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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mercredi 17 mai 1995 - Vol. 34 N° 21

Poursuite du débat sur le discours sur le budget


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Table des matières

Déclarations d'ouverture

Discussion générale


Autres intervenants
Mme Diane Barbeau, présidente
M. Henri-François Gautrin
M. Rosaire Bertrand
M. Claude Lachance

Journal des débats


(Seize heures trente-six minutes)

La Présidente (Mme Barbeau): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget. Permettez-moi de rappeler les règles du débat... Ah! pardon, j'oubliais un item. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, il n'y a pas de remplacements.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci. Bon, permettez-moi de rappeler les règles du débat. Le mandat que nous entreprenons aujourd'hui, pour une période de 10 heures, prend la forme d'une interrogation au ministre des Finances par les membres de la commission sur la politique budgétaire présentée lors du discours du budget. Les règles du débat ont été fixées par la commission de l'Assemblée nationale le 23 mai 1984.

Nos travaux vont commencer par une période de déclarations d'ouverture au cours de laquelle le ministre des Finances puis le porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances pourront prendre la parole pendant 20 minutes. Les membres de la commission auront ensuite un temps de parole de 10 minutes, réparti en une ou plusieurs interventions qui peuvent prendre la forme de questions au ministre ou de commentaires. Le ministre disposera d'un temps de parole de 10 minutes après chaque intervention. J'inviterais M. le ministre, pour 20 minutes.


Déclarations d'ouverture


M. Jean Campeau

M. Campeau: Merci, Mme la Présidente. Bien, vous n'en doutez pas que c'est un plaisir pour moi que d'avoir l'occasion d'étudier plus attentivement avec vous, Mme la Présidente, le budget que j'ai déposé la semaine dernière. Je suis particulièrement content que ce soit vous qui soyez la Présidente. Je suis convaincu que vous êtes capable de saisir la teneur et de saisir les bons côtés de ce budget.

(16 h 40)

En effet, c'est un budget honnête, c'est un budget qui est responsable, c'est un budget qui est équitable et c'est un budget qui est courageux. Qu'est-ce qu'on doit se rappeler? Bien, il faut se rappeler que l'ex-gouvernement libéral nous a laissé un déficit record, j'insiste, Mme la Présidente, record de 6 100 000 000 $ – ce n'est pas rien, ça – et, par rapport à la prévision annoncée en mai 1994, il s'agissait là d'un trou de 1 700 000 000 $. Heureusement, Mme la Présidente, il nous a été possible de combler cet écart, du moins partiellement – pas autant qu'on aurait voulu – pour ramener le déficit à 5 700 000 000 $. Le gouvernement précédent s'était non seulement délesté de ses responsabilités en matière de contrôle du déficit, mais il avait laissé augmenter – vous ne le croirez pas, Mme la Présidente – les dépenses de programmes de 4,4 % en moyenne par année, au cours des cinq dernières années, soit un taux largement supérieur à l'inflation.

C'est le genre de gouvernement, Mme la Présidente, qui pensait que, s'il mettait de l'argent, c'était pour mieux aller. La gestion, ce n'était pas important. Pourvu qu'on mette de l'argent, ça va mieux aller. Et c'est le genre de gouvernement qui pense que, quand on retire de l'argent, ça marche plus mal. Autrement dit, améliorer la gestion, c'est impossible; mais mettre de l'argent, c'est ça qui fait foi de tout.

C'est comme un genre de gouvernement qui n'a jamais été dans l'entreprise privée, qui est habitué d'opérer avec les fonds des autres puis qui s'en fout. Puis on voit ça et, bien évidemment, ce gouvernement-là se trompait, dans son déficit, de 1 000 000 000 $ chaque année, en moyenne. Parce que, si je vais chercher votre accord, je peux dire: En moyenne, en moyenne chaque année. Il faut le faire, là! À un moment donné, on peut faire une erreur une année, mais les autres années, là! En fait, dans la finance, on juge quelqu'un sur une base de deux, trois, quatre ou cinq ans. Alors, là on a jugé sur cinq ans. Eh bien! vraiment là, il ne passe pas la moyenne.

Il n'a jamais eu le courage de ramener les dépenses à un niveau acceptable. Encore moins celui de les geler. Chaque année, automatiquement, les dépenses augmentaient et il les laissait augmenter. C'est la loi de la facilité. Alors que, s'il les avait gelées, au moins on aurait pu voir quelque chose. Mais il ne les a même pas réduites. Alors, c'est avec cet héritage que, moi, comme ministre des Finances, j'ai commencé à bâtir mon budget. J'ai un avantage, sûrement, parce que je peux juste... Le présent gouvernement ne peut que faire mieux. Faire pire, là, ça va être difficile. Franchement là, il va falloir se surpasser.

Alors, malgré cela, nous avons présenté, la semaine dernière, le budget le plus rigoureux de l'histoire contemporaine du Québec. Je comprends que, les gens d'en face, ils réagissent au mot «rigoureux». Parce que c'est vrai qu'il faut être rigoureux dans cette affaire-là. Alors, pour eux autres, ça devient impossible. Pour eux autres, c'était impossible de réduire les dépenses. Il fallait qu'elles augmentent chaque année, qu'ils les laissent augmenter automatiquement. Alors, qu'on dise ça, je le comprends. Ils ne peuvent pas le croire. Je le comprends et, ça, je trouve ça...

Ça ne fait pas longtemps que j'ai compris ça; j'ai compris ça il y a deux ou trois jours. Je me suis dit: Ils ne peuvent pas comprendre quelque chose qu'ils n'ont jamais eu l'idée de faire. Alors, c'est quand j'ai eu une question de la députée de Saint-François que, là, j'ai compris. Pour eux autres, un hôpital qui marche bien, Mme la Présidente, c'est: plus vous mettez d'argent dedans, mieux il va marcher. Mais ça dépend comment vous l'utilisez, votre argent. Eux autres, plus on met d'argent, mieux ça marche. C'est drôle. Je vous dis qu'une chance que ces gens-là n'ont pas dirigé une compagnie parce que je vous dis que la compagnie n'aurait pas duré longtemps et que ça aurait fait une autre belle faillite.

Mais le déficit de la première année, nous autres, est réduit du tiers. Puis le plus important, c'est qu'on atteint ces résultats sans augmenter les impôts des particuliers. C'est vrai que c'était un engagement du gouvernement. Mais c'est vrai que c'est une des raisons pour lesquelles on a fait ça. On ne peut pas nier ça. Un engagement, ça doit se respecter. Mais la raison principale, ce n'est pas ça, c'est que les Québécois sont bien assez taxés et qu'au cours des cinq dernières années, là, ils ont eu leur lot à endurer. Ils ne peuvent plus en prendre. Alors, c'est la raison principale pourquoi on n'a pas augmenté les impôts des particuliers avec la raison, évidemment, que c'était un engagement électoral et que le Parti québécois est connu pour respecter ses engagements électoraux.

On va aussi le faire par une perception accrue de ce qui est dû au gouvernement. Mme la Présidente, si, dans un gouvernement, votre voisin ne paie pas ses impôts, vous, ça ne vous tente pas beaucoup de les payer non plus. Alors, il faut que tout le monde donne l'exemple. Il faut qu'un gouvernement collecte ses taxes. On veut aussi limiter certains abris fiscaux. Il est quand même drôle, Mme la Présidente, que les banques et les caisses populaires puissent bénéficier d'un crédit en recherche et développement pour l'installation de guichets automatiques. Alors, ça, on a éliminé ça, on a éliminé aussi d'autres abris fiscaux tels que la taxe sur la capitalisation.

On demande aussi un effort particulier temporaire des grandes entreprises. On va voir plus loin qu'il est vrai que l'impôt des particuliers, pas l'impôt, la taxe, ce qu'on demande aux grandes entreprises en taxe sur le capital et taxe sur la masse salariale a été augmenté. Mais, après 18 mois, l'effet est neutre. Alors, nous réduisons, de plus, le déficit en mettant en place une série d'actions pour la création d'emplois, ce qui est profitable, et pour les chômeurs, et pour le déficit. Parce que, quand vous créez de l'emploi, ça a un effet double. Ça vous fait moins d'argent à verser en sécurité du revenu, et, ensuite de ça, les gens qui travaillent vous donnent, ils paient des taxes et de l'impôt. Alors, ça a un effet positif en même temps que ça annule l'effet négatif. Alors, c'est très important.

Enfin, ce budget-là – je dis «enfin», dans le fond, on devrait dire «at last», le vrai mot anglais, je ne savais pas comment le traduire en français – simplifie la vie aux entreprises. Enfin! Nos entreprises, dont on veut qu'elles soient performantes, on leur avait donné un système de taxes, là, qui était infâme. C'était un fouillis, ça. Quand je vais sur la rue, là, puis que je rencontre des dépanneurs, surtout, puis des gens de petites entreprises, depuis que le budget est passé, eux, ils se sont reconnus, beaucoup plus que les grandes entreprises. Ils ont beaucoup réalisé l'importance de la simplification de la taxe, de l'harmonisation de la taxe de vente. Eux, franchement, sont en mesure de constater l'effort qui a été fait, combien ça va leur sauver beaucoup d'ouvrage et de maux de tête.

Parce que, vous savez, Mme la Présidente, le petit entrepreneur, lui, il fait sa propre comptabilité, le soir. Le dépanneur, c'est lui qui la fait, alors que, la grande entreprise, bien, elle s'engage des comptables. Alors, le grand patron là, vu que ce n'est pas lui qui la fait, il ne réalise pas comme l'autre; alors que le petit entrepreneur, le gars du dépanneur, il le réalise bien. J'étais à la télévision, dimanche dernier, et je rencontre quelqu'un qui me conduisait. Il dit: Ma mère vous remercie. Il dit: Elle tient un dépanneur, puis elle vient de réaliser l'ouvrage qu'elle va sauver, en plus des remboursements sur intrants. Alors, voilà des citoyens qui vont être plus heureux parce qu'à l'avenir ça va être beaucoup plus facile de faire affaire au Québec.

Notre budget 1995-1996 intensifie l'action de notre gouvernement en faveur de l'emploi. On le fait d'abord dans chacune des régions du Québec. On va livrer, avec le Fonds de solidarité, 16 fonds régionaux de capital de risque. Notre objectif, c'est de créer, dans chacune des régions, de véritables centres de décision capables d'orienter le développement économique en leur faveur. Bon, alors, les conseils d'administration de ces fonds-là vont être composés majoritairement d'investisseurs régionaux, des gens qui connaissent les problèmes de la région. Autrement dit, ces fonds de capital de risque là ne seront pas dirigés par des gens de la ville de Québec ou des gens de la ville de Montréal. Ça va être des gens du Saguenay–Lac-Saint-Jean, des gens de la Gaspésie, Abitibi-Témiscamingue, dépendamment d'où sera installé le fonds, donc des gens qui connaissent les problèmes de la région. Et, ça, ça nous semble un atout majeur, et c'était essentiel que ça se fasse au Québec. Et tant mieux que le Fonds de solidarité puisse remplir cette tâche-là. Si on peut le supporter, plus on pourra le supporter, mieux ça sera. Et c'est un peu l'effet d'avoir déplafonné les sommes d'argent que le Fonds peut recueillir chaque année.

