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(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration entreprend ce matin une consultation générale
sur l'étude de l'opportunité de maintenir en vigueur ou de
modifier la Loi sur la fonction publique.
M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président, il n'y a pas
de remplacement pour la séance.
Le Président (M. Lemieux): Comme il n'y a pas de
remplacement, permettez-moi de vous faire état de l'ordre du jour. Dans
un premier temps, il y aura des déclarations d'ouverture, soit la
déclaration du président de la commission et la
déclaration du vice-président de la commission, puis, par la
suite, nous procéderons. à la déclaration du
président du Conseil du trésor et ministre
délégué à l'Administration et à la Fonction
publique. Nous suspendrons nos travaux à 12 h 30 pour les reprendre
à 14 heures. Nous entendrons, dans un premier temps, le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec, à 14 heures. À 15
heures, nous entendrons le Syndicat des professionnelles et professionnels du
gouvernement du Québec; à 16 heures, l'Association
professionnelle des ingénieurs; à 17 heures, le Syndicat des
avocats et notaires. Nos travaux seront suspendus à 18 heures pour
reprendre à 20 heures avec le Syndicat des agents de la paix; puis,
à 21 heures, avec le Syndicat des agents de conservation de la faune;
pour ajourner à 22 heures.
Maintenant, permettez-moi de vous rappeler les règles de
l'audition, telles que convenues entre les membres de cette commission. M. le
député des Îles-de-la-Madeleine, ça va? La
période des déclarations d'ouverture durera 30 minutes, soit 15
minutes pour le président de la commission et 15 minutes pour le
vice-président. Nous débuterons ensuite la période des
auditions avec celle du président du Conseil du trésor et
ministre délégué à l'Administration et à la
Fonction publique. La durée totale de l'audition du président du
Conseil du trésor sera de 2 heures, dont 40 minutes pour l'exposé
du ministre et 80 minutes pour les échanges avec les membres de la
commission. La durée totale de l'audition, pour tous les autres
organismes entendus aujourd'hui, sera d'une heure, soit 20 minutes pour
l'exposé du mémoire et 40 minutes pour les échanges avec
les parlementaires. Les temps de parole des députés seront de 10
minutes, en respectant la règle de l'alternance dans les interventions.
Est-ce que l'ordre du jour est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Chagnon: Est-ce qu'il y a des modifications, M. le
Président, pour les auditions en cours de semaine?
Le Président (M. Lemieux): Normalement, on me fait
état que les journées de jeudi et de vendredi devraient
être reportées, mais que le tout est actuellement en
négociations et que la décision finale n'a pas encore
été prise, M. le député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Nous le saurions quand?
Le Président (M. Lemieux): M. le secrétaire? Dans
24 heures, M. le député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci.
Déclarations d'ouverture Le
Président
Le Président (M. Lemieux): Alors, comme je l'ai
énoncé au début de la séance, la commission du
budget et de l'administration a été chargée
d'étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas
échéant, de modifier fa Loi sur la fonction publique. C'est un
large mandat et tout un défi. Un défi pour les membres de cette
commission qui, eu égard probablement aux circonstances, ont eu
très peu de ressources et qui doivent se faire une opinion
indépendante de celle du gouvernement. Un défi également
pour tous les artisans de la fonction publique qui viendront témoigner
devant nous et qui tenteront de nous exposer leur point de vue afin de faire
avancer les choses. Troisièmement, un défi pour les
représentants des citoyens, qui chercheront à nous rappeler que
la fonction publique doit fournir des services de qualité, sans oublier
d'être le reflet du Québec d'aujourd'hui et de demain.
C'est aussi, il faut bien le reconnaître, un défi pour le
gouvernement, qui a accepté de se soumettre à un examen public de
sa gestion sans en contrôler toutes les règles du jeu.
Depuis le 13 mars 1990, les membres de la commission ont entrepris cette
étude d'une façon indépendante et non partisane. Je tiens
à le souligner afin que nous nous rappelions bien le but de nos travaux:
fournir à l'Assemblée nationale un rapport qui contiendra nos
observations,
nos conclusions et nos recommandations. Ce rapport portera non seulement
sur les modifications qui pourraient être apportées à la
loi, mais aussi sur les améliorations à la façon dont elle
a été appliquée.
Le rôle des parlementaires qui sont assis autour de cette table
consiste, en premier lieu, à écouter et à comprendre ce
que les principaux intéressés ont à dire sur l'application
de la Loi sur la fonction publique depuis la refonte de 1983. Ils auront
ensuite à se faire une opinion et à formuler leurs
recommandations. Celles-ci s'appuieront sur les témoignages entendus au
cours des audiences publiques et sur les résultats de l'enquête
que la commission parlementaire mène déjà depuis six
mois.
Notre mandat comporte au moins deux aspects. Le premier consiste
à faire le bilan de l'application de la loi depuis la refonte de 1983.
Ce bilan fera sans doute ressortir diverses faiblesses, mais sûrement
aussi de solides acquis. Le second aspect consiste à faire un exercice
de prospective, c'est-à-dire prévoir ce que devra être ta
fonction publique de l'an 2000.
Certains diront peut-être qu'il s'agit là de
considérations bien théoriques. Cependant, le document de
consultation que la commission a publié à la mi-juin et qui a
été largement diffusé po6e des questions bien
concrètes et vise, selon nous, à mettre sur la table les vrais
problèmes vécus par ceux qui fournissent les services
gouvernementaux à la population québécoise.
Il faut se rappeler que l'effectif entier de la structure centrale de
l'État, celle-ci excluant les réseaux des affaires sociales, de
l'éducation et autres, compte plus de 60 000 employés permanents
et occasionnels. Nous estimons que les citoyens y investissent annuellement
plus de 2 000 000 000 $ en salaires seulement. Tout en tenant compte de cette
réalité, nous croyons que les enjeux d'une fonction publique
moderne dépassent la seule question financière. N'oublions pas
que le facteur humain constitue en soi un élément clé du
système.
L'objectif fondamental de la Loi sur la fonction publique, laquelle a
été sanctionnée le 22 décembre 1983, est
énoncé clairement à son article 2. Permettez-moi de vous
en rappeler la teneur. "La fonction publique a pour mission de fournir au
public les services de qualité auxquels il a droit, de mettre en oeuvre
les politiques établies par l'autorité constituée et
d'assurer la réalisation des autres objectifs de l'État. " Afin
d'accomplir cette mission, la loi stipule que la fonction publique doit
être organisée de manière à favoriser l'efficience
de l'administration, la responsabilisation et la reddition de compte des
fonctionnaires, l'égalité d'accès de tous les citoyens
à la fonction publique, l'impartialité et l'équité
des décisions affectant les fonctionnaires ainsi que la contribution
optimale au sein de la fonction publique des diverses composantes de la
société québécoise.
Au moment de son adoption, en 1983, la Loi sur la fonction publique
était une loi d'avant-garde, qui conserve encore aujourd'hui toute son
actualité. Néanmoins, pour assurer à la fonction publique
les meilleures perspectives d'avenir, nous croyons indispensable de faire le
point sur la situation qui prévaut et de se poser un certain nombre de
questions. À titre d'exemple:
Premièrement, où en est actuellement la fonction
publique?
Deuxièmement, quels sont les aspects dont nous pouvons être
fiers et ceux que nous aimerions renforcer ou améliorer?
Troisièmement, les programmes ou initiatives à
entreprendre pour assurer à la fonction publique l'avenir
souhaité reposent-ils sur des assises solides?
Il est temps de planifier dès maintenant le passage du
présent à l'avenir. Il faut se demander quelles sont les
traditions et tes valeurs solidement ancrées dans la fonction publique
qui doivent être préservées, et identifier celtes qui
doivent être modifiées ou ajoutées pour faire face aux
multiples défis que l'avenir nous réserve.
Je suis bien conscient qu'il n'est pas opportun de prévoir dans
les moindres détails un plan exhaustif pour une organisation aussi
diversifiée et aussi complexe. Mais il m'apparaît fondamental et
stimulant que la fonction publique développe sa propre vision et
élabore les lignes directrices de son avenir. C'est d'ailleurs à
cette condition que l'on pourra développer chez les fonctionnaires un
sentiment de solidarité, une fierté collective pour les services
importants, voire essentiels, qu'ils rendent aux citoyens du Québec.
Cette vision sera probablement une combinaison de valeurs, de principes
et d'objectifs. Elle devra tenir compte des réalités
démographiques, sociales, technologiques et économiques. Elle
devra inspirer la conception des principes de gestion qui permettront de
relever les défis de la prochaine décennie. Si cette vision est
réaliste, l'avenir de la fonction publique répondra à nos
aspirations et non à nos craintes. Pour cela, il faudra la participation
de tous les intéressés, du plus haut niveau jusqu'au plus bas de
la pyramide gouvernementale, c'est-à-dire des fonctionnaires de
première ligne qui rendent directement des services aux citoyens
jusqu'à ceux qui sont chargés d'orienter et de
décider.
À la lecture de plusieurs mémoires et de comptes rendus
d'entrevues avec les fonctionnaires, il y a lieu non pas de s'alarmer, mais de
s'inquiéter de la situation actuelle dans la fonction publique. Les
trois problèmes fondamentaux les plus fréquemment cités
sont: le manque apparent de leadership, l'impression qu'ont les employés
de n'être guère appréciés et les inquiétudes
nourries par les fonctionnaires à l'égard de leur carrière
et de leur avancement.
Les fonctionnaires ne s'attendent pas à des miracles. Ils
aimeraient toutefois savoir qu'on se préoccupe d'eux, qu'il existe des
solutions à leurs problèmes, que ces solutions répondent
bien à l'ampleur. des problèmes et, surtout, que quelqu'un est
prêt à les écouter.
Les problèmes sont sans doute de taille, mais ils commandent une
gestion stratégique des ressources humaines afin de rendre
l'administration publique plus productive et plus efficace.
La Loi sur la fonction publique de 1983 nous trace, comme je le
mentionnais au début, des moyens pour améliorer la gestion des
ressources humaines, et l'heure est venue d'évaluer les progrès
accomplis. S'il s'avérait qu'ils soient trop modestes, il faudra en
découvrir les causes et trouver des solutions pour
accélérer la progression de la fonction publique.
Des études préliminaires effectuées à la
demande de la commission, notamment sur la qualité des services rendus
aux citoyens, sur l'implantation d'un système d'imputabilité, sur
l'utilisation optimale des compétences disponibles et, enfin, sur la
dotation des emplois et le développement des ressources humaines,
arrivent à des conclusions parfois rassurantes mais malheureusement
souvent troublantes, pour ne pas dire inquiétantes.
Dans la catégorie des conclusions rassurantes, je me permets de
souligner les principales: les citoyennes et les citoyens du Québec sont
généralement satisfaits ou très satisfaits des services
dispensés par les fonctionnaires, la fonction publique dispose en
général de ressources humaines compétentes, un effort
important est consacré au maintien et au développement de ces
ressources humaines.
Dans la catégorie des constatations troublantes, nous observons
que les nouvelles directives et politiques qui ont remplacé l'ancienne
réglementation en matière de gestion des ressources humaines
n'ont pas augmenté la marge de manoeuvre des gestionnaires, n'ont
apporté aucun changement important dans la philosophie de gestion et
sont presque aussi lourdes qu'auparavant. En parallèle, la comparaison
des conventions collectives d'avant la loi 51 avec celle présentement en
vigueur démontre que ces nouvelles conventions réduisent encore
plus la marge de manoeuvre des gestionnaires. L'implantation du système
d'imputabilité, pierre angulaire de la loi 51, est à peine
amorcée dans les ministères et organismes. Une partie importante
des cadres et des professionnels de 45 ans et plus sont sous-utilisés.
Il n'existe peu ou pas de systèmes valables de planification à
moyen et à long terme des besoins en ressources humaines, tant au niveau
des organismes centraux que dans les ministères et organismes
opérationnels.
Considérant ce qui précède, tes efforts
consacrés au développement des ressources humaines ne
découlent pas d'un plan d'ensemble et sont souvent improvisés,
sans compter qu'au- cun moyen n'existe pour en mesurer l'impact et les
bénéfices. Il n'existe pas encore de système de
planification et de développement de la carrière du personnel
d'encadrement.
Enfin, la crédibilité du système du mérite
accuse une baisse importante dans l'esprit des fonctionnaires.
Malgré les difficultés prévisibles, le peu de
moyens mis à la disposition de la commission et la complexité des
problèmes soulevés, ces constatations préliminaires ne
peuvent que susciter chez les membres de cette commission une grande
détermination pour en rechercher les causes et y apporter les correctifs
appropriés.
J'ai peut-être mis beaucoup d'accent sur l'administration interne
de la fonction publique et, plus particulièrement, sur l'importance
capitale de la qualité de la gestion. Je partage l'opinion de certains
témoins qui viendront devant nous, et en particulier celle de M. Louis
Bernard, qui affirme qu'il importe, compte tenu de l'envergure de l'entreprise
que représente l'État, que celle-ci soit bien
gérée, sinon tout le développement de notre
société sera pénalisé, surtout en ce temps
où la concurrence internationale est féroce et sans
pitié.
Dans le même ordre d'idée, le rapport du comité de
gestion publique de l'Organisation de coopération et de
développement économiques, l'OCDE, mentionne que
l'efficacité du secteur public est une condition de l'efficacité
de l'économie nationale: "Les gouvernements des 22 pays reconnaissent et
admettent que l'amélioration de la gestion publique fait partie des
ajustements structurels indispensables a l'amélioration des performances
économiques dans un environnement mondial en constante évolution.
"
Avant de terminer, je tiens à assurer tous les intervenants qui
se présenteront devant cette commission qu'ils seront
écoutés avec la même ouverture d'esprit et la même
impartialité. Le seul fait qu'ils aient mis du temps et de
l'énergie à analyser la situation de la fonction publique
témoigne certainement de leur intérêt pour cette importante
question.
Aussi, nous leur garantissons que toutes les propositions qui seront
formulées seront étudiées très attentivement et
avec la plus grande objectivité. J'invite donc mes collègues
à unir leur compétence et leur détermination pour faire un
succès des travaux de cette commission. Je suis persuadé qu'ils
sont, comme moi, convaincus de l'importance de la contribution de la fonction
publique au développement de la collectivité
québécoise. Je vous remercie.
M. le député de La Prairie, pour votre déclaration
d'ouverture.
Le Vice-Président
NI. Lazure: Merci, M. le Président. Le mandat que notre
commission a reçu du président de l'Assemblée nationale le
13 mars 1990 consiste
à étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou,
le cas échéant, de modifier la Loi sur la fonction publique qui
fut sanctionnée en décembre 1983.
Une telle étude par un organisme relativement non partisan comme
cette commission parlementaire est amplement Justifiée, puisque cette
loi introduisait une réforme d'envergure qui modifiait grandement le
mode d'organisation et de gestion des ressources humaines dans la fonction
publique.
Dès l'article 2 de cette loi, le législateur,
particulièrement sage à cette époque, M. le
Président, énonçait clairement la mission...
Le Président (M. Lemieux): En politique, M. le
député de La Prairie.
M. Lazure:... fondamentale de la fonction publique: "La fonction
publique a pour mission de fournir au public les services de qualité
auxquels il a droit, de mettre en oeuvre les politiques établies par
l'autorité constituée et d'assurer la réalisation des
autres objectifs de l'État. "
Tous les autres articles de la loi ont été
énoncés dans le but de faciliter l'accomplissement de cette
mission, en introduisant une philosophie nouvelle de gestion des ressources
humaines qui s'inspirait des recommandations formulées par la commission
Bisaillon en juin 1982.
Notre commission il faut le dire, M. le Président a abordé
de façon bien consciencieuse et non partisane cette tâche
importante qui lui était confiée en mars. C'est dans une
atmosphère propice à la réflexion que se sont
déroulées les délibérations du comité
directeur et de la commission, l'Opposition entend bien continuer dans cette
lancée.
Cependant, une mise au point s'impose et certaines choses doivent
être dites bien clairement. (10 h 30)
Le mandat reçu par ce corps législatif qu'est notre
commission ne doit, d'aucune façon, être gêné ou
paraître être gêné par des interventions du corps
exécutif. Or, en juillet dernier, le ministre
délégué à l'Administration et à la Fonction
publique et président du Conseil du trésor faisait parvenir une
lettre - que je dépose, d'ailleurs - à tous les ministères
et organismes gouvernementaux qui dit, entre autres choses: "Si, par ailleurs,
votre ministère juge à propos de soumettre à la commission
des commentaires supplémentaires au Rapport - que, lui, le
président du Conseil du trésor, avait soumis en décembre
1988 - je vous saurais gré de m'en informer à l'avance afin de
pouvoir coordonner l'expression des préoccupations gouvernementales sur
l'ensemble des questions qui seront soulevées. "
Le président du Conseil du trésor se
référait à une lettre que vous aviez
expédiée en juin, M. le Président, à tous les
ministères et organismes, invitant ceux-ci à faire
connaître leurs commentaires sur le document de consultation
préparé par notre commission. Plutôt que d'encourager les
ministères et organismes à collaborer aux travaux de la
commission parlementaire, comme l'aurait fait tout ministre respectueux des
prérogatives du corps législatif, le président du Conseil
du trésor utilise un "si votre ministère juge à propos de
soumettre des commentaires à la commission" qui n'est certes pas de
nature à encourager la haute fonction publique à s'empresser de
collaborer avec la commission.
Pour être bien sur que la mise en garde est comprise par tout, le
monde, le Conseil du trésor revient à la charge en août,
cette fois avec une lettre du secrétaire, c'est-à-dire, son
sous-ministre - que je dépose aussi - qui dit: "Je vous demande de
communiquer à l'avance au secrétariat du Conseil du
trésor, pour discussion préalable, tout commentaire au document
d'information relatif au Rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur la
fonction publique. "
Bien sûr, le président du Conseil du trésor va
tenter de nous démontrer que lui et son sous-ministre ont toujours voulu
collaborer aux travaux de la commission, qu'il n'a jamais été
question d'obstruction, mais seulement de coordination. Cependant, il a bien
fallu constater, au cours de l'été, que plusieurs
ministères et organismes ont longuement tardé à fournir
leurs réactions au document de travail de la commission. Dans la grande
famille que constitue la fonction publique, surtout ici à Québec,
tout le monde parlait de cette mise en garde du Conseil du trésor
à l'égard de la commission.
Toute apparence d'ingérence de l'exécutif sur la bonne
marche de la commission doit être éliminée au
départ, et le président du Conseil du trésor doit
comprendre qu'il ne s'agit pas de sa commission parlementaire, comme c'est le
cas lorsqu'un ministre pilote un projet de loi. C'est pourquoi son autre
démarche ultérieure, toute récente, par laquelle il
s'invite pour une intervention de deux heures au début des travaux, en
plus de celle d'une heure à la clôture des travaux, a paru
carrément disproportionnée et a amené l'Opposition
à enregistrer pour vote sa dissidence à la décision
majoritaire prise par des députés ministériels qui n'ont
pas osé déplaire à ce ministre si autoritaire mais si
puissant, si puissant à l'égard de tous les budgets
gouvernementaux, pratiquement, y compris ceux qui vont dans les comtés
de chaque député.
Par son comportement, le président du Conseil du trésor
démontre qu'il ne comprend pas la philosophie qui a
présidé en 1984 à la réforme des travaux des
commissions parlementaires, confiant à celles-ci beaucoup plus
d'autonomie par rapport au pouvoir exécutif. C'est plutôt avec
modestie, si possible, qu'il devrait se présenter devant cette
commission, non pas
seulement pour y prononcer un discours, mais surtout pour
répondre aux questions des députés.
Pour revenir de façon plus précise à notre mandat,
il serait intéressant de voir quel diagnostic le président du
Conseil du trésor pose sur les progrès accomplis dans l'atteinte
de l'objectif fondamental de la loi, qui était d'améliorer la
qualité des services à la population.
Nous savons que, dans certains ministères et organismes, la
qualité des services a progressé de façon notable et
remarquable, par exemple, au Revenu et à la Régie de l'assurance
automobile. Il peut être utile de rappeler qu'au moment de l'adoption de
la loi 51, en décembre 1983, il existait au gouvernement d'alors un
Secrétariat aux relations avec les citoyens, créé en
septembre 1982, en même temps qu'était désigné un
ministre délégué aux Relations avec les citoyens. Ce
Secrétariat a accompli un travail acharné de persuasion et
d'incitation auprès des ministères et organismes. On peut
s'interroger sur la sagesse de la décision du nouveau gouvernement de
1985 d'abolir un organisme qui jouait un rôle important dans
l'amélioration des rapports entre l'État et ses citoyens et
citoyennes.
Cette préoccupation du gouvernement de l'époque quant
à la qualité des services à la population s'est
concrétisée par une collaboration intime entre l'équipe de
la ministre Leblanc-Bantey, qui pilotait le projet de loi à
l'époque, et celle que je dirigeais aux Relations avec les citoyens dans
la préparation du projet de loi 51, avec comme orientation fondamentale
celle exprimée dans le rapport Bisaillon.
Tout en confiant au président du Conseil du trésor la
responsabilité pour une partie importante de la loi, le gouvernement
désignait par décret, un deuxième ministre comme
responsable de l'Office des ressources humaines, et cette pratique a
été continuée par le gouvernement libéral de 1985.
Ce n'est qu'à l'automne de 1988 que le gouvernement décide, par
le décret 10-20-88, de confier à un seul ministre, soit le
président du Conseil du trésor, la responsabilité de
toutes les parties de la loi, incluant celles qui traitent de l'Office des
ressources humaines. Comme plusieurs autres, je crois qu'il s'agit là
d'une erreur. La mission première du Conseil du trésor en est une
de surveillance et de contrôle des dépenses de l'État, et
toute son action, c'est normal, est colorée par cette mission difficile.
Par conséquent, plusieurs aspects de la loi 51 seront difficilement
compatibles avec la vocation du Conseil du trésor, par exemple la
décentralisation des pouvoirs en faveur d'un ministère quant
à la gestion des ressources humaines.
Il n'est donc pas surprenant que les ministères se plaignent de
l'excès de contrôle souvent tatillon émanant du Conseil du
trésor. En effet, celui-ci a augmenté depuis quelques
années le nombre de directives, normes et politiques touchant les
ressources humaines, agissant plus comme un organe de contrôle que comme
un partenaire dans le champ des ressources humaines. L'esprit de la loi 51
était de déréglementer, et on se retrouve avec une
pléthore de directives et normes qui laissent peu de place aux variantes
et aux variations dans les ministères et organismes.
Le mémoire de l'Association des cadres intermédiaires du
gouvernement du Québec, quand il traite de la qualité et de
l'efficacité des services, révèle qu'un sondage
récent auprès des membres de la fonction publique démontre
que 68, 2 % d'entre eux dénoncent comme une grande faiblesse
l'incohérence du processus décisionnel. De façon plus
spécifique, 63, 2 % des gestionnaires déplorent leur peu
d'influence, 51 % s'estiment brimés par la limitation de leur droit de
gérance et 47 % signalent leur peu de pouvoir et d'outils pour stimuler
l'initiative de leur personnel.
En décembre 1988, le président du Conseil du trésor
remettait au président de l'Assemblée nationale son rapport sur
la mise en oeuvre de la Loi sur la fonction publique. Son appréciation
est plutôt élogieuse, mais rarement étoffée par des
données précises qui auraient pu cependant être
éloquentes. Par exemple, quand il traite du programme d'accès
à l'égalité pour les femmes et certains groupes cibles,
tel que celui des personnes handicapées, il se contente d'affirmer "que
les ministères et organismes ont établi des plans d'action leur
permettant de réaliser leurs objectifs". Hélas! aucune
statistique n'apparaît à ce chapitre, ni d'ailleurs dans
l'ensemble de son rapport. Cependant, le mémoire de l'Office des
personnes handicapées apporte un éclairage bien différent,
en démontrant que la représentation des personnes
handicapées dans la fonction publique a baissé, entre mars 1987
et mars 1990, de 508 à 391 personnes, soit de 0, 96 % à 0, 74 %
de l'ensemble de la fonction publique.
Devant ces faits, l'Office exprime sa grande déception, d'autant
plus que le Conseil du trésor avait approuvé, en juillet 1984, un
plan d'embauché gouvernemental, conformément à l'article
63 de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.
Ce plan prévoyait un engagement du gouvernement d'obtenir un taux
minimum de 2 % de représentativité des personnes
handicapées dans la fonction publique, alors qu'actuellement, nous
sommes à 0, 74 %.
J'aurais souhaité, M. le Président, que le
président du Conseil du trésor, dans son rapport à
l'Assemblée, aille au-delà des généralités
et qu'il traite de façon plus critique l'organisme qu'il dirige.
L'embauche des personnes handicapées à la fonction publique
constitue une illustration bien précise d'un secteur où le
gouvernement a lamentablement échoué, donnant ainsi aux
employeurs du secteur privé un bien piètre exemple. Et le
président du Conseil du trésor devrait s'en expliquer, avec toute
l'humilité dont il est capable, auprès des membres de cette
commission et surtout auprès des personnes
handicapées.
Un service de qualité à la population, raison d'être
de la fonction publique, ne sera assuré que le jour où les 60 000
personnes qui oeuvrent dans les ministères et organismes jouiront d'un
climat de travail propice au développement de leur initiative. À
cet égard, la participation du personnel aux décisions doit
être accrue, de même que Ton doit favoriser des plans de
perfectionnement technique et profes-sionel. En dehors du scandale bien connu
que constitue ie "tablettage" de centaines de hauts fonctionnaires à
salaire élevé, il faut s'arrêter davantage à la
sous-utilisation du personnel cadre, surtout à Québec
même.
En région, l'inverse est souvent vrai, puisque, trop souvent, les
mesures de restrictions budgétaires dont le Conseil du trésor a
la responsabilité s'appliquent davantage dans les bureaux
régionaux que dans les maisons mères, et le personnel trop
réduit de ces bureaux régionaux est souvent
débordé, d'où un service à la clientèle qui
devient alors plus problématique.
La gestion des ressources humaines, surtout dans une entreprise comptant
plus de 60 000 employés, ne peut se faire uniquement selon les
méthodes utilisées en gestion des ressources financières.
Et si, comme il est peut-être ie cas, la loi demeure très bonne
quant à son esprit et à sa lettre, il m'apparaît
évident qu'il y a des lacunes graves dans l'application de cette loi et
qu'elfes s'expliquent par le manque de leadership du maître d'oeuvre de
la loi. Qu'on le veuille ou non, le Conseil du trésor est perçu,
tant par la fonction publique que par la population, comme un organisme qui
négocie les conditions de travail et qui contrôle les
dépenses gouvernementales.
Pour que l'application de la loi en reflète mieux les objectifs,
il faut briser le monopole détenu par un seul organisme, le Conseil du
trésor, et par un seul ministre, son président. Confier la
responsabilité de la toi à deux ministres, comme ce fut le cas
jusqu'en 1988, constituait déjà une certaine protection contre
une application trop influencée par une seule optique, et
peut-être faut-il envisager d'y revenir.
À une époque où te monde des affaires accorde de
plus en plus d'importance à la participation du personnel à la
prise de décisions, il serait opportun que l'État donne l'exemple
en matière de gestion participative et qu'il fasse entrer
syndiqués, professionnels et cadres dans le cénacle où se
prennent les décisions qui vont affecter le quotidien de tout le
personnel de la fonction publique.
Le gouvernement doit redonner à sa fonction publique un nouveau
souffle de fierté, semblable à cet esprit de pionnier, de
bâtisseur qui animait, dans les années soixante, ceux et celles
qui arrivaient par milliers pour donner enfin au Québec une
véritable fonction publique. Pour ce faire, il faut que le leadership
minis- tériel, exercé sur l'ensemble des 60 000 serviteurs de
l'État, soit animé de motifs qui ne sont pas associés
seulement aux équilibres financiers, mais étroitement liés
à la qualité, à l'excellence de l'administration publique
québécoise. Et, dans la meilleure des hypothèses, ce
deuxième souffle, grandement attendu par la fonction publique
elle-même, pourrait être celui qui découlerait de la
volonté collective de l'ensemble de notre population de se bâtir
un pays bien à elle, mais je me rends compte, M. le Président,
que j'empiète sur le terrain d'une autre commission parlementaire bien
spéciale et encore plus importante que la nôtre, disons-le bien
humblement.
En conclusion, l'Opposition écoutera avec beaucoup d'attention
tous les groupes et individus qui ont répondu à l'invitation de
notre commission et collaborera avec les autres membres de cette commission
pour remplir avec diligence le mandat que nous a confié
l'Assemblée nationale. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député La Prairie. En vertu de l'article 162 du règlement,
un document ne peut être déposé à la commission
parlementaire qu'avec le consentement du président. Et un des
critères principaux pour qu'un document soit déposé, M. le
député de La Prairie, c'est l'authenticité. Alors, pour
les deux documents que vous m'avez déposés, je ne peux
considérer ces documents-là comme étant authentiques,
puisqu'ils n'ont ni signature, ni nom, ni correspondant concerné,
c'est-à-<_hre2c_ et="" ne="" le="" _c3a0_="" dans="" de="" la="" _c27_est="" _mc3aa_me="" _dc3a9_pc3b4_t="" _remarquez2c_="" ici="" signature="" si="" lettre="" cas.="" qui="" refuse="" _n27_y="" des="" deux="" les="" _alors2c_="" _qu27_il="" pas="" a="" _qu27_on="" _envoyc3a9_e.="" chose="" vous="" sait="" _c3a9_tc3a9_="" je="">
M. Lazure: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Lazure: ...sur une question de règlement.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement.
M. Lazure: Est-ce que vous permettriez, M. le Président,
que le président du Conseil du trésor nous garantisse
l'authenticité du premier document, que je lirai avec plaisir? J'en ai
d'ailleurs lu un extrait, mais je pense que, lorsqu'on lit
l'entièreté du premier document, il devient évident,
même si la signature n'apparaît pas au bas, puisque, dans la lettre
elle-même, le président du Conseil du trésor
s'identifie...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, je pense que le règlement est assez clair et assez facile
à interpréter. Je vous ai déjà fait mention que je
refuse le dépôt de ces
documents eu égard à leur caractère
d'authenticité. J'inviterais maintenant M. le président du
Conseil du trésor à bien vouloir prendre la parole.
M. Johnson: Merci, M. le Président. Dès le
départ, je demanderais une question de directive. J'ai entendu, tout
à l'heure, que nous ajournions nos travaux à 12 h 30, alors que
les deux heures que vous auriez réservées aux fins de nos
échanges se termineraient plutôt à 12 h 45. J'étais
simplement curieux de savoir...
Le Président (M. Lemieux): J'espère qu'il y a
consentement. Est-ce qu'il y a consentement pour que le président du
Conseil du trésor puisse poursuivre? À 12 h 30? (10 h 45)
M. Lazure: Oui, 12 h 30, c'est une bonne heure pour finir.
Le Président (M. Lemieux): Non, non, je m'excuse,
là. Je demande...
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): Un instant! Ce que nous allons
faire, M. le président du Conseil du trésor, c'est que nous
allons commencer et puis nous verrons. S'il nous manque du temps, par la suite,
on prendra la décision. Vous pouvez opérer, M. le
président du Conseil du trésor.
Exposé du ministre délégué
à l'Administration
et à la Fonction publique et
président
du Conseil du trésor
M. Daniel Johnson
M. Johnson: M. le Président, je vois que vous menez nos
travaux avec la même souplesse et la même autonomie que nous le
souhaitons pour l'ensemble des ministères dans le cadre de la Loi sur la
fonction publique.
J'aimerais tout de suite vous présenter les gens qui
m'accompagnent. À ma droite, M. Denis Bédard, qui est
secrétaire du Conseil du trésor, le sous-ministre donc. À
ma gauche immédiate, M. Michel Crête, qui est le secrétaire
associé, donc sous-ministre associé aux politiques de personnel
et relations de travail, ils sont eux-mêmes flanqués
respectivement de Mme Johanne St-Cyr, chef de service des politiques de
personnel au Secrétariat du Conseil du trésor, et de M.
André Savard, qui est cadre à cette direction des politiques de
personnel et qui a été le coordon-nateur de l'implantation de la
Loi sur la fonction publique à titre, je vais le dire, de rescapé
du ministère de la Fonction publique.
J'ai pris quelques notes à l'occasion de votre intervention, M.
le Président, de même que lors de l'intervention du
député de La Prairie.
Déjà, il y a passablement de matière pour que nous
échangions sur la seule foi de ces interventions. J'aurai
néanmoins un texte ou des remarques assez complètes à vous
livrer dans quelques instants, mais auparavant, j'aimerais tout de suite faire
quelques mises au point.
Il s'est écrit beaucoup de choses, depuis quelques jours. Il s'en
est dit d'autres, il y a quelques instants, notamment par le
député de La Prairie. Je vais les prendre dans l'ordre.
J'aurais écrit à mes collègues, l'été
dernier, pour leur demander de bien vouloir m'aviser de la nature des
commentaires qu'ils pourraient faire parvenir à la commission.
Effectivement, car le Rapport de 1988 est un rapport gouvernemental qui a
été adopté après discussion au Conseil des
ministres. En conséquence, si la commission suscite des commentaires de
qui que ce soit, ou si quelqu'un veut suggérer des interventions de la
part des différents ministères, il appartient au ministre
responsable qui portait le dossier au Conseil des ministres de rappeler
à ses collègues qu'il s'agit là d'un document
gouvernemental et qu'il y a une réponse gouvernementale à donner.
C'est la raison pour laquelle, évidemment, j'ai communiqué avec
mes collègues.
La même chose est vraie quant à la coordination de
l'exercice, parce que c'est majeur, évidemment. Vous le savez, du
côté de la commission, avec les travaux que vous avez fait faire,
et la même chose est vraie du côté gouvernemental. Il y a
une documentation volumineuse à mettre sur pied, à organiser.
Elle émane, cette documentation, de toutes sources, qu'il s'agisse des
organismes dont je suis responsable ou alors des ministères qui sont les
premiers pris à parti, je devrais dire, par les travaux de la commission
compte tenu des responsabilités qui sont les leurs en vertu des
dispositions mêmes de la Loi sur la fonction publique. Donc, oui, c'est
normal que et moi-même et le secrétaire du Conseil du
trésor communiquions avec nos homologues dans le cadre de cet
exercice.
Deuxièmement, le député de La Prairie, notamment -
et je l'ai lu, moi aussi - prétendrait que j'ai imposé ma
présence ici même. Je demande au député de La
Prairie de lire l'article 163 de nos règlements. "Toute commission doit
- non pas "peut", pas "devrait", pas "peut-être bien" pas,
"peut-être bien que oui, peut-être bien que non" - entendre un
ministre qui demande à s'exprimer dans le cadre de l'examen d'une
affaire. " Et c'est à cette fin que, le 25 septembre, j'ai écrit
au président de la commission. Je cite, moi aussi, un document que j'ai
écrit: conformément à l'article 163 des règles de
procédure, afin d'être entendu. La commission a
décidé elle-même de déterminer la plage horaire, la
longueur de temps qui serait consacrée à mon intervention.
Même si les députés mettent en doute la décision de
la commission - c'est ce
qu'on m'a dit, qu'il y avait eu un vote - le règlement
était donc appliqué et respecté de la part de la
majorité de la commission, et l'intervention d'aujourd'hui
découle de nos règlements et de nos procédures.
Troisièmement, j'ai également lu que j'aurais eu vent des
mémoires qui auraient été déposés ou
acheminés vers la commission, que j'en aurais eu vent, et je cite de
mémoire, "contrairement aux procédures établies". J'ignore
qu'il y ait, dans les règlements de l'Assemblée nationale ou de
la commission, quelque procédure qui interdise de prendre connaissance
des mémoires qui sont déposés à partir du moment
où la commission, maître qu'elle est de la disposition qu'elle
peut faire de ses mémoires, se serait rendue, m'indique-t-on, à
la demande du bureau du leader du gouvernement et aurait acheminé copie
de ses mémoires au bureau du leader du gouvernement, qui aura à
répondre de la distribution qu'il en a faite. On ne m'a pas
avisé, par ailleurs, qu'il y aurait eu un embargo de
décrété par la commission iors de la transmission de ces
documents au bureau du leader qui, évidemment, est la source, quant
à moi, de la documentation que j'ai reçue.
Un commentaire d'ordre général, M. le Président,
dans les questions que vous avez formulées ou que les membres de la
commission peuvent avoir formulées, soit oralement, soit dans les
entrevues, ou soit dans le document de consultation. Les questions qui sont
posées définissent un point de départ qui risquerait de
nous engager dans la polémique, la controverse ou I'"adversarial. La
question de savoir si les structures du maître d'oeuvre de la mise en
vigueur et de l'implantation de la loi lui permet tent d'exercer son
leadership, comme je l'expliquerai tout à l'heure, est une fausse
question. En étant un peu condamné à dire si oui ou non,
nos structures sont ou ne sont pas bonnes, ça présumerait que
l'objet même de la question est pertinent. Dans la mesure où, vous
le verrez, la loi prévoyait non pas un leadership d'un martre d'oeuvre,
mais bien un partage des responsabilités afin de mettre en vigueur les
dispositions de la loi, H n'y a pas, à proprement parler, un
maître d'oeuvre de l'implantation de la loi. À mon sens, cette
question est, je le répète, une question piège, qui nous a
peut-être logés, de part et d'autre de cette discussion
d'aujourd'hui, dans des rapports d'adversaires plutôt que de
collaborateurs comme, quant à moi, je l'ai toujours souhaité.
Nous connaissons tous, M. le Président, l'expression qui veut que
l'intendance suive lorsque les maîtres politiques ont défini les
objectifs. On présumait sans doute par là que la fonction
publique s'ajuste naturellement aux attentes qu'on lui signifie et
exécute des volontés qui sont dans des lois, des
règlements ou d'autres décisions d'allocations de ressources.
Cette petite phrase peut laisser croire que l'administration serait une simple
machine - une autre expression consacrée - qui répondrait
automatiquement à des ordres clairs, nets, précis et bien
définis. Si l'exécutif n'a pas, à proprement parler,
à administrer les atteintes des objectifs qu'il fixe, il appartient
à la fonction publique de mettre sur pied les moyens d'atteindre ces
objectifs. Mais comme la réalité est complexe et variée,
la fonction publique est plutôt d'un organisme vivant, et non pas une
machine, qui sait analyser, peser, choisir.
Comme on peut le soupçonner, il est également primordial
de pouvoir juger de la qualité des activités auxquelles s'adonne
la fonction publique dans l'exécution de ses innombrables mandats. C'est
ici que s'offre un choix absolument fondamental: contrôler
l'exécution des gestes requis pour atteindre les objectifs ou alors
mesurer l'atteinte de ces objectifs.
Ce choix traduit une vision de l'administration publique, une
préférence quant au mode d'organisation, et amène à
priver l'un ou l'autre des modèles d'accomplissement des tâches
matérielles par les ressources humaines. Il s'ensuit que les rapports
d'autorité et de collaboration entre les divers agents et acteurs seront
marqués par ce choix initial. Ce choix est englobant, en ce qu'il touche
tout autant la. gestion des ressources matérielles et financières
que celles des ressources humaines.
Ce choix, c'est celui qui se fait entre la centralisation ou la
décentralisation, entre le contrôle ou la mesure, entre la
directive ou la reddition de compte, entre la dictée et l'écoute,
entre l'obéissance et la motivation. La Loi sur la fonction publique
visait très précisément à mettre en place un
système qui laisse au ministère le choix des moyens qui
facilitent l'atteinte des objectifs, grâce à la souplesse
organisationnelle et la capacité d'adaptation exigée par la
complexité même des tâches et la mouvance de
l'environnement.
Comme responsable de la fonction publique, ce choix de la
décentralisation, de la motivation, de la mesure et de
l'évaluation est le mien et celui du gouvernement. Les pistes que permet
de suivre la loi sont celles que l'expérience dicte comme étant
les plus susceptibles de valoriser nos ressources humaines, tout en assurant
une excellente qualité des services publics
Je tenais, dès le départ, à montrer mes couleurs en
ce premier jour des travaux de la commission, car il m apparaît essentiel
que nous sachions tous que le gouvernement a choisi de pousser l'administration
publique dans le sens d'une plus grande responsabilisation, d'une plus grande
efficacité, et donc de l'excellence.
La commission entreprend aujourd'hui une série de consultations
dans le cadre de ces travaux sur l'opportunité de maintenir, ou, le cas
échéant, de modifier la Loi sur la fonction publique. Je tenais
évidemment à me faire entendre, je l'ai souligné, pour
vous faire part
de mon point de vue sur ce sujet. J'aurai surtout l'occasion de
compléter l'information et l'évaluation présentées
dans le Rapport de décembre 1988. Cette intervention me permettra
également de répondre à certaines de vos
préoccupations qui sont exprimées dans le document de
consultation que la commission a rendu public en juin dernier.
La loi adoptée en 1983 visait à introduire une gestion des
ressources humaines différente de celle qui avait cours jusqu'alors.
D'abord, elle rappelle clairement que la mission de la fonction publique est de
mettre en oeuvre les politiques gouvernementales et de fournir au public des
services de qualité. Ensuite, au plan des grandes orientations, le
législateur a défini, à l'article 3, de la loi les
préoccupations extrêmement précises qui constituent des
principes et des défis et que l'on peut résumer en trois
points...
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor, un instant! Ça va, O. K., vous pouvez
continuer. Vous pouvez continuer, M. le président du Conseil du
trésor. Il faut éviter qu'il y ait de petits caucus à
l'intérieur de la commission, afin qu'on puisse écouter ce que
vous dites. Allez-y.
M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président, de
souligner que si vous devez m'entendre, vous devez aussi essayer de
m'écouter. Donc, l'article 3, on peut le résumer ainsi:
reconnaître la gestion proprement dite des ressources humaines, où
l'on passe d'un mode de gestion centralisé et réglementé
à un mode de gestion plus décentralisé, autonome et
tourné vers l'efficience; assurer l'accessibilité à la
fonction publique non seulement de l'ensemble des citoyens en
général, mais également de diverses composantes de la
société, notamment les femmes et les personnes
handicapées, les membres de communautés culturelles et les
autochtones; enfin, garantir aux fonctionnaires le droit d'être
traités impartialement et équitablement dans les décisions
qui les affectent.
La recherche de l'efficience et de l'efficacité a mis en
évidence les désavantages des systèmes de gestion
centralisés ou trop réglementés. Ces systèmes
facilitent les contrôles, mais ils réduisent les
responsabilités des gestionnaires et les empêchent de
développer le sens de l'initiative et de l'innovation.
Il est difficile, dans le secteur public, de trouver ce juste
équilibre entre l'autonomie et le contrôle, mais la faillite des
systèmes centralisés nous amène à valoriser
l'autonomie et la décentralisation et à remplacer le
contrôle par la reddition de compte. C'est-à-dire que l'obtention
de l'assurance de la conformité des décisions et actions de ceux
que la loi responsabilise par rapport aux orientations politiques s'effectue
par des vérifications a posteriori, plutôt que par des
autorisations préalables ou des contrôles ad hoc.
Dans les faits, nous constatons comment la gestion
décentralisée a pu améliorer la qualité des
services. Des programmes de formation du personnel peuvent maintenant
être élaborés en fonction de clientèles
spécifiques qui ont à transiger avec un ministère, sans
que la satisfaction des besoins des organisations ne soit limitée a
priori par le respect d'une norme gouvernementale, comme c'était le cas
auparavant. Je donne comme exemple qu'au ministère du Revenu, on a
réorganisé, ces dernières années l'ensemble des
services à la clientèle, avec les succès que l'on
connaît. De même, le ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu a réussi à implanter un
programme de formation pour son personnel qui a à transiger, on le sait,
avec des clientèles très particulières. (11 heures)
En fait, les gouvernements sont d'énormes entreprises de
services, et la qualité des services est entre les mains des membres de
la fonction publique. Certains groupes élaborent des politiques et des
programmes qui permettent de mettre en oeuvre des choix et priorités
politiques, alors que d'autres sont sur la ligne de front pour gérer et
opérationnaliser ces politiques.
Chacun des maillons de la chaîne hiérarchique doit avoir
comme souci constant l'atteinte des objectifs gouvernementaux de la
façon la plus simple et la plus efficace possible. Le citoyen doit
pouvoir avoir accès aux services publics sans avoir l'impression
d'affronter une énorme machine anonyme.
En fait, nous sommes passés d'un cadre de gestion très
réglementé à un cadre axé plutôt sur la
responsabilisation des sous-ministres et des dirigeants et dirigeantes
d'organismes. Par conséquent, le Secrétariat du Conseil du
trésor et l'Office des ressources humaines se sont appliqués
à définir le cadre de gestion des ressources humaines dans les
organisations. Conformément à la loi, cela a
généralement pris la forme de politiques en ce qui a trait au
Secrétariat du Conseil du trésor, et de programmes et services
pour ce qui est de l'Office des ressources humaines.
À titre d'exemple, l'ORH a révisé de fond en comble
la réglementation reliée à la tenue de concours. Des
modifications substantielles furent adoptées afin d'harmoniser cette
réglementation avec les principes et orientations de la loi.
Menés en collaboration avec les représentants des
ministères et organismes, ces travaux ont conduit à une
simplification des règles applicables, que ce soit par
l'amélioration de leur contenu ou la réduction de leur
nombre.
Toujours dans une perspective de décentralisation, un maximum de
responsabilités a été confié aux sous-ministres et
aux dirigeants et dirigeantes d'organismes dans le processus d'implantation de
la loi. La décentralisation de la gestion des ressources humaines a
été réalisée en ayant comme préoccupation de
laisser aux
ministères et organismes le plus de latitude, de
flexibilité et de souplesse possible dans le choix des moyens
nécessaires afin que la fonction publique s'adapte aisément aux
orientations gouvernementales.
La société doit s'adapter aux changements significatifs
qui se produisent, à l'évolution démographique, au
vieillissement de la population, à l'internationalisation des
échanges, aux changements technologiques, toutes des notions qui
bouleversent l'économie et l'organisation du travail.
Pour le gouvernement, le défi consiste à permettre
à notre société de s'adapter à ces changements, de
mettre en place des politiques et programmes qui minimiseront les contraintes
qui en découlent et qui permettront aux entreprises, notamment, de
maintenir et d'accroître leur capacité concurrentielle. Depuis
cinq ans, nous travaillons en ce sens, en sachant que seule la
prospérité économique qui en découle peut permettre
d'offrir des services sociaux, éducatifs, culturels que la population
souhaite.
Comme ministre responsable de la fonction publique, mon défi
consiste à voir à ce que le mode de gestion des ressources
humaines à l'Intérieur de la fonction publique soit suffisamment
souple pour s'adapter aux nouvelles orientations gouvernementales, lorsqu'elles
se présentent. Nous évoluons dans un monde qui fait appel
à une multitude de spécialités, et de nouvelles
spécialités apparaissent constamment.
Nos ressources humaines doivent s'adapter également à ces
changements. Elles doivent arriver à une polyvalence qui résulte
de l'intégration de diverses spécialités et de
l'expérience qu'elles acquièrent dans l'exercice de leurs
fonctions. Nous devons faciliter l'intégration des
spécialités par des programmes de perfectionnement, de formation,
de recyclage.
La fonction publique doit demeurer dynamique et motivée face aux
changements. Le Conseil du trésor a adopté récemment de
nouvelles orientations gouvernementales en matière de
développement du personnel cadre. Nous devons maintenant faire ce
même exercice à l'égard des autres personnes et relier
ensuite ces orientations avec le processus d'évaluation du rendement, de
façon à ce que les efforts de développement
répondent le mieux possible aux besoins de nos employés.
Dans son document de consultation, la commission a fait du
développement et du perfectionnement une question prioritaire, en
demandant si les divers programmes en ces matières découlaient
d'une stratégie globale d'utilisation optimale des ressources, tant au
niveau central qu'au niveau des ministères et organismes.
Je dois dire que je me méfie du terme "stratégie globale",
car il sous-entend une capacité de maîtriser l'ensemble des
variables d'un système pour atteindre tes objectifs qui sont, par
ailleurs, très clairement définis. Le Conseil du trésor
essaie bien sûr d'avoir une approche globale et rationnelle dans la
définition de ses politiques, mais ce qui est important, pratique et
réaliste, c'est de mettre en place un cadre de référence,
de donner aux gestionnaires les outils qui leur permettent de faire fonctionner
le système de façon à ce qu'il se rapproche d'une
situation souhaitée.
Pour poursuivre l'approche de décentralisation stipulée
à l'article 3 de la loi, la responsabilité du
développement et du perfectionnement doit être partagée
à tous les niveaux de l'organisation, de l'administration, et par la
direction de chaque ministère et organisme. Un effort spécial de
développement et de sum devra être fait au cours des prochaines
années par te Secrétariat du Conseil du trésor et l'Office
des ressources humaines pour s'assurer que le développement et le
perfectionnement restant une priorité de gestion du personnel de ta
fonction publique.
Le document de consultation de la commission soulève un certain
nombre de questions sur le leadership du maître d'oeuvre dans
l'implantation de la loi, tel que je l'indiquais plus tôt. N y a lieu,
tout d'abord, d'éclaircir ta question de la responsabilité de
l'Implantation, puisqu'on semble croire que le Conseil du trésor est le
maître d'oeuvre de l'implantation de ta loi. Cependant, le Conseil du
trésor n'est pas te seul organisme à intervenir, et la loi
définit des responsabilités spécifiques à
l'intention du Conseil du trésor, de l'Office des ressources humaines,
de la Commission de la fonction publique et surtout des ministères et
organismes.
Chaque organisme ou instance a donc ses propres responsabilités
et, en ce qui concerne le Conseil du trésor, on les retrouve aux
articles 77, 78, 79 et 80 de la Loi sur la fonction publique. Elles portent
principalement sur les objets suivants: établir tes politiques
générales de gestion des ressources humaines et en évaluer
la réalisation; établir les maxima d'effectifs, la classification
des emplois, les modes de dotation, d'intégration et les conditions
relatives aux mises en disponibilité; déterminer la
rémunération et les conditions de travail et négocier des
conventions collectives; établir des programmes d'accès à
l'égaKté.
Le Conseil du trésor ne peut donc pas intervenir directement dans
les domaines de compétence des autres organismes. Il s'est
acquitté de ses propres responsabilités, notamment celles
d'établir des politiques généottes de gestion des
ressources humaines, d'établir des programmes d'accès à
l'égalité et d'émettre des directives administratives
appropriées. Comme le Conseil du trésor a la
responsabilité d'évaluer la réalisation de ces politiques,
il demande aux ministères un bilan annuel de réalisation. Ces
bilans sont analysés et donnent lieu à des rapports annuels, de
même qu'au dernier rapport
déposé à l'Assemblée nationale sur les
programmes d'accès à l'égalité, à titre
d'exemple.
Par ailleurs, il ne faudrait pas confondre la responsabilité du
Conseil du trésor décrite à l'article 172 de la loi
concernant la préparation d'un rapport sur la mise en oeuvre de la loi
avec la responsabilité même de mettre en oeuvre la loi. Le
président du Conseil du trésor est également ministre
délégué à l'Administration et à la Fonction
publique et, de ce fait, actuellement responsable, à divers
degrés, des trois principaux organismes centraux concernés par la
Loi sur la fonction publique. Mais il n'en fut pas toujours ainsi, comme l'a
lui-même souligné le député de La Prairie.
Il n'y a donc pas eu, on le voit, de responsabilité unique
d'implantation de la loi. Si les organismes visés par la loi quant aux
pouvoirs et fonctions qui devraient être exercés
répondaient à des ministres différents, à
l'évidence, il n'y avait pas un maître d'oeuvre de la loi. Le
Secrétariat du Conseil du trésor s'est toutefois assuré
que les éléments de la loi étaient mis en place et il a,
en ce sens, joué un rôle de concertation et de coordination
particulièrement actif au cours de la phase d'implantation de la
loi.
La commission s'est également interrogée à savoir
si les structures actuelles du Conseil du trésor favorisent l'exercice
d'un leadership aussi vigoureux en matière de gestion des ressources
humaines qu'en matière de gestion des ressources financières.
C'est la question piège dont je faisais état, et s'il fallait
répondre par l'affirmative, on nierait alors le rôle
qu'envisageait la loi à l'égard des ministères, de
l'Office des ressources humaines, de la Commission de la fonction publique.
Donc, le Conseil du trésor s'est doté de structures respectueuses
des responsabilités dévolues aux ministères, et par
ailleurs susceptibles de bien lui permettre de remplir le rôle de
leadership qui est le sien en matière de relations du travail, et dans
celles décrites aux articles 77 et suivants de la loi.
Je dirais que même dans le domaine des relations du travail, le
Conseil du trésor a suivi la voie tracée par la loi, en
décentralisant vers les ministères la négociation des
conditions de travail des clientèles dites exclusives,
c'est-à-dire ces clientèles, ces corps d'emploi qu'on ne retrouve
que dans un seul ministère: agents de conservation de la faune au MLCP,
agents de la paix en milieu de détention au ministère de la
Sécurité publique, etc. Ces ministères, et non le
Secrétariat du Conseil du trésor, négocient les conditions
de travail de ces employés. Nous avons même ajouté la
possibilité d'aménagements locaux du temps de travail et des
conditions de travail, pour répondre plus précisément et
adéquatement aux besoins de prestations de services des
différents ministères, ou même de différentes
régions de différents ministères.
Depuis quelques années, la gestion des ressources se fait de pius
en plus rigoureusement. L'augmentation structurelle des coûts des
programmes et le souci gouvernemental de maintenir une fiscalité
concurrentielle font en sorte qu'une revue exhaustive des programmes est
actuellement en cours, comme j'ai pu le mentionner récemment. La
fonction publique doit non seulement s'adapter, mais, évidemment,
s'associer à ce processus, là aussi selon les
caractéristiques des ressources humaines des différents
ministères.
Dans l'exercice de son leadership, le Secrétariat du Conseil du
trésor travaille en étroite collaboration avec l'Office des
ressources humaines clans le domaine de la gestion des ressources humaines et
de la mise en oeuvre des politiques et programmes. Cette collaboration est
complétée par une coordination de plus en plus poussée
avec l'ensemble des ministères, depuis que le Secrétaire
général du gouvernement a créé deux comités
de sous-ministres qui se penchent sur les questions de gestion, d'une part, et
de développement, d'autre part, des ressources humaines.
