sur 20, 25 ans; on pourrait aussi les payer beaucoup plus... donner beaucoup plus de capital au départ. Donc, il y a différentes avenues pour faire en sorte que les logements à prix modique qu'on réalise coûtent moins cher à moyen et à long terme.

Mais ce sur quoi j'aimerais attirer votre attention, c'est la comparaison entre les suppléments au loyer privés, qui sont demandés par l'entreprise privée, et les HLM. Et ça, je pense, c'est important. Le supplément au loyer, on dit que ça coûte 260 $ par mois. Ce montant-là, c'est sûr et certain qu'il va augmenter parce que, l'an prochain, dans deux ans, dans trois ans, le coût des loyers sur le privé va augmenter, donc le supplément au loyer qu'on verse va lui aussi devoir augmenter, alors que si... Et on est locataire toute notre vie. L'État est locataire toute sa vie au nom de 200, 300 000 ménages. Si l'État est propriétaire de ces immeubles-là, ça lui coûte plus cher au début, mais, au fur et à mesure que les hypothèques sont payées, les coûts diminuent. Et c'est la logique entre est-ce qu'il vaut mieux que l'État soit locataire à vie pour 100, 200, 300 000 ménages ou est-ce que ce serait un meilleur placement de devenir propriétaire en disant que ça va coûter moins cher à moyen et à long terme? Et, là-dessus, il y a plusieurs études intéressantes.

M. Laprise: Face à la loi n° 49, suite à la loi n° 49, avec les nouvelles responsabilités qui vous ont été allouées en regard des différents programmes, est-ce que c'est plus facile que les HLM ou c'est plus difficile de mettre à la disposition du public des logements à ce moment-là?

M. Pilon (Robert): Bien, moi, je vous dirais que c'est beaucoup plus intéressant pour le pauvre monde d'aller habiter dans un HLM, parce que non seulement tu payes un loyer qui a de l'allure, mais en plus tu as ton mot à dire, tu peux t'impliquer dans la gestion, l'administration. Puis c'est plus intéressant, aussi, pour les gens de passer le balai puis de faire des corvées parce qu'ils sentent qu'ils sont plus chez eux, ils sont écoutés, tu sais, ils ne sont pas juste des... qu'ils n'aillent pas juste consommer un bien, qu'ils n'ont pas un mot à dire, ils sont partenaires. Ça fait qu'il y a beaucoup plus d'actions bénévoles à l'intérieur des HLM.

M. Laprise: Dans les listes d'attente que vous avez actuellement, est-ce qu'il y a beaucoup de demandes pour des familles de deux, trois enfants, par exemple? Est-ce qu'on sent que c'est une classe, au niveau de la classe moyenne, qui, à un moment donné, quand les enfants sont jeunes, on sent qu'il y a des difficultés au niveau d'attacher les budgets des deux bouts, là?

M. Pilon (Robert): La réalité des listes d'attente, c'est qu'il y a les deux, hein? Puis, le document de la commission le montre, il y a beaucoup plus de personnes seules au Québec maintenant et il va y avoir de plus en plus de personnes seules. D'ailleurs, c'est peut-être un drame pour eux autres, là. Il y a des gens qui vivent bien ça, mais, pour d'autres, la solitude ça crée d'autres problèmes. Mais donc il y a de plus en plus de personnes seules qui ont besoin d'un petit logement.

Et il demeure qu'il y a toujours beaucoup de jeunes familles avec deux, trois enfants qui, eux, ont de plus en plus de difficultés à se loger parce que, vous le savez, le marché privé locatif, quand ils ont le choix puis qu'il y a 15 personnes qui attendent à la porte, le logement de deux, trois chambres à coucher, ils vont préférer les louer à des personnes seules, c'est beaucoup plus tranquille, qu'à des familles. Et donc ce problème de discrimination là, sur le privé, fait en sorte que beaucoup de familles s'inscrivent sur les listes d'attente.

Le Président (M. Vallières): Merci. Juste avant de passer la parole au député de Saint-Maurice, Mme la députée d'Anjou a peut-être une précision à vous faire... a quelque chose à vous faire affirmer qu'on retrouve dans votre mémoire en page 16. Vous dites que «l'accession à la propriété est un phénomène naturel qui n'a pas besoin d'être subventionné dans le contexte actuel». Donc, on vous comprend bien, que, pour vous, là, l'accès à la copropriété, à la propriété, on n'a pas besoin de subventionner ça, c'est un phénomène naturel. Et les gens qui soutiennent la thèse que, à partir du moment où des gens qui sont locataires présentement deviennent propriétaires, ça libère des logements, ce n'est pas, pour vous autres, une avenue qui est intéressante à regarder.

M. Pilon (Robert): Bien, on pense que c'est une théorie. Aux États-Unis, c'était à la mode, dans les années quatre-vingt, on avançait l'idée, là, du «filtering down» puis du «filtering up», là, c'est-à-dire que, par exemple, les gens qui accédaient à la propriété individuelle libéraient des logements et ça permettait à des plus pauvres d'en profiter. Sauf que la réalité est plus complexe que ça, notamment à cause de ce que je viens de vous dire c'est-à-dire que, si un logement sur le Plateau Mont-Royal se libère parce que quelqu'un accède à la propriété privée, le propriétaire, lui, de ce logement-là va se dire: Je le louais 400 $; là, oups! il est libre puis j'ai une file d'attente de 15 personnes, je ne le louerai plus 400, je vais le louer 600 ou 700, parce qu'il y a de la demande comme ça, et je ne le louerai pas au plus pauvre, je vais le louer à qui je veux. Donc, cette théorie-là, là, de dire qu'on va libérer, par l'accession à la propriété, des logements pour les plus pauvres, c'est plus ou moins valable.

Et, sur l'accession à la propriété comme telle, moi, j'en ai bénéficié, plein de gens en ont bénéficié au Québec. Je pense à Mon taux, mon toit; il y a eu Corvée-Habitation; il y a eu plein de mesures. La plupart de ces programmes-là visaient à réduire les taux d'intérêt à environ 5, 6 % pour que ce soit possible pour n'importe qui d'acheter. Ça, ça a été fait. Actuellement, les taux d'intérêt sont à ce niveau-là.

L'autre bracket de gens qu'on voudrait qui deviennent propriétaires dans le document de la commission, c'est les gens entre 20 000 et 30 000. Et, nous, on pense que c'est casse-gueule pour ces gens-là. L'expérience qu'on a là-dessus, c'est en Angleterre. Mme Thatcher avait vendu les HLM à presque rien aux gens pauvres. Et le résultat, cinq ans, 10 ans après, c'est que le tiers des gens pauvres qui avaient acheté les HLM pour une bouchée de pain avaient dû les revendre parce qu'ils n'avaient pas les moyens de les entretenir puis de les rénover. Et ils les avaient vraiment eu pour une bouchée de pain. Donc, ça nous inquiète un peu, là. C'est-à-dire, on ne peut pas être contre la vertu mais on se dit: Combien d'argent il faudrait véritablement que l'État donne aux gens pour qu'ils puissent, ces gens pauvres là, accéder à la propriété? C'est-u 40 000, 50 000 $? Et, à ce moment-là, si c'est ça, bien, on pense que, tant qu'à mettre cet argent-là là, il vaudrait mieux le mettre dans le logement public parce que c'est une garantie à vie que ces logements-là vont rester accessibles et à bas loyer alors que même... Si on finance la propriété pour quelqu'un qui est pauvre, si dans cinq ans il n'est pas capable de la garder, sa propriété, il va la revendre et on la perd. C'est un marché spéculatif. L'argent de l'État ne nous garantit pas que ces logements-là vont rester à vie à bas loyer puis occupés par des pauvres.

Le Président (M. Vallières): Merci, Mme la députée d'Anjou.

Mme Thériault: Moi, j'aimerais savoir si vous avez des moyennes qui ont été faites sur le nombre de temps qu'une personne ou une famille peut passer dans un HLM au niveau de l'occupation. Première des choses, parce que j'ai deux autres questions qui se rattachent à ça.

M. Pilon (Robert): Ça existe mais je ne l'ai pas. Ce que je pourrais vous dire, c'est que le taux de roulement dans les HLM est environ 10 % par année. Donc, on peut penser que, sur 10 ans, à 10 % par année, ça fait le tour. Dans le cas des HLM famille, à cause des problèmes sociaux qui existent, il y a des taux de roulement qui pouvaient aller jusqu'à 20 % par année. Et c'est pour ça d'ailleurs qu'on demandait, là, des programmes de soutien.

Mme Thériault: Par contre, j'imagine qu'avec les personnes âgées qui sont en HLM qui, elles, restent là... Parce que ça existe, et je parle en connaissance de cause, parce que j'ai des HLM où j'ai beaucoup de personnes âgées, qui sont dédiés qu'aux personnes âgées seulement, il n'y a pratiquement pas de roulement.

M. Pilon (Robert): Les décès.

Mme Thériault: C'est... Évidemment. Donc, j'imagine que ça doit s'équilibrer quelque part. J'aimerais vous entendre en réaction à deux commentaires qui ont été émis par d'autres groupes. Qu'est-ce que vous pensez de faire passer de 25 à 30 % la portion d'argent qui serait consacrée au loyer? Première réaction. Et, la deuxième chose, j'aimerais aussi vous entendre en réaction suite aux propos concernant les listes d'attente de 25 000 personnes, que vous dites, où les gens qui sont là veulent tout simplement payer moins cher de loyer que d'être sur le marché locatif privé.

Le Président (M. Vallières): Alors, en deux minutes, M. Pilon. Ce n'est pas beaucoup de temps, mais c'est le temps qu'on a.

M. Pilon (Robert): Le taux d'effort actuel dans les HLM est de 28,5 %, et non pas de 25 %, parce qu'on doit additionner les coûts d'électricité. Bon. Puis le faire passer de 28,5 à 30 %, je ne peux pas vous dire que ça ferait l'affaire des résidents puis que les gens diraient: Bravo! on augmente nos loyers, c'est formidable. Mais donc, je veux juste vous dire qu'actuellement le taux est de 28,5 et non pas de 25. L'autre question qu'on se poserait sûrement, c'est: Si le loyer était augmenté, où irait cet argent? Si on nous dit que c'est pour être réinvesti pour le logement social, c'est peut-être un moindre mal. Si c'est pour financer l'entreprise privée, je pense que les gens chialeraient encore plus.

n(12 h 40)n

Sur la deuxième question, ce que je sais, c'est qu'il y a deux... Avant-hier soir, j'étais dans le quartier Rosemont à Montréal, il y a 1 900 ménages... où il y avait une assemblée publique pour les gens qui étaient en attente d'un HLM. L'Office avait convoqué 1 900 ménages, et on leur disait qu'il y a seulement 100 logements HLM qui vont se libérer dans l'année dans le quartier Rosemont. Et il y avait plusieurs centaines de ménages sur place. Et ces gens-là, ce qu'ils souhaitaient, c'est un logement HLM, pour diverses raisons. Et ça varie. Dans certains cas, c'était à cause de la difficulté de s'en trouver un sur le marché privé. Parce que, vous savez, il y a une... la pénurie existe. On ne l'invente pas, elle est là. Donc, les gens voulaient d'abord avoir accès, rentrer dans un logement à quelque part. Et le marché privé actuellement ne leur en offre pas, de logement. Donc, beaucoup des gens qui étaient présents dans la salle venaient dans l'espoir d'enfin pouvoir accéder à un logement, en plus à un logement pas cher et un logement de bonne qualité, où tu as un propriétaire à vocation sociale qui est là pour te... Sa raison d'être, c'est de bien te traiter. Donc, je pense que les gens allaient là en connaissance de cause.

Les gens qui sont inscrits sur des listes d'attente de HLM et qui renouvellent chaque année leur demande en envoyant toutes sortes de formulaires et de photocopies, je pense qu'ils le font en connaissance de cause. C'est ça qu'ils veulent, ils veulent un HLM. S'ils voulaient autre chose, ils appliqueraient ailleurs.

Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, je veux remercier mes collègues de droite qui ont consenti, quelques minutes, grâce à la souplesse des mandats d'initiative, à ce qu'on puisse compléter les réponses à Mme la députée d'Anjou. Merci de votre contribution et d'avoir accepté notre invitation. Alors... Oui?

Mme Doyer: On avait consenti d'étirer, là, mais il faut...

M. Pinard: Vous êtes gentil, M. le Président, c'est parce que, voyez-vous...

Le Président (M. Vallières): Il restait deux minutes de votre côté. Alors, on pourra... On peut l'utiliser, oui.

M. Pinard: C'est parce qu'à la page 15 du rapport que vous nous avez formulé, vous posez la question: Est-ce que des contrôles trop sévères de la Régie du logement découragent la construction de nouveaux logements locatifs? Et vous mentionnez que le chef de notre collègue, qui est encore malheureusement absent ce matin, de l'ADQ, a soutenu cette thèse dans ses déclarations entourant la problématique du 1er juillet 2002. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Pilon (Robert): Bien, écoutez, nous, on a été surpris d'entendre M. Dumont, à la radio, puis je l'ai entendu de mes oreilles, dire que le fait qu'il existe un contrôle des loyers décourageait les propriétaires de construire du logement neuf. Ce qui m'a frappé là-dedans, c'est le fait que M. Dumont ne semblait pas savoir que, pendant les cinq premières années d'existence d'un logement, tu peux charger le prix que tu veux. Tu peux construire un logement neuf demain matin puis charger 1 200 $.

L'autre élément, je dirais, là-dessus, c'est que le principal problème des propriétaires à construire du logement neuf, ce n'est pas la Régie du logement, c'est les condominiums. C'est beaucoup plus intéressant, actuellement, pour les personnes âgées qui reviennent en ville de dire: Je vais m'acheter un condo à 900, 1 000 $ par mois plutôt qu'aller être propriétaire dans un logement flambant neuf qui va me coûter le même prix. Donc, la principale compétition qui nuit au marché privé du locatif neuf, selon nous, c'est justement l'accès à la propriété qui est rendu facile à cause des bas taux d'intérêt. Et ça, on n'y peut rien. C'est comme ça, c'est la business.

Le Président (M. Vallières): Bien, Mme la députée de Matapédia, en terminant.

Mme Doyer: Bien, moi, j'aimerais ça, des fois, que vous remettiez les pendules à l'heure. Parce que, des fois, quand ce sont les parlementaires qui parlent, on dirait qu'on est moins crédibles. Alors, les principaux concernés, les gens comme vous, j'aimerais ça que vous remettiez les pendules à l'heure sur des faussetés de ce genre-là.

Le Président (M. Vallières): Ceci clôt notre travail pour ce matin. Nous ajournons nos travaux à cet après-midi, 15 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

 

(Reprise à 15 h 35)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission de l'aménagement du territoire reprend son travail et poursuit les auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le logement social et abordable. Alors, bienvenue avec nous tout au long de l'après-midi.

Alors, le premier groupe que nous entendrons cet après-midi sera l'Association des propriétaires du Québec. Je vois qu'ils sont déjà en place. Alors, je vous prierais de vous présenter et de procéder également à la lecture de votre mémoire dans les 15 minutes qui viennent. La parole est à vous.

Association des propriétaires
du Québec (APQ)

M. Messier (Martin): Merci, M. le Président. D'abord, M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires, nous tenons à vous remercier de nous donner l'occasion de vous entretenir de nos points de vue sur le logement locatif québécois. L'Association des propriétaires du Québec, fondée en 1984, est un regroupement de propriétaires de logements locatifs qui regroupe près de 6 000 membres, principalement dans la grande région de Montréal, qui a pour mandat de protéger et de défendre les intérêts de ses membres. D'entrée de jeu, j'aimerais indiquer que nous faisons partie d'un front commun d'associations de propriétaires qui est composé de nous-mêmes, l'Association des propriétaires du Québec, de la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, de la Ligue des propriétaires de Montréal ainsi que du Regroupement des propriétaires d'habitations locatives.

M. le Président, avec votre permission, je vais lire un bref extrait d'une déclaration commune que nous avons tous convenu de vous lire, qui se lit comme suit: «Nous sommes honorés de participer à cette consultation et nous tenons à vous informer que tous les mémoires déposés devant votre commission soutiennent une position commune et font foi de solidarité. En effet, après une lecture approfondie de chacun des chapitres du document de consultation, les membres du front commun cheminent vers une même direction que chacun développera à l'intérieur de son mémoire.» Je peux peut-être vous remettre, même s'il a été déposé, le document pour...

Le Président (M. Vallières): Oui.

M. Messier (Martin): Alors, M. le Président, comme nous sommes les derniers du front commun à vous entretenir, nous avons modifié quelque peu la séquence de notre représentation pour tenter de répondre à certaines des interrogations qui ont été soulevées au cours des présentations qui nous ont précédés.

Mais d'abord, M. le Président, on aimerait vous faire part du fait que les propriétaires que nous représentons, ce sont de petits propriétaires. En fait, nous sommes le reflet du marché immobilier puisqu'au-delà de 85 % de nos membres sont de petits propriétaires de six logements et moins. Et donc, ces propriétaires qui ont investi au fil des ans pour se créer un petit peu un fonds de pension, des propriétaires qui ont souvent un emploi, qui investissent dans l'immobilier avec une vision à long terme, des propriétaires, je pense, qu'on peut qualifier essentiellement de bons propriétaires. Au Québec, on a des propriétaires qui ont une conscience sociale, qui sont conscients des enjeux du marché actuellement et qui, malheureusement, sont déprimés. Ils sont déprimés, ces propriétaires, et si, aujourd'hui, on les interpellent et on leur demande s'ils sont intéressés à acheter à nouveau ou à réinvestir dans le logement locatif, ils vous répondront malheureusement, dans la vaste majorité des cas, qu'ils ne le sont pas.

Et cette perception du marché, cette sensation que l'immobilier locatif est devenu beaucoup plus un problème qu'un investissement, c'est à cette perception que nous devons nous attaquer, M. le Président. Si nous voulons régler le problème du logement avec respect pour les autres énoncés qui ont pu vous être transmis, nous croyons fermement, à l'APQ, qu'il faut stimuler le logement locatif et redonner aux propriétaires un intérêt, une vitalité que, au fils des ans, malheureusement, ils ont perdus. M. Gour, Gilbert Gour va prendre la parole.

Le Président (M. Vallières): Parfait. M. Gour.

M. Gour (Gilbert): Merci. Donc, c'est ça. Comme on discutait un peu plus tôt, on a un problème actuellement criant au niveau du logement. Donc, ce que nous devons faire, c'est aider le milieu locatif. Donc, malgré un titre accrocheur, la crise n'est, selon nous, rien de plus qu'une fluctuation temporaire du taux d'inoccupation des logements locatifs que vivent certaines régions de la province du Québec, le tout étant plus spectaculaire ? donc, je parle d'un taux d'inoccupation en deçà de 1 % ? dans les grandes régions métropolitaines de Montréal, Québec et Gatineau.

Ce phénomène peut être expliqué par la recrudescence économique des grandes régions métropolitaines par rapport aux autres régions du Québec. De plus, les difficultés et délais occasionnés, donc congestion des ponts et autoroutes afin d'accéder aux grandes villes, jumelés au coût élevé relié au transport, en ont convaincu plusieurs de revenir s'établir dans les grandes villes. Malheureusement, ce sont encore les familles à très faible revenu qui font les frais de cette situation. Nous avons tout avantage en tant que société à tout mettre en oeuvre pour aider les familles défavorisées à quitter le cycle de la pauvreté. En effet, bien que force est d'admettre que «les logements locatifs au Québec sont relativement abordables», citation qu'on retrouve à la page 57 du document de consultation, certaines familles ont eu plus de difficulté à se trouver un logement en juillet dernier.

n(15 h 40)n

Cependant, il faut être prudent quand au choix des moyens à employer afin de tenter d'aider ceux d'entre nous qui sont dans le besoin. «Il faut garder à l'esprit que, dans la société vieillissante qu'est le Québec du XXIe siècle, la demande de logements est appelée à diminuer et que toute mesure de court ou moyen terme qui viserait à accroître substantiellement l'offre de logements locatifs risque de se traduire, dans quelques années, par une offre excédentaire.» Cette citation vient de M. François Des Rosiers, dans un article de La Presse le 6 juillet dernier. En d'autres mots, il faut absolument éviter de créer un problème à long terme, soit l'effondrement du marché locatif, en tentant de remédier à un problème temporaire.

Voilà pourquoi l'Association des propriétaires du Québec soutient qu'une des solutions au problème actuel est la subvention dite d'aide à la personne qui vise à augmenter le pouvoir d'achat du ménage par une augmentation de ses revenus. Ce faisant, les familles à faibles revenus pourraient ainsi trouver plus aisément un relogement convenable en provenance du marché privé. Cette solution, en plus de compter parmi les plus avantageuses en termes de coût, permet également d'obtenir une plus grande mixité sociale en évitant la création de ghettos. Je passe la parole à Me Messier.

Le Président (M. Vallières): Bien.

M. Messier (Martin): Écoutez, simplement, la rupture dans la lecture de notre texte pour vous informer que, dans les petits propriétaires, vous savez, les gens sont prêts à faire un effort. Les gens sont prêts à intégrer, dans leur milieu, des locataires. Et je pense que, quand on parle de mixité sociale, c'est important. Nous, ce qu'on voit comme inconvénient important à une formule qui viserait à ne faire que du logement social du type HLM, c'est la création, la ghettorisation, pour ne pas la nommer, et je pense que, ça, c'est regrettable comme société.

Moi, ce qu'on vient vous véhiculer aujourd'hui, comme message, c'est que nos membres sont prêts, quand les conditions s'y retrouvent, à intégrer, dans leur parc immobilier, des logements locatifs où on va obtenir une aide à la personne qui permettra aux gens de se loger dans un marché comme le nôtre. Et je pense que c'est une des pistes qu'on veut transmettre aujourd'hui, à la commission, de porter une attention particulière à l'importance qu'a la mixité sociale dans une société qu'on est en train de construire ensemble.

Alors, je vais de nouveau repasser la parole à M. Gour.

M. Gour (Gilbert): Je vous remercie. Donc, la solution est de stimuler le logement. Il est écrit, à la page 61 du document de consultation, que le secteur du logement locatif actuellement en crise est confronté à plusieurs contraintes qui en font un secteur d'investissement peu attirant. Une des raisons pour lesquelles ce secteur est peu intéressant est la surréglementation dont sont victimes les propriétaires de logements locatifs québécois.

En effet, qui, aujourd'hui, serait intéressé à investir une forte somme d'argent dans la construction d'immeubles à logements en sachant fort bien que l'on tentera de l'empêcher de vérifier la solvabilité et la réputation de toute personne désirant louer un de ces appartements, que l'on tentera de le limiter dans le choix de ses locataires, qu'il devra essuyer des pertes lors de non-paiement de loyer, qu'il devra essuyer des pertes lorsqu'un de ses appartements subira des dommages par un locataire, qu'il lui faudra environ 20 ans avant de récupérer sa mise de fonds après une rénovation majeure à l'un de ses immeubles, qu'il devra faire face à des délais trop longs et autres difficultés en cas de demande d'expulsion, qu'il risquera d'être poursuivi par ses autres locataires s'il ne réussi pas à expulser le locataire indésirable dans un délai raisonnable alors qu'il n'a pas de contrôle sur les délais judiciaires, et qu'on l'empêchera d'augmenter suffisamment ses loyers afin de couvrir l'augmentation réelle de ses coûts d'exploitation, la méthode de calcul ne tenant pas compte des variations réelles des dépenses à plusieurs égards?

Dans la même veine, nous retrouvons plusieurs interrogations à la page 80 du document de consultation. La première question étant: La Régie, comme certains le prétendent, est-elle vraiment une nuisance à la production de logements? Nos contacts avec nos membres et différents investisseurs nous permettent enfin d'affirmer que, dans le choix d'un véhicule pour leurs investissements ou dans le choix d'un emplacement pour la construction de leurs prochains immeubles, l'application de la législation actuelle, par la Régie du logement, est un facteur très négatif dans le choix à faire.

La deuxième question: Sans sa présence, ne verrions-nous pas une augmentation incontrôlée des loyers de centaines de milliers de ménages? Tout comme l'énonce Pierre-Kelly Gagnon, de l'Institut économique de Montréal, nous croyons que, si l'État se retirait des forces naturelles de l'offre et de la demande, il permettrait de retrouver un équilibre sain dans l'évolution du marché immobilier.

Troisième question: Une remise en question de ces acquis ne constituerait-elle pas un retour en arrière qui risquerait de s'accompagner d'une baisse de qualité des logements québécois? Encore une fois, nous demeurons convaincus que l'offre et la demande pourront permettre d'en arriver à un équilibre sain et souhaitable du marché. Si nous désirons motiver le secteur privé à investir dans les immeubles locatifs résidentiels, nous nous devons de remettre en question toute la réglementation entourant ce secteur. De plus, le véritable problème que rencontre actuellement le marché locatif concerne moins la rentabilité du parc existant que son renouvellement. En effet, M. François Des Rosiers, Ph.D. en gestion urbaine et immobilière de l'Université Laval, écrivait à ce sujet: «Selon nos informations, le coût moyen de réalisation d'une unité de deux chambres à coucher serait de l'ordre de 70 000 à 75 000 $ alors que sa valeur marchande ne dépasserait pas les 50 000 $. Le fossé à combler est considérable. Il est peu probable qu'une déréglementation même complète des hausses de loyer pourrait être suffisante pour y parvenir.

«Les investisseurs sont unanimes: dans le contexte actuel, compte tenu des coûts de construction, des coûts de loyer, ainsi que la réglementation actuellement en vigueur, le coût de location requis afin de rentabiliser l'investissement dépasse largement le coût médian actuel. Ces unités, en présumant qu'elles trouvent preneurs à court terme, seraient certainement les premières à être libérées lorsque le taux d'inoccupation sera à la hausse.»

Je passe la parole à Me Messier.

M. Messier (Martin): Une des questions qui a été abordée précédemment est la question qui a trait au phénomène du non-paiement de loyer au Québec. C'est un phénomène qui, malgré la crise du logement ? et on les a cités un peu plus tôt ? les chiffres le démontrent, le nombre de demandes semble constant, le nombre de demandes pour non-paiement de loyer, éviction d'un locataire qui ne s'acquitte pas de ses obligations, et ça, malgré une crise du logement.

Quand on parle à nos propriétaires au Québec, non seulement à nos propriétaires qui n'ont que des investissements ici, mais également à ceux qui en ont ailleurs, on remarque une donnée dans leur insatisfaction, dans leur inquiétude, dans leur découragement qui est constante: le non-paiement de loyer ne semble pas être une considération importante pour un locataire. Et, jusqu'à novembre dernier, jamais, on n'avait incité le locataire à s'acquitter régulièrement de ses obligations. Et je pense que c'est une donnée qui est importante, parce que, vous savez, un propriétaire ? et on le disait plus tôt, mes collègues de la Corporation des propriétaires l'ont mentionné ? plusieurs propriétaires n'introduisent même pas de demandes devant la Régie du logement, et la raison en est fort simple: c'est que, souvent, devant le manque de recours efficace suite à une décision ? on s'entend qui ne concerne pas l'éviction mais qui concerne seulement le non-paiement du loyer ? les propriétaires savent fort bien que la décision elle-même ne vaut souvent pas plus que le papier sur lequel elle est écrite. Et ça, M. le Président, ça décourage les propriétaires. C'est une donnée qu'il faut traiter. Il faut tenter de stimuler cette question-là, non pas cette question-là, mais de stimuler l'intérêt des locataires à acquitter ces obligations. Et on remarque que l'impunité qui est offerte par certaines dispositions de différentes lois actuellement nuit au marché immobilier. Situation d'autant plus désagréable ? on s'entend sur ce point-là ? la majorité des locataires s'acquittent bien de leurs obligations, c'est clair. Il faut inciter la minorité, la faible minorité qui ne le font pas, à le faire. Et d'abord, on retrouvera des marges de manoeuvre qui sont intéressantes et une dynamique dans l'immobilier et je pense qu'il ne faut pas écarter cette piste de non-paiement de loyer.

On a soulevé également plus tôt... On a parlé souvent du phénomène de la discrimination dans la sélection du locataire. M. le Président, c'est certain que dans un contexte de crise du logement, certains cas peuvent apparaître plus patents. Maintenant, nous, ce qu'on constate, ce qui nous est rapporté par nos membres, c'est une intolérance ? et je ne dis pas que c'est la seule source du problème ? mais ce qui nous est apporté régulièrement, c'est l'intolérance des locataires entre eux. Et je pense, M. le Président, qu'on doit prendre en considération cette donnée-là, cette donnée-là qui nous est transmise par des gens du terrain.

n(15 h 50)n

Écoutez, quand on me dit, moi, qu'on cogne à la porte du propriétaire pour lui demander s'il y aura des enfants qui seront voisins du logement, auquel cas le proposant locataire se désisterait de son application, quand on me dit qu'on va demander si des gens d'autres ethnies sont dans l'immeuble, auquel cas le locataire se désisterait de l'information, c'est certain que ce phénomène de société, qui est, selon moi, l'intolérance, crée une pression sur le marché qui, oui, peut créer, dans certains cas, qui, selon nous, demeurent quand même l'exception ? sans référer aux chiffres de la Commission des droits de la personne où on voit qu'il y a quand même très peu de plaintes. Mais, malgré le faible nombre de plaintes, c'est important qu'on s'attaque au phénomène et qu'on réfléchisse sur les solutions à donner.

Et ce qu'on considère, c'est qu'une des principales pistes de solution passe par la sensibilisation. On a un phénomène de société qu'il faut changer. Ce n'est pas normal aujourd'hui qu'un locataire soit intolérant face à un enfant qui joue dans un logement, hein? C'est normal qu'un enfant génère des bruits. Et, aujourd'hui, on est dans un contexte où le propriétaire, coincé entre l'arbre et l'écorce, se retrouve dans une situation où il sera devant la Régie du logement en train de justifier le fait qu'un locataire ayant des enfants fasse du bruit. Un non-sens, M. le Président. Et je pense qu'il faut s'y attaquer.

Rapidement, M. le Président, simplement me permettre de répondre ou de compléter certaines affirmations qui ont été faites ou d'autres questions qui ont été soulevées. Et, après consultation ce midi, avec mes partenaires membres du front commun, nous tenons à réitérer notre ouverture à la participation d'une table de concertation qui réunirait propriétaires et locataires pour tenter de trouver des pistes de solution, de façon à aménager nos relations du mieux qu'on le peut. Et c'est ainsi qu'on répond à l'invitation qui a été lancée par Mme Fatima Houda-Pepin dans le cadre du projet de loi n° 26. Nous y avions déjà répondu de façon affirmative et nous désirons aujourd'hui réitérer le maintien de cette position.

Le Président (M. Vallières): On a déjà 18 minutes de passées...

M. Messier (Martin): Je m'arrête, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): C'est très intéressant mais il faut s'arrêter. Alors, il faut permettre les échanges avec les membres de la commission. La première intervenante sera Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, ma première intervention va aller dans le sens de vos propos sur la discrimination. Y en a-t-il? Je pense que oui. Les moyens de contrer ça? Vous nous dites quelque part que vous êtes pris avec le problème mais, en même temps, c'est sûr que vous êtes pris avec le problème puis vous êtes dedans. Et j'avais fait remarquer que, dans les HLM, on retrouve beaucoup d'émigrants qui sont parmi les plus démunis aussi. Donc, c'est à Montréal aussi principalement que ça se vit; ce n'est sûrement pas dans le comté de Matapédia. Nous autres, on a 99,99 % de francophones, alors.

Et ça, vous avez des propos, vous dites: Concernant le problème de discrimination, nous croyons que celui-ci résulte principalement d'un accroissement de l'intolérance entre les locataires. Et la discrimination, c'est aussi beaucoup par rapport aux familles avec enfants. De plus en plus là, c'est les gens... Vous le dites aussi.

Alors, en même temps, vous contrôlez l'offre. C'est vous qui contrôlez l'offre. Jusqu'à un certain point, vous contrôlez l'offre de logements aussi.

Une voix: Écoutez...

Mme Doyer: Attendez! je n'ai pas fini là. Vous réagirez tantôt. Parce que vous dites: Il y a 5 000 logements là qui ne font rien pour toutes sortes de raison, à Montréal, soit insalubres ou que les propriétaires, des fois, sont même disparus du décor puis on ne sait plus trop à qui ça appartient. Hier, le FRAPRU disait qu'on avait besoin de 23 000 au Québec puis qu'il y en a besoin de 16 000 à Montréal. Donc, il y a toute cette problématique-là.

Puis, quand vous parlez de contrôle de loyers, il y a aussi, dans les premières années qu'un logement se bâtit, il est neuf, il n'y a pas de fixation de loyer. Vous me réagirez là-dessus. Donc, si c'était si intéressant de répondre... Et, pour moi, ça m'apparaît peut-être intéressant de répondre à un besoin par rapport à un certain type de clientèle, puis qu'on a vu que, de plus en plus, il y a des clientèles de personnes seules. Ils ne sont pas tannants, eux autres, ils n'ont pas d'enfant. C'est des personnes seules qui ne sont pas nécessairement riches mais qui sont peut-être intéressées à devenir... qui font partie de la classe moyenne, auxquelles on pourrait répondre, puis ça libérerait des logements pour justement les personnes avec des enfants.

Alors, pourquoi on est capable de répondre quand c'est du haut de gamme puis que le monde ont de l'argent, puis pourquoi on n'est pas capable d'y répondre pour du monde qui n'ont pas d'argent puis beaucoup d'enfants et tout? C'est parce que ce n'est pas intéressant, puis c'est des clientèles laissées pour compte, peut-être. Ça, c'est mon opinion. Je suis comme Tintin, je la partage.

Donc, vous, vous êtes... vous parlez que vous aimez mieux l'aide à la personne parce qu'ils vont être libres d'aller où est-ce qu'ils veulent. Puis, en même temps, même s'ils ont ça, on n'est pas capable d'y répondre. Le marché privé n'est pas capable d'y répondre, puis on est obligés de s'adresser à des coops, des OBNL, puis des HLM, puis tout ça pour y répondre. Puis le salaire minimum, il va rester ce qu'il est au Québec. On nous dit déjà qu'il est trop élevé, à 7 $, les bas salariés, les familles avec enfants. Alors moi, il y a toute cette question de discrimination puis, à quelque part, un certain contrôle de l'offre aussi. Il faut s'en parler aussi. L'entreprise privée, c'est quoi, les moyens, aussi?

Et, moi, je vous redis, par rapport à l'énoncé de M. Pierre-Kelly Gagnon, de l'Institut: «Nous croyons que si l'État se retirait des forces naturelles de l'offre et de la demande, il permettrait de retrouver un équilibre sain dans l'évolution du marché immobilier.» Je suis très sceptique, je suis plus que sceptique. Je vous le dis: La déréglementation, là, ça a été essayé ailleurs aussi, et ça n'a jamais été une panacée. Alors, moi, je ne suis pas du tout de ce côté-là des choses. Puis, en même temps, on l'a vu, la dame de la Régie du logement a dit qu'il faudrait peut-être essayer de régler un certain nombre de problèmes, en termes de profitabilité, et de faire en sorte que, oui, effectivement on reconnaît que vous êtes pris avec des problèmes, des fois, de mauvais payeurs tout ça, et peut-être ? je vais le dire comme je le pense ? de serrer la vis par rapport à un certain nombre de mauvais payeurs pour que ça redevienne profitable. Et vous vous êtes prononcés pour l'aide plutôt à la personne qu'à la pierre. Alors, moi, j'aimerais que vous réagissiez là-dessus.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, M. Messier, vous aviez hâte de répondre aux questions. À vous, la parole.

M. Messier (Martin): Avec plaisir, M. le Président. Le volet 1 de votre question, d'abord, quant au fait que nous contrôlons l'offre. Écoutez, vous savez, dans un marché, même petit ? les propriétaires de six logements, ça constitue quand même une mini, une microentreprise, appelons-la comme ça ? l'offre, elle vise à répondre à la demande, et c'est comme ça que le marché réagit, tout simplement.

Ensuite, quant aux fixations de loyers qui sont libres sur cinq ans, on en a parlé dans nos commentaires, un des problèmes, relativement aux coûts de construction et à la valeur actuelle, c'est que non seulement dans le financement, mais également dans une situation où on considère que le phénomène de rareté de logement est un phénomène cyclique... Aujourd'hui, si je construis des unités et que je dois les louer à 850 $, 900 $ ? et on parle ici d'un quatre-et-demi, deux chambres à coucher, mais de bas de gamme ? je dois le louer à ce prix-là, alors que mon voisin d'en face, lui, il l'offre à un taux médian de 525. D'abord, aller chercher du financement pour ça, ce ne sera pas une sinécure; ensuite, dès que des logements vont se libérer, naturellement, on privilégiera les logements qui sont les moins cher, et je serai le premier à me retrouver avec des logements vides sur le marché. Et donc, dans le contexte actuel, même si je suis en mesure de fixer mes loyers. je suis contrôlé par un loyer médian qui est bas, et je ne peux pas, à moins, comme vous l'avez souligné, d'avoir des logements de luxe où, là, je suis en mesure de répondre à une demande de luxe, et donc, je fais une offre de luxe et je n'ai pas à me soucier d'un loyer médian de 525 $. Et c'est comme ça, par le biais peut-être d'une aide à la personne, qu'on peut permettre à quelqu'un de joindre les deux bouts et de maintenir un phénomène de mixité sociale.

