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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le mardi 23 mai 1995 - Vol. 34 N° 23

Poursuite du débat sur le discours sur le budget


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Table des matières

Journal des débats


(Dix heures six minutes)

La Présidente (Mme Barbeau): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration est réunie afin de poursuivre le débat sur le discours du budget. Alors, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Aucun remplacement.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci. À la fin des travaux, jeudi, il restait 2 h 9 min à faire au débat. Le député de Verdun avait huit minutes mais, comme il n'est pas présent, je dois passer au prochain intervenant. M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Il peut avoir de bonnes raisons de ne pas être présent.

La Présidente (Mme Barbeau): Oui, c'est vrai.


Discussion générale (suite)


Proposition de simplification du régime fiscal

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, récemment, j'ai pris connaissance d'un document qui m'est apparu extrêmement intéressant et j'aimerais avoir quelques commentaires du ministre sur ce document, un document qui origine de l'économiste Pierre Fortin. M. Fortin, comme vous le savez, est un économiste – comme disait Claude Piché dans La Presse du mardi 2 mai 1995 – québécois parmi les plus crédibles et les plus respectés. Il disait également que sa réputation déborde largement les frontières du Québec. Et je vais continuer à le citer: «Ses nombreuses interventions publiques, depuis 20 ans, ont toujours été marquées par une rigueur impeccable et un gros bon sens incontournable.» Et M. Piché d'ajouter: «C'est sans doute pour ces raisons que les membres de l'Association des économistes du Québec, qui regroupe aussi bien des militants syndicaux que des penseurs néo-libéraux, l'ont désigné le mois dernier comme le chercheur qui a le plus contribué à l'avancement des idées économiques au Québec.»

M. Fortin a produit un document qui pose un diagnostic assez implacable. Il dit: «Non seulement notre régime fiscal est-il injuste, complexe et coûteux, encore est-il nuisible sur le plan économique.» Et M. Piché d'ajouter: «Il n'y aura pas grand monde pour contester cela.» L'idée qu'amène M. Fortin, dans son document, afin de simplifier le système actuel où plusieurs personnes reconnaissent qu'il y a des problèmes depuis de nombreuses années... Il propose, M. Fortin, une solution simple, pratique, soit de taxer tous les revenus une seule fois, à un taux fixe et universel de 33 % pour tous les contribuables, que ce soient des particuliers ou des entreprises. Ce pourcentage-là correspond actuellement au niveau plancher des taux marginaux. Alors, dans un régime actuel où les taux marginaux vont jusqu'à 53 %, c'est certain que ça pourrait signifier des baisses d'impôts assez importantes pour certaines catégories de contribuables.

Ce qui est important, je pense, dans l'idée de M. Fortin, c'est que le gouvernement ne doit pas voir ses revenus diminuer. Mais ça signifierait, en contrepartie, qu'il y aurait la suppression d'à peu près tous les abris fiscaux, y compris les REER, y compris les abris qui s'adressent aux contribuables les plus fortunés.

(10 h 10)

La proposition de M. Fortin a l'avantage d'être d'application extraordinairement facile. Est-ce que c'est trop facile pour être beau, pour être réalisable? C'est une bonne question qu'on peut se poser, parce qu'on dirait que notre système a avantage à ce que ce soit complexe. Et, parfois, on a l'impression, comme individu, comme contribuable, que plus le système est complexe plus on se complaît.

Alors, moi, j'aimerais savoir de la part du ministre... Je ne sais pas si M. le ministre en a pris connaissance, de ce document-là, mais est-ce qu'il est dans les orientations d'un ministre des Finances de regarder la suggestion de l'économiste Pierre Fortin dans l'optique d'une révision de la fiscalité au Québec? Est-ce que c'est quelque chose, là, qui est envisageable? Et, si oui, est-ce qu'on peut avoir une idée du moment où une solution comme ça pourrait être regardée attentivement et voir de quelle façon ça peut déboucher sur un système beaucoup plus facile d'application ou en tout cas moins complexe pour les contribuables?

Le Président (M. Chagnon): Oui, M. le député de Bellechasse.

M. Campeau: Bien, je pense qu'il y a de nombreux groupes, là, qui nous ont signifié qu'on devrait simplifier la fiscalité au Québec. On a tâché d'en faire un bout en simplifiant la TVQ. J'étais en fin de semaine à ma maison de campagne puis je rencontrais des gens, là, qui ont des petites entreprises, et eux l'ont remarqué, puis elles, parce qu'il y a même une femme qui m'a parlé de ça. C'est elle qui fait la comptabilité pour l'entreprise de son mari, puis elle participe à l'entreprise, elle aussi. Eux ont vraiment remarqué, maintenant, la grande simplification qui a été apportée par l'arrimage, autrement dit, de la taxe de vente, dans les changements de la taxe de vente du Québec, où il sera plus facile de faire un seul rapport à la fin du mois.

De là il n'y a qu'un pas à penser qu'on aurait aussi un seul rapport d'impôts sur le revenu. Ça aussi, ça simplifierait beaucoup les choses, mais il faudrait qu'à ce moment-là, au Québec, on puisse s'arrimer, mais qu'on fasse comme le fédéral, en ce sens qu'il y a bien des choses où il y aurait complications, parce qu'on collecte d'autres... la Commission des normes du travail et d'autres organismes qu'on passe, là, par l'impôt sur le revenu.

Quant à la proposition de M. Pierre Fortin, il faut faire attention, là, et être objectif là-dedans. Quand vous passez de 53 % à 33 %, là, c'est sûr qu'il y a quelqu'un qui perd de l'argent, puis c'est le gouvernement. D'autre part, 53 % étant le plus haut taux ou à peu près, là, 16 % étant le plus bas taux, alors, celui qui paie 16 % aujourd'hui paierait donc 33 %; c'est beaucoup, là. Alors, on voit qu'on a un système progressif qui n'est pas là sans raison. Alors, comment il faudrait arrimer ça comme il faut ou harmoniser le 33 % versus 53 %? Ça vaut sûrement la peine de s'y arrêter et de le regarder attentivement. De là à prendre une décision à la hâte, là... Bon.

Maintenant, M. Fortin, il sera sûrement invité à venir témoigner devant la commission sur la fiscalité dans un Québec souverain, que nous ferons en septembre, là. Il aura donc la chance de bien s'exprimer, et c'est sûr qu'il sera écouté, parce que, comme vous disiez, oui, c'est un économiste reconnu et respecté à travers le Québec et ailleurs.

Maintenant, il faut aussi envisager d'autres mesures pour améliorer la fiscalité. Quand on regarde le livre sur la fiscalité, c'est un livre ça d'épais. C'est bien simple puis c'est bien compliqué. Mais refaire une fiscalité au complet, ce n'est pas un travail d'un seul budget, c'est un travail de plusieurs budgets, et il faut annoncer ses couleurs d'avance, il faut annoncer ses étapes. Là, cette année, on peut dire qu'on a une étape de faite, quand on a fait la TVQ puis les remboursements de taxes sur intrants. Ça simplifie le travail et ce sera donc plus facile de faire des affaires au Québec à partir du 1er août cette année, quand ça va être simplifié.

L'année prochaine, on a l'intention d'encore améliorer le système de la fiscalité. Vous, ce que vous demandez, c'est un changement en profondeur. Est-ce que la commission sur la fiscalité de septembre va nous convaincre qu'il faut changer en profondeur? En tout cas, on va être à l'écoute. Mais il faut aussi que notre système fiscal se compare toujours avec notre environnement, l'environnement étant les autres provinces, étant les États limitrophes des États-Unis qui touchent au Québec. Et ça, il faudra toujours, quand même, être très prudents dans tout ce qu'on va faire là-dessus, sur ce côté, mais il faudra toujours viser la simplicité. Par exemple, l'équité du régime fiscal, de façon à ce que tous supportent une proportion juste et raisonnable du financement des services publics.

Mais c'est quoi, une proportion juste et raisonnable? Notre système, à l'heure actuelle, il faut quand même lui reconnaître que ceux dont les revenus sont moins élevés paient moins, paient 16 %; ceux dont les revenus sont plus élevés, comme je le disais tout à l'heure, paient 53 %. Si vous arrivez juste au milieu, à 33 %, je ne suis pas prêt à l'acheter tout de suite. Je dis: L'idée est bonne. Est-ce que le chiffre de 33 % est à rediscuter, puisqu'il y a encore une petite nuance à apporter? C'est ça.

On veut améliorer la complexité du régime fiscal en tenant compte, comme je le disais tout à l'heure, du contexte géographique du Québec, on veut simplifier l'application des lois fiscales, puis on veut aussi favoriser l'observance des lois fiscales. Quand on voit le travail au noir, quand on voit d'autres éléments comme le travail au noir, il faut se demander si ce n'est pas parce que notre système fiscal est compliqué. Ce n'est sûrement pas l'unique raison, mais ça peut être un des facteurs qui favorisent le travail au noir. Alors, il faut quand même assurer un financement stable et adéquat des finances publiques, parce que ce n'est pas parce qu'on va réorganiser tout ça que le gouvernement n'aura pas besoin d'argent pour rendre les services à la population qu'il doit rendre dans les domaines de la santé ou dans le domaine de l'éducation, par exemple.

Alors, en résumé, oui, la proposition de Pierre Fortin mérite considération, mais il faudra être prudents et il faudra l'élaborer probablement en étapes. Je ne suis pas convaincu qu'on pourra élaborer ça d'un seul coup.

M. Lachance: Je comprends que le ministre manifeste une ouverture à cette proposition, quoiqu'il soit prudent, et je pense que c'est tout à fait normal. Je poursuis quand même brièvement ce que disait M. Fortin de son idée, que le Québec peut lui-même mettre en vigueur le taux uniforme sans arrangement fiscal fédéral-provincial particulier. Il disait que son idée permettait de réconcilier les exigences de l'efficacité et de l'équité, qu'il est capable de rassembler patronat, syndicats, riches et moins riches, donc, il prévoyait quand même un mécanisme pour les personnes moins fortunées, et il disait que, à son avis, il était souhaitable que nous procédions en cette matière avec détermination, compétence et célérité.

«Ce ne serait certes pas un drame si le Québec réussissait à moderniser sa fiscalité avant ses concurrents plutôt que d'agir le dernier en mouton suiveur», c'est ce que disait M. Fortin. Alors, je comprends, M. le ministre, que vous êtes ouvert à cette proposition, quitte à pouvoir la tester, la vérifier avec la batterie de spécialistes qu'il y a au ministère et en étant conscient qu'il y aura de la résistance au changement.

M. Campeau: Oui. Bien, la résistance au changement, c'est toujours, dans n'importe quel domaine. Je ne sais pas si M. Fortin a écrit son article... Je pense qu'il l'a écrit avant qu'on réforme la taxe.

M. Lachance: Exact, M. le ministre.

M. Campeau: Alors, peut-être qu'il était en mesure de déterminer qu'on avait un bon pas de fait. Mais, quand il dit qu'il faut en faire encore plus, là-dessus, on est tout à fait d'accord, il faut simplifier, il faut que, encore l'année prochaine, au prochain budget, on ait des mesures pour que faire affaires au Québec devienne de plus en plus facile. D'autres entrepreneurs disent, là: Foutez-nous la paix, on aime autant... Établissez la taxe que vous voulez mettre, mais faites ça simple, puis ne vous ingérez pas dans nos affaires. Alors, pour les entrepreneurs, un gouvernement, souvent, pour la plupart des entrepreneurs, c'est un gouvernement qui reste en dehors, qui ne vient pas leur imposer certains problèmes, certains troubles ou certaines demandes. Alors, eux autres, ils savent qu'ils doivent payer une taxe qui est normale, ils sont prêts à la payer, ils sont prêts à être honnêtes avec le gouvernement, mais ils veulent aussi qu'on leur foute la paix dans tous les dédales de l'administration de leurs affaires. Moi, j'abonde dans ce sens-là.

C'est un travail qu'on devra entreprendre et bien le faire. Il ne faudrait pas le faire à la hâte, parce que le changement dans la taxe de vente du Québec n'a pas été fait à la hâte, il a été fait et mûri au ministère des Finances; il a été refait et redigéré pendant quelques mois et c'est seulement là qu'on a été capable de le mettre. Alors, ça ne se fait pas en deux jours, une réforme, et la réforme dont on parle est encore plus importante.

Maintenant, de l'Ontario... Je lisais, dans les journaux, en fin de semaine, de l'Ontario, je ne me souviens plus si c'est le Toronto ... ou un autre journal qui disait que l'Ontario devrait prendre exemple sur le Québec pour simplifier son système de taxes, en Ontario, et que l'Ontario aurait dû le faire avant le Québec. Mais, coudon! ça s'est fait. Moi, je ne peux pas les blâmer là-dessus, et peut-être qu'ils pourront profiter de notre expérience, eux aussi. Et on est prêts, nous autres, évidemment, à avoir des échanges avec les gens de l'Ontario pour les aider à réussir avec cette taxe-là. D'ailleurs, ils n'ont peut-être pas besoin de nous autres. Tout ce qu'ils ont à regarder, c'est lire notre budget, voir comment on le fait et aller faire leur enquête chez des entrepreneurs, au Québec, pour voir les bons côtés puis ce qu'ils pourraient peut-être améliorer encore.

Alors, il n'est pas impossible que l'Ontario fasse, après ses élections, cet arrimage-là de sa taxe de vente, qu'elle le fasse rapidement et qu'elle profite de notre expérience. Puis, si elle trouve des meilleurs moyens que nous pour le faire, tant mieux! Et s'ils sont vraiment mieux, ces moyens-là, on s'arrimera l'année prochaine.

(10 h 20)

M. Lachance: Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de...

Une voix: Hull.

La Présidente (Mme Barbeau): ...Hull.

M. LeSage: Merci, Mme la Présidente. Le député de Bellechasse a soulevé un point, un sujet très important, ce matin, en nous parlant de la simplification des rapports d'impôts. J'avais également pris connaissance des propos de Pierre Fortin et j'en suis venu à la conclusion qu'il a totalement raison. Et le député de Bellechasse et M. Fortin.

Et lorsque le ministre se cache... D'abord, je dois dire au ministre: Changer le système, ce n'est pas sur recommandation de vos fonctionnaires et de vos experts. M. le ministre, vous avez été élu pour prendre des décisions et c'est une décision politique que de simplifier le système. Parce que, si vous attendez après vos experts, vous allez attendre longtemps. Vous avez juste à «checker» leurs rapports d'impôts, vous allez voir qu'eux autres ils vont s'en chercher, des déductions. Puis, lorsque vous vous cachez, M. le ministre, en arrière de ceux qui paient 16 % d'impôts, vérifiez donc leurs rapports d'impôts, à ces gens-là, si eux autres ils en ont, des déductions, si eux autres, par exemple...

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Hull, je vous demanderais juste de vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

M. LeSage: Alors, je demande au ministre, Mme la Présidente, de vérifier les rapports d'impôts de ceux qui paient 16 %, à savoir s'ils ont des déductions déclarées dans leurs rapports d'impôts comme ceux, par exemple, qui paient 50 % puis 52 % d'impôts. Il s'apercevra, Mme la Présidente, que c'est justement pour sauver cette équité que M. Fortin – et le député de Bellechasse le mentionnait tantôt – dit qu'il faut absolument changer le système.

On parlait de faire un rapport d'impôts, Mme la Présidente, sur une carte postale. On est rendu, pour faire un rapport d'impôts, là... Puis, si vous commencez à placer de l'argent un petit peu éparpillé, soit des REA, des actions accréditives ou des actions ordinaires, ça vous prend un comptable pas mal spécialisé. Puis, là, cette année, on avait les gains de capitaux qui embarquaient là-dessus. C'est à ne rien comprendre, Mme la Présidente, et c'est rendu que les fiscalistes, ceux qui préparent les rapports d'impôts, sont obligés de se recycler à tous les ans, avec tous les amendements qu'on apporte à nos lois, alors qu'on pourrait, comme le suggère Pierre Fortin, avoir un système très simple.

