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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 5 décembre 1990 - Vol. 31 N° 43

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente au détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal


Journal des débats

(Quinze heures quarante-trois minutes)

Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de l'administration est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président: Mme Caron (Terrebonne) remplacera M. Beaulne (Bertrand); M. Khelfa (Richelieu) remplacera Mme Bégin (Bellechasse); M. Thérien (Rousseau) remplacera M. Després (Limoilou); et M. Brouil-lette (Champlain) remplacera M. LeSage (Hull).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le secrétaire. Nous en sommes maintenant aux déclarations d'ouverture et je demanderais à M. le ministre si, effectivement, il a l'intention de faire des remarques préliminaires.

M. Savoie: Non, M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire des remarques préliminaires.

Le Président (M. Lemieux): J'aimerais demander à monsieur le porte-parole de l'Opposition, M. le député de Labelle, s'il a l'intention de faire des remarques préliminaires.

M. Léonard: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle, la parole est à vous.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, nous avons un projet de loi fort important qui implique une réforme profonde de notre système fiscal et qui est couplé, d'ailleurs, avec la réforme que fait le gouvernement fédéral à l'heure actuelle sur la taxe sur les produits et services, alors que le gouvernement fédéral transforme sa taxe de vente sur la fabrication en une taxe sur les produits et services, une taxe qui va être perçue à différents stades de la production avec tout un système de perception et de crédits et qui va introduire des changements profonds. Je vois que le débat même à la Chambre des communes et au Sénat, à l'heure actuelle, n'est pas terminé, que les sénateurs en particulier font une lutte contre ce projet, qu'il y a eu, d'ailleurs, des discussions très longues à la Chambre des communes. Il y a eu un très grand débat sur cette question parce que le changement est fondamental. Le gouvernement fédérai a eu, à mon sens, l'honnêteté politique d'annoncer sa réforme en 1987. En même temps qu'il abaissait les taux d'imposition, l'impôt sur le revenu, il introduisait une réforme de la taxe sur les produits et services qu'il voulait neutre. Mais le débat s'est fait depuis trois ans, au gouvernement fédéral, de sorte que les citoyens ont eu connaissance des modifications qui étaient apportées. Malgré tout ça, il y a eu beaucoup d'opposition et l'opposition, à l'heure actuelle, est transportée au Sénat. Je pense qu'il faut noter, en passant, qu'au Sénat canadien ce sont les sénateurs libéraux qui s'opposent à ce projet de loi. Les sénateurs libéraux, qui sont des amis de nos amis d'en face, ont des objections majeures, à ce qu'ils disent, à ce que ce projet de loi soit adopté. Nous, nous n'en avions pratiquement pas entendu parler ici, au gouvernement du Québec. Depuis 1987, le gouvernement ici n'en a pas parlé plus qu'il ne faut, sauf que nous savions que le ministre du Revenu du gouvernement du Québec avait de fortes oppositions à ce projet de loi qu'il a manifestées au cours de l'hiver dernier, notamment. Ceci nous a amenés, finalement, à des déclarations publiques à l'effet que le gouvernement du Québec avait des réticences majeures à suivre le gouvernement fédéral, comme les autres provinces canadiennes d'ailleurs, qui n'ont pas emboîté le pas au gouvernement fédéral. Alors, le ministre du Revenu, M. Yves Séguin, a fait des déclarations publiques qui ont été entérinées... Je vais en citer quelques-unes ici. Il les a rappellées, d'ailleurs, le 23 octobre dernier où il disait: La fiscalité est l'art de tirer sur le dos de la poule le maximum de plumes avec le minimum de cris. C'est l'ex-ministre du Revenu du Québec qui parle.

M. Savoie: Non, ce n'est pas l'ex-ministre du Revenu qui parle, c'est un ancien ministre des Finances français, une citation qui date du XVIe siècle.

M. Léonard: Citée par le ministre du Revenu du Québec...

M. Savoie: Parfait.

M. Léonard: ...qui est toujours député de Montmorency. J'ai été interrompu par le ministre du Revenu à l'heure actuelle. Je pense que lui n'aurait pas eu fa culture d'aller chercher une telle citation, c'est son collègue qui l'a eue, à l'époque.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle, s'il vous plaît. Vous avez suffisamment d'expérience parlementaire, M. le député de Labelle. Vous pourriez m'enseigner la procédure, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Très bien. Le ministre du Revenu m'a interrompu sans vous demander la permission. Il n'avait pas le droit de le faire, d'ailleurs, alors il s'attire des plumes... des bosses sous ses plumes. Alors, ce qu'il en dit, c'est qu'à son humble avis, et je cite: À mon humble avis, elle sera complexe, injuste, chère et dure pour l'économie, surtout en cette période de récession qui s'annonce. Ce que nous disions il le dit aussi. Il dit qu'il y a des avantages, effectivement, à la TPS fédérale, mais il dit aussi que malheureusement la TPS a une face cachée. En effet, dit-il, sous le couvert d'une réforme de la taxe d'accise portant sur les produits, le gouvernement fédéral introduit un nouveau champ de taxation, la taxe sur les services, deux fois plus importante que la taxe sur les produits. Ça me paraît drôlement important, cette affirmation.

Il dit plus loin: II est surprenant que personne n'ait mis en doute les revenus anticipés de la TPS présentés aux documents officiels. En réalité, la TPS récoltera environ 30 000 000 000 $ comparativement à 18 000 000 000 $ sous l'ancien système. C'était une accusation considérable à l'effet que le gouvernement fédéral allait chercher 12 000 000 000 $ de plus sans le dire. Il a répété cette affirmation, je pense bien, à la télévision et personne ne l'a critiqué depuis et je pense qu'on doit quand même accorder une certaine crédibilité.

Le ministre du Revenu actuel est très peu loquace sur toute cette question. J'ai hâte de l'entendre. Il a dit qu'il n'avait pas de remarques préliminaires à faire. Je suppose, à ce moment-là, qu'il n'a même pas repris cette affirmation de son collègue. Je suppose aussi que son collègue, qui est un spécialiste de la fiscalité, n'a pas été désigné tout a coup ministre du Revenu. Il a été désigné ministre du Revenu à cause de ses compétences. Je suppose aussi que, lorsqu'il a mentionné ces 30 000 000 000 $, il ne parlait pas à travers son chapeau puisqu'il venait à peine de quitter le ministère du Revenu et du Travail du Québec. Donc, il devait avoir en sa possession ou en sa mémoire des chiffres très précis, des évaluations qui ont été faites au ministère du Revenu. J'aimerais bien entendre le ministre là-dessus. Il n'a pas fait de remarques préliminaires, je ne sais pas pourquoi. Ça a l'air que son projet de loi, il ne le considère pas assez important pour faire des remarques préliminaires. Je suppose cependant qu'en réplique il répondra à cette question, à cette affirmation de son collègue, son ex-collègue ministre du Revenu.

Lorsque l'ex-ministre du Revenu dit 30 000 000 000 $, je voudrais simplement mettre en parallèle le fait que dans beaucoup, beaucoup de pays où on a instauré cette taxe sur la valeur ajoutée - à Ottawa, la TPS et, ici au Québec, la taxe de vente du Québec qui est une taxe de vente mais transformée par l'actuel projet de loi - lorsqu'on a appliqué de tels systèmes, généralement on est allé tirer des revenus plus élevés que prévus. Est-ce que cela a un impact sur le travail au noir? Est-ce que, effectivement, par l'application d'un tel système de taxation sur la taxe de vente qui est de contrôle plus facile que l'impôt sur le revenu, on contrôle davantage la production et la comptabilité des produits manufacturés comme des services et qu'effectivement, finalement, le rendement d'une telle taxe est plus important que ce qui avait été prévu? Je pense qu'on ne doit pas l'exclure, a priori, compte tenu de l'expérience des autres pays en la matière et il ne faut surtout pas l'exclure, compte tenu des affirmations de l'ex-ministre du Revenu qui, lui, a estimé son rendement pour le Canada à 30 000 000 000 $.

Si on fait la relation ici, avec le Québec, à supposer qu'on évalue qu'au Québec les revenues tirés de la TPS fédérale seront d'à peu près le quart, soit 7 500 000 000 $ ici au Québec, on peut probablement estimer qu'il y a des sommes considérables qui vont être perçues et que ça doit affecter vraisemblablement l'assiette. Alors, j'aimerais que le ministre nous réponde sur cette affirmation de son ex-collègue du Revenu. Les prévisions qui ont été établies à Ottawa sont, à mon sens là - je vais les qualifier - grossièrement sous-estimées. Est-ce qu'il ne s'agirait pas de la même opération ici? J'aimerais bien ça que le ministre ne me parle pas simplement des biens qui vont être taxés le 1er janvier 1991, mais aussi des services qui vont s'ajouter à partir du 1er janvier 1992, pour savoir si son collègue, le ministre des Finances, l'avait inséré dans ses prévisions au budget de l'an dernier, qu'il les avait camouflées sans en parler, d'ailleurs, dans son budget sans dire clairement qu'il avait introduit la nouvelle taxe de vente du Québec dans les prévisions budgétaires du gouvernement qu'il avait déposées, sans le dire...

Si tel est le cas, si jamais le rendement était supérieur à ce qui a été prévu, alors qu'il a collé son assiette sur l'assiette fédérale, on peut penser que le rendement de la taxe de vente du Québec sera très largement supérieur à ce qui a été déclaré et, donc, que les 362 000 000 $ que le gouvernement met dans ses poches par cette opération, pour l'année 1991, vont être beaucoup plus que 362 000 000 $ - peut-être bien qu'il s'agit de 500 000 000 $. Et j'aimerais que le ministre nous rassure sur cette hypothèse, parce que, dans une période de récession économique comme celle que nous connaissons, ce n'est pas indifférent que le ministère des Finances et le ministère du Revenu

aillent chercher dans le fond des poches des contribuables 500 000 000 $ qu'il met, lui, dans sa poche pour le bénéfice du gouvernement.

Justement, je vais rappeler l'affirmation que j'ai citée hier, que le mouvement Desjardins a affirmé, quant à lui, que la relance de l'économie passait par la relance de la consommation. En faisant cela, le gouvernement du Québec va accentuer, accentuer gravement la récession économique, justement au moment où il ne doit pas le faire. Une autre chose que l'ex-ministre du Revenu affirme, c'est qu'il se pose la question sur ceux qui paieront la taxe. En fait, il fait l'analyse que la taxe va comporter deux volets: la taxe sur les biens présentement qui s'applique dans certains secteurs, mais aussi l'élément nouveau, c'est que cette taxe va s'appliquer sur les services. Or, très peu de services sont taxés présentement. Tout ce qu'on appelle services professionnels, par exemple, notaires, avocats, n'est pas taxé. Les services d'assurance sont taxés, eux, à 5 %. Alors, on peut penser que la taxe sur les services va représenter un rendement important, inédit, dont on ne connaît pas le rendement exact mais qu'il estime, lui, à 75 % de la TPS en ce qui concerne le fédéral, donc un élément très important.

L'ex-ministre dit aussi que cette taxe va être très complexe d'administration: La TPS, dit-il, est complexe. La loi a près de 300 articles et déjà 1500 directives d'interprétation sont prêtes. Et ce n'est que le début. L'administration fiscale fera face à un défi colossal, 3 000 000 de nouveaux mandataires - il parle toujours du Canada - des milliers de fonctionnaires additionnels et un nombre imposant de vérifications portant sur les versements de taxes, les crédits, les remboursements, et cela sur chacun des biens tout au long du processus de fabrication. Il faut se rappeler que la TPS est une taxe multistade. La taxe sur les services, comme elle sera chargée directement aux consommateurs, sera moins problématique mais réserve des surprises sur son ampleur. Et, dit-il, ceux qui se sont réjouis de l'harmonisation de la taxe de vente du Québec avec la TPS fédérale devraient y regarder à deux fois, car les deux taxes demeureront chacune dans une loi distincte avec des formulaires différents et forcément dans les limites constitutionnelles du Québec, c'est-à-dire sans permettre à celui-ci de constituer une taxe indirecte comme l'est la TPS. Alors, il fait intervenir le fait que nous aurons de toute façon deux lois pour administrer la perception de la taxe: la TPS fédérale et la taxe de vente du Québec. Là, évidemment, en mentionnant ce fait, je fais référence au protocole d'entente qui a été signé le 30 août dernier, encore une fois, signé alors que nous y...

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous voulez vérifier si c'est un vote ou si c'est le quorum, madame?

M. Léonard: Le député des Îles-de-la-Madeleine, si je comprends bien, souhaite qu'il y ait le feu pour éviter d'avoir à étudier un tel projet de loi. Je comprends ses réticences. Alors, cette entente a été rendue publique le 30 août, en pleine convocation spéciale des Chambres, alors que l'Assemblée nationale était convoquée pour autre chose, une chose complètement différente de la déclaration ministérielle qu'il a faite à l'occasion. Il a, par la même occasion, rendu publique une entente qu'il avait signée avec le fédérai, ou le lendemain de sa déclaration ministérielle, donc pratiquement en catimini, en pleines vacances. Il faut voir toute la complexité parce que c'est de ça que je pariais, cet aspect complexité de l'administration de la taxe. La taxe de vente du Québec est modifiée. Son assiette va être la même que celle du gouvernement fédéral, mais il s'agira cependant toujours de deux lois différentes. Et il faut voir plus loin parce que la TPS fédérale est une taxe qui va être imposée à plusieurs stades du processus de fabrication avec un système compliqué de crédits et de versements au gouvernement fédéral, alors que ia taxe de vente, elle, va être appliquée surtout à la fin, parce que c'est le consommateur qui va la payer, et que le système de crédit va s'appliquer parfois sur certains biens et parfois ne s'appliquera pas parce que, dépendant de la nature du bien, il y aura déjà une taxe de vente qui aura été perçue et, dans la plupart des cas, il n'y en aura pas qui aura été perçue. Alors, ce qu'il en dit, l'ex-collègue du ministère du Revenu ou celui qui l'a précédé, il dit: De plus, l'entente intervenue afin de confier l'administration de la TPS fédérale à Revenu Québec constitue en pratique un recul important sur le plan de l'autonomie fiscale, puisque le ministre du Revenu du Québec sera sous l'autorité d'Ottawa et n'aura aucune discrétion dans l'interprétation ni dans l'application de la TPS dont il aura pourtant la responsabilité au Québec. (16 heures)

M. le Président, le ministre des Finances s'est pété les bretelles, je pense que c'est le mot qui convient surtout à la façon dont il s'exprime, sur cette entente, mais le ministre du Revenu du Québec, le ministre des Finances et le gouvernement du Québec, finalement, ont perdu toute autonomie dans l'application de leur propre loi. Parce qu'on a convenu par cette entente d'harmoniser l'assiette et, donc, de se servir absolument... de laisser tomber toute autonomie en ce qui concerne la détermination de cette assiette. Cette assiette sera uniforme, harmonisée et le ministre des Finances du Québec convient qu'il ne la modifiera pas.

Nous y reviendrons éventuellement, je suppose, tout au long de la discussion de cette loi, mais il reste que je vais souligner deux ou trois paragraphes fort importants en ce qui concerne cette harmonisation qui touche directement à l'autonomie du Québec en ce qui con-

cerne la taxe de vente qui est du ressort constitutionnel des provinces. Le Québec convient de respecter les paramètres nationaux requis pour assurer une application uniforme et cohérente de la TPS à travers le Canada. Le point 4 fait qu'on convient de respecter les paramètres. Donc, ce n'est plus le Québec qui les fixe, c'est le gouvernement fédéral qui les fixe et lui-même, dans sa propre taxe, va être obligé d'en tenir compte. Au point 6, le Canada et le Québec reconnaissent l'importance de maintenir une cohérence entre leurs assiettes fiscales respectives. Autre élément, autre élément qui fait que, finalement, il ne s'en départira pas. Et nous l'avons très bien vu dans toute la discussion qui a entouré la perception de la taxe de vente du Québec sur le livre. Ce produit, le livre, n'était pas imposé jusque-là, n'était pas imposé. Et tout à coup, par l'effet de la déclaration ministérielle du 30 août dernier, le livre, tout à coup, est devenu imposé. Tout le monde a regimbé sur cette question, parce que le livre n'a jamais été imposé, comme H ne l'est pas en Angleterre, comme H ne l'est pas dans beaucoup de pays et, lorsqu'il l'est, c'est à des taux très réduits que les livres sont imposés, que les imprimés sont imposés. Bref, il a fallu une bataille de plusieurs mois pour finalement amener le ministre des Finances à rembourser la taxe de vente du Québec imposée sur les livres. Cette taxe, il va la percevoir et il va finalement appliquer une espèce de crédit équivalent au montant perçu pour la taxe, si nous comprenons, de façon à ce que l'assiette demeure identique entre l'assiette fédérale et l'assiette du Québec.

Alors, nous nous retrouvons... nous avons une preuve tout de suite qu'il sera extrêmement difficile de ne pas avoir la même assiette. On le voit très bien par cet exemple du livre et on peut se poser la question sur ce qui va arriver sur tous les produits qui, ici, étaient exemptés de taxe. Nous avons fait état en deuxième lecture, M. le Président, de l'exemption de taxe que nous avions, nous, donnée à d'autres secteurs comme le meuble, les vêtements, les chaussures. À partir du 1er janvier prochain, ces secteurs connaîtront une taxe de vente du Québec. C'est considérable, M. le Président, parce que, dans ces secteurs, il était particulièrement important de ne pas appliquer de taxe de vente, parce que c'étaient des secteurs névralgiques au Québec et que, surtout dans des périodes de récession comme celle que nous connaissons, ces secteurs doivent continuer à être exemptés. Nous avons, d'ailleurs nous aurons l'occasion de le mentionner, une foule de gens qui ont réclamé d'être exemptés de ces secteurs. Le fait que l'assiette soit la même que celle du fédéral va nous empêcher d'exempter ces secteurs. Donc, tout de suite, ce gouvernement, il faut le constater, vient "clencher" des secteurs complets de notre économie: le vêtement, qui sera moins concurrentiel vis-à-vis de l'Ontario qu'il ne l'est maintenant, le meuble, les chaussures, tous des secteurs qui emploient une foule de gens ici.

Le Président (M. Lemieux): M. te député de Labelle, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Léonard: Oui, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Rapidement, M. le député.

M. Léonard: Oui. C'est malgré nous, évidemment, que nous allons commencer l'étude de ce projet de loi article par article, en commission, parce que... Je rappelle simplement Ie6 arguments que nous avons et que nous aurons à développer: cette taxe nous enlève toute flexibilité sur le plan économique, elle s'applique à un mauvais moment, à un moment où nous entrons en récession, depuis quelques mois déjà, cette taxe va s'appliquer indifféremment à tous les secteurs et je pense qu'elle sera très dommageable à l'économie du Québec.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Labelle. Est-ce qu'H y a d'autres remarques préliminaires? Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

M. Léonard: La ministre ne répond pas aux objections?

Mme Caron: Non, de Terrebonne, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Terrebonne, je m'excuse, madame. Je m'excuse. C'est vraiment une erreur impardonnable de ma part, et je m'en souviendrai. Terrebonne.

Mme Joceiyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous comprendrez que je m'en voudrais énormément de ne pas profiter de ce temps des remarques préliminaires pour rappeler à quel point je m'oppose vivement à ce projet de loi 89. J'ai toujours cru qu'un gouvernement devrait être à l'écoute d'une population, être conscient des réalités et conscient do la capacité de payer des contribuables.

Je m'interroge sérieusement, à savoir si les membres de ce gouvernement, lorsqu'ils retournent dans leur comté, lorsqu'ils font du bureau de comté, lorsqu'ils font des activités les fins de semaine, puisque présentement nous sommes en session intensive, entendent les mêmes commentaires que nous, sur ce projet de loi. Les Québécois et les Québécoises, ce qu'ils nous disent constamment, c'est qu'ils ne sont plus capables de recevoir de surplus de taxes. Ils en ont suffisamment reçus depuis plus d'un an. Je comprends mat qu'on reste aussi indifférent ou

qu'on ne prenne pas la peine de calculer, puis d'additionner ce que toutes ces hausses ont fait, au cours de l'année, au budget des contribuables québécois, à moins qu'ils ne vivent dans un autre pays tout à fait en dehors du nôtre. Ça m'étonne énormément. Et ce n'est pas seulement les contribuables québécois qui ont cette perception-là - et je l'ai clairement démontré, dans ma deuxième intervention sur le projet de loi - mais aussi des économistes qui nous ont dit: Assez! Ce n'est pas le bon moment de faire cette réforme-là.

Il y a aussi des entreprises qui ont alerté le gouvernement, qui lui ont donné toute l'argumentation nécessaire pour démontrer tous les problèmes qui seraient engendrés par ce projet de loi. Et le gouvernement continue de faire la sourde oreille, continue de croire qu'il détient la vérité et qu'il n'y a rien à faire. On ne prend même plus la peine, M. le Président, d'écouter les citoyens. On se retrouve devant une situation de récession, dans une crise, où les pertes d'emplois augmentent à une vitesse vertigineuse. Seulement dans la région Laurentides, les pertes d'emplois sont passées de 6,1 % à 11,8 %, donc une augmentation de 5,7 %. Toutes ces personnes qui ont perdu leurs emplois, parce que ce sont bien des personnes qui ont perdu des emplois, vont se retrouver avec les mêmes augmentations de taxes que ce gouvernement-là nous a données, depuis un an, et avec l'élargissement des taxes, maintenant, par ce projet de loi 89.

On a eu des commentaires du côté des industries... l'industrie de l'insolvabilité, parce que vous savez très bien que, lorsque nous sommes en période de récession, de crise, cette industrie vit des jours extrêmement heureux, ce sont des jours très fastes pour cette industrie. En décembre, le 1er décembre 1990, on nous rapportait que présentement, l'industrie de l'insolvabilité connaît des jours encore meilleurs qu'en 1982, donc au plus fort de la crise de l'ancien gouvernement. Vous savez que ces gens-là, eux, de l'industrie de l'insolvabilité, en période de récession, ils le savent immédiatement parce qu'automatiquement, bien sûr, ils voient les industries tomber comme des mouches. Les industries vont immédiatement... Ils sont tout de suite concernés, bien sûr, et ils ont, eux, le nez collé à la réalité. On s'attendrait à ce que les ministres aient cette même vision de la réalité ou, s'ils ne l'ont pas, prennent la peine de s'informer.

Nous sommes donc en inflation. Lorsque des économistes aussi importants que Clément Gignac, économiste principal à la Banque Nationale du Canada...

M. Léonard: M. le Président, est-ce que je pourrais faire remarquer que le ministre devrait écouter ma collègue de Terrebonne au lieu de lire un livre? Il me semble que c'est le ministre du Revenu et qu'à mon sens...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle...

M. Léonard: ...il est trop tard pour que se fasse sa formation. Il devrait écouter.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle, s'il vous plaît.

M. Léonard: C'est une marque d'arrogance, ce qu'il fait là.

Le Président (M. Lemieux): Je pense que votre remarque est hors d'ordre. On ne peut présumer ni... Je ne peux présumer des intentions de M. le ministre du Revenu à l'effet que M. le ministre du Revenu n'écoutait pas. Écoutez, vraiment, votre temps de parole était expiré. Alors, Mme la députée de Terrebonne, s'il vous plaît.

M. Savoie: Bien que ça ne soit pas digne de répétition, je pourrais facilement répéter ce qu'a dit à date la députée, et je suis en train de vérifier ses dires dans les lois fiscales.

Mme Caron: M. le Président, je l'ai mentionné, dans le peu de temps depuis que j'ai commencé mon discours, à plusieurs reprises, j'ai parlé de la capacité d'écoute de ce gouvernement. Je pense que c'était une allusion très claire, même si le ministre ne l'a pas comprise. Donc, l'économiste principal à la Banque Nationale du Canada, M. Clément Gignac, lui, semble être davantage conscient que ce gouvernement de l'inflation qui existe au Québec. Il ne l'attribue pas à des phénomènes extérieurs à la politique de ce gouvernement mais, au contraire, il l'attribue carrément aux décisions prises par ce gouvernement. Il donne les principaux facteurs en citant la hausse de 7,5 % du coût de l'électricité, les hausses de taxes scolaires, les primes d'assurance automobile et le dégel des frais de scolarité. Il ajoute que l'inflation va grimper encore et très rapidement avec la hausse du prix de l'essence et l'entrée en vigueur de la TPS.

C'est donc dans ce contexte-là que le gouvernement nous présente un projet de loi pour venir chercher encore davantage dans les poches des contribuables alors qu'il y a de plus en plus de chômeurs, alors que 12 000 personnes supplémentaires se retrouvent sur l'aide sociale. Ces personnes-là ont été victimes de coupures avec la loi 37 et, pour ces personnes-là, le prix des objets qu'elles doivent acheter, des biens de consommation, des biens essentiels, le prix est le même. Et là on leur annonce qu'en plus des taxes qu'elles avaient déjà elles devront s'ajouter les taxes sur les chaussures, des taxes sur les meubles, sur les vêtements, sur les appareils électroménagers. Je suis vraiment tout à fait étonnée de l'inconscience de ce gouvernement. J'avais des gens justement, hier soir, qui me

disaient: Mais ils ne s'en rendent pas compte, qu'est-ce qu'on peut faire pour qu'ils se rendent compte qu'on n'est plus capables de payer? Qu'est-ce qui nous reste comme moyen si un gouvernement ne nous entend pas? Qu'est-ce qui nous reste? Que voulez-vous, M. le Président, ils sont loin d'entendre les citoyens et les citoyennes, ils n'entendent même pas la voix de l'Opposition qui est directement devant eux. (16 h 15)

Donc, on a décidé d'ajouter à toute la kyrielle de taxes que j'ai déjà mentionnées ce projet de lot. Et qu'est-ce que les entreprises en pensent? On a tenté de nous dire que ça améliorerait le sort des entreprises. Eh bien, malheureusement, la Corporation des marchands de meubles du Québec et l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec sont loin d'être d'accord, M. le Président, très loin. Je pense que je vais les citer quelque peu: L'érosion du pouvoir d'achat des consommateurs jointe à l'augmentation constante et graduelle du fardeau fiscal, surtout dans un contexte d'essoufflement économique, auront, il va sans dire, de graves répercussions pour l'ensemble de l'industrie du meuble. Quelles sont ces répercussions? Il y en a plusieurs. Imposer une taxe de 8 % sur les meubles aura comme effets de compresser davantage les dépenses de consommation, compressions qui se feront sentir surtout dans le secteur des biens durables, dont les meubles évidemment, d'accroître davantage l'indice de malaise des consommateurs au plus bas niveau depuis 1983 - donc, nous sommes au plus bas niveau depuis la dernière crise - d'accroître davantage l'endettement des consommateurs fortement touchés par la croissance des impôts et le ralentissement du revenu familial. Lorsqu'il y a perte d'emploi, c'est évident qu'il y a ralentissement du revenu familial et c'est évident aussi que la croissance des impôts - et là on aurait peut-être pu davantage dire la croissance des taxes indirectes du gouvernement - fait que le taux d'endettement n'a jamais été aussi fort pour les consommateurs. Autre conséquence: de modifier les parts de marché des différentes catégories de dépenses, de ralentir la productivité des entreprises et de les rendre encore plus vulnérables à la concurrence étrangère. Tout le contraire de ce qu'on a tenté de nous démontrer de l'autre côté. Donc, les secteurs mous, évidemment, se retrouveront dans une situation beaucoup plus vulnérable du côté de la concurrence étrangère. De réduire le nombre d'emplois au Québec et d'accentuer la croissance du chômage. Avec le taux de chômage où nous sommes rendus, accentuer encore ce taux devient plus qu'alarmant. De ralentir la croissance des revenus gouvernementaux et d'augmenter les déficits gouvernementaux, vu les perspectives d'une reprise anémique sur le plan économique. Parce qu'il faut rappeler aussi que ce gouvernement n'a pris aucune mesure pour relever l'économie, absolument pas. On ne tend aucunement à mettre en place des programmes, comme le Parti québécois l'avait fait en 1982, pour améliorer les emplois au Québec. Le plan Biron 1, le plan Biron 2. Il n'y a absolument rien de comparable qui se fait à l'heure actuelle par ce gouvernement. On a décidé de maintenir la crise, de ne rien faire parce que c'est l'attitude normale du gouvernement depuis quelques années. On ne fait rien, on laisse flotter les événements. Et on voit le résultat aujourd'hui. Et, bien sûr, cette nouvelle mesure va prolonger la période d'essoufflement et retarder la reprise de l'économie.

Le directeur général de la Corporation des marchands de meubles du Québec, M. Yves Varin, concluait en disant: Faut-il rappeler qu'une telle taxe sur les meubles avait, vers la fin de la décennie 1970, été instaurée? Les conséquences de cette taxe avaient vite été jugées néfastes. C'est pourquoi elle fut abolie en 1981. Donc, si on maintient cette décision, si dans un contexte de prospérité, dans les années soixante-dix, cette taxe avait été jugée néfaste, c'est évident qu'aujourd'hui elle va se retrouver encore plus néfaste, dans un climat de récession. Donc, ce qu'on prévoit du côté des marchands de meubles du Québec, c'est que le nombre d'emplois de cette industrie pourra décroître, près de 21 000 personnes pourront perdre leur emploi de ce côté-là.

C'est la même chose du côté de l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec qui, eux aussi, craignent énormément du côté de la concurrence étrangère et qui nous disent très bien qu'une hausse de taxe sur les vêtements freinera les achats des consommateurs ou favorisera les achats de vêtements aux États-Unis au détriment du produit québécois, créant ainsi des pertes d'emploi et une augmentation du taux de chômage au Québec avec les conséquences désastreuses telles que nous les connaissons tant au plan économique que social. Et si on connaît un petit peu la situation du vêtement du côté des États-Unis, c'est bien évident que la frontière n'est pas très loin et que ça pourra être extrêmement tentant pour les consommateurs québécois d'aller se procurer des vêtements aux États-Unis plutôt que d'acheter des vêtements ici avec une taxe de 8 %.

C'est la même chose du côté des chaussures. Qu'on soit la famille la plus démunie qu'on puisse imaginer, c'est évident que ces gens-là doivent acheter des chaussures. Et on sait que souvent, du côté des familles défavorisées, démunies, il y a plusieurs enfants dans la famille; donc, automatiquement, les achats, à ce niveau-là, sont d'une importance très grande et tout ajout de taxe constitue quelque chose d'extrêmement difficile pour ces gens-là.

On a tenté, de l'autre côté, de nous dire aussi qu'il y avait une grande protection du côté des plus démunis parce qu'ils avaient des crédits

d'impôt. Les réactions sont très partagées de ce côté-là parce qu'on sait très bien que souvent, parmi les plus démunis, rares sont les personnes qui font une déclaration d'impôt puisqu'elles n'ont absolument pas de revenu à déclarer. J'aimerais aussi citer un article qui est paru tout dernièrement, de Monique Girard Solomita, qui dit que le crédit d'impôt qui est prévu sur la TPS - et non sur la TVQ - pénalise les familles avec enfants. Et je vais éviter toute la longueur du calcul, mais ce qu'on nous dit, c'est que les couples non mariés, avec enfants, profiteront moins du crédit d'impôt sur la TPS que les couples vivant dans la même situation, mais sans enfants. La démonstration qu'on nous fait, c'est que pour les couples maries le calcul se fait... Dans le cas des premiers couples - je vais essayer de vous simplifier ça, là - chacun des conjoints est considéré comme célibataire. Donc, le revenu qui est imposable pour chacun est de 20 000 $, si on prend un revenu moyen de 20 000 $ par conjoint. D'accord? Donc, ils recevront, pour crédit de la TPS, 380 $, soit 190 $ chacun. Alors qu'un couple avec enfants, marié, qui fait son rapport d'impôt et dont les deux revenus sont calculés ensemble, soit 40 000 $, eux n'auront droit à aucun remboursement puisqu'on ne calculera pas pour chacun 20 000 $, mais ensemble 40 000 $. J'avoue que l'ACEF du Nord a réagi très fortement devant cette situation. Elle s'oppose évidemment avec vigueur à la TPS fédérale, mais s'oppose aussi avec vigueur à la TVQ qui nous est présentée aujourd'hui par le projet de loi 89. La Fédération des associations coopératives d'économie familiale du Québec, qui est en relation directe avec les familles les plus démunies, qui fait le calcul budgétaire de ces familles et qui tente de trouver des solutions, qui doit très, très souvent négocier des ententes avec Hydro-Québec parce que ces familles-là n'arrivent pas à payer leur compte d'électricité et se retrouvent souvent avec des coupures, même l'hiver... Donc, la Fédération des associations coopératives d'économie familiale du Québec a dénoncé vertement la TVQ québécoise et a vraiment manifesté son indignation devant cette nouvelle hausse qui s'ajoutait à toutes les autres.

Je sais que le ministre nous dira que l'Association des consommateurs du Québec, qui regroupe 3000 membres, elle, s'est prononcée et a dit qu'elle était favorable au principe, sauf qu'elle a très clairement indiqué qu'elle n'endossait pas, à l'heure actuelle, la façon de le faire. Et on a fait des recommandations extrêmement précises, c'est-à-dire qu'on a bien indiqué que la TPS fédérale et la taxe québécoise devraient apparaître séparément sur la facture qui est remise au consommateur parce qu'on craint, effectivement, de se retrouver devant un véritable fouillis à ce niveau-là. On a aussi dénoncé le fait que la taxe québécoise s'ajoute à la TPS fédérale, qu'elle soit calculée par-dessus. On a aussi demandé une garantie pour une pleine indexation des crédits d'impôt pour la taxe de vente du Québec, garantie que nous n'avons toujours pas à ce jour, M. le Président, et que le ministre semble très loin de pouvoir nous donner. À moins qu'il ne retrouve ça dans ses documents, à moins que le ministre des Finances ne lui ait glissé une garantie dans ce sens, ce qui m'éton-nerait beaucoup.

Vous savez, les crédits d'impôt, c'est ce qu'on nous dit qui va permettre d'établir une certaine justice par rapport aux démunis. Mais je tiens à rappeler que la plupart ne font pas de déclaration d'impôt. Ces crédits d'impôt n'apporteront aucunement de remède, ne seront aucunement une mesure positive pour la classe moyenne, la famille moyenne. Et c'est celle qui est la plus brimée par ce gouvernement depuis un an, parce que toutes les hausses qu'on a ajoutées au cours de la dernière année ont touché directement la classe moyenne. Lorsqu'on parle de hausse de taxe scolaire, on attaque fortement la classe moyenne. Lorsqu'on parle de hausse des frais de scolarité, on attaquait encore une fois la classe moyenne. Même s'il y avait un moyen de prévu pour les plus démunis, la classe moyenne, elle, on ne l'aidait aucunement. Même chose du côté de l'électricité. La classe moyenne, elle, est complètement à bout de souffle. Je suis extrêmement surprise que ce gouvernement ne s'en rende aucunement compte et fasse toujours comme si la réalité qui était vécue par les consommateurs, par les contribuables québécois n'était que le fruit de l'imagination de l'Opposition.