Ensuite, j'aimerais attirer votre attention, puisqu'on parle de discrimination, sur, déjà, l'imposante réglementation que les propriétaires subissent. Vous savez, une personne qui loue un logement aujourd'hui, elle est protégée mur à mur, de tous bords, de tous côtés ? vous me permettrez l'expression. D'ailleurs, dans le bail officiel, obligatoire, disons-le, de la Régie du logement, on retrouve des informations sur la discrimination, des informations où le locataire se verra informé de ses droits, s'il y a une discrimination face à l'âge, la race, bon, etc., les dispositions de la Charte. Et donc, le propriétaire est contrôlé, avant la signature du bail, dans la sélection de son locataire, par la Commission des droits de la personne qui pourra se saisir, en cas de plainte, de la problématique. Il est contrôlé également dans la cueillette d'informations par la Commission d'accès à l'information, et, une fois le bail signé, il est très contrôlé ? permettez-moi de vous le souligner ? par la Régie du logement et toute la réglementation qu'elle applique avec science.

Ensuite, un dernier mot ? puisque vous en avez parlé ? sur la fixation de loyer, déréglementation, écoutez, qui pourrait peut-être se faire de façon graduelle. Déjà, l'ouverture de la présidente, nous l'accueillons très favorablement et nous nous déclarons ouverts également à participer à une table sur ce sujet.

Et permettez-moi de profiter de l'occasion pour vous lancer un cri d'alarme, un cri d'alarme sur l'état actuel de notre parc de logements, mais surtout sur l'état des investissements face à la rénovation ou même au maintien de ce parc de logements. On le sait, mes collègues l'ont dit, la façon de calculer le taux de rendement actuellement, on prend le taux d'intérêt moyen payé par les 10 plus grandes institutions financières sur un dépôt à terme de cinq ans, on ajoute 1 % à ça, puis on dit aux propriétaires: Soyez heureux. Alors, ils ne sont pas heureux. Qu'est-ce qu'on fait? On n'investit pas. Si le toit coule, on bouche ce petit trou là. Si la fenêtre est brisée, au lieu de refaire une façade à notre immeuble, qui serait esthétiquement plus intéressante, plus fiable, on répare la fenêtre seulement. Et on a un parc immobilier qui est en voie de péricliter. Et ça, c'est un cri d'alarme qu'on vous lance: Il faut s'attaquer à cette problématique.

Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Messier et M. Gour, bienvenue à notre commission. Merci pour le mémoire. Vous rejoignez vos collègues des associations des propriétaires qui se sont présentés devant nous avant vous, et donc vous endossez du même coup les propositions qui nous ont été faites et vous souscrivez éventuellement au consensus que vous avez dégagé à l'effet que, si la commission a décidé de retenir la proposition des mesures fiscales pour inciter le privé à aller dans le logement, ce serait applicable exclusivement au logement social, n'est-ce pas? On est d'accord là-dessus.

M. Messier (Martin): Abordable.

n(16 heures)n

Mme Houda-Pepin: Social et abordable, parce que c'est de ça... Le thème de la discussion, c'est ça, c'est le logement social et abordable. Est-ce que vous souscrivez à ça?

M. Messier (Martin): Nous y souscrivons.

Mme Houda-Pepin: Parfait. Merci beaucoup. Ça facilite donc nos travaux. Parce qu'on essaie de dégager des consensus, hein, puis c'est très difficile dans ce dossier-là. Les positions sont diamétralement opposées.

Je voudrais, M. le président, quand même souligner que nous avons un très bon mémoire d'un groupe qui est membre de votre coalition mais qui ne se présentera pas devant nous, c'est le Regroupement des propriétaires d'habitations locatives de l'Estrie. C'est un très, très bon mémoire et il vous rejoint parfaitement dans beaucoup, beaucoup de points.

Donc, pour revenir à cette histoire du consensus, vous le savez, on a eu l'occasion d'en discuter avec vous à quelques reprises, et vous admettez avec nous qu'il est extrêmement difficile d'amener les partenaires de l'habitation, ceux qui sont sur le terrain: le secteur privé, le secteur coopératif, le secteur communautaire dans sa très grande diversité, parce qu'il n'est pas homogène, à s'entendre sur des pistes de solution consensuelles. Alors, malgré tout, malgré ça, parce que c'est un fait, on essaie quand même d'aller au-delà de cette contrainte et dégager quand même des pistes de solution. C'est pour ça que je vous lance des perches et je veux vérifier avec vous si vous êtes en mesure d'aller dans certaines directions.

Vous dites, M. Messier, dans votre mémoire que le secteur privé ne va pas dans la construction d'immeubles à logements locatifs, j'entends par là les logements d'ordre social et même abordable, pour un certain nombre de raisons, vous les invoquez: parce qu'on va l'empêcher de vérifier la solvabilité de son client, parce qu'on va tenter de le limiter dans le choix de ses locataires, les pertes de non-paiement de loyer, les dommages subis suite peut-être à un départ de locataire, ça vous prend 20 ans pour récupérer votre mise après une rénovation majeure, et vous dites également que vous risquez d'être poursuivi par les autres locataires si vous ne réussissez pas à expulser le locataire indésirable. Pour ce point-là, le dernier, il y a combien de cas actuellement et est-ce que certains de ces cas se rendent vraiment devant les tribunaux? Ça représente quoi?

M. Messier (Martin): Écoutez, dans une situation où nous vivons un phénomène de rareté de logements, principalement dans le Grand Montréal et d'autres zones urbaines, vous savez, l'entente qui était possible il y a plusieurs années, où on disait au locataire: Cher locataire, je te libérerai de tes obligations ou on va prendre entente pour un certain montant et il y aura une résiliation de bail consensuelle et, cher locataire, tu pourras te relocaliser dans un immeuble où tu seras heureux, où tu te sentiras confortable, aujourd'hui, dans un phénomène de rareté de logements, c'est beaucoup plus difficile parce que ce locataire, qui ne veut pas changer d'école, s'il a des enfants, qui ne veut pas déménager, veut rester dans son logement envers et contre tous, même si lui est malheureux et que les autres le sont également qu'il soit là, et ça dégénère dans un phénomène qu'on va appeler...

Mme Houda-Pepin: ...un des cas. Est-ce que c'est assez de cas pour vous rendre la vie difficile ou est-ce que c'est des cas qui sont sporadiques?

M. Messier (Martin): Mme Fatima Houda-Pepin, dans un esprit où les propriétaires sont découragés dans le marché actuel, ces cas-là, ne serait-ce que d'en vivre un, risquent de se traduire par une pancarte À vendre devant l'immeuble, ou un propriétaire qui jamais ne voudrait plus investir, en plus d'en faire un propriétaire craintif dans la sélection de ses locataires. Et je vous dirais, sans avoir de statistiques précises, qu'il y en a trop et que, de façon générale, ça contribue à l'image très négative qu'a l'immobilier locatif aujourd'hui en termes d'investissement.

Mme Houda-Pepin: O.K., d'accord. Dans les suggestions que vous nous avez proposées dans votre mémoire, il y a un certain nombre de suggestions ou de propositions qui méritent d'être clarifiées. Par exemple, lorsque vous dites «permettre aux propriétaires d'effectuer des travaux de rénovation mineurs (peinture, vernissage de planchers, etc.) sur leurs logements sans avoir à recourir au service d'une main-d'oeuvre licenciée», il va sans dire que, comme propriétaire, vous devez être très fier d'avoir recours à une main-d'oeuvre licenciée, le cas échéant, mais vous semblez vous en plaindre lorsqu'il s'agit de travaux de rénovation. Et, moi, j'aimerais vous donner la chance de nous expliquer ça, parce que je crois que c'est une disposition qui s'applique au commercial, au secteur commercial. Est-ce qu'elle s'applique également au secteur résidentiel?

M. Messier (Martin): Je laisserais M. Gour traiter de la question.

Mme Houda-Pepin: Alors, éclairez-nous là-dessus.

M. Gour (Gilbert): C'est ça. Vous pouvez voir, ici, là, ce dont à quoi je faisais référence au niveau du mémoire. C'est quelque chose qui est très simple. Quand un propriétaire, lorsqu'un locataire vide les lieux, a le choix entre soit mettre environ 200 $ de peinture et faire le travail lui-même ou alors de payer, au bout de la ligne, un peintre qui va monter après ça, pour le même travail, une facture de 800, 1 200 $, vous comprendrez qu'il est beaucoup plus facile, à ce moment-là, de faire passer dans une augmentation une facture de 200 $. Et, en même temps, ça justifie, ça aide à éviter une hausse du loyer, plutôt qu'à ce moment-là d'avoir à justifier une mise de fond de 800, 1 200, 1 400 $ pour le travail qui a été fait, pour une main-d'oeuvre qui est licenciée. Donc, c'est actuellement ce qu'on demande avec cette suggestion-là.

Mme Houda-Pepin: Et pour la deuxième proposition, «d'offrir des crédits d'impôt aux propriétaires qui décideront de faire effectuer leurs travaux par la main-d'oeuvre licenciée», est-ce que, actuellement, un immeuble qui génère des revenus, il n'y a pas de déduction de ces revenus sur le rapport d'impôts? Oui?

M. Messier (Martin): Tout à fait. Ce qu'on demande, à l'instar de certains États américains, en fait, c'est que, dans ce choix d'options où le propriétaire pourrait être apte à effectuer les travaux lui-même, alors même qu'il n'est pas membre d'une association de constructeurs ou de rénovateurs reconnue, il pourrait, s'il décide de faire effectuer les travaux par autrui, pour permettre et mettre l'emphase, on le disait plus tôt, sur la rénovation, obtenir des crédits d'impôt et non pas simplement la déduction de la dépense, mais également des crédits d'impôt.

Mme Houda-Pepin: Bon. Et, troisième suggestion, «permettre aux propriétaires de récupérer l'investissement requis pour l'exécution de travaux majeurs dans un délai raisonnable», qu'est-ce qu'un délai raisonnable?

M. Messier (Martin): Cinq ans.

Mme Houda-Pepin: Hein?

M. Messier (Martin): Cinq années.

Mme Houda-Pepin: Cinq années.

M. Messier (Martin): Écoutez, c'est ce qui se fait en Ontario actuellement, et c'est pour ça que d'entrée de jeu je vous donne cette réponse-là. Mais la raison pour laquelle nous n'avons pas précisé de délai, c'est justement que je crois que cette révision-là devrait faire l'objet elle aussi de plusieurs pistes de solution. Et, évidemment, nous aimerions être invités à participer, que ce soit avec la Régie du logement ou d'autres intervenants du milieu. Et ce qui se fait en Ontario, parce qu'ils ont connu eux aussi un grave problème de brique, ils ont permis un amortissement sur une période de cinq ans, des travaux majeurs.

Mme Houda-Pepin: Oui. Le Programme d'aide à l'accession à la propriété ou un projet de cette nature, ça ne fait pas votre affaire, hein? Ce n'est pas votre tasse de thé.

M. Messier (Martin): Écoutez, nous...

Mme Houda-Pepin: Vous permettez?

M. Messier (Martin): Oui, bien, oui, certainement.

Mme Houda-Pepin: Ce n'est pas votre tasse de thé et vous nous donnez des arguments pourquoi est-ce que vous n'êtes pas tout à fait d'accord avec ça. Mais est-ce que ce n'est pas parce que ça vient vous concurrencer aussi?

M. Messier (Martin): Certainement, certainement. Écoutez, d'abord, la vision première du marché, nous, on pense qu'on est en mesure de répondre de façon favorable à l'offre. Et, c'est certain, quand on parle de HLM, quand on parle de déprime du marché, les propriétaires, nos petits propriétaires, voient la venue massive de HLM, d'aide à la brique, comme une compétition, c'est certain. C'est une offre qu'on n'est pas en mesure de faire, ça, c'est clair. Maintenant, je pense que, réellement, on est en mesure d'offrir, et le prix des loyers actuellement le démontre, on est en mesure d'offrir des logements de qualité, dans la mesure où on nous permet d'évoluer de façon saine, à un prix raisonnable. Et j'y reviens tantôt.

n(16 h 10)n

Il faut faire attention. On est dans un marché qui est déprimé. On nous dit: On manque de logements, vous n'êtes pas intéressés à en construire? C'est vrai, on veut stimuler le marché. Vous allez faire quoi pour stimuler le marché? Vous allez dire: Chers propriétaires, on va construire des condos. Puis on pense qu'on va stimuler le marché avec ça? Au contraire. Au contraire, Mme la critique officielle de l'opposition en matière d'habitation.

Mme Houda-Pepin: Je vous donne la chance d'expliquer votre opinion, parce que, moi, des fois, je lis entre les lignes. Alors, c'est pour ça que j'ai eu cette idée de vous poser la question, parce que, en effet, propriétaires, là, il faut y penser, hein, ça vient vous concurrencer.

La question de la discrimination dans le logement. Vous êtes les grands méchants loups pour ça, vous le savez, hein? Et je sais, et je l'ai dit à quelques reprises, que les relations entre les propriétaires et les locataires, dans l'ensemble, sont des relations harmonieuses, qu'il y a une proportion de discrimination et de problèmes autres qui relèvent notamment de non-paiement de loyer, etc. Et, moi, je me dis que la meilleure façon pour vous de faire une démonstration de bonne volonté, de bonne foi, c'est de vous donner des codes d'éthique dans vos associations de propriétaires. Et puis je sais que les gens de l'Estrie sont à l'avant-garde, n'est-ce pas, et, ces gens-là, ils ont déjà un code d'éthique dans la région. Ce serait peut-être inspirant pour vous de regarder ce qui se passe là.

Est-ce que les associations de propriétaires, maintenant que vous travaillez un peu de concert, vous pouvez envisager cette possibilité? Vous allez me dire: On ne peut pas contrôler tous les propriétaires, parce qu'il y en a qui ne sont pas membres dans vos associations, et ça, je peux le comprendre. Mais pour ceux qui sont dans vos associations, est-ce que vous organisez des sessions de formation, d'information sur la Charte des droits, sur les droits des locataires pour essayer de donner tous les outils aux propriétaires pour ne pas qu'ils commettent de la discrimination et qu'on se ramasse à chaque fois avec des cas assez pathétiques?

M. Messier (Martin): Oui, Mme Houda-Pepin. Oui, nous avons des véhicules d'information. D'ailleurs, les membres de l'Association reçoivent mensuellement un journal d'information qui normalement leur donne des informations pertinentes sur la façon d'opérer de façon agréable, légale et rentable au Québec. En plus, on a des séances de...

Mme Houda-Pepin: Est-ce que je peux être sur votre liste d'envoi?

M. Messier (Martin): Avec plaisir. Ensuite, oui, nous avons des séances de formation, et, enfin, suite à ce que vous avez mentionné hier, où nos collègues de l'Estrie, avant-gardistes peut-être, ont un code de déontologie, je dois avouer que ça suscitera certainement l'objet de notre attention dans les semaines à venir. Vous nous faites travailler, madame.

Mme Houda-Pepin: Bien, formidable. Ce serait vraiment une excellente idée parce qu'il faut que cette question-là soit réglée. Puis, moi, ça me gêne à chaque fois de voir qu'il y a des problèmes de discrimination par rapport au logement, parce que, d'abord, pour votre image, ce n'est pas très, très joli puis, en fait, lorsqu'on regarde en arrière, on réalise que la plupart des propriétaires ne font pas de la discrimination, mais la perception générale, c'est celle-là. Et je pense que vous seriez mieux servis par vous-mêmes en vous donnant les outils, de dire: On va contrôler ce fait-là.

La politique d'habitation, je pense que, dans le mémoire du Regroupement de l'Estrie et quelque part chez vous, vous y revenez, mais vous n'avez pas élaboré davantage. Est-ce que vous estimez qu'il est nécessaire d'avoir une politique d'habitation au Québec?

M. Messier (Martin): Écoutez, on a demandé, dans le cadre du projet de loi n° 26, des états généraux sur l'habitation et je pense que, oui, on est conséquents avec cette demande-là. On croit que ça nous prend, à tout le moins, des états généraux pour qu'on puisse réétudier la situation de l'habitation dans un cadre peut-être plus général que l'actuelle commission, bien que ça nous permette d'aborder plusieurs sujets fort intéressants. Je pense qu'il serait souhaitable d'avoir des états généraux sur l'habitation, oui. Et simplement pour préciser quand même que, malgré le fait que nous n'ayons pas de code de déontologie, nous avons un code civil du Québec, nous avons une charte des droits et libertés et nous avons une loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé qui pourraient fort bien faire office de code de déontologie.

Mme Houda-Pepin: Oui, mais, vous savez, on n'est jamais mieux servi que par soi-même, Malgré qu'on puisse avoir les outils législatifs, c'est plutôt dans la pratique que ces choses-là... Il y a quelqu'un qui est venu, dans une autre commission, nous dire que le meilleur code d'éthique, c'est celui qui se pratique. Alors, c'est pour votre réflexion.

Je voudrais vous demander rapidement, le Programme de logement abordable, ça vous intéresse, vous êtes intéressé à y investir? C'est-à-dire, vos associations se sont-elles prononcées là-dessus?

M. Messier (Martin): Oui. Nous nous sommes prononcés là-dessus. Nous avons, dès l'annonce de ce Programme de logement abordable, dû constater avec déception que, alors qu'on parlait à l'époque d'un investissement du fédéral de 15 000 $ et, à l'époque, la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, Mme Harel, parlait d'une contribution similaire du provincial, quand on a vu le libellé du Programme, il s'agissait plutôt d'une subvention de moins de la moitié de ce qu'on avait annoncé, soit au lieu de 30 000 $, 12 500 $. Et, dans le contexte actuel, avec les paramètres qui vous ont été exposés, et d'autres intervenants vous l'ont mentionné, ce n'est pas intéressant. On ne retrouve pas là des marges de manoeuvre qui vont permettre de rentabiliser le Programme de logement abordable, tel qu'il est là. Par contre, ce qu'on vous dit, c'est que...

Mme Houda-Pepin: Au niveau des coûts, c'est quoi, la marge à partir de laquelle vous seriez intéressé à investir?

M. Messier (Martin): Écoutez, je pourrais vous revenir là-dessus. C'est une question assez économiste et ce n'est pas mon... Je ne voudrais pas vous induire en erreur. Mais certainement que je pourrai vous faire parvenir, ou à la commission, des chiffres sur ces données-là.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Vous plaidez beaucoup pour l'aide à la...

Le Président (M. Vallières): Alors, il reste un peu moins d'une minute, Mme la députée.

Mme Houda-Pepin: Oui, d'accord. Vous plaidez beaucoup pour l'aide à la personne au lieu de l'aide à la pierre. Puisqu'il nous reste moins d'une demi-minute, je voulais juste vous faire le commentaire qu'on est d'accord pour l'aide à la personne, sauf que, dans certains contextes où il y a une rareté de logements, le programme ne fonctionne pas. Donc, oui, pour l'aide à la personne mais ça n'exclut pas l'aide à la pierre, là où il n'y a pas d'unités de logement disponibles.

M. Messier (Martin): Écoutez, on vous rejoint là-dessus, dans le sens où on est d'accord que, dans certains cas, on parlait de clientèles spécifiques, on n'est pas en mesure de répondre à la demande. On parle de certaines clientèles. Par contre, si des programmes d'aide à la personne intéressants sont mis sur pied, et on discutait de ça avec la Société d'habitation du Québec au printemps dernier, si des programmes intéressants sont mis sur pied, là, on vient changer la demande. Et rapidement, vous allez voir, nous sommes habiles à répondre à la demande par des offres intéressantes.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup.

Le Président (M. Vallières): Merci. Alors, ça va nous amener au député de Saint-Maurice. Simplement indiquer aux gens qui parlaient tantôt de discrimination que demain on aura la chance de pouvoir recevoir la Commission des droits de la personne et de la jeunesse. Ça va être intéressant d'échanger avec eux sur ces questions également. M. le député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Ce matin, nous avons terminé notre avant-midi en recevant la Fédération des locataires de HLM du Québec, qui nous ont déposé un excellent rapport, tout comme le vôtre que j'ai parcouru également. Dans le rapport de l'association des locataires, ces derniers posent une question: Les contrôles trop sévères de la Régie du logement découragent-ils la construction de nouveaux logements locatifs? Et il nous rappelle que la Régie ne contrôle d'aucune espèce de façon le prix des logements neufs au cours de leurs cinq premières années d'existence. Les propriétaires sont donc libres de charger les prix qu'ils veulent pour rentabiliser leurs investissements. L'existence de la Régie n'a d'ailleurs pas empêché le secteur privé de connaître des années records de construction variant entre 20 000 et 25 000 logements dans les années quatre-vingt. C'est le marché qui a décidé de construire moins, constatant que le taux de vacance de 7 ou 8 % dans les années quatre-vingt-dix pouvait nuire à son taux de profit.

À vrai dire, selon l'Association, ce n'est pas la Régie qui freine le développement du logement locatif, mais plutôt le marché de la copropriété, et ils terminent: Pourquoi être locataire quand, pour un loyer aussi élevé, on peut être propriétaire en condominium? Et j'aurais aimé cet après-midi avoir la présence du député de l'ADQ, député de Saguenay, pour vérifier si, effectivement, il soutient la thèse de son chef, qui a fait une déclaration semblable lors de la crise de 2002. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus.

n(16 h 20)n

Le Président (M. Vallières): Alors, simplement indiquer à mon honorable collègue de Saint-Maurice que notre règlement ne permet pas de signifier l'absence d'un autre collègue.

M. Pinard: Excusez-moi, M. le Président. Je n'ai surtout pas voulu transgresser notre règlement.

Le Président (M. Vallières): Ça, je suis persuadé. Alors, oui, M. Messier, en réponse.

M. Messier (Martin): Ni nous non plus. D'ailleurs, M. le député, nous ne voulons pas transgresser de règlement, et c'est la raison pour laquelle nous respectons la législation sur le logement locatif actuel, notamment les règles sur la fixation de loyer, règles qui, oui, nous permettent, dans les cinq premières années, de fixer le loyer que l'on veut bien fixer. Par contre, on a fait état tout à l'heure un petit peu de l'offre et de la demande et, un des problèmes qu'on a, c'est que, si j'offre un loyer, moi, aujourd'hui, à un prix qui est de 3 à 400 $ plus élevé que le voisin d'en face, je vais avoir des difficultés, d'abord, à trouver du financement, ensuite, si le taux d'inoccupation remonte ? et nous y croyons, puisque, nous vous le disons, selon nous, il s'agit d'une fluctuation naturelle des marchés ? ces logements-là se retrouveront rapidement vides. Et donc, même si on se retrouve dans un immeuble où on peut fixer le loyer comme on le veut, les lois de l'offre et de la demande... Et c'est là qu'on rejoint peut-être un peu l'étude de M. Kelly-Gagnon, qui nous dit que, dans un marché en équilibre, les loyers sont raisonnables. On en a fait la démonstration. C'est qu'on n'est pas en mesure d'en faire des plus chers, parce qu'on n'a pas d'offres plus chères si on n'a pas de demandes à ce prix-là. Bon.

Ceci étant dit, on a parlé de la bulle. Et je vais faire un bref commentaire, parce que, honnêtement, je ne suis pas un économiste ni un spécialiste de ce qui s'est déroulé dans les années quatre-vingt, mais, de ce que j'en sais, on parle beaucoup plus d'une bulle spéculative où l'immobilier prenait une tangente que nous ne retrouvons pas et nous ne retrouverons probablement pas. Ceci pour vous dire que les contrôles sévères de la Régie du logement, notamment quant au phénomène de fixation des loyers, oui, sont un phénomène qui décourage l'investissement, malgré la norme du cinq ans, parce que ça a une incidence sur le marché à long terme. Et on sait que, de toute façon, après le cinq ans, on entrera dans le carcan aussi.

M. Pinard: Est-ce que vous croyez que, actuellement, c'est davantage le contrôle de la Régie ou plutôt le développement du marché de la copropriété, c'est-à-dire des condominiums, qui est davantage difficile pour l'industrie du marché locatif?

M. Messier (Martin): Non. Écoutez, c'est un commentaire nouveau mais que, non, on ne retrouve pas dans le marché. Les gens qui sont à logement, et des études l'ont démontré... Il y a d'ailleurs eu un livre d'Éric, un économiste, Éric Brassard...

M. Pinard: Vous nous affirmez que le développement fulgurant du marché de copropriété n'est pas une entrave actuellement à votre développement.

M. Messier (Martin): Écoutez, ce que je vous dis, c'est qu'actuellement ce qui est une entrave réelle à notre développement ce n'est pas le marché du condo mais bel et bien la fixation du loyer. Dans un contexte où on développerait le condo d'une façon fulgurante, dans un secteur qui nous viendrait directement en compétition, ce qui n'est pas le cas actuellement, parce que des condos à 525 $ par mois, ça ne court pas les rues, ce qui n'est pas le cas actuellement, peut-être que ça le deviendrait, peut-être que ça deviendrait une compétition. Mais, actuellement, moi, ce que je vous dis, c'est que, dans le marché, ce qui décourage les propriétaires, avant de réfléchir à une compétition condo, beaucoup plus les règles de fixation du loyer.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, une dernière courte question de Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Bien, peut-être avec un petit point d'information. Ce ne sera pas long. La Charte des droits et libertés, demain, on va le voir, elle nous dit que le droit au logement, c'est un droit fondamental. Mais on va y revenir demain. Moi, il y a comme un paradoxe, là. Parce qu'on a vu qu'il y avait 92 %, au niveau des logements, c'était du privé, au Québec, et 8 % du social ? puis les gens des HLM sont venus nous le dire ce matin. Puis, vous, dans le document, vous dites... Attendez un peu. Vous nous dites, O.K.: «Après lecture dudit document, nous n'avons pu que constater que le gouvernement du Québec cherche à augmenter encore une fois sa mainmise sur le secteur des logements locatifs.» On n'a pas tant de mainmise que ça, puisqu'on a juste 8 % d'aide, dans le fond, de choses qu'on aide.

Moi, il y a ici un paradoxe, dans le sens que... «Le secteur privé est et demeurera toujours le joueur le mieux équipé ? c'est vous qui dites ça, là ? afin de fournir des logements salubres et de qualité aux familles québécoises, et ce ? et ce, vous le dites ? malgré toutes les réglementations existantes qui découragent les nouveaux investisseurs.» Comment ça que vous dites ça? Vous nous dites que vous êtes le meilleur joueur pour répondre à tout ça, on ne le fait pas, puis vous dites: «Malgré les réglementations existantes.» C'est sûr que, dans un monde idéal, on peut tout enlever la réglementation, vous seriez aux petits oiseaux, puis tout ça, mais...

Le Président (M. Vallières): Bien. M. Messier, il faut y aller.

Mme Doyer: C'est juste ça. Alors, la situation gagnant-gagnant dans ça, puis, l'autre affaire, c'est: Par rapport au parc immobilier qui est le vôtre, toutes les cartes que vous avez déposées, c'est quoi, les bâtisses neuves, la proportion des bâtisses neuves, la proportion des bâtisses vieilles qui demandent des rénovations? Parce que vous nous avez beaucoup parlé de ça.

Le Président (M. Vallières): M. Messier, rapidement.

M. Messier (Martin): D'abord, simplement vous préciser qu'actuellement, oui, quand on parle de l'existant, de la construction existante, malgré les règles, ce sont quand même des secteurs qui demeurent intéressants. La raison en est fort simple: quand on acquiert un immeuble aujourd'hui, on ne l'acquiert pas sur les coûts de construction, on va l'acquérir sur le rendement de l'immeuble et donc sur la marge de manoeuvre. Donc, on acquiert une micro-entreprise en fonction de revenus et de dépenses, alors que, si on parle de construction neuve, alors là c'est une toute autre chose, on doit tenir compte de coûts de construction qui sont, là, d'un ordre tout à fait différent.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation à partager avec nous votre point de vue. Je demanderais maintenant aux représentants de l'INRS-Urbanisation, Culture et Société de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Alors, je demanderais aux gens représentant l'INRS de bien vouloir s'identifier et procéder à la présentation de leur mémoire dans les 15 prochaines minutes.

Oui. Alors, je demanderais aux gens représentant l'INRS de bien vouloir s'identifier et procéder à la présentation de leur mémoire dans les 15 prochaines minutes.

INRS-Urbanisation, Culture et Société

M. Divay (Gérard): Très bien. Merci beaucoup. Mon nom est Gérard Divay, je suis directeur du Centre de recherche Urbanisation, Culture et Société de l'INRS, et je suis accompagné de deux professeurs qui, entre autres, travaillent sur les questions de logement: Mme Francine Dansereau et Mme Anne-Marie Séguin.

Le Président (M. Vallières): La parole est à vous.

M. Divay (Gérard): Très bien, je vous remercie beaucoup. Si je comprends bien, j'ai 15 minutes et pas plus?

Le Président (M. Vallières): Je vais vous le dire quand c'est à deux minutes de la fin.

M. Divay (Gérard): Très bien. Alors, nous tenons d'abord à vous préciser qu'on vous a laissé un petit mémoire sur papier qui, je suppose, vient de vous être distribué. Je ne lirai pas le mémoire, sinon, en 15 minutes, c'est sûr que je n'aurai pas le temps de passer à travers. Alors, je vais essayer de vous livrer un peu quelques messages essentiels là-dessus.

Dans un premier temps, je voudrais d'abord remercier la commission de nous avoir invités. Notre centre de recherche a une longue tradition d'étude sur les questions d'habitation. Au cours des deux dernières années, nous avons, entre autres, étudié, dans le cadre de mandats faits pour la Société d'habitation du Québec ou pour d'autres organismes, les caractéristiques du parc locatif privé au Québec ? l'étude est parue d'ailleurs la semaine dernière; nous sommes en train de compléter des études sur une analyse comparative des tendances dans les politiques d'habitation des principaux pays occidentaux, quelque chose qui devrait sortir assez vite ? et nous avions organisé d'ailleurs un colloque là-dessus dont les actes sont parus vendredi dernier; et nous avons une série d'autres thèmes que nous avons étudiés. Alors, comme directeur du centre, il me fait très plaisir de vous parler de ces questions d'habitation. Nous avons d'ailleurs laissé une bibliographie des principales études que nous avons faites au cours des 10 dernières années.

n(16 h 30)n

Il me fait plaisir aussi de présenter ce mémoire à titre tout à fait personnel. J'ai eu le privilège, en 1982 et 1984, lorsqu'il y avait un ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, de piloter le premier exercice au Québec d'essai d'élaboration d'une politique d'habitation, qui s'est traduit par un document qui s'appelait Se loger au Québec, en 1984. Alors, si j'ai bien écouté la fin de la période de questions sur l'intervention précédente, je suppose que je vais avoir une question sur l'utilité d'une politique d'habitation, et je vous promets une réponse surprenante.

Ce que je retiens de cette expérience personnelle ? et c'est tout à fait confirmé par les études que nous pouvons faire dans notre centre ? c'est que, quand on parle des questions d'habitation, surtout dans une perspective de politique, il faut avoir une très grande modestie, pour deux raisons au moins. La première, c'est que derrière toutes les statistiques qu'on peut manipuler se cachent des situations personnelles et familiales parfois très difficiles, et on est désolés de ne pas avoir de réponse immédiate pour soulager ces problèmes-là; et la deuxième raison plus importante est qu'on fait face, dans la question de l'habitation, à une très grave complexité.

Et, avant même d'aborder le vif du sujet, permettez-moi de dire deux mots sur cette complexité-là parce que c'est important. Il y a trop souvent, dans l'habitation, une série de propositions qui viennent de positions idéologiques ou autres qui font en sorte que même si les préceptes peuvent être intéressants à première vue ils ne permettent pas de rendre compte de la dynamique qui se passe dans le domaine de l'habitation. Et cette complexité-là, elle vient essentiellement de trois éléments. Le premier élément: la très grande diversité des situations d'habitation au Québec, et ça, à de nombreux points de vue. Quand on regarde les types de propriétaires, le comportement d'un propriétaire occupant d'un duplex n'est pas le même que le comportement qu'une société d'investissement dans les gros complexes immobiliers; diversité aussi quant au mode d'occupation et, surtout avec le développement de la copropriété, cette diversité-là s'est accrue; diversité de situations géographiques: le document de consultation que vous avez fait préparer montre à quel point la conjoncture du marché du logement est différente d'une agglomération à l'autre. Donc, on fait face à des situations extrêmement diverses. Premier élément de complexité.

Le deuxième élément de complexité, il est le plus central dans tout ce qu'on va vous dire. Vous nous excuserez, par rapport à peut-être d'autres interventions, on va rester à un certain niveau parce qu'il nous semble, du moins personnellement, après lu quelques articles dans les journaux sur les propositions qui vous étaient faites, qu'il y a une nécessité d'avoir un bon cadre d'ensemble pour essayer de voir comment se situent les différentes propositions. Alors, c'est plutôt sur ce cadre d'ensemble qu'on va brièvement élaborer. Alors, le deuxième élément de complexité, c'est l'interdépendance des choses qui se passent sur le marché. Le marché du logement fait que ce qui se passe dans un endroit donné ? on peut en parler en termes de sous-marché, de localisation, de prix, de modes d'occupation ? a des conséquences sur ce qui se passe aux alentours. Le marché du logement, c'est une sorte de gros échiquier dans lequel d'un côté vous avez ? les cases de l'échiquier ? une structure de logement qui est relativement stable et, par ailleurs, se déplaçant à l'intérieur de cet échiquier-là, des ménages qui sont en mouvance de plus en plus rapide: la formation, la décomposition, la recomposition, les sorties finales du marché. Donc, c'est cette dynamique d'ensemble qu'il est important de comprendre.

Le troisième élément important de complexité, c'est que ce qui se passe au niveau du marché du logement reflète des tendances plus générales dans la société mais, en même temps, contribue à ces tendances-là. On a beaucoup parlé de la multiplication des ménages d'une personne. Cela en général entraîne souvent un problème d'accessibilité financière au logement, mais c'est aussi facilité du fait que, récemment du moins, il y avait une bonne disponibilité de logements sur le marché locatif.

Alors, ce que ces éléments-là viennent situer: deux temps ? il me reste 10 minutes, je vais essayer, cinq minutes sur chaque partie. Première partie: c'est quoi, les grands éléments d'analyse de la situation qu'il faut rappeler ? et je dis bien «rappeler» parce que, à certains égards, ils vous ont déjà été soumis ? essentiellement, les problèmes et quelles sont les tendances qui alimentent les problèmes? Et là, volontairement, on va prendre une perspective qui n'est pas uniquement conjoncturelle, la crise du logement actuelle, mais essayer de replacer ça sur des tendances de fond qu'il y a actuellement.

Des problèmes: essentiellement trois, même s'il n'y en a que deux dont on parle maintenant. Le premier problème dont on parle peu, c'est un peu la qualité du stock de logements. À cet égard-là, on trouve forcément énormément de situations majeures, et le pourcentage des logements qui sont perçus par les gens comme nécessitant des réparations majeures est à peu près le même maintenant qu'il y a 20 ans. Ça ne veut pas dire que les programmes de rénovation n'ont pas été efficaces; ça veut dire qu'il faudrait investir systématiquement dans le stock. Les deux problèmes principaux, c'est le problème de la disponibilité de logements locatifs qui se traduit dans les taux de vacance et le problème de l'accessibilité financière au logement qui se traduit par le taux d'efforts pour le logement. Alors, ces deux problèmes-là sont interreliés. Pas le temps? Donc, on pourrait y revenir un peu, sur la façon dont ils jouent ensemble, mais ils sont quand même interreliés de manière assez étroite.

Un mot sur le problème de disponibilité avant de parler de celui d'accessibilité. La disponibilité de logements locatifs dans une agglomération donnée ? il ne faut pas généraliser, il faut toujours y aller sur une approche d'agglomération ? ça, il faut l'envisager à partir d'une double comptabilité, si vous voulez, une comptabilité de stock puis une comptabilité de flux. La comptabilité de stock, c'est: il y a combien d'unités qui sont soustraites du parc de logements locatifs, soit par démolition soit par conversion en copropriétés et, par ailleurs, il y a combien d'unités qui s'ajoutent au parc locatif par construction? Premier élément.

Il y a une deuxième comptabilité majeure à avoir, c'est une comptabilité de flux: il y a combien de ménages locataires qui quittent le parc de logements locatifs pour devenir propriétaires? Et la disponibilité de logements, à un moment donné, dans une agglomération donnée, résulte de ces deux types de comptabilité, sur l'addition des deux.

Et, là-dessus, bien, vous connaissez un peu toutes les tendances, des chiffres vous ont été rappelés. Ce qu'il est important de retenir comme idée, c'est que la disponibilité dans le logement locatif dépend surtout de ce qui se passe dans l'accession à la propriété. Donc, la comptabilité de flux, c'est ça qui est le plus important pour comprendre à un moment donné quels sont les problèmes de disponibilité.

Maintenant, sur les problèmes d'accessibilité financière, quelques considérations. Une première considération, c'est sur comment on mesure l'accessibilité financière. Habituellement, la mesure qui est le plus utilisée: on prend 30 % du revenu, on l'applique au logement. Si un ménage dépasse ce seuil-là, il a un problème d'accessibilité financière. Je ne veux pas entrer dans tous les problèmes, là, qu'on peut se poser sur la mesure, mais il y a quand même deux questions qui doivent se poser là-dedans. Est-ce que le fait d'avoir un taux élevé d'efforts pour le logement ? consacrer plus que 30 % ? reflète un problème de revenus ou reflète un problème de coût de logement? Là-dessus, le document de consultation que vous avez fait préparer, je pense, est tout à fait correct. Il dit que c'est d'abord, essentiellement, un problème de revenus, et je vais revenir là-dessus.

