L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de l'aménagement du territoire

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de l'aménagement du territoire

Version finale

38e législature, 1re session
(8 mai 2007 au 5 novembre 2008)

Le mercredi 7 novembre 2007 - Vol. 40 N° 19

Consultations particulières sur le projet de loi n° 22 - Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'agglomération de Montréal


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. L'Écuyer): Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'aménagement du territoire ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires.

Des voix: ...

Le Président (M. L'Écuyer): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission est réunie afin de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation particulière sur le projet de loi n° 22, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'agglomération de Montréal.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui. M. Francoeur (Portneuf) est remplacé par Mme Lapointe (Groulx); M. Roux (Arthabaska) est remplacé par M. Benjamin (Berthier); M. Côté (Dubuc) est remplacé par M. Curzi (Borduas); M. Cousineau (Bertrand) est remplacé par M. Turp (Mercier).

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. le secrétaire. Ce matin, nous entendrons les représentants de l'ADISQ ainsi que l'organisme Culture Montréal vers 11 heures environ.

Alors, j'invite maintenant les représentants de l'ADISQ à prendre place à la table des témoins, en leur rappelant qu'ils disposent d'une période de 15 minutes pour leur présentation. J'inviterais son porte-parole à s'identifier et à présenter les gens qui l'accompagnent.

Avant le début de votre introduction, nous avons aussi un autre remplacement.

Le Secrétaire: Oui. M. Tomassi (LaFontaine) est remplacé par M. Arcand (Mont-Royal).

Auditions (suite)

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, merci, M. le secrétaire. Alors, comme je vous le disais antérieurement, alors j'aimerais que vous vous identifiiez, et identifiez les gens qui sont avec vous.

Association québécoise de
l'industrie du disque, du spectacle
et de la vidéo (ADISQ)

Mme Drouin (Solange): Donc, oui. Bonjour, je suis Solange Drouin, vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ. Je suis également coprésidente de la coalition canadienne pour la diversité culturelle. M'accompagne, aujourd'hui, M. Jacques Primeau, ici, à ma droite, qui prendra aussi la parole. Jacques est une figure très connue dans le monde des industries culturelles. En plus d'être un producteur et un gérant réputé, il est membre du conseil d'administration depuis 1992 et il est encore membre aujourd'hui. Il a été président de l'ADISQ de 2000 à 2003. À ce moment-là, il a d'ailleurs initié, entre autres, le projet du Quartier des spectacles. Il est, aujourd'hui, encore vice-président du conseil d'administration du Partenariat du Quartier des spectacles et membre du conseil d'administration de l'ADISQ; à sa droite nous accompagne Pierre Blanchet, directeur du financement des entreprises et de la formation professionnelle à l'ADISQ.

Alors, aujourd'hui, au nom de l'ADISQ, nous souhaitons nous prononcer sur les aspects du projet de loi n° 22 qui touchent spécifiquement le secteur du spectacle de chanson et de variétés à Montréal. Notre légitimité à cet égard vient de notre membership de quelque 270 entreprises, dont pas moins de 145 sont engagées dans des activités de production de spectacles. À ce titre, nos membres sont responsables de la très grande majorité de l'activité spectacle au Québec, dans le domaine de la chanson et des variétés.

n (10 h 10) n

Évidemment, nous ne nous attribuons aucune autorité pour nous prononcer sur les aspects du projet de loi qui ne touchent pas notre sphère de compétence, à savoir les règles de gouvernance de l'agglomération de Montréal et les compétences exercées par son conseil. Notre intervention ne porte que sur les dispositions qui concernent deux aspects qui nous préoccupent au plus haut point: d'une part, la taxation des droits d'entrée à un lieu de divertissement, donc aux salles de spectacle; d'autre part, la taxation d'un immeuble et donc des stationnements commerciaux. Ce pouvoir de taxation pourrait lui aussi avoir une incidence sur le secteur du spectacle, puisque le stationnement est souvent partie intégrante du budget de l'amateur de spectacles.

Aujourd'hui, nous désirons vous inviter à étudier avec nous les différents tableaux, que vous avez probablement en main, et des graphiques qui, nous l'espérons, vous fourniront un portrait éloquent du rôle que joue Montréal dans l'offre globale de spectacles au Québec. Plus spécifiquement, nous souhaitons vous démontrer que l'imposition des taxes affecterait les spectacles à Montréal, mettrait en danger un écosystème déjà fragile, qui permet de nourrir en spectacles non seulement Montréal, mais aussi l'ensemble du Québec. Nous allons donc, Jacques et moi, nous servir de ces tableaux pour vous offrir un tour guidé de la réalité du spectacle à Montréal et au Québec, mais auparavant je pense qu'il est important de souligner ? probablement que vous l'avez vu ? que la population de Montréal, dans un sondage UniMarketing-La Presse publié lundi dernier, s'est prononcée à 84 % contre une taxe spécifique s'appliquant aux sorties de spectacles.

Ce que nous allons essayer de vous expliquer aujourd'hui, c'est pourquoi ce pouvoir de taxation, dont personne ne veut, il semble, doit absolument être retiré du projet de loi.

Une dernière précision, si vous me le permettez, avant de passer à nos statistiques. Je tiens à préciser que les contraintes financières auxquelles doit faire face la ville de Montréal sont loin de nous échapper. Nous saluons la volonté du gouvernement du Québec d'ouvrir à la ville de nouvelles avenues de financement qui lui assureront des revenus additionnels pour faire face à ses défis. Dans la mesure où ces entrées de fonds seront des revenus de croissance qui agiront comme leviers et dynamiseront le développement économique de Montréal, nous ne pouvons que prêter notre appui à une telle volonté. Le problème, c'est que des taxes sur les spectacles et sur les stationnements ne généreront pas de tels revenus de croissance. Au contraire, elles auront trois effets directs: elles affaibliront, premièrement, la réalité déjà fragile du spectacle à Montréal; deuxièmement, elles freineront l'effet d'entraînement qu'a Montréal sur le développement d'une offre spectacle globale au Québec; et finalement elles couperont les jambes au projet du Quartier des spectacles sur lequel nous comptons tant pour réénergiser un secteur vital de son centre-ville.

Une taxe sur le spectacle, loin d'être un revenu de croissance, serait une source de fragilisation, de démobilisation et de désarticulation pour l'industrie québécoise du spectacle et elle serait un vecteur de décroissance économique et culturelle pour Montréal.

Je vais maintenant passer le micro à Jacques, qui va diriger le tour guidé de la réalité des spectacles, que nous tenons à vous offrir à l'aide du document que nous vous avons passé, j'espère bien. Jacques.

M. Primeau (Jacques): Oui. Bonjour. Merci, Solange. Pour commencer, je vous référerais à la page 6 du document que nous vous avons remis.

Ce que vous voyez dans ces deux graphiques, c'est une réalité en demi-teintes. J'attire particulièrement votre attention sur le segment de la chanson francophone. Au premier coup d'oeil, ce segment semble en santé, puisque le nombre de représentations était en hausse de 7,3 % l'année dernière. Pourtant, les revenus de billetterie, eux sont en baisse de 7,6 %. Du côté de la chanson anglophone, les représentations étaient en hausse d'environ 40 %, ce qui est énorme, on conviendra, et les revenus, de 5 %. Évidemment, la chanson anglophone domine toujours la chanson francophone pour les revenus de billetterie. Ça, c'est une donnée qui est assez constante. Mais ce que nous voyons ici, c'est une industrie où il n'y a pas un rapport direct entre l'effervescence de l'activité et les revenus qu'elle génère. Le spectacle est un secteur dynamique mais évidemment très volatile, et le moindre revirement peut affecter grandement, positivement comme négativement.

Alors, les graphiques de la page 7 maintenant vous permettent d'entrer dans le détail de cette réalité. J'attire votre attention sur celui du haut. Comme vous pouvez le voir, en 2006, le taux de l'assistance payante pour la chanson francophone se situait à environ 56 %, en baisse de 11 % sur l'année précédente. Ça signifie en moyenne que les billets que nous vendons ne réussissent à remplir qu'à peu près la moitié de nos salles. Si vous fréquentez les spectacles de chanson dans les salles du Québec et particulièrement à Montréal, vous allez peut-être me dire que ce chiffre ne correspond pas à votre perception. Vous avez raison. L'équation est simple. C'est qu'il y a des spectateurs évidemment qui ne paient pas leurs billets. Donc, les spectateurs payants remplissent la moitié de la salle. Mais évidemment on comble souvent ce vide-là par des billets gratuits.

Alors, pour les spectacles de chanson francophone, ils étaient en hausse ? on le voit en page 8 ? de près de 54 % l'année dernière. Je parle des billets de faveur. C'est tout simple, un spectateur sur cinq n'a pas eu à payer son billet pour un spectacle de chanson francophone en 2006. Donc, nos salles ont beau être remplies presque aux trois quarts, il reste qu'une personne sur cinq est entrée gratuitement. En ce sens, certains pourraient dire que nous sommes nos artisans de notre propre malheur. Je répondrai simplement qu'on a intérêt à remplir le reste de la salle, ne serait-ce que quand on est producteur et surtout gérant, parce qu'on veut que nos artistes se produisent devant une salle où il se passe quelque chose. Et les spectateurs y jouent un rôle essentiel, mais il y a aussi qu'on a une réalité plus globalement que, quand on veut lancer un nouvel artiste, quand on veut lancer un nouveau spectacle et qu'on y croit mais qu'il faut convaincre les gens, convaincre les médias, créer un bouche à oreille, on doit parfois effectivement créer ce phénomène-là et donc donner des billets.

Pourquoi c'est plus présent à Montréal qu'ailleurs? On le verra plus tard. C'est parce qu'effectivement beaucoup de ces spectacles-là, dans une grande majorité, sont initiés à Montréal. Donc, ceci explique cela.

Il y a un dernier aspect de la réalité particulière du spectacle à laquelle je tiens à attirer également votre attention. À la page 9, nous avons comparé la chanson francophone et la chanson francophone québécoise à la chanson anglophone sur deux points: le nombre de représentations et les revenus de billetterie. Je vous invite à vous attarder sur les deux tartes de droite, qui sont fascinantes parce qu'elles sont un peu le miroir inversé l'une de l'autre. Ce qu'elles illustrent: ce sont les spectacles de chanson francophone québécoise qui assurent le plus grand nombre de représentations au Québec, mais ce sont les spectacles de chanson anglophone qui génèrent la plus grande part des revenus. Alors, le star-système québécois a ceci de particulier qu'il ne repose pas sur la présence de Madonna, de U2 ou Justin Timberlake, mais dont la machine promotionnelle est à ce point puissante qu'elle peut imposer des prix exorbitants à chaque représentation, et ce, sans même avoir à assumer un coût de promotion publicitaire. Alors, autrement dit, le billet peut être à 150 $ comme pour Madonna, alors que les artistes parmi les plus populaires, comme Martin Matte ou Daniel Bélanger, ne vont pas dépasser 50 $. Donc, on ne peut pas monnayer autant l'augmentation de notoriété d'un artiste.

Comme ils ne peuvent augmenter le prix des billets, les producteurs de spectacles québécois doivent plutôt, évidemment, chercher à intensifier la promotion pour offrir davantage de représentations partout au Québec. Dans ce sens-là, Montréal a effectivement besoin, pour rentabiliser ses spectacles, d'une représentation à l'échelle du Québec. Alors, à ce chapitre, le tableau de la page 10 traduit une réalité inquiétante. Comme vous pouvez le constater, faute de financement adéquat pour en assurer la promotion et la tournée, chaque spectacle de chanson québécoise en moyenne a été présenté seulement quatre fois en 2006. Songez que, pour être rodé, un spectacle a généralement besoin d'au moins trois représentations. Dans le cas de plusieurs spectacles d'humour, on parle de 30, mais, en chanson, trois, c'est, on pourrait dire, un minimum. La durée de vie de nos spectacles coïncide donc dangereusement avec leur période de rodage. C'est dramatique à la fois pour nos artistes et pour leur public, qui est privé d'un rendez-vous auquel il a droit, un rendez-vous avec l'expression vivante de sa propre culture.

Solange va maintenant vous expliquer ce que nous essayons de faire pour pallier à ce problème structurel.

Mme Drouin (Solange): Merci, Jacques. Vous comprenez que nous ne sommes pas ici pour demander de l'argent à qui que ce soit, enfin pas aujourd'hui, mais simplement pour demander à nos élus de ne pas saper nos efforts en allant gruger dans le budget spectacle des amateurs de chansons et de variétés québécoises. De l'argent pour le spectacle, cependant nous en avons effectivement demandé au gouvernement québécois qui a répondu favorablement à nos demandes au printemps dernier. Il faut voir, dans cette réceptivité à nos demandes, le signe que le gouvernement québécois reconnaît à la fois le rôle essentiel de l'industrie québécoise du spectacle et sa grande fragilité.

Je passe outre les pages 11 et 12 pour vous diriger vers la page 13, pour vous indiquer, comme vous le voyez, que nous estimons à un total de 5 millions par année les besoins supplémentaires du secteur du spectacle en termes d'aide à la tournée nationale, internationale et en termes de soutien à la promotion et à la mise en marché.

n (10 h 20) n

Comme vous le voyez également, nous ne sommes pas sortis de l'auberge, puisque l'aide consentie, bien que fort appréciée à ce jour, consiste en un apport d'urgence non récurrent de 1,5 million de dollars. C'est un soutien apprécié, comme je le répète, mais le problème chronique reste entier. La quasi-totalité du montant a d'ailleurs, déjà, été allouée judicieusement par la SODEC, ce qui démontre avec éloquence à quel point le spectacle au Québec est dans une situation fragile. Inutile de vous dire qu'à l'aube d'une nouvelle année le monde du spectacle attend non pas une taxe sur ces activités, mais l'annonce d'une aide plus substantielle et permanente, qui lui permettrait de déployer véritablement son offre.

Je vous invite maintenant à passer à la dernière section de notre document, qui commence à la page 15. Nous y démontrons plus spécifiquement le rôle des salles de spectacle de Montréal dans l'ensemble de la dynamique du spectacle au Québec. Un coup d'oeil d'abord au tableau de la page 15. Sans surprise, on constate qu'à elle seule Montréal génère plus de la moitié des revenus de billetterie pour les arts de la scène au Québec. En ce qui concerne la chanson elle-même, la dernière colonne du tableau, c'est même 56 % des revenus de billetterie, en chanson, qui sont générés à Montréal. Ces chiffres traduisent une triple réalité: d'abord, que Montréal joue un rôle central dans l'économie générale du spectacle au Québec, une économie, je vous le rappelle, nous l'avons démontré, très fragile par ailleurs; ensuite, que ce rôle est essentiel à la promotion de spectacles qui pourront ensuite circuler ailleurs au Québec et donc que toute décision qui fragiliserait cette dynamique précieuse nuirait à la diffusion des spectacles partout au Québec. En outre, une telle décision irait à l'encontre des priorités affichées du gouvernement dans le domaine.