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. J'invite fortement le ministre responsable de ce projet de loi à être attentif aux demandes des citoyens et des citoyennes du Québec. Ces demandes se font, bien sûr, présentement par la voie de l'Opposition. Mais je l'invite peut-être à faire des recherches un petit peu dans le milieu de l'ensemble des députés de son gouvernement et à vérifier que ce que nous avançons est parfaitement la réalité vécue par les Québécois et les Québécoises et ne pas seulement écouter l'Opposition, mais écouter aussi tous les spécialistes qui se sont prononcés sur le sujet. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Si je comprends bien, maintenant, c'est au tour de M. le député de Gouin au niveau des remarques préliminaires. M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Oui. Merci, M. le Président. Il n'est jamais bien agréable de discuter de l'impo-

sition d'une nouvelle taxe à la fois, je suis convaincu, pour les parlementaires libéraux qui, à ce jour, depuis quoi, 40 minutes, et à l'occasion des travaux en Chambre, ne se sont pas vraiment exprimés bien à fond sur cette question... Donc, à la fois pour nous et, je pense, pour l'ensemble des parlementaires, ce n'est pas une chose facile de discuter d'une taxe semblable à celle-là, d'autant plus si on prend en considération l'ensemble des implications à la fois fiscales, politiques et sociales que l'imposition d'une nouvelle taxe pourrait avoir sur notre économie.

M. le Président, j'aimerais aborder dans mes remarques préliminaires un certain nombre d'éléments. Vous me permettrez, dans un premier temps, de parler du contexte dans lequel on impose la nouvelle TVQ, peut-être aussi de ses conséquences et du contenu de certains éléments du projet de loi et parler aussi d'un certain nombre de secteurs qui me préoccupent particulièrement, que ce soit l'industrie du textile et des vêtements ou que ce soit tout le secteur des industries culturelles. Et, s'il me reste un peu de temps, j'aimerais aborder la question de l'administration de la taxe et la question des crédits d'impôt. Ceci étant dit, M. le Président, d'entrée de jeu, je me questionne sur le silence du ministre et sur le silence des membres libéraux de cette commission. Ma courte expérience parlementaire m'aura appris qu'il est de tradition de voir le ministre, à tout le moins au début de l'étude du projet de loi, faire un certain nombre de remarques préliminaires, ce qui permet, bien sûr, d'éclairer l'ensemble des membres de la commission sur peut-être un certain nombre de perceptions ou sur le contenu du projet de loi. Le silence du ministre m'inquiète, d'autant plus qu'il occupe une fonction privilégiée qui l'amène de façon quotidienne à répondre aux demandes des citoyens. S'il y a un ministère dans l'appareil de l'État qui est en constante relation entre les citoyens et les citoyennes du Québec, c'est bien le ministère du Revenu. La grande majorité des citoyens et des citoyennes remplissent un rapport d'impôt. Ce sont eux qui souvent ont à faire un certain nombre de représentations quant à la façon dont, par exemple, le formulaire pour remplir nos rapports d'impôt est conçu. Je crois que, s'il y a une qualité qui est nécessaire pour exercer la fonction de ministre du Revenu, c'est bien celle, à tout le moins, d'être soucieux des commentaires de la population en général. (16 h 30)

M. le Président, peut-être que le ministre... Il faut se rappeler aussi le contexte dans lequel nous nous trouvons. Si c'est maintenant le député d'Abitibi-Est qui est responsable du ministère du Revenu, c'est bien parce que le député de Montmorency a décidé de faire de cette question un enjeu fondamental qui l'a amené à démissionner du gouvernement. J'imagine, sans avoir pu y assister, les vives discussions qu'il y a eu alentour de la table du Conseil des ministres et je suis convaincu que le ministre sera fidèle à la tradition de solidarité ministérielle. Peut-être que son silence signifie à tout le moins qu'il ne se fera pas un grand défenseur de la nouvelle taxe, la nouvelle TVQ. M. le Président, tenons-nous en aux faits, en parlant premièrement du contexte dans lequel on se retrouve à étudier, cet après-midi, le projet de loi 89.

M. le Président, cette nouvelle taxe s'ajoute à trois nouvelles taxes aussi qui ont été annoncées dans le discours sur le budget. Rappelons l'augmentation de taxes sur les boissons alcooliques, qui va chercher 103 000 000 $ dans la poche des consommateurs; le gouvernement récoltera aussi, de plus, 133 000 000 $ suite à la hausse de la taxe sur les tabacs; les entreprises aussi, M. le Président, auront été affectées par ces nouvelles taxes. Effectivement, on a décidé d'une augmentation de l'impôt sur les profits des contributions des employeurs au fonds des services de santé et de la taxe sur le capital. Au total, le gouvernement s'enrichit de 104 000 000 $, en 1990-1991, grâce à cette mesure. Ces trois augmentations annoncées dans le discours sur le budget font qu'il y aura une ponction d'environ 1 200 000 000 $ de 1990 à 1993, sur une période de trois ans.

Or, c'est dans ce contexte que le 30 août dernier le ministre des Finances nous annonce, un peu de façon particulière, parce que faut-il se rappeler le contexte dans lequel on nous a annoncé la nouvelle taxe de vente québécoise... On avait convoqué l'ensemble des parlementaires pour discuter de deux choses: la formation de la commission constitutionnelle Bélanger-Campeau et le prolongement de l'autoroute 30 à Kanawake. Et, un peu par surprise, le ministre des Finances, de façon un peu inhabituelle, par le biais d'une déclaration ministérielle, nous annonce ses intentions quant à l'harmonisation avec la TPS fédérale.

M. le Président, cette réforme calquée sur la TPS fédérale rapportera au gouvernement des revenus de 77 000 000 $ cette année, un montant qui atteindra 324 000 000 $ l'an prochain, et au total, M. le Président, 362 000 000 $ au cours des trois prochaines années. Donc, d'entrée de jeu, on aura beau me parler des crédits d'impôt qui seront offerts aux contribuables à revenus plus modestes, il n'en demeure pas moins que c'est une ponction de 362 000 000 $ sur une période de trois ans, 362 000 000 $ qu'on va aller prendre dans la poche des contribuables pour les affecter au gouvernement du Québec.

M. le Président, cette taxe s'ajoute aussi à toutes celles qui ont été imposées par différents organismes gouvernementaux. Ma collègue députée de Terrebonne, tout à l'heure, nous parlait des frais de scolarité: une augmentation, M. le Président, de 130 % sur une période de deux ans. La contribution des étudiants augmentera de 52 000 000 $ en 1990-1991, 104 000 000 $ en

1991-1992. Je vais vous dire, ça commence à faire pas mal d'argent! Les tarifs d'Hydro-Québec, augmentés au-delà de l'inflation; le financement des commissions scolaires, 320 000 000 $; les permis de conduire, l'immatriculation; et si l'on tient compte aussi des intentions du gouvernement annoncées dans le discours sur le budget, c'est 1 014 000 000 $ au total, le total potentiel, 1 014 000 000 $, en 1990-1991. Et en 1990-1993, si toutes les intentions manifestées se maintiennent et se réalisent, c'est 4 382 000 000 $. Écoutez, 4 000 000 000 $, là, on ne discute pas de l'achat - je ne sais pas, moi - de valises pour le gouvernement du Québec, on ne discute pas de la construction d'un pont, on parle de 4 382 000 000 $, ponction qui sera faite dans la poche des contribuables.

Alors, M. le Président, à tout le moins, dans ce contexte-là qui nous amène à discuter de la TPS, on aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement à la fois prenne plus de temps, démontre aussi une plus grande volonté pour discuter de cette question, puisse à tout le moins déposer un certain nombre d'études. On me dit que ça a été fait dans certains cas. On l'a fait... Il y a eu un comité interministériel qui s'est penché sur la question du livre; il y en a eu d'autres, apparemment, dans d'autres secteurs. Le ministre des Finances, en commission parlementaire, me rappelle-t-on, a déposé un certain nombre d'études d'impact de l'imposition d'une nouvelle taxe pour les contribuables. Mais, dans bien d'autres secteurs, aucune étude n'a été déposée, rien n'a été présenté à l'ensemble des parlementaires. Il est quand même difficile, M. le Président... On nous demande notre consentement, on nous demande d'appuyer cette mesure alors que nous ne sommes même pas à même de consulter les études qui ont été préparées par le ministère du Revenu ou le ministère des Finances. Vous comprendrez, M. le Président, que dès le départ, en privant l'Opposition officielle d'un certain nombre de documents qui nous apparaissent fondamentaux, il est difficile d'accorder notre appui, comme ça, de façon rapide, au projet de loi 89 qui impose la nouvelle taxe de vente québécoise.

M. le Président, cette réforme-là se fera en deux étapes. Le député de Verdun, hier, nous rappelait à juste titre que, bien sûr, par ce projet de loi, nous diminuerons la taxe de vente québécoise. Actuellement à 9 %, elle passera à 8 % au premier 1er janvier 1991. Elle diminuera aussi de 8 % à 7 % au 1er janvier 1992. Mais ce qu'il faut aussi rappeler, c'est que dans la première étape, d'ici le 1er janvier 1991, par le même coup, en diminuant la taxe de vente de 9 % à 8 %, on élargira aussi l'assiette des biens immobiliers. Au 1er janvier 1992, l'élargissement de l'assiette de taxation pour y inclure aussi l'ensemble des services.

M. le Président, qu'est-ce que le ministre nous a présenté, lui qui tient de façon si con- vaincante à avoir notre consentement, qui souhaite... J'entendais le ministre des Finances encore cette semaine, au salon de l'Assemblée nationale, nous dire: C'est inscrit dans votre programme, vous devriez nous appuyer. Mais à tout le moins, M. le Président, je pense que nous sommes en droit d'exiger un certain nombre d'études et aussi nous serons en droit - et je crois que nous pourrions peut-être le faire, je vais le suggérer sûrement à mes collègues - d'entendre, avant l'étude du projet de loi, peut-être un certain nombre d'intervenants. Je suis convaincu que c'est une suggestion qui plaira à mon collègue, le député de Labelle et porte-parole de l'Opposition officielle en matière de finances. Je crois que nous devons nous faire un devoir de faire ce travaif-fà, de faire un travail correct. Il est dommage de voir que c'est un peu à la sauvette, en fin de session, dans la grande noirceur, que nous aurons à étudier ce projet de loi. De façon quotidienne, nous rencontrons des intervenants, que ce soit des gens du milieu - et j'y reviendrai tout à l'heure - du vêtement, que ce soit des gens des industries culturelles, qui demandent à rencontrer notre caucus pour nous sensibiliser aux différentes conséquences de la TPS, qui nous demandent d'intervenir auprès du ministre, qui nous demandent d'intervenir auprès du gouvernement libéral pour à tout le moins essayer, comme on l'a fait dans le cas du livre, de réduire les effets qu'aura la TPS québécoise, bien sûr, qui s'appliquera dorénavant à l'ensemble des biens mobiliers et des services.

M. le Président, il y a un secteur, particulièrement, où je crois que nous nous devons d'avoir un certain nombre de réponses. Le ministre est en train de s'informer dans sa lecture, qui semble des plus intéressantes, sur l'application de la TPS dans le secteur du vêtement; je suis convaincu que c'est ça qu'il lit, parce que ça doit lui aussi le préoccuper. Ça doit le préoccuper, l'application de la TPS dans le secteur du vêtement. Faut-il rappeler que c'est un secteur qui joue un rôle fondamental dans notre économie? Permettez-moi de vous rappeler que, juste pour la région de Montréal, ils sont 14 400 emplois dans le secteur du textile. 41 000 - d'ailleurs, je parle de la région 01, à la fois Montréal et Laval - 41 000 emplois dans le secteur de l'habillement. Au total, 55 400 emplois, ce qui représente 23,9 % du secteur manufacturier, alors que ce secteur représente, pour l'ensemble du Québec, 17 %. Lorsqu'on sait que l'ensemble du secteur du textile et de l'habillement compte pour 52 % de la main-d'oeuvre manufacturière à Montréal, je crois que nous sommes en droit d'obtenir un certain nombre de réponses.

Est-ce qu'il y a une étude qui a été faite, M. le ministre, sur cette question-là? Est-ce que les intervenants ont été entendus? Nous aimerions bien connaître, à tout le moins, votre

opinion. Parce que, il faut le rappeler, présentement - et là je cite l'annexe à la déclaration ministérielle concernant l'administration de la TPS et la réforme des taxes à la consommation au Québec - les ventes de vêtements de 500 $ ou moins, sauf les vêtements de protection utilisés dans une activité sportive, ainsi que les ventes de chaussures de 125 $ ou moins sont exemptées de la taxe de vente du Québec. Et tout à l'heure ma collègue députée de Terrebonne parlait des meubles meublants pour une habitation résidentielle qui, eux aussi, sont exemptés.

M. le Président, nous recevons, de façon quotidienne, des représentations. L'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec, en date du 21 novembre 1990, m'adressait une lettre. C'est M. Israël Shames qui m'écrivait et qui nous disait: Les modifications de taxe à la consommation annoncées le 30 août dernier par le ministre québécois des Finances, M. Gérard D. Levesque, et le taux d'imposition de cette taxe constituent une situation sérieuse pour l'industrie québécoise du vêtement. Selon les années, cette industrie se classe au premier ou au second rang en importance, comme secteur industriel, au Québec - écoutez, là, je ne parle pas d'un petit secteur manufacturier, je ne parle pas d'un secteur qui emploie, je ne sais pas, quelques centaines d'employés, je vous parle d'un des secteurs les plus importants pour le Québec - Elle compte à elle seule environ 60 000 emplois directs à travers le Québec et engendre localement environ 100 000 emplois supplémentaires chez le fournisseur de biens et services à cette industrie.

M. le Président, est-ce qu'il y a une étude qui a été préparée par le ministère du Revenu? S'il y en a une - le ministre me fait signe que oui - pourquoi n'a-t-elle pas encore été déposée? S'il y a un secteur crucial à l'heure actuelle, lorsqu'on tient compte des négociations du GATT... Le démantèlement de l'arrangement multifibres, M. le Président, risque de remettre en question cette industrie qui est déjà fragile, qui déjà doit faire face à une concurrence internationale accrue. Bien, je ne vois pas pourquoi le ministre, M. le Président, se plaît à rire et à prendre ça à la légère. Je suis convaincu que, si les représentants de l'industrie étaient ici présents, ils ne trouveraient pas du tout satisfaisante la complaisance du ministre du Revenu. Ce sont des préoccupations, M. le ministre, qui sont légitimes. Et si le ministre se plaît à adopter la même attitude qu'il a prise à l'occasion de la commission Bélanger-Campeau, si la seule chose qu'il trouve à dire à ces gens qui viennent s'exprimer et avec lesquels il n'est pas d'accord, c'est de quitter, je peux vous dire que les citoyens et citoyennes du Québec...

Une voix: C'est vrai.

M. Boisclair: ...ont raison d'être inquiets. M. le Président, le devoir que nous avons tous, que l'ensemble des parlementaires ont, c'est à tout le moins d'écouter les gens qui font des représentations légitimes. Et ce n'est pas parce qu'on n'est pas d'accord avec ce que les gens nous disent... Moi aussi, j'en rencontre des gens, dans mon bureau, avec qui je ne suis pas d'accord, mais, ma foi du bon Dieu, je ne prends pas la fuite par en avant. Et j'ai, à tout le moins, le respect de ces gens-là et le respect de leur opinion, et je les écoute.

M. le Président, c'est très faible, très faible de quitter en avant, et de ne même pas avoir la décence de les écouter. Sans doute, encore une fois, le ministre était-il à cours d'arguments, parce que son silence, M. le Président, nous laisse perplexes. L'intervention et le sourire du ministre m'ont fait perdre le fil de mes idées.

J'aimerais revenir au secteur manufacturier. M. le Président, M. Shames continue, en m'écri-vant: Ainsi que nous l'avons déjà fait valoir aux diverses instances gouvernementales, une hausse de taxe sur le vêtement freinerait les achats des consommateurs et favoriserait les achats de vêtements aux États-Unis. M. le Président, la baisse des ventes au détail commence déjà à se faire sentir. Ça fait tous les titres dans les journaux. Vous savez, M. le ministre, que 59 % du produit intérieur brut sont constitués essentiellement de ventes à la consommation. 59 % du PIB, ce sont les achats des consommateurs. Est-ce que, par exemple, le ministre pourrait nous répondre: Quelles seront les conséquences pour les gens qui habitent aux frontières du Québec? On a vu les effets désastreux au moment de l'imposition de la taxe sur l'essence. Souvenez-vous de tout le débat qu'il y a eu pour les gens qui habitaient près des frontières ontariennes ou près de la frontière américaine. (16 h 45)

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: C'est une question qui est importante. Il y aura des effets d'éviction importants et, je crois, ce qu'on appelle des "externalités", des effets pervers à cette nouvelle taxe. À tout le moins, M. le Président, je crois que nous pourrions avoir réponse à nos questions. J'aurais aimé avoir eu le temps, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): II vous reste une minute 14 secondes.

M. Boisclair: ...de parler du secteur des industries culturelles...

Le Président (M. Lemieux): Habituellement, quand je dis "en conclusion", c'est qu'il vous reste environ une minute, une minute 15 secondes. O.K.?

M. Boisclair: Bon, alors je prendrai la

dernière minute qu'il me reste pour parler des industries culturelles. M. le Président, notre grande prétention à constituer une société distincte repose essentiellement sur le dynamisme de nos industries culturelles. Savez-vous que, à l'heure actuelle, l'imposition sur un billet de théâtre, sur un billet d'opéra, un billet de cinéma, sera 10 % de taxe municipale plus 15 virgule quelque chose, si on tient compte de la TPS et de la TVQ, 25 %? 25 %; M. le Président, sur un billet de théâtre, un billet d'opéra, un billet de concert qui iront renflouer le gouvernement du Québec. 25 %! Les activités culturelles au Québec seront plus taxées que l'essence. M. le Président, ce que nous disons au ministre, en conclusion, c'est qu'il aurait dû faire preuve d'imagination, faire preuve de courage, faire preuve de lucidité. Bien sûr, avoir fait une certaine discrimination en fonction de l'importance collective de chacun des biens ou services aurait amené un certain nombre de critiques, c'était inévitable, mais, à tout le moins, aurait permis, peut-être, une plus grande justice, comme on l'a reconnu dans plusieurs pays. M. le Président, je terminerai là-dessus en souhaitant que nous pourrons entendre un certain nombre de groupes et en souhaitant aussi que le ministre se fasse plus loquace sur cette question. Parce que là je suis obligé de conclure que nos arguments le laissent béat, qu'il n'a pas de réponses à nos questions. Alors, nous avons hâte de l'entendre, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Gouin. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

Une voix:...

Le Président (M. Lemieux): Non, non, c'est interdit en commission parlementaire. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, je voudrais d'abord dire à mon collègue de Gouin que le ministre est sans doute sage de ne pas parler parce que, d'une part, il ne sait sans doute pas quoi dire et que, d'autre part, son prédécesseur a parlé puis il n'est plus là. Le prédécesseur, M. Yves Séguin, lui, it a dit la vérité sur cette taxe, la TPS, que, d'une part, elle constitue un transfert phénoménal de fiscalité des entreprises vers les individus, puis il avait trouvé une formule fort intéressante. Il dit: Pour régler le problème de 30 000 entreprises qui payaient une taxe un peu bebête du fédéral sur les produits manufacturés, au Québec, pour alléger 30 000 entreprises, on va imposer 3 000 000 de contribuables. Ça a eu comme conséquence que, dans son dos, lui qui était ministre du Travail et ministre du Revenu, le ministre des Finances et d'autres ont négocié avec Ottawa, puis que le ministre est parti. Alors, le ministre ne peut pas parler des négociations, il n'était pas là pour la négociation avec Ottawa, puis son prédécesseur non plus. Sauf que le ministre des Finances est à quatre pattes devant le fédéral. Pour lui, le gouvernement senior, c'est Ottawa. Nous autres, on est une succursale. On est une petite banque nationale pépère en région qui ne marche pas fort, puis le bureau-chef est à Ottawa. Alors, Ottawa a décidé de taxer. On taxe, pareil comme eux, sur deux ans et puis on va collecter pour eux. Le fédéral étant le "shylock", le Québec a décidé d'être le collecteur pour le "shylock". Or, c'est une taxe, M. le Président, qui a été annoncée hypocritement, qui est injuste et puis qui va être mauvaise pour l'économie. Rappelons-nous, M. le Président, que, au figuré, c'est quasiment derrière les barricades de la crise autochtone que le ministre des Finances s'est caché pour annoncer en douce, à une session spéciale qui avait été convoquée à cause de la crise amérindienne et pour former la commission Bélanger-Campeau... Il a annoncé... à propos, une petite déclaration ministérielle avec une annexe d'à peu près 100 pages, une espèce de nouveau discours sur le budget, pour dire: Le fédéral frappe et je vais frapper avec le fédéral contre la population. On avait raison, à l'époque, de citer la phrase de la Bible qui dit: "Je viendrai comme un voleur."

Alors, en pleine canicule, le gouvernement a décidé d'y aller. Et le problème, M. le Président, c'est que les gens en arrachent. Ça, on voit ça dans nos comtés, les gens en arrachent. Et le gouvernement va y aller encore plus fort. Qu'est-ce qu'ils apprennent, les jeunes couples qui ont acheté des maisons dans le quartier Pointe-aux-Trembles, entre autres - de mon comté - pour autour de 100 000 $ il y a trois ans? Bien, ils apprennent que leur hypothèque est renouvelée, pas à 9 % mais à 13 % et 14 %. Ça, c'est un bienfait du fédéralisme qui leur arrive d'un coup sec. Ils vont paver 200 $, 250 $, 300 $ par mois de plus d'hypothèque. Ça, c'a été une première nouvelle qu'ils ont apprise. Vive le Canada! Et que nos libertés sont garanties dans ce pays où les taux d'intérêt sont tels qu'un jeune couple avec enfants se retrouve avec une dépense de 250 $, 300 $ de plus par mois, en frais d'intérêt, parce que l'économie, nous disait-on, surchauffait à Toronto! Et, il y a trois semaines, on a appris qu'elle ne surchauffe plus mais que les taux d'intérêt sont élevés pareil. Mais les gens payent. Ils ont appris aussi qu'Hydro-Québec augmentait leur facture d'électricité, non pas d'une somme égale à l'inflation, ce qui pourrait se comprendre... Mais il faut bien qu'Hydro-Québec arrive, puis l'inflation la touche elle aussi. Mais HydroQuébec demandait des hausses de tarifs et la ministre de l'Énergie et des Ressources lui a donné tout ce qu'elle demandait, moins 20 000 000 $. Et ces deux hausses de 7 % qui

s'ajoutent à la TPS fédérale de 7 %... L'effet composé, là... On est près de 24 % de hausse des tarifs d'électricité pendant un an. Les gens payent, le jeune couple dont je parle, de Pointe-aux-Trembles, qui a renouvelé son hypothèque... Deuxième mauvaise nouvelle: Hydro-Québec augmente ses tarifs deux fois et elle les augmente de presque 5 % de plus que l'inflation parce qu'il ne pleut pas assez. En plus, le fédéral va percevoir sa TPS sur la facture d'électricité. Et la TVQ, ça s'en vient faire la même chose que la TPS à terme. On le sait, là, le taux a été baissé de 9 % à 8 % et, dans le cas de la restauration, de 10 % à 8 %, sauf qu'on a couvert un grand nombre de choses qui n'étaient pas couvertes par la taxe de vente du Québec avant les meubles, les vêtements, les chaussures et certains électroménagers, qui avaient été exemptés à l'époque où le Parti québécois était au pouvoir. Et au lieu d'être à quatre pattes devant Jean Chrétien comme le ministre des Finances est à quatre pattes devant le ministre fédéral aujourd'hui, le ministre des Finances de l'époque, Jacques Parizeau, s'est tenu debout, il nous a mis une fiscalité québécoise et il a exempté de la taxe de vente des secteurs où on produit. Mais là le ministre des Finances ajoute: Bang! Moi, je frappe là-dessus aussi.

La TPS comme la TVQ sont des taxes foncièrement injustes. Une personne qui gagne 75 000 $ par année et qui achète une voiture de 15 000 $ paie 8 % et 7 % composés: 15,56 %. Une personne qui en gagne 30 000 $ - la moitié moins - paie le même montant. Et j'ai beau écouter les experts patentés nous dire que ça, c'est infiniment plus juste vu que tout le monde paie le même, je ne peux pas m'empêcher de penser que la TVQ et la TPS sont bien plus proches de la "poll tax" de Margaret Thatcher que des mesures progressistes. Il n'y a rien de progressiste dans la TPS. Il n'y a rien de progressiste dans la taxe de vente du Québec. Tout le monde paie égal. Et Mme Thatcher, c'est ça qu'elle a découvert en Grande-Bretagne, que la "poll tax" n'était pas populaire. Oui, notre programme parle d'une taxe sur la valeur ajoutée. Bien, oui. Mais on dit d'abord qu'il faut la différencier et qu'elle ne doit pas être égale sur tout. Je vais prendre un exemple. Si jamais il lit le Journal des débats, même le ministre des Finances qui est le vrai interlocuteur, alors s'il le lit, c'est sûr qu'une taxe sur les Rolls Royce, ça ne fera pas battre bien des députés libéraux dans les comtés, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, nous devons suspendre nos travaux pour quelques instants.

M. Bourdon: Pour aller voter, parfait.

Le Président (M. Lemieux): On me fait état qu'il y a un vote en Chambre. Alors, nous suspendons nos travaux. Vous avez fait huit minutes, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: Allons à la Chambre. (Suspension de la séance 16 h 56)

(Reprisée 17 h 13)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît*

Une autre suspension des travaux à ce stade-ci, M. le député de Labelle. M. le député de Pointe-aux-Trembles, la parole est à vous.

M. Bourdon: M. le Président, comme...

M. Léonard: Si on assure le quorum, on va attendre...

Le Président (M. Lemieux): II y a quorum actuellement.

M. Léonard:...

M. Bourdon: On va s'en aller. On va attendre que...

Le Président (M. Lemieux): C'est quatre membres. Un, deux, trois... Est-ce qu'il y a quelqu'un qui soulève l'absence de quorum? Il n'y a personne là. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui soulève l'absence de quorum?

M. Lazure: Le quorum est de combien, M. le Président?

Le Président (M. Lemieux): De quatre.

M. Lazure: Étant donné que je dois quitter pour quelques minutes, M. le Président, j'appréhende que le quorum ne sera pas observé puisque je quitte pour quelques minutes.

Le Président (M. Lemieux): Non, parce qu'il y a quorum actuellement.

Motion proposant d'étudier l'article 1

M. Savoie: M. le Président, vous pouvez passer à l'article 1, s'il vous plaît.

Le Président (M. Lemieux): En faites-vous une motion, M. le député d'Abitibi-Est?

M. Savoie: Oui, j'en fais motion, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que la motion est recevable. Est-ce que la motion est adoptée? Adopté. J'ai une proposition qui a été adoptée et faite par le député d'Abitlbi-Est que

je me dois de juger recevable en vertu du règlement à l'effet d'appeler l'article 1 du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

Discussion sur le défaut de quorum

M. Léonard: M. le Président, je pense qu'on n'avait pas quorum. Au moment où on est venus, on a demandé de faire un caucus. On est allés le faire et on revient. Je pense que nous en sommes aux remarques préliminaires.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle, écoutez, le problème que j'ai, c'est que je dois appliquer le règlement et, en vertu du règlement, il faut absolument qu'absence de quorum me soit soulevée. L'absence de quorum ne m'a pas été soulevée en vertu de l'article 156, troisième paragraphe: "Une fois la séance déclarée ouverte, le quorum est présumé exister tant que son défaut n'a pas été signalé par un membre ou constaté par le résultat d'un vote. Dans ces cas, le président suspend la séance", ce qui n'a pas été le cas. Le député d'Abitibi-Est m'a soumis une motion qui était recevable à l'effet de passer immédiatement à l'étude de l'article 1, et j'ai demandé le vote à l'effet de passer effectivement à l'étude de l'article 1; le vote a été pris, la motion a été adoptée, je me dois d'appeler l'article 1 du projet de loi 89.

M. Bourdon: ...quorum quand vous l'avez voté, voyons donc! Vous n'aviez pas le quorum quand vous l'avez voté, puis on vous a souligné qu'il n'y avait pas quorum. Arrêtez, là, les affaires de bras!

Le Président (M. Lemieux): Ce que je veux vous dire, M. le député de Pointe-aux-Trembles, à la lecture de l'article 156, troisième paragraphe, c'est que le quorum est présumé exister. Je vais reprendre la lecture de l'article...

M. Bourdon: On vous avait demandé de constater qu'il n'existait pas...

M. Léonard: ...quorum, quand on est partis...

M. Bourdon: On a dit qu'il n'y avait plus quorum.

Le Président (M. Lemieux): Oui, mais regardez, M. le député de Pointe-aux-Trembles, regardez, au niveau de la séquence, à partir du moment où vous m'avez demandé de constater s'il y avait quorum, je vous ai répondu: Oui. Il y avait quorum. Il y avait quorum au moment où vous m'avez demandé de le constater. Moi, je dois ici, en tant que président, appliquer le règlement...

M. Léonard: Je m'excuse, M. le Président, alors votons là, tout de suite... ¦ Le Président (M. Lemieux): Alors, le vote a été pris!

M. Léonard: Comment ça, le vote a été pris?

Le Président (M. Lemieux): Le vote...

M. Bourdon: Là, vous êtes en train d'instaurer la clôture en commission parlementaire, soyons sérieux, là!

M. Léonard: On est allés faire un caucus.

M. Bourdon: On est allés faire un caucus, on en avait le droit, puis vous avez, en notre absence et sans quorum...

M. Léonard: On avait le droit de faire un caucus.

M. Bourdon: ...décidé de faire la clôture en commission parlementaire...

M. Léonard: Là, ça va faire, là! M. Bourdon: Ça va faire, là.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, la séance avait été déclarée ouverte...

M. Bourdon: Et on était aux remarques préliminaires...

Le Président (M. Lemieux): Nous étions aux remarques préliminaires...

M. Bourdon: Vous n'aviez pas quorum et vous le saviez que vous n'aviez pas quorum quand vous avez voté! Ça, c'est clair, vous ne l'aviez pas....

Le Président (M. Lemieux): Au moment où on m'a demandé...

M. Bourdon: Vous étiez trois.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, au moment où on m'a demandé si, effectivement, il y avait absence de quorum, il y avait quorum, et, au moment où l'équipe des députés de l'Opposition ont quitté la commission parlementaire, personne ne m'a soulevé l'absence de quorum et c'est alors, à cet instant même, que le député d'Abitibi-Est est intervenu, me soulevant l'article 156, troisième paragraphe, et me disant: Appelez l'article 1 du règlement. Et si je lis le troisième paragraphe de l'article 156: "Une fois la séance déclarée

ouverte, le quorum est présumé exister tant que son défaut n'a pas été signalé..." Vous savez, moi, je me dois d'appliquer...

M. Lazure: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: M. le Président, je dois vous rappeler que lorsque j'ai quitté la salle il y a cinq minutes, je vous ai dit, bien clairement, que j'appréhendais qu'il n'y aurait pas quorum, en quittant la salle puisque j'avais compté le nombre de députés autour de la table et que, appréhendant qu'il n'y aurait pas quorum, je vous ai demandé aussi de prendre note que nous avions un caucus de cinq minutes. Je vous ai signifié que nous avions un caucus de cinq minutes. Si notre commission ne peut pas fonctionner avec des règles de gentil hommerie, de courtoisie élémentaire, je pense qu'on va avoir des journées et des soirées difficiles dans les jours qui viennent. Je vous ai signifié bien clairement que nous avions un caucus de cinq minutes et, au bout de quatre minutes, nous sommes revenus, M. le Président. Alors, lorsqu'une formation politique, au cours d'une commission parlementaire, demande quelques minutes de répit pour tenir un caucus, il est de coutume qu'on accepte et qu'on ne profite pas de cette occasion pour demander un vote ou présenter une motion, comme ça a été le cas.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle.

M. Léonard: Oui, M. le Président. Je pense qu'au terme de l'article 244, avant de passer à l'étude détaillée d'un projet de loi et selon la coutume... Il y a une décision qui a été rendue. Et, selon la coutume, le processus d'étude détaillée débute d'abord par des remarques préliminaires, lesquelles, en l'occurrence, n'étaient pas terminées, et se continue par la suite par des motions préliminaires et, finalement, par l'étude article par article. Il faut que chaque étape soit respectée et, en l'occurrence, ça ne l'a pas été. Le fait d'étudier une motion préliminaire signifie donc que l'étape des remarques préliminaires est terminée, mais elle ne l'était pas à l'époque. Et, pour revenir à cette étape, la commission doit adopter une motion.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres éléments?

M. Léonard: Les remarques préliminaires n'étaient pas terminées. L'Opposition n'a jamais dit, ni le député de Labelle ni personne ici qu'ils avaient terminé les remarques préliminaires et, donc, cette étape-là n'était pas terminée. Je pense qu'il faut vraiment constater ce fait qu'on ne pouvait pas passer tout de suite à l'étape de l'étude article par article. Je pense qu'il m'ap-paraît très important...

Une voix: M. le Président...

M. Léonard: Et puis si on regarde... Un instant, M. le Président.

M. Boisclair: À tout le moins, M. le Président, pourrions-nous suspendre pour vérifier les galées, pour voir si vous avez bien mis terme au débat?

M. Léonard: M. le Président, je pense qu'il y a des étapes qui n'ont pas été respectées, c'est fondamental, là, franchement.

Le Président (M. Lemieux): Je ne crois pas qu'au niveau de la procédure... Ce n'est pas le fait que les étapes n'ont pas été respectées comme telles. J'aimerais faire remarquer au député de La Prairie qu'à ma connaissance je ne me souviens pas qu'il ait fait état qu'il y aurait, dans le couloir, un caucus d'environ cinq minutes et je vais suspendre...

