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(Dix heures cinq minutes)
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, la
commission du budget et de l'administration reprend ses travaux, eu
égard à la poursuite du débat sur le discours sur le
budget. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Organisation des travaux
Le Secrétaire: oui, m. le président. _ m. fradet
(vimont) remplace m. bélisle (mille-îles) et m. dufour
(jonquière) remplace m. boisclair (gouin).
Le Président (M. Lemieux): Eu égard à une
entente entre les leaders. Est-ce qu'il y a des leaders parlementaires de
chacune des formations politiques? Est-ce qu'il y a consentement pour que le
président du Conseil du trésor participe aux travaux de cette
commission, eu égard à un empêchement du ministre des
Finances? Consentement. M. le député de Labelle.
M. Léonard: oui. je voudrais simplement dire que je
comprends, s'il y a des raisons de santé, et nous allons être
fair-play là-dessus, il n'est pas question de... nous allons accepter
que le président du conseil du trésor vienne, même s'il est
moins compétent que son collègue en la matière.
M. Johnson: On verra à la fin, je suppose, là,
premièrement.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Monsieur, s'il vous
plaît...
M. Johnson: Tout ce que j'essaie de faire, c'est de remplacer le
plus dignement possible le ministre des Finances qui est retenu à
l'extérieur de cette Chambre, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Et j'en suis bien conscient, M.
le président du Conseil du trésor. M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Je suppose que le ministre des Finances, c'est
lui qui a la charge des finances, alors, c'est lui qui a la compétence
actuelle.
Le Président (M. Lemieux): Alors, au sens de la loi, il y
a eu consentement, et c'est la raison pour laquelle j'ai fait état que
le président du Conseil du trésor participe, parce que le mot
"participer" est bien important, puisqu'il n'est pas membre de cette
commission.
M. le secrétaire, les remplacements ont été
annoncés, nous en étions, la dernière fois, au
député de Labelle, si je me souviens bien. M. le
député de Labelle.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais soulever,
quand même, une question de règlement en partant, ici. Je
comprends qu'on accepte que le président du Conseil du trésor
remplace le ministre des Finances, fort bien, il y a des raisons de
santé, je pense qu'on est corrects, on est fair-play, on joue comme
ça. Je voudrais revenir sur une question de même nature, vendredi
soir, où j'ai dû arriver quelques minutes en retard et vous avez
commencé la commission, alors que, de consentement, on avait convenu
qu'on terminerait plus tôt, vers 21 h 15, pour permettre au ministre des
Finances de prendre un train, mais je pense que le fair-play doit jouer dans
les deux sens. Si quelqu'un est en retard un peu, de quatre ou cinq minutes, je
pense que, cependant, il n'était pas question de commencer la
commission. C'est ce que vous avez fait, et je trouve qu'il y a quand
même une tolérance, alors que, nous-mêmes, on avait
donné un consentement pour que les travaux se terminent assez tôt.
Je trouve que c'est un peu fort le café, disons, parce qu'il peut
arriver toutes sortes de questions qui peuvent survenir, de la part des
députés.
Le Président (M. Lemieux): Je comprends très bien.
Il ne s'agit pas d'une question de règlement, il s'agit d'un commentaire
de la part du député de Labelle, et je prends votre commentaire
en très très grande considération, M. le
député de Labelle. Simplement, peut-être...
M. Léonard: Deuxièmement...
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le
député dé Labelle.
M. Léonard: Deuxièmement, M. le Président,
j'aimerais demander, de la part du secrétaire, à combien de temps
on est rendus, chaque partie, autour de la table, ici.
Le Secrétaire: La commission a siégé
jusqu'à maintenant pour une durée de sept heures quarante
minutes. Il y a eu sept minutes trente-cinq d'organisation des travaux;
cinquante et une minutes et cinq de déclarations d'ouverture. Quant au
débat, II s'est réparti de la façon suivante: deux
heures cinquante-cinq minutes chez les ministériels, trois heures six
minutes trente-cinq à l'Opposition.
M. Léonard: Deux heures cinquante-cinq
minutes pour les ministériels, et puis trois heures six...
Le Président (M. Lemieux): Trois heures six minutes pour
l'Opposition.
M. Léonard: ...pour l'Opposition.
Une voix: Ça inclut les réponses du ministre?
M. Léonard: Elles ne sont pas comptabilisées, les
réponses du ministre.
Le Secrétaire: Oui, oui. Alors, les ministériels
comme tels, les membres ministériels ont parlé durant une heure
trente-six, le ministre a répondu pendant une heure dix-huit. En ce qui
concerne l'Opposition, les députés ont parlé une heure
dix-huit et le ministre a répondu durant une heure quarante-sept. Il y a
eu des questions de règlement et des demandes de documents pour seize
minutes trente-cinq.
M. Léonard: Alors, ce que vous comptabilisez, ça
comprend la réponse du ministre?
Le Secrétaire: Dans les deux heures cinquante-cinq des
ministériels et les trois heures six, cela comprend la réponse du
ministre.
M. Léonard: En tout cas, ça a été
compté... Ce n'est pas le décompte que j'avais fait vendredi
soir. Enfin! On pourra le vérifier. Alors, monsieur le...
M. Johnson: Oui, je vous crois sur parole.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle, la parole est à vous.
Discussion générale (suite) Transports
fédéraux
M. Léonard: Très bien. J'ai posé une
question, vendredi soir, au ministre des Finances en ce qui concerne les
transferts fédéraux. Le ministre des Finances, durant de longs
paragraphes de son discours sur le budget, a déploré que ces
transferts fédéraux se soient stabilisés au cours des
années, depuis 1982-1983, ou à peu près, et il a
déclaré, dans son discours sur le budget, qu'il entendait
réclamer de nouveaux arrangements fiscaux avec le fédéral.
Je suppose que c'est avec l'intention d'aller chercher davantage d'argent, de
sommes, au gouvernement fédéral.
Au fond, la question que j'aimerais poser, à ce stade-ci, au
président du Conseil du trésor, c'est: Comment pense-t-il que son
gouvernement va être capable d'aller chercher des sommes additionnelles
au gouvernement fédéral, alors que, d'une part, ce gouvernement
est pratiquement en faillite, qu'il a accumulé 352 000 000 000 $ de
déficit, ce qui est de très loin supérieur au
déficit que le Québec a accumulé lui-même? Et on se
pose la question: Comment peut-on aller chercher des sommes additionnelles chez
un quêteux, parce que c'est ça la situation
fédérale? Est-ce qu'on n'est pas en train d'essayer de
prétendre à l'impossible, que d'aller chercher des sommes
additionnelles de ce côté-là? Ce qu'on peut attendre dans
l'avenir, c'est qu'au plus le fédéral stabilise ses versements de
transfert aux provinces, plutôt que l'inverse, qu'il ne les augmente.
Dans la mesure même où M. Wilson ne rencontrera pas ses
prévisions budgétaires quant au taux d'escompte applicable au
gouvernement, applicable à ses emprunts et applicable par la Banque du
Canada, qu'il avait prévu à 11,1 % et qui est actuellement
à 13,85 %, ou 13,82 %, pardon, comment... Le résultat de tout
ça, c'est que le déficit accumulé du
fédéral... Le déficit de cette année va s'ajouter,
d'ailleurs, au déficit accumulé et le déficit de cette
année, au lieu d'être de 28 500 000 000 $, risque fort
d'être rendu à pas loin de 33 000 000 000 $, entre 32 500 000 000
$ et 33 000 000 000 $. On sait la détermination que le gouvernement
fédéral veut mettre pour baisser son déficit et on peut se
poser la question: Sur quoi va-t-il couper pour entrer dans les normes?
On peut même penser que, d'ici à quelques mois, d'ici
à l'automne, il va déposer un budget supplémentaire
indiquant de nouvelles coupures pour équilibrer ou garder son
déficit dans la marge prévue, à 28 500 000 000 $. Alors,
je pense que c'est une question fort importante, parce qu'elle a trait aux
grands équilibres financiers dans le pays, le Canada, et qu'il y aura
des répercussions sur les provinces. L'endroit où il pourra
couper, d'après ce qu'il a fait dans son dernier budget, où il
pense, lui, pouvoir couper, c'est vraiment dans le budget des provinces. En
tout cas, il l'a fait, dit le ministre des Finances, de façon
substantielle, il a fait un budget en trompe-l'oeil à cet
effet-là, avec les conséquences que l'on connaît.
Alors, le taux d'escompte, au lieu d'être de 11,1 %, est de 13,8 %
et les conséquences sont majeures. S'il pense, s'il veut réduire
son taux d'escompte moyen durant l'année à 11,1 %, il faudrait
connaître une baisse substantielle du taux d'escompte, en bas de 11,1 %,
puisque maintenant, après deux mois et demi dans son année
financière, il a administré à 13,8 %. Conséquence
sur l'année: 4 000 000 000 $ et plus de déficit additionnel
à ce qu'il avait prévu. Donc, il y aura cet aspect des
choses.
Deuxièmement, M. le président du Conseil du trésor
pense-t-il, comme son collègue qu'il représente ce matin, que si
le fédéral ne peut pas augmenter ses paiements de transfert,
finalement, si le Québec insiste pour avoir des
versements additionnels qui seraient plus équitables à son
endroit, cela équivaut à aller en chercher chez d'autres
provinces et que, faisant cela, ayant une telle position, il risque d'avoir des
embêtements majeurs ailleurs au Canada, chez les autres provinces? Je
comprends que l'accord du lac Meech se dessine dans le décor, mais je
parle finances, ce matin, puis je pense qu'il y a des conséquences
à ce que j'en dis, actuellement.
Alors, est-ce que le président du Conseil du trésor peut
nous indiquer s'il trouve réaliste une telle déclaration à
l'effet de négocier des arrangements fiscaux qui, pour le ministre des
Finances indiquerait, je pense, dans le sens où il l'a dit, ou indiquait
des rentrées de fonds additionnelles de la part du
fédérai?
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor?
M. Johnson: M. le Président, je dirais que c'est non
seulement réaliste mais essentiel, c'est un des objectifs de la
politique que nous poursuivons, dans un contexte que j'aimerais, par ailleurs,
décrire au député de Labelle. Les transactions, au sens
large, fédérales-provinciales sont constituées d'une
longue liste d'éléments et elles sont fort nombreuses. Sans
vouloir minimiser l'impact des transferts fédéraux sur nos
revenus, la diminution relative des transferts fédéraux, il faut,
en même temps, avoir à l'esprit les autres dossiers. Je me
permets, au nom de la majorité ministérielle, de faire ressortir
qu'il n'y a pas que des dossiers où nous sommes en demande pour avoir
des résultats concrets dans l'avenir, mais qu'il y a également,
à l'égard de nos transactions avec le fédéral, des
dossiers qui se sont réglés à l'avantage du Québec.
Alors, il ne faut pas perdre de vue ces éléments-là. Je
répète que ce n'est pas pour minimiser ce qui est central. Quand
on regarde nos revenus, lorsqu'on regarde nos équilibres à nous,
il y a un des postes de revenu qui est substantiel, qui est le revenu de source
fédérale.
Les revenus de source fédérale sont le résultat de
calculs de répartition entre les provinces des transferts que le
fédéral effectue vers celles-ci, répartition qui est
fondée sur des calculs de richesse, des indices de capacité
fiscale, des rendements fiscaux de différents impôts, selon les
différentes provinces. Comme le député le sait, ça,
c'est une chose qu'on peut regarder en soi et qui est, en
réalité, indépendante du niveau de déficit
fédéral. La réduction du déficit
fédéral, c'est un objectif que le gouvernement
fédéral devrait avoir, au nom de tous les citoyens du Canada, de
cesser de consacrer un pourcentage, je crois, de plus de la moitié du
PIB du Canada et maintenant... Enfin, on mesure la dette du gouvernement
canadien, par rapport au PIB, comme excédant maintenant la moitié
du PIB. C'est 54 %, 351 000 000 000 $, plus ou moins, ce qui amène le
gouvernement fédéral à verser, au titre du service de la
dette, près de 40 000 000 000 $ cette année. Alors, des sommes
considérables sont en cause et sont le résultat de la croissance
structurelle de certaines dépenses du gouvernement
fédéral. C'est un problème de croissance des
dépenses qui est en cause, de non-contrôle de certaines
dépenses qui est en cause. Si le gouvernement fédéral
s'imagine qu'il va réduire son déficit en réduisant les
paiements de péréquation aux provinces, il se leurre grandement.
Il n'y a pas beaucoup de potentiel de résorption d'un déficit
à ce niveau. Le paiement d'un service de la dette de cette ampleur, il
n'y a pas grand potentiel de réduction de tout cela, si on s'imagine que
la diminution des transferts fédéraux va contribuer à
l'équilibre financier du gouvernement fédéral.
Alors, il ne faudrait pas mêler les choses. Le
député de Labelle semble dire que ce n'est pas une façon
de régler le déficit du fédéral ou encore semble
dire que c'était inéquitable pour le fédéral de
réduire son déficit de cette façon-là. Je dirais
qu'il ne semble même pas être capable de le réduire de
façon significative par ce mécanisme-là, mais je constate
qu'il tente, malgré tout, de pelleter une partie de son déficit
dans la cour des provinces, notamment les provinces les moins nanties, ce qui
m'amène à mon deuxième point: les répartitions des
paiements de péréquation.
Ces répartitions sont fondées sur des formules, je le
répète, qui maintenant désavantagent le Québec. On
sait que le barème a été modifié pour comprendre
maintenant cinq provinces, soit l'Ontario, la Colombie-Britannique, l'Alberta,
le Manitoba et le Québec, alors que ces deux dernières
étaient absentes du calcul de base qui permettait de déterminer
les montants de péréquation. Alors, si on se compare à une
moyenne qui est moins élevée que celle qu'on utilisait autrefois,
on va nécessairement perdre quelque chose en termes relatifs, par
opposition à ce qu'on pouvait recevoir lorsque les trois provinces les
plus riches étaient utilisées comme étalon - si on peut
employer l'expression - pour déterminer les montants de
péréquation.
C'est là-dessus que porte la discussion. Le fédéral
a son travail à faire dans sa cour, au nom de tous les contribuables
canadiens, celui de réduire son déficit, comme on l'a fait
nous-mêmes, et, deuxièmement, en matière de relations
fédérales-provinciales, nous devons, évidemment, regarder
quelle nouvelle entente, quel nouveau contrat, on devrait passer entre toutes
les provinces, évidemment, et le fédéral afin de
refléter plus adéquatement les richesses relatives, la
prospérité relative qu'on doit maintenir dans l'équilibre
fédéral canadien. Nous avons donc, je dirais, à faire
comprendre ou à faire comprendre de nouveau au fédéral
quels sont les fondements mêmes du système de
péréquation pour assurer une véritable redistribution des
richesses au
Canada et faire en sorte, à ce point de vue là, qu'on
puisse prendre en compte les besoins véritables des citoyens des
différentes régions, leur capacité fiscale étant la
seule vraie mesure de leur habilité à pouvoir rencontrer ces
besoins qu'on définit comme étant les besoins de tous les
Canadiens. Et tous les ajustements qu'on peut faire valoir doivent s'articuler
autour du rôle redistributeur de la péréquation, un
rôle que le gouvernement fédéral semble avoir perdu de vue
et par sa façon, je dirais, d'imposer un nouveau calcul qui nous
désavantage, et, deuxièmement, par des décisions purement
unilatérales de pelleter une partie de son déficit dans la cour
des provinces, notamment des provinces les plus pauvres, étrangement, ce
qui ne règle en rien le problème de fond que le
député a évoqué, dans le fond, et qu'on
connaît tous comme contribuables canadiens, celui du déficit
explosif du gouvernement canadien.
