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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le vendredi 10 mai 1991 - Vol. 31 N° 70

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation : Le contrôle des valeurs mobilières au Québec


Journal des débats

 

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Farrah): Bonjour tout le monde. Alors, la commission du budget et de l'administration débute ses travaux. La commission est réunie ce matin afin de procéder à l'interpellation du député de Gouin et de la ministre déléguée aux Finances sur le sujet suivant. Le contrôle des valeurs mobilières au Québec.

M. le secrétaire, il n'y a pas de remplacement ce matin?

Le Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Alors, juste pour débuter, j'aimerais peut-être rappeler la procédure de fonctionnement de la commission ce matin. Oui, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: je voudrais juste m'assurer qu'on reprenne le temps qui a été perdu afin qu'on puisse avoir le consentement pour terminer nos travaux à 12 h 5.

Le Président (M. Farrah): Est-ce que ça va, Mme la ministre?

Mme Robic: Pas de problème.

Le Président (M. Farrah): Consentement.

M. Boisclair: Merci.

Le Président (M. Farrah): Alors, la commission se terminera à 12 h 5 pour s'assurer qu'on ait les deux heures, tel que prescrit au départ.

M. Chagnon: ...mettre fin au débat plus tôt. Mais avec consentement, on y repensera.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Saint-Louis, ça va. Je veux simplement rappeler les règles de procédure. Dans un premier temps, le député de Gouin aura dix minutes pour ses remarques d'ouverture, la ministre aura dix minutes également en réplique et, par la suite, les députés de l'Opposition, cinq minutes et les députés de la formation ministérielle, cinq minutes également, en alternance. Alors, sans plus tarder, M. le député de Gouin, je vous cède la parole.

Exposé du sujet

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Nous sommes aujourd'hui réunis pour discuter la demande de l'Opposition officielle sur le contrôle de l'industrie des valeurs mobilières. Au Québec, vous le savez comme moi, M. le Président, c'est la Commission des valeurs mobilières qui est chargée de l'administration de la Loi sur les valeurs mobilières. Cette Commission a pour principale mission de favoriser le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières, tout en assurant la protection du public investisseur, tel que défini à l'article 276 de la Loi sur les valeurs mobilières.

J'aimerais, M. le Président, insister dès le départ sur l'importance du rôle de la Commission. J'ai déjà eu l'occasion de dire en cette Chambre que la Commission est garante de la confiance que le public accorde au marché des valeurs mobilières. S'il était prouvé que la Commission ne remplissait pas son mandat, ou en avait l'impossibilité, faute de ressources, c'est la confiance même du public investisseur à l'égard du marché des valeurs mobilières qui serait remise en question. À un moment où le gouvernement du Québec a affirmé, dans son récent budget, sa volonté d'accélérer le rythme des investissements des entreprises en s'assurant qu'elles disposent de fonds suffisants, surtout au niveau du capital de risque, comme disait le ministre des Finances, vous êtes à même de saisir l'importance d'un organisme de réglementation comme la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Les efforts qui seront entrepris pour favoriser la capitalisation de la petite et de la moyenne entreprise se traduiront si, et seulement si, un contexte favorable à l'émission de titres apparaît et si, et seulement si, les investisseurs témoignent d'une confiance inébranlable envers le marché et, par extension, à l'organisme qui le réglemente et qui protège le public, à savoir: la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Il est vrai, cependant, M. le Président, que nous traversons à l'heure actuelle une situation économique difficile qui force le gouvernement à réviser ses orientations budgétaires. Cependant, nous ne pouvons pas nous payer le luxe de risquer d'écarter un véhicule de placement important à cause d'un manque de confiance à l'égard de certains véhicules de placement.

Il faut, au contraire, prendre tous les moyens pour donner confiance au public investisseur à l'égard de ces véhicules de canalisation de l'épargne et, à ce titre, s'assurer de l'efficience du marché, d'une protection adéquate du public investisseur. Par exemple, M. le Président, alors que le gouvernement annonce son intention de soutenir les compagnies juniors d'exploitation minière, il faut s'assurer que celles-ci bénéficient

de la confiance des investisseurs, pour atteindre leur objectif et pour assurer la capitalisation nécessaire à leur développement.

Il est bien certain, M. le Président, cependant, que favoriser le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières tout en assurant la protection des épargnants est, chaque jour, une responsabilité considérable pour la Commission. Les membres de cette Assemblée sont sensibles à cette situation et ont d'ailleurs démontré à plusieurs reprises leur intérêt à l'égard de la Loi sur les valeurs mobilières. Rappelons, d'ailleurs, qu'en juin 1987 la commission du budget et de l'administration rendait public un examen des orientations, des activités et de la gestion de la Commission des valeurs mobilières du Québec. La commission du budget et de l'administration proposait d'ailleurs 16 recommandations et, déjà, avec beaucoup de perspicacité, M. le Président, la commission s'interrogeait sur la fonction quasi judiciaire de l'organisme.

La commission du budget et de l'administration recommandait que la Commission des valeurs mobilières du Québec prenne les mesures nécessaires pour que la distinction entre le tribunal, entre guillemets, de la Commission des valeurs mobilières du Québec, et l'organisme administratif soit clarifiée, soit connue et ne fasse pas de doute. Et je cite une partie du rapport: "II faut non seulement que justice soit rendue, mais qu'elle paraisse avoir été rendue", pouvait-on lire dans le rapport de la commission du budget et de l'administration. Pour ce faire, la Commission des valeurs mobilières du Québec a beaucoup de pouvoirs d'intervention. Elle les assume avec certains partenaires, dont la Bourse de Montréal; elle accepte le poids de cette responsabilité et le gouvernement, qui vote les lois, l'accepte aussi par ricochet.

L'industrie des valeurs mobilières, quant à elle, sait reconnaître son véritable intérêt. Elle sait qu'il lui faut tenir compte des intérêts des investisseurs. Si elle vient à s'égarer, c'est le rôle de la Commission des valeurs mobilières du Québec de rappeler le représentant de l'industrie à l'ordre.

Aujourd'hui, hélas, plusieurs soupçons pèsent sur la façon dont la Commission des valeurs mobilières du Québec s'acquitte de son mandat. Ces soupçons, M. le Président, sont de deux ordres: premièrement, manquement dû à l'absence de ressources financières adéquates; deuxièmement, manquement dû au laxisme de la Commission ou de la Bourse dans certaines affaires. Nous y reviendrons au cours de cet avant-midi.

En ce qui concerne le premier point, l'absence de ressources, M. le Président, il faut se demander si la Commission des valeurs mobilières du Québec a les moyens de ses politiques. Plusieurs observateurs du monde financier croient que non et je pourrais citer à la ministre et vous présenter, M. le Président, plusieurs articles de journaux, de spécialistes, qui témoignent effectivement de cette réalité.

La lecture du rapport Mallette, rapport présenté pour le président de la Commission des valeurs mobilières, rapport tout à fait récent, qui date de novembre 1990, m'amène aussi à croire que la Commission des valeurs mobilières du Québec n'a pas les moyens de ses politiques. Rappelons certaines allégations contenues dans le rapport Mallette, et je les cite, M. le Président: Le service d'inspection n'effectue que la moitié des inspections projetées; il y a 238 dossiers en attente au service des enquêtes; sur ces 238 dossiers, entre 130 et 140 pourraient faire l'objet de fermeture, compte tenu des délais. On poursuit dans ce même rapport en disant: Les enquêteurs ne disposent pas de guide ou de normes pour la conduite d'une enquête et on se repose davantage sur l'expérience de chaque enquêteur; le service du contentieux n'a pas les ressources nécessaires pour fournir les opinions juridiques demandées; la Commission n'a pas réussi à mettre en place un système informatique efficace; le service du budget de la Commission ne présente pas des demandes étoffées pour justifier l'augmentation pourtant nécessaire de ses budgets au Conseil du trésor; la Commission a perdu tout leadership dans le développement des politiques et des normes de réglementation au Canada; la Commission estime elle-même, d'ailleurs, qu'elle ne remplit pas son rôle d'information suffisamment, information pourtant si importante à l'égard du public épargnant, etc.

M. le Président, je pourrais continuer pendant encore plusieurs minutes à vous parler du contenu du rapport de la Commission. La ministre déléguée aux Finances pourra m'accuser, comme elle l'a fait à l'occasion de l'étude des crédits, de ne citer que certains extraits du rapport. Je conçois très bien qu'effectivement, je cite certains extraits du rapport. Il n'en demeure pas moins qu'elle ne peut réfuter ces allégations et qu'à elles seules elles sont déjà suffisantes pour semer un doute dans l'esprit des épargnants.

En ce qui a trait au laxisme de la Commission des valeurs mobilières du Québec ou de la Bourse dans le traitement de certaines affaires, je me permets de citer l'exemple de Scotia-McLeod à Chicoutimi, sur lequel nous reviendrons tout à l'heure. J'aimerais cependant rappeler immédiatement à la ministre l'article 348 de la Loi sur les valeurs mobilières qui la désigne responsable de l'application de la loi, et l'article 303 de la même loi qui lui permet d'exiger tout rapport - tout rapport, M. le Président - qu'elle requiert au président de la Commission.

Si la ministre n'a pas d'ordre à donner à la Commission des valeurs mobilières du Québec, elle a cependant l'obligation de s'y intéresser drôlement. La ministre ne peut, d'un côté de la bouche, dire qu'elle ignore le contenu d'un rapport dont nous, dans cette Chambre, connais-

sons tous le contenu et, d'un autre côté, nous annoncer le dépôt prochain de plaintes. Elle ne peut pas nous dire que, d'un côté, ce rapport-là n'existe pas et, d'un autre côté, être informée qu'il y aura un dépôt prochain de plaintes.

Alors voilà, M. le Président, la situation telle que la perçoit l'Opposition officielle. Nous espérons avoir des réponses à nos questions. Nous aborderons trois principaux points, à savoir: la délégation des pouvoirs à la Commission des valeurs mobilières vers d'autres organismes d'autoréglementation, et particulièrement la Bourse de Montréal. Nous questionnerons aujourd'hui dans le cas de l'affaire ScotiaMcLeod, mais pas sur le fond. Nous comprenons que cette cause se trouve devant la Bourse de Montréal à l'heure actuelle. Nous questionnerons plutôt sur la forme et non pas sur le fond. Plus de quatre ans, à ce jour, ont traîné sans qu'il y ait aucune mesure, ni disciplinaire, ni en fonction des dispositions pénales prévues à la loi. Aucun geste, à ce jour, n'a été posé.

Nous questionnerons aussi, M. le Président, sur l'administration de la Commission des valeurs mobilières du Québec et nous interrogerons particulièrement quant à la nomination d'un vice-président, qui devra être effectuée incessamment, compte tenu du départ d'un des vice-présidents de la Commission. Je vois d'ailleurs le chef de cabinet de la ministre qui regarde vers la droite. Je ne sais pas si c'est un présage pour l'avenir, mais je souhaite peut-être que certaines personnes de l'entourage de la ministre se retrouvent à la Commission des valeurs mobilières du Québec. (10 h 15)

Le Président (M. Farrah): Vous avez terminé, M. le député de Gouin? En conclusion. Merci.

M. Boisclair: Ceci étant dit, en conclusion, j'espère que nous aurons une réponse à nos questions. Elles seront nombreuses et j'espère que la ministre collaborera à cet exercice dans le meilleur intérêt des Québécois et des Québécoises, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): je vous remercie, m. le député de gouin. en réplique maintenant, je vais reconnaître Mme la ministre déléguée aux Finances.

Réponse de la ministre Mme Louise Robic

Mme Robic: Oui, M. le Président. Le mot qui me vient en tête, M. le Président, en ce moment, c'est "irresponsabilité". M. le Président, l'irresponsabilité de l'Opposition officielle, aujourd'hui et dans les semaines précédentes, n'a d'égale que son insouciance des conséquences importantes des accusations gratuites et des critiques démesurées dont elle affuble les institu- tions de contrôle et de surveillance du marché des valeurs mobilières du Québec.

L'Opposition officielle devrait faire preuve de plus de retenue et ne pas agiter des épouvan-tails alors qu'il n'y en apas. Il est irresponsable, M. le Président, de tenter de faire croire à la population, comme le fait l'Opposition officielle, que la Commission des valeurs mobilières du Québec est incapable de protéger les épargnants et d'assurer le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières. Le critique de l'Opposition en matière d'institutions financières, le député de Gouin et, mieux que tout autre, le chef de l'Opposition savent à quel point la confiance que les investisseurs doivent avoir dans le marché financier est un élément déterminant non seulement dans la réglementation de ces marchés, mais dans leur stabilité.

Le public investisseur est en droit de s'attendre, M. le Président, à ce que le marché soit encadré par une législation adéquate des organismes de contrôle qui disposent de l'autorité législative et morale nécessaire à l'accomplissement de leurs fonctions. C'est pourquoi les commentaires téméraires de l'Opposition sur la Commission des valeurs mobilières du Québec ou ses dirigeants, que ce soit sur l'application de la loi, l'administration ou la gestion de la Commission, ne peuvent contribuer qu'à saper l'autorité morale de la Commission et, par conséquent, avoir un impact sur la confiance des investisseurs dans le marché des valeurs mobilières. S'il est un secteur des activités gouvernementales qui ne devrait connaître aucune par-tisanerie mesquine, il s'agit bien du secteur financier. En tant que parlementaires, il est de notre devoir de soutenir la confiance de nos institutions publiques. Il conviendrait tout naturellement que nous soulignions ensemble le grand respect que nous manifestons pour les travaux de la Commission des valeurs mobilières, d'autant qu'elle est reconnue pour son leadership dans tout le Canada.

M. le Président, la vitalité, l'intégrité et l'efficacité de nos marchés financiers ne peuvent être mises en cause ou altérées par des insinuations ou des allusions qui ne reposent sur rien ou qui s'appuient, dans bien des cas, sur une ignorance manifeste des lois et des faits. Il serait irresponsable et lourd de conséquences de ternir sans fondement la confiance du public à l'égard de nos marchés financiers. Il est vital de veiller à ce que cette confiance ne soit pas atteinte. Le régime de contrôle des valeurs mobilières au Québec, M. le Président, est un bon régime, un régime harmonisé de réglementations qui favorisent l'efficacité des marchés sur le plan national. Le public investisseur peut avoir confiance dans la Commission des valeurs mobilières et ses dirigeants.