Puis ça, Mme la Présidente, le député de Bellechasse a raison de soulever ce point-là, il faut le changer, et ce n'est pas vrai que ça prend des études à n'en plus finir. Si les États-Unis ont été capables de le faire et que certains États américains sont capables de le faire et que d'autres pays sur la planète sont capables de le faire, je pense que le Québec aussi pourrait simplifier ses rapports d'impôts et faire en sorte que les plus riches paient un peu plus, et que les plus riches n'aient plus la possibilité d'aller chercher des paquets de déductions pour faire en sorte... Il y en a même, Mme la Présidente, qui gagnent de très, très gros salaires, qui ont des revenus extraordinaires, au Québec, puis qui ne paient pas d'impôts, parce qu'on a un système qui favorise ces personnes qui vont chercher des déductions à n'en plus finir, de tous bords de tous côtés.

Ce que le député de Bellechasse a soulevé ce matin, Mme la Présidente, c'est justement pour faire en sorte d'éliminer ces abus et faire en sorte que les plus fins n'aillent pas chercher, au détriment des moins... des moins... des moins intelligents, je vais le dire, ou des moins... des moins instruits, ou des moins compétents, ou des personnes qui ont moins de revenus puis qui ne peuvent pas bénéficier du système tel qu'il est établi présentement.

Mme la Présidente, je pense que le député de Bellechasse avait raison, je le mentionne à nouveau, et j'aimerais dire au ministre, par votre entremise, Mme la Présidente, qu'il se doit, comme élu et non comme fonctionnaire, de dire à ses fonctionnaires de changer le système. Ça devrait être une décision de son gouvernement; il a été élu pour décider et je lui suggère fortement, Mme la Présidente, de décider.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: Bien, je tiens d'abord à dire au député de Hull, si vous permettez, Mme la Présidente: La résistance, elle va venir des fiscalistes, elle ne viendra pas des fonctionnaires.

Bon. Maintenant, on a déjà fait un pas important avec la TVQ. Je ne veux pas toujours critiquer l'autre côté, mais ça fait quand même neuf ans que votre parti complique l'impôt. En neuf ans, vous avez dû le compliquer un peu pas mal. Alors, vous avez eu neuf ans pour le simplifier. Ma foi, il était temps. Alors, nous autres, dès le premier six mois, on décide de le simplifier. Alors, oui, la simplification de la taxe, c'est une décision politique, c'est une décision du pouvoir, c'est une décision du ministre des Finances. Mais vous comprendrez bien que le ministre des Finances va utiliser ses fonctionnaires pour y parvenir. Et c'est comme ça, cette année, qu'on a pu sortir, dans le budget, à temps, une réforme de la taxe bien faite, à notre avis, avec l'aide des fonctionnaires du ministère des Finances.

Bon. L'idéal, là, pour les particuliers, bien oui, ce serait d'avoir un seul rapport d'impôts, pas deux, et qu'il tienne sur une seule page. Moi, je ne veux quand même pas exagérer, là, et je ne veux pas vous faire de reproches non plus, je pense bien que c'est une figure de style, si vous permettez, Mme la Présidente, que le député de Hull a voulu faire quand il a dit «une carte postale». Quand même! à moins que ce ne soit une grande carte postale, mais c'est un peu petit, là. Alors, si on en venait sur une seule page...

Mais, quand il dit que c'est compliqué, les rapports d'impôts, bien oui, puis ça n'a pas de sens. Alors, il faut travailler dans ce sens-là. On a fait un bout cette année; l'année prochaine, on va faire un autre bout. On devrait, l'année prochaine, arriver avec un programme et dire: Voici ce qu'on va faire en 1996, voici ce qu'on fera en 1997 et en 1998. Probablement qu'on ne pourra pas tout faire la même année, mais on devrait annoncer nos intentions, par exemple, annoncer nos objectifs, et ça, ça donnerait au moins une marge, une piste où on irait.

Bon. Les dépenses fiscales, on a quand même simplifié cette année, là. Dans le discours sur le budget, il y a des abris fiscaux qui ont été limités: le remboursement des crédits d'impôt aux entreprises a été limité, ça constitue une forme d'impôt minimum; l'assiette de la taxe sur les institutions financières a été élargie; les crédits d'impôt des institutions financières pour la recherche-développement ont été grandement restreints, certains éliminés; les dons d'oeuvres d'art, ça a été resserré.

Le député de Hull va être d'accord avec moi pour dire qu'il fallait faire quelque chose dans le don des oeuvres d'art. Par exemple, un hôpital qui reçoit une peinture et qui donne un reçu d'impôt comme don de charité et qui affiche la peinture sur son mur, bien, sa fonction principale, à l'hôpital, ce n'est pas d'être un musée, c'est de soigner les malades. Alors, là, on a dit qu'il faudra qu'il vende maintenant l'oeuvre et qu'il encaisse l'argent et qu'il s'en serve pour l'objectif de son institution.

Alors, dans le cadre constitutionnel actuel, il est à peu près impossible, là, d'aller plus loin, là, sans nuire à la compétitivité de l'économie québécoise. Il faut toujours, quand même, se dire qu'on est dans le système fédéral et que le budget a été fait comme dans un système fédéral, avec les contraintes du système fédéral.

Bon. Le cas des fiducies familiales, c'est un autre exemple, ça, qui favorise une certaine classe de la population. Il ne faut pas nécessairement dire les riches, il y a des riches qui n'ont pas de fiducie familiale, il y en a qui en ont. Bien, on pense, nous autres, que c'est un privilège qu'il faut arrêter le plus tôt possible. Les gens repoussent les paiements de taxes, privent donc l'État de revenus importants. On ne peut pas le faire parce qu'il y aurait déplacement, et vous pouvez, vous, le confirmer encore plus, vous, vous êtes à Hull, pas loin de l'Ontario. Si on met une taxe sur les fiducies familiales et que les autres provinces ne la mettent pas en même temps, bien, les entreprises vont déménager dans une autre province, et on ne saurait les blâmer non plus. Je trouve ça normal de chercher à payer moins d'impôts dans la légalité. Alors, il ne faudrait pas qu'il y ait des pertes éventuelles de revenus pour le gouvernement du Québec au profit d'autres provinces.

(10 h 30)

Alors, ça couvre donc. On a fait le ménage dans les abris fiscaux. Est-ce qu'il en reste à faire? Est-ce que tous les abris fiscaux demeureront dans les années à venir? Il faudra y voir, Mme la Présidente. On en a déjà vus qui ne rapportent pas autant qu'ils rapportaient. On a cru bon de les garder encore cette année parce qu'il était rentable pour l'économie de les garder, mais, à chaque année, on va les analyser et peut-être qu'on devra en enlever un certain nombre. La fiducie fiscale, on va attendre jusqu'en 1999 et on va s'arrimer avec le fédéral là-dessus pour ne pas susciter des déménagements de fiducies familiales en dehors du Québec. Je me rappelle, c'est la même chose que les exemptions de gains en capital pour les petites entreprises. C'est à peu près tout, Mme la Présidente.

Juste un mot de plus. Oui, on est d'accord avec le député de Hull pour simplifier les rapports d'impôts. Je suis content qu'il soit d'accord avec nous. Je lui dis juste – je veux juste rappeler sans être méchant – qu'il a eu neuf ans pour le faire, et qu'on est arrivés, nous, on commence, après six mois, on a déjà un bon bout de fait et que, l'année prochaine, on aura une autre étape de faite encore. Et on espère que, à ce moment-là, au prochain comité qui analysera le discours du budget, le député de Hull sera à l'aise pour nous en féliciter.

La Présidente (Mme Barbeau): J'aimerais juste rappeler, pour le bénéfice des membres, la façon dont ça procède. Vous avez 10 minutes en une ou plusieurs interventions. Et le ministre, à chaque fois que vous posez une question, que vous finissez l'intervention, a 10 minutes aussi. Alors, vous le prenez à votre discrétion.

M. LeSage: Merci, Mme la Présidente. Le ministre, Mme la Présidente, à deux reprises a mentionné que le gouvernement libéral avait eu neuf ans pour compliquer l'existence de tout le monde avec les lois fiscales. C'est donc dire qu'il admet que c'est compliqué présentement. Et il a fini par dire qu'il était prêt à modifier le système.

Mme la Présidente, s'il y a un dossier important dans le gouvernement, c'est un budget. Ça, là, ça affecte tout le monde. Et le ministre, à une question du député de Laporte, en Chambre, tout récemment, a refusé de dire au député de Laporte que Jean-François Lisée avait participé à l'élaboration de son budget, que c'est lui qui préparait son budget puis que c'est lui qui décidait. Mme la Présidente, est-ce que je peux demander au ministre de décider, puisqu'il admet que le système n'est pas correct, de le changer le plus rapidement possible et de faire en sorte qu'on puisse faire un rapport d'impôts, et je le répète, sur une carte postale, Mme la Présidente: Nom, adresse, numéro d'assurance sociale, numéro de téléphone, si vous le désirez, revenus, vos déductions comme parent monoparental ou marié avec un ou deux ou trois enfants, la balance x taxable à tel taux. Point. Ça ne prend pas une bien, bien grande carte postale pour faire ça. Ça va faire mal à certaines organisations, je le sais, ça. Puis ça va faire mal à ceux qui font bien de l'argent itou, mais, ça, je m'en fous. Moi, ce que je veux, là, c'est que le petit ait les mêmes chances que le gros. Puis la seule façon de le faire, c'est de suivre la proposition de Pierre Fortin qui a été amenée ce matin sur la table par le député de Bellechasse. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: Mais, Mme la Présidente, le député de Hull, là, fait un peu de «mémèrage» quand il parle des gens qui ont contribué à faire le discours du budget. Moi, je vous dirais qu'il n'y a rien, dans la préparation d'un discours du budget, qui équivaut à des fonctionnaires compétents et à un sous-ministre compétent là-dedans, là, pour préparer un budget et pour nous aider à pouvoir livrer la marchandise.

Mais ce que je remarque du ton que le député de Hull prend, c'est qu'il est content que nous soyons au pouvoir. Pendant neuf ans, on n'a pas simplifié ça, alors il se dit: Enfin, voilà un gouvernement qui a bien l'intention de simplifier les choses dans les prochaines années. Alors, il reprend espoir. Et, pour reprendre espoir, bien, là, il dit: Je ne m'adresse pas à un mur, je m'adresse directement au ministre des Finances, qui saura m'écouter, et j'espère que, l'année prochaine, on aura fait du chemin.

Sauf que, je le dis, si on fait du chemin, là, comme je pense qu'on va en faire, comme je le souhaite beaucoup, j'espère que le député de Hull sera là pour nous féliciter. Parce qu'on n'est pas insensible à ses félicitations, Mme la Présidente. J'ai beaucoup de respect pour lui. Et, quand il dit des bons mots, ça me fait plaisir; ça me fait autant de peine quand il critique sur ses affaires. D'autre part, je ne m'en fais pas trop parce que, des fois, je sais bien qu'il voudrait nous féliciter puis qu'il est forcé, à cause du système, de nous faire certaines remarques.

Mais il y a une chose dont je suis sûr, là, quand je l'écoute parler, c'est qu'il va sûrement, lui, collaborer et être un membre important des travaux sur la commission sur la fiscalité. Je suis sûr que le député de Hull va être présent pour passer son expérience, passer ses commentaires positifs et s'assurer qu'il n'y a pas d'erreur qui est faite. Parce que, dans un système comme ça, si on change le système, il faut bien le changer. Je le répète, ce qu'on a fait dans la TVQ, dans l'arrimage, on était sûr de notre coup. Alors, les autres changements, il faudra aussi être sûr de notre coup. Bon. Être sûr de soi-même, ça ne veut pas dire qu'on attend des années, mais, des fois, mieux vaut repousser pour un mois ou deux, mais pas éternellement. Alors, moi, je dis, dans la vie, il faut prendre des décisions, il faut savoir les prendre. Il n'y a rien de mal à repousser sa décision au lendemain. Une bonne nuit de sommeil, des fois, ça fait réfléchir et ce n'est pas être quelqu'un qui ne prend pas de décisions que de repousser certaines décisions. Mais il faut les faire, par exemple, il faut aboutir, il faut accoucher avec nos décisions. Alors, de ce côté-là, le député de Hull peut être sûr que ça va être fait.

Non, non, je n'ai pas fini. Je veux juste rappeler au député qu'il ne faudrait pas qu'il oublie non plus que des rapports d'impôts, ça crée beaucoup d'emplois à Hull puis à Shawinigan. Je ne voudrais pas que le député de Hull parle contre son comté. Nous, on veut l'aider dans un souci d'efficacité. Je voulais juste lui rappeler ce point-là, c'était quand même un point important pour lui. Pour l'efficacité de tout le Québec, il faut quand même prendre des décisions, des fois, qui font mal temporairement.

M. LeSage: Alors, Mme la Présidente, pour terminer, si vous le permettez, j'aimerais tout simplement dire au ministre que je le félicite d'avance, si jamais il apporte ce projet de loi là. Il devrait l'apporter. Mais ce que j'aimerais lui dire de plus important que les félicitations que je peux lui adresser à l'avance, c'est que je lui offre mon concours pour étudier d'une façon très approfondie, d'une façon très, très objective un tel projet de loi, et ça me ferait plaisir, Mme la Présidente, si le ministre pouvait le déposer à l'automne. Merci.

La Présidente (Mme Barbeau): Avez-vous quelque chose à ajouter, M. le ministre?

M. Campeau: Bien, ça me fera plaisir de recourir aux services du député de Hull, mais, encore une fois, le rapport sera déposé en temps opportun, et on ne fera rien à la course. Mais il faut que ça se fasse, puis on va le faire, mais on va réfléchir sur le sujet abondamment.

La Présidente (Mme Barbeau): Vous avez terminé, M. le député de Hull?

M. LeSage: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Charlevoix.


Perception de tous les revenus dus au gouvernement (suite)

M. Bertrand (Charlevoix): Mme la Présidente, je voudrais aujourd'hui, devant cette commission, toucher un élément particulier. Jusqu'à maintenant, on a touché différents éléments, particulièrement sur les chiffres, sur, exemple, l'amélioration des formules et quelques autres sujets. Mais il y a un sujet, je pense, qui fait l'unanimité des deux côtés de cette commission, c'est les fameux problèmes qui nous sont créés par l'évasion fiscale et le travail au noir au Québec. Alors, dans le dernier budget, dit budget Campeau, on en a fait mention. Ces mesures-là nous démontrent que le budget 1995-1996 est responsable, mais aussi qu'il est responsabilisant pour l'ensemble des citoyennes et des citoyens. Mais j'insiste sur le fait qu'il est important pour notre gouvernement de rétablir – et ça, ça m'a semblé aussi en accord avec les deux côtés de la Chambre – la confiance entre les Québécoises et les Québécois et l'État, et que le budget Campeau comprend des mesures concrètes en ce sens. Il devenait donc nécessaire – et je vais revenir un petit peu sur certains éléments du budget avant d'arriver à deux questions que j'ai à poser au ministre – voire urgent d'intervenir dans différents secteurs tels le commerce illégal des boissons alcooliques, le travail au noir dans l'industrie de la construction, et de faire cesser les activités illégales des jeux de loterie vidéo. Nous l'avons fait. Il est essentiel que les Québécois et Québécoises aient confiance dans l'État, mais il est aussi nécessaire que cette confiance devienne réciproque. J'ajouterais, Mme la Présidente, qu'il est nécessaire que cette confiance redevienne réciproque, ce qu'elle n'est pas, selon moi, dans le moment. Non seulement cette confiance doit-elle devenir mutuelle, mais elle doit venir entre les citoyens et citoyennes eux-mêmes.