On pourrait, aux fins d'être le plus complet possible à ce
sujet-là, constater que la situation est particulièrement
paradoxale. Afin de réduire la croissance de ces transferts vers les
provinces plus riches, le fédéral a réagi en coupant
indistinctement dans tous ses transferts, y compris à l'endroit des
provinces moins riches. Dans une dynamique comme celle-là, dans un
système comme celui-là, il est inévitable que le
Québec soit, à court terme, perdant, ce qui nous a amenés,
je dirais, sans aucune hésitation, à un discours de
dénonciation, au sens juridique, de l'entente qui nous lie avec le
fédéral au titre des paiements de péréquation. Nous
avons à dénoncer une façon de faire, nous avons à
amener nos partenaires à redéfinir un véritable pacte de
partage, de redistribution de la richesse.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Labelle.
M. Léonard: Je trouve que ce sont là des paroles
vagues par rapport à une réalité très
concrète. Les paiements de transfert du gouvernement
fédéral, depuis 1985-1986, donc, depuis cinq ans, auront
augmenté de seulement 500 000 000 $; même pas 10 % sur cinq ans.
Ça a été dit par le ministre des Finances. Et donc, le
gouvernement fédéral ne suit pas, ne serait-ce que l'inflation,
à toutes fins pratiques. En termes réels, les transferts
fédéraux diminuent de plus en plus. Cette année, il a
sabré, de façon importante encore, dans le financement des
programmes établis, ce qu'on appelle les FPE. Je pense que le ministre
des Finances mentionne de temps en temps les chiffres de 221 000 000 $ ou de 1
300 000 000 $, selon la façon dont on le calcule, et ce sont des
chiffres que je ne conteste pas. Mais quand il affirme qu'il va aller
négocier, qu'il va demander une réouverture des arrangements
fiscaux au Canada, je me demande jusqu'à quel point on peut être
optimistes, jusqu'à quel point il est réaliste de croire que le
gouvernement fédéral, avec le déficit qu'on lui
connaît et la politique de redressement qu'il doit suivre, qu'il s'est
imposé de suivre, comment on peut même penser à
améliorer la situation. Comment ne pas évoquer la
possibilité qu'elle se détériore, même au terme des
transferts fédéraux? Quand un gouvernement est cassé, on
ne peut pas penser qu'il va en redonner plus aux provinces et qu'il va
redistribuer...
La seule chose possible qui pourrait être évoquée,
c'est que les arrangements entre les provinces favorisent davantage le
Québec dans d'autres négociations que maintenant. Maintenant,
là encore, il faut se poser la question sur le réalisme d'une
telle approche, parce que cela veut dire que le fédéral en
verserait davantage au Québec et l'enlèverait ailleurs, compte
tenu des contraintes financières qu'il a lui-même. Il en couperait
à Terre-Neuve pour en donner à Québec? Peut-être. On
voit ce qui est arrivé la semaine dernière ou il y a dix jours,
lorsqu'il a annoncé ses programmes d'aide aux pêcheries, mais il
l'a fait par ses ministères. En termes de transferts
fédéraux en argent direct, sonnant, je pense qu'on ne peut pas
penser que la situation va s'améliorer. Le gouvernement
fédéral est un gouvernement en faillite. Comment pouvez-vous
penser aller chercher de l'argent additionnel chez un gouvernement en faillite,
de façon concrète? Est-ce que vous avez, là aussi, des
exigences minimales, comme au lac Meech?
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: Pour dix minutes, M. le Président?
Le Président (M. Lemieux): Dix minutes, M. le
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Un maximum, évidemment. Le Président
(M. Lemieux): Évidemment.
M. Johnson: Le député de Labelle revient avec un
peu la même approche que tout à l'heure, là. Il risque
d'avoir la même réponse. Bien oui. Le député nous
dit: Le fédéral a un gros déficit, il est cassé,
qu'est-ce qui vous prend d'aller lui demander plus d'argent? On doit se
retourner, à ce moment-là, dans deux directions; enfin, on doit
viser deux objectifs. Le premier, à la rigueur, en termes purement
techniques, ce serait la redistribution de la même masse, mais d'une
façon qui reflète véritablement les besoins des provinces,
leur capacité fiscale de rencontrer ces besoins-là et, s'il y a
un écart entre les deux, d'y pourvoir. C'est une question, je
présume, rhétorique de la part du député de Labelle
de demander: Est-ce qu'on va couper Terre-Neuve pour en donner au
Québec? Vous me
permettrez de dire que, pour autant que je me souvienne, à peu
près la moitié des revenus du gouvernement de Terre-Neuve, la
moitié probablement, je ne le sais pas, quelque part entre 46 %et48 %
des revenus de Terre-Neuve...
M. Léonard: C'est 52 %, M. le président du Conseil
du trésor, 52 %.
M. Johnson: ...52 %. Plus de la moitié vient du
gouvernement fédéral, ce qui n'est pas notre cas, sauf erreur.
Alors, disons qu'on n'aspire pas à être aussi pauvres que
Terre-Neuve. Mettons les choses comme elles sont et comparons-nous
plutôt, si on regarde la distribution de cette masse, à celle des
provinces qui en reçoivent trop par rapport à leurs besoins et
à leur capacité fiscale. Je rappelle au député que
nous avons divulgué, en page 16 de l'annexe E, les facteurs qui
expliquent évidemment le phénomène observé: faible
croissance, coupures répétées d'un montant égal par
habitant, per capita... C'est le même montant, dans le cas du financement
des programmes établis, quelle que soit la capacité fiscale des
provinces touchées. À sa face même, on voit que si on
uniformise les transferts de cette façon-là, si on les baisse
d'un même montant, c'est que, proportionnellement, on vient toucher plus
durement les provinces qui ont une capacité fiscale plus basse. (10 h
30)
Bon. Première chose à corriger: la faible croissance des
transferts alloués dans le cadre des programmes à frais
partagés. C'est le même principe, dans la mesure où les
besoins, si on peut prétendre qu'ils sont les mêmes et qu'il y a
même du rattrapage à faire dans les provinces les plus pauvres,
les moins bien nanties... Si on laisse une espèce, de pression sur les
programmes à frais partagés, encore une fois, ce sont les
provinces les moins bien nanties qui risquent d'en pâtir le plus.
Troisièmement, la disposition au plafond du programme de
péréquation limite également la progression des revenus
qu'on recevrait normalement, autre mesure égalitaire qui, par sa
définition même, touche - et c'est ce qu'on observe et c'est ce
qu'on vit - les provinces qui en ont le plus besoin.
Alors, ce que j'indique c'est qu'il n'y a pas d'adéquation entre
les demandes du Québec, d'une part, et la capacité ou la
volonté du gouvernement fédéral de faire quelque chose
avec l'ampleur de son déficit. On va aller au centre des choses,
là: le fédéralisme canadien. Qu'est-ce que c'est,
l'idée d'un système fédéral ou d'un régime
fédéral, sinon, primordialement, d'assurer un niveau, je dirais,
de prospérité, d'égalité des chances à tous
les Canadiens et de se livrer, donc, à une oeuvre de redistribution de
la richesse qui vise à assurer cet objectif et sa réalisation?
Cela n'a rien à voir avec la façon, je dirais,
débridée avec laquelle le gouvernement fédéral
dépense dans toutes sortes de program- mes qui n'ont rien à voir
avec la redistribution de la richesse au Canada. C'est évidemment de ce
côté-là qu'ils doivent faire leur travail pour se
dégager de ce poids que fait peser le déficit
fédéral sur tous les Canadiens. Ça, c'est le premier
objectif.
Le deuxième objectif, c'est de revenir à son rôle
central et de regarder, dans la mesure où il y a redistribution de la
richesse, de quelle façon, avec quelle formule on peut le faire pour
véritablement se comporter comme des gens qui croient au
fédéralisme, ce qui, disons, ne s'ensuit pas, à l'heure
où je vous parle, lorsqu'on regarde la façon dont les formules
fonctionnent.
M. Léonard: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez
terminé, M. le président du Conseil du trésor?
M. Johnson: Évidemment, j'avais ça en
mémoire, mais pas le mot à mot. Mes collaborateurs me font
remarquer qu'à la page 15 de l'annexe E on se permet de rafraîchir
la mémoire du gouvernement fédéral en lui citant les
articles 36.1 et 36.2 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui définit
très précisément quels sont les engagements des ordres de
gouvernement. Et je les ai formulés tout à l'heure: "promouvoir
l'égalité des chances de tous les Canadiens dans la recherche de
leur bien-être; favoriser le développement économique pour
réduire l'inégalité des chances; fournir à tous les
Canadiens, à un niveau de qualité acceptable, les services
publics essentiels. Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent
l'engagement de principe de faire des paiements de péréquation
propres à donner aux gouvernements provinciaux des revenus suffisants
pour les mettre en mesure d'assurer les services publics à un niveau de
qualité et de fiscalité sensiblement comparable." On est au coeur
même de ce que signifie le fédéralisme canadien. Ce sont
des rappels qu'on a à faire de façon constante, par les temps qui
courent, à nos interlocuteurs, ce qui ne nous empêche pas de les
exhorter en parallèle à mettre de l'ordre dans les finances
publiques. Et, s'ils décident un jour de le faire, à tout le
moins, qu'ils ne le fassent pas aux dépens des provinces.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Oui. J'entends bien le président du
Conseil du trésor qui dit à tout son monde qu'il n'a pas d'argent
pour payer parce qu'il a un déficit de 1 750 000 000 $, qu'on ne peut
pas dépasser au Québec, alors qu'au fédéral le
déficit est de 28 500 000 000 $, très possiblement entre 32 000
000 000 $ et 33 000 000 000 $ pour
l'année prochaine. Il dit, il affirme ici devant cette commission
qu'il n'y a pas de relation entre le niveau du déficit canadien et les
paiements qu'il fait et les programmes qu'il doit assumer en tant que
gouvernement fédéral. Je pense, moi, qu'il y a une relation. Si
le gouvernement fédéral continue d'accumuler un déficit
à raison de 30 000 000 000 $ par année, il est évident, au
bout du compte, qu'il va falloir qu'il affecte ses programmes, quels qu'ils
soient... Les gros programmes dont il dispose, ce sont les programmes de
santé, les pensions de vieillesse et des programmes sociaux comme
ceux-là, les programmes de transfert aux provinces et certains autres
programmes. Est-ce qu'il est en train de nous dire, finalement, qu'il ne peut
pas couper dans les transferts, mais qu'il va devoir couper dans les programmes
de santé ou de redistribution à la grandeur du Canada? Où
va-t-il couper pour résorber son déficit? En
réalité, on sait, depuis un certain temps, que le gouvernement
fédéral a commencé à couper dans des programmes
fort importants. Il a plafonné les pensions de vieillesse, il s'est
sorti de l'assurance-chômage, il s'est sorti de Via Rail, de grandes
responsabilités qu'il assumait, et il en est à stabiliser depuis
cinq ans, à toutes fins pratiques, les transferts
fédéraux. Alors, quand le président du Conseil du
trésor dit qu'il n'y a pas de relation entre les deux, je regrette,
là, il y a des relations entre les deux.
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Labelle sur votre temps de parole.
M. Johnson: II ne devrait pas y en avoir.
M. Léonard: Oui. J'ai une heure et dix-huit minutes contre
une heure et trente-six minutes d'accumulée, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé votre
temps de parole, mais vous pourrez revenir; c'est votre première
période de dix minutes.
M. Léonard: Alors je pense, M. le Président, qu'il
y a des relations. Je veux bien qu'on essaie d'aménager un peu mieux la
formule de redistribution entre les provinces mais, globalement parlant, il
n'aura pas le choix. À un moment donné, si on veut
équilibrer les finances fédérales, résorber le
déficit accumulé, il va falloir que tous les programmes du
gouvernement fédéral soient affectés et je pense
qu'actuellement il est en train de dresser un constat de faillite du
fédéralisme canadien.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: Ah! je me doutais, avant que le député
de Labelle ne commence, quels seraient ses derniers mots. On connaît son
option constitutionnelle...
M. Léonard: On connaît la vôtre aussi. M.
Johnson: Oui, oui, c'est ça.
M. Léonard: Les refrains, là. Allez-y du
vôtre.
M. Johnson: Les refrains, on a entendu le vôtre, là,
alors...
M. Léonard: Allez-y.
M. Johnson:... vous me permettrez d'être, quant à
moi, plus descriptif de ce qui se passe. Je ne prétends pas qu'il n'y a
pas de relation de cause à effet entre la hausse du déficit
fédéral et la tentative du gouvernement fédéral de
résorber son déficit en dompant ça - permettez-moi
l'expression - sur le dos des provinces. Je dis qu'il ne devrait pas y avoir,
dans un régime constitutionnel fédéral, de relation de
cause à effet entre ces deux choses-là. Je dis que ce sont deux
jobs différentes auxquelles le gouvernement fédéral a
à faire face. La première, c'est de mettre de l'ordre dans ses
propres programmes qui croissent à un rythme qui, aujourd'hui, lui
réserve des lendemains toujours plus douloureux que ceux de la veille.
Il doit s'occuper de cette job-là comme telle.
Deuxièmement, à l'égard de son rôle central
de redistribution de la richesse, on doit observer que, depuis quelques
années, les paiements de péréquation aux provinces ont
augmenté, mais que le réaménagement des formules de
distribution a désavantagé le Québec, notamment, et
d'autres provinces moins bien nanties telles que la Colombie-Britannique,
I'Alberta et l'Ontario. C'est ça qui est en cause.
Si on regarde, par exemple, dans les programmes de logement social, la
croissance des engagements fédéraux en implication sociale, de
1986 à 1989, a augmenté de 1, 6 % au Québec, de 8, 7 %
dans les provinces moins bien nanties et de 17, 7 % dans les provinces bien
nanties, dont 19, 9 % en Ontario. Voulez-vous me dire si cela a du bon sens? Il
y a de la place en masse pour refaire des formules qui reflètent la
réalité des taux de croissance comme ceux qui sont
observés au titre des transferts fédéraux vers les autres
provinces, qui feraient en sorte que les provinces moins bien nanties... Au
total, la croissance, de tous les transferts aux provinces et territoires,
incluant les transferts fiscaux, de 1984 à 1988, vers les provinces
moins bien nanties, soit Terre-Neuve, l'île-du-Prince-Édouard, la
Nouvel-le-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Manitoba, la Saskatchewan,
les Territoires du Nord-Ouest et le Yukon, a été de 5, 7 % -
croissance des transferts fédéraux. Pour le Québec,
à l'intérieur
de cette masse-là, c'était 3,5 %. Il y en a qui, de toute
évidence, ont constaté qu'on était plus riches que
Terre-Neuve mais plus pauvres que d'autres. Bon! les provinces bien nanties
ont, quant à elles, vu les transferts fédéraux à
leur endroit augmenter de 7,7 % en pourcentage de croissance annuelle, de 1984
à 1988, dont 8,1 % vers l'ontario. il y a quelque chose qui ne marche
pas là-dedans. ça s'explique, entre autres, parce que l'ontario,
avec des moyens extraordinaires, a décidé de mettre en place des
affaires chromées à frais partagés. le
fédéral a suivi. chromé, très riche,
capacité fiscale sensationnelle. ils ont mis sur pied des programmes
remarquablement généreux pour leur population, dans le cadre de
programmes à frais partagés. le fédéral a
embarqué dans ce train-là, alors qu'ici, paradoxalement, ou dans
d'autres provinces moins bien nanties, les programmes à frais
partagés nous permettent de bénéficier de transferts
fédéraux, mais à un niveau qui correspond à notre
capacité fiscale, étrangement, alors que les programmes, je
dirais, de fédéralisme, la responsabilité de
redistribution qu'on devrait observer dans un régime
fédéral devrait plutôt reconnaître les
différentes capacités fiscales et venir complementer et
supplémenter, et non pas simplement jumeler, imiter les efforts des
provinces, mais bien permettre l'atteinte d'objectifs à un niveau
national, et ce, à même des fonds qui doivent être
distribués conformément à la capacité fiscale de
chaque province de réaliser ses objectifs nationaux.