Et, là-dessus, c'est évident que nous en sommes très fiers. Le Fonds de solidarité, Mme la Présidente, avait été créé sous le Parti québécois dans le but de créer des emplois. Et je peux vous assurer que ça avait eu un effet majeur, au Québec, dans l'économie. Ça avait eu aussi l'effet d'éveiller les travailleurs aux avantages de connaître les affaires. On nous a dit qu'avec la création du Fonds de solidarité les relations entre le côté patronal et le côté ouvrier, le côté syndical, étaient beaucoup meilleures, parce que les ouvriers étaient en mesure de constater ce que c'était, faire un profit. Ce que l'entrepreneur, à un moment donné, pouvait payer une année, il ne voulait pas le payer une autre. Alors, ils pouvaient être plus raisonnables dans leurs demandes parce qu'ils savaient qu'ils avaient la vérité, puis ils étaient mieux informés de ce secteur-là.

On a vu aussi que les compagnies dans lesquelles le Fonds de solidarité a investi, pour la plupart, ont été très rentables. Il y a peut-être eu certains accidents, mais, sur une moyenne, c'est quand même normal, dans l'investissement, d'avoir certaines malchances. C'est l'ensemble qui compte. Pourvu que la moyenne générale soit bonne, pourvu que la performance sur quelques années soit bonne, c'est là qu'on juge si les gens sont bons dans l'investissement ou moins bons.

(16 h 50)

Alors, dans le cas du Fonds de solidarité, ça s'est avéré un outil fort important. Et, ici, je pense qu'il nous faut rendre hommage à M. Louis Laberge et aussi à Fernand Daoust, qui ont été deux des principaux fondateurs du Fonds de solidarité. Et M. Laberge, c'est un peu... Ce goût-là, il l'a un peu développé à la Caisse de dépôt. Gérald Larose, son fonds s'en vient. On va en parler un petit peu plus long. Mais je peux, ayant été à la Caisse de dépôt pendant 10 ans avec M. Laberge, être en mesure de constater comment c'était un Québécois habile et qui a... C'est un peu son stage à la Caisse de dépôt qui lui a peut-être donné l'idée de partir le Fonds de solidarité. Il l'avait peut-être dans son subconscient, mais il l'a plus formalisée par ses 10 ans à la Caisse de dépôt, à force de voir les transactions, d'être habitué au monde des affaires, de réaliser aussi, peut-être avec envie, la bonne performance de la Caisse de dépôt dans les années 1980 à 1990. C'est une performance qui a dépassé la moyenne des gestionnaires canadiens sur une base de 10 ans, et je pense que M. Laberge en était fort heureux.

Et il a aussi vu la Caisse de dépôt, bien sûr, grandir puis s'améliorer. Quand il est arrivé là, je pense que la Caisse de dépôt avait 2 000 000 000 $ d'actifs; quand il est parti, elle en avait 47 000 000 000 $, 48 000 000 000 $. Alors, moi, quand je suis arrivé, elle en avait 8 000 000 000 $; puis, quand je suis parti, elle en avait 41 000 000 000 $. Mais la performance... Ce n'est pas nécessairement d'augmenter la Caisse qui compte – parce qu'on reçoit de l'argent de bons déposants – mais c'est surtout la performance de la Caisse qui a incité M. Laberge à travailler à la création du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Je pense que c'est un individu, au Québec, qui a fait sa marque. Et, dans les annales du Québec, M. Louis Laberge, c'est un type dont on se souviendra longtemps. Ah, il y a des...

Non, il n'est pas mort, mais on va se souvenir de son action, tout comme on se souvient d'un bon libéral – il y en a eu au moins un, bon libéral – Jean Lesage. Dans ce temps-là, les libéraux se tenaient debout. Puis quand venait le temps – il est mort, lui – de se battre contre Ottawa, par exemple, ces gars-là ne revenaient pas à genoux; Jean Lesage est toujours revenu debout d'Ottawa. C'est un grand Québécois puis c'est lui qui a parti la Caisse de dépôt, la Régie des rentes. Puis, quand Ottawa rencontrait Jean Lesage, ils savaient qu'ils ne se frottaient pas à un deux de pique, et on a gagné beaucoup, le Québec, avec Jean Lesage. Moi, quand je regarde les politiciens – il y en a plusieurs autres peut-être qui sont grands – mais ça, c'en était un grand. C'est vrai que, dans ce temps-là, dans le temps de Jean Lesage, il était secondé quand même par du bon monde, et, à ce moment-là, les gens du Parti québécois faisaient partie, pour plusieurs, du Parti libéral. Puis, à un moment donné, ils ont décidé de partir. Depuis ce temps-là, ça a affaibli le Parti libéral, il est moins fort, les meilleurs sont partis, sauf M. Lesage qui est resté là jusqu'à sa mort.

Une voix: ...

M. Campeau: Bien, est-ce qu'il était parent avec vous?

La Présidente (Mme Barbeau): S'il vous plaît, s'il vous plaît, si vous pouviez respecter un peu le droit de parole. Vous allez tous avoir le droit de parole.

M. Bourbeau: C'est parce qu'on est très heureux d'entendre le cours d'histoire apprêté à la sauce Campeau. Il faudrait peut-être corriger un peu certains faits, mais...

La Présidente (Mme Barbeau): Vous allez avoir 20 minutes, ça ne sera pas long, M. Bourbeau.

M. Campeau: Il va avoir le temps de corriger ça. Alors, si le député de Laporte veut me contredire et dire que Jean Lesage n'était pas un grand Québécois, je vais m'objecter formellement, Mme la Présidente, parce que, dans mon livre, c'est quelqu'un qu'on ne peut pas oublier, qui a fait partie de l'histoire et qui a été un bon premier ministre. Il a été là juste six ans, malheureusement, juste six ans. Ça veut dire que, des fois, quand on est bons, ça ne veut pas dire qu'on reste si longtemps que ça; on fait son ouvrage et on s'en va.

On va aussi injecter, Mme la Présidente, 97 500 000 $ sur trois ans dans l'industrie forestière. Le ministère des Ressources naturelles a déjà lancé un plan de mise en valeur des ressources du milieu forestier qu'il compte réaliser en partenariat avec l'industrie et les divers milieux régionaux. Ce plan-là va créer ou soutenir 7 400 emplois pendant ces trois années-là. Il y a aussi un crédit d'impôt pour la mise en exploitation de nouvelles mines. On n'abandonne pas les régions, Mme la Présidente, contrairement au critique de l'opposition en chambre. Je vous ai dit qu'on allait dans les ressources naturelles, dans la forêt, maintenant les mines. Alors, notre objectif, c'est de permettre aux petites compagnies spécialisées dans l'exploitation minière de se développer puis de prendre de l'expansion. Alors, elles auront les moyens de se lancer dans l'exploitation des gisements qu'elles auront découverts plutôt que de devoir les vendre aux grandes compagnies déjà installées. C'est un petit peu pour garder le caractère québécois à ces mines-là, les aider à partir et, aussi, qu'elles ne se sentent pas obligées de vendre avant que leur compagnie au moins soit bien installée et que, si elles décidaient de vendre, à tout le moins, elles en retirent un profit intéressant.

Comme vous le savez, notre gouvernement désire redonner à la formation professionnelle... Puis, là, je le sais, que le député de Laporte va être touché par ça, parce que, lui, la formation professionnelle, ça l'intéressait beaucoup. Sauf que, chaque fois qu'il est revenu d'Ottawa, c'est avec rien. Des fois, il aurait été aussi bien mieux de ne pas y aller. C'est là-dessus que vous ne ressemblez pas à Jean Lesage. Jean Lesage, quand il allait à Ottawa, quand il revenait, il avait gagné. Vous, quand vous allez à Ottawa, puis ça ne dépend pas... C'est peut-être de la malchance, mais, dans la formation professionnelle... Puis pourtant, vous aviez l'air sincère, puis, moi aussi, dans ce temps-là, je trouvais... Je vous admire encore, mais, dans ce temps-là, je vous admirais pour ça, parce que vous vous teniez debout devant la formation professionnelle. Sauf que vous étiez malchanceux. Vous reveniez d'Ottawa, vous ne gagniez pas. Et peut-être aussi que vous vous résigniez trop vite à ne pas gagner. Quand on est en négociation, qu'on revient puis qu'on a perdu, il faut tout de suite préparer la prochaine. Alors, là-dessus, je trouve que la formation professionnelle, je pourrais vous donner d'autres qualificatifs, mais vous l'avez travaillée, mais on n'a pas avancé.

Alors, redonner à la formation professionnelle le rôle qu'elle doit jouer dans une économie à forte valeur ajoutée comme la nôtre. Alors, l'ancien gouvernement ne s'en est pas préoccupé beaucoup, puisque le nombre d'élèves inscrits en formation professionnelle au secondaire est tombé, Mme la Présidente... Moi aussi, j'attire votre attention, c'est important. Au secondaire, il est tombé de 53 000 en 1985-1986 à 7 000 en 1994-1995. De 53 000 à 7 000! Ça, c'est un véritable désastre, parce que la formation des jeunes, c'est ça qui est l'avenir. Alors, si nos jeunes ne sont pas formés, qu'est-ce qu'il va arriver?

Mes collègues sont déjà à l'oeuvre pour réparer les pots cassés. Le ministre de l'Éducation a annoncé plusieurs mesures pour lutter contre le décrochage scolaire et pour relancer l'enseignement professionnel. Elles permettront de diversifier les formations professionnelles et les cheminements pour y accéder, tout en favorisant une plus grande intégration de l'école à l'entreprise.

La Présidente (Mme Barbeau): Il vous reste une minute, M. le ministre. Une minute.

M. Campeau: Madame, il me semble que je viens de commencer.

La Présidente (Mme Barbeau): Bien, ça passe vite.

Une voix: Ça va bien, M. le ministre.

Une voix: ...

M. Campeau: Mais, tout le détour... On pourra revenir puis reparler de Jean Lesage, là. Si vous me faites des reproches parce que j'ai parlé de Jean Lesage, je vous ai donné mon admiration pour Jean Lesage.

Une voix: Louise Beaudoin...

M. Campeau: Louise Beaudoin va bien réussir aussi. Elle en a déjà fait rentrer un bon montant d'argent. Sans elle, on ne l'aurait pas eu. C'est vrai qu'elle est peut-être moins bien reçue.