(10 h 40)

Tous les Québécois, sans exception, désirent fondamentalement – et on le voit de plus en plus – garder les institutions et services pour lesquels ils ont ardemment travaillé et auxquels ils ont droit. On le voit particulièrement, là, dans les domaines de la santé et de l'éducation. Il est donc impératif que l'ensemble des citoyens, sans exception, prennent leurs responsabilités et fassent leur part pour l'ensemble de la collectivité, surtout pour nos jeunes qui auront à vivre avec l'héritage que nous leur aurons légué.

J'accepte très difficilement, M. le Président, ce qu'on est en train de constater actuellement, c'est-à-dire un laisser-aller total et une façon de voir et d'agir qui est complètement inacceptable, exemple: aller dans une station de services pour faire laver une automobile et se faire demander si on veut que ce soit facturé ou non facturé; arriver dans un restaurant et se faire demander si on veut que ce soit facturé ou non facturé. C'est en train de devenir généralisé. Bien, je pense que, pour nous, législateurs, ça devient extrêmement inquiétant, ce climat-là qui est en train de s'instaurer.

Je suis donc fier des mesures qui sont contenues dans le budget actuel pour que chacun paie son dû. Mais, avant de se permettre d'envisager une augmentation des impôts et des taxes des citoyens, notre gouvernement doit d'abord – et ça aussi je pense que c'est la préoccupation des deux principaux partis – s'assurer que chaque contribuable s'acquitte de ses obligations fiscales. À cet égard, le gouvernement aura donné au ministère du Revenu des ressources de vérification nécessaires. J'espère et j'ai hâte de voir les résultats, dans les prochains mois, de ces ressources-là.

Je tiens à préciser, M. le Président, qu'à la suite d'une vérification récente à l'égard du travail au noir dans l'industrie de la construction il a été constaté qu'un travailleur sur quatre, sur les chantiers officiels, n'était pas déclaré à la Commission de la construction du Québec et qu'un entrepreneur sur trois était en cause. C'est totalement inacceptable.

C'est une lourde tâche que de supprimer ce fléau, mais, en tant que gouvernement responsable, nous nous y attaquons avec force et détermination. À cet effet, le ministre des Finances a annoncé que, au cours de l'année qui vient, les entreprises délinquantes ne recevront plus de contrats du gouvernement ni de ses sociétés d'État. De plus, la Commission de la construction du Québec pourra arrêter les travaux sur les chantiers où s'exerce ce travail au noir, et, en cas de récidive, la Régie du bâtiment suspendra les permis des entreprises concernées.

Les activités de surveillance et d'inspection des chantiers seront encore accrues et améliorées, et les poursuites judiciaires seront intensifiées. Les inspecteurs seront dotés d'ordinateurs portatifs et pourront vérifier sur-le-champ la conformité d'un entrepreneur ou d'un ouvrier avec les lois.

De plus, M. le Président, notre gouvernement est à mettre en place un filet informatisé destiné à capturer les présumés entrepreneurs fantômes. Ce sont des mesures punitives, celles-là.

Par ailleurs, la Loi sur le bâtiment et les règlements qui l'accompagnent seront modifiés pour permettre aux municipalités, à la Régie du bâtiment et à la Commission de la construction d'échanger tous les renseignements entourant les demandes de permis de construction, et ce, à travers le Québec. Ces renseignements seront consignés dans une banque de données informatisées.

Vous savez, M. le Président, que le phénomène de la fausse autoconstruction a été estimé à près de 5 000 maisons par an, et c'est seulement ce que nous savons. Imaginez les sommes qui sont ainsi perdues.

Enfin, le ministère du Revenu exigera dorénavant des reçus officiels de tous ceux qui réclament des déductions fiscales pour les travaux de construction ou de rénovation d'immeubles.

Je tiens à souligner, M. le Président, que la lutte au travail au noir rapportera à l'État 30 000 000 $ cette année, 47 000 000 $ l'an prochain, et plus et combien encore si on trouve encore d'autres mesures pour les autres domaines.

Je suis fier, quant à moi, de ce budget, dans cette partie-là, mais j'aimerais réaffirmer qu'aucune mesure, quelle qu'elle soit, ne saurait remplacer la décision de chaque citoyen de prendre ses responsabilités en assumant sa juste part, sa contribution au financement de nos services publics. Vous voyez, M. le Président, j'insiste beaucoup sur le fait qu'on doive revenir à la responsabilisation de nos concitoyens et concitoyennes.

Cependant, nous savons tous que, en tant que gouvernement et en tant que citoyens, il nous reste beaucoup de ménage à faire dans nos propres affaires. En effet, les mesures du budget sont, à mon avis, le début d'une étape de grand ménage dans le fléau de l'illégalité et du travail au noir. Ce fléau s'est malheureusement généralisé, au Québec, en raison particulièrement du laxisme de l'ancien gouvernement.

Je sais que le ministre actuel est tenace, efficace et responsable. J'ose espérer que le ministère étendra ses activités de perception et de vérification à l'ensemble des secteurs d'activité des citoyens du Québec afin que tous, sans exception, paient leur dû et participent au partage de la facture collective.

Notre gouvernement s'est engagé, dès le début de son mandat, sur la voie du respect, de la responsabilité et de l'honnêteté, et nous continuerons sans relâche dans ce sens.

Les Québécois exigent de droit que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour contrer et éliminer le déficit tout en maintenant les services collectifs à leur niveau actuel. On ne veut pas perdre de services. Il va falloir que nos concitoyens et concitoyennes acceptent qu'il y a un prix à payer et, entre autres, de payer la juste part des taxes et des impôts.

Ce qui m'amène, M. le Président... Mme la Présidente – il faut lever la tête souvent – à poser deux questions au ministre des Finances. Un, outre les mesures déjà annoncées dans le budget 1995-1996 pour en finir avec les problèmes d'illégalité et de travail au noir au Québec, quelles sont les mesures et les actions que vous comptez entreprendre pour poursuivre vos actions en ce sens? Deux, la commission du budget et de l'administration peut-elle aider le ministère du Revenu en se donnant un mandat, style analyser, étudier et recommander au ministère différentes formules, incitatives au maximum et punitives au minimum, pour que les citoyennes et les citoyens paient leurs taxes et leurs impôts? Et, dans la même question, est-ce que ce serait bien vu par nous qu'on soumette au comité directeur de la commission cette question-là?

M. Chagnon: Au comité directeur.

M. Bertrand (Charlevoix): Au comité directeur. C'est ça que j'ai dit.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: Mme la Présidente, d'abord un commentaire sur le travail au noir. Il n'y en a pas seulement dans la construction, il y en a ailleurs. À l'heure actuelle, on semble donner plus d'importance à la construction, et c'est vrai. La publicité est plus forte là-dessus parce qu'il semble que ce soit plus évident et en plus grand nombre. Quand on dit un travailleur sur quatre, un employeur sur trois, ce sont des pourcentages qui font frémir. Alors, c'est là-dessus qu'on y va. Mais il y en a aussi ailleurs, du travail au noir, et, là-dessus, on doit prendre des mesures pour aussi aller le contrer.

On dit qu'au Québec – le député de Verdun confirmait ça, mais j'ai vérifié les chiffres encore plus à fond – si on collectait tout ce qui revient du travail au noir, c'est 1 500 000 000 $ de plus, 1 250 000 000 $ de plus de revenus que le gouvernement du Québec collecterait. C'est une somme assez importante. Personne n'est en mesure vraiment de dire si le chiffre est exact, mais il est sûrement de cet ordre-là. Alors, ce n'est pas une chose à négliger, dans quelque domaine que ce soit.

Évidemment, le signe qu'on donne, à l'heure actuelle, avec le présent budget, c'est qu'on ne se résigne pas. Dans l'histoire, on peut dire que René Lévesque était quelqu'un qui ne se résignait pas et – pour faire plaisir aux libéraux – notre ami Jean Lesage n'était pas quelqu'un qui se résignait non plus. On a vu qu'il a obtenu de grandes choses, les deux ont obtenu de grandes choses, ils ont même travaillé ensemble quelque temps.

J'entendais l'autre jour le député de Laporte qui disait, à la télévision, je pense – il me corrigera si les mots ne sont pas corrects ou l'intention, ou peut-être qu'il veut se corriger d'avoir dit ça: Quand le fédéral nous frappe – parce qu'il vient de nous couper quelque chose, de réduire les transferts auxquels on a droit et les transferts qui ont été coupés depuis 1982 jusqu'à aujourd'hui – on est choqué pendant 10 minutes – ce n'est pas le mot «choqué» qu'il a utilisé, je ne me souviens plus du mot – on est indisposé pendant 10 minutes, puis, après ça, on s'en remet. Moi, je pense que c'est un peu une attitude de...

Une voix: Il faudrait plus corriger les mots, là, c'est un peu court...

La Présidente (Mme Barbeau): Si vous voulez attendre votre tour, c'est M. le député de Laporte, le député de...

M. Campeau: C'est un peu court, mais ça voulait dire ça, là.

M. Bourbeau: Citez donc ça au texte...

La Présidente (Mme Barbeau): ...puis je dois... Je vais mettre votre nom, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Campeau: On peut. Qu'est-ce que vous voulez corriger? Vous pouvez corriger si... Mme la Présidente, le député pourra corriger à son tour de parler, c'est son droit le plus simple.

La Présidente (Mme Barbeau): C'est ça, ça va être lui après.

(10 h 50)

M. Campeau: Mais ça revenait à 10 minutes puis, après ça, on s'en remet, puis on se met à travailler. Je ne pense pas que c'est cette attitude-là qu'il faut entreprendre. Quand il est allé pour la main-d'oeuvre, quand il a perdu dans la main-d'oeuvre, quand il était revenu, il me semble qu'il était de mauvaise humeur. Alors, peut-être que sa mauvaise humeur n'a duré que 10 minutes, mais, quand même, il était de mauvaise humeur pareil, puis je pense que ça s'impose. Si j'étais de l'autre côté, je lui demanderais s'il est résigné à laisser la formation de la main-d'oeuvre à Ottawa, vu que, pendant des années, ils ont dit non. Est-ce qu'il est résigné à ce système-là? Parce que, si c'est ça, comment voulez-vous... Quand vous négociez, vous préparez déjà la prochaine négociation. Alors, si le fédéral sait qu'au Québec – quand le Parti libéral était au pouvoir, quand le Parti libéral était au gouvernement – même si vous lui enlevez de l'argent, il se choque pendant 10 minutes, puis, après ça, il ne se choque pas, alors il va continuer à lui en enlever, hein. Il ne faut pas montrer son jeu pour la prochaine négociation. Quand vous négociez, même quand la négociation est finie et que tout est signé, il faut déjà préparer la prochaine. Alors, il faut quand même cacher son jeu un peu. Remarquez bien, je trouve que ça n'a pas de bon sens d'être résigné, mais, même si ça avait du bon sens, il ne faudrait pas le montrer.

Les négociations, par exemple, au Japon, quand vous avez fait une négociation, les gens sont tous là autour de la table, ils disent que ça a été dur, ça a été ci, ça a été ça, il n'y a jamais personne de complètement content, jamais personne qui sourit, parce qu'on dit toujours que les négociations, bien, c'est acceptable, que vous les ayez gagnées ou perdues. Généralement, dans des négociations honnêtes, il n'y a aucun gagnant, c'est neutre; il y a des avantages pour les deux côtés. Alors, au moins, quand on revient d'Ottawa et qu'on s'est fait plumé, bien, ce n'est pas juste 10 minutes qui vont faire qu'on va être de bonne humeur. Alors, si c'est ça, l'attitude, c'est que plus on va aller à Ottawa, plus ils vont nous enlever de l'argent, plus on va revenir puis on va être content. Bien, je ne pense pas que c'est défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises d'agir de cette façon-là.

Quant à la proposition du député de Charlevoix d'avoir une commission, une extension de la commission ici, pour aider le ministre du Revenu à analyser des formules incitatives, des façons incitatives et punitives, bien, moi, je trouve que ça vaut la peine d'y méditer. Peut-être que cette commission-ci, surtout à cause de la présence des députés, autour de la table, de plusieurs régions, ça nous donnerait une bonne température du Québec, dans chacune des régions, des choses. Alors, chaque député aussi en apprendrait sur les régions des autres, et ils pourraient échanger et peut-être qu'on pourrait améliorer les moyens qu'on veut mettre en égard. Ça prendrait une coopération des deux côtés de la table, une coopération... Il faudrait que tout le monde s'aligne et dise: Il faut combattre le travail au noir, puis on est tous d'accord, donc on va prendre les meilleurs moyens possibles. Il ne faudrait pas qu'il y ait confrontation, parce que, là-dedans, il faut qu'il y ait une unité de toute l'Assemblée nationale pour combattre ça. Parce que, s'il se discute des choses ici et qu'un côté de la table n'est pas d'accord puis qu'il s'en va aider... En tout cas, il faudrait que ce soit positif d'un côté, que tout le monde soit d'accord pour faire ça. S'il n'y a pas unanimité des membres de la commission, on ne peut pas le faire, à moins qu'on fasse un groupe de députés au pouvoir et un groupe de députés dans l'opposition d'une façon tout à fait séparée.

Les actions et les mesures à entreprendre. Oui, on en a commencé, il y en a d'autres qui sont à être formulées et, en temps et lieu, on en fera part ou bien on n'en fera pas part. Il y a des choses qu'on ne pourrait peut-être pas dire dans notre stratégie pour contrer le travail au noir ou la contrebande d'alcool, c'est peu à peu que ça va se dévoiler sur tous les plans. Il est sûr qu'on ne négligera pas... On va même inciter la publicité quand, par exemple, il y a une opération contre la contrebande d'alcool qui se fait ou qu'on puisse saisir une incitation pour inciter les gens à ne pas frauder. Alors, il y a, là-dessus, une mise en place d'un système informatisé... Dans la construction, par exemple, il faut mettre en place... Et c'est déjà amélioré, le système informatisé de saisie de gestion et de l'information qui est recueillie par nos inspecteurs. Il faut améliorer notre système, il faut poursuivre l'établissement de mécanismes visant à accélérer l'acheminement des constats d'infraction aux contrevenants. Il faut, quand il y a une infraction, que ça se sache et il faut qu'on agisse rapidement. Il faut que le Revenu, la contrebande d'alcool et la Régie des alcools soient en étroite collaboration pour travailler ensemble. Il faut qu'il y ait une coordination de tous les organismes contre le travail au noir. Je pense que c'est comme ça qu'on va y parvenir.

Maintenant, avec la commission dont parle le député, peut-être qu'il y aurait moyen de trouver de meilleurs outils encore, de meilleures avenues, et peut-être que ça pourrait nous favoriser une meilleure perception, parce que, comme je le dis encore, où cette commission-là serait riche, c'est qu'elle aurait des députés autour de la table, je pense, venant de toutes les régions du Québec. Ça, c'est une richesse, parce qu'un ministre, quand même, n'est pas... Il a son comté à lui, il sait comment ça se passe dans son comté, mais il n'a quand même pas la connaissance de tous les comtés à travers le Québec, de toutes les façons qu'on peut utiliser pour se soustraire à l'impôt et aux taxes. Alors, c'est ma réponse, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Charlevoix, est-ce que vous avez d'autres interventions? Il vous reste une minute.