De façon imagée, je dirais qu'ils sont tout croches dans
leur façon d'envisager les relations
fédérales-provinciales en matière de transferts fiscaux au
niveau fédéral. Ce qu'on leur dit, c'est: Si vos transferts sont
en train de croître à cette vitesse-là, notamment vers les
provinces les mieux nanties, il y a quelque chose qui ne marche pas dans votre
système; vous ne vous conformez même pas à votre mission.
C'est de ça qu'on parle. On n'est pas en train de dire, comment
dirais-je: Arrêtez de pelleter votre déficit sur nous autres.
Ça, c'est une chose, entre autres. On leur dit, en même temps: Ce
n'est pas comme ça que vous allez régler le problème du
déficit. Prenez vos responsabilités. Les gens sont élus,
là, ce n'est pas à nous, ici, autour de la table, de leur dire
quoi faire avec leurs programmes. Qu'ils le fassent et qu'ils en paient le prix
politique, incidemment, au lieu d'essayer d'éviter ça et d'en
pelleter davantage dans le champ des provinces, non seulement en faisant
ça, mais en le faisant tout croche, de sorte que l'effet net, c'est
qu'à coupures égales - pour revenir sur la scène
québécoise - per capita, des programmes fédéraux,
on doit, au Québec, taxer, hausser nos taxes davantage, de quelque 12 %
par rapport à ce que l'Ontario doit faire, si on veut retrouver les
niveaux, je dirais, d'activité ou de financement d'activité qu'on
peut avoir aujourd'hui. Il y a quelque chose dans la dynamique du
système, dans sa formulation, dans les définitions, dans
l'arrimage des divers éléments qui désavantage les
provinces moins bien nanties.
Ce n'est pas une question de dire: "Ergo", faisons l'indépendance
du Québec. Je comprends que c'est votre cassette à vous, mais je
trouve, par ailleurs, qu'il y a pas mal plus de potentiel de redistribution de
la richesse a long terme si le système fonctionne comme il doit
fonctionner et comme les engagements fédéraux le laissent
soupçonner.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député des
Iles-de-la-Madeleine, je suis bien conscient qu'en principe je dois respecter
la règle de l'alternance. Mais il y a un autre principe, aussi, une
question d'équité, et quand je regarde le temps qui a
été accumulé l'Opposition est en carence d'un certain
nombre de minutes, d'environ huit à dix minutes. Alors, vous me
permettrez de donner la parole au député de Labelle, quitte
à revenir dans le cadre du débat. M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Merci, M. le Président.
J'apprécie ce nouveau sens de l'équité, ce matin.
Très bien. Je vais quand même poursuivre sur ce plan, M. le
président du Conseil du trésor, parce que, au fond, ça
fait cinq ans que vous êtes là et vous vous apercevez cette
année que, finalement, il y a une espèce de stabilisation des
transferts fédéraux. Donc, ou bien vous ne vous en êtes pas
aperçu avant, ou bien vous vous en êtes aperçu et vous avez
mal négocié mais, à toutes fins pratiques, les
résultats sont là pour les Québécois: ils sont
défavorisés par le système. (10 h 45)
Maintenant, j'aimerais poser une question au président du Conseil
du trésor parce que, quand même, même s'il n'y a pas de
relation directe de cause à effet, ce que je n'ai pas voulu indiquer non
plus, entre le niveau du déficit canadien et les coupures ici et
là, il reste qu'il y a une relation, ne serait-ce que, simplement, par
vases communicants. S'il veut rétablir sa situation financière,
il va falloir qu'il rogne un peu partout, dans tous ses programmes, ce qu'il a
déjà commencé à faire, puisque, déjà,
ses dépenses de programmes sont inférieures à ses recettes
de quelque 12 000 000 000 $, 13 000 000 000 $ OU 14 000 000 000 $, de cet
ordre-là. On peut penser que, dans le temps aussi, il va falloir qu'il
le fasse de la même façon.
Alors, M. le Président, est-ce que le gouvernement du
Québec, compte tenu de la gravité d'une telle situation -
j'aimerais que le président m'écoute, parce que c'est une
question que je trouve importante.
M. Johnson: Elles sont toutes importantes, vos questions.
M. Léonard: Est-ce que le gouvernement du Québec
est intervenu, d'une façon ou de l'autre, vis-à-vis du
gouvernement fédéral, pour indiquer qu'il était inquiet de
la situation et de la détérioration de la situation
financière du fédéral, inquiet par rapport aux
conséquences à terme sur le gouvernement du Québec et ses
rentrées de fonds?
M. Johnson: Constamment.
M. Léonard: Alors, il n'y a pas eu d'effet.
M. Johnson: Écoutez, est-ce qu'on doit mesurer l'effet
à la conviction qu'on manifeste à soutenir un point...
M. Léonard: M. le Président, si vous me le
permettez...
M. Johnson:... ou à la capacité de celui à
qui on s'adresse de comprendre? Bon.
M. Léonard: Ah! Bien là, vous êtes gentil
avec eux ce matin, oui.
M. Johnson: Oui, mais écoutez, il est de commune
renommée que le déficit fédéral canadien fait peser
un poids extraordinaire sur l'économie, sur le fardeau fiscal des
Canadiens et même, je dirais, sur le niveau des taux
d'intérêt. Bon. Alors, tout le monde est au courant de l'effet de
"crowding". Je ne peux pas croire qu'il n'y a pas un peu de "crowding" sur les
marchés financiers à cause des niveaux d'emprunt du gouvernement
fédéral. Quoique je devrais dire que c'est simplement une
observation hypothétique; impossible de savoir de combien de points
ça explique la hausse des taux d'intérêt ou leur niveau,
mais vous me permettrez de croire, en nous déguisant tous autour de la
table membres de la commission du budget et de l'administration, on va faire
croire qu'on est tous des profanes dans ces matières. Des niveaux de
déficit comme ceux-là ne peuvent pas faire autrement que d'avoir
un effet sur l'économie et sur la constitution de l'épargne au
niveau des taux d'intérêt au Canada. Ça, on ne peut pas en
sortir. Quand on a un gouvernement qui traîne un déficit de 350
000 000 000 $, qui correspond à peu près à la
moitié du PIB, ça commence à être du monde.
Ce qu'on doit avoir à l'esprit, c'est, à tout le moins,
que les contraintes financières qu'on observe un peu partout dans les
différents niveaux de gouvernement amènent tranquillement ceux-ci
à tenir au moins le même langage. Peut-être pas avec les
mêmes effets. Moi, j'entends aussi constamment le ministre
fédéral des Finances dire qu'il veut baisser son déficit,
baisser les impôts, faire du Canada un endroit plus concurrentiel. Je
dois dire que les gouvernements qui l'ont précédé ne
s'exprimaient pas comme ça. Je pense que c'est notoire, les
gouvernements des années soixante-dix, début des années
quatre-vingt, au niveau fédéral, ne tenaient pas un discours de
rigueur financière et budgétaire. Bon. Alors, au moins, c'est un
changement pour le mieux. On va reconnaître ça. C'est d'ailleurs
ce que nous avons fait, et nous tentons, quant à nous, de prêcher
par l'exemple, croyant par là avoir réussi à impressionner
nos interlocuteurs sur le fait qu'il y a des choses qui sont faisables,
à condition de s'y prendre à long terme et de mettre en place des
politiques rigoureuses de contrôle des dépenses et,
également, au niveau politique, de convaincre nos citoyens que c'est
à l'avantage, à long terme, des générations qui
vont nous suivre de se comporter de cette façon-là en
matière financière et budgétaire. Bon.
Est-ce que la question du député de Labelle demeure
toujours d'actualité? Moi, je vais la reformuler, je la reformule
encore: Ce n'est pas une question de savoir si les gens qui parlent au
gouvernement fédéral ont du succès. Puis, s'ils n'ont pas
de succès, bon, ils font quoi, exactement; ils s'en vont tous sur la
lune? La question est de savoir si le gouvernement fédéral a,
lui-même, ce gouvernement, la volonté de baisser son
déficit et d'encourir le coût politique que ça peut
comporter. Alors, la question n'est pas de savoir si on dit les bonnes choses
et si on a de l'influence ou si on n'en a pas. La question est de savoir s'ils
comprennent ce qu'on dit ou s'ils ne comprennent pas. Il me semble qu'il s'est
glissé, je dirais un délai entre le moment où le message
est promulgué et le moment où le message est compris et,
finalement, appliqué. Alors, je ne suis pas totalement... Je ne
désespère pas totalement de la capacité du gouvernement
fédéral à mettre de l'ordre dans ses affaires. Comme les
autres membres du gouvernement, je l'exhorte tout simplement à ne pas
s'imaginer que la solution à long terme à ses problèmes,
c'est de passer ses problèmes aux provinces.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: M. le Président, je pense, quand
même, qu'il faut constater que, d'une part, il veut que le gouvernement
fédéral réduise son déficit et, en même
temps, il voudrait que les paiements de péréquation ou autres et
les paiements de transfert augmentent. Alors, il y a comme quelque chose de
très significatif. Comme province, il voudrait en avoir plus, il pousse
à la consommation, et, comme Canadien, il veut réduire le
déficit. Alors, je pense qu'on est vraiment dans la contradiction
canadienne, actuellement.
Mesures de relance de l'économie par ailleurs, je voudrais
aborder an autre sujet, m. le président du conseil du trésor,
compte tenu de cette situation financière et des hauts taux
d'intérêt qu'elle nous amène. en tout cas, selon la
thèse du gouverneur de la banque du canada, nous devons constater que le
pourcentage de faillites au québec est considérable. les
faillites du québec représentent 43 % des faillites au canada.
donc, la situation économique est dramatique, parce que c'est un des
indices les plus importants dont on dispose pour juger de la santé
économique, et ce pourcentage de faillites rejoint le pourcentage que
nous avons connu au moment de la crise économique de 1981 et 1982, la
pire depuis 1929. donc, nous avons là un problème important. 30
000 emplois créés l'an passé! nous sommes toujours en
période de progression économique et non pas en période de
récession. il n'y a que des signes de ralentissement: il y a seulement
30 000 emplois qui ont été créés, mais avec 43 % de
faillites.
Je voudrais ramener, aussi, un engagement de la dernière campagne
électorale du Parti libéral, à l'effet que ce parti
voulait baisser le chômage structurel de 2 % au Québec, en
particulier à parti'' des programmes de formation professionnelle.
Là, je pense que ce que nous avons connu, sur ce plan-là, ce
n'est pas une politique globale comme on l'avait annoncée avec tambour
et trompette, mais c'est un volet partiel, improvisé, qui
n'évitera pas le maraudage entre les entreprises. Nous l'avons
très clairement, et d'après ce qu'on peut voir, les 2 % de baisse
du chômage structurel, on ne les connaîtra pas parce que je ne
décèle pas dans ce budget quelque mesure que ce soit qui puisse
relancer l'économie de façon significative. On a vu que le
programme de transport routier était de la poudre aux yeux. Mon
collègue de Lévis l'a très bien démontré. Il
n'y a pas de fonds additionnels de dépensés aux Transports par
rapport à l'an dernier et, même, en termes de dollars
réels, il s'agit d'une baisse.
Donc, compte tenu de la situation financière canadienne qui
commande ces hauts taux d'intérêt, compte tenu du chômage
qu'elle entraîne, le gouvernement n'a pas mis dans son budget de mesures
qui puissent relancer l'économie.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: M. le Président, pour reprendre dans l'ordre
les commentaires du député de Labelle, je dirais qu'en toute
dernière minute on nous annonce que c'est en Ontario, le mois dernier,
que la hausse des faillites a été le plus spectaculairement
élevée au Canada, soit 76 % par rapport au même mois l'an
dernier, alors qu'au Québec, c'a été de 17 %, soit
nettement sous la hausse moyenne canadienne de 35 %.
Voilà pour des nouvelles un peu plus fraîches. Mais on
reconnaîtra quand même que-Une voix:...
M. Johnson: On reconnaîtra quand même que, sur la
période de toute Une année - et on l'a dit là aussi - les
politiques macroéconomiques restrictives de la Banque du Canada en
matière de taux d'intérêt ne font pas autrement que
d'affecter de façon plus dure le Québec que d'autres
régions canadiennes. Ça s'ajoute, évidemment, au
ralentissement qui, de toute façon, fart en sorte qu'il y a des
entreprises qui ne passent pas au travers. Enfin, le nettoyage
économique se fait en cas de ralentissement et les plus faibles, dans
notre système, ne peuvent pas survivre aussi longtemps qu'elles ne le
croyaient. Et il y a, de façon plus spécifique, un ralentissement
un peu plus marqué de la demande des ménages et de la
construction domiciliaire au Québec qu'au Canada, pour l'an dernier.
Par ailleurs, au titre de la création d'emplois, nous sommes, ici
au Québec, heureux d'avoir pu connaître une augmentation de
l'emploi de 29 000, soit la plus élevée de toutes les provinces,
au mois d'avril. En Ontario, l'emploi a reculé de 1000 et, au Canada, il
s'est accru de 56 000, au total. Alors, la progression de l'emploi, au
Québec, est plus importante depuis un an que la hausse de l'Ontario et
de l'ensemble du Canada. Et à ce titre-là, il m'ap-paraît
que tout n'est pas aussi noir que ne voudrait le dépeindre le
député de Labelle. Mais je le comprends, je crois accepter... On
va tous accepter que c'est son rôle, ici, de peindre un noir tableau du
Québec, en reliant la couleur de ce tableau aux décisions, ou
à l'absence de décisions, qu'a prises le gouvernement du
Québec. Et je le corrige à l'instant.
Le budget du mois dernier prévoit, justement, des mesures de
soutien à l'économie, et conjoncturelles et structurelles. Je
pense que ça a déjà été dit et
répété. Je le vois au sourire, que je qualifierais de
narquois, du député de Labelle. Il ressemble à quelqu'un
qui a déjà entendu le discours que je vais tenir. Mais,
évidemment, dans la mesure où il me pose des questions que j'ai
déjà entendues, je risque fort de formuler des réponses
que, lui aussi, il a déjà entendues.
Le plan d'accélération des investissements dans le secteur
public, le plan de transport, quoi qu'en dise le député de
Labelle, sont des mesures qui viennent soutenir l'activité
économique au Québec. Mais j'aimerais mieux, parce que c'est
plutôt ma propension, insister davantage sur les mesures à long
terme, donc à caractère structurel.