Jacques va maintenant vous dévoiler un aspect de cette dynamique qu'il vit, lui, concrètement, en tant que producteur de spectacles, et qui prend toute son importance à la lumière du projet de loi n° 22. Jacques.

M. Primeau (Jacques): Oui. C'est un élément important parce que tous les producteurs de variétés ont constaté cette tendance-là, mais on commence, si on veut, aujourd'hui, donc à documenter cette évolution majeure dans ce qu'on peut appeler l'environnement concurrentiel du spectacle dans la grande région de Montréal, depuis 10 ans.

Nous parlons ici de l'émergence d'une infrastructure de spectacles de qualité dans la couronne montréalaise. Du point de vue global de l'offre culturelle, c'est un phénomène éminemment bienvenu. Il faut s'entendre que, quand on est producteur de spectacles ou gérant d'un artiste, que les gens nous voient à Terrebonne, à Chicoutimi ou à Montréal, l'important, c'est que le spectateur se rende à la salle de spectacle. Ça fait que ça, c'est la bonne nouvelle. Si on le traduit au niveau de Montréal, on voit qu'à la page 16 ça nous donne des chiffres assez intéressants. Les tableaux de la page 16 donc traduisent cette réalité de façon impressionnante. Alors que l'offre de billets et l'assistance stagnent à Montréal et même régressent pour les variétés, quand on regarde ce qui se passe dans une région comme Laval, Laurentides, on voit que l'offre explose. Ce n'est pas difficile à comprendre. Les résidents de la couronne peuvent assister maintenant à des spectacles de qualité sans encourir les frais additionnels que représentent le transport, le stationnement et souvent la restauration pour un spectacle à Montréal. Il y a la proximité, mais il y a aussi la qualité dans la mesure où les investissements, entre autres, de Québec beaucoup et des municipalités, au fil des ans, ont permis d'offrir des salles qui offrent une qualité de spectacle quasi équivalente et souvent même supérieure à celle de Montréal.

Donc, à la page 17, ce qu'on voit, c'est qu'on peut mesurer le phénomène maintenant dans son ampleur. On parle d'une offre qui a presque doublé dans le couronne, en 10 ans. Encore une fois, il faut se réjouir de cette évolution, j'insiste. Il faut aussi en mesurer l'impact sur l'écosystème global du spectacle au Québec. En offrant une alternative moins coûteuse à l'offre montréalaise, cette évolution affaiblit Montréal dans son rôle moteur pour l'ensemble de l'offre spectacle au Québec. Cette évolution est donc bienvenue et probablement gérable, mais à condition de ne pas l'alimenter et de ne pas l'accélérer en rendant le spectacle encore plus cher à Montréal. Simplement, je fais juste un petit aparté. C'est qu'on voit que l'augmentation de... rapidement c'est 80 % de plus d'offre, 70 % de plus de recettes, donc c'est considérable. Ce que ça permet de voir aussi dans les tableaux qu'on regarde, c'est que le prix d'un spectacle en région, en région et particulièrement dans la couronne, est en général inférieur à celui de Montréal. Mais les dépenses extérieures aux spectacles, à savoir le stationnement par exemple ou dans certains cas même le temps de gardiennage, bien, évidemment, c'est un attrait inévitable.

Je dirais même aussi que c'est un phénomène maintenant. Ça a été ma grande surprise avec un de mes artistes, Jean-Thomas Jobin, qui rejouait...

Une voix: Monsieur...

M. Primeau (Jacques): Ah, on ne peut pas sortir du texte, en fait. Excusez-moi.

Le Président (M. L'Écuyer): Non, ce n'est pas ça, M. Primeau, c'est que votre 15 minutes est écoulé.

M. Primeau (Jacques): Déjà! Excusez.

Le Président (M. L'Écuyer): Oui, déjà. Alors, on va demander maintenant peut-être au moment... D'ailleurs, je vous remercie beaucoup de votre mémoire, une belle présentation. Maintenant, au moment des échanges, peut-être vous allez pouvoir en fait reprendre le texte que vous avez peut-être omis.

Une voix: ...

Le Président (M. L'Écuyer): Oui.

Mme Normandeau: ...on propose peut-être avec le consentement des collègues, si vous souhaitez terminer votre présentation, parce que c'est très intéressant.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, de consentement. Alors, à ce moment-là...

Une voix: Oui, merci.

Le Président (M. L'Écuyer): ...en fait c'est par équité pour tout le monde que j'interviens.

M. Primeau (Jacques): Je vais juste finir sur un élément. C'est qu'en comparaison ? je saute une étape, là; il y a un chiffre qui est aussi important; c'est qu'en comparaison ? 40 % des spectacles de chanson présentés à Montréal sont les spectacles de la relève, alors que dans la couronne 15 % sont de la relève. Alors, c'est un élément qu'il faut garder en tête. Ça explique plusieurs choses. On pourra y revenir dans la période des questions.

Mme Drouin (Solange): D'accord. Et peut-être le dernier élément qu'on pourrait ajouter ? et on souhaite vraiment discuter avec vous, Jacques en a parlé à la page 19 ? c'est qu'on a vraiment fait des analyses pour un même spectacle à Montréal et dans la couronne de Montréal pour un même artiste. On a vraiment fait des analyses sur plusieurs artistes et on s'aperçoit que le billet de spectacle est déjà plus cher à Montréal qu'en région, 10 % plus cher pour le spectacle de chanson et 15 % plus cher pour un spectacle d'humour, variétés.

Donc, pour nous évidemment le fait d'augmenter ce fardeau-là, alors que le billet est déjà plus cher, pourrait évidemment faire glisser encore plus les gens vers les régions. On dit ? on le répète: C'est sûr que c'est positif, tout ça. Mais en même temps, étant donné le rôle moteur de Montréal pour abreuver l'ensemble du spectacle dans toutes les régions du Québec et aussi son rôle important en relève pour ensuite faire les artistes établis de demain, que tout le monde se partagera dans toute la province de Québec, on pense que c'est important de maintenir cet écosystème très, très vivifiant et très florissant de Montréal. Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, merci, Mme Drouin. Maintenant, nous sommes à l'étape de la période des échanges avec les membres. Alors, je demanderais à madame avec le groupe parlementaire. Nous allons débuter avec le groupe parlementaire formant le gouvernement, avec Mme la ministre. Je vous cède maintenant la parole, Mme la ministre.

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Bon matin à vous, très heureuse de vous retrouver. Alors, vous me permettrez évidemment, au nom de mes collègues, de remercier Mme Drouin, M. Blanchet, M. Primeau. Nous sommes très heureux de vous accueillir en commission parlementaire. On sait que vous êtes des gens très occupés, donc on apprécie doublement le fait que vous ayez pris le soin de rédiger, là, un mémoire, que vous preniez le soin de venir nous le présenter. C'est important parce que, vous l'avez peut-être constaté à la lecture d'un certain nombre d'articles parus ce matin, c'est un sujet qui fait couler un peu d'encre, toute la question des pouvoirs habilitants, là. C'est une section importante contenue dans le projet de loi n° 22.

Moi, j'ai un certain nombre de questions à vous poser, une première plus générale et une deuxième vraiment plus spécifique, mais, dans un premier temps, vous me permettrez de saluer la qualité donc de votre mémoire et surtout de reconnaître l'apport que vous a offert le gouvernement, entre autres, avec l'aide d'urgence de 1,5 million, là, qui vous a été consentie. On aura assurément l'occasion de se voir au rendez-vous culturel qui va démarrer lundi, à Montréal ? lundi et mardi. C'est un rendez-vous important, et bien des collègues y seront assurément. Et vraiment on attend plus de 1 000 personnes. C'est vraiment un événement qui sera très couru et à juste titre, parce qu'on sait très bien que, sur le plan culturel, Montréal est notre métropole, est un véhicule, une locomotive absolument extraordinaire.

Moi, j'aurais peut-être une question à vous poser. Ce matin, je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de prendre connaissance de la lettre qu'a fait paraître le maire Tremblay. C'est une lettre ouverte. Alors, dans Le Devoir, l'entièreté de la lettre s'y retrouve. Et vous me permettrez de vous citer un passage de cette lettre qu'a rendue publique le maire Tremblay en parlant des pouvoirs habilitants. Le maire nous dit: «...ces pouvoirs habilitants sont nécessaires pour permettre à Montréal d'atteindre l'autonomie dont il a besoin. En tant qu'élus, nous sommes responsables, et aucune décision ne sera prise sans consultation avec nos partenaires.»

J'ai eu l'occasion d'interpeller vos prédécesseurs sur cette question. L'appel qui nous a été lancé par la ville de Montréal et en particulier par le maire Tremblay, de ce côté-ci, a été entendu. La preuve, c'est qu'on a pris le soin d'ajouter une section en fait pour répondre positivement à un appel maintes fois répété par la ville de Montréal sur la pertinence d'avoir des pouvoirs comme ceux qui ont été consentis à la ville de Toronto par le gouvernement ontarien. Alors, j'aimerais savoir de votre part qu'est-ce que vous répondez ce matin. Et, si j'avais à vous poser donc la question, si le maire Tremblay était avec nous ce matin, qu'est-ce que vous auriez à lui répondre sur cet appel qu'il lance aux élus que nous sommes, à l'Assemblée nationale? Et il le fait, je crois, sincèrement, dans le respect des partenaires que vous êtes.

n(10 h 30)n

Deuxièmement, une question plus précise, plus pointue. Puis je comprends très bien la démonstration que vous avez faite, qui est assez éloquente, sur la concurrence ou l'énergie que vous devez déployer effectivement à maintenir une compétitivité, entre autres, au niveau de toute l'industrie du spectacle et de la chanson. On est dans le domaine de l'hypothétique, là. Si la ville de Montréal, par exemple, décidait de lever une taxe spéciale sur les spectacles provenant de l'extérieur ou, par exemple, sur des événements sportifs, là ? lundi soir, The Police est au Centre Bell, alors ce n'est pas un spectacle, là, avec des artistes québécois; Bon Jovi est là, je pense, la semaine prochaine... Enfin bref, je ne connais pas tout l'horaire des grands artistes, là, des grandes vedettes de la planète qui viennent nous voir à Montréal. Mais enfin bref je pourrais donner l'exemple aussi, par exemple, pour un spectacle de sport professionnel, là, un spectacle à grand déploiement qui vient de l'extérieur.

Alors, quelle serait la réaction officielle de l'ADISQ dans cette éventualité ou dans cette hypothèse que je soulève ce matin?

M. Primeau (Jacques): Je peux commencer sur le premier point, la réaction tout d'abord au maire Tremblay. On est conscients de ça puis on en a parlé souvent avec les gens de Montréal et même au maire. Nous, on reconnaît d'emblée qu'il y a un problème de financement majeur à Montréal, et je dirais même qu'il y a un problème aussi de, je dirais...

Je vais faire un petit retour dans le passé. J'étais président de la Coalition des arts de la scène quand la taxe d'amusement est disparue et j'ai vécu aussi autant les négociations pour représenter les arts de la scène qu'être assis à la même table que l'Union des municipalités et de voir comment Québec pouvait compenser les municipalités pour une perte d'une source de revenus importante. Et il y a eu des mesures de compensation, mais, dans la plupart des cas, elles ont été temporaires. Dans notre cas, ça a été quand même extrêmement positif. On peut regarder qu'il y a une série de mesures qui ont aidé les spectacles, qui sont apparues à partir de ce phénomène-là et qui se sont bonifiées au fil des ans. D'ailleurs, je soulignerais la très grande continuité, depuis 15 ans, que j'ai vue des ministres de la Culture. Je dirais presque: Des ministres. C'est juste des femmes, pratiquement. Mais, au fil du temps, il y a eu une belle continuité au fil des gouvernements, qu'ils soit libéraux ou péquistes. Il y a une belle continuité. Mais ça a été un moment clé, un moment fondamental, la perte de la taxe d'amusement. Ça a empêché qu'on puisse dire à une municipalité, pour encourager un projet culturel, une nouvelle salle de spectacle, et ça, ce n'est pas vrai juste à Montréal, ça a été vrai... Il y a eu un traumatisme où on les municipalités ont dit: Bien là, achalez-nous plus avec vos projets parce que, là, allez demander à Québec parce que c'est eux autres qui ont l'argent maintenant.

Et, quand on donne plus de pouvoirs à des festivals, à des manifestations culturels, on se fait répondre ça régulièrement. Ça fait que je peux comprendre cette frustration-là, mais je peux comprendre aussi qu'à quelque part il y a un retour qui devrait être fait de la part de Québec pour dire: C'est vrai qu'on doit encourager les municipalités à investir davantage dans le culturel.

Moi, j'ai une position qui n'a pas été débattue à l'ADISQ, donc ce n'est pas une position collective. D'instinct, je dirais: Pourquoi on ferait payer plus quelqu'un qui va voir The Police plutôt que d'acheter le DVD d'un jeu vidéo américain dans un Wal-Mart? Pourquoi on lui ferait payer plus? Moi, je vous dis que, comme expérience de président de la Coalition des arts de la scène, pour avoir assisté, il y a eu 200 000 personnes, spectateurs qui ont signé une pétition, il y a 84 % des gens qui ont dit non. Je veux dire, je peux comprendre l'idée: Ah, bien c'est vrai, on va demander aux plus riches de payer, ceux qui paient 150 $ pour Madonna, mais, je vous dis, cette mesure-là va demander une énergie épouvantable pour la vendre. Moi, je ne serai pas là pour la vendre. Ça, c'est sûr. Et, dans le milieu, ça va créer une source de conflits: Pourquoi lui? Pourquoi pas moi? Le Cirque du Soleil rentre-tu dedans, il ne rentre pas dedans? Ça va être ingérable.

Moi, à mon avis ça prend une solution plus globale. Et, moi, en tant que producteur de DVD... Et, quand vous allez acheter un DVD des Têtes à claques, s'il y a 1 % de plus dessus, je ne pense pas que ça nuise aux ventes des fêtes ni des Têtes à claques ni des autres DVD que je fais et je ne pense pas non plus que ça va empêcher quelqu'un d'aller faire une activité quelconque. Parce que c'est ce que j'entends du maire Tremblay, c'est: Si vous nous donnez le 1 %, bien on ne va pas commencer à installer des mesures à droite, à gauche, etc. Prenons le stationnement à Montréal. Si vous demandez à n'importe quel Montréalais s'il est content de payer 8 $ pour stationner deux heures, puis après ça revenir en catastrophe pour s'apercevoir qu'il a un ticket de 45 $ parce qu'il est arrivé juste cinq minutes trop tard, on ne peut plus aller plus loin à ce niveau-là. Ce qui a été fait à mon avis devait être fait peut-être.

Et je suis d'accord avec toutes les mesures pour favoriser le transport en commun, etc., mais concrètement, dans le centre-ville, en ce moment, si on ne permet pas aux automobilistes des banlieues de venir à Montréal, on va voir accélérer un phénomène qu'on voit déjà, de fuite des banlieues, bien pas fuite... mais plutôt de non-désir de la couronne de venir voir des événements culturels à Montréal.