Depuis 1987, les politiques, programmes et directives adoptés par
le Conseil du trésor ont été l'objet d'une consultation
poussée auprès de l'un ou l'autre de ces comités,
notamment en ce qui a trait aux programmes d'accès à
l'égalité, au contrôle des effectifs, à la
reconnaissance de l'excellence, à la gestion des cadres
supérieurs, à la gestion des cadrés intermédiaires,
au développement du personnel d'encadrement, etc. L'approche
générale empruntée par le Secrétariat du Conseil et
l'ORH dans la mise en oeuvre de la loi est également en harmonie avec
l'objectif de décentralisation de la gestion auprès des
ministères et organismes. Cette décentralisation touche à
presque tous les domaines importants de la gestion, c'est-à-dire
l'organisation administrative, l'évaluation des emplois, l'embauche, la
dotation, le développement des ressources humaines, l'évaluation
de rendement, l'aide aux employés, la reconnaissance de l'excellence et
le recrutement du personnel occasionnel. Là aussi, cette approche et ce
choix correspondent à la philosophie du gouvernement actuel, et doivent
donc s'intensifier.
En matière de système de planification des ressources
humaines, il faut souligner que la loi ne prévoit aucun rôle
à cet égard de la part du Conseil du trésor, mais il y a
lieu de mentionner que le Secrétariat du Conseil effectue des travaux
liés à la planification des ressources humaines dans des
contextes particuliers. Ainsi, la conception et la mise à jour des
régimes d'emplois et des diverses études de classification qui
conduisent à la création, à l'abolition et à la
modification de l'un ou l'autre des corps, classes ou catégories
d'emploi impliquent un examen systématique du type de ressources
requises pour assumer une fonction essentielle à l'actualisation des
mandats ministériels. De plus, l'élaboration
de programmés d'accès à l'égalité et
la détermination d'objectifs quantitatifs et qualitatifs qu'ils doivent
comprendre sont des outils de planification de main-d'oeuvre. En effet,
l'analyse de la composition de l'effectif tant à l'intérieur de
la fonction publique qu'à l'extérieur de celle-ci est un
préalable à l'identification d'objectifs pertinents et
réalistes pour de tels programmes d'accès à
l'égalité.
Enfin, l'évolution du profil de l'effectif est l'objet d'une
attention continue, ce qui permet au Conseil de prendre dès
décisions éclairées en matière de gestion de
ressources humaines. Ainsi, l'article 78 de la loi prévoit que le
Conseil doit établir les effectifs maxima pour chaque ministère
et organisme, ce qui se fait annuellement dans le cadre de la revue des
programmes. Pour l'année 1990-1991, ces maxima ont été
établis en équivalents temps complet à la fois pour les
effectifs réguliers et occasionnels, de façon à fixer une
enveloppe globale fermée qui facilite une gestion intégrée
de l'effectif. Au cours des dernières années, l'approche globale
à la planification de l'effectif gouvernemental a visé à
stabiliser son niveau en procédant à des compressions
générales et en faisant ensuite, si nécessaire, certaines
réallocations pour tenir compte dés besoins prioritaires. Cette
approche a permis un contrôle et une rationalisation de l'effectif des
ministères et organismes.
La décentralisation est maintenant une réalité. En
contrepartie, l'implantation de la loi a demandé que les fonctionnaires
investis de pouvoirs de gestion décentralisés soient
appelés à en rendre compte et que le Conseil du trésor
voie à la vérification de l'application de ses politiques et de
ses programmes. Pour être complété, le processus de
décentralisation doit s'effectuer non pas seulement des organismes
centraux vers les ministères, mais à l'intérieur des
ministères vers les unités administratives
opérationnelles. (11 h 15)
Le suivi des politiques, qui s'est par la suite traduit par le bilan de
la gestion des ressources, a été implanté dès la
première année de mise en oeuvre de la loi. Même si un
bilan de la gestion des ressourcés s'est fait chaque année
depuis, ce processus de suivi et d'évaluation doit subir des adaptations
pour en arriver à remplir pleinement son rôle. D'une part, il a
fallu laisser le temps aux ministères et organismes de s'approprier les
nouvelles orientations de la loi. D'autre part, il a fallu que les intervenants
centraux en arrivent à identifier les objets spécifiques du suivi
pour que toutes les facettes de la gestion fassent l'objet d'une
évaluation soit annuelle et récurrente, soit ponctuelle.
Je ne saurais trop insister sur l'importance que revêt le bilan de
gestion des ressources comme outil de planification et de contrôle en
matière de gestion de personnel. Il est essentiel, à mon sens, de
pouvoir disposer de données quantitatives et qualitatives
précises et fiables pour mesurer le degré d'atteinte des
objectifs. À cette fin, les ministères doivent accorder une
attention encore plus grande à la réalisation de leur bilan de
gestion des ressources humaines au cours des années à venir, de
manière qu'il devienne un outil de rétroaction de plus en plus
adapté à nos besoins.
Par ailleurs, aussi efficace qu'il puisse devenir, le bilan de gestion
demeure un exercice annuel, il ne suffit donc pas, par définition,
à assurer la rapidité de réaction et d'adaptation qui doit
caractériser une administration moderne. À l'heure actuelle, il
s'écoute souvent une longue période entre le constat et la
réponse administrative, qui prend la forme de directives et de
programmes. Par exemple, l'élaboration et la mise en place du programme
d'accès à l'égalité pour les membres des'
communautés culturelles, dont j'ai annoncé l'entrée en
vigueur en mars dernier, a nécessité passablement de recherche,
dont une bonne partie a été employée à tracer un
profil précis de notre main-d'oeuvre pour établir tes cibles
à atteindre et les mesures à prendre pour y arriver. Pour
remédier à cette situation, nous devrons, dans les années
à venir, disposer de données ponctuelles que nous pourrons
rapidement extraire d'un système d'information et de gestion à la
hauteur des défis implicites à la poursuite du processus de
décentralisation qui caractérisera en partie ta fonction publique
des années 2000.
À cette fin, une refonte en profondeur du système SAGIP a
été entreprise, système automatisé de gestion des
informations sur le personnel. Il faut se rappeler qu'au départ, SAGIP
se voulait uniquement un système de gestion centralisé de la paie
de nos employés. Au cours de la dernière décennie, nous en
avons tiré des informations fort utiles à l'élaboration de
nos politiques en matière de gestion des ressources humaines. Force nous
est cependant de constater que nos besoins et nos exigences dépassent
aujourd'hui largement ce que SAGIP peut nous fournir. La refonte entreprise
devra donc être accélérée au cours des prochains
mois. En collaboration avec le Secrétariat du Conseil et l'Office des
ressources humaines, les ministères et organismes seront mis à
contribution afin de s'assurer que te système d'information et de
gestion réponde adéquatement à leurs attentes et
besoins.
Sans procéder à un bilan exhaustif et une
énumération complète des politiques et programmes qui
témoignent du rôle confié au Conseil du trésor par
la Loi sur la fonction publique, je tiens à vous faire part de quelques
exemples de la façon dont j'ai choisi d'exercer ce rôle depuis
deux ans. J'estime essentiel que les membres de la fonction publique
développent et conservent un sentiment d'appartenance à
l'organisation, qu'ils sachent qu'en intégrant la fonction publique, ils
ont un régime de carrière qui leur
permettra d'évoluer et de développer diverses expertises,
qu'ils aient toujours en tête également ce souci de la
qualité totale des services, à la clientèle qu'ils seront
appelés à. élaborer ou à rendre.
Ainsi, premièrement, quant au programme de reconnaissance de
l'excellence, celui-ci illustre l'implication des divers intervenants en
gestion des ressources humaines, tel que le veut la Loi sur la fonction
publique. Sa mise en oeuvre se fait de façon
décentralisée, sous l'initiative des ministères et
organismes, et le Conseil se réserve la responsabilité d'adopter
le programme, d'en évaluer le fonctionnement et de le modifier
ultérieurement, si nécessaire.
Afin que nos gens, dans tous les ministères, se sentent
personnellement responsables de l'atteinte des cibles fixées, nous
devons encourager les initiatives et l'excellence, les souligner et les
récompenser. Le programme de reconnaissance de l'excellence vise
à souligner des réalisations remarquables et des comportements
exemplaires de la part de nos employés. J'estime essentiel d'encourager
l'initiative chez nos employés, pour maintenir le niveau de motivation
requis pour une qualité des services publics.
Deuxièmement, la conversion des postes occasionnels L'analyse de
l'évolution de l'effectif de la fonction publique montre, depuis 1980,
deux phénomènes distincts. D'une part, le personnel
régulier en poste est passé d'un niveau de 57 954 en 1980
à celui de 52 835 au 31 mars 1990, soit une diminution de 5119 postes,
dont 1719 correspondent à des transferts dans des organismes et 3400
correspondent à une diminution réelle du nombre
d'employés. D'autre part, l'effectif occasionnel a été en
progression constante, passant de 10 931 à 15 455 pendant la même
période, soit 4524 employés équivalents temps complet de
plus. L'effectif total est donc demeuré à peu près stable,
la diminution des employés permanents étant compensée par
l'augmentation des occasionnels. Je pense qu'il est important de discuter de ce
jeu de compensation.
À l'instar de toutes les grandes organisations, la fonction
publique a besoin d'une main-d'oeuvre d'appoint qui doit rencontrer les
surcroîts temporaires de travail, les périodes de pointe. Par
exemple, c'est le cas pour le ministère du Revenu, celui des Transports
et celui de l'Énergie et des Ressources. La fonction publique a
également besoin de main-d'oeuvre pour remplacer des employés
permanents qui s'absentent ou pour permettre la mise en oeuvre de certains
projets spéciaux à durée limitée.
Depuis 1980, les besoins de main-d'oeuvre d'appoint ont augmenté
en raison de nouveaux programmes, tel le reboisement, et en raison de la plus
grande flexibilité offerte à notre personnel régulier de
se prévaloir de congés sans solde. Ces raisons n'expliquent
toutefois pas toute la progression de l'effectif occasionnel. L'analysé
des bilans de gestion a confirmé le phénomène de postes de
nature permanente comblés par des employés occasionnels.
Devant cette situation, j'ai pris la décision de convertir les
postes occasionnels de nature permanente en postes réguliers.
L'opération est en cours, et les dernières estimations laissent
entrevoir qu'environ 3500 postes seraient ainsi convertis. De plus, pour que la
situation ne se répète pas, le Conseil du trésor a
resserré les règles qui s'appliquent à la gestion du
personnel occasionnel. J'estime que les mesures permettront de réserver
le recours au personnel occasionnel à des situations temporaires ou
encore à des situations se caractérisant par un travail pendant
une partie de l'année seulement, ce qui ne justifie pas l'utilisation de
personnel permanent. S'il s'avère que ces mesures ne suffisent pas, il
est dans mon intention d'intervenir de nouveau par des mesures additionnelles,
si cela est requis. J'entends tout mettre en oeuvre afin que l'utilisation de
personnel occasionnel pour réaliser des activités permanentes
cesse définitivement et que ce problème soit enfin
réglé.
Troisièmement, la réorganisation de la structure
d'encadrement intermédiaire. Guidés par ces mêmes objectifs
que j'énonçais, une autre de nos actions a consisté
à repenser et à simplifier la structure d'encadrement
intermédiaire afin d'éliminer le plus possible les
ambiguïtés et de permettre une plus grande mobilité de ce
type de personnel. Cette action nous est apparue fondamentale afin de s'assurer
que les messages émanant du haut de la structure soient bien
diffusés et compris par les personnes auxquelles ils sont
destinés.
À cette fin, nous avons donc entrepris, en 1988, de regrouper en
une seule classe à 10 niveaux quelque 3000 fonctionnaires qui
occupaient, à des degrés différents, des fonctions de
gérance et de supervision de personnel. Cette tâche s'est
avérée très ardue, puisque, auparavant, ces personnes
étaient dispersées dans une centaine de classes d'emploi
différentes, qui variaient de l'agent de maîtrise à
l'attaché d'administration. Cette opération a permis
principalement de clarifier le rôle de ces fonctionnaires en tant que
représentants de l'employeur et d'accroître la mobilité et
la polyvalence de ces fonctionnaires afin de maximiser non seulement leur
utilisation, mais également leur motivation et leurs opportunités
de cheminer dans l'organisation.
Par ces trois exemples, dont les deux derniers sont, M. le
Président, d'envergure majeure, j'ai voulu montrer ma
détermination et celle du gouvernement de développer et de
maintenir un sentiment d'appartenance, une motivation qui seuls peuvent faire
en sorte que nos employés se préoccupent de la qualité
totale de leur travail et des services qu'ils sont appelés à
offrir.
Dans le même ordre d'idée, il m'apparaît essentiel de
chercher à connaître la perception individuelle que les
fonctionnaires peuvent avoir de leur situation. Certains indices portent
à croire qu'ils sont relativement satisfaits. Ainsi, selon un sondage
effectué par l'ORH, les cadres considèrent que le dernier emploi
obtenu a été généralement favorable à leur
cheminement de carrière. Le degré de mobilité se compare
à ce qui existe dans d'autres administrations et la durée moyenne
d'occupation dans l'emploi montre une bonne disponibilité au
changement.
Un sondage fait avec le Syndicat des professionnelles et des
professionnels a également été effectué
auprès de ce personnel et il se dégage un degré de
satisfaction élevé sur l'ensemble des conditions reliées
à leur organisation du travail et leurs conditions de travail, dont
l'encadrement et la supervision dont ils sont l'objet. Les relations entre le
personnel cadre et le personnel professionnel semblent donc bonnes. Ces
résulats nous laissent croire que les orientations du système de
gestion vont dans le bon sens.
Je dirais en conclusion, M. le Président, ce qui suit. La
commission a choisi de faire de la qualité et de l'efficacité des
services aux citoyens l'un des thèmes principaux de la consultation
qu'elle entreprend aujourd'hui. J'ai déjà abordé ce sujet,
mais je tiens à y revenir, puisque, au fond, il s'agit là de la
raison d'existence de la fonction publique: rendre des services publics poUr
l'amélioration du bien-être de la collectivité. Les
politiciens établissent des choix, des priorités; la fonction
publique les met en oeuvre, se charge des opérations. Le gouvernement
actuel s'impose volontairement des balises qui tiennent compte de la
capacité de payer des contribuables. Les ressources ne sont pas
illimitées. Il serait irresponsable d'offrir des services que nous
n'avons pas les moyens de payer et d'en faire assumer le coût par les
prochaines générations.
S'il est primordial de répéter ce message afin de
responsabiliser les citoyens dans leur utilisation des services publics, il
l'est tout autant de s'assurer que ~ les employés de l'État aient
constamment le souci d'offrir des services d'une qualité correspondant
au prix payé qui, je le répète, n'est pas
insignifiant.
En tant que ministre responsable de l'administration et de la fonction
publique, je trouve important de bien établir le lien qui existe entre
la qualité des services et les politiques de gestion du personnel.
L'administration publique est amenée chaque année à poser
des millions de gestes qui se traduisent en autant de services à
différentes clientèles. Il n'existe pas d'indicateurs qui
permettent de vérifier l'évolution de la qualité de ces
services, mais au moins, comme d'autres sociétés modernes, le
Québec s'est doté, par exemple, d'un Protecteur du citoyen pour
corriger les cas d'abus possibles. Plusieurs facteurs interviennent dans la
détermination de la qualité. Outre les ressources humaines, la
qualité de la prestation dépend de là nature du service
lui-même, de la localisation du point de service, de l'équipement
disponible, des systèmes de traitement de l'information et de toutes
autres ressources matérielles et financières qui peuvent
être nécessaires.
Tout comme les services dans le secteur privé, les services
publics connaissent, surtout depuis 10 ans, une révolution technologique
suite à l'utilisation de plus en plus poussée de l'informatique.
Le gouvernement investit actuellement beaucoup dans la rénovation ou le
développement des systèmes de traitement de données. Ces
investissements sont faits en questionnant toujours les coûts et les
bénéfices qui en découlent, et les ministères et
organismes qui ont été les plus actifs dans le domaine pourraient
témoigner des améliorations qui en résultent pour les
services aux citoyens.
En terminant, je tiens à insister sur le fait que les politiques
de personnel ne sont donc qu'un des éléments affectant
l'évolution de la qualité des services, mais que c'est la
motivation et la performance des hommes et des femmes qui forment la fonction
publique qui, en définitive, demeurent do loin le facteur le plus
important. En permettant une gestion décentralisée du personnel,
je suis convaincu que la Loi sur la fonction publique a eu un impact
très favorable sur la qualité des services, puisque chaque
ministère et organisme peut adapter la gestion de son personnel au
contexte et aux particularités de son environnement. Je crois donc
qu'une attention accrue devra y être apportée au cours des
prochaines années.
Ainsi, nos concitoyens font constamment appel aux services publics, et
ce, des milliers de fois par jour. Qu'on pense au nombre de contribuables, de
détenteurs de permis de toutes sortes, de prestataires d'allocations de
tous genres, et on constate que les clientèles cumulatives de l'ensemble
des ministères se dénombrent par dizaines de millions. On
constate ainsi l'ampleur et l'envergure et la variété des
interventions que l'on demande d'effectuer à quelques dizaines de
milliers de fonctionnaires. Le système de responsabilisation qui a
été suggéré par la loi et mis sur pied par
différents organismes sectoriels et centraux assure une qualité
de services remarquable, dans des circonstances où l'exigence accrue de
clientèles de mieux en mieux informées le dispute à la
complexité des demandes qu'elles formulent. (11 h 30)
Je veux donc adresser un hommage et des félicitations bien
senties à tous ces serviteurs de l'État, car ils sont les acteurs
de première ligne, en contact quotidien avec nos concitoyens. Leur
tâche est d'autant plus difficile qu'on leur demande aussi d'exercer une
responsabilité financière accrue, car les quelques
dernières
années ont été caractérisées par la
pénurie de ressources et, donc, la rationalisation des activités,
et non par le développement; carac-térisées par la
réallocation dos ressources, et non par l'ajout de nouvelles
activités à colles existantes. Il faut de la compétence
pour bien gérer des ressources plus rares. Il faut de la loyauté
pour contribuer et collaborer à l'atteinte de l'objectif fiscal du
gouvernement. Il faut du doigté pour transiger avec des
clientèles qui ont accès à un éventail très
large de recours et d'appels de toutes natures. La fonction publique du
Québec a su relever ces nombreux défis, et nous devons tous, M.
le Président, lui en être reconnaissants.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
président du Conseil du trésor. Je vais passer la parole à
M. le député de Mille-Îles.
Discussion générale
M. Bélisle: Merci, M. le Président. M. le
Président, à l'encontre du député de La Prairie -
et ce que je vais dire sera très court - je me sens rassuré comme
parlementaire de voir devant nous, ici, ce matin, le président du
Conseil du trésor, pour la bonne et unique raison qu'on aurait pu dire,
s'il n'avait pas été ici à la première
journée de nos délibérations. Bien, il n'est pas
là. Se cache-t-il? Qu'a-t-il à cacher? Pourquoi ne participe-t-il
pas? N'est-il pas à l'écoute? Alors qu'il s'agit, M. le
Président, bien entendu, je pense, d'une responsabilité
très importante en tant que ministre responsable de la fonction
publique.
J'ose espérer, M. le Président - et je vais arrêter
mes premières remarques là-dessus - que le débat que nous
allons mener cette semaine, l'analyse que nous allons faire, nous allons la
faire sans partisanerie, comme la commission du budget et de l'administration a
fait une autre analyse sur un mandat d'initiative concernant la Commission des
valeurs mobilières du Québec en 1987, qui a employé, M. le
Président - vous me corrigerez si je me trompe - tout près d'une
année de travail. Le but, ce n'était pas de chercher des
coupables, de faire la chasse aux sorcières, mais d'essayer de savoir
auprès de gens qui étaient impliqués quels étaient
leurs attentes, leurs besoins. Aujourd'hui, il ne s'agit pas seulement de
permettre - et je vais y venir tantôt - à ces gens-là de
parader devant nous avec des revendications qui, quelquefois, sont
exclusivement, à ma lecture de certains mémoires, corporatistes
et institutionnelles, sans se soucier du monde qu'on sert en dessous et sans
même se soucier des gens qui font partie des corporations qui sont
impliquées.
Je l'avoue, c'est nouveau. Oui, c'est vrai. Peut-être que le
système est train de changer, au Québec. Oui c'est vrai.
Peut-être que c'est une bonne chose, mais il en dépend seulement
de chacun d'entre nous. Quand je vois le président du Conseil du
trésor venir devant nous ce matin, ce n'est certainement pas un signe de
quelqu'un qui ne veut pas participer à cette évolution
là.
Cela dit, M. le Président, l'objectif de notre commission, c'est
quoi? C'est d'améliorer le comportement d'êtres humains face
à d'autres êtres humains. Les gens qui servent sont au service
d'autres qui sont les citoyens. Ces citoyens-là, en même temps, ce
sont des gens qui paient, ce sont les payeurs» tout comme celui qui est
dans la fonction publique, quand il va acheter un pain à
l'épicerie, il paie à son tour pour un bien. Le citoyen du
Québec, lui, paie une fois par année, dans ses impôts, et
il ne peut pas tellement se permettre de choisir, ailleurs parce qu'il y a un
monopole d'État qui est assure par les services publics.
La grande question, elle est toute simple: La fonction publique est-elle
administrable, oui ou non? Comment? Par quels moyens peut-on améliorer
l'administration de cette fonction publique?
Ça va aussi loin que... Je lis dans certains mémoires que
la permanence est la solution à tous les maux. La permanence, c'est
l'éternité assurée, c'est la garantie de l'efficience, M.
le Président. C'est ce que j'ai lu dans les documents du Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec. C'est ce que j'ai lu. Je ne suis
pas si convaincu que ça que l'éternité assure
l'efficience. Est-ce que c'est un frein au rendement, la permanence? Est-ce que
c'est aussi un frein à l'imputabilité? J'ai eu beau regarder dans
des documents, j'ai été estomaqué et renversé de
voir les attitudes des gens qui vont venir devant nous. Je ne peux pas
m'empêcher de souligner, M. le Président, que, dans le
mémoire du Syndicat des professionnelles et professionnels du
gouvernement du Québec, ils revendiquent - je vais vous le citer
là - "que le principe de l'imputabilité des fonctionnaires soit
accepté dans la mesure où toutes les conditions de travail sont
négociables". On veut négocier la reddition des comptes et
l'imputabilité. On pose ça comme une condition de
négociation. Assurément, on n'a pas compris le système, on
comprend mal. On ne comprend absolument pas ce qui se passe. Moi, comme
parlementaire, et même, pas seulement comme parlementaire, mais comme
citoyen et payeur d'impôts, si on en est rendu à ce moment,
aujourd'hui, à négocier l'imputabilité comme condition de
travail, selon moi, on n'a rien à foutre dans la fonction publique. S'il
y a un principe de base, c'est qu'on doit rendre des comptes. Peut-être
qu'on doit se poser cette question: à qui doit-on les rendre les
comptes? Le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec disait
également dans son mémoire que les sous-ministres devaient rendre
dès comptes. Bien oui! On va se poser la question, au cours des
prochains jours. Le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec
n'a pas répondu à
cette queâtion-là, mais moi, je vais leur poser cette
question-là. À qui les sous-ministres devraient-Ils rendre des
comptes? À qui les cadres supérieurs devraient-ils rendre des
comptes? Je ne le sais pas, mais on dit quelque part dans le document: Oui, ils
devraient faire la démonstration que leur personnel est utilisé
de façon optimale, en déposant notamment les bilans, les projets
de dotation, de développement des ressources humaines. C'est très
bien, ça, mais ça ne règle pas le fond de la question.
À qui va-t-on rendre des comptes?
Quand je continue, le maître d'oeuvre... Le président du
Conseil du trésor nous le disait tantôt, il n'y a pas un seul
maître d'oeuvre. Dans la loi qui a été adoptée avant
1985, il n'y en avait pas de maître d'oeuvre unique. On se posait la
question: Est-ce qu'il devrait y avoir un maître d'oeuvre unique, oui ou
non?
Les sanctions, les rendements, les primes au rendement... Est-ce que
notre fonction publique au Québec, M. le Président, est
vouée à l'excellence, quand on sait, d'après les
études qu'on a faites, par les gens qui nous ont assistés
à la commission, que des cotes d'excellence, ce n'est jamais
donné quand les gens sont évalués? Alors, pourquoi mettre
de l'avant un faux système d'excellence? Pourquoi ne pas donner de a,
donner des b et des c? Est-ce que c'est être excellents que de donner des
primes de rendement par rotation annuelle entre les fonctionnaires? Poser la
question, c'est y répondre. Ce n'est pas un système d'excellence,
c'est un système de nivellement vers la base. Comment encourager des
gens qui veulent faire des choses à l'intérieur de la fonction
publique en fonction de ça? Les sanctions? Il y en a dans l'entreprise
privée. On ne peut pas dire que c'est inefficient, parce qu'il y en a.
Ça en prend, des sanctions. Ça en prend, des notes. Ça
prend des notes au dossier, ça prend du suivi de dossier. 40 % des
professionnels interrogés nous disent qu'annuellement, ils n'ont pas
d'attentes fixées par leur supérieur. Aïe! c'est grave 12
000 au gouvernement. Il n'y a pas de révision en cours de mandat par les
supérieurs. Il me semble que, chaque deux semaines, tu
réévalues où tu en es rendu dans l'accomplissement d'un
mandat, ou peut-être chaque mois. On se parle. Pourquoi ne se parle-t-on
pas? Pourquoi ne réévalue-t-on pas les mandats en cours de route?
Et on va nous dire qu'on va tout régler ça l'efficience, et qu'on
va négocier l'Imputabilité aux tables de négociation?
Jamais! Jamais, ce n'est pas vrai. Moi, je dis, M. le Président, qu'il
va falloir, tous ensemble, faire nos devoirs ensemble. Il va falloir se poser
des questions fondamentales, gratter beaucoup plus qu'en dessous de
l'écorce, aller au coeur et répondre à des questions de
fond. C'est seulement à cette condition-là que, d'Ici quelques
mois, on pourra, de toutes nos délibérations, de la part de tous
et de chacun... Et là, il n'y a pas de parti, là-dedans. Ce n'est
pas le Parti libéral du Québec qui est au poteau, ce n'est pas le
président du Conseil du trésor, ça n'a rien à voir
avec ça C'est l'avenir du Québec qui, chaque jour, se joue dans
des décisions de gens qui n'ont pas d'attente, qui n'ont pas de
révision d'attente, qui sont malheureux, et des gens aussi dont les
corporations qui les représentent nous disent: Messieurs, nous,
l'imputabilité, nous allons négocier ça...
J'ose espérer, M. le Président, que ces courtes remarques
- parce qu'il y en a, du jus; lisez-les, les rapports, lisez les
mémoires - vont bien cadrer l'approche dans laquelle nous nous situons,
les collègues de ma formation et moi. Sans parti pris, on veut tout
mettre sur la table et on veut regarder ça attentivement, correctement,
dans le but que tout le monde obtienne des retombées de ce travail de
groupe. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Mille-Îles. M. le député de
Labelle.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais souligner
aujourd'hui la présence de nombreux participants à cette
commission ici et les remercier d'être venus et d'y avoir
participé. Je voudrais aussi souligner le large écho qu'ont
déjà les travaux de notre commission dans la presse,
actuellement, notamment en fin de semaine, surtout dans les derniers jours
donc. Je pense que c'est de nature à faire avancer le débat et,
en tout cas, à éclairer nos concitoyens sur ce qu'est la fonction
publique au Québec.
C'est sûr que cette commission publique est
particulièrement importante. La fonction publique est imposante en
nombre au gouvernement ici, mais il ne faudrait pas oublier la fonction
publique des réseaux des affaires sociales et de l'éducation, ces
gens qui, même s'ils ne font pas directement partie de la fonction
publique, s'alignent quand même en termes de mode de travail, entendu de
façon large, et sur les conditions de travail de la fonction publique.
Donc, nous parlons aujourd'hui, vraisemblablement, d'un grand nombre de
fonctionnaires non seulement de la fonction publique comme telle, je pense,
mais aussi de celle de tous les réseaux, et je pense qu'il convient de
le souligner.
Je voudrais remercier la fonction publique québécoise de
ce qu'elle a fait pour le Québec depuis 50 ans. Je pense qu'il faut le
dire, la fonction publique du Québec a accompagné la
société québécoise dans son affirmation. Un
journaliste en particulier soulignait que la première loi concernant le
service civil avait été adoptée en 1943; donc, nous sommes
pratiquement 50 ans après. La fonction publique a contribué au
développement du Québec, et je pense que nous devons la remercier
largement pour ce fait. 1943, c'est l'origine, pourrait-on dire. Il y avait des
fonctionnaires avant, mais disons que ça a été la
première loi qui a donné corps à la fonction
publique. Je dirais qu'elle a connu une explosion, comme le
Québec lui-même, au début des années soixante et
que, depuis, elle s'est enrichie, mais qu'elle nous a enrichis. Je pense qu'il
faut dire que le Québec moderne a été fait en grande
partie avec la fonction publique. J'y reviendrai tout à l'heure.
Je voudrais, M. le Président, simplement souligner que nous
n'avons pas apprécié la manière dont le président
du Conseil du trésor s'est comporté pour venir à cette
commission. Nous n'avons jamais refusé que le président du
Conseil du trésor vienne à cette commission. Au contraire, nous
l'avons accepté. Mais j'ai l'impression que, parlant aujourd'hui en
1990, on peut dire qu'il n'a pas évité ce qu'avait décrit
George Orwell dans "1984", lorsqu'il a décrit les comportements de Big
Brother. Vous avez vu les lettres Nous avons vécu, lu semaine
dernière, en particulier, une session de travail où nous avons
été infiltrés par un membre de son cabinet. Nous avons
dû reprendre la chose. Ça a été souligné par
la presse elle-même. Et je pense que nous n'avions pas été
habitués à tant de sollicitude de la part du président du
Conseil du trésor, qui s'est décrit, tout à l'heure, comme
étant un collaborateur. (11 h 45)
J'ai, participé, au mois de décembre dernier, à une
interrogation à l'Assemblée nationale de la part du chef de
l'Opposition officielle au président du Conseil du trésor,
où il nous a bien dit que, finalement, les affaires des finances et du
Conseil du trésor, les décrets ou les décisions internes
ne regardaient pas l'Opposition. Je pense qu'aujourd'hui, avant de se
décrire comme collaborateur, il devrait avoir un peu plus de
modestie.
Je voudrais aussi répondre au député de
Mille-Îles, qui a pris à partie mon collègue de La Prairie.
Ces faits n'ont pas été soulignés seulement par le
député de La Prairie, ils ont été soulignés
par le député de Vanier et président de la commission, en
partant, tout à l'heure.
Alors, je pense qu'au-delà de la lettre... Parce qu'il a bien
analysé le "doit", la commission "doit entendre" Nous étions
d'accord pour "doit entendre". Mais, ce matin, nous avons entendu un
mémoire. Je pense que, quand il a exigé trois heures ici à
la commission, alors que tous les autres intervenants avaient droit à
une heure, il a exagéré. Il s'est imposé. La commission a
suspendu pour consulter, pour prendre une décision finale et faire une
proposition ici. Vous pourrez relire les débats de la semaine
dernière là-dessus.
Je pense que ça n'était pas enregistré.
C'était une commission de travail, M. le Président, une
séance de travail. Alors, je trouve qu'on y est allé très
fort, il y est allé très fort de sa sollicitude. Je pense qu'il
devrait être aussi transparent tout le temps. Quant à
déposer un mémoire, une longue déclaration qu'on pourrait
presque assimiler à une déclaration ministérielle, ce
matin, il aurait pu, ce mémoire, être déposé avant,
comme l'ont fait tous les autres participants, parce qu'on aurait pu, comme
l'opposition officielle, réagir en toute connaissance de cause. Le
président du Conseil du trésor nous a lancé beaucoup de
chiffres, a fait beaucoup d'affirmations. On ne peut pas disconvenir
d'emblée comme cela. Il a fait pratiquement une déclaration
ministérielle, ce matin, sur les occasionnels. Nous étions rendus
dans le bois. Très bien. Je pense que, là-dedans, il y avait
beaucoup de lieux communs qui cachaient des réalités plus
discutables, tout simplement, et je pense que nous devrions, sur ce plan, bien
prendre acte que notre commission n'est pas la commission du président
du Conseil du trésor. Elle est la commission du budget et de
l'administration de l'Assemblée nationale.
Alors, je rappelais tout à l'heure, M. le Président, le
rôle de la Fonction publique, rôle qu'elle a tenu durant 50 ans. Je
pense aussi qu'à ce stade-ci, je voudrais apporter un
élément dans le débat. C'est qu'au fond, lorsque nous
discutons du rôle de la fonction publique, on est amenés aussi
à concevoir, à émettre ou à faire un bilan du
rôle de l'État au Québec, tout comme nous devons examiner
les perspectives de cet État dans l'avenir, parce que, autrement, il me
semble que, si on n'élargit pas suffisamment, on n'explore pas ces
perspectives. Nous pourrions alors être amenés à faire des
recommandations, en fin de commission, qui ne soient pas conformes à ce
que nous voudrions.
Le rôle de l'État québécois et de sa fonction
publique qui, finalement, le représente dans le vécu
général quotidien, ça a été d'affirmer la
société québécoise, qui s'est effectivement
construite depuis plusieurs années. Puis on a vécu, quant
à nous, pour ceux qui sont ici, surtout depuis les années
soixante... Le Québec avait besoin pour se développer, d'un
État solide, fort, bien constitué, appuyé
évidemment par sa fonction publique, pour se développer. Et c'est
ce que nous avons vécu, depuis les années soixante, avec de hauts
fonctionnaires très compétents jusqu'aux fonctionnaires les plus
modestes, qui ont eu cette vision dont parlait le député de
Mille-Îles, tout à l'heure. C'est comme ça qu'elle a
été motivée à faire des choses. À mon sens,
là fonction publique québécoise a été aussi
efficace, aussi fidè/e qu'ailleurs, je n'en disconviens absolument pas.
Elle a très bien compris les perspectives qui avaient été
données, et je pense que le Québec, dans le contexte où
nous sommes, au Canada, en Amérique du Nord, avait besoin que cet
État soit solide.
Je pense aussi, en ce qui concerne les perspectives, qu'il y a des
questions fondamentales que nous devrons soulever au cours de cette commission.
Aujourd'hui, la commission constitutionnelle, qui est une commission
spé-
ciale, entreprend ses travaux sur l'avenir du Québec, et il
semble qu'on ne peut pas dissocier l'une de l'autre, actuellement, parce qu'au
fond, il y a effectivement cette décentralisation qui est dans l'air,
dont a parlé le président du Conseil du trésor, mais il y
a aussi en parallèle, en même temps, la question de fond de
l'existence du Québec comme pays souverain, qui met donc en cause un
afflux...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le
député de Labelle.
M. Léonard: ...qui met éventuellement en cause - et
je pense que c'est une éventualité très probable - la
fusion de la fonction publique fédérale avec celle du
Québec, ce qui signifie le doublement de la fonction publique
québécoise d'ici quelque temps. Je pense que, ça, c'est un
élément très important qui devra être ramené
devant les membres de cette commission durant les travaux de la commission.
Merci, j'y reviendrai.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Labelle. J'aimerais faire état que cet
échange de 10 minutes peut faire l'objet de commentaires et peut aussi
faire l'objet de questions au président du Conseil du trésor. M.
le député de Saint-Louis. M. le président du Conseil du
trésor, vous me demandez la parole?
M. Johnson: Oui, M. le Président, j'allais vous demander -
je vous voyais prendre des notes copieuses - de me suggérer ou
peut-être de formuler, pour les membres de la commission non partisane,
si je comprends bien, malgré les interventions que je viens d'entendre.
Peut-être que vous-même avez dégagé des questions,
compte tenu des réflexions des députés de La Prairie, de
Labelle, de Mille-Îles.
M. Lazure: Moi, j'ai une question...
M. Johnson: Je ne veux pas les formuler moi-même, à
la lumière...
M. Lazure: ...de règlement, de procédure.
Le Président (M. Lemieux): Une question de
règlement, oui.
M. Johnson: Je ne veux pas les formuler moi-même,
là.
M. Lazure: M. le Président, moi, je trouve un peu
exagérée, encore une fois, l'attitude du président du
Conseil du trésor, qui est en train de vous dicter une ligne de
conduite, qui demande au président de la commission: Voulez-vous, M. le
Président, me poser des questions?
Le Président (M. Lemieux): M. le
député..
M. Lazure: Nous poserons les questions que nous jugerons utiles
de vous poser.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, je peux vous assurer que le président de cette commission
est suffisamment autonome pour ne pas avoir à prendre les directives du
président du Conseil du trésor.
M. Johnson: En effet.
Le Président (M. Lemieux): Je vous assure, M. le
député de La Prairie, que nous nous sommes unis vers un objectif
qui est celui de l'atteinte de l'excellence au niveau de cette commission et au
niveau de l'administration publique. Lorsque le président du Conseil du
trésor me demande la parole, je suis conscient qu'il n'y a pas - et je
peux vous assurer que je connais bien ma jurisprudence - de
précédent à ce niveau. Par contre, je suis aussi bien
conscient que le mandat que nous exerçons présentement, c'est un
mandat qui nous est donné par la loi, et que le président du
Conseil du trésor est un membre de l'Exécutif. A ce titre, il me
serait permis, dans la signification du mot "entendre" qu'il veut bien dire
vouloir entreprendre des échanges.. Il mapparaîtrait tout à
fait normal, à l'occasion, de permettre au président du Conseil
du trésor non pas de s'exprimer une demi-heure - ce serait contraire
à la logique et à l'équité - mais de s'exprimer
pendant une dizaine de minutes. Je pense que ça entre directement dans
la philosophie de la procédure parlementaire et du règlement. Sur
ce, M. le député de Saint-Louis, vous avez la parole.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Les propos que j'ai
entendus ce matin, et, entre autres, la déclaration d'ouverture du
député de La Prairie, m'ont fait bondir, par bouts. Je dois dire,
tout comme le député de Labelle, que je pense qu'il nous faut,
comme citoyenne et citoyen du Québec, bien comprendre le rôle que
la fonction publique a pu jouer, particulièrement dans
l'établissement de cette fonction publique moderne dans les
années post-soixante. Il n'en demeure pas moins que certaines
déclarations soi-disant sous le couvert pudique de la par-tisanerie,
dans la déclaration d'ouverture du député de La Prairie,
sont particulièrement intéressantes. Lorsqu'en page 7 on disait
"pour ce faire, il faut que le leadership ministériel exercé par
l'ensemble des 60 000 serviteurs de l'État soit animé de motifs
qui ne sont pas associés seulement aux équilibres financiers,
mais étroitement liés à la qualité et à
l'excellence de l'administration publique québécoise", je suis,
sans me forcer, obligé d'admettre qu'il y a là un peu
d'amnésie volontaire, ou peut-être que les propos récents,
nouveaux, amenés par nos collègues de l'Opposition sont le fruit
de remords, sept ou huit ans après le fait, de ce
qu'a fait l'équipe ministérielle, à
l'époque, de ce qu'était la fonction publique. Tous se
souviendront que la commission Bisaillon a déposé son rapport en
juin 1982. La vraie réponse du gouvernement d'alors,
particulièrement sage, à cette époque - lorsqu'on la
stipule ici un peu avec autosatisfaction - ç'a été quoi?
Ç'a été la crucifixion de façon unilatérale
du régime de retraite des employés de l'État, ç'a
été l'ablation de droits acquis de façon encore
unilatérale, ç'a été l'extorsion de 20 % du salaire
des employés de l'État en guise de remerciement. C'était
le quarantenaire de l'institution de la Commission de la fonction publique,
comme le député de Labelle nous l'a rappelé:
1943-1983.
Quatrièmement, je pourrais ajouter la campagne de
dénigrement qui a eu lieu, à l'époque, à
l'égard des fonctionnaires, à l'égard des enseignants,
à l'égard du personnel dans les hôpitaux et dans les
centres d'accueil. Je pense qu'il ne faut pas oublier non plus cette
étape-là. Elle n'était pas très jolie, j'en
conviens, mais il faut tenter d'éviter de faire des restrictions
mentales et tenter de se disculper a posteriori, surtout pour les membres de
l'ancien gouvernement.
Je dois admettre que la lecture de tous les mémoires, enfin,
certain mémoires, m'a fait tiquer à quelques reprises. On l'a
noté un peu avant moi: certains mémoires ont
démontré un corporatisme très décevant par rapport
aux intentions et aux volontés de cette commission, à ce qu'elle
avait demandé quant à son mandat. Certains organismes ont
préféré se retirer complètement et évacuer
le mandat de la commission pour nous entretenir plutôt de la
problématique des relations du travail, qui, dans certains cas, est soit
en voie de règlement, soit en voie de discussions ou de
négociations, au moment où on se parle.
Je pense qu'il faut savoir revenir sur la question: Quel est le
rôle du législateur dans ces années quatre-vingt-dix. C'est
un rôle qui s'est émancipé au cours des ans; c'est un
rôle qui, tout comme la fonction publique, a beaucoup
évolué. Il me semble que le rôle du législateur dans
les années quatre-vingt-dix est un rôle de contrôleur, d'une
part, de la qualité des objectifs politiques pris par l'Exécutif,
et ce, par le biais d'une commission parlementaire comme celle dans laquelle
nous travaillons actuellement. C'est aux membres de l'Exécutif, aux
membres du gouvernement, de venir eux-mêmes vis-à-vis des
commissions parlementaires, particulièrement à l'époque
des crédits d'ailleurs, expliquer quelles sont les orientations
politiques de leur ministère. Si ces orientations politiques sont
claires, on peut s'attendre que la clarification des moyens administratifs pris
pour que ces orientations politiques soient mises de l'avant, soient
effectives, et que, sur le plan administratif, les administrateurs
d'État et l'ensemble de l'administration de la fonction publique
pourront emboîter le pas et trouver des moyens des plus directs et des
plus efficaces pour faire en sorte que les orientations politiques puissent
véritablement servir la population.
Un des points importants - il y en aura deux - qu'aura à juger
cette commission parlementaire sera certainement toute la question de
l'imputabilité. D'abord l'imputabilité interne, celle de tous les
niveaux d'exécutants, tous les niveaux des fonctionnaires à
l'égard de leur supérieur immédiat dans la
hiérarchie de notre fonction publique. Aussi, il faudra en discuter et
avoir une ouverture vers ces discussions et être capables, nous, en tous
cas, législateurs, de pouvoir faire la part des choses et tirer des
conclusions. Ensuite, une imputabilité externe, c'est-à-dire une
imputabilité du rôle des administrateurs d'État
vis-à-vis des commissions parlementaires quant aux moyens administratifs
qui ont pu être pris pour faire en sorte que les objectifs politiques
soient bien rendus, essentiellement au niveau du public. (12 heures)
Quant à l'autre volet, qui m'apparaît le plus important, ce
sera toujours celui qui est fondamental à toute administration publique,
que ce soit dans les réseaux, au niveau municipal, au niveau scolaire,
au niveau des services de santé et des services sociaux ou encore dans
l'ensemble de la fonction publique. C'est de savoir comment faire pour parvenir
à donner le meilleur service au citoyen. Cela me semble et
m'apparaît comme étant ou devant être les deux principales
questions que nous aurons à soulever au cours des cinq ou six jours
d'audition que nous aurons de tous les gens qui ont bien voulu, et je les en
remercie à l'avance, témoigner, devant cette commission, de leur
réflexion. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Limoilou.
M. Després: Je voudrais faire une proposition, une
question de règlement, M. le Président. Dans le cadre de notre
règlement, étant donné qu'on s'est entendus pour 10
minutes d'Intervention du côté ministériel et 10 minutes du
côté... En vertu du règlement, est-ce qu'il est possible
qu'on puisse, avec entente de (a part de l'Opposition, dans les 10 minutes qui
nous sont allouées de part et d'autre, partager entre nos
collègues pour maximiser dans le temps les interventions que nous avons
avec le président du Conseil du trésor?
Le Président (M. Lemieux): De consentement, on peut tout
faire, sauf changer un homme en femme. Alors, si vous êtes
d'accord...
M. Després: Est-ce que c'est possible, M. le
Président, ce qu'on demande?
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Lazure: Oui, l'Opposition consent, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Elle n'est pas forte, n'est-ce
pas, M. le président du Conseil du trésor? Alors, il y a
consentement?
M. Lazure: Oui, consentement.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Alors, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, je pense qu'il est bon de
dire, à l'ouverture de ces travaux, que la fonction publique
québécoise mérite qu'on réexamine son statut et la
façon dont elle fonctionne, surtout qu'il y aura peut-être,
éventuellement, des changements politiques au Québec qui vont en
accroître les pouvoirs et en accroître aussi, d'une façon
considérable, les effectifs. Il est sûr aussi que, des deux
côtés de la table ici, on partage l'objectif d'une plus grande
efficacité possible de la fonction publique et c'est dans cette
optique-là que nous, en tout cas, nous engageons l'examen de la loi qui
régit la fonction publique. Il est certain que, du côté des
contribuables, ce qui est attendu de la fonction publique, c'est d'être
bien accueillis et que les problèmes se règlent avec
célérité. Autrement dit, que le contribuable n'ait pas
l'impression d'être un numéro quand il fait affaires avec
l'appareil du gouvernement. Quand on pense à la fonction publique, je
pense aussi que les employés de l'état ont le droit, eux autres
aussi, de ne pas être traités comme des numéros. Et je
pense que ça veut dire qu'il faudrait trouver des modes plus
opérationnels de consultation des employés dans le travail qui se
fait dans le secteur public.
À cet égard-là, je pense que l'État accuse
un retard, en regard des parties les plus modernes de l'entreprise
privée. Les gens d'affaires reconnaissent de plus en plus que la
participation des employés est quelque chose qui est non seulement
possible, mais souhaitable. Donc, associer les artisans de la fonction publique
à ce qui les concerne pour qu'ils puissent, eux aussi, se faire
entendre. Je pense qu'à cet égard, il y aurait peut-être
moyen d'envisager qu'il n'y ait pas que le Conseil du trésor qui ait des
responsabilités à l'égard de la fonction publique, mais
qu'il y ait un autre ministre qui puisse s'occuper notamment de l'Office des
ressources humaines pour qu'il n'y ait pas que l'élément de la
rentabilité et l'élément... Je retire
"rentabilité". Le respect des normes financières, ça ne
devrait pas être la seule chose. Le Conseil du trésor est
très attaché à ça, c'est son rôle, mais qu'il
ait aussi celui de faire participer les employés. À cet
égard-là, je pense qu'il y a quelque chose d'important à
faire.
Il y a également des choses à faire à
l'égard de l'article 70, qui exclut certains objets des
négociations. Ça, c'est la question assez fondamentale, à
savoir que l'État qui est employeur est aussi législateur. Que ne
se donne-t-il pas le respect des mêmes règles que les autres
employeurs? C'est-à-dire que, quand il y a un litige, on se
réfère au ministère du Travail, à la
mécanique d'accréditation. Pourquoi devrait-il, dans la loi, y
avoir des questions exclues comme telles des négociations? Je pense
qu'à cet égard-là, il y a des intervenants qu'on va
entendre et qui en parleront; ils ont raison de poser ce
problème-la.
Alors, je pense qu'il y a des choses à faire, pour ce qui est de
revoir la Loi sur la fonction publique. Moi personnellement, je suis
attaché entre autres aux critères d'efficacité. Aussi,
pour réaliser justement cette efficacité-là, il faudrait
décentraliser et associer les employés à la prise de
décision. Maintenant, quant à ce que dit le député
de Saint-Louis, je voudrais lui souligner qu'il a devant lui le
président du Conseil du trésor, qui a défendu avec
acharnement, durant plusieurs mois, la perte d'ancienneté d'à peu
près 100 000 infirmières et employés d'hôpitaux.
Alors, je pense qu'il devrait parler avec un peu moins d'assurance du respect
des droits des personnes qui sont là, parce que la perte
d'ancienneté des infirmières et des autres employés
d'hôpitaux, ça leur a enlevé, en pratique, l'application
d'une quarantaine de clauses de leur convention collective et ça a
semé le bordel dans le réseau hospitalier, entre autres, et dans
celui des affaires sociales. Je suis à l'aise pour en parler, car j'ai
cessé d'être membre du Parti québécois à
l'époque des coupures dont le gouvernement parle. Mais je pense qu'il y
en a des plus convaincants que nos amis d'en face pour parler des droits des
employés du secteur public, quand on regarde la perte
d'ancienneté des infirmières, entre autres, et qui perdure
après...
On pourrait ajouter comme élément du débat que,
s'il y avait plus de participation des employés dans la fonction
publique, on pourrait, comme dans les entreprises modernes, éviter et
tenter de mettre fin aux affrontements qui surviennent tous les trois ans entre
l'État et ses employés. Souvent, par le passé, on a connu
des affrontements, et la fin d'un affrontement signalait la préparation
du prochain, ce qui va être le cas avec les infirmières, si le
gouvernement continue sa politique de les priver d'un droit essentiel, qui est
le droit d'ancienneté. Alors, disons qu'à cet égard,
l'État devrait s'enligner sur les employeurs, dans un climat où
on favorise l'implication des employés plutôt que les
affrontements.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Je demanderais aux membres de
cette commission d'éviter de se
garroçher des roches de part et d'autre. M. le président
du Conseil du trésor, vous avez demandé la parole?
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Vous avez cinq minutes, parce
qu'il reste cinq minutes...
M. Johnson:... je vais prendre la parole... Est-ce que vous m'y
autorisez?
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez prendre la parole
pour cinq minutes, après que le membre de l'Opposition soit intervenu.
Alors, M. le député de Bertrand.
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je n'ai pas
l'intention, à cette étape ci de nos
délibératiotis, de me prononcer sur le contenu des
mémoires que nous allons examiner plus tard. J'aimerais, comme mon
collègue de Labelle, souligner l'apport de la fonction publique
québécoise au développement de l'État
québécois. J'en ai été moi-même
témoin, particulièrement lors de l'ouverture du Québec sur
le monde et lorsque le Québec s'est doté de
délégations commerciales et de bureaux de représentation
à l'étranger. J'étais, à ce moment-là, au
ministère des Affaires extérieures, à Ottawa, et j'ai pu
constater l'efficacité et la ferveur de la fonction publique
québécoise.
Cela étant dit, je pense qu'il n'est pas approprié ici de
décortiquer à qui la faute s'il existe présentement des
lacunes dans le bon roulement de notre fonction publique. Il est évident
qu'après plusieurs années de fonctionnement, des lacunes sont
à souligner. Les petits sous-comités de travail que notre propre
commission a mis sur pied en ont identifié quelques-unes, et nous aurons
l'occasion d'y revenir au cours des délibérations.
Il me semble toutefois que certains paramètres doivent être
pris en considération pour que nos travaux se déroulent de
façon consistante et pour qu'ils puissent déboucher sur quelque
chose de positif et de concret. D'abord, il faut noter la complexité des
responsabilités de la fonction publique, non seulement au Québec,
mais dans les autres États des pays industrialisés. Mon
collègue de Labelle a également souligné
l'éventualité où nous devrons absorber certains effectifs
de la fonction publique fédérale; ça a déjà
commencé dans le cas du ministère du Revenu avec l'application ou
la collection de la TPS fédérale par le gouvernement du
Québec. Il y a également d'autres responsabilités, comme
la surveillance des ponts, jadis sous le contrôle de la Gendarmerie
royale et de la police fédérale, qui sont passées sous
contrôle québécois, et il va y en avoir d'autres à
mesure que le Québec va s'affirmer comme État.
Il existe également un besoin de décentrali- sation, dans
le sens où cette complexité et la diversification des services
qu'offre l'État entraînent un besoin, à mon avis, pour les
responsables de ces services de se rapprocher des usagers. Dans ce sens, cela
permettrait d'épargner aux députés ce qu'un bon nombre
d'entre-eux ont à faire de façon systématique,
c'est-à-dire intervenir auprès des différents paliers de
la fonction publique pour s'assurer que leurs citoyens reçoivent un
service adéquat de tel ou tel ministère.
Il faut également prendre en considération que nos revenus
budgétaires, quel que soit le parti au pouvoir, ne sont pas
illimités, et que si l'on veut offrir des services qui ont du bon sens
à la population du Québec, il faut, également prendre en
considération les coûts que ces services Impliquent. Nous aurons
l'occasion de revenir sur cette question là, puisque l'idéal
serait d'offrir l'ampleur la plus grande de services au coût le plus
efficace.
Et, à ce niveau-là, je ne pense pas qu'il soit important
ici d'attribuer des torts, que ce soit aux gestionnaires de la fonction
publique eux-mêmes ou au gouvernement lui-même. Je devrais dire aux
gouvernements, c'est-à-dire tous ceux qui se sont succédé
jusqu'ici. À mon avis, il y a dans ce système, une lacune, qu'on
n'a pas mentionnée jusqu'ici, et c'est le fait que nous-mêmes,
parlementaires, devrions peut-être jeter un regard plus attentif et un
suivi annuel plus efficace des activités de la fonction publique. Nous
le faisons dans le cas de l'étude des engagements des crédits des
ministères. Nous le faisons également dans le contexte de
l'étude des crédits des ministères et nous le faisons
chaque année dans le contexte de l'exercice de l'approbation
budgétaire. Et, dans ce sens, je pense qu'il serait important que nous,
parlementaires autour de cette commission, allions dans le sens d'une plus
grande implication dans le suivi et la surveillance des activités de la
fonction publique.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Bertrand. M. le président du Conseil du
trésor, vous avez demandé la parole.
M. Johnson: Je vais prendre la parole si vous me l'offrez, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Non, est-ce que vous avez
demandé la parole?
M. Johnson: Je ne demande pas...
Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le
député de...
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Johnson:... c'est juste dans la mesure où
je sens poindre des questions chez les membres de la commission. Si
ceux-ci appellent des réponses, ça me fera plaisir de les donner.
SI ceux-ci n'en appellent pas, je souhaiterais faire part de mes commentaires
à la fin, effectivement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Limoilou, ou... M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je pense qu'il
est temps qu'on entre dans le vif du sujet, M. le président du Conseil
du trésor. Je vais vous parier de l'excellence et du rendement.