Lorsqu'on parle d'une économie qui est en transformation et qui
doit donc s'adapter à un contexte d'internationalisation des
échanges, il
est de notre première responsabilité d'assurer une
qualité et une diversité de main-d'oeuvre, une nature, donc, de
la main-d'oeuvre qui puisse permettre à nos entreprises d'être
concurrentielles sur le continent et même à l'échelle
internationale. Nous avons donc, comme gouvernement, décidé
d'appuyer - on l'a vu dans le discours sur le budget - les activités de
formation professionnelle auxquelles les entreprises entendraient se livrer.
C'est un système fondé sur l'incitation à la formation des
ressources humaines. C'est un système qui met à la disposition
des entreprises des ressources considérables, dans les dizaines et
dizaines de millions de dollars, près de 100 000 000 $, pour la seule
année en cours, par-dessus tout ce qui se fait, par ailleurs, en
matière de formation professionnelle.
Vous me permettrez de dire que, dans des moments de finances
particulièrement serrées, alors qu'on tente le plus possible
d'éviter d'hypothéquer l'avenir, on a, malgré tout,
décidé que la formation des ressources humaines était
primordiale pour la qualité de notre avenir et que c'est vers des
mesures comme celle-là que le gouvernement a décidé de
consacrer des ressources financières. C'est un effort qui, dans les
circonstances, est considérable, substantiel, et qui devrait donner des
résultats. Nous sommes confiants que c'est ce qui arrivera malgré
toutes les hésitations, les critiques, toutes moins fondées les
unes que les autres, du député de Labelle. (11 heures)
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Labelle.
M. Léonard: Alors, on verra ce que les
Québécois en penseront, parce que c'est eux qui auront à
payer ce budget avec les hausses de taxes et d'impôts qu'il y a
dedans.
Je voudrais poser une question factuelle au président du Conseil,
du trésor. Quelles sont les prévisions du ministère des
Finances quant aux taux d'intérêt de 1990 et, par la suite, 1991,
1993, s'il y en a qui ont été faites?
M. Johnson: On va vous référer à une annexe
précise. C'est une course contre la montre. Bien, voilà.
M. Léonard: C'est à la page D3... M. Johnson:
D5, D3.
M. Léonard:... on envisage, on attend peu de répit
avant la mi-année. Est-ce qu'il y a des données plus factuelles
que celles-là, chiffrées?
M. Johnson: On m'assure que ce n'est pas 11, 1 % comme au
fédéral.
M. Léonard: Bien, c'est ce que je pensais vous...
M. Johnson: C'est de l'ordre...
M. Léonard:... faire dire aussi.
M. Johnson:... entre 12 % et 12, 5 %.
M. Léonard: 12, 5 %?
M. Johnson: Entre 12 %, oui, 12, 4 %.
M. Léonard: A quel moment pensez-vous que les taux
d'intérêt vont casser?
M. Johnson: Si on savait tous ça... M. Léonard:
Le taux d'escompte...
M. Johnson:... on serait tous très riches,
évidemment. Mais si tout le monde le savait, tout le monde aurait la
même richesse. Alors, vous me demandez de faire de la prévision.
Les perspectives économiques au gouvernement, compte tenu du budget
fédéral, selon le ministère des Finances, au premier
trimestre, faisaient état en 1990 de prévisions, donc, de 12, 4
%. Les taux à court terme, les bons du Trésor...
M. Léonard: À partir du 1er janvier? Pardon?
M. Johnson: Oui, pour l'année 1990... M.
Léonard: 1990. O. K.
M. Johnson:... le niveau moyen pour du taux
d'intérêt à court terme, 12, 4 % et, en 1991, on a
construit nos prévisions avec 11, 5% pour l'année 1991...
M. Léonard: Pour l'année 1991? 11, 5 %?
M. Johnson:... en présumant que c'est à
mi-année, donc, au 30 juin, je ne sais pas à quelle heure, que
les taux vont commencer à baisser. Mais c'est un modèle,
évidemment, notre meilleure prévision à ce moment-ci.
M. Léonard: Donc, c'est le meilleur que vous puissiez
envisager. Parce que, si ça remontait...
M. Johnson: On me souligne que les impacts, évidemment,
sur nos équilibres, qu'il s'agisse du gouvernement du Québec ou
du gouvernement du Canada, les impacts sur les équilibres sont
fondamentalement différents. Alors, on sait que c'est 11, 1 % qui est
l'évaluation en prévision de M. Wilson pour cette année et
9, 5 % pour l'an prochain. Il faut savoir que 60 % de la dette du gouvernement
canadien - ce sont les obligations d'épargne essentiellement -
est à taux flottant... Les bons du Trésor, pardon, sont
à taux flottant, alors que 85 % de notre dette est à taux fixe.
Alors, évidemment, on est moins vulnérable à des grosses
fluctuations sur le taux à court terme.
M. Léonard: La longueur moyenne de notre dette, de
l'échéance?
M. Johnson: Dix ans.
M. Léonard: C'est dix ans, oui.
M. Johnson: Dix ans, oui.
M. Léonard: Au fédéral, c'est trois ans et
six mois, trois ans et huit mois?
M. Johnson: À peu près, oui. C'est trois ans et
demi, quatre ans.
M. Léonard: Bon, je voulais simplement, à titre de
dernière remarque par rapport à ce que disait le président
du Conseil du trésor, noter quand même que le taux de
chômage prévu est en hausse de 0,6 % dans ce budget. Il passe de
9,3 % à 9,9 %. Donc, malgré tout, je pense que c'est un taux
très important en période de progrès économique, en
période de prospérité économique.
M. Johnson: Prospérité est bien bien relatif
là. On est en période stable...
M. Léonard: Ralentissement.
M. Johnson: ...sinon quelque peu ralentie. Je rappelle au
député que le taux de chômage est la résultante de
différents facteurs, qui sont le ralentissement ou la croissance
économique, d'une part, mais également les taux d'activité
de la main-d'oeuvre. On doit également considérer l'attrait
qu'exerce le marché du travail pour un nombre croissant de gens depuis
quelques années.
Le Président (M. Lemieux): Merci M. le président du
Conseil du trésor. Est-ce que vous avez terminé, M. le
député? Il vous reste deux minutes, M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Moi... Il me reste deux minutes, deux minutes
seulement?
Le Président (M. Lemieux): M. le député...
Il y a M. le député de Saint-Louis...
M. Léonard: Ah! d'accord!
Le Président (M. Lemieux): ...qui a demandé la
parole.
M. Léonard: On va rétablir après?
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Léonard: Parce que je voudrais que...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Saint-Louis.
M. Léonard: ...le député de Jonquière
intervienne.
Programme d'habitation sociale
M. Chagnon: Bon, M. le Président, vous vous souviendrez
que, la semaine dernière, j'avais parlé au sujet des
administrations locales et que nous avions eu un échange, le
député de Labelle et moi-même, sur cette volonté de
décentralisation, cette volonté de responsabilisation
vis-à-vis des communautés locales et les institutions qui
animaient le gouvernement. Je regarde le député de
Jonquière qui a l'air de douter un peu, mais le temps fera son oeuvre,
j'en suis convaincu, et il sera lui-même convaincu et probablement
défenseur de cette volonté nouvelle pour un gouvernement à
ce niveau.
Le député de Labelle, ce matin - ça me permettra de
parler un peu d'autre chose - le député de Labelle, avec raison,
a mentionné jusqu'à quel point le gouvernement
fédéral, entre 1974 et 1984 particulièrement, je dirais, a
malencontreusement fait gonfler le niveau du déficit
fédéral à un point tel qu'il est à peu près
incontrôlable au moment où l'on se parle. Je suis obligé de
mentionner et de rappeler au député de Labelle qu'à
l'annexe E, aux pages 36 et 37, au Sommaire des opérations
financières, on s'apercevra que, de 1976-1977 à 1985-1986, le
gouvernement du Québec a aussi connu le même travers: des niveaux
de déficit record comme jamais le Québec n'en avait connu, des
niveaux de déficit accumulé, qui sont passés de 6 000 000
000 $, en 1976-1977, à 23 000 000 000 $ en 1985-1986. Or, il y a la
même problématique du gonflement de la dette accumulée, et,
dans le cas du Québec, en plus - et je présume que c'est la
même chose au niveau du gouvernement fédéral - avec un
déficit du solde courant qui fait en sorte d'obliger le gouvernement
actuel à financer pendant encore plusieurs années - et les
gouvernements qui suivront financeront encore - le solde courant,
c'est-à-dire les dépenses d'épicerie faites par le
gouvernement passé et encore, il en reste encore une petite marge, par
le gouvernement actuel.
Mais je voudrais revenir plus longtemps, M. le Président, sur des
paiements de transfert du gouvernement fédéral au gouvernement du
Québec qui ont très largement diminués depuis quelques
années, tant au régime d'assistance publique du Canada,
programmes à frais partagés et aux coupures dans les
dépenses de santé et d'enseignement postsecondaire, qui
créent un désé-
quilibre qui s'en va croissant, M. le Président. Je voudrais
mentionner, ce matin, le problème que l'on retrouve dans le programme
d'habitation sociale. Vous savez, M. le Président, à
Montréal, qui est la plus grande ville du Québec, une ville
où l'on retrouve une population de plus d'un million, on retrouve aussi
75 % de ses habitants qui ne sont pas propriétaires mais qui sont
locataires. On y retrouve une partie du marché locatif parmi les plus
abimées au Québec, on y retrouve aussi un nombre record
d'habitations qui sont dégradées et qui ont
dégénéré.
Dans l'annexe E du budget présenté par le ministre des
Finances, à la page 19, nous nous référons à ce qui
s'est passé entre le gouvernement fédéral et les
gouvernements provinciaux, et plus particulièrement celui du
Québec, entre 1986 et 1989. Alors que les engagements
fédéraux en habitation sociale ont connu une croissance annuelle
de 1,6 % au Québec et de 8,7 % dans les provinces moins bien nanties,
c'est de 17,7 %, M. le Président, dans les provinces bien nanties,
c'est-à-dire la Colombie-Britannique et I'Alberta, et de 19,9 % en
Ontario. Il semble que le raisonnement du gouvernement fédéral,
en matière d'investissements en logement social, aille de façon
inversement proportionnelle à la richesse collective moyenne des
provinces qui devraient être, elles, garantes et servies de façon
régulière et normale par le biais des programmes de la
Société d'habitation du Canada. En deux mots, compte tenu de
leurs capacités financières, les provinces moins bien nanties se
doivent de recourir à des efforts de rationalisation pour tenter de
briser le cercle vicieux de l'habitation sociale, de l'habitation qui se
dégrade.
Et, si on regarde, en page 20, le tableau qui nous est
présenté, il est évident, M. le Président, que ce
tableau démontre une mauvaise connaissance, à tout le moins, et
une vision tordue de l'habitation sociale au Canada. Je regarde: en 1986, le
gouvernement fédéral a investi 1 294 000 000 $, soit 49 % de ses
budgets à l'habitation sociale, dans les provinces les moins bien
nanties, et 51 % dans les provinces bien nanties; dans le cas du Québec,
662 000 000 $, soit 25 % du budget, comparativement à 34 %, avec 894 000
000 $, pour l'Ontario. Encore là, en 1986, entre le Québec et
l'Ontario, il y a quand même un autre critère qu'on peut regarder,
c'est celui de la population. L'Ontario a une population qui représente
un peu plus de 35 % à 36 % de la population canadienne; le Québec
en représente à peu près 25 %. On retrouve cette
statistique, on retrouve cette proportion dans les budgets qui ont
été alloués en 1986. Mais, en 1989, M. le
Président, ça devient passablement inquiétant de constater
que les provinces moins bien nanties ont reçu 1 661 000 000 $, soit 43 %
du budget, par rapport aux provinces bien nanties qui ont reçu, elles,
57 % du budget. C'est dommage et c'est...
Ce n'est plus, ce n'est pas compréhensible lorsqu'on regarde la
proportion de budget de la Société canadienne d'habitation qui
est allée au Québec, soit 695 000 000 $ en 1989, 18 % du budget;
seulement 18 % du budget est allé au Québec, comparativement
à 40 % en Ontario.
Il me semble, M. le Président, que cette situation-là
n'est plus admissible, n'est pas admissible, n'est plus admissible, et le
gouvernement du Québec se doit d'augmenter la pression de ses
négociateurs... Et je sais qu'il se fait de la négociation,
à l'heure actuelle, pour augmenter le nombre d'habitations à
loyer modique pour le Québec, d'augmenter le nombre d'OSBL, d'organismes
sans but lucratif, soit sur le plan coopératif, ou sur le plan de la
gestion collective, et aussi des besoins particuliers qui devront être
touchés pour l'aménagement de résidences et de
propriétés pour des personnes âgées.
Mais qu'en est-il, M. le Président, de ces programmes qui ont
permis, dans le passé, d'améliorer le logement locatif et
d'améliorer... Le PARCQ, parlons-en du PARCQ. Le programme
d'aménagement des résidences Canada-Québec, qui avait
été signé en 1986, eh bien, par hasard, en 1989, dans le
budget du gouvernement Wilson de mai 1989, on a fait sauter le volet du PARCQ,
le programme PARCQ. Et le programme PARCQ locatif, dont le premier
bénéficiaire, probablement au Canada, était la ville de
Montréal, a été abandonné.
Ma question, M. le Président, s'adresse évidemment au
président du Conseil du trésor, qui remplace, ce matin, le
ministre des Finances: Est-ce que le gouvernement a l'intention d'augmenter ou
de faire pression sur le gouvernement fédéral pour
améliorer le pourcentage de constructions d'habitations à loyer
modique, d'habitations sociales, en général, de façon
qu'on puisse permettre aux citoyennes et aux citoyens de Montréal et de
la grande région de Montréal, et non seulement ceux-là,
mais tous ceux du Québec, de pouvoir profiter d'une habitation plus
salubre...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Alors, de profiter
d'une habitation plus salubre et de profiter, finalement, d'un bien qui est
jugé par tous comme essentiel. Est-ce que le ministère des
Finances, qui ne l'indique pas dans son budget, a l'intention de contribuer
à faire en sorte que le PARCQ locatif puisse se développer comme
ça l'était avec l'entente fédérale-provinciale dans
le passé?
Le Président (M. Lemieux): Pouvez-vous reprendre votre
question?
M. Chagnon: Alors, j'en avais une. (11 h 15)
Le Président (M. Lemieux): C'est inter-rogatif ou...
M. Chagnon: Ma question est à deux niveaux. Le premier
niveau, c'est de savoir si le gouvernement du Québec a l'intention
d'augmenter la pression pour améliorer le sort de ses
négociateurs à la table fédérale-provinciale qui
fera le partage de l'assiette ou du gâteau de l'habitation sociale dans
chacune des provinces. Ma deuxième question est: Est-ce que le
gouvernement du Québec a l'intention de reprendre à son compte
l'ancien programme fédéral-provincial qui s'appelait et PARCQ
locatif et PARCQ propriétaire?
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: Très bonne question celle-là,
très bonne question, parce qu'elle va justement au coeur des
préoccupations qui ne sont pas seulement économiques du
gouvernement - elles sont sociales effectivement - et qui visent à
soutenir la qualité des logements occupés par des gens dont les
revenus sont moins élevés.
Au point de vue historique, l'histoire récente quant au maintien
du volet locatif du programme PARCQ, je dirais au député que le
ministère des Affaires municipales, le ministre responsable de la
Société d'habitation du Québec bénéficie de
crédits additionnels cette année, afin de maintenir la
participation québécoise à ce qui était un
programme conjoint jusqu'à l'an dernier. Ce sont des engagements d'une
quinzaine de millions de dollars de plus que la SHQ pourra prendre à
l'égard de ce programme, du volet locatif, donc, du programme PARCQ,
avec évidemment à terme un crédit direct du même
montant, mais, pour cette année, c'est quand même plusieurs
centaines de milliers de dollars qui sont en cause au titre de ces engagements
qui pourraient être pris cette année.