M. Bertrand (Charlevoix): Il y a une chose qui me frappe, puis j'imagine que ça a frappé un peu tout le monde aussi, quand le ministre parle des 1 250 000 000 $ qu'on pourrait aller chercher. En tout cas, moi pour un, je favoriserais beaucoup qu'on travaille très, très fort pour trouver des formules qui vont faire, même s'il est utopique de penser qu'on peut aller chercher tout le montant... Mais, quand je regarde dans les prévisions qui sont de 30 000 000 $, 47 000 000 $ et 56 000 000 $, bien, je pense qu'on doit, comme parlementaire, en faire une priorité et une priorité extrêmement importante, d'où la recommandation que j'ai faite. Et je pense que je crois déceler dans la volonté du ministre – puis j'aimerais ça qu'il me le confirme de façon peut-être encore plus solide – qu'il faut vraiment tout mettre en oeuvre, malgré ce qui s'est tenté dans le passé, pour augmenter nos revenus de cette façon-là, autrement dit de convaincre les gens à payer leur dû.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le député de Charlevoix. M. le ministre.

M. Campeau: Je suis complètement d'accord avec le député de Charlevoix. Ce n'est pas nécessairement en ajoutant beaucoup d'argent, peut-être qu'il y a des fois qu'il faut ajouter des sommes, mais c'est aussi en le gérant d'une façon encore plus efficace et en trouvant des moyens d'améliorer notre gestion qu'on peut y parvenir.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre. M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Oui, Madame. Je vais céder mon droit de parole au député de Westmount–Saint-Louis.

La Présidente (Mme Barbeau): Non, je ne peux pas, je dois respecter l'alternance.

M. Chagnon: Alors, Mme la Présidente, je voudrais continuer sur le sujet dont vient de soulever le député de Charlevoix concernant la contrebande et le travail au noir. Moi, je suis... Évidemment, l'opposition est tout aussi opposée à ces procédés illicites, le travail au noir puis la contrebande, etc., ce genre de problème là, on ne peut pas être d'accord avec ça, comme législateur, puis comme membre du Parlement, et, éventuellement, comme, ce qui viendra chez nous après la prochaine élection, membre du gouvernement.

Ceci étant dit, ça ne serait peut-être pas bête, effectivement, que le comité directeur de la commission puisse regarder cette question-là. Vous me l'avez suggéré, je trouve... Je prendrai en délibéré, avec le président de la commission, je souleverai la question et nous en étudierons les possibilités d'étude.

Le travail au noir ou la contrebande, c'est fondamentalement axé et basé sur un dérèglement de notre économie. Notre économie se trouve déréglée et, généralement, c'est la faute des gouvernements quand l'économie se dérègle, quel qu'ils soient, de toute façon. On pourrait bien faire une commission parlementaire qui pourrait intéresser des députés de toutes les régions, comme disait M. le ministre, mais, fondamentalement, on aura à apprendre l'a b c de la mécanique de l'organisation de notre économie. Quand, par exemple, le gouvernement pense qu'il pourra réduire la contrebande ou le travail au noir en ajoutant une répression, en ajoutant une police de l'essence, une police de la cigarette, une police du revenu, c'est sûr qu'en poliçant davantage on peut ramasser des cas de contrebande puis des cas de ci puis des cas de ça, mais le seul effet... Quand je vous parlais du dérèglement de notre économie, c'est que c'est le fait qu'un produit comme l'alcool ou les cigarettes est trop taxé par rapport au prix où on peut le payer dans les alentours qui provoque cette contrebande. C'est parce qu'on a trop réglementé le travail. On a accepté, comme gouvernement, par le biais de règlements, de la voie réglementaire... Le règlement, par exemple, concernant les décrets dans la construction a provoqué et continue de provoquer une grande partie du travail au noir, celui de la construction. M. le ministre et le député de Charlevoix mentionnaient qu'il n'y a pas seulement dans la construction qu'il y a du travail au noir, c'est vrai. C'est vrai parce que notre organisation du travail est trop réglementée. Les gens ne veulent pas, les individus ne veulent pas payer le prix du décret de la construction pour faire faire des travaux relativement bénins chez eux. Et c'est ça qui provoque une bonne partie du travail au noir.

(11 heures)

L'exemple que soulignait le député de Charlevoix concernant la possibilité de laver son auto avec ou sans un reçu, eh bien, la contrainte, c'est le taux de taxation. On a un taux de taxation qui est considéré par les citoyens comme étant trop élevé. Et le ministre nous a annoncé qu'il était pour l'augmenter de 1 % l'an prochain. Vous ne verrez pas de diminution du taux de contrebande ou du taux des niveaux de travail au noir.

Même dans les déplacements de l'argent, lorsque le ministre nous annonce, dans son discours, qu'il augmente le taux de la taxe sur le capital... sur la taxe générale, il passe de 0,56 % à 0,64 %; dans les institutions financières, de 1,12 % à 1,28 %; pour le fonds de santé, de 3,75 % à 4,26 %. Bien, moi, je peux vous dire, tout de suite, ce que ça va avoir pour effet. Ça va avoir pour effet de déplacer du capital de gestion. Des sociétés de gestion vont tout simplement déplacer leur corporation de Québec ou de Montréal à la province canadienne qui va avoir une meilleure fiscalité; ça pourra même être les Territoires du Nord-Ouest, s'il le faut. D'ailleurs, l'Alberta et les Territoires du Nord-Ouest seront probablement les deux endroits suggérés par les fiscalistes à tous les détenteurs de portefeuilles de gestion, au moment où on se parle. Voilà une cause où on vient de provoquer un départ de sociétés de capital de gestion par une décision gouvernementale. Eh bien! c'est le même effet qu'on retrouve dans la réglementation qui entraîne le travail au noir, ou les taux de taxation, encore une fois, déréglés, qui entraînent la contrebande. Ceci étant dit, on aura sûrement l'objet et le plaisir de discuter de ces questions-là en comité directeur de cette commission.

Mme la Présidente, j'aimerais savoir du ministre des Finances, puisque son budget est basé sur ce qu'on retrouve dans le livre des crédits, à savoir qu'il y a une non-indexation des salaires de la fonction publique, à quel endroit retrouve-t-on, dans le budget, les montants qui devraient prévaloir pour l'organisation de la négociation qui s'en vient?

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: ...

La Présidente (Mme Barbeau): Pas de problème! On vous attend.

M. Chagnon: J'espère que je ne vous ai pas trop ennuyé avant.

M. Campeau: Bien, au contraire! Au contraire, Mme la Présidente!

D'abord, un peu d'éclaircissement sur le 1 250 000 000 $, dont je parlais tout à l'heure, d'impôts qu'on devrait collecter, et le manque à gagner qu'on laisse de côté, là. Bien, ça comprend plusieurs choses, hein? Ça comprend les travaux ménagers, puis les travaux d'entretien; ça, c'est du travail au noir. Ça comprend les travaux de couture à la maison, par exemple, alors, ça dépend; la construction, la restauration, les garages. Évidemment, il y a certains secteurs où il serait souhaitable que tout le monde paie là-dedans. Le souhait, c'est clair; de là à aller superviser chacun des secteurs, peut-être qu'il en coûterait trop au gouvernement pour faire tout l'ouvrage.

Alors, il s'agit de faire de l'incitation – comme le disait, tout à l'heure, le député de Westmount–Saint-Louis – plutôt que du punitif. Le punitif, c'est quelque chose d'au-dessus. C'est pour favoriser, c'est vrai, mais c'est les deux côtés qu'il faut prendre, il faut prendre les deux moyens, et on va favoriser plutôt l'incitation que le punitif. D'autre part, dans certains cas, oui, il faut qu'ils soient punitifs. Alors, nous le ferons.

On parlait de la fiscalité du Québec. Pourquoi n'avons-nous pas taxé les impôts sur les revenus des compagnies? La réponse est très simple, c'est qu'on veut, au Québec, continuer à attirer les entreprises qui sont rentables. Alors, il y a plusieurs entreprises, ici, au Québec, qui favorisent la déclaration de leurs impôts au Québec plutôt que dans une autre province. Alors, ça, nous ne voulons pas y toucher.

Et, quand on regarde l'ensemble des charges d'une entreprise, soit ses impôts, la taxe sur le capital et la taxe sur la masse salariale, notre compétitivité est excellente, Price Waterhouse avait fait une étude, avant le budget, qui le démontrait. Et même l'écart qu'on a apporté nous rend encore d'une façon compétitive. On le voyait, d'ailleurs, dans le journal Les Affaires de la fin de semaine ou des derniers jours, qui démontrait...

Alors, même l'État de New York va démontrer ça, que nous demeurons compétitifs dans ce domaine-là. Il n'y a pas de compagnies qui vont déménager. Parce que, faire des affaires au Québec, ça coûte encore meilleur marché que dans les autres provinces. Alors, la compétitivité de notre régime, elle est là.

Maintenant, il n'en reste pas moins que la nouvelle taxe sur les entreprises, la taxe sur le capital et la taxe sur la masse salariale...

M. Chagnon: Mais, la taxe sur le capital, c'est une taxe sur les profits. Ce n'est pas la même chose.

M. Campeau: Non, ce n'est pas du tout la même chose. Mais, quand il faut regarder, dans un système de compétition, il faut regarder...

M. Chagnon: Moi, je vous parlais des sociétés...

M. Campeau: ...M. le député, les trois, et...

M. Chagnon: ...je vous parlais des sociétés de gestion.

M. Campeau: ...quand on regarde ça, il faut regarder les trois en même temps.

Alors, c'est la même chose. Les sociétés de gestion, si elles déménagent leur capital, elles déménagent aussi leurs profits. Alors, c'est pour ça qu'il faut les garder, ici, au Québec. Alors, quand on regarde ces incitations-là, il faut regarder les trois items en même temps. Et, quand les analystes, les experts examinent où il est le mieux de faire affaire, ils prennent aussi ça en considération, les trois items. Et, là-dessus, notre compétitivité demeure, et, même, attire des capitaux, ici, au Québec.


Politique gouvernementale en matière salariale (suite)

Quand vous parlez des... Est-ce qu'il y a eu des montants pour les salaires, les augmentations de salaires, les augmentations d'honoraires dans la fonction publique? Bien, chaque ministère a son enveloppe fermée, et ça ne viendra pas du Conseil du trésor, et ça va être pris, par chaque ministère, à l'intérieur de ses fonds, à l'intérieur du budget qui lui a été attribué.

Maintenant, je voudrais dire que, si chacun paie son dû, là, bien, évidemment que le fardeau fiscal de chacun serait réduit. Alors, on doit être responsable, là, ne pas faire de cadeau avant de régler le problème du déficit et de la dette. Mais, si on parvenait, comme on a l'intention de le faire, à améliorer la perception de nos revenus, de ce qui est dû à l'État, bien, c'est bien sûr que ça nous place en mesure de réduire notre déficit, partant, de réduire notre dette, et, aussi, de réduire les impôts et les taxes de l'ensemble des citoyens et des citoyennes.

M. Chagnon: On a eu un gel de notre budget de programmes. Les enveloppes sont fermées dans les ministères, et on a une politique de non-indexation des salaires. C'est donc que, dans le budget, on a même escompté le 1 % de moins des salaires de 1993-1994 que l'on a récupéré par la voie de la loi 102.

Alors, est-ce que je dois comprendre qu'il n'y a rien de prévu dans le budget pour augmenter la masse salariale ou les bénéfices marginaux, suite aux négociations qui pourraient s'en venir?

M. Campeau: En fait, depuis quelques mois, la présidente du Conseil du trésor a commencé à rencontrer les différents représentants des syndicats, et il y a des travaux qui se font sur l'organisation du travail, là, pour prévoir les économies. Et, s'il y avait lieu de donner des augmentations, de corriger des choses, l'argent sera pris à même la réorganisation du travail et à même les enveloppes de chacun des ministères.

M. Chagnon: M. Rhéaume nous suggère aussi le Fonds de suppléance. Mais, dans le Fonds de suppléance, on...

M. Campeau: Oui, oui, le Fonds de suppléance, là, il a d'autres...

M. Chagnon: ...sait comme... vous et moi savons que le Fonds de suppléance est déjà, en grande partie... sera en grande partie occupé par le trou – je pourrais qualifier – que l'on retrouve au ministère – le plus gros – celui qu'on retrouve au ministère de la Sécurité du revenu, qu'a soulevé le député de Laporte, à l'effet qu'il manque 200 000 000 $ uniquement pour financer l'aide sociale.

M. Campeau: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Alors, ça fait déjà un trou dans le Fonds de suppléance.

Mais, expliquez-moi donc. Si je comprends bien, on a escompté, dans le budget, les bénéfices de la loi 102, et on ne prévoit pas dépenser plus d'argent, l'an prochain, pour financer les salaires et les bénéfices marginaux, qui représentent 60 % des dépenses du gouvernement, si on exclut le service de la dette.

M. Campeau: Bon. Deux choses. Un, là, je reviens à mon sous-ministre de tout à l'heure, là, je ne l'ai pas entendu dire les paroles que vous lui avez prêtées, et je suis juste assis à côté de lui. Alors, je ne sais pas, là, si vous avez deviné dans sa pensée ou si...

M. Chagnon: Ce n'était pas votre bonne oreille.

M. Campeau: Ce n'est peut-être pas ma bonne oreille, mais je vous dirais qu'elles sont toutes les deux...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: ...elles sont toutes les deux bonnes. À part de ça, il n'a rien dit. Alors, je ne sais pas si vous avez entendu des anges vous dire des choses...

M. Chagnon: Non, non.

M. Campeau: ...ou si les murs ont parlé...

M. Chagnon: Non, mais ce n'est...

M. Campeau: ...ou si c'est votre collègue de gauche.

M. Chagnon: ...pas un défaut, là. De toute façon, il vous conseille et je n'ai rien contre ça.

(11 h 10)

M. Campeau: Alors, ce n'est pas ça qu'il a dit. Bon.


Prévisions budgétaires du ministère de la Sécurité du revenu

Alors, maintenant, le trou de 200 000 000 $, là. La ministre s'est levée en Chambre, elle l'a expliqué exactement. Je peux bien vous l'expliquer à nouveau, là, si on veut, mais il me semble qu'elle l'a expliqué une fois. Ça devrait être correct, là.

M. Chagnon: Moi, je vous avoue que je n'ai rien compris de ce qu'elle a pu dire en Chambre. C'était tellement mêlé. Mais j'ai confiance que vous nous démêliez, par exemple.

M. Campeau: Si vous m'écoutez, là, vous allez comprendre. Il est déplorable, là, on entretient une impression, là, qu'il y aurait des cachettes dans le budget. Ça veut dire que vous ne serez pas le prochain, je veux dire, vous ne serez pas le prochain ministre des Finances, là – d'abord, dans plusieurs années, à moins que vous ne repassiez sur notre bord. Alors...

M. Chagnon: J'espère que vous n'en doutez pas.

M. Campeau: Hein?

M. Chagnon: J'espère que vous n'en doutez pas.

M. Campeau: Je ne le sais pas!

M. Chagnon: II ne faudrait pas qu'on aille en élection ces jours-ci, parce que...

M. Campeau: Oui, le Parti québécois est toujours ouvert pour des candidats brillants.

M. Chagnon: Je pensais que vous étiez ouverts au changement, qu'on pouvait prendre votre place.

M. Campeau: Bien, au changement, on change, là; on l'a changé, là. Vous avez vu la taxe, c'est un vrai changement. Je trouve ça formidable, hein? Ça fait neuf ans qu'on ne fait rien dans la fiscalité, puis, là, on fait quelque chose. Alors, neuf ans... Je comprends que le député de Laporte n'ait pas été là longtemps.