Les enjeux sont importants, M. le Président. Aujourd'hui, la concurrence au sein des marchés se fait plus vive. La complexité et le degré de

sophistication des formes d'investissements s'accroissent à un rythme accéléré. Tout cela ajoute chaque jour à la responsabilité déjà considérable pour la Commission des valeurs mobilières de favoriser le bon fonctionnement du marché tout en assurant la protection des épargnants contre des pratiques déloyales, abusives et frauduleuses.

La mission de la Commission des valeurs mobilières du Québec, à l'instar de la plupart des commissions des pays développés à travers le monde, est vaste et importante. Les pouvoirs que le gouvernement lui a confiés sont étendus. Ils sont ceux d'une véritable régie dont la fonction juridictionnelle est rattachée à une fonction de réglementation. On en retrouve les grandes lignes à l'article 276 de cette loi.

En plus d'être chargée d'administrer la loi, la Commission des valeurs mobilières définit sa mission en quatre volets: favoriser le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières; assurer la protection des épargnants contre les pratiques déloyales, abusives et frauduleuses; régir l'information des porteurs de valeurs mobilières et du public; enfin, encadrer l'activité des professionnels du marché des valeurs mobilières, des associations et des organismes chargés d'assurer le fonctionnement du marché.

M. le Président, le gouvernement a choisi des moyens d'assurer le bon fonctionnement du marché des valeurs mobilières. Il a pris des dispositions pour assurer aux épargnants qu'ils seront protégés contre les pratiques déloyales et frauduleuses. Il a prévu que les sociétés qui ne faisaient pas appel à l'épargne publique émettraient des informations sur l'utilisation des fonds qu'elles prélèvent dans le public et il a prévu des dispositions pour reconnaître les bourses et surveiller les marchés des valeurs mobilières et les associations, inscrire les courtiers, vérifier qu'Hs soient solvables, honnêtes et compétents.

À n'en pas douter, M. le Président, la protection des épargnants est un aspect important et constitue la mission principale de la Commission. Cette dernière est souvent, en matière de crimes économiques spécialisés, l'instance de dernier recours pour des petits épargnants victimes de pratiques déloyales, abusives et frauduleuses. Différentes mesures sont d'ailleurs prévues, tant dans la Loi sur les valeurs mobilières que dans le Code criminel, visant à prévenir et à réprimer diverses actions trompeuses et frauduleuses. La Commission utilise au besoin divers outils qui sont à sa disposition afin de protéger les épargnants: inspection préventive, enquête, ordonnance de blocage de fonds, administration provisoire, suspension ou radiation des courtiers ou de représentants, ordonnances diverses, accusations.

La Commission obtient en outre la coopération d'autres commissions et, au besoin, des corps policiers dans certains cas. De plus, divers organismes d'autoréglementation, comme la bourse de montréal et l'association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, collaborent au contrôle des activités de leurs membres en surveillant activement ces derniers, tant par des inspections préventives rigoureuses que par l'imposition de sanctions disciplinaires au besoin. m. le président, la protection des épargnants est principalement fondée sur la divulgation d'information sur les personnes qui font publiquement appel à l'épargne et sur les valeurs émises par celles-ci, afin que les investisseurs aient en main l'information leur permettant de décider eux-mêmes si un placement particulier convient. en ce sens, le prospectus constitue certes l'instrument de prévention par excellence. je dis bien prévention, parce que aucune garantie de la valeur de l'investissement concerné n'est donnée par les autorités publiques. le premier paragraphe d'un prospectus stipule d'ailleurs clairement qu'aucune commission des valeurs mobilières, ni aucune autorité similaire au canada ne se prononce sur la qualité des titres offerts dans le prospectus et que toute personne qui donne à entendre le contraire commet une infraction. dans le haut d'un prospectus, m. le président, c'est là qu'on voit la mise en garde.

Aucune Commission des valeurs mobilières ne peut vérifier l'exactitude de la totalité des informations contenues dans ces documents. Ce sont les responsables de l'émetteur et du placeur, ainsi que les firmes de vérificateurs et d'avocats qui voient à la cueillette et à l'exactitude de ces informations. Ils en assument l'entière responsabilité. Le prospectus contient une foule d'informations importantes pour l'épargnant, dont la divulgation est exigée par la loi et le règlement. La Commission voit à ce que l'émetteur fournisse ces renseignements aux investisseurs potentiels. Ces informations doivent cependant être examinées attentivement par l'épargnant lui-même ou ses conseillers personnels afin qu'il s'assure que le placement envisagé corresponde adéquatement à ses besoins, à ses attentes et au niveau de risques qu'il est prêt à assumer.

M. le Président, en plus d'exiger la divulgation d'une information initiale pour les épargnants, la loi voit à ce qu'une information continue leur soit fournie afin qu'ils puissent surveiller l'évolution des entreprises dans lesquelles ils ont effectué des placements. Cette surveillance et l'évolution de la situation de l'émetteur permettent à l'épargnant de vérifier si le placement correspond toujours à ses objectifs personnels. Le projet de loi 101, adopté par le consentement de l'Opposition au mois de décembre dernier, propose d'ailleurs une série de mesures qui ont pour effet d'améliorer la protection du public investisseur en lui assurant, entre autres, l'accès à une information exacte, pertinente, complète et continue.

Ce projet de loi, il incombe de le rappeler, poursuit comme objectif une meilleure protection

du public investisseur et le maintien de sa confiance dans le système. Les dispositions de ce projet de loi introduisent par ailleurs des règles destinées à prévenir les conflits d'intérêts ou à en neutraliser les effets. En outre, des exemples malheureux vécus au cours des dernières années dans des dossiers de sociétés immobilières en commandite ont amené le gouvernement à en revoir les modalités et à prévoir un nouveau régime d'administration provisoire des sociétés, qui permettra dorénavant de tenir compte, dès le début, de la viabilité financière et de l'utilité des recours pour les investisseurs lésés.

M. le Président, vous comprendrez que je pourrais allonger, mais le temps passe. Donc, je voudrais tout simplement terminer en vous disant que la Commission des valeurs mobilières du Québec s'acquitte fort bien de ses tâches et quiconque connaît un peu cette industrie le reconnaît. C'est un jeu dangereux, M. le Président, auquel s'adonne l'Opposition. J'espère simplement qu'elle saura en mesurer l'impact véritable.

Le Président (M. Farrah): Merci, Mme la ministre. Maintenant, je reconnais M. le député de Gouin pour une intervention de cinq minutes maximum.

Argumentation M. André Boisclair

M. Boisclair: Rapidement, M. le Président, c'est bien beau, effectivement, d'être capable de lire devant les membres de cette commission l'article 276 de la loi qui définit le mandat de la Commission, mais encore faut-il, M. le Président, que la Commission ait les moyens de ses politiques. Le dire et l'écrire dans une loi, c'est une chose. Avoir les moyens d'exercer ces pouvoirs, c'est une autre chose. J'aimerais demander à la ministre ce qui est le plus irresponsable: poser des questions afin d'éclaircir une situation, afin d'apaiser des soupçons ou, plutôt, comme elle le fait, ne pas répondre à des questions et laisser planer un doute en espérant que le temps arrange les choses?

M. le Président, c'est une situation que l'Opposition ne peut accepter, avec laquelle elle ne peut vivre. Ce que nous voulons aujourd'hui, c'est des réponses à nos questions. Nous voulons nous assurer que des gestes soient posés lorsqu'il y a des cas patents de fraude et je serais, même aujourd'hui, capable d'en démontrer quelques-uns. Faut-il rappeler que c'est la ministre qui est responsable de l'application de la loi et qu'elle a le pouvoir direct, dans la loi, de demander au président de la Commission des valeurs mobilières de lui faire rapport sur n'importe quel dossier? Je reprends, et la ministre me dit que non. Je peux lui citer l'article de loi. Si elle ne connaît pas sa loi, c'est son problème, ce n'est pas le mien.

M. le Président, j'aimerais revenir sur un élément important de l'administration des valeurs mobilières au Québec, qui est la délégation de pouvoirs. L'article 170 de la loi nous indique que "la Commission peut, aux conditions qu'elle détermine, déléguer à un organisme reconnu l'application de tout ou partie des dispositions du titre cinquième et des règlements pris pour son exécution."

Actuellement, un certain nombre de ces pouvoirs sont délégués à la Bourse de Montréal. La délégation peut présenter, bien sûr, un certain nombre d'avantages, une plus grande efficacité, des coûts d'opération moindres, une procédure, aussi, moins lourde. La Commission des valeurs mobilières du Québec, d'ailleurs, lorsqu'elle venait témoigner en 1987 devant la commission du budget et de l'administration disait, et je cite: "La délégation externe de fonctions comme instrument pour rationaliser l'utilisation de ressources matérielles de la CVMQ tout en continuant d'assurer une protection adéquate a donc atteint, dans le contexte actuel, ses limites extrêmes." C'est la Commission des valeurs mobilières qui parle.

La Commission des valeurs mobilières n'en garde pas moins la responsabilité de s'assurer que les pouvoirs ainsi délégués permettent d'atteindre ces objectifs et se garde un certain nombre de pouvoirs à l'égard des organismes d'autoréglementation. Citons, par exemple - et la ministre connaît certainement la loi aussi bien que moi - l'article 175 de la Loi sur les valeurs mobilières qui assure un certain nombre de règles et d'exigences avant qu'un organisme ne soit reconnu. Les articles 309 et 310 de la loi nous disent de façon très claire quels sont les pouvoirs que la Commission peut exercer et qu'elle peut appeler, par exemple, toute affaire devant elle dont est saisie une personne exerçant un pouvoir délégué. "La Commission peut, d'office, réviser toute décision rendue par une personne exerçant un pouvoir délégué ou par un organisme d'autoréglementation."

L'article 181, M. le Président, nous donne une protection supplémentaire aussi. L'article 181 nous dit clairement que "la Commission peut ordonner à un organisme reconnu la conduite à tenir, lorsqu'elle estime cette mesure nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de l'organisme ou la protection des épargnants." Voilà le cadre légal, tel qu'il existe dans la loi, pour la délégation de pouvoirs. Et nous reviendrons sur ces dispositions, M. le Président. (10 h 30)

Dans le cas de plaintes relatives à des courtiers membres de la Bourse de Montréal, la commission transmet la plainte, par exemple, et s'assure qu'elle est traitée. Au 14 juin 1990, 69 plaintes en cours étaient inscrites à la Bourse de Montréal - dont 24 dataient de plus d'un an - lesquelles impliquent, pour la plupart, des

mesures disciplinaires à l'égard des courtiers. Cette situation, nous indique le rapport Mallette, laisse présager que la Bourse de Montréal... Et ça, ce n'est pas l'Opposition officielle, c'est un rapport fait par un groupe d'experts indépendants qui nous disent que cette situation laisse présager que la Bourse de Montréal n'est plus en mesure d'effectuer seule le règlement de plaintes. J'aimerais donc demander à la ministre, qui qualifiait, à l'étude des crédits, ce rapport Mallette d'excellent, si elle trouve normal... J'aimerais qu'elle m'écoute, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Votre temps achève, M. le député.

M. Boisclair: Oui, mon temps achève, mais je suis là pour interpeller la ministre qui ne m'écoute même pas, M. le Président. J'espère qu'elle prend note de mes questions. Si la ministre trouve normal qu'il y ait 24 plaintes qui datent depuis plus d'un an à la Bourse de Montréal, qu'une révision de la délégation de pouvoir de la Bourse de Montréal est nécessaire, tel que le dit le rapport Mallette...

Le Président (M. Farrah): ...terminé, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: ...et, finalement, ne trouve-t-elle pas qu'il est nécessaire, encore une fois, comme le recommandent les experts du groupe Mallette, Major, Martin que les services d'inspection de la Commission des valeurs mobilières du Québec vérifient les pouvoirs délégués à la Bourse de Montréal, le règlement...

Le Président (M. Farrah): Votre temps est écoulé, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: ...et aussi le règlement de plaintes reçues contre l'un de ses membres, ce qui ne se fait pas à l'heure actuelle?

Le Président (M. Farrah): Votre temps est écoulé, M. le député de Gouin. Je vais reconnaître maintenant Mme la ministre, pour une réplique maximale de cinq minutes.

Mme Louise Robic

Mme Robic: Merci, M. le Président. M. le Président, il est malheureux que l'Opposition se serve indûment d'un document qui établit des orientations à venir de la Commission pour prétendre qu'elle ne peut s'acquitter convenablement aujourd'hui de son mandat. Si on reprend le document Mallette, je peux vous citer plusieurs pages où on fait état de la capacité de la Commission de s'acquitter de son rôle.

Page 52, M. le Président. "Le niveau d'efficience est satisfaisant. L'équipe est bien organisée. Le contrôle ot les suivis sont effec tués. Les outils de travail sont adéquats." Page 57: "Des guides et procédures sont en place pour l'analyse des documents financiers annuels et trimestriels. La répartition du portefeuille d'émetteur par agent est efficiente. Le personnel fonctionnaire est efficient. Les agents vérificateurs sont efficients et ont réussi à faire face à la croissance du volume des activités." Page 61: "Le processus d'inscription est efficace. La perception des droits des courtiers a connu une nette amélioration." Page 64. "Le service établit des objectifs annuels d'inspection par type de courtier. Ce système est efficace. La répartition des dossiers d'inspection par rotation permet d'assurer à la Commission l'objectivité des inspections. L'efficacité des inspections est élevée." Page 66: "Le service établit un plan annuel d'inspection et rédige des rapports d'activité sur une base régulière. Des guides et procédures d'inspection sont utilisés. La répartition des dossiers d'inspection est efficiente. Le suivi des dossiers est informel mais efficient. Les feuilles de temps et rapports d'activité permettent une mesure des résultats et de la performance." À la page 82: "La Commission accomplit ses fonctions de base dans les domaines de l'appel public à l'épargne, de l'information continue, de l'inscription, de l'inspection, des enquêtes et du contentieux de façon efficace. L'analyse de l'efficience a démontré que le personnel est, en règle générale, efficient dans l'accomplissement de ses tâches." Et à la page 52: "Le niveau d'efficience est satisfaisant. L'équipe est bien organisée, le contrôle et le suivi sont effectués, les outils de travail sont adéquats." Je me répète, M. le Président.