Excellence! L'excellence. Ce que toute entreprise publique, parapublique
ou privée vise, c'est l'excellence. Quand on vise l'excellence, on
vérifie, M. le président du Conseil du trésor, sur le
terrain, dans chacun des départements, dans chacun des services, le
rendement, la performance d'un Individu, son degré de présence
vis-à-vis de la clientèle, son degré d'efficacité,
sa production, sa façon d'être vis-à-vis de ses
collègues de travail, la performance d'un individu, son rendement en
général. (12 h 15)
J'ai été un petit peu estomaqué de voir, M. le
président du Conseil du trésor, d'après les analyses qui
ont été faites, entre autres - je vous livre quelque chose comme
ça - auprès des cadres supérieurs, qui sont très
importants dans notre pyramide gouvernementale, que les notes excellentes, on
n'en donnait pas. On n'attribuait pas, lorsqu'on évaluait le rendement
des cadres supérieurs, la mention "excellent. " Sur 56 personnes qui ont
été Interrogées, zéro "excellent", 19 "très
bien", 31 "satisfaisant", un "moins bon" et pas un qui n'est pas bon. Autrement
dit, 52 sur 56 qui sont tous entre "très bon" et "satisfaisant". On est
dans la moyenne, 52 sur 56. Ça veut dire qu'on a une excellente fonction
publique au niveau des cadres supérieurs, que tout le monde est dans la
moyenne. Moi, je ne crois pas ça, que tout le monde soit dans la
moyenne. Je sais qu'il y a une cloche statistique: Il y en a qui sont à
un extrême, il y en a qui sont dans la cloche centrale et il y en a
d'autres qui sont à l'autre extrême. Je me pose la question:
Est-ce qu'on n'a pas institutionnalisé un système dans lequel il
ne faut pas qu'il y ait d'excellence, parce que la personne qui est excellente,
elle est dérangeante pour les gens de la moyenne? Là, quand on en
arrive... Et si on en arrivait à dire qu'il y en a 5 "excellent" sur 56,
les primes que l'on donne... Parce qu'il y a des primes à l'excellence,
M. le président du Conseil du trésor, des primes
monétaires qu'on accorde à l'excellence. Normalement, s'ils sont
excellents, ça devrait être les excellents qui devraient les
avoir, mais il semble que non. Il semble, d'après l'information qu'on a,
qu'on obtient avec nos recherchistes, que c'est réparti entre ceux qui
ont une mention "très bien" ou "satisfaisant". Tout le monde se cadre
à l'intérieur de ça, 52 sur 56, presque la
totalité. Puis, chaque année ou chaque six mois, on se passe le
"poque": il y en a un qui a sa prime pendant six autres mois, et il y en a un
autre qui a sa prime pendant six autres mois ou... Attends ton tour,
l'année prochaine. Tu ne fais pas partie du bon groupe, parce qu'on n'en
a pas assez dans la masse. C'est une question d'équité
plutôt qu'une question d'excellence. Là, on part du haut de la
pyramide.
J'aimerais savoir, M. le président du Conseil du trésor,
vous qui provenez de l'entreprise privée et qui savez très bien
jusqu'où on attache de l'importance à l'excellence, comment
fait-on pour inciter des gens à être mieux que tres bien" et mieux
que "satisfaisant"? Comment doit-on les rétribuer? Comment doit-on
changer la règle qui fait que tout le monde se classe dans les
"très bien" et dans les "satisfaisant" et qu'on n'a personne dans les
"excellent"? Comment les cadres supérieurs, s'il n'y en a pas qui sont
excellents, peuvent-ils motiver des fonctionnaires? Je suppose qu'il n'y a pas
de fonctionnaires excellents? Voyons donc! Ça ne se peut pas. Il doit y
en avoir, des fonctionnaires excellents, aussi, d'autres qui sont très
bien ou satisfaisants. Il y a quelque chose que j'ai de la difficulté
à saisir, et j'aimerais savoir le fond de votre pensée comme
administrateur.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: M. le Président, avant de répondre aux
questions très Importantes, j'aimerais savoir combien il nous reste de
temps, si vous permettez. Dans la mesure où j'ai cru déceler six
questions différentes soulevées par les membres de la commission
et auxquelles j'aimerais enfin apporter un début de réponse, quel
est le temps qui me serait consacré d'ici la fin de...
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor, en vertu du règlement, il n'y a pas de temps
qui vous est dévolu, mais, en vertu de l'article 163 - c'est ce que je
disais tout à l'heure - comme vous êtes ici témoin, vous
n'êtes pas membre de cette commission.
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Lemieux):... vous êtes membre de
l'Exécutif. À mes yeux, le "doit entendre" implique qu'il y ait
un échange. Si on vous pose des questions, il va de soi que vous
répondiez aux questions.
M. Johnson: D'accord.
Le Président (M. Lemieux): Comme on vous pose des
questions, vous devez répondre. Maintenant, je vais juger de la
pertinence de la longueur de la réponse...
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux):... dans le cadre d'une.. Oui.
M. le...
M. Johnson: Est-ce qu'il a été...
M. Léonard: M. le Président, je voudrais que...
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Léonard: ce soit bien clair que c'est dans le cadre des
10 minutes réservées, par exemple, au parti au pouvoir ou
à celui qui pose la question.
M. Lemieux: Dans le cadre des 10 minutes, M. le président
du Conseil du trésor, de celui qui pose la question.
M. Johnson: Et est-ce qu'on suspend nos travaux à 12 h 30
ou à 12 h 45, finalement, M. le Président?
Le Président (M. Lemieux): Si j'ai le consentement pour
poursuivre jusqu'à 12 h 45.
Une voix: On pourra poursuivre jusqu'à 12 h 45...
Le Président (M. Lemieux): J'ai le consentement, nous
poursuivons jusqu'à 12 h 45.
M. Johnson: Je le répète parce que les
députés de part et d'autre, à votre gauche et à
votre droite, ont soulevé, je les ai notées, cinq questions
différentes, dont l'une plus pointue, soit celle du député
de Mille-Îles, à laquelle je m'adresse tout de suite.
Je veux faire remarquer immédiatement que, quant à la cote
d'excellence... D'abord, à l'égard du vocabulaire, il existe
évidemment un système de rémunération, de
reconnaissance à l'égard des cadres, mais le député
a également parlé des fonctionnaires. Comment se fait-il qu'il
n'y a pas de fonctionnaires "excellents"? On va se comprendre, là.
Lorsqu'on a dépassé les 2500 cadres et qu'on tombe chez les 50
000 autres, il n'y a pas de système de cette nature-là, je dirais
de cote, mais il y a, effectivement, à l'égard des professionnels
dans les 50 000 autres fonctionnaires qui ne sont pas des cadres, le
régime de primes, comme celles de complexité supérieure,
par exemple, des primes de fonction. Alors là, on parle de trois notions
différentes. J'aimerais peut-être traiter de celle qui semblait
préoccuper davantage le député de Mille-Îles.
J'aimerais savoir, à titre d'exemple - et ce n'est pas
négligeable, c'est la question que je veux demander -
l'échantillonnage des 56 cas qui ont été relevés.
Parce qu'à la grandeur de la fonction publique, c'est l'ordre de
grandeur; sur 2500 cadres ou à peu près, bon an, mal an, il y en.
a; une quarantaine qui ont la cote "excellent". Elle est vraiment
réservée à moins de 2% de nos gens, sachant que les cotes
a et b prises cumulativement sont attribuées à 30 % environ de
nos cadres. Mais à l'intérieur des a et b, les a, il y en a
très peu. Évidemment, si l'étude a porté sur 56
cadres et qui ont été pris sur les 2500 un peu partout, les
chances sont énormes qu'on ne retrouve pas une seule cote a, parce que
cette distribution de la cote a, cette évaluation est faite à
l'intérieur d'une organisation, d'un ministère. Si le
député m'avait dit qu'à l'intérieur d'un ou de
plusieurs ministères, on a regardé de fond en comble depuis
plusieurs années et qu'il n'y a pas une seule cote a, là, on se
poserait des questions. Je ne peux pas nier l'affirmation du
député que l'échantillonnage qui a été pris
ne comprend pas une seule cote a. Je dirai tout de même que
l'échantillonnage ne reflète probablement pas la distribution
à la grandeur de la fonction publique ' des cotes a, b, c d, etc.
Ça m'apparaît quelque chose qu'on ne doit pas oublier.
Deuxièmement, quant à la distribution en rotation, ai-je
entendu, dans la première et la dernière intervention du
député de Mille-Îles, il y a certains bonis ou certaines
primes, dans le cas des fonctionnaires professionnels, primes de fonction ou
d'emploi de complexité supérieure, qui seraient attribuées
en rotation, donc, dans le fond, un petit peu à tout le monde au fur et
à mesure. Je dois dire que c'est peut-être un symptôme, dans
certains cas, dans une organisation en particulier, de la difficulté
qu'il y a de répartir équitablement cette marge de manoeuvre du
gestionnaire. Je dirai surtout - parce que j'ai eu connaissance que ça
se déroulait dans un ministère dont j'ai eu déjà la
charge ou dont j'ai la charge actuellement; je ne veux pas préciser, ce
n'est pas nécessaire - que, lorsque dans une direction ou un service, un
gestionnaire a tenté d'attribuer cette prime-là en rotation, le
sous-ministre est intervenu. Il a dit: Ce n'est pas comme ça que
ça marche. La gestion doit se faire d'une façon plus rationnelle,
en respectant l'atteinte des objectifs qui ne sont pas nécessairement de
même niveau, de même qualité ou de même performance
selon les individus, les postes, etc.
Ce que j'indique, c'est que c'est décentra, lise, que l'outil
existe et qu'il appartient au sous-ministre de le faire Si, à la
rigueur, ça semblait vouloir continuer et que le sous-ministre d'un
ministère en particulier ne respectait pas -et je reviens à
l'attribution des cotes à nos cadres - la distribution idéale qui
est recherchée, oui, la distribution en cloche, avec très
très peu de gens, on le reconnaît, aux deux extrêmes, le
Secrétariat du Conseil du trésor, dans son rôle, je dirais,
de concertation, d'évaluation - un rôle un peu pédagogique,
à certains égards, parce que l'expertise en matière de
classification, en vertu de la loi, est logée au
Secrétariat du Conseil du trésor - entrerait en contact
avec les hautes autorités administratives du ministère qui ne
semblent pas exactement conformes aux grandes politiques qui avaient
été définies par le Conseil du trésor...
Lé Président (M. Lemieux): II reste une minute, M.
le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: ...et pourrait donc, par son intervention, faire en
sorte que ça change dans le sens souhaité par le
député.
Donc, le système est très sensible à ces
choses-là. Les bilans, la reddition de compte, ce qu'on entend, les
témoignages qui viennent du niveau politique ou par la filière
administrative permettent au Secrétariat et au Conseil d'intervenir pour
que les grandes politiques de décentralisation - souligner le rendement,
valoriser la performance, etc. - soient effectivement mises en oeuvre. Mais
c'est une illustration parfaite, je pense, du fait que ce n'est pas le
Secrétariat ni le Conseil qui imposent dans les ministères
l'exécution des gestes requis dans l'atteinte des objectifs de la
gestion des ressources humaines.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Conseil du trésor. M. le député de Labelle, pour 10
minutes.
M. Léonard: Oui, je partagerai avec mon collègue de
La Prairie.
Le Président (M. Lemieux): Tel que convenu entre les
parlementaires, oui.
M. Léonard: Je voudrais revenir là où j'ai
laissé, pratiquement, sur cette question de l'État et des
perspectives que nous devons évoquer. Il est sûr qu'actuellement,
la situation financière impose au gouvernement du Québec des
mesures imposantes de restrictions budgétaires, nous l'avons vu, qui
tiennent en bonne partie à la situation économique, mais aussi
à la situation financière du gouvernement fédéral.
Je pense encore une fois que les travaux de la commission constitutionnelle ont
une importance par rapport à ce que nous faisons, môme si,
vraisemblablement nous terminerons nos travaux dans le cadre actuel bien avant
ceux de la commission constitutionnelle. Je pense toutefois que la question de
fond doit se poser et qu'on doit l'avoir à l'esprit. Même si, pour
certains, elle peut être hypothétique, je crois que, quant
à nous, de notre côté ici, c'est une chose qui se fera
à plus ou moins brève échéance, mais qui se fera,
de toute façon.
Donc, lorsque nous évoquons les perspectives qui touchent l'an
2000, elles doivent prendre en compte les transferts massifs de fonctionnaires
fédéraux et une fusion des deux fonctions publiques, la
québécoise et la partie fédérale qui touche le
Québec. Nos concepts doivent donc être alignés
là-dessus, et je pense qu'au cours des travaux de la commission, il
faudrait examiner très attentivement ce qui se passe dans la fonction
publique fédérale, de façon à aligner les choses
pour l'avenir.
Je pense aussi que, lorsque nous pensons à l'an 2000, au fond,
c'est 10 ans en avant. Ce n'est pas très loin. Ça nous
apparaît loin, mais ce ne l'est pas, parce que dans la vie d'un
État, 10 ans, ce n'est rien. Il faut plus voir 50 ans en avant. Je pense
que nous devons essayer de voir ce qui se passe ailleurs. Est-ce que
l'inspiration qui a été faite ici, dans l'établissement de
la fonction publique, est correcte? Est-ce que nous aurions
intérêt à aller voir ce qui se passe en France, par
exemple, sur l'État et la conception même de la fonction publique
qu'on se fait là-bas? Est-ce qu'on devrait aussi examiner ce qui se
passe aux États-Unis, sur la façon de fonctionner de la fonction
publique aux États-Unis, en Amérique du Nord?
Donc, il faut se situer dans ce contexte. En réalité, on
pourrait très bien se voir à 50 ans d'ici plutôt
qu'à 10 ans. Il me semble qu'il y a des questions de fond comme
celles-là qu'on doit poser. Je reviens à une autre chose,
à un autre concept, parce que, lorsque le président du Conseil du
trésor nous parle de décentralisation, je m'interroge beaucoup
sur le sens des mots: Et je sais qu'on pourrait faire beaucoup de discussions
sur le sens des mots la "décentralisation", la "déconcentration",
etc.
Ce matin, par exemple, il nous a parlé de négociations qui
étaient faites au niveau local dans certains ministères,
effectivement. Ça s'est toujours fait, et je pense qu'on va devoir y
aller encore plus que maintenant et qu'on devra aménager, assouplir
toute espèce de convention collective qu'on doit signer, de façon
à rendre l'État très flexible par rapport aux besoins de
la population.
Mais il y a un autre aspect de la décentralisation, qu'il n'a pas
évoqué, actuellement qui est, non plus, cette fois, de la
déconcentration, mais de la décentralisation, c'est lorsque nous
pensons aux autres institutions dans l'État québécois,
comme les municipalités, comme le réseau des commissions
scolaires.
J'ai parlé de la fonction publique du réseau des
commissions scolaires, tout à l'heure. Je pense quelle est dans le
décor, d'une façon indirecte, peut-être mais elle y est. Il
faut vraiment s'interroger sur jusqu'où on ira, parce qu'à partir
du moment où nous faisons une fusion de deux fonctions publiques de
façon massive, il est évident que nous devrons préparer un
rôle beaucoup plus important aux autres niveaux institutionnels du
Québec: municipalités, commissions scolaires, réseau de la
santé. À ce titre, l'expérience américaine pourrait
être particulièrement éclairante, parce que les
États américains eux-mêmes ont toute une expérience
dans ce
domaine de la décentralisation On va même, dans certains
États, jusqu'à élire plusieurs dizaines de fonctionnaires,
et je sais que, dans certains États, c'est même 170 sur une liste.
C'est tout simplement pour voir que la participation des citoyens doit
être encouragée à la base.
Lorsque nous parlons de décentralisation, nous ne parlons pas
strictement d'équilibre financier ou d'une façon
d'équilibrer les comptes de l'État central, mais l'on parle d'un
partage des ressources fiscales entre différents niveaux institutionnels
de l'État. Là, je pense qu'il faut revenir à ce concept de
base fondamental qui est celui de la vie des citoyens, qui ne sont pas juste
concernés par l'État central, mais par tout niveau institutionnel
ailleurs. Je pense qu'il y a des questions fort Intéressantes à
soulever sur ce plan et, au cours des mémoires, j'espère bien que
nous aurons l'occasion d'y venir. (12 h 30)
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Labelle. Il vous reste trois minutes, M. le
député de La Prairie, puisque le député de Labelle
a empiété sur votre temps.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Rapidement, bien
sûr que l'Opposition acceptait sans aucun problème de recevoir
à cette commission parlementaire le président du Conseil du
trésor. Je rappelle l'article 172 de la Loi sur la fonction publique,
qui dit que le président de l'Assemblée convoque dans un
délai d'un an une commission parlementaire. Le gouvernement n'avait pas
le choix, il était obligé de par la loi de convoquer cette
commission parlementaire.
Une voix: C'est l'Assemblée, M. le Président.
M. Lazure: Je voudrais revenir sur un point particulier. À
l'article 171, juste avant, "le gouvernement désigne les ministres
responsables de l'application des dispositions de la présente loi".
Ça n'a pas encore été relevé mais je pense que nous
devrons entendre, à un moment donné, le gouvernement actuel nous
dire pourquoi II a dérogé à ce qui avait été
établi comme coutume entre 1984 et 1988 d'avoir des ministres
responsables. Nommez-m'en deux au lieu d'un. Pourquoi a-t-il changé son
fusil d'épaule et centralisé dans les mains d'une seule personne,
toute honorable soit-elle, c'est-à-dire le président du Conseil
du trésor, cette lourde responsabilité?
J'ai aussi une question, puisqu'il faut poser quelques questions au
président du Conseil du trésor. La première. Le
président du Conseil du trésor peut-il nous dire pourquoi le plan
d'embauché, qui avait été accepté par le Conseil du
trésor en 1984 et qui stipulait qu'au moins 2 % des membres de la
fonction publique seraient des personnes handicapées, n'a-t-il pas
été réalisé? On n'en est qu'à 0, 7 %.
M. le Président, dernière question, puisque mon temps est
écoulé: étant donné que le président du
Conseil du trésor a bien voulu reconnaître la paternité de
la lettre du mois de juillet, que je voulais déposer tantôt, ainsi
que la paternité de son sous-ministre, M. Bédard, pourrait-il
déposer lui-même les deux documents que j'ai voulu déposer?
Si on a enlevé les noms, la raison est évidente, c'est que les
fonctionnaires qui ont reçu ces lettres-là n'ont pas
intérêt, dans un certain régime de crainte, sinon de
terreur, à ce que leur nom soit connu. Alors, le président du
Conseil du trésor, pour dissiper tout malentendu, devrait déposer
les deux lettres: celle qu'il a envoyée en juillet à tous les
ministères et organismes et aussi celle que M. Bédard a
envoyée au mois d'août.
M. Bélisle: Est-ce qu'il y a consentement, M. le
Président, pour permettre...
Le Président (M. Lemieux): Un instant! M. le
président du Conseil du trésor, vous ne pouvez pas
répondre, je n'ai plus de temps à vous donner.
M. Johnson: Bien, ça n'a pas d'allure!
M. Bélisle: M. le Président, est-ce que
l'Opposition consent à accorder du temps au...
M. Lazure: Oui, oui, nous consentons.
Des voix: Ah!
M. Bélisle: Ah bon! C'est bon!
M. Lazure: Pas sur notre temps, sur le...
M. Bélisle: Ah! c'est très ouvert.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez! Non, non,
attention! Écoutez, un instant! S'il vous plaît! Je m'excuse, M.
le député de La Prairie...
M. Bélisle: Ça commence très mal.
Le Président (M. Lemieux):... vous posez des questions au
président du Conseil du trésor, des questions qui sont les
vôtres, et vous demandez que le président du Conseil du
trésor réponde sur le temps des parlementaires du groupe
ministériel. Écoutez, il faut quand même s'entendre. Est-ce
que j'ai consentement pour qu'il puisse répondre sans que le temps des
ministériels ne soit touché?
M. Lazure: Oui, M. le Président, à condition que ce
soit un temps limité de trois à quatre minutes.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que le groupe des
ministériels est d'accord?
Des voix: Oui.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: M. le Président, je ferais remarquer qu'une
des difficultés qu'on a à affronter chaque fois qu'on a des plans
d'embauché pour des clientèles de cette nature, c'est que la
mesure elle-même de 0,7 % vient de l'auto-identification que font les
employés de l'État de leur statut de handicapé. Il
n'appartient pas à un tiers, à un observateur, de dire: Ah! Mme
Une telle est une handicapée; on la rentre dans les... Ah bon! Le
député me dit que c'est faux, et tout le monde qui administre le
programme me dit que c'est vrai. Alors là!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, la parole est au président du Conseil du trésor. S'il
vous plaît, continuez, M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: M. le Président, l'Office des ressources
humaines, les gens chargés des programmes de plans d'embauché,
des programmes d'accès à l'égalité m'indiquent - et
c'est toujours ça que j'ai compris - que, lorsqu'il s'agit d'inventorier
les différentes clientèles à l'intérieur de la
fonction publique, on doit se reposer sur l'auto-identification que fait cette
personne de son statut de membre d'une communauté culturelle, de
handicapé ou de quoi que ce soit. On doit se fier, lorsqu'on regarde
SAGIP, à l'Identification qui a été faite au dossier par
la personne elle-même. On n'a pas le droit de dire: Ah! Cette
personne-là, on va la compter dans les handicapés, visés
par le plan d'embauché parce qu'elle est handicapée, tu as
raison, c'est un handicap. On n'a pas le droit de dire ça, comme
gestionnaire. Ça, c'est le respect le plus élémentaire.
Maintenant, si le député de La Prairie veut qu'on manque à
cette règle-là, qui est en place depuis le début, depuis
toujours, c'est autre chose. Mais je lui dis que c'est ça, la
situation.
M. Lazure: Ma question ne portait pas... M. le
Président...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, mais...
M. Lazure: Je ne conteste pas que la perception...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie...
M. Lazure: ...de la personne elle-même compte...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie...
M. Lazure: ...mais pourquoi avoir limité...
Le Président (M. Lemieux): M le député de La
Prairie, s'il vous plaît! Question de règlement, M. le
député de Mille-Îles.
M. Bélisle: M. le Président, c'est censé
être une commission où on échange, où on se parle,
où on discute, etc. J'aimerais ça que de part et d'autre, on soit
flexibles, mais pas seulement quand ça fait notre affaire de donner du
temps au ministre pour répondre. Sinon, ça ne sert à rien
de lui parler, et même qu'il vienne à la fin des débats. Si
on veut avoir un impact sur ce qu'on va faire, il faut qu'il nous
réponde, il faut qu'on discute, il faut qu'on jase avec lui, avec tous
ceux qui viendront après aussi. J'aimerais que l'attitude change, sinon
ça commence très mal, très mal. Moi, je ne suis pas venu
ici pour Jouer au bouffon autour d'une table, en commission parlementaire.
Simplement donner le droit de parole à quelqu'un quand ça fait
notre affaire et quand ça ne fait pas notre affaire, on ne donne pas le
droit de parole...
M. Lazure: Sur la question de règlement, M. le
Président...
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement?
M. Lazure: ...parce que je pense qu'on ne peut pas accepter qu'on
nous fasse la morale comme ça sans répliquer. La raison pour
laquelle je voulais intervenir sur le temps de notre parti... M le
Président, je vous ferais remarquer que c'est le temps de notre
côté. La raison pour laquelle je voulais intervenir, c'est que le
président du Conseil du trésor ne répondait pas à
ma question. Ma question ne portait pas sur les critères qui
président à l'identification des personnes handicapées. Ma
question était très simple. Pourquoi le Conseil du trésor
n'a-t-il pas vu à ce que son plan d'embauché soit
réalisé, c'est-à-dire embaucher plus de personnes...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: .qui se voient comme des personnes
handicapées?
Le Président (M. Lemieux): J'ai voulu vous écouter,
parce que ni le député de Mille-Îles ni vous n'étiez
sur une question de règlement. J'ai fait preuve d'une ouverture d'esprit
peut-être un peu trop grande, je vous ai laissé aller tous les
deux. Alors, il ne s'agit pas d'une question de règlement, mais bel et
bien d'un commentaire. On a convenu dès le début que M. le
président du Conseil du trésor pouvait s'exprimer par voie de
consentement après que vos 10 minutes eurent été
écoulées, le tout ayant été fait dans le cadre
de l'entente qu'on a eue. Je vais céder maintenant la parole
à M. le député des Îles-de-la-Madeleine. M. le
député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Farrah: Merci, M. le Président, ça va être
très bref, parce que je veux donner l'opportunité au
président du Conseil du trésor de pouvoir répondre
à mes questions. Alors, dans un premier temps, dans votre discours
d'ouverture, M. le président du Conseil du trésor, vous avez fait
mention de la capacité d'adaptation et de mouvance, et ça
m'apparaît un élément fort important, compte tenu de la
grosseur de l'appareil. Dans ce sens-là, j'imagine qu'il y a beaucoup de
mobilité à l'intérieur, compte tenu que c'est un appareil
quand même relativement important. Alors, dans ce sens-là, est-ce
que ça ne crée pas un problème? C'est dans le sens
suivant: est-ce que, souvent, on ne se retrouve pas, peut-être à
cause de la lourdeur, avec les mauvaises personnes au mauvais endroit? Parce
que, sur le fond, chez les fonctionnaires, je pense qu'il y a de l'excellence.
II y a de la compétence au niveau de la fonction publique, je pense
qu'il faut l'admettre, c'est tout à fait normal. Dans ce sens-là,
à cause de ce mouvement, cette mobilité, on se demande si - on
est un peu dans un carcan à cause des différentes conventions,
etc. - ce ne sont pas les mauvaises personnes qui sont au mauvais endroit.
Parce que, avec les recherchistes, je pense, durant le briefing, il y a une
couple de semaines, c'est un élément qui est ressorti. Alors,
quand je vous ai entendu parler de capacité d'adaptation, il y a un
élément important. C'est qu'au bout de la ligne, c'est le service
au citoyen qu'on vise. Et je pense que cet élément-là
touche définitivement cet aspect-là. J'aimerais vous entendre
là-dessus, M. le président du Conseil du trésor.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Johnson: M. le Président, je dois dire que le
député des Îles-de-la-Madeleine va au fond de la question.
Ça me permettra de raccrocher certaines des préoccupations
exprimées, notamment par le député de Bertrand qui, avec
beaucoup d'à-propos, a soulevé la difficulté de reddition
de compte, d'imputabilité, de responsabilisation et d'identification des
zones de responsabilité, de la même façon que les
députés de Mille-Îles et de Pointe-aux-Trembles ont
soulevé la question de la permanence, d'une part, et de la
non-négociabilité de certains éléments des
conditions de travail. Nous avons devant nous une immense organisation, qui est
d'abord et avant tout une entreprise de services. Ces services-là sont
édictés, dirions nous, par le gouvernement, qui propose à
l'Assemblée nationale qui, elle, vote éventuellement certaines
lois. Le gouvernement met sur pied des program- mes, suite à l'adoption
de ces lois, il édicte des directives, il fait des choix d'allocation de
ressources. Nous avons un appareil qui doit répondre à des
conditions qui peuvent changer littéralement à 180° d'une
année à l'autre, devant la conjoncture, devant des choix
politiques qui sont exprimés par des clientèles
organisées, devant des choix idéologiques, également, que
les gouvernements font au fur et à mesure qu'ils se
succèdent.
À partir de ce moment-là, on doit doter l'appareil de
toute la flexibilité de gestion qui lui permet de rencontrer ces
nouveaux défis à mesure qu'ils apparaissent. Ce que le
député évoque, c'est: n'y a-t-il pas un risque, à
un moment donné, que des gens se retrouvent aux mauvais endroits aux
mauvais moments et qu'il y ait une sédimentation de l'activité de
certains postes alors qu'on n'en a pas besoin, entre guillemets? Je dirais que
le régime que semble soutenir le député de
Pointe-aux-Trembles mènerait à cette situation, alors que le
régime que nous avons actuellement, d'exclure du champ de la
négociation les champs indiqués à l'article 70 de la Loi
sur la fonction publique, donne justement aux gestionnaires cette
capacité d'adaptation, cette souplesse qui permet d'affronter de
nouveaux besoins.
En même temps et en contrepartie, la permanence est un
phénomène auquel on doit quand même, également,
porter attention. Je dis "en contrepartie", parce que c'est
précisément à la lumière de la souplesse du
gestionnaire qu'on a à se demander si, en toute équité, on
ne doit pas assurer une certaine permanence de l'emploi, à condition que
le développement et la formation du personnel lui permettent
d'acquérir la polyvalence qui permet de rencontrer les nouveaux besoins
que la souplesse de gestion permet de rencontrer en assignant les ressources
humaines là où elles sont utiles. Il m'apparaît
également que la permanence, pour conclure sur ce point, est
véritablement destinée à mettre la fonction publique
à l'abri des pressions, des conflits d'intérêts, des
interventions indues. C'est la meilleure façon que nous ayons
trouvée ici, au Québec, d'assurer le caractère
professionnel de la fonction publique, d'assurer que les services qui sont
rendus le sont non seulement, je dirais, en toute indépendance de
contraintes extérieures, mais essentiellement rendus en fonction des
objectifs politiques qui sont le fait du gouvernement qui propose, comme je
l'indiquais à l'Assemblée, des choses à faire pour nos
concitoyens et qui confie ensuite, en vertu de la Loi sur la fonction publique,
l'exécution, J'atteinte de ces objectifs à la fonction
publique.
Alors, je remercie le député des
Îles-de-la-Madeleine. Il m'a permis de peut-être faire un tour des
quelques questions qui ont été soulevées par les
collègues ici autour de la table. J'ajouterais, pour être plus
complet, qu'il y en aurait long à dire. Peut-être y reviendrai-je
si la
commission, comme elle l'a indiqué, consent toujours à
m'accueillir à la fin de ses travaux. Nous aurons peut-être
l'occasion de parler plus longuement - M. le député de Bertrand
et celui de Saint-Louis, notamment, en étaient friands -de
l'imputabilité interne où externe de la fonction publique, de la
reddition de compte, donc du bilan de ce que la fonction publique a à
faire dans l'atteinte des objectifs qui lui sont définis.
En terminant, je dirais que j'ai été
particulièrement heureux d'être accueilli comme je l'ai
été par la commission. On pourra contester le caractère
entièrement non partisan des interventions qu'on a pu entendre ici. Je
veux qu'on comprenne très bien le sens de ma présence devant vous
aujourd'hui. En vertu du règlement, je tenais, comme ministre
responsable d'un des grands volets... Et d'autres viendront après moi.
L'Office de ressources humaines viendra; la Commission de la fonction publique
viendra; le secrétaire général du gouvernement...
Le Président (M. Lemieux): II vous reste 10 secondes, M.
le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: ...sera devant nous.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, je me dois de suspendre les travaux. Nous allons reprendre nos
travaux à 14 heures. Je vous remercie.
M. Johnson: Merci, M. le Président. (Suspension de la
séance à 12 h 45)
(Reprise à 14 h 6)
Auditions
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux. Tel que convenu ce matin et tel que
mentionné à l'ordre du jour, nous allons maintenant entendre le
Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. J'aimerais leur
rappeler tes règles de l'audition. La durée totale de l'audition
de tous les organismes entendus sera d'une heure, soit 20 minutes pour
l'exposé de votre mémoire et 40 minutes d'échange avec les
parlementaires. Le temps de parole d'un député sera de 10
minutes, en respectant la règle de l'alternance et les interventions. Je
demanderais au représentant du groupe du Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec de bien vouloir s'identifier, s'il vous
plaît, et de nous présenter les gens qui l'accompagnent, de
manière rapide, pour que nous puissions immédiatement passer
à l'audition de votre mémol re.
Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
Québec
M. Harguindeguy (Jean-Loui«): Merci, M. le
Président. Jean-Louis Harguindeguy, président du syndicat.
À ma droite, René-Jean Banville, vice-président à
l'exécutif, Robert Lapierre vice-président également
à l'exécutif, Jean Robert, vice-président à
l'unité "ouvriers" de l'exécutif, Jean-Charles Morin,
vice-président, et Denis Gaudreau, vice-président. Il y a
quelques membres qui sont absents, étant retenus par d'autres
activités et préoccupations.
Merci, M. le Président, de nous avoir reçus. MM. les
membres de la commission, nous tenons à vous remercier, à titre
de représentants des fonctionnaires et ouvriers de la fonction publique,
de l'occasion que vous nous accordez pour vous faire part de notre opinion sur
l'opportunité de maintenir en vigueur ou de modifier la Loi sur la
fonction publique.
Nous considérons important de vous indiquer, dès le point
de départ, que nous sommes fort désappointés que la
commission n'ait pas jugé à propos de nous accorder le temps
approprié que nous estimions nécessaire pour justifier de
façon exhaustive l'ensemble de nos représentations en ne nous
accordant qu'une petite heure. D'autre part, nous trouvons totalement
disproportionnée la période de temps qui a été
allouée au président du Conseil du trésor qui s'est vu
accorder une période de trois heures pour justifier les quelque 25 pages
sur la soixan taine dactylographiées à double interligne du
Rapport dans lequel le Conseil du trésor fait part de son
appréciation générale de la mise en oeuvre de la loi, tel
que déterminé par l'article 172 de la Loi sur la fonction
publique.
Nous aurions pu croire que le président du Conseil du
trésor, à la lecture des mémoires dont il a pris
connaissance, aurait cru opportun d'obtenir une telle période pour faire
ce matin un acte de contrition. C'est plutôt un acte de foi auquel nous
avons eu droit. Nous aurions cru que la présente commission aurait tenu
compte de notre revendication à ce chapitre pour nous permettre
d'élaborer sur notre mémoire qui comporte 47 pages
dactylographiées à simple interligne. Nous estimons
également, compte tenu du temps alloué à certains citoyens
et citoyennes - à tout le moins 30 minutes - pour faire valoir leur
point de vue, et qui sont pour la plupart représentés par des
organismes syndicaux, que nous n'avons pas été traités
équitablement étant donné le nombre imposant de membres,
que nous représentons.
Vous n'êtes sûrement pas sans savoir que les dispositions de
la Loi sur la fonction publique ainsi que d'autres matières
législatives concernent de façon directe les conditions de
travail de près de 42 000 de nos membres sur une base annuelle, mais
concernent effectivement plus de 50 000 personnes. Loin de nous cependant
l'Idée
de restreindre le droit des citoyens et citoyennes de faire valoir leur
point de vue, bien au contraire. Nous aurions d'ailleurs souhaité que
plus de citoyennes ou citoyens ou à tout fe moins des groupes
représentatifs de l'ensemble des consommateurs des services publics
fassent valoir leur position sur la qualité des services qu'ils
obtiennent. Nous aurions par contre pu espérer que la commission ait
déterminé une période de temps appropriée en tenant
compte du caractère représentatif de l'organisation
intéressée.
Nous espérons également que nous ne sommes pas les acteurs
d'un simulacre de consultations et que nous ne participons pas à une
mise en scène qui pourrait éventuellement laisser sous-entendre
que les principaux intéressés ont été entendus.
Malgré tout, compte tenu du refus des représentants du
gouvernement de discuter, lors des négociations pour le renouvellement
des conventions collectives, des matières qui pourraient
éventuellement restreindre les pouvoirs de certains dirigeants ou
organismes, nous n'avons pas d'autre alternative que de vous faire part de
notre opinion.
Nous tenons immédiatement à vous indiquer que nous ne
partageons pas l'opinion du Conseil du trésor qui est d'avis qu'il est
opportun de maintenir en vigueur la Loi sur la fonction publique, et ce, compte
tenu des nombreuses difficultés que nous avons rencontrées dans
l'application de la loi. Nous n'avons sûrement pas l'intention,
après la présentation de notre mémoire, de nous limiter
à commenter les questions qui semblent préoccuper principalement
votre commission. Nous avons d'ailleurs été en mesure de
constater, selon la nature des interventions de ce matin, que nous ne vivons
pas sur la même planète.
Nous aurions également souhaité que la possibilité
nous soit offerte de pouvoir éventuellement répliquer aux
propositions qui pourraient être formulées par d'autres
organismes, tels l'Office des ressources humaines et la Commission de la
fonction publique et estimons que, si la commission du budget et de
l'administration n'adopte pas un mode de fonctionnement différent de
celui qui nous est actuellement imposé, la présente commission
n'atteindra pas l'objectif visé de procéder à une
étude adéquate de l'opportunité de maintenir en vigueur
ou, le cas échéant, de modifier la loi actuelle.
Nous sommes fermement convaincus qu'actuellement, la fonction publique
ne remplit pas sa mission qui est de fournir au public les services de
qualité auxquels il a droit et que le mode d'organisation des ressources
humaines qui est actuellement en vigueur ne permet pas de favoriser
l'efficience de l'administration, la responsabilité et le
développement des fonctionnaires, l'égalité d'accès
de tous les citoyens à la fonction publique, l'impartialité et
l'équité des décisions affectant les fonctionnaires, au
sens large du terme ainsi que la contribution optimale au sein de la fonction
publique des diverses composantes de la société
québécoise.
Nous croyons, de plus, que la loi devrait garantir aux fonctionnaires la
gestion courante de leurs dossiers, sans avoir à faire face à
quelque forme d'intervention d'ordre politique, convaincus qu'à titre de
fonctionnaires et ouvriers de la fonction publique, nous sommes au service des
citoyens et citoyennes et non pas de l'appareil politique que constitue le
gouvernement.
Nous sommes plus que convaincus que la loi actuelle n'assure pas la
transparence de la gestion et l'unité d'action qu'exige toute fonction
gouvernementale.
Les droits de la population. Nous faisons donc valoir à nouveau
les droits de la population à des services de qualité et estimons
que les principes fondamentaux suivants devraient être Inscrits de
façon formelle dans la loi.
Les services publics doivent être au service de la population. Les
services publics doivent être accessibles à tous les citoyens et
citoyennes, indépendamment de leur lieu de résidence et sans
tenir compte de leur statut social ou économique.
Les services publics ne doivent pas être refusés ou
retardés par quelque forme de discrimination que ce soit: intervention
politique, intérêts personnels ou bureaucratiques.
Les services publics doivent être donnés de façon
efficace, prompte et courtoise par des employés publics dont le
professionnalisme, le nombre ainsi que les traitements et conditions de travail
garantissent régulièrement des standards de qualité.
Les services publics ne doivent pas être fournis par des
entreprises privées ou des individus qui sont vulnérables au
patronage et dont le seul intérêt est leur profit personnel, qui
est assurément incompatible avec la qualité des services et qui
ne tient pas compte de l'intérêt public.
Après plus de cinq ans d'application des dispositions de la loi,
nous sommes encore à nous interroger sur la signification que le
législateur voulait donner lorsqu'il rendait les fonctionnaires
imputables. Dans ce domaine, nous croyons que chaque sous-ministre ou dirigeant
d'organisme devrait à tout le moins rendre compte des attentes
suivantes: faire la démonstration que les programmes et systèmes
gouvernementaux dont il a l'entière responsabilité administrative
soient plus efficients et efficaces d'une année à l'autre; faire
la démonstration que tout son personnel est utilisé de
façon optimale et exiger qu'il dépose et soutienne ses bilans de
dotation des emplois et de développement des ressources humaines en
même temps que ses plans de dotation et de développement des
ressources humaines.
Même si la Loi sur la fonction publique accorde à la
Commission de la fonction publique
un mandat important à nos yeux, soit le pouvoir de
vérifier le caractère impartial et équitable des
décisions prises en vertu de la loi qui affecte les fonctionnaires, nous
estimons, compte tenu de certaines expériences que nous avons
vécues au cours de l'application de la présente loi, que la
Commission de la fonction publique devrait voir son mandat élargi pour
pouvoir rectifier les situations lorsqu'elle constate que les décisions
administratives outrepassent les dispositions de la loi ou des
règlements, particulièrement celle du favoritisme que nous avons
vécue au cours des dernières années.
Nous estimons également, particulièrement en
matière de dotation, qu'il est essentiel qu'une autorité soit
véritablement responsable et qu'elle puisse avoir une certaine autonomie
qui ne relèverait pas d'une autorité politique et
réitérons donc à nouveau notre intention à l'effet
que l'Office des ressources humaines devrait être l'unique organisme
assumant les responsabilités quant au recrutement et à la
promotion et que, conséquemment, il se rapporte directement à
l'Assemblée nationale. De plus, malgré un cadre légal
fixant les responsabilités du Conseil du trésor dans la gestion
du personnel, nous devons malheureusement constater un émiettement de
ses responsabilités. L'éloignement que nous constatons entre
l'établissement des mesures de gestion des ressources humaines et
l'application que nous en vivons nous permet de constater l'absence de
décideurs dans l'application des conventions collectives, et ce,
malgré l'utilisation incantatoire de l'imputabilité par les
gestionnaires locaux.
Aux fins d'éviter l'aggravation de problèmes liés
aux responsabilités du Conseil du trésor de signer les
conventions collectives, d'en surveiller et d'en coordonner l'application et le
vécu d'une application parfois fugitives dans les ministères et
organismes, nous vous suggérons d'accorder un pouvoir coercitif à
un organisme mandataire du gouvernement dans ses relations avec les services du
personnel des ministères et organismes.
En effet, nous croyons de plus en plus qu'un tel organisme devrait
être chargé de voir à l'application des conventions
collectives et qu'il devrait en déterminer l'interprétation
puisque nous estimons que, dans ce domaine, il est essentiel d'établir
une autorité claire en matière de gestion du personnel de la
fonction publique même si ceci peut créer parfois des
inconvénients tant pour les fonctionnaires que pour les associations de
fonctionnaires.
En effet, la multiplication indue du pouvoir de. gérance, au nom
d'une imputabiiité indiscernable dans l'application des conventions
collectives ou dans la tenue des concours, crée des engorgements
contraires à une saine utilisation du temps dévolu au
travail.
Cette possibilité actuelle d'encourager l'instauration de
multiples petites fonctions publiques dans la grande fonction publique indique
l'urgence de modifier les dispositions de la loi afin de rendre responsable un
seul organisme en ce qui concerne la gestion des ressources humaines. Il est
inadmissible selon nous, à l'aube du XXIe siècle, que les
restrictions législatives qui sont les nôtres et, par voie de
conséquence, la décision du gouvernement dé se soustraire
de l'application de diverses lois soit encore en vigueur.
Tel que nous l'avions revendiqué antérieurement et comme
l'avait également recommandé la commission spéciale sur la
fonction publique en 1982, nous estimons que le régime syndical qui est
actuellement applicable à l'ensemble des autres citoyens et citoyennes
du Québec, c'est-à-dire le régime prévu au Code du
travail, devrait être envisagé pour tous les fonctionnaires, quel
que soit leur niveau d'emploi. L'acceptation d'une telle recommandation
équivaudrait au retrait des mesures qui font en sorte que la Loi sur la
fonction publique soit une loi d'exception restreignant la portée du
Code du travail et qui, par voie de conséquence, restreint les droits
fondamentaux des travailleurs et travailleuses de la fonction publique.
Nous ne croyons pas, d'autre part, que l'appartenance à une
entité administrative ou à une classe d'emploi constitue en soit
un motif d'exclusion, tout comme nous ne croyons pas que le gouvernement soit
justifié de maintenir une telle exclusion et ainsi soustraire de
l'application de la Loi sur la fonction publique ou du Code du travail un
membre du personnel de l'Assemblée nationale ou de certains organismes,
tels le Directeur général dos élections et le Protecteur
du citoyen, ou parce qu'ils occupent certaines fonctions qui seraient de nature
confidentielle, particulièrement lorsqu'ils font partie du service du
personnel ou d'une direction du personnel.
Nous croyons que, dans ce domaine, le gouvernement confond abusivement
confidentialité et discrétion. D'autre part, nous
prétendons que le même équilibre de relations du travail
existant dans le secteur privé au Québec peut exister dans la
fonction publique, et ce, malgré les prétentions de certains
à l'effet que ce modèle ne s'applique qu'à l'entreprise
privée et qu'il n'est pas adapté au secteur public.
Vouloir pour un employeur, soit-il un gouvernement régissant par
législation, soustraire des sujets potentiellement divergents à
la négociation collective et libre n'atténue en rien ces
divergences, vous en conviendrez sûrement. Au contraire, elles
exaspèrent les employés qui ne peuvent accepter que leur
vis-à-vis se donne un avantage indu, celui de décider seul. Dans
ce contexte, un dialogue franc, fondé sur la bonne foi est difficilement
possible.
Nous demandons donc au gouvernement de relever le défi de la
libre négociation en rendant négociable l'ensemble de nos
conditions de
travail et, conséquemment, d'abroger la loi 37 sur le
régime de négociation dans les secteurs public et parapublic et
que la Loi sur la fonction publique soit expurgée de tout article ou
pouvoir réglementaire qui limite les conditions de travail
négociables.
Ainsi en est-il de la classification et de nombreuses autres
matières qui ne concernent rien de moins que la carrière de nos
membres. Le gouvernement, en plus de se soustraire à la libre
négociation de l'ensemble de nos conditions de travail, a jusqu'à
présent préféré agir seul sur un certain nombre
d'autres questions pourtant directement reliées à nos conditions
de travail. Le traitement de faveur qui nous est actuellement accordé
n'existe pas pour les personnels des réseaux de l'éducation, de
la santé et des services sociaux avec lesquels, cependant, le
gouvernement se plaît à nous comparer. Nous devons donc, à
regret, constater encore une fois, comme dans les années soixante, que,
plus on est prêt de la reine, moins elle a le désir de
négocier avec ses sujets.
Nous sommes convaincus que cette nouvelle orientation, si le
gouvernement y donnait suite, accroîtrait l'efficacité et la
productivité de la fonction publique québécoise par la
sécurité qu'elle apporterait à nos membres, l'arbitraire
qu'elle limiterait, l'accroissement possible de la souplesse dans la gestion
des ressources humaines, la réduction des délais et
assurément une motivation plus grande, un défi qui est
sûrement alléchant et que nous sommes disposés à
relever.
Lé gouvernement devra aussi se considérer comme un
employeur ordinaire dans certains autres domaines, tels la détermination
des services essentiels, les programmes d'accès à
l'égalité, sans oublier la santé et la
sécurité du travail. Il est anormal, selon nous, que les
programmes d'accès à l'égalité, qui sont
implantés dans les ministères et organismes, ne soient pas
assujettis à l'approbation, ni à la surveillance de la Commission
des droits de la personne.
Compte tenu des résultats obtenus, notamment dans le cadre des
programmes d'accès à l'égalité pour les femmes,
nous n'avons aucune hésitation à prétendre que le
gouvernement n'a pas rencontré ses obligations dans ce domaine, et nous
pouvons donc nous interroger sur l'organisme qui aura le pouvoir de contraindre
le gouvernement d'aller au-delà de belles déclarations
d'intentions qu'à l'occasion, il se permet de publiciser, toujours
à l'occasion de circonstances particulières.
Nous prétendons que les programmes d'accès à
l'égalité que le gouvernement devait implanter depuis plus de 10
ans dans la fonction publique sont un échec pour le groupe de femmes que
nous représentons. Nous sommes convaincus que les résultats
atteints, qui, selon les données statistiques, peuvent s'avérer
positifs, sont beaucoup plus le résultat du processus d'embauche que le
résultat concret des programmes d'accès à
l'égalité en emploi pour les femmes qui font déjà
partie de la fonction publique.
De plus, malgré la mise en place d'une politique visant les
personnes handicapées, force nous est de constater qu'entre autres, la
réintégration à l'emploi du personnel devenu
handicapé ne trouve malheureusement pas sa finalité dans la
fonction publique, puisque certains fonctionnaires ouvriers se voient mis
à pied lorsqu'on cours d'emploi, ils deviennent invalides. Pour ce qui
est des programmes à l'intention des membres des communautés
culturelles, dont je suis, il est encore trop tôt pour se prononcer sur
un tel programme, compte tenu de sa récente adoption, et notamment du
gel de l'embauche dans la fonction publique.
Nous sommes, par contre, heureux de constater que le gouvernement, lors
des dernières négociations pour le renouvellement de la
convention collective, s'est rendu à l'évidence même qu'un
programme d'aide aux employés nécessitait que toute action en la
matière soit conjointe en acceptant de nous y associer à titre
consultatif. Dans le domaine de la santé et de la sécurité
du travail, nous devons vous faire part de notre indignation devant les retards
indus et délibérés, semble-t-il, de la part de certains
ministères et organismes à rendre opérants dans la
fonction publique les articles qui. constituent la pierre d'assise de la loi
17.
Nous estimons que le gouvernement abusé sans vergogne de ses
pouvoirs. Nos membres font plus souvent qu'autrement l'objet de chantage
lorsqu'ils tentent de revendiquer leurs droits dans ce domaine, subissant les
menaces de leurs gestionnaires de voir confier à sous-contrats les
travaux qu'ils exécutent actuellement.
Nous demandons donc au gouvernement de s'inscrire pleinement dans
l'esprit de la Loi sur l'Assemblée nationale, d'être un
modèle en la matière et de proclamer les règlements de la
Commission sur la formation des comités de santé et de
sécurité et la désignation et l'action de
représentants à la prévention de la fonction publique,
afin d'en faire un véritable secteur prioritaire. Pouvons-nous
espérer que ceci soit un fait accompli au cours des prochaines
semaines?
S'il y a un domaine dans lequel la loi actuelle, malgré nos
revendications formulées avant son adoption, a imposé des reculs
aux fonctionnaires et ouvriers, c'est bien le processus de dotation qui est
actuellement en vigueur et qui a été mis en place sous le
prétexte que ses nouveaux aménagements étaient
prévus pour assurer un meilleur choix dans de meilleurs délais et
à un coût plus raisonnable.
Contrairement aux principes énoncés à l'article 3
de fa Loi sur la fonction publique, qui est à l'effet de favoriser
l'impartialité et l'équité des décisions affectant
les fonctionnaires, nous sommes plus convaincus que jamais que les
modalités actuelles ont ouvert une porte extrêmement large au
favoritisme et à la partialité,
particulièrement au niveau administratif.
Nous avons été en mesure de constater que, si un
fonctionnaire souhaitait sortir du labyrinthe que lui imposent les dispositions
actuelles, il est quasi nécessaire qu'il soit quelque peu
"pistonné". De plus, l'employé qui, finalement, voit son nom
inscrit sur une liste de déclaration d'aptitudes n'est pas
nécessairement au bout de ses peines, puisqu'il n'est pas assuré
d'être titularisé, le ministère pouvant décider de
ne plus utiliser une telle liste advenant le cas où la candidature
disponible ne lui conviendrait pas. Les délais feront leur oeuvre.
Comme si les contraintes actuelles n'étaient pas suffisantes pour
limiter les droits de la collectivité, un fonctionnaire peut
également faire l'objet d'une promotion sans concours. Malheureusement,
dans ce domaine, nous avons vécu trop de situations qui nous
démontrent que les sous-ministres ont pu ainsi engager ou accorder des
promotions aux personnes qu'ils souhaiteraient favoriser au détriment de
l'ensemble des personnels de la fonction publique.
Nous estimons donc que la situation est suffisamment alarmante pour
redonner à tout le processus de dotation la crédibilité et
la transparence qu'il se devrait d'avoir et souhaitons donc que
l'Assemblée nationale prenne les dispositions appropriées afin
qu'une enquête approfondie soit effectuée dans les meilleurs
délais aux fins de trouver les correctifs qui s'imposent.
Nous nous estimons pleinement justifiés de traiter de la
situation du personnel occasionnel, puisque nous constatons que, pour les
catégories d'emplois que nous représentons, plus de 10 000
personnes sont généralement en poste à ce titre, et ce,
sur une base régulière. Nous ne devons pas oublier que le
Syndicat des fonctionnaires a été, dès 1973, l'instigateur
de la syndicalisation de cette catégorie de personnel et a pu obtenir
une telle reconnaissance minimale après de nombreuses démarches
judiciaires.
Nous croyons, cependant, que la décision du Conseil du
trésor de modifier en 1985 la directive alors en vigueur, afin de
permettre au ministère de créer des fichiers ministériels,
dans lesquels les citoyennes et citoyens devaient soumettre leur candidature, a
été la raison d'être de l'Instauration d'un système
de patronage qui, en plus d'être nécessairement politique, est
également de nature administrative. Or, l'expérience nous
démontre que le patronage administratif est plus pernicieux quo le
patronage politique, étant difficilement imputable de façon
précise à des autorités Identifiables.
Quant au patronage politique, nous n'avons rien à vous apprendre,
puisque vous êtes sûrement à même d'en évaluer
les résultats et les possibilités qui sont offertes à tous
ceux et celles qui oeuvrent dans l'appareil politique gouvernemental.
Nous croyons que la teneur du rapport annuel de la Commission de la
fonction publique 1988-1989, quoique timide sur cet aspect, est malgré
tout éloquent et devrait inciter les membres de la commission du budget
et de l'administration à se pencher sérieusement sur cet aspect
et à convenir de modifications majeures aux dispositions de la loi.
Nous croyons, tout comme la Commission de la fonction publique, que le
statut juridique des occasionnels doit faire immédiatement l'objet d'un
examen sérieux à un niveau plus global par le Conseil du
trésor, en cohérence avec les grands principes
énoncés dans la Loi sur la fonction publique. Nous constatons
à regret que, dans plusieurs de nos secteurs d'activité, la
règle d'exception qui permettait l'embauche des catégories de
personnel et qui devait pallier des situations marginales devient
malheureusement une règle do gestion généralisée,
encouragée par l'ensemble des paliers d'autorité, une
façon abusive de contourner la règle générale.
Jumelé à l'objectif de réduction des effectifs
permanents, cette pratique de gestion a pour conséquence directe que des
emplois qui devraient être reconnus comme permanents sont en fait
comblés par des employés occasionnels, comme nous avons eu
notamment l'opportunité de le démontrer lors de l'audition de la
requête en jugement déclaratoire concernant les secrétaires
de juges, ce qui est sûrement une job permanente.
D'autre part, l'escalade des coûts supplémentaires
liés à l'initiation et à la formation de personnel
constamment renouvelé nous semble peu compatible avec des principes de
saine gestion et de rentabilité de la fonction publique.