M. Bourbeau: Elle a des arguments convaincants.

M. Campeau: Bien, vous allez voir, on reviendra vous en parler quand elle va avoir réussi, là, quand ça va rentrer.

Alors, la ministre de l'Emploi vient de déposer un projet de loi qui incitera les entreprises du Québec à investir plus intensivement dans la formation de leurs employés. Puis, sur ça, je le sais, que vous êtes d'accord avec moi. Je le sais, que vous allez prendre le même discours que ça, parce que, vous aussi, vous êtes pour la formation de l'emploi, sauf que vous n'avez pas réussi. Mais, nous autres, on va réussir.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre. On va donner la parole à M. le député de Laporte pour 20 minutes.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, Mme la Présidente. Quand j'écoute le ministre des Finances, j'ai peine à penser qu'il est sérieux. Le ministre des Finances avait la réputation d'être un individu qui ne provenait pas tellement de l'entreprise privée, même s'il semble le dire. Je sais qu'il a été dans les obligations, à un moment donné, mais il a surtout fait carrière dans l'entreprise publique. Alors, c'est drôle de voir un ministre des Finances qui vient nous faire la leçon de l'entreprise privée alors que, manifestement, il n'est pas issu de ce milieu-là. Et ce n'est peut-être pas tellement non plus la marque de son gouvernement ni de son chef.

Alors que, de ce côté-ci, c'est vraiment la marque de commerce. Alors, la plupart, un bon nombre de nos collègues sont issus de l'entreprise privée, dont moi qui ai fait carrière une vingtaine d'années là-dedans. Alors, j'ai de la difficulté à comprendre que le ministre des Finances n'ait pas saisi, enfin utilise cet argument-là alors que l'argument ne tient pas du tout quand on regarde les faits. Et je suis surpris aussi de voir avec quelle facilité le ministre des Finances tombe dans la démagogie, une démagogie primaire qui fait que, en très peu de temps, il a perdu le sérieux qu'on lui prêtait pour se lancer dans des attaques souvent assez farfelues. Et je lui dirais de faire bien attention quand il utilise ce type de discours là parce que l'expérience prouve qu'à la longue ça finit toujours par nous retomber sur le nez.

(17 heures)

À titre d'exemple, Mme la Présidente, quand je vois que le ministre des Finances nous parle de son excellent budget et du mauvais gouvernement qui l'a précédé et qui avait préparé de très mauvais budgets, si le ministre des Finances retournait un peu plus loin en arrière – si on veut faire un peu d'histoire – il remarquerait que, sous le premier mandat du Parti québécois, on avait établi, à l'époque – et de loin – le record de tous les déficits en chiffres absolus. Si on prend les déficits du temps de M. Parizeau, des années 1976 à 1985, et qu'on actualise les chiffres... Parce que la seule façon vraiment de comparer des comparables, c'est de regarder les déficits par rapport au PIB. On se rend compte que le déficit le plus élevé de tous les temps, bien plus élevé que celui de l'an dernier, c'est le déficit que M. Parizeau nous avait concocté en 1980-1981, un déficit de 3 450 000 000 $ à l'époque. Et, ça, si ma mémoire est fidèle, ça correspondait à 4,8 % du PIB. C'était énorme, énorme. C'est plus grand que tout ce qu'on a vu depuis ce temps-là. Et le deuxième plus grand déficit, si ma mémoire est fidèle, mais on va sortir les chiffres, c'est l'année suivante, où on était monté à peu près à 3,6 %, 3,7 % du PIB.

Sous le régime Bourassa, on a fait des années extraordinaires, où le déficit était très bas, et d'autres, en période de récession, où le déficit a augmenté. Mais jamais on est monté à des sommets comme ceux qu'on a connus sous M. Parizeau, jamais. Et le ministre des Finances devrait écouter, parce que, là, il s'en souviendrait puis il ne répéterait pas ça la prochaine fois. Exemple, sous le régime Bourassa, il y a eu deux périodes. Il y a eu la période 1985 à 1990. Là, on était en période de croissance économique et, systématiquement, le gouvernement Bourassa, année après année, a réduit les déficits, de sorte que, vers la fin de cette époque-là, en 1990, on était rendu à peu près où veut aller le ministre des Finances, c'est-à-dire à l'équilibre du compte courant. On avait réduit le déficit à 1 671 000 000 $, effectivement, en 1989-1990, et l'année précédente, à 1 632 000 000 $. C'était le point des dépenses d'immobilisations. C'était le montant équivalant aux dépenses d'immobilisations du gouvernement. Donc, ce qu'on appelle l'équilibre des dépenses d'opérations courantes, le Parti libéral l'a réalisé deux années de suite.

Malheureusement, la récession est arrivée et on n'a pas pu aller plus loin, en arriver à l'équilibre budgétaire, c'est-à-dire à aucun déficit du tout y compris les dépenses d'immobilisations. Et, là, à l'occasion de la récession, on a dû encaisser des déficits plus élevés. Selon la théorie, d'ailleurs, du premier ministre actuel, M. Parizeau, qui nous expliquait, il y a une couple d'années, en Chambre, comment, dans une période de croissance économique, on doit réduire les déficits, ce que nous avons fait, et comment, en période de récession, on peut les laisser monter, ce qu'il avait fait. Ce qu'il avait fait, d'ailleurs, à un niveau plus élevé que nous par rapport à l'époque.

Alors, ce qui m'amène, Mme la Présidente, à conclure que le ministre des Finances devrait être prudent quand il compare les budgets Bourassa. Les budgets de l'ère Bourassa ont été des budgets qui ont réduit le déficit jusqu'à l'équilibre du compte courant deux années de suite, en 1989 et 1990, pour, finalement, lors de la récession, remonter sensiblement. Et ça m'amène à parler du budget de l'an dernier. Là, le ministre des Finances, lorsqu'il affirme que le gouvernement précédent a fait un déficit de 5 700 000 000 $, là, Mme la Présidente, le ministre charrie, pour employer une expression assez connue.

Et un budget, ça, c'est comme un bateau. C'est un bateau qu'on met à l'eau. On met le bateau à l'eau, puis c'est dans les premiers jours après la mise à l'eau qu'on voit si le bateau flotte ou ne flotte pas. Et, cette année, manifestement, on voit qu'après une semaine le bateau prend l'eau. Il prend l'eau de plusieurs places, d'ailleurs, on l'a vu. Et, après une certaine hésitation, là, dans la presse et chez les commentateurs, de plus en plus on se rend compte que l'opinion générale est à l'effet que, le budget de cette année, il prend l'eau, il ne flotte pas. Ce qui n'était pas le cas l'an dernier. L'an dernier le budget a flotté totalement. Il n'y a eu aucune espèce de critique sérieuse contre le budget de l'an dernier jusqu'à ce que, évidemment, le gouvernement change. Ça veut dire qu'à sa face même, au départ, quand on a mis le budget à l'eau, quand on a mis le bateau à l'eau, il flottait, l'an dernier; et, cette année, il ne flotte pas. Disons que les composantes intrinsèques du budget, l'an dernier, elles résistaient à l'analyse; cette année, ça ne résiste pas puis le bateau prend l'eau.

Mais, une fois que le bateau est à l'eau, là, ce n'est plus le constructeur, ce n'est plus l'architecte qui est en charge du bateau, c'est le capitaine, et ce n'est plus le même. Et, quand le capitaine prend le bateau, normalement on s'attend à ce qu'il mette le cap sur l'objectif et qu'il garde le cap. Et, si, à la première tempête, au premier coup de vent, le bateau dérive et que le capitaine ne fait pas les efforts voulus pour remettre le bateau sur l'objectif, remettre le bateau sur le cap, bien, le bateau commence à dériver. Il dérive, puis il dérive, puis, finalement, si le capitaine laisse le bateau dériver, il va aller s'échouer sur des récifs. Et, là, il va prendre l'eau pour vrai. Là, il va prendre l'eau. Mais est-ce qu'on va blâmer l'architecte naval pour le capitaine qui a laissé le bateau s'écraser sur des récifs? Est-ce que c'est le constructeur du bateau qui va être tenu responsable d'un capitaine qui n'est pas capable de garder le cap? Bien, c'est ça qui est arrivé, Mme la Présidente.

Vous avez un bateau, qui était parfaitement construit...

Une voix: Hum!

M. Bourbeau: ...qui était parfaitement capable de garder l'eau, de garder la flottaison, et vous avez un capitaine qui a décidé, lui, qu'il n'était pas intéressé à garder le cap sur l'objectif et qui a systématiquement évité de replacer le bateau dans sa trajectoire, et qui l'a laissé dériver, au fil de chacune des tempêtes qui sont survenues – parce qu'il en survient toujours, des tempêtes – et qui n'a pas fait les efforts voulus pour que le bateau reprenne sa direction. Alors, moi, je dis que, quand le bateau s'écrase sur les récifs, c'est le capitaine qu'il faut blâmer et non pas celui qui a construit le bateau, et non pas l'architecte naval ou le constructeur. Et c'est ça, en fait, qui est arrivé.

Le gouvernement du Parti québécois n'a pas fait les efforts voulus pour replacer le budget dans sa perspective. Et, à ce sujet-là, quand on parle du déficit de 5 700 000 000 $, il faudrait que le ministre des Finances, à un moment donné, nous explique certaines choses. Comme, par exemple, qu'il nous explique comment ça se fait, là, qu'au poste de l'impôt sur le revenu des particuliers, le plus gros poste de revenus du gouvernement, là, environ 12 000 000 000 $ sur 36 000 000 000 $, un tiers des revenus, l'an dernier, on a fait... Le rendement de cette taxe-là a été moins 65 000 000 $ par rapport à l'année précédente. Il faut le faire, hein? Moins 65 000 000 $ de rendement par rapport à l'année précédente.

Cette année, on nous dit: Ça va être 1 000 000 000 $ de plus. Assez étonnant, parce que les paramètres économiques sont les mêmes. L'an dernier, on avait prévu 3,2 %; le ministre, lui, a prévu 3,3 % cette année. D'ailleurs, c'est ce qu'on avait prévu l'an dernier pour cette année. Mais la réalité a été meilleure. C'est autour de 4 %, quoi? C'est 4,2 %, même, la croissance économique. On a eu une meilleure année l'an dernier que prévu, et, cette année, le ministre pense que ça va être meilleur. Je le souhaite pour lui.

Mais les observateurs s'accordent pour dire que ce sont deux années à peu près semblables. Les paramètres économiques sont à peu près les mêmes pour les deux années, et on devrait avoir les mêmes résultats. Donc, je pose la question au ministre: Comment ça se fait qu'avec des paramètres semblables, l'an dernier, cet impôt-là a subi une baisse de 65 000 000 $ et, cette année, on nous dit qu'il y aura une hausse de 1 000 000 000 $?