Alors, M. le Président, il est bien sûr que dans son rôle, la Commission veut devenir de plus en plus efficace. Devenir de plus en plus efficace n'exclut pas l'efficacité, M. le Président. Cette efficacité est...

Le Président (M. Farrah): Mme la ministre.

Mme Robic: En vous regardant, M. le Président, j'ai perdu mes mots. L'efficacité est là, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Je vous fait de l'effet, Mme la ministre.

Mme Robic: Et ce rapport présente un plan triennal. D'ailleurs, M. le Président, j'ai toujours dit à l'Opposition que je trouvais que c'était un excellent rapport qui parle de l'avenir. On a bien l'intention de voir ce rapport s'accomplir. Oui, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Maintenant, je vais reconnaître le député de Saint-Louis pour une intervention maximale de cinq minutes. À vous la parolo

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: merci, m. le président. m. le président, je tiens aussi à remercier, évidemment, le député de gouin de nous inviter ici en interpellation ce matin. il n'y a rien de plus plaisant, par ces avant-midi maussades, que d'étudier un problème comme celui de la commission des valeurs mobilières du québec.

Des voix: Ha,ha, ha!

M. Chagnon: II est important d'étudier la Commission des valeurs mobilières du Québec, d'une part, parce que ça met en cause un organisme de régulation économique extrêmement important dans notre société. Mais il faut savoir que cet organisme de régulation économique est aussi, et c'est bien important, un organisme qui a deux fonctions. C'est un organisme de régulation économique d'abord et, ensuite, c'est un tribunal administratif. Le député de Gouin, je l'ai vu en commission parlementaire et je l'ai revu ici en Assemblée au moment de la période de questions, s'est interrogé et a interrogé la ministre pour savoir si elle a pris connaissance de tel ou tel type d'informations concernant la Commission des valeurs mobilières.

Je pense que le député de Gouin est capable de faire la part des choses entre la capacité que la ministre peut avoir de par ses fonctions, de par les attributs que la loi sur la Commission des valeurs mobilières lui donne pour exiger tous les rapports que le député de Gouin demande à un ministre en fonction de l'article 303 de la loi de la Commission des valeurs mobilières, en ce qui concerne le premier mandat de la Commission des valeurs mobilières, c'est-à-dire le mandat de régulation économique.

Quant au travail de la Commission des valeurs mobilières, eu égard à son rôle de tribunal administratif, je pense qu'il ne serait pas prudent que le personnel politique de n'importe quel gouvernement puisse avoir la capacité de venir s'ingérer dans les travaux de la Commission des valeurs mobilières. Par extension, puisque la Commission des valeurs mobilières du Québec a délégué à la Bourse de Montréal ses pouvoirs d'enquête, donc, elle permet à la Bourse de Montréal d'avoir non seulement un tribunal qui est dit administratif à la Bourse de Montréal, mais aussi un pouvoir d'enquête sur des activités qui pourraient être irrégulières.

Il est tout à l'honneur du député de Gouin et des membres de cette Chambre, ici, de bien vouloir protéger les épargnants. Les épargnants sont des gens qui sont susceptibles, évidemment, d'être toujours écorchés quand il s'agit d'acheter des valeurs mobilières. Je me souviens d'un vieux discours du président actuel de la Bourse; je pense que M. Riverain n'aimerait pas que je dise que c'est un vieux discours, il prétend qu'il est encore un peu jeune, M. Riverain, mais un discours dans lequel il disait: S'il y a une chose que je ne veux plus entendre, s'il y a une chose que je ne me permets pas de dire, c'est qu'il ne faut pas jouer à la Bourse. La Bourse, ce n'est pas un jeu. La Commission des valeurs mobilières a le rôle d'émettre des prospectus, de donner de l'information aux épargnants qui pourraient utiliser un véhicule extrêmement important dans nos sociétés, un véhicule qui permet à des sociétés, petites et moyennes, de pouvoir jouir de liquidités. On l'a vu dans le passé avec la création des RÈA et autres; l'investisseur doit avoir non seulement la capacité de se renseigner par le biais des prospectus, mais aussi avoir une certaine confiance vis-à-vis de son courtier.

Le rôle de la Commission des valeurs mobilières et le rôle de la ministre responsable, eh bien! on sait donc que l'organisme, la Commission des valeurs mobilières, a des pouvoirs quasi judiciaires, que l'organisme a des pouvoirs d'enquête et que l'organisme a aussi des pouvoirs d'instruction générale. Ces pouvoirs d'instruction générale sont aussi d'ordre quasi réglementaires et c'est assez normal. Il m'apparaît que c'est sur ce dernier point que le député de Gouin pourrait davantage questionner la ministre, eu égard, entre autres, à l'article 261 de la Loi de la Commission des valeurs mobilières, qui, si je ne m'abuse, définit les pouvoirs de la ministre. Le député de Gouin se référait à l'article 348 de la loi. C'est un peu maigre comme article. Puisqu'il s'agit de l'article qui statue que le gouvernement doit nommer un ministre pour être responsable de la Commission des valeurs mobilières, c'est assez évident que nous avons un ministre responsable de la Commission des valeurs mobilières.

Alors, c'est à cela, M. le Président, que j'invite le député de Gouin, d'une part. Et, d'autre part, je lui dis à l'avance de se méfier non pas de son impétuosité, mais de se méfier de lui-même, dans le fond, quant à la capacité qui pourrait faire en sorte de m'obliger à recourir à notre règlement pour protéger les éventuels recours qui pourraient être faits dans des causes qui pourraient être soulevées plus tard. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Saint-Louis, en vous faisant remarquer également qu'il est de mon droit de faire respecter le règlement si...

M. Chagnon: Ah! Je n'en doute aucunement, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Je vous remercie.

M. Chagnon: Comptez sur moi pour vous aider.

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Saint-Louis. Je reconnais maintenant M. le député de Gouin, pour une intervention

maximale de cinq minutes.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Si vous saviez, M. le Président, combien j'apprécie la modération des propos du député de Saint-Louis qui devrait conseiller de façon plus - comment pourrais-je dire?

M. Chagnon:... de faire des beaux mots, vous aussi.

M. Boisclair: Qui devrait conseiller plus fréquemment la ministre déléguée aux institutions financières. Ce que j'aimerais dire à mon bon ami, le député de Saint-Louis, c'est qu'effectivement il a sans doute raison. Mais la ministre responsable a aussi la responsabilité de voir à ce que le doute ne s'installe pas, comme c'est le cas à l'heure actuelle. Le député de Saint-Louis aurait sans doute raison s'il n'y avait des allégations de faute grave qui pèsent sur la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Bourse de Montréal. Puisque le contexte est différent, ce que l'Opposition dit à la ministre, M. le Président, par votre entremise, c'est que la ministre doit enlever ses lunettes roses. La ministre doit arrêter de nous dire que tout va bien.

Je suis d'accord, et je l'avais prévenue au moment de mon intervention au début de cette interpellation. Je la prévenais que je ne citais que certains extraits du rapport. Je ne nie pas du tout les extraits qu'elle a cités. Je veux tout simplement lui dire que d'aucune façon elle n'a réussi à réfuter les allégations que l'Opposition soutient et qui se retrouvent dans le rapport Mallette. Et ce qui m'inquiète encore plus, c'est de voir que la ministre, d'aucune façon, n'a été capable de répondre à mes questions. Trouve-t-elle normal qu'il y ait 24 plaintes qui traînent à la Bourse de Montréal depuis plus d'un an? Est-ce que la ministre est d'accord pour que la Commission, comme le recommande le rapport d'experts du groupe Mallette, Major, Martin, révise le pouvoir de délégation à la Bourse de Montréal? Est-ce qu'elle est d'accord pour que la Commission des valeurs mobilières du Québec fasse un suivi plus important de la façon dont sont traitées les plaintes par ta Bourse de Montréal?

M. le Président, la question de délégation de pouvoir à des organismes d'autoréglementation est importante, en ce sens que, comme parlementaires, on peut s'interroger sur la capacité des organismes à agir à la place et au nom de la Commission. De prime abord, je soutiens, par exemple, que la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Bourse de Montréal poursuivent des objectifs opposés par rapport à la protection du public investisseur. En effet, la Commission des valeurs mobilières du Québec est un organisme quasi judiciaire créé par le gouvernement pour veiller à la bonne conduite des courtiers, de leurs représentants, des conseillers financiers, des promoteurs ou des émetteurs, et qui doit aussi surveiller, comme le rappelait le député de Saint-Louis avec beaucoup de pertinence, le bon fonctionnement des marchés et la protection du public épargnant.

Mais, pour sa part, la Bourse de Montréal - et la ministre, je l'espère, le sait - est un organisme privé créé par les courtiers, régi par eux et autoréglementé quant aux questions de bonne conduite du marché et des affaires. Bien que les membres de la Bourse n'aient aucun intérêt à ce qu'un nombre désordonné de plaintes surgissent à leur égard, ils n'ont pas non plus intérêt à ce que de gros scandales concernant leur comportement éclatent au grand jour. La Commission des valeurs mobilières du Québec, par contre, ne devrait pas avoir ces mêmes préoccupations puisqu'elle ne tire aucun revenu direct du marché boursier et répond à un mandat qui lui vient du gouvernement.

M. le Président, cette relation contradictoire s'inscrit dans une toile de fond. Il faut connaître un peu le fonctionnement de ta Commission des valeurs mobilières, et j'espère que la ministre le connaît. Le service d'inspection, par exemple, de la Commission des valeurs mobilières du Québec, qui n'a pas de pouvoirs juridiques - ce sont seulement plutôt des pouvoirs administratifs - se limite à l'inspection des courtiers, à l'analyse de rapports financiers et au traitement de plaintes reçues pour les personnes inscrites. Le service n'inspecte d'ailleurs pas les courtiers de plein exercice puisque cette responsabilité relève des pouvoirs de la Bourse. (10 h 45)

Le service d'enquête, cependant, quant à lui, à la Commission des valeurs mobilières du Québec, est responsable de toute enquête relativement aux infractions à la Loi sur les valeurs mobilières. Les pouvoirs de ces services ont une certaine valeur juridique: subpoenas, convocations, ainsi de suite. Selon des personnes - des informations qui nous viennent de la Commission des valeurs mobilières du Québec, Mme la ministre, pas de l'Opposition officielle - il appert que les enquêtes touchent, plus souvent qu'autrement des personnes physiques et des promoteurs. Le service d'inspection, quant à lui, se voit confier la plupart des dossiers qui touchent les courtiers et leurs représentants. Les informations sont aussi à l'effet qu'une enquête rend les courtiers plutôt rébarbatifs et la coopération est souvent réduite. Il est, semble-t-il, plus facile d'obtenir la collaboration des courtiers pour une inspection puisque les inspecteurs agissent plus discrètement et sans coercition légale.

J'aimerais donc demander à la ministre, alors que la grande majorité des dossiers des malversations impliquant les promoteurs et émetteurs sont traités par le service des

enquêtes, qu'il y ait des pouvoirs judiciaires, les plaintes relatives aux courtiers ou représentants aboutissent au service de l'inspection. Ne s'agit-il pas là de deux poids, deux mesures?

Le Président (M. Farrah): Mme la ministre. Mme Louise Robic

Mme Robic: M. le Président, encore une fois, je vois l'Opposition tenter de se servir d'un rapport pour faire croire aux gens que la Commission ne peut pas s'acquitter adéquatement de son mandat. Écoutez, il n'aime pas que je me serve du mot "irresponsabilité", mais il n'y en a pas un autre qui me vient en tête. C'est tout à fait irresponsable de sa part et, oui...

M. Boisclair: C'est antiparlementaire.

Mme Robic: On me donne un communiqué de presse, je lui retourne. M. le Président, c'est tout à fait irresponsable. C'est vous qui êtes irresponsable.

M. le Président, depuis un an et demi que nous sommes en poste, le président de la Commission des valeurs mobilières et la ministre, nous avons fait énormément de choses pour améliorer la protection des épargnants. Le député de Gouin, pour des fins politiques, bien sûr, aime mieux ignorer ce qui a été fait depuis un an et demi. Il aime mieux citer des passages du rapport Mallette - un très bon rapport, M. le Président, je le répète - qui parle d'avenir, M. le Président, qui présente un plan triennal pour l'avenir, avec lequel nous sommes d'accord. Mais prétendre qu'en ce moment la Commission ne peut pas faire son travail, c'est dangereux. La Commission s'acquitte de son travail. Elle joue son double rôle et un de ces rôles-là est son rôle quasi judiciaire. Eh bien, M. le Président, c'est bien sûr que je ne m'ingérerai pas dans ce domaine-là,

Je n'ai pas lu le document dont il parle, M. le Président. S'il en a copie, je lui suggère de la mettre sous clé. Il y a une injonction, je vous le rappelle. C'est un document... Le président de la Commission n'a pas lu le document, M. le Président, parce qu'il peut être appelé à siéger en appel des décisions de la Bourse, si c'est la Bourse qui dépose des plaintes. C'est un tribunal quasi judiciaire.

M. Boisclair: Quatre ans, les prescriptions sont passées. Deux ans...

Mme Robic: quasi judiciaire! il n'y a pas de prescription. je vous demanderais de... vous pouvez bien me citer des articles de la loi, mais vous ne connaissez pas le processus, c'est évident. au niveau des plaintes, il n'y a pas de prescription et si vous vous rappelez la loi 101, on a allongé les prescriptions de deux ans à cinq ans. Alors, ne me dites pas que c'est quatre ans, c'est deux ans qui sont passés. Ce n'est pas toujours facile d'obtenir toutes les preuves dans des dossiers aussi complexes que des dossiers comme celui que vous avez mentionné en période de questions et que vous avez mentionné au début. Et je vous mets encore en garde au sujet de ce dossier-là.

Le Président (M. Farrah): C'est tout, Mme la ministre?

Mme Robic: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Je vous remercie. Maintenant, je vais reconnaître, Mme la députée de Bellechasse.

Mme Louise Bégin

Mme Bégin: Merci, M. le Président. M. le Président, comme tout autre secteur, la participation au marché des valeurs mobilières comporte des risques. Il incombe donc à l'épargnant qui désire participer à ce marché d'obtenir les informations et les conseils adéquats afin de déterminer si un placement lui convient, tant en fonction de sa situation financière et de ses objectifs de placements personnels que des risques qu'il est prêt à assumer. Ceci est d'autant plus vrai, M. le Président, surtout lorsque l'épargnant doit, pour effectuer ce placement, emprunter.