La deuxième question qui est assez importante dans une perspective d'élaboration politique, c'est de se demander: Est-ce que ce taux d'effort résulte d'un choix délibéré, quelqu'un qui décide, entre guillemets, de surconsommer du logement, ou est-ce que ça résulte de contraintes pour se loger avec une taille de logement qui convient à la taille de son ménage ? il est coincé, il est obligé de dépenser plus, avoir un loyer tel qu'il est obligé de dépenser plus? Toutes les données statistiques qu'il y a ? et je n'aurai pas le temps de passer à travers, vous en avez juste quelques-unes ici sur les problèmes d'accessibilité dans la région de Montréal ? pointent beaucoup plus et de manière très, très large sur le fait que ce n'est pas une question de choix, c'est une question de contrainte. Les gens qui consacrent plus que 30 % de leurs revenus au logement le font par contrainte de marché et ne le font pas par choix, même ici pour les hauts revenus.

Et, là-dessus, il y a des différences très claires quand même entre les locataires et les propriétaires. Il ne faut quand même pas oublier qu'il n'y a pas uniquement les locataires qui consacrent plus que 30 %, il y a un certain nombre de propriétaires ? dans la région de Montréal, en 1996, à peu près 19 % ? mais les profils des deux sont extrêmement différents. En général, les locataires sont beaucoup plus pauvres, d'ailleurs en bas de 20 000. Deux tiers des ménages locataires qui consacraient plus que 30 % de leurs revenus au logement en 1996 dépendaient de transferts gouvernementaux. Mais c'était quand même le cas d'un tiers des propriétaires qui étaient dans cette situation-là. Autant chez les propriétaires que chez les locataires, mais pour des raisons différentes, les minorités visibles ? c'est quand même un élément important maintenant dans le fonctionnement du marché de la région ? les minorités visibles sont toujours plus mal prises que le reste de la population, autant pour les locataires que pour les propriétaires. Sur les chiffres, je passe parce que vous en avez un certain nombre.

Maintenant, quelles sont les tendances de fond? Ces deux problèmes-là, ce n'est pas seulement des problèmes conjoncturels, c'est des problèmes qui s'inscrivent dans certaines tendances de fond des deux ou trois dernières décennies. Et deux mots sur chacune de ces tendances-là. La première tendance, c'est ce qu'on appelle la spécialisation sociale du logement locatif. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire tout simplement que, quand on observe l'évolution de la clientèle propriétaire et la clientèle locataire, ce qu'on voit, c'est un décrochage systématique des deux types de clientèle. Un des meilleurs indicateurs de ça, c'est de regarder le rapport sur le revenu médian des locataires par rapport à celui des propriétaires. En 1971, ce rapport-là était de 80 %, ce qui veut dire que, somme toute, on n'avait pas deux populations complètement différentes. Trente ans plus tard, à partir des données, justement, de l'enquête sur les logements locatifs ? évidemment, ce n'est pas une donnée de recensement, c'est quand même une donnée à partir d'un sondage ? mais le rapport est descendu à 55 %. Le revenu médian des locataires n'est plus que de 55 % du revenu médian des propriétaires.

n(16 h 40)n

Donc, dans les faits, ce que ça veut dire, c'est que le marché locatif est en train, par toutes sortes de forces, de se spécialiser dans le logement des ménages pauvres. Et ça, c'est une tendance à long terme, et vous allez y venir tantôt. Ce qu'on peut anticiper, c'est un renforcement de cette tendance-là.

Deuxième élément, deuxième tendance de fond assez importante, c'est qu'il faut aller regarder qu'est-ce qui se passe du côté des revenus. C'est bien beau de parler que la conjoncture économique influence le marché du logement. Oui, mais la raison principale, c'est: qu'est-ce qui se passe au niveau du revenu et du revenu des ménages? Et, là-dessus, il y a eu des tendances majeures au cours des années soixante-dix: la croissance des inégalités de revenus dans la population; les revenus des 20 % de ménages plus riches ont augmenté plus vite que les autres, et donc, il y a une sorte d'écart qui se crée. Ça, ça va venir renforcer la tendance à la spécialisation sociale du logement locatif. Ça, c'est un élément majeur. Il y a une autre caractéristique de l'évolution... Pardon?

Le Président (M. Vallières): Deux minutes. Il vous reste deux minutes.

M. Divay (Gérard): Ah! Bon.

Le Président (M. Vallières): Je m'excuse du temps.

M. Divay (Gérard): Les propositions de politiques, on y reviendra de toute façon, c'est sûr, dans la discussion. Alors, je vais quand même glisser un peu plus. L'autre élément important dans l'évolution des revenus, c'est de voir qu'est-ce qui se passe avec les revenus des ménages pauvres. Et là, il y a des études de Statistique Canada qui sont extrêmement importantes pour notre discussion. C'est qu'il y a une très grande fluctuation dans qui est pauvre à un moment donné. Par exemple, dans le cadre de l'étude sur l'évolution des revenus de 1993 à 1999, les statistiques montrent que, en 1998, un tiers des personnes qui étaient considérées à faibles revenus ne le sont plus en 1999. Mais, à l'inverse, en 1999, 30 % des personnes qui sont à faibles revenus ne l'étaient pas en 1998 et, sur une période de cinq ans, c'est à peu près un quart de la population canadienne qui a connu ? et, selon toute vraisemblance, c'est vrai pour le Québec ? qui a connu un épisode de faibles revenus. Donc, il y a une très grande fluctuation.

L'élément majeur qu'il faut en retirer, c'est que, désormais, il ne faut absolument plus «designer» les programmes gouvernementaux en fonction de grandes catégories de clientèles: les jeunes, les pauvres, les personnes âgées. Il faut avoir une très grande flexibilité et être capables de s'adapter à la très grande mouvance des ménages. L'étude de Statistique Canada dont je parle montre clairement que le fait de passer de faibles revenus à au-dessus de faibles revenus, c'est souvent lié à des phénomènes dans la composition ou la recomposition du ménage ? à peu près un tiers des cas ? ou à la sortie ou à l'entrée sur le marché de l'emploi. Et ça, il faut que nos programmes, surtout les programmes qui s'adressent à ces clientèles-là, soient des programmes extrêmement sensibles à ces éléments-là. Donc, c'est deux grandes tendances de long terme qu'il faut prendre en compte. Et, au niveau de l'élaboration des politiques, il y a quelques balises qu'on indique dans notre mémoire et sur lesquelles on pourra revenir dans la discussion.

D'une part, c'est que, par rapport au problème de la disponibilité, il faut faire deux choses en même temps: il faut ? vous excuserez l'expression, elle est formulée de manière volontaire pour piquer un peu ? il faut réduire le nombre de locataires tout en augmentant le nombre de logements locatifs; par ailleurs, par rapport au problème d'accessibilité, il faut développer le logement social tout en soutenant davantage la spécialisation sociale du locatif privé; et, par ailleurs, il faut commencer à ne plus penser en termes de logement, mais en termes de services résidentiels et en termes d'habitat. La demande évolue dans ce sens-là. D'ailleurs, si on regarde les besoins prévisibles en logements et les préférences en logements de la cohorte d'âge qui va le plus augmenter au cours des deux prochaines décennies, celle des personnes dites âgées de plus de 65 ans, c'est des personnes qui ne vont pas demander en tant que tel un logement mais des services résidentiels, c'est-à-dire une intégration au logement de toutes sortes de services périphériques. Et, à cet égard-là, cette base démographique et cette évolution dans les attentes sont très intéressantes pour envisager une transformation du territoire de nos grandes agglomérations, notamment en termes d'intensification urbaine.

Le Président (M. Vallières): Merci. Merci, M. Divay. Mme la députée de Matapédia sera la première à vous poser des questions.

Mme Doyer: Merci. Bien, je veux vous dire que je vous aurais écouté encore très longtemps, ça n'aurait pas été du temps gaspillé. Je trouve ça extrêmement intéressant, ce que vous nous dites là. Et moi... Hier, il y a des gens qui représentaient les locataires, qui sont venus nous dire que, à quelque part, de trop vider, en tout cas de penser en termes d'accession à la propriété pour des locataires, c'est peut-être d'avoir... ils appelaient ça le mythe ou le leurre de l'accession à la propriété. Et, vous, vous nous dites: Il y a aussi ces solutions-là, d'abaisser le nombre de locataires, de faire en sorte que, dans le fond, de libérer... Ce que les gens appellent régulièrement l'effet de percolation.

Alors, moi, il y a ça que... J'aimerais vous voir réagir là-dessus, et de m'expliquer davantage toute cette question de spécialisation sociale du secteur locatif privé. Parce que, nous, on veut que ça aille bien. Tantôt je demandais aux gens qui étaient là: Vous représentez le secteur privé, comment arriver à une situation gagnant-gagnant? Dans le fond, on recherche un équilibre entre l'offre et la demande, hein, puis que chacun puisse se loger convenablement au Québec. C'est ça, c'est ça, l'objectif fondamental. Voilà mes deux choses.

Le Président (M. Vallières): M. Divay.

M. Divay (Gérard): Bon. Si je comprends bien, votre question porte plus sur l'accession à la propriété et ses effets. O.K.

Mme Doyer: Oui. C'est parce que... Est-ce que c'est vraiment un mythe ou un leurre, de faire en sorte que des gens qui, des fois, vont travailler toute leur vie, qui vont être locataires toute leur vie, de faire en sorte que ces personnes-là... Parce que, eux autres, ils parlaient des revenus 20 000, 25 000, 30 000 et que, à quelque part, au bout de quatre ans, cinq ans, 10 ans, ils ne seront plus capables de rester dans leur appartement qu'ils achèteraient ou dans leur petite maison qu'ils achèteraient, donc... Alors, on dit: D'aller vers l'accession à la propriété, c'est un leurre à quelque part, n'allons pas vers ça. Puis, moi, je trouve que, des fois, c'est un peu intéressant parce que les gens travaillent toute leur vie, s'ils peuvent accumuler un capital, c'est quand même intéressant. Puis cette question de spécialisation sociale du secteur locatif privé, ça veut dire quoi, en peu de mots?

M. Divay (Gérard): O.K. Alors, sur la première question, comme j'ai beaucoup parlé, là, je vais laisser les collègues répondre. On va être les trois à répondre aux questions. Vas-y.

Mme Dansereau (Francine): Sur l'accession à la propriété?

M. Divay (Gérard): Oui.

Mme Dansereau (Francine): Alors, sur la question de l'accession à la propriété: est-ce que c'est un mythe, est-ce que c'est un leurre? La meilleure preuve... Je pense qu'il ne faut pas se poser des questions dans l'abstrait, il faut regarder les comportements des gens. Quand on a eu dans le passé des programmes d'aide à l'accession à la propriété, ça a été extraordinairement populaire. Je ne dis pas que tous les ménages qui se sont prévalus de ces programmes-là ont fait des choix qu'ils n'ont pas regrettés à un moment donné, parce que, effectivement, il existe des situations où, bon, il y a perte d'emploi, donc perte, disons, de capacité de payer, décomposition du ménage, bon, etc., surtout si on a acheté une maison dans un endroit où le marché n'est pas très actif, bon, etc. Mais je crois qu'il faudrait vraiment refaire l'histoire de ces programmes-là et de leur mérite.

Un autre exemple: un peu partout dans le monde ? on ne le fera pas au Québec parce qu'on a un très petit parc de logement social ? on a offert aux habitants des HLM d'acheter leur logement. Ça a eu une popularité extraordinaire en Angleterre. Et, bon, bien, je ne crois pas que les ménages regrettent particulièrement le choix qu'ils ont fait. Alors, c'est pour répondre à la question: Est-ce que c'est un leurre? Est-ce qu'on ne met pas les gens dans des situations où ils vont se trouver égorgés, bon, etc? Je crois que, si on regarde vraiment l'expérience des programmes qui ont été mis en oeuvre, bon, c'est plutôt une expérience positive.

Maintenant, la question qu'on a soulevée ? c'est celle qui est dans le document, d'ailleurs ? c'est celle de l'accompagnement de programmes d'accession à la propriété d'allocation-logement généralisée. Je pense que le document appelait ça un supplément au loyer ou je ne sais pas trop, mais il s'agit d'allocations-logement. Elles existent, les allocations-logement, elles sont disponibles quel que soit le statut d'occupation quand on a un revenu x. Elles ne sont peut-être pas suffisantes, mais il faut penser que ce dispositif-là existe pour niveler un peu les évolutions en dents de scie possibles des revenus. Donc, je ne pense pas qu'on s'engage dans un terrain extrêmement aventureux et hasardeux en prônant l'accession, en acceptant l'idée de l'accession à la propriété.

L'autre question, je pense que c'était: Quel est le rapport entre l'évolution du marché locatif en termes de clientèle et l'accession à la propriété? C'est sûr que c'est des vases communicants, il n'y a aucun doute là-dessus. Et moi, une des questions que je me pose sur le genre de programme d'accession à la propriété qu'on devrait considérer, qu'on pourrait mettre de l'avant, c'est: Est-ce qu'il s'agit de penser seulement en termes de programme d'accession à la propriété pour les couches à revenus modestes ou d'un programme un petit peu plus généralisé qui, comme c'était le cas traditionnellement en Amérique du Nord, s'adresserait plutôt aux couches moyennes ou à la basse... disons, aux couches les plus basses, aux tranches les plus basses des couches moyennes? Je pense que c'est une vraie question. Moi, je pense qu'il faut les deux et non pas un ciblage extrêmement étroit exclusivement sur les couches à revenus modestes.

Maintenant, là-dessus, on a eu des problèmes dans le passé parce que ça a été des programmes strictement conjoncturels, hein. On a utilisé des leviers en habitation pour relancer l'économie et stimuler l'emploi dans l'industrie de la construction, etc. Je pense que ce n'est pas une façon correcte, adéquate, d'aborder ces questions-là. Si on est pour penser à de nouveaux programmes d'aide à l'accession à la propriété, il faut les penser dans la durée, il faut les penser sur un nombre d'années, il faut, autrement dit, que les ménages qu'on chercherait à intéresser par ces formules-là puissent avoir un horizon d'une dizaine d'années pour prendre leur engagement. Puis là, ça suppose ici toute une série d'arrangements, de type de conventions avec le secteur des prêteurs hypothécaires. Alors, il faut penser formule... Il faut bien réfléchir, puis il faut penser à une formule durable.

n(16 h 50)n

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, M. Divay, vous voulez ajouter? Non, ça va? Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Bien. Est-ce que vous avez bien répondu à l'autre partie de ma question, qui était: Comment on fait ça, soutenir la spécialisation sociale du secteur locatif privé?

M. Divay (Gérard): Essentiellement, les formules qu'il y a actuellement, c'est les formules de supplément au loyer, d'allocation-logement. La formule d'allocation-logement existe. Si on regarde les statistiques, les montants, quand même, par ménage par mois ne sont pas considérables. À ma connaissance, je n'ai pas vu d'évaluation pour voir quel est le réel impact dans l'amélioration de l'accessibilité financière, mais c'est certainement un des moyens.

Étant donné que le logement social, il est quand même très minoritaire actuellement à l'intérieur du logement locatif et que les problèmes d'accessibilité débordent largement sur l'ensemble des marchés locatifs, donc il ne faut pas seulement favoriser le développement du logement social. En soi, le développement du logement social à long terme est intéressant, mais pensez aux locataires qui sont sur le marché privé, et c'est à eux... de leur donner des coups de pouce lorsque la situation le nécessite.

Mme Doyer: D'accord, merci.

Le Président (M. Vallières): Merci. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. Divay, Mme Dansereau, Mme Séguin, bienvenue à la commission. En effet, on pourrait vous entendre pendant des heures. Là, vous expérimentez nos contraintes de temps de parole, hein, comme parlementaires. Vous savez la frustration qu'on vit, nous, tout le temps de ne pas pouvoir avoir suffisamment de temps. Et vous, comme professeur et chercheur, parler, c'est... vous pouvez parler des heures de temps. Ça, c'est un loisir qu'on n'a pas ici.

M. Divay (Gérard): Si vous permettez, madame, j'ai assez côtoyé les élus pour avoir un grand respect à l'égard des frustrations qu'ils vivent.

Mme Houda-Pepin: Oui, oui, je sais. Je le sais. Dans votre cas, je le sais.

Petite question: Le colloque que vous avez organisé et auquel j'ai participé sur, justement, la question de l'habitation, est-ce qu'il y a un document qui est sorti de ça, et est-ce qu'on peut l'avoir ici, pour la commission?

M. Divay (Gérard): Oui, la SHQ l'a publié jeudi dernier, il est en ligne sur le site Web de la SHQ.

Mme Houda-Pepin: Parfait. Merci beaucoup. Parce que j'ai trouvé ça intéressant. Il y avait des échanges fort intéressants, et puis, au bénéfice de tous les collègues, ce serait aussi utile pour eux.

M. Divay et les interventions de Mme Dansereau en complément nous indiquent que le dossier de l'habitation est un dossier très complexe, comme vous l'avez si bien dit. Ça, c'est une réalité avec laquelle on est tout à fait familiers. Vous avez aussi dit qu'il y a une diversité dans les besoins, nous savons cela aussi.

Le problème que nous avons particulièrement dans ce mandat d'initiative où nous cherchons des solutions, nous cherchons des solutions pour un problème particulier qui est la crise du logement social et abordable. C'est ça, le thème. Donc, on s'adresse à une clientèle qui, comme vous le savez, est très diversifiée, mais il n'en demeure pas moins qu'elle est relativement identifiable socialement parlant par ses revenus, son mode de consommation, sa localisation géographique, son profil démographique: les jeunes, les personnes âgées, etc., les femmes aussi, parce que, quand on parle de la pauvreté puis de la crise du logement, les femmes ne sont pas loin. Alors...

Et on a des intervenants. On a des intervenants, c'est-à-dire le gouvernement qui intervient dans cette crise, nous avons des partenaires, notamment le privé, le secteur coopératif, le secteur communautaire. On n'est pas capables, même en mettant de l'argent sur la table, de livrer les unités de logement là où il faut construire parce que, à Montréal ? on peut débattre longuement sur les théories ou sur les statistiques ? il demeure un fait, c'est que les taux d'inoccupation dans certains secteurs sont autour de zéro. Donc, même si on donnait des suppléments au loyer, on n'est pas capables de résorber la crise. Il faut construire.

Et j'aimerais avoir votre avis là-dessus parce que vous êtes des experts. M. Divay, vous avez parlé qu'il faut penser en termes d'habitat, en termes de services parce que les besoins, ils sont de plus en plus multiples, et une personne qui a besoin de logement, c'est aussi une personne âgée qui a besoin également de services autour d'elle, à proximité, même sur le lieu de son habitat. Qu'est-ce que vous pouvez nous suggérer qui pourrait nous aider à mieux orienter notre réflexion, en essayant de répondre de façon concrète au comment? Comment régler la crise, sachant les ressources qui sont à notre disposition et la réalité avec laquelle on travaille?

La Présidente (Mme Doyer): M. Divay.

M. Divay (Gérard): Peut-être trois éléments dans la réponse. J'aborderai les deux premiers; je pense qu'Anne-Marie va aborder le troisième sur les questions de l'habitat proprement dit. Les deux autres éléments: comme vous le dites, il y a effectivement un problème de crise en termes de taux de vacance, O.K., et vous avez aussi mentionné que ce que vous recherchez, comme commission, c'était de vous faire une idée sur ce qu'il faut faire par rapport au logement social et abordable.

Le premier élément de réponse qu'on vous dit, c'est que vous ne pouvez pas arriver avec des propositions uniquement sur le logement social et abordable. Ça ne marche pas comme ça. Il faut regarder la place du logement social et abordable dans l'ensemble du marché. Et, à cet égard-là, par rapport au problème de disponibilité ? pour rappeler un peu le genre de comptabilité dont je parlais tantôt ? éviter qu'il y ait des unités, à court terme du moins, qui sortent du stock locatif. Donc, ça veut dire par exemple pas de conversion en copropriétés. D'ailleurs, la politique de la ville de Montréal ne permet pas la conversion en copropriétés lorsque les taux de vacance sont trop bas. Donc, un, pas de soustraction au stock.

Deuxièmement, additionner des nouvelles unités de logement. Ça, de quelle façon? Il y a déjà un certain nombre de choses qui ont été annoncées du côté du programme AccèsLogis, du Programme de logement abordable. Il faut vraiment centrer tous les efforts dans ces programmes-là sur la construction neuve. Et, par ailleurs, il faut, dans la conjoncture actuelle, songer à un coup de pouce à la construction de logements locatifs. De quelle façon? Plusieurs intervenants l'ont dit, on l'a vu dans des mémoires ou dans des articles de journaux: par des mesures fiscales. Et, à cet égard-là, les mesures fiscales, il y a deux façons de les envisager: elles peuvent être sans conditions attachées, pour n'importe quel type de logement ? on sait que, dans les faits, ça va être des logements plus haut de gamme et moyenne gamme ? ou elles sont avec certaines conditions, notamment une des conditions qu'on observe dans plusieurs politiques ou programmes dans d'autres pays: que le promoteur fasse non seulement son logement de marché normal mais contribue aussi à du logement abordable pour des clientèles à revenus plus modestes. Là-dessus, il y a toutes sortes d'expériences qui existent ailleurs. Donc, au niveau du locatif, il faut empêcher les soustractions, gonfler les additions.

Et l'autre mouvement, la comptabilité de flux, dans la conjoncture actuelle, un coup de pouce éventuellement pour accélérer la sortie de locataires vers de la propriété. Parce que, même si le profil des ménages locataires est à faibles revenus ? on en a un peu parlé tantôt ? rien que dans la région de Montréal, il reste 100 000 ménages qui ont des revenus supérieurs à 50 000, donc il y a des candidats.

n(17 heures)n

Mme Houda-Pepin: Sur ce point-là, M. Divay, on a entendu des groupes qui nous ont dit: Le phénomène de percolation, c'est un leurre; que, finalement, lorsqu'un logement se libère pour que la personne locatrice s'en aille, devienne propriétaire, le propriétaire du logement va le rénover et il va augmenter le loyer, et ça ne sera plus dans la capacité de la personne à faibles revenus pour laquelle on cherche à trouver les solutions, elle n'aura pas la capacité d'accéder à ce logement-là. Qu'est-ce que vous répondez à ça?

M. Divay (Gérard): La réponse est assez simple. C'est que, effectivement, dans un contexte de marché très serré tel que nous le vivons, il y a une forte probabilité que le logement libéré par un ménage qui devient propriétaire soit occupé par un ménage qui a un certain niveau de revenus, c'est un fait. Mais ce qui est très clair aussi, c'est que, si on ne prend pas une série de mesures comme celles que j'ai proposées, l'effet de resserrement du marché se répercute jusque sur les faibles revenus. Donc, on vient d'empirer la condition des faibles revenus. C'est la dynamique dans ça. Alors, c'est pour ça que moi, personnellement, de manière conjoncturelle, je n'ai aucun problème à envisager qu'il puisse y avoir un programme pour accélérer l'accession à la propriété, ce qui est différent d'une solution de plus long terme d'aider à l'accession à la propriété pour des ménages à revenus plus modestes qui, ça, est pleinement justifié.

Vous avez aussi, avant d'aborder la question d'habitat, abordé un fait, que, oui, il amène de l'argent là, mais il se passe un certain temps avant qu'il puisse y avoir du logement, avant qu'on puisse avoir un impact sur le marché. La remarque est très juste, mais, je pense, elle vient en bonne partie de ce que nous avons un historique de programmes de logement, sinon éphémères, du moins à relativement courte durée, O.K., pour quelques années, et après, une fois que les paramètres ont complètement changé, soit que le programme est abandonné et on revient. Et, si on regarde les tendances de fond sur l'évolution des ménages locataires, ce n'est pas de l'an dernier que l'acuité du problème de logement abordable se posait, c'était prévisible depuis quasiment une dizaine d'années.

Mme Houda-Pepin: Oui, je suis d'accord avec vous.

M. Divay (Gérard): Alors, là, il y a une question de conception de programmes, de la longévité des programmes. Quand on observe dans d'autres pays des programmes qui ont eu des effets majeurs, c'est quelquefois des programmes qui ont 30 ans de durée de vie, avec des petites modalités au gré des gouvernements, de la conjoncture financière publique et tout dans les modalités, mais, fondamentalement, certains programmes restent là.

Alors, maintenant, sur les questions d'habitat, si vous permettez, Anne-Marie va compléter.

Mme Houda-Pepin: Oui, d'accord.

Mme Séguin (Anne-Marie): Évidemment, considérer le logement dans un cadre plus large, celui de l'habitat, c'est peut-être rêver un peu, dans le sens que ça peut coûter plus cher. Je vous explique pourquoi. Évidemment, si on parle de nouveaux logements, de logements neufs, le coût du terrain est souvent moins cher dans les endroits plus isolés, moins bien desservis. Et je pense que, vraiment, si on parle de logement social, de logement pour des clientèles fragiles, vulnérables comme les femmes chefs de famille monoparentale, les personnes seules, etc., il faut vraiment penser à des environnements de vie et non pas seulement l'abri qu'est le logement. Alors, ça veut dire souvent des bonnes localisations dans des endroits bien desservis où il y a des services, etc. Et ça, je pense que le gouvernement, même si c'est plus cher, même si l'aide devrait être un peu plus chère, devrait faire ce calcul-là, parce qu'il va y avoir une multiplication, c'est-à-dire, l'aide va avoir un impact sur l'ensemble des conditions de vie des familles, par exemple. Ou il y a aussi toute l'idée des personnes âgées ? le Québec va vieillir ? et je pense qu'il faut... parce que les banlieues ne sont pas du tout conçues pour ça.

Donc, en ce moment, on est à un moment crucial, il va y avoir, je pense, des interventions massives, et il faudrait que le gouvernement tienne compte des besoins dans 20 ans, 30 ans, parce que le logement, par définition, c'est quelque chose de fixe et ça ne se change pas du jour au lendemain. Alors, je pense que c'est dans ce sens-là qu'on disait une approche habitat.

Mme Houda-Pepin: Merci. J'ai bien compris votre point de vue, il est très pertinent.

M. Divay, concernant les tendances lourdes, les tendances de fond dont on doit tenir compte, outre la démocratie... pardon, la démocratie, la démographie ? parce que je suis dans un autre dossier sur la démocratie, vous voyez ? outre la démographie, quelles sont les autres tendances lourdes? Vous qui avez suffisamment de recul, comme chercheur dans votre tour, et vous regardez la société un peu de loin, là, vous nous observez, est-ce que vous avez identifié des tendances lourdes dont on doit tenir compte dans une politique publique de l'habitation? Et, subséquemment, puisque vous m'avez invitée à vous poser la question, la fameuse politique de l'habitation, qu'est-ce que vous en pensez?

M. Divay (Gérard): Deux questions bien différentes. Mais, si vous permettez, quand même, au passage, les chercheurs peuvent avoir une certaine perception extérieure, là, de quelqu'un ou de personnes qui sont dans des tours, qui peuvent observer de loin, je vous avoue que les meilleures recherches, c'est celles qu'on fait sur la rue et sur le terrain. C'est là où on se pose les vraies questions, habituellement, même si c'est des questions très inconfortables pour les chercheurs par rapport aux théories, mais c'est quand même là où c'est intéressant. Ceci dit, vous posez une question à la fois sur les tendances lourdes et sur la politique. Sur les tendances lourdes, la première... Oui?

La Présidente (Mme Doyer): Je m'excuse, M. Divay, il reste deux minutes, alors, vous avez deux minutes pour répondre aux questions de la députée de La Pinière.

M. Divay (Gérard): Premièrement, sur les tendances lourdes, évidemment, la démographie, et deuxièmement, l'évolution des revenus, et là-dessus, il y a des choses quand même majeures à regarder dans ce qui se passe au niveau de la société, actuellement, sur l'évolution dans la distribution des revenus et les mesures de redistribution. C'est un élément majeur et, quant à moi, c'est peut-être l'élément le plus déterminant. Il y a des questions de mode de vie, mais les questions de mode de vie ? on le dit un peu dans le papier ? il ne faut pas tout prendre pour acquis; à la fois les différents organismes de la société civile et le gouvernement peuvent faire évoluer certaines conceptions concernant les modes de vie.

Maintenant, concernant la politique de l'habitation ? et c'est quelque chose sur laquelle j'ai eu l'occasion de réfléchir à la fois quand on m'avait demandé de la faire, et après, en regardant ce qui se passe ailleurs dans les autres pays ? globalement, quand même, il faut reconnaître que les politiques sont souvent des exercices assez intellectuels et théoriques, et que ce n'est pas ça qui est important. Ce qui est important, ce que vous pourrez appeler plus davantage des stratégies, avec trois éléments là-dedans: un premier élément qui est vraiment du très long terme, c'est ce qu'on peut appeler le niveau institutionnel, c'est-à-dire toutes les dispositions légales, réglementaires qui influencent sur le comportement des ménages, sur le comportement des intervenants, qu'ils soient propriétaires, qu'ils soient investisseurs, les relations locataire-propriétaire, tout le bloc, disons, institutionnel. Ça, c'est déterminant.

Le deuxième bloc, Francine l'a évoqué, je vous l'ai réévoqué: essayer de concevoir des programmes dans la durée. Les décisions majeures d'un ménage par rapport à son logement, ça se planifie souvent quelques années d'avance. Il faut avoir des programmes dans la durée, parce qu'il y a des ajustements conjoncturels.

Et le troisième élément que ça prend, ça prend des bonnes observations très fines sur ce qui se passe sur le marché du logement non pas seulement globalement au niveau du Québec, mais au niveau de chaque agglomération, et fines aussi par rapport aux types de ménages, par rapport aux clientèles. Parce que c'est uniquement avec ce genre de mesures régulières que, là, il peut y avoir certains ajustements.

Mais, l'importance de la durée dans les programmes, si on veut orienter sur un long terme le comportement des ménages, c'est important. Et, quant à elles, les tendances démographiques, on peut en avoir une certaine idée sur de nombreuses années d'avance. Les tendances de revenus, c'est plus aléatoire, mais quand même, si on regarde les types d'emplois qui sont créés actuellement dans l'économie, on peut se faire aussi une certaine idée sur ce qui peut arriver.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Doyer): Je vous remercie, M. Divay. Alors, je vais donner la parole à mon collègue le député de Roberval, et, comme je veux aussi donner... Ça va? Alors, je vais donner la parole à mon collègue de Saint-Maurice. Il nous reste six minutes du côté ministériel.

M. Pinard: Merci. Alors, MM. et Mmes les professeurs, j'aimerais vous entendre sur... Tout à l'heure, il m'a semblé vous entendre dire que l'accessibilité à la propriété dans la région de Montréal, par exemple, métropolitaine, serait facile à lancer puisqu'il y aurait actuellement sur le marché 100 000 locataires qui auraient des revenus supérieurs à 50 000 $. Est-ce que j'ai bien entendu ces chiffres?

M. Divay (Gérard): Les chiffres sont exacts, dans le recensement de 1996, il restait 100 000 ménages locataires qui ont plus que 50 000. De là à dire que ce serait facile, ça, je ne le sais pas.

M. Pinard: Mais ces chiffres-là sont exacts.

M. Divay (Gérard): Oui, c'est tiré du recensement.

n(17 h 10)n

M. Pinard: D'accord. Lorsqu'on parle, parce qu'on a reçu plusieurs groupes, il y a certains groupes qui prétendent qu'une famille, peu importe que ce soit une famille monoparentale ou encore un couple avec enfants, qui a des revenus inférieurs à 30 000 $, ne pourrait accéder... devenir propriétaire. Est-ce que vous trouvez que ce jugement-là est encore opportun ou si vous le trouvez... Moi, en tout cas... Non, je ne vous livrerai pas ma pensée; je vais vous entendre là-dessus, peu importe qui veut prendre cette question.

La Présidente (Mme Doyer): M. Divay.

M. Divay (Gérard): Donc, la question que vous me posez, c'est de voir si l'accession à la propriété pour des groupes de revenus plus modestes, 20 à 30 000, est envisageable. Effectivement, dans le document de consultation que vous avez fait préparer, il y a des propositions là-dessus. La clientèle potentielle pour la région de Montréal m'apparaît peut-être un peu surestimée, on vous le dit, en soi, surtout si c'est de l'accession dans du logement existant. Je pense que, en bas de 20 000, ça commence à devenir très problématique. De 20 à 30 000, ça peut être envisageable. Cela suppose quand même deux choses: d'une part, une aide au départ qui soit importante et, deuxièmement, une forme de sécurisation de l'accès à la propriété. Donc, je vous l'ai mentionné tantôt, si on regarde l'évolution des revenus, il y a beaucoup de hauts et de bas, surtout dans ces niveaux de revenus là. Il faut donc que le ménage qui accède à la propriété avec une aide, au départ, importante puisse aussi faire face aux aléas éventuels de l'emprunt ou de la composition du ménage. Ces mesures de sécurisation, d'ailleurs, existent dans les politiques et les programmes de certains pays actuellement.

M. Pinard: J'ai connu, dans le passé, des programmes, par exemple, qui s'étalaient sur quelques années. On a eu des programmes d'accessibilité qui augmentaient l'aide en fonction du nombre d'enfants. On a eu surtout des programmes qui étaient étalés, je crois, sur trois ans maximum. Lorsque vous référez à des programmes sur un étalement, est-ce que vous envisagez un étalement supérieur à cinq ans? Et vous vous basez sur des expériences qui ont été vécues, dans quels pays, par exemple?

La Présidente (Mme Doyer): M. Divay.

M. Divay (Gérard): Notamment pour la rénovation, en France, il y a un programme, une forme d'intervention qui est là depuis très longtemps. Aux États-Unis, pour aider les municipalités dans le domaine du logement, les aider de manière assez générale, pour de la rénovation mais, aussi, éventuellement, pour du logement, il y a un programme qui est là depuis une trentaine d'années, et ça permet à la municipalité, bon an, mal an, d'essayer de voir comment elle peut planifier ses interventions.

La Présidente (Mme Doyer): Oui, Mme Dansereau.

Mme Dansereau (Francine): Pour répondre tout de suite à votre question, dans le document, on fait état de ce qui existe en France depuis quelques années, qui s'appelle le prêt à taux zéro. Il y a toujours eu en France ? ça fait des années, depuis 1977 ? des programmes d'aide à l'accession sociale à la propriété, donc, des ménages à revenus modestes. Alors là, prêt à taux zéro, ça veut dire: prêt sans intérêt pour une durée X, pour une partie seulement de l'emprunt hypothécaire que le ménage fait. Ça marche surtout pour l'achat dans l'existant. Donc, ça a donné des résultats surtout là. Comme on est dans une situation où on dit: Bien non, dans l'existant, ça ne sert à rien parce qu'on est en train de faire de la... c'est probablement occupé déjà par un locataire. Bien, peut-être. En tout cas, il ne faudrait pas que ce soit déjà occupé par un locataire et puis qu'on soustraie une unité de logement du parc.

Mais, en tout cas, toujours est-il, je faisais un rapide calcul tout à l'heure, 30 000 $; à 30 000 $, ça veut dire que vous êtes capable de contracter, supposément, si on pense toujours à notre 30 %, un engagement de 9 000 $ par année. Là, vous payez là-dessus vos assurances, vos taxes, bon, etc. Mais, si vous avez un crédit de taxe, parce qu'on parle de choses comme ça, un crédit de taxe foncière sur 10 ans, hein, espérons 10 ans, au moins sept ans ? je ne sais pas ce que tu en penses, Gérard; mais, en tout cas, au moins sept ans, dans mon livre à moi ? si vous avez une allocation-logement, puis si vous avez un prêt à titre gracieux, un prêt qui va... une partie de votre prêt qui va être sans intérêt pendant, je ne sais pas quoi, cinq ans, à condition que vous respectiez, que vous soyez en dessous de certains plafonds de revenu, bon, etc. Ça devrait être jouable.

La question, c'est entre 20 000 et 30 000. Bien. À 20 000, ça doit être difficile, ça dépend où, mais, à 30 000, ça me semble possible.

La Présidente (Mme Doyer): Alors, est-ce que vous vouliez ajouter quelque chose? Très succinctement, Mme Séguin, et puis sur...

Mme Séguin (Anne-Marie): Oui. On en a discuté. Je suis un peu moins optimiste que mes collègues.

On en a discuté et, effectivement, parce qu'il y a la précarité de l'emploi, parce qu'il y a des revenus qui sont variables, je pense qu'il faudrait qu'on prévoit des formules où on peut avoir comme un filet de protection. Autrement dit, si pendant quatre, six mois les propriétaires ne sont pas capables de faire face à leurs obligations, qu'ils ne perdent pas tout. Parce que, en France, dans l'accession dans le logement social, dans le parc social, il y a eu des expériences et certains ménages ont eu des problèmes justement. Parce que si un fils de 16 ans partait, l'aide personnalisée au logement baissait et là, ils avaient du mal à...

Donc, il faut prévoir, je pense, et il faut que l'aide soit longue, effectivement qu'on assiste longuement les propriétaires, les accédants qui sont peu fortunés.

La Présidente (Mme Doyer): Alors, merci à mes collègues. Merci, M. Divay, Mme Séguin, Mme Dansereau. Merci beaucoup de votre contribution.

(Changement d'organisme)

La Présidente (Mme Doyer): Alors, je demanderais aux représentants de la ville de Longueuil de prendre place. Alors, j'aimerais que vous... D'abord, je suis contente de vous accueillir en tant que présidente de la commission et j'aimerais que vous vous présentiez messieurs, madame.