Nous estimons, quant à nous, qu'un travailleur ou une
travailleuse qui occupe un poste à caractère permanent devrait
être embauché sur une base permanente et, conséquemment,
tout poste à caractère permanent devrait être comblé
de façon permanente par des effectifs réguliers.
Continuer à nier ce droit nous ramène à la
période d'avant 1960, où l'ensemble des employés de la
fonction publique possédaient un statut d'emploi plus que
précaire, avec toutes les possibilités d'abus du pouvoir, tant
administratif que politique, que nous avions crues révolues.
Nous avions, lors des récentes négociations pour le
renouvellement de la convention collective, souhaité trouver une
solution adéquate à cette situation en prévoyant que tout
employé à l'emploi du gouvernement depuis plus d'un an sur un
emploi à caractère permanent soit nommé à titre
permanent.
Nous estimons que l'Assemblée nationale devrait envisager
l'adoption de dispositions similaires à celles prévues à
l'article 164 de la Loi sur la fonction publique actuelle afin de
régulariser la situation de ces miliers de personnel dont la situation
est pleine d'incertitudes. Il est également important de constater que
cette catégorie de personnel est composée plus souvent
qu'autrement de jeunes et particulièrement de
femmes qui servent la population québécoise depuis
quelques années et qu'il est essentiel pour les fins de la
collectivité québécoise et pour assurer la progression
économique qu'une certaine stabilité leur soit également
possible. Dans le cas contraire, on peut difficilement parler d'une
réelle politique de planification familiale.
D'autre part, les effectifs de la fonction publique ne seront pas
indéfiniment compressibles. Continuer dans cette voie du rapetissement
de l'appareil administratif de l'État contribue à la
détérioration d'un instrument collectif important.
La baisse continuelle des effectifs dans certains secteurs met en
péril certaines missions de l'État lorsqu'elle n'a pas pour effet
la réduction, sinon l'abolition de services à la population. Afin
de corriger certaines anomalies constatées lors du recrutement du
personnel occasionnel, nous prétendons que le recrutement de cette
catégorie d'employés sur des emplois effectivement occasionnels
devrait être effectué à la suite de déclarations
d'aptitudes de l'Office des ressources humaines.
La priorité d'accès aux emplois permanents devrait, par la
suite, être accordée à cette catégorie de personnel,
et un certain droit de rappel devrait être également
accordé à un employé occasionnel qui aurait
accumulé six mois de service dans un même emploi.
Il est également une catégorie de personnel qui vit une
situation encore plus précaire que le personnel occasionnel, plus
couramment reconnu comme stagiaires en milieu de travail.
Les constatations que nous faisons de l'expérience vécue
dans la fonction publique nous démontrent que, de toute évidence,
ces personnes ne reçoivent pas la formation que tout employeur doit leur
fournir et que, conséquemment, c'est beaucoup plus l'utilisation d'une
telle main-d'oeuvre que nous pourrions considérer comme étant du
"cheap labour" qui est actuellement effectuée par l'ensemble des
ministères et organismes.
Conséquemment, de tels stagiaires reçoivent une
rémunération dérisoire pour le travail qu'ils
accomplissent dans les divers secteurs de travail où ils sont à
l'emploi, alors qu'à toutes fins pratiques, ils remplacent des
employés occasionnels. Cette situation devra nécessairement aussi
être corrigée.
De plus en plus, le gouvernement a pour philosophie de vouloir confier
la réalisation de certains travaux auparavant effectués par nos
membres à des intervenants de l'extérieur. Pour justifier le
recours à un tel fonctionnement, la plupart des ministères et
organismes invoquent, généralement, des économies
potentielles. Dans d'autres cas, cependant, le recours à la
sous-traitance à pour unique but de se soustraire à l'application
de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.
Nous croyons que le gouvernement peut difficilement prétendre que
l'octroi de tels sous-contrats a pour effet de maintenir, à tout le
moins dans le domaine de l'entretien, la qualité des services rendus
à la population, et encore moins l'augmenter. Nous ne pouvons non plus
affirmer que l'économie de coûts est le seul motif invoqué,
mais il sert aussi de prétexte à des impératifs beaucoup
moins louables que nous n'avons sûrement pas, compte tenu de votre
expérience, dans ce domaine à vous énumérer.
Nous estimons que dans ce domaine, le gouvernement devra faire preuve de
transparence aux fins de pouvoir en discuter de façon plus approfondie
avec les organismes représentant les personnels. Nous estimons qu'il est
grand temps que le gouvernement restreigne de plus en plus le recours à
la sous-traitance et mise sur les ressources internes qu'il possède aux
fins d'éviter les pertes d'expertises déjà existantes dans
la fonction publique.
C'est en 1982 que le gouvernement nous avait annoncé la
privatisation de certains services de la fonction publique. Depuis lors, les
gouvernements qui se sont succédé ont maintenu cette orientation.
Nous ne croyons pas que le secteur privé puisse ou doive continuer
à gruger dans des activités qui sont la responsabilité
première de l'État.
Quant à nous, nous croyons que la notion de recherche du profit
est étrangère à l'entreprise publique, même si elle
a son importance. Elle peut même être contraire à des
objectifs comme ceux de l'équité sociale, de protection du
consommateur, de préservation dé divers patrimoines, de poursuite
d'un effort collectif important au plan économique,
particulièrement pour certaines régions, pour ne nommer que
ceux-là.
De plus, l'expérience des négociations que nous avons
vécues avec des sociétés déjà existantes
démontre la totale emprise du Conseil du trésor sur de telles
organisations. Alors, pourquoi créer des apparences de
décentralisation? Nous suggérons plutôt d'utiliser les
possibilités de décentralisation des mandats que contiennent
déjà les lois de la fonction publique et de l'administration
financière pour optimiser la gestion de certains services
gouvernementaux plutôt que de créer des faux-fuyants. Nous
estimons que le développement de la société
québécoise repose aussi sur un secteur public en santé,
capable de jouer pleinement son rôle. Lors de la campagne
électorale de 1985, un représentant du gouvernement actuel avait
endossé le bilan très négatif que nous faisions à
l'époque de la gestion de la fonction publique. Il a même
affirmé: Le gouvernement devra associer ses employés et
employées pour une meilleure qualité de vie et de services
à la population parce que les services, entre autres donnés par
le gouvernement, ont été diminués depuis quelques
années.
À la suite de son élection, le gouvernement a
annoncé, lors de son premier discours inau-
gural, son intention de faire des employés et employées de
l'État des partenaires dans la recherche d'une administration publique
plus productive au service des citoyennes et citoyens.
Près de cinq ans après ces engagements, nous avons le
sentiment que ce n'était que des paroles en l'air, puisqu'en pratique
nous avons été tenus à l'écart de toutes les
réflexions sur le devenir de la fonction publique; et au niveau des
divers milieux de travail, nos membres ont constaté une gestion aussi
sinon plus opaque que celle mise de l'avant par le précédent
gouvernement.
Nous croyons, quant à nous, à la nécessité
de la mobilisation de personnel à la fois en tant que travailleuses et
travailleurs qui mettent leurs compétences au service do la population,
on tant que citoyennes et citoyens qui vivent dans une société
qui doit compter sur une fonction publique imaginative, productive et efficace
pour continuer à se développer.
Nous estimons que le niveau des effectifs que nous connaissions lors de
Contrée en vigueur de la présente Loi sur la fonction publique
était le seuil en deçà duquel l'éventail et la
qualité des services donnés à toutes les composantes de la
société ne peuvent être maintenus. Comme ces services que
nous donnons contribuent au mieux-vivre et à la richesse collective de
la population, nous ne pouvons qu'affirmer que les Québécois et
Québécoises en seront aujourd'hui plus pauvres. Nous estimons que
l'Assemblée nationale devrait se pencher sur cet aspect. Nous croyons
donc essentiel que le gouvernement prenne les mesures pour amener les effectifs
à un niveau précité. Nous croyons également que le
recours de plus en plus systématique à l'embauche d'effectifs
occasionnels ne relève pas d'une gestion éclairée de
l'appareil de l'État, mais plutôt d'une gérance à la
petite semaine, traduisant ainsi un manque flagrant de planification.
Nous exigeons donc que tout poste à caractère permanent
soit comblé de façon permanente par des effectifs
réguliers selon le niveau de l'emploi. Pour montrer l'importance que le
gouvernement attache à la fonction publique, nous estimons que la
moindre des décisions soit à l'effet d'élargir le
rôle, les mandats et la composition de la Commission de la fonction
publique.
Nous croyons qu'on devrait permettre à la population, aux
syndicats et au gouvernement de collaborer à l'amélioration des
services publics. La Commission de la fonction publique pourrait être le
lieu d'une telle collaboration. Il suffirait de changer son rôle, sa
composition et son mandat. Nous nous permettons de vous rappeler que notre
volonté d'oeuvrer à une meilleure visibilité et à
une meilleure perception de la fonction publique par les citoyens et citoyennes
s'est déjà traduite par diverses campagnes publicitaires dans
lesquelles nous avons déjà investi des sommes importantes.
Le gouvernement devrait donc se rendre compte qu'il doit contribuer lui
aussi à cet effort de restauration de limage de la fonction publique.
Beaucoup de gestionnaires du secteur privé parmi les plus avisés
ont compris les avantages de pouvoir compter sur du personnel fier de son
appartenance à l'organisation. Nous ne croyons pas que, dans ce domaine,
le programme de reconnaissance de l'excellence mis en place par le Conseil du
trésor réponde à nos attentes. Nos membres n'ont que faire
d'appréciation, d'épin-glettes ou de certains congés
spéciaux. (14 h 30)
D'autre part, afin de vous permettre, à titre de membres de la
commission du budget et de l'administration, de formuler les modifications qui
s'avéreraient nécessaires à la présente Loi sur la
(onction publique, compte tenu de la période de temps limité qui
nous est accordée pour faire valoir notre point de vue, nous estimons
qu'un groupe de travail devrait être formé, composé de
représentants des divers intervenants dans la gestion des ressources
humaines dans la fonction publique, aux fins de permettre d'échanger
dans un contexte de travail plus approprié sur les solutions à
envisager pour assurer à nos citoyennes et citoyens les services de
qualité.
Nous croyons d'autre part que le processus de révision de la mise
en oeuvre de la loi, que nous expérimentons actuellement, devrait
être introduit de façon permanente, et ce, indépendamment
des modifications qui pourraient être apportées à la loi
suite aux travaux de la présente commission.
En effet, nous croyons qu'il serait de mise que l'ensemble de la gestion
de la fonction publique puisse faire régulièrement l'objet de
discussions et de réflexions par l'entremise d'une commission
parlementaire qui pourrait entendre à ce sujet - peut-être plus
longuement, nous le souhaitons - les représentations des personnes et
organismes intéressés et aurait également le mandat
d'étudier l'opportunité de maintenir en vigueur ou, le cas
échéant, de modifier la loi pour tenir compte de
l'évolution des besoins de la société
québécoise.
Qu'il s'agisse des déficiences dans la gestion des ressources
humaines, de la précarisa-tion de l'emploi, des problèmes
d'accès à l'égalité, de la multiplication des
sous-contrats, de sociétés autonomes, des iniquités dans
le domaine de la libre négociation, ou de l'avenir même de la
fonction publique, nous sommes convaincus que pour chacun des problèmes
que nous avons exposés aujourd'hui rapidement, il y a des solutions
pratiques et réalistes. Il y va de notre intérêt commun de
les trouver et de les mettre en application.
Nous voulons être des partenaires actifs d'une fonction publique
plus impliquée et plus efficace dans les services que nous rendons
à la
population, mais encore faut-Il que vous nous en donniez les
moyens..
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Syndicat des fonctionnaires provinciaux. Dans un premier temps, je prends
bonne note de vos commentaires du début, et j'aimerais vous assurer que
cette commission parlementaire a comme objectif premier, comme je l'ai dit ce
matin, de faire en sorte de mieux servir les citoyens et les citoyennes du
Québec par une administration plus efficace et plus efficiente.
J'ai pris le temps, et je ne le regrette pas, de lire les 47 pages de
votre mémoire y compris votre synthèse de 12 pages. Je vous
passerais bien le mien. Vous allez voir qu'il est très annoté. Je
veux aussi ajouter que j'ai pris connaissance de certaines de vos remarques que
je trouve intéressantes, lorsque vous parlez d'une possibilité,
au tout début de la première page dans le bas, de peut-être
revoir ou réviser ce qui pourrait être apporté comme
modifications par l'Office des ressources humaines ou à la Commission de
la fonction publique et avoir des mots à dire là-dessus. Aussi,
lorsque vous faites état de modalités d'un processus permanent de
révision de la loi, il y a des choses que je trouve
intéressantes. Il y a des choses sur lesquelles j'ai beaucoup de
questions - je ne suis pas le seul, mes collègues de Limoilou,
Mille-Îles, les îles et de Prévost - mais il y a une chose
dont je peux vous assurer, c'est qu'à la page 23 de votre
mémoire, lorsque vous faites état qu'il est nécessaire
pour que les fonctionnaires aient une promotion dans la fonction publique - et
je vais employer votre expression - qu'ils soient quelque peu
"pistonnés", moi, je peux vous assurer d'une chose que cette commission,
elle n'est pas "pistonnée". M. le député de
Mille-Îles, la parole est à vous.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. On va essayer
de faire vite parce qu'on a des blocs de 10 minutes. On va essayer d'en sortir
le plus possible. Page 3 de votre résumé, de votre
mémoire: Les devoirs de l'administration. "Chaque sous-ministre devrait
à tout le moins répondre aux attentes suivantes - on fixe des
attentes, des objectifs, des mandats clairs, précis, deux façons
- faire la démonstration que les programmes qu'il administre sont plus
efficients et efficaces d'une année à l'autre - ça, tout
le monde devrait être d'accord avec ça - faire la
démonstration que son personnel est utilisé de façon
optimale, en déposant notamment ses bilans et projets de dotation et de
développement des ressources humaines. " Or, deux côtés:
production, gestion des ressources humaines. On voit déjà que
vous le dégagez. Première question, M. Harguindeguy: À qui
doit-il être responsable? Vous êtes muet dans votre document
là-dessus. On part de la tête de la pyramide et on va descendre de
la tête de la pyramide et on va aller voir jusqu'où
l'imputabilité doit aller. Mais la première personne à qui
vous dites: Faites vos devoirs, à qui doit-elle répondre?
M. Harguindeguy: Si vous me permettez, M. le Président, je
vous référerais à la page 8 de notre mémoire plus
complet - parce que dans le résumé, on ne pouvait pas quand
même tout mettre - pour vous souligner que le gouvernement aurait
intérêt à se référer à nouveau aux
recommandations formulées dans le rapport de la commission Bisaillon -
page 43 du rapport de 1982 - qui indique que c'est auprès de
l'Assemblée nationale que les sous-ministres devraient faire rapport. Je
peux vous lire la partie de cette disposition-là. Je pensais que
c'était connu. On ne s'est pas référé à
tout, vous comprendrez, parce que 20 minutes, ça n'aurait même pas
été suffisant. Alors, on disait pour les sous-ministres: La
commission est convaincue de rendre le sous-chef imputable... Alors, vous ayez
la page suivante, on dit: Le Conseil des ministres pourra, devant une
confirmation suffisante d'incurie administrative, démontrer par une
commission parlementaire ou autrement, modifier substantiellement la
responsabilité des conditions de travail... Et c'est là que
l'Assemblée nationale indiquait... En tout cas, à
l'époque, le rapport Bisaillon disait que ça devait être
auprès d'une commission parlementaire et que l'Assemblée
nationale... On dit. "En conséquence, la commission est d'avis qu'il y
aura lieu de priviléger l'ordre suivant: d'abord, les organismes quasi
autonomes et l'Assemblée nationale, puis les ministères, en
donnant une priorité générale aux ministères
à réseau, et enfin les organismes centraux. Notons
qu'annuellement, une douzaine de ministères ou organismes pourraient
être convoqués de façon discrétionnaire par la
commission parlementaire responsable de l'imputabilité des sous-chefs.
Cela permettrait, en cinq ans, de rencontrer les sous-chefs responsables de la
presque totalité des effectifs de la fonction publique. Notre
mémoire faisait référence à cette
recommandation-là.
M. Bélisle: O. K. Alors, c'est plus précis parce
que ce n'était pas exactement dans votre mémoire tel quel. C'est
sûr que vous faisiez référence à la commission
Bisaillon...
M. Harguindeguy: C'est ça.
M. Bélisle:... mais ce n'était pas
précisé avec autant de précision que vous le faites
présentement. Quand on parle de sous-chefs, on parle de cadres...
M. Harguindeguy: Sous-chefs, ce sont les dispositions de la loi
elle-même qui établit c'est quoi un sous-chef...
M. Bélisle: En vertu de..
M. Harguindeguy:... c'est le sous-ministre.
M- Bélisle:... la Loi sur la fonction publique, ce sont des
sous-chefs, des cadres.
M. Harguindeguy: C'est le terme que j'utilise depuis près
de 20 ans.
M. Bélisle: Est-ce que vous appliquez, dans votre
recommandation, quant à l'imputabilité - aux pages 8| et 9 - des
sous-ministres con tenue dans le rapport Bisaillon, par voie indirecte, de ce
que vous incluez... Est-ce que vous allez aussi loin que les sous-chefs,
c'est-à-dire les cadres du gouvernement soient imputables et rendent
compte à l'Assemblée nationale du Québec?
M. Harguindeguy: En fait, si vpus voulez aller jusque-là,
je vous ai sûrement donné libre cours, mais les cadres sont
généralement responsables à un niveau hiérarchique,
qui peut être au directeur de service ou au sous-ministre aussi,
même au ministre. Si vous voulez voir tous les cadres passer devant vous
- parce qu'il y en a plusieurs, on vpus interroge quelquefois même sur la
nécessité d'être aussi nombreux, parce qu'on vit Line
réduction d'effectifs et on a une augmentation des cadres pareil - s|
vous voulez que les quelque 3000 passent devant vous, vous n'aurez pas fini. Il
faudrait que vous preniez seulement cinq minutes chacun, vous n'aurez pas
grapd-chose. Donc, celui qui est responsable finalement des deniers publics,
c'est le sous-ministre, le sous-chef, c'est ce qui est prévu dans la
loi.
M. Bélisle: Je ne pense pas que ce spit notre intention de
voir tout le monde, absolument pas. Je pense que c'est d'être
sérieux et de voir peut-être un certain nombre de personnes, ce
qui ne se fait pas, au moins cette chose-là est
précisée.
M. Harguindeguy: Mais il y a quand même un niveau
hiérarchique qui existe déjà dans chacun des
ministères ou organismes.
M. Bélisle: D'accord, d'accord, d'accord.
M. Harguindeguy: Bien, ça doit jouer son rôle.
M Bélisle: Quand on parle effectivement de permanence, ça
revient souvent; quand vous faites référence aux sous-ministres,
qui sont à la tête de la pyramide... Devoirs de l'administration,
vous, n'avez pas mentionné, vous êtes muet dans votre rapport...
Avez-vous une idée, avez-vous une opinion ou peut-être que vous
n'avez pas d'opinion sur la durée d'un mandat qui devrait être
accordé à un sous-ministre?
M. Harguindeguy: En fait, la durée des mandats des
sous-ministres, vous avez... Chaque ministre aime bien s'entourer de
collaborateurs en qui il a bien confiance. Comme, généralement,
les mandats des ministres sont de quatre ans - parfois ils sont plus brefs, des
fois, ils sont plus longs - j'imagine qu'un ministre veut garder quelqu'un sur
lequel il a l'emprise, parce que faut-il aussi qu'il soit assuré que le
sous-ministre ne prendra pas de décisions qui vont emporter son
siège éventuellement. Généralement, les mandats, de
ce que je connais, quand il y a des changements ministériels, même
en cours du mandat d'un gouvernement, bien souvent, le sous-ministre change.
Alors, de là à vous recommander d'avoir une durée
permanente de mandat d'un sous-ministre, je pense bien que ça ne
passerait sûrement pas. On ne demande pas ça, on a autre chose de
pjus important pour nous, que nous revendiquons devant la présente
commission.
M. Bélisle: Quand vous parlez d'excellence, M.
Harguindeguy, vous avez dit tantôt dans votre discours "des
épinglettes"...
M. Harguindeguy: Oui.
M. Bélisle:.. et des congés, etc. Dans ce
style-là, vous n'en avez pas besoin.
M. Harguindeguy: C'est le cadre du programme actuel, M. le
député.
M. Belisle: O. K.
M. Harguindeguy: Si vous prenez connaissance du programme mis de
l'avant par le...
M. Bélisle: Exact.
M. Harguindeguy:.. Conseil du trésor, le programme a pour
effet de remercier ou de reconnaître un geste particulier d'un
fonctionnaire en lui transmettant soit une lettre d'appréciation; dans
certains ministères, ça a été des
épinglettes d' appartenance au ministère. Vous avez soit un
congé spécial avec traitement, pouvant aller jusqu'à cinq
jours ou le maximum étant une prime de 500 $. Ça, c'est le
programme qui est actuellement mis de l'avant par le Conseil du trésor
et dans l'ensemble des ministères. On estime que c'est faire totalement
fausse route, parce que ce qu'on doit, quant à nous, développer,
c'est un sentiment d'appartenance collectif. Il y a une synergie qu'on devrait
quand même développer dans les divers services gouvernementaux et,
quant à nous, le programme du Conseil du trésor passe
complètement à côté de la "track".
M. Bélisle: La portion effectivement des 500 $
versés, prime qui est comptable en aspect
monétaire, quant au rendement d'un individu, est-ce que vous
êtes pour ou contre un système semblable?
M. Harguindeguy: Absolument contre. M. Bélisle:
Vous êtes contre.
M. Harguindeguy: L'argent achète trop de choses en ce bas
monde.
M. Bélisle: Vous êtes contre ça.
M. Harguindeguy: Ce n'est pas ça que les gens demandent.
C'est bien beau d'avoir donné de l'argent pour satisfaire sa conscience
en tant qu'employeur, en disant: On vous a donné des primes, on vous a
donné telle chose, ça va bien, tout va bien. Ce que les gens
veulent, c'est avoir la possibilité de progresser à
l'intérieur de la fonction publique, chose qu'ils n'ont pas à
l'heure actuelle. Actuellement, on vous indique que la dotation des emplois, il
n'y a plus personne qui y croit. Parce que si vous voulez avoir une chance de
promotion, malheureusement... Le dernier rapport statistique de la Commission -
parce que depuis 1987, il n'y en a pas eu d'autres d'effectué -
démontre qu'il y avait 50 % des promotions qui étaient
données sans concours. Ça veut dire qu'on assoit quelqu'un de
façon bien arbitraire sur une chaise donnée. On dit: Soit
tranquille pendant un an, ne fait pas de trouble à personne, dans un an
on va te qualifier, tu vas être nommé. Et ça, ça
désabuse bien du monde. Il y a du monde qui n'y croit plus, à la
promotion, parce que, avec les conditions additionnelles qui peuvent être
assorties dans un concours, on peut déterminer et faire le portrait de
l'individu qu'on veut asseoir sur une chaise.
J'ai déjà vécu un concours où on demandait,
pour être sur une chaise de magasinier qui n'est quand même pas un
poste de gérance bien important, magasinier, d'être
résident de la localité de Sainte-Foy. Dans les recherches que
nous avons effectuées, on a retrouvé une seule personne qui
pouvait rencontrer ce critère-là. Et on peut ajouter toutes
sortes de conditions, dire: Vous devez appartenir à telle entité
administrative, avoir tant d'années d'expérience dans tel
domaine, tel autre, dans tel autre domaine. Finalement, quand on épluche
tout le monde qui s'inscrit, il en reste deux ou trois qu'on est d'accord pour
avoir. Et si, malheureusement, quelqu'un passe le tamis et réussit
à se qualifier, tout ce que le ministère a à faire, c'est
d'attendre pour combler l'emploi, dire: Là, je le gèle, je ne le
compte plus, celui-là. Dans un an, deux ans ou trois ans maximum, la
liste de déclaration d'aptitudes va devenir caduque et notre ami va
devoir se qualifier à nouveau. Je pourrais vous en citer, si on avait le
temps, de nombreux cas où des individus ont dû se qualifier
jusqu'à cinq et six reprises, réussir le premier niveau et,
chaque fois, ne pas pouvoir faire l'objet d'une nomination parce que la
personne était persona non grata dans le ministère.
Ça, c'est le mode de dotation qu'on vit dans la fonction publique
québécoise actuelle. Le Conseil du trésor se satisfait de
ça, c'est évident. Ils ont la mainmise sur tout ce qui peut se
faire. Ils ont les belles règles du jeu. Ils changent les
règlements, dans la "game" de cartes, comme ils veulent. Mais nous, on
estime que la commission parlementaire doit se pencher sérieusement sur
toute la gestion de la fonction publique, si vous y croyez le moindrement.
Autrement, ça ne vaut pas la peine.
M. Bélisle: Est-ce que c'est exact, M. Harguindeguy,
est-ce que ça existe, les primes actuelles de rendement qui sont
données par rotation?
M. Harguindeguy: Non. Ce matin... M. Bélisle: Ce
n'est pas vrai, ça?
M. Harguindeguy: En tout cas, pas à notre niveau. Ce dont
on a parlé ce matin, qui est illégal, qui est contraire à
la convention collective, ce sont des primes de poste, quelqu'un qui est
affecté temporairement pour une période qui ne doit pas
excéder six mois, dans la fonction publique, à notre niveau, du
moins, ce sont des primes pouvant aller jusqu'à 5 % du traitement,
lorsque la personne exécute des responsabilités plus grandes.
Quand vous parlez des primes de rendement, il faut dissocier ça du
rendement réel. Ça, c'est pour les sous-ministres, pour leur
permettre de repartir l'enveloppe budgétaire qui est accordée
pour les cadres. La rémunération des cadres est basée sur
quoi? Essentiellement, les effectifs qu'ils dirigent et également
l'évaluation qui est faite de leur rendement sur une base de
pourcentage. Il y a, mettons, 4 % de la masse salariale qui est accordée
pour les salaires des cadres. Il ne peut pas y avoir des "excellents" parce
que, autrement, il faut leur donner plus de 2 % ou 3 % et il faut en donner un
petit peu à tout le monde pareil. Alors, c'est strictement une politique
de rémunération. Et ça aussi, quant à nous... En
tout cas, ce n'est pas notre groupe. Ils vont sûrement se
présenter pour parler de ça.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Harguindeguy: Mais, en tout cas, chez nous, on n'en a pas et
on n'en veut pas non plus. D'ailleurs, on n'en a jamais demande. Parce que,
tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas de critères qui ne seront pas
arbitraires, qui permettront à un employé d'être
évalué à son mérite, on est opposé aux
primes au rendement parce que, actuellement, c'est le patronage et le
"pistonnage" qui fonctionnent pour ces primes-là. Avancement
accéléré pour rendement excellent,
on connaît tous...
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Mille-Îles. Deux questions très rapides.
Êtes-vous en train de nous dire que la promotion sans concours est
devenue un mode de dotation?
M. Harguindeguy: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Deuxième question...
M. Harguindeguy: Et je pourrais vous indiquer même des
services où pratiquement 95 % des effectifs en place ont eu des
promotions sans concours.
Le Président (M. Lemieux): Êtes-vous en train de me
dire que ce qu'on retrouve au dernier paragraphe de l'article 43 de la loi 51,
relativement aux exigences additionnelles eu égard à l'emploi,
devrait disparaître?
M. Harguindeguy: Je ne nie pas que, dans certaines situations, il
puisse y avoir des exigences qui soient normales. Mais avoir des exigences dans
tel corps d'emploi qui est d'un niveau technique, comme exiger que la personne,
mettons, en plus d'avoir son diplôme du collégial, doive
satisfaire à deux ou trois ans d'expérience pratique, ça,
c'est de favoriser du monde au détriment des autres.
Lé Président (M. Lemieux): Ce que vous êtes
en train de me dire, c'est qu'on se sert de l'article 43, deuxième
paragraphe, si on désire avoir quelqu'un qui a une oreille plus basse
que l'autre, qui a le nez un petit peu plus large et les cheveux plus raides.
On est capable de le faire, c'est ça que vous voulez dire?
M. Harguindeguy: On élimine, avec cette
disposition-là, l'article 43, qui permet à un
sous-minlstre...
Le Président (M. Lemieux): De faire du patronage
administratif?
M. Harguindeguy: .d'exiger des conditions additionnelles, de
faire du patronage administratif... (14 h 45)
Le Président (M. Lemieux): Merci.
M. Harguindeguy: Et Dieu sait s'il s'en fait!
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
féliciter M. le président du Syndicat des fonctionnaires, lui et
son équipe, pour le travail considérable qu'ils ont fait en
préparant ce mémoire. Je me réjouis, au départ,
qu'il suggère qu'on fasse valoir davantage les droits de la population
à des services publics de qualité, en l'Inscrivant dans la loi,
sous la forme de cinq principes fondamentaux, c'est-à-dire obligation,
accessibilité, empressement, efficacité et
désintéressement. Je pense que c'est tout à l'honneur des
fonctionnaires de faire cette suggestion.
Deuxièmement, je note aussi que vous revenez - à la page 5
et à la page 17 - avec assez d'insistance, sur le favoritisme qui
semble, selon votre mémoire, s'accroître de plus en plus dans la
fonction publique. Alors, j'aimerais peut-être que vous nous en parliez
de façon un peu plus détaillée, de la même
façon que pour le phénomène de la sous traitance.
Deux points additionnels sur lesquels je voudrais entendre vos
commentaires. La loi prévoit, à l'article 171: "Le gouvernement
désigne les ministres responsables de l'application des dispositions de
la loi." Or, vous savez qu'entre 1984 et 1988, il y a eu deux ministres; depuis
1988, il y a un seul ministre. J'aimerais bien entendre vos réactions
sur les avantages ou les inconvénients de la situation actuelle
où il y a un seul ministre responsable pour l'ensemble de la foi.
Finalement, M. le président, j'aimerais bien entendre vos
commentaires sur les façons dont pourrait se doter le gouvernement d'un
mécanisme de gestion par participation, c'est beaucoup dire, mais au
moins d'une certaine participation de vos membres à la prise de
décision. Je trouve fort intéressante votre proposition, qu'il y
ait une révision permanente de la loi. Quant à nous, nous pensons
quo, si Hydro-Québec est importante au point où on doit, chaque
année, en commission parlementaire, entendre le plan
d'Hydro-Québec, je ne vois pas pourquoi on ne devrait pas, chaque
année, entendre les divers intéressés, les diverses
personnes intéressées et groupes intéressés,
à faire le point sur les avantages ou les inconvénients de la loi
actuelle de la fonction publique, pas seulement sur la loi, les articles et la
philosophie, mais surtout sur la façon dont elle est
implantée.
Alors, j'ai ces trois ou quatre questions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, est-ce que vous pourriez être plus explicite sur ces
modalités d'avoir à réviser la Loi sur la fonction
publique de manière permanente? Je parle particulièrement au
niveau de la plomberie.
M. Harguindeguy: Alors, ce n'est pas rien qu'un...
Le Président (M. Lemieux): Ce n'est pas une question
facile.
M. Harguindeguy: ...il y a cinq questions.
Le Président (M. Lemieux): Oui, oui, je suis
conscient.
M. Lazure: On vous donne de notre temps.
Le Président (M. Lemieux): Écoutez, si ce
n'était que de moi...
M: Harguindeguy: Celui qui m'a précédé avait
cru comprendre qu'il y avait des questions, moi, j'en ai des précises,
alors on va y répondre.
Le Président (M. Lemieux): Et je peux vous dire que j'en
aurais pas mal d'autres.
M. Harguindeguy: Moi aussi, vous savez. Vous pourrez nous inviter
à nouveau si vous voulez. On est disponibles, on pourrait en avoir pour
deux jours.
Le Président (M. Lemieux): On ne vous dit pas non, vous
savez.
M. Harguindeguy: J'avais souhaité une journée et
demie, au minimum, pour nous faire entendre.
Le Président (M. Lemieux): On ne vous dit pas non.
M. Harguindeguy: Alors, voici, on va les prendre peut-être
dans l'ordre où elles ont été
présentées.
Le Président (M. Lemieux): Ça va.
M. Harguindeguy: Pour ce qui est du patronage concernant la
promotion, ce qui peut se faire... On a vécu des cas de gens qui ont
obtenu des promotions qui impliquaient un déplacement de domicile sans
avoir à se déplacer de domicile. Je vais peut-être vous
expliquer un peu comment ça arrive, vous savez, dans un ministère
donné. Ça marche aussi en collusion avec certains
ministères, il n'y a pas qu'un ministère seul, parce qu'il y a
aussi des échanges de bons procédés entre des
sous-ministres, entre des directeurs de service, même des directeurs
régionaux; en fait, il y a toutes sortes de confréries qui
existent dans la fonction publique québécoise.
Le Président (M. Lemieux): II y en a partout, vous
savez.
M. Harguindeguy: II y en a partout, c'est ça. Tout le
monde protège ses intérêts.
Le Président (M. Lemieux): On se comprend.
M. Harguindeguy: Disons qu'il y a des cas... Exemple: Vous avez
un poste qui s'ouvre dans une région donnée. Il y a eu, une fois,
un poste d'ouvert comme agent de l'aide sociale, classe principale, à
Povungnituk; ça, c'est loin, c'est dans le Grand-Nord.
Le Président (M. Lemieux): II ne devait pas y avoir
beaucoup de candidats.
M. Harguindeguy: Et, comme par hasard, très peu de
personnes se sont inscrites, parce que, quand on ne connaît pas la
finalité du concours, on ne s'inscrit pas, quand on ne veut pas y aller
surtout. Alors, il y a eu quelqu'un qui s'est inscrit, finalement, qui s'est
qualifié pour Povungnituk. Il n'y est jamais allé. Il a
été nommé effectivement. Les nominations, les papiers qui
se promènent dans la fonction publique sont tous beaux. Je pourrais vous
en déposer si vous voulez, où la personne est titularisée
à Povungnituk; le lendemain, elle est affectée parce que
l'affectation, après qu'on a comblé un poste, on peut être
affecté au bon vouloir du sous-ministre. Ce n'est pas un droit, mais
c'est au bon vouloir. Donc, la même personne, comme par accident, le
lendemain, est affectée au poste de Lévis. Ça, c'est plus
proche.
Le Président (M. Lemieux): Je pensais que c'était
à Montréal, mais c'est plus...
M. Harguindeguy: Alors, comment voulez-vous que les gens qui sont
à Lévis puissent accepter que, finalement, un poste qui s'ouvre
de façon bien spontanée à Lévis soit comblé
par quelqu'un qui n'a jamais bougé de Québec? Ou quelqu'un qui
part comme agent de bureau au ministère des Transports à
Drummondville, qui s'en va se qualifier à un poste d'agent d'aide
socio-économique à Trois-Rivières, il va une semaine en
affectation, payé avec les frais de déplacement, donc, aux frais
de la reine, revient avec un reclassement comme technicien en administration
dans le même bureau qu'il vient de quitter aux Transports à
Drummondville. Si les gens avaient su qu'il y avait un poste de technicien
d'ouvert, ils auraient sûrement postulé. Comment comprenez-vous la
situation d'une secrétaire principale au bureau de la sous-ministre du
Loisir, qui est affectée avec un reclassement comme technicienne en
administration à Rimouski parce qu'elle désire y aller alors
qu'il y a du monde qui attend comme ça à Rimouski qu'il y ait des
postes qui s'ouvrent pour la promotion?
Ça se fait sur une grande échelle et si on a le malheur de
contester parfois certains concours, bien là, le ministère, pour
pénaliser la personne qui a fait appel auprès de la Commission,
un droit reconnu par la loi, décide de ne plus combler l'emploi. On dit:
On ferme, on n'en a plus besoin. On laisse passer le temps, les délais,
ça ne sert à rien de poursuivre. La liste, un an après,
tombe caduque. Des fois, on va remplacer la personne en pratique parce que,
physiquement, il en faut une, soit par affectation temporaire en payant
la prime de 5 %, ou en embauchant une employée occasionnelle. Ça,
c'est le mode de gestion. Si vous en voulez, invitez-nous, on va en avoir pour
une semaine au moins à vous expliquer comment ça fonctionne.
Mais ça, il est temps que l'Assemblée nationale se penche
là-dessus parce que même si la Commission de la fonction publique
ou l'Office ou même le Vérificateur général peuvent
constater des irrégularités, il n'y a personne qui a un pouvoir
coercitif pour imposer des changements auprès des ministères
concernés. Même au ministère de la Justice, on a
déjà porté plainte auprès de la Commission
où il y a eu du patronage comme ça qui a été
effectué, où la Commission a statué qu'effectivement,
c'est vrai que c'est contraire à la loi, mais personne ne peut
remédier à la situation.
Le Président (M. Lemieux): Ce pouvoir coercitif là,
si je me souviens bien de votre mémoire, vous voudriez le remettre entre
les mains de la Commission de la fonction publique?
M- Harguindeguy: Normalement, c'est elle qui est là, mais
tout ce qu'elle peut faire, c'est constater. Mis à part les concours,
où elle peut ordonner la reprise des concours, elle ne peut pas ordonner
ou annuler les nominations qui sont effectuées par des ministères
parce que c'est l'imputabilité, c'est le saus-ministre qui est
responsable. Ça, c'est en partie pour le patronage.
Quand vous dites: Est-ce qu'on devrait dissocier le Conseil du
trésor de l'administration de la fonction publique? C'est évident
que le Conseil du trésor comme tel est, en partie, en conflit
d'intérêts parce que, d'un côté, il est le
gestionnaire de la fonction publique et que, d'un autre côté,
c'est lui qui autorise les budgets. Conséquemment, il y a
peut-être deux chapeaux qui sont portés par la même
personne. Il y aurait peut-être lieu de dissocier ça, maintenant,
même si, à l'époque, nous étions d'accord, quoiqu'il
va falloir aussi que l'on modifie quand même quelque peu les
réglementations actuellement en vigueur. C'est parce que tant et aussi
longtemps que le Conseil du trésor aura la mainmise sur le budget - vous
connaissez ça, les budgets donnés par le Conseil du trésor
- tant que le Conseil du trésor aura son droit de regard sur les
budgets, que, finalement, on ne tiendra pas compte des besoins réels des
ministères pour satisfaire aux vocations que les lois leur attribuent,
on n'arrivera absolument à rien parce que si le Conseil du trésor
n'accorde pas les budgets appropriés.. Tantôt, j'ai entendu le
président du Conseil du trésor parler d'une façon
éloquente de la formation éventuelle des fonctionnaires parce
que, là, on avait fait les tables des cadres, il va falloir qu'il donne
les budgets itou. Les budgets ne se donnent pas. Actuellement, vous avez des
poli- tiques qui sont mises de l'avant qui doivent se faire dans le cadre des
budgets actuellement accordés. Donc, quand est-ce qu'on va dissocier
l'aspect monétaire de l'aspect gestion? Tant que cela va être
associé, il n'y a rien qui va se faire. C'est impossible. On ne peut pas
faire 1, 50 $ avec 1 $, ce n'est pas vrai ça.
Les sous-contrats, ça aussi... Vous m'excuserez, mais on a la
forte impression qu'en partie, c'est politique, excessivement politique. Vous
comprendrez fort bien que nous, en tant que fonctionnaires, on n'a pas les
moyens de contribuer très fort à la caisse électorale.
D'autres ont plus les moyens que nous autres, et ça peut avoir une
incidence, je le dis bien franchement. C'est pour ça, c'est un peu comme
à la confession ici, cet après-midi.
Le Président (M. Lemieux): Ça reste entre nous.
M. Harguindeguy: Oui, oui, c'est ça, effectivement.
Quoique, parfois, on souhaiterait que ça sorte, par exemple.
Généralement, dans le domaine de l'entretien des routes aux
Transports, s'il y a de nos membres qui se plaignent trop ou qui revendiquent
trop que leur travail soit effectué de façon sécuritaire,
ce n'est pas compliqué, la menace, c'est de dire: Si tu n'es pas
content, mets ta vie en danger parce qu'autrement, ta job, tu vas la perdre, on
va donner ça à contrat. Et ça se fait de façon
régulière partout. Ça, ce ne sont pas des politiciens
seulement, ce sont des gestionnaires, vos directeurs régionaux, les
ingénieurs qui sont responsables de districts. En fait, ils sont
là, c'est eux qui "runnent". Ils ont peut-être à satisfaire
des choses. Je ne dis pas qu'il y a, des fois, des interventions parce qu'on a
connaissance d'interventions qui sont faites, mais c'est un peu le
problème et on n'est pas sûr que ce soit nécessairement
plus rentable. Ça, ce n'est pas vrai. Et, sur cet aspect, on a
déjà offert notre collaboration pour avoir dos
aménagements.
Ce matin, le président du Conseil du trésor a parlé
de la possibilité d'aménager particulièrement les horaires
de travail. Eh bien, j'avais envie de rire parce que, en négociations,
on a tenté d'en obtenir justement, des aménagements de travail,
pour faire en sorte d'être encore plus efficients, plus efficaces et plus
rentables, et ceux qui s'y refusent, c'est les employeurs, les gestionnaires,
qui se refusent à peut-être prévoir des modalités
particulières de rappel au travail comme dans l'entreprise
privée. On a tenté des expériences pilotes au
Cap-de-la-Madeleine et à Chicoutimi pour prévoir l'entretien
d'hiver, comme l'entreprise privée, que les gens soient sur appel,
garantie de traitement de 40 heures par semaine et, quand ils en ont besoin,
ils appellent, comme l'entreprise.
Le Président (M. Lemieux): Monsieur...
M. Harguindeguy: Mais ça ne marche pas. C'est le
ministère qui ne veut plus.
Le Président (M. Lemieux): M. le président,
j'aimerais peut-être vous arrêter, avec la permission du
député de La Prairie, sur un point particulier de votre
intervention qui me fatigue un petit peu Vous avez parlé du Conseil du
trésor en termes de gestion financière et de gestion des
ressources humaines. Êtes-vous en train de nous dire que vous aimeriez
voir ces deux fonctions se dissocier complètement? .
M. Harguindeguy: On le souhaiterait là, même si, en
1983, on voulait avoir rien qu'un patron. On veut encore un seul patron, mais
qui soit dissocié de la partie budget, parce que c'est ça qui
nous crée le plus de problèmes.
Le Président (M. Lemieux): Êtes-vous en train de
nous dire que la gestion des ressources humaines ne devrait pas relever du
Conseil du trésor?
M. Harguindeguy: Non, pas comme tel parce qu'on estime que...
Actuellement, ce n'est pas compliqué. Moi..
Le Président (M. Lemieux): Non, mais |e veux bien qu'on
s'entende là dessus.
M. Harguindeguy: Oui, oui.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez passé
très rapidement là-dessus, un petit peu comme un politicien.
M. Harguindeguy:... parce que nous avons l'impression que,
lorsque les ministères s'adressent au Conseil du trésor pour
obtenir des orientations sur la façon de gérer leur personnel, si
l'opération a, en bout de ligne, un signe de piastre...
Le Président (M. Lemieux): O. K. C'est ça.
M. Harguindeguy:... c'est non. Si ça n'implique pas de
déboursés additionnels, ils peuvent tout faire, ils sont libres.
C'est un peu la politique d'en faire plus avec moins. Ce n'est pas
compliqué. C'est ça qui est de mise, à l'heure actuelle.
Bon.
Vous avez parlé également de la participation des
employés. N'ayez crainte, on ne demande pas la cogestion; on n'est pas
encore rendu là. Mais on estime que, pour déterminer les
orientations et les objectifs dans certains ministères ou certains
services, sur une base ministérielle, c'est peut-être difficile,
parce que, quand vous avez de gros ministères de 2000 personnes, on ne
peut quand même pas se réunir tout le monde ensemble pour
déterminer les orientations. Mais il nous semble que les fonctionnaires
et les ouvriers, à quelque titre que ce soit, devraient être
partie plus prenante de la détermination des objectifs, des
modalités, comment faire, quand le faire, ainsi de suite. Actuellement,
notre impression, c'est que les fonctionnaires, les ouvriers sont rendus des
numéros qu'on étiquette. On dit: Toi, tu fais ça; toi, tu
t'en vas là, t'as rien à dire, et, quand quelques-uns se chargent
de vouloir dire quelque chose, de vouloir formuler des recommandations, ce
n'est pas nécessairement toujours accepté parce que, des fois, il
y a des gestionnaires qui pensent que c'est leur poste qui est en jeu; si un
employé, un subalterne a trop d'initiative, ce n'est pas
nécessairement bien vu non plus.
Nous, on estime qu'il faudrait plus globalement laisser la place.
D'ailleurs, j'ai eu l'occasion d'entretenir les directeurs des communications
sur cet aspect-là la semaine dernière, soit qu'il nous semble
qu'en 1990, on devrait modifier quelque peu le mode de gestion dans la fonction
publique, pour utiliser en fait beaucoup plus les capacités et les
énergies qui existent dans le secteur.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Pointe-aux-Trembles, est-ce que vous avez une question?
M. Bourdon: Oui. M. le président du syndicat, vous parlez,
dans votre document, de 42 000 de vos membres qui sont concernés sur une
base annuelle, mais vous ajoutez: "Mais qui concerne effectivement plus de 50
000 personnes. " La différence entre les deux, est-ce que ce serait le
nombre d'occasionnels?
M. Harguindeguy: C'est exact. Au syndicat que je
représente, nous avons environ 32 000 employés permanents
réguliers et environ, sur une base régulière, à
chaque période de paye, de 10 000 à 14 000 occasionnels à
l'emploi, selon les périodes plus ou moins, ce qui donne, sur une
moyenne annuelle, 42 000 membres au syndicat, c'est-à-dire les effectifs
à temps complet, en fait, selon l'évaluation récente faite
par le Conseil du trésor. Mais c'est au-delà de 50 000 qui,
finalement, passent dans nos rangs sur une base annuelle.
M. Bourdon: Est-ce que vous avez établi des chiffres sur
le nombre de vrais occasionnels qu'il devrait y avoir versus ceux dont vous
dites dans votre document qu'ils occupent en permanence un emploi
temporaire?
M. Harguindeguy: Bon, voici. Sur les 50 000 en moyenne, on a 11
000 occasionnels qui sont sur listes de rappel qui, eux, occupent des emplois
à caractère cyclique, donc qui reviennent selon les
périodes, variables selon les ministères aussi et qui, mis
à part quelques cas, sont, je dirais, des postes permanents
occupés par les
occasionnels. Parce que vous avez, dans certains ministères ou
organismes tels la SAAQ maintenant, des gens qui travaillent 10 ou 11 mois par
année comme occasionnels, sur liste de rappel. Si on dit que ce n'est
pas un poste permanent, en tout cas, j'y comprends moins. Par contre, on a
à peu près 5000 personnes de façon régulière
qui sont embauchées comme étant des occasionnels tout court ou
supposément pour des surcroîts de travail ou des projets
spécifiques qui n'en sont pas; par exemple, nous dire qu'on embauche des
occasionnels pour des projets spécifiques qui n'en sont pas. Exemple:
Vous dites qu'on embauche des occasionnels pour des projets spécifiques
à la Main-d'oeuvre et à la Sécurité du revenu, on
espérant peut-être bien que l'aide sociale va disparaître un
jour, mais je ne pense pas que c'est demain la veille Quand on parle d'avoir
des occasionnels qui sont là depuis 12 ans comme secrétaires de
juges, s'il y a un poste qui est permanent, c'est bien la Justice, avec tous
les problèmes qu'on vit de plus en plus. Et ça, c'est des postes,
chez nous, au syndicat que je représente. Je dirai qu'on a au moins un
bon 3000 qui sont réellement des postes permanents camouflés en
postes occasionnels. (15 heures)
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Pointe-aux-Trembles, je m'excuse, mais pour votre collègue, M. le
député de Bertrand, qui n'a pas encore pris la parole, il nous
reste environ quatre, cinq minutes pour finir l'audition du Syndicat des
fonctionnaires. M. le député de Bertrand, avez-vous une question
rapide?
M. Beaulne: Oui, merci, M. le Président. Vous avez
parlé...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député. Si vous permettez, M. le député de
Bertrand.
M. Beaulne: Vous avez parlé d'un aspect important qui est
la possibilité d'avoir des promotions à l'intérieur de la
fonction publique, comme étant un des éléments les plus
incitatifs. Ça m'amène à parler d'un
phénomène qui existe aussi bien dans la grosse fonction publique
privée que dans la fonction publique étatique, c'est le
phénomène d'engorgement à certains niveaux et ce qu'on
appelle couramment les "tablettes". Ça existe chez les cadres, ça
existe probablement dans votre groupe aussi. Moi, j'aimerais bien vous entendre
là-dessus parce que c'est bien beau de vouloir avoir un système
mobile où l'ascension est de rigueur et constitue la motivation
principale, mais qu'est-ce que vous faites de ces gens qui, pour une raison ou
pour une autre, continuent à occuper une partie du budget puisqu'ils
continuent à être rémunérés, mais n'exercent
plus les fonctions pour lesquelles ils sont rémunérés?
Le Président (M. Lemieux): Rapidement, monsieur.
M. Harguindeguy: Oui D'abord, c'est une question de gestion. Je
pense que, si on pouvait arriver à éliminer le cloisonnement qui
existe entre les ministères, possiblement qu'on pourrait utiliser le
personnel de façon plus appropriée, plus adéquate.
Actuellement, chaque ministère est responsable de ses effectifs et il
peut arriver des périodes où vous avez un surplus de personnel
dans un ministère, qui pourrait être utilisé par d'autres
ministères sous une même région administrative, s'entend,
ce qui, actuellement, n'est pas possible parce qu'il n'y a pas personne, il n'y
a pas un ministre ou un sous ministre qui va admettre qu'à une
période donnée, il y a trop d'effectifs, de crainte de se voir
couper les effectifs par le Conseil du trésor. Ça, c'est un peu
comme les dépenses des budgets.
Si, à la fin de l'année, Us ne dépensent pas le
budget, le Conseil du trésor coupe et il part à partir des
dépenses réelles l'année suivante. Donc, on a
peut-être des dépenses inutiles. C'est tout ce mode de
gestion-là. Je peux vous dire aussi qu'on a déjà
proposé, nous, au Conseil du trésor - et ça peut
peut-être paraître un crime ou un péché mortel -
d'abolir la permanence comme telle, qui est accordée par la loi parce
qu'elle ne veut rien dire, en pratique, pour nous, si ce n'est qu'on estime
d'avoir de la permanence d'occuper des emplois; avec des politiques de mise
à pied comme il existe dans la fonction publique sur la base, mettons,
de l'ancienneté, capacité de remplir l'emploi, il n'y a pas un
employé permanent actuel qui est là qui serait mis à
pied.
Avec le nombre d'occasionnels que le gouvernement embauche, il y aurait
l'utilisation possible, mais peut être dans d'autres ministères ou
d'autres services. Ça ne se fait pas par exemple parce que chacun
administre son ministère comme si c'était sa job à lui,
son affaire à lui; l'affaire du voisin, les problèmes financiers
ou les problèmes de gestion on ne s'en occupe pas au gouvernement. C'est
60 fonctions publiques à l'intérieur de la grande fonction
publique. C'est peut-être ce schème-là qu'il va falloir
corriger aussi si on veut réellement être efficient dans la
gestion de la fonction publique.
On est disposé à vous en parler. C'est pour ça...
Réinvitez-nous n'importe quel temps, nous sommes...
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président.
M. le député des îles de la Madeleine, rapidement.
M. Farrah: Oui, merci, M. le Président. Au niveau de
l'imputabilité, vous dites que c'est principalement au niveau des
sous-chefs ou des sous-ministres que serait la principale
responsabilité, mais c'est encore loin du citoyen, au
niveau de la structure. Il n'y a pas moyen de trouver une formule
où la responsabilité face au service au citoyen serait
répartie plus en profondeur au niveau de la structure parce qu'on est
encore loin et il y a peut-être là un danger que le sous-ministre
aussi centralise tout compte tenu que c'est lui au bout de la note qui paie
pour tout, ou encore qu'il y ait un problème de canal au niveau de
l'information.
M. Harguindeguy: À mon sens, les effectifs de la
gérance sont suffisamment imposants pour être redevables ou
imputables auprès de la population localement. En fait, je ne connais
pas... Rares sont les bureaux où II y a seulement des techniciens qui
sont on poste. Généralement, partout, il y a un directeur qui se
doit d'oeuvrer et d'être imputable auprès de la population locale.
En principe, c'est lui qui doit rendre service.
M. Farrah: Le directeur, vous dites?
M. Harguindeguy: Le directeur. Il y en a des cadres qui sont
là.
M. Bélisle: Imputable au niveau local. M. Harguindeguy:
Comment?
M. Bélisle: Directeur imputable au niveau local?
M. Harguindeguy: Eh bien, normalement, il doit rendre des
comptes. Lui a des boss. Tout le monde a des boss au gouvernement. On en a
assez, ça fait qu'il doit y en avoir quelques-uns.
M. Bélisle: Ce que vous êtes en train de dire,
peut-être qu'on se comprend mal là, vous ne dites pas au niveau de
la population. Vous dites: Directeur imputable au niveau de la
hiérarchie gouvernementale.
M. Harguindeguy: Oui, mais il pourrait... M. Bélisle:
C'est ça que vous dites là.
M. Harguindeguy: Oui. Il pourrait aussi être imputable de
donner des bons services à la population et de faire les
représentations voulues aussi, parce que si la population se plaint du
manque de service, tantôt quand les gens auront à faire 100
kilomètres pour aller chercher une plaque d'immatriculation
là...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Harguindeguy:... parce que les bureaux vont être
fermés dans certaines régions, il me semble que le directeur
local aurait la possibilité de faire des interventions aussi, autant au
niveau de la population qu'auprès de ses boss à lui.
Le Président (M. Lemieux): II faudrait... J'ai une petite
question, mais allez-y, M. le député de Mille-Îles,
très rapidement.
M. Bélisle: Est-ce que c'est ça que vous disiez
dans votre document à la page 2, 9R? Je vais vous le lire. "Pour les
fonctionnaires et ouvriers de la fonction publique, ce principe semble acquis
depuis fort longtemps, puisque, de tout temps, ils estiment être au
service des citoyennes et citoyens, et non pas de l'appareil politique que
constitue le gouvernement. " C'est-à-dire que vous voudriez
peut-être être, d'une certaine façon, imputable directement
à la population? Est-ce que c'est ça que vous êtes en train
de nous dire, M. Harguindeguy?