Ça fait que bref, pour faire une histoire courte, moi, je ne pense pas que c'est une mesure qui va être accueillie favorablement dans le milieu et je ne pense pas qu'elle va régler beaucoup de problèmes, mais je pense qu'il faut effectivement reconnaître que Montréal a besoin... Puis je dis «Montréal», mais on pourrait aussi dire: À peu près toutes les villes centrales, de Montréal, Trois-Rivières, Québec, ont besoin d'un coup de main pour encourager la vitalité culturelle dans leur ville.

Mme Drouin (Solange): Je pense que ce qu'on a voulu vous démontrer. C'est que, si on ciblait, une taxe sur le spectacle, ce n'est pas un revenu de croissance. Ce qu'on est en train de dire puis finalement ce qu'on a déjà dit au maire Tremblay et toute l'équipe, c'est que, nous, on vous démontre finalement ce glissement et qu'ultimement, en voulant créer un problème de financement, on va le créer peut-être à court terme, mais à moyen terme, mais même à court, moyen terme, il n'y aura pas... les sommes que ça générera vont aller en décroissant. Alors, qu'est-ce qu'on aura réglé? On n'aura pas réglé grand-chose.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, Mme Drouin. Mme la ministre.

Mme Normandeau: Mon collègue.

Le Président (M. L'Écuyer): Ah! M. le député de Mont-Royal, bonjour.

M. Arcand: Bonjour. Merci, M. le Président. Je suis très heureux, ce matin, de retrouver des gens que j'ai bien connus dans une vie antérieure. Mme Drouin, entre autres, et M. Primeau, ça me fait bien plaisir de vous retrouver ce matin.

C'est un dossier que je connais assez bien. Alors, je pense que c'est important de souligner d'une part que, le gouvernement du Québec, vous ne le savez peut-être pas, mais, si on le compare aux autres provinces, c'est environ 45 $ par habitant, dans les autres provinces, qui est consacré au niveau de la culture; pour ce qui est du Québec, c'est plus de 80 $. Alors, déjà, le Québec fait quand même sa part de ce côté-là. Moi, j'avais une question. Je pense qu'on comprend très bien le message de ce matin, que vous nous envoyez. La ministre, tout à l'heure, parlait des spectacles américains. J'ai lu un papier il y a quelques temps où quelqu'un parlait d'une autre possibilité, parce que, quand on décide de parler de spectacles américains, disons, ou venus de l'extérieur, peu importe, le danger, c'est que ça devient discriminatoire. J'avais lu un papier où on avait, à ce moment-là, parlé de spectacles peut-être de 5 000 personnes et plus ou 4 000 personnes et plus et que ça devrait être le critère, ce qui taxerait peut-être beaucoup plus probablement, largement, les spectacles américains mais sans nécessairement porter le nom.

Je voulais simplement avoir votre opinion là-dessus. Si on disait, par exemple, je ne sais pas ? puis on est encore, évidemment, dans l'hypothèse, là... Mais on parle de spectacles quand même avec un nombre suffisant de gens pour qu'il n'y ait pas d'impact sur la profitabilité de spectacle.

Mme Drouin (Solange): Je peux peut-être commencer là-dessus. C'est clair que, vous le savez, l'ADISQ, on s'est battus beaucoup et on se bat encore. Et, moi, de façon active, au nom de l'ADISQ, je suis coprésidente de la Coalition pour la diversité culturelle, et on plaide évidemment pour le pouvoir des États et des gouvernements d'établir leur propre politique culturelle. Quand on parle de culture, on est souverain sur notre territoire. Alors, bien entendu, je serais mal placée de vous dire que... C'est clair que ça ne fera pas plaisir aux Américains, ce genre de mesure là, parce que c'est essentiellement dans les chiffres, les chiffres dont vous parlez, Pierre... pardon, M. le député... Pardon. Il y a très peu d'artistes qui atteignent ces niveaux-là. Il y a très peu d'artistes qui font trois centres Bell, là. Il y en a quelques-uns, mais quand même, à ces niveaux-là, le Saint-Denis, c'est 2 000 places, puis après, évidemment, ça va à Wilfrid-Pelletier, et ensuite c'est le Centre Bell, là. Mais en même temps c'est clair qu'il y aurait une discrimination importante. Il y aurait sûrement une contestation.

On s'embarquerait dans quelque chose de très difficile à gérer. Et, comme je vous dis, il y a certains spectacles, il y en a, des spectacles anglophones, mais je pense ? surtout anglophones qui atteignent ce niveau-là; mais je pense ? qu'on ne générerait pas la masse de revenus qu'on a besoin pour vraiment régler un problème. Je pense que ce serait encore, malheureusement, un plasteur sur une plus grosse plaie, qui est le financement de la ville de Montréal. Je pense que ça ne toucherait pas à ce point, et ça créerait énormément de problèmes de gestion en tout cas, cette mesure.

M. Primeau (Jacques): Je pense que ça va coûter cher d'avocats.

n(10 h 40)n

M. Arcand: Lorsque vous parlez, M. Primeau, lorsque vous parlez de solution plus globale, vous avez dit à un moment donné: Ça prend une solution plus globale. Et j'essayais juste de voir ce que vous vouliez dire exactement par «solution plus globale».

M. Primeau (Jacques): ...ce n'est pas juste le producteur de télévision ou le producteur, il s'adonne que je travaille dans toutes les industries culturelles. Si le Québec donne plus, et heureusement, et on l'apprécie, il y a aussi que, comparativement au reste du Canada, les 30 émissions les plus écoutées au Québec, c'est 29 émissions sur 30 qui sont québécoises. Au Canada, il y en a une parmi les 30, c'est le Hockey Night in Canada. Si on a 20 % de parts de marché dans le cinéma québécois, alors que le cinéma canadien est en bas de 2 % ? puis on pourrait continuer comme ça au niveau de la musique, on pourrait continuer comme ça dans tous les champs ? c'est que ce n'est pas rien qu'on encourage la culture, je pense que ce qui est important, c'est dire que c'est un secteur qui crée de l'emploi, qui est extrêmement dynamique, sur lequel il faut souffler pour créer encore plus. Quiconque passe à côté du Cirque du Soleil la première fois, le siège social, dit: Est-ce que c'est Ford ou GM qui est partie de Sainte-Thérèse pour s'installer à côté de Métropolitain? Il y a des milliers de personnes qui travaillent là, qui sillonnent le monde, qui représentent à peu près 60 % de la production de spectacles à Vegas. Ces expertises-là reviennent à Montréal travailler dans nos productions.

On a une qualité de créateurs, d'artisans immense. On a un potentiel d'exportation immense. La première industrie aux États-Unis, c'est quoi? C'est l'«entertainment». Au Québec, on est placés pour performer, pour créer des emplois. Ça fait que, quand je dis: Une vision plus globale, c'est de dire que voilà un secteur qui, au détriment d'autres, ne doit pas être au contraire affaibli mais encouragé. Et est-ce qu'on fait une taxe de vente variée comme la TVA en France ou selon le produit de luxe? Si on taxe le luxe, si le luxe du spectacle à 100 $... bien taxons la bague de diamant, taxons la BMW, celle qui consomme plus d'essence, encourageons. De vision globale, c'est de dire: Qu'est-ce qui est le plus écologique dans une activité, etc.? Il y a tellement... et c'est hors de mon champ de compétence.

Quand je dis que c'est plus global, c'est que, pour moi, ça n'aura pas de résultat. Et je pense qu'il faut voir comment on encourage un secteur qui marche et un secteur qui peut encore mieux marcher à créer des emplois. Et pour ça, moi, je pense ? et je reviens à ce que je disais tout à l'heure ? quand j'ai vu comment s'est fait le deal, entre guillemets, entre Québec et les municipalités lors de la perte d'un champ de taxation, je pense que la plupart des municipalités au Québec ? et surtout les municipalités; j'appellerais ça les villes centrales, et Montréal évidemment en est une importante ? ont été perdantes. Et je pense qu'ils doivent être compensés et qu'il y a une occasion en or ? ce n'est pas moi qui le dis, c'est marqué dans les journaux ? en parlant que le fédéral nage dans l'argent. Bien, pendant que 1 % de taxation au consommateur qui se baisse... moi, je pense que c'est l'occasion de dire aux municipalités qui sont les plus performantes: Vous avez le 1 % sur la consommation. Et, quand les festivals vont s'asseoir avec Montréal, ils ne vont pas se faire dire encore: Bien, écoutez, nous, on vous aide, on paie des choses, mais tout l'argent, ça va à Québec et à Ottawa.

On va pouvoir leur dire, à chacune des municipalités: Si vous êtes dynamiques, bien vous allez être encouragées, puis on va pouvoir monnayer ce pourcent-là dans une intervention municipale de plus grande envergure. C'est un peu ça que je voulais dire.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. Primeau.

M. Arcand: Donc, si je comprends bien, M. Primeau, si je comprends bien ? je ne veux pas vous mettre de mots dans la bouche ? mais, lorsque vous parlez de solution globale, vous seriez plus favorable à une espèce de... Ce matin, le maire Tremblay parlait, là, du pourcentage de la TPS qu'il voulait récupérer pour les municipalités ou encore ça pourrait être une taxe sur l'essence. C'est des choses comme ça qui pour vous seraient plus acceptables? Des taxes plus générales?

M. Primeau (Jacques): En résumé, oui, je pense effectivement que c'est mieux.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. Primeau. Alors, maintenant, nous allons donner la parole, pour la période d'échange, au groupe de l'opposition officielle. Alors, M. le député de Prévost.

M. Camirand: Bonjour, Mme Drouin, M. Blanchet et M. Primeau. Bon matin, également.

Quelques petites questions pour commencer. J'aimerais savoir bien sûr si vous avez été consultés sur le projet de loi et si ça a été une surprise de l'apprendre pour vous le 21 juin. Ça a-tu été une surprise? Et est-ce que vous avez été consultés et par les gens du gouvernement et par Montréal?

Mme Drouin (Solange): Écoutez, évidemment on était au courant qu'il y avait des discussions qui se tenaient sur ce sujet-là, mais officiellement je dois dire que non.

M. Primeau (Jacques): Moi, je peux dire que, lors de rencontres, entre autres, pour le Quartier des spectacles, ça a été abordé dans différentes tables que c'était une possibilité qui s'en venait.

M. Camirand: On vous a accordé bien sûr une aide d'urgence de 1,5 million, on en parlait tantôt. Pourquoi vous pensez d'abord que le gouvernement taxe votre industrie quand on sait que c'est déjà fragile? C'est quoi, votre idée par rapport au principe qu'on revient vous taxer avec le projet de loi n° 22, quand justement tout ça est fragile chez vous? Comment vous voyez cette vision-là de pouvoir vous taxer à nouveau?

M. Primeau (Jacques): Moi, je dirais que la première réaction que j'ai eue quand j'ai... les premières consultations de la ville où il était question d'un retour d'une taxe de divertissement, entre guillemets, ce qu'on appelait, à Montréal, la taxe d'amusement, j'ai dit: J'ai déjà vu ce film-là. C'est comme l'impression d'aller dans un club vidéo puis, là, tu dis: Il me semble que je l'ai vu. Puis tu arrives à la maison, puis tu regardes, tu dis: Mais je l'ai déjà vu, ce film-là. C'est toutes des discussions qui ont été réglées au début des années quatre-vingt-dix, où on a dit: Bien non, ce n'est pas normal qu'on taxe plus spécifiquement ce secteur-là. C'est un vieux fond; l'origine de ça, c'est un vieux fond catho, hein? Je veux dire, les gens s'amusent, bien on va les taxer. Je pense que ça a été une réaction d'avertissement, si on veut, que c'était une fausse bonne idée.

Mme Drouin (Solange): Je pense qu'on l'a fait connaître. D'ailleurs, quand cette idée-là a été même évoquée, quand le projet de loi a été déposé, je pense qu'on a fait savoir très clairement, par voie de communiqué, qu'on trouvait que ce n'était pas la bonne voie à emprunter.

M. Camirand: J'aimerais vous entendre aussi sur un autre sujet On a parlé, à un moment donné, des frais de police rattachés aux spectacles particuliers, que les frais de police pourraient être chargés aux grands spectacles qu'on a parlé tantôt. Souvent, il y a des déploiements de police. Comment vous voyez cette vision-là apportée par certains membres, là, de la communauté?

M. Primeau (Jacques): Moi, je sais que c'est un dossier qui est assez pointu au niveau particulièrement des grands festivals ou des grands événements comme le Grand Prix, ou etc. C'est clair qu'encore là c'est une discussion à mon avis qui est: Qu'est-ce que ça apporte à une ville d'avoir tout cet achalandage-là, d'avoir toute cette gestion de gens à faire? Moi, je parle, dans la plupart des événements, que ce soit Juste pour Rire ou le jazz, que je connais bien, il y a déjà une bonne partie aussi de l'infrastructure qui est assumée par les festivals. C'est normal que la police soit là quand il se passe quelque chose. Sinon, je veux dire, on peut bien dire: Ça va être plus de trouble de faire un événement dans la rue, ça fait qu'à la limite on va dire non parce que ça coûte trop cher.

Moi, je pense qu'encore là ça revient à la même discussion, c'est-à-dire: Si, ces grands événements là, il y a une portion des retombées fiscales qui retourne aux municipalités, à mon avis c'est une façon de régler le problème aussi, une fois pour toutes.

M. Camirand: Vous avez parlé tantôt de taxe de luxe. J'imagine que c'est basé sur l'Europe, ça, les principes plus tu achètes le luxe, plus la taxe est grande. Est-ce que c'est...

M. Primeau (Jacques): ...exactement.

M. Camirand: ...c'est sur ces principes-là?

M. Primeau (Jacques): Ce n'est pas une suggestion que je fais. Tout ce que je dis, c'était que, si on est pour varier ou cibler sur certains produits, avoir des taxes de consommation puis d'autres produits, non, on pourrait prendre aussi d'autres pistes comme celle-là. On pourrait discuter encore longtemps. Je ne sais pas si c'est l'avenue à ? je vous fais confiance là-dessus... voir si c'est l'avenue à suivre ou pas. Tout ce que je dis, c'est: Pourquoi on appliquerait ça à un champ aussi pointu que des spectacles, et en particulier des spectacles américains? Moi, je peux vous prédire que les jeunes en particulier vont réagir très, très mal à ça, et même ça risque de nous causer des problèmes en disant: Bon, on sait bien, protectionnisme, les francophones sont protégés, c'est méchant d'aller voir un show américain. Je vous prédis une mauvaise presse totale dont on va tous subir les conséquences.