Ville de Longueuil

M. Gladu (Claude): Mme la Présidente, distingués membres de la commission, à titre de vice-président du comité exécutif et de responsable du dossier sur le logement social pour la ville de Longueuil, je suis fier de présenter notre mémoire.

Pour la présentation, je suis accompagné de Mme Manon D. Hénault, conseillère municipale et présidente de l'Office municipal d'habitation de Longueuil. et de M. Jean-Benoît Laberge, directeur de l'Office municipal d'habitation de Longueuil.

L'objectif premier de ce document est de vous présenter des avenues de solutions durables au phénomène de la rareté de logements sociaux et abordables. Les constats, obstacles et enjeux identifiés dans le document de consultation, préparé à l'attention des membres de la commission, colle à la réalité longueuilloise. Ils servent de base à un débat d'idées plus large qui devrait avoir cours sur la demande et l'offre du logement social locatif. Par sa présentation, la ville de Longueuil entend donc amener des éléments de réflexion sur les pratiques actuelles en matière d'aide au logement.

Au profit d'une perspective à moyen et à long terme, nous croyons qu'il faut cesser coûte que coûte de mettre en place des mesures de courte vue qui, en bout de ligne, ne répondent qu'à des conjonctures particulières. Il faut coordonner davantage nos actions avec les différents intervenants en la matière pour établir une planification d'ensemble en vue de rétablir le fragile équilibre du logement social locatif.

La ville de Longueuil est née, le 1er janvier 2002, du regroupement des municipalités de Boucherville, Brossard, Greenfield Park, LeMoyne, Longueuil, Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Hubert et Saint-Lambert. La ville de Longueuil compte 371 934 habitants, ce qui en fait la troisième ville en importance au Québec, après Montréal et Québec.

n(17 h 20)n

Les territoires des anciennes municipalités locales sont devenus des arrondissements avec comme principale compétence d'offrir les services de proximité à leur population. À titre d'exemple, voici cinq indicateurs qui dressent un portrait de Longueuil dans le présent mémoire:

Une augmentation de la population vieillissante: plus de 24 % de notre population est âgée de plus de 55 ans.

Un pourcentage élevé de familles monoparentales: c'est dans l'arrondissement du Vieux-Longueuil où l'on retrouve le plus grand pourcentage de familles monoparentales, avec 16 %; pour l'ensemble du territoire, il est de 13 %;

Six citoyens sur 10 sont propriétaires, plus précisément, il y a 59 % de propriétaires contre 41 % de locataires. En 1991, on comptait 58 % de propriétaires et 42 % de locataires pour l'ensemble des municipalités couvrant le territoire de la ville de Longueuil. C'est donc dire que le pourcentage des propriétaires a augmenté de 1 % entre 1991 et 1996.

Revenus faibles pour les ménages monoparentaux. Quant aux revenus par ménage en 1996, 23 % des ménages percevaient moins de 20 000 $ par année. Ainsi, le revenu moyen par ménage pour les familles monoparentales était de 50 % moindre que celui des familles comptant un couple.

Locataires en difficultés financières. Selon des statistiques de 1996, pour 23 735 ménages, le taux d'effort consenti pour le loyer dépassait 30 % de leurs revenus. Plus de 12 000 d'entre eux n'avaient d'autre choix que d'allouer plus de 50 % de leurs revenus pour acquitter leur loyer.

Le parc immobilier privé locatif se concentre en priorité dans les arrondissements du Vieux-Longueuil, de Saint-Hubert, Greenfield Park et Saint-Lambert?Le-Moyne. Le parc date des années soixante et offre en général des logements de bonne qualité à un coût relativement abordable en comparaison avec les autres villes canadiennes.

Des organismes sur notre territoire, voués à la gestion des logements, s'occupent de l'ensemble du parc immobilier locatif social. C'est le cas de l'Office municipal d'habitation de Longueuil, issu du regroupement de huit offices municipaux d'habitation couvrant les territoires juridiques des anciennes municipalités. Cet Office est géré par un conseil d'administration dont les neuf membres sont nommés majoritairement par la ville de Longueuil. Sa présidente est une élue municipale de la ville, Mme Hénault, que je vous ai présentée plus tôt. Plus de 2 702 logements sont offerts par l'Office dont la majorité est sous forme d'habitations à loyer modique. Quelque 400 logements offerts sont loués à des propriétaires privés dans le cadre du Programme de supplément au loyer.

Longueuil compte aussi sur des coopératives d'habitation. Au parc immobilier de l'Office municipal d'habitation, il faut donc ajouter plus de 1 200 logements coopératifs. On compte 63 coopératives sur le territoire, majoritairement localisées dans l'arrondissement du Vieux-Longueuil.

Enfin, il y a les organismes à but non lucratif. Ces organismes offrent à des clientèles fragilisées des logis adaptés à leurs besoins. Un projet comptant 26 chambres a été réalisé en 2001-2002 et près de 47 autres unités sont en cours de réalisation par trois organismes porteurs de projets.

Parmi les constats dégagés dans le document de consultation, deux principales causes expliquent la non-disponibilité de logements locatifs abordables. Tout d'abord, on indique l'augmentation rapide du nombre de ménages composés d'une seule personne. Ensuite, on constate une très faible production de logements locatifs. Entre 1989 et 1995, on a construit 2 133 unités de logement locatif. Pour les quatre années suivantes, 364 unités de logement locatif ont été mises en chantier. Les mises en chantier de logements locatifs entre janvier 1996 et décembre 2000 ont donc chuté considérablement sur notre territoire. Ces statistiques parlent par elles-mêmes.

Les constats dégagés mettent en évidence que, malgré les sommes importantes engagées par la SHQ dans les différents programmes, 360 millions par année, à peine 15 % des ménages ayant un taux d'efforts supérieurs à 30 % ont été aidés. Ces piètres résultats soulèvent avec beaucoup d'acuité le faible taux de pénétration de ces programmes.

Les causes expliquant la crise du logement locatif sont attribuables aux changements profonds de la société québécoise ainsi qu'aux tendances lourdes présentement observées. L'individualisation des comportements, le retour à la ville chez les jeunes et les moins jeunes observé depuis plus d'une décennie, sont autant de facteurs qui ont influencé la crise que nous traversons. La planification d'ensemble, évoquée précédemment, aurait contribué à mettre en place les mesures adéquates. Les pressions sur le logement locatif se poursuivront pour les 10 prochaines années et se résorberont par la suite. À moyen terme, si les bonnes décisions ne sont pas prises maintenant, c'est un parc immobilier locatif trop élevé dont on héritera. En raison de l'individualisation des comportements, l'amélioration de la disponibilité des logements locatifs pour les ménages à revenus modestes composés d'un seul adulte est la principale avenue sérieuse à emprunter.

Pour ce qui est des clientèles vivant des problèmes particuliers, la ville de Longueuil est en accord avec les mesures proposées en collaboration avec les organismes partenaires du logement social et communautaire du milieu consulté.

De plus, la ville de Longueuil est d'avis que la piste analysée plus à fond par la Communauté métropolitaine de Montréal est porteuse d'avenir. Nous devons encourager le retour des investissements privés dans le secteur du logement locatif. Nous y reviendrons dans les avenues de solution durable que nous encourageons.

L'avenir nous réserve une nouvelle crise du logement. Le marché du logement locatif est en équilibre lorsque le taux d'occupation est de 3 %. Le faible taux d'inoccupation d'octobre 2001 a conduit à une crise du logement en juillet dernier. Sur notre territoire, plus de 200 familles ont alors eu recours à une aide urgente au logement. Cette crise fut précédée de signes précurseurs tels la baisse du taux d'inoccupation des logements locatifs et l'augmentation en flèche des demandes de logements à loyer modique. Ces demandes sont passées de 1 000 à plus de 2 200 en l'espace de quelques mois. De ce nombre, les deux tiers étaient composées de personnes seules. La liste d'attente de locataires potentiels à l'Office municipal de logement est nettement plus chargée qu'elle ne l'était l'an dernier. Tout porte à croire que la crise du logement vécue à Longueuil ne s'apparente en rien à celle qui nous attend. Le défi consiste à trouver rapidement des mesures qui permettront d'en atténuer les impacts sur les familles longueuilloises.

En guise de solution, voici donc cinq pistes présentées par la ville de Longueuil. Ces solutions devraient avoir un impact positif sur l'offre du logement social et abordable. Avant tout, il importe d'améliorer les programmes existants et de concentrer plus d'efforts au volet de l'aide à la personne. Actuellement, le portrait du logement social est surtout représenté par les habitations à loyer modique et les logements loués dans le secteur privé dans le cadre du Programme de supplément au loyer. La subvention mensuelle versée, par ménage, est, en 2002, dans le volet HLM longueuillois, de 234 $ comparativement à 288 pour le ménage bénéficiant du Programme de supplément au loyer. Si le Programme de supplément au loyer est plus dispendieux, il offre en retour l'avantage de ne pas étiqueter le ménage bénéficiaire. De plus, le supplément au loyer évite toute forme de concentration de ménages défavorisés dans un même îlot. Par contre, ce programme a ses limites: les propriétaires se montrent récalcitrants à signer des ententes avec l'Office. La raison: le marché actuel permet à ces derniers de choisir leurs locataires. L'exclusion sociale refait donc surface et les familles avec enfants de même que les individus ayant des problématiques particulières ne trouvent plus d'endroit où se loger.

n(17 h 30)n

Le volet HLM offre l'avantage d'offrir des milieux de vie agréables aux personnes retraitées, par des logements de bonne qualité et des aires communes favorisant la socialisation. Il permet également de loger les familles sans aucune forme de discrimination liée aux enfants et à l'origine culturelle ou religieuse. Malheureusement, certains grands parcs immobiliers familiaux ressemblent plus aujourd'hui à des ghettos où la qualité de vie laisse à désirer. La réglementation au niveau de l'attribution est en partie responsable de cette situation, puisqu'elle ne favorise aucune forme de mixité sociale dans les grands complexes immobiliers.

Les programmes plus récents appelés Logement abordable et AccèsLogis visent la construction de nouvelles unités de logement. Près de 500 nouvelles unités de logement devraient voir le jour à court terme sur notre territoire. Malheureusement, le coût de réalisation reconnu par la SHQ ne reflète pas le coût du marché immobilier actuel. Cette sous-estimation met un frein à tout programme de développement.

Afin de pallier ces problèmes, la ville de Longueuil recommande à la commission:

1° d'augmenter les investissements pour la création de nouvelles unités de logement de types HLM et coopératif, et ce, afin de répondre aux besoins des ménages n'ayant pas les moyens financiers de se loger décemment ou faisant l'objet d'exclusion sociale;

2° d'assouplir la réglementation d'attribution des logements en HLM afin de permettre une plus grande mixité sociale dans les immeubles familiaux et doter les OMH des outils nécessaires pour remédier aux problèmes liés à la ghettoïsation des grands ensembles immobiliers;

3° de maintenir le Programme de supplément au loyer, même si, à moyen et à long terme, il s'avère plus dispendieux;

4° d'augmenter les coûts de réalisation reconnus par la SHQ pour la création de nouvelles unités de logement dans le cadre des programmes Logement abordable et AccèsLogis; de plus, donner suite aux représentations faites par la Communauté métropolitaine de Montréal pour la majoration des coûts de réalisation maximaux admissibles pour ces programmes.

Le Président (M. Vallières): M. Gladu, notre temps imparti est terminé, mais je pense qu'il serait intéressant que vous nous lisiez quand même vos recommandations. Peut-être passer aux recommandations, celles qui restent, parce qu'on a déjà dépassé de quelques minutes. Ça passe vite, 15 minutes.

M. Gladu (Claude): Oui. J'en avais encore pour quelques temps, pas quelques heures mais quelques minutes. Je vais essayer de lire un peu plus vite, et, s'il manque de temps, bien, vous m'arrêterez.

Le Président (M. Vallières): Oui, c'est parce que ça va réduire le temps d'intervention, de questions des députés. Mais on peut vous laisser encore quelques minutes, mais c'est pour ça que je vous recommandais de lire peut-être vos recommandations directement.

M. Gladu (Claude): Très bien, nous allons... Pour complément, la ville de Longueuil propose cinq autres recommandations à la commission.

Première recommandation, de créer un programme d'accession à la propriété pour les ménages à revenus faibles à modérés; si l'avenue du dégrèvement d'impôt foncier était retenue, de permettre au préalable aux municipalités d'en analyser les impacts sur leur territoire;

Deux, de favoriser toute mesure fiscale favorable au secteur privé pour faciliter la création de nouveaux logements locatifs afin de permettre au marché locatif d'atteindre un équilibre;

Trois, de revoir la pertinence de maintenir la création de nouvelles unités de logement une fois que le marché locatif aura atteint un taux d'inoccupation des logements de l'ordre de 3 %;

Quatrièmement, de créer, au niveau local, un guichet unique de traitement de demandes en matière d'aide au logement, pour réduire le nombre de démarches que doivent faire les bénéficiaires de ces programmes;

Et, cinquièmement, de créer un programme d'incitation à l'établissement de ménages en région pour combler la pénurie de main-d'oeuvre dans différents secteurs économiques, pour y combler les logements locatifs sociaux et abordables vacants.

C'est les cinq recommandations.

Le Président (M. Vallières): Merci beaucoup, M. Gladu. Alors, première question, Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui. Très vite. On vous a réservé des budgets, je pense, hein? Vous dites à la page 12, là, vous écrivez, l'aide à la pierre: volets Logement abordable et AccèsLogis: «Ces volets plus récents visent la construction de nouvelles unités de logement.» Vous en auriez besoin de combien actuellement, pour répondre correctement à vos besoins? Actuellement.

M. Gladu (Claude): D'unités de logement actuellement?

Mme Doyer: C'est quoi, vos besoins, là?

M. Gladu (Claude): On a des attentes actuellement de 2 000 démunis qui attendent pour avoir des logements.

Mme Doyer: D'accord. Sur votre liste d'attente, 2 000, puis là vous dites: «Près de 500 nouvelles unités de logement devraient voir le jour à court terme sur notre territoire.» C'est «devraient». Donc, il y a comme un doute, là. Et, vous, vous avez, avec la nouvelle ville de Longueuil ,et tout ça, vous avez des budgets qui sont réservés. C'est quoi, vos budgets? C'est quoi, vos budgets?

M. Gladu (Claude): On a des budgets qui sont réservés, c'est aux environs de 1,1 million de dollars. Mais, par contre, le problème qu'on connaît, c'est que ces budgets-là, on les a, nous, mais, dans le privé, pour faire des logements abordables, les gens n'embarquent pas, parce que le programme n'est pas assez élevé pour que la construction puisse se faire.

Mme Doyer: D'accord. Ça veut dire que, actuellement, sur votre table à dessin, là, il n'y a aucun projet, zéro projet.

M. Laberge (Jean-Benoît): Si vous permettez, je vais répondre. Oui, nous avons des projets. Nous en avons...

Mme Doyer: Expliquez-moi ça, parce que, là, moi, c'est le «devraient», là. Puis, quand je vois 2 000 puis vous dites 500, malheureusement...

Le Président (M. Vallières): M. Laberge.

Mme Doyer: Ce serait quoi, le coût? Allez-y.

M. Laberge (Jean-Benoît): Il y a un type qui demande la parole, là.

Le Président (M. Vallières): Non, mais vous avez la parole pour répondre à cette question. M. Laberge.

Mme Doyer: La demande, c'est pour après.

M. Laberge (Jean-Benoît): O.K. D'accord. Merci. Alors, lorsqu'on parle de 500 logements, c'est déjà prévu, c'est une programmation qui était déjà déterminée à l'avance par la Société d'habitation du Québec. Actuellement, nous avons des projets, nous avons l'équivalent de tout près de 100 logements sous forme de projets. Par contre, le problème que nous rencontrons, c'est qu'il y a des coûts de réalisation reconnus par l'État et que ces coûts-là sont trop bas, compte tenu du contexte immobilier actuel que nous vivons sur la Rive-Sud de Montréal. Alors, lorsqu'on nous indique que nous devons réaliser un logement de trois pièces et demie pour 62 000 $, ça ne reflète pas le marché. On est incapables de rencontrer ces coûts-là. C'est des coûts de construction qui existaient peut-être il y a cinq ans, 10 ans, mais aujourd'hui c'est carrément irréaliste.

Mme Doyer: Ça veut dire que, dans le fond, les coûts... On a parlé de quel montant, là, de quel prix? 92 000? C'est quoi? 70 000, 82 000? Ce serait quoi? Parce que, moi, chez nous, là, on en fait, du logement, chez nous, on a des besoins, dans Matapédia, puis on en construit. On a bâti, l'an passé, 23 logements pour les personnes âgées. On a transformé une bâtisse et, à côté, un an après, on en a bâti 23, logements neufs, tout ça. Comment ça se fait que chez nous on est capables, puis c'est un petit milieu, il y a 20 000 personnes, et que, dans une ville comme Longueuil, vous... C'est quoi, votre problème? Qu'est-ce qui pourrait être le prix de construction par unité qui serait faisable? Ça n'a comme pas de bon sens. L'argent est là. On n'a pas arrêté de l'entendre partout, là, de... L'argent est là.

Le Président (M. Vallières): M. Laberge, vous avez une réponse à ça?

M. Laberge (Jean-Benoît): Oui, bien sûr. Le coût de réalisation qu'on nous reconnaît à Longueuil est le même que chez vous, madame, sauf que le coût du terrain à Longueuil est drôlement plus élevé peut-être que chez vous.

Mme Doyer: On l'avait déjà.

M. Laberge (Jean-Benoît): Vous l'aviez déjà. Vous étiez chanceuse.

Mme Doyer: Il n'a pas coûté grand-chose, effectivement.

M. Laberge (Jean-Benoît): Nous, on doit l'acheter, madame.

Mme Doyer: C'est ça, c'est ça qu'il faut dire.

M. Laberge (Jean-Benoît): Alors, le coût du terrain est drôlement plus élevé qu'en région. Montréal, Gatineau et Québec bénéficient d'un coût plus élevé. Ce sont les seules trois grandes villes du Québec, alors que Longueuil et Laval, on a les mêmes coûts que Matapédia.

Mme Doyer: Mais on ne tient pas compte de ça dans l'enveloppe? Moi, j'aimerais mieux qu'ils en bâtissent 10 ou 20 ou 30 plus élevés. Vous comprenez?

Une voix: Ils n'ont pas de banque de terrains.

Mme Doyer: Ils n'ont pas de banque de terrains. Ça n'a pas de bon sens. Tout le monde s'en vont là.

M. Laberge (Jean-Benoît): Il faudrait peut-être que l'État reconnaisse que construire un immeuble de 30 logements à Longueuil ne coûte pas le même prix que le construire à Matapédia. Simplement, c'est une question, là, de marché immobilier, madame. Le coût du terrain à Montréal, il y a une surchauffe.

Mme Doyer: Oui, écoutez, je sais ça. Je sais ça. Mais vous avez 1,1 million et, si je comprends bien, ça, c'est la réglementation, c'est le cadre à partir duquel vous fonctionnez. Puis il y a aussi les terrains qui vous coûtent plus cher, qui vous obligent, dans le fond, à vous asseoir là-dessus puis attendre. C'est quoi qui va arriver, là?

M. Laberge (Jean-Benoît): Bien là regardez. Bien, c'est ça, madame. Si les coûts de réalisation ne sont pas revus à la hausse, comme la Communauté métropolitaine le demande, nous allons vers un mur de béton.

Mme Doyer: Vous avez le million qui est là, qui reste là, puis que ça fait rien.

M. Laberge (Jean-Benoît): Parce qu'on ne peut pas réaliser un projet... Si je dépose un projet, le coût de réalisation, par exemple, pour un logement, l'État me reconnaît 62 000 $ et j'arrive avec le coût du marché qui est environ 75 000 $, l'État refuse de subventionner. Le projet meurt.

Mme Doyer: Bon. C'est ça. D'accord. Je comprends très bien. Merci.

Le Président (M. Vallières): On parle ici d'un logement à deux chambres à coucher, là, à peu près, quand vous parlez de 75 000 $.

M. Laberge (Jean-Benoît): Là, présentement, la région de Montréal, avec la firme d'architectes avec laquelle nous travaillons et le GRT, nous arrivons à un coût tout près de 72 000 $ pour un logement d'une chambre à coucher.

Mme Doyer: Mais ce n'est pas la volonté d'agir qui vous arrête, là.

M. Laberge (Jean-Benoît): Au contraire, madame.

Mme Doyer: D'accord. C'est bien. Ça va.

Le Président (M. Vallières): O.K. Très bien. Mme la députée de La Pinière.

n(17 h 40)n

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. Gladu, Mme Hénault et M. Laberge, soyez les bienvenus. Vous parlez d'une réalité que je connais trop, parce que vous êtes de la Rive-Sud, mon comté est chez vous. Alors, on travaille ensemble dans ce dossier-là quand c'est possible. Je voudrais vous féliciter pour le travail et les efforts que vous faites pour le dossier de l'habitation. M. Gladu, je vous salue particulièrement. D'habitude, on vous recevait ici comme étant le maire de Longueuil. Alors, c'est la première fois que je vous reçois comme vice-président du comité exécutif de la nouvelle ville, la grande ville de Longueuil.

Nous avons écouté l'UMQ, qui sont venus présenter leur mémoire, ainsi que la Communauté métropolitaine de Montréal, et on a attiré notre attention sur la réalité des municipalités, le fait que le gouvernement leur demande de s'impliquer dans des dossiers sociaux, notamment le logement social, alors que leur capacité financière, qui repose sur les taxes foncières, ne leur permet pas finalement de faire ce type d'investissement parce que c'est coûteux, parce que... certains disent que ce n'est pas nécessairement dans leur mandat. Mais, quoi qu'il en soit, on vous a envoyé de toute façon le ballon et il faut le porter.

Et vous avez dit qu'il y a 2 000 noms sur les listes d'attente actuellement à l'OMH de Longueuil. J'imagine que ça vient spécifiquement du Vieux-Longueuil, ce qu'on appelait le Vieux-Longueuil, ou ça vient de tous les arrondissements? La liste, elle vient d'où?

M. Gladu (Claude): Ça vient de tous les arrondissements, mais il y en a plus dans le Vieux-Longueuil.

Mme Houda-Pepin: O.K. Très bien.

M. Gladu (Claude): Et Saint-Hubert aussi qui a une bonne liste.

Mme Houda-Pepin: Saint-Hubert aussi, d'accord. Le fonds que vous avez constitué avec la nouvelle ville, 1,1 million de dollars, c'est ça...

M. Gladu (Claude): C'est bien ça.

Mme Houda-Pepin: ...est-ce que tous les arrondissements y contribuent maintenant? Parce que, avant, il y avait des... Dans l'ancien temps, les villes ne participaient pas toutes au logement social.

M. Gladu (Claude): Toutes les villes doivent contribuer maintenant, oui.

Mme Houda-Pepin: O.K. Très bien. Vous soumettez un certain nombre de propositions fort intéressantes. Je voudrais m'arrêter à la question, là, des mesures fiscales que vous proposez pour le privé. Et on a eu un débat avec les représentants des associations de propriétaires qui ont convenu que peut-être ce serait possible de considérer des mesures fiscales pour le logement social et abordable en particulier.

Puis j'ouvre une parenthèse pour expliquer un peu le quiproquo que vous avez eu. Parce que le problème qu'on a actuellement pour le logement social et abordable, c'est qu'il y a deux programmes. Il y a le programme AccèsLogis qui, lui, date de 1997-2001, c'était sur cinq ans, qui n'a pas donné nécessairement... qui n'a pas livré toutes les unités qui avaient été programmées, budgétées, etc. Et ça, c'est à la grandeur du Québec et ça s'adresse à différentes clientèles. Mais depuis novembre 2001, il y a un nouveau programme qui s'appelle le Programme de logement abordable, qui est un programme paritaire fédéral-provincial, avec une contribution des municipalités d'ailleurs, et qui vise à construire des logements qui sont un peu une coche supérieure à ce qu'on connaît dans le logement social traditionnel. Et ce programme-là, dans lequel il y a 324 millions de dollars, pour 2002-2004, lui, il n'y a pas d'unités de logement de construites, précisément pour les raisons que vous avez expliquées: parce que les paramètres qui sont définis par le gouvernement ne tiennent pas compte de la réalité du marché. Et il y a des groupes qui ont signalé aussi leur incapacité de pouvoir produire du logement à cause de cette difficulté-là.

Alors, pour revenir aux mesures fiscales, s'il fallait que la commission s'en aille dans cette direction pour faire une recommandation, s'en aller dans le sens de mettre de l'avant des mesures fiscales pour inciter le secteur privé à investir dans le logement social et abordable, sachant que le public, avec toutes ses variantes institutionnelles, coopératives et communautaires, n'est pas capable de répondre à la crise du logement, s'il fallait qu'on aille dans cette direction-là, quel serait, à ce moment-là, le rôle ou la contribution financière que vous voyez du côté des municipalités?

Le Président (M. Vallières): Oui, alors, M. Gladu, M. Laberge? M. Gladu.

M. Gladu (Claude): Bien, écoutez, le rôle de notre municipalité est d'aller de l'avant si on a les moyens. On va y aller selon nos moyens. Comme je vous ai dit, dans Longueuil, actuellement, il y en a 2 000 qui attendent pour avoir des logements. Et sûrement qu'avec la nouvelle ville on est prêts à faire notre part. Mais là je ne peux pas vous dire exactement jusqu'où on peut aller. Mais sûrement que, pour la première année, on croit que 1,1 million, c'était beaucoup pour une nouvelle ville. Et, l'an prochain, on était prêts à en mettre autant pour continuer...

Mme Houda-Pepin: Quelle est la part de ce 1,1 million qui va à la rénovation, par exemple? Parce que je sais que le parc locatif n'est pas suffisamment bien entretenu; il y a des dépenses nécessaires pour entretenir le parc à Longueuil.

M. Laberge (Jean-Benoît): Alors, le 1,1 million, madame, vise seulement la création de nouvelles unités de logement.

Mme Houda-Pepin: Ah! d'accord.

M. Laberge (Jean-Benoît): D'accord? Il y a d'autres programmes gouvernementaux qui existent pour la rénovation des logements sur le marché privé. Et bien sûr, pour les logements sociaux, nous avons notre plan triennal de modernisation de nos immeubles.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Et vous avez combien de budget dans ce programme de rénovation? Parce que Réno Québec, c'est 50 % gouvernement, 50 % les municipalités.

M. Laberge (Jean-Benoît): Pour le secteur privé, madame, je ne pourrais pas vous répondre. Pour le secteur social, celui que je gère, nous avons, pour nos 2 200 unités, un budget de 1,3 million pour rénover nos immeubles HLM.

Mme Houda-Pepin: HLM. D'accord. Pour revenir à l'accession à la propriété, M. Gladu, vous êtes favorable à cette proposition-là d'aller dans ce sens-là. Il y a des groupes qui nous ont dit que, finalement, c'est un peu illusoire de penser que, en encourageant l'accession à la propriété, on puisse régler la crise du logement, parce que, lorsque les logements se libèrent, la reprise par les propriétaires vise à les rénover et les remettre sur le marché à des prix beaucoup plus élevés dont les citoyens à faibles revenus n'ont pas la capacité d'atteindre.

M. Gladu (Claude): Je crois qu'il y a des ententes qui se font, à ce moment-là, dans le secteur privé. Ils ne peuvent pas augmenter le loyer pendant les années qu'on a signé avec eux. S'ils le font par la suite, bien là...

Mme Houda-Pepin: C'est-à-dire, actuellement, dans le régime actuel du contrôle des loyers, durant les cinq premières années de la nouvelle construction, effectivement le propriétaire peut, mais, à un moment donné, il tombe sur le régime du contrôle des loyers par la Régie du logement et il doit se conformer au barème de la Régie.

Mais ce n'est pas ça ma question. Ma question, c'est par rapport à l'encouragement de l'accession à la propriété pour les jeunes familles, les familles de la classe moyenne qui, elles aussi, sont aux prises... Parce que, finalement, cette crise de logement, qui a affecté initialement les familles à faibles revenus, est en train de déborder sur les autres couches de la société. Et donc on a eu juste avant vous le professeur de l'INRS qui, lui, nous disait que, le logement social et abordable, il ne faut pas le prendre en exclusion du reste, il faut l'inscrire dans une politique de l'habitation qui soit globale et qui tient compte de tous les besoins.

Alors, comme, vous, vous êtes localement sur le terrain pour gérer ce genre de dossier, vous avez le paysage devant vous, là, si on décidait de mettre des initiatives pour encourager le privé, pour investir dans l'accession à la propriété... ou plutôt les familles de la classe moyenne pour aller accéder à la propriété, ça représente quoi pour vous comme difficulté?

M. Laberge (Jean-Benoît): Si vous permettez, je vais répondre à la question, d'accord? L'accession à la propriété est un des éléments que nous préconisons, d'accord? Et, attention, quand on parle de leurre, c'est un leurre de croire également que, lorsqu'un logement se libère, automatiquement, il est rénové et le propriétaire revoit à la hausse le coût du loyer. Je vous parle de l'expérience du terrain depuis 20 ans, très peu de logements vont subir des rénovations majeures qui vont susciter une augmentation sensible du coût du loyer. Et dites-vous bien, lorsque vous louez un logement sur le marché privé et que l'immeuble à logements est le même que le mois précédent, le propriétaire doit indiquer dans le bail le coût du dernier loyer payé. Et le locataire a toujours un recours devant la Régie du logement, si le locataire, excusez-moi, le propriétaire a augmenté le loyer d'une façon indue.

n(17 h 50)n

Alors, c'est sûr que, si on permet à des jeunes ménages ou même à des ménages moins jeunes d'avoir accès à la propriété, dont les revenus peuvent osciller entre 30 000 et 40 000 $, ça libère un nombre de logements. En libérant un grand nombre de logements, ça enlève la pression sur le marché locatif, parce que, présentement, il y a pénurie de logements locatifs.

Mme Houda-Pepin: Tout à fait, tout à fait. Lorsque vous demandez de créer, au niveau local, un guichet unique de traitement des demandes en matière d'aide au logement, est-ce que ça, c'est en plus des offices municipaux d'habitation?

M. Laberge (Jean-Benoît): Oui.

Mme Houda-Pepin: Ou à la place de?

M. Laberge (Jean-Benoît): Bien, regardez le problème actuellement que nous vivons. La personne qui est à la recherche d'un logement, que ce soit sous une forme coopérative, sous une forme d'organisme sans but lucratif ou encore de HLM, doit cogner à toutes les portes, c'est-à-dire vient à l'Office pour un logement HLM; il y a 63 coops à Longueuil, donc doit cogner à chacune des 63 portes; et il y a environ quatre ou cinq OSBL, encore là, cinq portes à cogner. Imaginez-vous, vous êtes monoparentale, trois enfants dont le plus jeune a cinq ans. Bonne chance. Alors, pourquoi pas faciliter l'aide à ces personnes-là pour dire: À un seul endroit, elle va prendre connaissance de tous les services qui existent sur le territoire. Et même ça peut être les services locaux, et on peut les informer sur les services aussi gouvernementaux, dont, entre autres, votre Programme d'allocation-logement. Facilitons la vie aux citoyens.

Mme Houda-Pepin: Très bien. Est-ce que ce service pourrait être rendu par les offices municipaux qui existent déjà et qui pourraient élargir un peu leur champ d'intervention dans les différents types de logement et pas seulement dans le logement HLM?

M. Laberge (Jean-Benoît): Évidemment, c'est une piste de solution fort encourageante. Il faut croire que... Je parle pour ma paroisse, vous allez me dire sauf que les offices municipaux, nous couvrons le territoire québécois; nous sommes partout. Alors, il y a eu regroupement au niveau de l'île de Montréal, regroupement au niveau de Longueuil, il peut y avoir du regroupement au niveau des MRC pour offrir un service de qualité à l'ensemble des citoyens. On est là pour servir le peuple.

Mme Houda-Pepin: Mais ce matin ou hier, nous avons entendu un groupe qui nous a parlé, c'est parmi les secteurs privés, qui nous disait qu'ils ont fait une demande à Montréal pour construire du logement, dans le cadre du Logement abordable, à Longueuil, et on leur a dit qu'il ne se construit pas de logements abordables à Longueuil: Vous ne pouvez pas vous prévaloir de ça, il faudrait que vous restiez à Montréal. Et, apparemment, ils avaient même acheté des terrains à Longueuil ou sur la Rive-Sud de Montréal, ce n'était pas précisé Longueuil comme tel, mais sur la Rive-Sud, ils avaient acheté des terrains et ils ont dû les vendre parce qu'on leur a dit: Longueuil ou la Rive-Sud immédiate, ce n'est pas dans notre champ de vision pour le logement abordable.

M. Gladu (Claude): Pour moi, ils ont dû une mauvaise information. Je ne connais pas...

Mme Houda-Pepin: Ils ne sont pas tombé sur le bon guichet unique, là.

M. Gladu (Claude): Sûrement. Sûrement.

Mme Houda-Pepin: Très bien. Très bien.

Le Président (M. Vallières): Très bien.

Mme Houda-Pepin: Ça complétait?

Le Président (M. Vallières): Oui. Ça va vite, n'est-ce pas?

Mme Houda-Pepin: Le supplément au loyer, juste pour terminer là-dessus, ça représente quoi dans la ville de Longueuil, dans la grande ville de Longueuil?

M. Laberge (Jean-Benoît): Quoi? En termes d'unités?

Mme Houda-Pepin: Oui.

M. Laberge (Jean-Benoît): Quatre cent huit unités.

Mme Houda-Pepin: Quatre cent huit. Et en termes de subventions?

M. Laberge (Jean-Benoît): La subvention, j'y vais de mémoire dans les chiffres, c'est environ 278 $ par logement-mois, comparativement au volet HLM qui est de 234. Et les dernières unités que nous avons louées, liées à la crise du logement, dans le cadre du Programme de supplément au loyer, dit urgence, c'est une subvention de 308 $ par mois.

Mme Houda-Pepin: Et, en terminant, la Communauté métropolitaine de Montréal, dont la nouvelle ville de Longueuil fait partie, est-ce qu'elle vous aide au niveau de la solution de la crise de logement, le fait d'y participer, d'y contribuer financièrement, ou ça ne change pas grand-chose pour vous?

M. Gladu (Claude): En ce moment, c'est l'argent qu'on a mis, la nouvelle ville, qui nous revient automatiquement par la CMM.

Mme Houda-Pepin: Donc, c'est la même chose.

M. Gladu (Claude): La même chose. Pour le moment, c'est la même chose.

Mme Houda-Pepin: La structure, en tant que telle, n'a pas aidé. Très bien. Merci, M. le Président, merci, M. Gladu, madame et monsieur.

Le Président (M. Vallières): Merci. On aura certainement l'occasion de reparler du guichet unique qui est... C'est la première fois, je pense, qu'on l'entend...

Mme Doyer: Non, le HLM, le regroupement des HLM.

Le Président (M. Vallières): Les HLM nous en ont parlé déjà. Parce que des OMH, il n'y en a pas dans toutes les municipalités. Alors, ça ne peut pas être le point de chute, là. Il faudrait peut-être voir la MRC ou la municipalité locale. Mais, quoi qu'il est soit, il y a une idée à exploiter là sûrement. M. le député Saint-Maurice, en cinq minutes. Pardon, M. le député de Roberval avait demandé la parole avant vous.

M. Laprise: Ce ne sera pas bien long.

Le Président (M. Vallières): En cinq minutes aussi.

M. Laprise: J'ai bien apprécié votre document. Merci beaucoup, M. le Président. Je tiens à vous féliciter de votre document. Vous prenez ce problème-là comme un heureux problème, de recevoir chez vous, quand même, une population qui, du à votre activité économique, est de plus en plus importante.

Et, à la page 18 de votre mémoire, vous recommandez quelque chose qui me plaît énormément, à savoir: Vous êtes prêt à partager ce beau problème là, justement, avec les régions qui sont en développement et qui seraient en mesure d'accueillir des couples qui répondraient également à un besoin au niveau de la main-d'oeuvre de petites entreprises dans ces secteurs-là. Et vous recommandez même que, dans un programme d'incitation à l'établissement de ménages en région pour combler la pénurie de main-d'oeuvre dans différents secteurs économiques pour y combler les logements locatifs sociaux abordables vacants... Parce que vous savez que, dans certains secteurs, ils sont vacants. Alors, au moment où, vous autres, vous accueillez des gens plus que la normale, dans bien des régions, on perd de la population. Et cette ouverture d'esprit tout à votre honneur, je vous en félicite.

Je vous demanderais simplement une question suivante: En termes de programmes pour une municipalité, est-ce qu'il y a beaucoup de différences dans les programmes qu'on a actuellement avec ceux qu'on avait autrefois? Est-ce que ça nécessite un investissement plus important de la part de la municipalité? Parce que, à chaque fois qu'on bâtissait des HLM, la municipalité y participait également pour un 10 %. C'est sûr qu'on recevait des taxes en conséquence, mais il fallait y participer quand même. Assez souvent, des fois, on donnait le terrain ou on y participait.

M. Gladu (Claude): Oui. C'est officiel, avec les nouveaux programmes, il faut investir, puis je pense que la ville de Longueuil était prête à investir. Le 1,1 million, on ne l'avait pas auparavant. Depuis qu'il y a la fusion et la CMM, la nouvelle loi nous oblige. Mais, par contre, on est d'accord avec ce processus parce qu'on voit que, chez nous, il y a beaucoup de démunis et qu'on veut aller de l'avant pour aider avec les nouveaux programmes.