M. Harguindeguy: Bien, nous, on estime qu'on est embauchés
pour rendre des services à la population et non pas pour rendre service
au parti qui est en place. On n'a que faire des partis qui forment le
gouvernement, que ce soit actuellement les libéraux ou le Parti
québécois. Moi, j'ai vécu tous les partis. Alors, je les
ai tous passés.
M. Bélisle: Est-ce que vous avez réfléchi
longuement sur...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Mille-Îles, s'il vous plaît!
M. Bélisle: C'est parce que, M. le Président, c'est
tellement important...
Le Président (M. Lemieux): Écoutez, peut-être
qu'on devra retenir la suggestion du président du Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec de le réentendre ou de le
revoir. Ce serait peut-être...
M. Harguindeguy: On est disposés.
Le Président (M. Lemieux): Alors, c'est une chose qui
pourrait être discutée.
M. Bélisle: Parce que, là, on va avoir un maudit
problème...
Le Président (M. Lemieux): On est disponibles. C'est une
chose sur laquelle on va réfléchir, la commission parlementaire.
Seulement une dernière question...
M. Harguindeguy: Vous pourrez sûrement faire à
l'après-clôture.
Le Président (M. Lemieux): Je profiterai peut-être
des pouvoirs de la présidence pour vous poser une dernière
question. Vous savez tous qu'on est des députés dans nos bu-
reaux de comté. On reçoit des gens qui nous disent...
M. Harguindeguy: Vous devez sûrement avoir des
téléphones.
Le Président (M. Lemieux): On aimerait ça avoir un
emploi dans la fonction publique. On aimerait ça avoir une job dans la
fonction publique.
M. Harguindeguy: C'est parce qu'ils ne connaissent pas comment
c'est. Parce que, là, ils changeraient d'idée.
Le Président (M. Lemieux): Attention! Des voix: Ha,
ha, ha!
Le Président (M. Lemieux): J'ai une question à vous
poser là-dessus par rapport à l'article 3 de la loi qui fait
état d'égalité d'accès de tous les citoyens dans la
fonction publique. Et je fais référence à votre
mémoire à la page 19 lorsque vous parlez du personnel
occasionnel. Vous faites la suggestion à l'effet que le personnel
occasionnel devrait être, lors du recrutement, sur une liste de
déclaration d'aptitudes de l'Office. Mais en haut de la page, vous allez
un petit peu plus loin, quand vous dites que la priorité d'accès
aux emplois permanents devrait être accordée à cette
catégorie de personnel. Comment concilier votre suggestion de
restreindre ça aux occasionnels avec le principe de l'article 3 de la
loi 51?
M. Harguindeguy: Actuellement, il faut... Quand même, vous
savez comme moi que les occasionnels sont embauchés sans avoir
nécessairement à faire preuve de leur compétence. Ils
s'inscrivent aux fichiers ministériels, c'est par ordre
d'ancienneté. Il y a une légère vérification pour
voir si la personne a les aptitudes. Elle vient en poste. Elle peut rester
là bien longtemps.
Nous, ce qu'on indique, c'est que les occasionnels, même pour un
tel emploi d'occasionnel, pourraient ou devraient faire l'objet d'une
évaluation positive, bien sûr, donc démontrer leur
compétence et peut-être être en attente; ils peuvent occuper
un poste occasionnel et attendre éventuellement d'avoir un poste
permanent s'il s'ouvre. Et, dans ce cas-là, vu qu'il a
déjà démontré sa compétence pour occuper un
tel emploi, s'il est agent de bureau, s'il est technicien en information ou
technicien en administration...
Le Président (M. Lemieux):... citoyen ordinaire.
M. Harguindeguy:... comme il s'est qualifié comme citoyen,
donc; ce sera ouvert à tout le monde et, après ça, c'est
l'accession comme la promotion pour quelqu'un qui est déjà dans
la fonction publique, qui passe d'agent de bureau à technicien.
Ça pourrait être un principe de promotion qui est accordée
dans ce cas-là. Mais, à tout le moins, il aura au moins
démontré sa compétence et ses connaissances.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, au nom des
deux groupes parlementaires, M. le président du Syndicat des
fonctionnaires provinciaux du Québec, en espérant que
peut-être nous aurons l'occasion de nous revoir à court terme.
M. Harguindeguy: On le souhaite. On vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): Nous suspendons nos travaux
pour permettre au prochain groupe, soit le Syndicat des professionnelles et
professionnels du gouvernement du Québec, de bien vouloir prendre place.
Alors, nous suspendons nos travaux pour une période d'environ trois
minutes.
(Suspension à 15 h 9)
(Reprise 15 h 11)
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que les gens du Syndicat
des professionnels du gouvernement du Québec voudraient bien prendre
place à la table des témoins? Je sais que M. le président
est là, ça va. Alors, vous êtes seul, M. le
président?
M. Giroux (Daniel): Non, mes collègues...
Le Président (M. Lemieux): J'allais dire que vous
étiez un brave.
M. Giroux: Non, je ne suis pas venu tout seul.
Le Président (M. Lemieux): Non, vous n'êtes pas venu
seul.
M. Giroux: Mes collègues sont fumeurs.
Le Président (M. Lemieux): Ah bon! Alors, on va leur
donner le temps de respirer pour nous empêcher de respirer.
M. Giroux: Ils ont cru que votre pause de trois minutes leur
laisserait le temps d'en fumer une.
Le Président (M. Lemieux): Ça va. Alors, on se
donne encore une minute.
(Suspension de la séance à 15 h 12)
(Reprise 15 h 13)
Le Président (M. Lemieux): La commission reprend ses
travaux et nous allons maintenant entendre le Syndicat des professionnelles et
professionnels du gouvernement du Québec. Je demande au porte-parole de
ce syndicat de bien vouloir s'identifier et d'identifier les membres qui
l'accompagnent. S'il vous plaît!
Syndicat des professionnelles et professionnels du
gouvernement du Québec
M. Giroux: Merci, M. le Président. MM. les
députés. Je suis accompagné de Mme Sylvie Bélanger,
vice-présidente, à ma gauche, Jean Côté, qui est un
agent de la gestion financière au ministère du Revenu - Sylvie,
elle, était agente de recherche au ministère de la Santé
et des Services sociaux - et Michel Gonthier du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Le Président (M. Lemieux): II n'y a personne du Conseil du
trésor?
M. Giroux: Les gens du Conseil du trésor ne sont pas
syndicables, pas plus que ceux de l'Office des ressources humaines, M. Lemieux,
vous devriez vous en souvenir.
Permettez-moi d'abord de vous préciser à quel point nous
sommes heureux de nous présenter devant vous pour revoir la Loi sur la
fonction publique, cette législation qui définit les grandes
balises à l'inférieur desquelles évoluent les services
publics québécois. Une législation d'importance qui, en
définissant des règles de gestion du personnel, influe sur la
qualité des services rendus et sur leur à-propos.
Nous nous présentons devant vous dans un esprit de proposition
éloignant de cette enceinte les hauts et les bas de la
négociation de notre convention collective, mais recherchant des moyens
pour que la fonction publique québécoise franchisse d'autres
étapes sur la route de l'excellence et de la qualité des services
à la population: deux valeurs que nous nous sommes engagés
à promouvoir comme syndicat auprès de nos 12 000 membres en
créant d'ailleurs l'an dernier un prix excellence et un prix service,
qui sera décerné chaque année par un jury formé
majoritairement de personnes extérieures à la fonction
publique.
Nous aurions préféré que tous les groupes qui
viennent devant vous aient pu se faire entendre avec les mêmes moyens.
Nous aurions préféré que le Conseil du trésor n'ait
pas un accès privilégié aux mémoires qui ont
été déposés devant vous. C'est sans doute la vie,
cependant.
Le moment où se tiennent les travaux de cette commission nous
semble particulièrement propice, puisque tout le Québec
s'interroge actuellement sur son avenir. En ce sens, nous croyons que la
présente commission doit aborder de front les grands problèmes
qui confrontent la fonction publique québécoise et
l'empêchent, dans une certaine mesure, de redevenir l'instrument
collectif de développement social, économique et culturel qu'elle
a déjà été. Ne limitez pas vos réflexions
aux seuls aspects administratifs de l'appareil gouvernemental, osez des
orientations, des propositions susceptibles de refaire de la fonction publique
l'instrument indispensable de développement collectif dont ont besoin
les Québécoises et Québécois, un outil de pointe
dont aura encore davantage besoin la population du Québec si elle opte
pour plus de souveraineté ou pour la souveraineté tout court.
Nous voulons partager avec vous trois grandes préoccupations: le
rôle de la fonction publique, sa neutralité politique et le droit
des fonctionnaires de participer à la vie politique en tant que
citoyennes et citoyens et la levée du régime d'exception qui
régit les relations du travail dans la fonction publique. Je voudrais
également, à la fin de mon intervention, vous sensibiliser au
sort qui attend plusieurs milliers de personnes à statut précaire
après l'annonce faite ce matin par le ministre Johnson de conversion de
3500 postes.
D'abord, le rôle de la fonction publique. Dans cette
société en évolution, nous réaffirmons, quant
à nous, le rôle fondamental de l'État pour lutter contre
les inégalités, pour favoriser le développement,
l'autonomie de chacune et de chacun, pour favoriser la solidarité
sociale et préserver notre patrimoine linguistique culturel,
économique et écologique.
Cette intervention de l'État appuie notre vision de son
instrument privilégié d'intervention qu'est la fonction publique.
À cette fin et nous allons dans le même sens que le
Syndicat des fonctionnaires à cet égard - il nous apparaît
urgent de recentrer la fonction publique sur les citoyennes et les citoyens en
y ajoutant, par exemple, à l'article 2, une définition plus
claire du service à la population, de la mission de la fonction
publique, une partie qui pourrait indiquer, entre autres choses, qu'elle doit
être un instrument au service également des débats
démocratiques de notre société.
Déjà, en 1985, dans un document que nous avions
publié et expédié au gouvernement de l'époque, nous
donnions quelques pistes pour que les services publics soient davantage
ouverts. Il nous semble que cela suppose un changement en profondeur des
valeurs et des comportements qui façonnent les rapports entre
l'administration et la population; que cela passe également par une
vulgarisation et une accessibilité des directives, des politiques et des
décisions de l'appareil administratif, de la mise en place d'un
processus interne de révision des décisions administratives
prises à l'endroit des citoyens, d'un assouplissement des règles
de procédure lors d'un recours devant un tribunal administratif et des
efforts
redoublés pour faire mieux connaître le Protecteur du
citoyen.
Il nous semble également qu'on doit mettre un effort important
vers l'information auprès des clientèles visant à faire
connaître les contenus des programmes et des services, l'information
touchant à des comportements collectifs à l'égard de la
santé, de l'environnement, l'information à l'égard des
droits et des obligations des citoyens et des citoyennes.
Je vous parlerai maintenant d'imputabilité, ayant en tête,
bien sûr, cette optique d'une fonction publique qui soit un
véritable instrument au service des citoyennes et citoyens et non
seulement une immense bureaucratie, suffisante envers elle-même, mais
où la responsabilité est très diffuse.
Nous avons deux constats à faire à cet égard.
Malgré l'implantation de la nouvelle loi, nous croyons que la plupart
des hauts fonctionnaires de nos ministères et du Conseil du
trésor ne veulent pas d'un système qui les mettrait sur la
sellette et les obligerait publiquement à justifier certaines de leurs
décisions administratives. Nous vous référons dans notre
document aux actes d'un colloque sur l'imputabilité qui s'est tenu en
1983, à l'instigation de l'ENAP, et qui le montre très
clairement. D'ailleurs, depuis la nouvelle loi, il y a eu très peu
d'efforts d'imputabilité de faits. Ce dont M. Johnson nous a
parlé ce matin, c'est de décentralisation, de
déconcentration, de délégation de pouvoirs du Conseil du
trésor vers les ministères, de l'Office des ressources humaines
vers les ministères, mais ce n'est pas de l'imputabilité, ce
n'est pas de la reddition de compte. Le seul mécanisme de reddition de
compte dont on nous a parlé, c'est les bilans ministériels
acheminés au Conseil du trésor, dont personne n'a jamais vu la
couleur sinon les gens du Conseil du trésor.
Cette décentralisation en matière de ressources humaines
qu'on a connue, par ailleurs, a servi au Conseil du trésor et aux
ministères à se renvoyer la balle et, en conséquence,
à ne rendre de comptes à personne. Pour le Conseil du
trésor, les problèmes que nous soulevons viennent d'une mauvaise
application de ses politiques et, pour les ministères, viennent du
contenu même des politiques du Conseil du trésor.
Pour contrer ces facéties, nous souhaitons la mise en place d'une
table patronale de négociations représentant directement les
sous-ministres, ceux qui ont la responsabilité de gérer les
ressources humaines et relevant d'un ministre senior, le pendant du poste de
vice-président aux ressources humaines des grandes entreprises, - pour
répondre à l'une des questions que vous avez posées - un
ministre différent du ministre responsable des ressources
financières.
Nous faisons nôtres, quant à l'imputabilité, les
mécanismes avancés par la commission Bisaillon en 1983:
commissions parlementaires, rôle accru pour le Vérificateur
général qui, dans ses rapports publics, dans ses enquêtes,
pourrait aller vérifier comment on utilise avec efficience, comment on
remplit les mandats qui sont donnés.
Il nous semble aussi que l'imputabilité gagnerait à
s'étendre au-delà des commissions parlementaires et du
Vérificateur. Elle pourrait impliquer les clientèles desservies
par les ministères et organismes qui pourraient discuter annuellement
avec les sous-ministres et les cadres du ministère des plans
d'activités, des bilans, formuler des questions, critiquer,
commenter.
Nous sommes tout à fait prêts - et cela est souhaitable et
nous le souhaitons depuis longtemps - que la reddition de compte s'applique
jusqu'à nos membres. Je pense que le député de
Mille-Îles a mal compris notre mémoire à cet égard.
Nous avons simplement ajouté que cela supposerait, à notre humble
avis, que toutes nos conditions de travail soient négociables, non pas
qu'on négocie l'imputabilité, faute de quoi nous-mêmes et
certains de nos membres ne pourraient être rendus responsables de gestes
posés, n'ayant pas participé à l'élaboration d'une
partie du cadre à l'intérieur duquel ils ont été
posés. Puisque l'imputabilité se rend jusque-là, il faut
participer à la définition du cadre, il faut avoir la chance de
donner notre "input" à l'organisation des activités, et, ensuite,
une fois cela fait, on a des mandats en conséquence et on est
prêts à rendre des comptes là-dessus.
Nous estimons également qu'il y a un prérequis, et
celui-ci, c'est un prérequis fondamental, un vrai prérequis, pour
que l'imputabilité puisse s'actualiser correctement, qu'il y ait une
plus grande impartialité et une neutralité politique de
l'appareil étatique qui soit au-dessus de tout soupçon.
Voilà apparaître notre seconde préoccupation. Mais
entendons-nous bien là-dessus. Nous ne remettons pas en cause la
légitimité de l'autorité politique qui dirige la fonction
publique, qui lui indique les directions à prendre. La fonction publique
ne doit pas être un instrument appelé à déformer la
réalité pour justifier l'action politique, pour embellir son
image, ne doit pas être appelée à avoir des attentions
envers certaines personnes ou certains organismes en particulier qui sont mieux
en vue.
Permettre une ingérence politique et administrative, c'est
permettre qu'en fonction de critères inconnus, des personnes ou des
organismes puissent obtenir davantage ou de meilleurs services et que seules
quelques personnes aient véritablement accès à
l'information et en tirent profit.
Malgré la loi sur l'accès à l'information et la
protection des renseignements personnels, la règle de la fonction
publique est toujours: Ici, le silence est d'or. C'est contraire à
l'ouverture que nous préconisons et cela laisse la fonction publique
perméable à des influences indues. Nous croyons que tout
fonctionnaire devrait être tenu
de fournir à la population toute l'information dont il dispose,
sauf celle nommément confidentielle, selon la Loi sur l'accès
à l'information et aux renseignements personnels, ou encore selon des
dispositions expresses émises par les autorités du
ministère. Et dans un tel cas, il devrait y avoir des mécanismes
d'appel.
Il nous faut ériger également des frontières, avec
un flux d'échanges bien sûr, entre la fonction publique et le
politique, mais des frontières claires, connues de tous, qui ne puissent
varier d'un ministre à l'autre. Il y a actuellement deux énormes
brèches, dans cette frontière, qui devraient être
colmatées. La première: les règles qui régissent
l'embauche du personnel occasionnel permettent qu'interviennent des
ingérences politiques ou administratives. Plusieurs cas laissant planer
des doutes de partialité ont été portés à
notre connaissance. Le personnel occasionnel devrait être embauché
par concours généraux, comme les autres fonctionnaires. Cette
avenue se justifie d'autant que le mécanisme de rappel instauré
par les conventions collectives pour faire en sorte que les occasionnels aient
accès à d'autres emplois occasionnels qui s'ouvrent lorsqu'ils
sont mis à pied tend à maintenir à l'emploi les
mêmes personnes sur plusieurs postes successifs pendant plusieurs
années.
Deuxième brèche, l'octroi d'un grand nombre de contrats
externes, d'un grand nombre, puisqu'ils atteignent, actuellement, pour les
seuls projets à caractère professionnel, environ 20 % de la masse
salariale de nos membres et que cela augmente chaque année. Nous en
sommes à 446 000 000 $ de contrats externes donnés à des
firmes privées pour faire des travaux de la fonction publique. Cette
croissance nous inquiète, pas tant dans le choix du sous-traitant
où les risques de favoritisme seraient atténués si les
recommandations du comité Bernard sont mises en application, mais en
raison de la facilité avec laquelle on recourt à la
sous-traitance, alors que la fonction publique possède souvent
l'expertise nécessaire à ces travaux ou aurait
intérêt à l'acquérir. Nous assistons souvent
à des travaux externes de complaisance ou inutiles qui nous font songer,
qui nous font croire que ces travaux existent simplement parce que les
entreprises de consultation participent fréquemment à la vie des
partis politiques et qu'elles ont également intérêt
à aller dans le sens des autorités si elles veulent obtenir une
suite. au contrat ou d'autres du même genre.
Par ailleurs, le statut de citoyenne et de citoyen à part
entière gagné de haute lutte par les fonctionnaires doit
être préservé à tout prix. À cette fin, nous
nous opposerons à toute restriction au droit de participer pleinement,
pour des fonctionnaires, à la vie politique, comme n'importe quelle
autre personne au Québec. Mais en plus d'être des citoyens
à part entière, nous aimerions être des travailleurs ayant
tout le loisir de négocier nos conditions de travail, sous
réserve de services essentiels à fournir.
De façon générale, le consensus social au
Québec, en matière de relations du travail, repose sur les
principes de la liberté d'association, de la libre négociation et
de l'équilibre entre les parties. Dans l'entreprise privée, on
négocie de plus en plus à livre ouvert du côté
patronal, traitant les employés comme des partenaires avec lesquels il
faut partager la croissance de l'entreprise, on veut les responsabiliser. M.
Johnson, ce matin, parlait de développer le sentiment d'appartenance, de
développer la motivation des employés. Or, dans la fonction
publique, le régime de négociation instauré par la loi
fait complètement fi de ces principes et crée un
déséquilibre sérieux favorable aux intérêts
patronaux.
Pour illustrer l'utilisation abusive des législations à
des fins patronales, trois éléments retiennent notre attention.
Le gouvernement se soustrait, comme employeur, de l'application de certaines
législations telle la Loi sur les normes du travail. En matière
d'accréditation, c'est-à-dire de reconnaissance d'une association
syndicale plutôt qu'une autre, encore là, la loi prévoit un
régime différent. Et la loi crée tellement une mauvaise
habitude chez l'employeur que, lorsque les tribunaux donnent à notre
accréditation une interprétation qui lui déplaît, eh
bien, il s'empresse de modifier la loi. C'est d'ailleurs l'objectif d'un projet
de loi qui est devant vous, devant l'Assemblée nationale, qui vise
à amender le Code du travail pour exclure de la syndicalisation tous les
employés du Conseil exécutif et un grand nombre de gens qui ont
déjà été syndiqués alors qu'ils ne
relevaient pas du Conseil exécutif, le Secrétariat aux affaires
intergouvernementales, le Secrétariat à la jeunesse, celui
à la famille. Nous disons qu'il y a alors abus de pouvoir. (15 h 30)
Troisièmement, la loi rend non négociables des murs
entiers de nos conditions de travail. Les promotions, la classification de nos
emplois, les normes d'éthique et de discipline, les plans
d'organisation. Nous traiter ainsi, c'est refuser de nous responsabiliser.
C'est nous provoquer chaque fois que nous soulevons un problème et qu'on
nous répond que ce n'est pas négociable. Ce régime
d'exception pourrit les relations du travail, il cherche à nous
infantiliser.
Notre jugement est très sévère, j'en conviens, mais
vous trouverez dans notre mémoire et, particulièrement dans
l'annexe qui traite de cette question, toutes les embûches à la
négociation que nous avons rencontrées et que nous rencontrons
toujours parce que la loi fait qu'une partie de nos conditions de travail n'est
pas négociable, alors que l'autre l'est et qu'il y a difficulté
d'harmonisation de l'une et de l'autre.
Si les règles usuelles de la négociation s'appliquaient
aux sujets qui en sont exclus, nous éviterions sans doute des promotions
sans
concours qui sont du pur favoritisme - le confrère Harguindeguy
vous en a parlé - nous aurions sans doute évité une
classification qui maintient un régime salarial discriminatoire envers
les femmes, des règles d'éthique qui vont jusqu'à
interdire aux professionnels d'exercer leur profession pour un autre employeur,
donc, bien au-delà des limites du conflit d'intérêts Nous
aurions sans doute évité que des personnes occupent de faux
emplois occasionnels depuis trois, quatre, cinq, six, dix ans et parfois plus
encore. Nous demandons à être traités comme des
travailleurs et travailleuses responsables en nous appliquant toutes les
dispositions du Code du travail.
Voilà pour nos deux grands objectifs de votre vision à
moyen terme. Il y a cependant un élément qu'on veut porter
à votre attention et qui, à notre avis, demanderait une mesure
exceptionnelle. On vous en parle parce que M. Johnson, jusqu'à
maintenant, a plutôt l'oreille sourde à cette question: c'est
celle des 3500 personnes qui occupant les emplois que le Conseil du
trésor va transformer d'emplois occasionnels en emplois permanents. M.
Johnson vous a indiqué qu'il y avait sans doute eu erreur
d'étiquette sur ces emplois, qu'on se rend compte maintenant qu'un grand
nombre d'entre eux étaient permanents, sauf que c'est le Conseil du
trésor et les ministères qui les ont soustraits de l'application
de la loi en utilisant, de manière abusive, l'article 83 de la loi qui
restreint pourtant à des motifs d'urgence, des raisons pratiques ou
d'intérêt public, le fait que des emplois sont soustraits des
mécanismes de recrutement prévus dans la loi. Tous ces emplois
ont été soustraits par le Conseil du trésor et les
ministères et ils savaient tous deux qu'un bon nombre d'entre eux
étaient permanents.
Or, maintenant qu'on s'apprête à corriger
l'étiquette des emplois, on dit aussi aux personnes qui les occupent:
Excusez-nous, nous nous sommes trompés d'étiquette et vous serez
mis à pied, à moins que vous ne passiez le crible des examens de
recrutement, que vous soyez parmi les meilleurs, auquel cas nous allons, bien
sûr, vous garder en emploi. Mince prix de consolation, à notre
avis, pour des personnes qui occupent ces emplois depuis de nombreuses
années, qu'on essaie de motiver, chez qui on essaie de développer
un esprit d'appartenance et on pense qu'elles ont fait preuve de
qualité...
Le Président (M. Lemieux): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Giroux:... et de dévouement. C'est une
déloyauté incompréhensible et la façon de corriger
tout cela, puisque ce sont des femmes, que ce sont des jeunes, on ne doit pas
les remettre en concurrence avec tout le monde qui a travaillé ailleurs
et qui, peut-être, a acquis, pour l'instant, des compétences plus
grandes. Les gens ont démontré qu'ils avaient la
compétence pour faire ces emplois. Il faudrait, et j'espère qu'on
pourra avoir votre collaboration, de même que celle du gouvernement,
modifier, dès cet automne, la législation pour permettre aux
personnes qui occupent ces emplois depuis plus de trois ans il y en a d'autres
qui sont là depuis moins de trois ans, elles devront participer au
concours - de demeurer en emploi pourvu qu'elles réussissent avec
succès un concours de compétence mais qui ne les place pas en
concurrence avec toutes les autres. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président
du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du
Québec. M. le député de Mille îles, je pense que M.
le député de Limoilou avail demandé la parole. M. le
député de Mille îles.
M. Després: On peut peut-être se partager le
temps.
Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le
député de Limoilou.
M. Després: Oui, tout simplement une sous-question.
À la première page de votre résumé du
mémoire, vous dites au point 1, le rôle de la fonction publique.
"À maintes reprises, depuis sa création il y aura bientôt
25 ans, le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du
Québec a questionné la place de la fonction publique... " Vous
continuez, pour arriver au dernier paragraphe... C'est là que je veux en
venir. Je vais vous dire que je suis un petit peu surpris. Je veux que vous me
donniez des explications. "Pour que ces qualités se traduisent en gestes
concrets, il est temps que la société québécoise se
redonne un projet collectif. " C'est quoi, ce projet collectif, dans le cadre
du mandat qu'or) a là? Ça veut dire quoi pour vous? Ça
n'existe pas, il n'y en a pas de projet collectif? Je pourrais continuer la
phrase: "... et qu'elle comprenne bien que l'appareil gouvernemental est
là pour servir ses intérêts et non ceux de quelque parti
politique temporairement au pouvoir. " J'aimerais ça que vous me donniez
des explications, M. Giroux. Vous voulez dire quoi?
Mme Bélanger (Sylvie): À quelle page, monsieur?
M. Després: À la première page de votre
mémoire, sous le titre, le rôle de la... Dans le
résumé là, au point 1, le rôle de la fonction
publique, au dernier paragraphe. "Pour que ces qualités se traduisent en
gestes concrets - au début - il est temp;; que la société
québécoise se redonne un projet collectif. "
M. Giroux: Excusez-nous, c'est parce que le
résumé auquel vous faites allusion, ce n'est pas nous qui
l'avons préparé.
M. Oesprés: Excusez, ce n'est pas vous? Est-ce qu'on a
bien le document 16R qui est préparé...
M. Giroux: Oui, oui
M. Després: C'est votre document?
M. Giroux: Excusez, oui.
M. Després: On se comprend bien?
M. Giroux: Oui, oui, le résumé qu'on a
envoyé. D'accord.
M. Després: Je veux bien qu'on s'entende, c'est...
M. Giroux: Oui, oui.
M. Després: Moi, ce que j'ai, c'est Identifié au
Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du
Québec.
Le Président (M. Lemieux): C'est bien ça. C'est
bien le résumé.
M. Oesprés: Ça va.
M. Giroux: Enfin, c'est peut être un jugement global. Mais
il nous semble qu'il y a eu des projets collectifs de société
auxquels la fonction publique était appelée de façon
très claire dans les années soixante et soixante-dix. Il nous
semble, pour toutes sortes de raisons - et c'est à vous, j'imagine, de
le débattre - que depuis le début des années quatre-vingt,
nous manquons de ce type de projets collectifs qui donneraient des indications
claires aux employés de l'État du sens à donner à
leurs interventions, à leur recherche. Remarquez que ce n'est pas
là l'objet principal de notre intervention devant vous aujourd'hui, mais
il y a comme un élan qui manque. Ça pourrait être un
élan qui dise: II faut se rapprocher des citoyens par exemple, comme on
vous le suggère, mais ces indications claires manquent
énormément. D'ailleurs, j'entendais M. Johnson parler ce matin et
il parle beaucoup de décentralisation, etc., mais c'est un objectif
d'organisation, ce n'est pas un objectif clair qui mobilise les ressources.
M. Després: Un instant, monsieur. J'ai l'impression qu'on
ne se comprend pas. Je vais relire comme il faut. "Pour que ces qualités
se traduisent en gestes concrets, il est temps que la société
québécoise... " J'ai l'impression que le Syndicat des
professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec doit faire
partie de la société québécoise?
M. Giroux: Oui.
M. Després: "... se redonne un projet collectif. " Alors,
je vous demande c'est quoi votre projet collectif, au Syndicat des
professionnelles et professionnels, face à la Loi sur la fonction
publique? C'est quoi? On va peut-être se comprendre.
M. Giroux: Parfait, excusez-moi. Oui. Quant à nous, c'est
de rapprocher la fonction publique - c'est la partie que nous contrôlons,
qui nous intéresse comme groupe - des citoyens et des citoyennes. On a
l'impression actuellement que dans la fonction publique - bien sûr, il y
a une préoccupation dans les différents champs pour les
clientèles qu'on a à desservir - il y a beaucoup de gens qui
vivent pour l'organisation elle-même. On cherche à trouver des
moyens pour que la préoccupation des citoyens et des citoyennes soit
toujours au coeur des travaux, des programmes qu'on met en place, des
interventions qui sont faites.
Le Président (M. Lemieux): M. le député des
îles-de la-Madeleine.
M. Farrah: Dans le cadre de la tâche que vous accomplissez,
en tout cas, en tant que travailleurs de l'État, vous dites: Tout peut
être négociable en fin de compte. Si je comprends bien, vous avez
mentionné ça tantôt dans votre présentation. Quand
on fait un lien aussi avec le service aux citoyens... Ce matin, M. Johnson a
parlé de l'aspect de la permanence au niveau des fonctionnaires qui rend
peut-être l'appareil lourd, compte tenu des diminutions d'emplois, des
difficultés budgétaires, etc. Alors, il y a des exemples, en
termes de permanence, dans des sociétés privées comme IBM
ou Toyota où la permanence est conditionnelle, par exemple, à une
polyvalence, conditionnelle également à la performance et aux
profits de l'entreprise, plus ou moins, votre salaire peut plus ou moins
diminuer. On ne peut pas faire non plus un lien nécessairement direct
avec l'entreprise privée, compte tenu de l'état de la fonction
publique au niveau de l'État. Mais ce que je veux vous dire, c'est:
Compte tenu des contraintes qu'on a et de l'objectif, qu'on veuille quand
même améliorer ou augmenter le service aux citoyens, c'est
ça le but qu'on veut poursuivre, est-ce qu'il y a moyen de regarder un
système où la permanence ne ferait pas en sorte - je ne veux pas
nécessairement dire que c'est ça qui existe, mais la question se
pose quand même - qu'elle ne serait pas non plus un frein à un
service continu et efficace aux citoyens?
M. Giroux: D'abord, la permanence. Et, là-dessus, je vais
être en accord avec ce que disait M. Johnson ce matin, la permanence est
importante, non pas pour donner des privilèges aux
fonctionnaires, mais pour donner une protection aux employés de
l'État contre des influences indues, et on pense toujours que c'est
important de la maintenir. Quant à nous, la permanence n'a pas
empêché beaucoup de mouvements de déconcentration des
services de Québec vers les régions. Nombre de ministères,
depuis 10 ans, ont énormément augmenté leurs effectifs
dans les points de service locaux, régionaux, et tout cela s'est fait
avec la permanence, sur une base volontaire, et on a réussi relativement
facilement, pourvu qu'on donne aux gens le temps de s'organiser pour le faire,
certains délais pour le faire.
La polyvalence est très importante. Toute notre classification
est organisée de manière à permettre à des gens
d'être polyvalents d'un emploi à l'autre pour acquérir,
dans un autre milieu en fonction d'autres préoccupations, les
connaissances, des habiletés nouvelles pour sans cesse continuer
à progresser. Je vous dirais qu'en négociations, on cherche avec
l'employeur à développer de nouveaux outils de polyvalence compte
tenu du fait qu'il se libère de moins en moins d'emplois. La
polyvalence, c'est intéressant lorsqu'on peut aller combler un autre
emploi ailleurs, mais, lorsque les autres emplois vacants ailleurs, on ne les
comble pas, il faut trouver d'autres mécanismes pour favoriser la
polyvalence, et nous sommes tout à fait d'accord avec vous pour
introduire des modalités d'opération là-dessus.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Mille-Îles. Ah! Aviez-vous une autre question, M.
le député de Îles-de-la-Madeleine?
M. Farrah: Je ne veux pas prendre le temps de mon collègue
des Mille-Îles. Je peux revenir aussi. C'est juste..:
Le Président (M. Lemieux): C'est en com plément.
Allez-y, allez-y.
M. Farrah: Un constat que nous faisons également, c'est
qu'on se rend compte peut-être que le cap que la fonction publique doit
prendre ou doit viser ne semble pas être compris du haut de la pyramide
au bas de la pyramide. Ma question est la suivante - et c'est peut-être
un constat que j'ai fait avec les premiers intervenants et vous-même -
est-ce qu'il y a des lacunes ou des problèmes au niveau du canal des
communications, dans la hiérarchie de l'appareil de l'État?
M. Giroux: Je vous dirais que cette culture varie beaucoup d'une
organisation ministérielle à une autre. Il y a des organisations
où le sous-chef ou le sous-ministre rend très clairs annuellement
ses objectifs, les partage avec ses employés et invite ses cadres
à en faire autant, etc. Mais il y a d'autres organisations qui sont
d'une vieille école, qui ne rendent pas les choses très claires,
n'en parlent surtout pas avec leurs employés et, effectivement, vous
avez raison, à ce moment-là, ça ne se rend pas jusqu'aux
gens qui ont à faire les opérations. Il faut travailler sur la
culture des gens manifestement et peut-être que s'il y avait des
mécanismes de reddition de compte très clairs, ça vous
permettrait à vous d'insuffler des choses à cet
égard-là. (15 h 45)
Le Président (M. Lemieux): C'est peut-être la chose
la plus difficile à faire, n'est-ce pas?
M. Giroux: Sans doute.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie, la parole est à vous.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux
féliciter M. Giroux et son équipe pour la qualité de leur
mémoire. Je vais peut-être commencer par un point qui a
été soulevé par un collègue de l'Opposition sur le
projet collectif. Je pense qu'on peut avoir une partie de la réponse du
syndicat quand on regarde à la page 4 et à la page 5 de leur
mémoire...
Une voix: C'est un collègue ministériel, Denis, il
n'est pas encore dans l'Opposition.
M. Lazure: De notre Opposition à nous. Des voix:
Ha, ha, ha!
M. Lazure: D'abord, on remarque dès la page 2, comme le
Syndicat des fonctionnaires, que le Syndicat des professionnelles et
professionnels met l'accent sur la qualité du service aux citoyens, mais
le mémoire enchaîne en disant: Quatre propositions mises de
l'avant en 1985 tracent des pistes en ce sens. Et là, on a quand
même quatre façons de faire participer la fonction publique
à ce qu'ils appellent dans le mémoire les grands débats
démocratiques de la société. Moi, je lis ça comme
étant en partie, en tout cas, une réponse à la question
qui a été posée par le député
tantôt.
Et, moi, personnellement, je trouve ça emballant, ce genre
d'objectif défini ici. Et quand le Syndicat des professionnelles et
professionnels nous parle de l'information qui doit être transmise, toute
information, sauf celle qui est nommémont étiquetée comme
confidentielle, comme devant être transmise, je pense que là, il
touche une corde sensible et, moi, je souhaiterais que ça se
réalise, ça. Trop souvent, des patrons à
l'intérieur d'un ministère ou d'un organisme imposent le silence
- ça peut être parfois le ministre aussi - une autorité
administrative ou politique impose le silence à un professionnel sur des
documents qui ne sont absolument pas confidentiels. Et je pense que, trop
souvent, on prive la population de sources d'information
intéressantes et qui bien souvent seraient de nature à
rapprocher le serviteur de l'État, le professionnel fonctionnaire et la
population.
Et si on veut parler d'autres formes de valoriser la fonction publique,
bon, vos remarques sur la sous-traitance, je trouve que vous nous laissez un
message grave, sérieux. 20 % de la masse salariale, au-delà de
400 000 000 $ sont octroyés en sous-contrats et vous dites: Ça
continue d'augmenter. Moi, je pense que c'est une des sources de baisse du
moral dans la fonction publique, et ce n'est pas depuis 1985, c'est depuis
plusieurs années. Les gouvernements n'utilisent pas de façon
intelligente et à plein les ressources des professionnels de la fonction
publique. J'ai vivants à l'esprit des exemples au ministère des
Affaires sociales, lorsque je me suis rendu compte que des architectes ne
demandaient pas mieux que de dessiner des plans de centres d'accueil ou
d'établissements, mais qu'automatiquement, les administrations
antérieures avaient tout donné à l'extérieur par
contrat. Et les architectes fonctionnaires étaient
sous-utilisés.
Et nous avons réussi, en tout cas, sur cet aspect-là,
à redonner une certaine dignité aux architectes du
ministère des Affaires sociales et ils ont, effectivement, fait des
plans, et ces plans-là ont été utilisés largement
dans le réseau, dans la construction de centres d'accueil pour personnes
âgées à l'époque. Je comprends qu'il y a beaucoup
moins de construction de centres d'accueil pour personnes âgées,
entre parenthèses, mais il y a d'autres façons - c'est un exemple
parmi tant d'autres - il y a certainement des façons d'utiliser à
plein les ressources de nos professionnels plutôt que de recourir - et on
sait très bien que ça se fait de plus en plus - à des
contrats externes, qui coûtent d'abord plus cher à l'État,
donc, aux deniers publics et qui, on est loin d'en être sûrs, sont
de meilleure qualité.
Alors, M. le Président, je pense qu'il faut bien tenir compte de
ces remarques, de ces demandes du Syndicat des professionnelles et
professionnels. Moi, je poserais une dernière question au Syndicat des
professionnels, comment il verrait... Vous avez parlé de table de
concertation tantôt. J'aimerais que vous me donniez un peu plus de
détails sur la façon concrète, pratique que ça
pourrait être établi, ce genre de table de concertation. J'ai
posé une question, M. le Président. Il s'apprête à
répondre.
Le Président (M. Lemieux): Excusez. O. K., ça
va.
M. Giroux: La réponse ne sera pas très longue.
Chaque ministère a une mission relativement bien identifiée.
Prenons la Main-d'oeuvre et la Sécurité du revenu, par exemple,
auprès de l'ensemble de ses bénéficiaires d'aide sociale.
Il existe des organisations qui regroupent cette clientèle. Or, pourquoi
le sous-ministre ne pourrait-il pas échanger avec ces
représentants de clientèle, une fois l'an, faire le bilan, donner
ses orientations quant au fonctionnement, à l'allocation des ressources
et aux modalités opérationnelles pour l'année qui vient et
recevoir des représentants de ces clientèles des remarques sur la
façon de faire des fonctionnaires, sur ses priorités, sur les
problèmes qu'il n'a peut-être pas vus?
Alors, notre société est suffisamment organisée en
groupes de pression ou en groupes d'intérêts pour permettre ces
discussions au niveau de chacun des ministères. On pourrait penser
à la CSST, de la même manière.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Pointe-aux-Trembles et, après ça, M. le député de
Bertrand.
M. Bourdon: Je voudrais dire mon accord avec le Syndicat sur la
question de l'article 70 qui définit ce qui n'est pas négociable
à l'égard de la fonction publique. Là-dessus, je voudrais
dire que l'État est en flagrant délit. Ça arrive souvent
et ça arrive à toutes les époques de se soustraire
à ses propres lois et d'appliquer ce qui, dans ma jeunesse, était
souvent devenu un adage, soit de dire: Faites ce que je dis, mais ne faites pas
ce que je fais. En ce sens que, même vis-à-vis de ses partenaires,
l'État n'a protégé ni les commissions scolaires ni les
hôpitaux en disant ce qui serait négociable et ce qui ne le serait
pas.
Et je suis de ceux, en passant, qui pensent que le fait qu'une chose
devient négociable ne veut pas dire que c'est l'enfer sur terre et que,
là, la révolution est partie. Ça prend plus que ça
pour faire une révolution. Et il n'y a pas de révolution dans les
hôpitaux et dans l'éducation, dune part.
D'autre part, ça va au point que, par exemple, si le Tribunal du
travail donne tort à l'État employeur dans le cas du
ministère du Conseil exécutif, on dit: On va aller en appel
pendant des années, comme les patrons qu'on rappelle à l'ordre
des fois Et puis, au cas où on ne réussirait pas en appel, on va
modifier la loi à l'occasion d'une autre modification.
Ce que j'entends par là, c'est que nous, comme
législateurs, on se fait dire en entrant ici, dans la boîte,
qu'à part de transformer les hommes en femmes et les femmes en hommes,
et encore! on peut faire à peu près n'importe quoi. C'est qu'il
me semble que l'État doit appliquer des critères de morale
ordinaires et qu'il doit s'appliquer ce qu'il applique aux autres.
Dans votre mémoire, vous soulignez ce qui est patent. C'est que
les normes minimales du travail ne s'appliquent pas au gouvernement du
Québec. Et je trouve qu'il y a un problème aussi de faire la
leçon aux employeurs du secteur privé, quand soi-même, on
dit: Moi, quand ça me
dérange, par exemple, comme je suis législateur, je viens
le faire. Et ça, en tout cas, je suis largement d'accord avec ce que
vous dites sur cette question-là. C'est vraiment une tentation de
glisser et de dire: Nous autres, on règle le problème
nous-mêmes. Notamment, en ayant dans le secteur public des tas d'emplois
non syndiqués qui n'ont pas de raison d'être non syndiqués.
D'autres de dire: la reine ne veut pas être entourée de gens qui
ont commis le crime de devenir syndiqués, et, si les employés du
Secrétariat à la famille du ministère du Conseil
exécutif étaient syndiqués, ils se mettraient à
révéler à tout le monde ce qui se passe. L'obligation de
discrétion ne les lierait plus, parce que c'est connu qu'un
syndiqué, ça révèle tout.
Et quand on parle avec des journalistes, ce qu'ils disent, c'est que,
quand ils vont se chercher des affaires, ce n'est pas sur la base d'être
syndiqués ou pas qu'ils se font des sources d'information quand il faut
s'en faire.
Le Président (M. Lemieux): Une question, M. le
député de Pointe-aux-Trembles, parce que je vois M. le
député de Bertrand. Il ne reste pas beaucoup de temps.
M. Bourdon: Bien, ma question est la suivante: Pensez-vous que le
gouvernement va se rendre à vos arguments?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourdon: Oui ou non?
M. Giroux: Oui! Non!
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Beaulne: Le groupe qui vous a précédé
d'ailleurs, comme vous-même, vous vous fixez comme objectif de
répondre du mieux possible, de servir le mieux possible la
clientèle de l'État. Sauf que, comme parlementaire, il y a un
lien qui m'échappe dans les deux présentations qui ont
été faites jusqu'ici. C'est: Quel est notre rôle à
nous, comme parlementaires, dans ce système-là? Dans le sens
où nous, comme parlementaires... Le gouvernement, en l'occurrence, a
l'occasion de répondre à la population, de rendre compte de ses
activités. Et la population, dans un système démocratique,
a l'occasion d'exprimer son verdict de façon périodique.
J'aimerais vous entendre élaborer un peu plus sur le lien que vous
établissez et le rôle que vous réservez dans votre
système aux parlementaires et, en particulier, aux parlementaires d'une
commission comme la nôtre.
M. Giroux: Bien. Je pense que vous avez un grand rôle.
Quant à définir comment cela peut se faire, mettre en place des
règles législatives ou administratives pour l'atteindre,
ça passe manifestement par l'imputabilité, non pas la
décentralisation, mais l'imputabilité. On pourrait - et on en
fait la suggestion dans notre mémoire - élargir la mission de la
fonction publique dans le corps même de la Loi sur la fonction publique.
Cela lance un message très clair du législateur à
l'ensemble des gens qui, dans leur champ d'intérêt respectif, que
ce soit à l'Environnement, à l'Agriculture, au Revenu, devraient
avoir une préoccupation du citoyen, de la clientèle, etc. C'est
peu présent actuellement dans nos législations.
L'imputabilité, je pense que vous allez devoir la mettre en place
comme parlementaires. Devant vous, parlementaires, les sous-ministres devraient
pouvoir venir expliquer des choses. Il faut commencer poliment, sans trop de
partisanerie évidemment, parce que le chef d'un ministère n'a pas
à défendre les politiques d'un gouvernement. Il ne faut pas
l'attaquer là-dessus, mais on peut facilement avec eux, je pense,
discuter, voir comment ils mettent en place cette préoccupation que vous
pourriez avoir de services aux citoyens, par exemple, en renforçant
également - et là c'est votre rôle - le mandat du
Vérificateur général, en l'élargissant pour qu'il
puisse aller mesurer l'efficience, les comportements autres que simplement
financiers ou comptables, le comportement des différentes
administrations, peut-être en mettant en place des mécanismes
comme on vous le propose, de reddition de compte dans les ministères. Je
pense que vous avez un grand rôle à jouer pour donner cette
impulsion-là qui n'existe pas depuis 1983.
Le Président (M. Lemieux): Merci. Alors, maintenant, il y
a le député de Mille-Îles, il y a le député
de Limoilou, il y a le député des Iles, il y a le
député de Saint-Louis. Alors, écoutez, comme... On va
commencer par le député de Mille-Îles. Le
député de Saint-Louis n'a pas encore demandé la parole. On
va lui céder la parole après. Le député de
Limoilou... Vous n'avez pas le choix, vous devez céder vos droits de
parole.
M. Bélisle: Dans la même veine de ce qui vient
d'être dit - page 8 et page 9 de votre mémoire - sur
l'imputabilité, vous parlez des fonctionnaires en général.
Je me suis toujours questionné à savoir qui vous
définissez par les fonctionnaires. Parlez-vous seulement des
professionnels? Vous pariez de tous ceux qui sont au service de l'État,
incluant les fonctionnaires qui rendent des services au comptoir à la
population.
M. Qiroux: Exact.
M. Bélisle: Est-ce que j'ai bien compris ce que vous
sous-entendiez dans votre texte?
M. Giroux: Oui
. M. Bélisle: Bon. Alors la différence du groupe
qui est venu avant vous, vous seriez d'accord pour une imputabilité du
haut de la pyramide au bas de la pyramide, pour que tous se sentent
responsables vis-à-vis soit de l'Assemblée nationale ou d'une
autre mécanique qui pourrait être développée. Est-ce
que je vous comprends bien?
M. Giroux: C'est-à-dire que, oui, nous sommes d'accord
pour l'imputabilité, mais la façon de rendre les comptes pourrait
être différente de l'un à l'autre. D'accord?
M. Bélisle: II pourrait y avoir cinq, six moyens ou
façons différentes, mais ça devrait être pour tout
le monde..
M. Giroux: Oui et si...
M. Bélisle:... la même règle.
M. Giroux:... le sous-ministre est imputable à quelqu'un
extérieur à son ministre, évidemment, lui aussi va
instaurer à l'intérieur de son organisation un système de
reddition de compte qui va se rendre jusqu'au simple fonctionnaire, si vous me
permettez l'expression.
M. Bélisle*. C'est logique et je vous suis à 100%.
J'ai mal interprété votre texte à la page 2, quand je
lisais "que le principe de l'imputabilité - votre résumé
16R - des fonctionnaires soit accepté dans la mesure où toutes
les conditions de travail sont négociables". J'ai relu votre texte
à la page 8, attentivement, il y a de la confusion de la façon
quo c'est dit. D'accord? Ce n'est pas un -reproche que je vous fais, mais on
lit ça et on fait un saut de trois pieds D'accord? Je me suis
posé des questions toute simples. (16 heures)
On va prendre l'exemple d'un ingénieur, d'un notaire, d'un
économiste, d'un avocat à qui vous confiez un mandat comme
professionnel au gouvernement. Vous dites à l'ingénieur:
Trace-moi, fais-moi telle étude de choses, d'impact, à tel
endroit. Tu as le mandat. D'accord? Vas-y, utilise tes connaissance, produis le
travail. Au notaire: Acquiers-moi telle pièce de terrain au nom du
ministère des Transports. À l'avocat: Va me plaider tel dossier
à tel endroit. Mais qu'est-ce qui est négociable
là-dedans? Qu'est-ce qui est négociable sur le plan des
conditions de travail?
Une voix: O. K.
M. Bélisle: La nature du mandat, le contenu du mandat, ce
n'est pas négociable, c'est un ordre hiérarchique qui vient de
quelqu'un qui est en état d'autorité dans le réseau. Quand
on dit:
On veut bien du principe de l'imputabilité, mais le cadre du
mandat, la nature du mandat, ça. dépend essentiellement des
qualités du professionnel, comment il va l'accomplir. Ce n'est pas
négociable, ça. La nature et le contenu du mandat, ça
aussi, ce n'est pas négociable. Alors, qu'est-ce qu'il y a de
négociable comme conditions de travail? L'heure, les
déplacements, les horaires, les plages horaires? Je ne saisis pas
là. Même, je ne comprends encore pas, malgré que je me
doute de ce que vous voulez dire, mais je ne comprends pas.
Le Président (M. Lemieux): M. le président du
Syndicat.
M. Giroux: II y a deux choses dans votre question. Ce que nous
voulions dire - et j'espère que je vais le rendre maintenant très
clairement - c'est que, pour nous, comme organisation et pour nos membres, un
régime d'imputabilité a du sens dans la mesure où,
collectivement, par la négociation collective, on a une prise sur
l'ensemble des conditions de travail, et donc, une fois qu'on met notre
signature parce que c'est ça l'objectif d'une convention collective - on
met notre signature au bas d'une convention collective - on accepte les
conditions de travail qui nous sont faites, qui sont celles dans lesquelles on
aura à réaliser nos mandats. Ce n'est pas que des questions
d'horaire; c'est aussi des moyens mis à notre disposition pour le faire.
Que ce soient des ressources financières, des ressources humaines, les
délais dans lesquels on nous place, la charge de travail, si on nous
donne trois ou quatre ponts dont il faut dessiner la structure en un mois, je
pense que c'est impossible. Alors, ce sont des balises comme celles-là
qu'on veut avoir dans nos conventions collectives, qui permettent à nos
gons de diro: Oui, voilà, je suis imputable, je sais dans quel cadre
cela se situe et je peux aussi, avec mon supérieur, quand il veut me
donner des mandats, en discuter correctement en étant un peu
protégé pour convenir avec lui, dès le départ, des
moyens, des échéanciers, du cadre dans lequel ça va se
réaliser, former une espèce de contrat ensemble.
M. Bélisle: Est-ce que vous êtes d'accord avec une
partie de notre étude qui a été menée par nos gens
ici - je vais vous mentionner les données - conduite auprès de
personnes qui ont 45 ans, et plus? Sur 1812 professionnels, on en a
sélectionné 440. Il y a eu 363 entrevues de menées par
trois personnes du bureau du Vérificateur général. Voici
ce que ça donne, quand vous parlez des mandats. Très
symptomatique, il y a 38 % des professionnels sur les 363 qui ont
déclaré ne jamais avoir d'attentes annuellement de fixées
par le supérieur immédiat. C'est-à-dire que les gens ne
savent pas quoi faire. On leur donne un cadre général, mais on
n'a pas d'attentes spécifiques grevées à
l'exécution de leur
travail comme professionnel. Ça "as-tu" du sens les chiffres
qu'on a?
M. Giroux: oui.
M. Bélisle: Ça a du sens?
M. Giroux: Oui
M. Bélisle: Q. K. Est-ce que ça a du sens
également si je vous disais, d'après cette même
étude,, qu'il y a à peu près 38 %, 39 %, qui ne sont pas
évalués à la fin de chaque année qu'il n'y a pas de
note de rendement quant à la performance du professionnel dans le cadre
de l'exécution des tâches qui lui sont confiées? 40 % des
professionnels interrogés nous disent...
M.. Giroux: Est-ce que je comprends...
M. Bélisle:... qu'il n'y a pas d'évaluation de ce
qu'ils ont fait pedant l'année Comment voulez-vous avoir du monde
motivé s'il y a des gens qui ne sont pas évalués?
M. Giroux: Versus les attentes ou qui ne sont jamais
évalués?
M. Bélisle: Qui ne sont jamais évalués.
Jamais évalués, pas de feedback, rien. Le gars est dans le champ,
et il, ne sait pas effectivement si le travail qu'il a fait, c'est
apprécié ou pas apprécié.
M. Giroux: Ce|a me surprend beaucoup, 40 %. C'est sûrement
moindre que cela, il faudrait voir votre étude, comment elle a
été construite. Mais, il y a effectivement des gens qui ne sont
jamais évalués. Mais par ailleurs, ça ne veut pas dire
qu'ils n'ont jamais de feedback cependant. Ils n'ont peut être pas un
feedback tout à, fait organisé..
M. Bélisle:... informatisé
M. Giroux:... systématique annuellement, mais je pense
qu'ils, ont en cours de route des feedback, pour la plupart, je croirais.
M. Bélisle: Est-ce que vous êtes - ça
n'existe pas chez vous? - pour le rendement, l'excellence, le programme de
l'excellence? Je m'excuse, mais Saint-Hubert, une de nos grandes marques de
commerce au Québec, dans le domaine privé, c'est leur slogan: A.
l'excellence! Est-ce que vous êtes...
Le Président (M. Lemieux): Vous êtes en conflit
d'intérêts, M. le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Oui, je le sais, mais il faut que je le dise.
Est-ce que vous êtes partisan d'une politique de gestion des ressources
humaines basée sur un système qu'on pourrait mettre de l'avant,
sur l'excellence? Le syndicat qui était avant vous nous a dit: Nous
autres, des dollars, ça ne nous intéresse pas, c'est la promotion
à l'intérieur du système qui nous intéresse. On
n'en veut pas des dollars, on ne veut pas avoir de prime à l'excellence
de cette façon-là. C'est, en fin de compte, |e contraire de tout
ce qui se passe partout sur le marché du travail, à part des
bonis qui sont des bonis d, 'autres ordres. Est-ce que vous ayez
réfléchi là-dessus? Est-ce que vous avez des idées
là-dessus?