Moi, j'attends des réponses du ministre. De deux choses l'une, ou bien ses chiffres sont totalement irréalistes, surnaturels, ou bien il s'est passé quelque chose en fin d'année. Ça, ce n'est pas impossible, pas impossible. Je ne sais pas si le ministre sait ce que c'est que la gestion de fin d'année; on a dû lui expliquer ça un peu, là. Mais le ministre pourrait-il nous dire combien de fonds ont été impliqués dans la gestion de fin d'année, de façon à pouvoir nous expliquer comment ça se fait qu'on est passés de moins 65 000 000 $ à plus 1 000 000 000 $? Autrement dit, combien de centaines de millions de dollars avez-vous fait passer d'une année à l'autre dans le fonds, dans les revenus du budget des impôts sur le revenu des particuliers?

Ça ne peut pas s'expliquer autrement, Mme la Présidente. Il n'y a aucune autre explication, car, de deux choses l'une, ou bien les chiffres, cette année, n'ont pas d'allure, sont absolument injustifiables, surréalistes, ou bien les chiffres sont bons, mais c'est ceux de l'an dernier qu'on a tronqués. Ça, c'est possible. Si on a joué avec les chiffres de l'an dernier, peut-être que l'année dernière a été moins mauvaise qu'on pense et que cette année va être un petit peu moins bonne, mais qu'on a fait un genre de transfert, là, d'une année à l'autre. Alors, il faudrait que le ministre nous donne des explications, parce que, jusqu'à maintenant, ça, dans son budget, c'est un des plus gros points faibles de son budget. C'est le trou, là, le plus inexpliqué, le plus inexplicable. Ça dépasse l'entendement. Et tous ceux qui ont regardé ça sont du même avis, que ça n'a pas d'allure. Alors, il s'est passé quelque chose, et le ministre aura peut-être l'occasion de nous donner des explications qui pourront nous satisfaire ou, enfin, qui justifieront cet écart absolument invraisemblable d'un budget à l'autre.

(17 h 10)

Il y a aussi, Mme la Présidente, la question... Le ministre a traité de la question du Fonds de solidarité. Là-dessus, le Fonds de solidarité, il faudrait faire attention, hein? Du capital de risque, là, les observateurs sont pas mal tous d'accord qu'il y en a passablement au Québec, du capital de risque, peut-être même trop, au moment où on se parle. Et le gouvernement décide de mettre sur pied un autre fonds de capital de risque, probablement pour faire plaisir à ses petits amis de la CSN. Moi, ça ne me fait rien, mais, à chaque fois qu'on fait ça, ce sont les contribuables québécois qui paient puis c'est sur nos taxes, nos impôts que ces crédits-là sont consentis. Et, dans le Fonds de solidarité de la FTQ, il y a des obligations qui sont faites au Fonds d'investir une certaine partie du capital dans les entreprises québécoises, d'une façon concrète, non pas dans de la dette, mais dans de l'équité. J'aimerais savoir si le ministre suit attentivement ça, si, effectivement, la FTQ, le Fonds de solidarité, respecte ses engagements. Puis, ce n'est pas en prenant 100 000 000 $ puis en l'envoyant dans les régions que la FTQ peut dire: Ça y est, j'ai mis mon 100 000 000 $ dans l'entreprise. Il faudrait être sûrs que, dans les régions, ces fonds-là vont, effectivement, être mis dans des entreprises, qu'ils ne seront pas placés dans des comptes de banque et que, ensuite, le Fonds de solidarité puisse rapporter qu'il a investi dans l'entreprise. Alors, j'aimerais que le ministre nous donne des garanties à ce sujet-là.

Et puis, pour ce qui est des déficits des budgets en proportion du PIB – parce qu'on parlait de ça tantôt – j'ai devant moi, ici, la liste des plus hauts déficits de l'histoire du Québec. Le champion... C'est préparé par le ministère des Finances du Québec. Alors, on peut lui faire confiance, c'est le même ministère qui prépare les chiffres du ministre. Alors, en 1980-1981, championnat toutes catégories de M. Parizeau, 4,8 % du PIB, le plus haut déficit de l'histoire du Québec; deuxième plus haut, 1984-1985, sous, encore, le Parti québécois, 3,8 %; et le troisième plus élevé de l'histoire du Québec, d'après ce que j'ai devant moi, toujours d'après les chiffres, 3,6 % en 1979-1980, toujours sous Jacques Parizeau. Ça, c'étaient des déficits, à l'époque, qui se comparent avantageusement à ceux que vous avez faits l'année dernière, c'est plus élevé que ceux de l'an dernier. Celui de l'an dernier, avec les chiffres tels qu'ils apparaissent, probablement qu'il se compare au troisième dont on vient de parler ici. Encore que, nous, on refuse la paternité de ce déficit-là. On a été là à peine cinq mois et ce n'est pas nous qui avons précipité le bateau sur les récifs. Alors, là-dessus, on vous laisse la responsabilité de votre 3,7 % ou de votre 3,8 % de l'année dernière.

Maintenant, le ministre nous disait tout à l'heure... Au sujet des entreprises, je voudrais revenir à l'augmentation de la taxe sur la masse salariale, j'ai une question à poser au ministre. Le ministre n'arrête pas de dire depuis le début que, au bout de 18 mois, l'effet est neutre en ce qui concerne la taxe sur la masse salariale. J'aimerais que le ministre nous dise pour qui l'effet est neutre, et, deuxièmement, comment ça se fait que l'effet est neutre. Moi, je ne comprends pas vraiment. J'aimerais que le ministre m'explique ça, parce que, si je comprends bien, la taxe devient une dépense, une dépense qui est déductible de l'impôt fédéral. Mais, à ce que je sache, l'impôt fédéral, ce n'est pas 100 % du revenu, c'est autour de 30 %, là. Alors, comment peut-on dire que l'effet est neutre? Si, moi, j'ai une dépense, disons, de 10 000 $ puis que je déclare ça comme une dépense, bien, je ne paierai pas 10 000 $ de moins à l'impôt là; je vais payer une partie seulement de moins. Alors, je ne vois pas, là. Si la compagnie n'avait pas eu cette dépense-là, est-ce qu'elle serait plus riche ou plus pauvre? Manifestement, elle serait plus riche de 10 000 $. Si elle peut déduire la dépense de 10 000 $, est-ce que ça veut dire, ça, qu'elle va ravoir son 10 000 $? Je ne pense pas. Il y a une partie qui va être soustraite de l'impôt, mais, le reste, ça va être une dépense nette. Alors, j'aimerais que le ministre explique ça, parce que, enfin, pour quelques-uns d'entre nous, là, ce n'est pas très clair, cet effet neutre là, puis peut-être que le ministre aura des explications qui pourront nous convaincre.

Maintenant, je voudrais... le ministre a parlé, tantôt, de la formation professionnelle, et j'aimerais revenir là-dessus un peu. Bon, quand le ministre utilise des chiffres de 57 000 qui sont tombés à 7 000, je comprends que le ministre n'était pas ici dans les années précédentes, dans les années quatre-vingt, mais il faudrait que le ministre fasse un petit peu de vérifications là-dessus. Il va se rendre compte qu'il y a eu une réforme de l'enseignement professionnel dans les années quatre-vingt, où on a aboli le secondaire long, par exemple, où on a aussi fait...

Une voix: Le secondaire court, le secondaire court.

M. Bourbeau: Le secondaire court, oui, je m'excuse, effectivement, c'est ça... et, aussi, où on a fait des changements importants dans l'enseignement. Entre autres, on a fait des changements dans l'éducation des adultes et de la clientèle qui existait à l'époque et qu'on considérait comme étant la clientèle de l'enseignement professionnel. Il y a une bonne partie qui a été récupérée par l'enseignement des adultes, en vertu des changements qui ont été effectués. Il y a eu les changements de structure dans la façon d'enseigner la formation professionnelle, de sorte que bien des gens qui ne connaissent pas vraiment le dossier, qui ont regardé seulement les chiffres tels qu'ils étaient publiés, n'ont pas réalisé qu'une grosse partie de leurs clientèles ont été virées dans d'autres programmes. Moi, ça ne me fait rien, mais, si le ministre veut utiliser ces chiffres-là, quand ses petits-enfants feront une étude, dans quelques années, du dossier, ils se rendront compte que le grand-père, parfois, citait des chiffres qu'il n'avait pas vérifiés.

Maintenant, la question de la formation professionnelle et des pérégrinations que j'aurais pu ou n'aurais pas pu faire à Ottawa. C'est vrai, Mme la Présidente, que le gouvernement précédent, comme le gouvernement actuel, d'ailleurs, avait avancé une politique de main-d'oeuvre qui faisait en sorte de tenter de diminuer autant que possible les chevauchements dans la formation professionnelle, tenter de faire en sorte d'avoir un système qui soit le plus cohérent possible. Le gouvernement du Canada, comme vous le savez, puise de plus en plus dans le fonds d'assurance-chômage pour des fins d'adaptation de la main-d'oeuvre. Ce n'est pas anormal. Ça se fait comme ça dans tous les pays du monde. De plus en plus, on utilise des fonds de ce genre-là pour la formation professionnelle, pour l'adaptation de la main-d'oeuvre. Nous avions débuté avec le gouvernement fédéral des discussions qui n'ont pas eu le temps de se terminer et qui, possiblement, enfin, selon des discussions préliminaires, auraient permis de transférer au Québec des sommes d'argent importantes. Je ne dis pas que le fédéral acceptait toute la proposition du gouvernement du Québec, mais...

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Laporte, il vous reste une minute.

M. Bourbeau: Oui, très bien. Une certaine partie aurait pu être transférée. Malheureusement, le nouveau gouvernement n'a pas donné suite à ça. Et je conclus en disant qu'il y a déjà une taxe sur la formation professionnelle qui est l'assurance-chômage, qui utilise des centaines de millions de dollars pour l'adaptation de la main-d'oeuvre. Et peut-être que le gouvernement aurait plutôt intérêt, plutôt que de taxer davantage les entreprises de 1 %, à s'entendre ou à tenter de s'entendre avec le fédéral pour récupérer une partie de ces fonds-là, qui sont déjà des fonds qui sont utilisés pour la main-d'oeuvre, pour éviter que les Québécois soient taxés deux fois: une fois pour le chômage qui va vers la main-d'oeuvre et une deuxième fois pour la taxe sur la main-d'oeuvre. Alors, ce sont des suggestions que je fais au ministre et qui lui permettraient peut-être d'éviter de taxer nos entreprises à outrance sur la main-d'oeuvre, une fois avec l'assurance-chômage, une deuxième fois avec le 1 % et une troisième fois avec le Fonds des services de santé. Ça m'apparaît être un peu trop, là, sur la masse salariale.

Mme la Présidente, puisque vous m'avez indiqué que mon temps était terminé...

La Présidente (Mme Barbeau): Oui, merci, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: ...je vais passer la parole à quelqu'un d'autre et je reviendrai.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre, pour un maximum de 10 minutes.