La première question était de savoir si le gouvernement du
Québec entend maintenir la pression auprès du gouvernement
fédéral pour qu'il maintienne sa présence, accroisse sa
présence dans ces programmes. Nous connaîtrions la réponse
dans quelques heures, M. le Président, si nous avions tous l'information
parfaite à notre disposition. La conférence
fédérale-provinciale des ministres responsables de l'habitation
doit se dérouler le 22 mai, donc la semaine prochaine, mardi prochain,
et le ministre responsable et la délégation du Québec
seront investis d'un mandat très spécifique à l'occasion
du Conseil des ministres qui précède cette conférence,
c'est-à-dire le Conseil des ministres de demain. Il est évident
que le mandat que le gouvernement du Québec confie au ministre de
l'Habitation vise à corriger le déséquilibre qui s'est
glissé dans la participation fédérale au titre de ces
différents programmes en matière d'habitation. Réponse
courte en trois lettres: c'est oui.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Labelle. Je
m'excuse, M. le député de Jonquière.
Taxe foncière concernant les commissions
scolaires
M. Dufour: J'aurais peut-être le goût, avant
d'enchaîner l'essentiel de mes propos, de relever la façon dont le
député de Saint-Louis a parlé du sujet de l'habitation.
J'avais l'impression que ça aurait pu se parler dans un caucus
particulier et non en commission parlementaire, parce que ce que je crois
déceler des propos, c'est: Est-ce que c'est l'impuissance du
gouvernement du Québec à négocier avec le gouvernement
fédéral ou bien est-ce que c'est le fédéralisme
rentable? Je pense que c'est une démonstration assez forte qui a
été faite au point de vue de l'habitation. C'est clair que
Montréal a des besoins immenses au point de vue de l'habitation, mais ce
n'est pas le fédéral... Quand un gouvernement est cassé...
Il faut bien penser qu'il n'y en a pas d'argent. On veut bien vous faire
confiance pour la négociation, mais, moi, je n'y crois pas plus fort que
ça.
Là-dessus, je voudrais aller à l'essentiel de mes propos,
la taxe foncière concernant les commissions scolaires dans le champ
d'impôt foncier municipal. Les pires appréhensions se sont
avérées fondées où, au départ, on parlait de
75 000 000 $, avec une modulation jusqu'à 320 000 000 $. Dans le
discours du ministre des Finances, on se rend compte, effectivement, que
c'était 320 000 000 $, puisqu'on prévoit de 100 $ à 150 $
de crédits d'impôt par rapport à cette fiscalité.
320 000 000 $... On parle de décentralisation, les 38 000 000 $ que le
gouvernement a été obligé de remettre dans le "pot"... 38
000 000 $ sur 320 000 000 $, si j'ai bien compris, il reste environ 290 000 000
$ ou 288 000 000 $.
Le cours de caisse du gouvernement du Québec était
à environ 220 000 000 $, si on prend que le fédéral avait
pelleté 220 000 000 $ dans la cour du gouvernement du Québec.
Donc, c'est une opération intéressante, le gouvernement du
Québec. Et quand on l'analyse un peu partout, on regarde si c'est de la
décentralisation. Décentraliser des comptes à payer, je
n'ai jamais pensé... La collection des comptes, je n'ai jamais
pensé que c'était de la décentralisation, parce que l'une
ne va pas sans l'autre.
Si on décentralise des responsabilités, il faut aussi
décentraliser des champs de taxation correspondants. Pour ma part, je
considère que l'opération ou l'entretien des écoles, tel
qu'on en parle dans le budget... On aurait pu penser que c'était pour un
cours de caisse court, pour peu de temps. On parie de 1990, on parie de 1991,
deux années consécutives. Est-ce que c'est une
opération qui est là pour demeurer, ou si c'est une
opération temporaire?
Ça pourrait être changé, le sens des propos. Bien
sûr que, nous, on peut maintenir, si c'est une façon temporaire ou
une façon permanente... Donc, je pose la première question,
quitte à revenir, puisque j'aimerais échanger par rapport
à ça. Actuellement, ce champ de taxation qu'on veut remettre aux
commissions scolaires - qui en ont eu plus qu'elles n'en ont demandé,
incidemment - est-ce que c'est une façon permanente ou est-ce que c'est
une façon ponctuelle pour répondre à des besoins de caisse
du gouvernement du Québec?
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: nous avons déjà indiqué, par la
voie du ministre des finances, celui des affaires municipales, celui de
l'éducation et surtout - je le garde pour la fin - le premier ministre,
aux pouvoirs municipaux que nous devions tenir compte des demandes
légitimes du milieu scolaire d'être pourvu de moyens financiers
pour exercer de véritables responsabilités, sans prendre une
part, entre guillemets, indue de l'assiette fiscale locale, mais pour
restaurer, à la rigueur, enrichir quelque peu la part de l'assiette
fiscale qu'elles occupaient - les commissions scolaires - il y a une dizaine
d'années.
Je rappelle au député que ça a déjà
été autour de 9 %, la présence des pouvoirs fiscaux locaux
dans l'assiette totale locale. C'était autour de 5 %, depuis quelques
années. On a restauré en l'enrichissant, parce que ça doit
quand même, deuxièmement, obéir à une certaine
cohérence, cette décision-là.
Il faut reconnaître que c'est devenu urgent d'agir dans ce
sens-là, à l'occasion d'un autre budget fédéral qui
réduisait davantage les revenus du gouvernement du Québec en
provenance du fédéral. En conséquence, il y avait des
gestes à poser pour préserver les équilibres financiers du
gouvernement du Québec et une des pistes qu'on pouvait emprunter,
c'était celle que nous avons effectivement empruntée, soit la
décentralisation, dans les commissions scolaires, de certaines
activités avec le transfert parallèle, concurrent des ressources
financières.
On n'est pas pour se faire dicter le montant de la
décentralisation par un budget fédéral. Et il ne faut pas
constamment se lier totalement au montant de la réduction additionnelle
que nous envoyait par la tête le fédéral. C'est 220 000 000
$ par-dessus le montant de 1 100 000 000 $ qui était déjà
dans le système. Enfin, dans quelques cas, il y a des réductions
de transfert qui remontent à des changements effectués en 1985,
en 1982, alors qu'il devait y avoir d'autres mauvais négociateurs
à notre place pour s'occuper de ces choses-là, si je comprends
bien.
Alors, à un moment donné, trop c'est trop. À un
moment donné, il faut réagir. On a mangé le morceau, quand
même, et réussi à protéger nos équilibres
financiers. Mais il est arrivé ce point où le budget
fédéral est venu mettre une autre goutte qui faisait
déborder le vase des finances publiques. Là, on s'est
retournés vers cette solution-là. Ce que je dis, c'est qu'elle
doit être, cette solution, cohérente, logique, défendable.
S'attacher au chiffre de 220 000 000 $ voudrait signifier qu'il a fallu
identifier, a posteriori, les postes de dépenses à
décentraliser qui correspondraient à 220 000 000 $, chiffre qui
vient, qui est une résultante d'une décision du gouvernement
fédéral. C'est un petit peu étroit de dire: Bon, où
sont les 220 000 000 $ qu'on pourrait décentraliser? Je pense qu'il faut
dire: Quelles sont les pistes qu'on peut explorer? Et on en a exploré,
assez rapidement, j'en conviens, avec les municipalités au titre de
certains transferts, certaines subventions, certains revenus qu'on redistribue
aux municipalités.
On a regardé un tas de choses. Il y avait une commande
considérable, entre guillemets, que les municipalités
étaient incapables de livrer. À la rigueur, c'est ça qui
est à souhaiter. Et c'est comme ça que ça s'était
engagé: il s'agissait de trouver une façon de combler un
écart qu'on avait chiffré entre 175 000 000 $ et 200 000 000 $
pour l'année financière 1990-1991 du gouvernement du
Québec. Ce sont les chiffres qu'on a véhiculés devant, je
dirais, l'impossibilité des municipalités de trouver des
solutions qu'on aurait, ensemble, pu forger. Nous avons dû prendre nos
responsabilités et décider d'identifier un champ particulier de
décentralisation, au niveau local, de certaines dépenses
scolaires, identifier les postes précis de dépenses des
commissions scolaires qui pouvaient être ainsi
décentralisés.
Le fonctionnement des équipements, par l'ampleur que ça
représente, par la responsabilité vraiment locale, je dois dire,
en parallèle, que ça représente également, s'est
imposé, je dirais, lorsqu'il s'agissait de voir quelles sont les options
qui nous étaient offertes. Il s'est imposé d'emblée, et
c'est donc la voie que nous avons suivie.
Alors, est-ce que c'est une mesure - je vais continuer avant que le
député ne revienne à la charge - qui est là pour
rester? Je suis conscient que la condition numéro quatre de l'Union des
municipalités du Québec, adoptée en congrès, vise
à remettre le financement scolaire sur la table pour fins - je cite -
"de discussion et de révision" de la quatrième exigence de l'UMQ
adressée au gouvernement du Québec, il y a quelques jours. on
peut toujours discuter, réviser certaines choses. il s'agit de voir,
maintenant, que toutes ces discussions et révisions doivent avoir lieu
dans un contexte global. nous persistons à croire qu'on doit discuter -
et le ministre des finances
l'a indiqué, le premier ministre également - avec les
instances municipales, de leurs responsabilités et des nôtres, de
l'ampleur financière de leurs responsabilités et des
nôtres, des sources de financement actuelles et possibles pour
réaliser ces activités et exercer nos responsabilités, de
même qu'au niveau local. C'est dans ce contexte-là, je
présume, que tout est discutable et révisable, mais il ne faut
pas oublier que tout doit être sur la table. C'est ce qu'on a
indiqué. C'est ce que les municipalités demandent. Alors, il ne
devrait pas y avoir de difficultés de ce côté-là
pour s'entendre, mais je ne peux répondre... On ne peut pas
répondre, dans un domaine comme celui-là, à la
pièce. C'est un peu comme... Sans prétendre que ce sont des
négociations entre employeurs et employés...
M. Léonard: M. le Président, est-ce qu'on me
permettra une question? Étant donné qu'il veut faire une
négociation globale, réintroduira-t-il les 2 % de taxe de vente
qui avaient été remis au gouvernement par les
municipalités lors de la réforme, puisqu'on parle de... (11 h
30)
M. Johnson: Tous les éléments dont nous entendons
discuter - mon collègue des Affaires municipales l'a dit - seront
discutés avec les municipalités. Le contenu des discussions en
sera un qui, aujourd'hui, ne connaît pas de limites. C'est ce qu'on
indique. Je ne sais pas si le député de Labelle s'exprime au nom
des municipalités. Si oui, je présume que les
municipalités feront valoir les 2 %. Je l'ai entendu sur la place
publique, j'ai entendu des municipalités dire: Ah! dans ce
cas-là, il va falloir parler des 2 % sur la taxe de vente. Je l'ai
entendu, moi aussi. On va voir. Nous entendons bien nous documenter, de notre
côté, bien nous préparer à cet exercice. Je suis
profondément convaincu que les municipalities font de même, de
leur côté. Et, en temps utile, lorsque tout le monde sera
prêt, de part et d'autre, à discuter de l'ensemble des relations
Québec-municipalités, ça va avoir lieu. C'est le choix des
municipalités, c'est ça que j'ai compris, et j'ai saisi que, du
côté gouvernemental, la réponse viendra rapidement. Mais je
n'ai pas entendu de rejet ou de fin de non-recevoir de la demande de l'UMQ.
Qu'on s'assoie et qu'on discute des champs d'activité, qu'on discute des
sources de financement, qu'on discute, quatrièmement, du financement
scolaire de façon très précise dans ces champs-là
et, cinquièmement, de mémoire, que le ministre des Affaires
municipales et le ministre des Finances soient également présents
à la table Québec-municipalités: ce sont les cinq
conditions, le député de Jonquière les connaît
autant que moi. Je n'ai entendu personne, de notre côté, dire que
c'était irrecevable, inacceptable. Alors, on va avoir la réponse
en temps et lieu.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Bien sûr, on peut y aller sur beaucoup
d'aspects, je pense qu'on n'aurait pas assez de la journée,
peut-être, pour vider la question. Par contre, si je regarde par rapport
au monde scolaire, le ministre semble dire que le monde scolaire
désirait une décentralisation très large et très
grande dans les rencontres qu'il a eues avec le gouvernement.
Ce que j'ai cru comprendre et ce que j'ai toujours entendu dire,
même par les commissions scolaires locales de chez nous, c'est que les
commissions scolaires cherchaient à obtenir 75 000 000 $. C'était
ça, le champ de taxation qu'elles voulaient obtenir, soit par
subventions ou autrement. Je ne pense pas qu'elles aient dit, au départ,
comment elles voulaient l'avoir. Mais on sait une chose, c'était 75 000
000 $ et ça représentait une certaine réévaluation
des 6 % du budget net et, en même temps, elles revalorisaient les 0,25 $
qu'elles avaient obtenus lors du pacte fiscal des municipalités.
Moi, j'ai l'impression que le gouvernement... C'est vrai que vous n'avez
pas regardé d'une façon étroite. J'ai parlé de 220
000 000 $, tout à l'heure, c'était un peu volontaire, parce que
je sais bien que la décision a été prise au mois de
novembre. En fin de compte, c'était ça, d'aller ouvrir le champ
de taxation à partir du 6 novembre 1989. Donc, 75 000 000 $, vous ouvrez
le champ, parce que vous dites: Si on ne peut pas regarder ça d'une
façon très très étroite, on va y aller plus loin.
Là, j'ai l'impression que vous avez piégé les commissions
scolaires. Les commissions scolaires avaient dit publiquement: Nous, on est
prêtes à taxer pour aller chercher nos 75 000 000 $. Le fait que
le gouvernement profite d'une ouverture pour ouvrir la porte au complet, j'ai
l'impression que vous avez piégé les commissions scolaires. Les
commissions scolaires sont un peu victimes, par rapport à ça.
C'est le contribuable, dans le fond, qui va être la victime
réelle, mais les commissions scolaires ne cherchaient pas 320 000 000 $,
elles ne cherchaient pas à être le percepteur pour l'État;
pour autant que je sache, ce n'était pas leur rôle. Leur
volonté, c'était d'aller chercher 75 000 000 $ pour pouvoir faire
des activités scolaires ou parascolaires, des activités qu'elles
sont mandatées de faire. C'était ça. Vous en avez
profité et vous les avez piégées.
Je ne sais pas ce qui arrivera par rapport à ça, je me
pose des questions. Est-ce que vous avez choisi la bonne méthode. En
tout cas, vous avez profité des circonstances, c'est le moins que je
puisse dire. Est-ce que vous avez l'impression que la démarche que vous
avez entreprise, actuellement, c'est la bonne? Est-ce que c'est de nature
à favoriser le climat social qui existait auparavant entre tous les
partenaires du Québec?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Johnson: La réponse, c'est oui, M. le
Président.
M. Dufour: Vous répondez que votre attitude, ou ce que
vous avez pris comme méthode, c'est de nature à favoriser un
climat social amélioré au Québec.