M. Camirand: Merci. Je vais passer à mes collègues. Ils ont des questions aussi, également.

Le Président (M. L'Écuyer): Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Bonjour. Bienvenue. Je vais revenir plus au début. Vous êtes un groupe de gens d'affaires qui existe depuis plusieurs années. Comment c'était avant l'augmentation des pouvoirs donnés aux agglomérations dans l'entreprise du spectacle? Comment c'était? Et en même temps la loi apporte deux côtés: le pouvoir habilitant et en même temps pour les agglomérations le secrétariat. Est-ce que vous ne voyez pas là-dedans l'opportunité qu'on devrait scinder la loi? Il y a comme deux aspects à ma question: Comment c'était avant?, et en même temps si on ne devrait pas scinder la loi.

n(10 h 50)n

Mme Drouin (Solange): Bien, écoutez, là-dessus, sur cet aspect-là... Nous, on s'est vraiment concentrés sur les aspects sur lesquels on pense en tout cas qu'on a une certaine compétence pour éclairer le débat. Ça, là-dessus, on ne s'est pas du tout penchés là-dessus. Tout ce qui touche l'autre portion de la loi, à savoir une loi, deux lois, écoutez, on n'a pas du tout analysé dans ces... On avait déjà beaucoup à faire avec notre propre dossier. On n'a pas du tout et on ne se sent pas compétents pour répondre à ce genre de question là.

M. Primeau (Jacques): Juste un élément aussi. C'est que, dans le domaine des industries culturelles mais particulièrement dans le domaine des variétés, le rapport avec la municipalité, et en particulier Montréal, il origine à peu près de l'histoire de la taxe d'amusement. Pourquoi? Parce que, la ville, sa vision ou sa charte même fait en sorte qu'elle n'intervient que sur les organismes sans but lucratif.

Si on prend Québec, par exemple, qui est un modèle à mon avis que le ville devrait imiter, à Québec, on a un conseil des arts d'un côté et on a la SODEC pour gérer les industries culturelles. À Montréal, il y a le Conseil des arts, mais il n'y a pas d'autre équivalent. Il y a un bureau du cinéma, mais il n'y a pas une vision globale des industries culturelles. Donc, on n'a pas officiellement, par exemple, à Montréal, l'ensemble de l'industrie du disque et du spectacle ou des salles privées, un intervenant, si on veut, paramunicipal ou municipal. On doit intervenir sur des questions politiques, mais en général ça ne nous concerne pas. Ce que je veux dire, c'est que, si, par exemple, la ville obtient plus d'argent de Québec pour aider la culture, en ce moment elle n'a pas le droit de nous aider de par sa charte. On l'a souligné à Montréal, quand on a refait la politique culturelle de la ville. C'est une aberration. Ça veut dire que le groupe de hip-hop de Montréal-Nord qui veut appliquer à la SODEC, qui n'a certainement pas plus d'argent que l'orchestre symphonique, lui, il n'a pas le droit de demander de l'argent, le Conseil des arts. Il faut qu'il demande à Québec. Il n'y a aucune place à Montréal où il peut demander de l'argent parce que, pour être dans le programme de la SODEC, il doit être à but lucratif, puis, pour être à Musicaction également, un organisme fédéral qui aide le disque...

Alors, bref, il se retrouve entre deux chaises. Nous, on trouve qu'à terme il va falloir se pencher sur la question. Mais pour le moment c'est pour ça que notre industrie n'a pas une longue histoire d'intervention sur des questions municipales, sauf évidemment quand on s'attaque au prix du billet.

Une voix: Merci.

Le Président (M. L'Écuyer): Je cède maintenant la parole à M. le député de Berthier.

M. Benjamin: Alors, bonjour. Alors, déjà, vous avez dit qu'il y avait une différence entre les prix des billets à Montréal et celui de la couronne. Est-ce que vous pensez que c'est la raison du déplacement de la clientèle déjà?

M. Primeau (Jacques): Je pense que c'est un phénomène mineur. C'est-à-dire c'est un phénomène, mais à mon avis, je dirais, le plus grand phénomène, c'est une question de proximité, c'est-à-dire que des gens qui sont à Terrebonne, qui ont une salle extraordinaire, ou les gens qui sont à L'Assomption, qui ont une salle extraordinaire, ils voient le même spectacle annoncé dans le journal à Montréal, ils vont aller au Saint-Denis, là, il faut stationner, on va revenir très tard, c'est plus facile.

Moi, je pense que le principal facteur, c'est l'amélioration de la qualité des salles de spectacle. Ils ont fait du bon travail dans la couronne. Il y a des diffuseurs qui ont fait un travail extraordinaire. Ça, c'est la première des choses.

La deuxième des choses, oui, il y a effectivement un problème de prix. Pourquoi? Parce que, quand on initie un spectacle à Montréal, il faut payer la promotion initiale, c'est-à-dire toute la mise en marché, la publicité que tu dois faire dans les journaux, etc. Le budget de publicité d'une opération minimale de spectacle, c'est 30 000 $, 40 000 $, 50 000 $. Ça va jusqu'à 100 000 $ en publicité qui doit être amorti uniquement sur les ventes de revenus de spectacle et amorti sur les ventes du spectacle en diffusion partout au Québec, dont la couronne, ce qui fait que, dans cette situation-là, le diffuseur de Laval ou de Terrebonne est dans une situation comme un diffuseur à Québec ou autres. Et le lecteur qui est à Laval, il lit le même journal que celui de Montréal, mais il n'a pas besoin, celui de Laval, de prendre la même grosseur de page que celui qui a lancé le spectacle à Montréal.

Bref, les coûts de mise en marché expliquent en majeure partie la différence de prix, d'une part; d'autre part, je dirais aussi que les salles à Montréal voient augmenter, dans certains cas, des coûts à cause du non-renouvellement de l'équipement, ce qui veut dire que des salles au Saint-Denis... Toutes les salles qui touchent les variétés sont en général les salles privées. On a vu le Spectrum fermer. C'est un phénomène majeur à Montréal. Il y a d'autres salles, à Montréal, privées qui sont dans un moins bon état que des salles qui viennent d'être rénovées en banlieue, ce qui fait carrément que, pour te produire au Saint-Denis, ça va te coûter plus cher en location d'éclairage au Saint-Denis que si tu te produis à Laval, parce que leur équipement est plus récent, ou à Terrebonne.

Alors, ça crée donc une pression supplémentaire au niveau des coûts de production.

Une voix: Merci.

M. Primeau (Jacques): ...spectateur en général, il faut ajouter à ça le stationnement, qui est plus cher, et les frais de déplacement, et le gardiennage, mine de rien, aussi.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. Primeau. Alors, M. le député de Berthier.

M. Benjamin: Ça fait que... C'est que, tu sais, s'il y a une augmentation de la taxe, est-ce qu'on creuse encore un fossé? Ou si, mettons, il y avait des ententes qui pourraient être mises... Est-ce que le fossé entre les régions et Montréal va grandir si on rajoute encore un prix sur les billets de spectacle?

M. Primeau (Jacques): C'est exactement ça. Là, c'est 10 %, ce qu'on voit, 10 % à 15 %. Bien, c'est rajouté x % de plus. Bien, ça va être X % de plus, encore davantage.

Mme Drouin (Solange): C'est sûr qu'il y a, comme Jacques le disait, il y a une foule de raisons pourquoi ça se fait, tout ça, là, pourquoi il y a ce glissement-là, mais c'est clair que le prix du billet... Et, si on l'ajoute encore, on se dit: Bien là, arrêtez le massacre, là, c'est sûr. Mais en même temps je pense qu'il faut le dire, et Jacques l'a redit plusieurs fois: en tant que producteur de spectacles, qu'il y ait trois spectacles à Montréal et 22 dans la couronne, le producteur, lui, ça fait 25. Puis, même si c'était l'inverse... Mais c'est que Montréal a un rôle moteur dans l'approvisionnement de spectacles pour l'ensemble de la province. On l'a dit et on l'a redit. Il a un rôle important de stimulation de la relève. Et, les spectacles de la relève, comme on l'a démontré, il y a 40 % des spectacles sur Montréal qui sont des spectacles de la relève, alors que dans la couronne, en tout cas ce qu'on a évalué, il y a seulement 15 % des spectacles de la relève qui sont là pour des salles comparables. Et là, à ce moment-là, bien, écoutez, c'est les artistes de demain, les artistes établis de demain dont tout le monde voudra. Bien, il faut, à un moment donné, il faut les alimenter, il faut leur donner l'occasion de le faire, et ça, c'est sûr que ça se fait plus à Montréal que ça se fait ailleurs dans la province.

Alors ça, c'est un rôle essentiel. Si on parle en termes de pérennité de notre culture et ensuite de rayonnement d'une culture et sur plusieurs années, ça, c'est un rôle central pour nous, et donc, Montréal, ce rôle-là est moteur.

Le Président (M. L'Écuyer): Mme la députée de Groulx. Merci, Mme Drouin.

Mme Lapointe (Groulx): Je vais revenir sur un commentaire. Je crois que c'est M. Primeau qui l'a dit tantôt. Vous parlez du 1 % sur les Têtes à claques, le DVD des Têtes à claques, mais ça a été très bref comme commentaire. J'aimerais ça vous entendre un peu plus là-dessus.

M. Primeau (Jacques): Ce que je veux dire, c'est que, dans notre industrie culturelle, souvent on occupe plusieurs terrains, c'est-à-dire que, moi, je suis à la fois gérant d'artistes, je suis à la fois... dans certains cas je suis seulement gérant. Dans des cas, je suis producteur de spectacles. Dans ce cas-ci, je suis le diffuseur de DVD ou producteur de DVD et je dirais que, si on parle du divertissement, le seul exemple que je donnais, c'était que, s'il y avait 1 % de plus sur les ventes de disques ou de DVD et que ce soit appliqué sur l'ensemble de la consommation, je pense que l'effet serait moins dramatique que de taxer spécifiquement un des secteurs des industries culturelles, c'est-à-dire le spectacle.

C'est dans ce sens-là que je disais ça. Ce que je voulais dire aussi, c'est qu'un de nos concurrents majeurs, au spectacle, c'est le divertissement à la maison. Alors, que ce soit le jeu vidéo, si on veut amener les gens à sortir, ça demande un effort supplémentaire. C'est déjà plus cher et c'est déjà aussi une activité plus difficile à solliciter. Moi, je pense qu'il faut voir l'activité du spectacle. Et ce n'est pas simplement dans la chanson, ça s'applique à tous les arts de la scène. Quand on réussit à sortir les gens de chez eux... Quand on dit, par exemple, que certains diffuseurs en province prennent moins de risques, il faut s'entendre; quand tu mets une affiche de spectacle, puis il faut que la salle soit pleine, c'est de prendre un gros risque. Un billet de spectacle, c'est comme le yogourt, hein, la date qu'il y a dessus, là; il ne vaut plus rien le lendemain, hein, c'est terminé, alors que, dans toutes sortes de champs, il y a des inventaires, et vous avez une deuxième chance, faire une deuxième... C'est le cas dans le disque, c'est le cas dans le DVD.

L'activité spectacle, c'est de loin celle qui est la plus risquée.

Alors donc, quand on dit qu'elle est fragile, c'est que, malgré tout le flair ? et c'est ça, le beau côté de notre métier ? on s'est tous, dans notre métier, en 15, 20 ans, plantés, c'est-à-dire qu'on a cru à un spectacle énormément, et finalement les spectateurs n'ont pas suivi. Puis les spectateurs ont toujours raison. Mais parfois on ne se trompe pas, heureusement, puis il y a du monde. Je voulais juste dire que, s'il y a une activité qu'il ne faut pas, si on veut, contribuer à la rendre plus difficile, c'est celle-là.

n(11 heures)n

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. Primeau. Maintenant, nous terminerons la période d'échange avec le deuxième groupe d'opposition pour les 13 prochaines minutes. Je cède la parole au député de Mercier dans un premier temps.

M. Turp: Alors, merci, M. le Président. Je voudrais saluer la ministre, les collègues de l'opposition officielle, vous prier d'excuser notre collègue le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques qui est au salon bleu, ce matin, là, pour débattre d'une motion, de notre motion du mercredi. Je suis avec le député de Borduas, et notre formation s'intéresse, comme vous le savez, aux questions culturelles.

Et on est très heureux que l'ADISQ ait pris le temps, dans des délais rapides, de faire un mémoire de très grande qualité, mais l'ADISQ nous habitue à des mémoires de grande qualité lorsqu'elle se présente devant cette Assemblée. Et je vous remercie donc d'éclairer la commission sur l'impact que pourrait avoir l'imposition d'une taxe comme celle qu'on propose d'établir ou qu'on propose à la ville de Montréal de pouvoir éventuellement utiliser en vertu d'un pouvoir général de taxation, Mme la ministre, qui n'a pas vraiment l'air d'un pouvoir général de taxation. Je dois vous avouer qu'en lisant cette section le mot «général», là, je pense, ce n'est pas très, très bien utilisé parce que c'est une série de pouvoirs exceptionnels et d'exceptions à une taxe ou à un pouvoir qui est accordée en vertu de cet article-là. Mais de toute évidence le gouvernement presque invite de la sorte la ville de Montréal à imposer une taxe sur le divertissement. C'est comme dire à la ville: Bon, bien vous avez un pouvoir général, mais il y en a une, là, qu'on vous signale comme étant une que vous devriez utiliser. Et le maire de Montréal, ce matin ? vous avez remarqué, Mme la ministre ? il dit: Ce n'est peut-être pas une bonne idée de faire ça, là. Peut-être qu'on devrait nous accorder l'autonomie fiscale, puis, nous, on déciderait si on ferait une taxe ? peut-être une taxe sur le divertissement ? et c'est nous qui pourrions aussi décider de dédier les revenus de cette taxe à la culture peut-être, comme on le fait pour la promotion touristique. Et peut-être que ça, c'est une avenue plus intéressante.

Mais, moi, j'aimerais vous entendre sur l'idée d'une taxe sur le divertissement, sur le fond des choses. Là, je crois comprendre que vous avez une objection de fond sur l'idée même d'une taxe sur le divertissement, qui serait imposée par le palier municipal, à cause des impacts. Est-ce que vous auriez la même objection s'il y avait une obligation pour la ville de dédier les revenus de cette taxe à des activités culturelles ou aux spectacles et donc de soutenir l'industrie du spectacle à Montréal, par les revenus qui découleraient de l'imposition de l'industrie du spectacle? Alors, je pense vous me comprenez, parce qu'il y a, dans certains pays, par exemple comme en France... où il y a une taxe sur les billets de cinéma et où les revenus par ailleurs sont versés à un fonds national et qui permet de soutenir l'industrie du spectacle. Et d'ailleurs, M. le député de Mont-Royal, il n'y a pas de discrimination entre les productions nationales et internationales lorsqu'il s'agit d'une taxe dédiée comme celle-là parce que ça poserait des problèmes sérieux, là, au plan des accords de libre-échange et au plan même de nos lois fiscales ou à nos propres lois fiscales.

Alors donc, ma première question, c'est: Est-ce que vous êtes complètement contre une taxe de cette nature ou, si ces revenus étaient dédiés à votre industrie, est-ce que vous auriez moins d'objections?