M. Léonard: Oui, oui, ça a été fait ici.

Le Président (M. Lemieux): Écoutez, écoutez, je vais suspendre pour vérifier ce fait-là, si effectivement ça paraît aux galées. J'ai vérifié avec le secrétaire, celui-ci ne se souvient pas d'avoir entendu M. le député de La Prairie avoir fait état qu'il quittait pour un caucus de cinq minutes dans le passage. Écoutez, je vais...

M. Lazure: II est possible que je n'aie pas été placé directement vis-à-vis mon micro lorsque je vous ai dit ça. Mais ce qui est impossible, cependant, ce qui est totalement impossible, c'est que vous n'ayez pas entendu, parce que je me suis adressé à vous.

Le Président (M. Lemieux): Je vais suspendre pour vérifier parce qu'au meilleur de ma connaissance, M. le député de La Prairie, je ne m'en souviens pas. Je vais suspendre pour vérifier les galées, environ cinq minutes.

M. Léonard: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Oui, M le député de Labelle.

M. Léonard: ...vous êtes le président de cette commission et, à mon sens, je répète bien respectueusement que vous devez protéger le droit des parlementaires a s'exprimer...

Une voix: Nous ne sommes pas d'accord.

M. Léonard: II était très clair que les

remarques préliminaires n'étaient pas terminées, nous nous sommes levés en disant que nous faisions un caucus. D'autant plus qu'il y avait seulement deux députés de l'autre côté. Donc, nous avons demandé, et c'est très clairement entendu, ça a été très clairement dit, de ce côté-ci, que nous faisions un caucus de cinq minutes et, donc, nous avons suspendu.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: Je ne pourrais pas intervenir sur les derniers propos du député de Labelle parce que j'étais absent à ce moment-là. Mais je pense que les travaux de la Chambre et les travaux d'une commission doivent toujours être le suivi de ce que la Chambre nous a commandé comme demande. Qu'est-ce que la Chambre nous a demandé? La demande de la Chambre, l'exécution que nous devons faire des travaux de la Chambre, c'est d'analyser et de regarder chacun des articles du projet de loi. La seule véritable question que nous avons à travailler ici, c'est évidemment de commencer à travailler ce projet de loi article par article.

Et la commande que la Chambre nous a donnée, eh bien, tous les membres de cette assemblée en ont été saisis au même moment, cet après-midi, lorsque la Chambre a été...

M. Bourdon: M. le Président, c'est une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Je décide de suspendre 10 minutes, je veux vérifier les galées. M. le député de...

M. Bourdon: M. le Président, quand une résolution a été faite par le député d'Abitibi-Est alors que tous les gens présents ici savaient qu'il n'y avait pas quorum, ce qui rend la résolution illégale, c'est à un moment où j'avais commencé une intervention et j'avais droit à 20 minutes. Et vous m'avez dit, avant de quitter, qu'il y avait 8 minutes et 25 secondes de passées. Pourriez-vous répondre à ma question: Est-il de coutume qu'on interrompe une intervention pour adopter une résolution? Et une dernière chose, M. le Président, si l'idée, c'est de faire comme au Sénat, ça va faire comme au Sénat.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, j'aimerais vous faire remarquer que votre question est excessivement pertinente, c'est la raison... Et si ma décision allait dans le sens qu'on aurait à continuer les remarques préliminaires, c'est effectivement eu égard à ce que vous venez d'invoquer et non pas parce que la procédure comme telle aurait été, je dirais, faussée. Et c'est l'élément, je dirais, peut-être le plus important eu égard à la décision que j'aurais à rendre. C'est ce que vous avez soulevé et c'est la raison pour laquelle je veux vérifier les galées. Parce que M. le député d'Abitibi-Est, en vertu de l'article 156, paragraphe 3, était en droit de faire la motion qu'il a faite.

M. Savoie: Tu avais cessé ton discours et tu avais quitté la salle. Alors, on pouvait présumer qu'on pouvait continuer.

M. Lazure: M. le Président, pour avoir... M. Chagnon: M. le Président, question de...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie et, après, M. le député de Saint-Louis, une dernière intervention. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Pour avoir siégé ensemble, vous, à titre de président, et moi, à titre de vice-président, dans cette commission à plusieurs reprises, nous avons tous les deux respecté certaines règles traditionnelles. Je me rappelle que cette commission, il y a quelque temps, a siégé pour étudier la Loi sur la fonction publique. Et je me souviens qu'à un moment donné, au début d'une séance, une des toutes premières séances, votre formation politique a demandé un ajournement pour faire un caucus de quelques minutes et ça a été accordé de façon informelle. Je vous répète, M. le Président, que tout à l'heure, il y a 15 minutes environ, lorsque moi et mes collègues nous nous sommes levés, je vous ai dit... Il se peut que ce ne soit pas enregistré au Journal des débats, parce que j'étais levé. Je vous ai dit: Nous allons tenir un caucus de cinq minutes. Le ministre du Revenu m'a entendu. Vous m'avez entendu, M. le Président. Le secrétaire de la commission m'a entendu et un autre député présent ici m'a entendu.

Une voix: Oui, tout le monde l'a entendu.

M. Lazure: Alors, je pense qu'il faut faire preuve d'un minimum de bonne foi et ne pas profiter d'une situation tout à fait normale, un caucus de cinq minutes d'une formation politique, pour essayer de faire de la finasserie.

M. Savoie: Attends une seconde.

M. Lazure: Ce n'est pas de la finasserie d'avocat, c'est de la finasserie de notaire dans le cas...

M. Savoie: Oui, on va respecter la parole du député.

M. Lazure: Je n'avais pas fini de mon droit de parole.

Le Président (M. Lemieux): M. le député...

Allez-y, M. le député de La Prairie. M. Savoie: Demandez-lui.

M. Lazure: M. le ministre, je peux compléter mon intervention?

M. Savoie: Oui.

M. Lazure: Ce n'est pas vous qui présidez là, c'est...

M. Savoie: Non. Mais demandez-lui, il va vous répondre.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît. Allez-y, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Je n'ai rien à demander au député. Je m'adresse au président.

Le Président (M. Lemieux): Je vous écoute, M. le député de La Prairie. Continuez.

M. Lazure: Bon. J'allais conclure en vous implorant d'accepter la bonne foi de notre formation. Nous avons fait exactement ce que nous avons dit que nous allions faire, c'est-à-dire tenir un caucus de cinq minutes en attendant que vos collègues soient arrivés pour tenir la séance.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de La Prairie. M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: Alors, brièvement, M. le Président. Puisque vous avez déjà annoncé que vous suspendriez pour prendre une décision sur la demande des députés de Labelle et de La Prairie, je vous requiers, au moment de la prise de décision, que vous preniez votre décision eu égard à l'ordre de la Chambre que nous avons reçu cet après-midi et, particulièrement, fondez votre opinion sur cet ordre que nous avons et que nous devons remplir.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Saint-Louis. M. le député d'Abitibi-Est, vous avez quelque chose à ajouter?

M. Savoie: Simplement, je me suis demandé si les déclarations du député de La Prairie étaient fondées. Alors, j'ai demandé à mon collègue si effectivement c'était ce qu'il a dit. Je n'ai pas besoin de le répéter, il va le dire de lui-même.

Le Président (M. Lemieux): Et vous aviez un commentaire, M. le député d'Abitibi-Est, par rapport aux remarques préliminaires du député de Pointe-aux-Trembles tout à l'heure.

M. Savoie: Oui, bien, c'est ça. Lorsqu'il a quitté volontairement la salle... Il s'est levé et il a quitté volontairement la salle. À ce moment-là, la procédure nous permettait de procéder à l'article 1 puisqu'on présumait, étant donné qu'ils se sont levés et qu'ils ont quitté, qu'il y a eu un changement de politique au niveau de l'Opposition.

M. Bourdon: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je vais suspendre. M. le député de Prévost...

M. Bourdon: Faites donc comme à Val-d'Or, M. le ministre. Sortez donc.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Savoie: Bien, ce n'est pas moi, c'est vous autres qui sortez. Ce n'est pas moi.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Prévost.

M. Forget: Écoutez, moi, tout simplement, lorsque vous vous êtes levés pour partir...

M. Bourdon: Ça ne restera pas calme, vous allez voir.

M. Forget: ...je n'avais aucune idée où vous vous en alliez. Je pensais que vous vous en alliez... parce qu'il n'y avait pas d'explication.

Le Président (M. Lemieux): Alors, oui, M. le député de Prévost.

M. Forget: Écoutez, vous avez tout simplement mentionné, si j'ai bien compris, que vous ne vous trouviez pas à revenir.

M. Lazure: Voyons donc!

M. Forget: Mais moi, j'ai compris ça de vous.

M. Lazure: Ah, bien non. Là, il y a de la mauvaise foi quelque part.

Le Président (M. Lemieux): Alors, je vous remercie. Nous suspendons nos travaux 15 minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 30)

(Reprise à 17 h 49)

Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux pour faire l'étude détaillée du projet de

loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Relativement au problème de procédure qui a été soulevé, je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures, considérant qu'il m'est essentiel d'obtenir les galées puisqu'il s'agit d'une question mixte de fait et de droit. Et il me semble excessivement important que je puisse prendre connaissance des galées. Alors, je vais rendre la décision au début de l'ouverture de la commission, vers 20 heures. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: M. le Président, est-ce que, dans ces circonstances-là, étant donné que notre formation politique voudra aussi consulter les galées, on peut prendre pour acquis qu'il y aura une copie-Le Président (M. Lemieux): Aucune objection, M. le député de La Prairie, aucune objection.

M. Lazure: ...pour notre formation avant le début de la séance?

Le Président (M. Lemieux): Non. Les galées, ce sont des documents d'ordre public et... C'est que...

M. Lazure: C'est juste par commodité: en demander deux copies au lieu d'une.

Le Président (M. Lemieux): Je comprends très bien ça, M. le député de La Prairie. Alors, nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 50)

(Reprise à 20 h 16)

Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux, relativement à l'étude du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Un petit instant, s'il vous plaît.

Une voix: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Question de règlement. J'ai eu le temps de prendre connaissance de la transcription. J'ai eu aussi le temps de prendre connaissance de quelques articles dans Beauchesne version anglaise et dans Geoffrion. Et j'aimerais, pour vous offrir une tentative de solution pour sortir de cette espèce d'impasse dans laquelle nous sommes actuellement, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie?

M. Lazure: ...et pour tenter de rétablir le climat de confiance mutuelle...

M. Farrah: Je m'excuse, M. le Président. M. Lazure: C'est une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Oui, je n'ai pas d'objection à vous entendre, M. le député des îles.

M. Farrah: Moi, c'est juste pour savoir si vous avez les documents. Est-ce que vous avez distribué les galées?

Le Président (M. Lemieux): On va vous en distribuer une copie. C'est vrai que vous les aviez demandées, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Effectivement, vous les aviez demandées.

M. Farrah: C'est qu'on aimerait les avoir de notre côté aussi tout simplement. Je m'excuse auprès de mon collègue de La Prairie.

M. Lazure: C'est tout à fait légitime.

Le Président (M. Lemieux): C'est toujours avec beaucoup de complaisance que j'écoute Beauchesne et compagnie.

M. Lazure: Alors, on va commencer par Beauchesne puisque vous citez Beauchesne. Je m'excuse de devoir le citer en anglais; c'est le seul exemplaire que j'ai. À l'article 592, page 194... J'ai toujours la parole?

Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez y aller M. le député.

M. Lazure: L'article 592 traite de la définition du quorum. Ensuite l'article 593 est pertinent à notre situation, je crois. Je le lis en anglais pour être sûr de ne pas le traduire de façon incorrecte: "Until a quorum is present, the committee cannot proceed to its business if that business concerns the making of decisions. It is the duty of the Clerk - et, dans les termes fédéraux, "clerk" serait l'équivalent du secrétaire de la commission quant à moi - it is the duty of the Clerk attending the committee to bring to the attention of the Chairman the fact of the lack of a quorum, whereupon the Chairman must suspend the proceedings until a quorum is again present or adjourn the committee to some future time."

Je crois, M. le Président, que le sens de cet article est limpide et tout à fait clair et la responsabilité du secrétaire, du "clerk" comme on l'appelle ici, et je vois que personne ne l'a

fait d'après la transcription, la responsabilité du secrétaire consistait à vous rappeler, à vous comme président de la commission, qu'il n'y avait pas quorum. À ce moment-là, selon Beauchesne, vous devez comme président suspendre la séance ou l'ajourner. L'un ou l'autre. Alors je pense que, à moins qu'on ne conteste la teneur de l'article 593 dans Beauchesne, à moins qu'on n'essaie de contester ça...

Une voix: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je comprends très bien, monsieur, là. Vous pouvez continuer.

M. Lazure: Vous comprenez très bien? À ce moment-là, je pense, M. le Président, que tout ce qui s'est passé durant l'absence de quatre minutes des membres de cette commission de ce côté-ci de la table, que tout ce qui s'est passé à ce moment-là ne peut pas être retenu comme étant légitime.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez d'autres éléments à faire valoir?

M. Lazure: Pas pour le moment, pas pour le moment.

M. Boisclair. Rapidement, M. le Président, si vous me permettez de soumettre à votre attention l'article 190 de notre règlement, qui stipule que les motions doivent être écrites, sauf celles dont les termes ne varient pas, faisant bien sûr référence à des motions de première lecture, deuxième lecture ou troisième lecture, et j'aimerais savoir - c'est à l'article 190, M. le Président - si, d'une part, le secrétaire ou vous-même avez reçu une motion écrite du ministre du Revenu et député d'Abitibi-Est et porter à votre attention, aussi, l'article 221: "Avant de mettre une motion aux voix, le président en donne lecture". Il m'apparaît, à la lecture du "transcript" des débats, que vous n'avez pas lu la motion avant de la mettre aux voix. Alors j'aimerais donc vous demander, à cet égard, une directive. Il me semble de façon assez claire que vous avez quand même... que les choses ont été un peu précipitées durant ces quelques minutes où nous nous sommes réunis en caucus et il m'apparaît que le règlement à cet égard n'a pas été respecté.

Le Président (M. Lemieux): Ça va. Je comprends l'argumentation là-dessus. Il n'y a pas de problème.

M. Bourdon: M. te Président, un point bref. Je regarde la transcription du débat et je vous souligne d'entrée de jeu que, dans le haut de la page, le président dit: "A l'ordre, s'il vous plaît! ...une autre suspension des travaux à ce stade-ci, M. le député de Labelle". Et, là, vous terminez en disant: "M. le député de Pointe-aux-Trembles, la parole est à vous", alors, avant ¦ qu'il n'y ait une motion sur la table, j'avais la parole et je n'avais pas terminé l'intervention de 20 minutes à laquelle le règlement me donne droit et, dans ce sens-là, je pense qu'on devrait continuer, M. le Président, là où on avait laissé, c'est-à-dire à mon intervention.

Le Président (M. Lemieux): Oui, monsieur, ça va, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Ça, j'en ai tenu compte tout à l'heure, vous aviez fait cette argumentation-là, ça va.

M. Bourdon: Bon.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie, oui, pour terminer une dernière...

M. Lazure: Oui, juste une dernière remarque cette fois-ci, qui est rattachée à la transcription. Comme je vous le disais avant l'ajournement, j'ai... je cite la transcription. Vous aviez répondu que le quorum était de quatre - c'est dès la première page de la transcription - et je dis: "Étant donné que je dois quitter pour quelques minutes, M. le Président, j'appréhende que le quorum ne sera pas observé puisque je quitte pour quelques minutes." Alors, il y avait même un préavis, à vous comme président et au secrétaire de la commission, qu'il n'y aurait pas quorum. Moi, je ne comprends pas, surtout compte tenu de Beauchesne, pourquoi à ce moment-là on procède à prendre un vote sur une motion. Je ne comprends pas. Alors, moi, je propose que nous revenions effectivement aux remarques préliminaires du député de Pointe-aux-Trembles le plus tôt possible.

Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Autre point important, je pense, on n'a aucunement demandé aux autres membres de la commission s'il y avait d'autres membres qui voulaient exprimer des remarques préliminaires et on n'a aucunement demandé au ministre s'il voulait exercer son droit de réplique, avant de commencer à déposer des motions.

M. Savoie: Ça a tout été fait, ça.

Mme Caron: Ce n'est pas du tout inscrit dans les galées.

M. Savoie: Ça a tout été fait, ça.

M. Boisclair: Alors, M. le Président, si le ministre remet en question le "transcript" des débats, est-ce qu'on doit se fier, M. le Président, à l'enregistrement, à la bande magnétique ou si on doit se fier à la transcription de nos débats?

C'est là aussi une autre question qu'il faudra peut-être résoudre.

Décision du président

Le Président (M. Lemieux): Ça va. Écoutez, j'ai regardé ça attentivement. J'ai aussi, après avoir rédigé moi-même une petite décision sur sept pages seul, consulté - je ne vous le cacherai pas, parce que je trouvais que le point était très délicat - les conseillers en droit parlementaire qui ont aussi, je dirais, analysé le dossier, et ils arrivent à peu près aux mêmes conclusions que moi. Les conclusions sont similaires; sans que je leur aie parlé, on arrive à peu près aux mêmes conclusions. Il est évident, et c'est seulement une remarque, c'est un obiter dictum, comme on dirait en droit - M. Grenier comprend ce que je veux dire - c'est évident qu'on ne peut pas en arriver à soulever un quorum d'une manière appréhendée. On ne l'a jamais fait en Chambre, puisque la personne se doit d'être présente. C'est comme en droit en contre-interrogatoire. En interrogatoire principal, lorsqu'on en arrive à poser une question qui est purement de nature hypothétique, immédiatement, vous allez voir le procureur de la partie adverse qui va vous dire: C'est hypothétique. Et on ne peut pas appréhender qu'effectivement il n'y a pas de quorum, parce qu'un quorum, c'est une question de fait, ce n'est pas une question de droit. C'est strictement une question de fait, à savoir s'il y a tant de personnes qui sont là pour composer la nature de ce quorum-là.

Les questions que je me suis posées sont les suivantes: Est-ce que M. le député d'Abitibi-Est pouvait demander au président de cette commission de passer à une autre étape de l'étude détaillée du projet de loi? Est-ce que, dans le cas qui nous concerne, le président a constaté, séance tenante, qu'il y avait défaut de quorum? Là-dessus, ce qu'on peut constater, et j'ai ici deux versions, c'est qu'à la reprise de nos travaux, après une suspension pour voter en Chambre vers 17 heures, j'ai redonné, tel qu'en témoignent les galées, la parole au député de Pointe-aux-Trembles, qui avait été interrompu, on se souvient bien, au moment de la suspension. J'ai, effectivement, et je l'ai dans mes notes, fait remarquer au député de Pointe-aux-Trembles, et je m'en souviens, ça n'apparaît pas aux galées, qu'il lui restait huit minutes.

À partir du moment où les parlementaires ont repris leur siège en commission parlementaire, c'est là que le défaut de quorum a été soulevé et c'est à partir de ce moment que j'ai effectivement constaté, eu égard au règlement et à son article 156.3, que le quorum existait, qu'il était valide, quand l'ensemble des députés se sont levés. Et connaissant ses droits, le député de Pointe-aux-Trembles était au courant qu'il lui restait huit minutes de droit de parole. Quand l'ensemble des députés se sont levés, à l'excep- tion du député de La Prairie qui s'est levé mais qui est resté dans la salle, aucun d'entre vous ne m'a demandé de suspendre les travaux, d'autant plus que j'avais donné, comme je le disais tout à l'heure, la parole au député de Pointe-aux-Trembles et que celui-ci, en connaissance de cause, savait que son droit de parole n'était pas terminé. Mais, séance tenante, tous les députés sont sortis sans donner, et je m'en souviens, à la présidence d'explication, sans même demander à la présidence de suspension. L'option dont disposaient les députés, à cette époque-là, en vertu du règlement, était de me demander de suspendre les travaux.

On peut penser qu'on peut quitter la commission, effectivement, comme l'a souligné le député de Labelle, pour un caucus, mais il est important de le dire à la présidence. La présidence ne peut pas évaluer les états d'âme. Peu importe le groupe, peu importe le parti ministériel, il est difficile pour moi d'évaluer des gestes. Je suis limité, moi, dans mon interprétation, par un règlement. Et dans ce cas-ci, lorsque le député d'Abitibi-Est m'a présenté une motion en bonne et due forme, je l'ai jugée recevable de facto. Elle n'a pas à être écrite si, de facto, j'en viens à la conclusion, et c'est un privilège de la présidence, qu'elle est recevable dans les faits et en droit. C'est un privilège qu'a la présidence, ça, d'avoir effectivement à juger de la recevabilité d'une motion et, ça, je l'ai fait. Cette motion a été votée, elle a été dûment adoptée et elle était valide, parce qu'elle ne visait pas dans le présent cas à clore le débat, mais plutôt à passer à une autre étape de l'étude détaillée du projet de loi. Et, comme je l'ai dit tout à l'heure, et je reprends peut-être une partie, ici, de ce que j'avais écrit, malgré que le député de La Prairie, lorsqu'il est resté ici, nous ait dit qu'il appréhendait le défaut de quorum, on doit admettre que la seule expression de cette appréhension-là ne faisait pas preuve de sa présence, car en effet seul un membre présent peut soulever le défaut de quorum. La séance pouvait être comme je l'ai dit tout à l'heure tenue comme étant régulière et valide. (20 h 30)

Lorsque le député d'Abitibi-Est a présenté sa motion, elle a été dûment votée par les députés présents. Ce qui est important au niveau du quorum, ce n'est pas la présence ou non soit de l'Opposition ou du parti ministériel, c'est qu'il y ait suffisamment de personnes présentes pour assurer ce quorum-là. L'élément juridique, c'est de savoir s'il y avait effectivement quorum ou pas. Or, sur deux questions au niveau du droit, ça n'a pas été soulevé comme quoi il y avait absence de quorum, si ce n'est que M. le député de La Prairie faisait état hypothétiquement que, si lui quittait, il aurait pu y avoir défaut de quorum, mais aucun membre de ceux présents n'a fait état de ça et, en vertu de l'article 156.3, je me devais de constater qu'effectivement il y

avait quorum et que c'était valide. Comme président, il était de mon devoir de poursuivre tes travaux de cette commission et de donner la parole au député d'Abitibi-Est.

J'en arrive à la conclusion qu'effectivement au niveau du droit et au niveau de la procédure la motion du député de d'Abitibi-Est est rece-vable, mais j'aimerais lui faire remarquer, eu égard à la nature du débat, eu égard à une certaine polémique qui a peut-être pu s'engendrer, eu égard que parfois il peut arriver qu'on ait peut-être une interprétation des faits qui puisse laisser un doute, susceptible peut-être, dans l'esprit du président, même si parfois le règlement peut être restrictif et difficile... Il y a un principe en droit qui dit: lex dura sed scripta. Lorsque la loi est écrite ou lorsque le règlement est écrit, on doit l'appliquer, mais nous devons quand même penser au bon déroulement de ces travaux.

J'aimerais simplement lire l'article 195 à M. le député d'Abitibi-Est, qui dit ceci: "L'auteur d'une motion ou, avec sa permission, un autre député peut en proposer le retrait. Si elle n'a pas été mise en discussion, il le fait sur motion sans préavis et non débattue. Si elle a été mise en discussion, le retrait fait l'objet d'un débat, au cours duquel l'auteur et un représentant de chaque groupe parlementaire ont un temps de parole de dix minutes. L'auteur a droit à une réplique de cinq minutes." Elle a été adoptée, il ne faudrait que le consentement du député d'Abitibi-Est pour la retirer.

Je dirais qu'on doit donner au règlement une interprétation qui doit être la plus large possible, la plus libérale possible, qui accomplisse son objet et sa fin. Dans le cadre des présents travaux, je laisse le soin - et je le dis, la motion est valide, légale et dûment adoptée - je laisse le soin au député d'Abitibi-Est de réfléchir sur le sens et la portée de l'article 195 du règlement.

M. le député d'Abitibi-Est, est-ce que vous voulez la parole?

M. Savoie: Merci, M. le Président. D'abord, je dois vous féliciter. Un excellent travail de juriste, une bonne analyse perçante, directe, avec une bonne probité intellectuelle, je dois dire. Malheureusement, je ne peux pas retirer ma motion. La motion a été dûment proposée, ma motion respecte les règles de pratique de la commission et, dans ce sens-là, je ne peux pas la retirer. Par contre, vous le comprendrez, je brûle, je brûle vraiment d'une grande passion de connaître le résultat du discours du député de Pointe-aux-Trembles parce que, évidemment, il était parti dans une belle envolée oratoire...

M. Bourdon: M. le Président, je soulève un point de règlement.

M. Savoie: ...et je serais très intéressé...

M. Bourdon: Est-ce que le député d'Abitibi-Est pourrait dire si oui ou non il retire sa motion?

M. Farrah: M. le Président, ce n'est pas une question de règlement.

M. Savoie: Bien non, mais je suis en train de terminer.

M. Bourdon: Non, mais...

M. Savoie: Je suis en train de terminer. Alors, étant donné que je brûle de savoir si effectivement...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de

Pointe-aux-Trembles a raison, M. le député des

Îles-de-la-Madeleine. C'est une vraie question de règlement.

M. Savoie: Oui.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que oui ou non, M. le député d'Abitibi-Est vous retirez votre motion?

M. Savoie: Bien non, je ne retire pas ma motion.

Le Président (M. Lemieux): Bien voilà.

M. Savoie: La réponse c'est non, mais par contre ce que je vais permettre qu'on fasse pour continuer, dans le but justement de briser le suspense sur le résultat du discours du député de Pointe-aux-Trembles, je vais lui permettre de continuer ses remarques préliminaires, dans le but d'en arriver à la continuation des procédures.

Le Président (M. Lemieux): Écoutez, vous avez passé une motion pour qu'on puisse immédiatement procéder à l'étude du projet de loi, article par article. Si vous ne retirez pas votre motion, elle demeure valide. Donc je me dois de m'y conformer et d'appeler l'article 1, à moins qu'il n'y ait consentement et le consentement doit être unanime.

M. Savoie: Bien oui!

Le Président (M. Lemieux): Si j'ai le consentement unanime...

M. Savoie: Bien oui, on va donner notre consentement unanime à ça.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'Opposition donne son consentement unanime à ce que le député de Pointe-aux-Trembles poursuive ses remarques préliminaires?

M. Savoie: Oui.

M. Léonard: On revient aux remarques préliminaires, parce que le député de La Prairie n'a pas parlé non plus.

Le Président (M. Lemieux): Alors, est-ce que, M. le député d'Abitibi-Est, ça va aussi pour M. le député de La Prairie?

M. Savoie: Ah oui.

Le Président (M. Lemieux): Alors, de consentement unanime, ça va. De consentement unanime, cette chose-là peut se faire.

M. Farrah: Une question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: C'est juste pour bien comprendre, là.

Le Président (M. Lemieux): Oui, moi aussi je voudrais...

M. Farrah: Parce que, là, je dois vous dire que j'ai de la difficulté à comprendre.

Le Président (M. Lemieux): Moi aussi j'ai eu certaines difficultés à comprendre le raisonnement de M. le député d'Abitibi-Est.

M. Farrah: Non, ce que je veux dire là, est-ce qu'on revient à l'article 1 ou on ne revient pas à l'article 1?

M. Savoie: Non, on va permettre au député de Pointe-aux-Trembles...

Le Président (M. Lemieux): Ce que je viens de dire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, au député d'Abitibi-Est, c'est que je comprenais mal son raisonnement, puisqu'il venait de me faire adopter une motion à l'effet d'appeler l'article 1 du projet de loi. M. le député d'Abitibi-Est m'a dit, vu l'intérêt qu'il porte aux commentaires du député de Pointe-aux-Trembles, qu'il serait intéressé à entendre le député de Pointe-aux-Trembles. La seule chose qui me permet d'entendre le député de Pointe-aux-Trembles, c'est le consentement unanime des membres de cette commission et, si j'ai le consentement unanime, comme on m'a dit, on reprend et on va écouter le député de Pointe-aux-Trembles et le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui, M. le Président, dans la mesure où, en donnant notre consentement, nous revenons au cheminement qui avait été amorcé cet après-midi, nous donnons notre consentement. Simplement quelques remarques avant que vous ne donniez la parole à mon collègue de Pointe- aux-Trembles; je voudrais quand même vous féliciter moi aussi pour les efforts que vous avez faits pour justifier votre décision. Mais, contrairement à votre conclusion, je dois encore une fois citer Beauchesne.

Le Président (M. Lemieux): Beauchesne va à rencontre de l'article 156, paragraphe 3. Je l'avais lu, M. le député.

M. Lazure: Moi, je vous cite 593. Je ne sais pas si vous l'avez lu.

Le Président (M. Lemieux): Oui, mais il va à rencontre de 156. Je l'ai lu, j'ai pris le temps tout à l'heure de le lire, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Vous avez semblé, tantôt, acquiescer à la pertinence de 593. Vous acquiescez encore à 593.

Le Président (M. Lemieux): Je l'ai lu. Mais, dans notre règlement, Beauchesne nous donne des orientations de nature jurisprudentielle, une interprétation, mais je dois me fier à l'article 156, paragraphe 3. Et vous savez, j'ai aussi un problème de fond, actuellement. Vous en êtes bien conscient. Il y a une motion qui a été adoptée et, de consentement, on me demande de revenir. C'est vraiment un précédent parlementaire, on me demande de revenir au tout début en faisant abstraction que, effectivement, il y a une motion sur la table qui a été dûment validée et adoptée.

M. Lazure: Bon, M. le Président, moi je ne veux pas éterniser le débat là-dessus. Le député d'Abitibi-Est, à toutes fins pratiques, met sur la glace sa motion, pour ainsi dire, pour nous permettre de continuer nos remarques préliminaires. Nous comprenons bien.

M. Savoie: Parfait.

M. Léonard: Et des motions ultérieures...

M. Lazure: Et d'autres débats ultérieurs qui pourraient prendre place.

M. Savoie: Mais là pour le moment, c'est d'autres discours.

M. Lazure: Mais, M. ie Président, je voudrais juste terminer, j'ai encore le droit de parole. Je voudrais quand même faire quelques remarques sur le caractère très inusité de ce qui s'est passé durant l'absence très brève des parlementaires de notre parti. Quand je lis la transcription, vous dites: Est-ce que la motion est recevable? Vous vous répondez, vous enchaînez tout de suite en disant: Est-ce que la motion est adoptée? Vous vous êtes répondu intérieure-

ment. Vous avez reçu la motion et, ensuite, vous dites: Est-ce que la motion est adoptée? Vous dites: Adopté. Mais on n'a pas le nom, on ne sait pas quels sont les députés qui ont voté pour la motion. On ne le sait pas.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie, vous savez fort bien avec votre expertise... Votre expertise parlementaire, M. le député de La Prairie. D'abord, la décision a été rendue. C'est sans doute ce que veut me dire le député des Îles-de-la-Madeleine. Deuxièmement, vous savez, avec votre expérience parlementaire, on dit souvent: Adopté et l'ensemble des députés, je me suis reviré, a dit: Adopté. J'ai dit: Adopté. Il est certain que ça s'est fait, ça. Maintenant, vous savez que de consentement, ici, en commission parlementaire, on peut peut-être tout faire, mais je vais vous avouer que j'ai de la difficulté. Je veux bien là, sur les galées, qu'il soit bien inscrit qu'il s'agit vraiment d'une situation d'exception. Il ne faudrait pas faire une règle de ce qui s'est passé ici ce soir: adoption d'une motion et revenir de consentement à des remarques préliminaires. Alors, là, il y a consentement unanime et, purement, c'est sur une question de fait, de fait strictement, que, moi-même comme président, j'accepte ce consentement parce qu'il y a une question de fait qui me laisse certains doutes. Jamais autrement je n'aurais pu accepter qu'une motion qui est légalement accepté, qu'on puisse revenir de consentement jusqu'à invalider, d'une certaine façon, cette motion-là, parce qu'on fait indirectement ce qu'on vient de faire tout à l'heure directement. C'est interdit habituellement.

Alors, M. le député de Pointe-aux-Trembles pour la fin de vos remarques préliminaires pour huit minutes.

M. Farrah: J'ai une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Question de règlement? Oui.

M. Farrah: En vertu de l'article 41, M. le Président, on ne peut pas contester votre décision. Vous l'avez rendue.

Le Président (M. Lemieux): Non, elle est rendue. Ça va.

M. Farrah: Alors, je pense qu'il n'est plus question de discussion sur la décision.

Le Président (M. Lemieux): Alors, est-ce qu'il y a consentement?

M. Farrah: II y a consentement, oui.

Le Président (M. Lemieux): II y a consentement unanime. M. le député de Pointe-aux-

Trembles, il y a consentement. Et je tiens à le "resouligner". Je ne voudrais pas que ça fasse jurisprudence ou quoi que ce soit à l'avenir dans les autres commissions parlementaires. C'est une question de fait. Il y a une exception qui est vraiment particulière dans ce cas-ci ot il ost contre nature, lorsqu'une motion a été dûment adoptée, d'en arriver à faire indirectement ce qu'elle nous défendait de faire directement. O.K? Alors, allez-y, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

Remarques préliminaires (suite) M. Michel Bourdon (suite)

M. Bourdon: M. le Président, de mémoire, j'avais utilisé huit minutes de mon temps de parole de 20 minutes et ça avait été établi avant qu'on n'aille voter en Chambre. Alors, je prends pour acquis que je vais avoir 12 minutes pour terminer mon intervention. M. le Président, la taxe sur les produits et services et la TVQ, la taxe de vente du Québec modifiée, ne peuvent pas arriver à un pire moment. L'économie va se ressentir de cette taxation qui va nécessairement ralentir les dépenses de consommation des ménages. Et c'est tellement évident, M. le Président, que cette taxe-là n'est pas défendable que le ministre n'a pas dit mot depuis que cette commission siège. Il a parlé quand l'Opposition n'était pas là, puis pour faire une tactique déloyale, pour tenter de nous enlever notre droit de parole.