Le prospectus constitue pour l'épargnant un outil privilégié. L'information est mise à sa disposition pour l'aider à prendre une décision. Ce document contient une foule importante de renseignements passés, présents et futurs sur la société dans laquelle il entend investir. Toute l'information présentée dans le prospectus doit faire l'objet d'une vérification spécifique par les différents professionnels qui interviennent dans le cadre du financement de la société. Entre autres, les états financiers présentés dans ce document sont signés par des vérificateurs qui sont, habituellement, des comptables agréés indépendants de la société.

Par la suite, le prospectus est étudié par les analystes financiers de la Commission et si ce document d'information doit être clarifié ou corrigé, il fera l'objet de lettres d'observation émises par la Commission afin de s'assurer que l'information présentée dans ce document permette à l'épargnant de prendre une décision éclairée.

Bien que la Commission analyse ce prospectus, elle ne se prononce nullement sur la qualité du placement des titres offerts à l'épargnant. Celle-ci n'a pas plus le contrôle sur ce qui se passe après le financement, si ce n'est de suivre l'évolution financière via le dépôt des états financiers subséquents. C'est à l'épargnant et à lui seul, M. le Président, de prendre connaissance

de ce document mis à sa disposition pour décider s'il doit ou non investir dans cette société. Cependant, de nombreuses remarques de la part des épargnants amènent à conclure qu'ils ont la conviction que, parce que le dossier a été accepté par la Commission, celle-ci s'est prononcée sur la qualité du placement. Cette conviction est erronée et le prospectus contient en première page une mention à l'effet que la Commission ne se prononce nullement sur la qualité du placement.

Les contacts avec les épargnants montrent que peu de ceux-ci lisent le prospectus avant d'investir et qu'ils portent très peu d'attention à la divulgation concernant les facteurs de risque. Les épargnants ne semblent pas être au courant que, par suite d'une plainte, l'intervention de la Commission, via une enquête, ne saurait leur faire récupérer les sommes perdues.

Si vous me permettez de conclure, M. le Président, il faut être conscient que la Commission des valeurs mobilières met a la disposition de l'épargnant tous les instruments nécessaires pour lui permettre de prendre une décision éclairée, mais, naturellement, elle ne peut s'assurer que celui-ci s'en prévaudra. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Je vous remercie, Mme la députée de Bellechasse. En réplique toujours, M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: J'aimerais que la ministre me comprenne clairement. Ce que je lui demande, c'est de répondre tout simplement à des questions pour essayer de dissiper tout doute ou tout soupçon qui peut exister. Ma question, tout à l'heure, visait à savoir s'il y avait deux poids, deux mesures au service d'enquête pour les émetteurs, qui a des pouvoirs judiciaires, et au service d'inspection, qui n'a que des pouvoirs administratifs, pour les courtiers. Elle m'accuse de ne pas connaître le processus suivi par la Commission des valeurs mobilières. L'absence de réponse de la ministre m'amène à me demander si la ministre, elle, sait ce qui se passe à la Commission des valeurs mobilières du Québec, si elle sait qu'il y a un service d'enquête et un service d'inspection et que les deux services ont des pouvoirs différents. Comment se fait-il que le service d'enquête ne va pas chez les courtiers, que c'est essentiellement un service d'inspection? Qu'est-ce qui arrive lorsque le service d'inspection se présente chez un courtier et remarque des infractions à la Loi sur les valeurs mobilières? Quel est le processus? La ministre le connaît-elle?

M. le Président, nous l'avons dit au départ tout à l'heure, à l'introduction, non seulement doit-il y avoir justice, mais il doit aussi y avoir apparence de justice. Or, pour qu'il y ait appa- rence de justice, il faut sentir qu'il se passe au moins quelque chose. Or, dans le cas de Scotia-McLeod à sa succursale de Chicoutimi, tel n'est pas le cas. Permettez-moi de citer un certain nombre de journaux; c'est public. Le journal Finance, le 9 octobre 1989: La Bourse de Montréal n'a toujours pas rendu sa décision sur le dossier des quatre représentants de ia succursale Scotia-McLeod à Chicoutimi, presque deux ans après que des actes présumément illégaux eurent été commis. Finance, le 9 octobre 1989.

Permettez-moi aussi de citer, M. le Président - et je suis prêt à ia déposer - une lettre de l'ex-président de la Commission des valeurs mobilières du Québec adressée à un épargnant. La Commission a effectué une longue enquête, disait M. Guy - est-ce qu'il confondait avec l'inspection? C'est une autre chose à voir - sur la situation qui a prévalu à Chicoutimi. Nous discutons présentement des suites à donner à ce dossier avec la Bourse de Montréal. Nous devrions donc être en mesure de prendre une décision d'ici à quelques mois. D'ici à quelques mois. Il a écrit ça le 13 mars 1989. Je suis prêt à lui laisser deux mois, trois mois. On est même prêt à être généreux, M. le Président, et à lui laisser six mois. Il a écrit sa lettre en mars 1989; nous sommes aujourd'hui en 1991, au mois de mai. Rien n'a été fait dans ce dossier. Est-ce que cette situation, la ministre la qualifie de normale? La ministre semblait s'inquiéter et dire qu'elle n'était pas au courant de ia question, alors que tous ces faits-là se retrouvent dans des journaux publics et elle était sûrement au courant du dossier. m. le président, le 20 novembre 1987, la bourse de montréal demandait que deux courtiers de scotiamcleod à chicoutimi bénéficient d'une surveillance plus étroite. le rapport d'inspection du 22 décembre 1988, signé conjointement - c'est important, ça - par des représentants de la commission des valeurs mobilières du québec et de la bourse - la commission a fait un bon coup en s'assurant qu'il y ait un représentant de la bourse qui signe ce même rapport - indiquait que rien n'avait changé suite aux demandes de la bourse le 20 novembre. les reproches faits aux représentants de scotiamcleod remontent à 1987 et avant cela. cela fait donc quatre ans, et rien, si ce n'est la demande d'injonction de la commission des valeurs mobilières du québec pour interdire la publication du rapport d'inspection du 22 décembre 1988. c'est la seule chose, m. le président, qui a été faite dans ce dossier et vous savez comme moi, mme la ministre, que la prescription de deux ans pour des infractions qui entraîneraient l'utilisation de dispositions pénales dans la loi est passée. cela veut donc dire, concrètement, qu'il ne pourra y avoir aucune amende imposée aux courtiers de plein exercice ou aux représentants, compte tenu du délai de deux ans.

Donc, des soupçons depuis quatre ans; rien

pour inspirer confiance, M. le Président, à l'égard de la Commission des valeurs mobilières et de la Bourse. J'aimerais demander à la ministre ce qui se passe dans ce dossier. Quelle a été la procédure suivie après la constatation d'infractions à la Loi sur les valeurs mobilières et aux règlements qui en découlent, tel qu'établi dans le rapport d'inspection du 22 décembre 1988. La procédure régulière a-t-elle été suivie? Sinon, pourquoi? Y a-t-il eu enquête de la Commission des valeurs mobilières du Québec, comme l'indique la lettre de M. Paul Guy, datée du 13 mars 1989? Comment la ministre explique-t-elle que le rapport d'inspection soit toujours à attendre des suites? Et comment ta ministre peut-elle expliquer qu'un avocat de la Commission des valeurs mobilières, lorsqu'il se présente devant le juge pour obtenir l'injonction de non-publication du rapport, plaide devant le juge que la décision de la Bourse doit être rendue incessamment? Je crois qu'ils sont allés plaider devant le juge un mardi; l'avocat a dit au juge qu'il avait l'autorisation de dire au juge que la décision allait être rendue le vendredi. Ça fait deux semaines de ça et rien n'a été fait. Pourquoi rien n'a-t-il été fait et est-ce que la ministre veut tout simplement mettre le couvercle sur la marmite?

M. Chagnon: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Oui, M. le député de Saint-Louis, sur une question de règlement.

M. Chagnon: Le député de Gouin soulève une question qui, sans doute, est très intéressante, mais qui risque de nous entraîner, à tout le moins. J'écoutais attentivement ce que le député de Gouin disait et je ne pense pas qu'il ait lui-même glissé dans cette pente dangereuse et un peu particulière de notre règlement. M. le Président, l'article 35.3 - et je vous invite à le lire à le relire - nous dit ceci, et mes propos s'adressent autant au député de Gouin qu'à la ministre responsable qui aura à répondre aux questions: "Le député qui a la parole ne peut: parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit." Ça n'a pas été le cas dans les propos du député de Gouin. Nous avons une injonction provisoire qui a été émise le mardi 25 avril à ce sujet, compte tenu de...

M. Boisclair: Question de règlement.

M. Chagnon: Est-ce que je peux terminer?

Le Président (M. Farrah): Vous pouvez terminer, M. le député de Saint-Louis. Je vous reconnaîtrai après. Avez-vous terminé, M. le député de Saint-Louis?

M. Boisclair: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Chagnon: Ma question de règlement est à l'effet de prévenir, et le député de Gouin et la députée de Bourassa...

Le Président (M. Farrah): À ce moment-là, M. le député de Saint-Louis, c'est une question de règlement hypothétique en termes de prévention. Je ne peux pas la reconnaître, sauf que je suis au courant du règlement, l'article 35, troisième paragraphe.

M. Chagnon: Je voulais vous prévenir qu'on a quand même un sujet qui est litigieux, qu'il y a un litige dans ce dossier-là.

M. Boisclair: Oui, oui.

Le Président (M. Farrah): J'en conviens, M. le député de Saint-Louis, que c'est un sujet qui peut être délicat, sauf que je suis conscient du règlement également. C'est a moi à l'appliquer et, que je sache, jusqu'à présent, je ne pense pas que le député de Gouin n'ait pas respecté le règlement.

M. Chagnon: Je suis d'accord avec vous, mais il faut faire attention qu'il n'y ait pas de préjudice aux parties.

M. Boisclair: Oui, oui, je suis tout à fait d'accord.

Le Président (M. Farrah): Je suis conscient que c'est délicat, mais je pense que le député de Gouin, jusqu'à présent, a respecté le règlement sans problème.

M. Chagnon: Ah oui! j'en conviens!

Le Président (M. Farrah): Alors, ce n'est pas une question de règlement. Je reconnais Mme la ministre.

M. Boisclair: Sur cette même question, cependant, que le député de Saint-Louis a soulevée, j'aimerais bien tout simplement avoir l'occasion de prouver au député que je respectais bien le règlement en rappelant les questions. Je veux tout simplement...

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, non, ça va, j'ai quand même admis que c'était...

M. Boisclair: Mais comment se fait-il... L'avocat s'appelle Jacques Breton, celui qui a plaidé devant le juge. (11 heures)

Le Président (M. Farrah): S'il vous plaît, M. le député de Gouin, ça n'est pas une question de règlement.

M. Boisclair: Parfait.

Le Président (M. Farrah): Je viens de le reconnaître.

M. Boisclair: Alors la ministre...

Le Président (M. Farrah): Vous n'avez pas à intervenir sur la question de règlement, ça n'en est pas une.

M. Boisclair: Je veux juste que la ministre réponde aux questions.

Le Président (M. Farrah): Je suis conscient quand même que, pour les deux parties en cause, c'est des questions très délicates, et je pense que chacun est conscient des problèmes.

M. Boisclair: Oui, sur la question de règlement, je veux rappeler tout simplement qu'on ne doit pas tenir des propos qui porteraient préjudice a des individus. Et c'est ce que l'article 35. 3 dit dans le règlement, ce qui ne nous empêche pas de discuter sur la forme.

Le Président (M. Farrah): Ça va, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Et sur le processus et les démarches qui sont entreprises.

Le Président (M. Farrah): Là, on perd du temps au niveau du débat. Peut-être en conclusion, M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: C'est le coeur du sujet, là, selon notre jurisprudence.

M. Boisclair: Tout à fait d'accord.

Le Président (M. Farrah): Alors, on s'entend de part et d'autre.

M. Boisclair: Sur la forme.

Le Président (M. Farrah): Chacun est conscient que la question est délicate. Alors, je vais reconnaître maintenant sans plus tarder Mme la ministre.

Mme Louise Robic

Mme Robic: Oui, M. le Président, encore là, je remercie mon confrère de nous mettre en garde. II a tout à fait raison M. le Président, je comprends son inquiétude, là. M. le Président, je sais qu'il y a eu un rapport d'enquête. Je n'ai pas à être informée du contenu de ce rapport d'enquête là, parce que la Commission doit garder toute sa latitude dans l'exercice possible de ses pouvoirs quasi judiciaires. Je n'ai pas non plus l'intention, et je vous le répète, de demander au président de la Commission qu'il me transmette copie de ce rapport. Et je vous le répète encore une fois - vous ne semblez pas comprendre - que le président de la Commission n'a même pas pris lui-même connaissance du rapport, pour préserver la possibilité pour la Commission d'exercer ses pouvoirs quasi judiciaires.

Que je sache qu'il peut y avoir des plaintes, après une longue enquête comme il y a eu et l'injonction qu'on a demandée - je peux supposer qu'il va y avoir des plaintes de déposées; je l'ai même lu dans les journaux - c'est la seule information que j'ai, M. le Président, et je n'en veux pas d'autres. C'est juste que ça a été un long processus, mais c'est des dossiers tellement complexes, et pour aller chercher toutes les preuves, ce n'est pas des choses qui peuvent se faire aisément, facilement et rapidement. Mais je n'ai pas, M. le Président, à intervenir dans le processus d'enquête. Et, encore une fois, je le répète, la Commission peut être amenée a exercer ses pouvoirs quasi judiciaires dans ce dossier-là, et la seule possibilité que la Commission exerce ses pouvoirs quasi judiciaires justifie la décision de la ministre de refuser de produire le document, ou même de le commenter, et ça justifie qu'une injonction provisoire ait été émise.