M. Laprise: Votre guichet unique aussi, c'est une bonne idée. Maintenant, je laisse à mon collègue.

Le Président (M. Vallières): M. le député de Saint-Maurice. Maintenant, il ne vous reste que deux minutes.

M. Pinard: Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le vice-président, Mme la conseillère, M. Laberge, dans la même veine que mon collègue député, et ex-maire... Tout à l'heure, je lisais votre mémoire et je constate qu'en 1996 vous aviez 57 070 locataires sur votre territoire et que ceux-ci, les revenus oscillaient entre 28 000 $, 27 999 et 28 578 $. Si je me fie à l'étude qui a été déposée tout à l'heure par trois professeurs de l'INRS, ces gens nous mentionnaient que ce qui a fait défaut dans le passé, ça a toujours été des politiques à courte vue au niveau de l'habitation. C'est-à-dire qu'on avait des projets. Lorsque la construction allait mal, on relançait un programme de construction AccèsLogis, Loginove, mettez-en, avec des congés d'intérêt sur le remboursement hypothécaire: si tu as deux, trois enfants, tu paies moins que... Bon. Et, en fin de compte, ça a relancé à court terme l'habitation au Québec. Et ces gens, ces trois spécialistes nous mentionnaient que, si on voulait vraiment avoir une incidence marquée sur le logement au Québec, il faudrait y aller avec une politique qui pourrait s'étendre sur cinq à 10 ans, disons ? eux autres préféraient 10 ans ? qui ferait en sorte de permettre à des jeunes foyers où la santé financière se situerait à environ 30 000 $ et plus d'y aller vers l'accessibilité à la propriété.

n(18 heures)n

Ma question est la suivante, c'est que, dans une situation où vous avez actuellement certaines problématiques: vous avez en banque une somme d'argent importante qui vous a été consentie suite à la fusion, vous avez également une politique d'investissement dans le logement, que vous nous avez parlé tout à l'heure, d'approximativement 1,3 million, est-ce que vous seriez prêts à avancer dans cette accessibilité à la propriété pour les jeunes ménages, qui ferait en sorte de soulager automatiquement la pression sur le logement et qui consacrerait un déblocage au niveau de la propriété, soit la copropriété ou soit la maison unifamiliale, sur votre territoire? Et quelle serait, à ce moment-là, l'aide que vous pourriez accorder? Est-ce que vous seriez prêts à aller, par exemple, sur une aide... sur un dégrèvement de taxes sur une période de cinq à 10 ans, en partie ou en totalité, sur un remboursement de la taxe de mutation, sur, enfin, sur d'autres avenues de ce genre qui pourraient accompagner la mesure gouvernementale?

M. Gladu (Claude): Bien, au départ, juste vous dire que les fusions, puis ce que vous nous avez accordé, les montants accordés pour la fusion, est minime. C'est des choses qu'on va vous revenir parce que, si vous pensez que les montants, je pense que c'est... Chez nous, on a eu à peu près 10 à 11 millions pour compléter la fusion puis ça nous en aurait pris peut-être 30, 40 millions. On va s'apercevoir, avec le nouveau budget qu'on est après faire, là, il va falloir revenir vous voir. Parce que c'est beau les fusions, mais, à un certain moment, ne pensez pas qu'on a de l'argent en banque avec le 11 millions qu'on a reçu, il en manque beaucoup plus que ça. Veux-tu continuer?

M. Laberge (Jean-Benoît): Oui. Pour les autres éléments, à savoir est-ce que la ville de Longueuil doit commencer un programme de dégrèvement d'impôts fonciers pour permettre la construction de logements dits abordables pour les jeunes ménages qui veulent avoir accès à la propriété, comme on vous a indiqué au début, on a eu un très court laps de temps pour préparer le mémoire et nous avons pu, dans ce court laps de temps, évaluer les impacts. Est-ce que la ville de Longueuil est prête, exemple, à mettre sur la table 1, 2, 3 millions sous forme de crédit de taxes? Il est trop tôt pour se prononcer actuellement, on n'a pas eu le temps voulu pour faire l'étude approfondie. Mais c'est sûr que toute forme d'aide n'est pas rejetée du revers de la main.

Le Président (M. Vallières): Merci. On pourrait, si vous consentez... une courte question à Mme la députée de La Pinière, qui demanderait, j'espère, aussi une courte réponse.

Une voix: Consentement, M. le Président.

Le Président (M. Vallières): Il y a consentement, on y va.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup. M. Gladu, il y a des problèmes de maisons lézardées qui se manifestent sur le territoire de Brossard, Saint-Hubert, je ne sais pas qu'est-ce qui se passe du Vieux-Longueuil, est-ce que, vous avez, au niveau de la...

M. Gladu (Claude): Excusez, les problèmes de?

Mme Houda-Pepin: Des maisons lézardées, les maisons lézardées.

M. Gladu (Claude): Oui, oui, très bien.

Mme Houda-Pepin: C'est ça. Alors, fissurées dans leur fondation. J'ai même organisé une assemblée d'information technique pour les citoyens. Il y avait près de 200 personnes dans cette assemblée. Je veux savoir si vous avez pris une décision, dans la ville de Longueuil, pour intervenir dans ce dossier et quelles sont les interventions que vous avez l'intention de faire.

M. Gladu (Claude): Bien, écoutez, on a eu cette discussion dernièrement à l'assemblée municipale, le dernier conseil, et le maire a dit qu'il se pencherait sur cette problématique. Mais c'est tout nouveau pour nous, comme, dans le Vieux-Longueuil, on n'en a pas. Je sais qu'à Brossard ils en ont, Saint-Hubert en ont. Et, dans les prochaines semaines, nous allons prendre une décision.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation, d'avoir été là. La commission suspend ses travaux à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 3)

 

(Reprise à 20 h 4)

Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il vous plaît! la commission de l'aménagement du territoire reprend ses travaux. Alors, nous débuterons ce soir avec le Front d'action populaire en réaménagement urbain, le FRAPRU ? je demanderais à ses représentants de bien vouloir prendre place ? dirigé par M. Saillant, un habitué à nos travaux. Alors, M. Saillant, bonjour.

Mme Houda-Pepin: Un très habitué.

Le Président (M. Vallières): Un très habitué à nos travaux. Alors, M. Saillant, je vous prierais d'identifier la personne qui vous accompagne puis de nous présenter votre mémoire, dans les 15 minutes.

Front d'action populaire
en réaménagement urbain (FRAPRU)

M. Saillant (François): La personne qui m'accompagne est Sonia Côté qui est membre du conseil d'administration du FRAPRU et qui est coordonnatrice du groupe Loge m'entraide à Saguenay. On s'excuse pour François Giguère, qui est le président du conseil d'administration, qui a été retenu à Châteauguay, mais il devait être là.

Alors, bonjour. Peut-être juste, au départ... Je pense que c'est important d'affirmer au début que le logement, avant d'être une industrie ou un commerce, c'est un droit, c'est un droit qui est un droit fondamental. Je rappellerais juste que le Québec a adhéré en 1976, sous René Lévesque, au Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels qui reconnaissait, entre autres, clairement ce qu'on appelle le droit à un logement suffisant. Et il y a un comité, le comité qui est chargé de la surveillance de ce droit-là aux Nations unies, qui a défini ce que ça pouvait vouloir dire, le droit à un logement suffisant. Et ce qu'il disait là-dedans, c'est qu'on ne devait pas considérer que le droit au logement, c'était uniquement le droit d'avoir un toit sur la tête, que ça dépassait ça et que ça couvrait un certain nombre... qu'il fallait aussi que ça englobe un certain nombre d'aspects, dont ce qu'on appelle la sécurité d'occupation, là ? le fait d'être protégé contre les évictions ? l'accès au logement sans discrimination, la capacité de paiement, l'habitabilité ? la qualité du logement, en d'autres mots ? et d'autres aspects aussi. Donc, le droit au logement, c'est quelque chose qui est assez global et qui ne se résume pas juste au fait que tu as un toit sur la tête ou tu n'en as pas.

On était déjà loin du plein respect de ce droit-là. Ce qu'on doit constater aujourd'hui, c'est qu'on s'en est éloignés encore plus avec la pénurie de logements locatifs qu'on connaît présentement dans quatre régions métropolitaines et dans 11 agglomérations urbaines. Peut-être juste vous citer deux chiffres. Il y a 80 % des locataires du Québec qui habitent dans une région qui est frappée à un niveau ou à un autre par la pénurie de logements locatifs. Et hier, au FRAPRU, on révélait en conférence de presse ? vous allez retrouver ça dans notre mémoire aussi ? qu'il manque 23 000 logements locatifs, qu'on estime qu'il manque 23 000 logements locatifs au Québec pour qu'on se sorte de la pénurie: 17 500 de ces logements-là dans la région métropolitaine de Montréal, 13 000 à Montréal même, 3 000 dans la région métropolitaine de Québec, 1 000 à Gatineau, 250 à Sherbrooke, etc.

Tout ça, ça a des conséquences. D'abord, ce qui est arrivé ? c'est le phénomène le plus visible de ça ? c'est l'aggravation du problème de l'itinérance. On se retrouve maintenant, au Québec, avec des familles qui sont sans logis. Et pas juste le 1er juillet, là, parce que souvent évidemment la tension médiatique est retenue beaucoup sur les 1er juillet, mais ça existe à l'année longue. Il y a aujourd'hui, au moment où on se parle, des gens qui n'ont pas un toit à eux autres, et des gens en grand nombre, là.

Il y a des chiffres dans notre mémoire, là ? je ne les répéterai pas ? sur ce qu'a été la situation au 1er juillet, qui a été extrêmement pénible cette année encore. Juste pour vous dire qu'à l'heure actuelle, dans les chiffres officiels ? et je parle bien des chiffres officiels ? de l'Office municipal d'habitation de Montréal, on parle d'environ 250 ménages qui sont toujours sans logis au moment où on se parle. Et ça, c'est des chiffres qui datent parce qu'on n'enregistre plus, on ne prend plus les noms des gens depuis déjà un bout de temps. Mais ce qu'on me disait à l'Office municipal d'habitation ce matin, c'est qu'ils ont plusieurs dizaines d'appels par jour de gens qui sont en recherche de logement, qui n'ont pas un toit à eux autres.

J'en profite ? ce n'est pas le point essentiel de notre présentation ? pour insister, qu'il y ait un programme d'urgence qui soit créé au Québec. Ça n'a pas de bon sens qu'on laisse ces gens-là sans aide, qu'on les laisse abandonnés à eux-mêmes et abandonnés à des groupes communautaires, parce que souvent on les réfère à des groupes communautaires qui n'ont pas les moyens de s'occuper de ces gens-là. On n'a pas de logements, nous autres, on n'a même pas de places d'hébergement pour des familles. Donc, ces gens-là sont carrément abandonnés à eux-mêmes à l'heure actuelle, et ces gens-là ne sont pas moins importants que l'étaient ceux du 1er juillet, leur cas n'est pas moins dramatique, et je dirais même: Jusqu'à un certain point, à cause des raisons pour lesquelles les gens perdent leur logement à cette période-ci de l'année, leur cas peut même être plus dramatique.

Bon. Ça, c'est évidemment le phénomène le plus visible et avec les conséquences que ça a, notamment en termes d'hébergement, de places d'hébergement. À l'heure actuelle, les centres d'hébergement pour sans-abri, les centres d'accueil pour les nouveaux arrivants, les centres d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale, même, débordent. Et, dans le cas des sans-abri, que tu débordes à partir du mois d'août, c'est plutôt rare. Habituellement, tu débordes dans le coin de Noël mais pas avant ça.

Il y a eu des conséquences aussi, il y a encore des conséquences de cette situation de pénurie là en termes de hausses de loyer; on vous a dit souvent les chiffres, je pense, au cours des derniers jours, je ne vous les répéterai pas, mais des hausses importantes dans les régions touchées par la pénurie. Il y a eu augmentation du nombre d'évictions pour non-paiement de loyer. Le dernier rapport de la Régie du logement nous parle de 37 000 cas qui ont été présentés à la Régie du logement pour demander ce qu'on appelle recouvrement de loyer et résiliation de bail, donc éviction du locataire. Il y a aggravation importante du phénomène de la discrimination au moment de la recherche d'un logement, discrimination qui s'exerce à l'endroit des gens qui sont sur l'aide sociale, des familles avec enfants ? c'est devenu, semble-t-il, un tort d'avoir des enfants dans notre société ? des nouveaux arrivants, évidemment. Ça, c'est la réalité pour 80 % des locataires dont la pénurie aggrave la situation. Pour les autres, ça ne veut pas dire que la situation est nécessairement drôle et ça ne veut pas dire que le droit au logement est pleinement respecté. Et, là-dessus, je vais passer la parole à Sonia Côté qui, comme je vous le disais, vient de la région du Saguenay.

n(20 h 10)n

Le Président (M. Vallières): Très bien. Mme Côté.

Mme Côté (Sonia): Oui. Alors, bonsoir. Loge m'entraide est un organisme communautaire sans but lucratif et qui compte actuellement 807 membres de notre organisme. Alors, c'est en leur nom également que je suis là ce soir. Alors, également, Loge m'entraide est membre actif du FRAPRU et rallie sa voix à lui afin de vous interpeller sur la crise du logement qui sévit actuellement au Québec mais aussi au Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Alors, Loge m'entraide, pour vous situer dans le contexte, est venu en aide depuis quatre ans et demi à 3 576 personnes qui sont venues demander de l'aide. Ces personnes que nous défendons ardemment vivent des difficultés de logement de toutes sortes mais vivent aussi une problématique commune qui les touche, soit la crise de logements sociaux. Alors, bien que notre région ne vit pas de pénurie de logements locatifs, comme nous venons de l'entendre pour Montréal, également Gatineau, Québec, il n'en reste pas moins que le Saguenay?Lac-Saint-Jean vit aussi sa crise comme partout au Québec, celle du manque de logements sociaux, comme je vous l'ai dit tout à l'heure.

Alors, Loge m'entraide est carrément touché par la condition économique des personnes locataires à faibles revenus de notre région, et nous constatons que des personnes, des enfants, encore aujourd'hui, en 2002, ne mangent pas à leur faim et sont aux prises avec des conditions de logement inacceptables, très souvent insalubres et en très mauvais état. Ces personnes vivent isolées et sont très désemparées face à la situation actuellement.

Je vais vous tracer un portrait rapide de la situation au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Actuellement, 900 personnes attendent un HLM au Saguenay. Il y a des personnes qui attendent depuis, quatre, cinq, huit, 10 ans. 9 300 personnes locataires paient plus de 50 % de leurs revenus pour se loger et ce nombre de ménages a augmenté de 52 % en l'espace de cinq ans, soit de 1991 à 1996. Aucun nouveau HLM n'a été construit depuis 1994 et seulement 76 unités de logements locatifs ont vu le jour au Saguenay?Lac-Saint-Jean depuis 1997. Alors, il est clair que, pour nous, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, les personnes locataires ne manquent pas de logements locatifs, puisque notre taux d'inoccupation est en moyenne de 4,9 %, contrairement à Montréal qui se situe à 0,6 %. Mais les locataires à faibles revenus sont carrément étouffés par la pauvreté qui les accable jour après jour. Pour Loge m'entraide, toute personne devrait avoir les moyens financiers nécessaires pour subvenir à ses besoins les plus essentiels: se nourrir, se loger et se vêtir adéquatement, et sans recourir, justement, à la charité publique. Le logement social est un moyen incontestable pour lutter contre la pauvreté, et cela redonne la dignité et l'espoir à ces personnes.

En ce qui a trait à la question du logement abordable, cette forme de logement ne vient pas vaincre la pauvreté des locataires à faibles revenus, bien au contraire. Nous savons pertinemment que ces logements sont destinés tout d'abord à ces villes où le taux d'inoccupation est en bas de 3 %, ce qui n'est pas le cas dans notre région. Malgré tout, nous ne pouvons pas être contre ce type de logement, mais ceux-ci ne viennent pas aider les personnes locataires à faibles revenus. Ces personnes encore vont consacrer 50, 60, 70 % de leurs revenus pour se loger.

Alors, en terminant, solidaires avec les 275 000 ménages du Québec qui consacrent 50 % de leurs revenus au loyer, nous revendiquons le développement d'un nombre suffisant de logements sociaux, soit la création de 8 000 nouveaux logements sociaux par année au Québec, et ce chiffre donnerait au Saguenay? Lac-Saint-Jean tout près de 250 unités de logement sous forme de HLM, de coopératives d'habitation et de logements sans but lucratif.

Je voudrais terminer juste par un témoignage qui souvent nous est adressé à Loge m'entraide. Vous savez, le plus beau témoignage est de voir une personne obtenir son logement social, en venant nous rencontrer à nos bureaux, avec une larme à l'oeil et une joie inexprimable, qui, après sept ans d'attente, grâce à l'obtention de son HLM, enfin elle pourra manger trois repas par jour et nourrir ses enfants adéquatement.

M. Saillant (François): Alors, pour continuer sur la question des solutions qu'on pense qui doivent être apportées à cette question-là, évidemment, Sonia a nommé celle qui pour nous autres est principale, mais peut-être que c'est important de voir que, pour nous autres, si le logement social doit être au centre des actions en habitation, ça prend une politique globale d'habitation. Je pense qu'on n'est pas les premiers à dire ça au cours des derniers jours, et, on le répète, ça prend une politique globale et intégrée d'habitation. Moi, ça fait 23 ans que je suis dans le domaine. Quand je suis arrivé, ça faisait au moins deux, trois ans qu'il se parlait d'une politique d'habitation, j'ai vu des documents qui dataient de 1977 qui présentaient les grandes lignes directrices d'une politique d'habitation. Je ne l'ai pas encore vue, la politique d'habitation en question, et, pour moi, c'est une nécessité. C'est une nécessité pour coordonner non pas juste l'action d'un organisme qui est la Société d'habitation du Québec ou même la Société d'habitation du Québec plus la Régie du logement, mais l'ensemble des ministères gouvernementaux. Ça, c'est essentiel, d'avoir une politique d'habitation à ce niveau-là, qui va permettre d'intervenir à différents niveaux: le contrôle du marché privé, les conditions de logement, la qualité des logements, la question de l'accessibilité universelle au logement, bref, un paquet d'enjeux.

Évidemment, au centre de cette politique-là, pour nous autres, il doit y avoir le logement social. Et là, je tiens à bien préciser qu'est-ce qu'on veut dire par «logement social», parce que le mot est galvaudé. Pour nous autres, un logement social, c'est un logement qui est sans but lucratif, sur lequel il n'y a aucune notion de profit, c'est un logement qui appartient à la collectivité, sous forme de logement soit public ou sous forme communautaire mais qui appartient à la collectivité, où le loyer est plus bas que celui du marché et où les locataires ont leur mot à dire. Pour nous autres, c'est ça, un logement social.

La demande qu'on porte depuis plusieurs années, qui ne vous surprendra sûrement pas, mais ce qui va peut-être vous surprendre, c'est qu'on s'est posé des questions dessus tout récemment, jeudi passé, en assemblée générale spéciale du FRAPRU, c'est la demande de 8 000 logements sociaux par année dont la moitié en HLM. On s'est dit: Est-ce que c'est encore adapté à la situation actuelle, compte tenu de ce qu'on vous disait tout à l'heure, le 23 000 logements locatifs qui manquent et le fait qu'il y a d'autres problèmes de logement qui continuent à exister? Et notre réponse, ça a été oui. Pour nous autres, 8 000 logements sociaux, si on le faisait pour de vrai ? évidemment, si on veut en faire plus, on n'a aucune objection ? c'est une réponse à la pénurie de logements. On a évalué au FRAPRU que, sur une période de deux à cinq ans, dépendant des régions, on pourrait, en faisant 8 000 logements sociaux un peu partout à travers le Québec, mais évidemment avec une concentration là où il y a pénurie, passer à travers la pénurie et on pourrait donc construire suffisamment de logements, et on ferait ça en assurant la pleine accessibilité financière de ces logements-là aux gens à faibles revenus, qui sont les victimes de la crise. Les principales victimes de la crise, c'est ces gens-là. Les gens qui sont allés coucher à la polyvalente Saint-Henri cet été, ce n'étaient pas des gens qui étaient à bons revenus; les gens qui ont appelé dans des centres d'aide ? il y a des chiffres là-dessus ? c'est des gens à faibles revenus, c'est eux autres qui sont les victimes principales de la crise.

Donc, pour nous autres, cette formule-là permettrait de passer à travers la pénurie mieux que d'autres formules qui ont été présentées dans les derniers jours. L'aide à la personne, quand on parle de supplément au loyer ou d'allocation-logement, ça ne crée pas un logement. Ça aide les gens à habiter des logements qui sont déjà construits, mais ça ne crée pas un seul logement. Des formules comme des mesures fiscales pour encourager la construction de logements locatifs ou encore des mesures pour encourager l'accès à la propriété, ça n'assure pas l'accessibilité financière aux gens à plus faibles revenus qui, comme je vous le disais, sont les principales victimes de la crise. La déréglementation du marché du logement et particulièrement l'affaiblissement du contrôle des loyers, dont on a parlé, ça ne garantit pas la construction de nouveaux logements, mais il y a une chose que ça garantit, c'est l'augmentation des loyers et l'appauvrissement encore plus grand des locataires à faibles revenus. Donc, pour nous autres, aucune de ces solutions-là ne peut répondre adéquatement à la crise.

n(20 h 20)n

Le logement social peut le faire et il permet aussi de s'attaquer de manière permanente, de manière durable, à une autre crise qui est celle dont Sonia parlait, qui est celle de l'incapacité de payer des ménages locataires. Là, il y a tout près d'un ménage locataire sur quatre, au Québec, qui paie plus que la moitié de ses revenus pour se loger. Il y a 42 % des locataires qui paient plus que 30 %, ce qui est supposé être la norme. Ça permettrait de s'attaquer à ça, si on investit dans 8 000 logements sociaux sur une base qui est récurrente. Ça veut dire 40 000 logements sur une période de cinq ans; ça veut dire 80 000 sur une période de 10 ans; ça veut dire qu'on reprend une vitesse de croisière dans le logement social et que le pourcentage de logement social, sur l'ensemble du parc de logements locatifs, continue à augmenter. Et, pour nous autres, ça, c'est une solution qui est durable aux problèmes.

Finalement, je voudrais juste terminer en vous disant qu'on est bien heureux de venir aujourd'hui vous présenter nos points de vue mais qu'on a bien hâte de savoir ce que les partis politiques, eux autres, pensent. On s'exprime souvent, nous autres, mais les partis politiques ne nous disent pas beaucoup, eux autres, ce qu'ils pensent. Et on pense particulièrement ? parce que, évidemment, le gouvernement, on sait un peu plus, il y a des politiques ? mais on pense particulièrement au Parti libéral et à l'Action démocratique du Québec dont on a bien hâte de savoir ce qu'ils pensent d'enjeux comme le contrôle des loyers, le logement social, le maintien des programmes, la demande de logements sociaux, etc. Et, là-dessus, on a envoyé un questionnaire, hier même, aux chefs des trois partis, en leur demandant d'y répondre avant le 18 novembre. On l'a fait sur d'autres dossiers. Je pense qu'on est capables de le faire sur un problème aussi important que la crise du logement. Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Saillant et Mme Côté. Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, merci, M. Saillant, merci, madame, de votre présentation. Moi, j'aimerais que vous me précisiez quelque chose: est-ce que le privé... Parce qu'on a reçu beaucoup, je dirais, de gens qui sont venus nous parler, qui étaient un petit peu à l'opposé, avec des opinions assez bien campées à venir jusqu'à maintenant. Et le privé, à un moment donné, les gens du secteur privé venaient nous dire que, dans le fond, c'est le contexte avec, justement, une réglementation, que ce soit par rapport au prix du loyer ou que ce soit par rapport au domaine de la construction qui est trop réglementé, etc., qui ne leur permet pas, dans le fond, de livrer et que, si n'eût été de ça, ils seraient capables de nous livrer ça pas mal plus vite que ce qu'on est en train de faire, nous, avec les différents partenaires qui sont dans le décor.

Alors, je veux que vous réagissiez là-dessus: Est-ce que le privé pourrait faire du social? AccèsLogis, logement abordable, sur 15... Parce que, des fois, c'est étalé sur 15, 35 ans au niveau de l'amortissement. On nous dit que le privé est capable de livrer plus vite. Une pénurie, on en a déjà connue, hein, en 1974, en 1985. Puis là on en a une autre. Et les mesures fiscales et d'autres mesures qui ont déjà été utilisées dans le temps, des programmes d'accession à la propriété, ont fait en sorte, des fois, de résorber la crise au niveau de la pénurie, mais ça a aussi eu des effets pervers d'avoir des surplus. Par exemple, ce qui nous a été proposé par rapport à la classe 31, 32, qui était, dans le fond, un beau gros bonbon fiscal ? je vais le dire comme ça ? bien, c'est sûr que ça a créé... ça a enlevé une pénurie, mais ça a fait en sorte d'avoir un surplus de 5 % dans un délai assez court.

Comment ça se fait, M. Saillant? Comment ça se fait que le délai... Est-ce que vous trouvez que le délai est normal, le délai de livraison de ce qu'on demande? Dans le fond, on a l'argent. Parce que les gens sont venus nous dire: Il y en a de l'argent, il y en a. Mais est-ce que c'est... Est-ce qu'il va falloir se demander si ce n'est pas normal, à quelque part, d'avoir des délais d'un an, un an et demi, peut-être deux ans pour livrer un certain nombre de logements si on veut de la qualité puis que ce soient les gens qui évaluent bien les besoins dans les milieux qui sont concernés? Donc, il y a assez d'argent.

Est-ce que le social est capable d'y répondre? Le privé nous dit: Nous, on serait capables, dépendamment d'un certain nombre de conditions. Et j'ai reçu tantôt, à mon bureau ? probablement que mes collègues aussi l'ont reçu ? c'était quoi donc? C'était intéressant. C'est parce qu'on a posé des questions, puis là, ça nous répondait à ça: Quelles sont les contraintes qui empêchent de livrer? Puis on les a eues là. Hein, on les a eues. Vous avez dû regarder ça, je l'ai regardé avec grande attention. Puis on nous a donné un grand nombre de raisons qui font qu'on n'est pas capables de livrer. Mais, vous, qu'est-ce que vous pensez de ça? Pour que ça aille plus vite là.

Ça fait que, dans le fond... Dans le fond, les gens cherchent tous le même objectif: c'est de répondre aux besoins de la population. Et vous avez raison qu'on a le droit d'avoir, au Québec, une population qui aspire à être bien logée. Écoutez là, avec le climat qu'on a, quatre saisons différentes bien tranchées, je pense qu'on ne s'ostinera pas longtemps là-dessus.

Et j'aimerais que vous vous prononciez sur le... Je ne sais pas si vous avez eu le plaisir de parcourir le document de M. Pierre Desrochers, le mémoire sur le logement social, une solution durable à la crise du logement, de l'Institut économique de Montréal. Eux y vont d'une déréglementation tous azimuts.

Le Président (M. Vallières): M. Saillant.

M. Saillant (François): Ça fait beaucoup de questions dans une, mais je vais essayer de couvrir.

Mme Doyer: ...réponses.

M. Saillant (François): La première chose, c'est cette question-là justement: Est-ce que c'est les contrôles qui sont le problème au Québec puis est-ce que c'est ça qui entrave? Moi, j'ai un problème: ces contrôles-là, ils ne sont pas nés hier. Les contrôles... la loi actuelle de la Régie du logement, c'est en 1981 si ma mémoire est bonne ? en tout cas, c'est au tout début des années quatre-vingt ? et, depuis ce temps-là, il y a eu des périodes où on a eu des taux de logements inoccupés de 7, 8, 9 % dans les régions. C'était le même contrôle des loyers qui était là. Il y a eu des périodes où il se construisait 26 000 logements locatifs en 1987, 26 000 logements locatifs en un an. C'étaient les mêmes contrôles qui étaient là.

Pour moi, ça, c'est vraiment un discours d'apprenti sorcier, et je pense qu'il n'y a aucune crédibilité à accorder à des gens comme l'Institut économique de Montréal. Regardons les positions qu'ils ont pris sur d'autres dossiers; moi, je n'accorde aucune espèce de crédibilité à cet organisme-là.

Mme Doyer: Vous cherchiez la position de l'ADQ, là. C'est presque la même, en passant.

M. Saillant (François): Bien, on a bien hâte qu'ils nous la disent. J'ai effectivement entendu M. Dumont lors de la conférence de presse qu'il a donnée sur ce sujet-là, et je dois vous avouer que ça m'inquiétait profondément, comme si on ouvrait des grosses, grosses portes. Et c'est sûr que c'est une chose qu'on va surveiller de près.

Par ailleurs, sur la question des mesures fiscales, là où on a des questions, nous autres, c'est que ? on écoute, on regarde le dossier qui a été préparé par la Communauté métropolitaine de Montréal ? c'est sûr que c'est moins loufoque que l'étude de M. Desrochers mais, en même temps, on a des questions qui ne sont pas répondues là-dedans: Est-ce que, oui ou non, ces mesures fiscales là permettraient la construction d'un plus grand nombre de logements locatifs? On dit s'appuyer sur une étude. Là-dedans, on s'appuie sur une étude de comptables.

On essaie, au FRAPRU, avec un groupe de chercheurs qui travaille avec nous autres, qui s'appelle IRIS, de mettre la main sur cette étude d'impact là, et on refuse de la rendre publique. Si c'est si... Si ça parle tant que ça, cette étude-là, si ça prouve tant que ça que ça permettrait la construction de logements locatifs, comment ça se fait qu'on n'est pas capables de rendre cette étude-là publique pour qu'on puisse faire une expertise, une contre-expertise, pour savoir si c'est vrai, cette étude d'impact là?

Ce qu'on sait par contre, à coup sûr, c'est que ça ne permettrait pas la construction de logements plus abordables. Et ça, on le dit très franchement. L'Association provinciale des constructeurs d'habitations l'avoue: si on met un contrôle de loyer avec ça, ça ne marche plus. Il ne faut pas qu'il y ait de contrôle des loyers pour que ça fonctionne. Et ce qu'on nous explique, c'est la fameuse théorie du percolateur, la théorie de percolation, c'est ça qui, par effet indirect, permettrait de construire du logement, de produire du logement pour les gens à faibles revenus. C'est une théorie qui n'est pas prouvée dans la pratique.

Et, nous autres, ce qu'on pense au FRAPRU, c'est que si tu veux, si tu penses que le logement qu'il faut créer, c'est du logement abordable, que c'est là qu'est le besoin, que c'est les gens à plus faibles revenus qui ont besoin d'aide au logement, pourquoi tu donnerais l'argent à quelqu'un à plus hauts revenus? Si tu veux aider Sarah, pour reprendre l'exemple qu'on donnait hier, tu donnes l'argent pour se loger à Sarah, pas à Pierre. Pierre, il n'a pas de problème pour se loger. Donc, de ce côté-là, pour nous autres, ça ne fonctionne pas.

Sur la question des délais. Le logement social, je dois vous dire: S'il y a du monde que ça fatigue dans la vie, c'est bien nous autres. On voit les gens qui ont des problèmes de logement, on voit les gens qui n'arrivent pas à se trouver de logement puis on regarde comment ça prend de temps à l'heure actuelle. C'est sûr qu'il y a eu des problèmes d'adaptation des programmes. Malheureusement, on aurait pu les prévenir; on ne l'a pas fait. On avait prévenu l'année passée, quand on nous a présenté ces programmes-là, qu'il y a des choses qui ne marcheraient pas bien là-dedans, qu'on sous-estimait les coûts réels, entre autres de réalisation de logements dans les centres comme Montréal, comme Longueuil ou Laval, pour parler juste de ces exemples-là. On le savait. Malheureusement, on ne nous a pas écoutés à l'époque. Maintenant, on essaie de faire du rattrapage. Là-dessus, on a eu quand même une écoute attentive de la part du ministre Boisclair quand on l'a rencontré et qu'il s'est dit prêt à apporter des changements. On les espère les plus rapides possible.

Par ailleurs, il y a certains problèmes aussi, pour parler du cas de Montréal, certains problèmes au niveau de la ville elle-même. Il faut voir qu'on est dans une nouvelle ville. Il y a eu création entre autres des arrondissements. Avant, tu présentais un projet de logement social et il y a juste une place où c'était étudié: c'était étudié au niveau de la ville. Maintenant, c'est étudié au niveau de la ville puis c'est étudié au niveau des arrondissements, et peut-être pour une question de culture, mais ça complique singulièrement la tâche et ça prend du temps supplémentaire, en plus qu'il faut voir que, quand on fait du logement ? et ça, le privé aussi a ces contraintes-là ? tu interviens pour faire du logement à Montréal, tu travailles sur des terrains qui sont souvent pollués, et c'est des problèmes qui sont réels. Mais, pour moi, il y a moyen. C'est sûr que tu ne fais pas un logement en claquant des doigts, mais il y a moyen, puis ça, je pense qu'il faut que tout le monde, tout le monde, tout le monde fasse son possible pour qu'on raccourcisse ces délais-là. Et je pense qu'à ce moment-là le logement social va prouver qu'il est capable de répondre aux besoins de façon très adéquate. Je ne sais pas si ça fait le tour de vos questions.

Mme Doyer: Oui. Je penserais que oui. Merci, M. Saillant.

n(20 h 30)n

Le Président (M. Vallières): Oui. Alors, M. Saillant, peut-être une courte question avant de passer la parole à Mme la députée de La Pinière. Dans votre document, à la page 20, vous parlez d'accès à la propriété. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus, puisque on a relevé, chez certains autres groupes qui sont venus nous voir, des points de vue là-dessus. C'est intéressant de vous entendre parce que ce que vous me dites c'est que vous ne vous opposez pas à l'accès à la propriété individuelle, mais vous ne semblez pas voir l'État s'immiscer. Ça semble être un phénomène naturel d'être accessible aux propriétés.

M. Saillant (François): À l'heure actuelle surtout, je ne pense pas qu'il y ait un gros problème d'inaccession à la propriété, là. Il y a eu, au cours des deux dernières années, acquisitions... par exemple: des gens, qui ont acquis un première maison, un nombre record. Je pense que c'est la Société canadienne d'hypothèques et de logement, dans une enquête sur la situation à Montréal, qui disait ça. Donc, il y a, à l'heure actuelle, accès à la propriété de façon importante, là. Tout ce qu'on pourrait faire, c'est d'accélérer les choses ou de diriger vers un certain marché. Pour nous autres, il y a là une question de priorité de la part du gouvernement: ou tu mets l'argent pour loger les gens qui sont les plus mal pris, ou ceux qui ne sont pas parfaits, qui ont encore des problèmes, qui aimeraient ça améliorer le sort, mais qu'ils ne sont quand même pas dans une situation si urgente. Donc, il y a une question de priorité d'abord.

Il y a une question de façon de le faire aussi. Moi, j'ai assez mal réagi en lisant le document qui a été présenté pour la commission quand on proposait, entre autres, qu'on passe par la conversion de logements locatifs pour faciliter l'accès à la propriété, à un condo. Regardons, à l'heure actuelle, on est dans une période où le taux de logements inoccupés dans plusieurs régions est en bas de 3 %. Il me semble que ce n'est surtout pas le temps de se mettre à perdre des logements locatifs. Même si c'est pour permettre à des locataires d'accéder à la propriété, ce n'est pas le temps de perdre des logements locatifs. Je pense qu'il faut préserver les logements locatifs qu'on a. Donc, ça ne me semble pas très souhaitable.

Par ailleurs, au-delà même de tout ça, il y a quelque chose qu'on parle dans notre étude que... ? je pense qu'on est les seuls à avoir amené cet élément-là. Ça nous est beaucoup venu d'une étude qui a été publiée par un chercher d'Ottawa qui s'appelle Steve Pomeroy, ce qu'il appelle, lui, la résidualisation des ménages locataires, le fait que les ménages locataires... il s'est produit un phénomène d'écrémage chez les locataires où les locataires à plus hauts revenus ont quitté le logement locatif pour accéder à la propriété. Et, au cours des dernières années, on assiste à une accélération de ça, et c'est sûr que, si on avait un programme d'accès à la propriété généreux, on accélérerait encore plus ça. L'effet que ça a, c'est que les gens qui restent locataires sont des gens qui ne sont pas rentables pour le marché.

Et est-ce qu'on pense que le marché va être bien intéressé à s'occuper de ces gens-là, si on écrème encore plus, et si vraiment les gens qui sont là, c'est des gens qui n'arrivent jamais à se loger par le privé? Donc, pour nous autres, il y a là un effet qui peut être un peu pervers de l'accès à la propriété.

Dernière chose, c'est, je pense, qu'il ne faut pas voir l'accès à la propriété comme une panacée universelle. Il y a des gens qui peuvent accéder à la propriété parmi eux, et je n'ai absolument rien contre ça. Il y a des gens qui n'y accéderont jamais parce qu'ils sont trop pauvres et il y a des gens aussi qui peuvent accéder à la propriété, mais c'est fragile, leur situation, et ça ne prend pas grand-chose, des fois, pour qu'ils se retrouvent dans une situation où ils risquent de perdre le peu qu'ils ont acquis difficilement, là. Et il ne faudra pas mettre des gens dans cette situation-là non plus. Je pense qu'il y a bien des gens, dans les ACEF, entre autres, qui pourraient témoigner de cas de gens qui se sont retrouvés dans cette situation-là et je peux vous dire que, parmi les gens qui nous ont appelés cet été parce qu'ils se retrouveraient sans logis, il y avait des gens dont c'était le cas, des gens qui avaient perdu des maisons, là.