Alors, M. le Président, le mérite de la question, c'est qu'à partir du 1er janvier une foule de produits qui n'étaient pas couverts par la taxe de vente vont l'être et, dans ces produits, il y a tous ceux que le gouvernement de mon parti avaient exemptés de la taxe lors de son premier mandat. Je pense aux meubles, aux vêtements, aux chaussures et à certains appareils électro-ménagers. M. le Président, s'il a été observé à l'époque que l'abolition de la taxe sur ces produits stimulait leur vente, les intéressés sont évidemment aux abois parce qu'ils savent que la réintroduire comme ça se fera, à compter du 1er janvier, va créer l'effet inverse, c'est-à-dire que ça va ralentir considérablement la vente de meubles et les responsables de cette industrie ont dit que certaines entreprises fermeraient. Des responsables de l'industrie du vêtement ont dit la même chose. Donc, M. le Président, il y a quelque chose d'élémentaire. C'est que nous sommes maintenant officiellement en récession et, dans une telle période, les ménages ralentissent leur consommation. Et là, en plus, de connivence avec le fédéral, le gouvernement va, d'un coup sec, augmenter tous ces produits par une taxe de 15,56 % à partir du 1er janvier. (20 h 45)

II y a plus grave, M. le Président, les industries culturelles restent touchées, même si

le ministre des Finances a été battu par son propre parti et a dû reculer quant au livre. On a tous assisté, par télévision interposée, au conseil général du Parti libéral où les délégués de ce parti ont rejeté du revers de la main et avec raison les sornettes du ministre des Finances qui nous disait que c'était une question de caisse enregistreuse qui l'empêchait d'abolir sa taxe projetée sur le livre et de faire différent du gouvernement fédéral. Mais les industries culturelles, M. le Président, demeurent menacées, même si, au moins pour un an, le ministre des Finances a retiré son projet de taxer le livre. Le théâtre, la danse, le cinéma, le spectacle, tout ça encore est visé directement par la nouvelle taxe de vente du Québec, qui va s'appliquer à eux et qui, je le répète, va s'additionner aux 7 % de la TPS fédérale. Le député de Qouin le faisait observer avec raison, M. le Président, cela implique que les industries culturelles vont avoir trois taxes. Quand on va entrer voir un spectacle de Ding et Dong - je ne parle pas du "ding et dong" politique, je parle des vrais, je parle du spectacle de Ding et Dong, ces gens qui sont volontairement drôles - eh bien, on va payer les 10 % de la taxe municipale d'amusement, les 7 % de la TPS fédérale et les 8 % de la taxe de vente du Québec.

Il y a encore plus grave, M. le Président, les périodiques culturels vont toujours être touchés par la taxe, de même que les hebdomadaires régionaux. Il y en a 195 au Québec qui viennent d'apprendre, et ils sont furieux, alors que la déclaration du ministre des Finances parlait de taxer les publications vendues, que des génies du ministère des Finances ont inventé la notion que l'imprimeur de L'Avenir de l'Est dans mon comté ou du Flambeau dans mon comté ne reçoit pas une commande et un contrat du propriétaire de l'hebdomadaire. Ces génies ont décidé que l'imprimeur vend le journal à l'éditeur et que l'éditeur se retourne et le donne à la population. Donc, les 195 hebdomadaires de quartier, locaux dans une ville ou régionaux dans plusieurs, vont payer 4 000 000 $ de taxe de vente sur leur facture d'impression. Ça ne peut avoir qu'une conséquence, M. le Président, comme ces publications sont essentielles, et le ministre du Revenu va s'en apercevoir, même dans son comté, que ces publications-là sont essentielles et importantes, celles-ci n'auront d'autre choix que de réduire l'espace consacré à l'information, puisqu'elles vivent uniquement de publicité et qu'elles n'ont, ces publications-là, aucun revenu de vente. C'est paradoxal, M. le Président, d'imposer une taxe de vente à des gens qui donnent. C'est vraiment génial d'avoir pensé à ça pour l'ensemble des hebdomadaires qui sont lus par 78 % de la population. Et je vous ferai remarquer, M. le Président, que les quotidiens sont lus, au Québec, par 40 % de la population et les hebdomadaires par 78 %; chaque député le sait dans son comté. La photo d'un député dans son hebdomadaire local ou régional ou de quartier, ça compte infiniment plus que ce qu'un quotidien peut publier: il a le double de population qui le lit. Et là, on va leur imposer une taxe qui va toucher, comme le livre, la matière imprimée, l'information qui est essentielle dans une société comme la nôtre et c'est peut-être, d'une certaine façon, plus grave, M. le Président. La taxe sur le livre était une taxe injuste, mauvaise; quand on se dit une société distincte, un peuple, une nation parlant français, ça n'avait pas de sens de taxer le livre, mais là, en plus, on taxe les hebdos que 80 % de la population lit. Et ça aura comme conséquence de réduire l'information qui se trouve dans ces journaux.

M. le Président, je voudrais souligner aussi que, d'une certaine manière, la nouvelle taxe de vente que le gouvernement impose pour faire pareil comme Ottawa, pour singer Ottawa, est en deux étapes: premier janvier 1991, on taxe à peu près tous les produits, sauf les remèdes et la nourriture; premier janvier 1992, on taxe les services comme Ottawa et on prélève au nom d'Ottawa, eh bien, ce n'est pas d'une certaine manière la goutte d'eau qui fait déborder le vase, je dirais que c'est la cruche qui fait déborder l'autre cruche. Dans les derniers mois, M. le Président, sur les boissons alcooliques y compris la bière, le gouvernement a imposé des taxes qui, en trois ans, vont lui rapporter 317 000 000 $_. La surtaxe sur les tabacs va lui rapporter en trois ans 529 000 000 $. La hausse des impôts des entreprises qui a pris la forme de contributions des employeurs au fonds des services de santé, la taxe sur le capital et l'impôt sur le revenu, va rapporter en trois ans 351 000 000 $. La réforme des taxes à Ja consommation, la TVQ, qui est la version québécoise de la TPS fédérale, va rapporter en trois ans au gouvernement 362 000 000 $. Maintenant par organismes interposés, l'augmentation des frais de scolarité au niveau universitaire va rapporter 270 000 000 $. La hausse des tarifs d'Hydro-Québec au-delà de l'inflation va rapporter 568 000 000 $. Le désengagement du gouvernement à l'égard du financement des commissions scolaires, qui a entraîné des taxes scolaires et qui a entraîné des défaites aux récentes élections scolaires et, dans certains cas, c'était un peu spécial à regarder, M. le Président, de bons libéraux qui ont été sacrifiés par le gouvernement libéral, ça va rapporter en trois ans 960 000 000 $. Il doit y avoir plus d'un commissaire d'écoles qui doit prononcer, M. le Président, la phrase de Voltaire: Seigneur, délivrez-moi de mes amis. Mes ennemis, je m'en charge. Ensuite, il y a les ponctions que le gouvernement a faites à la Société de l'assurance automobile du Québec. Le Parti libéral a voté contre dans l'Opposition quand on l'a instituée et maintenant le gouvernement est bien content de l'avoir pour pouvoir piger dedans. On pige 625 000 000 $...

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: ...ce qui a forcé la Société à augmenter le coût des permis de conduire et des immatriculations de 424 000 000 $. La facture, M. le Président, et ça ce n'est pas comme les hypothèses sur le coût de la souveraineté, c'est que notre gouvernement provincial actuel, en trois ans, va nous coûter en nouveaux impôts et en nouvelles taxes, directement ou indirectement, la jolie somme de 3 781 000 000 $. M. le Président, on trouve que c'est trop, que le gouvernement devrait y repenser et revenir à une taxation plus juste.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Nous sommes dans les dernières semaines de notre session avant l'ajournement des fêtes et beaucoup d'observateurs de la colline parlementaire ont noté le maigre menu législatif de ce gouvernement, de cette session. En réalité, les mets importants dans ce menu-là sont des mets tout à fait indigestes et ça, ça en est un bel exemple ce soir. C'est un bel exemple, ce projet de loi tout à fait inacceptable, tellement inacceptable que le ministre, l'ex-ministre du Revenu, le député de Montmorency, a jugé bon de démissionner tellement il s'opposait au principe même de cette loi, de cette taxe.

Et moi, je veux, en remarques préliminaires, rendre hommage au député de Montmorency, peu importe sa future carrière politique, s'il en aura une, je ne sais pas, mais je rends hommage au courage qu'il a eu. Il n'y a pas beaucoup d'hommes ou de femmes en politique, qui ont des convictions au point ou ils ou elles abandonnent, si je peux, si le député de... oui? abandonnent des fonctions prestigieuses, importantes, intéressantes. Ils abandonnent tout simplement parce que le gouvernement dont ils font partie est en train de poser un geste qui répugne à leur conscience, à leurs convictions. C'est ce qui est arrivé au député de Montmorency.

Moi, je souhaiterais que ça arrive plus souvent, dans nos gouvernements, quel que soit le parti au pouvoir. Je souhaiterais que ça arrive un peu plus souvent. Je parle en connaissance de cause le député de Labelle aussi...

Le Président (M. Lemieux): C'est ce que je soulignais au député de Labelle d'ailleurs.

M. Lazure: Nous avons dû à un moment donné démissionner du gouvernement auquel nous appartenions, avec quelques autres. Mais c'était pour des convictions profondes.

Alors, chapeau au député de Montmorency! Je pense que son parti devrait en tirer une leçon, mais malheureusement ça ne semble pas être le cas. Le député d'Abitibi-Est s'est empressé de sauter sur cette offre que son chef lui faisait, d'être un vrai ministre et d'avoir un poste important. Je ne sais pas à quel point il était préparé à prendre la relève. Il est en train de faire ses classes. Il est en train de lire là. Espérons qu'il fait de la lecture rapide. Espérons qu'il apprenne rapidement. Mais je pense que pour une fois que nous avions, dans le gouvernement du Parti libéral, un ministre du Revenu extrêmement compétent, il est dommage qu'il soit parti. Non seulement il est dommage qu'il soit parti, mais il est dommage que son gouvernement se soit entêté par le biais du ministre des Finances, qui n'était pas le ministre responsable du dossier finalement, que son gouvernement se soit entêté malgré la démission du ministre du Revenu à procéder avec ce projet de loi tout à fait inacceptable. Et comment l'ont-ils fait? Ils l'ont fait à brûle-pourpoint, pratiquement en cachette. Un projet de loi aussi important, on l'a coincé en sandwich, un sandwich à trois tranches. Il y avait une session spéciale, supposément pour un bout de route, un bout de l'autoroute 30, il y avait la crise amérindienne, il y avait aussi la création de la commission Bélanger-Campeau. Et on a réussi à introduire, à travers ces trois tranches de sandwich, comme si de rien n'était, comme si c'était un geste banal, ordinaire, comme une lettre à la poste, ce projet de loi de portée considérable.

Je me permets de citer quelques paragraphes d'une causerie récente de M. le député de Montmorency: "L'annonce récente par le ministère des Finances du Québec, par le ministre pardon, M. Gérard D. Levesque, à l'effet d'une part de modifier la taxe de vente provinciale en fonction de la TPS fédérale et d'autre part de rendre Revenu Québec responsable de l'administration de cette TPS fédérale, m'est apparue contraire à mes principes et j'ai démissionné. On dit que la TPS sera simple, équitable, neutre et stimulante pour l'économie. À mon humble avis, au contraire, elle sera complexe, injuste, chère et dure pour l'économie, surtout en cette période de récession. Je me suis toujours battu pour une meilleure justice fiscale et pour redonner aux contribuables ordinaires confiance dans le système fiscal. La fiscalité ne représente-t-elle pas l'une des relations les plus importantes, concrètes, mais aussi délicates entre l'État et le citoyen? C'est en grande partie par son rapport d'impôt que le citoyen réalise son contrat social. Plus cette relation s'embrouille par la complexité et la confusion fiscales, plus la méfiance et même le cynisme s'installent. Les efforts des deux dernières années à Revenu Québec - M. le Président, vous savez qu'on peut en témoigner de ces efforts-là, vous et moi - à l'égard du formulaire simplifié, à l'égard des rembourse-

ments d'impôt accélérés et de l'information publique ne sont que quelques exemples qui démontrent qu'une administration fiscale peut être simple, transparente et respectueuse du contribuable". (21 heures)

J'espère que le député d'Abitibi-Est va endosser au moins cette partie-là du credo du député de Montmorency. "Malheureusement, la TPS a une face cachée. En effet, sous le couvert d'une réforme de la taxe d'accise portant sur les produits, le gouvernement fédéral introduit un nouveau champ de taxation, la taxe sur les services, deux fois plus importante que la taxe sur les produits."

C'est rare qu'on voit un ministre du Revenu, M. le Président, avoir ce que j'appellerais une approche socio-politico-économique de sa tâche. Et je veux vraiment rendre... J'ai vu plusieurs ministres du Revenu depuis que je suis en politique, même avant d'être en politique, et j'ai rarement vu un ministre du Revenu exprimer des considérations je dirais même presque philosophiques vis-à-vis du rôle d'un ministère du Revenu. Je pense que le Parti libéral avait une perle rare; il va regretter la perte de cette perle rare. Et je ne pense pas que le député d'Abitibi-Est, à moins qu'il fasse des progrès prodigieux, subits et tout à fait inattendus, arrive à la hauteur de l'envergure qu'avait le député de Montmorency en abordant ses tâches.

Le ministère du Revenu sous le député de Montmorency, avait, effectivement, fait des efforts considérables pour améliorer la qualité des services à la population. C'était le ministère, probablement, à l'intérieur de la machine gouvernementale actuelle, qui avait fait les efforts les plus remarquables, avec de bons résultats aussi, qui ont été soulignés par plusieurs lors des séances de notre commission parlementaire qui étudiait la Loi sur la fonction publique.

Moi, je voudrais insister aussi sur le caractère injuste pour les particuliers de cette taxe. Ce sont les particuliers qui vont écoper surtout. Le taux de taxation des entreprises au Canada et au Québec continue de diminuer par rapport au taux d'augmentation de la taxation des particuliers. Je comprends que ça puisse refléter, pour le Parti libéral, sa propre philosophie libérale au plan socio-économique. Je comprends que ses accointances, ses liens, ses affinités soient plutôt avec le patronat, surtout le grand patronat, ce même grand patronat qui, trop souvent, triche le trésor public par des évasions fiscales plus ou moins légales. Et, trop souvent, le pouvoir politique est complice de ces tricheries. Le député de Montmorency avait le courage, en démissionnant, de bien exposer le caractère injuste, inique de ce projet de loi, de cette taxe à l'égard des particuliers et son caractère de favoritisme à l'égard des entreprises. Donc, c'est une taxe régressive, une taxe injuste.

Maintenant, elle s'ajoute à toute une série de taxes. D'autres l'ont dit, mais ça vaut la peine de le répéter. Pas plus tard que la semaine dernière, dans mon comté de La Prairie, des contribuables sont venus me montrer leur compte de taxes scolaires. Des augmentations, M. le Président, de 140 %, 150 %, 160 % sur les comptes de taxes scolaires. Beau cadeau de Noël que ce gouvernement du Parti libéral fait aux contribuables, parce que c'est le gouvernement du Parti libéral qui fait ça en se cachant derrière les commissions scolaires. Ce gouvernement a pris l'habitude de se cacher derrière les instances publiques et parapubliques pour imposer la population de façon excessive. Les contribuables vont en parler dans les chaumières au temps des fêtes. Ils vont en parler, ils vont en discuter chaudement. Peut-être pas tellement dans le comté du député de Saint-Louis, il y a peu de chaumières, il y a des conciergeries. On va en parler dans les conciergeries, dans les blocs à appartements, mais dans les chaumières d'Abitibi-Est on va en parler par exemple. Là, on va en parler. Et j'espère que le ministre du Revenu va se promener dans les maisons, les résidences de ses contribuables, va même provoquer des réunions pour entendre ce que les contribuables ont à dire sur les nouvelles taxes: commissions scolaires, la future TPS, les ponctions que son gouvernement est allé faire à la Société de l'assurance automobile du Québec, et on pourrait continuer longtemps.

Un deuxième caractère odieux de cette taxe, c'est sur les activités culturelles. Bien sûr, l'ineffable ministre des Finances a dû reculer devant son propre parti, devant son propre caucus et on peut rendre hommage à plusieurs députés du parti gouvernemental qui ont tordu le bras du ministre des Finances, qui lui ont fait mal de concert avec les jeunes du Parti libéral jusqu'à ce qu'il finisse par reculer. C'est consolant, parce que ça démontre que des députés qui se tiennent debout peuvent faire reculer des ministres trop téméraires et qui ne veulent pas comprendre qu'en taxant le livre, on taxe, comme plusieurs l'ont dit auparavant, la culture. Et Dieu sait que, dans notre société québécoise francophone, on ne peut pas se payer le luxe d'empêcher, à cause de considérations économiques, les gens de lire. Au contraire, je pense qu'il faut dénoncer l'inaction de ce gouvernement libéral en matière de bibliothèques publiques.

Le gouvernement du Parti québécois avait, avec le plan Vaugeois, commencé à créer un réseau de bibliothèques publiques considérable à travers le Québec, considérable. Et en 1985, avec l'arrivée du gouvernement du Parti libéral, ce réseau-là a stoppé. Non seulement on n'a pas construit de nouvelles bibliothèques publiques, mais on a diminué les subventions. Le député de Saint-Louis le sait parce qu'il est bien au courant des activités de la bibliothèque de

Boucherville. Alors qu'il habitait la ville de Boucherville dans le beau comté de Bertrand alors que j'étais son député, il a pu profiter comme bien d'autres de cette magnifique bibliothèque qui avait été inaugurée par le ministre Vaugeois et par son député à l'époque, votre humble serviteur. Mais depuis ce temps-là, depuis que les libéraux sont arrivés, on a coupé les subventions pour l'achat de livres et de périodiques dans les bibliothèques publiques. Et maintenant le recul sur les livres, on n'en est pas sûr du tout, il va falloir que les députés libéraux renouvellent leur bataille contre le ministre des Finances, parce qu'on n'est pas sûr du tout que le ministre des Finances va reculer sur les périodiques, sur les spectacles. Et notre petite société, petite en nombre, ne peut pas non plus priver la population de spectacles artistiques. Les activités culturelles sont compromises avec une telle taxe.

Un troisième aspect, M. le Président, c'est le caractère servile de ce gouvernement et en particulier de mon ex-confrère de classe de collège, le ministre des Finances que je reconnais encore comme un ami malgré tout, mais comme un homme politique qui vraiment s'est égaré. Il s'est égaré dans l'obéissance servile à son parti et l'obéissance trop servile à son credo fédéraliste. Le député de Bonaventure est un des plus illustres dinosaures du fédéralisme dans le Parti libéral québécois actuellement, lui et quelques autres qu'on pourrait nommer. Et je pense qu'il est irrécupérable de ce point de vue là contrairement à la majorité des députés libéraux surtout ceux qui sont autour de cette table qui penchent de plus en plus vers une forme de souveraineté, notre président, le député des Îles-de-la-Madeleine. Il y en a plusieurs autour de la table qui sont des députés libéraux de plus en plus attirés par la notion que le peuple du Québec a tout ce qu'il faut pour se prendre en main totalement. Il ne reste pour eux que d'accepter le mot "souveraineté". Ça, c'est un problème. On parle bien d'autonomie, on parle bien de récupération maximale de tous les pouvoirs, mais on hésite encore à utiliser le mot, à franchir le dernier pas. Mais, M. le Président, le ministre des Finances s'est rendu pieds et mains liés au gouvernement fédéral dans l'entente qu'il a conclue.

Je pourrais citer encore certains extraits de la conférence du député de Montmorency, par exemple, lorsqu'il dit: "Voulant contrer un déficit galopant vers les 400 000 000 000 $, le gouvernement fédéral annonce une réforme fiscale majeure. Avec la TPS, le gouvernement fédéral va collecter beaucoup plus d'argent que l'ancien système et il est surprenant que personne n'ait mis en doute les revenus anticipés de la TPS. En réalité, la TPS récoltera environ 30 000 000 000 $ comparativement à 18 000 000 000 $ sous le système actuel. Curieusement, les entreprises qui payaient avant ces 18 000 000 000 $ ne paieront plus que 9 000 000 000 $, soit 50 % de moins." Ça confirme ce que je disais tantôt sur le caractère injuste pour les particuliers et le caractère privilégié pour les entreprises. "Cette diminution importante du fardeau fiscal des entreprises explique évidemment leur appui à la TPS."

Par l'entente qu'il a signée, le ministre des Finances s'est rendu, a capitulé de façon honteuse devant les pressions du fédéral. Et le député de Montmorency le démontre aussi dans sa conférence. A une époque où l'ensemble de son gouvernement que ce soit en matière de main-d'oeuvre, en matière d'immigration, l'ensemble de son gouvernement, l'ensemble de ses collègues réclame des pouvoirs plus étendus, rapatriement de pouvoirs qui sont au niveau fédéral, ce ministre des Finances va à contre-courant, complètement à contre-courant, contre la marée. Et, lui, il se rend à Ottawa et il donne des pouvoirs que le Québec avait déjà. Il cède des pouvoirs au fédéral au lieu d'aller en chercher. Même son ex-patron, Jean Lesage, Dieu ait son âme, frémirait devant un tel geste. M. le Président, on dirait, à part l'ex-ministre du Revenu, que les autres collègues du ministre des Finances sont hypnotisés par le spectacle qu'il donne à l'Assemblée nationale. Ses talents de comédien lui ont permis de faire avaler une couleuvre aussi considérable à l'ensemble de ses collègues du Conseil des ministres et à son caucus.

Nous sommes devant un recul sérieux. Le gouvernement du Parti québécois avait, en 1978, exempté justement des biens essentiels...

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: ...les vêtements, les meubles, de la taxe de vente et aujourd'hui tous ces biens essentiels de la vie quotidienne vont de nouveau être taxés et durement taxés.

En conclusion, M. le Président, je pense qu'il faut dénoncer, encore une fois, la politique à courte vue de ce gouvernement et la politique cachée, le manque de transparence de ce gouvernement qui n'a pas le courage d'imposer directement les nouvelles taxes aux citoyens, qui prend toutes sortes de moyens détournés. Si nous voulons avoir un débat de fond lors de l'étude de projet de loi, c'est précisément pour un peu faire le contre-poids à cette opération surprise qui nous a été imposée par le ministre des Finances, qui pensait nous faire accepter une chose aussi considérable et qui pensait que la population allait accepter une chose aussi considérable. M. le Président, c'est évidemment pour ça que nous avons beaucoup de choses à dire sur le projet de loi au nom de la population qui, on le sait par tous les sondages, s'oppose férocement à ce projet de loi. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de La Prairie. Je veux seulement attirer votre attention. Vous connaissez tous l'article 35 qui dit qu'un député, qui a la parole, ne peut employer un langage grossier ou irrespectueux envers l'Assemblée. Alors, parfois je demanderais, s'il vous plaît, s'il n'y aurait pas possibilité de faire preuve d'une certaine réserve au niveau, parfois, de certains termes qui ont été employés. (21 h 15)

Je vois que M. le député de Labelle me regarde, je pense, entre autres... Vous savez un terme, lorsque des mots y sont ajoutés, des phrases, c'est dans la manière dont il est dit, le contexte où il est dit que cela peut me forcer ou m'obliger à faire état de l'article 35,7, 35,6 et 35,7. Je n'ai pas eu à le faire à venir jusqu'à maintenant, mais l'emploi parfois du mot "servile" peut laisser à interprétation. C'est simplement une petite remarque d'ordre préliminaire.

M. Lazure: Dinosaure. Pour le mot "dinosaure", si le mot "dinosaure", M. le Président, vous envoie...

Le Président (M. Lemieux): Non, dinosaure, il n'y a pas de problème, monsieur...

M. Lazure: II n'y a pas de problème. J'aurais pu parler d'un homme fort d'une autre époque.

Le Président (M. Lemieux): II n'y a pas de problème, M. le député de La Prairie là-dessus.

M. Lazure: Bon, pas de problème. D'accord. Une voix: C'est du langage paléontologique.

Le Président (M. Lemieux): Alors, il n'y a pas d'autres remarques préliminaires. Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? Il n'y a pas d'autres remarques préliminaires. Alors, comme il n'y a pas d'autres remarques préliminaires... M. le député de Labelle, oui?

M. Léonard: M. le Président, je voudrais en vertu de l'article 244, déposer une motion, que je lirais comme suit: Que conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89...

M. Savoie: Question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement.

M. Savoie: Oui, je pense que ce qu'on avait fait, c'est qu'on avait dit qu'on mettait de côté la motion pour adopter l'article 1, pour permet- tre, justement, à nos vaillants défenseurs des déficits accumulés de présenter...

M. Bourdon: J'invoque le règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Monsieur, voulez-vous laisser terminer M. le député d'Abi-tibi-Est?

M. Bourdon: Non, non, M. le Président. Le député de Labelle lisait une motion. Il faut qu'il finisse de la lire et de la déposer, avant que le député d'Abitibi-Est n'interrompe encore une intervention d'un député de mon groupe.

M. Savoie: La question de règlement avant.

Le Président (M. Lemieux): Non, non, mais il y a une question. M. le député de Pointe-aux-Trembles... M. le député de Pointe-aux-Trembles, lorsqu'une question de règlement est soulevée en vertu du règlement, je me dois d'écouter la question de règlement du député d'Abitibi-Est. Il s'agit d'une question de règlement. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: C'est parce que, je ne sais pas si vous vous le rappelez, M. le Président, j'avais présenté une motion. On a décidé de maintenir la motion. Toutefois, avec un consentement unanime, on a permis au député de Pointe-aux-Trembles, je crois, de même qu'au député de La Prairie de terminer leurs remarques d'ouverture, mais là je pense qu'on devrait retourner à l'article 1, puisque évidemment on va vraiment à ce moment-là mettre sur la table les motifs réels vis-à-vis...

M. Bourdon: Quand vous avez voté ça, c'était illégal.

M. Savoie: Je suis en train de parler. M. Bourdon: M. le ministre, c'était illégal!

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous plaît» M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Un minimum de bon sens et de décence s'imposent à ce moment-ci.

M. Bourdon: La décence, vous ne l'avez pas eue quand à trois vous avez décidé...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous plaît, M. le député de Pointe-aux-Trembles, M. le député de Pointe-aux-Trembles... M. le député de Pointe-aux-Trembles, je vais vous écouter sur une question de règlement, mais permettez au député d'Abitibi-Est de s'exprimer. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Je termine donc en disant qu'on devrait peut-être, compte tenu des arguments qu'ils ont présentés sur le projet de loi, je me dis bon, on va procéder immédiatement et on va commencer à s'attaquer au tout, article par article. À ce moment-là, ils pourront défendre leur point de vue en étudiant les articles spécifiquement un à un.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles. Voulez-vous vous exprimer M. le député de Pointe-aux-Trembles sur la question de règlement?

M. Léonard: M. le Président, je voudrais... oui?

M. Bourdon: M. le Président, le député de Labelle était en train de lire une motion. Est-ce qu'elle est recevable ou non? Je pense qu'il faudrait l'entendre en entier avant d'entendre le député d'Abitibi-Est, qui a fait une motion illégale pendant mon temps d'intervention avant, ce qui est un procédé minable et une tactique déloyale de quelqu'un qui ne sait parier, non pas pour défendre ses chats... Le député de Labelle avait la parole, il lisait une motion, M. le Président. Et il n'a pas d'affaire à être interrompu et puis de donner la parole au député d'Abitibi-Est. On n'invoque pas le règlement, quand on s'objecte à une motion. La recevabilité, on en dispose après qu'elle est lue, comme quand les libéraux siègent à trois entre eux-autres et qu'ils entendent une motion entre eux en quatre minutes.

Le Président (M. Lemieux): M. le député. Alors, M. le député de Pointe-aux-Trembles, l'article 36 du règlement nous dit ceci: "Aucun député ne peut interrompre celui qui a la parole". C'était le cas.

M. Bourdon: C'est le député de Labelle qui avait la parole. Alors si vous ne voulez pas qu'on vous interrompe, M. le député d'Abitibi-Est, eh bien! c'est de ne pas nous le faire.

M. Savoie: Ça suffit, là.

Le Président (M. Lemieux): Messieurs! S'il vous plaît, est-ce que je peux terminer? Est-ce que je peux terminer la lecture... M. le député de Pointe-aux-Trembles, est-ce que je peux terminer la lecture, est-ce que je peux terminer la lecture de l'article 36, s'il vous plaît? "Aucun député ne peut interrompre celui qui a la parole, sauf - sauf! sauf! - pour faire un rappel au règlement, signaler le défaut de quorum ou attirer l'attention sur une violation de droit ou de privilège." Il était dans son droit, M. le député d'Abitibi-Est, en vertu de l'article 36, de soulever cette question de règlement et il était de mon droit comme président, immédiatement, de statuer sur cette question de règlement.

M. Bourdon: M. le Président, le député d'Abitibi-Est a interrompu le député de Labelle - je retire ce que j'ai dit avant quand je pariais du député de La Prairie - sur la recevabilité d'une motion. Ce n'était pas une question de règlement qu'il soulevait. Il s'attaquait à la recevabilité de la motion que le député de Labelle n'avait pas terminé de lire.

Le Président (M. Lemieux): Non. Non. La question de règlement du député d'Abitibi-Est, à moins que je n'aie vraiment, vraiment, vraiment rien compris...

M. Savoie: Vous avez bien compris, oui.

Le Président (M. Lemieux): ...s'attaquait strictement à la teneur du consentement qui a été donné par celui-ci.

Une voix: Par une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): ...par une question de règlement. Et ce que le député d'Abitibi-Est va sans doute me demander, c'est si, effectivement, il est permis, après qu'il y ait eu des remarques préliminaires à l'Opposition officielle, d'y aller de motions préliminaires. J'imagine que c'est le sens de son intervention.

M. Savoie: C'est exactement ça, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Là-dessus, je vais écouter maintenant le député de Labelle.

M. Léonard: Je pense que j'avais compris que le consentement avait été donné pour qu'on reprenne le processus là où il était. Donc, c'est à ce titre-là que je présentais une motion préliminaire. C'était le cheminement normal sur lequel nous nous étions entendus. C'est simplement là-dessus que je répète cela. Si vous voulez, M. le Président, je vais lire ma motion.

Le Président (M. Lemieux): Là-dessus, je n'ai pas statué sur la question de règlement du député d'Abitibi-Est et je dois vous avouer, M. le député d'Abitibi-Est, que j'ai moi-même aussi interprété le sens de votre consentement dans le sens du député de Labelle, d'autant plus que, selon la coutume, le processus détaillé débute d'abord par des remarques préliminaires et se continue, par la suite, par des motions préliminaires et, finalement, c'est l'étude article par article. Ce sont des éléments qui sont disctincts. Et lorsque vous avez, effectivement, donné votre consentement... C'est la raison pour laquelle j'ai fait état et j'ai dit clairement que je ne voulais pas que ça fasse jurisprudence; c'était une

question de fait et ça allait de soi, pour moi, que le principal devait suivre l'accessoire dans ce cas-là et qu'après les remarques préliminaires, on en arriverait, et j'en étais certain, à des motions préliminaires, M. le député d'Abttibi-Est. J'en étais certain. Et le sens de votre consentement, c'est la raison pour laquelle je suis intervenu et je vous ai dit: Êtes-vous bien certain? C'est ça? Vous m'avez dit oui. Le député de Pointe-aux-Trembles peut faire ses remarques préliminaires et, de facto, je dois suivre la coutume puis le processus établi. Après les remarques préliminaires, ce sont des motions préliminaires. Ça va de soi. Et je dois interpréter le sens de votre consentement d'une manière très large, libérale, comme le veut l'article 41 de la Loi d'interprétation et comme le veulent les règles parlementaires. En conséquence, si M. le député de Labelle a une motion préliminaire à faire, je dois l'entendre. M. le député de Labelle.

M. Léonard: Alors, je la reprends et je suis convaincu que ça pourrait vraisemblablement intéresser le ministre du Revenu. "Que, conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende l'Association des économistes du Québec."

Ceux-ci n'ont pas été particulièrement contre tout ce qu'il y a dans le projet de loi.

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous avoir copie écrite de la motion?

M. Léonard: Pardon?

Le Président (M. Lemieux): Copie écrite de la motion, ça va. Est-ce qu'il y a des remarques sur la recevabilité de la motion?

M. Chagnon: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, monsieur.

M. Chagnon: Enfin, la recevabilité de la motion appelée à l'article 244 qui stipule: "Avant d'entreprendre l'étude détaillée, la commission peut décider de tenir des consultations...", ne va-t-elle pas à rencontre du jugement que vous avez déjà donné au début des travaux de cette commission, ce soir, après avoir pris en délibéré le fait que la commission, au moment où elle avait son quorum, à partir de l'article 156 qui stipule que lorsque le tiers des membres, y compris le président, est en situation de prendre un vote, a déjà pris un vote pour commencer l'étude de l'article 1, n'est-il pas opportun de penser, à ce moment-ci, à ce stade-ci, que toute motion particulière, particulièrement dans le cadre qui nous occupe, à partir de l'article 244, n'est pas recevable, compte tenu d'un jugement qui est sans appel, le vôtre, M. le Président?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Saint-Louis, je comprends votre interprétation, mais il faut que vous ayez à l'esprit qu'à partir du moment où il y avait un consentement unanime à la fois du parti ministériel et de celui de l'Opposition, on annulait. On ne suspendait pas, on annulait la motion du député d'Abitibi-Est et je me devais de revenir aux étapes normales, tel que la coutume le veut, qui veut que ce soit, dans un premier temps, des remarques préliminaires, dans un deuxième temps, des motions préliminaires et dans un troisième temps, l'étude article par article du projet de loi qui est devant moi, soit le projet de loi 89. J'en étais conscient lorsque ce consentement-là a été donné et j'en ai fait état. Je ne peux pas revenir sur cette décision-là. Vraiment, ce serait, je dirais, en arriver à une zizanie parlementaire, une procédure que je n'ai jamais vu à venir jusqu'à maintenant, en cinq ans de présidence à la tête de cette commission parlementaire. Et je me dois maintenant de déclarer comme tel...

M. Chagnon: M. le Président? Le Président (M. Lemieux): Oui.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que les remarques... le fait qu'on ait eu un consentement après coup, après votre jugement, pour faire en sorte que, dans le sens de la plus grande loyauté, la plus grande "gentlemenship" dans cette commission, on puisse entendre les remarques préliminaires des députés, je pense entre autres au député de Pointe-aux-Trembles qui n'avait pas fini, pas terminé ses remarques préliminaires avant que le vote ait lieu cet après-midi, qu'on ait permis aux députés qui n'avaient pas eu et n'avaient pas fait leurs remarques préliminaires, justement de pouvoir les terminer, les faire... Mais à partir du moment où les remarques préliminaires étaient terminées, nous commencions l'étude de l'article 1?