M. Primeau (Jacques): Moi, je fais la distinction entre une mesure pour favoriser, par exemple, l'expansion, par exemple, cette mesure-là au cinéma. C'est quelque chose qui a été examiné souvent à la SODEC. Et il ne faut pas appeler ça une taxe dédiée. C'est autre chose. Là, on parle d'une taxe et on parle de problèmes de financement municipal, et c'est là-dedans qu'on est. Nous, ce qu'on dit, c'est que de taxer spécifiquement le secteur spectacle ou une partie de ce secteur-là, pourquoi ça plutôt que n'importe quoi d'autre? Et ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas une bonne idée parce que ça va amener moins de revenus que prévu parce que ça va faire baisser l'activité. Donc, ce n'est pas une bonne source de revenus et ce n'est pas non plus un bon message à lancer à une activité qui doit être, au contraire d'être découragée, encouragée. Ça, c'est la première des choses.

À savoir si on doit réussir à financer davantage la production ? et ça s'appliquerait au cinéma, ça pourrait s'appliquer à la chanson, ça pourrait s'appliquer à tous les domaines ? est-ce qu'on est capable d'aller percevoir l'argent de la part d'une contribution du consommateur à un fonds pour financer la production? C'est un autre débat. C'est un débat qui n'est pas... Je n'ai pas d'opinion arrêtée là-dessus. Je dis juste que c'est sûr que, si vous demandez aux gens: Est-ce que ça vous tente en général de payer plus cher ou d'avoir une taxe?, ils vont dire non. Si on le vend comme effectivement une façon de contribuer, bien, à ce moment-là, je dirais: Peut-être. Mais il y a une chose qui est sûre, vous l'avez souligné, c'est que, si on commence à cibler certains secteurs ? je répète ce que j'ai dit tout à l'heure ? ça va coûter cher d'avocats.

Mme Drouin (Solange): Mais aussi peut-être ajouter qu'en France, oui, il y a ce qu'on appelle la parafiscale. On a déjà analysé ces méthodes-là, ces outils-là. Et c'est clair que la parafiscale ne s'applique pas juste à Paris ni dans un arrondissement de Paris, elle s'applique sur l'ensemble du territoire français, sur l'ensemble des productions, alors ce n'est pas du tout la même chose. Là, on parle d'une autre avenue. Et eux perçoivent sur l'ensemble des productions étrangères et nationales, sur l'ensemble du territoire et ils gardent une portion même... Il ne retournent pas, là, de l'argent pour les productions étrangères, ils gardent cet argent-là pour leurs nationaux.

Alors, on parle complètement d'autre chose. Ça, c'était à analyser. On l'a déjà analysé, nous, déjà, en détail. Mais ça ne visait pas une région où on pense que ça pourrait avoir un impact très, très important, surtout au détriment des autres.

M. Turp: M. le Président, de toute évidence, dans le projet de loi, il n'y aurait rien qui obligerait la ville de Montréal à investir davantage dans la culture et le spectacle. C'est comme des revenus additionnels qui résultent d'une fréquentation d'événements culturels, mais il n'y a aucune, aucune assurance que ces sommes-là iraient pour soutenir l'industrie du spectacle. Et ça dépendrait de la volonté politique de la ville et de la possibilité pour les partenaires de la convaincre d'investir davantage dans la culture, ce qui n'est jamais évident à Montréal comme ailleurs.

Mais l'une des choses que vous soulevez dans votre mémoire, c'est l'impact de ce qui se passe maintenant dans la périphérie, là, et les statistiques sont assez... Il faut se réjouir par ailleurs que ce qui se fait sur les deux couronnes en matière culturelle suscite autant d'intérêt puis une plus grande fréquentation. Ça, je pense qu'on devrait être très fiers de cela. Et en même temps, si ça a un impact sur Montréal à cause de cette taxe, bien vous voyez, Mme la ministre, ce qu'il faudrait envisager pour être équitable, c'est de donner à Laval et Longueuil le même droit de taxation pour qu'ils puissent l'utiliser aussi, et ne pas placer Montréal dans une situation où elle va vouloir utiliser ce pouvoir-là avec l'impact peut-être négatif que ça aurait sur l'industrie, et ne pas donner le même pouvoir aux autres municipalités environnantes. Je ne crois pas que c'est dans vos plans, là, à moins que ce soit dans vos plans de donner de tels pouvoirs à Laval et Longueuil. Et, vous voyez, c'est ça que ça crée, créer une taxe sur le divertissement pour une seule ville, pour une métropole, et les effets pervers que ça a sur une industrie du spectacle comme celle de Montréal.

Alors, comment réagissez-vous à ça? Est-ce que vous diriez: «Bien, si Montréal a ce pouvoir, il faudrait que les autres villes l'aient aussi ou, parce qu'on ne veut pas l'attribuer aux autres villes, Montréal ne devrait pas l'avoir»?

n(11 h 10)n

M. Primeau (Jacques): Déjà, en posant cette question-là, on voit déjà que ça va être une très longue discussion, et il y a eu à mon avis, à Montréal, suffisamment de discussions ou de chicanes entre le 450 et le 514 ou entre les arrondissements et Montréal. Je suis de ceux et celles qui pensent qu'il ne faut surtout pas en créer de nouvelles, et il faut, je pense, avoir une vision de développement de Montréal où on englobe.

Parce que je vais donner l'exemple de nos partenaires. Quand on parle du succès des salles dans la couronne, le succès de nos spectacles repose sur une diffusion qui va partout au Québec, y compris dans la couronne. Comme producteur de spectacles à Montréal, oui, on est en concurrence, mais comme celui qui vend le spectacle partout en province, c'est nos partenaires, les gens de la couronne. Donc, c'est sûr que nous placer dans une chicane, par exemple, en disant: Bien, si vous imposez une taxe à Montréal, il va falloir l'imposer à Laval, Longueuil, puis on se lance dans un débat là-dessus, ça va être un débat à mon avis extrêmement stérile, et je ne pense pas que c'est une avenue intéressante pour une activité qui, je le répète, doit être encouragée.

Moi, j'aimerais mieux une taxe ? puis là je parle tout à fait personnellement ? sur le temps passé sur Internet chez les jeunes de moins de 25 ans, et on leur donne un billet de spectacle gratuit s'ils baissent leur consommation de trois heures d'Internet par semaine. On est confrontés à une activité qui demande un plus grand effort que tout ce qui se fait depuis des années, qui incite les gens à rester chez eux, alors les mesures doivent être plutôt de dire: Qu'est-ce qu'on peut faire pour que les gens sortent de chez eux? Quand les gens vont au Festival de jazz et qu'ils vont manger, des fois ils se rencontrent, ils se marient, il se passe de quoi, les gens socialisent. Si vous voulez savoir de quoi ça a l'air, une métropole multiculturelle, venez un soir, au Festival de jazz. C'est à peu près le seul moment où vous pouvez voir l'ensemble des communautés culturelles de Montréal. C'est l'activité qui est une des plus bénéfiques socialement.

Alors, je pense qu'il faut sortir du vieil esprit catho qui a initié une mesure comme: Bien, si vous voulez vous amuser puis ne pas travailler, on va vous taxer. C'est ça, essentiellement. Sur l'activité spectacle c'est à peu près la pire chose qu'on peut faire. Et ça ne s'applique pas juste à la chanson, ça s'applique au théâtre, ça s'applique à toutes les formes d'art. Il faut encourager les gens à aller sortir et aller dans les salles, il ne faut pas les décourager.

Mme Drouin (Solange): Moi, j'ajouterais peut-être là le chapeau très industrie du disque et industrie de la musique. Dans le contexte où, vous le savez, les ventes de disques baissent à cause justement, bon, du piratage, on compte beaucoup, l'ensemble de notre industrie de la musique, sur l'activité spectacle. C'est une composante importante justement qui va nous permettre de sortir justement de ce marasme-là, qui fait en sorte que les revenus dans l'industrie du disque descendent de plus en plus et que l'industrie du spectacle, elle, qui est déjà fragile... On pense que c'est un outil important pour continuer à ce que les gens aient accès à leur musique d'ici. Et on voit très clairement que les gens qui sortent aux spectacles ont une petite gêne, comme dirait mon ami Jacques Primeau, à copier l'artiste justement qu'ils viennent de voir en spectacle. Il y a vraiment un contact particulier qui se fait au moment du spectacle, et, à ce moment-là, ils comprennent que cet artiste-là, s'ils veulent le voir dans un deuxième spectacle, ils ne copieront peut-être pas son disque.

Alors, pour nous, dans l'économie de notre secteur de la musique, de façon large, la composante spectacle a un poids important et, je vous dirais, a toujours été importante, mais de plus en plus importante au moment où on vend de moins en moins de disques.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, Mme Drouin. Alors, ceci termine la séance. Et je remercie tous les représentants de l'ADISQ. Alors, Mme Drouin, M. Primeau, M. Blanchet, au nom de tous les parlementaires ici présents, on a apprécié votre présence.

(Changement d'organisme)

Une voix: Avec votre permission, je demanderais maintenant la présence... j'inviterais l'organisme Culture Montréal à prendre place.

Alors, j'invite maintenant les représentants de Culture Montréal à s'identifier. Alors, on vous souhaite la bienvenue. La Commission de l'aménagement du territoire vous accueille, et nous allons vous écouter avec... attentivement les propos de votre rapport. Alors, madame.

Culture Montréal

Mme Jean (Anne-Marie): Bonjour, Mmes, MM. les députés, Mme la ministre qui était ici, tout à l'heure. Mon nom est Anne-Marie Jean, je suis directrice générale de Culture Montréal et je suis accompagnée de Charles-Mathieu Brunelle, le directeur général de la Tohu et membre du conseil d'administration de Culture Montréal.

Une voix: Bonjour.

Mme Jean (Anne-Marie): Bonjour. Le projet de loi n° 22 déposé à l'Assemblée nationale apporte des modifications aux règles de gouvernance et d'agglomération de Montréal. Il octroie à la ville de Montréal un pouvoir de taxation sur son territoire, sous réserve des exclusions énumérées dans la loi et du respect des conditions qui y sont prévues ou qui peuvent être déterminées par le gouvernement.

Les changements aux facteurs qui influent sur le développement des collectivités ont engendré la réalisation de multiples études sur les grandes villes. L'étude Competitive Cities in the Global Economy de l'OCDE affirme qu'il y a un large consensus parmi les économistes à l'effet que les grandes villes, de par leur productivité, sont le moteur du développement régional et que de ce fait leur propre développement est vital. Cette hypothèse est confirmée par une vaste étude du Conference Board du Canada, pour qui la prospérité du pays dépend du succès de ses grandes villes. Ainsi, la création de richesse collective repose de plus en plus sur les centres urbains, et une nouvelle forme de compétition s'exerce entre les villes. La concurrence de plus en plus marquée entre Montréal et d'autres villes d'Amérique du Nord illustre bien cette tendance. Dans ce contexte, le développement de Montréal ne vise pas seulement le mieux-être des Montréalais mais bien la capacité du Québec et du Canada à atteindre leur plein potentiel. Les modifications à la charte de Montréal proposées par le projet de loi n° 22 doivent être en mesure de répondre à ces nouveaux enjeux.

Fondé en 2002, Culture Montréal est un mouvement citoyen et non partisan dont le mandat est d'affirmer le rôle central des arts et de la culture dans toutes les sphères du développement de Montréal. Par le biais d'activités d'analyse, de communication, de recherche et de concertation, Culture Montréal contribue à édifier l'avenir de Montréal, métropole culturelle. Organisation indépendante de réflexion et d'action, Culture Montréal joue en outre un rôle conseil en matière de culture auprès de l'administration municipale et des gouvernements, ainsi que du secteur privé et de certains organismes culturels. Ses quelque 700 membres provenant de tous les horizons bénéficient d'un éclairage critique sur les enjeux d'actualité politique montréalaise, nationale et internationale en matière d'arts et de culture.

Entre autres activités de l'organisme, Culture Montréal a proposé et initié Montréal, métropole culturelle ? Rendez-vous novembre 2007. Les 12 et 13 novembre prochains sera présenté un plan d'action élaboré par les partenaires du rendez-vous et destiné à être largement bonifié par les milieux culturel, des affaires et communautaire.

n(11 h 20)n

Ce plan d'action 2007-2017 pour le développement de Montréal par le biais des arts et de la culture est déjà riche en initiatives concrètes. Ces dernières visent à donner à Montréal l'élan qui lui permettra d'être consacrée métropole d'envergure du XXIe siècle. Y sont présentées cinq grandes orientations: la démocratisation de l'accès à la culture; l'investissement dans les arts et la culture; la qualité culturelle du cadre de vie; le rayonnement culturel de Montréal; les moyens d'une métropole culturelle.

Les quatre premières orientations du plan d'action présupposent la réalisation de la cinquième orientation, elle-même tributaire, entre autres, d'un engagement de tous les partenaires et plus spécifiquement des gouvernements, et ce, afin que Montréal puisse atteindre les objectifs énoncés au plan d'action. Il en va de son rôle et de son développement social, économique, culturel ainsi que de son rayonnement international. Culture Montréal est d'avis, comme en fait d'ailleurs mention le plan d'action 2007-2017, que la consécration de Montréal à titre de métropole culturelle aura des retombées significatives et appréciables pour l'ensemble du Québec, du fait que la ville pourra accompagner encore plus solidement les régions du Québec dans leur propre développement. Toutefois, pour ce faire, Montréal doit être dotée de pouvoirs habilitants qui lui permettront de consolider ses acquis, d'accélérer son déploiement et d'affirmer son positionnement à titre de ville de savoir, de culture et de créativité.

Dans un contexte de mondialisation et dans un monde où l'économie du savoir domine, les villes sont de plus en plus au coeur du développement. Leurs responsabilités envers leurs propres citoyens et envers la nation, entendue ici dans son sens géopolitique, dépassent largement l'aménagement du territoire et l'offre de services aux citoyens. Afin de relever les nouveaux défis qui leur incombent, les villes, dont la croissance se voit souvent sclérosée par des budgets ne correspondant plus à leurs besoins, doivent se tourner vers les paliers supérieurs de gouvernement, dans la mesure où les revenus relevant des habituels pouvoirs de taxation sont nettement insuffisants. Montréal se retrouve donc face à un dilemme de taille. Son succès dépend en grande partie des décisions qui se prennent à d'autres niveaux et sur lesquelles elle n'a aucun contrôle. Ajoutons à ça les crises qui touchent certains secteurs d'activité implantés à Montréal, dont le secteur manufacturier, et on obtient un inquiétant portrait de la réelle menace d'impasse financière qui plane sur Montréal.

Actuellement, les villes n'ont ni les ressources fiscales ni les outils législatifs pour s'acquitter adéquatement de leurs responsabilités. Elles ne disposent pratiquement que de l'impôt foncier et de ce fait manquent d'options financières. Selon les données de l'OCDE, Montréal se classe au 26e rang sur 26 des villes d'Amérique du Nord en ce qui a trait au niveau de vie. Ainsi, Montréal doit pouvoir avoir des taxes de croissance généralement reliées à l'impôt sur le revenu et à la consommation. Le fait d'accorder des pouvoirs habilitants est le début d'une reconnaissance du fait que Montréal doit pouvoir compter sur des revenus de croissance. Et, du même souffle, Culture Montréal souligne que l'exercice de ce pouvoir habilitant doit se faire avec discernement.