Il est important, M. le Président, de protéger ce processus judiciaire ou quasi judiciaire. Je voudrais vous rappeler, M. le Président - je pense que le député de Gouin l'a bien mentionné - que je n'ai aucune autorité sur la Bourse. Donc, je n'ai pas à répondre de la Bourse lorsque cette dernière agit dans l'exercice d'un pouvoir délégué par la Commission, non plus que de ses règles administratives. La Bourse a des pouvoirs auprès de ses membres, en tant que tribunal domestique, sur des matières relatives à la discipline. Et il faut faire confiance à nos organismes d'autoréglementation, M. le Président. La Bourse veut que le marché fonctionne bien, c'est sa survie même qui en dépend. Alors, M. le Président, de mettre en doute le travail impartial de la Bourse me surprend au plus haut point. quant à la commission, elle a des pouvoirs sur les représentants, les courtiers et les agents en tant qu'autorité de contrôle et de surveillance. elle peut retirer, suspendre ou assortir de conditions un permis d'exercice, et toute décision de la bourse qui affecte un de ses membres est appelable devant la commission. la ministre doit en ce sens s'assurer que la commission exerce ses pouvoirs de tribunal d'appel des décisions de la bourse, mais elle ne doit pas s'ingérer dans ce processus.

II est donc normal que, par son injonction, la Commission veuille protéger ses sources. Et il

reviendra aux tribunaux d'en évaluer l'opportunité, et non pas à la ministre. La publication d'informations contenues dans un rapport d'enquête risquerait de saper l'autorité de la Commission. Les pouvoirs d'intervention de la Bourse portent sur des matières de nature administrative seulement. Il n'y a donc pas de délai de prescription dans les matières de nature disciplinaire alors qu'il y a un délai de prescription dans les matières de nature pénale. Et je vous rappellerai, M. le Président, qu'au moment de l'adoption du projet de loi 101, nous avons modifié le délai de prescription pour porter des plaintes pénales de deux ans à cinq ans. La raison? La complexité des enquêtes et le souci d'obtenir toutes les informations nécessaires et pertinentes aux fins du traitement des plaintes. M. le Président, il y a à peine quelques mois, l'Opposition était d'accord avec cette disposition de la loi 101.

Le Président (M. Farrah): Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Hull.

M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. J'écoute attentivement depuis le début de nos travaux le député de Gouin qui tente par tous les moyens d'attaquer l'intégrité de notre gouvernement et, dans ce sens-là, je trouve qu'il a un rôle très ingrat parce que, tout en attaquant l'intégrité du gouvernement, il met en péril, souvent, la confiance que les gens pourraient avoir dans une sphère de notre système financier.

M. le Président, même les recherchistes de l'Opposition, le matin, doivent se dire: II faut que je me trouve des arguments pour attaquer l'intégrité du gouvernement. Pendant ce temps, lorsque le député de Gouin se lève, qu'il regarde à l'extérieur et qu'il fait un soleil radieux, il se dit...

M. Boisclair: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Vous conviendrez comme moi que mon collègue est présentement hors d'ordre, qu'il ne traite d'aucune façon du sujet que nous devons traiter aujourd'hui, qui est le contrôle de l'industrie des valeurs mobilières du Québec. Quant à moi, j'assumerai fort volontiers les conséquences de mes actes. Je suis bien prêt à le faire...

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, ce n'est pas relatif à la question de règlement.

M. Boisclair: en lui rappelant la confiance que les gens ont à l'égard de son gouvernement et lui rappeller l'affaire Tommy D'Errico à Laval.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, ce n'est pas relatif...

M. LeSage: M. le Président, vous voyez encore dans quelle attitude le député de Gouin s'aligne et, tantôt, le député de Saint-Louis a tenté, d'une façon amicale, de rappeler au député de Gouin l'importance et les conséquences qui pourraient survenir suite aux interventions qu'il fait en ce qui concerne les transactions immobilières sur le marché boursier au Québec.

Mais le député de Gouin ne s'en inquiète pas. Peu importe ce qu'il dit, peu importent les conséquences sur cette activité, qui est très sensible. Que ce soit à Montréal, New York, Tokyo, c'est un marché qui est très sensible à ce qui peut être dit par des personnes qui peuvent attaquer l'intégrité de ce système financier, de ce système de placements pour les épargnants. Mais ça, ça n'inquiète pas le député de Gouin. Ce qui l'inquiète, ce qui est important pour lui, c'est d'attaquer l'intégrité du gouvernement, peu importe de quelle façon il le fait. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il manque à son devoir pour lequel il a été élu député dans la circonscription de Gouin par ses commettants et ses commettantes. Il a d'abord été élu, M. le Président, pour protéger les intérêts de ses commettants et il est de son devoir, comme à nous tous, de...

M. Boisclair: M. le Président, je connais mes responsabilités. Question de règlement.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin, question de règlement.

M. Boisclair: M. le Président, je connais mes responsabilités. Je suis conscient des gestes que je pose. J'en assumerai les conséquences. Je veux tout simplement que vous demandiez...

Le Président (M. Farrah): Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: ...que vous rappeliez le député à l'ordre et lui rappeliez la pertinence, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Je vous demande tout simplement de rappeler la pertinence.

Le Président (M. Farrah): m. le député de gouin. un instant, s'il vous plaît... m. le député de saint-louis, sur cette question de règlement. ce n'en est pas une, m. le député de saint-louis.

M. Chagnon: M. le Président, on avait... Pardon?

Le Président (M. Farrah): Ce n'est pas une question de règlement.

M. Chagnon: Ah! Ce n'est pas une question de règlement? Mais je pensais qu'on invoquait l'article 211.

Le Président (M. Farrah): Alors, je ne peux pas vous reconnaître sur la question de règlement. Je n'ai pas reconnu cela comme une question de règlement.

M. Chagnon: Je pensais qu'on invoquait l'article 211. C'est l'article 211, M. le député de Gouin, que vous voulez invoquer?

M. Boisclair: 211, qui est la règle de la pertinence.

M. Chagnon: La règle de la pertinence. Sur la règle de la pertinence, M. le Président...

Le Président (M. Farrah): M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: ...les jugements que nous avons eus ici dans cette Chambre et aussi en commission parlementaire sont à l'effet non seulement d'encadrer le sujet, mais d'élargir sur la...

Le Président (M. Farrah): Ah! Tout à fait. Je m'excuse. J'ai reconnu quand même que c'était pertinent. Je peux... Écoutez, M. le député de Hull faisait allusion quand même à la crédibilité au niveau des milieux financiers, etc. Alors, la décision que j'ai prise, c'est pertinent et M. le député de Hull, je vous prie de continuer votre intervention.

M. LeSage: Je vous remercie, M. le Président, d'avoir accepté que je puisse continuer dans la même veine parce que, pour moi, il est très, très important, il est même primordial que les gens aient confiance en notre système. Ce n'est pas le député de Gouin qui va venir faire penser aux gens qu'ils ne devraient pas avoir confiance dans le système. Je disais que c'était plutôt son devoir de faire comprendre aux gens que c'était un bon système de placements, le système boursier. Il serait irresponsable, M. le Président, et très lourd de conséquences, de ternir sans fondement la confiance des épargnants dans ce système financier. C'est ça que je voulais dire au député de Gouin. Ce n'est pas compliqué. Et je disais que le matin, il ne devrait pas se lever et commencer à dire: Je dois attaquer l'intégrité du gouvernement dans ce sens-là. Tout simplement.

C'est bien sûr qu'il y a des risques dans le marché financier, dans le marché boursier. La participation au marché des valeurs mobilières, M. le Président, comporte des risques inhérents et l'évolution de l'économie générale, c'est un secteur d'activité particulier. Ce n'est pas tout le monde qui peut placer de l'argent, et les gens qui s'attendent à placer de l'argent, les petits épargnants, devraient s'enquérir et s'informer des conséquences, des risques. Est-ce qu'on devrait placer de l'argent dans un système boursier pour y récolter de l'argent à court terme? Je ne le crois pas. C'est peut-être de cela que M. le député de Gouin devrait nous entretenir ce matin plutôt que d'essayer de ternir le gouvernement de quelque façon que ce soit.

Alors, je vous remercie, M. le Président. J'aurai l'occasion d'y revenir tantôt.

Le Président (M. Farrah): Merci, M le député de Hull. Je reconnais maintenant M. le député de Gouin pour une intervention maximale de cinq minutes.

M. André Boisclair

M. Boisclair: C'est intéressant, ces propos. Encore un autre membre du gouvernement, M. le Président, qui a des lunettes roses. Je suis tout à fait d'accord avec ce que le député nous dit, sauf qu'il y a des gens qui ont enfreint la loi depuis 1987 et il n'y a rien. Ces gens-là courent toujours. Est-ce que le député veut cautionner ce genre de réalité là? Est-ce que le député est d'accord pour qu'il y ait deux poids, deux mesures? Et faut-il rappeler - juste rapidement, permettez-moi de revenir sur les propos de la ministre tout à l'heure - que l'article 181 de la loi force la Bourse... Par ce biais-là, la Commission pourrait forcer la Bourse à tenir, à poser des gestes. L'article 309 permet à la Commission des valeurs mobilières du Québec d'appeler devant elle toute affaire dont un fonctionnaire est saisi, un employé de la Commission à qui un pouvoir est délégué. Alors... Et rappelons que lorsqu'on parle du délai de prescription de cinq ans, la loi 101, la ministre le sait, n'est pas rétroactive. Dans le cas qui nous intéresse, ScotiaMcLeod, le délai de prescription est de deux ans. La loi n'a pas été adoptée avec des dispositions rétroactives.

Or, je repose la même question à la ministre. Qu'est-ce qui est le plus irresponsable: poser des questions pour s'assurer de faire toute la lumière, pour essayer de dissiper tout soupçon qui pourrait peser sur la Commission des valeurs mobilières ou plutôt de cautionner le silence, comme la ministre et comme les députés ministériels le font à l'heure actuelle? Je crois que, dans le meilleur intérêt des investisseurs, nous nous devons de faire preuve de transparence. À force de ne pas douter, on devient arrogant. Et la ministre, je pense, est en train de tomber dans ce piège-là.

M. le Président, depuis une semaine, j'ai eu

l'occasion d'étudier - et laissez-moi vous dire que ce n'est pas une tâche simple et la ministre devrait le faire - les rapports détaillés des transactions de la Bourse de Montréal portant sur un certain nombre de titres qui sont en Bourse à Montréal, essentiellement des titres miniers. Des rapports - et j'en ai, je suis même prêt à les déposer si vous voulez - d'août et septembre 1987 et aussi, ce même genre de rapport, pour octobre et novembre 1987. Ils contiennent le nom du courtier acheteur, le nom du courtier revendeur, le prix auquel se sont faites les transactions, le nombre d'unités qui ont été échangées et on peut même savoir quelle succursale du courtier puisqu'elles sont toutes numérotées. J'ai eu l'occasion, M. le Président, d'étudier des documents qui sont publics. Alors, d'aucune façon... Et la conclusion de mon étude m'amène à partager la même opinion que M. David, un actionnaire, président du groupe Ariel qui disait, dimanche, le 7 mai, dans La Presse: M. David avoue également qu'il avait entendu parler de la concentration des actions de son groupe dans cette région. J'en arrive à la même conclusion que M. David. Or, M. le Président, je voudrais tout simplement revenir au contenu d'un article qui est public et dans les journaux. J'en arrive à cette même conclusion. Et l'analyse de ces rapports nous amènerait peut-être à croire qu'il y a eu concentration de titres, ce qui est d'ailleurs l'opinion retenue par M. David, président du groupe Ariel. Alors on peut peut-être croire...

M. Chagnon: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Farrah): M. le député, sur une question de règlement.

M. Chagnon: Là, on est dans le coeur du sujet, M. le député de Gouin. Selon, moi, M. le Président...

Le Président (M. Farrah): Vous faites référence à quel article, M. le député de Saint-Louis?

M. Chagnon: Nous sommes dans un sujet qui est sub judice. On commence à parler des parties, du sujet. Or, si on n'est pas dans le coeur de la cause qui est devant les tribunaux à l'heure actuelle, on est où? (11 h 15)

M. Boisclair: Est-ce qu'on peut m'informer, M. le Président, de quelle cause et quels sont les... S'il y a une cause, c'est quoi la cause?

Le Président (M. Farrah): M. le député de Saint-Louis, c'est que...

M. Boisclair: Est-ce qu'il y a une cause?

Le Président (M. Farrah):... M. le député de Gouin fait référence à un article de journal et, que je sache...

M. Boisclair: II n'y en a pas de cause, à date.

Le Président (M. Farrah):... à ce stade-ci, je ne pensé pas qu'il y ait de préjudice.

M. Boisclair: Je respecterai votre décision, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Vous pouvez poursuivre, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Alors, je cite un article de journal. M. David, président du groupe Ariel, avoue également qu'il avait entendu parler de la concentration des actions. Vous savez comme moi, M. le Président, et la ministre et l'ensemble des députés savent très bien qu'une concentration de titres n'est pas la meilleure chose pour assurer l'efficacité et l'efficience d'un marché. Vous êtes à même de comprendre les conséquences et on pourrait même croire... Il y aurait même moyen de l'évaluer. Je n'ose pas présenter de chiffres parce que je ne voudrais pas qu'on me prenne sur ces simples faits, mais l'expertise qu'on a pu développer dans ce domaine nous amènerait peut-être même à sous-estimer la concentration puisque plusieurs actions étaient bloquées.

Compte tenu de l'importance de la firme, il m'apparaît que celle-ci a violé les règlements de la Bourse, peut-être pas concernant la concentration de titres, mais elle a certainement nui à la bonne pratique des affaires et ça, c'est un règlement de la Bourse. Il y a déjà des plaintes, M. le député. Vous me dites qu'ils déposent une plainte. C'est ça, le problème. Il y a des plaintes qui ont été déposées depuis 1987 et il n'y a rien qui s'est fait.

Alors, dans ces circonstances, on peut donc affirmer que le marché n'a pas été efficace, n'a pas été efficient et que ça a nui considérablement aux investisseurs. On peut aussi souligner la possibilité de conflit d'intérêts. Alors, ce que j'aimerais demander, M. le Président, devant ces faits graves: Est-ce que la ministre va demander au président qu'il lui fasse rapport? Est-ce que la ministre va être prête pour qu'on demande la révision des pouvoirs délégués à la Bourse? Et, finalement, trouve-t-elle normal qu'après quatre ans il n'y ait rien de fait?

Le Président (M. Farrah): Votre temps est écoulé, M. le député de Gouin. Maintenant, je reconnais Mme la ministre.