Le Président (M. Lemieux): Oui et le consentement - ce que je veux que vous compreniez, monsieur, il y a une étape entre les remarques préliminaires et l'étude article par article d'un projet de loi, tel qu'en fait foi notre règlement, et ce sont les motions préliminaires - le consentement qui a été donné par l'ensemble de la commission annulait de facto et de droit la motion qui avait été présentée par le député d'Abitibi-Est, que je considérais valide, mais de consentement, la commission a décidé d'annuler cette motion et on revenait au tout début du processus. En conséquence, le jugement est alors rendu, je ne reviens plus sur ce

jugement-là et maintenant je déclare que la motion... Oui, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Est-ce qu'on peut demander un consentement pour procéder à l'article 1?

Le Préaident (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Lazure: On va reporter.

Le Président (M. Lemieux): il n'y a pas de consentement.

M. Lazure: On consent à étudier l'article 1, mais un peu plus tard.

Le Préaident (M. Lemieux): Vous aviez raison, il n'y a pas de consentement, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Lazure: Un peu plus tard.

Le Président (M. Lemieux): Alors, la motion du député de Labelle, qui se lit comme suit: "Que, conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende l'Association des économistes du Québec" est recevable. Et à ma connaissance, en vertu du règlement, je pense que c'est à l'article 209, l'auteur de la motion a 30 minutes, puisqu'il s'agit d'une motion de forme, pour s'exprimer et, après, chacun des membres peut s'exprimer sur cette motion pour une période de temps de 10 minutes.

M. Lazure: Dix minutes?

Le Président (M. Lemieux): Pardon. L'auteur de la motion, en vertu de l'article 209, paragraphe 2, qui dit ceci: "Cependant, l'auteur d'une motion, le premier ministre et les autres chefs de groupes parlementaires, ou leurs représentants, ont un temps de parole d'une heure pour les motions de fond - ce n'est pas une motion de fond dans ce cas-ci, c'est une motion de forme - et de 30 minutes pour les motions de forme." Alors, celui qui présente la motion a donc 30 minutes, suivra après une période d'échange au niveau de chacun des intervenants, une période de 10 minutes. Et le représentant ministériel a effectivement, lui aussi, une période de 30 minutes. Alors, M. le député de Labelle, vous avez la parole sur votre motion, pour une période de 30 minutes. (21 h 30)

Motion proposant d'entendre l'Association des économistes du Québec

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce que je veux souligner par cette motion, c'est que les économistes ont eu à traiter très longuement de cette question, les taxes à la consommation versus l'impôt sur le revenu. C'a été traité en Europe d'abord, parce qu'il y a quelqu'un qui l'a effectivement traité en Europe, qui a reçu un prix Nobel d'économie pour cette question-là, parce qu'il a démontré que le système de taxation pouvait receler des distorsions fort importantes selon qu'on était dans un système de l'impôt sur le revenu ou dans un système de taxation à la consommation. Ce qu'il m'apparaît important de souligner ici, c'est que nous sommes en train de faire un changement majeur dans le système de taxation des contribuables, des sources de revenus des gouvernements. On l'a fait depuis un certain temps, il y a eu peu de débats ici, à l'Assemblée nationale, sur cette question. Je dirais que ce qui est grave, c'est que ces débats, à mon sens, on tente de les escamoter présentement. Le débat a été fait au gouvernement fédéral dans les circonstances que l'on connaît, notamment celle d'un déficit galopant du gouvernement fédéral. On sait que ce déficit, qui était de moins de 10 000 000 $ en 1970, est passé en 1980 à 80 000 000 $, à 80 000 000 000 $, pardon, je parle en milliards plutôt. Actuellement, il est passé de 180 000 000 000 $ en 1985 à 360 000 000 000 $ maintenant.

Alors, au fond, le gouvernement fédéral était pressé d'en arriver à ce système et pressé aussi de l'établir de façon draconienne dès le départ, de sorte qu'il avait envisagé un taux de taxation de la TPS de 9 % avec une assiette très large, en prétendant que ses effets seraient neutres. Effectivement, à la face des chiffres qu'il proposait, on pouvait le dire comme cela, mais la réalité, je pense que là-dessus l'ex-ministre du Revenu a des chiffres qui démontraient que, finalement, à cause de l'assiette fiscale qui était en cause, le rendement de cette taxe pouvait être de 30 000 000 000 $, alors qu'on diminuait l'impôt des entreprises de 9 000 000 000 $. Tout de suite là, c'est un changement majeur. C'est la base, effectivement, des travaux des économistes européens sur cette question, parce que la question qu'ils posaient était que l'on transférait le fardeau de la taxation des entreprises vers les consommateurs et ils démontraient, à ce moment-là, que c'était plus juste de le faire comme cela.

Il y a des justifications. Il y a, évidemment, des analyses macro-économiques sur ce thème qui démontrent une certain nombre de vérités qu'il faut admettre et qu'il serait bon de connaître. Par ailleurs, ce qu'il faut considérer, c'est qu'en faisant un tel changement dans les fardeaux de

l'imposition de taxation on a aussi amené une autre modification fort importante qui concerne l'impôt sur le revenu.

L'impôt sur le revenu, c'est une autre question. Jusqu'ici, depuis au moins 30 ans, 40 ans, on avait tablé, de grandes théories avaient tablé sur la progressivité de l'impôt comme mesure de justice sociale, comme façon de répartir plus équitablement le fardeau de la fiscalité entre les contribuables. Il faut considérer que les tables d'impôt ont connu des taux croissants selon les niveaux de revenus imposables des contribuables. Au début, ces taux étaient plutôt bas, si on parle de la création de l'impôt sur le revenu vers 1917 et les années subséquentes, mais, graduellement, surtout après la guerre, ces taux sont devenus très progressifs ou, avec la guerre et après la guerre, ces taux étaient devenus très progressifs jusqu'au jour où certains se sont posés la question. On l'a vu dans les années quatre-vingt, on s'est posé cette question de la "désincitation" au travail que pouvait procurer une telle progressivité des courbes d'impôt.

Parallèlement à tout ça, à partir des années soixante notamment, pour contrer la progressivité de l'impôt, on a vu une foule d'exemptions d'impôt se manifester graduellement dans la loi de l'impôt. Au début, on ne taxait pas les gains en capital; ensuite, on a donné des exemptions, par exemple, sur les fermes; ensuite, on a exempté sous toutes sortes de formes, mais disons pour raccourcir, on a exempté par des systèmes d'abris fiscaux, de sorte que la progressivité de l'impôt était devenue plus théorique que réelle. En réalité, le travailleur ordinaire, qui n'avait pas les moyens de se payer un fiscaliste, un conseiller fiscal, lui profitait très peu jusqu'au début des années quatre-vingt à tout le moins, des abris fiscaux, alors que c'étaient seulement les plus riches, qui pouvaient disposer de tels fiscalistes, qui en profitaient. Le résultat de tout cela, c'est que la courbe de l'impôt est progressive, effectivement, jusqu'à des revenus à l'heure actuelle, disons, aux chiffres de 1987, de 200 000 $, mais dès que ça arrive à 200 000 $, ce n'est rien. Il n'y a pratiquement plus d'impôt, parce que ces gens ont toute une foule de façons de s'exempter de l'impôt.

J'en parle parce que, au fond, c'est une question majeure. Je voudrais simplement citer, pour le bénéfice des gens de cette commission, le livre "La part du lion" de Mme Linda McÛuaig qui est une journaliste. Je vais donner, pour le bénéfice des membres de la commission, rapidement son curriculum vitae. C'est une journaliste née à Toronto, diplômée de l'Université de Toronto en 1974 et qui a travaillé en particulier à la radio de Radio-Canada, au magazine Maclean's et au Globe and Mail. Elle a écrit ce livre, La part du lion, édité en 1987 et traduit en 1987, intitulé autrement comme suit: Comment les riches ont réussi à prendre le contrôle du système fiscal canadien.

Je pense que c'est le fond du débat. En réalité, ce n'est pas si clair que ça que n'importe quelle TPS peut être un système d'impôt valable. Je comprends aussi que les données de la question, la problématique qui a été soulevée, c'est celle de la vétusté de la taxe de vente fédérale. Mais ce n'est pas parce que ce système-là est vétusté qu'on doit pour autant modifier tout le système de l'impôt de la façon dont on le fait, parce qu'il y a d'autres débats derrière ça. C'est vrai que la taxe fédérale de vente est vétusté et c'est à ce titre-là que nous avons jugé, nous au Parti québécois, qu'il fallait mettre à notre programme l'application de la taxe sur la valeur ajoutée, le système européen appliqué non seulement en Europe, mais dans beaucoup d'autres pays, mais notamment en Europe. Je les cite, parce que ce sont des pays industrialisés, les plus proches de notre structure économique, et donc des pays qui sont comparables à ce que nous avons ici.

Je voudrais, je pense pour le bénéfice des gens, lire peut-être une page ou deux, citer des extraits de ces pages sur cette question parce que, à mon sens, c'est percutant. Mme McQuaig démontre en particulier que les gens sont beaucoup plus sensibles à l'action des gouvernements lorsqu'il s'agit d'attribuer des subventions qui sont très visibles, un ministre déclare en se levant en Chambre donner à telle entreprise ou donner à tel groupe de citoyens, alors que, généralement, les citoyens, la population en général et la presse accordent très peu d'attention à toutes les exemptions fiscales, à tous les abris fiscaux qui existent. Et lorsqu'on les regarde de très près, ces abris fiscaux sont considérables et beaucoup plus que les subventions qui sont attribuées par le gouvernement.

Elle cite, par exemple, le cas de l'exemption des profits en capital qu'un particulier fait sur sa maison privée. Tout le monde sait qu'une maison familiale est exemptée d'impôt quant au profit en capital qu'un contribuable fait sur cette maison familiale, la sienne. C'est connu de tout le monde. Vous achetez une maison à 30 ans et vous la revendez 10, 15 ou 20 ans après et vous réalisez un profit de capital sur une maison ordinaire peut-être de 30 000 $ ou de cet ordre-là. C'est vrai pour le citoyen ordinaire, mais lorsque vous allez chez les contribuables qui ont beaucoup plus de richesses, qui ont investi dans leur maison, le capital investi dans la maison prend de l'importance. Ce qui arrive, c'est que quelqu'un qui a les moyens au bout d'un certain temps, de s'acheter une maison de 200 000 $ va probablement la revendre au bout de quelques années beaucoup plus cher. Elle cite par exemple le cas de M. John Turner qui a acheté une maison en 1975 au coût de 265 000 $ et qui l'a revendue 10 ans après pour à peu près 900 000 $. Son profit de capital a été de 635 000 $. On me

dira que c'est un chanceux. Fort bien, mais de quoi s'agit-il? Le contribuable ordinaire fait un profit de capital, lui, de 20 000 $, de 30 000 $ et H le considère un peu comme son fonds de pension - c'est le lot des gens ordinaires - alors que le riche qui a investi beaucoup là-dedans va alter se chercher un profit de capital beaucoup plus grand et il va être exempté d'impôt de sorte que le rendement des abris fiscaux, le rendement des profits de capitaux exemptés d'impôt est considérable. Je ne parte pas des profits de capital réalisés dans le cours des affaires parce que, dans les lois actuelles, ils sont imposés à 66 2/3 %, donc, exemptés à 33 % ou au tiers, mais dans le cas de la maison privée, ils sont exemptés complètement. Donc, personne ne s'est soucié de mettre un maximum aux profits de capital sur les maisons privées.

La réalité, c'est que c'a coûté combien à l'État, les 635 000 $ de profit en capital sur la maison de John Turner? 50 % au moins! Donc, c'a coûté 300 000 $. Si un ministre s'était levé en Chambre pour donner une subvention à M. John Turner de 300 000 $, tout le monde aurait crié au meurtre, mais, en réalité, comme c'est dans la loi, que personne ne l'a vu, personne n'a posé de questions là-dessus, mais ça équivaut à donner une subvention à M. John Turner de 300 000 $. Est-ce que c'est ça que la loi voulait? Je pense que, là-dessus, le livre est très instructif pour bien démontrer que les riches se sont toujours battus férocement pour éviter que les profits de capital soient assujettis à l'impôt et pour des raisons très précises, de la même façon qu'ils se sont toujours battus pour éviter que les profits sur les actions soient imposables. Qui transigent les actions en Bourse? Généralement, des gros montants d'actions en Bourse? Des gens qui ont beaucoup de capital. De la sorte, notre analyse sur la progressivité de l'impôt est faussée en grande partie, parce qu'on est porté à regarder seulement la progressivité des taux et beaucoup moins l'assiette sur laquelle s'applique ces taux et, donc, tout est faussé. Faire une comparaison entre ces différents systèmes, il me semble que ça mériterait un large débat dans la société.

Alors, je vous cite un certain nombre d'éléments. Ce qu'elle dit, par exemple page 30, le scepticisme est utile pour évaluer toute demande de réduction du fardeau fiscal et le regretté Louis Eisenstein, expert américain de la fiscalité, a habilement montré la nature intéressée des arguments habituellement utilisés pour justifier des réductions d'impôt. Les personnes en moyens, généralement, jouent très peu sur les subventions dans ce secteur-là, mais jouent davantage sur les incitatifs à l'investissement, sur les exemptions d'impôt, sur l'assiette de l'impôt et, là-dessus, c'est une chose qui se fait une fois, dans un discours d'un ministre des Finances en Chambre. Il le fait au mois d'avril. Ça paraît un peu dans les journaux. Généralement, ça paraît surtout dans la partie financière des journaux. Alors que les exemptions portant ou les subventions portant sur un, deux ou trois enfants paraissent en première page. Des choses importantes en termes de fiscalité, en termes d'incitatifs financiers, économiques sont reléguées aux pages économiques que le citoyen ordinaire consulte peu ou lit peu et 15 jours après tout le monde a oublié ce qui s'est réellement passé. Et là, les conséquences à terme se font sentir beaucoup plus dans ce secteur de cette façon-là qu'autrement.

Les gains en capital, j'en ai parié. Autre chose aussi, un argument qu'elle soulève, c'est qu'on prétend, avec la même véhémence, qu'un taux d'imposition marginal élevé aura pour effet d'anéantir l'enthousiasme au travail des cadres supérieurs et des professionnels. Pourquoi ces contribuables à haut revenu se forceraient-ils pour gagner quelques dollars supplémentaires s'ils doivent, de toute façon, les donner au gouvernement? C'est un argument que vous entendez, qu'on a beaucoup entendu, surtout au cours des années quatre-vingt. Plutôt que de passer une soirée de plus au bureau à travailler sur un gros contrat, ils iront prendre un verre ou resteront chez eux en famille. Eisenstein a répertorié toutes les sombres prédictions sur l'avenir de ces cadres désabusés et découragés par des impôts trop élevés. Certains pessimistes, a-t-il noté, vont même jusqu'à penser que des impôts trop élevés pourraient pousser vers la prêtrise certains hommes d'affaires parfaitement compétents. C'est très ironique, mais c'est aussi très juste. Je pense qu'elle a frappé juste. C'est une argumentation que nous voyons partout. Au fond, il y a plusieurs facteurs, autres que le désir de garder la plus grosse part de leurs revenus, qui motivent les gens. C'est le prestige, c'est le pouvoir, c'est fa satisfaction, c'est un bureau plus luxueux et on peut en nommer plusieurs autres. Les analyses de psychologie industrielle ont été claires là-dessus. Je pense qu'il ne faut pas se faire d'illusions sur cette question. (21 h 45)

Les mêmes personnes, par ailleurs, qui prétendent que les cadres ne sont motivés au travail que lorsqu'ils reçoivent d'importantes compensations financières font volte-face et affirment du même souffle que donner aux travailleurs des compensations financières par le biais du système d'assurance-chômage leur enlève toute envie de travailler. On peut continuer dans ce sens-là. Ce sont des arguments, une argumentation que nous entendons régulièrement sur cette question et, à mon sens, elle colle parfaitement à la réalité et démontre bien les mécanismes qu'on a bâtis dans l'argumentation pour défendre des points de vue très intéressés au fond. Dans le cas des cadres, leur permettre de conserver d'importantes sommes d'argent ne détruit pas leur ardeur au travail - au contraire, cela les incite à travailler plus fort - mais

donner de modestes prestations aux travailleurs sape complètement leur envie de travailler et les rend tout à fait satisfaits de leur sort. En conséquence, il faut que les travailleurs soient maigres et affamés, il faut nourrir généreusement les cadres et voilà, évidemment, un argument qu'il fait bon entendre quand on est cadre.

Je pense que le débat là-dessus n'est pas terminé, il n'est qu'ouvert. Il me semble que, si l'on prête beaucoup d'attention, en réalité, à la façon dont le gouvernement dépense ou consacre ses crédits, comme dirait Duplessis, s'il faut attribuer beaucoup d'attention à cela, il faudrait en attribuer tout autant à la façon dont il perçoit ses revenus. Nous n'avons qu'un ministre du Revenu qui, habituellement, est un ministre plutôt inconnu, plutôt modeste dans le gouvernement, généralement un nouveau ministre passe par là. Après ça, il gradue, il s'en va aux Finances, s'il le peut, en fin de carrière. Mais, en réalité, le ministère du Revenu...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle, votre motion, s'il vous plaît. Vous êtes allé pas mal sur le fond. Je vous laisse aller, mais la motion c'est: Est-ce opportun ou non d'entendre l'Association des économistes? Vous savez ça.

M. Léonard: Oui, M. le Président. J'y viens, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Vous savez ça.

M. Léonard: J'y viens parce que, lorsque nous regardons la perception des fonds qui font vivre un gouvernement, qui lui permettent d'agir sur le plan économique, il s'agit de décisions économiques majeures, tout autant que n'importe quelle autre attribution de crédits de l'autre côté du bilan ou de l'état des profits et pertes. Alors, les économistes en général sont plutôt d'accord avec un système qui vise l'imposition de la consommation, actuellement. C'est vrai en Europe et c'est vrai, actuellement, au Canada. Par ailleurs, je ne suis pas sûr qu'ils aient considéré tous les aspects de la question et, à mon sens, il serait drôlement important que nous les entendions, que nous discutions avec eux de cette question parce qu'ici, au gouvernement du Québec, le débat ne s'est pas fait. Notre structure d'imposition, quant à l'impôt sur le revenu, est différente de celle du fédéral pour des raisons bien précises, historiques et les impacts de la taxe de venté, même remodelée, refaite, redessinée par le gouvernement du Québec sont différents de ce qu'ils seront à Ottawa.

L'autre élément qui a été abondamment cité au cours du débat de deuxième lecture sur la loi sur la taxe de vente au détail au Québec, c'était évidemment que, nous, en termes économiques, il était important que nous exemptions un certain nombre de secteurs de l'économie. Nous l'avions fait à la fin des années soixante-dix et, à mon sens, les raisons qui militaient en faveur de l'exemption de ces taxes militent toujours parce que, essentiellement, la composition, la structure même de notre économie n'a pas changé. Le meuble est toujours très important dans l'économie québécoise; dans l'appareil de production, il est toujours très important. Au fond, s'il est important qu'on l'exempte, ici, au Québec, effectivement, ça produisait des effets en termes de ventes sur le plan de la consommation. Par ailleurs, ça n'empêcherait pas que le fédérai lui-même modifie sa TPS parce que, effectivement, cela gênait les exportations de meubles mais il faut voir que c'était la taxe de vente fédérale telle qu'elle était conçue où les gens, les exportateurs de meubles ne pouvaient pas bénéficier d'exemptions de cette taxe lorsqu'ils faisaient des exportations ou d'une partie des intrants dans la fabrication des meubles qui servait aux exportations. C'était alors des éléments qui nuisaient considérablement à la valeur totale de nos exportations, par exemple vers les États-Unis.

Voilà un secteur important. Les économistes nécessairement ne peuvent pas faire autrement que de considérer ce secteur dans toute étude macroéconomique, dans toute étude qui porte sur les effets de la taxation. Un autre secteur majeur, le vêtement, les chaussures pareillement. Le vêtement est exempté de taxe fédérale et de la taxe de vente du Québec. Il est exempté des deux taxes. À partir du 2 janvier prochain, il sera imposé, le vêtement sera imposé, les chaussures aussi seront imposées. Sur le plan de la concurrence interprovinciale entre le Québec et les autres provinces, la taxe fédérale ne change rien actuellement. L'imposition de la taxe fédérale ne change rien, les deux systèmes... Que la production se fasse en Ontario ou qu'elle se fasse au Québec, l'impact est nul quant a la TPS, parce que les deux vont être assujettis au même système fédéral. Avant c'était la taxe fédérale de vente, maintenant c'est la TPS pour le Québec et l'Ontario, mais nous allons imposer, nous, une taxe de vente sur nos produits. La taxe de vente du Québec va s'appliquer à ces produits. Lorsque nous allons exporter aux États-Unis, nos produits seront exemptés, mais quand nous allons expédier, faire des expéditions et des exportations vers l'Ontario par exemple, notre taxe de vente du Québec va continuer à s'appliquer. Donc nous perdons un avantage concurrentiel par rapport à la réalité, à ce qui se passe maintenant. Donc nous nous défavorisons sur ce plan-là.

M. le Président, je considère qu'il y a des conséquences économiques majeures à la transformation de notre système de taxe de vente au détail au Québec, considérables, et qu'il n'est pas exagéré et que ce n'est pas faire perdre le temps de la commission que de faire venir des économistes, ici. Si nous avions procédé comme le gouvernement fédéral qui a émis ses lignes de

conduite sur cette affaire au mois de juin 1987, qui a fait un débat de trois ans sur la question, qui n'est pas encore terminé et les amis de nos amis d'en face qui sont des sénateurs libéraux et trouvent qu'ils veulent encore du temps pour en parler. Dans notre cas, nous avons toujours compris à ta suite des déclarations du ministre du Revenu d'alors, des déclarations du premier ministre du Québec le 15 mars dernier qu'on ne s'orientait pas vers la perception d'une TPS au Québec ou d'une TPS assimilée au Québec, lorsque, soudainement, le 30 août dernier le ministre des Finances s'est amené, je dirais, d'une façon absolument inattendue avec une déclaration ministérielle, disant que tout était bâclé, qu'il s'en allait signer un protocole d'entente avec le gouvernement fédéral et qu'il servirait, lui, de percepteur de la TPS fédérale. Le débat au fond ne pouvait pas avoir lieu à ce moment-là, puisque l'Assemblée nationale était en vacances, ne siégeait pas. Nous n'avons eu que quelques heures en commission parlementaire pour discuter de cette déclaration ministérielle qui donnait prise, effet à un changement majeur dans le système de taxation au Québec Alors, M. le Président, je pense que les économistes dans cette question ont toujours eu un mot déterminant à dire, ont toujours eu à éclairer les gouvernements sur les effets de telles décisions qui touchent toute l'économie et à mon sens nous devrions pouvoir les entendre. C'est le sens de la motion que j'ai déposée tout à l'heure et le ministre lui-même devrait admettre qu'au moins les économistes devraient venir ici. Il doit savoir...

M. Lazure: Minimum. M. Savoie: Ha, ha, ha!

M. Léonard: II en rit, mais il doit savoir que les économistes sont plutôt d'accord avec son projet qu'autrement.

M. Savoie: II fait par exprès pour me faire rire. M. le Président, vous devriez le rappeler à l'ordre. Il faut le rappeler à l'ordre. 26.

M. Lazure: Non. Je disais que c'était un minimum d'entendre au moins les économistes. Au moins!

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Labelle... Allez-y, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Les économistes ne sont pas contre son projet, faut-il le lui rappeler? Et même des économistes de notre côté sont d'accord avec l'imposition d'une taxe à la consommation ou, en tout cas, d'élargir la taxe à la consommation. Un certain nombre, mais...

M. Savoie: Ah! Ah! Il le savait! Il le savait!

M. Léonard: ...je pense qu'il y a des questions qui se posent et que ces aspects économiques doivent être discutés ici, à la barre de la commission.

M. Savoie: À l'ordre, à l'ordre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Léonard: M. le Président, à moins de vouloir escamoter tous les débats à l'Assemblée nationale comme on l'a fait cet automne, il faut quand même entendre des citoyens éclairés sur cette question. Vous faites une déclaration ministérielle, le 30 août, avec quelques heures de discussions sur un projet qu'on n'a pas vu, dont on vient de nous parier simplement dans une déclaration ministérielle. Par la suite, le projet de loi n'apparaît pas tout de suite, il est déposé le dernier jour où on dort le déposer, te 15 novembre, pour être adopté avant Noël, pour pouvoir utiliser les motions de clôture. Alors, nous vous voyons venir avec ce projet de loi. Mais ce que vous devez admettre, c'est que le débat sur la réforme de la taxe de vente au Québec est escamoté, absolument escamoté, que vous ne donnez pas la chance à l'Assemblée nationale d'entendre des groupes de citoyens, d'en discuter correctement.

Nous sommes en deuxième lecture. Nous avons adopté la deuxième lecture à l'Assemblée nationale, mais il est encore temps d'entendre des gens et des groupes sur cette question. Il y a des gens qui vont être durement touchés. Je prends juste un de ces groupes: l'industrie touristique. Elle est particulièrement "clenchée" par ce projet de loi. Les taxes, depuis quelques années, il n'y avait plus de taxes sur les chambres d'hôtel, eh bien, maintenant, il y en aura, et ces taxes... Pardon? Il me reste trois minutes. Je vais les prendre sûrement. Je vais vous parler de l'industrie touristique, M. le ministre, parce que je suppose que...

M. Savoie: Non, mais c'était pour vous aider.

M. Léonard: Ne vous inquiétez pas, M. le ministre du Revenu. Ne vous inquiétez pas. N'essayez pas de m'interrompre. Je pense que vous auriez intérêt à éclaircir vous-même vos idées sur cette question-là.

Quant à l'industrie touristique, l'industrie touristique n'avait pas connu de TPS, en ce qui concerne les chambres d'hôtel, depuis de nombreuses années. Dorénavant, elle sera assujetti à la taxe fédérale dès le 1er janvier et dès le 1er janvier 1992, à une autre taxe qui est celle du Québec. Donc, nous aurons 14,5 % de taxes sur les chambres d'hôtel, ce que nous n'avions pas.

Vous allez me dire que les étrangers qui viennent ici peuvent réclamer du gouvernement

le remboursement de la taxe qu'ils auront payée sur les hôtels, très bien, pour ceux qui décideront de le faire. Quelqu'un qui vient en voyage peut le faire. S'il le fait, tant mieux. Je ne suis pas sûr que tous les étrangers qui vont venir ici vont y penser, vont se bâdrer d'une telle réclamation. Et je ne suis pas sûr, lorsqu'on va vouloir susciter la venue de congrès internationaux ici, par exemple au Palais des congrès à Montréal, que l'argumentation va être bien développée à l'effet qu'il n'y a pas de taxe et qu'on va bien sensibiliser les congressistes à l'effet qu'ils peuvent réclamer du gouvernement une telle taxe. On voit tout de suite la complexité administrative qu'il y a derrière ça, mais surtout, au-delà de la complexité adminstrative, le fait que, à la face même des factures, il y ait 14, 5 % qui s'ajoutent, 14, 5 %, en réalité, ça va décourager beaucoup de gens avant qu'ils prennent bien conscience qu'ils ne sont pas assujettis. Considérable.

(22 heures)

D'autre part, les Québécois avaient pris l'habitude de faire plus de villégiature chez eux, de prendre leurs vacances l'été, chez eux, de se promener, d'aller en Gaspésie, par exemple, pour essayer d'aider davantage les Gaspésiens. À partir de l'an prochain, ça va leur coûter 14, 5 % de plus pour le faire, quand ils vont rester ici. C'était une taxe qui n'existait pas jusqu'ici. Il n'y avait pas de taxe fédérale, c'était un service, il n'y avait pas de taxe du Québec et, là, vous venez d'augmenter le prix d'une chambre de motel à Gaspé de 14, 5 %. Le prix d'une chambre de motel au Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est pareil et, dans la ville de Québec, la même chose. Dès que vous allez loger à l'hôtel, au motel, dans une chambre, vous allez être assujettis à cette taxe. Ça, ce sera un frein énorme au déplacement des personnes à l'intérieur du Québec. Ce sera un facteur qui va faire augmenter l'inflation au Québec de façon appréciable. Le Conference Board a évalué que le taux de l'inflation serait augmenté de 1, 5 % à cause de la taxe fédérale et d'au moins 0, 5 % à cause des modifications apportées à la taxe du Québec. Je pense qu'il faut en tenir compte.

On me dira que les repas au restaurant, le taux de taxe sur les repas au restaurant, lui, diminue de 10 % à 7 %, mais il ne faut pas oublier la taxe fédérale toujours. Donc, en réalité, votre repas au restaurant va vous coûter 7 % de taxe fédérale et 7, 5 % de taxe du Québec. Au fond, vous en êtes maintenant à 14, 5 % et la réalité, c'est une augmentation du coût des repas au restaurant de 4, 5 % pour le citoyen.

Le Président (M. Lemieux): II vous reste une minute, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Je fais un calcul tout à fait exact, M. le ministre du Revenu. Peut-être que vous avez des difficultés à me suivre, mais c'est exactement ce qui se passe. Le coût des repas vient d'augmenter de 4, 5 %, le coût des chambres d'hôtel vient d'augmenter de 14, 5 %. Je ne dis pas à partir du 1er janvier 1991, mais à partir du 1er janvier 1992. C'est là où les services seront imposés, mais on sait très bien que le présent projet de loi établit les principes sur lesquels on va appliquer la taxe de vente du Québec dorénavant, à partir du 1er janvier 1991 et 1992 pour les services.

Nous en sommes là et je pense, M. le Président, qu'il conviendrait de recevoir les économistes pour en discuter, pour voir les effets de freinage économique que comporte l'imposition d'une telle taxe.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Labelle. M. le député d'Abitibi-Est en réplique pour une durée de 30 minutes.

Une voix: Vous demandez la réplique tout de suite?

Le Président (M. Lemieux): La réplique de 30 minutes tout de suite et après, c'est en vertu de la règle de l'alternance 10 minutes, 10 minutes.

M. Bourdon: On va l'écouter au complet, nous autres.

M. Savoie: La motion... M. le Président, s'il vous plaît.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: M. le Président, on savait que les économistes étaient en faveur de l'harmonisation par le gouvernement du Québec avec la TPS du gouvernement fédéral. Ils ne pouvaient pas être contre. Comme gouvernement, tout ce qu'on fait, c'est qu'on dit que la taxe va passer de 9 % à 8 % au niveau de la taxe de vente et, au niveau de la restauration, ça va passer de 10 % à 8 %. Il y a, bien sûr, au niveau du gouvernement du Québec, une perte de revenu sur une période de trois ans. On parle d'une perte de 19 000 000 $ sur une période de trois ans avec ce processus d'harmonisation.

Deuxièmement, il faut bien comprendre que ce n'est pas une mesure nouvelle. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on prend la taxe de vente et on la modifie dans le sens que je vous ai indiqué et on l'étend aussi. On l'étend pour s'harmoniser, tout simplement pour faciliter les choses pour les Québécois, tel que demandé, hein? Le processus d'harmonisation a été demandé par une vingtaine d'associations, de commerçants, d'hommes d'affaires, de professionnels du Québec. Ça nous a été demandé au courant de l'été. On a eu des

lettres officielles nous disant: On requiert l'harmonisation. Évidemment, après un examen très détaillé de la situation, il a été convenu que, oui, on n'avait pas le choix, que c'était peut-être regrettable de prendre à ce moment-ci cette orientation, mais que finalement on n'avait pas le choix. Face à la situation de fait, on doit assumer nos responsabilités, poser les gestes qui s'imposent. Elle a été décidée. C'est une décision gouvernementale. Je suis convaincu que c'est une décision de société de prendre cette direction-là pour aller de l'avant.

Je ne connais aucune firme de comptables agréés - je parle d'une firme importante - qui s'oppose à cette mesure-là. On n'en connaît aucune. J'ai fait des démarches. Je n'en connais pas une. Je ne connais pas non plus une firme importante au niveau des avocats qui nous soit arrivées et qui nous ait dit: Comme orientation, il y a des lacunes, ça crée des problèmes. Il y a des difficultés, tout le monde le reconnaît, on va les travailler, on va chercher à les régler. Il y a des problèmes qui se soulèvent, mais, fondamentalement, il y a un accord de principe de l'ensemble des Québécois et des Québécoises au niveau décisionnel sur ce projet de loi. il y a eu des difficultés au niveau du livre. On l'a reconnu. Il y a eu, au niveau du livre, une certaine volonté de la part d'un certain groupe. On pourra revenir là-dessus un peu plus tard, sur le livre. Finalement, les commentaires que j'ai entendus depuis le début de l'après-midi, je trouve que c'est assez faible comme argumentation. Ça manque de sérieux, ça manque d'approche et ça manque de recherche. Franchement, ça manque de recherche.

Si, effectivement, je sentais qu'il y avait un intérêt réel de la part de l'Opposition d'avancer sur ce projet de loi-là ou d'apporter des modifications, par exemple, en permettant la présence de l'Association des économistes devant nous, je le ferais et je l'appuierais volontiers. Mais, comprenez-vous, ie problème n'est pas là. Le problème, je vous l'ai dit c'était quoi, la minute où j'ai fait mon discours sur le projet de loi. Je vous ai dit trois choses. Je vous ai dit que c'est un projet de loi dont l'impact est en quelque sorte historique. C'est un revirement majeur, puisqu'on s'enligne avec la TPS et que la TPS c'est l'introduction d'un élément relativement nouveau. Donc, il y a quelque chose là-dedans pour le citoyen que j'ai attaché à la notion de démocratique. Deuxième élément d'importance... Il y a un élément démocratique dans le sens que les taxes vont être apparentes. Elles vont être à la fin. Le citoyen va être sensibilisé à ce débat-là.

Le troisième élément, c'est que l'Opposition en tant qu'Opposition n'aurait pas joué son rôle dans ce dossier et vous me le confirmez. Le député de Pointe-aux-Trembles a parlé de Ding et Dong, ça ressemble un peu à Ding et Dong ce qui se passe ici, parce que l'Opposition utilise et va utiliser, aussi longtemps qu'elle le pourra, toutes sortes de mesures dans le but de contrer l'adoption de ce projet de loi, uniquement en tenant un discours que j'appelle purement contradictoire, contradictoire avec ce que nous allons faire, contradictoire avec elle-même, contradictoire avec ses propres orientations. Si j'avais senti qu'effectivement l'Oppostion était de bonne foi dans ce dossier-là, si j'avais senti que l'intérêt réel était là, qu'elle avait dit: On veut vous aider, on veut améliorer ce projet de loi, vos orientations, il m'aurait fait plaisir d'entendre l'Association des économistes, et les trois autres que vous voulez présenter avec d'autres motions.