M. Johnson: Deuxième question, ça. M. Dufour:
O. K.
M. Johnson: Première question, si on regarde ça en
termes financiers, si la méthode de décentralisation est la
meilleure, est souhaitable, je dis oui, parce qu'elle prévoit que les
postes de dépenses décentralisés sont plus facilement
identifiables. Ça répond à une logique, à une
cohérence qui permet au pouvoir local de s'exercer très
clairement à l'égard de certains éléments de ses
activités, de taxer en conséquence et de prendre le coût
politique qui y est associé. Et je dirais que c'est à la demande
des commissions scolaires qu'on a prévu un système qui les
responsabilise davantage, qu'on a prévu une méthode qui leur
dégage également une marge de manoeuvre qu'elles souhaitaient. Et
je dirais, en troisième lieu, après avoir indiqué deux
choses que les commissions scolaires, essentiellement, demandaient et qu'on
leur a livrées, je dirais, en conclusion, qu'il y a seulement le
député de Jonquière, à ma connaissance, qui se
plaint au nom des commissions scolaires, qu'il n'y a aucune...
M. Dufour: J'en ai entendu parler.
M. Johnson: Bien oui! Le député de Jonquière
me signale que les commissions scolaires de son coin se sont plaintes à
lui; elle ne se sont pas plaintes à nous, elles ne se sont pas plaintes
au ministre de l'Éducation, elles ne se sont plaintes au ministre des
Finances, elle ne se sont pas plaintes au premier ministre, elles ne ne sont
pas plaintes à aucun député, sauf au député
de Jonquière qui s'est levé, au moment où on se parle,
pour dire: Les commissions scolaires de mon "boutte" n'ont pas aimé
ça. Je l'invite, évidemment, à leur demander confirmation
écrite de cette plainte et d'en envoyer copie à tous les
intervenants, puis là, on va savoir qui est-ce qui se plaint. Parce que,
à l'heure actuelle, je n'ai pas entendu de plainte. Moi, je n'en ai pas
entendu, dans le secteur scolaire.
Ce qui demeure important, dans tout cet exercice, c'est de bien
identifier quelles sont les responsabilités du niveau local et quelles
sont les responsabilités du niveau du gouvernement du Québec. Je
dirais, de façon globale, à l'égard de l'éducation,
d'une part, qu'il est très certainement de notre devoir d'assurer un
enseignement et tout l'encadrement pédagogique et les outils
pédagogiques les plus identiques possible, si l'expression se dit,
à tous les Québécois, au primaire et au secondaire. Enfin,
que les bases soient les mêmes pour tous les Québécois. Et
ça, c'est la responsabilité du gouvernement du Québec, et
le ministère de l'Éducation le fait.
Maintenant, à savoir si ça va jusque dans la
décision sur les mécanismes les plus économiques de
chauffage et d'éclairage, sur la qualité de la peinture qu'on met
sur les portes, sur la façon de gérer, nettoyer, surveiller les
lieux... Enfin, il y en a quand même pour quelque 300 000 000 $, à
peu près 300 000 000 $ à ce titre-là; 272 500 000 $, de
mémoire, pour l'an prochain. Est-ce que ce ne sont pas des
décisions qui sont mieux prises au niveau local? On soutient que oui. Et
à partir de ce moment, si elles souhaitent, désirent et veulent
exercer cette responsabilité, les commissions scolaires devraient avoir
le pouvoir de taxer au niveau local pour l'exercice de ces
responsabilités avec le bénéfice suivant. Le
bénéfice suivant, c'est qu'en conséquence nous ne sommes
pas, comme gouvernement, lorsque nous confectionnons nos budgets de revenus et
de dépenses, obligés de taxer, de hausser les impôts de 272
000 000 $. On se parle bien clairement; afin de respecter les équilibres
financiers. Il n'y a personne qui va prétendre le contraire, ici. Et la
décision relève du gouvernement du Québec.
Ce n'est pas de mépriser les autres niveaux de gouvernement que
d'affirmer: c'est le gouvernement du Québec qui a la
responsabilité première, je dirais unique, je dirais exclusive,
de décider, dans son champ de compétence, quelle sera la
répartition du fardeau fiscal. Oui, en effet, ce sont tous des
contribuables qui sont touchés; ce sont toujours les mêmes
contribuables qui paient soit une taxe de vente, soit une taxe sur les
cigarettes, soit l'impôt sur le revenu des particuliers, soit des taxes
locales, à titre de taxe d'eau, de taxe foncière municipale, de
taxe foncière scolaire. Ce sont toujours les mêmes contribuables.
Et on a, comme gouvernement, la responsabilité exclusive - je le dis
encore plus clairement - de déterminer, au Québec, quel devrait
être le profil du fardeau fiscal, afin d'atteindre une répartition
de ce fardeau-là qui nous permette d'être concurrentiel lorsque
vient le moment d'assurer le développement économique du
Québec.
On pourrait, en suivant la logique du député de
Jonquière, compte tenu de la clientèle qu'il entend cultiver,
décider qu'on va financer les municipalités, qu'il n'y aura pas
de fardeau fiscal local et que les impôts sur le revenu des particuliers
vont être 5 000 000 000 $ plus élevés. On peut
décider ça. À l'inverse, pour être tout aussi
absurde, on va dire qu'on ne fait plus rien. Que tout ce qui se passe dans un
territoire municipal, au sens strict, que tout ce qui semble se raccrocher,
même de loin, à une responsabilité
locale, on ne touche plus à ça jamais et on va
probablement baisser les impôts sur le revenu du Québec de 1 600
000 000 $ ou à peu près, l'an prochain. Ce sont les deux
extrêmes, M. le député.
À l'intérieur de ces balises, vous me permettrez de croire
qu'on a pris une décision qui est à l'avantage des commissions
scolaires - elles l'ont demandée, elles ne s'en plaignent pas - qui
permet de réaliser des équilibres, afin qu'on se consacre
à notre mission première, en matière d'éducation.
Ça n'enlève rien, r-i-e-n, aux municipalités du
Québec, que nous aménagions le fardeau fiscal de telle sorte
qu'à force d'injecter 31 000 000 $ d'allégement dans le
système, les gens les plus démunis soient moins touchés
par cette mesure et, en définitive, c'est un fardeau de l'ordre de 76 $
par ménage qui est en cause, après les mesures
d'allégement. Vous me permettrez de croire que c'est quelque chose qui,
compte tenu de la facture totale des taxes locales, est de l'ordre de 4 % ou 5
%. C'est un choix qu'on a fait. C'est un choix qu'on est disposés
à défendre sur la place publique. Et vous voyez, le gouvernement
continue à le faire. Ça n'empêche pas qu'on va pouvoir
discuter de toutes ces choses-là, s'il y en a d'autres, avec les
municipalités, dans les semaines et les mois qui vont venir.
Le Président (M. Forget): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Si j'avais confiance que le président du
Conseil du trésor tienne compte de la volonté des commissions
scolaires, peut-être que je pourrais me risquer à dire: Oui, on va
les faire se plaindre, pour qu'elles exigent exactement ce qu'elles voulaient
et qu'elles l'expriment clairement. Que vous en teniez compte, j'en doute
quelque peu. En faisant votre décentralisation, il y a
définitivement... Le problème va se soulever à l'effet
qu'il va y avoir des commissions scolaires riches, il va y avoir des
commissions scolaires pauvres, comme il y en avait anciennement. La
qualité de l'éducation ne sera possiblement pas la même,
parce qu'elle ne sera pas donnée dans les mêmes conditions et
ça va causer, définitivement, des problèmes. C'est encore
les régions les plus pauvres qui, à mon point de vue, vont en
souffrir.
Quand j'écoute votre discours, je suis un peu
impressionné, mais je reste un peu coi ou bouche bée par rapport
à la façon dont vous voyez l'autonomie municipale. Parce que vous
dites: Le gouvernement du Québec a tous les pouvoirs, il peut faire
telle chose, telle autre, telle autre, imposer, exiger. Bien, en fait, je vous
prends au mot. Je vous dirai ce que vous avez dit, je vous ai
écouté religieusement, mais ce que vous dites, que vous pouvez,
vous avez le pouvoir de déterminer quel est leur taux de taxation,
comment elles vont fonctionner, quelles sont les responsabilités
qu'elles vont avoir, à peu près tout ça... Si c'est
ça, l'autonomie municipale, moi, je pense que c'est bon qu'on le sache.
C'est, en fait, la façon dont on s'est comportés. Ça, je
pense qu'il n'y a aucun doute. Pour une fois, le discours que vous m'avez
maintenu, ici, c'est vraiment ce qui s'est passé, dans les faits, sur la
place publique.
J'avais une question, à savoir: Est-ce que vous êtes
conscients que, quand il y a eu un pacte fiscal qui a été
signé entre les municipalités et le gouvernement du
Québec, à partir de ça, il y a eu un paquet de
responsabilités que les municipalités se sont engagées
à accepter et, en même temps, à agir? Je prends des
exemples, comme l'assainissement de l'eau qui n'était pas dans le
portrait en 1980. Les municipalités se sont embarquées
là-dedans. L'environnement. En général, ce sont aussi des
coûts supplémentaires que les municipalités ont bien voulu
prendre. Le transport en commun s'est développé dans beaucoup de
régions. Je ne parle peut-être pas de la région de
Montréal comme telle, mais elles ont aussi pris des
responsabilités dans ces domaines-là. Si on prenait toutes les
fonctions que les municipalités ont exercé depuis 1980... Quand
vous me dites: On n'enlève rien aux municipalités, quand on
permet à la commission scolaire ou aux commissions scolaires d'aller
dans l'impôt foncier, je voudrais juste vous rappeler que j'ai
vécu le système où il y avait deux intervenants dans le
champ de l'impôt foncier. Et il y avait un problème, parce que les
commissions scolaires taxaient et les municipalités étaient
obligées d'en tenir compte; les municipalités taxaient et les
commissions scolaires en tenaient compte. Ce qui faisait qu'il y avait une
dualité régulière. C'était chacun son tour qui
allait là-dedans. On n'a pas la garantie, au moment où on se
parle, que le montant que vous ouvrez va demeurer là. On parle de 320
000 000 $, cette année. Mais c'est quoi, les autres années? C'est
quoi, dans le futur? Tout à l'heure, vous ne m'avez pas dit: Non, on va
s'en tenir à ça, mais vous avez ouvert la... En fait, la
boîte est ouverte, la caisse est là. (11 h 45)
Le Président (M. Forget): Alors, M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, je veux être bien
sûr d'être bien compris par le député de
Jonquière et son collègue. Parce que, de ce côté-ci,
on se comprend, nous autres. Je n'ai pas de difficulté. Je ne suis pas
obligé de leur expliquer, à mes collègues de ce
côté-ci. Je continue à prétendre, enfin, que la
conception qu'on doit se faire du gouvernement du Québec comprend un
champ de responsabilités exclusives, à cause des outils qui sont
à notre disposition et qui permettent de déterminer quelle doit
être la répartition du fardeau fiscal à l'intérieur
des pouvoirs qu'on a au Québec. C'est une loi de
l'Assemblée nationale qui avait permis d'entériner ou je
dirais, d'actualiser le pacte fiscal, entre guillemets. Personne d'autres. Ce
ne sont pas des résolutions de MRC, là, ce n'est pas le
gouvernement fédéral: c'est l'Assemblée nationale.
Ce que je ne remets pas en cause, en disant ça, néanmoins
- je veux être bien clair - c'est le degré de concertation qu'il
doit y avoir entre les paliers de gouvernement au Québec, dans la
détermination des différents fardeaux fiscaux et dans leur
distribution. Parce que c'est ça qui est en cause, cette fois-ci.
Ç'a été une décision, le premier ministre l'a dit,
du gouvernement du Québec afin de réaliser ses équilibres
financiers, de choisir de faire peser sur l'assiette locale certaines
dépenses jusque-là assumées par le gouvernement du
Québec, le ministère de l'Éducation. Ça n'a pas
été caché. Est-ce que c'était anticonstitutionnel?
Pas du tout. Personne n'a prétendu ça. Est-ce que c'est
antiéconomique? Je n'ai entendu personne dire ça non plus. Est-ce
que c'est antisocial? J'ai entendu le député de Jonquière
le dire un petit peu, en raison de ce fardeau, dit régressif, que
constituerait la taxe foncière. Ça néglige le fait que
c'est un genre d'impôt qui, à certains égards, pour des
dizaines de millions de dollars l'an dernier, est remboursable à
certains ménages qui en font la demande, est remboursable en partie. Un
fardeau qui est, par ailleurs, déductible des frais des entreprises,
lorsqu'elles calculent leur impôt sur les profits des corporations, au
fédérai, d'ailleurs, comme au Québec. Et, à ce
titre, il y a toutes sortes d'allégements qui existaient
déjà, et on en introduit pour 31 000 000 $ de plus. Alors, vous
me permettrez de dire que ce n'est même pas antisocial, parce que, si
l'effet est de nous éviter, comme gouvernement du Québec, des
augmentations d'impôt nettement anticoncurrentielles ou création
d'emplois, bien, tout le monde en bénéficie. Je pense qu'il faut
regarder ça. Encore une fois, je ne pense pas... Je dis et j'affirme
qu'il faut regarder ça d'une façon la plus large possible. Donc,
c'est du ressort exclusif du gouvernement du Québec et de
l'Assemblée nationale de décider et de voter des choses de cette
nature là.
Deuxième volet: Ma conception de notre vie en
société, avec les niveaux de gouvernement qu'on a au
Québec - gouvernement du Québec et gouvernements locaux -
où il y a deux gouvernements qui sont élus, un scolaire et un
municipal - m'amène à dire que, lorsqu'il s'agit de
déterminer l'assiette fiscale, que notre pouvoir incontestable de
décider de la répartition du fardeau fiscal doit
néanmoins, le plus possible - c'est dans une situation idéale,
lorsqu'on a le temps de le faire - nous amener à des consultations les
plus profondes, les plus précises possible, avec nos partenaires du
monde local. Nous avons déjà expliqué comment les gouttes
additionnelles qu'a déversées le gouvernement
fédéral, par son dernier budget de février, dans les
finances publiques du Québec nous ont amenés à devoir
décider rapidement certaines orientations. Mais non sans avoir
convoqué... Et j'ai été présent à quatre
rencontres, personnellement. J'ai eu connaissance de deux rencontres où
le premier ministre était là, personnellement, avant la
décision et de rencontres où le ministre des Finances
était là à trois reprises avant que les décisions
ne soient prises de façon définitive, où les
représentants du monde municipal ont pu faire valoir - on les comprend,
ils l'ont dit publiquement - que c'était venu vite, que ça
n'avait pas de bon sens et que ce n'était pas comme ça que
ça se passe. Mais les circonstances dictent pas mal les processus,
à l'occasion. on aurait tous aimé avoir plus de temps - il n'y a
pas de doute dans mon esprit là-dessus - mais la nature et le contenu
des discussions que j'ai eues personnellement, que mon collègue des
finances a eues et que le premier ministre aussi a eues avec les
municipalités ont toujours porté sur la nécessité
d'assurer un niveau de fiscalité sur l'impôt sur le revenu des
particuliers, notamment, qui était à notre avantage, qui
n'alourdissait pas indûment le fardeau fiscal des particuliers afin de
pouvoir maintenir l'avantage concurrentiel en matière d'attrait des
investissements et de création d'emplois. tout le monde s'est mis
d'accord là-dessus.