Mme Louise Robic Mme Robic: M. le Président, le député de

Gouin dit: II m'apparaît que. Il est difficile d'arriver à des conclusions avec des "il m'apparaît que", M. le Président, n'est-ce-pas? C'est plutôt, là... Quand je parlais d'accusation gratuite, M. le Président, "il m'apparaît que", ça prouve que le député veut tenter de voir des choses où il n'y en a pas, des problèmes où il n'y en a pas nécessairement.

M. le Président, quatre critères déterminent ce qu'est l'objet de l'administration de la Loi sur les valeurs mobilières: le bon fonctionnement du marché, la protection des épargnants, régir l'information, encadrer l'activité des professionnels. Si on regarde, au cours des dernières années, on a vu apparaître dans les décisions de la Commission et de son personnel le motif du bon fonctionnement du marché et de la concurrence qui s'ajoute à celui de la protection des épargnants. Il n'est pas suffisant que la Commission invoque la protection des épargnants pour prendre une mesure. Elle peut en plus dire: Oui, mais il nous faut favoriser le bon fonctionnement du marché. Il ne faut jamais oublier le fonctionnement du marché. Il ne faut pas l'étouffer, ce marché-là, M. le Président. Même si cela assure la protection des épargnants, ce n'est pas suffisant.

Il faut encore autre chose, en plus. Il faut assurer le bon fonctionnement du marché et maintenir la concurrence dans cette industrie. Le bon fonctionnement, c'est l'efficacité des marchés financiers. Cela fait partie du bon fonctionnement de s'assurer qu'il y ait une saine concurrence, qu'il n'y ait pas de règle restreignant la concurrence. Cela fait partie du bon fonctionnement, également, des marchés financiers.

Et là, je voudrais vous rappeler qu'il y a eu des améliorations apportées au marché des valeurs mobilières au niveau de l'information de l'investisseur. La Commission a entrepris au cours des ans un programme d'information remarquable, me dit-on. Ce programme comprend notamment des publications, des participations à des salons d'information et de la publicité sur divers thèmes d'intérêt public. De nombreuses études sur les marchés des valeurs mobilières ont été entreprises et rendues publiques.

Mais encore une fois, M. le Président, je voudrais vous rappeler la mission de la Commission des valeurs mobilières. C'est important de connaître cette mission-là. La protection du public, laquelle s'accomplit par la divulgation d'une information complète et véridique. Et j'avais tout à l'heure, M. le Président, un prospectus. Il y a des gens, M. le Président, qui nous disent: II y a beaucoup d'informations dans un prospectus. Bien, oui, M. le Président, il y a toute l'information pertinente pour que l'investisseur puisse prendre une décision éclairée sur les investissements qu'il veut faire, qui lui conviennent. La Commission n'a pas à prendre de décision pour l'investisseur. C'est un choix que l'investisseur prend. C'est de la prévention. Le prospectus est visé et on le dit bien. C'était le président de la Commission, je crois, qui disait qu'il ne faut pas dire que le prospectus est approuvé, mais il est visé par la Commission, oui. Et la Commission met en garde les investisseurs. Ce n'est pas un cautionnement qu'elle donne à l'investissement. La Commission s'assure que l'investisseur a toute l'information nécessaire pour prendre une décision éclairée. Et l'investisseur, M. le Président, doit se prévaloir de toute l'information disponible, pertinente, qu'il y a dans ce prospectus.

Il a également une responsabilité, l'investisseur. D'ailleurs, M. le Président, c'est le député de Lévis qui parlait de la responsabilité de l'investisseur dans l'une de ses interventions en cette Chambre. Alors, lui, il comprenait le rôle de la Commission, le rôle de la Bourse; il savait l'importance de la crédibilité à accorder à ces deux institutions. Et il disait, il rappelait à l'investisseur sa responsabilité. Alors, je fais de même ce matin, M. le Président. Je dis à cet investisseur et je dis au député de Gouin que le meilleur outil de protection pour l'investisseur...

Le Président (M. Farrah): Votre temps est écoulé, Mme la ministre.

Mme Robic:... c'est, dès le début de l'opération, le prospectus.

Le Président (M. Farrah): Je vous remercie Mme la ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Hull.

M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Alors, peut-être, Mme la ministre, que vous avez convaincu le député de Gouin du bien-fondé des organismes qui sont là pour protéger les petits épargnants, mais à écouter le député de Gouin, je me rends compte, finalement, qu'il s'attaque à tout le monde, même à l'épargnant, au courtier: Les courtiers ne sont pas comme ci, alors qu'il sait très bien l'intégrité de la très grande majorité des participants au marché des valeurs. Ah! vous pouvez chialer si vous voulez, M. le député de Gouin, ça ne me dérange pas.

Le Président (M. Farrah): M. le député de Hull.

M. LeSage: Tantôt, vous avez chialé parce que la ministre ne vous écoutait pas, mais, pour vous, c'est correct de ne pas écouter les autres intervenants. Ça prouve...

Le Président (M. Farrah): M. le député de Hull. Le règlement nous dit qu'il faut que vous vous adressiez à la présidence.

M. LeSage: Vous avez raison, M. le Président. Alors, je disais donc que l'intégrité de la très grande majorité des participants au marché des valeurs mobilières et les exigences et contrôles, tant de la Commission des valeurs mobilières que de divers organismes d'autorégle-mentation, font en sorte que, sur des millions de transactions - et Dieu sait qu'il y en a des transactions à la Bourse de Montréal - il y en a une minime, une petite partie, seule une infime minorité où il y a des difficultés; et M. le député de Gouin tente d'en faire un grand plat pour miner la crédibilité de notre gouvernement.

Il sait très bien que notre système fonctionne tout aussi bien qu'en Ontario, qu'à New York ou qu'à Tokyo. Nous faisons également partie, d'une association canadienne sur les valeurs au Canada, M. le Président, l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières. C'est un organisme national d'autoréglementation du commerce des valeurs mobilières au Canada qui a également comme objet la réglementation des opérations sur titre de ses membres, l'encouragement à l'observation de pratiques professionnelles loyales entre ses membres, l'application de pratiques et l'exigence pour la protection de ses membres et de leurs clients respectifs et du public en général.

M. le Président, j'ai eu l'occasion, personnellement, avec des collègues de Hull, de placer certaines sommes d'argent à la Bourse. Nous avons fait affaire avec plusieurs courtiers, M. le Président. Bien sûr qu'on était conscients qu'il y avait des risques. Bien sûr qu'on était conscients qu'on pouvait faire de l'argent à long terme ou à court terme. On pouvait aussi en perdre, M. le Président. C'est ce que semble ne pas comprendre te député de Gouin. Peut-être qu'il devrait aller prendre un peu d'expérience sur le marché, sur le terrain, aller voir des personnes qui jouent à la Bourse, qui placent de l'argent à la Bourse. C'est peut-être ce qu'il devrait faire. Il se rendrait compte que le marché va très bien et il ne tenterait pas de miner notre gouvernement en tentant de diminuer l'efficacité de notre service boursier au Québec, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Hull. Je reconnais maintenant le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je pense aux gens de la Bourse de Montréal, aux gens de la Commission des valeurs mobilières qui sont sûrement en train de nous écouter et ils doivent se sentir bien mal pris de voir qu'il y a une ministre qui, à l'heure actuelle, confond deux parties de la loi. Je suis tout à fait d'accord pour dire que, dans la loi, il y a effectivement des obligations de divulgation, mais dans cette même loi on nous dit que la Commission des valeurs mobilières du Québec doit régir les courtiers. Est-ce que la ministre comprend ça? Est-ce que la ministre a bien lu sa loi? La ministre sait sûrement que, souvent, les petits épargnants se fient aux propos de leurs courtiers et ont une certaine confiance aussi. Ils vont suivre la recommandation des gens à qui, d'ailleurs, ils paient une commission.

À ce stade-ci du débat, M. le Président, j'aimerais peut-être soulever un certain nombre d'allégations qui se retrouvaient dans La Presse du dimanche 7 mai, où un Dr Couture, dans une déclaration de poursuite, allègue que, par ses agissements, M. Montpetit, qui est le directeur de la succursale de ScotiaMcLeod à Chicoutimi, a commis plusieurs fautes, notamment de ne pas avoir respecté les objectifs de placements de son client, d'avoir usé de subterfuges, d'avoir employé des moyens abusifs pour empêcher son client de vendre ses actions et d'avoir effectué des achats non autorisés pour le compte de M. Couture. Ce sont les allégations déposées en Cour supérieure au mois de mai 1989.

Nous pouvons donc en déduire qu'il y a eu des infractions à la Loi sur les valeurs mobilières, aux articles 149, 161, 163 et 200, ainsi qu'aux articles 231 et 235 des règlements de la Loi sur les valeurs mobilières, pour lesquels il n'y a pas de pouvoir de délégation à la Bourse de Montréal. Même si c'était le cas, M. le Président, les articles 309 et suivants de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec permettent à la Commission des valeurs mobilières elle-même d'intervenir. La délégation de pouvoir n'implique donc pas une perte de contrôle de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

La ministre ne peut non plus se défiler, car l'article 181 de la Loi sur les valeurs mobilières dit, et je cite: "La Commission peut ordonner à un organisme reconnu la conduite à tenir, lorsqu'elle estime que cette mesure est nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de l'organisme ou la protection des épargnants. " L'article 303 de cette même loi implique la ministre directement. On dit à cet article: "Le président fournit au ministre tout renseignement et tout rapport que celui-ci requiert sur les activités de la Commission. " La ministre a cette possibilité d'intervention. Notons qu'il s'agit cependant de pouvoirs discrétionnaires qui impliquent qu'il y ait une volonté d'agir de la part de la Commission des valeurs mobilières du Québec et de la ministre. Mais il convient de rappeler le mandat. On va rappeler pour la nième fois le mandat de la Commission des valeurs mobilières dont la ministre a la responsabilité. Essentiellement, l'article 276: favoriser le bon fonctionnement du marché et assurer la protection des épargnants.

Il m'apparaît, M. le Président, que devant ces faits soulevés dans le dossier ScotiaMcLeod par certains épargnants qui ont été lésés, en

ayant pris aussi connaissance du contenu du rapport ScotiaMcLeod, devant l'ampleur du problème, devant l'ampleur du scandale, la Commission des valeurs mobilières du Québec a manqué à son devoir. Rappelons que la ministre est responsable de l'application de la loi et, à l'occasion de l'étude du rapport quinquennal sur l'application de la Loi sur les assurances, dans le rapport sur le courtage immobilier, la ministre nous indiquait que sa première préoccupation était de protéger l'épargnant. (11 h 30)

L'Opposition s'explique donc mal, en ce qui a trait à la Loi sur les valeurs mobilières du Québec, que cette préoccupation de protéger le public ne se manifeste pas davantage. La ministre ne peut se réfugier indéfiniment derrière l'injonction de non-publication de rapport d'inspection. Tous les faits que j'ai évoqués aujourd'hui sont publics. On les retrouve dans les journaux. Il est légitime pour l'Opposition d'interroger la ministre sur ce que fait la Commission des valeurs mobilières du Québec dans pareil dossier. M. le Président, nous demandons formellement à la ministre d'utiliser l'article 303 de sa loi et de demander que le président de la Commission des valeurs mobilières lui fournisse un rapport détaillé dans l'affaire ScotiaMcLeod, que la ministre rende ce rapport public pour s'assurer que tout doute soit dissipé a l'égard de fa façon dont la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Bourse s'acquittent de leur mandat, sans quoi nous serons...

Le Président (M. Farrah): En conclusion, M. le député.

M. Boisclair: ...obligés de comprendre que ia ministre veut mettre le couvercle sur la marmite, qu'elle n'a pas l'intention de faire respecter la loi et que dorénavant, pour les courtiers qui pratiquent au Québec, il y a deux poids, deux mesures.

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Gouin. Je reconnais maintenant Mme la ministre déléguée aux Finances.

Mme Louise Robic

Mme Robic: M. le Président, c'est incroyable. Je vais vous citer, parce que le député de Gouin aime citer des articles de journaux, des suppositions, des... Moi, je vais vous citer ce que le député de Lévis disait en commission parlementaire, le 7 mars 1989: "Nous sommes dans un domaine où la crédibilité est fondamentale parce que tout repose sur la crédibilité dans ce domaine. On sait à quel point, dans le domaine des valeurs mobilières, tout est fluide et fragile et entacher la crédibilité de la Commission des valeurs mobilières de quelque façon que ce soit ne serait pas dans le sens de préserver les intérêts économiques du Québec." C'est votre confrère, M. le député, qui disait ça.

M. le Président, prétendre que les organismes d'autoréglementation n'accomplissent pas leur travail ou sont en conflit d'intérêts, c'est miner la crédibilité de ces organismes-là dont le sérieux ne doit pas être mis en cause, M. le Président. C'est toute une industrie que l'on met en cause quand on prétend que ces gens-là ne jouent pas leur rôle. D'ailleurs, M. le Président, encore là, je vais vous citer le Journal des débats du 4 mars 1987 où M. Renaud de l'Accovam disait: "On exerce une certaine prévention au moment même où on engage des gens". Ce n'est pas fait à la légère, M. le Président, cette industrie-là n'agit pas à la légère. Même au moment de l'embauche, tous tant que nous sommes dans l'industrie, nous essayons d'avoir des standards de recrutement et nous engageons le plus possible des gens honnêtes, intègres et qui respectent les règles de l'industrie et de la firme qui les engage. On a également des agents de conformité à l'intérieur de chacune des maisons qui surveillent les activités à l'intérieur des firmes. Cela part du bureau du représentant qui ouvre un compte pour son client et à qui il doit poser la question: Est-ce que ce client détient un poste de direction qui en ferait un initié à l'intérieur d'une compagnie? Sur une base quotidienne et surtout lorsqu'il y a des transactions spéciales qui se préparent, dit-il, il y a une surveillance plus étroite qui est exercée sur les activités anormales qui pourraient se passer sur ce titre. Même après l'émission, la Bourse même se charge de surveiller pour qu'il n'y ait pas d'activité anormale dans les actions. On est surveillé par différentes sources".