M. Bourbeau: ...que les fonctionnaires ne travaillent pas, quoi?

M. Campeau: Justement, si c'était ça, là. Alors, je pense que, maintenant, il y a une bonne direction, les fonctionnaires sont aussi bons qu'ils étaient. Il s'agit d'avoir une bonne coopération, et c'est ce qu'on a eu, Mme la Présidente. Et c'est pour ça qu'on a pu réaliser un excellent budget et faire les changements qui s'imposaient, et le ménage.

Mais ce n'est pas fini, le ménage, Mme la Présidente. Il va y en avoir encore, du ménage. Et, là, l'année prochaine, je suis convaincu que le député de Hull sera en mesure de nous féliciter. Il nous a déjà félicités d'avance. Il a tellement confiance qu'il était prêt à des félicitations d'avance, mais on va les tenir sur la glace, ses félicitations, on va les garder pour l'année prochaine.

M. LeSage: Il ne faudrait pas que la glace fonde.

M. Campeau: Oui, si vous voulez. Mais, qu'est-ce que vous voulez, c'est une expression, «tenir sur la glace». Ça dépend si on a une bonne glacière électrique ou non, qui fonctionne.

Moi, ce que j'ai compris de Mme Blackburn, c'est qu'elle a eu l'occasion de donner toutes les explications pertinentes. Alors, ce que je proposerais, là, au député de Westmount–Saint-Louis, c'est d'avoir une rencontre avec elle, qu'elle lui explique à nouveau...

M. Chagnon: Mais vous ne pourriez pas le faire ici, en résumé? Moi, j'aurais confiance de comprendre votre explication.

M. Campeau: Bien, je pourrais vous la faire, si vous voulez. Il n'y aura pas de déficit de 200 000 000 $ de programmes, là – oubliez ça – à la Sécurité du revenu pour l'année 1995-1996. D'abord, il est faux de prétendre, comme le député de Laporte le prétend, qu'on dénombre 19 000 ménages de plus pour l'ensemble de l'année 1995-1996, comparativement à 1994-1995. Ça, d'abord, la prémisse, en partant, est fausse.

Selon les spécialistes du ministère de la Sécurité du revenu, il est vrai, d'autre part, que, pour les mois de février, Mme la Présidente, mars, avril, le nombre de bénéficiaires est en hausse, compte tenu de la fin successive des prestations d'assurance-chômage pour des milliers de travailleurs et de travailleuses. À un moment donné, quand l'assurance-chômage finit, quand on a fini nos prestations, bien, on tombe sur ce système-là. Alors, c'est un fait que ça marche comme ça. Alors, selon les spécialistes du ministère de la Sécurité du revenu, il est vrai que ces mois-là n'ont pas été très bons pour ce programme-là.

Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que le nombre des bénéficiaires va décroître à compter du mois de juin. Parce que ce n'est pas les mêmes mois, ça, mars, avril, mai. En juin, l'ouvrage reprend, l'été, puis va refléter la poursuite de la reprise économique. C'est dans nos prévisions, et ces prévisions-là sont validées par le secteur privé, elles sont endossées par le secteur privé. On se rappellera qu'on est beaucoup plus conservateur que le secteur privé: on a prévu 3,3, nous autres; le secteur privé prévoit 3,6. C'est partout dans nos revenus, il y a un conservatisme dans tous nos chiffres.

Alors, on peut affirmer que, pour 1995-1996, un nombre moyen de 470 000 ménages recevra des prestations de dernier recours, soit le même nombre que l'an dernier. Alors, c'est notre base. Donc, il est faux de prétendre qu'il y aura un trou de 77 000 000 $ dû à une sous-estimation de la clientèle. Alors, n'eût été de restrictions apportées par le gouvernement fédéral – les gens vont dire: Toujours le gouvernement fédéral! mais, oui, qu'est-ce que vous voulez, il est là – au régime d'assurance-chômage – ça s'adonne que c'est encore lui qui paie l'assurance-chômage – le nombre de ménages à l'aide de dernier recours aurait connu une décroissance notable.

Mais l'application, maintenant, l'admissibilité à l'assurance-chômage, c'est encore plus sévère qu'avant: elle dure moins longtemps. Ça fait que, quand quelqu'un sort du chômage, il tombe sur les prestations de dernier recours. Ça coûte plus cher au Québec. Mais, même avec ça, nos prévisions sont qu'on va revenir au même chiffre que l'année passée.

Puis, Mme Blackburn a indiqué aussi que les prévisions budgétaires de son ministère, pour 1995-1996, sont inférieures de 132 000 000 $ aux dépenses réalisées en 1994-1995, alors que la clientèle demeure au même niveau. Puis l'écart pour le plein effet de 1995-1996, c'est un ensemble de mesures qui ont été introduites en 1994-1995. Le gain anticipé de ces mesures-là est de 54 500 000 $.

Mais ce qu'il faut retenir, pour le député de Westmount–Saint-Louis, c'est les mois où ç'a été calculé. Il ne faut pas multiplier par 12, prendre comme barème un mois qui est mars, avril ou mai; il faut regarder tous les autres mois, et ce n'est pas nécessairement une règle mathématique. Alors, c'est là le point principal, c'est là notre prévision et la prévision de Mme Blackburn.


Perception de tous les revenus dus au gouvernement (suite)

M. Chagnon: Vous pourriez me commenter le passage où je vous parlais de l'économie réglementée, en ce qui a trait à la contrebande ou au travail au noir? Quand je disais que la première cause de la contrebande ou du travail au noir, c'est le gouvernement qui réglemente trop ou qui rend ses niveaux de taxe dysfonctionnels par rapport à l'ensemble de la taxation sur un territoire... J'aimerais vous entendre, au moins, sur le plan des principes.

M. Campeau: Oui, bien sûr, Mme la Présidente. En fait, le député de Westmount–Saint-Louis vient confirmer ce que j'ai dit, tout à l'heure, quand j'ai dit que l'entreprise voulait être moins réglementée. Alors, ce que l'entreprise disait, c'est: Simplifiez-nous la vie!

M. Chagnon: Et moins taxée aussi.

M. Campeau: Simplifiez-nous la vie! Oui, on est prêt à payer une certaine taxe pour reconnaître ce qu'on doit donner à la société, les services à la société, que ce soit l'éducation ou les affaires sociales, mais, d'autre part, pour le reste, ce que je disais et ce que le député de Westmount–Saint-Louis confirme dans sa question, c'est qu'il faut simplifier la vie aux entreprises. C'est ça, Mme la Présidente, qu'on a commencé à faire dans l'arrimage de la TVQ: on l'a simplifiée. Comme je le disais – et je le répète, parce que, peut-être qu'il n'était pas là pendant toute la commission – il est maintenant plus facile de faire affaire au Québec, depuis le budget du 9 mai.

M. Chagnon: Oui, mais je n'en suis pas sur la paperasse. Ça, je suis d'accord avec vous là-dessus, qu'il faut la simplifier.

M. Campeau: Bien, je voulais...

M. Chagnon: Mais ce que je vous dis, c'est que, si vous voulez combattre le travail au noir... Par exemple, dans la construction, regardez votre règlement du décret de la construction, et faites juste l'analyser comme individu.

M. Campeau: Oui.

M. Chagnon: Vous êtes un citoyen responsable, vous allez comprendre ce que je vous dis, vous allez être d'accord avec moi, peut-être.

M. Campeau: Je...

M. Chagnon: Et, si vous voulez combattre la contrebande, diminuez vos taxes sur les cigarettes, l'alcool et les autres produits qui sont susceptibles d'être des objets de contrebande.

M. Campeau: Mais, ça, le député de Westmount–Saint-Louis, c'est comme s'il voulait endosser la décision qui a été prise, il y a quelques mois, déjà, vis-à-vis des cigarettes, quand l'ancien gouvernement avait baissé d'une façon drastique la taxe sur les cigarettes. Peut-être que, à ce moment-là, il devait le faire, mais il s'est pris...

M. Chagnon: Non seulement je voudrais l'endosser, mais j'y ai participé.

M. Campeau: Donc, il a participé. Parfait! Mais ce que je dis au député de Westmount–Saint-Louis: À ce moment-là, il n'avait pas le choix. La décision ne prenait même pas de courage politique, on était rendu au bout, où, tout le monde, si vous n'aviez pas fait ça...

M. Chagnon: C'était une bonne décision.

M. Campeau: Mais, si vous l'aviez fait avant, par exemple, là vous auriez pu l'enrayer.

M. Chagnon: Oui, oui, mais je n'étais pas là, avant.

M. Campeau: Mais pendant neuf ans! Eh! cette contrebande-là sur les cigarettes a commencé avec vous autres; l'alcool, la même chose, elle s'est empirée pendant que vous étiez au pouvoir. Alors, votre grande erreur, ça a été de ne pas réagir.

Une voix: ...dans les années trente, l'alcool.

M. Bourbeau: Ça a commencé un peu avant nous autres, la contrebande.

M. Campeau: Mais le gros impact de la contrebande, c'est sous votre gouvernement. Et l'erreur de votre gouvernement, ça a été de réagir trop tard, puis il n'aurait pas eu besoin de réagir tant que ça.

Bon, mais ce que je vais vous dire, c'est ça: L'automne dernier, on a constaté – vous parlez de la loi – que la loi mise en place par l'ancien gouvernement avait détérioré le fonctionnement de l'industrie. Elle n'avait pas réglé le problème du travail au noir.

M. Chagnon: Quelle industrie? De quoi vous parlez, là?

M. Campeau: Je parle de votre loi que vous aviez faite, la loi 142.

M. Chagnon: Sur la construction?

M. Campeau: Oui, oui. Bien, c'était un laisser-faire complet, là, qui se produisait; il fallait, nous autres, réagir.

M. Chagnon: Un laisser-faire complet.

M. Campeau: Alors, tout ce qu'on fait, le gouvernement indique tout simplement qu'il est déterminé à éliminer le travail au noir avec l'aide des organismes en place. On n'en créera pas d'autres, c'est les organismes en place qui vont nous aider à enrayer le travail au noir. Sauf qu'il faut une volonté du gouvernement pour faire ça, Mme la Présidente.

(11 h 20)

Alors, il ne s'agit pas de faire peur aux gens de l'industrie, mais il faut assurer l'équité du marché, tant pour les salariés que pour les employeurs. L'équité, Mme la Présidente, c'est que, si un constructeur, lui, paie ses taxes, comment voulez-vous qu'il soit motivé à payer ses taxes si son compétiteur, à côté de lui, ne le fait pas? Or, c'est cette motivation-là, cette incitation-là qu'il faut aller chercher. Nous autres, ce qu'on veut faire, c'est ça. On n'alourdit pas la réglementation. Et le député de Westmount–Saint-Louis a raison: quand vous alourdissez la réglementation, ça n'aide pas la cause; il faut que ça demeure simple. On donne un appui réel à des pouvoirs accrus aux organismes existants.

M. Chagnon: Votre problème, c'est qu'elle est déjà trop lourde, la réglementation; peu importe qui l'a rendue, elle est lourde, elle est déjà trop lourde. Il faut l'alléger, au moment où on se parle.

M. Campeau: Le député de Westmount–Saint-Louis a raison quand il dit: La réglementation, il faut l'alléger. Mais ça prend des réglementations; il faut qu'elles soient efficaces, simples à administrer et comprises par tout le monde.

Mais ce que l'ancien gouvernement aurait pu faire, ce n'est pas seulement de baisser les taxes, comme il a fait, dans le cas de la cigarette, à ce moment-là... Voyez-vous? Il baisse les taxes dans la cigarette. Bon. Puis, en même temps, il ne baisse pas ses dépenses. Alors, ce qu'il aurait fallu réaliser, quand il perdait, là, son revenu important de taxes, là, qui lui revenait de la cigarette, il aurait fallu que, en même temps, il baisse ses dépenses. Mais non! il a laissé la situation empirer. Finalement, acculé au pied du mur, il a décidé de baisser, d'une façon drastique, les taxes et les impôts.

À ce moment-là, est-ce qu'on peut critiquer sa décision, à ce moment précis là? Je ne voudrais pas porter de jugement sur le moment précis où il l'a fait. Mais, d'autre part, j'oserais dire que peut-être qu'il n'avait plus le choix, à ce moment-là. Il fallait qu'il fasse quelque chose. Mais il aurait dû, en même temps, réduire les dépenses de programmes. Et qu'est-ce qu'on a vu? On a vu que, dans cette même année-là, et l'autre budget, il a augmenté encore les dépenses de programmes de 1 000 000 000 $ par année. L'année passée, c'était à peu près de l'ordre de 1 000 000 000 $, l'augmentation des programmes.

Alors, on l'a vu baisser les revenus. Il y a eu une taxation, et, on les a sacrifiés, parce qu'on était forcé par les circonstances, et on n'a pas baissé les dépenses de programmes. Alors, ce qu'il aurait dû faire, en même temps, en réalisant qu'il ne faisait pas ses revenus, il fallait qu'il baisse ses programmes.

D'autre part, le député de Westmount–Saint-Louis – je tiens à le répéter – quand il dit qu'on doit simplifier les choses, s'il est possible, nous, on essaie de ne pas les alourdir par la réglementation. Quand il parle d'avoir toutes sortes d'inspecteurs... On va utiliser les instruments qui sont là déjà, on va tâcher de les rendre plus efficaces. Et, éventuellement, s'il dit: Est-ce que vous allez faire quelque chose pour encore simplifier les affaires au Québec? Oui, Mme la Présidente, c'est notre objectif que de faire des affaires au Québec devienne de plus en plus simple, pour qu'on puisse attirer encore de nombreuses entreprises et qu'ils aiment aussi le système fiscal qu'on va leur présenter, pour que les compagnies les plus profitables soient attirées par le Québec, comme elles le sont à l'heure actuelle. S'il y a moyen de faire un pas de plus, nous le ferons.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre. M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci beaucoup!

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Bellechasse.


Réforme de la taxe de vente du Québec (suite)

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. Je reviens à la TPS, parce que ça a une incidence, je crois, sur notre budget et sur la TVQ.

On sait que l'actuel gouvernement qui est au pouvoir à Ottawa, le gouvernement de M. Chrétien, lors de la campagne électorale de 1993 et pendant tout le débat qui avait précédé l'adoption de la loi sur la taxe des produits et services par le gouvernement conservateur, s'était opposé farouchement, en menant même une bataille – vous vous en souvenez – au Sénat, et avait promis, dans son livre rouge, que la TPS serait chose du passé quelque temps après la prise du pouvoir par le Parti libéral fédéral.

Ça va faire bientôt deux ans que les libéraux sont au pouvoir à Ottawa, et la TPS est toujours là. Dernièrement, le premier ministre du Canada indiquait que c'était toujours de son intention de remplacer la TPS par quelque chose d'autre, suite à l'étude, par un comité de la Chambre des communes... Et il laissait entendre qu'il attendait le résultat des élections en Ontario pour pouvoir procéder.

Alors, j'aimerais savoir, de la part du ministre des Finances – sans, évidemment, l'amener à rompre certains éléments qui pourraient être confidentiels; en tout cas, il pourra toujours nous le dire – est-ce qu'il y a, entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec, des discussions sur le remplacement de la TPS par une quelconque autre taxe fédérale moins visible que la TPS? Parce que, dans l'esprit de plusieurs personnes, le fait d'avoir «visibilisé» la TPS a été un élément important pour accroître le travail au noir, ou, encore, accroître cette pratique dénoncée tout à l'heure par le député de Charlevoix, où on se fait demander, de façon très, très régulière, si on veut avoir une facture ou un reçu pour éluder le paiement de la TPS et de la TVQ en même temps.

Est-ce qu'il y a des discussions, M. le ministre, qui ont eu lieu ou qui ont lieu, présentement, sur une nouvelle forme de taxation fédérale pour remplacer la TPS?