Ainsi, l'idée de taxer les billets de spectacle nous apparaît comme une avenue totalement inacceptable. Il ne faut pas proposer des solutions qui visent à augmenter le fardeau fiscal, il faut repenser le partage des revenus provenant de la fiscalité.

M. Brunelle (Charles-Mathieu): Culture Montréal est d'avis que les nouveaux pouvoirs de taxation suggérés dans le projet de loi n° 22 auront, en plus d'un effet dissuasif sur les consommateurs, un impact négatif sur la fréquentation des lieux culturels et des manifestations artistiques, lesquels font de Montréal une ville reconnue mondialement comme l'un des hauts lieux de la création artistique et de l'événementiel.

De façon générale, l'augmentation des taxes et l'imposition de nouvelles taxes ont un effet dissuasif. Taxer les billets de spectacle entraînera donc, indubitablement, soit une diminution tout acabit de la fréquentation de spectacles ou un exode des publics naturels de la ville vers les lieux culturels des banlieues. Nous nous devons ici de mentionner qu'à Montréal les revenus de billetterie constituent pour les organismes culturels une source importante de revenus autonomes. En mai 2005, un comité d'orientation présidé par M. Pierre Moreau remettait à Mme Line Beauchamp, alors ministre de la Culture et des Communications du Québec, le cahier de propositions Pourvoir la culture ensemble. Parmi les principaux éléments du diagnostic, le comité soulignait que les dépenses que les individus et les ménages consacrent aux arts et à la culture représentent un volet prometteur en termes de financement privé pour les organismes culturels. Ainsi, les dépenses de consommation de produits culturels est leur principale source de revenus autonomes et donc une piste de solution intéressante pour l'augmentation des budgets de fonctionnement.

Le rapport fait également état d'une progression de l'assistance aux spectacles. En arts de la scène, elle est passée de 2,3 millions de spectateurs en 1994-1995 à 3,5 millions en 2002-2003, une hausse donc de plus de 54 %. En proposant une taxe sur les billets de spectacle, le gouvernement risque de freiner cette progression. Dans un contexte où les organismes subventionneurs peinent à suivre le rythme de développement du milieu culturel et artistique, Culture Montréal ne peut que s'opposer fermement à la portion du projet de la loi n° 22, qui imposerait à Montréal le choix entre une augmentation des taxes sur les biens culturels et une stagnation de ses revenus, tout comme il risquerait de réduire les revenus des organismes artistiques.

Conscient des enjeux auxquels sa ville fait face, le maire de Montréal réclame à juste titre les outils fiscaux particuliers à travers le pouvoir habilitant. De tous les revenus des gouvernements, seulement 12 % en moyenne vont aux villes, 39 % au fédéral et 50 % aux provinces. Le 30 octobre dernier, le budget Flaherty choisissait de réduire la taxe sur les produits et les services de un point de pourcentage. Cette mesure représente une perte de revenus directs d'environ 6 milliards par année pour le gouvernement fédéral. Toutefois, ceci se traduit également par une perte de revenus pour les provinces. Sans vouloir renier les avantages que comporte une réduction de la TPS pour les citoyens canadiens, Culture Montréal est d'avis que ces derniers auraient davantage bénéficié de l'utilisation de ces sommes par les pouvoirs publics pour l'amélioration de la qualité de leur milieu de vie. À cet effet, les grandes villes canadiennes ont formé une coalition pour que la baisse de 1 % de la TPS soit redirigée vers les villes. Nous aurions souhaité un appui de Québec en ce sens, surtout dans un contexte où le gouvernement actuel réclame, entre autres, un règlement équitable du déséquilibre fiscal. En ne réclamant pas les sommes qui lui reviennent d'office, le gouvernement du Québec se prive de moyens qui lui permettraient de soutenir non seulement Montréal, mais l'ensemble des villes qui constituent autant de poumons économiques pour le Québec.

Culture Montréal aimerait également porter à l'attention de la commission les conclusions de l'étude de Thomas J. Courchene... pardon, Thomas J. Courchene, intitulée Global Futures for Canada's Global Cities. Dans cette étude, M. Courchene affirme que la décision d'Ottawa de partager avec les municipalités une partie des recettes fédérales tirées de la taxe sur l'essence aurait pu contribuer à renforcer la situation financière des grandes villes. Or, ce n'est pas le cas, car les recettes qui proviennent en majeure partie des grandes villes sont redistribuées à toutes les municipalités sur la base de l'égalité par habitant. Montréal y perd donc au change. Force est de constater qu'un programme qui devait servir de mécanisme de partage entre deux paliers de gouvernement s'est transformé en transfert de péréquation des grandes villes vers les plus petites agglomérations.

Enfin, Culture Montréal désire se prononcer sur la création possible du Secrétariat de l'agglomération de l'île de Montréal. Selon un récent rapport de l'ONU, la moitié de la population mondiale vivra bientôt en ville. Diriger une métropole comme Montréal n'est pas une mince tâche. Cette responsabilité est maintenant aussi lourde que de gouverner un État. Les fusions et les défusions municipales ont eu pour effet de compliquer la gouvernance de la métropole. Montréal est balkanisée. La ville est devenue ingérable du fait qu'elle est morcelée entre ses arrondissements, ses villes de banlieue, sa ville centre et sa communauté métropolitaine, le tout divisé entre l'île, Laval, la Rive-Sud et la couronne nord. La création du Secrétariat de l'agglomération de l'île de Montréal change les règles du jeu en imposant une double majorité. Ainsi, on vient de paralyser la ville dans son action. Force est de constater que les fusions et les défusions n'ont pas eu les résultats escomptés. En effet, malgré une diminution du nombre d'élus, il coûte aux contribuables montréalais plus cher qu'avant. Toronto compte 1 million de citoyens de plus que Montréal. Pourtant, elle est dirigée par moins d'élus.

De plus, les économies d'échelle anticipées ne se sont pas matérialisées principalement en raison de l'augmentation de la bureaucratie. Enfin, la création d'une série de mairies d'arrondissement à l'intérieur de l'ancienne ville a découpé, démultiplié ce qui était autrefois centralisé. Peut-on encore parler de cohérence administrative et politique qui devait émerger de la ville unifiée?

Considérant le rôle moteur essentiel que joue Montréal pour le rayonnement et le développement économique, social et culturel du Québec;

Considérant qu'il faut donner à Montréal les ressources fiscales dont elle a besoin pour s'acquitter de ses responsabilités;

Considérant qu'une taxe sur les billets de spectacle aurait un effet dissuasif qui porterait atteinte aux organismes culturels;

Culture Montréal s'oppose à l'imposition d'une taxe sur les billets de spectacle, Culture Montréal recommande de revoir le partage de l'assiette fiscale ? et là, pour être plus précis, je parle de la taxe à la consommation ? et finalement de récupérer le point de TPS.

En conclusion, les métropoles sont les ambassadrices des nations. La richesse, la prospérité qu'elles engendrent soutiennent le développement économique du Québec et la qualité de vie des citoyens. En raison de sa proximité avec les citoyens, nous sommes d'avis qu'il faut impliquer Montréal en tant que partenaire dans toutes les délibérations sur les politiques, programmes ou mesures qui ont une incidence directe sur la métropole. Je vous remercie.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, M. Brunelle. Merci, Mme Jean. Alors, maintenant, nous allons passer à la période d'échange avec le groupe parlementaire formant le gouvernement. Mme la ministre des Affaires municipales et des Régions.

n(11 h 30)n

Mme Normandeau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, Mme Jean, M. Brunelle, merci d'être là. Vous êtes le dernier groupe qu'on entendra aujourd'hui. Alors, bien heureux et heureuses de vous entendre ce matin. Comme je l'ai fait pour vos prédécesseurs, merci d'avoir pris soin de mettre sur papier votre opinion entourant un certain nombre de dispositions qui sont contenues dans le projet de loi n° 22. Contrairement à d'autres groupes, vous avez osé émettre une opinion sur le Secrétariat d'agglomération. Je vais cependant, à mon tour, peut-être vous donner un certain nombre de précisions pour vous conforter, vous rassurer. C'est mon objectif.

Tout d'abord, vous faites référence à l'introduction d'une disposition, dans le projet de loi, sur une règle de la double majorité pour le fonctionnement du Secrétariat d'agglomération, du futur secrétariat. Je veux vous rassurer sur le fait qu'il n'y a pas de disposition à cet égard prévue dans le projet de loi. Et peut-être également en profiter aussi pour vous conforter sur le fait que le secrétariat, parce qu'on a fait beaucoup d'histoires autour du secrétariat... on a fait beaucoup de chichi. Il y a eu plusieurs éditoriaux, des textes qui ont été produits par les journalistes, entre autres, de Montréal, dans La Presse, en particulier. Et le secrétariat en fait, ce qu'on vise comme objectif, c'est vraiment d'assurer une plus grande transparence dans les affaires de l'agglomération et s'assurer qu'il y ait une plus grande fluidité dans la transmission de l'information au sein des membres de l'agglomération. C'est d'ailleurs un reproche qui est fait en permanence, je vous dirais, par les maires des villes reconstituées. Alors, bien qu'il y ait des commissions de créées, les gens nous disent: Écoutez, il faudrait vraiment s'assurer, là, d'avoir accès à toute l'information, à la bonne information, et ce, dans un contexte de très grande transparence.

Donc, loin de nous l'idée, là, d'ajouter, là, une autre structure, mais on veut vraiment avoir un mécanisme souple de transmission de l'information, puis vous me donnez l'occasion d'apporter une précision là-dessus.

L'autre élément: au niveau du transfert de la taxe sur l'essence. Aussi, vous indiquez que, la ville de Montréal, parce que vous émettez une opinion aussi là-dessus que je reçois, votre prétention, c'est de dire: Écoutez, on aurait peut-être dû consacrer ces sommes-là aux grandes villes pour leur donner tout l'oxygène qu'elles revendiquent. Mais j'aimerais vous rassurer sur le fait que la ville de Montréal a donné son accord à la répartition des sommes qui ont été faites dans le cadre de ce transfert de la taxe sur l'essence, et, pour Montréal, là, en fait Montréal vient chercher 34 % de l'ensemble du transfert, c'est-à-dire 1,8 milliard de dollars en provenance d'Ottawa et de Québec, parce que, nous, on a ajouté 620 millions de dollars du presque 1,3 milliard confirmé par Ottawa. Mais, aujourd'hui, ce que Montréal nous dit finalement, au-delà de l'entente sur le partenariat fiscal et financier qu'on a négociée avec les villes et les municipalités ? c'est des sommes importantes, hein, qui ont été consenties pour Montréal; à l'échelle de l'agglomération, c'est presque 1 milliard sur une entente de 3,8 milliards, à l'échelle de l'agglomération de Montréal... Si on ajoute à ça le transfert de la taxe sur l'essence, qui se poursuit jusqu'en 2014, plus toutes les autres ententes qu'on a négociées avec Montréal, vraiment, là, c'est des milliards qui s'accumulent. Mais Montréal nous dit aujourd'hui: Ce n'est pas encore suffisant, ce n'est pas assez; ces sommes-là sont importantes, mais ça ne nous permet pas de boucler notre budget.

Et Montréal affirme également qu'elle est encore trop dépendante de la taxe foncière, ce qui est le cas pour à peu près toutes les villes et les municipalités du Québec.

Alors, évidemment, comme je l'ai dit aux représentants de l'ADISQ tout à l'heure, le maire de Montréal, et ses conseillers, et membres du conseil de ville de Montréal souhaitent avoir accès à une nouvelle source de revenus, et c'est précisément dans ce sens-là donc qu'on a donné suite à la volonté qu'a exprimée la ville de Montréal d'avoir accès donc à une nouvelle source de revenus via des pouvoirs habilitants. Et on a voulu, dans le projet de loi, laisser quand même... Beaucoup, en fait. C'est notre prétention, de laisser le plus de latitude possible à la ville de Montréal pour déterminer un certain nombre donc de pouvoirs qui pourraient être identifiés.

Mais, ceci étant, sincèrement votre plaidoyer n'est pas différent de tous ceux qu'on a entendus jusqu'à maintenant. Évidemment, on comprend bien que votre organisme, qui est là pour protéger et défendre les intérêts du milieu culturel montréalais, s'objecte formellement à une taxe particulière pour la culture, mais je vais tenter, comme je l'ai fait avec Mme Drouin et M. Primeau, de vous soumettre une proposition hypothétique ? j'ai fait une tentative tout à l'heure ? alors une autre hypothèse de travail. Puis je teste des choses avec vous.

Si, par exemple, Montréal décidait de lever une taxe pour les salles de plus de 2 000 places ou encore de plus de 1 000 places ? puis c'est intéressant, les consultations, parce qu'on peut vraiment prendre la température de l'eau, prendre votre pouls là-dessus ? alors comment vous réagiriez là-dessus? Si Montréal cherchait un petit peu à aplanir les objections que l'ensemble du milieu culturel formule ? je pense que ça, c'est assez unanime ? est-ce qu'il y aurait des zones de compromis possible? Je vais dire ça comme ça.

M. Brunelle (Charles-Mathieu): J'ai écouté mes collègues de l'ADISQ. Je pourrais juste répéter la même chose que Jacques Primeau a dit. Je veux dire, honnêtement, j'ai l'impression que c'est une façon de couper les cheveux en quatre. Ce qu'on voulait vous dire dans le fond, c'est peut-être de regarder ça d'une façon un peu holistique. Je comprends qu'il y a une façon de voir, et j'ai compris que 34 % de la taxe sur l'essence va à Montréal. Je ne sais pas si c'est assez, je ne sais pas si c'est trop. Mais le message qu'on vous envoie, c'est un message de régler un problème qui est un problème de solidarité puis d'interdépendance. C'est pour ça que, quand on regardait des solutions qui nous semblaient des solutions globales et qui sont justes et équitables pour l'ensemble du territoire par ailleurs, la taxe d'essence selon nous c'était sur le principe de consommation. Comme il y a beaucoup de consommation à Montréal, selon nous ce serait une logique, comme c'est une taxe à la consommation, que ça retourne un peu plus à Montréal. Ça, c'est le premier point qui était en arrière de ça, cette mesure-là.

Au niveau de la TPS, on dit sur toutes les plateformes publiques: On a besoin de fonds. Selon nous, il y avait une opportunité et il y a une opportunité en or sans qu'il y ait un impact significatif ou notable dans les poches de chacun d'entre nous, mais il y a là une source de financement très importante et qui ne rentre pas dans un débat qui est un débat finalement qui va créer beaucoup plus de problématiques. Et par ailleurs une industrie puis une forme d'art qui est une des grandes locomotives du Québec aujourd'hui, au niveau du sens, au niveau de la crédibilité, la créativité, le rayonnement à travers la planète du Québec, ça passe beaucoup par le spectacle et beaucoup par les arts. Et plus on va stimuler ce secteur-là, plus ce secteur-là va nous porter à travers le monde, et ça, je pense qu'il ne faut pas l'oublier. Comme notre réalité des communautés culturelles, c'est probablement nos deux forces économiques les plus importantes en ce moment.