Le Président (M. Vallières): Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. Saillant, Mme Côté, bienvenue à la commission. Votre mémoire est fidèle à vos positions antérieures; donc, il n'y a pas de surprise. Je voulais vous rassurer d'entrée de jeu, M. Saillant, concernant la position du Parti libéral par rapport au dossier de l'habitation. Je crois que vous nous avez vus aller dans ce dossier-là. Vous savez à quel point ce dossier nous préoccupe, et on lui a consacré beaucoup de temps, beaucoup d'énergie, beaucoup d'interventions aussi. On a utilisé, comme opposition officielle, tous les forums qui sont donnés à l'Assemblée nationale pour inscrire le logement social et abordable à l'agenda de nos débats. Alors, c'est déjà une indication qui témoigne de l'importance qu'on accorde au sujet.

Quant à notre position par rapport au dossier sur le plan politique, c'est évident que, sachant que cette commission se tenait, par respect aussi pour vous et pour tous les autres groupes qu'on devait entendre et qu'on va entendre ? demain, on va compléter nos travaux ? il était plus judicieux, à notre avis, d'attendre d'abord les commentaires et les suggestions que nous allons recevoir de tout le monde pour avancer notre réflexion. C'est une question tout simplement de délai. Mais, rassurez-vous, nous y travaillons et la politique de l'habitation, comme les autres volets de la politique sectorielle, sur lesquels d'ailleurs on ne s'est pas encore prononcé, sont des choses à venir.

Et, vous avez dit, M. Saillant, que, le gouvernement, vous savez à quoi vous attendre. Est-ce que le gouvernement a une politique d'habitation? Parce que vous la réclamez depuis longtemps. À moins que vous ayez des informations que, nous, on n'a pas, on attends toujours aussi la politique d'habitation du côté du gouvernement. Donc, de ce côté-là, je pense que les choses se font attendre.

Pour ce qui est de l'ADQ, moi aussi, je déplore, comme vous, le manque d'intérêt que l'ADQ a manifesté par rapport à ce dossier-là. Je ne me rappelle pas, sauf exception, une fois, que le chef de l'ADQ se soit levé pour poser une question sur ce dossier. Et lorsque nous avons eu la consultation sur le projet de loi, le fameux projet de loi où vous avez vous-même participé, je me rappelle qu'il est venu pendant 15 minutes, prendre la parole pendant cinq minutes dans trois journées de consultation. Et, cette fois-ci, nous somme en commission parlementaire; ça dure quatre jours, et vous lirez les galées, vous êtes un familier, vous ne verrez pas, vous n'entendrez pas la voix de l'ADQ. Il semblerait peut-être que ce n'est pas si important que ça pour eux autres.

Mais, quoi qu'il en soit, restons dans le débat, je vous remercie pour votre mémoire. Vous avez annoncé aujourd'hui ? du moins, via la presse et devant nous aujourd'hui ? qu'il manque 23 000 unités de logement pour combler les besoins dans le contexte de la crise que nous connaissons, laquelle crise a sévi de façon aiguë en 2001, en 2002 et elle est appréhendée également pour 2003. Sur quelles bases est-ce que vous avez compilé ces données? Et, lorsqu'on les regarde, les 23 000 unités de logement manquantes, est-ce que ça comprend tous les besoins de toutes les clientèles, ou vous référez à des unités construites? Est-ce que vous référez à la pierre ou ça inclut aussi l'aide à la personne?

M. Saillant (François): Le 23 000 logements, c'est le nombre de logements qui manquent pour que le taux de logement passe à 3 % dans l'ensemble des régions métropolitaines et agglomérations urbaines qui sont touchées par une pénurie. Donc, c'est tout ça, là. C'est uniquement ça; ça ne couvre évidemment pas d'autres types de besoins. Mais, le 23 000 logements, la façon de le compiler, ça a tout simplement été de partir de l'enquête sur le logement locatif de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et de l'appliquer à l'ensemble du parc de logement locatif. On sait que l'enquête de la SCHL ne tient pas compte, entre autres, des duplex et des triplex où il y a propriétaire occupant. Nous autres, ce qu'on a fait, c'est de l'appliquer à l'ensemble du parc, donc sur le total de logements locatifs.

Bon. Vous nous dites: Bon, là, ce n'est pas très fiable, comme chiffre. Je peux vous dire: Effectivement, ça n'arrive pas au chiffre exact de combien exactement de logements qui a le besoin. Mais, pour nous autres, si ça a un effet, c'est plus de sous-estimer le besoin que de le surestimer. Je réfère là-dessus au document qui est paru la semaine dernière, une étude, entre autres, qui a été faite pour le compte de la Société d'habitation du Québec qui dit que, dans les plus petits immeubles, c'est là où les pertes pour logements inoccupés sont les moins grandes, donc, on peut penser, où le taux de logements inoccupés est le plus bas.

Ce qui fait que, pour nous autres, c'est un chiffre qui est conservateur. Et d'ailleurs la méthodologie utilisée est un peu la même que la Communauté métropolitaine de Montréal a appliquée à Montréal même que, nous autres, on a appliquée à l'ensemble des régions touchées par la pénurie, là.

Mme Houda-Pepin: Et donc, les coûts de base... Vous dites qu'au total ça va coûter 400 millions de dollars par année pour répondre à tous ces besoins-là. Mais, le coût de base du logement, vous l'avez calculé à combien?

M. Saillant (François): Par logement?

Mme Houda-Pepin: Bien...

M. Saillant (François): Ce qu'on a calculé grosso... Bien, comme je vous le dis... Comme on le dit là: C'est une évaluation grossière de la situation. On a essayé de ne pas trop sous-estimer les coûts. Donc, on a évalué quelque chose en tenant compte de la réalité de 85 à 95 000 $ par logement, ce qui est à peu près le coût maximal selon les régions, en tenant compte du fait qu'il devait y avoir des suppléments au loyer par contre, et que, dans le 400 millions, la première année, il y avait investissement de suppléments au loyer.

Et on ajoutait dans une petite note là ? ce n'était pas une clause cachée dans un contrat ? que le coût du supplément au loyer, lui, évidemment il est récurrent parce qu'on souhaite que, quand tu donnes de l'aide, du supplément au loyer, que ça soit permanent. Et, là-dessus, je rappelle juste que l'engagement du Parti québécois à l'effet de rallonger le supplément au loyer dans AccèsLogis n'est pas encore tenu, là.

n(20 h 40)n

Mme Houda-Pepin: Oui. Sur ce point-là de l'aide permanente, nous avons entendu aujourd'hui les représentants de l'INRS-Urbanisation qui sont venus nous dire que le phénomène de la pauvreté est un phénomène qui est très complexe et que, finalement, les pauvres ne sont pas toujours pauvres longtemps, et qu'il y a un phénomène, là, de balancier. Il y a des gens qui n'ont jamais été pauvres dans leur vie et ils tombent pauvres, perte d'emploi, etc., et d'autres, finalement, ils l'ont été et ils vont le rester peut-être pendant longtemps. Donc, c'est un phénomène qui est très complexe. Si on dit que le supplément de loyer doit être là de façon permanente, c'est comme si on condamne la personne qu'on aide à rester dans la pauvreté.

M. Saillant (François): C'est vrai, je ne nierai sûrement pas ça, là, ce que l'INRS vous a dit, c'est un phénomène qui est vrai. Mais ce qu'il faut ajouter, par contre, c'est qu'il y a toujours des pauvres, et que si ce n'est pas les personnes mêmes qui ont eu besoin de cette aide-là en arrivant, qui en bénéficient, par après, il y a d'autres gens qui vont pouvoir en bénéficier.

J'habite dans une coopérative d'habitation, moi, qui est une coopérative fédérale, financée par le fédéral, et on a des gens qui ont amélioré leur sort dans notre coopérative d'habitation, qui avaient de l'aide, ce qu'on appelait l'aide de dernier recours à Ottawa, qui ont bénéficié de cette aide-là pendant quelque temps, qu'à un moment donné n'en ont plus besoin. Mais, il y avait toujours des gens pour les remplacer parce que le besoin, lui, est toujours là. Donc, c'est l'unité de supplément au loyer qui est permanente, ce n'est pas chaque personne qui, elle, l'a de façon permanente.

On souhaite, puis on pense que le logement social est un bon outil pour ça, on souhaite que les gens sortent de la pauvreté. Donc, on ne veut surtout pas les maintenir par cette formule-là, et il faut voir que c'est... Mais il va toujours y avoir besoin de logements pour les pauvres dans les logements sociaux. Si on a fait des logements sociaux pour qu'à un moment donné qu'ils ne servent plus du tout aux pauvres, je me demande pourquoi on les a faits.

Mme Houda-Pepin: Et vous vous êtes prononcés fortement contre les mesures fiscales visant à inciter le privé à aller dans le logement social et abordable. J'aimerais qu'on se comprenne là-dessus, hein? On va faire un constat réaliste. Les besoins, vous l'avez mentionné vous-même, sont criants: on parle de 23 000 unités de logements, si je me base sur vos propres chiffres. Les argents que le gouvernement a mis sur la table sont de loin insuffisants pour répondre à ces besoins dans les délais prescrits. Les groupes communautaires, ils s'arrachent les cheveux et ils ne sont pas capables de livrer plus qu'ils ne le font actuellement dans le contexte des contraintes qu'ils vivent.

Donc, de façon réaliste, on peut s'entendre sur une chose: c'est que le privé a un rôle à jouer dans la crise du logement, pas seulement dans la construction du haut de gamme et des autres catégories de logements qui, comme vous dites, le marché fonctionne bien pour ces gens-là, mais pour ceux pour qui le marché ne fonctionne pas, puis qui ont besoin d'une aide quelconque. On veut amener le privé à s'impliquer dans cette catégorie de logements dont le niveau de rentabilité n'est pas très élevé comparativement aux autres types de logements mais, en même temps, on veut le faire en partenariat, ça veut dire le public et le privé. Un des mécanismes serait d'offrir des incitatifs fiscaux pour leur permettre de s'intéresser à un secteur qu'ils ont délaissé objectivement, parce que ce n'est pas rentable. D'accord? Mais, ultimement, nous, le résultat qu'on cherche, c'est qu'il y ait plus de logements sociaux et abordables pour les plus démunis et les gens à revenus moyens. D'accord?

Mais alors, si vous excluez les mesures fiscales, est-ce qu'il y a un autre mécanisme que vous pouvez envisager pour inciter le privé à aller dans un secteur qui, économiquement, est jugé non rentable?

M. Saillant (François): Bien, d'abord, il faut voir que le privé, d'une certaine façon, de lui-même s'est restimulé à investir dans ce domaine-là. Regardons les dernières données sur la construction de logements locatifs: il y a augmentation. Il y a eu augmentation dans les deux dernières années. À l'heure actuelle, on peut s'attendre à ce que, en 2002, il y ait 7 000 à 8 000 logements locatifs qui soient construits alors que, il y a quelques années, c'était plus autour de 2 ou 3 000. Si on est à 8 000 logements, si je me fie à l'étude que Desjardins a fait paraître en début de semaine, on parle de formation de 8 000 ménages, 8 000 nouveaux ménages par année dans les nouveaux centres urbains, on parle de construction de 7 à 8 000 logements locatifs, ça veut dire qu'on réussirait minimalement à répondre à la demande, sans ajouter d'exemption fiscale, d'élément fiscal.

Nous autres, ce qu'on met en doute, et là-dessus on demande juste qu'on nous prouve des choses: Est-ce que, oui ou non, ça va vraiment stimuler la construction de logements locatifs? On se fie sur une étude ? si tu regardes la Communauté métropolitaine de Montréal ? de Raymond, Chabot, Grant, Thornton. On ne l'a pas vue, cette étude-là, et ce n'est pas parce qu'on n'a pas essayé de la voir. Est-ce que vous l'avez vue? C'est la seule preuve que, dans le document de Communauté métropolitaine de Montréal, tout ce qu'on nous dit pour prouver que ça va marcher, c'est: On a un étude d'une firme comptable qui nous prouve ça. Mais qu'on ait le courage de la mettre sur la table, l'étude en question. Il me semble que, comme commission parlementaire, d'ailleurs, vous devriez revendiquer, de mettre la patte sur cette étude-là pour savoir si c'est sérieux ou non. Il me semble que, quand il y a des gens qui... La Communauté métropolitaine de Montréal, c'est des élus là, qu'ils mettent quelque chose sur la table et ils devraient être capables de prouver ce qu'ils disent. Donc, ça, c'est la première chose.

La deuxième, c'est: Est-ce que, oui ou non, ça va avoir un effet sur le logement qui est plus abordable? Et ça, au-delà même de l'étude qui pourrait être produite, ici, on a des doutes très, très sérieux. Il faut voir que l'effet de percolation, pour entrer un petit peu plus là-dedans, ça fonctionne peut-être théoriquement, mais il y a des choses que ça ne tient pas en compte, entre autres, le loyer. À chaque fois qu'il y a déménagement d'une personne, le loyer augmente. Tout le monde qui sont dans le logement vont vous le dire.

Mme Houda-Pepin: D'accord, sur ce point-là, M. Saillant... Nous très limités par le temps mais, sur ce point-là, la ville de Longueuil est venue nous dire... parce que je leur ai servi l'argument que vous apportez là à savoir que lorsque l'effet de percolation n'est pas automatique et que le propriétaire peut rénover son immeuble et puis le remettre sur le marché au double du prix ou triple du prix, peu importe, et on m'a dit que ça, c'est une idée théorique. Parce que dans la pratique, ça ne se fait pas de même, que, généralement, les immeubles, les loyers qui sont disponibles sont reconduits sur le marché et que le problème de la rénovation puis de l'augmentation du prix, c'était quelque chose d'assez théorique parce que, dans la pratique, ça se fait très peu.

Alors, moi, j'ai deux avis de gens qui sont sur le terrain, qui gèrent ces programmes-là et qui voient comment ça marche et qui sont vraiment sur le plancher des vaches et qui nous disent: Ce n'est pas de même que ça marche...

M. Saillant (François): On ne parle pas de cas de rénovation là...

Mme Houda-Pepin: Bien, que ce soit rénové...

M. Saillant (François): Je parle tout simplement quand un locataire déménage, le propriétaire... Je ne vous dirai pas que c'est dans 100 % des cas mais la pratique... vous ferez témoigner... L'ensemble des gens qui travaillent avec des locateurs, ils vont vous dire que, ces cas-là, c'est une chose qui est fréquente, qui est très fréquente.

Mme Houda-Pepin: Non, non. Je peux comprendre que le propriétaire puisse vouloir augmenter le loyer lorsque le loyer se libère. Mais ce que j'essaie de vous dire, c'est que parce qu'il y a des gens qui, de toute façon, vont accéder à la propriété, donc il y a une marge qui se crée pour les gens qui sont mal logés ou qui n'ont pas de logis, et c'est ça qui est l'idée.

Maintenant, on navigue entre des interprétations qui sont différentes. La vôtre, c'est de dire: Ne comptez pas là-dessus, on ne peut pas dégager cette marge de manoeuvre, qu'on veut avoir avec des logements disponibles, pour les plus démunis. Permettez-moi de vous poser une question, parce que le temps court, c'est très frustrant pour vous et pour moi. Le logement abordable là, vous êtes de ceux, avec moi, qui avons applaudi à ça, hein? vous avez applaudi à ça. On a écouté les groupes aujourd'hui. On a écouté les groupes aujourd'hui et hier et ils nous disent: Ça ne marche pas, il n'y a pas de logements qui sont construits parce que les paramètres sont trop compliqués, ça ne correspond pas à la réalité du marché. Est-ce que vous êtes déçus? Est-ce que vous voyez des solutions par rapport à ça?

Le Président (M. Vallières): Ça va conclure, M. Saillant.

M. Saillant (François): Bien, il y a une certaine déception, c'est clair, mais, pour nous autres, on ne lâche pas, on essaie toujours que ce programme-là soit amélioré. C'est sûr que le Programme de logement abordable a des problèmes à plusieurs, plusieurs niveaux ? ce serait très long à vous en parler ? qu'on avait dit dès le départ et notamment le fait que, les gens, on s'adresse à 100 % des gens à faibles revenus. C'est un programme qui est destiné exclusivement à des gens qui sont sous les seuils de besoins impérieux, comme on dit, mais qui est moins généreux que l'autre programme, AccèsLogis, qui, lui, s'adresse juste à 50 % des gens à faibles revenus. Dans AccèsLogis, tu as ce qu'on appelle du supplément au loyer, tu n'en as pas dans le Programme de logement abordable, alors que l'exigence que tu as, c'est de t'adresser à 100 % à des gens qui auraient droit à du supplément au loyer. Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans.

Et nous autres, ce qu'on a accueilli favorablement, c'était l'investissement mais, pour nous autres, l'investissement, l'argent est encore là. Il n'y a pas de contraintes si énormes que ça dans l'entente qui a été signée avec le fédéral. Je pense qu'il y a moyen ? puis il faut le faire de façon urgente ? de se rasseoir et de...

Mme Houda-Pepin: C'est dans l'application qu'il y a des problèmes.

M. Saillant (François): C'est ça. Mais s'assurer d'une chose, c'est que ça reste dans le logement social.

n(20 h 50)n

Par ailleurs, j'ajouterais juste une chose. Si c'est vrai que le logement social, le volet social a des problèmes dans ce programme-là, le volet privé, je peux vous dire qu'il y en a aussi, il ne marche pas plus.

Mme Houda-Pepin: ...pour les deux là.

Le Président (M. Vallières): Ça termine cet échange. Ça nous amène au député de Saint-Maurice.

M. Pinard: Merci. Moi, ma question était sur la question d'accessibilité. Parce que, cet après-midi, nous avons eu des professeurs de l'INRS qui sont venus nous dire que, un des problèmes majeurs que nous avons au Québec, c'est le fait que les politiques, les politiques au niveau de l'accessibilité à la propriété ont toujours été des politiques très, très ponctuelles pour relever notamment... et même ils allaient plus loin en nous disant que ces politiques-là avaient comme but ultime de relever l'industrie de la construction, souvent, qui était par terre et qui, indirectement, aidaient aussi la question du logement. Ils nous mettaient devant l'évidence que, suite à certaines études qu'ils ont faites dans d'autres pays, notamment en France, que, les politiques... si on voulait vraiment régler une fois pour toutes les politiques de l'habitation, l'accessibilité au logement et les problèmes d'habitation, c'est qu'il fallait y aller avec une politique qui serait étendue sur une période de cinq à 10 ans minimum et qui, à ce moment-là, amènerait également une obligation de la part des municipalités de concéder également une portion importante au niveau de la taxation, au niveau des droits d'habitation, et ainsi de suite. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Saillant (François): D'abord, sur le besoin de politiques qui soient à plus long terme, je pense que, une des nécessités d'une politique globale d'habitation, c'est d'être capable de prévoir des choses. On nous a toujours dit d'ailleurs, pas juste le gouvernement actuel, le précédent aussi, et je me souviens de M. Ryan qui nous disait souvent: On n'a pas besoin de politiques, on a des programmes. Des programmes, ça ne remplace pas une politique, parce qu'une politique ça permet de mettre plus de monde à contribution et ça permet de prévoir, d'avoir une durée dans tes politiques.

Sur la question de l'accessibilité à la propriété, c'est vrai que les programmes ont été ponctuels aussi, ont eu ce défaut-là. Mais, moi, ce que je dirais là-dessus: À l'heure actuelle, ce qu'il faudrait qu'on me démontre, c'est en quoi il y a une pertinence à l'heure actuelle pour ça, en quoi c'est là à l'heure actuelle, que vraiment le besoin est criant, qu'il faut vraiment donner le coup de pouce qui va permettre aux gens d'accéder à la propriété. Moi, en tout cas, ce que je vois ? puis Sonia pourrait témoigner là-dessus aussi, puis s'il y avait d'autres jeunes ? ce n'est pas ces gens-là qui ont des problèmes à l'heure actuelle vraiment criants. Ce n'est pas parce que ces gens-là vont accéder à la propriété que ça va entraîner une amélioration du sort des gens plus pauvres. Là-dessus, encore là, on revient avec l'effet de percolation, et ça, pour moi, ça, c'est de la théorie pure. Ça, ce n'est pas démontré dans la pratique là. Et je pense qu'à l'heure actuelle les choses se font, les gens accèdent à la propriété présentement, les gens qui ont les moyens de le faire le font.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. le député de Saint-Maurice.

M. Saillant, nous vous remercions de votre contribution à nos travaux. C'est fortement apprécié.

M. Saillant (François): C'est nous qui vous remercions.

Le Président (M. Vallières): Je demanderais maintenant à la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Alors, je vous prierais de bien vouloir vous identifier et de procéder à la présentation de votre mémoire dans les 15 prochaines minutes.

Confédération des organismes de personnes
handicapées du Québec (COPHAN)

Mme Filion (Nicole): Oui. Bonsoir, je m'appelle Nicole Filion. Je représente la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec. Je suis accompagnée de deux personnes qui représentent des membres de la Confédération, c'est-à-dire Sophie Lanctôt qui représentante Société Logique et M. Marcel Blais qui représente le regroupement qui s'appelle les Frères et Soeurs d'Émile Nelligan.

Un petit mot de présentation rapide de la Confédération. C'est une organisation qui a été fondée en 1985 par des personnes qui ont des limitations fonctionnelles. Je dis les mots «limitations fonctionnelles» plutôt que de dire handicapées. On préfère les mots «limitations fonctionnelles», on va expliquer pourquoi et quel sens ont ces termes-là.

Alors, notre organisme est un organisme qui milite et qui se bat pour faire valoir les droits et faire valoir aussi les intérêts des personnes qui ont des limitations fonctionnelles. On regroupe une trentaine d'organisations nationales. Ces organisations-là représentent toutes les personnes qui ont des limitations fonctionnelles, c'est-à-dire autant motrices, organiques, neurologiques, troubles d'apprentissage, intellectuels, visuels, auditifs, parole et langage, et santé mentale.

Dans le mémoire qu'on vient tout juste de vous remettre, on vous a présenté une série de statistiques. De l'ensemble de cette série de statistiques là, on peut conclure qu'en fait il y a près d'une personne sur sept au Québec qui ont des limitations fonctionnelles. C'est important aussi de savoir qu'il y a plusieurs types de limitations fonctionnelles. Ça veut donc dire qu'il y a plusieurs types de besoin. Il n'y a pas de solution magique pour répondre aux besoins des personnes qui ont des limitations fonctionnelles. Il faut comprendre qu'il y a des problématiques variées, qu'il y a des besoins variés puis qu'il faut trouver des solutions variées pour répondre aux besoins de ces gens-là. Il faut aussi savoir que la situation socioéconomique dans laquelle se trouve les personnes qui ont des limitations fonctionnelles est comparativement plus défavorable que l'ensemble de la population, et aussi que, en dépit de cette situation, elles sont obligées d'assumer souvent des dépenses supplémentaires qui sont reliées à leurs limitations fonctionnelles.

Puis, aussi, des statistiques qu'on vous a remises dans le mémoire, vous allez voir qu'il y a seulement une partie des besoins spéciaux qui est comblée en matière d'habitation et qu'il y a au-delà de 26 000 ménages actuellement qui ont des besoins qui ne sont pas comblés. Vous allez voir aussi que, dans la série de statistiques qui ont été tirées de l'enquête québécoise sur la limitation d'activités, qui a été faite en 1998, malheureusement, en matière d'habitation, on n'a pas d'information ou de renseignements pertinents sur les problèmes d'habitation en ce qui concerne les personnes qui ont une déficience intellectuelle et les personnes qui ont vécu ou qui vivent des problèmes en santé mentale. Et, d'ailleurs, vous constaterez, à la fin de notre mémoire, parmi les recommandations, qu'il y en a une qui nous amène à recommander que cette lacune soit comblée. C'est-à-dire qu'il nous semble qu'on devrait avoir beaucoup plus d'informations pertinentes sur la situation en habitation pour ces deux groupes de personnes là.

Avant de passer la parole à mes deux collègues, je voulais peut-être aborder rapidement la problématique générale dans laquelle travaillent les organisations de défense des droits des personnes handicapées. Je faisais une distinction tantôt entre limitation fonctionnelle et personne handicapée. Ce qu'on entend par personne qui a des limitations fonctionnelles, ce sont des personnes dont la capacité d'accomplir certaines activités essentielles à la vie quotidienne est réduite. En fait, nous, on estime que ces personnes-là ne sont handicapées que dans la mesure où il y a des situations handicapantes. Donc, l'existence du handicap se trouve à être le fruit de l'inadaptation de l'environnement humain et social et, donc, l'inadaptation entre l'environnement humain et social et les caractéristiques inhérentes à la personne. Alors, dans la mesure où les éléments qui sont à l'origine du handicap sont neutralisés, si on peut dire, par des adaptations ou des mesures d'accommodement, bien une personne qui a des limitations fonctionnelles ne sera plus handicapée, puisqu'on aura éliminé les obstacles à sa participation sociale et on aura aussi éliminé les facteurs de discrimination dont elle peut faire l'objet.

Pour garantir le droit à l'égalité et avoir une société inclusive, les personnes qui ont des limitations fonctionnelles doivent avoir accès à différents programmes, que ce soit le Programme de maintien à domicile, le Programme de transport adapté. Enfin, il faut fournir des services à ces personnes-là pour qu'elles puissent fonctionner comme toutes les autres personnes dans la société. Puis, en matière d'habitation, bien, il faut concevoir une variété de types et de lieux d'habitation qui vont répondre aux différentes problématiques.

n(21 heures)n

Dans le document de consultation qui est à l'étude actuellement, on termine le document en ouvrant sur une perspective de développement durable. Mais, si on veut vraiment s'inscrire dans une perspective de développement durable, on estime, nous, à la COPHAN, que les solutions proposées doivent intégrer l'ensemble des besoins de la population en termes d'habitation. Je pense que le FRAPRU est venu expliquer assez explicitement les besoins de l'ensemble de la population, mais il faut aussi tenir compte qu'il faut que cette réflexion-là se fasse de manière inclusive, en tenant compte des besoins des personnes qui ont des limitations fonctionelles. Et cette réflexion-là doit se faire non pas pour le monde qui ont des limitations fonctionnelles, mais elle doit se faire avec les gens qui ont des limitations fonctionnelles. Et, nous, évidemment, on estime que l'intervention de l'État est essentielle. On ne peut pas penser que, sans intervention de l'État et sans réglementation de l'État, on va mettre en oeuvre des moyens pour faire en sorte que notre société soit inclusive.

Alors, l'essentiel de notre présentation va porter sur: Pensons d'une façon intégrée à l'habitation. On veut aborder aussi les questions relatives à l'accessibilité architecturale; on fera un bref exposé sur les alternatives qu'on devrait explorer à l'institutionnalisation des jeunes adultes qui se retrouvent en CHSLD, en soins de longue durée, lorsqu'ils sont atteints de certaines maladies évolutives; et on conclura avec certains éléments de réflexion qui seront amenés par un groupe en santé mentale. Alors, je vais demander à Sophie de poursuivre.

Mme Lanctôt (Sophie): Moi, je vais vous parler plus concrètement au niveau architecture. Dans un contexte de pénurie de logements qui touche les grands centres urbains, les clientèles qui sont traditionnellement susceptibles de vivre de la discrimination sont et seront encore plus marginalisées. Il apparaît clairement que les propriétaires bailleurs privés, qui ont le choix au moment de la location de leurs unités, privilégieront certains candidats, et ça, malgré tous les recours légaux disponibles pour les personnes qui sont discriminées. Donc, pour la clientèle qui éprouvait déjà de la difficulté à se loger de façon décente, que ce soit à cause de préjugés, de comportements jugés marginaux ou à cause de besoins en termes d'aménagements architecturaux spéciaux qui peuvent être perçus comme complexes par les propriétaires bailleurs, la crise du logement qu'on vit actuellement rend la situation intenable. Ça va être vraiment ceux qui vont être le plus discriminés.

Donc, si le marché privé ne veut et ne peut pas, dans ce contexte, répondre à leurs besoins, le logement social et abordable dont on parle aujourd'hui doit obligatoirement prendre la relève, d'où l'importance de ne pas circonscrire la problématique à quelques logements adaptés pour les clientèles vivant des problèmes particuliers. Et je cite le document de consultation qui nous a été remis en préparation de la séance d'aujourd'hui.

D'autre part, les besoins en aménagements spéciaux, en support communautaire et en maintien en domicile, qui sont engendrés, entre autres, par la désinstitutionnalisation des dernières décennies, sont considérables et poursuivront leur croissance avec le vieillissement de la population. Il devient donc de moins en moins viable de prévoir quelques unités spéciales lorsque le poids démographique de la clientèle qu'on veut desservir par ces unités-là s'approche de plus en plus de la population sans besoin particulier. On parle actuellement, dans les statistiques que Nicole nous a présentées tout à l'heure, de 30 % des ménages au Québec qui comportent une personne qui a des limitations fonctionnelles. Ça, ça veut dire une famille sur trois où on a une personne qui a de la difficulté à marcher, à entendre, à voir, à apprendre, à comprendre. Un ménage sur trois, ça en fait des ménages, et un ménage, ça égale un logement.

Les questions relatives à l'habitation ont un impact sur tous les domaines de la société. Se loger dans un logement décent répondant à ses besoins, ça permet de maximiser son autonomie, d'avoir moins recours aux services de maintien à domicile, de poursuivre ses études, d'intégrer le marché du travail, d'avoir des loisirs, une vie sociale et une vie familiale active. Bref, ça permet d'être un citoyen à part entière, de participer, de payer des impôts. Certains efforts ont été consentis par le gouvernement, d'une part, au niveau de la réglementation, avec l'entrée en vigueur du nouveau Code de construction, et, d'autre part, avec le Programme d'adaptation de domicile de la Société d'habitation du Québec. Toutefois, si on veut opérer un redressement adéquat de la situation et éviter la discrimination que les gens vivent quotidiennement et de façon très importante actuellement, il faut envisager à court et à moyen terme une série de mesures gouvernementales plus musclées, que je vais appeler curatives, d'un côté, et préventives, de l'autre.

Curatives d'abord. Faire du Programme d'adaptation de domicile de la Société d'habitation du Québec un programme efficient et efficace. Peut-être que certains d'entre vous le connaissent, ce programme-là, c'est une aide financière qu'on donne aux personnes handicapées qui vivent dans des logements qui ne répondent pas à leurs besoins pour faire des travaux. Ça sert à éliminer des barrières architecturales. Ce programme-là, ça ne s'adresse pas aux gens qui eu ont un accident d'auto ou un accident de la route, c'est la couverture minimale de base des gens qui n'ont pas d'autres recours. Actuellement, malheureusement, la liste d'attente atteignait un record jamais égalé de 2 812 personnes le 1er juillet 2002 ? 1er juillet 2002 parce qu'il n'y a plus personne qui calcule à la SHQ actuellement où on en est rendu. Pour l'année financière 2002-2003, le budget du Programme est de 4,2 millions au lieu des 15 millions requis pour répondre aux 150 nouvelles demandes reçues chaque mois dans le cadre du Programme. Donc, on parle de 2 812 personnes en attente, et, avec les budgets actuels, ça représente, pour ces gens-là, de six à sept ans d'attente. Six à sept ans d'attente, là, sans rentrer dans sa salle de bain, c'est long, c'est très long.

Les montants que les gens ont, maximum, pour faire des travaux dans leur domicile maintenant ont été établis il y a 20 ans et n'ont jamais été indexés depuis ce temps-là. La SCHL indique que le coût des matériaux a augmenté depuis 1991 de 33 %, sans compter les coûts de main-d'oeuvre. Donc, vous comprendrez que le pouvoir d'achat des gens qui ont à faire faire des travaux dans leur domicile, bien, ça s'est rétréci considérablement depuis les 20 dernières années et ça rend difficile de faire minimalement les interventions qui sont nécessaires pour pouvoir vivre quotidiennement.

Le coroner Malouin, dans son rapport d'enquête faisant suite à de nombreux décès dans des plateformes élévatrices résidentielles, rappelle la responsabilité de la Société d'habitation du Québec concernant ces équipements-là, qui actuellement ne répondent à aucune norme canadienne en termes de sécurité et de conformité. La SHQ doit assurer la sécurité des utilisateurs en rendant conformes ces équipements-là.

Donc, faire du curatif, pour nous, c'est de faire de ce programme-là un programme qui réponde minimalement aux besoins des personnes qui ont des limitations fonctionnelles. Il faut que le gouvernement injecte rapidement les sommes supplémentaires requises pour éliminer la liste d'attente actuelle, réponde aux nouvelles demandes qui s'ajoutent à chaque mois et rende conforme et sécuritaire les quelques 3 000 plateformes élévatrices qui ont été installées au Québec depuis le milieu des années quatre-vingt. Il faut également augmenter les montants maximums d'aide par dossier pour s'assurer que les gens qui arrivent au traitement de leur demande puissent au moins faire les travaux minimums pour rentrer et sortir de leur maison, pour avoir accès et utiliser leur salle de bain et avoir accès et utiliser leur cuisine. On ne parle pas de luxe, là, on parle de se laver, d'entrer puis de manger.

Agir préventivement en construisant des logements accessibles dès le départ, ça, c'est notre volet prévention. Le programme PAD coûte cher, va coûter de plus en plus cher. Les travaux d'adaptation de domiciles coûtent cher. Ils sont réalisés dans des logements qui ont été construits selon de vieux principes élaborés, à l'époque, pour l'individu moyen jouissant de toutes ses capacités. Aujourd'hui, malgré le fait que la population soit vieillissante et que tous peuvent s'entendre que les besoins changent, nous continuons toujours à construire selon ces vieux principes. Agir préventivement, c'est réaliser que les besoins ont changé et c'est d'ajuster nos façons de faire. C'est de construire de façon plus accessible dès le départ pour réduire les besoins et les coûts en adaptation de domicile. C'est la seule voie possible pour arriver à contrôler des programmes qui ont des listes d'attente intenables, comme ce que je vous ai dit tout à l'heure.

Construire de façon accessible, ça ne coûte pas plus cher que de construire de façon traditionnelle, la démonstration a déjà été faite. Il n'est pas question, ici, de faire des logements uniquement pour les personnes handicapées mais plutôt de faire des logements adéquats pour tous, incluant les personnes handicapées. On appelle ça le concept d'accessibilité universelle. C'est construire des logements qui sont conçus pour tous, qui peuvent être occupés tels quels ou avec de légères modifications par des personnes handicapées.

Le Président (M. Vallières): En concluant, Mme Lanctôt.

n(21 h 10)n

Mme Lanctôt (Sophie): Oui, j'arrive à ma conclusion. Agir préventivement signifie de faire en sorte que les nouvelles unités de logement social et abordable dont on parle ce soir soient universellement accessibles, que les nouvelles unités de logement privé qui soient construites soient également accessibles, en introduisant dans la réglementation de construction des exigences minimales d'accessibilité pour l'intérieur des logements et que les logements adaptés ou rendus accessibles puissent être reloués à des personnes handicapées via le soutien à des banques de logements accessibles comme il s'en est développé à travers le Québec.

Le Président (M. Vallières): Merci.

Mme Filion (Nicole): Il nous reste deux points à traiter, parce que je vous avais expliqué qu'il y avait quatre éléments qu'on voulait aborder. Je voudrais dire deux petits mots sur le problème de... Il faut vraiment chercher des alternatives à l'institutionnalisation des adultes, des jeunes adultes qui se retrouvent dans des soins de longue durée. Là-dessus, je vous inviterais à prendre connaissance de ce qu'on a écrit dans le mémoire. Mais on voudrait chercher des solutions et des alternatives à cette institutionnalisation. Il va falloir aussi inscrire cette recherche-là pas seulement dans les cadres de la recherche que fait le ministère de la Santé, mais il va falloir que d'autres ministères s'impliquent dans un dossier comme celui-là, il va falloir impliquer aussi d'autres partenaires.

Puis, avant de conclure, je vais laisser la parole à Marcel, qui voulait vous entretenir sur le dossier plus spécifique de la santé mentale.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, nous allons continuer, là, mais il faut être conscients que les échanges vont être moins longs avec les membres de la commission. Alors, on passe à M. Blais.

M. Blais (Marcel): Bonjour. Vous avez dans le document de la COPHAN, de la moitié de la page 1 et 2 à la page... C'est parce que là, ce n'est pas dans le dossier. Je ne sais pas pourquoi, là. Quelle page?

Mme Filion (Nicole): Excusez-nous. Ça se trouve à la page 15 du dossier.

M. Blais (Marcel): Oui, 15, 16, vous avez une traduction, mais vous avez aussi le texte des Frères et Soeurs que Nicole a essayé de traduire dans un vocabulaire, je dirais, plus accessible. Alors, ce sont des vocabulaires mais qui sont quand même similaires, en termes de questionnements qu'on peut avoir en rapport avec le logement social et abordable mutuel.

Mais, avant de commencer, j'aimerais dédier ce document à la douce mémoire des Jean-Paul Lizotte, de la naissance à l'autre porte. Puis on connaît les personnes, puis j'aimerais ça qu'on prenne un petit cinq secondes pour penser à ces personnes-là puis à toutes ces autres personnes, qui sont soit des Jean-Paul Lizotte ou des Marie-Ève, qui, pour des raisons d'itinérance ou d'errance ou des raisons de sans-adresse, éprouvent de la difficulté à se maintenir socialement puis à pouvoir participer socialement, je dirais, aux activités de la communauté.