Le Président (M. Chagnon): M. le ministre.

M. Campeau: M. le député, là, peu de temps après l'élection, il y a eu une rencontre, à Ottawa, des ministres des Finances. Il a été question de la TPS. Et, oui, à ce moment-là, l'avenir du projet fédéral semblait incertain. Plusieurs provinces ont manifesté leur désapprobation vis-à-vis de ce projet-là. Oui, Jean Chrétien s'était engagé à faire disparaître la TPS. J'espère que ça ne vous surprendra pas s'il a changé d'idée. C'est, pour le gouvernement fédéral, le gouvernement central, une importante source de revenus. Alors, si le gouvernement central décidait d'annuler cette source de revenus, il faudrait qu'il compense ailleurs.

Et vous comme moi avons vu le déficit du gouvernement, puis la dette qui monte d'année en année, et son effort pour réduire son déficit de cette année. Comment il pourrait faire? Il vient même nous enlever de l'argent, aux provinces, de l'argent qu'il nous doit, qu'il ne nous renverra pas; il réduit son déficit à même ça. Et, en plus de ça, il y a d'autres mesures. Comment voulez-vous qu'il pense à annuler la TPS? S'il faisait ça, il faudrait qu'il ait un autre truc, qu'il la remplace par autre chose. Il viendrait quand même nous chercher de l'argent dans nos poches.

Alors, nous, qu'est-ce qu'on a fait là-dessus? Deux points. Pourquoi on s'est arrimé? Je l'ai dit: l'avenir du projet paraissait incertain. Le fédéral a aussi annoncé que, dernièrement, ce projet-là, de l'annuler, ce n'était plus prioritaire. On sent que l'idée a changé. Et, même, je vous dirais que, à la première rencontre avec le ministre des Finances, moi, j'étais pas mal convaincu qu'il ne ferait rien, du moins à court terme. Le ministre des Finances, Paul Martin, en avait parlé ainsi, juste par des entre-mots, des phrases, entre les lignes, on pouvait lire que, peut-être, son premier ministre avait fait cette promesse-là, mais que, lui, il ne voyait pas comment il pouvait la tenir, parce qu'il n'y avait pas d'autre moyen d'aller recevoir ces revenus et qu'il faisait face aussi à un déficit énorme.

Le Québec ne pouvait pas attendre l'issue d'une réforme improbable. Alors, c'est pour ça, nous autres... Quand on sait qu'il a fallu 50 ans au fédéral – 50 ans – pour réformer son ancienne taxe de vente, qui était nuisible, on s'en souviendra, nuisible à l'exportation, bien, vaut mieux ne pas attendre après lui pour faire bouger les choses. Ça a pris 50 ans, et ce n'est même pas ce gouvernement-là qui l'a fait, c'est le gouvernement précédent, le gouvernement conservateur.

Nous, ici, on pensait qu'il y avait une situation qui exigeait une action rapide, puis on voulait simplifier substantiellement le régime de la TVQ. Comme je le disais, tout à l'heure, on voulait favoriser les affaires au Québec. Alors, le gouvernement devait mettre un terme à la taxation de certains intrants, par exemple, afin de favoriser la croissance économique, et surtout favoriser l'exportation.

Je pense bien que, Mme la Présidente, quand je vous dis qu'on favorise l'exportation, du fait que, toutes les taxes sur les intrants, le manufacturier peut les réclamer à la fin du mois ou du trois mois, comme ça, ça descend son coût de production quand il s'agit d'exporter aux États-Unis. Alors, il y a assez d'entraves, il y a assez de règlements vis-à-vis de l'exportation aux États-Unis, ou dans d'autres pays, ou dans d'autres provinces, sans que, en plus de ça, la taxe sur intrants demeure. Il s'agissait, pour nous, de vraiment jouer notre rôle puis de se dire: Si on veut simplifier le travail des compagnies, simplifier les affaires au Québec, il nous fallait faire cette mesure-là.

(11 h 30)

Cette détaxation totale des intrants, comme je le disais, réduit les coûts de production, puis on diminue aussi le coût des exportations du Québec. Parce que – je ne le répéterai jamais assez – les exportations, c'est une part importante de notre économie. Le fait de pouvoir vendre aux États-Unis, c'est une part importante; de vendre aussi dans les autres provinces. Par exemple, il ne faut pas s'en faire, avec une souveraineté du Québec, on va continuer de vendre dans les autres provinces, on va continuer de vendre aux États-Unis, parce qu'il y a une interdépendance, au point de vue économique, entre les provinces canadiennes et nous; aussi envers les États-Unis. Alors, quand on nous dit: Ah! oui, mes affaires vont arrêter dans un Québec souverain, ce n'est pas vrai, ça, ne croyez pas ça! Parce que l'Ontario nous vend – je vais vous donner des chiffres de grandeur – pour quelque 25 000 000 000 $ de produits, de biens et services au Québec; et, nous, on lui en vend pour 20 000 000 000 $. Est-ce que vous pensez que ce commerce-là va arrêter après une souveraineté? Le commerce va quand même continuer après. Alors, là-dessus...

La Présidente (Mme Barbeau): ...M. le député de Hull.

M. Campeau: Mais c'est évident que, cette taxe-là, elle va très bien fonctionner dans un Québec souverain aussi. Il ne faut pas s'en faire, là, parce qu'elle facilite les affaires au Québec. Bon. J'entends, de l'autre côté, mon collègue le député de Hull qui trouve que les réponses sont trop longues. Je peux lui en donner d'autres aussi là.

L'accession à la souveraineté, ça veut dire d'abord se prendre en main, puis gérer ses propres affaires. Alors, la taxe de vente, c'est un début, ça. Elle est là, cette taxe de vente, on la perçoit déjà. Comme je disais, après l'indépendance, le Québec et le Canada vont continuer à faire des affaires dans les meilleurs intérêts de chacun. Quand on vend, nous autres, en Ontario, l'Ontario n'achète pas de nous autres parce qu'on a des beaux yeux, elle achète parce que le produit est bon, puis que le prix est bon, puis que la qualité est là. Puis nous autres, la même chose, quand on achète de l'Ontario, c'est parce que le produit est bon, la qualité est bonne; autrement, on achèterait des États-Unis, avec le libre-échange. Alors, il y a un commerce qui se fait, il y a un bon commerce qui se fait entre les provinces canadiennes et les États-Unis.

Mais il ne faut pas faire de religion avec la fiscalité. Une décision comme la pleine harmonisation de la TVQ puis de la TPS, c'est bon pour la croissance économique du Québec. Puis il était tout indiqué de procéder ainsi. Alors, ce n'est pas une doctrine, ça, ce n'est pas une religion. Comme je vous le disais, c'est parce que c'était pratique pour nous de faire ça, c'est parce que ça favorise l'économie au Québec qu'on l'a fait. On ne l'a pas fait pour faire plaisir à personne; ça simplifie les affaires au Québec.

Évidemment, ça fait plaisir aux entrepreneurs, mais les entrepreneurs méritent qu'on s'occupe d'eux, parce que ce sont eux qui font avancer l'économie. On voudrait peut-être me dire: Bien oui, mais on aurait dû ne pas augmenter leurs taxes. Bien, si on avait eu les moyens de le faire, on l'aurait fait, mais on ne pouvait pas se permettre de laisser tomber un revenu de 500 000 000 $; il fallait aller le récupérer. Alors, en refaisant toute cette harmonisation de la TVQ, en remboursant les intrants, ça coûte au Québec 500 000 000 $ de revenus de moins qu'il va avoir. Il fallait qu'il aille les chercher ailleurs, surtout dans les conditions actuelles économiques. Surtout, il faut continuer à tenir notre promesse de réduire le solde des opérations courantes à zéro en deux ans. Alors, on a fait ce qui devait être fait. Alors, la TVQ, elle va devenir une véritable taxe sur la valeur ajoutée, puis ça sera plus facile à administrer, plus favorable à la croissance économique, ce que je disais tout à l'heure.

Maintenant, quand vous dites: Est-ce que la taxe devrait... La visibilité de la taxe. Bien, c'est un item qu'on aura à discuter à la commission sur la fiscalité, à l'automne. C'est un item important. Les opinions sont partagées là-dessus, il va falloir l'analyser à fond. Moi, je ne suis pas en mesure, aujourd'hui, de me brancher ni d'un côté ni de l'autre, mais je serai attentif aux experts qui viendront donner leur opinion là-dessus à la commission. Et, si personne n'en parle, bien sûr, on va susciter la discussion là-dessus.

M. Lachance: Mais, M. le ministre, est-ce que votre perception n'est pas à l'effet que l'accélération de l'évasion fiscale puis du travail au noir ne correspond pas chronologiquement au moment où la TPS est arrivée dans le décor? Est-ce qu'il n'y a pas une coïncidence, plus qu'une coïncidence là-dedans où le fait d'avoir «visibilisé» une taxe qui, dans bien des domaines, existait déjà a fait en sorte que ça a eu un effet, je dirais – puis le mot n'est pas trop fort – répugnant sur le consommateur et que le consommateur a essayé d'éluder cette taxe-là en la voyant comme il la voit maintenant, depuis cette époque? En tout cas, vous nous avez indiqué que votre opinion n'était pas faite là-dessus, mais, à la lumière de ce que vous avez pu vous-même observer ou que vos proches collaborateurs ont observé, est-ce qu'il n'y a pas un lien de cause à effet là-dedans?

M. Campeau: Moi, je pense que, le travail au noir, c'est plusieurs facteurs. Alors, si vous me dites: Est-ce que, ça, c'est un facteur? La réponse, c'est: Oui. Est-ce que c'est un facteur majeur? Certains seraient portés à dire oui, certains vont dire: Peut-être que ce n'est pas majeur. Moi, je vous dis, en tout cas: Il faut faire attention aux marchands. Et la question que vous posez, dans le fond, comme député de Bellechasse... C'est vrai que, vous, vous rejoignez les États-Unis avec votre comté?

M. Lachance: Très peu. C'est la frontière, mais... Il y a des chemins forestiers.

M. Campeau: Des chemins forestiers. Alors, vous rejoignez la frontière. Alors, vous pourriez vous allier avec le député de Hull, parce que, lui, il en a, des problèmes de frontière. Et lui, c'est clair...

M. LeSage: Madame...

M. Campeau: ...c'est clair que la...

M. LeSage: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Barbeau): Avez-vous une question de règlement, M. le député de Hull?

M. LeSage: Bien, je trouve insultant pour les gens de Hull...

La Présidente (Mme Barbeau): Avez-vous une question de règlement, M. le député de Hull?

M. LeSage: ...Mme la Présidente, que le ministre compare mon comté à une forêt, là, il y a des limites!

La Présidente (Mme Barbeau): Il a seulement dit qu'il pouvait se joindre à vous, à ce que je me souvienne. De toute façon, je me réfère à l'article 36...

M. LeSage: Mais ça ne me surprend pas, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député, je me...

M. LeSage: Je vais y revenir.

M. Campeau: Vous êtes sorti du bois, là.

M. LeSage: Ouais!

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Lachance: Moi, je voudrais ajouter quelques éléments, là. C'est que – et le ministre va s'en rappeler – pendant quelques années bienheureuses, au Québec, on a eu l'abolition complète de la taxe de vente sur les vêtements, à titre d'exemple. Le jour où la TPS est apparue dans le décor, il y a eu la TVQ aussi, là, qui est apparue à peu près en même temps. Et, moi, j'ai eu une réaction personnelle et une réaction, aussi, que j'ai entendue à de multiples occasions. Quand tu t'en vas t'acheter des vêtements et que tu es obligé, dans ta tête, de te mettre à calculer: Bon, ça coûte x dollars, et, là, il faut que je calcule la TPS plus la TVQ, ça met le monde en maudit.

Je comprends que les gouvernements ont besoin de rentrées fiscales, ont besoin de se financer, mais cette mesure, vous vous en souviendrez, M. le ministre, qui avait été prise par l'actuel premier ministre, M. Parizeau, d'abolir la taxe de vente du Québec sur les vêtements, les meubles et les appareils électroménagers fabriqués au Québec, ça fait partie des souvenirs bienheureux, mais, au moment où ça a été de nouveau taxé, là, ça a eu un effet où ça a choqué le monde. Alors, je pense qu'il faut quand même les comprendre d'avoir eu une réaction d'essayer d'éluder le plus possible les taxes qu'ils pouvaient sauver, en utilisant le...

Je ne dis pas que je suis d'accord avec ça, parce qu'il faut des sources de revenus du gouvernement, mais on comprend quand même, au point de vue humain, la réaction des citoyens, la réaction des contribuables devant l'arrivée, comme ça, tout à coup, sur des éléments, sur des biens qui n'étaient pas taxés auparavant, de voir apparaître, comme ça, une taxe qui, à l'époque, était d'au-delà de 15 %.

M. Campeau: Bon. C'est qu'à l'heure actuelle, quand même, on n'est pas encore un pays souverain. Alors, il nous faut un certain arrimage qui est souhaitable avec les taxes du fédéral. Alors, s'il fallait avoir deux systèmes de taxe tout à fait différents, la différenciation des biens, ça serait complexe et pour les entrepreneurs et pour le consommateur.

Maintenant, je veux revenir au député de Hull. Tout à l'heure, je n'ai pas comparé son comté avec la forêt. Même si lui n'aime pas la forêt, là, le député de Laporte disait qu'il avait passé la fin de semaine dans la forêt et qu'il était très heureux. Alors, je ne vois pas ce qui arrive là-dedans de pas correct. On peut être très heureux dans la forêt.

Ce que je voulais dire, Mme la Présidente, c'est qu'il a des problèmes de frontière, le député de Hull, il y a des gens qui vont acheter à Ottawa et acheter à Hull. À un moment donné, il faut un certain arrimage de la taxe dans les deux provinces. Alors, est-ce qu'une province devrait avoir une taxe invisible, et l'autre, une taxe visible? Il faut regarder tout ça, là. Ce n'est pas comme si on vivait dans un vase clos, il faut tenir compte de notre entourage, il faut tenir compte de notre géographie. Je suis sûr que, vous, M. le député de Bellechasse, vous tenez compte de votre géographie et que, vous promener dans la forêt, c'est pour vous un plaisir et un repos.

M. Lachance: Ah! il n'y a pas de doute, M. le ministre, les petits oiseaux et la nature, il n'y a rien pour remplacer ça.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Lachance: Merci.

La Présidente (Mme Barbeau): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Bellechasse? M. le ministre, avez-vous terminé?

M. Campeau: Bien...

La Présidente (Mme Barbeau): Oui?

M. Campeau: La taxe sur les vêtements. Là, c'est clair que ça serait mieux que, des taxes sur les vêtements, on n'en ait pas. À l'heure actuelle, on n'est pas rendu là. Est-ce qu'un jour on pourra se le permettre? Je l'espère. Ça serait sûrement bon pour l'économie et ça serait sûrement bon, pas juste pour l'économie, pour les familles aussi, là. D'autre part, je vous dirai qu'aux familles, dans le budget, à l'heure actuelle, quoi qu'on en dise, nous avons des... Le gouvernement, jusqu'ici, a tenu les mêmes liens pour la famille et les mêmes avantages.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci. Est-ce terminé, M. le ministre? M. le ministre, c'est terminé?

M. Campeau: Oui, c'est fini, madame.

La Présidente (Mme Barbeau): O.K.

M. Campeau: Merci.

(11 h 40)

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Merci. Mme la Présidente, on en arrive bientôt à la fin de cette étape de l'étude du budget. Je ne sais pas si on peut parler d'étude, mais plutôt de monologue sur le budget. Il y a quand même certains points qui n'ont pas encore été couverts, là, par le ministre.