À ce moment-là, étant donné que ce n'est pas le cas, étant donné que je ne sens pas ça de la part... Par exemple, je n'ai pas senti ça dans les discours. Je ne l'ai pas senti, ça me fait de la peine. Je ne l'ai pas senti et je l'ai cherché. Je pense que j'ai fait un effort pour le trouver, mais je ne l'ai pas senti. Ce que je sentais, c'était ce maintien d'une position contradictoire. On va s'opposer pour la forme. On va tenir un discours qui est contradictoire avec les orientations du Parti québécois. On va tenir un discours qui est contradictoire avec la volonté de la majorité des intervenants au niveau des taxes de vente au Québec. Il faut le rappeler. Et on va tenir également un discours contradictoire - et ça c'est ce qu'il y a de plus intéressant - avec notre propre discours. Parce que si vous vous écoutez, l'un après l'autre, vous ne dites pas la même chose, même que celui qui est le plus connaissant, évidemment, c'est le député de Labelle. Je l'avoue, il a une bonne connaissance du dossier, il présente bien sa position. C'est toujours intéressant de l'écouter, évidemment. Et c'est un peu gênant; je sens qu'il est gêné de faire ce qu'il doit faire ce soir. Je le sais, moi. Comme moi, je suis gêné. Je ne voudrais surtout pas être...

M. Bourdon: Ce que vous venez de dire, c'est vrai.

M. Savoie: Je ne voudrais surtout pas être à la télévision. Je ne voudrais surtout pas que les citoyens nous voient faire, en train de débattre un élément aussi important que ça.

M. Lazure: C'est intéressant ce que vous dites là.

M. Savoie: Oui, je l'ai dit. C'est intéressant. Je l'ai avoué, sauf que c'est un peu gênant. Je le sens qu'il est gêné. Ça, je le sens. Honnêtement, je vous le dis. Comme moi je suis un peu gêné d'être obligé d'arriver et de vous dire: Vous nous présentez une motion pour recevoir l'Association, si je sentais que c'était vrai, si je sentais qu'il y avait vraiment quelque chose là, comprenez-vous? J'en ai fait pour d'autres. Je l'ai fait.

Le Président (M. Lemieux): M. le député...

M. Savoie: Je l'ai fait. Demandez à votre députée de Chicoutimi. Je l'ai fait avec elle, au sujet des dentistes et des denturologistes. On a convenu ensemble. Oui, ça a bien été, ça s'est bien déroulé. Ça a duré deux jours. On a eu pour 17 heures de présentation. Ce n'était pas d'aucune façon requis. Tout simplement en discussion on a dit: Pour éclaircir ça on va faire ça. On s'est entendu là-dessus. Je ferais la même chose avec vous autres, je vous le dis, je ferais la même chose avec vous autres si je sentais qu'on n'avait pas pris cette tournure. La minute où j'ai déposé le projet de loi, je vous l'ai dit. C'est ce que vous allez faire, je le savais que vous alliez faire ça. Vous êtes devenus finalement les sénateurs de l'Assemblée nationale dans votre position. Ça n'a pas de bon sens et c'est gênant surtout à un moment où on parle un peu plus de souveraineté-association...

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de Verdun. M. le député de Saint-Louis là, s'il vous plaît.

M. Savoie: ...où on parle un petit peu plus de souveraineté...

M. Bourdon: M. le Président, j'invoque le règlement. Quand on nous compare aux sénateurs...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, ce n'est pas un propos antiparlementaire...

M. Bourdon: Non, de dire qu'on n'est pas élu? On a été élu, M. le Président. Les sénateurs ne le sont pas.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles...

M. Bourdon: Et le député d'Abitibi-Est ne le sera peut-être pas à la prochaine...

Le Président (M. Lemieux): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: Justement les interventions, malheureusement, et là je suis sincère, vos interventions ce soir n'ont rien fait pour faire avancer le débat non plus. Je veux dire, vous jouez le jeu et je suis bien prêt à jouer le jeu moi aussi et je tâche de jouer le jeu en faisant mes lectures et en voulant me concentrer sur d'autres choses et en essayant d'utiliser mon temps d'une façon intelligente. Vous comprendrez qu'il y a des limites quand même à faire cet exercice, à faire ce qu'on appelle en langage parlementaire, qui était certainement très valable aux dix-septième, dix-huitième, dix-neuvième siècles, j'en conviens, qu'on appelle un "filibuster" et qui impose par la suite, à un moment ultérieur, l'utilisation d'une autre motion qu'on appelle de clôture. Franchement, je trouve que le citoyen qu'on veut défendre, l'intérêt de la famille qu'on veut protéger sont mal desservis par nos interventions de ce soir, par vos motions de ce soir. J'ai de la misère avec ça.

Si on s'y était pris autrement, on a encore le temps de s'y prendre autrement, on commence cette procédure-là. Vous me dites l'Association des économistes du Québec... Repensez à votre affaire, arrivez-moi avec une nouvelle proposition et, je vous le dis, la porte est ouverte. Pour le moment, c'est non et je ne peux pas me prêter à ça. Je pense que c'est partagé par mes collègues, je pense qu'ils ressentent un peu la même chose, qu'il n'y a pas une volonté réelle de faire avancer ce projet de loi là, et vous savez ce qui va arriver, hein? C'est qu'on va le passer en bloc, sans finalement bénéficier d'un échange réel à ce niveau-là, sans utiliser vraiment notre pouvoir de législateur, sans vraiment utiliser les ressources qui sont à notre disposition pour faire avancer le projet de loi. On va dire non à cette motion-là et, là, vous avez l'ordre de je ne sais pas trop qui, de je ne sais pas trop où dans votre organisme qui va nous arriver et va dire: Là, vous allez présenter une autre motion et vous allez en faire trois, quatre motions comme ça là-dessus, ce soir. Et demain, ça va recommencer sur autre chose et, finalement, le citoyen, lui, là-dedans? Son argent? Notre temps? Notre connaissance? L'utilisation? Le député de La Prairie n'est plus en âge pour faire cet exercice-là. Ha, ha, ha! Ce n'est plus un jeune homme pour continuer à siéger jusqu'à minuit, jusqu'à Noël. Ça ne marche plus cette affaire-là. Il faut qu'on utilise notre temps mieux que ça. Non, je dis ça en farce, M. le député de La Prairie, c'est de bonne guerre. Je le comprends moi aussi. Eh bien, c'est ça. Il y a un temps pour ces choses-là et on n'est plus... Il faut faire autre chose. On parle de quand même... On a combien d'années d'expérience ici ensemble autour de la table comme parlementaires, comme législateurs, comme gens qui sont supposés regarder un projet de loi. Comment pensez-vous que je me sens, moi, vis-à-vis des fonctionnaires de carrière quand ils sont en train... L'aboutissement de leur travail à ce stade-ci où c'est supposé être sanctionné par le législateur, quand on arrive avec des bouffonneries comme ça, pensez-vous que je trouve ça... C'est le première fois que je vis ça...

Le Président (M. Lemieux): Monsieur, oui, M. le député d'Abitibi-Est...

Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): ...le terme "bouffonneries", voulez-vous retirer ce terme?

D'accord...

M. Savoie: Oui, je m'excuse...

Le Président (M. Lemieux): ...parce que les parlementaires, on doit utiliser leur règlement.

M. Savoie: ...je retire le mot "bouffonneries" M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci.

M. Savoie: Mais comprenez-vous, M. le Président? C'est la première fois que je vis ça. Ça fait cinq ans que je suis élu, j'ai eu des projets de loi avant au niveau des mines... Non, non, c'est vrai. J'ai toujours eu une bonne collaboration de l'Opposition. On a toujours traversé chacune des étapes tant bien que mal, mais jamais comme ça. C'est la première fois. C'est un peu un choc culturel pour moi. J'en ai entendu parler, je l'ai suivi, mais c'est la première fois que ça m'arrive.

M. Lazure: Relaxez... (22 h 15)

M. Savoie: Oui, oui, relaxez, sauf que vous comprendrez ma frustration et je suis certain que vous avez senti la même chose, lorsque vous avez été ministre de la santé et qu'on a fait la même chose, on a fait un "filibuster" et que vous avez passé des nuits blanches à faire ça, à participer à ce rituel dépassé, démodé, inutile et improductif. Alors, c'est ça. Moi, je vous laisse avec ça. Vous en ferez ce que vous voudrez. Moi, je vous dis que la porte est ouverte chez moi pour faire quelque chose de constructs Je suis certain que c'est partagé par mes collègues. Je suis certain que c'est partagé par le président et je suis certain que c'est partagé par tout le monde qui nous écoute ce soir.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député d'Abitibi-Est. Est-ce que c'est Mme la députée de Terrebonne? M. le député de Rousseau, s'il vous plaît. Mme la députée de Terrebonne m'a demandé la parole. Vous avez droit à 10 minutes, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Sur la motion du député de Labelle.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Oui. M. le Président, je comprends difficilement l'attitude du ministre sur cette motion. Il a parfaitement raison de se sentir gêné, parce que les propos qu'il a tenus, M. le Président, certains de ses propos étaient carrément antiparlementaires comme vous l'avez bien souligné. Son attitude aussi, M. le Président. Parce que, depuis le début de nos travaux ici, on réussit facilement à faire rire le ministre. Parce que, pour lui, c'est un jeu. Il nous l'a bien dit, mais j'espère qu'on va réussir aussi facilement à le convaincre de l'importance de ce projet de loi-là. Et le seul ordre, M. le Président, que comme députés, on accepte, c'est l'ordre de la population qui est contre ce projet de loi. C'est le seul ordre qu'on accepte et donc on utilise les moyens pour l'empêcher ce projet de loi-là, parce que la population est contre.

C'est effectivement un événement historique, un impact majeur. Et, si le ministre pense que son projet de loi c'est un événement historique et un impact majeur, il devrait commencer par accepter de recevoir des spécialistes, c'est-à-dire l'Association des économistes du Québec, puisque ce projet de loi va avoir un impact majeur sur l'économie. Si c'est un événement historique et qu'il veut être conséquent avec ce qu'il nous dit, eh bien! qu'il commence par rencontrer l'Association des économistes du Québec. Il nous dit aussi que c'est...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. M. le député de Saint-Louis. O.K. Ça va. S'il vous plaît.

M. Chagnon: Je suis là, M. le Président, ne soyez pas inquiet.

Le Président (M. Lemieux): Parce qu'il y a des murmures. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît. J'aimerais qu'on puisse bien entendre les intervenants. Ça fait deux ou trois fois. Mme la députée de Terrebonne. Non, ça va. Allez-y, Mme la députée. J'ai vu là, le regard furibond de Mme la députée de Terrebonne. C'était compréhensible. Allez-y, madame.

Mme Caron: II n'y a rien pour me faire perdre le fil, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Non, mais une question de respect mutuel. Respecter les droits des parlementaires. Allez-y madame.

Mme Caron: Deuxième point, on nous dit que c'était démocratique pour les citoyens, effectivement, parce qu'ils vont voir la taxe, mais ils vont être obligés de la payer. Ça, c'est un petit peu moins démocratique. Et douter de la bonne foi de l'Opposition, le ministre nous dit qu'il n'a pas senti la bonne foi de l'Opposition, eh bien, c'était très difficile de la sentir, puisqu'il a passé son temps à lire, M. le Président.

Donc, la motion qu'on a devant nous, c'est de recevoir l'Association des économistes du Québec. C'est loin d'être une demande inutile, puisque tout le monde sait que, du côté des économistes, on ne fait pas l'unanimité par rapport à ce projet de loi-là, contrairement à ce que le ministre nous a dit. Guy Mailloux, dans un article sur la TPS, spécial économique, définit clairement la controverse concernant la TPS et concernant l'harmonisation que le ministre nous propose aujourd'hui. Contrairement au ministre, M. Mailloux a jugé bon, lui, d'entendre le point de vue des économistes, chose que le ministre ne fait pas, absolument pas. Il est allé interviewer cinq économistes et professeurs à l'Université du Québec à Montréal. Contrairement à ce qu'on nous dit, les économistes sont loin d'être d'accord avec le projet de loi et je vais me permettre de les citer. Diane Bellemare, économiste, professeur à l'Université du Québec à Montréal nous dit: "Une taxe sur la consommation sera toujours plus injuste qu'un système d'impôt sur le revenu basé sur une définition exhaustive du revenu et ne comportant aucune exemption, aucun abri fiscal permettant d'échapper au fisc. Non, cette taxe sur la consommation est régressive pour la classe moyenne. J'aurais souhaité que les secteurs mous comme le meuble, l'édition, le vêtement, bénéficient sinon d'une exemption, au moins d'un taux plus bas. Une TPS à taux variable comme c'est le cas en Europe est plus difficile à appliquer, mais demeure plus équitable". Elle ajoute: "Bien qu'il n'y ait jamais vraiment de bon temps pour imposer une nouvelle taxe, je crois que le gouvernement fait une erreur d'imposer cette taxe qui est inflationniste et récessionniste au moment où le Canada est plongé dans une récession. La TPS sera très lucrative pour le gouvernement et il est à prévoir que cette taxe ne restera pas très longtemps à 7 %".

Puisque notre gouvernement tient à s'harmoniser, bien sûr qu'il va changer son taux lui aussi. Donc, elle va monter comme cela s'est produit dans tous les pays ayant un système de taxe sur la valeur ajoutée. D'autre part, le gouvernement Mulroney commet l'erreur d'imposer cette taxe sans avoir obtenu le consensus de ses partenaires sociaux et économiques. Il a perdu, à cause de cela, toute sa crédibilité et c'est ce que refait le gouvernement que nous avons devant nous, M. le Président, parce qu'il refuse d'entendre.

M. Yves Rabeau, également économiste, nous dit: "La TPS ne devrait pas jouer un rôle inflationniste très important, bien qu'elle contribuera très certainement à une certaine augmentation des prix à la consommation. " Lui aussi nous dit: "Je suis assez sensible à l'argumentation du monde de l'édition et je crois que le gouvernement devra, d'une façon ou d'une autre, corriger les effets négatifs de la TPS pour certains secteurs. " Alors, je pense qu'il serait peut-être important d'entendre les économistes nous dire les secteurs qu'il faudrait toucher, quels secteurs il faudrait faire varier.

Même son de cloche du côté de l'économiste Pierre Fortin: "La consommation en biens et services devrait, à court terme, coûter un peu plus cher aux consommateurs. On ne peut dire de cette taxe à la consommation, qui touche uniformément tous les produits et services, qu'elle est régressive ou progressive, parce que son effet sera directement lié au revenu consacré à la consommation. " Là-dessus, l'ex-ministre du Revenu, lui, disait: Vous pensez peut-être que plus un contribuable riche consomme, plus il paiera de TPS, et cela n'est que juste. En apparence, on peut le penser, mais en pratique il faut constater qu'il y a une certaine limite à l'achat de biens pour usage personnel, à tout le moins pour satisfaire les besoins de la vie même avec grand luxe. L'observation des statistiques fiscales démontre qu'au-delà d'une certaine consommation le contribuable riche investit dans les placements, les affaires et sans qu'on observe une consommation effrénée.

Les avis sont partagés, ce dont le ministre du Revenu ne semble absolument pas se rendre compte, et il est important que les économistes viennent nous dire, tout comme le disait M. Rabeau, qu'il y a peut-être certains secteurs où il y aurait des effets négatifs qu'il faudrait protéger, comme nous le disait Diane Bellemare, comme le disait également l'économiste Clément Gignac qui, lui aussi, nous confirme que, même si le taux de la taxe provinciale sera porté de 9 % à 8 % en janvier prochain, l'extension de l'assiette existante à tous les biens, tels vêtements, chaussures, livres et meubles exercera une pression à la hausse sur les prix.

Or, quand le ministre nous dit que les économistes sont tous d'accord avec lui, avec ce projet de loi là, eh bien, M. te Président, c'est à mon tour de lui dire qu'il n'a pas fait tellement de recherches. Il a lu beaucoup durant cette commission, mais je n'ai pas l'impression qu'il a lu beaucoup les avis des économistes. Il aurait peut-être dû le faire, il ne nous aurait peut-être pas donné les commentaires qu'il nous a donnés tantôt.

M. le Président, ce que l'Opposition fait ici, c'est un travail pour répondre non à un ordre d'un esprit supérieur, comme semble nous le dire le ministre du Revenu, mais bien pour répondre à la demande de nos citoyens et citoyennes dans nos comtés qui nous ont demandé, tout comme les centrales syndicales, tout comme l'industrie des manufacturiers, du vêtement, du meuble, tout comme certains économistes, de faire une lutte farouche contre cette loi qui est tout à fait injuste. Et de ne même pas prendre le temps, M. le Président, de lire les avis des économistes, de préférer lire les catalogues, M. le Président...

M. Lazure: De voyages.

Mme Caron: ...je pense que c'est évident qu'on ne fait pas avancer le débat et qu'on tient des discours dans le style de ce qu'on nous a donné tantôt, M. le Président. Je vous avoue que, pour me préparer à cette commission parlementaire, j'ai préféré lire des documents quelque peu plus sérieux que ce que fait le ministre présentement. Et ça m'amène à vous dire qu'il devrait entendre davantage les économistes. Puisqu'il refuse de les lire, il pourrait peut-être les recevoir et leur poser des questions. SI je pousse son argument jusqu'au bout, ces économistes-là, puisqu'il est si certain qu'ils sont d'accord avec son projet de loi, pourraient peut-être arriver mieux que le ministre à convaincre l'Opposition que son projet de loi est bon. Alors, si on veut pousser son argument jusqu'au bout, M. le ministre, il devrait accepter qu'on reçoive l'Association des économistes du Québec et, peut-être, à ce moment-là, que l'Opposition sera convaincue de la justesse de son raisonnement.

Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de Terrebonne, une minute, s'il vous plaît. Une minute, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Peut-être que les arguments des économistes seront plus frappants et plus convaincants que ceux du ministre, puisqu'il n'a aucunement utilisé son temps de parole pour nous donner des arguments pour défendre son projet de loi, mais a toujours utilisé son temps de parole tout simplement pour douter de la bonne foi de l'Opposition. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la députée de Terrebonne. Est-ce qu'il y a des interventions du côté ministériel? Il n'y a pas d'intervention. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt tout à l'heure le ministre du Revenu qui nous a fait part de son point de vue sur la motion déposée par le député de Labelle.

M. le Président, j'essaierai, de façon très calme et très sereine, d'essayer de mettre un certain nombre d'éléments en perspective dans les 10 minutes qui me sont consacrées pour intervenir sur cette motion, pour dire de façon, je crois, honnête que, si comme le disait le ministre tout à l'heure dans son intervention nous sommes de mauvaise foi, je dois cependant lui dire que lui, de son côté, les gens de sa formation ont toujours manifesté leur volonté de ne pas consulter les gens du milieu. Ça, je pense qu'il ne peut pas le nier. Qu'on prenne, par exemple, l'attitude et la façon dont l'annonce d'une imposition d'une TVQ a été faite en cette Chambre. D'aucune façon on nous a remis, à nous parlementaires, des documents justifiant la nécessité de l'harmonisation, justifiant la nécessité d'imposer le milieu du livre.

Nous nous disons, M. le Président, que si on a peut-être réussi à le faire pour le livre, il serait peut-être tout aussi urgent qu'on le fasse pour d'autres secteurs. Le député de Labelle a parlé du milieu touristique tout à l'heure. On pourrait parler d'autres secteurs du milieu culturel, que ce soit le théâtre, que ce soit le cinéma, que ce soit les concerts ou tout ce qui a trait au spectacle, où on aura une taxe, 25 % d'imposition, M. le Président.

Je dis de façon très candide au ministre du Revenu que, si ses fonctionnaires ont autre chose à faire ce soir que de nous écouter, moi, je pourrais très bien lui dire aussi que moi, j'aimerais bien être ailleurs qu'ici ce soir à 22 h 30, que d'être autour de la table et d'essayer de faire valoir mon point de vue. Nous le faisons, non pas parce que nous sommes forcés de le faire, nous sommes tous libres de nos gestes et de nos propos. Nous le faisons, parce que nous sommes convaincus du bien-fondé de notre point de vue. Je crois que l'erreur fondamentale du ministre, c'est de croire que nous sommes seuls à vouloir nous battre.

M. le Président, on évoquait tout à l'heure... Dans le fond, il dit: Si je refuse et si je n'accepte pas la motion du député de Labelle, c'est parce que je ne sens pas chez vous qu'il y a une volonté de faire progresser le débat. M. le Président, je peux vous dire que, de notre côté, on n'a pas senti beaucoup de volonté du ministre... on n'a pas senti d'ouverture à tout le moins de sa part.

On regarde ce qui se passe ailleurs, particulièrement dans d'autres provinces canadiennes. Quelle autre province a décidé aussi rapidement de s'harmoniser? Pas une, M. le Président. Pas une. Où était l'urgence? Où était l'urgence? Je crois dans ce contexte qu'il y a un certain nombre de questions légitimes que nous nous posons. Je crois que l'éclairage de l'Association des économistes pourrait être pertinent. Que le ministre réponde à tout le moins à nos questions ou qu'il nous fasse parvenir de la documentation, sans doute produite par les fonctionnaires de son ministère. Quelles vont être les conséquences, par exemple, et jo le soulevais tout à l'heure dans mon intervention, de l'imposition d'une TPS pour les villes qui sont frontalières des États-Unis ou des provinces ontariennes? Qu'est-ce qui va arriver? Quelle perte de revenu le gouvernement aura-t-il à subir des consommateurs qui iront magasiner en Ontario ou qui iront magasiner aux États-Unis? Où était l'urgence, M. le Président? (22 h 30)

Quand je dis que nous ne sommes pas les

seuls à nous battre, à vouloir défendre notre point de vue, par exemple, l'ancien ministre du Revenu et député de Montmorency trouvait que c'était une erreur tellement fondamentale qu'il a décidé de démissionner, de quitter son poste au cabinet, de quitter de façon très claire la vie politique.

Donc, M. le Président, je ne me sens pas du tout coupable d'être ici ce soir et d'essayer de faire valoir un point de vue que nous jugeons légitime. Si le ministre, de son côté, répondait à tout le moins à nos interrogations, s'il répondait à nos interrogations. S'il pouvait peut-être nous rassurer. Comme nous l'avons dit et comme le ministre le souligne, personne ne nie qu'il existe à l'heure actuelle une taxe de vente. Personne ne nie que la taxe de vente du Québec, par exemple, sur les repas servis au restaurant diminuera, mais il faut aussi tenir compte du contexte et de la TPS fédérale. Il y aura des conséquences sévères sur notre économie. Par exemple, j'écoutais tout à l'heure et je voyais fe président de cette commission, lorsqu'on parlait de l'importance des conséquences pour le milieu touristique, 15 % sur une chambre d'hôtel, le président semblait un peu étonné même. On vous écoutait tout à l'heure, vous sembliez étonné de l'impact et de l'ampleur de cette nouvelle taxe. Il y a matière à réflexion, M. le Président. Ce que nous demandons, de façon très simple, sans aucune prétention, sans aucune partisannerie, c'est d'essayer d'aller un peu plus au fond des choses.

Les Québécois et Québécoises voient aussi ce qui se passe à la Chambre des communes à Ottawa ou voient ce qui s'est passé au Sénat et ils savent, cependant, que les parlementaires ont eu l'occasion de questionner bien des intervenants. Si je ne me trompe pas, et on me corrigera si je suis dans l'erreur, il y a eu un comité de la Chambre des communes qui s'est penché sur la question. Les parlementaires ont eu l'occasion de recevoir l'éclairage de spécialistes qui ont pu soit confirmer ou infirmer leurs craintes. Mais, à tout le moins, je crois que nous sommes légitimés de demander à une association comme celle des économistes ou à tout autre groupe d'experts de bien venir vouloir apporter aux parlementaires, membres de cette commission, un éclairage. Je me dis que c'est à la fois dans l'intérêt, bien sûr, des membres de l'Opposition, mais aussi dans l'intérêt de tous les membres de cette commission. Où est l'urgence? Pourquoi ne le ferait-on pas?

Bien sûr, M. le Président, il y a une objection de fond que nous manifestons quant à l'harmonisation, en décidant d'adopter la même assiette fiscale et aussi en décidant d'adopter un même taux peu importe le produit ou le service. On a vu que dans d'autres pays, il y a différents moyens ou d'autres solutions qui ont été mises de l'avant pour aborder un problème sérieux, nous en convenons. Notre capacité concurrentielle à l'échelle internationale, oui, c'est impor- tant. Oui, la taxe de vente dans sa forme actuelle est régressive et affecte notre capacité concurrentielle. Tout le monde l'admet. Ce que nous disons cependant, c'est que la solution présentée par le gouverment libéral, à notre avis, n'est pas la meilleure et qu'il y aurait moyen de chercher à bonifier le projet de loi que nous étudions ce soir. Et nous croyons que l'Association des économistes pourrait apporter un éclairage pertinent.

M. le Président, s'il y a bien une situation et s'il y a bien quelqu'un qui doit se sentir inconfortable ce soir, c'est sans doute le ministre du Revenu, qui lui a à faire une job de bras. La décision a été prise par le ministre des Finances. Il est arrivé dans un ministère à la dernière minute, on le lui a donné après la démission du député de Montmorency et il est pris pour faire passer ce projet de loi. Et je suis convaincu qu'il a reçu des ordres, lui aussi, fui disant de ne pas accepter d'amendements qui modifieraient le fond du projet de loi. On a juste à voir de quelle façon les gens de l'industrie du livre ont dû se démener pour amener fe gouvernement à fa raison, comment les députés libéraux ont dû se démener, comment les membres du conseil général du Parti libéral du Québec ont dû se démener pour amener le ministre des Finances à changer sa position. M. le Président, je parlais à des parlementaires qui ont plus d'expérience que moi, qui sont ici a l'Assemblée nationale depuis plus longtemps, c'est rare qu'on voit un ministre des Finances changer de position. C'est rare que, sous la pression des députés qu'on dit d'arrière-ban ou sous la pression d'une formation politique, on voit un ministre changer d'opinion. S'il l'a fait, M. le Président, sur le livre, c'est parce qu'il avait des raisons valables. Et il y a des raisons tout aussi valables qui mériteraient qu'on revoie la politique à l'égard des autres industries culturelles, de l'industrie touristique. Je suis convaincu que des gens viendraient témoigner de cette importance-là. Pourquoi avoir ouvert une porte uniquement pour le livre?

Le Président (M. Lemieux): Trente secondes, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: En 30 secondes, M. le Président. Je ne me sens pas du tout coupable de faire le travail que je fais ici ce soir. Je suis même content de le faire, parce que je sens que le débat que nous menons est un débat de fond, un débat important. Pour avoir entendu les interventions de l'ensemble de mes collègues, je crois qu'il n'y avait pas de bouffonneries, loin de là. Nous essayons tous de faire un travail sérieux et nos interventions, je crois, démontrent jusqu'à quel point nous avons fait une recherche importante.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Et je m'attendrais des collègues libéraux qu'ils fassent la même chose. Ils en reçoivent des représentations, qu'ils témoignent des représentations qu'ils reçoivent. Alors, M. le Président, je conclus là-dessus, nous aussi nous voulons progresser dans le débat. Nous aussi nous voulons faire avancer le débat, mais faites preuve d'un peu d'ouverture.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de

Gouin, vous avez terminé, merci. M. le député de Champlain. Vous n'êtes pas membre de cette commission, ça va, merci. Est-ce que M. le député de Pointe-aux-Trembles... Il n'y a pas d'intervention ministérielle? M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: Oui. M. le Président, c'est particulier d'entendre le ministre parler et dire qu'il est déçu de l'Opposition, nous dire en somme, qu'on arrive à la dernière minute pour faire entendre l'Association des économistes du Québec. J'aimerais lui rappeler que cette même commission, M. le Président, la commission du budget et de l'administration, s'est vue soumettre par mon groupe parlementaire il y a un an un mandat d'initiative pour entendre tous ceux dans la population du Québec qui auraient eu quelque chose à dire sur la TPS. Malheureusement, les ministériels n'ont pas retenu cette proposition-là, il y a un an. Nous proposions d'entendre tous ceux qui auraient eu quelque chose à dire sur la TPS. Ce n'était pas encore un projet de ce gouvernement-ci, c'était le projet du fédéral et on disait, entre Québécois, qu'on devrait regarder ce que ça ferait. Ça ne s'est pas fait. Il n'est pas trop tard pour le faire, M. le Président.

Ce qui me frappe aussi dans le discours du ministre du Revenu et du ministre des Finances, c'est qu'ils disent: Les deux premières années du régime de TVQ, le gouvernement ne fera pas une cent avec ça. Bien, on dirait que c'est du vice pour le plaisir de mal faire, M. le Président. On se dit: Ils le font, ils vont se mettre la population à dos. Déjà ce gouvernement qui traîne derrière dans les sondages, dans les intentions de vote - les derniers sondages nous donnent 97 sièges advenant une élection - s'en va au bâton avec un projet...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles. De la pertinence, s'il vous plaît.

M. Bourdon: La pertinence est simple, M. le Président. Je mets le gouvernement en garde de perdre ses élections à cause de cette taxe-là.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce opportun ou non d'entendre l'Association des économistes?

M. Bourdon: Bien oui, qu'il écoute les économistes plutôt que d'écouter le fédéral pour ne pas perdre le pouvoir. Ça ne serait pas drôle d'être 24. Dans les derniers sondages, vous étiez à 24.

Une voix: Vous pariez d'expérience.

M. Bourdon: Alors, M. le Président, oui, on sait ce que c'est que de perdre le pouvoir. Et, M. le Président, on sait ce que c'est l'arrogance d'un deuxième mandat. Le ministre lit le journal ostensiblement. Il n'écoute pas quand on parle et, après ça, il dit qu'il ne nous comprend pas. Alors ça, M. le Président, je pense que c'est frappant. Qu'on réponde donc à nos questions! Comment le ministre peut-il me dire qu'il y a une quelconque justice? Qu'un salarié à 20 000 $ qui achète une auto de 15 000 $ paie le même montant qu'un salarié à 60 000 $ qui achète une auto. Les crédits, M. le Président, il faudrait justement en discuter avec l'Association des économistes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourdon: Les crédits là, on se fait dire toutes sortes de sornettes par le gouvernement. Crédits d'impôt aux personnes âgées pour l'impôt foncier, scolaire et municipal, elles ne récupèrent pas 25 % de ce qu'elles ont donné, M. le Président. On le demandera aux économistes: Est-ce qu'une taxe...

Le Président (M. Lemieux): Je dois vous féliciter, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Je ne vous ai jamais vu revenir d'une manière aussi rapide à la pertinence. Je vous en félicite.

M. Bourdon: Absolument, M. le Président. Et on pourrait demander à l'Association des économistes: Qu'est-ce qu'il y a de juste dans le fait qu'une personne à 20 000 $ par année, pour un même produit, paie exactement la même taxe qu'une personne qui en fait 60 000 $? Ça, c'est une question. Comment se fait-il qu'on donne des crédits, qu'on remette de l'argent aux plus mal pris, ça va jusqu'à 25 000 $, et rien pour la classe moyenne? Comment ça se fait? Une taxe sur la valeur ajoutée peut s'admettre, M. le Président, si en même temps on révise l'impôt sur le revenu pour le rendre plus juste et qu'on arrête d'avoir des abris fiscaux, M. le Président. Il y a combien de contribuables québécois gagnant plus de 100 000 $ par année qui ne paient pas un sous d'impôt sur le revenu? Les derniers chiffres canadiens, M. le Président, c'était 8000, donc notre part au Québec, c'est 2000. Il n'y a rien dans ça qui va aller à rencontre et il y a les entreprises aussi que la nouvelle TVQ va exempter d'à peu près 500 000 000 $ de dépenses.

Quand on dit qu'après deux ans, M. le

Président, le gouvernement ne fera pas plus d'argent, il y a un transfert d'un demi-milliard qui se fait des entreprises aux individus, on pourrait demander aux économistes: Est-ce vrai comme le dit souvent le chef de l'Opposition officielle, que ce n'est pas le temps de taxer la consommation lourdement? M. le Président, ils doivent connaître ça les fabricants de meubles et les fabricants de vêtements qui disent que l'effet va être catastrophique? Est-ce que les économistes ne pourraient pas répondre à la question: Est-ce le temps, quand on sait que 59 % du produit intérieur brut au Québec est fait des dépenses des ménages, au moment où les gens voient le taux de chômage monter et vivent une récession, de leur rendre la plupart des produits plus chers qu'avant? Ce sont des questions qu'on aurait pu poser à des économistes il y a un an, M. le Président. Les ministériels ont dit non. La TPS, je me rappelle encore les arguments, M. le Président, Us disaient: La TPS c'est le fédéral, c'est mauvais, on ne s'en occupe pas parce que ce n'est pas nous autres, c'est le fédéral.

Et le pire du projet qui est devant nous, M. le Président, c'est qu'il n'y a rien qui a été fait pour amener le fédéral a composer et à tenir compte des réalités. Il y a des projets qui ont été mis de l'avant comme de préconiser que le Québec dise au fédéral: Bon, ça pourrait rapporter votre TPS au Québec un taux moyen de 7 %, mais laissez-nous l'adapter, le moduler. Ce n'est pas ça qui a été demandé. Le ministre des Finances, à l'insu du ministre du Revenu, a fait une entente avec le fédéral disant: On va faire exactement comme vous autres. Il y a juste le livre qui est passé à côté. Mais à part ça, c'est exactement pareil au 1er janvier 1991, et complètement pareil au 1er janvier 1992 où le Québec, en plus, va faire la "collecte" pour le fédéral, à sous-contrat. Il va être un sous-traitant du fédéral et notre ministère va être en pratique au moins à moitié gouverné par des directives fédérales. Quelle affirmation nationale! Quel souverainisme en douleur, en devenir qu'on a devant nous!

Une voix: Es-tu un "affirmationniste"?

M. Bourdon: Ils nous disent... Non. Ils nous disent finalement, M. le Président, et ça le ministre des Finances... Rappelez-vous le discours d'il y a une semaine du ministre des Finances, M. le Président, qui disait: Les caisses enregistreuses ne permettent pas d'abolir la taxe sur le livre et, en plus, si le fédéral l'enlevait, je l'enlèverais. Il y a eu un conseil général, il s'est fait dire que c'était des sornettes. Devant la pression de son parti, il a enlevé la taxe sur le livre. Alors, les caisses enregistreuses ont-elles changé depuis une semaine? Pourquoi n'a-t-il écouté personne? Et l'impact sur l'économie, c'est une évidence, M. le Président. Les produits vont être plus chers pour tout le monde le 1er janvier et déjà les ménages ont tendance à consommer moins. Ça a déjà un impact sur l'économie. (22 h 45)

Je suggérerais aux ministériels dans leur comté de parler aux commerçants de ce temps-là pour connaître leur état d'âme. Ça ne vend pas, M. le Président. On nous dit: On est au début de décembre et il n'y a rien qui laisse présager la fièvre habituelle d'achats pour Noël. Qu'est-ce que ça va être à partir du 1er janvier où ça va coûter encore plus cher? Et qu'est-ce qu'on répond à l'argument? Que si l'abolition de la taxe de vente en 1978 a stimulé les ventes d'électroménagers, de meubles et de vêtements, qu'est-ce que ça va être de les augmenter? Dans le temps, on les avait réduits de 9 %. Qu'est-ce que ça va être de les augmenter de 15,56 %? Le chef de l'Opposition avait raison de dire: Au moins, retardez ça de 6 mois. Et dans ça on pourrait dire, nous: Le risque électoral est énorme, et vous dites que ça n'apportera rien.