Tout d'abord, permettez-nous de signaler que le domaine du logement social et abordable préoccupe les Frères et Soeurs d'Émile Nelligan, qui est une organisation provinciale d'entraide, de promotion et de défense des besoins, intérêts et droits en santé mentale, entre guillemets, de vous dire que la question du logement nous préoccupe depuis, je dirais, notre naissance corporative. Présentement, un projet d'étude sur les conditions de vie des personnes que nous représentons circule. Ce projet d'étude est en cours de validation avec le ministère de la Santé et l'OPHQ.

La toile de fond qui va préoccuper nos interrogations touche des domaines marginalisés, vraiment marginalisés, dont ceux de l'errance ? je pense qu'il y a une théorie sur l'errance qui circule actuellement ? de l'itinérance et des sans-adresse. Les sans-adresse, comparativement aux errants ou aux itinérants, ce sont les personnes qui ne possèdent pas de clé mais qui parcourent un peu à travers la ville, le monde rural. Des sans-adresse, c'est ceux qui ne possèdent pas de clé puis qui aboutissent éventuellement à des maisons du Père ou à des maisons de la Mère. En tout cas, on se base sur ça. Ces domaines nous apparaissent comme solidaires de structures et modèles des forces du marché locatif, qui serait à refaire, à redire et à repenser.

Depuis la récente contextualisation ? puis, après ça, je vais aboutir sur les pistes de solution ? depuis la récente phase de la désins en santé mentale, entre guillemets, également en déficience intellectuelle, entre guillemets, pour la nouvelle politique qui s'installe actuellement dans ce milieu-là, il y a des phénomènes nouveaux qui réapparaissent puis qui sont discutés du cadre de la sédentarité. Les articles de journaux et les médias électroniques en témoignent couramment. On judiciarise et médicalise d'une manière massive, je dirais, des problèmes psychologiques et comportementaux. On marginalise les personnes ou les ressources qui voudraient aider éventuellement ces personnes-là.

Il y a aussi la présence de ce que je dirais... en tout cas, dans nos réflexions, on dit «l'intolérance visuelle et sociale», que cette intolérance-là est plus rattachée, je dirais, à l'application concrète d'un principe qu'on appelle «valorisation des rôles sociaux» et aussi du processus et zone de production du handicap. C'est une théorie qui est en train de s'installer dans les réseaux. Il faut dire qu'actuellement il n'y a pas que la personne, il y a aussi une production d'handicaps qui entoure la personne puis qui fait qu'éventuellement elle éprouve de la difficulté à s'en sortir, l'improductivité et aussi la mort sociale.

Des phénomènes complaisants ou rentables? Je ne le sais pas, sauf qu'on dirait complaisants dans le sens qu'ils autoriseraient volontairement ou librement une accessibilité universelle limitée et sans-lieu à du logement social et abordable; rentables en ce qu'ils susciteraient un partenariat socioéconomique à haut salariat, de haute compétence et de haute performance. Vous savez, quand on s'angoisse ou qu'on n'a pas quelque chose à... comme Sophie disait, tout simplement de se laver, bien, à un moment donné, on aboutit en psychiatrie, on aboutit en psychologie, on reçoit des services infirmiers, des services de réadaptation, de la pharmacologie, services judiciaires, services de sécurité publique, solidarité sociale et communautaire puis, finalement, pour terminer, comme Jean-Paul, des services funèbres. Qu'ajouter à ça? On ne le sait pas. Mais, en tout cas, on peut se poser la question.

De ce qui précède, les Frères et Soeurs constatent un essoufflement majeur des forces du marché locatif en matière de santé mentale, entre guillemets, ou de déficience. On constate aussi une recrudescence du monde des préjugés et interdits qui sont défavorables à l'accessibilité à du logement social. Parce qu'on est tannant, on brûle des maisons, on fait le fou. Vous comprenez? Le monde de la santé mentale, dans les médias, c'est très mal vu.

Ensuite, vous avez aussi un marché locatif d'accès socioéconomique limité et éclaté tant auprès des personnes dont le revenu optimal est égal ou inférieur à 10 000, mais aussi auprès des ressources qui sont vulnérables, qui reçoivent un sous-financement sociocommunautaire chronique, qui ne peuvent même pas aider, dans leur suivi communautaire, des personnes qui nécessiteraient du logement social et abordable mutuel.

Bon, je me dis: Ou bien on ne fait rien ou bien il y a quelque chose qui se passe. Est-ce qu'on vise une réinstitutionnalisation des personnes qui seraient en santé mentale ou bien donc on radicalise ou on banalise les forces du marché locatif? Qu'est-ce qu'on veut faire avec nous autres? Est-ce que vous voulez qu'on soit présents dans la communauté? Si vous ne voulez pas qu'on soit présents, dites-le tout de suite, puis on va le savoir, puis on va retourner à Robert-Giffard, à Hippolyte Lafontaine, je ne le sais pas. Vous comprenez? Mais, en attendant, on va poursuivre et ou on va fluctuer ou encore on va rêver.

n(21 h 20)n

Compte tenu de ce qui précède, les Frères et Soeurs aimeraient convier la commission à quelques pistes de solution et d'action suivantes. Qu'il plaise aux membres de la commission de favoriser des recommandations ou des propositions de recommandations soutenant ou visant à soutenir... Et c'est dans l'articulation de ces propositions de recommandations qui va faire en sorte qu'on va pouvoir soutenir, par exemple, l'accessibilité universelle libre, volontaire et adaptée au marché locatif régulier ou subventionné; soutenir des structures d'habitation locative souples, adaptées et déghettoïsées, hein? On veut vivre avec le monde, parmi le monde puis dans le monde. On ne veut pas être ghettoïsés à quelque part, qu'on identifie à des clientèles vulnérables. Et puis c'est peut-être plus sécurisant pour le marché locatif, mais c'est encore plus enrichissant quand on va plus loin dans la société.

Ensuite, je dirais, l'humanisation et la civilisation des forces du marché locatif: déjudiciariser, par exemple, ou démarginaliser ce qu'on appelle les problèmes de paiement de loyer. Ce n'est pas toujours nécessaire d'aller à la Cour pour se faire dire qu'on a 400 $ puis qu'on de la misère à payer un loyer de 300 $. Vous comprenez? Il y a peut-être des mesures alternatives qui vont faire en sorte qu'on va être aidés plutôt que d'être poussés à l'angoisse, ou à de l'involution sociale, ou à de l'exclusion sociale. En tout cas, il y a des façons de procéder autrement.

Et, à ce chapitre-là, il y a...

Le Président (M. Vallières): Alors, je vous inviterais, M. Blais, à...

M. Blais (Marcel): Et, à ce chapitre-là...

Le Président (M. Vallières): M. Blais, parce que j'aimerais qu'il y ait au moins un 10 minutes d'échange avec les membres de la commission. Je vous demanderais de conclure.

M. Blais (Marcel): Oui, oui, je termine, il me reste deux petits points, c'est tout. En tout cas, c'est pour nous aider davantage. C'est juste dans ce sens-là.

Ensuite, l'ensemble des recommandations des milieux associatifs communautaires, ainsi que des milieux d'action communautaire autonome; ensuite, de soutenir l'intégration, le maintien, ainsi que la participation en société des personnes et ressources de la communauté; et aussi de soutenir, je dirais, la Charte des droits et libertés de la personne. Je vous remercie. Et puis mes salutations d'entraide nelliEganienne à tout le monde.

Le Président (M. Vallières): Merci, M. Blais. Alors, Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Merci, Mme Lanctôt, Mme Filion, M. Blais, de votre présentation. Moi, je trouve ça intéressant, parce que vous êtes les premiers à nous parler... pas les premiers, mais aussi pointus, de façon aussi précise, de ces problématiques-là que vous nous présentez maintenant. Moi, je trouve ça intéressant aussi, parce que j'avoue que je ne connaissais pas Société Logique. Et, je pense, Mme Lanctôt, vous êtes architecte?

Mme Lanctôt (Sophie): Non, j'ai une formation en urbanisme.

Mme Doyer: En urbanisme. Bon. Alors, c'est toute une nouvelle vision que vous nous présentez là, en ce sens que vous nous amenez sur un terrain où vous dites: Il faudrait peut-être penser à modifier le Code ? je ne me trompe pas en disant ça ? du bâtiment pour préparer au cas où. C'est ça, hein?

Mme Lanctôt (Sophie): Oui.

Mme Doyer: Et de penser aussi, quand on pense habitation, quand on pense politique d'habitation, de se dire: Que nous prépare l'avenir? Et on a vu, au niveau des statistiques, au niveau de l'évolution démographique... Vous avez lu le document de consultation où, dans... Ça va changer, et, nous, on veut se donner une vision de court, de moyen et de long terme pour faire les bonnes affaires, utiliser à bon escient l'argent de tout le monde, dans le fond, pour régler un certain nombre de problématiques ou y penser avant.

Alors, vous nous dites: Il y a des limitations fonctionnelles chez des gens, mais, à quelque part, c'est des limitations fonctionnelles parce que l'environnement n'est pas adapté: par exemple, sur les trottoirs, pour une chaise roulante. Moi, je peux vous dire, comme députée, que ça m'a pris un an. Mon propriétaire de qui je louais mes bureaux m'avait promis dans un mois, ça a pris un an avant d'avoir l'accessibilité à la clientèle. Et je suis une députée. Imaginez-vous un citoyen ou une citoyenne ordinaire, entre guillemets, hein? Alors, voyez-vous?

Je sais que vous nous amenez sur ce terrain-là. Mais, moi, je voudrais... Parce qu'il y a des problématiques. Dans le fond, il faut y penser. Et le débat par rapport aux personnes handicapées ou avec des limitations fonctionnelles, c'est un débat aussi... le même débat que la médecine à deux vitesses, hein? Parce que les personnes qui ont le moyen de se doter... d'avoir de l'adaptation à domicile quand il arrive un événement malheureux, ils sont en chaise roulante, il n'en ont pas trop de problèmes, parce qu'ils sont capables de se le donner.

Et, comme députés, on a tous des dossiers, puis, moi, je termine là-dessus, on a tous des dossiers qu'on a travaillés de 50 000 façons, en allant chercher un discrétionnaire, en le donnant nous-mêmes de notre petit discrétionnaire, pour essayer de régler des problèmes. Parce que, vous avez raison qu'à un moment donné, dans l'évaluation des coûts, c'est vrai que ce n'est pas à jour. Moi, je voudrais juste que vous nous précisiez: L'enveloppe pour les personnes... C'est combien, l'enveloppe, pour adapter.... la liste d'attente, par rapport à la liste d'attente et les ressources qu'il y a actuellement?

Mme Lanctôt (Sophie): Il y a 2 812 personnes sur la liste d'attente, à une moyenne de 10 700 $ par dossier. Avec les abandons, on parle d'un besoin actuellement de 24 millions pour écouler la liste d'attente.

Mme Doyer: 24 millions au total?

Mme Lanctôt (Sophie): On parle de 15 millions récurrents par année pour répondre aux nouvelles demandes qui arrivent chaque mois et on parle d'un minimum de 10 millions pour mettre en conformité les plateformes élévatrices existantes, qui ont causé des décès dans certains cas. Mais ça, je veux vous rappeler que c'est du curatif. Ça va aller en augmentant. La Société d'habitation du Québec a mis deux fois 20 millions dans ce programme-là au cours des dernières années. Quand ils sont revenus à leur budget initial, la liste d'attente s'est reconstituée en deux ans et demi. C'est du curatif. Si on ne veut pas avoir à augmenter ce budget-là indéfiniment, il faut faire du préventif. Et, via la réglementation de construction, ça ne coûte pas plus cher à personne. Il faut juste le faire.

Mme Doyer: D'accord. Alors, on en ferait de l'argent avec notre 50 millions par semaine, hein? C'est un autre usage de plus, en passant. Mon petit côté politique, ce soir.

Une voix: ...

Mme Doyer: Mon petit commercial. Et je peux vous dire que vous avez quand même... Ici, on a eu, je termine là-dessus, le Réseau québécois des organismes sans but lucratif d'habitation, qui sont venus nous présenter aussi, de très intéressante façon, la nécessité d'avoir un soutien communautaire, un peu dans le sens que M. Blais nous disait, avec des services, un petit peu plus d'argent pour du financement, et vraiment pour répondre aux services dont ils ont besoin.

Puis, dans mon comté, par exemple, on a gardé quatre HLM à Amqui avec deux personnes qui accompagnent pour des personnes qui normalement seraient restées en institution puis qu'on a réussi à sortir, à intégrer dans le milieu et qui sont très heureuses. Mais ça prend des ressources pour le faire. Je vous remercie.

Mme Lanctôt (Sophie): Je voudrais juste rappeler que construire des logements pour répondre à la crise du logement, c'est une chose, gérer ces logements-là, opérer ces logements-là pour que ça continue à répondre puis que les gens vivent de façon intégrée, ça prend du support, comme la Fédération le demande. Et ça, c'est aussi important, sinon plus.

Mme Doyer: Oui. Vous avez raison.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Je vous remercie. Mme la députée de La Pinière, en huit minutes.

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, Mme Lanctôt, Mme Filion et M. Blais, merci pour votre mémoire. C'est un mémoire qui est touchant parce que, au-delà des statistiques, vous parlez des réalités vécues. Moi, ça me touche. Ça me touche d'autant plus que je suis assez sensibilisée et assez au courant des réalités que vivent les familles suite à la désinstitutionnalisation, particulièrement en ce qui a trait à la santé mentale.

Et je viens d'une région où les ressources sont dramatiquement rares pour venir en aide à ces familles et répondre particulièrement à ces besoins. Sachant que, depuis la désinstitutionnalisation, les personnes atteintes de maladie mentale sont, d'une certaine manière, laissées à elles-mêmes, une famille dont l'enfant a 50 ans et qui a vécu 30 ans ou 40 ans dans une institution et qui, du jour au lendemain, se retrouve à la maison, c'est presque un étranger pour sa famille. Il faut apprendre à vivre avec ça avec très peu de ressources. Donc, ce n'est pas étonnant que ce genre de problème se retrouve, déborde sur la rue et que ça vient aggraver la situation de l'itinérance et de l'errance. Et je suis très, très sensible à ce que vous nous dites.

Pour revenir à la situation du Programme d'adaptation de domicile, le programme PAD, vous nous dites que, bon, il y a des coupures dans les budgets, il y a des listes d'attente qui rallongent, il vous faut des montants assez significatifs pour répondre aux besoins, pour faire la prévention et également anticiper les besoins à venir, et vous référez toujours à la Société d'habitation du Québec. Vous savez que la Société d'habitation du Québec est un organisme qui opère en fonction des budgets qui lui sont accordés par le gouvernement. Est-ce que le ministre responsable de l'Habitation est au courant des problèmes que vous vivez, est-ce que vous l'avez rencontré et qu'est-ce qu'il pense de tout ça? Est-ce qu'on vous a donné des signes ou des indications comme quoi il y aurait éventuellement une aide dans le sens que vous le demandez?

n(21 h 30)n

Le Président (M. Vallières): Mme Filion.

Mme Filion (Nicole): Il y a eu une rencontre, justement, la semaine dernière, avec le ministre Côté pour lui faire part de ce qu'il y a dans le mémoire, là. Alors, ce que M. Côté nous a dit, c'est que, de toute façon, ce serait bien difficile de ne pas reconnaître qu'il y a un problème. Alors, il a reconnu effectivement le problème et nous a soumis qu'il avait saisi le Conseil des ministres de cette situation-là et qu'en fait le dossier était actuellement au Conseil du trésor. Alors, bon, nous, on va faire les pressions auprès du Conseil du trésor pour qu'on reconnaisse effectivement ces besoins-là.

Parce que, de toute façon, un peu comme d'autres ont dû vous le dire aussi, si on ne règle pas les problèmes d'habitation, il y a des problèmes de détresse psychologique, d'angoisse, finalement, puis en plus les personnes ont à demander encore plus au niveau des services de maintien à domicile. Alors, en fait, c'est des vases communicants puis, au bout de la ligne, il n'y a pas seulement l'État qui est perdant, il y a aussi la personne qui est perdante parce qu'elle ne peut pas participer socialement comme elle voudrait le faire.

Mme Houda-Pepin: Alors, en vous identifiant comme un regroupement de personnes ou d'organismes représentant des personnes ayant des limitations fonctionnelles, vous embrassez large, parce que, dans ce monde-là auquel vous vous adressez, il y a de multiples réalités. Par exemple, une limitation fonctionnelle physique n'est pas du même ordre qu'une limitation fonctionnelle psychologique, par exemple. Donc, quelqu'un qui est en fauteuil roulant, il a des besoins beaucoup plus faciles à circonscrire en termes d'identification; on a besoin d'un architecte, on a besoin d'un urbaniste, on sait ce que ça coûte, etc. Et vous avez, dans votre mémoire, dit que ça prend de six à sept ans, les délais d'attente, avant qu'on puisse répondre à ces besoins-là. C'est énorme, comme besoins.

Mme Filion (Nicole): Ce n'est pas seulement énorme, c'est inacceptable.

Mme Houda-Pepin: Oui, oui, évidemment, c'est dans ce sens-là que je vous rejoins. Et vous avez souligné, dans votre mémoire, le manque d'information. Vous êtes revenue souvent là-dessus: «Et combler l'absence de renseignements sur les besoins en matière d'habitation des personnes ayant une déficience intellectuelle.» Est-ce que c'est si difficile que ça obtenir des informations comme ça? Par exemple, l'Office des personnes handicapées du Québec ne compile pas de données du genre que celles que vous recherchez? Est-ce que vous les avez demandées? Est-ce que vous avez une collaboration avec cet organisme?

Mme Filion (Nicole): Bon, l'Office des personnes handicapées du Québec a son propre plan stratégique d'intervention. Nous, quand on a... et n'a pas exploré spécifiquement cette problématique-là. Quand, nous, on s'est penché, là, sur l'ensemble des problèmes en habitation du monde qu'on rejoint, on s'est inspiré, au départ, on est parti de statistiques qui existaient. Le gouvernement a fait une enquête en 1998, l'enquête québécoise sur les limitations d'activités, et, malheureusement, dans la section habitation ? pourtant, c'est quelque chose, c'est un élément essentiel, l'habitation ? bien, il n'y a pas de questions qui ont été adressées plus spécifiquement aux groupes de personnes qui ont une déficience intellectuelle ou aux personnes qui ont des problèmes en santé mentale.

Nous, en tout cas, par rapport à çà, ce qu'on souhaiterait, parce que si, ce soir, il y a deux ou trois choses qui ont été comprises, on souhaiterait que ce serait les suivantes, en fait: c'est qu'on voudrait qu'on pense à une société qui soit inclusive plutôt que d'avoir ensuite à adapter la société à des besoins. Si on veut vraiment mettre à terre toutes les barrières et tout ce qui est facteur de discrimination, il faut penser inclusif. Il faut penser qu'il n'y a pas de solution toute faite à l'ensemble des problématiques qu'on a essayé très rapidement de vous soumettre ce soir, il faut penser qu'il y a des problèmes variés, puis il faut avoir une approche souple qui va tenir compte des besoins des personnes.

Mme Houda-Pepin: Ça, je...

Mme Filion (Nicole): Il faut le faire, si on veut trouver des solutions, il faut penser trouver des solutions non pas pour les personnes, mais avec les personnes.

Mme Houda-Pepin: C'est bien dit dans votre mémoire, écrit et souligné, même. J'ai bien noté. La problématique de l'itinérance, des sans-abri, des toxicomanes, lorsqu'on essaie d'y répondre par l'habitation, généralement, il y a des réactions dans les milieux, il y a des préjugés et les préjugés ont la vie dure.

Est-ce que votre organisme travaille ou a développé des outils d'information, de sensibilisation pour faire accepter et s'assurer que l'atterrissage de ces clientèles-là dans le voisinage, dans le milieu urbain ou rural, ça puisse se faire en toute harmonie et qu'il n'y aurait pas de rejet? Est-ce que vous faites ce type de travail?

Le Président (M. Vallières): M. Blais.

M. Blais (Marcel): Bien. Disons que présentement nous avons une étude qu'on est en train de valider concernant les conditions de vie de nos frères et soeurs et puis, aussi, à partir du mandat, que nous avons provincialement, de la santé mentale, et aussi de la clientèle en déficience parce qu'on s'occupe de ces deux secteurs-là en même temps.

C'est sûr que les gens sont informés de ce qu'ils vivent puis ils crient par dessus. Sauf qu'il n'y a pas de communication qui se passe entre, ce que je dirais, les décideurs ou les acteurs dans la société, parce qu'on est rendu, je dirais, à la notion de la mutualité. Tout autant on va aborder la question des préjugés et puis de l'acceptation des personnes dans la société, en même temps, ça soulève toute la question de l'acceptation de la différence puis des concepts qui sont autour de ça. Mais, il demeure qu'il y a des Auberges du coeur, par exemple, il y a le suivi communautaire qui sont quand même des modèles intéressants dans l'actualisation, je dirais, du logement social et abordable où on va repérer toutes sortes d'informations pour nous habiliter ou du moins pour essayer de vivre dans la société.

En tout cas, il y a des efforts qui se font de ce côté-là et il y a aussi des politiques clientèles comme la transformation en santé mentale qui regardent un petit peu, mais pas tellement, ainsi que la déficience.

Mme Houda-Pepin: Merci.

Le Président (M. Vallières): Merci. En fait... En résumé. Oui. Brièvement.

Mme Lanctôt (Sophie): Il s'agit d'un complément d'information. C'est ça, brièvement.

C'est certain que si on essaie d'implanter, par exemple, une ressource résidentielle pour des gens, en santé mentale, de 150 unités dans un quartier résidentiel, on va avoir des problèmes de «pas dans ma cour». Il y a la non-ghettoïsation des gens aussi. Et quand on parle de logement social et abordable, c'est de pouvoir, dans différents types, dans différents OSBL, différentes coopératives que ces gens-là puissent trouver leur place puis être intégrés, donc de ne pas faire des ressources pour eux mais de faire des ressources où ils vont également trouver leur place.

Avec un principe comme ça...

Une voix: C'est l'intégration.

Mme Lanctôt (Sophie): C'est ça, l'intégration. Avec un principe comme ça, on a beaucoup moins de problèmes de «pas dans ma cour». C'est quand on fait des ghettos que c'est plus difficile.

Le Président (M. Vallières): Bien. M. le député de Saint-Maurice, en terminant sur cette question.

M. Pinard: Moi, je m'interroge, madame, sur votre place réelle dans le milieu, dans le sens suivant: c'est que lorsqu'une municipalité, par exemple, a un projet de développement d'habitation pour personnes handicapées, par exemple, bon. On élabore le projet, on va en soumission et, une fois que la bâtisse est construite, on se rend compte qu'avant de faire entrer des clients il faut peut-être adapter la résidence en fonction des besoins des personnes handicapées. On s'aperçoit de cela une fois que tout le projet est fini, réalisé, la brique est posée, la pelouse. Là, on dit: Oups! un instant, là, il y a des personnes handicapées qui vont rentrer ici. Donc, là, on va chercher l'autre subvention à côté ? celle que vous avez mentionnée tout à l'heure ? de 25 quelque millions. Là, on va adapter les logements. Ils sont toujours neufs, là.

Vous avez dit que ça ne coûterait pas plus cher parce que, à l'intérieur du code d'habitation, vous pouvez intervenir et faire en sorte que la construction de l'immeuble soit faite immédiatement en fonction de la clientèle qui va en bénéficier. Mais où êtes-vous donc dans le processus? La Société d'habitation est là, l'Office de la protection des personnes handicapées est là, les organismes sociaux sont là. Mais, savez-vous une chose, j'ai été maire, je suis député depuis huit ans et c'est la première fois que j'entends parler de vous et de votre organisme.

Mme Lanctôt (Sophie): J'espère que vous allez vous rappeler de nous! Ha, ha, ha!

n(21 h 40)n

M. Pinard: Non, mais... Mais, madame, puis-je vous mentionner que vous existiez il y a un an, vous existiez il y a deux ans, mais où êtes-vous dans le processus? Est-ce que vous êtes rattachés à la SHQ, à L'Office des personnes handicapées? Est-ce que vous êtes rattachés au monde municipal? Ce matin, on avait, là, une équipe qui est venue nous rencontrer, l'équipe de M. Johnston, M. Bergeron, M. Goyer qui nous parlaient du Réseau québécois des organismes sans but lucratif d'habitation et qui nous mentionnaient à quel point qu'il fallait qu'on tende vers un mode d'habitation avec des ressources pouvant faire en sorte de maintenir en habitation des clientèles tout à fait précises et, là, on avait une énumération: l'Alzheimer, les ex-psychiatrisés, ainsi de suite. Madame.

Mme Lanctôt (Sophie): Bien, nous, Société Logique, qu'on existe depuis 20 ans, nous sommes un organisme sans but lucratif subventionné à 15 % par l'Office des personnes handicapées du Québec et à 1,5 % par la Société d'habitation du Québec. On intervient en promotion de l'accessibilité universelle depuis tout ce temps-là, et je vous donnerais l'exemple, juste à Montréal, des unités de logement social et abordable malgré qu'on soit situé à Montréal et qu'on intervienne à Montréal depuis 20 ans. Des projets déposés dans le programme AccèsLogis actuellement à l'étude à Montréal, il y en a un qui a des unités universellement accessibles, c'est le projet sur le centre Préfontaine et j'y travaille depuis huit mois. On a un message à répéter, qu'on répète, qu'on répète aux architectes, mais, dans votre cas de bâtiments, ça s'appelle un programme architectural, au départ, et, si le programme architectural ne tient pas compte des besoins des gens qui vont habiter dans le bâtiment, on se retrouve dans des situations comme ça. Ce n'est pas normal.

M. Pinard: Est-ce que l'Ordre des architectes vous connaît?

Mme Lanctôt (Sophie): Oui, effectivement, on a fait une journée...

M. Pinard: ...Québec connaissent votre expertise?

Mme Lanctôt (Sophie): Effectivement, et les gens pensent souvent qu'on résout tous les problèmes d'habitation, d'accessibilité aux bâtiments publics des personnes handicapées en suivant les exigences minimales du Code de construction du Québec. Mais il n'y a presque rien dans le Code de construction du Québec. Savez-vous qu'il n'y a absolument rien pour l'intérieur des logements? Absolument rien. Donc, il y a encore énormément de travail à faire puis je suis contente que vous puissiez compter sur les informations qu'on va pouvoir vous donner à l'avenir.

M. Pinard: Vous savez, madame, on n'est pas en région éloignée. Nous sommes seulement en Mauricie, mais j'apprécierais beaucoup, beaucoup, beaucoup recevoir de la documentation de votre organisme et je vous invite à revoir l'Ordre des architectes, à les renseigner lors d'un congrès ou d'une séance de perfectionnement. Comprenez-vous?

Mme Lanctôt (Sophie): Ça va me faire plaisir de vous donner notre dépliant puis ma carte d'affaire.

M. Pinard: Parce que, en bout de ligne, madame, c'est nous qui payons, hein. C'est les deniers publics qui payons et vous venez de me dire, ce soir, qu'on pourrait économiser des sommes phénoménales si on tenait compte de votre expertise.

Alors, s'il vous plaît, madame, veuillez nous faire économiser le plus rapidement possible.

Mme Lanctôt (Sophie): ...

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors, ça termine cet échange. Je vous remercie. Merci beaucoup de votre contribution à nos travaux.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, très rapidement, je ne voudrais quand même pas que vous partiez avec l'idée que les parlementaires ne vous connaissent pas. Peut-être que l'ancien maire ne vous connaît pas, mais il y a des députés qui vous connaissent et on sait que votre organisme existe.

M. Pinard: Alors, vous entendez la voix de Montréal, mais celles des régions ici ne vous connaissent pas, madame.

Une voix: Dans les régions comme les nôtres, on les connaîtrait.

Mme Lanctôt (Sophie): ...des personnes handicapées en région nous connaît très bien également.

Le Président (M. Vallières): Merci de votre contribution à nos travaux. Je demande aux gens, les représentants de la ville de Québec de bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Vallières): Très bien. Alors, je demanderais aux gens qui représentent la ville de Québec de bien vouloir s'identifier et de procéder à la présentation de leur mémoire.

Ville de Québec

M. Larose (Claude): Bonsoir. Je suis Claude Larose, conseiller municipal à la ville de Québec, vice-président du Comité exécutif de la ville et responsable des dossiers d'habitation entre autres. Je suis accompagné, ce soir, de Mme Louise Lapointe qui est conseillère municipale, membre de la commission d'habitation; de M. Jean-Luc Duclos qui est conseiller municipal et président de la commission de l'habitation à la ville; et de M. Louis Méthé qui est fonctionnaire municipal responsable des dossiers d'habitation.

Alors, j'imagine qu'à l'heure qu'il est, votre fatigue doit être égale à la nôtre. Alors on va essayer d'être le plus dynamique et le plus vivant possible. Alors...

Une voix: ...

Le Président (M. Vallières): Il reste un petit peu d'énergie pour vous entendre et vous questionner. Allez-y, M. Larose.

M. Larose (Claude): Je ne vous lirai pas le texte. Vous avez reçu notre texte et je ne vous le lirai pas. Je ferai une présentation des principaux éléments d'abord pour dire qu'on a beaucoup apprécié le texte de la recherche qui a servi de document de fond pour la réflexion. C'est un document qui, au plan de l'analyse, est extrêmement bien fait, qui apporte des facettes nouvelles, qui a saisi des réalités nouvelles et qui nous présente la problématique sous à peu près tous les angles d'une façon extrêmement intéressante. Il suggère aussi de nouvelles pistes pour trouver des solutions durables et il est très teinté par la philosophie du développement durable, ce qui nous inspire beaucoup aussi à la ville de Québec.

On est très heureux d'être ici, ce soir, aussi, pour vous parler, dans le contexte qu'on connaît, de la rareté, de la pénurie des logements au Québec. Et on est heureux que vous consacriez du temps et de l'énergie à réfléchir à cette question et à prendre la peine d'essayer de mettre en place, de trouver des mesures dans une vision d'ensemble, des mesures durables pour améliorer la situation globale du logement au Québec. Le gouvernement risque... la commission, ici, risque de parler d'innovation malgré l'urgence de la situation et essaie d'envisager une approche globale. C'est extrêmement intéressant de prendre le temps de faire ce débat-là parce que le secteur de l'habitation est un secteur, on le sait tous, extrêmement complexe. Il y a beaucoup de facettes, il y a beaucoup d'intervenants et je pense qu'il n'y a pas une solution, il y a un ensemble de solutions qui peuvent nous aider à améliorer la situation, et on voudrait, ce soir, attirer votre attention sur quelques éléments qui, nous autres, nous semblent importants.

Il faut, je pense... Au Québec, on a une historique, un ensemble d'interventions dans le secteur de l'habitation qui nous ont permis d'arriver à une situation qui comporte des éléments extrêmement intéressants. On a un secteur de l'habitation où il y a de multiples intervenants, où il y a des pratiques extrêmement intéressantes et, malgré le fait qu'on a, au Québec, probablement une situation difficile, une population qui a un revenu moyen plus faible que la moyenne au Canada, par exemple, on a, dans le domaine de l'habitation, réussi à maintenir des coûts d'habitation qui sont relativement modérés et à avoir une situation où une grande partie de la population, qui est en situation financière difficile, a réussi quand même à trouver des solutions assez intéressantes sur le plan de l'habitation jusqu'à maintenant. Les interventions proposées par les auteurs de l'étude nous interpellent aussi beaucoup en tant que municipalité. Ils suggèrent des interventions et des rôles pour le niveau municipal et on y reviendra tout à l'heure, on a quelques commentaires à faire là-dessus.

n(21 h 50)n

Au niveau de l'amélioration des pratiques existantes, de ce qu'on fait déjà au Québec en habitation, on voudrait faire quelques commentaires. On a, au Québec, plusieurs interventions autant en termes de création de logements sociaux, qu'ils soient sous forme publique ou sous forme sans but lucratif ou sous forme coopérative. On a à court terme un chantier extrêmement important à faire au Québec pour contribuer à sortir de la situation difficile actuelle. Notre ville, entre autres, s'est impliquée grandement dans ce chantier et on est très préoccupé par le fait qu'il faut produire au Québec, dans les deux prochaines années, un grand nombre d'unités d'habitation de type social. Et on invite le gouvernement et la SHQ à mettre la priorité là-dessus et à... On est inquiet des délais administratifs et des difficultés, des embûches qu'il y a à avancer dans ce domaine-là, et on pense qu'il faut attirer l'attention de tout le monde pour qu'on réussisse ce chantier-là dans les deux prochaines années.

Dans les mesures à court terme aussi, dans le cadre de la pénurie de logements, il y a une solution qui a été mise en place, qui est d'offrir des unités de supplément au loyer temporaires pour les personnes qui se retrouvent en situation d'absence de logement. C'est une situation qui, si elle se répète encore une année ou deux, risque de devenir problématique parce que les gens vont rapidement saisir l'astuce et ne vont pas renouveler leur bail pour se retrouver en situation difficile pour avoir priorité, avec des unités de supplément au loyer, pour entrer dans le système plutôt que de demeurer sur les listes d'attente. Alors, je pense que, une des suggestions qui est faite, on puisse aller davantage à court terme avec une aide directe au ménage dont le seul problème, c'est son revenu insuffisant, ce serait peut-être une mesure, à très court terme, plus efficace et plus judicieuse pour aider, dépanner les ménages qui sont vraiment en situation d'absence de logement et d'incapacité de trouver un logement à très court terme.

On a une pratique de développement du logement social avec une implication importante des milieux communautaires, des GRT, et les auteurs proposent de renforcer le rôle de ces organismes et de trouver des moyens pour qu'on ait une plus grande pérennité de ce secteur-là, qu'il soit capable de générer ses propres fonds pour l'entretien et le développement des logements et qu'on puisse bâtir, à partir du capital qui dort, dans l'ensemble immobilier du secteur communautaire et coopératif. Et, là-dessus, on pense qu'il faut qu'il y ait un effort qui soit fait, que ça pourrait être une piste intéressante.

On a aussi une pratique, au Québec, assez unique, de contrôle du prix des logements. On pense, au niveau de la ville de Québec, que c'est un outil précieux et qu'il faut résister aux tentations de mettre la hache là-dedans au cours des prochaines années. C'est un des outils qui est très utile dans l'équilibre du secteur de l'habitation au Québec. Et, même si certains sont portés à dire que ça nuit à la production de nouveaux logements locatifs, je pense que la solution n'est pas dans la hache dans le contrôle des loyers, au contraire. On voit ce qui se passe ailleurs autour de chez nous et une intervention drastique pour réduire les contrôles aurait un effet dévastateur, à notre avis, dans l'ensemble de l'équilibre du système. Mais je vous donnerais juste un exemple personnel que j'ai vécu l'année dernière. Mon fils, qui est à Ottawa comme étudiant, a cherché un logement, et les logements qui... dans le cadre de la rareté actuelle, des logements d'étudiants, qui se louaient 900 $ l'année précédente, sont passés, en un an, à 1 200 $. Alors, c'est une augmentation de 33 % en un an. Alors, ça se vit quotidiennement en Ontario, ça. Alors, je pense que ce n'est pas ce qu'on souhaite comme modèle de société, ici, au Québec.

Je pense qu'il est urgent aussi ? et on le pense à la ville de Québec ? que, pour une période brève, pour nous permettre de sortir de la pénurie actuelle, les gouvernements doivent adopter des mesures fiscales pour inciter la construction de logements locatifs privés. Bien sûr, il faut que ce soit bien encadré, il faut que ce soit pour une période brève parce qu'il ne faut pas que ça serve à créer un nouveau déséquilibre au niveau du taux de vacance, mais je pense que ça s'impose parce qu'il faut absolument qu'il y ait une mise en chantier massive de logements, si on veut sortir rapidement et qu'on ne traîne pas la situation de pénurie actuelle pendant quatre, cinq ans. Et ça, nous, au niveau de la ville de Québec, on a fait de nombreuses pressions dans ce sens-là auprès des gouvernements de Québec et d'Ottawa et on espère que les gouvernements annonceront, dans les prochains mois, des initiatives en ce sens, parce que, si on ne le fait pas, c'est certain qu'au 1er juillet 2003 ce n'est pas quelques dizaines ou quelques centaines de familles qu'on aura sur les trottoirs mais ce sera plusieurs centaines, même à Québec.

Il y a une idée qui est soumise, assez novatrice pour le Québec, dans le rapport, qui est de faire un programme d'accession à la copropriété pour des ménages à revenus modestes. C'est une idée qui est intéressante, qui doit faire partie, je pense, de l'ensemble des moyens qu'on met en oeuvre. Et, à Québec, il y a des groupes communautaires qui ont déjà commencé à penser à cette idée-là au cours de la dernière année et on envisage, on souhaite démarrer un projet-pilote dans ce sens-là à Québec dans les prochains mois. À notre avis, c'est une mesure qui peut être intéressante pour une catégorie de la population, et on envisage de faire un projet-pilote où les familles, dans le cas qu'on envisage, pourraient devenir propriétaires progressivement, à la manière d'un bail ou location-achat, où, avec l'aide d'une société acheteuse, on pourrait acquérir des bâtiments, et les ménages pourraient devenir propriétaires progressivement des bâtiments. Et ça, je pense que c'est une solution qui peut aider une certaine couche de la population et qui peut aider à sortir de la crise actuelle.