Création de fonds régionaux de capital de risque et d'un fonds des travailleurs de la CSN (suite)

Il y a la question des sommes additionnelles que le gouvernement entend consacrer pour subvenir aux besoins du Fonds de solidarité de la FTQ et la création d'un nouveau fonds pour la CSN.

J'aimerais demander au ministre s'il estime qu'on a besoin encore de beaucoup d'argent, si le Québec doit consacrer encore beaucoup d'argent à même ses rentrées fiscales pour constituer des fonds de cette sorte-là. Celui de la FTQ, semble-t-il, est déjà grassement pourvu, là, et on entend dire de plus en plus qu'il y a, au Québec, énormément d'argent disponible pour du capital de risque, et même qu'on réussit difficilement à investir tout le capital de risque disponible.

La FTQ va acheminer une centaine de millions de dollars dans les régions. Est-ce qu'on a des garanties que ces sommes-là vont être investies dans les entreprises ou si, une fois rendues dans les régions, ça peut rester dans les comptes de banque? Est-ce qu'il y a un suivi qui se fait pour s'assurer que ces sommes-là vont être réellement investies? Et, d'autre part, quelles sont les projections en ce qui concerne la CSN? Combien d'argent la CSN pourra-t-elle accumuler au cours de la prochaine année, par exemple, ou dans les années qui suivent, quel est l'impact sur les finances du Québec? Est-ce qu'il y a d'autres fonds semblables qui sont prévus? On parle du Mouvement Desjardins, par exemple. Alors, j'aimerais que le ministre fasse le point là-dessus.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le ministre.

M. Campeau: Oui, Mme la Présidente. Commençons par le dernier commentaire du député. Ce sont, le fonds de la FTQ et le fonds de la CSN, des fonds de travailleurs, comme il y en a maintenant plusieurs à travers le Canada, qui jouissent d'avantages fiscaux. Et la CSN se conforme aux exigences du fédéral et devrait avoir son avantage du fédéral, elle aussi. Donc, la CSN, c'est les mêmes avantages fiscaux accordés aux autres centrales syndicales qui oeuvrent principalement au Québec et qui sont responsables du respect des critères que le gouvernement avait établis lors de la création du fonds de solidarité des travailleurs syndiqués.

Il y a peu de centrales syndicales qui oeuvrent au Québec. Est-ce qu'il y en aura d'autres qui viendront faire application? On verra, mais il faut que ça soit des centrales principalement au Québec et qui respectent évidemment les critères que nous demandons. Or, dans le cas de la CSN, elle est au Québec, elle a respecté les critères que nous demandons.

Et ajouter un fonds n'augmente pas nécessairement les investissements potentiels. Ça demande peut-être une spécialisation, ça va peut-être faire en sorte qu'il y ait des besoins qui n'étaient pas remplis, mais ça n'ajoute pas nécessairement des investissements potentiels. Ça vient peut-être mettre un peu d'ordre pour rencontrer des investissements qui n'auraient pas été rencontrés ou bien une question de préférence ou de partage de la dette... de la propriété ou de partage de la tarte.

Le fonds de solidarité des travailleurs de la CSN. À quoi s'est engagé le fonds? Il va viser à soutenir l'emploi, à promouvoir l'éducation économique des travailleurs. Si on se rapporte au Fonds de solidarité, ça a été très important et très bon de promouvoir l'éducation économique des travailleurs. Ces gens-là ont été plus sensibilisés à la profitabilité. Ils comprennent mieux, maintenant... Quoiqu'ils le comprenaient peut-être avant, ça va les aider à mieux comprendre les problèmes de l'entrepreneur qui, lui, doit se financer, qui doit avoir un actif, un passif, qui doit faire des profits. Sans ça, s'il ne fait pas de profit, il ne subsistera pas. Alors, maintenant, à cause du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, les travailleurs sont plus sensibilisés à la nécessité pour une entreprise de faire du profit, ils sont plus en faveur du profit dans une compagnie.

Alors, la CSN va émettre la majorité de ses actions auprès des travailleurs. Comme le Fonds de solidarité, elle aura la clause de un pour un. Autrement dit, si elle va chercher une piastre chez ses travailleurs, elle pourra aller chercher aussi une piastre dans le public. Elle va se doter d'une infrastructure de collecte de l'épargne transparente, qui va répondre aux exigences d'une saine gestion financière. Elle sera, tout comme le Fonds de solidarité, sous la supervision de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Quel sera, maintenant, l'impact financier pour le Québec la première année, 1996-1997? L'effet que ça aura – mais, en fait, c'est pour l'année 1995 – ça coûtera 5 000 000 $ au gouvernement du Québec; l'année suivante, l'année financière 1996, un autre 5 000 000 $; et en 1997, 5 500 000 $. Bon. En 1982, le crédit moyen versé à l'égard des actions du Fonds de solidarité était de 362 $. Sur cette base, la limite actuelle ne devrait pas être véritablement contraignante.

Desjardins, privilèges pour capitalisation: bien, on verra, on a du chemin à faire avec lui. En plus de ça, comme je l'indiquais dans mon budget, il faut prendre en considération que Desjardins n'a pas de taxe sur le capital. Alors, ça sera deux questions qu'on devra examiner en même temps. Dans le cas de Desjardins, d'autre part, sa capitalisation est en bonne santé et il s'agit de prévoir pour l'avenir, de prévoir au cours de son développement; il n'y a pas urgence dans ce sens-là et c'est une des raisons pour lesquelles Desjardins ne nous est pas revenu rapidement, sur notre négociation, mais on continue nos pourparlers avec Desjardins et on va les continuer jusqu'à temps qu'on ait trouvé une solution acceptable aux deux parties.

Mais, je vous rappelle, ce n'est pas la même chose; le Fonds de solidarité et le fonds de la CSN sont des fonds de travailleurs. Mais, par exemple, le fédéral, lui, ne donne un crédit d'impôt qu'à des fonds de travailleurs à travers tout le Canada, bien entendu, d'abord qu'ils ont leur siège social au Canada – bien, c'est un de ces critères-là. Alors, il faut bien distinguer les fonds de travailleurs puis les fonds de Desjardins.

Je pense aussi qu'il faudrait peut-être aborder la question des fonds régionaux. Bien, le Fonds de la FTQ a été déplafonné, oui; ça représente des coûts pour le gouvernement du Québec de déplafonner ça, mais une des raisons aussi...

M. Bourbeau: Combien?

M. Campeau: ...c'était... C'est 20 % du montant qui est mis; alors, on peut l'évaluer à 60 000 000 $ par année, dépendamment du montant qu'ils récolteront. Mais on a aussi insisté pour que le Fonds de solidarité se développe en région. En dépit des commentaires qu'on entend du député de Laporte, toutes les régions n'étaient pas couvertes par les fonds des capitaux de risque. Et, surtout, il faut rendre ces régions-là autonomes, il faut que les décisions d'investissement soient prises en région, par des gens des régions, et c'est pour ça, là, qu'on a insisté et exigé que le Fonds crée des fonds régionaux autonomes gérés par un conseil d'administration autonome, formé majoritairement de représentants de la région, formé de gens qui connaissent la région et qui travaillent pour les gens de la région.

Vous avez beau avoir des fonds et avoir beaucoup d'argent, si tous les membres de votre conseil viennent de Québec, ou de Montréal, ou de Trois-Rivières, ou de Hull, bien, ils ne comprendront pas exactement les problèmes de l'Abitibi-Témiscamingue ou de la Gaspésie. On veut donc des gens qui soient des régions, des gens qui sont de là, qui connaissent et qui ont à coeur le succès de la région, de leur région, et puis aussi qu'ils soient redevables un peu beaucoup aux gens de la région. Donc, ils vont être forcés d'écouter les recommandations des gens de la région et ils vont être sensibles aux critiques que les gens de la région pourraient leur formuler. Alors, c'est un peu un début de décentralisation, et c'est comme ça que le gouvernement du Parti québécois veut gérer aussi, éventuellement, tout le Québec.

Bon. Lors de ces créations, c'est 6 000 000 $ qui vont dans chaque fonds. Il s'agit donc d'investissements de près de 100 000 000 $, au total, dès le départ. Pour les années subséquentes, le Fonds de solidarité avancera un montant additionnel au fur et à mesure des besoins. S'il n'y en a pas, de besoins, si une région se développe moins rapidement qu'une autre, elle n'aura pas d'argent, il n'y a pas de besoins; si une région se développe plus rapidement qu'une autre, le Fonds verra à lui fournir les sommes nécessaires.

(11 h 50)

Ce qui va arriver aussi dans les régions, il va y avoir une solidarité. Est-ce qu'il va y avoir d'autres investisseurs qui vont se joindre aux fonds régionaux? Il est fort probable. Est-ce qu'il y a des fonds, dans les régions, qui sont inactifs, qui sont dormants ou qui ont besoin d'une piqûre de vitalité? Pas parce qu'ils sont méchants, c'est parce que ça fait peut-être quelques années qu'ils sont créés et ils n'opèrent pas comme ils devraient opérer. Bien, la présence de ces fonds-là va sûrement les stimuler, et ça fera de la compétition ou bien donc il y aura des fusions.

Bon! Le réseau complet des fonds, c'est un engagement qui sera implanté sur 18 mois. On nous en a promis 12 au cours de la prochaine année, c'est quand même un nombre important. Nous, on a voulu donner la limite sur 18 mois pour que tout soit bien fait.

La Présidente (Mme Barbeau): Il vous reste une minute, M. le ministre.

M. Campeau: On ne croit pas, Mme la Présidente, qu'il faut leur pousser dans le dos trop en même temps, parce que partir 16 fonds régionaux, là, c'est beaucoup d'ouvrage pour quelque entreprise que ce soit.

Dans ces fonds-là, je vous soulignerai qu'un des items importants, ce n'est pas nécessairement juste l'argent, c'est le gestionnaire qui va gérer chacun des fonds. Je l'ai dit quelques fois à cette commission-ci, et je vais le répéter: L'item principal, c'est le régional, c'est le gestionnaire de la région. Il nous faut, là-dedans, une espèce de directeur général qui soit actif et qui connaisse la région, et qui soit dédié à sa région. Je veux répéter qu'une des raisons du succès d'Innovatech Montréal – qui va faire plaisir aux gens de l'opposition – c'est le choix du directeur, du gestionnaire, M. Coupal.

Les dépenses d'opération de chaque fonds sont estimées à 500 000 $ par année, financées en partie par le gouvernement. L'entente est valable pour cinq ans. Alors, c'est ce que j'avais à dire sur les fonds, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le ministre. M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Le 500 000 $, c'est la portion gouvernementale, ça, hein?

M. Campeau: Alors, en réponse à la question, le 500 000 $ est le coût total d'opération et le gouvernement en assume 300 000 $; l'autre 200 000 $ est assumé par le fonds, et cette entente est valable pour cinq ans. Et c'est au départ qu'on fait ça, là.

M. Bourbeau: Le 300 000 $, est-ce que c'est le même 300 000 $ que le gouvernement a transféré aux CRD, dans les régions, ou c'est un nouveau 300 000 $?

M. Campeau: C'est un nouveau 300 000 $. C'est différent, à par de ça, ça n'a rien à faire.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, quand on regarde ça, là, ça m'apparaît un peu exorbitant, le privilège que le gouvernement confère au Fonds de solidarité de la FTQ. D'abord, il faudrait quand même corriger l'impression que donne le ministre quand il dit que c'est un fonds pour les travailleurs, là. Les travailleurs, ça dépend de la définition que le ministre donne à un travailleur. Mais un député, c'est un travailleur. Un sous-ministre des Finances, c'est un travailleur. Le ministre, c'est un travailleur lui-même. Tous ces gens-là ont le droit de souscrire au Fonds de solidarité de la FTQ, les députés de l'opposition aussi, le député de Laporte aussi. Donc, il ne faudrait pas donner l'impression que c'est seulement les travailleurs de la FTQ qui ont droit de souscrire au Fonds de solidarité, c'est ouvert à tout le monde.

En fait, probablement que ceux qui ont les revenus les plus élevés sont ceux qui peuvent en profiter le plus, parce que ça va jusqu'à 5 000 $ par personne. Ce n'est pas chaque travailleur qui peut prendre 5 000 $ et sortir ça de son compte de banque et mettre ça dans le Fonds de solidarité de la FTQ avec un crédit de 80 %. C'est une concession majeure à la fiscalité. Il n'y a rien de comparable à ça, là, cherchez nulle part ailleurs. C'est pas mal plus intéressant que tous les autres abris fiscaux, et la FTQ, évidemment, en profite énormément.

Cette année, la bonification passe du simple au triple. Le plafond était autour de 100 000 000 $. Là, ce que je crois comprendre, ça va aller à 300 000 000 $. Donc, 200 000 000 $ de plus, à 20 %, ça fait 40 000 000 $. Le coût, au gouvernement, si je comprends bien, va être de 40 000 000 $ de plus, en vertu du nouveau plafond. Voilà qui est intéressant pour le Fonds de solidarité. Voilà qui est intéressant. Moi, je me réjouis que le gouvernement ait les moyens de payer des choses semblables pour certains contribuables qui sont éveillés, qui se tiennent à l'affût de ces choses-là et qui ont les moyens de mettre de l'argent dans le Fonds de solidarité.

Ce qui m'étonne un peu, c'est que le gouvernement, après avoir fait un tel avantage à la FTQ, décide de souscrire encore davantage en finançant une bonne partie: 60 % du réseau dans les régions. Ça, ça va être des fonctionnaires, je présume. Pas ceux qui sont autour du ministre, d'autres, là, régionaux, des gens qui vont être engagés pour faire l'analyse des dossiers, etc.

Le gouvernement a déjà dépensé 40 000 000 $ de plus, c'est-à-dire 60 000 000 $ en tout, en fiscalité, là, en concessions fiscales pour aider à la mise sur pied du régime. Est-ce que, vraiment, on a besoin, en plus de ça, d'aller rajouter un autre 5 000 000 $, 6 000 000 $ par année, essentiellement en salaires dans les régions, pour permettre au Fonds de solidarité de bien investir son argent? Il me semble que, si le Fonds de solidarité a le droit de prélever tant d'argent que ça, est-ce qu'il ne serait pas normal qu'il finance lui-même ses coûts, les coûts qui lui sont occasionnés pour placer son argent?

Les autres prêteurs, quand ils ont de l'argent à prêter, ils font l'analyse de leurs dossiers eux-mêmes, ils ne demandent pas au gouvernement, en plus d'avoir fourni l'argent, en tout cas une partie de l'argent, de venir, ensuite de ça, payer les honoraires ou les frais des fonctionnaires qui vont décider si les placements sont bons ou pas bons. Ça m'apparaît être une double concession qu'on fait au Fonds de solidarité par rapport à ce qu'il peut y avoir de compétition dans le marché. Je trouve ça particulièrement généreux que le gouvernement décide de financer une bonne partie du salaire de ceux qui vont décider si les placements de la FTQ sont bons. Moi, je trouve que la FTQ devrait payer pour ça. De toute façon, ils ne seront tenus de payer des dividendes à personne, ce n'est pas obligatoire, là.

Est-ce que ça va être la même chose pour la CSN? Ils vont utiliser le même réseau? Probablement qu'ils vont utiliser le même réseau. Finalement, c'est de l'argent privé. Tout ça, c'est de l'argent privé, dans le fond, qui vient du Fonds de solidarité, enfin de l'argent qui n'appartient pas au gouvernement mais qui est placé avec des fonds... enfin, par l'entremise d'un réseau financé par le gouvernement, en partie. Ça m'apparaît étrange, étonnant un petit peu que le gouvernement aille si loin dans sa générosité.