Le Président (M. Lemieux): Une minute, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: Alors, à votre fait, il n'y a que des inconvénients. Alors, s'il n'y a que des inconvénients, abandonnez-le, à moins que ce ne soit que le Parti libéral du Québec, congénitale-ment, est incapable de faire autre chose que ce que le fédéral fait. Finalement, c'est la soumission tranquille qui anime ce parti, qui nous a pourtant donné a une autre époque la Révolution tranquille. Là, c'est la soumission tranquille, de dire: On ne le fait pas parce qu'on est d'accord, on le fait parce qu'Ottawa le fait et que nous autres on le singe. Sauf pour le livre.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député des îles et après je reviens à l'Opposition. M. le député de Saint-Louis a demandé la parole. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Georges Farrah

M. Farrah: Merci, M. le Président. Le problème qui existe à faire venir l'Association des économistes ici, c'est qu'à entendre le député de Pointe-aux-Trembles, on va l'envoyer suivre un cours d'économie avant parce qu'il ne comprendra pas les économistes lorsqu'ils vont venir.

Une voix: C'est ça.

M. Farrah: À la lumière des commentaires qu'il vient de nous donner, dont il vient de nous faire part, quand même que l'Association des économistes serait ici, je pense qu'il ne semble pas comprendre grand-chose à l'économie, M. le Président.

M. Bourdon: Faites-les venir, on verra.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous plaît.

M. Farrah: Dans le sens suivant, c'est que lorsque le député de Pointe-aux-Trembles dit: Bon, bien, il n'y a pas de différence entre un salarié à 20 000 $ et un à 60 000 $ eu égard à la TVQ, c'est totalement faux. Il y a une différence énorme, M. le Président. C'est que le salarié à 20 000 $ a un remboursement de taxe, il faut quand même le dire, M. le Président. Alors, c'est totalement incorrect ce que le député de Pointe-aux-Trembles vient de mentionner. Un autre élément qu'il faut relever, c'est l'équité. Alors, lorsque le député de Pointe-aux-Trembles parle de ceux à 100 000 $, dans le régime actuel, souvent les gens qui font 100 000 $ par année ne paient pas de taxes, ont beaucoup d'exemptions, de choses et d'autres, ne paient pas d'impôt, disiez-vous, justement d'amener une telle taxe, M. le Président, en termes d'équité, c'est que ces gens-là consomment davantage parce qu'ils ont plus d'argent. Alors voilà un moyen, M. le Président, de faire en sorte d'aller chercher de l'impôt chez les plus riches pour le redistribuer équitablement à l'ensemble des consommateurs et des consommatrices.

Alors, cela dit, M. le Président, pour toutes ces raisons, je ne vois pas pour quelle raison nous devrions inviter l'Association des économistes, compte tenu de l'incompréhension chronique dont témoigne le député de Pointe-aux-Trembles. Alors, je lui suggère fortement d'aller suivre un cours, peut-être aux HEC avec le député de Labelle qui a été... Dans ce sens-là, M. le Président, on verra, peut-être pour un autre projet de loi, si on invite l'Association des économistes, on pourra l'inviter, mais je pense que c'est prématuré, compte tenu de l'incompréhension chronique du député de Pointe-aux-Trembles.

Alors, cela étant dit, M. le Président, je demanderais le vote sur la motion proposée par le député de Labelle.

Le Président (M. Lemieux): Un instant, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: J'avais demandé la parole.

Une voix: Dans le micro.

M. Lazure: Oui, dans le micro.

Le Président (M. Lemieux): Considérant l'article 203 et que le député de La Prairie de même que le député de Saint-Louis m'avaient demandé la parole, je vais rejeter d'office la motion du député des Îles-de-la-Madeleine, non pas parce que la motion de fond se prolonge indûment, mais parce que j'en arrive à la conclusion que les droits des députés seraient peut-être lésés par une mise aux voix immédiate. En vertu de l'article 203 du règlement, allez-y, M. le député de La Prairie.

M. Farrah: M. le Président, donc la motion n'est pas recevable?

Le Président (M. Lemieux): Je ne dis pas qu'elle n'est pas recevable, je dis qu'elle est recevable mais qu'elle est rejetée en vertu de l'article 203.

M. Lazure: Alors, est-ce que j'ai la parole?

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Moi, je dois dire jusqu'à quel point je suis surpris de l'intervention du ministre du Revenu. J'ai écouté attentivement toutes les interventions, y compris la sienne. J'ai appris des choses en entendant mon collègue de Labelle, ma collègue de Ter-rebonne, mon collègue de Pointe-aux-Trembles et celui de Gouin, mais, à écouter le ministre du Revenu, je commence à comprendre maintenant pourquoi il est si distrait. Il lit les journaux, il lit les revues de jouets, il passe son temps à placoter à gauche et à droite, il mange, il fait toutes sortes de choses, sauf écouter les interventions. Il met en doute le sérieux de l'Opposition quand nous demandons des consultations, mais c'est la dernière chose qu'il devrait faire, parce qu'il devrait se rendre compte que c'est une demande tout à fait logique. Sur un projet de loi aussi fondamental, jamais depuis que je suis en politique, je n'ai vu si peu de consultations. Je le dis très sérieusement et je mets le député d'Abrtibi-Est, nouveau ministre du Revenu, au défi de me trouver un autre projet de loi qui ait autant de répercussions au plan fiscal, au plan des taxes, des impôts et qui ait eu si peu de consultations. Je le mets au défi. Si, pour une minute, il peut prendre quelque chose au sérieux, mais, là, je commence à en douter, je le vois toujours rire depuis qu'on a commencé nos séances.

Une voix: II est jovial. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: C'est peut-être un disciple du jovialisme, peut-être, mais le député d'Abitibi-Est... Je pense que c'est contagieux le jovialisme du député d'Abitibi-Est, le député de Vanier est pris d'une crise aiguë de jovialisme, lui aussi.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M.

le député de La Prairie, c'est involontaire.

M. Lazure: Je vais tenter de continuer. Ces gens-là, en face de nous, M. le Président - je ne vous inclus pas, évidemment, je respecte la présidence...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député.

M. Lazure: ...mais je m'adresse à vous et je vous parle de vos collègues qui sont nos vis-à-vis - manquent totalement d'esprit démocratique. Ils ont applaudi le geste de leur ministre des Finances qui a eu l'hypocrisie - je pèse bien mes mots, l'hypocrisie - de nous présenter un projet aussi important lors d'une session spéciale d'une journée et qui a eu le culot de refuser des consultations. Le ministre du Revenu a le même culot. L'Association des économistes pourrait...

M. Farrah: Question de règlement, M. le Président.

M. Chagnon: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Oui, j'ai compris. 35, 6, le mot "culot". D'accord.

M. Lazure: Du culot, ce n'est pas antiparlementaire du tout, du tout.

M. Chagnon: M. le Président, on ne peut pas imputer à un député des motifs qui sont indignes comme ceux dont on parle: l'hypocrisie. Vous avez dit et je cite: Je me répète, hypocrisie. On impute un motif au ministre des Finances qui est absolument...

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le député de Saint-Louis, vous avez raison. Plus de retenue, s'il vous plaît, M. le député de La Prairie, effectivement.

M. Lazure: Oui. Je veux bien retirer le mot "hypocrisie", surtout appliqué à mon ami de Paspébiac.

M. Chagnon: C'est ça que je ne comprends plus.

M. Lazure: Je veux bien le retirer...

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie.

M. Lazure: ...mais je dis qu'il a agi de façon sournoise.

M. Chagnon: Ce n'est pas diable mieux! M. Lazure: II a agi de façon sournoise.

M. Chagnon: M. le Président... M. Lazure: Ça, c'est parlementaire.

Le Président (M. Lemieux): Monsieur, c'est synonyme. C'est synonyme, M. le député de La Prairie. S'il vous plaît.

M. Lazure: Ça, c'est parlementaire.

M. Chagnon: Essayez donc quelque chose d'autre. Essayez quelque chose d'autre, M. le député.

M. Farrah: Oui. Vous avez un bon vocabulaire, essayez ça, oui. Essayez autre chose.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de La Prairie, voulez-vous...

M. Savoie: Essayez "honnête". M. Farrah: Honnête. M. Savoie: "Honnête, intègre". M. Farrah: "Transparent". M. Lazure: Très peu honnête.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie, s'il vous plaît. S'il vous plaît.

Des voix: Ah, Ah!

M. Lazure: Bon. Alors, si on cesse de m'interrompre, je vais reprendre mon intervention et j'espère que toutes les minutes où on m'a interrompu ne me seront pas enlevées.

Le ministre du Revenu a essayé de faire croire à cette commission que les économistes étaient unanimes à appuyer son projet, eh bien, c'est faux. C'est faux, ça. Puis ce n'est pas antiparlementaire de dire que c'est faux, la députée de Terrebonne l'a démontré tantôt en citant des témoignages. Le ministre du Revenu défend très mal son projet de loi.

Une voix: Oui. C'est vrai.

M. Lazure: Je pense qu'il le connaît mal. Il a été parachuté assez subitement, à la dernière minute. Je doute que ses études de notariat ou sa pratique de notaire en Abitibi l'aient bien préparé à défendre un tel projet de loi aussi complexe. J'en doute, M. le Président. J'en doute.

M. Savoie: Je faisais beaucoup de fiscalité.

M. Lazure: Lui a douté de ma capacité de pouvoir travailler jusqu'à minuit. Qu'il se rassure, le député d'Abitibi-Est. Je demande simplement qu'il soit plus présent aux discussions de notre

commission.

Une voix: Consentement jusqu'à 1 heure. M. Lazure: Si vous voulez. Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Caron: Jusqu'à demain matin si vous voulez.

M. Lazure: M. le Président, il n'y a jamais eu de débat à la commission du budget et de l'administration, cette même commission où on travaille ce soir. Dès notre première séance à l'automne dernier, nous vous avions proposé une étude spéciale du projet TPS qui, à l'époque, n'était qu'un projet fédéral. D'ailleurs, vous avez refusé, vous, du Parti libéral, un tel mandat d'initiative sous prétexte que ça ne concernait pas le Québec. Nous avions l'intuition que ça allait concerner le Québec, mais ça le concerne deux fois plus qu'on ne l'aurait cru à l'époque, parce que le gouvernement libéral a profité de cette occasion pour, en même temps, aller abdiquer ses pouvoirs, ses droits, ses pratiques traditionnelles dans le domaine de la taxation. Ça, ça nous concerne beaucoup et ça concerne toute la population du Québec.

Le ministre s'est emporté tantôt. Bon. Ça lui arrive souvent me dit-on et peut-être qu'il a appris ça de son mentor, le ministre des Finances, qui nous fait de grands spectacles à l'Assemblée nationale; peut-être que ça commence à déteindre sur lui. Son mentor est un expert en spectacles à l'Assemblée nationale et, peut-être, qu'il ambitionne un jour devenir ministre des Finances, lui aussi. Donc, il se prépare à sa vocation future. Mais, M. le Président, sérieusement, nous aurions avantage à recevoir les économistes.

Le député de Montmorency a des commentaires qui laissent entendre que cette taxe-là est beaucoup plus complexe et beaucoup plus incomplète que le ministre du Revenu ne le pense. Je cite quelques commentaires de l'ancien ministre du Revenu qui, lui, connaissait ça. Il parle d'une taxe complexe. La loi fédérale a près de 300 articles et, déjà, 1500 directives d'interprétation sont prêtes et ce n'est que le début. Si le député de Montmorency en parle, même si c'est une loi fédérale, c'est qu'on sait qu'on s'est branché sur cette loi-là et qu'à bien des égards on va être obligé de suivre ces 1500 directives d'interprétation. L'administration fiscale fera face à un défi colossal, 3 000 000 de nouveaux mandataires, des milliers de fonctionnaires additionnels et un nombre imposant de vérifications portant sur les versements de taxes.

Ceux qui se sont réjouis de l'harmonisation de la taxe de vente du Québec avec la TPS fédérale devraient y voir à deux fois. Ça s'adresse à vous, parlementaires libéraux, car les deux taxes demeureront chacune dans une loi distincte, avec des formulaires différents et, forcément, dans les limites constitutionnelles du Québec, c'est-à-dire sans permettre à celui-ci de constituer une taxe indirecte comme l'est la TPS. La loi sur la taxe de vente...

Le Président (M. Lemieux): Une minute, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: ...est donc appelée à un grand chambardement. D'accord. M. le Président, moi, en tout cas, j'aurais des choses à apprendre des économistes, si le ministre du Revenu prétend ne pas en avoir et je pense qu'il fait trop preuve d'arrogance. J'aurais des choses à apprendre aussi de certains manufacturiers. C'est pourquoi je vous propose la motion suivante: "Que, conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89... des consultations particulières et que à cette fin elle entende: l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec. Excusez-moi. Erreur. La dernière ligne, le Conseil québécois du commerce du détail, à substituer à l'Institut des manufacturiers du vêtement."

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous amender la motion? Est-ce que vous voulez amender la motion du député de Labelle?

M. Lazure: Oui, j'amende la motion initiale. Tout simplement changer...

Le Président (M. Lemieux): C'est une nouvelle motion.

M. Lazure: C'est une nouvelle motion, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Regardez, M. le député de La Prairie, j'ai déjà une motion sur la table. Je n'ai pas encore disposé de cette motion. Il faut que je dispose de la motion que j'ai sur la table.

M. Lazure: D'accord. Je vous donne un préavis que j'ai une motion à présenter. (23 heures)

M. Savoie: On demande le vote.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que la motion du député de Labelle, qui se lit comme suit: "Que, conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende

l'Association des économistes du Québec", est adoptée?

M. Bourdon: Vote nominal.

M. Chagnon: Vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Appel nominal.

M. le secrétaire. Effectivement, M. le député de

Saint-Louis... Vous demandez le vote. Ça va. Appel nominal.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, est-ce que l'Opposition pourrait désigner les trois membres qui exercent le droit de vote?

Le Président (M. Lemieux): Les trois membres qui exercent le droit de vote en vertu du règlement du côté de l'Opposition ministérielle?

M. Léonard: II y en cinq.

Le Président (M. Lemieux): Trois, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Trois, pardon.

Le Secrétaire: M. Léonard (Labelle)?

M. Léonard: Contre, non, pour la motion.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Secrétaire: M. Lazure (Laprairie)?

M. Lazure: Pour.

Le Secrétaire: M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles)?

M. Bourdon: Pour.

M. Savoie: La seule personne de la gent féminine autour de cette table n'a pas le droit de vote sur cette motion.

Le Secrétaire: M. Savoie (Abitibi-Est)?

M. Savoie: Tout ça parce que vous voulez passer vos vieux amis.

Mme Caron: Vous, il n'y en a même pas.

M. Savoie: Oui, je sais. Mais la seule personne de la gent féminine n'a pas le droit de vote sur cette motion.

Le Président (M. Lemieux): Messieurs, s'il vous plaît! C'est le vote, M. le député d'Abitibi-Est, on prend le vote.

M. Bourdon: M. le Président, le député d'Abitibi-Est m'a convaincu. Je retire mon vote et je vais laisser ma collègue...

M. Savoie: II est trop tard.

Le Président (M. Lemieux): Non, non. Le vote est enregistré. M. le député de Pointe-aux-Trembles, cette fois-ci. M. le député d'Abitibi-Est?

M. Savoie: Je votre contre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Farrah: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Prévost?

M. Forget: Contre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Saint-Louis?

M. Chagnon: Contre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Rousseau?

M. Thérien: Contre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Vanier, abstention.

M. Brouillette: M. le Président, je remplace moi.

Le Président (M. Lemieux): Ah, vous remplacez M. le député de Champlain. Je m'excuse, M. le député de Champlain. M. le député de Champlain?

M. Brouillette: Contre.

Le Secrétaire: 7, contre; 3, pour.

Le Président (M. Lemieux): C'est vrai, je n'ai pas le droit de vote eu égard au nouveau règlement. C'est vrai, je m'en excuse. La motion est donc rejetée.

M. Lazure: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): La motion a été rejetée. M. le député de La Prairie.

Motion proposant d'entendre le Conseil québécois du commerce de détail

M. Lazure: Que conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration

tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende: le Conseil québécois du commerce de détail.

Le Président (M. Lemieux): La motion est... Oui, M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: Je demande le vote. On a entendu les arguments qui prévalaient dans toutes les discussions...

Le Président (M. Lemieux): Oui. Est-ce qu'il y a des interventions sur la motion?

M. Lazure: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): La motion est recevable. Il y a des interventions sur la motion.

M. le député de La Prairie, vous disposez d'une demi-heure et M. le ministre, vous disposez d'une demi-heure pour répondre. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Moi, M. le Président, je doute que le ministre du Revenu puisse parler pendant une demi-heure sans rire aux éclats comme il le fait tout le temps. Je pense qu'un jour ou l'autre il aura des comptes à rendre.

M. Savoie: Je n'ai pas de misère avec ça. Non, tantôt je n'ai pas... Question de règlement, M. le Président.

M. Lazure: II n'y a pas de question de règlement sur ça.

Le Président (M. Lemieux): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: II y a eu allégation comme quoi je suis incapable... ha, ha, ha! ...de parier une demi-heure de temps sans rire. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lemieux): Ce n'est pas une question de règlement, M. le député d'Abitibi-Est. M. le député de La Prairie.

M. Savoie: Question de règlement, M. le Président, Ding et Dong.

M. Farrah: Je demande consentement au député de La Prairie pour laisser une demi-heure à M. le ministre.

M. Lazure: Je peux lui laisser tout de suite même, si j'ai ma demi-heure après. Volontiers.

Le Président (M. Lemieux): Non, non, M. le député. Le pétitionnaire dispose d'une période d'une demi-heure, il en est de même pour le ministre. M. le député de La Prairie, on vous écoute.

M. Denis Lazure

M. Lazure: C'est bien ce que je savais. Alors, l'Opposition croit que les libéraux ont fait une erreur en refusant qu'on reçoive les économistes. Nous leur donnons une occasion de racheter cette erreur. Nous leur donnons l'occasion, au moins, d'entendre cette fois-ci les manufacturiers de vêtements, de chaussures, de meubles qui se sont regroupés dans une association qui s'appelle le Conseil québécois du commerce de détail. Le Conseil québécois du commerce de détail, dont je cite le communiqué de presse qu'il a émis il n'y a pas si longtemps, le 16 novembre, ça fait moins d'un mois, ce conseil considère que l'imposition d'une nouvelle taxe provinciale de vente de 8 % sur le vêtement, la chaussure et le meuble qui s'ajoutera à la taxe fédérale aura un effet négatif sur les consommateurs et sur nos détaillants, indiquait M. Gaston Lafleur, son président-directeur général. L'imposition de cette nouvelle taxe provinciale sur ces biens de consommation, en plein coeur d'une récession qui s'annonce difficile, aura des effets néfastes pour les détaillants qui vivent déjà une situation précaire. Je viens de citer deux paragraphes, j'y reviendrai tantôt.

Je conseille au ministre du Revenu et à ses collègues libéraux d'aller faire un tour à Place Québec où, en principe, on a une cinquantaine de boutiques. Il faut dire que, depuis quelques mois, un bon nombre de ces boutiques ont fait faillite. Il faut dire aussi, M. le Président, quand on se promène à Place Québec ces jours-ci, même si on est à trois semaines, deux semaines même de Noël, qu'il n'y a à peu près personne. Les marchands au détail, qu'il s'agisse de chaussures, qu'il s'agisse de meubles ou de vêtements, tout le commerce de détail est absolument paniqué actuellement. Non seulement à cause de la récession, d'abord et avant tout y a-t-il une désaffectation de la part du consommateur, y a-t-il une espèce d'abstention de la part du consommateur, mais en plus les consommateurs, appréhendant les effets de la nouvelle taxe à partir de janvier, les consommateurs n'ont pas les moyens d'aller magasiner. Je pense que ce serait édifiant pour le ministre du Revenu d'aller se promener en s'identifiant: Moi, je suis le ministre du Revenu, je suis celui qui pilote le projet de loi sur la TPS. En s'identifiant clairement et j'aimerais ça ensuite qu'il nous fasse rapport sur la façon dont il a été reçu dans les boutiques de Place Québec. J'espère qu'il ira aussi dans les boutiques de son comté d'Abitibi-Est durant ses vacances de Noël. J'espère qu'il va y aller. J'espère qu'il va aller rencontrer les clubs de l'âge d'or aussi, parce qu'il a l'air de se moquer des gens qui ont 65 ans et plus comme votre serviteur. Il a l'air de s'en moquer.

M. Savoie: Franchement.

M. Lazure: Tantôt il disait: J'espère que le député de La Prairie va pouvoir...

M. Savoie: Question de règlement.

M. Lazure: Non, on va retourner au Journal des débats.

Le Président (M. Lemieux): M. le député d'Abitibi-Est.

M. Savoie: II faut que je rappelle au député de La Prairie qu'il s'agit ici d'une procédure officielle. Il y a enregistrement. Lorsque vous dites que je me moque des gens de 65 ans, je ne peux pas laisser passer ça. Vous savez que ça va à rencontre de la bonne marche de cette commission et je vous demanderais de retirer vos paroles.

M. Lazure: M. le Président, j'ai bien entendu parce que, moi, je l'écoute quand il parle. Lui, je ne suis pas sûr qu'il nous écoute quand nous parlons, mais je l'ai bien entendu tantôt faire allusion à mon âge avancé, qui ne me permettrait pas de travailler de façon efficace à cette commission. Mes collègues l'ont entendu aussi.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de La Prairie, la remarque de M. le député d'Abitibi-Est s'adressait à vous personnellement et il ne faudrait peut-être pas prêter des propos au député d'Abitibi-Est, des intentions qu'il n'a pas.

M. Lazure: Bien, je suis sûr que les gens des clubs de l'âge d'or sont solidaires de celui qui vous parle, M. le Président. Alors, par solidarité, je vais simplement souligner au ministre du Revenu qu'il aurait avantage à être plus respectueux des députés, quel que soit leur âge.

M. Savoie: Et vous, du ministre du Revenu, M. le député.

M. Lazure: Oui. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Bon. Cela étant dit, nous pensons que parmi tous les gens qui sont de nature... les gens qui seraient susceptibles de nous éclairer et surtout d'éclairer le ministre, il y a ce Conseil québécois du commerce de détail. Je reviens à leur communiqué du 16 novembre. Pour l'Association des fabricants de meubles du Québec, cette nouvelle taxe représente un autre clou dans le cercueil. C'est une image assez frappante quand même. M. Claude Jutras, qui dit ça, le vice-président de l'association, considère que cette nouvelle taxe ne fait qu'ajouter à la psychose du consommateur, qui doit déjà s'adap- ter à la TPS prochaine. L'industrie du meuble n'a pas besoin de cette nouvelle taxe provinciale. Plusieurs fabricants de meubles sont déjà sur la corde raide. L'imposition de cette nouvelle taxe le 1er janvier risque de semer le chaos dans l'industrie. Il y a beaucoup d'emplois en jeu. La nouvelle taxe de vente proposée, si elle s'applique le 1er janvier prochain, est une bombe à retardement.

C'est quand même des paroles assez lourdes de conséquences. Et, M. le Président, je reviens à ce que mes collègues ont réclamé tantôt, à ce qui a été réclamé aussi par notre chef, que le gouvernement prenne le temps de bien étudier la question. Et prendre le temps de bien étudier la question, ça veut dire avoir des consultations, ça veut dire utiliser l'outil privilégié de la commission parlementaire pour recevoir des groupes. Il n'y a rien de frivole dans ça. M. le Président, moi, je pourrais vous énumérer des tas de projets de loi qui ont beaucoup moins de conséquences et pour lesquels les deux partis politiques ont convenu dans le passé, d'avoir des audiences, d'avoir des rencontres. Dans le domaine de l'environnement, même si j'ai souvent des divergences d'opinion et des combats assez raides avec le ministre de l'Environnement, je dois dire que, contrairement à son collègue du Revenu, lui, il a accepté des motions semblables lorsque nous avons étudié, il y a quelques mois, deux projets de loi sur l'environnement. Et il a accepté au dernier moment, comme nous le faisons aujourd'hui, comme nous le faisons ce soir, nos demandes de faire venir des groupements. Nous avons reçu sept ou huit groupements à chacune des commissions pour chacun des projets de loi.

M. Bourdon: C'est un démocrate.

M. Lazure: II est beaucoup plus démocrate, effectivement, que le ministre du Revenu, beaucoup plus. Maintenant, si le gouvernement s'entête à refuser toutes les consultations, il va en payer les conséquences. C'est ce que le député de Pointe-aux-Trembles essayait de faire ressortir tantôt dans ses remarques judicieuses. Il y a un danger dans ce gouvernement. Parce qu'on a exercé le pouvoir pendant un premier mandat, on sait ce que c'est le gouvernement, on sait quoi faire, on sait ce qui est bon pour la population, et puis on y va, on "bulldoze" littéralement les groupements, on les met de côté et on procède. C'est ça que le ministre du Revenu fait actuellement.

Le Conseil québécois du commerce de détail, ce n'est quand même pas le club des cyclistes de Limoilou ou d'Amos. C'est un groupement qui a des antennes partout dans le Québec et il nous dit: C'est une bombe à retardement. De son côté, l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec considère que la nouvelle taxe de vente sur le vêtement occasionnera des pertes d'emplois

directes chez les manufacturiers de vêtements. M. Israël Shames, son directeur, affirme que plus de 35 % des emplois du secteur manufacturier à Montréal sont reliés aux vêtements. Déjà les carnets de commandes diminuent de façon constante. Cette nouvelle taxe de vente affectera davantage nos manufacturiers et aura pour effet d'augmenter le chômage. (23 h 15)

Quand on pense, M. le Président, qu'en 1978 le gouvernement du Parti québécois s'était rendu à des attentes de la population et avait aboli la taxe de vente sur des biens essentiels, vêtements, chaussures, meubles, et là, tout à coup, après 12 ans de régime où le petit salarié ou le salarié moyen avaient profité de cette détaxe, voilà qu'un gouvernement libéral, déconnecté de la réalité, refusant de rencontrer des groupements, voilà que ce gouvernement impose de nouveau des taxes sur ces biens essentiels. M. le Président, il n'y a pas eu de débat sur ce projet de loi. Il n'y en a pas eu. C'est une réforme majeure qu'on essaie de faire passer sans qu'il y ait de débat. On a parlé de l'industrie touristique tantôt. J'ai parlé des cyclistes. Le député de Saint-Louis me dit: Bon, bien, qu'est-ce que vous avez contre les cyclistes? Je n'ai rien et j'irais même jusqu'à proposer qu'on rencontre aussi l'association des marchands de bicyclettes. Tous les marchands détaillants vont être affectés par une telle loi. Alors il faut prendre au sérieux ce qu'il ont à nous dire. Dans le même communiqué, M. le Président, l'Association des manufacturiers de chaussures du Canada considère que la nouvelle taxe de vente sur les chaussures affectera les fabricants québécois de chaussures, dont plus de 70 % de la production vendue au Québec est présentement exemptée de la taxe. C'est ça qu'il faut comprendre, que c'est établi dans les moeurs commerciales. Qu'il s'agisse de chaussures, de vêtements ou de meubles, il s'est établi une espèce de tradition, depuis maintenant 12 ans, où il n'y en a pas de taxe et tout à coup on va arriver avec cette taxe tout à fait injuste. Les gens ont raison de se plaindre et, moi, je suis sûr qu'ils auraient des messages percutants à passer au ministre du Revenu. Si le ministre des Finances a pu être persuadé d'enlever la taxe sur les livres, qu'on me donne donc une bonne raison pourquoi le ministre du Revenu ne pourrait pas être persuadé, lui, d'enlever la taxe sur les meubles. J'aimerais bien l'entendre. J'espère qu'il va parler tantôt, qu'il va utiliser son droit de parole.

Une voix: C'est vrai, ça fait longtemps qu'il n'a pas parlé.

M. Lazure: II faut qu'il donne de bonnes raisons aux manufacturiers de chaussures, de vêtements et de meubles. Si les livres ont été exemptés, pourquoi les chaussures ne seraient-elles pas exemptées? Il pourrait commencer, avec nous, à essayer de pratiquer la justification qu'il aurait à leur présenter. Même les propriétaires et les gestionnaires de centres commerciaux ont senti le besoin de venir à la rescousse des détaillants. Et voici ce qu'ils disent: Cette nouvelle taxe de vente provinciale sur le vêtement, la chaussure et le meuble affectera plus de 55 % de nos détaillants. Qui dit ça? Cadillac Fairview, rien de moins Cadillac Fairview, c'est quand même une société pesante, une société considérable qui est propriétaire de plusieurs centres d'achats à travers le Québec. Et Cadillac Fairview nous dit: Attention, 55 % de nos détaillants vont être affectés. L'imposition d'une nouvelle taxe de vente sur le vêtement, la chaussure et le meuble pourrait inciter des fermetures de commerces, et Dieu sait qu'il y en a assez de fermés. J'incite le ministre du Revenu encore, s'il ne l'a pas fait, à aller se promener dans Place Québec, à aller voir toutes les boutiques qui sont désertes, tous les espaces qui sont déjà fermés et les boutiques ouvertes mais qui manquent de clients, qui sont complètement désertes, et à avoir des conversations avec les propriétaires de ces boutiques et, ensuite, il pourra venir nous parler plus en connaissance de cause des répercussions de sa loi sur les commerces de détail. Alors, tous ces groupes ont décidé de conjuguer leurs efforts dans le but de convaincre le gouvernement et le ministre des Finances... Ils ne parlent pas du ministre du Revenu, parce qu'ils savent que dans le fond c'est le ministre des Finances qui mène. C'est pour ça que le ministre du Revenu a de la misère à défendre son projet. Il faudrait peut-être aussi, mon collègue de Labelle, qu'on présente une motion tantôt pour faire venir le ministre des Finances parce que c'est - ha, ha, ha! - lui qui est responsable...

Mme Caron: C'est une bonne idée, ça. C'est vrai.

M. Lazure: ...finalement et on impose peut-être un fardeau injuste au ministre du Revenu, injuste. Alors, en tout cas, les commerçants s'adressent au ministre des Finances malgré le fait que tous s'entendent sur les bienfaits et les bénéfices d'une harmonisation provinciale-fédérale, mais ils continuent de dire que l'application de cette nouvelle taxe n'est pas appropriée dans le contexte économique actuel et qu'elle va causer un préjudice important aux détaillants et aux fabricants. J'ai hâte de voir ce qu'il va dire, le ministre du Revenu. Tantôt il a dit, au sujet des économistes: Ah bien, il n'y a pas de problèmes, on n'a pas besoin de les entendre, ils sont tous d'accord avec mon projet de loi. C'est faux, c'est faux, je le répète. La députée de Ter-rebonne l'a démontré par des citations. Oui, c'était faux, c'était inexact, si vous voulez, parce que ça a été démontré par des citations de la députée de Terrebonne qu'il y a beaucoup

d'économistes qui contestent plusieurs aspects de ce projet de loi.

Et ce n'est pas vrai, si des gouvernements ont absolument besoin de renflouer des dettes importantes, qu'il s'agisse d'Ottawa ou de Québec, qu'on doive le faire surtout sur le dos du contribuable moyen ou du petit contribuable. Ce n'est pas vrai ça, il y a d'autres façons de le faire. Il y a d'autres sociétés, je vais en nommer, la Suède, pour le député de Rousseau. La Suède est un pays très prospère, qui a un niveau de vie plus élevé que le Canada, pour votre information, comme la Norvège, d'ailleurs. Ces pays-là n'ont pas les dettes considérables que le Canada a. Ces pays-là ont un système de taxation pas mal différent du nôtre, un système de taxation qui passe surtout par l'impôt sur le revenu. Un peu de TVA, mais surtout un système de taxation d'impôt sur le revenu qui met sur le dos du contribuable très riche un taux d'imposition beaucoup plus élevé qu'ici. Malgré ça, les Suédois, comme les Norvégiens, comme les Danois, parce qu'ils ont sensiblement le même système de taxation, vous ne les voyez pas partir en vague pour venir immigrer aux États-Unis ou au Canada. Vous n'en voyez pas souvent des immigrés danois, norvégiens ou suédois. Le niveau de vie est très élevé, dans chacun de ces pays-là, et les gens qui ont des revenus plus élevés paient des impôts sur le revenu beaucoup plus élevés qu'ici, ce qui fait qu'il y a une justice sociale, une équité sociale, qui s'opère par le biais de l'impôt sur le revenu. Mais ici, le gouvernement du Québec s'est calqué un peu à la façon d'un esclave, d'un colonisé sur la manière qu'Ottawa avait décidé d'utiliser pour renflouer...

Le Président (M. Forget): Je pense qu'on s'éloigne du sujet que vous avez soulevé au début.

M. Lazure: M. te Président, si vous voulez, je rejoins les critiques des manufacturiers, des détaillants, qui disent: Laissez donc tranquille le contribuable, le consommateur. Laissez-le avoir un peu plus d'argent dans ses poches pour qu'il vienne acheter.

M. Chagnon: M. le Président... M. Lazure: Et à ce moment-là...

Le Président (M. Forget): Oui, M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, je m'excuse d'interrompre notre ami le député de La Prairie, ça va lui permettre de prendre un verre d'eau; c'est pour son bien que je le fais. Nous avons au départ...

Le Président (M. Forget): Est-ce que c'est une question de règlement, M. le député de

Saint-Louis? Oui.

M. Chagnon: Oui, oui absolument. Nous avons évoqué le fait... je vais demander une motion de mise aux voix de la motion du député de La Prairie. Or, H y a une demi-heure... le député de La Prairie a une demi-heure pour parler sur la mise de la motion aux voix. On est rendu sur le fond. Est-ce que nous allons éventuellement entendre le député de La Prairie nous indiquer pourquoi nous devrions voter tout de suite ou non sur la motion?