Alors, on pense qu'il vaut mieux trouver des solutions qui par ailleurs sont pratiques, disponibles et qui ne font vraiment pas très mal.

Mme Normandeau: Merci.

Le Président (M. L'Écuyer): M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Merci, M. le Président. Juste pour revenir sur le secrétariat, là, je lisais, tout à l'heure, les fonctions du secrétariat pour vous sensibiliser au niveau du projet de loi. On parle de trois choses principalement: favoriser la circulation de l'information, de procéder à des vérifications sur des aspects administratifs d'agglomération et de formuler des avis et de faire des recommandations au conseil d'agglomération. Il n'y a pas de pouvoir, là, au Secrétariat d'agglomération, qui est très contraignant de ce côté-là.

Alors, je voulais juste faire le point là-dessus parce que, comme l'a dit ma collègue tout à l'heure, il y a eu beaucoup d'informations sur le fameux Secrétariat d'agglomération. Et ce que j'ai compris, c'est que souvent les maires de banlieue se plaignaient de recevoir, à la dernière minute, les agendas, de ne pas avoir l'information, et ainsi de suite. Alors, le secrétariat, c'est, d'abord et avant tout, de favoriser un meilleur échange parce que dans le dossier, actuellement, je pense qu'il n'y a pas beaucoup de communication entre les maires de banlieue et la ville de Montréal. Donc, c'était ça qui était le but. Et on parle d'un secrétariat de peut-être quatre, cinq personnes, tout au plus. Donc ça, c'est un des points importants.

Moi, je voulais revenir sur un des aspects qui me préoccupent et qui est un aspect plus fondamental. Hier, un des organismes est venu, et ils nous ont dit, de façon très simple, qu'il n'y avait pas eu à Montréal, depuis plus de 15 ans, d'investissement privé à Montréal, privé-privé. Depuis en fait l'investissement d'IBM-Marathon au centre-ville de Montréal, il n'y avait pas eu d'investissement privé. Tous les investissements qu'il y a eu, importants et majeurs à Montréal, ça a été, d'abord et avant tout, avec l'aide des gouvernements.

Dans votre document, vous dites que, selon le récent rapport ? je crois que c'est l'OCDE ou l'ONU ? de l'OCDE, on est 26e sur 26e. Or, pourtant, si on regarde la situation de Montréal, ce n'est quand même pas la ville nécessairement où ça coûte le plus cher. Comment vous expliquez la pauvreté relative, là, de Montréal? Comment vous expliquez ça, cette situation-là?

n(11 h 40)n

Mme Jean (Anne-Marie): Si on avait la réponse, on deviendrait peut-être très riches. En fait, on parle, dans cette étude-là, du niveau de vie des Montréalais.

Donc, je pense qu'on a effectivement une économie. Je ne suis pas une économiste. Je ne peux pas répondre, vous dire pourquoi on a le niveau de vie le plus bas à Montréal, mais il reste que c'est un constat que les gens font, et c'est vrai qu'on doit stimuler l'investissement privé. Et maintenir l'attrait que la ville présente pour les investisseurs est très, très important pour attirer la richesse, et le dynamisme culturel de Montréal fait partie, est un très grand contributeur au maintien de cet attrait.

Donc, je ne peux pas vous donner d'explication pour le niveau de vie, mais je peux vous dire que nous croyons profondément que le développement culturel et la vitalité artistique demeurent un atout et qu'on doit investir fortement dans ce secteur d'activité.

M. Arcand: ...à Montréal, sur le plan culturel, il se passe quand même beaucoup de choses. Vous avez le Festival de jazz. Je pense que Montréal peut être considérée. En tout cas, c'est un des secteurs très importants et très forts de Montréal, et pourtant on ne semble pas sortir encore une fois j'appelle ça de la pauvreté relative, mais on semble avoir de la difficulté.

Mme Jean (Anne-Marie): Et c'est vrai qu'il y a un certain niveau de morosité, je crois, que tout le monde a constaté dans les dernières années, et qu'on semble avoir de la difficulté à faire démarrer les projets, et donc il faut collectivement se réunir, développer des plans d'action. Et ce qu'on a voulu faire, nous, à notre niveau, en proposant la tenue d'un rendez-vous sur la culture où on ne conviait pas que le milieu culturel, mais toute la population montréalaise. Tous les acteurs du développement de Montréal sont là. Les gens d'affaires y seront aussi, et je pense que ça témoigne d'un changement de mentalité aussi et d'un constat qui est fait par la communauté des affaires, que la créativité et le dynamisme culturel de Montréal font partie des cartes que nous avons dans notre jeu pour nous positionner sur l'échiquier mondial.

Donc, je pense qu'on doit investir à long terme, dans ce secteur, pour positionner Montréal et augmenter sa compétitivité internationale.

Le Président (M. L'Écuyer): Merci, Mme Jean. Alors, M. le député de Mont-Royal.

M. Arcand: Merci, M. le Président. Vous savez, l'un des problèmes que nous avons, c'est que c'est toujours difficile d'identifier exactement les besoins de Montréal. Vous savez, il y a un débat qui dure depuis quelque temps. Il y en a qui disent que Montréal n'est pas bien gérée, d'autres qui disent que c'est exagéré, d'autres qui disent que Montréal a besoin de 100 millions, 200 millions, 500 millions. Il y a toutes sortes de chiffres qui sont avancés là-dessus. Vous, vous semblez donc un peu comme l'ADISQ précédemment. L'ADISQ a parlé de solution globale; vous aussi, vous parlez de solution globale, de ne pas taxer quelque chose en particulier mais de prendre quelque chose comme le point de TPS ou autre chose mais de façon globale. Est-ce que c'est ça que je comprends?

Mme Jean (Anne-Marie): Absolument.

M. Brunelle (Charles-Mathieu): C'est tout à fait ça. Puis je vais abonder dans votre sens. La job n'est pas finie, mais ? je ne veux pas décourager personne ? mais la job ne sera jamais finie, c'est-à-dire qu'une ville va toujours être en construction, et ça, je pense que c'est important. Plutôt que de rester dans une dynamique de morosité, on essaie, de notre côté, Culture Montréal, à Montréal de créer une synergie, créer une solidarité dans laquelle l'implication des paliers de gouvernement est essentielle. Le gouvernement n'arrêtera jamais d'investir à Montréal. Et de stimuler l'entreprise privée, c'est aussi le leadership qu'on doit tous exercer, chacun à notre niveau, dans la société civile, pour réunir les gens et pour finalement les motiver, les mobiliser à nous accompagner dans ce grand chantier là. Et, le leadership, on doit tous l'exercer à notre niveau.

M. Arcand: Non, je suis d'accord avec vous, tout à fait d'accord, mais je faisais encore référence, vous savez, à un des grands projets qu'on a à Montréal. Ça va être évidemment le CHUM et l'autre hôpital anglais. C'est un autre grand projet. On regarde la situation partout. Mais c'est toujours des projets qui sont générés, en très grande majorité, par le public ou, si c'est fait par le privé, il y a toujours un apport du public. On dirait qu'il n'y a pas d'intérêt, de la part du secteur privé, d'investir de façon massive, à Montréal, comme c'était le cas des autres villes. Alors, c'est un peu la question que je voulais poser là-dessus ce matin, et j'essayais de savoir pourquoi ou si vous aviez une idée par rapport à ça. Est-ce que c'est parce qu'on n'est pas compétitif? Il doit y avoir un problème à quelque part.

Mme Jean (Anne-Marie): Je pense qu'il y a eu des investissements. On a des exemples. En fait, on a un exemple récent qui est le Quartier international de Montréal, où c'est vrai que ce sont les gouvernements qui ont mis la table, je dirais, pour intéresser les investisseurs. Et on a élaboré un plan d'urbanisme. Les gouvernements, oui, ont investi, mais les investissements privés suivent. Et je pense qu'on aura un autre exemple à partir de la semaine prochaine, où on annoncera le Quartier des spectacles. Je pense que ce sont les gouvernements, oui, qui doivent arriver et donner un signal en disant: Ce quartier a besoin d'être renouvelé, rénové, amélioré, c'est visible à l'oeil nu. Mais, quand on aura mis la table, je pense que, là aussi, les investissements suivront. Je pense qu'il y a des impulsions qui doivent être données par les autorités gouvernementales et que le secteur privé, quand il flaire l'opportunité, il se présente.

Une voix: Bon.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, maintenant, nous allons poursuivre cette période d'échange avec les membres de l'opposition officielle, et je cède la parole à M. le député de Prévost.

M. Camirand: Bien. Merci d'être présents et de venir échanger avec nous aujourd'hui, avec votre mémoire. On l'a eu seulement aujourd'hui. On a eu quand même le temps, pendant que nos collègues vous posaient des questions, d'un peu de scruter votre mémoire. Et vous êtes un des premiers à parler également des problématiques d'agglomération, ce qui m'intéresse aussi également dans le projet de loi. Mais en premier lieu la plupart des intervenants qui sont venus, dont vous aujourd'hui, ce qu'on propose dans le projet de loi ne semble pas rejoindre la population visée, bien sûr. Est-ce qu'on devrait scinder en premier lieu notre projet de loi pour le pouvoir de taxation pour Montréal et les problématiques d'agglomération, justement?

Est-ce que vous pensez que ce sont deux projets de loi différents ou on devrait intégrer ces deux projets de loi? Avez-vous une position sur ces principes?

Mme Jean (Anne-Marie): Non, pas vraiment. J'allais dire: Là non plus je ne suis pas une spécialiste en législation. Cependant, j'ai été contente d'entendre la ministre et M. le député nous donner des précisions sur les mandats qui seront donnés et les pouvoirs qui seront dévolus au Secrétariat d'agglomération parce que les documents qui sont en circulation présentement sur ce projet de loi font état de la double majorité, par exemple. Alors, si ça a été retiré du projet de loi, c'est tant mieux parce que c'était très inquiétant. Quant à la circulation de l'information, on est tous d'accord que c'est important que ça se fasse dans une société comme la nôtre. Il faut que tout le monde qui se présente dans une assemblée qui a des pouvoirs puisse avoir accès à la même information.

Quant au pouvoir de taxation, bien, nous, effectivement, que ce soit dans ce projet de loi ou dans un autre projet de loi, nous aurons la même opinion par rapport au projet qui nous est présenté, à la proposition présentée.

M. Camirand: Bien sûr, vous parlez de la double majorité. Pour seulement vous informer moi également, oui, il existe, dans le projet de loi ? sans rependre la ministre, parce que, bon, on parlait plutôt de Secrétariat d'agglomération; mais dans le projet de loi ? il existe pour les voies de circulation un principe d'arbitrage qui inclut effectivement un principe de double majorité, si on peut appeler ça comme ça. Et votre article, s'il peut faire référence à cette partie de projet de loi là, parce que le projet de loi est public, là, c'est... Toutes les sorties qui ont été faites ne sont pas nécessairement complètement, complètement discordées, là, c'est les plus les voix exprimées. Là, c'est peut-être ça que vous avez voulu dire dans votre projet de loi. J'essaie de rassembler ce que vous avez pu écrire dans votre texte, mais sur ces principes-là c'est plutôt sur les voies de circulation qui ne touchent aucunement, bien sûr, le Secrétariat d'agglomération.

Vous avez parlé, à la page 3 de votre mémoire, des revenus fiscaux des différents paliers de gouvernement. Qu'est-ce que vous appelez par «revenus fiscaux»? Est-ce que vous voulez parler d'équité, transferts du gouvernement, TPS? «Il faut repenser le partage des revenus fiscaux des différents paliers de gouvernement.» J'aimerais vous entendre sur ce positionnement-là. C'est la dernière phrase du troisième paragraphe de la page 3.

Mme Jean (Anne-Marie): ...que vous.

M. Camirand: Ah, peut-être pas la même version.

n(11 h 50)n

Mme Jean (Anne-Marie): Mais ce qu'on voulait dire, c'est que présentement les villes sont dépendantes de l'impôt foncier, et ce qu'on veut, c'est un nouveau partage de l'assiette fiscale, ce à quoi on faisait référence tout à l'heure. C'est donc accès à ce point de TPS ou encore la taxe sur l'essence. C'est une question de répartition de ces revenus-là qui présentement entrent dans les coffres des gouvernements supérieurs, alors que les besoins sont exprimés dans les villes et que leurs pouvoirs de générer des revenus sont limités et ne bénéficient pas de la croissance parce que l'immobilier ne croît pas au même rythme que l'économie, que la consommation.

M. Camirand: O.K. Merci. Vous avez parlé également, à la page 5 de votre mémoire, la page 5 que nous avons: Montréal a été balkanisée. Est-ce que la décentralisation vers les arrondissements a créé des problèmes au niveau de la culture chez vous? Est-ce que ça a créé justement une disparité au niveau de la culture?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui.

M. Brunelle (Charles-Mathieu): Oui, tout à fait. Puis sans hésitation, je veux dire, il y a eu, pendant de nombreuses années, beaucoup de difficultés à poursuivre et même à réaliser des projets dans le courant de cette transformation de Montréal. Puis cette transformation-là n'est pas terminée. Les difficultés se poursuivent. On le voit quotidiennement, dans les journaux aussi. Oui, c'est une réalité, il y a une balkanisation.

M. Camirand: Autre question. Et effectivement, sur votre mémoire, vous parlez, là, bien sûr des fusions-défusions... n'a pas eu le résultat escompté. Les fusions-défusions municipales ont eu un effet de compliquer la gouvernance. Là, moi, j'appelle ça la «confusion». C'est peut-être un mot qui se ressemble, là. Les fusions-défusions n'ont pas été simples, effectivement. Et vous parlez également du gonflement de la bureaucratie au niveau des fusions-défusions. Est-ce que vous pensez que Montréal devrait réviser la partie bureaucratie?

Mme Jean (Anne-Marie): Je pense qu'il faut revoir. Certainement que ce n'est pas une bonne idée que d'augmenter les bureaucraties et les paliers bureaucratiques, mais il y a très certainement une révision de la répartition des pouvoirs et des responsabilités en tout cas qui doit être faite. On parlait, tout à l'heure, des arrondissements. Les pouvoirs sont souvent divisés entre la ville et les arrondissements, ce qui fait que pour un promoteur ça devient extrêmement compliqué de savoir à qui il doit s'adresser. Et, oui, le fait d'avoir dévolu de nouveaux pouvoirs aux arrondissements, eh bien, obligatoirement, pour les mettre en oeuvre, ils ont été obligés de se doter de nouveaux services et donc de ressources humaines plus importantes pour le faire. Je pense qu'il y a une révision de la gouvernance à faire, c'est entendu.