Mais, M. le Président, la protection de l'épargnant, ça passe par la bonne information. Le député de Gouin disait, lui, le 8 mars I989. "Ceux qui investissent de l'argent ont une certaine responsabilité aussi". La participation au marché des valeurs mobilières, M. le Président, comporte des risques inhérents à l'évolution de l'économie générale, à un secteur d'activité particulier à une entreprise individuelle. Il incombe à l'épargnant d'obtenir les informations et les conseils adéquats afin de déterminer si un placement en particulier lui convient, tant en fonction de sa situation financière et de ses objectifs de placements personnels que des risques qu'il est prêt à assumer. Ceci est plus particulièrement important lorsque l'épargnant est appelé à emprunter pour effectuer un placement. L'épargnant-investisseur qui agit sur le marché des valeurs mobilières doit être conscient des risques inhérents à l'évolution de l'économie générale, à un secteur d'activité particulier ou à une entreprise individuelle. Mais en aucun cas la vigilance des investisseurs ne doit diminuer à cause des pouvoirs dont sont investies les autorités. Seuls les recours exercés contre les promoteurs et leurs associés par les investisseurs

eux-mêmes sont susceptibles de leur procurer compensation pour les pertes causées en cas d'insuffisance de biens lors d'une liquidation.

Le Président (M. Farrah): En conclusion, Mme la ministre.

Mme Robic: M. le Président, encore une fois, je vais répéter ce que le député de Saint-Louis disait au sujet d'un discours que M. Bruno Riverain de la Bourse de Montréal a donné...

Le Président (M. Farrah): Votre temps est écoulé, Mme la ministre, terminé.

Mme Robic: M. le Président, je voudrais vous dire tout simplement: Un investisseur ne doit pas jouer à la Bourse, mais choisir ses véhicules de placements avec minutie et en toute connaissance de cause.

Le Président (M. Farrah): Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant Mme la députée de Bellechasse, pour une intervention maximale de cinq minutes.

Mme Louise Bégin

Mme Bégin: Merci, M. le Président. Vous vous souviendrez que le 22 décembre 1990 était adoptée et sanctionnée en cette Chambre, la loi 101, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières qui avait été présentée par la ministre déléguée aux Finances et à laquelle a souscrit l'Opposition. Cette loi met en place un ensemble de modifications concernant principalement les pouvoirs de la Commission des valeurs mobilières du Québec, les règles relatives au contrôle des activités des émetteurs de valeurs et le régime de l'administration provisoire, tout ceci afin de permettre à nos institutions financières de s'épanouir, mais, par ailleurs, de s'assurer de la mise en place de mécanismes de contrôle et de surveillance justes et efficaces, ' le tout à la faveur de la protection de l'épargne du public et de sa confiance dans le système financier.

Parmi les mesures que la loi 101 retient dans le sillage du rapport quinquennal se retrouve le pouvoir des organismes d'autoréglementation de sous-déléguer, en faveur d'un comité de membres ou d'un membre de leur personnel, des pouvoirs disciplinaires qui leur ont été délégués par la Commission.

L'intention du gouvernement dans le domaine des valeurs mobilières est certes d'assumer pleinement ses responsabilités, mais en respectant la mission de l'autonomie de la Commission quant à ses pouvoirs d'enquête et ses pouvoirs quasi judiciaires. Il ne saurait nullement être question, pour tout ministre responsable de l'application de la Loi sur les valeurs mobilières, d'intervenir dans l'administration interne ou dans la fonction quasi judiciaire de la Commission. Il ne faut pas risquer de porter atteinte, de quelque manière que ce soit, à la crédibilité que doit susciter l'action de la Commission à l'égard des investisseurs.

La loi a prévu certaines dispositions visant à neutraliser les conflits d'intérêts dans le processus d'intermédiation qui se déroule sur nos marchés de capitaux et à éliminer les effets néfastes qui peuvent en découler pour le public investisseur. En vertu de ces nouvelles règles qui seront complétées par une refonte de l'instruction générale numéro Q-2 de la Commission qui porte sur les financements immobiliers, la Commission prend en considération, pour chaque projet de financement, cet aspect des conflits d'intérêts et de la concentration des pouvoirs corporatifs avant de les admettre à solliciter les épargnes auprès du public.

Pour ce qui est des courtiers, il leur est dorénavant défendu de participer au placement des titres d'un émetteur lorsque eux-mêmes, une personne qui leur est liée ou l'un de leurs dirigeants agit comme promoteur, gérant ou commandité de l'affaire pour le financement de laquelle le placement est réalisé. Il importe de souligner qu'il s'agit là, à n'en pas douter, d'une modification tout à fait radicale par rapport à la politique qui était suivie jusqu'ici par la Commission et cela, avant la loi 101, à l'effet de tolérer l'existence de conflits d'intérêts pourvu qu'ils soient clairement et complètement divulgués au public. évidemment, certains pourront prétendre qu'il s'agit là d'une solution imparfaite ou incomplète puisqu'elle n'a pas pour effet d'éliminer tous les risques supportés par les investisseurs. or, le devoir fondamental du gouvernement est de favoriser un environnement qui permettra à tous ceux et à celles qui font le choix d'investir sur nos marchés d'assumer, en toute connaissance de cause, les risques qui se rattachent aux véhicules d'investissements qu'ils ont choisis.

M. le Président, la loi 101 comporte par ailleurs un certain nombre de dispositions qui illustrent le souci du gouvernement d'assurer à la Commission des valeurs mobilières toute la crédibilité nécessaire comme organisme de surveillance et de contrôle des marchés financiers québécois. Ainsi, la loi établit de façon spécifique le pouvoir d'inspection à l'égard tant des personnes inscrites que des organismes d'autoréglementation. La Commission doit, en effet, être en mesure d'effectuer des inspections faites aux seules fins de vérifier la conformité à la réglementation applicable.

La loi étend à cinq ans à compter de l'infraction le délai de prescription afférent aux poursuites pénales que peut intenter la Commission. Cette mesure démontre donc la profonde détermination de notre gouvernement de se donner les moyens qui répriment les pratiques illégales et de punir ceux qui, en s'y livrant, risquent de miner la crédibilité de nos marchés

de capitaux.

En conclusion, la loi 101 modifiant la Loi sur les valeurs mobilières que nous avons adoptée avec le consentement de l'Opposition constitue une nouvelle étape de modernisation de notre législation. Nous voulons d'abord assurer une protection efficace des intérêts financiers des investisseurs et des épargnants, lesquels dépendent essentiellement de la fiabilité, de la stabilité et du fonctionnement ordonné de nos marchés de valeurs mobilières.

Le Président (M. Farrah):...

Mme Bégin: Oui, M. le Président, j'y arrive. Nous voulons également assurer à nos entreprises québécoises qu'elles puissent avoir accès à ces marchés dans un cadre qui favorise la souplesse sur le plan des règles et la transparence sur le plan des exigences à respecter. Merci.

Le Président (M. Farrah): Merci, Mme la députée. Alors, en vertu de l'article 302 qui dit ceci: "Vingt minutes avant la fin de la séance, le président accorde un dernier temps de parole de dix minutes au ministre et un droit de réplique de même durée à l'interpellant", étant donné qu'à 11 h 45 on doit interrompre le débat pour aller vers les conclusions, alors, il vous reste, M. le député de Gouin, à peu près, deux minutes trente secondes pour votre intervention.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Je vous remercie, M. le Président. J'aimerais rappeler encore une fois que la meilleure façon de s'assurer que nos institutions soient efficaces, efficientes, c'est de pouvoir démontrer qu'elles font bien leur travail. On parie particulièrement de la Commission des valeurs mobilières, on parle de la Bourse de Montréal.

Or, la ministre, tout ce qu'elle fait, elle se contente de dire que c'est le cas, que, oui, la Commission fait bien son travail et que, oui, la Bourse fait bien son travail. Mais d'aucune façon, d'aucune façon, elle n'a fait la preuve qu'il en était ainsi. Pire encore, elle ne tente même pas de le faire. D'aucune façon, elle n'a réussi à réfuter toutes les accusations, toutes les allégations que nous avons présentées aujourd'hui. Encore pire que ça. elle refuse de se prévaloir des dispositions qui sont contenues dans la loi pour exiger un rapport du président dans l'affaire ScotiaMcLeod.

La meilleure façon que la ministre a de démontrer ma soi-disant irresponsabilité, c'est de prendre chacune de mes allégations et de les contredire, ce qu'elle ne fait pas. Je suis donc obligé de conclure, M. le Président, que c'est elle qui est irresponsable, c'est elle qui n'assume pas ses responsabilités et c'est elle qui en paiera le prix un jour, parce qu'une chose est certaine dans l'affaire ScotiaMcLeod, c'était que la prescription de deux ans, en vertu des infractions qui auraient entraîné des dispositions pénales, est passée et, dans ce cas-ci, ni les courtiers, ni la firme ne pourront se voir dans l'obligation de payer une amende. Tout ce qui reste, ce sont des sanctions.

Mais, M. le Président, je rappelle que les avocats de la Commission eux-mêmes, lorsqu'ils ont plaidé l'injonction devant le juge Jacques Breton, si je ne m'abuse - je dis ça de mémoire - l'avocat de la Commission a dit au juge: "M. le juge, j'ai l'autorisation de vous dire que la Bourse de Montréal va rendre une décision vendredi". Il a plaidé une injonction un mardi je crois, ou un mercredi. Il a dit au juge: "J'ai l'autorisation de vous dire que la décision sera rendue vendredi". Ça fait maintenant deux semaines qu'on reporte d'échéance en échéance. La ministre nous a dit en Chambre, à l'occasion de la période de questions, que des plaintes seraient bientôt déposées. Ça fait quatre ans qu'on attend! Est-ce que c'est cette idée, cette conception de l'administration de la justice que la ministre se fait et quand est-ce qu'elle va prendre ses responsabilités et poser des gestes le plus tôt possible?

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Gouin. Tel qu'on s'est entendus, on doit terminer à 12 h 5. Alors, nous sommes rendus au stade des conclusions. Je vais reconnaître Mme la ministre pour une période de dix minutes et, ensuite, je reconnaîtrai, M. le député de Gouin pour les dix minutes finales. Mme la ministre, la parole est à vous.

(11 h 45)

Conclusions Mme Louise Robic

Mme Robic: M. le Président, malgré les conseils de mon confrère, je voudrais rappeler au député de Gouin qu'il est en train de transgresser lui-même la loi. Je le rapporte. Il nous a cité des articles de la Loi sur les valeurs mobilières. Je lui rappelle l'article 296 qui dit: "La Commission peut, lorsqu'elle juge que la communication d'un document risque de causer un préjudice grave, déclarer qu'il n'est pas accessible. Le présent article s'applique malgré l'article 9 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels."

C'est ce fameux document, M. le Président, que le député de Gouin voudrait déposer. C'est incroyable. M. le Président, je voudrais vous rappeler la mission de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Je pense que c'est important de vous la rappeler. Vous la connaissez très bien, j'en suis persuadée, mais le député de Gouin a des problèmes, M. le Président. La

mission de la Commission, c'est la protection du public, laquelle s'accomplit par la divulgation d'une information complète et véridique. Le prospectus, entre autres.

Ce n'est pas le mandat de la Commission d'évaluer le risque inhérent à toute valeur mobilière, mais d'assurer la divulgation et la transparence. Le mandat n'est pas d'assurer que les obligations contractées par un émetteur vont nécessairement se réaliser. Ce n'est pas le mandat de la Commission. C'est une décision que prend l'investisseur une fois qu'il s'est bien informé. Et c'est cette information que la Commission tente de donner à l'investisseur, une information complète et transparente.

Il faut éviter de faire des accusations, M. te Président, sur le travail de la Commission. C'est facile d'accuser, mais il faut connaître l'importance du rôle de la Commission avant d'aller faire des accusations gratuites, dangereuses, qui mettent en cause l'intégrité même de la Commission et des organismes d'autoréglementa-tion qui s'y rapportent. Très dangereux. Votre député de Lévis vous l'a dit, l'a dit en commission à plusieurs reprises. Ce qui est difficile, c'est de s'assurer que la Commission joue son rôle et il faut comprendre qu'il y a des dossiers qui ne se règlent pas en 24 heures. On parle de dossiers complexes, d'informations qu'il faut obtenir pour pouvoir bien juger des circonstances, obtenir toutes les informations pertinentes dans des dossiers complexes. Ça ne se fait pas en 24 heures.

M. le Président, tout peut s'améliorer. Nous avons le rapport Mallette sur la table; celui-là est public et c'est un très bon rapport, M. le Président, qui présente à la Commission un plan triennal avec lequel je suis tout à fait d'accord. En même temps, le rapport Mallette nous dit: En ce moment, la Commission s'acquitte bien de son travail. Il y a place à amélioration, comme je l'ai déjà dit. Même chez M. le député de Gouin, il y a de la place pour de l'amélioration, M. le Président; même chez la ministre, il y a place pour de l'amélioration.

Mais, M. le Président, le dossier Mallette dit bien que la Commission s'acquitte efficacement de sa mission. M. le Président, depuis un an et demi que je suis dans ce dossier, que nous avons un nouveau président à la Commission des valeurs mobilières du Québec, je dois vous dire qu'on n'a pas dormi sur ce dossier-là et qu'on ne l'a pas traité à la légère non plus. Ce n'est pas un dossier que je traite à la légère. Mes responsabilités, je les comprends. Mes responsabilités au niveau des institutions financières qui ont un rôle moteur au niveau du développement économique du Québec, vous comprendrez, M. le Président, que je suis consciente de ces responsabilités et de l'importance de ces responsabilités.

C'est pourquoi, M. le Président, nous avons ici en Chambre, il y a quelques mois, adopté un projet de loi, la loi 101, qui élargissait le renforcement des pouvoirs de la Commission, qui traitait de conflits d'intérêts. Ce n'est pas qu'il n'y avait pas de règles concernant les conflits d'intérêts, M. le Président, mais avec de nouveaux véhicules, on s'est assurés que ces règles-là soient élargies pour comprendre des nouveaux programmes, des nouveaux véhicules qui arrivent sur le marché et qui amènent d'autres genres de conflits d'intérêts.