M. Jean Campeau

M. Campeau: Merci, madame. Bien, l'ancien ministre des Finances, l'actuel député de Laporte, prévoyait, dans son budget – d'abord, dans les prévisions – de mai 1994, que les revenus autonomes devaient augmenter de 4,6 % alors qu'il prévoyait un taux de croissance du PIB nominal de 3,8 %. Ça démontre une manoeuvre pour camoufler un déficit plus élevé...

M. Bourbeau: Nominal, ah! nominal, O.K.

M. Campeau: ...que les 4 400 000 000 $ qu'il a inscrits dans son budget. Puis, d'ailleurs, le déficit de 4 400 000 000 $, là, je ne sais pas si le député y croyait lui-même. Deux mois avant son budget, il déclarait qu'un déficit de 5 000 000 000 $, c'est un déficit tolérable. Peut-être qu'il a changé d'idée...

M. Bourbeau: L'année précédente.

(17 h 20)

Une voix: Les monnaies remontent, hein?

M. Campeau: Peut-être qu'il a changé d'idée, peut-être qu'un déficit de 5 000 000 000 $, ce n'est plus tolérable, peut-être qu'il a vu l'Ontario qui avait, dès 1993, commencé à diminuer ses dépenses de programmes, peut-être que, là, il s'est dit: Je suis deux ans en retard, mais il a quand même dit: 5 000 000 000 $, acceptable. Je suis sûr qu'aujourd'hui il a changé d'idée parce qu'il trouve même que le nôtre de 3 900 000 000 $ est encore trop élevé. Il n'en reste pas moins que, l'histoire, ça marque. Puis, il y en a qui peuvent donner des cours d'histoire; d'autres peuvent donner des cours de navigation. Alors, je comprends que le député est meilleur dans les cours de navigation, peut-être que c'est un champion de bateau à voile, mais la voile, il faut l'orienter sur le bon bord. Alors, 5 000 000 000 $, il disait ça un an à peine après que son gouvernement eut présenté le document «Vivre selon nos moyens». C'était quand même un document, «Vivre selon nos moyens», qu'il valait la peine de lire. Je ne dis pas qu'on peut être d'accord avec tout ce qu'il y avait là-dedans, mais c'était un document de réflexion.

Alors, qu'est-ce que c'est, là, vis-à-vis de la population, est-ce que c'est un manque de courage, est-ce que c'est un manque de responsabilité? Je ne le sais pas. Lorsqu'on a été élus, nous autres, on a pris l'engagement de redresser la situation financière du gouvernement. C'est ça qu'on veut faire. La population nous a fait confiance pour réparer les désastres laissés par le gouvernement précédent, M. le Président.

Il suffit d'examiner l'évolution récente des finances publiques pour constater l'ampleur des dégâts. Le déficit budgétaire de l'ancien gouvernement, savez-vous combien, M. le Président? 20 000 000 000 $ en quatre ans. Depuis 1991-1992, le déficit dépasse les 4 000 000 000 $. Ce n'est pas rien, hein? En 1994-1995, le déficit a atteint 5 700 000 000 $. En fait, depuis quatre ans, les déficits ont totalisé, comme je le disais tout à l'heure, 20 000 000 000 $, ça, c'est un record: 1991-1992, 4 191 000 000 $; 1992-1993, 4 932 000 000 $; 1993-1994, 4 894 000 000 $; 1994-1995, 5 715 000 000 $. Total de l'ordre de 20 000 000 000 $; pour être plus précis, de 1991-1992 à 1994-1995, 19 732 000 000 $.

L'ancien gouvernement avait perdu complètement le contrôle de la dette. La dette totale du gouvernement est passée – regardons bien les chiffres, parce que le député parle de PIB – de 28,2 % du PIB en 1988-1989 à 44,4 % en 1994-1995. C'est une augmentation de 16,2 %, en pourcentage, en seulement six ans. Ce n'est pas rien, ça. Il faut le faire, ça. Alors, la dette, au 31 mars de l'année financière – parce que, quand même, ça se reflète sur la dette – 1988-1989, où sommes-nous? 39 688 000 000 $, en pourcentage du PIB, 28,2 %; 1989-1990, 42 019 000 000 $, pourcentage du PIB, 28,3 % – ça monte tout le temps, c'est une affaire qui devrait descendre, mais, ça, ça monte; je ne sais pas ce qui arrive – 1990-1991, la dette, 45 864 000 000 $, en pourcentage du PIB, 30 %; 1991-1992, 51 249 000 000 $, 33 %; 1992-1993, où est la dette à la fin de l'année? 58 899 000 000 $, 37,6 %; 1993-1994, 65 643 000 000 $, pourcentage du PIB, 40 %; 1994-1995, 74 471 000 000 $, 44,4 %. Il semble, Mme la Présidente, que, les chiffres, ça ne vous impressionne pas beaucoup. En conséquence, la dette totale s'élève maintenant à 74 500 000 000 $, soit 10 188 $ par habitant.

Or, de 1988 à 1989, on est passés de 39 000 000 000 $ à 74 500 000 000 $. Alors, la dette a augmenté de 34 800 000 000 $ au cours des six dernières années. Ça représente 47 % de la dette actuelle. Ce n'est quand même pas trop mal. Peut-être qu'on n'est pas le champion dans d'autres choses, mais, dans la dette, on semble être le champion. Ça signifie 2 900 000 000 $ de plus en dépenses d'intérêts. Et c'est là qu'est le cancer, Mme la Présidente. 2 900 000 000 $ de plus en dépenses d'intérêts, c'est-à-dire 47 % du service de la dette totale de 6 200 000 000 $ en 1995-1996.

Et la dette, quand on commence à faire le budget, Mme la Présidente, on ne peut pas la descendre. Quand elle est là, c'est un frais qu'on doit monter. C'est tellement vrai que nos dépenses de programmes, cette année, ont été réduites. Mais, quand on tient compte du service de la dette, il arrive que nos dépenses, au total, ne sont pas réduites. Alors, on voit que, la dette, c'est vraiment un cancer. Et qui a créé ce cancer-là? Qui était au pouvoir de 1988-1989 jusqu'en 1994? On le voit. Les chiffres, ça ne ment pas, là. C'est là. Puis ça, quand même qu'on voudrait le couper, on n'est pas capables. La dette, il faut qu'on la respecte. J'en ai là-dessus.

Je voulais, maintenant, vous donner un autre élément de réponse là-dessus. Sur le plan des équilibres des opérations courantes, maintenant. On ne prendra pas toute la dette, juste les opérations courantes. Est-ce que l'opposition peut nous donner une leçon, Mme la Présidente? On vient de dire qu'il y a eu une forte croissance économique dont a bénéficié le gouvernement libéral lors de son premier mandat. Je ne parle pas du dernier mandat, le premier mandat. Est-ce qu'il a pu atteindre l'équilibre des opérations courantes? Bien non. Et, comme le disait le député de l'opposition tout à l'heure, c'est dans les temps de prospérité qu'il faut bien gérer pour être en mesure de mieux gérer la récession. Si on a mal géré la prospérité, bien sûr, la récession, on est bien mal pris, et c'est ça qui est arrivé.

Je vais continuer en vous donnant quelques chiffres. Les neuf années du gouvernement libéral ont été marquées par des déficits très importants des opérations courantes; résultat, le déficit accumulé des opérations courantes totalise 19 200 000 $ entre 1986-1987 et 1994-1995. Ça, c'est le déficit que, nous, nous voulons ramener à zéro. Alors, avant d'espérer équilibrer les opérations courantes sur l'ensemble du cycle économique, il faut franchir la première étape qui consiste à éliminer le déficit actuel. C'est ce que nous réaliserons dès 1997-1998.

Maintenant, Mme la Présidente, j'ai un chiffre... Je sais que peut-être que vous... Mais vous allez finir par aimer ça, les chiffres, madame, comme on va vous les donner. Alors, le gouvernement du Québec... Je voudrais vous donner le solde des opérations courantes, là, ce qu'on veut réduire, les dépenses qu'on fait pour l'épicerie, alors que, pour les dépenses qu'on peut dire d'investissement, on pourrait peut-être se permettre d'emprunter, quoique ce serait mieux de ne pas avoir de déficit du tout. Alors, je vous donne, depuis 1976 – on voulait parler du Parti québécois au pouvoir, parlons-en – je vais vous donner les déficits des opérations courantes en millions de dollars chaque année, et, après ça, Mme la Présidente, je vais vous donner le total du temps où était le Parti québécois et le total, après ça, où est le Parti libéral. Et, là, vous pourrez juger. Il me reste juste une minute?

La Présidente (Mme Barbeau): Il vous reste une minute, monsieur.

M. Campeau: Madame, c'est tellement des chiffres importants que, même si vous ne me donnez pas la permission de continuer, je vais y revenir plus tard, parce que je voudrais que vous les compreniez.

La Présidente (Mme Barbeau): Ha, ha, ha!

M. Campeau: Et je suis convaincu qu'une fois que vous allez avoir compris ces chiffres-là, là, ça va vous éclairer sur bien des choses.

La Présidente (Mme Barbeau): Vous êtes bien gentil, M. le ministre.

M. Campeau: Alors, est-ce que j'ai encore 30 secondes, là?

La Présidente (Mme Barbeau): Bien, là, c'est fini, je pense, hein? O.K., 30 secondes.

M. Campeau: 30 secondes. En 1976-1977, quel était le déficit sous le Parti québécois? 323 600 000 $; 1977-1978, 180 900 000 $; 1978-1979, 551 300 000 $; 1979-1980, 1 422 000 000 $; 1980-1981, le député en a parlé tout à l'heure, 2 529 000 000 $; 1981-1982, 1 616 000 000 $; 1982-1983, 1 319 000 000 $. Et, là, je vais aller vite, là, vous me donnez 15 secondes...

La Présidente (Mme Barbeau): Il ne veut plus arrêter.

M. Campeau: Le sous-total là-dessus, là, pour le Parti québécois, 13 126 900 000 $. Et le sous-total de 1986-1987 à 1994-1995, savez-vous combien, sous le gouvernement du Parti libéral? On a fait, nous autres, 13 126 000 000 $; eux, 19 239 000 000 $.

Une voix: Mais qu'est-ce que vous voulez, ce n'est pas les mêmes valeurs...

M. Campeau: Un gouvernement qui se pique d'être...

M. Gautrin: Ce n'est pas les mêmes monnaies, s'il vous plaît, là.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre.

M. Campeau: Non, non, ils ont pris la monnaie américaine. Tu sais, un gouvernement qui se pique...

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre.

M. Campeau: ...d'avoir fait de l'entreprise privée...

Une voix: Ça, c'est...

M. Campeau: ...et d'être des gens d'affaires.

Une voix: Ça, c'est démagogue, là.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre.

M. Campeau: Je vous en prie, madame.

La Présidente (Mme Barbeau): Maintenant...