M. Camirand: Dans les principes qui sont présentement au niveau de la gouvernance, de quelle façon, vous, avez-vous vu ça pour Montréal? Est-ce que la gouvernance en ce moment est ingérable? Comment l'industrie de la culture s'est sentie au cours des dernières années, justement depuis les fusions de 2001? Est-ce qu'il y a eu un ralentissement d'investissements? Est-ce qu'il y a eu un ralentissement d'économie? Est-ce qu'il y a eu un ralentissement chez vous, causé par ces problématiques de fusions-défusions là?

Mme Jean (Anne-Marie): C'est un ralentissement pas nécessairement des investissements, c'est que ça devient très compliqué de tout faire, d'obtenir des permis pour les promoteurs, les producteurs. D'un arrondissement à l'autre, les règles ne sont pas les mêmes. Il y a ceux de la ville centre, ceux de l'arrondissement, et tout ça. Donc, on a compliqué la vie des gens énormément. C'est ce qu'on a constaté. Et, moi, j'ai fait une tournée des arrondissements, quand je suis arrivée à Culture Montréal, pour rencontrer les gens, pour me rendre compte que les services offerts aussi étaient extrêmement variés, que tous les Montréalais n'étaient pas égaux dans les services culturels et dans les services qu'ils recevaient, dans l'offre culturelle. Et donc tout ça, ça a eu de très gros impacts sur le milieu, c'est certain.

M. Camirand: Ce que vous me dites, c'est important, là, parce que les arrondissements, bon, ont été créés par le gouvernement. Et que la culture en souffre dans des arrondissements plutôt qu'en d'autres ? en présentant des spectacles, des fois on a besoin effectivement de plus de permis, plus de choses... Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu effectivement de revoir ces principes-là au niveau de la culture? C'est-u quelque chose qui serait intéressant aussi? Vous le soulevez, là, à l'intérieur. Ce serait quelque chose qu'il faudrait regarder au niveau du gouvernement, à ce qu'il y ait un ajustement pour la culture?

Mme Jean (Anne-Marie): En fait, nous, on a déjà soulevé cette question publiquement. En fait, c'est connu qu'on a proposé une revue de la gouvernance culturelle en ramenant de la centralité dans la prise de décision, en créant une agence qui aurait cette responsabilité et qui aurait la responsabilité aussi d'assurer les liens avec les arrondissements et l'uniformité des politiques, et des pratiques, et des procédures.

M. Camirand: Merci. Je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. L'Écuyer): Mme la députée de Groulx.

Mme Lapointe (Groulx): Merci, M. le Président. Bonjour et bienvenue. Merci. Je trouvais ça très intéressant, ce que vous venez de parler. C'est un point très important par rapport à la gouvernance de Montréal. Je trouve votre mémoire très intéressant. Vous touchez aux deux aspects de la loi: le pouvoir habilitant, la même chose que pour le Secrétariat à l'agglomération. L'île de Montréal. Je suis d'accord avec vous que les métropoles sont des poumons économiques. C'est très important, cet aspect-là. Il faut faire attention de donner les pouvoirs pour que la métropole reste et soit encore plus performante au niveau nord-américain.

Vous suggérez la récupération du point de TPS. J'ai entendu ça ou j'ai compris ça. Comment vous voyez son application? Puis est-ce que vous pourriez m'en parler?

M. Brunelle (Charles-Mathieu): L'idée, c'était: il y avait une opportunité ? bien, j'imagine qu'elle est encore là, cette opportunité-là, elle ne disparaît pas ? mais cette opportunité-là qui représentait des sommes importantes pourrait être divisée, mettons ? là, je ne peux pas arbitrer ça ? mais d'une division qui permettrait à Montréal d'avoir des fonds supplémentaires pour répondre à ses besoins puis répondre aux besoins de qualité de vie, que ce soient les infrastructures, ou culturels, ou autres. On le faisait en opposition, si vous voulez, qu'on trouvait qu'il y avait là une opportunité qui nous semblait beaucoup plus, je dirais, équitable à la limite et beaucoup plus prometteuse que celle de taxer le milieu du spectacle.

Mme Lapointe (Groulx): Ça fait le lien avec ce que vous disiez. L'idée de taxer les billets de spectacle vous apparaît comme une avenue totalement inacceptable. Déjà, il y a une différence entre les banlieues, comme on en parlait tantôt. Ça accentuerait, selon vous, et ça diminuerait l'impact de Montréal?

Mme Jean (Anne-Marie): C'est une mesure désincitative à la fréquentation culturelle, alors ça ne peut pas faire autrement que d'avoir des impacts financiers dans les budgets de fonctionnement des organismes culturels.

Mme Lapointe (Groulx): ...comprends bien et je trouve ça très intéressant. Merci.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, M. le député de Berthier...

M. Benjamin: Alors...

Le Président (M. L'Écuyer): ...vous désirez intervenir.

M. Benjamin: Pardon. Bonjour à vous deux. On sait qu'il y a déjà, comme ma collègue l'a déjà dit, il y a déjà une disparité entre le prix des billets à Montréal et dans les régions. Avec une nouvelle taxation, est-ce que vous pensez que le fossé va grandir? Puis pourquoi il y a déjà un fossé avant que la taxation arrive? Pourquoi il y a une différence du prix du billet, d'après vous?

M. Brunelle (Charles-Mathieu): Jacques Primeau vous l'a bien expliqué, puis, moi, je peux vous dire exactement la même chose. Dans la production d'un spectacle, dans la mise en marché d'un spectacle à Montréal, il y a des coûts qui sont très importants, et ces coûts de mise en marché... Et puis, dans une autre vie, j'aide à développer un réseau pour les arts du cirque à travers le Québec. La Tohu, en présentant des spectacles de cirques étrangers ou même des spectacles québécois... aider la circulation, à travers le Québec, de ces spectacles-là, bien sûr des régions attendent les opportunités. C'est-à-dire ils attendent les résultats des critiques, les résultats qui se passent dans les médias. L'investissement en média se fait à Montréal beaucoup plus qu'en région. Ça, ça justifie une des différences de prix. Puis l'autre différence de prix, c'est tous les coûts qui sont inhérents à la production à Montréal. Le fossé s'est creusé parce qu'il y a des salles de qualité et grâce au fait qu'il y a des salles de qualité en banlieue, mais, je dirais, c'est tellement complexe de répondre à cette question-là sans tomber dans une question, qui est beaucoup plus large, de mesures qui ont fait, de façon peut-être malheureuse... qui ont mis Montréal dans cette situation-là, depuis un certain nombre d'années, depuis de nombreuses années.

Donc, celle-là en ce moment ne ferait que pousser le clou encore plus loin, selon nous, et c'est un peu pourquoi on s'y oppose.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, ceci termine l'échange avec l'opposition officielle. Maintenant, nous allons passer avec le deuxième groupe d'opposition pour les 13 prochaines minutes. Je cède la parole à M. le député de Borduas.

n(12 heures)n

M. Curzi: Merci, M. le Président. En fait, si on analyse bien ça, vous avez dit qu'effectivement Montréal, métropole culturelle, devrait confirmer vos objectifs mais qu'il faut les lire en partant du dernier, c'est-à-dire qu'il faut d'abord que la métropole culturelle ait les moyens d'accomplir ses autres buts qui sont la démocratisation, l'investissement, la qualité, le rayonnement. D'ailleurs, je pense que la ministre de la Culture disait, je crois, ce matin que le Québec a besoin d'un Montréal culturel fort et qu'il faut que la métropole culturelle soit forte.

C'est ce que dit Mme St-Pierre. On ne peut qu'être d'accord avec ça. Mais je comprends aussi ? c'est assez clair, dans le fond ? que ce que vous dites, c'est que vous vous opposez carrément à ce qu'il y ait une augmentation des taxes sur les biens culturels et que ce soit mis en équilibre avec une stagnation des revenus, donc. Mais ce que vous n'affirmez pas mais ce qui semble évident, c'est qu'il n'y a jamais eu l'intention, de la part de la ville de Montréal, que ce projet de loi et son pouvoir de taxation soient dirigés d'abord vers une taxe sur les produits culturels.

C'est ma première question, mais je ne vous demande pas d'y répondre. Ça me semble assez...

Une voix: ...

M. Curzi: Oui? Ça n'a jamais été exprimé d'aucune façon.

Mme Jean (Anne-Marie): Non. Et en fait le contraire a été exprimé. Je pense que la ville de Montréal a bien dit qu'elle ne l'utiliserait pas, ce pouvoir-là. Je pense que M. Zampino l'a dit deux fois, récemment. Donc, je partage votre opinion là-dessus.

M. Curzi: ...la même façon, on peut dire que, si la ville avait un pouvoir ? ou en fait c'est ce que je vous demande; si la ville avait un pouvoir ? de taxation plus large, est-ce que vous croyez qu'elle dirigerait d'abord ses efforts vers le milieu du divertissement et de la culture comme premier champ de taxation?

Mme Jean (Anne-Marie): ...crois pas. On voudrait qu'elle investisse ses efforts après, avec les revenus, vers ce secteur-là, mais je ne pense pas que ce serait son premier choix, non, de taxer, parce que je pense que les gens sont conscients que c'est une mesure désincitative. Taxer le billet de stationnement, le billet de spectacle, tout ça, c'est la fréquentation du centre-ville qui s'en trouve perdante. Donc, je ne crois pas que la ville, avec les investissements qu'elle a consentis au Quartier international et qu'elle s'apprête à consentir au Quartier des spectacles, va souhaiter que ces lieux soient désertés. Il faut encourager la fréquentation de ces milieux-là par toutes sortes de mesures, mais en tout cas il ne faut pas ajouter des mesures désincitatives. C'est sûr qu'il faut encourager le transport en commun, et tout ça, faciliter l'accès au centre-ville par les moyens de transport mais surtout encourager les gens à participer à l'offre qu'on leur fait de vivre des expériences culturelles très riches, diversifiées, enrichissantes.

M. Curzi: Puis en fait, implicitement, dans votre réponse, il y a déjà ma troisième question, c'est-à-dire que, si la ville de Montréal avait la jouissance de pouvoirs habilitants plus larges, vous croyez en tout cas ou est-ce que vous croyez que la ville les utiliserait en bonne partie aussi pour favoriser le développement culturel de la métropole?

Mme Jean (Anne-Marie): En tout cas, c'est ce qu'on lui demandera. C'est ce qu'on lui a déjà demandé. Lors de la campagne électorale municipale de 2005, on avait élaboré une plateforme culturelle où on demandait à la ville d'augmenter ses dépenses culturelles au même rythme que les dépenses globales de la ville. Donc, ça voudrait dire que, le soutien aux arts et à la culture, le budget du Conseil des arts de Montréal serait augmenté, et tout le soutien aux industries culturelles qui est consenti aussi par le service de développement culturel de la ville augmenterait.

M. Curzi: Dernière question pour moi. Dans le fond, ce que vous dites au sujet de la balkanisation de Montréal: ça vous semble être une des raisons contreproductives, disons, pour l'épanouissement du développement culturel de la ville de Montréal. Et est-ce que vous avez déjà envisagé des solutions globales, en fin de compte, pour faciliter une meilleure réalisation de Montréal, métropole culturelle? Si vous aviez à proposer ou à imaginer une... Admettons qu'on soit complètement libres. Mais, si vous aviez à imaginer ça, comment ça se déclinerait, selon vous?

M. Brunelle (Charles-Mathieu): C'est ce qu'on disait. C'est-à-dire c'est une des propositions qu'on va faire ou qui a été faite. C'était de revoir la gouvernance culturelle à Montréal, de la revoir en recomposant une agence qui pourrait rejoindre l'ensemble des propositions qu'on a en termes de rayonnement, de diffusion, de production, de rayonnement international, qui rejoindrait les industries culturelles, et autant les industries culturelles que les organismes artistiques, et qui regrouperait les services municipaux qui interviennent en termes culturels... que le Conseil des arts de Montréal. En fait, c'est de recréer une agence à la hauteur et à la mesure des besoins d'une métropole culturelle... en fait les services culturels.

M. Curzi: Dernière question. Puis là elle est vraiment un peu théorique, puis, j'avoue, il y a une part d'ignorance là-dedans. Mais, quand on parle de pouvoirs habilitants, si vous aviez à répondre ? et je comprends que les pouvoirs habilitants peuvent avoir une définition plus ou moins grande ? est-ce que vous avez une opinion ou une vision de l'étendue et de la façon dont ces pouvoirs habilitants là pourraient se déployer, de votre point de vue, du point de vue de Culture Montréal?

Une voix: ...

M. Curzi: C'est une question théorique.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, maintenant, je reconnais le député de Mercier.

M. Turp: Peut-être juste une remarque, là, pour la ministre. C'est quand même assez curieux, là, qu'on inclue, dans un projet de loi, un pouvoir spécifique de taxation sur le divertissement, alors que la ville n'en veut pas. Et je pense qu'il va falloir prendre acte du fait que les gens du milieu culturel de Montréal viennent dire: Regarde, ça va avoir un effet très, comment dire, très dévastateur sur la culture ou sur le milieu artistique. Ça va avoir un effet dissuasif. C'est ce que vous utilisez, c'est ce qui vous fait vouloir vous opposer fermement. Je pense qu'il va falloir prendre acte qu'on s'oppose fermement. L'ADISQ n'a pas été plus tendre à l'égard de cette suggestion.

Alors, est-ce que vous pouvez comprendre pourquoi le gouvernement met ça dans un projet de loi, dans Culture Montréal?

Mme Jean (Anne-Marie): En fait, je pense que les gens cherchent des solutions au problème. Cette solution proposée ne nous semble pas acceptable. Nous l'exprimons. Et nous voulons contribuer à la recherche de solutions. Mais ce n'est certainement pas celle qui est à privilégier. Elle est à proscrire, en fait. Tout ce qui a un effet dissuasif sur la consommation culturelle, sur la fréquentation culturelle sera toujours pour nous inacceptable, mais on est volontaires pour participer à la réflexion qui mènera aux solutions. Celle-ci n'en est pas une.

M. Turp: La démonstration qu'a fait l'ADISQ ? je ne sais pas si vous avez pu prendre connaissance du mémoire, là, de l'ADISQ ce matin ? la démonstration sur cet effet négatif, vous partagez ces vues de l'ADISQ qui nous sont présentées ce matin?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui.

M. Turp: Culture Montréal est du même avis?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui, tout à fait.

M. Turp: J'imagine que, puisque vous vous intéressez à la culture en général, pas seulement à l'industrie du spectacle, que vous êtes aussi d'avis que ça aura un effet dissuasif dans les autres domaines et dans les autres activités culturelles?

Une voix: Tout à fait.

M. Turp: Merci.

Le Président (M. L'Écuyer): Alors, ceci termine cette période d'échange, et je remercie, au nom de tous les parlementaires, Mme Jean de même que M. Brunelle. Et nous avons eu l'occasion de vous entendre.

Les travaux sont ajournés jusqu'au 8 novembre, à 9 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 8)


Document(s) associé(s) à la séance