Le Président (M. Lemieux): La parole, après, est
à M. te député de Saint-Louis. Vous pouvez
répondre.
M. Giroux: Vous avez constaté vous-même que 38 % de
nos professionnels, selon, ce qu'ils vous disent, n'ont pas d'attentes
signifiées clairement. Comment peut-on, sur cette base, les
évaluer en fonction d'un rendement et faite varier leur salaire en
fonction de cela? El je vous dirai que ce n'est pas nouveau Ça, existe
pour les cadres, le régime au rendement. Et, quatre ou cinq ans
après son implantation - il faudrait peut être savoir maintenant
comment ça s'applique - la plupart des cadres n'avaient toujours pas
d'attentes signifiées clairement. Alors, c'est impossible, probablement
de, penser avoir ça en place dans notre régime actuel.
Deuxièmement, je vous dirais que, nous craignons
énormément l'arbitraire, que l'arbitraire est source de
démotivation énorme. Le confrère Harguindeguy vous en a
parlé, dans le cadre des promotions sans concours, comment ça
pouvait démotiver les gens Nous avons l'impression qu'un régime
salarial qui repose en partie sur le jugement de quelqu' un est très
arbitraire.
Prenons l'exexnple d'un cadre qui gère une équipe
mullidisciplinaire et qui veut d'ailleurs que les gens, travaillent. Ie plus
possible en complémentarité les uns avec les autres sur un mandat
précis. Comment peut il évaluer correctement l'apport d'un
économiste par rapport à un sociologue, par rapport à
quelqu'un d'une autre discipline? À, moins qu'il ne connaisse
lui-même la discipline ou à moins qu'il ne soit toujours avec eux,
c'est impossible. Alors, nous avons dit et nous répétons: Tenons
ce calice loin de nous, ça ne résout pas le problème,
ça n'insuffle rien de nouveau dans la fonction publique; ça ne
ferait qu'accroître l'arbitraire et, il y en a déjà
suffisamment.
Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Trois, quatre minutes, M. le
député.
M. Chagnon: Je voudrais revenir sur le point qui a
été soulevé concernant l'imputabilité ou \a
reddition de compte. Je pense que la discussion nous amène à
comprendre que le Syndicat des professionnels est d'accord avec le principe de
la reddition de compte ou de l'imputabilité tant interne qu'externe,
c'est-à-dire interne à l'intérieur de la hiérarchie
de l'administration publique et externe vis-à-vis de l'Assemblée
nationale, ses membres et sa composition. Il me semble - et je reviens à
la phrase qui a été mentionnée dans le
résumé de votre mémoire, "que le principe de
l'imputabilité des fonctionnaires soit accepté dans la mesure
où toutes les conditions de travail sont négociables" - moi
aussi, dans mon esprit, que ça pose une dichotomie. Il
m'apparaîtrait plus évident de reprendre le raisonnement que vous
venez de faire, à savoir que, oui, on serait capables d'être
imputables, à tout le moins à l'interne, à la condition
que nos attentes et les objectifs soient clairs. La protection des membres
quant à l'imputabilité, pour moi, je n'ai pas saisi ce
bout-là parce qu'il m'apparaît que l'imputabilité ne peut
être que l'objet du jugement de la personne qui a eu à prendre des
décisions en cours de route ou encore de ses compétences qui
peuvent très bien s'arrimer à son jugement.
On parlait de l'environnement, vous avez parlé de l'environnement
tout à l'heure. La ou les personnes qui ont, par exemple, donné
le permis d'utilisation des terrains de Saint-Jean à la Balmet, en
1983-1984, ont sûrement erré, en termes de jugement. Qui en a
écopé? Évidemment, c'est l'appareil politique, c'est le
ministre du temps, c'est le gouvernement du temps. Mais il y a des gens qui ont
erré en prenant une décision sur ce sujet-là, à
l'époque. Et ce n'est pas parce que leurs conditions de travail
étalent complètement négociables que ça les a
empêchés d'errer, qu'ils ont eu éventuellement à
rendre des comptes à quiconque ou, troisièmement, qu'ils ont pu
être sanctionnés ou. dans d'autres cas, promus par rapport
à leur qualité de travail, leur jugement ou leur
compétence. Il me semble que le principe de l'imputabilité ne
s'accroche pas directement aux conditions de travail. On peut avoir les deux,
faire les deux postulats, que le principe d'imputabilité des
fonctionnaires soit accepté et aussi, deuxième postulat, que
toutes les conditions de travail soient négociables. Mais seulement,
comment est-ce qu'on accroche le bébé, là, dans le
carrosse?
M. Giroux: L'imputabilité suppose une
décentralisation vers les gens qui sont près des décisions
à prendre, que toutes les décisions ne soient pas prises par le
sous-ministre ou le ministre, mais qu'on délègue et qu'on juge en
fonction des résultats à partir des mandats qu'on a
donnés.
Or, dans ce processus de délégation - vous avez raison de
dire que ce n'est pas une condi- tion nécessaire de
l'imputabilité, mais c'est un accompagnement, je dirais, qui
faciliterait les choses. Si les conditions de travail étaient toutes
négociées et, dans un cadre général, applicables
également à tout le monde, alors que, lorsqu'il s'agit d'une
directive du Conseil du trésor, un ministère peut en appliquer
une partie, peut ne pas appliquer l'autre, si c'était dans la convention
collective, c'est la même règle de droit, à ce
moment-là, qui s'applique à tout le monde. On aurait une
égalité dans le ministère, à cet
égard-là, et on pourrait, nous, facilement dire à nos
gens: Nous devons maintenant totalement être responsables, il n'y a plus
de fuite possible, ni pour vous, ni pour vos gestionnaires; les règles
sont claires, les politiques sont claires, elles sont dans la convention
collective pour la partie de gestion des conditions de travail et des
ressources humaines.
Prenons le perfectionnement, par exemple. C'est une matière un
peu négociable, mais le fait que ce soit le Conseil du trésor qui
soit notre interlocuteur et que les ministères soient très loin,
on ne parle pas de vrai perfectionnement. On parle de quantum, on ne parle pas
d'objectif de gestion des ressources, etc., c'est très difficile. Alors,
si on changeait un peu le processus, puisque le perfectionnement, c'est pour
permettre de réaliser des mandats, on aurait un peu plus de
responsabilités nous-mêmes. Mais vous avez raison de dire que ce
n'est pas une condition essentielle.
Le Président (M. Lemieux): Merci, monsieur...
M. Chagnon: Une question accessoire...
Le Président (M. Lemieux): Accessoire, mais pas trop
longue, M. le député de Saint-Louis.
M. Chagnon:... à l'énoncé qui a
été fait par M. le président Giroux, à
l'égard de l'intégration des personnes qui sont occasionnelles
comme permanentes. Vous semblez nous indiquer que vous avez... Vous ne semblez
pas apprécier l'idée qu'il y ait des concours pour les gens qui
sont actuellement occasionnels, depuis, vous avez dit, au-delà de trois
ans, si je ne m'abuse.
M. Giroux: Exact.
M. Chagnon: Comment arrimez-vous ça avec la volonté
politique qui a certainement un peu d'âge, à l'égard de
créer certaines formes de discrimination positive pour les femmes, les
personnes des minorités visibles, les handicapés, les
autochtones? Est-ce que le fait de ne pas revenir faire un concours pour juger
les personnes qui sont les plus compétentes, avec
l'élément de discrimination positive en
arrière-scène, ne permettrait pas, plus rapidement, de
répondre à des attentes qui sont très légitimes de
la part de
tous ces groupes dans la société - les femmes, 51 % de la
population, en partant?
M. Giroux: On parle ici d'emplois à statut
précaire, les emplois occasionnels, et d'un phénomène qui
a crû considérablement ces dernières années. Ce
qu'on constate, quant à nous, en tout cas, pour les gens qui occupent
ces emplois, Il s'agit, en très grand nombre, de jeunes, donc de gens
qui ont quitté les univer-sités il y a peu de temps et qui ont de
la difficulté à se trouver des emplois réguliers un peu
stables et qui donc viennent dans 1a fonction publique où il y a eu un
peu de croissance. Et la seule croissance dans la fonction publique, M. Johnson
le disait ce matin, c'est par les emplois occasionnels. Ce sont
également, pour la moitié chez nos membres, des femmes
occasionnelles, alors que, pour les effectifs réguliers, les femmes
comptent maintenant pour 20 % seulement. Or, il y a là, en les
maintenant en emploi, possibilité d'atteindre une croissance des
effectifs féminins, de donner de l'emploi à ces jeunes
plutôt que de les remettre en concurrence avec des gens qui sont
peut-être plus compétents, plus âgés, plus vieux, qui
ont acquis leurs compétences ailleurs. Parce que c'est ça, des
concours de recrutement, nous allons aller voir sur le marché qui est le
plus compétent pour venir occuper ces emplois. Nous disons, nous: Pourvu
qu'on vérifie leur compétence, ces gens-là sont venus dans
des conditions précaires offrir leurs services, on les a formés,
on a investi, ils se sont dévoués, on devrait les garder. Ce
n'est pas leur faute si on change l'étiquette de leur emploi. (16 h
15)
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président.
J'aurais peut-être une petite question qui n'a pas été
abordée. C'est dans votre mémoire, à la page 9, où
vous parlez de la participation des fonctionnaires à la vie politique
comme citoyens et citoyennes et après vous faites
référence, dans votre paragraphe 2. 1, à
l'ingérence politique et administrative. Je viens de prendre
connaissance des articles 10, 11 et 12 de la loi que j'ai devant moi. Il y a
une question qui m'est venue à l'esprit et que j'ai
rédigée. Comment pouvez-vous concilier cette neutralité
politique de la fonction publique et la participation comme telle des
fonctionnaires à la vie politique? Vous vous défendez - je
remarque ça dans votre deuxième paragraphe - de
l'ingérence politique venant de l'extérieur, et je me demande
comment vous, vous allez contrôler l'influence ou l'ingérence des
fonctionnaires qui pourraient être politisés. Ce que je crains y
voir arriver, je vais vous dire ce que je crains et ce que j'ai dans la
tête là. Ça ne serait pas le cas où il pourrait y
avoir une nouvelle source de conflit entre syndiqués et administrateurs.
Est-ce que pour vous les articles 10, 11 et 12 de la loi ne vont pas assez
loin? Est-ce que vous voudriez y voir des modifications à ces articles
10, 11 et 12 de la loi?
M. Giroux: Non, pas du tout. Notre lecture n'est peut-être
pas correcte, mais le plus grand danger, puisque je crois saisir votre
préoccupation... Vous dites: Si les fonctionnaires font des
activités politiques, se commettent politiquement, d'une certaine
manière, qu'est-ce qui nous assure qu'ils seront impartiaux dans le
travail?
Le Président (M. Lemieux): C'est effectivement le sens de
ma question.
M. Giroux: Moi, je pense que si les règles de gestion des
ressources humaines à l'intérieur font en sorte que quelqu'un qui
agirait ainsi n'en a aucun avantage interne, ce qui n'est pas garanti
maintenant, et c'est là le lien que nous faisons avec les
barrières à l'embauche pour les occasionnels, les promotions sans
concours, les règles pour les sous-contrats également mais aussi
dans toute la gestion interne. S'il y avait des processus de
rémunération au rendement par exemple, ce serait encore pire.
Alors, pourvu que les gens qui agissent ainsi ne soient pas
récompensés, mais peut-être disciplinés si c'est le
cas, il n'y a pas de problème. Mais je dirais que le signal le plus
important devrait venir de nos partis politiques. Si nos partis politiques
continuent à faire des nominations partisanes - et j'inclus les deux
partis politiques - à des postes de plus en plus bas dans nos
hiérarchies, forcément, les gens comprennent que le signal qu'on
leur envoie, c'est que le dévouement envers un parti politique,
ça paye, alors la confusion va s'installer dans nos rangs.
Le Président (M. Lemieux): M. Giroux, êtes-vous
capable de vivre actuellement avec les articles 10, 11 et 12 de la loi?
M. Giroux. Oui, et nous souhaitons qu'ils soient maintenus.
Le Président (M. Lemieux): Oui. O. K. Ça va. Alors,
nous vous remercions de votre collaboration et de votre participation
très enrichissante à cette commission. Nous allons suspendre pour
trois minutes et 30 secondes.
(Suspension de la séance à 16 h 19)
(Reprise à 16 h 27)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Auriez-vous l'amabilité et la gentillesse de bien vouloir prendre
place? La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux.
Nous allons maintenant entendre l'Association professionnelle des
ingénieurs du gouverne-
ment du Québec. Est-ce que le porte-parole de cette association
professionnelle voudrait bien s'identifier, s'il vous plaît, et
identifier les gens qui l'accompagnent?
Association professionnelle des ingénieurs du
gouvernement du Québec
M. Colbert (Claude): Merci beaucoup, M. le Président Je
suis Claude Colbert, ingénieur et vice-président à
l'exécutif de notre association. Je suis accompagné aujourd'hui
de M. Denis Ouellet, également à l'exécutif do
l'association, de M. Jean Lavergne, qui est au conseil d'administration de
notre association. À ma droite, l'ingénieur Robert Cloutier, qui
siège au comité de négociation, et Mme
Hélène Cloutier, qui est agente de recherche et d'information et
permanente à notre syndicat.
Avant de débuter, M. le Président, j'aimerais que vous
m'apportiez une précision, à savoir si mes collègues
peuvent intervenir lors de la période de questions ou si c'est
réservé exclusivement au porte-parole. Je ne voudrais pas
créer de précédent.
Le Président (M. Lemieux): Non, ils peuvent
intervenir.
M. Colbert: D'après ce que j'ai vu...
Le Président (M. Lemieux): On est très
libéral ici.
M. Colbert: Oui. O. K.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Colbert: Avant de débuter...
Le Président (M. Lemieux): Pas de commentaires.
M. Colbert:... la présentation de notre mémoire,
j'aimerais peut-être faire une petite mise en situation. C'est
peut-être la première fois pour bien du monde qu'ils entendent
parler de l'Association des ingénieurs du gouvernement du Québec.
Je prendrai juste quelques minutes pour vous expliquer pourquoi on existe et
pourquoi on est rendus là.
Disons que notre Association regroupe un peu plus de 1000
ingénieurs qui oeuvrent au gouvernement du Québec, dans la
fonction publique, et nous avons obtenu depuis à peu près deux
ans notre accréditation syndicale de façon indépendante.
J'aimerais vous rappeler aussi que les ingénieurs du gouvernement du
Québec ont été les premiers salariés dans les
années soixante à lutter pour le droit à la reconnaissance
syndicale dans la fonction publique. À cette époque-là,
certains de vous s'en souviendront, le mot "syndicalisme" était presque
antiprofession- nel. Alors, c'est notre groupe qui s'est, le premier,
porté à la défense de la reconnaissance syndicale, et
c'est en décembre 1965, par la loi 55, que le gouvernement a reconnu de
fait l'entité syndicale des ingénieurs. À cette
époque, cette Loi sur la fonction publique donnait à tous les
fonctionnaires le droit de négocier et le droit de grève, et, on
a fait un bon bout de chemin depuis ce temps-là. Mais la loi, même
à cette époque-là, soustrayait déjà
l'application de certaines parties du Code du travail en imposant certaines
conditions de travail non négociables. Les groupes qui nous ont
précédés en ont fait mention et je vais y revenir un petit
peu plus tard.
Le but qui nous motive aujourd'hui, ce n'est pas de faire de la
politique ou quoi que ce soit dans ce genre-là. C'est vraiment pour
s'assurer que nos conditions de travail puissent nous permettre de donner le
meilleur service à la population, des services de qualité
auxquels la population est en droit de s'attendre.
Actuellement, le mandat de votre commission est un mandat très
vaste. Nous, avons pu le constater dans l'appel public de consultation. Nous on
veut se limiter seulement aux aspects qui nous préoccupent.
Peut-être pensez-vous qu'on a des préoccupations très
pointues? Ce n'est pas que les autres problèmes ne nous
intéressent pas. Au contraire. Mais étant donné qu'on est
un nouveau syndicat indépendant et qu'on est encore à
négocier avec votre collègue du Trésor notre
première convention collective, on va surtout se concentrer sur les
choses qui nous préoccupent vraiment.
Le principal point de préoccupation, justement, dans vos quatre
mandats, c'est la gestion des ressources humaines parce qu'on croit que c'est
par les employés que la mission fondamentale de la fonction publique est
réalisée, mission qui est de fournir au public les services de
qualité auxquels elle a droit et de s'assurer de la
concrétisation des objectifs de l'État.
Or, comme je le disais tantôt, la loi actuelle sur la fonction
publique crée un régime de relations du travail d'exception en
rendant non négociables pour les employés de l'État
certaines choses qui sont négociables pour les employés en
général, en vertu du Code du travail. Quand on donne de tels
pouvoirs à l'État-employeur, si on peut dire, ça risque de
provoquer des situations où il y a abus d'autorité et des risques
de décisions arbitraires assez élevés.
Nous, on croit que pour éviter ce genre de problème, toute
condition de travail devrait être négociée de façon
à favoriser l'implication et la motivation des employés. C'est
pourquoi nous recommandons que la loi soit modifiée de façon
à permettre la négociation de toutes les conditions de travail,
comme c'est accordé à d'autres groupes d'employés par le
Code du travail.
À ce sujet, nous avons, excusez l'expres-
sion, "spotté" quelques sujets que la commission Bisaillon avait
déjà proposé d'inclure dans les conventions collectives en
1982; je veux parler ici de l'éthique et de la discipline, de même
que du classement des fonctionnaires. D'abord, en ce qui concerne
l'éthique et la discipline qui sont des règles
édictées par règlement par le Conseil du trésor, ce
sont des aspects qui concernent presque exclusivement le service exclusif que
doit donner le professionnel à son employeur et,
particulièrement, ceux auxquels une loi confère un champ de
pratique exclusif. C'est notre cas. Les ingénieurs, on est assujetti
à la Loi sur les ingénieurs qui nous confère un champ de
pratique exclusif et c'est pour cette raison-là que le service exclusif
nous touche un peu plus que d'autres professionnels de la fonction publique ou
d'autres fonctionnaires éventuellement.
Alors, on trouve qu'à cause de notre loi de champ de pratique
exclusif, ça nous crée une situation un peu discriminatoire par
rapport à d'autres groupes d'employés qui pourraient
éventuellement avoir un service, qui ont un service non exclusif
à l'État. Dans notre cas, à cause de la Loi sur les
ingénieurs, ça nous confère d'être exclusivement au
service de l'État, ce qui, à notre sens, est un peu
discriminatoire par rapport à d'autres employés de la fonction
publique.
Il y a un autre aspect qui est lié à ce facteur de service
exclusif, c'est le manque de mobilité. Actuellement, les
ingénieurs ne font pas exception à la règle dans ce
domaine-là. Mais ce qu'on trouve, c'est que le rapport Bisaillon
préconisait à l'époque aussi une grande mobilité
des employés de l'État, autant à l'intérieur du
gouvernement, que vers le secteur péripublic, voire même dans
certaines circonstances, la possibilité d'échanger des
fonctionnaires avec le secteur privé.
Dans notre cas, c'est particulièrement intéressant. Dans
le plus grand intérêt de la population, les ingénieurs,
pour acquérir une certaine compétence, une certaine expertise
dans plusieurs domaines, devraient pouvoir être assurés d'une
certaine mobilité d'aller faire un petit tour, par exemple, dans la
pratique privée, de revenir au gouvernement, et inversement.
Malheureusement, à l'heure actuelle, à cause du régime du
fonds de retraite, entre autres, auquel on est assujettis, plusieurs
ingénieurs ne peuvent même pas penser à délaisser la
fonction publique pour aller dans la pratique privée un bout de temps
parce qu'ils perdraient tout simplement trop d'argent. Donc, peut-être
que la négociation même du régime de retraite des
ingénieurs ou peut-être d'autres professionnels devrait être
envisagée pour permettre cette plus grande mobilité. Alors, dans
ce sens, ce qu'on propose - ce n'est peut-être pas dans la Loi sur la
fonction publique mais c'est quand même indirectement relié
à la question d'une plus grande mobilité - c'est qu'on devrait
s'assurer que tous les fonds de retraite puissent être
transférés avec des sociétés d'État ou
d'autres organismes, voire même remis à l'employé s'il veut
quitter pour le privé.
Il faut que le gouvernement prenne conscience, que par ces
régimes de retraite, les employés sont ni plus ni moins
menottés. On pourra faire état de quelques exemples, si vous le
voulez, tantôt. Par exemple, après une vingtaine d'années,
c'est bien clair qu'un ingénieur, ayant mis trop d'argent dans son
régime de retraite et la partie réputée de l'employeur
étant très difficile à percevoir, rendu à cette
époque, étant près de la retraite, n'osera même pas
tenter l'expérience d'aller acquérir une meilleure expertise
ailleurs. Alors, pour cette partie-là, c'est correct.
Maintenant, il y a d'autres règles qui devraient être aussi
négociées, à notre avis. C'est le classement. Toutes les
matières de classification devraient être négociables parce
qu'on trouve, particulièrement présentement, que le Conseil du
trésor lie trop la classification en. termes de gros sous Pour des
économies de bouts de chandelles, des employés vont être
mal classifiés et ça va créer de l'insatisfaction. On
pense que ce sont des choses qui devraient être négociées
avec le syndicat de façon à rendre les employés un peu
plus motivés. Je vais vous donner quelques exemples. Par exemple, dans
le recueil des politiques de gestion du Conseil du trésor, pour
être classé professionnel, on exige un premier diplôme de 16
ans de scolarité. Or, dans toutes les facultés de génie au
Québec, le diplôme universitaire comporte 17 ans de
scolarité et le Conseil du trésor ne tient pas compte de ce taux
de scolarité pour accorder aux ingénieurs les 30 crédits
supplémentaires qui pourraient leur être attribués par
rapport à d'autres groupes de professionnels, sous prétexte que
c'est le diplôme qui fait la loi. Vous avez un diplôme, peu importe
si ç'a pris plus ou moins d'années, vous êtes classé
zéro en partant et c'est comme ça que ça marche. C'est la
même chose pour le deuxième diplôme universitaire. Les
diplômes de maîtrise, par exemple, requièrent, dans le
domaine du génie, en général, 45 crédits, alors
qu'en général, c'est 30 crédits qui sont reconnus. C'est
encore une façon pour les ingénieurs de perdre à peu
près la valeur d'une demi-année. C'est, à notre avis,
discriminatoire à notre égard.
Un autre exemple Bien, celui là est pas mal contre le bon sens.
Le Conseil du trésor, dans sa réglementation, reconnaît
l'expérience d'étudiants qui font des stages pratiqués en
entreprise comme crédits d'expérience, sauf pour ceux qui sont
membres d'une corporation professionnelle. Alors, des ingénieurs qui
viennent sur le marché du travail après avoir fait des stages
soit au gouvernement, soit dans l'entreprise, en plus d'avoir
étudié un an de plus, ils ne se le font même pas
reconnaître comme expérience sous prétexte
qu'ils sont membres d'une corporation professionnelle. Dans le cas des
facultés de génie au Québec, c'est, bien sûr, la
faculté de génie de l'Université de Sherbrooke qui est la
plus touchée. Les étudiants en génie de cette
faculté n'ont plus aucun avantage à venir au gouvernement;
même, au contraire, on a beaucoup de difficultés à recruter
ces étudiants bien qu'ils aient, à cause justement des stages en
milieu de travail, généralement plus de facilité à
s'adapter à leur nouvelle carrière. On a même vu dans
certains cas aussi des ingénieurs, par exemple, qui, après avoir
acquis un certain nombre d'années d'expérience sur le
marché du travail, ont été classés comme ayant huit
ans d'expérience alors que s'ils acceptaient, par exemple, d'être
agents de recherche ou de planification socio économique ou autre, on
leur aurait reconnu 10 ans d'expérience, en supposant qu'un
ingénieur aurait travaillé deux ans dans un domaine professionnel
mais qui n'est pas relié à la pratique du génie. Encore
là, ce sont différentes façons dont la classification nous
pénalise.
Maintenant, comme je vous l'ai dit tantôt, on n'a pas voulu faire
de mémoire exhaustif sur la Loi sur la fonction publique, mais il y a
une dernière chose que je voudrais vous mentionner, c'est - les groupes
qui nous ont précédés l'ont fait allègrement -
effectivement, la recommandation de réduire progressivement l'embauche
d'employés occasionnels. Depuis 1988, le nombre n'a cessé
d'augmenter, et on se rend compte, nous autres aussi, comme dans d'autres
secteurs, que les employés occasionnels, bien souvent, sont des
employés permanents. Et je pense que, dans le contexte actuel, il y
aurait certainement lieu de réviser la possibilité de rendre
permanents beaucoup de postes occasionnels. Nous, ce qu'on préconise
dans ce domaine là, c'est l'intégration pure et simple des
employés occasionnels qui ont plus de cinq ans do service. S'ils ont
fait l'affaire pendant cinq ans, je ne vois pas pourquoi ils ne feraient pas
l'affaire pour le reste de leur carrière. Aussi, permettre aux
employés qui se situent entre trois et cinq ans de
bénéficier au moins de certains avantages lorsqu'ils auront un
appel de promotion dans le cas de leur poste.
Brièvement, on pourrait résumer comme suit. Nos
recommandations veulent simplement qu'on puisse négocier toutes les
conditions de travail que la loi ne nous reconnaît pas actuellement,
dont, en particulier, les normes sur l'éthique et la discipline, et on
vise indirectement le champ de pratique exclusif. Les normes de classement des
individus devraient aussi faire l'objet de négociations directes. Nous,
dans plusieurs cas, on est pénalisés par rapport à
d'autres corps d'emploi, et il en est de même pour différentes
règles de promotion et de permanence, puisque, dans le cas des
ingénieurs, certaines attributions de la Loi sur les ingénieurs
nous donnent certains devoirs. En ce qui concerne les occasionnels, je le
répète, on recom- mande l'intégration pure et simple des
occasionnels de cinq ans et plus et que le gouvernement se dote de
mécanismes pour accorder aux occasionnels de plus de trois ans un statut
de permanent, selon des critères qui seront à
déterminer.
Alors, c'est tout ce que j'ai dans ma présentation.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Les membres
de cette commission ont pris connaissance de votre mémoire, y compris
moi-même, et on se rend bien compte, à la lecture de votre
mémoire, que vous ne faites peut-être pas une étude
exhaustive de la loi mais que vous faites ressortir, je dirais, des points qui
touchent davantage les conditions de travail des gens que vous
représentez. La commission, vous en êtes bien conscients, a comme
mandat d'entendre les intéressés, et subsidiairement, dans
certains cas, effectivement, les conditions de travail se rapprochent, je
dirais, de certains aspects qu'on a à regarder sur la Loi sur la
fonction publique. Mais je veux que vous sachiez dès le départ
que la commission ne se mêlera pas du processus de négociation ni
le discutera. Je veux que vous en soyez bien conscients. Et sur ça, je
cède la parole au député de Mille-Îles.
M. Bélisle: Merci M. le Président. M. Colbert, la
partie importante dans votre document, c'est la pratique exclusive, le service
exclusif. J'aimerais bien comprendre ce que vous entendez. Est-ce que cela
signifie que, quand vous êtes un ingénieur à l'emploi du
gouvernement du Québec, parce que vous êtes un employé de
l'État du Québec, vous ne pouvez en aucune façon obtenir
des contrats, solliciter des contrats, exécuter des contrats pour
quelque autre partie que ce soit? Est ce que c'est ça, le service
exclusif? (16 h 45)
M. Colbert: Le service exclusif, oui, c'est ça. Nous, de
par la Loi sur les ingénieurs, on a aussi un champ de pratique exclusif,
et ceci nous donne certains devoirs de pratique. Vous y avez fait allusion
tantôt, devant le groupe qui nous précédait. Quand un
ingénieur a un mandat, il a le devoir de réaliser son mandat,
mais, par contre, on veut s'assurer aussi qu'il ait le droit de l'assumer
exclusivement, non pas que certains mandats du domaine du génie soient
donnés à d'autres employés - sans que je mette les
compétences en doute - qui ne sont pas habilités à poser
certains actes techniques. On n'aurait pas l'idée, par exemple, d'aller
porter un animal chez le médecin. C'est un vétérinaire qui
fait ça, et les humains, ce sont les médecins. Bien, les actes
d'ingénierie, on veut que ça soit réservé
exclusivement à l'ingénieur, et ce n'est pas toujours le cas.
M. Bélisle: Est-ce que vous êtes en train de
nous dire qu'à l'intérieur de la fonction publique
québécoise, il y a des actes qui devraient être
posés par des ingénieurs, mais qui sont posés par des
personnes d'autres niveaux, des techniciens, qui n'ont pas la formation
conformément à votre corporation professionnelle? "C'est-u"
ça que vous êtes en train de nous dire?
M. Colbert: Je pense que oui. Nous sommes en train
actuellement...
M. Bélisle: Êtes-vous sûr ou si vous
pensez...
M. Colbert: Vous nous avez...
M. Bélisle: Répondez-moi en ingénieur
là.
M. Colbert: M. le président nous a dit de ne pas faire de
négociation ici
Le Président (M. Lemieux): Non, mais est ce que vous
pensez ou...
M. Bélisle: Ce n'est pas de ia négociation
là.
M. Colbert: Effectivement, il y a des cas où le
gouvernement ou des gestionnaires de l'État permettent que des actes
d'ingénierie soient faits par des personnes autres que des
ingénieurs, membres de l'Ordre des ingénieurs du Québec.
On est en train d'essayer de régulariser ça dans bien des cas, et
l'Ordre des ingénieurs va devoir intervenir.
M. Bélisle: Autrement dit, l'Ordre des ingénieurs
est déjà dans le décor, si je comprends bien. C'est
ça?
M. Colbert: Bien entendu.
M. Bélisle: Bon. Est-ce que ça fait
référence aussi à l'autre partie, c'est-à-dire des
contrats à l'extérieur? Il n'y a rien à voir avec
ça.
M. Colbert: Non.
M. Bélisle: On parle juste de tâches à
l'intérieur du réseau de la fonction publique.
M. Colbert: C'est ça.
M. Bélisle: C'est bien ça? O. K. Il y a une
recommandation que vous faites à la page... En tout cas, il n'y a pas de
page dans votre document, mais je suppose que c'est la page...
M. Colbert: Vous savez, l'informatique... M. Bélisle:
Sur la loi Une voix:...
M. Bélisle: Là. je pense que je dois être
à peu près à la page 5 sur les régimes de retraite
des employés du gouvernement, la transférabilité. Vous
pourriez peut être élaborer un petit peu plus là-dessus,
parce que je ne trouve pas ça énorme, ce qui est là. Puis,
sans m'impliquer dans des négociations de fond, ça peut toucher
tout le monde dans la fonction publique, pas seulement vous autres comme
ingénieurs. Ça peut toucher des notaires, des avocats, des
économistes. Ça peut toucher un paquet de personnes qui
pourraient être plus mobiles, sortir, s'en aller vers une fonction
publique municipale, scolaire, etc., fédérale, privée
ou... J'aimerais vous entendre là dessus, parce que ça, en tout
cas, c'est pratique, c'est concret, et ça a beaucoup de sens en termes
de mobilité de main-d'oeuvre. Je pense que ça serait
excellent.
M. Colbert: Si vous permettez, je vais demander à mon
collègue, Robert Cloutier, de vous répondre à
ça.
Le Président (M. Lemieux): M. Cloutier.
M. Cloutier (Robert): Bon. En ce qui concerne les fonds de
pension du gouvernement, II faut dire que ce sont à peu près...
J'ai fait une étude, moi, depuis deux ans, sur les fonds de pension et
celui du gouvernement du Québec arrive, disons, pas mal à la
queue. C'est-à-dire qu'on est à peu près en arrière
de tous les fonds de pension, que ce soit municipal, fédéral ou
des gros fonds de pension privés. De sorte qu'un ingénieur qui
travaille au gouvernement, après une dizaine d'années, il est
pris par le système, et même s'il veut quitter, il ne peut pas
quitter sans subir une pénalité. Mais là, entendons-nous.
Ce n'est pas une pénalité seulement de la part du gouvernement
qu'il n'obtient pas. C'est une pénalité de sa propre part,
c'est-à-dire de l'argent qu'il a mis dans le système et qu'il ne
peut pas récupérer ou, disons, dont il récupère
seulement une partie. Si l'employé a plus de 45 ans, sa retraite est
différée à 65 ans. Et dans certains cas, il n'y a
même pas d'Indexation entre le moment où il quitte et le moment
où il retire sa pension. Alors, disons que le gouvernement, des fois,
dit qu'il nous donne la permanence, mais il va plus loin que ça, il nous
tient en sevrage, si on peut dire, en nous forçant... Après 20
ans, même quelqu'un qui aurait une augmentation, disons, de 10 000 $, 15
000 $, ne peut pas quitter le gouvernement sans perdre justement à cause
de ce mécanisme de pension différée à 65 ans. Si
quelqu'un est dans le RRF, par exemple, à 55 ans, il va avoir droit
à une pleine pension. Le fait qu'il quitte avant d'être admissible
à la pension le reporte à 65 ans Et cette pénalité
là, lorsqu'on met des chiffres, ça peut représenter
jusqu'à 500 000 $ Alors, disons que pour les ingénieurs. C'est
bien sûr, un obstacle très grand à la mobilité.
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député
de...
M. Després: Passez-lui la parole, je reviendrai par
après.
Le Président (M. Lemieux): Vous allez revenir par
après?
Une voix: Oui. Mon collègue a une sous-question.
Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le
député des îles-de la-Madeleine.
M. Farrah: J'ai une sous question, un commentaire par rapport
à ça. Je pense que c'est un élément fort
intéressant au niveau des fonds de pension parce que, lorsqu'on parle de
mobilité, je pense que le fonds de pension est un frein à cette
mobilité-là. Et je parle pour l'ensemble de la fonction publique,
parce que, souvent, si on pouvait avoir un lien avec d'autres organismes, comme
au niveau des municipalités, au niveau du privé également,
qu'il y aurait une possibilité de transférer ces fonds de
pension-là... Aussi, c'est qu'au niveau de la mobilité, ça
apporterait du sang nouveau.
Il y aurait une plus grande facilité d'aller chercher du sang
nouveau, soit des gens dans le privé, qui, peut-être en fin de
carrière, pourraient transférer leur fonds de pension et venir
travailler quelque temps au niveau de la fonction publique, par le goût
du métier et qui pourraient peut-être venir apporter ou donner des
choses qu'ils ont acquises dans le privé. Ou même l'inverse, des
gens qui ont travaillé dans la fonction publique pendant fort longtemps
ou x nombre d'années qui peuvent peut-être amener une contribution
autre au privé et qui amènent une motivation aussi à ces
individus-là, en fin de carrière ou peu importe à quel
niveau dans leur carrière.
Ça peut être un élément qui peut faire - ce
n'est pas le seul - mais un élément qui peut faire en sorte de
garder une motivation au niveau de l'ensemble des gens de la fonction publique.
Alors, moi, je trouve ça très intéressant comme
élément discuté et je pense que ça déborde
le cadre des ingénieurs. Peut-être qu'un jour il faudrait au moins
en discuter au niveau de l'ensemble de la fonction publique. Est-ce que vous
savez si d'autres professionnels, au niveau de la fonction publique, ont le
même problème ou ont évoqué ce fait-là, ou
seraient d'accord pour regarder la possibilité au moins d'ouvrir
ça? Est-ce que vous avez des alliés; en d'autres mots,
sur cette question-là?
M. Cloutier (Robert): C'est un problème qui est
particulier aux ingénieurs. C'est un problème qui a toujours
existé pour les ingénieurs parce que les gros projets, par
exemple, qui sont faits au Québec, les ingénieurs aiment bien y
participer, et puis, le fait qu'actuellement, on est pris dans un régime
qui à un moment donné nous enchaîne avec les années,
nous empêche de profiter de cette mobilité-là qui est, je
dirais, naturelle à l'ingénieur.
M. Farrah: C'est que, moi, je pense...
M. Cloutier (Robert): Par contre, pour les autres, comme les
fonctionnaires, les professionnels, je ne suis pas en mesure de savoir...
M. Farrah: Vous ne savez pas?
M. Cloutier (Robert):... à quel point ils sont
affectés.
M. Farrah: O. K. Ce sera peut-être un élément
à discourir avec d'autres groupes également. Merci.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous voulez... M. le
député de Limoilou. Je pense que vous avez une question sur le
même...
M. Després: Vous avez fini? Est-ce qu'il nous reste du
temps?
Le Président (M. Lemieux): Oui, allez-y, M. le
député de Limoilou. Allez-y.
M. Després: Je voudrais peut-être revenir sur deux
points, M. le Président. D'abord, sur l'exclusivité. En faisant
sauter des clauses d'exclusivité, ne craignez-vous pas de
dévaloriser ou de diminuer plus les emplois d'ingénieurs,
notamment au niveau de la rémunération?
Mme Cloutier (Hélène): Au niveau justement
du...
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous vous
identifier?
Mme Cloutier: Pardon...
M. Colbert: Mme Hélène Cloutier.
Le Président (M. Lemieux): Allez-y, ça va.
Mme Cloutier: Au niveau du service exclusif, ce que, dans notre
rapport on voulait dire c'est que, présentement, le Conseil du
trésor, dans ses normes d'éthique et de discipline, impose aux
professionnels qui ont un champ exclusif, exige d'eux l'exclusivité du
service au gouvernement. Ce qui veut dire, en pratique, que l'ingénieur
qui travaille à plein temps au gouvernement ne peut pas travailler,
disons, par ses soirs, pour une compagnie privée ou les fins
dé
semaine ou... C'est ça. Et ça, c'est uniquement pour les
professions qui ont un champ exclusif. Ce qui veut dire que d'autres
professionnels ne sont pas soumis à cette discipline-là, à
cette règle d'éthique. Alors, nous, ce qu'on demande, c'est que
cette norme-là soit discutable, c'est-à-dire soit
négociable, si vous voulez.
C'est qu'à un moment donné, ç'a été
appliqué d'une façon très restrictive. Un
ingénieur, par exemple, ne pouvait pas aller enseigner. On demande que,
dans la mesure où il n'y a pas de conflit d'intérêts on
laisse à l'ingénieur la liberté de travailler à
l'extérieur, à temps partiel, s'il le peut ou pour prendre de
l'expérience, soit dans d'autres domaines, ou...
M. Després: De toute façon, on ne le retrouve pas
seulement chez les Ingénieurs, présentement. On le retrouve aussi
chez les avocats, les notaires, etc.
Mme Cloutier: Ah bon! Alors tous ceux qui ont un champ exclusif.
Je suis d'accord.
M. Després: II y a un autre sujet que j'aimerais
peut-être aborder, M. le Président, vitement,
l'imputabilité. Vous n'en avez pas traité. Le Syndicat de
professionnels, lui, en a traité. Vous êtes aussi des
professionnels, les ingénieurs. J'aimerais savoir où vous vous
situez là-dedans. Vous êtes tout à fait pour ça,
contre ça? Si vous êtes pour, de quelle façon? Est-ce qu'on
doit y aller de bas en haut?
M. Colbert: M. Jean Lavergne va répondre à
ça.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. Lavergne.
M. Lavergne (Jean): Nous sommes en faveur d'une telle chose. Nous
sommes tellement en faveur que nous avons même une lof, la loi des
Ingénieurs, qui tient celui qui exerce la profession imputable de ses
actes. C'est-à-dire que, lorsque nous faisons un design ou que nous
faisons des travaux, nous sommes, de par la loi, des ingénieurs tenus
responsables de ces travaux-là. On remarquera cependant que, par les
années, cette imputabilité-là est diminuée par
l'administration publique. C'est-à-dire, lorsqu'il y a eu faute,
à certains endroits, l'administration publique a pu en prendre charge.
Parce que lorsque l'ingénieur se sent complètement imputable, il
se sent aussi obligé de se prendre des assurances, comme dans le
privé. C'est un système pratique qui existe. On ne peut
être imputable sans s'assurer d'être capable de rencontrer les
obligations pour lesquelles on est imputable. Dans le système public,
ça pourrait impliquer certaines négociations de conditions.
Le Président (M. Lemieux): On a terminé, M. le
député de Limoilou, malheureusement. Alors, M. le
député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. te Président. D'abord, juste pour
situer l'action de vos membres. À part le ministère des
Transports, quels seraient les ministères ou organismes où il y a
concentration d'ingénieurs, de vos membres?
M. Colbert: Disons que le ministère des Transports
regroupe peut-être le tiers des effectifs, 400 ingénieurs. Le
ministère de l'Environnement viendrait en deuxième place, la
Commission de la santé de la sécurité du travail aussi a
beaucoup d'ingénieurs comme inspecteurs, et c'est peut-être
l'endroit où il y a le plus de problèmes de respect du champ de
pratique. Et disons qu'ensuite, viendrait l'Agriculture, les Communications,
Énergie et Ressources, et il y a quelques ingénieurs dans
à peu près tous les ministères. Vous avez parlé
tantôt des architectes aux Affaires sociales; il y a sûrement des
ingénieurs là aussi pour faire les devis de mécanique et
d'électricité.
M. Lazure: Vous avez entendu le Syndicat des professionnels
tantôt nous parler de l'augmentation des sous-contrats qui sont
donnés à des firmes privées à l'extérieur,
alors que le Syndicat des professionnels pense que, souvent, ces
travaux-là pourraient être effectués par des fonctionnaires
professionnels de l'intérieur de la machine gouvernementale Est-ce que
vous autres, les ingénieurs, vous avez le sentiment que ces contrats,
à l'extérieur de la machine gouvernementale, su donnent souvent
à des confrères ingénieurs, alors que ces
travaux-là pourraient être faits par vos membres?
M. Colbert: Disons que nos confrères ingénieurs du
prive ont aussi le droit de pratique exclusif de leur profession. Et nous, en
ce qui nous concerne, en autant que ces travaux-là sont faits dans le
but d'aider les ingénieurs fonctionnaires à compléter des
projets, il va de soi qu'on n'a pas toujours la main-d'oeuvre et l'expertise
nécessaires pour réaliser un projet particulier. Dans le sens que
le gouvernement doit recourir à des firmes privées pour
compléter dés travaux bien particuliers, on est prêts
à collaborer entièrement avec les ingénieurs de pratique
privée. C'est ça qui se passe dans les faits. Peut-être M.
Lavergne pourra ajouter quelque chose.
Le Président (M. Lemieux): M. Lavergne
M. Lavergne: Oui. Nous, dans les ministères, nous sommes
des organismes où on exerce une surveillance de contrôle de
qualité, où on étudie les plans et devis pour certains
travaux. Il faut se rendre compte que, dans la province, il y a
énormément d'ingénieurs qui sont dans la pratique.
Il y a 30 000 ingénieurs. Il y en a énormément dans les
bureaux de consultants. La majorité des grands travaux qui sont soumis
aux différents ministères, sont soumis par des firmes
privées. Maintenant, on no devrait pas remplacer les mécanismes
de contrôle par du privé, mais il ne faut pas s'attendre à
ce que les ingénieurs des différents ministères puissent
achever toutes les tâches qui incombent actuellement aux firmes de
consultants privés.
M. Lazure: Je prends bonne note de votre esprit de collaboration
avec vos confrères du privé, c'est normal. Mais est-ce qu'il y a,
dans votre secteur à vous autres, un problème semblable à
celui qui a été décrit par le groupe
précédent, le Syndicat des professionnels, à savoir une
exagération des contrats et sous-contrats donnés à
l'extérieur? Est-ce que ça existe comme problème pour les
ingérieurs? (17 heures)
M. Lavergne: A ma connaissance, nous n'avons pas de
problèmes.
M. Lazure: Merci. Juste une autre question ... Oui, si vous
voulez.
M. Cloutier (Robert): En ce qui concerne les transports, disons
que je peux dire que ça va assez bien, mais, par contre, il y a toujours
disons, une petite pointe d'ingérence politique qui a tendance à
se faire, et certains secteurs, particulièrement du génie, ne
sont pas utilisés à 100 %, alors que ce sont des
ingénieurs qui espèrent être utilisés à 100
%.
M. Lazure: Donc, il y un problème de sous-utilisation de
vos membres dans la fonction publique.
M. Cloutier (Robert): De sous-utilisation.
Parfois, aussi, on pourrait dire d'utilisation douteuse, ou de mauvaise
utilisation des ressources.
M. Lazure: Est-ce que vous avez des exemples en tête, sans
donner de nom, juste pour illustrer ce que vous voulez dire?
M. Cloutier (Robert): Bon, disons, prenons par exemple sur des
contrats de conception routière, on va faire faire... On va donner
à une firme de génie-conseil de préparer les plans et
devis et de faire la surveillance, alors que le génie, par exemple,
pourrait très bien le faire. C'est une façon. Une autre
façon, aussi, c'est que, comme les consultants, parfois, sont, disons,
harceleurs, d'une certaine façon, le ministère peut avoir
tendance à faire préparer, par anticipation, un surplus de plans,
qui, en réalité, ne seront jamais utilisés. Alors
ça, ça crée un deuxième malaise chez les
ingénieurs.
M. Lazure: Le principe du plus que moins. Une autre question,
dans un tout autre ordre d'idées. La loi que nous étudions depuis
ce matin prévoyait, à l'article 171 ou 172, que les diverses
dispositions de la loi sont la responsabilité de ministres
désignés par le gouvernement. Vous savez que, de 1984 à
1988, il y a eu deux ministres, en général, qui. étaient
responsables pour l'ensemble des dispositions de la loi. Et depuis 1988, il y a
un seul ministre qui est responsable de toutes les dispositions. Est-ce que
vous avez, vous autres comme syndicat, une opinion là-dessus? Est-ce
qu'il vous paraît souhaitable que ce soit une seule personne, un seul
organisme, c'est-à-dire le Conseil du trésor, qui ait
l'entière responsabilité de toutes les dispositions de la loi, ou
si vous pensez que c'est préférable qu'il y ait plus d'un
ministre? Avez-vous une opinion là-dessus?
M. Colbert: Bien, pour répondre à ça, moi je
vous dirais que, indiscutablement, il faut dissocier le capital humain du
capital tout court. Quand le comptable d'une entreprise considère ses
employés comme des sous, ça devient ni plus ni moins que des
machines-outils, alors que ça fait peut-être partie de son actif.
Nous autres, les ingénieurs, on considère que l'expertise qu'on
a, qu'on peut donner à l'État, fait partie des acquis.
L'expérience, ça ne s'acquiert pas du jour au lendemain, et le
fait de pouvoir en bénéficier devrait être
considéré comme un actif dans l'entreprise plutôt que comme
une dépense. Alors, dans ce sens-là, il est bien évident
que si le comptable de l'entreprise, qui est représenté ici par
le Conseil du trésor, est le même que celui qui classe les
employés, par exemple, ça explique pourquoi des aberrations aussi
ridicules comme aller à l'école un an de plus et qu'à
cause de ça, on part en retard, non seulement on part au même
échelon que les autres, mais on part un an plus tard en plus. Donc,
à la fin de notre carrière, on a travaillé un an de moins.
Et j'ai donné l'exemple aussi du classement des étudiants
stagiaires. Ça démontre bien que le comptable rattache
strictement la performance de ses employés à un coût
direct. Nous autres, c'est à travers ces
éléments-là qu'on pense que ça devrait être
dissocié. Si on peut gérer le capital humain d'un bord et
gérer les ressources financières de l'autre bord, c'est
probablement la meilleure façon pour faire que les employés vont
se sentir heureux d'être dans leurs postes et donner le rendement qui va
avec ça.
Le Président (M. Lemieux): Le député de
Prévost me fait des signes depuis tout à l'heure. Une petite, M.
le député de Prévost.
M. Forget: Si je peux.
Le Président (M. Lemieux): Allez-y, allez- y...
M. Forget: Oui, je peux? Voici, tout à l'heure vous avez
quand même parlé...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie donne le consentement.
M. Forget: Merci, M. le Président. Vous avez quand
même parlé, au niveau du ministère des Transports, qu'il y
a un malaise au niveau des Ingénieurs. Est ce que Ie même malaise
vous le ressentez au ministère de l'Environnement? Vous savez, avec
l'assainissement des eaux, il me semble qu'à un moment donné, on
trouvé que les ingénieurs du ministère de l'Environnement,
les ingénieurs d'entreprises privées, un moment donné, se
recroisent?
M. Colbert: Veux-tu répondre à ça, Jean,
concernant l'Environnement? M. Lavergne?
M. Lavergne: Je vais essayer de répondre avec le plus de
connaissances possible. C'est que, dans les travaux qui ont trait à
l'assainissement des eaux, il y a une société qui s'occupe de ces
travaux-là, et qui elle-même emploie des ingénieurs. Donc,
les relations ont davantage lieu entre les ingénieurs de la
société qu'avec les ingénieurs de l'Environnement, les
ingénieurs du ministère de l'Environnement gardant la notion de
contrôlé sur les travaux de la société Moi, c'est
comme ça à peu près que je le vois. Maintenant,
l'ingérence possible ou les difficultés, je ne peux pas vous en
parler.
Le Président (M. Lemieux): Alors..
M. Forget: Parce que si on regarde les municipalités,
elles s'en vont en appel d'offres, par exemple, au niveau des firmes
d'ingénieurs.
Alors, est-ce que vous ressentez, à ce moment- ià, quand
même, que les ingénieurs du ministère de l'Environnement,
pourraient faire plus, sans passer par les firmes privées?
M. Lavergne: On n'a pas de membres qui nous ont rapporté
de problème sur le sujet. Donc, si on avait... C'est nouveau, c'est
ça.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Mille-Îles, une dernière intervention.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je vais revenir
tantôt. M. Colbert, vous m'avez induit en erreur, peut-être
involontairement, mais quand je vous ai posé des questions au tout
début, c'était très très précis, sur: Est-ce
que le professionnel en ingénierie avait le droit de prendre des
contrats à l'extérieur? Vous m'avez dit non, Mme Cloutier nous a
dit: Bon, ça veut dire ça aussi. Je comprends que pour
l'enseignement, il ne devrait pas y avoir, peut-être, de problème,
quitte à diminuer peut-être la portion salariale, s'il y a trois
heures qui sont consommées dans une semaine à donner un cours
à l'Université Laval, donner un cours à
l'Université de Montréal, à ce moment-là, on fait
une proportion, puis on permet à l'ingénieur de donner son
expertise à d'autres dé plus jeunes générations,
ça va. Mais je verrais très mal, moi, un ingénieur
spécialisé en mécanique puis en électricité
au gouvernement du Québec, sortir le soir puis commencer à faire
ce qu'on appelle du "moonlighting", en égout et en aqueduc puis
compétitionner avec un bureau dans un sous sol, effectivement, des
firmes d'ingénieurs conseils, qui, à grands frais, maintiennent
des bureaux et des niveaux d'expertise assez hauts. Je ne verrais pas un
notaire ou un avocat au gouvernement du Québec sortir puis prendre une
cause pour une compagnie dans la région de Québec ou pour un
syndicat dans la région de Quebec. Ça n'a pas de sens. Vous
êtes peut-être prisonniers de votre propre avantage, jusqu'à
un certain point, d'avoir une pratique exclusive, mais c'est un peu le lot de
tous les professionnels qui ont des champs exclusifs C'est assez pointilleux,
c'est assez, mon collègue des Mille-Iles dit "touchy", mais c'est assez
pointilleux, ce que vous nous demandez là-dessus.
Le Président (M. Lemieux): Ça va, un dernier
commentaire.
M. Colbert: Oui, Je suis bien d'accord avec vous, et ce n'est pas
qu'on demande que les ingénieurs puissent faire de la pratique
privée en dehors de leur travail. C'est simplement que là loi a
été faite de façon tellement obtuse que certains
gestionnaires ont mêlé "service exclusif" et "champ de pratique
exclusif", et ça a été interdit, par exemple, à des
ingénieurs d'aller enseigner au cégep des cours du soir dans leur
domaine respectif, alors que d'autres professionnels...
M. Bélisle: Ça, c'est tiré par les
cheveux...
M. Colbert: C'est juste ça qu'on voulait dire. Mais en
rendant ces choses-là négociables, nous autres, on pense que
notre Association, de gré à gré avec le gouvernement, on
est capables de s'entendre sur des mécanismes bien plus souples que ce
qui serait défini dans une loi.
M. Bélisle: La seule chose que je peux vous dire, c'est
qu'on n'est pas ni obtus, ni imbu, on est un homme complètement ouvert.
Alors...
Le Président (M. Lemieux): Sur ce.
M. Bélisle: Je pense que votre message...
M. Colbert: Ce n'est pas votre commission que je mets en cause,
c'est le régime.
Le Président (M. Lemieux): Merci de votre
collaboration et de votre participation à cette commission
parlementaire. Maintenant j'inviterais le Syndicat des avocats et notaires.
Nous allons supendre deux minutes seulement, et vraiment deux minutes, pour
leur permettre de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 10)
(Reprise 17 h 12)
Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de
l'administration reprend ses travaux pour entendre... À l'ordre, s'il
vous plaît! Auriez-vous la gentillesse et l'amabilité de bien
vouloir prendre place. Nous allons maintenant entendre le Syndicat des avocats
et notaires. Je demanderais à son président, M. Bilodeau, de bien
vouloir nous présenter les gens qui l'accompagnent.
Syndicat des avocats et notaires de la fonction
publique
M. Bilodeau (Pierre): Donc, à ma gauche, Luc Bruneau,
adjoint au comité exécutif et, à ma droite, Isabelle
Demers, secrétaire du Syndicat.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Nous sommes
prêts maintenant à vous entendre.
M. Bilodeau: Le Syndicat des avocats et notaires de la fonction
publique représente actuellement plus de 650 juristes dans la fonction
publique. Nous négocions avec le gouvernement nos conditions de travail,
lesquelles sont, après négociation, adoptées par le
Conseil du trésor. Donc, si on regarde présentement, la
dernière entente salariale entre le gouvernement du Québec et les
avocats et notaires s'est terminée le 31 décembre 1988. Les
avocats et notaires de la fonction publique, présentement, sont en
moyens de pression, et on est toujours en attente d'un dépôt de la
partie patronale Lorsque la négociation - ce n'est pas long, juste une
ou deux phrases...
Le Président (M. Lemieux): Vous avez compris la remarque
que j'ai faite tout à l'heure. O. K. Allez-y. Ça va.