M. Gautrin: D'habitude, vous avez de meilleurs sentiments que ça. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Barbeau): Maintenant, nous allons passer à la deuxième partie du débat. J'aimerais juste rappeler la façon dont ça fonctionne, les règles. Les membres de la commission ont un temps de parole de 10 minutes, réparti en une ou plusieurs interventions qui peuvent prendre la forme de questions au ministre ou de commentaires. Le ministre disposera d'un temps de parole de 10 minutes après chacune des interventions, et je respecterai l'alternance. Et le porte-parole officiel a 10 minutes, pour commencer.

M. Bourbeau: Si on pose une question, là, est-ce que ça veut dire que le ministre peut prendre 10 minutes à chaque question?

La Présidente (Mme Barbeau): Oui, mais...

M. Bourbeau: Bien, à ce moment...

La Présidente (Mme Barbeau): ...vous ne perdez pas votre temps.

M. Bourbeau: À ce moment...

La Présidente (Mme Barbeau): Je veux dire, votre temps dans...

M. Bourbeau: À ce moment...

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Barbeau): ...ce n'est pas ça que je veux dire, là. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: À ce moment-là, je vais lui poser six questions et il va prendre une heure.

La Présidente (Mme Barbeau): C'est...

M. Gautrin: Non, non, il va prendre 10 minutes.

M. Bourbeau: Bien, je ne comprends pas, là.

La Présidente (Mme Barbeau): Attends une seconde, là, je vais vérifier.

M. Bourbeau: Si c'est des questions, ça ne peut pas...

Une voix: ...

M. Bourbeau: Une question qui va prendre trois secondes...

Une voix: Non, on fait comme d'habitude. Vous parlez deux minutes...

M. Bourbeau: Non, non, non, mais, si on...

La Présidente (Mme Barbeau): Juste une seconde, s'il vous plaît. Je vérifie ça.

M. Bourbeau: Est-ce qu'on peut suspendre une seconde, parce qu'on peut...

La Présidente (Mme Barbeau): Une seconde. Je suspends...

M. Bourbeau: Oui.

La Présidente (Mme Barbeau): ...pour une minute.

(Suspension de la séance à 17 h 30)

(Reprise à 17 h 31)

La Présidente (Mme Barbeau): Vous avez bien compris. Alors, M. le député de Laporte.


Discussion générale


Déficit budgétaire

M. Bourbeau: Oui, une remarque. Je pense que la meilleure façon de voir – parce qu'on peut parler du passé longtemps, il faudrait peut-être parler du présent aussi – quels gouvernements ont le mieux visé la cible dans les prévisions, ce dont le ministre parlait tantôt, qu'on s'est trompés beaucoup, nous, puis que le PQ ne se serait pas trompé beaucoup... J'ai ici un tableau qui donne le budget de chacune des années depuis 1976-1977 et puis le réel, donc budget de revenus – ce qui a été budgété – puis le réel, puis la dépense budgétée puis la dépense réelle, et l'écart, à chacune des années, dans le budget, pour les revenus et l'écart pour les dépenses.

On remarque que, l'an dernier, le budget qu'on vient de faire, là, on avait prévu un déficit de 4 425 000 000 $ et ça a fini à 5 715 000 000 $. Alors, vous avez fini à 5 715 000 000 $, ce qui fait un écart de 1 290 000 000 $. Donc, l'écart par rapport au budget, c'était 29 %, l'an dernier, et le ministre, évidemment, a dit qu'on s'est beaucoup trompés. L'année précédente, l'écart avait été de 18 % et l'année précédente, 30 %; ça a été les trois pires années, je pense, les dernières, là, la récession.

Retournons à une époque semblable dans le temps du Parti québécois. On n'était pas en récession en 1978-1979, mais l'écart était de 43,7 %. Là, c'est des chiffres absolus parce que mon collègue avait raison de dire que, quand on parle de milliards, des milliards de 1975, c'était pas mal plus élevé que... Quand on parle de 1 000 000 000 $ en 1975, c'est un gros chiffre par rapport à 15 ans plus tard. Alors, en 1978-1979, l'écart du réel par rapport au budget était de 43,7 %; le Parti québécois s'était trompé. L'année suivante, 1979-1980, 62 %, l'écart. Aïe, il faut le faire, on s'était trompés de 62 %, on avait budgété une différence de 1 450 000 000 $, et l'écart réel a été de 2 349 000 000 $. En 1980-1981, un écart de 50 %, O.K.? Alors, vous avez trois années, là, 43 %, 62 %, 50 %, les trois pires, à rapprocher aux trois dernières, 30 %, 18 %, 29 %.

Alors, je pense que, vraiment, là, au lieu de blâmer l'ancien gouvernement pour avoir mal fait des prévisions en temps de récession, il faudrait peut-être regarder les écarts du temps du Parti québécois en temps de prospérité. Parce que ce n'était pas la récession, en 1978; la récession a frappé en 1982, comme on sait.

Mais j'aurais une question à poser au ministre des Finances, si je peux attirer son attention, Mme la Présidente, là, j'aurais une question à poser au ministre des Finances. M. le ministre des Finances, est-ce que je peux vous poser une question?

M. Campeau: Bien oui.

M. Bourbeau: Bon. Dans le budget 1995-1996, dans les transferts du gouvernement du Canada, bon, il y a la péréquation, il y a le programme de bien-être en transferts liés aux accords fiscaux puis il y a Autres programmes. Dans la rubrique Autres programmes, on a 333 000 000 $ de prévus et, justement, on entendait dire, hier, aux nouvelles, que votre collègue, la ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, est allée à Ottawa avec une facture de 333 000 000 $. Alors, cette question est très simple, est-ce que c'est le même 333 000 000 $ dont on a parlé dans les journaux hier?

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: Avant ça, je voudrais d'abord qu'on revienne sur certains chiffres, quitte à parler du 333 000 000 $ plus tard. Revenons sur le déficit budgétaire, sur les chiffres que le député a mentionnés, sur les pourcentages. S'il veut jouer avec les pourcentages, parfait. Alors, on va prendre les comptes publics qui est ce qui arrive vraiment d'officiel, comptes publics sur le discours du budget.

Alors, en 1976-1977, discours du budget, on avait prévu un déficit de 630 000 000 $; on est arrivés à 991 000 000 $; l'écart est donc de 361 000 000 $; ça faisait 57,3 % par rapport au déficit. En 1977-1978, discours du budget, 640 000 000 $; comptes publics, 760 000 000 $; 120 000 000 $; 18 %. Alors, 1978-1979, 42 %, par la suite 25 % deux fois. Et, par la suite, en 1981-1982, discours sur le budget, 2 970 000 000 $; comptes publics, 2 888 000 000 $; on a donc une amélioration de 82 000 000 $ du déficit; soit un pourcentage de moins 2,8 %. Pas vu souvent, ça. En 1982-1983, 2 985 000 000 $; comptes publics, 3 049 000 000 $; un écart de 64 000 000 $; donc, en pourcentage, un écart de 2 %. L'année qui suit, en 1983-1984, on prévoit 3 185 000 000 $; on arrive à 3 113 000 000 $; déficit de 72 000 000 $, un écart de moins 2,3 %. En 1984-1985, 3 175 000 000 $; comptes publics, 3 232 000 000 $; 57 000 000 $; plus 1,8 %. Bon. En 1985-1986, c'est vous autres, ça? Bon, 3 095 000 000 $ de prévus; comptes publics, 3 141 000 000 $; un écart, donc, de 1,5 % positif. Pas si mal, le Parti libéral, pour une fois. En 1986-1987, 2 895 000 000 $; comptes publics, 2 809 000 000 $; vous êtes même à moins 2,6 %. Je ne sais pas ce qui était arrivé. Je ne sais pas si la chance vous était tombée dessus. En 1987-1988, 2 400 000 000 $; 2 373 000 000 $; moins 1,1 %. Deux années de file, c'est quand même remarquable.

M. Bourbeau: ...découvrir qu'il y a eu une bonne administration avant lui. Bon.

M. Campeau: C'est quand même remarquable, hein?

M. Bourbeau: Oui.

M. Campeau: En 1988-1989, 1 600 000 000 $; 1 613 000 000 $; 0,8 %. 1990-1991, wow! là, il semble qu'il y a eu comme un essoufflement. Je ne sais pas si c'est parce qu'il aurait fallu que le gouvernement soit battu. Changement de ministre? Non, c'était le même. Mais peut-être que ça a changé au Conseil du trésor. Le Conseil du trésor, quand même, ça a une influence sur le budget. En 1990-1991, qu'est-ce qui est arrivé? Un discours sur le budget qui prévoit 1 750 000 000 $. Le vrai déficit? 2 825 000 000 $. L'écart? 1 075 000 000 $. En pourcentage? 61,4 %. Le plus haut dans l'histoire. Le plus haut dans l'histoire.

M. Bourbeau: ...

M. Campeau: Bien, non, mais je le sais bien. Moi, je prends les chiffres officiels; vous, vous prenez vos chiffres à vous. Je crois bien. On n'a peut-être pas la même machine non plus.

En 1991-1992, 3 480 000 000 $ de prévus; comptes publics, 4 191 000 000 $; 711 000 000 $; erreur? 20,4 % en pourcentage. En 1992-1993, je pense qu'on arriverait aux mêmes chiffres, éventuellement, là: l'écart, 1 142 000 000 $; 30 % d'erreur. En 1993-1994, 749 000 000 $; 18 %. Et, cette année, 1 290 000 000 $; 29 %.

Alors, moi, j'ai les chiffres officiels du discours du budget... J'ai les chiffres des comptes publics. Ils ne peuvent pas être plus officiels, là, les comptes publics, en tout cas, ce qu'on fait...

À ceci, je voudrais ajouter le budget présenté l'an dernier. À un moment donné, il faut en parler, parce que, après ça, on va en parler un peu moins. Alors, l'an dernier, le gouvernement libéral, regardez comment il était irresponsable et carrément électoraliste. Quand vous autres, vous dites: Budget référendaire; regardez le budget de l'année passée: électoraliste, c'est fantastique. Quand c'était le temps de couper, l'Ontario coupait. Vous autres, qu'est-ce que vous faites? Vous donnez un cadeau, en fait d'impôts, et puis vous augmentez vos dépenses. Ça s'explique parce que le déficit a été révisé à 5 700 000 000 $. C'est ça, l'explication. C'est 1 300 000 000 $ de plus que prévu, là. Et il est bon de rappeler que le gouvernement libéral, comme je le disais, a accordé des cadeaux coûteux aux contribuables lors du budget de mai 1994. Peut-être que vous ne les avez pas vus passer, vous ne vous en souvenez pas, ou c'est le président du Conseil du trésor qui les a décidés. Bien, pourtant, il n'en avait pas les moyens. Réductions d'impôts et de taxes, 700 000 000 $.

Il faut se rappeler également que le gouvernement libéral a abandonné le contrôle des dépenses. Ça, on l'a vu, là. En effet, la croissance des dépenses est largement supérieure au taux d'inflation. Est-ce qu'on est d'accord? Notre croissance des dépenses ne devrait pas dépasser le taux d'inflation.