Nous avons également touché l'administration provisoire. Il y a également l'instruction générale Q-2 qui est en révision présentement, qui va donner plus de dents à la Commission, particulièrement au niveau des placements immobiliers. Vous savez, M. le Président, que là aussi, c'est vrai, on a eu des aventures malheureuses et on a tenté, avec la loi 101 et l'instruction générale, de prévenir ce genre de problème et d'élargir les pouvoirs de la Commission. Il y a encore - je reviens, M. le Président, sur le rapport stratégique - connaissant le député de Gouin, je suis sûre qu'il va y toucher - des recommandations qui s'appliqueront dans les années qui viennent, mais il y a également des recommandations de ce rapport qui ont déjà été mises en place; celles qui étaient évidentes, qu'on pouvait mettre en place rapidement, ça a été fait.

Il y a également, M. le Président, un projet-pilote au niveau du Vérificateur général, d'implantation d'un processus de reddition de comptes sur l'efficacité de la Commission. La Commission a accepté ce projet-pilote là avec beaucoup d'enthousiasme. Donc, là, c'est un autre outil pour pouvoir juger de l'efficacité de la Commission. On n'a pas attendu les critiques de l'Opposition pour se mettre à l'oeuvre, on l'a fait depuis longtemps. On parle même de créer un bureau d'arbitrage pour le traitement des plaintes, qui rendrait le processus beaucoup plus efficace, plus rapide. Alors, encore là, M. le Président, je voudrais rappeler au député de. Gouin que la Commission fait un travail de qualité et qu'il est dangereux, encore une fois, pour faire de la petite politique, d'entacher la réputation de la Commission et des organismes d'autoréglementation qui s'y rattachent. Je le mets en garde.

M. le Président, je le mets également en garde de traiter d'un dossier qui reste et qui est sous une injonction provisoire. On pourrait faire en sorte que la publication de ce dossier - parce que le député de Gouin prétend qu'il l'a en main; il faut présumer qu'il y a du coulage quelque part, M. le Président, c'est épouvantable - on me dit que la publication, en tout ou en partie, du rapport est susceptible d'entraver le déroulement de toute procédure de nature judiciaire, quasi judiciaire ou disciplinaire et pourrait causer un préjudice grave aux personnes qui y sont mentionnées. Je le dis, M. le Président, parce que c'est tellement grave que je veux bien que le

député de Gouin soit conscient de ce qu'il tente de faire quand il parle de déposer ce genre de rapport qu'il ne devrait pas, d'ailleurs, avoir entre les mains, M. le Président.

M. le Président, je répète les paroles du député de Lévis qui nous disait: Nous sommes dans un domaine où la crédibilité est fondamentale, parce que tout repose sur la crédibilité dans ce domaine. On sait à quel point, dans le domaine des valeurs mobilières, tout est fluide et fragile et entacher la crédibilité de la Commission des valeurs mobilières de quelque façon que ce soit ne serait pas dans le sens de préserver les intérêts économiques du Québec.

M. le Président, nous sommes... Je dois, en terminant - vous me faites des signes - vous dire... Mon dernier message, M. le Président, sera pour les épargnants. La meilleure protection, M. le Président... Comme disait M. Blanchard en commission parlementaire le 31 mars 1987: La meilleure protection pour le consommateur, l'épargnant, c'est encore la connaissance. Il doit s'informer...

Une voix: ...ne pas en acheter...

Mme Robic: ...avant de faire un placement, M. le Président. L'information commence là, au niveau du prospectus et il ne doit pas hésiter, M. le Président, à aller chercher de l'information additionnelle chez les courtiers et même auprès de la Commission, de la Bourse et de l'Accovam, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Farrah): Alors, je vous remercie, Mme la ministre, de votre collaboration. Je reconnais maintenant, en conclusion finale, M. le député de Gouin pour une intervention maximale de dix minutes.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je dois d'abord noter le changement d'attitude de la ministre qui, pour la première fois, reconnaissait qu'il y avait des améliorations à apporter à la Commission des valeurs mobilières du Québec. J'espère que ces améliorations se traduiront par une augmentation des budgets dont pourra disposer, sur lesquels pourra compter la Commission des valeurs mobilières du Québec, sans quoi, ce sera encore là des paroles en l'air tenues par la ministre déléguée aux Finances. Faut-il rappeler aussi que la ministre a annoncé le fait que la Commission se doterait, comme le recommandait d'ailleurs le Protecteur du citoyen dans son dernier rapport annuel, d'un bureau de plaintes. Je crois que c'est dans son meilleur intérêt.

M. le Président, nous avons aujourd'hui essayé de mettre en évidence un certain nombre de soupçons qui pesaient sur la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Bourse de

Montréal. Nous l'avons fait pour que, rapidement... et même pour donner l'occasion à la ministre de dissiper tous les soupçons qui pouvaient peser sur la Commission ou la Bourse. Nous lui avons donné l'occasion de nous dire que l'Opposition était dans l'erreur, mais d'aucune façon elle n'a été capable de réfuter nos arguments.

Je suis d'accord avec la ministre. Malgré le fait qu'elle nous l'ait répété trois, quatre et cinq fois - c'est à peu près tout ce qu'elle a été capable de dire, M. le Président - qu'effectivement la question de la confiance est un enjeu fondamental, particulièrement, M. le Président, lorsqu'on parle des petites compagnies, des juniors d'exploitation minière, où les gens sont particulièrement sensibles à cette réalité. Nous sommes particulièrement sensibles à cette réalité, compte tenu des efforts que ces gens-là doivent faire pour être capables de chercher les capitaux nécessaires pour assurer la croissance, pour assurer les objectifs et assurer le développement économique du Québec. Ces gens-là doivent disposer des capitaux nécessaires pour le faire et ont besoin de la Bourse, ont besoin de la Commission, ont besoin de faire appel à l'épargne, ont besoin de la confiance des investisseurs.

Il y a, à l'heure actuelle, M. le Président, deux éléments fondamentaux que nous avons essayé de mettre en évidence. Les missions parfois contradictoires qu'ont à assumer la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Bourse, parce que nos informations sont à l'effet que s'il n'y a pas de poursuites qui sont prises, s'il n'y a pas de sanctions qui sont prises, ce n'est pas parce que la Commission ne veut pas qu'il y en ait. Au contraire, la Commission, j'en suis convaincu, souhaite que dans le cas de ScotiaMcLeod, il y ait des gestes qui, rapidement, soient posés, sauf que le problème, il se situe à la Bourse de Montréal. La Commission, si elle veut vraiment qu'il y ait un règlement dans ce dossier, peut ordonner la conduite et la marche à suivre à la Bourse de Montréal dans le dossier. La ministre peut, elle, exiger, en fonction des dispositions qui sont contenues dans la loi, qu'un rapport détaillé lui soit soumis par le président. Elle peut même le rendre public pour dissiper tout doute, parce qu'un jour au l'autre, Mme la ministre, ce rapport d'enquête, ce rapport d'inspection chez ScotiaMcLeod, il sera rendu public.

Permettez-moi, M. le Président, de peut-être faire une comparaison avec les dossiers d'Hydro-Québec, avec les contrats d'Hydro-Québec qu'on a voulu tenir cachés pendant une bonne période de temps, ce qui a suscité l'intérêt du public. Si on avait fait preuve de transparence et si, dès le départ, on les avait rendus publics pour permettre un véritable débat, je suis convaincu que nous n'en serions pas rendus où nous en sommes à l'heure actuelle. La ministre aurait tout intérêt à ce que ce rapport

sorte pour qu'elle puisse commenter et qu'on puisse régler une fois pour toutes cette affaire. Parce qu'un jour ou l'autre, elle devra rencontrer, elle devra être questionnée, elle devra faire face au contenu, aux allégations qui sont contenues dans le rapport.

Non seulement il existe, M. le Président, un certain nombre de, peut-être, contradictions entre la mission de la Bourse et la mission de la Commission des valeurs mobilières, mais il existe aussi une contradiction dans la façon dont on traite les épargnants et dont on traite les courtiers à la Commission des valeurs mobilières du Québec. Comment se fait-il qu'on envoie seulement des gens du service d'inspection chez les courtiers? Comment se fait-il qu'on n'envoie pas des enquêteurs? Comment se fait-il que le rapport de ScotiaMcLeod soit un rapport du service d'inspection? Parce que ce rapport d'inspection, la conclusion en est assez intéressante - que les purs me comprennent - on soulève une série de questions à la fin de ce rapport dans lequel, si on lit entre les lignes, il est très clair que les gens du service d'inspection savaient très bien que ce n'était pas de leur compétence de faire ce genre de travail là, que c'était de la compétence du service d'enquête de la Commission des valeurs mobilières d'agir de cette façon. Cependant, qu'est-ce qui arrive lorsque le service d'inspection de la Commission remarque des infractions à la loi? Comment se fait-il que, dans le cas de ScotiaMcLeod, il a fallu... On aurait pu, dans un délai de deux ans, qui est un délai raisonnable, prendre des dispositions, utiliser les dispositions pénales qui sont prévues à la loi. Rien n'a été fait. Deux poids, deux mesures.

M. le Président, comment se fait-il que des représentants de la Bourse nous disaient en 1989 que la décision était imminente? Comment se fait-il que Paul Guy, le 13 mars 1989, nous disait que nous devrions être en mesure de prendre une décision d'ici à quelques mois? Je suis prêt à lui laisser six mois, mais lui laisser deux ans et demi, c'est de l'abus, M. le Président..

L'attitude de la ministre me confirme dans la volonté qu'elle a de mettre le couvercle sur la marmite, de laisser des gens qui ont enfreint la loi peut-être enfreindre encore la loi dans l'avenir. Et c'est pour ça que la demande que j'ai faite au Protecteur du citoyen, de faire enquête sur la façon dont la Commission des valeurs mobilières du Québec assume son mandat, est si importante. Et, compte tenu des nouveaux faits qui ont été portés à mon attention, compte tenu de l'analyse du relevé des titres hebdomadaires de la Bourse de Montréal, je crois que cette enquête est d'autant plus justifiée.

M. le Président, il me reste quelques instants pour dire que oui, les investisseurs ont la responsabilité de s'assurer d'avoir toutes les informations. Je suis d'accord avec la ministre, je suis d'accord avec le député de Lévis. Oui, les investisseurs doivent assumer les risques qui sont relatifs à leurs placements. Mais ceci étant dit, la Commission des valeurs mobilières a la responsabilité de régir les courtiers et les organismes telle la Bourse. La Commission des valeurs mobilières du Québec a la responsabilité de s'assurer que des courtiers dont la probité est douteuse ne courent pas les rues, dans le meilleur intérêt des investisseurs.

M. le Président, vous savez comme moi qu'il existe un certain nombre de dispositions dans la loi quant aux dispenses. L'attitude de la Commission des valeurs mobilières du Québec m'amène à dire que si... Son attitude dans ce dossier m'amène à dire qu'elle ou la Bourse... Les gens jugeront, mais je ne me battrai pas pour un empire de fonctionnaires, certainement pas. Mais les gens jugeront le comportement de la Commission ou de la Bourse qui a décidé de dispenser ScotiaMcLeod, ou les personnes qui travaillent pour elle, de toutes les parties et des obligations qui sont prévues dans la loi, particulièrement au titre cinquième, en n'agissant pas. C'est comme si la Commission des valeurs mobilières du Québec, ou la Bourse - dépendant des juridictions, s'il s'agit des règlements de la Bourse ou de la Loi des valeurs mobilières, ou des règlements sur les valeurs mobilières - avait décidé de donner une dispense.

Et les courtiers qui, aujourd'hui, nous écoutent, qui ont écouté les propos de la ministre, ils doivent rire, M. le Président, de voir que la ministre ne s'intéresse pas plus que ça, qu'elle se ferme les yeux devant un cas patent de fraude, de malversation, de manipulation de titres, qu'elle se ferme les yeux.

M. le Président, qu'elle fasse le même exercice que moi. Qu'elle regarde le relevé hebdomadaire des titres de la Bourse de Montréal. Qu'elle regarde en 1987, de quelle façon les titres ont été transiges. Elle en viendra sûrement à la même conclusion que moi.

M. le Président, une chose est déjà claire, c'est que les dispositions pénales ne pourront plus être utilisées, compte tenu du délai de prescription. Est-ce que, ça, c'est normal? Oublions la question de fond, oublions l'affaire ScotiaMcLeod. Est-ce qu'il est normal que nous, qui votons des lois, on ne soit même pas capables de s'assurer que ces lois soient respectées? Est-ce qu'il est normal qu'il y ait deux poids, deux mesures? Est-ce qu'il est normal que des gens qui ont enfreint la Loi sur les valeurs mobilières du Québec, d'aucune façon ces gens-là ne soient pénalisés? C'est ça, la question de fond:

La loi prévoit des dispositions pénales à la Loi des valeurs mobilières du Québec qui prévoit des amendes en cas d'infraction à la loi. On ne s'en est pas servi. Et même si on voulait s'en servir, il est trop tard parce que le délai de prescription est passé.

Est-ce que c'est cette image... La ministre

et le député de Hull nous pariaient de l'image des politiciens. Est-ce que c'est cette image de l'administration de la justice que ce gouvernement veut donner au public québécois? Est-ce que c'est cette image de l'administration de la justice que le gouvernement libéral veut donner aux épargnants?

La confiance, M. le Président, n'existera que dans la mesure où il y a de la transparence. Et j'invite la ministre, malgré son arrogance, à douter un peu, à douter au sujet des allégations qui ont été présentées, connues et publiques depuis longtemps.

Le Président (M. Farrah): La conclusion...

M. Boisclair: M. le Président, finalement... Le député de Louis-Hébert... Oui, on me rappelle que le député de Louis-Hébert, lui, avait compris, lui, s'est plaint publiquement. Et lui a critiqué vertement la ministre. Ça serait intéressant de voir ce qu'il pense de cette affaire-là.

En conclusion, nous nous sommes présentés ici de bonne foi pour permettre à la ministre de dissiper tout doute. Elle n'a été capable de répondre à aucune de nos questions. En fait, par sa démonstration, elle nous a dit, elle nous a démontré qu'elle ne connaissait pas sa loi, qu'elle ne connaissait pas le fonctionnement du marché des valeurs mobilières. Nous avions l'espoir, M. le Président, d'être confondus. Hélas, la ministre en a été incapable. Son incapacité entache la réputation de la Commission des valeurs mobilières du Québec, de la Bourse de Montréal, des courtiers honnêtes et des entreprises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Farrah): Merci, M. le député de Gouin. Notre enveloppe de temps étant épuisée et notre mandat ayant été accompli, j'ajourne la commission sine die.

(Fin de la séance à 12 h 6)

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