Financement des activités relatives à l'action communautaire

Et parlant de réseau, il semble que, dans le budget, le gouvernement s'est lancé à l'attaque des réseaux, là. Je ne sais pas si c'est une façon de créer de l'emploi, mais on crée un nouveau réseau: l'action communautaire. Alors, là, vraiment, le gouvernement a décidé d'ouvrir très grande la machine: 11 000 000 $, en année de croisière, qu'on va consacrer au Secrétariat à l'action communautaire. Et puis, miracle, ça ne coûtera rien au gouvernement! Ça ne coûtera rien au gouvernement parce que c'est financé par les casinos; donc, ce n'est pas notre argent, c'est l'argent des casinos.

Mais 11 000 000 $, ça, c'est le Secrétariat, mais, si on prend toutes les sommes d'argent qui vont être déboursées là-dedans – Carrefour jeunesse, projet jeunesse – on en arrive à 40 000 000 $; 40 000 000 $, c'est pas mal d'argent, c'est à peu près 40 fois le coût de l'«Élysette», à chaque année. Pour faire plaisir à qui? Est-ce que c'est les mêmes bénéficiaires? on ne sait pas trop. Mais il reste que 40 000 000 $ par année, c'est beaucoup d'argent. 11 000 000 $ vont au Secrétariat, ce qui veut dire... 11 000 000 $ sur 40 000 000 $, c'est 26 %, 27 %, 28 % de frais de fonctionnement; ça m'apparaît beaucoup.

Puis financé à même les casinos. Évidemment, quand on parle des casinos, c'est comme si c'était de l'argent trouvé dans une boîte nouvelle. Mais, à moins que je me trompe, ça va être 40 000 000 $ de moins qui vont entrer dans les coffres du gouvernement, ailleurs. Je présume qu'on ajoute 40 000 000 $, d'un côté, dans les dépenses, il va falloir qu'on soustraie 40 000 000 $ de la rentrée des fonds qui sont prévus de la part des casinos de Loto-Québec.

La Présidente (Mme Barbeau): Il vous reste une minute, M. le député.

M. Bourbeau: Oui. C'est donc la même chose, c'est du pareil au même. Je suis convaincu que le ministre des Finances lui-même a soustrait 40 000 000 $ dans ses rentrées de fonds du casino de Loto-Québec. Alors, il ne faudrait pas penser que c'est un miracle qui s'est produit.

Alors, j'aimerais connaître le point de vue du ministre là-dessus, sur ces nouveaux frais-là, surtout en réseaux, les frais de fonctionnement. Je trouve que c'est beaucoup d'argent investi dans des réseaux.

(12 heures)

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le député de Laporte. M. le ministre.

M. Campeau: Mme la Présidente, je peux dire au député de Laporte que je suis d'accord avec lui sur un point: l'argent des casinos, c'est notre argent à nous. Alors, si on utilise l'argent des casinos pour faire un projet, ce n'est pas de l'argent qui vient du ciel, et il y a un point de saturation, dans les casinos, qu'on peut rencontrer. Alors, quand, à même ces revenus, on attribue des sommes à un programme ou à une société, bien, ça diminue les revenus du gouvernement, et là-dessus je suis d'accord avec lui.

Je veux revenir en disant, parce que le député de Hull est là: Oui, on a réussi, nous, à décider où on était pour établir le casino de l'Outaouais, et on pense qu'on a pris un bon site. On a réglé le différend ou la chicane qu'il y avait entre les députés du bout, qui ne savaient pas où le mettre, parce qu'il y avait une place et une autre. Mais un des sites que vous aviez détectés, on a décidé que c'était le bon site, et on l'a pris, on a pris la décision.

Une voix: Le site du député de Laporte.

M. Campeau: Bien, je suis bien content. Ha, ha, ha!

M. LeSage: Exactement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: C'était le site du député de Laporte ou du député de Hull? En tout cas, je ne saurais pas le dire.

Une voix: C'est le même. C'est le même.

Une voix: ...ministre des Finances.

M. Campeau: En tout cas, vous comprendrez que, nous, on n'a pas de parti pris. On a regardé les études qui étaient faites, on les a supervisées, on les a refaites, pas refaites au complet, on les a prises et on a pris la bonne décision. Et nous sommes convaincus que c'est le site qu'il fallait choisir.

Une voix: Je suis d'accord avec vous là-dessus.

M. Campeau: Bien, alors, ça fait deux fois qu'on est d'accord. Dommage qu'on ne finisse pas là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Les jeunes, maintenant. Bien, les jeunes, là, le projet jeunesse, quand on parle de ça, ils ont été délaissés tellement longtemps qu'il serait temps qu'on s'en occupe un peu. Alors, nous, on a décidé de mettre des ressources pour les jeunes, c'est l'avenir. C'est demain, les jeunes, et on a décidé qu'on ne les laisserait pas tomber. Et même l'année prochaine on reviendra avec des projets sur les jeunes. Il faut faire une révision fondamentale de tous les programmes qui existent à l'intention des jeunes, de la pertinence de chacun de ces programmes-là. Il y en a beaucoup, mais il faut savoir s'ils servent à quelque chose, puis s'ils sont connus ou perçus. Puis le Secrétariat à la jeunesse va participer à la mise en chantier d'un certain nombre de ces projets-là, mais il faut d'abord faire du ménage là-dedans, mettre de l'ordre. Le Secrétariat va disposer de crédits additionnels: 3 000 000 $ en 1995-1996, 4 000 000 $ pour les années subséquentes. Et c'est normal. Nous, on est fiers de notre contribution là-dedans et on va continuer.


Création de fonds régionaux de capital de risque et d'un fonds des travailleurs de la CSN (suite)

Les coûts des fonds. Au départ, les premières années, le rendement n'est pas immédiat quand on crée un fonds, et ça amène même des dépenses importantes. On trouve tout à fait logique que, pour susciter le développement économique en région, le gouvernement contribue dans les premières années. Je désirerais clarifier les montants que je vous ai donnés tout à l'heure. C'est 300 000 $ la première année sur les 500 000 $. Des années deux à cinq, c'est 400 000 $, mais, après la troisième année, pour qu'on continue dans le même montant, il faut qu'il y ait des objectifs de placement de rencontrés. Si l'argent n'a pas été investi et si les rendements ne sont pas là, le gouvernement arrête sa contribution.

Je tiens aussi à souligner que ce sont des travailleurs syndiqués, hein – quand je disais «les travailleurs syndiqués», c'est dans les deux fonds – et que, pour 1 $ qu'un syndiqué va avoir mis, le Fonds peut aller chercher 1 $ de vos poches à vous ou de mes poches à moi. Mais il faut que ce soit un travailleur syndiqué. Il faut toujours qu'il y ait un équilibre 50-50 entre les deux. C'est une des conditions pour enlever le plafond et c'est une des conditions, dans le cas de la CSN, pour l'aider à créer son fonds. Ne jamais dépasser le ratio de 1 $ pour 1 $. Donc, le travailleur met aussi de l'argent.

C'est évidemment des mesures, les fonds dans les régions, qui vont soutenir l'emploi, le développement régional et aussi la prise en main des régions. Le gouvernement veut que ces fonds-là, je le répète, soient gérés par des gens de la région qui sont là, qui connaissent les besoins, qui ont à faire face à la population à tous les jours, aux critiques bonnes et mauvaises. Donc, ils auront à «performer». Ils ne pourront pas se sauver en étant trop loin, ou à Montréal, ou à Québec, ou à Hull, pour faire plaisir.

Il y a quand même des placements risqués là-dedans. Il ne faut pas s'en faire, il y en a, des placements risqués, mais ça fait partie du jeu. Les gens étant en région seront peut-être mieux à même d'établir les risques. Il faudra qu'ils profitent quand même, puis il faudra que le rendement soit là, et c'est sur plusieurs années qu'on pourra juger de leur performance. Ce n'est pas la première année ni la deuxième. En finances, je pense l'avoir déjà dit, c'est sur un horizon de cinq ans qu'on peut vraiment juger de la performance d'un fonds, et, quand c'est nouveau, des fois ça prend plus que cinq ans.

Je pense que ce n'est pas nouveau, la SRI, société de région en investissement, le gouvernement a déjà aidé là-dedans. Mais, d'autre part, on n'est pas une banque d'État. Alors, contrairement à ce que le député de Laporte dit, ce ne sont pas des fonctionnaires qui vont aller gérer ça, ça va être géré par des gens du milieu. Autrement dit, le gouvernement, lui, a décidé... On le voit aussi avec le plan Paillé, il ne veut pas agir comme une banque, il ne veut pas prendre les décisions d'un banquier. Je ne veux pas parler ici de la SDI, parce qu'on s'entendait bien, puis je ne voudrais pas reprendre tout le problème de la SDI, mais on ne veut pas que ce soient des... Il faut que les décisions soient prises par des gens du milieu, par des gens à l'extérieur du gouvernement, qu'il n'y ait pas de fonctionnaires d'impliqués là-dedans, du gouvernement directement ou indirectement.

M. Bourbeau: Ça va être des fonctionnaires des régions. Ça va être d'autres personnes engagées pour faire ça.

M. Campeau: Ce ne sera pas des fonctionnaires. C'est des personnes qui sont des employés du Fonds. Si vous me dites qu'aujourd'hui les employés du Fonds de solidarité de la FTQ à Montréal sont des fonctionnaires, bien, je vous dis que ça va être le même genre de personnes. Mais ce ne sont pas des fonctionnaires, ils dépendent du Fonds. Le gouvernement n'a pas d'influence dans l'emploi de ces gens-là. C'est les gens de la région qui décident qui ils emploient, évidemment en accord avec le Fonds de solidarité des travailleurs. Le Fonds de solidarité, vu qu'il met son argent, va quand même avoir une influence sur les compétences de ces gens-là. On ne pourra pas quand même... C'est localement que ça va se faire.

Innovatech, je pense que c'est la même chose: ce n'est pas le gouvernement qui choisit les employés d'Innovatech, à ce que je sache, à moins qu'il les ait déjà choisis. Je ne pense pas. En tout cas, ça devrait être à peu près la même chose. Mais, en tout cas, le Fonds de solidarité, c'est quand même lui le grand patron. Oui, il va gérer avec des gens de la région, mais, quand même, il met son argent, alors il va falloir qu'il ait une certaine supervision, on doit lui accorder ça, au moins.

M. Bourbeau: Il met votre argent.

M. Campeau: Pardon?

M. Bourbeau: Il met votre argent.

M. Campeau: Il met l'argent de ses épargnants, puis on lui confie aussi un certain montant d'argent pour l'administration.

M. Bourbeau: Voilà!

M. Campeau: Mais ce n'est pas de l'argent pour l'investissement que le gouvernement met. La CSN, je veux bien la respecter, là, mais c'est quand même un nouveau fonds, et, comme je le disais tout à l'heure, un nouveau fonds prend quelque temps à «performer». Ça va peut-être aller plus vite, ce n'est pas tout à fait nouveau parce qu'il y a des choses, qui vont rentrer dans ce fonds-là, déjà existantes, il y a une certaine amalgamation d'entreprises qui va se faire, ou d'organisations, mais elle n'ira pas, je pense, dans les régions directement tout de suite avec des fonds régionaux. Peut-être que de Montréal ou de Québec – je ne sais pas où sera son siège social, je pense que c'est Montréal – elle pourra investir dans les régions, comme le Fonds de solidarité le faisait, mais, dès le départ, elle n'aura pas de filiale dans ces régions. Ça va prendre quelque temps avant qu'elle fasse ça, et le gouvernement... Nous, en tout cas, on n'a pas l'intention d'exiger d'elle, au début, dans les premières années, qu'elle s'implante en région. Si elle désire le faire, tant mieux, on coopérera avec elle, mais on aimerait quand même avoir un petit peu d'expérience avec le Fonds de solidarité avant pour voir comment ça opère.

Les premières années, c'est toujours plus difficile, il faut que les gens s'habituent à transiger, s'habituent à vivre ensemble et tout ça. Pour le fonds de la CSN, on verra. S'ils nous font une demande, on l'étudiera en temps et lieu, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Barbeau): M. le député de Laporte, 15 secondes. C'est rapide, un petit mot de la fin.


Conclusions


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente. Bien, simplement, j'aurais voulu que le ministre nous dise un mot sur la mesure qui permettra de ne faire des remises qu'une fois l'an pour les employeurs qui ne remettent que 1 200 $ par année. Ça équivaut à peu près à un salaire de combien, ça? Est-ce que le ministre pourrait nous le dire à peu près? Parce qu'il n'y a pas seulement le salaire, il y a toutes les déductions.

Il y a aussi les fiducies familiales. J'aurais aimé que le ministre élabore un peu là-dessus, mais on n'aura peut-être pas le temps de le faire. On ne connaît pas tellement ça, nous autres, ici, les fiducies familiales, et on aimerait bien se faire expliquer ce que c'est, mais peut-être que...

La Présidente (Mme Barbeau): Merci, M. le député de Laporte. M. le ministre, vous avez jusqu'à et quart. Vous avez le mot de la fin pour de vrai.


M. Jean Campeau

M. Campeau: Bien, d'abord, les fiducies familiales, on pourrait y revenir, c'est un moyen par lequel on repousse l'impôt éventuellement. On le repousse de génération en génération. Nous, on trouve que c'est un privilège exagéré. On aurait voulu y mettre fin immédiatement, le fédéral a dit qu'il y mettrait fin en 1999, alors on va attendre 1999 et on y mettra fin en même temps que lui. À ce moment-là, en tout cas, ce sera notre décision à nous.

(12 h 10)

Alors, Mme la Présidente, je voudrais vous remercier pour votre bon travail, je voudrais remercier ceux qui vous ont remplacée à l'occasion. Ça a été agréable. Je voudrais aussi remercier la secrétaire. C'est 10 heures, je pense, agréables qui ont été passées ensemble; j'espère que l'opposition est du même avis que moi. Alors, je les remercie de leur coopération. Vous transmettrez mes salutations au député de Verdun aussi qui nous a permis de bien étudier la TVQ.

Je pense que les échanges ont été fructueux, mais je compte bien m'en servir au cours de la prochaine année. Je me réserve le privilège, aussi, de consulter les députés, bien sûr, du Parti québécois d'abord, mais aussi les députés de l'opposition aussi souvent que nécessaire, surtout les députés qui sont dans des comtés où l'expérience est différente d'autres comtés. Ce que je recherche, au Québec... Si on veut faire quelque chose, il faut qu'on ait le pouls de chacun des comtés. Alors, là-dessus, c'est bien sûr, je voudrais donner beaucoup d'importance au député de l'Acadie, je lui en donne aussi, mais j'en donne encore plus au député de Hull, qui est plus loin de mon comté. Il y a des problèmes là, et on doit jouir de votre expérience dans cette région-là, et j'ai l'intention d'y faire appel lorsque nécessaire.

Bien, merci à tous les fonctionnaires qui ont supporté la commission. Merci du travail que vous avez fait avant le budget. Mais, là, ce que je veux vous dire, le signal que je veux vous dire, c'est: Maintenant que le budget va se finir, cet après-midi, par le discours de clôture, après que le député de Laporte aura fait sa demi-heure, le travail ne fera que commencer. Il faut maintenant réaliser tout ce que nous avons écrit dans le budget, et je compte sur vous, particulièrement mon sous-ministre. Et, si mon sous-ministre pensait prendre des vacances, bien, il devra les reporter.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Campeau: Mme la Présidente, je termine là-dessus. Merci de votre collaboration.

La Présidente (Mme Barbeau): Merci. Je remercie tous les membres de cette commission, M. le ministre, et ses fonctionnaires.

Alors, la commission ayant accompli son mandat, elle ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 12)


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