En plus, les faits démontrent que l'ancien gouvernement a erré dans ses prévisions au cours des dernières années. Je viens de le dire, je ne voudrais pas le répéter, mais, dans le dernier budget, là, l'ancien gouvernement, il s'est surpassé. Mais on veut savoir quelles sont les raisons de la hausse du déficit à 5 700 000 000 $, là? Vous, c'est ça qui vous intéresse surtout, parce que c'était votre premier budget. Alors, dans le document publié le 8 décembre dernier, moi, j'ai indiqué les facteurs qui expliquent la révision du déficit à 5 700 000 000 $.

(17 h 40)

Alors, non seulement l'ancien gouvernement avait erré dans ses prévisions, mais il avait inscrit, dans ses revenus prévus au dernier budget, des montants qui ne correspondaient qu'à des intentions. Et ça, on le répète, là, mais c'est dans notre document du 8 décembre dernier.

Il y en avait pour 648 000 000 $, d'intentions. Au moins, si c'étaient des bonnes intentions, ça serait peut-être louable. Il y avait 126 000 000 $ à l'égard du plan visant à accroître les activités de vérification puis de perception du ministère du Revenu, 126 000 000 $, Mme la Présidente. Il y avait la non-réalisation de l'implantation du réseau des loteries vidéo. On avait fait un estimé de 74 000 000 $ pour les loteries vidéo puis elles n'étaient pas implantées.

Les privatisations de sociétés d'État – oui, chose intéressante à parler – n'avaient pas été réalisées ni même amorcées. Lorsque le changement de gouvernement a eu lieu, c'est un manque à gagner de 166 000 000 $. Je sais que c'est un sujet favori du député de parler des privatisations de sociétés d'État, mais, avant de faire une privatisation – maintenant, il le sait, je suis sûr qu'il va être d'accord avec moi – ça prend du temps puis il faut prévoir, préparer nos documents et, quand le marché est bon ou quand les circonstances sont bonnes, bien, il faut faire la transaction. Il ne faut jamais que ce soit une transaction faite d'une façon urgente, parce qu'il y a une échéance qui approche, que ce soit parce que les élections sont prochaines... Il ne faut jamais faire ce genre de transactions là, il faut être en mesure de cacher son jeu avec l'acheteur et de ne pas lui dire si on est pressé de vendre ou pas. Il faut une certaine indépendance vis-à-vis de la personne avec qui on transige, et cette indépendance-là, dans le temps, il faut aussi que nos partenaires, que nos associés la partagent. Il ne faut pas que des fonctionnaires qui font leurs transactions se sentent bouleversés et obligés de faire la transaction rapidement. Il faut qu'on leur donne les coudées franches et qu'ils puissent monter un bon dossier et, de l'autre côté, l'acheteur donc, voyant que le vendeur n'est pas pressé de vendre, bien, il doit aiguiser son crayon un petit peu plus et peut-être donner un meilleur prix.

Puis il y a des temps pour vendre aussi. Quand l'économie est bonne, c'est le temps de vendre; quand l'économie n'est pas bonne, c'est le temps d'acheter. Généralement, les prix sont plus bas. Il en va de même dans le domaine immobilier, dans les maisons. Si on veut s'acheter une maison, c'est mieux de l'acheter en temps de récession où il y a moins de demandes, alors, si on est en pleine...

M. Gautrin: Les taux d'intérêt sont plus élevés.

M. Campeau: Oui, mais ils vont être plus élevés peut-être pour un an. Alors, peut-être, à ce moment-là, qu'il faut financer juste pour un an puis attendre que, vraiment, ça ait repris. Et, quand les taux d'intérêt ont baissé, on gèle pour cinq ans ou plus. D'ailleurs, au député de Verdun... Je suis sûr qu'il a dit ça juste pour m'agacer, parce qu'il connaît tous ces détails-là.

J'ajoute aussi 282 000 000 $ qui ont été inscrits dans les revenus au titre de programmes de stabilisation à l'égard de l'année 1991-1992. Or, le 29 novembre dernier, le ministre fédéral des Finances a annoncé que le Québec n'était pas admissible à recevoir ce montant. Là, je trouve que le député de Laporte, qui a des...

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre, il reste une minute.

M. Campeau: ...relations particulières, en tout cas, d'amitié ou d'échange de bon aloi avec le ministre des Finances, s'il avait été si ami que ça avec lui, le ministre des Finances d'Ottawa, il l'aurait avisé qu'il ne l'aurait pas, l'argent, puis il ne l'aurait pas mis dans ses chiffres. Puis, quant au chiffre de 333 000 000 $ qui apparaît aux prévisions des autres... Pour 1995-1996, bien, c'est une coïncidence que le sous-ministre me dit. Moi, je pensais bien que c'était le bon chiffre, je me disais: Pour une fois, le député de Laporte va être arrivé pile sur le bon chiffre. Mais je vois que c'est un hasard. Alors, si j'étais pour donner des compliments, je les retire. Alors, le Vérificateur général du Canada étudie présentement la réclamation du Québec, une réclamation de 379 000 000 $...


Transferts fédéraux

M. Bourbeau: Les autres programmes, 333 000 000 $, c'est quoi exactement?

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre, je dois passer la parole à M. le député de...

M. Bourbeau: Non, non, mais je demande au ministre... Il n'a pas répondu. C'est quoi, le 333 000 000 $, 1995-1996? On va le laisser répondre à la question là.

La Présidente (Mme Barbeau): O.K.

M. Campeau: Ce sont des programmes à frais partagés qu'on dit normaux. Alors, je continue: 119 000 000 $ pour l'enseignement aux enfants autochtones, ça... C'est de ça que notre collègue a parlé hier.

M. Bourbeau: ...333 000 000 $, ça?

M. Campeau: Non. Ça, c'est des vieilles factures que le Québec réclame depuis fort longtemps, qui s'accumulent d'année en année.

M. Bourbeau: Mais c'est où dans le budget, ça?

M. Campeau: Il y a aussi... Le gouvernement fédéral a refusé de verser une compensation au Québec pour sa demande à l'égard de 1991-1992, on l'a dit.

M. Bourbeau: La facture de Mme Beaudoin, elle est où dans le budget?

M. Campeau: Il a aussi refusé de soumettre cette décision à l'arbitrage. Alors, tout ce qu'il va nous rester à faire, c'est analyser les options qui s'offrent à nous pour faire valoir la position du Québec.

M. Bourbeau: Mais ces sommes-là, elles sont où dans le budget? À quel poste sont-elles?

M. Campeau: Elles étaient inscrites aux revenus dans les années précédentes par l'ancien gouvernement.

M. Bourbeau: Ces sommes-là?

M. Campeau: Oui, puis elles n'ont pas été rayées.

M. Bourbeau: Mais, alors, elles ont été reprises où dans le budget de cette année?

M. Campeau: Elles n'ont pas besoin d'être là. On ne les ajoute pas à ça.

M. Gautrin: Donc, ça diminuerait le déficit accumulé.

M. Bourbeau: On va laisser le ministre répondre à la question, là, s'il peut donner des précisions un peu, là.

M. Campeau: Bien, je pense que je vous ai répondu, là, M. le député.

M. Bourbeau: Bien, j'aimerais savoir, là, dans le 333 000 000 $, si ce n'est pas la facture, le même chiffre, c'est quoi, exactement, ces sommes-là?

M. Campeau: On devrait plutôt, Mme la Présidente, parler des coupures dans les transferts fédéraux. Ça éclairerait peut-être plus, là.

M. Bourbeau: Bien non, mais, écoutez, là. Il y a une question de posée, le ministre peut-il répondre à la question?

M. Campeau: C'est M. Martin. Il a écrit dans son discours du budget... Ça serait peut être beaucoup plus important de regarder les coupures que le fédéral nous donne, là, en les mettant d'une façon très claire. Alors, il est bien écrit, dans le discours du budget, aux pages 21 et 22, que les transferts fédéraux vont être coupés de 2 500 000 000 $ en 1996-1997, puis de 4 500 000 000 $ en 1997-1998.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, je m'excuse, là. J'ai donné du temps supplémentaire au ministre, là, tantôt. Il avait fini son 10 minutes. Je lui ai donné du temps supplémentaire pour répondre à une question, mais le ministre...

M. Campeau: Bien, est-ce que je peux répondre?

La Présidente (Mme Barbeau): Bien, écoutez, M. le député de Laporte. M. le ministre a dit que, lui, il considérait – il a dit ça tout à l'heure – qu'il avait répondu. Alors, je vous repasse votre parole et je vais le calculer dans le temps.

M. Bourbeau: Bien, là, mais, écoutez, le ministre des Finances ne veut pas répondre aux questions. On va sacrer notre camp, nous autres, puis vous allez rester tout seuls. Si le ministre ne veut pas se prêter à répondre à des questions de son budget, bien, à ce moment-là, on perd notre temps ici. Alors, si le ministre veut être sérieux un peu, là, il y a des chiffres qui sont dans son budget. On lui demande des questions précises. Le 333 000 000 $ pour 1995-1996, Autres programmes, c'est quoi? Ça comprend quoi exactement? Si le ministre, il faut qu'il le demande, bien on va attendre.

La Présidente (Mme Barbeau): Est-ce que, M. le ministre, vous avez un complément de réponse? Ou...

M. Campeau: Un complément de réponse sur les transferts fédéraux. Je pense qu'il est approprié de donner des explications sur les transferts fédéraux, sur les coupures des transferts fédéraux, qui viennent expliquer beaucoup de choses et qui viennent beaucoup mieux renseigner sur tout le budget.

M. Bourbeau: Bien oui, mais ça ne peut pas être un transfert fédéral. Ce n'est pas une coupure; c'est un montant, 333 000 000 $. C'est quoi, le montant? Et, même s'il y a eu des coupures, il reste 333 000 000 $. C'est quoi, le montant de 333 000 000 $? Ça devient très, très suspect le fait que le ministre ne puisse pas répondre à cette question-là. Il me semble que ce n'est pas compliqué: 333 000 000 $ puis c'est Autres programmes, c'est quels programmes?

M. Campeau: Bon. Moi, je pense, madame, qu'on peut parler des coupures dans les transferts fédéraux. On pourra revenir sur le 333 000 000 $, là, ou quelques chiffres un peu plus tard. Je vais faire le relevé au complet. Peut-être que ce sera mieux comme ça.

La Présidente (Mme Barbeau): Bon. Je crois comprendre que le ministre veut aller chercher l'information. Alors, vous continuez votre...

M. Bourbeau: Bon. Très bien. Non, ça me satisfait. Si le ministre veut revenir plus tard, moi, je ne veux pas insister pour tout de suite. Je comprends qu'il n'a pas le chiffre sous la main présentement, là. C'est des choses qui se comprennent.