Au niveau des liens entre le logement et la pauvreté, entre le logement et les problèmes sociaux, je dirais qu'à Québec on a certaines situations particulières sur lesquelles on souhaiterait intervenir, et les programmes actuellement en vigueur ne sont pas toujours facilitants pour ça. Je pense à, par exemple, la construction de maison de transition pour les immigrants nouvellement arrivés. On a énormément de difficultés à Québec à recevoir et à retenir les immigrants et, avec les programmes actuels, on ne peut pas vraiment construire des maisons de transition pour les immigrants nouvellement arrivés. Et on pense que, dans AccèsLogis, par exemple, on devrait pouvoir le permettre.

La construction de résidences pour les ménages étudiants, étrangers ou québécois, c'est un autre secteur de marché sur lequel on a de la difficulté, avec les programmes actuels, à pouvoir créer des logements adéquats.

Et je terminerais en vous disant que les grands centres urbains, et là, je pense à l'exemple de notre ville, la ville de Québec, on est extrêmement touchés par la problématique du logement, par la pénurie actuelle et par la nécessité de fournir une grande quantité de logements à une population qui a des revenus modestes. Et, avec les moyens que nous avons, on fait un effort maximum. La ville de Québec va consacrer cette année près de 10 % de son programme d'immobilisations pour le logement social. C'est un effort sans précédent, historiquement, et on est à la limite de ce que nous pouvons faire.

Les municipalités... Et là je fais un court plaidoyer pour dire que les municipalités, à partir de l'impôt foncier, ne peuvent pas s'impliquer dans toutes les problématiques sociales et dans toutes les problématiques auxquelles nous avons à faire face. Et j'ai parlé tout à l'heure de l'immigration, je parle du logement social, de la pauvreté. Et les municipalités vont, dans les prochains mois et dans la prochaine année, revendiquer ? vous l'avez déjà entendu ? une réforme fiscale, parce que les municipalités pensent aussi qu'il y a un déséquilibre fiscal envers les municipalités et vont revendiquer une réforme fiscale pour être en mesure de continuer à supporter les efforts, comme ceux qu'on fait actuellement dans le domaine de l'habitation.

n(22 heures)n

Alors, voilà pour les principales idées que je voulais vous soumettre. Je ne sais pas si mes collègues ont des choses à ajouter, mais on est prêts à répondre à quelques questions si vous en avez.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie, M. Larose. C'est très bien chronométré, on est exactement dans le 15 minutes, c'est bien préparé. Il y a des demandes d'intervention à ma droite. Oui, Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Oui, ce ne sera pas trop long. À la page 5, vous parlez ? juste un point d'information ? vous avez parlé de revenus de citoyenneté dans le quatrième paragraphe, deuxième ligne, troisième ligne. Je voudrais savoir qu'est-ce que vous entendez par ça? Moi, j'avoue que je ne connais pas ça.

Ensuite, j'aimerais ça... Je crois que le gouvernement accepte que vous soyez mandataires au niveau du logement sur votre territoire? Bien, en tout cas, il y a la question du contrat de ville. Dans votre mémoire vous parlez de Montréal et que vous allez probablement aussi avoir un contrat de ville. Moi, j'aimerais que vous nous disiez en quoi d'être mandataires ou de signer un contrat de ville va vous aider par rapport à une problématique telle que celle du logement social et de quelle façon vous pouvez aller plus vite sur un territoire comme celui de la ville de Québec? Je sais que vous avez un rééquilibrage à faire aussi sur votre territoire, en termes de quartier, de réponses par quartier, par arrondissement, vous appelez ça des quartiers, hein?

M. Larose (Claude): Arrondissement.

Mme Doyer: Arrondissement, arrondissement. Je devrais le savoir, j'habite Québec aussi. Et ça, dans la chaîne de production ? parce que vous avez comme la coop, le GRT, la SHQ qui est là dans le décor aussi et la ville de Québec ? comment faire pour que vous alliez plus vite dans la livraison? Voilà.

M. Larose (Claude): Pour répondre à votre dernière question, d'abord, effectivement, la ville de Québec, on a terminé la négociation avec la SHQ et on va devenir mandataires dans les prochaines semaines pour l'administration des programmes de logement social, et on est convaincus qu'on pourra ? parce qu'on est très près des gens et qu'on aura des agents qui seront très près des groupes de ressources techniques ? accélérer de beaucoup les processus. Actuellement, les processus sont assez longs avec la SHQ parce qu'il y a beaucoup de dossiers, il y a un volume beaucoup plus important de dossiers, et la SHQ a dû embaucher une nouvelle personne, il y a des personnes qui ont été formées et les processus ? en tout cas, depuis six mois ? les processus sont plus longs qu'ils étaient avant. Alors, ce n'est pas de cette façon-là qu'on va être capables de livrer une plus grande quantité de logements. Alors, nous avons décidé de devenir mandataires, et nous sommes convaincus que nous pouvons, en travaillant de concert, de très près avec les groupes de ressources techniques, accélérer de plusieurs mois les processus de livraison dans chaque projet.

Mme Doyer: Merci. Et sur le revenu de citoyenneté, c'est quoi, ça?

M. Larose (Claude): Peux-tu répondre, là-dessus?

M. Méthé (Louis): Oui, oui, je peux répondre. Alors, le revenu de citoyenneté, c'est un revenu ? on en a parlé il y a un an ou deux, beaucoup, dans les journaux ? c'est un revenu ? on trouve ça en Scandinavie, par exemple ? c'est un revenu qui assure un revenu minimal de base à tous les citoyens. Ça vient remplacer toutes les mesures d'aide sociale disparates qu'on peut avoir en ce moment à la disponibilité des gens qui en ont besoin, et c'est une mesure globale: tout le monde a accès à ce revenu-là. Ça permet d'assurer en quelque sorte à tout le monde une base de citoyenneté, donc.

Mme Doyer: Excusez-moi. Est-ce que c'est comme ce qu'on appelait ici, et ce qu'on appelle encore, le revenu minimum garanti? C'est comparable?

M. Méthé (Louis): Oui, ça ressemble à ça, sauf que tout le monde y a accès, qu'on travaille ou qu'on ne travaille pas, par exemple. Et, comme je disais, ça vient remplacer toute la panoplie disparate qu'on peut avoir à l'heure actuelle: des suppléments au loyer, des allocations au logement, de base, plus un bonus quand on en a plus besoin, la pension de vieillesse, etc. Si on a mis ça dans le document, ici, c'est pour inviter justement à une réflexion plus globale sur l'ensemble de la question de la politique de l'aide sociale. On s'adressait à l'Assemblée nationale du Québec, donc un peu au sommet, si vous voulez, social par excellence. Et le message qu'on voulait lancer, c'est que le logement n'est pas indépendant de toutes les mesures d'aide sociale autres que celles qui vont spécifiquement au logement.

Et comme le document qui a été préparé par la commission est un document de grande envergure qui, quand même, pose beaucoup et bien des problèmes, ce qu'on voulait, c'était inviter justement à une réflexion sur l'ensemble de la question sociale. Parce que le logement, on a beaucoup tendance ici à... Moi, ça fait 20 ans que je travaille dans le logement, et, je me rappelle, il y a trois ans, j'avais été à Toronto parce que j'étais préoccupé de comprendre quelle pouvait être la situation quand on avait un taux d'inoccupation des logements inférieur à 1 %. À l'époque, on était à 5,6 % d'inoccupation à Québec même. Les gens là-bas étaient très surpris. En trois ans, on les a rattrapés, et je suis absolument sidéré de voir que personne n'a vu ça venir. Et, d'un autre côté, je regarde en Europe, et on voit, par exemple à Amsterdam, que les deux tiers des logements locatifs sont propriété publique, ce sont des OBNL, des coopératives, des logements d'État, les deux tiers.

Mme Doyer: Les deux tiers?

M. Méthé (Louis): Les deux tiers. Ici, on a peut-être, quoi? Bon, alors, on a des chiffres ici: c'est peut-être, dans l'ensemble des logements, 7 % qui sont des logements sociaux, peut-être que ça fait 10 ou 12 % de l'ensemble des logements locatifs. Donc, on est très, très loin de l'Europe. Donc, on n'a pas vraiment une problématique d'ensemble puis une approche d'ensemble de toute cette question-là.

Mme Doyer: Je vous remercie, madame, monsieur.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Larose, M. Duclos, Mme Lapointe et M. Méthé, de la ville de Québec. On vous a gardés pour le dessert. Intéressant un peu, surtout, l'expérience qui se fait ici dans la ville de Québec et votre réalité. Alors, je vais d'abord vous poser une question juste pour me situer: 283 000 logements, dont 13 000 logements sociaux, c'est bien ça, à Québec?

Une voix: Oui, 230 000, 238 000.

Mme Houda-Pepin: 230 000? O.K. Dans quel état est le parc locatif chez vous, à Québec?

M. Larose (Claude): Le parc locatif global?

Mme Houda-Pepin: Global, oui.

M. Larose (Claude): Il y a des programmes. La ville de Québec a depuis 25 ans participé à tous les programmes gouvernementaux pour améliorer l'état du parc locatif. Donc, il y a encore un bon pourcentage de logements qui ont besoin de rénovations, mais il y a eu un effort énorme qui a été fait, particulièrement dans le centre-ville, pour améliorer l'état du parc de logements, et je pense que, là-dessus, c'est une ville probablement... une des villes qui a fait le plus au Québec dans ce domaine-là.

Mme Houda-Pepin: Vous avez un budget, pour la rénovation, de combien?

M. Larose (Claude): Cette année, par exemple, le programme Rénovation Québec, conjointement avec la SHQ, c'est 10 millions de dollars pour la rénovation.

Mme Houda-Pepin: Bien. Et pour le logement social, l'enveloppe, c'est quoi?

M. Larose (Claude): Pour les deux années, 2002 et 2003, au total, la part ville est de 10 millions pour deux ans et la part du gouvernement du Québec est de l'ordre de 45 millions.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Le logement abordable...

M. Duclos (Jean-Luc): J'ajouterais: Sur le plan, je dirais, de la qualité des logements, évidemment, ça...

Mme Houda-Pepin: Pourriez-vous vous identifier?

M. Duclos (Jean-Luc): Jean-Luc Duclos, je m'excuse.

Mme Houda-Pepin: O.K. M. Duclos. Excusez-moi.

M. Duclos (Jean-Luc): Bon. Demeurant un peu plus en banlieue, c'est sûr que la parc immobilier de la banlieue qui a été construit au cours des années soixante, soixante-dix, quatre-vingt, contrairement peut-être au début du siècle, dans le centre-ville de Québec, l'état, c'est différent comme situation. Alors, je pense que, ça... Ça va?

Mme Houda-Pepin: Oui, je comprends. Pour le logement abordable, la ville de Québec a déjà planifié ses besoins, je pense. Vous avez combien de logements qui vont se réaliser et est-ce que vous avez une idée quand est-ce que vous allez commencer à faire les premières pelletées de terre?

M. Larose (Claude): Il y en a déjà de faites. La ville de Québec, dès la création de la nouvelle ville au mois de janvier, un des premiers dossiers que nous avons abordés, compte tenu du problème de la pénurie de logements, c'est celui-là. Dès le mois de février, nous avons déposé à la SHQ une dizaine de projets pour 200 unités AccèsLogis et nous avons indiqué aux groupes de ressources techniques, dès ce moment-là, que nous voulions réaliser au total plus de 700 logements pour le 1er juillet 2003. Et nous avons mis les groupes de ressources techniques au travail de telle sorte qu'ils nous ont déposé avant la fin septembre, cette année, tous les projets pour 2002 et 2003.

Mme Houda-Pepin: Ça, c'est pour le programme AccèsLogis.

M. Larose (Claude): Et le logement abordable.

Mme Houda-Pepin: Le logement abordable. Vous avez déjà appliqué des paramètres qui sont définis par le gouvernement au logement abordable?

M. Larose (Claude): Oui.

Mme Houda-Pepin: Ça vous coûte combien, la porte, dans le cas du logement abordable?

M. Larose (Claude): Oh! Je ne peux pas vous répondre parce que je ne connais pas les chiffres par coeur. Mais les projets ont tous été déposés. L'analyse n'est pas faite encore, mais les projets ont été déposés au 30 septembre. On avait demandé aux groupes des ressources techniques de déposer tous les projets pour plus de 700 unités, et on est confiants que la plupart d'entre eux seront réalisés pour le 1er juillet 2003.

n(22 h 10)n

Mme Houda-Pepin: O.K. D'accord. Donc, vous avez commencé, vous, à réaliser, dans le cadre du programme de logement abordable?

M. Larose (Claude): Les deux programmes, oui.

Mme Houda-Pepin: Parce que plusieurs groupes se sont présentés pour nous dire que le programme ne fonctionne pas actuellement, qu'il y a une révision des paramètres du programme qui restent à être précisés et que le gouvernement n'a pas encore donné signe de vie pour savoir quelle suite il va donner aux propositions qui ont été faites par le milieu pour améliorer ou bonifier les critères du logement abordable.

M. Larose (Claude): Nous, les groupes ont présenté des projets en fonction des critères connus jusqu'à maintenant, et les projets qui ont été déposés semblent viables. On va faire l'analyse.

Mme Houda-Pepin: Vous abordez dans votre mémoire un certain nombre de choses, notamment lorsque vous parlez des programmes. Vous dites qu'il faudrait, en fin de compte, évaluer la pertinence et l'efficacité d'un certain nombre de mesures.

Est-ce que, à votre avis, il est utile d'évaluer les programmes de la Société d'habitation du Québec, sachant que ces programmes-là ont été développés en fonction d'un certain nombre de besoins, que ces besoins-là sont changeants, que les réalités ont été modifiées et que peut-être il est temps qu'on regarde ces programmes-là en fonction de leur efficacité?

M. Larose (Claude): C'est sûr que c'est toujours pertinent de faire l'évaluation pour voir si on utilise au maximum l'argent public puis qu'on a le maximum d'efficacité. Mais je vous dirais que, globalement, avec l'expérience qu'on a, il faut s'assurer que si on veut améliorer la situation et régler les problèmes, il faut s'assurer qu'on a une panoplie d'interventions. Par exemple, il y a tout un débat entre les gens qui sont plutôt favorables à la construction de logements sociaux versus ceux qui sont davantage favorables au supplément au loyer dans le marché privé. Nous, on pense qu'il faut là-dedans avoir un équilibre, que les deux formules doivent être appliquées. De toute façon, lorsque ? on s'en rend compte ? lorsque le taux de vacance varie, il y a une formule qui devient plus efficace que l'autre, par exemple. Lorsque les taux de vacance sont très bas, les propriétaires privés deviennent beaucoup moins intéressés à avoir des suppléments au loyer dans leur bâtiment, et on a parfois de la difficulté à placer tous les suppléments au loyer dans les bâtiments. Alors, si c'était la seule formule qu'on avait, ce ne serait pas efficace.

Donc, l'idéal, c'est d'avoir un panier de formules, comme on a au Québec actuellement, pour s'assurer qu'on touche plusieurs des situations, parce qu'on touche toujours des clientèles particulières puis des situations particulières dans beaucoup de domaines. Et je pense qu'avec AccèsLogis, avec le supplément au loyer, avec le contrôle des loyers qu'on a au Québec, avec l'essai qu'on pourrait faire de l'accès à l'habitation pour les ménages à revenus modestes, l'accès à la propriété pour les ménages à revenus modestes, cet ensemble-là va nous aider à régler les problèmes, mais je ne pense pas qu'on doive s'enligner vers une mesure en particulier. Mais l'évaluation peut nous aider à s'assurer que, dans chaque mesure, on est le plus efficient possible.

Mme Houda-Pepin: D'accord. Vous avez proposé, je crois, des maisons de transition, d'accueil pour les nouveaux arrivants. Je sais que la ville de Québec est venue en commission parlementaire pour réclamer que la ville de Québec soit déclarée pôle d'immigration. Je vous en félicite, je pense que c'est important que vous puissiez avoir votre quote-part de l'immigration, surtout pour répondre aux besoins du marché du travail. Mais la formule de parquer les nouveaux arrivants dans un seul immeuble, vous ne pensez pas que ça pourrait être un peu contraire à l'idée même que l'on se fait de l'intégration, surtout dans les premières années d'arrivée des gens qui doivent être en contact direct avec la société d'accueil et avec le milieu?

M. Larose (Claude): Mais nous, lorsqu'on parle de maisons d'accueil, ce n'est pas pour des années, là, c'est pour quelques mois parce qu'il arrive... À Québec, on a beaucoup de difficultés, au niveau de l'accueil des immigrants et au niveau de la rétention des immigrants. Et, au niveau de l'accueil, il y a un cas pathétique actuellement dans la ville de Québec où une dizaine de familles qui représentent 100 personnes ont été parquées dans un immeuble privé avec un bail de deux ans et c'est un drame, là, actuellement. Ça a fait les articles dans les journaux la semaine dernière. Il y a des problèmes qui se sont développés et c'est un drame. Mais ce qu'on pense que ça prend davantage, c'est des maisons d'accueil et de transition pour quelques mois, le temps que les personnes mettent pied à terre, qu'elles soient capables de choisir le meilleur endroit pour aller demeurer. Mais je suis d'accord avec vous qu'il ne faut pas viser à créer des ghettos.

Mme Houda-Pepin: Mais, en tout cas, je trouve cette idée discutable, largement discutable parce que je suis d'avis qu'il faudrait que les nouveaux arrivants aient un contact direct avec la société d'accueil, immédiatement à leur arrivée. Parce que, par exemple, vous avez des immigrants qui arrivent en famille. Les enfants, il faut qu'ils aillent à l'école, le conjoint doit chercher du travail. Souvent, le support, on l'obtient dans le voisinage, et il faut entrer en contact avec les gens du milieu, qui connaissent la société, qui pourraient aider ces gens-là à choisir l'école pour leur enfant, à savoir qu'est-ce que c'est qu'un CLSC, savoir c'est quoi, les services gouvernementaux, etc. Alors, si on met les gens qui viennent d'arriver du Laos, de la Chine, d'Afrique ensemble, ça va être un nouvel exil pour eux parce qu'ils sont tous dans la même situation; ils n'ont pas le support nécessaire requis pour, d'abord, amoindrir le choc culturel qu'ils vont vivre inévitablement et, deuxièmement, prendre contact et connaître les institutions, parce que l'intégration, c'est ça, c'est de connaître les institutions, leur fonctionnement et savoir comment s'insérer là-dedans, que ce soit le marché du travail ou l'école ou les services sociaux ou les services de santé et ainsi de suite.

Alors, moi, je vous inviterais à reconsidérer votre idée. L'idée, par exemple, de trouver, d'identifier des logements et de pouvoir référer les nouveaux arrivants, là, oui, par supplément de loyer ou autrement, mais de les parquer là dans les premiers mois de leur arrivée, je vous dis que ce n'est pas nécessairement la meilleure façon de les retenir. Ça, soyez sûrs et certains de ça, ce n'est pas comme ça qu'on va les retenir parce qu'ils vont se retrouver encore isolés, doublement isolés de la société dans laquelle ils veulent s'intégrer.

Le Président (M. Vallières): Je pense que M. Méthé veut répondre à la question.

Mme Houda-Pepin: Oui.

M. Méthé (Louis): Vous avez entièrement raison, mais il faut quand même se rappeler une chose, c'est que nous sommes en situation de pénurie de logements. Il n'y a pas de logements. Et je me rappelle une expérience personnelle. On m'avait téléphoné, des gens du ministère de l'Immigration, parce que des gens arrivaient prochainement d'Afrique, une famille de 14 personnes; on ne trouvait pas de logement à Québec et, effectivement, on n'en a pas trouvé à Québec, on les a envoyées à Chicoutimi. C'est pour pallier à une situation comme ça qu'on pense qu'il serait bon qu'on puisse disposer de logements qui seraient réservés pour les nouveaux arrivants. Maintenant, ces logements-là, on ne les placera pas nécessairement tous à la même place, etc. Ils peuvent être disséminés à travers la ville, mais, au moins, ça va nous faire une banque d'endroits où on va pouvoir diriger des gens, alors qu'à l'heure actuelle on en manque. C'est dans ce sens-là.

Mme Houda-Pepin: Moi, dans la mesure où on va les disséminer puis qu'ils vont vivre avec les autres, je n'ai pas de problème. C'est lorsqu'on me parle de maisons de transition pour leur faciliter l'atterrissage ici que... Je peux vous dire que, au début, ça va prendre minimalement une année avant qu'une personne rapide au niveau de l'intégration va pouvoir circuler par ses propres moyens. Donc, une année, c'est long dans les premières années d'arrivée.

Je voulais vous demander une question qui nous a été soulevée concernant les redevances de développement. Certains groupes nous ont dit qu'ils sont préoccupés par le fait que le gouvernement puisse introduire une sorte de nouvelle taxe qui s'appellerait les redevances de développement. Est-ce que vous en avez entendu parler? Qu'est-ce que vous dites par rapport à ça?

M. Larose (Claude): Oui, les municipalités en discutent actuellement. On pense qu'il faut que, lorsqu'il y a des nouveaux développements, tous les coûts qui sont liés aux services qu'il va falloir donner à ces nouveaux développements soient pris en compte de plus en plus.

n(22 h 20)n

Nous, à la ville de Québec par exemple ? et là, je déborde un petit peu des redevances de développement ? on envisage actuellement, lorsqu'on envisage un nouveau développement domiciliaire, de prendre en compte non seulement les coûts des infrastructures d'eau, d'aqueduc, d'égout qui sont actuellement pris en compte lorsqu'on fait un nouveau développement mais de prendre en compte aussi tous les coûts futurs de services qu'il faudra donner: le transport en commun, les écoles, les services de loisirs, tous ces coûts-là, pour qu'on n'ouvre pas des quartiers sans tenir compte de ça et que les gens qui vont choisir d'aller s'établir dans les nouveaux quartiers aient à payer le coût réel de leur arrivée à cet endroit. Et, de cette façon, les municipalités pourront s'assurer qu'il n'y aura pas d'étalement urbain où les gens vont aller s'installer à certains endroits parce que les terrains sont moins chers puis où les gens, une fois qu'ils sont installés, vont demander d'avoir tous les services qui vont devoir leur être payés par le reste de la population. Alors, on va prendre en compte, en partant, tous les coûts et on va les imputer à ce développement, de telle sorte que les gens qui vont choisir d'aller demeurer à un certain endroit vont payer le coût réel de leur choix, et ceux qui ne voudront pas faire le choix vont aller rester ailleurs. Ça va permettre, entre autres, de développer les sites qui sont déjà desservis. Dans une ville comme Québec, par exemple, il y a des sites desservis par aqueduc et égout, mais qui ne sont pas construits, des terrains pour construire 60 000 unités de logement. Pourtant, il y a des promoteurs qui veulent continuer à ouvrir des rues dans le champ puis dans la forêt. Alors, ça, ça fait partie des préoccupations qu'on a de plus en plus. On veut donc que, dans tout nouveau développement, on prenne en compte non seulement les coûts des infrastructures immédiates mais les coûts des services futurs à fournir.

Le Président (M. Vallières): Merci. M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que vous avez un mémoire qui a apporté certainement une lumière, une réflexion, qui a apporté de l'information à notre réflexion sur le dossier de l'habitation. J'aimerais savoir, moi, votre pourcentage de propriétaires à Québec.

M. Méthé (Louis): Dans la nouvelle ville?

M. Laprise: Vous avez 238 000 logements. Je trouve ça beaucoup, quand même, de locataires, 238 000.

M. Méthé (Louis): Non, c'est 238 000 logements au total, ça. Ce n'est pas seulement les locataires. Ça, c'est au total.

M. Laprise: O.K. Votre pourcentage de propriétaires, vous n'avez pas ça, à brûle-pourpoint?

M. Méthé (Louis): Je vous dirais autour de 40 % de propriétaires, 60 % de locataires.

M. Laprise: O.K., O.K.

M. Méthé (Louis): De mémoire, là.

M. Laprise: 13 000 logements, comme ça. Maintenant, c'est bien évident que, à Québec, vous êtes une des régions, quand même, qui ont le plus bas taux de chômage au Québec, la région de Québec.

M. Larose (Claude): De si peu!

M. Laprise: Ça veut dire que vous avez une activité économique en conséquence. C'est peut-être pour ça que ça vous a surpris, les trois ans que vous...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pinard: Ils sont partis de...

M. Laprise: Les trois ans... Vous avez peut-être été surpris. Si ça a augmenté, justement, c'est parce que l'activité économique de Québec a été, avec les nouvelles technologies, le Parc technologique, tout ce qui s'est présenté à Québec...

M. Larose (Claude): Vous avez raison.

M. Laprise: ...vous n'avez pas diminué au niveau du tourisme, la ville de Québec est encore la ville par excellence pour le tourisme au Québec. Même si le Jardin zoologique était fermé puis l'Aquarium, vous n'avez pas baissé en tourisme, vous avez conservé votre achalandage, c'est très positif pour vous autres.

Maintenant, je voudrais savoir si, avec les programmes qui existent actuellement, vous êtes en mesure de répondre aux besoins. Parce que, c'est bien évident, malgré qu'il y a une activité économique importante, il y a toujours des gens qui sont plus démunis les uns que les autres, et ces gens-là, il faut les supporter, il faut les encadrer. Ça, c'est inévitable.

M. Duclos (Jean-Luc): Oui. Vous parlez du taux de chômage. Ça a été un des facteurs ? qui est mentionné, je pense, dans le rapport ? le fait que les jeunes ont du travail assez facilement, même si ce n'est peut-être pas à des salaires mirobolants. Ces jeunes-là qui sont ? il faut se le dire entre nous autres ? des enfants des baby-boomers, le taux de natalité n'est pas fort, mais, comme c'est des enfants des baby-boomers qui étaient, eux, nombreux, temporairement, ça fait une pression sur les logements, et ça, ça va se résorber avec le temps. Là, je lisais un rapport dernièrement où on disait que les logements qu'on va construire d'ici une vingtaine d'années se libéreront tous dans les années qui vont suivre. Donc, si on se reporte dans 20 ans, disons, on aura probablement un taux de vacance, peut-être, de 10 %, je ne sais pas, là.

M. Laprise: Mais avez-vous pensé mettre un incitatif pour l'accès à la propriété justement pour les jeunes techniciens qui arrivent ici, à Québec? Moi, j'en ai un garçon à Québec; il vient de se bâtir, là. Puis je pense que c'est vraiment un point important pour un jeune, d'avoir son chez-soi, un jeune couple qui veut avoir des enfants. Alors, c'est important, d'avoir son chez-soi. Il y aurait peut-être un incitatif ou encore une promotion à faire, comme on en fait pour d'autres choses, pour inciter les jeunes à avoir leur propriété, à avoir leur petit lopin de terre.

M. Larose (Claude): À la ville de Québec, depuis sept, huit ans, on a effectivement un programme d'accession à la propriété dans les quartiers du centre-ville parce qu'on voulait ramener des familles avec des jeunes enfants dans le centre-ville, et les familles n'avaient souvent pas les moyens d'acheter les bâtiments au centre-ville. Donc, on a un programme d'accession à la propriété où on donne aux jeunes à peu près l'équivalent de la mise de fond qu'ils doivent mettre pour acheter, c'est-à-dire un 5, 6 000 $ qui est la mise de fond qu'ils doivent mettre pour acheter une maison de 90, 100 000 $ ou un logement.

M. Laprise: ...de ramener du monde dans votre centre-ville pour lui donner un coeur, lui donner de la vie, c'est avec des jeunes. C'est ça, la vie: les jeunes qui arrivent, là.

M. Larose (Claude): C'est justement ça qu'on a fait comme programme.

M. Laprise: Il faut leur donner de la place au soleil. Je pense que c'est une responsabilité municipale, ça.

Mme Doyer: C'est parce qu'il y a trop de députés, il y a trop de députés dans ce coin-ci, là.

M. Duclos (Jean-Luc): C'est ça, le problème des centres-villes, mais, pour les villes périphériques, on remarque depuis quelques années un certain intérêt des jeunes pour les anciens quartiers, là, qui ont vieilli.

M. Laprise: Vous plaidez votre cause, vous, là, là, hein.

M. Duclos (Jean-Luc): Non, mais les gens... Le quartier où j'habite, là, bon, c'est un quartier qui a été construit il y a une quarantaine d'années, alors les gens, les personnes âgées commencent à quitter, et on voit des jeunes qui viennent s'installer dans ces quartiers-là plutôt que de se construire en périphérie, là, très loin des services. En tout cas, c'est un phénomène, moi, que j'observe chez moi. C'est peut-être moins évident pour un quartier plus vieux comme Saint-Roch, ce coin-là, je ne sais pas, peut-être moins....

M. Laprise: Parce que vous avez tout ce qu'il faut pour attirer. Vous avez une dimension culturelle fort importante, vous avez un paquet d'attraits fort importants. Alors, je pense que vous avez ce qu'il faut, les instruments, là. Il s'agit que vous ayez le «guts» pour relever ce défi-là.

Le Président (M. Vallières): Alors, M. Méthé, vous voulez répondre à la question du député de Roberval?

M. Méthé (Louis): Je voudrais profiter de la perche que vous nous tendez là. Vous parlez de développement économique, et c'est très intéressant, cette remarque sur le développement économique. Effectivement, à Québec, on sent un souffle économique vigoureux, là, mais il y a un paradoxe par rapport au logement, c'est que les endroits... L'endroit que j'ai visité dont je vous ai parlé tout à l'heure où on avait un taux d'inoccupation inférieur à 1 %, c'est Toronto. Toronto qui est un endroit, en fait, au Canada, qui est l'endroit au Canada qui est le plus prospère au plan économique. C'est aussi l'endroit où on a de très gros problèmes de logement parce que ça fait une pression. Les gens qui viennent, les nouveaux arrivants, le prix du terrain qui monte, je voyais ces gratte-ciels au centre de la ville qui supposaient qu'autour on avait une rente foncière très grande, là, un prix de terrain très, très élevé, avec des édifices à trois étages autour des gratte-ciels. Je me disais: Mais ça n'a pas de bon sens, la pression qui doit s'exercer sur ces terrains-là par rapport justement à la valeur du prix du terrain qui est là.

M. Laprise: C'est là qu'on doit être différent des autres. Ne copiez pas Toronto mais, au contraire, mettez de la vie dans votre ville. Vous êtes porteur d'une ville nouvelle, monsieur, vous êtes porteur d'une ville nouvelle qui doit être accueillante à la vie des jeunes, à la vie des personnes âgées, à la vie des handicapés, à la vie de tout le monde. C'est ça, votre mission. C'est ça, votre mission.

M. Méthé (Louis): Ça, c'est très bien, oui, du point de vue économique ça va très bien. Du point de vue économique, oui, du point de vue économique, ça va bien.

M. Laprise: Dites ça joyeusement, vous avez l'air triste.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Méthé (Louis): Mais je vous donnerais un autre exemple, je vous donnerais un autre exemple, je vous donnerais un autre exemple, c'est l'exemple d'une ville en Alberta.

M. Laprise: Vous êtes porteur d'une capitale, monsieur, vous êtes porteur d'une capitale, puis vous représentez l'image du Québec, de ces grandes régions, de toutes ces ressources.

M. Méthé (Louis): Oui, mais là, je vais vous parler d'importateurs de pétrole, je vais vous parler...

Une voix: ...

Le Président (M. Vallières): Mais là, vous m'avez l'air d'être partis jusqu'à demain matin. M. Méthé.

M. Méthé (Louis): Je veux quand même apporter à votre attention: si on est porteur de beaucoup de choses, il y a des gens qui ne profitent pas de ce qu'on porte parce qu'il n'y a pas de retombées. Et l'exemple le plus patent de ça, c'est une ville en Alberta où on a trouvé du pétrole. Le pétrole, on le sait, c'est l'or noir, hein. Ils étaient porteurs de pétrole, donc une richesse incommensurable. Et le maire qui participait à un congrès auquel j'assistais a été un des plus véhéments à réclamer des programmes d'aide au logement parce que dans sa municipalité, lui, comme maire, maire d'une municipalité qui ? comment je dirais? ? qui flottait sur la richesse, il était incapable de loger les gens qui venaient chez lui.

Et c'est le paradoxe du développement économique et il faut être très préoccupés de cette situation-là parce que, dans la ville de Québec, il y a des gens qui n'en profiteront pas automatiquement du développement économique. Pourquoi? Parce qu'ils ne sont pas sur le marché du travail. Alors, en 1996, on avait déjà, quoi, 43 % de la population, des ménages, qui avait un taux d'effort de 30 %, mais le quart des ménages payaient plus que 50 % pour se loger. Et combien dans ça pourront profiter vraiment directement de l'amélioration de l'économie de la ville? Alors, quand on se préoccupe de logement et qu'on voit qu'une situation économique s'améliore grandement, il faut en être d'autant plus préoccupés par rapport au logement.

Le Président (M. Vallières): Bien. Alors...

n(22 h 30)n

M. Méthé (Louis): La deuxième question, c'est par rapport...

Le Président (M. Vallières): M. Méthé, rapidement. Il faut aller rapidement.

M. Méthé (Louis): Très, très rapide, là. C'est une question qui est récurrente par rapport aux programmes, par rapport aux contrats de ville, etc. On s'est posé la question par rapport à l'évolution des programmes: Est-ce que les programmes sont adaptés? Je vous dirais que, avec la Société d'habitation du Québec, les programmes sont continuellement en adaptation depuis 20 ans que je vois ça avancer. On a continuellement eu de nouvelles générations de programmes et on s'en est allés vers des programmes qui sont de plus en plus globaux et qui délèguent des responsabilités aux municipalités. Et là, j'arrive aux contrats de ville, contrats de ville qui justement sont un lien qui devrait exister entre la ville et le gouvernement par rapport à des grandes missions de la ville.

Et, quand on regarde les contrats de ville en France, par exemple, le logement occupe une grande place dans la préoccupation de ce qu'on appelle les contrats de ville. Mais, bon, il y a toutes sortes d'autres contrats que les municipalités peuvent signer. Donc, il faudrait éventuellement penser dans cette question des contrats de ville, dans ces questions des grandes missions de la ville, de ces engagements entre la ville et le gouvernement, penser à placer le logement parmi les objets qui font l'objet de ce lien de contrat entre la ville et le gouvernement.

Le Président (M. Vallières): Je vous remercie. Il y a Mme Lapointe qui, à un moment donné, voulait prendre la parole. On va terminer avec vous, en indiquant aux membres de la commission que, demain matin, on ne pourra pas commencer comme on a fini là, avec le député de Roberval. On va essayer de garder ça à l'ordre un peu plus. On permet une certaine effervescence de fin de séance là. On va terminer avec Mme Lapointe, avec vos commentaires.

Mme Lapointe (Louise): Deux commentaires. J'aurai deux commentaires: c'est-à-dire que, monsieur, vient de m'interpeller quand il parle d'une ville globale, d'une ville neuve, d'une ville qui a toutes les capacités possibles d'accueil. Mais il ne faut pas oublier que, dans cette ville-là, on a des jeunes puis on a des vieux. Alors, quand on parle des vieux, il faudrait penser que ces vieux-là veulent rester à domicile le plus longtemps possible. Alors, moi, je glisse un peu sur autre chose, il faudrait que le gouvernement pense à bonifier le programme de maintien à domicile pour les personnes âgées. On parle de nos personnes âgées et, actuellement, les personnes âgées, il faut cesser de les déraciner. Ça, ça les fait mourir plus vite quand on les envoie en centre d'accueil où ils ne veulent pas aller, et puis, dans les CHSLD, où elles ne sont pas encore ne perte d'autonomie pour avoir accès à ce type de logement là. Alors, moi, vous m'avez interpellée. C'est vrai qu'il y a des jeunes, il faut les accueillir, mais il faut penser aux vieux qui sont déjà là puis il faut les garder chez eux. C'est l'intervention que je voulais faire.

Le Président (M. Vallières): Très bien. Je vous remercie...

Mme Lapointe (Louise): Je n'avais pas encore fini.

Le Président (M. Vallières): Oui.

Mme Lapointe (Louise): Madame, quand vous parlez de l'immigration, à Québec, quand vous dites qu'il faut tenter de les disséminer, mais eux-mêmes cherchent à se rapprocher.

Mme Houda-Pepin: C'est normal, ça.

Mme Lapointe (Louise): On a un secteur à Québec qui est après se développer avec de la couleur, je vous jure là. On commence à voir de la couleur, mais juste dans un secteur. Et on a des petits restaurants asiatiques à tous les coins de rue. Et puis tous les jeunes, je les vois traverser la rue ? parce que c'est dans mon district électoral ? le matin, je les vois traverser la rue puis ils sont presque tous dans la même cour de récréation où la minorité visible, c'est les Blancs. Alors, je me dis... Puis ils sont très heureux. Puis on a des Africains, des Vietnamiens, des Coréens, on a de toutes les sortes. Et ils cherchent à se regrouper. Mais ils ne sont pas plus malheureux pour autant. Une famille arrive, les autres suivent. Ils ne veulent pas aller ailleurs.

Mme Houda-Pepin: Je n'ai jamais dit qu'ils étaient malheureux.

Mme Lapointe (Louise): Non, non!

Mme Houda-Pepin: J'ai dit que vous avez une responsabilité.

Le Président (M. Vallières): S'il vous plaît! Mme Lapointe, terminez.

Mme Lapointe (Louise): Oui, mais ils sont bien intégrés. Ils sont heureux, même s'ils sont tous dans le même secteur. C'est juste ça que je voulais dire.

Le Président (M. Vallières): Alors, on remercie beaucoup les gens de la ville de Québec. Et, même si vous étiez les derniers, vous avez eu un avantage comparatif: vous avez eu un peu plus de temps que les autres. C'est votre récompense. Merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux. La commission ajourne ses travaux à demain, 9 heures.

(Fin de la séance à 22 h 34)


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