M. Bilodeau: Lorsque la négociation est terminée
entre le Syndicat des avocats et notaires et le Conseil du trésor, le
Conseil du trésor adopte par directive les conditions de travail des
avocats et notaires. Donc, c'est pour ça que je veux le contexte. C'est
que les conditions de travail des avocats et notaires sont adoptées par
une directive du Conseil du trésor.
Donc, nous travaillons à trouver des solutions aux
problèmes de relations du travail de nos membres. Donc, au cours des
années 1988 et 1989, nous avons fait trois requêtes à la
Commission de la fonction publique et aucune d'entre elles, à nos
demandes, n'a donné... La Commission n'est intervenue dans aucune des
requêtes pour faire des recommandations. Donc, le mémoire que nous
vous présentons a pour objectif de trouver des solutions au refus de la
Commission de la fonction publique d'exercer son pouvoir d'enquête et de
recommandation, conformément à l'article 115 de la Loi sur la
fonction publique, lequel permet de vérifier le caractère
inéquitable des décisions prises par l'employeur et affectant nos
membres.
Une des questions qui préoccupent la commission du budget et de
l'administration, c'est la qualité et l'efficacité des services
rendus aux citoyens. Donc, il y a l'article 2 de la loi et l'article 3. 4 que
je vais relire pour nous mettre dans le contexte. L'article 2 de la loi dit:
"La fonction publique a pour mission de fournir au public les services de
qualité auxquels il a droit, de mettre en oeuvre les politiques
établies par l'autorité constituée et d'assurer la
réalisation des autres objectifs de l'État. " Et, à
l'article 3, on dit: "L'objet de la présente loi est de permettre
l'accomplissement de cette mission. À cette fin, elle institue un mode
d'organisation des ressources humaines destiné à favoriser: - et
notre mémoire touche au point 4° de l'article 3 -
l'impartialité et l'équité des décisions affectant
les fonctionnaires. "
Donc, à partir de cet article-là, nous traitons d'abord de
la portée du pouvoir que la Commission de la fonction publique a; par la
suite, nous vous présentons la nature des requêtes et les
réponses de la Commission, et nous nous interrogeons sur le refus d'agir
de la Commission concernant les requêtes présentées par le
Syndicat des avocats et notaires en vertu de l'article 115 de la Loi sur la
fonction publique. Enfin, nous vous présenterons nos recommandations
pour remédier au refus d'agir de la Commission.
Donc, le pouvoir d'enquête et de recommandation de la Commission
de la fonction publique, c'est l'article 115 de la Loi sur la fonction publique
qui attribue ce pouvoir, lequel se lit comme suit - c'est important parce que
tout le mémoire porte sur l'article 115 - "115. En outre de la fonction
d'entendre les recours en appel des fonctionnaires prévus par la
présente loi, la Commission est chargée: 1° de
vérifier le caractère impartial.. " et pour nous, c'est "de
vérifier le caractère... équitable des décisions
prises en vertu de la présente loi, qui affectent les fonctionnaires. "
Je vais lire quand même le deuxième au complet, mais on va revenir
dans le reste du mémoire sur l'article 115. 1. Donc, l'article 115. 2:
"vérifier l'observation de la loi et de ses règlements
relativement au système de recrute-
ment et de promotion des fonctionnaires. "Aux fins de l'application du
premier alinéa, la Commission effectue des enquêtes qu'elle juge
nécessaires, formule des recommandations aux autorités
compétentes ou, si elle le juge utile, fait rapport à
l'Assemblée nationale. "
Donc, en vertu de ces articles, la Commission a donc un double mandat:
d'une part, de vérifier le caractère impartial et
équitable des décisions prises en vertu de la Loi sur la fonction
publique et, d'autre part, de vérifier l'observation de la Loi sur la
fonction publique et de ses règlements concernant le système de
recrutement et de promotion des fonctionnaires.
En ce qui nous concerne, nous voulons des solutions au refus de la
Commission do vérifier le caractère équitable des
décisions prises par l'employeur. Le pouvoir d'intervention de la
Commission n'est pas limité par un délai de prescription ou ce
qu'on appelle dans notre mémoire une clause de "recours adéquat"
Donc, pour comprendre qu'est ce qu'une clause de recours adéquat, on
regarde un exemple dans la Loi sur le Protecteur du citoyen où on dit:
Qui empêche le Protecteur du citoyen d'intervenir lorsqu'une personne ou
un groupe de personnes a un recours légal. On n'a pas de clause
semblable dans la Loi sur la fonction publique, donc on croit que la Commission
ne peut pas se servir de cet argument-là pour refuser d'intervenir.
On va vous présenter la nature des requêtes qu'on a
présentées à la Commission de la fonction publique et les
réponses qu'elle nous a données. On prend un premier dossier
qu'on a présenté en date du 21 mars 1988, qui concerne une
discrimination qui est faite à des juristes entrés en fonction
après le 31 décembre 1985. Donc, des juristes ayant la même
expérience, dépendamment de la date où ils sont
entrés dans la fonction publique, gagnent 6815 $ de moins. Par exemple,
on prend un Barreau 1981 qui était dans la fonction publique au 31
décembre 1985, on lui a donné un salaire avec des règles
et, arrive le 1er janvier, les conditions de travail des personnes qui entrent
dans la fonction publique ne sont pas négociées, elles sont
adoptées par le Conseil du trésor, par une directive de
détermination du taux de traitement d'embauche. Cette
directive-là fait que le juriste qui entre en fonction, qui est un
Barreau 1981, gagne 6815 $ de moins, et ça, c'est pour le reste de sa
carrière. Donc, on dit: On va faire une demande à la Commission
de la fonction publique, de vérifier le caractère
équitable de cette directive-là qui a été
adoptée par le Conseil du trésor. On n'a pas eu de réponse
de la Commission de la fonction publique.
La Commission de la fonction publique s'est peut-être dit: Cet
individu-là a un recours, un recours en vertu, dans la Loi sur la
fonction publique, de l'article 127 qui prévoit la création d'un
comité d'appel. Quand quelqu'un considère qu'une directive
normalement lui donne des droits et que l'employeur ne lui donne pas ce
à quoi il a droit, il peut faire un appel. Donc, dans un cas comme
ça, notre problème, c'est qu'on se retrouve. C'est que l'individu
peut faire un appel, mais les interprétations qui sont données
présentement par les tribunaux, c'est que l'individu, tout ce qu'il peut
demander, c'est qu'on lui applique la directive. Donc, l'individu, lui,
demande, fait un appel et on lui dit: Bien, on vous applique la directive. Ce
qu'on dit, nous autres, c'est que la Commission de la fonction publique, dans
un dossier comme ça, aurait dû intervenir pour aller
vérifier s'il y avait un problème d'équité dans ce
dossier là et faire une recommandation au Conseil du trésor qui
aurait été de modifier la directive en question.
Je prends un deuxième exemple: la requête qu'on a faite en
date du 4 octobre 1988 où le Syndicat requiert l'intervention de la
Commission à la suite de la décision des représentants du
Conseil du trésor do retenir une somme de 239 000 $ dos sommes à
distribuer pour l'ajustement dos traitements de 550 juristes au 1er janvier
1988. Bon, il y a un article 13 des conditions de travail qui dit que
l'exercice d'ajustement des traitements a pour effet de distribuer la
totalité des sommes. L'employeur, le Conseil du trésor,
décide de garder 239 000 $. Donc, on fait une demande d'intervention
à la Commission Et, dans ce dossier-là, la Commission, encore le
cas, vu qu'il y avait des individus qui avaient fait des appels devant le
comité d'appel, a décidé de ne pas donner suite à
l'enquête, et on n'a pas eu encore de solution à ce
problème-là.
Je prends un troisième dossier, une troisième
requête: le Syndicat requiert l'intervention de la Commission à la
suite de la décision des représentants du Conseil du
trésor de refuser que soit octroyée une
rémunération additionnelle pour grande disponibilité aux
juristes occasionnels court terme qu'on dit engagés pour moins d'un an.
Ce qu'il faut savoir, c'est que les avocats et notaires de la fonction publique
ne sont pas rémunérés pour leur temps
supplémentaire. Donc, il existe, une fois par année, 0, 5% de la
masse salariale qui est accordé pour permettre une certaine
rémunération pour grande disponibilité. Donc, on dit: Los
juristes, qu'ils soient permanents ou occasionnels, peuvent être autant
disponibles. Et très souvent les juristes occasionnels sont très
disponibles, ils peuvent faire l'équivalent de plusieurs heures
supplémentaires. On dit à l'employeur: La directive ne fait pas
d'exclusion pour les occasionnels court terme. Donc, on demande à la
Commission d'intervenir et la Commission ne considère pas opportun
d'utiliser les pouvoirs d'enquête et de recommandation que lui
confère l'article 115 précité aux fins de résoudre
ou de tenter de résoudre un différend entre une association
d'employés et d'employeurs portant sur l'interprétation d'une
directive établissant les conditions de travail.
Donc, on se retrouve dans une situation où il n'y a pas de
solution à ça, en voulant dire que la prime à la
disponibilité est à la discrétion de l'employeur. Donc, un
avocat travaille à la Société de l'assurance automobile,
son employeur a la discrétion de lui donner ou non cette
prime-là. Sauf que là, le Conseil du trésor décide,
et dit à la Société de l'assurance automobile: Vous ne
pourrez pas donner cette prime-là aux personnes qui sont occasionnelles.
Et là, on se retrouve dans une situation où l'occasionnel ne peut
pas aller prendre un recours, puisque c'est une discrétion de
l'employeur.
Donc, le refus d'agir de la Commission de la fonction publique. La
Commission n'a pas effectué ou complété les
enquêtes, malgré le fait qu'il s'agissait, dans chaque cas, d'une
demande de vérification du caractère équitable d'une
décision prise par l'employeur. Dans les deux premières
requêtes, nous constatons que la Commission refuse de faire enquête
sur les requêtes présentées par le Syndicat et
préfère encourager le recours prévu à l'article 127
de la Loi sur la fonction publique, parce qu'il y avait des individus qui
avaient fait des appels.
Nous sommes d'avis que l'interprétation qu'elle fait de l'article
115 de la Loi sur la fonction publique comporte une aberration qui met
invariablement en péril les requêtes du Syndicat formulées
en vertu de cet article. La Commission considère que le recours de
l'article 115 de la Loi sur la fonction publique est un moyen
résiduaire, même en l'absence d'une clause de recours
également adéquat.
Par ailleurs, la seule raison qui, quant à nous, pourrait
expliquer le refus d'agir de la Commission est que l'impartialité du
président du comité d'appel, qui est généralement
un des membres de la Commission, pourrait être mise en doute En effet,
lorsqu'une requête en vertu de l'article 115 de la Loi sur la fonction
publique est présentée à la Commission et qu'en même
temps un appel portant sur le même sujet est présenté
devant un comité d'appel, on a un problème. C'est le même
individu qui devrait faire enquête, en vertu de l'article 115 de la Loi
sur la fonction publique, et qui doit entendre l'appel Donc, sans nous le dire,
c'est peut être ça que la Commission fait. Elle se dit: Je suis
dans une mauvaise position. Je suis le même individu. Si je fais
enquête et, après ça, je m'en vais entendre la cause comme
président du comité d'appel, je vais me faire dire que je ne suis
pas un tribunal impartial. Donc, sans nous le dire dans les réponses,
c'est peut être ça c'est peut être la seule raison qu'on
voit qui pourrait empêcher la Commission d'intervenir. Donc, vous allez
voir dans nos recommandations où on va arriver tantôt, on va vous
dire: Changeons ce problème-là.
Si je lis, juste pour clarifier, l'article 127 de la Loi sur la fonction
publique, ça peut donner une idée. L'article 127 de la Loi sur la
fonction publique dit: Le gouvernement prévoit par règlement, sur
les matières qu'il détermine, un recours en appel pour les
fonctionnaires qui ne sont pas régis par une convention collective -
c'est le cas des avocats et notaires - et qui ne disposent d'aucun recours sur
ces matières en vertu de la présente loi. " Donc, le gouvernement
a adopté un règlement permettant aux juristes de faire appel et,
en pratique, ce qu'on fait, c'est qu'on nomme les membres de la Commission de
la fonction publique présidents des comités d'appel.
Donc, qui plus est, chaque fois qu'elle manque ainsi à son devoir
et nous renvoie au recours prévu à l'article 127, la Commission
augmente de façon déraisonnable les coûts et les
délais pour en arriver à un règlement final du litige. Or,
dans certains dossiers, on est obligé de dépenser des milliers de
dollars pour se faire dire que le comité d'appel n'a pas juridiction.
Tout ce qu'il fait, c'est appliquer les directives. Il n'a pas à dire si
la directive est équitable ou non équitable, il dit: La
directive,, on vous l'a appliquée selon l'écriture, les articles
sont écrits de cette façon-là.
Donc, en ce qui nous concerne - on prend la troisième
requête dont je vous ai parlé, la question des occasionnels, prime
à la disponibilité - une fois de plus, la Commission refuse
d'exercer pleinement son pouvoir d'enquête et de recommandation en ne se
prononçant pas sur l'inéquité d'une décision prise
par les représentants du Conseil du trésor relativement aux
juristes occasionnels court terme. De fait, le Conseil du trésor refuse
de laisser aux ministères et organismes la possibilité d'accorder
une rémunération additionnelle pour grande disponibilité
aux juristes occasionnels court terme. Étant donné que cette
rémunération n'est accordée à un juriste
qu'à la discrétion de l'employeur, le juriste ne peut exercer un
recours en appel en vertu de l'article 127 de la Loi sur la fonction publique.
Alors, le Syndicat qui représente ces juristes se voit refuser le seul
recours que lui confère la Loi sur la fonction publique. Par
conséquent, le litige entre lés parties n'est pas
résolu.
Comment le recours prévu à l'article 115 de la Loi sur la
fonction publique peut-il être refusé puisque la Loi sur la
fonction publique et ses règlements ne confèrent pas d'autres
recours à une association ou à un syndicat non
accrédité, représentant des fonctionnaires? Comment une
association ou un syndicat voué à la défense et à
la protection des intérêts de ses membres peut-il remplir son
rôle, s'il ne peut exercer le seul recours que lui confère la
loi?
On peut prendre des exemples, aux pages 33 et 34 du rapport annuel de la
Commission de la fonction publique où on nous dit: Au cours de
l'année 1989-1990, 170 requêtes furent adressées à
la Commission. Des 170 requêtes reçues en 1989-1990, 131 furent
traitées en cours d'année,
en ajoutant les 45 requêtes en voie de traitement à la fin
de l'année précédente, la division a donc
complété l'étude de 176 requêtes. On regarde le
résultat. Parmi les 176 requêtes traitées en cours
d'année, 57 ont été considérées comme
fondées. Lorsqu'on regarde quel genre de dossiers sont accordés,
on s'aperçoit que c'est 115. 2; 115. 2, on fait son travail comme
Commission. Quand on touche une question de recrutement, on va vérifier
si on a appliqué les règles ou pas.
Lorsqu'on fait une demande en vertu de l'article 115. 1 et qu'on dit: II
y a un problème d'équité, la Commission de la fonction
publique, fais ton travail. Elle refuse. Elle refuse toujours. On en arrive
donc à nos recommandations à la commission du budget et de
l'administration. Nous vous recommandons ici deux solutions pour
remédier au refus d'agir de la Commission sur les requêtes
présentées en vertu de l'article 115: premièrement, que
les membres de la Commission qui sont chargés de faire des
enquêtes concernant les requêtes en vertu de l'article 115 ne
soient pas également nommés présidents de comités
d'appel. Donc, s'ils n'étaient pas nommés présidents de
comités d'appel, ils pourraient faire leur travail de Commission de la
fonction publique). Deuxièmement, que le Règlement sur un recours
en appel pour les fonctionnaires non régis par une convention collective
soit modifié afin que le Syndicat puisse former en son nom ou au nom de
ses membres des appels en vertu de l'article 127. Donc, si on prend le cas de
prime à la disponibilité pour les occasionnels, le Syndicat
pourrait. Présentement, le Syndicat ne peut même pas faire ce
recours-là parce que le règlement prévoit uniquement des
recours pour le fonctionnaire.
Le Président (M. Lemieux): Avez vous terminé?
M, Bilodeau: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Alors, nous vous remercions de
votre présentation. Si je comprends bien, si le Syndicat des
fonctionnaires provinciaux veut donner beaucoup plus de pouvoirs à la
Commission de la fonction publique, vous, vous semblez avoir certaines
réserves.
M, Bilodeau: On n'a pas de réserves à lui donner
plus de pouvoirs, on dit: La Commission de la fonction publique ne fait pas son
travail. Nous autres, on dit: II faudrait donner à la Commission de la
fonction publique de vrais pouvoirs. Présentement, elle a un pouvoir
dans notre cas, les avocats et, notaires Si elle faisait son travail,
même si c'est un pouvoir de recommandation, on considère que
ça aurait du poids.
Une voix: O. K.
M. Biiodeau: Si la Commission de la fonc- tion publique avait dit
au Conseil du trésor: Ta directive est discriminatoire, ta directive
crée des inéquités, on te demande de corriger ta
directive, il l'aurait probablement changée. Sauf qu'on n'a jamais eu de
réponse de la Commission.
Le Président (M. Lemieux): On aura l'occasion d'aborder le
sujet avec ia Commission de la fonction publique sur l'article 115. M. le
député de La Prairie, la parole est à vous. (17 h 30)
M. Lazure: Merci, M. le Président. Moi, je suis
porté à partager ('opinion émise par le président
du Syndicat des avocats et notaires. Le problème n'ep est pas tellement
un. Est-ce que la Commission a assez de pouvoirs ou trop de pouvoirs? Je pense
qu'inévitablement, ça nous ramène à la
responsabilité politique du contenu de la Loi sur la fonction publique,
lequel contenu comprend évidemment la Commission de la fonction
publique. Dans la mesure où il y a un seul ministre depuis 1988 qui est
responsable de l'application de toutes les dispositions de la loi, y compris
celles sur la Commission de la fonction publique, dans la même mesure
où ce ministre unique est aussi président du Conseil du
trésor et responsable des directives, je pense que nous avons devant
nous un bel exemple où, la responsabilité politique étant
celle du président du Conseil du trésor, nous sommes dans une
impasse. C'est un exemple où s'il y avait au-delà et à
part te présidont du Conseil du trésor qui assumerait, comme
c'était le cas entre 1984 et 1988, une partie de la
responsabilité de ia loi et qu'il y avait un ou une autre ministre
responsable de certaines autres sections de la loi.. La première
question que je pose au président du Syndicat, c'est: Est-ce que vous
croyez qu'il est opportun, qu'il est sage, d'avoir un seul ministre responsable
de toutes les dispositions de la loi ou s'il n'est pas préférable
d'en avoir plus d'un? Et la deuxième question que j'ai posée
tantôt à vos prédécesseurs, l'Association
professionnelle des ingénieurs: Est ce que vous pouvez nous dire si,
dans le cas des avocats et notaires, vous notez aussi une augmentation, comme
l'a fait te Syndicat des professionnelles et professionnels tantôt, du
nombre de sous-contrats octroyés à l'extérieur pour des
tâches qui pourraient être accomplies par vos membres?
M. Bilodeau: Pour la première question, normalement - on a
un problème avec le Conseil du trésor présentement - on
négocie nos conditions de travail avec le Conseil du trésor En
cours de négociation, bon, on finit une négociation, il ne se
règle aucun problème, pendant deux ou trois ans parce que le
Conseil du trésor garde tous les problèmes pour la prochaine
négociation. Donc, pour tous les dossiers dont je vous parle, on a
toujours une réponse négative du Conseil du trésor parce
qu'ils savent qu'ils vont avoir à
nous parler un an ou deux ans après. Il dit: Ça nous
ferait une monnaie d'échange. Donc, c'est probablement ça. Si on
avait deux ministres, le ministre qui s'occuperait de nous autres qui n'aurait
pas à négocier nos conditions de travail pourrait régler
les problèmes qu'on vit comme Syndicat des avocats et notaires.
Présentement, c'est toujours négatif au Conseil du trésor.
On ne vient pas à bout de régler des dossiers avec lui: La
deuxième question en ce qui concerne les sous-contrats, ce n'est pas
vraiment un problème majeur pour les avocats et notaires
présentement.
M. Lazure: Allez-y.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Bertrand.
M. Beaulne: Oui, un peu pour enchaîner sur ce que disait
mon collègue, c'est un peu la même observation qui découle
des présentations qu'ont faites les groupes précédents.
Vous avez souligné des lacunes au niveau du fonctionnement de la
Commission. Est-ce que vous seriez d'accord, comme certains autres groupes
l'ont été précédemment et comme d'ailleurs je leur
ai posé la question et je vous pose la même question, pour qu'une
fois par année les agissements de la Commission de la fonction publique
et l'application de la Loi sur la fonction publique soient sujets à
examen et à vérification par une commission parlementaire, en
l'occurrence probablement la commission du budget et de l'administration?
M. Bilodeau: Réponse: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Je tiens peut-être
à souligner au député de Bertrand que nous avons ce
pouvoir actuellement, à la commission du budget et de l'administration,
de faire comparaître ces organismes, mais on ne l'a pas exercé. M.
le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Juste dire au Syndicat que lorsque je lis le texte de
la loi à l'égard des mandats et des pouvoirs de la Commission et
qu'on dit de vérifier le caractère impartial et équitable
des décisions prises en vertu de la présente loi qui affecte les
fonctionnaires et que je regarde l'un des cas que vous avez soulevés
auprès de la Commission, celui d'une espèce de clause orphelin,
que les juristes embauchés après telle date avaient des
conditions moindres que ceux- embauchés avant cette date là, je
dois vous dire que je trouve comme vous Incompréhensible que la
Commission n'ait pas vérifié le caractère équitable
parce que dans le fond. Je suis étonné que le Conseil du
trésor applique ça parce qu'à mon avis, ce sont des
dispositions salariales discriminatoires prima facie. On dit: II y a deux
citoyens qui font un travail d'une valeur comparable, et il y en a un qu'on
paie moins que l'autre parce qu'à partir de telle date, on le paie moins
que l'autre.
Je sais que, dans le privé et aux États-Unis, ça
s'est développé et ça procure de véritables
orgasmes aux nouveaux libéraux. Je ne parle pas, là, de
"libéral" au sens du Parti libéral, parce que la commission
jeunesse du Parti libéral a dénoncé ça avec raison.
C'est un principe fondamental qu'à un travail d'une valeur égale
doit correspondre une rémunération égale. Alors,
là-dessus, on pense, moi, je pense, en tout cas, que la Commission
aurait dû intervenir. En plus, il y a une autre question, je pense, que
vous posez, c'est que, dans la mesure où vous n'avez pas les attributs
qu'un syndicat peut avoir d'obtenir arbitrage, s'il est mécontent de
l'application de ses conditions de travail, eh bien, il faut qu'il y ait un
vrai recours qui se substitue à l'autre, ce qu'on fait par la Commission
de la fonction publique, dans un cas de congédiement, mettons, sauf que
la loi est plus large que juste si quelqu'un avait à se plaindre,
n'étant pas protégé par une convention collective, d'avoir
été congédié. Mais comme dans les cas que vous avez
soulignés, quelqu'un qui se plaint que les ajustements de traitements ne
sont pas distribués ou qu'on applique ce qu'on a appelé dans le
jargon des médias une clause orphelin...
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. M. le député de
Mille-Îles.
M. Bélisle: Question. 115. 1. Est-ce que vous avez
envisagé d'autres recours après la décision de la
Commission de la fonction publique, suite à leur refus de rendre une
décision, comme juriste?
M. Bilodeau: Oui, comme juriste, là, on avait le choix
comme recours de prendre des recours pour ordonner à une commission de
faire enquête sur des...
M. Bélisle: Cour supérieure.
M. Bilodeau: Oui, il faut faire attention là. Le
débat est plus compliqué que ça. On a des recours. On est
rendus devant la Cour d'appel là.
M. Bélisle: Est-ce que je dois comprendre, c'est bien
important.
M. Bilodeau: Pas tout à fait dans ce cadre-là, dans
un autre cadre...
M. Bélisle: Oui.
M. Bilodeau:... au niveau comité d'appel. On est rendu
devant les tribunaux.
M. Bélisle: O. K. Autrement dit, vous avez exercé
votre droit. d'appel de tout citoyen ou corps dûment constitué en
tant que Syndicat, devant les tribunaux de droit commun. C'est ça que
vous avez fait.
M. Bilodeau: Ce qu'on a fait, c'est qu'on a dû
procéder, première étape, devant le comité
d'appel...
M. Bélisle: Oui, ça, c'est sûr.
M. Bilodeau: On a essayé de donner au comité
d'appel une certaine juridiction...
M. Bélisle: Ils n'ont pas voulu te prendre.
M. Bilodeau: Ils n'ont pas voulu le prendre et ils se sont dit:
Nous autres, tout ce qu'on fait...
M. Bélisle: C'est ça.
M. Bilodeau:... on se limite à interpréter...
M. Bélisle: O. K.
M. Bilodeau: la directive.
M. Bélisle: Bien logique. Après, vous vous
êtes retournés de bord comme juristes et vous avez dit: On s'en va
devant les tribunaux de droit commun.
M. Bilodeau: On est allés en évocation en Cour
supérieure.
M. Bélisle: Vous êtes allés en
évocation en Cour supérieure. Là, vous êtes en
appel.
M. Bilodeau: Là, on est rendus en appel.
M. Bélisle: Bon. Est ce que ça veut dire qu'au
niveau de l'évocation en Cour supérieure vous avez perdu?
M. Bilodeau: Oui
M. Bélisle: Bon. Et là, vous êtes en appel.
C'est sub judice, M. le Président. J'ai un problème, moi,
là. Je ne sais pas comment le traiter, le problème. En tout
cas...
M. Bilodeau: Vous pouvez le traitor au niveau de la commission,
il n'y a pas de problè me.
M. Bélisle: Je ne suis pas si sûr que ça, moi
là.
Le Président (M. Lemieux): L'article 35, je pense.
M. Bilodeau: Non, mais ce que je disais tantôt, c'est que
la commission...
M. Bélisle: Non, non. Attendez une petite minute. Tu sais,
c'est bien beau là, venir devant nous autres là. On a des
règles à respecter, puis c'est pour ça que moi, depuis
tantôt, je vous ai laissé aller. Je me suis dit: Ce sont des
juristes brillants. Ce sont d'excellents juristes. Mon réflexe a
été de dire: Évocation, "let's go", hein? Le tribunal de
droit commun, si les règles où il y a un refus d'exercer une
juridiction, c'est un reflexion de titre de......
M. Bourdon: J'invoque le règlement parce que le
gouvernement a déposé un projet de loi qui touchait les articles
45 et 46 du Code du travail et qui, incidemment, excluait du champ de
juridiction du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement
du Québec les employés du ministère du Conseil
exécutif. Si le législateur dépose une loi pour une cause
qui est sub judice parce que, dans le cas du ministère du Conseil
exécutif, il a perdu au Tribunal du travail et qu'il est rendu en Cour
d'appel, alors, à plus forte raison, on peut discuter...
M. Bélisle: M. le Président, question de
règlement. Ce n'est pas du tout mon point:
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Mille-Îles. Ce n'est pas le point, M. le député.
M. Bélisle: II faut... Ne mélangeons pas les
bananes avec les tomates. Si vous êtes présentement, comme
entité juridique légale, reconnu par les lois du Québec
devant un tribunal, moi, comme parlementaire, je ne peux pas discuter avec vous
du recours et je me refuse à discuter avec vous du recours et du
bien-fondé, quel que soit le bien-fondé présumé ou
éventuel de ce que vous pourriez nous recommander à la
commission. Je vous remercie de votre présentation, mais, quant à
moi, ma discussion avec vous, elle s'arrête là.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de
règlement, M. le député?
M. Lazure: Non.
Le Président (M. Lemieux): Non, mais c'est parce que je me
dois de souligner l'article 35. 3.
M. Lazure: Oui S'il a fini..
Le Président (M. Lemieux): Vous parlez d'une affaire qui
est devant les tribunaux. En droit criminel, on doit être très
strict. Par. contre, on doit comprendre...
M. Bilodeau: Ce n'est pas ta question qu'on
est présentement dans le mémoire et pas devant les
tribunaux.
M. Lazure: Je pense qu'on dramatise. C'est parce que M. le
député...
M. Bilodeau: La question qui est devant les tribunaux, c'est la
question d'un autre dossier, c'est le dossier avec des comités d'appel.
Au niveau de la Commission de la fonction publique, présentement, on
n'est pas devant les tribunaux.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
La Prairie.
M. Lazure: M. le Président, vu que le député
de Mille-Îles disait qu'il arrêtait là son intervention,
c'est pour ça...
Une voix:
M. Lazure:... que j'avais levé la main. Je pense qu'on
exagère un peu la portée de cette vieille règle du sub
judice. Mais de toute façon, moi, je veux parler de la première
recommandation du Syndicat qui dit: Que les membres de la Commission de la
fonction publique qui sont chargés de faire des enquêtes
concernant des requêtes en vertu de l'article 115 de la Loi sur la
fonction publique ne soient pas également nommés
présidents de comités d'appel. Moi, ça me paraît une
recommandation tout à fait légitime, tout à fait normale,
éviter que ces gens-là soient en conflit d'intérêts.
Et ce que j'ajoute, c'est que, si le ministre, encore une fois, qui est
responsable de l'application de la totalité des articles de cette
loi-là, n'était pas en conflit d'intérêts, il aurait
peut-être accueilli favorablement une telle recommandation. Il est en son
pouvoir, comme membre du Conseil des ministres, de procéder à une
révision de la coutume qui veut qu'actuellement, les présidents
des comités d'appel soient aussi membres de la Commission. Et
peut-être aurait-il pris sur lui de proposer au Conseil des ministres de
modifier cette coutume-là de manière à ce que les membres
de la Commission ne soient pas en même temps présidents des
comités d'appel, et ainsi éviter des conflits
d'intérêts et, par conséquent, suite logique, donner
satisfaction à un corps important de la fonction publique. Actuellement,
ce corps important de la fonction publique est obligé d'aller en dehors
des cadres de la fonction publique gouvernementale, aller devant les tribunaux
pour trouver une solution à un problème qui normalement devrait
trouver sa solution dans l'action gouvernementale Je trouve que c'est dommage
qu'on pénalise des membres de la fonction publique en les obligeant
à faire les frais d'une poursuite devant les tribunaux, alors que ce
problème-là pourrait être réglé sans frais,
s'il y avait - je reviens là-dessus encore une fois. - dans l'appareil
gouvernemental un ministre autre que le président du Conseil du
trésor qui serait responsable de l'application de la loi et qui aurait
accueilli cette suggestion et modifié une pratique qui semble
prévaloir et qui ne paraît pas normale.
Le Président (M. Lemieux): Oui, allez-y, M. le
député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Farrah: Moi, c'est que là, vous mettez en cause le
président du Conseil du trésor au niveau de la recommandation du
Syndicat des notaires.
M. Bilodeau: Le Syndicat des avocats et notaires de la fonction
publique.
M. Farrah: Avocats et notaires, ça va. Mais est-ce que
cette demande-là a été faite au président du
Conseil du trésor? Parce que là, quand même, la Commission
de la fonction publique a une autonomie de fonctionnement. Là, il ne
faut pas mélanger les chèvres et les choux.
Le Président (M. Lemieux): On aura l'occasion de
questionner la Commission de la fonction publique relativement à son
article 115. Je souscris à une partie de l'exposé de mon
collègue de Mille-Îles et vous devez le comprendre. Eu
égard à l'article 35 du règlement, je me dois de le faire
respecter. Mais la façon et la manière dont la Commission de la
fonction publique applique l'article 115, on Jui posera des questions et elle
donnera probablement des réponses à ça, et probablement
que le cas des avocats et notaires sera soulevé devant la Commission de
la fonction publique lorsqu'elle comparaîtra et on écoutera ce
qu'elle aura à dire. Je pense qu'on ne doit pas immédiatement se
substituer aux législateurs. Ce n'est pas notre rôle. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions? Il n'y a pas d'autres interventions? Oui.
M. Bélisle: Mais votre point, il est fait là. Je
veux que vous compreniez bien, d'accord.
M. Bilodeau: Oui.
M. Bélisle: Vous avez marqué votre point. Votre
point, on l'a compris.
Le Président (M. Lemieux): Oui. On a bien compris
votre...
M. Farrah: Oui.
Le Président (M. Lemieux): On a bien compris votre point
et on va poser...
M. Bélisle: On se comprend bien là. Y
Le Président (M. Lemieux):... les questions, dans
l'avenir, à qui de droit: Alors, comme il n'y
a pas d'autre intervention, nous vous remercions de votre participation
à cette commission parlementaire et nous suspendons nos travaux
jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 17 h 45)
(Reprise à 20 h 7)
Le Président (M. Farrah): Prenez vos places, s'il vous
plaît. La commission du budget et de l'administration reprend ses
travaux. Le mandat de la commission, je dois le répéter, c'est
une consultation générale dans le cadre de l'étude de
l'opportunité de maintenir en vigueur ou de modifier la Loi sur la
fonction publique. Les premiers intervenants sont le Syndicat des agents de la
paix. C'est bel et bien ça?
Une voix: C'est exact.
Le Président (M. Farrah): Dans un premier temps,
j'aimerais vous aviser que vous avez 20 minutes pour la présentation de
votre mémoire et que les 40 minutes de discussions seront
réparties équitablement entre l'Opposition officielle et le
gouvernement. Dans un premier temps, j'aimerais que le porte-parole du groupe
s'identifie, ainsi que la personne qui l'accompagne. Après ça,
vous pourrez procéder à la lecture de votre mémoire. Sans
plus tarder, on vous souhaite la bienvenue et on vous cède la
parole.
Syndicat des agents de la paix en services
correctionnels du Québec
M. Escola (Jorge): Bonsoir. Mon nom est Jorge Escola. J'occupe
actuellement la fonction de président provincial du Syndicat des agents
de la paix en services correctionnels du Québec. Mon collègue,
à ma droite, est Me Yves Lemieux, procureur de notre Syndicat.
Le Président (M. Farrah): On vous écoute.
M. Escola: M. le Président, MM. les membres de la
commission, nous tenons à vous remercier à titre de
représentants des agents de la paix en service correctionnel
québécois de l'opportunité que vous nous accordez en vue
de pouvoir vous faire part de notre opinion, soit celle de maintenir en vigueur
ou de modifier la Loi sur la fonction publique. En premier lieu, nous tenons
à préciser qu'en temps que membre du Secrétariat des
syndicats de la fonction publique, nous sommes entièrement d'accord sur
les sujets abordé au cours de la journée, soit par le Syndicat
des fonctionnaires provinciaux du Québec ou le Syndicat des
professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, à
savoir la précarité du statut des fonctionnaires, la
qualité des services à la population et la nécessaire
neutralité politique de l'appareil administratif. Il va de soi que tous
ces sujets ayant déjà été abordés par mes
camarades au cours de la journée, nous, les représentants du
Syndicat des agents de la paix en services correctionnels
québécois, allons plutôt attirer votre attention sur les
modes de négociation applicables aux fonctions d'agent de la paix, selon
les articles 71 à 76 inclusivement dans la loi actuellement en
vigueur.
Contrairement aux autres syndicats de ta fonction publique et
parapublique, nous sommes encore assujettis à la période de la
grande noirceur, puisque, dans les faits, on ne nous accorde pas encore
aujourd'hui la garantie de négocier avec équité.
Les mécanismes actuels mis en place ne sont pour nous qu'un beau
tableau en vue d'esquiver les difficultés quant aux droits fondamentaux
de la catégorie des travailleurs et travailleuses que nous
représentons. Même si, après la Révolution
tranquille, les agents en services correctionnels québécois ont
pu se constituer un syndicat en vue d'aplanir les inégalités
inhérentes aux relations entre employeurs et employés, le droit
à la négociation collective nous a toujours été
limité, c'est-à-dire que si le Conseil du trésor rejette
en partie ou en bloc nos demandes, le seul et unique moyen qu'il nous reste,
c'est d'attendre qu'un décret ministériel nous tombe sur la
tête.
C'est pour ces quelques brèves raisons que nous venons de vous
indiquer, les autres apparaissant plus en détail dans le mémoire
que nous vous avons déposé Par ailleurs, ce que nous vous
demandons, en fait, c'est le droit d'être géré
exclusivement par le Code du travail québécois, ce qui veut dire,
pour nous, l'obtention du droit de grève, ou alors une modification
majeure devra être apportée sur l'arbitrage de différends
afin que la décision de l'arbitre, une fois rendue, lie les deux
parties. Il va de notre intérêt à tous de trouver une
alternative pouvant accommoder les deux parties et ainsi éviter autant
que possible des affrontements face à face. Donnez-nous les moyens de
négocier librement et sans contrainte juridique N'oubliez pas que notre
rôle s'est radicalement modifié au cours des années,
passant d'un rôle exclusivement de gardiennage à celui d'agent en
relation d'aide. Nous ne sommes pas les bourreaux tant désignés
dans les films français et même américains, mais
plutôt des travailleurs et travailleuses québécois oeuvrant
dans un milieu dur et difficile, certes, mais parfois fort gratifiant. Je vous
remercie de nous avoir écoutés avec sérieux et
bienveillance.
Le Président (M. Farrah): Merci, M. Escola. Sans plus
tarder, je passe la parole à M. le député de La Prairie.
À vous, M. le député.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Vous venez de nous
exposer un peu l'espèce do
situation extrêmement difficile sinon impossible dans laquelle
vous êtes eu égard à des négociations possibles avec
votre employeur. Est-ce que vous pourriez nous présenter un peu plus en
détail les façons par lesquelles vous voudriez que cette
impasse-là soit dénouée, des façons avec lesquelles
le gouvernement pourrait ou devrait, selon vous, remédier à cette
situation?
M. Escola: Enfin, n 'étant pas le législateur, il
nous serait difficile évidemment de vous donner des... Enfin, ce qu'on
fait, c'est vous donner...
M. Lazure: Selon votre point de vue à vous
M. Escola:... des pistes. La première piste qu'on verrait,
c'est peut-être un souhait d'accorder des pouvoirs plus accrus au
président du comité paritaire qui, actuellement, n'a aucun
pouvoir, c'est-à-dire que le pouvoir qu'on pourrait lui donner, c'est
qu'en cas de différend entre les deux parties en cause, le
président pourrait trancher et faire évidemment des
recommandations au Conseil du trésor, qui deviendraient par le fait
même exécutoires. Il est évident que la piste qu'on
favorise le plus, c'est qu'on nous accorde un peu l'équivalent de ce
qu'on accorde actuellement aux pompiers et aux policiers municipaux,
c'est-à-dire le droit à l'arbitrage exécutoire.
Le Président (M. Farrah): M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Si je comprends bien, on vous a assimilé comme
service, pour autant que les règles applicables soient l'interdiction de
faire la grève; on a dit, dans le fond, que vous aviez comme un statut
semblable à celui des pompiers et des policiers, mais en ne vous donnant
pas le recours qu'ont les corps de police, c'est-à-dire, quand les
négociations sont infructueuses, le recours d'aller devant un arbitre et
d'avoir une convention collective. Si je comprends bien votre mémoire,
vous dites qu'en bout de ligne, si vous n'aboutissez pas à un
règlement, vous pouvez vous retrouver dans une impasse où vos
conditions de travail seront décrétées Votre demande
serait de vous appliquer les clauses applicables du Code du travail,
c'est-à-dire celles qui prévoient un arbitrage des
différends dans le cas des policiers et des pompiers.
M. Escola: Exécutoire, oui, oui, effectivement.
M. Bourdon: Donc, une sentence arbitrale exécutoire, donc
une convention...
M. Escola: C'est exact. Me Lemieux me rappelle que même si
on est le porte-parole du Syndicat des agents de la paix en services
correctionnels, il n'en demeure pas moins qu'il y a d'autres syndicats d'agents
de là paix qui sont assujettis au même problème. On serait
environ 2500 à 3000 travailleurs actuellement qui ont ces
problèmes. Et, effectivement, il ne faut pas non plus négliger le
droit de grève quand même qui est aussi une voie possible,
c'est-à-dire que si le droit à l'arbitrage exécutoire
n'est pas possible, à ce moment-là qu'on nous accorde librement
le droit de grève advenant le cas où il y aurait une impasse
à la table de négociation, en tenant compte évidemment des
services essentiels qui s'appliqueraient dans le cadre de nos fonctions.
Le Président (M. Farrah): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Oui. D'abord, je voudrais m'excuser envers la
commission. Cet après-midi, j'étais à l'autre commission
constitutionnelle. Ce n'est pas par manque d'intérêt pour les
travaux qui touchent la fonction publique. Je voulais faire ce point
jusqu'ici.
Oui, avec la fusion de la fonction publique fédérale qui a
beaucoup d'agents de la paix elle aussi et celle du Québec, alors, le
syndicat peut s'attendre à voir ses cadres grossir. Alors, vous, entre
deux, qu'est-ce que vous préférez, la grève ou l'arbitrage
exécutoire?
Le Président (M. Farrah): M. Escola.
M. Escola: Vous me demandez une question qui est personnelle.
J'espère qu'elle est personnalisée.
M. Léonard: Non. Vous pouvez avoir des opinions
personnelles. Vous pouvez en avoir que vous avez discutées dans votre
Syndicat. Les deux.
M. Escola: Je pense que le droit le plus fondamental, même
s'il n'est pas parfait, ce serait le droit de grève qui serait l'outil
peut-être le plus radical mais peut-être le plus adéquat
pour nous, les travailleurs, étant donné que, nous, on ne
détient pas le pouvoir économique.
M. Léonard: Qu'est ce qui arrive dans les centres
correctionnels le jour où vous décidez de faire la
grève?
M. Escola: Je pense que les mêmes mesures peuvent
s'appliquer dans le mène sens qu'au niveau de la santé. Je pense
que vous avez des mécanismes en ce qui a trait aux services essentiels.
Et là-dessus, on débattra le tout devant le Conseil. (20 h
15)
M. Léonard: Les services essentiels comporteraient des
dispositions suffisantes pour assurer, disons, une garde suffisante dans
les
centres correctionnels.
M. Escola: Ce serait un débat à faire à ce
moment-là, en temps et lieu, entre les deux parties, pour savoir combien
de personnes pourraient effectuer le travail en cas de grève. Il va de
soi que si la Commission voit d'un mauvais oeil le droit de grève, la
seule alternative qu'il nous reste à ce moment-là, et on en a
fait mention tout à l'heure, c'est l'arbitrage exécutoire.
M. Léonard: Vos moyens de pression seraient exercés
finalement sur les prisonniers, par exemple, parce que si je comprends bien,
des agents de la paix, il y en a en centres correctionnels et c'est surtout
là que vous êtes. Est-ce que vous avez beaucoup d'autres
adhérents ailleurs?
M. Escola: Mon.
M. Léonard: Non. C'est strictement dans les centres
correctionnels.
M. Escola: Les centres de détention du Québec.
M. Léonard: Pour le moment...
Le Président (M. Farrah): Est-ce qu'il y a d'autres
questions du côté de l'Opposition officielle? M. le
député de Limoilou, M. le député de Prévost?
M. le député de Labelle, est-ce que vous avez d'autres questions?
Alors, il n'y a pas d'autres questions. Est-ce que vous avez d'autres
commentaires, messieurs?
M. Lemieux (Yves): A tout événement, finalement, la
Loi sur la fonction publique retire le droit de grève, par l'entremise
de l'article 69, à cinq groupe de salariés qui sont couverts par
l'article 64, paragraphe 4° de la Loi sur la fonction publique. C'est
carrément archaïque, compte tenu du fait que l'ensemble des
travailleurs qui sont assujettis au Code du travail du Québec ont par
ailleurs droit, par l'entremise de l'article 58, au droit de grève. Ce
que le Syndicat préconise ici, finalement, c'est une ouverture d'esprit
de la part du législateur, dans un premier temps, à tout le
moins, et, deuxièmement, si on décide de maintenir la
constituante qu'est le comité paritaire, au moins donner les outils
nécessaires pour que ledit comité puisse exercer les fonctions
auxquelles les parties pourraient s'attendre, à savoir rendre une
sentence arbitrale exécutoire C'est tout.
Le Président (M. Farrah): Ça semble clair, merci.
Est-ce qu'il y a des questions suite aux commentaires de Me Lemieux? Alors,
s'il n'y a pas d'autres questions, permettez-moi, au nom des membres de la
commission, de vous remercier infiniment de nous avoir soumis un mémoire
et de vous être présentés ce soir. Merci beaucoup.
Alors, sans plus tarder, j'invite le prochain groupe à venir
à la table en avant, s'il vous plaît. Il s'agit du Syndicat des
agents de conservation de la faune. Bonsoir, messieurs. Au nom de la
commission, nous vous souhaitons la plus cordiale des bienvenues. Comme j'ai
fait mention pour l'autre groupe précédemment, je vous avise que
vous avez 20 minutes pour votre présentation et les 40 minutes suivantes
seront pour une interrogation entre les membres de la commission et votre
organisme, ces 40 minutes seront réparties équitablement entre
l'Opposition et la partie ministérielle Alors, sans plus tarder,
j'aimerais peut être que le représentant de l'organisme se nomme
et nomme tes collègues qui l'accompagnent. Après, vous pourrez
procéder à la lecture de votre mémoire.
Syndicat des agents de conservation de la faune du
Québec
M. Pichette (Alain): Bonsoir.
Le Président (M. Farrah): Bonsoir.
M. Pichette: On vous remercie de nous accueillir et de pouvoir,
nous aussi, présenter un mémoire qui, dans l'ensemble, va
reprendre un petit peu beaucoup ce que vous avez entendu aujourd'hui.
Étant également des agents de la paix, on a le même
problème que M. Escola à présenté tantôt, au
niveau de la négo, au niveau de l'arbitrage. Il y a des..
Le Président (M. Farrah): Je m'excuse. Juste pour le
bénéfice du Journal des débats, peut être
pourriez-vous vous identifier ainsi que les gens qui vous accompagnent, s'il
vous plaît.
M. Pichette: O. K. Mon nom est Alain Pichette, président
du Syndicat des agents de conservation de la faune A ma droite, M. Allen
Charland qui, tantôt, va vous présenter le mémoire -
étant un employé saisonnier, il vit le problème et M.
Roger Cloutier, directeur au Syndicat des agents de conservation.
Le Président (M. Farrah): Merci beaucoup. Alors, la parole
est à M. Charland. C'est ça?
M. Pichette: C' est ça.
Le Président (M. Farrah): Alors, on vous
écoute.
M. Charland (Allen): Le présent mémoire a pour but
de présenter la problématique concernant l'accès des
agents saisonniers à des emplois permanents. Dans une lettre du 12
décembre 1989 que M. Pierre Boudreault, directeur des relations
professionnelles au Secrétariat du Conseil du
trésor, adressait à M. Alain Pichette, président du
Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec, il a
été convenu de former un comité mixte pour explorer les
solutions au problème d'accès des agents de conservation de la
faune saisonniers à des emplois permanents.
Depuis 1978, les agents de conservation de la faune saisonniers et
occasionnels sont recrutés à partir d'une liste de
déclaration d'aptitudes . constituée suite à des concours
de recrutement. Cette façon de procéder comporte des avantages
évidents puisque les agents saisonniers et occasionnels sont
susceptibles d'être nommés sur des postes permanents tant et aussi
longtemps que la liste est valide. De plus, ils sont déjà
entraînés et pourvus de leur équipement. Dépendant
des années, la liste d'aptitudes était valide pour une
période plus ou moins longue. Le règlement actuel sur la tenue
d'un concours prévoit une durée d'une année, avec des
renouvellements annuels jusqu'au total de trois ans. Cependant, de 1978
à 1987, moins de 10 agents de conservation de la faune occasionnels et
saisonniers sur liste d'aptitudes recevaient leur poste permanent. Le dernier
concours de recrutement s'est terminé en février 1987 et a
attiré près de 2000 candidats et candidates pour combler,
à cette époque, une cinquantaine de postes vacants. Les agents
saisonniers qui, pour la grande majorité, avaient déjà
été déclarés aptes sur les anciens concours de
recrutement de 1978 et 1981 ont dû se présenter à nouveau,
puisque leur liste de déclaration d'aptitudes avait été
annulée suite à l'adoption du règlement sur la tenue du
concours actuel Ainsi, un agent saisonnier ou occasionnel qui s'était
classé sur la liste de déclaration d'aptitudes en 1978 devait se
classer encore une fois en 1981 et encore une autre fois en 1987 Les agents de
conservation de la faune saisonniers et occasionnels se demandent combien de
fois ils devront réussir des examens d'aptitudes avant d'obtenir un
poste permanent.
Environ 200 agents saisonniers et occasionnels se sont inscrits au
concours de 1987 et 90 d'entre eux ont réussi les examens. Ce concours
fut contesté pour diverses raisons, et tous les examens écrits
ont dû être recorrigés et les examens oraux ont dû
être dispensés deux mois après les examens originaux. Ce
concours a créé beaucoup de controverse et de contestation de la
part des agents saisonniers. Un grand nombre d'agents saisonniers. n'ont
cependant pas réussi, mais ils sont toujours à l'emploi du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et leur rendement
est tout à fait satisfaisant. Aussi, compte tenu du fait qu'ils avaient
déjà passé des concours de recrutement pour devenir
saisonniers ou occasionnels, ils ont été très
déçus, démotivés et démoralisés.
Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche les
rappelle chaque année pour occuper des postes d'agent saisonnier ou
occasionnel en période intensive de travail, mais ils ne sont pas aptes
à occuper un emploi permanent. Admettons que la situation est difficile
à justifier par l'employeur.
Dû à ces faits, un nombre croissant de très bons
agents de conservation de la faune, saisonniers et occasionnels, quittent le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour occuper des
postes dans la Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale du
Canada ou d'agents de la protection de la nature de l'Ontario, pour n'en nommer
que quelques-uns. Ils posent ces gestes, non pas parce qu'ils n'aiment pas
l'emploi, mais ils ont perdu espoir d'obtenir un poste permanent avec le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui est l'unique
employeur d'agents de conservation de la faune. Ils veulent une
sécurité d'emploi, ils ne veulent pas être des agents
saisonniers ou occasionnels permanents. Il est à noter qu'il y a un
agent saisonnier ou occasionnel pour 2. 67 agents permanents au
Québec.
La problématique. Le ministère du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche compte plus de 170 agents de conservation de la faune
saisonniers à son emploi et 453 agents de conservation permanents. Il
compte recruter environ 15 emplois permanents par année, et ce, pour
toutes les régions administratives actuelles. Il s'avère donc
très onéreux de lancer un concours de recrutement qui attirerait
pas moins de 2500 candidats et candidates pour combler 15 postes par
année. Nous estimons le coût d'un tel concours de recrutement
public à 130 000 $ en traitement et dépenses d'opération.
J'aimerais vous référer à l'annexe II où toutes ces
dépenses sont étalées en plus grand détail.
Or, un concours réservé à des agents saisonniers
pourrait coûter 15 000 $ au maximum, dépendant du type d'examen.
Ce serait une gestion saine et logique des fonds publics et du personnel
compétent déjà en place De plus, la liste de
déclaration d'aptitudes qui vient à échéance en
mars 1991 n'est pas valide pour toutes les régions administratives du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. En effet, pour
des motifs de pénurie de main-d'oeuvre et de rétention dans les
régions éloignées, le dernier concours excluait les
régions de Québec, Trois-Rivières, Estrie et
Montréal, car les emplois situés dans ces régions sont
plus faciles à combler par affectation. (20 h 30)
L'expérience démontre cependant que ces régions
éprouvent certaines difficultés à combler leurs emplois
puisque la politique interne de dotation prévoit qu'un agent doit
oeuvrer en région isolée ou éloignée pendant trois
ou six ans respectivement Si aucun employé ne répond à
cette condition, les régions centrales ne peuvent avoir recours à
la liste de recrutement. Elles doivent alors faire exception à la
politique de dotation, ce qui engendre un taux de roulement inacceptable pour
les régions plus éloignées des grands centres. Ces
exceptions à la politique
de dotation du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche s'avèrent aussi très onéreuses et peu
efficaces.
Les solutions. Les avantages du ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche de réserver un concours à ses propres
employés sont très nombreux. Ces avantages sont tant d'ordre
administratif que pécuniaire. Nous nous permettons d'en citer
quelques-uns. Les agents saisonniers déjà à l'emploi du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ont reçu
une certaine formation aux frais de l'employeur et ils sont pourvus de
l'équipement nécessaire. Ce personnel a plusieurs saisons
d'expérience pertinente, connaît la réalité du
travail des agents de conservation de la faune ainsi que les procédures
opérationnelles du MLCP. Ils aiment leur travail et ont un
intérêt réel à la conservation et à la mise
en valeur de la faune. Ils ont atteint une certaine maturité qui va de
pair avec leur satut d'agent de la paix et la nécessité du port
d'armes.
Avec leur expérience, ils connaissent les modus operandi des
réseaux de braconniers déjà mis à jour. L'employeur
a aussi le grand avantage d'avoir plusieurs saisons pour évaluer les
performances et capacités de ses employés saisonniers,
contrairement à 34 semaines pour une recrue au public, car les autres 18
semaines de son année de probation sont passées à suivre
les cours de perfectionnement à Duchesnay. La période
d'apprentissage et de rodage des employés saisonniers est aussi moins
longue, vu leur expérience déjà requise, ce qui
représente une autre économie pour l'employeur.
Il est aussi logique que le plan de carrière d'un agent de
conservation de la Jaune commence lorsqu'il entre en fonction comme occasionnel
suite à un concours de recrutement à la fonction publique et
qu'il puisse ensuite gravir les écheIons avec des concours de
régie interne. Aussi, étant donné le taux de roulement de
4 % environ, il s'avère très coûteux de lancer un concours
de recrutement. Compte tenu des conditions d'admission, il est pratiquement
impossible d'utiliser d'autres mouvements de personnels que l'affectation pour
combler les emplois. Il est primordial que le MLCP puisse lancer un concours
réservé à ses agents saisonniers afin d'éviter des
coûts importants, d'autant plus que lancer un concours dans le public qui
attirerait pas moins de 3000 candidats et candidates pour un si petit nombre de
postes engendre beaucoup d'attentes et de frustration. En outre, l'Office des
ressources humaines a déjà lancé des concours
réservés à des occasionnels qui avaient plus de cinq
années de service, pour régulariser des situations plus ou moins
légales. Raison de plus pour réserver un concours à des
agents saisonniers dont la situation est régulière et qui
fournissent un rendement qui satisfait le ministère. D'ailleurs,
l'article 43 de la Loi sur la fonction publique prévoit de telles
possibilités.