Et afin de nous aider à boucler nos livres, les
municipalités ont fait des suggestions très précises,
mais, malheureusement, irréalisables dans le cadre de l'année
budgétaire 1990-1991, irréalisables dans le temps. L'ampleur, la
volonté, le désir de coopérer y étaient. Ça,
je suis prêt à le reconnaître et le premier ministre l'a
reconnu, le premier ministre l'a reconnu, mais il faut également
être très précis. À un moment donné, il faut
aligner les chiffres et dire à quel moment on va pouvoir
bénéficier de cet avantage financier. Vous, les
municipalités, vous, le scolaire, vous, le gouvernement du
Québec, vous allez agencer tous ces blocs-là pour que, du 1er
avril 1990 au 31 mars 1991, on puisse, comme gouvernement, réaliser une
économie budgétaire de 191 000 000 $. Bon, on ne s'en est
caché nulle part. Au dépôt des crédits, j'en ai
parlé, ce qui correspond à 272 000 000 $, 273 000 000 $ sur une
base annuelle, l'année complète, bon, pour le côté
du scolaire. Ça, ç'a été dit bien bien ouvertement
et les municipalités ont fait un effort louable pour tenter de
contribuer aux équilibres financiers à ce niveau-là. Mais
toutes les suggestions qui ont été faites ne pouvaient se
réaliser ou s'actualiser dans le cadre financier qui est le nôtre.
Alors, on ne peut pas leur en vouloir, on ne peut pas s'en vouloir à
nous autres non plus. C'est une réalité. Mais je pense qu'il faut
partir de là et dire: Dans la mesure où on s'est entendus sur
l'objectif qui est d'assurer des impôts qui font du Québec un
endroit concurrentiel, dans la mesure où on n'enlève rien
à court terme aux municipalités, oui, un pouvoir virtuel
d'aller taxer dans une assiette déjà chargée par le
pouvoir scolaire, chargée davantage par le pouvoir scolaire, donc,
soi-disant une marge de manoeuvre et un espace fiscal réduits
virtuellement et éventuellement et hypothétique-ment pour les
municipalités. Bon! Reconnaissons que c'est virtuel mais qu'aujourd'hui
on n'enlève rien. Reconnaissons qu'on a indiqué que, s'il y avait
une décentralisation additionnelle de certaines activités vers le
niveau local, elle devra, cette décentralisation, s'accompagner
obligatoirement du transfert de ressources financières ou de
l'identification de nouvelles sources de financement. Il me semble que c'est
clair comme discours. C'est assez global. Ça n'exclut rien. Ça ne
présume de rien non plus.
J'ai entendu le député de Labelle hurler - hurler, je
m'excuse - dire très fort et très vigoureusement que nous tirions
239 000 000 $ par la tête de la CUM ou de la STCUM-Une voix: 277
000 000 $.
M. Johnson: 277 000 000 $. De toute façon, ça n'a
pas d'importance, le chiffre, ce n'est pas vrai, dans un cas comme dans
l'autre. Vous pouvez dire le chiffre que vous voulez. On n'envoie rien. On
n'envoie pas une facture à Mme Roy. Elle ne sera pas obligée de
tripler la passe mensuelle. Toutes théoriques, je dirais même,
plus qu'académiques, hypothétiques, ces choses-là. Il
s'agit...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
président du Conseil du trésor, s'il vous plaît.
M. Johnson: En conclusion, je dirais que c'est une illustration
du fait que c'est prématuré d'aller prétendre, au niveau
municipal, qu'on va augmenter leurs charges financières sur le dos de
leurs concitoyens sans même vouloir discuter de tous ces
éléments de décentralisation éventuelle, y compris,
je le répète, l'identification des nouvelles sources de
financement qui seront ouvertes aux municipalités.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Limoilou.
Indexation des exemptions personnelles
d'impôt
M. Després: Oui. Peut-être avant de redonner
éventuellement la parole au député de l'Opposition, et
justement un petit peu dans le même ordre d'idées, en tout cas au
niveau de la fiscalité, probablement pas au niveau du pacte fiscal entre
les municipalités, mais au niveau de la fiscalité des individus,
des exemptions personnelles, j'aimerais savoir, de la part du président
du Conseil du trésor... On se rappellera qu'en 1978 le gouvernement du
Parti québécois avait fait une réforme du Conseil du
trésor, une réforme fiscale qui avait comme objectif... Le
gouvernement en place avait annoncé son intention d'indexer
dorénavant les exemptions personnelles.
Si on se reporte au moment où il a fart cette
réforme-là, c'est-à-dire de 1979 à 1985, si on
regarde, par exemple, en 1979, l'évolution des prix de l'année
précédente, parce que, pour indexer, on doit se fier sur les prix
de l'année précédente, était de 8,9 % et on a
attribué le chiffre zéro à l'indexation personnelle de
cette année-là, M. le Président. En 1980,
l'évolution des prix de l'année précédente, qui
était de 9,2 %...
Le Président (M. Lemieux): ...M. le député
de Limoilou?
M. Després: Non, je ne fais pas allusion à un
document qui est nécessairement au budget, mais ce à quoi je veux
en venir, c'est que j'aimerais savoir si, dans la réforme fiscale, alors
que ce gouvernement avait adopté une politique d'indexer les exemptions
personnelles en 1978... Je m'aperçois qu'en 1979 l'évolution des
prix était de 8,9 % et qu'on a indexé de 0 %; en 1980, elle
était de 9,2 %, m. le président, et, cette
année-là, on a essayé de faire du rattrapage, on l'a
dépassée, on a augmenté jusqu'à 12,5 %. donc, si on
fait une moyenne sur les deux ans, ça nous ramène à 6,3 %,
disons. en 1981, révolution des prix a été de 10,2 % et on
a indexé à 7,5 %. en 1982, l'évolution des prix
était de 12,5 %, le gouvernement a indexé à 7,5 %. en
1983, 10,9 %, on a indexé à 7,5 %. en 1984, l'évolution
des prix a été de 5,8 %, on a indexé à 5 %. et, en
1985, l'indice des prix était à 4,3 % et on a indexé
à 0 %. donc, si on fait le total, m. le président, de
l'évolution des prix, on arrive à 82,2 %, de 1979 à 1985,
alors qu'après avoir annoncé cette réforme d'exemption, de
1979 à 1985, on a augmenté les exemptions de 46,7 %, ce qui
représente un écart assez significatif.
J'aimerais peut-être demander au président du Conseil du
trésor, dans le fait que, concernant la fiscalité, l'indice des
prix a augmenté presque deux fois plus vite que les exemptions
personnelles, entre 1979 et 1985... Et ça, on sait que c'est important,
parce que ça touche l'impôt à payer des contribuables, pris
directement dans leur poche d'année en année, donc une autre
façon pour le gouvernement qui est en place de se financer, en plus
d'avoir réussi à augmenter les déficits d'année en
année, comme on le sait, M. le Président. J'aimerais demander au
président du Conseil du trésor quel a été le suivi
de cette évolution-là, de 1986-1987, de 1988-1989, en regard des
autres années? Parce que je pense que, justement, on a réussi,
pendant un certain nombre d'années, à augmenter constamment
le
déficit, à augmenter les taxes, à augmenter les
impôts. Et je lisais, dans une revue de presse, alors que le chef de
l'Opposition officielle n'était pas à ce moment-là, revenu
en Chambre, qu'il avait terminé son mandat de ministre des Finances,
qu'il avait fait une déclaration sur la taxe à la consommation
où il disait, dans Le Devoir du 26 avril 1986: "Les taxes
à la consommation demeurent le seul échappatoire possible pour
maintenir les équilibres budgétaires..." (12 heures)
On sait que la politique de ce gouvernement-là a toujours
été, M. le Président, celle d'augmenter constamment les
impôts, d'augmenter constamment les taxes et je n'ai pas l'impression
qu'on a de leçons à recevoir de gens qui ont eu, eux aussi, la
chance d'administrer, pendant neuf ans, les fonds publics. J'ai plutôt
l'impression qu'avec la politique du gouvernement en place, qui est toujours
celle de cette saine gestion, il a réussi à diminuer le
déficit, à minimiser le nombre de taxes, en tout cas, dans le
cadre du premier mandat, à ne jamais augmenter les taxes, à ne
pas augmenter les impôts et à diminuer le déficit.
J'aimerais peut-être laisser la parole au président du Conseil du
trésor qui pourra, en tout cas, au niveau des exemptions personnelles,
nous dire ce qui s'est passé depuis 1985.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Limoilou. M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: Très bonne question, M. le Président.
C'est une excellente question parce qu'elle visait à répondre
à des arguments que j'ai entendus du côté de l'Opposition,
notamment du chef de l'Opposition qui, avec la façon
particulièrement théâtrale qu'on lui connaît, s'est
exclamé que ce n'était pas un cadeau véritable que
d'indexer les exemptions personnelles et un tas de choses comme ça, et
que ce n'était pas de vraies diminutions d'impôt. Venant de celui
qui, justement, tout le temps qu'il a été ministre des Finances,
a refusé systématiquement de pleinement indexer à
l'inflation les exemptions personnelles, créant, par là, des
augmentations d'impôt, en termes réels, au-delà de toutes
celles qu'il a véhiculées, venant du député de
L'Assomption et chef de l'Opposition, j'ai trouvé ça
particulièrement savoureux, M. le Président.
On notera que, pour nos prédécesseurs, l'indexation des
exemptions personnelles n'était, ni plus ni moins, qu'un outil de
propagande partisane, lorsqu'on voit qu'en 1979 l'indexation a
été de zéro et que, ô miracle, elle a
été de 12,5 % quelques semaines avant le
référendum, dans le budget préréférendaire.
C'est le genre d'utilisation des équilibres financiers que,
personnellement, je réprouve profondément, M. le
Président.
Quant à savoir ce qui est arrivé depuis 1985-1986, le
gouvernement, pour 1986 et 1987, a décidé d'appliquer un
réaménagement du régime d'imposition qui visait à
reconnaître adéquatement le coût des besoins essentiels,
particulièrement en introduisant des exemptions personnelles pour les
enfants à charge. Alors, là, on ne compare plus des pommes avec
des pommes, ce sont des pommes de différente nature. Ce n'est pas des
pommes et des oranges, des pommes et des pamplemousses, là. Mais on a
changé quelque peu le système afin de reconnaître
également, dans le régime des besoins essentiels, les coûts
reliés à l'emploi, par exemple, en ajustant les déductions
relatives à l'emploi et pour frais de garde d'enfants. Et on a
également réduit les taux d'imposition. On a réduit les
taux d'imposition, à partir du premier budget complet, étant
élus en 1985, le premier budget 1986, année d'application: 1987,
année civile 1987, l'application de ce nouveau régime.
Alors, ce n'est pas pleinement comparable. Parce que, si on
décide qu'on réduit les impôts - on peut faire ça -
au lieu d'augmenter les exemptions personnelles, par exemple, là, tout
le monde en bénéficie d'une façon extrêmement
directe. Mais on a, dès la première année complète
sur laquelle on pouvait agir, en 1987, augmenté les exemptions
personnelles pour enfants. Elles furent pleinement indexées, alors que
l'exemption de base demeurait supérieure aux besoins essentiels
reconnus; alors, on a donc plutôt suivi un système. On a
évalué précisément ce que doit couvrir l'exemption
personnelle, on a identifié les besoins essentiels reconnus: logement,
chauffage, nourriture, etc. On a marié les deux et on s'est
aperçu que l'exemption personnelle, au niveau où c'était
rendu, compte tenu du fait que, par ailleurs, on faisait toutes sortes d'autres
gestes, était encore suffisante, à ce moment-là, pour
couvrir, donc, les besoins essentiels et qu'il n'y avait pas lieu, de
façon spécifique, de toucher à l'exemption
personnelle.
En 1988, deuxième réforme, harmonisation de ce
régime, les exemptions, à la réforme de la
sécurité du revenu. Ainsi, dans le discours sur le budget, en
1988-1989, nous avons harmonisé les montants des besoins reconnus dans
la fiscalité à ceux qui sont reconnus par la réforme de la
sécurité du revenu de 1989 et transformé les exemptions
personnelles en crédits d'impôt: autre changement qui fait en
sorte que notre pomme ressemble de moins en moins à une pomme, si on
veut la comparer au régime qui existait jusqu'en 1986, en
réalité.
En 1988 et 1989, les montants reconnus à l'égard des
adultes dans la fiscalité demeuraient toujours supérieurs
à ceux reconnus à l'aide sociale, donc pas de
nécessité évidemment de hausser ces montants. Finalement,
dans le discours sur le budget de l'an dernier, l'indexation de 4,9 % a
été accordée et a permis d'arrimer complètement les
besoins reconnus dans la fiscalité et à l'aide sociale. Par
ailleurs, nous avons évidemment arrimé dans le dernier
discours
ces mêmes besoins reconnus par la fiscalité et la
sécurité du revenu. C'est ainsi que l'ensemble des montants de
base, exemptions pour personnes mariées, exemptions pour les enfants
à charge, qui servent à établir les crédits
personnels, sont indexés au même taux de 4,8 % que les prestations
de la sécurité du revenu, comme les programmes APTE et APPORT. Je
dois dire qu'on se compare avantageusement avec le fédéral et les
autres provinces où les montants qui servent à établir les
crédits personnels, donc tous ces montants qui sont indexés, le
sont à un taux d'indexation-inflation moins 3 %. Ce qui fait
évidemment, que, pour 1991, dans les autres provinces et au
fédéral, c'est 1,8 % d'indexation et nous, c'est 4,8 %.
M. le Président, on est très fiers de ne pas avoir fait de
partisanerie avec ça, d'avoir réaménagé le
programme pour qu'un besoin reconnu à l'aide sociale, la
sécurité du revenu, devrais-je dire, et en matière de
fiscalité soit la même chose et d'avoir véritablement
indexé tous ces besoins dans le dernier budget. Ne pas l'avoir fait
eût été l'équivalent d'une hausse d'impôt.
C'est ce que nos prédécesseurs de l'autre parti ont fait tout le
temps qu'ils étaient là.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
président du Conseil du trésor. Avez-vous terminé, M. le
député de Limoilou?
M. Després: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé. M. le
député de Labelle.
Conclusions M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, on vient d'assister
à la nième séance de grattage de dos qu'on a connu au
cours de ces dix heures sans arrêt. Alors, je trouve que c'est
pratiquement une déviation du parlementarisme que de voir des
députés qui posent des questions mais préparées
d'avance et le ministre reprend le couplet préparé par des
fonctionnaires qu'il nous lit ici. Alors, je trouve que c'est effectivement ce
qui s'est passé chaque fois que les députés minis-.
tériels ont pris la parole. C'a été de dire: M. le
ministre, vous avez fait un excellent budget. Et le ministre qui répond:
Que vous posez donc des questions intelligentes! Que vous êtes gentils!
Que vous êtes bons! Etc. C'est vraiment des séances de narcissisme
caractérisé. Vraiment! Je trouve que le parlementarisme n'y gagne
pas à un tel jeu. En tout cas, j'espère que vous ferez une
rectification du tir, parce que, vraiment, c'est indécent, tout
simplement. Je tiens à le dire parce que, vraiment, c'est ce qu'on a
connu durant ces dix heures de la part du parti minis- tériel.