Revenus provenant des entreprises du gouvernement

Je voudrais revenir à un autre poste. Dans les revenus provenant des entreprises du gouvernement, il y a la Société des alcools, Loto-Québec, Hydro-Québec, puis il y a Autres. Dans les autres, là, il y a une somme de 509 000 000 $. Est-ce que le ministre pourrait nous dire en gros c'est quoi, ces sommes-là, qui sont prévues, de 509 000 000 $, les autres?

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce qu'on est repartis, Mme la Présidente, sur un autre 10 minutes ou quoi?

La Présidente (Mme Barbeau): Pardon?

M. Bertrand (Charlevoix): Est-ce qu'on est sur un autre 10 minutes ou quoi? Je veux juste savoir où on est dans le temps, là.

La Présidente (Mme Barbeau): C'est-à-dire que M. le député de Laporte a encore du temps dans son 10 minutes.

M. Bertrand (Charlevoix): O.K.

La Présidente (Mme Barbeau): Aussitôt qu'il va avoir terminé, je vais passer en alternance.

M. Bertrand (Charlevoix): Non, non. En autant qu'on...

La Présidente (Mme Barbeau): Non, inquiétez-vous pas. Tout est chronométré. Ha, ha, ha!

M. Bertrand (Charlevoix): C'est beau.

(17 h 50)

Des voix: Ha, ha, ha!

(Consultation)

M. Campeau: Alors, je comprends, Mme la Présidente, que c'est mon droit de 10 minutes qui me revient. Alors, je veux bien l'utiliser.

La Présidente (Mme Barbeau): Oui, M. le ministre.

M. Campeau: Alors, revenons aux transferts.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Mme la Présidente, voyons donc!

M. Campeau: Bien, elle me donne mon 10 minutes.

M. Bourbeau: Question de règlement, Mme la Présidente. Je regrette, là, mais on a posé une question au ministre, on lui a...

M. Campeau: Mais on me dit que j'ai mon 10 minutes...

M. Bourbeau: Le ministre...

M. Campeau: ...alors, je le reprends.

M. Bourbeau: ...peut-il être sérieux un instant? On lui a laissé deux, trois minutes de silence...

M. Campeau: Mme la Présidente, est-ce que c'est lui qui a la parole...

M. Bourbeau: ...nous, on a respecté...

M. Campeau: ...ou si c'est moi?

M. Bourbeau: Mme la Présidente, j'ai demandé...

La Présidente (Mme Barbeau): Il a soulevé une question de règlement. On va regarder si c'est...

M. Bourbeau: Mme la Présidente, là.

M. Campeau: Ça va.

M. Bourbeau: On a posé une question au ministre et, pendant deux minutes, nous, on a respecté le silence du ministre qui, manifestement, était en train de consulter ses fonctionnaires. Si le ministre n'a pas le chiffre, qu'il nous le dise, on comprend ça, on reviendra, on va attendre qu'il nous donne le chiffre ce soir ou demain matin. Je ne demande pas d'avoir sur le bout des doigts, là, tous les chiffres. Mais, si le ministre refuse de répondre, qu'il nous le dise. Si le ministre refuse de répondre à des questions de l'opposition sur des chiffres précis de son budget, qu'il le dise. Là, on saura à quoi s'en tenir. Mais je veux que le ministre réponde. Parce que, nous, on ne se prêtera pas à un jeu, ici, là, où, le ministre, on va poser des questions, puis il va répondre des choses qui n'ont absolument aucune espèce de relation avec ce qu'on pose. Si le ministre veut faire une étude de son budget sérieuse, on va la faire, sinon, il va la faire tout seul.

La Présidente (Mme Barbeau): Un instant...

M. Bourbeau: Puis il en portera les conséquences, à part ça, devant la population.

La Présidente (Mme Barbeau): On me dit qu'en vertu de l'article 82 le refus de répondre du ministre ne peut être discuté. Je demande quand même...

M. Bourbeau: Mais ça permet quand même à l'opposition de ne pas participer à une mascarade, quand même.

La Présidente (Mme Barbeau): Ce n'est pas écrit, «mascarade», là-dedans. Je vais vérifier ça, mais...

M. Lachance: L'interprétation du député de Laporte, Mme la Présidente, je pense, là, que le ton du débat, ici, devrait être beaucoup plus «relax». Je pense que vous avez un travail à faire...

La Présidente (Mme Barbeau): Mais, M. le député de Bellechasse...

M. Lachance: Oui, vous avez un travail à faire.

La Présidente (Mme Barbeau): ...c'est moi qui préside.

M. Lachance: Bien, c'est du même ordre, question de règlement.

La Présidente (Mme Barbeau): Moi, je vais essayer de démêler ça, là.

(Consultation)

La Présidente (Mme Barbeau): C'est sûr que, si un député trouve que la réponse ne lui convient pas, c'est au jugement de chacun, là. On appelle à la collaboration de tout le monde.

M. Bourbeau: Sur ma question de règlement, j'aimerais citer le règlement...

La Présidente (Mme Barbeau): Lequel? Allez-y.

M. Bourbeau: L'article 82, le refus de répondre.

La Présidente (Mme Barbeau): Oui.

M. Bourbeau: «Le ministre auquel une question est posée peut refuser d'y répondre, notamment:

«1° s'il juge contraire à l'intérêt public de fournir des renseignements demandés – que le ministre nous le dise, s'il trouve que c'est contraire à l'intérêt public, qu'il le dise;

«2° si les renseignements ne peuvent être colligés qu'à la suite d'un travail considérable que leur utilité ne justifie pas – le ministre peut peut-être invoquer ça aussi, il devrait évidemment justifier sa réponse.

«Il doit refuser d'y répondre si sa réponse aurait pour effet de contrevenir aux paragraphes 2° et 3° de l'article 35.»

Alors, si le ministre veut nous dire que ça va contre l'intérêt public de répondre, qu'il le dise ou que c'est un travail considérable que l'utilité ne justifie pas. Mais ça va être assez difficile de faire croire au monde que c'est un travail considérable de nous dire ce qu'il y a dans le 509 000 000 $, avec tout l'appareil, les fonctionnaires qui l'accompagnent. Puis, l'intérêt public, on ne comprend pas comment l'intérêt public pourrait justifier de répondre à une question comme celle-là.

M. Campeau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Barbeau): Un instant, s'il vous plaît.

(Consultation)

La Présidente (Mme Barbeau): Alors, on me dit que, selon l'article 81: «Aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante.» Alors, j'en appelle à la collaboration de tous les membres, s'il vous plaît. Je demande la collaboration, des deux côtés, de tous les membres pour essayer d'apporter le plus d'information...

M. Gautrin: Mme la Présidente, sur une question de règlement, je ne voudrais surtout pas que... Mais c'était la tradition, dans cette commission, qu'on ne s'enfarge pas dans les questions de règlement. Mais la base même derrière, c'est que le ministre devait répondre aux questions. Je comprends qu'on n'a pas à contester si la réponse est bien ou pas. Mais, quand même, il y a un minimum de bon sens qui est la pertinence du débat. Et le ministre comprend bien en général. Si on pose une question sur quelle est la dépense qui correspond au 509 000 000 $, j'imagine que c'est...

Évidemment, il y a des ministres qui le font, et, moi, je l'ai vécu parfois avec le ministre de l'Éducation, d'avoir des réponses qui soient un peu bizarres, mais le ministre des Finances nous avait habitués à beaucoup plus, je dirais, de concision et de précision dans ses réponses. Comprenez bien, on n'est pas ici pour gagner du temps ou perdre du temps, on est vraiment ici pour mieux comprendre le budget. Évidemment, vous pouvez prendre, à chaque fois, vos 10 minutes pour raconter n'importe quoi, mais, d'habitude, ce n'est pas ce que vous faites...

M. Bertrand (Charlevoix): C'est ça que vous avez fait durant neuf ans de temps. Tout à coup, là, c'est juste...

M. Gautrin: Non, non, un instant, un instant, là.

La Présidente (Mme Barbeau): Pardon, je m'excuse, mais ce n'est pas un échange ici, là.

M. Gautrin: Moi, je dis là-dessus... Et je suis en train de m'exprimer là-dessus, sur cette question-là.

La Présidente (Mme Barbeau): Expliquez votre question de règlement, je vous écoute en même temps que...

M. Bertrand (Charlevoix): Non, mais ce n'est pas à sens unique, ça, cette affaire-là.

La Présidente (Mme Barbeau): Non, non, mais il a posé une question.

M. Gautrin: Non, non, mais je suis d'accord avec vous là-dessus.

La Présidente (Mme Barbeau): Je le laisse parler une minute, là, pour qu'il s'explique. Mais, moi, je vérifie, en même temps, les règlements.

M. Gautrin: Bon, vous m'écoutez ou vous regardez...

La Présidente (Mme Barbeau): Je vous écoute en même temps, inquiétez-vous pas. Je suis capable de faire bien des affaires.

M. Gautrin: En général, une personne écoute...

M. Bertrand (Charlevoix): De toute façon, vous avez une oreille mutuelle très attentive.

M. Gautrin: Non, excusez, après, vous suspendrez pour regarder. Ce que j'essaie de dire là-dedans, c'est le concept qui est derrière le concept de question. Autrement dit, on est dans un échange où les parlementaires membres de la commission, que ce soient les parlementaires gouvernementaux ou que ce soient les parlementaires de l'opposition, questionnent le ministre. Je comprends qu'on n'a pas, à l'heure actuelle, à juger si la question est pertinente ou pas. Ce n'est pas ça que j'essaie de dire sur l'article 82. Mais, au minimum, qu'après chaque question il y ait un effort, par le principe de la pertinence. Et ça, c'est de relier la réponse, au minimum, à la question. C'est ça le but auquel je voudrais qu'on arrive, et, à chaque fois, on pourrait revenir sur l'article, sur le 257, de la pertinence.

La Présidente (Mme Barbeau): Bon, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sujet? Bon, je vais rappeler qu'il y a toujours la règle de la pertinence, et je demande la collaboration de tous les membres de cette Assemblée pour qu'on puisse poursuivre nos travaux.

Et, si, bon...

M. Bourbeau: Mme la Présidente, si mes questions sont impertinentes, vous me le direz, je les retirerai.

La Présidente (Mme Barbeau): Si M. le ministre veut bien essayer de répondre aux interrogations de l'opposition officielle et de tous les membres de cette commission. Merci. Alors...

M. Campeau: Est-ce que c'est votre verdict, Mme la Présidente?

M. Lachance: Bien, Mme la Présidente, moi...

La Présidente (Mme Barbeau): Vous avez une question de règlement?

M. Lachance: Bien, Mme la Présidente, compte tenu de l'heure, je vous suggérerais qu'on reporte nos travaux à demain matin, 10 heures.

La Présidente (Mme Barbeau): Bien, alors, s'il y a consentement, j'ajourne les travaux de la commission à jeudi, le 18, à 10 heures. Merci.

(Fin de la séance à 17 h 58)


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