La liste de déclaration d'aptitudes actuelle comprend encore 154
noms, doht 39 anciens agents saisonniers ou occasionnels. Compte tenu des
coûts encourus par le dernier concours et qu'il reste encore 154
candidats déclarés aptes, il serait souhaitable de reconduire la
liste de déclaration d'aptitudes pour un maximum d'une année,
c'est-à dire jusqu'en mars 1992.
Les recommandations. 1) Qu'un concours réservé aux agents
de conservation de la faune soit lancé par le MLCP avec l'accord du
Conseil du trésor et l'Office des ressources humaines, 2) que le MLCP
puisse prolonger la liste de déclaration d'aptitudes présentement
en vigueur jusqu'en mars 1992; 3) que cette liste puisse être
utilisée par les régions centrales. 4) quo l'Office des
ressources humaines donne son accord à toutes ces recommandations.
J'aimerais aussi porter à votre attention l'annexe I qui est la
lettre que M. Pierre BoudreaUlt a adressée à notre
président provincial. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Farrah): Merci beaucoup, M. Charland.
Sans plus tarder, je passe la parole au député de Limoilou.
M. Després: Peut-être une petite question, M. le
Président. J'aimerais que vous m'expiiquiez... Vous dites que 55 % des
agents saisonniers ont échoué a l'examen, comme tel, de
recrutement de 1987 Comment expliquez-vous ça, étant donné
que ce sont des gens tout de même qui ont une certaine expérience,
qui ont peut-être été dans le secteur d'activité
pendant, je ne sais pas, trois ans, quatre, sept ans et peut-être plus
que ça même, qui fait que 55 %, c'est à l'examen
écrit ou à l'examen oral, c'est quoi, votre vision des
choses?
M. Pichette: C'est un peu des deux. Si, par exemple, on demandait
parmi le groupe qu'il y a devant moi, il y a sûrement des avocats, des
notaires, je ne pense pas qu'un avocat, après 15 ans de pratique, puisse
repasser ses examens du Barreau. Chez nous, c'est un peu des automatismes qu'on
développe en travaillant, mais lorsque vous passez un examen, soit
écrit ou oral, ce n'est pas tout à fait le genre de questions...
Autrement dit, quelqu'un qui fait l'emploi est désavantagé par
rapport à quelqu'un qui arrive et qui passe un examen. C'est
peut-être difficile à.
M. Després: Vous voufez dire qu'if est
désavantagé
M. Pichette: Oui
M. Després: J'aurais plutôt tendance à
croire, par le fait qu'il a déjà exercé cette
profession pendant un certain temps, qu'il sait au moins à quoi
s'attendre, qu'il connaît au moins le métier.
M. Pichette: Pour respecter la Loi sur la fonction publique ou la
Charte des droits, si vous voulez, on ne peut pas avantager un groupe au
détriment d'un autre. Donc, on fait un concours qui fait en sorte que la
personne qui exerce l'emploi depuis 10 ou 12 ans, son expérience ne lui
sert pratiquement pas ou même pas du tout lors de l'examen parce que
l'examen n'est pas nécessairement en fonction du travail qu'il accomplit
au moment où il passe son examen.
M. Després: Pouvez-vous m'expliquer, à ce
moment-là, quel genre d'examen vous passez parce que rendu à
l'examen oral, je ne sais pas, il doit y avoir sûrement, en termes de
contenu, le fait de pratiquer cette profession là qui doit l'avantager?
De là à dire que ça ne va sûrement pas le
désavantager, mais, en tout cas, au contraire, ça devrait lui
donner une certaine chance.
M. Pichette: À l'examen oral..
M. Després: À l'examen, vous avez été
confronté?
M. Pichette: Personnellement, le dernier examen...
M. Després: L'ojectif, c'est quoi?
M. Pichette:... je ne l'ai pas passé. Je vais laisser
répondre M. Charland; lui, il a passé cet examen-là.
M. Charland: Disons que dans ces examens, les
éléments ne sont jamais tous là. Lors de l'une de nos
interventions, on fait cela machinalement, d'une façon automatique. On
ne mentionne peut-être pas lors de ces examens, tous les petits points
qui sont de moindre importance, mais que les personnes sur le comité
veulent entendre.
M. Després: Au niveau des agents de la faune, étant
donné que la vision du ministère par rapport au patrimoine
faunique a sûrement évolué au fil des ans, est ce que les
exigences pour un agent de la faune sont les mômes qu'elles
étaient en 1987 ou si elles sont les mêmes en 1990 qu'elles
étaient au début dos années quatre-vingt?
M. Pichette: Elles sont toujours les mêmes, même si
on aimerait* mieux, par exemple, qu'on demande soit une technique
policière ou un DEC ou un cours de courtage qu'on appelle en
aménagement cynégétique analytique. On n'a jamais voulu
changer ces critères d'embauche.
Donc, aujourd'hui ce sont les mêmes: secondaire V avec option
agent de conservation de la faune. Ça s'arrête là.
M. Després: Quel est le profil de ceux qui sont les
occasionnels parmi ceux qui ont passé le concours en 1987, la
majorité des occasionnels agents de la faune? Est-ce que ce sont des
gens qui ont une formation particulière ou des gens qui ont une
expérience dans le domaine, point?
M. Pichette: Dans la majorité des cas, pour les
critères, ce que possèdent les agents, c'est supérieur aux
exigences. Par exemple, il y en a beaucoup chez nous qui ont des DEC.
M. Després: Oui, qui ont des DEC. Est-ce la
majorité?
M. Pichette: Du dernier concours de recrutement, si l'on
enlève, par exemple, ceux qui sont saisonniers, ceux-là qui ont
passé l'examen et qui étaient saisonniers antérieurement,
pour ceux là je ne peux pas vous dire, mais les nouveaux, les recrues,
les "vertes" là, qui arrivent, eux autres, pour la majorité, ce
qu'ils possèdent, c'est plus élevé que les
critères.
M. Després: O. K. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Farrah): M. le député de
Prévost, avez-vous une question? Ça va? M. le
député de Mille-Îles?
M. Bélisle: Vous parlez des critères. Ce que le
député de Limoilou vient de soulever, c'est quand même
assez important et c'est symptoma- tique d'une situation. Si vous dites que
ceux qui se présentent année après année aux
examens sont des gens qui ont un bagage académique plus important que
ceux qui sont en place, d'après ce que je dois décoder quand vous
parlez d'un DEC, est-ce que c'est surtout du théorique qu'on demande
comme question ou est-ce que c'est réellement l'application pratique
dans le champ?
M. Pichette: Bon. Je reprends peut-être ce que M. Charland
a mentionné tantôt. Avec le pratique vécu, une personne qui
se présente à un examen du ministère ne peut pas faire
ressortir tous les éléments d'une réponse qu'on attend
d'elle par rapport au vécu et au pratique qu'elle fait sur le terrain.
Parce que notre travail, c'est un travail d'intervention et ces interventions
se font, comme on le mentionnait tantôt, souvent de façon quasi
machinale. On le fait. Quel exemple est-ce que je pourrais bien vous
donner?
M. Bélisle: Je suppose qu'il n'y a pas de cours de
préparation et de cours écrit pour se préparer à
passer un examen?
M. Pichette: II y a le cours d'agent de
conservation de la faune.
M. Bélisle: Non, mais à part le cours? M.
Pichette: Non.
M. Bélisle: Autrement dit, un manuel comme ça
arrive des fois. Tu te présentes à un examen du Barreau...
M. Pichette: C'est ça.
M. Bélisle:... t'as une brique comme ça. Tu dis:
Tiens, je m'en vais pour deux jours et voici mon examen. Je passe tel autre
examen. Là tu passes tes questions des 25 dernières
années. Il n'y en a pas dans votre cas, je suppose.
M. Pichette: Bien non!
M. Bélisle: Bon. Ça ne doit pas. Alors là,
si c'est des questions qui sont appliquées au déroulement
quotidien d'une activité ou à des règlements et tout le
reste, la personne qui est en position de l'exercer quotidiennement et qui le
fait depuis trois ans va avoir une drôle de connaissance comparativement
au 'ti-clin" qui a un DEC, qui arrive là pour passer l'examen.
M. Pichette: Oui, mais c'est justement. Le "ti-clin" qui a son
DEC, quand il arrive pour passer l'examen, lui, par rapport au saisonnier, les
questions qu'on devrait poser à l'agent saisonnier qui serait
avantagé ne sont pas posées.
M. Bélisle: Ah! Donc, on pose des questions
théoriques.
M. Pichette: C'est des questions théoriques qui
amènent à un moment donné des sous-questions, mais qui ne
sont pas nécessairement liées au travail d'application sur le
terrain.
M. Bélisle: O. K. Qui compose l'examen? Oui compose le
questionnaire d'examen?
M. Pichette: Le ministère, le service de dotation chez
nous.
M. Bélisle: Le service de dotation M. Pichette:
MLCP. M. Bélisle:. au MLCP M. Pichette: Oui.
Le Président (M. Farrah): Est-ce tout, messieurs? M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Bon. Est-ce qu'on me permet rapidement de dire que
ça me rappelle des souvenirs de mon bureau de comté, ce que
j'entends. Des gens viennent me voir; ils exercent un métier et ils vont
à des examens du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Il y on a
un. outre autres, quo jo suis; ça fait trois fois qu'il échoue
à l'examen. II fait le travail dans une entreprise de petrochimie de
Montréal-Est, et son employeur atteste qu'il le fait d'une façon
parfaite. Mais il échoue à l'examen Le même employeur me
dit qu'il ne voudrait pas prendre quelqu'un qui, dans un livre, ramasserait ce
qu'il faut pour réussir l'examen, mais qui ne ferait pas le travail, et
c'est légal qu'il fasse le travail; il ne le fait pas à
côté, en aucune manière. Sauf que la conséquence
pour lui, c'est qu'il gagne 6 $ l'heure de moins, parce qu'il n'est pas
classé dans le métier où il fait sa demande. Moi, je
trouve que, dans ce temps-là, ce n'est peut être pas la personne
qui est un problème, c'est peut être l'examen, c'est
peut-être le système.
M. Bélisle: C'est le système qui n'est pas
correct.
M. Bourdon: J'ai un autre cas d'un ancien travailleur de Vickers
qui, lui, a passé un examen parce qu'il n'avait pas le secondaire V, il
voulait faire un nouvel apprentissage à la commission de formation
professionnelle. En français et en mathématiques, il a
passé, mais, en anglais, il avait l'équivalent du secondaire III
alors qu'on demandait l'équivalent du secondaire IV. Ça a
duré trois semaines. On a écrit, on a appelé parce que
pour être soudeur, ce n'est pas évident que ça prend
nécessairement l'anglais équivalent secondaire IV plutôt
que secondaire III, sauf qu'on applique à des adultes des
critères qui, dans une école secondaire, ont parfaitement leur
raison d'être. Finalement, on a trouvé un cadre de Vickers, qui
ferme, qui a attesté par écrit qu'il lisait fréquemment,
dans son ancien métier, dans des livres de directives en anglais et
qu'il était capable de se débrouiller, et il a été
admis. Mais je pense qu'il y a un problème là-dedans Est-ce qu'on
fait un examen pour vérifier l'habileté d'une personne ou bien si
on fait un examen théorique pour... Et je peux vous dire que, du
côté des employeurs, ce que j'entends, c'est que les employeurs
ont une approche bien pratico-pratique Celui dont je vous parle, son employeur
me dit. Il travaille très bien. Il dit: Moi, ce qui m'intéresse,
c'est qu'ils fassent leur travail. Ce n'est pas... (20 h 45)
Le Président (M. Farrah): Le même problème
existe au niveau des cartes de compétence dans la construction.
M. Bourdon: Oui.
Le Président (M. Farrah):, où tu as des
charpentiers-menuisiers qui sont excellents pra- tiquement. Au niveau
théorique, au niveau des tests, s'ils échouent, mais ce sont des
gens qui sont excellents, bien reconnus par leur employeur.
M. Bourdon: Je pense que ça ne tient pas compte des
habiletés et que ce n'est pas fait pour des adultes et qu'on applique,
je pense en gros, les tests que, appliqués à nos adolescents, on
trouvait bien normal.
Le Président (M. Farrah): M. Pichette, vos commentaires
là dessus
M. Pichette: Écoutez, nos saisonniers qui sont en place,
comme l'a mentionné tantôt M. Charland dans ce qu'on vous a
présenté, reviennent d'année en année. Le
ministère est très satisfait. C'est un peu comme avoir un
restaurant, d'avoir un cuisinier à temps partiel, puis, à un
moment donné, ton permanent fout le camp. Tu as besoin d'un cuisinier
pour le remplacer, mais celui à temps partiel ça fait 10 ans, tu
ne le prends pas, tu vas aller en chercher un autre. Vous comprendrez que ce
n'est pas facile, et la situation de ces gens là change d'année
en année. Au début, lorsqu'ils sont entrés au
ministère, ils étaient garçons, je veux dire, en bon
québécois: Le pocheton est au bord de la porte, tu t'en vas, il
n'y a pas de problème.
À partir du moment où tu es marié et que tu as des
responsabilités, tu demandes un petit peu plus d'avantages, de
sécurité. Ce que nos employés saisonniers chez nous n'ont
pas. M. Charland, ça fait 12 ans qu'il est saisonnier. Demain matin,
avec des coupures budgétaires ou n'importe quoi, il ne sera peut
être pas rappelé au travail. Il fait quoi, le gars qui est rendu
à 40 ans? Où on s'en va? On ne le snit pas. Tout ce qu'on
demandé. on pense, et on y croit fermement, que la loi devrait
être modifiée pour permettre un concours de recrutement pour
sélectionner nos employés occasionnels, que d'occasionnels
à saisonniers, ça devrait être considéré,
entre guillemets, comme une espèce de promotion, donc, inclus à
l'interne chez nous. Et de saisonniers à permanents, ça, on
devrait le faire chez nous.
Non pas après avoir eu un paquet de gens à votre service
qui sont vraiment compétents, en bout. de ligne, parce qu'on a un poste
permanent, on le donne à l'autre à côté.
Le Président (M. Farrah): Ça va, merci. Je vais
maintenant reconnaître, M. le député de Bertrand.
M. Beaulne: D'abord, je dois dire, sur le plan strictement
personnel, que je suis d'accord avec vous. Le problème se situe au
niveau où l'examen est conçu, et puis, à ce
niveau-là, vos membres ne devraient pas se sentir
incompétents.
Si on prend d'autres secteurs, comme par exemple dans le domaine de la
comptabilité où bon nombre d'étudiants
québécois ont échoué aux examens, on
s'aperçoit en rétrospective qu'il y a des lacunes
sérieuses dans ces examens-là. Si on prend également
d'autres secteurs où les gens ont échoué, prenons, par
exemple, les permis de conduire, combien de personnes qui ont conduit pendant
au-delà de 10 ans viennent repasser le permis de conduire et puis
échouent?
Alors, je pense que votre point a bien été pris en
considération par les membres de la commission à ce
niveau-là. Je pense qu'effectivement, vous avez soulevé quelque
chose d'important, à savoir qu'on jette un coup d'oeil. Jusqu'à
présent, on s'est penché sur l'imputabilité, sur la
responsabilité ministérielle, enfin sur ces
critères-là II faudrait peut-être qu'on jette un coup
d'oeil également sur la façon dont les examens en toute
équité sont adaptés à la réalité.
Dans ce sens-là, vous êtes le premier groupe qui soulève
cette question-là de façon aussi percutante.
Une question que j'aimerais vous poser. Sur les 3500 occasionnels que le
président du Conseil du trésor dit qu'il va transformer en
permanents, est-ce qu'il y en a dans votre groupe?
M. Pichette: Je ne sais pas s'il y en a dans notre groupe.
M. Beaulne: Au fond, de la façon que vous décrivez
votre système de fonctionnement, vous êtes des occasionnels
permanents.
M. Pichette: Oui, attachés à un signe de piastre.
Occasionnels permanents attachés à un signe de piastre.
M. Beaulne: Dans le sens... Oui, mais vous expliquez dans votre
mémoire que vous êtes occasionnels pondant une certaine
période de temps, mais que, souvent, ce sont les mêmes qui sont
rappelés au métier. Au fond, c'est un peu comme les
pêcheurs.
M. Pichette: Le système fait en sorte qu'au début,
lorsque vous êtes recruté, vous êtes occasionnel jusqu'au
moment où votre nom est inscrit sur la liste ef que vous avez une fiche
d'évaluation positive et trois mois de travail, 60 jours. À
partir de ce moment-là, l'année suivante, lorsque vous êtes
rappelé, vous devenez saisonnier. Lui, le saisonnier, on le rappelle
tant et aussi longtemps qu'on a du travail pour lui, jusqu'au moment où
le travail est encore là mais que le budget n'est plus là. Depuis
trois ou quatre ans, le nombre d'employés saisonniers chez nous a
diminué à cause des coupures budgétaires. Ça,
écoutez, on les vit partout.
M. Beaulne: Mais d'après vous, qui serait le mieux
placé pour préparer ou rédiger l'examen
qui serait axé vers la pratique plus que vers la
théorie?
M. Pichette: Écoutez, au ministère, chez nous, ils
sont sûrement bien placés pour confectionner l'examen, sauf que ce
qu'on nous répond, c'est que l'examen doit faire en sorte qu'on respecte
le principe de la Loi sur la fonction publique, c'est-à-dire permettre
l'accès à la population québécoise à la
fonction publique Donc, à ce moment-là, on fait un examen qui
fait en sorte - pour revenir un petit peu à ce qu'on a dit depuis le
début qu'il va favoriser, dans bien des cas, quelqu'un qui ne fait pas
l'emploi au détriment des gens qui sont chez nous et qui font l'emploi
depuis 10 à 12 ans et dont l'employeur est très satisfait.
Le Président (M. Farrah): Ça va. Alors, M. le
député de Labelle.
M. Léonard: Oui, peut-être une question qui est un
peu en dehors de votre mémoire. D'abord, je constate qu'il y a beaucoup
de gens qui aimeraient être même employés saisonniers.
Est-ce que, dans le cadre de votre travail qui est, je pense, un travail
très intéressant, surtout comme ça se passe
l'été, dans la nature..
M. Pichette: Je vous rappellerai Sainte-Agathe, l'automne,
l'hiver, la chasse de nuit. C'est peut-être moins intéressant.
M. Léonard: Oui. Je pense qu'il y a des choses comme
ça qui se passent, mais une des questions que je voulais vous poser,
c'est: Dans l'exercice de vos fonctions, les relations qu'il y a avec les
biologistes ou avec le corps juridique du ministère, ça se passe
bien, il n'y a pas de problème particulier qui se pose sur ce plan?
M. Pichette: Bien, je pense que c'est un tout. Tout le monde doit
travailler dans le même sens. Nous, on fait appliquer des lois, des
règlements, et les biologistes voient à l'échantillonnage
du gibier, les périodes de chasse, etc. Je pense que ça se
complète très bien ensemble.
M. Léonard: Oui. Je suppose bien que c'est ça.
Disons, quand on parle de la surveillance ou de la conservation de la faune, il
y a toutes sortes d'opérations. Il y a la surveillance par rapport
à des gens qui braconnent, disons, pour employer le mot. mais il y a
aussi toutes les mesures de prévention, les travaux qui touchent
à l'Habitat faunique, et enfin...
M. Pichette: Oui.
M. Léonard: Vous, là-dessus, combien en avez-vous?
Vous dites que le ministère en a 170. C'est dans tout ie
Québec.
M. Pichette: C'est ça.
M. Léonard: Pas juste dans des centres.
M. Pichette: C'est ça Disons que permanents et
saisonniers, chez nous, nous comptons environ 600 employés.
M. Léonard: 600 emplois. Est-ce que ça a
déjà été plus que ça, au
ministère?
M. Pichette: Là, par exemple, je dois reconvertir les
employés saisonniers à demi-temps ou à pou près, ce
qui représente peut-être 80 postes permanents, grosso modo, avec
453.. On atteint 5?5 postes permanents si on les transpose en postes permanents
12 mois, là.
M. Léonard: Oui, mais vous avez 453 agents
réguliers. Je pense que là, il y a des exigences assez
importantes pour passer régulier. Ce sont les mêmes que pour
être saisonnier?
M. Pichette: C'est le concours de recrutement, la même
chose.
M. Léonard: C'est toujours le même concours de
recrutement?
M. Pichette: C'est ça. Sauf que le saisonnier doit se
répéter plusieurs fois pour penser pouvoir avoir un poste
permanent à un moment donné. C'est là qu'est tout le
problème de notre mémoire.
Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le
député de Labelle? Alors, merci. Je vais reconnaître M. le
député de Prévost et, ensuite, le député de
Mille îles. Alors, allez y, M. le député.
M. Forget: Merci, M. le Président. Voici ma question. Au
niveau des écoles de formation concernant les agents de la faune - dans
les écoles de formation de région - est-ce que vous pouvez aller
récupérer plus d'inspecteurs à l'intérieur de ces
régions-là ou bien si c'est plus au niveau universitaire ou chez
ceux qui vont chercher un DEC?
M. Pichette: Bien, au moment où...
M. Fortier: Excusez-moi. Parce que ceux des régions, ils
ont quand même peut-être beaucoup plus de vécu de la
forêt comme tel, l'expérience vécue. Et lorsqu'ils arrivent
au niveau des examens, est-ce que ces gens-là se trouvent
favorisés ou bien pas du tout?
M. Pichette: Je ne pense pas.. Le cours d'agent de conservation
qui se donne soit à La Tuque, à Mont Laurier ou ici, à
Québec. Je pense que ces gens-là devraient être
favorisés d'une certaine façon parce qu'ils ont peut-être
une
meilleure formation académique. Oui, peut être qu'ils
peuvent être favorisés dans ce sens là.
M. Forget: Par contre, vous n'avez pas de chiffres de ça
si-...
M. Pichette: Non, du tout.
M. Forget: Non, vous n'avez aucune..
M. Pichette: Je peux vous dire qu'il y a des gens du public et
des gens des écoles. Sur un concours, je pense que ça se partage
assez bien, comme résultat, peut être 50-50, peut être
60-40. Mais je ne veux pas avancer de chiffres.. Je ne le sais pas.
Le Président (M. Farrah): Merci, M. le
député. M. le député de Mille îles
maintenant.
M. Bélisle: C'est bien évident, M. le
Président, que les questions que j'ai posées au tout
début, ça menait à l'opinion de ce que mes deux
collègues de Pointe-aux-Trembles et de Bertrand ont dit tantôt,
c'est ce que je pensais. Des petites questions, des petites rapides, des
petites vîtes. Quand c'est le début d'une saison, est-ce que les
agents de conservation de la faune... Peut-être que M. Charland est
capable de me répondre parce qu'il vit ça, lui, quand ça
commence, le début de la saison. Y a-t-il quelqu'un qui va vous voir, M.
Charland, et qui vous dit supérieur immédiat ou régional,
donnez-moi le poste qu'il porte, le gars, le chapeau, le grade --. M. Charland,
on s'attend de vous, cette année, à ce que vous ayez tel
objectif, que vous fassiez telle chose dans votre poste? Est-ce qu'ils vous
décrivent le mandat et ce qu'ils s'attendent à ce que vous
fassiez? Y a-t-il quelqu'un qui va vous voir et qui vous parle?
M. Charland: Oui, mais pas d'une façon personnelle. Ce
sont des objectifs régionaux que le chef du service sort au mois
d'avril. Ça comporte les augmentations qu'il aimerait dans divers
milieux, lés plaintes, les infractions, les cours, etc.
M. Bélisle: Ça se fait au niveau de la
région.
M. Charland: De la région.
M. Bélisle: Et le directeur général, il ne
va pas vous voir.
M. Charland: II nous voit le premier jour. Il nous explique les
orientations et les attentes, mais ce n'est pas sur un point de vue personnel,
c'est en groupe.
M. Bélisle: O. K. Combien vous êtes, à ce
moment-là, dans la salle?
M. Charland: Ça peut dépendre des
régions.
M. Bélisle: Prenez chez vous, là, dans votre
région.
M. Charland: On est une quinzaine. M. Bélisle: Vous
êtes une quinzaine. M, Charland: Oui.
M. Bélisle: Vous êtes réunis une
journée de temps.
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Le directeur régional vous expose les
objectifs de la région pendant la saison. Et là, vous autres,
vous partez de là, après cette réunion-là, et vous
entrez dans lé terrain.
M. Charland: C'est ça.
M. Bélisle: Et là, vous essayez de faire du mieux
que vous pouvez, individuellement ou en groupe, avec vos collègues, pour
atteindre ces objectifs-là.
M. Charland: Un peu, oui.
M. Bélisle: II n'y a personne qui vous dit à vous,
M. Charland, le directeur de la région qui vous dit: Vous
personnellement, M. Charland, on s'attend, cette année, à ce que
vous fassiez telle chose. Vous avez eu un très bon comportement
l'année, passée, vous êtes très bon avec les gens,
vous êtes aimable avec le public, vous faites bien, faites donc telle
chose supplémentaire. Il n'y a personne qui vous tracé une
attente personnelle, un profil personnel.
M. Charland:. Mon chef de poste, mon responsable de poste voit la
notation que j'ai eue l'année précédente et il
essaie d'améliorer avec les objectifs régionaux.
M. Bélisle: O. K. votre chef de poste. Vous en avez
combien dans votre région, les 15 dont vous me parliez au niveau de la
région?
M. Charland: II y a cinq chefs de poste.
M. Bélisle: Cinq chefs de poste pour les 15 agents.
M. Charland: Oui, mais il y en a rien que quatre...
M. Bélisle: II y en a rien que quatre... M.
Charland:... qui ont des agents.
M. Bélisle:... qui ont des agents. D'accord Quatre chefs
de poste. Et les chefs de poste, suite à cette réunion-là,
est ce qu'ils vous rencontrent, est-ce qu'ils vous parlent personnellement,
comme vous nous le dites? Les attentes qu'ils ont vis-à-vis de vous avec
votre fiche de rendement, ils font tout ça?
M. Charland: Ça dépend du chef de poste
Habituellement, oui.
M. Bélisle: Habituellement, oui. M. Charland:
Habituellement, oui.
M. Bélisle: O. K Ça fait combien de temps que vous
êtes saisonnier là bas, M. Charland?
M. Charland: Depuis 1978.
M. Bélisle: O. K. Est-ce que chaque année, depuis
1978, vous avez eu votre chef de poste qui est venu vous voir ou qui vous a
expliqué chaque année ce qu'on s'attendait de vous pour vous
motiver, vous encourager, vous donner les limites de ce qu'on attendait de
vous?
M. Charland: Oui. Habituellement, oui. M. Bélisle:
Passablement, chaque année? M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Est-ce que chaque année, depuis 1978,
vous avez été noté sur le rendement, sur
l'évaluation?
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: C'est votre chef de poste qui fait
ça?
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Seul ou avec le directeur régional?
M. Charland: Habituellement, c'est seul, et le chef du service
émet ses commentaires.
M. Bélisle: Ses commentaires. M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Est-ce que vous êtes consulté
après, une fois que vous avez le rapport devant vous, quand il vous
donne le rapport de rendement? Est-ce qu'il s'assoit avec vous?
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Le directeur de région et le chef de
poste vous disent...
M. Charland: Habituellement, c'est uniquement le chef de
poste.
M. Bélisle: Le chef de poste.
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: O. K. Bon!
Une voix:
M. Bélisle: Allez y.
Le Président (M. Farrah): Avez-vous d'autres
questions?
M. Bélisle: C'est parce que c'est très important,
c'est la première fois qu'on a je m'excuse, là quelqu'un qui est
sur le terrain. Les autres qui sont venus nous voir, c'est des syndicats J'aime
bien les syndicats... (21 heures)
Une voix: Mais on est trop sur le terrain.
M. Bélisle: mais vous êtes sur le terrain, vous
autres. Vous êtes des fonctionnaires, vous êtes des vrais qui
parlez au monde. Moi, ça me fait plaisir de parler à des gens qui
sont des vrais, qui sont sur le terrain, avec le public, etc. Une question,
M.; Charland. Vous, quand on vous dit que vous avez des comptes
à rendre à quelqu'un.
M. Charland: Oui
M. Bélisle: pour votre job que vous faites, à qui
vous rendez vos comptes?
M. Charland: A mon chef de poste.
M. Bélisle: Chef de poste. Est-ce que vous pensez que,
dans votre fonction, quand vous êtes sur le terrain avec le public, vous
avez des comptes à rendre au public?
M. Charland: Eh oui!
M. Bélisle: Comment rendez-vous vos comptes au public?
M. Charland: J'essaie de leur donner les services qu'ils
espèrent.
M. Bélisle: O. K. Mais vous n'expliquez pas au public
pourquoi vous faites ça d'une telle façon plutôt que d'une
telle autre? Vous appliquez les règles, c'est ce que vous faites?
M. Charland: Non. On fait beaucoup d'éducation.
M. Bélisle: D'éducation.
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Oui, d'accord.
M. Charland:. via les lois et règlements C'est
préférable de prévenir des gens plutôt que de
toujours leur imposer des sanctions, pour leur comportement en forêt via
l'environnement, les coupes de bois dans les parcs et réserves. Il y a
une foule de choses sur lesquelles on renseigne le public.
M. Pichette: Si vous prenez le volet éducation, juste pour
rajouter un petit peu, il y a à peu près cinq ou six ans, les
agents de conservation devaient peut-être donner, grosso modo, 200
conférences au niveau scolaire. On faisait ça durant une
période d'un mois et demi à deux mois. Maintenant, la
majorité des régions ont des agents qui sont, au niveau
éducation, a temps plein On ne sulfil pas aux demandes puisque à
une certaine période de l'année, avec le personnel restreint, on
ne peut pas répondre à ces attentes-là, puisqu'on est
obligé de rapatrier les gars de l'éducation pour les mettre du
côté opérationnel.
M. Bélisle: O. K. Me permettez-vous, M. le
Président?
Le Président (M. Farrah): Allez-y. Je vais en avoir une
dans la même foulée.
M. Bélisle: Bien, allez-y, je vais revenir
après.
Le Président (M. Farrah): Dans la même foulée
que mon collègue de Mille-Îles, c'est que, là, vous avez
une rencontre la première journée de votre travail avec votre
chef de service qui vous indique les orientations, etc. À la fin, on
vous revient avec une fiche do notation ou une évaluation. C'est
exact?
Une voix: Oui.
Le Président (M. Farrah): Entre-temps, est-ce qu'il y a
une évaluation continue qui se fait, de façon
systématique, afin de s'assurer que les orientations dites au
début sont bel et bien respectées ou qu'il n'y ait pas une
tangente différente qui se prend en cours de route? Là, je vois
ça globalement dans la fonction publique, je pense qu'il y aura
certainement un malaise si, au début, on donne des directives et,
à la fin, on évalue, mais qu'entre-temps, il n'y a pas de suivi
à ça. Dans ce sens-là, souvent, on peut parler de
blâmer le fonctionnaire, mais lui, sans le vouloir, des fois, il peut
dévier, un peu pour toutes de raisons qui sont bien légitimes.
Mais s'il n'y a personne pour le ramener ou pour l'évaluer en cours de
route... Est-ce que dans votre cas précis, pour avoir un cas pratique,
il y a une évaluation qui se fait de façon suivie ou continue ou,
en tout cas, systématique?
M. Charland: Habituellement, il y a des réunions,
dans chaque bureau, qui se tiennent chaque mois ou chaque six semaines. Le chef
de poste nous explique si on a atteint les objectifs auxquels il s'attendait.
Il nous dit s'il y a eu changement dans l'orientation globale.
Le Président (M. Farrah): Ah! c'est intéressant. M.
le député de Mille-Îles.
M. Bélisle: M. Charland, la question s'adresse à
vous trois. Qu'est-ce que, demain matin, on pourrait faire pour... Supposons
que vous êtes trois.. On suppose, au départ, que vous êtes
d'excellents agents de conservation de la faune, d'accord.
Une voix: Ils le sont. M. Bélisle: Vous
l'êtes.
Une voix: Vous m'arrachez les mots de la bouche.
M. Bélisle: Est-ce que vous pourriez être encore
meilleurs, demain matin? Est-ce que ce serait possible que vous soyez encore
meilleurs que vous ne l'êtes?
M. Charland: Ah oui!
M. Bélisle: O. K. Dites-moi ce qu'on pourrait faire dans
le système pour vous aider à l'être...
M. Charland: O. K.
M. Bélisle:... pour vous motiver à l'être,
pour être encore plus excellents que vous êtes excellents?
M. Charland: Nous donner le cours de formation de base que les
agents permanents reçoivent.
M. Bélisle: Point.
M. Charland: Point.
M. Bélisle: O. K. Est-ce que...
M. Charland: Avec un concours en régie interne, ça
nous motiverait beaucoup aussi.
M. Bélisle: O. K., d'accord. M. Charland:
Beaucoup
M. Bélisle: D'accord, ça, j'ai compris ça.
J'ai compris votre point, M. Charland. Une autre question dans cette
ligne-là. Supposons qu'une
étape semblable est faite et que vous soyez
sécurisés sur le plan de l'emploi, vous ayez une certaine
sécurité d'emploi, est-ce qu'il y a des primes au rendement qui
vous aideraient à être plus performants? Si on vous disait,
admettons, il y en a, parmi les 15 dans votre région, trois bons et,
Charland, c'est le meilleur. Charland. dans les 15, c'est le meilleur et parce
que c'est le meilleur, il devrait avoir une prime cette année. Vous
n'êtes pas d'accord avec ça?
M. Charland: Non.
M. Bélisle: Vous êtes contre ça, vous?
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: Vous êtes contre ça.
M. Charland: Présentement, c'est le chef de poste qui
reçoit les primes pour notre rendement.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: C'est ça. C'est en plein ça.
M. Bélisle: C'est pour ça que je vous dis
ça, là. Je ne parle pas...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bélisle: Non, non, écoutez. Je comprends, M.
Charland. Ma question a toute sa signification, compte tenu de la
réponse que vous venez de donner. Oubliez ce qui se passe en ce moment,
O. K. là? On part un autre système et on essaie d'être
encore mieux qu'on était avant. Est-ce qu'une incitation
monétaire quelconque, dans un groupe lorsqu'on dirait: Charland, c'est
le meilleur du groupe ou il y en a deux qui sont excellents dans le groupe et
on va primer l'excellence... On va inciter les gens à se dépasser
eux-mêmes. "C'est u" avec des épingles? "C'est-u" avec des
"candies"? "C'est-u" avec des congés? "C'est-u" avec des dollars au bout
qu'on va vous motiver? Avec quoi on va le faire? Je vous pose la question. Vous
êtes sur le terrain, vous.
M. Charland: Je crois que des primes au rendement, ça
pourrait devenir dangereux, c'est-à-dire que des agents feraient des
causes pour des niaiseries et écoeureraient le public pour absolument
rien, uniquement pour une prime.
M. Bélisle: Non, non, vous ne me comprenez pas là.
Je ne dis pas que l'agent qui va être excellent, c'est celui qui tape le
plus sur la tête du public. Ce n'est pas ça que je dis là.
Ce n'est pas ça, là. C'est peut être l'agent qui ferait le
plus d'éducation auprès du public, dépendant des
critères, celui qui serait le plus près des gens, qui leur
expliquerait le plus comment préserver la nature, ot lout le reste. Pas
celui qui tape sur la tête et qui colle des infractions en vertu de. la
loi sur la faune. J'ai beaucoup de difticulté, M. le Président,
depuis le début de la journée à comprendre comment il se
fait que tout le monde qui a passé devant nous aujourd'hui, quand je
parle d'excellence, quand je parle d'une volonté de se dépasser
eux-mêmes, quand je parle d'un système à imaginer pour
être encore meilleurs qu'on ne l'est, que systématiquement ce
n'est pas dans la culture de notre institution, la fonction publique
québécoise, de penser dans ces termes-là. Ça
m'agace, M. Charland. Ça m'agace profondément. Ça
m'agace.
M. Pichette: II y a une petite chose qu'il faut penser. Je
voudrais bien que vous me compreniez. Écoutez. Je ne sais pas si vous
vous souvenez du temps où les agents de conservation oeuvraient avec un
salaire misérable niais qui étaient payés au prorata des
amendes. O. K. C'était comme ça dans le temps.
M. Bélisle: C'est vrai. Vous avez raison.
M. Pichette: Bon Je ne pense pas que c'était un bon
système que ce système-là. Le vôtre, c'est
différent. Je le vois d'une façon complètement
différente de celui, comme vous dites, qui... Et vlan! là,
v'Ià un 10 $. Ce n'est pas de même. Je ne le vois pas comme
ça. Je suis parfaitement d'accord avec vous. Mais il y a de petites
choses qui font qu'à un moment donné, une motivation peut
être haussée et à un autre, elle peut être
baissée.
M. Bélisle: Bon, O. K À part ce que M. Charland m'a
dit, en avez-vous, des idées?
M. Pichette: Par exemple...
M. Bélisle: Donnez-nous en des idées.
M. Pichette: on a fait une guerre pour la couleur des
véhicules, des jaunes, des bleus, des marrons, toutes sortes de
couleurs. Chez nous, les agents sont attachés à ce qu'on a, notre
travail, notre uniforme. Remontez quelques années en arrière,
l'uniforme des agents de conservation de la faune, c'était comme
ça. Vous les regarderez passer aujourd'hui: des pantalons de cinq, six
couleurs; les souliers sont revenus au noir parce que, brun, il y a plusieurs
sortes de brun. Noir, c'est noir. Je pense, par exemple, aux agents qui vont
mieux performer lors de la séance de tir annuellement. On nous a
cassé les oreilles avec la fameuse petite décoration des gars de
la Sûreté du Québec, leurs petites étoiles et le
revolver. On ne les a pas, chez nous, ces choses-là. On était
supposé les avoir. Ce sont toutes des petites choses qui font, à
un moment donné, que ton sentiment d'appartenance a l'organisme lait en
sorte que t'es là, que l'es pas
là ou que t'es là à moitié. Je pense qu'il y
a un grand bout de chemin à faire, à la conservation de la faune,
pour être un pelit peu plus imaginatif. pour créer une motivation
qui amène ce que vous visez, vous: l'excellence.
M. Bélisle: O. K. Est ce que vous...
Le Président (M. Farrah): M. le député de
Mille-Îles, M. Cloutier, je pense, veut ajouter là-dessus...
M. Cloutier (Roger): Juste, M. le député de
Mille-Îles, pour compléter parce que c'est une chose qui m'a
tracassé souvent. Je sais que vous parliez de prime, tout à
l'heure, et j'ai a oeuvrer dans un secteur que vous fréquentez.; je
reconnais certains visages, à l'occasion, l'été S'il y
avait des primes d'instituées, je sais pertinemment bien que, dans ce
milieu là en tant que tel, dans un milieu de pêche, los lois et
règlements sont très bien observés dans un endroit
où vous oeuvrez occasionnellement. Je pense que. s'il y avait un
système de primo, je ne ferais pas grand piastres là, moi. Vous
avez une partie où les règlements et los lois sont
observés.
La conservation de la faune, on a peut être une image à
dire, qu'on peut partir le matin et qu'on peut faire 20 ou 25 "tickets", mais
ce n'est pas de même que ça marche. J'ai aimé tout à
l'heure parce que vous nous avez dit: Enfin, on a de vrais agents en avant de
nous autres. On peut vous dire que, nous, on oeuvre sur le terrain. On est
là. On est dans la vraie vie et on les vit, les problèmes avec
lesquels on vit.
Mon président vous faisait part, tout à l'heure, rien que
de la couleur des véhicules, comment on a joué avec ça. Il
y a aussi au point de vue du travail, la couleur du véhicule, pour nous,
est importante On lait du travail -de nuit. Souvent, et très souvent,
pour dissimuler un camion jaune, couleur voirie, pour nous, c'est difficile en
forêt.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cloutier (Roger): Alors, je dois vous l'avouer. Par contre,
ça avait certains avantages lorsqu'on avait des camions jaunes, tu
pouvais passer sur une ligne double, lu avais moins de plaintes; asteur, tu as
un camion; ils disent que c'est un camion de garde-chasse, il faut dire le vrai
mot, c'est de même encore que le monde nous appelle.
Au niveau de l'excellence d'agent de conservation, je pense que chacun
fait son cheminement et la restriction des gars qu'on a là-dedans, si on
était 4000, je dirais: Bien, il y on a peut-être qui s'en foutent
un peu, malgré qu'il y a des cas d'exception. Il y en a peut être
qui s'en foutent, de la job de conservation. Mais je dois vous dire
l'attachement dos 400 agents de conservation qui sont là, permanents,
aussi ceux, les 170 agents occasionnels et saisonniers, ils ont une
appartenance au service, ils sont fiers de leur travail et de ce qu'ils font.
Je pense que des efforts sont laits de la part du ministère; on doit
dire aussi que le ministère, dans les relations de travail qu'on
entretient... Et c'est ce qu'on a toujours tenté d'oeuvrer depuis qu'on
est en place, le Syndicat des agents de conservation et qu'on le chemine,
d'avoir toujours de très bonnes relations de travail chez nous.
Dépendamment de ce qu'on peut laisser croire, que ces
relations-là...
Vous disiez: Les sources de motivation... Vous avez insisté, tout
à l'heure, en disant: Ça se "calcule-tu" en dollars ou n'importe
quoi? Si c'était ça, en dollars, parce qu'on croit tous qu'on a
le même salaire qu'un gars de la Sûreté du Québec,
loin de là, monsieur Examinez notre salaire, vous allez voir qu'il y a
un pas à faire. On ne l'a pas, le salaire, et on fait, encore 2080
heures par année et on demande une petite réduction d'heures, on
fait huit heures et demie par jour On a des points d'assignation. On est
parqué dans des lieux pour des périodes de 10 et 15 jours, dans
des lieux isolés. Je regardais, à un moment donné, il y
avait un député qui faisait une commission parlementaire, pour ne
pas le nommer, le député d'Ungava, et il disait: II n'y en a pas
beaucoup parmi vous autres qui le feraient, le travail Remarquez bien, on a
embarqué là-dedans; on a des convictions et on veut le faire, le
travail, et on veut bien le faire. Mais, par contre, on devrait avoir une
certaine reconnaissance pour les agents qui oeuvrent depuis 10 ou 12 ans dans
ce service-là et qui sont allés se parquer dans des endroits
isolés sur. la Côte-Nord, dans la Gaspésie, dans des
milieux de nuit, dans les mouches. Vous y allez à la pêche et
à la chasse, mais quand vous y allez, vous êtes en vacances; nous
autres, on est là-dedans à l'année. Moi, quand ma femme me
dit: Aïe Roger, en fin de semaine, on "va-t -u" faire un tour dans le
bois? Je dis: Aïe! l'asphalte, hein!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cloutier (Roger): Parce que là, je me suis fait brasser
là dedans, ces "trucks" là. Vous le savez, quand vous y allez en
forêt, vous revenez, vous êtes épuisés de votre
partie de pêche de deux ou trois jours de vacances Pour nous, on le fait
à l'année. Ça peut peut-être apporter une
précision parce que ça...
M. Pichette: J'aurais quelque chose à ajouter là.
Notre niveau, chez nous, ce qu'on a mal évalué de la part du
ministère, cest le danger du travail de l'agent de conservation de la
faune. Ce n'est pas nécessairement, beau temps, beau chemin. O. K.
Ça, je pense qu'à date, il y a des corps comme, je crois, la
détention, et également au niveau des transports, les
contrôleurs routiers, ont cette étude-là de faite. Je
vous dis qu'elle a été faite chez nous, mais qu'elle ne
nous a pas été donnée. Je regarde ce qu'on a eu comme
décès depuis cinq ans, pour avoir le même ratio c'est con
ce que je vous dis- il faudrait qu'il y ait ou 61 membres de la
Sûreté du Québec qui se soient fait tuer pour avoir la
même chose chez nous par rapport à ce qu'on a. On n'est pas
appelé à diminuer. Chez nous, des ' gens qui viennent de passer
en cour, ça a coûté 4200 $ d'amendes et une confiscation
des tout terrain, etc. Le "pusher" n'a même pas ça quand il passe
en cour. À ce moment-là, plus ça va, plus le danger
augmente, mais on ne nous reconnaît pas comme policiers. (21 h 15)
M. Bélisle: L'implication du milieu?
Le Président (M. Farrah): Dernière question.
M. Bélisle: Quand vous êtes ensemble avec votre
directeur régional et vos chefs de poste au début de la saison,
est ce que ça arrive, lors de ces rencontres là, est ce que
ça vous est déjà arrivé, M. Charland, ou M.
Cloutier. dites le moi si cela vous est déjà arrivé, de
vous faire poser la question: Vous autres, les gars, avez vous des
idées à suggérer pour améliorer le système,
le réseau, le service9 Est-ce qu'on va chercher vos
idées?
M. Charland: Oui.
M. Bélisle: On va chercher vos idées. Les applique
t-on, après?
M. Cloutier (Roger): La marge. M. Bélisle:
Qu'est-ce qu'il a dit là? M. Cloutier (Roger): La marge.
M. Bélisle: La marge.
M. Cloutier (Roger): C'est ça II y a un grand escalier,
là. De là à dire.
M. Bélisle: La marche.
M. Cloutier (Roger): Entre les deux, il y a une marge entre ce
qu'on revendique et ce qu'on peut appliquer réellement parce qu'on
invoque toujours des raisons financières ou que ce sont des projets trop
dispendieux ou que ce sont des choses infaisables. Il y a de multiples raisons.
Mais je dois dire, je ne voudrais pas que vous vous fassiez une fausse
idée à l'effet que le directeur régional nous rencontre
annuellement, là, au début de la saison, n'importe quoi, il ne
faut pas véhiculer ces choses-là. Il nous rencontre, le chef de
service, parce qu'il y a des paliers hiérarchiques.
M. Bélisle: D'accord
M. Cloutier (Roger): C'est l'agent occasionnel saisonnier qui
peut oeuvrer avec un permanent, un "mix" des deux, parce qu'il faut quand
même que l'occasionnel, à ses tout débuts, que lu puisses
lui montrer c'est quoi le travail en tant que tel. Après ça, ils
oeuvrent encore deux occasionnels ensemble, tout dépendamment des
milieux. ' Le milieu de la Gaspésie, il y a environ 80 occasionnels
saisonniers. annuellement parce que c'est une région qui demande
énormément, ce qu'on n'a pas dans la région de
Québec. J'en ai environ neuf ici, moi. Par contre, à. Trois
Rivières, eux autres ont à peu près 12 ou 15 occasionnels,
dépendamment des sommes d'argent qu'ils ont Los permanents, c'est encore
la quantité. II y en a 52 dans la région de Québec. Aussi,
il faut faire attention là-dedans. C'est ton chef, ton responsable de
bureau qui, lui, est sous les ordres d'un chef de service régional.
Donc, cost ce responsable de bureau qui voit a ta supervision. Quand tu as un
problème qui se pose, ce n'est pas le directeur en tant que tel parce
que. là, on sauterait des paliers hiérarchiques, il faut suivre
les voies. On nous dit souvent qu'on saute peut être des étapes,
des fois. On se limite au responsable de bureau qui, lui, a des réunions
de gestion plus souvent, qui fait part des représentations des agents Je
ne voudrais pas prendre trop de temps au niveau de l'éducation, le
président en a parlé tout à l'heure. On a
débuté. là-dedans il y a environ quatre ou cinq ans. dans
les écoles. J'en suis un agent éducateur auprès du milieu
scolaire, cinquième et sixième année, à leur parler
dos animaux, de commencer à' leur montrer comment aimer l'environnement,
la nature, et les respecter. On sait quo les animaux, on va les respecter et on
va les aimer si on les connaît un peu mieux Donc, on en a fait, de
l'éducation, en période hivernale dans les milieux scolaires. On
n'en fait pas dans lo temps de la chasse. On a besoin de tous nos effectifs,
même on en manque. C'est une partie de notre travail qui a
amélioré et qui a fait connaître l, agent beaucoup parce
que sachez que Tout a l'heure, vous disiez: Est- ce que le public semble bien
vous percevoir? Peut être que vous ne vous êtes jamais fait prendre
à la pêche ou à la chasse, bien quand tu t'es fait prendre,
une fois, vous allez voir qu'on ne se parlerait pas pareil. Moi, je vous
aurais. pris; tu dirais: Ouais! C'est un travail beaucoup répressif.
M. Bélisle: C'est la preuve que je ne me suis pas fait
prendre.
M. Cloutier (Roger): Peut-être que vous n'allez pas
à la pêche ni à la chasse.
M. Bélisle: Ah oui!
Le Président (M. Farrah): M. le députe de
Prévost.
M. Forget: Merci, M. le Président. Voici ma question. Qui
décide au niveau d'un certain lac, par exemple, certaine région,
qu'on va, surveiller plus que l'autre? Même dans le même secteur,
vous allez avoir un lac. Débarquez votre chaloupe. Là, c'est bien
de valeur, vous venez de vous faire ramasser. Dans un autre lac, juste un peu
plus loin, vous n'avez à peu près pas de problèmes ou dans
un territoire bien précis, vous n'avez pas de problème. Est-ce
que c'est le chef de district qui vous donne des ordres comme ça ou bien
non c'est à la suite d'une consultation entre vous autres, que vous
décidez que tel lac ou telle ou telle région... ?
M. Cloutier (Roger): Assez souvent ce qui arrive, c'est que les
agents font du travail de reconnaissance où tu rencontres les
pêcheurs parce qu'on a le contact directement avec l'individu qui
fréquente ces activités-là, soit le pêcheur ou le
chasseur. Donc, à la suite de campagnes qui sont faites d'un
réseau de braconnage, de SOS., d'information, d'une ligne "inwatt", en
tout cas, j'en mets, et il y a d'autres contacts que nous avons avec des
individus, à un moment donné, qui viennent faire enregistrer un
orignal, ils ont eu connaissance de choses, et là, on accumule un bagage
d'informations. À la suite de ce bagage où il y a des
fréquentations, si on veut, sur des lacs que nous, on vient à
connaître à force de voir ce que les pêcheurs prennent en
capture là, on dit: Ce sont des lacs qui sont potentiellement dangereux
à être "over limit". Donc, on sait qu'il y a des lacs, par
habitude du terrain, parce qu'on travaille par secteur et par contact des
autres équipes de travail, où les gars disent: Surveille tel lac
de tel nom, le lac Mille-Îles, supposons, pour la simple et bonne raison
qu'il était à quota, qu'il vient de commencer à mordre et
qu'il peut être dangereux.
Donc, ce qu'on fait, c'est un travail de concertation entre nous autres,
on fait part de ga au responsable du bureau qui, lui, dit J'ai besoin d'agents
à tel endroit Là, il sort une première embarcation qui,
elle, a son quota et ils sont trois pêcheurs et ça fait deux
heures qu'ils sont à pêcher. Là, l'autre embarcation n'est
pas encore sortie et ils sont trois dans la chaloupe et il est 5 heures de
l'après-midi, ça fait sept heures qu'ils pêchent et ils ne
sont pas encore sortis. Là, tu te poses des questions Donc, tu te
camoufles dans les mouches et tu attends ton pêcheur. C'est ce qui fait
qu'à un moment donné, après coup, tu frappes les choses.
Mais il est aussi question des horaires de travail qu'il faut respecter; on a
la cour à travers ça. Nos infractions, cet automne, qu'on fait
à la chasse, on va les plaider quand? Dans l'été? Dans la
période des mois de mai et juin, l'abondance de la cour? Cest là
qu'il faut être sur le terrain. Donc, il y a des Coordinations la dedans
qu'il faut faire Dos agents, je dois vous jurer qu'il y on a qui disent:
Ça fait 10 ans que j'y vais et c'est la première fois que je me
fais demander mon permis. Je comprends et, à part ça, on est
toujours dans le bois et, assez souvent, il faut se cacher. On travaille
caché; on n'est pas vu. On va essayer de percer.
M. Pichette: On avait présenté au ministère,
à un moment donné, une toute petite statistique, juste pour finir
là, avec les personnes accidentées du travail, en congé.
de maladie; les cédules font en sorte qu'ils s'en vont en diagonale. Il
y a des périodes, à un moment donné, où c'est
complètement au neutre, il n'y a pas de personnel. Avec la reprise de
temps supplémentaire parce qu'il n'y a pas de temps payé, on
arrivait à une statistique de 0, 27 agent par corps de travail par
bureau. Ça vous donne une idée du manque d'agents de
conservation.
Le Président (M. Farrah): Ça va. M. le
député de Bertrand.
M. Beaulne: Oui, juste une dernière question très
brève: Si j'en juge par votre intérêt à venir devant
la commission présenter un mémoire, est-ce que vous souhaiteriez
que les parlementaires, via, par exemple, une commission comme celle-ci, se
penchent plus fréquemment et de façon plus consistante sur tout
le fonctionnement de la fonction publique?
M. Charland: Oui
M. Léonard: Moi, je voudrais...
Le Président (M. Farrah): M le député de
Labelle, en terminant.
M. Léonard:... remercier les gens. Vous avez un
témoignage vraiment vécu. Ça se sent. Et je peux
témoigner, quant à moi, dans notre coin, de tout le travail que
vous faites dans notre comté qui touche beaucoup dé
Montréalais notamment. Je voudrais vous remercier d'être venus
ici, à cette commission.
Une voix: C'est nous qui vous remercions.
Le Président (M. Farrah): Alors, MM. Pichette, Charland et
Cloutier, au nom des membres de la commission, merci beaucoup pour la
présentation de votre mémoire, et bonsoir.
Je remercie aussi les membres de la commission, tous ceux et celles qui
ont assisté de façon assidue à ces travaux durant toute la
journée, et les gens, les consultants de la commission qui ont
été ici toute la journée aussi, et M. le
secrétaire. Sans plus tarder, j'ajourne les travaux à demain
matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 23)