M. Lazure: M. le Président, je reviens à la motion, j'ai le texte de la motion...

Le Président (M. Forget)): Je regrette, M. le député de Saint-Louis, ce n'est pas recevable. Alors, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: ...devant moi. La motion est à l'effet que nous tenions, en tant que commission, des consultations particulières, notamment avec le Conseil québécois du commerce de détail.

M. Chagnon: C'est la question de la mise aux voix.

Le Président (M. Forget): La mise aux voix.

M. Lazure: Nous n'en sommes pas à la mise aux voix.

M. Chagnon: Oui, oui. La présidence a déjà accepté la mise aux voix.

Le Président (M. Forget): Quand même, c'est l'opportunité d'entendre, M. le député de...

M. Lazure: Oui, c'est ça, l'opportunité d'entendre le Conseil québécois du commerce de détail.

Le Président (M. Forget): C'est ça.

M. Chagnon: M. le Président, on a déjà accepté la mise aux voix. C'est la question qui se pose et c'est pour ça qu'on a une demi-heure de discussion.

Le Président (M. Forget): II avait 30 minutes. Alors, son temps n'est pas écoulé encore. M. le député de La Prairie.

M. Bourdon: II n'y a pas de vote avant qu'on ait fait nos interventions.

M. Lazure: Non seulement, M. le Président, les libéraux veulent-ils couper la parole aux experts de l'extérieur en refusant de les voir, mais ils veulent même couper la parole aux gens de l'Opposition loyale de Sa Majesté.

M. Chagnon: Qui ne sont pas véritablement des experts.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lazure: Justement, parce qu'on n'est pas expert, on veut en faire venir, des experts. On veut justement en faire venir des experts.

M. Chagnon: On les a entendus.

Le Président (M. Forget): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lazure: Bon, M. le Président...

Le Président (M. Forget): Quand même! On discute sur le Conseil québécois du commerce de détail. M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Je souhaite, M. le Président, que le député de Saint-Louis retourne à sa lecture de roman qui a l'air intéressant et, moi, je vais continuer à plaider pour que cette commission reçoive des experts, justement, pour l'éclairer le ministre, nous éclairer nous autres aussi. Nous pensons que les commerçants au détail ont des choses à nous dire. Alors, M. le Président, je continue.

Il faut croire que le gouvernement fait fausse route en refusant de tenir un débat semi-public. On ne demande même pas un grand débat public: un débat semi-public. On devrait peut-être, parce qu'il y a des débats publics qui sont tenus sur des choses moins importantes que ça. Alors, je pense qu'on devrait tenter de convaincre, dans les heures, dans les jours qui vont suivre, ce gouvernement. Parce qu'il a cédé une fois, je comprends qu'il soit sur ses gardes. Il a peut-être reçu un mot d'ordre: On a cédé une fois, mais il n'est plus question de céder. Probablement qu'il a reçu un mot d'ordre comme ça de la part des hautes instances, mais nous, on va continuer à faire notre travail de parlementaires de l'Opposition. Nous allons continuer de transmettre a ce gouvernement les inquiétudes de la population. Nous allons continuer de plaider pour que des groupements soient entendus. Si le gouvernement décide de faire la sourde oreille, il aura à vivre avec ses décisions. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Forget): Merci, M. le député de La Prairie. Je passe la parole au ministre-Une voix: Pour une demi-heure.

Le Président (M. Forget): Pour 30 minutes.

Une voix: Une demi-heure sans rire à part ça.

M. Savoie: Non, M. le Président, je ne prendrai pas la parole.

Le Président (M. Forget): Vous ne prenez pas la parole. Est-ce que le député de...

M. Chagnon: Alors, c'est la mise aux voix, M. le Président. J'avais déjà demandé la mise aux voix.

Le Président (M. Forget): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants qui veulent intervenir?

Mme Caron: Oui.

M. Chagnon: Non, non!

Le Président (M. Forget): Alors, M. le député de Labelle.

M. Chagnon: M. le Président, je réfère à notre règlement. À partir du moment où la mise aux voix a été demandée, c'est l'article 100...

Le Président (M. Forget): Non. Je regrette. M. Chagnon: Monsieur, on poursuit...

Le Président (M. Forget): II n'y a pas de mise aux voix de demandée.

M. Chagnon: Oui. Je l'ai demandée. Je l'ai demandée, M. le Président.

Le Président (M. Forget): Alors, on était en train d'étudier la motion. Je regrette, je passe la parole au député de Labelle.

M. Léonard: Oui.

M. Chagnon: Hé! J'ai demandé le vote il y a à peu près une demi-heure, exactement une demi-heure. On l'a accepté.

M. Bourdon: M. le Président, question de règlement. La coutume...

Le Président (M. Forget): II y a un vote qui a été pris sur la première...

M. Chagnon: Et j'ai demandé le vote sur la deuxième.

Le Président (M. Forget): Maintenant, on est à l'étude de la deuxième. Et je pense que, présentement, je passe la parole au député de Labelle pour une période de 30 minutes. 10 minutes.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: On ne peut pas demander un vote qui restreindrait le droit de parole des

parlementaires. Je pense que le député de Saint-Louis est assez démocrate pour comprendre ce point et l'admettre. Alors, M. le Président, par rapport à toute cette question du commerce au détail, je voudrais simplement revenir à un point qui a été soulevé tout à l'heure par le député des Îles-de-la-Madeleine qui disait qu'un célibataire qui gagne 20 000 $ est avantagé par la réforme. Je veux simplement faire le point suivant que, au contraire, le célibataire ayant moins de 65 ans, qui gagne 20 000 $, paiera des taxes sur la consommation de 146 $ et aura des avantages, par ailleurs, avec des crédits à la consommation, etc., de 141 $. Il perd 5 $. Alors, on me dira... Je vois quelqu'un d'en face dire: Ce n'est pas très important. Oui, peut-être bien que ce n'est pas très important, mais, M. le Président, pour celui qui gagne 20 000 $ par année, 5 $, c'est important et des jeux d'écriture comme ça ou, en tout cas, des transferts financiers de l'ordre de 146 $ et de 141 $ ont une certaine importance, parce que ses 146 $, justement, il va les payer tout le long de l'année, alors que les avantages qu'il va recevoir, il va les recevoir une fois après l'année. En termes simplement de comportement social, je pense que ce n'est pas indifférent, le point que je soulève.

Lorsque nous soulevons ces points, lorsque nous examinons les tableaux, moi, évidemment, j'ai touché un peu à cette question de la fiscalité. Effectivement, on fait des tableaux pour des sommes de 150 $, en plus, en moins. On parle de quelqu'un qui gagne 20 000 $, alors, lui, il perd 5 $. Quelqu'un qui en gagne 60 000 $ va en perdre 199 $. C'est ça que les tableaux démontrent et vous voyez qu'on joue dans des chiffres relativement peu importants. Relativement, entre guillemets, toujours, j'entends. (23 h 30)

Je reviens sur cette question de la consommation parce que, à mon sens, depuis un certain temps, nous étions préoccupés par cette question. Par exemple, au cours de l'hiver dernier, nous avions demandé à entendre, à tenir une commission parlementaire sur les effets de la TPS fédérale sur l'économie québécoise et sur la consommation au Québec. Moi, je pense que, si on nous avait écoutés à ce moment-là et si on avait accepté de tenir une commission parlementaire, nous n'en serions pas, dans la précipitation d'aujourd'hui, à étudier le projet de loi 89. Nous n'aurions pas eu une déclaration ministérielle qui disait que tout était réglé et que, veux veux pas, les effets commençaient à courir dès le 1er septembre, parce que c'est ça qu'il faut savoir. Quelqu'un qui prenait, par exemple, une police d'assurance pour un an à compter du 1er septembre payait déjà sa TPS ou sa taxe de vente du Québec modifiée à partir du 1er septembre. Il me semble que l'Opposition a été de bonne foi en demandant la commission parlementaire sur cette question. Le gouvernement l'a refusée.

Aujourd'hui même, quand on redemande d'entendre des groupes, on nous dit encore non, comme on nous a dit non en ce qui concerne les économistes et, finalement, c'est quoi l'exercice de la démocratie?

Je voudrais aussi dire que ces crédits d'impôt qui sont mis dans les documents, qui sont promis par le ministre des Finances, à mon sens, recèlent un problème parce que, d'ores et déjà, il faudrait que le ministre des Finances s'engage à les indexer. Ça me paraît particulièrement important qu'ils soient indexés, surtout pour les gagne-petit. Mais ce n'est pas une chose à laquelle il s'engage, d'autant plus que pour présenter la réforme de la TPS et camoufler ses 362 000 000 $ qu'il va aller chercher dans les poches des contribuables, consommateurs, il a mis une indexation à 4,5 % en disant: Nous promettons l'indexation, nous soustrayons l'indexation du coût de la réforme et, finalement, il dit qu'il versera 19 000 000 $. En réalité, ce sont deux choses absolument différentes, d'autant plus que non seulement il n'indexe pas selon les prévisions, par exemple, du Conference Board qui prévoit que l'inflation sera de 2 % plus élevée que ce qui avait été prévu à cause des réformes et, donc, que l'indexation sera de l'ordre de 6 % plutôt que d'être de 4,5 %... En passant, cela signifie que le ministre des Finances vient encore gruger de 1,5 % le pouvoir d'achat du contribuable en faisant cela.

Moi, M. le Président, comme je n'ai pas beaucoup de temps, je voudrais encore mettre en parallèle toutes ces questions de consommation par rapport au système fiscal sur lesquelles les gens spécialisés dans la consommation pourraient fort bien nous éclairer. Vous savez, il faut quand même regarder ça d'un peu plus haut pour voir qu'il y a des avantages fiscaux considérables donnés à des individus dans la ligne de ce que je disais tout à l'heure. Quand les frères Reichman ont concocté le dispositif financier pour acquérir le contrôle de Gulf Canada, ils ont demandé au gouvernement fédéral un abattement fiscal de 500 000 000 $. Rien de moins. C'était ça le prix de la transaction pour le gouvernement fédéral. Il s'agit là de sommes considérables et, pour quelques individus d'une même famille, cela a coûté à chacun des contribuables du Canada 30 $. Et tous les contribuables du Canada, c'est du monde, parce que ça comprend ceux qui sont affectés par la TPS. 30 $ par contribuable, les 500 000 000 $ des frères Reichman pour acquérir le contrôle de Gulf Canada. On me dira que c'est une transaction pour le bien du Canada, pour assurer les assises économiques du Canada, mais c'est tout le monde qui paie pour ça. Quand on donne des abattements fiscaux à des individus qui sont riches, il faut savoir que l'ensemble de la population contribuable paie pour ces abattements, paie pour ces cadeaux du gouvernement, qu'il soit fédéral ou qu'il soit ici, paie pour tous ces cadeaux. Ce sont des éléments qui coûtent

extrêmement cher, sur lesquels nous ne nous posons pas de questions, qui ont des impacts considérables et qui expliquent même, en bonne partie, le déficit du gouvernement fédéral.

Vous me dites encore que je parle du gouvernement fédéral. Pourquoi les finances du Québec sont-elles autant aux abois que maintenant, sinon parce que le gouvernement fédéral a un déficit épouvantable qu'il refile, qu'il "repellete" aux provinces et qu'il "repellete" au Québec. Même à l'heure actuelle, le seul intérêt, le seul service de la dette et, même, juste les intérêts sur la dette, la part du Québec dans le service de la dette et les intérêts du gouvernement fédéral représentent 1 500 000 000 $ de plus que tous les paiements de transfert qu'il nous donne.

Alors, il y a des conséquences à tout cela. Nous les voyons ici et ça a des impacts directs sur la consommation des individus et des contribuables. Si on doit charger 5 $ de plus à quelqu'un qui gagne 20 000 $, il y en au moins 25 $ qui sont partis pour les frères Reichman là-dedans, parce que eux auraient un avantage. Je pense que, si l'on parle de l'équité du système fiscal, il va falloir qu'à un moment donné on s'attaque à ça aussi. Il me semble, si on parle des impacts de cette taxe sur la consommation, qui nécessairement va introduire encore une fois un élément inflationniste très clair, qui va entraîner très probablement une décision de John Crow, gouverneur de la Banque du Canada, de monter ses taux d'intérêts de un point de plus, un point et demi de plus, peut-être de deux points de plus, qui va payer pour ça? Tous ceux qui ont des hypothèques? Bien sûr, tous ceux qui vont renouveller leur hypothèque, tous les contribuables canadiens, à cause de tous ces abattements fiscaux qu'on a donnés indirectement, de façon camouflée, sur lesquels nous ne nous posons pas de questions.

Quand on arrive avec des courbes de progressivité de l'impôt qui sont discutables présentement, mais qu'on écrête pour faire quelques cadeaux à quelques individus, il me semble que c'est un point très important qui a des impacts directs sur la consommation. Quand on exempte les profits de capital, quand on exempte pratiquement les profits de capital, c'est la même chose. Quand on exempte un contribuable de quelque chose, et généralement ce sont tous les riches qu'on exempte, ça veut dire qu'on fait payer ça à tous les autres contribuables. Le bonhomme qui a payé pour avoir mis ça en lumière, c'est Kenneth Carter qui a présidé la commission Carter sur la fiscalité au Canada. Aujourd'hui, il est mis de côté. Les gens qui étaient sympathiques à ses idées haussent les épaules, parce qu'ils trouvent que c'est techniquement faisable tout ce qu'il disait, c'était juste, c'était équitable, mais politiquement pas faisable. Ce que ça veut dire en clair, tout simplement, c'est que les hommes politiques, les femmes politiques qui sont aux commandes n'ont pas la volonté, n'ont pas le courage de poser les vraies questions sur le système fiscal au Canada et de prendre le temps de l'analyser. Aujourd'hui, nous introduisons un changement fondamental dans le système fiscal...

Le Président (M. Forget): En conclusion, M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, ça ne sera pas long. Nous introduisons un changement fondamental. Les fédéraux ont mis trois ans pour l'étudier, nous, nous avons eu droit à une déclaration ministérielle à entendre, quelques heures en commission et nous arrivons encore une fois en fin de séance, en fin de session, pour étudier la question. Je reviendrai, M. le Président.

Le Président (M. Forget): Merci, M. le député de Labelle. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Du côté ministériel?

Une voix: Oui, il y a d'autres invervenants.

Le Président (M. Forget): Oui. Du côté ministériel? M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: Oui, s'il n'y a pas d'autres intervenants qui peuvent ou qui veulent discourir ce soir...

Le Président (M. Forget): Oui, mais il y a d'autres intervenants.

Une voix: II y a le député de Gouin.

M. Chagnon: Sinon, on peut ajourner à demain matin, 10 heures, ça ne me fait rien. C'est pour vous.

Le Président (M. Forget): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

M. Boisclair: Oui, on va y aller.

Le Président (M. Forget): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: M. le Président, je dispose de 10 minutes, si je ne me trompe pas?

Le Président (M. Forget): 10 minutes, M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, s'il y a des gens qui peuvent nous éclairer sur le projet de loi 89 et ses conséquences, c'est bien le Conseil québécois du commerce de détail. Il s'agit d'avoir pris connaissance d'un communiqué qu'il rendait

public le 16 novembre 1990 pour voir jusqu'à quel point ce sont des gens qui tout comme nous partagent un point de vue qui va à rencontre de celui du ministre. J'essayais de l'illustrer tout à l'heure en disant au ministre jusqu'à quel point l'erreur fondamentale qu'il faisait, c'était de croire que nous étions les seuls à nous opposer au contenu du projet de loi, à la façon aussi dont on introduit la TVQ, à son harmonisation et au fait qu'on ait un taux unique pour l'ensemble des biens et services. M. le Président, permettez-moi de vous citer un extrait du communiqué que rendait public ce Conseil québécois du commerce de détail. Il disait, et je cite: "L'imposition de cette nouvelle taxe provinciale sur ces biens de consommation en plein coeur d'une récession qui s'annonce difficile aura des effets néfastes pour les détaillants qui vivent déjà une situation précaire". M. le Président, c'est un point de vue qui mérite qu'on l'étudié. - J'ai de la misère à m'entendre, M. le Président. - C'est un point de vue, je crois, qui vaut la peine d'être entendu par les membres de cette commission.

On a discuté tout à l'heure de la possibilité d'entendre l'Association des économistes. Mais ce que les gens du commerce de détail pourraient venir nous dire, de la même façon que l'Association des économistes aurait aussi bien pu venir en témoigner, c'est que cette taxe, à court terme, et ça tout le monde l'admet, aura un effet inflationniste. Avant que l'effet de la baisse du prix des intrants dans le système de production se fasse sentir, si on parle de l'automobile par exemple, où effectivement la TPS viendra modifier la structure de tarification dans les intrants qui entrent - par définition, c'est un pléonasme - qui sont nécessaires à la production d'une voiture, il est très clair qu'il y aura une période d'ajustement. Cette période d'ajustement et cette période d'inflation, mon collègue le député de Labelle en donnait les chiffres exacts tout à l'heure, on parle d'une augmentation de 0,5 % seulement pour l'impact de la TVQ provinciale, auront des impacts importants sur la consommation. M. le Président, ce que le Conseil québécois du commerce de détail, tout comme l'Association des économistes serait venu nous dire, c'est qu'une augmentation de l'inflation entraînerait automatiquement une diminution de la consommation. M. le Président, c'est un principe économique et ça ne prend pas la tête à Papineau pour le comprendre. Une augmentation du prix, quand la taxe est refilée au consommateur entraîne nécessairement une baisse de la demande.

On sait qu'à l'heure actuelle nous traversons une situation économique difficile, la vice-première ministre du gouvernement l'admettait, nous sommes en récession. À un moment où les petits commerçants, membres du Conseil québécois du commerce de détail éprouvent de plus en plus de difficulté à vendre leurs produits, qu'est-ce qui se passe? C'est essentiellement, M. le Président, un ralentissement encore plus accéléré qui sera observé. Et vous comme moi, M. le Président, nous avons des commerces dans nos comtés. À Montréal, il y a des artères commerciales qui sont regroupées au sein de ce qu'on appelle les SIDAC. Avez-vous idée, M. le Président, du taux de vacance sur ces artères commerciales? 20 % des fois. Au-dessus de 30 % dans certains cas. Ce que ça veut dire, M. le Président, concrètement, c'est qu'il y a des gens qui perdent leur job. Il y a des entreprises qui ferment. Et à tout le moins, il serait pertinent d'étudier la possibilité d'introduire cette TVQ à un moment où notre économie traverse une période difficile. Le Conseil québécois du commerce de détail pourrait venir en témoigner.

Tout le monde admet que l'introduction de la TPS fédérale et aussi de la taxe de vente du Québec aura un impact positif sur la capacité concurrentielle de nos entreprises. Mais cependant, M. le Président, est-ce que c'est le bon moment pour introduire une taxe semblable à la TVQ et, surtout, pour étendre le champ d'application de l'actuelle taxe de vente? Soit, comme le dit le projet de loi et c'est important de le rappeler, la taxe de vente baissera de 9 à 8 % en janvier 1991, de 8 à 7 % en janvier 1992, mais ce que ce projet de loi fait du même coup, c'est d'étendre l'assiette, d'étendre le champ d'application. M. le Président, je suis convaincu que le Conseil québécois du commerce de détail viendrait témoigner à l'effet que la TPS québécoise, malgré qu'elle prévoie le remboursement aux entreprises d'une partie importante des taxes qu'elles paient sur leurs achats, viendrait nous dire que le gouvernement a décidé de compenser, lui, son manque à gagner sur le dos des consommateurs. Ma collègue la députée de Terrebonne a très bien illustré ce point de vue tout à l'heure.

M. le Président, j'en appelle encore au ministre qui a un rôle important à jouer. Il pourrait peut-être chuchoter quelques mots dans le creux de l'oreille de son collègue, le ministre des Finances, et lui faire comprendre que nous de l'Opposition, nous sommes prêts à étudier ce projet de loi. Nous sommes prêts à avancer dans l'étude article par article, mais à tout le moins, M. le Président, on aimerait être rassuré. On aimerait entendre des experts, parce que je l'admets bien candidement, j'ai beau avoir fait un bac en économie, M. le Président, il y a encore bien des choses qui nous échappent, comme je suis convaincu qu'elles échappent à bien des gens du parti ministériel.

Lorsqu'on voit avec quel sérieux le comité de la Chambre des communes à Ottawa a tenu des audiences, a fait témoigner les organismes devant la commission, on se demande pourquoi, quelles raisons il faut invoquer pour empêcher la même chose au Québec? Pourquoi empêcher le Conseil québécois du commerce de détail? (23 h 45)

M. le Président, le ministre nous disait tout à l'heure: Si au moins je sentais un peu de bonne volonté de la part des membres de l'Opposition, je serais prêt à entendre... On parlait de l'Association des économistes et je suis convaincu que, s'il avait pris la parole sur la motion d'entendre le Conseil québécois du commerce de détail, il aurait dit la même chose. J'aurais le goût de demander au ministre qu'est-ce qu'il attend comme démonstration de notre bonne volonté, qu'est-ce qu'il attend? Pourquoi s'entêter à tenir un discours qui n'est pas fondé? M. le Président, vous conviendrez comme moi que c'est difficile de parler à quelqu'un quand il a un journal en pleine face, mais j'ai espérance qu'il entende.

Tout à l'heure le ministre, M. le Président, nous disait qu'il ne sentait pas que nous avions de la bonne volonté. J'aurais le goût de lui dire qu'il avait le nez bouché, M. le Président. Je sais qu'il se fait tard, que nous sommes tous fatigués, que nous avons tous d'autres choses à faire sans doute toutes aussi importantes, mais j'en appelle encore à la bonne foi du ministre, à la bonne foi aussi des membres du parti ministériel pour qu'ils fassent pression auprès du ministre du Revenu pour entendre le Conseil québécois du commerce de détaii. Qu'est-ce que vous avez à perdre? Pourquoi, MM. mes collègues... Il y a Mme la députée de Terrebonne qui appuie cette proposition, mais pourquoi vous opposer à entendre un groupe aussi important? Surtout quand on sait l'attitude que vous avez prise au moment où on a demandé de réaliser un mandat d'initiative pour étudier les conséquences de l'introduction de la TPS. Quel est votre intérêt, messieurs? Pourquoi ne pas faire pression auprès du ministre pour entendre le Conseil québécois du commerce de détail? Pourquoi faire la sourde oreille aux représentations qui sont faites quotidiennement dans vos bureaux de comté, auprès des chambres de commerce par des gens que vous rencontrez dans vos milieux de vie? Pourquoi cet entêtement? M. le Président, le Conseil québécois du commerce de détail...

Le Président (M. Forget): En conclusion, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: En terminant, le Conseil québécois du commerce de détail est un intervenant important qui est à même de nous parler des conséquences immédiates de l'introduction de la TVQ dans le contexte particulier de récession auquel sont confrontés les Québécois et les Québécoises. Je crois que son témoignage est essentiel pour faire avancer les travaux de cette commission. Alors j'espère, M. le Président, que tous conviendront de l'urgence de l'entendre et que tous les membres de cette commission conviendront et appuieront la proposition pour que, rapidement, nous puissions l'entendre. Merci

Le Président (M. Forget): Merci beaucoup, M. le député de Gouin. Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Farrah: M. le Président, je fais motion pour qu'on vote sur la proposition, s'il vous plaît?

Le Président (M. Forget): Alors, encore un intervenant? Alors, est-ce que vous voulez intervenir M. le député des Îles-de-la-Madeleine?

M. Farrah: Bien, je veux demander le vote, M. le Président.

Mme Caron: Mais non, ce n'est pas ça.

Le Président (M. Forget): Mais il y a d'autres intervenants. Alors...

M. Farrah: De votre côté?

Le Président (M. Forget): Oui. Est-ce que...

M. Boisclair: M. le député de Saint-Louis, on aimerait ça vous entendre.

M. Chagnon: Non, ça va.

Le Président (M. Forget): À l'ordre! Alors, Mme la députée de Terrebonne. 10 minutes.

M. Chagnon: Je cherche à me laisser convaincre.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, s'il est trop tard pour parler pour les députés ministériels, je vous avoue que, de notre côté, il n'y a pas d'heure pour parler de cette loi. Vous savez, M. le Président, que le Conseil québécois du commerce de détail dans un communiqué du 16 novembre a clairement indiqué que c'était un accueil mitigé qu'on faisait du côté des détaillants à ce projet de loi déposé par le ministre des Finances du Québec à l'Assemblée nationale. Alors, je pense qu'il serait peut-être important de les entendre, d'abord, pour leur exprimer que c'est le ministre du Revenu qui a la responsabilité de ce projet de loi. C'est drôlement étonnant que des gens qui sont aussi près, qui vont avoir à vivre avec cette taxe-là, n'aient point entendu le ministre du Revenu. Alors, moi, je pense que ce serait important de les entendre, parce que ce sont effectivement eux et les consommateurs qui vont avoir à vivre avec cette TVQ. Et c'est toujours important lorsqu'on étudie un projet de loi de regarder qui, dans la réalité quotidienne de tous les jours, va avoir à vivre avec une taxe comme cette taxe-là. Je pense que les commerçants au détail sont les premiers concernés. Ce serait bon de les entendre sur

leurs inquiétudes, sur les conséquences de cette taxe-là, mais je pense qu'ils ont à s'exprimer sur bien d'autres choses qu'on n'a aucunement abordées encore en commission, c'est-à-dire sur l'application technique de cette taxe-là. Et sur ça, je pense qu'ils en auraient drôlement à dire, M. le Président. Le peu qu'ils ont exprimé là-dessus, ce qu'ils nous disent, les commerçants, c'est qu'ils ne sont pas prêts. Ils ne sont pas prêts à l'appliquer à partir du 1er janvier et ils sont très clairs là-dessus. J'ai trouvé certains documents qui nous disent que très nombreuses sont les entreprises canadiennes du commerce de détail qui ont tardé à s'inscrire comme agent percepteur de la TPS ou qui ne seront aucunement prêtes à la collecter le 1er janvier prochain. S'ils ne sont pas prêts à collecter la TPS, ils ne sont pas davantage prêts à collecter la TVQ qui va aller avec. Donc, les consommateurs pourront se faire refiler l'impact de cette attitude attentiste, si les marchands sont alors incapables de se faire rembourser la taxe de vente fédérale de 13,5 % et de réclamer les autres compensations prévues par la loi.

Le ministre des Finances, lorsqu'on a fait le débat sur la taxe sur les livres, semblait réduire le débat uniquement à un problème de caisses enregistreuses. Et là, lorsqu'on regarde l'attitude des commerçants de détail, ce qu'ils nous disent, c'est que, du côté même des caisses enregistreuses, ils ne sont pas prêts. C'est peut-être important de les entendre là-dessus, M. le Président. Ce qu'ils nous disent, un petit peu plus loin, toujours en date du 28 novembre -alors ce que je vous dis là, ça ne remonte pas à des mois. Dans le court laps de temps d'un mois avant l'entrée en vigueur de la TPS, il ne sera pas facile aux marchands de procéder aux changements de prix et d'étiquettes ou à la disposition des affiches précisant si leurs prix incluent ou non la TPS. Enfin, ils n'auront guère de temps pour se pourvoir des enregistreuses, les adapter ou préparer leur personnel à percevoir et à faire les remises de TPS. Dans les trois cas, s'il ne peut satisfaire aux exigences de la TPS, le marchand sera obligé de payer de sa poche ou de se dédommager dans celle des clients. Alors, d'un côté ou de l'autre, il y a quelqu'un qui va devoir payer. Et, moi, j'aimerais les entendre là-dessus et leur faire dire le délai dont ils ont besoin pour être capables de mettre la taxe en application. Là-dessus, personne n'a donné de réponses à ces interrogations-là.

Présentement, les représentants du commerce de détail se promènent un petit peu partout et tentent d'expliquer, d'illustrer avec des tableaux, avec des pourcentages, ce système de taxation-là. Ils le présentent vraiment comme un système qui est beaucoup plus complexe que les gens ne le croient, qui va être beaucoup plus difficile à appliquer que ce que nous laisse présager le ministre du Revenu. Parce que lui, du côté de l'application, il est resté complètement muet. On n'a eu aucune donnée là-dessus, mais vraiment aucune. Et les représentants de commerce, qui font présentement une tournée, qui ont même tenté d'essayer de l'expliquer, ont donné une séance d'fnformat/on extrêmement convaincante aux journalistes pour essayer d'expliquer toute la complexité de ce qui les attend à partir du 1er janvier. Moi, j'aimerais les entendre sur cette complexité-là et sur les inquiétudes qu'ils ont et, dans la représentation qu'ils ont faite, tableaux à l'appui, pour eux, c'était très clair que l'entrée en vigueur de (a TPS serait loin d'être une aubaine pour les consommateurs et loin d'être une aubaine pour eux qui vont avoir à vivre avec quotidiennement.

On sait que malgré la période des fêtes qui approche et qui est habituellement une période de vente extrêmement importante dans l'année pour les commerçants, présentement, si vous vous promenez dans les commerces dans vos différents comtés, tous les commerçants se plaignent que les ventes sont très peu élevées, malgré les rabais et malgré le tapage publicitaire qui a été fait par les commerçants pour dire aux consommateurs: Achetez avant la TPS, achetez avant la TVQ. On ne peut pas dire que les commerçants ne l'ont pas dit. Je voyais tantôt des circulaires que le ministre regardait et c'était exactement ça: Avant la TPS! On dit aux consommateurs: Achetez vos meubles, vos chaussures, vos vêtements, vos appareils électroménagers. Et bien malgré ces pressions qu'on a faites sur les consommateurs pour sauver et la TPS et la TVQ, les ventes ne bougent pas. Et ça, c'est significatif. Elles ne bougent pas, ce n'est pas parce que les consommateurs ne veulent pas faire d'économies, c'est parce qu'ils n'ont même pas les moyens d'acheter ces biens essentiels là sans compter la TPS et la TVQ. Ils ne les ont pas, les moyens. Pensez-vous qu'ils vont les avoir davantage après le 1er janvier avec l'ajout des deux taxes? C'est tout à fait irrationnel de penser ça, M. le Président. Et je suis convaincue que le Conseil québécois du commerce de détail pourrait venir nous expliquer ce qui s'est passé depuis cette campagne publicitaire qu'il a faite et nous exprimer pourquoi les consommateurs n'embarquent pas malgré les incitatifs, et ils sont très forts les incitatifs. Même du côté des ventes d'automobiles qui sont supposées devenir un avantage pour les consommateurs après la TPS, les marchands d'automobiles ont même essayé de donner les mêmes avantages avant l'application de la TPS et, là aussi, les consommateurs n'ont aucunement, mais aucunement bougé.

Comment le gouvernement peut-il croire que les commerçants qui nous disent qu'ils ne sont pas prêts à l'appliquer la taxe... comment ça va se traduire dans la réalité quotidienne de tous les jours des commerçants? Et je suis très étonnée de voir que le ministre du Revenu, lui, ne s'est pas posé cette question-là. Il n'en a aucunement fait mention dans son discours lors

du dépôt du projet de loi. il n'en a aucunement fait mention tantôt, puisqu'il n'a même pas utilisé son droit de réplique sur cette motion. Donc il ne semblait aucunement juger de l'utilité de recevoir l'avis du Conseil québécois du commerce de détail et il faut ajouter que les commerçants de détail ont également reçu l'appui des propriétaires et des gestionnaires des centres commerciaux qui, habituellement, n'ont... Ils n'ont vraiment pas l'habitude, M. le Président, de se porter à la rescousse des consommateurs, mais ils ont jugé bon de se porter à la rescousse des détaillants et ce n'est pas pour rien. Ils appréhendent même que plus de 55 % des détaillants vont être affectés par ces taxes-là. Or, plus de 55 %, eh bien, on dépasse la moitié et c'est sûre qu'il va y avoir des conséquences extrêmement importantes au niveau de toute l'économie et tout ce qu'on risque d'avoir au bout du compte, c'est peut-être une augmentation du déficit...

Le Président (M. Forget): En conclusion, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je souhaite ardemment que le ministre entende la voix de l'Opposition et reconnaisse la justesse de l'importance d'entendre les commerçants sur le côté pratique et l'application directe de cette loi-là. Et je dois vous aviser, M. le Président, que, suite à l'appel aux voix de cette motion, j'aurai une autre motion à déposer pour entendre un autre groupe.

Le Président (M. Lemieux): Nous vous...

Mme Caron: M. le Président, évidemment, un groupe qui me touche de près en tant que porte-parole, c'est-à-dire la Fédération des ACEF du Québec.

Le Président (M. Lemieux): Nous vous remercions, Mme la députée de Terrebonne. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Comme il n'y a pas d'autres interventions, est-ce que la motion est adoptée?

Une voix: Adoptée?

Mme Caron: On demande le vote?

Le Président (M. Lemieux): Oui, alors nous... Appel nominal?

M. Léonard: Oui.

Le Président (M. Lemieux): Appel nominal. La motion se lit comme suit: "Que, conformément aux dispositions de l'article 244 de nos règles de procédure, la commission du budget et de l'administration tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 89: Loi modi- fiant la Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, des consultations particulières et qu'à cette fin elle entende le Conseil québécois du commerce de détail."

Le Secrétaire: Alors, M. Léonard (Labelle)?

M. Léonard: Pour.

Le Secrétaire: Mme Caron (Terrebonne)?

Mme Caron: Pour.

Le Secrétaire: M. Savoie (Abitibi-Est)?

M. Savoie: Contre.

Le Secrétaire: M. Thérien (Rousseau)?

M. Thérien: Contre.

Le Secrétaire: M. Chagnon (Saint-Louis)?

M. Chagnon: Contre.

Le Secrétaire: M. Brouillette (Champlain)?

M. Brouillette: Contre.

Le Secrétaire: M. Forget (Prévost)?

M. Forget: Contre.

Le Secrétaire: M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine)?

M. Farrah: Contre.

Le Secrétaire: M. Lemieux (Vanier)?

M. Lemieux: Abstention.

Le Secrétaire: Alors, 6 contre, 2 pour, une abstention. Motion rejetée.

Le Président (M. Lemieux): Merci. Alors, nous ajournons... La motion est rejetée et nous ajournons nos travaux...

M. Léonard: M. le Président, on vous a donné un préavis que nous déposerions une autre motion demain matin.

Le Président (M. Lemieux): Oui, ça va, c'est-à-dire que nous ajournons nos travaux jusqu'à demain 10 heures. Alors il n'y a pas de problème, Mme la députée de Terrebonne. Alors, je vous remercie pour votre collaboration.

(Fin de la séance à minuit)

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