M. le Président, on vient de parler des taxes. C'est une question
sur les crédits d'impôt, évidemment. Nous avons un
système différent depuis quelques années qui a
été amorcé, je pense bien, sous l'influence du
gouvernement américain en bonne partie, sous l'influence du gouvernement
canadien qui a suivi depuis 1982 dans les réformes de taxation en
Amérique du Nord, notamment. Alors, ce qui s'est passé au cours
de ce budget, c'est que les taxes ont augmenté de façon
significative, d'une part; d'autre part, on a refilé ces factures
à toutes sortes d'institutions internes. J'entendais le président
du Conseil du trésor faire tout à l'heure un discours sur la
décentralisation. Mais, vraiment, alors là, on voit le fond des
choses, parce que, à mon sens, il y a eu une décision très
claire au Conseil des ministres du 6 novembre dernier, avec un paragraphe
très clair sur le financement des municipalités, à savoir
qu'il fallait essayer d'aller en chercher le plus possible de ce
côté-là.
Le discours sur la décentralisation qu'on entend aujourd'hui
n'est qu'un vernis sur une décision qui était déjà
prise d'aller chercher des fonds dans ce secteur-là. Ce n'est pas autre
chose. Je pense que, connaissant un peu la machine gouvernementale, des
fonctionnaires brillants ont dit: II y a des choses à aller chercher
là. Donnez le coup et, après, on justifiera. C'est exactement ce
que ça donne, non seulement comme impression, mais ce que c'est comme
réalité. C'est ça, la réalité.
En plus, à entendre ce discours sur la décentralisation
où on dit: Écoutez, la peinture sur les murs puis les
poignées de porte, qu'on règle donc ça au niveau local,
nous, on va garder les décisions importantes... C'est ça, le
discours sur la décentralisation. Vous ne comprenez rien à la
décentralisation; vous venez de le démontrer. Vous venez de le
démontrer. Simplement, on va lire les textes. Le texte de ce que vous
avez dit tout à l'heure, c'est ça que vous avez dit,
fondamentalement, c'est ça que vous avez dit.
Ne continuez pas à parler de décentralisation, vous vous
calez. N'en parlez pas trop, parce que vous allez être gênants tout
à l'heure et vous allez être gênés aussi. Le fond des
choses ressort. C'est un discours improvisé qui est un vernis sur une
décision déjà prise d'aller chercher des sous dans ce
secteur. Tout simplement, c'est ça. Les taxes. On va faire le tour. Vous
faites ça vis-à-vis de la Régie de l'assurance automobile.
C'est une régie, l'assurance automobile. Là, vous vous en servez
pour financer les travaux routiers. Bon, voilà! Simplement, c'est
ça. 625 000 000 $. Peut-être que l'an prochain, sous la pression
de la carence fédérale, les transferts fédéraux
vont augmenter de 625 000 000 $ ou de 125 000 000 $ par année, en
moyenne, à 175 000 000 $... Puis, là, on va
obliger... Alors, c'est devenu une source de financement, la
Régie de l'assurance automobile.
Les commissions scolaires, je viens d'en parler. Les commissions
scolaires n'ont pratiquement pas de fonds additionnels. On n'a pas
indexé l'enveloppe tout simplement. On a indexé de 1 %
l'enveloppe des commissions scolaires. Alors, elles sont obligées
d'aller chercher des sources de financement par l'impôt foncier. M. le
Président, elles ne trouvent même pas les 75 000 000 $ qu'elles
voulaient. Elles trouvent une marge de 13 000 000 $ avec une
péréquation qui a été augmentée, mais qui va
amener des conséquences dramatiques considérables sur les
différences quant au niveau de l'éducation au Québec.
Les étudiants. On a fait le débat ici sur les frais de
scolarité. Peut-être qu'aux États-Unis on peut justifier
une telle approche. C'est ça, le système américain. Est-ce
que c'est une justification pour le faire ici? On fait payer aux
étudiants les problèmes financiers du gouvernement, son image
portant sur un déficit qui est faux à la base, parce que les
chiffres ne sont pas comparables. Et ça, vous me permettrez de le dire,
parce que c'est ça, la réalité. Ce sont les
étudiants qui vont trinquer. La situation du Québec est
très différente de celle des États-Unis. Mais on n'a pas
réglé les problèmes de financement ou de différence
de financement entre les universités pour autant. Les revenus des fonds
de dotation de McGill sont toujours soustraits à l'impôt, ce qui
donne une position privilégiée à l'Université
McGill par rapport aux autres universités au Québec. Pas un mot
là-dessus. Silence total. Les universités francophones ne seront
jamais compétitives par rapport à des universités qui
disposent de fonds de dotation de 300 000 000 $ ou 350 000 000 $. Jamais elles
ne seront compétitives. Les chercheurs feront le tiers de leurs projets
de recherche avant de les amener devant les organismes de financement de la
recherche, de sorte qu'ils gagneront toujours. Et ce n'est que par
condescendance qu'on donnera des fonds de recherche à des chercheurs
québécois. Mais, ça, vous ne l'avez pas posée,
cette question-là, quand vous avez parié des frais de
scolarité aux étudiants. Vous ne l'avez pas posée, jamais.
Mais c'est une question de fond par rapport à la
compétitivité des universités au Québec. Question
très importante.
Maintenant, Hydro-Québec. J'entendais des députés
dire: Mais ça n'a aucune relation, les revenus d'Hydro-Québec. On
ne tire pas de dividendes, etc. Les revenus complets d'Hydro-Québec
transparaissent aux états financiers du gouvernement. Et quand on
établit le niveau du déficit, ils sont là. Alors, on
l'a.
Puis faites le tour. On dit: Bien non. C'est faux, ça, que les
municipalités vont avoir à payer les déficits des
commissions de transport. Qu'est-ce que vaut un discours d'un ministre des
Finances dans un discours sur le budget si l'intention n'indique pas une
intention très sérieuse de procéder. Même s'il parle
de consultation, il reste que le coup est donné. Il n'y a personne qui
s'est trompé dans le décor, personne. Les commissions de
transport et les municipalités savent très bien qu'elles auront
à écoper. Et le vrai tableau et le vrai chiffre que vous visez
là-dedans, c'est le dernier chiffre de la page, ici, à la
dernière page, 1 286 000 000 $. Si pouvez l'atteindre, vous allez le
faire. C'est ça, la réalité, parce que, au fond, on a
touché un sujet qui est majeur, au début de l'avant-midi. Le
gouvernement fédéral n'a plus un sou et vous vous attendez que le
fédéral vous en repellette une autre série de son
déficit l'an prochain. Vous vous préparez au pire, donc à
aller chercher davantage aux municipalités, davantage aux institutions
internes au Québec pour faire face à la musique quand le
fédéral va couper davantage parce que lui, il entend respecter
son plan de résorption du déficit, mais au détriment des
provinces.
Quand le lac Meech sera passé, peut-être... Alors
là, on peut s'attendre non pas à aller en chercher plus au
fédérai, mais que le reste du Canada en demande au Québec.
C'est ça, les nouveaux équilibres qui s'en viennent. Et
ça, vous nous préparez à en prendre la facture
présentement. Vous nous avez conseillé de voter non au
référendum; vous en avez la conséquence aujourd'hui, dix
ans après. Dix ans après, le déficit
fédéral, la course à la répartition, on paie pour.
Tout ce qui a été donné dans le passé, nous aurons
à le payer à 25 % parce que nous versons 25 % des recettes du
gouvernement fédéral. Nous n'avons même pas le choix de
négocier le partage de la dette fédérale dans votre
système.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Daniel Johnson
M. Johnson: M. le Président, je vais commencer avec deux
commentaires sur les derniers mots du discours quelque peu anachronique
premièrement. Deuxièmement, on a aujourd'hui à payer, au
Québec, 100 % du déficit que, de 1976 à 1985, l'illustre
député de L'Assomption et maintenant chef de l'Opposition a
imposé aux Québécois et qui réduit toutes les
marges de manoeuvre possibles et imaginables pour rencontrer les besoins de la
population du Québec. 2 000 000 000 $ par année de plus au titre
du service de la dette que ce qu'autrement on aurait à payer si vous
n'aviez pas emprunté pour payer l'épicerie.
Décentralisation. La vraie décentralisation, c'est celle
qui loge là où les gens veulent la loger: la décision et
les sources de financement qui permettent de donner suite aux
décisions.
Est-ce qu'il y a quelque chose de plus local qu'une école? C'est
un local, une école, pour ne pas faire de jeux de mots, c'est un
endroit, de façon générale, vers lequel les gens peuvent
graviter et, je le sais, dans des comtés comme le mien et probablement
comme ceux de la plupart de mes collègues, c'est un équipement de
nature locale qui peut servir à plusieurs fins. Dans de nombreux
milieux, notamment - moi, je pense à des cas dans mon comté - on
a décidé, conjointement, au niveau de la commission scolaire ou
d'organismes communautaires et de la municipalité, d'utiliser cet
équipement à des fins locales autres que d'y loger des enfants
qui apprennent à lire, à écrire, la géographie,
l'histoire ou tout ce que vous voulez. C'est donc un équipement local
qui, à notre sens, doit être, quant à son fonctionnement,
quant à son entretien, à la charge du niveau local, à la
charge, pour nous, de transférer, à ce niveau, les ressources
financières, d'une part, qui lui permettent de rencontrer cette
exigence. Et, deuxièmement, ce que le député a
ignoré, peut-être pas sciemment, c'est que toutes les formules que
nous avons mises sur pied au titre du financement local des équipements
scolaires prévoient également une marge de manoeuvre de 48 000
000 $ additionnels à ce qu'autrement les commissions scolaires auraient
eu. Ça nous explique, en grande partie, pourquoi on n'entend pas de
plaintes.
Les formules de financement permettent aux commissions scolaires d'aller
chercher de la marge de manoeuvre de près de dizaines de millions de
dollars, tel qu'elles le souhaitaient. Nous avons donc fait d'une pierre deux
coups et je n'ai pas, quant au reste, à nos relations avec les
municipalités, à refaire le discours que j'ai fait au
député de Jonquière. Donc, pour notre conception de la
décentralisation qui serait absolument méprisante et
éculée, on repassera parce que ce n'est pas du tout ça qui
est en cause.
Deuxièmement - et là le député s'en est
allé dans toutes les directions à la fois - les frais de
scolarité. L'augmentation des frais de scolarité qui fait en
sorte que dans deux ans, lorsque les frais de scolarité auront
été augmentés à deux reprises, nous serons toujours
en dessous du niveau des frais de scolarité déboursés,
aujourd'hui, par les étudiants de l'Université Memorial à
Terre-Neuve, les plus pauvres au Canada. Ils paient 1280 $ de frais de
scolarité, aujourd'hui, et n'ont certainement pas le régime de
prêts et bourses que nous avons. Moi, je suis prêt à en
débattre sur la place publique. 540 $, les frais de scolarité, le
même niveau, d'ailleurs, que lorsque le député de Labelle
était à l'université ou moi-même. Enfin, ça
fait une génération, sinon deux... Ça fait dix
générations d'étudiants universitaires que les frais de
scolarité n'ont pas bougé. On va en revenir et on va permettre
aux universités, justement, d'être concurrentielles. Quant
à reflé- ter les fonds de dotation que certaines
universités se seraient constitués dans des formules de
financement, on va être logiques, on va le refléter aussi, pour
les dizaines de millions que l'Université de Montréal et que
l'Université Laval sont en train de se ramasser. Ce qui a transparu
beaucoup plus qu'autre chose, qu'une logique, qu'une cohérence qu'on
doit souhaiter lorsqu'on recherche l'excellence, c'est la hargne
viscérale du député de Labelle pour des institutions qui,
de façon prédominante, ne semblent pas fonctionner dans sa langue
maternelle à lui. Ça m'apparaît extrêmement dangereux
pour l'avenir scientifique, médical, technique du Québec de faire
des distinctions sur la base de ia langue entre les différentes
universités alors que, comme Québécois et Canadiens, nous
pouvons nous promener partout dans le monde et attirer des gens de partout dans
le monde vers la région de Montréal, notamment, en raison de la
présence de quatre universités dont deux sont de langue anglaise,
mais dont une est universellement connue et se classe, pour le plus grand
avantage de tous les Québécois, quelle que soit leur langue, au
tout premier rang des universités internationales. On ne peut qu'aspirer
à imiter cet exemple plutôt que de choisir de l'éliminer du
portrait. hydro-québec, des augmentations de 7,5 %, ce ne sont pas des
dividendes qui vont être versés à personne, ce sera
largement retenu à l'intérieur des équilibres
d'hydro-québec dont le rendement sur l'avoir qui a été,
l'an dernier, de 4,8 %, sera, en 1990, selon ce qu'on prévoit, de 4,8 %,
rendement sur l'actif, 1,3 %, 164 000 000 $ de moins que l'an dernier, un taux
d'autofinancement de 25,8 %, alors qu'on doit viser 30 %, en tout état
de cause, et une couverture des intérêts de 1,05 %, à peine
5 % de plus de marge de manoeuvre par rapport à la couverture
d'intérêts dictée par la loi applicable.
M. le Président, je peux comprendre que le député
de Labelle ait été insatisfait de cet exercice d'une dizaine
d'heures. Je crois saisir qu'il voudrait avoir à lui seul et pour ses
collègues de l'Opposition une grosse majorité du temps
d'intervention. Notre règlement, dans sa sagesse, n'est pas ainsi fait.
Le règlement prévoit que les parlementaires de quelque formation
politique qu'ils soient, à la condition qu'ils prennent place à
la table, ici, ont des droits de parole équivalents. J'ai
également noté qu'à l'égard du partage du temps
vous avez néanmoins fait preuve d'ouverture, vous l'avez dit, ça
a été reconnu du côté de l'Opposition, quant
à leur permettre un temps d'antenne peut-être supérieur
à ce que leur force numérique laisserait soupçonner. C'est
également dans nos traditions parlementaires d'aménager le
règlement pour refléter la situation que souhaite le
député de Labelle. Alors, je ne vois pas pourquoi il se
plaint.
Je peux comprendre, évidemment, qu'il trouve difficile, quant au
fond, de critiquer le
budget du gouvernement du Québec pour l'année 1990-1991.
C'est un budget qui, dans la conjoncture que nous traversons, a reconnu
certains besoins et a amené le gouvernement à poser certains
gestes. Accélération des investissements publics, 279 000 000 $,
un rétablissement de certains budgets de base du ministère des
Transports afin qu'il puisse mener à bien sa mission et continuer
à la mener, je dois le dire, d'une façon autrement plus
substantielle que ça ne l'a été dans les quelques
années qui ont précédé 1985. De permettre,
contrairement à ce qu'il a dit, la pleine indexation, au niveau des
ministères de l'Education, de la Santé et des Services sociaux et
de l'Environnement, des dépenses de ces ministères lors de la
constitution des enveloppes finales. Il est important - ce sont là nos
missions premières: l'environnement, l'éducation, la santé
et les services sociaux - que nous ne puissions faire porter sur ces
ministères et leurs émanations, je dirais, les contraintes
budgétaires qui doivent nécessaire ment être
édictées si on veut un Québec où notre fardeau
fiscal est concurrentiel, si on veut une société qui
dégage des marges de manoeuvre pour les choses importantes, si on veut
s'assurer qu'on ne lègue pas à ceux qui vont nous suivre le genre
d'héritage avec lequel, depuis 1985...
Le Président (M. Lemieux): II vous reste 30 secondes, M.
le ministre.
M. Johnson:... M. le Président, nous sommes appelés
à vivre.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. Alors, la commission du budget et de
l'administration ayant accompli son mandat relativement à la poursuite
du débat sur le discours sur le budget, pour une durée de dix
heures, en vertu de l'article 272 du règlement, nous ajournons sine die,
et je remercie les membres de chacune des formations politiques pour leur
collaboration.
(Fin de la séance à 12 h 26)